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Full text of "La musique mise à la portée de tout le monde : exposé succinct de tout ce qui est nécessaire pour juger de cet art, et pour en parler sans l'avoir étudié"

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University  of  Ottawa 


littp://www.arcliive.org/details/lamusiquemiselOOft 


LA  MUSIQUE 


MISE  A  LA   PORTEE 


JDE  TOUT  LE  MONDE. 


IMPRIMF,    PAR   LES   PROCKDF.& 

F.  r    PAR    I.F.S    PRESSES    MKC.A  MQUF.S 

n'E.    nUVERGI  R  , 

RUE   PF   VIBNEUII.,   n"   1. 


MAR  i  3 

LA  MUSIQUE 

MISE  A   LA  POHTÉE 


^/<^ 


DE  TOUT  LE  MONDE, 

EXPDSK    SUCCINCT   DE    TOUT   CE   QUI   EST    NÉCESSAIRK 
POUR   JUGER   DE   CET    ART; 


PAR  M.  FETIS 

Il  I  R  F  C  T  E  U  rî    DE    LA    REVUE    M  l  S  I  C  A  I.  K  : 

DEUXIÈME  ÉDITION 

AUGMENTÉE    DE   PLUSIEURS  CHAPITRES 

M  DICTIONNAIRE  DES  TERMES  DE  MUSIOUE 

ET   d'une    biographie    DE   I,  \    MUSIOUE. 


PARIS 


LllIllAIKIK    MUSICALE    D'K.   DlJVKlUiK 

RUE  SAINTE-ANNE,  34; 

roMPTOin   DES  IMPRIMEURS   UNIS, 

m   il     MAI.AQl  »1S,    15. 


Nul  n'a  la  science  infuse.  11  n'est  point  de 
connaissances  si  simples  qu'on  ne  soit  forcé 
d'acquérir  par  sa  propre  expérience  ,  ou  par 
l'éducation.  Cette  proposition,  si  vraie  en  toute 
chose,  est  surtout  incontestable  en  ce  qui  con- 
cerne les  arts.  Notre  œil  ne  sait  discerner  les 
qualités  ou  les  défauts  d'un  tableau ,  notre 
oreille  est  inhabile  à  saisir  les  combinaisons  de 
l'harmonie ,  si  l'exercice  ne  les  y  a  disposés. 
Sans  doute  l'habitude  de  voir  et  d'entendre 
suffit  en  beaucoup  d'occasions  pour  sentir  les 
beautés  de  la  peinturé  ou  de  la  musique  ;  mais 
l'habitude  est  elle-même  une  éducation. 

Toutefois,  il  y  a  bien  loin  de  ce  sentiment 
vague ,  qui  n'a  d'autre  origine  que  des  sensa- 
tions irréfléchies,  à  la  sùrelé  de  jugement  qui 
résulte  de  connaissances  positives.  Chaque  art 
a  ses  principes  qu'il  faut  étudier  pour  aug- 
menter ses  jouissances  en  formant  son  goÙL. 
I-,a  musique  en  a  de  plus  compliqués  que  la  pein- 
ture; aussi  est-elle  à  la  fois  une  science  et  uu 


!|  INTRODUCTION. 

art.  C'est  cette  complication  qui  en  rend  l'é- 
tude longue  et  pénible  pour  quiconque  veut  y 
acquérir  un  certain  degré  d'habileté.  Mallieu- 
reusement  il  n'est  guère  possible  d'abréger  le 
temps  qu'on  est  forcé  d'y  employer.  De  quel- 
([ue  facilité  qu'on  soit  doué,  quels  que  soient 
les  procédés  dont  on  se  serve,  à  quelque  méthode 
qu'on  ait  recours,  encore  faut-il  habituer  ses 
organes  à  lire  avec  facilité  la  foule  de  signes 
dont  se  compose  l'écriture  musicale,  à  prendre 
les  intonations  avec  justesse,  à  sentir  les  divi- 
sions de  la  mesure,  enfin  à  combiner  tous  les 
élémens  de  l'art;  le  temps  seul  peut  en  donner 
les  moyens. 

Mais  le  temps  est  précisément  ce  qui  man- 
que dans  le  cours  de  la  vie,  surtout  en  l'état  de 
civilisation  perfectionnée  de  nos  jours.  Obligé 
d'apprendre  une  foule  de  choses  diverses,  on 
ne  peut  y  donner  qu'une  attention  fort  légère, 
et  l'on  est  forcé  de  n'en  prendre  que  ce  qui  est 
le  plus  utile  dans  l'usage  habituel.  Les  arts,  con- 
sidérés comme  délassemens,  comme  moyens  de 
plaisirs,  sont  au  nombre  des  objets  dont  on  ne 
prend  en  général  d'idées  qu'en  courant,  et  dont 
tout  le  monde  se  croit  juge  naturellement  et 
sans  travail.   Ce  n'est  pas  qu'on  n'aimerait  à 


INTRODUCTION.  lij 

posséder  sur  ce  qui  les  concerne  des  notions 
exactes,  pourvu  qu'il  n'eu  coûtât  pas  plus  de 
peine  pour  les  acquérir  qu'on  n'en  éprouve  à 
se  mettre  au  courant  de  la  politique  du  jour  en 
lisant  un  journal.  Mais  où  trouver  le  livre  qui 
satisfasse  à  ce  besoin?  Essayer  de  donner  des 
connaissances  générales  et  suffisantes  de  tout  ce 
qui  concourt  à  l'ensemble  de  l'art  musical,  en 
ne  faisant  que  peu  d'usage  du  langage  techni- 
que, est  une  tache  qu'aucun  écrivain  n'a  entre- 
prise ;  c^est  celle  que  je  m'impose  dans  cet  ou- 
vrage. Peut-être  dira-t-on  qu'on  ne  trouve  dans 
mon  livre  que  la  science  des  ignorans!  A  la 
bonne  heure.  Cette  science  est  suffisante  pour 
beaucoup  de  monde,  et  je  ne  croirai  point  avoir 
dérogé  de  ma  qualité  de  professeur  pour  l'avoir 
enseignée.  Répandre  le  goût  de  l'art  que  je 
cultive  est  ma  vocation  ;  j'y  obéis.  Tout  ce  qui 
mène  à  ce  but  me  paraît  bon  en  soi.  J'ose  croire 
que  ce  sera  là  mon  excuse  auprès  de  mes  savans 
collègues. 

On  se  tromperait  si  l'on  croyait  trouver  dans 
ce  livre  une  méthode  nouvelle,  un  système  ou 
quelque  chose  de  semblable  ;  sou  titre  dit  assez 
l'objet  que  je  me  suis  proposé.  Donner  des  no- 
tions suffisantes  de  tout  ce  qui  est  nécessaire 


IV  INTRODUCTION. 

pour  augmenter  les  jouissances  que  procure  la 
musique,  et  pour  parler  de  cet  art  sans  l'avoir 
étudié ,  tel  est  mon  but.  Que  si  l'on  veut  ap- 
prendre réellement  ses  principes,  La  Musique 
mise  à  la  portée  de  tout  le  monde  sera  encore 
utile,  en  cequ'elledisposera  l'esprit  à  des  études 
qu'on  fait  presque  toujours  avec  dégoût,  parce 
qu'on  n'aperçoit  pas  la  liaison  de  leurs  élé- 
mcns;  mais  il  faudra  de  plus  des  méthodes  spé- 
ciales, des  maîtres  et  surtout  beaucoup  de  dé- 
vouement et  de  patience.  Dans  ce  cas,  sentir  et 
raisonner  de  ses  sensations  ne  sera  plus  l'objet; 
il  s'agira  de  faire  nailre  soi-même  ces  sensations  ; 
cela  est  plus  difficile  et  demande  plus  de  temps. 
Qu'on  ne  croie  point  aux  promesses  de  cer- 
tains charlatans;  en  vain  affirment-ils  qu'ils  fe- 
ront des  musiciens  improvisés,  le  savoir  ne 
s'improvise  pas.  Disons  mieux:  On  ne  sait  bien 
que  ce  qu'on  a  appris  avec  peine.  Comprendre 
le  mécanisme  de  la  science  et  du  langage  de  la 
musique  est  chose  facile  ;  on  pourra  s'en  con- 
vaincre en  lisant  le  résumé  qne  je  présente  au 
public  ;  mais  devenir  habile  est  autre  chose  ;  ce 
ne  peut  être  que  le  résultat  de  longs  travaux. 
Quelques  critiques,  en  rendant  compte  de  la 
première  édition  de  ce  livre,  ont  dit  qu'il  ne 


INTKODUC'iJOlV.  V 

justifie  pas  son  titre  et  qu'il  ne  met  point  la  mu- 
sique d  la  portée  de  tout  le  monde,  c'est-à-dire 
qu'il  n'en  rend  point  l'étude  moins  longue  ni 
plus  facile.  J'ai  lieu  de  croire  que  ces  critiques 
n'ont  point  lu  cette  introduction,  car  ils  au- 
raient vu  que  j'y  ai  répondu  d'avance  à  leurs 
objections  et  que  mon  but  n'est  pas  celui  qu'ils 
ont  supposé. 

La  Musique  mise  à  la  portée  de  tout  le  monde 
appartient  à  cette  partie  de  la  littérature  des 
arts  qu'on  nomme  X jJLslUétique.  Aucun  livre 
de  ce  genre  n'a  été  publié  en  France,  mais  il  en 
existe  plusieurs  en  Allemagne.  Ceux-ci  ne  sont 
que  des  essais  imparfaits  qui  seront  sans  doute 
surpassés  quelque  jour  ;  mais  enfin  ils  ont  le 
mérite  d'avoir  tracé  la  route,  et  ce  mérite  leur 
restera.  J'ose  croire  qu'il  en  sera  de  même  de 
mon  ouvrage  ;  on  pourra  mieux  faire,  mais  on 
sera  forcé  d'avouer  l'utilité  qu'on  en  aura  re- 
tirée. 

L'accueil  favorable  que  le  public  a  fait  à  La 
Musique  viise  éi  la  portée  de  tout  le  monde  a  sur- 
passé mon  attente.  En  moins  de  deux  années, 
outre  l'édition  de  Paris,  il  en  a  été  fait  deux 
autres:  une  à  Liège,  in-1 2,  et  l'autre  à  Bruxelles, 
in-18.  M.  Charles  Blanc  en  a  donné  unclraduc- 


VJ  INTRODUCTION. 

tion  allemande  sous  le  titre  de  Die  Musik  etc. 
(  Berlin,  1830,  1  vol.  in-12  )  ;  il  y  a  ajouté  quel- 
ques notes.  En  1831  on  en  a  aussi  publié,  à 
Londres,  une  traduction  anglaise  intitulée  :  Ma- 
sik  made  easy ;  enfin  les  journaux  italiens  en 
ont  annoncé  une  version  en  langue  italienne. 
Ce  succès  général  défend  mieux  mon  livre 
que  je  ne  pourrais  le  faire  dans  une  préface  ; 
toutefois,  il  ne  m'aveugle  pas  sur  ses  défauts  et 
ne  diminue  pas  le  désir  que  j'ai  de  l'améliorer  et 
d'augmenter  son  utilité.  C'est  ce  désir  qui  m'a 
conduit  à  y  changer  de  nombreux  passages  et  à 
l'augmenter  d'un  second  volume,  bien  que  je 
sois  convaincu  que  le  mérite  d'un  ouvrage  ne 
se  mesure  point  à  son  étendue.  J'ai  cru  que  ce 
volume  serait  d'un  usage  commode  pour  les 
gens  du  monde,  et  même  pour  les  artistes  qui 
n'ont  pas  eu  le  temps  d'étudier  toutes  les  parties 
de  leur  art.  Il  contiendra  1°  un  Dictionnaire  des 
mots  dont  l'usage  est  le  plus  habituel  :  j'espère 
que  l'utilité  de  cette  addition  sera  sentie  par 
mes  lecteurs  ;  2°  un  Catalogue  systématique  des 
principaux  ouvrages  français  sur  les  diverses 
parties  de  la  musique. 


LA  MUSIQUE 

MISE  A  LA  PORTÉE 

DE  TOUT  LE  MONDE. 


PREMIERE  SECTION. 

«U    SYSTÈME     MUSICAL,    CONSIDÉRÉ    DANS    LES    TROIS    QUALITÉS 
DES  SONS,  SAVOIR  :  l'iNTONATION,  LA  DUREE  ET  l'iNTENSITÉ. 


CHAPITRE  I. 

objet  <1p  la  musique. —  Son  origine.  —  Ses  moyens. 

lia  musique  peut  se  définir  Vart  d'émom'oir  par  la 
combinaison  des  sons  *.  Ce  n'est  pas  seulement  sur  l'es- 
pèce humaine  que  l'action  de  cet  art  se  fait  sentir;  la 
plupart  des  êtres  organisés  y  sont  plus  ou  moins  soumis. 
L'ouïe  qu'il  attaque  immédiatement  semble  n'être  que 
son  agent  :  c'est  sur  le  genre  nerveux  que  sa  puissance  se 

(i)  Celte  définition  n'est  pas  celle  qu'on  trouve  dans  les  dic- 
tionnaires. J.-J.  Rousseau  dit  que  la  musique  est  l'art  de  combiner 
les  sons  d'une  manière  agréable  à  l'oreille  ;  c'est  borner  l'action  de  cet 
art  à  une  sensation  physique  bien  qu'il  en  ait  une  morale.  Le  cé- 
lèbre philosophe  Kant  définit  la  musique  l'art  d'exprimer  une 
agréable  succession  de  sentimens  par  les  sons,  ce  qui  semble  exclura 
les  émotions  fortes  du  domnine  lie  cet  art.  Mosel,  littérateur  alle- 

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3  INTONATION.  SKCT.    I. 

tléveloppe  avec  le  plus  de  force;  de  là  vient  la  diversité 
de  ses  effets.  Le  chien,  le  cheval ,  le  cerf,  l'éléphant,  les 
reptiles,  les  insectes  même,  sont  sensibles  à  la  musique, 
mais  d'une  manière  différente.  Dans  les  uns,  la  sensation 
ressemble  à  un  ébranlement  nerveux  porté  jusqu'à  la 
douleur;  dans  les  autres,  le  plaisir  subit  diverses  trans- 
formations. L'attention  de  tous  est  fixée  dès  que  les  sons 
se  font  entendre. 

Les  phénomènes  développés  par  la  musique  dans  l'or- 
ganisation humaine  sont  surtout  très  dignes  de  remarque. 
àSur  un  certain  nombre  d'individus  également  sensibles 
?i  ses  accens ,  il  est  des  combinaisons  de  sons  qui  excitent 
le  plaisir  des  uns,  tandis  que  les  autres  restent  impas- 
sibles; et  réciproquement.  Telle  combinaison  qui  ne 
nous  a  point  émus  dans  un  moment,  nous  transporte 
d«  plaisir  dans  un  autre.  Quelquefois  ce  plaisir  n'est 
qa'une  douce  sensation  à  laquelle  on  semble  s'aban- 
d">nner  d'une  manière  passive;  dans  d'autres  circons- 
tances, l'action  de  l'art  prend  le  caractère  de  la  violence, 
et  tout  le  système  vital  est  ébranlé.  La  constitution  déli- 
cate des  femmes  les  rend  propres  à  éprouver  dans  l'au- 
dilion  de  la  musique  de  plus  vives  sensations  que  les 
Iiommes  ;  il  en  est  même  chez  lesquelles  l'action  de  cet 
art  porte  le  délire  des  sens  jusqu'au  dernier  degré. 

Mais  si  le  goût  de  la  musique  nous  est  donné  par  la 
nature,  l'éducation  y  ajoute  beaucoup,  et  peut  même  le 

mand.  dit  qne  la  musique  est  l'art  d'exprimer  des  sentimens  déier- 
minés  par  des  tons  bien  coordonnés  t  m.iis  les  sentimens  ne  soat  dé- 
ti-rmiiics  d:i:is  l'effet  de  la  niusiq'io  que  par  le  sens  des  paroles 
qu'on  y  nd.ijite;  Us  sont  indéterminés  dans  la  rauiiqiie  instriimen- 
t:ile  et  n'en  sont  pas  moins  vifs.  Je  crois  que  ma  définition  est  la 
meilleure. 


CHAP.   r.  ORIGINE  UE  LA  MUSIQUE.  3 

faire  nalfre.  De  là  vient  sans  doute  que  l'on  voit  dans  la 
monde  des  hommes,  distingués  d'ailleurs  par  les  qualités 
de  l'esprit  et  par  des  taiens  d'un  autre  genre,  montrer 
non -seulement  de  l'indifférence,  mais  même  de  l'aver- 
sion pour  cet  art.  Queli|ues  philosophes  ont  pensé  que 
l'organisation  de  ces  individus  est  incomplète  ou  vicieuse; 
il  se  peut  toutefois  que  leur  manière  d'èlro  ne  soit  que 
le  résultat  d'une  longue  impassibilité  des  nerfs  musi» 
eaux,  et  que  le  défaut  d'exercice  ait  produit  leur  inseu'» 
sibililé. 

L'action  de  la  musique  sur  les  organes  physiques  et 
sur  les  facultés  morales  a  fait  imaginer  de  s'en  servir 
comme  d'un  moyen  curatif,  non-seulement  dans  les 
affections  mentales,  mais  même  dans  certaines  maladies 
où  l'organisation  animale  parait  seule  atteinte.  Beaucoup 
de  médecins  ont  fait  sur  ce  sujet  des  recherches  intéres- 
santes, mais  dans  lesquelles  l'esprit  philosophique  n'a 
point  assez  dominé  :  le  nombre  des  ouvrages  où  ils  les 
ont  consignées  est  très  considérable,  et  les  faits  qui  y 
sont  exposés  ont  quelque  chose  de  si  peu  vraisemblable 
qu'ils  ont  besoin  de  l'autorité  du  nom  des  auteurs  pour 
être  admis. 

Malgré  sa  capacité  relative,  l'esprit  humain  a  des 
bornes  telles  que  l'idée  de  l'infini  n'y  entre  qu'avec  ef- 
fort. On  veut  trouver  un  commencement  à  toute  chose, 
et,  dans  les  idées  vulgaires,  la  musique  doit  avoir  une 
origine  comme  toutes  nos  connaissances.  La  Genèse  ni 
les  poètes  de  l'anliquilé  profane  ne  parlent  des  inven- 
teurs de  cet  art;  seulement  ils  citent  les  noms  de  ceux 
qui  ont  fait  les  premiers  instrumens ,  Tubal,  Mercure, 
Apollon  et  d'autres.  On  pense  bien  que  c'est  la  Geoèse 
que  je  crois  sur  cet  objet ,  comme  sur  d'autres  plus  im- 


f  INTONATION.  StCT.   I. 

portans;  mais  ce  n'est  pas  de  cela  qu'il  s'agit.  Quant  à 
l'origine  de  la  musique ,  chacun  l'a  arrangée  a  sa  fanta- 
sie  ;  toutefois  l'opinion  qui  la  place  dans  le  chant  des 
oiseaux  a  prévalu.  Il  faut  avouer  que  c'est  la  une  idée 
bizarre,  et  que  c'est  avoir  une  opinion  bien  singulière  de 
l'homme  que  de  lui  faire  trouver   l'une  de  ses  jouis- 
sances les  plus  vives  dans  l'imitation  du  langage  de  cer- 
tains animaux.  Non,  non,  il  n'en  est  point  ainsi  !  1  homme 
chante  comme  il  parle,  comme  il  se  meut,  comme  d  dort, 
,,ar  une  suite  de  la  conformation  de  ses  organes  et  de  la 
disposition  de  son  ame.  Cela  est  si  vrai  que  les  peuples 
les  plus  sauvages  et  les  plus  isolés  de  toute  commun.ca- 
tion  avaient  une  musique  quelconque  quand  on  les  a 
découverts,  lors  même  que  la  rigueur  du  climat  ne  per- 
mettait point  aux  oiseaux  de  vivre  dans  le  pays  ou  d  y 
chanter.  La  musique  n'est,  dans  son  ongine    composée 
f,ue  de  cris  de  joie  ou  de  gémissemens  douloureux;  a 
mesure  que  les  hommes  se  civilisent,  leur  chant  se  per- 
fectionne; et  ce  qui,  d'abord,  n'était  qu  un  accent  pas- 
sionné ,  finit  par  devenir  le  résultat  de  l'étude  et  de  l  art 
Il  y  a  loin ,  sans  doute ,  des  sons  mal  articules  qui  sortent 
du  gosier  d'une  femme  de  la  Nouvelle-Zemble  aux  fio- 
ritures de  mesdames  Malibran  et  Sontag;  mais  il  nen 
est  pas  moins  vrai  que  le  chant  mélodieux  de  celles-ci  a 
pour  premier  rudiment  l'espèce  de  croassement  de  celle- 
là.  Au  reste ,  il  importe  peu  de  savoir  quelle  a  ete  l  ori- 
gine de  la  musique  :  ce  qui  doit  nous  intéresser,  c  est  de 
savoir  ce  qu'elle  est  devenue  dès  qu'elle  a  mente  le  nom 
d'art;  c'est  de  nous  disposer  à  recevoir  toutes  les  im- 
pressions déplaisir  qu'elle  peut  nous  donner    et  d  en 
augmenter  l'effet  autant  qu'il  est  en  nous.  C  est  la  ce  c,v.. 
jDérile  d'clrc  exainiii-j  et  recherche. 


^"^''•'-  < mOLMi  DE  I..V  .UtSK^LE.  j 

Par  quels  moyens  la  musique  agit-elle  sur  les  êtres 
organisés?  question  qui  se  répète  souvent  sous  diverses 
formes  ,  et  dont  la  solution  renferme  tout  le  mécanisme 
de  l'art.  Toutefois,  sans  entrer  dans  tant  de  détails,  cha- 
cun y  répond  selon  son  goût,  en  disant  que  c'est  la  mé- 
lodie, ou  Yharmonie,  ou  enfin  l'union  de  ces  deux  cho- 
ses, mais  sans  expliquer,  et  peut-être  même  sans  savoir 
exactement  ce  que  c'est  que  la  mélodie  ou  Yharmonie. 
J'essaierai  de  lever  tous  les  doutes  à  cet  égard;  mais  au- 
paravant je  dois  déclarer  qu'il  est  un  troisième  moyen 
d'action  que  possède  la  musique,  et  auquel  on  n'a  point 
pensé  :  c'est  Vaccent,  dont  la  présence  ou  l'absence  est 
cause  que  la  même  mélodie  ou  la  même  harmonie  pro- 
duit ou  ne  produit  point  d'effet.  J'expliquerai  aussi  en 
quoi  il  consiste. 


CHAPITRE  II. 

De  la  diversité  des  sons  et  de  la  mauière  de  les  exprimer  par  des 


noms. 


Il  n'est  personne  qui  n'ait  remarqué  que  le  caractère 
des  voix  de  femmes  ou  d'enfans  diffère  entièrement  de 
celui  des  voix  d'hommes  :  les  unes  sont  plus  ou  moins 
aiguës;  les  autres  plus  ou  moins  graves.  Il  y  aune  infinité 
d'intonations  possibles  entre  le  son  le  plus  aigu  des  unes 
et  le  plus  grave  des  autres.  Chacune  de  ces  intonations 
est  un  son  distinct  pour  une  oreille  exercée.  Toutefois 
on  conçoit  que  si  l'on  avait  voulu  donner  un  nom  diffé- 
rent à  chacun,  cette  multiplicité  de  noms,  loin  d'être 
un  secours  pour  l'esprit,  aurait  inutilement  chargé  la 


1. 


O  IXTOXATIOïî.  8ECT.  I. 

tDémoire;  mais  les  philosophes  et  les  sa  vans  qui  se  sont 
ôccapés  du  soin  de  coordonner  les  sons  d'une  manière 
régulière,  ayant  remarqué  qu'au-delà  d'un  certain  nom- 
bre de  sons  rangés  dans  un  certain  ordre,  ascendant  ou 
descendant ,  les  autres  se  reproduisent  ensuite  dans  le 
même  ordre,  et  n'ont  avec  les  premiers  d'autre  diffé- 
rence que  celle  qui  résulte  d'une  voix  aiguë  à  une  voix 
grave  qui  s'accordent  ensemble,  ils  en  ont  conclu  que 
les  uns  ne  sont  que  la  lépétition  des  autres  à  une  cer- 
taine distance  qu'ils  ont  appelée  octave.  Par  exemple: 
ayant  désigné  le  premier  son  par  C,  le  second  par  D,  le 
troisième  par  E,  etc. ,  dans  cet  ordre,  C,  D,  E,  F ,  G, 
A,  U,  ils  recommençaient  la  seconde  série  par  c,  d,  e,f, 
g,  a,  h,  et  la  troisième  par  ce,  dd ,  ee,  etc.  On  attribue 
communément  l'invention  des  syllabes  ut,  ré,  mi,  fa, 
sol,  la,  dont  on  se  sert  aujourd'hui ,  à  un  moine  italien 
nommé  Gui  d'Arezzo ,  qui  les  aurait  tirées  de  l'hyrane 
à  saint  Jean  dont  les  paroles  sont: 

rVqueant  Iaxis,  resonare  fibris  , 
3/ii'a  gestoruiD,yamu)i  tuorum, 
So/ve  polluti, /abii  reatum 

Sancte  Joannes.  ^. 

.  r 
Mais  dans  une  épitre  à  un  autre  moine,  Gui  conseille 
seulement  à  son  confrère  de  se  souvenir  du  chant  de  cet 
hymne  qui  s'élève  d'une  note  sur  chaque  syllabe  ut,  ré, 
mi,  etc.,  pour  trouver  l'intonation  de  chaque  degré  de 
la  gamme.  Cinq  siècles  plus  tard,  un  Flamand  ajouta  le 
nom  de  si  aux  six  premiers ,  et  compléta  la  série ,  après 
laquelle  on  dit  ut,  ré,  mi,  fa,  sol,  la,  si ,  deuxième  oc- 
tave, et  ainsi  de  suite  :  troisième,  quatrième,  cinquième 
octaves.  Vers  1640,  Doni,  savant  musicien,  substitua  do 
à  ut  y  comme  plus  agréable  à  prononcer  et  à  entendre 


CHAP.  II.  UIVERSITÉ   DKS  SONS.  7 

dans  la  solnusation  '.  Les  Italiens,  les  Français,  les  Es- 
pagnols et  les  Portugais  ont  adopté  ces  syllabes  pour 
nommer  les  sons;  les  Allemands  et  les  Anglais  ont  con^ 
serve  les  lettres  peur  le  même  usage.  La  série  dea  noms 
ou  des  lettres  s'appelle  la  gamme  *. 

Après  avoir  ainsi  désigné  les  sons,  on  s'aperçut  qu'il 
y  en  avait  d'intermédiaires  que  l'oreille  appréciait  par- 
faitement. Par  exemple,  on  reconnut  qu'entre  les  sons 
désignés  par  ut  et  ré,  il  y  en  avait  un  troisième  égale- 
ment éloigné  de  ut  et  de  vé.  Pour  ne  pas  multiplier  les 
noms,  on  supposa  que  ce  son  est  quelquefois  ut  élevé, 
et  quelquefois  ré  abaissé.  On  appela  ut  dièse,  Vul  élevé, 
et  ré  bémol,  le  ré  abaissé,  et  l'on  fît  de  même  pour  les 
sons  intermédiaires  de  ré,  mi,  fa,  sol,  etc.  Cette  opé- 
ration a  fait  du  mot  dièse  le  synonyme  d'élevé,  et  de 
bémol  celui  de  baissé.  Il  est  évident  que  tout  cela  n'est 
qu'une  opération  factice  imaginée  seulement  pour  plus 
de  simplicité;  car  un  son  ne  peut  être  modifié  dans  son 
intonation  et  ne  peut  se  changer  en  un  autre  sans  cesser 
d'exister.  Ut  dièse  n'est  donc  plus  un  ut;  mais  les  mu- 
siciens qui  n'ont  que  de  la  pratique,  et  c'est  le  plus 
grand  nombre,  ayant  attaché  une  idée  de  réalité  aux  si- 
gnes représentatifs  des  sons,  et  voyant  que  les  signes  d'ut 
ou  de  ré  ne  changent  pas,  et  qu'on  y  joint  seulement  les 
signes  de  l'élévation  ou  de  l'abaissement,  c'est-à-dire  le 
dièse  ou  le  bémol,  ces  musiciens,  dis-je,  se  sont  imaginé 
que  ut  est  toujours  ut,  soit  qu'on  y  ait  joint  un  dièse  on 

(i)  Voyer  ce  mot  au  dictionnaire  dans  la  II*  partie. 

A  l'égard  du  nom  de  la  gamme,  il  vient  de  ce  que  la  note  la  plus 
Lasse  de  l'éclielle  des  sons  était  représentée  par  la  troisième  lettre 
de  l'alphabet  grec,  appelée  gamma.  Ce  gamma  était  le  sisacdesol. 

(a)  Voyez  ce  mot  au  dictionnaire,  dans  la  lie  partie. 


s  IMOSAllON.  SECT.  J. 

qu'il  n'y  en  ait  point.  De  pareilles  eiTeurs  sont  fréquentes 
dans  la  musique;  elles  ont  jeté  beaucoup  d'obscurité  sur 
l'exposé  de  ses  principes. 

Ut  dièse  étant  intermédiaire  entre  ut  et  ré,  ainsi  que 
?(/  bémol,  il  semblerait  que  ces  deux  notes  doivent  être 
jjarfaitement  à  l'unisson  ;  mais,  suivant  la  théorie  fondée 
sur  le  calcul  des  longueurs  des  cordes  et  les  phénomènes 
de  leur  résonnance ,  il  résulte  que  ut  dièze  n'est  pas 
exactement  le  même  son  que  ré  bémol,  et  que  leur  dif- 
férence est  comme  80  :  81  dans  certains  cas  ,  ou  comme 
125  :  128  dans  d'autres.  On  donne  le  nom  de  comma  à 
ces  différences.  Mais  la  difficulté  de  construire  des  ins- 
trumens  à  clavier,  tels  que  le  piano  ou  l'orgue,  qui  eus- 
sent exprimé  ces  proportions,  et  l'embarras  que  de  pa- 
reils instrumens  auraient  causé  dans  l'exécution,  ont  fait 
imaginer  d'accorder  ces  mêmes  instrumens  en  faisant 
sur  la  série  totale  de  leurs  sons  la  répartition  de  ces  dif- 
férences ,  afin  qu'elles  fussent  moins  sensibles  à  l'oreille. 
On  a  donné  le  nom  de  tempérament  à  cette  opération. 
Tous  les  accordeurs  la  pratiquent  par  habitude,  sans  en 
connaître  la  théorie.  On  conçoit  que  par  le  tempérament 
on  n'obtient  qu'une  justesse  approximative;  mais  cette 
justesse  suffit  pour  l'oreille  dans  l'usage  ordinaire  de  la 
musique. 

Si  chacun  était  libre  de  nommer  ut  le  premier  son 
venu,  ré  le  suivant,  et  ainsi  de  suite  en  s'élevant,  il  ré- 
gnerait dans  la  musique  une  confusion  extrême  et  l'on 
ne  pourrait  s'accorder.  Pour  obvier  à  cet  inconvénient, 
on  a  construit  de  petits  instrumens  en  acier  ayant  la 
forme  d'une  fourchette  et  produisant  un  son  modèle 
qu'on  appelle  diapason,  nom  qui,  par  analogie ,  se  donne 
àriustrument  lui-même.  C'est  sur  ce  son  qu'on  accorde 


cil  VI'.  u.  m Ai'Aso.v.  9 

tous  les  instrumens  et  que  les  voix  se  règlent.  En  France 
ce  son  est  la;  en  Italie,  c'est  ut.  De  là  so  .it venues  les 
expressions  usitées  dans  les  orchestres  pour  accorder  les 
instrumens  entre  eux  ;  en  France  on  dit  donner  le  la; 
en  Italie,  siionar  il  do.  Le  diapason  n'est  pas  identique- 
ment le  même  dans  tous  les  pays  ;  il  a  même  subi  diver- 
ses modifications  dans  le  même  lieu.  Chaque  théâtre  de 
Paris  avait  autrefois  le  sien  ;  celui  de  l'Opéra  était  le  plus 
bas ,  et  celui  du  théâtre  italien  le  plus  élevé.  Il  y  a  main- 
tenant très  peu  de  différence  entre  eux.  Un  diapason 
trop  bas  nuit  à  l'éclat  de  la  sonorité ,  parce  que  les  cor- 
des des  instrumens  ne  sont  pas  assez  tendues  ;  un  diapa- 
son trop  élevé  fatigue  les  voix. 

L'usage  du  diapason  n'est  pas  assez  répandu.  La  plu- 
part des  pianos  qu'on  trouve  dans  les  provinces  de  France 
sont  accordés  trop  bas.  Les  chanteurs  qui  s'accompa- 
gnent avec  ces  pianos  habituent  leurs  voix  à  une  sorte 
de  paresse  qu'ils  ne  peuvent  vaincre  quand  ils  doivent 
chanter  au  diapason. 


CHAPITRE  III. 

Comment  on  représente  les  sons  par  des  signes. 

L'opération  d'esprit  par  laquelle  l'homme  a  imaginé 
de  représenter  les  sons  de  la  parole  par  des  signes  sera 
éternellement  un  mystère;  mais  une  fois  parvenu  à  cette 
découverte ,  on  conçoit  qu'il  n'a  pas  dû  éprouver  beau- 
coup de  difficulté  pour  trouver  les  moyens  d'exprimer 
les  sons  de  son  chant.  Les  Grecs  et  les  Romains  se  ser- 


iO  INTONATION,  SECT.   I. 

valent  pour  cela  des  lettres  de  leur  alphabet  diversement 

combinées  ou  tronquées  ;  les  Musulmans  n'ont  point  de 
signes  pour  cet  objet;  les  Chinois  en  possèdent  qui  sont 
compliqués  et  bizarres  comme  leur  langue. 

Après  plusieurs  siècles  d'une  lutte  sans  cesse  renais- 
sante contre  les  barbares  du  Nord,  l'empire  d'Occi- 
dent fut  vaincu  et  s'écroula;  les  arts  périrent  avec  lui, 
et  il  n'en  resta  guère  qu'un  souvenir  vague  qui  s'affaiblit 
insensiblement  jusqu'au  huitième  siècle  où  il  se  perdit 
complètement.  La  musique  surtout ,  c'est-à-dire  la  mu- 
sique des  Grecs  qui  avait  charmé  Rome  et  l'Italie,  fut 
absolument  oubliée,  et  il  n'en  resta  que  ce  que  deux 
pères  de  l'Eglise  (saint  Ambroise  et  saint  Grégoire)  en 
avaient  conservé  pour  le  service  divin.  Les  mélodies 
étaient  si  simples,  ou  plutôt  si  bornées,  qu'il  fallait  peu 
de  signes  pour  les  écrire,  et  ces  signes  ne  se  composaient 
que  de  quelques  lettres  de  l'alphabet. 

Mais  pendant  que  les  peuples  latins  faisaient  usage  de 
ces  signes,  les  Lombards  et  les  Goths ,  dont  la  domina- 
tion s'était  établie  en  Italie,  en  apportaient  d'autres  d'un 
système  bien  différent ,  car  ceux-ci  ne  représentaient 
pas  seulement  des  sons  isolés,  mais  des  collections  de 
sons,  et  même  des  phrases  entières.  Les  grandes  biblio- 
thèques renferment  des  manuscrits  où  l'on  trouve  ces 
signes  appliqués  aux  chants  de  l'église,  ce  qui  a  permis 
de  les  déchiffrer  en  les  comparant  avec  les  mêmes  chants 
notés  par  les  signes  de  la  musique  latine. 

Il  est  au  reste  remarquable  que  les  peuples  de  l'Orient, 
qui  ont  songé  à  représenter  les  sons  par  des  signes , 
n'ont  compris  l'usage  de  ceux-ci  que  comme  des  moyens 
d'exprimer  des  collections  de  sons  en  un  seul  signe,  au 
lieu   de  lea    décomposer  dans    leurs  élémens  les  plus 


THAP.    III.  !S'OTATI0\.  11 

simples.  Cette  singularité  doit  être  attribuée  à  leur 
goût  pour  les  ornetnens  multipliés  à  l'excès  dans  leurs 
mélodies,  qui  auraient  rendu  la  lecture  de  la  musique 
fort  difficile  si  l'on  n'eût  trouvé  le  moyen  de  représenter 
plusieurs  sons  en  un  seul  signe.  Les  signes  qui  sont  en- 
core en  usage  dans  la  musique  des  églises  grecques  de 
l'Orient  sont  de  cette  espèce  j  ils  ont  été  inventés  par  le 
moine  Jean  de  Damas. 

Il  serait  difficile  de  fixer  aujourd'hui  l'époque  précise 
où  les  notes  du  plain-chant,  d'où  la  notation  moderne 
a  tiré  son  origine,  ont  été  imaginées;  on  en  trouve 
des  exemples  dans  des  manuscrits  de  la  première 
moitié  du  onzième  siècle  ;  mais  rien  ne  prouve  qu'ils 
n'ont  pas  été  inventés  dans  un  temps  plus  reculé.  Au 
reste  il  est  bon  de  remarquer  qu'à  cette  époque  il 
n'y  avait  pas  de  système  uniforme  de  signes  pour  écrire 
la  musique.  Chaque  maître  avait  le  sien  ;  il  le  transmet- 
tait à  ses  élèves,  et  l'on  ne  pouvait  guère  passer  d'un 
canton  dans  un  autre  sans  être  obligé  d'en  étudier  un 
nouveau. 

Quoi  qu'il  en  soit ,  le  système  des  notes  du  plain- 
rhant,  tel  qu'on  le  voit  dans  les  livres  de  l'église,  finit 
par  dominer  et  servit  de  base  à  la  notation  qui  est 
maintenant  adoptée  par  toutes  les  nations  européennes. 
Des  améliorations  successives  en  ont  fait  insensiblement 
«ne  chose  toute  différente  de  ce  qu'elle  fut  dans  l'ori- 
gine. Je  vais  essayer  d'en  donner  des  notions  exactes 
avec  le  plus  de  concision  qu'il  me  sera  possible. 

La  collection  des  signes  de  la  musique  s'appelle  la 
notation.  On  la  divise  en  deux  espèces  :  la  première 
renferme  les  signes  à' intonation,  la  seconde  les  signes 
de  {Jurée,  Les  uns  et  les  autres  sont  d'une  utilité  indis^ 


12  ISTOXATION.  SKCT.   ï. 

pensable,  car  il  ne  suffit  pas  de  reconnaître  à  l'inspec- 
tion d'un  signe  le  son  qu'il  représente,  il  faut  encore  en 
connaître  la  dui-ée  et  pouvoir  la  mesurer.  Ces  signes  se 
disposent  sur  un  papier  spécialement  préparé  pour  cet 
objet  et  qu'on  appelle  papier  de  musique.  La  prépara- 
tion consiste  à  tracer  horizontalement  des  réunions  de 
cinq  lignes  parallèles  qu'on  nomme  portées ,  et  qui  sont 
figurées  de  cette  manière  *: 


C'est  sur  ces  lignes  ou  dans  les  intervalles  qu'elles  lais- 
sent entre  elles  que  se  placent  les  signes  de  la  notation. 
J'ai  dit  que  ceux-ci  se  divisent  en  deux  espèces^  les  si- 
gnes d'intonation  et  ceux  de  durée.  Les  signes  d'intonation 
sont  de  deux  sortes  :  on  donne  le  nom  de  clefs  aux  uns, 
et  celui  de  notes  aux  autres. 

La  diversité  des  voix  a  donné  naissance  aux  clefs, 
qui,  placées  au  commencement  des  portées,  indiquent 
que  ce  qui  y  est  écrit  appartient  à  telle  ou  telle  voix.  Le 
signe  des  voix  ou  des  instrumens  aigus  s'appelle  clef  de 
sol  ;  il  est  fait  ainsi  ^.  On  le  met  ordinairement  sur  la 
deuxième  ligne  de  la  partie  inférieure  de  la  portée,  ce 
qui  indique  que  le  signe  du  son  appelé  sol  se  met  sur 
cette  ligne.  On  donne  le  nom  de  clef  de  fa  au  signe  des 
voix  ou  des  instrumens  graves;  en  voici  la  forme  9'.  Sa 
position  ordinaire  est  sur  la  quatrième  ligne  en  partant 

(i)  Il  y  a  du  papier  de  musique  qui  contient  dix  portées  dans 
chaque  page  ,  d'autre  douze,  quatorze,  seize  et  même  vingt-quatre. 
On  appelle  papier  à  la  Française  celui  qui  est  de  hauteur  ,  etpa» 
pier  à  rilalienne]e  papier  d'une  largeur  oMong-tp. 


ClIAP,    Iir.  NOTATION.  n 

du  bas  de  la  portée;  ullo  indique  i[ue  J^ci  est  sur  ctiie; 
li^ne.  Le  signe  des  voix  et  des  instrumens  intermédiaires 
se  nomme  clef  d'«/;  mais  comme  il  y  a  plusieurs  nuances 
d'élévation  ou  de  gravité  parmi  ces  voix  ,  on  exprime  ces 
nuances  en  plaçant  ce  même  signe  sur  des  lignes  diffé- 
rentes. La  clef  d'ut  est  faite  ainsi  p^  :  elle  donne  son 
nom  à  la  note  qui  se  trouve  sur  la  ligue  oi!i  elle  est  pla- 
cée. 

Les  diverses  qualités  de  voix  peuvent  se  réduire  à 
quatre  :  1"  les  voies  aiguës  de  femmes;  2°  les  voix  gra- 
ves de  femmes;  3°  les  voix  aiguës  d'hommes  ;  4°  les  voix 
graves  d'hommes.  La  voix  aiguë  de  femme  se  nomme 
soprano  ou  dessus;  la  voix  intermédiaire  du  même  sexe 
mezzo  soprano  ou  second  dessus  ;  la  voix  grave  con- 
tralto ;  la  voix  aiguë  d'homme  s'appelle  tenore ;  la  voix 
grave  basse.  On  appelle  bariton  la  voix  intermédiaire 
du  tenore  et  de  la  basse.  Les  voix  aiguës  d'homme  étant 
naturellement,  et  par  l'effet  de  leur  conformation,  plus 
graves  d'une  octave  que  les  voix  aiguës  de  femmes ,  on 
pourrait  se  servir  de  la  même  clef,  c'est-à-dire  de  la 
clef  de  sol  pour  toutes  deux,  laissant  à  la  nature  le  soin 
d'opérer  la  différence  d'octaves.  Quant  au  contralto  ou 
voix  grave  de  femme,  qui  est  à  l'octave  supérieure  de  la 
basse,  on  pourrait,  par  les  mêmes  motifs,  écrire  sa  par- 
tie avec  la  clef  dey^.  A  l'égard  des  instrumens  qui,  dans 
-  l'orchestre,  remplissent  les  fonctions  des  voix  intermé- 
diaires, on  pourrait  aussi  les  réduire  à  cette  simplicité, 
en  indiquant  le«  différences  d'octaves  par  un  signe  sim- 
ple tel  qu'un  ■ —  qui  barrerait  les  clefs  de  sol  ou  d.e.fa. 

Mais  s'il  est  possible  de  supprimer  les  clefs  d'ut  dans 
l'usage  ordinaire,  ces  mêmes  clefs  sont  d'un  grand  se- 

2 


14  IXTOA'ATIOX.  SECT.  I. 

cours  dans  certains  cas  dont  je  parlerai  plus  loin  * ,  et 
dans  l'obligation  où  l'on  est  d'en  faire  usage  dans  ces 
occasions,  il  est  nécessaire  de  se  les  rendre  familières, 
et  conséquemment  de  s'en  servir  habituellement.  De  là 
vient  que  la  complication  résultant  de  la  multiplicité 
des  clefs  s'est  conservée  jusqu'aujourd'hui,  quoiqu'on 
ait  reconnu  l'avantage  qu'il  y  aurait  d'ailleurs  à  la  faire 
disparaître. 

Les  clefs  ne  sont  que  des  signes  généraux  qui  indi- 
quent une  fois  pour  toutes  le  genre  de  voix  ou  d'instru- 
ment qui  doit  exécuter  la  musique  qu'on  a  sous  les  yeux; 
les  notes  sont  les  signes  particuliers  de  chaque  son.  Tou- 
tefois, il  ne  faut  pas  croire  qu'il  soit  nécessaire  d'avoir 
un  signe  d'une  forme  particulière  pour  chacun  de  ces 
sons;  une  pareille  multiplicité  jetterait  l'esprit  dans  la 
confusion  et  fatiguerait  la  mémoire  sans  utilité.  Ce  n'est 
point  la  forme  de  la  note  qui  détermine  l'intonation , 
mais  la  place  qu'elle  occupe  sur  la  portée.  Pour  rempUr 
cet  objet,  un  point  placé  sur  la  ligne  ou  dans  l'espace 
suffirait. 

La  note  placée  sur  la  ligne  inférieure  de  la  portée  re- 
présente un  son  comparativement  plus  grave  que  celles 
qui  occupent  d'autres  positions  sur  cette  même  portée; 
ainsi  la  note  qui  est  dans  l'espace  entre  la  première  et 
la  deuxième  ligne  exprime  un  son  plus  élevé  que  celle 
qui  est  sur  la  première  ;  la  note  placée  sur  la  deuxième 
ligne  représente  une  intonation  encore  plus  élevée  :  il  en 
est  de  même  de  toutes  les  autres  positions  à  mesure  qu'on 
s'élève  sur  la  portée.  Si  donc  on  appelle  ut  la  note  de  la 
preaaière  ligne,  on  donne  le  nom  de  ré  à  celle  qui  occupe 

(i)  Voyez  ch.  iv,  page  22. 


tBAV.  in.  îîOTATlOW.  15 

l'espace  entre  la  première  et  la  seconde  ligne,  celui  de 
mi  à  la  note  qui  est  posée  sur  la  deuxième  ligne ,  et  ainsi 
des  autres,  comme  on  le  voit  dans  l'exemple  suivant: 


ut 

ré 

mi 

fa 

sol 

la 

si 

ut 

ré 

^ 

ë 

_      «       - 

0 

^ 

0 

ë... 

On  conçoit  qu'une  voix  ou  un  instrument  qui  serait 
borné  à  un  si  petit  nombre  de  sons  n'offrirait  que  de 
faibles  ressources  au  chanteur  ou  à  l'instrumentiste; 
aussi  n'en  est-il  point  qui  soient  retenus  dans  des  limites 
si  étroites.  Les  instrumens  surtout  dépassent  tous  de 
beaucoup  l'étendue  de  la  portée  de  cinq  lignes.  Mais  si 
l'on  était  obligé  de  composer  la  portée  d'autant  de  lignes 
permanentes  qu'il  en  faudrait  pour  embrasser  l'étendue 
de  certains  instrumens ,  une  sorte  de  labyrinthe  inextri- 
cable résulterait  de  cette  multitude  de  lignes,  et  l'œil  le 
plus  clairvoyant  tie  parviendrait  pas  à  distinguer  une 
seule  note  sans  utl  travail  pénible  *.  Le  moyen  doiit  on 
se  sert  pour  éviter  cet  inconvénient  est  ingénieux.  Il 
consiste  à  ajouter  des  fragmens  de  lignes  à  la  portée, 
soit  au-dessus,  soit  au-dessous,  au  fur  et  mesure  des 
besoins,  et  de  les  supprimer  lorsqu'ils  cessent  d'être  uti- 
les. Ces  fragmens  ne  se  confondent  pas  avec  la  portée, 
et  se  détachent  sensiblement  pour  l'œil;  on  peut  en  juger 
par  l'exetnple suivant: 

(i)  Cet  inconvénient  a  existé  autrefois  dans  la  musique  instru- 
mentale, et  particulièrement  dans  la  musique  d'orgue  du  seizième 
et  du  dix-septième  siècle.  De  là  vient  que  les  ouvrages  des  grands 
organistes  de  cette  époque  sont  illisibles  pour  la  plupart  de»  mu- 
siciens. 


(j 

-  ■ 

IJiTOKATION. 

■± 

A. 

^ 

SECT 

.   1 
JE. 

*  -0- 

-9 

-*• 

-9 

■♦- 

Tf  Zi. 

Toute  note  placée  sur  la  même  ligne  que  la  clef  qui 
est  au  commencement  de  la  portée  prend  le  nom  de 
cette  clef  et  sert  de  point  de  comparaison  pour  nommer 
toutes  les  autres  notes.  Ainsi ,  lorsque  la  clef  de  sol  se 
trouve  au  commencement  d'une  portée  posée  sur  la  se- 
conde ligne  ,  la  note  placée  sur  cette  ligne  s'appelle  sol, 
et  toutes  les  autres  se  nomment  d'après  celle-là.  S'il  s'a- 
git d'une  clef  de/a  posée  sur  la  quatrième  ligne, /«  se 
trouve  sur  cette  ligne;  il  en  est  de  même  des  autres.  On 
conçoit  d'après  cela  que  le  nom  des  notes  est  éventuel 
et  ne  peut  se  déterminer  d'une  manière  invariable.  La 
différence  des  voix  qui  a  donné  lieu  à  la  multiplicité  des 
clefs  est  la  cause  première  de  ces  variations. 

Mais  si  la  position  des  notes  est  variable ,  il  n'en  est 
pas  de  même  de  leur  intonation ,  laquelle  se  règle  d'après 
le  son  modèle  qu'on  nomme  diapason  en  français  et 
corista  en  italien.  Ainsi  une  note  donnée,  que  nous  nom- 
merons ut,  par  exemple,  ne  peut  avoir  qu'une  intona- 
tion, quelle  que  soit  sa  position  sur  la  portée.  La  seule  dif- 
férence qu'il  y  aura  dans  les  diverses  positions  de  cet  ut 
et  dans  sa  sonorité,  c'est  qu'il  pourra  appartenir  aux 
limites  aiguës  d'une  voix,  telle  que  la  basse-taille ,  au 
milieu  ou  médium  d'une  autre ,  comme  le  ténor,  et  aux 
limites  graves  d'une  troisième  qui  sera  le  soprano. 


1.11  SI".    III. 


>()T  VIION, 


17 


Exemple  J'uneiutonation  identique  appurtcouut  ù  des  voix 
diverses. 

uasse-iaïue.      lenoic.  haute -conirc.  oh coiilrallo.  om violon. 
ut  ut  ut  ut  ut 


^=^ 


^ 


Î3= 


Sou  élevé. 


Son  du  médium. 


Jusqu'Ici  l'on  a  vu  comment  on  représente  la  suite 
des  sons  qu'on  appelle  ut,  ré,  mi,  fa,  sol,  la,  si;  mais 
on  n'a  point  encore  aperçu  les  signes  des  sons  intermé- 
diaires auxquels  on  donne  le  nom  de  dièse  et  de  bémol. 
Le  dièse  est  fait  ainsi  i^;  le  bémol  a  cette  forme  [,. 

Toutes  les  lignes  et  tous  les  espaces  étant  occupés  par 
les  notes  qui  représentent  ut,  ré,  mi,  etc.,  il  ne  reste  point 
de  place  sur  la  portée  pour  les  sons  intermédiaires;  mai;; 
comme  on  suppose  dans  le  langage  ordinaire  que  les 
mots  de  ut  dièse  ou  de  ré  bémol  sont  suffisans  pour  ex- 
primer l'idée  du  son  intermédiaire  de  ut  et  de  ré,  on  est 
convenu  aussi  que  le  j^  mis  avant  la  note  ///,  ou  le  \>  placé 
avant  ré,  suffisent  pour  représenter  aux  yeux  ce  son  in- 
termédiaire. 


Excmpli's  : 


3r=|$3C 


Lorsqu'il  s'agit  de   détruire  l'effet  du  dièse  ou  du 
bémol ,  on  se  sert  d'un  autre  signe  qu'on  nomme  bécarre, 

2. 


iS  ÎNTONATIOX.  SECT.   I. 

et  dont  voici  la  forme  t^.  Le  bécarre  se  met  \  côté  de  la 
note  qui  était  précédée  d'un  dièse  ou  d'un  bémol,  et  de- 
vient l'équivalent  de  ces  phrases  :  le  dièse  est  ôté,  ou 
bien  il  ny  a  plus  de  bémol.  C'est  en  quelque  sorte  un 
sigTie  sténographique. 

On  donne  le  nom  de  ton  à  la  différence  de  deux  sons 
comme  ut  et  ré;  la  différence  de  l'un  de  ces  sons  à  l'in- 
termédiaire, représenté  par  un  dièse  ou  un  bémol,  s'ap- 
pelle demi-ton.  Le  demi-ton  est  le  plus  petit  intervalle 
que  l'oreille  d'un  Européen  puisse  apprécier  avec  jus- 
tesse. 

Par  xme  singularité  remarquable,  la  différence  qui  se 
trouve  entre  les  sons  ut  et  ré  n'est  point  égale  entre  tous 
les  sons  de  la  gamme,  en  sorte  que  le  son  intermédiaire 
ne  se  trouve  point  entre  mi  tifo,  ni  entre  si  et  ut  *.  La 
différence  entre  ces  notes  n'est  que  d'un  demi-ton.  Une 
suite  de  sons  faite  sur  le  modèle  de  celle-ci ,  ut,  ré,  mi, 
fa,  sol,  la  ,  si,  ut,  s'appelle  une  succession  diatonique  ; 
si  on  y  introduit  les  sons  intei-médiaires ,  comme  utul^, 
ré,  ré^,  mi,  etc.,  on  lui  donne  le  nom  de  succession  chro- 
matique. On  disait  autrefois  de  la  musique  qu'elle  était 
dans  le  genre  diatonique  quand  on  y  rencontrait  peu  de 
sons  intermédiaires,  et  qu'elle  appartenait  au  genre  chro- 
matique,  lorsque  ces  sons  y  dominaient  :  on  ne  se  sert 
plus  de  ces  expressions  depuis  que  l'art  musical  s'est  en- 
richi d'une  foule  de  combinaisons  qui  résultent  du  mé- 
lange continuel  des  deux  genres.  Quelques  airs  anciens, 
quelques  mélodies   simples   peuvent   donner  l'idée  du 

(l)  Je  ne  parle  point  ici  de  la  différence  qu'il  y  a  entre  le  ton 
majeur  ut,  ré,  et  le  ton  mineur  ré  mi,  parce  que  ce  n'est  qu'une  di- 
versité de  l'iof  ervalle  du  ton  pins  appréciable  par  le  calcul  que  sen- 
«Djie  à  l'oreille. 


CHAP,    m.  NOTATION.  19 

genre  diatonique;  le  genre  chromatique  est  fréquem- 
ment employé  dans  la  musique  moderne  :  il  en  eât  le 
Caractère  distinctif.  On  y  trouve  aussi  quelquefois  un 

w 

autre  genre  qu'on  nomme  enharmonique,  mais  l'emploi 
de  celui-ci  est  plus  rare.  J'expliquerai  ailleurs  en  quoi  il 
consiste. 

Les  mots  diatonique  et  chromatique ,  qui  ont  passé 
de  la  langue  grecque  dans  les  langues  modernes  ,  n'ont 
qu'une  signification  impropre  dans  celles-ci;  car ,  diato- 
nique vient  de  dia,  par,  et  tonos,  ton;  or,  il  n'est  pas 
vrai  que  la  musique  procède  uniquement  par  tonx  dan» 
la  musique  moderne,  puisqu'il  y  a  deux  demi-tons  dans 
toutes  les  gammes,  comme  de  mikfa,  et  de  si  à  ut,  dans 
la  gamme  (Tut.  Cela  se  verra  clairement  dans  le  chapitre 
suivant.  L'expression  est  peut-être  plus  juste  dans  chro- 
matique, mais  elle  manque  de  clarté.  Chromatique  vient 
du  mot  grec  chroma,  qui  signifie  couleur  :  c'est  qu'en 
effet  cette  suite  de  demi-tons  colore  la  musique,  mai» 
seulement  dans  le  sens  fisuré. 


CHAPITRE  IV. 

De  la  différence  des  gammes  ;  des  noms  qu'on  leur  donne,  et  de 
l'opération  qu'on  appelle  transposition. 

La  gamme  ut ,  ré,  mi,  fa,  sol,  la,  si,  ut ,  est  dispo- 
sée de  manière  qu'il  y  a  un  ton  entré  ut  et  ré,  un  autre 
ton  entre  ré  et  mi,  un  demi-ton  de  midi  fa,  un  ton  entre 
fa  et  sol,  un  ton  entre  sol^X.  la,  un  ton  entre  la  et  j/, 
un  demi-ton  de  si  à  ut;  en  résumé  elle  présente  une 


20  ^!\rc)^ATlo^.  sect,  i. 

suite  de  deux  Ions ,  uu  deuii-ton ,  trois  Ions  et  un  derai- 
ton. 

Si  l'on  voulait  disposer  la  gamme  de  cette  manière, 
/e,  mi, /a,  sol,  la,  si,  ut,  ré,  l'ordre  des  tous  et  des 
demi-tons  serait  interverti;  car  il  y  aurait  un  ton  entre 
ré  et  mi,  un  demi-ton  de  mi  àya,  un  ton  enlrey^z  et 
sol,  uu  ton  entre  sel  et  la,  un  ton  entre  la  et  si,  uu 
demi-ton  de  si  a.  ut ,  et  un  ton  de  ut  kré;  en  résumé, 
on  aurait  une  suite  d'un  ton,  un  demi-ton,  trois  tons, 
un  demi-ton,  un  ton.  On  fait  disparaître  celte  irrégula- 
rité en  substituant  /a  dièse  l\.f(i,  et  ut  dièse  à  ut.  De 
cette  manière  on  a  un  ton  de  ré  à  mi,  un  ton  de  mi  a. 
fa  ^ ,  un  demi-ton  àefa  j;|  à  sol,  un  ton  de  sol  kla,  un 
ton  de  la  à  si,  un  ton  de  si  à  nt  \l[,  un  demi-ton  d'ut  tt  à 
ré,  et  la  gamme  est  composée  de  la  manière  suivante  : 

rc,  mi, /a i^,  sol,  la,  si,  ut^,  ré; 
ce  qui  présente  une  suite  de  deux  tons,  un  demi-ton, 
trois  tons,  un  demi-ton,  comme  dans  la  gamme  qui  com- 
mence par  ut. 

En  opérant  de  la  même  manière,  et  en  conservant 
l'ordre  des  tons  et  des  demi-tons,  on  peut  commencer 
la  gamme  par  toutes  les  notes,  même  par  les  sons  inter- 
médiaires, et  avoir  autant  de  gammes  régulières  qu'il  y 
a  de  sons  dans  l'étendue  d'une  octave.  On  donne  à  cha- 
que gamme  le  nom  de  la  note  par  où  elle  commence; 
mais  au  lieu  de  dire  la  gamme  de  ré,  de  mi  bémol ,  de/a, 
on  dit  la  gamme  du  ton  de  ré,  du  ton  de  mi  bémol,  du 
ton  de  fa,  et  l'on  appelle  symphonie  en  ré,  sonate  en 
mi  bémol,  ouverture  enja,  les  morceaux  qui  sont  écrits 
avec  les  sons  qui  appartiennent  aux  gammes  de  ré ,  de 
mi  \f ,  ou  de  fa. 

On  vient  de  voir  que  le  mot  ton  a  une  autre  accep- 


CHAP.    IT.  r.AMMKS.  2  I 

lion  que  celle  qui  exprime  la  distance  d'une  noie  à  une 
aulre,  et  qu'il  si{:;nifie  aussi  certaines  dispositions  de 
sons.  LiC  ton  de  ré  est  une  expression  qui  indifiiio  que 
les  sons  ont  la  disposition  convenable  pour  une  gamme 
qui  commenr<;  par  ré.  Ce  double  emploi  d'un  mot  est 
une  défectuosilé  delà  lan}j,ue  musicale.  Il  yen  a  plusieurs 
autres.  Trompées  i)ar  ces  mots  :  le  ton  d'ut ,  le  Ion  de  nii 
bémol,  le  ton  de  sol,  etc.,  les  personnes  qui  ne  sont 
pas  musiciennes  se  sont  persuadées  que  ton  est  synonyme 
(le  son,  et  elles  disent  un  ton  fort,  un  ton  moelleux , 
un  ton  criard,  au  lieu  <Vun  son  fort,  un  son  moelleux , 
un  son  criard  :  ces  expressions  sont  impropres. 

Toutes  les  voix  n'ayant  pas  la  même  étendue,  il  arrive 
souvent  qu'un  morceau  (pii  est  convenable  pour  certai- 
nes personnes  contient  des  sons  trop  aigus  ou  trop  graves 
pour  d'autres;  mais  il  plaît,  on  voudiait  le  chanter,  et 
l'on  ne  trouve  d'autre  moyen  d'y  parvenir  qu'en  le  bais- 
sant s'il  est  trop  haut,  ou  en  l'élevant  s'il  est  trop  bas, 
c'est-à-dire  (ju'cn  substituant,  dans  le  premier  cas,  la 
gamme  d'«/  à  la  gamme  de  ré,  ou  la  gamme  de  ré  h,  celle 
de  mi  bémol;  et  dans  l'aulre,  qu'en  faisant  le  contraire, 
c'est-à-dire  en  substituant  une  gamme  plus  élevée  à  celle 
du  ton  dans  lequel  le  morceau  est  écrit.  Cette  opération 
s'appelle  fra«^/?Oi77«o«.  Les  personnes  qui  ne  savent  pas 
la  musique  transposent  naturellement  et  sans  le  remar- 
(pjer,  en  pla<^'anl  l'air  qu'elles  chantent  dans  la  position 
la  plus  favorable  à  leur  voix;  mais  l'opération  de  l'ins- 
irumcntiste  qui  accompagne  un  morceau  transposé  est 
beaucoup  plus  compliquée  ,  car  elle  consiste  à  jouer 
d'autres  notes  que  celles  qui  sont  écrites,  ce  qui  exige 
une  attention  soutenue  et  beaucoup  de  présence  d'esprit, 
surtout  si  l'instrument  est  un  piano ,  car  il  faut  faire  une 


9^  INTOKATIOJf.  JECT.  t» 

double  opération  pour  la  musique  de  la  main  droite  et 
pour  celle  de  la  main  gauche. 

On  conçoit  que  s'il  fallait  faire  iin  calcul  pour  chaque 
note,  pour  chaque  dièse ,  bémol  ou  bécarre,  afin  de  dé- 
couvrir ce  qu'il  faut  leur  substituer,  dans  la  transposi- 
tion, l'esprit  le  plus  prompt  pourrait  éprouver  de  grands 
embarras  à  cause  de  la  rapidité  de  l'exécution.  Mais  il  est 
un  moyen  de  simplifier  cette  opération  ;  il  consiste  à  sup- 
poser une  autre  clef  que  celle  qui  est  placée  au  commen- 
cement des  portées,  et  à  choisir  celle  qui  correspond  au 
ton  dans  lequel  on  veut  transposer.  Par  exemple ,  si  le 
morceau  est  dans  le  ton  de  re,  écrit  avec  la  clef  de  sol, 
et  si  l'on  veut  transposer  en  si  bémol ,  on  substitue  par 
la  pensée  la  clef  à' ut  sur  la  première  ligne  à  la  clef  de 
sol,  on  suppose  deux  bémols  à  côté  de  la  clef,  et  la  trans- 
position se  trouve  faite,  comme  on  peut  le  voir  par 
'exemple  suivant  : 

ré      fa     mi     ré      ut      si      la     sol      fa 

jg    '«■ • • m 


Transposition  : 
ti      ré     ut      si     la     sol     fa     mi      ré 


â=5= 


*      » 


■fi 


c'est  particulièrement  à  cet  Usage  que  sert  la  multiplicité 
des  clefs. 

La  transposition  est  une  des  plus  grandes  difficultés 
dfe  U  musique,  considérée  sôus  le  rapport  de  la  pratique  : 


CHAP.   IV.  GAMMES.  28 

elle  exige  une  aptitude  particulière  que  des  lecteurs , 
d'ailleurs  habiles ,  n'ont  pas  toujours.  C'est  pour  aplanir 
ces  difficultés  qu'on  a  imaginé  de  faire  des  pianos  qui 
opèrent  la  transposition  d'une  manière  n^éc^nique;  on 
les  nomme  pianos  transpositeurs^.  Cette  invention, 
bien  qu'assez  commode,  a  eu  cependant  peu  de  succès. 
Les  éditeurs  de  musique,  dans  le  but  de  rendre  plus 
facile  aux  amateurs  la  pratique  de  cet  art,  transposent 
souvent  les  morceaux  les  plus  en  vogue  pour  les  mettre 
à  la  portée  des  divers  caractères  de  voix,  et  pour  dispen- 
ser l'exécutant  de  l'opération  de  la  transposition;  mais 
comme  ils  ne  peuvent  transposer  toute  sorte  de  musique, 
il  est  utile  de  savoir  faire  soi-même  cette  opération. 


CHAPITRE  V. 

Tous  les  peuples  ne  se  servent  pas  de  la  même  gamme.  —  11  n'est 
pas  prouvé  que  celle  des  Européens  soit  parfaite;  mais  elle  est 
la  meilleure. 

La  gamme  ou  échelle  des  sons ,  dont  on  vient  de  voir 
l'exposé,  est  celle  dont  les  nations  européennes  font 
usage,  et  qui  a  été  transportée  dans  les  colonies  fondées 
par  ces  nations.  Produite  par  une  succession  de  tâton- 
nemens  et  de  modifications ,  depuis  l'antiquité  jusqu'au 
dix-septième  siècle  ,  elle  est  devenue  pour  nos  organes, 

(i)  On  s'est  servi  de  divers  procédés  pour  opérer  la  transposition 
mécanique  ;  mais  les  premiers  pianos  transpositeurs  qui  eut  été  en 
usage  sont  ceux  de  MM.  RoUer  et  Blancbet,  facteurs  à  Paris,  bou- 
levard Poissonnière.  M.  Pfeiffer  a  perfectionné  leur  iavention  eu 
bornant  cette  opération  à  la  pressioa  d'une  péd«lc. 


24  INTOSATIOX.  iKCT.    1. 

par  l'éducatiou  et  par  l'habitude,  une  règle  de  rapports 
métaphysiques  des  sons  qui  nous  semble  la  seule  admis- 
sible à  l'oreille,  et  qui  nous  rend  en  quelque  sorte  in- 
habiles à  en  concevoir  d'autres. 

Mais  il  n'en  est  pas  ainsi  de  tous  les  peuples  ;  quel- 
ques-uns d'entre  eux  ont  eu  ou  ont  encore  des  divisions 
de  l'échelle  générale  des  sons  très  différentes  de  celle-là. 
Ces  divisions  sont  de  deux  espèces  :  les  unes  sont  basées 
s^ir  des  distances  de  sons  de  même  nature  que  celles  de 
la  musique  européenne,  mais  disposées  dans  un  autre 
ordre;  les  autres  sont  établies  sur  des  distances  moindres 
et  inappréciables  à  notre  oreille.  Examinons  d'abord  les 
premières. 

Il  existe  à  la  Chine  et  dans  l'Inde  une  gamme  majeure 
disposée  de  cette  façon  : 


On  voit  que  cette  gamme  diffère  de  la  nôtre  en  ce  que 
le  premier  demi  -  ton ,  au  lieu  d'être  placé  entre  le 
troisième  et  le  quatrième  degré,  comme  il  l'est  dans  la 
nôtre,  se  trouve  entre  le  quatrième  et  le  cinquième,  ce 
qui  établit  une  différence  complète  de  tonalité  qui 
choque  notre  oreille ,  tandis  que  la  gamme  des  Euro- 
péens paraît  insupportable  aux  Chinois  '. 

Les  Ecossais  et  les  Irlandais  ont  une  gamme  majeure 
assez  semblable  à  la  gamme  des  Chinois,  mais  plus  sin- 
gulière encoie  que  celle-ci,  en  ce  qu'il  n'y  a  point  de 

(l)  L'abbé  Roussier  a  essayé  de  démontrer  dans  son  Mémoire  sur 
la  musique  des  anciens,  et  dans  ses  Lettres  à  l'auteur  du  Journal  des 
Biaux-Arti  et  de^  Sciences,  etc.,  que  celle  gamme  est  naturelle  parce 


demi-ton  entre  le  septième  et  le  huitièine  son ,  maiii  un 
ton  complet.  Voici  cette  gamme  ; 


-^^ 


^ 


Les  défauts  de  cette  gamme  sont  encore  plus  cho- 
([uans  pour  une  oreille  de  musicien  que  celle  des  Chi- 
nois, à  cause  de  la  double  fausse  relation  qui  s'y  trouve 
f  aire  la  quarte  majeure  de  la  tonique  au  quatrième  degré 
et  la  quarte  diminuée  de  ce  quatrième  degré  au  septième. 
De  là  vient  que  tous  les  airs  écossais  ou  irlandais  com- 
posés d'après  cette  gamme  ont  dû  être  arrangés  et  dé- 
naturés pour  être  publiés. 

Les  Irlandais  ont  aussi  une  gamme  mineure  qui  est 
fort  singulière;  elle  n'a  que  six  notes,  et  sa  disposition 
est  faite  comme  on  le  voit  ici  : 


p 

—rr  Ho- 

"^ 

— T~ 

—e~ 

-~ù. — 

-Çt- 

1 

- 

:^_c 

n 

Le  défaut  logique  de  cette  gamme  est  de  même  nature 

qii'elleest  le  produitd'uae  progression  régulière  de  quartes  ascen- 
dantes et  de  quintes  desceudautes  telle  que 


ZOl 


Ces  sortes  de  régularités  ont  quelque  chose  de  séduisant  pour 
l'esprit,  mais  ne  prouvent  rien  quant  à  l'affinité  métaphysique  de» 
sous.  Cette  gamme  choquera  toujours  l'oreille  d'un  musicien  euro- 
péen, parce  qu'il  s'y  trouve  une  fausse  relation  eatre  le  quatrième 
son,  le  premier  et  le  huitième. 


26  IKTOMATIOJf.  SECT.   I. 

que  celui  dea  précédentes  ;  car  il  consiste  dans  une  rela- 
tion fausse  entre  le  troisième  et  le  sixième  son,  ce  qui 
n'a  point  lieu  dans  la  gamme  des  autres  nations  euro- 
péennes. 

Les  gammes  dont  il  vient  d'être  parlé  sont  divisées 
comme  la  gamme  de  la  musique  française ,  italienne , 
allemande,  etc.,  par  tons  et  demi-tons;  elles  ne  dif- 
fèrent de  celle-ci  que  par  la  disposition  de  ces  tons  et 
demi-tous;  mais  il  est  quelques  peuples  orientaux,  tels 
que  les  Arabes,  les  Turcs  et  les  Persans,  dont  les  instru- 
mens  sont  construits  sur  une  échelle  d'intervalles  di- 
visés par  tiers  de  ton.  De  pareils  intervalles  et  une  sem- 
blable division  d'échelle  musicale  ne  peuvent  être 
appréciables  que  pour  des  organes  habitués  à  leur  effet 
par  l'éducation  ;  la  sensation  qu'ils  produisent  sur  l'o- 
reille d'un  Européen  est  celle  de  sons  faux  et  de  succes- 
sions désagréables,  tandis  que  les  Arabes  y  trouvent  du 
plaisir  et  sont  affectés  de  sensations  pénibles  à  l'audition 
de  notre  gamme. 

Lorsque  l'on  considère  les  effets  de  gammes  si  di- 
verses, une  question  se  présente  àl'esprit,  c'est  celle-ci: 
Y  a-t-il  une  gamme  absolument  conforme  aux  principes 
naturels?  Dans  le  cas  contraire,  quelle  est  celle  qui 
réunit  le  plus  de  conditions  désirables?  Pour  résoudre 
la  première  partie  de  cette  question,  il  faut  la  considérer 
sous  deux  rapports,  c'est-à-dire,  examiner  d'abord  si 
les  phénomènes  des  corps  sonores  et  les  proportions 
qu'on  en  déduit  entre  les  divers  sons  de  la  gamme 
donnent  pour  résultat  des  intonations  précises,  inva- 
riables ,  et  si  les  lois  physiques  de  leur  arrangement 
sont  également  positives. 

Il  faut  bien  l'avouer,  la  science  est  restée  fort  im- 


CHAP.  T.  GAMMBS.  ^7 

parfaite  à  cet  égard,  comme  je  le  ferai  voir  quand  je 
parlerai  de  l'acoustique.  Les  phénomènes  ont  été  mal 
observés,  les  expériences  faites  avec  négligence,  et, 
comme  il  arrive  presque  toujours,  on  s'est  pressé  dfe 
conclure  sur  dés  données  incertaines. 

Reste  la  seconde  considération  ;  celle-ci  est  toute 
métaphysique*  Il  s'agit  de  savoir  si  les  affinités  des  sohs 
de  notre  gamme  sont  suffisamment  établies  par  les  rap- 
ports de  convenance  qu'elles  ont  avec  notre  manière  de 
sentir,  et  avec  les  conditions  de  l'harmonie  et  de  la  mé- 
lodie dont  se  compose  notre  musique  ;  or,  quel  que  soit 
l'aspect  sous  lequel  on  considère  cette  gamme,  on  ne 
peut  nier  que  là  convenance  est  parfaite  sous  le  rapport 
de  la  disposition  des  sons,  et  q'i'on  ne  pourrait  lui 
substituer  un  autre  ordre  sans  que  la  mélodie  ainsi  que 
l'harmonie  en  flissent  considérablement  modifiées,  et  con- 
séquemment  sans  changer  la  nature  de  nos  sensations. 


CHAPITRE  VI. 

De  la  durée  des  sons  et  du  silence  en  musique;  comment  on  la  re» 
présente  par  des  signes,  et  comment  on  la  mesure. 

Les  alphabets  de  toutes  les  langues  n'ont  qu'un  objet  : 
celui  de  représenter  des  sons.  L'alphabet  musical  est 
l)lus  compliqué,  car  il  faut  que  ses  signes  d'intonation  se 
combinent  avec  ceux  de  durée,  et  même  que  les  notes 
indiquent  les  deux  choses  à  la  fois.  Cette  complication 
est  la  cause  principale  de  la  difficulté  qu'on  éprouve  à 
lire  la  musique. 


28  L't'RtE  DES  SONS.  SECT.   1, 

Il  est  évident  que  tous  les  sons  qui  entrent  dans  la 
composition  de  la  musique  n'ont  pas  la  même  durée;  il 
y  a  beaucoup  de  nuances  dans  leur  longueur  ou  leur 
brièveté.  Les  notes  étant  destinées  à  représenter  les  sons, 
on  a  dû  modifier  leur  forme  afin  qu'elles  pussent  expri- 
mer aussi  les  différences  de  leurs  prolongemens  *.  Dans 
ce  but ,  on  a  supposé  une  unité  de  durée  qu'on  a  appelée 
ronde  ;  la  moitié  de  cette  durée  a  reçu  le  nom  de  blan- 
che ;  le  quart,  celui  de  noire  f  le  huitième  a  été  appelé 
croche ,  le  seizième,  double  croche ,  le  trente-deuxième, 
triple  croche  y  et  le  soixante -quatrième,  quadruple 
croche. 

Figures  de  ces  signes  de  durée  : 

RrmHp  Rbnrhf»    Nnlrp  Trnrhp   Plusieurs   Double       Plusieurs 
Ronde.  Blancbe.  Noire,  croche,   croches    croche,  doubles  croches 

°  r  r  p  ù'  ^  L4^ 

Triple  Plusieurs  Quadiuple  Plusieurs 

croche.        triples  croches.  croche,     quadruples  croches 


Remarquez  que  les  noms  de  doubles  croches,  triples 
croches  et  quadruples  croches  expriment  précisément 
le  contraire  de  l'idée  qu'on  y  attache;  car  loin  de  dou- 
bler,  de  tripler,  ou  de  quadrupler  la  valeur  de  la  note, 

(i)Si  j'aTais  à  exposer  d'une  manière  philosophique  les  principes 
de  la  mesure  du  temps  dans  la  musique,  je  procéderais  d'une  autre 
manière  que  je  ne  le  fais  ici  ;  mais  je  ne  dois  pas  oublier  que  l'objet 
de  ce  livre  n'est  pas  de  faire  remarquer  les  défauts  de  la  partie  tech- 
nique de  l'art.  II  est  pins  utile  de  faire  connaître  comment  elle  est 
faite. 


CHAP.   VI.  SIGNKS  DE  DIJRKK.  2î) 

la  double,  la  triple  et  la  quadruple  croche  n'en  sont 
que  des  fractions.  L'origine  de  ces  fausses  dénomina- 
tions se  trouve  dans  le  double ,  le  triple  et  le  quadruple 
crochet  qui  termine  la  partie  inférieure  de  la  note.  Les 
Allemands  disent  avec  plus  de  raison  demi-croche,  quart 
de  croche,  huitième  de  croche. 

Quelle  que  soit  la  forme  de  la  noie  et  de  la  durée 
qu'elle  représente,  l'intonation  ne  varie  pas,  et  le  nom 
de  la  note  reste  le  même ,  comme  on  le  verra  par  les 
exemples  suivans  : 

sol  la    si    ut    ré  mi    fa  sol  sol  la     ei    ul   ré  mi   fa    soi 

^      O      . ! 


-n-^ 


fcE 


Sol  la    si    ut  ré   nii   fa  sol  sol  la    si    ut   ré  mi  fa  sol 

Toutes  les  figures  de  notes  qu'on  vient  de  voir  sont 
destinées  à  représenter  des  durées  de  sons  qui  sont  dans 
les  proportions  del  à2,  là4,  là8,  etc. ,  ou  |  à  1  , 
^  à  1 ,  ^  à  1,  etc.,  c'est-à-dire  qui  sont  deux  fois,  quatre 
fois,  huit  fois  plus  longues  que  d'autres,  ou  qui  n'en 
sont  que  la  moitié,  le  quart,  le  huitième.  Mais  il  y  a  de 
certaines  durées  de  sons  qui  sont  trois  fois,  six  fois, 
douze  fois  plus  longues  que  d'autres,  ou  qui  n'en  sont 
que  le  tiers,  le  sixième,  le  douzième,  etc.  On  a  imaginé 
de  représenter  les  premières  par  une  figure  quelconque 
de  note  suivie  d'un  point,  en  sorte  que  le  point  augmente 
la  durée  de  ces  notes  de  la  moitié.  Ainsi  la  ronde  pointée 
a  la  même  durée  (^ue  trois  blanches,  ou  six  noires,  ou 

3. 


30  DURÉE  DES  SORS.  SECT.   1. 

douze  croches ,  etc.  ;  la  blanche  pointée  est  dans  la  même 
proportion  à  l'cjard  des  noires,  croches  ou  doubles  cro- 
ches et  ainsi  des  autres.  Il  suit  de  là  que  la  blanche  n'a 
que  le  tiers  de  la  valeur  de  la  ronde  pointée ,  que  la 
noiie  n'en  représente  que  la  sixième  partie,  la  croche 
un  douzième,  etc.  Quelquefois  enfin  les  sons  se  trouvent, 
à  l'égard  de  certains  autres,  dans  la  proportion  de  2  à  3. 
Ou  donne  le  nom  de  triolets  à  ceux  qui  sont  dans  la 
proportion  de  3  à  2  ,  et  l'on  indique  leur  qualité  en  pla- 
çant un  3  au-dessus  des  notes  qui  les  représentent. 

Les  sons  et  leur  durée  ne  sont  pas  les  seuls  élémens 
de  la  musique;  le  silence  plus  ou  moins  long  y  joue  aussi 
un  rôle  fort  important.  La  nécessité  de  le  soumettre  à 
des  règles  de  proportion  a  fait  imaginer  de  le  diviser 
comme  les  figures  de  notes,  et  de  le  représenter  par 
des  signes  analogues.  On  avait  pris  la  ronde  pour  unité 
de  durée  d'un  son;  on  représenta  le  silence  d'une  durée 
correspondante  par  une  jtciuse  ^  la  moitié  de  ce  temps 
fut  appelée  derni-pause ,  le  quart,  soupir,  le  huitième, 
demi-soupir ,  le  seizième  quart  de  soupir.  Tous  ces  si- 
gnes de  silence  ont  une  valeur  égale  à  celle  des  diverses 
figures  de  notes.  En  voici  le  tableau: 

Ronde     nianrhe    Noire      Croche     ^^"^'.'^      "'"'"'P,'®  Quadruple 
Ronac.    Biancne.   iNoire.     ciociie.    cpQ^.i,e_    croclie      croche. 


»>„,•„„„«  c«.,r^:..     Hemx      Quart  de  Demi-quart  Seizième 
pause.  Dcjiii-pause.  Soupir.    5^^,.^.  «g^upir.    de  soipir.  de  soupir 


? — y—t- 


On  conçoit  que  la  ronde  avec  nn  point  se  représente 


CHAP.   VI.  SIGNES  DE  DUREE.  31 

par  une  pause  suivie  d'une- demi  pause;  la  blanche 
pointée,  par  une  demi-pause  suivie  d'un  soupir,  et  ainsi 
du  reste. 

Ces  différentes  proportions  de  durées  relatives  de  sons 
et  de  silences  sont  susceptibles  de  beaucoup  de  combi- 
naisons. L'œil  le  plus  exercé  éprouverait  quelque  diffi- 
culté à  les  discerner,  si  l'on  n'avait  imaginé  de  les 
séparer  de  distance  en  distance  par  des  barres  qui 
traversent  perpendiculairement  la  portée.  On  donne  le 
nom  de  mesure  à  l'espace  qui  se  trouve  compris  entre 
àeux  barres  de  séparation.  Au  moyen  des  barres,  l'œil 
isole  facilement  chaque  mesure  de  cette  multitude  de 
signes ,  pour  n'en  considérer  que  le  contenu.  La  somme 
totale  de  ce  contenu  doit  être  d'une  durée  uniforme  dans 
toutes  les  mesures;  mais  cette  durée  peut  être  à  volonté 
égale  à  la  valeur  d'une  ronde,  ou  d'une  blanche,  ou 
d'une  blanche  pointée,  etc. 

On  rend  aussi  plus  facile  la  lecture  de  ce  qui  est  con- 
tenu dans  chaque  mesure,  en  divisant  celle-ci  par  par- 
ties égales  qu'on  nomme  temps,  et  qu'on  indique  par 
des  mouvemens  de  la  main.  Cette  division  peut  se  faire 
en  deux,  trois  ou  quatre  parties  ;  le  compositeur  fait 
connaître  à  cet  égard  son  intention  par  un  signe  qu'il 
place  au  commencement  de  chaque  morceau.  Si  la  di- 
vision doit  se  faire  en  deux  temps,  le  signe  est  un  (f^  ;  si 
c'est  en  trois  temps,  le  signe  est  3  ou  ^  ;  enfin,  s'il  faut 
diviser  la  mesure  en  quatre  temps,  le  signe  indicateur 
est  C'A  l'inspection  du  signe,  les  musiciens  disent  que 
la  mesure  est  à  deux,  à  trois  ou  à  quatre  temps. 

Remarquez  qu'on  trouve  encore  ici  un  exemple  de  la 
pauvreté  de  la  langue  musicale  ;  car  on  donne  le  nom  de 
mesure  à  des  choses  absolument  différentes;  mesure  se 


32  DLRÉE  DES  SONS.  SECT.  I. 

dit  de  l'espace  qui  est  compris  entre  deux  barres ,  de  la 
division  de  cet  espace,  et  aussi  de  l'instinct  de  l'exécu- 
tant pour  faire  cette  division  avec  facilité.  Par  exemple, 
on  dit  qu'un  chanteur  ou  un  instrumentiste  ont  ou  n'ont 
pas  de  mesure,  en  raison  de  leur  aptitude  à  diviser  le 
temps.  Cette  aptitude  étant  indispensable  pour  bien 
exécuter  la  musique,  on  dit  aussi  de  celui  qui  ne  la 
possède  pas  (\uil  n'est  pas  musicien  ;  ce  qui  ne  signifie 
point  qu'il  ne  fait  pas  sa  profession  de  la  musique, 
mais  qu'il  n'a  pas  les  qualités  du  musicien. 

J'ai  dit  que  la  ronde  est  considérée  comme  unité  de 
durée  ;  on  en  voit  surtout  la  preuve  dans  certains  signes 
de  mesure  qui  se  trouvent  quelquefois  au  commence- 
ment d'un  morceau  de  musique,  tels  que  |  >  f  >  |  j  4  >  ^ » 
|,  |,  |,  f  , -y-;  car  ces  signes  font  voir  que  l'espace 
compris  entre  deux  barres  renferme  deux  quarts,  trois 
quarts  j  six  quarts,  neuf  quarts,  douze  quarts  de  ronde, 
ou  deuj:  huitièmes ,  trois  huitièmes ,  six  huitièmes , 
douze  huitièmes  de  la  même  unité.  Parmi  ces  quantités, 
celles  qui  sont  susceptibles  d'être  divisées  par  2  ,  comme 
I ,  I ,  I  et  I ,  appartiennent  à  la  mesure  à  deux  temps, 
qui  se  marque  en  baissant  et  en  levant  alternativement 
la  main;  celles  qui  ne  peuvent  être  divisées  que  par  3, 
comme  ^>  f  >  i  et  |  sont  de  l'espèce  des  mesures  à  trois 
temps,  où  la  main  fait  trois  mouvemens,  l'un  en  bais- 
sant, le  second  à  droite  et  le  troisième  en  levant;  enfin 
les  quantités  ^  et  ^ ,  qui  peuvent  être  divisées  par  qua- 
tre, appartiennent  à  la  mesure  à  quatre  temps,  et  se 
marquent  par  quatre  mouvemens  de  la  main  en  baissant, 
à  gauche,  à  droite ,  et  en  levant. 

Tout  ce  qu'on  a  vu  jusqu'ici  concernant  la  mesure 
des  sons  et  du  silence  ne  présente  que  des  quantités  de 


CHAI'.   M.  TEMPS,   MESURE,  o3 

durées  relatives,  et  rien  n'indique  le  temps  positif  qui  est 
dévolu  à  chaque  signe  de  temps.  Il  aurait  été  fort  diffi- 
cile en  effet,  ou  plutôt  impossible,  d'exprimer  par  des 
signes  cette  durée  rationnelle ,  qui  ne  peut  être  repré- 
sentée que  par  les  vibrations  du  pendule  astronomique , 
ou  par  des  divisions  de  ces  vibrations.  Cependant  on 
conçoit  que  s'il  n'existait  aucun  moyen  d'indiquer  cette 
durée  dans  la  musique,  l'intention  du  compositeur  pour- 
rait être  souvent  dénaturée  dans  l'exécution,  car  chacun 
étant  libre  d'attribuer  à  la  ronde,  prise  comme  unité, 
une  durée  de  fantaisie,  le  même  morceau  pourrait  être 
exécuté  tantôt  avec  la  lenteur  d'une  complainte,  tantôt 
avec  la  vivacité  d'une  contredanse.  Pour  obvier  à  cet 
inconvénient,  on  n'imagina  d'abord  rien  de  mieux  que 
d'écrire  en  tête  des  morceaux  certains  mots  italiens  ou 
français  qui  faisaient  connaître,  tant  bien  que  mal,  le 
degré  de  lenteur  ou  de  vitesse  qu'il  fallait  donner  à  la 
mesure,  c'est-à-dire  à  la  durée  de  la  ronde  ou  à  ses 
fractions.  Ainsi  les  mots  largo,  maestoso ,  larghetto, 
adagio ,  grave,  lento,  indiquèrent  diverses  nuances  de* 
lenteur;  andantino,  andante ,  moderato  ,  a  placer e , 
allegretto ,  comodo ,  furent  les  signes  d'un  mouvement 
modéré  diversement  modifié  ;  enfin ,  allegro,  con  moto , 
presto,  vicace,  prestissimo,  servirent  d'indications  pour 
des  vitesses  toujours  plus  accélérées.  On  conçoit  que 
dans  ces  variétés  de  lenteur  et  de  vitesse ,  la  ronde ,  la 
pause  et  toutes  leurs  subdivisions  varient  aussi  de  du- 
rée ,  au  point  qu'il  n'y  a  pas  plus  de  rapport  entre  une 
ronde  et  une  autre  ronde  qu'il  n'y  en  a  entre  la  durée 
relative  d'une  ronde  et  d'une  double  croche.  En  effet, 
il  est  tel  mouvement  lent  oii  cinq  rondes  occupent  la 
durée  d'une  minute,  et  tel  mouvement  vif  où  la  durée 


34  DURÉE  DES  SOKS.  SECT.  I. 

de  quarante  rondes  s'écoule  dans  le  même  espace  de 
temps.  Cette  variété  dans  la  durée  positive  ne  change 
rien  à  la  valeur  relative  des  signes  entre  eux. 

Autrefois,  toutes  les  pièces  de  musique  instrumentale 
composées  par  les  plus  célèbres  musiciens  portaient  les 
noms  de  danses  connues,  tels  que  ceux  d'allemandes , 
sarabandes  j  courantes,  gigues,  etc.  ;  non  qu'elles  eus- 
sent le  caractère  de  ces  sortes  de  danses,  mais  elles  en 
avaient  le  mouvement.  Or,  ces  mouvemens  étant  connus, 
il  était  inutile  de  les  indiquer  d'une  autre  manière.  De- 
puis que  ces  pièces  ont  passé  de  mode,  il  a  fallu  recou- 
rir à  d'autres  indications;  c'est  depuis  ce  temps  que  les 
mots  italiens  dont  il  a  été  parlé  précédemment,  et  beau- 
coup d'autres  encore,  ont  été  adoptés. 

Mais  qu'il  y  a  de  vague  dans  ces  expressions!  que  de 
nuances  n'y  a-t-il  point  entre,  tel  mouvement  allegro 
(gai)  et  tel  autre  allegro  ?  entre  tel  adagio  (lent)  et  tel 
au\.re  adagio"?  Hg  pareilles  indications  ne  peuvent  ja- 
mais être  que  des  à  peu  près,  que  l'intelligence  ou  l'or- 
ganisation particulière  de  chaque  exécutant  modifie.  Il 
en  résulte  que  la  musique  est  rarement  rendue  selon  la 
pensée  de  l'auteur,  et  que  le  même  morceau  prend  dif- 
férons caiaclères  en  passant  par  les  mains  de  di\ers  mu- 
siciens. Ajoutons  que  l'usage  de  ces  mots  est  quelquefois 
un  contresens  ;  car  il  est  tel  morceau  dont  le  caractère 
passionné  semble  exprimer  la  colère  ou  la  douleur,  et 
dont  le  mouvement  est  indiqué  par  le  mot  allegro.  Il  y  a 
en  cela  un  mal  réel  qui  a  été  senti  depuis  long-temps,  et 
auquel  on  n'a  porté  remède  que  depuis  peu  d'années. 
Dès  la  fin  du  dix-septième  siècle  on  avait  reconnu  qu'une 
machine  régulière  serait  ce  qu'il  y  aurait  de  mieux  pour 
fixer  la  lenteur  ou  la  rapidité  des  mouvemens  de  la  mu- 


CHAP.   \r.  MOUVKMENT.  35 

sique.  Plusieurs  musiciens  et  mécaniciens  se  sont  occu- 
pés de  chercher  les  principes  de  la  construction  d'une 
semblable  machine.  En  1698,  un  professeur  de  musique 
nommé  Loulié  en  proposa  une  qu'il  nomma  chronomè- 
tre (mesure  du  temps).  Vers  la  même  éjioque,  Ljaifilard, 
musicien  de  la  chapelle  du  roi,  en  inventa  une  aulre. 
Plus  tard,  Harrison,  fameux  mécanicien  anglais,  qui 
s'est  illustré  par  ses  montres  marines,  trouva  une  ma- 
chine qui  paraît  avoir  été  parfaite,  mais  qui  ne  pouvait 
devenir  populaire  à  cause  de  son  prix  élevé.  En  1782, 
Duclos,  horloger  de  Paris,  fit  une  autre  machine,  qu'il 
appelait  rhjtliinomèlre  (mesure  du  rhylhnie),  et  qui  re- 
çut alors  l'approbation  de  quelques  musiciens  distin- 
gués. A  cette  machine  succéda  le  chronomètre  d'un  mé- 
canicien nommé  Pelletier  :  on  ignore  aujourd'hui  quels 
étaient  sa  forme  et  son  mécanisme.  En  1784,  Reneau- 
din,  horloger  de  Paris,  construisit  un  pendule  qui  avait 
la  même  destination.  Le  célèbre  horloger  Bréguet  s'oc- 
cupa aussi  de  la  solution  du  même  problème,  sans  faire 
connaître  le  résultat  de  ses  travaux.  Enfin  Despréaux, 
professeur  au  Conservatou'e  de  musique,  proposa,  eu 
1812,  l'adoption  d'un  chronomètre  composé  d'un  ta- 
bleau indicateur  des  mouvemens,  et  d'un  pendule  ou 
balancier  en  cordonnet  de  soie  terminé  j)ar  un  poids, 
dont  les  différentes  longueurs  donnent,  suivant  des  lois 
physiques  très  connues,  les  divers  degrés  de  vitesse. 
Plusieurs  musiciens  allemands  avaient  déjà  fait  connaî- 
tre des  chronomètres  de  cette  espèce,  qui  ont  le  double 
avantage  d'être  d'une  construction  simple  et  peu  dispen- 
dieuse ,  mais  qui  ont  l'inconvénient  de  ne  point  rendre 
sensible  à  l'ouïe  le  tcict  ou  \e  frappé  des  temps. 

Une  invention  que  deux  mécaniciens  halîilcs,  mes- 


36  ULRKK    DES   Si>\.s.  SKCT.    I. 

sieurs  WjfîJi^l ,  d'Amsterdam ,  et  Maelzei ,  se  sont  dis- 
putée, a  satisfait  enfin  à  toutes  les  conditions  voulues; 
je  veux  parler  du  métronome ,  qui  a  été  soumis  à  l'ap- 
probation de  l'Institut  en  1 8 1 6 ,  et  dont  l'usage  est  main- 
tenant connu  des  amateurs.  Dans  cette  machine,  chaque 
vibration  du  balancier  rend  le  tact  sensible  à  l'oreille. 
L'inventeur  a  pris  pour  unité  la  minute^  dont  les  temps 
delà  musique  ne  sont  que  des  fractions.  Toutes  les  nuan- 
ces des  mouvemens,  depuis  le  plus  lent  jusqu'au  plus 
rapide,  y  sont  exprimées  et  représentées  par  des  vibra- 
tions de  balancier  qui  se  décomposent  à  volonté  en  me- 
sures à  deuXj  trois  ou  quatre  temps,  et  qui  représentent, 
selon  la  fantaisie  du  compositeur,  des  rondes,  des  blan- 
ches, des  noires  ou  des  croches.  La  simplicité  du  prin- 
cipe de  cette  machine  en  fait  le  mérite  principal.  Ce 
principe  consiste  à  déplacer  le  centre  de  gravité  de  ma- 
nière à  pouvoir  substituer  une  verge  de  courte  dimen- 
sion à  un  pendule  très  long ,  et  à  opérer  de  grandes  va- 
riations de  mouvement  par  des  changemens  peu  sensibles 
dans  le  déplacement  du  point  central.  Au  moyen  du  mé- 
tronome, tout  le  système  de  la  division  du  temps  en 
musique  est  représenté  dans  son  ensemble  et  dans  ses 
détails. 


CHAPITRE  VII. 

De  ce  qu'on  appelle  expression  dans  l'exécution  de  la  musique  ( 
de  ces  moyens,  et  des  signes  par  lesquels  ou  l'indique  dans  la 
notation. 

Jusqu'ici  il  n'a  été  question  que  de  deux  attributs  des 


THAÏ'.    MI.  *;X1'RESSI0N.  37 

sons,  savoir,  l'intonation  et  la  durée  ;  il  reste  à  les  con- 
sidérer sous  le  rapport  de  leur  intensité ,  c'est-à-dire 
sous  leurs  diverses  nuances  de  douceur  ou  de  force,  ce 
qui  complétera  le  tableau  des  qualités  par  lesquelles  ils 
agissent  sur  nous. 

La  douceur  des  sons  produit  en  général  sur  l'homme 
des  impressions  de  calme,  de  repos,  de  plaisir  tranquille 
et  de  toutes  les  nuances  de  ces  diverses  situations  de 
l'ame.  Les  sons  intenses,  bruyans,  éclatans,  excitent 
au  contraire  des  émotions  fortes,  et  sont  propres  à 
peindre  le  courage,  la  colère,  la  jalousie  et  les  autres 
passions  violentes  ;  mais  si  les  sons  étaient  constamment 
doux,  l'ennui  naîtrait  bientôt  de  leur  uniformité,  et  s'ils 
étaient  toujours  intenses,  ils  fatigueraient  et  l'esprit  et 
l'oreille.  D'ailleurs  la  musique  n'est  pas  uniquement  des- 
tinée à  peindre  les  modifications  de  l'ame  ;  souvent  son 
objet  est  vague,  indéterminé,  et  son  résultat  est  plutôt  de 
chatouiller  les  sens  que  de  parler  à  l'esprit.  C'est  ce 
qu'on  remarque  particulièrement  dans  la  musique  in- 
strumentale. 

Or,  soit  qu'on  considère  la  mobilité  des  facultés  de 
l'ame  et  les  nombreuses  métamorphoses  dont  elles  sont 
susceptibles  ,  soit  qu'on  n'ait  égard  qu'aux  impressions 
des  sens ,  on  reconnaît  bientôt  que  le  mélange  des  sons 
doux  et  forts,  et  les  diverses  gradations  de  leurs  succes- 
sions ,  sont  des  moyens  puissans  de  peindre  les  unes  et 
de  faire  naître  les  autres.  On  donne  en  général  le  nom 
d'expression  à  ce  mélange  de  douceur  et  de  force ,  à 
ces  gradations  ou  à  ces  dégradations  d'intensité ,  enfin  à 
tous  les  accidens  de  la  physionomie  des  sons  ;  non  qu'ils 
aient  toujours  pour  objet  d'exprimer  ou  des  idées  ou 
des  scntimons,  car  ils  no  sont  souvent  que  le  résultat  de 


âS  INTEKSITÉ.  SECT.  I. 

la  fantaisie  ou  d'une  impression  vague  et  indéfinissable  ; 
mais  on  ne  peut  nier  que  leur  mélange  bien  ordonné 
n'ait  pour  effet  de  nous  émouvoir  d'autant  plus  vive- 
ment que  l'objet  est  moins  positif.  Si  l'on  demandait  à 
un  habile  chanteur  ou  à  un  grand  instrumentiste  ce  qui 
les  détermine  à  donner  de  la  force  à  tels  sons,  à  faire 
entendre  à  peine  tels  autres,  à  augmenter  graduellement 
l'intensité  ou  à  la  diminuer ,  à  faire  certains  sons  d'une 
manière  vive  et  détachée ,  ou  bien  à  les  lier  ensemble 
avec  abandon  et  mollesse ,  leur  réponse  se  ferait  long- 
temps attendre,  ou  plutôt  ils  répondraient  naïvement  : 
^ous  l'ignorons  ;  mais  nous  sentons  ainsi.  Certes,  ils 
auraient  raison  s'ils  faisaient  passer  leurs  sensations  dans 
l'ame  de  leurs  auditeurs.  Il  y  a  plus  :  s'ils  pouvaient 
s'observer  eux-mêmes,  ils  avoueraient  que  les  mêmes 
traits  ne  les  ont  pas  toujours  affectés  de  la  même  ma- 
nière, et  qu'il  leur  est  arrivé  de  les  exprimer  dans  des 
ssntimens  très  différens ,  quoique  le  résultat  fût  égale- 
ment satisfaisant. 

Cette  faculté  d'exprimer  de  plusieurs  manières  les 
mêmes  pensées  musicales  pourrait  avoir  de  graves  incon- 
véniens  dans  un  ensemble  où  chacun  s'abandonnerait  à 
ses  impressions  du  moment;  car  il  pouri'ait  arriver  qu'un 
musicien  exécutât  avec  force  sa  partie  pendant  qu'un 
autre  rendrait  la  sienne  avec  douceur,  et  qu'un  troisième 
détachât  les  sons  du  même  trait  que  son  voisin  croirait 
devoir  lier.  De  là  la  nécessité  que  le  compositeur  indi- 
que sa  pensée ,  sous  le  rapport  de  l'expression  ,  par  des 
signes  non  équivoques,  comme  il  le  fait  pour  le  mouve- 
ment. C'est  en  effet  ce  qui  a  toujours  li€u. 

Les  signes  d'expression  sont  de  plusieurs  espèces  :  les 
up.s  sont  relatifs  à  la  force  ou  à  la  douceur  des  sons  ;  les 


CHAt".   VII.  EXl>RESSIO:<.  S§ 

autres  sont  destinés  à  faire  connaître  s'ils  doivent  être 
détachés  ou  liés;  d'antres  enfin  indiquent  de  légères  va- 
riations de  mouvement  qui  contribuent  à  augmenter  l'ef- 
fet de  la  musique. 

Quelques  mots  italiens  scivent  à  faire  connaître  aux 
exécutans  les  diverses  nuan-^es  de  force  ou  de  douceur 
des  sens  :  Piano,  ou  simplement  P,  signifie  qu'il  faut 
chanter  ou  jouer  avec  douceur;  Pianissimo ,  ou  PP,  in- 
dique l'excès  du  doux  ;  Forte ,  ou  F,  fort  ;  Fortissimo^ 
ou  FF,  très  fort.  Le  passage  du  doux  au  fort  s'exprime 
par  Cresce/^o,  ou  Orsc,  ou  Cr.  ;  celui  du  fort  au 
doux  par  Decrescendo,  Diminuando ,  Smorzando ,  ou 
parles  abréviations  de  ces  mots.  Un  son  doux  suivi  d'un 
fort  s'indique  par  PF,  et  le  contraire  parFP.  Un  petit 
nombre  de  sons  plus  forts  que  d'autres  s'expriment  jiar 
Rinforzando,  ovi  simplement  Rf)  SJ'orzando ,  on  Sf; 
Forzando ,  ou  Fz.  Enfin  ,  l'augmentation  ou  Ifl  diminu- 
tion de  force  instantanée  s'indiquent  par  ces  signes  <C^. 
La  fantaisie  peut  multiplier  ces  sortes  de  signes  et  en 
imaginer  de  nouveaux  ;  mais  ceux  qu'on  vient  de  voir 
suffisent  pour  les  masses  de  chanteurs  ou  d'instrumentis- 
tes. Quant  à  l'expression  qu'un  grand  artiste  met  dans 
son  jeu  ou  dans  son  chant,  ce  sont  des  accens  de  l'ame 
qui  ne  se  présentent  presque  jamais  de  la  même  manière 
dans  les  mêmes  circonstances,  et  qu'on  ne  pourrait  pein- 
dre aux  yeux  par  des  volumes  de  signes.  Il  y  a  plus  ; 
cette  multitude  de  nuances  combinées  d'avance  serait 
froide, prétentieuse,  et  nuirait  à  la  musique  aulieu  d'aug- 
menter son  effet. 

Les  signes  des  sons  détachés  sont  de  deux  sortes  :  les 
uns  consistent  en  des  points  allongés  qui  se  placent  au- 


40  INTENSITÉ.  SECT,   I. 

dessus  des  notes;  ces  points  indiquent  la  plus  gi.ande 
légèreté  possible  dans  rémission  du  son. 


Lorsque  les  sons  doivent  être  détachés  avec  une  cer- 
taine lourdeur,  les  notes  sont  surmontées  de  points  ronds 
qui  sont  placés  quelquefois  sous  une  ligne  courbe,  comme 
dans  cet  exemple  : 


éfn:\ 


Une  courbe  sans  points  placée  au-dessus  des  notes  est 
le  signe  des  sons  liés. 


È 


=«=5= 


Les  altérations  de  mouvement ,  qui  sont  un  moyen 
d'expression  dont  on  abuse  quelquefois,  s'indiquent  par 
ces  mots  :  con  fiioco,  con  moto,  lorsqu'il  s'agit  d'aug- 
menter la  vitesse,  et  par  celui  de  ritardando,  s'il  faut  la 
diminuer.  Plus  souvent  le  compositeur  abandonne  le 
soin  de  ces  légères  perturbations  à  l'intelligence  des  exé- 
CtUans. 

Il  est  quelques  autres  signes  accessoires  dont  l'utilité 


(JUAP.   VII.  KXJ'UtbSlOX.  -Il 

se  fait  sentir  dans  l'exécution ,  mais  qui  n'ont  point  de 
rapport  aux  trois  qualités  principales  des  sons,  et  que, 
par  ce  motif,  je  ne  crois  point  devoir  exposer  ici. 

Tout  ce  qui  précède  renferme  le  tableau  de  ce  qu'on 
appelle  la  notation.  Il  suffit  d'en  avoir  compris  le  méca- 
nisme pour  comprendre  avec  facilité  le  reste  de  cet  ou- 
\rage;  car  on  se  tromperait  si  l'on  croyait  devoir  charger 
sa  mémoire  de  tous  les  termes  et  de  la  figure  de  tous  les 
signes.  Les  efforts  auxquels  une  élude  semblable  donne- 
rait lieu  seraient  en  pure  perte  pour  l'objet  que  se  pro- 
posent et  les  lecteurs  de  ce  livre  et  son  auteur.  Il  importe 
peu  qu'un  homme  du  monde,  appelé  à  juger  une  compo- 
sition musicale  et  à  en  parler,  sache  distinguer  un  ut 
d'un  sol  ou  une  noire  d'une  croche  ;  mais  il  est  néces- 
saire qu'il  connaisse  l'usage  de  tout  cela,  ne  fût-ce  que 
pour  se  soustraire  à  l'importance  pédantesque  de  ceux 
tjui  en  ont  fait  une  étude  approfondie.  Qu'il  soit  utile 
autant  qu'agréable  de  savoir  la  musique,  c'est  ce  qui  ne 
peut  être  mis  en  doute  ;  mais  comparés  à  la  population 
générale  d'un  pays,  ceux  qui  possèdent  cet  avantage  sont 
presque  toujours  en  petit  nombre.  C'est  pour  les  autres, 
c'est-à-dire  pour  ceux  que  mille  obstacles  empêchent  de 
se  livrer  à  l'élude  d'un  art  difficile ,  que  ce  livre  est  com- 
posé; l'auteur  manquerait  donc  son  but  si ,  pour  se  faire 
comprendre,  il  exigeait  qu'on  acquît  des  connaissances 
auxquelles  il  doit  suppléer. 

Effrayés  de  la  nmltiplicité  des  signes  de  la  notation 
musicale,  des  hommes  de  mérite,  qui  n'étaient  d'ailleurs 
que  de  médiocres  musiciens,  ont  essayé  de  faire  adopter 
d'autres  systèmes  en  apparence  plus  simples  et  qui  se 
composaient  de  chiffres  ou  de  signes  arbitraires;  mais 
outre  que  de  pareils  changemens  ne  sont  pas  plus  ad- 


42  INTENSITÉ.  SECT.   I. 

inISsibles  que  ne  k  serait  celui  de  l'alphabet  d'une  lan- 
gue pour  le  peuple  qui  la  parle,  puisqu'ils  auraient  l'in- 
convénient très  grave  de  replacer  tous  ceux  qui  savent 
la  musique  dans  un  état  d'ignorance  complète  et  d'a- 
néantir tout  ce  qui  existe  de  monumens  de  l'art,  il  est 
un  autre  motif  qui  fera  toujours  rejeter  les  systèmes 
qu'on  proposera  pour  la  réforme  de  la  notation,  si  sim- 
ples qu'ils  soient:  c'est  que  les  signes  de  ces  systèmes  ne 
seront  point  sensibles  à  l'œil  comme  ceux  qui  viennent 
d'être  exposés,  et  que,  conséquemment,  ils  ne  facilite- 
ront pas  la  lecture  rapide  de  la  musique  comme  le  fait 
le  sj'stème  de  notation  en  usage  aujourd'hui.  On  repro- 
che aux  différentes  parties  de  ce  système  de  manquer 
d'analogie;  c'est  une  erreur;  tous  les  élémens  me  sem- 
blent liés  entre  eux  de  manière  qu'on  ne  puisse  en  sup- 
piimer  quelqu'un  sans  détruire  l'ensemble.  La  multi- 
plicité des  clefs  même,  contre  laquelle  se  sont  élevées 
quelques  personnes  peu  musiciennes,  loin  d'être  un 
embarras,  a  des  avantages  incontestables  dans  certains 
cas. 

Dans  l'origine  de  la  musique  moderne,  c'est-à-dire 
vers  les  dixième  et  onzième  siècles,  on  a  pu  essayer  de 
divers  systèmes  de  notation  et  se  livrer  à  l'examen  des 
avantages  et  des  inconvéniens  de  chacun;  plus  tard  (au 
dix-iseptième  siècle),  on  a  pu  renoticer  à  l'échafaudage 
ridicule  de  certaines  proportions  qui  hérissaient  la  lec- 
ture delà  musique  de  difficultés  presque  insurmontables, 
sans  aucune  utilité  réelle  pour  l'art;  mais  en  son  état 
actuel,  la  notation  musicale  forme  un  système  complet 
et  logique;  rien  ne  saurait  plus  y  être  changé  sans  dom- 
raaEre. 


DEUXIÈME  SECTION. 

nE«  soif 5  roNsiuKRKs  dans  leurs  n apports  de  socckSSIo»  KT 

DS  SIMni.TANÊlTÉ;  DU   RESULTAT  DR  CES  CHOSES. 


CHAPITRE  VIII. 

Ce  que  c'est  que  le  rapport  ou  la  relation  des  sons. 

Il  y  a  beaucoup  d'analogie  entre  les  impressions  que  la 
musique  laisse  dans  l'ame  de  ceux  qui  ignorent  ses  pro- 
cédés et  les  sensations  du  compositeur  au  premier  jet 
de  son  inspiration.  En  général,  le  public  n'est  frappé  que 
d'un  ensemble  dont  il  n'aperçoit  pas  les  détails,  et  le 
musicien  a  trop  de  fièvre  pour  analyser  sa  pensée;  mais 
lorsque  celui-ci  veut  écrire  ce  qu'il  a  inventé,  une 
grande  différence  s'établit  entre  lui  et  le  vulgaire.  Dès 
qu'il  a  saisi  sa  plume,  le  calme  rentre  peu  à  peu  dans  son 
ame,  ses  idées  s'éclairclssent,  le  morcellement  de  ses  pé- 
riodes musicales  en  phrases  plus  ou  moins  régulières 
s'opère  dans  sa  pensée;  les  voix,  les  instrumens  qui  les 
accompagnent  et  l'expression  dramatique  des  paroles 
cessent  de  faire  un  tout  homogène.  Alors  se  manifeste 
une  pensée  musicale  qu'on  appelle  mélodie;  alors  s'é- 
tablit la  différence  des  sons  qui  se  succèdent  et  de  ceux 
qui  se  font  entendre  simultanément;  alors  les  défauts 
de  nombre  dans  les  phrases  deviennent  aussi  remarqua- 
bles pour  le  musicien  qxie  les  fautes  de  quantité  le  sont 
pour  le  poète;  l'arrangement  des  voix,  les  dispositions 
des  groupes  de  sons,  le  choix  des  instrumens,  lerhythme. 


44  RAPPORTS   DES  SONS.  SECT.    II. 

tout  enfin  devient  l'objet  d'un  examen  particulier;  tout 
est  susceptible  de  perfectionnemens  dont  la  nécessité 
n'avait  point  été  aperçue  d'abord,  et  l'art  vient  prêter 
son  secours  au  génie. 

De  toutes  les  opérations  de  l'esprit,  celle  par  laquelle 
un  compositeur  de  musique  conçoit  l'effet  de  sa  com- 
position sans  l'entendre  parait  être  et  la  plus  difficile 
et  la  plus  étonnante.  Quelle  complication!  Que  de  rap- 
ports divers!  Que  détalent,  de  perspicacité,  d'expérience 
et  d'observation ,  même  dans  un  ouvrage  médiocre  !  car 
ce  n'est  point  assez  d'être  ému  par  la  situation  qu'on 
veut  peindre  ou  le  sentiment  qu'il  s'agit  d'exprimer,  il 
faut  encore  trouver  des  mélodies  analogues  à  ces  divers 
objets  ;  il  faut  que  ces  chants  se  combinent  et  se  parta- 
gent entre  plusieurs  voix  de  différens  caraotères,  dont  il 
est  indispensable  de  pressentir  l'effet;  il  faut  enfin  que 
tout  cela  soit  accompagné  par  un  nombre  plus  ou  moins 
considérable  d'instrumens  qui  diffèrent  d'accent  et  de 
sonorité,  et  qui  doivent  être  employés  de  la  manière  la 
plus  satisfaisante  et  la  plus  utile  k  l'effet  général.  Chacune 
de  ces  choses  entraine  une  multitude  de  détails  qui  con- 
courent à  compliquer  les  élémcns  de  cet  art  singulier.  Il 
suffit  au  musicien  de  jeter  un  coup  d'œil  sur  le  papier  qui 
reçoit  ses  inspirations,  pour  se  rendre  compte  de  sa  com- 
position comme  s'il  l'entendait  réellement  exécuter. 

Dès  qu'on  porte  avec  attention  ses  investigations  dans 
la  musique,  on  y  remarque  quatre  choses  principales  qui 
concourent  à  son  effet,  savoir:  la  succession  des  sons  qui, 
comme  on  vient  de  le  voir,  se  désigne  par  le  nom  de 
mélodie;  leur  simultanéité,  d'où  résulte  l'harmonie; 
la  sonorité  y  qui  est  plus  ou  moins  satisfaisante,  suivant 
le  choix  ou  la  disposition  des  voix  et  des  instrumens  ; 


CliAP.   vm.  nELATION  UtS  SONS.  .Jô 

et  enfin  l'accent,  qui  vivifie  tout  cela,  mais  qui  échappe 
a  l'analyse.  Les  rapports  sensibles  des  sons  se  présentent 
donc  sous  trois  aspects:  1°  succession;  2°  simulta- 
néité; 3°  sonorité.  Chacune  de  ces  divisions  se  frac^ 
tionnc  comme  on  le  verra  par  la  suite. 


CHAPITRE  IX. 

De  la  mélodie. 

C'est  dans  sa  propre  voix  que  l'homme  trouve  le  type 
originaire  de  la  musique.  Cet  instrument,  le  premier  de 
tous,  parce  qu'il  est  à  la  fois  le  plus  touchant  et  le  plus 
fécond  en  effets  divers,  ne  donne  par  lui-même  que  des 
.dées  de  successions  de  sons,  et  ne  fait  pas  même  sup- 
poser la  possibilité  de  simultanéité  dans  leur  émission. 
De  la  vient  sans  doute  que  la  mélodie  est  la  première 
chose  qu'on   remarque    quand   une   éducation    précoce 
n  a  point  modifié  les  dispositions  naturelles.  Disonsplus- 
c'est  elle  seule  qui  attire  l'attention  de  ceux  qui  sonj 
complètement  étrangers  aux  éludes  musicales,  et  l'har- 
monie des  accompagnemens  frappe  en  vain  leur  oreille- 
elle  n'est  pas  entendue.  Il  y  a  environ  vingt  ans  qu'on 
s'est  assuré,  par  diverses  expériences,'  qu'une  partie  du 
public  de  nos  spectacles  croyait  que  l'orchestre  jouait  à 
1  unisson  des  chanteurs.  On  est  plus  instruit  maintenant 
grâce  au  perfectionnement  des  méthodes  d'enseignement 
et  a  l'mfluence  des  journaux.  Au  reste,  il  est  remarquable 
que  les  peuples   européens  sont  les  seuls  qui  aient  fait 
usage  de  l'union  de  l'harmonie  à  la  mélodie  depuis  le 
moyen-âge;  l'antiquité  parait  n'en  avoir  eu  aucune  con- 


4é  EAPPORTS  DÉS  SOWS.  SECT.   îr. 

naissance,  et  les  Orientaux  ne  la  comprennent  pas  quand 
ÔTi  la  leur  fait  entendre.  Il  serait  facile  de  démontrer 
que  l'harmonie  ne  peut  s'allier  aux  divisions  de  l'échelle 
musicale  de  certains  peuples,  et,  d'autre  part,  qu'elle  est 
le  produit  presque  nécessaire  de  notre  garrihie.  Là  «lé- 
lodie  est  de  tous  les  pays  et  de  tous  les  temps;  mais  ses 
formes  sont  variables  comme  les  élémens  qui  entrent 
dans  sa  composition. 

Il  ne  faut  pas  croire  que  cette  mélodie ,  telle  qu'on 
l'entend  dans  les  chants  populaires  et  au  théâtre,  n'ait 
d'autre  règle  que  la  fantaisie.  Le  génie  le  plus  libre,  le 
plus  original,  obéit,  à  son  insu,  lorsqu'il  imagirie  des 
^hatits,à  certaines  règles  de  symétrie  dont  l'effet  n'èèt 
pas  plus  de  convention  que  ne  l'est  le  t-hythttie  du  tam- 
bour âur  des  masses  de  soldats  qu'on  fait  raouvoii-.  Qu'on 
ne  croie  point  que  cette  régularité  de  formes  n'affecte 
que  ceux  qui  ont  étudié  les  principes  de  la  musique  ; 
quiconque  n'a  pas  l'oreille  inerte  ou  rebelle  y  est  sen- 
sible, sans  qu'il  soit  obligé  pour  cela  d'analj'ser  ses  sen- 
sations. 

La  différence  de  vitesse  et  de  lenteur,  établie  dans 
un  ordre  régulier  quelconque,  constitue  ce  qu'on  nomme 
le  rhj'thme  en  musique.  C'est  par  le  rhythme  que  cet 
art  excite  les  plus  vives  émotions,  et  l'action  de  ce 
rhythme  est  d'autant  plus  puissante  qu'elle  est  plus 
prolongée.  Par  exemple,  une  noire  suivie  de  déUx  ctO- 
ches  est  une  succession  qu'on  rencontre  à  chaque  in- 
stant dans  la  musique  sans  la  remarquer;  mais  qu'elle 
se  prolonge  un  certain  temps,  elle  deviendra  un  rhythme 
capable  de  produire  les  plus  grands  effets. 

Le  rhythme  est  susceptible  de  beaucoup  de  variétés. 

Dans  les  mouvéméns  lénts,  tels  que  V adagio,  le  largo. 


il  est  presque  nul  ;  mais  dans  les  mouvçmens  modérés 
ou  rapides  il  est  très  remarquable.  Quelquefois  il  ne  ré- 
side que  dans  la  mélodie;  d'autres  fois  il  est  dans  l'ac- 
compagnement; enfin,  il  est  des  cas  où  deux  rhylhmes 
différeus,  l'un  placé  dans  le  chant,  l'autre  dans  l'accom- 
l)agnement,  se  combinent  pour  produire  un  effet  mixte. 
La  musique  dépourvue  de  rhythme  est  vague  et  ne 
peut  se  prolonger  sans  faire  naître  l'ennui.  Cependant 
on  emploie  quelquefois  avec  succès  des  mélodies  de  cette 
espèce  pour  exprimer  une  certaine  rêverie  mélancolique, 
le  calme  des  passions,  l'incertitude  et  d'autres  choses 
semblables.  Toutefois,  de  pareils  cas  sont  rares. 

D'après  ce  qui  vient  d'être  dit,  on  conçoit  que  le 
rhythme  fait  partie  des  règles  de  symétrie  auxquelles  la 
mélodie  est  soumise;  elle  en  est  la  première  et  la  plus 
impérieuse;  c'est  elle  qui  souffre  le  moins  d'exceptions, 
et  à  laquelle  on  est  le  moins  tenté  de  se  soustraire. 

La  sensation  du  rhythme  delà  musique  est  simple  ou 
complexe.  Elle  est  simple  quand  un  seul  genre  de  com- 
binaison de  temps  frappe  l'oreille;  elle  est  coiQ|ïlexe 
quand  des  combinaisons  de  genres  différens  se  font  en- 
tendre en  même  temps. 

La  sensation  est  d'autant  plus  simple  que  l'ordre  sy- 
métrique se  compose  de  moins  d'élémens.  Les  élémens 
du  rhythme  sont  les  temps  de  la  mesure  et  leurs  frac- 
tions, soit  binaires,  soit  ternaires. 

(i)  Ce  morceau  est  extrait  de  la  quatrième  leçon  du  cours  de 
philosophie  et  d'histoire  de  la  musique,  par  M.  Fétia. 


A8  rapports  «es  so:«s.  sv.ct.  il. 

Exemples  de  quelques  eléraens  de  rliythities  simples. 

Ordre  binaire. 

rr  rrirr  rrirr  m- 
r  rrir  rrir  m- 


Ordre  ternaire. 


rrnrrrirrrirrri- 
r  nr  rir  rir  ri- 
frrirTnr-rrif^ri- 
ffnrfrirfnrfnr- 

La  simplicité  de  la  sensation  du  rhythme  diminue  en 
raison  de  l'augmentation  du  nombre  d'élémens  qui  en- 
trent dans  sa  composition. 


•HAP.    I\.  MKI.OniK.  If) 

F.xcmplei.  Ji-  rliytliiiifs  coinposi-s  de  i)lui>i*ius  élémeiis. 

Rljylhrae  binaire. 

r  rirrrir^^rrir  r 

Rhythme  ternaire. 

rrrif^rin^prnr^i 

Le  résultat  d'une  sensation  très  simple  de  rhythme 
étant  d'affecter  l'organe  de  l'ouïe  d'une  manière  uni- 
forme, cette  sensation  se  fait  remarquer  sans  peine;  il 
n'en  est  pas  de  même  lorsque  le  rhythme  est  le  produit 
d'élémens  multipliés  et  diversement  combinés.  Dans  les 
deux  derniers  exemples ,  chaque  case  de  mesure  con- 
tient des  élémens  différens,  et  chacune  d'elles,  consé- 
quemment,  produit  une  sensation  distincte;  d'où  il  suit 
([ue  la  symétrie  d'arrangement  disparait,  et,  par  suite, 
(jue  le  rapport  rhythmique  s'affaiblit  d'autant  plus. 

Mais  un  nouveau  rapport  de  nombres  peut  résulter 
de  combinaisons  semblables.  En  effet ,  l'oreille ,  sans 
compter  le  nombre  des  mesures  ,  est  cependant  saisie  de 
!a  sensation  de  ce  nombre  ;  de  là  nait  pour  elle  la  néces- 
sité qu'il  se  répète,  et,  si  elle  est  satisfaite  sous  ce  rap- 
port, un  nouveau  genre  de  rhythme  s'établit  pour  elle  par 
la  symétrie  des  phrases  ;  ce  rhythme  constitue  la  phra- 
séologie, qu'on  désigne  en  musique  sous  le  nom  de  car~ 
rure  des  phrases.  La  nécessité  de  symétrie  dans  le  nom- 
bre de  mesures  correspondantes  établit  donc  un  nou- 
veau genre  de  rhythme ,  lorsque  cette  symétrie  n'existe 
plus  dans  les  élémens  du  rhythme  des  temps,  et  ce  nou- 
veau rhythme  est  d'autant  plus  satisfaisant  pour  l'oreille 
que  la  similitude  est  plus  parfaite  dans  l'arrangement 
des   élémens  rhythuiiqucs   de  chaque  mesure.  Ainsi  les 


•>0  RAPPORTS  DE6   bO!»S.  ?ECT.  II. 

rhythmes  qui  ont  été  donnés  en  dernier  lieu  comme 
exemples  devieiidi'ont  réguliers  et  sensibles  si,  à  chacun 
de  ces  exemples,  composés  de  quatre  mesures,  corres- 
pondent des  phrases  semblables  et  pour  le  nombre  des 
mesures  et  pour  l'arrangement  des  temps. 

Exemples  : 
Rh)'thme  binaire.  —  Première  phrase. 

r  hrrnr(:prnr  ni 

Deuxième  phrase. 

f  ri  r  r  ri  r  î  ^  r  r'i  r  ■  li 

Rhythme  leni.nire.  —  Prpn»ière  phrase. 

rrrirrrlr^^^nr  h 

Deuxième  pLrasc. 

rrnr?nr!:pci:'ir  î 

Dans  ces  exemples,  il  y  a  parité  non-seulement  à 
l'égard  du  nombre  de  mesures  de  chaque  phrase,  mais 
la  cinquième  mesure  répond  exactement  à  la  première 
pour  l'arrangement  des  élémens  du  rhythme,  la  sixième 
à  la  seconde,  la  septième  à  la  troisième,  et  la  huitième 
à  la  quatrièii)e.  Lne  différence  se  fait  cependant  remar- 
quer entre  les  deux  phrases  du  premier  exemple  ,  car  au 
lieu  de  deux  blanches  qui  se  trouvent  dans  la  quatrième 
mesure,  il  n'y  en  a  qu'une  suivie  d'un  silence  dans  la 
huitième.  La  raison  de  cette  différence  est  qu'après  les 
deux  phrases  le  sens  rhytbmique  est  terminé,  et  que  le 


ntAP.  IX.  MKt.nmr..  51 

premier  temps  de  la  dernière  mesure  est  précisément  Irt 
point  de  la  terminaison. 

L'arrangement  du  rhythme  phraséologiqnê  n'est  pa* 
toujours  aussi  régulier  que  dans  les  exemples  dont  il 
â'agit;  mais  on  peut  affirmer  que  moins  il  y  a  de  régula- 
rité dans  cet  arrangement ,  plus  la  sensation  de  ce  genre 
de  rhythme  s'affaiblit.     ^ 

L'expression  de  carrure  des  phrases  ^  dont  on  se  %zi\ 
dans  le  langage  ordinaire  pour  désigner  le  rhythme 
phraséologique ,  peut  faire  croire  à  la  nécessité  absolue 
de  composer  toutes  les  phrases  de  quatre  mesures  ;  mais 
cette  nécessité  n'existe  point,  car,  ainsi  qu'il  existe  un 
rhythme  ternaire  de  temps ,  il  y  a  un  rhythme  ternaire 
de  phrases.  Une  phrase  de  trois  mesures  ,  si  elle  a  pour 
correspondante  une  autre  phrase  de  trois  mesures,  Sera 
donc  parfaitement  rhythmique  ;  et  le  rhythme  sera  sur- 
tout satisfaisant  si  l'arrangement  des  élémens  du  rhyth- 
me de  chaque  mesure  est  absolument  symétrique  dans 
les  deux  phrases. 

Il  y  a  auàsi  des  phrases  correspondantes  de  cinq  me- 
sures chacune;  mais  à  leur  égard  on  peut  faire  la  même 
observation  que  pour  le  rhythme  de  cinq  temps  par  me^ 
sure,  que  quelques  auteurs  ont  essayé  d'introduire  dans 
la  musique  ;  c'est  que  l'oreille  est  absolument  inhabile  à 
saisir  les  rapports  de  cette  combinaison  par  cinq,  et  que 
si  des  combinaisons  semblables  ont  été  essayées  avec 
quelque  succès,  c'est  que  l'oreille  les  a  décomposées 
comme  des  rhythmes  alternativement  binaires  et  ter- 
naires, et  que  la  symétrie  qui  résulte  de  là  répétition 
établit  pour  cet  organe  des  rapports  d'ordre  qui  finis- 
sent par  le  satisfaire.  Une  suite  de  mesures  à  cinq  temps 
se  présente  donc  à  l'oreille  comme  une  alternative  de 


Ô2 


RAPPORTS  DES  SONS. 


»ECï.  II. 

mesures  à  deux  et  à  trois  temps;  une  suite  de  phrases 
de  cinq  mesures  est  une  combinaison  alternative  de 
phrases  de  deux  et  de  trois  mesures;  d'où  il  résulte  que 
le  rhythme  phraséologique  de  phrases  de  cinq  mesures 
est  le  moins  simple  de  tous ,  et ,  par  suite,  le  plus  faible 
pour  l'oreille. 

Quelquefois  la  phrase  première  de  quatre  mesures  est 
coupée  par  un  repos  incident  à  son  milieu,  c'est-à-dire 
au  bout  de  deux  mesures;  dans  ce  cas,  l'oreille  exige 
que  la  même  césure  musicale  se  fasse  sentir  dans  la 
phrase  complémentaire  ou  correspondante.  Je  citerai 
pour  exemple  la  romance  du  Prisonnier. 

-Ni 


^ 


-^ 


-e- 


5 


-r 


i^nm 


=5 


S: 


Lorsque  dans   u  -  ne  tour  ob  -  scu-re 


Cejeunehommeest dans  la    dou  -  leur, 


^^ 


4t 


y~r 


Mon  cœur    gui  -  dé  par    la     na  -  tu  -  re 


f^-^  \>\r^-& 


Doit  corn  -  pa  -  tir  à    son     mal-  heur. 

Dans  cet  exemple,  A  est  le  commencement  de  la 
proposition  dont  B  est  le  complément;  1,  2,  3,  4, 
sont  des  membres  de  phrases  correspondans  et  symétri- 
ques. 


en  Ai'.  IX.  MÉLODIE.  53 

Quelquefois  le  sens  musical  resle  suspendu  après  la 
deuxième  phrase  de  quatre  mesures;  dans  ce  cas  une 
troisième  pinase  de  quatre  doit  servir  de  complément 
|iour  satisfaire  l'oreille.  Tel  est  l'exemple  qu'on  en  trouve 
dans  la  célèbre  canzonetle  du  Mariage  de  Figaro  qui 
commence  par  ces  mots  :  Mon  cœur  soupire,  etc. 


^ 


F^=^^^ 


1^2    J 


-^ 6»- 

Mon  cœur  sou-pi-re    La  nuit    le         jour; 


P    ,t>     ,     b(*     h 

1    #.- 1 

k   ^       la    .. 

1 

-> 

/îv      CT             »         1^    ■■         "1 

'             tf 

p       V  w      ^W    ■ 

'iVs  ^             J 

I         1          r 

■^ 1 ^ ' 

l_Si^ — j — 

^      "     }\ 

' ' 



Qui  peut   me      di    -  re      Si    c'est  d'a-mour? 


~^^â^^^\^-^ 


Quipeutmedi    -    re  Si  c'est  d'a-mour? 


On  serait  dans  l'erreur  si ,  de  ce  qui  a  été  dit  précé- 
demment, on  tirait  la  conséquence  qu'un  morceau  de 
musique  quelconque  doit  toujours  renfermer  un  nombre 
pair  de  mesures;  car  il  arrive  souvent,  dans  un  finale 
d'opéra  ou  dans  toute  autre  pièce  écrite  pour  plusieurs 
voix,  que  la  mesure  finale  d'une  phrase  sert  aussi  de 
première  pour  une  autre  phrase,  ce  qui  rend  à  la  fin  le 
nombre  des  mesures  impair,  sans  que  l'oreille  en  soit 
blessée  ;  cette  sorte  d'enjambement  a  même  de  la  grâce 
quand  elle  est  faite  à  propos. 

Il  n'est  pas  sans  exemple  qu'une  phrase  isolée  de  cinq 
ou  de  trois  mesures  se  trouve  placée  au  milieu  d'autres 
phrases  régulières  et  carrées  ;  mais  un  pareil  défaut  est 


54  RAPPORTS   DES    SONS.  SFCT.    II. 

toujours  choquant  pour  une  oreille  délicate;  on  peut 
affirmer  avant  l'examen  que  la  phrase  est  mal  faite ,  et 
qu'en  la  considérant  avec  soin  l'auteur  aurait  pu  la  car- 
rer. Au  reste  ce  sont  des  cas  fort  rares,  car  le  musicien 
se  conforme  à  la  carrure  des  phrases  comitié  le  poète  à 
la  mesure  des  vers,  naturellement  et  sans  y  penser. 

Toutefois,  certaines  mélodies  populaires  des  pays  de 
montagnes  tels  que  la  Suisse,  l'Auvergne  ,  l'Ecosse ,  sont 
empreintes  de  nombreuses  irrégularités  de  ce  genre,  el 
n'en  sont  pas  moins  agréables.  L'irrégularité  est  même  ce 
qui  plaît  le  plus  dans  ces  sortes  de  mélodies,  parce 
qu'elle  contribue  à  leur  donner  la  physionomie  particu- 
lière, étrange,  sauvage,  si  l'on  veut,  qui  pique  notre 
curiosité  en  nous  tirant  de  nos  habitudes.  Mais  il  ne  faut 
pas  s'y  tromper;  ce  qui  nous  séduit  un  instant  en  elles 
nous  fatigue  bientôt  si  nous  n'en  sommes  distraits  par 
d'autre  musique,  et  l'irrégularité  qu'on  y  remarque  et 
qui  nous  plaisait  d'abord  finit  par  nous  sembler  mono- 
tone et  affectée.  Un  musicien  peut  tirer  un  parti  avanta- 
geux de  ces  sortes  de  mélodies;  mais  il  faut  qu'il  sache 
les  employer  à  propos  et  qu'il  n'en  soit  point  prodigue. 

La  mélodie,  fruit  de  l'imagination  et  de  la  fantaisie, 
libre  de  toute  entrave  en  apparence,  est  donc  soumise  i: 
trois  conditions  d'où  dépend  son  existence,  savoir  :  hi 
convenance  de  tonalité,  le  rhythme  et  le  nombre.  On 
va  voir  qu'il  en  est  une  autre  non  moins  importante,  non 
moins  impérieuse  et  plus  gênante  ;  je  veux  parler  de  /a 
modulation.  On  appelle  de  ce  nom  le  passage  d'un  ton 
dans  un  antre,  c'est-à-dire  de  la  gamme  d'une  note  dans 
la  gamme  d'une  autre  note.  11  est  nécessaire  d'expliquer 
en  quoi  consiste  le  mécanisme  et  le  but  de  ces  change- 
mens  de  toq. 


<:kap.  i\.  MKr.oDiE.  55 

Si  un  morceau  de  musique  était  tout  entier  dans  le 
tiiêhie  ton  ,  il  en  résulterait  une  sorte  d'uniformité  rati- 
fiante; cette  uniformité  se  désigne  exactement  par  le 
nom  de  monotonie  (un  seul  ton).  Dé  petits  airs,  d'un 
style  naïf  et  simple,  peuvent  seuls  admettre  l'unité  de  ton 
sans  donner  lieu  aux  inconvéniens  de  la  monotonie.  Dès 
qu'il  s'agit  d'un  morceau  d'une  certaine  étendue,  la  mo- 
dulation devient  nécessaire;  mais  celle-ci  est  soumise 
aux  exigences  de  l'oreille  comme  le  rhythme  et  la  forme 
des  phrases.  Dès  qu'on  veut  faire  usage  de  la  modula- 
tion ,  ou  plutôt  dès  qu'on  y  est  déterminé  par  la  nature 
des  chants  qu'on  invente  ,  l'embarras  du  choix  des  tons 
se  préfeente.  En  effet,  l'oreille  n'admet  pas  que  toute 
succession  de  tons  puisse  lui  plaire.  Pour  atteindre  ce 
but,  il  faut  qu'il  y  ait  quelque  analogie  entre  le  ton 
qu'on  quitte  et  celui  dans  lequel  on  entre;  et  cependant 
il  est  un  grand  nombre  de  circonstances  où  la  modula- 
tion doit  être  inattendue  pour  être  agréable. 

En  réfléchissant  sur  la  contradiction  qui  semble  naître 
de  cette  double  obligation,  on  s'aperçoit  qu'il  y  a  dans 
un  morceau  quelconque  deux  sortes  de  modulations  : 
l'une,  principale,  qui  en  détermine  la  forme;  l'autre, 
accessoire,  qui  n'est  qu'épisodique.  La  modulation  prin- 
cipale ayant  pour  objet,  tout  en  contribuant  à  la  variété, 
(le  présenter  àVec  simplicité  la  pensée  du  compoàitéur, 
n'admet  que  l'analogie  de  ton  dont  il  vient  d'être  parlé, 
tandis  que  les  modulations  incidentes,  étant  destinées  à 
réveiller  l'attention  de  l'auditeur  par  des  effets  piquans, 
ne  sont  point  soumises  à  cette  analogie.  Plus  la  première 
est  naturelle  et  simple,  plus  elle  est  satisfaisante;  plus  les 
autres  sont  inattendues,  plus  elles  contribuehtà  atlgrtiéil- 
ter  l'effet. 


56  BAPPORTS  DES   SO>S.  SKCT.    II. 

Cela  posé ,  uue  nouvelle  difficulté  se  présente  :  la 
voici.  Quel  que  soit  le  ton  principal  choisi  par  l'auteur 
d'un  morceau  de  musique,  plusieurs  autres  tons  se  grou- 
pent autour  de  lui  de  manière  à  être  avecluien  rapport 
d'analogie;  car  s'il  s'agit  d'un  ton  majeur,  ou  trouve  d'a- 
bord le  ton  mineur  relatif,  c'est-à-dire  celui  qui  a  le 
même  nombre  de  dièses  ou  de  bémols,  puis  celui  qui  a 
un  dièse  ou  un  bémol  de  plus  ,  et  enfin  celui  qui  a  un 
dièse  ou  un  bémol  de  moins;  s'il  est  question  au  cou- 
traire  d'un  ton  mineur,  on  trouve  d'abord  le  ton  majeur 
relatif,  c'est-à-dire  celui  qui  a  le  même  nombre  de  diè- 
ses ou  de  bémols,  puis  ceux  qui  ont  un  dièse  ou  un  bé- 
mol de  plus  ou  de  moins.  Mais  de  tous  ces  tons,  quel  est 
celui  qn'il  faut  adopter?  A  oilà  ce  qui  heureusement  est 
en  question  ;  car  on  conçoit  que  s'il  n'y  avait  qu'une 
manière  de  sortir  du  ton  principal ,  la  modulation  serait 
toujours  prévue,  et  dès  lors  le  plaisir  causé  par  la  mu- 
sique serait  beaucoup  diminué,  ou  nicme  s'évanouirait 
complètement.  Il  suffit,  pour  qu'une  modulation  soit 
agréable  et  régulière,  qu'elle  ait  lieu  du  ton  principal  à 
l'un  de  ses  analogues,  c'est-à-dire  qu'elle  introduise  dans 
la  mélodie  un  dièse  ou  un  bémol  de  plus,  ou  qu'elle  en 
retranche  un.  Supposons  un  Ion  majeur,  ré,  par  exemple, 
dans  lequel  y  a  deux  dièses,  savoir,  zxifa  et  à  X ut  :  la 
pensée  du  compositeur  pourra  être  également  simple  et 
naturelle,  soit  qu'il  conduise  sa  modulation  en  si  mineur, 
où  il  y  a  le  même  nombre  de  dièses;  soit  que  cette  mo- 
dulation passe  en  la,  où  il  y  a  un  dièse  de  plus;  en  fa 
dièse  mineur,  où  il  se  trouve  aussi  un  dièse  de  plus,  et 
en  sol,  où  il  y  a  un  dièse  de  moins  :  la  fantaisie  seule  dé- 
termine le  choix. 

Toute  modulation  principale  peut  donc  se  faire  par 


CJIAP,  IX.  MELODIE.  Ô7 

quatre  tons  <lifféren3.  Et  qu'on  ne  croie  pas  que  lo  pé- 
dantisine  des  écoles  a  réglé  les  choses  à  ce  petit  nombre 
de  moyens;  les  compositeurs  les  plus  audacieux,  ceux 
dont  le  génie  a  le  plus  d'indépendance,  ont  été  ramenés 
malgré  eux  ù  s'y  renfermer,  parce  qu'ils  ont  reconnu  que 
tout  ce  qui  en  sort  choque  l'oreille  au  lieu  de  lui  plaire. 
Ils  ne  se  livrent  ù  des  écarts  et  ne  s'abandonnent  à  toutes 
les  saillies  modulées  de  leur  imagination  qu'après  avoir 
établi  d'abord  régulièrement  la  modulation  principale; 
mais  celles-là,  loin  de  dépiaire  à  l'oreille,  lui  procurent 
des  sensations  d'autant  plus  vives  qu'elles  sont  plus  inat- 
tendues. 

Je  viens  de  dire  que  tous  les  compositeurs  se  confor- 
ment au  système  régulier  delà  modulation  principale; 
je  dois  ajouter  (jue  parmi  les  quatre  tons  dont  on  peut  se 
servir  pour  cet  objet,  il  est  ordinaire  qu'on  en  adopte 
un  de  préférence  à  d'autres  pour  le  faire  entendre  plus 
souvent.  Ainsi,  bien  que  la  modulation  la  plus  simple, 
la  plus  naturelle,  la  plus  universellement  adoptée,  soit 
celle  où  la  mélodie  passe  d'un  ton  majeur  dans  un  autre 
ton  majeur  qui  a  un  bémol  de  moins  ou  un  dièse  de  plus, 
comme  de  ré  en  la,  ou  bien  d'un  ton  mineur  au  ton  ma- 
jeur relatif,  comme  de  si  mineur  en  re  majeur,  cepen- 
dant quelques  musiciens  ont  préféré  des  modulations 
moins  usitées,  et  s'en  sont  servi  habituellement.  Rossini, 
par  exemple,  a  adopté  la  modulation  qui  passe  d'un  ton 
majeur  à  un  ton  mineur  avec  un  dièse  de  plus,  comme 
du  ton  de  ré  majeur  au  ton  de/a  dièse  mineur;  mais  il 
s'est  servi  si  souvent  de  ce  moyen  qu'il  l'a  usé  et  l'a  même 
rendu  trivial. 

Telles  sont  donc  les  conditions  principales  de  la  mé- 
lodie :  1°   convenance   dx;   tonalité;    2"   symétrie  de 


58  RAPPORTS  DÈS  SONS,  SECT.  U. 

rhythme ;  3*  symétrie  de  nombre;  4"  régularité  de 
modulation.  On  serait  clans  l'erreur  si  l'on  se  pei-suadait 
qu'elles  soht  autant  d'obstacles  à  la  production  des  idées  ; 
car  le  rhythme  ,  le  nombre,  la  modulation  sont  si  bien 
îtthéfehs  au^  facultés  du  musicien  qu'il  y  obéit  sâtis  le 
rem<1rquer  et  comme  par  instinct,  Uniquement  Occtipé 
du  caractère  gracieux,  énergique,  gai  ou  passionné  dé 
sA  mélodie  ou  caniilène  '.  Que  d'autres  entraves  bien 
plus  réelles  il  est  obligé  de  surmonter,  dans  la  produc- 
tion et  dans  l'arrangement  de  ses  idées  !  S'il  écrit  sur  des 
paroles,  dans  le  style  dramatique,  l'arrangement  des  vers, 
la  prosodie,  la  rapidité  de  l'action,  et  beaucoup  d'autres 
considérations  le  contraignent  biéti  davantage,  comme 
on  le  verra  dans  la  suite;  cependant  l'homme  de  génie 
en  triomphe  toujours.  C'est  un  mystère  qui  ne  peut  être 
f^ômpris  que  par  les  compositeurs  eux-mêmes  que  cette 
faculté  d'inventer,  de  conserver  de  l'élan,  de  la  chaleut", 
du  délire,  (le  se  passionner  enfin  ati  Inilieu  de  tant  d'obs- 
tacles; de  rester  indépendant  dans  le  choix  de  son  sujet, 
et  de  le  manier  avec  dextérité,  comme  si  rien  ne  s'y  op- 
posait. Lorsqu'on  songe  à  toutes  ces  choses,  on  conçoit 
qn'il  peut  y  avoir  du  mérite  même  dans  de  la  musique 
médiocre. 

Il  est  des  mélodies  qui  séduisent  par  elles-mêmes  et 
dépouillées  de  tout  ornement  étranger,  même  d'accom- 
pagnertient;  celles-là  sont  en  petit  nombre.  Il  en  est  d'au- 
tres qui,  lïien  que  purement  mélodiques,  ont  besoin  du 
secours  d'une  harmonie  quelconque  pour  produire  leur 
effet.  Il  en  est  enfin  dont  l'origine  réside  dans  l'barmo- 


(i)  Ce;*  den*  tn6t«  éont  .iyil6iiVrtié»,  Le  Sétirttoé  ési  tii>é  de  l^îtalien 

cttntileha-. 


cuAv.  IX.  nitom^.  i>d 

nie  qui  les  accoiupagoe.  Quiconque  n'est  pas  insensible 
à  l'effet  des  sons  saisit  facilement  l'ensemble  des  mélo- 
dies de  la  première  espèce  :  de  là  vient  que  celles-ci  sont 
bientôt  populaires.  Les  mélodies  qui  ne  produisent  leur 
effet  qu'avec  le  secours  d'un  accompagnement  quelcon- 
que n'exigent  pas  de  grandes  connaissances  musicales 
pour  être  senties,  mais  toutefois  elles  ne  peuvent  plaire 
qu'aux  oreilles  habituées  à  entendre  de  la  inusique. 
Quant  aux  piélodies  de  la  troisiènae  espèce,  qu'o|i  peut 
nommer  mélodies  harmonieuses ,  les  musiciens  seuls 
sont  en  état  de  les  apprécier,  parce  qu'au  lieu  d'être  le 
résultat  d'une  idée  simple,  elles  se  compliquent  de  di- 
vers élémens,  et  exigent  conséquemment  une  sorte  d'a- 
nalyse pour  être  comprises  :  analyse  qu'un  musicien  fait 
avec  la  rapidité  de  l'éclair,  mais  que  l'homme  du  monde 
ne  peut  faire  que  lentement  et  avec  peine.  Ce  ne  sont 
pas  moins  des  mélodies  très  réelles,  et  c'est  à  tort  qu'on 
s'écrie  souvent  qu'il  n'y  a  point  de  chant  dans  un  mor- 
çpau  quelconque,  lorsque  ce  genre  de  mélodie  s'y  trouve; 
on  devrait  diie  seulement  que  le  chant  n'en  est  pas  fa- 
cile à  comprendre.  S'attacher  à  en  saisir  l'esprit  serait 
augmenter  ses  jouissances  et  n'exigerait  pas  une  étude 
fort  longue;  mais  la  paresse  naturelle  que  nous  portons 
en  toute  chose  exerce  son  influence ,  même  sur  nos  plai- 
sirs. 

Quoique  la  mélodie  soit  en  apparence  ce  que  tout  le 
monde  peut  apprécier  avec  facilité,  elle  est  cependant 
une  des  parties  de  la  musique  sur  lesquelles  on  porte  les 
jugemens  les  plus  erronés.  11  est  peu  d'habitués  des  théâ- 
tres lyriques  qui  ne  se  croient  en  état  de  prononcer  sur- 
la  nouveauté  d'une  mélodie;  néanmoins,  outre  que  l'é- 
rudition musicale  leur  manque  pour  cela,  combien  de 


(iO  RAPPORTS  DES  SONS.  «Ef-T.    if. 

fois  ne  sont-ils  pas  dupes  des  ornemens  du  chanteur, 
qui  donnent  un  air  de  nouveauté  à  des  choses  suran- 
nées? Que  de  vieilleries  hahillées  à  neuf  au  moyen  d'ac- 
compagnemensde  formes  différentes,  d'instrumens  nou- 
veaux ,  de  changemens  de  mouvement,  de  mode  ou  de 
ton  !  Et  tandis  qu'on  n'aperçoit  pas  les  analogies  réelles 
qu'il  y  a  entre  telle  mélodie  ancienne  et  telle  autre  qu'on 
croit  nouvelle  ,  que  de  fois  il  arrive  qu'on  signale  des 
ressemblances  imaginaires  ,  parce  qu'on  a  remarqué 
quelque  similitude  de  rhythme  entre  deux  mélodies  dont 
les  caractères,  les  formes  et  l'inspiration  n'ont  rien  d'a- 
nalogue !  Les  bévues  de  ce  genre  sont  innombrables  ; 
néanmoins  on  n'en  reste  pas  moins  convaincu  de  l'in- 
faillibilité  de  son  jugement,  et  l'on  est  toujours  prêt  à 
retomber  dans  les  mêmes  erreurs  avec  la  même  assu- 
rance. 

Mais,  dit-on,  il  n'esl  pas  besoin  de  tout  examiner 
pour  savoir  si  telle  mélodie  est  agréable  ou  déplaisante  ! 
Cela  se  sent  plus  que  cela  ne  s'analyse,  et  tout  le  monde 
est  en  état  déjuger  de  ses  sensations. — Tout  cela  est  in- 
contestable; mais  qu'en  faut-il  conclure?  Que  chacun 
est  en  droit  d'affirmer  que  telle  mélodie  lui  plaît  ou  lui 
semble  insignifiante  ou  désagréable,  mais  non  de  décider 
de  son  mérite,  s'il  n'est  en  état  de  l'analyser.  A  Dieu  ne 
plaise  qu'on  soit  contraint  d'analyser  les  mesures  des 
phrases  pour  s'assurer  qu'elles  sont  carrées  !  un  pareil 
travail,  indigne  de  quiconque  a  le  sentiment  de  la  mu- 
sique, n'est  jamais  néces.saire  quand  on  a  su  rendre  son 
oreille  délicate,  sous  le  double  rapport  du  rhythme  et 
du  nombre.  C'est  à  perfectionner  cet  organe  qu'il  faut 
travailler,  et,  pour  y  parvenir, l'attention  seule  est  néces- 
saire, sans  y  joindre  le  secours  de  la  science.  Qu'un 


*  "^^''-    IX-  MKL(>l>ir.  i;  / 

honirne  du  nioiiilc  ,  au  lieu  de  s'abaudomier  sans  lé- 
»eive  au  plaisir  vague  que  lui  cause  un  air,  un  duo,  se 
décide  à  en  examiner  l'ordonnance,  à  considérer  la  dis- 
position et  le  retour  des  phrases,  les  rhyihmes  princi- 
paux, la  cadence,  etc.  :  d'abord  ce  travail  lui  sera  pé- 
nible et  troublera  ses  jouissances;  mais  insensiblement 
l'habitude  suppléera  l'attention,  et  bientôt  elle  sera  telle 
que  l'attention  même  sera  moins  nécessaire.  Alors  ce 
•  jui  n'aura  paru  d'abord  qu'un  calcul  aride  deviendra 
l'origine  d'un  jugement  facile  et  la  source  des  plus  vives 
jouissances. 

II  est  une  autre  objection  qu'on  répète  volontiers  et 
qu'il  ne  faut  point  laisser  sans  réponse,  parce  qu'elle  est 
spécieuse  et  peut  faire  naître  des  doutes,  même  dans  un 
esprit  juste.  «Gardez -vous  de  toute  cette  science  »,  di- 
sent ceux  qu'une  paresse  invincible  domine ,  «  elle  ne 
peut  qu'affaiblir  vos  plaisirs.  Les  arts  ne  nous  procurent 
de  jouissances  qu'autant  que  leurs  effets  sont  imprévus. 
Ne  cherchez  donc  point  à  acquérir  des  connaissances 
dont  le  résullatdo  it  être  de  vous  rendre  propres  à  juger 
plutôt  qu'à  sentir  «.—  Tout  ce  raisonnement  est  fondé 
sur  cet  axiome  de  philosophie  :  «  Apercevoir,  c'est  sentir; 
comparer,  c'est  juger  ».  Mais  le  perfectionnement  de  l'or- 
gane auditif,  qui  résulte  de  l'observation  de  l'effet  des 
sons,  n'est  qu'un  moyen  de  percevoir  mieux  et  d'aug- 
menter par-là  la  somme  de  ses  jouissances.  Voilà  pour- 
quoi l'attention  est  nécessaire  à  l'homme  du  monde  tan- 
dis que  celui-ci  tirerait  peu  d'utilité  d'un  savoir  imparlait. 
Tout  le  monde  porte  des  jugemens  sur  la  musique;  les 
uns  par  un  instinct  aveugle  et  avec  précipitation,  les  au- 
tres par  un  goût  perfectionné  et  avec  réflexion.  Qui  ose- 

6 


62  RAPPOJITS  U£b  SONS.  SECT.   II. 

rait  dire  que  la  premrère  espèce  de  ju^eiuens  v«u(  mieux 
que  l'autre  ? 

Lorsque  je  traiterai  de  l'exprpssion  dramatique,  je 
ferai  voir  quelle  est  la  portion  de  la  mélodie  que  l'o- 
reille la  moins  exercée  juge  sainement  par  instinct. 


CHAPITRE  ^. 

De  rharmonie. 

Plusieqrs  sons  qui  se  font  entendre  ^inmltanépi^nt, 
et  dont  la  réunion  flatte  plus  pu  moin$  agréablement 
l'oreille,  prennent  le  noip  collectif  d'accords.  I>fi  sys- 
tème général  des  accords  et  les  lois  de  leur  sucpejjsion 
appartiennent  èi  une  branche  de  l'art  musical  qu'çp  dé- 
signe par  le  nom  d'harmonie. 

Harmonie  est  un  mot  générique  quand  il  signifie  la 
science  des  accords.  Mais  on  dit  aussi  V harmonie  d'un 
accord  pour  indiquer  l'effet  qu'il  produit  sur  l'oreille: 
autre  exemple  de  la  pauvreté  de  la  langue  musicale. 

Par  suite  de  l'éducation  des  peuples  modernes  et  ci- 
vilisés,  on  se  persuade  que  le  sentiment  de  l'harmonie 
est  si  naturel  à  l'homme  qu'il  a  dû  le  posséder  de  tout 
temps.  C'est  une  erreur ,  car  il  y  a  beaucoup  d'apparence 
que  les  peuples  de  l'antiquité  n'en  ont  point  eu  d'idée; 
les  Orientaux,  même  de  nos  jours,  n'y  sont  pas  plus 
initiés.  L'effet  de  notre  musique  en  accord  les  impor- 
tune. La  question  de  la  connaissance  que  les  Grecs  ou 
les  Romains  ont  pu  avoir  de  l'barjuonie  a  été  vivement 
controversée,  mais  inutilement,  personne  ne  pouvant 


rfTAP.   X.  HARMOIflK.  68 

alléguef  de  pi'éuves  en  faveur  de  son  opinion  à  cet 
égard  '.  L'^'qnivalent  du  mot  harmonie  ne  se  trouve  pas 
èi'iiplové  une  seule  fols  dans  les  traités  de  musique  grecs 
oU  latins  qui  sont  parvenus  jusqu'à  nous  '  ;  le  chant 
d'ilMe  ode  <lé  Pindare,  celui  d'un  hj'mne  à  îfértiésis  et 
c|itelques  SUtl-es  fragmens,  Sont  tout  ce  qui  s'est  tén- 
servé  de  l'ancienne  musique  grecque,  et  l'on  n'y  troiiVé 
aucunes  traces  d'accords;  enfin  la  fortue  des  l^tes  et 
des  cvlhares,  le  petit  rtbnihfe  de  leurs  èôMeS  qtll  rié 
pouvaierlt  être  liiôdifiées  comme  celles  dé  rtos  guitàféS, 
(PS  instrumens  n'ayant  point  de  manches  comme  lëà 
nôtres,  tout  cela,  dis-je,  donne  bèducbUp  dé  probabi- 
lité à  l'opinion  de  ceux  qui  ne  croietit  point  à  l'eiistencè 
de  l'harmonie  dans  la  musique  des  anciens.  Leurs  ad- 
versaires opposent  que  cette  harmoUie  est  dans  la  na- 
ture.—  A  la  bonne  heure;  mais  que  de  choses  sont 
dans  la  nature,  et  n'ont  été  remarquées  que  très  tard! 
L'harmonie  est  dans  la  nature,  et  cependant  l'oreille 
des  Turcs,  des  Arabes  et  des  Chinois  n'a  pu  s'y  accou- 
tumer jusqu'ici. 

Les  premièf-es  traces  de  l'harmonie  se  font  aperce- 
voir chez  les  écrivains  du  moyen-âgé  ,  vefs  le  neuvième 
siècle;  mais  elle  resta  dans  uh  état  de  barbarie  jusqUë 
vers  lé  milieu  du  quatorzième,  époque  où  quéîqtiêsi 
musiciens    italiens    eommencèrent   à   lui    donner    dêâ 

(i^  Je  croî'!  jifitif  tnrif  fju'il  ser.Ti't  possible  de  dcfnon^fét- p!i<- Î.1 
niitnre  mpme  de  l'échelle  ninsimle  des  Grecs  qu'ils  fi'ont  pu  ftiife 
ii.s.ige  de  rh.irmonie,  dans  le  sens  que  nous  y  attachons  ;  mais  c'est 
une  question  délicate  qui  ne  doit  point  trouver  place  ici. 

(2)  Ces  traités  ont  été  écrits  depuis  le  temps  d',\Iexandre  jusque 
vers  la  fin  de  l'empit-e  grée.  Lf-s  ])1(i5  importons  sodt  ceux  d'AfiS- 
toxène,  d'Ari«tide  Quintilien,  d'AljpiuJ^  dePlolémée  et  de  Boèe«. 


6^  RAPPORTS  DES  SOMS.  SECT.  II. 

formes  plus  douces.  Parmi  ces  musiciens ,  ceux  qui  se 
distinguèrent  le  plus  furent  François  Landino,  sur- 
nommé Francesco  Cieco ,  parce  qu'il  était  aveugle,  ou 
Francesco  d'egU  organi ,  à  cause  de  son  habileté  sur 
l'orgue,  et  Jacques  de  Bologne.  L'harmonie  se  perfec- 
tionna ensuite  entre  les  mains  de  deux  musiciens  fran-» 
çais ,  Guillaume  Dufay  et  Gilles  Binchois,  et  d'un 
Anglais,  Jean  Dunstaple.  Tous  trois  vécurent  dans  la 
première  moitié  du  quinzième  siècle.  Leui's  élèves 
ajoutèrent  à  leurs  découvertes,  et  depuis  lors  l'har- 
monie s'est  continuellement  enrichie  d'effets  nouveaux. 
L'habitude  d'entendre  de  l'harmonie  dès  notre  en- 
fance nous  en  fait  un  besoin  dans  la  musique.  Il  semble 
d'ailleurs  que  rien  n'est  plus  naturel,  et,  dans  l'état  de 
civilisation  musicale  où  nous  sommes  parvenus ,  il  est 
rare  que  deux  voix  chantent  ensemble  sans  chercher  à 
s'accorder  y  c'est-à-dire  à  faire  des  accords.  Chaque 
voix  ne  pouvant  produire  qu'un  son  à  la  fois  ,  deux  voix 
qui  s'unissent  ne  peuvent  donc  faire  que  des  accords  de 
deux  sons;  ceux-là  sont  les  plus  simples  possibles.  On 
les  désigne  par  le  nom  iï intervalles ,  parce  qu'il  y  a  né- 
cessairement une  distance  quelconque  d'un  son  à  un 
autre  ;  les  noms  de  ces  intervalles  expriment  les  dis- 
tances qui  se  trouvent  entre  les  deux  sons.  Ainsi  l'on 
appelle  seconde  l'intervalle  compris  entre  deux  sons 
voisins,  tierce  celui  qui  se  trouve  entre  deux  sons  sé- 
parés par  un  autre ,  quarte  celui  qui  renferme  quatre 
sons,  et  ainsi  de  suite  à  mesure  que  la  distance  s'aug- 
mente d'un  son,  quinte,  sixte,  septième,  octave  et 
neuvième.  Les  intervalles  qui  dépassent  la  neuvième 
conservent  les  noms  de  tierce,  quarte,  quinte,  etc., 
parce  que  ce  ne  sont  que  des  doubles  ou  triples  tierces, 


CHAP.   X,  HARMONIE.  63 

quartes,  quintes,  etc.,  et  que  leur  effet  est  analogue  à 
celui  des  intervalles  non  redoublés. 

Si  l'on  n'a  point  oublié  que  divers  sons,  tels  que 
ré  b,  ré  ^  et  ;ï?  j^  conservent  la  dénomination  commune 
de  ré  par  l'idée  de  réalité  qu'on  attache  au  nom  des 
notes,  on  concevra  sans  peine  que  chaque  intervalle  est 
susceptible  de  se  présenter  sous  diftérens  aspects;  car  si 
ré  forme  toujours  une  seconde  à  l'égard  A'ut,  ce  ré  ou 
cet  ut  pourront  être  dans  l'état  de  bémol,  de  bécane 
ou  de  dièse,  et  des  lors  la  seconde  sera  plus  ou  moins 
étendue,  plus  ou  moins  resserrée.  Un  intervalle  réduit  à 
sa  plus  petite  dimension ,  et  dans  lequel  on  ne  trouve 
que  les  signes  d'un  ton  et  d'un  mode  quelconque ,  se  dé-, 
signe  par  l'épithète  de  mineur;  le  même  intervalle  , 
dans  sa  plus  grande  extension  relative  au  ton ,  est  ma~ 
jeiir.  Par  exemple,  l'intervalle  d'«/  1|  à  /v  ]?  est  une 
seconde  mineure  ;  celui  à! ut  tl  à  re  tj  est  une  seconde 
majeure.  Mais  si ,  par  une  altération  momentanée  qui 
n'est  conforme  à  aucun  ton,  on  construit  des  intervalles 
plus  petits  que  les  mineurs  ou  plus  grands  que  les  ma- 
jeurs, on  désigne  les  premiers  par  le  nom  de  diminués , 
et  les  autres  par  celui  à' augmentés.  Par  exemple,  l'in- 
tervalle à'ut  ^  à  yêz  tj  est  une  quarte  diminuée  qu'on 
ne  peut  considérer  que  comme  une  altération  momen- 
lanée;  car  il  n'est  aucun  ton  où  ut  soit  diésé,  tandis 
que /a  ne  l'est  pas;  par  le  même  motif,  l'intervalle 
à'ut  bi  a  sol  f}  est  une  quinte  augmentée.  Les  divers  de- 
grés d'extension  des  intervalles  sont  donc  de  quatre  es- 
pèces :  diminué ,  mineur,  majeur,  augmenté. 

On  se  servait  autrefois  des  dénominations  àe  Juste  et 
Ae/aux  pour  les  variétés  d'extension  de  la  quarte  et  de 
la  quinte  ;  mais  ce  qui  est  faux  ne  pouvant  trouver  place 

6. 


66  KAPPORTS  BtS  SONS.  SECT.    II. 

en  inu3iqué ,  on  a  renoncé  à  ces  mauvaises  e)L|)ression8< 

Tous  les  intervalles  an  accords  de  deuï  sons  ne  pro- 
duisent pas  le  même  effet  sur  l'oreille  :  les  uns  lui 
plaisent  par  lenr  harmonie,  les  autres  l'affectent  moins 
agréablement  et  ne  peuvent  la  satisfaire  que  par  leur 
enchaînement  avec  les  premières.  On  donne  le  nom  de 
connoiinances  aux  intervalles  agréables,  et  celui  de  dii" 
^O'iances  aux  autres. 

Les  intervalles  consonnans  sont  la  tierce  ,  la  quarte  ^ 
la  quinte  y  la  sixte  et  l'octave.  Lès  dissouans  sont  la 
seconde ,  la  septième  et  la  neuiièlne. 

Les  intervalles  consonnans  et  dissouans  ont  la  pro- 
priété de  se  renverser  ;  c'est-si-dire  que  deux  notes 
quelconques  peuvent  être  à  l'égard  l'une  de  l'autre  dans 
une  |>o»ition  inférieure  ou  supérieure.  Par  exemple,  uL 
étant  la  noie  inférieure  et  mi  la  supérieure,  il  en  résulte 
ime  tierce  )  mais  que  rhi  soit  la  note  inférieure  et  ut  la 
supérieure,  elles  formeront  une  sixte. 

Le  renversement  des  consonnances  produit  des  con- 
sonnances;  celui  des  dissonantes  engentlre  des  disso- 
nances. Ainsi  la  tierce  renversée  produit  la  sixte  ^  là 
(piarte  produit  la  quinte,  celle-ci  produit  la  quarte,  la 
bixte  produit  la  tierce,  la  seconde  produit  la  septième, 
et  celle-ci  la  seconde. 

On  a  disputé  long-temps  pour  savoir  si  la  quarte  est 
vme  consonnance  ou  une  dissonance;  deux  gros  livres 
ont  même  été  écrits  sur  cette  question  ;  on  se  serait  épaiv 
gné  beaucoup  de  mauvais  raisonnemens  si  l'on  eût  pensé 
à  la  loi  du  renversement.  La  quarte  est  une  consonnance 
d'une  qualité  inférieure  aux  autres  ;  mais  elle  est  une 
consonnance,  car  elle  provient  d'une  autre  consonnance 
(la  qninte^  dont  elle  est  le  renversement. 


(HAP.    X.  Il\r.M()"*IE.  67 

Le  renv«rseinenl  csl  une  source  de  variélé  poitr  l'har- 
monie, car  il  sulfil  de  déplacer  la  position  des  notes 
pour  obtenir  des  effets  différons. 

J'ai  dit  que  les  intervalles  consomians  sont  agréables 
par  eux-mêmes,  et  que  les  antres  ne  le  deviennent  que 
par  leur  combinaison  avec  eu*.  Il  résulte  de  cette  dif- 
férence que  la  succession  des  consnnnances  est  libre  et 
tjuon  peut  en  faire  des  suites  aussi  étendues  qu'on  le 
veut;  deux  dissonances^  au  contraire ^  ne  peuvent  se 
succéder,  et  dans  la  résolution  d'une  dissonance  sur  une 
ronsoanance  ,  la  note  dissonante  doit  descendre  d'un 
(lesré.  Cette  rtgle,  qu'on  ne  viole  pas  sans  blesser  une 
oreille  délicate,  n'est  cependant  pas  toujours  respectée 
par  Rossini  ni  par  les  compositeurs  de  son  école  ;  mais 
si  le  maître  de  Pésaro  fait  pardonner  ses  négligences  eu 
faveur  des  qualités  de  son  génie,  il  n'en  reste  pas  moins 
certain  que  la  règle  est  fondée  sur  des  rapports  irrécu- 
sables de  convenance  ou  de  répulsion  des  sons ,  rapports 
qu'où  ne  viole  pas  en  vain. 

On  conçoit  que  si  l'on  réunit  deux  ou  trois  conson- 
nances,  telles  que  la  tierce,  la  quinte  et  l'octave  dans 
un  seul  accord,  cet  accord  sera  consonnant ;  mais  si  à 
jilusieurs  consonnances  on  ajoute  ime  dissonance,  l'ac- 
cord deviendra  dissonant.  Dans  la  plupart  des  accords 
dissonans  il  n'y  a  qu'une  dissonance  ;  quelques-uns  ce- 
pendant en  contiennent  deux. 

Si  l'on  était  obligé  d'énumérer  tous  les  intervalles  qui 
entrent  dans  la  composition  d'un  accord  de  quatre  ou  de 
cinq  sons,  la  nomenclature  de  ces  accords  serait  embar- 
rassante dans  le  langage  de  la  science  et  fatigante  pour 
la  mémoire  ;  mais  il  n'en  est  point  ainsi.  L'accord  qui  se 
forme  de  la  réunion  de  la  tierce,  de  la  quinte  et  de  l'oc- 


fis  RAPPORTS  DKS  SONS.  SECT.  II. 

tave  s'appelle  par  excellence  V accord  parfait ,  parce  que 
c'est  celui  qui  satisfait  le  plus  l'oreille ,  le  seul  qui  puisse 
servir  de  conclusion  à  toute  espèce  de  période  harmo- 
nique ,  et  qui  donne  l'idée  du  repos.  Tous  les  autres  se 
désignent  par  l'intervalle  le  plus  caractéristique  de  leur 
composition.  Ainsi  un  accord  formé  de  la  tierce,  de  la 
sixte  et  de  l'octave,  s'appelle «ccor^  </e  sixle,  parce  que 
cet  intervalle  établit  la  différence  qui  existe  entre  cet  ac^- 
cord  et  le  parfait  ;  on  donne  le  nom  à' accord  de  se- 
conde à  celui  qui  est  composé  de  seconde,  quarte  et 
sixte,  parce  que  la  seconde  est  la  dissonance  dont  la  ré-» 
solution  descendante  est  obligée  ;  on  appelle  accord  de 
septième  celui  qui  est  composé  de  tierce,  quinte  et 
septième,  etc. 

C'est  surtout  dans  les  accords  composés  de  trois  ou  de 
quatre  notes  que  la  variété  résultante  du  renversement 
se  fait  apercevoir,  car  l'harmonie  de  ces  accords  peut 
s'offrir  à  l'oreille  sous  autant  d'aspects  différens  qu'il  j  a 
de  notes  dans  leur  composition.  Par  exemple,  l'accord 
parfait  est  composé  de  trois  notes  qu'on  peut  placer  à 
volonté  dans  la  position  inférieure.  Dans  la  première 
disposition  ,  l'accord  est  composé  de  tierce  et  de  quinte: 
c'est  V  accord  parfait  ;  dans  la  seconde,  l'accord  ren- 
ferme la  tierce  et  la  sixte  :  c  esXV  accord  de  sixte  ;  enfin 
dans  la  troisième,  les  intenalles  sont  la  quarte  et  la 
sixte  :  c'est  Y  accord  de  quarte  et  sixte.  La  même  opéra- 
tion peut  avoir  lieu  pour  tous  les  accords,  et  donne  lieu 
à  des  groupes  de  formes  et  de  dénominations  différentes 
qu'il  est  inutile  d'énumérer  ici  puisque  ce  livre  n'est 
point  un  traité  d'harmonie.  Il  suffît  qu'on  se  fasse  une 
idée  nette  de  l'opération. 

Il  y  a  des  accords  dissonans   qui  ne  blessent   point 


CHAP.    \.  UARMOME,  ÇO 

l'oreille  lorsqu'ils  se  font  entendre  immédiatemenl  et 
sans  aucune  préparation  ;  ceux-là  s'appellent  accords 
dissonans  naturels  ;  il  en  est  d'autres  qui  feraient  un 
effet  désafjrcable  si  la  note  dissonante  ne  se  faisait  d'a- 
bord entendre  dans  l'état  de  consonnance.  Cette  oblij:;a- 
tion  se  nomme  préparation  de  la  dissonance ,  et  celte 
espèce  d'accords  se  désigne  sous  le  nom  à\tccords  par 
prolongation.  Dans  d'autres  accords  on  substitue  une 
note  à  une  autre  qui  entre  plus  naturellement  dans  leur 
composition.  Dans  cet  état,  ces  accords  s'appellent  ac- 
cord par  substitution.  Les  accords  par  altération  sont 
ceux  dans  lesquels  une  ou  plusieurs  notes  sont  momenta- 
nément altérées  par  un  dièse,  un  bémol  ou  un  bécarre 
accidentels.  Enfin,  il  est  des  harmonies  dans  lesquelles 
la  prolongation  ,  la  substitution  et  l'altération  se  com- 
binent deux  à  deux  ou  toutes  ensemble.  Si  l'on  consi- 
dère en  outre  que  toutes  ces  modifications  se  reproduisent 
dans  tous  les  renversemens ,  on  pourra  se  former  une  idée 
de  la  prodigieuse  variété  de  formes  dont  l'harmonie  est 
susceptible.  Cette  variété  s'augmente  encore  par  la  fan- 
taisie de  certains  compositeurs  qui,  quelquefois,  anti- 
cipent dans  leurs  accords  sur  l'harmonie  des  accords 
suivans  ;  ce  genre  de  modifications ,  bien  qu'assez  incor- 
rect dans  une  foule  de  circonstances,  n'est  pas  dépourvu 
d'effet. 

Dans  tous  les  accords  dont  il  vient  d'être  parlé  les 
sons  ont  entre  eux  un  rapport  plus  ou  moins  direct, 
plus  ou  moins  logique  ;  il  est  des  cas  où  ce  rapport 
disparaît  presque  entièrement.  Dans  ces  sortes  d'anoma- 
lies harmoniques ,  une  voix  ou  un  instrument  grave ,  du 
médium  ou  de  l'aigu,  soutiennent  un  son  pendant  un 
certain  nombre  de  mesures.  Cette  tenue  se  désigne  sous 


fO  KAPPOKTS  t)ES  SOÎTS.  iECt.   TI. 

le  notn  âe pédalé,  parée  qne  j  dans  l'origine  de  son  in- 
vention, elle  ne  fut  employée  que  dans  la  musique  d'é^ 
glise  par  l'organiste,  qui  êe  servait  pour  cela  du  claviéf 
des  pédales  de  son  iostruitietiti  Sur  la  pédale  une  har* 
monie  variée  se  fait  entendre  et  produit  souvent  Un  très 
bon  effet  y  quoique,  chose  singulière,  le  son  de  cette  pé^ 
dale  ne  soit  en  rapport  avec  elle  que  de  loin  en  loin  :  il 
suffit  qtie  le  rapport  se  rétablisse  d'une  manière  cortre- 
nable  à  la  conclusion. 

Lorsque  l'instrumentation  n'avait  point  eneore  acquis 
d'importance  dans  la  musique  d'église,  l'orgué  étftit 
presque  le  seul  instnmient  dont  on  faisait  usage  pour  ce 
genre  de  musique.  Son  emploi  se  borna  même  pendant 
long-temps  à  soutenir  les  voix  dans  l'ordre  où  leur  par- 
tie élait  écrite ,  sans  y  mêler  rien  d'étranger.  Lorsque  la 
basse  chantante  devait  garder  le  silence ,  là  basse  de 
l'orgue  se  taisait  aussi,  et  la  maiii  gauche  de  l'artiste 
était  alors  occupée  à  exécuter  la  partie  de  ténoré  6li  de 
contralto.  On  attribue  communément  à  Louis  Viadana  , 
maître  de  chapelle  de  la  cathédrale  de  Mantoue,  l'inveil- 
tion  d'nne  basse  indépendante  dti  chant,  propre  à  être 
exécutée  sur  l'orgue  ou  tout  autre  instrument  à  clavier, 
et  qui ,  n'étant  point  interrompue  comme  l'ancienne 
basse  j  reçut  le  nom  de  basse  continue.  Plusieurs  musi- 
ciens semblent  avoir  eu  l'idée  de  cette  basse  danè  le 
mênié  temps;  mais  Viadana  en  à  donné  le  premier  des 
règles  précises  dans  une  instruction  publiée  en  1606,  à 
la  suite  d'un  recueil  dé  ses  compositions.  Il  exprima, 
par  des  chiffres  placés  au-dessus  des  notes  de  la  basse, 
lés  accords  des  difféfentes  voix,  et  eefte  manière  abrégée 
lui  permit  de  ne  point  écrire  sur  la  partie  destinée  à 
rorgamtt«ce  qui  appartenait  aux  voix.  Cetfe  partie  3Ur- 


montée  (de  chiffrer  pritien  Italie  le  nom  de  jiartirftefitOj 
et  en  France  celui  de  bu^se  chiffrée, 

(Si  l'on  écrivait  un  chiUVe  pour  chaque  intervalle  qui 
çfltfe  (J^ans  la  composition  d'un  accord  ,  il  en  résull^ralt 
ifpç  confusion  plus  fréquente  pour  i'guil  de  l'organiste 
qi^fi  la  lecture  de  tontes  lep  parties  réunies  en  notation 
ordinaire,  et  le  but  serait  manqué.  Au  lieu  de  (sel*,  (»a 
n'indique  que  l'intiervi^Ue  paractéristiqnp.  Poiir  l'accord 
parfait,  parexemplp,  op  n'écrit  qae  3,  qni  indique  la 
tierce.  Si  cette  tierce  devient  accidentellement  njsjiiinre 
ou  mineure  par  l'effet  d'un  ^  ou  d'un  fl  ,  on  place  ce*  li- 
gnes à  côté  et  en  ayant  du  chiffre  j  si  eile  devient  \\\\- 
neure  par  l'effet  d'un  [>  ou  d'un  \ ,  op  ys/e  du  lajèu^p  pro- 
cédé. Lorsque  deux  intervalles  sofit  par^Gtéristjqujes  d'un 
accord,  on  les  joint  ensemble  :  par  exemple,  Vaccprd  de 
quinte  et  sijpie  s'exprime  par  ^.  Les  intervalles  d'"'J"'iés 
se  marquent  pa|.'  un  trait  diagonal  qui  b^rr^  l^  (cluifre 
de  cette  manière  ^  ;  quant  aux  intervalles  augmentés,  ils 
s'expriment  en  plaçant  à  côté  du  chiffre  le  J^,  le  t»  ou  h;  t] 
qui  les  modilie.  Lorsque  la  note  sensible  est  caractévisli- 
que  d'un  inJLeryalie,  ou  l'ejiprinie  parée  signe  '  . 

Chaque  époque,  chaque  écoje ,  ont  eu  des  systijues 
différens  pour  chiffrer  les  basses.  Ces  différences  Sj^ut 
de  peu  d'iinportance  :  il  suffit  que  l'on  s'entende  et  que 
l'organiste  ou  l'accopipagnateur  soit  instruit  des  diverses 
méthodes. 

Dan^  l'état  actuel  de  la  niusique  l'orgue  ne  tient  plus 
qu'un  rang  secondaire  au  milieu  de  la  masse  d'instru- 
mens  dont  il  estenvirpnué,  en  §orlp  que  1^  basse  phiffrée 
ou  continuiç  a  perd.u  une  partie  de  son  inlérêt;  mais  il 
n'egt  pas  moins  nécessaire  qu'elle  soit  pultivée,  soit  pour 
développci'  i\w^  les  jeune:?  ar(istt;s  le  senlimeni  de  riiar!» 


73  RAPPORTS  DES  SOSS.  «ECT.   lî. 

uionie  par  ce  genre  d'étude,  soit  pour  conserver  ta  tra- 
dition des  belles  compositions  de  l'ancienne  école.  Au- 
trefois on  ne  disait  point  en  France  :  il  faut  étudier 
V  harmonie,  radUs  il  faut  apprendre  luisisse  continue.  Les 
Allemands  ont  conservé  l'équivalent  de  cette  expression 
dans  leur  General-Bass,  et  les  Anglais  dans  leur  tho" 
rough-bass. 

L'histoire  de  l'harmonie  est  l'une  des  parties  les  plus 
intéressantes  de  l'histoire  générale  de  la  musique.  Non- 
seulement  elle  se  compose  d'une  succession  non  inter- 
rompue de  découvertes  dans  les  propriétés  agrégatives 
des  sons,  découvertes  qui  ont  dû  leur  origine  au  besoin 
de  nouveauté,  à  l'audace  de  quelques  musiciens  ,  au  per- 
fectionnement de  la  musique  instrumentale,  et  sans 
doute  aussi  au  hasard  ;  mais  il  est  une  section  de  cette 
histoire  qui  n'est  pas  moins  digne  d'intérêt  :  c'est  celle 
des  efforts  qu'on  a  faits  pour  rattacher  à  un  système  com- 
plet et  rationnel  tous  les  faits  épars  offerts  par  la  pra- 
tique à  l'avide  curiosité  des  théoriciens.  Et  remarquez 
que  l'histoire  de  la  théorie  est  nécessairement  dépen- 
dante de  celle  de  la  pratique,  car  à  mesure  que  le  génie 
des  compositeurs  hasardait  de  nouvelles  combinaisons, 
il  devenait  plus  difficile  de  les  rattacher  au  système  gé- 
néral et  de  reconnaître  leur  origine.  Les  nombreuses 
modifications  que  subissaient  les  accords  dénaturaient 
si  bien  leur  forme  primitive  qu'on  ne  doit  pas  être 
élonné  s'il  a  été  commis  beaucoup  d'erreurs  dans  les  di- 
vers classemens  qui  en  ont  été  faits. 

Jusque  vers  la  fin  du  seizième  siècle  on  ne  fit  usage 
que  d'accords  consonnans  et  de  quelques  prolongations 
qui  produisaient  des  dissonances  préparées  :  avec  de 
tels  élémeus  les  formes  harmoniques  étaient  bornées  de 


CUAP.   X.  UARMOMIB.  7S 

telle  sorte  qii'oi»  ne  songea  point  à  les  réunir  en  corps 
de  science,  et  qu'on  n'imagina  même  pas  qu'il  y  eût  une 
liaison  systématique  entre  les  accords  qu'on  employait. 
On  conàidérait  les  intervalles  deux  à  deux,  et  l'art  de 
les  employer  selon  de  certaines  conditions  composait 
toute  la  doctrine  des  écoles.  Vers  l'an  1590,  un  Véni- 
tien, nommé  Claude  Monteverde,  se  servit  pour  la  pre- 
mière fois  des  accords  dissonans  naturels  et  des  substi- 
tutions; dès  lors  le  domaine  de  l'harmonie  s'étendit 
beaucoup  ,  et  la  science  qui  en  est  le  résultat  attira  les 
regards  des  maîtres.  Ce  fut  environ  quinze  ans  après  les 
heureux  essais  de  Monteverde  que  Viadana  et  quelques 
Allemands,  qui  lui  disputent  son  invention,  imaginèrent 
de  représenter  l'harmonie  par  des  chiffres,  et  pour  cela 
furent  obligés  de  considérer  les  accords  isolément;  alors 
ce  nom  A'accord  fut  introduit  dans  le  vocabulaire  de  la 
musique,  et  l'harmonie,  ou  la  basse  continue,  comme 
on  disait,  devint  une  branche  de  la  science  que  les  mu- 
siciens devaient  étudier.  Pendant  près  d'un  siècle  les 
choses  restèrent  en  cet  état,  quoique  de  nombreux  ou- 
vrages élémentaires  eussent  été  publiés  dans  cet  inter- 
valle pour  aplanir  les  difficultés  de  cette  science  nou- 
velle. 

Une  expérience  de  physique,  indiquée  par  un  moine 
nommé  le  P.  Mersenne,  en  1636,  dans  un  gros  livre 
rempli  de  choses  curieuses  et  d'inutilités,  qui  a  pour 
{.'lire  V Harmonie  universelle,  expérience  répétée  par  le 
célèbre  mathématicien  Vallis,  et  analysée  par  Sauveur, 
de  l'Académie  des  sciences,  fournit  plus  tard  à  Pvameau, 
habile  musicien  français,  l'origine  d'un  système  d'har- 
monie où  tous  les  accords  furent  ramenés  à  un  seul 

7 


74  RAPPORTS  DES  SONS.  8ECT.  II. 

principe.  Par  cette  expérience  on  avait  remarqué  qu'en 
faisant  résonner  une  coi  de  on  entendait,  outre  le  son 
principal  résultant  de  la  totalité  de  la  corde,  deux  autres 
sons  plus  faibles,  dont  l'un  était  à  la  douzième  et  l'autre  à 
la  dix-septième  du  premier, c'est-à-dire  qui  sonnaient 
l'octave  de  la  quinte  et  la  double  octave  de  la  tierce, 
d'où  résulte  la  sensation  de  {'accord  parfait  majeur, 
liameau,  s'emparant  de  cette  expérience,  en  fît  la  base 
d'un  système  dont  il  développa  le  mécanisme  dans  un 
Traité  de  l'harmonie  qu'il  publia  en  1722.  Ce  système, 
connu  sous  le  nom  de  système  de  la  basse  fondamen- 
tale,  eut  une  vogue  prodigieuse  en  France,  non-seule- 
ment parmi  les  musiciens,  mais  aussi  parmi  les  gens  du 
inonde.  Du  moment  où  Rameau  eut  adopté  l'idée  de 
faire  ressortir  toute  l'harmonie  de  certains  phénomènes 
physiques ,  il  fut  obligé  de  recourir  à  des  inductions 
forcées  j  car  toute  harmonie  n'est  point  renfermée  dans 
l'accord  pariait  majeur.  L'accord  parfait  mineur  était 
indispensable  à  son  système;  il  imagina  je  ne  sais  quel 
frémissement  du  corps  sonore  qui,  selon  lui,  faisait  en- 
tendre cet  accord  à  une  oreille  attentive,  bien  que  d'une 
manière  moins  distincte  que  l'accord  parfait  majeur. 
Au  moyen  de  celte  disposition,  il  n'avait  plus  qu'à  ajou-» 
ter  ou  retrancher  des  sons  à  la  tierce  supé»ieure  ou  infé- 
rieure de  ces  deux  accords  parfaits  pour  trou\er  une 
grande  ])artie  des  accords  en  usage  de  son  temps,  et  de 
cette  manière  il  obtint  un  système  complet  où  tous  les 
accords  se  liaient  entre  eux.  Bien  que  ce  système  repo- 
sât sur  des  bases  très  fragiles,  il  avait  l'avantage  d  être 
le  premier  qui  présentât  de  l'ordre  dans  les  phénomènes 
harmoniques.  D'ailleurs  Pvameau  avait  le  mérite  d'être 


CHAP.  X.  HAKNOinB.  75 

aussi  le  premier  qui  eût  aperça  le  mécanisme  du  renver- 
sement des  accords;  à  ce  litre,  il  méritait  d'être  placé 
au  rang  des  fondateurs  de  la  science  harmonique. 

Par  la  génération  factice  qu'il  avait  donnée  aux  ac-r 
cords,  il  avait  fait  disparaître  les  affinités  de  successions 
qu'ils  tirent  de  la  tonalité,  et  il  fut  obligé  de  remplacer 
les  règles  de  ces  affinités  par  celles  d'une  basse  fonda- 
mentale qu'il  formait  des  sons  graves  des  accords  primi- 
tifb,  règles  de  fantaisie  qui  ne  pouvaient  avoir  qu'une 
application  forcée  dans  la  pratique. 

Dans  le  temps  où  Rameau  produisait  son  système  en 
France,  Tartini ,  célèbre  violoniste  italien,  en  proposait 
un  autre  qui  était  aussi  fondé  sur  une  expérience  de 
résonnance.  Par  cette  expérience  ,  deux  sons  aigus 
vibrant  à  la  tierce  en  faisaient  résonner  un  troisième 
au  grave,  également  à  la  tierce  du  son  inférieur,  ce  qui 
donnait  encore  l'accord  parfait.  Là-dessus,  Tartini 
avait  établi  une  théorie  obscure  que  J.-J.  Rousseau 
vanta  au  détriment  du  système  de  Rameau,  quoiqu'il  ne 
l'entendit  pas,  mais  qui  n'eut  jamais  de  succès.  Les 
systèmes  d'harmonie  étaient  devenus  une  sorte  de  mode  ; 
chacun  voulut  avoir  le  sien  et  trouva  des  gens  qui  le  prô- 
nèrent. La  France  vit  éclore ,  presque  dans  le  même 
temps,  ceux  de  Raillère,  de  Jamard,  de  l'abbé  Rous- 
sier,et  beaucoup  d'autres  qui  sont  maintenant  ignorés 
et  qui  méritent  de  l'être. 

Marpurg  avait  tenté  d'introduire  en  Allemagne  le 
système  de  Rameau,  mais  sans  succès.  Kirnberger,  cé- 
lèbre compositeur  et  théoricien  profond,  venait  de  dé- 
couvrir la  théorie  des  prolongations  des  sons,  qui 
explique  d'une  manière  satisfaisante  et  naturelle  des 
harmonies  dont  aucune  autre   théorie  ne  peut  donner 


76  RAPPORTS  DES  SOys.  ÊïCT.  II. 

les  lois.  Plus  tard,  M.  Catel  reproduisit  en  France  cette 
même  théorie  d'une  manière  plus  simple  et  plus  claire, 
dans  le  Traité  d'harmonie  qu'il  composa  pour  le  Con- 
servatoire de  Musique,  et  s'il  m'est  permis  de  parler 
de  mes  travaux,  je  dirai  que  je  l'ai  complétée  par  l'ex- 
plication du  mécanisme  de  la  substitution  et  de  la  com- 
binaison de  cette  même  substitution  avec  les  prolon- 
gations et  les  altérations.  De  cette  théorie  sont  nées 
des  harmonies  d'un  ordre  nouveau  dont  l'art  s'est  enri- 
chi ;  ce  n'est  point  ici  le  lieu  d'entrer  dans  des  explica- 
tions sur  ce  qui  concerne  cet  objet. 


CHAPITRE  XI. 

De  l'acoustique. 

"V acoustique  est  une  science  dont  l'objet  est  la  théorie 
du  son.  Elle  diffère  de  la  musique  en  ce  qu'elle  n'a  point 
de  rapport  aux  lois  de  succession  des  sons,  d'où  résulte 
la  mélodie^  ni  à  celles  de  leur  simultanéité,  qui  règlent 
l'harmonie.  L'examen  des  phénomènes  qui  se  manifestent 
dans  la  résonnance  des  corps  sonores  de  diverses  natures 
et  de  dimensions  différentes,  et  les  résultats  de  ces  phé- 
nomènessur  l'ouïe,  composent  le  domaine  de  l'acoustique. 
Ce  mot  est  dérivé  d'un  verbe  grec  qui  signifie  entendre. 

La  percussion,  le  frottement,  ou  d'autres  modes  de 
résonnance  étant  imprimés  aux  corps  sonores,  produisent 
dans  l'air  qui  les  environne  certains  mouvemens  oscilla- 
toires qu'on  nomme  vibrations.  Lorsque  ces  vibrations 
sont  d'une  lenteur  excessive,  le  son  n'est  point  apprécia- 
ble par  rorcille;  il  ne  produit  sur  cet  organe  que  l'effet 


CHAP.  XI.  ACOUSTIQUE.  77 

du  bruit;  si  ces  vibrations  acquièrent  une  certaine  ra- 
pidité, comme  64  dans  une  seconde,  on  entend  un  son 
très  grave.  L'intonation  s'élève  à  mesure  que  le  nombre 
des  vibrations  devient  plus  considérable  dans  un  temps 
donné.  Au-delà  de  certaines  limites  de  rapidité,  l'oreille 
cesse  d'entendre  le  son. 

On  a  cru  long -temps  que  l'air  possédait  seul  le  degré 
d'élasticité  nécessaire  pour  transmettre  le  son  à  l'oreille; 
on  sait  aujourd'hui  que  les  liquides  et  certains  corps 
solides  jouissent  du  même  avantage;  ils  propagent  même 
le  son  avec  plus  de  force  et  de  rapidité  que  l'air. 

On  trouve  dans  tous  les  traités  de  physique  ce  prin- 
cipe,  que  l'air  mis  en  vibration  est  le  véritable  corps 
sonore,  et  l'on  y  donne  comme  une  démonstration  de  ce 
principe  le  rcsirltat  de  cette  expérience.  Si  l'on  place  sous 
le  récipient  d'une  machine  pneumatique  un  timbre  ac- 
compagné d'un  petit  appareil  mécanique  qui  le  frappe, 
l'oreille  entend  le  son  tant  que  le  récipient  est  rempli 
d'air;  mais  à  mesure  qu'on  retire  cet  air  au  moyen  de 
la  pompe  aspirante,  le  son  s'affaiblit,  et  il  finit  par  s'a- 
néantir dès  que  l'air  est  entièrement  retiré,  quoique  le 
mouvement  de  percussion  continue  sur  le  timbre.  Cette? 
expérience  est  moins  concluante  qu'elle  ne  le  paraîl 
d'abord  ;  car  outre  que  le  son  peut  être  transmis  à  l'oreilK- 
par  d'autres  corps  élastiques  que  l'air,  on  ne  pourrai! 
rendre  raison  de  la  différence  des  timbres,  c'est-à-dire 
des  diverses  qualités  de  son,  si  les  corps  sonores  ne  pos- 
sédaient par  eux-mêmes  des  qualités  sonores  qui  se  mo- 
difient par  le  système  de  production  du  son.  Sous  ce  rap- 
port, comme  sous  beaucoup  d'autres,  la  science  de 
l'acoustique  est  encore  bien  imparfaite. 

Une  corde  de  métal,  de  soie  ou  debovau,  fixée  d'une 


'^^  RAPPPIITS  PfiS  SONS.  f^^Jt  lit 

manière  solide  par  un  bout  et  tendue  de  l'autre  par  iip 
poids  ou  par  une  cheville;  une  lame  métallique,  une 
plaque  d'une  forme  quelconque,  en  bois,  en  métal  ou 
en  cristal,  un  tube  dans  lequel  on  introduit  de  l'air,  une 
cloche,  etc.,  sont  des  corps  sonores  dont  les  vibrations 
font  entendre  des  sons  de  qualités  différentes.  Depuis 
environ  trente  ans,  l'acoustique  s'est  enrichie  d'une 
multitude  d'observations  sur  les  phénomènes  produits 
par  les  résonnances  de  ces  corps;  ces  observations  n'ont 
pas  été  inutiles  au  perfectionnement  de  certains  instru- 
niens  et  ont  donné  lieu  à  l'invention  de  quelques  autres, 
Il  y  a  lieu  de  croire  qu'on  obtiendra  plus  tard  des  ré- 
sultats plus  salisiaisans  encore  des  recherches  auxquelles 
se  livrent  quelques  savans  acousticiens. 

L'i'uperfection  des  appareils  d'expérimentation  et  le 
défaut  de  soin  et  de  précision  dans  les  expériences  ont 
introduit  daps  la  science  de  l'acoustique  bien  des  erreurs, 
d'autant  plus  graves  que  les  mathématiciens,  s'emparant 
de  faits  mal  constatés  pour  les  soumettre  au  calcul  et  les 
considérant  comme  des  vérités  démontrées,  en  ont  tiré 
des  conséquences  qui  paraissent  être  en  opposition  di- 
recte avec  d'autres  faits  démontrés  dans  la  pratique  de 
la  musique.  En  voici  un  exemple. 

.Supposant  d'une  manière  absolue  qu'un  corps  sonçr^^ 
dont  les  dimensions  sont  exactement  de  moitié  plus  pe- 
tites que  celles  d'un  autre  corps,  lait  dans  un  temps 
donné  un  nombre  de  vibrations  double  du  plus  grand, 
et  qu'il  fait  entendre  l'octave  juste  de  celui-ci,  ils  ont 
pris  pour  expression  du  corps  sonore  le  pljis  grand  le 
nombre  1,  et  pour  celle  du  plus  petit  le  nombre  2.  Ad- 
mettant également  que  la  quinte  juste  du  son  du  corps 
sonore  le  plus  grand  serait  fourni  par  un  aqlre  corps 


(,flAp,  XI.  ,4ÇOUSTIQWR.  7^ 

qui  aurait  les  deux  tiers  des  dimensions  de  celui-là,  U 
(juarte  par  un  corps  qui  en  sprait  les  trois  quarts,  la 
tierce  Tnajcure  les  quatre  cinquiènney^  la  tierce  mineure 
les  cinq  sixièmes,  la  sixte  mineure  les  cinq  huitièmes,  la 
sixte  majeure  les  trois  cinquièmes,  et  ainsi  des  autres 
intervalles,  ils  ont  exprimé  les  rapports  de  tous  les  in- 
tervalles de  la  gamme  par  les  proportions  suivantes: 

Le  ton  majeur  (ut^  ré)  comme  9  est  à  8;  le  ton  mi- 
neur [ré,  mi)  comme  10  est  à  9  ;  la  tierce  majeure  Çut, 
rni)  confine  5  çst  à  4;  la  tierce  majeure  [ré,  fa)  comme 
6  est  à  5;  la  quarte  juste  {ut,  fa)  comme  4  est  à  3; 
la  quinte  juste  {ut,  sol)  comme  3  est  à  2;  la  sixte  ma- 
jeure [ut,  la)  comme  5  est  à  3;  la  sixte  mineure  {mi,  ut) 
comme  8  est  à  5;  le  demi-ton  majeur  {ut,  r^' [>)  comme 
16  est  à  16;  le  demi-ton  mineur  {ut,  «f  ^)  comme  25  est 
à  24;  et  hi  différence  entre  «f  ^  et  re  t  comme  81  est 
ù  80. 

Or,  il  résulterait  de  là  que  dans  la  pratique  de  l'exé- 
cution, les  musiciens  devraient  faire  ré  [,  plus  élevé  que 
ut  j^,  et  c'est  précisément  le  contraire  qui  a  lieu ,  parce 
que  les  musiciens  sentent  que  uf^  a  une  affinité  ascen- 
dante, tandis  que  ré\;  en  a  une  descendante.  La  pratique 
se  trouve  donc  en  cela  en  contradiction  avec  la  théorie. 
Quelques  théoriciens,  considérant  l'affinité  dont  il  vient 
d'être  parlé  comme  un  fait  résultant  de  l'organisation 
des  musiciens,  ont  dit  que  ce  fait  ne  détruit  pas  la  théo- 
rie, qui  ne  saurait  être  fausse;  d'autres  ont  affirmé  que 
les  musiciens  font  réellement  ré  L  en  croyant  ut^,  et 
vice  versa,  ce  qv^,  si  cela  était  vrai,  détruirait  toute 
l'économie  de  la  tonalité.  Hàtons-nous  de  dire  que  d'A- 
leinbert,  le  physicien  Charles,  MM.  de  Prony,  Savart  et 
quelques  autres  savans,  frappés  de  la  solidité  de  l'objec- 


%0  RAPPORTS  DES  SOVS.  SECT.  II. 

lion,  ont  avoué  qu'il  est  possible  que  des  faits  inconnus 
jusqu'ici  renversent  l'édifice  des  calculs  qu'on  a  cru 
exacts,  et  que  la  théorie  des  véritables  rapports  des  in- 
tervalles musicaux  est  peut-être  encore  à  faire. 

Les  accordeurs  des  instruniens  à  clavier,  placés,  sans 
le  savoir,  sous  l'influence  des  affinités,  éprouvent  quelque 
peine  à  modérer  le  penchant  qu'ils  ont  à  donner  trop 
d'élévation  aux  sons  supérieurs  de  certains  intervalles, 
penchant  qui  les  entraînerait  à  rendre  faux  d'autres  in- 
tei'valles  dans  lesquels  les  mêmes  lois  d'affinité  ne  se 
font  point  sentir.  Le  soin  qu'ils  apportent  à  corriger  le 
penchant  de  leur  oreille  se  désigne  en  général  par  le  mot 
de  tempérament.  On  a  imaginé  plusieurs  formules  dif- 
férentes pour  pratiquer  ce  tempérament  :  peut-être  ar- 
rivera-t-on  quelque  jour  à  démontrer  qu'elles  sont  le 
produit  d'une  théorie  mal  faite  de  la  tonalité.  Je  crois 
qu'il  est  possible  de  porter  jusqu'à  l'évidence  la  preuve 
que  l'accord  des  instrumens  est  soumis  à  la  direction 
plus  ou  moins  avancée  de  la  musique  dans  de  certaines 
conditions  harmoniques,  et  que  cet  accord  ne  peut  plus 
être  le  même  qu'au  commencement  du  dix -septième 
siècle. 

D'après  ce  qui  vient  d'être  dit ,  on  voit  que  la  science 
de  l'acoustique  n'est  point  faite,  et  que  sur  les  choses  les 
plus  importantes  on  n'en  est  encore  qu'aux  conjectures, 


CHAPITRE  XII. 

De  l'art  d'écrire  la  musique.  —  Contrepoint — Canons.— >  Fugue. 
Dans  la  poésie p  comme  dans  quelques-uns  des  art» 


r.HAP.   XII.  rONTIVEPOINT.  8l 

du  dessin,  la  composition  se  présente  à  l'imagination  du 
poète  ou  de  l'artiste  sous  la  forme  d'une  idée  simple  qui 
s'exprime  comme  elle  se  conçoit,  c'est-à-dire  sans  com- 
plications d'élémens.  Il  n'en  est  pas  de  même  en  musi- 
que. Dans  cet  art,  tout  est  complexe;  car  composer  n'est 
pas  seulement  imaginer  des  mélodies  agréables,  ou  trou- 
ver l'expression  vraie  des  divers  sentimens  qui  nous 
agitent,  ou  faire  de  belles  combinaisons  d'harmonie,  ou 
disposer  les  voix  d'une  manière  avantageuse,  ou  inven- 
ter de  beaux  effets  d'instrumentation;  c'est  faire  à  la  fois 
tout  cela,  et  beaucoup  d'autres  choses  encore.  Dans  un 
quatuor,  dans  un  chœur,  dans  une  ouverture,  dans  une 
symphonie,  chaque  voix,  chaque  instrumenta  une  mar- 
che particulière,  et  de  tous  ces  mouvemens  se  forme 
l'ensemble  de  la  musique.  Que  l'on  juge  d'après  cela  de 
la  complication  qui  embarrasse  cette  opération  de  l'es- 
prit qu'on  nomme  composition ,  et  des  études  qui  sont 
nécessaires  pour  vaincre  tous  les  obstacles  d'un  art  si 
difficile! 

Il  fut  un  temps  où  l'on  ne  pouvait  pas  dire  que  les 
musiciens  composaient  ;  ils  arrangeaient  des  sons.  Ce 
temps  renferme  près  de  trois  siècles,  c'est-à-dire  depuis 
la  fin  du  treizième  jusque  vers  1590.  Quelques  misé- 
rables cantilènes  populaires  et  le  plain-chant  de  l'église 
étaient  les  seules  mélodies  qu'on  connût;  il  n'était  pas 
rare  de  voir  le  même  chant  de  cette  espèce  servir  de 
thème  obligea  vingt  compositions  différentes,  et  s'appli- 
quer indifféremment  à  toute  espèce  de  paroles.  Nulles 
traces  d'expression,  d'enthousiasme,  de  passion  ni  d'élé- 
vation ne  se  font  remarquer  dans  la  multitude  de  messes, 
de  motets,  de  chansons  à  plusieurs  voix  et  de  madrigaux 


83  RAPPORTS  DES  SOMS.  8ECT.  II. 

qui  virent  alors  le  jour  :  singularité  d'autant  plus  re-r 
marquable  que  c'est  précisément  dans  le  même  temps  que 
la  fermentation  des  ima°;inations  fut  le  plus  ardente  en 
idées  religieuses,  en  philosophie,  en  poésie,  en  peinture  ; 
que  le  génie  de  l'homme  s'est  élevé  aux  plus  hautes  ré- 
glions ,  et  que  ses  passions  se  sont  développées  avec  le 
plus  de  violence.  Mais  liLre  de  tonte  entrave,  la  pensée 
du  poète  pouvait  en  un  instant  créer  des  beautés  sublimes, 
comme  fit  le  Dante,  sans  être  ari'ètée  par  les  difficultés 
d'un  art  matériel  ;  instruit  par  ce  qui  était  sous  ses  yeux, 
le  peintre  ne  pouvait  tarder  à  s'apercevoir  que  l'imitar- 
tion  de  la  nature  devait  être  le  but  de  ses  travaux;  aver- 
tis par  l'excès  des  maux  qui  accablaient  l'humanité,  le 
philosophe,  le  jurisconsulte,  le  théologien,  n'avaient  be- 
soin que  de  laisser  éclater  leur  indignation  pour  parler 
avec  éloquence  de  la  liberté,  des  lois  et  de  la  religion. 
Dans  tout  cela,  comme  je  l'ai  dit,  les  idées  sont  simples, 
le  génie  trace  la  route  et  la  science  vient  après.  En  mu- 
sique, ce  fut  le  contraire.  Il  fallut  d'abord  que  les  mu-r 
siciens  s'occupassent  du  soin  de  créer  les  ressources 
matérielles  de  leur  art;  mais  dans  la  recherche  de  ses 
moyens  ils  se  trompèrent,  et  crurent  marcher  vers  le 
but,  tandis  qu'ils  se  préparaient  seulement  à  entrer  dans 
la  route  qui  devait  y  conduire. 

Leur  erreur  fut  un  bien;  car  il  ne  falifiit  pas  moin^ 
que  toute  la  persévérance  de  leurs  elfortspour  débrouil- 
ler le  chaos  des  formes  variées  que  peut  prendre  l'en- 
chaînement des  sons.  Que  de  combinaisons  harmoniques 
dans  les  ouvrages  de  ces  vieux  maîtres  !  que  d'adresse 
dans  le  maniement  des  difficultés.  Habitués  que  noua 
sommes  à  faire  usage  des  procédés  qu'ils  nous  ont  en- 


CHAP.   XII.  CONTREPOINÏ.  88 

seiguéâ,  nous  n'y  voyons  que  des  subtilités  scolastiques; 
mais  ceux  qui  ont  tait  cette  science  étaient  des  hommes 
de  génie. 

Un  njot  presque  barbare,  qui  n'a  plus  depuis  long- 
temps qu'une  signification  traditionnelle,  sert  à  expri- 
mer l'opération  d'écrire  la  musique  selon  de  certaines 
lois  ;  ce  mot  est  celui  de  contrepoint.  Il  parait  tirer  son 
origine  de  ce  que,  dans  quelques  notations  particulières 
du  moyen-âge,  ou  écrivait  la  musique  avec  des  points, 
dont  les  distances  respectives  entre  plusieurs  voix  s'ap- 
pelaient/^o///^  contre  point  [punctum  contra  punctum)  ; 
par  contraction  on  a  dit  contrepoint.  Les  musiciens  de 
profession  appellent  celui  qui  enseigne  l'art  d'écrire  en 
musique  un  professeur  de  contrepoint'^  les  gens  du 
monde  lui  donnent  le  nom  de  maître  de  composition; 
cette  dernière  locution  est  vicieuse,  car  on  n'apprend 
point  à  composer.  .Si  le  contrepoint  était  autrefois  l'art 
d'arranger  des  points  contre  des  points,  c'est  maintenant 
celui  de  combiner  des  notes  avec  des  notes.  Cette  opé- 
ration serait  certainement  longue ,  fatigante  et  destruc- 
tive de  toute  inspiration,  si  le  compositeur  ne  parve- 
nait, au  moyen  d'études  bien  faites  dans  la  jeunesse,  à 
se  rendre  familières  toutes  ces  combinaisons,  de  telle 
sorte  qu'elles  ne  soient  pour  lui  que  comme  les  règles 
de  la  grammaire,  auxquelles  personne  ne  pense  en  écri- 
vant ou  en  parlant.  Ce  qu'on  nomme  la  science  en  mu- 
sique n'est  une  science  véritable  qu'autant  qu'elle  est 
devenue  une  habitude  qui  ne  distrait  point  l'imagina- 
tion. 

De  quelque  manière  que  la  pensée  du  compositeur 
soit  dirigée  dans  l'arrangement  des  voix  ou  des  iostru- 
menSfiliie  peut  faire  que  cinq  opérations  différentes, 


84  RAPPORTS  DES  SOWS.  SECT.    II. 

qui  sont  :  1°  de  donner  à  chaque  partie  des  notes  d'é- 
gale durée;  2°  de  faire  la  durée  des  notes  d'une  voix  plus 
rapide  de  moitié  que  celles  d'une  autre  voix  ;  3°  de  les  ré- 
duire dans  une  partie  au  quart  de  la  valeur  de  celled'une 
autre  partie;  4**  de  lier  les  notes  en  syncopes  dans  une 
partie,  tandis  qu'unesecondemarcheen  suivant  les  temps 
de  la  mesure;  5°  de  mêler  ensemble  ces  divers  genres  de 
combinaisons,  en  y  joignant  les  accidens  du  point  et 
différentes  sortes  d'ornemens.  La  décomposition  de  ces 
diverses  combinaisons  a  fourni  cinq  espèces  de  contre- 
points ou  études,  qu'on  appelle  contrepoints  simples  de 
première,  de  seconde,  de  troisième,  de  quatrième  et  de 
cinquième  espèce,  des  études  se  font  sur  un  chant  choisi 
ou  donné,  et  l'on  commence  ordinairement  par  écrire 
à  deux  voix,  puis  à  trois,  à  quatre,  à  cinq,  à  six,  à  sept 
et  à  huit.  Plus  le  nombre  de  voix  augmente ,  plus  les 
combinaisons  se  compliquent;  si  l'on  écrit  à  trois  par- 
ties, par  exemple,  on  peut  mettre  une  seule  note  à  une 
voix,  tandis  qu'il  y  en  a  deux  à  la  seconde,  et  quatre  à  la 
troisième;  à  quatre  parties  on  peut  y  joindre  la  syn- 
cope, etc.  On  conçoit  que  de  pareilles  études  souvent  ré- 
pétées enseignent  à  prévoir  tous  les  cas,  à  vaincre  toutes 
les  difficultés,  et  cela  sans  efforts  et  presque  sans  y  penser. 
On  se  persuade  en  général  qu'un  musicien  instruit  écrit 
avec  plus  de  calcul  que  celui  qui  n'a  jamais  fait  d'études, 
mais  c'est  une  erreur;  je  crois  même  que  le  contraire  a 
lieu,  et  qu'à  tout  prendre,  celui  qu'on  nomme  par  déri- 
sion un  musicien  sai'ant,  quand  il  est  vraiment  digne  de 
ce  nom ,  écrit  moins  péniblement  que  celui  qui ,  n'ayant 
point  fait  d'études,  peut  être  à  chaque  instant  arrêté  par 
des  difficultés  qu'il  n'a  point  prévues. 

Le  contrepoint  simple,  dont  il  vient  d'être  parlé,  est 


CHAP.    MI.  COKTREPOINT,  85 

la  base  de  tonte  composition ,  car  ses  applications  sont 
de  tous  les  instans  ,  de  toutes  les  circonstances  ;  on 
ne  peut  écrire  quelques  mesures  avec  élégance  sans  en 
faire  usage,  et  celui  qui  en  parle  avec  le  plus  de  mépris 
en  fait  comme  M.  Jourdain  faisait  de  la  prose,  sans  le 
savoir.  Il  n'en  est  pas  de  même  de  ce  qu'on  nomme  con- 
trejioint  double  ;  celui-ci  est  fondé  sur  de  certaines  con- 
diUons  dont  l'usage  est  limité.  Un  compositeur  drama- 
tique peut  écrire  un  grand  nombre  d'opéras  sans  avoir 
occasion  de  s'en  servir;  mais  dans  la  musique  instrumen- 
tale et  dans  la  musique  d'église,  cette  espèce  de  contre- 
jioint  est  fréquemment  employée.  En  écrivant  du  con- 
trepoint simple,  le  compositeur  n'est  occupé  que  de 
l'effet  immédiat  de  l'harmonie;  mais  dans  le  contrepoint 
double  il  faut  encore  qu'il  sache  ce  que  celte  harmonie 
deviendrait  si  elle  était  renversée,  c'est-à-dire  si  ce  qui 
est  aux  parties  supérieures  passait  à  la  basse,  et  récipro- 
quement; en  sorte  que  l'opération  de  son  esprit  est  réel- 
lement double. 

Lorsque  le  contrepoint  peut  être  renversé  à  trois  par- 
ties différentes,  on  lui  donne  le  nom  de  conlrepoiiit  tri- 
ple^ s'il  est  susceptible  d'être  renversé  à  quatre  parties, 
il  s'appelle  contrepoint  quadruple. 

Le  renversement  peut  s'opérer  de  plusieurs  manières. 
S'il  consiste  dans  un  simple  changement  d'octave  entre 
les  parties,  c'est-à-dire  si  ce  qui  était  aux  voix  graves 
passe  à  l'aigu,  et  réciproquement ,  sans  changer  le  nom 
des  notes,  on  appelle  cette  faculté  de  renversement  con- 
trepoint double  (i  l'octave.  Si  le  renversement  peut  s'o- 
pérer à  l'octave  de  la  quinte,  soit  supérieure,  soit  infé- 
rieure, on  appelle  la  composition  contrepoint  double  à 
la  douzième  ;  enfio  si  l'arrangement  de  l'harmonie  est 


86  RAPPORTS   DES  SONS.  SECT.  H. 

tel  que  le  renversement  puisse  avoir  lieu  à  l'octave  de  la 
tierce  supérieure  ou  inférieure,  c'est  un  contrepoint  à  la 
dixième.  Le  contrepoint  double  à  l'octave  est  plus  satis- 
faisant pour  l'oreille  que  les  deux  autres;  il  est  aussi  d'un 
usage  plus  général. 

Lorsqu'il  s'agit  de  développer  un  sujet,  une  phrase, 
un  motif,  et  de  les  présenter  sous  toutes  les  formes, 
comme  Haydn  et  Mozart  l'ont  fait  dans  leurs  quatuors 
et  leurs  symphonies  ,  Hsendel  dans  ses  oratorios,  et 
M.  Chérubini  dans  ses  belles  messes,  le  contrepoint 
double  offre  des  ressources  immenses  que  rien  ne  pour- 
rait remplacer;  mais  dans  la  musique  dramatique,  où 
ce  développement  d'une  même  idée  musicale  nuirait  à 
l'expression  et  mettrait  à  la  place  de  la  vérité  une  affec- 
tation pédantesque  ,  ce  contrepoint  serait  non-seulement 
inutile  en  beaucoup  d'occasions,  mais  même  souvent 
nuisible.  Le  goût  et  l'expérience  doivent  guider  le  com- 
positeur à  cet  égard. 

Jusqu'ici  l'on  a  vu  que  la  science  ne  se  composait  que 
d'objets  utiles  ou  nécessaires;  nous  allons  la  considérer 
dans  SCS  abus.  Comment  qualifier  en  effet  ces  bizarres 
arrangemens  de  sons  qu'on  appelle  contrepoints  rétro- 
grades,  c'est-à-dire  allant  à  reculons,  contrepoints  par 
motivement  contraire ,  dans  lesquels  les  voix  se  meuvent 
dans  des  directions  opposées,  contrepoints  rétrogrades 
contraires^  ou  à  retourner  le  livre,  contrepoints  inverses 
contraires^  qui  sont  encore  plus  compliqués?  Tout  cela, 
je  le  répète,  est  l'abus  de  la  science.  L'oreille  souffre  des 
entraves  que  le  musicien  s'est  impesées  et  dont  celui-ci 
ne  tire  aucun  profit  réel.  Ces  vaines  subtilités  n'existent 
que  pour  l'œil.  Il  ne  faut  pas  croire  toutefois  que  ce 
soient  ces  logogryphes  musicaux  qui  ont  donné  aux  gens 


CHAP.  XII.  CONTREPOINT.  87 

du  inonde  leurs  préjugés  contre  la  science  _,  car  il  y  a 
long-temps  qu'ils  ne  font  plus  partie  de  la  musique 
usuelle  et  qu'ils  sont  relégués  dans  la  poussière  de  l'é^ 
cole.  Ils  n'ont  même  jamais  eu  grand  crédit;  quelques 
maîtres  pédans  du  seizième  et  du  dix-septième  siècle 
sont  les  seuls  qu'on  peut  accuser  d'avoir  essayé  de  les 
substituer  à  la  science  véritable.  Ce  sont  ces  musiciens 
qui  avaient  imaginé  des  bizarreries  telles  que  le  contre- 
point sauté,  dans  lequel  il  était  défendu  de  faire  a^ir 
les  voix  par  mouvemens  conjoints;  le  contrepoint  tié, 
où  l'on  s'interdisait  toute  espèce  de  saut  de  tierce,  de 
quarte,  etc.;  le  contrepoint  obstiné,  qui  n'admettait 
qu'un  seul  trait  répété  sans  cesse  par  une  voix  pendant 
que  les  autres  cheminaient  à  l'ordinaire,  et  mille  autres 
folies  qu'il  serait  trop  long  de  détailler.  Le  monde  et  les 
musiciens  ont  fait  justice  de  celte  dégradation  d'un  art 
dont  la  destination  véritable  est  d'émouvoir  et  non  de 
se  transformer  en  énigmes. 

Certqinçs  formes  de  convention,  qu'on  nomme  imita- 
tions, canons  et  fugues ,  sont  cependant  fort  utiles  et 
ne  partagent  pas  le  discrédit  de  celles  dont  il  vient  d'être 
parlé.  J'oserais  presque  dire  qu'on  peut  en  tirer  des  effets 
plus  grands,  plus  majestueux,  plus  variés  que  de  toutes 
les  autres  combinaisons  de  la  musique.  Les  personnes 
fiui  ont  entendu  dans  l'institution  royale  de  musique  re- 
ligieuse dirigée  par  M.  Choron  les  compositions  de  Pa- 
lestrina,  de  Clari  et  de  Hœndel;  celles  qui  ont  assisté 
dans  la  chapelle  du  roi  à  l'exécution  des  belles  messes 
de  M.  Chérubiiii  l  ;  celles  enfin  qui  se  rappellent  les  ef- 
fets   des  symphonies    de   Haydn  ,    de    Mozart    ou    de 

f  0  Ces  deux  étalilisse.nens  de  mtisiqun  ont  c-té  .nalheureusement 
supprimés  depuis  que  la  première  éditiou  de  ce  livre  a  paru. 


8iî  RAPPORTS  DES  SONS.  5ECT.  II. 

Beethoven ,  et  qui  n'ont  point  oublié  la  puissance  ma- 
gique des  ouvertures  de  la  Flûte  enchantée  et  de  Don 
Jaan^  ces  personnes,  dis-je,  me  comprendront  lors- 
qu'elles sauront  que  toutes  ces  créations  ont  pour  bases 
ces  mêmes  formes  de  convention  auxquelles  le  génie  a 
su  donner  de  la  vie.  II  est  nécessaire  que  j'explique  en 
quoi  consistent  ces  formes. 

Dans  l'analyse  de  la  musique,  on  rencontre  quelque- 
fois de  certaines  phrases  dont  le  caractère  est  plus  pro- 
noncé que  celui  des  autres,  et  qui  offrent  l'avantage  de 
pouvoir  être  répétées  plusieurs  fois  en  contribuant  à 
augmenter  l'effet  général  du  morceau.  Mais  si  la  même 
voix  ou  le  même  instrument  étaient  toujours  employés 
pour  faire  celte  répétition  de  phrases,  celles-ci  devien- 
draient monotones  et  fatigantes;  il  y  a  donc  de  l'avantage 
à  faire  passer  la  phrase  qu'on  veut  répéter  d'une  partie 
dans  une  autre,  et  même,  pour  plus  de  variété,  à  la 
transporter  tantôt  à  une  quarte ,  tantôt  à  une  quinte  ou 
à  une  octave  plus  haut  ou  plus  bas.  La  phrase  principale, 
ainsi  conduite  d'une  partie  dans  une  autre  et  variée  de 
position,  prend  le  nom  d'ùnitation,  parce  que  les  voix 
ou  les  inslrumens  s'imitent  mutuellement ,  et  l'on  dit 
que  l'imitation  est  à  la  quarte,  à  la  quinte  ou  à  l'oclave, 
selon  le  degré  d'élévation  où  elle  se  fait.  Pour  donner 
un  exemple  d'imitation  connue  de  tout  le  monde,  je  ci- 
terai la  scène  des  ténèbres  de  l'opéra  de  Moïse ^  par 
Rossini,  où  la  phrase  d'accompagnement  passe  alterna- 
tivement d'un  instrument  à  un  autre. 

L'imitation  est  libre  en  ce  qu'elle  ne  se  fait  pas  tou- 
jours avec  exactitude  depuis  le  commencement  d'une 
phrase  jusqu'à  la  fin;  mais  il  est  des  espèces  d'imitations 
plus    rigoureusas,    qui    non-seulement   se  poursuivent 


^"^P-   X»-  CANON.  S^ 

dans  toute  l'étendue  d'une  phrase ,  mais  qui  se  conti- 
nuent même  pendant  toute   la   durée  d'un    morceau  : 
celles-li  prennent  le  nom  de  cano^is.  Ce  genre  de  mu- 
si'iue  était  autrefois  for»  à  la  mode  dans  la  société;  on 
les  chantait  à  fable,  et  presque  toujours  les  paroles  en 
étaient  burlesques  ou  grivoises.  Tout  le  monde  connaît 
celui  qui  commence  par  ces  mois  :  Frère  Jacques,  dor- 
mez-vous?  Ils  étaient  tous  faits  sur  ce  modèle.  Piccinni 
est  le  premier  qui  ait  introduit  les  canons  au  théâtre, 
dans  son  opéra  de  la  huona  FigUoIa;  ils  sont  devenu! 
depuis  lors  d'un  «sage  fréquent.    Rossini  et  ses  imita- 
teurs en  ont  mis  dans  presque  tous  les  ouvrages;  mais 
leurs  canons  diffèrent  de  celui  de  Martini,  en  ce  que  ces 
compositeurs  se   bornent  presque   toujours   à   faire  la 
phrase  principale  d'un  chant  agréable,  négligeant  tout 
ce  qui  sert  à  l'accompagnement ,  au  lieu  que  le  canon  de 
Martini,  comme  ceux  de  tous  les  maîtres  qui  ont  su  faire 
ce  genre  de  musique,  se  compose  d'autant  de  phrases 
qu'il  y  a  de  voix ,  et  celles-ci  se  servent  mutuellement 
d'accompagnement,   en    passant   alternativement  d'une 
partie  dans  l'autre.  Pour  écrire  des  canons  de  cette  es- 
pèce, il  faut  avoir  fait  de  bonnes  études  musicales  qu'on 
ne  fait  plus  en  Italie.  M.  Chérubini  en  a  composé  beau- 
coup qui  sont  d'un  bel  effet  et  d'une  grande  pureté  de 
style. 

L'imitation  des  canons  peut  se  faire  comme  l'imita- 
tion libre,  en  commençant  à  la  quarte,  à  la  quinte,  à 
l'octave,  et  même  à  tous  les  intervalles;  c'est  ce  que  si- 
gnifient ces  mots  qu'on  voit  souvent  écrits  sur  la  mu- 
sique :  Canon  à  la  quarte,  Canon  à  la  quinte  infé- 
rieure, etc.  La  voix  qui  commence  le  canon  se  nomme 


90  RAPPORTS  DES   SONS.  SECT.    II. 

Y  antécédent}  celle  qui  l'imite  prend  le  nom  de  consé- 
quent. 

Quelquefois  le  canon  est  double,  c'est-à-dire  qu'on 
rencontre  de  ces  canons  où  deux  parties  conimenctiit  à 
la  fois  deux  chants  différens,  et  sont  suivies  de  deux 
autres  parties  qui  les  imitent.  Il  y  a  aussi  des  canons  où 
rimitation  se  {AÏlpar  mouvement  contraire,  ce  qui  si- 
gnifie que  tout  ce  qui  se  fait  en  montant  par  une  voix  se 
fait  en  descendant  par  celle  qui  imite,  et  rériproquemenl. 
Enfin ,  dans  les  anciennes  écoles  de  musique  ,  on  écrivait 
beaucoup  de  canons  où  l'on  s'imposait  des  conditions 
bizarres  tomme  celles  des  contrepoints  dont  j'ai  parlé, 
et  même  plus  singulières  encore  ;  par  exemple,  il  fallait 
que  toutes  les  notes  blanches  de  Mantécédent  devinssent 
noires  dans  le  conséquent ,  ou  qu'on  supprimât  toutes 
les  noires  poiu*  ne  laisser  que  les  blanches,  etc.  Les 
maîtres  de  ces  écoles  se  faisaient  entre  eux  des  espèce  de 
défis  et  s'envoyaient  des  canons  composés  d'après  ce» 
conditions  bizarres ,  dont  ils  gardaient  le  secret.  Ils  les 
écrivaient  sur  une  seule  ligne,  afin  que  leurs  adversaire» 
fussent  obligés  d'en  chercher  la  solution,  et  les  envelop- 
paient à  dessein  d'autant  de  diificuitcs  qu'ils  pouvaient. 
C'étaient  dçs  espèces  çl'énig|nes  où  çbacun  s'efforçait  de 
montrer  son  adresse  et  sa  perspicacité.  Le  maître  qui 
aurait  refusé  un  pareil  défi,  ou  tjui  aurait  échoué  dans 
la  recherche  de  la  solution  du  canon,  aurait  été  dés- 
honoré. 

Mais  comme  dans  toute  espèce  de  combat  il  y  a  des 
règles  qu'on  ne  peut  enfreindre,  il  y  en  avait  une  dans  les 
défis  de  canons  qui  obligeait  l'auteur  d'un  canon  énig- 
matiqne  à  l'accompagner  d'une  devise  propre  à  faciliter 


t^IJAP.  Xll.  CANOW,  ^|) 

la  rechei'cljc  de  la  soUuion.  Les  livres  des  vieux  maîtres 
du  seizièiiie  et  du  dix -septième  sièclp  nous  ont  transmis 
une  collection  de  ces  devises,  dont  voici  quelque$i-unes. 

Clama  ne  cesses,  ou  Olla  chirU  villa,  faisaient  con^- 
naitre  que  le  conséquent  devait  imiter  toutes  les  notes 
de  ranlécédent)  en  supprimant  je?  silences. 

Ncscit  vojC  missa  reverli,  ou  Semper  contrarias  estQ, 
ou  enlin  lufilru/n  iinus  noctu  eccc  ut  consumiiniir  igni,  - 
indiquaient  que  le  conséquent  devait  imiter  l'antécé- 
dent par  mouvement  rétrograde.  Remarquez  que,  d^H^ 
celte  dernière  devise,  toutes  les  lettres  prises  à  rebours 
forment  les  mêmes  mots  qu'en  lisant  de  gauche  a  droite. 

Solpost  vesperas  déclinât  signifiait  qu'à  chaque  re- 
pris.e  le  canon  baissait  d'un  ton. 

Ciççus  non  judicaL  de  colore  indiquait  que  les  notes 
noires  de  l'antécédent  devaient  se  convertir  en  blanches 
dans  le  conséquent.  Et  ainsi  des  autres. 

Toutes  ces  subtilités  n'allaient  guère  au  but  de  l'art; 
mais  elles  étaient  dans  le  goût  de  ces  temps  de  pé- 
dantisme. 

L'imitation  peut  prendre  une  forme  périodique  et  par- 
fois interrompue  pour  èlre  reprise  ensuite  ;  dans  ce  cas 
on  lui  donne  le  nom  de  fugue,  qui  vient  àe  fuga, 
fuite,  parce  que,  dans  une  imitation  de  cette  espèce, 
les  parties  senîblent  se  fuir  dans  les  reprises  du  motif. 
La  fugue,  lorsqu'elle  est  bien  faite  et  lorsqu'elle  est  ma- 
niée par  un  homme  de  géqie,  comme  Jean-Sébastien 
Bach,  Haendel  ou  M.  Chérubini,  est  la  plus  majestueuse, 
la  plus  énergique  et  la  plus  harmonieuse  de  toutes  Içs 
formes  musicales.  On  ne  peut  l'employer  avec  succès 
dans  la  musique  dramatique,  parce  que  sa  marche  très 
développée  nuirait  à'I'intérêt  de  la  scène  ;  mais  dans  la 


92  RAPPORTS  DES  SO!?S.  SECT.  II. 

musique  instrumentale  ,  et  surtout  dans  la  musique  d'é- 
glise ,  elle  produit  des  effets  admirables  ,  d'un  ordre  tout 
particulier.  Le  magnifique  allcluia  du  Messie  de  Haendel, 
et  les  fugues  des  messes  de  M.  Chérubini ,  que  chacun 
a  pu  entendre  à  Paris,  sont  des  modèles  de  ce  genre  de 
beautés.  Toutefois,  il  faut  l'avouer,  ces  beautés  sont  de 
celles  qu'on  ne  peut  goûter  qu'après  s'y  être  accoutumé, 
parce  que  la  complication  de  leurs  élémens  demande  une 
oreille  attentive  et  exercée.  On  peut  lui  appliquer  ce 
vers  de  Boileau  : 

C'est  avoir  profité  que  de  savoir  s'y  plaire. 

La  fugue  n'a  pas  toujours  eu  la  forme  qu'on  lui  con- 
naît aujourd'hui  ;  comme  toutes  les  autres  parties  de  l'art 
musical,  elle  s'est  perfectionnée  lentement.  Les  diverses 
parties  qui  la  composent  sont  maintenant  \e  sujet,  les  con- 
tre-sujfts,  la  réponse,  Y  ex  position ,  les  épisodes  ou  di- 
vertissemens  ,  les  reprises  modulées ,  les  strettes  et  la 
pédale. 

La  phrase  qui  doit  être  imitée  se  nomme  le  sujet. 
Cette  phrase  est  ordinairement  accompagnée  par  d'autres 
qui  forment  avec  elle  un  contrepoint  double^  c'est-à- 
dire  une  harmonie  susceptible  d'être  renversée  de  ma- 
nière à  échanger  la  position  des  notes  en  passant  alter- 
nativement des  voix  inférieures  aux  supérieures,  et  de 
celles-ci  aux  inférieures;  ces  phrases  d'accompagnement 
s'appellent  contre-sujets.  Lorsque  la  fugue  est  écrite 
pour  quatre  voix  ou  pour  quatre  parties  instrumentales, 
il  y  a  ordinairement  un  contre-sujet;  dans  ce  cas,  elle 
est  susceptible  d'être  riche  d'harmonie  et  libre  dans 
ses  mouvemens.  Quelquefois  le  compositeur  emploie 
deux  contre-sujets  ;  on  clil  alors  que  la  fugue  est  à  trois 


cHAP.  xn.  ruciJK.  9S 

sujets.  Une  fugue  semblable  est  plus  difficile  à  faire; 
mais  elle  est  plus  sèche,  plus  scolastique  et  moins  variée. 

L'imitation  tlu  sujet  se  nomme  la  réponse.  Cette  ré- 
ponse ne  peut  pas  être  en  tout  semblable  au  sujet,  parce 
que  si  celui-ci  module  d'un  ton  quelconque  à  un  ton 
analogue,  il  faut  que  la  réponse  ramène  l'oreille  de  ce 
ton  nouveau  dans  le  ton  primitif;  car  c'est  précisément 
dans  cette  sorle  de  promenade  d'un  ton  dans  un  autre 
que  consiste  l'intérêt  de  la  fugue.  La  marche  inverse  que 
l'on  suit  dans  la  réponse  à  l'égard  du  sujet  oblige  à  un 
léger  changement  d'intervalle  qu'on  appelle  mutation. 
Ce  qu'il  y  a  de  remarquable ,  c'est  qu'on  juge  de  l'ha- 
bileté d'un  musicien  sur  l'adresse  avec  laquelle  il  saisit 
le  point  de  la  réponse  où  il  faut  faire  la  mutation  dans  un 
sujet  donné;  sur  cent  musiciens  instruits  à  bonne  école, 
il  n'en  est  pas  un  qui  ne  fasse  celle  mutation  au  même 
endroit ,  tandis  que  ceux  dont  les  éludes  ont  été  mal  di- 
rigées ne  sont  jamais  certains  de  réussir  à  la  faire  comme 
il  faut  C'est  comme  une  espèce  de  pierre  de  touche  de 
leur  savoir;  aussi  quand  on  dit  de  l'auteur  d'une  fugue, 
il  a  manqué  la  réponse,  on  ne  peut  rien  ajouter  de  plus 
méprisant. 

L'exposition  se  compose  d'un  certain  nombre  de  re- 
prises du  sujet  et  de  la  réponse,  après  lesquelles  viennent 
les  épisodes ,  qui  se  composent  ordinairement  d'imita- 
tions formées  de  fragmens  du  sujet  et  du  contre-sujet.  Ce 
sont  ces  épisodes  qui  jettent  de  la  variété  dans  la  fugue 
et  qui  servent  à  moduler.  Lorsque  le  compositeur  juge 
qu'il  s'est  assez  étendu  sur  les  développemens  du  sujet , 
il  rentre  dans  le  ton  primitif,  et  fait  ce  qu'on  appelle  la 
stretta  ou  les  strettes,  mot  qui  vient  de  l'italien  stretto 
(serré),  parce  que  ces  strettes  sont  des  imitations  plus 


94  RAPPORTS   DES   SONS.  SECT.  II, 

vives  du  sujet  et  de  la  réponse.  Cette  pçirtie  de  la  fugue 
est  la  plus  brillante ,  et  c'est  celle  où  le  conipositeui  peut 
mettre  le  plus  d'effet.  Quand  le  sujet  est  favorable,  il  y 
a  plusieurs  sirettes  de  plus  en  plus  vives.  Elles  se  ter- 
niiuent  ordinairement  par  une  pédale  où  toutes  les  ri- 
chesses de  l'harmonie  sont  réunies. 

Rousseau  a  dit  qu'une  belle  fugue  est  l'ingrat  chef- 
d'œuvre  d'un  bon  harmoniste.  On  n'était  point  assez 
avancé  dans  la  musique  en  France,  du  temps  de  Rous- 
seau, pour  sentir  le  prix  d'une  belle  fugue,  et  cet  écri- 
vain n'avait  jamais  eu  l'occasion  d'en  entendre  de  sem- 
blables. 

Ce  n'est  que  vers  le  commencement  du  dix-huitième 
siècle  qu'on  a  fait  des  fugues  dans  le  système  que  je  viens 
d'analyser.  .J^usque  là  on  n'avait  eu  que  du  contrepoint 
yj/^«c',  c'est-à-dire  du  contrepoint  à  quatre,  cinq,  six 
ou  sept  parties ,  dont  le  sujet  était  pris  dans  les  antiennes 
et  les  hymnes  du  plain-chant,  avec  des  imitations  et  des 
canons.  Ce  genre  de  compositions  fuguées  se  désigne  sous 
lenorade  contrepointfl//^zy7a/<'j//"/rta,parcequ'un  célèbre 
copipositeur  nommé  Palestrina  ,  qui  vivait  dans  le  sei- 
zième siècle,  en  a  porté  le  style  au  plus  haut  point  de  per- 
fection. Dans  ce  genre  de  musique,  en  apparence  si  sec  et 
si  peu  favorable  aux  inspirations,  Palestrina  a  su  mettre 
tant  de  majesté,  un  sentiment  religieux  si  calme  et  si 
pur,  qu'il  semble  avoir  écrit  toutes  ces  difficultés  scien- 
tifiques sans  peine ,  uniquement  occupé  de  rendre  digne- 
ment le  sens  des  textes  sacrés.  Lorsque  ses  motifs  sonl; 
exécutés  avec  la  tradition  parfaite  d'exécution  de  la  cha- 
pelle Sixtine,  l'impressiorj  qu'ils  laissent  ne  peut  être 
égalée  par  aucune  autre,  spus  le  rappQrt  de  la  grandeur 
des  proportions.   A  l'époque  où  ce  maître  écrivait ,  on 


C.BXP.  \iJ. 


9S 


n'avait  point  encore  imaginé  de  considérer  la  musique 
sous  le  rapport  drartii.lique.  De  nos  jours,  ce  besoin  de 
dramatique  se  porte  dans  tous  les  styles,  même  dans  ce- 
lui de  la  musique  d'église;  il  en  est  résullé  de  grandes 
beautés  d'un  genre  particulier,  mais  il  me  semble  que, 
sous  le  rapport  de  la  convenance  et  de  l'élévation  des 
sentimens  religieux,  le  contrepoint  fugué  de  Pàlestrina 
est  beaucoup  plus  convenable. 

D'après  ce  qui  vient  d'être  dit,  on  peut  se  former 
une  idée  du  mécanisme  des  compositions  scientifiques, 
et  de  l'utilité  dont  elles  peuvent  être.  Si  j'ai  su  nie  faire 
comprendre,  bien  des  amateurs  renonceront  à  leurs 
préjugés  contre  la  science,  et  avoueront  que  c'est  un 
ridicule  de  vouloir  que  les  musiciens  ne  sachent  pas  ce 
qu'ils  font  pour  écrire  de  bonnes  choses.  Si  l'art  d'écrire 
en  musique  est  quelquefois  entaché  d'un  air  de  pédan- 
tisme,  ce  n'est  pas  la  science  qu'il  en  faut  accuser,  mais 
des  esprits  mal  organisés  qui  en  ont  fait  usage.  Et  re- 
marquez que  la  science  n'a  jamais  cet  air  qu'entre  les 
mains  de  musiciens  qui  ne  sont  réellement  point  savans. 
Cette  science,  pour  être  réelle,  a  besoin  d'être  tournée 
en  habitude,  afin  que  celui  qui  la  possède  ne  s'en  sou- 
vienne plus ,  ce  qui  ne  peut  avoir  lieu  que  lorsqu'elle  a 
été  étudiée  dans  la  jeunesse  ;  car  il  est  trop  tard  pour 
songer  à  réformer  par  la  science  des  habitudes  vicieuses  , 
quand  elles  sont  contractées.  Plus  le  compositeur  dont 
les  études  ont  été  mal  faites  a  de  talent  naturel ,  moins 
il  peut  se  corriger  quand  il  n'est  plus  jeune.  S'il  s'obstine, 
il  perd  les  qualités  qu'il  tient  de  la  nature,  il  s'alourdit 
et  devient  pédant. 


#6  RAPPORTS  DES  SONS.  SKCT.  II. 

CHAPITRE  XIII. 

De  l'emploi  des  voix. 

Quel  que  soit  le  degré  de  perfection  auquel  parvient 
un  instrumentiste,  il  sera  toujours  difficile  qu'il  exerce 
sur  des  masses  populaires  une  puissance  égale  à  celle 
qui  est  dévolue  à  la  voix  humaine,  lorsque  celle-ci  sera 
dirigée  par  un  bon  sentiment  et  perfectionnée  par  de 
bonnes  études.  Il  n'est  même  pas  besoin  de  faire  preuve 
d'une  grande  habileté  de  mécanisme  pour  faire  naître 
dans  l'ame  des  impressions  vives  et  fortes  par  les  voix; 
l'harmocie  même  n'est  pas  nécessaire  :  l'unisson  suffit. 
Je  citerai  à  cet  égard  un  des  effets  les  plus  élonnans 
qu'on  puisse  entendre  :  c'est  celui  de  quatre  ou  cinq 
mille  enfans  des  établissemens  de  charité  qui ,  à  Lon- 
dres, dans  l'église  de  Saint- Paul,  chantent  à  l'unisson 
des  cantiques,  certain  jour  de  l'année,  avec  simplicité 
et  candeur.  Les  plus  grands  musiciens,  Haydn  entre 
autres,  ont  avoué  (jue  tout  ce  qu'ils  avaient  entendu  de 
plus  beau  n'approchait  pas  de  l'effet  prodigieux  qui  naît 
de  la  réunion  de  ces  voix  enfantines  à  l'unisson  le  plus 
parfait  qu'on  puisse  imaginer  '.  Il  y  a  quelque  chose 
d'attractif,  de  sympathique  dans  cet  effet,  car  les  per- 
sonnes dont  la  sensibilité  est  la  moins  expansive  n'ont 
pu  retenir  les  larmes  qu'il  leur  arrachait.  A  cet  exemple 
de    la   puissance  des  voix  à  l'unisson,   on  pourrait  en 

(r)  Remarquez  que  cet  unisson  devient  parfait  précisément  par 
le  grand  nombre  des  voix,  car  il  y  a  enti  e  toutes  ces  voix  une  at- 
traction sonore  telle  que  les  imperfections  individuelles  d'intona- 
tion disparaÏBsent  pour  ne  former  que  des  sons  homogènes. 


i  H\P.    XIH.  K>li>L01    DES    VOIX.  M  4 

ajouter  quelques-uns  tirés  des  ouvrages  dramatiques; 
toutefois  il  est  utile  de  dire  que  ces  effets  ne  réussissent 
qu'avec  de  grandes  masses,  el  qu'en  général  l'harmonie 
olfre  plus  de  ressources. 

Les  chœurs  à  grand  nomhre  de  parties  étaient  en 
usage  dès  le  seizième  siècle,  particulièrement  en  Italie'; 
plus  tard,  on  imagina  de  diviser  ces  voix  en  plusieurs 
chœurs  de  quatre  parties  chacun,  et  de  placer  dans  les 
grandes  églises  plusieurs  orgues  pour  accompagner  ces 
chœurs;  mais,  outre  qu'il  est  difficile  de  mettre  de  l'en- 
semble dans  l'exécution  d'une  musique  si  compliquée  , 
l'effet  qu'on  en  obtenait  ne  répondait  presque  jamais  à 
l'idée  qu'on  s'en  était  formée.  On  a  fini  par  s'apercevoir 
que  des  chœurs  bien  écrits  à  trois  ou  quatre  parties 
réelles  ont  plus  d'énergie,  d'exactitude  et  même  d'har- 
monie. En  général  l'usage  des  chœurs  à  quatre  parties  a 
prévalu.  Les  genres  de  voix  qui  entrent  dans  leur  com- 
position sont  le  soprano  ou  dessus,  le  contralto  ou 
haute-contre,  le  tenore,  qu'on  appelait  autrefois  en 
France  la  taille ,  et  le  basso  ou  basse. 

La  partie  de  contralto  était  chantée  autrefois  en  Italie 
par  des  castrats,  dont  le  timbre  de  voix  a  quelque  chose 
de  pénétrant  que  rien  ne  peut  remplacer.  Cependant  la 
coutume  de  mutiler  des  hommes  pour  en  faire  des  chan- 
teurs ne  s'élant  jamais  établie  en  France,  on  y  rempla- 
çait le  contralto  par  des  hautes-contres,  genre  de  voix 
qui  ne  se  rencontre  guère  que  dans  le  Languedoc,  et 
particulièrement  dans  les  environs  de  Toulouse.  La  même 

(i)  Ils  le  sont  encore  aujourd'hui  en  Espagne,  où  la  musique  d'é- 
glise est  presque  toujours  à  douze  ou  à  seize  parties  divisées  en 
trois  ou  quatre  cbœura, 

9 


98  HAPPORTS   DES  SO>-S.  SECT.  II. 

cause  a  fait  disparaître  presque  entièrement  de  la  mu- 
sique les  castrats  et  les  hautes-contres;  cette  cause  est  la 
révolution  française,  qui,  nous  ayant  mis  en  possession 
de  l'Italie,  a  fait  abolir  la  coutume  barbare  de  la  cas- 
tration, et  qui,  ayant  détruit  les  maîtrisés  de  cathédrales, 
a  privé  les  habitans  du  Languedoc  de  l'instruction  musi- 
cale qu'ils  y  recevaient  sur  les  lieux. 

De  la  disparition  presque  totale  de  deux  espèces  de 
voix  si  utiles  est  résulté  un  assez  grand  embarras  dr>ns 
la  disposition  des  chœurs  et  dans  leur  exécutiftir.  L'essai 
des  voix  de  femme  en  contralto  pour  remplacer  les  cas- 
trats ne  fut  point  heureux,  parce  que  ces  voix  manquent 
de  timbre  dans  le  bas;  et  l'emploi  des  ténors  poar  tenir 
lieu  des  hautes-contres  ne  le  fut  pas  davantage,  parce 
que  la  musique  écrite  pour  celles-ci  se  trouvait  trop 
haute  pour  le-*  ptifres.  Cette  double  difficulté  a  déterminé 
ph»sieu»"s  romj)ositPurs  à  écrire  leurs  chœurs  à  quatre 
parties  pour  deux  voix  de  femme,  soprano  et  mezzo 
soprano,  ténor  et  basse.  Par  ce  moyen,  l'harmonie  s'est 
trouvée  remplie  sans  sortir  des  bornes  des  voix  :  le  ténor 
s'est  seulement  élevé  de  deux  ou  trois  notes  au-dessus 
des  bornes  étroites  dans  lesquelles  il  était  autrefois  ren- 
fermé. 

Dans  le  dessein  de  ne  point  appauvrir  les  dessus  en  les 
divisant  en  deux  parties,  M.  Chérubini  a  imaginé  d'é- 
crire dans  quelques-nnes  de  ses  messes  des  chœurs  à 
trois  parties,  composés  seulement  du  soprano,  du  té- 
nor et  de  la  basse,  et  a  sn  tirer  les  plus  beaux  effets  de 
celte  disposition,  malgré  sa  pauvreté  apparente;  mais  il 
faut  tout  le  savoir  d'un  maître  tel  que  lui  pour  surmon- 
ter les  difficultés  qui  s'y  rencontrent,  et  pour  produire 
de  pareils  effets  avec  des  moyens  si  bôriiés. 


CHAP.    XIII.  EMPLOI    UtS  VOIX,  9U 

Rossini  et  ses  imitateurs,  n^iis  p?ir  Ije  désir  dtj  remplir 
leur  harmonie,  ont  pris  un  autre  pa^li  ^  l'égard  de? 
chœurs  :  il  consiste  à  les  écrire  presque  toujours  à  cinq 
ou  six  parties,  savoir,  deux  basses,  deux  ténors,  pre- 
mier et  second  dessus.  Cette  abondance  apparente  n'est 
toutefois  qu'une  véritable  stérilité,  car  les  voix  iotermé- 
tliaires  redoublent  à  chaque  instant  les  mêmes  notes  et 
les  mêmes  mouvemens.  Une  pareille  méthode  n'est  ap- 
plicable qu'à  des  chœurs  dont  l'harmonie  sans  raou\e- 
ment  se  désigne  sous  le  nom  à' harn^onie  plaquée  :  çest, 
en  effet  celle  qui  est  en  usage  dans  celte  école.  l'A\e 
séduit  la  multitude  par  son  remplissage  j  mais  les  oreille^ 
exercées  et  délicates  sont  à  chaque  instant  blessées  de 
ses  imperfections. 

L'emploi  des  voix  dans  la  distribution  des  rôles  de 
théâtres  se  fait  toujours  en  Italie  de  la  manière  la  plus 
convenable  pour  obtenir  le  meilleur  effet  possible  dans 
les  morceaux  d'ensemble.  Ainsi  l'on  trouve  dans  presque 
tous  les  ouvrages  deux  basses,  un  ou  deux  ténores,  une 
prima  donna  contralto  ou  mezzo  soprano  et  un  so- 
prano^ ce  qui,  dans  la  réunion  des  voix,  offre  l'en- 
semble d'harmonie  le  plus  complet.  Il  n'en  est  pas  de 
même  en  Fji-ance,  où  c'est  presque  toujours  le  poète  qui 
décide  du  choix  des  acteurs,  en  raison  du  physique  et 
de  certaines  qualités  qui  n'ont  point  de  rapport  à  la 
musique.  L'habitude  que  l'on  a  d'ailleurs  de  désigner 
les  emplois  par  les  non^s  des  acteurs  qui  s'y  sont  distin- 
gués encombre  nos  théâtres  de  voix  de  même  espèce  , 
parce  que  ces  emplois  ne  diffèrent  que  par  des  nuances 
indifférentes  pour  la  musique.  Ainsi  l'on  a  des  Elleviou, 
des  Philippe,  des  Gavaudan,  des  Laruette  et  des  Trial, 
qui  étaient  des  amoureux  ou  des  comiques,  et  dont  les 


i);ILIOTHECA 


100  RAPPORTS  DES  SOKS.  SECT.  II. 

voix  étaient  des  ténors;  tous  les  emplois  ont  des  dou- 
bles, en  sorte  que  les  ténors  abondent  dans  nos  grands 
théâtres,  tandis  qu'on  n'y  trouve  qu'une  ou  deux  basses. 
Or,  celte  dernière  espèce  de  voix  étant  destinée  aux 
rôles  de  pères  ou  de  tuteurs,  il  en  résulte  que  s'il  n'y  a 
point  de  personnages  de  ce  genre  dans  un  ouvrage,  le 
compositeur  est  obligé  d'écrire  la  musique  pour  des  té- 
nors et  des  dessus.  Avec  ces  moyens  bornés  on  peut 
faire  de  jolis  couplets,  des  romances,  des  airs  et  des 
duos  agréables,  mais  jamais  de  bons  morceaux  d'en- 
semble; jamais  il  n'y  a  d'harmonie  dans  les  voix.  Telle 
est  l'origine  du  peu  d'effet  de  la  plupart  des  finales  de 
nos  opéras-comiques,  et  de  l'infériorité  où  la  musique 
française  se  trouve  à  l'égard  de  l'italienne  sous  ce  rap- 
port. 1,'harmonie  vocale  est  une  source  d'effets  char- 
mans,  mais  on  ne  peut  l'obtenir  avec  des  voix  de  même 
espèce. 

On  trouve  en  Italie  comme  en  France  une  sorte  de 
voix  de  basse  qu'on  désigne  sous  le  nom  de  bariton  ; 
elle  tient  le  milieu  entre  la  basse  grave  et  le  ténor,  et 
produit  un  fort  bon  effet  quand  elle  est  employée  dans 
son  véritable  caractère  ;  mais  dans  nos  théâtres  on  s'est 
obstiné  à  en  faire  aussi  des  ténors.  Martin,  Solié  et 
Lays,  qui  possédaient  des  baritons,  ont  beaucoup  con- 
tribué à  en  altérer  le  caractère.  On  semble  revenir  main- 
tenant à  des  idées  plus  saines,  et  sentir  la  nécessité  de 
renfermer  les  voix  dans  leurs  bornes  naturelles. 

L'art  d'écrire  convenablement  pour  les  voix  et  d'une 
manière  favorable  aux  chanteurs  est  mieux  connu  des 
compositeurs  italiens  que  des  Allemands  et  des  Français; 
la  cause  de  cette  différence  réside  dans  les  études  de 
chant  qui  font  partie  de  la  première  éducation  descom- 


CHAI».  XIII.  EMPLOI  DKS  VOIX.  101 

positeurs  en  Italie,  tandis  que  les  Français  et  les  Alle- 
mands les  négligent  absolument.  Sans  parler  desavantasies 
de  la  langue  italienne,  qui  sont  incontestables,  on  trouve 
je  ne  sais  quoi  de  facile  et  de  naturel  dans  la  disposition 
des  phrases,  dans  le  caractère  des  traits,  dans  leur  en- 
chaînement et  dans  l'analogie  du  rhylhme  poétique 
avec  le  rhythrae  musical ,  qui  favorise  l'émission  de  la 
voix  en  même  temps  que  l'articulation  du  gosier  et 
de  la  langue  dans  le  chant  italien;  avantages  qui  ne 
se  rencontrent  que  bien  rarement  dans  la  musique  fran- 
çaise et  plus  rarement  encore  dans  l'allemande;  car 
celle-ci  est  souvent  chargée  de  modulations  qui  rendent 
les  intonations  fort  difficiles.  On  attribuait  autrefois  la 
facilité  du  chant  italien  au  cercle  étroit  de  ses  modula- 
tions et  de  ses  formes;  mais  Rossini  a  démontré  par  ses 
ouvrages  que  ce  cercle  peut  s'agrandir  sans  que  le  chant 
perde  de  ses  avantages.  Il  est  vraisemblable  que  la  po- 
pularité que  sa  musique  a  acquise  en  France  contribuera 
à  améliorer  notre  système  de  chant;  mais  pour  que  la 
réforme  soit  complète,  le  concours  des  poètes  et  des  musi- 
ciens sera  nécessaire,  comme  je  le  démontrerai  ailleurs. 
Il  est  un  point  sur  lequel  les  compositeurs  italiens 
portent  toute  leur  attention ,  pour  éviter  la  fatigue  aux 
chanteurs;  c'est  celui  du  degré  d'élévation  dans  lequel 
ils  maintiennent  les  voix.  Dans  leur  musique,  chaque 
genre  de  voix  parcourt  une  étendue  au  moins  égale  à 
celle  qu'on  lui  donne  dans  la  musique  française;  mais 
les  traits  de  grande  extension,  soit  à  l'aigu,  soit  au  grave, 
ne  s'y  présentent  que  de  loin  en  loin,  et  la  voix  reste 
ordinairement  dans  son  médium  ,  tandis  qu'on  rencontre 
dans  les  partitions  françaises  des  morceaux  qui,  sans 
parcourir  une  grande  étendue,  font  éprouver  beaucoup 

9- 


JO^  RAP*t>UTS    Lits  StfKS.  Stî.T.  H. 

de  fatigue  au  chauteiir,  parce  qu'ils  reppsept  longrteinpa 
sur  des  notes  peu  favorajjles.  Les  ouvrages  de  Gpptry 
offrent  beaucoup  d'exeinplps  de  ce  dpfi^Ut?  Une  cantatr 
trice  inonf.efa  s;ins  fatigue  aijx  son^  les  plus  lâlevés  de  sa 
voix,  lels  que  ut  ou  ré,  tandis  qu'il  lui  ipv4  très  pénible 
de  chanter  jpiig-temps  sur  ml,  fa,  iOl.lX  eu  e^l  de  u»é»ue 
des  ffînprs,  qui  se  partagent  ep  des*»  sor^ei^  de  ^op  ti'è* 
distincts,  savoir,  les  ifons  dff  noifrina  et,  ifis  sop.s  fie 
tétc ,  qu'on  désigne  quelquefois  S(/us  |p  no)n  de  MotVr 
jnixt(;\  Il  faut  beaucoup  d'art  au  «.lianteur  pour  aliaihlir 
autant  que  possible  le  passage  des  ^pi)s  de  poitrine  k  )a 
vois  lUfxte,  et  de  G^l|^-ci  ^un  non»  dft  pojltriiie,  tjf  ma- 
nière à  rendre  peu  sensible  la  d'Oéi'en«e  des  timbres  : 
ce  passage  a  Ijpn  dans  la  plupart  de^  voix  de  ténor  entre 
ley<^j  et  le  sol,  Or,  qi\  çQuçoit  q|ie  sj  je  compositeur  fait 
reposer  le  ciiant  sqr  cps  notes,  ji  fi^il  éprouver  «TU  ciian- 
leur  une  fatjgue  qui  nuij,  aq  déve|)^ppement  de  ses 
înoyens ,  et  qui  lui  est  beaucoiqj  pj'.fs  péuiblp  qup  pe  |^ 
serait  j'ql^ligatiou  de  iiuii]ter  aux  sons  ïa^  pius  MJpvés  de 
la  voix  dp  têtp.  1}  arrive  ^qqv^ot  a<'x  c|ianîe;qf^  des  î^çei- 
tleus  dont  ils  sont  bieo  niojns  coupables  qqç  }e  couijjp- 
slieur  qui  les  y  a  exposés. 

Il  est  des  intervalles  que  la  vqix  ne  peut  franchir 
qu'avpc  be^ucQup  de  peiqe,  et  que  Ip  cjhanteur  ne  fait 
entendre  qu'avec  tip^idilé,  parce  qu'il  est  (qrt  difficile 
de  les  entonner  avep  justesse.  Ces  intervalles  sont  ceux, 
de  quinte  mineure,  de  quipte  augmentée,  dp  quarte  JH^^r 
jeure  ou  triton,  de  quarte  diminuée  et  de  ^i^çon^^  ^^è~ 

(l)  M.  Bennatî  a  déinonfré,  dans  ses  Recherches  sur  le  mècanùme 
de  la  voix  humaine  (  Paris,  i832,  in-8"  ),  que  le  nom  véritable  de  ces 
sons  doit  être  surlarjmgien»,  pacce  qae  le  nom  indique  la  manicre 
dont  iU  oe  forment, 


(.JiJAP.   Mil.  tiU'iOl   uts  VOIN.  lOS 

nicntée;  le  passage  de  l'une  »  l'.TUtre  note  qui  forment 
ces  intervalles  n'est  pas  naturel  aux  mouvcmcns  du  go- 
sier, ce  qui  n^ligç  le  chanteur  à  des  préparations  fiu'il 
n'a  point  le  teinps  de  faire  dans  les  Irajts  rapides.  Si 
quelque  circonstance  met  le  compositeur  dans  la  nécs- 
sité  d'en  faire  usage,  il  faut  que  ce  snii  au  moyen  de 
notes  d'une  certaine  durée. 

Ce  ne  sont  pas  seulement  les  sons  que  le  chanteur  ar- 
ticule qui  peuvent  opposer  des  obstacles  à  la  justesse  de 
son  chant;  il  suffit  que  son  orejUe  soit  affectée  d'une 
iiarmonie  étrangère  à  l'intonation  qu'il  doit  attacjuer, 
l)0ur  qu'il  n'aborde  cette  intonation  qu'avec  incertitude. 
Par  exemple,  s'il  doit  faire  entendre  ut  tt  et  si  l'accprd 
qui  précède  renferme  ut  ^  dans  d'autres  parties  vocales 
ou  dans  l'accompagnement,  le  souvenir  de  cet  ul  ^  occu- 
pera l'oreille  du  chanteur,  de  telle  sorte  qu'il  ne  prendra 
Vut  ti  qu'avec  timidité,  et  rarement  avec  justesse.  On  a 
donné  le  nom  (\efaus':es  relations  à  ces  successions  de 
sons  qui  n'ont  point  de  rapport  entre  eux.  Les  compo- 
siteurs anciens  de  l'école  italienne  les  évitaient  avec  soin; 
on  les  trouve  quelquefois  dans  la  musique  de  l'école  aç-r 
tuelle. 

Le  choix  des  mots  influe  aussi  beaucoup  sur  l'émission 
des  sons  de  la  voix ,  et  l'art  du  compositeur  consiste  à  ne 
placer  certains  traits,  çertames  notes  que  sur  des  syl- 
labes qui  en  facilitent  l'exécution.  Tel  trait,  telle  note  , 
qui  coûtent  beaucoup  de  peine  au  chanteur  sur  une  syl- 
labe, lui  deviennent  faciles  sur  une  autre.  Il  est  d'autant 
plus  nécessaire  d'être  en  garde  sur  ce  point,  lorsqu'on 
écrit  de  la  musique  sur  des  paroles  françaises,  que  notre 
langue  abonde  en  svllabes  sourdes  et  nasales  qui  dé- 
tournent le  son  de  sa  roule  naturelle.  Par  exemple,  on 


104  RAPPORTS  DES  SONS.  SECT.   II. 

ne  pourra  jamais  donner  des  sons  de  bonne  qualité ,  ni 
articuler  du  gosier  d'une  manière  facile  sur  les  syllabes 
on ,  an ,  en,  ein ,  if,  etc.;  il  faut  donc,  lorstjiie  ces 
sortes  de  syllabes  se  rencontrent  dans  les  vers  lyriques  , 
que  le  musicien  les  place  dans  le  médium  de  la  voix 
et  qu'il  évite  d'y  adapter  des  traits  ou  des  sons  soutenus. 


CHAPITRE  XIV. 

Des  instrumens. 

La  nature  a  établi  des  nuances  très  diverses  dans  les 
différens  timbres  de  voix  ;  l'art  est  allé  plus  loin  dans  la 
fabrication  des  instrumens,  qui,  dans  l'origine,  ont  été 
construits  à  l'imitation  de  ces  mêmes  voix.  Le  son, 
comme  on  sait ,  n'est  que  la  vibration  d'un  corps  sonore 
transmise  et  modifiée  par  l'air;  mais  que  de  variété  dans 
ces  modifications  d'un  principe  si  simple!  Quelle  dif- 
férence entre  la  nature  du  son  d'une  cloche  et  celle  des 
instrumens  à  vent,  à  claviers,  à  archet,  à  cordes  pin- 
cées et  à  frottement  !  Enfin  ,  dans  chacune  de  ces  grandes 
divisions,  que  de  nuances  dans  la  qualité  des  sons!  Et 
cependant,  tout  n'est  pas  fait  encore,  et  chaque  jour  de 
nouvelles  découvertes,  de  nouveaux  perfectionnemens 
ouvrent  de  nouvelles  routes  où  d'autres  découvertes 
restent  à  faire  et  de  nouveaux  perfectionnemens  à  in- 
troduire. 

Les  instrumens  les  plus  anciens  dont  il  soit  fait  men- 
tion dans  l'histoire  sont  les  instrumens  à  cordes  pin- 
cées ,  telles  que  les  lyres ,  les  cythares  et  les  harpes.  Les 
monumens  de  l'antiquité  nous  en  offrent  de  nombreux 


CHAP.  XIV.  INSTRtJMETfS.  105 

modèles  ;  mais  les  formes  sont  différentes  et  caractéris- 
tiques chez  les  divers  peuples.  Ainsi  les  lyres  et  les  cy- 
thares  appartiennent  particulièrement  aux  Grecs,  aux 
habilans  de  l'Asie  mineure  et  aux  Romains;  la  harpe 
semble  être  le  partage  des  habitans  de  la  haute  Asie, 
de  l'Egypte  et  du  nord  de  l'Europe. 

La  fable,  qui  se  mêle  en  tout  à  l'histoire  dos  Grecs , 
attribue  à  Mercure  l'invention  de  la  lyre,  qui  n'eut 
originairement  que  trois  cordes.  Le  nombre  de  ces 
cordes  fut  successivement  augmenté,  mais  il  ne  fut  ja- 
mais porté  au-delà  de  sept ,  ce  qui  en  faisait  un  instru- 
ment fort  borné,  puisqu'il  n'avait  point  de  manclie , 
comme  nos  guitares,  pour  qu'on  pût  y  modifier  les  inîo- 
nations  de  ces  sept  cordes,  lesquelles  conséquemment 
ne  pouvaient  rendre  que  sept  sons  différens.  Il  résultait 
de  là  qu'un  musicien  ne  pouvait  changer  de  mode  sans 
changer  de  lyre.  Les  variétés  de  la  lyre  se  désignaient 
par  les  noms  de  cythare ,  de  chélys ,  et  ùe  phonninx. 
Ces  instrumens  se  pinçaient  autrefois  avec  les  doigts  , 
mais  plus  souvent  avec  une  espèce  de  crochet  qu'on 
appelait  plectre,  ce  qui  prouve  qu'on  ne  faisait  sonner 
qu'une  corde  à  la  fois. 

L'origine  de  la  harpe  est  environnée  d'obscurité.  On 
la  trouve  dans  l'Inde ,  en  Egypte ,  sur  les  monumens  les 
plus  antiques,  chez  les  Hébreux,  en  Italie,  chez  un  an- 
cien peuple  nommé  Arpe ,  chez  les  Scandinaves  et  dans 
l'ancienne  Angleterre,  sans  pouvoir  découvrir  si  tous  ces 
peuples  l'avaient  reçu*  par  communication  ou  s'ils 
l'avaient  inventée  simultanément.  L'usage  de  la  harpe 
chez  les  anciens  peuples  de  l'Inde  et  de  l'Egypte  fait 
présumer  que  les  Grecs  et  les  Romains  en  ont  eu  con- 
naissance ,  et  qu'ils  s'en  servaient  ;  mais  le  nom  que  nous 


106  RAPPORTS  DES  eOKS.  »ECT.   Il» 

lui  doqaoos  ne  $e  rencontre  chez  aucun  djes  écrivains  4« 
l'antiquité.  On  cfoit  généralement  que  |e  trigone  ojj  la 
sambuque  n'était  que  cet  instrument.  Un  savant  cooit 
mentateur  des  poésies  de  Callimaque  a  prouvé  que  toiJ^ 
les  instr^mens  ù  cordes  obliques,  tels  qwe  le  nutdum  ,  le 
harbitos ,  le  magade  ,  Je  psalieriutn  et  la  sainluiCjue  , 
dont  il  est  parlé  dans  l'Écriture  sainte  et  dans  les  écrits 
de  l'antiquité ,  étaient  du  genre  de  la  harpe  et  d'origine 
phénicienne,  chaldaïqjie  ou  syrienne.  A  l'éj^ard  des  Ro- 
mains, on  ç,TQ}^  que  n^jS^rument  qq'U$  nomment  ^iVzAfû/a 
n'est  autre  chose  que  la  harpe ,  et  que  ce  nom  n'.est  que 
la  traduction  de  hynnor  ou  hinnar,  qui,  dans  le  texte 
hébreu  de  l'Écriture  sainte  ,  désigne  la  harpe  de  David, 
Le  nombre  de^  cordes  de  la  harpe  antique  était  de  treize 
dans  l'origine;  niais  ce  nonibre  s'est  succ«ssiv«»neot 
augmenté  jusqu'à  vingt,  et  mèipe  jusqu'à  quarante,  Cps 
cordes  étaient  faites  de  boyaux  comme  celles  de  nos 
harpies,  ainsi  qij'oq  le  voit  par  jjne  épigramme  griecque 
de  l'Anthologie.  Les  p/eupies  de  l'antiquité  pe  paraiss/snt 
pas  avoir  eu  connaissance  de.s  cordes  d'a'^ier  ni  de  )aj.T 
ton  ;mais  plusieurs  auteurs  assurent  qn' ils  faisaient  usage, 
dans  l'origine,  des  cordes  de  lin,  ce  qni  e$t  di'fi'-ije  à 
croir.e,  c^  (cje  pareiJJ^  cordes  pe  pquvaiept;  produire 
qu'un  son  sourd  et  presque  nul. 

D'abord  la  harpe  p'eut  aucuri  mojjen  de  n7Q4ulatipp  , 
parce  qu'il  était  jjnpossible  d'y  mettre  WP  assez  grai)4 
nombrp  de  cjprdps  pour  représenter  tous  les  soqs  qui 
correspon4ent  aux  notes  exprirpécs  par  les  dièses  et  les 
bémols.  Ce  ne  fut  (jue  vers  1660  qu'on  imagina,  dans 
le  Tyrpl,  dajpMter  des  crochets  à  l'insfr^pient  pour 
éleyej*  l'intopatlOD  des  cordes  lorsqije  çe|3  ^^9^\\  i?éçe§r 
sairp  \  mais  l'obligation  de  se  servi}-  d.c^  plains  pour  faire 


(^xi.  Kiv.  iNSTfii!A<ei»s.  107 

momoir  les  cfôchéls  était  fort  gênante  ;  ttn  (utbiér  de 
bonaWeHh ,  nArtimé  Hochbfucker,  inventa^  erf  1720  nne 
inécartîrjue  qn'ort  faisait  montoif  avec  lés  pfîed*,  et  qui 
de  là  prit  le  nom  de  pédale.  Qtioi(jnc  fort  imparfaites, 
les  pédales  étaient  nfiles;  mais  la  difficulté  de  mouvoir 
les  pieds  en  même  tenijis  qtie  les  mains  ,  difficulté  à  la- 
quelle on  n'était  point  habitué,  fit  rèntoftti'er  beaucoup 
d'obstacles  à  l'inventciir.  En  17*40,  la  hàrj^e  à  pédales 
n'était  point  encore  connue  en  France  ;  ce  fut  un  musi- 
cien allemand,  rtommé  Stecht,  c(ui  l'y  irttroduîsit.  Hoch- 
brucker,  neveu  du  l'nthiér,  et  bon  harpiste  pour  le  temps, 
en  perfectionna  l'nsage  vers  1770.  Mais  ce  fut  Surtout 
Naderman,  luthier  de  Paris,  qui  dorina  an  mécanisme 
de  la  harpe  à  crochets  toute  la  perfectiort  dont  il  était 
stisceptibïé;  Cependant  lé  principe  de  té  mécanisme  était 
vicieux  et  sujet  à  beaucoujt)  d'accidens;  c'est  ée  qui  dé- 
termina M.  Sébastien  Erard  à  le  remplacer  par  un  méca- 
nisme mieinj  conçlr,  dalis  lequel  une  fotfrchette  pirtçail 
la  COT'de  sans  la  tiret  hors  de  la  lign^  perpenditulaire , 
canirrre  cela  aVait  lieu  dans  Irt  harpe  à  crochets.  JLe  stic- 
cèâ  de  son  invention  le  conduisit  ensuite  a  compléter  les 
améliorations  dont  la  harpe  était  susceptible,  en  donnant 
à  chaque  corde  la  possibilité  de  fournir  trois  intonations, 
savoir,  le  k  le  tf  et  le  i^,  ce  qu'il  fit  au  moyen  d'un 
mécanisme  à  double  inom>einent.  Il  ne  par.iît  pas  qiî'on 
puisse  rien  ajouter  à  ces  harpes;  toute  la  perfection  dé- 
sirable s'y  trouve. 

J'ai  dit  qu'on  n'a  point  connu  chez  les  Grecs  les 
instrumens  à  cordes  pincées  ayant  un  manche  sur  lequel 
on  appuie  les  cordes  en  divers  endroits  pour  en  modifier 
le»  intonations;  ttrti*  tes  wi6'n*mén»  égyptiens  offrent 
quelques  exemples  de  cette  espèce  d'instrumensj  ce  qui 


108  B  APPORTS  DES  SONS.  SECT.  II. 

pourrait  faire  croire  que  ce  peuple  a  été  assez  avancé  dans 
la  musique.  L'origine  des  instrumens  à  cordes  pincées  et 
à  manche  parait  se  trouver  dans  l'Orient.  La  wina  de 
l'Inde,  qui  consiste  dans  un  corps  de  bambou  attaché 
à  deux  grandes  courges ,  et  qui  est  monté  de  plusieurs 
cordes  qu'on  appuie  sur  des  chevalets  avec  les  doigts, 
parait  être  le  type  de  ces  instrumens  ;  mais  c'est  surtout 
Veoud  ou  luth  des  Arabes ,  importé  en  Europe  par  le» 
Maures  d'Espagne,  qui  a  servi  de  modèle  à  tous  les  ins- 
trumens de  cette  espèce,  car  ces  instrumens  n'en  sont 
que  des  variétés  plus  ou  moins  compliquées. 

Le  corps  du  luth,  convexe  du  côté  du  dos,  et  à  table 
plate ,  a  un  manche  large  garni  de  dix  cases  pour  poser 
les  doigts  aQu  de  varier  les  intonations.  Il  est  monté  de 
onze  cordes,  dont  neuf  sont  doubles,  trois  à  l'unisson 
et  six  à  l'octave.  Les  deux  premières,  ou  chanterelles , 
sont  simples.  Cet  instrument  est  oifûcile  à  jouer  et 
demande  beaucoup  d'étude.  Il  était  autrefois  cultivé 
avec  succès;  Bérard ,  en  Allemagne,  et  deux  musiciens 
nommés  Gaultier,  en  France ,  s'y  sont  rendus  célèbres 
dans  le  dix-septième  siècle.  Du  nom  de  luth  on  a  fait 
luthier,  qui  signifia  d'abord  un  fabricant  de  lullis,  et 
qu'on  a  appliqué  depuis  à  tous  les  facteurs  d'instrumens 
à  cordes,  et  même  à  ceux  qui  construisent  des  instru- 
mens à  vent. 

Une  imitation  du  lulh  ,  de  proportions  beaucoup  plu» 
considérables,  et  monté  d'un  plus  grand  nombre  de 
cordes,  a  été  nommé  autrefois  archiluth.  De  tous  les 
instrumens  du  même  genre  ,  celui-là  avait  le  son  le  plus 
volumineux;  mais  la  largeur  excessive  de  son  manche, 
qui  le  rendait  fort  incommode  à  jouer,  l'a  fait  abau- 
donner. 


HaP.  \IV.  INSTBUMENS.  109 

Le  théorie  élait  aussi  une  espèce  de  luth  qui  avait 
lenx  manches  accolés  parallèlement  ;  le  plus  petit  de 
•es  manches  élait  semblable  à  celui  du  luth,  et  portait 
c  même  nombre  de  cordes  ;  mais  le  second ,  qui  était 
)eaucoupplus  grand,  soutenait  les  huit  dernicves  cordes, 
|ui  servaient  pour  les  basses. 

Deux  autres  sortes  de  luth  ont  été  fort  en  usage  vers 
e  commencement  du  dix-huitième  siècle;  le  premier 
le  ces  instrumens  s'appelait  la  pandore.  Il  y  avait  le 
néme  nombre  de  cordes  qui  s'accordaient  de  la  même 
nanière;  mais  au  lieu  d'être  faites  de  boyau,  ces  cordes 
îtaient  de  métal.  Une  autre  différence  se  faisait  aussi 
emarquer  dans  sa  forme.  Au  lieu  d'être  convexe,  le  dos 
le  la  pandore  était  plat.  Le  second  instrument  du  genre 
lu  lulh  était  la  mamlore.  Celui-ci  n'avait  que  quatre 
•ordes  qui  étaient  accordées  de  quinte  en  quarte.  On 
[baissait  quelquefois  la  corde  la  plus  haute  ou  cliante- 
elle  d'un  ton  pour  obtenir  d'autres  accords  ;  cela  s'ap- 
jelait  jouer  a  corde  avalée.  Ces  deux  instrumens  ont 
essé  d'être  en  usage  depuis  long-tenqjs. 

Ënhn  ,  un  petit  instrument  qui  appartient  à  l'espèce 
iu  luth  se  nomme  mandoline.  Le  corps  est  rond 
:omme  le  lulh,  mais  le  manche  a  plus  de  rapport  avec 
?L  ^uilare  ,  dont  je  parlerai  tout  à  l'heure.  La  man- 
doline se  lient  de  la  main  gauche,  et  l'on  en  lire  des 
sons  par  le  moyen  d'une  plume  tenue  avec  l'extrémiié 
du  pouce  et  de  l'index;  mais  II  faut  que  l'index  soit  tou- 
jours au-dessous  du  pouce  sans  serrer  la  plume.  Les 
quatre  cordes  de  cet  instrument  sont  accordées  à  l'unis- 
son de  celles  du  violon.  En  Italie  il  y  a  des  mandolines 
à  trois  cordes,  d'autres  à  cinq,  dont  l'accord  varie  selon 
le  caprice  des  maîtres.  Le  calascione  ou  colascione , 


110  RAPPORTS  DKS  SO>'S  SECT.    II. 

petit  instrument  avec  un  très  long  manche,  dont  le  peu- 
ple napolitain  se  sert,  est  une  espèce  particulière  de 
mandoline  qui  se  joue  aussi  avec  une  plume.  Il  est  ordi- 
nairement monté  de  trois  cordes,  mais  quelquefois  il 
n'en  a  que  deux. 

Toute  cette  famiHe  du  luth  a  disparu  de  la  musique 
européenne  et  ne  se  retrouve  plus  que  dans  l'Orient , 
où  elle  joue  un  grand  rôle  dans  les  concerts.  Aux 
seizième  et  dix-septième  siècles  elle  tenait  la  première 
place  dans  ce  qu'on  nommait  les  concerts  de  chambre 
{^viuHca  da  caméra) y  et  c'était  avec  ces  mêmes  instru- 
mens  qu'on  accompagnait  les  madrigaux,  villanelles, 
chansons  de  tables  et  autres ,  qui  étaient  toujours  chan- 
tés à  plusieurs  parties.  Tous  les  concerts  que  représen- 
tent les  tableaux  du  Titien  ,  de  Valentin  ,  et  des  autres 
peintres  anciens  de  l'école  italienne,  offrent  de  ces  réu- 
nions d'instrumens  à  cordes  pincées  et  de  chanteurs. 
Quoiqu'ils  n'eussent  qu'une  qualité  de  son  peu  éclatante, 
ces  mêmes  instrumens  faisaient  aussi  partie  des  orchestres 
dans  l'origine  de  l'opéra.  On  en  voit  un  exemple  dans  le 
drame  musical  intitulé  :  //  S.  Alessio ,  composé  par 
Etienne  Landi,  en  1634.  L'instrumentation  de  cet  ou- 
vrage était  composée  de  trois  parties  distinctes  de  vio- 
lons, de  harpes,  de  luths,  de  théorbes ,  de  basses  de 
viole,  et  de  clavecins  pour  la  basse  continue.  Un  pareil 
orchestre  paraîtrait  aujourd'hui  bien  sourd,  mais  l'effet 
en  serait  original. 

La  guitare  paraît  être  originaire  d'Espagne,  quoi- 
qu'on la  trouve  dans  quelques  parties  de  l'Afrique.  Elle 
est  connue  en  France  depuis  le  onzième  siècle;  on  lui 
donnait  alors  le  nom  de  guiterne.  C'est  à  peu  près  le  seul 
des  instrumens  à  cordes  pincées  et  à  manche  qui  soit 


CHAP.  XIV.  INSTRtMENS.  111 

resté  en  usage.  On  sait  que  le  corps  de  la  guitare  est 
aplati  des  deux  côtés;  elle  est  montée  de  six  cordes,  et 
son  manche  est  divisé  par  cases  pour  y  poser  les  doigts. 
En  France,  en  Allemagne  et  en  Angleterre,  l'art  de 
jouer  de  la  guitare  est  porté  à  un  très  haut  point  de  per- 
fection ;  dans  ces  derniers  temps,  MM.  Sor ,  Aguado, 
Hiierta  et  Carcassi  en  ont  fait  un  instrument  de  concert , 
et  sont  parvenus  à  y  exécuter  de  la  musique  très  compli- 
quée à  plusieurs  parties;  mais  en  Espagne,  pays  origi- 
naire de  cet  instrument,  il  ne  sert  qu'à  accompagner 
les  boléros,  les  tirannas  et  autres  airs  nationaux,  et 
ceux  qui  s'en  servent  en  jouent  d'instinct  en  frappant 
les  cordes  ou  les  raclant  avec  le  dos  de  la  main. 

Toutes  les  recherches  qui  ont  été  faites  pour  décou- 
vrir si  les  peuples  de  l'antiquité  ont  eu  connaissance  des 
instrumens  à  archet  ont  été  infructueuses,  ou  plutôt  il 
est  à  peu  près  démontré  qu'il  leur  a  été  complètement 
inconnu.  Il  est  vrai  qu'on  a  cité  une  statue  d'Orphée  qui 
tient  un  violon  d'une  main  et  un  archet  de  l'autre  ;  mais 
en  V  regardant  de  près ,  on  s'est  aperçu  que  le  violon  et 
l'archet  sont  de  l'invention  du  sculpteur  qui  a  restauré 
la  statue.  On  a  cité  aussi  des  passages  d'Aristophanes , 
de  Plutarque,  d'Athénée  et  de  Lucien,  où  l'on  préten- 
dait trouver  la  preuve  de  l'existence  de  l'archet  chez  les 
Grecs  ;  mais  le  moindre  examen  fait  évanouir  toutes  ces 
prétendues  preuves. 

Nul  doute  que  les  instrumens  à  table  d'harmonie,  à 
manche,  et  à.  cordes  élevées  sur  un  chevalet  et  mises  ea 
vibration  par  un  archet  ne  soient  originaires  de  l'Occi- 
dent; mais  à  quelle  époque,  et  dans  quelle  partie  de 
l'Europe  ont-ils  été  inventés?  voilà  ce  qu'il  n'est  pas 
facile  de  décider.  On  trouve  dans  le  pays  de  Galles  un 


118  *  RAPPORiS   DES  SONS.  SEtiT.   II. 

instrument  de  forme  presque  carrée,  ayant  un  manche 
et  des  cordes  élevées  sur  un  chevalet;  cet  instrument, qui 
parait  exister  dans  le  pays  de  toute  antiquité,  se  nomme 
crwlh  et  se  joue  avec  un  archet.  On  le  regarde  en  An- 
gleterre comme  le  père  des  diverses  espèces  de  violes  et 
du  violon. 

Les  monuraens  gothiques  du  moyen-âge,  et  particu- 
lièrement les  portails  d'église  du  dixième  siècle,  sont  les 
plus  anciens  où  l'on  trouve  des  instrumens  de  l'espèce 
générique  qu'on  nomme  viole;  mais  on  serait  encore 
dans  l'incertitude  sur  les  divisions  de  ce  genre  d'instru- 
mens,  si  le  manuscrit  d'un  traité  de  musique  composé 
par  Jérôme  de  Moravie  ,  au  treizième  siècle  ,  n'avait  levé 
tous  les  doutes  à  cet  égard.  On  y  voit  que  la  viole  se  di- 
visait en  deux  sortes  d'instrumens:  la  rubebbe  et  la  viole  y 
ou  vielle'^.  La  rubebbe  n'avait  que  deux  cordes  qui  s'ac- 
cordaient à  la  quinte  ;  la  vielle  en  avait  cinq  dont  l'ac- 
cord se  faisait  de  différentes  manières.  Ces  instrumens 
n'avaient  pas  précisément  la  forme  de  nos  violons  et  de 
nos  violes;  la  table  d'harmonie  ou  dessus,  et  le  dos  de 
l'instrument  n'étaient  point  séparés  comme  dans  ceux-ci 
par  la  partie  intermédiaire  qu'on  nomme  éctisses  ;  le 
dos  était  rond  comme  celui  des  mandolines,  et  la  table 
était  collée  sur  les  bords.  Plus  tard  ,  ces  rubebbes  et  ces 
vielles  subirent  diverses  modifications,  et  donnèrent 
naissance  aux  différentes  violes,  savoir  :  la  viole  pro- 
prement dite,  qui  se  plaçait  sur  les  genoux  et  qui  était 
montée  de  cinq  cordes;  le  pardessus  de  viole,  qui  avait 
aussi  cinq  cordes  accordées  à  la  quinte  de  la  viole,  la 

(i)  La  vielle  dont  il  s'iigit  n'avait  point  de  rajjpoit  avet:  riustiu- 
meut  qu'on  appelle  aujourd'hui  du  ce  uoui  ;  celui-ci  s'appelait 
ref«  dan»  l'ancieu  langage  français. 


CHAP.   XIV.  IWSTRUMEIfS.  118 

basse  de  viole ,  que  les  Italiens  nommaient  viola  du 
gamba,  j)oiir  la  distinguer  des  antres  qu'on  désignait 
souvent  par  le  nom  de  viola  da  braccio  :  la  basse  de 
viole  était  montée  tantôt  de  cinq  cordes,  tantôt  de  six  ; 
le  violone  ,  ou  grande  viole,  qui  était  posé  sur  un 
pied,  et  qui  était  monté  de  sept  cordes  ;  et  V accorda , 
autre  espèce  de  î'/o/o.'/e qui  était  monté  de  douze  cordes, 
et  même  de  quinze,  dont  plusieurs  résonnaient  à  la  fois 
et  faisaient  harmonie  à  chaque  coup  d'archet.  I.e  violone 
et  l'accorda  avaient  un  manche  divisé  par  cases  comme 
le  luth  et  la  guitare;  on  ne  pouvait  les  jouer  qu'en  se 
tenant  debout,  à  cause  de  leurs  grandes  proportions.  Il 
y  eut  encore  une  espèce  de  viole,  qu'on  appelait  7h'oI(' 
d'amour.  Ses  proportions  étaient  à  peu  près  celles  du 
pardessus  de  viole  ;  elle  était  montée  de  quatre  cordes  de 
boyau  attachées  comme  aux  autres  instrumens,  et  de 
quatre  cordes  de  laiton  qui  passaient  sous  la  touche,  et 
qui,  étant  accordées  à  l'unisson  avec  les  cordes  de  bnyau, 
rendaient  des  sons  doux  et  harmoniques  quand  l'instru- 
ment était  joué  d'une  certaine  manière.  La  viole  d'a- 
mour est  un  instrument  plus  moderne  que  les  autres. 

Vers  le  quinzième  siècle,  il  parait  qu'on  réduisit  en 
France  la  viole  à  de  plus  petites  proportions  pour  en 
former  le  violon  tel  qu'on  le  connaît  aujourd'hui,  et 
pour  borner  cet  instrument  à  quatre  cordes.  Ce  qui  peut 
faire  croire  que  cette  réforme  se  fit  en  France,  c'est  que 
le  violon  est  indiqué  dans  les  partitions  italiennes  de  la 
fin  du  seizième  siècle  sous  les  noms  de  piccoli  violim 
alla  franccse  (petits  violons  à  la  française  ).  I.e  violon 
est  monté  de  quatre  cordes  accordées  par  quintes,  uii , 
la,  ré ,  sol.  Il  sert  pour  les  dessus.  La  supériorité  des 
5ons  du  violoa  sur  ceux  dts  violes  lui  fit  bientôt  donner 


114  RAPPORTS   DES  SO^■S.  SECT.   II. 

la  préférence ,  et  il  devint  d'un  usage  général.  D'habiles 
luthiers  se  formèrent  en  France,  en  Italie  et  en  Alle- 
magne ,  et  de  leurs  ateliers  sortirent  d'excellens  violons 
qui  sont  encore  très  recherchés  j>ar  les  virtuoses.  Parmi 
ces  luthiers  on  remarque  Nicolas  et  André  Amati,  de 
Crémone ,  à  la  fin  du  seizième  siècle  ;  Antoine  et  Jérôme 
Amati ,  fils  d'André  ;  Antoine  Stradivari ,  élève  des 
Amati  ,  ainsi  que  Pierre -André  Guarneri  et  Joseph 
Guarneri  ;  Jacques  Steiner,  tyrolien,  également  élève 
des  Amati,  et  plusieurs  autres.  Les  violons  de  ces  habiles 
artistes  se  vendent  depuis  cent  Louis  jusqu'à  six  mille 
francs.  On  en  fait  aujourd'hui  des  imitations  qui  sont 
fort  bonnes ,  et  qui  même ,  par  leur  parfaite  ressemblance 
avec  les  instrumens  anciens,  trompent  d'habiles  con- 
naisseurs. Ces  imitations  ne  coûtent  que  trois  cents 
francs. 

De  toutes  les  anciennes  violes ,  on  n'a  conservé  que 
celle  qu'on  nomme  proprement  viole,  on  alto,  ou  quinte, 
et  qu'on  a  réduite  à  (juatre  cordes,  qui  sont  accordées 
une  quinte  plus  bas  que  les  cordes  du  violon.  Cet  instru- 
ment fait  l'office  du  contralto  dans  l'orchestre. 

La  basse  de  viole,  instrument  difficile  à  jouer  et  dont 
les  sons  étaient  un  peu  sourds,  a  disparu  pour  faire 
place  au  violoncelle,  moins  séduisant  peut-être  dans 
lessolos,  mais  plus  énergi(iue  el  plus  propre  aux  eflets 
d'orchestre.  Il  fut  introduit  en  France  sous  le  règne  de 
Louis  XIV  par  un  Florentin  nommé  Jean  Batistini; 
mais  il  ne  fut  déûnitiveinenl  substitué  à  la  basse  de  viole 
que  vers  1720. 

Le  violone  et  V accorda ,  instrumens  dont  on  se  ser- 
vait dans  les  orchestres  pour  jouer  la  basse  de  l'har- 
monie ,  avaient  le  défaut  de  toutes  les  espèces  de  violes, 


(.11  VP.    XIV.  INSTRUMENS.  1  15 

celui  de  ne  produire  que  des  sons  sourds  et  d«'^pourvus 
d'énergie.  A  mesure  que  la  musique  eut  plus  d'éclat,  il 
fallut  songer  à  donner  plus  de  force  à  la  basse.  C'est 
pour  arriver  à  ce  but  qu'on  construisit  en  Italie  des  con- 
trebasses au  commencement  du  dix-huitième  siècle.  Ces 
instrumens  ,  qui  sont  aujourd'hui  le  fondement  des 
orchestres,  ne  furent  adoptés  en  France  qu'avec  beau- 
coup de  difliculté.  La  première  contrebasse  fut  introduite 
a  l'Opéra  en  1700;  ce  fut  un  musicien  nommé  Monté- 
clair  qui  la  jouait;  en  17Ô7  ,  il  n'y  avait  encore  qu'un 
de  ces  instrumens  dans  l'orchestre  de  ce  théâtre,  et  l'on 
ne  s'en  servait  que  le  vendredi,  qui  était  le  beau  jour  de 
ce  spectacle.  Gossec  en  fit  ajouter  une  seconde;  Plùiidor, 
compositeur  français,  en  mit  une  troisième  dans  l'or- 
chestre pour  la  première  représentation  de  son  opéra 
à' Emelinde ,  et  successivement  le  nombre  de  ces  instru- 
mens s'est  augmenté  jusqu'à  huit.  La  contrebasse  est 
montée  avec  de  très  grosses  cordes  qui  sonnent  à  l'octave 
inférieure  des  sons  du  violoncelle.  Ces  cordes  sont  au 
nombre  de  trois  aux  contrebasses  françaises ,  et  sont, 
accordées  par  quintes  ;  les  contrebasses  allemandes  et 
italiennes  sont  montées  de  quatre  cordes,  accordées  par 
quartes;  ce  dernier  système  est  préférable,  eu  ce  qu'il 
rend  l'instrument  plus  facile  à  jouer. 

La  troisième  espèce  d'instrumens  à  cordes  est  celle  où 
les  cordes  sont  mises  en  vibration  par  le  moyen  du  cla- 
vier ;  ces  instrumens  sont  de  deux  sortes.  La  première  a 
pour  origine  l'imitation  des  luths  et  sutres  instrumens 
dont  les  cordes  étaient  pincées  par  une  plume  ou  par  un 
morceau  d'écaillé  de  tortue;  imitation  qui  se  fit  par  \\a 
mécanisme,  et  qui  avait  l'avantage  d'offrir  les  moyens 
ji'embrasser  une  plus  grande  étendue  de  sons  qu'on  qe 


116  RAPPORTS  DKS  SONS.  bECT.  II. 

pouvait  le  faire  sur  toutes  ces  variétés  de  luiii.  Le  pre- 
mier instrument  de  cette  espèce  qu'on  fabriqua  fut  le 
clavicithcrium  ,  qui  était  monté  de  cordes  de  boyaux 
qu'on  mettait  en  vibration  au  moyen  de  morceaux  de 
buffles  poussés  par  les  touches  du  clavier.  La  virginale 
était  aussi  un  instrument  à  cordes  et  à  clavier.  On  a  ré- 
pété souvent  que  !e  nom  de  cet  instrument  était  une  flat- 
terie pour  Elisabeth,  reine  d'Angleterre,  qui  en  jouait 
et  (jui  l'aimait  beaucoup  ;  mais  c'est  une  erreur,  car  la 
virginale  existait  déjà  en  lâSO  et  portait  le  même  nom. 
Le  clavecin  était  aussi  déjà  inventé  à  cette  époque.  Cet 
instrument,  le  plus  grand  de  tous  ceux  de  son  espèce, 
avait  à  peu  près  la  forme  des  pianos  à  queue  de  nos 
jours.  Il  avait  souvent  deux  claviers  qui  pouvaient  être 
joués  ensemble  et  qui  faisaient  sonner  à  la  fois  deux 
notes  accordées  à  l'octave  pour  chaque  touche.  Les 
cordes  du  clavecin  étaient  mises  en  vibration  par  des 
languettes  de  bois  armées  d'un  morceau  de  plume  ou  de 
buffle  qui  étaient  soulevées  par  les  touchés  du  clavier. 
Le  bout  de  plume  ou  de  bufile  ployait  en  appuyant  sur 
la  corde  et  la  faisait  résonner  en  s'échappant.  ISepinettCy 
qui  n'était  qu'un  clavecin  carré,  était  construite  sur  le 
même  principe.  Il  y  en  avait  d'une  espèce  particulière 
dont  le  son  était  fort  doux  ,  et  qu'on  appelait  à  cause  de 
cela  sourdines.  Le  clavecin  ,  l'épinette  et  le  clavicorde 
ont  continué  d'être  en  usage  jusque  vers  1 785. 

L'autre  genre  d'instrumens  à  clavier  avait  eu  pour 
modèles  les  instrumens  orientaux  appelés  canon  et 
psalteriiun  ou  psaltérion.  On  sait  que  le  psaltérion 
dont  on  se  servait  beaucoup  autrefois  était  composé 
d'une  caisse  carrée,  sur  laquelle  une  table  de  sapin  était 
collée.  Sur  celte  table,  des  cordes  de  fd  de  fer  ou  de 


1.J1A.1>.    SIV.  ïîiSTRUMENS.  117 

laiton  étaient  tendues  par  des  chevilles  et  accordées  de 
manière  à  produire  tous  les  sons  de  la  gamme.  Celui 
qui  jouait  de  cet  inslruuiont  avait  dans  cliaque  main  une 
petite  baguette  dont  il  frappait  les  cordes.  Un  pareil 
instrument  était  à  la  fois  incommode  et  borné  dans  ses 
moyens;  on  songea  à  le  perfectionner,  et  des  recherches 
qu'on  fit  à  ce  nujet  naquit  le  clai'icorde ,  qui  consistait 
en  une  caisse  d'harmonie  de  forme  triangulaire,  avec  une 
table  d'harmonie,  des  chevilles  auxquelles  étaient  atta- 
chées des  cordes  de  laiton,  et  un  clavier  qui  faisait  mou- 
voir de  petites  lames  de  cuivre,  lesquelles  frappaient  les 
cordes. 

Ce  fut  ce  même  instrument  qui  plus  tard  donna  l'idée 
du  piano.  Le  son  grêle  et  quelquefois  désagréable  du 
clavecin  ,  de  l'épinctte  et  même  du  clavicorde  ,  avait  dé- 
terminé depuis  long -temps  quelques  constructeurs  de 
clavecins  à  chercher  les  moyens  d'en  produire  de  plus 
doux;  déjà,  en  1716,  un  facteur  de  Paris,  nommé 
3Iarius,  avait  présenté  à  l'examen  de  l'Académie  des 
sciences  deux  clavecins  dans  lesquels  il  avait  substitué 
des  petits  marteaux  aux  languettes  pour  frapper  les 
cordes.  Deux  ans  après,  Christoluica,  Florentin,  peifec- 
tionna  celte  invention  et  fit  le  premier  piano  qui  a  servi 
de  modèles  pour  ceux  qu'on  a  faits  depuis  lors;  mais  il 
paraît  que  les  premiers  essais  de  ce  genre  lurent  reçus 
froidement,  car  ce  n'est  que  vers  1760  que  Zumpe,  en 
Angleterre,  et  SUbeiuttann ,  en  Allemagne,  eurent  des 
fabriques  régulières,  et  commencèrent  à  multiplier  les 
pianos.  En  1776,  MM.  Erar.d  frères  fabriquèrent  les 
premiers  instrumens  de  celte  espèce  qui  aient  été  con- 
struits en  France  ,  car  jusque  là  on  avait  été  obligé  de  les 
faire   venir  de  Londres.   Les    premiers   pianos   qu'on 


118  RAPPORTS  DES  SONS.  SECT.  II. 

construisit  à  cette  époque  n'avaient  qu'une  étendue  de 
cinq  octaves  ,  et  les  marteaux  frappaient  sur  deux  cordes 
à  l'unisson  pour  chaque  note.  Dans  la  suite  l'étendue  du 
clavier  fut  successivement  portée  jusqu'à  six  octaves  et 
demie,  et  le  nombre  de  cordes  appartenant  à  chaque  note 
s'éleva  jusqu'à  trois,  afin  que  le  son  eût  plus  de  corps 
et  de  force.  De  nombreux  changemens  ou  perfectionne- 
mens  ont  été  faits  dans  la  fabrication  des  pianos.  Leur 
volume  a  été  augmenté,  leur  mécanisme  a  subi  mille 
transformations,  leur  qualité  de  son  a  cessé  d'être  mai- 
gre et  criarde  jiour  devenir  moelleuse  et  puissante.  La 
forme  même  de  l'instrument  a  beaucoup  varié;  on  en  a  fait 
en  carré  long,  qui  sont  ceux  dont  l'usnge  est  le  plus  com- 
mun ;  à  queue,  c'est-à-dire  dans  la  forme  des  clavecins; 
verticaux,  dont  les  cordes  sont  verticalesou  obliques,  et 
de  beaucoup  d'autres  formes  qu'il  sérail  trop  long  de  dé- 
tailler. Les  pianos  anglais  ont  eu  lo;ig-temps  une  supé- 
riorité incontestable  sur  les  autres,  principalement  les 
pianos  à  queue;  maison  en  construit  maintenant  à  Paris 
qui  peuvent  lutter  avec  eux  sous  le  rapport  de  la  qualité 
des  sons  et  sous  celui  du  mécaiiisme.  Les  pianos  alle- 
mands, et  surtout  ceux  de  Vienne,  sont  aussi  fort  agréa- 
bles, mais  leur  son  est  mpins^jubsant.  Leur  mécanisme 
est  très    léger  et  facilite  l'exécution   des  difficultés. 

De  tout  ce  qui  vient  d'être  dit ,  il  résulte  que  les  ins- 
trumens  qui  ont  pour  principe  des  cordes  flexibles  et  so- 
nores sont  susceptibles  de  beaucoup  de  variété,  et  qu'ils 
ont  subi  des  modifications  de  tout  genre,  comme  tout  ce 
qui  appartient  à  la  musique;  les  mêmes  circonstances  se 
font  remarquer  dans  les  instrumens  qui  ont  pour  principe 
sonore  l'air  insufflé.  Ces  instrumens  se  divisent  en  trois 
espèces  principales  :  1  "  les  flûtes  qui  résonnent  au  inoven 


CIIAP.   XIV.  INSTRUMRNS.  119 

de  l'air  introduit  dans  un  tube  par  un  orifice  latéral  ou 
supérieur;  2"  les  instruinens  à  anches,  dans  lesquels  les 
battemens  d'une  languette  flexible  produisent  le  son  ; 
3"  les  instrumens  à  bocal,  oîi  les  intonations  se  forment 
par  les  modifications  du  mouvement  et  de  la  position  des 
lèvres. 

Les  flûtes  d'une  forme  quelconque  se  trouvent  chez 
tous  les  peuples  qui  ont  cultivé  la  musique.  L'Inde,  l'E- 
gypte, la  Chine,  nous  en  offrent  des  variétés  qui  re- 
montent aux  temps  les  plus  reculés.  Les  Grecs  et  les  Ro- 
mains avaient  des  flûtes  de  formes  différentes  pour  la 
plupart  de  leurs  cérémonies  religieuses,  pour  les  festins, 
les  mariages,  les  funérailles,  etc.  La  flûte  à  plusieurs 
tuyaux  de  diverses  longueurs,  qu'on  voit  encore  entre 
les  mains  de  quelques  musiciens  ambulans,  parait  être  la 
plus  ancienne  dont  les  Grecs  aient  fait  usage;  ils  attri- 
buaient son  invention  à  Marsyas.  Après  celle-là  venait 
la  flûte  phrygienne ,  qui  n'avait  qu'un  seul  tuyau  percé 
de  trois  trous,  et  qui  se  jouait  en  mettant  un  des  bouts 
de  l'instrument  dans  la  bouche;  la  flûte  double,  compo- 
sée de  deux  tuyaux  percés  de  trous,  lesquels  se  réunis- 
saient vers  un  seul  orifice  qu'on  appelait  embouchure ,  se 
tenait  des  deux  mains.  C'est  le  seul  instrument  de  l'an- 
tiquité qui  puisse  faire  croire  que  les  Grecs  et  les  R.o- 
mains  ont  connu  l'harmonie;  car  il  n'est  pas  présumable 
que  les  deux  tuyaux  fussent  destinés  à  jouer  à  l'unisson. 
Quelques  critiques  ont  cru  que  les  deux  tuyaux  de  cette 
llùte  ne  jouaient  point  ensemble,  et  qu'ils  ne  servaient 
qu'à  passer  d'un  mode  dans  un  autre.  Tout  cela  est  fort 
obscur.  Les  trois  espèces  de  flûtes  principales  dont  il 
vient  d'être  parlé  se  divisaient  eu  une  infinité  d'autres; 


120  RAPPORTS    DFS   SOWS.  SECT.  II. 

les  archéologues  prétendent  que  le  nonthre  âe-<  variétés 
était  de  plus  de  deux  cents. 

On  a  souvent  agité  cette  question  :  si  les  Grecs  et  les 
Romains  ont  connu  laj^ûte  traicrsière ,  qui  est  la  seule 
dont  on  se  sert  maintenant  dansla  musique  régulière?  Des 
monumens  antiques  récesnmeul  découverts  ont  résolu  la 
difficulté  en  montrant  sur  un  bas-relief  un  génie  qui  joue 
de  cette  flûte.  Cela  explique  les  passages  des  écrivains  de 
Tanliquilé,  qui  établissent  en  beaucoup  d'endroits  les 
différences  de  \^Jlûle  droite  avec  Vàjlûie  oblique.  Cette 
flûte  oblique  n'était  que  \zjlute  traversière. 

On  ne  se  servait  autrefois  en  France  que  de  XaJliUe  à 
bec,  c'est-à-diie  dont  l'embouchure  était  placée  à  l'unt* 
des  extrémilés.  Toutes  les  parties  de  flûte  qui  sont  indi- 
quées dans  les  opéras  du  siècle  de  Louis  XIV  se  jouaien; 
avec  des  flûtes  de  celle  espèce.  On  l'appelait  ausû  flûte 
dnnce  on  flûte  d' Angleterre.  Dans  la  nouveauté,  on 
donna  le  nom  ùej/ûîe  allemande  à  la  flûte  traversière, 
parce  queson  usage  se  renouvela  d'abord  en  Allemagne; 
jusque  vers  la  fin  du  dix -huitième  siècle,  elle  n'eut  qu^ 
six  trous,  qui  se  bouchaient  avec  les  doigts  ,  et  un  sep- 
tième, qui  s'ouvrait  par  le  moyen  d'une  clef.  Comme  la 
plupart  des  instrumcns  à  vent,  celui-là  était  imparfait 
dans  plusieurs  noies,  qui  manquaient  de  justesse;  ces 
défauts  ont  été  corrigés  par  les  clefs  qu'on  y  a  ajoutées,  et 
qui  se  trouvent  maintenant  au  nombre  de/i«/V^. 

Ces  clefs  ont  d'ailleurs  prociu'é  la  facilité  d'exécuter 


(i)  On  a  même  fabriqué  en  Allemagne  des  flûtes  qui  ont  jus- 
qu'à dix-sept  clefs;  elles  ont  une  étendue  plus  grande  que  les  au- 
tres; mais  cette  multiplicité  de  clefs  est  embarrassante,  «t  la  sono* 
rite  (le  l'iDstrument  en  est  altérée. 


IMAH.    \l\.  l>STRt>IF.?rS.  1 1' t 

beaucoup  de  tiaits  qui  ne  pouvaient  se  taire  sur  l'an- 
cienne flûte. 

I-a  ttùle  est  naturellement  clans  le  ton  de  }é  ;  ce  qui 
n'empêche  pas  qu'elle  soit  susceptible  d'être  jouée  dans 
tous  les  autres  tons.  On  se  sert,  dans  la  musique  militaire 
et  dans  la  musique  d'instrumens  à  vent  qu'on  nomme 
inii.sique  d' hannonle ,  de  fliiies  un  peu  plus  petites;  cel- 
les-ci sont  accordées  en  Jiii  b,  enja,  etc.  Une  autre  es- 
pèce de  petite  fliile  qui  se  nomme  octavin  on piccolo  sert 
aussi  dans  l'orchestre,  lorsqu'on  veut  obtenir  des  effets 
brillans  ou  lorsqu'on  veut  (aire  des  imitations  matérielles 
telles  (pie  le  siitlementdes  vents  dans  la  tenqjèle.  Le  /jic- 
colo ,  dont  les  proportions  sont  de  moitié  plus  petites 
que  celles  de  la  flûte  ordinaire,  soiuie  une  octave  plus 
haut ,  ce  qui  rend  la  qualité  de  ses  sons  criarde  et  sou- 
vent désagréable.  Les  compositeurs  de  l'école  actuelle 
poussent  l'emploi  de  cet  instrument  jusqu'à  l'abus. 

La  matière  des  flûtes  est  ordinairement  le  buis,  l'é— 
bène,  ou  l'érable,  etc.;  mais  tous  ces  bois  ont  l'incon- 
vénient de  s'échauffer  par  le  souifle  et  de  faire  varier  I  in- 
tonation de  l'instrument.  Pour  obvier  à  ce  défaut,  on  a 
fait  des  flûtes  de  cristal  qui  étaient  à  peu  près  invaria- 
bles, mais  leur  poids,  incommode  dans  l'exécution,  et 
leur  fragilité,  les  ont  fait  abandonner.  On  a  trouvé  plus 
simple  et  plus  utile  d'adapter  à  la  flûte  ordinaire  un 
corps  à  pompe  qui  se  tire  lorsque  la  flûte  s'échauffe,  et 
qui  rétablit  l'équilibre  en  allongeant  le  tube. 

De  toutes  les  anciennes  fliites  à  bec,  une  seule  est 
restée  en  usage  ;  c'est  le  flageolet^  dont  l'effet  est  agréa- 
ble dans  les  orchestres  de  bal.  Cet  instrument  était  au- 
trefois fort  défectueux  sous  le  rapport  de  la  justesse,  et 
fort  borné  qiinnt  à   ses  movens  d'exécution  ;  maison  l'a 


122  RAPPORTS  DES  SONS.  SECT.  II. 

beaucoup  perfectionné  depuis  quelques  années ,  par  le 
moyen  des  clefs  qu'on  y  a  ajoutées. 

De  toutes  les  variétés  d'instrument  à  anche  dont 
on  a  fait  usage  à  diverses  époques,  on  u'a  conservé  que 
le  hautbois ,  le  cor  anglais ,  la  clarinette  et  le  basson. 

Le  plus  ancien  de  ces  instrumens  est  le  hautbois;  car 
les  ménétriers  s'en  servaient  déjà  vers  la  fin  du  seizième 
siècle.  A.  cette  époque  c'était  un  instrument  grossier, 
d'un  son  dur  et  rauque  ,  qui  n'avait  que  huit  trous,  sans 
clefs.  Sa  longueur  totale  était  de  deux  pieds.  Il  resta  long- 
temps dans  un  état  d'imperfection  qui  ne  permettait  de 
l'employer  dans  l'orchestre  que  pour  la  musique  cham- 
pêtre. On  ne  commença  à  lui  ajouter  des  clefs  que  vers 
1690.  Les  Besozzi ,  qui  se  rendirent  célèbres  par  leur 
talent  sur  cet  instrument,  s'attachèrent  à  le  perfection- 
ner; un  luthier  de  Paris  nomuié  De  Lusse  y  ajouta  une 
clef  vers  1780;  et  quelques  autres  améliorations  faites 
dans  ces  derniers  temps  l'ont  porté  à  un  point  de  perfec- 
tion qui  ne  laisse  rien  à  désirer.  Son  étendue  est  mainte- 
nant de  plus  de  deux  octaves  et  demie. 

La  qualité  de  son  du  hautbois  se  prête  merveilleuse- 
ment à  l'expression  quand  il  est  bien  joué;  ce  son  a  plus 
d'accent ,  plus  de  variété  que  celui  delà  flûte.  Quoiqu'il 
soit  le  produit  d'un  petit  instrument,  il  a  beaucoup  de 
puissance  et  perce  souvent  au-dessus  des  masses  d'or- 
chestre les  plus  formidables.  Le  hautbois  était  l'instru- 
ment à  vent  aigu  dont  les  compositeurs  faisaient  le  plus 
fréquent  usaj^e  il  y  a  quarante  ans.  Il  convient  également 
aux  effets  de  l'orchestre  et  aux  solos. 

L'instrument  auquel  on  a  donné  improprement  le  nom 
de  cor  anglais  peut  être  considéré  comme  le  contralto 
du  hautbois,  dont  il  est  une  variété.  Ses  dimensions  sont 


CHAP.   XIV.  INSTRUMENS.  123 

beaucoup  plus  grandes,  en  sorte  que,  pour  en  faciliter  le 
jeu,  on  a  élénl)Ii{;é  de  le  courber.  Le  cor  anglais  sonne 
Tine  quinte  plus  bas  que  le  hautbois,  à  cause  de  la  lon- 
gueur de  son  tube.  Le  son  en  est  plaintif,  et  ne  convient 
qu'aux  mouvemens  lents,  aux  romances,  etc.  C'est  un 
instrument  moderne,  et  qui  était  inconnu  il  y  a  soixante 
ans. 

Le  ba<!Son,  qui  appartient  aussi  à  la  famille  des  haut- 
bois, et  qui  en  est  la  basse,  a  été  inventé  en  r53â_par 
un  chanoine  de  Pavie  nommé  Ajrânifl.  Les  Italiens  l'ap- 
\\Q:\\ej\\.fngntto ,  parce  qu'il  est  formé  de  plusieurs  pièces 
de  bois  réunies  en  faisceau.  Son  étendue  est  de  trois  oc- 
taves et  demie  environ;  sa  note  la  plus  grave  est  le  si  |> 
au-dessous  de  la  portée,  à  la  clef  de  fa.  La  forme  de  cet 
instrumenta  subi  beaucoup  de  modiflcations,  et  malgré 
les  travaux  de  beaucoup  d'artistes  et  de  luthiers  habiles, 
il  est  loin  d'être  arrivé  à  la  perfection.  Plusieurs  de  ses 
notes  sont  fausses,  et  ne  peuvent  être  corrigées  jusqu'à 
un  certain  point  que  par  l'adresse  de  l'artiste  qui  en  joue. 
Presque  tous  ses  sons  îjraves  sont  trop  bas ,  comparés  aux 
sons  élevés.  On  a  multiplié  ses  clefs  jusqu'au  nombre  de 
quinze,  et  ses  moyens  d'exécution  en  sont  devenus  plus 
riches,  mais  tous  ses  défauts  n'ont  pas  été  corrigés.  Plu- 
sieurs sons  n'ont  pas  cessé  d'être  sourds  ;  d'autres  sont  res- 
tés faux,  principalement  dans  le  bas.  Il  est  vraisemblable 
qu'on  ne  vaincra  ces  défauts  qu'en  perçant  l'instrument 
sur  de  meilleurs  principes  et  dans  un  système  nouveau. 
Peut-être  faudra-t-il  changer  sa  forme  et  recourber  son 
extrémité  inférieure,  afin  de  l'échauffer  plus  promptement. 

Les  défauts  que  je  viens  de  signaler  dans  le  basson 
sont  d'autant  plus  fâcheux  que  c'est  un  instrument  in- 
dispensable dans  la  composition  des  orchestres.   Il  rem- 


I  24  RAPPORTS  DES   50MS.  SECT.  II. 

plit  à  la  fois  l'office  de  ténor  et  de  basse  des  instrumens 
à  anche,  et  lie  les  différentes  parties  de  l'harmonie.  Son 
emploi  est  d'un  nieillpiir  effet  dans  l'orchestre  cpie  dans 
le  snlo.  Sfs  accens  sont  tiisles  et  monotones  lorsqu'il 
chante  seul. 

On  se  sert  quelquefois  en  Allemagne  d  une  contre- 
basse de  basson  qu'on  appelle  conlrebassnn  ;  ses  propor- 
tions sont  plus  grandes  que  celles  du  basson,  dont  il 
sonne  l'octave  grave.  Cet  instrument  est  difficile  à  jouer, 
et  exige  que  l'exécutant  soit  constitué  d'une  manière 
robuste.  Il  a  le  défaut  d'articuler  lentement  les  sons. 

La  clarinette  est  un  instrument  beaucoup  plus  mo- 
derne que  le  hautbois  et  le  basson;  car  elle  n'a  été  in- 
ventée qu'en  1690,  par  Jean-Christophe  Deuner^  luthier 
de  Xaremberg.  Elle  n'eut  d'abord  qu'une  seule  clef,  et 
ne  fut  que  dun  usage  fort  rare,  à  cause  de  ses  nombreuses 
imperfections;  mais  la  beauté  de  ses  sons  détermina 
quelques  artistes  à  chercher  des  améliorations  dans  sa 
construction.  Insensiblement ,  le  nombre  de  ses  clefs  s'ac- 
crut jusqu'à  cinq;  mais  arrivée  à  ce  point,  elle  n'olfrait 
encore  que  peu  de  ressources.  Cependant  elle  resta  dans 
cet  état  depuis  1770  jusqu'en  1787,  où  une  sixième  clef 
lui  fut  ajoutée.  Enfin,  le  nombre  de  ces  clefs  s'est  suc- 
cessivement élevé  jusqu'à  quatorze;  mais  tous  les  dé- 
fauts n'ont  pas  disparu.  Outre  les  difficultés  d'exécution, 
qui  existent  encore,  plusieurs  notes  manquent  de  jus- 
tesse et  de  sonorité.  Il  en  est  de  la  clarinette  comme  du 
basson;  il  faudrait  que  son  tube  fût  percé  d'après  un 
meilleur  système  acoustique.  La  multiplicité  des  clefs 
dans  les  instrumens  à  vent  corrige  les  défauts  de  justesse, 
mais  nuit  à  la  sonorité. 

Les  difficultés  d'exécution  sont  telles  sur  la  clarinette, 


CHAP.  XIV.  INSTRUMEMS.  120 

que  le  même  instrument  ne  peut  pas  servir  pour  jouer 
dans  tous  les  lon.i.  Les  tons  clans  les(juels  il  y  a  beauroiip 
de  dièses  exigent  une  ciarinelte  parlicidière;  il  en  est  de 
même  des  tons  dans  lesquels  il  y  a  beaucoup  de  bémols. 
Pour  comprendre  ceci,  il  faut  savoir  que  plus  le  tube 
d'un  instrument  à  vent  est  court  ,  plus  ses  intona- 
tions sont  élevées,  et  que  ces  intonations  s'abaissent  à 
mesure  qu'on  allonge  le  tube.  Il  résulte  de  là  que  si 
l'on  allonge  une  clarinette  de  telle  sorte  que  son  ul  soit 
à  l'unisson  de  si^,  il  suffira  de  faire  l'instrument  de 
celte  dimension  pour  que  l'instrumentiste  produise  l'effet 
du  ton  de  si  l>  en  jouant  en  ul  ;  il  sera  donc  dispensé 
d'exécuter  les  notes  qui  offrent  des  difficultés  à  vaincte 
dans  l'exécution.  Si  l'on  continue  à  allonger  la  clarinette 
de  manière  que  son  ;//  sonne  comme  la ,  l'effet  que  pro- 
duira l'artiste  en  jouant  eu  ut  sera  comme  s'il  jouait  eu 
la ,  avec  trois  dièses  à  la  clef.  Telle  est  l'explication  de 
ces  mots  dont  les  musiciens  se  servent  :  clarinette  enut , 
claiinette  en  si  L,  clarinette  en  la. 

La  clarinette  n'a  été  introduite  dans  les  orchestres 
français  qu'en-iXiX^  elle  est  devenue  depuis  lors  d'un 
usage  général,  non-seulement  dans  les  orchestres  ordi- 
naires, mais  dans  les  orchestres  militaires,  où  elle  joue 
la  partie  principale.  Le  son  de  cet  instrument  est  volu- 
mineux, plein,  moelleux,  et  d'une  qualité  qui  ne  res- 
semble à  celle  d'aucun  autre  instrument,  particulière- 
ment dans  la  partie  grave,  qu'on  nomme  le  chalumeau. 
On  se  sert  dans  la  musique  militaire,  pour  les  solos,  de 
clarinettes  en  mi  t»  ou  en  fa,  dont  le  son  aigu  et  per- 
çant convient  à  ce  genre  de  musique,  destinée  à  être 
entendue  en  plein  air.  Il  y  a  aussi  de  très  grandes  cla- 
rinettes qui  sonnent  une  quinte  plus  bas  que  les  clari- 

ir. 


126  RAPPORTS   DES  SONS.  SECT.   II. 

nettes  en  ut ^  et  qui  ont  une  qualité  de  son  concentrée; 
on  les  nomme  cors  de  bassette.  Ce  sont  les  contraltos 
de  la  clarinette.  On  a  construit  depuis  peu  une  clari- 
nette-basse qui  n'offre  pas  plus  de  ditficultés  dans  l'exé- 
cution que  la  clarinette  ordinaire  et  qui  complète  cette 
famille  d'inslrumens. 

Dans  la  troisième  espèce  d'instrumens  à  vent,  qui  se 
jouent  avec  une  embouchure  ouverte  ou  bocal,  sont 
compris  les  cors,  les  diverses  sortes  de  trompettes ,  les 
trombones  ,  le  serpent  et  les  ophicléides. 

Les  airs  de  chasse  ne  furent  joués  dans  les  premiers 
opéras  que  par  des  cornets  faits  eu  corne  et  percés  de 
trous  :  on  appelait  ces  instrumens  grossiers  des  cornets 
a  bouquin.  Le  cor  de  chasse  fut  inventé  en  France  eu 
1680,  mais  il  ne  servit  d'abord  que  pour  l'exercice  dont 
il  porte  le  nom.  Transporté  en  Allemagne,  il  y  fut  per- 
fectionné, et  fut  appliqué  à  l'usage  de  la  musique.  Eu 
1730,  on  commença  à  s'en  servir  en  France,  mais  il  ne 
fut  introduit  dans  l'orchestre  de  l'Opéra  qu'en  1757. 
Les  sons  qu'on  en  pouvait  tirer  alors  étaient  en  petit 
nombre,  mais  en  1760,  un  Allemand  nommé  Hamvl 
découvrit  qu'il  était  possible  de  lui  en  (aire  prodiï*  ■• 
d'autres  en  bouchant  en  partie  avec  la  main  la  [«••!• 
tion  ouverte  de  l'instrument  qu'on  nomme  le  pavil- 
lon. Cette  découverte  ouvrit  la  carrière  à  d'habiles  ar- 
tistes qui  se  livrèrent  à  l'étude  du  cor.  Un  autre  Alle- 
mand, qui  se  nommait  Haltenhofi ,  compléta  les  amélio- 
rations de  cet  instrument  en  y  ajoutant  une  pompe  à 
coulisse,  au  moyen  de  laquelle  on  en  règle  la  justesse 
lorsque  les  intonations  s'élèvent  par  la  chaleur. 

Il  est  dans  la  nature  du  cor  de  ne  donner  que  de  cer- 
tsijnçs  noies  d'un  son  pur,  franc  et  ouvert  ;  les  autres 


i;HAP.  XIV.  INSTUUMENS.  127 

sons  ne  s'obtiennent  que  par  l'arlifice  de  la  main  et  sont 
beaucoup  plus  sourds;  on  les  nomme  sons  bouchés. 
Mais  couAiMc  il  est  des  tons  où  ces  sons  bouchés  sont 
piécisément  ceux  qu'on  enlendiait  le  plus  souvent,  ce 
qui  serait  sans  effet,  on  a  imaj^iné  d'ajouter  au  cor  des 
tubes  d'allonge  dont  les  fonctions  sont  de  changer  le 
degré  d'élévation  de  rinstrumenl,  comme  on  change 
celui  de  la  clarinette  en  allongeant  son  tube.  Par  exemple, 
si  l'on  suppose  que  le  cor  est  en  iit,  on  conçoit  qu'en 
y  ajoutant  un  tube  qui  baisse  ut  d'un  ton  ,  le  cor  sera  en 
si  1?,  et  tous  les  sons  ouverts  du  ton  iVut  seront  des  sons 
ouverts  du  ton  de  si  \>.  Si  le  tube  ajouté  est  plus  grand, 
il  mettra  le  ton  du  cor  en  la  ;  s'il  est  plus  grand  encore, 
il  pourra  le  mettre  en  sul,  et  ainsi  de  suite.  Il  résulte  de 
là  que  l'artiste  joue  toujours  en  ut,  et  que  le  tube  ajouté 
opère  la  transposition  nécessaire. 

Ce  système  est  ingénieux,  et  satisferait  à  tous  les  be- 
soins, si  la  musique  ne  modulait  pas,  ou  si,  en  modu- 
lant ,  elle  laissait  le  temps  de  changer  le  tube  transposi- 
teur;  mais  il  n'en  est  pas  toujours  ainsi.  Le  compositeur 
se  voit  donc  obligé  de  supprimer  les  parties  de  cors  dans 
de  certains  endroits  où  elles  produiraient  de  très  bons 
effets,  ou  de  les  écrire  en  sons  bouchés  qui  ne  rendent 
point  sa  pensée.  Frappé  de  cet  inconvénient  du  cor  or- 
dinaire, un  musicien  allemand  nommé  .Sto/zf/ imagina 
d'y  ajouter  des  pistons  par  lesquels  il  mettait  à  volonté 
la  colonne  d'air  du  cor  en  communication  avec  celle  de 
tubes  additionnels,  et  par-lù  obtenait  des  sons  ouverts  à 
toutes  les  notes.  Cette  amélioration,  perfectionnée  par 
plusieurs  facteurs  d'instrumens  de  cuivre,  sera  quelque 
jour  d'une  grande  ressource,  mais  n'est  pas  encore  généra- 
lement adoptée.  11  faut  avouer  d'ailleurs  que  le  défaut  des 


12S  1;AP10RT5  Dt3  6U>.i.  SEtT.    II. 

pistons  est  de  détériorer  la  belle  qualité  de  son  du  cor. 

Le  cor  est  un  instrument  précieux  par  la  variété  de 
ses  effets  :  tour  à  tour  énergi(|iie  ou  suave,  il  se  prête 
également  bien  à  l'expression  des  passions  violentes  et  à 
celle  des  sentimens  tendres.  Aussi  bien  placé  dans  les 
solos  que  dans  les  remplissages  d'orchestre,  il  se  modifie 
de  mille  manières,  mais  il  faut  le  bien  connaître  pour  en 
tirer  tout  le  parti  possible.  L'art  d'écrire  les  parties  du  cor 
avec  les  développcmens  de  toutes  ses  ressources  est  un 
art  tout  nouveau  que  Rossini  a  porté  à  sa  perfection. 

La  trompette  est  le  soprano  du  cor,  car  elle  sonne 
un  octave  plus  haut  que  cet  instrument.  Plus  bornée 
que  le  cor,  puisqu'elle  n'a  pas  les  sons  bouchés  avec  la 
main ,  elle  n'est  pas  moins  utile  dans  beaucoup  de  cir- 
constances. Sa  qualité  de  son  est  plus  argentine,  plus 
claire,  plus  pénétrante,  et  les  effets  d'un  de  ces  instru- 
mens  ne  peuvent  être  remplacés  par  ceux  de  l'autre. 
Leur  réunion  offre  quelquefois  des  combinaisons  fort 
heureuses.  On  ne  connaissait  point  autrefois  d'autre 
trompette  que  la  trompette  de  cavalerie;  pendant  bien 
des  années,  il  n'y  en  eut  pas  d'autres  à  l'Opéra.  Enfin 
des  trompettes  perfectionnées  furent  apportées  d'Alle- 
magne par  les  deux  frères  Braun,  vers  1770,  et  depuis 
lors,  la  trompette  de  cavalerie  a  disparu  des  orchestres. 
Au  commencement  de  ce  siècle,  on  fit  des  trompettes 
semi-circulaires,  qui  n'étaient  à  proprement  parler  que 
de  petits  cors;  mais  le  son  de  ces  trompettes  n'avait  pas 
l'éclat  des  autres.  On  est  revenu  à  l'ancien  modèle  depuis 
quelques  années. 

Les  intonations  de  la  trompette  se  modifient  pour  les 
changemens  de  tons  de  la  même  manière  que  dans  le 
cor;  c'est-à-dire,  par  le  moyen  de  tubes  additionnel:.. 


CHAP.  XIV.  INSTRUMEIfS.  î2!) 

Divers  essais  avaient  été  faits  il  y  a  environ  vingt- 
cinq  ans,  pour  aiigmenlerles  ressources  delà  trompette, 
niais  sans  (pie  le  résiillal  eùl  répondu  à  ce  qu'on  en  at- 
tendait; enfin  un  Anj^lais  a  imaginé  d'y  ajouter  des  clefs 
comme  aux  clarinettes  ou  hautbois,  et  ses  reclierches 
pour  y  parvenir  ont  été  couronnées  parle  succès;  mais 
il  s'est  trouvé  qu'il  avait  créé  un  nouvel  instrument  donl 
la  qualité  de  son  a  peu  de  rapport  avec  le  son  de  la  trom- 
pette ordinaire;  c'était  une  acquisition,  mais  non  un 
perfectionnement.  L'inventeur  désigna  sa  trompette  à 
clefs  sous  le  nom  de  Hotn-bugle.  Cet  instrument,  sur  le- 
quel ou  peut  exécuter  des  chants  comme  sur  la  clari- 
nette ou  le  hautbois ,  est  maintenant  employé  avec  succès 
dans  la  musique  militaire,  et  même  dans  l'opéia.  Pios- 
sini  en  a  fait  un  heureux  essai  dans  le  premier  acte  de 
Semiramide. 

Le  principe  de  la  construction  des  trompettes  à  clefs 
une  fois  découvert,  on  en  a  conclu  qu'on  pouvait  l'appli- 
quer à  des  instrumens  de  même  nature,  mais  de  plus 
grandes  dimensions,  qui  seraient  l'alto,  le  ténor  et  la 
basse  de  cette  même  trompette.  On  a  donné  à  celte  fa- 
mille nouvelle  d'instrumens  de  cuivre  le  nom  CCophi- 
cléide.  L'étendue  de  ces  divers  instrumens  est  à  peu 
près  celle  des  voix  auxquelles  ils  corresj'ondent.  Leur 
réunion  produit  d'heureux  eifets,  qui  ne  peuvent  être 
remplacés  par  les  autres  instiumens  de  cuivre  qui  n'ont 
pas  les  mêmes  moyens  de  modulai  ion. 

Il  est  un  autre  genre  d'instrumens  qu'on  nomme  trom- 
bones,  et  qui  est  aussi  susceptible  de  donner  toutes  les 
notes  en  sons  ouverts,  par  le  moyen  d'une  coulisse  que 
l'exécutant  fait  mouvoir  pour  allonger  ou  raccourcir  le 
tube  sonore.  Cet  instrument  se  divise  en  trois  voix ,  sa- 


130  RAPPORTS  DES  SO>'S.  SECT.   II. 

voir  :  l'alto,  le  ténor  et  la  basse.  Le  son  des  trombones 
est  plus  sec,  plus  dur  et  plus  énergique  que  celui  des 
opliicléides;  mais  ces  instru-nens  ont  des  effets  qui  leur 
sont  propres,  et  qui  ne  ressemblent  à  ceux  d'aucun  autre. 

Toute  cette  grande  division  d'instrumens  de  cuivre  se 
met  en  vibration  par  le  moyen  d'une  emboucbure  coni- 
que et  concave  contre  laquelle  on  applique  les  lèvres 
plus  ou  moins  rapprochées,  en  soufflant  et  en  marquant 
la  note  par  un  coup  de  lani;ne.  Cet  exercice  est  fort  dif- 
ficile, et  exige  autant  de  dispositions  naturelles  que  de 
travail.  Il  est  des  personnes  dont  la  conformation  des 
lèvres  est  un  obstacle  insurmontable  pour  bien  jouer  du 
cor  ou  de  la  trompette. 

Aux  instrumens  à  embouchure  ou  hornf.  qui  viennent 
d'être  nommés,  il  faut  ajouter  le  serpent,  instrument 
barbare  qui  fatigue  l'oreille  dans  nos  églises,  mais  qui 
n'est  pas  aussi  désagréable  dans  la  musique  militaire, 
lorsqu'il  est  uni  aux  autres  basses  telles  que  le  trombone 
et  l'ophicléide.  Cet  instrument  fut  inventé  en  1590  par 
un  chanoine  d'Auxerre,  nommé  Edme  Guillaume.  Sa 
construction  est  vicieuse  de  tous  points;  beaucoup  de 
ses  intonations  sont  fau.sses,  et  à  côté  de  notes  très  fortes 
on  en  rencontre  qui  sont  très  faibles.  L'expulsion  du  ser- 
pent des  églises  sera  un  pas  de  fait  vers  le  bon  goût  en 
musique. 

Le  plus  considérable ,  le  plus  majestueux ,  le  plus 
riche  en  effets  divers  et  le  plus  beau  des  instrumens  à  I 
vent  est  l'orgue.  On  a  dit  que  c'est  plutôt  une  machine 
qu'un  instrument;  cela  peut  être  vrai;  mais  de  quelque 
manière  qu'on  le  qualifie,  il  n'est  pas  moins  certain  que 
c'est  une  des  plus  belles  inventions  de  l'esprit  humain,     j 

Quelques  passages  des  écrivains  de  l'antiquité,  et  no-  ' 


riIAP.   XIV.  INSTRUMENS.  l3l 

tammentde  Vitruve,  ont  mis  à  lalorture  les  commenta- 
teurs qui  voulaient  éclaircir  ce  que  ces  écrivains  enten- 
daient par  Voi^ite  hydraulique ,  dont  ils  attribuent 
l'invention  à  Ctésibius,  niutliéiuaticien  d'Alexandrie, 
qui  a  vécu  du  temps  de  Ptolémée-Évergète.  Tout  ce 
qu'en  ont  dit  ces  commentateurs  n'a  servi  qu'à  prouver 
qu'ils  étaient  complètement  ignorans  de  l'objet  en  ques- 
tion. Vraisemblablement  on  ne  saura  jamais  quel  était 
le  mécanisme  de  cet  orgue  hydraulique.  Quant  à  l'orgue 
pneumatique ,  c'est-à-dire  celui  qui  est  mis  en  vibration 
par  l'action  de  l'air,  qu'on  dit  aussi  avoir  été  connu  des 
anciens,  sans  autre  garantie  que  quelques  passages  ob- 
scurs de  poètes,  il  est  vraisemblable  que  ce  n'était  que 
l'instrument  rustique  des  Ecossais  et  des  Auvergnats, 
que  nous  nommons  cornemuse. 

L'orgue  le  plus  ancien  dont  il  est  fait  mention  dans 
l'histoire  est  celui  que  l'empereur  Conslantin-Copronyme 
envoya  en  757  à  Pépin,  père  de  Charlemagne.  Ce  fut  le 
premier  qui  parut  en  France.  On  le  plaça  dans  l'église 
de  Saint-Corneille,  à  Compiègne.  Cet  orgue  était  exces- 
sivement petit  et  portatif  comme  celui  qui  fut  construit 
par  un  Arabe  nommé  Giafar,  et  qui  fut  envoyé  à  Char- 
lemagne par  le  kalife  de  Bagdad. 

Grégoire,  prêtre  vénitien,  parait  avoir  été  le  premier 
qui  ait  essayé  de  construire  des  orgues  en  Europe.  En 
826,  il  fut  chargé  par  Louis-le-Pieux  d'en  faire  un  pour 
l'église  d'Aix-la-Chapelle.  Les  progrès  furent  peu  ra- 
pides dans  l'art  de  construire  cet  instrument;  il  paraît 
même  que  ce  ne  fut  qu'au  quatorzième  siècle  que  cet 
art  commença  à  se  développer.  François  Landino,  sur- 
nommé Francesco  d'egli  organi,  à  cause  de  son  habi- 
leté sur  cet  instrument,  y  fit  beaucoup  d'amélioratiosa 


132  RAPPORTS  DES  SONS.  SECT.  li. 

vers  1350.  En  1470,  un  Allemand  nommé  Bernard, 
organiste  à  Venise,  inventa  les  pédales. 

L'orgue  se  compose  de  plusieurs  suites  de  tuyaux, 
dont  les  uns  sont  en  bois  ou  en  mélange  d'etain  et  de 
plomb,  qu'on  nomme  étoffe ,  à  bouche  ouverte  comme 
les  flûtes  à  bec,  et  dont  les  autres  portent  à  leur  em- 
!)OUchure  des  languettes  de  cuivre  ou  anches.  Ces  tuyaux 
sont  placés  debout,  du  côté  de  leur  embouchure,  dans 
des  trous  qui  sont  pratiqués  à  la  partie  supérieure  de  cer- 
taines caisses  de  bois  qu'on  appelle  sommiers.De ^vands 
soufflets  distribuent  le  vent  dans  des  conduits  qui  com- 
muniquent avec  l'intérieur  des  sommiers.  A  chaque  ran- 
gée de  tuyaux  correspond  une  réglette  de  bois  qui  est 
aussi  percée  de  trous  à  des  distances  égales  aux  trous  du 
sommier.  Cette  réglette  s'appelle  registre.  Le  registre  est 
disposé  de  manière  à  couler  facilement  lorsqu'il  est  tiré 
ou  poussé  par  l'organiste.  Si  le  registre  est  poussé,  ses 
trous  ne  correspondent  point  à  ceux  du  sommier  dans 
lesquels  les  tuyaux  sont  placés,  et  dès  lors  le  vent  ne  peut 
entrer  dans  les  tuyaux;  mais  s'il  est  tiré,  ces  trous  se 
trouvent  dans  une  correspondance  parfaite,  et  l'air  peut 
pénétrer  dans  les  tuyaux.  Alors,  quand  l'organiste  pose 
le  doigt  sur  une  touche,  celle-ci ,  en  s'enfonçant,  tire  une 
baguette  qui  ouvre  une  soupape  correspondante  au  trou 
du  registre,  le  vent  y  pénètre,  et  le  tuyau  de  la  note  rend 
le  son  qui  appartient  à  cette  note.  Si  plusieurs  registres 
sont  tirés,  tous  les  tuyaux  de  ces  registres  qui  corres- 
pondent à  la  note  touchée  résonnent  à  la  fois.  Si  le  tuyau 
est  une  flûte,  le  son  est  produit  par  la  colonne  d'air  qui 
vibre  dans  le  tuyau;  si  c'est  un  jeu  d'anche,  le  son  ré- 
sulte des  battemens  de  la  languette  qui  brise  l'air  contre 
les  parois  du  bec  du  tuyau. 


«MAP.  XIV.  INSTRUMEWS.  1 3  :i 

Outre  la  variété  de  sons  qui  provient  de  cette  diver- 
sité de  principes  dans  leur  production  ,  l'orgue  en  a 
d'autres  qui  sont  le  résultat  des  différentes  formes  et 
dimensions  des  tuyaux.  Par  exemple,  si  le  tujau  de  la 
note  qui  correspond  à  Vutde  la  clefdeya  au-dessous  de 
la  portée  est  un  jeu  de  flûte  de  huit  pieds  de  hauteur,  on 
lui  donne  le  nom  débute  ouverte;  ce  jeu  est  dans  toute 
l'étendue  du  clavier  à  l'unisson  des  différentes  voix  que 
rfnferme  cette  étendue,  savoir  la  basse,  le  ténor,  le 
contralto  et  le  soprano  le  plus  aigu.  La  hauteur  des 
tuyaux  décroît  à  mesure  que  les  notes  s'élèvent.  Si  le 
plus  grand  tuyau  n'a  que  deux  pieds,  et  s'il  est  de  l'es- 
pùce  des  flûtes,  on  lui  donne  le  nom  depresiant,  qui 
veut  dire  excellent,  parce  que  c'est  le  jeu  qui  résonne 
avec  le  plus  de  netteté  et  qui  perd  le  moins  son  accord. 
Ce  jeu  est  plus  élevé  d'une  octave  que  la  flûte  ouverte. 
.Si  le  tuyau  n'a  qu'un  pied  hauteur  à  la  note  la  plus 
grave,  il  résonne  à  deux  octaves  au-dessus  de  la  flûte 
ouverte  :  on  nomme  flageolet  l'ensemble  de  ses  tuyaux. 
Ln  jeu  de  flûte  qui  a  huit  pieds  dans  son  ut  grave  ré- 
sonne à  une  octave  plus  bas  que  la  flûte  de  quatre.  Il  y 
a  des  jeux  de  seize  et  même  de  trente- deux  pieds.  Lors^ 
que  l'espace  dont  on  peut  disposer  n'est  pas  assez  vaste 
pour  qu'on  puisse  faire  usage  de  tuyaux  d'aussi  grandes 
dimensions,  on  se  sert  d'un  moyen  ingénieux  qui  con- 
siste à  boucher  l'extrémité  du  tuyau  opposée  à  l'embou- 
chure; la  colonne  d'air  sonore  ne  trouvant  point  d'is- 
sue est  forcée  de  redescendre  pour  sortir  par  une 
petite  ouvertuie  qu'on  nomme /«  lumière,  et  de  cette 
manière,  parcourant  deux  fois  la  hauteur  du  tuyau, 
elle  sonne  une  octave  plus  grave  que  si  elle  était  sortie 
jmnaédiatement  par  le  haut  de  ce  même  tuyau.  Cette 


134  RAPPORTS  DES  SOBS.  SECT.  II. 

espèce  de  jeu  de  flûte  se  norame  bourdon.  Si  c'est  un 
jeu  de  quatre  pieds  bouchés,  on  l'appelle  bourdon  de 
huit;  s'il  est  de  huit  pieds,  c'est  un  bourdon  de  seize. 
Parmi  les  jeux  de  flûte,  il  y  en  a  en  étoffe,  dont  le  tuyau 
se  termine  par  un  tuyau  plus  petit  qu'on  nomme  che- 
minée ;  d'autres  ont  la  forme  de  deux  cônes  renversés 
et  superposés;  chacun  de  ces  jeux  a  une  qualité  de  son 
particulière,  etc.  Les  jeux  d'anches,  qu'on  appelle  trom- 
pettes, clairons  y  bombardes ,  voiv  humaine,  se  pré- 
sentent sous  la  forme  d'un  cône  renversé  ouvert.  Les 
tuyaux  du  chromorne,  autre  jeu  d'anche,  sont  des  cy- 
lindres allongés.  La  fantaisie  des  facteurs  d'orgues  peut 
varier  ces  sortes  de  jeux  à  volonté. 

On  trouve  dans  l'orgue  une  sorte  de  jeu  dont  l'idée 
est  très  siti|;ulière,  et  dont  l'effet  est  un  mystère.  Ce  jeu, 
qu'on  dési{!;ne  en  f^onéral  sous  le  nom  de /eu  de  muta- 
tion, se  divise  en  fourniture  ou  mixture  et  en  cymbale. 
Chacun  de  ces  jeux  se  compose  de  quatre ,  ou  cinq  ou 
six ,  et  même  dix  tuyaux  pour  chaque  note.  Ces  tuyaux, 
de  petite  dimension  et  d'un  son  aigu,  sont  accordés  en 
tierce,  quinte  ou  quarte,  octave,  double  tierce,  etc., 
en  sorte  que  chaque  note  fait  entendre  un  accord  parfait 
j)lusieurs  fois  redoublé.  Il  en  résulte  que  l'organiste  ne 
peut  faire  plusieurs  notes  de  suite  sans  donner  lieu  à  dos 
suites  de  tierces  majeures  ,  de  quintes  et  d'octaves.  Mais 
ce  n'est  pas  tout:  si  l'organiste  exécute  des  accords,  cha- 
cune des  notes  qui  entrent  dans  sa  composition  fait 
entendre  autant  d'accords  parfaits  redoublés  ou  tri- 
plés, en  sorte  qu'il  semblerait  qu'il  doit  en  résulter 
une  cacophonie  épouvantable;  mais,  par  une  sorte  de 
magie,  lorsfjne  ces  jeux  sont  unis  à  toutes  les  espèces 
de  jeux  de  flûte,  de  deux,  quatre ,  huit ,  seize  et  trente- 


THAP.    XIV.  INSTmiMKNS.  f35 

deux  pieds,  ouverts  ou  bouchés,  il  résulte  de  ce  mé- 
lange, qu'on  nomme  plein  jeu  ,  l'ensemble  le  plus 
majestueux  et  le  plus  étonnant  qu'on  puisse  entendre. 
Aucune  autre  combinaison  de  sons  ou  d'instrumens  ne 
peut  en  donner  l'idée. 

Outre  les  solos  de  flûte,  de  hautbois,  de  clarinette, 
de  basson  et  de  trompette  qu'on  peut  exécuter  sur  l'or- 
},Mie,  le  jeu  de  cet  instrument  peut  se  diviser  en  trois 
{grands  elfets,  qui  sont  :  1°  la  réunion  de  tous  les  jeux 
de  Uûte,  qu'on  appelle  fonds  d'orgue;  2"  la  réunion 
de  tous  les  jeux  d'anches  ,  qui  prend  les  noms  de  grand 
'eu  ou  grand  chœur,  et  le  plein  jeu. 

Un  grand  orgue  a  ordinairement  quatre  ou  cinq  cla- 
viers pour  les  mains,  et  un  clavier  aux  pieds,  qu'on 
nomme  clavier  de  pédale.  Le  premier  clavier  appartient 
à  un  petit  orgue  séparé,  dont  le  nom  est  positif.  Le 
second  clavier  est  ordinairement  celui  du  grand  orgue  ; 
il  peut  se  réunir  au  premier  pour  jouer  les  deux  orgues 
ensemble.  On  y  ajoute  quelquefois  un  troisième  clavier, 
t|u'on  nomme  clavier  de  bombarde  ,  sur  lequel  on  joue 
les  jeux  d'anches  les  plus  forts.  Le  quatrième  clavier  sert 
pour  les  solos  ;  on  l'appelle  clavier  de  récit.  Le  cin- 
t|uième  clavier  est  destiné  à  produire  des  effets  A' écho. 
Quant  au  clavier  des  pédales ,  il  sert  à  l'organiste  pour 
jouer  la  basse,  lorsqu'il  veut  disposer  de  sa  main  gauche 
])Our  exécuter  des  parties  intermédiaires. 

On  a  long-temps  regretté  que  l'orgue,  qui  est  pourvu 
de  tant  de  moyens  de  variété  et  d'une  si  grande  puis- 
sance d'effet,  ne  fût  ^o'mi  expressif ,  c'est-à-dire  qu'on 
ne  pût  lui  donner  les  moyens  d'augmenter  et  de  dimi- 
nuer graduellement  l'intensité  du  son.  Quelques  facteurs 
anglais  et  allemands  avaient  d'abord  imaginé  de  faire 


186  RAPPORTS  DES  SOÎfS.  SECT.  !l. 

ouvrir  ou  fermer  par  une  pédale  des  trapes  qui  permet- 
taient au  son  de  se  produire  avec  force,  ou  qui  le  con- 
centraient dans  l'intérieur  de  l'inslrument;  mais  ce  genre 
d'expression  avait  l'inconvénient  de  ressembler  à  un  long 
bâillement.  Avant  la  révolution  ,  M.  Sébastien  Erard 
entreprit  de  construire  un  piano  organisé,  dans  lequel 
les  sons  étaient  expressifs  par  la  pression  du  doigt  sur 
la  touche  ;  il  avait  réussi  complètement  lorsque  les  trou- 
bles de  la  révolution  se  manifestèrent,  et  les  choses  en 
demeurèrent  là.  Depuis  lors,  un  amateur  instruit, 
nommé  M.  Grenié,  a  imaginé  de  rendre  l'orgue  expressif 
au  moyen  d'une  pédale  dont  la  pression  plus  ou  moiiis 
forte  donne  aux  sons  une  intensité  plus  ou  moins  grande. 
Il  a  prouvé  la  réalité  de  sa  découverte  d'abord  dans 
quelipies  petites  orgues,  ensuite  dans  des  instrumens 
de  plus  grande  dimension  à  l'École  royale  de  musique 
et  à  la  Congrégation  du  Sacré-Cœur,  à  Paris.  L'effet  de 
ces  orgues  est  de  la  plus  grande  beauté.  M.  £rard  a  mis 
le  comble  à  la  perfection  de  l'orgue  en  réunissant,  dans 
un  instrument  qu'il  a  construit  pour  la  chapelle  du  roi, 
le  genre  de  l'expression  de  la  pédale  sur  les  deux  claviers 
du  grand  orgue,  à  l'expression  par  la  pression  du  doigt 
sur  un  troisième  clavier.  Dans  cet  état,  l'orgue  est  vrai- 
ment l'instrument  le  plus  beau,  le  plus  majestueux,  le 
plus  puissant  qui  existe,  et,  l'on  peut  le  dire,  un  des 
chefs-d'œuvre  de  l'esprit  humain. 

Les  plus  célèbres  facteurs  d'orgue  ont  été,  en  France  , 
les  Dallery,  Clicquot,  MM.  Erard  et  Gren'é;  en  Italie, 
Azzolino  (lella  Cinjci  de  Sienne,  les  Tronci  dePistoie, 
Eugène  Biroldi,  Jean-Baptiste  Ramaî,  les  Serassi  de 
Bergame,  un  prêtre  dalmate  nommé  Nanchini,  et  son 
élève  Callido  ;  en  Allemagne,  Jean  Scheibe,  Godefroi 


CHAP.   XIV.  INSTRtJMENa.  137 

Silberinann,  Jean-Jac(|iies  et  INIichel  Wagner,  Sclirœt- 
ker,  Ernest  Maix  ,  Galder,  J.-G.  Taasclier  et  l'al)l)é 
Vogler.  Ce  dernier  s'est  fait  remarquer  par  un  système 
de  siinpUficdllon  dont  l'objet  est  de  faire  disparaître  de 
l'orgue  lesyVuo:  dt  mutation. 

Les  orgues  à  cylindre,  dont  les  musiciens  ambidans 
font  usage,  et  la  serinette,  sont  construites  d'après  les 
mêmes  principes  que  le  grand  orgue.  Un  cylindre  piqué 
avec  des  pointes  de  cuivre  tient  lieu  d'organiste  et  fait 
mouvoir  les  touches.  L'art  de  piquer  ou  de  noter  ces 
cylindres  se  nomme  la  tonotecknie. 

Dans  ces  derniers  temps,  on  s'est  servi  de  l'action  de 
l'air  comprimé  pour  établir  un  nouvau  système  d'instru- 
niens.  Ce  système  consiste  à  faire  agir  le  vent  par  un 
orifice  très  petit,  qui  s'ouvre  graduellement  sur  des  lames 
métalliques  très  minces,  qui  entrent  en  vibration  dès 
que  l'air  les  frappe,  et  qui  sonnent  des  sons  graduelle- 
ment plus  forts,  à  mesure  que  l'action  du  vent  se  déve- 
loppe. Ces  instrnmens  ont  été  inventés  en  Allemagne 
depuis  peu  d'années.  Leurs  variétés  se  nomment  j'hys- 
hannonica ,  éoli/ie ,  éolodion  ,  etc.;  ils  n'ont  point 
assez  de  force  pour  produire  de  l'elfet  dans  de  grandes 
salles;  mais  ils  sont  fort  agréables  dans  un  salon. 
M.  Dielz,  facteur  de  pianos  à  Paris,  a  perfectionné  ce 
système  de  résonnance  dans  un  instrument  qu'il  a  nommé 
aéréphone. 

I/effet  de  ces  instrumens  est  analogue  à  celui  qui  se 
manifeste  dans  l'harmonica ,  dont  le  principe  est  le 
frottement.  Un  Irlandais,  nommé  Puckeridge,  paraît 
avoir  été  le  premier  qui  imagina  de  réunir  un  certain 
nombre  de  verres  à  boire,  de  les  accorder  en  variant 
leur  intonation  par  la  quantité  d'eau  qa'il  y  mettait,  et 


138  RAPPORTS   DES  SO^S.  SRCT.  11. 

d'en  tirer  des  sons  en  frottant  leur  bord  avec  les  doigts 
légèrement  mouillés.  Le  célèbre  docteur  Franklin  fit 
quelques  perfeclionnemens  à  cette  découverte,  princi- 
palement en  indiquant  des  procédés  pour  fabriquer  des 
verres  propres  à  fournir  des  sons  purs.  L'instrument 
ciinsi  perfectionné  fut  apporté  en  Europe,  et  deux  sfturs 
anglaises,  mesdemoiselles  Davis,  le  mirent  en  réputation 
par  leur  talent  à  le  jouer.  Plus  tard ,  on  a  perfectionné 
l'harmonica  en  le  construisant  avec  des  cloches  de  verre 
traversées  par  un  axe  en  fer,  et  mises  en  mouvement 
j)ar  une  roue.  Un  clavier  d'une  espèce  particulière  fai- 
sait avancer  sur  le  bord  des  cloches  un  tampon  en  peau 
qui  remplaçait  le  doigt,  et  de  cette  manière  on  put  exé- 
cuter des  pièces  régulières  sur  l'harmonica  et  y  faire 
des  accords.  L'effet  vitreux  de  cet  instrument  est  nui- 
sible à  la  santé  parce  qu'il  ébranle  le  système  nerveuK 
avec  trop  de  force. 

Divers  instrumens  à  frottement  ont  été  faits  à  l'imita- 
tion de  l'harmonica  ;  le  plus  célèbre  est  le  clavicylindre 
que  le  physicien  Chladui  a  fait  entendre  à  Paris  vers 
1806.  Bien  que  l'inventeur  de  cet  instrument  ait  gardé 
le  secret  de  sa  construction,  on  a  cru  découvrir  qu'il 
consistait  en  une  suite  de  cylindres  métalliques  sur  les- 
quels une  manivelle  faisait  agir  des  archets  qui  étaient 
mis  en  contact  avec  eux  par  Je  moyen  des  touches  d'un 
clavier. 

Il  me  reste  à  parler  de  la  dernière  et  de  la  moins  im- 
portante espèce  d'instrumens,  ceux  de  percussion.  Ces 
instrumens  sont  ceux  dont  les  formes  et  l'usage  laissent 
le  moins  de  doute  dans  les  représentations  que  nous  en 
offrent  les  monumens  de  l'antiquité.  Ils  se  divisent  en 
deux   classes  principales  :  les  sonores  et  le»  bnijans- 


CHAP.  XIV.  INSTRIIMENS.  139 

Parmi  les  inslruniens  de  percussion  sonores ,  qui  ont  été 
en  usage  en  Egypte,  en  Grèce  et  à  Rome,  il  faut  ranger 
lo  sistre,  qui  consistait  en  une  espèce  d'ellipse  en 
cuivre,  traversée  par  des  tringles  sonores  qu'on  frappait 
avec  une  baguette  pour  les  faire  résonner;  les  cymbales, 
formées  de  deux  plateaux  sonores  qu'on  frappait  l'un 
contre  l'autre,  et  les  crotales  ou  grelots.  Un  seul  instru- 
ment bruyant  se  fait  remarquer  dans  les  peintures  et  les 
bas-reliefs  antiques;  c'est  le  tambour  à  grelots  que  nous 
appelons  tambour  de  basque.  On  en  jouait  comme  de 
nos  jours,  soit  en  le  frappant  avec  la  main,  soit  eu  l'a- 
gitant. 

La  musique  moderne  admet  un  grand  nombre  d'in- 
slrumens  de  percussion.  Parmi  les  sonores  on  remarque 
le  triangle,  qui  tire  son  nom  de  sa  forme,  et  qui  con- 
siste en  une  verge  d'acier  qu'on  frappe  avec  un  mor- 
(  tau  de  fer.  Ce  petit  instrument,  qui  est  originaire  de 
l'Orient,  produit  un  assez  bon  effet  dans  certains  mor- 
«eaux,  lorsqu'on  n'en  prodigue  pas  l'usage.  Il  s'unit 
bien,  dans  la  musique  militaire,  aux  autres  instrumens 
de  percussion  sonore.  Le  chapeau-chinois  ou  crotale  et 
les  cymbales  viennent  aussi  de  l'Orient  où  l'on  fabrique 
les  meilleurs.  Ces  instrumens  ne  servaient  autrefois  que 
dans  la  musi(pie  militaire;  mais  Rossini  et  ses  imitateurs 
en  ont  transporté  l'usage,  ou  plutôt  l'abus,  au  théâtre, 
en  l'unissant  au  plus  bruyant  des  instrumens  de  percus- 
sion,  cette  grosse  cfm\?e  étourdissante,  qui  n'est  bien 
placée  qu'à  la  tête  d'une  troupe  de  soldats  dont  elle  guide 
les  pas. 

Au  nombre  des  instrumens  bruyans  de  percussion  se 
trouvent  les  timbales,  qui  se  distinguent  des  autres  par 
la  possibilité  de  varier  leurs  intonations  et  de  pouvoir 


140  RAPPORTS   DES    SOMS.  ÎECT.    II. 

s'accorder.  Les  timbales  consistent  en  deux  bassins  de 
cuivre  recouverts  d'une  peau  tendue  par  un  cercle  de 
fer  qui  se  serre  par  des  vis  Cliai|ue  timbale  rend  un  son 
différent,  et  ces  sons  se  modifient  en  serrant  ou  desser- 
rant le  cercle  de  fer.  Les  deux  timbales  s'accordent  ordi- 
nairement à  la  quinte  ou  la  quarte  l'une  de  l'autre  ;  mais 
il  est  des  cas  où  cet  ordre  est  interverti.  Bien  que  l'into- 
nation de  la  timbale  ne  soit  pas  d'une  perception  facile, 
cependant  une  oreille  attentive  parvient  à  la  discerner 
quand  l'inslrument  est  bien  accordé. 

Deux  autres  instrumens  du  même  genre  s'emploient 
dans  la  musique  militaire;  l'im  est  le  tambour  propre- 
ment dit ,  qui  n'est  que  bruyant,  et  qui  sert  à  marquer 
le  rbylhme  de  la  marche  des  soldats;  l'autre  est  la  caisse 
roulante,  quiconsistedans  une  caisse  plus  allongée  que  le 
tambour,  et  qui  rend  un  son  plus  grave  et  moins  fort.  Ou 
les  introduit  quelquefois  dans  les  orchestres  ordinaires. 

Dans  la  récapitulation  que  je  viens  de  faire  des  instrti- 
mens  de  musique,  j'ai  négligé  quelques  variétés  qui 
n'ont  eu  qu'une  courte  existence,  ou  qu'on  ne  peut 
considérer  que  comme  des  instrumens  de  fantaisie. 
Toutefois  je  ne  dois  point  passer  sous  silence  ceux  de 
cette  espèce  qui  ont  eu  pour  objet  de  résoudre  deux 
problèmes  difficiles,  en  enrichissant  la  musique  d'un 
système  d'effets  qui  n'existait  pas,  et  en  fournissant  aux 
compositeurs  les  moyens  de  conserver  leurs  improvisa- 
tions. Je  veux  parler  des  instrumens  qui  réunissent  le 
clavier  à  l'archet,  et  Aes  pianos  mélographes. 

Il  y  a  plus  d'un  siècle  qu'on  a  essayé  pour  la  première 
fois  de  donner  aux  instrumens  à  clavier  la  faculté  de 
soutenir  les  sons  à  l'exemple  des  instrumens  à  archet. 
Vers  1717,  un  facteur  de  clavecins  de  Paris  essaya  de 


fUAP.  XIV.  1NSTRCMEN3.  141 

résoudre  la  difficulté  dans  un  instrument  qu'il  nomma 
clavecin  vielle,  parce  qu'il  ressemblait  à  une  vielle 
posée  sur  une  table,  parce  qu'au  lieu  d'archet  il  y  avait 
mis  une  roue,  et  parce  que  le  son  était  semblable  à  celui 
d'une  vielle.  Cet  instrument  fut  approuvé  par  l'Acadé- 
mie des  sciences.  Il  parait  qu'il  se  passa  beaucoup  de 
temps  avant  qu'on  songeât  à  pei Teclionner  l'invenlion  de 
ce  fact'?ur.  Vers  la  fin  du  dix-huilième  siècle,  un  méca- 
nicien de  Milan,  nommé  Getii ^  fit  entendre  dans  plu- 
sieurs concerts  et  dans  des  églises  un  instrument  qui 
avait  la  forme  d'nn  clavecin ,  et  qui  était  monté  de  cordes 
de  boyau,  lesquelles  étaient  jouées  par  des  archets  de 
crin,  selon  ce  qui  est  rapporté  dans  les  journaux  italiens 
de  ce  temps. 

Lors  de  l'exposition  des  pincbiits  de  l'industrie  qui 
eut  lieu  aux  Invalides,  en  1806,  Schimdt,  fadeur  de 
pianos,  à  Paris,  présenta  un  instrument  qui  avait  la 
forme  d'une  longue  caisse  carrée;  à  l'une  de  ses  extré- 
mités se  trouvait  un  clavier  avec  un  mécpnisme  de  piano 
ordinaire;  de  l'autre  côté  était  un  antre  clavier  destiné 
à  faire  mouvoir  de  petits  archets  cylindriques  qui  faisaient 
résonner  des  cordes  de  boyau.  Les  sons  qu'on  obtenait 
par  ce  mécanisme  avaient  l'inconvénient  de  ressembler 
à  ceux  de  la  vielle. 

Divers  autres  essais  ont  été  tentés  et  ont  plus  ou  moins 
réussi.  Un  mécanicien,  nommé Pouleau,  a  fait,  vers  1810, 
un  orchcslrino  qui  était  du  même  genre  que  Tinslru- 
ment  de  Schmidt;  les  sons  en  étaient  assez  agréables, 
mais  faibles.  L'abbé  Grégoire  Trentin  a  construit  ensuite 
un  violin-cetnbalo  qui  était  de  la  même  espèce.  Il  en  est 
de  même  d'un  sostfnante- piano- furie  inventé  par 
M.    Mott ,  de  Brighton  ,  et    du  plectro-euphone  que 


142  RAPPORTS  nF.S  SOXS.  SECT.  II. 

MM.  Gama,  de  Nantes,  ont  fait  entendre  à  Paris  en 
1828.  Enfin  ,  M.  Dietz  est  arrivé  aussi  près  que  possible 
de  la  solution  du  problème,  dans  son  polyplectron , 
qu'il  a  fait  connaître  dans  le  même  temps.  Les  prin- 
cipes d'après  lesquels  M.  Dietz  a  construit  son  instru- 
ment sont  plus  conformes  à  ce  que  l'observalion  enseigne 
sur  la  résonnance  des  instrumens  à  archet,  que  ceux  qui 
avaient  été  adoptés  par  ses  prédécesseurs.  Le  polyplec- 
tron est  susceptible  de  produire  une  foule  d'effets  fort 
jolis;  mais  ce  sont  ceux  d'un  instrument  particulier  plu- 
tôt que  des  imitations  du  violon  et  des  alitres  instrumens 
à  archet. 

L'idée  de  construire  un  clavecin  ou  piano  au  moyen 
duquel  on  conserverait  les  improvisations  d'un  compo- 
siteur a  beaucoup  occupé  plusieurs  mécaniciens.  Un  An- 
glais, nommé  Creed  ,  fut  le  premier  qui  écrivit,  en 
1747,  un  mémoire  où  il  prétendait  démontrer  la  possi- 
bilité de  cette  invention.  On  assure  que  le  moine  Engra- 
melle  exécuta,  vers  1770,  une  machine  de  cette  espèce 
dont  le  succès  fut  complet  ;  mais  les  explications  qu'on 
en  donne  sont  fort  obscures  ,  et  de  nature  à  faire  naître 
des  doutes  sur  la  vérité  des  faits.  D'un  autre  côté,  Jean- 
Frédéric  Ungher,  conseiller  de  justiceà  Brunswick,  a  ré- 
clamé, dans  un  ouvrage  allemand  imprimé  en  1774,  l'in- 
vention de  la  machine  attribuée  à  Creed,  et  a  prouvé  qu'il 
avait  exécnté  antérieurement  un  instrument  semblable. 

Au  mois  d'août  1827  ,  M.  Carreyre  a  fait,  devant 
l'Académie  des  beaux-arts  de  l'Institut,  l'essai  d'un 
piano  mélogniphe  qui  consistait  en  un  mouvement 
d'horloge,  lequel  faisait  dérouler  d'un  cylindre  sur  un 
autre  une  lame  mince  de  plomb  où  s'imprimaient,  par 
l'action  des  touches  du  piano ,  certains  signes  particu- 


i:HAP.    XIV.  INSTRUMENS.  143 

liers  qui  pouvaient  se  traduire  en  notation  ordinaire,  au 
moyen  d'une  table  explicative.  Après  l'expérience ,  la 
bande  fut  enlevée  pour  en  opérer  la  traduction,  et  une 
commission  fut  nommée  pour  en  faire  le  rapport  ;  mais 
ce  rapport  n'ayant  point  été  fait,  il  est  vraisemblable  que 
la  traduction  ne  s'en  est  point  trouvée  exacte.  Dans  le 
même  temps ,  M.  Baudouin  a  lu  à  l'Académie  un  mé- 
moire, accompagné  de  dessins,  sur  un  autre  piano  mé- 
lographe  ;  mais  l'Institut  n'a  point  prononcé  sur  le  mé- 
rite de  cette  découverte.  Il  résulte  de  tout  cela  que  le 
problème  reste  encore  à  résoudre. 

Dans  l'exposé  rapide  qui  vient  d'être  fait  de  ce  qui 
concerne  les  instrumens  et  leur  fabrication ,  on  a  pu  re- 
marquer la  prodigieuse  fécondité  d'imagination  qui  s'est 
nianifeslée  dans  toutes  ces  inventions.  Les  choses  en 
resteront-elles  où  elles  sont  à  cet  égard?  Cela  est  incer- 
tain. L'imagination  des  honuDes  aimera  toujours  à  s  exer- 
cer ;  mais  on  peut  mettre  en  doute  que  l'on  produise 
désormais  des  effets  beaucoup  meilleurs  que  ceux  qu'on 
obtient  maintenant.  Tous  les  hommes  de  mérite  qui  se 
soutoccuj;és  de  la  construction  des  instrumens  ont  voulu 
les  perfectionner  par  une  aj)plicalion  plus  sévère  des 
principes  de  la  théorie  ;  mais  dans  la  pratiqiie  les  résul- 
tats n'ont  point  été  ce  qu'ils  espéraient,  soit  par  des 
causes  inconnues,  soit  qu'on  n'eût  pas  pris  les  précau- 
tions nécessaires.  La  théorie  s'est  trouvée  quelquefoi;;  en 
opposition  avec  la  pratique.  Par  exemple,  les  principes 
de  la  résonnance  des  surfaces  \ibrantes  démontrent  {[ue 
les  violons,  violes  et  basses  sont  construits  sur  des  don- 
nées arbitraires  plutôt  que  fondées  en  raison  ;  mais  dans 
l'application  de  ces  principes  on  n'est  point  parvenu  à 
faire  des  instrumens  aussi  bons  que  ceux  qu'on  fabrique 


144  RAPPORTS  DES  SONS.  8ECT.  IX. 

par  des  règles  dont  l'origine  est  inconnue.  Même  chose 
se  remarque  dans  les  pianos.  Le  temps  portera  la  lu- 
mière dans  ces  faits  mystérieux. 


CHAPITRE  XV. 

De  rinstrumcntation. 

\J Instrumentation  est  l'art  d'employer  les  instrumens 
de  la  manière  la  pins  utile  pour  en  tirer  le  meilleur  effet 
possible  dans  la  musique.  Cet  art  peut  s'apprendre  avec 
le  temps  et  l'expérience  des  effets  ;  mais  il  exv^c , 
comme  toutes  les  autres  pariies  de  la  musique,  une  dis- 
position particulière,  un  certain  pressentiment  du  résul- 
tat des  combinaisons.  Le  compositeur,  en  disposant 
l'ensemble  de  sa  musique ,  en  faisant  en  un  mot  ce  qu'on 
appelle  lu  ])n>l'iii(in,  c'esl-à-diie  la  réunion  de  toutes  les 
parties  qui  doivent  concoiu'ir  à  l'effet, ne  pourrait  écrire 
qu'au  liasard ,  s'il  n'avait  présens  à  la  pensée  la  qualité 
des  sons  de  chaque  instiumenl,  leur  accent  et  les  effets 
qui  résultent  de  leurs  combinaisons  partielles  ou  totales. 
Quelquefois,  il  est  vrai,  on  obtient  des  résultats  qu'on 
n'avait  point  prévus;  dans  d'autres  circonstances,  ceux 
qu'on  s'était  efforcéde produire  ne  réussissent  pas;  mais, 
en  général,  un  compositeur  habile  parvient  au  but  qu'il 
se  propose  dans  l'arrangement  de  l'instrumentation. 

Ce  n'est  pas  une  des  moindres  merveilles  de  la  mu- 
sique que  celte  faculté  de  prévoir  parla  seule  force  des 
facultés  intellectuelles  l'effet  d'un  orchestre  dont  on  dis- 
pose riustrumenlalioû,  comme  si  cet  orchestre  jouait 


ClIA!'.  W.  INSTRUMKNTATIO^.  J  45 

réc'IleiiK  iil  j>ciu!ai!î;  le  travail  de  l'arliste  ;  c'est  cc|!en- 
cUnt  ce  qui  a  lieu  chaque  fois  qu'un  compositeur  ima- 
gine un  morceau  quelconque;  car  le  chant,  les  voix  qui 
l'accompagnent,  l'harmonie,  l'effet  des  instrumens,  tout 
enfin  se  conçoit  d'un  seul  jet,  toutes  les  fois  qu'un  musi- 
cien est  né  véritablement  digne  de  ce  nom.  Quant  à  ceux 
f|ui  n'imaginent  les  choses  que  successivement,  on  peut 
assurer  que  leurs  conceptions  musicales  resteront  tou- 
jours dans  des  bornes  étroites.  Tel  était  Grélry,  qui  avait 
le  génie  de  l'expression  dramatique  et  celui  des  chants 
heureux,  mais  qui ,  n'éitantqiie  médiocrement  musicien, 
ne  pouvait  se  former  tout  d'un  coup  lidée  de  l'ensemble 
d'un  morceau.  Mais  Haydn,  Mozart,  Beethoven,  Ché- 
rubini,  Rossini,  n'ont  jamais  été  forcés  d'y  revenir  à 
deux  fois  pour  comprendre  les  effets  qu'ils  voulaient 
produire. 

11  est  un  genre  de  connaissances  matérielles  qui  n'est 
pas  moins  utile  au  compositeur;  c'est  celui  des  moyens 
propres  de  chaque  instrument,  des  traits  qu'ils  peuvent 
exécuter  et  de  ceux  qui  leur  offriraient  des  difficultés  in- 
surmontables. Ce  genre  de  connaissances  peut  facilement 
s'acquérir  ou  par  la  lecluie  des  partitions,  ou  par  les  le- 
çons d'un  maître,  ou,  mieux  encore  ,  par  la  culture  de 
quelques-uns  de  ces  instrumens.  Le  soin  que  prend  le 
compotileur  de  ne  mettre  dans  chaque  partie  que  ce  que 
les  artistes  peuvent  jouer  avec  facilité  tourne  au  profit 
de  l'exécution  de  sa  musique. 

Rarement  on  fait  usage  d'un  seul  instrument  de  chaque 
espèce  dans  l'instrumentation;  presque  toujours  les  cla- 
rinettes, les  hautbois,  les  bassons,  les  cors,  les  tiom- 
peties  s'emploient  deux  à  deux  ;  cependant  on  écrit 
quelquefois  uue  partie  de  flûte  seule,  lorsqu'elle  doit 

i3 


146  RAPPORTS  DES  SONS.  SECT.   H. 

s'unir  à  des  parties  de  clarinettes  ou  de  hautbois.  Quel- 
quefois aussi  les  cors  sont  au  nombre  de  quatre  ;  mais 
dans  ce  cas  on  les  dispose  de  telle  sorte  que  deux  jouent 
dans  un  Ion  et  deux  dans  un  autre.  Dans  les  morceaux 
qui  demandent  de  l'éclat  et  de  la  force,  on  ajoute  deux 
parties  de  trompettes  aux  parties  de  cors.  Le  trombone 
ne  s'emploie  point  seul  ;  il  est  ordinaire  de  réunir  le 
trombone  allô,  le  ténor,  et  la  basse.  Le  système  général 
des  instrumens  à  vent,  dans  une  ouverture  ou  dans  un 
autre  grand  morceau  dramatique,  se  compose  de  deux 
flûtes,  deux  hautbois,  deux  clarinettes,  deux  ou  quatre 
cors,  deux  trompettes,  trois  trombones  et  deux  bassons. 
On  y  joint  presque  toujours  deux  timbales. 

Deux  parties  de  violons,  une  ou  deux  parties  de  violes, 
violoncelle  et  contrebasse  composent  l'ensemble  des  in- 
strumens à  cordes  d'une  symphonie,  et  de  toute  espèce 
de  musique  à  grand  orchestre.  Le  nombre  d'instrumen- 
tistes qu'on  réunit  à  chaque  partie  de  violon  est  indéter- 
miné. Il  peut  être  de  huit,  dix  ,  douze  et  même  de  vingt. 
Les  parties  de  violes,  de  violoncelle  et  de  contrebasse 
sont  jouées  aussi  par  un  certain  nondjre  d'artistes. 

Mozart,  Haydn  et  quelques  autres  compositeurs  dis- 
tingués variaient  le  système  d'instrumentation  de  leurs 
morceaux  ;  quelquefois  ils  n'employaient  que  les  hautbois 
et  les  cors  comme  instrumens  à  vent;  d'autres  fois  les 
ilûteset  les  clarinettes  remplaçaient  les  hautbois;  d'autres 
fois  enfin  toutes  les  richesses  de  l'orchestre  étaient  réu- 
nies. D'heureuses  oppositions  d'effets  résultaient  de  cette 
variété.  Dans  la  nouvelle  école,  tous  les  moyens  sont 
toujours  réunis  poiu' obtenir  le  plus  grand  effet  po>sible, 
quel  que  soit  le  caractère  du  morceau.  Chaque  partie 
de  la  composition,  prise  isolément,  est  plus  brillante, 


CHAP.   XV.  INSTRUMENTATION.  147 

grâce  à  cette  profusion  de  moyens  ;  mais  une  certaine 
monotonie  est  la  suite  inévitable  de  l'uniformité  de  ce 
sysième.  ÎMaiheuieiiseiiient  il  en  est  de  ce  défaut  comme 
de  celui  de  l'abus  du  bruit;  il  a  fini  par  devenir  un  mal 
nécessaire.  Accoutumée  à  ce  luxe  d'instrumentation , 
l'oreille,  bien  ((u'elle  en  soit  souvent  fatiguée,  trouve 
faible  ce  qui  en  est  dépourvu.  Rien  n'est  funeste  comme 
de  fatiguer  les  sens  par  des  sensations  fortes  trop  prolon- 
gées ou  trop  répétées;  le  palais  d'un  gourmand,  lors- 
qu'il est  usé  par  les  sauces  relevées  et  par  le  piment, 
trouve  que  les  mets  simples  et  naturels  manquent  de 
saveur. 

Les  ïiccompagnemens  d'une  musique  bien  faite  ne  se 
bornent  point  à  soutenir  le  chant  par  une  harmonie  pla- 
quée; souvent  on  y  remarque  un  ou  deux  dessins  qui 
semblent  au  premier  abord  devoir  contrarier  la  mélodie 
principale,  mais  qui ,  dans  la  réalité,  concoui-ent  à  for- 
mer avec  elle  un  tout  plus  ou  moins  satisfaisant.  Ces  sys- 
tèmes d'acconqiagnemens  figurés  peuvent  importuner 
une  oreille  peu  e\ercée,  mais  ils  complètent  le  plaisir 
des  musiciens  instruits  et  des  amateurs  éclairés.  Quel- 
quefois ils  deviennent  la  partie  la  plus  importante  du 
morceau ,  et  les  voix  leur  servent  en  quelque  sorte  d'ac- 
lompagncmenl.  Cela  se  remarque  dans  ces  airs  bouffes 
italiens  qu'on  désigne  par  ces  mots  :  note  et  parole ,  et 
dans  les  chœurs.  Dans  ces  circonstances  ,  il  est  nécessaire 
que  les  formes  de  l'accompagnement  soient  gracieuses  et 
chantantes,  ou  sémillantes  et  vives.  Les  œuvres  de 
Mozart,  de  Cimarosa  et  de  Paisiello  renferment  des 
choses  charmantes  en  ce  genre.  Parmi  les  ouvrages  fran- 
«^ais,  les  opéras  de  M.  Boieldieu  sont  remplis  deces  sortes 
d'accompagnemens  spirituels. 


148  noppoivTs  DES  sons.  stCT.  ir. 

Les  instrumens  de  cuivre,  tels  que  les  cors,  trom- 
pettes, trombones  et  ophicléides  ont  accjuis  une  impor- 
tance qu'ils  n'avaient  pas  autrefois  ;  Jléhiil  et  ^l.  Chéru- 
Ijiiii  ont  commencé  à  la  lui  dormer;  Rossini  a  achevé 
1,1  ré\o!ution,  et  a  enrichi  l'emploi  de  ces  instrumens 
d'une  foide  de  combinaisons  et  d'effets  qui  étaient  incon- 
nus avant  qu'il  écrivît.  Employés  avec  sobriété,  ces 
mêmes  effets  augmenteront  beaucoup  la  puissance  de  la 
iuusi({ue  dans  certaines  circonstances  où  l'emploi  des 
moyens  ordinaires  est  insuflisant. 

Après  avoir  jeté  un  coup  d'œil  sur  les  riches  combi- 
naisons d'effets  dont  on  a  poussé  l'usage  jusqu'à  l'abus 
depuis  quelques  années,  une  question  se  présente;  la 
voici:  Abstraction  faite  des  créations  du  génie,  quefera- 
t-on  maintenant  pour  continuer  la  marche  progressive  des 
effets  dont  on  est  devenu  si  avide?  Espère-t-on  en  obte- 
nir de  nouveaux  en  augmentant  le  bruit?  Non,  car  la 
sensation  du  bruit  est  celle  qui  est  le  plus  promptement 
suivie  de  fatigue.  D'un  autre  côté,  il  y  aurait  peut-être 
beaucoup  de  difficulté  à  ramener  le  public  à  la  simpli- 
cité d'instrumentation  de  Cimarosa  et  de  Paisiello,  car 
il  faudrait  bien  plus  de  génie  pour  faire  adopter  cette 
marche  rétrograde  qu'il  n'en  a  fallu  pour  nous  conduire 
au  point  où  nous  sommes.  Que  reste-t-il  donc  à  faire  ?  Il 
me  semble  qu'on  peut  l'indiquer;  voici  mes  idées  à  cet 
égard. 

La  variété,  comme  on  sait,  est  ce  qu'on  désire  le  plus 
dans  les  arts  et  ce  qui  est  le  plus  rare.  Le  moyen  d'obte- 
nir le  meilleur  effet  de  l'orchestre  serait  donc  d'établir 
cette  variélé  dans  l'instrumentation  ,  au  lieu  d'adopter  un 
système  uniforme,  comme  on  l'a  toujours  fait.  Tous  los 
opéras  du  dix-septième  siècle  ont  pour  accompagnement 


CHAi».   XV.  INSTRUMENTATION,  149 

des  violons,  des  violes,  et  des  basses  de  viole.  An  com- 
mencement du  dix-luiitième  siècle,  l'accompagnement 
consisteen  violons,  basses,  flûtes  ou  haulbois;  successi- 
vement les  ressources  augmentent,  mais  les  formes  de 
rinstrumentation  sont  toujours  les  mêmes  tant  qu'un  sys- 
tème est  en  vigueur.  De  nos  joins  il  est  rare  de  trouver 
un  air,  un  duo,  une  romance  même  qui  n'aientpour  ac- 
compagnement deux  parties  de  violons,  altos,  violoncelles, 
contrebasses,  flûtes,  hautbois,  clarinettes,  cors,  trom- 
pettes, bassons,  timbales,  etc.  Quelle  source  de  mono- 
tonie qu'une  semblable  obstination  à  reproduire  sans 
cesse  les  mêmes  sons,  les  mêmes  accens,  les  mêmes  as- 
sociations! Pourquoi,  avec  des  moyens  bien  plus  déve- 
loppés, ne  donnerait-on  pas  à  chaque  morceau  une  phy- 
sionomie particulière,  par  la  différence  de  sonorité  des 
instrumens?  On  aurait  des  airs,  des  duos,  des  romances, 
des  quatuors  même  accompagnés  par  des  instrumens  à 
corde  de  différentes  espèces ,  ou  même  d'une  seule  ,  telle 
que  des  violoncelles  ou  des  violons  et  altos;  on  pourrait 
diviser  le  système  des  instrumens  à  cordes  en  deux:  une 
partie  serait  à  sons  soutenus,  une  autre  à  sons  pinces. 
On  pourrait  également  employer  des  flûtes  ou  des  clari- 
nettes seules;  des  hautbois  avec  des  cors  anglais  et  des 
bassons  ;  des  associations  d'instrumens  de  cuivre,  tels 
que  les  trompettes  ordinaires,  trompettes  à  clefs,  cors, 
ophicléides  et  trombones.  Cette  variété  que  je  propose 
pourrait  être  établie  non -seulement  dans  des  morceaux 
différens,  mais  même  dans  le  cours  d'une  scène.  La  réu- 
nion de  toutes  les  ressources  aurait  lieu  dans  les  situa- 
tions fortes,  dans  \esjina[c\',  etc. ,  et  l'on  en  tirerait  d'au- 
tant plus  d'effet  que  cette  réunion  serait  plus  rare. 
Tout  cela,  dira-l-on,  n'est  pas  le  génie.  Je  le  sais;  il 


15b  BAPPORTS  DES  soirs.  SECT.  II. 

est  heureux  qu'il  en  soit  ainsi;  car  s'il)  avait  des  procédés 
pour  faire  de  bonne  musique,  l'art  serait  peu  digne  de 
fixer  l'attention  des  esprits  élevés.  Mais  pourquoi  n'of- 
frirait-on pas  à  ce  génie,  sans  lequel  on  ne  peut  rien, 
toutes  les  ressources  que  l'expérience  ou  la  réflexion  font 
trouver?  Pourquoi  borner  son  domaine?  Réduisez  Mo- 
zart et  Rossini  au  quatuor  de  Pergolèse,  ils  trouveront 
de  beaux  chanta,  une  harmonie  élégante,  mais  ils  ne 
pourront  produire  les  effets  si  énergiques  que  vous  ad- 
mirez dans  leurs  compositions.  Comment  supposer  l'exis- 
tence de  Don  Juan  et  de  Moïse  avec  violons,  altos 
et  basses?  N'en  doutons  pas,  les  beaux  effets  qu'on  y 
trouve  sont  le  résultat  d'un  orchestre  formidable  et  du 
génie  qui  a  su  le  mettre  en  œuvre.  Les  grands  maîtres 
des  anciennes  écoles  ont  aussi  inventé  des  effets  d'un  au- 
tre genre  avec  des  moyens  bien  plus  simples;  et  voilà 
pourquoi  je  demande  qu'on  ne  renonce  point  à  ces 
moyens.  Je  désire  f|u'on  use  de  tout  ;  le  reste  est  l'affaire 
du  talent.  Tout  le  monde  a  remarqué  qu'au  théâtre  les 
morceaux  sans  accompagnement  plaisent  toujours  quand 
ils  sont  bien  chantés;  cet  effet  est  une  conséipience  na- 
turelle d'un  changement  de  moyens  indépendant  même 
de  la  nianière  plus  ou  moins  heureuse  dont  le  composi- 
teur les  emploie.  Qu'on  essaie  du  mêiTie  prorédé  à  l'é- 
gard de  l'instrumentation  ,  et  l'on  verra  disparaître  cette 
fatigue  qui  se  fait  toujours  sentir  vers  la  fin  de  la  repré- 
sentation d'un  opéra  de  longue  durée,  quelque  beau 
qu'il  soit. 


CHAP.  XVI.  MUSIQUE  SACK^E.  151 

CHAPITRE  XVI. 

De  la  forme  des  pièces  dans  la  inusi(jue  vocale  et    dans  l'instru- 
mentale. 

La  musique,  soit  vocale,  soif  instrumentale,  à  diver- 
'ies  destinations  q'ii  établissent  des  différences  naturel- 
les dans  la  forme  des  morceaux.  Quatre  grandes  di- 
visions s'établissent  d'abord  dans  la  musique  vocale*  ce 
sont:  1"  la  musique  sacrée,  2^  la  musique  dramatique; 
3"  la  musique  de  chambre;  4°  les  airs  populaires.  La 
musique  instrumentale  ne  se  divise  qu'en  deux  espèces 
principales:  1"  la  musique  d'orchestre;  2°  la  musique 
de  chambie.  Ces  genres  caractéristiques  se  subdivisent 
eux-mêmes  en  plusieurs  classes  particulières. 

Dans  la  musiqiie  d'église,  on  trouve  les  messes  entiè- 
res, les  vêpres,  les  motets.  Magnificat^  Te  Deuin  et 
litanies.  Les  messes  sont  de  Jeux  espèces,  ou  brèves  ou 
solennelles.  On  appelle  messe  brève  celle  où  les  paroles 
ne  sont  presque  ])oint  répétées.  Dans  celles-là,  le  Ky- 
rie, le  Gloria,  le  Credo,  le  Sanctiis  et  Yrigjius  Dei , 
qui  sont  les  divisions  principales,  ne  forment  qu'un 
morceau  de  peu  de  durée.  Il  n'en  est  pas  de  même  des 
messes  solennelles  ;  celles-ci  ont  quelquefois  un  déve- 
loppement si  considérable  que  leur  exécution  dure  deux 
ou  trois  heures.  Dans  ces  messes,  le  Kyiie,  le  Gloria, 
le  Credo  se  divisent  en  plusieurs  morceaux,  qui  sont  in- 
diqués par  la  nature  des  paroles.  Par  exemple ,  après 
l'introduction  du  Credo,  qui  est  ordinairement  pom- 
peuse, viennent  Ylncarnatiis  est,  qui  doit  former  un 
inorceau  religieux,  le  Crucijixus,  dont  le  caractère  est 


152  RAPPORTS  DES  SO^•S.  SECT.  ir. 

sombre  ou  inélancoIi'|ue,  et  le  Resurre.vk,  qui  annonce 
la  joie.  Les  messes  solennelles  de  Pcrgolèse,  de  Léo,  de 
Durante  et  de  Jomelll  '  n'avaient  pas  autant  de  dévelop- 
pement qu'on  leur  en  donne  aujourd'hui.  La  raison  de 
cette  différence  consiste  dans  la  manière  de  concevoir  la 
musique  d'église.  Les  anciens  maîtres  croyaient  que  ce 
genre  de  musique  devait  être  pompeux  ou  religieux; 
mais  ils  ne  pensaient  point  à  le  rendre  dramatique.  Nos 
compositeurs  modernes,  Mozart  et  M.  Chérubini,  par 
exemple,  ont  conçu  la  musique  d'église  d'une  manière 
toute  dramatique,  ce  qui  exige  bien  plus  de  dé\elop])e- 
ment,  puisqu'il  faut  peindre  une  foule  d'oppositions  in- 
diquées par  les  paroles  sacrées. 

Lorsque  les  églises  étaient  frétjuentées  par  la  haute  so- 
ciété pendant  presque  toute  la  durée  des  fêtes  et  diman- 
ches, comme  cela  se  pratiquai!  il  y  a  environ  cinquante 
ans,  on  écrivait  beaucoup  de  vêpres  en  musique;  mais 
depuis  que  les  églises  sont  peu  fiéquentées,  les  composi- 
teurs ne  se  livrent  plus  à  ce  genre  de  travail,  qui  était 
très  long.  Les  Magnificat,  qui  faisaient  partie  de  ces 
vêpres,  sont  abandonnés  ainsi  que  les  litanies.  Les  Te 
Dewn,  qui  servent  aux  réjouissances  publiques,  et  les 
motels,  sont  les  seules  pièces  détachées  de  musique  d'é- 
glise auxquelles  les  compositeurs  travaillent  encore.  Leur 
développement  plus  ou  moins  grand  dépend  de  la  fantai- 
sie du  musicien. 

Dans  les  usages  des  églises  catholiques  on  ne  connaît 
que  deux  manières  de  chanter  les  prières,  savoir:  le 
plaln-chant  el  la  musique  solennelle.  Le  plain-chant, 

(t)  Maîtres  napolitaio^  qui  écrivaient  Tei's  le  milieu  du  dix-huj- 
tiem*  siècle. 


CUAP.   XVI.  MUSIQUE  SACRÉE.  158 

tel  qu'on  l'entend  dans  les  églises  de  France,  est  horri- 
•^blement  défignré  par  nne  mauvaise  exécution;  l'usage  de 
la  miisii|ue  solennelle  y  devient  chaque  jour  plus  rare, 
en  sorte  (|u'une  oreille  un  peu  délicate  est  sans  cesse  ex- 
posée à  être  déchirée  par  les  hraillemens  des  chantres, 
qui  ne  comprennent  ni  les  paroles  qu'ils  prononcent,  ni 
le  ch'int  qu'ils  exécutent.  Il  est  fâcheux  qu'on  ne  puisse, 
à  l'imitation  des  églises  |)rotestantes  d'Allemagne,  intro- 
duire dans  les  nôtres  un  genre  de  musique  simple  et  fa- 
cile qui  soit  chanté  par  le  peuple ,  sans  autre  accompa- 
gnement que  les  jeux  doux  de  l'orgue.  Il  y  aurait  dans 
une  musique  usuelle  semblable,  et  plus  de  recueillement 
religieux,  et  plus  de  satisfaction  pour  l'oreille.  Ce  genre 
de  musique  aurait  d'ailleurs  l'avantage  de  former  le  peu- 
ple à  un  meilleur  goût,  et  de  lui  faire  perdre  l'habitude 
de  ces  cris  inhumains  qui  rendent  les  chants  populaires 
odieux  à  une  oreille  délicate. 

L'oratorio ,  en  Italie,  en  Allemagne  et  en  Angleterre, 
fait  partie  de  la  musique  religieuse;  mais  en  France,  ce 
n'est  que  de  la  musique  de  concert,  car  jamais  on  n'y 
exécute  d'oratorio  dans  les  églises.  Lorsque  les  compo- 
siteurs français  se  livraient  à  ce  genre  de  travail,  ils  fai- 
saient toujours  entendre  leurs  productions  au  concert 
spirituel.  Haendel,  célèbre  musicien  allemand  qui  a  passé 
la  plus  grande  partie  de  sa  vie  en  Angleterre,  a  composé 
de  magnifiques  ouvrages  en  ce  genre  sur  des  paroles  an- 
glaises; le  Messie,  Judas  Machabée ,  Athalie ,  Samson 
et  la  cantate  des  Fêtes  d'Alexandre  sont  cités  surtout 
comme  des  modèles  du  style  le  plus  élevé.  Quels  que 
soient  les  progrès  de  la  musique  à  l'avenir,  Hsendel  sera 
toujours  cité  comme  un  des  plus  beaux  génies  qui  ont 
illustré  cet  art. 


154  RAPPOBTS  DES  SONS.  SECT.  II. 

Le  genre  de  musique  qui  est  le  plus  généralement 
connu  est  celui  du  théâtre.  Tout  le  monde  juge  la  nuisi- 
que  dramatit|ue,  tout  le  monde  en  parle,  et  ses  termes 
techniques  ne  sont  plus  même  inconnus  aux  personnes 
les  moins  versées  dans  l'art.  Mais  tout  le  monde  ne  con- 
naU  pas  l'origine  et  les  variations  des  divers  morceaux 
qui  entrent  dans  la  composition  d'un  opéra  ;  je  crois 
donc  nécessaire  d'entrer  à  ce  sujet  dans  quelques  dé- 
tails. 

La  musique  était  réduite  aux  formes  symétriques  du 
contrepoint,  qui  ne  trouvaient  leur  application  que  dans 
la  musique  d'église  et  de  chambre,  lorsqu'une  réunion 
de  littérateurs  et  de  musiciens  italiens,  parmi  lesquels 
on  distinguait  Vincent  Galilée,  31ei  et  Caccini,  imagina 
de  se  servir  de  l'union  de  la  poésie  à  la  musique  pour 
faire  revivre  le  système  dramatique  des  Grecs  où  la  poé- 
sie était  chantée.  Galilée  fit  entendre  comme  premier 
essai  de  ce  genre  de  pièces  l'épisode  du  Coinle  U{;olin  , 
qu'il  avait  mis  en  musique.  L'acoueil  qui  fut  fait  à  ce 
premier  essai  détermma  le  poète  Rinuccini  à  composer 
un  opéra  de  Daine  (vers  t590j ,  qui  fut  mis  en  musique 
par  Péri  et  Caccini.  Cet  ouvrage  fut  suivi  ^' Euritlice , 
et  tous  deux  obtinrent  un  grand  succès.  Telle  est  l'ori- 
gine de  l'opéra. 

La  partie  la  plus  importante  de  ces  ouvrages  consistait 
en  récits,  qui  quelquefois  étaient  mesurés,  et  quelque- 
fois libres  de  toute  mesure.  Ces  récits  prirent  le  nom  de 
récitatif.  La  marche  de  ces  récitatifs  anciens  était  moins 
\ive,  moins  sjllabique  que  celle  du  récila'if  de  nos  opé- 
ras; c'était  plutôt  une  espèce  de  chant  languissant,  dé- 
pouillé de  mesure  en  plusieurs  endioits,  qu'un  récitatif 
véritable;  mais  c'était  cependant  à  celte  époque  une  in- 


CHAf.    XVI.  MUSIQUE  DRAMATIQUE.  l5^ 

iiuvatioii  remarquable,  |iuis(itif  rien  de  ce  qui  en  avait 
préféilé  l'invention  n'en  pouvait  donner  l'idée. 

Dans  l'Dpéra  (ï Euridire ,  qui  fut  le  second  qu'on 
écrivit,  un  des  personnages  chante  des  stances  ana- 
créoiitiqnes  qu'on  peut  considérer  comme  l'origine 
de  ce  qu'on  nomme  un  air.  Une  petite  ritournelle  pré- 
cède ce  morceau.  Les  mouvemens  de  la  basse  suivent 
note  pour  note  ceux  de  la  voix,  ce  qui  donne  de  la  lour 
deur  au  caractère  du  morceau,  mais  ce  qui  établit  une 
différence  notable  entre  ce  genre  de  morceau  et  le  réci- 
tatif, où  la  basse  fait  souvent  des  tenues.  Au  reste,  le 
modèle  des  airs  d'opéras  existait  auparavant  dans  les 
chants  populaires  qui  étaient  connus  depuis  long-iemps. 
Les  airs  prirent  une  forme  un  peu  plus  arrêtée  dans  un 
drame  musical  d'Etienne  Landi ,  intitulé  II  Sunlo  Ales- 
sio,  qui  fut  composé  et  représenté  à  Rome  en  1634. 
Celui  qui  se  trouve  au  premier  acte  de  cet  ouvra{,e,  sur 
les  paroles  :  .ye  L'hoie  vulano ,  est  remarquable  non- 
seulement  par  le  rhvlhme  de  la  première  phrase  du 
chant,  mais  aussi  par  un  trait  de  vocalisation  assez 
étendu  sur  il  volo;  mais,  comme  tous  les  airs  du  dix- 
septième  siècle,  il  a  le  défaut  de  contenir  des  change- 
mens  de  mesure  et  de  passer  alternativement  de  trois  k 
quatre  temps.  Une  monotonie  de  forme  se  trouve  dans 
tous  les  airs  de  cette  époipie  :  ils  sont  tous  cou|<és  en 
couplets  comme  nos  vaudevilles  ou  nos  romances.  Cette 
habitude  se  retrouve  encore  dana  tous  les  opéras  de 
CavaHi,(|ui  en  composa  près  de  quarante,  et  particu- 
lièrement dans  son  Jasoii ,  qui  fut  représenté  à  Venise 
en  1649.  Par  une  singulière  disposition  ,  tous  les  airs  de 
ce  temps  étaient  placés  au  commencement  des  scènes  et 
noa  vers  la  fin ,  comme  dans  les  opéras  modernes. 


156  RAPPORTS  UES   SONS.  »ECÏ.    11. 

Dans  la  seconde  moitié  du  dix-sej>lième  siècle,  la 
coupe  des  airs  fut  changée,  et  les  plus  habiles  composi- 
teurs en  adoptèrent  une  qui  était  ce  qu'on  pouvait  ima- 
giner de  plus  défavorable  à  l'effet  dramatique  et  à  la 
raison.  Ces  airs  commençaient  par  un  mouvement  lent 
qui  se  terminait  dans  le  ton  du  morceau;  puis  venait  un 
mouvement  vif,  conçu  dans  un  système  d'expression 
scénique,  après  quoi  l'on  revenait  au  mouvement  lent, 
qui  était  répété  en  entier.  Le  moindre  défaut  de  ce  re- 
tour était  de  détruire  l'effet  musical  qui  venait  d'être 
produit  par  V allegro;  car  il  arrivait  souvent  qu'il  était 
un  coniresens.  Par  exemple,  dans  l'air  de  VOlyrnjiiade , 
où  Mégaclès,  déterminé  à  s'éloigiier  d'Aristée  qu'il  aime, 
pour  la  céder  à  Licidas ,  son  ami ,  adresse  à  celui-ci  ces 
vers louchans  : 

Se  cerca, se  dice  : 
L'iiinico  tlovV:  ? 
L'iimico  infelioe, 
Rispondi,  rnori. 

C'est-à-dire  :  «Si  elle  cherche,  si  elle  dit  :  Où  est 
«  ton  aini?  réponds  :  Mon  inallieureux  ami  est  mort. 
«  Ah  !  non  ;  ne  lui  cause  point  une  si  grande  peine  pour 
«  moi;  réponds  seulement  en  pleurant  :  Il  est  parti. 
«  Quel  abîme  de  maux  !  quitter  ce  qu'on  aime,  le  quitter 
«  pour  toujours,  et  le  quitter  ainsi  !  « 

Tous  les  compositeurs  qui  ont  écrit  de  la  musique 
sur  ces  paroles  n'ont  pas  manqué,  après  le  mouvement 
vif  et  dramatique  qu'ils  plaçaient  sur  ces  mots,  quel 
abîme  de  maux!  de  revenir  froidement  au  commence- 
ment, et  de  reprendre  le  mouvement  lent  des  mots,  si 
elle  cherche ,  etc.,  comme  s'il  était  possible  que  Méga- 
clès se  calmât  subitement  après  une  explosion  passion- 


OHM».    \VI.  MlîsI.M'E  l»li\>I ATIQIJK.  i'if 

rioe.  .lomclli  est   le  premier  i]ui  ait  senti  la  tiéeessité  île 
fiiiif  p;ir  les  ijimtre  ticriiiei  s  vers 

L'usage  de  la  coupe  d'airs  dont  je  viens  de  parler 
s'est  perpétué  jusqu'à  Piecini  et  .Sacchini.  On  en  écrivit 
aussi  i)eaucoup  dans  le  cours  du  dix-huitièine  siècle  qui 
n'étaient  composés  que  d'un  seul  mouvement  très  lent  et 
très  développé:  de  pareils  morceaux,  mnigré  tout  leur 
mérite,  ne  pourraient  j)lus  réussir  aujourd'hui,  où  l'on 
s'est  habitué  aux  rhythmes  plus  ou  moins  rapides  et 
prononcés.  De  simples  cavntines ,  d'une  courte  durée, 
peuvent  seules  être  écrites  dans  celte  manière. 

Parmi  les  formes  d'airs  qui  ont  eu  le  plus  de  succès, 
\ii  rondeau ,  qui  consiste  à  reprendre  plusieurs  lois  la 
première  phrase  dans  le  cours  du  morceau,  tient  la  pre- 
mière place.  Son  invention  parait  appartenir  à  un  com- 
positeur italien  nommée  Buononcini,  qui  vivait  au  com- 
mencement du  dix-huitième  siècle.  Plus  tard,  Sarti, 
autre  maître  renommé,  imagina  le  rondeau  à  deux 
mouvemens,  dont  il  donna  le  premier  exemple  dans 
l'air  un  amante  iventurato ,  qu'il  écrivit  à  Rome  pour 
le  chanteur  Millico,  et  qui  eut  un  succès  prodigieux. 

Un  compositeur  du  plus  beau  génie,  nommé  Majo, 
qui  ne  vécut  point  assez  pour  sa  gloire,  donna  le  pre- 
mier exemple  d'un  air  à  un  seul  mouvement  allegro 
sans  reprise,  dans  celui  dont  les  premiers  mots  sont,  ah! 
non  parla.  Cette  coupe  d'air  a  eu  plus  de  succès  en  France 
qu'en  Italie,  car  presque  tous  les  airs  d'opéras  français 
des  anciens  compositeurs  ont  été  faits  dans  celte  forme. 
Paisiello,  Cîmarosa  ,  Mozart,  Pa«"r  et  Mayer  ont  écrit 
beaucoup  d'airs  de  demi-caractère  compo.sés  d'un  mou- 
vement lent  suivi  d'un  allegro,  et  quelques-uns  de  ces 
airs  sont  des  chefs-d'œuvre  d'expression  ou  passionnée 


16S  RAPPORTS  UEb  SONS.  SECT.   II. 

uu  comique.  Leur  coupe  paraît  cire  la  plus  favorable  à 
l'effet  musical.  Rossini  a  fait  adopter  une  autre  disposi- 
tion, qui  consiste  à  faire  un  premier  mouvemeiil  allegro 
modéré,  suivi  d'un  andantc  ou  d'un  adagio,  et  à  ter- 
miner le  morceau  par  un  mouvement  vif  et  rhythmé. 
Cette  disposition  serait  bonne,  quant  à  l'effet,  si  elle  ne 
donnait  aux  morceaux  un  développement  trop  considé- 
rable, qui  souvent  fait  languir  la  situation  dramatique. 
La  gradation  des  mouvemens  de  plus  en  plus  précipités 
est  un  moyen  presque  infaillible  de  ranimer  l'attention 
de  l'auditoire  :  les  imitateurs  de  Rossini,  qui  n'ont  pas 
son  génie,  s'en  servent  souvent  pour  cacher  la  nullité 
de  leurs  idées.  Il  en  est  de  ces  coiqies  d'airs  comme  des 
moyens  d'instrumentation  ;  on  peut  s'en  servir  avec  avan- 
tage, pourvu  que  ce  ne  soit  pas  un  thème  tout  fait  qu'on 
présente  toujours  de  la  même  manière.  Toutes  les  dis- 
positions d'airs  dont  il  vient  d'être  parlé  sont  admissi- 
bles, si  l'on  sait  les  employer  à  propos;  il  doit  résulter 
de  leur  mélange  une  variété  qui  n'existe  plus,  et  dont  le 
besoin  se  fait  sentir  chaque  jour  davantage. 

Une  sorte  de  petit  air,  qu'on  nomme  couplet  quand  le 
caractère  en  est  gai,  et  romance  lorsqu'il  est  niélanco- 
liquc  ,  appartient  origmairement  à  l'opéra  français. 
Dans  sa  nouveauté,  l'opéra  -  comique ,  tel  qu'il  pa- 
rut aux  foires  Saint-  Laurent  et  Saint  -  Germain  , 
n'était  que  ce  qu'on  nonune  maintenant  If  vaudc- 
i'ille.  Les  couplets  en  faisaient  tous  les  frais.  Ce  pe- 
tit genre  de  musique,  né  du  goût  fort  ancien  des 
Français  pour  les  chansons,  est  encore  fort  à  la  mode 
dans  le  public,  et  souvent  les  compositeurs  qui  veulent 
lui  plaire  en  fout  usage  jusqu'à  l'abus.  Cependant,  tout 
en  condamnaat  cette  profusion  de  petits  morceaux,  je 


CHAP.  TVI.  MtrsiQTJE  DRAMATIQtTB.  1 59 

suis  loin  d'en  blâmer  absolument  l'usage.  Les  couplets 
et  les  romances,  qui  cxi^ont  tle  la  |>art  du  musicien  de 
l'eprit  et  du  goût,  ont  l'avanta-îe  de  ne  pas  ralentir  la  mar- 
che scéni(|ue,  comme  le  ferait  un  grand  air,  et  l'on  peut 
y  mettre  des  mélodies  aussi  suaves,  aussi  élégantes  que 
dans  celui-ci.  Toute  la  difféience  consiste  dans  les  pro- 
portions qui  sont  plus  petites.  Les  couplets  et  les  ro- 
mances ont  d'ailleurs  l'avantage  de  varier  les  formes. 
Les  compositeurs  italiens  ont  senti  qu'il  était  possible 
d'en  tirer  bon  parti;  depuis  peu  d'années  ils  ont  intro- 
duit dans  leurs  opéras  des  romances  qui  ont  toujoiu's  été 
bien  accueillies,  même  par  les  Italiens.  A  la  tête  de  ces 
morceaux  il  faut  placer  la  romance  A^Olello. 

Après  l'air,  le  genre  de  morceau  qu'on  trouve  le  plus 
communément  dans  la  musique  de  théâtre  est  le  duo. 
Ses  formes  ont  subi  à  peu  près  les  mêmes  variations  que 
celles  des  airs.  Le  premier  exemple  d'un  duo  se  trouve 
dans  le  drame  d'//  Santo  Ale<;sio ,  dont  j'ai  déjà  parlé  ; 
mais  c'est  surtout  dans  l'opéra  bouffe  italien  qu'on  le 
trouve  le  plus  souvent  emplové.  Les  anciens  opéras  sé- 
rieux italiens  n'en  contenaient  autrefois  qu'un  seul,  qui 
était  toujours  placé  dans  la  scène  la  plus  intéressante, 
aujourd'hui  on  n'écrit  guère  d'opéra  (|ui  ne  renferme 
plusieurs  duos  ,  ou  comiques,  ou  sérieux,  ou  de  demi- 
caractère. 

Les  compositeurs  italiens  n'écrivent  plus  que  des  duos 
dont  ils  semblent  mesurer  le  mérite  à  la  taille;  ce  sont 
toujours  les  mêmes  patrons,  c'est  à-dire  les  trois  inter- 
minables mouvemens  ;  et  l'on  se  croirait  déshonoré  si 
l'on  composait  un  duo  court  et  gracieux  comme  ceux  du 
Mariage  de  Fl^dvo  et  de  Don  Juan ,  Su  l'aria  ;  Crudel, 
perche  fin  ora  ;  ou  La  ci  darem  la  mano.  Il  faudra 


160  RAPPORTS   DES   SONS.  8ECT.    II. 

pourtant  en  revenir  à  user  quelquefois  de  ces  propor- 
tions, qui,  quoi  qu'on  en  dise,  sont  plus  dramatiques 
que  la  plupart  des  longs  morceaux  qui  leur  ont  succédé. 

Les  trios  d'opéras  sont  nés  en  Italie,  comme  tous  les 
morceaux  d'ensemhle.  C'est  dans  l'opéra  bouffe  que  Lo- 
groscino,  compositeur  vénitien,  en  fit  le  premier  essai 
vers  1750.  Il  fut  surpassé  dans  ses  effets  par  Galuppi, 
son  compatriote;  mais  ce  fut  surtout  Piccini  qui,  dans 
sa  Buoiia  Figliola ,  porta  ce  qu'on  appelle  en  général 
des  morceaux  cT ensemble  à  un  point  de  perfection 
très  remarquable.  Les  finale  ^(\\n  n'en  sont  que  des  mo- 
difications très  développées,  devinrent  aussi  nécessaires 
pour  les  terminaisons  d'actes.  On  sait  tout  l'intérêt  que 
Paisiello,  Cimarosa  et  Guglielmi  surent  répandre  sur 
cette  partie  de  la  musique.  Le  fameux  septuor  du  Roi 
Théodore  fut  un  pas  immense  fait  dans  l'art  de  jeter  de 
l'intérêt  sur  les  scènes  lyriques  à  personnages  nom- 
breux; Mozart  compléta  ensuite  cette  grande  révolu- 
tion musicale  par  ses  merveilleux  trios,  quatuors,  sex- 
tuors et  finales  de  la  Flûte  enchantée ,  de  Don  Juan  et 
du  Mariage  de  Figaro.  Rossini  n'a  point  inventé  dans 
la  forme  des  morceaux  d'ensemble  ;  mais  il  a  perfec- 
tionné des  détails  de  rhylhme,  d'effets  de  voix  et  d'instru- 
mentation. 

Les  anciens  compositeurs  français  ne  comprenaient 
pas  l'utilité  des  grandes  réunions  de  voix  qui  n'aura-ient 
peut-être  pas  été  à  la  portée  de  leur  auditoire.  D'ailleurs 
les  sujets  d'opéras-comiques  étaient  trop  légers  ,  et  le 
nombre  des  peisonnHgcs  trop  peu  considérable  pour 
qu'on  pût  rien  écrire  de  semblable.  Cependant  Pbiiidor 
saisit  l'occasion  qui  lui  fut  offerte  dans  Tom  Joncs  pour 
faire  un  bon  «juaîuor  ;  Monsigny,  dont  le  savoir  en  mu- 


CilW.Wl.  -'lUSlyLE  lUVAMATIQUE.  I  (j  J 

si-i.ie  émit  fort  médiocre,  mais  qui  possédait  une  imngi- 
nniion  très  vixe  el  hcauco.ip  de  sensibilité,  fit  aussi  diuis 
Fc.',.c  ou  l' Enfant  trouve  un  trio,  sinon  fort  bon,  du 
moins  fort  expressif. 

Q..antà  l'opéra  sérieux  français,  Gluck,  qui  en  avait 
fixe  la  forme,  ne  fit  entrer  dans  sa  composition  que  le 
récitatif  porté  à  sa  plus  grande  perfection,  les  chœurs, 
les  airs,  rarement  les  duos,  et  presque  jamais  les  trios' 
quatuors  ou   morceaux  d'ensemble.  Les  formes  un  peu' 
compliquées  de  ce  genre  de  musique  ne  commencèrent 
ase  naturaliser  en  France  que  par  les  travaux  de  MéhuI 
et  deM.  Chérubini.  Concevant  les  développemens  de  la 
scène  lyrique  sur  un  pian  plus  vaste  que  leurs   devan- 
ciers, ces  deux  grands  musiciens  appliquèrent  à  la  scène 
française  les  améliorations  de  l'opéra  italien,  en  les  mo- 
difiant par  les  qualités  particulières  de  leur  génie.  Leurs 
productions  eurent  un  degré  d'énergie  de  plus  que  celles 
de  Paisiello  et  de  Cimarosa;  ils  exagérèrent  même  la  n- 
chesse  d'harmonie  dont  l'école  allemande  avait  donné  le 
modèle;  ils  firent  des  découvertes   dans  l'instrumenta- 
tion, decouverles  dont  Rossini  a  profité  depuis  lors;  il. 
fnrent  enfin  plus  observateurs  de  l'exactitude  drama- 
tique; mais  ils  chantèrent  moins  heureusement ,  et  firent 
quelquefois  consister  un  peu  plus  le  mérite  de  la  musique 
dans  l'arrangement  que  dans  l'inspiration.  Quoi  qu'il  e.i 
sou   de   l'opinion   qu'on  peut  se   faire   du  genre  qu'ils 
a^alent  adopté,  on  ne  peut  nier  qu'ils  aient  rendu  de 
grands  services  aux  progrès  de  leur  art;  ce  sont  eux  qui 
ont  fait  enfin  pénétrer  dans  la  musique  des  proportions 
musicales    plus   grandes  que    celles   dont    les  Français 
avaient   l'habitude,  et  qui  ont  écrit  de  vrais  morceaux 
d'ensemble,  ^!c  vrais  finales  dignes  de  fix.r  l'artcntion 


162  RAPPORTS  DES  SOIfS.  SECT.  II. 

des  musiciens  instruits  et  des  gens  de  goût.  Leur  exemple 
a  Iracé  la  roule  à  d'autres  compositeurs  haiiiles  qui  leur 
ont  succédé  :  MM.  Boieldieu ,  Cale!,  Auber,  Hérold  et 
d'autres,  se  font  gloiie  d'avoir  reçu  leurs  conseils  et  suivi 
leur  exemple.  M.  Boieldieu  s'est  particulièrement  distin- 
gué par  la  grâce,  l'élégance  et  l'esprit  qu'il  a  su  allier 
avec  les  formes  musicales  dévelfjppées. 

Une  des  qualités  par  lesquelles  l'école  française  s'est 
distinguée  le  plus  est  celle  d'avoir  produit  des  chœurs 
excellens.  Rameau  fut  le  premier  qui  fit  briller  les  opéras 
français  par  la  beauté  de  ce  genre  de  morceau.  Si  son 
mérite  est  inférieur  à  celui  de  Ilaendel  sous  le  rapport  de 
la  richesse  des  formes  saxantes  et  de  la  modulation,  on 
ne  peut  nier  du  moins  qu'ii  n'ait  su  donner  aux  chœurs 
de  ses  opéras  une  grande  force  dramatique.  D'ailleurs, 
les  formes  savantes  des  chœurs  d'oratorios  et  les  fugues 
dont  ils  sont  remplis  ne  conviennent  |>oint  à  la  scène; 
car  il  ne  faut  point  détourner  l'attention  de  l'objet  prin- 
cipal, qui  est  l'intérêt  dramatir|ue.  Depuis  Rameau,  une 
immense  quantité  de  chœurs  français  ont  été  écrits  par 
Gluck,  3Iehul,  M.  Chérubini,  et  toute  leur  école. 

Celte  portion  de  l'opéra  était  autrefois  la  plu-;  faible 
en  Italie,  parce  que  les  spectateurs  italiens  n'y  atta- 
chaient aucune  importance.  MM.  Paêr  et  Mayer  ont  été 
les  premiers  a  rendre  aux  chœurs  l'éclat  qu'ils  doivent 
avoii  dans  la  musique  draiTiatir|ue  ;  Rossini  est  venu  après 
eux  enrichir  cette  partie  'lu  drame  de  formes  mélodiques 
qu'on  ne  lui  avait  pas  données  auparavant;  il  en  résulla 
des  effets  nouveaux  auxquels  on  n'était  pas  accoutumé, 
et  qui  ont  eu  de  brillans  fuccès.  Les  chœurs  de  WebrT 
sont  distribués  d'une  manière  pittoresque  et  drauiatique 

L'ouverture  des  opéras,  que  le»  Italiens  nomment  sin 


CHAP.    XVI.  MVSIQUE  DRAMATIQVE.  16S 

f'oni'n,  estronsidéiéepar  quelques  personnes  comme  une 
j)<Trlie  importante  de  la  musique  d'un  drame  ;  dautres 
en  font  peu  de  cas.  La  première  ouverture  qui  ail  joui  de 
quel<|ue  réputation  en  Italie  est  celle  de  la  Fra\ciitana 
de  Paisiello.  L'ouverture  à'iphigcnic  en  JuUde,  de 
(•luck,  fit  un  effet  prodiijieux  lorsiiu'ou  l'entendit  pour 
la  première  fois,  en  1773,  et  depuis  lors  elle  n'a  cessé 
d'exciter  l'admiration  par  le  mélange  de  majesté,  de  dés- 
ordre et  de  pathétique  dont  elle  est  empreinte.  L'ouver- 
ture de  Df'innpiion ,  de  Vogel ,  est  aussi  fort  belle  dans 
son  début  et  dans  toute  sa  première  partie,  mais  la  fin 
est  indigne  du  commencement.  Deux  autres  ouvertures 
ont  eu  aussi  beaucouj)  de  réputalion  en  Fi-ance  ;  cesont 
celles  de  la  Ceiren-nne  et  de  Panitr^c,  composées  toutes 
deux  par  Grélry.  Elles  contiennent  des  phrases  d'un 
chant  heureux,  mais  elles  ne  méritent  point  leur  réputa- 
tion, car  elles  sont  mal  faites.  Dénuées  de  plan,  de  fac- 
ture et  d'harmonie,  ces  ouvertures  n'ont  pu  obtenir  leur 
succès  que  lorsque  le  goût  du  public  français  était  encore 
à  former.  I^L  Cherubini  a  fait  jiliisieurs  ouverluies  dont 
le  mérite  est  très  remar(|ualile  ;  elles  sont  devenues  clas- 
siques dans  presque  tous  les  concerts  de  l'Europe  ;  on  les 
joue  avec  un  éj;al  succès  en  Ani;lelerre,  en  Allemag;ne 
et  en  France.  Les  plus  belles  sont  celles  de  V Hôielleric 
portiif^aise  et  d\Jnacrt'on  ;  leur  plan  ,  leur  facture  et 
leur  instrumentation  sont  éj^alement  admirables. 

Parmi  les  morceaux  «le  ce  genre,  il  en  est  im  qui  est 
considéré  comme  ce  qui  existe  de  plus  beau  .  sous  quel- 
tjue  aspett  qu'on  veuille  l'examinei-  ;  l'est  l'ouverture  de 
la  Flûte  etichiuilce ,  de  3Li/.art,  clief-d'œu\re  inimitable 
qui  sera  éternellement  le  modèle  des  ouvertures  et  le 
désespoir  des  compositeurs.  Tout  se  trouve  réuni  dan"i  r? 


164  RAPPORTS   DEi)  SOKS.  Si.CT.   II. 

bel  ouvrage;  début  large  et  magnifique,  nouveauté  des 
motifs,  variété  dans  la  manière  de  les  reproduire,  science 
profonde  dans  le  plan  et  dans  les  détails,  instrumenta- 
tion piquante ,  intérêt  croissant  et  péroraison  pleine  de 
chaleur.  On  peut  encore  citer  comme  des  modèles  d'in- 
térêt dramatique  les  ouvertures  A'E^mont  et  de  Pro- 
méthée,  de  Beethoven.  Rossini ,  dans  ses  ouvertures  de 
Tancrcde ,  d'Otello,  du  Barhier  de  Sévllle  et  de  Se- 
inirarnide,  a  multiplié  les  mélodies  les  plus  heureuses  et 
les  effets  d'instrumentation  les  plus  séduisans;  mais  il  y 
a  fait  voir  que  le  génie  le  plus  heureusement  organisé 
ne  suffit  pas  toujours  pour  tirer  parti  des  idées  les  plus 
favorables.  En  effet,  tout  morceau  de  musique  instru- 
mentale se  divise  ordinairement  en  deux  parties.  La  pre- 
mière contient  l'exposé  des  idées  de  l'auteur  et  module 
dans  un  ton  relatif  au  ton  principal;  la  seconde  partie 
est  consacrée  au  développement  de  ces  idées,  au  retour 
dans  le  ton  primitif,  et  à  la  répétition  de  certains  traits 
de  la  première.  Le  développement  des  idées  dans  la 
seconde  partie  est  ce  qu'il  y  a  de  plus  difficile  dans  l'art 
de  traiter  une  ouverture;  il  exige  des  études  prélimi- 
naires dans  la  science  du  contrepoint,  et  du  soin  dans 
les  combinaisons.  Rossini  a  coupé  le  nœud  gordien;  il 
n'a  point  fait  la  seconde  partie,  et  s'est  borné  à  quel- 
ques accords  pour  rentrer  dans  le  ton  primitif,  et  à  ré- 
péter à  peu  près  exactement  toute  la  première  partie 
dans  un  autre  ton.  Dans  l'ouverture  de  Guiilanine  Tell 
il  s'est  livré  à  de  plus  grands  développemens  et  a  pro- 
duit un  ouvrage  plus  digne  de  sa  brillante  réputation. 

On  a  répété  souvent  qu'une  ouverture  doit  être  un 
résumé  de  la  pièce,  et  qu'elle  doit  rappeler  quelques 
traiîs  des  situations  primipnlcs  qui  s'y  trouvent.   Plu— 


CHAP.   XVI.  MUSIQUE  UnvMATIyUK.  165 

sieurs  musiciens  ont  adopté  celle  idée,  et  n'ont  l'ail 
qu'une  espèce  de  pot-pourri  de  l'ouverture  de  leur 
opéra;  celte  idée  me  paraît  bizarre.  Qu'un  résumé  de 
l'opéra  soil  nécessaire,  à  la  bonne  beiire  ;  mais  ce  ré- 
sumé devrait  se  trouver  à  la  fin  de  la  pièce ,  où  le  spec- 
tateur peut  sentir  le  mérite  du  retour  de  certaines  phrases 
qui  lui  rappellent  des  situations  de  l'ouvrage.  Si,  au  con- 
traire, ces  phrases  sont  entendues  par  lui  avant  qu'il  ait 
pris  connaissance  des  situations ,  elles  ne  lui  rappellent 
rien  et  n'attirent  pas  plus  son  altenlion  que  d'autres  phrases 
ne  pourraient  le  faire.  Au  reste,  il  est  bon  de  se  rappeler 
qu'aucune  ouverture  justement  estimée  n'est  faite  dans 
ce  système.  Les  ouvertures  à^ If>hii;érne ,  de  Détnophon, 
de  Don  Juan,  de  la  Flûte  cnchanl'fe ,  (ï Egmont ,  de 
Prométhée ,  de  V Hôtellerie  portugaise  et  ^ Anacréon 
ne  sont  que  des  symphonies  dram.Ttiques ,  et  non  des 
pots-pourris. 

Quoique  l'ouverture  appartienne  à  la  musique  instru- 
mentale, j'ai  cru  devoir  en  parler  à  propos  du  drame 
musical.  Je  reviens  à  ce  qui  concerne  la  forme  des  pièces 
vocales. 

Dans  le  cours  des  seizième  et  dix-septième  siècles  il 
y  eut  de  véritable  musique  de  concert  privé,  laquelle 
consistait  en  une  sorte  de  pièces  vocales  à  quatre,  cin([ 
ou  six  parties,  et  qu'on  nommait  luddricaux  et  chan- 
sons', l'usage  de  ce  genre  de  Tnusi(|ue  a  diminué  dès  que 
l'opéra  fut  devenu  assez  intéressant  pour  attirer  l'atten- 
tion des  amateurs;  insensiblement  les  airs  d'opéras  ont 
pris  la  place  de  ce  qu'on  nommait  la  musique  de  cham- 
bre ,  et  celle-ci  a  fini  par  disparaître  presque  entière- 
ment. On  n'en  a  conservé  que  les  canzonctte ,  en  Italie; 
les  lieder ^  en  Allemagne,  et  les  loinances  pour  une  ou 


166  RAPPORTS  DES  S0:NS.  8ECT.  II. 

deux  voix  ,  en  France.  Ces  différentes  pièces  participent 
du  goût  national  empreint  dans  les  autres  parties  de  la 
mnsiiiiie  de  chacun  de  ces  peuples  ;  ainsi  le  goût  des 
Italiens  pour  le  chant  élégant  et  embelli  <\e  fioritures 
se  remarque  dans  les  conznnette ;  les  licderou  chansons 
allemandes  se  distinguent  par  «ne  franchise  de  ton  re- 
marquable uni  à  un  sentiment  d'harmonie  recherché; 
les  romances  françaises  brillent  surtout  par  une  expres- 
sion ou  dramatique  ou  spirituelle  des  paroles.  On  donne 
souvent  le  nom  de  nocturnes  aux  romances  à  deux 
voix. 

Ces  petites  voix  ont  quelquefois  une  vogue  prodigieuse 
dans  la  nouveauté,  et  leurs  auteurs  jouissent  pendant 
dix  ou  douze  ans  de  réputations  de  salons  fort  brillantes, 
qu'ils  perdent  par  suite  de  l'engouement  qui  se  manifeste 
])Our  quelque  nouveau  venu.  Un  musicien  devenu  cé- 
lèbre dans  un  genre  plus  élevé,  M.  Boieldieu,a  fait  des 
romances  charmantes  qui  ont  été  fort  recherchées; 
après  lui  est  \enu  Garât ,  puis  Blangini  ,  puis  M™"  Gail, 
à  qui  M.  Romagnési  a  succédé;  M.  Amédée  de  Beau- 
plan  a  joui  d'un  instant  de  vogue;  aujourd'hui  MM.  La- 
barre,  Panseron  et  Masini  sont  à  la  mode. 

La  musi(|ue  instrumentale  se  divise  en  plusieurs  bran- 
ches qui  se  rattachent  à  deux  espèces  principales  :  1°  la 
musique  de  concert;  2°  la  musique  de  chambre. 

La  symphonie  lient  le  premier  rang  dans  la  musi(jue 
de  concert.  Son  origine  remonte  à  un  certain  genre  de 
pièces  instrumentales  qu'on  nommait  autrefois  en  Italie 
ricercari  da  sunnare ,  et  en  Allemagne  pnrtit'n^  les- 
cjuelles  se  con)posaierit  de  chansons  variées ,  d'airs  de 
danses  et  de  fugues  ou  morceaux  fugues,  destinés  à  être 
exécutés  par  des  violes,  des  basses  de  violes,  des  luths, 


CHAP.    XVI.  MtSlQtE    HE    CONCERT.  IC7 

ihéorbcs,  elc.  Lorscjuc  ces  pièces  passèient  de  mode,  on 
leur  substitua  des  morceaux  coupés  en  deux  parties, 
d'im  mouvement  assez  vif,  suivis  d'un  autre  morceau 
d'un  mouvement  plus  lent,  et  d'un  rondeau  qui  tirait 
sou  nom  de  la  répétition  d'une  phrase  principale.  Les 
premières  symphonies  ne  furent  d'abord  composées  cpie 
de  deux  parties  de  violon  ,  alto  et  basse.  Un  nmsicien  al- 
lemand nommé  Vaidiall  commença  à  perfectionner  la 
symphonie,  en  y  ajoutant  deux  hautbois  et  deux  cors; 
il  fut  imi.é  par  Toesky  ,  Van-Malder  et  Stamitz.  Gossec 
ajouta  les  parties  de  clarinettes  et  de  bassons  aux  autres 
instrumens,  et  les  menuets  avec  les  trios  augmentèrent  le 
nombre  des  morceaux  cpii  existaient  déjà  dans  la  sym- 
phonie. Le  menuet  tire  son  nom  de  la  mesure  à  trois 
temps  dans  laquelle  il  est  écrit.  Il  était  autrefois  d'un 
mouvement  presque  aussi  lent  que  ia  danse  dont  il  porte 
le  nom:  mais  insensiblement  sa  vitesse  a  augmenté,  et 
Beethoven  a  fini  par  en  faire  un  presto.  C'est  à  cause  de 
cela  qu'il  lui  a  ôlé  son  nom  de  menuet,  pour  lui  substi- 
tuer celui  de  scherzo  T  badinage].  Je  n'ai  pu  découviir 
ce  que  signifie  le  nom  de  trio  qu'on  donne  à  la  seconde 
partie  du  menuet.  Il  se  pourrait  qu'il  vînt  de  ce  qu'on 
supprimait  quelquefois  un  instrument  dans  celte  seconde 
partie. 

On  ne  peut  guère  prononcer  le  nom  de  symphonie 
sans  réveiller  le  souvenir  de  Haydn.  Ce  grand  musicien 
a  si  bien  perfectionné  le  plan  et  les  détails  de  ce  genre  de 
musique  qu'il  en  est  en  quelque  sorte  le  créateur.  L'his- 
toire des  progrès  du  génie  et  du  talent  de  cet  homme  éton- 
nant est  l'histoire  même  des  progrès  de  l'art.  Déjà  ses 
premiers  ouvrages  annonçaient  sa  supériorité  sur  ses  con- 
temporains; mais  ils  étaient  bien  inférieurs  à  ceux  qui. 


168  RAPPORTS  DF.S  SOXS.  SE<;T.    II. 

l'opuis,  sont  sortis  de  sa  plume.  Si  l'on  n'oublie  pas  que 
ces  mêmes  ouvrages  ont  toujours  été  mesurés  au  degré 
d'habileté  des  exécnlans,  habileté  (ju'il  a  lui-même  pro- 
voquée et  dont  il  est  en  partie  cause,  on  concevra  sans 
peine  quelle  profondeur  de  talent  il  a  fallu  pour  pro- 
dtiire  des  chefa-d'œuvre  en  se  conformant  ainsi  à  des  en- 
traves et  à  des  considérations  particulières.  Si  Haydn 
éiait  venu  dans  un  temps  où  le  savoir  des  exécutans  eût 
élé  ce  qu'il  est  aujourd'hui ,  il  n'aurait  rien  laissé  à  faire 
à  ses  successeurs.  Le  talent  principal  de  Haydn  consiste 
il  tirer  parti  de  l'idée  la  plus  simple,  à  la  développer  de 
hi  manière  la  plus  savante,  la  plus  riche  en  harmonie, 
la  plus  inattendue  dans  ses  effets,  sans  jamais  cesser 
ti  être  gracieux.  Une  autre  qualité  le  distingue,  c'est  la 
rectitude  et  la  netteté  du  plan  ,  qui  sont  telles  que  l'ama- 
Irnr  le  moins  instruit  en  suit  sans  peine  les  détails  comme 
le  musicien  le  plus  habile. 

Mozart,  toujours  passionné,  toujours  mû  par  un  sen- 
timent profond,  a  moins  brillé  que  Haydn  dans  le  déve- 
loppement de  la  pensée  de  ses  symphonies;  mais  il  a 
trouvé,  dans  cette  scnsibilitéexquise  dont  il  était  si  abon- 
damment pour\u,  une  puissance  d'émotion  qui  entraîne 
toujours  l'audiloire  et  qui  lui  fait  j)artager  sa  passion. 

Beethoven  ,  dont  le  talent  fut  long-temps  méconnu  en 
France,  règne  maintenant  dans  la  symphonie.  Plus  hardi 
que  les  deux  grands  artistes  que  je  viens  de  nommer,  il 
ne  craint  pas  d'aborder  les  plus  grandes  difficultés,  et 
souvent  il  en  trionqilie  avec  bonheur.  Son  génie  s'élève 
aux  plus  hautes  régions,  nul  n'a  connu  mieux  que  lui 
les  effets  de  l'instrunicntaiion,  dans  lesquelles  il  a  fait 
beaucoup  de  découvertes;  mais  il  est  souvent  bizarre, 
incorrect ,  et  semble  plutôt  improviser  que  suivre  un  plan 


(  M\i'.  XVI.  Ml  ^loi  r  i>v  i.HwmRE.  Kî!) 

:nrclé.  Du  reste  il  partaj;o  li;  sort  de  tons  los  iiomirrs  ;!  ■ 
génie,  en  occnpant  l'allcnlion  plntôt  des  beautés  qu'il 
prodigue  qne  des  défauts  c|ui  les  déparent. 

Les  quatuors,  quinteltis,  sextuors,  etc.,  sont  des  di- 
minulirsde  la  svniplionie;  ils  sont  destinés  à  en  tenir  lieu 
d::ns  les  concerls  privés.  Havdn  ,  Mozart  et  Beethoven 
sont  encore  les  chefs  de  ce  genre  de  symphonie  en  minia- 
ture, et  souvent  le  talent  qu'ils  y  déploient  est  tel  qu'ils 
foîil  oublier  les  étroites  proportions  des  moyens  qu'ils 
nultent  en  usage.  Les  mêmes  qualités  que  ces  trois 
gr;inds  artistes  ont  mises  dans  la  grande  symphonie  se 
reîrouvent  dans  le  genre  du  quatuor. 

Un  homme  qui  a  vécu  pauvre,  isolé  et  méconnu  en 
Espagne,  a  aussi  cultivé  ce  genre,  et  particulièrement 
le  quintetto,  avec  un  rare  bonheur  d'inspiration;  cet 
homme  est  Bocchérini.  N'ayant  point  assez  de  connnu- 
nicalions  avec  le  monde  pour  être  informé  des  progrès 
de  la  musique  et  des  variations  du  goût,  il  composa 
pendant  près  de  cinquante  ans  sans  renouveler  ses  sensa- 
/  tions  musicales  par  l'audition  ou  par  la  lecture  des 
œuvres  de  Haydn  ou  de  Mozart;  il  tira  tout  ce  qu'il 
écrivit  de  son  propre  fonds;  de  là  l'indépendance  de 
manière  et  de  style,  l'originalité  d'idées,  et  le  charme 
(le  naïveté  qui  caractérisent  ses  productions.  On  peut 
d.  sirer  plus  d'acquis,  plus  de  richesse  d'harmonie  et 
quelque  peu  moins  de  vieillesse  dans  les  formes  de  la 
musique  de  Bocchérini,  mais  non  plus  de  véritable 
inspiration. 

L^sonate,  pour  un  instrument  seul  ou  pour  plusieurs 
récnis,  est  encore  une  sorte  de  symphonie.  Son  nom 
vient  de  suonare ,  qui  signifie  jouer  d'un  ou  plusieurs 
instrumens.   Ce   mot   ne   s'appliquait  autrefois   qu'aux 


170  RAPPORTS  DES  SO^S.  SECT.   II. 

instrumens  k  cordes  ou  à  vent  ;  en  parlant  des  instru^ 
mens  à  clavier  on  disait  toccare,  d'où  l'on  avait  fait 
tuccata,  qui  signifie  une p.èce  à  tout/ie/-;  depuis  près 
d'un  siècle,  sonale  se  dit  de  toutes  les  pièces  de  ce 
genre,  pour  quelque  itistrumenl  que  ce  soit. 

Comme  la  sym|>honie  ou  le  quatuor,  la  sonate  se  di- 
vise eu  plusieurs  morceaux,  qui  consistent  en  un  pre- 
mier mouvement ,  un  adagio  et  un  rondeau  ;  rarement 
on  y  joint  un  menuet.  Les  sonates  accompagnées  par  un 
ou  deux  instrumens  prennent  ordinairement  les  noms  de 
duos  ou  t'ios.  Il  y  a  des  sonates  de  piano  composées 
pour  être  exécutées  par  deux  personnes.  Les  quatre 
mains  embrassent  toute  l'étendue  du  clavier  et  rem- 
plissent l'harmonie  d'une  manière  riche  et  intéressante 
de  formes,  quand  ces  pièces  sont  écrites  par  un  com- 
positeur habile. 

Les  meilleures  sonates  de  piano  ont  été  écrites  par 
Ch.-Ph -Em.  Bach  ,  Haydn  ,  Mozart,  Beethoven,  dé- 
menti, Dusseck,  Cramer;  les  sonates  fuguées  de  .lean- 
Sébaslien  Bach  pour  clavecin  et  violon  sont  des  chefs- 
d'œuvre.  Krumphollz  a  été  pour  la  musii|ue  de  harpe 
ce  que  démenti  fut  pour  celle  de  piano,  c'est-à-dire  le 
modèle  de  ceux  qui  ont  écrit  ensuite  pour  cet  instru- 
ment. Une  élévation  de  style  peu  commune  et  des  effets 
d'une  harmonie  piquante  sont  les  qualités  par  lesquelles 
ce  composileiu-  s'est  distingué.  Corelli,  Tartini ,  Loca- 
felli ,  Leclair  sont  à  la  tête  des  auteurs  qui  ont  composé 
les  nseilleurs  sonates  de  violon.  Francischeîlo  et  Duport 
se  sont  distingués  dans  la  composition  des  sonates  de 
violoncelle.  Quant  aux  sonates  d'inslriunens  à  vent,  il  y 
enapeu  qui  méritent  d'être  citées.  En  général,  la  musique 
destinée  à  ces  instrumens  est  lestée  dans  un  état  d'infé- 


CMAP.    XVI.  MUSIQUE  DE  CHAMBRE.  171 

riorité  très  sensible  ;  un  compositeur  habile  pourrait  y 
acquérir  de  la  répulalion  ,  par  cela  seul  qu'il  mettrait  ce 
genre  de  musique  à  la  hauteur  des  pièces  qui  ont  été 
écrites  poiu*  tous  les  autres  iustrunu-ns.  On  ne  jjossède 
en  ce  genre  qu'un  ou  deux  beaux  morceaux  de  Mozart 
et  de  Beethoven.  Kronnner  a  écrit  aussi  de  la  musique 
d'instrumens  à  vent  dans  lacpielle  il  y  a  de  l'effet,  et 
M.  Reicha,  venu  après  lui,  a  écrit  les  meilleurs  ou- 
vrages en  ce  genre  qui  soient  connus  en  France. 

Depuis  plusieurs  années,  la  sonate  est  tombée  dans 
le  discrédit.  Certaine  futilité  de  goût,  qui  a  fait  invasion 
dans  la  musique,  a  substitué  aux  formes  sérieuses  de  ce 
genre  de  pièces  des  ouvrages  plus  légers  auxquels  on 
donne  les  noms  de/a/it(ii.\ies ,  d'airs  varies,  de  ca- 
prices, etc.  La  fantaisie,  dans  son  origine,  était  une 
pièce  où  le  compositeiu*  se  livrait  à  toutes  les  saillies  de 
son  imagination.  Point  de  plan;  point  de  parti-pris ^ 
l'inspiration  du  moment,  de  l'art,  de  la  science  même, 
mais  cachée  avec  soin,  voilà  ce  qu'on  trouvait  dans  la 
fantaisie  telle  que  Bach,  Handel  et  Mozart  savaient  la 
faire.  Mais  ce  n'est  point  cela  qu'on  entend  aujourd'hui 
parce  mot.  Jamais  fantaisie  ne  fut  moins  réelle  que  ce 
qu'on  trouve  dans  les  pièces  qui  portent  ce  nom.  Tout, 
excepté  l'art  et  la  science,  y  est  réglé,  compassé,  arrangé 
sur  un  plan  qui  est  toujours  le  même.  Entendre  une  fan- 
taisie moderne,  c'est  les  entendre  toutes,  car  elles  sont 
toutes  faites  sur  le  même  modèle,  sauf  le  thème  princi- 
pal,  qui  n'est  pas  même  d'invention;  car  c'est  presque 
toujours  le  chant  d'une  romance  ou  d'un  air  d'opéra  qui 
en  fait  les  frais.  La  fantaisie  se  terminant  toujours  par 
des  variations  sur  ce  thème,  l'air  varié  n'en  difière  point. 
Il  n'est  pas  possible  que  le  dégoût  et  la  satiété  ne  soient 


IT2  KAPPORTS    DES  SONS.  8ECT.   II. 

la  suite  de  l'abus  qu'on  fait  de  ces  formes  ;  alors  on  re- 
viendra à  de  la  musique  plus  réelle ,  et  l'art  rentrera  dans 
son  domaine. 

Ces  tristes  fantaisies,  ces  airs  variés  si  monotones, 
ont  aussi  usurpé  la  place  du  concerto,  sorte  de  pièce  qui 
n'est  pas  sans  défaut,  mais  qui  a  du  moins  l'avantage  c!e 
montrer  le  talent  de  l'artiste  sous  un  aspect  de  grandes 
proportions.  Concerto,  mot  italien  qui  signifiait  autre- 
fois un  concert,  une  assemblée  de  musiticns  qui  exé- 
cutent divers  morceaux  de  musique  (on  dit  maintenant 
acadania),  s'écrivit  d'abord  concento.  Dans  le  dix- 
septième  siècle  on  commença  à  donner  le  nom  de  coi.~ 
ccrto  à  des  morceaux  composés  j^onr  faire  briller  i;n 
instrument  principal  que  les  antres  accompa^ndienl  ; 
mais  ce  ne  fut  que  vers  le  tonqjs  de  Corclli,  célèbre  vio- 
loniste romain,  fjue  ce  genre  de  pièce  devint  à  la  mod.. 
On  croit  généralement  qu'un  autre  violoniste,  nommé 
Torelli,  qui  ne  le  précéda  que  de  quelques  années,  donna 
au  concerto  la  forme  qu'il  a  conservée  jusque  vers  1760. 
Le  concerto,  lorsqu'il  était  accompagné  d'un  double 
quatuor  de  violon,  viole  et  basse,  s'appelait  concerta 
grosso,  grand  concert.  Le  concerto  grosso  avait  des 
espèces  de  tutli  où  tous  les  instrumens  étaient  employés  ; 
mais  un  auti'e  genre  de  concerto,  qu'on  appelait  con- 
certo cla  caméra,  n'avait  qu'une  partie  principale  avec 
de  simples  accompagnemens.  Il  n'y  eut  d'abord  que  des 
concertos  de  violons,  mais  par  la  suite  on  en  a  fait  pour 
tous  les  instrumens,  et  l'on  y  a  joint  des  accompagne- 
mens d'orchestre  complet. 

Les  concertos  de  violon  composés  par  Corelli,  Vivaldi 
et  Tartini  furent  autrefois  célèbres  dans  le  monde;  ils 
le  sont  encore  dans  l'école,  et  méritent  la  vénération 


i. 


<:'IU'.    \vi.  Wl!Sl,^)tii  i)i.:  tUA-MBRE.  J  73 

des  artistes  par  la  grandeur  des  pensées  et  la  noblesse  d,. 
le    S,a,n.,.,  Lolli  ot  Ja.nnwick,  bien  qu'ils  ne  f«s- 
t  pa.  dépourvus  de  n^é.ite,  ne  su.ent  point  conser- 
n  concerto  son  caractè.  e  d'élévation.  Leurs  efforts 
e     ent  pour  but  de  se  „.ettre  à  la  portée  du  public  par 
d  s  choses  ag..ables,  et  l'on  doit  avouer  qu'ils' y  réu'i- 
nt  souvent.  Le  prenuer  de  ces  violonistes,  ,ui  était  ne 
n  Bohen,e,  et  qu.  brilla  à  la  cour  de  Manhein.,  vers 
mo    redu.su  a  deux  le  no.nbre  des  n.orceaux  qui  en- 
fa.ent  dans  la  coniposition  du  concerto,  c'est-à-dire  à 
un  pre„.er  ..orceau  et  au  rondeau  ou  rondo,  et  divisa 
hncun  de  ces  morceaux  en  trois  solos,  entrecoupés  d.^ 

succès.  EnhnparutVaotti,  qui,  sans  rien  inventer  quant 
a  la  onne  du  concerto,  se  „.ontra  tellement  inventeur 
lan.  le  chant  dans  les  traits,  dans  la  forme  des  accon. 
P  «nemens,  dans  l'harmouieet  dans  la  modulation,  qu'il 
fit  b.entot  oublier  ses  devanciers,  et  qu'il  laissa  s^s  ri- 
vau.x  sans  espoir  de  soutenir  la  comparaison.  Viotti  ne 
bnlla.t  point  par  le  savoir  ;  ses  études  avaient  été  mé- 
d-ocres;  mais  sa  richesse  d'imagination  était  telle  qu'il 
n  avait  pas  besoin  de  songer  a  économiser  ses  idées  H 
composait  bien  £lus^£arJ„syrM..que„. par  réflexion; 
mais  cet  instinct  le  guidait  à  n.erveille,  et  lui" faisait 
rencontrer  juste  ,  même  dans  l'harmonie. 

On  ne  s'est  avisé  de  faire  des  concertos  de  clavecin 
que  long-temps  «près  les  premières  compositions  du 
même  genre  pour  le  violon,  et  plus  tard  encore  on  en 
a  eu  pour  les  instrumens  -i  vent;  mais  les  uns  et  les 
autres  ne  furent  que  des  imitations  des  formes  arrêtées 
du  concerto  à  la  Stamitz.  Cependant  ce  sont  précisé- 
n^enl  ces  formes  qui  me  semblent  vicieuses  et  qui  me 


1  74  RAPPORTS  DES  SO«S.  SECT.   11. 

paraissent  causer  l'ennui  de  l'audiloire.  Comment  se 
fait-ii  qu'on  soit  resté  jusqu'aujourd'hui  altaclié  à  une 
coupe  aussi  défectueuse  que  celle  de  cr-s  concertos  où 
le  premier  fulti  fait  entendre  exactement  les  mêmes 
phrases  que  le  premier  solo?  où  il  suit  la  même  modu- 
lation de  la  tonique  à  la  dominante  pour  revenir  ensuite 
à  la  tonique  et  recommencer  la  même  marche?  où  trois 
solos,  qui  ne  sont  que  le  développement  des  mêmes 
idées,  les  rejiroduisent  sans  cesse  en  variant  seulement 
le  ton?  où  les  cadences  de  repos,  mullipliées  à  dessein 
pour  avertir  le  public  qu'il  doit  applaudir  l'exécutant, 
contribuent  à  rendre  le  morceau  pins  monotone?  enfin, 
où  le  morceau  final  reproduit  à  peu  près  le  même  sys- 
tème et  tons  les  défauts  du  premier  tillef^ro?  11  serait 
temps  de  chercher  les  moyens  d'éviter  ces  défauts  et  de 
ne  plus  avoir  de  ces  cadres  tout  faits  pour  toute  espèce 
de  sujets.  La  fantaisie  d'un  compositeur  doit  être  libre, 
et  les  idées  ne  doivent  pas  êtie  accommodées  à  la  forme, 
mais  la  forme  aux  idées. 

Il  est  un  genre  de  musique  instrumentale  qu'on  peut 
considérer  comme  une  branche  de  musique  sacrée  :  je 
veux  parler  des  pièces  d'orgues.  Outre  que  les  ressources 
immenses  de  l'instrument  invitent  le  génie  de  l'organiste 
à  la  variété,  la  diversité  des  cultes  et  des  cérémonies  de 
chaque  rite  occasionnent  l'emploi  de  beaucoup  de  stxles 
différens.  Par  exemple,  dans  les  églises  protestantes, 
l'organiste  doit  savoir  accompagner  par  une  haimonie 
riche  d'effet  et  de  modulation  les  chorals  et  cantiques. 
De  plus,  il  doit  posséder  une  imagination  féconde  pour 
les  préludes  de  ces  cantiques,  qu'il  faut  savoir  varier 
avec  élégance  sans  nuire  à  la  majesté  du  temple  et  sans 
négliger  la  science.   La   fugue,  véritable  fondement  de 


CHAP.   XVI.  MLSIylJE   1)E  CUAMUKE.  175 

l'art  de  toucher  tle  l'orgue,  doit  être  familière  à  l'artiste; 
enfin  il  est  néressaire  (|u'il  possiile  la  cotinaissance  des 
anciens  styles  pour  en  tirer  parii  dans  les  circonstances 
favorables.  L'Allemagne  a  produit  une  quantité  piodi- 
giense  de  grands  organistes;  depuis  SanuK'l  Scheidt,  qui 
vivait  à  Hambourg  au  commencement  du  dix-septième 
siècle,  et  qui  posséda  un  talent  de  premier  ordre,  on 
compte  Buxtehude  ,  Reinken  ,  Jean-Sébastien  Bach, 
Kittel,  etc.,  qui  ont  écrit  dans  tous  les  genres  des  pièces 
d'orgues  qui  seront  long- temps  encore  considérées 
comme  des  modèles  de  perfection. 

L'art  de  l'orgdniste  catholique  est  encore  plus  étendu. 
La  nécessité  de  bien  connaître  les  plains-chants  ro'iiain 
et  parisien  ,  ainsi  que  les  différentes  manières  de  les 
accompagner,  soit  en  les  plaçant  à  la  basse,  soit  en  les 
mettant  au-dessus;  l'art  de  traiter  les  messes,  vêpres, 
Mofinificot,  hymnes, antiennes  et  yf/^e^/w selon  l'impor- 
tance des  lêtes,  les  offertoires  et  antres  grandes  pièces, 
les  fugues  ou  le  style  fugué;  tout  cela,  dis-je,  appar- 
tient à  cet  art  de  l'organiste  ,  dont  on  ne  soupçonne  point 
en  général  la  difficulté.  Dans  les  préjugés  ordinaires,  un 
organiste  est  un  artiste  vulgaire,  au(|uel  on  donne  peu 
d'attention;  dans  le  fonds  cependant,  un  organiste  qui 
possède  toutes  les  qualités  de  son  art  devrait  marcher 
de  pair  avec  les  compositeurs  les  plus  renommés,  car 
rien  n'est  plus  difficile  ni  plus  rare  que  de  rencontrer 
celte  réunion  de  qualités. 

Il  s'en  faut  de  beaucoup  que  le  répertoire  de  l'orga- 
niste catholique  soit  aussi  riche  que  celui  de  l'organiste 
protestant.  Après  Frcscobaldi  et  un  petit  nombre  d'an- 
ciens organistes  italiens  et  Irançais  qui  ont  laissé  de 
beaux  ouvrages,  on  ne  trouve  rien.  Malheureusement  il 


|7o  RAPi'OUTs  UEb  SO«S.  SKCT.   II. 

n'y  a  point  une  seule  place  d'organiste  en  France  qui 
offre  des  ressources  suffisantes  pour  vivre;  il  n'est  donc 
point  étonnant  que  l'émulation  des  art  sles  ne  soit  point 
excitée,  et  que  l'art  d'écrire  pour  l'orgue  se  détériore  de 
plus  en  plus.  Il  est  douteux  que  cet  art  se  régénère,  si 
le  talent  ne  peut  espérer  une  existence  honorable. 

Dans  l'aperçu  qui  vient  d'être  fait  de  la  forme  des 
pièces  de  musique,  quelques  genres  secondaires  ont  été 
négligés,  parce  qu'ils  ne  sont  que  des  divisions,  ou 
plutôt  de  légères  modifications  de  genres  plus  impor- 
tans;  mais  rien  d'essentiel  n'a  été  oublié. 


TROISIEME  SECTION. 


DE  L  EXECUTION. 


CHAPITRE  XVII. 

Du  chaut  et  des  chanteurs. 

Lorsqu'un  chanteur,  cloué  d'une  belle  voix,  d'intel- 
ligence, de  sentiment,  et  qui  a  consacré  plusieurs  années 
de  sa  vie  à  développer  par  l'étude  les  qualités  dont  la 
naiure  l'a  pourvu,  lors,  dis-je,  cjue  ce  chanteur  vient 
essayer  pour  la  première  fois  en  public  l'effet  des  avan- 
tages qui  semblent  devoir  assurer  son  succès,  et  qu'il 
voit  tout  à  coup  ses  espérances  déçues,  il  accuse  ce  même 
public  d'injustice,  et  celui-ci  traite  le  chanteur  d'igno- 
rant et  de  cuistre.  En  pareil  cas  tout  le  monde  a  tort; 
car,  d'une  part,  celui  cjui  ne  connaît  ses  moyens  que 
par  l'effet  qu'ils  ont  produit  dans  une  école  est  hors 
d'état  d'en  régler  l'usage  devant  une  grande  assem- 
blée et  dans  un  vaste  local  ;  et ,  d'un  autre  côté,  le  pu- 
blic se  presse  trop  de  juger  sur  ses  premières  impres- 
sions, n'ayant  ni  assez  d'expérience,  ni  assez  de  savoir 
pour  discerner  le  bien  qui  se  trouve  mêlé  au  mal,  ou 
pour  tenir  compte  des  circonstances  qui  peuvent  s'op- 
poser à  l'effet  des  talens  du  chanteur.  Que  de  fois  le 
public  a  lui-même  réformé  ses  jugemens,  faute  de  les 
avoir  portés  d'abord  avec  connaissance  de  cause!  Tant 
de  choses  sont   à   examiner  dans  l'art  du  chant  qu'à 


178  DE   l'exécution.  SECT.   III. 

moins  d'en  avoir  fait  une  étude  particulière,  ou  d'avoir 
appris  par  la  réflexion  et  l'expérience  en  quoi  cet  art 
corisisie,  il  est  bien  difficile  de  ne  point  se  tromper  à 
la  première  audition  d'un  chanteur,  soit  en  bien,  soit 
en  mal. 

Pour  chanter,  il  ne  suffit  pas  de  posséder  une  belle 
voix,  quoique  ce  don  de  la  nature  soit  un  avantage  pré- 
cieux que  toute  l'habileté  possible  ne  peut  jamais  rem- 
placer. Mais  celui  qui  possède  l'art  de  poser  sa  voix 
avec  aplomb  et  d'en  ménager  les  ressources,  tire  quel- 
quefois meilleur  parti  d'une  voix  médiocre,  qu'un  chan- 
teur ignorant  ne  peut  faire  d'un  bel  organe. 

Poser  la  voix,  c'est  coordonner  aussi  parfaitement 
que  cela  est  possible  les  mouvemens  de  la  respiration 
avec  l'émission  du  son ,  et  développer  la  puissance  de 
ce  son  autant  que  le  comportent  le  timbre  de  l'organe  et 
la  conformation  de  la  poitrine,  sans  arriver  jusqu'à  l'ef- 
fort qui  fait  dégénérer  le  son  en  cri.  Lorsqu'il  existait  en 
Italie  de  bonnes  écoles  de  chant,  la  mi.sedevoix,  comme 
disaient  les  chanteurs  de  ce  temps,  était  une  étude  de 
plusieurs  années;  car  on  ne  crojait  point  alors  comme 
aujourd'hui  que  le  talent  s'improvise.  On  jieut  juger  du 
soin  que  les  maîtres  et  les  élèves  mettaient  à  cette  étude 
par  l'anecdote  suivante. 

Porpora,  l'un  des  plus  illustres  maîtres  de  l'Italie, 
prend  en  amitié  un  jeune  caslralo  son  élève.  Il  lui  de- 
mande s'il  se  sent  le  courage  de  suivre  constamment  la 
route  qu'il  va  lui  tracer,  quehpie  ennuyeuse  qu'elle  puisse 
lui  paraître.  Sur  sa  réponse  affirmative,  il  note  sur  une 
page  de  papier  réjilé  les  gammes  diatoniques  et  chroma- 
tiques, ascendantes  et  descendantes,  les  sauts  de  tierce, 
de  quarte,  de  quinte,  etc.,  pour  apprendre  à  franchir  le« 


CHA>.  XVII.  un   CHAITT.  170 

intervalles  et  à  porter  le  son;  des  trilles,  des  groupes, 
des  ajipogiatures  et  des  traits  de  vocalisation  de  diffé- 
rentes espèces. 

Celle  feuille  occupe  seule  pendant  nn  an  le  maître  et 
l'écolier;  l'année  suivante  y  est  encore  consacrée;  à  la 
troisième,  on  ne  parie  pas  de  la  changer;  l'élève  com- 
mence à  murmurer;  mais  le  mai  Ire  lui  rappelle  sa  pro- 
messe. La  quatrième  année  s'écoule,  la  cin([Liième  la  suit, 
et  toujours  l'éternelle  feuille.  A  la  sixième  on  ne  la 
quitte  point  encore,  mais  on  y  joint  des  leçons  d'articu- 
lation, de  prononciation  et  enfin  de  déclamalion;  à  la 
fin  de  cette  année  l'élève,  qui  ne  croyait  encore  en  être 
qu'aux  élémens,  fut  bien  surpris  quand  le  maitre  lui  dit  : 
«  Va,  mon  fils,  tu  n'as  plus  rien  à  apprendre;  tu  es  le 
«  premier  chanteur  de  l'Italie  et  du  monde.  «  Il  disait 
vrai,  car  ce  chanteur  élaU_CiUlax:£jlj. 

Ce  n'est  plus  ainsi  qu'on  s'y  prend  maintenant.  Un 
élève  qui  se  confie  aux  soins  d'un  maître  ne  se  rend  au- 
près de  lui  que  pour  apprendre  tel  air,  tel  duo;  lecravon 
du  maître  trace  quelques  traits,  quelques  ornemens  ;  le 
chanteur  en  herbe  en  attrape  ce  qu'il  peut,  et  bientôt  il 
se  compare  aux  pi  emiers  artistes.  Aussi  n'avons-nous 
plus  de  Caffarelli.  Il  ne  reste  pas  maintenant  en  Eut  ope 
une  seule  école  où  l'on  emploie  six  ans  à  enseigner  le 
mécanismedu  chant.  Il  est  vrai  que,  pour  y  consacrer  un 
temps  si  considérable,  il  faut  pren  Ire  les  élèves  dans  une 
extrême  jeunesse,  et  que  les  chances  désavantageuses  de 
la  mue  peuvent  rendre  inutile  tout  à  coup  le  travail  de 
plusieurs  années.  La  voix  des  castrats  ne  présentait  point 
les  mêmes  înconvéniens  ;  elle  avait  d'ailleurs  l'avantiijçe 
d'une  mise  de  voix  naturelle;  aussi  ces  êtres  infortunés 
ont-ils  été  les  chanteurs  les  plus  parfaits  qu'il  y  ait  eus. 


180  T)K  l.'KXKCrTJO>.  SECT.  m. 

lorsque  l'opération  n'a  point  été  suivie  d'accidens.  Si 
c'est  un  triomphe  pour  la  morale  que  l'humanité  ne  soit 
I  plus  soumise  à  ces  honteuses  mutilations,  c'est  une  cala- 
milé  pour  l'art  que  d'être  privé  de?  ces  voix  admirables. 
Ou  ne  peut  se  faire  d'idée  aujourd'hui  de  ce  que  furent 
des  chanteurs  tels  que  Ballhasar  Ferri,  Sénésino,  Fari- 
nelli  et  plusieurs  autres  qui  brillaient  dans  la  première 
moitié  du  dix-huitième  siècle.  Crescentini,  qui  a  terminé 
sa  carrière  de  chanteur  à  la  cour  de  Napoléon,  et  qui  est 
maintenant  professeur  de  chant  au  collège  royal  deNa- 
ples,  est  le  dernier  virtuose  de  cette  belle  école  ita- 
lienne. 

Après  les  voix  de  castrats,  les  voix  de  femmes  sont 
cilles  qui  ont  le  moins  à  redouter  la  mue.  Le  seul  effet 
qui  résulte  de  l'approche  de  la  nubilité  est  un  certain 
amaigrissement  du  timbre,  qui  dure  ordinairement  deux 
ou  trois  ans,  aju'ès  quoi  la  voix  reprend  son  éclat  et  ac- 
cpiiert  une  qualité  plus  pure,  plus  onctueuse  qu'avant  son 
ailération.  C'est  depuis  lâge  de  dix-huit  ans  jusqu'à 
trente  que  les  femmes  jouissent  de  toute  la  beauté  de 
leur  voix,  quand  des  études  mal  dirigées  n'ont  point  dé- 
t  rioré  les  dons  de  la  nature. 

On  se  rappelle  ce  qui  a  été  dit  concernant  la  voix  de 
j;oiLrine  et  la  voix  mixte  ou  de  tète  des  hommes;  les 
femmes  ne  possèdent  jias  ce  dernier  genre  de  voix,  ce 
qui  fait  qu'elles  ne  peuvent  monter  avec  autant  de  faci- 
lité que  les  ténors.  3Iais  si  cet  avantage  ne  leur  est  point 
dévolu,  elles  ont  celui  d'avoir  pi :;s  d'égalité.  Les  voix  de 
femmes  sont  naturellement  moins  bien  posées  que  celles 
des  hommes.  On  y  remarque  en  généial  une  sorte  de 
petit  silflemeut  sourd  qui  précède  le  son  et  qui  fait  naître 
l'habitude  de  prendre  le  son  un  peu  en  dessous  pour  le 


CHAI",  xvii.  un  CHAWa.  181 

porter  ensuite  à  son  intonation  réelle.  Les  maîtres  ne 
sont  point  assez  î-.ttentifs  à  coirij^cr  ce  Jélaul;  dès  que 
riiahitucie  en  a  été  contractée  pendant  un  an  ou  deux, 
le  mal  est  sans  remède.  La  rareté  des  voix  de  femmes 
très  jiures  ajoute  à  leur  mérite.  Madame  Eariili  en  élait 
douée;  madame  Damoreau  possède  le  même  avantage. 

Le  travail  le  plus  utile  de  l'art  du  chant,  pour  les 
femmes,  consiste  dans  le  développement  de  la  respira- 
lion,  qui  est  chez  elles  plus  courte  que  chez  les  hommes, 
ce  qui  est  cause  qu'elles  respirent  souvent  mal  à  propos, 
soit  en  altérant  le  sens  de  la  phrase  musicaîe,  soit  même 
en  nuisant  à  la  prononciation. 

Je  me  suis  servi  des  termes  porter  le  son,  trilles, 
groupes^  appo'^iatuie'',  fioritures,  etc.j  il  est  nécessaire 
que  j'explique  leur  signification. 

Si  deux  sons  se  succèdent  en  frappant  sur  chacun 
une  articulation  du  gosier,  sans  aucune  liaison  entre  eux, 
on  nomme  cet  effet  un  détaché  ou  staccato.  L'cirlicula- 
tion  de  deux  sons  qui  se  font  en  unissant  le  premier  au 
second  par  une  liaison  du  gosier,  se  \ïO\nn\e  port  de 
voir.  Porter  le  son,  c'est  unir  un  son  à  un  autie  par  le 
mouvement  du  gosier. 

Le  trille,  qu'on  appelle  souvent  improprement  ca- 
aence,  est  le  passage  alternatif  et  rapide  d'une  noie  à  la 
note  voisine.  C'est  un  des  effets  les  plus  difficiles  de  l'art 
du  chant.  Quelques  chanteurs  ont  naturellement  \c  trille 
dans  la  voix;  d'autres  ne  l'acquièrent  que  par  un  travail 
long  et  pénible. 

he  g/oupe  est  une  suite  rapide  de  trois  au  quatre  sons 
qui  sert  de  broderie  aux  notes  que  le  chanteur  croit  être 
trop  simples  pour  l'effet  du  chaut.  Le  groupe  est  un  cr- 
ie 


183  DE  l'exécutiom.  sect.  m. 

neinent  utile;  mais  certains  chanteurs  le  prodiguent  trop 
et  fiiiissent  par  lui  donner  un  air  commun, 

\S<i/t  o^idliLie  est  luie  note  lie  goiit  (|Mi  se  joint  qiicl- 
qiiel'ois  à  une  note  écrite  et  (jui  prend  la  moitié  de  sa 
valeur.  L'ajjpo^ialure  peut  être  pris  en  dessus  ou  en  des- 
sous de  la  note  réelle;  le  goiU  et  le  discernement  du 
ciianteur  doivent  le  guider  dans  le  choix  de  cet  orne- 
ment. 

Fia  ri  litres  est  un  mot  qui  désigne  en  général  toute 
espèce  d'ori)enien(,  et  en  particulier  certains  traits  «om- 
posés  de  gammes  diatoni:(ues  ou  chromatiipies,  de  traits 
en  tierces  ascendantes  ou  descendantes,  elc.  Les  fiori- 
tures sont  indispensables  dans  le  chant;  mais  il  ne  faut 
point  en  abuser.  Le  mérite  de  la  plupart  des  chanteurs 
de  l'école  a- lueile  se  borne  presque  au  talent  d'exécuter 
les  fioritures  a\ec  rapidité.  Autrefois  le  compositeur 
écrivait  le  chant  simjile  et  laissait  à  la  saga<i!é  des  chan- 
teurs le  choix  de  ces  fioritures,  ce  qui  contribuait  à  la 
var'éié  de  la  musique;  car  tous  les  exécutans  n'étant 
point  guidés  de  la  même  manière,  ils  choisissaient  leurs 
traits  selon  l'inspiratijn  du  moment  et  le  même  morceau 
.s'offrait  presque  loiij;)nrs  sous  un  aspect  différent.  Lois- 
quci  les  écoîes de  chant  commen'èrenl  à  sedéléi  iorer,  les 
clKinteurs  furent  moins  capables  de  choisir  "ux-mènies 
les  ornemcns  convenables  à  chaque  genre  de  morceau; 
la  chose  on  vint  au  point  q'ie  Rossini  se  crut  obligé  d'é- 
crite pres(|ue  toutes  les  fioritures  dont  il  voulait  em- 
bellir ses  mélodies.  Cette  méthnde  eut  d'abord  un  résultat 
assez  avantageux,  relui  de  dissimuler  la  faiblesse  des  | 
chnnteurs  en  leur  faisant  débiter  une  leçon  toute  faite;  | 
mais,  en  définitive,  elle  eut   l'inconvénient  de  rendre 


CHAP.  XVIT.  nu   CHANT.  183 

la  musique  monotone  en  la  présentant  tonjonrs  sous 
le  même  aspect,  et  de  plus,  el'e  li:il)itiia  les  clianteiirs 
à  ne  plus  se  ineltie  en  peine  de  oherelier  des  foimes 
nom  elles  d'oineinens,  puisiin'iU  en  trouvaient  de  tonles 
faites  à  la  lianlenr  <Ie  lenrs  moyens  d'exécntion.  Cela 
acheva  de  ruiner  l'école  dont  il  ne  reste  presque  plus  de 
traces. 

Le  mécanisme  (]u  cliant,  même  le  plus  parfait,  est  nnc 
partie  indispensable  du  méiile  d'un  bon  chantei;r;  mais 
ce  n'est  pas  tout.  La  mise  de  voix  la  plus  sati^faisanie, 
la  respiialicm  la  mieux  réj;lée,  l'exécution  la  plus  pure 
des  ornemens  <\y\  diant,  et,  ce  qui  est  bien  rare,  l'intona- 
tion la  plus  parfaite,  sont  les  moyens  par  lesquels  un 
grand  chanteur  exprime  le  sentimceit  dont  il  est  animé, 
mais  ce  ne  sont  que  des  moyens;  celui  (jui  se  persuat!e- 
rait  que  tout  l'art  du  chisnteur  y  est  renfermé  pourrait 
quelcpiefois  causer  un  plaisir  tran(piille  à  son  auditoire, 
mais  ne  lui  ferait  jamais  éprouver  ;le  vives  émoticins.  I.e 
granJ  chanteur  est  celui  qui  s'identifie  au  personnage 
qu'il  représente,  à  la  situation  où  il  se  trouve  et  aux 
sentimens  qui  doivent  i'agiler;  (pii  s'abandonne  à  des 
inspiratioris  mouïcnlances,  comme  a  dû  faire  le  conipo- 
sitcur  en  écrivant  la  muii(jue  rpTil  exécule,  et  rpii  ne  né- 
glige lien  de  ce  cpii  peut  contribuer  à  l'effet,  non  d'un 
morceau  isolé,  mais  d'un  rôle  entier.  La  réunion  de 
toutes  ces  qualités  compose  ce  qu'on  nomme  rr.r/;/".v- 
slon.  Sans  expression,  il  n'y  a  jamais  eu  de  grand  chan- 
teur, quelle  que  fût  la  pcriection  du  mécanisme  de  son 
cliant;  l'expression,  quand  elle  était  réelle,  et  no^i  inie 
espèce  de  charge  telle  (pie  la  font  quelques  acteurs,  a 
souvent  lait  pardonner  une  exécution  incorrecte. 

Les  chanteurs  célèbres  du  dix-huitième  siècle  ne  fu- 


184  DE  l'exécution,  8KCT.  III. 

rent  pas  moins  renommés  pour  leur  faculté  d'exprimer 
que  pour  la  beauté  de  leur  méranisme.  On  en  rapporte 
des  choses  qui  paraîtraient  fai)nleiises  aujourd'iuii.  On 
connaît  l'histoire  de  Faririelli,  dont  la  voix  et  i'expi'ession 
loucliantes  guérirent  le  roi  d'E-^pagne,  Philippe  V,  d'un 
accès  de  mélancolie  no'rre  qui  Taisait  craindre  pour  sa 
raison.  Raff,  sauvant  la  vie  de  la  princesse  Bdinonte, 
mise  en  danger  par  les  suites  d'un  chagrin  violent,  en 
lui  faisant  répandre  un  torrent  de  larmes,  atteste  encore 
quelle  était  la  puissance  d'expression  de  ces  chanteurs 
prodigieux.  Sénésino,  chanteur  d'un  mérite  extraordi- 
naire, oubliant  son  rôle  pour  embrasser  Farinelli  qui  ve- 
nait de  chanter  un  air  avec  une  perfection  miraculeuse; 
la  Gabrielli,  toucliée  jusqu'à  laisser  paraître  l'émotion 
la  plus  vive,  après  avoir  entendu  Marchés!  chanter  un 
canlahilc^  et  Crescenliui  faisant  verser  des  larmes  à  Na- 
poléon et  à  toute  sa  cour  dans  Romeo  et  Julielle,  sont 
encore  des  preuves  de  la  ]juissance  d'expression  que  pos- 
sédaient ces  dieux  du  chant.  Quelques  momens  où  ma- 
dame Malibran  sait  éviter  l'exagération,  pour  rester  dans 
l'expression  vraie  et  dans  lesquelles  son  exécution  eslir- 
réj)ro(  hable,  ont  pu  donner  l'idée  de  ce  genre  de  mérite; 
mais  si  j'en  juge  par  Crescenlini,  que  j'ai  entendu,  les 
chanteurs  dont  je  viens  de  pailer  soutenaient,  pendant 
toute  la  durée  d'un  rôle,  cette  perfection  que  madame 
Malibran  ne  nous  a  fait  entendre  qu'à  de  certains  in- 
tervalles. 

Les  chanteurs  français  n'ont  jamais  eu  la  réunion  de 
qualités  qu'on  a  admirées  dans  les  Italiens;  un  seul, 
doué  d'une  chaleur,  d'une  verve  entraînante  el  d'un 
goût  délicat,  en  a  beaucoup  approché  sous  de  certains 
rapports  et  possédé  des  qualités  particulière»  qui,  dans 


CHAP.   XVII.  l)li  CHANT.  185 

un  aulre  genre  en  ont  fait  un  des  chanteurs  les  plus 
étoniians  qui  aient  existé.  Ce  chanteur  était  Garât.  Ja- 
mais ou  ne  fut  organisé  plus  henreusement  et  jamais  on 
ne  courut  l'art  du  chaut  d'une  manière  plus  large.  La 
pensée  de  Garât  était  toujours  ardente;  mais  il  savait 
toujours  la  i-égler  par  l'art  et  par  la  raison.  Un  air,  un 
duo  ne  consistait  pas,  selon  ce  grand  chanteur,  dans  une 
suite  de  phrases  bien  exécutées  et  même  bien  senties;  il 
lui  fallait  un  plan,  une  gradation,  qui  n'amenât  les  grands 
eflets  que  lorsqu'il  en  était  temps,  et  lorscpje  la  jiassion 
était  ai  rivée  à  son  développement.  Rarement  on  saisissait 
sa  pensée  lorsque,  discutant  sur  son  art,  il  parlait  ilu 
plan  d'un  morceau  de  chant;  les  musiciens  même  se  per- 
suadaient qu'il  y  avait  de  l'exagération  dans  ses  idées  à 
cet  égard;  mais  lorsqu'il  joignait  l'exemple  au  précepte, 
et  que,  voulant  démontrer  sa  théorie,  il  chantait  un  air 
avec  les  difCérentes  couleurs  qu'on  pouvait  lui  donner, 
on  comprenait  tout  ce  qu'il  avait  fallu  de  réflexions  et 
d'études  pour  arriver  à  celle  perfection  dans  un  art  qui 
ne  semble  destiné,  au  premier  aperçu,  qu'à  procurer  des 
jouissances  à  l'oreille. 

Une  des  qualités  les  plus  précieuses  de  Garât  était  la 
beauté  de  sa  prononciation  ;  ce  n'était  pas  seidement 
une  netteté  parfaite  d'articulation,  sorte  de  mérite  fort 
rare,  c'était  en  lui  un  moyen  puissant  d'expression.  Il 
est  juste  de  reconnaître  que  cette  qualité  appartient  pUis^ 
à  l'école  du  chant  français  qu'à  tout^e^autre,  et  que  Gluck 
V  avait  trouvé  le  principe  du  genre  (ju'il  adopta  pour 
notre  opéra.  Il  y  a,  dans  la  prononciation  de  la  langue 
I  française,  quelque  chose  d'éner|^iqiie  qui  n'est  peut-être 
j  pas  favorable  à  l'émission  douce  et  gracieuse  de  la  voix, 

mais  qui  est  très  jroju'e  à  l'e.pression  dramatique,  vîal- 

^-. _ ......._.^„. 


156  DE  l'exécution.  sect.  m. 

heureusement  quelques  acteurs  de  l'Opéra,  tels  qu^ 
Laine  et  Adrien,  orM  abusé  de  ce  caractère  particulier  de 
la  langue  française  et  ont  fait  dégénérer  en  charge  celte 
expres-inn  dramatique.  Dans  leur  manière  de  sc^Uilei:  in 
parole,  la  voix  ne  sortait  que  pai'  éclats  et  avec  effort,  ev. 
sorte  qne  les  sons  ne  se  prodnisaient  plus  que  sous  l'as- 
pect de  cris  souvent  fort  désagréables.  Aucune  appa- 
rence de  mise  de  voix  ni  de  vocalisation,  aucune  trac- 
de  ce  qu'on  nommait  en  Ilaîîe  l'art  du  chant,  ne  se  fai- 
saient apercevoir  dans  la  manière  qui  s'était  établie  •. 
l'Opéra.  C'était,  si  l'on  veut,  de  la  déclamation-jxotée  ; 
mais  ceux  qui  bornaient  leur  art  à  celle  déclamation  n- 
pouvaient  passer  pour  cliantenrs.  Haratseid  sutpronoii- 
rer  d'une  manière  dramatique  sans  s'éloigner  des  bclle-i 
traditions  de  l'écnlf  véritable  i\n  chant,  et  sut  dotuier  i 
son  chant  une  grande  expression  dramnlifpie  sans  né 
gliger  tontes  les  ressources  de  la  vocalisation. 

Les  conditio?is  du  chant  français  diffèrent  à  certains 
égards  de  celles  du  chant  italien.  Une  voix  pure  et  so- 
nore, une  proimncialion  nette  et  régniière  et  de  l'expres- 
sion dramatique,  xoilà  tout  ce  qu'on  a  demandé  pendant 
long-temps  aux  chantcius  français.  Un  piéjngépeu  rai- 
sonnable avait  fait  considérer  les  traits  et  les  ornemens 
comme  peu  convenables  à  notre  langue;  insensiblement 
l'Opéra -Comique  s'est  aflranchi  des  obstacles  qu'on  lui 
opposait  sous  ce  rapport  ;  mais  l'Opéra  avait  toujours  ré- 
sisté; enfin  il  a  Cvîdé  a  l'enqjire  de  la  mode  et  ses  progrès 
ont  été  rapides  en  ce  genre.  On  doil  l'en  féliciter,  puis- 
que le  moment  était  venu  où  la  déclamation  lyiique 
n'intéressait  plus  les  spectateurs  dont  le  goût  avait  pris 
une  autre  diieclion  depm's  qu'ils  s'étaient  accoutumés  à 
la,  musique  italienne. 


CHAP.   XVII.  DU   CHANT.  187 

Cependant  il  faut  seganlcr  de  tomber  d'un  excès  dans 
un  autre;  il  csl  lion  de  coiisei-.er  îi  la  iniisicjiie  d'un  pa^s 
sa  physionomie  parlieulière  ;  une  iuiilation  servile  n'est 
ianiais  une  conquête.  L'nsaf;e  raisoruiable  des  ornemcns 
di!  chant  d;ti)S  le  style  français  est  nécessaire;  l'excès  se- 
rait nuisible.  Il  y  a  dans  nos  iiahitndes  tliéàlrales  un 
penchant.i\_la  lai.son  tpji  ex(  lut  ces  niorceinx  de  placage 
qui  n'ont  d'arlrc  !)nt  que  de  faire  admirer  la  flexibilité 
d'mi  gosier.  Admettons  les  traits  et  lonle  espèce  d'orne- 
niens,  mais  ne  bannissons  pas  nos  formes  dramalifi'.ies 
auxquelles  il  ne  man(]ualt  qisedes  chants  plus  faciles  et 
plus  élé^ans.  Ne  perdons  pas  surtout  la  tradition  de  ce 
beau  i:écii,;vliCà  la  manière  de  GIih  k,  dont  les  composi- 
teurs italiens  reconnaissent  aujourd'hui  si  bien  le  niéiite 
qu'ils  cherchent  à  s'en  rapprocher  autant    ([u'ils    peu- 


vent. 


Il  est  un  point  sur  lequel  rautorilé  qui  a  régi  jusqu'ici 
lesartsen  France  n'a  point  encore  porté  un  coup  d'oeil 
assez  atlenlil;  c'est  la  préparation  et  la  conservation  des 
chanteurs.  Ce  que  je  r.onnne  la  préparation  des  chan- 
teurs consiste  dans  le  choix  des  sujets  et  dans  leur  édu- 
cation hygiéni(pie.  Si  les  sujets  qu'on  choisit  pour  en 
faire  des  chanleîirs  se  pré-^enlaicnt  avec  des  voix  tciites 
faites,  à  l'abri  des  révolu.tions  p!iysi(jues  qui  modifiant 
les  individus  dans  la  jeunesse,  rien  ne  seiail  plus  faciie 
que  de  faire  ce  choix.  ?]ais  il  n'en  est  point  ainsi;  sur 
cent  individus  qui  ont  une  jolie  voix  dans  leur  enfance, 
quatre-vingt-dix  la  perdent  dans  la  mue,  ou  ne  la  re- 
trouvent que  médiocre  quand  elle  a  changé  de  timbre; 
et  sur  les  dix  (jui  ont  été  plus  favorisés  par  le  sort,  on 
n'est  pas  toujours  certain  iVen  remontrer  un  qui  réu- 
nisse à  1.1  beauté  de  son  organe  un  sentiment  assez  \if^ 


188  DE  L  EXÉCCTION.  9ECT.  lit. 

assez  profond  pour  qu'il  devienne  ce  qu'on  appelle  à 
jn?te  litre  un  chanteur.  Ce  senlitnent  se  manifeste  dans 
renfnnce  de  manière  à  cire  facilement  aperçu  par  un 
maître  pourvu  des  qualités  nécessaires  à  l'exercice  de 
snii  arl;  deux  sons  sulfisenl  poiu*  le  faiie  reconnaître. 
]\lais  celui  chez  lequel  on  le  découvre  sera-l-il  un  de 
ceux  qui  conserveront  leur  voix?  Voilà  ce  que  nul  signe 
extérieur  ne  fait  apercevoir.  C'est  cette  incertitude  qui 
a  été  l'origine  de  la  castration  des  individus  du  sexe  mas- 
culin. 

Rebuté  par  une  multitude  d'essais  infructueux  faits 
sur  des  enlans  de  ce  sexe,  on  a  pris  le  parti  de  ne  plus 
admettre  dans  les  écoles  publupies  de  chant  que  des 
adultes,  avec  Icsipiels  on  n'a  point  les  mêmes  risques  à 
courir.  Mais  ici  une  nouvelle  difficulté  se  présente,  dif- 
ficulté plus  Jurande  parce  qu'elle  est  sans  remède  et  pres- 
que sans  exce|)lion;  c'est  que  les  individus  qui  arrivent 
à  l'âge  de  jiniierlé  sans  avoir  jiosé  les  bases  de  Jeur  édu- 
cation musicale  par  de  longues  études  ne  parviennent 
presque  jamais  à  .«eNenir  musiciens,  soit  sous  le  rapport 
de  la  l'ctiue  de  la  musirpie  à  première  vue,  soit  sous 
celui  du  sentiment  de  la  mesure.  Quelle  que  soit  la  beauté 
de  la  voix,  sa  flexibilité,  son  timbre  et  même  quel  ([ue 
soit  le  sentiment  de  justesse  d'intonation  et  d'expression 
dont  un  chanteur  commencé  dans  l'adolescence  soit 
pourvu,  il  ne  sera  jamais  qu'un  artiste  incomplet,  dont 
l'cxéculion  n'offiira  point  de  sécui  ité,  parce  qu'il  ne 
sera  guidé  que  par  une  sorte  d'instinct  qui  peut  être 
souvent  en  défaut. 

Placé  entre  dcuxécueils  également  redoutables, il  est 
nécessaire  que  le  gouvernement,  qui  fait  les  frais  de  l'é- 
ducation   musicale  des  chanteurs,   ne  néglige    aucune 


C0A1».   XVII.  UU  CUANT.  185) 

chance  de  succès  et  qu'il  coure  beaucoup  de  risques  en 
pure  perle  pour  trouver  quelques  résultats  heureux. 
Mais  il  ne  faut  pas  qu'il  s'en  remette  au  hasaicl  pour  se 
proi'iu'er  les  sujets  sur  lesinieLs  on  doit  faire  les  essais, 
car  il  pourrait  être  long-temps  déçu  dans  ses  espérances. 
Voici  comment  il  fautirait  cpi'il  s'y  prît. 

L'expérience  a  démontré  (pie  les  voix  sont,  eu  géné~ 
rai,  distribuées  en  France  par  cantons,  comme  les  vi- 
gnobles. La  Pi(jardi£_Xauiuiil,-des  basses  plus  belles  et  en 
])lus  grande  quantité  qu'aucune  autre  province;  presque 
toutes  les  belles  basses  qui  ont  brillé  à  l'Opéra  et  dans 
les  autres  établissemens  musicaux  étaient  picardes.  Les 
ténors,  et  particulièrement  ceux  qu'on  nomiue  haute- 
contres,  se  rencontrent  en  plus  grand  nombre  dans  le 
Languedoc,  et  surtout  à  Toulouse  et  dans  ses  environs, 
qu'en  aucun  autre  lieu  de  la  France.  Les  voix  de  cette 
espèce  y  sont  d'une  beauté  singulière,  et  les  chances  de 
conservation,  après  la  mue,  y  sont  beaucoup  plus  favo- 
rables qu'ailleurs.  Enfin,  dansIti.Boiu'gngncct  la  Franche- 
("omlé,  les  voix  de  l'ejimies  ont  jjIus  d'étendue  et  un  tim- 
bre plus  pur  que  dans  toutes  les  autres  provinces.  Sans 
cherrher  à  explicpjer  cette  singularité,  il  suffit  de  la  con- 
stater pour  se  convaincre  de  la  nécessité  d'aller  chercher 
dans  les  diverses  parties  de  la  France  qui  viennent  d'être 
indicpiées  les  enfans  qu'on  destine  à  la  profession  de 
chanteurs,  et  de  confier  la  recherche  de  ces  sujets  aux 
soins  d'un  homme  éclaiié  qui  sente  bien  l'importance  de 
sa  mission.  Nul  doute  qu'au  moyen  de  semblables  pré- 
cautions on  n'obtint,  au  bout  de  sept  ou  huit  ans,  un 
certain  nombre  de  bons  chanteurs  dont  le  besoin  se  fait 
sentir  davantage  chaque  jour. 

Pour  parer  à  ce  besoin  de  chanteurs,  on  s'empresse 


190  X)£  l'exécution.  »ect.  m. 

ordinairement  de  produire  sur  la  scène  des  élèves  dont 
l'édnralion  musicale  est  à  peine ébau<liée;  celte  fimeste 
niélliode  se  prati(]ue  non-setilemcnt  en  France,  mais  en 
Italie;  et  tel  chanteur  reste  dans  la  médiocrité  toute  sa 
vie,  faute  d  avoir  employé  deux  ou  trois  années  à  per- 
fectionner ses  éludes.  Ainsi  l'on  dissipe  infruclueuse- 
ment  ce  qui  aurait  pu  fournir  des  ressources  durables. 
C'est  à  metire  un  terme  à  ce  mal  déplorable  que  les 
gouvernemens  qui  se  font  les  prolecleuis  des  ai  ts  de- 
vraient s'appliquer;  en  un  mot,  il  ne  suffit  pas  de  pré- 
parer des  chanteius,  il  faut  les  conserver,  ce  qui  exiye 
des  soins  de  plus  d'une  espèce.  Autrefois  la  métliot'e 
suInIc  par  Laine,  Adrien  et  tous  ces  maitrrs  qu'on  appe- 
lait/>7v</l?.y.icM/.v  (le  flc(  [(irnation  lyrique,  avait  pour  cllet 
inévitable  de  détruire  les  voix  dans  leur  principe,  par 
l'ignorance  où  l'on  était  de  ce  (|ui  concerne  la  mixe  ilc 
voix,  lu  vocttlixalio/i,  et  plus  encore  par  l'exagération 
de  force  qu'on  exigeait  d'élèves  dont  la  constitution 
physique  était  à  peine  formée.  L'émission  du  son  ne  se 
yfaisaut  jamais  d'une  manière  naturelle  et  la  force  des 
poumons  étant  mise  sans  cesse  en  jeu,  les  voix  plus  ro- 
bi:slcs  ne  pouvaient  résister  à  la  fatigue  d'un  trav.iil 
pour  lequel  les  forces  herculéennes  d'Adrien  avaient  éié 
insulfisantes  ;  aussi  a-t-on  vu  pendant  plusieurs  années 
f|ne  des  voix  franches  et  bien  îimbiées,  ()u'on  n'était 
parvenu  à  se  piocurer  qu'avec  beaucoup  de  peine,  ex|)i- 
ra  eut  avant  d  avoir  pu  sortir  de  lEcoie  roynie  de  Mu- 
sique. Enfin  ce  mal  a  disparu  avec  la  musique  qui  y 
donnait  lieu  et  avec  les  professeurs  (|ui  étaient  chargés 
de  propager  la  tradition  de  celle-ci.  Mais  tout  n'est  jj.'.s 
fait. 

Les  soins  qu'exige  la  conservation  de  la  voix  doivent 


CUAP.     XVII.  DL'    CUATVT.  191 

commencer  du  moment  de  sa  première  émission;  or  il 
esl  à  rein:\rqier  (|ireti  dehors  de  i'arl  du  chant  il  y  a  une 
pirlie  préliminaire  de  la  musi((ue  qu'on  nomme  la  sol- 
inisa/iori,  la(]uel!e  est  destinée  à  former  «\'!ial)iles  lec- 
tcins,  par  l'exéc-lion  de  certains  exercices  gradués,  sur 
tontes  les  dilticullés  de  la  mesure  et  de  l'intonation.  L'é- 
lude de  ces  exercices  se  fait  ordinairement  dans  l'en- 
îaïue,  sous  la  direction  de  mallies  qui,  pour  la  plupart, 
sont  étrangers  à  l'art  du  chant.  Aucun  soin  n'est  apporté, 
soit  dans  la  rédaction,  soit  dans  le  choix  de  ces  exercices, 
sous  I»  rapport  de  l'étendue  des  voix;  en  sorte  qu'il  ar- 
rive pres(|ue  toujours  qu'on  fait  chanter  les  enfans  hors 
des  limites  que  la  nature  leur  a  assignées.  Les  efforts 
(lu'ils  sont  ohligés  de  faire  pour  atteindie  aux  intonations 
aij^uès  (pi'on  leur  fait  chanter  ont  hienlôt  détruit  le  prin- 
(  i]>e  de  la  voix  et  forcé  les  ligamens  du  gosier.  Quand 
ce  mal  esl  fait,  il  n'y  a  plus  de  leniède,  et  tout  l'art  du 
ir.ondc  ne  peut  rendre  à  ces  enfans  le  velouté  de  la  voix, 
car  ils  l'ont  perdu  pour  toujours.  Ajoutez  à  cela  que  les 
j)rccantions  nécessaires  pour  apprendre  dès  l'origine  à 
poser  le  son  avec  la  respiration,  à  ne  point  respirer  trop 
souvent  et  à  ne  pas  fatiguer  la  poitrine  par  une  tenue 
trop  piolongée  de  Ihaleins,  tout  cela,  dis-je,  est  com- 
plètement ignoré  de  la  plupart  des  maîtres  de  solfège. 
A])rès  deux  ou  trois  années  d'exercice, ils  arrivent  à  for- 
mer de  bons  lecteurs  de  musique;  mais  ils  ont  détruit  ou 
alieré  la  voix  de  leurs  élèves,  et  c'est  en  cet  état  qu'ils  les 
livrent  aux  soins  des  professeurs  de  chant,  dont  l'ai  t  ne 
peut  rendre  à  ces  pauvres  jeunes  gens  ce  qu'ils  ont  perdu 
sans  retour. 

Ce  qk'il  faudrait  faire  pour  mettre  un  terme  au  mal 
que  je  viens  de  signaler,  le  voici  :  la  lecture  de  la  mu- 


11)2  DE  v'EXÉCrïIOÎC.  SECT.    111, 

sique  e»t  indépendante  de  l'art  du  chant;  il  est  donc- 
inutile  de  réunir  dans  l'élude  deux  choses  qui  se  sépa- 
rent naturellement.  Les  leçons  du  professeur  de  solfège 
se  bornant  à  faire  tire  la  musique  en  nommant  seulement 
les  notes  au  lieu  de  les  chanter,  et  à  diviser  avec  exacti- 
tude tous  les  temps  de  la  mesure  et  toutes  les  combi- 
naisons des  notes,  atteindraient  sûrement  le  but  qu'on 
se  propose  dans  cette  étude  préliminaire.  A.  l'égard  dtf 
l'intonation,  à  laquelle  il  faut  accoutumer  l'oreille,  ce  se- 
rait l'affaire  du  professevir  de  chant,  qui  y  disposerait 
ses  élèves  avec  les  précautions  convenables.  Dès  le  pre- 
mier moment  qu'un  enfant  essaierait  d'émettre  des  sons 
avec  la  voix,  il  serait  prémuni  contre  les  écarts  d'une  mé- 
thode vicieuse,  et  tout  concourrait  a  tirer  le  meilleur 
parti  possible  des  disjiosilions  primitives  de  l'organe. 

Qu'on  ne  croie  jjoint,  au  reste,  qu'il  s'agit  ici  d'une 
théorie  nouvelle  de  la  division  des  études  musicales;  car 
c'est  ainsi  que  ces  études  se  faisaient  en  Italie,  quand 
l'art  du  chant  y  était  cultivé  avec  succès.  L'expérience 
autant  que  la  raison  déuionire  la  nécessité  d'adopter 
cette  méthode.  L'intérêt  seul  des  maîtres  de  solfège,  pour- 
rait en  souffrir,  car  ils  aiment  assez  qu'on  les  prenne 
pour  des  maîtres  de  chant.  Je  ne  doute  point  que  le 
temps  n'amène  cette  amélioration  importante  dans  les 
études  musicales,  qui  ont  fait  de  fort  giands  progrès 
en  France  depuis  plusieurs  années. 


«UAP.    XTUI.  JEt     irt»Thl  MENTAL.  193 

GHAPITRy:  XVIII. 

De  rexéciitioD  instrumentale. 


§1. 

De  l'iiit  déjouer  des  instrurnen». 

L'exécution  inslriiinontale  se  divise  naturellement  en 
indivitluelle  et  en  collective.  Elle  se  compose  de  l'art  de 
jouer  des  Instrumens,  et  de  celcii  d'accorder,  par  la  me- 
sure et  le  sentiment,  un  certain  nombre  d'exéculans 
réunis.  Il  est  nécessaire  de  traiter  séparément  de  chacune 
de  ces  choses. 

On  sait  que  les  instrumens  se  divisent  en  cinq  espèces 
principales:  la  première  se  compose  des  instrumens  à 
archet;  la  seconde,  des  instrumens  à  cordes  pincées;  la 
troisième ,  des  instrumens  à  clavier;  la  quatrième,  des 
inslriunens  à  vent,  et  la  cinquième,  des  instrumens  de 
percussion.  Chaque  f^enred'instrinnens  exige  de?  qualités 
parlicullères  pour  être  bien  joué;  ainsi  les  instrumens 
à  archet  demandent  avant  tout  une  oieille  délicate  pour 
la  justesse  des  intonations,  qui  ne  se  forment  qu'en 
appuyant  les  doigts  sur  les  cordes,  et  beaucoup  de  sou- 
plesse dans  le  bras  pour  le  maniement  de  l'archet.  On 
ne  peut  parvenir  à  une  bonne  exécution  sur  les  instru- 
mens à  cordes  pincées  qu'autant  que  les  doigts  sont 
pourvus  d'une  grande  énergie  pour  résister  à  la  pression 
des  cordes  et  pour  en  tirer  de  beaux  sons.  Les  instru- 
mens à  clavier ,  dans  lesquels  les  intonations  sont  toutes 
faites,  exigent  surtout  des  doigts  longs,  soupirs,  agiles 


194  DE    l'eXÉCUTIOIT.  8ECT.  lU. 

et  forts.  Pour  acquérir  une  certaine  habileté  sur  les  in- 
striiinens  à  vent,  il  faut  la  même  justesse  d'oreille  que 
pour  les  instnimens  à  conles,  et ,  de  plus,  la  lacnlié  de 
iiiOU'oir  les  lèvres  avec  facilité  , d'en  modifier  la  pression, 
et  de  régler  la  force  du  souffle,  (pialités  qu'on  nomme  en 
général  Vonboachiiie.  Quant  aux  instrumens  de  percus- 
sion ,  il  semble  au  premier  aspect  que  tout  homme  ro- 
buste doit  être  pourvu  des  qualités  nécessaires  pour  en 
jouer;  oependanl  on  remarque  des  différences  notables 
entre  tel  ou  tel  tiud)alier,  bien  qu'ils  aient  fait  les 
mêmes  éludes;  il  est  nécessaire  de  pos-^éder,  pour  jouer 
de  la  timbale,  une  ccriaine  souplesse  de  poignet  et  un 
certain  tact  qu'on  ne  peut  analyser,  mais  qui  ne  sont  pas 
moirs  réels. 

Dans  l'énumération  des  qualités  nécessaires  pour  bien 
jouer  des  instrumens  ,  je  n'ai  point  parlé  de  la  sensibilité 
ni  de  l'imagination,  principes  de  tout  lalenl,  parce  qu'il 
ne  s'agit  en  ce  moment  (|ue  des  dispositions  physiques; 
en  vain  un  pianiste  ou  im  hautboïste  seraient-ils  pour- 
vus de  la  sensibilité  la  |)lus  exquise,  si  l'un  a  des  doigis 
raides  ou  mous,  et  l'autre  des  lèvres  ])lates  et  sèches;  ils 
ne  deviendront  pas  plus  dé  grands  instrumentistes  que 
t'hounne  le  mieux  organisé  ne  de\iendrait  un  chanteur 
s'il  n'avait  pas  de  voix. 

L'exécution  des  instrumens  à  archet,  tels  que  le  violon, 
l'alto,  le  violoncelle  et  la  contrebasse,  se  compose  de 
deux  parties  distinctes  :  le  doi^lé  et  /t?  niaiiieincut  de 
l'arc/i(  t.  Le  doigté  est  l'art  de  former  les  intonations 
par  la  pression  des  doigts  sur  les  cordes  contre  la  partie 
supérieure  du  manche,  qu'on  nomme  lu  louche.  Cette 
pression,  qui  raccourcit  plus  ou  moins  la  longueur 
vibrante  de  la  corde,  ue  peut  produire  des  sons  purs 


CBAP.    XVm.  JEU    INSTRUMENTAL.  195 

qn'aninut  qu'elle  est  trt-s  énergique,  car  une  corde  ne 
vibre  d'ime  maiiii-re  salisfaisniitc  (|ue  lorsqu'elle  esl  fixée 
très  solideinenl  sur  ses  points  d'altaclie.  Il  est  donc  né- 
cessaire qu'un  violoniste,  i\n  vioIouK'llisIe,  appuient  les 
doij;lsavec  i)eauiou|)  de  force  sur  les  cordes,  malgré  la 
sensation  douloureuse  que  leur  fait  éprouver  cet  exercice 
dans  le  coinmeocemeut  de  leurs  éludes.  Il  est  des  artfsles 
dont  le  l)OUt  des  doigts  finit  par  se  garnir  d'une  sorte  de 
ca!us  ou  de  durillons  par  un  long  usage  de  leur  instru- 
ment; il  ne  parait  pas  qu'il  eu  résulte  d'inconvénient 
pour  la  nature  du  son. 

Un  autre  point  important  du  doiglé  est  ]a  /'r/x/esve , 
c'est-à-dire  l'art  de  placer  les  doigts  sitr  les  cordes  de 
manière  à  rendre  les  intonations  justes.  Tous  les  violot;s 
ou  tous  les  violoncelles  n'ont  pas  les  mêmes  dimension.^; 
certains  luthiers  ont  adopté  pour  ces  instrumens  des 
formes  plus  grandes  que  d'autres;  or  l'écavtement  des 
doigts  pour  former  les  intonations  est  toujours  en  raison 
de  la  longueur  du  maiiclie  du  violon,  de  l'alto  ou  du 
violoncelle;  car  il  est  évideiit  (pie  la  longueur  des  cordes 
est  proporlinnuelle  aux  diniensujus  de  l'instruiiient.  Plus 
celie  longr.eur  est  considérable,  plus  l'écarlement  doit 
cire  grand  pour  passer  d'un  sou  à  un  autre;  moins  elle 
est  étendue,  plus  il  faut  rapprocher  les  doigts.  Une 
oreille  délicate  avertit  prompteuienl  l'exécutant  des  fautes 
qu'il  commet  contre  la  justesse;  mais  cela  ne  suffit  pas  : 
pour  jouer  toujours  juste  ,  il  faut  être  |)Ourvu  d'une  cer- 
taine disjjObUioii  d'adresse,  et  avoir  fait  un  long  exeicice 
des  intonations.  Il  y  a  divers  degrés  dans  la  manière  de 
jouer  jii.slc  ou  faux.  Une  justesse  approximative  est  la 
seule  il  îacjuelle  parviennent  les  intrumentistes  ordinaires; 
la  justesse  absolue  n'est  le  partage  que  d'un  très  petit 


it^ 


19G  DE  l'EXÉCUTIOW.  SECT.    III. 

nombre  d'artistes.  Elle  est  surtout  difficile  à  acquérir 
dans  ce  qu'on  nomme  les  passages  à  dnithle  cnrâe. 
Dans  ces  sortes  de  traits,  c|ui  produisent  l'effet  de  la 
rétuiion  de  deux  voix,  l'archet  est  j)osé  sur  deux  cordes 
et  fait  résonner  à  la  Icis  deux  intonations  qui  sont  le 
résultat  de  la  combinaison  des  doigts  de  la  main  gauche. 
Outre  l'influence  nécessaire  des  doigts  sur  la  justesse,  il 
parait  que  l'archet  en  exerce  une  autre  par  la  manière 
d'attaquer  la  corde ,  et  que  la  position  de  la  main  gTuche 
étant  fixée  pour  un  son  d'une  manière  invariable,  l'into- 
nation peut  être  ou  plus  haute  ou  plus  basse  en  raison  du 
mode  de  pression  de  l'archet.  C'est  du  moins  à  celte  in- 
fluence de  J'archet^ue  le  célèbre  violoniste  Paganini 
attribue  la  justesse  fort  remarquable  de  son  jeu. 

L'action  des  doigts  de  la  main  gauche  sur  les  cordes 
n'a  d  influence  que  sur  la  justesse  des  intonations  et  sur 
la  pureté  des  vibrations;  ipian;  à  la  fpialité  des  sons,  plus 
«)U  moins  douce  ou  foite,  plus  ou  moins  dure  ou  moel- 
leuse, elle  est  le  résultat  du  maniement  de  l'archet  par 
la  main  droite.  Ce  maniement,  qui,  en  apparence,  se 
borne  à  tirer  et  pousser  alternativement  la  Irèle  machine 
sur  les  cordes,  est  d'une  diffiçullé  excessive.  D'abord 
l'expérience  a  démontré  qu'on  ne  peut  mettre  dans  un 
\  ensemble  parfait  les  mouvemens  de  l'archet  et  ceux  des 
doigts  qu'en  affaibjissant  autant  que  possible  l'action 
du  bras  qui  dirige  cet  archet ,  de  iïianière  que  le  poignet 
agisse  librement  et  sans  raideur.  Si  l'on  examine  les 
mouvemens  d'un  violoniste  habile,  rien  ne  paraît  plus 
facile  que  cette  indépendance  du  jioignet;  mais  il  faut 
plusieurs  années  d'études  pour  l'acipiérir.  Ce  n'est  pris 
tout  :  le  lire  et  le  pnu^sè  de  l'aichet  sont  susccptil)lc3 
d'une  multitude  de  combinaisons  qui  ont  aussi  leurs  di(- 


l:ii.\l-.   WUl.  JEU  IKâTRVMJiNTAl,.  197 

ficiiltés.  Quelquefois  plusicitrs  sons  se  covilent  par  le 
inèiiie  (OUI»  (rarrliel,  ce  qui  exi^e  beaucoup  de  ménage- 
ment tians  le  développement  du  bras;  eu  d'autres  occa- 
sions, toutes  les  noies  se  font  dans  un  mouvement  rapide 
par  un  nombre  de  coups  d'archet  éj^al  à  celui  des  notes, 
(  e  (|ui  demande  beaucoup  d'ensendîle  entre  les  monve- 
liiens  des  doij^ls  de  la  main  gauche  et  ceux  de  la  main 
droite;  d'autres  combinaisons  olfrent  des  suites  de  sons 
.illernalivement  coulés  et  détachés;  enfin  il  est  des  suc- 
cessions de  notes  qu'on  détache  d'un  mouvement  rapide 
par  un  seul  coup  d'archet  tiré  ou  poussé  :  ce  dernier 
genre  de  trait,  (pi'on  nonuiie  staccato,  demande  une 
habileté  particulière. 

Ce  n'est  point  seulement  à  vaincre  ces  difficultés  de 
mécanisme  que  l'artiste  doit  s'atlacher;  l'art  de  modifier 
la  qualité  des  sons  doit  être  aussi  l'objet  de  ses  études. 
On  croyait  autrefois  ne  pouvoir  obtenir  une  bonne  exé- 
cution (|u'au  moyen  d'un  archet  très  rigide,  parce  que 
les  effets  étant  peu  variés,  on  n'exigeait  de  l'instrumen- 
tiste qu'un  jeu  large  et  franc,  où  prestpie  tous  les  sons 
étaient  détachés.  Pour  obtenir  cette  rigidité  nécessaire, 
on  avait  imaginé  de  donner  à  l'archet  une  courbe  con- 
vexe, à  peu  près  semblable  à  celle  d'un  arc,  dont  le  crin 
formait  la  corde.  Plus  lard  on  s'aperçut  qu'un  archet 
flexible  est  plus  propre  à  produire  des  sons  moelleux  et 
purs  qu'un  archet  raide  et  tendu;  la  baguette  fut  d'abord 
remise  en  ligne  d'oite,  et  finit  par  prendre  la  courbe 
concave  qu'on  lui  voit  aujourd'hui.  Les  artistes  modifient 
maintenant  la  légère  tension  de  leur  archet  par  le  moyen 
d'une  vis,  en  raison  de  la  qualité  de  leur  jeu  et  des  traits 
avec  les(piels  ils  se  sont  familiarisés.  Au  moyen  de  cet 
arche!  flexible  et  léger,  les   effets  qu'on  peut  produire 


19S  DE  l"kxecutio>.  sect.  m. 

sur  le  viulon  ou  sur  le  \ioIonrelle  sont  de  beau'-oup  d'es- 
pèces. Près  du  chevalet ,  les  cordes  ayant  une  tension 
très  énergique,  l'anhet  ne  les  peut  mclîre  dans  un  élat 
de  \ibralion  complile  qu'avec  beaucoup  de  difCcidté,  et 
les  sons  qu'elles  profluisent,  quand  elles  sont  touchées 
dans  cet  endroit,  ont  quelejuc  chose  de  nasoi^d  et  de  res- 
semblant à  la  vielle.  Si  l'on  écarte  un  peu  l'archet  de 
cette  position,  les  cordes  rendent  un  son  volumineux, 
ninis  peu  agréaijie  et  même  dur;  cependant  on  lire  bon 
pirli  de  ces  sons  dans  les  trnits  délachés  qui  demandent 
de  la  force.  Plus  l'arclict  se  rapproche  de  la  touche,  plus 
les  sons  prennent  une  qualité  moelleuse,  mais  m(<ins  ils 
ont  d'inlensilé.  On  joue  aussi  quelquefois  sur  la  louche; 
dans  celle  position  de  l'archet,  les  sous  deviennent  Irès 
doux,  mais  ils  sont  sourds.  A.  mesure  que  l'archel  s'éloi- 
gne du  chevalet,  l'aitisle  diniinue  la  foice  de  pression 
sur  les  cordes.  L'inclinaison  plus  ou  moins  considérable 
de  la  baguetle  sur  les  cordes  ,  modifie  aussi  la  ipialilé  des 
sons.  De  tous  ces  faits,  qui  ont  été  successivement  ob- 
servés, résidie  la  variété  inépui.sable  d'effets  ([u'un  {rrauf! 
artiste  parvient  à  tiier  de  son  instrument.  Peut-ètr;- 
reste- t-il  encore  beau(Oiip  à  découvrir  pour  porter 
l'exécution  des  inslrumens  à  archet  aussi  loin  qu'tllc 
peut  aller;  cependant  sous  le  rapport  de  la  variété  d'et- 
fets  et  de  la  difficulté  vaincue,  Pjigaiiini  parait  avoir 
porté  l'art  déjouer  du  \iolon  à  ses  dernièies  limites. 

Le  violon  ne  fut  pendant  long;  temps  q-i'un  instru 
ment  de  ménétrier;  son  u.sage  se  boriuiil  à  jouer  des  airs 
populaires  ou  à  faire  danser.  Phis  lard  on  linlroduisil 
dans  l'orchestre  ,  où  il  tient  maintenant  la  première 
place;  mais  ceux  qui  en  jouaient  avaient  si  peu  d'habi- 
leté que  T.nl'v  s?  p'.i'g':nit  c!r  r.c  pou'o'r  hrsardo»'  de 


C:UAI'.   XVIIJ.  JT.V  INSTRUMENTAL.  199 

placer  les  passages  les  moins  d-lficiles  dans  ses  compo- 
silions,  ilans  la  crainlo  qiu:  les  synijilionisles  ne  pussent 
les  e\éciHrr  ].a  Tiance,  l'ilalie  et  l'Allemagne  ne  possé 
(laiertl  pas  luie  seule  éio'c  de  vi<  Ion,  Le  premier  (pii 
rom|)rit  ce  qu'on  pouvait  faire  de  cet  inshumeiit  fut 
Corelli.  Ce  violoniste  italien  'écul  à  la  fin  du  dix-sep- 
tième siècle  et  au  eommeruemeni  du  dix-hnilième.  Ses 
sonates  et  ses  rofici r/os  sont  enroie  considérés  connue 
des  modèles  classiques.  Il  y  inliodiiisit  une  multitude 
de  traits  et  de  combinaisons  de  doif^lé  et  de  coups  d'ar- 
chet dr)nl  on  n'avait  pas  d'idée  avant  lui.  Ses  successeuis. 
Viv^aldi  et  X<J£tini,  étendirent  le  domaine  de  rinstiument 
(ju'il  venait  en  quel(|ue  sorte  de  créer;  Nardini,  Pujjuani, 
et  beaucoup  d'autres  violonistes  italiens,  qu'il  serait 
trop  long  de  nommer,  perleclionnèient  successiveinen! 
l'ait  de  manier  l'archet  et  celui  du  doiglé.  Enfin  A  iotti 
recula  les  bornes  qu'on  avait  assi^n;^es  au  violon,  tant 
par  son  exécution  prodigieuse  fpie  par  la  beaulé  de  ses 
compositions,  qui  réunissent  la  nouveauté  et  la  grâce 
des  chants,  l'expression,  la  largeur  des  proportions  et 
le  biillant  des  trails.  Les  concertos  de  Violti  sont  les 
plus  beaux  qu'on  connaisse. 

Les  violonistes  allemands  se  dislinguent  dejiuis  le  mi- 
lic!)  du  dix-huitième  siècle  par  Ihabilelé  de  leur  main 
ganch.e;  mais  ils  tirent  peu  de  son  de  l'inslruinent ,  et 
leur  maniement  d'archet  est  en  général  peu  développé." 
L'Italie  et  la  France  possédaient  de  grands  violonistes 
long-temps  avant  que  l'Aliemagne  en  eût  de  remarcpia- 
bles.  Le  premier  qui  fonda  une  école  allemande  du 
violon  lut  Benda.  Vers  1790,  Eçk  se  plaça  à  la  tèle  des 
violonisles  allemands.  On  ciiait  aussi  dans  le  même 
temps  rra?nzel,   dont  îe  talent  agréable   était  renfermé 


200  DE  L  l:XtCLT10X.  Sh-CT.    III. 

dans  de  plus  jjelites  proportions.  Aujourd'hui,  Spnhr 
passe  pour  être  le  chef  des  vicdonisles  de  l'Allemagne; 
il  possède  en  effet  beaucoup  d'habilclé;  mais  son  exé- 
cution uiL^ii.U.uide  n'a  pu  obtenir  de  succès  en  France, 
pays  où  les  violonistes  sont  jugés  le  plus  sévèrement. 

Les  violonistes  français  sont  célèi)res  dans  ioute  l'Eu- 
rope depuis  plus  d'un  siècle.  Lecicre,  dont  la  manière 
appartenait  à  l'école  de  Corelli,  fui  le  premier  qui  par- 
vint à  lutter  sans  désavanlagc  avec  les  grands  artistes 
italiens.  La  musiipie  qu'il  composa  pour  son  instrument 
fut  considérée  long-lemps  comme  un  modèle  classique; 
elle  n'est  pas  sans  difficultés  pour  les  violonistes  de  nos 
Jours,  malgré  les  progrès  immenses  qu'on  a  faits  dans 
l'art  déjouer  du  violon.  Guillcmain,  Pagin  et  quelques 
autres  (pii  vinrent  après  Lcclere,  eurent  plus  de  grâce 
dans  leur  jeu,  mais  moins  de  largeur  dans  le  sl\le  et 
dans  le  son.  Gaviniès,  qu'on  a  surnommé  le  Tarluii 
fianrais,  fut  digue  de  ce  nom  par  les  grandes  projmr- 
lioiis  de  son  jeu.  L'art  du  maniement  d'archet,  qu'on 
avait  négligé  en  France  jusqu'à  lui,  pour  s'occuper  de 
la  main  gauche,  atliia  son  attention,  et  il  y  acquit  une 
habileté  t|ue  Violti  lui-même  admirait.  Les  éludes  (pi'il  a 
publiées,  sous  le  litre  des  v  n.^'.-quatre  mcilinces ,  res- 
teront comme  un  monument  de  son  talent. 

Après  lui  commence  ce  qu'on  peut  appeler  l'école  mo- 
derne. Kreut/cr,  Rode  et  Eaiilot  en  sont  les  chefs.  Le 
premier  n'avait  point  fait  d'études  cla>siques;  mais  son 
heureuse  organisation  lui  révéla  le  secret  d'une  sorte  de 
style  chevaleresque,  brillanl,  léger  et  plein  de  charmes. 
Plus  correctj  plus  pur,  le  talent  de  Roçjje  fut  un  modèle 
de  peifeclion.  Admirable  par  la  justesse  de  ses  intona- 
tions et  l'art  de  chanter  sur  son  ins'rument,  il  se  faisait 


C:nAl».   XVlir.  JEU    INSTRUMENTAL.  201 

aussi  remarquer  par  la  prestesse  de  son  doigté;  on  ne 
pouvait  lui  reprocliei  que  de  manquer  un  peu  de  variété 
dans  le  maniement  de  son  arcliet.  I^es  deux  granils  ta- 
lens  que  je  \iens  de  citer  ne  sont  déj  »  plus  que  des  sou- 
venirs ([iM  appartiennent  à  l'histoire  de  l'art,  et  Baillot, 
leur  contemporain,  Baillot,  répertoire  vivant  de  toutes 
/  les  traditions    classiques  de    la    France   et  de  Pltalie, 

'  Baillot  est  encore  debout,  brillant  de  jeunesse  et  de 
verve,  grandissant  avec  l'âge,  et  semblant  défier  à  la 
lois  et  le  siècle  qui  le  fuit  et  celui  qui  s'avance.  C'est  à 
ce  grand  artiste  f|u'apparlient  surtout  la  gloire  d'avoir 
établi  en  France  l'école  de  violon  la  plus  brillante  qu'il  y 

i^^it  en  Europe,  tant  par  les  élèves  qu'il  a  formés  que  par 
l'exemple  qu'il  donne  d'un  mécanisme  admirable  et  du 
style  le  plus  élevé.  Sa  variêJjè  çL'ai'cbet  est  prodigieuse; 
mais  son  habileté  n'est  en  lui  cpi'up  moyen  de  seconder 
ses  inpirations,  qui  sont  toujours  piolondes  ou  passion- 
nées. Baillot  donne  surtout  l'essor  à  son  talent  lorsqu'il 
exécute  la  musique  des  grands  maîtres,  et  lors(jue  son 
auditoire  partage  ses  émotions.  Nul  n'a  aussi  bien  ana- 
Ivsé  que  lui  les  qualités  de  style  propres  à  l'exécution 
delà  musique  des  grands  maîtres;  aussi  peut-on  alfirmer 
qu'il  pst  Jp  plus  varié  dps-viftLjni.'Upf;  ^  lorsque  dans  la 
même  soirée  il  fait  entendre  des  quatuors  ou  des  quin- 
tetlis  de  Bocchérini ,  de  Haydn,  de  Mozart  et  de  Beetho- 
ven. Chacun  de  ces  compositeurs  prend  sous  sa  main  le 
caractère  (|ui  lui  appartient,  et  l'on  croit  entendre  suc- 

^  cessivement  des  vinlonistes  différens. 

Aux  trois  grands  artistes  que  je  viens  de  nommer,  il 
faut  joindre  Lafont,  (pu,  sans  avoir  ce  qu'on  nomme 
communément  </t;  Cccole,  c'est-à-dire,  une  théorie  de 
l'archet  et   du  doigté,    s'est  fait,  par  un   travail  assidu. 


202  DE  l'eXÉCUTIO».  «ECT.  III. 

un  jeu  fort  agréable  sons  le  raj  porl  de  la  justesse  et  de 
la  douceur  des  sons. 

Les  violonistes  que  je  viens  de  noniincr  ont  fnrtr.é 
une  nïullitude  d'élèves  (|ui  sont  devenus  des  aiiislcs  dis- 
tingués, et  qui  assurent  aux  orcliestres  fiançais  une  su- 
périorité inronleslable. 

Une  nouvelle  ère  a  coinnirncé  pour  le  violon  :  c'est 
celle  c!e  la  dilficullé  vaincue.  Pj^/um.,  doué  d'une  or- 
ganisation nerveuse  et  [Icsible,  possédanl  ujjjjijijin  pro- 
clJj^eiJSËnipnL.j>auple^  qui  lui  offre  les  moyens  d'exécu- 
ter des  passages  que  nul  autre  ne  peut  faire  comme  lui, 
a  dû  ù  ces  av^iiiagcs,  au  travail  le  plus  Ojwjwdtre  et  à  quel- 
ques circonstances  particulières  une  habileté  qui  tient 
du  merveilleux.  iN'avant  eu  en  qtu'lque  sorte  d'antre 
mailrp  que  lui-niffnVj  il  parait  avoir  compris  sa  desti- 
nation par  la  vue  de  quelques  œuvres  de  Loc.itelli ,  vio- 
loniste italien  di\  dix-bnitième  sièdc  (pii  avait  tourné  .ses 
idées  vers  la  production  d'effets  nouveaux,  et  dont  les 
Cûy?m e.y  semblent  avoir  servi  de  modèles  aux  premiers 
exercices  dePagni.ini.  Locatelli  faisait  un  fréi|nent  usage 
des  .iu//s  /tannn/iifjuc.'i ;  Paganini  s'est  attaché  à  pei  fec- 
tionner  ces  sons,  à  les  produite  dans  lonles  les  positions 
et  dans  tons  les  ions  ;  enfin  à  les  (aire  en  double  corde, 
et  à  les  marier  aux  sons  ordinaires  de  l'instrument.  Le 
doigte  du  violon  offre  quelquefois  des  diilicullés  insur- 
montables pour  certains  passages;  Paganini  a  éludé  ces 
didicultés  en  variant  rjucord  de  l'instrument  ,  de  ma- 
nière à  se  plarer  dans  les  conditions  les  plus  avanta- 
geuses pour  l'exéi  uliun  des  passages  (ju'il  niédiiail.  C'est 
par  le  moyen  de  ces  variétés  d'accord  «pi'il  a  aussi  pro- 
duit des  effets  de  sonorité  qui  n'existeraieul  pas  sans 
cela.  Ainsi   il  joue  un  concerto    en   mi  bémol  mineur ^ 


CHAP.    \T11I.  lli.L    INSTRLJIENTAI..  203 

dans  lei|uel  il  a  mnlliplié  les  tours  de  force;  cela  semble 
tenir  du  >)r()iliL;e;  niais  le  seccct  de  celle  merveille  con- 
siste à  laire  |oner  l'oreiiesUe  en  ////  hcinol  iinn'ur,  tandis 
qtie  le  violon  Mil»  est  monlé  un  demi-ton  [tins  lianl  que 
laccoid  ordinaire,  et  que  rexéculant  ne  joue  réellement 
qu'en  rc  //lificiir.L.^  tliliicnlté  disparaît  donc  en  partie; 
mais  l'eflet  n'en  est  pas  moins  satisfaisant.  Pii;:;anini  est 
le  premier  qui  ait  exécuté  des  traits  dans  lestpiels  la 
main  i^auclie  pince  certaines  notes  tandis  que  l'archet 
en  joue  d'autres  ,  et  qui  ait  trouvé  le  moyen  de  jouer 
sur  la  quatrième  corde  des  morceaux  entiers  qui  sem- 
bleraient exiger  les  quatre  cordes  de  l'instrument.  On 
ne  peut  donc  nier  (|ue  ce  virtuose  ait  étendu  les  res- 
sources du  violon;  malheureusement  le  désir  de  se  faire 
applaudir  par  ses  tours  de  foice  lui  en  lait  faire  un  abus 
qui  le  place  souvprit  en  dehors  du  domaine  de  l'art. 
L'habileté  de  l'artisie  se  fait  toiijours  admirer,  mais  le 
^^;aùt  n'est  pas  toujours  satisfait.  Quoi  qu'il  en  soit,  on 
doit  avouer  que  Paganini  est  le  violoniste  le  plus  extraor- 
dinaire qui  ait  jamais  existé;  c'est  aussi  celui  qui  a 
excité  le  plus  généralement  l'enthousiasme,  et  dont  la 
fortune  est  la  plus  brillante. 

Dans  la  nouvelle  école,  il  est  un  autre  violoniste  qui, 
quoi(|ue  jeune,  s'esl  fait  une  grande  réputation  par  la 
pureté  de  son  talent;  ce  violoniste  est  jje^  Bériot.  Possé- 
dant un  son  superbe,  un  archet  flexible  et  varié,  une 
intonation  irréproch  ii)le  et  beaucoup  de  goût,  il  ne  lui 
man  |uait  que  d'agrautlir  les  proportions  de  son  jeu,  et 
de  ne  pas  se  borner  au  geiue  un  peu  rétréci  de  l'air 
varié;  ses  derniers  travaux  ont  lait  soir  qu'd  a  conq)ris 
ce  qui  lui  reste  à  faire ,  et  l'oa  peut  espérer  qu'il  se  pla- 


204  »E  l'ïxécutio??,  »kct.  m. 

cera  quelque  jour  à  un  haut  degré  de  l'échelle  des  vio- 
lonistes. 

Autant  le  violon  est  un  instrument  brillant  et  puissant 
dans  le  solo,  autant  la  viole  ou  alto  paiait  destinée  à  ne 
se  faire  entendre  que  dans  les  morceaux  d'ensemble  et 
comme  partie  d'accompagnement.  La  qualité  de  son  de 
cet  instrument,  mélancolique  et  concentrée,  le  rend  peu 
pi'Opie  à  satisfaire  lotig-lemps  l'oreille.  Dans  le  quatuor 
ou  dans  la  symphonie,  il  dialogue  bien  avec  les  autres 
instrumens;  mais  il  devient  monotone  lors(prilse  fait  en- 
tendre seul.  Il  n'est  donc  point  étonnant  (pi'on  ait  écrit 
peu  de  solos  pour  l'alto,  et  (|ue  peu  de  violonistes  aient 
songé  à  cultiver  parlicidièrenient  cette  variété  du  violon. 
Alexandre  Rolla,  chef  d'orchestre  du  théàlre  de  la 
Scala,  à  Milan,  et  M.  Ui  han  ,  professeur  de  Paris,  sont 
à  peu  près  les  seuls  qui,  dans  <es  derniers  temps,  s'y 
sont  distingués.  Le  doigté  et  le  maniement  lîe  l'archet 
étant  les  mêmes  pour  cet  inslniment  et  pour  le  violon, 
tout  violoniste  peut  jouer  de  la  viole. 

Il  n'en  est  pas  de  même  du  vi  loncelle,  qui  se  place 
entre  les  jambes  de  l'exécutant  et  cjui  exige  un  doigté 
particulier.  L'écartemenl  des  doigts,  pour  former  les 
intonations,  étant  toujours  en  raison  de  la  iongnear  des 
cordes,  on  conçoit  qu'il  doit  être  beaucoup  plus  consi- 
dérable sur  le  violoncelle  î|ue  sur  le  violon.  Il  suit  de  là 
qu'on  ne  peut  faire  sur  cet  inslnnnput  les  notes  de  même 
dénomination, affectées  de  dièses,  de  bémols  ou  de  bécar- 
res, avec  les  mêmes  doigts,  comme  cela  se  prali(|ue  sou- 
vent sur  le  violon.  En  outre,  l'ohligalioii  de  (|uitter  le 
manche  pour  appuyer  le4iûjice..sur  la  touche,  lors(|u'on 
veut  atteindre  aux  inloaaliond  aiguës ,  n'a  aucune  analo- 


»H\P.    XVI II.  iEU    INSTIll.'MKNTAL.  ^O-'i 

gie  avec  ce  qu'on  nomme  le  démcnclié  du  violon  :  ces 
lieux  instrumens  sont  tlonc  aussi  différens  sons  le  r<ip- 
jioit  de  l'exécution  qu'ils  le  sont  sous  celui  de  leurs 
dimensions. 

Le  violoncelle  est  susceptible  de  produire  de  grands 
effets  dans  les  solos  comme  dans  l'orchestre;  sa  qualité 
de  son  est  pénétrante  et  a  beaucoup  d'analogie  avec  la 
voix  humaine.  Aussi  la  destination  naturelle  de  cet  ins- 
trument dans  les  solos  paraît-elle  être  de  chanter,  c'est- 
à-dire  d'exécuter  des  cantilènes.  Toutefois,  la  plupart 
des  violoncellistes  font  consister  leur  habileté  à  jouer 
beaucoup  de  passages  difficiles,  parce  (|ue  ces  dilficultés 
leur  prorurenl  les  applaudissemens  du  public. 

Le  premier  qui  introduisit  le  violoncelle  dans  l'or- 
chestre de  l'Opéra  fut  un  musicien  nommé  Battistini ,  de 
Florence,  peu  de  temps  avant  la  mort  de  Lulli.  Avant 
lui  on  ne  se  servait  que  de  la  basse  de  ri>te  (qui  était 
montée  de  s_e(iL  cordes)  pour  accompagner  le  chant 
comme  pour  la  musique  instrumentale.  Franciscello , 
violoncelliste  romain,  fut  le  premier  qui  se  rendit  célèbre 
dans  l'exécution  des  solos;  il  vivait  vers  1725.  Deux 
virtuoses  allemands,  Quanz  et  Benda,  qui  l'entendirent 
à  Naples  et  à  Vienne  ,  s'accordent ,  dans  les  éloges  qu'ils 
lui  donnent,  à  le  ranger  à  la  tète  des  artistes  les  ])lus  ha- 
biles de  leur  temps.  _Eeï:liiau£l,  né  à  Valenciennes  au 
commencement  du  dix-huitième  siècle,  doit  être  con- 
sidéré comme  le  chef  de  l'école  française  du  violoncelle. 
Parmi  ses  éièves  on  remarque  les  deux  frères  Janson, 
Duport  l'ainé,  et  surtout  Louis  Duport  le  jeune,  qui 
jus(|u'ici  n'a  point  été  surpassé  sous  le  double  rapport 
de  la  beauté  du  son  et  de  la  dextérité  d'archet.  A  l'égard 
de  l'élégance  du  style  et  de  l'habileté  du  doigté,  La- 

i3 


206  DE  L  EXF.CVTlOJf.  StCl.    III. 

lïiarre  parait  être  le  violonrelliste  qui  s'est  élevé  le  plus 
haut;  mallienreuseinent  son  jeu  laissait  souvent  à  di'sirer 
un  son  plus  voliimiiietix  et  plus  mordant,  particulière- 
ment sur  la  troisième  et  la  rpialrième  corde.  L'école 
française  compte  aujourd'hui  plusieurs  artistes  de  beau- 
coup de  talent. 

L'école  allemande  s'est  distinguée  par  cjHelquos  \;o- 
lonrellistes  «.î'im  grand  mérite.  Le  premier  en  date  est 
Bernard  Romberg,  dont  les  compositions  ont  servi  de 
modelé  pour  la  facture  des  concertos  à  la  plupart  de  ses 
successeurs.  Une  manière  large  et  vigouieuse  était  ce 
qu'on  remarquait  surtout  dans  son  talent.  Après  Rom- 
berg est  venu  Maximilien  B.oiîjer ,  qui  s'est  fait  une 
grande  réputation  par  son  hab  leté  à  se  jouer  des  plus 
grandes  difiicultés,  sa  justesse  d'intonation  et  l'élégance 
de  son  jeu.  Sans  être  aussi  remarquable  sous  le  rapport 
de  l'exécution,  J^ûLouév  miri  e  d'èlre  cité  pour  ses 
compositions,  qui  sont  d'un  très  bon  style. 

Les  Anglais,  qui  n'ont  point  eu  de  violoniste  qu'on 
puisse  citer,  coinpfeni  parmi  leurs  musiciens  deux  vir- 
tuoses sin-  le  violoncelle.  L'un  est  Crossdill,  qui  se  dis- 
tingua par  une  exécution  vigoureuse  et  large,  rauli'ee<ît 
I.iiiley.  Une  belle  qualité  de  son  ,  beaucoup  de  prestesse 
d'archet  et  une  grande  netteté  d'exécution  lui  ont  pro- 
curé une  réifulalion  méritée.  Malheureusement  son  jeu 
est  absolument  dépourvu  de  style,  et  sa  manière  est 
vulgaire. 

La  contrebasse,  instrument  gigantesque  qui  est  monté 
de  quatre  cordes  en  Allemagne,  et  qui  n'en  a  que  trois 
^en  France,  en  Italie  et  en  Angleterre,  est  le  fondement 
des  orcîicstres.  Aucun  autre  instrument  ne  peut  le  rem- 
placer pour  l'iatensité  et  la  puissance  du  son.  La  Ion- 


11 


t:nAP.   X\III.  JSU  INSTRUMENTAL.  207 

gueur  de  ses  cordes  csl  telle  que  l'écartement  esl  consi- 
dér<d>le  cnlie  cha(|ue  noie,  ce  (nii  oblige  celui  qui  en 
joue  à  ciianj^cr  à  cii.uiue  instiinl  la  position  de  sa  main, 
en  sorle  (|ue  les  liaits  rapides  y  sont  d'inie  exéeulion 
fort  dilTi(  ile.  Rarement  cette  exécution  esl  salisfaisanle, 
car,  parmi  les  contrebassistes,  les  uns  se  bornent  à  jouer 
les  n(»tes  principales,  en  négligeant  ce  qui  leur  send)le 
moins  nécessaire,  et  les  antres,  plus  exacts,  ne  tirent  que 
peu  de  son  dans  la  rapidité  des  notes.  L'ensemble  du 
doigte  et  de  l'archet  est  fort  difficile  à  acquérir.  La  des- 
tination de  la  contrebasse  parait  être  uniquement  de 
compléter  par  ses  sons  graves  le  système  d'un  orchestre; 
cependant,  malgré  ses  dimensions  colossales,  malgré  la 
rudesse  de  ses  sons  et  les  difficultés  qu'il  oppose  à  un 
jeu  délicat,  on  esl  parvenu  à  y  jouer  le  solo  de  manière 
à  faire  naître  au  moins  l'élonneuicnt ,  si  ce  n'est  à  char- 
mer l'oreille.  Dragonetli,  premier  contrebassiste  de  l'O- 
péra et  du  concert  philharmonique  de  Londres,  est  par- 
venu à  un  degré  d'habileté  en  ce  genre  qui  surpasse 
tout  ce  qu'on  peut  imaginer.  Né  avec  un  sentiment  mu- 
sical très  énergi(pie,  Dragonelli  possède  un  aplomb  dans 
la  mesure  et  une  linesse  de  tact  (jui  le  font  dominer  tous 
les  artistes  qui  l'environnent  dans  un  orchestre;  mais  ce 
n'est  là  qu'une  portion  de  son  mérite.  Personne  n'a  poussé 
aussi  loin  que  lui  l'art  d'exécuter  des  dilficiillés  et  de 
manier  avec  dextérité  le  lourd  archet  de  son  instrument. 
Ce  qu'il  fait  tient  du  prodige.  Tous  ceux  qui  ont  tenté 
de  l'iiiiiler  n'ont  point  a]i))ro(  hé  de  sou  talent  et  n'en 
ont  reproduit  que  de  faibles  copies. 

Tous  les  insirumens  à  cordes  et  à  archet  dont  il  vient 
d'être  parlé  composent  la  base  des  oielustres;  ils  furent 
iitéiue  les  aeuis  qu'où  y  employa  dans  la  première  moitié 


208  Dfc  l'exïcl'tiok.  sect.  m. 

du  dix-huitième  siècle,  soit  dans  la  musique  dramati- 
que, soit  dans  le  style  religieux.  Les  opéras  de  Pergo- 
lèse  ,  de  Léo,  de  Vinci,  de  Poroora,  n'ont  point  d'autre 
instrumentation  que  celle  des  violons,  violes  et  basses. 
Les  accoinpagnenicns  du  chant  n'étaient  alors  qu'un  ac- 
cessoire peu  remarquable;  tout  le  niérile  de  cette  mu- 
sique consistait  dans  la  grâce  des  mélodies,  et  dans  l'ex- 
^pression  des  paroles.  Les  instrumens  à  veni,  qui,  par 
les  caractères  divers  de  leurs  sons,  forment  des  opposi- 
tions heureuses  avec  les  instrumens  à  cordes,  et  colo- 
rent la  musi(|ue  de  teintes  variées,  n'avaient  point  en- 
core pris  place  dans  Torcheslre,  du  moins  y  étaient  pres- 
que inaperçus,  parce  qu'ils  n'y  étaient  employés  que  de 
loin  en  loin  et  avec  maladresse.  Ce  penre  d'instrument  a 
acquis  successivement  une  plus  grande  importance  dans 
les  divers  styles;  mais  les  violons,  violes  et  basses  sont 
restés  et  resteront  toujours  le  fondement  des  orchestres, 
parce  que  ces  instrumens  sont  à  la  fois  les  plus  éncrgi- 

I  ques,  les  plus  doux   et  les  plus  susceptibles  de  vaiieF 

^leurs  accens. 

Mais  pour  tirer  des  instrumens  à  cordes  fout  l'effet 
dont  ils  sont  susceptibles  dans  de  grandes  masses  d'or- 
chestre, il  faut  qu'il  y  ait  unité  dans  le  mode  d'exécu- 
tion ,  c'est-à-dire  que  les  mêmes  traits  soient  exécutés  de 
la  même  manitve  par  tous  les  instrumentistes;  que  tous 
les  archets  tirent  et  poussent  en  même  temps;  que  les 
détachés  et  les  liés  se  fassent  aux  mêmes  endroits;  que 
les  accens  du  fort  et  du  faible  soient  exprimés  sur  les 
mêmes  notes;  en  un  mot,  qu'il  semble  n'y  avoir  qu'un 
violon,  une  viole,  un  violoncelle,  une  contrebasse.  Il  n'y 
a  point  de  pays  où  ces  conditions  sont  aussi  bien  rem- 
plies qu'en  France;  les  orchestres  de  Paris  sont  surtout 


L.n\V.  \.V1II.  JliU   iNàïftLMKXTAI..  20D 

remarquables  sous  ce  rappoil.  II  en  faut  atlribucr  la 
cause  à  la  supérii  rilé  d'éinle  f|ui  existe  au  Clonscrxa- 
toire,  cl  à  la  sùielé  de  piiucipcs  rpTon  y  pi'oIVsse.  On 
a  <|uel(|uefois  leproclié  à  celle  école  de  jeier  lou3  ses 
inslruuienlistes  dans  le  même  moule;  ce  re|)roclie  me 
pnraîl  èlre  piulùt  un  élo;;e  (pi'une  crilirpie  à  régar»'.  des 
violonistes  d'orchestre.  Quant  à  ceux  cpie  la  nature  ap- 
pelle à  se  distinguer  dans  le  solo  ,  s'ils  ont  reçu  d'elle  les 
qualités  (jui  lout  le  g;rand  artiste,  c'est-à-dire  un  senti- 
ment énerj^icpie  et  le  i^erme  d'une  m;iuiîre  |)ailicul.èrc, 
1,1  réj^ularilé  des  principes  qu'ils  reçoivent  dans  une 
école  ne  peut  être  un  obstacle  au  développenu-nl  'le 
leur  talent  naturel;  ils  sauionl  toujours  secouer  les  en- 
traves du  maître,  (piaud  le  tenqis  sera  veini ,  et  il  leur 
restera  l'avantage  d'un  maniement  raisonné  d'archet.  Tous 
les  compositeurs  étrangers  qui  ont  visité  la  France,  et  par- 
ticulièrement Rossini ,  ont  admiré  les  violonistes  français. 

Bien  que  la  France  ait  piodnit  plusieurs  virtuoses 
pour  les  instrumens  à  vent,  elle  n'a  point  la  même  supé- 
l'iorilé  en  ce  genre  que  dans  les  instrumens  à  cordes;  en 
général,  l'aUJeiria^ne  l'emporte  sur  elle  à  tel  égard.  Une 
des  plus  grandes  difficultés  rpi'il  y  ait  à  vaincre  .sur 
celle  sorte  d'inslrumens  est  d'en  adoucir  le  son,  et  de 
jouer  piano  ;  les  instrumens  à  vent  jouent  généralement 
tro^fort  dans  les  orchestres  français.  L'obligation  de 
jouer /;irt«o  est  cependant  devenue  d'autant  plus  iuqié- 
rieuse,  que  la  musiipic  delà  nouvelle  école  admet  l'usage 
presque  continuel  de  tous  les  inslriunens  par  masse, 
pour  en  tirer  du  coloris,  et  que  ces  masses  étouffent  le 
chaiil  lorsqu'elles  ne  sont  point  adoucies  à  l'excès. 

Les  instrumens  à  vent  employés  dans  l'on  hestre  par 
les  compositeurs  de  l'école  actuelle  sont  :  deux  flûtes, 


210  DK   l'kMCLTÎON.  SVA.r.    III. 

deux  liautbois,  deux  clarineltes,  deux  bassons,  deux  ou 
t^uatre  cors,  deux  trompellcs,  auxquels  on  njoiite  quel- 
cjuelois  trois  troml)onps,  plusieurs  ophicléide»,  un  bujjie 
ou  Irompelte  à  tiers,  elc. 

La  qualité  la  plus  nécessaire  pour  bleu  jfKier  de  la 
flùle  est  une  bonne  embouchure,  c'esf-à-dire  une  <er- 
laine  disposition  des  lèvres  propre  à  faire  enlrer  dans 
l'instrument  tout  le  soufûe  qui  sort  de  la  bouche,  et  à 
ne  pas  faire  entendre  une  sorte  de  sifflement  qui  pré- 
cède le  son,  et  qui  est  fort  désagréable  dans  le  jeu  de 
quelques  flùlistes.  La  construclion  de  l'instrument  a  été 
beaucoup  améliorée  depuis  vingt-cini|  ans;  néanmoins 
elle  n'est  pas  parfaite,  et  sa  justesse  est  loin  d'être 
irréprochable;  l'artiste  seul  peut  lui  donner  celle  jus- 
tesse si  nécessaire  par  la  modification  de  son  souffle, 
et  quelquefois  par  de  certaines  conibinaisf)ns  de  doigté. 
Les  notes  détachées  se  faisant  au  moyeu  d'une  arlicula- 
tion  qu'on  appelle  roi/p  fie  hir/f^iie,  il  est  indispensable 
(jue  l'artiste  possède  beaucoup  de  volubilité  dans  l'or- 
gane de  la  parole  pour  exéciilei'  avec  nellelé  les  traits 
rapides,  et  surtout  il  faut  cpi'il  s'accoutume  à  mellie  un 
ensemble  parfait  entre  les  mouvemens  de  la  langue  et 
ceux   des   doigts. 

Le  premier  flûtiste  qui  eut  quelque  mérite  en  France 
fut  Blavet,  directeur  de  la  musique  du  comte  de  Cler- 
mont  :  il  brilla  dans  la  première  moitié  du  dix-huitièm^ 
siècle;  mars  il  fut  inférieur  à  Quanz,  compositeur  de  la 
cour  de  Prusse,  et  maître  de  flûte  de  Frédéric  IL  Quanz 
fut  non-seulement  un  virtuose,  mais  un  grand  professeur 
qui  a  écrit  un  livre  élémentaire  excellent  sur  l'art  de 
jouer  de  la  flùle,  et  qui  a  commencé  à  perfectionner  cet 
instrument  en  y  ajoMiTnt  une  clef;  la  flûte  n'en  avait 


rUAi'.  xvm.  ir.i    iNsniLMENTAi..  211 

qu'une  seule  .ivaul  lui.  Aucun  flûtiste  rcniarquahlo  ru* 
s'était  fait  connaître  depuis  Quanz  et  Blavcl ,  I<)rs(|uc 
Htigot ,  artiste  Iraiiçais,  se  fil  une  brillante  répulaiioii 
\ers  1  790  par  la  beauté  du  son  qu'il  tirait  de  la  flùti"  et. 
par  la  netteté  de  son  exécution.  Quant  à  son  st\Ie,  il 
était  vulgaire  comme  celui  de  tous  les  joueurs  J'iuslru- 
mens  à  vent  de  son  temps.  Cet  artiste  recommandalile, 
(!aus  lU)  accès  de  fièvre  chaude,  s'échappa  de  sou  Ht  et 
se  précipita  par  sa  fenêtre,  au  mois  de  septembre  1803. 
Aucun  flûtiste  n'avait  pu  remédierau  défaut  principal 
Je  la  flûte,  qui  est  la  monotonie,  quand  Tulou,  encore 
enfant  et  élève  du  Conservatoire,  manifesta  un  géaiepar- 
licidier  qui  devait  réformer  à  la  fois  et  l'instrinnent,  et 
l'art  d'en  jouer,  et  la  musique  qui  lui  était  destinée.  Le 
premier  il  reconnut  que  la  flûte  est  susceptible  de  va- 
i  ier  ses  accens  et  de  fournir  diverses  qualités  de  son  par 
le  moyen  des  modifications  du  soûl  fie.  Celte  découverte 
ne  fut  pas  le  résultat  de  ses  recherches  ui  de  ses  lé- 
Uexions ,  mais  d'une  soiie  d'instinct  qui  fait  les  grands 
artistes.  La  flûte,  sous  les  doigts  de  Tulou,  a  souvent  des 
inflexions  dignes  de  rivaliser  avec  la  voix  humaine,  et 
cela  donne  à  son  jeu  une  fpialité  d'expression  qui  n'a  été 
égalée  par  aucun  flûtiste,  bien  que  d'autres  virtuoses 
aieiU  pris  sa  manière  pour  modèle ,  au  moins  en  certaines 
choses.  Drouet  et  Nicholson  tiennent  le  premier  rang 
parmi  ceux  ci.  Le  premier  se  distingue  par  une  exéctit  ion 
biillanleet  par  une  volubilité  de  langue  plus  étonnante 
que  tout  ce  qu'on  avait  entendu  jusciu'à  lui;  mais  son 
style  est  froid  et  son  jeu  ressemble  plus  à  des  tours  de 
force  qu'à  de  la  musiijue  véritable.  Nicholson  est  le  pre- 
mier flûtiste  de  l'Angleterre,  et  serait  partout  un  aitiste 
distingué.  Il  y  a  bien  quelques  traces  de  mauvais  goût 


212  DE  l'exécutiOs.  »ecï.  m. 

dans  son  jeu  ,  et  surtout  dans  sa  musique;  mais  son  exé- 
cution est  nette  et  brillante,  sa  qualité  de  son,  pure  et 
volumineuse,  et  son  habilelé  à  passer  «l'un  scn  à  un 
autre  par  des  nuances  insensibles  fort  remarquable. 

C'est  eu  Italie  que  l'art  de  jouer  du  liaulbois  a  pris 
naissance,  et  que  l'on  a  fait  d'un  instrument  grossier, 
destiné  aux  bergers,  l'instrument  le  plus  parfait  de  la 
famille  des  pneumatiques.  La  difficulté  la  plus  considé- 
rable qu'il  y  ait  à  vaincre  pour  bien  jouer  du  hautbois 
consiste  dans  l'obligation  de  retenir  le  souffle  pour  adou- 
cir le  son  et  pour  éviter  les  accidens  (|u'on  nomme  vul- 
gairement des  couacs;  accidens  qui  ont  lieu  lorsque 
l'anche  seule  entre  en  vibration,  sans  faire  sortir  le  son 
de  l'instrument.  Cependant  il  est  nécessaire  de  prendre 
certaines  précautions  lors(|u'on  joue  avec  beaucoup  de 
douceur,  parce  que  l'instrument  peut  quehiuefois  ocla- 
uier,  c'est-à-dire  faire  entendre  l'octave  aiguë  du  son 
qu'on  veut  produire. 

JFilidoii,  hautboïste  né  à  Sienne,  contemporain  de 
Louis  XIII,  qui  l'entendit  avec  admiration,  e^t  le  pre- 
mier qui  soit  mentionné  dans  l'histoire  de  la  musi(|ue 
pour  son  talent  à  jouer  de  son  instrument.  Une  famille 
originaire  de  Parme,  nommée  Bésozzi ,  a  produit  ensuite 
olusieurs  artistes  célèbres  en  ce  genre,  qui  ont  brillé  eu 
Italie,  en  Allemagne  et  en  France,  pendant  toute  la  du- 
rée du  dix-huitième  siècle.  Alexandre  Bésozzi ,  aine  de 
quatre  frères,  vécut  à  la  cour  de  Sardaigne,  et  y  con- 
sacra sa  longue  vie  à  perfectionner  son  talent  et  à  com- 
poser de  bonne  musique  pour  son  instrument.  Antoine 
s'établit  à  Dresde,  et  y  forma  des  élèves  qui  ont  ensuite 
propagé  sa  méthode.  Gaétan  brilla  à  Londres  jusqu'en 
1793.  Charles  Bésozzi,  fils  d'Antoine,  fut  élève  de  son 


cnAP.  xviij.  jr.v  msTntMEHTAL.  213 

père  pour  le  hautbois,  et  le  surpassa  en  habileté.  Knfin 
Jéiômc,  fils  de  Gaêlan,  entra  au  service  tlu  roi  de  France 
en  1769,  et  y  rosia  jiis(|M'à  sa  mort.  Un  liautljnîsle  alle- 
mand, nnmnié  Fischer,  fut  le  rival  des  Iiés'.zzi  ,  cl  par- 
vint à  jouer  du  liaulbois  avec  une  légèreté  et  une  dou- 
ceur inconnues  jusqu'à  lui.  L'école  de  lianlhois  fondée 
eu  Fiance  par  Jérôme  Bcsozzi  a  produit  riainier  et  Sa- 
lenlin.  M.  Vogt,  élève  de  ce  dernier,  se  distingue  main- 
tenant par  une  puissance  d'exéculion  très  reuinrcpinble; 
on  ne  peut  lui  reprocher  que  de  ne  pas  adoucir  assez  le 
son  de  son  instrument.  M.  Brod  ,  élève  de  M.  Voj;f,  a 
éviiéce  défaut  de  son  maître,  et  joue  avec  une  léj^èrelé 
et  un  goùl  parfaits;  mais  il  lomhe  quelciuelois  dans  le 
défaut  contraire  à  celui  de  M.  Vo<;t,  car,  eu  jouant  avec 
douceur,  il  lui  ar:ive  quelqucicis  d'oclavier. 

La  clarinette,  instrument  dont  la  (|ual;lé  de  son  ne 
ressemble  ni  à  la  flûte,  ni  au  hautbois,  est  d'une  grande 
utilité  dans  l'orchestre.  Malheureusement  sa  construc- 
tinin  est  encore  imparfaite  sous  le  double  rapport  de 
la  j.yitesse  et  de  l'égalité  des  sons;  mais  le  talent  de 
l'exécutant  peut  parvenir  à  faire  disparaître  ces  défauts, 
au  moins  en  partie.  Les  clarinettistes  allemands  ont  une 
supériorité  incontestable  sur  les  Fiançais.  Quelques-uns 
de  ceux-ci  se  sont  distingues  par  un  jeu  biiilant,  mais 
ils  n'ont  jamais  pu  af()uérir  le  son  doux  et  velouté  de 
leurs  rivaux  de  rAlleniagne.  Divers  préjugés  les  en  ont 
empêchés;  par  exemple,  ils  font  consister  une  partie 
du  talent  à  tiier  de  leur  instrument  un  son  puissant  et 
volumineux ,  qui  est  incompalilile  avec  la  douceur;  île 
plus,  ils  s'obstinent  à  presser  l'anche  par  la  lèsre  supé- 
rieure, au  lieu  de  l'appuyer  sur  l'inférieure,  qui  est  à 
la  fois  plus  ferme  et  plus  moelleuse.  Joseph  Béer,  vir- 


Î14  Dt  l'exkcltio?;.  stcx.  lU. 

tuose  au  senicedu  roi  de  Prusse,  a  fondé,  dans  la  se- 
conde moitié  du  dix-huilième  siècle,  une  école  de  cla- 
rinette de  laquelle  sont  sortis  pUisieiiis  artistes  remar- 
quables, parmi  lesquels  on  dislinj^ue  Baerniann  ,  qui  s'csl 
fait  entendre  à  Paris  avec  beanconp  de  succès  eu  1818. 
Un  son  doux  et  velouté,  unearticulation  nette  cl  fra:iclie 
dans  les  difûcultés,  et  un  style  plus  élégant  que  celui 
des  autres  clarinettistes  connus,  ont  placé  cet  artiste  au 
premier  rang,  même  en  AUemaj^ne.  M.  Vtillman,  de 
Londres,  est  aussi  un  artiste  d'un  mérite  fort  rare;  enfin 
M.  Berr,  de  l'orchestre  du  théâtre  Italien  ,  se  fait  remar- 
quer par  sa  belle  qualité  de  son  et  le  fini  de  son  exécu- 
tion. 

On  a  vu  '^chap.  XIV)  quels  sont  les  défauts  du  bass')n; 
soit  par  l'inQuence  de  ces  défauts,  soit  par  toute  autre 
cause,  il  a'est  guère  de  bassoniste  qui  ait  mérité  d'être 
cité  pour  un  talent  supérieur.  Ozi  et  Dclcambre  pos.é- 
daient  un  beau  son,  mais  n\an(|!i-iienl  de  goût,  et  ont 
retenu  l'iiislrument  dans  des  Itorues  étroites,  quant  aux 
difficidtés.  Un  Hollandais,  noiinné  Mann,  eut  un  talent 
j)lus remarquable  pour  l'art  de  chanter  et  pour  la  netteté 
du  jeu;  nuiis  il  ne  chercha  point  à  se  faire  connaître  et 
resta  dans  l'obscurité.  Le  réformateur  du  basson  n'est 
point  encore  venu.  £n.  France,  les  bassonistes  ont  un  sq» 
assez  joli,  n»als  dépourvu  d'intensité;  il  n'en  est  pas  dtf 
I  même  en  A-llemagnCi  où  le  son  a  généralement  plus  de 
rondeur. 

Les  instruinens.de  cuivre  sont  fort  difficiles  à  jouer, 
particulièrement  ceux  dont  les  intonations  ne  se  modi- 
fient (|ne  par  le  mouvement  des  lèvres,  comme  le  cor  et 
la  tromjielte.  Ctttc  dilficul.é  est  si  grande  sur  le  cor 
qu'il  a  été  ncccssaiie  de  boii.vr,   po'ir  la  plu,jjiart  des 


CUAl'.    \fill.  Utï.     l.'^iTR.tMtNTAI..  214 

e\èculans,  l'étendue  de  l'éclielle  des  sons  i|u'ib  doivent 
panoiii  ir.Tc^l  arlislc  qui  joue  avec  faiililé  les  sons  graves 
cl  ct'ux  du  médiiiiii  nu  jhmU  parvenir  à  joner  les  sons 
aig,iis,  et  lu'cc  versd.  La  dilatation  consiilérablc  des  lè- 
vres (]ni  est  nccissairc  ponr  les  uns  est  ineompatibleavet: 
la  eontiaction  par  laqiulle  on  exécute  les  autres.  D'ail- 
leurs l'eniboueliure  varie  d'ouverture  à  son  orifice  selon 
la  gravité  ou  l'aigu  des  sous  de  l'instrument.  Pour  les 
sons  graves  il  faut  une  euibouclune  évasée,  et  pour  les 
sons  aigus  il  faut  qu'elle  soit  beaucoup  nioins  ouverte. 
Ces  considérations  ont  fait  diviser  le  cor  en  nreinier  et 
ifco/ul  cor,  que  M.  Dauprat,  professeur  au  Conserva- 
toire, a  nommés  avec  plus  de  justesse  cuf  allu  et  cor 
liasse,  parce  que  le  diapason  de  l'instrument  divisé  de 
cette  manière  a  de  l'analogie  avec  les  voix  de  contraho 
et  de  basse.  Les  artistes  qui  jouent  la  partie  de  cor  a'io 
he  peuvent  jouer  celle  de  cor  basse,  et  réciproqueuient. 
Oulre  les  deux  divisions  du  cor  dont  il  vient  d'èîie 
parlé,  il  en  est  une  autre  à  îacjuelie  on  a  donné  le  nom 
de  vor  tnixtf ,  parce  qu'elle  participe  des  deux  pre- 
mières, sans  alteindîe  aux  extrémités  graves  ou  aiguës 
de  l'une  ou  de  l'autre.  Cette  division  est  celle  où  il  est 
le  plus  lacile  d'acquérir  une  exécution  nette  et  sûre.^ 
parce  qu'elle  s'éloigne  égaienieiU  et  des  inconvénieiis 
d'une  troj'i  grande  dilatation  des  lèvres,  et  de  ceux  d'ure 
contraction  exagérée.  Les  cors  d'orchestre  sont  toujours 
rangés  dans  l'une  ou  l'autre  des  deux  premières  catégo- 
ries; mais  que'ques  cornistes  soios  ont  adopté  la  troi- 
sième. Celle-ci  est  la  n»oins  estimée,  parce  qu'elle  est 
bornée  à  un  petit  non>bre  de  notes,  et  parce  qu'elle  est 
plus  facile  que  les  deux  autres.  Frédéric  Duvcnioy  ,  qui 
a  joui  d'une  grande  réputation,  il  y  a  vinj^l  cinq  ans, 


2!fi  v%  L'KxicuTioN,  »%cr.  lu. 

était  un  cor  mixte;  il nçsorlait  jamais  de  l'étendue  d'un* 
octave  du  tnnh'uin. 

Après  la  (lifliciiilé  d'altaquer  les  sons  avec  netteté  et 
celle  d'exécuter  les  traits  avec  facilité  et  volubililé,  il 
n'en  est  pas  de  plus  grande  que  d'égaliser  la  force  des 
sons  ouverts  et  des  sons  bouchés.  Ceux-ci  sont  presque 
toujours  sourds,  pendant  que  les  autres  ont  de  la  ron- 
deur et  de  l'éclat.  Personne  ne  parait  avoir  possédé  aussi 
Lieu  queM-^^llay  cette  égalité  si  nécessaire.  Il  est  fort 
dnfuile  de  distinguer  dans  son  jeu  ces  deux  espèces  de 
sons,  tant  il  a  d'habileté  sous  ce  rapport.  On  doit  le  pro- 
poser pour  modèle  aux  jeunes  cornistes. 

Après  Hasnpl,  le  premier  corniste  qui  acquit  de  la 
célébrité,  fut  Piuilo,  son  élève,  né  à  Teschen  en  Bohème, 
vers  1755  Cet  artiste,  dont  le  véritable  nom  était  .S//cA, 
qui  signifie  jiijûic  {jjiinlo  en  italien  ,  eut  un  talent  ad- 
mirable pour  tirer  de  beaux  sons  du  coi"  dans  les  notes 
aiguës,  et  pour  exécuter  les  traits  et  le  trille  counne  au- 
rait pu  le  faire  un  violoniste  sur  son  instrument.  Il  se 
servait  habituellement  d'un  cor  d'argent,  qui,  disait-il, 
était  d'une  ((ualilé  de  son  plus  pure  que  ceux  de  cuivre. 
Lebiun,  corniste  français  au  service  du  roi  de  Prusse, 
fut  l'émule  de  Punto  et  l'emporta  sur  lui  dans  l'art  de 
chanter  avec  grâce  sur  s(in  instrument.  Ce  fut  lui  tpn  ,  le 
prei:iii-r,  imagina  de  se  servir  d'une  boite  conique  en 
carton  ,  percée  d'iui  trou  ,  pour  faire  les  effets  d  échos. 
Plusieurs  autres  cornistes  français  se  sont  distingués  par 
des  ipi.ililés  p;;rliruliercs;  j'ai  cité  Duveruoy  et  Gallay; 
ou  peut  ii(im:ner  aussi  Al.  Daupiat,  (pii,  connue  pro- 
fesseur, a  beaucoup  amélioré  l'école  du  cor  au  Conser- 
vatoire, 

Dans  les  orchestres  oo  remarque  souvent  qu'il  arrive 


CHM>.  Wlll.  Ji:U   INSTRUMENTAL.  217 

aux  coniisles  de  maïujuer  leurs  intonations  et  de  faire 
ce  qu'on  uon'.nie  vulj;aiicinent  un  couac  j  ces  accidens 
proviennent  presque  toujours  de  ce  que  l'artiste  néglige 
de  retirer  l'eau  (jui  s'amasse  dans  le  tube  par  l'effet  de 
la  respiration;  la  moindre  bulle  suffit  pour  arrêter  l'air 
au  passage  et  l'cmpèchcr  d'articuler  les  sons.  On  serait 
jBoins  exposé  à  ces  accidens  si  l'on  adoptait  l'usage  des 
cprà  à_pistous. 

La  trompette,  instrument  du  mênia  genre  que  le  cor, 
est  aussi  fort  difficile  à  jouer,  et  les  fautes  que  fait  l'exé- 
cutant y  sont  plus  facilement  senties  ,  parce  que  les  sons 
ont  une  qualité  plus  pénétrante  et  plus  aiguë.  Il  est  sur- 
tout difficile  d'en  jouer  avec  douceur  et  pureté.  Les  ar- 
tistes français  qui  jouent  de  cet  instrument  n'ont  pas  l'ha- 
bileté des  Allemands,  ni  même  des  Anglais.  On  cite  en 
Allemagne  les  deux  Altenburg,  père  et  fils,  qui  furent 
des  virtuoses  de  premier  ordre,  et  beaucoup  d'autres  qui 
exécutent  avec  douceur  et  piécision  des  passages  singu- 
lièrement difficiles.  Quelques  ouvrages  de  Haendeî  con- 
tiennent des  parties  de  trompette  si  difficiles  qu'on  peut 
à  peine  comprendre  comment  on  pouvait  les  jouer  ;  elles 
font  présumer  qu'il  y  eut  en  Angleterre  dans  ce  temps- 
là  quelque  trompettiste  doué  d'un  talent  extraordinaire. 
Aujourd'hui  M.  Harper  se  fait  remarquer  par  l'art  de 
modifier  la  douceur  et  la  force  des  sons,  par  la  précision 
avec  laquelle  il  exécute  les  difficultés,  et  par  l'heureuse 
disposition  de  ses  lèvres  qui  lui  permet  de  monter  sans 
peine  aux  sons  les  plus  aigus. 

Les  instrumens  de  cuivre  dont  les  intonations  se  mo- 
difient par  des  moyens  mécaniques  ,  comme  la  Irompeite 
à  clefs,  les  ophicléides  et  les  trombones,  ont  aussi  leur 
genre  de  difficultés;  mais  ils  ont  l'avantage  de  ne  point 

'y 


218  DE  l'kxécutioi».  skct.  m. 

exposer  rexécutant  à  manquer  ies  noies.  Le  mouvement 
continuel  de  la  coulisse  des  trombones,  et  les  ouver- 
tures des  clefs  des  hornbugles  et  des  ophicléides,  jointes 
à  leur  large  diamètre,  ne  permettent  pas  à  l'eau  de  s'y 
condenser  en  bulles  et  d'empècber  la  colonne  d'air  de 
vibrer  dans  le  corps  de  l'instrument.  Pour  bien  jouer  de 
ces  instrumens,  il  faut  seulement  être  bon  musicien, 
avoir  des  lèvres  fermes  et  une  poitrine  robuste.  Il  y  a 
quelques  artistes  qui  se  distinguent  par  les  tour.s  de  force 
qu'ils  exécutent  sur  le  trombone;  mais  ces  difficultés 
vaincues  sont  plus  singulières  qu'utiles  dans  l'orchestre, 
où  la  place  de  cet  instrument  est  marquée. 

Jusqu'ici  je  n'ai  parlé  que  de  l'exécution  sur  les  ins- 
trumens qui  se  réunissent  en  collection  plus  ou  moins 
nombreuse  dans  les  orchestres  grands  ou  petits  ;  il  me 
reste  à  parler  de  ceux  qui  se  font  le  plus  souvent  en- 
tendre isolément ,  tels  que  l'orgue  ,  le  piano  ,  la  harpe  et 
la  guitare. 

A  l'énoncé  des  difficultés  qui  se  rencontrent  dans 
l'art  déjouer  de  l'orgue,  et  surtout  d'un  grand  orgue,  on 
conçoit  à  peine  (ju'il  se  trouve  des  hommes  assez  bien 
organisés  pour  y  parvenir.  En  effet ,  outre  que  cet  art  se 
compose  d'abord  de  l'articulation  libre  des  doigts  et  des 
règles  du  doigté  comme  pour  les  autres  instrumens  à 
claviers;  outre  que  la  difficulté  se  complique  de  la  ré- 
sistance des  touches,  qui  exigent  quelquefois  chacune 
l'effort  d'un  poids  de  deux  livres  pour  fléchir  sous  le 
doigt,  il  faut  que  l'organisle  apprentie  à  mouvoir  les  pieds 
avec  rapidité  pour  jouer  les  basses  siu'  le  clavier  des  pé- 
dales, lorsqu'il  veut  laisser  à  la  mair  gauche  la  liberté  de 
jouer  des  parties  intermédiaires,  et  cette  double  attea- 
Jion  e^t  fort  pénible;  il  faut  qu'il  sache  se  servir  à  propos 


CH&P.  XVIII.  JEU   INSTRnMSNTAL.  219 

du  mélange  des  claviers ,  les  réunir ,  les  séparer ,  passer 
de  l'un  à  l'anlre  sans  interruption  dans  son  exécution; 
qu'il  <«it  l'intellipence  des  effets  des  différens  jeux  et  du 
g;oùt  pour  inventer  de  nouvelles  condjinaisons  ;  enfin 
qu'il  pnsH'de  à  la  fois  de  la  science  et  du  génie  pour 
traiter  les  chants  de  l'église  avec  majesté,  et  pour  impro- 
viser des  préludes  et  des  pièces  de  tout  genre.  Mille  au- 
tres détails  entrent  encore  dans  les  obligations  de  l'orga- 
niste; par  exemple,  il  faut  qu'il  ne  snit  pas  étranger  à  la 
connaissance  du  plain-  chant,  qu'il  en  sache  déchiffrer 
la  notation,  qui  est  différente  de  la  notation  ordinaire, 
qu'il  sache  les  usages  de  chaque  localité  pour  les  offices 
de  l'église,  et  qu'il  puisse  porter  de  prompts  remèdes 
aux  accidens  momentanés  qui  arrivent  à  son  instrument. 
Lorsqu'on  considère  cette  complication  de  difficultés, 
on  n'est  point  étonné  du  petit  nombre  de  grands  orga- 
nistes qui  se  rencontrent  dans  l'espace  de  trois  siècles, 
c'est-à-dire  depuis  le  seizième  jusqu'au  dix-neuvième. 
L'Italie  et  l'Allemagne  sont  les  pays  qui  en  ont  produit 
le  plus.  On  cite  parmi  les  organistes  italiens  Claude 
Mérulo ,  qui  vivait  à  la  fin  du  seizième  siècle,  les  deux 
Gabrielli ,  ses  contemporains  ,  Antegnati  et  surtout  Fres- 
cobaldi,  qui  brillèrent  depuis  1615  jusque  vers  1640. 
L'Allemagne  a  produit  Froberger ,  de  Kerl ,  Buxtehude  , 
Pachelbel,  Jean-Sébastien  Bach  et  les  élèves  de  celui- 
ci.  La  plupart  de  ces  organistes  se  sont  distingués  par  des 
qualités  particulières;  mais  il  en  est  bien  peu  qui  aient 
possédé  toutes  celles  dont  l'énumération  vient  d'être 
faite;  je  crois  même  que  Jean-Sébastien  Bach  est  le 
seul  ([ui  ait  présenté  ce  phénomène.  Ce  grand  artiste  fut 
un  de  ces  rares  génies  qui  sont  comme  des  phares  placés 
au  milieu  des  siècles  pour  les  éclairer.  Sa  eupériorilé  fut 


220  DE  l'exécutiow.  sect.  m. 

telle,  comme  compositeur  et  comme  exécutant,  qu'il  a 
servi  de  modèle  à  tous  ses  successeurs,  et  que  l'ambition 
de  ceux-ci  a  consisté  à  approcher  de  son  mérite  le  plus 
près  possible,  mais  non  à  l'égaler.  Les  organistes  fran- 
çais ont  presque  tous  manqué  de  savoir  ;  mais  ils  ont  du 
goût  dans  le  choix  de  leurs  jeux  et  dans  l'art  d'en  tirer 
des  effets.  Les  Couperin ,  Calvière  ,  Marchand  ,  Daquin  , 
n'eurent  point  d'autre  mérite;  Rameau  seul  connut  le 
véritable  style  de  l'orgue,  c'est-à-dire  le  style  grave  et 
sévère  qui  convient  à  cet  instrument. 

Le  piano  n'a  guère  d'autre  rapport  avec  l'orgue  que 
celui  d'un  clavier  sur  lequel  on  fait  mouvoir  les  doigts, 
et  les  qualités  d'un  bon  pianiste  ne  sont  nullement  celles 
d'un  organiste.  Le  tact ,  c'est-à-dire  l'attaque  des  tou- 
ches par  des  mouvemens  fermes  et  souples  des  doigts  ,  ce 
tact  indispensable  pour  bien  jouer  du  piano,  ne  res- 
semble point  au  toucher  de  l'orgue,  qui  doit  «tre  4ié_ 
plutôt  que  brillant.  L'une  des  plus  grandes  difficultés  de 
l'art  de  toucher  du  piano  consiste  à  tirer  un  beau  son  de 
l'instrument  par  une  certaine  manière  d'attaquer  les 
touches.   Pour    acquérir  cet  art ,    il    faut   apprendre  à 

I  rendre  nulle  l'action  des  bras  sur  le  clavier  ,  et  à  donner 
aux  doigts  une  souplesse  égale  à  la  force,  ce  qui  de- 
mande beaucoup  d'exercice.  Une  bonne  position  de  la 
main,  et  l'étude  constante  de  certains  traits,  exécutés 
d'abord  lentement  avec  égalité ,  et  successivement  plus 
vite  jusqu'au  mouvement  le  plus  accéléré,  finit  par  don- 
ner cette  souplesse  nécessaire.  Ce  n'est  pas  à  dire  toute- 
fois que  l'art  de  tirer  un  beau  son  du  piano  soit  pure- 
ment mécanique;  il  en  est  de  cet  art  comme  de  tout 
autre;  son  principe  réside  dans  l'ame  de  l'artiste,  et  se 
répand  avec  la  rapidité  de  l'éclair  jusqu'au  bout  de  ses 


CBAP.   XVIII.  JEU   INSTRUMENTAL.  221 

doigts.  On  a  l'inspiration  du  son  comme  celle  de  l'ex- 
pression ,  dont  il  est  un  des  élémens. 

Un  heau  son  et  un  mécanisme  libre  et  facile  sont  les 
conditions  indispensables  d'un  talent  véritable  sur  le 
piano  ;  mais  ce  ne  sont  pas  les  seules.  Il  faut  aussi  du 
goût  pour  savoir  se  tenir  également  éloigné  de  deux  ex- 
cès dans  lesquels  tombent  la  plupart  des  pianistes , 
savoir  :  de  ne  faire  consister  le  mérite  de  toucher  l'instru- 
ment que  dans  l'habileté  de  faire  un  grand  nombre  de 
notes  le  jilus  rapidement  possible ,  ou  de  vouloir  res- 
treindre ce  mérite  au  seul  genre  de  l'expression ,  qui 
n'appartient  pas  naturellement  aux  sons  de  l'instrument. 
C'est  le  mélange  bien  combiné  de  ces  deux  choses  qui 
fait  le  grand  pianiste. 

On  peut  diviser  en  trois  époques  principales  les  varia- 
tions de  goût  c|ue  l'exécution  des  clavecinistes  a  éprou- 
vées. La  première  renferme  le  style  lié,  où  les  doigts 
des  deux  mains  jouaient  à  quatre  ou  cinq  parties  réelles 
dans  un  système  plus  harmonique  que  mélodique;  cette 
époque  finit  à  Jean-Sébastien  Bach  ,  qui  eut  le  plus  beau 
talent  de  ce  genre  qui  ait  existé.  Pour  être  habile  clave- 
ciniste dans  ce  système,  il  fallait  posséder  une  organisa- 
tion forte  sous  le  rapport  de  l'harmonie  ,  et  que  tous  les 
doigts  fussent  également  aptes  à  exécuter  les  difficultés. 
Ces  difficultés,  d'une  espèce  particulière,  sont  si  grandes, 
qu'il  existe  fort  peu  de  pianistes  assez  habiles  de  nos 
jours  pour  bien  jouer  la  nîusique  de  Bach  et  de  Haendel. 
La  seconde  époque,  qui  commence  à  Charles-Emmanuel 
Bach,  est  celle  où,  sentant  le  besoin  de  plaire  par  la 
mél.Qdje,  les  pianistes  commencèrent  à  cpiitter  le  style 
serré  de  leurs  prédécesseurs,  et  introduisirent  dans  leurs 
ouvrages  les  diverses  combinaisons  des  gammes,  (jni  ont 


'222  DE  l'exécution.  sf.ct.  m. 

été  pendant  près  de  soixante  ans  les  types  de  tous  les 
traits  brillans  du  piano.  Les  difficiillés  étaient  bien 
moindres  dans  cette  seconde  manière  que  dans  la  pre- 
mière; aussi  le  mérite  des  pianistes  commeuça-t-il  dès 
lors  à  consister  davantage  dans  l'expression  et  dans  l'élé- 
gance que  dans  les  difficultés  vaincues.  Le  chef  de  celte 
nouvelle  école  fut,  comme  on  vient  de  le  voir,  le  fils  de 
Jean-Sébastien  Bach,  pour  l'Allemagne  ;  après  lui  vin- 
rent Mozart,  3Iûller,  Beethoven  et  Dusseck.  démenti, 
né  en  Italie,  marcha  dans  la  même  route  et  perfectionna 
la  partie  dogmatique  de  l'art  de  jouer  du  piano.  Ses 
élèves  ou  imitateurs.  Cramer,  RIengel  et  (|uel(|ue3  au- 
tres, ont  fermé  cette  seconde  époque.  Sleibelt  fut  un 
pianiste  du  même  temps;  mais  son  talent,  qui  était  réel , 
bien  que  son  mécanisme  fût  incorrect,  fut  d'une  nature 
particulière.  Homme  de  génie,  il  n'avait  songé  à  étudier 
aucun  mai  Ire,  à  imiter  aucun  modèle;  son  jeu,  comme 
sa  musique,  n'appartenait  qu'à  lui.  Ses  désordres  l'ont 
empêché  d'atteindre  à  toute  la  hauteur  de  sa  portée; 
mais,  tel  qu'il  était,  ce  fut  un  artiste  remarquable.  La 
troisième  époque  du  piano  a  commencé  avec  Humme! 
et  IvaJLkbrenner.  Ces  grands  artistes,  conservant  ce  qu'il 
y  avait  de  large  et  de  sage  dans  le  mécanisme  de  l'é- 
cole précédente,  ont  introduit  dans  le  style  du  piano 
un  nouveau  système  de  traits  brillans ,  qui  consiste  dans 
la  dextérité  à  saisir  des  intervalles  éloignés  et  à  grouper 
\  les  doigts  dans  des  traits  harmoniques  indépendans  des 
\ gammes.  Cette  nouveauté,  qui  eût  enrichi  la  musique 
du  piano  si  l'on  n'en  eût  point  abusé,  changea  complè- 
tement l'art  de  jouer  de  l'instrument.  Dès  qu'on  eut  fait 
un  pas  dans  les  hardiesses  de  l'exécution ,  on  ne  s'arrêta 
plus.  Moschelos,  eu  qui  le  truvail  a  développé  la  soi}- 


CHAP.  XVIII.  JEU  INSTRUMENTAI.'  323 

plesse,  la  fermeté  et  l'agilité  des  doigts  jusqu'au  pro- 
dige,   ne   tarda    point   à   affronter  des    difficultés  plus 
grandes  que  celles  dont  Ilumniel  et  Kalkbrenner  avaient 
donné  le  module;   Herz  renchérit  encore  sur  les  sauts 
périlleux  et  le  fracas  de  notes  de  la  nouvelle  école;  à 
l'exemple  de   Moscholès   il  obtint  de  {grands  succès ,  et 
tous  les   jeunes  pianistes  se  mirent  à  la  suite  de  ces  vir- 
tuoses. L'un  de  ces  derniers ,  M.  Schunck ,  a  même  ima- 
giné des  traits   plus  singuliers  encore  et  plus  difficiles 
que  ceux  qu'on  avait  tentés  jusqu'à  lui  ;  enfin  l'art  de 
jouer  du  piano  est  devenu  l'art  d'étonner;  il  s'est  parfai- 
tement assimilé  à  l'art  de  la  danse,  en  ce  qu'il  n'a  plus 
pour  objet  d'intéresser,  mais  d'amuser.  La  pensée  n'est 
presque  plus  rien  dans  le  talent  du  pianiste;  le  méca- 
nisme en  fait  presque  tout  le  mérite.  Toutefois  le  ridi- 
cule de  cette  direction  de  l'art  a  déjà  fi-appé  de  bons  es- 
prits et  des  hommes  d'un  talent  réel;  Moschelès,  plus 
apte  qu'un  autre  à  vaincre  toutes  les  difficultés  de  méca- 
nisme,   s'est  arrêté    dans  cette    roule    et   s'est  attaché 
depuis  quelque  temps  au  genre  expressif  dans  lequel  il 
excelle    maintenant   comme    dans    les   tours   de   force. 
Kalkbrenner  et  Hummel  ont  résisté  au  torrent  ;  il  est 
vraisemblable  qu'ils  auront  à  la  fin  des  imitateurs  ,  et 
que  l'art  de  jouer  du  piano  redeviendra  digne  de  son 
origine. 

Chez  les  Grecs,  les  Romains,  et  en  général  chez  les 
peuples  de  l'antiquité  de  l'Orient  ou  du  Nord,  les  ins- 
trumens  à  cordes  pincées  ont  tenu  la  première  place,  et 
ceux  qui  en  jouaient  avec  habileté  furent  regardés  comme 
les  plus  recommandables  entre  les  musiciens.  Dans  la 
musique  moderne,  ces  instruraens  ont  perdu  leur  préé- 
wiinencCj,  parce  qu'ils  sonl  bornes  daus  leurs  moyens  et 


224  DE  I/EXECUTIO?».  SKCT.   III. 

peu  propres  à  suivre  les  progrès  constans  de  l'art  musi- 
cal. La  harpe  et  la  guitare  sont  les  seuls  inslrumens  de 
celte  espèce  qui  ont  survécu  à  tous  ceux  qui  furent  en 
usage  dans  les  quinzième  et  seizième  siècles.  La  musi- 
que de  harpe  fut  long-  temps  composée  seulement  de 
gammes  et  d'une  sorte  de  traits  qu'on  nomme  aj-pèges. 
Les  mêmes  formes  se  représentaient  sans  cesse,  parce 
que  la  construction  de  l'instrument  ne  permettait  guère 
de  les  varier.  Madame  Krumpholz  sut  cependant  tirer 
parti  d'un  genre  de  musique  si  rétréci ,  et  trouver  des 
accens  expressifs  dans  des  choses  qui  semblaient  y  être 
si  peu  favorables;  le  vrai  talent  donné  par  la  nature 
triomphe  de  tous  les  obstacles.  Vint  ensuite  M.  de  Ma- 
rin, qui  agrandit  le  domaine  de  la  harpe  et  qui  parvint 
à  y  jouer  de  la  musique  d'un  genre  plus  large  que  tout 
ce  qu'on  avait  écrit  pour  cet  instrument  jusqu'à  lui.  Sa 
manière  était  élevée,  son  jeu  passionné,  son  exécution 
puissante  dans  les  difficultés,  et  s'il  ne  fit  pas  davantage 
pour  affranchir  la  harpe  de  ses  entraves,  c'est  qu'il  était 
venu  trop  tôt  pour  profiler  des  avantages  que  présenle 
la  harpe  à  double  mouvement. 

Le  premier  qui  connut  tout  le  parti  qu'on  pouvait  ti- 
rer de  ce  nouvel  instrument,  et  qui  sut  s'en  servir,  fut 
M.  Dizi,  célèbre  harpiste  belge,  qui  a  vécu  long-temps 
à  Londres  et  qui  vient  de  se  fixer  à  Paris.  Ses  études, 
remplies  de  traits  d'un  genre  neuf,  ont  fait  sortir  l'art 
de  jouer  de  la  harpe  des  limites  étroites  où  il  était  re- 
tenu auparavant.  Boc!isa,  qui  vint  après  lui,  n'eut  jamais 
de  netteté  dans  son  exécution  ;  mais  il  donna  une  impul- 
sion brillante  à  son  instrument  par  l'élégance  et  l'éclat 
du  style  de  ses  premières  compositions;  maintenant  il 
n'est  plus  qu'un  harpiste  ordinaire,  et  ses  dernie»"S  ou- 


CHAP.  XVIII.  JEU   INSTRUMENTAL.  225 

vrages  ne  méritent  aucune  estime.  Un  jeune  artiste  fran- 
çais, M.  Théodore  Labarre  et  mademoiselle  Bertrand 
ont  porté  l'exécution  sur  la  harpe  au  plus  haut  point  de 
perfection  qu'elle  ait  atteint  jusqu'ici.  Le  plus  beau  son  , 
le  style  le  plus  élevé,  la  nouveauté  des  traits  et  l'énergie 
sont  les  caractères  distinctifs  de  leur  talent.  Une  gloire 
solide  sera  le  paitage  de  M.  Labarre,  s'il  comprend 
toute  sa  portée  et  s'il  a  le  courage  de  lutter  contre  la 
monotonie  naturelle  de  son  instrument. 

Tout  le  monde  sait  combien  la  guitare  est  bornée 
dans  ses  ressources;  elle  ne  semble  destinée  qu'à  soute- 
nir légèrement  la  voix  dans  de  petites  pièces  vocales  , 
telles  que  les  romances,  couplets,  boléros,  etc.  Mais  quel- 
ques artistes  ne  se  sont  point  tenus  à  ce  faible  mérite; 
ils  ont  voulu  vaincre  les  désavantages  d'un  son  maigre, 
les  difficultés  du  doigté  et  l'étendue  bornée  de  l'échelle 
de  l'instrument.  M.  Carulli  fut  le  premier  qui  entreprit 
d'exécuter  des  difficultés  sur  la  gnitaie  ,  et  qui  y  parvint 
de  manière  à  exciter  l'éîonnement.  M?*i.  Sor ,  Carcassi 
Huerta  et  Aguado  ont  porté  cet  art  à  un  plus  haut  point 
de  perfection;  si  la  guitare  pouvait  prendre  place  dans 
la  musique  proprement  dite,  nul  doute  que  ces  vir- 
tuoses n'eussent  opéré  ce  miracle;  mais  pour  une  sem- 
blable métamorphose  les  obstacles  sont  invincibles. 

§  IL 

De  l'exécutiou  en  général,  et  de  l'exécution  collective. 

Pour  un  musicien  vulgaire  la  musique  n'est  qu'un 
amas  de  notes,  de  dièses,  de  bémols,  de  pauses,  de  sou- 
pirs ;  jouer  juste  et  en  mesure  lui  semble  le  comble  dç 


226  DE  l'exécution.  sect.  m. 

la  perfection;  et  comme  ce  mérite  est  assez  rare,  on  est 
forcé  de  convenir  qu'il  n'a  pas  tort  de  restimer.  Mais 
qu'il  y  a  loin  de  cette  exécution  mécanique,  qui  laisse 
l'anie  de  l'auditeur  dans  l'état  d'inertie  où  se  trouve  celle 
du  symphoniste,  à  l  accord  de  sentiment  qui,  de  proche 
en  proche,  se  communique  des  exéculans  au  public;  à 
ces  nuances  délicates  qui  colorent  la  pensée  du  compo- 
siteur, en  montrent  le  sublime,  et  souvent  lui  prêtent 
des  beautés;  à  cette  expression,  enfin,  sans  laquelle  la 
musique  n'est  qu'un  vain  bruit  ! 

Effet  remarquable  et  qui  prouve  la  puissance  du  vrai 
talent  !  Supposez  un  orchestre  ,  une  troupe  de  chanteurs 
médiocres,  qui,  dans  leur  exécution  terne  ,  laissent  nos 
sensations  en  repos;  qu'un  chef  ardent,  un  musicien 
doué  d'une  organisation  forte,  arrive  au  milieu  d'eux  ; 
tout  à  coup  le  feu  sacré  embrasera  ces  êtres  inanimés; 
la  métamorphose  opérée  dans  un  instant  pourra  même 
être  telle  qu'on  aura  peine  à  se  persuader  qu'on  entend 
les  mêmes  symphonistes,  les  mêmes  chanteurs.  Le  ncc 
plus  ullrà  de  l'effet  musical  ne  peut  avoir  lieu  que  lors- 
que tous  les  exécutans  possèdent  non-seulement  uno 
égale  habileté,  mais  une  semblable  flexibilité  d'organes, 
un  pareil  degré  de  chaleur  et  d'enthousiasme.  De  pa- 
reilles réunions  ont  toujours  été  rares  et  ne  sont  que 
des  exceptions.  La  fameuse  troupe  des  bouffons  de  1  789 
en  a  offert  un  exemple;  depuis  lors  Viotti,  accompagné 
par  madame  de  Montgeroult;  Baillot,  dans  un  trio  joué 
par  lui ,  Rode  et  Lamarre  au  Conservatoire,  ont  donné 
l'idée  d'une  perfection  qu'on  peut  trouver  dans  des  réu- 
nions peu  nombreuses,  mais  à  laquelle  il  est  bien  diffi- 
cile d'atteindre  avec  des  chœurs  ou  des  orchestres  com- 
plets. A  défaut  de  ce  beau  idéal ,  on  se  contente  du  beau 


CHAP.  XVIII.  ORCnESTRES.  227 

relatif,  parce  qu'on  n'en  connaît  point  d'nutre.  C'est, 
comme  je  l'ai  dit,  cclni  qui  rcsnite  de  l;i  réunion  de 
quelques  artistes  du  premier  ordre  à  d'autres  moins  heu- 
reusement organisés.  Tel,  qui  n'a  pas  été  dolépar  la  na- 
ture assez  libéralement  pour  communiquer  de  vives  sen- 
sations à  ce  qui  l'entoure,  est  du  moins  susceptible  d'en 
recevoir;  c'est  ce  qui  explique  les  transformations  su- 
bites qu'on  remarque  dans  les  individus,  selon  qu'ils 
sont  bien  ou  mai  dirigés. 

L'habileté  dans  le  mécanisme  du  chant  ou  dans  le  jeu 
dos  instrumens  est  sans  doute  nécessaire  pour  atteindre 
à  une  bonne  exécution,  mais  elle  ne  suffit  pas.  C'est 
dans  sa  sensibilité,  dans  son  enthousiasme  qu'un  artiste 
trouve  le  plus  de  ressources  pour  émouvoir  ceux  qui 
l'écoutent,  La  dextérité  peut  quelquefois  étonner  par 
ses  prodiges;  mais  l'expression  véritable  a  seule  le  privi- 
lège de  toucher.  Ce  que  j'appelle  expression  n'est  pas 
ce  jeu  grimacier  qui  consiste  à  se  tordre  les  bras,  à  se 
pencher  avec  affectation,  à  agiter  le  corps  et  la  tête, 
so?  te  de  pantomime  dont  quelques  musiciens  font  usage 
et  dont  eux  seuls  sont  dupes  ;  l'expression  véritable  se 
manifeste  sans  effort  par  les  accens  de  la  voix  ou  des 
Instrumens.  Le  musicien  qui  en  a  le  sentiment  le  trans- 
met comme  par  enchantement  de  l'ame  au  gosier,  au 
bout  des  doigts,  à  l'archet,  à  la  corde,  ati  clavier.  Le 
timbre  de  sa  voix,  sa  respiration,  son  toucher  en  sont 
empreints;  pour  lui  il  n'y  a  pas  de  mauvais  instrumens, 
parce  qu'il  améliore  tout  ;  j'oserais  presque  dire  qu'il  n'y 
a  pas  de  mauvaise  musique,  quoiqu'il  soit  plus  sensible 
qu'un  autre  aux  beautés  de  la  composition. 

On  serait  dans  l'erreur  si  l'on  croyait  qu*il  n'y  a  d'ex- 
pvçs^ioii  possible  que  celle  de  la  tristesse  ou  celle  de  I» 


228  DE  l'eXKCCTION.  SECT.    111. 

mélancolie;  chaque  geni'e  a  des  acccns  qui  lui  sont  pro- 
pres; le  talent  consiste  à  s'identifier  au  stjle  dumorceau 
qu'on  exécute,  à  être  simple  dans  la  simplicité,  véhé- 
ment dans  la  passion  ,  avare  d'orneinens  dans  la  musique 
sévère,  brillant  de  fioritures  dans  les  élégantes  folies  à 
la  mode,  et  toujours  grand,  même  dans  les  petites  cho- 
ses. Il  n'est  pas  besoin  de  beaucoup  d'efforts  ou  de  grands 
développemens  pour  nous  procurer  des  émotions  de  di- 
verses espèces;  une  phrase  de  canlabile ,  un  motif  de 
rondo  suffisent.  Que  dis-je?  une  simple  note,  un  ap- 
pogiature  bien  senti ,  un  accent ,  tirent  quelquefois  des 
cris  d'admiration  de  tout  un  auditoire.  Dût-on  m'accu- 
ser  d'exagération ,  je  dirai  même  qu'on  pressent  sou- 
vent le  grand  artiste  à  la  manière  dont  l'archet  attaque 
la  corde  ou  dont  le  doigt  frappe  la  touche  en  s'accor- 
dant.  Je  ne  sais  quelle  émanation  se  répand  alors  dans 
l'atmosphère  pour  annoncer  la  présence  du  talent;  mais 
on  s'y  trompe  rarement.  Je  me  persuade  que  je  serai 
compris  par  quelques-uns  de  mes  lecteurs. 

La  nature  a  placé  dans  tous  les  pays  des  êtres  heureu- 
sement organisés  pour  les  arts;  mais  leur  nombre  diftère 
selon  que  les  circonstances,  le  climat,  ou  d'autres  causes 
difficiles  à  apprécier  sont  plus  ou  moins  défavorables. 
Ainsi,  parmi  les  exécutans ,  la  Fiance  a  produit  Garât, 
Kode ,  Baillot,  Kreutzer,  Duport,  Tulou  et  beaucoup 
d'autres  qu'on  pourrait  citer,  et  qui  rivalisent  avec  les 
plus  grands  artistes  de  l'Italie  ou  de  l'Allemagne;  ce- 
pendant les  dispositions  naturelles  de  la  nation  fran- 
çaise ne  sont  pas  favorables  à  la  musique;  l'état  florissant 
dans  lequel  y  est  cet  art  est  plutôt  le  fruit  de  l'éducation 
que  celui  d'un  goût  inné.  Les  Français  connaissent  la 
perfection  et  la  cherchent;  mais  quoique  leur  goût  soit 


riiAP.  xviii.  oncHKvrRKs.  'J'2Û 

exij^eant,  ils  n'obtieiiDent  pas  toujours  de  bons  résultiit;; 
dans  leur  nuisi(|uc  tl'enscinhlc,  parce  qu'il  n'y  a^tpiat 
d'unité  dans^leur  manière  de  sentir.  Les  Italiens,  au  con- 
traire ,  s'accordent  assez  facilement  de  la  médiocrité; 
on  les  voit  assister  patiemment,  pendant  toute  une  sai- 
son, à  un  mauvais  opéra,  mal  exécuté,  pourvu  qu'il  y  ait 
dans  le  cours  de  la  représentation  une  cavatine,  un  duo, 
un  air,  assez  bien  chantés  pour  les  indemniser  du  reste. 
Mais  ce  peuple,  indifférent  en  apparence  sur  le  mérite 
de  l'exécution,  est  susceptible  d'atteindre  aux  plus  beaux 
effets  d'ensemble  par  l'unanimité  de  sentiment  qui  di- 
rige les  chanteurs  et  les  instrumentistes.  L'expérience 
prouve  que  quatre  ou  cinq  chanteurs  médiocres,  pris  au 
hasard  parmi  les  Italiens,  et  soutenus  par  un  accompa- 
gnateur qui  pourrait  jouer  à  peine  une  sonate  de  Nico- 
laï,  ont  une  verve,  un  brio  qu'on  ne  trouverait  pas  dans 
le  même  morceau  exécuté  par  d'excellens  chanteurs 
français,  et  accompagné  par  un  virtuose,  bien  qu'aucun 
des  Italiens  ne  put  soutenir  la  comparaison  avec  les 
Français  pris  individuellement.  Il  y  a  chez  nous  je  ne 
sais  quelle  distraction  qui  s'oppose,  en  général,  au  con- 
cours d'intentions  nécessaire  pour  obtenir  de  grands 
effets  d'ensemble ,  tandis  que  les  Italiens  sont  évidem- 
ment captivés  par  la  puissance  de  la  musique. 

Il  faut  l'avouer,  ce  que  la  nature  nous  avait  refusé, 
l'éducation  l'a  conquis.  L'institution  du  Conservatoire 
a  fait  faire  d'immenses  progrès  à  la  musique  en  France  ; 
non  qu'il  s'y  soit  formé  de  plus  grands  talens  que  ceux 
qu'on  admirait  avant  son  établissement  ;  car  Rode  , 
Kreutzer,  Baillot,  Duport,  sont  encore  les  modèles  de 
nos  jeunes  artistes;  mais  le  nombre  de  gens  habiles  s'est 
beaucoup  augmenté;  plusieurs  se  sont  dispersés  dans 


230  DR  L  EXÉCUTION.  SECT.   III. 

les  provinces,  y  ont  excité  une  émulation  inconnue  au- 
paravant, et  celles-ci  renvoient  maintenant  en  échange 
dans  la  capitale  des  élémens  de  talens  nouveaux.  L'étude 
de  riiarmonie,  devenue  générale,  commence  à  familia- 
riser les  amateurs  avec  des  combinaisons  qu'on  aurait  à 
peine  supportées  autrefois.  L'organe  auditif  des  exécu- 
lans,  rendu  plus  sensible  par  celte  étude,  saisit  beau- 
coup plus  promptement  les  intentions  du  compositeur, 
(•r  par  cela  seul  ils  s'y  prêtent  davantage  et  les  rendent 
mieux.  Si,  nonobstant  ces  améliorations  ,  l'on  remarque 
souvent  un  défaut  d'ensemble  dans  les  masses,  si  même 
des  artistes  distingués  laissent  à  désirer  dans  l'ensemble, 
c'est ,  ce  me  semble ,  parce  qu'on  ne  porte  point  assez 
d'attention  à  des  dispositions  préliminaires  d'une  grande 
importance,  et  parce  que  certains  préjugés  ont  retenu 
dans  un  état  d'infériorité  des  parties  essentielles  qu'il 
serait  facile  de  perfectionner.  Les  objets  qui ,  dans  l'état 
actuel  des  choses  ,  méritent  le  plus  d'attention,  sont  : 

1    La  disposition  des  orchestres; 

2"  Les  proportions  de  ces  mêmes  orchestres,  soit  à 
l'égard  des  voix,  soit  par  rapport  aux  instrumens  entre 
eux; 

3°  L'exécution  vocale  dans  les  chœurs  et  dans  les 
morceaux  d'ensemble  ; 

4°  L'accompagnement  ; 

5°  L'ensemble; 

Les  orchestres  des  concerts  et  des  représentations 
théâtrales  ne  se  disposent  pas  de  la  même  manière , 
quoiqu'on  n'aperçoive  pas  trop  la  cause  de  cette  diffé- 
rence. La  place  du  chef  y  est  surtout  choisie  d'une  ma- 
nière toute  opposée,  excepté  au  Théâtre  Italien.  Tout  le 
inonde  avoue  qu'il  faut  qu'un  chef  d'orchestre  ait  sous 


CHAP.  XVIII.  ORCHESTRES.  281 

ses  yeux  les  musiciens  qu'il  dirige,  et  néanmoins  l'on 
s'obstine  à  le  placer  près  de  la  rampe;  de  manière  que 
tous  les  iiistriimenlisles  sont  derrière,  et  qu'il  doit  se 
toiuner  pour  les  voir;  c'est  du  moins  ainsi  .[u'on  en  use 
dans  la  |)lupart  de  nos  tliéàlres.  Cependant,  oiilre  l'avan- 
tage qu'il  y  a  pour  un  chef  de  voir  sessubordonnés  pour 
les  surveiller,  exciter  leur  attention  et  les  ramener 
promptement  au  mouvement  qui  a  subi  quelque  altéra- 
tion ,  il  est  aussi  fort  important  que  les  musiciens  puis- 
sent rencontrer  quelquefois  les  yeux  de  celui  qui  les 
dirige  ;  car  le  moindre  signe  de  tête  est  souvent  significa- 
tif,  et  détermine  avec  promptitude  une  intention  d'effet 
qui  est  comprise  à  l'instant  par  tout  le  monde.  D'ail- 
leurs il  est  presque  impossible  qu'un  orchestre  reste  in- 
différent ou  froid  lorsqu'il  voit  son  chef  attentif  et  plein 
d'ardeur.  La  disposition  du  Théâtre-Italien,  et  la  place 
qui  était  occupée  par  M.  Grasset,  rappelaient  à  peu 
près  l'arrangement  du  théâtre  Feydeau ,  à  l'époque  oià  il 
était  dirigé  par  La  Houssaye.  Cette  disposition,  qui 
place  le  chef  vers  l'un  des  côtés  de  la  scène  et  qui  range 
tous  les  musiciens  devant  lui,  est  excellente  quant  à  la 
partie  instrumentale  ;  mais  elle  paraît  moins  heureuse 
en  ce  qui  concerne  le  théâtre,  parce  qu'elle  isole  le  chef 
des  acteurs  et  des  choristes,  et  parce  qu'elle  l'oblige  à 
tourner  la  tête  pour  voir  la  scène.  La  meilleure  disposi- 
tion paraît  être  celle  où  le  chef  d'orchestre  est  placé  en 
face  de  la  scène ,  un  peu  en  arrière  et  au  centre  des 
musiciens,  parce  qu'il  peut  y  voir  d'un  coup  d'œil  et 
les  chanteurs  et  les  symphonistes.  C'est  celle  qu'on  a  re- 
prise au  Théâtre  Italien;  il  est  vraisemblable  qu'on  finira 
par  l'adopter  dans  tous  les  spectacles  lyriques. 

Quant  aux  orchestres  de  concert ,  nul  doute  que  les 


232  DE  l'exécution.  sect.  m. 

pupitres  de  violons  ne  doivent  être  placés  perpendiculai- 
lement  à  la  salle  ,  les  premiers  en  regard  des  seconds, 
les  violes  dans  le  fond ,  et  les  inslrumens  à  vent  en  am- 
phithéâtre avec  les  basses  derrière.  Le  chef,  placé  en 
lèle  des  premiers  violons,  à  la  gauche  du  spectateur,  voit 
sans  peine  tous  les  musiciens  et  en  est  vu  de  même.  La 
disposition  du  concert  philharmonique  de  Londres  sem- 
ble être  faite  à  dessein  pour  empêcher  les  symphonistes 
de  se  voir  et  de  s'entendre.  Les  basses  sont  en  avant,  les 
premiers  violons  derrière,  les  seconds  au-dessus  de  ceux- 
ci  dans  une  espèce  de  galerie ,  les  flûtes  et  hautbois  vers 
le  milieu  ,  lés  bassons  dans  une  galerie  correspondante  à 
celle  ou  se  tiennent  les  seconds  violons  avec  les  altos,  les 
cors  d'un  côté,  les  trompettes  de  l'autre;  enfin  nul  en- 
semble, nul  plan.  Le  chef  d'orchestre^  placé  en  avant 
et  en  face  de  l'auditoire  ,  est  dans  l'impossibilité  de  voir 
les  musiciens  qu'il  dirige.  En  fait  de  musique,  les  An- 
glais font  toujours  le  contraire  de  ce  qu'il  faudrait  faire. 

Les  proportions  des  orchestres  de  théâtres  sont  rom- 
pues depuis  quelques  années;  le  nouveau  système  de 
musique  dramatique,  en  multipliant  les  inslrumens  de 
cuivre,  a  rendu  trop  faible  la  masse  des  instrumens  à 
archet,  notamment  des  violons.  Sans  parler  des  orches- 
tres de  villes  de  province ,  ce  défaut  de  proportion  se 
fait  remarquer  particulièrement  au  théâtre  de  l'Opéra- 
Comique,  où  huit  premiers  et  huit  seconds  violons  ne 
peuvent  lutter  contre  le  son  puissant  de  deux  flûtes, 
deux  hautbois,  deux  clarinettes,  deux  bassons,  quatre 
cors,  deux  trompettes,  trois  trombones  et  timbales. 

Quoi  qu'on  fasse,  les  effets  les  plus  vigoureux,  les 
plus  brillans,  les  plus  variés,  se  trouveront  toujours 
^ans  les  instrumens  à  archet.  Je  suis  loin  de  condamner 


CHAI*,   Wni.  ORGHESTBES.  233 

l'usage  des  autres;  ce  sont  eux  qui  colorent  la  musique, 
et  l'on  ne  peut  disconvenir  que,  malgré  tout  le  génie 
des  anciens  compositeurs,  on  s'aperc^oit  aujourd'hui  que 
cette  ressource  leur  a  manqué.  Leurs  ouvrages  sont 
riches  d'invention  et  de  mélodie,  mais  pauvres  d'effets. 
2ie  bannissons  donc  pas  des  orchestres  les  nouveaux 
moyens  qui  sont  offerts  aux  compositeurs;  mais  faisons 
remarquer  qu'il  est  indispensable  d'augmenter  le  nombre 
des  violons ,  des  violes  et  des  basses.  Ce  n'est  pas  seule- 
ment quand  ils  sont  accompagnés  de  toute  la  masse  des 
instrumens  à  vent,  de  ceux  de  cuivre  et  de  percussion, 
que  les  autres  paraissent  faibles;  l'impression  que  laisse 
tout  ce  bruit  dans  l'oreille ,  quand  il  cesse,  diminue 
l'effet  produit  par  les  instrumens  à  archet.  ï^es  piano  pa- 
raissent maigres  et  dénués  de  son  après  \esJ^orte  formi- 
dables de  tout  l'orchestre.  Vingt-quatre  violons,  huit 
violes  ou  altos,  dix  violoncelles  et  huit  contrebasses, 
sont  nécessaires  pour  faire  équilibre  avec  tous  les  instru- 
mens dont  on  vient  de  voir  l'énumération.  Les  bonnes 
proportions  dans  la  force  sonore  des  diverses  parties  d'un 
orchestre  sont  indispensables  pour  produire  des  effets 
satisfaisans  d'exéculion. 

Il  y  a  trop  souvent  deux  directions  imprimées  à  l'exé- 
cution, lorsque  des  masses  vocales  sont  réunies  à  l'or- 
chestre ,  principalement  au  théâtre.  Rien  de  plus  difficile 
et  de  plus  rare  que  l'unité  de  sentiment  entre  les  chan- 
teuis  et  les  symphonistes,  particulièrement  en  France, 
où  tout  ce  qui  n'est  pas  air  ou  duo  est  considéré  par  les 
acteurs  comme  des  accessoires  de  peu  d'importance.  La 
conscience  d'un  chef  d'orchestre,  son  amour  pour  l'art 
et  son  habileté  viennent  échouer  contre  ce  préjugé  des 
acteurs.  En  vain  cherclie-t-il  à  communiquer   le  tienlj- 

30. 


234  DE  l'exécution.  SECT.  III. 

ment  dont  il  est  animé  aux  musiciens  qu'il  dirige;  en 
vain  veut-il  obtenir  des  nuances  de  piano ,  àe/orte ,  de 
crescendo ,  de  dbninuendo;  les  distractions  des  chan- 
teurs, leur  froideur,  leur  insouciance,  résistent  à  ses  ef- 
forts, font  d'abord  disparate  avec  ce  qui  se  passe  dans 
l'orchestre,  et  finissent  par  y  faire  pénétrer  le  désordre 
et  le  laisser-aller. 

Cependant  quels  résultats  peut-on  espérer  quand  tous 
ceux  qui  concourent  à  l'exécution  d'un  morceau  ne  sont 
pas  animés  du  même  esprit?  L'indifférence,  l'attention 
ou  l'enthousiasme  des  exécutans  rendent  le  public  indif- 
férent, ou  attentif,  ou  enthousiaste;  car  il  y  a  une  action 
réciproque  de  l'auditoire  sur  les  artistes  et  de  ceux-ci  sur 
l'auditoire,  qui  fait  le  charme  ou  le  supplice  des  uns  et 
des  autres.  Que  de  fois  il  est  arrivé  qu'un  virtuose  ayant, 
par  un  accent  heureux  et  inattendu,  arraché  tout  à  coup 
à  ses  auditeurs  un  cri  d'admiration  ,  s'est  senti  lui-même 
comme  transporté  dans  une  sphère  nouvelle  par  l'effet 
qu'il  venait  de  produire,  et  a  découvert  en  lui  des  res- 
sources qu'il  n'y  soupçonnait  pas  auparavant!  C'est  dans 
ces  sortes  d'occasions  que  la  musique  est  un  art  divin  au- 
quel nous  devons  les  plus  vives  jouissances;  mais  hors 
de  cela  ce  n'est  rien.  Que  dis-je?  elle  devient  un  tour- 
ment. Quand  la  musique  n'émeut  pas,  elle  est  insuppor- 
table, et  l'on  est  tenté  de  lui  dire  comme  Fontenelle  à  l;i 
sonate  :  Que  me  veux-tu?  O  vous  qui  désirez  obtenir  des 
succès,  vous  qu'une  louable  ambition  porte  à  vouloir 
sortir  de  la  foule,  ayez  vous-mêmes  la  conviction  de  ce 
que  vous  faites  si  vous  voulez  convaincre  les  autres  ; 
soyez  ému  si  vous  voulez  émouvoir ,  et  croyez  qu'on  n'a 
jamais  excité  dans  autrui  des  impressious  qu'on  ne  res- 
sentait pas! 


CHAP.  XVIII.  ORCHESTl\K5.  285 

Un  chanteur  peut  obtenir  des  applaïulissemens  dans 
nn  air,  une  cavatine,  une  romance,  par  le  seul  fait  de 
son  habileté  dans  le  niéc;niisme  du  chant  ou  parla  beauté 
de  sa  voix;  mais  dans  les  morceaux  d'ensemble  il  faut 
autre  chose.  Chacun  y  perdant  le  droit  de  fixer  rallen- 
lion  sur  lui-même  exclusivement,  concourt  à  transporter 
celte  attention  sur  la  musique,  qui  devient  l'objet  prin- 
cipal; les  individus  s'effacent  pour  ne  laisser  apercevoir 
que  le  tout;  l'ensemble  gagne  ce  que  chacun  perd  en  par- 
ticulier. Les  qualités  premières  d'un  morceau  d'ensemble 
sont  nnp  jii<fp<;>;p  alisnlnp   et  l'unité  de   mesure.  Ce  que 
j'appelle  /a  mesure  n'est  pas  ce  qu'on  décore  ordinaire- 
ment de  ce  nom,  c'est-à-dire  un  à-peu-près  oia  l'on  se 
contente,  pourvu  qu'on  arrive  ensemble  au  temps  frappé; 
mais  un  sentiment  parfait  du  temps  et  du  rhythme,  qui 
se  fait  remarquer  jusque  dans  les  moindres  divisions  et 
dans  les  durées  les  plus  fugitives,  sans  que  cette  exacti- 
tude nuise  à  la  chaleur  ou  à  l'abandon.  Quant  à  la  justesse, 
on    la  régularise  dans  l'orchestre   en   s'accordant  avec 
soin  ;  mais ,  dans  l'ensemble  des  voix ,  elle  peut  être  com- 
promise à  chaque  instant ,  presque  à  chaque  note.  Aussi 
rien  n'est-il  plus  rare  que  d'entendre  exécuter  un  mor- 
ceau d'ensemble  qui  ne  laisse  rien  à  désirer  sous  ce  rap- 
port. Plus  le  nombre  des  voix  est  considérable,  plus  le 
défaut  de  justesse  est  à  craindre  ;  dans  les  chœurs  il  est 
presque  permanent,  surtout  au  théâtre.  Il  y  a  cependant 
quelques  exceptions  d'après  lesquelles  on  peut  juger  de 
l'effet  que  ceux-ci  produiraient  s'ils  étaient  toujours  bien 
exécutés.  On  peut  citer  comme  exemples  les  chœurs  de 
Mocse  aux  premières  représentations,  ceux  de  la  Muetle 
de  Poftici,  de   Guillaume   Tell,    et  quelques-uns  de 
ccu.\  (|u'ua  chaule  ai?  Tliéùtrc-Ikdien.  A.  l'Opéra  -Conii- 


236  LtE    LEXtCLTlON.  SKCT.    III. 

que ,  on  ne  trouve  ni  soin  ,  ni  justesse ,  ni  ensemble  parmi 
les  choristes.  Dans  l'Institution  royale  de  Musique  reli- 
gieuse dirigée  par  31.  Choron  ,  on  entendait  des  chœurs 
qui  approchaient  quelquefois  de  la  perfection. 

Les  proportions  qu'il  faut  donner  aux  voix  dans  les 
chœurs  ont  été  l'objet  des  recherches  de  plusieurs  maîtres 
de  chapelle.  On  conçoit  qu'elles  peuvent  varier  à  l'infini 
comme  les  masses.  Je  suppose,  pour  prendre  un  terme 
moyen  à  peu  près  semblable  à  celui  de  nos  théâtres, 
qu'il  soit  question  d'un  chœur  de  soixante  voix.  Dans 
l'ancien  système  on  l'aurait  divisé  comme  il  suit  : 
1°  Vingt-quatre  dessus  ou  soprani;  2°  dix  hautes- 
contres;  3°  douze  ténors;  4"  quatorze  basses.  Mais  la 
rareté  des  voix  de  haute-contre,  qui  ne  sont  qu'un  cas 
particulier  du  ténor,  a  produit  depuis  vingt  ou  vingt-cinq 
ans  des  changemens  remarquables  dans  la  disposition 
des  chœurs.  Au  lieu  de  hautes-contres  on  a  des  seconds 
dessus,  autrement  dits  mezzo  soprano  ou  contralto. 
Rossini  et  tous  ses  imitateurs  ont  divisé  la  partie  de  ténor 
en  deux ,  en  sorte  que  tous  les  chœurs  sont  maintenant 
écrits  à  cinq  parties;  il  en  est  résulté  qu'il  a  fallu  aug- 
menter le  nombre  des  ténoristes ,  parce  qu'ils  auraient 
été  trop  faibles  dans  l'ancienne  proportion,  étant  divisés 
en  deux  parties  distinctes.  Le  contraire  a  eu  lieu  pour 
les  dessus;  car  l'obligation  de  former  une  partie  de 
contralto  sans  augmenter  le  nombre  des  voix,  pour  se 
conformer  au  budget  des  théâtres,  a  fait  diminuer  le 
nombre  des  dessus,  et  l'on  a  établi  la  proportion  sui- 
vante :  1°  Seize  dessus  ou  so]>rani  ;  2°  douze  contralli  ; 
3°  dix  premiers  ténors  ;  4*  dix  seconds  ténors  ;  5°  douze 
basses.  On  conçoit  que  tout  cela  n'est  pas  invariabie  , 
car  la  qualité   des  voix  a  beaucoup  d'inQuence  sur  Its 


CHAI'.   XVIII.  ORCHESTRES.  337 

proportions.  Il  se  peut  que  les  dessus  ou  les  ténors  soient 
trop  biillans  pour  les  confralti,  on  que  les  basses  étouf- 
fent les  sons  des  ténors.  Eu  général  ce  sont  ceux-ci  qui 
sont  les  plus  faibles. 

Tel  chanteur,  dont  la  voix  est  faiblement  timbrée, 
peut  racheter  ce  désavantage  dans  un  air  ou  dans  un  duo 
par  la  bonté  de  sa  méthode  et  de  son  goût  ;  mais  dans  un 
morceau  d'ensemble  rien  ne  peut  tenir  lieu  de  voix  so- 
nores. Avec  des  voix  faibles  il  n'y  a  point  d'effet  à  es- 
pérer. A  rOpéra-Comique,  par  exemple,  Ponchard  et 
madame  Rigaut  étaient  des  chanteurs  excellens  dont  le 
goût,  la  méthode  et  la  brillante  vocalisation  se  faisaient 
remarquer  dans  les  airs,  les  romances,  les  cavatines  et 
les  duos,  mais  leurs  voix  manquaient  de  mordant  et  de 
force  dans  les  morceaux  d'ensemble.  Ces  sortes  de  mor- 
ceaux sont  toujours  ceux  qui  produisent  le  plus  d'effet 
au  Théâtre-Italien  ou  à  l'Opéra  ;  mais  sur  la  plupart  des 
autres  théâtres  lyriques  de  France  ils  sont  la  partie  la  plus 
faible  de  l'exécution. 

Malgré  les  progrès  que  la  musique  a  faits  parmi  nous 
depuis  quelques  années ,  le  public  conserve  toujours 
quelque  chose  de  son  penchant  pour  la  chanson;  caries 
Français  sont  naturellement  plus  chansonniers  que  mu- 
^  siciens.  Les  rondes,  les  romances,  les  couplets  sont  ce 
qu'on  applaudit  le  plus  dans  les  opéras-comiques  ;  ce 
goût  est  à  la  fois  la  cause  et  l'effet  du  mal  qui  vient 
d'être  signalé.  Avec  cette  habitude  de  petites  proportions, 
on  ne  songe  point  à  ce  qu'il  y  a  d'élevé  dans  les  arts;  le 
mesquin  d'une  composition  entretient  le  laisser-aller 
d'une  exécution  mesquine  ,  et  celle-ci  s'oppose  à  l'éman- 
cipation de  l'intelligence  musicale  du  public.  N'en  dou- 
tons pasj    c'est  là  le   mal  radical  de   l'opéra-coraique 


Î38  DE  l'exécctiok.  sect.  m. 

français.  Il  ne  prendra  le  rang  qu'il  doit  tenir  dans 
l'art  musical  que  lorsqu'une  réforme  complète  de  son 
système,  qui  est  encore  jusqu'à  un  certain  point  celui  de 
la  comédie  à  ariettes,  sera  faite ,  et  lorsqu'à  un  air  bien 
chanté  succédera  un  quintette  ou  un  sestetto  tels  que 
ceux  qui  produisent  tant  d'effet  dans  le  Barbier  de  Sé~ 
ville,  la  Cenerentola  ou  la  Gazza  Ladra  ,  et  que  nos 
acteurs  auront  appris  à  les  chanter  avec  l'ensemble,  la 
verve  et  le  soin  des  Italiens.  Une  semblable  réforme  s'est 
opérée  à  l'Opéra;  on  peut  juger  par  le  bien  qui  en  est 
résulté  de  ce  qui  arriverait  à  l'Opéra-Comique. 

Il  V  a  d'excellens  orchestres  en  France;  il  pourrait 
V  en  avoir  davantage  avec  les  élémens  qu'on  possède. 
Dans  la  symphonie  les  musiciens  français  n'ont  point  de 
rivaux,  surtout  pour  la  verve  et  la  vigueur.  Cette  verve 
les  entraîne  seulement  quelquefois  à  donner  trop  de  rapi- 
dité aux  mouvemeus  vifs,  ce  qui  nuit  à  la  perfection  des 
détails;  mais  ils  rachètent  ce  défaut,  facile  à  corriger, 
par  tant  de  qualités,  qu'ils  n'en  ont  pas  moins  de  droits 
à  occuper  la  première  place  parmi  les  symphonistes  du 
reste  de  l'Europe,  lorsqu'ils  sont  bien  dirigés.  On  sait 
quelle  réputation  s'était  faite  l'orchestre  composé  des 
élèves  du  Conservatoire  dans  les  exercices  de  cet  établis- 
sement ;  la  supériorité  de  cet  orchestre  sur  tous  les  autres 
est  encore  devenue  plus  incontestable  dans  les  nouveaux 
concerts  de  l'École  royale.  Celte  supériorité  est  due  prin- 
cipalement au  rare  talent  de  M.  Habeneck,  le  meilleur 
directeur  de  concerts  qui  ait  peut-être  jamais  existé. 

Sous  le  rapport  de  l'accompagnement  du  chant ,  on 
faisait  autrefois  à  cet  orchestre,  et  en  général  à  tous  ceux 
de  la  France,  le  reproche  de  jouer  trop  fort  et  de  négliger 
les  nuances  :  ce  reproche  a  cessé  d'être  mérité.  Il  y  a 


CHAP.  XVIII.  OUCHESTRES.  239 

même  depuis  quelques  aiiuiies  une  délicatesse  remar- 
quable dans  la  manière  d'accompagner  des  orchestres  de 
l'Opéra  el  de  l'Ecole  royale  de  Musique.  Celui  du  Théâtre- 
Italien  a  perdu,  il  est  vrai,  quelque  chos^  de  sa  légè- 
reté et  de  son  ensemble;  mais  cela  tient  à  des  circons- 
tances particulières  qui  peuvent  disparaître  d'un  instant 
à  l'autre,  et  qu'il  est  inutile  d'examiner  d'ici,  parce 
qu'elles  n'ont  point  de  rapport  avec  l'état  actuel  de  l'art. 
Tout  en  accordant  aux  orchestres  qui  viennent  d'être 
cités  de  justes  éloges  sur  l'effet  général  de  leur  exécution, 
on  ne  peut  dissimuler  qu'il  est  une  foule  de  nuances  qu'ils 
négligent,  et  qui  pourraient  ajouter  beaucoup  à  l'effet 
des  morceaux.  Par  exemple,  les  piano  et  \e^  forte  ne 
sont  que  bien  rarement  le  maximum  de  ce  que  devraient 
être  ces  nuances;  les  uns  ne  sont  pas  assez  doux,  les 
autres  pas  assez  forts.  Lorsque  le  passage  de  l'un  à  l'autre 
de  ces  effets  n'est  pas  rempli  par  un  crescendo  ^  il  fau- 
drait que  leur  succession  fût  beaucoup  plus  tranchée 
([u'elle  ne  l'est  ordinairement,  ce  qui  ne  peut  avoir  lieu 
qu'en  portant  à  l'excès  le  caractère  de  chacun  d'eux.  Le 
crescendo  et  le  decrescendo  sont  encore  des  nuances  qui 
laissent  souvent  beaucoup  à  désirer,  parce  qu'elles  ne 
s'exécutent  pas  d'une  manière  assez  graduée.  Souvent  on 
hâte  trop  le  renflement  du  son ,  et  la  fin  de  l'effet  se 
trouve  affaiblie  et  manquée  ;  d'autres  fois  ce  renflement  se 
fait  trop  attendre,  en  sorte  qu'on  n'obtient  qu'un  demi- 
crescendo,  dont  l'effet  est  vague  et  peu  satisfaisant; 
enfin  il  arrive  que  le  crescendo  se  fait  inégalement  et 
sans  ensemble.  Tous  ces  défauts  se  remarquent  aussi 
dans  le  decrescendo.  Ln  bon  chef  peut  les  éviter;  son 
geste,  son  regard,  sont  des  indications  sûres  pour  les 


240  DE  l'kxécuttox.  sect.  tïi. 

musiciens;  tout  dépend  du  plus  ou  moins  de  sensibilité 
de  ses  organes,  de  son  intelligence  et  de  son  savoir. 

Une  certaine  nonchalance  naturelle  fait  que  les  exé- 
cutons donnent  généralement  peu  d'attention  à  la  valeur 
réelle  des  notes;  rarement  on  rend  cette  valeur  comme 
elle  est  écrite.  Par  exemple,  dans  les  mouvemens  un  peu 
vifs,  une  noire  suivie  d'un  soupir  s'exécute  comme  une 
blancheparun  grand  nombredemusiciens;  et  cependantla 
différence  est  très  notable  pour  l'effet,  bien  qu'elle  soit 
indifférente  pour  la  mesure.  Ces  sortes  de  faute  se  mul- 
tiplient à  l'inGni,  et  l'on  en  tient  peu  de  compte;  néan- 
moins, elles  nuisent  beaucoup  à  la  netteté  des  percep- 
tions du  public.  Pour  sentir  la  nécessité  de  s'en  abstenir, 
les  exéculans  devraient  se  souvenir  qu'ils  sont  appelés  à 
rendre  les  intentions  des  auteurs  sans  aucune  modifica- 
tion :  l'exactitude  est  non-seulement  un  devoir,  elle  est 
aussi  un  moyen  fort  commode  de  contribuer,  chacun  en 
ce  qui  le  concerne  ,  à  une  exécution  parfaite. 

Les  belles  traditions  de  l'école  française  de  violon 
ont  donné  naissance  à  un  genre  de  beauté  d'exécution 
qui  était  autrefois  inconnu  :  je  veux  parler  de  la  régu- 
larité des  mouvemens  d'archet  qu'on  remai-que  main- 
tenant parmi  tous  ceux  qui  jouent  la  même  partie;  régu- 
larité qui  est  telle  que,  sur  vingt  violonistes  qui  jouent 
le  même  passage,  il  n'y  a  pas  la  plus  légère  différence 
dans  le  temps  où  l'archet  est  tiré  et  poussé.  Si  l'on  exa- 
mine attentivement  tous  ces  violonistes,  on  verra  tous 
les  archets  suivre  un  mouvement  uniforme,  comme  si  le 
tiré  et  le  poussé  étaient  indiqués  par  des  chiffres.  Le  pu- 
blic ne  remarque  pas  ces  choses  et  ne  doit  pas  les  voir; 
mais  il  en  éprouve  le  résultat  à  sou  insu;  car  il  y  a  un  ac- 


t  HAP.    XVIII.  ORCHKSTBKS.  2'll 

i-ent  différent  de  l'archet  près  de  la  Iiausse  ou  près  dt- 
la  pointe.  Ce  qui  détermine  le  choix  du  poussé  ou  du 
tiré  est  d'abord  un  instinct  irréfléchi;  mais  l'observation 
régularise  ensuite  ce  qu'elle  a  reconnu  bon  et  avantageux. 

Il  Y  a  dans  toutes  ces  remarques  bien  des  faits  minu- 
tieux; mais  c'est  de  l'attention  plus  ou  moins  scrupu- 
leuse qu'on  leur  accorde  que  dépend  souvent  le  succès 
d'un  morceau  ou  même  d'un  opéra.  Le  musicien  qui  aime 
son  art  ne  les  néglige  pas,  parce  qu'il  y  trouve  du  charme. 
Tel  est  le  secret  d'une  bonne  exécution  :  aimer  la  musique 
«m'on  joue  ou  chante,  s'y  complaire,  s'en  occuper  à 
l'exclusion  de  tout  autre  objet  et  y  intéresser  sa  con- 
science, voilà  ce  que  fait  l'artiste  qui  a  le  sentiment  de 
sa  vocation.  On  dit  que  cette  conscience  n'accompagne 
p'is  toujours  le  talent;  je  crois  cependant  qu'elle  en  est 
le  signe.  On  contracte  l'habitude  d'une  attention  scru-. 
puleuse  comme  celle  du  laisser-aller;  tout  dépend  des 
circonstances  où  l'on  se  trouve  et  de  la  place  qu'on 
occupe.  Tel  musicien  qui  n'est  qu'un  croquenote  en 
j)rovince  devient  un  homme  habile  à  Paris ,  par  cela 
seul  qu'on  exige  davantage  de  lui.  Ce  qui  a  lieu  pour  les 
individus  arrive  aussi  dans  des  réunions  nombreuses. 
Un  orchestre  est  excellent;  confiez -le  à  un  chef  inhabile, 
eu  peu  de  temps  il  deviendra  l'un  des  plus  mauvais  qu'on 
puisse  entendre.  On  a  plus  d'un  exemple  de  semblables 
métamorphoses. 

Une  dernière  observation  sur  ce  qui  concerne  l'exé- 
cution. Il  est  rare  qu'un  auteur  soit  satisfait  de  la  ma- 
nière dont  on  rend  son  ouvrage;  presque  jamais  ses 
intentions  ne  sont  complètement  senties;  il  en  résulte 
qu'on  entend  rarement  la  musique  dans  toute  sa  puis- 
sance. Quand    un  compositeur  dit  qu'il  est  satisfait,  ce 


242  »i  l'exécutiow.  sect.  m. 

n'est  que  relativement  et  dans  la  persuasion  qu'il  ne 
pourrait  obtenir  davantage.  Il  y  a  cependant  des  momens 
d'inspiration  où  les  exéculans  vont  au-delà  de  la  pensée 
du  compositeur;  alors  la  musique  atteint  le  plus  haut 
degré  de  sa  puissance;  mais  de  telles  circonstances  sont 
bien  rares. 


QUATRIÈME  SECTION. 

COMMENT    ON     ANALYSE    LES    SENSATIONS     PRODUITES    PAR    LA 

MUSIQUE,  rouR  i'Ortjlr  des  jugemens  sur  celle-ci. 


CHAPITRE  XIX. 

Des  préjugés  des  ignorans  et  de  ceux  des  savans  en  musique. 

Il  est  plus  d'un  degré  dans  l'ignorance  des  arts.  Le 
premier  est  incurable;  c'est  celui  qui  consiste  dans  la 
répugnance  qu'ils  inspirent  :  celui-là  est  le  plus  rare. 
Les  individus  nés  dans  une  classe  obscure  et  loin  du 
séjour  des  villes  sont  au  second  degré;  leur  ignorance 
est  absolue,  mais  leur  rapport  négatif  avec  les  arts  peut 
n'être  qu'instantané  et  ne  suppose  pas  nécessairement 
de  l'aversion  pour  eux.  Au  troisième  degré  est  placé  le 
peuple  des  cités,  qui  ne  peut  faire  un  pas  sans  se  trouver 
en  contact  avec  les  résultats  de  la  musique,  de  la  pein- 
ture ou  de  l'architecture,  mais  qui  n'y  prête  qu'une 
attention  légère,  et  qui  n'en  remarque  ni  les  défauts  ni 
les  beautés,  quoiqu'il  finisse  par  en  recevoir  de  certaines 
jouissances  irréfléchies.  Les  gens  du  monde,  tous  ceux 
qu'une  éducation  libérale  et  une  position  aisée  mettent 
à  même  de  voir  beaucoup  de  tableaux  et  d'entendre 
souvent  de  la  musique,  n'acquièrent  pas  précisément 
du  savoir,  mais  finissent  par  avoir  des  sens  exercés  qui, 
jusqu'à  certain  point,  leur  tiennent  lieu  d'instruction. 
Si  l'on  excepte  les  individus  de  la  seconde  classe,  qui 


244  SENSATIONS  MUSICALES.  SECT.   IV. 

n'ont  point  d'occasions  de  sortir  de  leur  ignorance  ab- 
solue sur  des  choses  qui  ne  sont  point  en  rapport  avec 
leurs  besoins,  il  ne  se  trouvera  dans  les  autres  catégories 
que  des  gens  qui  s'empresseront  de  prononcer  sur  les 
sensations  qu'ils  reçoivent  des  arts  ,  comme  si  ces  sen- 
sations devaient  être  la  règle  de  tous,  et  comme  si  ces 
individus  possédaient  les  lumières  nécessaires  pour  dé- 
velopper et  appuyer  leur  opinion.  Remarquez  que  per- 
sonne ne  dit  :  Ceci  me  plaît  ou  ceci  me  déplaît;  on 
trouve  plus  convenable  et  plus  digne  de  dire  nettement  : 
Ceci  est  bon  ou  ceci  ne  vaut  rien.  Il  n'y  a  pas  jusqu'aux 
êtres  assez  malheureusement  organisés  pour  être  insen- 
sibles à  ces  arts  que  la  nature  nous  a  donnés  pour  adoucir 
nos  peines,  qui  n'aient  aussi  leur  avis  sur  les  objets  de 
leur  antipathie  et  qui  ne  le  disent  avec  assurance.  Ils  ne 
se  dissimulent  pas  que  leur  état  normal  présente  quelque 
chose  d'incomplet  et  d'humiliant;  mais  ils  se  vengent  en 
affectant  du  mépris  pour  les  choses  qui  ne  sont  point  à 
leur  portée ,  et  même  pour  ceux  qui  y  sont  sensibles.  A 
l'égard  du  peuple,  il  a  aussi  son  avis  et  l'exprime  à  sa 
manière.  Ce  ne  sont  point  les  délicatesses  des  arts  qui  le 
touchent;  il  ne  connaît  de  ceux-ci  que  certaines  parties 
grossières.  Par  exemple,  l'imitation  plus  ou  moins  exacte 
des  objets  matériels  est  à  peu  près  tout  ce  qui  le  frappe 
en  peinture;  ce  qu'il  admire  dans  une  statue,  c'est 
qu'elle  soit  de  marbre;  ce  qu'il  aime  en  musique,  ce 
sont  les  chansons  et  les  airs  de  danse.  On  ne  discute 
guère  avec  ces  deux  classes  d'individus;  les  gens  du 
monde  se  moquent  de  la  première  et  dédaignent  l'autre. 
Les  disputes  n'ont  lieu  que  dans  le  monde  sensible  et 
bien  élevé,  qui  prend  ses  préjugés  pour  ses  opinions  et 
celles-ci  pour  la  vérité, 


tJHAP.    XI\.  l'Rj'jUGÉS.  245 

Quiconque  cesse  d'être  en  bonne  santé  n'a  pas  besoin 
de  savoir  le  nom  ni  la  cause  de  sa  maladie  pour  être 
certain  qu'elle  existe  ;  la  sensation  du  mal  l'avertit  suf- 
fisamment. Il  en  est  de  même  de  la  musique.  Il  n'est 
point  nécessaire  de  savoir  comment  on  l'écrit  ni  com- 
ment on  la  compose  pour  avoir  la  conviction  du  plaisir 
qu'elle  fait  éprouver  ou  de  l'ennui  qu'elle  cause.  Mais 
s'il  faut  avoir  étudié  la  médecine,  vu  beaucoup  de  ma- 
lades, fréquenté  les  hôpitaux,  et  perfectionné,  par  l'ob- 
servation et  la  comparaison,  Taptitude  à  reconnaître  les 
symptômes  des  maladies,  pour  décider  de  leur  gravité  et 
des  remèdes  qu'on  peut  y  apporter,  on  doit  convenir 
qu'il  n'est  pas  moins  nécessaire  d'avoir  appris  les  élé- 
mens  de  l'art  musical,  d'avoir  étudié  toutes  ses  ressour- 
ces, les  variétés  de  ses  formes,  et  de  savoir  discerner  les 
défauts  de  l'harmonie,  du  rhythme  et  de  la  mélodie,  pour 
être  en  état  de  prononcer  sur  le  mérite  d'une  composi- 
tion. De  même  qu'on  se  borne  à  énoncer  le  mal  qu'on 
ressent  en  disant  :  Je  souffre ,  on  doit  dire  seulement  : 
Cette  musique  me  plaît,  ou  ne  nC  est  pas  agréable. 

Ou  serait  moins  disposé  à  donner  d'un  ton  tranchant 
son  avis  sur  la  musique  si  l'on  i-emarquait  qu'on  en 
change  plus  d'une  fois  dans  le  cours  de  la  vie.  Qu'on 
me  montre  celui  qui  n'a  point  abjuré  ses  premières  ad- 
mirations pour  se  livrer  à  de  nouvelles ,  et  qui  ne  soit 
au  moment  de  renoncer  à  celles-ci  pour  des  choses  qui 
d'abord  lui  étaient  antipathiques.  Que  de  partisans  for- 
cenés des  ouvrages  de  Grétry,  qui  d'abord  repoussèrent 
avec  horreur  les  brillantes  innovations  rossiniennes,  et 
qui  par  la  suite  ont  oublié  leurs  vieilles  prédilections  et 
leurs  nouvelles  antipathies  au  point  de  devenir  les  plus 
ardens  défenseurs  du  rossinisme  !  Comment  pourrfiit-îl 


246  SENSATIONS  MUSICALES.  SECT.   IV. 

en  être  autrement?  Les  arts  appartiennent  à  la  perfecti- 
bilité humaine  et  doivent  en  suivre  la  marche  ascen- 
dante; les  choses  et  les  événemens  changent  :  on  est 
donc  forcé  de  changer  aussi.  D'ailleurs  l'éducation  plus 
ou  moins  avancée,  l'habitude  d'entendre  certaines  choses 
et  l'ignorance  où  l'on  est  à  l'égard  de  certaines  autres, 
doivent  modifier  les  opinions  et  la  manière  de  les  sentir. 
On  voit  donc  que  c'est  à  tort  qu'on  se  prononce  d'une 
manière  si  positive  qu'on  le  fait  habituellement,  puis- 
qu'on est  exposé  sans  cesse  à  se  contredire.  En  général 
on  se  presse  trop  de  conclure. 

Les  artistes,  les  savans  en  musique  ou  en  peinture,  ne 
sont  pas  plus  exempts  de  préventions  et  de  préjugés  que 
lesignorans;  seulement  ces  préventions  et  ces  préjugés 
sont  d'une  autre  espèce.  Il  n'est  que  trop  ordinaire  d'en- 
tendre les  musiciens  soutenir  sérieusement  qu'eux  seuls 
ont  le  droit,  non-seulement  de  juger  la  musique,  mais 
même  de  s'y  plaire.  Etrange  aveuglement,  qui  fait  qu'on 
croit  honorer  son  art  en  limitant  sa  puissance!  Eh!  que 
seraient  la  peinture  ou  la  musi(|ue,  si  ces  arts  n'étaient 
qu'une  langue  mystérieuse  qu'on  ne  pût  entendre  qu'a- 
près avilir  été  initié  dans  leurs  signes  hiéroglyphiques?  A 
peine  mériteraient-ils  qu'on  voulût  les  étudier.  C'est  parce 
que  la  musique  agit  presque  universellement  et  de  di- 
verses manières,  quoique  toujours  vaguement,  que  cet 
art  est  digne  d'occuper  la  vie  d'un  artiste  heureusement 
organisé.  Si  son  action  se  bornait  à  intéresser  seulement 
un  petit  nombre  de  personnes,  où  serait  la  récompense 
de  longues  études  et  de  plus  longs  travaux?  Autre  chose 
est  de  sentir  ou  de  juger.  Sentir  est  la  vocation  de  l'es- 
pèce humaine  entière;  juger  appartient  aux  habiles. 

Mais  il  ne  faut  pas  que  ceux-ci  se  persuadent  que  leurs 


CHAP.  XIX,  PRÉJUGÉS.  247 

jiigemens  sont  toujours  irréprochables;  l'amour-propre 
blessé,  l'opposition  d'intérêt,  les  inimitiés,  les  préven- 
tions d'éducation  et  de  nation,  sont  des  causes  qui  les  vi- 
cient souvent.  L'ignorance  est  du  moins  exempte  de  ces 
faiblesses,  dont  les  artistes  et  les  savans  ne  se  défient 
pas  assez.  Il  y  a  tant  d'exemples  d'erreurs  occasionnées 
par  elles  que  l'on  devrait  toujours  s'abstenir  de  juger 
avant  d'avoir  examiné  sa  conscience  et  d'avoir  écarté  de 
son  cœur  et  de  son  esprit  tout  ce  qui  peut  paralyser  l'ac- 
tion de  l'intelligence.  Que  de  palinodies  on  éviterait 
avec  cette  sagesse  ! 

Il  est  une  classe  intermédiaire  entre  l'homme  qui  s'a- 
bandonne simplement  à  des  sensations  épurées  par  l'é- 
ducation et  l'artiste  philosophe;  c'est  celle  qu'on  pour- 
rait appeler  des  jugeurs.  Ce  sont  d'ordinaire  les  littéra- 
teurs qui  se  chargent  de  cet  emploi,  bien  qu'ils  n'y  soient 
pas  plus  aptes  que  tout  homme  du  monde  dont  les  sens 
ont  été  perfectionnés  par  l'habitude  d'entendre  ou  de 
voir.  A  l'air  d'assurance  dont  ils  donnent  chaque  malin 
leurs  théories  musicales  dans  les  journaux,  on  les  pren- 
drait pour  des  artistes  expérimentés,  si  leurs  bévues  mul- 
tipliées ne  montraient  à  chaque  instant  leur  ignorance 
du  but,  des  moyens  et  des  procédés  de  l'art.  Ce  qu'il  y  a 
de  plaisant,  c'est  que  leurs  opinions  sont  complètement 
changées  depuis  dix  ans,  et  que  leur  langage  est  aussi 
superbe  que  s'ils  avaient  eu  une  doctrine  invariable. 
Avant  que  Rossini  fût  connu  en  France,  avant  qu'il  eût 
obtenu  ses  grands  succès,  on  ne  cessait  de  s'élever  contre 
la  science  en  musique,  c'est-à-dire  contre  l'harmonie, 
contre  l'éclat  de  l'instrumentation  qui  brillait  aux  dépens 
de  la  mélodie  et  delà  vérité  dramatique,  et  l'on  débitait 
sur  tout  cela  autant  d'erreurs  que  de  mots.  Aujourd'hui 


248  SENSATIONS  MUSICALES.  SKCT.   IV. 

tout  est  changé;  les  savans  de  journaux  ont  pris  la  mu- 
sique de  Rossini  pour  de  la  musique  savante,  et  depuis 
ce  temps  chacun  s'est  mis  à  affecter  un  langage  scienti- 
fique dont  on  ne  comprend  pas  les  élémens.  On  ne  parle 
plus  que  déformes  de  l'orchestre,  de  modulations^  de 
strettes,  etc.  ;  et  sur  tout  cela  on  bâtit  des  systèmes  de 
musique  aussi  sensés  que  ceux  d'autrefois.  La  seule  dif- 
férence que  j'y  trouve  c'est  qu'au  lieu  de  proclamer  les 
opinions  qu'on  se  forme  comme  des  principes  généraux, 
on  s'est  fait  une  espèce  de  poétique  de  circonstance  qu'on 
applique  selon  les  cas  et  les  individus;  de  celte  manière 
on  croit  éviter  les  contradictions.  Mais  les  préventions 
favorables  ou  contraires,  les  sollicitations,  les  haines  on 
les  complaisances  ont  tant  d'influence  sur  des  jugemeiis 
déjà  entachés  d'ignorance,  que  si  l'on  compare  tout  ce 
qui  s'écrit  sur  un  ouvrage  nouveau  dans  les  feuilles  quo- 
tidiennes ou  périodiques,  on  y  trouve  le  pour  et  le  contre 
sur  toutes  les  questions.  Ce  que  l'un  approuve,  l'autre  le 
blâme,  et  vice  versa  ;  en  sorte  que  l'amour-propre  d'un 
auteur  est  toujours  satisfait  et  blessé  en  même  temps , 
s'il  est  assez  fou  pour  attacher  quelque  importance  à  de 
pareilles  fadaises. 

Parler  de  ce  qu'on  ignore  est  une  manie  dont  tout  le 
monde  est  atteint,  parce  que  personne  ne  veut  avoir  l'air 
d'ignorer  quelque  chose.  Cela  se  voit  en  politique,  en 
littérature,  en  sciences,  et  surtout  en  beaux-arts.  Dans 
les  conversations  de  la  société,  les  sottises  qu'on  débile 
sur  tout  cela  ne  font  pas  grand  mal,  parce  que  les  paroles 
sont  fugitives  et  ne  lai.ssent  pas  de  traces;  mais  les  jour- 
naux ont  acquis  tant  d'influence  sur  les  idées  de  tout 
genre  que  les  bévues  qu'ils  contiennent  ne  sontpassans 
danger;  elles  faussent  d'autant  plus  l'opinion  que  In  plu^ 


CHAP.    MX. 


249 


j)ait  des  oisifs  y  croient  aveuglément,  et  qu'elles  pé- 
nèlient  partout.  Il  faut  l'avouer  cependant,  depuis  quel- 
que temps  on  a  compris  la  nécessité  de  diviser  la  ré- 
daction des  écrits  périodiques  entre  les  hommes  que  leurs 
connaissances  spéciales  mettent  en  état  de  parler  conve- 
nablement des  choses  ;  aussi  remarque-t-on  que  l'on  ac- 
(juiert  dans  le  monde  des  idées  plus  justes  des  choses  et 
qu'on  en  parle  mieux. 


CHAPITRE  XX. 

De  la  poétique  de  la  musique. 

S'il  n'y  avait  dans  la  musique  qu'un  principe  de  sen- 
sation vague,  fondé  seulement  sur  un  rapport  de  conve- 
nance entre  les  sons,  ayant  pour  unique  résultat  d'af- 
fecter plus  ou  moins  agréablement  l'oreille ,  cet  art 
serait  peu  digne  de  l'attention  publique;  car,  n'étant  des- 
tiné qu'à  satisfaire  un  sens  isolé,  il  ne  mériterait  pas 
plus  de  considération  que  l'art  culinaire.  Il  y  aurait  en 
effet  peu  de  différence  entre  le  mérite  d'un  musicien  et 
celui  d'un  cuisinier;  mais  il  n'en  est  point  ainsi.  Ce 
n'est  pas  seulement  l'oreille  qui  est  affectée  par  la  mu- 
sique; si  celle-ci  réunit  certaines  qualités,  elle  émeut 
l'anie,  d'une  manière  indéterminée  à  la  vérité,  mais  plus 
puissamment  que  la  peinture,  la  sculpture  ou  tout  autre 
art. 

Pourtant  il  faut  avouer  qu'il  fut  un  temps  où  l'on 
croyait  que  satisfaire  l'oreille  était  l'objet  unique  de  la 
musique  ;  ce  temps  fut  celui  de  la  renaissance  des  arts, 


550  SENSATIONS  MUSICALES.  8ECT.  IT. 

Tout  ce  qui  nous  reste  de  monumens  de  celui-ci,  depuis 
le  milieu  du  quatorzième  siècle  Jusqu'à  la  fin  du  seizième 
siècle,  n'a  été  composé  évidemment  que  pour  l'oreille. 
Mais  que  dis-je?  ce  n'était  même  pas  pour  elle  que  les 
musiciens  écrivaient  alors;  c'était  pour  les  veux.  Tout 
leur  génie  s'épuisait  à  arranger  des  sons  dans  des  formes 
bizarres  qui  n'étaient  sensibles  que  sur  le  papier.  Les 
madrigaux,  les  motets,  les  messes,  toute  la  musique  en- 
I  fin  de  ces  premiers  temps  de  l'art  trouvait  cependant 
des  admirateurs,  parce  qu'on  ne  connaissait  rien  de 
mieux;  il  ne  faut  jamais  arguer  des  premiers  essais  d'un 
art  pour  en  poser  les  règles. 

Plus  tard  la  musique  devint  plus  agréable  et  plus  faite 
pour  flatter  les  sens;  tous  les  genres  se  ressentirent  de 
celte  tendance  vers  le  gracieux.  On  la  remarquait  dans 
'a  musique  instrumentale  comme  dans  la  vocale,  et  sur- 
tout dans  l'opéra.  Des  airs  et  puis  des  airs  composaient 
alors  toute  la  durée  d'un  spectacle  de  plusieurs  heures. 
C'est  de  cette  musique  prétendue  dramatique  qu'on  a 
dit  qu'elle  était  un  concert  dont  le  drame  était  le  pré- 
texte. L'art  s'y  était  amélioré,  mais  n'était  point  arrivéà 
son  but.  Pourtant  cette  musique  plaisait  à  l'oreille,  mais, 
ne  faisant  que  cela,  elle  ne  remplissait  qu'une  de  ses 
conditions. 

Dans  la  seconde  moitié  du  dix-huitième  siècle,  les 
idées  se  tournèrent  vers  la  vérité  de  déclamation;  alors 
on  voulut  que  la  musique  fût  une  langue,  et  léchant  fut 
négligé  pour  le  récitatif.  Cela  était  bon  en  soi;  mais  à 
force  de  chercher  la  vérité  de  ce  langage,  on  ne  vit  plus 
qu'une  des  facultés  de  ia  musique;  on  négligea  les  autres, 
et  au  lieu  d'opéras  on  eut  ce  qu'on  appelait  des trag^édics 
lyriques.  Dans  cette  révolution,  l'art  avait  évidemment 


CHAP.  XX.  POÉTIQUE.  251 

changé  d'objel;  il  n'était  plus  possible  de  dire  qu'il  fût  le 
plaisir  de  l'oreille  :  il  fut  décidé  qu'il  doit  être  celui  de 
l'esprit;  car  le  principe  fondamental  du  nouveau  genre, 
celui  qu'on  opposait  sans  cesse  à  toute  réclamation,  était 
celui-ci  :  la  r>érlté.  Or,  il  est  évident  que  la  vérité  ne 
s'adresse  point  à  l'oreille  ;  l'esprit  seul  en  jouit.  Heu- 
reusement Gluck ,  qui  mit  ce  système  en  vogue,  était 
plus  homme  de  génie  que  philosophe;  en  cherchantcette 
vérité,  jouissance  de  l'esprit,  il  trouva  V expression  ^  qui 
est  celle  du  cœur.  L'art  se  trouva  par-là  plus  près  de  son 
but. 

Une  fois  qu'il  fut  convaincu  que  la  vérité  est  le  prin- 
cipe de  la  musique  comme  de  tous  lesarts,  on  voulut  être 
toujours  vrai.  La  musique  est  susceptible  d'imiter  cer- 
tains effets,  tels  que  le  mouvement  des  flots,  la  tempête» 
le  ramage  des  oiseaux,  etc.  ;  on  en  conclut  qu'elle  est  es- 
sentiellement imitalise,  et  l'on  ne  vit  point  que  cette  fa- 
culté d'imiter  n'est  qu'un  des  cas  particuliers  de  ses 
fonctions;  on  ne  remarqua  point  qu'elle  est  plus  sa- 
tisfaisante quand  elle  exprime  les  passions,  la  douleur, 
la  joie,  en  un  mot,  les  diverses  émotions  de  l'arae.  Des 
milliers  d'exemples  auraient  dû  démontrer  qu'elle  est 
un  art  d'expression;  au  lieu  de  cela  chacun  en  fît  ce 
qu'il  voulut. 

Exprimer,  dans  le  sens  le  plus  étendu ,  c'est  rendre 
sensibles  les  idées  simples  ou  complexes  et  les  affections 
de  l'ame.  La  musique  n'est  guère  susceptible  que  de  la 
transmission  de  ces  dernières;  cependant  elle  n'y  est  pas 
absolument  bornée,  comme  on  le  verra  par  la  suite. 

Quand  on  dit  que  !a  musique  exprime  les  affections 
de  l'ame,  on  ne  prétend  pas  qu'elle  soit  capable  de  ren- 
dre compte  de  ce  qu'éprouve  toi  ou  tel  individu;  ellefait 


âSi  SENSATIONS   MUSICALES.  SECT.   iV. 

plus  :  elle  émeut  l'auditeur,  fait  naître  à  son  gré  des  im- 
pressions de  tristesse  ou  de  joie,  et  exerce  sur  lui  une 
sorte  de  puissance  magnétique  au  moyen  de  quoi  elle  le 
met  en  rapport  avec  les  êlres  sensibles  extérieurs.  La 
musique  n'est  donc  pas  seulement  un  art  d'expression, 
•/c'est  aussi  l'art  d^mouïoir.  Elle  n'exprime  qu'autant 
qu'elle  émeut,  et  c'est  là  ce  qui  la  distingue  des  langues, 
qui  ne  peuvent  exprimer  que  pour  l'esprit.  Cette  dis- 
tinction fait  voir  en  quoi  consiste  l'erreur  de  ceux  qui 
ont  cru  qu'elle  est  une  langue  analogue  à  toute  autre. 

La  musique  émeut  indépendamment  de  tout  secours 
étranger;  la  parole,  les  gestes  n'ajoutent  rien  à  sa  puis- 
sance, seulement  ils  éclairent  l'esprit  sur  les  objets  de 
son  expression.  Je  sais  qu'on  m'objectera  la  force  que 
reçoit  l'expression  musicale  d'une  prononciation  nette  et 
bien  articulée  de  la  parole  ;  mais  il  faut  distinguer.  S'il 
s'agit  d'un  mot,  d'une  exclamation  qui  peignent  un  sen- 
timent vif  ou  une  sensation  profonde,  l'accent  que  le 
chanteur  y  met  en  prononçant  devient  un  moyen  d'ex- 
pression très  actif;  moyen  qui  suffit  pour  émouvoir  l'au- 
diteur et  qui  affaiblit  conséquemment  l'action  de  la  mu- 
sique; car  nous  ne  sommes  pas  organisés  de  manière  à 
percevoir  plusieurs  sensations  à  la  fois  par  le  même  sens; 
un  effet  ne  peut  se  manifester  en  nous  qu'aux  dépens 
d'un  autre.  La  puissance  des  paroles  dans  la  musique, 
dont  je  viens  de  parler,  se  remarque  surtout  dans  le  ré- 
citatif. Là,  il  y  a  une  alternative  de  victoires  remportées 
par  les  paroles  et  par  la  musique  ;  c'est  presque  toujours 
dans  les  ritournelles  que  celle-ci  reprend  sa  puissance. 

Si  les  vers  qui  servent  de  base  à  la  musique  n'ont  point 
pour  objet  un  de  ces  sentiraens  vifs  et  profonds  qui  se 
peignent  par  quelques  mots;  s'ils  ont  besoin  de  longs  dé- 


t.lIAÎ'.    \X.  POl^TIQUK.  253 

Vf!(ij)j)ciiicn5,  la  musique  rcpi\ntl  toute  sa  supériorité; 
alors,  comme  je  viens  de  le  dire,  les  j)aroles  n'ont  d'uti- 
lité (jiie  pour  éclairer  l'esprit.  Dès  que  celui-ci  est  initié, 
CCS  paroles  deviennent  inuliies  pour  l'expression  et  ne 
servent  plus  qu'à  facditer  rarticulation  de  la  voix.  La 
musique  domine,  et  l'on  n'écoute  plus  celle  suite  de  syl- 
labes qui  frappent  l'air  sans  s'adresser  à  l'auditeur.  Ceci 
démontre  que  le  reproche  qu'on  adresse  queUinelois  aux 
compositeurs  de  trop  répéter  les  paroles  n'est  point 
fondé  lorsque  les  répétitions  ont  pour  but  de  donnera 
la  musique  le  temps  de  passer  par  tous  les  degrés  de  la 
passion,  ce  qui  est  le  point  important;  remarquez  qu'en 
parlant  de  l'elfet  de  la  musique  sur  l'auditeur,  en  pareille 
circonstance,  je  suppose  que  les  sens  de  celui-ci  sont 
assez  exercés  pour  comprendre  les  intentions  du  musi- 
cien et  les  transmettre  à  son  ame. 

De  tout  cela  on  peut  tirer  plusieurs  conséquences  :  la 
première  est  que  ce  qu'on  appelle  communément  Vcj:- 
prcssion  (les  pdvoles  n'est  point  l'objet  essentiel  de  la 
musicpie.  Je  m'explique  :  ce  que  le  poète  lyrique  met 
dans  la  bouche  des  personnages  de  son  drame  est  la 
manifestation  de  ce  qu'ils  éprouvent;  mais  de  deux  cho- 
ses l'une  :  ou  ees  personnages  ressentent  une  passion 
qu'il  faut  faire  partager  à  l'auditoire,  ou  ils  sont  en 
danger,  et  il  faut  intéressera  leur  sort.  Dans  l'un  et 
l'autre  cas  il  faut  émouvoir;  or,  de  tous  les  arts,  le  plus 
puissant  pour  y  parvenir  est  la  musique.  Les  paroles 
ne  peuvent  lui  prêter  qu'un  faible  secours  ;  il  suffit  que 
le  public  soit  instruit  dé  la  situation  des  choses.  S'il  s'a- 
git au  contraire  d'un  état  mixte  où  l'ame  n'est  point 
inerte,  quoiqu'elle  ne  soit  pas  vivement  émue,  la  mu- 
sique se  met  en  harmonie  avec  elle  par  la  suavité  de  can- 


lS4  St5»ATI(J?fS  MtSlCALtt.  SECT.  iV. 

/ilènes  un  peu  vag;ues  ,  par  la  ridiesse  des  accompagne- 
ment et  par  la  nouveauté  de  l'harmonie,  qui  produisent 
plutôt  des  sensations  que  des  émotions.  Dans  ce  cas  l'ac- 
tion dt;s  paroles  est  encore  plus  faible.  Enfin,  s'il  faut 
que  la  m^isique  soit  l'interprète  de  bons  mots,  de  plai- 
santeries et  de  quolibets,  on  s'apeiroit  au  premier  abord 
qu'elle  y  est  compiètcmenl  inhabile.  Si  le  musicien  ne 
veut  rien  dérober  de  l'esprit  du  poète  ,  il  s'efface  pour  le 
laisser  paraître,  et  dès  lors  il  est  faible  et  conlntint;  s'il 
6  obstine  à  y  mettre  du  sien  ,  il  devient  imjjortun. 

Je  prévois  des  objections,  car  tout  ceci  n'est  pas  dans 
les  idées  reçues.  Essayons  d'aller  au-devant  et  de  les  ré- 
soudie. 

a  Gréiry,  dira-t-on,  Grétry,  l'idole  des  Français  pen- 
«  dant  jjrès  de  soixante  ans  ,  brilla  pi  écisément  par  cette 
«  faculté  que  vous  refusez  à  son  art,  celle  d'exprimer 
«  des  paroles.  Il  mit  souvent  plus  d'esprit  dans  sa  mu- 
t  sique  que  le  poète  dans  ses  vers,  et  c'est  surtout  par-là 
«  qu'il  s'est  fait  une  brillante  lenommée.  »  Distinguons. 
Gréiry,  quoicjuc  fjible  harmoniste  et  musicien  médiocre, 
avait  reçu  de  la  nature  le  don  d'inventer  des  chants  heu- 
reux ,  beaucoup  île  sensibilité  musicale,  et  plus  d'esprit 
que  ses  livres  ne  semblent  l'indKjuer.  Ce  qui  reste  de 
lui  maintenant,  ceque  les  connaisseurs  admireront  encore 
quand  les  profjrès  de  l'art  et  la  mode  auront  fait  dispa- 
railre  pour  toujours  ses  ouvrages  de  la  scène,  ce  sont 
_se&-mélodics,  véritables  inspirations  d'un  instinct  créa- 
teur, et  cette  sensibilité  cpii  lui  faisait  trouver  des  accens 
pour  toutes  les  passions.  Quant  à  l'esprit  qu'il  se  piquait 
d'avoir  et  qui  consiste  à  faire  ressortir  un  mot,  à  cher- 
cher des  indexions  comiques,  à  sacrifier  la  phrase  ou  la 
période  musicale  pour  ne  pas  nuire  à  la  rapidité  du 


CHAP.  XZ.  FOÉTI^UK.  i$& 

dialowne,  c'est  pent-ètre  quelque  rhose  de  fort  bon  dans 
un  ceilain  SNSlcme,  mais  ce  n'est  pas  de  la  mnsi(nie. 
Cela  plaisait  aiilrtfois  à  des  spectateurs  français,  qui  ne 
cherchaient  que  le  vaudeville  dans  leurs  opéras-comi- 
ques, et  dont  les  organes  n'étaient  point  façonnés  pour 
entendre  autre  chose;  mais  à  l'époque  même  où  Giétry 
écrivait,  les  autres  peuples  de  l'Europe  entrevoyaient 
dans  la  musique  un  but  p'us  noble  que  de  se  rapprocher 
de  la  parole,  et  d'aflaihlir  l'une  pour  se  mettre  à  la 
portée  de  l'autre.  «  Tu  pai  les  trop  pour  un  homme  qui 
ft  chante,  tu  chantes  trop  pour  un  homme  qui  parle  v,' 
disait  Jules  César  à  certain  professeur  de  déclamation 
qui  roulait  faire  servir  la  musique  à  seconder  la  parole: 
celte  criti(|ue  est  applicable  à  tous  les  musiciens  qui  ont 
eu  la  faiblesse  de  se  laisser  diriger  par  des  gens  tle  lettres 
jaloux  de  la  gloire  de  leurs  héîiiisliches ,  et  qui  se  per- 
suadaient que  leurs  vers  étaient  ce  qu'il  y  avait  de  plus 
important  dans  un  opéra. 

Ce  n'est  pas  qu'on  doive  bannir  l'esprit  des  paroles 
destinées  à  la  musique,  ni  même  de  l'œuvre  du  musi- 
cien; les  meilleurs  opéras  italiens,  français  et  allemands 
offrent  des  traits  où  l'intonation  musicale  seconde  heu- 
reusement la  parole;  il  sulfîl  de  se  souvenir  que  ce  n'est 
point  I  objet  essentiel  de  la  n.usique.  D'ailleurs,  ces 
traits  où  la  musi(jue  partage  l'eflel  de  la  parole  sont  tou- 
jours de  courte  durée.  Le  musicien  ne  fait  jamais  bi  i!ler 
le  poêle  sans  délourner  l'atlenlion  de  sa  musique. 

On  m'objectera  encure  qu'il  y  a  beaucoup  de  mor- 
ceaux comitpies  où  l'an iculal ion  précipitée  des  paioles 
produit  un  bon  effet;  on  pourra  même  m'opposer  des 
narrations  qui  n'ont  pas  empéclié  les  hommes  de  géui^ 


256  SENSATIONS  MUSICALES.  »ErT.  IV. 

de  faire  t'e  bonne  musique  :  ceci  mérite  d'être  examiné. 

Les  opéras  boulfes  italiens  sont  remplis  de  morceaux 
qu'on  ;q)[)elle  noie  et  parole  ;  leur  effet  est  vif,  piquant, 
spirituel;  mais  il  ne  faut  pas  s'y  tromper  :  dans  ces  mor- 
ceaux, la  qualité  des  Idées  musicales  est  moins  impor- 
tante que  le  rhythme.  Les  ouvrages  de  Fioravanti  sont 
pleins  de  ces  choses  dont  l'effet  est  parfait,  quoique  les 
pensées  du  musicien  soient  communes  ;  c'est  que  le 
rhythme  en  est  excellent.  Ce  rhythme  est  tout  ce  qu'on 
remarque.  L'arrangement  plus  ou  moins  comique  des 
paroles  attire  ensuite  l'attention,  et  l'on  finit  par  penser 
à  peine  à  la  musique,  qui  n'est  plus  qu'un  accessoire. 
Remarquez  d'ailleurs  que  l'accent  bouffon  de  l'acteur 
et  ses  lazzi  sont  pour  beaucoup  dans  l'effet  de  ces  mor- 
ceaux. Tout  cela  est  bon  à  sa  place;  mais,  encore  une 
fois,  la  musique  n'y  joue  qu'un  rôle  secondaire. 

Quant  aux  narrations  ,  elles  sont  de  deux  espèces. 
Dans  la  première,  le  compositeur  ne  voulant  point  met- 
tre obstacle  à  l'articulation  des  paroles,  évite  de  donner 
à  la  voix  la  piirase  mélodique,  jette  l'intérêt  dans  l'or- 
chestre sur  un  thème  caractérisé,  et  ne  donne  à  la  voix 
qu'un  débit  presque  monotone  qui  permet  d'entendre 
distinctement  ce  que  dit  l'acteur.  Dans  ce  cas  l'effet  est 
complexe  pour  les  auditeurs  dont  l'oreille  est  exercée, 
et  leur  attention  se  partage  entre  la  scène  et  la  musique; 
les  autres  n'entendent  que  les  paroles  et  peu  ou  point  la 
musique. 

L'autre  manière  de  traiter  la  narration  consiste  à  ne 
prendre  du  sujet  que  .son  caractère  gai  ou  triste,  tran- 
quille ou  animé,  et  à  faire  un  morceau  de  musicpie  où 
les  paroles  n'ont  qu'une  action  secondaire,  tandis  que 


cu.-vi'.  XX.  ruhTiyi-'i:.  2.'>7 

l'attention  se  porte  sur  l'œuvre  du  musicien;  tel  est 
l'air  admirable  Pria  c/ic  spu/ili  du  Malriinonlo  se- 
greto. 

De  quelque  manière  qu'on  envisage  l'union  de  la  mu- 
sique aux  paroles,  on  voit  qu'on  ne  peut  sortir  de  cette 
alternative  :  ou  la  musique  domine  les  paroles,  ou  les 
paroles  dominent  la  musique.  Il  n'y  a  point  de  partage 
possible  entre  elles,  à  moins  (ju'elles  ne  soient  assez  fai- 
bles pour  qu'onsoitindifierent  àl'une  comme  aux  autres. 
La  musi(|uc  qui  émeut  exprime  des  situations  et  non  des 
paroles;  quand  celles-ci  se  font  remarquer,  l'autre  n'est 
plus  qu'un  accessoire;  dans  le  premier  cas,  l'ame  est 
émue;  dans  le  second,  l'esprit  est  occupé.  L'une  et  l'autre 
choses  sont  bonnes  quand  elles  sont  employées  à  propos, 
car  il  n'est  pas  donné  à  l'homme  d'être  continuellement 
ému;  les  émotions  fatiguent;  il  faut  des  repos,  et  sur- 
tout de  la  variété  dans  notre  manière  d'être. 

Rien  ne  prouve  mieux  la  faculté  d'émouvoir  que 
possède  la  musique,  indépendamment  de  la  parole,  que 
les  effets  produits  par  la  musique  instrumentale.  A  la 
vérité,  ces  effets  n'ont  lieu  que  pour  ceux  dont  l'éduca- 
tion a  été  bien  faite;  mais  cela  ne  conclut  rien  contre 
celte  proposition,  car  nous  n'avons  d'idées  que  par  l'é- 
ducation. Quel  est  l'homme,  quelque  peu  initié  à  cet 
art ,  qui  n'ait  été  ému  par  les  accens  passionnés  de  la 
symphonie  en  sol  mineur  de  Mozart?  Qnel  est  celui  qui 
n'ait  senti  de  l'élévation  dans  ses  idées  par  le  grandiose 
(!e  la  marche  de  la  symphonie  en  ut  mineur  de  Beetho- 
ven ?  On  pourrait  citer  des  milliers  d'exemples  sembla- 
bles. 

Mais,  dira-t-on,  la  nature  de  ces  émotions  est  vague 
et  n'a  point  d'objet  déterminé,  v'^ans  doute;  c'est  prr*  isé- 


258  8EXSATI0N.S  MUSICALES.  SECT.  IV. 

ment  pour  cela  qu'elles  ont  tant  d'action  sur  nous.  IMoins 
l'objet  est  évident,  moins  l'esprit  est  occupé,  plus  l'anie 
est  émue;  car  rien  ne  la  distrait  de  ce  (ju'elle  éprouve. 
Nos  perceptions  s'affaiblissent  par  leur  multiplicité; 
elles  sont  d'autant  plus  sensibles  qu'elles  sont  plus 
simples. 

Perdons  l'habitude  de  comparer  ce  qui  n'a  point  d'ar- 
nalogie,  et  de  vouloir  que  tons  les  arts  agissent  de  la 
même  manière.  La  poésie  a  toujours  un  obj^t  dont  l'es- 
prit s'empare  avant  que  le  cœur  soit  ému;  la  peinture  n'a 
d'effet  qu'autant  qu'elle  nous  présente  avec  vérité  les 
scènes  ou  les  objets  qu'elle  veut  reproduire,  et  qu'elle 
attaque  notre  conviction.  On  ne  demande  rien  de  tout 
cela  à  la  musitjue  :  qu'elle  nous  émeuve,  et  c'est  assez. 
—  Mais  sur  quel  sujet? — Peu  m'importe. — Par  quels 
moyens? — Je  l'ignore;  je  dis  plus  :  je  ne  m'en  inquiète 
guère. 

Dira-t-on  que  cet  art  serait  réduit  à  n'être  qu'un 
plaisir  des  servs ,  s'il  en  était  ainsi  ?  ce  serait  une  erreur. 
Ainsi  que  l'amour,  s'il  a  une  action  physique,  il  en  a 
une  morale  aussi.  On  a  souvent  eu  la  fantaisie  de  com- 
parer la  musicpie  à  cjuelque  chose,  et  personne  n'a  songé 
à  la  seule  passion  dont  les  symptômes  et  les  effets  sont 
analogues  aux  siens.  Ainsi  que  l'amour,  elle  a  ses  dou- 
ceurs voluptueuses,  ses  explosions  passionnées,  sa  joie, 
sa  douleur,  son  exaltai  ion,  et  le  vaj;ue,  ce  vague  déli- 
cieux qui  n'offre  aucune  idée  déterminée,  mais  qui  n'en 
exclut  aucune.  De  ce  qu'elle  ne  s'adresse  pas  à  l'esprit, 
il  ne  s'ensuit  pas  qu'elle  se  borne  à  satisfaire  l'oreille; 
car  l'oreille  n'est  que  l'organe,  et  l'ame  est  l'objet.  La 
musique  n'a  point  par  elle-même  les  moyens  d'exprimer 
les  nuances  des  passions  fortes,  telles  que  la  c(»lère,  la 


CHAP.   XX.  POÉTIQCB.  250 

jalousie  ou  le  désespoir;  ses  accens  tiennent  de  tout  cela, 
mais  n'ont  rien  de  positif.  C'est  aux  paroles  à  éclairer 
randileiir;  sitôt  que  ceUii-ci  est  instruit,  la  musique 
suffit,  car  elle  émeut.  Le  musicien  ne  doit  donc  pas  per- 
dre son  temps  à  chercher  les  limites  de  nuances  qu'il 
n'est  pas  en  son  pouvoir  il'exprimer.  Tous  les  conseils 
que  Grélry  a  donnés  à  cet  égard,  dans  ses  Essais  sur  la 
JlJirsiquc ,  sont  illusoires. 

Les  principes  de  la  poétique  et  de  la  pln'losophie  de 
la  musique  sont  très  déliés,  très  difficiles  à  saisir,  plus 
difficiles  encore  à  présenter  avec  évidence;  de  quelque 
manière  qu'on  les  considère,  on  arrivera  à  cette  conclu- 
sion que  la  musique  n'est  ni  un  art  d'imitation  ni  une 
langue,  mais  l'art  d'exprimer  ou  jjlutùtd'émouvoir. 

Ceci  posé,  il  devient  évident  c|ue  les  enthousiastes  de 
telle  ou  telle  manière,  de  telle  ou  telle  école,  de  te!  ou 
tel  genre,  ne  comprennent  point  le  but  de  la  musique. 
Les  préférences  que  certaines  personnes  manifestent 
pojr  la  mélodie,  ou  pour  l'harmonie,  ou  pour  les  moyens 
simples,  ou  pour  les  modulations  recherchées  et  multi- 
pliées, sont  autant  d'erieui's  par  lesqiielles  on  prétend 
limiter  l'action  de  l'art  qui  a  besoin  de  toutes  ces  choses 
et  de  beaucoup  d'autres.  Gluck  croyait  qu'il  est  néces- 
saire de  lier  si  bien  le  récitatif  aux  airs  qu'on  ne  pût 
presque  pas  sentir  où  commencent  ceux-ci.  Le  résultat 
de  son  système  devait  être  une  certaine  monotonie  qui 
a  peut-être  fait  vieillir  trop  vite  ses  chefs-d'œuvre  dra- 
mnli(|ues;  dcpui-.  quelques  années  on  a  reconnu  que 
l'etfet  des  morceaux  gagne  à  ce  (pi'on  sente  bien  où  ils 
commencent,  parce  que  ratieulion  de  l'auditoire  est 
plus  grande,  et  l'on  a  cherché  à  les  séparer  du  récitatif 
PiUtant  qu'on  l'a  pu.  On  n'a  fait  en  cela  que  recotamence? 


260  SENSATIONS  MUSICALES.  SECT.  IT. 

ce  qui  se  pratiquait  avant  la  révolution  opérée  dans  la 
musique  dramatique  par  le  grand  musicien  qui  vient 
d'être  nommé.  Mais  de  ce  que  la  mode  a  changé,  il  ne 
faut  pas  croire  que  le  système  de  Gluck  fût  absolument 
mauvais;  car,  à  la  monotonie  près,  il  y  a  dans  ce  système 
une  vivacité  d'expression  dont  l'application  peut  être 
excellente  en  beaucoup  de  circonstances  et  qui  est  du 
domaine  réel  de  l'art.  La  simplicité  d'instrumentation  a 
fait  place  à  une  richesse  qui  tient  quelquefois  de  la  pro- 
fusion ;  faut-il  condamner  l'une  ou  l'autre?  Non;  car 
il  est  de  certaines  situations  qui  demandent  delà  simpli- 
cité et  d'autres  qui  exigent  un  plus  grand  développe- 
ment de  moyens.  Enfin,  tous  les  compositeurs  de  l'an- 
cienne école  ont  considéré  le  luxe  des  fioritures  comme 
destructif  de  l'expression  dramatique;  dans  la  musique 
de  nos  jours,  au  contraire,  on  les  multiplie  à  l'excès. 
Les  partisans  de  l'ancienne  tragédie  lyrique  affirment 
que  cette  dernière  méthode  est  ridicule,  en  ce  qu'elle 
est  souvent  en  opposition  avec  les  senlimens  dont  les 
personnages  sont  animés,  et  les  amateurs  de  la  musique 
nouvelle  traitent  de  gothique  celle  qui  n'est  pas  enrichie 
de  ces  biillantes  fantaisies.  Les  uns  et  les  autres  ont 
tort;  les  premiers,  parce  que  la  musique  doit  avoir  des 
momens  de  repos  et  ne  peut  pas  toujours  exprimer  ou 
émouvoir;  les  autres,  parce  qu'il  est  telle  situation  oà 
l'on  ne  pourrait  employer  les  traits,  les  trilles,  les  grou- 
pes et  les  points-d'orgue,  sans  détruire  tout  principe  de 
vérité  Rossini,  qui  a  nudtiplié  dans  sa  musique  les  choses 
de  ce  genre  plus  qu'on  ne  l'avait  fait  jusqu'à  lui,  a  fait 
voir  qu'il  sait  y  renoncer  quand  il  en  est  temps,  particu- 
lièrement dans  le  beau  trio  de  Guillaume  Tell.  En  un 
mot,  émouvoir  l'ame  ou   plaire  à  l'oreille  étant  le  but. 


iiiAi'.  XX.  poKTryuK.  261 

tous  les  moyens  sont  bons  pour  y  parvenir;  il  ne  s'agi^ 
(]iie  de  les  employer  à  propos.  .Je  ne  connais  aucun  sys- 
tème, aucun  procédé  ([ui  ne  puisse  avoir  son  effet;  l'a- 
vantage qu'il  y  aurait  à  n'en  rejeter  aucun  serait  d'ob- 
tenir une  variété  qu'on  ne  rencontre  à  aucune  époque  de 
l'histoire  de  l'art,  parce  qu'on  s'est  toujours  attaché  à  tel 
ou  tel  système  à  l'exclusion  de  tout  autre. 

A  l'égard  de  la  musique  instrumentale,  la  carrière  est 
encore  plus  étendue  parce  (jue  l'objet  est  plus  vague. 
Pour  y  réussir  ou  pour  en  juger,  il  est  indispensable  de 
se  défendre  aussi  de  ces  penchans  ou  de  ces  aversions 
qui  ne  prennent  leur  orii|;ine  que  dans  nos  préjngés.  Il 
faut  de  la  science,  disent  les  uns;  il  faut  de  la  grâce  sur- 
tout, disent  les  autres.  —  Moi  j'aime  le  brillant  et  les 
traits  en  notes  rapides.  —  Moi  je  les  déteste.  —  Vive  la 
musique  sage  et  pure  de  Haydn!  —  Non;  vive  la  péné- 
trante passion  de  Mozart!  —  Eii  non!  vive  la  verve  ori- 
ginale de  Beethoven!  Que  signifie  tout  cela?  est— ce  à 
dire  que  chacun  de  ces  grands  artistes,  en  ouvrant  des 
routes  nouvelles,  ail  eu  moins  ou  plus  de  mérite  que  les 
autres?  et  parce  qu'il  en  est  un  qui  est  venu  le  dernier 
et  qui  a  fait  des  choses  dont  on  ne  sentait  pas  le  besoin 
auparavant,  faut -il  en  conclure  que  lui  seul  a  connu  le 
véritable  objet  de  l'art?  Ne  voulez-vous  qu'un  genre? 
vous  serez  bientôt  fatigués  de  ce  qui  d'abord  aura  fait 
vos  délices.  Quelque  autre  nouveauté  viendra  qui  mettra 
en  oubli  l'objet  de  vos  affections,  et  de  cette  manière 
l'art  musical  sera  comme  Saturne  qui  dévoiait  ses  en- 
fans.  En  marchant  sans  cesse  vers  lui  but  qu  on  n'attein- 
dra jamais,  on  perdra  sans  retour  le  souvenir  des  routes 
qu'on  aura  suivies.  Quelle  extravagance  de  ne  croire 
qu'en  soi,  et  de  s'imaginer  qu'on  a  des  sens  plus  perfec- 


263  SENSATIONS  MUSICALES,  8ECT.  IV, 

tjonnés  ou  un  jugement  plus  sain  que  ceux  par  qui  l'on 
a  été  précédé!  On  sent  autrement, on  juge  d'autre  sorte, 
et  voilà  tout.  Les  circonstances,  l'éducation  etsintoul  les 
préjugés  nous  obsèdent  en  tout  ce  que  nous  faisons,  et 
ce  sont  les  résultats  de  leur  action  que  nous  prenons 
pour  ceux  d'une  raison  supérieure.  Encore  une  fois,  ne 
rejetons  rien  de  ce  qui  esta  notre  disposition;  usons  de 
tout  en  temps  et  nous  en  serons  plus  riches. 

Pour  jouir  des  beautés  passées  de  mode  et  pour  en 
sentir  le  mérite,  plaçons-nous  dans  la  position  où  était 
l'auteur  lorsqu'il  écrivit  son  ouvrage;  rappelons-nous 
ses  antécédens;  peignons-nous  l'esprit  de  ses  contempo- 
rains et  oublions  pour  un  instant  nos  idées  habituelles; 
nous  serons  étonnés  d'être  devenus  sensibles  à  des  choses 
dont  nous  n'aurions  pu  reconnaître  le  mérite  si  nous 
nous  fussions  obstinés  à  prendre  pour  objet  de  compa- 
raison les  productions  qui  sont  plus  en  rapport  avec 
l'état  avancé  de  l'art  et  avec  nos  penchans.  Par  exemple, 
si  l'on  veut  juger  du  mérite  de  Haydn  et  de  ce  qu'il  a 
fait  pour  les  progrès  de  la  musique,  qu'on  se  fasse  jouer 
une  symphonie  de  Van  Malder  ou  de  Stamitz,  ou  un 
quatuor  de  Davaux  ou  de  Cambini,  et  l'on  verra  un 
génie  du  premier  ordre  créer  en  quelque  sorte  toutes  les 
ressources  dont  les  compositeurs  usent  aujourd'hui.  Que 
revenant  ensuite  à  Beethoven  pour  le  comparer  au  père 
de  la  symphonie,  on  examine  les  qualités  qui  brillent 
dans  les  ouvrages  de  l'un  et  de  l'autre,  et  l'on  se  con- 
vaincra que  si  Beethoven  l'emporte  sur  Haydn  pour  la 
hardiesse  des  effets,  il  lui  est  bien  inférieur  sous  les  rap- 
ports de  la  netteté  de  conception  et  de  plan.  On  verra 
Haydn  développant  avec  un  ait  inOni  des  idées  souvent 
médiocres  et  en  faire  des  merveilles  de  forme,  d'él<^- 


iHAP.    \\.  l'OKTlQUE.  263 

gunce  et  de  majesté,  tandis  qu'on  remarquera  dans  les 
productions  de  Beethoven  un  premier  jet  admirable  et 
des  pensées  giganlesf[ucs  qui,  à  force  de  développemens 
puisés  dans  une  vague  fantaisie,  perdent  souvent  de  leur 
effet  en  s'avanrant,  et  se  terminent  en  faisant  regretter 
que  l'auteur  n'ait  pas  fini  plus  tôt. 

Avec  cette  sage  direction  de  ses  impressions,  chacun 
parviendra  à  se  défaire  de  ses  préjugés  et  de  ses  penchans 
exclusifs  :  l'art  et  les  jouissances  qu'il  procure  y  auront 
gagné.  Les  artistes  éclairés  ont  un  avantage  incontesta- 
ble sur  les  gens  du  monde  :  celui  de  se  plaire  à  entendre 
la  musique  des  hommes  de  génie  de  toutes  les  époques 
et  de  tous  les  systèmes,  tandis  que  les  autres  n'admet- 
tent que  celle  qui  est  en  vogue  et  ne  comprennent  que 
celle-là.  Les  premiers  ne  cherchent  dans  la  musique 
ancienne  que  les  qualités  qui  sont  de  son  essence;  mais 
les  autres,  n'y  retrouvant  pas  leurs  sensations  habituelles, 
s'imaginent  qu'elle  ne  peut  en  procurer  d'aucune  espèce. 
Il  faut  plaindre  les  hommes  qui  mettent  ainsi  des  bornes 
étroites  à  leurs  jouissances,  et  (jui  n'essaient  même  pas 
d'en  agrandir  le  domaine;  il  est  vraisemblable  que  leur 
nombre  diminuera  dès  que  les  compositeurs  auront  com- 
pris que  tous  les  styles  avec  tous  leurs  moyens  sont  bons 
à  employer,  et  lorsqu'ils  se  seront  déterminés  à  refaire 
dans  leurs  ouvrages  l'histoire  des  progrès  de  leur  art. 


CHAPITRE  XXI. 

De  l'analyse  des  sensations  produites  parla  musique. 

rimagine  qu'en  écoutant  de  la  musique  l'homme  c^ui 


2o4  SENSATIOSS  MUSICALES.  SI?CT.  IV. 

n'a  point,  étudié  cet  art  et  qui  ignore  ses  procédés  n'en 
reçoit  qu'une  sensation  simple.  Pour  lui,  uu  chœur 
composé  d'un  grand  nombre  de  voix  n'est  que  comme 
une  voix  puissante,  un  orchestre  n'est  qu'un  grand  ins- 
trument. II  n'entend  point  d'accords,  point  d'harmonie 
ni  de  mélodie,  point  de  flûtes  ni  de  violons  :  il  entend 
de  la  musique. 

Mais  à  mesure  que  cet  homme  écoute,  ses  sensations 
se  compliquent.  I,'éducation  de  son  oreille  se  fait  insen- 
siblement; il  finit  par  discerner  le  chant  de  l'accompa- 
gnenient  et  se  forme  des  notions  de  mélodie  et  d'harmonie. 
Si  son  organisation  est  favorable,  il  arrivera  au  point  de 
distinguer  la  différence  de  sonorité  des  instrumens  qui 
composent  lorchestre,  et  par  rcconuaître  dans  les  sen- 
sations qu'il  recevra  de  la  musique  ce  qui  appartiendra  à 
la  composition  et  ce  qui  sera  l'effet  du  talent  des  exécu- 
taus.  L'expression  plus  ou  moins  heureuse  des  paroles, 
les  convenances  drauiatiques  et  les  effets  du  rhjlhme 
sont  encore  des  choses  sur  lesquelles  il  apprendra  à  for- 
mer des  jugemens;  son  oreille  ne  sera  insensible  ni  au 
défaut  de  justesse,  ni  au  manque  de  mesnre;  mais  il  ne 
sera  affecté  de  toutes  ces  choses  que  par  instinct  et  par 
habitude  de  comparer  ses  sensations.  Parvenu  à  ce  point 
il  sera  comme  tous  les  hommes  bien  élevés  qu'on  rencon- 
tre dans  les  salles  de  spectacles;  car  le  public  éclairé  qui 
fait  les  réputations  des  artistes  n'en  sait  pas  davantage 
et  ne  peut  porter  plus  loin  ses  analyses.  Dans  l'harmonie, 
ce  public  n'entend  point  d'accords;  une  phrase  qui  se 
représente  à  lui  accompagnée  de  diverses  manières  est 
toujours  la  même  phrase.  Les  nuances  délicates  de  forme 
qui  composent  une  grande  partie  du  mérite  d'une  com- 
position  n'existent  point  pour  lui;  en  sorte  que  s'il  est 


llllAP.  XXI.  l.Ktli    A^^Al.YSr..  tiCiÔ 

moins  choqué  que  les  artistes  des  défauts  d'une  compo- 
sition incorrecte,  il  est  moins  louché  des  beautés  de  la 
perfection. 

N'est-il  donc  aucun  moyen  d'aller  au-delà  de  celte 
perception  incomplète  de  l'effet  des  sons,  à  moins  de  se 
faire  initier  à  la  science  de  la  musique?  et  faut-il  absolu- 
ment faire  une  étude  longue  et  fastidieuse  des  principes 
et  des  procédés  de  celte  science  pour  en  goûter  tous  les 
résultats?  Si  je  parlais  en  artiste,  je  répondrais  affirmati- 
vement, et  je  dirais  avec  orgueil  qu'il  est  pour  moi  de 
certaines  jouissances  dans  la  musique  qui  ne  seront  jamais 
le  partage  des  gens  du  monde;  je  soutiendrais  même  que 
ce  sont  les  plus  vives,  afin  de  faire  mieux  ressortir  cette 
espèce  de  supériorité  que  me  donne  un  savoir  spécial. 
Mais  ce  n'est  pas  pour  cela  que  j'ai  entrepris  d'écrire 
mon  livre.  Indiquer  les  moyens  d'augmenter  les  jouis- 
sances et  de  diriger  le  jugement  sans  être  obligé  de  se 
soumettre  à  un  long  noviciat  qu'on  a  rarement  le  temps 
et  la  volonté  de  faire,  tel  est  mon  but  :  voyons  donc  par 
([uoi  l'on  peut  remplacer,  jusqu'à  certain  point,  l'expé- 
rience de  l'artiste  et  le  savoir  du  professeur. 

Je  suppose  qn'un  auditoire  sensible  aux  accens  de  la 
musique  assiste  à  la  représentation  d'un  opéra  nouveau  ; 
(jue  le  nom  du  compositeur  lui  est  inconnu,  et  que  le 
genre  de  la  musique  est  neuf  et  d'une  originaliié  telle  que 
toutes  les  habitudes  harmoniques  et  mélodlipies  de  cet 
auditoire  sont  troublées.  D'après  ces  données,  voici  ce 
que  je  crois  convenable  de  faire  poiu'  analyser  la  nou- 
velle composition. 

Le  premier  effet  d'un  nom  célèbre  d'artiste  est  d'ins- 
pirer de  la  confiance  et  des  préventions  favorables;  par 
un  effet  contraire  on  éprouve  je  ne  sais  quelle  défiance 


266  SENSATIONS  MlSlCALES  «CT.   JV. 

d'un  nom  inconnu ,  et  le  premief  mouvement  est  de 
condamner  les  choses  qu'on  ne  connaît  pas.  On  désire 
de  la  nouveauté  ,  mais  il  faut  juger  ce  qui  est  nouveau; 
on  craint  de  se  comj)rometlre,  et  comme  en  général  il  y 
a  moins  de  bonnes  choses  que  de  mauvaises,  on  croit 
qu'il  est  plus  sur  de  condamner  au  premier  abord  que 
d'approuver.  11  y  a  bien  plus  de  séiurité  avec  les  célé- 
brités; elles  dispensent  d'énoncer  une  opinion  générale, 
et  c'est  déjà  quelque  chose;  ensuite  il  est  à  peu  près 
certain  qu'il  se  trouve  dans  l'opéra  des  beautés  à  peu 
près  égales  aux  défauts;  il  est  donc  permis  de  porter  des 
jugemens  qui  ne  compromettent  point  pour  l'avenir. 
Telles  sont,  on  ne  peut  en  douter,  les  causes  des  opi- 
nions prématurées  qu'on  énonce  chaque  jour  dans  le 
monde.  Ces  choses  sont  les  conséquences  de  l'organisa- 
tion humaine  et  de  la  société.  La  première  règle  qu'il 
faut  se  faire,  pour  procédera  l'anaKse  des  sensations 
qu'on  éprouve  à  l'audition  d'un  ouvrage  nouveau,  est 
donc  de  se  défier  de  ses  piévenlions ,  et  d'être  convaincu 
qu'il  arrive  rarement  de  n'èlre  pas  trompé  par  elles  au 
premier  abord.  La  difficulté  de  ne  point  se  tromper  est 
d'autant  plus  grande  que  le  genre  de  la  musique  est  plus 
nouveau;  car  il  est  bien  rare  que  l'extrême  originalité 
ne  blesse  pas  d'abord.  Qu'on  se  rappelle  les  jugemens 
défavordbles  qu'on  a  portés  de  la  musique  du  Barbier 
de  Séi'il/e  k  sa  première  représentation,  et  des  compo- 
sitions de  Beethoven,  quand  on  les  entendit  la  première 
lois  :  ces  exemples  doivent  servir  de  leçon.  On  aura 
beaucoup  fait  quand  on  se  sera  défenxlu  de  la  précipita- 
tion des  jugemens  ;  car  il  coule  bien  moins  de  suspendre 
son  opiuion  que  de  revenir  sur  ce  qu'on  a  dit.  Que  de 
fois  il  est  arrivé  de  persister  dans  des  erreurs  manifestes, 


CHAP.  XXI.  LEUR  ANALTSK.  267 

uniquement  parce  qu'on  les  avait  professées  et  par  un 
intérêt  d'amour-propre  mal  entendu! 

D'autres  motifs  doivent  nous  mettre  en  garde  contre 
notre  penchant  à  nous  prévenir  pour  ou  contre.  Quelle 
musiipie,  si  bonne  qu'elle  fût,  n'a  point  perdu  son  charme 
par  l'effet  d'une  mauvaise  exécution?  Quelle  platitude 
n'a  point  fasciné  les  sens,  lorsque  de  grands  artistes  en 
étaient  les  interprèles?  La  musique,  telle  qu'elle  sort 
des  mains  du  compositeur,  est  une  table  rase;  l'exécu- 
tion benne  ou  mauvaise  en  fait  quelque  chose  ou  rien. 

C'est  encore  une  suite  de  la  conformation  humaine  de 
croire  que  tout  va  s'amélioranl  dans  les  arts  et  dans  la 
littérature  comme  dans  l'industrie.  Il  en  résulte  qu'on  se 
croit,  en  général,  appelé  à  remettre  en  question  les 
vieilles  renommées,  et  à  prononcer  en  dernier  ressort. 
Mais  dans  ces  singuliers  arrêts  de  cassation,  où  l'on 
penche  ordinairement  à  décider  que  les  générations  pas- 
sées ont  eu  tort  d'admirer  les  productions  de  leur  temps, 
on  ne  tient  pas  compte  delà  différence  des  circonstances, 
des  formes  de  mode  qui  emportent  le  fond,  nî  des  tradi- 
tions d'exécution  qui  sont  perdues.  On  se  croit  suffisam- 
ment instruit  après  une  mauvaise  audition  dans  laquelle 
on  était  bien  plus  disposé  à  chercher  le  côté  ridicule 
qu'à  écouter  véritablement.  Que  de  jugemens  de  cette 
espèce  !  On  en  a  vu  un  exemple  frappant  de  nos  jours  ,  à 
propos  du  fameux  ^//(  /«/«deH^endel.  Ce  beau  morceau, 
après  avoir  été  étudié  avec  une  attention  religieuse  dans 
l'Institution  royale  de  Musique  classique  dirigée  par 
M.  Choron,  y  fut  exécuté  avec  une  con\iction  qui  en- 
traîna celle  du  public,  et  qui  fit  naître  le  plus  vif  enthou- 
siasme dans  l'auditoire.  Quelque  temps  après,  le  même 
morceau  fut  donné  par  la  Société  des  concerts  à  l'École 


_u5  SENSATIONS  MUSICALES.  «ECT.   IV. 

royale  de  Musique  ;  on  devait  tout  attendre  des  chœurs 
et  de  l'orchestre  admirable  de  ces  concerts;  mais  la  plu- 
part des  artistes  qui  en  faisaient  partie,  admirateurs 
exclusifs  de  Beethoven  et  de  l'école  moderne,  n'exécu- 
tèrent le  chef-d'œuvre  de  Haendel  qu'avec  des  préven- 
tions défavorables,  en  ricanant  et  sans  soins;  l'ouvrage 
ne  fit  point  d'effet ,  et  il  fut  décidé  que  cette  musique  for- 
midable était  une  perruquerie. 

Que  si  l'on  parvient  à  se  défendre  de  toutes  les  fai- 
blesses qui  faussent  le  jugement  et  gâtent  les  sensations, 
alors  commencera  réellement  l'action  de  l'intelligence 
jjour  l'analyse  des  sensations,  et  pour  juger  de  leur  na- 
ture. La  première  chose  qu'il  faudra  examiner  seia  l'objet 
du  drame,  si,  comme  je  l'ai  dit,  il  s'agit  d'un  opéra.  Si 
le  sujet  est  historique,  on  pourra  reconnaître  au  premier 
abord  si  l'ouverture  est  analogue  à  son  caractère;  s'il  est 
de  fantaisie,  il  sera  seulement  possible  de  juger  si  elle 
est  agréable  et  bien  faite.  Agréable?  c'est  ce  que  tout  le 
monde  est  appelé  à  juger;  bien  faite?  c'est  le  point  de 
la  difficulté.  La  bonne  ou  mauvaise  facture  dépend  de 
l'ordre  qui  règne  dans  les  idées.  Une  ouverture  peut  être 
riche  d'invention  et  être  mal  faite;  car  si  les  idées  abon- 
dantes n'ont  point  de  liaison  entre  elles,  elles  fatigue- 
ront l'attention  sans  charmer  l'oreille.  C'est  une  chose 
d'expérience  qu'une  phrase,  (juel  que  soit  son  agrément, 
n'est  point  comprise  à  la  première  audition.  Ce  n'est 
qu'après  avoir  été  répétée  plusieurs  fois  cju'elle  se  grave 
dans  la  mémoire  et  qu'on  en  remarque  toutes  les  qua- 
lités. Mais  s'il  y  a  beaucoup  d'idées  dans  un  morceau 
et  si  chacune  d'elles  est  répétée  plusieurs  fois ,  le  morceau 
sera  très  long  et  fera  naître  la  fatigue.  D'ailleurs,  il  serait 
difficile  de  bien  retenir  et  de  bien  saisir  également  beau- 


tllAP.    XXI.  LELU   ANALYSE.  2G9 

coup  de  phrases  différentes.  Il  faut  donc  qu'il  n'v  ail  pas 
plus  d'idées  dans  un  morceau  que  ses  dimensions  n'en 
peuvent  comporter  sans  fatijiutr  raltcnlion  de  l'auditoire; 
d'où  il  suit  qu'un  petit  nombre  de  phrases  bien  disposées 
et  ramenées  avec  adresse  composent  un  morceau  bien 
lait  et  facile  à  comj)rendre.  D'un  autre  côté,  si  les  idées 
principales  d'une  ouverture  se  représentaient  toujours  de 
la  même  manière,  l'ennui  naîtrait  de  cette  uniformité. 
L'ouverture  sera  donc  d'autant  mieux  faite  que  les  idées 
seront  présentées  successivement  avec  des  formes  plus 
riches  d'harmonie  ou  d'instrumentation ,  de  manière 
qu'elles  se  termineront  par  une  péroraison  brillante  où 
le  compositeur  fera  entrer  des  modulations  inattendues 
qu'il  aura  réservées  pour  ce  moment  final;  car,  s'il  en 
usait  plus  tôt,  il  finirait  plus  faiblement  qu'il  n'aurait 
commencé,  ce  (]ui ,  en  toute  chose,  est  contraire  à  la  gra- 
dation des  émotions. 

Une  fois  instruit  de  ces  choses,  si  l'on  se  donne  la 
peine  d'en  suivre  les  détails,  on  finira  par  s'habituer  a 
les  distinguer  promptement,  et  par  sortir  de  ce  vague 
qui  traîne  l'indécision  à  sa  suite.  Il  sera  dès  lors  facile  de 
se  former  une  opinion  d'un  morceau  de  ce  genre.  Sans 
doute,  on  ne  parviendra  jamais  sans  être  profondément 
musicien  à  discerner  dans  la  rapidité  de  l'exécution  un 
accord  d'un  autre;  à  reconnaître  l'avantage  qu'il  y  aurait 
eu  à  faire  usage  de  telle  harmonie  sur  tel  passage  au  lieu 
de  telle  autre;  à  sentir  l'élégance  de  certains  mouvemens 
harmoniques  ou  les  défauts  de  certains  autres;  de  lon- 
gues études  peuvent  seules  don  er  la  promptitude  de 
perception  nécessaire  pour  porter  des  jugemens  de  cette 
espèce;  mais  on  peut  augmenter  ses  jouissances  musica- 
les, sans  arriver  à  ce  point  de  connaissances  positives, 


270  SENSATIONS  MUSICALES.  6ECT.  IV. 

Le  plaisir  on  la  froideur  qu'on  éprouve  en  écoutant  un 
air,  un  duo,  un  morceau  d'ensemble  ou  un  finale,  ne 
dépendent  pas  lonjours  des  qualités  de  la  musique;  la  si- 
tuation dramatique  est  pour  beaucoup  dans  l'effet  que 
ces  morceaux  produisent  sur  nous.  Cet  effet  est  satisfai- 
sant ou  défavorable,  selon  qu'il  y  a  convenance  ou  incon- 
venance avec  l'objet  de  la  scène.  De  là  vient  que  certains 
morceaux  plaisent  beaucoup  dans  un  salon  avec  un  simple 
accompagnement  de  piano,  et  déplaisent  au  théâtre.  Le 
mauvais  effet  d'nn  air,  d'un  duo,  ou  de  tout  autre  mor- 
ceau, peut  venir  de  ce  que  le  caractère  n'est  point  ana- 
logue avec  l'objet  de  la  scène,  ou  de  ce  qu'ils  prolongent 
trop  une  situation  languissante,  ou  enfin  de  ce  qu'une 
idée  principale  et  saillante  n'a  pas  assez  de  développe- 
ment. La  première  chose,  lorsqu'on  veut  jugei'  d'un 
morceau  scénique,  est  donc  de  faire  la  part  du  mérite 
dramati(|iie,  et  celle  de  la  musique  proprement  dite.  Jl 
est  vrai  que  cette  musique,  si  bonne  qu'elle  puisse  être, 
ne  l'est  qu'autant  qu'elle  est  convenable  pour  la  place 
qu'elle  occupe;  mais  cela  ne  conclut  rien  pour  ou  contre 
le  mérite  du  compositeur;  car  il  est  des  musichens  de 
génie  qui  ne  sotit  point  nés  pour  écrire  de  la  musique 
scénique,  quoiqu'ils  soient  capables  de  produire  de  belles 
choses  d'un  autre  genre;  tandis  qu'il  en  est  d'autres  dont 
les  idées  sont  communes,  quoiqu'ils  aient  le  sentiment 
des  convenances  de  la  scène.  Cette  distinction  est  une 
des  plus  difficiles  à  faire;  car  il  faut,  pd^ur  y  parvenir, 
résister  à  des  impressions  puissantes  par  lesquelles  on  est 
dominé;  il  ne  faut  même  pas  se  persuader  qu'elle  soit 
possible  à  une  première  audition.  Les  musiciens  de  pro- 
fession, les  plus  expérimentés  même,  sont  rarement  capa- 
bles d'un  pareil  effort.  Cela  fait  voir  qu'il  faut  nous  dé- 


CHAP.    XXI.  LECn  ANALYSE.  271 

fier  des  jngemêns  précipités  que  l'amour-propre  nous 
portf  souvent  à  faire. 

Dès  qu'on  est  parvenu  à  dis'.ingiier  ce  qui  concerne  le 
mérite  scénique  de  celui  de  la  musique  en  eUe-même,  il 
faut  procéder  avec  ordre  à  l'examen  de  celle-ci.  Parmi 
ses  qualités,  une  des  plus  importantes  doit  être  la  va- 
riété; il  faut  donc  considérer  d'abord  si  elle  s'y  trouve. 
La  variété,  comme  la  monotonie,  peut  exister  de  beau- 
coup de  manières,  f^lle  est  remaî'qnable  surtout  dans  la 
forme  des  pièces.  Les  airs  d'un  opéra ,  par  exemple ,  peu- 
vent, comme  on  l'a  vu  précédemment,  se  présenter  sous 
la  forme  du  rondeau  ,  de  la  cavatine  ou  air  sans  reprise , 
de  l'air  à  un  seul  ,  à  deux  ou  à  trois  mouvcmens ,  alterna- 
tivement vifs  et  lents,  ou  enfin  sous  l'aspect  de  la  romance 
ou  desimpies  couplets.  Si  toutes  ces  formes,  ou  du  moins 
la  plupart  d'entre  elles,  se  présentent  dans  le  cours  d'un 
opéra  ,  on  éprouve,  sans  en  remarquer  la  cause  ,  l'effet 
de  cette  variété;  mais  si  les  mêmes  formes  se  reprodui- 
sent sans  cesse,  comme  celles  des  airs  à  trois  mouve- 
mens,  dans  la  plupart  des  opéras  italiens  modernes,  ou 
des  couplets  et  des  romances  dans  beaucoup  d'opéi"as 
français ,  l'effet  inévitable  sera  la  monotonie  ,  et  par 
suite  le  dégoûi. 

Ce  sera  pis  encore  si  les  duos  sont  coupés  dans  la 
forme  des  airs;  enfin,  si  la  nature  des  idées  a  de  la  si- 
militude, si  les  mélodies  sont  d'un  caractère  uniforme, 
si  les  moyens  de  modulation,  d'harmonie  ou  d'instru- 
mentation ont  de  l'analogie,  l'ennui  naîtra  sans  mil 
doute  d'une  composilion  dont  chaque  ]iarlie,  considérée 
isolément,  serait  cependant  digne  d'éloges.  Cet  effet  est 
plus  commun  qu'on  ne  pense.  Il  y  a  des  multitudes  de 
jolis  airs  qui  ont  du  succès  lorsqu'ils  sont  exécutés  isolée. 


272  SL>5ATiONS  JltSlCALES.  SECT.   IV. 

ment ,  et  qui  perdent  tout  leur  effet  au  théâtre ,  à  cause 
de  leur  ressemblance  avec  d'autres  morceaux  du  même 
ouvrage.  Après  Texamen  des  convenances  dramatiques  , 
celui  de  la  variélé  ou  de  la  ressemblance  des  formes  est 
donc  un  des  plus  nécessaires  pour  juger  du  mérite  d'une 
composition. 

Les  qualités  mélodiques  d'un  air  ou  d'un  duo  sont, 
comme  celles  de  la  conception  dramatique,  du  domaine 
du  génie,  et  ne  sont  soumises  qu'aux  seules  conditions 
de  plaire  ou  d'émouvoir;  pourvu  que  le  rhylhme  et  la 
quantité  périodique  des  phrases  en  soient  régulièrement 
construits,  le  reste  est  du  ressort  de  la  fantaisie,  et  ne 
peut  être  limité  par  l'autorité  de  qui  que  ce  soit.  Moins 
l'œuvre  du  musicien  a  de  rapport  avec  ce  qu'on  a  fait 
précédemment ,  plus  il  est  prêt  du  but  qu'il  veut  attein- 
dre. Il  ne  peut  plaire  à  tout  le  monde  ,  car  il  n'est  point 
d'artiste  qui  ait  joui  de  cet  avantage;  mais  personne  n'est 
en  droit  de  discuter  le  penchant  ou  l'éloignement  qu'on 
éprouve  pour  ses  productions ,  car  c'est  involontaire- 
ment qu'on  se  plaît  ou  qu'on  se  déplaît  à  entendre  une 
mélodie.  Il  est  pourtant  un  signe  certain  de  la  bonté  de 
celle-ci  ;  c'est  l'approbation  du  plus  grand  nombre 
qu'on  appelle  communément  l'ajjprobalion  générale.  Je 
n'entends  point  par-là  le  suffrage  des  habitués  de  cer- 
tain théâtre,  de  certaine  ville,  de  certain  pays;  mais 
celui  de  toutes  les  populations  policées,  consacré  par 
le  temps.  Ce  genre  d'approbation  n'a  jamais  été  donné 
aux  choses  médiocres,  et  c'e=t  en  ce  sens  qu'on  dit  avec 
beaucoup  de  justesse  que  l'opinion  publique  est  tou- 
jours équitable. 

Le  simple  amateur  de  musique,  c'est-à-dire  celui  qui 
n'a  de  rannori  avpr  cet  ar'  r[\ip  p?r  les  sepsnfinns  riu'il 


CHAP.  XXI.  LEUR   ANALYSE.     '  273 

lui  procure,  uianque  de  l'érudition  nécessaire  pour  sa- 
voir si  l'invention  de  certaines  mélodies  apparvieni  à 
l'auteur  d'un  opéra  où  elles  se  trouvent  placées,  oy  si 
elles  ne  sont  qu'un  plagiat;  mais  c'est  un  soin  dont  il  ne 
doit  guère  s'embarrasser.  Les  plagiats  peuvent  se  diviser 
en  deux  espèces  :  dans  la  première  se  rangent  ces  rémi- 
niscences vulgaires  où  l'auteur  reproduit  sans  pudeur  ce 
ijiie  vingt  autres  ont  fait  avant  lui,  sans  se  donner  la 
peine  de  déguiser  ses  larcins,  ou  peut-être  sans  pouvoir 
le  faire.  Le  mépris  public  est  ordinairement  le  prix  de 
ces  choses,  et  l'oubli  profond  dans  lequel  elles  ne  tar- 
dent pointa  tomber  est  le  juste  châtiment  de  ceux  qui 
méprisent  assez  leur  art  pour  le  traiter  avec  si  peu  de 
conscience.  L'autre  espèce  de  plagiat  est  celle  que  les 
plus  grands  génies  n'ont  point  dédaignée.  Elle  consiste  à 
prendre  dans  des  ouvrages  ignorés  de  bonnes  choses 
dont  l'art  peut  s'enrichir,  et  à  les  utiliser  en  les  animant 
comme  fait  le  î,énie  de  tout  ce  qu'il  entreprend.  Les 
érudits,  ou  si  l'on  veut  les  pédans,  ne  manquent  jamais 
de  découvrir  les  sources  où  l'on  a  puisé,  et  d'en  faire 
grand  bruit;  mais  le  public  n'y  prend  point  garde  pourvu 
qu'on  l'amuse,  et  il  a  raison.  On  n'a  que  trop  délaissé 
de  belles  phrases  et  des  mélodies  auxquelles  il  ne  man- 
que que  d'être  habillées  un  peu  plus  à  la  moderne  pour 
produire  les  plus  beaux  effets  ;  c'est  les  sauver  du  nau- 
;  frage  c|ue  de  les  reproduire  dans  de  nouvelles  composi- 
tions en  leur  prèlanc  des  grâces  nouvelles.  Quoi  qu'eu 
puissent  dire  les  savans,  un  amateur  qui  ne  veut  ana- 
lyser ses  sensations  que  pour  leur  donner  plus  d'activité 
fera  donc  bien  de  ne  point  mettre  sa  tête  à  la  torture 
pour  découvrir  des  ressemblances  qui  troubleraient  inu- 


274  «ENSATIONS  MUSICALES.  SECT.  IT. 

tilement  ses  plaisirs ,  el  qui  finiraient  par  lui  en  faire 
trouver  d'imaginaires. 

Une  des  erreurs  dans  lesquelles  tombent  le  plus  com- 
munément les  gens  du  inonde,  lorsqu'ils  assistent  à  U 
représentation  d'un  opéia  nouveau,  consiste  à  confon- 
dre les  ornemens  que  les  chanteurs  ajoutent  aux  mélo- 
dies avec  ces  mêmes  mélodies,  et  à  se  persuader  que 
c'est  dans  ces  ornemens  que  consiste  le  mérite  de  la  mu- 
sique. Le  fond  sur  lequel  ces  broderies  sont  placées 
reste  souvent  inaperçu,  jusque  là  qu'il  est  arrivé  à  cer- 
tains habitués  d'un  théâtre  de  ne  plus  reconnaître  un 
air,  parce  qu'il  était  chanté  d'autre  manière  que  celle 
qui  leur  était  familière.  Un  peu  d'attention  accordée  k 
la  contexture  des  piirases  mélodiques  donnera  bientôt 
l'habitude  de  les  séparer  de  toutes  les  fioritures  dont 
elles  sont  habillées  par  les  chanteurs;  car  ces  fioritures 
n'ont  aucun  sens  musical.  Lorsqu'on  applaudit  à  ou- 
trance un  chanteur  pour  ses  tours  de  force,  ce  n'est 
pas  qu'elles  procurent  le  moindre  plaisir,  mais  c'est 
parce  qu'elles  étonnent.  Il  ne  s'agit  donc  que  de  remar- 
quer dans  le  ciiant  ce  c|ui  présente  à  l'oreille  un  sens 
complet,  susceptible  d'être  du  moins  décomposé  en  élé- 
uiens  de  phrases.  Avec  cette  habitude,  on  ne  confondra 
pas  ce  qui  n'est  que  le  résultat  de  la  flexibilité  du  go- 
sier avec  ce  qui  appartient  au  génie  du  compositeur.  Il 
est  des  musiciens  qui  affirment  que  les  mélodies  vagues 
et  peu  remarquables  sont  les  seules  qui  se  prêtent  à  re- 
cevoir les  broderies  des  chanteurs,  et  ils  citent  pour 
preuve  de  la  réalité  de  leur  opinion  la  musique  des  opé- 
ras de  Mozart ,  dans  la(|uellc  le  plus  intrépide  faiseur  de 
notes  ne  peut  rien  introduire  d'étranger;  mais  c'est  tou- 


C:U\f.   \X1.  LE1  r.    ANALTSK.  275 

jours  par  un  Taux  raisonnement  qu'on  conclut  du  par- 
ticulier au  e;énéral.  Les  mélodies  de  Mozart,  qui  sont 
ravissantes  d'expression  ,  sont  presque  toutes  empreintes 
d'un  caractère  harmonique;  c'est-à-dire  qu'elles  lais- 
sent soupçonner  par  la  succession  de  leurs  sons  l'har- 
monie dont  elles  doivent  être  accompagnées;  il  en  ré- 
sulte que  le  chanteur  est  retenu  dans  des  bornes  étroites 
par  la  crainte  de  faire  entendre  dans  ses  fioritines  des 
sons  étrangers  à  cette  harmonie.  Ajoutez  à  cela  que  ces 
mélodies,  tout  admirables  qu'elles  sont,  n'ont  pas 
une  construction  favorable  à  l'émission  libre  et  na- 
turelle de  la  voix,  comme  les  canlilènes  italiennes;  le 
génie  prodigieux  du  compositeur  s'y  manifeste  toujours, 
mais  on  y  voit  jusqu'à  l'évidence  que  l'art  du  chant  ne;^ 
lui  était  pas  familier.  En  résumé,  il  n'est  point  vrai 
qu'une  mélodie  est  médiocre  par  cela  seul  qu'on  peut  la 
broder  et  la  varier  avec  facilité.  Il  y  a  sans  doute  d'ex- 
cellente musique  qui  n'admet  point  de  broderies,  mais 
c'est  par  d'autres  motifs  que  cette  règle  qu'on  veut  don- 
ner. Il  serait  plus  juste  de  dire  qu'il  est  des  mélodies 
qui  n'ont  pas  été  composées  pour  admettre  des  fiori- 
tures, et  d'autres  qui  ont  été  faites  pour  favoriser  le 
chanteur;  les  unes  et  les  autres  peuvent  être  excellentes, 
chacune  en  son  genre;  un  amateur  attentif  ne  s'y 
trompera  jamais.  Si  le  chanteur  se  borne  à  faire  enten- 
dre la  mélodie  dans  toute  sa  simplicité,  il  pourra  en 
conclure  qu'tlle  n'est  point  de  nature  à  être  ornée;  car 
les  exécntans  résistent  rarement  au  désir  de  faire  briller 
leur  habileté.  Il  est  cependant  des  cas  où  ils  ont  assez 
de  goùl  pour  sentir  que  le  chant  simple  vaut  mieux  que 
ce  qu'ils  pourraient  y  mettre;  mais  cela  est  fort  rare. 
D'après  tout  ce  qui  vient  d'être  dit,  on  voit  que, 


27G  ïESliATIOS^S  MUSTCAl.lîS.  srCT.    IV. 

pour  se  former  une  opinion  des  qualités  d'un  air  ou 
d'un  duo,  il  est  nécessaire:  1°  de  le  considérer  d'abord 
sous  le  rapport  des  convenances  scéniques  ;  2°  d'en  com- 
parer la  forme  avec  celle  des  autres  morceaux  du  même 
{:enre  qui  se  trouvent  dans  le  même  ouvrage ,  pour  s'as- 
surer que  les  conditions  de  la  variété  y  sont;  3°  d'en 
constater  la  régularité  de  rhythme  et  de  quantité  symé- 
trique; 4»  de  remarquer  si  la  mélodie  laisse  des  im- 
jîressions  de  nouveauté  ou  de  banalité;  5°  et  enfin  d'en 
séparer  l'œuvre  du  compositeur  de  ce  qui  n'est  que 
l'effet  de  l'habileté  du  chanteur.  Au  moven  de  ces  ana- 
lyses on  pourra  raisonner  de  la  bonté  ou  des  défauts 
d'un  morceau  de  cette  espèce  de  manière  à  n'émettre 
([ue  des  opinions  fondées.  Il  est  sans  doute  d'autres  cho- 
ses qui  entrent  dans  la  conception  d'un  air  ou  d'un  duo  : 
l'harmonie  plus  ou  moi-ns  bien  choisie,  le  système  d'ins- 
irumcnlption  plus  ou  moins  élégant  et  convenable,  sont 
aussi  des  qualités  qui  méritent  d'être  examinées;  mais 
elles  ne  peuvent  entrer  dans  l'éducation  de  l'oreille  qu'a- 
près les  objets  dont  je  viens  de  parler;  car  les  percep- 
tions de  ceux-ci  sont  plus  simples  que  celles  des  autres. 
Je  ne  doute  pas  qu'en  habituant  l'oreille  et  le  jugement 
;i  faire  ces  analyses  avec  promptitude,  on  ne  parvienne 
a  les  familiariser  avec  les  combinaisons  de  l'harmonie. 
Ouant  au  svstème  d'instrumentation,  il  se  trouvera  sans 
doute  parmi  mes  lecteurs  quelque  habitué  des  théâtres 
lyriques  doué  de  sensibilité  musicale;  eh  bien!  qu'il  exa- 
mine ce  qui  s'est  passé  en  lui  depuis  le  temps  où  il  en- 
tend de  la  musique  dramatique;  il  verra  que  son  oreille 
distingue  maintenant  dans  l'orchestre  une  foule  de  dé- 
tails qui  étaient  nuls  pour  lui  dans  l'origine,  et  qu'il 
jouit  des  jolis  traits  de  violon,  de  flûte  ou  de  hautbois, 


»tiAi'.  XXI.  Ltun  ANAi.ysK.  27  > 

qui  d'abord  frappèrent  inutilement  son  ouïe.  Il  n'est 
rien  que  nous  ne  puissions  apprendre  à  voir  ou  à  en- 
tendre, par  le  seul  fait  de  la  volonté  de  regarder  ou  d'é- 
couter. 

A  mesure  que  les  voix  se  multiplient  avec  les  person- 
ur.ges  et  que  les  combinaisons  se  compliquent ,  il  devient 
plus  difficile  d'analyser  les  sensations;  de  là  la  peine 
(pTon  éprouve  à  se  faire  une  opinion  des  quatuors , 
n.orceaux  d'ensemble  et  finales,  aux  premières  repré- 
stnlations  d'un  opéra;  on  n'y  est  ordinairement  frappé 
qr.e  d'une  seule  chose,  l'intérêt  général;  mais  le  plus 
souvent  ce  sont  des  considérations  dramatiques  qui  dé- 
terminent les  jugemens  qu'on  en  porte.  Ces  considéra- 
li  ns  sont  en  effet  d'une  haute  importance;  car  plus  le 
nombre  des  personnages  qui  sont  en  scène  devient  con- 
sidérable, plus  il  est  nécessaire  que  la  scène  soit  animée. 
A  cet  égard,  il  est  bon  de  faire  quelques  observations. 

Depuis  qu'on  a  imaginé  les  morceaux  d'ensemble  et 
les  finales,  on  a  varié  sur  leur  but  dramatique  ;  mais,  en 
général ,  on  les  a  considérés  comme  des  moyens  d'ac- 
noîîre  l'intérêt  par  des  oppositions  de  caractères  et  de 
jiassions.  D'accord  sur  ce  point,  les  musiciens  ne  l'ont 
pas  élé  sur  les  moyens.  Les  uns,  considérant  que  l'action 
doit  être  d'autant  plus  languissante  que  le  nombre  des 
jicrsonnages  mis  en  scène  est  plus  grand,  si  ceux-ci  n'y 
prennent  une  part  active ,  ont  voulu  que  les  quatuors  , 
sextuors  ou  finales  eussent  une  marche  rapide  :  tel  est 
le  système  des  compositeurs  français  et  allemands;  les 
autres,  au  contraire,  ont  pensé  qu'il  est  nécessaire  de 
j.rofitcr  de  l'occasion  où  beaucoup  de  chanteurs  sont 
réunis  pour  produire  de  beaux  effets  de  musique,  au 
lisijue  de  l'aire  languir  l'action  dramatique;  de  là  les 

2-i 


278  SENbATlOWS  MUSICALES.  SECT.  lY. 

longs  concei'ts  qu'on  trouve  dans  les  finales  ou  les  autres 
morceaux  d'ensemble  de  l'école  italienne  moderne.  Ces 
deux  systèmes  ont,  parmi  les  amateurs  et  les  artistes, 
beaucoup  de  partisans  et  de  censeurs  ;  les  uns,  entraînés 
par  leur  goût  pour  les  convenances  dramatiques  et  leur 
pencbant  pour  ce  qui  est  raisonnable,  les  autres,  domi- 
nés par  leur  sensibilité  pour  la  musique;  car  toute  la 
différence  d'opinion  réside  en  deux  systèmes  différens, 
qui  ont  leurs  qualités  et  leurs  défauts.  Le  système  dra- 
matique est  d'un  effet  plus  sur  à  la  première  représenta- 
tion d'un  opéra,  surtout  en  France,  parce  que  l'on  s'y 
occupe  pi  js  du  sujet  de  la  pièce  et  de  la  marche  de  l'ac- 
tion que  de  la  musique;  mais  dans  la  suite  on  voit  sou- 
vent que  le  système  musical  l'emporte,  et  qu'il  donne 
aux  succès  plus  de  consistance. 

D'après  ce  qui  vient  d'être  dit,  il  est  évident  que  les 
sensations  sont  complexes  dans  l'audition  des  morceaux 
d'ensemble  et  des  finales;  il  est  donc  à  peu  près  impos- 
sible de  les  analyser  d'abord;  les  artistes  les  plus  expé- 
rimentés n'y  parviennent  pas  toujours;  il  leur  arrive 
même  souvent  de  prononcer  à  ce  sujet  des  jugemens 
qu'ils  désavouent  ensuite.  Ce  n'est  qu'après  avoir  en- 
tendu deux  ou  trois  fois  les  morceaux  de  cette  espèce 
qu'on  peut  se  faire  une  idée  nette  de  leur  construction 
et  en  apprécier  le  mérite.  Tout  ce  qui  concerne  leur 
partie  mélodique  s'analyse  de  la  même  manière  que  dans 
les  airs  et  les  duos;  mais  il  est  une  condition  de  per- 
fection pour  ces  morceaux  qui  doit  offrir  plus  de  diffi- 
cultés à  quiconque  n'a  point  fait  une  élude  sérieuse  de 
l'art;  c'est  la  disposition  des  voix  et  les  mouvcmens  con- 
trastés qui  en  résultent.  Pour  vaincre  cette  difficulté,  il 
sst  nécessaire  de  séparer  d'abord  ce  qui   appartient  à 


CHAP.  XXI.  LEUR  ANALTSE,  279 

l'expression  dramatiqne  et  à  la  mélodie  du  reste  des  par- 
ties constitnlivcs  du  morceau,  et  de  fixer  son  opinion  sur 
CCS  objeîs;  portant  ensuite  et  successivement  son  atten- 
tion sur  les  détails  du  mouvement  des  voix,  des  oppo- 
sitions de  caractère,  d'harmonie  et  d'instrumentation, 
on  pourra  se  former  peu  à  peu  des  notions  de  toutes  ces 
choses,  et  l'on  finira  par  être  si  bien  familiarisé  avec 
elles  qu'on  n'éprouvera  plus  de  difficulté  à  les  réunir  et 
à  en  apprécier  l'ensemble,  au  lieu  de  n'en  recevoir  qu'un 
plaisir  vague,  tel  que  l'éprouve  le  public,  qui  n'a  point 
appris  à  réfléchir  ses  sensations. 

La  nuisique  d'église  est  plus  simple  que  la  musique 
dramatique  sous  de  certains  rapports,  et  plus  compliquée 
sous  d'autres  points  de  vue.  Dans  son  origine,  ce  n'est 
que  l'expression  d'un  sentiment  religieux  dégagé  de  pas- 
sion,  et  conséquemment  fort  simple.  Mais  le  besoin  que 
nous  avoiis  d'émotions  n'a  pas  permis  aux  musiciens  de 
rester  long-temps  dans  des  limites  si  étroites.  Les  textes 
sacrés ,  les  ])saumes,  les  proses  contiennent  des  récits 
douloureux,  des  élans  de  joie,  et  un  langage  figuré  em- 
preint de  toute  la  pompe  de  l'Orient;  le  sentiment  pieux 
qu'enveloppent  ces  figures  et  ce  langage  a  disparu  aux 
yeux  de  beaucoup  de  compositeurs  pour  ne  leur  laisser 
apercevoir  que  la  possibilité  d'exprimer  ces  douleurs, 
ces  joies  du  roi-prophète ,  ou  les  événemens  retracés 
dans  le  symbole  des  apôtres.  Dès  lors,  il  a  fallu  avoir 
recours  aux  moyens  ordinaires  employés  dans  la  mu- 
sique dramatique ,  et  s'en  servir  avec  les  modifications 
d'un  style  plus  sévère.  Ces  innovations  ont  trouvé  des 
censeurs  et  des  partisans  comme  toutes  les  nouveautfe 
qu'on  introduit  dans  les  arts.  Le  parti  le  plus  sage  ,  dans 
res  sortes  de  disputes  ,  est  de  considérer  <iu'il  y  a   de^ 


280  SENSATIONS  MUSICALES.  SECT.  IV. 

beautés  et  des  défauts  inhérens  à  cha(|ue  genre,  et  qu'il 
n'est  rien  dont  un  homme  de  génie  ne  puisse  tirer  parti. 
Il  ne  peut  pas  exister  de  musique  qui  ne  suive  la  marche 
du  goût  général  et  qui  soit  absolument  étrangère  aux 
progrès  du  genre  dramatique  ;  car  cekii-ci  est  d'un  usage 
si  général  qu'il  est  connu  de  tout  le  monde,  et  qu'il  est 
nécessairement  le  régulateur  des  autres.  Après  avoir 
éprouvé  toutes  les  émotions  du  théâtre,  on  est  peu  disposé 
à  goûter  une  musique  simple  et  calme  pendant  toute  la 
durée  d'un  office;  les  compositeurs  ont  été  entraînés  par 
la  nécessité  à  faire  passer  dans  leur  musique  sacrée  un 
peu  de  l'expression  mondaine  de  l'opéra.  Toutefois,  il 
ne  faut  pas  croire  que  la  musique  d'église  calme  et  ma- 
jestueuse ne  puisse  être  goûtée  aujourd'hui.  Qu'on 
prenne,  par  exemple,  les  nicsscs  ou  les  motets  de  Pales- 
trina,  ou,  dans  un  autre  genre,  les  psaumes  de  Mar- 
cello, et  l'on  verra  qu'avec  une  bonne  exécution  celle 
musique  agira  sur  un  auditoire  sensible,  comme  pourrait 
le  faire  un  style  plus  moderne,  mais  avec  des  effets  dif- 
férens. 

Pour  se  disposer  à  goûter  de  la  musique  religieuse 
d'un  caractère  grave  et  antique,  il  faut  d'abord  se  dé- 
pouiller de  ses  habitudes  et  se  bien  pénétrer  de  cette 
vérité  que  l'art  a  plus  d'un  moyen  pour  arriver  jusqu'au 
cœur;  car  les  obstacles  que  nous  opposons  par  notre  vo- 
lonté à  certaines  émotions  contre  lesquelles  nous  avons 
des  préjugés  les  empêchent  de  naître.  Une  fois  mis  dans 
une  disposition  d'attention  et  de  désir  d'éprouver  du 
plaisir,  nous  ne  tardons  guère  à  en  ressentir  si  l'ouvrage 
que  nous  écoutons  renferme  des  beautés  réelles,  quoiqsie 
ces  beautés  soient  d'un  ordre  étranger  à  nos  idées  ordi- 
naires. II  ne  s'agit  doue  plus  que  d'analyser  nos  sensa- 


CHAI'.   \\I.  1.KUR  ANALYSE.  281 

lions,  et  pour  cela  nous  devons  procéder  comme  pour 
la  inusii|iie  d'un  autre  genre. 

Les  cauliKnes  de  la  niusi(|ue  religieuse  sont  rarement 
aussi  faciles  de  perception  (|iie  celles  de  la  musique  di  a- 
mali'pie,  parce  qu'elles  sont  plus  intimement  liées  à  l'har- 
monie. Ajoutez  à  cela  qu'elles  sont  le  plus  souvent  mê- 
lées d'imitations,  de  fugues  et  de  toutes  les  formes  scien- 
tidcpies  dont  on  a  vu  le  détail  précédemment  ;  aussi  n'est-il 
guère  possible  de  classer  dans  la  mémoire  celte  espèce  de 
mélodie,  comme  on  le  fait  de  celles  des  opéras.  A  cause 
de  cette  difficulté,  il  faut  percevoir  en  masse  les  impres- 
sions de  la  musique  religieuse,  c'est  pourquoi  elle  exige 
plus  d'aptitude  à  analyser  l'harmonie.  Ce  n'est  donc  pas 
par  ce  genre  de  musique  qu'il  faut  commencer  l'éduca- 
tion de  l'oreille.  Celle-ci  ne  pouvant  devenir  habile  que 
par  degrés,  il  est  nécessaire  de  ne  lui  faire  contracter 
l'habitude  de  porter  des  jugemens  sur  la  musique  sa- 
crée qu'après  qu'elle  se  sera  familiarisée  avec  le  style 
dramatique.  Aux  études  sur  les  masses  d'harmonie  suc- 
céderont insensiblement  les  observations  sur  les  formes 
scientiSques;  et  pour  peu  qu'on  y  prête  d'attention  ,  ou 
finira  par  avoir  des  notions  suffisantes  de  ces  combinfà- 
sons,  qui  sont  caraclérislicpies  du  style  religieux. 

Le  dernier  degré  de  l'éducation  musicale  d'un  ama- 
teur qui  n'a  point  fait  d'études  sérieuses  de  la  musique  , 
est  le  style  instrumental.  Aussi  voit-on  peu  de  personnes 
étrangères  à  cet  ait  qui  aiment  à  entendre  des  quatuors  , 
quinieltis  ou  autres  morceaux  qui  n'ont  pas  pour  objet 
de  faire  briller  l'habileté  de  l'instrumentiste.  Dans  ce 
genre  de  musique,  le  but  n'est  point  marqué,  l'objet  n'est 
pas  sensible.  Délecter  l'ouïe  est  certainement  l'un  des 
principes  de  la  mus^ique  inâtrumenlale  comme  de  toute 

21. 


282  SENSATIONS  MtrsiCALES.  8ECT.  IV. 

autre;  mais  il  faut  aussi  qu'elle  émeuve;  elle  a  son  lan- 
gage d'expression  particulier  qu'aucun  antre  n'inter- 
prète; il  faut  donc  deviner  ce  langaf^e  au  lieu  de  le  com- 
prendre, et  cela  demande  de  l'exercice.  Je  dirai  de  la 
musique  inslrumc  rtile  ce  que  j'ai  déjà  eu  occasion  de 
répéter  plusieurs  fois:  il  faut  avoir  la  patience  de  l'écou- 
ter sans  prévention  ,  bien  même  qu'on  ne  s'y  plaise  pas; 
avec  de  la  persévérance  on  finira  par  la  goûter,  et  dès 
lors  on  pourra  commencer  à  l'analyser;  car  ce  genre  dé 
musique  a  aussi  ses  mélodies,  son  rhythme,  ses  quantités 
symétriques,  ses  variétés  de  forme  ,  ses  effets  d'harmonie 
et  ses  modes  d'instrumentation.  En  y  appliquant  les  pro- 
cédés de  l'analyse  diamatique,  on  en  acquerra  des  no- 
tions comme  de  toute  autre  espèce  de  ïnusique. 


CHAPITRE  XXII. 

S'il  est  nlile  S'analyser  les  sensations  quela  musique  faft  naître. 

Je  *uis  certain  que  Ijeauconp  de  lecteui-s,  en  parcou- 
rant le  chapitre  qui  précède,  se  seront  dit  :  «  Que  pré- 
«  tend  cet  homme  avec  ses  analyses?  Veut-il  donc  gâter 
«  nos  jouissances  par  un  travail  continuel,  incompatible 
«  avec  les  plaisirs  que  procurent  les  arts?  Ceux-ci  doivent 
«  être  sentis  et  non  analysés.  Loin  de  nous  ces  observa- 
«  lions  et  ces  comparaisons,  bonnes  tout  au  plus  pour 
«  ceux  d.Tnl  l'ame  sèche  ne  peut  trouver  autre  chose  dans 
«  la  musifiue,  ou  pour  des  professeurs  de  contrepoint. 
«  Nous  voulons  jouiret  non  juger  ;  doncnous  n'avons  pas 
«  besoin  de  raisonnemens,  x  C'est  fort  bien.  A  Dieunçi 


r:nAP.  XXII.  VTiLiTK  Dï,  l'analysf..  283 

plaise  que  je  veuille  troubler  vos  plaisirs;  mais  à  peine 
aiirez-vous  prononcé  ces  paroles  que,  si  vous  allez  au 
théâtre,  vous  allez  vous  écrier:  Quelle  charmante  mu- 
sique! ou  bien:  Quelle  déleslahle  composition!  C est 
ainsi  qu'on  prétend  jouir  d'ordinaire  sans  porter  de  ju- 
geniens.  L'orsjueil  des  ij^norans  n'est  pas  moins  réel  que 
celui  des  savans;  mais  il  se  cache  derrière  le  manteau  de 
la  paresse. 

Se  persuaderait- on,  par  hasard,  que  je  suis  assez  privé 
de  sens  pour  vouloir  qu'on  substitue  l'analyse  des  pro- 
duits des  arts  aux  plaisirs  qu'ils  donnent?  Non,  non, 
telle  n'a  point  été  ma  pensée;  mais  certain  qu'on  ne  voit 
que  ce  qu'on  a  appris  à  regarder,  qu'on  n'entend  que  ce 
qu'on  sait  écouter,  que  nos  sens,  enfin,  et  par  suite  nos 
sensations,  ne  se  développent  que  par  l'exercice,  j'ai 
voulu  démontrer  comment  on  dii  ige  celui  de  l'ouïe  pour 
le  rendre  plus  habile  à  saisir  toutes  les  impressions  de  la 
musique;  je  n'ai  pas  cru  devoir  ajouter  que  les  exercices 
cessent  d'eux-mêmes  dès  que  l'organe  est  instruit,  parce 
que  cela  s'entend  de  reste;  il  n'est  plus  question  de  se 
guider  par  des  lisières  ni  de  s'appuyer  sur  les  meubles  dès 
qu'on  sait  marcher.  Ces  analyses  que  j'ai  présentées 
comme  nécessaires  pour  juger  des  qualités  de  la  musique 
ou  de  ses  défauts,  ces  analyses,  dis-je,  se  font  avec  la 
rapidité  de  l'éclair,  dès  qu'on  en  a  contracté  l'habitude; 
elles  deviennent  inhérentes  à  notre  manière  de  sentir, 
au  point  de  se  transformer  elles-mêmes  en  sensations. 
Eh  !  qu'est-ce,  je  vouis  prie,  que  ces  analyses  en  compa- 
raison de  celles  que  fait  un  musicien  habile?  Il  ne  se 
borne  point,  lui,  à  saisir  quelques  détails  de  formes,  à 
distinguer  des  mélodies  plus  ou  moins  bien  rhythmées, 
une  expression  plus  ou  moins  dramatique,  etc.;  le  mu- 


284  SENSATIONS  MUSICALES.  6ECT.  IV- 

sicien  entend  tous  les  détails  de  l'harmonie,  remarque 
un  son  qui  dans  un  accord  ne  se  résout  pas  cnnvena- 
hlemer.t,  ou  un  heureux  emploi  d'une  dissonance  inat- 
tendue, d'une  modulation  inusitée,  etde  toutes  les  finesses 
de  la  simultanéité  ou  de  la  succession  des  sons;  il  distin- 
gue les  diverses  sonorités  d'instrumens,  applaudit  osi 
censure  des  innovations  de  formules  ou  des  abus  de 
moyens;  enfin,  les  immenses  détails  de  tout  ce  qui  com- 
pose les  grandes  masses  musicales  sont  présens  à  son  ci- 
prit  comme  s'il  les  examinait  avec  réUexion  sur  le  papier. 
Croit-on  qu'il  fasse  pénibleuient  toutes  ces  remarques, 
que  cela  l'empêche  de  goûter  l'effet  général  de  la  com- 
position, et  qu'il  eu  éprouve  moins  de  plaisir  que  celui 
qui  s'abandonne  en  aveugle  à  ses  sensations?  ?Jul!e- 
ment.  Il  ne  pense  seulement  pas  à  toutes  ces  choses; 
elles  sont  présentes  à  sa  pensée,  mais  comme  par  enchai;- 
tement,  sans  qu'il  le  sache,  sans  même  qu'il  s'en  oc- 
cupe. 

Merveilleux  effet  d'une  organisation  perfectionnée  j).ir 
l'élude  et  par  l'observation!  Tout  ce  qui  semblerait  de- 
voir affaiblir  la  sensation,  pour  augmenter  la  part  de  l'in- 
telligence, tourne  au  profit  de  cette  même  sensation.  TS'ni 
doute  qu'une  musique  médiocre  ou  mauvaise  ne  soit 
plus  pénible  à  entendre  pour  un  artiste  habile  que  pour 
l'homme  du  monde  incapable  d'en  apercevoir  les  dé- 
fauts; sous  ce  rapport  celui-ci  a  l'avantage;  mais  aussi 
combien  les  jouissances  du  premier  sont  plus  vives,  si 
toutes  les  conditions  désirables  se  trouvent  réunies  da.ns 
une  composition!  Ces  conditions  ne  sont  nécessaires 
qu'autant  qu'elles  concourent  à  la  perfection;  mais  la 
perfection  résulte  de  choses  si  délicates,  si  fugitives, 
qu'on  ne  peut  la  sentir  qu'autant  que  ces  choses  sont  à  I51 


(  u\f.  \xii.  liTii.iTi'  DE  i,'a:<altse.  28,> 

portée  tle  l'iiilelligeuce  et  iju'on  s'est  familiarist;  aNcc 
elles.  De  là  vient  (jiie  les  simples  cm  ieiix  n'aperçoi\ent 
point  la  clilTéience  ([iii  se  trouve  entie  un  tableau  de  Ra- 
pliaël  et  un  ouvrajje  du  Coiiége  ou  du  Guide.  On  ne 
peut  nicllre  en  doute  (jue  la  perfection  ne  procure  des 
plaisirs  plus  purs  que  ce(jui  n'en  n'est  que  l'à-peu-près; 
mais  la  perfection  ne  se  voit  que  lorsqu'on  a  appris  à  la 
voir;  il  faut  donc  l'apprendre.  Qu'on  retourne  la  ques- 
tion comme  on  voudra,  il  faudra  en  venir  à  cette  con- 
clusion. 

Apprendre  à  faire  des  analyses  du  principe  des  sensa- 
tions musicales  est  sans  doute  une  étude  qui  détourne 
rattention  de  ce  qui  pourrait  flatter  les  sens;  cette  élude 
trouble  le  plaisir  qu'on  éprouverait  à  entendre  delà  mu- 
sique; mais  qu'importe,  si  l'on  ne  fait  que  suspendre  ce 
plaisir  pour  le  rendre  plus  vif?  Chaque  jour  l'étude  de- 
viendra moins  pénible,  dès  qu'on  en  aura  contracté 
l'habitude,  et  le  moment  viendra  où  l'analyse  se  fera 
sans  (ju'on  y  prenne  garde,  et  sans  que  les  sensations  en 
soient  troublées.  Si  l'on  pouvait  se  rendre  compte  des 
changemens  qui  s'opèrent  dans  la  manière  de  sentir  et 
apprécier  les  beautés  et  les  défauts  des  œuvres  musi- 
cales par  le  seul  fait  de  l'habitude,  et  indépendam- 
ment de  toute  connaissance  positive,  on  remarquerait 
que,  non-seulement  le  goût  se  modifie,  mais  qu'on  finit 
par  faire  jusqu'à  certain  point  de  ces  analyses  dont  je 
viens  de  parler,  sans  le  savoir,  et  sans  en  connaître  les 
règles.  De  là  vient  que  des  habitués  des  théâtres  lyri- 
ques ont  un  jugement  plus  sûr  que  ceux  qui  n'assistent 
aux  représentations  d'opéras  que  de  loin  en  loin.  [I  est 
évident  que  ce  qu'on  fait  sans  guide,  ou  peut  le  faire 
mieux  si  Ton  est  guidé.  Tout  ce  qu'on  débite  dans  le 


58B  fEïTSATTO!<S   MfSICALKS.  »ECT.  It. 

monde  et  dans  les  livres  sur  la  sensibilité  naturelle  pour 
les  arts,  et  sur. l'altération  de  celte  sensibililë  par  l'ob- 
servation, n'est  ni  fondé,  ni  raisonnable;  mais  la  paresse 
s'accommode  de  ces  niaiseries. 


CONCLUSION. 

Ai-je  mis  dans  ce  livre  tout  ce  qu'on  espérait  y  trou- 
ver? je  l'ignore.  Cela  est  d'autant  moins  vraisemblable 
que  tout  le  monde  n'y  cliercbera  pas  les  mêmes  choses. 
En  commençant  à  le  parcourir,  la  plupart  des  lecteurs 
auront  des  opinions  ,  des  préjugés,  des  affeclions  ou  des 
antipathies.  Comment  espérer  de  réformer  tout  d'abord 
ce  qui  ne  s'use  qu'avec  le  temps  ?  Mais  ce  qui  ne  sera  pas 
l'effet  immédiat  de  la  lecture  du  livre  sera  le  résultat 
des  réflexions  qu'il  auia  provoquées.  Je  crois  avoir  pé- 
nétré dans  les  causes  de  l'ignorance  volontaire  où  l'on 
reste  à  l'égard  delà  musique;  pour  la  faire  disparaître, 
je  n'ai  demandé  qu'un  peu  d'attention;  les  plus  rebelles 
iinirontpar  me  l'accorder,  fût-ce  même  sans  le  savoir. 


rtw. 


DICTIONNAIRE 

DES  MOTS 
DONT  L'USAGE  EST  LE  PLUS  HABITUEL 

DANS  LA  MUSIQUE. 


A 


ABRÉVIATIONS.  Signes  par  lesquels  on  représente  dan?  la  nota- 
tion de  la  musiejrie  cerfaiiies  suites  de  sons  et  même  des  phrases 
entières.  Les  abréviations  diminuent  le  travail  du  copiste,  et  fa- 
cilitent quelquefois  \,i  lecture  de  la  musique. 

ACtlOCATURA.  Mot  italien  qui  n'a  j)oiut  d'équivalent  dans  la  lan- 
gue française;  il  indique  une  sorte  d'ornement  employé  dans 
l'exécution  de  la  musique  de  piano  ou  de  liarjie,  lequel  consiste  à 
faire  entendre  suircessivement  et  rapidement  les  noies  d'un  ac- 
cord au  lieu  de  les  frapper  enseuibie. 

ACCIDEINTEL  (signe).  On  appelle  si\^nes accidentehles^,  [,,ou  t], 
qui,  n'étant  jioiut  placé.s  près  de  la  clef,  se  rencontrent  dans  le 
cours  d'un  morceui  de  musique. 

ACCOMPAGNATEUR.  Celui  qui  accompagne  nn  chanteur  ou  un 
iusti'umeutiste  sur  le  piano  ou  sur  l'orgiie. 

ACCOMPAGNEMENT.  Art  d'accompagner.  Il  se  divise  en  plusieurs 
espèces.  La  j)reunèie  est  VaccompagnemenC  plaqué,  qui  consiste 
à  jouer  avec  la  mi)in  gauche  sur  le  ilavier  la  basse  écrite  .•sur  le 
papier  de  musique  (  voy.  basse  ),  pendant  qu'on  exéoiife  aver  la 
main  droite  les  accord,  indiqués  par  des  chiffres  au-dessus  de 
cette  basse  (voy.  accoidt  et  cMffies),  La  deuxième  est  Vacçompa- 


238  DicTio>r?A(Ri 

gnementfiguri  dan»  lequel  la  mélodie  se  joint  à  l'harmonie  (voy. 
'mélodie  et  harmonie).  L;.  troisième  est  Y  accompagnement  de  la  par- 
ttion  (voy.  parution),  qui  consi-te  a  j.-uer  sinmllani-raent  sur  le 
piano  Inu'tes  les  parties  d'orchestre  (voy.  orch?stre). 

Accompagnement.  On  appelait  aussi  autrefois  de  ce  nom  ce  qu  on 
désigne  aujourd'hui  par  celui  d'inslrumenlalion  (voy.  mslrumen- 

tuliun).  , 

ACCORD.  Réunion  de  plusieurs  sons  qui  s'accordent  ensera.ile,  qui 

pl.iisent  à  l'oreille. 

ACCORDS  C0^SO^KA^'S.Les  accords  consonuaossontceuxdans 
lesquels  il  n'entre  que  des  intervalles  agréables  ai)pelés  conson- 
nances  (voy.  intervalle  et  consonnanvei). 

ACCORDS  DISSONANS.  Les  acords  di  sonans  sont  ceux  qui  pro- 
curent à  l'oreille  une  sensariou  inoius  douce  que  les  accords 
consonuans,    et  qui   sont   composés    de    dissonances    (voy.   ce 

mut). 
ACCORDS  FONDAMENTAUX.  Les  accords  fondamentaux  sont 
ceux  dans  lesquels  ou  dispose  les  .sons  dans  l'ordre  le  plus 
simple,  c'est-a-dire  i>  la  tierce  l'un  de  l'antre  (voy.  tie,-c^).  U  n'y 
en  a  que  deux,  l accord  par/ail  (voy.  ce  mot),  et  l  accord  de 
septième  {vn\.  tepli'me) 
ACCORDS  DERIVES.  Accords  tirés  des    fondamentaux,  et  dans 

lesquels  on  ne  dispose  pas  les  sons  daus  l'ordre  le  plus  di.ect. 
ACCORD  l'ARFAir.  A.cord   composé  de  trois  sons  accordés  a  la 
tierce  l'un  de  l'autre.  Cest  le  pins  doux  a  l'oreille,  et  le  seul  qui 
donne  la  sensatiou  d'une  conclusion  harmonique. 
ACCORDER.  C'est  mettre  dans  un  n.pport  satisfaisant  de  justesse 
pour   l'oreille  les  sons  d'un    instrument  avec  lui-même  on  avec 
d'autres  instrum.-ns,  soit  en  augmentant  ou  diminuant  la  IenM..n 
des  cordes  dun  violon,  d'une  basse,  d'une  guitare  on  d'un  piano, 
soit  en  allongeant  ou  raccourcissant  le  tube  d'un  instrument  à 
Tcnt,  comme  la  flûte,  le  cor,  etc. 
ACCORDEUR.  Celui  qui   accorde   les  inslrumens;  ce  nom  ne  se 
donne   qu'a  ceux   dont  l'état  est   daccorder  les   pianos  ou  les 

orgues.  .    /    1-  1 

ACOCSTîQUF.  Science  du  son;  ce  mot  est  dérive  d  un  ver.)e 
grec  qui  signiCe  en<eP(/re.  L'acoustique  se  iiartage  en  deux  par- 
ties distinctes;  l'uue  est  relative  aux  phénom.-nes  qui  se  mani- 
lestcut  d.nslarésonnanre  des  corps  sonore,,  l'autre  se  compose 


DK  MUSIQUE.  289 

lie  liiliiils  qui  ont  pour  olijet  de  dctertniner  les  rapports  des 
sons  entre  eux.  Lu  |,rernière  se  nomme  acoustique  expérimentale 
l'autre  est  Vacoustique  arithmilique  ou  canonique. 

Acoustique.  S'emploie  quehjuefois  comme  adjectif.  Ainsi  on 
dit  un  instrument  acoustique,  un  phénomlne  acoustique,  etc. 

AD  LIBITUM.  Mots  latins  qui  siguilient  à  volonté.  Lorsqu'on  les 
trouve  plarés  sous  un  trait  de  vocalisation  ou  sous  un  point 
d  orgue  (voyez  Vocalisation  et  Point  d'orgue  ),  ils  indiquent 
qu'on  peut  jouer  ce  qui  est  écrit  ou  le  supprimer  si  on  le  trouva 
Lou.On  trouve  aussi  quelquefois  ces  mots  placés  au  commence- 
ment d'une  partie  d'accompagnement  de  violon,  de  basse,  eic- 
cela  signifie  que  ces  accompagnemens  ne  sont  pas  indispen- 
sables. 

ADAGIO.  Mot  italien  qui  signifie  posément.  Ou  l'écrit  au  com- 
mencement des  morceaux  de  musique  pour  indiquer  un  mouve- 
ment lent. 

Adagio  se  prend  quelquefois  comme  le  nom  du  morceau  dontil 
indique  le  mouvement;  c'est  ainsi  qu'on  dit:  Un  bel  adagio  ,w 
adagio  de  Beethoven,  etc. 

AFFETTUOSO.  Mot  dont  on  se  servait  autrefois  i>our  avertir  le 
chanteur  ou  l'instrumentiste  qu'ils  devaient  jouer  ou  chanter 
avec  une  expression  douce  et  mélancolique.  L'emploi  de  ce  mol 
et  de  plusieurs  autres  du  méraegenre  est  devenu  moins  fréquent 
.lepuis  qu'on  indique  les  différens  degrés  de  lenteur  ou  de  vi- 
tesse,  par  les  numéros  du  métronome  de  Maelzel. 

AFFINITÉ  dîiOTj.».  Tendance  qu'ils  ont  les  uns  vers  les  autres.  La 
no'e  sensible  (voy.  ce  mot.)  a  de  l'affinité  avec  la  tonique;  le 
quatrième  degré  (voy.  ce  mot)  en  a  avec  le  troisième. 

AGILITE,  s.  f.  Se  dit  de  lu  facilité  possédée  par  un  chanteur  ou 
par  un  instrumentiste  à  exécuter  e-îes  suites  rapides  de  sons. 

AGITATO.  Mot  italien  qui,  placé  en  tête  d'un  morceau  Je  musi- 
que,  est  le  signe  d'un  caractère  d'expression  passionnée  joint  à 
la  vitesse. 

AGRÉMENS.  On  donnait  autrefois  ce  nom  à  certains  traits  im- 
provises ou  écrits  dont  on  ornait  les  mélodies;  on  l'a  remplacé 
ensuite  par  celui  û'ornemens  (voy.  ce  mot.),  et,  de  nos  jours, 
par  le  mot  n.i\ieu  fioruure  qu'on  a  francisé  (voy.  ce  mot). 

AlGt .  Se  dit  d'un  sou  élevé  de  l'échelle  musicale  (vov.  Son). 


290  DICTIOIiAIRF. 

AiGC  se  prend  quelquefois  substantivement,  et  s'emploie  pour  dé- 
signer par  comparaison  lu  partie  élevée  d'une  voix  ou  d'un  ins- 
trumeat.  Ou  dit  :  Aller  du  graje  à   Vai^u  ,  pour  passer  des  sous 
bas  aux  sons  élevés. 
AIK.  Nom  générique  par  lequel  on  désigne  toute  pièce  de  musique 
pour  une  voix  seule.  La  forme   des  airs  est  fort  variée.  Les  airs 
;•    les  plus  anciens  sont  les  chansons  ^  opulaires  (voy.  Chanson)  qu'o  n 
appelle  aussi  airs  nationaux.  Cliaque  peuple  en  a  de  particuliers  ; 
ou  cite  les  barcarollis  de  Venise,  les  tarantelles  et  les  viUanellt^ 
de  Naples,  les  lieder  de   l'Aliemagne,  les  Ranz-de-faches  de  la 
'    Suisse,  les  boléros,  séguedilles  et  tirannas  de  l'Espagne,  les  songs 
de  l'Ecosse   et  de   l'Irlande  (voy.   tous  ces  mots).  Chaque  pro- 
vince de  France    a    les  siens;  dans   l'Auvergne,   on  trouve  les 
bourrées  ;  dans   le  Poitou,  les  branles  i  dans  la  Bourgogne,  les 
Noêls,  etc.  (voy.  ces  mots).  Il  y  a  des  airs  qui ,  sans  être  popu- 
laires, ont   des  formes  particulières  à  certains  pays;  en  France, 
ou  a  la  romance  {  en  Italie,  la  canzone,  etc.  (voy.  ces  mots).  I^es 
airs  d'opéras  sont  de  plusieurs  espèces  :  le  premier  air  que  chante 
uu   acteur,  dans   la  pièce,  s'ajipelle  cavatiiief  les  airs  d'un  seul 
mouvement  j  dont  la  phrase   principale  est   ramenée   plusieurs 
fois,  portent  le  nom  de  rondeau.  Il  y  a  des  airs  d'uu  seul  mou- 
vement, d'autres   qui   ont  deux  mouvemeus  :  l'un   modéré   ou 
lent,  l'autre  vif.  Enfin,  il  en  est  qui  sont  composés  de  trois  inou- 
vemens:  le  premier  modéré,  le  second  lent  et  le  troisième  vif. 
Quelquefois  ces  airs  sont  j)récédés  d'un  rècilatif.  On  leur  donne 
en  général  le  nom  de  grands  airs,  et  celui  de   scène  quand   ils 
remplissent  en  effet  toute  nue  scène.  La  forme  des  airs  d'opéra 
a  varié  selon  les  temps  et  les  lieux  (voy.  cavatine,  rondeau,  réci- 

Les  petits  airs  d'opéras  français  prennent  le  nom  de  couplets, 
d'après  celui  de  la  petite  pièce  de  poésie  sur  laquelle  ils  sont 
placés. 

Les  airs  de  danse  font  partie  des  airs  nationaux  de  différens 
peuples.  Il  y  avait  autrefois  des  airs  de  danse  d'un  caractère 
déterminé,  qu'on  appelait  gigue,  courante ,  allemande ,  anglaise, 
menuet ,  etc.  (voy.  ces  mots);  il  n'y  a  plus  aujourd'hui  que  des 
contredanses  dont  les  thèmes  sont  pris  dans  des  airs  d'opéra  (voy. 
Centredanse).  L'Allemagne  a   donné  naissance  à  une  sorte  de 


DE  MUSIQUE.  291 

tianse  dont  l'air  est  en  mesure  teru.iire  et  qu'où  appelle  valse 
(voy.  ce  mot).  Le  fandans'o  des  Espagnols  est  aussi  un  air  de 
Hanse  d'un  mouvement  vif  en  mesure  ternaire  (voy.  Fandangoy; 
enfin  les  Polonais  ont  la  danse  grave  à  trois  temps,  fju'oa  ap- 
pelle polonaise  (voy.  t:e  mot).  L'air  de  danse  appelé  galope  ou 
galopade    est  une  valse  ra[)ide  et  sautée  à  deux  temps, 

ALLA  BREVE.  Mots  italiens  qu'on  trouve  quelquefois  au  com- 
mencement des  morceaux  de  musique  d'église,  et  qui  indi- 
quent un  mouvement  rapide  d'une  mesure  à  deux  temps,  com- 
posée d'une  ou  de  deux  rondes. 

ALLA  ^IILITARE,  à  la  miltiaire.  Ces  mots,  placés  au  Commence- 
ment d'un  morceau  de  mus'que,  indiquent  qu'il  faut  donner  à 
son  exécution  le  caractère  des  manlies  militaires. 

ALLA  PALESTRINA.  Se  dit  d'un  style  de  musique  d'église  et  de 
chambre,  traité  avei  tant  de  perfection,  dans  le  seizième  siè- 
cle, par  un  compositeur  de  l'école  romaine,  nommé  Pierre- 
Louis  de  Palestriaa ,  que  ses  ouvrages  sont  devenus  les  mo- 
dèles du  genre. 

ALLA  POLACCA,  c'est-à-dire,  dans  le  mouvement  de  la  polo- 
naise, en  mesure  ternaii'e  modérée. 

ALLEGRO.  Mot  italien,  qui  signifie  gai,  maïs  qu'on  emploie 
plus  communément  en  musique  pour  désigner  un  certain  de- 
gré de  vitesse  dans  le  mouvement  des  morceaux,  abstraction 
faite  de  leur  caractère  gai  ou  triste.  TJalh'gro  est  le  mouve- 
ment intermédiaire  entre  le  preiîo,  qui  «st  l'excès  du  vif,  et  l'a- 
dagio,  qui  est  l'excès  du  lent.  On  indique  ses  différentes 
modifications  de  lenteur  ou  de  vitesse,  en  joignant  au  mot  a^- 
legro  quelque  épithète  qui  indique  le  caractère  de  chacune  de 
ces  modifications.  Ainsi,  dans  la  gradation  de  l'allégro  de  plus 
en  plus  vif,  on  écrit  allegro  con  moto  ou  allegro  mosso ,  a'iegro 
con  brio,  allegro  animalo  ou  con  animo,  allegro  assai  et  allegro 
vivace  ;  dans  la  vitesse  décroissante  on  trouve  allegro  giuslo,  al- 
legro commodo ,  allegro  moderato  et  allegro  maesCoso.  Entre  les 
deux  extrêmes  a//egTo  maeî/oio  et  allegro  vivace,  la  différence 
de  mouvement  est  très  grande. 

ALLEGRETTO.  Diminutif  d'allegro,  indique  un  mouvement 
moins  vif,  quoique  d'un  caractère  léger  et  marqué. 

ALLEMANDE.  Air  de  danse  à  deux  teni'ps  composés  de  la  valeur 


392  DICTIONÎîAIRlî 

de  deux  noiies  dans  ane  mesure,  et  dont  le  niouveineiit  est 
«.•eliii  d'un  allegretio  un  ]>eu  animé.  Autrefois,  lorsque  les  termes 
italien'^  a//(?i/-o ,  a/lrgrello ,  etc.,  n'étaient  point  encore  en  us:ige, 
ou  désigniiit  les  mori^eanx  de  musique  instrumentaleà  deux  tein|;s 
correspondans  au  mouvement  de  l'allégretto  par  le  mot  alle- 
mande, l)iea  que  ces  morceaux  ne  fussent  pas  des  airs  de  danse. 
En  général,  on  se  servait  des  noms  des  airs  de  danse  pour  l'in- 
dication des  mouvemens,  parce  que  l'allure  de  ces  airs  était  con- 
nue de  tout  le  monde. 
ALTÉRATION,  s.  f.  Nom  qu'on  donne  en  général  aux  cliange- 
mens  accidentels  d'iutonation  qu'uue  note  éprouve  par  l'effet 
d'un  signe  d'élévation  ou  d'abaissement.  L'altération  a  toujours 
pour  effet  de  réduire  à  un  demi-ton  les  passages  d'uue  note  à 
une  autre. 

On  distingue  les  altérations  en  ascenr^antes  et  descendantes; 
les  altérations  ascendantes  transforment  la  note  altérée  en  note 
sensible  accidentelle;  les  altérations  descendantes  en  font  un  qua. 
trième  degré  momentané. 

LTÉRÉS ,  ALTÉRÉES.  Les  intervalles  altères  sont  ceux  que  l'alté- 
ration d'une  note  tirent  de  leur  (-onfornialion   naturelle  au  ton 
et  au  mode  d'un  morceau  de  musique;  les  notes  altérées  devien- 
nent telles  par  l'addiliou  d'un  signe  étranger  an  ton. 
ALTISTE.  Chanteur  qui  exécute  la  partie  d'a/(o  dans  les  chœurs 

(voy.  l'article  suivant). 
ALTO.    Nom  qu'on  donnait  autrefois  à  la  voîx  de  castrat  qui  cor- 
respondait à  la  voix  grave  de  femme  appelée  co/iira//o,  ou  aux  té- 
nors élevés    des   chœurs;  dans  ce  dernier  cas,  Vallo  était  syno- 
nyme du  mot  français  haute-contre  (voy.  ce  mot). 
ALTO  VIOLA,  c'est-à-dire,  viole  qui  correspond  à  la  voix  à^allo, 
qui  remplit  dans  la  musique  instrumentale  le  même  office  que 
la  voix  (Talto  dans  la  vocale.  Aujourd'hui  on  indique  plus  <:om- 
muiiémcnt  cet  instrument  par  le  simple  mot  de  viole,  ou  viola. 
AMABILE.  Mot  italien  qu'on  trouve  quelquefois  dans  la  inusitjue, 
et  qui  indique  que  le  caractère  de  l'exécution  doit  être  doux  et 
gracieux. 
A^IK,  petit  morceau  de  bois  cylindrique  qui,  placé   dans   l'inté- 
rieur du   violon,  de  la  viole  ou  de    la   basse,  sert   d'une  part  à 
soutenir  la  table  sous  la  pression  des  cordes,  et,  de  l'autre,  à 


mettre   en  communication  de   vibration  toutes  les  parties   de 
l'instrument. 

Amk  se  (lit  niissi  «le  la  faculté  d'expression  qui  réside  dans  la  sen- 
siiiilité  d'un  cliantenr  ou  d'un  instrumentiste.  On  dit  de  celui 
dont  le  cli:int  ou  le  jeu  décèle  une  grande  énergie  d'expression, 
qu  il  a  de  lame. 

A-MI-LA.  On  appelait  ainsi  autrefois  la  note  /a.  Quelques  musi- 
ciens de  province  se  servent  encore  de  cette  expression  su- 
rannée. 

.V-MI-LA  se  disait  aussi  du  petit  instrument  d'acier  à  deux  hran- 
clics,  qu'on  nomme  aujourd'hui  diapason  (voy.  ce  mot). 

.VMOROSO.  Mot  qui  se  place  quelquefois  au  uommeucement  d'un 
mor<-eau  de  musique,  et  qui  indique  à  la  fois  une  certaine 
uuan<'e  de  lenteur  dans  le  mouvement  et  un  caractère  de  douce 
langueur  dans  la  mélodie. 

Chanter  amoroso  se  dit  dans  une  acception  grotesque  et  jjour 
désigner  une  manière  de  rhanter  affectée  et  langoureuse. 

ANCHE,  s.  f.  Languette  simple  ou  double  qui  vibre  par  l'action 
de  l'air,  et  dont  les  battemens  sont  les  agens  du  son  dans  cer- 
tains instrumens  à  vent.  Ces  instrumens  sont  le  hautbois,  le  cor 
anglais,  le  basson, \d  clarindte  et  le  cor  de  bosselle.  L'an<be  du 
hautbois,  du  cor  anglais  et  du  basson  consiste  eu  deux  lan- 
guettes de  roseau,  amincies  par  l'extrémité  qui  doit  être  pres- 
sée par  les  lèvres,  et  ajustées  de  l'autre  sur  un  petit  tuyau  cy- 
lindrique, en  cuivre,  qui  s'adapte  à  l'iintrument  (voy.  Hautbois, 
Cor  anglais ,  Uasson).  L'anche  de  la  clarinette  et  du  cor  de  bas- 
sette  n'est  composée  que  d'une  seule  languette  mince,  égale- 
ment en  roseau,  qui  s'applique  .i  la  partie  sujiérieure  de  l'ins- 
trument appelée  le  bec  (voy.  Clar  nette  et  Cor  de  bassetle).  La 
beauté  du  son  qu'on  tire  de  ces  instrumens  dépend  à  la  fois  de 
la  qualité  de  l'ancbe,  de  la  <onformation  des  lèvres  qui  la  pres- 
sentj  et  de  la  quantité  d'air  qu'on  y  introduit. 

.4îrCHE  est  aussi  le  nom  d'une  petite  languette  de  lailon  qui  s'ap- 
plique à  de  certains  tuyaux  d'orgue  et  qui  produit  le  son  par 
sa  vibration  (voy.  Jeux  d'anche). 

ANDAM'E.  Mot  italien  qui  indique  un  mouvement  modéré, 
mais  d'un  rhythrae  sensible.  C'est  le  participe  du  verbe  andare. 


294  DICTIOIWAIRI 

Ahdante  se  preud  quelquefois  substantivement  lorsqu'on  dit  un 
andan  te  de  quatuor  on  de  sjmphonie. 

ANDA?«TINO.  Modification  du  mouvement  andante ;  littéralement, 
andantino  signifie  allant  un  peu;  c'est  donc  à  tort  que  quelques 
écrivains  ont  cru  que  le  mouvement  andantino  doit  être  plus 
animé  que  l'andante. 

ANGELIQUE  ,  s.  f.  Instrument  à  clavier  du  genre  du  clavecin 
ou  de  l'épinette  (voy.  ces  mots).  On  croit  qu'il  a  été  inventé 
à  Mulhausen  ,  au  commencement  du  xvii*  siècle,  par  un  fac- 
teur d'orgue  nommé  Ratz. 

A^ïGÉHQUE  (voix).  Sorte  de  jeu  d'orgue  composé  de  tuyaux  cylin- 
driques à  anclie  (voy.  Jeux  d'anche). 

ANGLAISE  ,  s  f.  Air  de  danse  à  mesure  binaire,  d'un  mouvement 
animé  et  d'un  rliytlime  égal. 

ANIM.\TO  ,  animé.  !Mot  qui  indique  l'accélération  d'un  mouvement 
donné.  Il  se  joint  ordinairemeut  à  un  autre  mot  qui  détermine 
le  caractère  du  morceau,  comme  allegro animato. 

ANIMO,  con  animo.  Exj)ressions  qui  se  trouvent  quelquefois  dans 
la  musique,  et  qui  indiquent  la  nécessité  d'un  caractère  d'éner- 
gie daus  l'exécution. 

ANIMOCORDE  ou  ANÉMOCORDE.  Instrument  à  clavier  dans  le- 
quel les  cordes  résonnent  par  le  moyen  d'un  courant  d'air  qui 
les  frajipe.  Cet  instrument  fut  inventé  à  Paris,  en  1789,  par  un 
Allemand  ,  nommé  Jean  Strbnell.  Il  n'est  plus  en  usage. 

ANONNER.  Lire  avec  {icine,  exécuter  avec  embarras  la  musique 
qu'on  a  sons  les  yeux. 

ANTICIP.iTION.  ilanifestation  prématurée  dans  une  harmonie 
d'un  son  qui  appartient  à  l'harmonie  de  l'accord  suivant.  Quel- 
quefois l'anticipation  est  dans  la  mélodie;  d'autres  fois  elle  est 
dans  les  parties  qui  l'accompagnent. 

ANTIENNE,  s.  f.  Chant  d'église  divisé  en  strophes,  qui  sont  réci- 
tées alternativement  par  une  partie  des  chantres  du  chœur,  pen- 
dant que  l'autre  se  tait,  ^/i/ienne,  en  latin  antiphona ,  est  formé 
de  deux  mots  grecs,  àvTi,  contre^  et  atà^ir,,  voix,  c'est  à-dire 
voix  mises  en  opposition.  Les  prières  si  connues  Ave  maris  Stella , 
Salve  Regina ,  et  Regina  cœli,  sont  des  antiennes. 

ANTIPHONAIRE  ou  ANTIPHONIER,  s.  m.  Recueil  des  antiennes 
{lotées  en  p.ain-chant  (voy.  ce  mot). 


DE  MUSIQDE.  295 

APOLLON.  Instrument  de  musique,  de  l'espèce  du  luth,  monté 
de  vingt  cordes,  inventé  à  Paris  eu  1(578,  par  un  musiciea 
nommé  Promt. 

APOLLGINICON.  Grund  orgue  perfectionné,  inventé  par  mes- 
sieurs Flight  etllobsou,  à  Londres,  vers  i824'  Cet  orgue  peut 
être  joué  à  volonté  par  uu  orgauiste  ou  par  un  mécanisme  au 
moyeu  de  cylindre»  notés. 

APOLLOINION.  Instruineut  à  clavier  inventé  par  Jean  Vœller,  à 
Darmstadt ,  vers  la  lin  du  dix-huitième  siècle.  Cet  instrument 
était  un  piano  à  deux  claviers  avec  plusieurs  jeux  d'orgue,  et 
surmonté  d'un  automate  qui  jouait  divers  concertos  de  flûte. 

APPASIONATO.  Mot  italien  qui  indique  la  nécessité  d'une  ex- 
pression paisiounée  daus  l'exécution  de  la  musique. 

APPOGIATURE,  s.  f.  Mot  italien  francisé  et  qui  vient  du  verbe 
appogiare  ,  appujer.  L'ai)p()giature  est  un  ornement  de  la  mélo- 
die qui  consiste  en  une  note  sans  valeur  réelle  dans  le  chant 
qu'on  ajoute  au-dessus  ou  au-dessous  d'une  autre  note  essen- 
tielle. Le  caractère  de  la  phrase  ,  les  circonstances  et  le  goût  du 
chanteur  ou  de  l'instrumentiste  déterminent  la  durée  de  la  note 
d'appogiature  ;  quelquefois  elle  est  assez  rapide  pour  n'avoir 
qu'une  valeur  inappréciable;  d'autres  fois  elle  enlève  à  la  note 
essentielle  la  moitié  de  la  durée;  il  arrive  même  qu'on  lui  donne 
une  valeur  plus -grande.  Il  est  des  cas  où  le  compositeur  écrit 
la  note  d'a])pogiature;  il  en  est  d'autres  où  il  abandonne  à  l'exé- 
cutant le  soin  déjuger  de  sa  nécessité. 

AllCHET,  s.  m.  Baguette  flexible  en  bois,  à  laquelle  sont  atta- 
chés des  crins  qu'on  enduit  d'une  résine  préparée  (voy.  Colo- 
phane) ,  et  qui  sert  à  faire  résonner  les  cordes  du  violon  ,  de  la 
viole,  du  violoncelle  et  de  la  contrebasse.  Le  nom  à''archet  vient 
de  ce  qu'origiiiairenientla  baguette  était  courbée  eu  forme  d'arc. 
En  italien  on  dit  arco.  Les  crins  de  l'archet  se  tendent  à  volonté 
par  le  moyen  d'une  vis  placée  à  l'une  des  extrémités. 

ARCHILUTH,  s.  m.  Sorte  de  grand  luth  qu'on  a  confondu  quel- 
quefois avec  le  théorbe,  quoique  ce  lussent  deux  instruniens 
différens.  L'archiluth  était  monté  de  vingt  cordes  accordées 
deux  par  deux  à  l'unisson.  C'était  un  instrument  difficile  à  jo  uer 

ARCO.  ÎNlot  italien  qui  signifie  archet.  Lorsqu'il  est  écrit  sous  une 
partie  de  violon,  de  viole  ou  de  basse,  il  indique  qu'il  ne  faut 
j,>as  pincer  les  cordes,  mais  jouer  avec  l'archet. 


298  DïCTïoïiWAiftE 

ARTA,  s.  m.  Ce  mot,  qui  .«ignifie  air  dans  la  laugne  italienne,  ne 
se  dit  en  France  que  dans  une  acreption  ironique,  par  les  per- 
sonnes qui  sont  peu  seiisililes  à  la  musique.  On  dit  de  garantis 
aria,  pour  dire  des  airs  longs  et  ennuyeux. 

ARIETTE,  s.  f. ,  diminiitir  d'a.r.  Une  ariette  devrait  donc  être  un 
petit  air,  cependant  un  nommait  ainsi  tous  les  airs  grands  et 
])etits.    /trietie  est  maiutenant  un  mot  vieilli  qui  ne  se  dit  ])lus. 

ARIOSO.  Adjeitif  qui,  lorsqu'il  est  pris  substantivement ,  indique 
que  l'exécution  d'une  j)ièce  de  musique  doit  être  d'un  caractère 
large  et  passionné. 

ARMER  LA  CLEF.  C'est  mettre  auprès  d'elle  le  nombre  de  dièses 
et  de  bémols  convenalde  pour  le  ton  d'un  morceau  de  rau'.lque. 

ARPEGGE,  s.  m. ,  en  italien  ar/jpo-gio.  Manière  de  faire  entendre 
successivement  les  notes  d'un  accord,  particulièrement  sur  les 
iustrumens  à  archet.  Ce  mot  vient  de  l'italien  arpa,  harpe, 
parce  que  cet  instrument  parait  avoir  donné  lieu  aux  premiers 
arpèges  qu'on  ait  faits. 

ARPEOER,  V.  n    Faire  des  arpèges. 

ARRANGER,  v.  a.  C'est  réduire  la  partition  d'un  opéra,  d'une 
ouverture,  d'un  air,  ou  de  tout  autre  morceau  de  musique  pour 
un  petit  nombre  d'instrumens  ou  pour  un  seul,  ou  seulement 
en  changer  la  nature,  comme lori^qu'on  arrange  un  conceito  de 
violon  pour  piano,  et  vice  versa.  Il  serait  j)lus  exact  de  dire 
déranger  qu'arranger,  car  on  ne  change  guère  la  disposition 
primitive  d'un  bon  morceau  de  musique  sans  eu  altérer  le  ca- 
racrtère  et  l'effet. 

ARTICULER,  v.  a.  C'est  faire  entendre  distinctement  les  paroles 
dans  le  chant,  et  rendre  les  notes  avec  précision  et  netteté,  soit 
avei:  la  voix,  soit  sur  un  instrument. 

ASCENDANT,  TE,  adj.  Se  dit  d'un  intervalle  (voy.  ce  mot)  ou 
d'une  note  dont  la  destination  est  de  se  résoudre  en  montant. 

ASPIRATION,  s.  f.  Action  de  respirer  dans  le  chant.  Lorsque 
l'aspiration  est  bruy.inte  ou  seulement  sensible,  il  en  résulte  un 
effet  désagréable  à  l'oreille  des  auditeurs. 

ASPIRER,  V.  a.   Prendre  la  respiration. 

ASSAI.  Adverbe  italien  qui  signifie  beaucoup.  Il  indique  une  aug- 
mentation de  lenteur,  de  vitesse,  de  force  ou  de  douceur,  lors- 
qu'il est  joint  à  d'autres  mots,  tels  que  largo,  allegro,  farte  ' 
piano  />'oy.  ces  mots). 


ATTACCA  SUBlTO.  Mots  it:iliens  qu'on  trouve  quelquefois  à  la 
fin  iWin  morceau  de  musique;  ils  indiquent  qu'il  faut  commen- 
cer iinniédiatemeiit  le  morceau  suivant. 

ATTAQUE,  s.  f.  Action  d'uu  musicien  qui  commence  un  mor- 
ceau, un  trait  après  uu  repos,  avec  |)ré<'isiou  et  hardiesse.  Dans 
les  chœurs  des  théâtres,  il  y  a  des  chefs  d'attaque  qui  guident 
les  autres  chanteurs  lorsque  ceux-ci  ne  sont  que  des  musiciens 
médiocres. 

ATTAQUER,  v.  a.   Faire  l'attacjiie  avec  précision. 

AUBADE,  s.  f.  Concert  qui  se  donne  à  l'auhe  du  jour,  en  plein 
air,  sous  les  fenêtres  de  quelqu'un.  L'auhade  n'est  guère  en 
usage  que  dans  les  corj)s  de  musiqui;  militaire;  ou  la  donne  aux 
princes,  aux  autorités  militaires,  etc. 

AUGMENTATION,  s.  f.  Se  dit  de  l'agrandissement  de  la  valeur 
des  notes  d'un  thème  ou  d'un  sujet  de  fugue;  sorte  d'artifice 
dont  on  se  sert  quelquefois  pour  donner  de  la  variété  à  ce  geure 
de  morceau  (voy.  Fugue). 

AUGME1NTF,,.EE.  Adj.  qui  se  joint  au  nom  d'un  intervalle  lorsque 
sa  note  supérieure  est  élevée,  ou  lorsque  la  note  inférieure  est 
biiissée  j)ar  l'effet  de  dièses,  de  bécarres  ou  de.  bémols  {y  o')'.  c:es 
mots)  qui  n'u[>partienneut  ni  au  tou  ,  ni  au  mode  du  morceau  ou 
du  passage. 

AUTHENTES  ou  AUTHENTIQUES.  Nom  de  certains  tons  de 
plain-chunt  (voy.  ce  mot). 


lî 


BAISSER,  V,  a.  C'est  descendre  l'intonation  d'une  note,  ou  parce 
qu'elle  est  trop  haute  ou  parce  que  la  voix  manque  d'énergie. 

BALLADE  ,  s.  f.  Chanson  dont  l'origine  remonte  au  douzième 
siècle,  et  dont  l'usage  s'est  conservé  en  Angleterre,  en  Irlande 
et  en  Ecosse.  Dans  les  manuscrits  des  anciens  trouvères  ou  trou- 
badours on  trouve  des  ballades  et  des  chansons  balladèes  avec  le 
chant  noté.  Le  sujet  de  la  ballade  est  ordinairement  un  trait 
d'histoire  vrai  ou  romanesque  ,  développé  sous  la  forme  d'une 
ode,  et  divisé  eu  plusieurs  strophes.  Les  mélodies  de  ballades 
écossaises  et  irlandaises  sont  d'un  caractère  mélancolique;  il  y 
eu  a  de  charmiutcs. 


298  mCTIOHNMRE 

BALLET,  s.  m.  Ce  mot  vient  de  l'italien  ballo,  danse.  Sa  signifi- 
cation exacte  a  varié.  Au  quinzième  siècle  il  y  avait  des  ballets 
composés  de  danses  graves,  de  personnages  historiques,  m y- 
tbologiquesou  même  bibliques;  ces  ballets  étaient  dansés  par  les 
rois,  les  princes  et  leurs  courtisans.  Plus  tard  on  eut  des  ballets 
mêlés  de  chant;  tel  était  le  ballet  comique  de  la  ro/ne  ,  composé 
par  Balthasarini,  pour  les  noces  du  duo  de  Joyeuse,  en  i58i  ; 
puis  vinrent  les  hallels-opèras  et  les  ballets  pantomimes.  Ces  der- 
niers sont  composés  d'une  action  dramatique  à  laquelle  la  danse 
est  mêlée. 
BANDE,  s.  f.  Mot  qui  a  passé  depuis  peu  de  la  langue  italienne 
en  français,  et  qui  signifie  un  corps  de  musique  militaire.  Il  n'a 
point  de  synonyme  dans  la  langue  française. 
BARBITON,  s.  m.  Nom  d'un  instrument  à  cordes  de  la  musique 

grecque.  On  croit  que  c'était  une  variété  du  genre  delà  lyre. 
BARCAROLLE,  s.  f.  Chanson  de  gondolier,  en  dialecte  vénitien. 
Les  mélodies  en  sont  généralement  agréables.  Leur  mouvement 
est   modéré  ,  en  mesure  binaire  à  divisions  ternaires.  Barcarolle 
signifie  chanson  de  barque,  et  vient  de   barca. 
BARDES,  s.  m.   Poètes   et  chanteurs  chez  les  anciens  Gaulois, 
Germains  et  Bretons.  C'étaient  eux   qui   entonnaient  les  chan- 
sons guerrières,  et  qui  étaient  chargés  d'exciter  le  courage  des 
héros.  Les  Bardes  les  plus  célèbres  sontFingal  et  son  filsOssian. 
BARITON,  s.  m.  Genre  de  voix  d'homme  qui  tient  le  milieu  entre 

la  basse  et  le  ténor.  « 

Bariton  est  aussi  le  nom  d'un  instrument  à  archet  d'un  genre  de 
la  basse  de  viole,  qui  fut  inventé  vers  1700.  On  l'appelait,  en 
Italie,  note  di  bordone.  Cet  instrument  était  monté  de  sept  i:or- 
des  de  boyaux,  qu'on  jouait  avec  l'archet,  et  de  seize  cordes  d'a- 
cier qu'on  pinçait  avec  le  pouce. 
BARRÉ,  s.  m.  Position  des  doigts  en  travers  du  manche  de  la 
guitare  sur  toutes  les  cordes,  ou  seulement  sur  quelques-unes. 
BARRES  ,  s.  f.  pi.  Traits  perpendiculaires  j)ar  lesquels  on  sépare 
la  quantité  de  notes  dont  la  valeur  forme  ce  qu'on  appelle  une 
mesure.  Ces  barres  ont  été  imaginées  pour  faciliter  la  lecture  de 
la  musique  et  lu  division  des  temps.  Elles  ne  furent  point  en 
usage  jusqu'à  la  fin  du  seizième  siècle.  D'abord  on  nelesjilaca 
qu'après  un  certain  nombre  pair  de  mesures,  tel  que  quatre  ou 
huit  ;  plus  tard  on  les  posa  de  deux  eu  deux ,  et  l'on  finit  par  en 


DE  MUSIQUE.  299 

luettie  à  la  fin  de  <'liaqiie  mesure,  soit  binaire,  soit  ternaire. 
On  se  sert  aussi  dans  I;i  musique  de  l)arres  obliques,  simi)les, 
doubles,  triples  ou  quadrui)les    Placées  après  des  traits  en  ero- 
tlios  simples,  douilles  ,  tii])les   ou   quadruples;  elles   indiquent 
qu'il  faut  les  répéter  autant  de  fois  qu'il  y  a  de  groupes  de  bar- 
res. Les  barres  obliques  sont  une  des  abréviations   de  la  mu- 
sique. 
BAS,  adj.  Synonyme  comparatif  de  grave,  se  dit  d'un  son  par  op- 
position a  Aaut  ou  atgu.   Chanter  bas   n'a   pas  une  signification 
analogue  à  parler  bas,  c'est-à-dire  demi-voix  ;  mais  chanter  au- 
dessous  du  ton.On  disait  cependant  autrefoiscAanier  à  voix  basse 
{jour  chanter  doucement ,  piano  ;   cette  expression  n'est  plus  eu 
usage. 
BAS-DESSUS,  voix  de  femme  d'une  élévation  moyenne,  qu'on  ap- 
pelle, en  Italie,  mezzo  soprano. 
BASSE,  s.  f.  \oix  la  plus  grave  de  toutes.  On  donne  aussi  ce  nom 
au  violoncelle  (voy.    ce  mot)  qui,  dans    ses  quatre  cordes,  sans 
démancher,  a  à  peu  près  l'étendue  delà  voix  de  basse.  Par  ana- 
logie  ou  appelle  basse  la  parlie  la  moins  élevée  de  toute  espèce 
de  musique,  celle  qui  sert  de  base  à  l'harmonie.  Par  exemple, 
on  dit:  Je  chanterai  le  dessus  ,  vous  ferez  la   basse  sur  le  violon, 
bien  que  le  violon  ne  s©it  pas  une  basse  et  n'ait  pas  la  gravité  de 
ses  sons. 
BASSE  CHAiVTANTE,  en  italien  basso  cantante.  La  partie  la  plus 

grave  de  la  musique  vocale. 
BASSE  CHIFFREE.  Partie  de  basse  surmontée  de  chiffres  sur  la- 
quelle les   organistes   accompagnent  l'harmonie  de  la  musique 
d'église   et  qui  servait  autrefois  à  l'accompagnement    de   toute 
espèce  de  musique  sur  le  clavecin  (  voyez  l'article  suivant  ). 
BASSE  CONTINUE.  Partie  de  basse  instrumentale  surmontée  de 
chiffres  indiquant  les  accords  qui  doivent  être  joués  par  l'accom- 
pagnateur.  L'invention  de  ce   genre  de  basse  remonte  au  com- 
mencement du  dix-septième  siècle;  on  l'attribue  à  Louis  Via- 
dana,  compositeur  italien.  On  lui  donna  le  nom  de  basse  con- 
tinue parce  qu'elle    n'était  pas  interrompue  comme  la    basse 
vocale.  On  disait  autrefois  enseigner  la  basse  continue  pour  dire 
enseigner  l'harmonie  ou  l'art  de  l'accompagnement.  L  expression 
de  basse  continue  a  cessé  d'être  en  usage. 
BASSE  CONTRAINTE,  en  italien   basso'  ostinato.[Tormu\e    de 


300  niCTioN>:.\iRF. 

basse  que  les  anciens  compositeurs  se  proposaient  avec  l'obli- 
gdtion  de  changer  saus  cesse  le  cbanl  et  l'harmonie. 
BASSE-CONTRE,  s.  f.  Variété  de  la  voix  de  basse  dont  le  timbre 
(  voyez  ce  mot)  est  plus  fort  que  celui  de  la  voix  de  Ijasse 
moyenue,  appelée  basse-taille,  qui  est  moins  étendue  dans  le  haut 
et  qui  a  quelques  notes  de  plus  dans  le  bas. 

BASSE  FUISD.AME>T.\LE.  IN'oin  imagiué  par  un  compositeur 
fr.incais,  nommé  Rameau,  pour  une  basse  rationnelle  composée 
des  notes  graves  de  certains  accords,  laquelle  servait  de  j)reuve, 
selon  lui,  de  la  régularité  de  l'Iiarmouie.  Le  sfSlt-me  de  la  bassp 
fondamentale  a  eu  beaucoup  de  vogue  en  France  pendant  une 
partie  du  dix-huitième  siècle;  mais  il  n'a  jamais  été  adopté  que 
dans  ce  pays;  il  est  maintenant  oublié. 

B.\SSE-DE-HAUTBOIS.  Ancien  nom  français  du  basson  (voyez  ce 
mot). 

PiASSF.-TAILLE.  Voix  de  basse  moyenne,  moius  grave  que  la 
bass -contre  (  voyez  ce  mot),  et  moins  élevée  que  le  bariloti 
(  voyez  ce  mot  ).  Basse-taille  est  particulièrement  le  nom  de  la 
voix  de  basse  des  chœurs  ;  la  voix  de  basse  des  chœurs  s'appelle 
hasse-chanlanie. 

u  ^SSE-DE-VIOLE,  en  italien  viola  da  gamba.  Instiument  qui  ser- 
vait à  faire  la  partie  de  basse  de  la  musique  instrumentale  avant 
l'invention  du  violoncelle  (voy.  ce  mot).  Après  l'introduction 
de  irelui-ci  dans  les  orchestres,  la  basse-de-viole  servit  encore 
long-temps  pour  jouer  des  solos.  Elle  était  montée  de  six  cordes 
et  quelquefois  de  sept. 

TASSE  DE  VIOLON.  On  donnait  antiefois  ce  nom  au  violoncelle, 
à  une  ancienne  basse  moyenne  appelée  aussi  basse-de-chaur ,  et 
même  à  la  contrebasse  (voy.  ce  mot). 

1>.\SSISTE,  s.  m.  Musicien  qui  joue  du  violoncelle. 

15  ^SSON,  s.  m.  Instrument  à  vent  composé  de  plusieurs  pièces  de 
bois  percées  de  trous  et  armées  de  clefs,  qui  se  joue  avec  une 
anche  (voy.  ce  mot) ,  adaptée  à  un  canal  de  cuivre  appelé  bocal. 

r.ASSos.  Jeu  d'orgue  composé  de  tuyaux  à  anches,  qui  imitent  le 
son  de  l'instrumeut  du  même  nom. 

BA.SSONISTE,  s.  m.  Musicien  qui  joue  du  basson. 

BATON  DE  PAUSES.  Barre  épaisse  qui  est  renfermée  dans  l'es- 
pace de  deux  ou  trois  lignes  de  la  portée,  et  qui  représente  un 
silence  de  deux  ou  de  quatre  mesures. 


DE  MUSIQUF.  ..or 

HATON  DE  MESURE.  Moneau  de  hois  court  cl  roud  avecleqii.  1 
IfS  iliefs  d'oiH-licstres  hiÉttent  la  mesure  qtinnd  ils  ne  se  servent 
pas  d'un  violon  pour  diiigorlos  musiciens. 

BATTERIE,  s.  f.  Passage  composé  des  notes  d'un  accord  qu'on 
fait  ente.idre  sueeessivement  sur  un  instrument ,  et  qu'on  répète 
plusieurs  fois  dans  uu  mouvement  j>lus  ou  moins  rapide. 

T5ArTlMENTO,fca«.'m<;.'ii. Sorte  d'ornement  du  chant  analogue  au 
mile  (voy.  ce  mot),  mais  qui  en  diffère  en  ce  que  la  première 
note  est  inférieure  à  la  seconde  au  lieu  d'être  supérieure. 

RATTRE  LA  MESURE.  C'est  en  marquer  les  jirincipales  divi- 
sions binaires  ou  ternaires  avec  la  main  ou  avec  le  pied  (voj'ez 
Mesure  et  Temps). 

BEC,  s.  m.  Partie  de  clarinette  qu'on  met  dans  la  bouche  pour 
jouer  de  cet  instrument. 

EECCO  POLACCO.  Nom  d'une  très  grande  espèce  de  cornemuse, 
<lont  se  servent  les  paysans  dans  quelques  parties  de  l'Italie 
(voy.  Cornemuse). 

DECARRE.  Caractère  de  musique  fait  dans  cette  forme  b ,  et  qui 
se  place  à  la  gauche  d'une  note  j>our  indiquer  l'élévation  de  cette 
note  à  un  demi-ton  supérieur  si  elle  était  précédemment  af- 
feitée  d'un  bémol,  ou  l'abaissement  à  une  distance  semi)lal>le  si 
elle  était  accompagnée  d'un  dièse  (voy.  bémol,  dièse  et  demi-ion). 

VjY.MO'L,  s.  m.  Cara(!tère  de  musique  fait  dans  cette  forme  U,  et 
qui  indique  la  nécessité  de  baisser  une  note  d'un  demi-ton  lors- 
qu'il est  placé  à  sa  gauche. 

BERGAMASQUE,  s.  f.  Ancien  air  de  danse  originaire  de  Ber- 
game,  dont  on  trouve  des  exemples  dans  quelques  œuvres  de 
sonates  composés  en  Italie  au  dix-septième  siècle. 

BINAIRE  {mesure)  Division  de  la  durée  musicale  en  temps  pairs, 
c'est-à-dire  ])ar  2  ou  par  les  multiples  de  2  ,  comme  4,  8  ,  16,  etc. 
Les  mesures  binaires  de  la  musique  sont  de  deux  espèces  :  la 
première  renferme  celles  dont  les  divisions  de  chaque  temps 
sont  aussi  binaires,  telles  que  (t  ,  ?  et  R.  L'auti-e  espèce  com- 
prend les  mesures  binaires  à  temps  ternaires  comme  ^  G  6 
BINAIRE  (temps).  Partie  delà  mesure  qui  se  subdivise  eu  nom- 
bres paiis,  c'est-à-dire  par  deux  ou  par  lesmiitiples  de  deux. 
BIS.  Mot  latin  qui  si°niiie  deuj  fois  et  qui  indique,  lorsqu'il  est 
placé  à  la  fin  d'un  morceau,  qu'il  faut  le  recommencer.  Le  [)ublic 

2ti 


302  DICTIONNAIRE 

se  sert  fréquemment  de  oe  mot  pour  témoigner  le  plaisir  que  lui 
a  fait  un  morceau  de  musique,  et  pour  demander  qu'il  soit  dit 
une  seconde  fois. 

BISCROMA.  Nom  itulien  qui  signiRe  double  croche  (voy.  ce  mot). 

BISSEX,  s.  m.  Instrument  de  la  famille  de  la  guitare,  inventé,  eu 
1770,  par  un  musicien  de  Paris,  nommé  Vanlioeke.  Cet  instru- 
ment était  monté  de  douze  cordes,  et  son  étendue  était  d'une 
octave  et  demie. 

BLANCHE,  s.  f.  L'un  des  caractères  de  la  notation  de  la  musique; 
il  est  fait  ainsi  P.  Sa  durée  dans  la  mesure  est  de  la  moitié 
d'une  ronde  (voy.  ce  mot),  du  double  de  la  noire  et  du  quadru- 
ple de  la  croche  (voy.  ce  mot).  Il  appartient  à  la  division  binaire 
de  la  mesure. 

BOC.^L  ,  s.  m.  Tuyau  courbe  de  cuivre  qui  s'ajuste  sur  le  basson, 
et  auquel  on  adapte  l'anche  pour  transmettre  le  vent  à  l'instru- 
ment. 

BOBISATIOX,  s.  f.   (voy.  Solmùation).  ' 

BOLERO,  s.  m.  Air  espagnol  qui  sert  à  la  fois  de  chanson  et  d'air 
de  danse.  Cet  air  est  souvent  en  mode  mineur  et  son  rhythme 
est  en  mesure  ternaire.  Cet  air  s'accompagne  avec  la  guitare.  11 
y  a  en  Espagne  une  multitude  de  boléros. 
BOMBARDE,  s.  f.  Instrumenta  vent  en  bois,  percé  de  trous,  dont  on 
faisait  beauroupd'usage  dans  les  seizième  et  dix-»eptièrae  siècles. 
Cet  instrument  était  de  l'espèce  du  hautbois,  et  se  jouait  avec 
une  anche.  Il  se  divisait  en  plusieurs  sortes  :  la  premièreétait  la 
contrebasse  de  bombarde  ou  bombardone,  qui  avait  une  étendue 

de   deux    octaves,  depuis   le   contre  fa  5         jusqu'au /a 

~^'-    P     ;  elle   avait  quatre  clefs  et  se  jouait  avec  un  bocal  J 


comme  le  basson.  La  seconde  bombarde  était  la  bombarde  pro- 
prement  dite,  qui  avait  aussi  quatre  clefs  et   une  étendue  de 


--=  ^ 


deux  octaves,  depuis   ut   -<^         \  -   jusqu'au/        y    \       .   Lk 


DE  HUSIQUK.  803 

ti'oisième ,  appelés  bombarde  ténor,  avait   trois  clefs ,  «t  s'éten- 


dait  d 


epuis  le  sol—-/' \—  jpsqu'au  ^"^^T^^^^zzjz  -  LeNicolo, 

quatrième  sorte  de  bombarde,  n'avait  d'étemhie  qu'une  octave 
et  demie,  depuis  u/  "^^~1~T  jusqu'à  jo/  ;_xL  —  .  Cet  ins- 
trument n'avait  qu'une  clef.  La  cinquième  sorte,  appelée  petite 
bombarde,  n'avait   aussi    qu'une  clef  et  s'étendait   depuis   le  sol 

Ah) — T"  iusau'aure'  ~m\—h~  ;  enfin,  la  sixième  bombarde, 
appelée  quelquefois  chalumeau  ,  n'avait  point  de  clef,  ou  quel- 


quefois n'en  avait  qu'une,  et  s'étendait  depuis  \efa      _ 


jusqu'au /a    —«^HfH.   Cette  famille  d'instrument  avait  le  son 


rude  et  très  fort;  elle  a  donné  naissance  aux  variétés  du  haut- 
bois. 

BOMBARDE,  s.  f.  Le  jjIus  grand  et  le  plus  fort  des  jeux  d'an- 
ches dans  l'orgue. 

BOUCHE,  s.  f.  Nom  qu'on  donne  à  l'ouverture  horizontale  pra- 
tiquée au  bas  d'un  tuyau  d'orgue,  immédiatement  au-dessus  de 
la  soudure  du  pied.  L'air  introduit  par  le  pied  du  tuyau  se 
brise  sur  la  lèvre  de  cette  boui:he  et  produit  le  son.  On  divise 
les  jeux  de  l'orgue  en  deux  espèces  :  les  tuyaux  à  bouche  et  les 
jeux  d'anche.  Les  tuyaux  à  anche  n'ont  point  de  bouche  (voy. 
Jeux  de  l'orgue  et  Tu;yaux). 

BOUCHE.  Se  dit  d'un  tuyau  d'<jrgue  en  ctain  ou  en  bois,  qui  est 
fermé  à  son  extrémité  supérieure.  Ces  tuyaux  rendent  des  sons 
plus  bas  d'une  octave  que  s'ils  étaient  ouverts ,  parce  que  l'air 


304  DICTIOIÏNAIRE 

est  oljligé  de  parcourir  deux  fois  leur  longueur,  eu  montant  et 
en  desceudant,  avant  que  de  résonner  à  sa  sortie. 

BOUCHES  [sons).  Ce  sont  les  sons  qu'on  tire  du  cor  en  introdui- 
sant la  main  dans  le  pavillon  (voy.  Cor). 

BOURDON,  s.  m  Nom  d'un  jeu  d'orgue  à  l)ou<-he  dont  les  tuyaux 
sont  Ijoucliés  à  leur  extrémité  supérieure,  et  qui  a  des  sous  de 
flûte  doux  et  sourds. 

EouRDOW.  Nom  du  grand  tuyau  de  la  musette  ou  de  la  cordi; 
grave  delà  vielle,  qui  donnent  toujours  le  même  son. 

BOURREE,  s.  f.  Air  de  dause  à  deux  temps  qui  est  originaire  de 
l'Auvergne  ,  et  qu'on  d. insait  autrefois  ,  même  à  la  rour. 

BRAILLER,  V.  n.  Crier  en  chantant  et  forcer  le  volume  naturel 
de  la  voix. 

BRANLE  ,  s.  m.  Air  de  Janse  fort  en  usage  en  France  aux  seizième 
et  dix-septième  siècles.  Il  y  en  avait  de  deux  sortes;  l'un  origi- 
naire du  Poitou  était  fort  gai  et  avait  la  forme  d'uu  rondeau; 
on  le  dansait  en  rond;  l'autre,  moins  vif,  avait  pris  naissauce 
dans  la  Bretagne. 

BR.VVO,  BRAVA.  Adjectif  italien,  qui  signifie  bon,  bonne,  et 
dont  on  a  Tiit  une  exclamation  admiralive.  Les  Italiens  y  joi- 
gnent souvent  le  nom  du  cotn])ositeur,  du  chanteur  ou  de  l'in- 
strument auquel  ils  adressent  l'applaudissement,  comme  bravo 
liossiiil  bravo  Ruhini !  bravo  ilfagotto  !  Cette  expression  est  aussi 
employée  quelquefois  comme  critique.  Par  exemple,  si  l'on 
trouve  dans  un  opéra  d'uu  compositeur  moderne  des  réminis- 
cences d'un  amien  maître,  comme  Cimarosa  ou  Paisiello  ,  le 
parterre  s'écrie:  bravo  Cimarosa  I  bravo  Vaisiello  I 

BRAVOURE  (air  de).  On  apj)elle  ainsi  un  air  dans  lequel  le  com- 
positeur introduit  Beaucoup  de  traits  difficiles  pour  faire  Briller 
l'hahileté  d'un  chanteur.  Les  airs  de  bravoure  étaient  autrefois 
fort  en  vogue  ;  ils  devinrent  plus  rares  à  mesure  que  le  f  entiment 
dramatique  domina  davantage  dans  la  musique  de  théâtre. 
BRÈVE  ,  s.  f.  On  appelait  autrefois  de  ce  nom  une  note  carrée  qui 

valait  lieux  rondes  de  la  musique  moderne. 
BRIOSO  ou   CON  BRIO.    Expression    qui    se   joint    quelquefois 
au  mol  allegro  ,  et  qui  indique  une  augmenti.tion  de  vitesse  de 
ce  mouvement. 
BRODERIES  ,  en  hAien ,  forilur^.  Se  dit  des  traits  JjIus  ou  moins 
rapides  et  brillaus  qu'un  chanteur  ajoute  à   la  musique  éciite, 


DK  MUSIQUE.  305 

afin  de  faire  briller  son  habileté  dans  l'iraprovisatiou  et  dans 
l'cxérution. 

BRUIT,  s.  m.  Commotion  de  l'air  dont  l'oreille  est   frapiiée  sans 

.  en  apprécier  les  vibrations  ;  c'est  en  cela  qu'il  diffère  du  son.  On 
donne  quelquefois  par  mépris  le  nom  de  bruit  à  la  musique  in- 
signifiante et  dépourvue  de  charme. 

BUCCIN  ,  s.  m.  Sorte  de  trom'.one  dont  le  pavillon  est  taillé  eu 
forme  de  gueule  de  serpent.  Le  son  en  est  sec  et  dur. 

BUCCINA,  s.  f.  Grande  trompette  de  guerre  des  Romains.  Elle 
étiiit  de  forme  conique. 

BUGLE,  ou  BUGLE-HORN.  Trompette  à  clefs  dont  on  se  sert 
maintenant  beaucoup  dans  la  musi(jue  militaire  et  même  dans 
l'opéra.  On  attribue  l'invention  de  la  trompette  à  clefs  à  M.  Hal- 
liday  Weidinger,  musicien  de  la  cham-lire  de  l'empereur  d'Au- 
triche; cependant  M.  Halliday,  fal)ricant  d'instrumens  de  cuivre, 
à  Londres,  passe  généralement  pour  l'inventeur  du  buglc-hotn 
à  six  clefs. 

BURLETTA,  bourlelte.  Nom  qui  se  donne  à  une  sorte  de  petit 
opera-comique  ou  àe/arce  en  musique. 


C.  Cette  lettre,  placée  au  commencement  d'un  morceau  de  musi- 
que, indique  que  la  mesure  doit  se  diviser  en  quatre  temps.  Si 

le  C  est  traversé  par  un  trait  vertical  ,  de  cette  manière  Ç  > 
on  l'appelle    Q,  barré ^  il  est  le  signe  de  la  mesure  à  deux  temps. 

CABALETTA,  s.  f.  Phruse  courte,  d'un  retour  périodique  et  d'un 
mouvement  animé  qui  se  place  à  la  fin  des  airs,  des  duos,  et 
d'autres  morceaux  d'opéra.  La  cabalette,  établie  ordinairement 
sur  une  de  ces  formes  de  convention  qu'où  appelle  dans  les  arts 
des  i>onsi/s ,  est  un  moyen  dont  les  compositeurs  de  l'école  ac- 
tuelle abusent  pour  indiquer  la  fin  d'un  morceau  et  provoquer 
les  applaudissemens. 

CACOPHONIE,  s.  f.  Musique  dans  laquelle  les  voix  ou  les  instru- 
mens  ne  s'accordent  jias;  la  cacopiiouie  est  plus  souvent  l'effet 
de  l'exécution  mal  réglée  que  de  la  composition. 

CADENCE,  s.  f.  Terminaison  d'une  phrase  en  mu'.ique  ou  repos 

7.«, 


306  DICTIOITMAIRE 

momentané.  On  doune  aussi  le  nom  de  eadente  à  certaines  sac 
cessions  d'accords  qui  indiquent  une  conclusion  finale  ou  acci- 
dentelle de  l'harmonie.  On  employait  autrefois,  en  France,  im- 
proprement le  terme  de  cadence  pour  celui  de  (rille  (voy.  ce  mot). 

Caderce  (la)  est,  dans  un  sens  absolu,  le  sentiment  bien  réglé  de 
la  mesure  à  l'égard  du  rapport  de  la  musique  avec  la  danse. 

Cadence,  en  italien  cadenza,  est  synonyme  de  point  d'orgue  (''oy. 
ce  mot);  c'est  une  suite  de  traits  de  fantaisie  qu'un  instrumen- 
tiste ou  nn  chanteur  improvise  quelquefois  sur  un  repos  d'har- 
monie vers  la  fin  d'un  morceau. 

CA1>"0RFICA,  s.  f.  Instrument  a  clavier  inventé  il  y  a  quelques 
années  par  M.  Rœllig,  facteur  d'instrumens  à  Vienne.  II  a  la 
forme  d'une  harpe;  les  cordes  sont  jouées  par  des  archets  cy- 
lindriques qui  se  meuvent  par  le  pied  et  qui  augmentent  ou 
diminuent  la  force  du  son  en  raison  de  la  pression  du  doigté 
sur  la  tuuclie.  Il  y  a  plusieurs  instrumens  de  cette  espèce. 

CAISSE  ROULAISTE.  Tambour  (voy.  ce  mot)  plus  grand  que  les 
tambours  ordinaires,  d'un  son  assez  doux,  et  dont  on  se  sert 
dans  la  musique  militaire  pour  exécuter  des  roulemens  et  mar- 
quer le  rliytlirae. 

CALARE.  Se  dit  en  italien  quand  l'iutouation  d'un  chanteur  ou  d'un 
instrumentiste  est  trop  liasse. 

CALASCIOE  ou  COLASCIOIN'E.  Sorte  de  luth  monté  de  deux 
cordes,  dont  le  corps  est  très  jietit  et  dont  le  manche  est  fort 
long.  Les  habilaus  du  royaume  de  Naples  font  usage  de  cet  in- 
strument. 

CANARDER,  v.  n.  C'est  tirer  un  son  criard  et  rauque  du  haut- 
bois, semblable  au  cri  du  canard;  c'est  un  défaut  fréquent  chez 
les  coraraencans. 

CA>'ON,  s.  m.  Pièce  de  musique  dans  laquelle  la  mélodie  s'accom- 
pagne par  elle-même,  étant  prise  successivement  par  deux,  trois 
ou  un  plus  grand  nombre  de  voix  ou  d'instrumens,  à  la  distance 
d'un  certain  nombre  de  temps  ou  de  mesures,  de  telle  manière 
que  ces  voix  ou  ces  instrumens  forment  une  harmonie  agréable 
et  correcte.  11  est  des  canons  où  la  mélodie  est  imitée  par  mouve- 
ment contraire;  d'autres  où  l'imitation  se  fait  à  reculons:  on 
nomme  ceux-ci  canons  en  écrcvisse;  d'antres,  cufin,  où  différentes 
mélodies  marchent  ensemble  ;  on  les  appelle  doubles,  triples  ca' 
nom,  etc. 


DK  MUSIQUE.  807 

CANON  ÉNIGMATIQUE.  C'est  un  canon  dont  on  ne  fait  connaître 
que  la  mélodie,  sans  indiquer  où  doivent  se  faire  les  entrées  des 
différentes  voix.  L'énigme  consiste  à  découvrir  la  place  et  le 
mode  de  ces  entrées. 

CANON  FERMÉ.  Canon  éoigmatique  dont  la  résolution  n'est 
point  trouvée  et  dont  la  mélodie  seule  est  écrite. 

CANON  OUVERT.  Canon  dont  la  résolution  est  faite  et  dont 
toutes  les  parties  sont  écrites. 

CANTABILE.  Adjectif  italien  pris  substantivement.  Ce  mot  indi- 
que, en  général,  une  mélodie  d'un  caractère  doux  et  gracieux 
et  d'un  mouvement  lent. 

CANTATE.  Ce  mot  a  deux  significations.  Par  la  première  il  indique 
un  petit  poème  mis  en  musique,  composé  de  récitatifs,  d'airs, 
de  duos,  etc.;  en  ce  sens  la  cantate  appartient  aux  concerts. 
L'autre  espèce  de  cantate  est  une  sorte  d'opéra  ou  d'oratorio 
qu'on  représente  quelquefois  sur  la  scène  ou  qui  requiert  l'em- 
ploi d'un  grand  nombre  de  chanteurs,  de  choristes  et  d'instru- 
mentistes. La  Création  du  Monde,  de  Haydn,  est  une  cantate. 

CANTATILLE,  s.  f.  Petite  cantate  qui  a  été  en  usage  en  France 
dans  la  première  moitié  du  dix-huitième  siècle. 

CANTATRICE,  s.  f.  Ce  mot  a  remplacé  celui  de  chanteuse  qu'on 
employait  autrefois  en  France  pour  désigner  une  femme  qui 
chante  an  théâtre  ou  dans  les  concerts;  cependant  on  appelle 
encore  chanteuses  les  actri(  es  dont  le  talent  est  médiocre,  et  l'on 
ne  donne  le  nom  de  cantatrices  qu'à  celles  qui  se  placent  au 
premier  rang  par  leur  haijileté  (voy.  Chanteuse"). 

CANTILÈNE  ,  s.  f.  Mot  traduit  de  l'italien  et  qui  est  synonyme  de 
mélodie  (voy.  ce  mot).  On  dit  une  douce  cantilène  pour  une  agréable 
mélodie. 

CANTIQUE,  s.  m.  Hymne  religieux.  Les  cantiques  font  partie  de 
la  liturgie  de  la  religion  réformée.  Leurs  mélodies  varient  selon 
les  nations,  les  langues  et  les  usages  particuliers  de  chaque 
église.  Les  cantiques  de  l'église  anglicane  ne  sont  pas  les  mêmes 
que  ceux  de  la  n-ligion  luthérienne. 

L'église  catholique  n'admet  que  sept  cantiques:  les  trois  prin- 
cipaux sont  celui  de  la  Vierge  [Magnificat)  qui  se  cl/ante  aux 
vêpres,  celui  de  Zacharie  {Uenediclus),  et  celai  de  Siméon  (^Ntinc 
dmdliis)  par  lequel  les  compiles  se  terminent. 

A  l'cg.ird  des  cantiques  en  usage  dans  quelques  congrégations 


d08  DlCilôNKAlKE 

et  qui  sout  écrits  en  langue  vulgaire,  on  ne  les  tronve  ui  dans 
le  Graduel  ni  dans  l'Antiphonaire.  On  les  chante  sur  des  airs  de 
vaudeville  ou  d'opéra. 

CANTO  FERMO,  s.  m.  Expression  italienne  dont  on  se  sert  souvent 
dans  la  musique  comme  d'un  synonyme  de  plain-chant  (voy.  ce 
mot). 

C.IKZONE  et  CA^ZONETTA,  s.  f.  Mots  italiens  qu'on  trouve 
souvent  au  commencemeut  de  certaines  petites  pièces  de  mu- 
sique du  genre  de  la  romance.  La  eanzone  est  d'un  développe- 
ment plus  considérable  que  la  romance  fiançaise;  la  canzonet'a 
a  de  l'analogie  avec  notre  cliansoii. 

CAPO-TASTO,  s.  m.  Petite  pièce  de  hois  ou  d'ivoire  qui  se  fixe  au 
manche  de  la  guitare  au  moyeu  d'une  vis  ,  et  qui  fait  Toffire  d'un 
sillet  mobile  di.nt  l'effet  est  d'élever  ]'ai:cord  général  de  l'in.stru- 
ment  d'un  ou  de  plusieurs  tons,  afin  de  ne  point  obliger  l'in- 
strumentiste à  faire  le  barré  (voy.  ce  mot)  avec  la  main,  et  laisser 
p'iis  de  liberté  à  celle-ci. 

(  APRICE  ,  s.  m.  Pièce  de  musique  d'un  style  libre  et  dont  le  plan 
n'est  pas  déterminé.  Ce  genre  de  musique  a  eu  de  la  vogue  au- 
trefois, surtout  pour  le  «riavecin  et  le  violon.  Les  caprices  de 
Locatelli  et  ceux  de  Fiorillo  pour  ce  dernier  instrument  ont  eu 
de  la  célébrité. 

(CARACTERE  de  la  musique.  Se  dit  du  genre  d'expression  que  le 
musicien  donne  à  sa  composition  et  de  la  convenance  du  style 
.1  l'ég.ird  de  l'objet  qu'on  s'est  i)roposé.  On  dit  de  la  musique  d  un 
beau  caractère,  d'un  grand  caractère.  Lorsqu'il  s'agit  de  musique 
légère  et  agréable,  on  se  sert  de  préférence  du  mot  style,  et  l'on 
dit  de  la  musique  d'un  slj le  gracieux  ,  élégant,  etc.  (^oy.  Stj-le). 

':ARACTÉRES  de  musique,  signes  de  la  notation  (v.  Notation). 

CARACTÈRES  DE  MUSIQUE  (Voy.  Tj-pographie  de  la  musique). 

';.\R.\MILLO,  s.  m.  Sorte  de  flageolet  espagnol. 

(CARILLON,  s.  m.  Collection  de  cloihes  accordées  de  manière  à 
former  une  échelle  chromatique  d'environ  deux  octaves  et  demie 
ou  trois  octaves.  Ces  cloches  sont  suspendues  dans  un  clocher  et 
sont  mises  en  vibration  au  moyen  de  ressorts  qu'un  double  cla- 
vier fait  mouvoir.  Le  clavier  supérieur  est  destiné  à  jouer  les 
notes  intermédiaires  en  frajipant  les  touches  avec  les  poings;  le 
clavier  inférieur  se  joue  avec  les  pieds,  et  sert  pour  les  notes 
graves,  Les  meilleurs  carillons  sont  dans  la  Belgique  et  dans  la 


DU.   MUSIQUE.  309 

Hollande;  ou  y  trouve  iinssi  d'iiabilrs  carillonneurs  ou  joueurs 
de  ces  instruinens  gigantesques.  Les  timbres  ou  les  airs  qui  pré- 
cèdent la  sounerie  des  iiirs  sont  joués  par  des  cyliudres  piques 
qui  remplacent  le  carilloiineur. 

Les  carillons  placés  dans  les  socles  de  pendules,  dans  les  ta- 
batières, les  montres  et  les  cachets  sont  composés  de  ressorts 
élastiques  et  sonores  qui  remplacent  les  cloches. 

CARILLONNER,  v.  a.  Jouer  du  carillon. 

CARILLONNEUR,  s.  m.  Joueur  de  carillon.  Il  y  a  des  artistes 
fort  habiles  qui  exécutent  sur  le  carillon  des  pièces  à  trois  par- 
ties fort  di^tinctes. 

CARREE,  s.  f.  On  appelait  autrefois  carrée  une  figure  de  note 
désignée  aussi  sous  le  nom  de  brève  à  cai.je  de  sa  forme  qui  of- 
frait en  effet  un  carré  régulier.  La  durée  de  cette  note  était 
égale  à  celle  de  deux  rondes  qu'on  appelait  alors  semi-brèves. 

CARRURE  des  phrases.  Disposition  symétrique  du  nombre  de 
mesures  qui  entrent  dans  la  formation  de  deux  phrases  de  mé- 
lodie qui  forment  une  période.  Le  nombre  de  mesures  qui  en- 
trent dans  les  phrases  est  communément  de  quatre;  c'est  de  la 
qu'est  venue  l'expression  carrure  des  phrases;  cependant  deux 
phrases  de  trois  ou  de  six  mesures  sont  carrées  ])ar(e  qu'elles 
ont  la  symétrie    de   nombre  (voy.  Phrase,  Période  et  Rhj-thme). 

CASTAGNETTES,  s.  f,  pi.  Instrument  d'origine  espagnole,  com- 
posé de  deux  |)etites  pièces  concaves  faites  en  forme  de  co- 
quille. Ces  coquilles  s'attachent  aux  doigts  au  moyen  de  cordons 
qui  les  réunissent.  On  les  frappe  l'une  contre  l'autre  en  mar- 
quant la  mesure,  et  quelquefois  en  les  agitant  avec  rapidité. 

C.4.6TP1AT,  s.  m.  Chanteur  en  voix  de  contralto  ou  de  soprano  qui, 
dans  son  enfance,  a  été  ])rivé  des  organes  delà  génération  dans 
le  but  d'empê<her  le  développement  physique  de  l'individu  à 
l'âge  de  la  puberté,  et  la  mutation  de  la  voix  qui  eu  est  la  con- 
séquence. La  voix  de  ces  chanteurs  avait  un  timbre  et  un  accent 
lieaucoup  plus  pénétrant  que  les  voix  de  femmes.  La  plupart 
des  grands  chanteurs  du  dix-huitième  siècle,  tels  que  Senesiuo, 
Farlnelli,  Cafarelli,  Gudagni  et  Manhesi  ont  été  des  castrats; 
Crescenfini  et  Veluti  sont  les  derniers  qui  ont  joui  d'une  brillante 
renommée.  On  tolérait  autiefois  dans  l'Etat  Romain  l'opération 
de  la  castration  ;  elle  était  surtout  fréquente  à  Maccrata.  Elle  est 
maintenant  sévèrement  défendue. 


310  DICTIONIfAIKE 

CATACOUSTIQUE,  s.  f.  Scieure  des  sons  répercntés,  d'où  dé- 
pend celle  de  la  construction  des  salles  de  spectacles  et  de  con- 
certs. 

CAVALQUET,  s.  m.  L'une  des  sonneries  de  trompettes  de  la  ca- 
valerie française. 

C.WATI^S^E,  s.  f.  Air  que  chante  un  acteur  lorsqu'il  paraît  pour 
la  première  fois  sur  la  scène  dans  un  opéra.  Ce  nom  vient  de 
l'Italien  cavare,  sortir.  Les  cavatiues  étaient  autrefois  des  airs 
d'un  seul  mouvement  sans  i-eprises;  aujourd'hui  elles  sont  sou- 
vent i;omposées  d'un  récitatif  et  de  deux  ou  trois  mouvemens 
alternativement  lents  et  vifs. 

CELESTINO  ,  s.  m.  Sorte  de  clavecin  à  archet  qui  fut  inventé  en 
Allemagne,  par  un  inécanicieu  non^mé  Walker,  vers  178/f.  Un 
cordon  de  soie,  placé  sous  les  cordes,  était  mis  en  mouvement 
au  moyen  d'une  roue  de  pédale,  et  de  petites  poulies,  mises  au 
bout  de  chaque  touche,  approchaient  ce  cordon  des  cordes  ,  et 
les  fai.saient  résonner  avec  expression,  crescendo  et  decrescendo. 

CEMBALO  ou  CLAVICEMBALO ,  s.  m.  Nom  italien  du  clavecin 
(voy.  ce  mot). 

CEMBALO  AÎS'GELICO.  Sorte  de  clavecin  inventé  à  Rome  et  qui, 
au  lieu  de  plumes  aux  sautereaux,  avait  des  morceaux  de  cuir 
revêtus  de  poils ,  lesquels  imitaient  la  mollesse  des  doigts  et  mo- 
difiaient le  son  avec  douceur. 

CEMBALO  DA  ARCO   (voy.  Clavecin  à  archei). 

CEMBALO  ou  NICORDO,  appelé  nuaiprotce.  Instrumenta  corde 
inventé,  en  iG5o,  par  un  Florentin,  nommé  François   Kigelli. 

CEMBALO  ORGANISTICO.  Piano-forté  avec  un  clavier  de  pé- 
dale, inventé  par  l'ahbé  Trentin,  à  Venise. 

CHACONE,  s.  f.  Air  de  danse  d'une  é'endue  assez  considérable, 
qui  serviiit  autrefois  de  finale  aux  opéras  ou  aux  ballets.  Il  n'est 
plus  en  usage. 

CHALUMEAU,  s.  m.  Flûte  champêtre  des  peuples  de  l'antiquité. 
Ou  lui  a  donné  le  nom  de  ca/amau/e,  tiré  du  latin  calamus.  Dans  les 
douzièmeel  treizième  siècles,  on  l'appelait  cAa/em  je.  Le  chalumeau 
est  encore  en  usage  dans  les  campagnes  du  raidi  de  la  France. 

Chalumeau  est  aussi  le  nom  des  grands  tuyaux  extérieurs  delà 
mu5ette  ou  cornemuse. 

Chalumeau.  On  donne  ce  nom  aux  sons  graves  de  '.a  clarinette, 
c'est-à-dire  à  ceux  de  la  dernière  octave  et  demie. 


DK  MUSIQUt.  311 

CHANSON,  s.  {.  Petit  po<ine  divisé  en  «ouiilets  ou  stroplips  au- 
quel on  applique  au  air  de  mélodie  simple ,  fucile  à  apprendre 
et  à  retenir.  La  chansfju  est  originaire  de  France';  elle  y  prit 
naissance  vers  le  huitirnie  siècle,  et  s'est  maintenue  en  faveur 
jusqu'aujourd'hui.  La  clianson  la  plus  célèbre  du  moyen-Age  fut 
celle  de  Roland;  elle  était  chantée  à  la  guerre  par  les  soldats. 
Les  trouvères  et  les  trouljadours  en  ont  composé  des  multitudes 
dans  les  douzième  et  treizième  siècles;  ils  écrivaient  et  les  paroles 
et  la  musique.  De  tous  temps  les  Français  ont  fait  beaucoup  de 
chansons  satiriques  sur  les  événemens  politiques  et  sur  les  jjrin» 
cipaux  personnages  de  l'Etat;  on  en  connaît  un  très  grand  nom- 
bre qui  ont  été  faites  aux  temps  de  la  Ligue,  de  la  Fronde,  de 
la  Régence,  etc.  Dès  le  quinzième  siècle,  les  chansons  à  plusieurs 
parties  étaient  fort  recherchées,  et  les  plus  habiles  musiciens  s'oc- 
cupaient de  ce  genre.  On  les  chantait  à  table,  et  on  les  accom- 
pagnait avec  les  instruraens.  Plus  tard,  les  chansons  de  table 
ou  à  boire ,  à  voix  seule,  les  ont  remplacées.  Plusieurs  provinces 
de  France  eut  des  airs  d'im  caractère  particulier;  on  remarque 
principalement  ceux  de  la  Provence,  de  la  Bourgogne,  de  l'Au- 
vergne et  de  l'Alsace  (voy.  Air-). 

CHANSONNETTE,  s.  f.  Petite  chanson. 

CHANT,  s.  m.  Émission  des  sons  diversement  modifiés  de  la  voix 
de  l'homme  et  des  oiseaux.  Le  chant  se  produit  par  instinct  dans 
la  race  humaine;  mais  en  perfectionnant  l'organe  de  la  voix  par 
l'exercice  on  en  fait  un  art  (voy.foi'x). 

Chant  est  quelquefois  synonyme  de  mc7orf('e  ;  c'est  en  ce  sens  qu'on 
dit  de  beaux  chants  ,  des  chants  dépourvus  de  grâce. 

CHANT  AMBROISIEN.  Gisant  ecclésiastique  foriaé,  par  saint  Am- 
broise,  de  quelques  fragineus  de  l'ancienne  musique  des  Grecs. 
Ce  chant  est  encore  eu  usage  dans  quelques  églises  de  Milan  , 
mais  sa  tradition  d'exécution  s'est  beaucoup  altérée. 

CHANT  GREGORIEN.  Chant  ecclésiastique  réglé  par  saint  Gré- 
goire ,  au  sixième  siècle.  Ce  «liant  est  celui  dont  on  se  sert  dans 
la  plupart  des  églises  catholiques.  II  diffère  du  chaut  ambroisien 
dans  quelques  détails  de  forme  plutôt  que  dans  la  tonalité.  Dans 
son  origine,  le  chant  ambroisien  était  rhythmé,  le  chant  gré- 
gorien ne  l'était  pas  (voy.  Plain-chant). 

CHANT  PARISIEN.  Sorte  de  chaat  d'église  en  usage  dans  le  dio- 


312  DICTIONNAIRE 

«•<-se  de  Paris.  Il  est  moins  simple  el  moins  beau   que   le    «-liant 

CHA>T  SLR  LE  LIVRE.  On  appelle  ainsi  une  liaimonie  impro- 
visée sur  le  ch.:nt  eotlésiastique,  par  les  rliantres  réuuis  autour 
ilu  lutrin.  Quelques  auteurs  assurent  qu'on  faisait  autrefois  de 
tort  bonnes  choses  en  ce  genre  dans  les  églises  d'Italie,  i)articu- 
lièrement  à  Rome;  mais  eu  France  cette  musique  était  fort  mau- 
vaise. Elle  n'est  plus  en  usage. 

C'IL-^NTAINT  ,  TE.  Adj.  dont  on  se  sert  quelquefois  comme  syno- 
nyme de  me/odj^uJ",  me  Wteufe.  Ce'a  esl  chantant ,  cette  musique 
est  chaulante ,  signifient  qu'une  musique  est  plus  riche  de  mélo- 
die que  d'harmonie. 

CH.VISTERELLE  ,  s.  f.  La  corde  la  plus  élevée  et  la  moins  grosse  da 
violon  et  de  la  guitare.  Cette  corde  {luî),  fournit  les  sons  les  plus 
iiigus  de  l'instrumeut  lorsqu'on  y  applique  les  doigts. 

CHANTEUR,  s.  m.  Homme  qui  connaît  l'art  du  cb.iot  et  que  la 
uature  a  pourvu  d'une  voix  |)lus  ou  moins  belle  (voy.  Voix,  Cas- 
trat, Haule-contre ,  Ténor  et  Basse). 

CliAÎSTEUSE,  s.  f.  Ce  nom  ne  se  donne  jilus  qu'aux  femmes  qui 
ont  peu  de  talent  dans  l'art  du  chaut,  dej>uis  que  celui  de  can- 
tatric:e  a  prévalu.  Cependant  on  s'en  sert  encore  dans  le  langage 
des  tbéàtfes  de  province,  et  l'on  dit:  Une  première  chanteme , 
une  chanteuse  a  roulades ,  une  ciia?îT£Use  sans  roulades! 

(Ml ANTRE,  s.  m.  Homme  qui  chante  au  lutrin  le  ]ilain-cliant  des 
offices.  Ce  mot  se  prend  quelquefois  en  mauvaise  part,  et  l'on 
dit  d'un  chanteur  sans  goût  :  C'est  un  chanire  de  paroisse. 

('li.APE.^U  CHINOIS.  Instrument  de  j)ercussiou  dont  on  fait  usage 
d.ms  la  mu.'ique  militaire.  II  a  la  forme  d'une  sorte  de  coiffure 
chinoise,  en  l'uivre,  et  plusieurs  petites  sonnettes  ou  grelots  sont 
suspendus  à  ses  bords.  On  le  fait  résonner  en  l'agitant  j)ar  se- 
cousses. 
CHAPELLE.  Se  dit  delà  réunion  des  musiciens  qui  exécutent  de 
1.1  musique  dans  une  église  ou  dans  la  cha]>elie  d'un  prince. 
C'est  ainsi  qu'on  dit  :  La  chapelle  pontificale ,  la  chapelle  du  roi  de 
liavilre ,  etc. 
CHEF  D'ATTAQUE.  Musiiien  qui  dirige  dans  un  chœur  toutes  les 
voix  de  même  espèce.  II  y  a  un  chef  d'attaque  pour  les  basses, 
un  autre  pour  les  ténors,  etc.  Si  tous  les  choristes  (voy.  ce  mot) 


Vr.  MUSIQUE.  SI  3 

ctiiient  des  miisiciL-iis  suflis.imment  liahiles,  les  «.liefs  d'altafiue 
sernient  inutiles,  et  il  ne  faudiiiit  <]u'uii  diicclciii- ile  toute  la 
musique. 

CHEl'"  DE  MUSIQUE.  Nom  du  musicien  qui  dirige  un  corps  de  mu 
sique  militaire. 

CHEF  DE  PUPITRE.  Celui  qui  dans  un  orcOiestre  dirige  tous  les 
instrumens  de  même  e^])èce. 

<:HEF  D'ORCHESTRE.  Nom  qu'on  donne  au  musicien  qui  dirige 
l'exécution  d'une  réunion  d'instrumentistes  et  quelquefois  de 
clianteurs.  A  l'opéra  de  Paris  on  donne  le  nom  de  chefs  ilu  chant 
à  des  musiciens  qui  sont  chargés  de  diriger  l'exécntion  des 
(liœurs. 

CHEVALET  ,  s.  m,,  en  italien  ponticef'o.  Petit  pont,  ou  morceau 
de  bois  peu  épais,  légèrement  arrondi,  sur  lequel  on  élève  les 
tordes  des  instrumens  à  archet,  afin  de  les  éloigner  de  la  touche 
et  de  leur  donner  plus  de  raideur  et  de  sonorité. 

CHEVILLE,  s.  f.  Morceau  de  bois  ou  de  fer  cylindrique  sur  le- 
quel on  roule  les  cordes  des  instrumens  afin  de  leur  donner  le 
degré  de  tension  nécessaire  pour  les  accorder. 

Cl-TEVROTER,  v.  u.  C'est  exécuter,  d'une  manière  défectueuse, 
avec  la  voix,  les  deux  notes  d'un  Iri/le  (voy.  ce  mot)  ,  sans  mar- 
«juer  l'articulation  de  chacune  et  eu  imitant  le  bêlement  des 
chèvres. 

CHIFFRER  nne  basse. C'est  déterminer  jiar  signes  et  des  chiffres 
l)lacps  au-dessus  de  chaque  note  l'anord  qui  doit  l'accompagner. 

(^HIKFRES.  Signes  qui,  j)lacés  au-dessus  des  notes  d'une  paroe 
de  basse ,  indiquent  aux  accompagnateurs  les  accords  dont  ils 
doivent  l'accompagner  sur  l'orgue  ou  sur  le  piano.  La  collection 
de  ces  signes  n'est  pas  uniforme  dans  toutes  les  écoles;  les  va- 
riétés qui  existent  à  cet  égard  jettent  souvent  de  l'incertitude 
dans  l'esprit  des  accompagnateurs  (v.  Accompagnateurs  et  Accom- 
pugnemeni).  Depuis  qu'on  a  pris  l'habitude  d'écrire  les  accompa- 
gnemens  de  piano  ])our  les  morceaux  de  chant,  la  méthode  de 
chiffrer  la  basse  a  été  abandonnée;  elle  n'est  plus  d'usige  que 
dans  les  études  d'harmonie.  Cependant  la  connaissance  des  chif- 
fres est  nécessaire  pour  accompagner  lif  musique  ancienne. 

CKIROPLASTE,  s.  m.  Machine  en  cuivre  ou  en  bois  qui  s'adapte 
au  clavier  des  pianos  et  qui  est  destinée  à  donner  une  bonne  po- 
sition aux  mains  des  élèves  coinmençans,  ainsi  qu'à  guider  les 

87 


314  DICTIONNAIRE 

mouveraens  de  leurs  doigts.  Cette  machine  a  été  inventée  à  Du- 
blin, par  M.  Logier,  qui  en  a  fait  ensuite  l'oljjet  d'une  méthode 
d'enseignement  à  Londres.  Chiroplaste  est  formé  des  deux  mots 
grecs, y  5(3  ,  main  ,  et  TrXâarfiÇj  qui  façonne  ,  c'est-à-dire  qui  forme 
la  main. 
CHOEUR,  s.  m.  Dans  l'acception  la  plus  générale,  c'est  une  réu- 
nion de  personnes  qui  parleutou  qui  chantent.  Dans  la  musique, 
le  chœur  est  ordinairement  composé  de  quatre  ou  de  cinq  es- 
pèces de  Toix ,  c'est-à-dire  de  voix  de  femme  aiguës,  appelées 
dessus  ou  soprano,  de  contralto,  ou  voix  de  femme  graves,  de  ténor 
et  de  basse  (voy.  tous  ces  mots).  Dans  les  chœurs  il  y  a  toujours 
plusieurs  j)ersonnes  pour  chanter  chaque  partie.  On  met  des 
chœurs  d.ins  les  opéras  et  dans  la  musique  d'église.  Quelquefois 
ils  chantent  seuls  ;  d'autres  fois  ils  accompagnent  une  voix  isolée 
qu'on  nomme  solo.  L'opposition  de  ces  masses  vocales  avec  le 
solo  produit  de  beaux  effets. 
CHORISTE   Homme  ou  femme  qui  chante  dans  les  chœurs.    On 

prononce  coriste. 
CHORUS.  Se  dit  du  refrain  d'une  chanson  qu'on  chante  quelque- 
fois en  chœur  à  l'unisson  ,  soit  à  table,  soit  dans  l'espèce  de  danse 
chantée  qu'on  nomme  ronde. 
CHROMATIQUE ,  adj.    Genre    de  musique   où  les   modulations 
(voy.  ce  mot)  sont  fréquentes  et  rapides.  On  distinguait  autrefois 
trois  genres  de  musique:  le  diatonique ,  qui  modulait  peu  ou  ne 
modulait  point,  le  chromatique  où  les  modulations  étaient  mul- 
tipliées, et  Venharmoniqu^pii  les  modulations  se  faisaient  par  uu 
mode  particulier  (voy.  diatonique  et  enharmonique);  mais  ces  dis- 
tinctions ne  se  font  plus,  parce  que  la  musique  de  nos  jours  est 
un  niéln'mge  <-ontinuel  des  trois  genres. 
Chromatique  se    prend    quelquefois    substantivement,    et    l'on 
dit  le  chromatique  pour  le  genre  chromatique. 

Une  gamme  chromatique  est  une  gamme  formée  de  demi- 
tons. 
CHROMAMETRE ,  s.  m.  Instrument  composé  d'un  petit  corps 
sonore  avec  un  long  mambe  divisé  par  demi-tons,  et  monté 
d'une  corde  sur  laquelle  ou  fait  glisser  un  capo-tasto  mobile  qui 
varie  les  intonations  selon  les  divisions  du  manche.  Une  touche 
de  clavier  ordinaire  fait  mouvoir  un  marteau  qui  frappe  la  corde 
et  la  fait  résonner.  Cet  instrument,  destiné  à   faciliter  l'accord 


0E  MUSIQUE.  315 

du  piano  aux  personnes  qui  n'en  ont  pas    l'tial)itade,  a  été  in- 
veuté  piir  INl.Roller,  facteur  de  piiiuos, à  Paris,  en  1827. 
CHRONOMETRE,  s.  ni.   Instrument  qui  sert  à  déterminer  la  me- 
sure du  teui[is  en  musique,  et  à  indiquer  les  diverses  nu.inces  de 
lenteur  et  de  vitesse.  11  y  en  a   de   plusieurs  sortes;  le  meilleur 
est  celui  qui  est  connu  sous  le  nom  de  métronome  (voy.  ce  mot). 
CLAIRON,  s.  m.  Petite  trompette  dont  ou  fais.iit  usage  dans  la 
musique  au  moyen-âge.  Cet  instrument  sonnait  l'octave  aiguë  de 
la  trompette  ordinaire. 
Clairon,  jeu  d'anclie  eu  étain,  qu'on  emploie  dans  les  orgues  de 
France  et  des  Pays-Bas ,  et  qui  soune  l'octave  du  jeu  de  même 
espèce  appelé  trompette. 
Clairon,  nom  delà  partie  aiguè  de  la  clarinette. 
CLARINETTE,  s.  f.   Instrument  à  vent  composé  d'un  tube  en  bois 
ou  en  ébèue,  terminé  par  un  pavillon  évasé,  et  qui  se  joue  en 
soufflant  par  un  bec  auquel  est  ajustée  une  languette  mince  de 
roseau  appelé  l'ancAe.   Le  tube  est  percé  de  trous  qu'on  boucbe 
avec  les  doigts  ou  avec  des  clefs  (v.  ce  mot),  et  qui  servent  à  modi- 
fier les  intonations,  La  clarinette  a  des  sons  plus  graves  que  la 
flûte  et  le  hautbois,  et  son  étendue  est  j)lus  grande  que  celle  de 
ces  instruraens.  Le  doigté  de  la  clarinette  étant  difficile  et  com- 
pliqué, il  est  de  certains  tons  dans  lesquels  on  ne  pourrait  jouer 
si  l'on  n'employait  des  iustrumens  de  différentes  longueurs  qui 
haussent  ou  baissent  le  ton,  en  raison  de  la  longueur  du  tuije. 
CLARINETTISTE.   Musicien  qui  joue  de  la  clarinette. 
CLAQUEBOIS  ou  REGALE.  Instrument  composé  de  morceaux  de 
bois  dur  et  sonore  dont  chacun  fait  entendre  les  sons  d'une  des 
notes  de  la  gamme,  quand  on  les  frappe  avec  un  marteau. 
CLAVECIN,  s.  m.   Instrument  à  clavier  dont  l'usage  a  précédé  ce- 
lui du  piano  (voj".  ce  mot).  Le  clavecin  n'était  point   un  instru- 
ment du  même  genre  que  ce  dernier,  car  ses  cordes,  au  lieu  d'ê- 
tre frappées  par  des  marteaux,  étaient  pincées  par  des  plumes 
attachées  à  une  sorte  de  leviers  ,  qu'on  appelait  sau/ereau.v.  De  là 
vient  qu'il  était  rangé  dans  la  classe  du  Inth,  de  la  mandoline, 
et  des    autres  instrumens  qu'on  ajipelait  slromenli  da  penna  (iu- 
strumens de  plume). 
CLAVECIN  A  MARTEAUX.  Instrument  qui  doit  être  considéré 
comme  l'origine  dn  piano  ,  et  dont  la  première  invention  est  due 
à  un  facteur  de  Paris  nommé  Marius.  ' 


316  DICTIONNAIRE 

CLAVICYLINDRE ,  s.  m.  Instrument  à  clavier  et  à  frotteraeut 
d'un  cylindre  de  verre,  dans  la  forme  d'un  clavecin, inventé  par 
le  physicien  Chladni ,  en  1793. 

CLAVICITHERIUM.  Espèce  de  harpe  à  clavier,  dont  les  cordes  de 
boyau  étaient  verticales.  Il  est  parlé  du  clavicitkerium ,  non 
comme  d'un  instrument  nouveau,  dans  la  Muiurgia  de  Nachti- 
gall, imprimée  dans  la  première  moitié  du  seizième  siècle. 

CLAVIER,  s.  m.  Assemblage  des  leviers  a|)])elés  (ouc/ie;  qui  ser- 
vent à  faire  résonner  les  cordes  du  clavecin,  du  piano  et  des 
autres  instriimens  du  même  genre,  ou  les  tuyaux  de  l'orgue. 
Clavier  vient  du  mot  latin  clavis  .  qui  signifie  clef  ou  touche. 

CLAVIHARPE,  s.  m.  Instrument  du  genre  de  la  harpe,  à  cordes 
de  boyau  verticales,  qui  résonnent  au  moyen  d'un  clavier.  (Jet 
instrument  a  été  inventé  à  Paris,  vers  1812,  par  M.  Dietz 
le  père. 

CLAVILYRA,  s.  m.  Instrument  du  même  genre  que  le  précédent, 
qui,  depuis  environ  dix  ans,  a  été  fabriqué  eu  Angleterre  par 
M.  Bafeman. 

CLEF ,  s.  f.  Signe  qui  se  met  au  commencement  des  portées  (voy. 
Porùe)  pour  indiquer  le  degré  d'élévation  ou  de  gravilé  des  no- 
tes qui  y  sont  placées  et  le  genre  de  voix  ou  d'instrument  au- 
quel ces  notes  a])partiennent.  D.ins  la  musique  moderne  il  y  a 
tiois  rlefs  qu'on  nomme  clef  de  sol ,  clef  d'ut  et  clef  de  fa.  La  jio- 
sition  de  ces  clefs  ,  sur  les  lignes  de  la  ])ortée,  est  vertiiale;  les 
noms  des  notes  changent  en  raison  de  la  position  des  clefs.  Les 
clefs  de  sol  el  d'uf ,  posées  sur  la  première  ligne  de  la  portée, 
servent  pour  les  voix  et  les  instruraens  à  sons  aigus;  les  clefs 
d'ut,  placées  sur  la  de-uxième,  la  troisième  et  la  quatrième  li- 
gne, ajipartiennent  aux  voix  et  aux  instrumeus  intermédiaires, 
entre  les  plus  graves  et  les  plus  aigus  ;  la  clef  de/a  est  celle  des 
voix  graves  (voy.  le  chap.  111  ). 

Clef  est  aussi  le  nom  de  certaines  pièces  mécaniques  qui  ser- 
vent à  boucher  ou  à  ouvrir  les  trous  des  instruinens  à  vent  que 
les  doigts  ne  peuvent  atteindre. 

CLOCHE ,  s.  f.  Instrument  composé  d'un  mélange  de  cuivre,  d'étaiu 
et  de  zinc,  dont  le  son  se  pro|)age  au  loin  ,  et  qu'on  fait  résonner 
au  moyen  d'un  morceau  de  fer  susjjendu  entre  ses  parois,  ou  en 
fra])pant  dessus  avec  uu  marteau.  Les  grosses  cloches  se  susj)en- 
dent  d'ordinaire  dans  le  haut  des  clochers  afin  qu'elles  agitent 


DE  MU51QUH.  317 

l'air  avec  plus  de  facilité  et  transmettent  le  son  au  loin  (voy.  Ca- 
ri/ton). 

CLOCHETTE.  Petite  cloclie. 

CODA.  Mot  italien  qui  signifie  queue  ou  terminaison  ,  et  qui  s'ap- 
plique à  certaines  phrases  musicales  ])ar  lesquelles  on  finit  un 
morceau  de  musique.  La  coda  ne  fait  pas  essentiellement  partie 
du  morceau  et  pourrait  quelquefois  être  supprimée. 

COLOPHANE  ,  s.  f.  Résine  préparée  qui  sert  à  froi ter  le  crin  des 
arcliels  d'instrumens  afin  de  leur  donner  du  mordant  sur  les  eor- 
des.  Le  nom  véiitable  de  la  résine  est  colophone  ,  mais  l'usage  a 
fait  ])révaloir  celui  de  colophane. 

COMMA  ,  s.  m.  Petit  intervalle  dont  on  ne  peut  faire  usage  dans 
la  musique  pratique,  mais  dont  les  théoriciens  sont  ohligés  de 
tenir  comiife  dans  le  calcul  des  proportions  de  l'échelle  musi- 
cale. Il  y  a  plusieurs  sortes  ilecomma.  Le  premier,  qu'on  nomme 
comma  sjnlonir/ue  ,  est  la  différence  qui  existe  entre  le  ton  ma- 
jeur représenté  par  la  j)r<>portiou  Ç)  :  8  ,  et  leton  mineur  qui 
s'exprime  par  9  :  10;  différence  qui  ei^t  la  neuvième  partie  d'uu 
tou  et  qui  se  représente  par  la  ])roportion  81:  80.  Le  second 
comma  s'appelle  comma  diatonique;  c'est  la  diflérence  qui  se 
trouve  entre  l'octave  juste,  représentée  par  la  proportion  r  :  2  , 
et  le  dernier  terme  de  douze  quintes  successives,  différence  ex- 
primée par  les  nombres  53r44i-  5^4288.  On  donne  aussi  à  ce 
comma  le  nom  de  commade  Pj  thagore.he  troisiînne  comma, appelé 
d.esis  par  les  anciens  tliéoriciens  ,  est  la  différence  qui  se  trouve 
entre  deux  sons  analogues  comme  ré  U  et  ut  >i,  différence  qui 
s'exprime  par  la  proportion  128:  i25.  Tous  ces  commas  s'éva- 
nouissent dans  la  division  de  l'octave  en  douze  parties  égales. 

COMMODO.  Mot  italien  qui  indique  un  niouvemeut  intermédiaire 
entre  la  lenteur  et  la  vitesse. 

COMPLAINTE  ,  s.  f.  Sorte  de  romance  populaire  qui  a  pour  ob- 
jet un  événement  public  ,  et  dont  l'air  est  d'un  caractère  pathé- 
tique. 

COMPOÎSIUM.  Instrument  inventé  vers  1820  par  uu  mécanicien 
hollandais ,  nommé  Viukel,  et  dont  le  mécanisme  est  resté  un 
secret.  Cet  instrument ,  par  une  combinaison  admirable,  im])ro- 
Tise  des  variations  que  MM.  BiotetCatel  ont  dit  être  inépuisa- 
bles, dans  un  rapport  qu'ils  ont  fait  à  l'Institut.  L'orgue  auquel 


318  DICTIONHAIRE 

ce  mccauisme  est  appliqué  est  d'ailleurs  remarquable  par  sa 
beauté. 

COMPOSER,  V.  a.  Action  d'inventer  de  la  musique  et  de  l'écrire 
selon  les  règles  de  l'art. 

COMPOSITEUR  ,  s.  m.  Celui  qui  invente  de  la  musique,  et  qui 
sait  les  différentes  parties  de  l'art  de  l'écrire  ,  telles  que  l'hArmo- 
nie,  le  contrepoint,  les  effets  de  voix  et  des  instrumens,  etc..  Il 
est  beaucoup  de  faiseurs  de  musique  qui  ignorent  une  partie  de 
ces  choses.  En  Italie,  on  se  sert  du  mot  maestro,  pour  désigner 
un  compositeur. 

COMPOSITION,  s.  f.  Art  d'inventer  et  d'écrire  de  la  musique. 
On  se  sert  en  général  de  mauvaises  locutions  lorsqu'on  dit  qu'on 
apprend  ou  qu  on  enseigne  la  composilion.  Composer,  c'est  inven- 
ter, ce  qui  ne  se  peut  enseigner;  mais  on  apprend  l'art  d'écrire, 
c'est-a-dire  le  contrepoint  et  l  harmonie. 

CON  A?*IMA,  avec  ame,  avec  expression.  Locution  italienne  qui  se 
met  quelquefois  sur  la  musique  pour  indiquer  le  caractère  de 
l'exécution. 

C0>'  BRIO,  avec  un  caractère  brillant,  avec  éclat.  Expression  qui 
se  place  au  commencement  de  certains  morceaux  d'un  mouve- 
ment vif. 

CON  ESPRESSION.  Qui  doit  être  joué  ou  chanté  avec  expres- 
sion. 

COÎf  MOTO.  Qui  doit  être  exécuté  dans  un  mouvement  décidé. 

CONCERT,  s.  m.  Réunion  de  musiciens  qui  exécutent  des  mor- 
ceaux de  musique  vocale  et  instrumentale.  Ce  mot  vient  du  la- 
tin concinere.  En  Italie  un  concert  se  vomme  academia. 

CONCERrO  SPIRITUEL.  Concert  où  l'on  ne  chante  que  de  la  mu- 
sique  d'église,  et  d'où  l'on  exclut  les  morceaux  d'opéras. 

CONCERTANT. Adj.  pris  substantivement,  se  disait  autrefois  du 
chanteur  ou  de  l'instrumentiste  qui  exécutait  dans  un  concert; 
on  dit  aujourd'hui  concertiste. 

CoxCERTAîfT  se  dit  particulièrement  d'un  morceau  de  musique 
dans  lequel  les  différentes  parties  brillent  alternativement.  Ainsi 
l'on  dit  un  duo ,  un  quatuor  concertant  pour  indiquer  des  pièces 
dans  lesquelles  deux  ou  quatre  parties  concerteut.  Vae  sympho- 
nie concertante  est  un  morceau  qui  sert  à  faire  briller  le  talent  de 
quelques  iastrunicntistcs,  pendant  que  les  autres  accompagnent. 
Il  y  a  de  ces  symphonies  pour  divers  genres  d'iustrumens. 


DE   MUSKjUE.  319 

CONCERTÉ,  utij.  Mot  qui  vient  de  l'italieu  et  qui  signifie  uu 
style  de  musique  d'église^  plus  brillaut  que  le  style  sévère  ap- 
pelé a  capclla  (tie  cliapelle).  Une  messe  concertée,  ua  psaume  con- 
certé sont  accoinpagués  avec  l'orchestre. 

CONCERTISTE  ,  adj.  pris  substantivement.  Celui  qui  joue  ou  qui 
chante  dans  un  concert. 

CONCERTO,  s.  m.  Sorte  de  pièce  de  musique  qui  sert  à  faire 
briller  le  talent  d'un  instrumentiste,  pendant  que  plusieurs  au- 
tres raccompagnent.  Ce  mot  est  italien.  Il  y  a  des  concerto  de 
violou,  de  piano,  de  flûte,  de  hautbois ,  etc. 

CONCERTO  UA  CAMERA.  C'était  autrefois  uu  concerto  qui  n'é- 
tait  accompagné  que  par  uue  basse. 

CONCERTO  GROSSO.  Expression  ancienne  par  laquelle  on  dé- 
signait un  concerto  pour  plusieurs  instrumens. 

On  se  sert  quelquefois  du  diminutif  conceilino ,  pour  désigner 
un  [)etit  concerto. 

CONCORDANT,  s.  m.  Voix  d'homme  composée  des  sons  les  moins 
élevés  du  ténore  et  les  moins  graves  de  la  basse.  Ce  mot  n'est 
plu.s  guère  en  usa.ge.  On  dit  aujourd'hui  un  bariton  (voy.  ce 
mot). 

CONSERVATOIRE,  s.  m.  Ecole  publique  de  musique,  entrete- 
nue aux  dépens  des  gouvernemens  ou  par  des  fondations  parti- 
culièv:'s.  Le  premier  conservatoire  fut  fondé  à  Naples,  en  i53-, 
sous  l'ivocation  de  Sanla-Maria-de-Loro.  Il  y  ea  eut  depuis  lors 
plusieurs  autres  dans  la  même  ville  et  à  Venise.  La  conserva- 
toire de  musique  de  Paris  a  été  établi  en  1793,  eu  vertu  d'une 
loi  du  16  thermidor  an  III.  Dans  ces  derniers  temps,  il  en  a  été 
foudé  sous  divers  titres  ,  à  Vienne  ,  Prague,  Berlin,  Londres  et 
Bruxelles. 

CONSOLE,  s.  f.  Partie  supérieure  de  la  harpe  qui  contient  la  por- 
tion la  plus  compliquée  du  mécanisme  des  pédales,  et  àlaquelle 
tiennent  les  chevilles  qui  servent  à  attacher  les  cordes. 

CONSONNANCE  ,  s.  f.  Réunion  simultanée  de  deux  sons  qui  s'ac- 
cordent ensemble,  et  dont  l'effet  est  agréable  à  l'oreille.  Les 
consonnances  sont  la  tierce,  la  quarte,  la  quinte,  la  sixte  et 
l'octave. 

CONSONNANT,  adj.  Intervalle  ou  accord  composé  de  sous  qui 
forment  des  consonnances. 

CONTRALTO,  s.  m,  Voix  intermédiaire  entre  le  soprano  ou  voix 


320  DICTIONNAIRE 

aiguë  de  femme,  et  letênore  ou  voix  aiguë  d'homme.  Il  v  a  des 
femmes  qui  ont  naturellement  la  voix  de  contralto  ;  les  eiivirons 
de  Toulouse  fournissent  aussi  des  hommes  qui  possèdent  le 
genre  de  voix  un  peu  plus  borné  à  l'aigu,  mais  plus  étendu  au 
grave.  Ou  donne  à  ces  voix  le  nom  de  haute-conlre.  En  Italie  ou 
obtenait  autrefois  artificiellement  de  belles  voix  de  contralto  ,  au 
moyen  de  la  castration. 

CONfRAPUNTIST£,s.  m.(voy.  Conirepointisie). 

CONTREBASSE,  s.  f.  Grand  instrument  à  archet  qui,  par  la  di- 
mension de  ses  cordes,  sonne  l'octave  grave  du  violoncelle.  Cet 
instrument  est  un  des  plus  nécessaires  dans  la  composition  d'un 
orchestre,  à  cause  de  son  énergie.  En  France,  la  contrebasse  est 
montéede  trois  cordes,  qu'on  accorde  à  la  quinte  et  dont  la  plus 
haute  est  la,  l'intermédiaire  ré ,  et  la  plus  basse  soL  En  Allema- 
gne, elle  a  quatre  cordes  qui  sont  accordées  à  la  quarte  l'une 
de  l'autre,  ce  qui  rend  le  doigté  plus  facile. 

CONTREBASSISTE,  s.  m.  Celui  qui  joue  de  la  contrebasse. 

CON TREBASSON  ,  s.  m.  Instrumeut  à  vent  et  à  znche  ,  du  genre 

l  du  basson  (voy.  ce  mot),  et  qui  par  ses  dimensions  sonne  Toc- 
tave  du  basson. 

CONTREDANSE,  s.  f  Sorte  de  danse  qui  a  succédé  à  toutes  les 
danses  autrefois  en  usage,  et  qui  se  danse  maintenant  dans  les 
salons  comme  d.ins  les  guinguettes.  Ce  mot  vient  de  l'exjïres- 
sion  anglaise  countrjr-dance ,  danse  de  la  campagne.  La  musique 
des  contredanses  est  d'un  mouvement  animé,  en  mesure  à  deux 
temps  ,  à  division  binaire  ou  ternaire.  La  ('ontredanse  est  for- 
mée de  diverses  figures  résultant  des  positions  des  d.in>eurs.  O.i 
a  donné  à  ces  figures  les  noms  de  pantalon  ,  été ,  trénisse ,  pas- 
tourelle,  chasse-croisé ,  etc.  (voy.  ces  mots). 

CONTREPOINT,  s.  m.  Art  d'écrire  la  musique  suivant  de  certaines 
conditions  (voy.  le  chap.  xri  ). 

CONTREPOINT  DOUBLE.  Contrepoint  susceptible  d'être  ren- 
versé ou  dans  lequel  ce  qui  est  au-dessus  peut  être  transporté  a 
la  basse,  et  réciproquement. 

CONTREPOINT  FUGUÉ.  Contrepoint  dans  lequel  il  y  a  desimi- 
lalions  ,  de^  canons  el  d'autres  artifices  de  l'art  d'écrire. 

CONTREPOINT  SIMPLE.  Contrepoint  qui  n'est  pas  susceptible 
d'être  renversé. 

CONTRE-SUJET,  s.  m.   Phrase  (J'accompagnemeat  qu'on  intro» 


DE   MUSIQUE.  331 

duit  dans  les  fugues  ])oiir  former  avec  le  sujet  un  contrepoint 
doul)le,  susceptible  d'être  renversé. 
COINTRE-TEMPS,  adv.  Aller  à  contre-temps,  c'est  manquer  à  la 
mesure,  ne  point  attaquer  en  temps. 

Un  morceau  de  musique  est  a  contre-temps  quand  son  rotn- 
mcn<-euient  n'est  point  établi  sur  le  temps  fort  ou  faible  auquel 
il  appartient;  l'effet  d'un  tel  morceau  blesse  une  oreille  exercée, 
quel  qu'en  soit  d'ailleurs  le  mérite. 
COPISTE  ,  s.  m.  Celui  qui  copie  de  la  musique.  Le  copiste  doit 
être  bon  musicien,  car  il  ne  se  borne  point  à  copier  exactement 
ce  qu'il  a  sous  les  yeux;  quelquefois  il  est  obligé  de  tiansposer 
(voy.  ce  mot) ,  d'extraire  des  parties  séparées  d'une  partition  et 
de  faire  d'autres  opérations  qui  exigent  de  l'intelligence  et  la 
connaissance  des  diverses  parties  de  la  musique. 
COR,  s.  m.   Instrument  à  vent,  en  cuivre,  qui  se  joue  avec  une 

embouchure  (voy.  le  ch.ip.  xix). 
COR  ANGLAIS.   Instrument  à  vent  et  à  anche  ,  du  genre  du  haut- 
bois (voy.  cl),  xix) ,  et  qui,  à  cause  de  sa  longueur,  sonne  une 
quinte  au-dessous  de  celui-ci. 

On  appelle  aussi  cor  anglais  un  registre  de  l'orgue  ,  à  anche, 
a  tuyaux  ouverts  de  deux  ou  de  quatre  pieds  et  de  forme  cy- 
lindrique. 
COR  DE  BASSET  (  en  allemand  bassec-hom).  Instrument  à  anche 
du  genre  de  la  clarinette,  et  qui  est  à  (-elle-ci  ce  que  le  cor  au- 
glais  est  au  hautbois. 
COR  RUSSE.  Instrument  à  vent  en  cuivre,  qui  se  joue  avec  une 
embourluire,  et  qui  est  de  forme  conique.  Le  tube  ne  fournit 
qu'un  son;  pour  avoir  quelques  octaves  de  tous  les  demi-tons, 
il  faut  avoir  autant  de  tubes  qu'on  veut  em])loyer  de  sons,  eten 
proportionner  la  longueur  au  degré  de  grave  ou  d'aigu  qu'on 
veut  obtenir  (voy.  le  cii.  xix  ). 
CORDE  SONORE.  Corde  tendue  dont  on  peut  tirer  du  son  (voy. 
Monocorde^  Il  y  a  i>lusieurs  genres  d'instrumeus  dont  la  produc- 
tion du  son  se  fait  au  moyen  de  cordes  tendues  sur  une  caisse 
sonore.  De  ce  nombre  sont  les  instrumens  à  cordes  frappées ,  tels 
que  le  clavecin,  le  piano  et  le  tyrapanon  ;  ceux  à  cordes  pincées 
])ar  des  corps  élastiques  ou  par  les  doigts,  tels  que  le  luth,  la 
mandoline,  le  clavecin,  la  guitare,  la  harpe,  etc.;  les iustrumeus 
à  archet ,  etc.  (voy.  le  chap.  xix). 


322  DlCTIONNAïaE 

CORDES.  Les  cordes  des  instruraeus  à  archet,  et  à  pincer  avec 
les  doigts,  sont  fuites  avec  des  intcstius  de  brebis  et  d'agneau, 
qui  sont  dégraissés  dans  la  lessive  et  filés  ensuite.  Les  meilleures 
cordes  fines,  telles  que  les  chanterelles  du  violon  ,  se  fubriqueut 
à  iSaples,  parce  qu'on  y  possède  une  sorte  d'agneau  qui  fournit 
les  meilleurs  intestins;  les  cordes  françaises  sont  mieux  fabri- 
quées que  les  cordes  de  Ka[)les,  mais  leur  qualité  est  inférieure 
dans  les  cordes  fines.  Le  piano  est  monté  de  cordes  d'acier  et  de 
Ijiton.  Presque  toutes  les  cordes  de  ce  genre  sortaient  autrefois 
des  fabriques  de  Nuremberg  ;  plus  tard,  les  cordes  de  Berlin  ont 
obtenu  la  préférence;  aujourd'hui  les  cordes  anglaises  sont  les 
meilleures. 

Les  grosses  cordes  des  instrumens  à  archet  sont  eu  boyaux  re- 
couverts d  un  fil  de  laiton  très  mince.  Les  grosses  cordes  de   la 
barpe  et  de  la  guitare  sont  en  soie  recouverte  d'un  fil  de  laiton 
semblable. 
CORNE-MUSE ,  s.  f.  Instrument  à  vent  composé   de  chalumeaux 
percés  de  trous  qu'on  fait  résonner  au  moyen  de  l'air  contenu 
dans  une  outre.  Cet  instrument  était  connu  des  peuples  de  l'an- 
tiquité. Les  Romains  l'appelaient   utriculaiium  ou    tibia  utricu- 
lar.t. 
CORNET,  s.  m.    Petit  cor  dont  se  servent  les  postillons  en  Allema- 
gne, et  qui  remplace  quelquefois  le   tambour  pour  guider  la 
marche  des  soldats. 
CoRS^ET.  Jeu  d'orgue  composé  de  quatre  tuyaux  qui  résonnent  à 
la  fois  sur  chaque  touche,  et  qui  sont  accordés  à  l'octave  ,  à  la 
douMe  quinte  et  à  la  triple  tierce. 
CORONA  ou  CORONELLA  (voy.  Point  d'orgue). 
CORPS  SONORE.  On  donne  ce  nom  à  tout  ce  qui  produit  des  sous, 

comme  une  corde  tendue,  une  cloche,  un  tuyau  d'orgue,  etc. 
CORYPHEE,  s.  m.    Chef  de  choristes,  qui  chante  les  solos  qui  se 

détachent   du  chœur. 
COULE.  Trait  composé  de  plusieurs  notes,  qui  se  fait  d'un  seul 
coup  d'archet  sur  le  violon,  l'alto  et  la  basse,  ou  sans  renouve- 
ler le  coup  de  langue  sur  les  instrumens  à  vent.   Le  coulé  se 
marque  par  une  liaison  qui  couvre  toutes  les  notes  du  trait. 
COUPE,  s.  f.  Disposition    des  jiarties  d'un  morceau  de  musique, 

et  retour  périodique  des  idées  principales. 
COUPLET,  s.  m.  Strophe  qui  se  chacte  sur  une  mélodie  d'un  mou- 


DE  MtlSIODE.  228 

vement  animé.  Il  y  a  ordinaiveinent  plusieurs  couplets  qoi  se 
t'hantent  sur  le  même  air  et  dont  les  vers  sont  rhytlimés  et  dispo- 
sés d'une  manière  uniforme  (voy.  Chanson  et  Vaudeville). 
COURAÎNTE,  s.  f.  Air  de  danse  en  mesure  ternaire,  qui  était  au- 
trefois usité  dans  les  bals  et  qui  a  passé  de  mode.  La  courante 
suivait  ordinairement  l'allerainde;  elle  était  à  deux  reprises. 
CRESCENDO.  Mot  italien   qui    indique  que  la  force  du  son  doit 
être  augmentée  aveu  gradation  Le  crescendo  est  un  des  effets  les 
plus  actifs  delà  musique;  on  l'emploie   ordinairement   vers  la 
terminaison  des  morceaux. 
CRIBLE,  s.  m.    Planche  percée  de  trous  qui  est   destinée  à  main- 
tenir les  tuyaux   dont  les  embouchures   sont    placées  dans   le 
sommier  de  l'orgue. 
CRIER,  V.  act.  C'est  exagérer  la  force  des  sons  de  la  voix  en  clian» 
tant.  Ce  défaut  est  celui  des  chanteurs  dont  la  voix  ne  se  pro- 
duit point  avec  facilité. 
CROCHE,  s.  f.    Caractère  de  musique  fait  de  cette  manière   J  ;  il 
représente  la  durée  d'un  son  égal  à  la  huitième  partie  d'uue  ronde 
(voy.  ce  mot).  Cette  durée  n'est  que  relative  et  dépend  de  la 
rapidité  ou  de  la  lenteur  du  mouvement. 
CROMORNE,  s.  m.  Nom  tiré  de  l'allemand  krumphorn ,  qui  signi- 
fie cor  tordu.  C'était  un  instrument  en  usage  dans  les  xv^  et  xvi" 
siècles,et  qui  est  oublié  depuis  long-temps. 
Cromorke.  Jeu  d'orgue  composé  de  tuyaux  cylindriques  à  anches  . 

Sa  qualité  de  son  a  quelque  rapport  avec  le  violoncelle. 
CE.OQUE -NOTE  ,  s.  m.  Musicien  qui  sait  lire  la  musique  avec  fa- 
cilité, mais  qui  est  dépourvu  de  goût  et  d'expression. 
CROTALES,  s.  f.  plur.   Instrument  de  percussion  du  genre  des 
cyraljales  et  dont  se  servaient  les  peuples  de  l'antiquité.  Dans  la 
musique   militaire  on  donne    quelquefois  le  nom  de  crotale  au 
chapeau  chinois  garni  de  sonnettes  et  de  grelots. 
CUVETTE,  s.  f.  Partie  inférieure  de  la  harpe  où  sont  placés  les 
ressorts  des  pédales  ,  et  dans  laquelle  sont  attachées  les  tringles 
qui   font  mouvoir   le  mécanisme  de  la   console  (voy.  Console, 
Harpe,  Pédales). 
CYMBALE,  s.  f.  Jeu  d'orgue  aigu,  placé  au  nombre  des  jeux  de 
mutation.  Il  est  composé  d'au  moins  trois  tuyaux  à  bouche  en 
étain,  sur  ch.ique  note,  et  quelquefois  de  cinq,  six,  sept  ou  da- 
vantage. On  les  accorde  à  la  tierce  ,  à  la  quinte,  à  l'octave,  avec 


•  24  DlCTlONNAlRfc 

des  redouUemeus.  La  cymbale  se  joint  k  U  foumiuire , '^  la  dou- 
hletle  (voy.  ces  noms)  ,  et  à  des  feux  de  fonds ,  pour  compose  r 
ce  qu'on  api.elle  \e  ph.n-jea  de  l'orgue. 

CYMBALES,  s.  f.  plur.  Instrument  de  percussion,  compose  de 
deux  pl.teaux  circulaires  en  métal  sonore  ,  de  onze  a  quatorze 
p„uces  de  diamètre,  d'environ  «ne  ligne  d'ép;..sseur,  et  qu.  ont 
a  leur  centre  une  cavité  qui  sert  à  faciliter  la  production  du  son. 
Ou  frappe  ces  plateaux  l'un  .outre  l'autre,  et  le  son  produit  par 
ce  choc  est  éclatant.  Ce  genre  d'instrument,  qui  se  jouU  ordi- 
nairement  a  la  grosse  caisse  pour  marquer  le  rhythme.  ne  ser- 
vait  autrefois  que  dans  la  musique  militaire,  mais  Rossiui  en  a 
introduit  l'usage  dans  l'orchestre  de  l'Opéra. 

CZA-CAN  ,  s.  m.  Espè.e  de  flûte  en  forme  de  canne,  qu.  a  eu  de  la 
vogue  en  Allemagne ,  vers  1800,  et  pour  laquelle  on  a  ecr.t  beau- 
,  oup  de  musique.  Le  son  en  était  doux. 


D 


D  T  A  RÉ.  Cette  expression ,  qui  dérive  de  l'an.ienne  manière  de 
solfier  (voy.  ce  mot),  servait  autrefois  à  désigner  la  note  re  ,  on 
„e  s'en  sert  plus  aujourd'hui.  r  •     '    1,  fin 

DV  CAPO,  et  par  abréviation  D.  C.  Se  met  quelquefois  a  la  hn 
aes'morceauxdemusiquepourindiqnerqu'ilfautles  reprendre 

,.  commencement  jusqu'à  un  endroit  où  est  la  C". -"'"^^• 
DI':(:AC0RDE,  s.  m.  Instrument  antique  monte  de  dix  cordes,  ne 

IVsnèce  de  harpes  simples  ou  trigones. 
T)FC1  ANT    s.  m.   Nom  qui  vient  du  latin  discantus,  et  qu  on  don- 

;^.t  dansles  treizième  et   quatorzième  siècles,  au  contrepoint 

,  plusieurs  parties  sur  le  plain-chant  (voy.  Conlrepo.n,) 
DECHIFFRER,  v.  act.Lire  de  la  musique.  On  ne  se  sertde  ce  mot 

nue  dans  le  sens  d'une  lecture  difficile  et  pénible. 
DKRESCENDO.  Mot  italien  qui  indique   une  diminution  pro 
"^iesSe  d'Intensité  des  sons  dans  l'exécution  delà  musique. 
DiGRÉ    s   m    Pc...ltion  relative  de  chaque  son  de  la   gamme  sur 
"^    e.^i!:esrelaportée(v.Ca.n,O.P-exemple,dans  la  ga.^e 

les  lignes  a         .        .„..,,,,    ^é  le  second,  mi  le  troisième,  etc. 

f'^'V^^Ti:     '    D^lan.  et  ^.e  .n.Ve).  On  dit  que 


DE  MUSIQUE.  325 

vont  d'une  note  quelconque  à  la  plus  Toisine,  soit  inférieure,  soit 
supérieure,  dans  leur  succession,  et  qu'elles  v(,nt  par  defruS 
disjoints  ou  par  sauts  lorsqu'elles  font  des  mouvemens  de  tierce, 
de  quarte  ,  de  quinte,  etc. 

DÉMANCHER,  V.  ac.  Action  de  changer  la  position  de  la  main 
sur  le  ra.m.hedu  violon,  delà  basse,  de  la  guitare,  etc.Déman- 
cl.er  est  une  des  plus  grandes  difficultés  de  ces  instruraens  parce 
qu'en  portant  la  main  avec  rapidité  d'une  position  à  une  autre, 
ou  plus  haute  ou  plus  basse,  il  faut  tomberavec  justesse  à  l'en- 
droit qu'indiquent  les  règles  du  doigté. 

DEMI-JEU.  Jouer  à  demi-jeu  d  un  instrument,  c'est  ne  point 
donner  aux  sons  toute  l'intensité  dont  ils  sont  susceptibles  Le 
demi-jeu  tient  le  milieu  eutre  le  fcrt  et  le  doux  absolus.  Les  Ita- 
liens indiquent  le  même  effet  par  les  expressions  solto  voce , 
mezza  voce,  mezza  forte, 

DEMI-PABSE,  s.  f.  Signe  de  la  notation  musicale  qui  indique  un 
silence  d'une  durée  égale  à  une  blanche  (voy.  Hlanche) 

DEMI-SOUPIR,  s.  m.  Signe  de  la  notation  qui  indique  un  silence 
égal  a  la  durée  d'une  croche  (voy.  Croche). 

DEMI-TON,  s.  m.  Distance  d'une  note  à  la  note  la  plus  rappro- 
chée; c'est  l'intervalle  le  plus  petit  qui  soit  employé  dans  la 
musique  des  Européens  modernes.  Par  la  théorie  ordinaire,  on 
distingue  deux  sortes  de  demi-tons  :  l'un  majeur,  qui  se  forme 
de  deux  notes  de  dénominations  différentes  comme  ufetre  bé- 
mol; l'autre  mineur,  qui  consiste  en  une  note  dans  sa  jjosition 
naturelle  au  ton  et  la  même  note  modifiée  par  un  dièse,  un  bé- 
mol ou  un  bécarre,  comme  ul  h  et  ul  W. 

DENIS  D'OR.  Nom  d'une  sorte  de  clavecin  avec  pédale,  inventé 
au  commencement  du  dix-septième  siècle  par  un  prêtre  de 
Predmitz  en  Moravie,  nommé  Difis. 

DÉSACCORDER  un  instrument,  c'est  en  détruiie  l'accord, soit  en 
tournant  les  chevilles  qui  tendent  les  cordes,  soit  par  des  secous- 
ses  qui  l'agitent,  ou  par  toute  autre  perturbation. 

DESCENDRE,  v.  ac.  C'est  passer  d'un  son  aigu  à  un  plus  grave. 
Descend, e  est  aussi  baisser  iuseDsiijleraent  l'intonation  d'une 
note,  ou  parce  qu'on  a  reconnu  qu'elle  est  trop  élevée,  ou  à 
caus»  delà  faiblesse  de  l'orgrme  vocal. 

DESSIN,. s.  m.  Le  dessin  d'un  morceau  de  niuvque  est  la  disposj- 

a. S 


326  DICTIONNAIRE 

tioa   de  "ses  différentes  parties   et  particulièrement  des  phnises 
mélodiques. 

DESSUS,  s.  tn.  On  appelle  de  ce  nom  ,  éii  France,  lés  voix  de 
femmes  et  d'eufaus  les  plus  élevées.  Ce  nom  répond  au  mot  ita- 
lien soprano. 

Dessus,  est  aussi  le  nom  de  la  partie  la  plus  élevée  de  la  musi- 
que vocale.  Lorsqu'il  y  a  deux  parties  aiguës  dans  la  musi- 
que, on  les  divise  en  premer  et  second dssus.  Autrefois  les  par- 
ties iastrumeutales  se  divisaient  de  la  même  manière,  et  l'on 
avait  des  dessus  ou  des  pardessus  de  viole  ,  et  des   dessus  de  violon. 

DEFACUE,  part.  Pris  substantivement,  en  italien,  Uaccalo  ;  mode 
d'exécution  de  la  voix  ou  des  instrumeus  dans  lequel  on  sépare 
tous  les  sons  par  une  émission  brève  et  non  prolongée.  Le  dé- 
taché est  l'opposé  du//e. 

DETONNER,  T.  n.  Chanter  faux;  manquer  à  la  justesse  des  in- 
tonations. 

DEUX-QUATRE  ou  DEUX-QUARTS.  Mesure  à  deux  temps    qui 
renferme  la  valeur  de  deux  noires,  et  qui  est  marquée  près  de  la 
c/e/(v(iy.  ce  mot)  par  cesigne     . 
D1AGKAM_ME  des  sous.  Etendue  générale  des  sons  du  système  des 
Grecs. 

DIAPASON'.  Nom  grec  de  roctave.  On  appelle  aussi  de  ce  nom 
l'étendue  d'une  voix  ou  d'un  instrument. 

DlATASOS  est  enfin  le  nom  d'un  petit  instrument  d'acier  qui  donne 
le  sou  fixe  d'après  lequel  on  accorde  tous  les  autres  iustrnmcns. 
Lediap.ison  s'appelle  C(;/ï>/a  en  italien.  Eu  France,  le  diapason 
sonne  le  la  ;  en  Ilalie  il  sonne  Vut. 

DIAPHONIE  ,  s.  f.  Sorte  d'harmonie  corajjosée  de  quartes  ou  de 
quintes  et  d'octaves,  qui  était  en  usage  dès  le  dixième  siècle,  et 
dont  les  successions  étaient  fort  dures. 

DIATONIQUE,  adj.  Mot  tiré  du  grec  et  qui  signifie  pa»- «on^.  Ce 
mot  avait  une  signification  juste  dans  la  musiijue  des  Grecs,  parce 
que  ce  peuple  avait  un  genre  de  musique  qui  ne  j>rocédait  que 
par  des  intervalles  de  tons;  mais  il  est  vide  de  sens  dans  ia  mu- 
sique moderne,  parce  que  l'éclielle  naturelle  des  tons  de  cette 
musique  renferme  des  intervalles  de  demi-tons.  Kous  ne  possé- 
dons point  de  véritable  gamme  ni  de  genre  diatoniques, 

DIAULE.  Flûte  double  des  Grecs,  appelée  ainsi  par  opposition  à 
ptonaul   ,  qui  était  la  ilîite  simple. 


i 


DE  MUSIQUE.  327 

DICORDE,  s.  m.  Instrument  des  peuples  de  l'antiqnîtc,  particu- 
lièrement des  Égyptiens.  II  aviiit  la  forme  d'un  lutli  aplati  aveu 
un  long  manilie ,  et  il  était  monté  de  deux  l'ordes. 

DIESE,  s.  m.  Signe  qui  est  f.iit  d.ins  cette  forme  tt,  et  qui ,  ctaat 
placé  à  la  gam-lie  d'une  note  ,  indique  lu  nécessité  d'élever  l'into- 
nation de  cette  note  d'un  dcrai-ton. 

DIESIS  était  dans  le  système  théorique  de  la  musique  des  anciens 
un  petit  intervalle  que  nous  appelons  comma.  Cet  intervalle  ré- 
sultait de  la  différence  de  deux  sons  approximatifs  comme  ré  L 
et  ut  ji;  ses  proportions  se  déterminent  par  128  :  125  (voy  Comma)- 

PJJjETTAIVTE.  Amateur  de  musique;  ce  mot  a  passé  de  la  langue 
italienne  dans  la  française. 

DIMINUÉ  ,  adj.  Se  dit  d'un  intervalle  de  deux  sons  qui  n'est 
point  conforme  à  la  constitution  d'un  ton;  ainsi  on  appelle  tierce 
diminuée  une  tierce  composée  de  u<  <lièse  et  de  re  Ijémol,  parce 
qu'il  n'est  aucun  ton  dans  lequel  on  puisse  trouver  à  la  fuis  des 
dièses  et  des  bémols.  Un  intervalle  de  celte  nature  n'est  qu'une 
altération  momentanée  d'un  intervalle  naturel. 

DIMINUENDO,  en  diminuant.  Mot  italien  qu'on  emploie  pour  in- 
diquer Mlle  dimirtution  graduée  du  son,  dans  l'exécution  di\  son. 

DIMINUTION,  s.  f.  Synonyme  de  variations  d.ins  les  dix-septième 
et  dix-liuitième  siècles.  Ou  appelait  aussi  quelquefois  doubles 
les  diminutions,  ce  qui  semblait  impliquer  contradiction. 

DIRECT,  adj.  (voy.  accord  et  IHout'cmen'). 

DIS.  Nom  allemand  de  ré  dièse. 

DISCANT.  Nom  anglais  de  la  voix  de  soprano  dans  la  musique 
d'église.  Ce  nom  vient  du  latin  discanlus  (douljle  chant),  parce 
que  le  chant  éti.if  ordinairement  au  tcnor  dans  l'ancien  contre- 
point, tandis  que  le  double  chant  ou  l'accompagnement  était 
au-dessus.  Dans  la  musique  ordiuaLie les  Anglais  appellent  ireA/a 
la  voix  de  soprano. 

DISCORD,  adj.  Se  dit  d'un  instrument  à  cordes  qui  n'est  pas 
d'accord. 

DISCORDANT,  adj.  Qui  choque  l'oreille  par  des  sons  faux  ou 
par  un  défaut  d'accord  dans  l'harmonie. 

DISJOINT,  adj  Intervalle  où  les  sons  ne  se  touchent  pas,  comme 
la  tierce,  la  quarte,  etc. 

DISSONANt^.E  ,  s.  f.  Réunion  de  deux  sons  rjui  ne  s'accordent  pas 
d'une  manière  parfaite  et  qui  ne  pgyt  §f  r^jp  qi4e  de  passage  à 


328  DICTIONNAIRE 

une  eonsonnance,  c'est-à-dire  uue  réuuiou  de  sons  plus  agréables 
à  l'oreille.  Les  dissouauccs  sout   la  seconde,  la  septième,  et  la 
neuvième  de  plusieurs  espèces. 
DISSO^AKT  (voy.  Accord,  Intervalle). 
DITALE-HARPE  (voy.  Harpe). 

BITTANKLASIS.  jN'om  donné  par  le  mécanicien  Muller,  de  Vienne, 
à  on  clavecin  inventé  par  lui  en  iSoo.  Cet  instrument  était  com- 
posé de  deux  claviers  dont  les  cordes  étaient  accordées  à  l'oc- 
tave l'une  de  l'autre.  Il  s'y  trouvait  en  outre  une  lyre  avec  des 
cordes  de  Ijov.tux. 
D1VERTISSEME>T,  s.  m.  P.irtie  de  la/ug-ue  qu'on  désigne  aussi 

quelquefois  sous  le  nom  d\'pisode  (voy.  le  cli.  xii). 
Divertissement.  Sorte  de  pièce  de  musique  instrumentale  qui  a 
eu  de  la  vogue  depuis    1790  jusqu'en   1810   environ.  Elle  con- 
sistait en  un  genre  facile  el  léger,  et  quelquefois  eu  un  mélange 
de  différens  thèmes  variés. 
DlVERTissEME>-T.  On  donne  quelquefois  ce  nom  à  de  petits  inter- 
mèdes, composés  de  danse  et  de  musique,  qui  terminent    des 
représentations  dramatiques. 
DIXIÈME,  s.  f.   Octave  de  la  tierce. 
DIX-SEPTIÈME  ,  s.  f.  Double  octave  de  la  tierce. 
DO.  Nom  substitué,  en   Italie, dans  le  dix-septième  siècle  à  celui 
d'ut,  pour  la  désignation  de  la  première  note  de  la  gamme,  dans 
la  solmisation. 
DOIGTER,  V.  n.   Diriger  les  doigts  sur  les  instruraens  par  de  cer- 
taines règles  qui  ont  pour  but  de  faciliter  l'égalité  et  la  rapidité 
de  l'exécutioi). 
DOIGTER.  Verbe  pris  suljstantivement  pour  indiquer  le   résultat 
du  mécanisme  des  doigts  sur  les  instrumcns.  On  dit  :  Ce  doigter 
ne  faut  rien;  Kalkbrenner  possède  le  meilleur  doigter  sur  le  piano. 
Quelquefois  on  écrit  duigié  au  lieu  de  doigter. 
DOLCE  (par  abréviation  dol).Ce  mot  italien  écrit  dans  la  musique 

indique  un  mode  d'exécution  doux  et  suave. 
DOMINANTE,  s.  f.  Cinquième  note  de  la  gamme  d'un  ton;  dan» 
le  ton  d'ut,  sol  est  la  dominante.  On  donne  le  nom  de  domi- 
nante à  celte  note  parce  qu'elle  se  trouve  dans  la  plupart  des 
accords  naturels. 
DoMrNA::<TE.  D.ins  le  plain-cbant  la  dominante  est  la  note  qui  se 
fuit  entendre  le  plus  souvent. 


I>K  MlJSIyLK.  329 

DOQÎJJîT  ou  TOQUi-T,  s.  m.  Nom  de  lit  trompette  qui  fait  la  par- 
tie grave  dans  les  fanfares  harmoniques  de  cavalerie. 

DOUBLE,  s.  m.  On  donnait  autrefois  ce  nom  aux  variations  d'un 
thème. 

Double  est  aussi  le  nom  des  chanteurs  qui,  daus  les  grands  théâ- 
tres, remplacent  les  premiers  acteurs  dans  leurs  rûles. 

DOUBLE-BASSE,  s.  f.  Nom  qu'on  donnait  autrefois  à  la  contre- 
basse en  France.  Cette  expression  est  encore  en  usage  en  An- 
gleterre. 

DOUBLE- BEMOL.  Signe  par  lequel  on  indique  rabaissement 
d'une  note  à  un  ton  au-dessous  de  son  intonation  naturelle.  Le 
(loui)le-bcmol  se  ligure  ainsi  :  UL. 

DOUBLE-  CORDE.  Manière  de  jouer  deux  cordes  à  la  fois  sur  le 
violon,  la  viole  et  le  violoncelle.  La  plus  grande  difficulté  de  la 
double-corde  <onsiste  à  jouer  avec  justesse. 

D{.)UBLE-CROCHE,  s.  f.  Figure  de  note  qui  représente  un  son 
d'une  durée  égale  au  seizième  delà  ronde.  Ce  nom,  qui  vient  du 
double  crochet  qui  termine  la  queue  de  la  note,  donne  une  idée 
fausse  de  la  durée  de  la  note ,  qui  n'est  qu'une  demi-croche  (voy. 
le  (h.  VI.  ) 

DOUBLE-DIESE.  Signe  qui  sert  à  indiquer  la  nécessité  d'élever 
d'un  ton  l'intonation  d'une  note.  Le  double  dièse  est  fait  ainsi  : 

DOUBLE-FUGUE.  IVom  mal  approprié  par  quelques  auteurs,  et 
surtout  par  les  Allemands,  à  une  sorte  de  fugue  à  deux  sujets 
(voy.  le  ch.  xti). 

DOUBLE-NOTE.  Note  douljlée  à  l'unisson  sur  deux  cordes  d'un 
violon,  d'uue  viole  ou  d'uue  basse.  On  l'indique  par  une  note  à 
laquelle  on  met  deux  queues,  l'une  tournée  vers  le  haut,  l'autre 
vers  le  bas  du  papier. 

DOUBLETTE,  s.  f.  Jeu  d'orgue  aigu,  à  bon<he,  qui  sonne  l'oc- 
tave da  preslant  (voy.  ce  mot)  ,  et  dont  le  tuyau  le  plus  long  n'a 
qu'un  pied  de  long. 

DOUZIÈME  ,  s.  f.  Octave  delà  quinte. 

DUO,  s.  m.  Composition  pour  deux  parties  concertantes  vocales 
ou  instrumentales.  Le  duo  instrumental  est  toujours  pour  deux 
instrumeus  seuls;  le  duo  vocal  est  souvent  accompagné  par  un 
orchestre,  un  piano,  etc.  Eu  italien,  ou  dit  duelto. 

a8. 


SSÇ  DICTIONNAIRE 

DTJLCIAN,  t.  m.  Ancien  nom  du  basson  (voy.  ce  mot),  dans  les 
quinzième,  seizième  et  dix-septième  siècles. 

DuLCiAJt  est  aussi  le  nom  d'un  jeu  d'orgue  à  anche,  qui  n'est  d'u- 
sage qu'en  Allemagne.  Il  ressemble  au  jeu  du  basson  des  orgues 
françaises, 

DUR,  adj.  Se  dit  d'un  accord  ou  d'une  harmonie  qui  blesse  l'o- 
reille. 

Daa  est  qussi  le  nom  ])ar  lequel  on  désigne  en  Alleiqagne  les  tons 
majeurs.  Ainsi  le  ton  de  ro  majeur  s'appelle  D  dur. 

DUTKA,  s.  f.  Double  flûte  des  paysans  russes,  composée  de  deux 
rospaux  d'inégale  longueur,  percés  chacun  de  trois  trous. 


E  LA  FA.   Ancienne  dénomination  du  mi  [>,  dans  la  solmisation. 

£  SI  Ml.  Ancien  nom  delà  troisième  note  de  la  gampie,  appelée 
aujourd'hui  simplement  mi.  £n  Italie  on  raj)pelait  £  la  mi. 

F-CHELLE,  s.  f.  ISom  qu'on  donne  en  général  au  système  des  sons 
de  la  musique  des  divers  peuples.  Plus  particulièrement  on  ap- 
pelle aussi  échelle  la  gamme  des  sept  sons,  ul,  rè,  mi,  fa,  sol,  la, 
si  (voy.  Gamme^.  Ce  nom  d'échelle  vient  de  la  position  graduée 
des  notes  sur  la  jjortée  (voy.  Portée j  ;  il  répond  au  diagrame  des 
Grecs. 

ECHO,  s.  m.  Réflexion  du  son  ])ar  un  corps  dur,  et  qui  se  répète 
à  l'oreille  après  avoir  été  déjà  entendu.  Les  angles  par  lesquels 
le  son  est  renvoyé  sont  égaux  à  ceux  de  la  lumière  lorsqu'il 
fra|)pe  une  surface  plane  et  polie.  On  donne  aussi  le  nom  d'tcAo 
au  lieu  où  l'effet  se  fait  entendre.  Il  y  a  des  dispositions  de  lieux 
telles  que  le  son  et  même  des  phrases  entières  sont  répétées. 
Dans  un  endroit  nommé  la  Simonelte  ,  à  deux  milles  de  Milan  ,  il 
y  a  un  écho  qui  répète  jusqu'à  vingt  fois. 

Les  effets  de  l'écho  s'emploient  quelquefois  avec  avantage  dans 
la  musique.  11  y  a  un  double  trio  de  Haydn  composé  tout  entier 
dans  ce  but. 

Ecfio  est  aussi  un  jeu  d'orgue,  ou  plutôt  un  petit  orgue  particu- 
lier ,  qui  se  joint  9{i\  grands  ipstrumeus  de  pelte  espèce  ,  e\.  pour 
lequel  ij  y  a  un  clavier  particulier. 


DE  MUSIQUE.  331 

ECLTSSES,  s.  f.  plar.  Planches  minces  et  courbées, qui  forment 
l'épaisseur  des  violons,  des  violes,  des  liasses,  etc.  ,  et  sur  les- 
quelles reposent  lu  laMeet  le  fond  de  ces  instrumens. 

ECOLES,  s.  f.  INoiii  par  lequel  on  désigne  les  divers  systèmes  de 
composition,  et  certains  peni'lians  qui  se  manifestent  dans  les 
produits  de  l'art.  U  y  a  des  écoles  générales  telles  que  l'école  ita- 
lienne, l'école  allemande  et  l'école  fraiic:iise;  puis  des  écoles 
particulières  dé  certains  maîtres,  coqipie  l'école  de  Palestrina, 
l'école  de  Durante,  etc. 

EFFET.  L'effet  eu  musique  est  le  résultat  des  inspirations  du  gé- 
nie et  des  combinaisons  de  l'art.  Les  effets  particuliers  sont  le 
produit  de  certains  systèmes,  de  certaines  formes;  ils  varientse- 
lon  les  temps  et  les  caprices  de  la  mode. 

EFFORT,  s.  m.  Défaut  qui  se  manifeste  dans  l'émission  de  la  voix 
chez  certains  chanteurs.  Quelquefois  ce  défaut  résulte  de  la  mau- 
vaise direction  donnée  aux  études  de  vocalisation;  mais  souvent 
il  est  causé  par  la  nature  ingrate  de  l'organe  vocal. 

ELODICON,  s.  m.  Instrument  inventé  il  y  a  environ  quinze  ans, 
par  M.  Escheuhach,  et  fabriqué  par  M.  Voigt,  facteur  d'instru- 
mens  à  Scliweinfurt.  Le  principe  de  cet  instrument  consistait  à 
faire  vibrer  non  les  cordes  tendues  ,  mais  des  lames  métalliques , 
au  moyen  d'un  soufflet  artificiel.  On  y  avait  réuni  les  effets  du 
clavicorde  avec  ceux  de  l'orgue.  C'est  le  même  principe  de  vi- 
brations de  lames  métalliques,  par  l'action  de  l'air,  qu'on  a  re- 
produit de|)uis  lors  dans  plusieurs  autres  instrumens. 

EMBOUCHURE,  s.  f.  Là  par  où  l'on  introduit  le  souffle  dans  les 
iusfrumens  à  vent.  L'cmboui.-Iiure  de  la  flûte  est  un  trou  percé 
latéralement  dans  l'instrument.  L'embouchure  du  cor  est  coni- 
que; celle  t)e  1»  trompette,  du  trombone,  du  serpenta  la  forme 
d'un  entonnoir;  celle  de  la  clarinette  est  un  bec  armé  d'une  an- 
che ;  le  hautbois,  le  cor  anglais  et  le  basson  n'ont  qu'une  anche 
double  pour  embuucbure. 

Embouchure  se  dit  aussi  de  la  disposition  naturelle  des  lèvres  de 
l'exécutant  pour  jouer  de  son  instrument;  ainsi  l'on  dit  que  tel 
flûtiste  a  une  bonne  ou  une  mauvaise  embouchure. 

EKHARMOIV'IE,  s.  f.  L'enharmonie,  dans  la  musique  moderne, 
consMte  dans  )e  change.Tient  de  desfination  d'un  accord  par  le 
changement  d'une  ou  de  plusieurs  notes  d'une  dénomination 
dans  une  autre,  ç^^ppgentent  qui  déte^'iuine  tiQP  o^utatioa  .d$ 


332  DICTIOSNAIRE 

gamme.  Par  exemple,  si  nn  trait  mélodiqne  semble  appartenir 
au  ton  de  sol  par  fa  dièse,  et  si  ce  fa  ^  est  changé  en  sol  bé- 
mol par  l'harmonie   dont  il  est   accoiuiiagné,  ce  sol  bémol  de- 
viendra le  quatrième  degré  du  ton  de  ré  bémol ,  et  il  y  aura  en- 
harmonie dans  ce  changement.   Il  est  au  reste  à  remarquer  que 
ce  mot  a  été  transporté  de  la  musique  des  Grecs  dans  la  musi- 
que moderne  sans  application  juste. 
ENSEMBLE,  adv.  Aller  ensemble  dans  l'exécution  de  la  musique, 
c'est  régler  convenablement   le   mouvement,  le  rhythme  et  les 
nuances  de  fort  et  de  doux  de  toutes  les  parties.  Ce  mot  est  pris 
quelquefois  su'ostanlivement,  et  l'on  dit:  Il j-  aeude  l'ensemble 
dans  cemorce.u,  ce  quatuor  a  manqué  d'ensemble. 
EA'SEMBLE  (MORCEAU  D').  On  appelle  ainsi  les  morceaux  de 
musique  vocale  et  dramatique  dans  lesquels  il  y  a  plus  d'une  ou 
deux  voix,  tels  que  les  trios,  quatuors,  quintettes ,  etc.  (voy.  tous 
ces  mots).  Les  chœurs   sont   aussi  des  morceaux  d'ensemble  ;  ce- 
]>eiidant  on  les  désigne  en  général  par  leur  nom  spécial. 
ENTONNER,  V.  a.  Signifie  à  la  lettre  prendre  le  ton,  saisir  l'inlo- 
nation.  Cette  dernière  locution  est  plus  habituelle  et  l'on   dit  : 
Celte  in'onation  est  difficile  à  saisir,  aa  lieu  de  dire:  Celle  note  est 
difficile  à  entonner. 
EsTOXXER  ne  se   dit  guère  que  pour  le  prêtre  ou  le  chantre  qui 
donue   le   ton    d'un  psaume ,  du  Magnificat ,  du  Te  Deum  ou  de 
quelque   autre    pièce  de   plainchant.  On  dit  aussi  entonner  un 
refrain  de  chanson. 
ENTR'ACTE,  s.   m.    Morceau  de   musique  instrumentale  qui  se 
joue  dans  l'intervalle  de  deux  actes  d'un  opéra,  d'une  tragédie  , 
d"un  ballet,  etc. 
ENTREE,  s.  f.  Commencement  de  chaque  partie  dans  un   mor- 
ceau de   musique,  après    un  repos  ou  dans   les  répercussions 
d'une  figure  (voy.  Bépercussion).  C'est  en  ce  sens  qu'on  dit  :  La 
flûte  a  manqué  son  entrée  ;  les   basses  n'ont  pas  bien  attaqué  leur 
entrée. 
EtîtrÉe  se  dit  aussi  des  parties  d'un  ballet  qu'on  désigne  sous  le 
nom  de  scènes  dans  un  opéra.  Cepend.iut  ce  nom  a  vieilli,  et  l'on 
donne  aujourd'hui  le  nom  de  scène  aux  entrées  de  ballet. 
ÉPIGONE.  Instrument  de  musique  des  Grecs,  qu'on  croit   avoir 

été  monté  de  quarante  cordes. 
£l?OEHE,  s.  f.  Instrumenta  clavier  et  à  cordes  pincées  par  des 


DE  MUSIQUE.  333 

morceaux  de  plume,  qui  fut  en  usage  vers  la  fin  du  seizième 
siècle  (voy.  le  ch.  xv  ). 

ÉPISODE  ,  s.  m.  Partie  de  la  fugue  qu'on  appelle  aussi  quelque- 
fois «/(«'er/iwe/nent  (voy.  le    cl).  XII  ). 

ESI'ACE  ,  s.  m.  lutervalle  qui  se  trouve  entre  les  lignes  de  la  por- 
tée   où  l'on   écrit    de  la  musique  (voy.    Portée.  —   Voy.  le  ch. 

r.SPRESSIVO.  Mot  italien  qu'on  écrit  dans  la  musique,  et  qui  in- 
dique qu'il  faut  jouer  ou  chanter  avec  expression. 
KTEISDUiî,  s.  f.  Se  dit  de  la  distance  plus  ou  moins  considérable 
qu'il  y  a  entre  le  son  le   plus  grave  et  le  plus  aigu  d'un  instru- 
ment ou  (l'une  voix. 

KTOUFFOIR,  s.  m.  Appareil  raécaniijue  destiné  à  arrêter  à  pro- 
pos les  vibrations  des  cordes  dans  les  instrumens  à  clavier  (voy. 
le  cL.  xv). 

E  rUDES,  s.  f.  plur.  Pièces  de  musique  destinées  à  faciliter  le  mé- 
canisme de  la  voix  ou  du  jeu  des  iustrnmens.  Les  compositeurs 
donnent  à  ces  pièces  un  caractère  mélodique  afin  d'éviter  le  dé- 
goût du  travail.  Les  études  pour  la  voix  s'appellent  particulière- 
ment  vocalises  (voy.  ce  mot). 

ELPH03SE,  s.  m.  Instrumenta  frottement  du  genre  de  Vhurmonica 
(voy.  ce  mot),  inventé  par  le  docteur  Cliladui,a  VNittemberg, 
en  1790.  Il  consistait  en  une  caisse  carrée  d'environ  trois  pieds 
et  haute  de  huit  pouces,  qui  contenait  42  petits  cylindres  de 
verre  donl  le  frottement,  et  par  suite  la  vibration,  s'opérait  par 
un  mécanisme  intérieur. 

EVITEE  (voy.  Cadence]. 

EXÉCUTANT,  part,  pris  substantivement.  Musicieu  qui  joue  ou 
«hante  de  la  musique. 

EXÉCUTER,  V.  ac.  Jouer  ou  chanter  de  la  musique  écrite  par  un 
compositeur. 

EXECUTION,  s.  f.  Action  de  jouer  ou  de  chanter  de  la  musique 
(voy.  la  troisième  section,  ch.  xvm  et  xix  ). 

EXERCICES,  s.  m.  plur.  Recueils  de  traits  difficiles  destinés  à  l'é- 
tude du  chant  ou  du  jeu  des  insti  umens.  Les  exercices  diffèrent 
en  général  des  études  en  ce  qu'ils  ne  sont  point  arrangés  dans 
une  forme  de  pièce  plus  ou  moins  mélodique. 

EXPRESSIF,  IVE,  adj.  Caractère  pas>ionué  de  la  musique,  sui- 
vant de  certaines  nuances. 


334  DICTIOITNA.IRE 

EXPRESSION ,  ».  f.  Qualité  par  laquelle  le  innsicleB  émeat  cenx 

qui  l'écoutent  (voy.  ch.  xviir  et  xix  ). 
EXTENSION,  s.  f.   Faculté  relative  d'allonger  les  doigts   sur   le 

manche  ou  sur  le  clavier  des  iostruraens  pour  y  saisir  de  grands 

intervalles.  L'exercice  développe  cette  faculté. 


F.  Cette  lettre  placée  sons  un  trait ,  dans  la  musique ,  signifie/orfe  , 
fort.  Deux  FF  indiquent  l'excès  de  la  force,  fortissimo. 

F.  Placée  à  la  tète  de  la  portée  dans  la  musique  du  moyen-âge  , 
était  le  signe  de  la  clef  deya. 

F  est  le  signe  de  la  quatrième  note  de  la  gamme  d'ut.  On  disait 
autrefois,  en  France,  F  ul  fa,  pour  désigner  cette  note;  dans 
l'ancienne  solmisation  italienne,  on  disait  F /a  ut. 

FA.  Nom  de  la  quatrième  note  de  la  gamme  d'u<. 

FACTEUR  d'orgues,  de  pianos,  de  harpes,  ou  d'instrumens  à 
vent.  On  donne  ce  nom  k  l'artiste  qui  construit  ces  instrumens. 
Le  facteur  d'orgues  faljriqiie  quelquefois  des  ])ianos;  néanmoins 
la  fabrication  de  ces  instrumens  exige  des  connaissances  diffé- 
rentes et  des  travaux  qui  n'ont  point  d'analogie.  La  coustruc- 
tion  de  la  harpe  est  aussi  un  art  spécial.  Les  facteurs  d'instru- 
mens de  cuivre  font  les  cors,  les  trompettes  ,  les  trombones,  les 
ophic  léides,  etc.;  les  facteurs  d'instrumens  à  vent  en  bois  font  les 
flûtes,  les  hautbois,  les  clarinettes,  les  flageolets  et  les  bsssons. 

FACTUPiE,  s.  f.  Manière  plus  ou  moins  scientifique  d'écrire  la 
musique;  par  facture  on  entend  plutôt  la  ])artie  harmonique  de 
la  musique  que  la  mélodique.  On  dit:  Ce  morceau  est  d'une  bonne 
facture;  la  facture  de  celte  sj-mphonie  est  médiocre.  En  général  ce 
mot  ne  s'applique  qu'aux  compositions  d'une  certaine  impor- 
tance. 

FAGOTTO  ,  s.  m.  Nom  italien  du  basson  (voy.  ce  mot). 

FAIBLE,  adj.  (voy.  Temps). 

FAIRE  DE  LA  MUSIQUE  peut  se  dire  et  de  l'acte  de  la  compo- 
sition, et  de  celui  d'exécuter  de  la  musique  écrite;  cependant 
l'opération  du  compositeur  se  désigne  plutôt  par  com^joier  ou 
écrire  de  la  musique.  Ainsi ,  quand  on  dit  ;  Nous  feront  de  la  mu' 


DE  MUSIQIJK.  335 

siquc  ce  soir,  cette  phrase  s'enteiiil  dans  le  sens  de  l'exécution. 

FANDANGO,  s.  m.  Ancien  ;iir  de  d.inse  à  trois  temps  d'un  mouve- 
ment animé,  originaire  de  l'Espagne  où  il  est  eni;ore  en  usage. 
On  le  danse  en  jouant  des  castagneHes  {voj.  ce  mot). 

FANFARE,  s.  f.  Air  militaire  qui  est  exécuté  par  plusieurs  trom- 
pettes, ou  par  une  coraliinaison  de  trompettes,  de  cors,  de 
trombones  et  d'opliicléides  (v.  tous  ces  noms).  On  produit  des 
effets  agréïbles  et  des  modulations  varices  dans  ces  sortes  de 
morceaux,  au  moyen  d'instrumens  en  difféiens  tons. 

On  joue  aussi  des  fanfares  avec  les  trompettes  de  chasse. 

FANTAIS'E,  s.  f.  Pièce  de  musique  dont  l'origine  date  du  seizième 
siècle.  Ce  fut  d'abord  une  composition  où,  suivant  le  titre,  le 
compositeur  s'abandonn.iit  aux  caprices  de  son  iinaginatiou. 
C'est  ainsi  que  la  fantaisie  fut  comprise  par  les  grands  musiciens 
allemands,  jusqu'à  Mozart;  mais  depuis  environ  vingt  ans,  rieu 
n'est  moins  libre  que  la  fantaisie;  on  ne  la  fait  plus  que  sur  un 
modèle  donné  qui  est  toujours  le  même,  et  dans  lequel  l'ima- 
gination n'est  pour  rieu.  Elle  a  toujours  pour  thème  quelque  air 
d'opéra  dont  le  motif  est  varié. 

FANTASTIQUE.  Ce  mot  s'est  glissé  jusque  dans  la  musique.  La 
musique  fantastique  est  composée  d'effets  d''instrumentation  .sans 
dessin  mélodique  et  avec  une  harmonie  incorrecte. 

FARANDOULE  ,  s.  f.  Air  de  danse  d'un  mouvement  vif  à  six-huit, 
sur  lequel  un  grand  nombre  de  personnes  dansent  en  se  tenant 
par  la  main,  ou  avec  des  mouchoirs  et  en  faisant  diverses  figures. 

FARCE  EN  MUSIQUE.  Sorte  d'opéra  plus  gai  e.  moins  raisonna- 
ble que  l'opéra  bouffe,  en  usage  eu  Italie. 

FAUSSE  QUINTE,  s.  f.  Expression  inexacte  par  laquelle  on  dési- 
gnait autrefois  la  quinte  mineure  (voy.  Quinte  diminuée  et  Quinte 
mineuie). 

FAUSSE  RELATION.  Relation  de  deux  notes  qui  se  font  enten- 
dre successivement  dans  des  parties  diff-érentes,  comme  le  dessus 
et  la  basse,  et  qui  donnent  la  sensation  de  deux  tons  sans  ana- 
logie; par  exemple,  ut  dièse  et  ut  jiécarre. 

FAUSSET  ou  FAUCET,  s.  m.  Voix  sur-laryngienne  ajipelée  plus 
exactement  voix  de  tête.  Ce  genre  de  voix  n'existe  guère  que 
chez  les  hommes  et  particulièrement  chez  les  ténors. 

FAUX,  adj  et  adv.  Intonation  qui  n'est  pas  juste  à  l'égard  des 
autres  sons.  Chanter  faux,  c'est  chanter  ou  trop  haut  ou  trop 


336  DICTIOKNAIRE 

bas,  et  ne  pas  s'accorder  avec  d'autres  voix  ou  avec  le»  instru» 
mens  qui  accompagnent. 

Oa  a  mis  souvent  en  question  s'il  y  a  des  voix  fausses  ou  si  l'on 
nechantefaux  que  par  suite  d'un  défaut  dans  l'orgnisation  de  l'o- 
reille; il  y  a  lieu  de  croire  que  ces  deux  causes  exercent  de  l'in- 
fluence sur  la  justesse  dans  le  chant;  on  a  vu  des  voix  justes  se 
fausser  après  un  exercice  trop  violent  ou  trop  prolongé. 

FAUX-BOURDON,  s.  m.  Contrepoint  sur  le  plain-chant  à  trois  ou 
quatre  parties,  et  à  notes  contre  notes  dont  on  f:iit  usage  aux 
fêtes  solennelles  dans  quelques  églises  de  France  et  d'Italie. 

FF.PM.VTA,  s.  f.  Mot  italien  synonyme  de  comune ,\orona  et  de 
pauta  gtneralt,  et  qui  signifie  un  arrêt  dans  la  mesure. 

FIFRE,  s.  ra.  Petit  instrument  à  veut,  du  genre  de  la  flûte  et  d'un 
son  perçant.  Il  fut  inventé  en  Suisse  et  était  déjà  en  usage  parmi 
les  soldats  dans  la  première  partie  du  seizième  siècle,  à  la  b;i- 
taille  de  Marignan. 

FIGURE,  s.  f.  Grou])e  de  notes  qui  forme  un  certain  dessin.  C'est 
delà  qu'on  a  appelé  f^oH/ _/î^uie  et  musique  figurée  tout  ce  (pii 
n'est  pas  du  ])lain-cliant. 

FIGURE,  adj.  (voy.  Conlrepoint). 

FILER  UiV  SON.  C'est  le  poser  doucement  avec  la  voix,  puis 
l'enfler  peu  à  peu  et  après  qu'il  a  acquis  le  plus  grand  degré  de 
force,  et  le  diminuer  de  la  même  manière. 

FIN.\.LE,s  m.  Note  par  laquelle  se  termine  une  antienne,  une 
hymne,  ou  une  autie  pièce  de  plain-chant. 

Finale,  s.  m.  Morceau  d'ensemble  très  développé  qui  termine 
un  acte  d'opéra.  Un  finale  renferme  quelquefois  des  airs,  des 
duos,  des  trios,  ou  quatuors,  ou  quintettes  et  des  chœurs. 

FIORITURES,  s.  m.  plur.  Mot  italien  francisé  qui  signifie  ornemens 
du  chant. 

FLAGEOLET,  s.  ra.  Sorte  de  flùtc  à  bec,  percée  de  six  trous  et 
armée  de  clefs  (voy.  le  oh.  xix). 

Flageolet.  Jeu  d'orgue  très  aigu  dont  les  tuyaux  à  bouche  sont 
composés  d'étain,  de  zinc  et  de  plomb.  Le  tuyau  le  plus  long  n'a 
que  six  pouces. 

Flageolet  (Jlagiolctto)  se  dit  aussi,  en  Italie,  du  jeu  en  sons  har- 
moniques sur  le  violon. 
FLAUTINO,  s.  m.  Mot  italien  qui  sigaiCie  petite  fût*.  Cette  flùie 


DE  MUSIQUE.  337 

sonne  l'octive  delà  flûte  ordinaire (voy.  Oitave,  Petit» flûte, -Pic- 
colai). 
FLEBILE.  Adjectif  italien  qui  se  joint  quehfiiefois  à  l'indication 
d'un    mouvement;   il   signifie  plaintif,  ^«(/an^e  yZcii/e  ,  andanto 
plaintif. 
FLOTTA ,  s.  f.  Nom  d'un   chœur  chanté   autrefois  par  un   grand 
nofulire  d'élèves  des    conservatoires    de  N.iples  à  la  procession 
de  saint  Janvier. 
FLOT  POLE.  Sorte  de  cantique  d'une  mélodie  douce,  que  les  élè- 
ves des  conservatoires  de  Venise  chantaient  dans  les  processions 
des  saints. 
FLUTE,  s.  f.  Instrumenta  vent  dont  les  formes  ont  été  très  va- 
riées  depuis  l'antiquité  jusqu'aujourd'hui   (voy.  le    ch.  xix  ). 
Il  y  a  en  des  flûtes  simples,  doubles,  égales,  inégales,  à  bec, 
à  une  embouchure  latérale,   etc.  Les  flûtes  sont   faites  en  l)ois, 
en  cristal ,  en  porcelaine  ,  eto. 
FLUTES.  Plusieurs  jeux  d'orgues  portent  ce  nom.  Il  y  a  âesjlùtes 
ouvertes,  bouchées,  coniques ,  à  cheminée;  elles  diffèrent  autant 
par  la  qualité  du  son  que  parla  forme. 
FLUTE,   EE,  adj.  On  dit:  un  son  flùlé  ,  une  voix flùtèe ,  pour  indi- 
quer que  ce  son  ou  cette  voix  ont  la  douceur  de  la  flûte. 
FLUTET,  s.  m.  (voy.  Galoubet). 

FOGLIETTO ,  s.  m.  On  appelle  de  ce  nom ,  en  It^ilie ,  la  partie  de 
premier  violon  qui  contient  les  solos  et   les  rentrées  des  autres 
parties  de  l'orchestre;  celte  partie  est  une  espèce  de  partition 
obligée. 
FOLIES,  s.  f.  plur.  Air  qui  se  dansait  autrefois  en   Espagne   avec 
des    castagnettes    du    même    nom.    Cet  air  est  à   trois  temps, 
d'un  mouvement  modéré  et  d'une  mélodie  simple;  il  est  connu, 
en  France,  sous  le  nom  de  Folies  d'Espasne. 
FOlSDAMElS'TAL,  adj.  Qui  est  la  hase  de  Tharraonie.  On  appelle 
son  fondamental  le  son  le  plus  grave  de  l'accord  parfait  ou  de  l'oc- 
cord  de  septième  {voy.  Accoid).  Un  acccord  fondamental  est  celui 
dont  les  autres  dérivent  par  renversement  (voy.  Dérivé  et  Renver- 
sement. Voy.  aussi  le  ch.  x  ). 
FORCE,  s.  f.  {\oy.  Intensité). 

FORCER  LA  VOIX.  Pousser  les  sons  avec  effort;  sortir  de  son 
étendue  naturelle;  crier.  Ce  défaut  prive  l'organe  vocal  de  sa 
flouceur  et  de  sa  justesse. 

=9 


338  DICTiONlTAlRE 

FORLA.NE ,  s.  f .  Danse  gaie  et  vive  du  Frioul ,  daus  l'État  véni- 
tien ,  dont  l'air  est  iiiiix-kuit. 

FORT,  adj.  (voy.  Temps). 

FORT,  TE,  adj.  pris  substantivement  comme  synonyme  d'habile. 
On  dit:  Ce  violoniste  est  fort;  cette  dame  est  forte  sur  le  piano, 

FORT  BIEN,  s.  m.  Nom  d'une  sorte  de  piano  inventé,  en  1758,  à 
Gira  ,  par  un  facteur  d'instrumens  nommé  Federici. 

FORTE,  adv.  italien  (prononcez /orte)  , /ort.  Nuance  d'intensité 
dans  l'exécution  delà  musique.  On  l'indique  par  une  F  dans  la 
mnsique. 

FORTE-PIANO,  s.  m.  Ancien  nom  de  l'instrument  qu'on  appelle 
aujourd'hui /);ono  (voy.  ce  mot). 

FORTISSIMO.  Superlatif  de  forte  ,  très  fort.  On  l'indique  par  FF. 
dans  la  musique. 

FOURCHETTE ,  s.  f.  Partie  du  mécanisme  de  la  harpe,  inventé  par 
Séb.istien  Erard,  pour  élever  les  cordes  d'un  demi-ton  (voy.  le 
ch.  XV  ). 

FOURNITURE,  ».  f.  Jeu  d'orgue  qui  entre  dans  la  composition  du 
plein-jeu  et  qui  est  composé  de  plusieurs  tuyaux  d'un  son 
aigu,  accordés  à  la  quinte,  à  l'oi  tave  de  la  tierce,  et  à  1^  double 
octave  du  son  principal ,  avec  des  redoublemens. 

FRAGMENS.  On  appelait  ainsi  à  l'ancien  Opéra  de  Paris  nn  choix 
de  plusieurs  actes  de  ballets  ou  d'opéras,  qui  n'avaient  point  de 
rapport  l'un  avec  l'autre,  mais  qui  formaient  un  spectacle  varié, 
d'une  durée  ordinaire.  Il  y  avait  aussi  des  fragment  composés 
exprès. 

FREDONS,  s.  m.  plur.  Ornemens  de  l'ancien  chant  français.  Ce 
mot  ne  se  prend  que  dans  un  sens  ridicule. 

FREDONNER,  V.  ac.  Chauter  à  voix  basse  et  entre  les  dents  quel- 
que passage  d'air  ou  de  clianson. 

FUGUE,  s.  f.  Morceau  de  musique  établi  sur  une  phrase  donnée, 
qui  passe  alternativement  dans  tontes  les  parties,  par  une  imita- 
tion périodique  (voy.  le  ch.  xil  ). 
FUGUÉ,  adj.  (en  italien /ug-ofo).  Qui  est  dans  le  style  delà  fugue. 
he  contrepoint  fugué  est  un  contrepoint  par  imitation   (voy.  le 
ch.  xii). 
FUSA  ,  s.  f.  Ancien  nom  italien  de  la  croche  (voy.  Croche). 
FUSÉE,  s.  f.  Trait  rapide  en  montdui:  ou  descendant.  Ce  mot  était 
en  usage  dans  l'ancienne  musique  française  ;  on  ne  »'en  lert  plus 
aujourd'hui. 


DE  MUSIQUE.  339 

G 


G.  Cette  lettre  est  le  signe  par  lequel  on  désigne  en(;nre  la  cîn- 
quic'ine  note  de  la  gamine  d'ut,  dans  la  solmisation  allemande  et 
anglaise. 

G  RE  SOL.  Ancien  nom  àesol ,  dans  la  solmisation  française;  les 
Italiens  disaient  :  G  sol  ré ,  ou  G  sol  ré  ut. 

GALIARDE,  s.  f.  Ancien  air  de  danse  d'un  mouvement  animé  eu 
mesure  ternaire.  Il  se  jouait  dans  les  seizième  et  dix-septième 
siècles,  après  la  Pavane  et  autres  danses  lentes. 

GALOUBET  ou  FLUTET,  s.  m.  Sorte  de  flûte  à  bec  en  usage  dans 
la  Provence,  et  nui,  étant  accompagnée  du  tamljourin,  sert  à  faire 
danser  les  paysans.  Ses  sous  sont  aigus.  Il  n'est  percé  que  de 
trois  trous  et  on  le  joue  d'une  seule  main  Celui  qui  enjoué,  bat 
de  l'autre  m.iin,  avec  une  baguette  ,  sur  le  tambourin,  long  tam- 
bour qui  fait  peu  de  bruit. 

GAMME,  s.  f.  On  appelle  de  ce  nom  la  série  des  sons  de  la  musi- 
que européenne,  qui  est  disposée  de  telle  sorte  qu'il  y  a  un  ton 
entre  la  jjremière  note  et  la  seconde,  un  ton  entre  la  seconde  et 
la  troisième,  un  demi-tou  entre  celle-ci  et  la  quatrième,  un  ton 
entre  la  quatrième  et  la  cinquième,  un  autre  ton  entre  ceile-ci 
et  la  sixième,  enfin  ni}  ton  entre  la  sixième  et  la  septième,  et  un 
demi-ton  entre  la  sej>ticme  et  la  huitième,  a]îrès  quoi  la  série 
recommence  dans  le  mêine  ordre,  une  octave  plus  haut  et  de 
même  jusqu'aux  sons  les  plus  aigus. 

Le  nom  de  gamme  vient  de  ce  que  l'on  représentait  autrefois 
la  note  la  plus  grave  de  l'écbelle  des  sous  par  la  troisième  lettre 
de  ]'al|)l)al?et  grec  appelée  gamma.  On  attribue  l'usage  du  gam- 
ma, et  le  nom  àe  gamme,  à  un  rnoine  italien  du  onzième  siècle, 
nommé  Gui  d'Arez:,o;  mais  lui-même  en  parle  comme  de  choses 
connues  avant  lui  (voy.  iTeracortie.  Yoy.  aussi  lech.  iv,  intitulé: 
De  la  différence  des  gammes). 

GAVOTTE,  s.  f.  Air  de  danse  en  mesure  à  temps  binaires  et  d'un 
mouvement  modéré.  La  gavotte  n'est  plus  en  usage  que  dans  les 
ballets. 

GENRES,  formules  de  successions  harmoniques  et  mélodiques. 
Les  Gi'ecs   avaient  trois  genres:   i°  Le  rftatonijue,  dans   leque) 


3-10  UXCTIOMNAIRE 

tous  le5  S0D5  étaient  à  la  distance  d'un  ton,  suiraut  lu  sigai£ea- 
tiou  exacte  du  mot  diatonique;  2°  le  chromatique  où  l'on  ein- 
jilovait  des  demi-tons  et  quelquefois  des  quarts  de  tons;  3°  Fcn- 
hannonique ,  dont_  nous  n'avons  qu'une  idée  imparfaite  et  sur 
lequel  les  écrivains  grecs  eux-mêmes  ne  sont  pas  d'accord.  Ces 
expressions,  transportées d^rns  la  musique  moderne,  «ont  ou  in- 
signifiantes ou  complètement  fausses.  Ainsi  nous  n'avons  point 
de  gamme  diatonique  puisqu'on  y  trouve  des  demi-tons  ;  les 
mots  chromatique  et  enharmonique  n'expriment  rien  dans  notre 
langage  musical,  ^ous  n'avons  pas  de  genre  d'ailleurs  propre- 
ment dit,  dans  notre  musique,  car  ils  y  sout  tous  mêlés. 
(ilGUE,  s.  f.  Air  de  danse  d'un  mouvement  vif  à  mesure  bioaire 
et  à  division  ternaire.  Le  mouvement  de  cet  air  a  été  employé 
])ar  un  grand  nombre  de  compositeurs  du  dix-septième  et  du 
(!ix-liuitième  siècle,  dans  leurs  pièces  instrumertales. 
GlUSTO  (TEMPO).  Expression  italienne  dont  on  se  sert  pour  in- 
diquer un  mouvement  qui  n'est  ni  trop  vif  ni  trop  lent. 
('■LOTTE,   s.    f.    Embouchure   des   instrumens    à    vent   chez    les 

Grecs. 
Glotte,  s.  f.  Partie  charnue  de  l'organe  de  la  voix  dont  les  mou- 

vemens  contribuent  à  l'articulation  des  sons. 
GORGHEGGIO.  Mot  italien  par  lequel  on  désigne  un  passage  ra- 
pide exécuté  avec  la  voix.  Ce  mot  est  en  usage  partout. 
GRADUEL,  ».    m.  Chant  qui  se  récite  dans  l'office  solennel  de  la 
messe  après  l'épître.   On  appelle  aussi  g^raifue/ le  livre  de  plain- 
chant  qui  contient  l'office  du  matin. 
GRA>'D  JEU  ou  GRAND  CHOEUR.  On  appelle  de  ce  nom  une 
pièce  di)rgue  qu'on  exécute  sur  les  claviers  réunis  du  grand  or- 
gue et  du  positif  avec  les  pédales,  et  dans  lequel  on  réunit  tous 
les  jeux    d'anches,   tel    que    les    trompettes,    ilairons,    l>om- 
bardes ,  chromornes,  auxquels  on  joint  quelquefois  des  jeux  de 
mutation,  tels  que  les  cornets  et  les  nazards,  et  même,  lorsque 
la  soufflerie  fournit  du  vent   en   abondance,  les  jeux  de   fonds, 
c'est-à-dire,  les  bourdons,   flûtes    et    montres    (voy.   tous   ces 
mots). 
GR.A.ÎV'D-OPERA,  nom  par  lequel  on  désignait  autrefois  l'Opéra 
de  Paris,  ])our  le  distinguer   de  V Opéra-Comique    On  dit  main" 
tenant  YOpèra. 
GRAVE,  adj.  Qualité    des   sons    produit?    par  les  instrumens  de 


Pt  MlSIQl'E.  341 

grandrs  dimensions  et  par  les  voix    de  Lasse.  Un  io/i  grave  est 
l'opposé  d'un  son  aigu. 

GR.WE  (prononcer  grave)  ,  adv.  italien,  graTement.  On  le  met  à 
la  tête  des  morceaux  de  musique  dont  le  mouvement  doit  être 
très  lent. 

CPiAVEUR,  sabst  de  deux  genres.  Artiste  qui  grare  de  la  musi- 
que sur  des  planches  d'étain ,  en  y  imprimant  des  empreintes  de 
poinçons  à  coups  de  marteau. 

OîIaVITÉ  des  sons.  Intonation  des  cordes  et  des  tuyaux  de  gran- 
des dimensions  ou  des  Toix  de  bdsse. 

GHAVURE,  s.  f.,  de  la  musique.  Art  du  graveur. 

GRAVURES,  s.  f.  plur.  Rainures  pratiquées  dans  le  sommier  de 
l'orgue,  pour  la  circulation  du  vent  jusqu'à  l'orifice  inférieure 
des  tuyaux. 

tjR-AZIOSO.  Acj.  italien  qui  signifie  gracieux  et  qu'on  met  en 
tête  de  certains  morceaux  de  musique  pour  indiquer  un  carac- 
tère d'exécution  doux  et  agréable. 

C-ROUPE,  s.  m.,  en  italien  grupetto.  Ornement  du  chant  composé 
de  trois  on  quatre  noies  de  peu  de  valeur,  et  qui  précède  quel- 
quefois l'attaque  d'une  autre  note  de  durée  jilus  longue.  11  y 
a  différentes  formes  de  groupes;  le  goût  du  cbanteur  le  dirige 
dans  l'emploi  qu'il  en  fait. 

GUDDOK.  TSota  d'un  violon  rustique  à  trois  cordes ,  en  nsage 
parmi  les  paysans  russes. 

GUIDE  ou  GULDO!N ,  s.  m.  Signe  qui  se  mettait  autrefois  an  bout 
de  la  portée  sur  le  degré  ou  devait  être  placée  la  note  de  la  por- 
tée suivante,  afin  de  faciliter  la  lecture  de  la  musique.  Ce  signe 
n'est  plus  en  nsage. 

GUITARE,  s.  f.  Instrument  à  cordes  avec  un  manclie  sur  lequel  il 
y  a  des  cases  marquées  pour  poser  les  doigts.  Les  cordes  de  cet 
instrument  se  pincent  avec  la  main  droite.  La  guitare  est  mon- 
tée de  six  cordes;  on  l'appelait  ^iferne  dans  les  quinzième  et 
seizième  siècles  (voy.  le  cb.  xrx). 

GUITARISTE,  s   m.  Musicien  qui  joue  de  la  guitare. 

GUZLA,  s.  f  Instrument  champêtre  des  Morlacqnes  sur  lequel  il 
n  y  a  qu  une  corde  de  crins  tressés.  Cet  instrument  sert  a  ac- 
compagner les  chants  nationaux  appelés /)iinie. 

39. 


342  DICTIONNAIRS 

H 


H.  Lettre  qui,  dans  la  désignation  des  notes,  indiqne  en  Allema- 
gne le  si  bécarre. 

HALALI ,  s.  ni.  Nom  d'un  air  qui  se  joue  sur  les  trompes  de  chasse 
lorsque  la  bête  se  rend. 

HARMOÎSICA,  s.  m.  Instrument  composé  de  cloches,  de  gobelets 
de  verre  qu'on  accorde  au  moyen  de  l'eau  qu'on  y  verse  avec 
plus  ou  moins  d'abondance,  et  dont  on  frotte  les  Ijords  avec  les 
doigts  pour  les  faire  résonner,  ou  formé  avec  des  cloches  de 
même  matière,  traversées  par  un  axe  mobile  et  qu'on  met  en 
mouvement  par  nue  péd.ile  (voy.  le  ch.  xv). 

Harmokica.  On  appelle  aussi  de  ce  nom  un  instrument  composé 
d'uue  éclielie  chromatique  plus  ou  moins  étendue,  de  lames  de 
verre  fixées  par  un  bout,  libres  par  l'autre,  et  qu'un  frappe 
avec  de  petites  baguettes  flexibles  terminées  par  un  morceau  de 
liège. 

HARMONIE,  s.  f.  Résultat  de  plusieurs  sons  entendus  ensemble 
et  qui  s'accordeat. 

Harsiowie.  Doctrine  des  accords  ;  système  de  leur  classification 
(voy.  le  ch.  x).  C'est  en  ce  sens  (ju'on  dit:  J'apprends  l'harmo- 
nie; on  enseigne  l'harmonie  au  Conservatoire, 

Harmonie.  Musique  d'instrumeus  à  vent  où  l'on  n'introduit  pas 
les  instrumens  de  peri'ussion.  C'est  par  ce  nom  qu'on  distingue 
ce  genre  de  musique  de  la  musique  miliiaire  (voy.  ce  mot)  ;  cepen- 
dant les  musiiieus  confondent  assez  souvent  ces  deux  choses. 

HARMOiriE.Les  facteurs  d'orgue  désignent  par  ce  mot  la  qualité 
propre  du  son  de  chaque  jeu  de  cet  instrument.  Ils  disent:  Celle 
flûte  ,  ce  hautbois,  cette  trompette  sont  d'une  bonne  harmonie,  c'est- 
à-dire  d'une  bonne  qualité  de  son. 

HARMONIEUX ,  adj.  Ce  qui  a  de  l'harmonie.  Cette  musique  est  har- 
monieuse, l'ensemble  de  ces  voix  est  harmonieux. 

HARMONIQUES.  Sons  qui  résonnent  faiblement  à  l'octave  de  la 
quinte  et  à  la  double  octave  de  la  tierce  d'un  son  grave  lorsqu'on 
fait  vibrer  avec  force  une  corde  de  grande  dimeasiDi)  (voy.  le 
ch.  jç  ). 

HARMONIQUES  (SONS},  (voy.  Sons  harmoniques). 


DE  MUSIQUE.  343 

HARMONISTE,  s.  des  2  g-  Musicien  qui  sait  la  science  de  l'har- 
monie. 

HARPE,  s.  f.  Instrument  de  grande  dimension,  monté  de  cordes 
de  boyaux,  qu'on  pince  avec  les  deux  mains  pour  en  tirer  des 
sons  (voy.  le  ch.  xv). 

Voy.  aussi  Colonne,  Console,  Cuvette,  Fourchette,  Pédale,  Sabot. 

HARPE-DITALE.  Petite  harpe  d'une  étendue  de  quatre  octaves, 
construite  par  M.  Pfeiffer,  à  Paris.  Le  mécanisme  des  pédales  de 
la  grande  harpe  est  placé  sous  les  doigts  dans  celle-ci. 

HARPISTE,  s.  des  2  g.  Musii-ien  qui  joue  de  la  harpe. 

Haut,  adj.  Sedit  de  l'intonation  du  son,  et  signifie  élevé,  aigu. 
Cette  femme  a  la  voix  haute  est  une  locution  dont  on  se  sert  pour 
dire  qu'elle  a  des  sons  aigus  dans  la  voix.  Chanter  trop  haut, 
c'est  chanter  au-dessus  du  ton  ,  chanter  faux. 

HAUTBOIS,  s.  m.  Instrument  à  veut  et  à  anche,  percé  de  trous 
et  armé  de  clefs,  qui  tient  une  place  importante  dans  l'orches- 
tre (voy.  le  ch.  xv). 

Hautbois.  Jeu  d'anche  de  l'orgue  qui  se  divise  en  deux  parties  , 
dont  la  supérieure  s'appelle  hautbois  et  l'inférieure  basson.  Les 
f.icteurs  d'orgues  jjlaccnt  ordinairement  ces  deux  parties  de 
l'orgue  sur  deux  registres  diflérens ,  afin  de  pouvoir  les  réunir 
ou  les  séparer  à  volonté. 

HAUBOISTE,  s.  des  deux  genres.  Musi<ien  qui  joue  du  hautl)ois. 

HAUTE-COÎNTRE,  s,  f.  Ancien  nom  français  d'une  voix  de  ténor 
élevé,  appelée  en  Italie  lenore  conlraltino.  Ce  genre  de  voix  ne 
se  trouve  communément  en  France  qu'à  Toulouse  et  dans  ses 
environs  (voy.  Contralto  et  Tenore). 

HEX.\C'ORDE,  s.  m.  Gamme  du  piain-chant  composée  de  six  no- 
tes qu'on  croit  généralement  avoir  été  inventée  par  un  moine  du 
onzième  sièile,  nommé  Gui  d'Arezzo  ,  mais  qui  n'a  été  mise  en 
usage  qu'après  lui  (voy.  Gamme,  Muances  et  So/misation). 

HUIT-PIEDS.  Nom  par  lequel  on  désigne  communément  les  or- 
gues dont  le  tuyau  le  plus  grand  du  jeu  de  flûte  ouverte  a  huit 
pieds  de  longueur.  Le  tuyau  de  huit  pieds  ouvert  est  censé  son- 
ner à  l'unisson  de  la  quatrième  corde  à  vide  du  violoncelle; 
mais  ces  proportions  ne  sont  plus  exactes  depuis  que  le  diapa- 
son s'est  élevé  (voy  Diapason). 

HUIT  PIEDS  BOUCHÉ.  Jeu  d'orgue  de  l'espèce  des  flûtes  ,  com- 
posé de  tuyaux  à  bouche  fermés  par  leur  extrémité.  On  donne 


344  DICTI05KA1BK 

aussi  à  ce  jeu  le  nom  de  bourdon  de  seize  (voy.  Bourdon,  Tujau  , 
Orgues.  Voy.  aassi  le  ch.  xv). 
HYMNE,  s.  m.  et  f.   Chant  triomphal  ou  patriotique.  En  ce  sens, 
hjmne  est  du  genre  masculin.  La  MarseiHane  est  un  hjrmne  de  la 
révolution  française.  Hjrmne,  chant  d'église,  est  du  genre  féminin. 


I 


IMITATION,  s.  f.  Phrase  mélodique  qui  passe  alternativement 
d'un  instrument  ou  d'une  voix  à  un  autre,  et  qui  sert  d'accom- 
pagnement à  d'autres  phrases,  au  moyen  de  certains  procédés  de 
l'art  d'écrire.  Il  y  a  plusieurs  sortes  d'imitations  dont  on  peut 
voir  l'iudicatien  au  ch.  xii). 

1511 TATIVE  (  MUSIQUE  ).  La  musique  imitatùe  est  celle  qui  a 
pour  objet  de  produire  des  effets  semblables  ou  analogues  à 
ceux  qu'on  remarque  dans  la  nature ,  tels  que  le  bruit  de  la 
tem])ète,  le  mouvement  des  flots,  relui  d'une  chasse,  le  galop 
<les  chevMux,  etc.  Ces  sortes  d'imitations  sont  fort  imparfaites  et 
ne  produisent  guère  que  des  effets  de  convention.  Ce|)endant 
elles  sont  quelquefois  nécessaires. 

r  TPROVIS.^TION ,  s.  f.  Invention  spontanée  d'un  morceau  de 
musique  pendant  qu'on  joue  d'un  instrument.  Il  y  a  peu  d'exem- 
ples d'improvis.itions  réelles;  souventce  qu'on  donne  comme 
tel  n'est  que  le  remplissage  d'un  cadre  préparé  à  l'av.mce,  et 
dans  lequel  on  fait  entrer  beaucoup  d'idées  arrêtées.  Ce  n'est  que 
lorsque  l'artiste  n'a  que  lui  pour  auditoire  qu'il  improvise  à  la 
lettre;  alors,  eu  milieu  de  pensées  vagues  ou  insignifiantes,  il 
s'en  produit  quelques-unes  qui  ont  le  caractère  de  l'inspira- 
tion. 

riPROVISER,  V.  n.  Faire  acte  d'improvisation. 

1  -GANNO,  s.  m.  Met  italien  qui  signifie  tromperie.  On  l'emploie 
dans  la  musique  pour  indiquer  une  modulation  inattendue  et 
différente  de  celle  que  semblait  indiquer  la  préparation  (voy. 
Cadence  et  Modulation). 

INSTRUMENS.  s.  m.  plur. Appareils  deatinésà  produiredes  sonsà 
l'imitation  de  la  voix  huiuaine,  et  a  former  des  concerts  par  la 
réunion  de  leurs  timbres.  On  divise  communément  les  instru- 
mens  eu  quatre  sections  principales,  savoir  :  i°  Les  instrnmeos 


nR  MUSIQUE.  345 

à  cordes;  2"  idem  à  vent;  3»  idem  à  percussion;  4°  idem  à  frot- 
tement et  II  corps  métalliques  ou  vitreux.  La  classe  des  iiistru- 
mens  à  cordes  se  subdivise  en  instrnmens  h  cordes  pincées,  à 
archet  et  à  clavier.  Pnrmi  les  instrumens  à  vent  on  remarque 
ceux  du  genre  des  flûtes  à  tuyaux,  à  bouche  ou  à  bec,  ceux  qui 
se  jouent  avec  une  anche  ou  languette  vilirante,  et  ceux  à  em- 
bouchure en  cuivre.  Les  instrumens  de  percussion  renferment 
deux  classes,  les  tambours  ou  instrumens  à  peaux  tendues  et  les 
timbres  de  diverses  formes.  Enfin  les  instrumens  à  frottement 
sont  les  harmonicas,  \e%  fers  harmonique!  ,  les  plaques ,  etc.  Pour 
plus  de  détails,  voy.  le  chapitre  xv. 

INSTRUMENTAL,  ALE.  adj.  Qui  se  rapporte  aux  instrumens.On 
dit  un  concert  instrumental ,  pour  un  concert  où  l'on  n'entend  que 
des  instrumens;  on  appelle  composition  instrumentale  la  musique 
qui  est  écrite  pour  les  instrumens.  Quelquefois,  par  voie  de  cri- 
tique, on  appelle  chant  instrumental  celui  où  le  chanteur,  abu- 
sant de  sa  facile  vocalisation,  imite  les  traits  des  instrumens, 
au  lieu  de  conserver  à  son  organe  le  caractère  d'expression  qui 
est  dans  sa  nature. 

INSTRUMENTISTE,  s.  des  2  g.  Musicien  qui  joue  d'un  ou  de  plu- 
sieurs  instrumens. 

INTENSITE,  s.  f.  Qualité  énergique  des  sons;  force  de  leur  vibra- 
tion. 

INTERMEDE  ,  s.  m.  Petite  pièce  mêlée  de  vers,  de  musique  et  de 
danse  qui  se  jouait  autrefois  entre  les  actes  d'une  tragédie,  d'un 
opéra  sérieux  ou  d'une  comédie  de  caractère.  Le  genre  de 
ces  intermèdes  était  presque  toujours  gui  ou  bouffon.  Eu  Italie 
on  donnait  autrefois  le  nom  (Vinlemie^zo  (intermède)  à  de  ])etits 
opéras  tels  que  la  Serva  Padrona,  de  Pergolèse,  bien  qu'ils  ne 
fussent  pas  toujours  joués  dans  les  entr'actes  des  autres  pièces; 
on  les  ajjpelle  aujourd'hui  Aes  farces.  Les  intermèdes  sont  passés 
de  mode  en  France. 

INTERVALLE,  s.  m.  Distance  qui  se  trouve  entre  un  sou  et  uu 
autre. 

INTERVALLE  CONSONNANT.  Relation  de  deux  sons  d'intona- 
tions  différeutes  et  agréables  à  l'oreille. 

INTERVALLE  DISSONANT.  Relation  de  deux  sons  d'intonations 
différentes,  et  qui  affecte  l'oreille  du  besoin  d'entendre  ensuite 
un  intervalle  consonnant  (voy.  le  ch.  x  ). 


346  DICTIONNAIRE 

INTERVALLE  REDOUBLÉ.  Distance  plus  grande  que  l'oetaTC 
entre  deux  sons;  la  neuvième  est  un  intervalle  de  seconde  re- 
doublée; la  dixième  est  un  intervalle  de  tierce,  etc.  (voy.  le  cb. 

X). 

INTERVALLE  SIMPLE.  Distance  de  deux  sons  renfermés  dans 
les  limites  de  l'octave  (voy.  le  cb.  x  ). 

INTERVALLE  RENVERSÉ  (voy.  Renversement). 

INTRODUCTION,  s.  f.  Commencement  d'un  opéra  dans  lequel 
la  musique  n'est  point  interrompue,  et  qui  renferme  quelque- 
fois plusieurs  scènes  et  plusieurs  morceaux.  L'introduction  est 
au  noraljre  des  formes  les  plus  modernes  de  l'opéra;  elle  est 
maintenant  ol^ligatoire. 

On  appelle  aussi  inlioduction  un  mouvement  lent  et  assez  court 
par  lequel  commenceut  quelquefois  une  sympbonie,  un  qua- 
tuor, une  ouverture,  et  qui  est  immédiatement  suivi  d'un  mou- 
vement plus  vif. 

INVERSE  (CONTREPOINT)  est  le  nom  d'une  sorte  de  composi- 
tion svstématique  dans  laquelle  une  ou  plusieurs  parties  prennent 
à  rebours,  c'est-à-dire  en  mouvement  rétrograde,  le«  pbrases 
que  d'autres  parties  ont  fait  entendre  dans  un  mouvement  direct 
(voy.  Mouvement    rétrograde.  Voy.    aussi  le  ch.  xii). 

INVERSE  CONTRAIRE  (CONTREPOINT  ou  IMITATION). 
Contrepoint  dans  lequel  une  ou  plusieurs  parties  prennent  par 
mouvement  rétrograde  et  par  mouvement  contraire  ce  que 
d'autres  ont  fait  entendre  par  mouvement  direct  (voy.  le  cli.  xii). 

IRRÉGULIERS  (TONS).  C'eit  dans  le  plain-cbant  une  antienne, 
une  hymne,  ou  toute  autre  pièce  dont  le  cbant  participe  de  plu- 
sieurs tons  à  la  fois  (voy.  Tom  du  plain-chani). 


JEU,  s.  m.  Manière  déjouer  d'un  instrument.  On  dit  :   Le  jeu  de  c  e 
violoniste  est  brillant. 

Jeu,  s.  m.  Collection  de  tuyaux  d'orgues  d'une  certaine  forme, 
d'une  certaine  espèce,  établie  sur  toutes  les  notes  dont  se  com- 
pose l'éclielle  générale  de  l'in>trument.  Un  jeu  de  Jliie  ouverte  de 
quatre  piedi  est  un  jeu  dont  le  tuyau  le  plus  grand  a  quatre  pieds 


HE  MUSIQUE.  347 

de  liaiitcur;  un  jeu  de  liaiitbois  est  un  jeu  compose  de  tuyaux  à 
anches  qui  iuiitent  le  sou  duhaulLois,  eti:  Ou  distingue  les  jeux 
de  l'orgue  ea  jeux  à^bouche ,  jeux  d'anches  et  jeux\de  mulaùon 
(voy.  le  ch.  xv  ). 

JEU  CELESTE.  Norn  d'une  pédale  du  piano  qui  fait  avancer  sonï 
les  cordes  des  morceaux  de  buffle  pendant  qu'une  autre  pédala 
lève  les  étouffoirs  (voy.  Piano). 

JOUER  des  instrumens,  c'est  eu  tirer  des  sons  de  manière  à  satis» 
faire  plus  ou  moins  l'oreille  ,  et  les  coordonner  daus  un  ordre 
mélodique  ou  harmonique.  On  disait  autrefois  toucher  du  piano, 
pincer  de  la  harpe  el  de  la  guitare,  donner  du  cor,  sonner  de  la 
trompette,  etc.  On  dit  maintenant^ouerde  tous  les  instrumens. 

JUSTE,  adj.  Une  intonation  est  juste  quand  elle  est  dans  un 
rapport  convenable  avec  les  autres  notes  du  ton  et  du  mode  (voy. 
ces  mots).  Une  octave  est  juste  quand  elle  n'est  point  altérée  par 
un  signe  d'élévation  ou  d'abaissement  accidentel. 

JUSTE,  adv.  Jouer  juste,  chanter  juste ,  c'est  faire  entendre  dans 
son  jeu  ou  dans  sou  chaut  des  intonations  d'une  justesse  conve- 
nable. 


K 


Kyrie  est  un  mot  grec  qui  sert  à  invoquer  le  nom  du  Seigneur 
au  corameni  émeut  de  la  messe.  Les  compositeurs  font  quelque- 
fois de  longs  morceaux,  dans  les  messes  eu  musique,  sur  ces 
mots  seuls  :  Kjrie  eleiion  ,  Chrisie  eleiion.  Kyrie  est  le  nom  de  ces 
morceaux,  et  l'on  dit  :  Un  beau  kjrrie,  un  long  kjriel 


LA.  Sixième  note  de  la  gamme  moderne  et  de  la  gamme  du  plain- 

chant. 
LAMENTABLE.  Epithète  qu'on   donne  quelquefois  à  la  musique 

triste  et  lugubre;  elle  se  prend  toujours  en  mauvaise  part. 
LARGHETTO.  Mot  italien  qui  sert  à  indiquer  une  nuance  de  lea- 


348  DICTIO^NAIKK 

leur  plus   prononcée  que  Vandante  et  moius  lente  que  Yadagio 
(voy.  ces  deux  mots). 

LARGO,  large,  adv.  Le  plus  lent  de  tous  les  mouvemens  de  la 
musique. 

LARIGOT,  s.  m.  Jeu  d'orgue  à  bouche  qui  sonne  !a  quinte  au-def- 
sns  de  la  doubhtle  (voy.  ce  mot).  Ce  jeu  est  un  des  plus  aigus  de 
l'orgue. 

LEG.ATO,  adj.,  lié.  Mot  italien  qui  s'emploie  pour  indiquer  un 
mode  d'exécution  dont  tous  les  sons  sont  liés  avec  soin. 

LE]NTO,  adv.  lenlemeni,  indique  un  mouvement  très  lent  dans  la 
musique. 

LIAISON,  s.  f.  Arc  de  cercle  qu'on  met  entre  deux  notes  de  même 
intonation,  pour  les  lier  l'une  à  l'nutrede  manière  à  n'en  faire 
qu'une  d'une  durée  égale  à  la  valeur  de  toutes  deux. 

LiAiso:»  est  aussi  unecouriie  qu'on  met  au-dessus  de  plusieurs  no- 
tes d'intonations  différentes  pour  qu'elles  soient  exécutées  par  un 
seul  coup  d'archet  ou  par  un  seul  coup  de  langue  de  manière  à 
être  liées. 

LICENCE,  s.  f.  Incorrection  qu'un  compositeur  se  permet  dans  sa 
manière  d'écrire  l'harmonie  de  la  musique,  et  dans  laquelle  il 
viole  mf)mcntanément  la  règle  de  l'école  et  par  suite  celle  de 
l'oreille. 

LIGATURE,  s.  f.  Synonyme  de  haison  (voy.  Sjrneope). 

LIGNE,  s.  f.  Traits  horizontaux  qui  composent  la  portée  sur  la- 
quelle est  écrite  la  musique.  Ces  lignes  sont  au  nombre  de 
cinq  dans  la  musique  ordinaire  et  de  quatre  dans  le  plain-chant. 
Le  nombre  de  ces  lignes  a  varié  dans  le  moyen-âge;  à  la  fin  <lii 
dix-septième  siècle  et  au  commencement  du  dix-huitième  ,  la 
portée  était  composée  de  huit  lignes  pour  la  musique  d'orgue 
et  de  clavecin. 

LIVRE  OUVERT.  Lire  à  livre  ouvert,  o'est  lire  la  musique  avec  fa- 
cilité. 

LOCO.  Ce  mot  italien  indique  j  après  un  passage  marqué  pour  être 
joué  à  une  octave  supérieure  ou  inférieure,  le  retour  à  la  jjosi- 
tion  naturelle  des  notes. 

LONGUE  ,  s.  f.  Figure  de  note  qui ,  dans  l'ancienne  notation,  éfait 
le  signe  d'une  durée  double  de  celle  de  la  brève  ou  ronde  (vov. 
ces  mots).  Dans  la  mesure  ternaire,  la  longue  valait  trois  brèves. 

I.OURE,  s.  f.  Air  de  danse  en  mesure  binaire  à  temps  ternaire  qui 


DE  MUSIQUE.  349 

était  autrefois  en  usage  dans  le  midi  delà  Franc(\  Son  ili\  tliine 
avait  de  l'analogie  avec  celui  de  l'air  appelé  Sicilienne. 

LUTH,  s.  m.  Instrument  originaire  de  l'Orient,  oîi  il  est  encore 
connu  sous  le  nom  d''éoud.  11  était  particulièrement  en  usage  aux 
seizième,  dix-septième  et  dans  la  première  moitié  du  dix-hui- 
tième siècle.  Son  corps  était  arrondi  comme  celui  de  la  mando- 
line qui  en  est  le  diminutif,  et  la  partie  sui)érieure  de  son  man- 
che, qui  était  très  large,  était  renversée.  11  était  monté  de  vingt- 
quatre  rordes.  Huit  de  ces  cordes  étaient  placées  en  dehors  du 
manche  et  se  pinçaient  à  vide  pour  faire  les  hasses  ;  les  seize  autres 
étaient  accordées  par  couples  à  l'unisson,  et  fournissaient  huit 
sons  à  vide.  Dans  les  seizième  et  d'x-septième  siècles,  le  luth  était 
l'instrument  principal  de  toute  musique  de  chambre  (  voy.  ces 
mots  ). 

LUTHIER,  s.  m.  On  donnait  autrefois  ce  nom  à  l'artiste  qui  cons- 
truisait des  luths  et  des  iustruraens  de  la  même  espèce,  tels 
que  Varchiluih,  le  ihéorbe  et  la  mandoline.  Par  la  suite,  on  a 
étendu  ce  nom  à  tous  les  fabricans  d'instiumens  à  archet,  ou 
même  à  ceux  qui  faisaient  des  guitares  et  des  harpes.  Dans  quel- 
ques villes  de  province  on  voit  même  des  enseignes  de  luthier  au- 
dessus  de  la  porte  des  fabricans  d'instrumcns  à  veut. 

LUTRIN,  s.  m.  Pupitre  de  chœur  sur  lequel  on  place  les  livres  de 
plain-chant  dans  les  églises  c^itholiques. 

LYRE,  s.  f.  Nom  générique  des  instrumens  à  cordes  pincées  de 
l'antiquité,  qu'on  désignait  par  des  noms  particuliers,  tels  que 
ceux  de  cjthaie,  cheljs,  de  phorminx ,  etc.  (voy.  le  ch.  xv  ).  On 
attribuait  son  invention  à  Mercure.  Elle  était  composée  d'un 
corps  sonore,  surmonté  de  deux  branches  attachées  par  une 
traverse  à  laquelle  on  fixait  les  cordes. 

Lyre,  s.  f.  On  a  donné  ce  nom  à  une  variété  de  la  guitare  qui  a 
eu  quelque  vogue  depuis  1795  jusqu'en  18 10.  Cette  guitare 
avait  en  effet  quelque  analogie  de  forme  avec  la  lyre  antique, 
et  n'en  différait  que  par  le  manche  qui  permettait  de  varier 
les  intonations  de  chaque  corde.  Cette  forme  était  peu  favorable 
à  la  production  du  son  ;  c'est  ce  qui  l'a  fait  abandonner. 

LYRIQUE,  adj.  Expression  qui  s'appliquait  autrefois  à  la  poésie 
destinée  à  être  chantée  avec  l'accompagnement  de  la  lyre.  Au- 
jourd'hui on  ajjpelle  poésie  lyrique  tout  ce  qui  est  destiné  à 
être  piis  en  musique,  bien  que  }a  lyre  soit  oubliée.   C'est  ainsi 


350  DICTIONHAÎRE 

qu'on  désigne  aussi  quelquefois  un  opéra  sous  le  nom  de  drame 
Ijrique,  et  qu'un  tliéâtre  où  l'on  représente  des  pièces  en  musi- 
que s'appelle  thcàtre  Ijrique. 

M 


MADRIGAL,  3.  m.  Pièce  composée  pour  les  toÏx,  sans  accompa' 
gnement,  qui  était  fort  en  usage  dès  le  coraraencement  du  sei- 
zième siècle,  et  qui  ne  cessa  d'être  à  la  mode  qu'après  le  triom- 
phe de  la  musique  dramatique.  Les  madrigaux  étaient  éi-rits  pour 
quatre,  cinq,  six  ou  sept  voix,  diins  un  style  rempli  de  comljinai- 
son»  recherchées  et  d^imitalions  (voy.  (-e  mot).  Les  compositeur.s 
italiens  et  belges  se  sont  surtout  distingués  dans  la  composition 
des  madrigaux;  à  l'époque  où  ce  genre  de  musique  était  en  vo- 
gue, les  musiciens  français  écrivaient  dans  un  si  vie  plus  liljre 
leurs  chansons  à  plusieurs  voix. 

MADRIGALESQUE,  adj.  Se  dit  du  style  du  madrigal. 

MAESTOSO,  adj.  italien  qui  désigne  uu  mouvement  lent  et  ma- 
jestueux de  la  musique. 

MAESTRO,  maître.  Ce  mot  a  passé  de  l'italien  dans  la  langue 
française.  On  dit  aujourd'hui  le  grand  maestro  pour  désigner 
un  compositeur  distingué. 

MAESTRO  Dl  CAPELLA  (voy.  Maure  de  chapelle). 

MAIN  HARMONIQUE.  Rom  que  les  anciens  écrivains  sur  la  mu- 
.sique  donnaient  à  la  figure  interne  dont  les  doigts  portent  les 
noms  des  notes  ut,  ré,  mi,  fa  ,  sol,  la  ,  disposés  de  manière  à  fa- 
ciliter aux  élèves  la  solmtsation  (voy.  ce  mot)  dans  les  trois  gen- 
res innielésparbémot ,  par  bécarre  et  par  nature ,  selon  la  méthode 
des  muances  (voy.  ce  mot).  L'invention  de  la  main  harmonique  est 
communément  attribuée  au  moine  Gui  d'Ârezzo ,  qui  vivait  dans 
le  onzième  siècle  j  cependant  on  n'en  trouve  nulle  trace  daus  ses 
ouvrages. 

MAITRE  DE  CHAPELLE.  On  ne  donnait  autrefois  ce  nom  qu'aux 
musiciens  attachés  au  service  d'une  église  pour  composer  de  la 
musique  sacrée.  On  appelle  aujourd'hui  maître  de  chapelle  tout 
compositeur  qui  écrit  pour  le  théâtre. 

MAITRE  DE  CONCERT.  Nom  qu'on  donne  en  Italie  et  en  Alle- 
magne au  musicien  qui  dirige  l'exécutiua  de  la  musique  daus 


DE  MUSIQUE.  351 

les  cours  ;  eu  France  ce  nom  u'est  puiut  en  usage  ;  on  dit  mailie 
de  musique  ,  ou  chef  d'onlieslre. 

MAITRE  DK  MUSIQUE.  Musicieu  qui  dirige  la  musique  d'une 
église  et  qui  donne  des  leçons  aux  cnfans  de  il)œur. 

Maître  de  musique  se  dit  aussi  d'un  musicien  qui  enseigne  les 
principes  du  solfège  (v.oy.  ce  mot). 

Maîtue  de  musique  entin  est  le  nom  du  musicien  qui  dirige  la 
musique  d'un  régiment, 

MAITRISE ,  s.  f.  Institution  de  musique  dépendante  des  églises 
cathédrales  ou  collégiales.  Les  maîtrises  se  composent  du  maî- 
tre de  musique  et  d'uu  certain  nomljre  d'enfans  de  chœur  placés 
sou»  sa  discipline.  Le  nomlire  des  maîtrises  était  autrefois  en 
France  d'environ  45o,  et  celui  des  élèves  qui  y  étaient  élevés 
était  de  quatre  à  cinq  mille;  la  plupart  de  ces  établisseraens 
ont  été  supprimés  après  la  révolution  de  178g. 

MAJEUR,  adj.  qui  indique  la  qualité  d'un  intervalle  plus  grand 
que  le  mineur  de  même  dénomination.  Ainsi  la  seconde  majeure 
estcom]>osée  d'un  ton,  et  la  seconde  mineure  d'uu  demi-ton. 

Cet  adjectif  s'applique  aussi  au  mode  d'un  ton  (voy.  Mode  et 
Ton),  qui  est  majeur  quand  la  tierce  et  la  sixte  de  la  tonique  (voy. 
ce  mot)  sont  dans  leur  plus  grande  extension  relative  au  ton  ,  et 
mineur  quand  ces  intervalles  ont  une  étendue  plus  petite  d'un 
demi-ton. 

MANCHE,  s.  m.  Partie  supérieure  des  instrumens  à  cordes  pincées 
ou  à  archet,  qui  sert  à  tenir  ces  instrumens.  Les  cordes  sont  ten- 
dues sur  le  manche  par  des  chevilles,  et  l'on  eu  modifie  les  in- 
tonations en  les  pressant  avec  les  doigts  contre  ce  manche  en 
divers  points  de  leur  longueur. 

MANDOLINE ,  s.  f.  luslrunient  à  cordes  pincées,  de  la  famille  du 
luth  et  de  plus  petite  dimension.  On  l'accorde  comme  le  vio- 
lon. Sa  chanterelle  est  simple,  mais  les  trois  autres  cordes  sont 
douilles.  Ces  cordes  doubles  sont  accordées  à  l'unisson  pour  le 
la  et  le  ré ,  et  celles  du  sol  sont  à  l'cctave.  On  pince  les  cordes  de 
la  mandoline  avec  un  morceau  d'écaillé  de  tortue,  un  bout  de 
plume  d'aigle,  on  un  morceau  d'éeoree  de  cerisier  (voy.  le    uh. 

XV). 

MANDOR,  s.  f.  Instrument  à  cordes  pincées  de  la  famille  du  luth, 
monté  de  quatre  cordes  doubles,  accordées  de  quinte  en  quarte 
(voy.  le  ch.  xv). 


352  DICT10NNA.IRE 

MARCHE,  s.  f.  Pièce  de  mnsiqae  composée  pour  des  instrumens 

à  vent  et  de  percussion,  destinée  à  régler  le  pas  d'une  troupe 
militaire.  Les  marches  s'emploient  quelquefois  dans  la  musique 
théâtrale,  et  souvent  on  y  joint  un  chœur.  Le  mouvement  de  la 
marche  est  à  quatre  temps,  d'un  caractère  bien  déterminé,  mai^ 
modéré. 

MARCHE  D'HARMONIE  se  dit  quelquefois  d'une  progression 
régulière  et  uniforme  d'accords  sur  un  mouvement  de  basse 
quelconque  (voy.  Progression). 

MARCHES  ,  s.  f.  pi.  On  donnait  autrefois  ce  nom  aux  touches  des 
divers  claviers  de  l'orgue.  Ou  appelle  aussi  marches  les  touches 
de  la  viille  par  lesquelles  on  forme  les  intouations  en  les  ap- 
l)uyant  contre  la  corde. 

MASURKA ,  s.  f.  Air  de  danse  qui  est  en  usage  dans  la  Pologne. 
Le  mouvement  de  cet  air  est  animé. 

M.iXIME,  s.  f.  Note  de  musique  dont  la  forme  est  un  carré  long 
terminé  par  une  queue  verticale  au  côté  droit.  Cette  figure  de 
note,  dont  la  valeur  était  de  huit  rondes  dans  les  mesures  bi- 
naires et  de  douze  dans  les  ternaires,  a  disparu  de  la  musique 
moderne. 

MEDIANTE,  s.  f.  Troisième  note  de  la  gamme  d'un  ton  quelcon- 
que (voy.  Gamme  et  Ton). 

MEDIUM,  s.  m.  Portion  moyenne  de  l'étendue  d'une  voix  ou  d'un 
instrument  ,  également  éloignée  des  extrémités  grave  et  ai- 
guë. 

MELODICA.  s.  f.  Instrument  à  clavier  dans  la  forme  d'un  clave- 
cin avec  un  jeu  de  flûte,  inventé,  dans  la  seconde  moitié  du  dix- 
huitième  siècle,  par  Jean-André  Slein,  d'Augsbourg. 

MELODICON,  instrument  à  clavier,  inventé  par  le  mécanicien 
Pierre  Rieffelsen  ,  à  Copenhague.  Le  son  était  produit  dans  cet 
instrument  par  le  frottement  de  pointes  métalliques  sur  un  cy- 
lindre d'acier. 

MELODIE,  s.  f.  Succession  de  sons  qui  forment  un  sens  musical 
plus  ou  mois  agréable  à  l'oreille.  La  mélodie  est  une  des  parties 
les  plus  importantes  de  la  musique.  Ses  élémeus  sont  la  succes- 
sion des  sons  et  le  rhytbme  (voy.  Bhjthm"). 

MÉLODIEUX,  adj.  Qui  a  de  la  mélodie.  Ou  dit  :  Une  musique  mé- 
lodieuse ,  un  chœur  mélodieux. 

MÉLODION,  s.  m.  Instrument  iuventé  en  Allemagne ,  par  M.  Di&tz 


va.  Mi'SiQi'h.  353 

le  père.  Les  «ons  de  cet  instrument  étaient  piuJuits  par  le  frot- 
tement de  petit»  cylindres  métalliques. 

MÉLODISTE,  s.  m.  Musicien  qui  est  doué  delà  faculté  d'inven- 
ter de  la  mélodie.  On  appelle  aussi  mélodiste  l'amateur  de  musi- 
que qui  a  un  goût  passionné  pour  la  mélodie.  Il  y  a  eu  Augle- 

•  terre  une  société  de  mélodistes  qui  a  j)our  Lut  d'encourager  la 
production  des  airs  populaires. 

MÉLODRAME,  s.  m.  Dans  son  acception  la  plus  exacte,  ce  mot 
signifie  drame  en  musique.  Un  opéra  est  un  véritable  mélodrame  ; 
cependant  l'usage  a  j)révalu  d'appeler  meVorframej  certaines  piè- 
ces dialoguées  oîi  la  musique  n'est  employée  que  pour  la  danse 
ou  j)our  annoncer  des  entrées  et  des  sorties  d'acteurs. 

MÉLOMANE,  s.  m.  Amateur  passionné  de  musique.  Le  mélomane 
diffère  du  mélodiste  en  ce  qu'il  aime  la  réunion  de  toutes  les  par- 
ties de  l'art,  au  lieu  que  le  mélodiste  n'aime  que  la  mélodie. 

MÉLOMAjN'IE,  s.  f.  Manie  de  la  musique. 

MÉLOPÉE,  s.  f.  Art  de  la  composition  du  oliant  cliez  les  anciens. 
Cet  art  avait  des  règles  sévères  et  multipliées.  Il  n'y  a  point  de 
mélopée  dans  la  musique  moderne  ,  la  composition  de  la  mélo- 
die élaut  j)resque  entièrement  livrée  aux  fantaisies  de  l'imagina- 
tion. 

MÉLOPLASTE,  s.  m.  Tableau  composé  des  cinq  lignes  delà  por- 
tée, avec  quelques  lignes  additionnelles  (voy.  Portée')  au-dessus  et 
au-dessous.  Ce  tableau  ,  sur  lequel  le  professeur  de  musique  pro- 
mène une  baguette  terminée  jiar  une  petite  boule,  sert  à  repré- 
senter par  une  notation  mobile  des  (liants  qui  sont  cliantés  par 
les  élèves  au  fur  et  à  mesure  que  la  baguette  leur  indique  de  nou- 
veaux sons,  ce  qui  les  dispense  d'apprendre  à  lire  les  signes  ordi- 
naires de  la  musique,  de  connaître  les  clefs  et  tous  les  acces- 
soires de  la  musique  écrite.  Cette  méthode  du  méloplaste  a  été 
inventée  vers  1817  ,  par  Pierre  Galin,  de  Bordeaux. 

MÉNESTRELS  ou  MÉNÉTRIERS.  Musiciens  poètes,  ou  quelque- 
fois simplement  joueurs  d  instrumeus,  qui  allaient,  dès  le  orzième 
siècle,  de  ville  en  ville  et  de  châteaux  en  ch.îteaux,  chantant  et 
s'accompagnant.  Les  rois ,  les  princes  et  les  grands  vassaux  de  la 
couronne  avaient  presque  tous  des  ménestrels  a  leur  service.  Il  y 
a  lieu  de  croire  que  le  nom  de  ménestrel  a  jiassé  dans  la  langue 
française  de  l'anglais  minstiil.  Les  noms  français  par  lesquels  on 
désignait  auparavant   les  musiciens  étaient  troubadours  dans  le 


354  DICTIONNAIRE 

midi  de  \a¥rance ,  trouvères  dans  le  nord,  chanterres,  etc.  Mène' 
/Wer  est  aujourd'hui  pris  en  mauvaise  part;  ce  nom  ne  se  donne 
qu'aux  jo  eurs  d'instruraens  qui  ne  savent  pas  la  musique,  et  qui 
ne  servent  qu'à  faire  danser  dans  les  guinguettes. 

ME]?«UET,  s.  m.  Air  à  trois  temps  d'un  mouvement  modéré  qui 
tire  son  nom  d'une  danse  autrefois  en  usage.  On  appelle  aussi 
menuet  certain  morceau  en  mesure  ternaire  qui,  dans  les  syra- 
])hunies,  précède  ou  suit  Vadagio  ou  Vandanle.  Autrefois  ce  mor- 
ceau avait  à  peu  près  le  mouvement  de  l'air  de  danse  du  même 
nom;  peu  à  peu  ce  mouvement  s'est  accéléré  II  est  en  général 
maintenant  très  rapide;  c'est  à  cause  décela  qu'on  lui  donne  au- 
jourd'liui  le  nom  de  scherzo  (ijadinage),  préférablement  à  relui 
de  menuet.  Le  menuet  ou  scherzo  est  ordinairement  composé  de 
deux  parties,  chacrune  divisée  en  deux  reprises.  La  première 
partie  a  proprement  les  noms  de  menuet  ou  de  scherzo  ^  la  se- 
conde s'appelle  trio  (voy.  ce  mot). 

MERLINE,  s.  f.  Orgue  a  cylindre  qui  sert  à  instruire  les  merles  et 
les  bouvreuils.  Le  son  de  la  merline  est  plus  fort  que  celui  delà 
serinette  qui  est  employée  pour  les  serins  et  les  chardonnerets. 

MERULA.  Ancien  registre  d'orgue  qu'on  appelait  quelquefois  en 
France  cossignol.ll  consistait  en  une  hoîte  d'élain  remplie  d'eau, 
avec  deux  ou  trois  tuyaux  dans  lesquels  l'eau  était  agitée  par  le 
vent;  ce  registre  imitait  le  gazouillement  des  oiseaux.  Il  est  main- 
tenant hors  d'usage. 

MESURE,  s.  f.  Division  du  temps  dans  la  musique  en  un  certain 
nombre  de  parties  égales.  Les  musiciens  considèrent  comme 
unité  de  temps  certains  signes  de  durée  qu'ils  divisent  en  par- 
lies  plus  petites;  mais  la  vérit.il)le  unité  de  durée,  en  musique 
lomme  en  astronomie,  c'est  la  minute  (j)our  la  théorie  de  la 
mesure,  voy.  le  cb.  vi.  Voy.  aussi  Métronome  et  Mouve- 
ment). 

MESURÉ,  part.  Ce  mot  indique  certaines  parties  du  récitatif  qui 
ne  se  disent  pas  librement  et  sans  mesure  comme  le  reste  (voy. 
Récitatif). 

MÉTHODE,  s.  f.  Manière  de  chanter  on  de  jouer  d'un  instrument 
d'après  de  certains  principes  plus  ou  moins  rationnels.  On  dit 
d'un  chanteur  dont  la  voix  est  bien  posée,  dont  la  vocalisation 
est  correcte  et  dont  la  prononciation  est  bien  articulée  ,  qu'il  a 
une  bonne  mélhodi. 


nr.  MUSIQUE.  Séià 

Mktpode,  s.  f.  Se  dit  aussi  du  recueil  de  préceptes  et  de  règles 
propres  à  former  de  bons  chanteurs,  de  bons  instrumentistes, 
ou  de  bons  lecteurs  de  musique,  U  y  a  des  méthudes  pour  cha- 
que instrument,  pour  chaque  partie  de  la  musique. 

MÉTRONOME,  s.  m.  Instrument  propre  à  mesurer  le  temps  mu- 
sical, inventé  par  le  mécanicien  Winckel,  d'Amsterdam,  et  pcr- 
f'ectiouné  par  Maelzel ,  qui  lui  a  donné  son  nom    (voy.  le  ch. 

VI)- 

MEZZA,  MEZZO,  adj.  italien  qui  signifie  demi.  Mezzo  voce,  à 
demi-voix;  mezzo  forte,  à  demi  fort. 

MI.  Nom  de  la  troisième  note  dans  l'ordre  de  l'échelle  musicale  ut , 
ré ,  mi ,  fa,  etc. 

MINEUR,  adj.  Intervalle  de  deux  sons,  plus  petit  d'un  demi-ton 
que  l'intervalle  majeur  de  même  dénomination  (voy.  Majeur), 
Uue  tierce  mineure  renferme  l'intervalle  d'un  ton  et  demi;  une 
tierce  majeure  est  formée  de  deux  tons. 

MINIME,  s.  f.  Signe  de  la  moindre  de  toutes  les  durées  en  notes 
blanches  dans  l'ancienne  musique.  Elle  a\ait  la  forme  de  la  blan- 
che de  la  musique  moderne. 

MINUETTO.  Voy.  Menuet. 

]\I1SE  DE  VOIX ,  en  italien  messa  di  voce.  Art  de  poser  le  son  de 
la  voix  d'une  manière  pure  et  libre,  et  de  régler  la  respiration 
dans  le  chant. 

MIXTE  ,  adj.  Se  dit  des  sons  sur-laryngiens  appelés  communé- 
ment voi.T  de  lele  ou  fausset.  La  voix  mixie  n'existe  presque  pas 
chez  les  femmes,  mais  elle  se  rencontre  chez  presque  tous  les 
hommes,  et  ])articulièrement  dans  la  voix  de  ténor, 

MODE,  s.  m.  Manière  d'être  d'un  ton  (voy.  Ton')  Dans  la  musique 
des  anciens,  il  y  avait  un  assez  grand  nomijire  de  modes  ;  dans  la 
musique  moderne,  il  n'y  en  a  que  deux,  et  le  mot  n'a  pas  la 
même  accejition  Ces  deux  modes  sont  le  majeur  et  le  mineur.  Le 
mode  est  majeur  quand  la  troisième  note  de  la  gamme  (voy.  ce 
mot)  d'un  ton  quclcoucpie  est  à  la  distance  de  deux  tons  de  la 
première,  et  la  sixième  à  l'intervalle  de  quatre  tons  et  demi;  le 
mode  est  mineur  quaud  ces  deux  intervalles  sont  plus  petits  d'un 
demi-ton. 

Mode  était  aussi,  dans  la  notation,  en  usage  depuis  la  fin  du  on- 
zième siècle  jusqu'au  milieu  du  dix-septième,  une  manière  de 
fixer  par  des  signes  la  valeur  relative  des  notes  et  des  silences. 


356  DICTIONNAIRE 

Le  mode  se  marquait  après  la  clef  par  des  cercles  ou  des  demi- 
cercles,  BTec  ou  sans  point  à  leur  centre,  accompagnés  des 
chiffres  2  ou  3,  selou  que  la  mesure  était  binaire  ou  ternaire. 
C'est  de  cet  usage  qu'est  resté  dans  la  musique  moderne  celui 
d'employer  le  Ç  ou  le  (C  pour  indiquer  la  mesure  à  quatre  ou 
à  deux  temps  (voy.  le  §  prem. ,  cli.  vi). 

MODERATO,  adv.  italien,  modéré.  Mouvement  ni  trop  vif  ni  trop 
lent  dans  une  pièce  de  musique. 

M0DUL.4.TI0N ,  s.  f.  Manière  de  changer  de  mode  ou  de  ion  (voy. 
ces  deux  mots),  dans  le  cours  d'une  pièce  de  musique  (voy.,  pour 
plus  de  détails,  le  ch.  ix  ). 

MODULER,  V.  act.  Faire  des  modulations  suivant  de  certaines 
règles. 

MONAULE,  s.  m.  Flûte  à  un  seul  tuyau  qui  était  en  usage  chez 
les  peuples  de  l'antiquité. 

MONFERINE,  s.  f.  Air  de  danse  en  ',  d'un  mouvement  vif  et  gai, 
en  usage  dans  le  Piémont  et  dans  la  Lombardie. 

MONOCORDE,  s.  m.  lusfrument  monté  d'une  seule  corde  dont  on 
v-irie  les  intonations  au  moyen  de  chevalets  mobiles,  et  qui  sert 
à  mesurer  les  proportions  des  intervalles  des  sons. 

MONOLOGUE,  s.  m.  On  donnait  autrefois  ce  nom  aux  scènes  d'o- 
péra comi>osées  de  récitatifs  et  d'airs  où  il  n'y  a  qu'un  seul  ac- 
teur. Ce  terme  n'est  plus  en  usage,  bien  qu'il  n'ait  pas  d'équi- 
valent, et  l'on  se  sert,  selon  les  circonstances,  pour  désigner  les 
monologues  de  musique,  des  noms  de  scène,  cavaline ,  ana  con 
recilalifo  ,  air  de  sortie,  etc.,  etc. 

MONTER,  V.  u.  Se  dit  de  l'effet  par  lequel  un  instrumentiste  ou 
un  chanteur  ])asse  gri.-duellement  des  sons  graves  aux  sons  élevés. 

Monter  est  aussi  manquer  à  la  justesse  des  intonations  en  les 
élevant  au-dessus  du  point  exact  qui  leur  convient,  ou  élever  ce. 
qui  est  trop  bas. 

MONTER  UN  INSTRUMENT.  C'est  le  mettre  en  état  d'être  joué. 
Ainsi,  monter  un  instrument  à  cordes  et  à  archet,  tels  que  le 
violon  et  la  basse  ,  c'est  non-seulement  y  mettre  des  cordes  et 
proportionner  la  grosseur  de  celles-ci,  c'est  aussi  les  garnir  de 
leurs  accessoires,  tels  que  les  chevilles,  le  cordier  ou  le  che- 
valet, et  donner  à  celui-ci  la  courbe  et  l'inclinaison  convenable; 
monter  un  orgue,  c'est  disposer  convenablement  chaque  pièce  du 
mécanisme  dans  un  emplacement  donné. 


DE    ML»  QUE.  3.')7 

MONTER  UN  OPÉRA.  C'est  distriliuer  les  rôles,  faire  les  études 
et  les  ropétitioiis  nécessaires,  et  préparer  les  accessoires  ,  tels  que 
la  mise  en  scène,  les  décorations  et  les  costumes. 

MONTRE,  s.  f.  Jeu  de  l'orgue  dont  les  tuyaux  en  étain  poli  sont 
placés  à  la  façade  de  l'instrument.  La  montre  appartient  à  l'es- 
pèce des  jeux  d;Jlàte  ;  lorsqu  'elle  est  bien  faite  sa  qualité  de  son 
esta  la  fois  douce  et  pénétrante. 

MORCEAU,  s.  m.  Portion  d'un  opéra,  d'une  symphonie,  d'une  so- 
nate, etc.  On  dit  d'un  air,  d'un  andatite  de  symphonie,  d'un  ron- 
deau, d'un  quatuor,  que  ce  sont  de  bi^aiix  morceaux. 

MORDANTE,  en  italien  rnordente.  Ornement  de  la  me'Iodie  com- 
posé de  deux  ou  trois  petites  notes  et  dont  on  peut  Tarier  la 
forme. 

MORENDO.  Mot  italien  qui  signifie  en  mourant  j  c'est-à-dire  en  ra- 
lentissant un  peu  le  mouvement,  et  diminuant  la  force  du  son 
jusqu'au  degré  le  plus  faille. 

MOSSO.  Più  mosso ,  c'est-à-dire  plus  anime,  plus  accéléré  dans  le 
mouvement. 

MOTET,  s.  m  Morceau  de  musique  pour  une  ou  plusieurs  voix, 
avec  ou  sans  accompagnement  d'orgue  ou  d'ordiestre,  composé 
sur  des  paroles  sacrées,  et  destiné  à  être  exécuté  pendant  la 
messe  ou  dans  quelque  autre  cérémonie  de  l 'église. 

MOTIF,  s.  m.  Idée  principale  d'un  morceau  de  musique,  considé- 
rée sous  ses  trois  aspects  de  la  mélodie  ,  de  l'harmonie  et  du  rliy- 
thme.  On  dit  d'un  air,  d'un  duo,  d'un  chœur,  ou  de  tout  autre 
mori-eau  de  musique,  que  le  motif  en  est  heureux  ou  mal  choisi. 
Lorsque  le  morceau  est  com|)osé  de  plusieurs  mouvemens,  cha- 
cun de  ces  mouvemens  a  ordinairement  un  motif  particulier. 

MOTO  (CON),  avec  mouvement ,  c'est-à-dire  avec  une  sorte  de  ra- 
jiidité. 

MOUVEMENT,  s.  m.  Mode  de  vitesse  ou  de  lenteur  d'un  morceau 
de  musique.  Ses  diverses  nuances  s'indiquent  jiar  des  mots, 
comme  adagio,  allegro ,  andanle ,  ou  par  les  signes  dumétronome 
(voy.  ce  mot). 

MOUVEMENT.  Progrès  ascendant  ou  descendant  d'une  basse  ou 

de  toute  autre  partie  de  l'harmonie,  selou  ds  certaines  formes. 

Le  mouvement  relatif  de   deux  parties   s'appelle  mouvement 

semblable  lorsque  ces  parties  montent  ou  descendent  ensemble; 

mouvement    oblique  lorsqu'une    des  jiartie»    monte  on  descend 


358  DICTIONNAIRE 

tandis  que  l'autre  soutient  la  même  note  ;  mouvement  contraire 
quand  une  des  parties  monte  tandis  que  l'autre  desiend. 
MUANCES,  s.  f.  Changemens  du  nom  des  notes  dans  la  solmisa- 
tion  (voy.  te  mot)  du  plain-cbant,  lorsque  le  chant  sort  des  bor- 
nes de  Vhexacorde  (voy.  ce  mot).  Les  chanteurs  ont  pour  règle, 
dans  ces  changemens,  d'appeler  mi /"a,  en  montant,  les  deux  no- 
tes entre  lesquelles  il  y  a  un  demi-ton  ,  et  fa  la ,  en  descendant, 
les  notes  qui  forment  le  même  intervalle,  lorsque  le  mouvement 
descendant  se  prolonge. 
MUE  de  la  voix,  s.  f.  Changement  qui  s'opère  dans  la  voix,  à  l'âge 
de  puberté.  Ce  changement  dans  la  voix  des  hommes  se  fait  en 
substituant  des  sons  graves  et  mâles  aux  sons  aigus  de  la  voix 
enfantine,  de  telle  sorte  que  l'ensemble  de  la  voix  se  trouve 
baissé  d'une  octave  ou  d'une  octave  et  demie.  Chez  les  femmes,  la 
mue  est  presque  insensible,  et  ne  se  manifeste  que  par  une  plus 
grande  intensité  dans  le  timbre  après  qu'elle  a  cessé.  Pendant  la 
mue  jiroprement  dite,  et  dans  le  moment  de  la  crise,  la  voix 
est  rauque  et  l'émission  du  son  |)énil)le,  ou  même  tout-à-fait 
impossiifle.  Il  est  nécessaire  de  suspendre  pendant  cette  crise 
toute  étude  de  chant. 
MURKY,  s.  f.  Ancien  air  de  danse  du  Nord,  à  l'imitation  duquel 

on  a  fait  autrefois  des  p.èces  de  clavecin. 
MUSETTE,  s.  f.  Instrument  qui,  dans  son  état  grossier,  s'appelle 
cornemuse  Çvoj.  ce   mot).  Il  est  composé  d'un  ou  deux  tuyaux 
percés  de  trous  qu'on  boui-he  avec  les  doigts,  d'un   tuyau  |)lus 
^rand  qui  ne  rend  qu'un  son  et  qu'on  appelle  bourdon,  d'une 
espèce  d'outre  en  |)eau  de  mouton  qui  contient  le  vent  et  qui  le 
communique  aux  chalumeaux,  enfin  d'un  petit  tuyau  qui  sert  à 
introduire  le  vent  dans  l'outre.  Cet  instrument  a  été   fort  en 
usage  en  France  vers  le  milieu  du  dix-huitième  siècle. 
Mlsette,  s.  f.  Air  pastoral  qui  tire  son  nom  de  l'instrument  sur 
lequel  on  le  jouait.  11  était  ordinairement  en  mesure  à  f,  d'un 
mouvement  assez  lent,  avec  une  basse  en  pédale  soatenue.  Cette 
espèce  d'air  n'est  plus  guère  eu  usage. 
MUSICAL,  ALE,  adj.  Qui  appartient  à  la  musique,  La  déclamation 

musicale  est  le  récitiitif. 
MUSICALEMENT,  adv.  Conformément  aux  préceptes  de  la  mu- 
sique. 
MUSICIEN,  s.  m.  Qui  sait  la  musique,  qui  sait  chanter  ou  jouer 


DE   MUSIQUE.  359 

d'un  instrument,  qui  compose   (voy.   Chanteur,  Instrumentiste, 
Compositeur). 

MUSICO,  s.  m.  Nom  qu'on  donnait  autrefoi»  aux  castrats  et  qu'on 
donne  encore  quelquefois  aux  femmes  qui  chantent  en  voix  de 
contralto  (voy.  ce  mot). 

MUSIQUE,  s.  f.  Résultat  de  la  combinaison  des  sons  dont  l'objet 
est  d'émouvoir  l'nme  de  manières  diverses  et  de  plaire  à  l'o- 
reille. 

La  musique,  considérée  comme  art,  renferme  plusieurs  parties 
dont  les  principales  sont:  Wnvention  formant  un  tout  mélodique, 
harmonique  et  rhythmique  ;  la  technologie  ,  ou  l'art  d'écrire  et 
de  lire  les  combinaisons  des  signes;  Vexécution,  ou  l'art  de 
chanter  et  de  jouer  des  instrumens. 

MUSIQUE  D'ÉGLISE.  Musique  écrite  sur  les  paroles  de  la  Messe, 
des  Vêpres,  des  Complies,  des  Antiennes,  Hymnes,  Lit-inies, 
Psaumes,  etc.  Il  y  a  de  la  musique  d'église  pour  les  voix  seules, 
il  y  en  a  avec  accompagnement  d'orgue  et  avec  orchestre.  Le 
plam-chant  (voy.  ce  mot)  est  la  musique  primitive  de  l'Eglise. 

MUSIQUE  DRAMATIQUE.  C'est  celle  qui  est  destinée  au  théâtre 
(voy.  Mélodrame,  Opéra,  Opéra-comique,  Opéra-boujj^e).  On  dit 
quelquefois  que  la  musique  insti umentale ,  et  même  la  musique 
d  église,  est  dramatique  lorsqu'elle  exprime  des  affections  pas- 
sionnées de  l'ame  et  lorsqu'elle  fait  naître  de  vives  émotions. 

MUSIQUE  INSTRUMENTALE.  Celle  qui  est  destinée  aux  instru- 
mens. 

MUSIQUE  MILITAIRE.  Marches,  pas  redoublés  (voy.  ces  mots) 
écrits  pour  être  joués  sur  des  iustrumens  à  vent  et  de  percussion 
à  la  télé  des  troupes. 

MUSIQUE  VOCALE.  Musique  écrite  pour  les  voix. 

MUTATION  (JEUX  DE).  On  ai)pelle  ainsi  les  registres  de  l'orgue 
dont  les  tuyaux  ne  sont  point  accordés  au  diapason  des  jeux  de 
fonds  et  qui  sonnent  ou  la  tierce,  ou  la  quarte,  ou  la  quinte  de 
ceux-ci,  et  quelquefois  plusieurs  de  ces  intervalles  à  la  fois  (voy. 
Corntt,  Cjmbals,  Fourniture,  Larigot,  Nazard,  Tierce,  etcVoy. 
aussi  (h.  XV  ). 

MUTATION,  s.  f.  (voy.  Muances). 


860  incTioim\iSK 


N 


N AZARD,  s.  m.  Jea  d'orgue  qui  tire  son  nom  de  sa  qualité  de  son 
nazillarde.  Il  sonne  la  quinte  du  prestant  (voy.  ce  mot),  c'est 
pourquoi  on  lui  donne  quelquefois  le  nom  de  quinte.  Le  nazard 
est  de  l'espèce  de  jeux  d'orgues  qu'on  appelle  jeu j-  de  mutation. 

NATUREL.  Adjectif  dont  on  se  sert  souvent  en  musique  d'une 
manière  impropre  en  ajipelant  ton  naturel  d'une  note  l'état  de 
cette  rote  lorsqu'elle  n'est  accompagnée  d'aciin  dièse  ni  bémol. 
On  trouve  d.ins  la  plupart  des  méthodes  de  musique  que  le  dièse 
hauise  la  note  d  un  demi-ton,  que  le  bémol  la  baisse  d'autant,  et 
que  le  bécarre  la  remet  dans  son  ton  naturel.  L'erreur  est  évidente, 
car  il  est  naturel  à  une  note  d'être  accompagnée  d'un  dièse  ou 
d'un  bémol  lorsque  le  ton  et  le  mode  l'exigent. 

NEUVIEME,  s.  f.  Intervalle  de  deux  notes  dont  la  plus  haute  est 
à  l'octave  supérieure  de  la  seconde.  La  neui'ilme  peut  être  ma- 
jeure on  mineure;  en  l'un  ou  l'autre  cas  elle  est  une  dissonance 
(voy.  Dissonance^ 

NICOLO,  s.  m.  IVom  d'une  ancienne  sorte  de  hautbois  qui  était  à 
la  quinte  inférieure  du  hautbois  ordinaire  et  qui  n'est  plus  en 
usage. 

NOCTURNE,  s.  m.  ÎS'om  qui  dans  l'origine  se  donnait  à  de  certaines 
pièces  qu'on  jouait  la  nuit  dans  des  sérénades  (voy.  ce  mot),  et 
qui  ensuite  a  passé  à  de  petits  morceaux  à  deux,  trois  ou  quatre 
■voix,  mais  plus  communément  à  deux.  Le  style  du  nocturne  est, 
comme  celui  de  la  romance,  doux  et  gracieux.  On  écrit  ordinai- 
rement ce  genre  de  morceau  pour  un  soprano  et  nn  ténor,  ou 
pour  deux  soprayi. 

NOELS,  s.  m.  Mélodies  simples  de  quelques  cantiques  qui  se  chan- 
tent à  l'église  pendant  les  fêtes  de  jSoèl.  Ces  vieux  airs  sont  ori- 
ginaires de  la  Provence  et  de  la  Bourgogne.  Les  Français  aiment 
beaucoup  les  Noèls,  et  les  organistes  en  jouent  souvent  en  dis- 
posant les  registres  de  leur  instrument  de  manière  à  imiter  la 
musette;  les  plus  habiles  les  varient  et  y  introduisent  des  diffi- 
cultés. Les  IS'oèls  de  ûaquin  ont  eu  autrefois  de  la  réputation. 

NOIRE,  s,  f.  Figure  de  note  qui  a  cette  forme  ]• ,  et  qui  représentt 


DK  MUSIQtJK.  3 (il 

la  diii'ée  tle  SOU  égale  au  quart  de  la  ronde  et  à  la  moitié  de  la 
Itlanclie. 

NON  TROPPO.  Expression  italienne  qui  se  joint  aux  indications 
de  moiiTeinent,  de  vitesse  ou  de  lenteur,  ou  aux  modifications 
de  force  et  de  douceur.  Ainsi  Non  troppo  allegro  veut  dire  pas 
trop  vite;  non  troppo  adagio,  pas  trop  leut;  non  troppo  forte,  pas 
trop  fort. 

NOTATION.  Système  d'écriture  de  la  musique  par  des  caractères 
spéciaux. 

NOTE,  s.  f.  Caractère  de  musique  qui  indique  à  la  fois  le  son  qu'il 
faut  produire  et  la  durée  de  ce  son. 

Note  est  pris  aussi  souvent  par  abstraction  comme  le  nom  d'un 
son  qui  peut  être  représenté  par  un  signe;  c'est  ainsi  qu'on  dit 
qu'il  y  a  sept  notes  dans  la  musique  qui  sont  ut,  ré,  mi,  fa,  sol, 
ta,  si.  Dans  ce  ca^note  est  S3'nonyiTie  de  son. 

NOTE  SENSIBLE.  On  appelle  ainsi  la  septième  note  d'une  gamme, 
lorsque,  par  de  certaines  combinaisons,  elle  est  appelée  impé- 
rieusement à  monter  sur  la  huitième  appelée  tonique  (  voy.  ce 
mot).  Elle  fait  pressentir  cette  tonique,  elle  en  fait  sentir  la  pré- 
sence future;  de  là  lui  vient  le  nom  de  note  sensible. 

NOTER,  V.  a.  Action  d'écrire  la  musique  avec  les  notes  et  les  autres 
laractèies  nécessaires  pour  l'intelligence  de  la  pensée  du  com- 
positeur. On  se  sert  plus  souvent  du  verbe  copier,  mais  ce  terme 
est  impropre  à  l'égard  des  musiciens  qui  ne  copient  pas  les  ou- 
vrages des  autres,  mais  qui  éirivent  ceux  qu'ils  inventent.  Noter 
est  pour  ce  cas  le  mot  convenable. 

NOTES  DE  PASSAGE.  On  appelle  de  ce  nom  les  notes  qui  ne 
font  point  partie  de  l'harmonie  et  qui  ne  sont  que  des  points  ia- 
termédiaires  entre  les  notes  essentielles  des  a<'cords. 

NOTEUR,  s.  m,  On  appelait  ainsi  autrefois  les  musiciens  qui  étaient 
employés  dans  les  chapelles  à  écrire  la  musique  qu'on  distribuait 
aux  exécutans.  Ce  nom  n'est  plus  eu  usage;  on  l'a  remj)lacé  par 
celui  de  copiste  (voy.  ce  mot). 


0 


OCLÏGE.  Adjectif  qui  indique  qu'on  ne  peut  pas  refranch*  r  cer- 
taines choses  dans  l'exécution   de   la    musique;  ainsi  une  /laitte 


362  DICTIONNAIRE 

obligée  est  uae  partie  de  <-'hant  ou  d'instrument  nécessaire,  qui 
n'est  point  de  remplissage,  ou  qu"on  ne  peut  exécuter  à  volonté 
(al  libitum).  Par  syncope  on  appelait  autrefois  récitatif  obligé 
celui  dont  l'accompagueinent  devait  être  exécuté  par  tout  l'or- 
chestre au  lieu  de  l'être  seulement  par  des  accords  plaqués  sur 
le  clavecin.  Cette  expression  ne  s'emploie  plus  que  rarement, 
OCTAVE,  s.  f.  Intervalle  qui  renferme  cinq  tons  et  deux  demi- 
tons,  et  au-delà  duquel  les  sons  se  reproduisent  dans  une  dis- 
position semblable  à  celle  des  div-ers  degrés  contenus  dans 
l'octave.  L'octave  est  considérée  comme  la  plus  parfaite  des  cori' 
sonnances  (voy.  ce  mot).  Les  diverses  modifications  de  l'octave 
s'appellent  octave  juste,  octave  diminuée,  octave  augmentée. 

OCTAVE  ou  OCTAVIN.  Petite  flûte  qui  sonne  l'octave  de  la  flilte 
ordinaire.  Les  Italiens  appellent  cet  instrumeut^auti'no  et  quel- 
quefois/j/cco/o. 

OCTAVIER,  V.  n.  Lorsque  le  souffle  s'introduit  avec  tro])  de  force 
dans  un  instrument  a  vent,  au  lieu  de  produire  le  son  que  vou- 
lait faire  entendre  l'exécutant,  il  donne  l'octave  supérieure; 
c'est  ce  qu'on  aj)pelle  octavier.  Il  en  résuite  un  effet  désagréable 
à  l'oreille.  Ce  n'est  que  par  un  long  exercice  que  les  instru- 
mentistes j)arviennent  à  ne  pas  octavier.  La  clarinette  n'octavie 
pas,  elle  fait  entendre  lu  quinte  au  lieu  de  l'octave  lorsqu'on 
force  le  vent. 

ODEOPHONE,  s.  m.  Instrument  inventé  à  Londres  par  un  Vien- 
nois nommé  Vanderburg.  Ce  n'était  qu'une  modification  assez 
bien  imaginée  du  clavi-cylindre  de  Chiadin.  Le  son  se  tirait  de 
petits  morceaux  de  métal,  au  moyeu  d'un  clavier  ou  d'un  cy- 
lindre. 

OEUVRE,  s.  m.  Ce  mot,  dont  on  se  sert  pour  désigner  les  ouvra" 
ges  de  musique  d'un  auteur,  est  masculin  en  français.  On  dit 
l'œuvre  IV  de  Mozart,  l'œuvre  LV  de  Beethoven.  Cette  indica- 
tion des  ouvrages  par  numéros  de  production  est  commode 
et  f.icile. 

ONZIÈME,  s.  f.  On  appelait  autrefois  de  ce  nom  le  redoublement 
de  la  quarte  à  l'octave,  et  l'on  appelait  accord  de  omième  un 
accord  qu'on  désigne  maintenant  par  le  nom  d'accord  de  quarte 
et  de  quinte. 

OPÉR.i,  s.  m.  Drame  eu  musique  (voy.  l'Histoire  abrégée  de  l'o- 
piraj  cliap.   xvii  ).  L'opéra    italien  se  divise  en  trois  genres  : 


DE   MUSIQUE.  363 

Yopéra  tèrieux,  le  semi-sèrieux  et  le  bouffe.  L'opéra  français  est 
de  deux  genres  :  le  grand  opè'V,  chaîné  d'un  bout  à  l'autre, 
et  Vovéi a-comique  ,  où  les  acteurs  [jurlent  et  chantent  tour  à 
tour. 

Oi'KRA,  s.  m.  Se  prend  souvent  dans  le  sens  de  spectacle  et  même 
de  s;ille  où  l'on  joue  des  opéras.  Ainsi  quand  on  dit  qu'on  va  à 
V Opira,  cela  veut  dire  qu'on  se  rend  dans  la  salle  de  l'Opéra, 
mais  non  à  tel  ou  tel  autre  ouvrage  qu'on  doit  représenter. 

OrÉRA,  mot  italien  qui  signifie  auvre,  et  par  lequel  on  désigne 
le  numéro  des  ouvrages  d'un  musicien. 

OPÉRA-BALLET.  Spectacle  mêlé  de  chant  et  de  danse  qui  fut  fort 
à  la  mode  en  France  jusqu'en  1775  et  qui  est  maintenant  à  peu 
près  oublié. 

OPÉRETTE,  s.  f.  Mot  qui  a  passé  de  la  langue  allemande  dans  le 
français,  et  par  lequel  on  désigne  de  petits  opéras  sans  impor- 
tance sous  le  rapport  de  l'art.  Ces  opéras  s'appellent  en  Italie 
des  farses. 

OPHICLEIDE,  instrument  à  vent  qui  peut  être  considéré  comme 
Yalto,  le  ténor  ou  la  basse  de  la  tompette  à  clefs,  selon  les  di- 
mensions qu'on  lui  donne. 

ORATORIO,  s.  m.  Drame  en  musique  dont  le  sujet  est  pris  dans 
la  Bible  ou  d.ins  les  légendes  des  saints.  L'invention  de  l'oratorio 
est  attriliuée  à  saint  Philippe  de  INéri,  fondateur  de  la  congré- 
gation de  l'Oratoire,  dans  la  première  moitié  du  seizième  siècle. 

ORCHESTRE,  s.  m.  Se  disait  oiiginairement  du  lieu  où  les  musi- 
ciens étaient  réunis  pour  l'exécution  de  la  musique,  mais  ce  mot 
se  prend  plus  souvent  aujonrd'jiui  dans  l'acception  de  la  réunion 
même  de  ces  musiciens  et  de  l'effet  qu'ils  jiroduisent.  On  dit 
qu'un  orchestre  est  bon  ou  mauvius  selon  que  les  musiciens  qui 
exécutent  la  musique  la  rendent  bien  ou  mal  (voy.  sur  la  com- 
])ositicu  et  les  qualités  des  orchestres,  chap.  xix). 

ORCHES TRINO,  s.  m.  Nom  donné  par  M.  Poulleau,  de  Paris,  en 
i8o8,  à  un  piano  à  archet  de  son  invention,  lequel  imitait  le 
viohm,  la  viole  d'amour  et  le  violoncelle. 

OPiCHES TRION,  s.  m.  Nom  de  deux  instrumens  à  clavier  qui  ont  été 
inventés  vers  la  fin  du  dix-huitième  siècle.  Le  premier  est  unor<Tiie 
portatif  composé  de  quatre  chiviers  ,  chacun  de  63  touches  ,  et 
d'un  clavier  de  pédales  «le  3i)  touches.  L'ensemble  de  l'instru- 
ment présente  un  cube  de  g  pieds.  Cet  instrument  fut  construit 


364  DICTIONNAIRE 

en  Hollande  sur  le  jilau  qui  en  fut  donné  par  l'abljé  Voglcr,  et 
fut  rendu  public  au  mois  de  novembre  17S9  à  Amsterd.im.  Ou 
y  trouve  un  mécanisme  de  crescendo  et  de  decrescendo,  et  l'in- 
tensité de  ses  sons  était  semblable  à  celle  d'un  orgue  de  16  pieds. 
L'autre  instrument  du  même  nom,  inventé  par  Thomas-Antoine 
KuDZ,  à  Prague,  en  1796,  était  un  piano  uni  à  quelques  registies 
d'orgue. 
OREILLE,  s.  f.  Est  pris  souvent  pour  le  sens  de  l'ouïe  à  l'égard 
des   perceptions  de  la  musique.  Avoir  de   l'oreille,  c'est   avoir 
l'ouie  sensible  et  capable  d'appréi  ier  les  moindres  différences 
d'intonation  et  de  mesure.  Avoir  l'oreille  fausse,  c'est  être  privé 
de  cette  senbil)ilité  d'organe. 
ORGANISTE.  Artiste  qui  joue   de  l'orgue  (voy.  cli.  xix,  quel- 
ques renseignemens  sur  les  organistes  les  plus  célèbres  et  sur 
la  difficulté  de  jouer  de  l'orgue). 
ORGA?<0-LYRICO!X.  Instrument  inventé  à  Paris,  en  1810,  par  uu 
français  nommé  M.  de  Saint-Pern.  Sa  forme  était  celle  d'un  se- 
crétaire à  cylindre;  il  contenait  un  piano  ordinaire  autour  duquel 
se  groupaient  quelques  instruraeus  à  vent. 
ORGUE,  s.  m.  au  sing.  et  f.  au  plur.  Le  plus  grand  de  tous  les 
instrumens,  composé   du  mécauisme  d'un  ou  de  plusieurs  cla- 
viers  et    de  plusieurs  rangées  de  tuyaux  qui  vibrent  au  moyen 
de  l'air  fourni  par  des  soufflets  (  voy.  chap.  xv,  l'analyse  abré- 
gée de  la    construction  de  l'orgue  et  l'indication  des  meilleurs 
facteurs  de  cet  instrument). 
ORGUE  A  CYLirSDRE.  Instrument  du  genre  de  l'orgue  ordinaire, 
mais  dans  lequel  un  cylindre,  armé  de  petits  morceaux  de  métal, 
remplace  les  doigts  de  l'organiste  pour  faire  mouvoir  ce  clavier. 
Ce  cylindre  est  mû  par  une  manivelle  ou  par  un  mouvement 
d'borlogerie.  On  donne  souvent  les  noms   d'orgue  d  Allemagne 
ou  (Vorgue  de  Barbarie  à  l'orgue  à  cylindre. 
ORGUE  HYDRAULIQUE.  Instrument  dont  il  est  parlé  par  quel- 
ques auteurs  de  l'antiquité;  mais  les  descriptions  qu'ils  en  ont 
données  sont  trop  obscures  pour  qu'on  puisse  savoir  quels  étaient 
son  mécanisme  et  sa  forme;  on  sait  seulement  que  les  sons  y 
étaient  produits  au  moyen  de  l'eau. 
ORPHEOREON.  Instrument  de  la  famille  des  lutLs,  armé  de  huit 

cordes  de  métal.  Il  n'est  plus  en  usage. 
ORPHICA.  Instrument  à  clavier  inventé  par  M.  RuUig.  Les  touches 


1)K   MISIQUE.  365 

ont  si  peu  de  largeur  que  cet  instrument  ne  peut  être  joué  que 
par  des  mains  d'enfiint. 
OUVERTl'RK,  s.  f.  Symphonie  qui  prcii'de  le  commencement  de 
l'action  tliéàtrjle  d'uu  opéra  on  d'un  ballet. 


P.  Cette  lettre,  ])ar  abréviation,  signifie /jiano,  c'est-à-dire  doux. 

PANAULON.  Flûte  traversiire  qui  descend  jusqu'au  sol  du  violon, 
imaginée  par  M.  Trexler,  de  Vienne. 

PANDORE,  s.  f.  Instrument  à  cordes  dont  le  chevalet  était  oblique 
et  dont  la  forme  avait  quelque  analogie  avec  celle  du  cistre. 
Les  cordes  se  ])iu<'aieat  avec  une  plume.  Cet  instrument  est 
maintenant  hors  d'usage. 

PANDURA,  s.  f.  Instrument  dont  on  se  sert  dans  le  royaume  de 
Naples.  Il  est  peu  différent  de  la  mandoline,  mais  il  est  plus 
grand  ;  il  est  armé  de  huit  cordes  de  métal  qui  rendent  une  har- 
monie agréable  et  qu'on  pince  avec  une  plume. 

PAN-MELODICON.  Instrument  inventé,  en  1810,  par  M.Xeppich, 
à  Vienne.  Il  consiste  en  un  cylindre  conique,  mû  par  une  roue, 
quimet  envil)ration  de  petits  morceaux  de  métal  courljés  à  angles 
droits,  lesquels  sont  touchés  légèrement  au  moyen  d'un  clavier. 

PAISTALO^X ,  s.  m.  Instrument  à  cordes  du  genre  du  tympanon, 
inventé  par  un  musicien  allemand  nommé  Pantaleon  Hebeustreit, 
au  commencement  du  dix-huitième  ;itcle.  Cet  instrument  avait 
l'étendue  du  clavecin  et  était  monté  de  deux  rangs  de  cordes,  les 
unes  en  métal,  les  autres  en  boyaux.  Ses  sons  étaient  majestueux, 
surtout  dans  la  basse. 

PAPIER  RÉGLÉ.  On  appelle  de  ce  nom  le  papier  sur  lequel  des 
portées  de  cinq  lignes  sont  tracées  à  de  (certaines  distances  par 
des  procédés  mécaniques,  pour  y  écrire  la  musique.  On  appelle 
papier  à  la  française  celui  qui  est  réglé  dans  sa  hauteur,  et  papier 
à  l  italienne  celui  qui  est  oblong. 

PARODIE,  s.  f.  Signifie  littéralement  imitation  burlesque  ,  mais  on 
doune  quelquefois  ce  nom  à  des  morceaux  de  musique  dont  on 
a  cliangé  les  paroles  ou  même  des  pièces  instrumentales,  dont 

3i. 


366  DICTIONNAIRE 

on  a  fait  des  airs,  des  duos,  etc.  Autrefois  on  appelait  impro- 
prement/)arorfi«T  les  traductions  d'opéras. 

PARODIER,  V.  a.  Faire  des  parodies  eu  changeant  la  nature  pri- 
mitive des  compositions  musicales. 

PARTIE,  s.  f.  On  appelle  de  ce  nom  la  portion  de  musique  appar- 
tenant à  chacune  des  voix  ou  à  chacun  des  instrumens  qui  con- 
courent à  former  l'ensemble  d'un  morceau  de  musique.  Ainsi, 
quand  on  dit  une  partie  de  hautbois ,  de  cor,  de  violon,  ou  de 
ténor,  de  soprano,  on  parle  de  la  musique  destinée  à  ces  instru- 
mens ou  à  ces  voix  pour  l'exécution  d'une  symphonie,  d'une 
ouverture,  d'un  chœur,  etc. 

Partie,  s.  f.  Est  aussi  la  portion  d'un  morceau  de  musique  séparée 
d'un  autre  par  une  double  barre  verticale  accomjiagnée  de 
])oints  qui  indiquent  l'obligation  de  recommencer  chacune  des 
deux  parties.  Presque  tous  les  premiers  morceaux  des  sonates  , 
des  symphonies,  des  quatuors,  etc.,  sont  coupés  eu  deux  parties. 

PARTIMENTI,  s.  m.  pi.  Nom  italien  de  certains  exercices  préparés 
pour  l'étude  de  l'accompagnement  et  de  l'harmonie,  dont  on 
fait  usage  dans  les  écoles  d'Italie.  Ces  exercices  sont  composés 
de  parties  de  basse  où  les  accords  sont  indiqués  p^r  des  chiffres 
placés  au-dessus  des  notes,  et  ces  accords  doivent  être  joués 
par  la  main  droite  des  élèves  pendant  qu'ils  jouent  la  liasse  avec 
la  gauche.  Il  y  a  plusieurs  recueils  de  ces  exercices  qui  sont  de- 
venus classiques. 

PARTITION,  s.  f.  Réunion  de  toutes  les  parties  instrumentales 
et  vocales  qui  entrent  dans  la  composition  d'un  morceau  de 
musique.  Toutes  ces  parlies  sont  superposées  sur  la  même  page 
de  papier  réglé  afin  que  le  compositeur  puisse  juger  de  l'effet 
de  sou  ouvrage  en  l'écrivant,  et  que  le  chef  d'ori.-hesfre  puisse 
saisir  d'un  coup  d'oeil  l'intention  de  l'auteur.  Les  voix  et  les 
instrumens  sont  disposés  dans  la  partition  selon  leur  degré  d'é- 
lévation ou  de  gravité,  les  plus  aigus  aux  lignes  supérieures,  les 
moyens  au  milieu,  et  les  ])lus  graves  aux  lignes  inférieures.  Il 
y  a  cependant  des  partitions  où  cet  ordre  rationnel  n'est  pas 
suivi. 

P.iRTiTioiN',  S.  f.  Est  aussi  une  certaine  règle  d'après  laquelle  les 
accordeurs  d'orgue  et  de  piano  accordent  ces  instrumens.  Cha- 
cun a  sa  méthode  à  cet  égard  ;  la  meilleure  est  celle  qui  permet 


DE  MUSIQUE.  3G7 

de  comparer  le  plus  souveut  et  le  plus  sûrement  les  différens 
sous  qu'où  accorde  entre  eux  avec  celui  qui  a  servi  de  point  do 
dé|>art,  parce  que  celle-là  permet  de  rectilier  avec  promptitude 
les  erreurs  de  l'oreille. 

PAS-REDOUBLK,  s.  m.  Sorte  de  marche  militaire  d'un  mouvement 
plus  rapide  que  la  marche  proprement  dite.  Le  pas  redoublé  est 
toujours  en  mesure  à  4  ouà^*. 

PASSACAILLE,  s.  f.  Air  de  danse  d'un  caractère  un  peu  mélan- 
colique et  d'un  mouvement  modéré,  dont  on  faisait  autrefois 
beaucoup  d'usage  dans  les  opéras  et  les  ballets,  mais  qui  est 
tuaintenaut  passé  de  mode. 

PASSAGE,  s.  m.  Ce  mot  a  plusieurs  acceptions:  dan>  l'une  il  est 
pris  comme  synonyme  de  phrase  :  ce  passage  ett  joJi,  je  n'aime 
point  ce  passage  ;  dans  l'autre  il  signifie  un  trait  de  notes  rapides, 
par  exemple  une  gamme  d'un  mouvement  accéléré. 

PASSEl'IED,  s.  m.  Air  de  danse  à  trois  temps  qu'on  employait  au- 
trefois dans  les  ballets  et  les  opéras.  Il  n'est  plus  en  usage. 

PASTICHE,  en  italien  PASTICCIO,  s.  m.  Opéra  formé  de  la  réu- 
nion de  morceaux  de  musique  pris  dans  plusieurs  autres  ouvrages 
dramatiques.  Ou  faisait  autrefois  de  ces  pastiches  en  Italie  lorsque 
l'opéra  préparé  pour  la  saison  dans  une  ville  ne  réussissait  pas. 
Presque  toujours  ils  étaient  bien  accueillis  parce  que  chaque 
chanteur  y  faisait  introduire  les  morceaux  qui  étaient  les  plus 
favorables  à  son  talent. 

PASTORALE,  s.  f.  Opéra  dont  les  personnages  sont  des  bergers. 
Ce  genre  d'ouvrage  a  eu  autrefois  de  la  vogue,  mais  la  fadeur  du 
lang.ige  des  amans  qui  en  étaient  les  héros  a  fait  bannir  depuis 
ces  pièces  de  la  scène.  On  donne  quelquefois  aussi  le  nom  de 
pastorales  à  de  certains  morceaux  de  musique  d'un  style  naïf  et 
champêtre.  On  connaît  la  sjniplioide pastorale  de  Beethoven,  chef- 
d'œuvre  du  genre. 

PATTE  A  REGLER,  s.  f.  Petit  instrument  de  cuivre,  composé  de 
cinq  rainures  également  espacées,  attachées  à  un  manche,  au 
moyeu  duquel  on  trace  d'un  seul  coup  les  cinq  lignes  qui  for- 
ment la  portée  de  musique. 

PAUSE,  s.  f.  On  donne  ce  nom  à  certain  silence  de  la  musique  et 
au  signe  de  ce  silence  (voy.  ch.  vi  ). 

PAVA?(E,  s.  f.  Air  de  danse  qui  fut  fort  à  la  mode  dans  les  sei- 


368  DICTIONNAIRE 

zième  et  dix-septième  siècles.  Cet  air  est  originaire  «l'Espagne  ; 
il  était  d'un  caractère  grave  et  d'un  mouvement  lent. 

PAVILLON,  s.  m.  Partie  inférieure  et  évasée  de  certains  instrumens 
à  vent,  tels  que  le  hautl)ois,  la  clarinette,  la  trompette  et  le  cor. 

PAVILLON  CHINOIS.  Instrument  de  percussion  dont  ou  se  sert 
dans  la  musique  militaire.  Il  est  composé  d'une  sorte  de  chapeau 
conique  en  cuivre  auquel  sont  attachés  des  grelots  et  des  son- 
nettes, et  qu'on  agite  au  moyen  d'un  long  bâton  auquel  l'appareil 
est  attaché. 

PECTIS.  Instrument  à  cordes  des  anciens  Grecs,  dont  l'invention 
est  .Ttlril)uée  à  Snpho. 

PÉDALES,  s.  f.  Touches  du  clavier  qui  est  jdacé  aux  j)ieds  de 
l'organiste;  elles  servent  à  faire  entendre  les  notes  de  basse 
pendant  que  les  mains  exécutent  d'autres  parties  sur  les  claviers 
supérieurs  (voy.  ch.  xix  ). 

Les  pùdalts  sont  aussi  des  leviers  de  cuivre  qui  servent  à 
élever  d'un  demi-ton  les  cordes  de  la  harpe  simple,  ou  d'un 
ton,  à  volonté,  dans  les  harpes  à  double  mouvement  (voy.  ch. 
x.x). 

Enfin  les  pédales  du  piano  sont  des  moteurs  de  certains  mé- 
canismes au  moyen  de  quoi  on  modifie  à  volonté  la  qualité  de 
sou  de  l'instrument,  soit  en  levaut  les  étoulfoirs,  soit  en  faisant 
mouvoir  le  clavier  et  portant  les  marteaux  sur  une  ou  sur  deux 
cordes,  soit  enfin  en  interceptant  les  vibrations  des  cordes  par 
l'attoucliement  de  morceaux  de  buffle,  etc. 

PÉDALE,  s.  f.  Note  soutenue  à  la  basse  ou  à  toute  autre  partie, 
sur  laquelle  plusieurs  accords  se  succèdent  sans  être  même  en 
rapport  direct  avec  elle  (voy.  ch.  x). 

PilRCUSSION  (instrumens  de).  Ce  sont  ceux  qui  résonnent  lors- 
qu'ils sont  frappés  (voy.  ch.  xv  ). 

PERDENDOSI  (en  se  perdant).  Ce  mot  italien  indique  que,  dans 
l'exécution,  le  son  doit  diminuer  graduellement  d'intensité  jus- 
qu'à ce  qu'il  devienne  presque  imperceptible. 

PERIODE,  s.  f.  Phrase  musicale  d'un  sens  complet,  qui  se  divise 
en  plusieurs  autres  phrases  d'un  certain  nomiire  de  mesures  uni- 
formes et  régulières  (voy.  ch.  ix). 

PERPETUEL  (Canon).  Canon  qui  n'a  point  de  fin  et  qu'on  peut 
Joujours  recommencer  (voy.  ch.  xii). 


DK   MUSIQUE.  369 

PHRASE,  5.  f.  Fragment  de  mélodie  qui  a  ordinairement  pour 
fragment  eorrespoudaut  une  autre  phrase  d'un  nombre  égal  de 
mesure,  de  même  rliytlime  et  de  même  <-araetère  (voy.  cli.  ix  ). 

PHRASKR,  V.  a.  C'est  donner  à  cliaque  phrase,  dans  l'exécution 
de  la  musique,  le  raraetère  eouvenable,  et  l'a(.'compagncr  de  tout 
ce  qui  peut  en  augmenter  l'ell'et. 

PHVSUARMOMICA,  s.  m.  Instrumenta  lames  métalliques  qui  vi- 
brent par  l'action  de  l'air  aliuicuté  par  un  soultlet.  Cet  instru- 
ment a  été  inventé  par  M.  Antoine  Hackel,  de  Vienne  (v.  ch.  xv  ). 

PIANISSIMO,  très  doux.  Ce  mot  se  marque  en  al^régé  par  un  dou- 
ble PP  dans  la  musique. 

PLANISTE,  Musicien  qui  joue  du  piano. 

PIANO,  doux.  Ce  mot  se  marque  par  abréviation,  c'est-à-dire  par 
un  P  dans  la  musique.  11  indique  la  nécessité  d'adoucir  les 
siins. 

Piano,  s.  m.  Instrument  à  clavier  (voy.  chap.  xv). 

PINCER,  V.  a.  Se  dit  de  l'action  de  jouer  des  instrumens  dont  les 
lordes  se  pincent  avec  les  doigts. 

PIQUE,  ËE;  adj.  Le  coup  d'archet  piqué  est  celui  par  lequel  on  dé- 
tache les  notes  avec  sécheresse;  les  noies  piquées  sont  celles  qui 
sont  surmontées  de  points  ronds  ou  allongés,  et  qu'on  rend 
d'une  manière  sèche  et  non  soutenue. 

PIZZICATO, /Ji'nce.  Ce  mot  se  place  quelquefois  sous  les  parties  de 
violon,  de  viole  et  de  basse  pour  faire  connaître  que  les  cordes, 
au  lieu  d'être  jouées  avec  l'archet,  doivent  être  pincées  avec  les 
doigts. 

PLAGAL  ,  adj.  Se  dit  d'une  c'ertaine  forme  des  tons  du  plain- 
chant,  qui  est  opposée  à  la  forme  des  tons  authentiques  (voy. 
ce  mot  ). 

PLAIN-CHANT,  s.  m.  Chant  des  antiennes,  des  hymnes,  des  psau- 
mes, des  répons,  des  proses  et  de  quelques  autres  pièces  de  l'office 
des  églises  catholiques.  Ce  chant  n'est  pas  mesuré,  et  sa  tonalité 
diffère  en  plusieurs  j)oints  de  la  musique  profane.  Dans  le  qua- 
trième siècle  de  l'èie  chrétienne,  saint  Ambroise,  archevêque  de 
Milan,  donna  au  plain-chant  sa  forme  primitive  en  se  servant 
pour  cela  de  quelques  anciennes  mélodies  grecques.  Plus  tard, 
le  pape  Grégoire-le-Grand  réforma  ce  premier  plain-chant  et 
lui  donna  le  caractère  qu'il  a  conservé  jusqu'ici  sous  le  nom  de 


370  DICTIONNAIRE 

chant  grégorien.^ ers  le  milieu  du  dix-huitième  siècle,  un  plain- 
cbaDt  plus  orné  fut  introduit  dans  les  églises  de  Paris  et  prit  le 
nom  de plan-ckant  parisien.  Chaque  ordre  monastique  a  eu  aussi 
son  plain-cbant  particulier. 

La  tonalité  du  plain-chant  diffère  de  la  tonalité  de  la  musique 
ordinaire  en  ce  qu'il  ne  se  compose  pas  d'un  mode  mineur  et 
d'un  mode  majeur.  Elle  se  divise  en  huit  tons  dont  quatre  sont 
appelés  aulhentiques ,  et  quatre  plagaux.  Les  tons  authentiques 
sont  ceux  dont  la  dominante  est  à  la  quinte  supérieure  de  la  to- 
nique ;  les  plagaux  sont  ceux  dont  la  dominante  est  à  la  quarte 
supérieure  de  la  tonique. 

PLA>'CHE,  s.  f.  On  appelle  de  ce  nom  les  lames  d'étain  ou  de 
cuivre  sur  lesquelles  ou  grave  la  musique.  Il  y  en  a  de  deux  for- 
mats. Les  plus  petites  se  nomment  planches  d'opéra,  \es  plus 
grandes  planches  de  symphonie.  Pour  quelques  ouvrages  de 
luxe,  on  fait  même  usage  de  planches  très  grandes  appelées 
grande  sjmphonie. 

PLECTRE,  s.  m.  Morceau  de  bois  ou  d'ivoire  terminé  par  un  cro- 
chet à  ses  extrémités,  dont  on  se  servait  dans  l'antiquité  pour 
pincer  ou  pour  frapper  les  cordes  de  la  lyre  et  de  la  cytliare. 

PLEIN-JEU.  Sorte  de  jeu  d'orgue  composé  des  jeux  de  mutation 
ai>pelcs  cymbale  et  fourniture;  ou  joiut  à  cette  combinaison  les 
jeux  de  fonds  tels  que  les  bourdons,  flûtes  et  prestans.  Ce  jeu 
a  de  la  puissance  et  de  la  majesté. 

PLEXIMETRE,  s.  m.  Instrument  du  genre  du  métronome,  in- 
venté ])ar  le  docteur  Jean  Finazzi  d'Oraegna  ,  en  Sardaigne  ,  fixé 
à  Milan.  Le  pleximètre  diffère  des  premiers  métronomes  de 
Maeizel  en  ce  qu'il  marque  les  premiers  temps  de  chaque  me- 
sure par  un  é(baj)pement.  Les  métronomes  construits  par 
M.  Bienaimé,  d'Amiens,  sont  établis  d'après  le  même  système. 
M.  Wagner,  mécanicien  de  Paris,  a  aussi  introduit  un  échappe- 
ment analogue   dans  les  métronomes  de  Maelzcl  (voy.  ch.vi). 

POCHETTE,  s.  f.  Petit  violon  de  poche  dont  les  maîtres  de  danse 
se  servent  pour  donner  leurs  leçons.  La  pochette  sonne  une  oc- 
tave ])lus  haut  que  le  violon. 

POINT,  s.  m.  Le  point  placé  avant,  après,  ou  entre  deux  notes,  mo- 
difiait autrefois  la  valeur  de  ces  notes  de  plusieurs  manières; 
dans  la  musique  moderne,  le  point  n'a  d'autre  effet  que  d'aug- 


DE  MUSIQUE.  371 

menter  de  mokié  \;\  valeur  de  la  note  après  laquelle  il  est  j)lncé. 
Les  i)oinl.<!  placés  au-dessus  dos  notes  indiquent  qu'elles  doivent 
être  délacliées. 
POINT -D'ORGUE.  Arrêt  indiqué  de  cette  manière  dans  la  musi- 
que /'T\  ,  pour  marquer  un  re])os  pendant  lequel  l'exécutant 
déploie  toute  son  habileté  dans  d  es  traits  de  fantaisie  que  lui 
inspire  son  imagination.  Cet  artifice,  appelé  parles  Italiens  ca- 
denza  ,  s'introduit  ordinairement  dans  les  concertos  d'instru- 
mens  ou  dans  les  solos  de  chant. 
POLONAISE,  s.  f.  Air  à  trois  tem])s,  d'un  mouvement  lent,  en 
usage  dans  la  Pologne,  et  dont  on  fait  des  chansons  et  des  airs 
de  danse.  Les  morceaux  qui  portent  le  nom  de  polonaises  dans 
les  sonates,  les  concertos,  etc.,  se  prennent  d'un  mouvement 
plus  animé  que  les  polonaises  véritables. 
POLYCORDE,  s.  m.  Instrument  à  archet,  inventé  en  1799,  P'"' 
M.  Hilmer  de  Leipsick.  Il  ressemblait  à  la  contrebasse  et  pou- 
vait en  tenir  lieu,  bien  qu'il  n'eût  que  i6  pouces  de  longueur 
sur  10  et  demi  de  largeur.  Sur  son  manche,  long  de  11  pouces, 
et  large  de  4)  étaient  tendues  dix  cordes  qui  fournissaient  à  une 
étendue  considérable.  Lepolycorde  était  fourni  de  touches  pour 
former  les  intonations. 
POMPE,  s.  f.  Partie  de  tuyau  en  fer  à  cheval,  qui  s'emboîte  à 
coulisse  dans  d'autres  tuyaux  pour  baisser  ou  hausser  à  volonté 
l'intonalion  du  cor  et  de  la  trompette  ,  par  l'allongement  ou  le 
raccourcissement  de  la  colonne  d'air.  La  flûte  et  la  clarinette 
ont  aussi  une  pompe  formée  d'une  emboîture  en  métal ,  dont 
l'emploi  est  le  même  que  celui  de  la  pompe  du  cor  ou  de  la 
trompette. 
PONTICELLO,  s.  m.  Nom  italien  du   chevalet  des  instrumens  à 

archet. 
PONT-NEUFS,  s.  m.  On  appelait  autrefois  de  ce  nom  les  airs  des 
cluinsons  vulgaires  et  des  vaudevilles.  Ce  nom  leur  venait  de  ce 
qn'autiefois  les  marchands  de  ces  chansons  se  plaçaient  sur  le 
Pont-Neuf,  à  Paris,  pour  chanter  et  débiter  leur  marchandise. 
On  dit  encore  aujourd'hui,  par  mépris  de  certains  airs  dont  la 
mélodie  est  commune,  que  ce  sont  des  ponts-neufs. 
POPiT-DE-VOIX,  en  italien, /)or;a;nen(o.  Accent  de  la  voix  dans  la 
succession  des  sous,  soit  en  montant,  soit  eu  descendant.  Il  se 


372  UICTlON\AlRK 

f  .it  en  poi;ant  la  voix  soit  au-dessus,  soit  en  dessous  du  son  qui 
doit  être  .ittaqué  et  en  glissant  sur  les  sons  iaterinédiaires  jus- 
qu'à ce  qu'on  arrive  à  l'iutonation  voulue.  Le  port-de-voix  pro- 
duit un  bon  effet  lorsqu'il  est  employé  à  propos,  mais  il  devient 
fatigant  si  oa  en  use  trop  fréquemmeat. 

PORTEE,  s.  f.  Piéunion  de  cinq  lignes  sur  lesquelles  on  écrit  la 
musique. 

P9SIT1F,  s.  m.  Petit  orgue  avec  lequel  on  accompagne  le  chœur, 
et  qui  est  ordinairement  placé  en  avant  du  grand  orgue  (voy. 
fh.  xv). 

POSITION,  s.  f.  Ce  mot  a  plusieurs  acceptions  en  musique  Dans 
la  science  de  l'harmonie  les  positions  des  notes  des  accords  se 
distinguent  en  raison  de  leur  rajiprocheraent  ou  de  leur  éloigne- 
ment  de  la  Lasse.  Dans  les  accords  composés  de  trois  notes ,  cha- 
cune pouvant  être  la  plus  rapprochée  de  la  basse,  la  moyenne 
ou  la  plus  éloignée ,  il  y  a  lieu  à  trois  positions.  Ceux  qui  sont 
composés  de  quatre  notes  peuvent  se  présenter  sous  l'aspect  de 
quatre  positions  différentes  On  appelle  aussi  positions  les  divers 
j>lacemens  de  la  main  sur  le  manche  des  instrumeus  à  cordes  pin- 
cées ou  à  archet.  La  première  position  est  celle  qui  est  la  plus 
rapprochée  des  chevilles;  les  autres,  à  mesure  qu'on  s'élève  vers 
les  sons  aigus,  s'appellent  seconde,  troisième  position  ,  etc. 

POT-POURRI ,  s.  m.  Sorte  de  pièce  de  musique  instrumentale  qui 
a  eu  autrefois  beaucoup  de  vogue  et  qui  est  maintenant  oubliée. 
Elle  consistait  en  un  certain  nombre  d'airs  connus,  enchaînés  au 
moyen  de  quelques  traits  intermédiaires  et  parfois  variés. 

PRELUDE,  s.  m.  Fantaisie  courte  par  laquelle  les  instrumentistes 
se  préparent  quelquefois  à  jouer  le  morceau  qu'ils  ont  sous  les 
yeux.  Il  faut  être  avare  de  ces  fantaisies,  et  les  préludes  doivent 
être  courts. 

PR.ELUDER.,  V.  act.  Jooer  des  préludes. 

PRÉPARATION,  s.  f.  Effet  d'une  note  qui  est  entendue  dans  l'é- 
tat de  con'ionnance  avant  de  devenir  dissonance  (voy.  ch.  x). 

l'RÉP.iRATION  AU  CHANT  (voy.  Solfège  et  Focalisation). 

PRESTANT,  s.  m.  Jeu  d'orgue  de  l'espèce  des  flûtes,  dont  le  plus 
grand  tuyau  a  2  pieds  de  longueur  (voy.  ch.  xv). 

PRESTO,  adv.  Mot  italien  qui  indique  un  mouvement  vif  dans 
l'exécution  d'un  morceau  de  musique. 


i)F.  iviusioiiF..  :i7:) 

l'ROGRESSlON  ,  ».  f.  Miuiveniens  rt'grili<'rs  d'iiarmonie  dans  une 
forme  déleriiiiiiée  et  j)rol()n^(!'t'. 

PROLOGUK),  s.  m.  Introduction  d'(>i)éru  autrefois  en  usage,  dont 
le  sujet  n'avait  aucun  rapport  avec  celui  delà  pièce.  Quelquefois 
le  prologue  était  assez  développé  j)our  être  lui-même  une  es- 
pèce de  petit  opéra.  Le  prologue  n'est  plus  de  mode. 

PilOLOINGATION,  s.  f.  Note  qui,  ayant  été  entendue  dans  uu  ac- 
cord, se  prolonge  par  une  liaison  sur  l'accord  suivant. 

PRONONCIATION,  s.  f.  Art  d'articuler  les  paroles  dans  le  chant. 
Une  bonne  prononciation  est  un  grand  moyen  d'effet  pour  les 
chanteurs,  mais  c'est  une  qualité  fort  rare. 

PROSE,  s.  f.  Pièce  deplain-chant  qui  se  chante  en  certaines  cir- 
constances Le  Dies  irœ  est  la  prose  des  morts. 

PSALMODIE.  Chaut  des  psaumes  sur  une  seule  intonation  de  la 
voix,  en  sons  soutenus  et  avec  l'accent  oratoire. 

PSALTÉRION,  s.  m.  Instrument  à  cordes  qui  n'est  presque  j)lus 
en  usage.  Il  a  la  forme  d'un  triangle  et  est  monté  de  cordes  mé- 
talliques qu'on  frappe  avec  de  petites  baguettes. 

Q 

QUADRUPLE  CROCHE,  s.  f.  Figure  de  note  représentant  un  sou 
d'une  durée  égale  à  la  huitième  partie  d'une  croche.  La  quadru- 
ple croche  est  faite  ainsi   m  ;  quand  il  y  en  a  plusieurs  ensemble 

elles  sont  réunies  par  quatre  barres  qui  traversent  la  queue  des 

notes. 
QUART  DE  SOUPIR.  Silence  qui  a  la  durée  d'une  double  croche 

et  qui  équivaut  au  quart  du  soupir. 
QUART  DE  TON. Quatrième  partie  de  l'intervalle  d'un  ton.  Notre 

oreille  n'est  point  habituée  à   mesurer  de  si  petits  intervalles  ; 

c'est  pourquoi  celui-ci  n'est  employé  ni  dans  la  mélodie,  ni  dans 

l'harmonie.   Les   peuples   orientaux,  habitués  à   faire  usage  de 

beaucoup  de  petits  intervalles  dans  la  musique,  ont  une  gamme 

chromatique  par  quarts  de  ton. 
QUARTE,  s.  1.  Intervalle  consonn.int  qui  se  peut  présenter  sous 

divers  aspects.  La  quarte  juste  est  composée  de  deux  tons  tt  un 

32 


374  DICTIONTÎAIRE 

demi-ton;  la  quarte  majeure  renferme  trois  tons  et  prend  quel- 
quefois, à  cause  de  cela,  le  nom  de  triton  ;  la  quarte  diminuée  est 
composée  d'un  ton  et  de  deux  demi-tons. 

On  a  long-temps  considéré  la  quarte  comme  une  dissonance, 
mais,  étant  un  renversement  de  la  quinte,  elle  ne  peut  être 
qu'une  consonnance. 

QUARTE  DE  NAZARD.  Jeu  d'orgue  fait  d'un  mélange  de  plorab 
et  d'étain  qui  sonne  la  quarte  supérieure  du  nazard  ou  l'octave 
aiguë  du  prestant. 

QUARTETTO  (voy.  Quatuor). 

QUATUOR,  s.  m.  Morceau  de  musique  pour  quatre  voix  ou  quatre, 
instrumens.  Dans  la  musique  moderne,  le  quatuor  vocal  est  sou- 
vent accompagné  par  des  instrumens. 

Le  quatuor  instrumental  est  un  genre  de  composition  qui  a 
fourni  à  beaucoup  de  grands  compositeurs,  tels  que  Haydn, 
Mozart  et  Beethoven,  l'occasion  de  déployer  toutes  les  ressources 
du  génie  et  du  talent,  et  de  produire  des  effets  qui  ne  semblent 
j)as  pouvoir  être  trouvés  dans  les  combinaisons  d'un  si  petit 
nombre  d'instrumens  (voy.  ch.  xix). 

QUEUE,  s.  f.  On  appelle  de  ce  nom  le  trait  vertical  qui  est  attaché 
à  la  tête  des  notes  de  musique. 

QUEUE,  s.  f.  Partie  du  violon  ,  de  l'alto,  du  violoncelle  et  de  la 
contrebasse  à  laquelle  l'extrémité  inférieure  des  cordes  est  atta- 
chée. On  lui  donnait  aussi  le  nom  de  cordier. 

QUINTE,  s.  f.  Intervalle  consonnant  qui  peut  se  présenter  sous 
plusieurs  aspects.  La  quinte  juste  est  composée  de  trois  tons  et 
demi  ;  la  quinle  mineure,  appelée  par  quelques  musiciens  quinte 
diminuée  et  par  d'autres/auMe  quinte,  est  composée  de  deux  tons 
et  de  deux  demi-tons;  la  quinte  augmentée  est  composée  de  trois 
tons  et  deux  demi-tons.  Ou  appelait  autrefois  cet  intervalle  quinle 
superjlue. 

QULNTE.  Jeu  d'orgue  qui  sonne  la  quinte  du  prestant.  On  lui 
donnait  autrefois  le  nom  de  natard  (vny.  ce  mot). 

QUINTE,  s.  f.  Kom  par  lequel  on  désigne  quelquefois  la  viole  ou 
alto. 

QUINTES  CACHÉES.  On  donne  ce  nom  en  musique  à  des  succes- 
sions harmoniques  qui  fout  pressentir  la  succession  de  deux 
quintes  conse'cutives. 

QUINTETTE,  s.  m.  Morceau  de  musique  composé  pour  cinq  voix 


DE  MUSIQUE.  375 

oa  cinq  înstramens.  Le  quintette  vocal  est  souvent  accompagné 
j);ir  l'ori-liestre.  Il  y  a ,  dans  des  genres  différens  ,  d'admirables 
quintettes  d'instruniens  tomposés  jiar  Bocclierini,  Beethoven, 
Moziirt  et  Onslow.  M  Reiclia  en  a  composé  pour  des  instruraens 
à  vent;  leur  facture  est  élégante. 
QUODLIBET,  s.  m.  Pièce  de  musique  autrefois  en  usage  en  Alle- 
m.igne,  et  qui  était  composée  pour  les  voix  sur  des  paroles  co- 
miques et  quelquefois  grivoises. 


R 


RACLER,  V.  a.  Terme  de  mépris  par  lequel  on  désigne  la  mauvaise 
manière  de  jouer  d'un  instrument,  tel  que  le  violon  ou  la  basse, 
en  faisant  crier  les  cordes  sous  l'archet. 

RACLEUR,  s.  m.  Musicien  qui  joue  avec  dureté  du  violon  ou  de 
la  basse. 

RALLENTANDO,  en  ralentissant.  Ces  mots  se  mettent  sous  les 
passages  d'un  morce.TU  de  musique  dont  l'expression  exige  que  le 
mouvement  soit  ralenti  dans  de  certains  endroits. 

RAMAGE,  s.  m.  On  désigne  par  ce  nom  le  chant  modulé  et  jihrasé 
des  oiseaux  chanteurs,  tels  que  le  rossignol,  la  fauvette,  le  se- 
rin, etc. 

Ramage  se  prend  en  mauvaise  part  lorsqu'il  s'agit  d'un  chanteur 
qui  ne  plaît  pas.  C'est  en  ce  sens  qu'on  dit:  L'ennuyeux  ramage 
de  cet  homme  me  fatigue. 

RANZ  DES  VACHES.  Airs  populaires  des  montagnes  de  la  Suisse. 
Il  y  en  a  d'historiques  dans  chaque  canton  ,  mais  les  musiciens 
du  pays  en  composent  chaque  jour,  hesranz  des  vaches  se  chan- 
tent ou  se  jouent  par  les  pâtres  sur  le  cor  des  Alpes  (^Halp- 
Horn). 

RAPPORTS  DES  INTERVALLES.  Calcul  exact  des  distances  des 
sons  entre  eux  (voy.  ch.  xr). 

RASGADO,  s.  m.  Prélude  des  boléros  et  des  séguedilles  que  les  Es- 
pagnols exécutent  en  faisant  sonner  rapidement  toutes  les  notes 
de  la  guitare  avec  le  pouce. 

RE.  Nom  de  la  deuxième  note  de  la  gamme  du  ton  lïut.  Chez  les 
Allemands  et  les  Anglais  on  l'indique  par  D. 


376  DICTIONNAIRE 

REBEC.  Instrument  d'une  forme  à  peu  près  semblable  à  celle  du 
violon,  dont  on  faisait  usage  en  France  dans  le  moyen-âge,  et 
qui  ne  fut  abandonné  qu'a  la  fin  du  dix-septième  siècle  par  les 
ménétriers.  Le  rebec  était  monté  de  trois  cordes;  il  y  avait  des 
dessus,  des  quintes,  des  tailles  et  des  basses  de  rebec. 

RECIT,  s.  m.  Ou  appelait  autrefois  de  ce  nom  tout  morceau  do 
musique  à  voix  seule.  On  disait  un  récit  de  taille,  de  basse  ou  de 
haule-conlre,  pour  un  air,  un  motet  écrit  pour  ces  voix. 

RECITANT,  part.  Celui  qui  clianle  un  récit. 

RECITATIF,  s.  m.  Partie  de  la  musique  dramatique  qui  n'est  point 
mesurée  et  que  le  cbanteur  exécute  à  volonté  en  tirant  ses  prin- 
cipaux moyens  d'effet  de  l'arliculatiou  et  de  l'accent  qu'il  donne 
aux  paroles.  Cette  partie  des  scènes  d'un  opéra  est  ordinairement 
suivie  d'un  air,  d'uu  duo,  ou  de  tout  autre  morceau  de  musique 
mesurée. 

Le  récitatif  n'est  quelquefois  accompagné  que  par  la  basse  et 
le  piano  ;  on  lui  donne  le  nom  de  récitatif  libre-  On  s'en  sert 
principalement  dans  l'opéra  bouffe  italien.  Le  chanteur  le  débite 
rapidement  et  donne  aux  jiaroles  moins  d'accentuation  qu'à  tout 
autre  récitatif. 

Le  récitatif  accompagné  par  l'orchestre,  et  qui  se  chante  avec 
force  et  accent,  s'appelle  récitatif  obligé  ;  on  en  fait  particuliè- 
rement usage  dans  les  opéras  sérieux  et  dans  ceux  de  demi- 
caractère. 

RÉCITER,  V.  a.  Chanter  un  récit. 

PiEDOUBLE,  adj.  L'intervalle  redoublé  est  celui  qni,  dans  uu  ac- 
cord, est  fait  par  deux  parties,  soit  à  l'unisson,  soit  à  l'octave. 
Dans  un  accord  de  sixte,  par  exemple,  on  redouble  ou  la  tierce, 
ou  la  sixte,  rarement  la  basse. 

RÉDUCTION,  s.  f.  Musique  à  grand  orchestre,  de  quelque  nature 
que  ce  soit,  arrangée  pour  le  piano  ou  pour  un  petit  nombre 
d'iustrumens.  Au  lieu  de  réduction  on  se  sert  quelquefois  du 
terme  d^arrangement. 

RÉDUIRE.  Arranger  une  partition  pour  le  piano  ou  pour  un  petit 
nombre  d'iustrumens. 

REFRAIN,  s.  m.  Terminaison  d'un  couplet  ou  d'un  air  de  vaude- 
ville qu'on  répète  ordinairement  deux  fois  et  qu'on  chante  quel- 
quefois en  chœur. 

RÉGALE,  s.  f.  Le  plus  aucieu  des  jeux  d'orgue,  composé  seule- 


DE  MUSIQUE.  377 

ment  d'anches  montées  sur  leurs  pieds.  Ce  jeu  n'existe  plus  dans 
l'orgue. 

RECîlSTRK,  s.  m.  Les  registres  sont  des  règles  de  bois  que  l'orga- 
niste tire  ou  pousse,  et  qui  font  agir  de  certains  mouveinens  pour 
ouvrir  ou  fermer  les  jeux  de  l'orgue  selon  qu'il  éprouve  le  hesoiu 
de  les  faire  chanter  ou  de  les  réduire  au  silence.  La  poignée  par 
laquelle  l'organiste  ouvre  ou  ferme  un  registre  s'appelle  tirant. 

REGISTRES  DE  LA  VOIX.  Etendue  naturelle  de  chaque  genre  de 
voix.  La  voix  de  poitrine  est  un  registre  ;  la  voix  de  tête,  commu- 
nément am^clée  fausset ,  et  plus  exactement  sur-Zar^no'tenne,  est 
un  autre  registre.  L'égalisation  de  l'intensité  et  de  la  qualité  du 
son  dans  le  passage  d'un  registre  à  l'autre  est  une  des  plus 
grandes  difficultés  de  l'art  du  chant. 

REGLE  DE  L'OCTAVE.  Succession  naturelle  d'accords  sur  tou- 
tes les  notes  de  la  gamme,  tant  en  montant  qu'en  descendant, 

;  sans  altération,  substitution  ni  retardement.  La  règle  de  l'octave 
est  le  fondement  de  tente  harmonie. 

REGLER  le  papier  de  musique,  c'est  y  tracer  les  parties  néces- 
saires pour  écrire  les  notes  et  les  autres  signes. 

RÈGLES  DE  LA  COMPOSITION.  Collection  de  préceptes  dictés 
par  l'expérience  acquise  dans  l'art  d'écrire  la  musique  (voy. 
ch.  XI  i). 

REGLEUR,  s.  m.  Ouvrier  qui  trace  les  portées  sur  le  papier  pour 
écrire  la  musique. 

REGLURE,  s.  f.  Manière  dont  le  papier  est  réglé.  Il  ne  faut  pas 
que  la  réglure  soit  trop  noire  ni  trop  serrée. 

RÉGULIER,  adj.  Un  mouvement  d'harmonie  est  régulier  quand 
il  ne  donne  lieu  qu'à  de  bonnes  successions  d'intervalles;  dans  le 
cas  contraire  il  est  trrégutier. 

RELATIF.  Un  ton  est  relatif  d'un  autre  quand  il  offre  à  la  clef 
les  mêmes  signes  de  tonalité.  En  pareil  cas,  l'un  des  tons  est  un 
mode  majeur,  et  l'autre  un  mode  mineur. 

RELATION,  s.  f.  Rapport  entre  un  son  qui  vient  d'être  entendu 
dans  une  partie  vocale  et  instrumentale,  et  un  autre  son  qu'on 
entend  actuellement  dans  une  autre.  Lorsque  ces  deux  sons  con- 
courent à  laisser  dans  l'oreille  la  sensation  d'une  consonnance 
exacte,  la  re/ation  est  bonne;  quand  il  résulte  de  leur  rapport 
une  consonnance  altérée,  la  relation  est  fausse.  Les  fausses  rela- 
tions sont  proscrites  en  composition. 

32. 


378  DICTIONNAIRE 

REMPLISSAGE,  s.  m.  On  appelle  parties  de  remplissage  celles 
qui,  dans  un  contrepoint,  ne  rem])lissent  pas  les  conditions  de 
canon,  de  l'imitatioû,  ou  du  contrepoint  doulile  ( 'voy.  ch. 
XII  ).  On  appelait  aussi  autrefois  parties  de  remplissage  (  di  ri- 
pieno)  celles  qui  dans  les  concertos  ne  jouaient  que  dans  les 
tutli  (vor.  ce  mot)  pour  donner  plus  de  force  à  l'ensemble. 

RENTRÉE,  s.  f.  Se  dit  en  général  d'un  instrument  ou  d'une  voix 
qui,  après  un  silence,  se  fait  entendre  de  nouveau.  Ce  mot 
s'applique  particulièrement  au  sujet  et  à  la  réponse  d'une  fugue 
(voy.  ces  mots). 

RENVERSÉ,  ÉE,  adj.  Un  intervalle  ou  un  accord  renversé  sont 
ceux  dans  lesquels  l'ordre  des  parties  est  interverti  de  telle  sorte 
que  les  notes  graves  sont  transpoitces  aux  ])arties  supérieures  , 
et  que  celles-ci  passent  aux  notes  graves. 

RENVERSEMENT,  s.  m.  Changement  de  disposition  dans  les  no- 
tes qui  composent  un  accord  et  dans  les  parties  qui  forment 
une  harmonie. 

RÉPERCUSSION,  s.  f.  Mot  nouvellement  introduit  dans  le  lan- 
gage de  la  science  musicale,  et  qui  signifie  la  même  chose  que  la 
rentrée  des  parties  dans  la  fugue. 

RÉPÉTER,  V.  act.  Faire  une  répétition. 

RÉPÉTITION,  s.  f.  Étude  d'un  morceau  de  musique  ou  d'un 
0|)éra  j)ar  ceux  qui  doivent  l'exécuter.  I-es  répétitions  sont  par- 
tielles ou  générales  selon  qu'elles  ont  lieu  seulement  entre  un 
petit  nombre  de  musiciens,  ou  que  tout  l'orchestre,  les  chan- 
teurs et  les  choristes  sont  réunis. 

RÉPLIQUE,  s.  f.  Signifie  oc/oie  quand  il  s'agit  d'un  son  redouljlé, 
et  reprise  du  sujet  lorsqu'on  parle  d'une  fugue. 

RÉPONSE,  s.  f.  Imitation  d'un  sujet  de  fugue  dans  laquelle  on 
altère  quelque  intervalle  de  ce  sujet  (voy.  ch.  xil). 

REPOS,  s.  m.  Terminaison  d'une  phrase,  d'une  période,  etc., 
dans  un  morceau  de  musique;  on  distingae  les  repos  incidens  des 
repos  finals. 

REPRISE,  s.  f.  Première  et  seconde  moitié  d'un  morceau  de  mu- 
sique dont  la  séparation  est  marcjuée  d'une  double  barre  accom- 


pagnée de  points  comme  ceci    II    Cette  séparation  indique  que 
chaque  moitié  de  ce  morceau  doit  être  chantée  ou  jouée  deux 


DE  MUSIQT3E.  379 

REPRISE  D'UN  OPÉRA.  Représentation  qu'on  donne  après 
;ivoir  été  jjIus  ou  moins  long-temps  sans  le  jouer. 

REPRISE  DU  SUJET.  Rentrée,  par  le  tbème  d'une  fugue,  d'une 
partie  qui  a  fait  un  repos. 

RESOLUTION.  Succession  d'un  intervalle  ou  d'un  accord  conson- 
naut  à  un  intervalle  ou  à  un  accord  affecté  de  dissonance. 

RESONNANCE,  s.  f.  Production  du  son  par  la  mise  en  vibration 
d'un  coips  sonore  tel  qu'une  corde,  une  table  harmonique, 
nn  tuyau  ,  une  plaque  métallique,  etc. 

RESP1R.4.T10N,  s.  f.  Action  des  poumons  lorsqu'ils  se  remplissent 
d'air  et  qu'ils  le  re|)oussent  ensuite.  Cette  action  se  compose  de 
Vaspiratian  ,  c'est-à-dire,  de  l'atlniclion  de  l'air,  et  de  l'expira- 
tion  ,  c'est-à-dire  la  ré|)ulsion  de  l'air.  L'art  de  respirer  à  propos 
etde  ménager  la  respiration  est  une  des  parties  les  plus  difficiles 
du  chant. 

RESSERRER  L'HARMONIE.  C'est  rapprocher  autant  que  possible 
les  uns  des  autres  tous  les  sons  qui  entrent  dans  sa  compo- 
sition. 

RETARD,  s.  m.  Le  retard  d'une  note  d'un  accord  résulte  de  la 
pio/ongation  d'une  autre  note  qui  lui  est  étrangère  (voy.  Piolon- 
gation'). 

RHYTHME,  s.  m.  Combinaison  symétrique  des  durées  longues  et 
brèves  des  sons  (voy.  ch.  xi). 

RHYTHMIQUE  (musique).  Qui  est  ordonné  dans  un  ordre  symé- 
trique de  durées. 

IIICERCARE  oc  RICERCATA  (recherche  ou  recherchée).  Morceau 
de  musique  h.isé  sur  l'imitation  d'un  ou  de  plusieurs  tlièmes 
qui  concourent  à  former  un  ton  mélodique  et  liarmonique.  Les 
duos  et  le»  trios  de  Clari,  de  Steffani,  de  Durante  et  de  Haudel 
sont  des  ricercari. 

RIGODON  ou  RIGAUDON.  Air  de  danse  à  deux  temps,  d'un 
mouvement  vif ,  qui  n'est  plus  en  us:ige. 

R.1jNF0RZAND0  ,  en  renforçant.  Mot  italien  qui  indique  une 
nu.ince  de  force  croissante  des  sons  dans  l'exécution  de  la  mu- 
sique. 

V\W\\LSO ,  TempUssaae.  Violino  di  ripieno ,  violon  de  remplissage, 
c'est-à-dire  partie  de  violon  non  oi>ligée. 

RISOLUTO,  c'est-à-dire  d'une  manière  résolue.  Indication  de 
mouvement  décidé  dans  la  musique. 


380  UICTIONAIF.E 

RIT ARDAHWO,  en  retardant.  Mot  qui  indique  l'obligation  de  ra- 
lentir dans  l'exécution  de  la  musique.  Ce  mot  est  s.yuonyrae  de 
ral'enlando. 

RITOURNELLE,  s.  f.  Prélude  instrumental  qui  précède  le  début 
du  chanteur  dans  un  air  ou  dans  tout  autre  morceau. 

ROLE,  s.  m.  Chanter  un  rôle  c'est  exécuter  tous  les  moreaux  qui 
sont  mis  par  le  poète  et  le  musicien  dans  la  bouche  d'un  person- 
nage d'un  drame. 

ROMANCE,  s.  f.  Petit  air  avec  ou  sans  paroles,  d'un  caractère  sim- 
ple et  mélancolique,  et  d'une  mélodie  douce  et  pure. 

RONDE ,  adj.  pris  subst.  Nom  d'une  note  de  musique  de  forme 
circulaire,  sans  queue,  dont  la  durée  est  douljle  de  la  blanche  et 
quadruple  de  la  noire.  Ou  l'appelait  autrefois  semi-bieve. 

IlONDK,  s,  f.  Air  de  danse  composé  pour  être  chanté,  divisé  en 
couplets  avec  un  refrain  qui  souvent  se  répète  en  chœur  et  sur 
lequel  les  danseurs  sautent  en  cercle,  se  tenant  parla  main. 

IlONDEAU,  s.  m.  Morceau  de  musique  dont  le  thème  se  reprend 
deux  ou  trois  fois,  et  qui  peut  élre  d'uu  mouvement  lent  ou  vif. 
Il  y  a  des  rondeaux  pour  la  voix  et  pour  les  instrumens. 

ROSALIE,  s.  f.  Nom  d'une  phrase  répétée  plusieurs  fois,  en  mon- 
tant chaque  fois  d'un  degré.  Les  rosalies  sont  considérées  comme 
des  phrases  défectueuses,  parce  qu'elles  laissent  trop  prévoir 
leur  marche  mélodique  et  harmonique. 

ROSE,  s.  f.  Nom  des  ouvertures  circulaires  pratiquées  dans  la  ta- 
ble des  clavecins,  théorlies,  luths  et  guitares. 

ROULADE,  s.  f.  Nom  vulgaire  des  traits  rapides  dans  le  chant. 

ROULEMENT,  s.  m.  Succession  rapide  de  percussions  sur  la  peau 
tendue  des  tambours  et  des  tjmbales. 


SABOT,  s.  m.  Sorte  de  crochet  qui,  dans  les  anciennes  harpes, 
pressait  la  corde  pour  l'élever  d'un  derai-ton  lorsque  le  \neA  de 
l'exécutant  s'appuyait  sur  la  pédale  qui  correspondait  à  cette 
corde.  Ce  mécanisme  était  défectueux  et  se  dérangeait  souvent; 
Érard  lui  a  substitué  avec  succès  celui  d'une  fourchette  qui 
saisit  la  corde  et  la  racourcit  en  tournant  sur  elle-même. 


DE  MUSIQUE.  381 

SAGUEBUTE,  s.  f.  Ancieu  nom   fiiinrais  du  trombone. 
SALTARELLE.  Air   de  dause  italien  à  trois  temps,  en  rhythm»; 

boiteux  de  notes  inégales. 
SARABANDE,  s.  f.  Air  de  danse  espagnol,  à  trois  temps,  d'un 
carartcre  grave,  et  qu'on  chantait  quelquefois  avec  des  paroles, 
au  lieu  de  le  jouer  avec  les  iustrumens. 
SAUT,  s.  m.  Toute  succession  de  notes  qui  ne  se  suivent  pas  im- 
médiatement dans  l'ordre   de  la   gamme  ascendante  ou  descen- 
dante est  un  saut.  Dans  l'art  d'écrire,  ces  successions  sont  pros- 
crites lorsqu'elles  donnent  lieu  à  des  intonations  difficiles  ou  à 
des  dissonances  irrégulièrement  attaquées  ou  résolues. 
SAUTEREAU,  s.  m.  Lame  de  bois  mince,  armée  d'un  morceau  di.' 
plume  ou  de  buffle,  qui,  dans  les  clavecins,  était  poussé  contre 
les  cordes  par   la    touche;  la  plume  ou  le  buffle,  faisant   l'effet 
d'un  ressort,  produisait  le  son  de  la  corde  en  s'éi  happant. 
SAUTEUSE,  s.  f.  Valse  d'un  mouvement  rapide,  à  deux  temps. 
SAUVER  (^!a  dissonance).  C'est  la  résoudre  en  la  faisant  descendre 

d'un  degré  sur  la  note  suivante. 
SCÈNE,  s.  f.   On  donne  ce  nom  en  musique  à  un  air  à  plusieurs 

mouvemens,  précédé  ou  coupé  de  récitatifs. 
SCHERZANDO.  Mot  italien  qui  indique  un  mode  d'exécution  lé- 
gère et  badine. 
SCHERZO,  badinage.  Ce  nom  se  donne  maintenant  aux  morceaux 
h    trois  temps  des    symphonies,  quatuors,  etc.,  qu'on    appelait 
autrefois  menuets.  Le  nom  de  scherzo  leur  a  été  appliqué  depuis 
que  leur  mouvement  s'est  considérablement  accéléré. 
SCORDATURA.  Mot  italien  qui  n'a  pas  d'équivalent  en   français, 
et  qui  signifie  l'action  de  désaccorder  les  instrumens  pour  pro- 
duire des  effets  particuliers.   Paganini  fait  souvent  usage  de  la 
scordature;  les  guitaristes  y  ont  aussi  recours. 
SEC,  adj.  Un  son  sec  est  celui  qui  n'est  pas  prolongé. 
SECONDE,  s.  f.  Intervalle  dissonant  de  deux  notes  voisines.  Il  y  a 
trois  sortes  de  seconde  ;  la  seconde  mineure ,  formée  d'un  demi-ton  ; 
la  seconde  majeure,  formée  d'un  ton;  la  seconde  augmentée ,  com- 
posée d'un  ton  et  demi. 
SEGNO  {al).  Ces  mots,  placés  près  d'un  signe  quelconque  à  la  fin 
d'un  morceau,  indiquent  qu'il  faut  recommencer  à  l'endroit  où 
ce  signe  est  placé. 
SEGUE,  juiVeî.  Ce  mot,  placé  entre  deux  morceaux  de  musique, 


383  DICTIONNAIRE 

fait  connaitre  que  le  second  doit  suivre  immédiatement  le  pre- 
mier. 
SEGUEDILLE  ou  SEGUIDILLE.  Air  de   danse  espagnol,  à  trois 

temps,  d'un  mouvement  ra])ide. 
SEMI-BREVE,  s.  f.  Ancien  nom  delà  figure  de  note  qu'on  appelle 

maintenant  ronde. 
SEMPLICE,   avec  simplicité.   Indication  d'un    mode   d'exécution 

qu'on  trouve  quelquefois  dansla  musique. 
SEPTIEME,  s.  f.  Intervalle  dissonant  formé  de  deux  notes  qui  sont 
a  la  distance  de  six  degrés  diatoniques.  Il  y  a  trois  sortes  de  sep- 
tièmes: la  septième  mineure,  composée  de  quatre  tons  et  deux 
demi-tons  inégaux;  la  septième  majeure,  composée  de  cinq  tons 
et  un  demi-ton  ;  la  septième  diminuée,  composée  de  deux  tons  et 
trois  demi-tons  inégaux. 
SEPTUOR,  s.  m.  Composition  pour  sept  voix  on  sept  instrumens. 
SERENADE,  s.  f.  Concert  qui  se  donne  le  soir  sous  les  fenêtres  de 

quelqu'un,  et  qui  est  composé  de  voix  ou  d'instrumens. 
Sérénade   est  aussi  le  nom  de  certains  morceaux   de  musique   oîi 
le  compositeur  a  fait  des   associations  d'instrumens  peu  usitées  , 
et  dont  la  forme  diffère  en  quelques  points  des  autres  pièces  ré- 
gulières. 
SERINETTE,  s.  f.  Très  petit  orgue  à  cylindre  dont  on  se  sert  pour 

l'éducation  des  serins. 
SERPENT,  s.  m.  Instrument  à  vent  dont  on  se  sert  particulière- 
ment dans  les  églises  et  dans  la  musique  mililaireoù  il  forme  la 
Lasse  avec  le  trombone  et  Vophiclèide.  Le  serpent  se  joue  avec  une 
large  embouchure  qu'on  apj>ellc  èoca/.  Cet  instrumenta  été  long- 
temps fort  imparfait;  on   l'a    perfectionné  en  lui  ajoutant  des 
clefs. 
SEXTUOR,  s.  m.  Composition  pour  six  voix  ou  six  instrumens. 
SFORZANDO,  en  renforçant.  Ce  mot  italien  indique  une  nuance 
d'expression  dans  l'exécution  de  la  musique,  où  l'intensité  des 
sons  est  augmentée  graduellement. 
SI.  Septième  note  de  la  gamme  d'u<,  et  l'un  des  noms  dont  on  se 

sert  pour  jo//îer  (voy.  ce  mot). 
SICILIENNE,  s.  f.  Air  originaire  de  Sicile,  à  ,,,  d'uu  mouvement 
modéré.  Chaque  mesure  de  cet  air  commence  par  trois  croches 
dont  la  première  est  pointée. 
SIGNES,  5.  m,  Caractèies  qui  servent  à  écrire  la  musique  ,  et  qui 


DE  MUSIQUE.  383 

se  composent  des  notes,  des  rlcfs,  des  dièses,  bémols,  béc.ir- 
rcs,  pauses,  etc.,  etc. 

SILENCES,  s.  m.  Interruptions  dans  l'audition  des  sons,  qui  sont 
mesurées  coinine  les  sons  eux-mêmes.  Ou  donne  aux  signes  de 
ces  interruptions  le  nom  de  silences  (voy.  cli.  vi). 

SILLET,  s.  m.  Petite  pièce  d'ivoire  ou  de  bois  dur  placée  à  l'ex- 
trémité supérieure  du  manche  des  instruniens  à  cordes  piucées 
ouàar'.bet,  qui  sert  de  point  d'appui  aux  cordes,  et  qui  les 
élève  de  manière  qu'elles  ne  posent  pas  sur  la  touche. 

SISTRE  ,  s.  m.  lastrumeut  de  percussion  ,  en  usage  dans  l'ancienne 
Egypte.  Il  était  composé  d'un  corps  sonore  de  métal,  d'une 
forme  à  peu  près  ovale,  qui  était  percé  de  trous  pour  y  poser 
des  baguettes  métalliques,  sur  lesquelles  ou  frappait  pour  en  ti- 
rer des  sons. 

SIXTE,  s.  f.  Intervalle  consonnant  qui  tire  son  nom  de  la  quantité 
de  degrés  compris  dans  leurs  extrémités.  Il  y  a  trois  sortes  de 
sixtes:  la  sixte  mineure,  composée  de  trois  tons  et  deux  demi- 
tons  inégaux;  la  sixle  majeure,  composée  de  quatre  tons  et  un 
demi-ton;  la  sixte  augmentée ,  composée  de  quatre  tons  et  deux 
demi-tons  inégaux. 

SMORZANDO  (voy.  Diminuendo).     , 

SOL.  Cinquième  note  de  la  gamme  d'uf  et  l'un  des  noms  dont  on 
se  sert  pour  solfier. 

SOLFEGE  ou  plutôt  SOLFEGES,  s.  m.  Collection  d'exercices  des- 
tinés à  faire  solfier  les  élèves,  c'est-à-dire  à  chanter  en  nom- 
mant les  notes.  On  donne  généralement  le  nom  de  solfèges  aux 
livres  élémentaires  qui  contiennent  les  principes  de  la  musique, 
et  des  leçons  propres  à  solfier,  disposées  dans  un  ordre  systé- 
matique. 

SOLFIER,  V.  n.  Chanter  des  exercices  de  solfège  en  nommant  les 
notes. 

SOLO,  s.  m.  Mot  italien  francisé  qui,  ap|)liqué  à  la  musique,  si- 
gnifie un  morceau  joué  par  un  seul  instrument,  communément 
accompagné  par  un  orchestre  plus  ou  moins  considérable.  Ce 
mot  s'applique  aussi  à  l'artiste  qui,  dans  une  chapelle,  un  or- 
chestre, ou  toute  autre  assemblée  de  musiciens,  joue  les  solos 
écrits  pour  son  instrumeut;  ainsi  on  dit  un  violon  solo,  un  r/o- 
loncelle  solo ,  etc. 


384  DirTioNX/viRt 

.'jOf.MiSATION,  s.  f.  A<tion  de  solfier  (voy.  Solfer  pt  Solfège). 

SOLUTION,  s.  f.  Se  dit  d'un  c:iuoii  énigmutique  dont  on  a  trouvé 
la  clef,  la  solution. 

SOMMIER,  s.  m.  Espèce  de  coffre  dont  la  table  supérieure  est 
percée  de  trous,  dans  lesquels  se  place  l'orifice  des  tuyaux 
d'un  orgue  dont  le  registre  est  ouvert,  et  les  fait  sonner  lorsque 
l'organiste  ouvre  leur  soupape  en  pressant  avec  les  doigts  le^ 
touches  qui  leur  correspondent. 

Le  sommier  d'un  piano  est  la  pièce  de  bois  solide  sur  laquelle 
s'appuie  la  table  à  l'endroit  où  sont  placées  les  chevilles  des 
cordes. 

.SON,  s.  m.  Sensation  qui  se  produit  à  l'oreille  lorsqu'un  corps 
sonore  est  rais  en  vibration  (voy.  Corps  sonore  et  Vibration).  La 
musique  est  le  résultat  des  diverses  modifications  et  combinai- 
sons de  la  sensation  du  ton. 

SONORE,  adj.  Qui  a  du  son,  un  son  volumineux.  On  dit  d'une 
voix  bien  limlrèe  (voy.  ce  mot)  ou  d'un  bon  instrument,  qu'ils 
sont  wnores.  Cela  se  dit  aussi  d'une  salle  de  concert  ou  de  spec- 
tacle quand  elles  sont  favorables  à  la  propagation  du  son. 

SONORITÉ  ,  s.  f.  Qualité  de  ce  qui  est  souore. 

SONS  HARMONIQUES.  Ces  sons  se  produisent  lorsqu'une  partie 
seulement  d'une  corde  ou  d'une  colonne  d'air  entre  en  vibra- 
tion de  manière  à  faire  entendre  ou  la  tierce  majeure,  ou  la  quinte, 
ou  l'octave  de  la  corde  totale,  ou  de  toute  la  colonne  d'air.  Les 
sons  harmoniques  ont  une  qualité  plus  donce,  plus  pure,  plus 
moelleuse  que  lesautres  sons;  on  en  fait  maintenant  un  fré- 
quent usage  sur  le  violon,  la  harpe,  la  guitare,  etc. 

SONATE,  s.  f.  Composition  instrumentale,  formée  de  trois  ou 
quatre  morceaux  de  caractères  différens,  dont  le  nom  vient  de 
l'italien  Juonare,  qui  signifie  jouer  d'un  instrument.  La  sonate  est 
fjite  quelquefois  pour  un  instrument  et  quelquefois  pour  plu- 
sieurs. Ce  genre  de  pièce,  qui  a  eu  autrefois  un  succès  de  vogue, 
est  maintenant  presque  abandonné. 

SONATINE,  s.  f.  Petite  sonate,  sonate  facile. 

SONNER,  V.  act.  On  disait  autrefois  sonner  de  la  trompette;  on 
dit  maintenantjoue»-  de  cet  instrument  comme  de  tous  les  autres. 

SONNERIE ,  s.  f.  Air  ou  trait  destiné  à  être  joué  sur  la  trompette, 
pour  indiquer  les  diverses  parties  du  service  de  la  cavalerie  mi- 


«F-  MUSIQUE.  385 

litaiii'.  Il  y  .1  viiiot-hiiit  soîinrries  prescrites  i)P.r  rorcloi)!!:!m'c 
pour  li;  servie»;. 

SONOMÈTRE,  s.  ra.  Instrument  destiné  à  mesurer  l'intensité  du 
son.  M.  Montu  a  présenté  à  l'Institnt,  il  y  a  quelques  années", 
nn  sonomètre  d'une  autre  esj)èce;  c'était  une  sorte  de  piano  des- 
tiné à  mesurer  tous  les  intervalles  admissibles  dans  la  musique. 

SOPRANO.  Voix  de  femme,  d'enfant  ou  de  castrat,  appelée  en 
français  dessus.  Primo  soprano  ,  premier  dessus  ;  seconda  soprano, 
deuxième  dessus.  Soprano  fait  soprani  au  pluriel. 

SOSTENUTO.  Soutenu,  d'un  mouvement  et  d'un  caractère  larges. 

SOTTE  VOCE.  Ces  mots  écrits  dans  la  musique  indiquent  un 
mode  d'exécution  à  demi-voix  ou  à  demi-jeu  ,  c'est-à-dire  avec 
j)eu  d'intensité  de  son. 

■SOl^FFLERIE,  s.  f.  L'ensemble  des  soufflets  d'un  orgue.  On  donne 
aussi  ce  nom  au  local  oii  est  placé  l'appareil  de  la  soufflerie. 

SOUFFLETS  DE  L'ORGUE.  Appareils  co~miiosé  de  planches  réu- 
nies par  des  peaux  collées,  qui  fournissent  le  vent  aux  sommiers 
de  l'instrument,  pour  être  ensuite  distribué  dans  les  tuyaux 
(voy.  cil.  xv). 

SOUFFLEUR,  s.  ra.  Musicien  qui,  ayant  la  partition  de  l'opéra 
qu'on  exécute  sous  les  yeux,  guide  les  acteurs  et  soulage  leur 
mémoire  en  leur  indiquant  les  parolesdes  morceaux  qu'ils  chan- 
tent. 

SOUFFLEUR  D 'ORGUE.  Homme  qui  fait  mouvoir  les  soufflets  de 
cet  instrument. 

SOUPIR,  s.  m.  Signe  de  silence  dont  la  durée  est  égale  à  celle 
d  une  noire. 

SOURDINE,  s.  f.  Espèce  d'épinette  d'un  son  sourd  et  agréable, 
dont  les  cordes  n'étaient  pas  pincées  par  des  plumes,  mais  étaient 
to:ichées  par  des  sautereaux  garnis  de  drap. 

SoLS'vDiNE,  s.  f.  Morceau  de  bois  préparé  pour  être  placé  sur  le 
chevalet  du  violon,  de  la  viole  et  de  la  basse,  afin  d'en  amortir 
les  sons  dans  certains  effets  indiqués  par  le  compositeur  au 
moyen  de  ces  mots  :  Con  sordini.  Pour  les  sourdines  du  hautbois 
et  de  la  clarinette,  on  a  imaginé  de  faire  des  pavillons  rentrans 
eu  dedans  et  n'ayant  qu'une  petite  ouverture.  La  sourdine  des 
cors  est  un  cone  en  carton,  percé  d'un  trou  à  sa  base  et  qu'on 
place  dans  le  )iavillon. 

SOIIS-DOMIIVANTE.  Nom  générique  de  la  quatrième  note  d'un 

33 


386  DICTIONNAIRE 

ton  quelconque.  On  désigne  quelquefois  cette  note  sons  le  nom 
(le  quatrième  degré. 

SPIRITÛSO,  avec  feu.  Ce  mot  se  place  à  la  tête  de  certains  mor- 
ceaux pour  indiquer  le  mode  d'exécution. 

STACCATO,  détaché.  Ce  mot  indique  que  l'archet  doit  détacher 
toutes  les  notes. 

STRETTE,  s.  f.,  en  italien  STRETTO.  Partie  dune  fugue  où  le 
sujet  est  traité  d'une  manière  plus  serrée  qu'au  commencement. 
Ce  mot  vient  de  reUretlo  ,  serré  (voy.  ch.  xii). 

On  se  sert  aussi  du  mot  slrelte  pour  indiquer  le  mouvement  ac- 
céléré des  finales  d'opéra. 

STYLE,  s.  m.  On  se  sert  de  ce  mot,  en  parlant  de  la  musique,  pour 
désigner  le  caractère  distinctif  d'uue  composition  ou  du  talent 
d'un  exécutant.  A  Tégard  de  la  composition,  le  sljle  consiste 
particulièrement  dans  la  propriété  des  idées  par  rapport  au 
genre  du  morceau  et  «  la  pureté  dans  la  manière  d'écrire.  A  l'é- 
gard de  rexé<'Ution,  c'est  une  certaine  manière  individuelle  que 
l'artiste  s'est  faite,  et  qui  est  le  fruit  de  son  organisation  et  de  ses 
études. 

SUBSTITUTION,  s.  f.  Changement  de  note  dans  un  accord  (voy. 
ch.  xi). 

SUITE,  s.  f.  Nom  ancien  d'une  certaine  collection  des  morceaux 
pour  le  clavecin,  l'orgue,  etc.  Ces  suites  contenaient  des  fugues, 
des  préludes,  des  gigues,  allemandes,  etc.  On  a  les  .«uites  de 
Haendel  et  de  Bacli,  qui  sont  des  modèles  de  beautés  instrumen- 
tales. 

SUJET,  s.  m.  Thème  sur  lequel  on  écrit  une  fugue  {-noy.  ch. 
xii). 

SUPPOSITION  {accords  par).  Nom  par  lequel  on  désignait,  dans 
le  système  de  la  iaMe/onciamfnïa/»  de  Ran.eau,  certains  accords 
qu'on  faisait  provenir  de  notes  ajoutées  au-dessus  de  certains 
autres. 

SUSPENSION,  s.  f.  Retard  dans  la  résolution  d'une  ou  de  plu- 
sieurs notes  d'une  harmonie  ou  même  d'un  accord  entier  (voy. 
Pivlongation  et  Retard.  Yoy.  aussi  le  ch.  xi)- 

SYMPHONIASTE,  s.  m.  Compositeur  de  plain-ciiant. 

SYMPHONIE,  s.  f.  Dans  l'acception  générale  de  ce  mot,  il  signifie 
une  composition  pour  plusieurs  inslrumens;  mais  dans  l'usage 
habituel,  c'est  le  nom  d'une  œuvre  divisée  en  quatre  morceaux 


DE  MUSIQUE.  387 

pour  un  orchestre  complet.  Les  symphonies  de  Haydn,  de  Mo- 
zart et  de  Beethoven  sont  connues  de  tout  le  monde  (voy. 
cb.  XTii). 

Les  Itiiliens  donnent  le  nom   de  simphonia  (symphonies)  aux 
ouvertures  de  leurs  opéras. 

SYMI'HO.ME  CONCERTANTE,  s.  f.  Morceau  concerté  pour 
plusieurs  instrumens  obligés  avec  accompagnement  d'orchestre. 

SYAlPHOMSTE,s.  m.  Musicien  dorchestre. 

SY>'COPE,  s.  f.  Liaison  de  deux  sons  semblables  dont  le  premier 
se  trouve  au  temps  faible  et  le  second  au  temps  fort  de  la  me- 
sure. On  donne  quelquefois  à  la  syncope  le  nom  de  ligature. 

SYSTEME,  s.  m.  Ce  mot  a  deux  acceptions.  Dans  la  première,  il 
signilJe  doctrine  de  l'ensemble  des  connaissances  musicales  ou 
de  quelque  partie  de  la  musique;  dans  l'autre,  c'est  la  disposi- 
tion de  l'échelle  musicale  d'un  peuple  ou  d'une  époque. 


TABLATURE ,  s.  f.  Manière  de  noter  la  musique  de  certains  ins- 
trumens, tels  que  le  luth,  le  clavecin,  l'orgue,  dans  les  seizième 
et  dix-septième  siècles,  afin  d'en  faciliter  l'impression,  la  com|>li- 
cation  de  ce  genre  de  musique  offrant  de  trop  grandes  difficul- 
tés par  les  caractères  ordinaires  de  musique,  à  une  é|)oque  où  la 
typographie  n'était  pas  avancée  sous  ce  rapport. 

Tablature  est  aussi  le  tableau  de  l'étendue  des  instrumens  à 
vent  et  à  trous  latéraux ,  et  du  doigté  de  ces  instrumens. 

TABLE  D'HARMOjVIE.  Partie  sonore  delà  caisse  des  instrumens 
à  claviers  et  à  cordes  pincées.  La  partie  sur  laquelle  on  appuie  le 
chevalet  des  violons,  violes  et  basse,  en  est  la  table  d  harmonie. 
Ou  l'appelle  simplement /a  table. 

TABLER ,  V.  act.,  un  violon  ,  une  basse,  etc.  C'est  coller  Id  tablesur 
les  éclisses  (voy.  ce  mot).  Détabler,  c'est  décoller  cette  table  pour 
corriger  quelque  défaut  de  l'instrument. 

TACET.  Mot  latin  qu'on  écrit  dans  la  musique  pour  indiquer  le  si- 
lence d'une  partie  pendant  un  morceau. 

TAILLE,  s.  f.  Nom  qu'on  donnait  autrefois  eu  France  à  la  voix  de 
ténor.  On  dit  encore  basse-taille,  qui  signifie  ténor  grave  ,  au  lieu 
de  dire  simplement  comme  les  Italiens  basse. 


388  DICTIONNAIRE 

TAMBOUR,  s.  m.  Instrument  de  percussion  dont  on  fait  particu- 
lièrement usage  dans  la  musique  militaire,  où  on  lui  donne  le 
nom  décaisse  pour  le  distinguer  de  celui  qui  en  joue,  et  auquel 
on  donne  aussi  le  nom  de  tambour.  Le  tambour  est  composé  d'une 
caisse  ronde  en  cuivre  ou  en  l)ois,  dont  les  extrémités  sont  cou- 
vertes d'une  peau  tendue  au  moyen  de  cerceaux  et  de  cordes. 
On  joue  du  tambour  en  le  battant  avec  deux  baguettes. 

TAMBOUR  (gros)  ou  grosse  caisse.  Tambour  de  grande  dimension 
qui ,  réuni  aux  cymbales  et  au  pavillon  chinois,  marquetés  temjis 
de  la  mesure  et  le  rhythme  dans  la  musique  militaire.  Celui  qui 
en  joue  le  porte  suspendu  horizontalement  et  frappe  une  des 
peaux  dont  il  est  recouvert  à  ses  extrémités  avec  une  baguette 
garnie  d'une  balle  de  peau. 

Rossini  et  les  musiciens  de  son  école  ont  introduit  le  gros 
tambour  dans  les  finales  et  dans  certains  autres  morceaux  d'o- 
péra. 

TAMBOUR  ROULANT  (voy.  Caisse  roulante). 

TAMBOUR  DE  BASQUE.  Petit  tambour  composé  d'un  cercle  de 
bois,  de  deux  à  trois  pouces  de  largeur,  avec  une  peau  tendue 
d'un  côté  du  cercle,  auquel  sont  attachés  des  grelots  et  des  lames 
de  métal.  La  peau  du  tambour  se  frappe  avec  le  dos  de  la  main, 
et  l'on  fait  résonner  les  grelots  soit  en  glissant  le  doigt  sur  la 
peau  du  tamijour,  soit  en  agitant  celui-ci. 

TAMBOURIN,  s.  m.  Tambour  d'un  diamètre  étroit,  mais  j)lus 
long  que  le  tambour  ordinaire,  dont  on  joue  dans  la  Provence 
pour  marquer  le  rhythme  de  la  danse.  Celui  qui  en  joue  avec 
une  seule  baguette  le  tient  suspendu  à  la  main  qui  tient  aussi 
le  galoubet  sur  lequel  il  exécute  les  airs  de  danse. 

Tambourin,  s.  m.  C'est  aussi  le  nom  d'un  air  de  danse  qui  n'est 
plus  en  usage. 

TAM-TAM,  s.  m.  Instrument  de  percussion  originaire  de  la  Chine 
et  de  l'Inde,  composé  d'un  grand  plateau  de  mélauge  métalli- 
que dont  le  son  est  très  fort  et  se  fait  entendre  long-temps.  On 
s'en  sert  dans  certains  effets  sombres  de  la  musique  dramatique. 

TARENTELLE,  s.  f.  Air  de  danse  napolitain  d'un  caractère  gai, 
en  mesure  à  deux  temps.  Cet  air  est  court,  mais  on  le  recom- 
mence plusieurs  fois. 

TARENTISME  ,  s.  m.  Maladie  qu'on  suppose  être  occasionnée  par 
la  piqûre  d'une  sorte  d'araignée,  nommée  tarentule,  qui  se  trouve 


DE  MUSIQUE.  389 

dans  le  royaume  de  Naples,  et  qui,  dit-on,  ne  peut  être  guciio 
que  par  la  musique.  Les  dernières  observations  des  médecins 
ont  démontré  que  la  maladie  et  la  guérisou  ne  sont  que  des 
spéi'idations  de  charlatans. 

TASTO  SOLO  (<i  louche  seule).  Mots  italiens  qu'où  écrivait  autre- 
fois dans  la  partie  de  l'organiste,  pour  lui  faire  connaître  qu'il 
ne  devait  pas  accompagner  la  basse  par  les  accords  de  la  main 
droite. 

TEMPÉRAMENT,  s.' m.  Égalisation  approximative  des  demi- 
tons  chromatiques  de  l'éclielle  musicale,  que  les  accordeurs  de 
pianos  et  d'orgue  obtiennent  en  altérant  un  peu  la  justesse  ab- 
solue de  tous  les  intervalles  (voy.  ch.  xi). 

TEMPO  DI  MARCIA.  Moiwement  de  marche;  —  DE  MTNUETTO, 
de  menuet  ;  —  GIUSTO,  modéré.  Indications  de  mouvement 
qu'on  place  en  tête  de  quelques  morceaux  de  musique. 

TEMPS ,  s.  m.  Durée  d'une  certaine  portion  de  la  mesure  musicale. 
Une  mesure  est  à  deux,  à  trois  ou  quatre  temps,  selon  qu'où 
mesure  une  certaine  quantité  de  notes  d'une  valeur  déterminée, 
en  deux,  trois  ou  quatre  parties.  La  rapidité  ou  la  lenteur  des 
temps  dépend  du  moucemeril  (voy.  ce  mot.  Voy.  aussi  Mesure  et 
ch.  vi). 

TEMPS  FAIBLE.  On  appelle  ainsi  les  temps  pairs  de  chaque  me- 
sure; ainsi,  dans  les  mesures  à  deux  et  à  trois  temps,  le  second 
est  le  temps  faible  ;  dans  la  mesure  à  quatre  temps,  le  second 
et  le  quatrième  sont  fiiililes. 

TEMPS  FORT.  Temps  impairs  de  chaque  mesure;  ainsi  dans  la 
mesure  à  deux  temps,  c'est  le  premier  qui  est  fort;  dans  la  me- 
sure à  trois  et  quatre  temps,  le  premier  et  le  troisième  sont 
forts.  C'est  sur  le  temps  fort  que  se  placent  les  syllabes  longues  et 
accentuées. 

TENOR,  s.  m.  Voix  d'homme  dont  l'étendue  est  la  même  à  peu 
près  que  le  soprano ,  une  octave  plus  bas.  Au  reste ,  cette  étendue 
varie  selon  les  individus. 

TENUE ,  s.  f.  Note  soutenue  pendant  un  certain  nombre  de  me- 
sures. 

TERNAIRE,  adj.  Composé  de  trois  unités.  La  mesura  lema&e  est 
celle  qui  est  divisée  en  trois  temps  ;  le  temps  ternaire  est  celui  qui 
est  fractionné  par  trois  notes  (voy.  ch.  vi). 

TERPODIUM,  s,  va.  Instrument  de  l'espèce  des  clavi- cylindres. 


390  DICTIONNAI&E 

inventé  vers  1817,  par  M.  Jean  David  Bascbmano  de  Friede» 
ric-hsrode,  près  de  Gotba. 

TERZETTO,  s.  m.  (voy.  Trio). 

TÉTRACORDE,  s.  m.  Suite  de  quatre  sons  par  laquelle  les  Grecs 
divisaient  l'étendue  générale  de  leur  érbelle  musicale.  Par  cxem~ 
pie,  lU,  rè,  mi,  fa  ,  composaient  un  tétracorde. 

THEME,  s.  m.  Sujet  que  le  musicien  entreprend  de  traiter  dans 
une  composition.  La  première  phrase  d'un  air  en  est  le  thème. 
Le  thème  d'une  fugue  s'appelle  sujet  (voy.  ce  mot). 

THÉORBE,  s.  m.  Instrument  à  cordes  de  la  famille  des  luths,  in- 
venté au  commencement  du  seizième  siècle,  par  un  musicien  ita- 
lien nommé  Rardella.  Le  théorhe  est  jilus  grand  que  le  luth  et  a 
deux  têtes,  l'une  pour  les  cordes  qui  se  doigtent  sur  le  manche, 
l'autre  pour  les  grosses  cordes  qui  servent  pour  les  basses  et 
qui  se  pincent  avide.  Le  dictionnaire  de  l'académie  a  con- 
servé l'ancienne  manière  d'écrire  le  nom  de  cet  instrument: 
tuorbe. 

TIERCE ,  s.  f.  Intervalle  consounant  qui  se  divise  en  quatre  sortes  : 
1°  la  tierce  mineure,  formée  d'un  ton  et  demi;  la  tierce  majeure, 
iomposée  de  deux  tons;  la  tierce  augmentée ,  qui  renferme  deux 
tons  et  demi,  et  la  tierce  diminuée ,  composée  de  deux  demi- 
tons  inégaux. 

TIERCE  DE  PICARDIE.  On  donne  quelquefois  ce  nom  à  la  tierce 
majeure  qui  terminait  souvent  des  morceaux  de  musique  d'é- 
glise en  mode  mineur. 

TIERCE.  Jeu  d'orgue  qui  sonne  la  tierce  au-dessus  du  prestant. 

TIMBALES,  s.  f.  pL  Bassins  semi-sphériques  en  cuivre,  recoa- 
verts  d'une  peau  qui  se  tend  par  un  cercle  en  fer  et  des  vis.  C'est 
par  ces  vis  que  se  change  l'intonation  des  timbales  au  moyen 
d'une  tension  plus  ou  moins  forte  des  peaux.  Les  timbales  se 
jouent  avec  des  baguettes  de  bois  dur  pour  obtenir  des  sons 
forts;  pour  les  effets  doux  on  a  des  baguettes  recouvertes  en 
jjeau.  Les  timbales  sont  ordinairement  au  nombre  de  deux  ; 
on  les  accorde  de  manière  à  souuer  la  tonique  et  la  dominanlt 
fvoy.  ces  mots)  des  morceaux  où  on  les  emploie. 

T[.MB.VLIER,  s.  m.  Musicien  qui  joue  des  timbales. 

TIMBRE,  s-  m.  Son  d'une  cloche  ,  d'une  lame  métallique  ou  d'un 
ressort  dont  l'intonation  peut  être  appréciée. 

TIMBRE  est  aussi  la  qualité  sonorç  d'un  instrument  ou  d'une  ?oin. 


DE  MUSIQUE.  391 

On  dit  :  Ce  violon  a  du  timbre;  cette  voix  est  bien  timbrée.  On  dit 
aussi  d'uuu  voix  pénétrante,  qu'elle  a  un  timbre  métallique. 

On  donne  encore  le  nom  àe  timbre  ?i.  la  double  corde  à  boyau 
•    jdacée  contre  la  peau  inférieure  du  tambour   et  qui  vibre  avec 
elle. 

TIMBRES,  s.  m.  Nom  que  les  vaudevillistes  douneut  aux  airs 
connus  sur  lesquels  ils  composent  leurs  couplets. 

TIRADE,  s.  f.  Ancien  nom  d'une  suite  de  plusieurs  notes  diato- 
niques de  même  valeur,  en  montant  ou  en  descendant. 

TIRANA,  s.  f.  Cliauson  espagnole,  à  trois  temps,  d'un  raouve. 
ment  modéré  et  d'un  rliyllime  syncopé. 

T1R.A.SSE,  s  f.  Clavier  de  pédale  d'orgue  qui  n'a  point  de  som- 
mier particulier,  et  qui  ne  parle  qu'eu  accrochant  les  notes  de 
la  basse  du  clavier  à  la  main. 

TIRA-TUTTO.  Registre  qui  ouvre  tous  les  jeux  de  l'orgue  à  la 
fois  et  qui  épargne  à  l'organiste  la  peine  de  les  ouvrir  succès- 
sivement. 

TOCCATE,  s.  f.  Pièce  composée  pour  le  clavecin  ou  le  piano.  Ce 
mot  vient  de  toccare  (  toucher).  La  toccate  diffère  de  la  sonate 
en  ce  qu'elle  n'est  souveut  composée  que  d'un  seul  morceau. 

TON,  s.  m.  Ce  root  a  plusieurs  acceptions  en  musique.  Dans  la 
première,  c'est  la  distance  qui  se  trouve  entre  deux  notes  dia- 
toniques, comme  ut  et  ré.  Le  ton  se  divise  en  deux  demi-tons. 
Dans  la  seconde,  c'est  la  constitution  d'une  gamme  quelconque 
avec  les  signes  qui  la  caractérisent,  tels  que  les  dièses  elles 
bémols.  Ainsi  l'on  dit  qu'une  musique  est  dans  le  ton  de  ré  ou 
de /a,  etc.,  selon  qu'elle  est  écrite  dans  les  conditions  des 
gammes  de  ré  ou  de  fa;  enfin,  le  ton  est  le  degré  d'élévation 
ou  d'al)aissement  d'un  instrument  résultant  de  sri  construction 
ou  de  son  accord.  Quelques  personnes,  peu  familiarisées  avec  le 
vocabulaire  de  la  musique,  se  servent  aussi  du  mot  ten  dans 
une  fausse  acception  en  le  jjrenant  pour  synonyme  de  fon.  C'est 
ainsi  qu'elles  disent  un  ton  faux  pour  un  son  faux. 

TONAL,  ALE,  adj.  Qui  estçonforme  au  ton.  Une  fugue  tonale  est 
une  fugue  qui  fiiit  entendre  dans  le  sujet  et  la  réponse  les  notes 
principales  du  ton,  c'est-à-dire  la  tonique  et  la  dominante  (  voy. 
ces  mots  ). 

TONALITE,  s.  f.  Propriété  constitutive  des  tons  et  des  modes  qui, 
dans  la  musique  modeiuc,  résulte,  quant  au  ton,  du  nipport  de 


392  DICTIONNAIRE 

la  noie  sensible  (  voy.  ce  mot  )  avec  le  quatrième  degré,  et, 
quant  au  mode  (voy.  ce  mot),  de  la  nature  de  la  tierce  et  de 
la  sixte  de  la  tonique  (voy.  ce  mot).  A  l'égard  du  plain-cliant, 
la  tonalité  se  détermine  par  la  position  de  la  dominante  (  voy.  ce 
mot)  et  de  la  finale  (  voy.  Plain-chanl). 

TONIQUE,  s.  f.  Première  note  de  la  gamme  du  ton  dans  lequel 
est  composé  un  morceau  de  musique. 

TONS  DU  PLAIN-CHANT.  Ils  sont  au  nombre  de  huit,  dont 
quatre  ont  la  dominante  à  la  quinte  supérieure  de  la  tonique  et 
sont  appelés  authentiques  ;  ce  sont  les  lef,  3e,  5e  et  ^e  tons; 
et  quatre  ont  la  dominante  à  la  quarte  supérieure  de  la  tonique 
et  sont  appelés  plagaux;  ce  sont  les  2e,  4^;  6e  et  8e  tons  (voy. 
Plaùi-chant^. 

TONS  DU  COR  ET  DE  LA  TROMPETTE.  Les  tons  du  cor  et  de 
la  trompette  sont  des  tubes  qu'on  ajoute  à  l'instrument  et  dont 
le  développement  plus  ou  moins  grand  hausse  ou  baisse  le  ton 
général  de  manière  à  fournir  des  gammes  en  ut,  ré,  mi  V  ,  etc. 
(  voy.  chap.  xix). 

TOUCHE,  s.  f.  La   touche  des  instrumens  à  archet  est  la  jiartie 

supérieure  de  leur  manche  recouverte  en  ébène,  et  sur  laquelle 

les  doigts    appuient   les   cordes  pour  varier  leurs  intonations. 

Les  touches  du  clavier  du  piano  ou  de  l'orgue  sont  les  leviers 

sur  lesquels  les  doigts  agissent  pour  faire  parler  les  notes. 

Les  touches  de  la  guitare  sont  les  filets  d'ivoire  qui  traversent 
le  manche  et  qui  marquent  les  positions  où  il  faut  mettre  les 
doigts  pour  former  les  intonations. 

TRAIT,  s.  m.  On  donne  ce  nom  à  certaines  suites  de  notes  ra- 
pides qu'on  exécute  sur  les  instrumens  ou  avec  la  voix.  C'est  eu 
ce  sens  qu'on  dit  des  traits  bnllans,  des  traits  difficiles. 

On  donne  aussi  le  nom  de  traits  à  des  phrases  mélodiques  ou 
à  des  successions  d'harmonie.  Ce  trait  de  chant  est  joli;  ce  trait 
d'harmonie  est  bien  écrit. 

TRANSITION,  s.  f.  Passage  inattendu  d'un  ton  à  un  autre.  La 
transition  est  une  des  parties  de  la  modulation. 

TRANSITION  ENHARMONIQUE.  C'est  celle  dans  laquelle  une 
ou  plusieurs  notes,  après  avoir  été  entendues  comme  apparte- 
nant a  un  ton,  changent  tout  à  coup  de  nature  et  se  transfor- 
ment en  notes  d'un  autre  ton. 

TRANSPOSER  ,  v.  a.  Noter  ou  exécuter  à  première  vue  un  mor- 


DE  MUSIQUE.  393 

«•eiiu  de  musique  dans  un  autre  ton   que  celui  où  il  est  écrit, 
TUAISSPOSITIDN,  s.   f.  Opération  jiar  laquelle  on  change  de  ton 
un  morceau  de  musique.  Cette    ojiératiou  offre  quelques  diffi- 
cultés et  exige  de  l'habitude  pour  être  bien  faite, 
TREMOLANDO.   Mot  italien  qui  indique  la  nécessité  de  mouvoir 

rapidement  l'archet  sur  une  même  note. 
TREMOLO   {iremblement)  .  Mouvement    rapide  et   continu  sur 

une  note. 
TRIANGLE,  s.  m.  Instrument  de  percussion  formé  d'une  tringle 
de   fer   pliée  en  forme  de  triangle,  sur  laquelle  on  frappe  avec 
une  verge  courte  de  même  métal  et  dont  le  son  a  quelque  rap- 
port avec  celui  d'une  sonnette. 
TRILLE,  s.  m.  Mouvement  accéléré  de  deux  notes  voisines  dans 
lequel  l'instrumentiste  ou  le    chanteur  passe  avec;  rapidité  de 
l'une  à  l'autre.  On  donnait  autrefois  improprement  au  trille  le 
nom  de   cadence,  et  quelques  personnes  ont  conservé  cette  ha- 
bitude vicieuse. 
TRIO,  s.  m.  Composition  pour  trois  voix  ou  trois  instrumeîis.  Le 
trio  instrumental  est  difficile  à  traiter  pour  produire  de  l'effet. 
Le  trio  vocal  est  presque  toujours  accompagné. 
Trio.  L'un  des  quatre  morceaux  de  la  symphonie. 
TRIOLET,  s.  m.  Groupe  de  trois  notes  représentant  une  division 

ternaire  de  temps  musical. 
TRITON,  s.  m.  Nom  de  la  quarte  majeure,  composée  de  trois  tons, 
et  de  l'accord  dans  lequel  cet  intervalle  entre  comme  élément. 
TROMBA.  Nom  italien  de  la  trompette. 

TROMBONE.  Nom  d'un    instrument  du   genre  de  la  trompette, 
mais  beaucoup  plus  grand,   et  dont  on  modifie  les  intonations 
en  allongeant    ou    raccourcissant   son    tube    au    moyen    d'une 
pompe  à   coulisse.  Il  y  a  trois  trombones;   le  plus   petit  est  le 
trombone  alto,    le  moyeu  le  trombone  ténor,  et  le  plus  grand  le 
trombone  basse;  trombone  est  l'augmentatif  de  tromba. 
TROMBONISTE,  s.  m.  Musicien  qui  joue  du  trombone. 
TROMPE,  s.  m.  Cor  dont  on  se  sert  à  la  chasse;  le  ton  en  est  dur 
et  rauque.  On  donnait  autrefois  à  cet  instrument  le  nom  de  cor 
de  chasse. 
TROMPETTE,  s.  f.  Instrument  de  cuivre  qui  servit  d'abord  à  la 
guerre  et  qu'on  a  introduit  ensuite  dans  l'orchestre.  Ainsi  que 
le  cor  ,  la  trompette  peut  changer  de  ton  au  moyeu  de  tubes 


894  DICTIONHAIRE 

supplémeDtaires  appelés  tons  (voy.  ce  mot);  mais  chaque  ton  ne 
fournit  qu'un  c-ertain  nombre  dénotes;  les  autres  ne  se  trouvent 
pas  dans  l'instrument.  Pour  olivier  à  cet  inconvénient,  M.  Hal- 
liday.  Anglais,  a  imaginé  d'adapter  des  clefs  à  la  trompette  (voy. 
Bugte-Horn).  Cette  addition  de  clefs  ayant  changé  la  nature  de 
l'instrument,  ou  a  essayé  depuis  de  faire  une  trompette  à  cou- 
lisse, dans  le  genre  du  trombone;  mais  le  meilleur  moyen  dont 
on  s'est  servi  est  celui  du  piston  qui  permet  de  faire  toutes  les 
notes  de  la  gamme  chromatique  en  sons  ouverts. 

TROMPETTE.  Jeu  d'orgue  de  la  classe  des  jeux  d'anches.  Les 
tuyaux  de  ce  jeu  sont  en  étain  et  d'une  forme  conique;  le 
son  qu'ils  rendent  a  delà  force  et  du  mordant,  (voy.  chap.  xv). 

TROMPETTE,  s.  m.  Nom  de  celui  qui  joue  de  la  trompette  dans 
la  cavalerie, 

TROMPETTE  MARINE,  s.  f.  Instrument  monté  d'une  seule  corde 
très  grosse  qa'on  joue  avec  un  archet  en  appuyant  dessus  le 
pouce  de  la  main  gauche;  la  forme  de  cet  instrument  est  fort 
allongée  et  son  dos  est  arrondi  en  poire. 

TROMPETTISTE,  s.  m.  Musicien  qui  joue  de  la  trompette  dans 
les  orchestres. 

TUTTI  {tous).  Mot  italien  par  lequel  ou  distingue  dans  lu  musique 
ce  qui  doit  être  exécuté  par  tous  les  instrumentistes  ou  tous  les 
chanteurs  de  ce  qui  est  réservé  comme  solo. 

TUYAUX  D'ORGUE.  Tubes  de  bois,  d'étain  ou  d'un  mélange  mé- 
tallique appelé  étoffe,  qui  rendent  des  sons  lorsque  le  veut  des 
soufflets  y  est  introduit  (voy.  cliap.  xv). 

TYMPAINON,  s.  m.  Instrument  à  cordes  ayant  la  forme  d'un  tra- 
pèze. Il  est  monté  de  cordes  d'acier  qu'on  frappeavecde  petites 
baguettes  recourbées  vers  le  bout. 

TYROLIENNES,  s.  f.  Mélodies  originaires  du  Tyrol,  dont  toute 
l'harmonie  ne  consiste  qu'en  deux  accords.  Son  mouvement  est 
modéré,  et  sa  mesure  est  à  trois  temps. 

u 

UNDA-MARIS.  Nom  de  registre  d'orgue  de  huit  pieds,  accordé 
un  peu  plus  haut  que  les  autres  jeux  et  formant  à  cause  de  cela 
une  sorte  de  battement  avec  eux,  qui  a  quelque  analogie  avec  le 
tnouvemeut  des  floti. 


DB  MUSIQUE.  395 

UNISSON,  ».  m.  Harmonie  de  deux  sons  dont  l'intonation  est 
absolument  la  mûrae.  On  plaçait  autrefois  l'anissoo  parmi  les 
intervalles;  c'éliiit  une  erreur,  car  il  n'y  a  point  de  distance  entre 
deux  sons  semlilables. 

UNISSOINI,  ou  en  abrégé  UNIS,  écrits  dans  une  partition  à  la 
partie  vide  du  second  violon,  de  la  deuxième  flùte,  du  second 
hautbois,  etc.,  indiquent  que  ces  parties  doivent  jouer  à  l'unis* 
son  avec  la  première  partie  de  Tinstrument  de  leur  espèce. 

UOMO  (primo).  Nom  par  lequel  on  désigne  quelquefois  un  so- 
praniste  castrat. 

URANION,  s.  m.  Instrument  à  clavier  inventé  en  1810,  dans  la 
Saxe,  par  un  musicien  nommé  Buscliiiiann.  Cet  instrument  a 
quelque  resseml)liiiice  avec  le  mé/odion  ;  sa  longueur  est  de  quatre 
pieds,  sa  largeur  de  deux,  sa  bauteur  d'un  pied  et  demi;  son 
étendue  totale  est  de  cinq  octaves  et  demie;  son  cyliudre,  couvert 
en  drap,  est  mis  en  mouvement  par  une  roue. 

UT.  Première  note  de  la  gamme  de  ce  nom,  et  l'una  des  syllabes 
qui  servent  à  la  solmisation.  On  la  remplace  souvent  par  do, 
qui  est  plus  doux  à  prononcer  en  chantant. 


VALEUR  DES  NOTES.  Durée  relative  de»  sons  résultant  de  la 
figure  des  notes.  C'est  ainsi  qu'on  dit  que  la  ronde  vaut  deux 
blanches,  la  blanche  deux  noires,   etc.,  etc.    (voy.  cb.  ti). 

VALSE,  s.  f.  Air  de  danse  à  trois  temps  sur  lequel  deux  danseurs, 
qui  se  ticnuent  embrassés,  pirouettent  saus  cesse.  La  valse  est 
originaire  de  l'Allemagne. 

VARIATIONS,  s.  f  pi.  Broderies  de  différens  genres  qu'on  fait 
sur  une  mélodie  de  choix.  Les  variations  sont  à  j)eu  près  la  $eule 
musique  de  piano  qui,  aujourd  liui,  a  quelque  chance  de  succès; 
mais  il  y  a  lieu  de  croire  qu'on  reviendra  à  des  choses  plus 
sérieuses. 

VAUDEVILLES,  s.  m.  Airs  qui  servent  à  chanter  des  couplets  dans 
les  pièces  auxquelles  ils  ont  donné  leur  nom.  Oa  dit  que  ce  genre 
d'air  français  fut  inventé  par  un  maître  de  moulin  à  foulon, 
nommé  Basselin,  du  Val-de-Vire  ;  qu'on  appela  ensijtite  ces  air» 
vanx-dt-virt,  d'où  est  venu  vaucffville. 


396  mcTioîfNAir.T' 

VEîfTRE,  s.  m.  Point  central  de  la  viùialiou  ùuue  oonL'  k,;.   it. 

Yir.RATION,  s.  f.  Ebranlement  des  diverses  parties  d'un  corps 
sonore  qui,  se  propageant  dans  l'air,  procure  à  l'oreille  la  sen- 
sation du  son.  L'éljraulement  dont  il  s'agit  établit  un  mouve- 
ment de  va  et  vient;  chacun  de  ces  mouveniens  est  une  vibration, 

VIELLE,  s.  f.  Instrument  à  corde  dont  l'origine  est  inconnue.  Il 
se  joue  au  moyen  d'une  roue  enduite  de  colophane  qu'on  fait 
tourner  plus  ou  moins  rapidement  par  une  manivelle.  Ses  into- 
nations se  font  an  moyen  des  touches  d'un  clavier  qui  presse  les 
cordes  contre  la  touche.  La  vielle  fut  un  instrument  fort  à  la 
mode  vers  le  milieu  du  dix-huitième  siècle. 

VIELLEUR,  VIELLEUSE.  Celui  ou  celle  qui  joue  de  la  vielle. 

VILLANCICO,  s.  m.  Air  espagnol  d'un  caractère  animé. 

VILL.OELLE,  s.  f.  Air  à  voix  seule  ou  à  plusieurs  parties,  origi- 
naire du  royaume  de  Naples.  Il  y  a  des  villanelles  composées 
pour  être  chantées  et  d'autres  pour  la  danse. 

VIOLE,  s.  f.  Instrument  de  musique  divisé  en  plusieurs  espèces 
au  on  appelait  j>ardeisus  ou  dessus  de  viole ,  viole ,  pToprement 
dite,  viole  bâtarde,  basse  de  viole  et  violone.  La  viole  ou  basse  de 
viole  fut  celui  de  ces  instrumens  dont  on  fit  le  plus  long-temps 
usage.  Elle  était  montée  de  sept  cordes  accordées  en  accord  par- 
fait. 

VIOLE  (quinte  ou  alto).  Instrument  accordé  à  la  quinte  inférieure 
du  violon,  et  qui  est  intermédiaire  entre  le  violon  et  la  basse.  On 
s'en  sert  communément  dans  l'orchestre. 

VIOLE  D'AMOUR.  Instrument  à  archet,  monté  de  sept  cordes 
accordées  en  accord  parfait  de  re  majeur.  Il  a  en  outre  sons  la 
touche  et  sous  le  chevalet  cinq  ou  six  autres  cordes  d'acier  ou  de 
laiton  qui  vibrentlorsqu'onjoue  à  vide  les  autres  cordes.  Les  sons 
de  cet  instrument  oat  quelque  rapport  avec  ceux  de  Vharmonica 
et  sont  agréables  à  l'oreille. 

VIOLON,  s.  m.  Instrument  à  arcliet,  monté  de  quatre  cordes,  ac- 
cordées ainsi  :  mi ,  la ,  ré,  sol  (voy.  ch.  xv). 

VIOLONISTE,  ou  VIOLINISTE.  Musicien  qui  joue  du  violon. 

VIOLONCELLE,  s.  m.  Instrument  à  cordes  et  à  archet,  qui  sert 
de  basse  au  violon.  Il  est  monté  de  quatre  cordes  accordées,  la, 
ré,  sol,  ut,  a  la  clef  de/a  (voy.  ch.   xv). 

VIOLONCELLISTE  ,  s.  m.  Musicien  qui  joue  du  violoncelle. 

VIOLONE,   s.  m.  Instrument  de  grandes^  dimensions,  qui   ser- 


DE  MUSIQUE.  39 1 

vait  autrefois  de  contrebasse  aux  différentes  espèces  de  violes. 

VIVACE,  vivement.  Ce  mot,  placé  au  commencement  d'un  mor- 
ceau de  musique,  iudique  un  mouvement  rapide. 

VOCAL,  ALE ,  adj.  Qui  appartient  à  la  voix.  Musique  vocale,  mu- 
sique pour  les  voix. 

VOCALISATION,  s.  f.  Art  de  diriger  la  voix  dans  le  mécanisme  du 
rliant,  au  moyen  d'exercices  exécutés  sur  une  voyelle. 

VOCALISER,  V.  a.  Exercer  la  voix  à  exécuter  avec  aisance  les  dif- 
ficultés de  l'art  du  chant. 

VOILE  DU  PALAIS.  Partie  suj>érieure  de  l'intérieur  de  la  bou- 
ille ,  dont  l'action  modifie  la  uatuie  des  sons. 

AOILE,  VOILEE.  Se  dit  de  l'organe  de  la  voix  dont  les  sons 
manquent  naturellement  d'éclat.  Cela  se  dit  aussi  des  instru- 
meus  :  Ce  violon  a  un  timbre  voilé. 

VOIX,  s.  f.  Organe  qui  produit  le  son  de  la  parole  et  du  chant,  et 
dont  le  siège  est  placé  dans  le  larynx. 

A'OIX  ANGELIQUE.  Ancien  jeu  d'orgue  à  anche  qui  a  été  aban- 
donné a  cause  de  sa  qualité  de  son  criarde. 

\  OIX  HUMAINE.  Jeu  d'orgue  ainsi  nommé  à  cause  de  sa  res- 
semblance avec  la  voix  de  l'homme  (voy.  ch.  xv). 

VOLATE,s.  f.  Nom  d'un  ancien  ornement  du  chant  qui  n'est  plus 
en  usage. 

V.  S.  Ces  deux  lettres,  placées  an  bas  d'une  page  de  musique, 
sont  l'abrégé  des  mots  ;  volll  subito  (tournez  vite). 


Z\.  Syllabe  dont  ou  se  servait  autrefois  pour  nommer  le  si  hémol. 


fîJt  DU  niCTrONNAtRE. 


34 


AVERTISSEMENT. 


FoRKEL  et  M.  LiCHTENTHAt  oat  publié  des  espèces 
de  Catalogues  raisonnes  de  tout  ce  qui  a  été  écrit  sur  la 
musique  dans  les  langues  anciennes  et  modernes,  sous 
le  titre  de  Littérature  générale  de  la  Musique  *.  La  dis- 
tribution qu'ils  ont  adoptée  pour  l'ordre  systématique 
des  matières  n'est  pas  exempte  de  défauts;  cependant 
j'ai  cru  devoir  la  suivre  dans  ce  Catalogiie  des  livres  fran- 
çais qui  traitent  de  la  musique,  afin  que  les  personnes 
qui  voudront  étendre  leurs  connaissances  dans  la  littéra- 
ture musicale,  et  qui  auront  recours  aux  auteurs  dont  je 
viens  de  parler,  n'éprouvent  point  d'embarras  dans  les 
recherches  qu'elles  pourront  faire  dans  leurs  Bibliogra- 
phies. 

Le  Catalogue  que  je  donne  ici  offrira,  j'espère  ,  des 

renseignemens  utiles  à  beaucoup  d'amateurs  de  musique  ; 

j'ai  reçu  si  souvent  des  demandes  d'indications  partielles 

sur  les  diverses  branches  de  l'art  que  j'en  ai  reconnu  la 

nécessité. 


(i)  Allegemeine  Litteratur  di;r  Musik  odcr  Ànhitung  zur  Keuntniss 
Musikalischer  liucher  (Littérature  générale  de  la  iniisique  ou  intro- 
duftioQ  à  la  connaissance  des  livres  de  musique,  pjr  Forkel).  Leip- 
slck,  Schwikert,  1792,  in-80. 

Dizzionario  e  bibliographia  delta  musica  deldoUore  PielroLichten- 
thal.  Milan,  Âut.  Foutana,  1S26,  4to1.  ia-S°. 


CATALOGUE  SYSTEMATIQUE 

DES 

PRINCIPAUX  OUVRAGES  FRANÇAIS^, 

su  R   LES  DIVERSES  PARTIES  DE  LA.  MUSIQUE. 


CHAPITRE  I. 

ORIGINE,  ÉLOGE,   UTILITE,    EFFETS  DE   LA    MUSIQUE. 

GRESSET  (Jean-Biiptiste-Louis),  né  à  Amiens  en  1709,  mort  à 
Paris  en  1777.  Discours  sur  l'harmonie  (la  musique  en  général), 
Paris,  1737, in-S".  Ouvrage  de  peu  de -valeur 

TELTN  (Guillaume),  né  à  Cusset,  en  Auvergne,  dans  les  premières 
années  du  seizième  siècle:  la  Louange  de  la  Musique.  Paris, 
i533,  in-40. 

YPiIARTE  (D.  Thomas  de).  La  Musique,  poème  traduit  de  l'espa- 
gnol par  J.-R.-C.  Grainville,  et  accompagné  de  notes  par  Langlé, 
membre  et  Lihliothécaire  du  Conservatoire.  Paris,  1799,   >i-i2. 

BORDENAVE  (M.).  La  Musique,  poème  eu  quatre  chants.  Paris, 
Lenormarid,  i8fl,in-8°. 

—  Réflexions  sur  la  musique,  ou  Recherches  sur  la  cause  des  ef- 
fets qu'elle  produit,  par  Y...  Paris,  Nyon,  1785,  în-12. 

BRIJON  (E.-R.).  L'Apollon  moderne,  ou  développement  intellec" 
tuel  par  les  sons  de  la  musique.  Paris  et  Lyon,  178 1,  in-8o. 
Livre  de  peu  de  valeur,  mais  basé  sur  une  idée  assez  originale. 

OLIVIER.  L'Esprit  d'Orphée,  ou  l'Influence  de  la  musique  sur  la 
morale  et  la  législation.  Paris,  Pougens,  1798,  92  pages  in-80. 
Brochure  où  se  trouvent  des  vues  utiles. 

ROGER  (Joseph-Louis),  né  à  Straslionrg,  médecin  à  Montpellier. 
Traité  des  effets  de  la  musique  sur  le  corps  humain,  traduit  du 
latin,  et  augmenté  de  notes  par  Etienne-Marie  de  Saint-Ursin , 

(l;  P.ir  les  pi inripnuxouvrogesy  on   u'tntend  point  p.irlcr  des  plus  yolumlneuï, 
niait  d<  ceux  4ui  reufernieot  le  plut  de  faits,  de  renteiguciuens  ou  de  tu«9  utiles. 


400  CATALOGUE 

niéJecin  de]MontpelHer.  Paris,  Treuttel  et  Wiirtz,  i8o3,  in-S". 

Excellent  ouvrage  qui  contient  ce  qu'on  a  écrit  de  mieux  sur 
cette  matière. 

DEBOUT  (Louis).  Sur  l'effet  de  la  musique  dans  les  maladies 
nerveuses,  traduit  de  l'italien.  Pétersliourg,  17S4,  in-S». 

GTJIAUD  fils,  docteur  en  médecine  de  la  faculté  de  Paris.  Consi- 
dérations littéraires  et  médicales  sur  la  musique,  lues  à  la  séame 
publique  de  la  société  de  médecine  de  Marseille.  Marseille, 
i8t6,  in-i2. 

MAJON  (Benoît).  Mémoire  sur  l'utilité  de  la  musique  dans  l'état 
de  sauté  et  dans  celui  de  maladie,  traduit  de  l'italien  par  le  doc- 
teur Muggetti  de  Pavie.  Paris,  i8o3,  in-80. 
Bon  ouvrage  de  peu  d'étendue. 


CHAPITRE  II. 

LITTÉRATURE    DE    l'hISTOIRE   DE  LA  MUSIQUE. 

I.  Histoire  générale. 

BONNET  (Pierre)  et  BOURDELOT.  Histoire  de  la  musique  de- 
puis son  origine,  les  progrès  successifs  de  cet  art  jusqu'à  présent 
et  la  comparaison  de  la  musique  italienne  et  de  la  musique 
française.  La  Haie,  1743,  4 '^'ol- in-i^. 

Ouvrage  superficiel  et  mal  fait,  si  on  le  considère  comme  une 
histoire  de  la  musique,  mais  qui  fournit  desrenseignemens  utiles 
sur  la  musique  du  temps  de  Louis  XIV  et  particulièrement  sur 
Lulli.  La  Comparaison  de  la  musique  italienne  avec  la  mu.sique 
française,  qui  forme  les  deux  derniers  volumes,  est  d'un  autre 
auteur  nomme  Lecerf  de  la  Vieuvillede  Fresneuse. 
BLAINVILLE  (Charles-Henri  de).  Histoire  générale,  critique  et 
philologique  delà  musique.  Paris,  Pissot,  1767,  in-4°. 

Livre  rempli  de  préjugés  et  dépourvu  de  critique,  mais  quia 

conservé  quelque  valeur  dans  le  commerce. 

ROUSSIEPi  (l'abbé).  Mémoire  sur  la  musique  des  anciens,  où  l'on 

expose  les  principes  des  proportions  authentiques,  dites  de  Py- 

thagore,  et  de  divers  systèmes  de   musique  chez  les  Grecs,  les 

,    Chinois  et  les  Egyptiens.  Paris,  Lacombe,  1770,  iii-4o> 


SYSTÉMATIQUE.  401 

Ouvrage  où  il  y  a  de  l'esjirit  de  recherclie,  mais  qui  a  pour 
base  un  système  faux. 

LA  BORDK  (Jeaii-Beujamiii  de),  premier  valet  de  cliamlirc  de 
Louis  XV,  né  en  I7')iîi  mort  le  20  juillet  179.1.  Essai  sur  la  mu- 
sique ancienne  et  moderne.  Paris,  Onfroy,  r7So,  4  vol.  iu-',". 

rollertiou  de  1  fnseigiiciiKJiis  sur  toutes  les  iKirlies  de  la  mu- 
sique, faite  sans  ordre  et  remplie  d'erreurs,  mais  oîi  l'on  trouve 
beaucoup  de  elioses  curieuses  et  utiles. 

RALKBEîNiNER  (Chrétien),  i-ompositeuretécrivaiusur  la  musique, 
né  à  Cassel  en  1755,  mort  à  Paris  en  1806.  Histoire  de  la  mu- 
sique. Paris,  Delavau,  1S02,  2  vol.  iu-So  en  un. 

Cet  ouvrage  est  particulièrement  relatif  à  la  musi<iue  des  Hé- 
breux et  des  Grecs. 

BAWR  (Madame  de).  Histoire  (al)régée)  de  la  musique.  Paris, 
182'i,  Andot,  I  vol.  in-r2. 

Ce  petit  volume  fait  partie  de  V Encyclopédie  des  Dames. 

EETIS  (Franc. -Jos.).  Curiosités liistoriques  de  la  musique,  complé- 
ment nécessaire  de  la  Musique  mise  a  la  portée  de  tout  le  monde, 
Paris. Janet  et  Cotelle,  i,S3o,  in-Sn. 

STAFFORD.  Histoire  delà  musique,  traduite  de  l'anglais  par  ma- 
dame Adèle  Fétis,  ave<;  des  notes,  des  additions  et  des  correc- 
tions par  M.  Fétis.  Paris,  Paulin,  1802,  i  vol.  in-12. 

II.  Histoire  de  la  musique  des  peuples  anciens. 

VILLOTEAU  (.I.-A.).  Mémoires  sur  la  musique  des  anciens  Egyp- 
tiens et  sur  les  instrumens  de  musique  du  même  peuple. 

Ces  Mémoires,  remplis  de  reclierclies  et  de  choses  excellentes, 
se  trouvent  dans  les  deux  éditions  de  la  Description  delEg/pte, 
etc.,  publiée  aux  frais  du  Gouvernement  fr.incais  et  [>ar  M.  Pan- 
kotike. 

AMIOT  (le  P.),  jésuite,  missionnaire  <à  la  Chine.  Mémoire  sur  la 
musique  des  Chinois  tant  anoiciis  que  modernes.  Paris,  l'^So, 
in-40. 

Cet  ouvrage  forme  le  (ie  volume  de  la  <iillectiou  qui  a  pour 
titre  :  Mémoires  concernant  l'hisloire,  les  sciences,  les  arts,  etc.,  des 
Chinois,  par  les  missionnaires  de  Péhin. 

CALMET  (Augustin).  Dissertation  sur  lu  musique  des  anciens  et 
particulièrement  des  Hébreux. 

34. 


402  CATALOGUE 

Cette  dissertation  se  trouve  dans  le  Commentaire  littéral  sur 
la  Bible,  de  cet  auteur.  Amsterdam,  X723,  in-S",  t.  IV,  p.  46-52. 

COISTAINT  DE  LA  MOLLETTE  (Philii.pe).  Traité  sur  la  poésie 
et  la  musique   des  Hélireux,    pour   servir  d'introduetion   aux 
psiiuraes  expliqués.  Paris,  Moutard,  17S1,  in-So. 
Ouvrage  très  faible. 

GIRAL'LT  (Claude-X;ivier).  Lettre  à  Millin  sur  la  musique   des 
Hébreux  et  sur  l'iincienneté  de  la  musique  dans  les  églises. 
Dans  le  M:igasin  encyclopédique,  1810,  t.  I,  p.  3l5. 

FRAGUIER  (l'abbé  Claude-François  ).  Examen  d'un  passage  de 
Platon  sur  la  musique.  Dans  les  Mémoires  de  l'Académie  des 
inscri|)tious  et  belles-lettres,  t.  IIL  p.  rrS. 

BURETTE  (Jean-Pierre).  Mémoires  et  dissertations  sur  la  mu- 
sique  des  Grecs.  Dans  les  Mémoires  de  l'Académie  des  inscrip- 
tious,  t.  IV,  p.  ir6;  t.  V,  p.  i33,  iSa,  169,  200;  t.  VIII,  p.  1, 
44.  63, 80;  t.  X,  p.  3,  i8o-3io:  t.  XVII,  p.  61-106,  106-126. 

Toutes  ces  dissertations  contiennent  d'excellentes  choses  sur 
le  sujet  dont  il  s'agit,  et  l'on  y  trouve  une  érudition  ])rofonde. 

CHATEAL"ISEUF  (l'abbé  de  ^.  Dialogue  sur  la  musique  des  an- 
cieus.  Paris,  1725,  in-12. 
Ouvrage  superficiel. 

—  Observations  sur  la  musique,  la  flûte  et  la  lyre  des  anciens. 
Dans  la  Bibliothèque  française  publiée  par  l'abbé  Goujet,  t.  V, 
p.  i07-ic>.5.  Ces  observations  sont  relativesà  l'ouvrage  précédent. 

BOURGEAUT  (  le  P.  Guillaume  Hyacinthe  ),  jésuite.  Nouvelles 
conjectures  sur  la  musique  des  Grecs  et  des  Latins  (  dans  les 
Mémoires  de  Trévoux,  t.  XLIX  Juillet  1725,  et  dans  le  t.  VII 
de  la  Bibliothèque  française  ). 

BARTHELEMY  (  l'abbé  Jean-Jacques  ).  Entretiens  sur  l'état  de  la 
musique  grecque  vers  le  milieu  du  quatrième  siècle  avant  l'ère 
vulgaire.  Paris,  Debure,  1777,  in-S". 

DU  CERCEAU  (  Jean-Antoine),  jésuite.  Dissertation  adressée  au 
P.  Sanadon,  où  l'on  examine  la  traduction  et  les  remarques  de 
M.  Dacier  sur  un  endroit  d'Horace,  et  où  l'on  explique  par  oc- 
casion ce  qui  regarde  le  tétracorde  des  Grecs  (dans  les  Mé- 
moires de  Trévoux,  t.  LU,  p.  loo,  284,  6o5;  t.  LUI,  p.  1223, 
i42o;t.  LV,p   2oS5,  2189;  t.  LVI,  p.  69,234). 

ROUSSIER.  (l'abbé).  Lettre  à  l'auteur  du  Journal  des  beaux- 
arts  et  des  sciences,  touchant  la  divisioa  du  îodiaque,  l'mstitu- 


SYSTEMATIQUE.  403 

tion  de  la  semaine  plimétaire,  relativement  à  une  progression 
géométrique  d'où  dépendent  les  proportions  musicales.  Paris, 
l-j'i,  in-i2,  -i-J  pages. 

LA  SALETTE  (  V.  Joubert  de),  ancien  général  de  brigade,  ins- 
pecteur d'artillerie.  Considérations  sur  les  divers  systèmes  de  la 
musique  ancienne  et  moderne,  et  sur  le  genre  enliarmonique 
des  Grecs,  avec  une  dissertation  préliminaire  relative  à  l'origine 
du  chant,  delà  lyre  et  de  la  flûte  attribuée  à  Pan.  Paris,  Goujon, 
i8iu,  a  vol.  iu-S". 

PERZnE  (  François  ).  Dissertations  et  Mémoires  sur  le  système 
musical  et  la  notation  de  la  musique  des  Grecs  (  dans  la  Rei'ue 
Musicale,  publiée  par  M.  Fétis,  t.  III,  p.  433,  481  ;  t.  IV,  p.  aS, 
219;  t.  V,  p.  24  r,  553;  t.  VIII,  p.97;  t.  I.X,  p.  129  ). 

Travail  excellent  qui  contient  des  vues  neuves  et  beaucoup 
de  faits  intéressaus. 

SPON  (  Jacques).  Dissertation  des  cymbales,  crotales  et  autres 
instrumens  des  anciens  (  dans  les  R echerches  curieuses  d'anti' 
çufVe'^.Lyon,  i683,  p.  i4*i-i5S). 

FÉTIS    (  Franr.-Jos.  ).    Esquisse   de    l'histoire    des  instrumens  à 
cordes  pincées  (dans    le  g«  vol.  de  la  Reçue  Musicale,  p.  I,  1 1  ). 
Cet  article  est  seulement  relatif  aux  lyres  et  aux  cythares  des 
anciens. 

Sur  les  diverses  espèces  de  flûtes  de  l'antiquité  et  des  temps 
modernes  (dans  le]  (3^  vol.  de  la  Reçue  Musicale,  p.  8,  4q, 
iSa). 

Les  trois  articles  dont  il  s'agit  ne  concernent  que  les  flûtes 
des  anciens;  la  partie  relative  aux  flûtes  du  moyen-âge  et  des 
temps  modernes  n'a  point  été  publiée. 

Dissertation  sur  la  connaissance  que  les  anciens  ont  eue  de 
l'orgue  pneumatique  (  dans  le  3*  vol.  de  la  Revue  Musicale,  p. 
193)- 

BOTJGEA??T  (le  P.  Guitl. -Hyacinthe  ).  Dissertation  sur  la  récita- 
tion on  le  chant  des  anciennes  tragédies  des  Grecs  et  des  Ro- 
mains (dans  les  Mcmoires  de  Trévoux,  t.  LXVIII,  1735,  p.  24 S- 

279)- 

VATRY  (  l'abbé  ).  Dissert.ition  oii  l'on  traite  des  avantages  que 
la  tragédie  retirait  de  ses  chœurs  (  Voy.  Mémoires  des  inscrip- 
tions et  helles-lelires,  t.  VIII,  p.  199). 

PERRAULT  (  Charles  ).  Parallèle  des  anciens  et  des  modernesen 
ce  q«H  regarde  les  arts  et  les  sciences,  Paiis,  lôgS,  in-8". 


'404  CATALOGUE 

BEAUMONT  (  Saunier  de  ).  Lettres  sur  la  musique  ancienne  et 
moderne.  Paris,  i743,  in.12. 

BRUAUD  (  Anne-Joseph  ).  Essai  sur  les  effets  de  la  musique  chez 
les  anciens  et  chez  les  modernes.  Tours,   iSiS.in-S". 

CHABAXON  (  de  ).  Conjectures  sur  l'introduction  des  accords 
dans  la  musique  des  anciens  (dans  les  Mémoires  de  l'Acadcmie 
des  inscriptions  et  helles-lettres,  t.  XXXV,  1770,  p.  36o  ). 

ROCHEFORT  (  Guill.  de).  Recherches  sur  la  symphonie  des  an- 
ciens (dans  les  Mem.  del'Acad.  des  inscriptions  et  belles-lettres, 
t.  XLI,p.  365). 

JII.  Histoire  de  la  musique  du  moyen-âge. 

Snr  les  bardes  et  les  ménestrels  irlandais  (  dans  la  Revue  Musiiale, 
t.  III,  p.  393,  5o5  ). 

Sur  la  notation  musicale  des  treizième  et  quatorzième  siècles  (  dans 
la  Rei/ue  Musicale,  t.  III  p.  457  ). 

PERNE  (  François).  Sur  des  instrumens  de  mnsique  du  moyen- 
âge  et  sur  un  ouvrage  manuscrit  de  Jérôme  de  Moravie  (  dans  la 
Revue  Musicale,  t.  II,  p.  457»  4^1  )• 

—  Sur  l'ancienne  musique  des  chansons  du  châtelain  de  Coucy 
(dans  l'édition  des  Chansons  de  ce  poète  musicien,  publiée  par 
M.  Francisque  Michel.  Paris,  i83o,  grand  in-S°  ). 

PEGERINS  (  Boneton  de  Moranges  de  ).  Dissertation  sur  l'origine 
et  l'utilité  des  chansons,  particulièrement  des  vaudevilles  (  dans 
le  Mercure  de  France,  décembre  1704,  p.  2645,  2661  ). 

L'ÉVESQUE  DE  LA  RAVALIÉRE.  Discours  sur  l'ancienneté  des 
chansons  françaises  (  dans  les  Poésies  du  Roi  de  Xai'arre.  Paris, 
I745,t.  I,  p.  183  ). 

FEÏIS  (  Franc -Jos.  ).  Mémoires  sur  cette  question:  Quels  onl  éléles 
mérites  des  Néerlandais  dans  la  musique,  principalement  aux  qua- 
torzième, quinzième  et  seizième  siècles?  etc.  Question  mise  an 
concours  pour  l'année  1828  parla  quatrième  classe  de  l'Institut 
des  sciences  littéraires  et  beaux-arts  du  royaume  des  Pays-Bas. 
Amsterdam,  J.  MuUer  et  com])agnie,  1829,  in-4°  de  56  pages. 

—  Sur  la  vie  et  les  ouvrages  d'Adam  de  le  Haie,  trouvère  du  trei- 
zième siècle  (  dans  la  Revue  Musicale,  t.  I,  p.  6  ). 

—  Sur  les  anciens  airs  français  (  Revue  Musicale,  t.  III,  p.  36l  ). 

-—  Sur  un  manuscrit  de  la  bibliothèque  du  roi,  qui  contient  de  1^ 
musitjue  du  quatorzième  siècle  (Revue  musicale,  t.  XII, p.  266). 


SVSTLMATlQtlE.  403 

—  Recherches  sur  la  musique  des  rois  de  France  (  Revue  Musicale, 
t.  XII,  j).  i()3,  218,  233,  242,  257  ). 

—  Découvertes  sur  le  musicien  belge  Roland  Lassus  (ihid.,  t.  XII, 
p.  239). 

—  Sur  les  anciens  airs  écossais  (  Rei'ue  Musicale,  t.  XII,  p.  261  ). 

IV.  Histoire  de  la  musique  moderne.  * 

GANTEZ  (Annilial).  Eiilielicn  faniilirr  des  musiciens.  Auxerre, 
i<i/j3,  iu-8°.  Ouvrage  curieux  qui  contient  des  reiiseigncmeiis 
intéressaîis  sur  la  musique  du    ilix-.scj)tième  siècle. 

BURNEY  (Charles).  Etat  présent  de  la  musique  en  France,  en  Ita- 
lie, en  Allemagne  et  dausles  Pays-Bas;  traduit  de  l'anglais,  par 
Brack.  Gênes,  1809,   1810,  3  vol.  in-8°. 

Mauvaise  traduction   d'un  livre  rempli  de  faits  intéressans  et 
de  vues  judicieuses. 

ORLOFF  (le  comte  Grégoire).  Essai  sur  l'histoire  de  la  musique  en 
Italie,  depuis  les  temps  les  plus  anciens  jusqu'à  nos  jours.  Paris, 
Dufort,  1822.  2  vol.  in-S". 

Livre  de  peu  de  valeur.  ) 

FETIS  (  François-Joseph  ).  Etat  actuel  de  la  musique  en  Italie 
(dans  la  Revue  Musicale ,  t.  I,  p.  11, 63,  80,  lAg)- 

KANDLER.  Sur  l'état  actuel  de  la  musique  à  Rome;  traduit  de 
l'italien  (dans  la  Revue  Musicale,  t.  III,  p.  49.  73,  97). 

—  Etat  actuel  de  la  musique  à  INaples;  traduit  de  l'italien  [ibid.  t. 
IV,  p.  r,  49,  145). 

FETIS  (François-Joseph).  Etat  actuel  delà  musique  en  Allemagne 

(^ibid.  ,   t.  1 ,  221  ,  2y3  ,  347). 
STOEPEL  (Fraucois).   Eitat  actuel    de    la   musique  en  Allemagne 

(ibid.,t.  VI,  p.  i). 

—  Ohservations  sur  l'état  actuel  de  la  musique  à  Dresde  (ibid. ,  t. 
II,  p.  234). 

—  Sur  l'état  actuel  de  la  musique  à  Vienne  {ibid.,  t.  III,  p.  121). 

—  Etat  actuel  de  la  musique  à  Breslau  (_ibid.,  t.  VI,  p.  217). 
FETIS  (François-Joseph).   Etat  actuel  de  la   musique  en  France 

{ibid.,  t.  I,  p.  446,  485,  533,  55:). 
CASTIL-BLAZE.  La   chapelle-musique  des  rois  de  France.  Paris, 

Paulin,  i832,  I  vol.  in-i2. 
MÉNESTRIER  (Le  P.  Claude-François).  Des  représentations  ei» 

lousique,  auciennes  et  modernes,  Paris,  x68i],  ia-X2. 


406  CATALOGDS 

—  Lettres  historiques  sur  tous  les  spectacles  de  Paris,  Paris 
1719,  in-i2. 

Titres  concernant  l'Académie  royale  de  musique.  Paris,  iiZi,    ' 
in-4°. 

DUPDY.  Lettres  sur  l'origine  et  les  progrès  de  l'opéra  en  France 
(dan?  les  Àmusemens  du  cœur  et  de  l'esprit,  par  le  même  au- 
teur. La  Haye,  1741  >  in-12). 

N0I3SVILLE  (le  président  Darcy).  Histoire  du  théâtre  de  l'Acadé- 
mie royale  de  Musique,  depuis  son  établissement  jusqu'à  pré- 
sent (1707);  seconde  édition.  Paris,  1757,  2  toI.  in-8°.  La  pre- 
mière édition,  eu  un  vol.  io-8°,  est  de  1753. 

COKT.\>T  D'ORVILLE.  Histoire  de  l'Opéra-Bouffon,  contenant 
les  jugemeus  de  toutes  les  pièces  qui  ont  paru  depuis  sa  nais- 
sance jusqu'à  ce  jour.  Amsterdam  et  Paris,  1768,  in-12. 

DESEOULMIERS.  Histoire  du  théâtre  de  l'Opéra-Comique.  Pa- 
ris, Lacombe,  1769,  7  vol.  iu-12. 

—  Histoire  auecdotique  et  raisonnée  du  Théâtre-Italien,  depuis 
son  rétablissement  en  France  jusqu'à  l'année  1769.  Paris,  La- 
combe, 176g,  7  vol.  in-12. 

ORIGIN'Y  (M.  d').  Annales  du  Théâtre-Italien,  depuis  son  origine 
jusqu'à  ce  jour.  Paris,  Duihesne,  1788,  3  vol.  in-S". 

DES  ESS.\RTS  (M  ).  Les  trois  théâtres  de  Paris,  ou  Abrégé  histo- 
rique de  l'établissement  de  la  Comédie-Française,  de  la  Comé- 
die Italienne  (  Opéra-Comique  )  et  de  l'Opéra.  Paris,  Lacombe, 
1777,  iu-8°. 

FETIS  (François-Joseph).  Histoire  de  l'Opéra-Comique  (dans  la 
Revue  Musicale,  t.  III,  p.  Sag,  553). 

LAPORTE  (l'abl)é  de).  Bibliothèque  des  théâtres;  Dictionnaire 
dramatique  contenant  le  catalogue  alj)habétique  des  pièces 
aramatiques,  opéras,  parodies  et  opér;.s  comiques,  avec  des 
aneidotes  sur  la  plupart  des  pièces  et  sur  la  vie  des  auteurs  mu- 
siciens et  ai-teurs.    Paris,  Duchesne,  1784,  3  vol.  in-12. 

GÉRARD.  Tables  chronologiques  des  pièces  de  l'Opéra.  Paris, 
1733,  in-8°.  —  Tables  chronologiques  des  pièces  du  nouveau 
Théâtre-Italien  (Jbid.,  i738,in-8°).  —  Tables  chronologiques 
des  pièces  représentées  sur  l'ancien  Théâtre-Italien  (lôjrf.,  l75o, 
in-8°). 

■ —  Etat  actuel  de  la  musique  du  roi  et  des  trois  spectacles  de 
Paris.  Paris,  1759-1777,  19  vol.  iii-12. 


SYSTÉMATIQUE.  407 

Les  années  1759  et  1760  ne  sont  que  le  même  wilume  dont 
on  :i  clinngé  le  frontispice.  Les  premières  années  sont  en  grand 
format,  les  autres,  en  petit.  Eu  174J  et  1744  >  '1  avait  déjà  paru 
un  très  petit  volume  ,  qui  avait  pour  titre  :  Etat  de  la  musique  du 
roi.  On  n'y  trouvait  que  la  composition  de  la  chapelle,  de  la 
musique  particulière  du  roi  et  du  concert  spirituel. 

Les  spectacles  de  Paris,  calendrier  historique  et  chronologique 
de  tous  les  théâtres,  commencé  eu  I75l,  par  l'abbé  de  Laporte, 
et  continué  par  lui  jusqu'en  1778.  Les  huit  années  suivantes  fu- 
rent rédigées  par  un  commis  de  Duchesne,  le  libraire,  nommé 
Androle.  On  ignore  qui  a  continué  cet  almanach  jusqu'en  I79'i, 
époque  où  sa  pulilication  fut  interrompue.  M.  Guilbert  Pixéré- 
court  le  reprit  en  1799  et  publia  aussi  les  deux  années  suivantes. 
Ce  recueil  ne  parut  plus  en  1802,  mais  on  donna  un  volume 
sous  le  même  titre  en  18 16.  Depuis  lors  il  a  cessé  de  paraître. 
La  collection  complète  renferme  47  vol.  in-i8.  Paris,  Duchesne, 
1751-1816. 
LUNEAU  DE  BOISGERMAIN.  Almanach  musical,  1782,  1783, 
1784.  Paris,  3  vol.  in-12. 

Petit  ouvrage  fait  sur  un  bon  plan. 
FRAMERY  (Nicolas-Etienne).  Calendrier  musical  universel,  con- 
tenant l'iudieation  des  cérémonies  d'église  en  musique,  les  dé- 
couvertes  et  les  anecdotes    de    l'année,    un   choix   de    poésies 
adressées  à  des  musiciens,  la   notice  des  pièces  en  mu.eique  re- 
présentées à  Paris,  à  Versailles,  à  Saint-Cloud,  sur  les  différens 
théâtres   de  l'Europe,  etc.,  pour^  l'année    1788.  Paris,  Prault, 
I  vol.  in-12. 
NOUGARET.  Spectacles  des  foires  et  des  boulevards  de  Paris,  on 
Calendrier  historique    et   chronologique    des   théâtres   forains. 
Paris,  1773-1788,  8  vol.  in-24. 
—  Almanach  général    de    tous  les  spectacles  de  Paris  et  des  pro- 
vinces, pour  l'année  1791,  par  une  société  de  gens  de  lettres. 
Paris,  1791,  1  vol.  in-12. 

Cet  ouvrage  était  beaucoup  mieux  fait  que  celui  que  Duchesne 

publiait  ;   cependant  il  n'eut   pas   de    succès   et   ne   parut   que 

cette  fois. 

VALLERON  (M.).  L'opinion  du  parterre,  ou  Revue  des  Théâtres 

français,  de  i'Opéra,  de  rOpéia-Cumique  national,  de  Louvois, 


408  Catalogue 

de  l'Opcra-Buffa  et  du  Vaudeville.  Paris,  MartiDCt,  i8o4-i3i3, 
g  vol.  in-i2. 

Cet  almanach  de  spectailes  fait  suite  à  un  autre  qui  avait  été 
publié  par  Clément  Courtois  sous  le  titre  de  VOpmion  du  par- 
terre ou  censure  des  acteurs,  auteurs  et  spectateurs  du  Théâtre- 
Français.  Paris,  Martinet,  gerra.  an  X[.  La  collection,  y  compris 
ce  volume,  doit  être  de  lo  vol. 

lUGUENAUD  et  AUDIFRED.  Annuaire  dramatique.  Paris,  ma- 
dame Cavanagli,  i8o5-iSiS,  i3  vol.  in-Sa.  On  y  trouve  des  no- 
tices assez  bien  faites  sur  quelques  musiciens. 

liOCQUET  (J.-M.).  Mémorial  dramatique  ou  almauach  théâtral, 
depuis  1S07  jusqu'en  181 8.  Paris,  Hocquet,  12  vol.  in-24- 

('  VRDETOIS'  (César).  Annales  de  la  musiijue  ou  almaiiacb  musical 
pour  l'an  18 19.  Idem  pour  l'an  1820.  Paris,  2  vol.  in-i8. 

—  Almanacli  des    spectacles,    i822-i83i.  Paris,  Barba,  10  v.  in-12. 
L IICLERC  (J.-B.).  Riipport  fait  au  conseil  des  Cinq-Cents  sur  l'éta. 

biissement  des  écoles  de  musique.  Paris,  1799,  iu-S°. 

Ml-IHUL  (Etienne-Henri).  Rapport  fait  à  l'Institut  sur  l'état  futur 
(le  la  musique  en  France. —  Idem  sur  les  travaux  des  élèves  du 
Conservatoire  qui  sont  pensionnaires  de  l'académie  des  Beaux- 
Arts  à  Rome  (dans  le  Magasin  encjciop.,  1808,  t.  V). 

— •  Règlement  du  Conservatoire  impérial  de  musique  et  de  décla- 
mation. Paris,  1808,  4^  P^g-  in-8°. 

—  Observations  sur  le  Conservatoire  de  musique  de  Paris,  dans 
lesquelles  on  démontre  les  vices  de  cet  établissement,  et  où  l'on 
|>ropose  les  moyens  d'en  améliorer  le  service  et  d'en  diminuer 
!es  dépenses.  Paris,  madame  veuve  Courcier,  i8i5,  in-S". 


CHAPITRE  III. 

POLÉMIQUE  SUR   tA  COMPARAISON  DE  LA  MUSIQUE  ITAtlEWKK  ET 
DE  LA  MUSIQUE  FRAITÇAISE. 

RAGUENET  (l'abbé).  Parallèle  des  Italiens  et  des  Français  en  ce 
qui  regarde  la  musique  et  les  opéras.  Paris,  1702,  )n-i2.  Ams- 
terdam, 1704,  124  p. 

DE  FRF.S?iEUSK  (.Fc:Mi-I.:iurPnt  T.c  Cc;f  de  1.;  Viru, ilir). Coinpa- 


SYSTÉMATIQUK.  409 

i'iiist)n    «le    1«    musique  it.ilitJiine   et   de  la  musique  frnnraise. 
Bruxelles,  i7o5,  2  vol.  in-i2. 

L'ablié  Riigueoet  s'était  prunoncé  en  faveur  de  la  musique 
italienne  contre  la  musique  française.  De  Freneuse  prit  la  dé- 
fense de  celle-ci.  Sou  ouvrage  a  été  réimprimé  avec  la  deuxième 
édition  de  l'Histoire  de  la  Musique,  <le  ISonnet. 

U.VGUENET  (rai)l>é).  Défense  du  j)arallèie  des  Italiens  et  des 
Français  en  ce  qui  regarde  la  musique  etlesopéras.  Paris,  l7o5, 
174  p-  iu-i2. 

Di:  FRENEUSE  (J.-L.  Le  Cerf  de  la  Vieuville).  L'art  de  décrier 
i.e  qu'on  n'entend  pas,  ou  le  Médecin  musicien.  Paris,  1706,  in-S". 
C'est  une  réponse  virulente  au  rédacteur  du  Journal  des  Sa- 
vons, qui  s'était  pronoucé  en  faveur  de   l'aljbé  Raguenet  dans 
cette  dispute  (ann.  1703,  p.  iig4). 

.SFRRE  (M.  de),  La  Musique,  poème enquatre  chants.  Lyon,  1717, 
in-4o- 

L'auteur  traite,  dans  le  premier  chant,  de  la  corruption  du 
goût  de  la  musique  française;  dans  le  second,  il  fait  la  critique 
de  l'opéra  français  ;  dans  le  tioisième,  il  fait  un  aperçu  histo- 
rique de  la  musique  italienne,  et,  dans  le  quatrième,  une  com- 
jiaraison  entre  la  musique  française  et  la  musique  italienne. 

KRAUSE  (Chr.-G.).  Lettre  sur  l.i  différencie  entre  la  musique  ita- 
lienne et  française.  Berlin,  1748,  in-S°. 

CKIMM  (F.-M.,  baron  de).  Le  petit  Prophète  de  Bohemichbroda, 
in-80  de  48  pag.  Sans  date  ni  uom  de  lieu. 

C'est  une  <:ritique  mordante  de  l'opéra  français.  A  la  suite  de 
la  publication  de  cet  opuscule,  il  se  forma  deux  [jartis,  l'un  com- 
posé desamateurs  de  musique  française,  qui  se  rangeait  à  l'Opéra 
«lu  côté  de  la  loge  du  roi,  et  qu'on  appelait  le  coin  du  roi; 
l'autre,  formé  des  admirateurs  de  la  musique  italienne,  qui  se 
mettait  près  de  la  loge  de  la  reine,  et  qu'on  désignait  à  cause  de 
cela  sous  le  nom  «lu  coin  de  la  reine.  La  première  troupe  de  chan- 
teurs italiens  qu'on  eût  entendue  en  France  depuis  le  cardinal 
Mazarin  était  alors  à  Paris  et  jouait  alternativement  avec  l'opéra 
français.  On  appelait  ces  chanteurs  les  bouffons.  Grimm  et  J.-J. 
Rousseau  étaient  à  I.t  tête  de  leurs  partisans  et  des  détracteurs 
delà  musique  française. 

VOtSENON  (l'abbé  «le).  Réponse  du  Coin  du  roi  au  Coin  <'c  l.i 
reine.  Janvier  r7.'ii'),  \  feuilles  in-S". 

35 


410  CATALOGUE 

OLBACH  (le  baron  d').  Arrêt  rendu  à  l'amphithéâtre  de  l'Opéra, 
sur  la  plainte  du  milieu  du  parterre,  intervenant  dans  la  guerre 
des  coins.  Paris,  1753,  i  feuille  in-8o. 

JOURDAN  (...).  Le  Correcteur  des  bouffons  à  l'écolier  dePrague. 
Paris,  1753,  în-8°  de  20  pag. 

PARISOT  (A).  Apologie  du  sublime  bon  mot.  Paris,  1753. 

Relation  véritable  et  intéressante  du  combat  des  Fourches 
caudines,  livré  à  la  place  Maubert,  au  sujet  des  bouffons.  Paris, 
17.-J  !,  in-i2. 

.TOURDAN  (...).  Seconde  lettre  du  Correcteur  des  bouffons  à  l'éco- 
lier de  Prague,  contenant  quelques  observations  sur  l'opéra  de 
Titon,  h  Jaloux  corrigé  et  le  Devin  du  village.  Paris,  le  jour  de  la 
reprise  de  Tilorij  vendredi  4  mai  1753. 

L'HERITIER  (...).  Lettre  critique  et  historique  sur  la  musique 
française,  l.i  musique  italienne  et  sur  les  bouffons,  à  madame  D. 
Paris,  1753,  in-So. 

—  La  nouvelle  bigarrure.  La  Haye,  1753,140  p.  in-ra. 

—  Epître  aux  Ijouffonistes,  en  vers.  Paris,  février  1753. 

—  La  réforme  de  l'Opéra;  sans  nom  de  lieu.  1753. 
MAIROBEPvT  (  ...  ).   Les  prophéties  du  grand  prophète  Monnet. 

1753,  I  feuille  in-S". 

—  Réponse  au  grand  et  au  petit  Prophète.   1753. 

—  Lettre  écrite   de  l'autre    monde   par  l'A.  D.  F.  (  l'abbé  DES- 
FOATAINES  ),à  M.  F.  (  Fréron  ).  Paris,  1754,  in-S". 

Barbier,  dans  son  Dictionnaire  des  Anonj-mes,  etc.  t.  Il,  p.  25  J, 
attribue  cet  écrit  à  Suard;  c'est  certainement  une  erreur;  Suard 
n'écrivait  point  encore  à  celte  époque. 
ROUSSEAU  (  Jean-Jacques  ).    Lettre   d'un  symphoniste  de  l'Aca- 
démie royale   de   musique   à   ses    camarades   de  l'onhestre. 

Cet  opuscule  se  trouve  dans  tjutes  les  éditions  des  œuvres  de 
l'auteur  parmi  les  écrits  relatifs  à  la  musique. 
SONNETTI   (Jean-Jacques  ).  Le    brigandage  de  la  musiqae  ita- 
lienne. Amsterdam  et  Paris,  1780,  I73  pages  iu-12. 

Le  nom  de  Sonneui  est  à  la  signature  de  l'épître  dédicatoire; 
il  y  a  lieu  de  croire  que  c'est  un  pseudonyme. 


SYSTÉMATIQUE.  411 

CHAPITRE  IV. 

rOLÉMIQUE    SDR  LA  MUSIQD8  FRANÇAISE. 

ROUSSEAU  (  Jean-Jacques  ).   Lettre  sur  la   musique    française. 
Paris,  i753,in.S''. 

Cet  écrit,  où  brille  le  talent  admirable  de  l'écrivain,  fit  une 
sensation  très  vive  au  milieu  de  cette  multitude  de  pampLlets 
dont  onlctait  accablé.  La  question  i.liangea  après  sa  j)ublication. 
Il  ne  fut  plus  question  d'attaquer  les  bouffons,  mais  de  défendre 
la  musique  française  contre  les  attaques  de  Rousseau,  et  de 
nouvelles  brochures  furent  encore  lancées  chaque  jour  dans  la 
circulation.  Il  serait  trop  long  de  les  citer  toutes;  voici  les  titres 
de  celles  qu'on  remarqua  plus  que  les  autres. 

1°  La  Guerre  de  l'Opéra,  ou  Parallèle  de  la  musique  française 
et  de   l'italienne  (  par    Cazotle  ).  Paris,    1753,  in-S";  2°  Justifi- 
tion  de  la  musique   française  contre  la  querelle  qui  lui  a  été  faite 
par  un  Allemand  et  un  Allohroge  (  par  Morand).  Iliid.,  1754, 
in-8°;  3°  Constitution  du  patri.irclie  de  l'Opéra  et  lettre  sur  l'o- 
rigine et  les  progrès   dej  l'Académie  royiile   de  musique.  Ibid., 
1754  ;  4°  Réflexions  sur  les  vrais  principes  de  l'harmonie,  con- 
damnés par  la  constitution  du  patriarche  de  l'Opéra.  Ibid.,  1754; 
So  La  Galerie  de  l'Académie  royale  de  musique,  contenant  les 
portraits  en  vers  de  ceux  qui  la  composent  en  la  présente  année 
1754,  dédiée  à  J.-J.  Rousseau  de  Genève  (  par  Travenol  ).  Paris, 
1754,  in-S";  6°  Supplique  de  l'Opéra  à  l'Apollon  de  la  France. 
Ibid,  1754;  iu-l2.  7^  Deux  Lettres  sur  la  musique  française  ea 
réponse  à  celle  de  J.-J.  Rousseau.  Paris,  1753,  iu-S"  ;  8°  Apologie 
de  la  musique  et  des  musiciens  français  contre  les  J.ssertions  peu 
mélodieuses, peu  mesurées  et  mal  fondées  du  sieur  Jean-Jacques 
Rousseau,  ci-devant  citoyen  de  Genève  (  par  de  Bonneval).  Paris, 
1754?    in-8°  ;    9°    Apologie    de    la     musique    française    contre 
M.  Rousseau  (  par  l'ahhé  Laugier).  Paris,  i754,in-8°;  10°  Arrêt 
du  conseil  d'Apollon,  rendu  en  faveur  de  l'orchestre  de  l'Opéra, 
c.ontre  le  nommé  J.-J.  Rousseau,  copiste  de  musique  (par  Tra- 
venol). Paris,    1754,  in-i2  ;    11°   L'inipaitia'ité  sur  la  musique, 
épîtreà  M.  J.-J.  Rousseau,  par  D.  fi.  (  Dandré  Baidoii  ),  sans  in- 
dicatioade  lieu,  1754,  petit  iu  4°  <ie  3(5 pages;  la"  Lettie  d'un 


412  CATALOGUE 

snge  a  un  homme  respectable  et  dont  il  a  besoin  (  par  La  Slcr- 
//eVe  ). Paris,  1734,  in-S";  i3^  Examen  de  la  lettre  de  M.  Rous^ 
seau  sur  la  musique  française  (  ]>ar  Bâton  jeune).  Paris,  1704, 
in-S°  ;  14°  Lettre  d'un  Visigoth  a  M.  Fréron  sur  sa  dispute  har- 
monique avec  M.  Piousseau  (par  l'alibé  de  Cateirac).  Septiraa- 
niopolis  (  Paris),  1754,  in-8°;  iS"  Oliservations  sur  la  lettre  de 
J -J.  Rousseau  (par  Cazoite).  Paris,  1754,  in-S"  ;  iC  Doutes 
d'un  ])yrrlionien,  proposés  amiralement  à  J.-J.  Rousseau  (  jiar 
Cosie  d'Airobat").  Paris,  1754;  17°  Lettre  d'un  Parisien,  conte- 
nant quelques  réflexions  sur  celle  de  M.  Rousseau  (  par  M.  Eo- 
binol,  ancien  notaire).  Paris,  1754;  18°  Lettre  d'un  académi- 
cien de  Bordeaux  sur  le  fond  de  la  musique,  à  l'occasion  de  la 
lettre  à  M.  J.-J.  Rousseau  contre  la  musique  française  (  par  le 
P.  Casiel).  Bordeaux  et  Paris,  1754,  in-12;  19°  Réponse  criti- 
que d'un  académicien  de  Rouen  à  l'académicien  de  Bordeaux,  sur 
le  plus  profond  de  la  musique  (  par  le  P.  Castel.  L'auteur  se 
répondait  à  lui-même  ).  Paris,  1754,  in-8°  ;  20"  Réfutation  sui- 
vie et  détaillée  des  principes  de  M.  Rousseau  de  Genève  tou- 
chant la  musique  française,  adressée  à  lui-même  en  réponse  à  sa 
lettre  (  par  M.  Aubert  ).  Paris,  1754,  in-8°;  210  Lettre  sur  celle 
de  M.  J.-J.  Rousseau,  citoyen  de  Genève  (  par  M.  Yzo  ).  Paris, 
17D4,  in-8o;  22°  Apologie  du  goût  français  relativement  à  l'O- 
péra, poème,  a\ec  les  discours  a|)ologéliques  et  les  adieux  aux 
Bouffons  (  par  Caux  de  Capeval  ).  Paris,  1754,  in  8°. 


CHAPITRE  V. 

POLÉMIQUE  SDR    LA.  MUSIQUE   DE    GLUCK    F.T  LA   DISPUTE   DES 
GLUCKISTES   ET    DES    PICCINISTES. 

Les  écrits  les  plus  importans  relatifs  à  cette  dispute,  la  plu- 
part extraits  des  journaux  littéraires  et  autres  de  l'époque,  ont 
été  recueillis  et  publiés  par  Pabbé  Lei)lond,  sous  le  titre  de 
Mémoires  pour  servir  à  l'histoire  de  la  révolution  opérée  dans 
la  musique,  par  M.  le  chevalier  Gluck,  à  Naples,  et  se  trouve  à 
Paris  chez  Bailli,  1781,  r  vol.  in-80  de  491  pages. 

Les  pièces  qui  n'ont  point  trouvé  place  dans  ce  recueil  sont  : 


SYSTÉMATIQUE.  4t3 

lo  Lettre  sur  les  propriétés  de  la  langue  française  (  par  C/ja- 
hanon,  dans  le  i)/e/-cu;e  de  janvier  1773,  p.  171.) 

2o  Dialogue  entre  LuUy,  Hameau,  etc.,  ibid.  ,177'i,  vol.  r, 
1>.  74.  C'est  un  éloge  de  la  musique  de  Gluck. 

3"  Lettre  à  M.  de  Cliabanon  pour  servir  de  réponse  à  celle 
qu'il  a  écrite  sur  les  propriétés  musicales  delà  langue  française, 
par  M.  le  C.  de  S.-A.  (  le  cbevalier  de  Saint-Alban  ).  Ihid.,  fé- 
vrier 1775,  vol.  2, p.  192. 

4°   Lettre  à  M.  le  cLev.  de sur  l'opéra  d'Orphée.  Paris, 

1774,  in-So. 

5»  Lettre  à  M....  sur  l'opéra   diphigènie   en  Aulide.  Paris, 

1775,  in-So. 

6"  Lettre  à  madame  la  marquise  de...  dans  ses  terres  près  de 
Mantes,  sur  l'opéra  d Iphigénie.  Paris,  X']'5,  3l  p.  iu-80. 

7°  Réflexions  sur  le  merveilleux  de  nos  opéras  française!  sur 
le  nouveau  genre  de  musique.  Paris,  1775,  4^  F-  in-So. 

8°  Lettres  sur  les  drames-opéras.  Amsterdam  et  Paris,  1776, 
55  p.  in-8». 

90  Réponse  à  l'auteur  de  la  lettre  sur  les  drames-opéras. 
Londres  et  Paris,  1776,  in-S». 

100  Lettre  sur  la  musique  dramatique,  par  Camille  Trillot, 
fausset  de  la  i^atbédjale  d'Auscb.  Paris,  1777,  43  p-  in-80. 
Camille  Trillot  est  un  pseudonyme. 

no  Lettre  à  M.  le  baron  de  la  Vieille-Crocbe,  au  sujet  de 
Castor  et  Pollux,  donné  à  Versailles  le  16  mai  1777  (  dans  le 
Meicure  de  France,  juillet  1777,  p-  146  )■ 

120  ROUSSEAU  (  J.-J.  ).  Lettre  à  M.  Burney  sur  la  musique, 
avec  des  fi  agmens  d'observations  sur  VAlceste  Italien  de  M.  le 
chevalier  Gluck. 

i3o  Extrait  d'une  réponse  du  Petit  Faiseur  à  son  Prête-Nom, 
sur  un   morceau  de  ÏOrphée  de  M.  lecliev.  Gluck. 
FETIS  (  Fr.-Jos.  ).   Sur  Gluck,  son  génie,  ses   opinions  et  son  in- 
fluence dans   la  musique  dramatique    (  dans  la  Revue  Musicale, 
t.  VL  p-  385,  409,  481  ). 

Ces  deux  morceaux  se  trouvent  dans  toutes  les  éditions  com- 
plètes de  l'auteur  parmi  les  écrits  sur  la  musique. 

UEncide,  opéra  français,  pour  être  représenté  quand  il  sera 
en  état,  suivi  A''Armide  à  son  tailleur,  Héroïde.  Londres,  et  se 
trouve  à  Paris  chez  J.-F.  Bastien  ,  r778  ,  in-S". 

C'est  une  critique  plaisante  de  la  musique  de  Gluck. 

35, 


414  CATALOGUE 

CHAPITRE  VI. 

BIOGRAPHIE  DES  MUSICIENS. 

TITON  DU  TILLET  (Evrard).  Parnasse  français.  Paris,  1778, 
in-fol. 

On  trouve  dans  cet  ouvrage  des  notions  biographiques  et 
quelques  portraits  de  musiciens  célèbres  qui  vécurent  sous  les 
règnes  de  Louis  XIII  et  Louis  XIV. 

CHORON  (  Alex.-Étienue  )  et  FAYOLLE  (  François-Joseph  ).  Dic- 
tionuire  historique  des  musiciens,  artistes  et  amateurs,  morts 
et  vivans  ,  qui  se  sont  illustrés  en  une  partie  quelconque  de  la 
musique  et  des  arts  qui  y  sont  relatifs  ,  tels  que  compositeurs  , 
écrivains  didactiques,  théoriciens,  poètes,  acteurs  lyriques, 
chanteurs  ,  instrumeutistes,  luthiers,  facteurs,  graveurs,  impri- 
meurs de  musique,  avec  des  renseignemens  sur  les  théâtres,  con- 
servatoires et  autres  établissemens  dont  cet  art  est  l'objet;  précédé 
d'nn  sommaire  de  l'histoire  de  la  musique.  Paris,  1810,  1811, 
2  vol.  in-S°. 

Le  troisième  volume  de  l'Essai  sur  la  musique,  de  Laborde, 
contient  de  nombreux  articles  biographiques  de  musiciens  an- 
ciens et  modernes.  On  peut  aussi  consulter  :  1°  La  Biographio 
universelle  des  frères  Mi<:haud.  Paris,  52  vol.  in-8°;  n^  \à  Bio- 
graphie universelle  portalii/e  des  contemporains.  Paris,  2  vol.  in-S" 
et  supplément;  3°  le  Dictionnaire  des  artistes  de  l' école  française 
au  dix-neuviem»  siècle,  par  M.  Gabet.  Paris,  madame  Vergne, 
i83i,  I  vol.  in-S". 

FETIS  (  Franc. -Joseph  ).  Galerie  des  musiciens  célèbres,  avec  des 
portraits  lithographies  par  les  meilleurs  artistes.  Paris,  1827- 
1828,  3  livraisons  gr.  in-fol. 

La  premicre  livraison  contient  les  portraits  de  Gluck  ,  Mèliul  , 
Viotti  et  Garât,  avec  leurs  biographies  et  des  fac-similé  de  l'écri- 
ture et  de  la  notation  de  Gluck  et  de  Méhul. 

La  deuxième  livraison  renferme  les  portraits  de  Gritry  ,  de 
Bach  ,  de  Corelli  et  de  Dussek,  avec  leurs  biographies  et  le/ac- 
ttmile  de  l'écriture  et  de  la  notatiou  de  Grétry. 

La  troisième  livraison  est  composée  des  portraits  de  Lulli , 
madame  Catalani,  Becihoi-cn,  Pa'estrina  ^avec  leurs  biographies. 


SYSTEMATIQUE.  415 

LE  BRETON  (  Joachlm).  Notice  sur  la  vie  et  les  ouvrages  tle  Gré- 
trj  ,  lue  à  la  séance  pulilique  de  la  classe  des  beaux-arts  de  l'Ins- 
titut. Paris,  1814.  iu-4°.  On  trouve  aussi  cette  notice  dans  le 
Magasin  enc/clopédique,  1814»  t.  IV,  p.  273. 

Le  premier  volume  des  Essais  sur  la  musique,  de  Grétry,  con- 
tient des  détails  étendus  sur  sa  vie  et  sur  ses  ouvrages. 

GRETRY  (  A.  ),  neveu.  Grétry  en  famille,  ou  Anecdotes  littéraires 
et  inusi(;ales  relatives  à  ce  célèbre  compositeur,  précédées  de 
son  oraison  funèbre.  Paris,  Cbaumerot,  i8i5,  in-ia,  avec  le 
portrait  de  Grétry. 

Rapsodie  sans  aucune  valeur. 

LIVRY  (  Hypolite  de  ).  Recueil  de  lettres  écrites  à  Grétry  ou  à  son 
sujet.  Paris,  Ogier,sans  date,  i  vol.  in-8°. 

Anecdotes    sur   feu  Mozart,    compositeur  allemand  (  dans  le 
Magasin  encyclopédique,  1798,  t.  VI,  p.  3G8  ), 
Ces  anecdotes  sont  peu  exactes. 

FRAMERY  (Nicolas-Etienne).  Notice  sur  Josepb  Haydn,  conte- 
nant quelques  particularités  de  sa  vie  privée,  relatives  à  sa  per- 
sonne et  à  ses  ouvrages ,  adressée  à  la  classe  des-beaux  arts.  Paris, 
Barba,  1801 ,  in-8°. 

LE  BRETON  (  Joai  bim  ).  Notice  bistorique  sur  la  vie  et  les  ouvra- 
ges de  Josepb  Haydn,  membre  associé  de  l'Institut  de  France  , 
lue  dans  la  séance  publique  du  6  octobre  1810.  Paris,  Baudoin, 
18 10,  in-4''. 

—  Essai  liistorique  sur  la  vie  de  Josepb  Haydn,  ancien  maître  de 
cbapelle  du  prince  Esterbazy.  Strasbourg  ,  imprimerie  de  Pb.-J. 
Daunebacii,  18 12,  10-8°. 

BOMBET(  Louis-Alexandre-César).  Lettres  écrites  de  Vienne  eu 
Autricbe  sur  le  célèlire  compositeur  Joseph  Haydn  ,  suivie  d'une 
vie  de  Mozart  et  de  cou.sidératious  sur  Métastase,  et  l'état  pré- 
sent delà  musique  en  France  et  en  Italie.  Paris,  imprimerie  de 
Didotaîné,  1814,  r  vol.  in-8°. 

Ces  Lettres  sont  un  plagiat;  elles  sont  traduites  littéralement 
de  celles  que  Carpani  avait  publiées  à  Milan,  en  1812,  sous  le 
titre  de  LeHajdine  ,  owero  Lettere  su  la  vita  et  le  opère  del  célèbre 
macstio  Giuseppe Hajdn.  M.  Beyie,  plus  connu  sous  le  nom  de 
Stcndhalt ,  s'est  cacbé  sous  c-elui  de  Bombet. 

WINKLER  (  ...  ).  Notice  sur  WolfgaDg-Tbcopbile  Mozart  (  dans  le 
même  recueil,  1801 ,  t.  III,  p.  29-73). 


416  CATALOGUE 

CRAMER  (  Charles-Frédéric  ).  Anecdotes  sur  W.-A.  Mozart.  Paris, 
iSor  ,iri-8°. 

SUARD  (  Jean-Bnptiste-Antoine  ).  Anecdotes  sur  Mozart  (  dans  les 
M'-h:iges  de  litléraluie  de  i-et  auteur,  t.  If,  n°  5,  p.  337-347  ). 

C:^(iUE!^'F.  (  Pierre -Louis).  A'otice  sur  Mozart  (dans  la  Dé- 
cade philosophique,  t  XXXI  ). 

SEVELINCES  (  de  ).  Notice  sur  Mozart  (  en  tête  de  l'édition  du 
Retjuiem  de  Mozart,  publiée  au  magasin  de  musique  du  Conser- 
vatoire ). 

—  Lettres  écrites  par  Mozart  à  son  père  pendant  le  voyage  qu'il 
fit  avec  sa  mère  en  1777  (  dans  la  Revue  musicale  ,  t.  YII ,  p.  i6r, 
225,  aSc),  36i  ). 

—  Sur  le  Requiem  de  Mozart.  Histoire  de  cette  composition  (  dans 
la  Revue  musica'e,  t.  I ,  p.  26  ,  23o,  447  î  t.  IV,  p.  121  ). 

CHABANON  (  de  ).  Eloge  historique  de  M.  Rameau.  Paris,  1764» 

in-i2. 
MARET  (  Huglus  ).  Éloge  historique  de  M.  Rameau  ,  1767,  récité 
à  la  société  des  Ijelles-leltres  de  Dijon. 

DE  CROIX  (  ...  ).  Biographie  de  Rameau  (  dans  l'ouvrage  de  cet 
auteur  inthu\éV^  mi  fies  aiis,  Paris,  1776,  p.  95-124  )• 

Voyez  aussi  la  hiogra]>hie  de  Rameau  dans  la  Bibliothèque  des 
aut'urs  de  Bouri:opne  ,  par  Papillon. 

LOYER  (  Pascal  ).  Notice  sur  la  vie  et  les  ouvrages  de  Pergolèse 
(  dans  le  Mercure  de  France,  juillet ,  1772  ,  p.  191  ). 

GINGUENE  (Pierre-Louis).  Notice  sur  la  vie  et  les  ouvrages 
de  Nicolas  Piccini.  Paris,  Paukouke,  1801  ,  in-8°  de  i44  pages. 

I  A'j  OLLE  (  Fiancois-Joscph  ).  Notices  sur  Corelli ,  Tartini ,  Ga- 
viniès,  Pugnani  et  Viotti,  extraites  d'une  histoire  du  violon.  Pa- 
ris ,  Dentu,  iSio,  in  8°. 

QUATREMÈRE  DE  QUINCY  (  ...  ).  Notice  historique  sur  la  vie 
et  les  ouvrages  de  Paisicllo  ,  lue  à  la  séance  publique  de  l'Aca- 
démie des  i)eaux-arts  le  4  octobre  1817.  Paris,  Firmin  Didot, 
in-4"  de  18  |)ages. 

QUATREMÈRE  DE  QUINCY  ( ).  Notice  historique  sur  la 

vie  et  les  ouvrages  de  M.  de  Monsigny,  lue  à  la  séance  j)U- 
Llique  de  l'Académie  royale  des  beaux-arts,  le  samedi  3  octobre 
r8l8.  Paris,  Firmin  Didot,  181S,  in-40  de  12  pages. 

HF.DOUIN  (Pierre).  Notice  historique  sur  P,-A.  de  Monsigny.  Pa- 
ris, Laffillé,  in-80. 


SYSTÉMATIQUE.  417 

QUATREMÈRE  DE  QUINCY  ( ).  Notice  historique  sur  la 

vie  et  les  ouvrages  de  M.  Méliul,  lue  à  la  séauce  publique  de 
l'Académie  royale  des  beaux-arts,  du  i  octobre  1819.  Paris, 
Firmin  Didot,  1819,  iu-40  de  n  pages. 

GUILBERT  (vicomte).  Notice  historique  s.ur  le  citoyen  Broclie , 
organiste  à  Rouen.  Rouen,  iSo.'v,  in-S"  de  3o  pages.  Celte  no- 
tice se  trouve  aussi  dans  les  Mélanges  biographiques  et  litté- 
raires de  Giiib<?rt  ,  t.  I ,  p.  522. 

l'IXÉRÉCOURT(Guilbert  de).  Essais  sur  la  vie  et  les  ouvrages  de 
Dalayrac.  Paris,  Barba,    1810,  i  vol.  in-80. 

DE  LA  CHESNAYE  ( ).  Éloge  funèbre  du  T.-.  R.-.F.-.  Da- 
layrac, chevalier  de  l'Empire,  ancien  dignitaire  de  la  R.-.  Loge 
des  Neuf-Sœurs,  lu  dans  cet  atelier.  Paris,  Egron,  1810,  une 
feuille  in-80. 

STENDHAL  (M.  de).  Vie  de  Rossini, ornée  des  portraits  de  Rossini 
et  de  Mozart.  Paris,  Auguste  Boulland  et  compagnie,  1824,  2*^ 
édition  (fictive)  ,  2  vol.  in-8''. 

FRAMERY  (Nicolas  Etienne).  Notice  sur  le  musicien  Della  Maria, 
mort  depuis  peu,  et  membre  de  la  société  philotechnique.  Pa- 
ris, 1800,  in-8''. 

DUVAL  (Alexandre).  Notice  sur  le  compositeur  Della  Maria  (dans 
la  décade  philosophique,  an  vui,  t.  XXV,  p.  25). 
—  Notice  sur  Guglielrai  (  dans  le  Magasin  encjrclop.,  1806,  t.  VF, 
p.  98). 

BAILLOT  (Pierre).  Notice  sur  J.-B.  Viotti ,  né  en  1755,  à  Fonia- 
netto,  en  Piémont,  mort  à  Londres,  le  3  mars  1824.  Paris,  im- 
primerie de  Hocquet ,  i825,  une  feuille  iu-80. 

MIEL  ( ).  Notice  historique    sur  J.-B.    Viotti,  tirée  de    la 

Biographie  universelle ,  t.  XLIX;  une  feuille  in-S",  à  deux  c(j- 
lonnes.  Paris,  imprimerie  d'Éverat.  Sans  date. 

EYMART  (A-.M.).  Anecdotes  sur  Viotti,  précédées  de  quelques 
réflexions  sur  l'expression  en  musique.  Milan,  sans  date,  46  p. 
petit  in-80. 

LMBERT  DE  LAPHALÈQUE  (G.).  Notice  sur  le  célèbre  violoniste 
Nicolo  Paganini.  l^aris,  E.  Guyot,   i83o,  in-80  de  66  pages. 

ANDERS  (G. -E.).  Nicolo  Paganini.  Sa  vie,  sa  personne,  et  quel- 
ques mots  sur  son  secret.  Paris,  Delaunay,  i83i,  in-S"  de  42 
pages. 

FÉÏIS  (François-Joseph).  Notices  diverses  dans  la  Revue  Musicale  y 


418  CATALOGUE 

dont  :  T.  I,  Allegri  (Grégorio),  p.  570.  Beethoven  (Louis  Van), 
Il4-  Billington  (madame  Elisabeth),  334.  Candeille  (Pierre-Jo- 
seph),  3io.  Conti  (François)  ,  92.  Dragonetti  (Dominique),  43i. 
Fesca  (Frédéric -Ernest),  56.  Oltani  (Bernard),  362.  Scarlatti 
(Alexandre),  5 16.  T.  II,  Burney  (Charles),  Sag.  Cerone  (Domi- 
nique-Pierre), 39g.  Cimaiosa  (Dominique),  433.  Dalnyrac  (Ni- 
colas),  187.  Delcambre  (Thomas),  566.  Délia  Maria,  34g.  Via- 
dana  (Louis),  i3.  T.  III,  Albrechtsberger  (Jean-Georges),  5go. 
Duporf  (Jean-Pierre),  173.  Duport  (Louis),  174.  TamLurini  (An- 
toine), 66.  Veirhi  (Horaee),  443.  Vinceutino  (Nicolas),  445.  T. 
IV,  Agostino  (Paul),  ii.  B:ich  (Charles-Philippe-Fraraanuel),  209. 
Braham  (Jean),  1-24.  Caccini  (Jules),  417.  Garissimi  (Jean-Jac- 
ques), 4ig.  Devienne  (François),  5l2.  Durante,  579.  T.  V,  An- 
fossi  (Pascal).  2g7.  Bird  (William),  488.  Bishop,  434-  Bonon- 
ciui  (Jean)  ,  464.  Bocclierini  (Louis),  536.  Ferrari  (Jacques-Go- 
dcfroij,  i5j.  Gossec  (Fr.iuçois) ,  80.  T.  VI,  Bemetzrieder  (N.), 
488.  Blonde!  ou  Blondiaux  de  Nesle,  (troubadour),  556.  Exi- 
nieno  (D.  Antoine),  i5.  Maupin  (Mlle),  344.  T.  VII,  Méhul 
(Heuri-Etienne),  icj'i.  Pistocchi  (Francois-.4.ntL»ine),  296.T.VIII, 
Pliilodème,  7g  Berardi  (Angelo) ,  249.  Britton  (Thomas),  3oo. 
T.  IX,  Colasse  (Pascal),  22.  Clairval  (René-André),  24-  Champeia 
(Stanislas),  rgg.  Benda  (François),  216.  T.  X,  Catel  (Charles-Si- 
mon), io5.  Grétry  (André- Erneste-Modeste),  i35.  T.  XI,  Conti 
(Joachim),  5r.  Dibdin  (Charles),  81.  Fiorillo  (Ignace),  189. 
Floquet  (Etienne-Joseph),  281.  Lays  (François),  75.  Erard  (Sé- 
bastien), 2i3.  Nourrit  (Louis),  273.  Pleyel  (Ignace),  344- T.  XÎI, 
Allégri  (Grégorio).  nouvelle  biographie,  214.  Gluck  (Christo- 
phe), 394.  Perne  (François-Louis) ,  i45.  T,  XIII,  Hérold  (Louis- 
Josepb-Ferdiuand) ,  2.  Garât  (Pierre). 


CHAPITRE  VII. 

BIBLIOGRArHIE    DE  LA  MUSIQUE. 

EPiOSSAB-T  (  Sébastien  de  ).  Catalogue  des  auteurs  qui  ont  écrit 
de  la  musique  ,  à  l.i  suite  de  sou  dictionnaire  de  musique.  Ams- 
terdam, 1703,  in-fol. 


SYSTÉMATIQUE.  419 

r.OTVI'N'  (  Jran  ).  Catalogne  général  des  livres  de  musîqne.  Paris, 
I7?.(),  iii-S". 

—  Auteurs  grecs  et  romains  qui  ont  écrit  sur  la  musique  ou  parlé 
des  musiciens  (  dans  l'Essai  surla  musique,  de  Laborde ,  t.  III, 
chap.  m  ,  p.  i33  ). 

. —  Auteurs  qui  ont  écrit  sur  la  musique  eo  latin  et  en  italien 
(  dans  le  même  ouvrage,  t.  III ,  chap.  vu,  p.  33 1  ). 

—  Auteurs  français  qui  ont  écrit  sur  la  musique  (  dans  le  même 
ouvrage,  t.  III  ,  cliap.  x,p.  54o  ). 

GARDETON  (César).  Bibliographie  musicale  de  la  France  et  de 
l'étranger,  ou  Répertoire  général  systématique  de  tons  les  traités 
et  œuvres  de  musique  vocale  et  instrumentale.  Paris  ,  Niogret  , 
1S22  ,  I  vol.  in-8°  de  608  pages. 

Ouvrage  détestable  dout  le  titre  est  un  mensonge ,  car  on  n'y 
trouve  que  l'indication  d'un  très  petit  nomjjre  de  livres  ,  dont 
les  titres  sont  défigurés  ,  et  un  catalogue  de  musique  excessive- 
ment incomplet. 


CHAPITRE  YIII. 

DICTIONNAIRE  TECHNIQUE  DE  LA    MUSIQUE. 

BROSSARD  (  Sébastien  de  ).  Dictionnaire  de  musique,  contenant 
une  explication  des  termes  grecs,  latins,  italiens  et  français  les 
plus  usités  en  musique,  etc.  Amsterdam,  Roger,  i73o,  i  vol. 
in-8°. 

Cette  édition  est  la  troisième  du  livre  de   Brossard.   La  pre- 
mière ,  publiée  en  1701  ,  est  in-fol. ,  et  la  seconde  in-S". 

LACOMBE  (Jacques).  Dictionnaire  portatif  des  beaux-arts,  ou 
Abrégé  de  ce  qui  concerne  l'architecture  ,  la  sculpture  ,  la  pein- 
ture ,  la  gravure  et  la  musique,  etc.  Paris,  i752,in-8<'. 

ROUSSEAU  (Jean -Jacques  ).  Dictionnaire  de  musique.  Paris, 
veuve  Duchesne,  1768,  i  vol.  in-40  de  5+8  pages.  Amsterdam, 
Marc-Michel  Rey  ,  1772,  2  vol.  in-S". 

Cet  ouvrage  se  trouve  dans  toutes  les  éditions  complètes  des 
oeuvres  de  l'auteur. 


420  CATALOGUE 

MEUDE-MONPAS  (J.J.-O  ).  Dictionnaire  de  musique  ,  dans  le- 
quel on  simplifie  les  expressions  et  les  dcfinitioiis  mnthématiques 
et  physiques  qui  ont  rapport  à  cet  art,  avec  des  remarques  sur 
les  poètes  lyriques,  les  compositeurs,  etc.  Paris,  Kuappen, 
1788,  in-8°. 
Mauvais   ouvrage  dont    on  ne  peut  tirer  aucune  utilité. 

—  Encjclopédie  méthodique.  Dictionnaire  de  musique,  t.  I,  A.-G., 
publié  par  MM.  Framery  et  Ginguené.  Paris,  Pankouke,  1791, 
111-4°;  t.  II,  H-Z,  publié  par  M.  de  Momigny. Ibid.,  madame  veuve 
Agasse,  18 18,  iu-4''. 

Cet  ouvrage  contient  tout  le  Dictionnaire  de  musique  de  J.-J. 
Eousseau,  avec  des  additions  très  nombreuses  et  très  étendues. 
Ginguené  y  mit  beaucoup  d'articles  historiques  qui  sont  fort 
bien  faits;  mais  la  partie  théorique  n'offre  rien  de  satisfaisant 
]>;irce  que  tous  ceux  qui  ont  concouru  à  sa  rédaction  professaient 
des  doctrines  opposées. 

MILLIN  (Aubin-Louis).  Dictionnaire  des  beaux-arts.  Paris,  1806, 
3  vol.  in-80. 

Cet  ouvrage ,  composé  sur  le  Dictionnaire  allemand  de  Sulzer, 
e.-t  fort  estimé  et  contient  de  bonnes  choses  sur  la  musique. 

CASTIL-BLAZE  (...,).  Dictionnaire  de  musique  moderne.  Paris, 
1S21 ,  2  vol.  in-So. 

Une  nouvelle  édition  de  cet  ouvrage  a  étépubliéeà'BruxelIes, 
ji:ir  M.  Mées,  en  1828,  i  vol.  in-80.  L'éditeur  y  a  ajouté  un 
yibrègè  historique  de  la  musique  moderne  depuis  le  quatrième  siècle , 
et  spécialement  relatif  à  l'école  flamande ,  suivi  d'un  catalogue  bio- 
graphique des  théoriciens,  compositeurs  et  musiciens  morts  qui  se  sont 
H'ustrés  dans  h  royaume  des  Paj's-Bas.  Cet  ouvrage  se  termine 
j):ir  une  instruction  abrégée  sur  l'organisation  et  la  conduite 
d'une  école  de  musique,  spécialement  pour  le  solfège  et  le 
(liant ,  avec  des  réflexions  et  des  observations  sur  les  divers  mo- 
des d'enseignement  mis  en  pratique  depuis  le  commencement 
du  dix-neuvième  siècle. 


SYSTÉMATIQUE.  421 

CHAPITRE  IX. 

THÉORIE    DU   SOÎÎ. 

Traités  généraux. 

CASTEL  (  le  P.  Louis-Bertrand  ),  jésuite.  Nouvelles  expériences 
d'optique  et  d'acoustique  adressées  à  M.  le  jirésident  de  Montes- 
quieu (  dans  les  Mémoires  de  Trévoux  ,  t.  LXIX ,  1735,  p.  1444- 
1482,  1619-1666.  Suite  et  troisième  partie,  ibid,  2335-2372.  Der- 
nière partie ,  ibid.,  2642-2768  ). 

RAMEAU  (  Jean-Baptiste).  Lettre  au  R.  P.  Casfel  au  sujet  de 
quelques  nouvelles  réflexions  sur  la  musique  ,  que  le  R.  P.  Castel 
a  insérées  dans  les  mois  d'août  (  deuxième  partie  )  et  de  sep- 
tembre 1735  des  Mémoires  de  Trévoux,  t.  LXXI,  1736,  p.  1691- 
1709. 

M.A.IRAN  ("Jean-Jacques  Dortous  de  ).  Discours  sur  la  propagation 
du  son  dans  les  différens  tons  qui  la  modifient  (  dans  les  Mé- 
moires deV  Académie  des  sciences,  1737,  p.  l-20  ). 

—  Eclaircissemens  sur  le  discours  précédent ,  ibidj  20-58. 

DIDEROT  (  Denis  ).  Principes  d'acoustique.  Paris,  1748,  i  vol. 
in-So. 

SUREMAIN  DE  MISSERY  (  Antoine  ).  Théorie  acoustico-musi- 
ciile  ,  ou  de  la  doctrine  des  sons  ,  rapportée  aux  principes  de 
leurs  comljinaisons.  Paris,  Didot,  1793,  in-S°. 

CIILADIS'I  (  Ernest-Floreut-Frédéric  ).  Traité  d'acoustique,  traduit 
de  l'allemand  par  l'auteur.  Paris,  i8io,  in-8°. 

PiAYMOND  (  G.-M.  ).  Déterrainaisons  des  bases  physico-mathéma- 
tiques de  l'art  musical ,  ou  Essai  sur  l'application  des  nouvelles 
découvertes  de  l'acoustique  à  l'art  musical ,  suivi  d'un  appendice 
sur  quelques  systèmes  d'écriture  musicale.  Paris,  madame  Cour- 
cicr,  18 13. 

MÛREL  (Alexandre-Jean  ).  Principe  acoustique,  nouveau  et  uni- 
versel, de  la  théorie  musicale,  ou  musique  expliquée.  Paris, 
Bachelier,  l8l6,  10-8". 

AZ.4.YS  (  II.  ).  Acoustique  fondamentale,  ou  bases  physiques  de  la 
musique  ;  lettres  à  M.  Fétis  (  dans  la  Revue  musicale,  t.  II,  11.  3o'|, 
317,  333  ,  365,  390  ;  t,  XII ,  p.  g,  180,  204  ). 

3G 


422  CATALOGUE 

BLEIN  (le  baron),  ancien  officier  général  du  génie.  Exposé  de 
quelques  principes  nouveaux  sur  l'a^  oustique  et  la  théorie  des 
vibration?,  et  leur  application  a  plusieurs  phénomènes  de  la 
physique.  Paris,  1827,  in-4o  de  44  pages,  avec  2  planches. 


CHAPITRE  X. 

Dt  l'ouïe  et  de  la  voix  humaine. 
E.  De  l'ouïe. 

HAUTEFEUILLE  (l'abbé  de).  Lettre  à  M.  Bourdelot,  premier 
médecin  de  madame  la  duchesse  de  Bourgogne,  sur  les  moyens 
de  perfectionner  l'ouïe.  Paris,  1 702,  in-4°. 

TICQ  D'AZYR  (Félix).  De  la  structure  de  l'organe  de  l'ouïe  des 
oiseaux,  comparé  avec  celui  de  l'homme,  des  quadrupèdes,  des 
reptiles  et  des  poissons  (dans  les  Mémoires  àe  l'Académie  des 
sciences,  177S.  Hist.  5.  Mém.  38i). 

SAVART  (Félix).  Recherches  sur  les  usages  de  la  membrane  du 
tym])an  et  de  l'oreille  externe,  lues  à  l'Académie  royale  des 
sciences  de  Paii-,  le  2g  avril  1822  (dans  les  Annalfs  de  chimie  et 
deph/sique,  t.  XXVI,  mai  1824,  p.  5). 

—  Note  sur  la  sensibilité  de  l'organe  de  l'ouïe  (dans  la  Bévue  mu- 
sicale, t.  X,  p.  356). 

Voy.  aussi  le  Mémoire  d'acoustique,  du  même  auteur,  dans  le 
Bulletin  des  sciences  dt  la  société  philomalique,  1822,  p.  90,  où  il 
traite  de  l'organe  de  l'ouïe. 

On  peut  aussi  lire  avec  fruit  sur  cette  matière  les  Traités  de 
physiologie,  de  Magendie,  d'Adelon,  et  des  autres  jjhy.siologisles 
français. 

II.  De  la  voix  humaine. 

DODART  (Denis).  loMémoire  sur  les  causes  delà  voix  deThomme 
et  de  ses  différens  tous  (dans  les  Mémoires  de  V Académie  rojrale 
des  sciences,  1700,  p.  238);  2°  Note  sur  le  mémoire  précédent 
{Ibid,  p.  268-287);  3°  Supplément  au  mémoire  sur  la  voix  et  sur 
ses  tons  {Ibid.,  1706,  p.  i36);  4»  Suite  de  la  première  partie  du 


SYSTÉMATIQUE.  423 

Supplément  au  mémoire  sur  la  voix  et  sur  ses  tons.  Quatrième 
addition.  De  la  différence  des  tons  de  la  parole  et  de  la  voix  du 
chant,  par  rapport  au  récitatif,  et  par  occasion  des  expressions 
de  la  musique  antique  et  de  la  musique  moderne  (^Ibid.,  p.  388); 
5»  Su])pléraent  au  mémoire  sur  la  voix  et  sur  les  tons,  Seconde 
])artie.  (Mém.  de  1707,  p.  66) 

FERREIN  (...).  Delà  formation  de  la  voix  de  l'homme  (dans  les 
Mémoires  de  l'Académie  rojale  des  sciences,  1741,  p-  409)- 

EERTiN  (M,),  médecin.  Lettre  à  M.  D....  sur  le  nouveau  système 
de  la  voix  (celui  de  Ferrein).  La  Haie,  1745,  in- 12. 

MO>TAGNAT  (...),  médecin,  élève  de  Ferrein.  Lettre  à  M.  l'abbé 
D  F.  (Desfontaines),  ou  Réponse  à  la  critique  que  fait  M.  Burlon 
(dans  ses  Jugeraens  sur  quelques  écrits  nouveaux)  du  sentiment 
de  M.  Ferrein  sur  la  formation  de  la  voix  humaine.  Paris,  David, 

1745,  in-i2. 

—  Eclaircissement  en  forme  de  lettre  à  M.  Bertin  sur  la  décou- 
verte que  M.  Ferrein  a  faite  du  mécanisme  delà  voix  de  l'hom- 
me, ou  réfutation  d'une  brochure  qui  a  pour  titre  :  Lettre  sur 
le  nouveau  système  de  lavoix.  Paris,  David,  1746,  in-12. 

—  Lettre  à  M.  Bertin,  médecin,  au  sujet  d'un  nouveau  genre  de 
vaisseaux  découverts  dans  le  corps  humain,  ou  Réponse  à  la  di- 
gression que  fait  l'auteur  anonyme  de  la  Lettre  sur  le  nouveau 
système  de  la  voix,  etc.  Paris,  David,  1746,  in-12. 

Cet  écrit  est  étranger  à  la  théorie  de  la  voix,  mais  il  est  pré- 
cédé d'un  avant-propos  de  12  pages  où  se  trouve  l'exposé  des 
discussions  relatives  à  la  doctrine  de  Ferrein  sur  cet  organe. 

BERTIN  (...).  Letires  sur  le  nouveau  système  de  la  voix  et  sur  les 
artères  lymphatiques.  Sans  nom  de  lieu,  1748,  in-12. 

La  première  de  ces  lettres,  publiée  pour  la  première  fois,  est 
adressée  à  M.  Guns,  professeur  d'anatomie  à -Leipsick;  la  seconde 
est  la  lettre  à  M.  D...,  déjà  imprimée  eu  1745,  mais  avec  beau- 
coup de  notes  nouvelles  ;  la  troisième  n'a  aucun  rapport  à  la 
théorie  de  la  voix. 

MOREL  (...).  Nouvelle  théorie  jihysique  de  la  voix.  Montpellier, 

1746,  in-12. 

VICQ-D'AZYR  (Félix).  Mémoires  sur  la  voix;  de  la  structure  des 
organes  qui  servent  à  la  formation  de  la  voix,  considérés  dans 
l'homme  et  dans  lus  différentes  classes  d'animaux  et  comparés 


424  CATALOGUE 

entre  enx  (dans  les  Mémoires  de  l'Académie  des  sciences^   1779. 
Hist.  p.  5,  Mém.  p.  178). 

DESPIKEY  (Félix).  Mélanges  physiologiques.  Lyon,  1822,  in-S" 
de  80  pages. 

Le  premier  morceau  de  ce  recueil  contient  des  Recherches  sur 
la  -voix  et  une  théorie  de  cet  organe  en  38  pag.  Il  est  suivi  de 
Considérations  générales  sur  la  voix,  et  de  deux  articles,  l'uu  sur 
Y  Art  du  ventriloque,  l'autre  sur  uos  instrumens  comparés  au  larynx. 

SAVART  (Félix).  Mémoire  sur  la  voix  humaine  (dans  le  Journal  de 
physiologie  expérimentale,  iSîS,  n.  4)- 

GERDY  (le  doct.).  Note  sur  les  raouvemens  de  la  langue  et  quel- 
ques mouvemens  du  pharynx  (dans  le  Bulletin  universel  des  scien- 
ces, puhlié  sous  la  direction  de  M.  de  Férussac,  janvier  i83o , 
sect.  lll). 

MALGAIGNE  (J.-F  ),  de  Charmes,  docteur  en  médecine,  chirur- 
gien à  Thùpital  militaire  d'instruction  du  Val-de-Grace. 

Nouvelle  théorie  de  la  voix  humaine,  mémoire  couronné  par 
la  société  d'émulation  médicale.  Paris,  Béchet  jeune,  i83r,in-So 
de  69  pages. 

Ce  mémoire  est  extrait  des  Archives  générales  de  médecine. 

BENNATI  (le  doct.  François).  Recherches  sur  le  mécanisme  de  la 
voix  humaine,  ouvrage  qui  a  obtenu  un  prix  à  la  société  des 
sciences  physiques  et  chimiques  de  Paris,  précédé  du  rapport 
de  MM.  G.  Cuvier,  de  Prony  et  Savart  à  l'Académie  des  sciences. 
Paris,  Baillière,  iSSa,  in-80  de  160  pages,  avec  une  planche. 

—  Recherches  sur  les  maladies  qui  affectent  les  organes  de  la  voix 
humaine,  lues  à  l'Académie  royale  des  sciences,  et  couronnées 
par  la  société  des  sciences  physiques  et  chimiques  de  Pans.  Pans, 
Baillière,  1882,  in-80  Je  rSa  pages,  avec  2  planches. 

Les  deux  ouvrages  de  M.  Bennati,  qui  sont  d'une  importance 
considérable,  à  cause  de  la  nouveauté  des  faits  qui  y  sont  con- 
signés, ont  été  réunis  dans  une  nouvelle  édition,  sous  le  titre 
suivant  -.Etudes  physiologiques  et  pathologiques  sur  les  organes  de 
la  voix  humaine,  ouvrage  auquel  l'Académie  royale  des  sciences  a 
décerné  un  des  prix  de  médecine/ondes  par  M.  de  Monthjon.  Paris, 
Baillière,  i833,  i  vol.  in-8<'. 

On  doit  aussi  consulter  sur  cette  matière  les  Traités  de phjsio- 
logie,  de  Magendie,  d'Adelon,  et  d'autres  savans  médecins. 


SYSTEMATIQUE.  425 

CHAPITRE  XI. 

DU  SON  ET  DE  SES  MODIFICATIONS. 

BURJA  (Abel).  Remarques  sur  la  musique  (dans  les  Mémoires  de 
r Académie  des  sciences  et  belles-lettres  de  Berlin,  1796.  Classe  de 
math.,  p.  1-16),  i"  sur  les  sons  qu'on  tire  des  plaques  ou  car- 
reaux de  verre;  2°  sur  l'usage  du  verre  dans  la  musique;  3°  Des- 
cription d'un  nouvel  instrument  de  musique  fait  de  plaques 
de  verre  qu'on  touche  avec  deux  archets. 

GAUTHEROT  (...).  Sur  la  théorie  des  sons.  Paris,  rSoo,  in-80. 

TREMBLY  (Jean). Observations  sur  la  théorie  du  son  (dans  les  Mé- 
moires de  l'Académie  de  Berlin,  1801.  Philos,  expérim.  p.  33). 


CHAPITRE  XII. 

••  DE   LA  VÉLOCITÉ  DU    SON. 

CASSINI  (  de  Thury).  Sur  la  propagation  du  son  (  dans  les  JJfe- 
moircs  de  V Académie  rojale  des  sciences,  1738,  p.  I,etmém.  24). 

—  IVouveiles  expériences  faites  en  Languedoc  sur  la  j)ropagation 
du  son,  qui  confirment  celles  qui  ont  été  faites  aux  environs  de 
Paris  (dans  les  Mémoires  de  1743,  p-  199)- 

NOLLET  (  l'abbé  ).  Mémoires  sur  l'ouïe  des  poissons  et  sur  la 
transmission  des  sous  dans  l'eau  (  dans  les  Mémoires  de  l'Aca- 
démie royale  des  sciences,  1743,  p.  199  ). 

EXILER  (  Léonard  ).  Eclaircissemens  détaillés  sur  la  génération 
du  son,  sa  propagation  et  sur  la  formation  de  l'écho  (  dans  les 
Mém.  de  l'Académie  royale  des  sciences  Ae^evWn,  1765,  p.  335). 

LAMBERT  |(  J. -Henri  ).  Sur  la  vitesse  du  son  (  dans  les  Mém.  de 
r  Académie  royale  des  sciences,  176S,  p.  70  ). 

LAGR.'V^NGE  (Louis  de).  Redierches  sur  la  nature  et  la  propaga- 
tion du  son  (  dans  les  Mém.  de  l'Acad.  de  Turin,  t.  I,  p.  I  ). 

—  Nouvelles  recherches  sur  la  propagation  du  son  [Jbid.  t.  IF, 
p.  323  ). 

36. 


426  CATALOGUE 

—  Solution  de  différens  problèmes  de  calcul  intégral  (  Ibid.  t.  III). 
L'auteur  traite,  dans  ce  mémoire,  de  plusieurs  choses  relatives  à 
la  vitesse  du  son. 

PÉROLLE  (  ...  ),  professeur  de  médecine  à  l'université  de  Mont- 
pellier. Expériences  physico-chimiques  relatives  à  la  propaga- 
tion du  son  dans  quelques  fluides  aériformes  (dans  les  Mèm.  de 
l'Acad.  rof.  de  Turin,  1786-87.  Mém.  desCorresp.,  p.  i,  10  ). 

—  Mémoire  physique  ,  contenant  des  expériences  relatives  à  la 
propagation  du  son  dans  diverses  substances,  tant  solides  que 
fluides;  2°  Essai  d'expériences  qui  tendent  à  déterminer  la 
cause  de  la  résonnance  des  instrumens  de  musique  (  Ibid.  1790- 
91,  t.  V,  p.  195,  280  ). 

PORLETTI  (  Modeste  ).  Recherches  sur  l'influence  que  la  lu- 
mière exerce  sur  la  propagation  du  son  (  Ibid.  i8o5-i8o8,  p.  r, 
p.  141,  109). 

BIOT  (...].  Expériences  sur  la  propagation  da  son  à  travers  les 
corps  solides  et  à  travers  l'air  dans  des  tuyaux  cylindriques  très 
allongés  (  dans  les  Archives  des  découvertes  dans  les  sciences  et  les 
Ans,  pendant  l'année   1808). 

LÂPLACE  ( ).  Développement  de  la  théorie  des  fluides 

élastiques  et  application  de  cette  théorie  à  la  vitesse  du  sou 
(  dans  le  Bulletin  de  la  société philomallque,  1S21,  p.  iGi  ). 


CHAPITRE  XIII. 

DK3  VIBRATIONS  DIS  CORDIS  ET  d'aUTRES  CORPS. 

BERNOULLI  (Daniel  ).  Réflexions  et  éclaircissemens  sur  les  vibra- 
K  tious  des  cordes  (dans  les  Mém.  de    l'Acad.  de  Berlin,  1753). 

—  Sur  les  vibrations  des    cordes  d'une   épaisseur  inégale  (  ibid. 
1765  ). 

EULER( Léonard).  Sur  les  vibrations  des  cordes  (dans  les  Mém. 
de  l'Acad.  de  Berlin,  174S-1753). 

—  Sur  le  mouvement  d'une  corde  qui,  an  coramemement,  n'a  été 
ébranlée  que  dans  une  partie  (  Ibid.  1765  ). 

BER.NÛULLI  (Jacques).    Essai  théorique  sur   les  vibrations  des 


SYSTÉMATIQUE.  427 

plaques  élastiques  rectaugulaireset  libres  (  daus  les  Méin.  do  l'A- 
cadémie Ae  Pétersbourg,  1787  ). 
PERROLLE  (.-.).  Sur  les  vibrations   totales    des    corps  sonores 

(  dans  \e  Journal  de  Physique,  1789,  t.  XXXVII  ). 
OSTED  (  J.-C.  ).  Lettre  au  professeur  Pictet  sur  les  vib»utions  so- 
nores  (  dans  la  Bibl.  Britan.,  t.  XXX,  Genève,    i8o5,  p.  364» 
372  ). 
POISSON  (  ...).  Traité  sur  le  mouvement  des  fluides  élastiques 
dans  les  tuj'aux  cylindriques  et  sur  la  théorie  des  instruraens  à 
vent  (  dans    les   Mèm.   de  l'Âcadèm,   rojr.  des  sciences  de   Paris, 
1817). 
GERMAIN  (  mademoiselle  Sophie  ).  Recherches  sur  la  théorie  des 
surfaces  élastiques.  Paris,  madame   Courtier,  1821,  in-4"  de  yG 
pages  avec  uue  planche. 
—  Remarques  sur  les  bornes  et   l'étendue  de  la  question  des  sur- 
faces élastiques.  Paris,  Baciielier,  1828,  in-4<'. 

POISSON  (  ).    Sur  la  propagation  du  mouvement  dans 

les  fluides  élastiques  (  dans  les  Annales  de  chimie  et  de  physique, 
t.  XXII,  p.  25o  ). 
SAVART  (  Félix  ).  Recherches   sur   les  vibrations  de  l'air  [Ibid., 

t.  XXIV,  septembre  1823,  p.  56  ). 
SAVART  (  Félix  ).  Mémoires  sur  les  vibrations   des  corps  solides, 
considérées  en  général  (  Ibid.,  t.  XXV,  janv.  1825,  p.  24  ). 

Ou  peut  lire  aussi  avec  fruit  sur  ces  matières  les  Traités  géné- 
raux de  physique  de  Haiiy,  de  Libes,  de  Biot  et  autres. 


CHAPITRE  XIV. 


DE    L  ECHO. 

HAUTEFEUILLE  (  l'abbé  de  ).  Dissertation  sur  la  cause  de  l'écho, 
couronnée  en  1718  par  l'Académie  des  belles-lettres,  sciences 
et  arts  de  Bordeaux.  Bordeaux,  Brun,  1718,  48  p.  iu-12. 

Un  extrait  de   cet   écrit   a    été  imprimé  à  Paris,  chez  Varin, 
1788,  in-8o. 

—  De  la  manière  dont  se  forme  l'évho  (  dans  les  Mém.  de  Trévoux, 
t.  XXXV,  p.  167,  171  ). 


428  CATALOGUE 

QUESNET  (  (loin  François  ).  Observations  sur  un  éclio  singulier 

près  de  Rouen  (  dans  les  Mèm.  del'Acad.    roy.  des  sciences,  t.  Il, 

]'•    140). 
GALLOIS  (  Jean  le).  Extrait  d'un  écrit  composé  par  D.  François 

Quesnet,  touchant  les  effets  extraordinaires  d'un  écLo  (  ibid , 

t.  X,  p.  187  ). 


CHAPITRE  XV. 

SUR    LA    SYMPATHIE    DES    SONS. 

ROMrEU(  ...  ).  JfouvcUe  découverte  des  sons  harmoniques  graves, 
dont  la  résonnante  est  très  sensible  dans  les  accords  des  instru- 
mens  à  vent  (  dans  le  recueil  intitulé:  Assemblée  publique  de  la 
société  rojale  de  Montpellier,  i~St  ). 

RAMEAU  (  Jean-Baptiste).  Lettres  aux  philosophes,  sur  la  réson- 
nance  des  corps  sonores  (  dans  les  Mém.  de  Trévoux,  1762, 
p.  465). 

—  Observations  sur  les  principes  d'oîi  M.  Rameau  fait  descendre 
les  deux  accords  parfaits,  l'un  majeur,  l'autre  mineur  (  dans  le 
Journal  des  savans,  août  1769,  p.   ri2,  l3()  ). 

TESTA  (  Dominique  ).  De  la  résonnance  des  corps  sonores  (dans 
le  Recueil  de  pièces  intéressantes  concernant  les  antiquités,  les 
beaux-arts,  etc.  Paris,  1788,   t.  III,  p.  167,  traduit  de  l'italien  ). 


CHAPITRE  XVI. 

DE  LA  DKTER3IINATI0ÎÎ  d'uîT  SON  FIXE. 

DOD  ART  (  Denis  ).  Sur  la  détermination  d'un  son  fixe  (  dans  V His- 
toire de  V Académie  royale  des  sciences,  1700,  p.  l3l-l4o  )• 

LA  SALETTE  (  P.  Joubert  de  ).  De  la  fixité  et  de  l'invariabilité  des 
sons  musicaux,  et  de  quelques  recherches  à  faire  sur  ce  sujet 
dans  les  écrivains  orientaus.  Paris,  Dondey-Dupré ,  1824,  iu-S"  . 


SYSTKMATIQUE.  429 

CHAPITRE  XVII. 

DES  PI'.KNOMtNES  ACOUSTIQUES. 

H.VUTEFEUILLE  (  l'abbé  de  ).  Explications  de  l'effet  des  trom- 
pettes i)arlaiites  ,  on  l'ou  voit  quelle  est  leur  projjortion  ,  leur 
ligure,  leur  matière  ,  leur  sphère  d'activité,  les  expériences  qui 
ont  été  faites,  et  quelques  trompettes  de  nouvelle  invention. 
Paris,  1673,  in-4o;  deuxième  édition,  1674,  in-4o- 

LA  HIRE  (Philippe  de  ).  Explic'ations  des  différens  sons  de  la 
corde  tendue  sur  la  trompette  marine  (  dans  les  Mémoires  de  l'A- 
cadémie roj-ale  des  sciences  ,  t.  IX,  p.  5oo,  et  Mémoires  demathé- 
Tnaliques,  169+  )• 

HAUTEFEUILLE  (  l'abbé  de  ).  Problème  d'acoustique  «'urieux  et 
intéressant.  Paris,  Varia,  1788,  in-So. 


CHAPITRE  XVÎII. 

APrUCATION  DES    MATHÉMATIQUES  A  LA   MUSIQUE. 

DESCARTES  (René).  Abrégé  delà  musique,  avec  les  éclaircisse- 
niens  nécessaires  (traduit  du  latin  par  le  P.  Poisson).  Paris,  in-4°. 

SAUVEUR  (  Joseph  ).  i»  Système  général  des  intervalles  des  sons, 
et  son  application  à  tous  les  systèmes  et  à  tous  les  înstrumens 
de  musique  (  dans  les  Mémoires  de  l  Académie  royale  des  sciences, 
1701  ,  p.  297-364  );  2°  Application  des  sons  harmoniques  à  la 
composition  des  jeux  d'orgue  (ièid.,  1702,  p.  3o8);  3 "Méthode 
générale  pour  former  le  système  tem>péré  de  musique,  et  du 
choix  de  celui  qu'on  doit  suivre  (  Ibid.,  1707,  p.  2o3  )  ;  4"  Table 
générale  des  systèmes  tempérésde  musique  (  Ibid.,  171!)  p.  3o9  ): 
5"  Rapport  des  sons  des  cordes  d'instrumens  de  musique  aux 
flèches  des  cordes ,  et  nouvelle  détermination  des  sons  fixes 
{Ibid.,  1713,  p.  324). 

EULER  (  Léonard  ).  Conjectures  sur  la  raison  de  quelques  disso- 
nances généralement  reçues  dans  la  musique  (  dans  les  Mémoires 
de  l' Académie  de  Berlin,  1764  )■ 

■ —  Des  véritables  caractères  de  la  musique  moderne  (  liid.  ). 


480  CATALOGUE 

—  Lettres  à  une  princesse  d'Allemagne  sur  divers  sujets  de  physi- 
que et  de  philosophie.  Pétersbourg,  1768-73,  3  vol.  iu-80,  léiin- 
primés  plusieurs  fois. 

Les  lettres  3  à  8,  l34,  i36  et  187,  traitent  de  divers  objets  re- 
latifs à  la  miitique. 

GALLIMARD  (  ....  ).  Arithmétique  des  musiciens,  ou  Essai  qui  a 
pour  objet  diverses  espèces  de  calcul  des  intervalles,  le  déve- 
loppement de  plusieurs  systèmes  des  sons  de  la  musique,  etc. 
Paris,  1754  ;  in-S". 

MONTU  (  A.  ).  Numération  harmonique,  ou  Echelle  d'arithmé- 
tique pour  servir  à  l'explication  des  lois  de  riiarmoiiie.  Paris, 
l8o2  ,    in-4o- 

DELEZEUNE  (...).  Mémoires  sur  les  valeurs  numériques  des  notes 
de  la  gamme.  Lille,  1827,  iu-S". 

MONTVALLON  (  M.  de  ).  Nouveau  système  de  musique  sur  les 
intervalles  des  tons  et  sur  la  proportion  des  accords,  où  l'o» 
examine  les  systèmes  proposés  par  divers  auteurs  (  dans  les  Mé- 
moires de  T^carf  miV  rojale  des  sciences  ,  1742,  p.  117)- 

BLEIN  (le  baron  ).  Principes  de  mélodie  et  d'harmonie,  déduits  de 
la  théorie  des  vibrations.  Paris,  Bachelier,  i832,  in-8". 

LAMBERT  (  Jean-Henri  ).  Remarques  sur  le  tempérament  en  mu- 
sique (  dans  les  Mémoires  de  l'Académie  de  Berlin  ,  1774  )• 

LOUET  (  Alexandre  ).  Instructions  théoriques  et  pratiques  sur 
l'accord  du  pi.mo-fnrté,  etc.  Paris,  1798,  in-S»  de  63  pages. 

LA  SALLETTE  (  P.  Joubert  de  ).  Lettre  sur  une  nouvelle  manière 
d'accorder  les  forté-pianos,  ou  plus  généralement  les  instrumeus 
à  clavier.  Paris  ,  1808,  in-80. 

BLANCHET  (  .4.-F.-N.  ).  Méthode  abrégée  pour  accorder  le  forte- 

piano.  Paris,  Brianchon  ,  in-8°. 
STEUP  (  H.-C.  ).  Méthode  pour  accorder  le  forté-piano.  Amster- 
dam ,  iSti ,  in-S°. 


CHAPITRE  XIX. 

DE   LA  CONSTRUCTION    DES  INSTRUMENS. 

CARRR  (Louis).  10  Traité  mathématique  des  cordes  par  rapport 
aux  instruincus  de  musique  (dans   les   Mimvi  e:  de    V Académie 


SYSTEMATIQUE.  48t 

royale  dti  sciences  ,  1706,  p.  114).  2°  De  la  proportion  que  doi- 
vt'iit  avoir  les  cylindres  pour  former  par  leurs  sous  les  accords 
de  lu  musique  {ibid.,  r^oy,  p.  47)- 

MAUPERTUIS  (S.  Baptiste  Drovel  de).  Sur  la  forme  des  instra- 
mens  de  musique  (ibid.,  1724,  p.  2i5-226). 

LAMBERT  (Jean-Henri).  Sur  les  tons  des  flûtes  (dans  les  Nouveaux 
Mémoires  de  l'Académie  de  Berlin  ,  1775). 

SIBIRE  (l'abljé).  La  Chélonomie,  ou  le  Parfait  luthier.  Paris,  1806, 
in-i2  de  288  pages. 

Lupot,  luthier  de  Paris,  a  fourni  les  matériaux  de  cet  ou- 
vrage. 

SAVART  (Félix).  Mémoire  sur  la  construction  des  instrumens  à 
cordes  et  à  archet,  etc.  Paris,  Déter-ville',  iSrp, in-8°. 
—  L' Art  du.  luthier  (  dans  V Encyclopédie  méthodique,  avec  des 
planches). 

FÉTIS  (François-Joseph).  Sur  la  construction  des  violons,  altos  et 
basses  (dans  la  Reme  Musicale ,  t.  II,  p.  i5). 

CAUX  (Salomon  de).  Les  raisons  des  forces  mouvantes  avec  di- 
verses machines.  Francfort,  i6i5,  in-fol. 

Le  troisième  livre  traite  spécialement  de  la  construction  de 
l'orgue. 

BERNOULLI  (Daniel).  Recherches  physiques,  mécaniques  et  ana- 
lytiques sur  le  son,  et  sur  les  tons  des  tuyaux  d'orgue  différem- 
ment construits  (dans  les  Mémoires  de  P Académie  royale  des  scien' 
ces,  1762,  p.  43i-'i85,  avec  deux  planches). 

BEDOS  DE  CELLES  (D.  François)  L'art  du  facteur  d'orgues. 
Paris,  1766-1778  ,  4  parties  grand  in-fol. 

Ouvrage  très  important  et  le  plus  considérable  qui  existe  sur 
ce  sujet. 

FETIS  (François-Joseph).  Sur  l'orgue  ex2)ressif  perfectionné  par 
Érard  (dans  la  Revue  Musicale,  t.  II,  p.  i28-i35  ;  t.  VI,  p.  104, 
129). 
WEBER  (W.).  Du  système  de  compensation  dans  les  tuyaux  d'or- 
gue (dans  \a  Revue  Musicale  ,  t.  VII,  p.  353). 
ROUSSIER  (l'abbé).  Mémoire  sur  la  nouvelle  harpe  de  Cousineau, 

Paris,  Lamy,  1782,  in-12. 
NADERM.4.1NN  (Henri).  Oliservations  de  MM.  Nadermann  frères 
sur  la  harpe  à  double  inouveineut,  ea  réponse  à  M.  de  ProiiT 


432  CATALOGUE 

membre  de  l'Acailémie   des  sciences.  Paris,  veuve  Nadermann, 
lSi5,  in-4°  de  4  feuilles,  avec  g  plaucli. 
FÉTIS  (Franc. -Joseph)  Sur  la  harpe  et  particulièrement  sur  celle 

<i'Erard  à  double  mouvement  (dans  la  Revue  musicacle,  t.  II, 

p.  ;î37-34f)). 
IvADERMA?<N  (Henri).   Réfutation  de  ce  qui  a  été  dit  en  faveur 

des  différens  mécanismes  de  la  harpe  à  double  mouvement,  ou 

Lettre  à  M.  Fétis.  Paris,  janvier  1828,  in-S". 
rÉTIS  (Franc. -Jos.).  Lettre  à  M.  Henri  Naderraann,  au  sujet  de  sa 

réfutation  d'un  article  de  la  Rerue  musicale  sur  la  harpe  à  double 

mouvement  (daus  la  Revue  musicale,  t.  III,  p.  l). 
KADERMA>'X  (Henri).  Supplément  à  ce  qui  a  été  dit  en  faveur 

des    différens   mécanismes  de   la  Iiarpe  à  doui.)le    mouvement. 

Paris,  avril  1828,  in-S"  de  32  pages. 
FÉTIS  (Franç.-Jos.).  Mon  dernier  mot  sur  la  harpe  à  doul)le  mou- 
vement (dans  la  Revue  musicale,  t.  III,  p.  2G5). 
Desc  ription  du  clavi-harpe  inventé  par  M.  Dietz   père.  Paris, 

Dietz.  fils,  1821,  19  p.  in-8°,  avec  une  planche. 
FETIS  (Franç.-Jos.).  Sur  les  perfectionnemens  importans  qui  ont 

été  faits  depuis  peu  d'années  dans  la  fabrication  des  pianos  (dans 

la  Revue  musical?,  t.  I,  ]).  32). 

—  Sur  les  pianos  de  MM.  Pfeiffer,  RoUer,  l'Ieyel,  Dietz,  Kleti- 
fer,  etc.,  etc.  {Ibid.,  t.  II,  p.  82-97). 

—  Sur  le polfpleciron,  instrument  nouveau,  inventé  par  M.  Dietz 

(ibtii.,  t.  m,  p.  593). 

LARORDE  (le  P.  de).  Le  Clavecin  électrique,  avec  une  nouvelle 
théorie  du  mécanisme  et  des  phénomènes  de  l'électricité.  Paris, 
I7(jr,  in-i2. 


CHAPITRE   XX. 

nu  CnROXOMÈTRE   ET  DES   DIVERS  ISSTRUMENS   PROPRES   A 
MESURER  tE  TE5IPS  EW  MUSIQUE. 

D.VVOUX  (...).  Lettre  sur  un  instrument  ou  pendule  nouveau  qui 
a  pour  but  de  déterminer,  avec  la  plus  grande  exactitude,  les 
dilférens   degrés   de  vitesse  ou  de  lenteur  des  temps  dans  une 


SYSTÉMATIQUE.  4.33 

pièce  de  musique,  depuis  le  prestissimo  jusqu'au  lar^o  (dans  h; 
Journal  encyclopédique,  juin  1784,  p.  534)- 
THIEME  (Frédérii).  Nouvelle  tliéorie  sur  les  diffcrens  mouvemens 
des  airs,  fondée  sur  la  pratique  de  la  musique  moderne,  avec  le 
projet  d'un  nouveau  chronomètre,  etc.  Rouen  et  Paris,  1801, 
in-S"  de  70  pag. 

—  Notice  sur  le  métronome  de  J.   Maelzel.  Paris,   Callard,  sans 
date,  in-80. 

FETIS  (Franç.-Jos.).  Sur  le  métronome  de  Maelzel,  avec  l'histoire 
du  chronomètre  (dans  la  Revue  musicale,  t.  II,  p.  3Ci). 

—  Notice  sur  le  métronome  perfectionné  de  Bienaimé.  Paris,  sans 
date,  une  feuille  in-So. 

■^  Sur  le  métronome  perfectionné  de  Bienaimé  (dans  la  Revue  mu- 
sicale,  t.  II,  p.  534). 


CHAPITRE  XXI. 

ART  DE  KOTER    LES  CYLINDRES  d'oRGUES  ET  DE  SERINETTES. 

ENGRAMELLE  (le  P.  Marie-Dominique-Joseph).  La  tonotechnie, 
ou  l'art  dénoter  les  cj'lindres.  Paris,  1775,  un  vol.  in-S". 


FIN    DU    CATALOGUE   STSTEMATIQIE 


TABLE 

UIÎS  MATIÈRES  PRINCIPALES 

CONTENUKS     DA?fS     CF.     VOLUME. 


INTRODUCTION. 

Nécessité  d'apprendre  tout  ce  qu'on  veut  savoir.  —  Le  senti- 
ment des  arls  n'est  que  le  résultat  de  l'éducation  des  or- 
ganes. —  Utilité  d'un  livre  qui  faciliterait  cette  éducation,  sans 
obliger  à  des  études  techniques. — Objetde  celui-ci.        page  j 

PREMIÈRE   SECTION. 

1)D  SYSTÈME  MUSICAL,  CONSIDÉRÉ  DANS  tES    TROIS   QUALITES    DES 

soifs,  SAVOIR  :  l'intosation,  la  durée  et  l'iktensité. 

CHAP.  I.  objet  de  la  musique.  Son  origine.  Ses  moyens,    p.    i 

La  musique  a  une  double  actiou  sur  les  hommes:  l'une  phy- 
sique, l'autre  morale. 

CHAP.  IL  De  la  diversité  des  sons  et  de  la  manière  de  les 
exprimer  par  des  noms.  p.   5 

Il  y  a  une  infinité  de  sons  possibles  entre  les  plus  graves 
d'une  voix  d'homme  et  les  plus  aigus  d'une  voix  de  femme  ou 
d'enfant;  on  peut  les  désigner  par  des  noms.  —  Quels  sont  ces 
noms,  cliez  les  peuples  modernes. 

CHAP.   in.  Comment    on   représente   les    sons   par   des  si- 
gnes, p.  9 
Eiiplication  des  signes  de  la  notation  et  de  leur  effet. 
CHAP.  ÎV\  De  la  difféi'enre  des  gammes;  des   noms    qu'on 


ÏMiLE   DES   MATIÈRES.  435 

leur  donne  ,    et    de  l'opéralion   qu'où  nomme   ininsposi— 
u'on.  page    19 

Contiuuatiou  du  dcveloppeineiit  du  système  de  la  uotatiou. 

CHAP.  V.  Tous  les  peuples  ne  se  servent  pas  de  la  même 
gamme.  —  Il  n'est  pas  prouvé  que  celle  des  Européens 
soit  parfaite,  mais  elle  est  la  meilleure.  p.  23 

CHAP.  VI.  De  la  durée  des  sons  et  du  silence  en  musique; 
comment  on  la  représente  par  des  signes  et  comment  on  la 
mesure.  P-  27 

Suite  du  développement  du  système  de  la  notation. 

CHAP.  VII.  De  ce  qu'on  appelle  expression  dans  l'exécution 
de  la  musique  ;  de  ses  moyens  et  des  signes  par  lesquels  ou 
l'indique  dans  la  notation.  p.   36 

Fin  du  développement  du  système  de  la  notation. 

DEUXIÈME   SECTION. 

UES   SONS  CONSIDÉRÉS    DANS    LEURS    RAPPORTS    DE    SUCCESSION     ET 
DE     SIMULTANÉITÉ  ;     DU      RÉSULTAT    DE     CES    CHOSES. 

CHAP.  VIII.  Ce  que  c'est  que  le  i-apport  ou  la  relation  des 
SOUS.  p.   43 

Les  sons  ont  trois  espèces  de  r.ipports ,  savoir  :  la  succession, 
d'oii  nait  la  mélodie i  la  simultanéité,  principe  de  Vharmonie  ;  et 
l'intensité,  ou  le  degré  de  force. 

CHAP.  IX.  De  la  mélodie.  p.   4  j 

Les  qualités  principales  de  la  mélodie  sont  la  convenance  dans 
la  succession  ôes  sous  et  le  rhythme.  —  La  mélodie  se  compose 
des  parties  qu'on  nomme  phrases.  —  Ce  que  c'est  que  la  carrure 
des  phrases.  —  Ce  que  c'est  que  la  modulation.  —  La  mélodie, 
bien  qu'elle  soit  le  fruit  de  l'imagination ,  est  soumise  à  trois  cou- 
ditioDs  qui  limitent  sa  liberté. 

Ces  règles  sont  la  sjmctrie  de  rhythme,  l.i  srmélric  de  carrure 
ou  de  nombre  ,  et  la  ré^ularilo  du  modulât  on. 


436  TABLE 

CHAP.  X.  De  l'harmouie.  page  62 

Les  peuples  de  l'jiitiqulté  n'ont  point?  connu  l'harmonie.  — 
Elle  est  née  d.ins  le  moyen-âge.  —  Les  élémens  de  Tbarmonie 
se  nomment  accords. —  Accords  agréables  nommés  consonnans; 
accords  moins  agréables  nommés  dissonans.  —  Les  accords  re- 
présentés par  dos  chiffres;  accompagnent. —  L'histoire  de  l'har- 
monie est  une  des  parties  les  plus  intéressantes  de  l'histoire  gé- 
nérale de  la  musique.  Abrégé  de  cette  histoire. 

CHAP.  XI.  De  l'acouslique.  p.  76 

CHAP.   XII.  De  l'art  d'écrire   la  musique.  —  Contre-point. 
—  Canons.  —  Fugue.  p.  80 

Explication  de  ces  choses;  leur  usage;  leur  utilité;  abus  qu'on 
en  a  fait. 

CHAP.  XIII.  De  l'emploi  des  voix.  p,   96 

Classement  des  voix;  conforme  à  la  raison  en  Italie;  vicieux  en 
France. —  L'art  d'écrire  pour  les  voix  est  mieux  connu  des  com- 
positeurs italiens  que  des  Allemands  et  des  Français.  —  Ce  qui 
est  favorable  ou  défavorable  dans  le  chant  à  l'émissioa  de 
la  voix. 

CHAP.  XIV.  Des  iuslruuiens.  !  p.    104 

lustrumens  à  cordes  pincées  dans  l'antiquité.  —  Histoire  de 
la  harpe.  —  Du  luth  et  de  ses  espèces.  —  Instrumeus  à  archet  : 
la  viole  et  ses  espèces;  le  violon;  le  violoncelle;  la  contrebasse. 
■ —  Instrumeus  à  claviers.  Leurs  variétés.  —  Instrumeus  à  vent  : 
flûtes,  hautbois,  cor  anglais,  clarinette,  basson. —  Instrumeus  de 
cuivre:  cors,  trompettes,  trombones,  ophicléides.  — Orgue.  — 
lustrumens  à  frottement  :  harmonica.  —  Instrumeus  de  percus- 
sion. —  lustrumens  de  fantaisie. 

CHAP.  XV.  De  l'instrumenlaliou.  p.   i44 

Emploi  des  instrumeus  dans  la  musique.  —  Systèmes  d'ao- 

compagucmeut.   —  F^ffets  qu'on  tire  des  divers  souorités. 


DES  MATIÈRFS.  437 

CHAP.  XVI.  De  la  forme  des  pièces  daus  lu  musique  vocale 
et  dansl'iustrumeutale.  page   i5i 

.  Quatre  divisions  de  la  musique  vocale  :  i°  la  musique  sacrée; 
2"  la  musique  dramatique;  3*^  la  musique  de  chambre;  4" '^s 
airs  populaires.  —  Deux  divisions  delà  musique  d'église,  savoir: 
\e  plain-chant  et  la  musique  solennelle.  —  Divers  genres  de  mu- 
sique solennelle. — Opéra  :  sou  histoire  abrégée.  —Coupe  des  airs. 

—  Duos,  trios  et  morceaux  d'ensemble.  —  Chœurs.  —  Ouver- 
tures. —  Chansons,  romances,  couplets.  —  Deux  divisions  de 
la  musique  instrumentale  :  1°  musique  de  concert;  2°  musique 
de  chambre.  —  Symphonie.  — Quatuors,  quiutettis,  etc.  — 
Sonates.  — ■  Fantaisies ,  airs  variés ,  etc.  ■ —  Concertos.  —  Musi- 
que d'orgue. 

TROISIÈME  SECTION. 

DE  l'exécution. 

CHAP.  XVII.  Du  chaut  et  des  chanteurs.  p.   177 

Direction  de  la  voix.  —  Exercice  du  chant.  —  Grands  chan- 
teurs italiens.  —  Explication  des  termes  de  l'art  du  chant.  —  Ce 
que  c'est  que  Vexpression.  —  Chanteurs  français.  Garât.  —  Con- 
ditions du  chaut   français  différentes  de  celles  du  chant  italien. 

—  Du  choix  des   voix;  de  leur  conservation;  de  leurs  maladies. 

—  Education  physique  et  morale  des  chanteurs. 

CHAP.  XVIII.  De  l'exécution  instrumentale.  §  I.  De  l'art  de 
jouer  des  iuslrumens.  §  II,  De  l'exécution  en  général  et  de 
l'exécution  collective.  p.   ig3 

§  I.  Qualités  nécessaires  pour  bien  jouer  de  chaque  espèce 
d'instrumens.  —  Du  jeu  des  instrumens  à  archet.  —  Violonistes 
célèbres.  — École  italienne  du  violon,  autrefois  la  meilleure. — 
École  française,  maintenant  supérieure.  —  Violoncellistes  et 
contrebassistes.  —  lustrumens  à  cordes,  fondement  des  or- 
chestres. —  Du  jeu  des  iustrumens  à  vent.  —  Flûte  et  flûtistes 
célèbres. — Hautbois  et  hautboïstes.  —  Clarinette  et  clarinet- 
tistes.— Basson  et  bassonistes. — Cor  et  cornistes. — Trompettes  et 
trompettistes.  —  Du  jeu  desinslrnraens  à  clavier.  —  Orgue;  diffi- 


438  TABLE 

«•ulté  d'en  jouer;  organistes  célèbres.- —  Piano:  différentes  ma- 
nières d'en  jouer  à  diverses  époques;  pianistes  célèbres.  —  Art 
de  jouer  de  la  harpe  ;  harpistes.  —  Guitare,  guitaristes. 

§  II.  La  perfection  de  l'exécution  collective  dépend  d'un  chef 
d'orchestre. — Habileté  dans  le  jeu  des  instrumens  et  dans  le 
chant  insuffisantes  pour  nne  bonne  exécution;  qualités  qu'il 
faut  y  joindre.  Certains  peuples  possèdent  naturellement  ces 
qualités  ;  l'étude  les  développe  chez  d'autres.  —  Dispositions 
des  orchestres ,  leurs  proportions.  —  Orchestres  français  supé- 
rieurs aux  autres.  —  Perfectionnemens  qu'on  peut  introduire 
dans  l'exécution  colIectÏTe. 

QUATRIÈME  SECTION. 

COMMENT    OK   ANALYSE   LES  SENSATIONS  PRODUITES   PAR    LA    MU- 
SIQUE,   PODR    PORTER     DES    JUGEMETfS  SUR   CELLE-CI. 

CHAP.  XIX.  Des  préjugés  des  ignorans  et  de  ceux  des  sa  vans 
en  musique.  page  243 

On  se  presse  trop  de  porter  des  jugemens  sur  ses  sensations. 
—  Les  musiciens  ne  sont  point  fondés  à  se  croire  seuls  juges  de 
la  musique.  —  Les  journalistes  et  les  littérateurs  n'ont  pas  les 
connaissances  nécessaires  pour  donner,  comme  ils  le  font,  des 
théories  de  musique. 

CHAP.  XX.  De  la  poétique  de  la  musique.  p.   249 

La  musique  n'est  pas  seulement  un  art  de  sensation  physi- 
que; son  objet  est  aussi  d'émouvoir.  —  C'est  à  tort  qu'on  en  a 
fait  un  art  d'imitation.  —  Elle  exprime  indépendamment  de  la 
parole.  —  Tous  les  styles  et  tous  les  moyens  sont  bons  lorsqu'ils 
sont  employés  à  propos.  —  Les  faux  jugemens  résultent  de  l'ad- 
miration qu'on  professe  pour  certaines  manières  à  l'exclusion  de 
certaines  autres. 

CHA.P.  XXI.  De  l'analyse  des  sensations  produites  par  la  mu- 
sique. !'•   ^"^ 

Dans  l'origine  des  sensations  musicales  on  n'en  aperçoit  pas 
le  principe.  —  L'halûlude    d'entendre   de  la  musique,  sans  en 


DKS   MATIF.r.F.S.  439 

analyser  les  dét;iils,  n'en  donne  que  «les  notions  et  des  sensa- 
tions incomplètes.  —  On  juge  en  général  sur  la  foi  d'autrui. — 
Nécessité  de  se  défendre  des  préventions  favorables  ou  contraires 
pour  sentiret  pour  juger.  —  Analyse  de  la  musique  dramatique. 
Idem  de  la  musique  religieuse.  —  Idem  de  la  musique  instru- 
mentale. —  Par  l'analyse  des  sensations  on  peut  parvenir  à  ju- 
ger sans  connaissances  tecliniques. 

CHAP.  XXII.  S'il  est  utile  d'analyser  les  sensations  que  la  mu- 
sique fait  naître,  page  282 

C'est  une  erreur  de  croire  qu'on  affaiblit  la  sensation  en  ré- 
fléchissant sur  elle;  comment  cela  peut  se  démontrer.  —  La  pa- 
resse est  l'origine  de  l'éloignement  qu'on  montre  pour  l'analyse 
des  sensations. 

CONCLUSION.  p.  286 


DICTIONNAIRE 

DES  MOTS  DONT  l'cSÀGE  EST  LE  TIVS  HABITUEL  DANS  LA 

MUSIQUE.  p.     287 


CATALOGUE  SYSTÉMATIQUE 

DES    PRINCtPAUX   OUVRAGES  FRANÇAIS   SDR  LES    DIVERSES  PARTIE? 
DE   LA  MUSIQUE. 

CiiAp.  I.  Origine,  éloge,  utilité,  effets  de  la  musique.  Page  899 
Chap.  II.  Littérature  de  l'histoire  de  la  musique.  400 

Chap.  III.  Polémique  sur  la  comparaison  de  la  musique 

italienne  et  de  la  musique  française.  408 

Chap.  IV.  Polémique  sur  la  musique  française,  411 

Chap.  V.   Polémique  sur  la  musique  de  Glurk  et  la  dis- 
pute des  Gluckistes  et  des  Piccinistes.  412 
Chap.  "VI.  Biographie  des  musiciens.                                     4^4 


440  TABLE    DES  MATIERES. 

Chap.  VII.  Bibliographie  de  la  musique.                   Page  418 

Chap.  Vin.  Dictionnaire  technique  de  la  musique.  419 

Chap.  IX.  Théorie  du  son.  421 

Chap.  X.  De  l'ouïe  et  de  la  voix  humaine.  422 

Chap.  XI.  Du  son  et  de  ses  modifications  425 

Chap.  XII.  De  la  vélocité  du  son.  Id. 

Chap.  XIII.  Des  vibrations  des  cordes  et  d'autres  corps.  426 

Chap.  XIV.  De  l'écho.  427 

Chap.  XV.   Sur  la  sjrropathie  des  sons.  428 

Chap.  XVI,  De  la  détermination  d'un  son  fixe.  Id. 

Chap.  XVÏÏT.    Des  phénomènes  acoustiques.  429 
Chap.    XVIII.    Application    des    mathématiques    à  la 

musique. 

Chap.  XtX.  De  la  construction  des  instrumens.  4  3o 
Chap.  XX.   Du  chronomètre  et  des  divers  instrumens 

propres  à  mesurer  le  temps  en  musique.  432 
Chap.  XXI.  Art  de  noter  les  cylindres  d'orgues  et  de 

serinettes.  433 


FrX  DE   LA  TABLE. 


Id. 


La  Bibliothèque 
Université  d'Ottawa 
Echéance 


The  Library 
University  of  Oi 
Date  Due 


57? 


m 


au'8i 


I  Cf. 


muGioigaî* 

10:    .     .        ■i2 

1 1  DEC.  n%2 
2 1  AVR.  1992 


var 


r 


CE    M7       Û0Û6 

.F44    1834 

COO   FETIS,  FRANC  NUSIQLE  HISE 

ACC#  1170Û6  7 


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1  ^ 

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