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University of Ottawa
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LA MUSIQUE
MISE A LA PORTEE
JDE TOUT LE MONDE.
IMPRIMF, PAR LES PROCKDF.&
F. r PAR I.F.S PRESSES MKC.A MQUF.S
n'E. nUVERGI R ,
RUE PF VIBNEUII., n" 1.
MAR i 3
LA MUSIQUE
MISE A LA POHTÉE
^/<^
DE TOUT LE MONDE,
EXPDSK SUCCINCT DE TOUT CE QUI EST NÉCESSAIRK
POUR JUGER DE CET ART;
PAR M. FETIS
Il I R F C T E U rî DE LA REVUE M l S I C A I. K :
DEUXIÈME ÉDITION
AUGMENTÉE DE PLUSIEURS CHAPITRES
M DICTIONNAIRE DES TERMES DE MUSIOUE
ET d'une biographie DE I, \ MUSIOUE.
PARIS
LllIllAIKIK MUSICALE D'K. DlJVKlUiK
RUE SAINTE-ANNE, 34;
roMPTOin DES IMPRIMEURS UNIS,
m il MAI.AQl »1S, 15.
Nul n'a la science infuse. 11 n'est point de
connaissances si simples qu'on ne soit forcé
d'acquérir par sa propre expérience , ou par
l'éducation. Cette proposition, si vraie en toute
chose, est surtout incontestable en ce qui con-
cerne les arts. Notre œil ne sait discerner les
qualités ou les défauts d'un tableau , notre
oreille est inhabile à saisir les combinaisons de
l'harmonie , si l'exercice ne les y a disposés.
Sans doute l'habitude de voir et d'entendre
suffit en beaucoup d'occasions pour sentir les
beautés de la peinturé ou de la musique ; mais
l'habitude est elle-même une éducation.
Toutefois, il y a bien loin de ce sentiment
vague , qui n'a d'autre origine que des sensa-
tions irréfléchies, à la sùrelé de jugement qui
résulte de connaissances positives. Chaque art
a ses principes qu'il faut étudier pour aug-
menter ses jouissances en formant son goÙL.
I-,a musique en a de plus compliqués que la pein-
ture; aussi est-elle à la fois une science et uu
!| INTRODUCTION.
art. C'est cette complication qui en rend l'é-
tude longue et pénible pour quiconque veut y
acquérir un certain degré d'habileté. Mallieu-
reusement il n'est guère possible d'abréger le
temps qu'on est forcé d'y employer. De quel-
([ue facilité qu'on soit doué, quels que soient
les procédés dont on se serve, à quelque méthode
qu'on ait recours, encore faut-il habituer ses
organes à lire avec facilité la foule de signes
dont se compose l'écriture musicale, à prendre
les intonations avec justesse, à sentir les divi-
sions de la mesure, enfin à combiner tous les
élémens de l'art; le temps seul peut en donner
les moyens.
Mais le temps est précisément ce qui man-
que dans le cours de la vie, surtout en l'état de
civilisation perfectionnée de nos jours. Obligé
d'apprendre une foule de choses diverses, on
ne peut y donner qu'une attention fort légère,
et l'on est forcé de n'en prendre que ce qui est
le plus utile dans l'usage habituel. Les arts, con-
sidérés comme délassemens, comme moyens de
plaisirs, sont au nombre des objets dont on ne
prend en général d'idées qu'en courant, et dont
tout le monde se croit juge naturellement et
sans travail. Ce n'est pas qu'on n'aimerait à
INTRODUCTION. lij
posséder sur ce qui les concerne des notions
exactes, pourvu qu'il n'eu coûtât pas plus de
peine pour les acquérir qu'on n'en éprouve à
se mettre au courant de la politique du jour en
lisant un journal. Mais où trouver le livre qui
satisfasse à ce besoin? Essayer de donner des
connaissances générales et suffisantes de tout ce
qui concourt à l'ensemble de l'art musical, en
ne faisant que peu d'usage du langage techni-
que, est une tache qu'aucun écrivain n'a entre-
prise ; c^est celle que je m'impose dans cet ou-
vrage. Peut-être dira-t-on qu'on ne trouve dans
mon livre que la science des ignorans! A la
bonne heure. Cette science est suffisante pour
beaucoup de monde, et je ne croirai point avoir
dérogé de ma qualité de professeur pour l'avoir
enseignée. Répandre le goût de l'art que je
cultive est ma vocation ; j'y obéis. Tout ce qui
mène à ce but me paraît bon en soi. J'ose croire
que ce sera là mon excuse auprès de mes savans
collègues.
On se tromperait si l'on croyait trouver dans
ce livre une méthode nouvelle, un système ou
quelque chose de semblable ; sou titre dit assez
l'objet que je me suis proposé. Donner des no-
tions suffisantes de tout ce qui est nécessaire
IV INTRODUCTION.
pour augmenter les jouissances que procure la
musique, et pour parler de cet art sans l'avoir
étudié , tel est mon but. Que si l'on veut ap-
prendre réellement ses principes, La Musique
mise à la portée de tout le monde sera encore
utile, en cequ'elledisposera l'esprit à des études
qu'on fait presque toujours avec dégoût, parce
qu'on n'aperçoit pas la liaison de leurs élé-
mcns; mais il faudra de plus des méthodes spé-
ciales, des maîtres et surtout beaucoup de dé-
vouement et de patience. Dans ce cas, sentir et
raisonner de ses sensations ne sera plus l'objet;
il s'agira de faire nailre soi-même ces sensations ;
cela est plus difficile et demande plus de temps.
Qu'on ne croie point aux promesses de cer-
tains charlatans; en vain affirment-ils qu'ils fe-
ront des musiciens improvisés, le savoir ne
s'improvise pas. Disons mieux: On ne sait bien
que ce qu'on a appris avec peine. Comprendre
le mécanisme de la science et du langage de la
musique est chose facile ; on pourra s'en con-
vaincre en lisant le résumé qne je présente au
public ; mais devenir habile est autre chose ; ce
ne peut être que le résultat de longs travaux.
Quelques critiques, en rendant compte de la
première édition de ce livre, ont dit qu'il ne
INTKODUC'iJOlV. V
justifie pas son titre et qu'il ne met point la mu-
sique d la portée de tout le monde, c'est-à-dire
qu'il n'en rend point l'étude moins longue ni
plus facile. J'ai lieu de croire que ces critiques
n'ont point lu cette introduction, car ils au-
raient vu que j'y ai répondu d'avance à leurs
objections et que mon but n'est pas celui qu'ils
ont supposé.
La Musique mise à la portée de tout le monde
appartient à cette partie de la littérature des
arts qu'on nomme X jJLslUétique. Aucun livre
de ce genre n'a été publié en France, mais il en
existe plusieurs en Allemagne. Ceux-ci ne sont
que des essais imparfaits qui seront sans doute
surpassés quelque jour ; mais enfin ils ont le
mérite d'avoir tracé la route, et ce mérite leur
restera. J'ose croire qu'il en sera de même de
mon ouvrage ; on pourra mieux faire, mais on
sera forcé d'avouer l'utilité qu'on en aura re-
tirée.
L'accueil favorable que le public a fait à La
Musique viise éi la portée de tout le monde a sur-
passé mon attente. En moins de deux années,
outre l'édition de Paris, il en a été fait deux
autres: une à Liège, in-1 2, et l'autre à Bruxelles,
in-18. M. Charles Blanc en a donné unclraduc-
VJ INTRODUCTION.
tion allemande sous le titre de Die Musik etc.
( Berlin, 1830, 1 vol. in-12 ) ; il y a ajouté quel-
ques notes. En 1831 on en a aussi publié, à
Londres, une traduction anglaise intitulée : Ma-
sik made easy ; enfin les journaux italiens en
ont annoncé une version en langue italienne.
Ce succès général défend mieux mon livre
que je ne pourrais le faire dans une préface ;
toutefois, il ne m'aveugle pas sur ses défauts et
ne diminue pas le désir que j'ai de l'améliorer et
d'augmenter son utilité. C'est ce désir qui m'a
conduit à y changer de nombreux passages et à
l'augmenter d'un second volume, bien que je
sois convaincu que le mérite d'un ouvrage ne
se mesure point à son étendue. J'ai cru que ce
volume serait d'un usage commode pour les
gens du monde, et même pour les artistes qui
n'ont pas eu le temps d'étudier toutes les parties
de leur art. Il contiendra 1° un Dictionnaire des
mots dont l'usage est le plus habituel : j'espère
que l'utilité de cette addition sera sentie par
mes lecteurs ; 2° un Catalogue systématique des
principaux ouvrages français sur les diverses
parties de la musique.
LA MUSIQUE
MISE A LA PORTÉE
DE TOUT LE MONDE.
PREMIERE SECTION.
«U SYSTÈME MUSICAL, CONSIDÉRÉ DANS LES TROIS QUALITÉS
DES SONS, SAVOIR : l'iNTONATION, LA DUREE ET l'iNTENSITÉ.
CHAPITRE I.
objet <1p la musique. — Son origine. — Ses moyens.
lia musique peut se définir Vart d'émom'oir par la
combinaison des sons *. Ce n'est pas seulement sur l'es-
pèce humaine que l'action de cet art se fait sentir; la
plupart des êtres organisés y sont plus ou moins soumis.
L'ouïe qu'il attaque immédiatement semble n'être que
son agent : c'est sur le genre nerveux que sa puissance se
(i) Celte définition n'est pas celle qu'on trouve dans les dic-
tionnaires. J.-J. Rousseau dit que la musique est l'art de combiner
les sons d'une manière agréable à l'oreille ; c'est borner l'action de cet
art à une sensation physique bien qu'il en ait une morale. Le cé-
lèbre philosophe Kant définit la musique l'art d'exprimer une
agréable succession de sentimens par les sons, ce qui semble exclura
les émotions fortes du domnine lie cet art. Mosel, littérateur alle-
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.-.••trV. .•.♦.j.'v.A ,> ••-•»^ A,, .
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% . . ■ X . '*■->' '^\ J
3 INTONATION. SKCT. I.
tléveloppe avec le plus de force; de là vient la diversité
de ses effets. Le chien, le cheval , le cerf, l'éléphant, les
reptiles, les insectes même, sont sensibles à la musique,
mais d'une manière différente. Dans les uns, la sensation
ressemble à un ébranlement nerveux porté jusqu'à la
douleur; dans les autres, le plaisir subit diverses trans-
formations. L'attention de tous est fixée dès que les sons
se font entendre.
Les phénomènes développés par la musique dans l'or-
ganisation humaine sont surtout très dignes de remarque.
àSur un certain nombre d'individus également sensibles
?i ses accens , il est des combinaisons de sons qui excitent
le plaisir des uns, tandis que les autres restent impas-
sibles; et réciproquement. Telle combinaison qui ne
nous a point émus dans un moment, nous transporte
d« plaisir dans un autre. Quelquefois ce plaisir n'est
qa'une douce sensation à laquelle on semble s'aban-
d">nner d'une manière passive; dans d'autres circons-
tances, l'action de l'art prend le caractère de la violence,
et tout le système vital est ébranlé. La constitution déli-
cate des femmes les rend propres à éprouver dans l'au-
dilion de la musique de plus vives sensations que les
Iiommes ; il en est même chez lesquelles l'action de cet
art porte le délire des sens jusqu'au dernier degré.
Mais si le goût de la musique nous est donné par la
nature, l'éducation y ajoute beaucoup, et peut même le
mand. dit qne la musique est l'art d'exprimer des sentimens déier-
minés par des tons bien coordonnés t m.iis les sentimens ne soat dé-
ti-rmiiics d:i:is l'effet de la niusiq'io que par le sens des paroles
qu'on y nd.ijite; Us sont indéterminés dans la rauiiqiie instriimen-
t:ile et n'en sont pas moins vifs. Je crois que ma définition est la
meilleure.
CHAP. r. ORIGINE UE LA MUSIQUE. 3
faire nalfre. De là vient sans doute que l'on voit dans la
monde des hommes, distingués d'ailleurs par les qualités
de l'esprit et par des taiens d'un autre genre, montrer
non -seulement de l'indifférence, mais même de l'aver-
sion pour cet art. Queli|ues philosophes ont pensé que
l'organisation de ces individus est incomplète ou vicieuse;
il se peut toutefois que leur manière d'èlro ne soit que
le résultat d'une longue impassibilité des nerfs musi»
eaux, et que le défaut d'exercice ait produit leur inseu'»
sibililé.
L'action de la musique sur les organes physiques et
sur les facultés morales a fait imaginer de s'en servir
comme d'un moyen curatif, non-seulement dans les
affections mentales, mais même dans certaines maladies
où l'organisation animale parait seule atteinte. Beaucoup
de médecins ont fait sur ce sujet des recherches intéres-
santes, mais dans lesquelles l'esprit philosophique n'a
point assez dominé : le nombre des ouvrages où ils les
ont consignées est très considérable, et les faits qui y
sont exposés ont quelque chose de si peu vraisemblable
qu'ils ont besoin de l'autorité du nom des auteurs pour
être admis.
Malgré sa capacité relative, l'esprit humain a des
bornes telles que l'idée de l'infini n'y entre qu'avec ef-
fort. On veut trouver un commencement à toute chose,
et, dans les idées vulgaires, la musique doit avoir une
origine comme toutes nos connaissances. La Genèse ni
les poètes de l'anliquilé profane ne parlent des inven-
teurs de cet art; seulement ils citent les noms de ceux
qui ont fait les premiers instrumens , Tubal, Mercure,
Apollon et d'autres. On pense bien que c'est la Geoèse
que je crois sur cet objet , comme sur d'autres plus im-
f INTONATION. StCT. I.
portans; mais ce n'est pas de cela qu'il s'agit. Quant à
l'origine de la musique , chacun l'a arrangée a sa fanta-
sie ; toutefois l'opinion qui la place dans le chant des
oiseaux a prévalu. Il faut avouer que c'est la une idée
bizarre, et que c'est avoir une opinion bien singulière de
l'homme que de lui faire trouver l'une de ses jouis-
sances les plus vives dans l'imitation du langage de cer-
tains animaux. Non, non, il n'en est point ainsi ! 1 homme
chante comme il parle, comme il se meut, comme d dort,
,,ar une suite de la conformation de ses organes et de la
disposition de son ame. Cela est si vrai que les peuples
les plus sauvages et les plus isolés de toute commun.ca-
tion avaient une musique quelconque quand on les a
découverts, lors même que la rigueur du climat ne per-
mettait point aux oiseaux de vivre dans le pays ou d y
chanter. La musique n'est, dans son ongine composée
f,ue de cris de joie ou de gémissemens douloureux; a
mesure que les hommes se civilisent, leur chant se per-
fectionne; et ce qui, d'abord, n'était qu un accent pas-
sionné , finit par devenir le résultat de l'étude et de l art
Il y a loin , sans doute , des sons mal articules qui sortent
du gosier d'une femme de la Nouvelle-Zemble aux fio-
ritures de mesdames Malibran et Sontag; mais il nen
est pas moins vrai que le chant mélodieux de celles-ci a
pour premier rudiment l'espèce de croassement de celle-
là. Au reste , il importe peu de savoir quelle a ete l ori-
gine de la musique : ce qui doit nous intéresser, c est de
savoir ce qu'elle est devenue dès qu'elle a mente le nom
d'art; c'est de nous disposer à recevoir toutes les im-
pressions déplaisir qu'elle peut nous donner et d en
augmenter l'effet autant qu'il est en nous. C est la ce c,v..
jDérile d'clrc exainiii-j et recherche.
^"^''•'- < mOLMi DE I..V .UtSK^LE. j
Par quels moyens la musique agit-elle sur les êtres
organisés? question qui se répète souvent sous diverses
formes , et dont la solution renferme tout le mécanisme
de l'art. Toutefois, sans entrer dans tant de détails, cha-
cun y répond selon son goût, en disant que c'est la mé-
lodie, ou Yharmonie, ou enfin l'union de ces deux cho-
ses, mais sans expliquer, et peut-être même sans savoir
exactement ce que c'est que la mélodie ou Yharmonie.
J'essaierai de lever tous les doutes à cet égard; mais au-
paravant je dois déclarer qu'il est un troisième moyen
d'action que possède la musique, et auquel on n'a point
pensé : c'est Vaccent, dont la présence ou l'absence est
cause que la même mélodie ou la même harmonie pro-
duit ou ne produit point d'effet. J'expliquerai aussi en
quoi il consiste.
CHAPITRE II.
De la diversité des sons et de la mauière de les exprimer par des
noms.
Il n'est personne qui n'ait remarqué que le caractère
des voix de femmes ou d'enfans diffère entièrement de
celui des voix d'hommes : les unes sont plus ou moins
aiguës; les autres plus ou moins graves. Il y aune infinité
d'intonations possibles entre le son le plus aigu des unes
et le plus grave des autres. Chacune de ces intonations
est un son distinct pour une oreille exercée. Toutefois
on conçoit que si l'on avait voulu donner un nom diffé-
rent à chacun, cette multiplicité de noms, loin d'être
un secours pour l'esprit, aurait inutilement chargé la
1.
O IXTOXATIOïî. 8ECT. I.
tDémoire; mais les philosophes et les sa vans qui se sont
ôccapés du soin de coordonner les sons d'une manière
régulière, ayant remarqué qu'au-delà d'un certain nom-
bre de sons rangés dans un certain ordre, ascendant ou
descendant , les autres se reproduisent ensuite dans le
même ordre, et n'ont avec les premiers d'autre diffé-
rence que celle qui résulte d'une voix aiguë à une voix
grave qui s'accordent ensemble, ils en ont conclu que
les uns ne sont que la lépétition des autres à une cer-
taine distance qu'ils ont appelée octave. Par exemple:
ayant désigné le premier son par C, le second par D, le
troisième par E, etc. , dans cet ordre, C, D, E, F , G,
A, U, ils recommençaient la seconde série par c, d, e,f,
g, a, h, et la troisième par ce, dd , ee, etc. On attribue
communément l'invention des syllabes ut, ré, mi, fa,
sol, la, dont on se sert aujourd'hui , à un moine italien
nommé Gui d'Arezzo , qui les aurait tirées de l'hyrane
à saint Jean dont les paroles sont:
rVqueant Iaxis, resonare fibris ,
3/ii'a gestoruiD,yamu)i tuorum,
So/ve polluti, /abii reatum
Sancte Joannes. ^.
. r
Mais dans une épitre à un autre moine, Gui conseille
seulement à son confrère de se souvenir du chant de cet
hymne qui s'élève d'une note sur chaque syllabe ut, ré,
mi, etc., pour trouver l'intonation de chaque degré de
la gamme. Cinq siècles plus tard, un Flamand ajouta le
nom de si aux six premiers , et compléta la série , après
laquelle on dit ut, ré, mi, fa, sol, la, si , deuxième oc-
tave, et ainsi de suite : troisième, quatrième, cinquième
octaves. Vers 1640, Doni, savant musicien, substitua do
à ut y comme plus agréable à prononcer et à entendre
CHAP. II. UIVERSITÉ DKS SONS. 7
dans la solnusation '. Les Italiens, les Français, les Es-
pagnols et les Portugais ont adopté ces syllabes pour
nommer les sons; les Allemands et les Anglais ont con^
serve les lettres peur le même usage. La série dea noms
ou des lettres s'appelle la gamme *.
Après avoir ainsi désigné les sons, on s'aperçut qu'il
y en avait d'intermédiaires que l'oreille appréciait par-
faitement. Par exemple, on reconnut qu'entre les sons
désignés par ut et ré, il y en avait un troisième égale-
ment éloigné de ut et de vé. Pour ne pas multiplier les
noms, on supposa que ce son est quelquefois ut élevé,
et quelquefois ré abaissé. On appela ut dièse, Vul élevé,
et ré bémol, le ré abaissé, et l'on fît de même pour les
sons intermédiaires de ré, mi, fa, sol, etc. Cette opé-
ration a fait du mot dièse le synonyme d'élevé, et de
bémol celui de baissé. Il est évident que tout cela n'est
qu'une opération factice imaginée seulement pour plus
de simplicité; car un son ne peut être modifié dans son
intonation et ne peut se changer en un autre sans cesser
d'exister. Ut dièse n'est donc plus un ut; mais les mu-
siciens qui n'ont que de la pratique, et c'est le plus
grand nombre, ayant attaché une idée de réalité aux si-
gnes représentatifs des sons, et voyant que les signes d'ut
ou de ré ne changent pas, et qu'on y joint seulement les
signes de l'élévation ou de l'abaissement, c'est-à-dire le
dièse ou le bémol, ces musiciens, dis-je, se sont imaginé
que ut est toujours ut, soit qu'on y ait joint un dièse on
(i) Voyer ce mot au dictionnaire dans la II* partie.
A l'égard du nom de la gamme, il vient de ce que la note la plus
Lasse de l'éclielle des sons était représentée par la troisième lettre
de l'alphabet grec, appelée gamma. Ce gamma était le sisacdesol.
(a) Voyez ce mot au dictionnaire, dans la lie partie.
s IMOSAllON. SECT. J.
qu'il n'y en ait point. De pareilles eiTeurs sont fréquentes
dans la musique; elles ont jeté beaucoup d'obscurité sur
l'exposé de ses principes.
Ut dièse étant intermédiaire entre ut et ré, ainsi que
?(/ bémol, il semblerait que ces deux notes doivent être
jjarfaitement à l'unisson ; mais, suivant la théorie fondée
sur le calcul des longueurs des cordes et les phénomènes
de leur résonnance , il résulte que ut dièze n'est pas
exactement le même son que ré bémol, et que leur dif-
férence est comme 80 : 81 dans certains cas , ou comme
125 : 128 dans d'autres. On donne le nom de comma à
ces différences. Mais la difficulté de construire des ins-
trumens à clavier, tels que le piano ou l'orgue, qui eus-
sent exprimé ces proportions, et l'embarras que de pa-
reils instrumens auraient causé dans l'exécution, ont fait
imaginer d'accorder ces mêmes instrumens en faisant
sur la série totale de leurs sons la répartition de ces dif-
férences , afin qu'elles fussent moins sensibles à l'oreille.
On a donné le nom de tempérament à cette opération.
Tous les accordeurs la pratiquent par habitude, sans en
connaître la théorie. On conçoit que par le tempérament
on n'obtient qu'une justesse approximative; mais cette
justesse suffit pour l'oreille dans l'usage ordinaire de la
musique.
Si chacun était libre de nommer ut le premier son
venu, ré le suivant, et ainsi de suite en s'élevant, il ré-
gnerait dans la musique une confusion extrême et l'on
ne pourrait s'accorder. Pour obvier à cet inconvénient,
on a construit de petits instrumens en acier ayant la
forme d'une fourchette et produisant un son modèle
qu'on appelle diapason, nom qui, par analogie , se donne
àriustrument lui-même. C'est sur ce son qu'on accorde
cil VI'. u. m Ai'Aso.v. 9
tous les instrumens et que les voix se règlent. En France
ce son est la; en Italie, c'est ut. De là so .it venues les
expressions usitées dans les orchestres pour accorder les
instrumens entre eux ; en France on dit donner le la;
en Italie, siionar il do. Le diapason n'est pas identique-
ment le même dans tous les pays ; il a même subi diver-
ses modifications dans le même lieu. Chaque théâtre de
Paris avait autrefois le sien ; celui de l'Opéra était le plus
bas , et celui du théâtre italien le plus élevé. Il y a main-
tenant très peu de différence entre eux. Un diapason
trop bas nuit à l'éclat de la sonorité , parce que les cor-
des des instrumens ne sont pas assez tendues ; un diapa-
son trop élevé fatigue les voix.
L'usage du diapason n'est pas assez répandu. La plu-
part des pianos qu'on trouve dans les provinces de France
sont accordés trop bas. Les chanteurs qui s'accompa-
gnent avec ces pianos habituent leurs voix à une sorte
de paresse qu'ils ne peuvent vaincre quand ils doivent
chanter au diapason.
CHAPITRE III.
Comment on représente les sons par des signes.
L'opération d'esprit par laquelle l'homme a imaginé
de représenter les sons de la parole par des signes sera
éternellement un mystère; mais une fois parvenu à cette
découverte , on conçoit qu'il n'a pas dû éprouver beau-
coup de difficulté pour trouver les moyens d'exprimer
les sons de son chant. Les Grecs et les Romains se ser-
iO INTONATION, SECT. I.
valent pour cela des lettres de leur alphabet diversement
combinées ou tronquées ; les Musulmans n'ont point de
signes pour cet objet; les Chinois en possèdent qui sont
compliqués et bizarres comme leur langue.
Après plusieurs siècles d'une lutte sans cesse renais-
sante contre les barbares du Nord, l'empire d'Occi-
dent fut vaincu et s'écroula; les arts périrent avec lui,
et il n'en resta guère qu'un souvenir vague qui s'affaiblit
insensiblement jusqu'au huitième siècle où il se perdit
complètement. La musique surtout , c'est-à-dire la mu-
sique des Grecs qui avait charmé Rome et l'Italie, fut
absolument oubliée, et il n'en resta que ce que deux
pères de l'Eglise (saint Ambroise et saint Grégoire) en
avaient conservé pour le service divin. Les mélodies
étaient si simples, ou plutôt si bornées, qu'il fallait peu
de signes pour les écrire, et ces signes ne se composaient
que de quelques lettres de l'alphabet.
Mais pendant que les peuples latins faisaient usage de
ces signes, les Lombards et les Goths , dont la domina-
tion s'était établie en Italie, en apportaient d'autres d'un
système bien différent , car ceux-ci ne représentaient
pas seulement des sons isolés, mais des collections de
sons, et même des phrases entières. Les grandes biblio-
thèques renferment des manuscrits où l'on trouve ces
signes appliqués aux chants de l'église, ce qui a permis
de les déchiffrer en les comparant avec les mêmes chants
notés par les signes de la musique latine.
Il est au reste remarquable que les peuples de l'Orient,
qui ont songé à représenter les sons par des signes ,
n'ont compris l'usage de ceux-ci que comme des moyens
d'exprimer des collections de sons en un seul signe, au
lieu de lea décomposer dans leurs élémens les plus
THAP. III. !S'OTATI0\. 11
simples. Cette singularité doit être attribuée à leur
goût pour les ornetnens multipliés à l'excès dans leurs
mélodies, qui auraient rendu la lecture de la musique
fort difficile si l'on n'eût trouvé le moyen de représenter
plusieurs sons en un seul signe. Les signes qui sont en-
core en usage dans la musique des églises grecques de
l'Orient sont de cette espèce j ils ont été inventés par le
moine Jean de Damas.
Il serait difficile de fixer aujourd'hui l'époque précise
où les notes du plain-chant, d'où la notation moderne
a tiré son origine, ont été imaginées; on en trouve
des exemples dans des manuscrits de la première
moitié du onzième siècle ; mais rien ne prouve qu'ils
n'ont pas été inventés dans un temps plus reculé. Au
reste il est bon de remarquer qu'à cette époque il
n'y avait pas de système uniforme de signes pour écrire
la musique. Chaque maître avait le sien ; il le transmet-
tait à ses élèves, et l'on ne pouvait guère passer d'un
canton dans un autre sans être obligé d'en étudier un
nouveau.
Quoi qu'il en soit , le système des notes du plain-
rhant, tel qu'on le voit dans les livres de l'église, finit
par dominer et servit de base à la notation qui est
maintenant adoptée par toutes les nations européennes.
Des améliorations successives en ont fait insensiblement
«ne chose toute différente de ce qu'elle fut dans l'ori-
gine. Je vais essayer d'en donner des notions exactes
avec le plus de concision qu'il me sera possible.
La collection des signes de la musique s'appelle la
notation. On la divise en deux espèces : la première
renferme les signes à' intonation, la seconde les signes
de {Jurée, Les uns et les autres sont d'une utilité indis^
12 ISTOXATION. SKCT. ï.
pensable, car il ne suffit pas de reconnaître à l'inspec-
tion d'un signe le son qu'il représente, il faut encore en
connaître la dui-ée et pouvoir la mesurer. Ces signes se
disposent sur un papier spécialement préparé pour cet
objet et qu'on appelle papier de musique. La prépara-
tion consiste à tracer horizontalement des réunions de
cinq lignes parallèles qu'on nomme portées , et qui sont
figurées de cette manière *:
C'est sur ces lignes ou dans les intervalles qu'elles lais-
sent entre elles que se placent les signes de la notation.
J'ai dit que ceux-ci se divisent en deux espèces^ les si-
gnes d'intonation et ceux de durée. Les signes d'intonation
sont de deux sortes : on donne le nom de clefs aux uns,
et celui de notes aux autres.
La diversité des voix a donné naissance aux clefs,
qui, placées au commencement des portées, indiquent
que ce qui y est écrit appartient à telle ou telle voix. Le
signe des voix ou des instrumens aigus s'appelle clef de
sol ; il est fait ainsi ^. On le met ordinairement sur la
deuxième ligne de la partie inférieure de la portée, ce
qui indique que le signe du son appelé sol se met sur
cette ligne. On donne le nom de clef de fa au signe des
voix ou des instrumens graves; en voici la forme 9'. Sa
position ordinaire est sur la quatrième ligne en partant
(i) Il y a du papier de musique qui contient dix portées dans
chaque page , d'autre douze, quatorze, seize et même vingt-quatre.
On appelle papier à la Française celui qui est de hauteur , etpa»
pier à rilalienne]e papier d'une largeur oMong-tp.
ClIAP, Iir. NOTATION. n
du bas de la portée; ullo indique i[ue J^ci est sur ctiie;
li^ne. Le signe des voix et des instrumens intermédiaires
se nomme clef d'«/; mais comme il y a plusieurs nuances
d'élévation ou de gravité parmi ces voix , on exprime ces
nuances en plaçant ce même signe sur des lignes diffé-
rentes. La clef d'ut est faite ainsi p^ : elle donne son
nom à la note qui se trouve sur la ligue oi!i elle est pla-
cée.
Les diverses qualités de voix peuvent se réduire à
quatre : 1" les voies aiguës de femmes; 2° les voix gra-
ves de femmes; 3° les voix aiguës d'hommes ; 4° les voix
graves d'hommes. La voix aiguë de femme se nomme
soprano ou dessus; la voix intermédiaire du même sexe
mezzo soprano ou second dessus ; la voix grave con-
tralto ; la voix aiguë d'homme s'appelle tenore ; la voix
grave basse. On appelle bariton la voix intermédiaire
du tenore et de la basse. Les voix aiguës d'homme étant
naturellement, et par l'effet de leur conformation, plus
graves d'une octave que les voix aiguës de femmes , on
pourrait se servir de la même clef, c'est-à-dire de la
clef de sol pour toutes deux, laissant à la nature le soin
d'opérer la différence d'octaves. Quant au contralto ou
voix grave de femme, qui est à l'octave supérieure de la
basse, on pourrait, par les mêmes motifs, écrire sa par-
tie avec la clef dey^. A l'égard des instrumens qui, dans
- l'orchestre, remplissent les fonctions des voix intermé-
diaires, on pourrait aussi les réduire à cette simplicité,
en indiquant le« différences d'octaves par un signe sim-
ple tel qu'un ■ — qui barrerait les clefs de sol ou d.e.fa.
Mais s'il est possible de supprimer les clefs d'ut dans
l'usage ordinaire, ces mêmes clefs sont d'un grand se-
2
14 IXTOA'ATIOX. SECT. I.
cours dans certains cas dont je parlerai plus loin * , et
dans l'obligation où l'on est d'en faire usage dans ces
occasions, il est nécessaire de se les rendre familières,
et conséquemment de s'en servir habituellement. De là
vient que la complication résultant de la multiplicité
des clefs s'est conservée jusqu'aujourd'hui, quoiqu'on
ait reconnu l'avantage qu'il y aurait d'ailleurs à la faire
disparaître.
Les clefs ne sont que des signes généraux qui indi-
quent une fois pour toutes le genre de voix ou d'instru-
ment qui doit exécuter la musique qu'on a sous les yeux;
les notes sont les signes particuliers de chaque son. Tou-
tefois, il ne faut pas croire qu'il soit nécessaire d'avoir
un signe d'une forme particulière pour chacun de ces
sons; une pareille multiplicité jetterait l'esprit dans la
confusion et fatiguerait la mémoire sans utilité. Ce n'est
point la forme de la note qui détermine l'intonation ,
mais la place qu'elle occupe sur la portée. Pour rempUr
cet objet, un point placé sur la ligne ou dans l'espace
suffirait.
La note placée sur la ligne inférieure de la portée re-
présente un son comparativement plus grave que celles
qui occupent d'autres positions sur cette même portée;
ainsi la note qui est dans l'espace entre la première et
la deuxième ligne exprime un son plus élevé que celle
qui est sur la première ; la note placée sur la deuxième
ligne représente une intonation encore plus élevée : il en
est de même de toutes les autres positions à mesure qu'on
s'élève sur la portée. Si donc on appelle ut la note de la
preaaière ligne, on donne le nom de ré à celle qui occupe
(i) Voyez ch. iv, page 22.
tBAV. in. îîOTATlOW. 15
l'espace entre la première et la seconde ligne, celui de
mi à la note qui est posée sur la deuxième ligne , et ainsi
des autres, comme on le voit dans l'exemple suivant:
ut
ré
mi
fa
sol
la
si
ut
ré
^
ë
_ « -
0
^
0
ë...
On conçoit qu'une voix ou un instrument qui serait
borné à un si petit nombre de sons n'offrirait que de
faibles ressources au chanteur ou à l'instrumentiste;
aussi n'en est-il point qui soient retenus dans des limites
si étroites. Les instrumens surtout dépassent tous de
beaucoup l'étendue de la portée de cinq lignes. Mais si
l'on était obligé de composer la portée d'autant de lignes
permanentes qu'il en faudrait pour embrasser l'étendue
de certains instrumens , une sorte de labyrinthe inextri-
cable résulterait de cette multitude de lignes, et l'œil le
plus clairvoyant tie parviendrait pas à distinguer une
seule note sans utl travail pénible *. Le moyen doiit on
se sert pour éviter cet inconvénient est ingénieux. Il
consiste à ajouter des fragmens de lignes à la portée,
soit au-dessus, soit au-dessous, au fur et mesure des
besoins, et de les supprimer lorsqu'ils cessent d'être uti-
les. Ces fragmens ne se confondent pas avec la portée,
et se détachent sensiblement pour l'œil; on peut en juger
par l'exetnple suivant:
(i) Cet inconvénient a existé autrefois dans la musique instru-
mentale, et particulièrement dans la musique d'orgue du seizième
et du dix-septième siècle. De là vient que les ouvrages des grands
organistes de cette époque sont illisibles pour la plupart de» mu-
siciens.
(j
- ■
IJiTOKATION.
■±
A.
^
SECT
. 1
JE.
* -0-
-9
-*•
-9
■♦-
Tf Zi.
Toute note placée sur la même ligne que la clef qui
est au commencement de la portée prend le nom de
cette clef et sert de point de comparaison pour nommer
toutes les autres notes. Ainsi , lorsque la clef de sol se
trouve au commencement d'une portée posée sur la se-
conde ligne , la note placée sur cette ligne s'appelle sol,
et toutes les autres se nomment d'après celle-là. S'il s'a-
git d'une clef de/a posée sur la quatrième ligne, /« se
trouve sur cette ligne; il en est de même des autres. On
conçoit d'après cela que le nom des notes est éventuel
et ne peut se déterminer d'une manière invariable. La
différence des voix qui a donné lieu à la multiplicité des
clefs est la cause première de ces variations.
Mais si la position des notes est variable , il n'en est
pas de même de leur intonation , laquelle se règle d'après
le son modèle qu'on nomme diapason en français et
corista en italien. Ainsi une note donnée, que nous nom-
merons ut, par exemple, ne peut avoir qu'une intona-
tion, quelle que soit sa position sur la portée. La seule dif-
férence qu'il y aura dans les diverses positions de cet ut
et dans sa sonorité, c'est qu'il pourra appartenir aux
limites aiguës d'une voix, telle que la basse-taille , au
milieu ou médium d'une autre , comme le ténor, et aux
limites graves d'une troisième qui sera le soprano.
1.11 SI". III.
>()T VIION,
17
Exemple J'uneiutonation identique appurtcouut ù des voix
diverses.
uasse-iaïue. lenoic. haute -conirc. oh coiilrallo. om violon.
ut ut ut ut ut
^=^
^
Î3=
Sou élevé.
Son du médium.
Jusqu'Ici l'on a vu comment on représente la suite
des sons qu'on appelle ut, ré, mi, fa, sol, la, si; mais
on n'a point encore aperçu les signes des sons intermé-
diaires auxquels on donne le nom de dièse et de bémol.
Le dièse est fait ainsi i^; le bémol a cette forme [,.
Toutes les lignes et tous les espaces étant occupés par
les notes qui représentent ut, ré, mi, etc., il ne reste point
de place sur la portée pour les sons intermédiaires; mai;;
comme on suppose dans le langage ordinaire que les
mots de ut dièse ou de ré bémol sont suffisans pour ex-
primer l'idée du son intermédiaire de ut et de ré, on est
convenu aussi que le j^ mis avant la note ///, ou le \> placé
avant ré, suffisent pour représenter aux yeux ce son in-
termédiaire.
Excmpli's :
3r=|$3C
Lorsqu'il s'agit de détruire l'effet du dièse ou du
bémol , on se sert d'un autre signe qu'on nomme bécarre,
2.
iS ÎNTONATIOX. SECT. I.
et dont voici la forme t^. Le bécarre se met \ côté de la
note qui était précédée d'un dièse ou d'un bémol, et de-
vient l'équivalent de ces phrases : le dièse est ôté, ou
bien il ny a plus de bémol. C'est en quelque sorte un
sigTie sténographique.
On donne le nom de ton à la différence de deux sons
comme ut et ré; la différence de l'un de ces sons à l'in-
termédiaire, représenté par un dièse ou un bémol, s'ap-
pelle demi-ton. Le demi-ton est le plus petit intervalle
que l'oreille d'un Européen puisse apprécier avec jus-
tesse.
Par xme singularité remarquable, la différence qui se
trouve entre les sons ut et ré n'est point égale entre tous
les sons de la gamme, en sorte que le son intermédiaire
ne se trouve point entre mi tifo, ni entre si et ut *. La
différence entre ces notes n'est que d'un demi-ton. Une
suite de sons faite sur le modèle de celle-ci , ut, ré, mi,
fa, sol, la , si, ut, s'appelle une succession diatonique ;
si on y introduit les sons intei-médiaires , comme utul^,
ré, ré^, mi, etc., on lui donne le nom de succession chro-
matique. On disait autrefois de la musique qu'elle était
dans le genre diatonique quand on y rencontrait peu de
sons intermédiaires, et qu'elle appartenait au genre chro-
matique, lorsque ces sons y dominaient : on ne se sert
plus de ces expressions depuis que l'art musical s'est en-
richi d'une foule de combinaisons qui résultent du mé-
lange continuel des deux genres. Quelques airs anciens,
quelques mélodies simples peuvent donner l'idée du
(l) Je ne parle point ici de la différence qu'il y a entre le ton
majeur ut, ré, et le ton mineur ré mi, parce que ce n'est qu'une di-
versité de l'iof ervalle du ton pins appréciable par le calcul que sen-
«Djie à l'oreille.
CHAP, m. NOTATION. 19
genre diatonique; le genre chromatique est fréquem-
ment employé dans la musique moderne : il en eât le
Caractère distinctif. On y trouve aussi quelquefois un
w
autre genre qu'on nomme enharmonique, mais l'emploi
de celui-ci est plus rare. J'expliquerai ailleurs en quoi il
consiste.
Les mots diatonique et chromatique , qui ont passé
de la langue grecque dans les langues modernes , n'ont
qu'une signification impropre dans celles-ci; car , diato-
nique vient de dia, par, et tonos, ton; or, il n'est pas
vrai que la musique procède uniquement par tonx dan»
la musique moderne, puisqu'il y a deux demi-tons dans
toutes les gammes, comme de mikfa, et de si à ut, dans
la gamme (Tut. Cela se verra clairement dans le chapitre
suivant. L'expression est peut-être plus juste dans chro-
matique, mais elle manque de clarté. Chromatique vient
du mot grec chroma, qui signifie couleur : c'est qu'en
effet cette suite de demi-tons colore la musique, mai»
seulement dans le sens fisuré.
CHAPITRE IV.
De la différence des gammes ; des noms qu'on leur donne, et de
l'opération qu'on appelle transposition.
La gamme ut , ré, mi, fa, sol, la, si, ut , est dispo-
sée de manière qu'il y a un ton entré ut et ré, un autre
ton entre ré et mi, un demi-ton de midi fa, un ton entre
fa et sol, un ton entre sol^X. la, un ton entre la et j/,
un demi-ton de si à ut; en résumé elle présente une
20 ^!\rc)^ATlo^. sect, i.
suite de deux Ions , uu deuii-ton , trois Ions et un derai-
ton.
Si l'on voulait disposer la gamme de cette manière,
/e, mi, /a, sol, la, si, ut, ré, l'ordre des tous et des
demi-tons serait interverti; car il y aurait un ton entre
ré et mi, un demi-ton de mi àya, un ton enlrey^z et
sol, uu ton entre sel et la, un ton entre la et si, uu
demi-ton de si a. ut , et un ton de ut kré; en résumé,
on aurait une suite d'un ton, un demi-ton, trois tons,
un demi-ton, un ton. On fait disparaître celte irrégula-
rité en substituant /a dièse l\.f(i, et ut dièse à ut. De
cette manière on a un ton de ré à mi, un ton de mi a.
fa ^ , un demi-ton àefa j;| à sol, un ton de sol kla, un
ton de la à si, un ton de si à nt \l[, un demi-ton d'ut tt à
ré, et la gamme est composée de la manière suivante :
rc, mi, /a i^, sol, la, si, ut^, ré;
ce qui présente une suite de deux tons, un demi-ton,
trois tons, un demi-ton, comme dans la gamme qui com-
mence par ut.
En opérant de la même manière, et en conservant
l'ordre des tons et des demi-tons, on peut commencer
la gamme par toutes les notes, même par les sons inter-
médiaires, et avoir autant de gammes régulières qu'il y
a de sons dans l'étendue d'une octave. On donne à cha-
que gamme le nom de la note par où elle commence;
mais au lieu de dire la gamme de ré, de mi bémol , de/a,
on dit la gamme du ton de ré, du ton de mi bémol, du
ton de fa, et l'on appelle symphonie en ré, sonate en
mi bémol, ouverture enja, les morceaux qui sont écrits
avec les sons qui appartiennent aux gammes de ré , de
mi \f , ou de fa.
On vient de voir que le mot ton a une autre accep-
CHAP. IT. r.AMMKS. 2 I
lion que celle qui exprime la distance d'une noie à une
aulre, et qu'il si{:;nifie aussi certaines dispositions de
sons. LiC ton de ré est une expression qui indifiiio que
les sons ont la disposition convenable pour une gamme
qui commenr<; par ré. Ce double emploi d'un mot est
une défectuosilé delà lan}j,ue musicale. Il yen a plusieurs
autres. Trompées i)ar ces mots : le ton d'ut , le Ion de nii
bémol, le ton de sol, etc., les personnes qui ne sont
pas musiciennes se sont persuadées que ton est synonyme
(le son, et elles disent un ton fort, un ton moelleux ,
un ton criard, au lieu <Vun son fort, un son moelleux ,
un son criard : ces expressions sont impropres.
Toutes les voix n'ayant pas la même étendue, il arrive
souvent qu'un morceau (pii est convenable pour certai-
nes personnes contient des sons trop aigus ou trop graves
pour d'autres; mais il plaît, on voudiait le chanter, et
l'on ne trouve d'autre moyen d'y parvenir qu'en le bais-
sant s'il est trop haut, ou en l'élevant s'il est trop bas,
c'est-à-dire (ju'cn substituant, dans le premier cas, la
gamme d'«/ à la gamme de ré, ou la gamme de ré h, celle
de mi bémol; et dans l'aulre, qu'en faisant le contraire,
c'est-à-dire en substituant une gamme plus élevée à celle
du ton dans lequel le morceau est écrit. Cette opération
s'appelle fra«^/?Oi77«o«. Les personnes qui ne savent pas
la musique transposent naturellement et sans le remar-
(pjer, en pla<^'anl l'air qu'elles chantent dans la position
la plus favorable à leur voix; mais l'opération de l'ins-
irumcntiste qui accompagne un morceau transposé est
beaucoup plus compliquée , car elle consiste à jouer
d'autres notes que celles qui sont écrites, ce qui exige
une attention soutenue et beaucoup de présence d'esprit,
surtout si l'instrument est un piano , car il faut faire une
9^ INTOKATIOJf. JECT. t»
double opération pour la musique de la main droite et
pour celle de la main gauche.
On conçoit que s'il fallait faire iin calcul pour chaque
note, pour chaque dièse , bémol ou bécarre, afin de dé-
couvrir ce qu'il faut leur substituer, dans la transposi-
tion, l'esprit le plus prompt pourrait éprouver de grands
embarras à cause de la rapidité de l'exécution. Mais il est
un moyen de simplifier cette opération ; il consiste à sup-
poser une autre clef que celle qui est placée au commen-
cement des portées, et à choisir celle qui correspond au
ton dans lequel on veut transposer. Par exemple , si le
morceau est dans le ton de re, écrit avec la clef de sol,
et si l'on veut transposer en si bémol , on substitue par
la pensée la clef à' ut sur la première ligne à la clef de
sol, on suppose deux bémols à côté de la clef, et la trans-
position se trouve faite, comme on peut le voir par
'exemple suivant :
ré fa mi ré ut si la sol fa
jg '«■ • • m
Transposition :
ti ré ut si la sol fa mi ré
â=5=
* »
■fi
c'est particulièrement à cet Usage que sert la multiplicité
des clefs.
La transposition est une des plus grandes difficultés
dfe U musique, considérée sôus le rapport de la pratique :
CHAP. IV. GAMMES. 28
elle exige une aptitude particulière que des lecteurs ,
d'ailleurs habiles , n'ont pas toujours. C'est pour aplanir
ces difficultés qu'on a imaginé de faire des pianos qui
opèrent la transposition d'une manière n^éc^nique; on
les nomme pianos transpositeurs^. Cette invention,
bien qu'assez commode, a eu cependant peu de succès.
Les éditeurs de musique, dans le but de rendre plus
facile aux amateurs la pratique de cet art, transposent
souvent les morceaux les plus en vogue pour les mettre
à la portée des divers caractères de voix, et pour dispen-
ser l'exécutant de l'opération de la transposition; mais
comme ils ne peuvent transposer toute sorte de musique,
il est utile de savoir faire soi-même cette opération.
CHAPITRE V.
Tous les peuples ne se servent pas de la même gamme. — 11 n'est
pas prouvé que celle des Européens soit parfaite; mais elle est
la meilleure.
La gamme ou échelle des sons , dont on vient de voir
l'exposé, est celle dont les nations européennes font
usage, et qui a été transportée dans les colonies fondées
par ces nations. Produite par une succession de tâton-
nemens et de modifications , depuis l'antiquité jusqu'au
dix-septième siècle , elle est devenue pour nos organes,
(i) On s'est servi de divers procédés pour opérer la transposition
mécanique ; mais les premiers pianos transpositeurs qui eut été en
usage sont ceux de MM. RoUer et Blancbet, facteurs à Paris, bou-
levard Poissonnière. M. Pfeiffer a perfectionné leur iavention eu
bornant cette opération à la pressioa d'une péd«lc.
24 INTOSATIOX. iKCT. 1.
par l'éducatiou et par l'habitude, une règle de rapports
métaphysiques des sons qui nous semble la seule admis-
sible à l'oreille, et qui nous rend en quelque sorte in-
habiles à en concevoir d'autres.
Mais il n'en est pas ainsi de tous les peuples ; quel-
ques-uns d'entre eux ont eu ou ont encore des divisions
de l'échelle générale des sons très différentes de celle-là.
Ces divisions sont de deux espèces : les unes sont basées
s^ir des distances de sons de même nature que celles de
la musique européenne, mais disposées dans un autre
ordre; les autres sont établies sur des distances moindres
et inappréciables à notre oreille. Examinons d'abord les
premières.
Il existe à la Chine et dans l'Inde une gamme majeure
disposée de cette façon :
On voit que cette gamme diffère de la nôtre en ce que
le premier demi - ton , au lieu d'être placé entre le
troisième et le quatrième degré, comme il l'est dans la
nôtre, se trouve entre le quatrième et le cinquième, ce
qui établit une différence complète de tonalité qui
choque notre oreille , tandis que la gamme des Euro-
péens paraît insupportable aux Chinois '.
Les Ecossais et les Irlandais ont une gamme majeure
assez semblable à la gamme des Chinois, mais plus sin-
gulière encoie que celle-ci, en ce qu'il n'y a point de
(l) L'abbé Roussier a essayé de démontrer dans son Mémoire sur
la musique des anciens, et dans ses Lettres à l'auteur du Journal des
Biaux-Arti et de^ Sciences, etc., que celle gamme est naturelle parce
demi-ton entre le septième et le huitièine son , maiii un
ton complet. Voici cette gamme ;
-^^
^
Les défauts de cette gamme sont encore plus cho-
([uans pour une oreille de musicien que celle des Chi-
nois, à cause de la double fausse relation qui s'y trouve
f aire la quarte majeure de la tonique au quatrième degré
et la quarte diminuée de ce quatrième degré au septième.
De là vient que tous les airs écossais ou irlandais com-
posés d'après cette gamme ont dû être arrangés et dé-
naturés pour être publiés.
Les Irlandais ont aussi une gamme mineure qui est
fort singulière; elle n'a que six notes, et sa disposition
est faite comme on le voit ici :
p
—rr Ho-
"^
— T~
—e~
-~ù. —
-Çt-
1
-
:^_c
n
Le défaut logique de cette gamme est de même nature
qii'elleest le produitd'uae progression régulière de quartes ascen-
dantes et de quintes desceudautes telle que
ZOl
Ces sortes de régularités ont quelque chose de séduisant pour
l'esprit, mais ne prouvent rien quant à l'affinité métaphysique de»
sous. Cette gamme choquera toujours l'oreille d'un musicien euro-
péen, parce qu'il s'y trouve une fausse relation eatre le quatrième
son, le premier et le huitième.
26 IKTOMATIOJf. SECT. I.
que celui dea précédentes ; car il consiste dans une rela-
tion fausse entre le troisième et le sixième son, ce qui
n'a point lieu dans la gamme des autres nations euro-
péennes.
Les gammes dont il vient d'être parlé sont divisées
comme la gamme de la musique française , italienne ,
allemande, etc., par tons et demi-tons; elles ne dif-
fèrent de celle-ci que par la disposition de ces tons et
demi-tous; mais il est quelques peuples orientaux, tels
que les Arabes, les Turcs et les Persans, dont les instru-
mens sont construits sur une échelle d'intervalles di-
visés par tiers de ton. De pareils intervalles et une sem-
blable division d'échelle musicale ne peuvent être
appréciables que pour des organes habitués à leur effet
par l'éducation ; la sensation qu'ils produisent sur l'o-
reille d'un Européen est celle de sons faux et de succes-
sions désagréables, tandis que les Arabes y trouvent du
plaisir et sont affectés de sensations pénibles à l'audition
de notre gamme.
Lorsque l'on considère les effets de gammes si di-
verses, une question se présente àl'esprit, c'est celle-ci:
Y a-t-il une gamme absolument conforme aux principes
naturels? Dans le cas contraire, quelle est celle qui
réunit le plus de conditions désirables? Pour résoudre
la première partie de cette question, il faut la considérer
sous deux rapports, c'est-à-dire, examiner d'abord si
les phénomènes des corps sonores et les proportions
qu'on en déduit entre les divers sons de la gamme
donnent pour résultat des intonations précises, inva-
riables , et si les lois physiques de leur arrangement
sont également positives.
Il faut bien l'avouer, la science est restée fort im-
CHAP. T. GAMMBS. ^7
parfaite à cet égard, comme je le ferai voir quand je
parlerai de l'acoustique. Les phénomènes ont été mal
observés, les expériences faites avec négligence, et,
comme il arrive presque toujours, on s'est pressé dfe
conclure sur dés données incertaines.
Reste la seconde considération ; celle-ci est toute
métaphysique* Il s'agit de savoir si les affinités des sohs
de notre gamme sont suffisamment établies par les rap-
ports de convenance qu'elles ont avec notre manière de
sentir, et avec les conditions de l'harmonie et de la mé-
lodie dont se compose notre musique ; or, quel que soit
l'aspect sous lequel on considère cette gamme, on ne
peut nier que là convenance est parfaite sous le rapport
de la disposition des sons, et q'i'on ne pourrait lui
substituer un autre ordre sans que la mélodie ainsi que
l'harmonie en flissent considérablement modifiées, et con-
séquemment sans changer la nature de nos sensations.
CHAPITRE VI.
De la durée des sons et du silence en musique; comment on la re»
présente par des signes, et comment on la mesure.
Les alphabets de toutes les langues n'ont qu'un objet :
celui de représenter des sons. L'alphabet musical est
l)lus compliqué, car il faut que ses signes d'intonation se
combinent avec ceux de durée, et même que les notes
indiquent les deux choses à la fois. Cette complication
est la cause principale de la difficulté qu'on éprouve à
lire la musique.
28 L't'RtE DES SONS. SECT. 1,
Il est évident que tous les sons qui entrent dans la
composition de la musique n'ont pas la même durée; il
y a beaucoup de nuances dans leur longueur ou leur
brièveté. Les notes étant destinées à représenter les sons,
on a dû modifier leur forme afin qu'elles pussent expri-
mer aussi les différences de leurs prolongemens *. Dans
ce but , on a supposé une unité de durée qu'on a appelée
ronde ; la moitié de cette durée a reçu le nom de blan-
che ; le quart, celui de noire f le huitième a été appelé
croche , le seizième, double croche , le trente-deuxième,
triple croche y et le soixante -quatrième, quadruple
croche.
Figures de ces signes de durée :
RrmHp Rbnrhf» Nnlrp Trnrhp Plusieurs Double Plusieurs
Ronde. Blancbe. Noire, croche, croches croche, doubles croches
° r r p ù' ^ L4^
Triple Plusieurs Quadiuple Plusieurs
croche. triples croches. croche, quadruples croches
Remarquez que les noms de doubles croches, triples
croches et quadruples croches expriment précisément
le contraire de l'idée qu'on y attache; car loin de dou-
bler, de tripler, ou de quadrupler la valeur de la note,
(i)Si j'aTais à exposer d'une manière philosophique les principes
de la mesure du temps dans la musique, je procéderais d'une autre
manière que je ne le fais ici ; mais je ne dois pas oublier que l'objet
de ce livre n'est pas de faire remarquer les défauts de la partie tech-
nique de l'art. II est pins utile de faire connaître comment elle est
faite.
CHAP. VI. SIGNKS DE DIJRKK. 2î)
la double, la triple et la quadruple croche n'en sont
que des fractions. L'origine de ces fausses dénomina-
tions se trouve dans le double , le triple et le quadruple
crochet qui termine la partie inférieure de la note. Les
Allemands disent avec plus de raison demi-croche, quart
de croche, huitième de croche.
Quelle que soit la forme de la noie et de la durée
qu'elle représente, l'intonation ne varie pas, et le nom
de la note reste le même , comme on le verra par les
exemples suivans :
sol la si ut ré mi fa sol sol la ei ul ré mi fa soi
^ O . !
-n-^
fcE
Sol la si ut ré nii fa sol sol la si ut ré mi fa sol
Toutes les figures de notes qu'on vient de voir sont
destinées à représenter des durées de sons qui sont dans
les proportions del à2, là4, là8, etc. , ou | à 1 ,
^ à 1 , ^ à 1, etc., c'est-à-dire qui sont deux fois, quatre
fois, huit fois plus longues que d'autres, ou qui n'en
sont que la moitié, le quart, le huitième. Mais il y a de
certaines durées de sons qui sont trois fois, six fois,
douze fois plus longues que d'autres, ou qui n'en sont
que le tiers, le sixième, le douzième, etc. On a imaginé
de représenter les premières par une figure quelconque
de note suivie d'un point, en sorte que le point augmente
la durée de ces notes de la moitié. Ainsi la ronde pointée
a la même durée (^ue trois blanches, ou six noires, ou
3.
30 DURÉE DES SORS. SECT. 1.
douze croches , etc. ; la blanche pointée est dans la même
proportion à l'cjard des noires, croches ou doubles cro-
ches et ainsi des autres. Il suit de là que la blanche n'a
que le tiers de la valeur de la ronde pointée , que la
noiie n'en représente que la sixième partie, la croche
un douzième, etc. Quelquefois enfin les sons se trouvent,
à l'égard de certains autres, dans la proportion de 2 à 3.
Ou donne le nom de triolets à ceux qui sont dans la
proportion de 3 à 2 , et l'on indique leur qualité en pla-
çant un 3 au-dessus des notes qui les représentent.
Les sons et leur durée ne sont pas les seuls élémens
de la musique; le silence plus ou moins long y joue aussi
un rôle fort important. La nécessité de le soumettre à
des règles de proportion a fait imaginer de le diviser
comme les figures de notes, et de le représenter par
des signes analogues. On avait pris la ronde pour unité
de durée d'un son; on représenta le silence d'une durée
correspondante par une jtciuse ^ la moitié de ce temps
fut appelée derni-pause , le quart, soupir, le huitième,
demi-soupir , le seizième quart de soupir. Tous ces si-
gnes de silence ont une valeur égale à celle des diverses
figures de notes. En voici le tableau:
Ronde nianrhe Noire Croche ^^"^'.'^ "'"'"'P,'® Quadruple
Ronac. Biancne. iNoire. ciociie. cpQ^.i,e_ croclie croche.
»>„,•„„„« c«.,r^:.. Hemx Quart de Demi-quart Seizième
pause. Dcjiii-pause. Soupir. 5^^,.^. «g^upir. de soipir. de soupir
? — y—t-
On conçoit que la ronde avec nn point se représente
CHAP. VI. SIGNES DE DUREE. 31
par une pause suivie d'une- demi pause; la blanche
pointée, par une demi-pause suivie d'un soupir, et ainsi
du reste.
Ces différentes proportions de durées relatives de sons
et de silences sont susceptibles de beaucoup de combi-
naisons. L'œil le plus exercé éprouverait quelque diffi-
culté à les discerner, si l'on n'avait imaginé de les
séparer de distance en distance par des barres qui
traversent perpendiculairement la portée. On donne le
nom de mesure à l'espace qui se trouve compris entre
àeux barres de séparation. Au moyen des barres, l'œil
isole facilement chaque mesure de cette multitude de
signes , pour n'en considérer que le contenu. La somme
totale de ce contenu doit être d'une durée uniforme dans
toutes les mesures; mais cette durée peut être à volonté
égale à la valeur d'une ronde, ou d'une blanche, ou
d'une blanche pointée, etc.
On rend aussi plus facile la lecture de ce qui est con-
tenu dans chaque mesure, en divisant celle-ci par par-
ties égales qu'on nomme temps, et qu'on indique par
des mouvemens de la main. Cette division peut se faire
en deux, trois ou quatre parties ; le compositeur fait
connaître à cet égard son intention par un signe qu'il
place au commencement de chaque morceau. Si la di-
vision doit se faire en deux temps, le signe est un (f^ ; si
c'est en trois temps, le signe est 3 ou ^ ; enfin, s'il faut
diviser la mesure en quatre temps, le signe indicateur
est C'A l'inspection du signe, les musiciens disent que
la mesure est à deux, à trois ou à quatre temps.
Remarquez qu'on trouve encore ici un exemple de la
pauvreté de la langue musicale ; car on donne le nom de
mesure à des choses absolument différentes; mesure se
32 DLRÉE DES SONS. SECT. I.
dit de l'espace qui est compris entre deux barres , de la
division de cet espace, et aussi de l'instinct de l'exécu-
tant pour faire cette division avec facilité. Par exemple,
on dit qu'un chanteur ou un instrumentiste ont ou n'ont
pas de mesure, en raison de leur aptitude à diviser le
temps. Cette aptitude étant indispensable pour bien
exécuter la musique, on dit aussi de celui qui ne la
possède pas (\uil n'est pas musicien ; ce qui ne signifie
point qu'il ne fait pas sa profession de la musique,
mais qu'il n'a pas les qualités du musicien.
J'ai dit que la ronde est considérée comme unité de
durée ; on en voit surtout la preuve dans certains signes
de mesure qui se trouvent quelquefois au commence-
ment d'un morceau de musique, tels que | > f > | j 4 > ^ »
|, |, |, f , -y-; car ces signes font voir que l'espace
compris entre deux barres renferme deux quarts, trois
quarts j six quarts, neuf quarts, douze quarts de ronde,
ou deuj: huitièmes , trois huitièmes , six huitièmes ,
douze huitièmes de la même unité. Parmi ces quantités,
celles qui sont susceptibles d'être divisées par 2 , comme
I , I , I et I , appartiennent à la mesure à deux temps,
qui se marque en baissant et en levant alternativement
la main; celles qui ne peuvent être divisées que par 3,
comme ^> f > i et | sont de l'espèce des mesures à trois
temps, où la main fait trois mouvemens, l'un en bais-
sant, le second à droite et le troisième en levant; enfin
les quantités ^ et ^ , qui peuvent être divisées par qua-
tre, appartiennent à la mesure à quatre temps, et se
marquent par quatre mouvemens de la main en baissant,
à gauche, à droite , et en levant.
Tout ce qu'on a vu jusqu'ici concernant la mesure
des sons et du silence ne présente que des quantités de
CHAI'. M. TEMPS, MESURE, o3
durées relatives, et rien n'indique le temps positif qui est
dévolu à chaque signe de temps. Il aurait été fort diffi-
cile en effet, ou plutôt impossible, d'exprimer par des
signes cette durée rationnelle , qui ne peut être repré-
sentée que par les vibrations du pendule astronomique ,
ou par des divisions de ces vibrations. Cependant on
conçoit que s'il n'existait aucun moyen d'indiquer cette
durée dans la musique, l'intention du compositeur pour-
rait être souvent dénaturée dans l'exécution, car chacun
étant libre d'attribuer à la ronde, prise comme unité,
une durée de fantaisie, le même morceau pourrait être
exécuté tantôt avec la lenteur d'une complainte, tantôt
avec la vivacité d'une contredanse. Pour obvier à cet
inconvénient, on n'imagina d'abord rien de mieux que
d'écrire en tête des morceaux certains mots italiens ou
français qui faisaient connaître, tant bien que mal, le
degré de lenteur ou de vitesse qu'il fallait donner à la
mesure, c'est-à-dire à la durée de la ronde ou à ses
fractions. Ainsi les mots largo, maestoso , larghetto,
adagio , grave, lento, indiquèrent diverses nuances de*
lenteur; andantino, andante , moderato , a placer e ,
allegretto , comodo , furent les signes d'un mouvement
modéré diversement modifié ; enfin , allegro, con moto ,
presto, vicace, prestissimo, servirent d'indications pour
des vitesses toujours plus accélérées. On conçoit que
dans ces variétés de lenteur et de vitesse , la ronde , la
pause et toutes leurs subdivisions varient aussi de du-
rée , au point qu'il n'y a pas plus de rapport entre une
ronde et une autre ronde qu'il n'y en a entre la durée
relative d'une ronde et d'une double croche. En effet,
il est tel mouvement lent oii cinq rondes occupent la
durée d'une minute, et tel mouvement vif où la durée
34 DURÉE DES SOKS. SECT. I.
de quarante rondes s'écoule dans le même espace de
temps. Cette variété dans la durée positive ne change
rien à la valeur relative des signes entre eux.
Autrefois, toutes les pièces de musique instrumentale
composées par les plus célèbres musiciens portaient les
noms de danses connues, tels que ceux d'allemandes ,
sarabandes j courantes, gigues, etc. ; non qu'elles eus-
sent le caractère de ces sortes de danses, mais elles en
avaient le mouvement. Or, ces mouvemens étant connus,
il était inutile de les indiquer d'une autre manière. De-
puis que ces pièces ont passé de mode, il a fallu recou-
rir à d'autres indications; c'est depuis ce temps que les
mots italiens dont il a été parlé précédemment, et beau-
coup d'autres encore, ont été adoptés.
Mais qu'il y a de vague dans ces expressions! que de
nuances n'y a-t-il point entre, tel mouvement allegro
(gai) et tel autre allegro ? entre tel adagio (lent) et tel
au\.re adagio"? Hg pareilles indications ne peuvent ja-
mais être que des à peu près, que l'intelligence ou l'or-
ganisation particulière de chaque exécutant modifie. Il
en résulte que la musique est rarement rendue selon la
pensée de l'auteur, et que le même morceau prend dif-
férons caiaclères en passant par les mains de di\ers mu-
siciens. Ajoutons que l'usage de ces mots est quelquefois
un contresens ; car il est tel morceau dont le caractère
passionné semble exprimer la colère ou la douleur, et
dont le mouvement est indiqué par le mot allegro. Il y a
en cela un mal réel qui a été senti depuis long-temps, et
auquel on n'a porté remède que depuis peu d'années.
Dès la fin du dix-septième siècle on avait reconnu qu'une
machine régulière serait ce qu'il y aurait de mieux pour
fixer la lenteur ou la rapidité des mouvemens de la mu-
CHAP. \r. MOUVKMENT. 35
sique. Plusieurs musiciens et mécaniciens se sont occu-
pés de chercher les principes de la construction d'une
semblable machine. En 1698, un professeur de musique
nommé Loulié en proposa une qu'il nomma chronomè-
tre (mesure du temps). Vers la même éjioque, Ljaifilard,
musicien de la chapelle du roi, en inventa une aulre.
Plus tard, Harrison, fameux mécanicien anglais, qui
s'est illustré par ses montres marines, trouva une ma-
chine qui paraît avoir été parfaite, mais qui ne pouvait
devenir populaire à cause de son prix élevé. En 1782,
Duclos, horloger de Paris, fit une autre machine, qu'il
appelait rhjtliinomèlre (mesure du rhylhnie), et qui re-
çut alors l'approbation de quelques musiciens distin-
gués. A cette machine succéda le chronomètre d'un mé-
canicien nommé Pelletier : on ignore aujourd'hui quels
étaient sa forme et son mécanisme. En 1784, Reneau-
din, horloger de Paris, construisit un pendule qui avait
la même destination. Le célèbre horloger Bréguet s'oc-
cupa aussi de la solution du même problème, sans faire
connaître le résultat de ses travaux. Enfin Despréaux,
professeur au Conservatou'e de musique, proposa, eu
1812, l'adoption d'un chronomètre composé d'un ta-
bleau indicateur des mouvemens, et d'un pendule ou
balancier en cordonnet de soie terminé j)ar un poids,
dont les différentes longueurs donnent, suivant des lois
physiques très connues, les divers degrés de vitesse.
Plusieurs musiciens allemands avaient déjà fait connaî-
tre des chronomètres de cette espèce, qui ont le double
avantage d'être d'une construction simple et peu dispen-
dieuse , mais qui ont l'inconvénient de ne point rendre
sensible à l'ouïe le tcict ou \e frappé des temps.
Une invention que deux mécaniciens halîilcs, mes-
36 ULRKK DES Si>\.s. SKCT. I.
sieurs WjfîJi^l , d'Amsterdam , et Maelzei , se sont dis-
putée, a satisfait enfin à toutes les conditions voulues;
je veux parler du métronome , qui a été soumis à l'ap-
probation de l'Institut en 1 8 1 6 , et dont l'usage est main-
tenant connu des amateurs. Dans cette machine, chaque
vibration du balancier rend le tact sensible à l'oreille.
L'inventeur a pris pour unité la minute^ dont les temps
delà musique ne sont que des fractions. Toutes les nuan-
ces des mouvemens, depuis le plus lent jusqu'au plus
rapide, y sont exprimées et représentées par des vibra-
tions de balancier qui se décomposent à volonté en me-
sures à deuXj trois ou quatre temps, et qui représentent,
selon la fantaisie du compositeur, des rondes, des blan-
ches, des noires ou des croches. La simplicité du prin-
cipe de cette machine en fait le mérite principal. Ce
principe consiste à déplacer le centre de gravité de ma-
nière à pouvoir substituer une verge de courte dimen-
sion à un pendule très long , et à opérer de grandes va-
riations de mouvement par des changemens peu sensibles
dans le déplacement du point central. Au moyen du mé-
tronome, tout le système de la division du temps en
musique est représenté dans son ensemble et dans ses
détails.
CHAPITRE VII.
De ce qu'on appelle expression dans l'exécution de la musique (
de ces moyens, et des signes par lesquels ou l'indique dans la
notation.
Jusqu'ici il n'a été question que de deux attributs des
THAÏ'. MI. *;X1'RESSI0N. 37
sons, savoir, l'intonation et la durée ; il reste à les con-
sidérer sous le rapport de leur intensité , c'est-à-dire
sous leurs diverses nuances de douceur ou de force, ce
qui complétera le tableau des qualités par lesquelles ils
agissent sur nous.
La douceur des sons produit en général sur l'homme
des impressions de calme, de repos, de plaisir tranquille
et de toutes les nuances de ces diverses situations de
l'ame. Les sons intenses, bruyans, éclatans, excitent
au contraire des émotions fortes, et sont propres à
peindre le courage, la colère, la jalousie et les autres
passions violentes ; mais si les sons étaient constamment
doux, l'ennui naîtrait bientôt de leur uniformité, et s'ils
étaient toujours intenses, ils fatigueraient et l'esprit et
l'oreille. D'ailleurs la musique n'est pas uniquement des-
tinée à peindre les modifications de l'ame ; souvent son
objet est vague, indéterminé, et son résultat est plutôt de
chatouiller les sens que de parler à l'esprit. C'est ce
qu'on remarque particulièrement dans la musique in-
strumentale.
Or, soit qu'on considère la mobilité des facultés de
l'ame et les nombreuses métamorphoses dont elles sont
susceptibles , soit qu'on n'ait égard qu'aux impressions
des sens , on reconnaît bientôt que le mélange des sons
doux et forts, et les diverses gradations de leurs succes-
sions , sont des moyens puissans de peindre les unes et
de faire naître les autres. On donne en général le nom
d'expression à ce mélange de douceur et de force , à
ces gradations ou à ces dégradations d'intensité , enfin à
tous les accidens de la physionomie des sons ; non qu'ils
aient toujours pour objet d'exprimer ou des idées ou
des scntimons, car ils no sont souvent que le résultat de
âS INTEKSITÉ. SECT. I.
la fantaisie ou d'une impression vague et indéfinissable ;
mais on ne peut nier que leur mélange bien ordonné
n'ait pour effet de nous émouvoir d'autant plus vive-
ment que l'objet est moins positif. Si l'on demandait à
un habile chanteur ou à un grand instrumentiste ce qui
les détermine à donner de la force à tels sons, à faire
entendre à peine tels autres, à augmenter graduellement
l'intensité ou à la diminuer , à faire certains sons d'une
manière vive et détachée , ou bien à les lier ensemble
avec abandon et mollesse , leur réponse se ferait long-
temps attendre, ou plutôt ils répondraient naïvement :
^ous l'ignorons ; mais nous sentons ainsi. Certes, ils
auraient raison s'ils faisaient passer leurs sensations dans
l'ame de leurs auditeurs. Il y a plus : s'ils pouvaient
s'observer eux-mêmes, ils avoueraient que les mêmes
traits ne les ont pas toujours affectés de la même ma-
nière, et qu'il leur est arrivé de les exprimer dans des
ssntimens très différens , quoique le résultat fût égale-
ment satisfaisant.
Cette faculté d'exprimer de plusieurs manières les
mêmes pensées musicales pourrait avoir de graves incon-
véniens dans un ensemble où chacun s'abandonnerait à
ses impressions du moment; car il pouri'ait arriver qu'un
musicien exécutât avec force sa partie pendant qu'un
autre rendrait la sienne avec douceur, et qu'un troisième
détachât les sons du même trait que son voisin croirait
devoir lier. De là la nécessité que le compositeur indi-
que sa pensée , sous le rapport de l'expression , par des
signes non équivoques, comme il le fait pour le mouve-
ment. C'est en effet ce qui a toujours li€u.
Les signes d'expression sont de plusieurs espèces : les
up.s sont relatifs à la force ou à la douceur des sons ; les
CHAt". VII. EXl>RESSIO:<. S§
autres sont destinés à faire connaître s'ils doivent être
détachés ou liés; d'antres enfin indiquent de légères va-
riations de mouvement qui contribuent à augmenter l'ef-
fet de la musique.
Quelques mots italiens scivent à faire connaître aux
exécutans les diverses nuan-^es de force ou de douceur
des sens : Piano, ou simplement P, signifie qu'il faut
chanter ou jouer avec douceur; Pianissimo , ou PP, in-
dique l'excès du doux ; Forte , ou F, fort ; Fortissimo^
ou FF, très fort. Le passage du doux au fort s'exprime
par Cresce/^o, ou Orsc, ou Cr. ; celui du fort au
doux par Decrescendo, Diminuando , Smorzando , ou
parles abréviations de ces mots. Un son doux suivi d'un
fort s'indique par PF, et le contraire parFP. Un petit
nombre de sons plus forts que d'autres s'expriment jiar
Rinforzando, ovi simplement Rf) SJ'orzando , on Sf;
Forzando , ou Fz. Enfin , l'augmentation ou Ifl diminu-
tion de force instantanée s'indiquent par ces signes <C^.
La fantaisie peut multiplier ces sortes de signes et en
imaginer de nouveaux ; mais ceux qu'on vient de voir
suffisent pour les masses de chanteurs ou d'instrumentis-
tes. Quant à l'expression qu'un grand artiste met dans
son jeu ou dans son chant, ce sont des accens de l'ame
qui ne se présentent presque jamais de la même manière
dans les mêmes circonstances, et qu'on ne pourrait pein-
dre aux yeux par des volumes de signes. Il y a plus ;
cette multitude de nuances combinées d'avance serait
froide, prétentieuse, et nuirait à la musique aulieu d'aug-
menter son effet.
Les signes des sons détachés sont de deux sortes : les
uns consistent en des points allongés qui se placent au-
40 INTENSITÉ. SECT, I.
dessus des notes; ces points indiquent la plus gi.ande
légèreté possible dans rémission du son.
Lorsque les sons doivent être détachés avec une cer-
taine lourdeur, les notes sont surmontées de points ronds
qui sont placés quelquefois sous une ligne courbe, comme
dans cet exemple :
éfn:\
Une courbe sans points placée au-dessus des notes est
le signe des sons liés.
È
=«=5=
Les altérations de mouvement , qui sont un moyen
d'expression dont on abuse quelquefois, s'indiquent par
ces mots : con fiioco, con moto, lorsqu'il s'agit d'aug-
menter la vitesse, et par celui de ritardando, s'il faut la
diminuer. Plus souvent le compositeur abandonne le
soin de ces légères perturbations à l'intelligence des exé-
CtUans.
Il est quelques autres signes accessoires dont l'utilité
(JUAP. VII. KXJ'UtbSlOX. -Il
se fait sentir dans l'exécution , mais qui n'ont point de
rapport aux trois qualités principales des sons, et que,
par ce motif, je ne crois point devoir exposer ici.
Tout ce qui précède renferme le tableau de ce qu'on
appelle la notation. Il suffit d'en avoir compris le méca-
nisme pour comprendre avec facilité le reste de cet ou-
\rage; car on se tromperait si l'on croyait devoir charger
sa mémoire de tous les termes et de la figure de tous les
signes. Les efforts auxquels une élude semblable donne-
rait lieu seraient en pure perte pour l'objet que se pro-
posent et les lecteurs de ce livre et son auteur. Il importe
peu qu'un homme du monde, appelé à juger une compo-
sition musicale et à en parler, sache distinguer un ut
d'un sol ou une noire d'une croche ; mais il est néces-
saire qu'il connaisse l'usage de tout cela, ne fût-ce que
pour se soustraire à l'importance pédantesque de ceux
tjui en ont fait une étude approfondie. Qu'il soit utile
autant qu'agréable de savoir la musique, c'est ce qui ne
peut être mis en doute ; mais comparés à la population
générale d'un pays, ceux qui possèdent cet avantage sont
presque toujours en petit nombre. C'est pour les autres,
c'est-à-dire pour ceux que mille obstacles empêchent de
se livrer à l'élude d'un art difficile , que ce livre est com-
posé; l'auteur manquerait donc son but si , pour se faire
comprendre, il exigeait qu'on acquît des connaissances
auxquelles il doit suppléer.
Effrayés de la nmltiplicité des signes de la notation
musicale, des hommes de mérite, qui n'étaient d'ailleurs
que de médiocres musiciens, ont essayé de faire adopter
d'autres systèmes en apparence plus simples et qui se
composaient de chiffres ou de signes arbitraires; mais
outre que de pareils changemens ne sont pas plus ad-
42 INTENSITÉ. SECT. I.
inISsibles que ne k serait celui de l'alphabet d'une lan-
gue pour le peuple qui la parle, puisqu'ils auraient l'in-
convénient très grave de replacer tous ceux qui savent
la musique dans un état d'ignorance complète et d'a-
néantir tout ce qui existe de monumens de l'art, il est
un autre motif qui fera toujours rejeter les systèmes
qu'on proposera pour la réforme de la notation, si sim-
ples qu'ils soient: c'est que les signes de ces systèmes ne
seront point sensibles à l'œil comme ceux qui viennent
d'être exposés, et que, conséquemment, ils ne facilite-
ront pas la lecture rapide de la musique comme le fait
le sj'stème de notation en usage aujourd'hui. On repro-
che aux différentes parties de ce système de manquer
d'analogie; c'est une erreur; tous les élémens me sem-
blent liés entre eux de manière qu'on ne puisse en sup-
piimer quelqu'un sans détruire l'ensemble. La multi-
plicité des clefs même, contre laquelle se sont élevées
quelques personnes peu musiciennes, loin d'être un
embarras, a des avantages incontestables dans certains
cas.
Dans l'origine de la musique moderne, c'est-à-dire
vers les dixième et onzième siècles, on a pu essayer de
divers systèmes de notation et se livrer à l'examen des
avantages et des inconvéniens de chacun; plus tard (au
dix-iseptième siècle), on a pu renoticer à l'échafaudage
ridicule de certaines proportions qui hérissaient la lec-
ture delà musique de difficultés presque insurmontables,
sans aucune utilité réelle pour l'art; mais en son état
actuel, la notation musicale forme un système complet
et logique; rien ne saurait plus y être changé sans dom-
raaEre.
DEUXIÈME SECTION.
nE« soif 5 roNsiuKRKs dans leurs n apports de socckSSIo» KT
DS SIMni.TANÊlTÉ; DU RESULTAT DR CES CHOSES.
CHAPITRE VIII.
Ce que c'est que le rapport ou la relation des sons.
Il y a beaucoup d'analogie entre les impressions que la
musique laisse dans l'ame de ceux qui ignorent ses pro-
cédés et les sensations du compositeur au premier jet
de son inspiration. En général, le public n'est frappé que
d'un ensemble dont il n'aperçoit pas les détails, et le
musicien a trop de fièvre pour analyser sa pensée; mais
lorsque celui-ci veut écrire ce qu'il a inventé, une
grande différence s'établit entre lui et le vulgaire. Dès
qu'il a saisi sa plume, le calme rentre peu à peu dans son
ame, ses idées s'éclairclssent, le morcellement de ses pé-
riodes musicales en phrases plus ou moins régulières
s'opère dans sa pensée; les voix, les instrumens qui les
accompagnent et l'expression dramatique des paroles
cessent de faire un tout homogène. Alors se manifeste
une pensée musicale qu'on appelle mélodie; alors s'é-
tablit la différence des sons qui se succèdent et de ceux
qui se font entendre simultanément; alors les défauts
de nombre dans les phrases deviennent aussi remarqua-
bles pour le musicien qxie les fautes de quantité le sont
pour le poète; l'arrangement des voix, les dispositions
des groupes de sons, le choix des instrumens, lerhythme.
44 RAPPORTS DES SONS. SECT. II.
tout enfin devient l'objet d'un examen particulier; tout
est susceptible de perfectionnemens dont la nécessité
n'avait point été aperçue d'abord, et l'art vient prêter
son secours au génie.
De toutes les opérations de l'esprit, celle par laquelle
un compositeur de musique conçoit l'effet de sa com-
position sans l'entendre parait être et la plus difficile
et la plus étonnante. Quelle complication! Que de rap-
ports divers! Que détalent, de perspicacité, d'expérience
et d'observation , même dans un ouvrage médiocre ! car
ce n'est point assez d'être ému par la situation qu'on
veut peindre ou le sentiment qu'il s'agit d'exprimer, il
faut encore trouver des mélodies analogues à ces divers
objets ; il faut que ces chants se combinent et se parta-
gent entre plusieurs voix de différens caraotères, dont il
est indispensable de pressentir l'effet; il faut enfin que
tout cela soit accompagné par un nombre plus ou moins
considérable d'instrumens qui diffèrent d'accent et de
sonorité, et qui doivent être employés de la manière la
plus satisfaisante et la plus utile k l'effet général. Chacune
de ces choses entraine une multitude de détails qui con-
courent à compliquer les élémcns de cet art singulier. Il
suffit au musicien de jeter un coup d'œil sur le papier qui
reçoit ses inspirations, pour se rendre compte de sa com-
position comme s'il l'entendait réellement exécuter.
Dès qu'on porte avec attention ses investigations dans
la musique, on y remarque quatre choses principales qui
concourent à son effet, savoir: la succession des sons qui,
comme on vient de le voir, se désigne par le nom de
mélodie; leur simultanéité, d'où résulte l'harmonie;
la sonorité y qui est plus ou moins satisfaisante, suivant
le choix ou la disposition des voix et des instrumens ;
CliAP. vm. nELATION UtS SONS. .Jô
et enfin l'accent, qui vivifie tout cela, mais qui échappe
a l'analyse. Les rapports sensibles des sons se présentent
donc sous trois aspects: 1° succession; 2° simulta-
néité; 3° sonorité. Chacune de ces divisions se frac^
tionnc comme on le verra par la suite.
CHAPITRE IX.
De la mélodie.
C'est dans sa propre voix que l'homme trouve le type
originaire de la musique. Cet instrument, le premier de
tous, parce qu'il est à la fois le plus touchant et le plus
fécond en effets divers, ne donne par lui-même que des
.dées de successions de sons, et ne fait pas même sup-
poser la possibilité de simultanéité dans leur émission.
De la vient sans doute que la mélodie est la première
chose qu'on remarque quand une éducation précoce
n a point modifié les dispositions naturelles. Disonsplus-
c'est elle seule qui attire l'attention de ceux qui sonj
complètement étrangers aux éludes musicales, et l'har-
monie des accompagnemens frappe en vain leur oreille-
elle n'est pas entendue. Il y a environ vingt ans qu'on
s'est assuré, par diverses expériences,' qu'une partie du
public de nos spectacles croyait que l'orchestre jouait à
1 unisson des chanteurs. On est plus instruit maintenant
grâce au perfectionnement des méthodes d'enseignement
et a l'mfluence des journaux. Au reste, il est remarquable
que les peuples européens sont les seuls qui aient fait
usage de l'union de l'harmonie à la mélodie depuis le
moyen-âge; l'antiquité parait n'en avoir eu aucune con-
4é EAPPORTS DÉS SOWS. SECT. îr.
naissance, et les Orientaux ne la comprennent pas quand
ÔTi la leur fait entendre. Il serait facile de démontrer
que l'harmonie ne peut s'allier aux divisions de l'échelle
musicale de certains peuples, et, d'autre part, qu'elle est
le produit presque nécessaire de notre garrihie. Là «lé-
lodie est de tous les pays et de tous les temps; mais ses
formes sont variables comme les élémens qui entrent
dans sa composition.
Il ne faut pas croire que cette mélodie , telle qu'on
l'entend dans les chants populaires et au théâtre, n'ait
d'autre règle que la fantaisie. Le génie le plus libre, le
plus original, obéit, à son insu, lorsqu'il imagirie des
^hatits,à certaines règles de symétrie dont l'effet n'èèt
pas plus de convention que ne l'est le t-hythttie du tam-
bour âur des masses de soldats qu'on fait raouvoii-. Qu'on
ne croie point que cette régularité de formes n'affecte
que ceux qui ont étudié les principes de la musique ;
quiconque n'a pas l'oreille inerte ou rebelle y est sen-
sible, sans qu'il soit obligé pour cela d'analj'ser ses sen-
sations.
La différence de vitesse et de lenteur, établie dans
un ordre régulier quelconque, constitue ce qu'on nomme
le rhj'thme en musique. C'est par le rhythme que cet
art excite les plus vives émotions, et l'action de ce
rhythme est d'autant plus puissante qu'elle est plus
prolongée. Par exemple, une noire suivie de déUx ctO-
ches est une succession qu'on rencontre à chaque in-
stant dans la musique sans la remarquer; mais qu'elle
se prolonge un certain temps, elle deviendra un rhythme
capable de produire les plus grands effets.
Le rhythme est susceptible de beaucoup de variétés.
Dans les mouvéméns lénts, tels que V adagio, le largo.
il est presque nul ; mais dans les mouvçmens modérés
ou rapides il est très remarquable. Quelquefois il ne ré-
side que dans la mélodie; d'autres fois il est dans l'ac-
compagnement; enfin, il est des cas où deux rhylhmes
différeus, l'un placé dans le chant, l'autre dans l'accom-
l)agnement, se combinent pour produire un effet mixte.
La musique dépourvue de rhythme est vague et ne
peut se prolonger sans faire naître l'ennui. Cependant
on emploie quelquefois avec succès des mélodies de cette
espèce pour exprimer une certaine rêverie mélancolique,
le calme des passions, l'incertitude et d'autres choses
semblables. Toutefois, de pareils cas sont rares.
D'après ce qui vient d'être dit, on conçoit que le
rhythme fait partie des règles de symétrie auxquelles la
mélodie est soumise; elle en est la première et la plus
impérieuse; c'est elle qui souffre le moins d'exceptions,
et à laquelle on est le moins tenté de se soustraire.
La sensation du rhythme delà musique est simple ou
complexe. Elle est simple quand un seul genre de com-
binaison de temps frappe l'oreille; elle est coiQ|ïlexe
quand des combinaisons de genres différens se font en-
tendre en même temps.
La sensation est d'autant plus simple que l'ordre sy-
métrique se compose de moins d'élémens. Les élémens
du rhythme sont les temps de la mesure et leurs frac-
tions, soit binaires, soit ternaires.
(i) Ce morceau est extrait de la quatrième leçon du cours de
philosophie et d'histoire de la musique, par M. Fétia.
A8 rapports «es so:«s. sv.ct. il.
Exemples de quelques eléraens de rliythities simples.
Ordre binaire.
rr rrirr rrirr m-
r rrir rrir m-
Ordre ternaire.
rrnrrrirrrirrri-
r nr rir rir ri-
frrirTnr-rrif^ri-
ffnrfrirfnrfnr-
La simplicité de la sensation du rhythme diminue en
raison de l'augmentation du nombre d'élémens qui en-
trent dans sa composition.
•HAP. I\. MKI.OniK. If)
F.xcmplei. Ji- rliytliiiifs coinposi-s de i)lui>i*ius élémeiis.
Rljylhrae binaire.
r rirrrir^^rrir r
Rhythme ternaire.
rrrif^rin^prnr^i
Le résultat d'une sensation très simple de rhythme
étant d'affecter l'organe de l'ouïe d'une manière uni-
forme, cette sensation se fait remarquer sans peine; il
n'en est pas de même lorsque le rhythme est le produit
d'élémens multipliés et diversement combinés. Dans les
deux derniers exemples , chaque case de mesure con-
tient des élémens différens, et chacune d'elles, consé-
quemment, produit une sensation distincte; d'où il suit
([ue la symétrie d'arrangement disparait, et, par suite,
(jue le rapport rhythmique s'affaiblit d'autant plus.
Mais un nouveau rapport de nombres peut résulter
de combinaisons semblables. En effet , l'oreille , sans
compter le nombre des mesures , est cependant saisie de
!a sensation de ce nombre ; de là nait pour elle la néces-
sité qu'il se répète, et, si elle est satisfaite sous ce rap-
port, un nouveau genre de rhythme s'établit pour elle par
la symétrie des phrases ; ce rhythme constitue la phra-
séologie, qu'on désigne en musique sous le nom de car~
rure des phrases. La nécessité de symétrie dans le nom-
bre de mesures correspondantes établit donc un nou-
veau genre de rhythme , lorsque cette symétrie n'existe
plus dans les élémens du rhythme des temps, et ce nou-
veau rhythme est d'autant plus satisfaisant pour l'oreille
que la similitude est plus parfaite dans l'arrangement
des élémens rhythuiiqucs de chaque mesure. Ainsi les
•>0 RAPPORTS DE6 bO!»S. ?ECT. II.
rhythmes qui ont été donnés en dernier lieu comme
exemples devieiidi'ont réguliers et sensibles si, à chacun
de ces exemples, composés de quatre mesures, corres-
pondent des phrases semblables et pour le nombre des
mesures et pour l'arrangement des temps.
Exemples :
Rh)'thme binaire. — Première phrase.
r hrrnr(:prnr ni
Deuxième phrase.
f ri r r ri r î ^ r r'i r ■ li
Rhythme leni.nire. — Prpn»ière phrase.
rrrirrrlr^^^nr h
Deuxième pLrasc.
rrnr?nr!:pci:'ir î
Dans ces exemples, il y a parité non-seulement à
l'égard du nombre de mesures de chaque phrase, mais
la cinquième mesure répond exactement à la première
pour l'arrangement des élémens du rhythme, la sixième
à la seconde, la septième à la troisième, et la huitième
à la quatrièii)e. Lne différence se fait cependant remar-
quer entre les deux phrases du premier exemple , car au
lieu de deux blanches qui se trouvent dans la quatrième
mesure, il n'y en a qu'une suivie d'un silence dans la
huitième. La raison de cette différence est qu'après les
deux phrases le sens rhytbmique est terminé, et que le
ntAP. IX. MKt.nmr.. 51
premier temps de la dernière mesure est précisément Irt
point de la terminaison.
L'arrangement du rhythme phraséologiqnê n'est pa*
toujours aussi régulier que dans les exemples dont il
â'agit; mais on peut affirmer que moins il y a de régula-
rité dans cet arrangement , plus la sensation de ce genre
de rhythme s'affaiblit. ^
L'expression de carrure des phrases ^ dont on se %zi\
dans le langage ordinaire pour désigner le rhythme
phraséologique , peut faire croire à la nécessité absolue
de composer toutes les phrases de quatre mesures ; mais
cette nécessité n'existe point, car, ainsi qu'il existe un
rhythme ternaire de temps , il y a un rhythme ternaire
de phrases. Une phrase de trois mesures , si elle a pour
correspondante une autre phrase de trois mesures, Sera
donc parfaitement rhythmique ; et le rhythme sera sur-
tout satisfaisant si l'arrangement des élémens du rhyth-
me de chaque mesure est absolument symétrique dans
les deux phrases.
Il y a auàsi des phrases correspondantes de cinq me-
sures chacune; mais à leur égard on peut faire la même
observation que pour le rhythme de cinq temps par me^
sure, que quelques auteurs ont essayé d'introduire dans
la musique ; c'est que l'oreille est absolument inhabile à
saisir les rapports de cette combinaison par cinq, et que
si des combinaisons semblables ont été essayées avec
quelque succès, c'est que l'oreille les a décomposées
comme des rhythmes alternativement binaires et ter-
naires, et que la symétrie qui résulte de là répétition
établit pour cet organe des rapports d'ordre qui finis-
sent par le satisfaire. Une suite de mesures à cinq temps
se présente donc à l'oreille comme une alternative de
Ô2
RAPPORTS DES SONS.
»ECï. II.
mesures à deux et à trois temps; une suite de phrases
de cinq mesures est une combinaison alternative de
phrases de deux et de trois mesures; d'où il résulte que
le rhythme phraséologique de phrases de cinq mesures
est le moins simple de tous , et , par suite, le plus faible
pour l'oreille.
Quelquefois la phrase première de quatre mesures est
coupée par un repos incident à son milieu, c'est-à-dire
au bout de deux mesures; dans ce cas, l'oreille exige
que la même césure musicale se fasse sentir dans la
phrase complémentaire ou correspondante. Je citerai
pour exemple la romance du Prisonnier.
-Ni
^
-^
-e-
5
-r
i^nm
=5
S:
Lorsque dans u - ne tour ob - scu-re
Cejeunehommeest dans la dou - leur,
^^
4t
y~r
Mon cœur gui - dé par la na - tu - re
f^-^ \>\r^-&
Doit corn - pa - tir à son mal- heur.
Dans cet exemple, A est le commencement de la
proposition dont B est le complément; 1, 2, 3, 4,
sont des membres de phrases correspondans et symétri-
ques.
en Ai'. IX. MÉLODIE. 53
Quelquefois le sens musical resle suspendu après la
deuxième phrase de quatre mesures; dans ce cas une
troisième pinase de quatre doit servir de complément
|iour satisfaire l'oreille. Tel est l'exemple qu'on en trouve
dans la célèbre canzonetle du Mariage de Figaro qui
commence par ces mots : Mon cœur soupire, etc.
^
F^=^^^
1^2 J
-^ 6»-
Mon cœur sou-pi-re La nuit le jour;
P ,t> , b(* h
1 #.- 1
k ^ la ..
1
->
/îv CT » 1^ ■■ "1
' tf
p V w ^W ■
'iVs ^ J
I 1 r
■^ 1 ^ '
l_Si^ — j —
^ " }\
' '
Qui peut me di - re Si c'est d'a-mour?
~^^â^^^\^-^
Quipeutmedi - re Si c'est d'a-mour?
On serait dans l'erreur si , de ce qui a été dit précé-
demment, on tirait la conséquence qu'un morceau de
musique quelconque doit toujours renfermer un nombre
pair de mesures; car il arrive souvent, dans un finale
d'opéra ou dans toute autre pièce écrite pour plusieurs
voix, que la mesure finale d'une phrase sert aussi de
première pour une autre phrase, ce qui rend à la fin le
nombre des mesures impair, sans que l'oreille en soit
blessée ; cette sorte d'enjambement a même de la grâce
quand elle est faite à propos.
Il n'est pas sans exemple qu'une phrase isolée de cinq
ou de trois mesures se trouve placée au milieu d'autres
phrases régulières et carrées ; mais un pareil défaut est
54 RAPPORTS DES SONS. SFCT. II.
toujours choquant pour une oreille délicate; on peut
affirmer avant l'examen que la phrase est mal faite , et
qu'en la considérant avec soin l'auteur aurait pu la car-
rer. Au reste ce sont des cas fort rares, car le musicien
se conforme à la carrure des phrases comitié le poète à
la mesure des vers, naturellement et sans y penser.
Toutefois, certaines mélodies populaires des pays de
montagnes tels que la Suisse, l'Auvergne , l'Ecosse , sont
empreintes de nombreuses irrégularités de ce genre, el
n'en sont pas moins agréables. L'irrégularité est même ce
qui plaît le plus dans ces sortes de mélodies, parce
qu'elle contribue à leur donner la physionomie particu-
lière, étrange, sauvage, si l'on veut, qui pique notre
curiosité en nous tirant de nos habitudes. Mais il ne faut
pas s'y tromper; ce qui nous séduit un instant en elles
nous fatigue bientôt si nous n'en sommes distraits par
d'autre musique, et l'irrégularité qu'on y remarque et
qui nous plaisait d'abord finit par nous sembler mono-
tone et affectée. Un musicien peut tirer un parti avanta-
geux de ces sortes de mélodies; mais il faut qu'il sache
les employer à propos et qu'il n'en soit point prodigue.
La mélodie, fruit de l'imagination et de la fantaisie,
libre de toute entrave en apparence, est donc soumise i:
trois conditions d'où dépend son existence, savoir : hi
convenance de tonalité, le rhythme et le nombre. On
va voir qu'il en est une autre non moins importante, non
moins impérieuse et plus gênante ; je veux parler de /a
modulation. On appelle de ce nom le passage d'un ton
dans un antre, c'est-à-dire de la gamme d'une note dans
la gamme d'une autre note. 11 est nécessaire d'expliquer
en quoi consiste le mécanisme et le but de ces change-
mens de toq.
<:kap. i\. MKr.oDiE. 55
Si un morceau de musique était tout entier dans le
tiiêhie ton , il en résulterait une sorte d'uniformité rati-
fiante; cette uniformité se désigne exactement par le
nom de monotonie (un seul ton). Dé petits airs, d'un
style naïf et simple, peuvent seuls admettre l'unité de ton
sans donner lieu aux inconvéniens de la monotonie. Dès
qu'il s'agit d'un morceau d'une certaine étendue, la mo-
dulation devient nécessaire; mais celle-ci est soumise
aux exigences de l'oreille comme le rhythme et la forme
des phrases. Dès qu'on veut faire usage de la modula-
tion , ou plutôt dès qu'on y est déterminé par la nature
des chants qu'on invente , l'embarras du choix des tons
se préfeente. En effet, l'oreille n'admet pas que toute
succession de tons puisse lui plaire. Pour atteindre ce
but, il faut qu'il y ait quelque analogie entre le ton
qu'on quitte et celui dans lequel on entre; et cependant
il est un grand nombre de circonstances où la modula-
tion doit être inattendue pour être agréable.
En réfléchissant sur la contradiction qui semble naître
de cette double obligation, on s'aperçoit qu'il y a dans
un morceau quelconque deux sortes de modulations :
l'une, principale, qui en détermine la forme; l'autre,
accessoire, qui n'est qu'épisodique. La modulation prin-
cipale ayant pour objet, tout en contribuant à la variété,
(le présenter àVec simplicité la pensée du compoàitéur,
n'admet que l'analogie de ton dont il vient d'être parlé,
tandis que les modulations incidentes, étant destinées à
réveiller l'attention de l'auditeur par des effets piquans,
ne sont point soumises à cette analogie. Plus la première
est naturelle et simple, plus elle est satisfaisante; plus les
autres sont inattendues, plus elles contribuehtà atlgrtiéil-
ter l'effet.
56 BAPPORTS DES SO>S. SKCT. II.
Cela posé , uue nouvelle difficulté se présente : la
voici. Quel que soit le ton principal choisi par l'auteur
d'un morceau de musique, plusieurs autres tons se grou-
pent autour de lui de manière à être avecluien rapport
d'analogie; car s'il s'agit d'un ton majeur, ou trouve d'a-
bord le ton mineur relatif, c'est-à-dire celui qui a le
même nombre de dièses ou de bémols, puis celui qui a
un dièse ou un bémol de plus , et enfin celui qui a un
dièse ou un bémol de moins; s'il est question au cou-
traire d'un ton mineur, on trouve d'abord le ton majeur
relatif, c'est-à-dire celui qui a le même nombre de diè-
ses ou de bémols, puis ceux qui ont un dièse ou un bé-
mol de plus ou de moins. Mais de tous ces tons, quel est
celui qn'il faut adopter? A oilà ce qui heureusement est
en question ; car on conçoit que s'il n'y avait qu'une
manière de sortir du ton principal , la modulation serait
toujours prévue, et dès lors le plaisir causé par la mu-
sique serait beaucoup diminué, ou nicme s'évanouirait
complètement. Il suffit, pour qu'une modulation soit
agréable et régulière, qu'elle ait lieu du ton principal à
l'un de ses analogues, c'est-à-dire qu'elle introduise dans
la mélodie un dièse ou un bémol de plus, ou qu'elle en
retranche un. Supposons un Ion majeur, ré, par exemple,
dans lequel y a deux dièses, savoir, zxifa et à X ut : la
pensée du compositeur pourra être également simple et
naturelle, soit qu'il conduise sa modulation en si mineur,
où il y a le même nombre de dièses; soit que cette mo-
dulation passe en la, où il y a un dièse de plus; en fa
dièse mineur, où il se trouve aussi un dièse de plus, et
en sol, où il y a un dièse de moins : la fantaisie seule dé-
termine le choix.
Toute modulation principale peut donc se faire par
CJIAP, IX. MELODIE. Ô7
quatre tons <lifféren3. Et qu'on ne croie pas que lo pé-
dantisine des écoles a réglé les choses à ce petit nombre
de moyens; les compositeurs les plus audacieux, ceux
dont le génie a le plus d'indépendance, ont été ramenés
malgré eux ù s'y renfermer, parce qu'ils ont reconnu que
tout ce qui en sort choque l'oreille au lieu de lui plaire.
Ils ne se livrent ù des écarts et ne s'abandonnent à toutes
les saillies modulées de leur imagination qu'après avoir
établi d'abord régulièrement la modulation principale;
mais celles-là, loin de dépiaire à l'oreille, lui procurent
des sensations d'autant plus vives qu'elles sont plus inat-
tendues.
Je viens de dire que tous les compositeurs se confor-
ment au système régulier delà modulation principale;
je dois ajouter (jue parmi les quatre tons dont on peut se
servir pour cet objet, il est ordinaire qu'on en adopte
un de préférence à d'autres pour le faire entendre plus
souvent. Ainsi, bien que la modulation la plus simple,
la plus naturelle, la plus universellement adoptée, soit
celle où la mélodie passe d'un ton majeur dans un autre
ton majeur qui a un bémol de moins ou un dièse de plus,
comme de ré en la, ou bien d'un ton mineur au ton ma-
jeur relatif, comme de si mineur en re majeur, cepen-
dant quelques musiciens ont préféré des modulations
moins usitées, et s'en sont servi habituellement. Rossini,
par exemple, a adopté la modulation qui passe d'un ton
majeur à un ton mineur avec un dièse de plus, comme
du ton de ré majeur au ton de/a dièse mineur; mais il
s'est servi si souvent de ce moyen qu'il l'a usé et l'a même
rendu trivial.
Telles sont donc les conditions principales de la mé-
lodie : 1° convenance dx; tonalité; 2" symétrie de
58 RAPPORTS DÈS SONS, SECT. U.
rhythme ; 3* symétrie de nombre; 4" régularité de
modulation. On serait clans l'erreur si l'on se pei-suadait
qu'elles soht autant d'obstacles à la production des idées ;
car le rhythme , le nombre, la modulation sont si bien
îtthéfehs au^ facultés du musicien qu'il y obéit sâtis le
rem<1rquer et comme par instinct, Uniquement Occtipé
du caractère gracieux, énergique, gai ou passionné dé
sA mélodie ou caniilène '. Que d'autres entraves bien
plus réelles il est obligé de surmonter, dans la produc-
tion et dans l'arrangement de ses idées ! S'il écrit sur des
paroles, dans le style dramatique, l'arrangement des vers,
la prosodie, la rapidité de l'action, et beaucoup d'autres
considérations le contraignent biéti davantage, comme
on le verra dans la suite; cependant l'homme de génie
en triomphe toujours. C'est un mystère qui ne peut être
f^ômpris que par les compositeurs eux-mêmes que cette
faculté d'inventer, de conserver de l'élan, de la chaleut",
du délire, (le se passionner enfin ati Inilieu de tant d'obs-
tacles; de rester indépendant dans le choix de son sujet,
et de le manier avec dextérité, comme si rien ne s'y op-
posait. Lorsqu'on songe à toutes ces choses, on conçoit
qn'il peut y avoir du mérite même dans de la musique
médiocre.
Il est des mélodies qui séduisent par elles-mêmes et
dépouillées de tout ornement étranger, même d'accom-
pagnertient; celles-là sont en petit nombre. Il en est d'au-
tres qui, lïien que purement mélodiques, ont besoin du
secours d'une harmonie quelconque pour produire leur
effet. Il en est enfin dont l'origine réside dans l'barmo-
(i) Ce;* den* tn6t« éont .iyil6iiVrtié», Le Sétirttoé ési tii>é de l^îtalien
cttntileha-.
cuAv. IX. nitom^. i>d
nie qui les accoiupagoe. Quiconque n'est pas insensible
à l'effet des sons saisit facilement l'ensemble des mélo-
dies de la première espèce : de là vient que celles-ci sont
bientôt populaires. Les mélodies qui ne produisent leur
effet qu'avec le secours d'un accompagnement quelcon-
que n'exigent pas de grandes connaissances musicales
pour être senties, mais toutefois elles ne peuvent plaire
qu'aux oreilles habituées à entendre de la inusique.
Quant aux piélodies de la troisiènae espèce, qu'o|i peut
nommer mélodies harmonieuses , les musiciens seuls
sont en état de les apprécier, parce qu'au lieu d'être le
résultat d'une idée simple, elles se compliquent de di-
vers élémens, et exigent conséquemment une sorte d'a-
nalyse pour être comprises : analyse qu'un musicien fait
avec la rapidité de l'éclair, mais que l'homme du monde
ne peut faire que lentement et avec peine. Ce ne sont
pas moins des mélodies très réelles, et c'est à tort qu'on
s'écrie souvent qu'il n'y a point de chant dans un mor-
çpau quelconque, lorsque ce genre de mélodie s'y trouve;
on devrait diie seulement que le chant n'en est pas fa-
cile à comprendre. S'attacher à en saisir l'esprit serait
augmenter ses jouissances et n'exigerait pas une étude
fort longue; mais la paresse naturelle que nous portons
en toute chose exerce son influence , même sur nos plai-
sirs.
Quoique la mélodie soit en apparence ce que tout le
monde peut apprécier avec facilité, elle est cependant
une des parties de la musique sur lesquelles on porte les
jugemens les plus erronés. 11 est peu d'habitués des théâ-
tres lyriques qui ne se croient en état de prononcer sur-
la nouveauté d'une mélodie; néanmoins, outre que l'é-
rudition musicale leur manque pour cela, combien de
(iO RAPPORTS DES SONS. «Ef-T. if.
fois ne sont-ils pas dupes des ornemens du chanteur,
qui donnent un air de nouveauté à des choses suran-
nées? Que de vieilleries hahillées à neuf au moyen d'ac-
compagnemensde formes différentes, d'instrumens nou-
veaux , de changemens de mouvement, de mode ou de
ton ! Et tandis qu'on n'aperçoit pas les analogies réelles
qu'il y a entre telle mélodie ancienne et telle autre qu'on
croit nouvelle , que de fois il arrive qu'on signale des
ressemblances imaginaires , parce qu'on a remarqué
quelque similitude de rhythme entre deux mélodies dont
les caractères, les formes et l'inspiration n'ont rien d'a-
nalogue ! Les bévues de ce genre sont innombrables ;
néanmoins on n'en reste pas moins convaincu de l'in-
faillibilité de son jugement, et l'on est toujours prêt à
retomber dans les mêmes erreurs avec la même assu-
rance.
Mais, dit-on, il n'esl pas besoin de tout examiner
pour savoir si telle mélodie est agréable ou déplaisante !
Cela se sent plus que cela ne s'analyse, et tout le monde
est en état déjuger de ses sensations. — Tout cela est in-
contestable; mais qu'en faut-il conclure? Que chacun
est en droit d'affirmer que telle mélodie lui plaît ou lui
semble insignifiante ou désagréable, mais non de décider
de son mérite, s'il n'est en état de l'analyser. A Dieu ne
plaise qu'on soit contraint d'analyser les mesures des
phrases pour s'assurer qu'elles sont carrées ! un pareil
travail, indigne de quiconque a le sentiment de la mu-
sique, n'est jamais néces.saire quand on a su rendre son
oreille délicate, sous le double rapport du rhythme et
du nombre. C'est à perfectionner cet organe qu'il faut
travailler, et, pour y parvenir, l'attention seule est néces-
saire, sans y joindre le secours de la science. Qu'un
* "^^''- IX- MKL(>l>ir. i; /
honirne du nioiiilc , au lieu de s'abaudomier sans lé-
»eive au plaisir vague que lui cause un air, un duo, se
décide à en examiner l'ordonnance, à considérer la dis-
position et le retour des phrases, les rhyihmes princi-
paux, la cadence, etc. : d'abord ce travail lui sera pé-
nible et troublera ses jouissances; mais insensiblement
l'habitude suppléera l'attention, et bientôt elle sera telle
que l'attention même sera moins nécessaire. Alors ce
• jui n'aura paru d'abord qu'un calcul aride deviendra
l'origine d'un jugement facile et la source des plus vives
jouissances.
II est une autre objection qu'on répète volontiers et
qu'il ne faut point laisser sans réponse, parce qu'elle est
spécieuse et peut faire naître des doutes, même dans un
esprit juste. «Gardez -vous de toute cette science », di-
sent ceux qu'une paresse invincible domine , « elle ne
peut qu'affaiblir vos plaisirs. Les arts ne nous procurent
de jouissances qu'autant que leurs effets sont imprévus.
Ne cherchez donc point à acquérir des connaissances
dont le résullatdo it être de vous rendre propres à juger
plutôt qu'à sentir «.— Tout ce raisonnement est fondé
sur cet axiome de philosophie : « Apercevoir, c'est sentir;
comparer, c'est juger ». Mais le perfectionnement de l'or-
gane auditif, qui résulte de l'observation de l'effet des
sons, n'est qu'un moyen de percevoir mieux et d'aug-
menter par-là la somme de ses jouissances. Voilà pour-
quoi l'attention est nécessaire à l'homme du monde tan-
dis que celui-ci tirerait peu d'utilité d'un savoir imparlait.
Tout le monde porte des jugemens sur la musique; les
uns par un instinct aveugle et avec précipitation, les au-
tres par un goût perfectionné et avec réflexion. Qui ose-
6
62 RAPPOJITS U£b SONS. SECT. II.
rait dire que la premrère espèce de ju^eiuens v«u( mieux
que l'autre ?
Lorsque je traiterai de l'exprpssion dramatique, je
ferai voir quelle est la portion de la mélodie que l'o-
reille la moins exercée juge sainement par instinct.
CHAPITRE ^.
De rharmonie.
Plusieqrs sons qui se font entendre ^inmltanépi^nt,
et dont la réunion flatte plus pu moin$ agréablement
l'oreille, prennent le noip collectif d'accords. I>fi sys-
tème général des accords et les lois de leur sucpejjsion
appartiennent èi une branche de l'art musical qu'çp dé-
signe par le nom d'harmonie.
Harmonie est un mot générique quand il signifie la
science des accords. Mais on dit aussi V harmonie d'un
accord pour indiquer l'effet qu'il produit sur l'oreille:
autre exemple de la pauvreté de la langue musicale.
Par suite de l'éducation des peuples modernes et ci-
vilisés, on se persuade que le sentiment de l'harmonie
est si naturel à l'homme qu'il a dû le posséder de tout
temps. C'est une erreur , car il y a beaucoup d'apparence
que les peuples de l'antiquité n'en ont point eu d'idée;
les Orientaux, même de nos jours, n'y sont pas plus
initiés. L'effet de notre musique en accord les impor-
tune. La question de la connaissance que les Grecs ou
les Romains ont pu avoir de l'barjuonie a été vivement
controversée, mais inutilement, personne ne pouvant
rfTAP. X. HARMOIflK. 68
alléguef de pi'éuves en faveur de son opinion à cet
égard '. L'^'qnivalent du mot harmonie ne se trouve pas
èi'iiplové une seule fols dans les traités de musique grecs
oU latins qui sont parvenus jusqu'à nous ' ; le chant
d'ilMe ode <lé Pindare, celui d'un hj'mne à îfértiésis et
c|itelques SUtl-es fragmens, Sont tout ce qui s'est tén-
servé de l'ancienne musique grecque, et l'on n'y troiiVé
aucunes traces d'accords; enfin la fortue des l^tes et
des cvlhares, le petit rtbnihfe de leurs èôMeS qtll rié
pouvaierlt être liiôdifiées comme celles dé rtos guitàféS,
(PS instrumens n'ayant point de manches comme lëà
nôtres, tout cela, dis-je, donne bèducbUp dé probabi-
lité à l'opinion de ceux qui ne croietit point à l'eiistencè
de l'harmonie dans la musique des anciens. Leurs ad-
versaires opposent que cette harmoUie est dans la na-
ture.— A la bonne heure; mais que de choses sont
dans la nature, et n'ont été remarquées que très tard!
L'harmonie est dans la nature, et cependant l'oreille
des Turcs, des Arabes et des Chinois n'a pu s'y accou-
tumer jusqu'ici.
Les premièf-es traces de l'harmonie se font aperce-
voir chez les écrivains du moyen-âgé , vefs le neuvième
siècle; mais elle resta dans uh état de barbarie jusqUë
vers lé milieu du quatorzième, époque où quéîqtiêsi
musiciens italiens eommencèrent à lui donner dêâ
(i^ Je croî'! jifitif tnrif fju'il ser.Ti't possible de dcfnon^fét- p!i<- Î.1
niitnre mpme de l'échelle ninsimle des Grecs qu'ils fi'ont pu ftiife
ii.s.ige de rh.irmonie, dans le sens que nous y attachons ; mais c'est
une question délicate qui ne doit point trouver place ici.
(2) Ces traités ont été écrits depuis le temps d',\Iexandre jusque
vers la fin de l'empit-e grée. Lf-s ])1(i5 importons sodt ceux d'AfiS-
toxène, d'Ari«tide Quintilien, d'AljpiuJ^ dePlolémée et de Boèe«.
6^ RAPPORTS DES SOMS. SECT. II.
formes plus douces. Parmi ces musiciens , ceux qui se
distinguèrent le plus furent François Landino, sur-
nommé Francesco Cieco , parce qu'il était aveugle, ou
Francesco d'egU organi , à cause de son habileté sur
l'orgue, et Jacques de Bologne. L'harmonie se perfec-
tionna ensuite entre les mains de deux musiciens fran-»
çais , Guillaume Dufay et Gilles Binchois, et d'un
Anglais, Jean Dunstaple. Tous trois vécurent dans la
première moitié du quinzième siècle. Leui's élèves
ajoutèrent à leurs découvertes, et depuis lors l'har-
monie s'est continuellement enrichie d'effets nouveaux.
L'habitude d'entendre de l'harmonie dès notre en-
fance nous en fait un besoin dans la musique. Il semble
d'ailleurs que rien n'est plus naturel, et, dans l'état de
civilisation musicale où nous sommes parvenus , il est
rare que deux voix chantent ensemble sans chercher à
s'accorder y c'est-à-dire à faire des accords. Chaque
voix ne pouvant produire qu'un son à la fois , deux voix
qui s'unissent ne peuvent donc faire que des accords de
deux sons; ceux-là sont les plus simples possibles. On
les désigne par le nom iï intervalles , parce qu'il y a né-
cessairement une distance quelconque d'un son à un
autre ; les noms de ces intervalles expriment les dis-
tances qui se trouvent entre les deux sons. Ainsi l'on
appelle seconde l'intervalle compris entre deux sons
voisins, tierce celui qui se trouve entre deux sons sé-
parés par un autre , quarte celui qui renferme quatre
sons, et ainsi de suite à mesure que la distance s'aug-
mente d'un son, quinte, sixte, septième, octave et
neuvième. Les intervalles qui dépassent la neuvième
conservent les noms de tierce, quarte, quinte, etc.,
parce que ce ne sont que des doubles ou triples tierces,
CHAP. X, HARMONIE. 63
quartes, quintes, etc., et que leur effet est analogue à
celui des intervalles non redoublés.
Si l'on n'a point oublié que divers sons, tels que
ré b, ré ^ et ;ï? j^ conservent la dénomination commune
de ré par l'idée de réalité qu'on attache au nom des
notes, on concevra sans peine que chaque intervalle est
susceptible de se présenter sous diftérens aspects; car si
ré forme toujours une seconde à l'égard A'ut, ce ré ou
cet ut pourront être dans l'état de bémol, de bécane
ou de dièse, et des lors la seconde sera plus ou moins
étendue, plus ou moins resserrée. Un intervalle réduit à
sa plus petite dimension , et dans lequel on ne trouve
que les signes d'un ton et d'un mode quelconque , se dé-,
signe par l'épithète de mineur; le même intervalle ,
dans sa plus grande extension relative au ton , est ma~
jeiir. Par exemple, l'intervalle d'«/ 1| à /v ]? est une
seconde mineure ; celui à! ut tl à re tj est une seconde
majeure. Mais si , par une altération momentanée qui
n'est conforme à aucun ton, on construit des intervalles
plus petits que les mineurs ou plus grands que les ma-
jeurs, on désigne les premiers par le nom de diminués ,
et les autres par celui à' augmentés. Par exemple, l'in-
tervalle à'ut ^ à yêz tj est une quarte diminuée qu'on
ne peut considérer que comme une altération momen-
lanée; car il n'est aucun ton où ut soit diésé, tandis
que /a ne l'est pas; par le même motif, l'intervalle
à'ut bi a sol f} est une quinte augmentée. Les divers de-
grés d'extension des intervalles sont donc de quatre es-
pèces : diminué , mineur, majeur, augmenté.
On se servait autrefois des dénominations àe Juste et
Ae/aux pour les variétés d'extension de la quarte et de
la quinte ; mais ce qui est faux ne pouvant trouver place
6.
66 KAPPORTS BtS SONS. SECT. II.
en inu3iqué , on a renoncé à ces mauvaises e)L|)ression8<
Tous les intervalles an accords de deuï sons ne pro-
duisent pas le même effet sur l'oreille : les uns lui
plaisent par lenr harmonie, les autres l'affectent moins
agréablement et ne peuvent la satisfaire que par leur
enchaînement avec les premières. On donne le nom de
connoiinances aux intervalles agréables, et celui de dii"
^O'iances aux autres.
Les intervalles consonnans sont la tierce , la quarte ^
la quinte y la sixte et l'octave. Lès dissouans sont la
seconde , la septième et la neuiièlne.
Les intervalles consonnans et dissouans ont la pro-
priété de se renverser ; c'est-si-dire que deux notes
quelconques peuvent être à l'égard l'une de l'autre dans
une |>o»ition inférieure ou supérieure. Par exemple, uL
étant la noie inférieure et mi la supérieure, il en résulte
ime tierce ) mais que rhi soit la note inférieure et ut la
supérieure, elles formeront une sixte.
Le renversement des consonnances produit des con-
sonnances; celui des dissonantes engentlre des disso-
nances. Ainsi la tierce renversée produit la sixte ^ là
(piarte produit la quinte, celle-ci produit la quarte, la
bixte produit la tierce, la seconde produit la septième,
et celle-ci la seconde.
On a disputé long-temps pour savoir si la quarte est
vme consonnance ou une dissonance; deux gros livres
ont même été écrits sur cette question ; on se serait épaiv
gné beaucoup de mauvais raisonnemens si l'on eût pensé
à la loi du renversement. La quarte est une consonnance
d'une qualité inférieure aux autres ; mais elle est une
consonnance, car elle provient d'une autre consonnance
(la qninte^ dont elle est le renversement.
(HAP. X. Il\r.M()"*IE. 67
Le renv«rseinenl csl une source de variélé poitr l'har-
monie, car il sulfil de déplacer la position des notes
pour obtenir des effets différons.
J'ai dit que les intervalles consomians sont agréables
par eux-mêmes, et que les antres ne le deviennent que
par leur combinaison avec eu*. Il résulte de cette dif-
férence que la succession des consnnnances est libre et
tjuon peut en faire des suites aussi étendues qu'on le
veut; deux dissonances^ au contraire ^ ne peuvent se
succéder, et dans la résolution d'une dissonance sur une
ronsoanance , la note dissonante doit descendre d'un
(lesré. Cette rtgle, qu'on ne viole pas sans blesser une
oreille délicate, n'est cependant pas toujours respectée
par Rossini ni par les compositeurs de son école ; mais
si le maître de Pésaro fait pardonner ses négligences eu
faveur des qualités de son génie, il n'en reste pas moins
certain que la règle est fondée sur des rapports irrécu-
sables de convenance ou de répulsion des sons , rapports
qu'où ne viole pas en vain.
On conçoit que si l'on réunit deux ou trois conson-
nances, telles que la tierce, la quinte et l'octave dans
un seul accord, cet accord sera consonnant ; mais si à
jilusieurs consonnances on ajoute ime dissonance, l'ac-
cord deviendra dissonant. Dans la plupart des accords
dissonans il n'y a qu'une dissonance ; quelques-uns ce-
pendant en contiennent deux.
Si l'on était obligé d'énumérer tous les intervalles qui
entrent dans la composition d'un accord de quatre ou de
cinq sons, la nomenclature de ces accords serait embar-
rassante dans le langage de la science et fatigante pour
la mémoire ; mais il n'en est point ainsi. L'accord qui se
forme de la réunion de la tierce, de la quinte et de l'oc-
fis RAPPORTS DKS SONS. SECT. II.
tave s'appelle par excellence V accord parfait , parce que
c'est celui qui satisfait le plus l'oreille , le seul qui puisse
servir de conclusion à toute espèce de période harmo-
nique , et qui donne l'idée du repos. Tous les autres se
désignent par l'intervalle le plus caractéristique de leur
composition. Ainsi un accord formé de la tierce, de la
sixte et de l'octave, s'appelle «ccor^ </e sixle, parce que
cet intervalle établit la différence qui existe entre cet ac^-
cord et le parfait ; on donne le nom à' accord de se-
conde à celui qui est composé de seconde, quarte et
sixte, parce que la seconde est la dissonance dont la ré-»
solution descendante est obligée ; on appelle accord de
septième celui qui est composé de tierce, quinte et
septième, etc.
C'est surtout dans les accords composés de trois ou de
quatre notes que la variété résultante du renversement
se fait apercevoir, car l'harmonie de ces accords peut
s'offrir à l'oreille sous autant d'aspects différens qu'il j a
de notes dans leur composition. Par exemple, l'accord
parfait est composé de trois notes qu'on peut placer à
volonté dans la position inférieure. Dans la première
disposition , l'accord est composé de tierce et de quinte:
c'est V accord parfait ; dans la seconde, l'accord ren-
ferme la tierce et la sixte : c esXV accord de sixte ; enfin
dans la troisième, les intenalles sont la quarte et la
sixte : c'est Y accord de quarte et sixte. La même opéra-
tion peut avoir lieu pour tous les accords, et donne lieu
à des groupes de formes et de dénominations différentes
qu'il est inutile d'énumérer ici puisque ce livre n'est
point un traité d'harmonie. Il suffît qu'on se fasse une
idée nette de l'opération.
Il y a des accords dissonans qui ne blessent point
CHAP. \. UARMOME, ÇO
l'oreille lorsqu'ils se font entendre immédiatemenl et
sans aucune préparation ; ceux-là s'appellent accords
dissonans naturels ; il en est d'autres qui feraient un
effet désafjrcable si la note dissonante ne se faisait d'a-
bord entendre dans l'état de consonnance. Cette oblij:;a-
tion se nomme préparation de la dissonance , et celte
espèce d'accords se désigne sous le nom à\tccords par
prolongation. Dans d'autres accords on substitue une
note à une autre qui entre plus naturellement dans leur
composition. Dans cet état, ces accords s'appellent ac-
cord par substitution. Les accords par altération sont
ceux dans lesquels une ou plusieurs notes sont momenta-
nément altérées par un dièse, un bémol ou un bécarre
accidentels. Enfin, il est des harmonies dans lesquelles
la prolongation , la substitution et l'altération se com-
binent deux à deux ou toutes ensemble. Si l'on consi-
dère en outre que toutes ces modifications se reproduisent
dans tous les renversemens , on pourra se former une idée
de la prodigieuse variété de formes dont l'harmonie est
susceptible. Cette variété s'augmente encore par la fan-
taisie de certains compositeurs qui, quelquefois, anti-
cipent dans leurs accords sur l'harmonie des accords
suivans ; ce genre de modifications , bien qu'assez incor-
rect dans une foule de circonstances, n'est pas dépourvu
d'effet.
Dans tous les accords dont il vient d'être parlé les
sons ont entre eux un rapport plus ou moins direct,
plus ou moins logique ; il est des cas où ce rapport
disparaît presque entièrement. Dans ces sortes d'anoma-
lies harmoniques , une voix ou un instrument grave , du
médium ou de l'aigu, soutiennent un son pendant un
certain nombre de mesures. Cette tenue se désigne sous
fO KAPPOKTS t)ES SOÎTS. iECt. TI.
le notn âe pédalé, parée qne j dans l'origine de son in-
vention, elle ne fut employée que dans la musique d'é^
glise par l'organiste, qui êe servait pour cela du claviéf
des pédales de son iostruitietiti Sur la pédale une har*
monie variée se fait entendre et produit souvent Un très
bon effet y quoique, chose singulière, le son de cette pé^
dale ne soit en rapport avec elle que de loin en loin : il
suffit qtie le rapport se rétablisse d'une manière cortre-
nable à la conclusion.
Lorsque l'instrumentation n'avait point eneore acquis
d'importance dans la musique d'église, l'orgué étftit
presque le seul instnmient dont on faisait usage pour ce
genre de musique. Son emploi se borna même pendant
long-temps à soutenir les voix dans l'ordre où leur par-
tie élait écrite , sans y mêler rien d'étranger. Lorsque la
basse chantante devait garder le silence , là basse de
l'orgue se taisait aussi, et la maiii gauche de l'artiste
était alors occupée à exécuter la partie de ténoré 6li de
contralto. On attribue communément à Louis Viadana ,
maître de chapelle de la cathédrale de Mantoue, l'inveil-
tion d'nne basse indépendante dti chant, propre à être
exécutée sur l'orgue ou tout autre instrument à clavier,
et qui , n'étant point interrompue comme l'ancienne
basse j reçut le nom de basse continue. Plusieurs musi-
ciens semblent avoir eu l'idée de cette basse danè le
mênié temps; mais Viadana en à donné le premier des
règles précises dans une instruction publiée en 1606, à
la suite d'un recueil dé ses compositions. Il exprima,
par des chiffres placés au-dessus des notes de la basse,
lés accords des difféfentes voix, et eefte manière abrégée
lui permit de ne point écrire sur la partie destinée à
rorgamtt«ce qui appartenait aux voix. Cetfe partie 3Ur-
montée (de chiffrer pritien Italie le nom de jiartirftefitOj
et en France celui de bu^se chiffrée,
(Si l'on écrivait un chiUVe pour chaque intervalle qui
çfltfe (J^ans la composition d'un accord , il en résull^ralt
ifpç confusion plus fréquente pour i'guil de l'organiste
qi^fi la lecture de tontes lep parties réunies en notation
ordinaire, et le but serait manqué. Au lieu de (sel*, (»a
n'indique que l'intiervi^Ue paractéristiqnp. Poiir l'accord
parfait, parexemplp, op n'écrit qae 3, qni indique la
tierce. Si cette tierce devient accidentellement njsjiiinre
ou mineure par l'effet d'un ^ ou d'un fl , on place ce* li-
gnes à côté et en ayant du chiffre j si eile devient \\\\-
neure par l'effet d'un [> ou d'un \ , op ys/e du lajèu^p pro-
cédé. Lorsque deux intervalles sofit par^Gtéristjqujes d'un
accord, on les joint ensemble : par exemple, Vaccprd de
quinte et sijpie s'exprime par ^. Les intervalles d'"'J"'iés
se marquent pa|.' un trait diagonal qui b^rr^ l^ (cluifre
de cette manière ^ ; quant aux intervalles augmentés, ils
s'expriment en plaçant à côté du chiffre le J^, le t» ou h; t]
qui les modilie. Lorsque la note sensible est caractévisli-
que d'un inJLeryalie, ou l'ejiprinie parée signe ' .
Chaque époque, chaque écoje , ont eu des systijues
différens pour chiffrer les basses. Ces différences Sj^ut
de peu d'iinportance : il suffit que l'on s'entende et que
l'organiste ou l'accopipagnateur soit instruit des diverses
méthodes.
Dan^ l'état actuel de la niusique l'orgue ne tient plus
qu'un rang secondaire au milieu de la masse d'instru-
mens dont il estenvirpnué, en §orlp que 1^ basse phiffrée
ou continuiç a perd.u une partie de son inlérêt; mais il
n'egt pas moins nécessaire qu'elle soit pultivée, soit pour
développci' i\w^ les jeune:? ar(istt;s le senlimeni de riiar!»
73 RAPPORTS DES SOSS. «ECT. lî.
uionie par ce genre d'étude, soit pour conserver ta tra-
dition des belles compositions de l'ancienne école. Au-
trefois on ne disait point en France : il faut étudier
V harmonie, radUs il faut apprendre luisisse continue. Les
Allemands ont conservé l'équivalent de cette expression
dans leur General-Bass, et les Anglais dans leur tho"
rough-bass.
L'histoire de l'harmonie est l'une des parties les plus
intéressantes de l'histoire générale de la musique. Non-
seulement elle se compose d'une succession non inter-
rompue de découvertes dans les propriétés agrégatives
des sons, découvertes qui ont dû leur origine au besoin
de nouveauté, à l'audace de quelques musiciens , au per-
fectionnement de la musique instrumentale, et sans
doute aussi au hasard ; mais il est une section de cette
histoire qui n'est pas moins digne d'intérêt : c'est celle
des efforts qu'on a faits pour rattacher à un système com-
plet et rationnel tous les faits épars offerts par la pra-
tique à l'avide curiosité des théoriciens. Et remarquez
que l'histoire de la théorie est nécessairement dépen-
dante de celle de la pratique, car à mesure que le génie
des compositeurs hasardait de nouvelles combinaisons,
il devenait plus difficile de les rattacher au système gé-
néral et de reconnaître leur origine. Les nombreuses
modifications que subissaient les accords dénaturaient
si bien leur forme primitive qu'on ne doit pas être
élonné s'il a été commis beaucoup d'erreurs dans les di-
vers classemens qui en ont été faits.
Jusque vers la fin du seizième siècle on ne fit usage
que d'accords consonnans et de quelques prolongations
qui produisaient des dissonances préparées : avec de
tels élémeus les formes harmoniques étaient bornées de
CUAP. X. UARMOMIB. 7S
telle sorte qii'oi» ne songea point à les réunir en corps
de science, et qu'on n'imagina même pas qu'il y eût une
liaison systématique entre les accords qu'on employait.
On conàidérait les intervalles deux à deux, et l'art de
les employer selon de certaines conditions composait
toute la doctrine des écoles. Vers l'an 1590, un Véni-
tien, nommé Claude Monteverde, se servit pour la pre-
mière fois des accords dissonans naturels et des substi-
tutions; dès lors le domaine de l'harmonie s'étendit
beaucoup , et la science qui en est le résultat attira les
regards des maîtres. Ce fut environ quinze ans après les
heureux essais de Monteverde que Viadana et quelques
Allemands, qui lui disputent son invention, imaginèrent
de représenter l'harmonie par des chiffres, et pour cela
furent obligés de considérer les accords isolément; alors
ce nom A'accord fut introduit dans le vocabulaire de la
musique, et l'harmonie, ou la basse continue, comme
on disait, devint une branche de la science que les mu-
siciens devaient étudier. Pendant près d'un siècle les
choses restèrent en cet état, quoique de nombreux ou-
vrages élémentaires eussent été publiés dans cet inter-
valle pour aplanir les difficultés de cette science nou-
velle.
Une expérience de physique, indiquée par un moine
nommé le P. Mersenne, en 1636, dans un gros livre
rempli de choses curieuses et d'inutilités, qui a pour
{.'lire V Harmonie universelle, expérience répétée par le
célèbre mathématicien Vallis, et analysée par Sauveur,
de l'Académie des sciences, fournit plus tard à Pvameau,
habile musicien français, l'origine d'un système d'har-
monie où tous les accords furent ramenés à un seul
7
74 RAPPORTS DES SONS. 8ECT. II.
principe. Par cette expérience on avait remarqué qu'en
faisant résonner une coi de on entendait, outre le son
principal résultant de la totalité de la corde, deux autres
sons plus faibles, dont l'un était à la douzième et l'autre à
la dix-septième du premier, c'est-à-dire qui sonnaient
l'octave de la quinte et la double octave de la tierce,
d'où résulte la sensation de {'accord parfait majeur,
liameau, s'emparant de cette expérience, en fît la base
d'un système dont il développa le mécanisme dans un
Traité de l'harmonie qu'il publia en 1722. Ce système,
connu sous le nom de système de la basse fondamen-
tale, eut une vogue prodigieuse en France, non-seule-
ment parmi les musiciens, mais aussi parmi les gens du
inonde. Du moment où Rameau eut adopté l'idée de
faire ressortir toute l'harmonie de certains phénomènes
physiques , il fut obligé de recourir à des inductions
forcées j car toute harmonie n'est point renfermée dans
l'accord pariait majeur. L'accord parfait mineur était
indispensable à son système; il imagina je ne sais quel
frémissement du corps sonore qui, selon lui, faisait en-
tendre cet accord à une oreille attentive, bien que d'une
manière moins distincte que l'accord parfait majeur.
Au moyen de celte disposition, il n'avait plus qu'à ajou-»
ter ou retrancher des sons à la tierce supé»ieure ou infé-
rieure de ces deux accords parfaits pour trou\er une
grande ])artie des accords en usage de son temps, et de
cette manière il obtint un système complet où tous les
accords se liaient entre eux. Bien que ce système repo-
sât sur des bases très fragiles, il avait l'avantage d être
le premier qui présentât de l'ordre dans les phénomènes
harmoniques. D'ailleurs Pvameau avait le mérite d'être
CHAP. X. HAKNOinB. 75
aussi le premier qui eût aperça le mécanisme du renver-
sement des accords; à ce litre, il méritait d'être placé
au rang des fondateurs de la science harmonique.
Par la génération factice qu'il avait donnée aux ac-r
cords, il avait fait disparaître les affinités de successions
qu'ils tirent de la tonalité, et il fut obligé de remplacer
les règles de ces affinités par celles d'une basse fonda-
mentale qu'il formait des sons graves des accords primi-
tifb, règles de fantaisie qui ne pouvaient avoir qu'une
application forcée dans la pratique.
Dans le temps où Rameau produisait son système en
France, Tartini , célèbre violoniste italien, en proposait
un autre qui était aussi fondé sur une expérience de
résonnance. Par cette expérience , deux sons aigus
vibrant à la tierce en faisaient résonner un troisième
au grave, également à la tierce du son inférieur, ce qui
donnait encore l'accord parfait. Là-dessus, Tartini
avait établi une théorie obscure que J.-J. Rousseau
vanta au détriment du système de Rameau, quoiqu'il ne
l'entendit pas, mais qui n'eut jamais de succès. Les
systèmes d'harmonie étaient devenus une sorte de mode ;
chacun voulut avoir le sien et trouva des gens qui le prô-
nèrent. La France vit éclore , presque dans le même
temps, ceux de Raillère, de Jamard, de l'abbé Rous-
sier,et beaucoup d'autres qui sont maintenant ignorés
et qui méritent de l'être.
Marpurg avait tenté d'introduire en Allemagne le
système de Rameau, mais sans succès. Kirnberger, cé-
lèbre compositeur et théoricien profond, venait de dé-
couvrir la théorie des prolongations des sons, qui
explique d'une manière satisfaisante et naturelle des
harmonies dont aucune autre théorie ne peut donner
76 RAPPORTS DES SOys. ÊïCT. II.
les lois. Plus tard, M. Catel reproduisit en France cette
même théorie d'une manière plus simple et plus claire,
dans le Traité d'harmonie qu'il composa pour le Con-
servatoire de Musique, et s'il m'est permis de parler
de mes travaux, je dirai que je l'ai complétée par l'ex-
plication du mécanisme de la substitution et de la com-
binaison de cette même substitution avec les prolon-
gations et les altérations. De cette théorie sont nées
des harmonies d'un ordre nouveau dont l'art s'est enri-
chi ; ce n'est point ici le lieu d'entrer dans des explica-
tions sur ce qui concerne cet objet.
CHAPITRE XI.
De l'acoustique.
"V acoustique est une science dont l'objet est la théorie
du son. Elle diffère de la musique en ce qu'elle n'a point
de rapport aux lois de succession des sons, d'où résulte
la mélodie^ ni à celles de leur simultanéité, qui règlent
l'harmonie. L'examen des phénomènes qui se manifestent
dans la résonnance des corps sonores de diverses natures
et de dimensions différentes, et les résultats de ces phé-
nomènessur l'ouïe, composent le domaine de l'acoustique.
Ce mot est dérivé d'un verbe grec qui signifie entendre.
La percussion, le frottement, ou d'autres modes de
résonnance étant imprimés aux corps sonores, produisent
dans l'air qui les environne certains mouvemens oscilla-
toires qu'on nomme vibrations. Lorsque ces vibrations
sont d'une lenteur excessive, le son n'est point apprécia-
ble par rorcille; il ne produit sur cet organe que l'effet
CHAP. XI. ACOUSTIQUE. 77
du bruit; si ces vibrations acquièrent une certaine ra-
pidité, comme 64 dans une seconde, on entend un son
très grave. L'intonation s'élève à mesure que le nombre
des vibrations devient plus considérable dans un temps
donné. Au-delà de certaines limites de rapidité, l'oreille
cesse d'entendre le son.
On a cru long -temps que l'air possédait seul le degré
d'élasticité nécessaire pour transmettre le son à l'oreille;
on sait aujourd'hui que les liquides et certains corps
solides jouissent du même avantage; ils propagent même
le son avec plus de force et de rapidité que l'air.
On trouve dans tous les traités de physique ce prin-
cipe, que l'air mis en vibration est le véritable corps
sonore, et l'on y donne comme une démonstration de ce
principe le rcsirltat de cette expérience. Si l'on place sous
le récipient d'une machine pneumatique un timbre ac-
compagné d'un petit appareil mécanique qui le frappe,
l'oreille entend le son tant que le récipient est rempli
d'air; mais à mesure qu'on retire cet air au moyen de
la pompe aspirante, le son s'affaiblit, et il finit par s'a-
néantir dès que l'air est entièrement retiré, quoique le
mouvement de percussion continue sur le timbre. Cette?
expérience est moins concluante qu'elle ne le paraîl
d'abord ; car outre que le son peut être transmis à l'oreilK-
par d'autres corps élastiques que l'air, on ne pourrai!
rendre raison de la différence des timbres, c'est-à-dire
des diverses qualités de son, si les corps sonores ne pos-
sédaient par eux-mêmes des qualités sonores qui se mo-
difient par le système de production du son. Sous ce rap-
port, comme sous beaucoup d'autres, la science de
l'acoustique est encore bien imparfaite.
Une corde de métal, de soie ou debovau, fixée d'une
'^^ RAPPPIITS PfiS SONS. f^^Jt lit
manière solide par un bout et tendue de l'autre par iip
poids ou par une cheville; une lame métallique, une
plaque d'une forme quelconque, en bois, en métal ou
en cristal, un tube dans lequel on introduit de l'air, une
cloche, etc., sont des corps sonores dont les vibrations
font entendre des sons de qualités différentes. Depuis
environ trente ans, l'acoustique s'est enrichie d'une
multitude d'observations sur les phénomènes produits
par les résonnances de ces corps; ces observations n'ont
pas été inutiles au perfectionnement de certains instru-
niens et ont donné lieu à l'invention de quelques autres,
Il y a lieu de croire qu'on obtiendra plus tard des ré-
sultats plus salisiaisans encore des recherches auxquelles
se livrent quelques savans acousticiens.
L'i'uperfection des appareils d'expérimentation et le
défaut de soin et de précision dans les expériences ont
introduit daps la science de l'acoustique bien des erreurs,
d'autant plus graves que les mathématiciens, s'emparant
de faits mal constatés pour les soumettre au calcul et les
considérant comme des vérités démontrées, en ont tiré
des conséquences qui paraissent être en opposition di-
recte avec d'autres faits démontrés dans la pratique de
la musique. En voici un exemple.
.Supposant d'une manière absolue qu'un corps sonçr^^
dont les dimensions sont exactement de moitié plus pe-
tites que celles d'un autre corps, lait dans un temps
donné un nombre de vibrations double du plus grand,
et qu'il fait entendre l'octave juste de celui-ci, ils ont
pris pour expression du corps sonore le pljis grand le
nombre 1, et pour celle du plus petit le nombre 2. Ad-
mettant également que la quinte juste du son du corps
sonore le plus grand serait fourni par un aqlre corps
(,flAp, XI. ,4ÇOUSTIQWR. 7^
qui aurait les deux tiers des dimensions de celui-là, U
(juarte par un corps qui en sprait les trois quarts, la
tierce Tnajcure les quatre cinquiènney^ la tierce mineure
les cinq sixièmes, la sixte mineure les cinq huitièmes, la
sixte majeure les trois cinquièmes, et ainsi des autres
intervalles, ils ont exprimé les rapports de tous les in-
tervalles de la gamme par les proportions suivantes:
Le ton majeur (ut^ ré) comme 9 est à 8; le ton mi-
neur [ré, mi) comme 10 est à 9 ; la tierce majeure Çut,
rni) confine 5 çst à 4; la tierce majeure [ré, fa) comme
6 est à 5; la quarte juste {ut, fa) comme 4 est à 3;
la quinte juste {ut, sol) comme 3 est à 2; la sixte ma-
jeure [ut, la) comme 5 est à 3; la sixte mineure {mi, ut)
comme 8 est à 5; le demi-ton majeur {ut, r^' [>) comme
16 est à 16; le demi-ton mineur {ut, «f ^) comme 25 est
à 24; et hi différence entre «f ^ et re t comme 81 est
ù 80.
Or, il résulterait de là que dans la pratique de l'exé-
cution, les musiciens devraient faire ré [, plus élevé que
ut j^, et c'est précisément le contraire qui a lieu , parce
que les musiciens sentent que uf^ a une affinité ascen-
dante, tandis que ré\; en a une descendante. La pratique
se trouve donc en cela en contradiction avec la théorie.
Quelques théoriciens, considérant l'affinité dont il vient
d'être parlé comme un fait résultant de l'organisation
des musiciens, ont dit que ce fait ne détruit pas la théo-
rie, qui ne saurait être fausse; d'autres ont affirmé que
les musiciens font réellement ré L en croyant ut^, et
vice versa, ce qv^, si cela était vrai, détruirait toute
l'économie de la tonalité. Hàtons-nous de dire que d'A-
leinbert, le physicien Charles, MM. de Prony, Savart et
quelques autres savans, frappés de la solidité de l'objec-
%0 RAPPORTS DES SOVS. SECT. II.
lion, ont avoué qu'il est possible que des faits inconnus
jusqu'ici renversent l'édifice des calculs qu'on a cru
exacts, et que la théorie des véritables rapports des in-
tervalles musicaux est peut-être encore à faire.
Les accordeurs des instruniens à clavier, placés, sans
le savoir, sous l'influence des affinités, éprouvent quelque
peine à modérer le penchant qu'ils ont à donner trop
d'élévation aux sons supérieurs de certains intervalles,
penchant qui les entraînerait à rendre faux d'autres in-
tei'valles dans lesquels les mêmes lois d'affinité ne se
font point sentir. Le soin qu'ils apportent à corriger le
penchant de leur oreille se désigne en général par le mot
de tempérament. On a imaginé plusieurs formules dif-
férentes pour pratiquer ce tempérament : peut-être ar-
rivera-t-on quelque jour à démontrer qu'elles sont le
produit d'une théorie mal faite de la tonalité. Je crois
qu'il est possible de porter jusqu'à l'évidence la preuve
que l'accord des instrumens est soumis à la direction
plus ou moins avancée de la musique dans de certaines
conditions harmoniques, et que cet accord ne peut plus
être le même qu'au commencement du dix -septième
siècle.
D'après ce qui vient d'être dit , on voit que la science
de l'acoustique n'est point faite, et que sur les choses les
plus importantes on n'en est encore qu'aux conjectures,
CHAPITRE XII.
De l'art d'écrire la musique. — Contrepoint — Canons.— > Fugue.
Dans la poésie p comme dans quelques-uns des art»
r.HAP. XII. rONTIVEPOINT. 8l
du dessin, la composition se présente à l'imagination du
poète ou de l'artiste sous la forme d'une idée simple qui
s'exprime comme elle se conçoit, c'est-à-dire sans com-
plications d'élémens. Il n'en est pas de même en musi-
que. Dans cet art, tout est complexe; car composer n'est
pas seulement imaginer des mélodies agréables, ou trou-
ver l'expression vraie des divers sentimens qui nous
agitent, ou faire de belles combinaisons d'harmonie, ou
disposer les voix d'une manière avantageuse, ou inven-
ter de beaux effets d'instrumentation; c'est faire à la fois
tout cela, et beaucoup d'autres choses encore. Dans un
quatuor, dans un chœur, dans une ouverture, dans une
symphonie, chaque voix, chaque instrumenta une mar-
che particulière, et de tous ces mouvemens se forme
l'ensemble de la musique. Que l'on juge d'après cela de
la complication qui embarrasse cette opération de l'es-
prit qu'on nomme composition , et des études qui sont
nécessaires pour vaincre tous les obstacles d'un art si
difficile!
Il fut un temps où l'on ne pouvait pas dire que les
musiciens composaient ; ils arrangeaient des sons. Ce
temps renferme près de trois siècles, c'est-à-dire depuis
la fin du treizième jusque vers 1590. Quelques misé-
rables cantilènes populaires et le plain-chant de l'église
étaient les seules mélodies qu'on connût; il n'était pas
rare de voir le même chant de cette espèce servir de
thème obligea vingt compositions différentes, et s'appli-
quer indifféremment à toute espèce de paroles. Nulles
traces d'expression, d'enthousiasme, de passion ni d'élé-
vation ne se font remarquer dans la multitude de messes,
de motets, de chansons à plusieurs voix et de madrigaux
83 RAPPORTS DES SOMS. 8ECT. II.
qui virent alors le jour : singularité d'autant plus re-r
marquable que c'est précisément dans le même temps que
la fermentation des ima°;inations fut le plus ardente en
idées religieuses, en philosophie, en poésie, en peinture ;
que le génie de l'homme s'est élevé aux plus hautes ré-
glions , et que ses passions se sont développées avec le
plus de violence. Mais liLre de tonte entrave, la pensée
du poète pouvait en un instant créer des beautés sublimes,
comme fit le Dante, sans être ari'ètée par les difficultés
d'un art matériel ; instruit par ce qui était sous ses yeux,
le peintre ne pouvait tarder à s'apercevoir que l'imitar-
tion de la nature devait être le but de ses travaux; aver-
tis par l'excès des maux qui accablaient l'humanité, le
philosophe, le jurisconsulte, le théologien, n'avaient be-
soin que de laisser éclater leur indignation pour parler
avec éloquence de la liberté, des lois et de la religion.
Dans tout cela, comme je l'ai dit, les idées sont simples,
le génie trace la route et la science vient après. En mu-
sique, ce fut le contraire. Il fallut d'abord que les mu-r
siciens s'occupassent du soin de créer les ressources
matérielles de leur art; mais dans la recherche de ses
moyens ils se trompèrent, et crurent marcher vers le
but, tandis qu'ils se préparaient seulement à entrer dans
la route qui devait y conduire.
Leur erreur fut un bien; car il ne falifiit pas moin^
que toute la persévérance de leurs elfortspour débrouil-
ler le chaos des formes variées que peut prendre l'en-
chaînement des sons. Que de combinaisons harmoniques
dans les ouvrages de ces vieux maîtres ! que d'adresse
dans le maniement des difficultés. Habitués que noua
sommes à faire usage des procédés qu'ils nous ont en-
CHAP. XII. CONTREPOINÏ. 88
seiguéâ, nous n'y voyons que des subtilités scolastiques;
mais ceux qui ont tait cette science étaient des hommes
de génie.
Un njot presque barbare, qui n'a plus depuis long-
temps qu'une signification traditionnelle, sert à expri-
mer l'opération d'écrire la musique selon de certaines
lois ; ce mot est celui de contrepoint. Il parait tirer son
origine de ce que, dans quelques notations particulières
du moyen-âge, ou écrivait la musique avec des points,
dont les distances respectives entre plusieurs voix s'ap-
pelaient/^o///^ contre point [punctum contra punctum) ;
par contraction on a dit contrepoint. Les musiciens de
profession appellent celui qui enseigne l'art d'écrire en
musique un professeur de contrepoint'^ les gens du
monde lui donnent le nom de maître de composition;
cette dernière locution est vicieuse, car on n'apprend
point à composer. .Si le contrepoint était autrefois l'art
d'arranger des points contre des points, c'est maintenant
celui de combiner des notes avec des notes. Cette opé-
ration serait certainement longue , fatigante et destruc-
tive de toute inspiration, si le compositeur ne parve-
nait, au moyen d'études bien faites dans la jeunesse, à
se rendre familières toutes ces combinaisons, de telle
sorte qu'elles ne soient pour lui que comme les règles
de la grammaire, auxquelles personne ne pense en écri-
vant ou en parlant. Ce qu'on nomme la science en mu-
sique n'est une science véritable qu'autant qu'elle est
devenue une habitude qui ne distrait point l'imagina-
tion.
De quelque manière que la pensée du compositeur
soit dirigée dans l'arrangement des voix ou des iostru-
menSfiliie peut faire que cinq opérations différentes,
84 RAPPORTS DES SOWS. SECT. II.
qui sont : 1° de donner à chaque partie des notes d'é-
gale durée; 2° de faire la durée des notes d'une voix plus
rapide de moitié que celles d'une autre voix ; 3° de les ré-
duire dans une partie au quart de la valeur de celled'une
autre partie; 4** de lier les notes en syncopes dans une
partie, tandis qu'unesecondemarcheen suivant les temps
de la mesure; 5° de mêler ensemble ces divers genres de
combinaisons, en y joignant les accidens du point et
différentes sortes d'ornemens. La décomposition de ces
diverses combinaisons a fourni cinq espèces de contre-
points ou études, qu'on appelle contrepoints simples de
première, de seconde, de troisième, de quatrième et de
cinquième espèce, des études se font sur un chant choisi
ou donné, et l'on commence ordinairement par écrire
à deux voix, puis à trois, à quatre, à cinq, à six, à sept
et à huit. Plus le nombre de voix augmente , plus les
combinaisons se compliquent; si l'on écrit à trois par-
ties, par exemple, on peut mettre une seule note à une
voix, tandis qu'il y en a deux à la seconde, et quatre à la
troisième; à quatre parties on peut y joindre la syn-
cope, etc. On conçoit que de pareilles études souvent ré-
pétées enseignent à prévoir tous les cas, à vaincre toutes
les difficultés, et cela sans efforts et presque sans y penser.
On se persuade en général qu'un musicien instruit écrit
avec plus de calcul que celui qui n'a jamais fait d'études,
mais c'est une erreur; je crois même que le contraire a
lieu, et qu'à tout prendre, celui qu'on nomme par déri-
sion un musicien sai'ant, quand il est vraiment digne de
ce nom , écrit moins péniblement que celui qui , n'ayant
point fait d'études, peut être à chaque instant arrêté par
des difficultés qu'il n'a point prévues.
Le contrepoint simple, dont il vient d'être parlé, est
CHAP. MI. COKTREPOINT, 85
la base de tonte composition , car ses applications sont
de tous les instans , de toutes les circonstances ; on
ne peut écrire quelques mesures avec élégance sans en
faire usage, et celui qui en parle avec le plus de mépris
en fait comme M. Jourdain faisait de la prose, sans le
savoir. Il n'en est pas de même de ce qu'on nomme con-
trejioint double ; celui-ci est fondé sur de certaines con-
diUons dont l'usage est limité. Un compositeur drama-
tique peut écrire un grand nombre d'opéras sans avoir
occasion de s'en servir; mais dans la musique instrumen-
tale et dans la musique d'église, cette espèce de contre-
jioint est fréquemment employée. En écrivant du con-
trepoint simple, le compositeur n'est occupé que de
l'effet immédiat de l'harmonie; mais dans le contrepoint
double il faut encore qu'il sache ce que celte harmonie
deviendrait si elle était renversée, c'est-à-dire si ce qui
est aux parties supérieures passait à la basse, et récipro-
quement; en sorte que l'opération de son esprit est réel-
lement double.
Lorsque le contrepoint peut être renversé à trois par-
ties différentes, on lui donne le nom de conlrepoiiit tri-
ple^ s'il est susceptible d'être renversé à quatre parties,
il s'appelle contrepoint quadruple.
Le renversement peut s'opérer de plusieurs manières.
S'il consiste dans un simple changement d'octave entre
les parties, c'est-à-dire si ce qui était aux voix graves
passe à l'aigu, et réciproquement , sans changer le nom
des notes, on appelle cette faculté de renversement con-
trepoint double (i l'octave. Si le renversement peut s'o-
pérer à l'octave de la quinte, soit supérieure, soit infé-
rieure, on appelle la composition contrepoint double à
la douzième ; enfio si l'arrangement de l'harmonie est
86 RAPPORTS DES SONS. SECT. H.
tel que le renversement puisse avoir lieu à l'octave de la
tierce supérieure ou inférieure, c'est un contrepoint à la
dixième. Le contrepoint double à l'octave est plus satis-
faisant pour l'oreille que les deux autres; il est aussi d'un
usage plus général.
Lorsqu'il s'agit de développer un sujet, une phrase,
un motif, et de les présenter sous toutes les formes,
comme Haydn et Mozart l'ont fait dans leurs quatuors
et leurs symphonies , Hsendel dans ses oratorios, et
M. Chérubini dans ses belles messes, le contrepoint
double offre des ressources immenses que rien ne pour-
rait remplacer; mais dans la musique dramatique, où
ce développement d'une même idée musicale nuirait à
l'expression et mettrait à la place de la vérité une affec-
tation pédantesque , ce contrepoint serait non-seulement
inutile en beaucoup d'occasions, mais même souvent
nuisible. Le goût et l'expérience doivent guider le com-
positeur à cet égard.
Jusqu'ici l'on a vu que la science ne se composait que
d'objets utiles ou nécessaires; nous allons la considérer
dans SCS abus. Comment qualifier en effet ces bizarres
arrangemens de sons qu'on appelle contrepoints rétro-
grades, c'est-à-dire allant à reculons, contrepoints par
motivement contraire , dans lesquels les voix se meuvent
dans des directions opposées, contrepoints rétrogrades
contraires^ ou à retourner le livre, contrepoints inverses
contraires^ qui sont encore plus compliqués? Tout cela,
je le répète, est l'abus de la science. L'oreille souffre des
entraves que le musicien s'est impesées et dont celui-ci
ne tire aucun profit réel. Ces vaines subtilités n'existent
que pour l'œil. Il ne faut pas croire toutefois que ce
soient ces logogryphes musicaux qui ont donné aux gens
CHAP. XII. CONTREPOINT. 87
du inonde leurs préjugés contre la science _, car il y a
long-temps qu'ils ne font plus partie de la musique
usuelle et qu'ils sont relégués dans la poussière de l'é^
cole. Ils n'ont même jamais eu grand crédit; quelques
maîtres pédans du seizième et du dix-septième siècle
sont les seuls qu'on peut accuser d'avoir essayé de les
substituer à la science véritable. Ce sont ces musiciens
qui avaient imaginé des bizarreries telles que le contre-
point sauté, dans lequel il était défendu de faire a^ir
les voix par mouvemens conjoints; le contrepoint tié,
où l'on s'interdisait toute espèce de saut de tierce, de
quarte, etc.; le contrepoint obstiné, qui n'admettait
qu'un seul trait répété sans cesse par une voix pendant
que les autres cheminaient à l'ordinaire, et mille autres
folies qu'il serait trop long de détailler. Le monde et les
musiciens ont fait justice de celte dégradation d'un art
dont la destination véritable est d'émouvoir et non de
se transformer en énigmes.
Certqinçs formes de convention, qu'on nomme imita-
tions, canons et fugues , sont cependant fort utiles et
ne partagent pas le discrédit de celles dont il vient d'être
parlé. J'oserais presque dire qu'on peut en tirer des effets
plus grands, plus majestueux, plus variés que de toutes
les autres combinaisons de la musique. Les personnes
fiui ont entendu dans l'institution royale de musique re-
ligieuse dirigée par M. Choron les compositions de Pa-
lestrina, de Clari et de Hœndel; celles qui ont assisté
dans la chapelle du roi à l'exécution des belles messes
de M. Chérubiiii l ; celles enfin qui se rappellent les ef-
fets des symphonies de Haydn , de Mozart ou de
f 0 Ces deux étalilisse.nens de mtisiqun ont c-té .nalheureusement
supprimés depuis que la première éditiou de ce livre a paru.
8iî RAPPORTS DES SONS. 5ECT. II.
Beethoven , et qui n'ont point oublié la puissance ma-
gique des ouvertures de la Flûte enchantée et de Don
Jaan^ ces personnes, dis-je, me comprendront lors-
qu'elles sauront que toutes ces créations ont pour bases
ces mêmes formes de convention auxquelles le génie a
su donner de la vie. II est nécessaire que j'explique en
quoi consistent ces formes.
Dans l'analyse de la musique, on rencontre quelque-
fois de certaines phrases dont le caractère est plus pro-
noncé que celui des autres, et qui offrent l'avantage de
pouvoir être répétées plusieurs fois en contribuant à
augmenter l'effet général du morceau. Mais si la même
voix ou le même instrument étaient toujours employés
pour faire celte répétition de phrases, celles-ci devien-
draient monotones et fatigantes; il y a donc de l'avantage
à faire passer la phrase qu'on veut répéter d'une partie
dans une autre, et même, pour plus de variété, à la
transporter tantôt à une quarte , tantôt à une quinte ou
à une octave plus haut ou plus bas. La phrase principale,
ainsi conduite d'une partie dans une autre et variée de
position, prend le nom d'ùnitation, parce que les voix
ou les inslrumens s'imitent mutuellement , et l'on dit
que l'imitation est à la quarte, à la quinte ou à l'oclave,
selon le degré d'élévation où elle se fait. Pour donner
un exemple d'imitation connue de tout le monde, je ci-
terai la scène des ténèbres de l'opéra de Moïse ^ par
Rossini, où la phrase d'accompagnement passe alterna-
tivement d'un instrument à un autre.
L'imitation est libre en ce qu'elle ne se fait pas tou-
jours avec exactitude depuis le commencement d'une
phrase jusqu'à la fin; mais il est des espèces d'imitations
plus rigoureusas, qui non-seulement se poursuivent
^"^P- X»- CANON. S^
dans toute l'étendue d'une phrase , mais qui se conti-
nuent même pendant toute la durée d'un morceau :
celles-li prennent le nom de cano^is. Ce genre de mu-
si'iue était autrefois for» à la mode dans la société; on
les chantait à fable, et presque toujours les paroles en
étaient burlesques ou grivoises. Tout le monde connaît
celui qui commence par ces mois : Frère Jacques, dor-
mez-vous? Ils étaient tous faits sur ce modèle. Piccinni
est le premier qui ait introduit les canons au théâtre,
dans son opéra de la huona FigUoIa; ils sont devenu!
depuis lors d'un «sage fréquent. Rossini et ses imita-
teurs en ont mis dans presque tous les ouvrages; mais
leurs canons diffèrent de celui de Martini, en ce que ces
compositeurs se bornent presque toujours à faire la
phrase principale d'un chant agréable, négligeant tout
ce qui sert à l'accompagnement , au lieu que le canon de
Martini, comme ceux de tous les maîtres qui ont su faire
ce genre de musique, se compose d'autant de phrases
qu'il y a de voix , et celles-ci se servent mutuellement
d'accompagnement, en passant alternativement d'une
partie dans l'autre. Pour écrire des canons de cette es-
pèce, il faut avoir fait de bonnes études musicales qu'on
ne fait plus en Italie. M. Chérubini en a composé beau-
coup qui sont d'un bel effet et d'une grande pureté de
style.
L'imitation des canons peut se faire comme l'imita-
tion libre, en commençant à la quarte, à la quinte, à
l'octave, et même à tous les intervalles; c'est ce que si-
gnifient ces mots qu'on voit souvent écrits sur la mu-
sique : Canon à la quarte, Canon à la quinte infé-
rieure, etc. La voix qui commence le canon se nomme
90 RAPPORTS DES SONS. SECT. II.
Y antécédent} celle qui l'imite prend le nom de consé-
quent.
Quelquefois le canon est double, c'est-à-dire qu'on
rencontre de ces canons où deux parties conimenctiit à
la fois deux chants différens, et sont suivies de deux
autres parties qui les imitent. Il y a aussi des canons où
rimitation se {AÏlpar mouvement contraire, ce qui si-
gnifie que tout ce qui se fait en montant par une voix se
fait en descendant par celle qui imite, et rériproquemenl.
Enfin , dans les anciennes écoles de musique , on écrivait
beaucoup de canons où l'on s'imposait des conditions
bizarres tomme celles des contrepoints dont j'ai parlé,
et même plus singulières encore ; par exemple, il fallait
que toutes les notes blanches de Mantécédent devinssent
noires dans le conséquent , ou qu'on supprimât toutes
les noires poiu* ne laisser que les blanches, etc. Les
maîtres de ces écoles se faisaient entre eux des espèce de
défis et s'envoyaient des canons composés d'après ce»
conditions bizarres , dont ils gardaient le secret. Ils les
écrivaient sur une seule ligne, afin que leurs adversaire»
fussent obligés d'en chercher la solution, et les envelop-
paient à dessein d'autant de diificuitcs qu'ils pouvaient.
C'étaient dçs espèces çl'énig|nes où çbacun s'efforçait de
montrer son adresse et sa perspicacité. Le maître qui
aurait refusé un pareil défi, ou tjui aurait échoué dans
la recherche de la solution du canon, aurait été dés-
honoré.
Mais comme dans toute espèce de combat il y a des
règles qu'on ne peut enfreindre, il y en avait une dans les
défis de canons qui obligeait l'auteur d'un canon énig-
matiqne à l'accompagner d'une devise propre à faciliter
t^IJAP. Xll. CANOW, ^|)
la rechei'cljc de la soUuion. Les livres des vieux maîtres
du seizièiiie et du dix -septième sièclp nous ont transmis
une collection de ces devises, dont voici quelque$i-unes.
Clama ne cesses, ou Olla chirU villa, faisaient con^-
naitre que le conséquent devait imiter toutes les notes
de ranlécédent) en supprimant je? silences.
Ncscit vojC missa reverli, ou Semper contrarias estQ,
ou enlin lufilru/n iinus noctu eccc ut consumiiniir igni, -
indiquaient que le conséquent devait imiter l'antécé-
dent par mouvement rétrograde. Remarquez que, d^H^
celte dernière devise, toutes les lettres prises à rebours
forment les mêmes mots qu'en lisant de gauche a droite.
Solpost vesperas déclinât signifiait qu'à chaque re-
pris.e le canon baissait d'un ton.
Ciççus non judicaL de colore indiquait que les notes
noires de l'antécédent devaient se convertir en blanches
dans le conséquent. Et ainsi des autres.
Toutes ces subtilités n'allaient guère au but de l'art;
mais elles étaient dans le goût de ces temps de pé-
dantisme.
L'imitation peut prendre une forme périodique et par-
fois interrompue pour èlre reprise ensuite ; dans ce cas
on lui donne le nom de fugue, qui vient àe fuga,
fuite, parce que, dans une imitation de cette espèce,
les parties senîblent se fuir dans les reprises du motif.
La fugue, lorsqu'elle est bien faite et lorsqu'elle est ma-
niée par un homme de géqie, comme Jean-Sébastien
Bach, Haendel ou M. Chérubini, est la plus majestueuse,
la plus énergique et la plus harmonieuse de toutes Içs
formes musicales. On ne peut l'employer avec succès
dans la musique dramatique, parce que sa marche très
développée nuirait à'I'intérêt de la scène ; mais dans la
92 RAPPORTS DES SO!?S. SECT. II.
musique instrumentale , et surtout dans la musique d'é-
glise , elle produit des effets admirables , d'un ordre tout
particulier. Le magnifique allcluia du Messie de Haendel,
et les fugues des messes de M. Chérubini , que chacun
a pu entendre à Paris, sont des modèles de ce genre de
beautés. Toutefois, il faut l'avouer, ces beautés sont de
celles qu'on ne peut goûter qu'après s'y être accoutumé,
parce que la complication de leurs élémens demande une
oreille attentive et exercée. On peut lui appliquer ce
vers de Boileau :
C'est avoir profité que de savoir s'y plaire.
La fugue n'a pas toujours eu la forme qu'on lui con-
naît aujourd'hui ; comme toutes les autres parties de l'art
musical, elle s'est perfectionnée lentement. Les diverses
parties qui la composent sont maintenant \e sujet, les con-
tre-sujfts, la réponse, Y ex position , les épisodes ou di-
vertissemens , les reprises modulées , les strettes et la
pédale.
La phrase qui doit être imitée se nomme le sujet.
Cette phrase est ordinairement accompagnée par d'autres
qui forment avec elle un contrepoint double^ c'est-à-
dire une harmonie susceptible d'être renversée de ma-
nière à échanger la position des notes en passant alter-
nativement des voix inférieures aux supérieures, et de
celles-ci aux inférieures; ces phrases d'accompagnement
s'appellent contre-sujets. Lorsque la fugue est écrite
pour quatre voix ou pour quatre parties instrumentales,
il y a ordinairement un contre-sujet; dans ce cas, elle
est susceptible d'être riche d'harmonie et libre dans
ses mouvemens. Quelquefois le compositeur emploie
deux contre-sujets ; on clil alors que la fugue est à trois
cHAP. xn. ruciJK. 9S
sujets. Une fugue semblable est plus difficile à faire;
mais elle est plus sèche, plus scolastique et moins variée.
L'imitation tlu sujet se nomme la réponse. Cette ré-
ponse ne peut pas être en tout semblable au sujet, parce
que si celui-ci module d'un ton quelconque à un ton
analogue, il faut que la réponse ramène l'oreille de ce
ton nouveau dans le ton primitif; car c'est précisément
dans cette sorle de promenade d'un ton dans un autre
que consiste l'intérêt de la fugue. La marche inverse que
l'on suit dans la réponse à l'égard du sujet oblige à un
léger changement d'intervalle qu'on appelle mutation.
Ce qu'il y a de remarquable , c'est qu'on juge de l'ha-
bileté d'un musicien sur l'adresse avec laquelle il saisit
le point de la réponse où il faut faire la mutation dans un
sujet donné; sur cent musiciens instruits à bonne école,
il n'en est pas un qui ne fasse celle mutation au même
endroit , tandis que ceux dont les éludes ont été mal di-
rigées ne sont jamais certains de réussir à la faire comme
il faut C'est comme une espèce de pierre de touche de
leur savoir; aussi quand on dit de l'auteur d'une fugue,
il a manqué la réponse, on ne peut rien ajouter de plus
méprisant.
L'exposition se compose d'un certain nombre de re-
prises du sujet et de la réponse, après lesquelles viennent
les épisodes , qui se composent ordinairement d'imita-
tions formées de fragmens du sujet et du contre-sujet. Ce
sont ces épisodes qui jettent de la variété dans la fugue
et qui servent à moduler. Lorsque le compositeur juge
qu'il s'est assez étendu sur les développemens du sujet ,
il rentre dans le ton primitif, et fait ce qu'on appelle la
stretta ou les strettes, mot qui vient de l'italien stretto
(serré), parce que ces strettes sont des imitations plus
94 RAPPORTS DES SONS. SECT. II,
vives du sujet et de la réponse. Cette pçirtie de la fugue
est la plus brillante , et c'est celle où le conipositeui peut
mettre le plus d'effet. Quand le sujet est favorable, il y
a plusieurs sirettes de plus en plus vives. Elles se ter-
niiuent ordinairement par une pédale où toutes les ri-
chesses de l'harmonie sont réunies.
Rousseau a dit qu'une belle fugue est l'ingrat chef-
d'œuvre d'un bon harmoniste. On n'était point assez
avancé dans la musique en France, du temps de Rous-
seau, pour sentir le prix d'une belle fugue, et cet écri-
vain n'avait jamais eu l'occasion d'en entendre de sem-
blables.
Ce n'est que vers le commencement du dix-huitième
siècle qu'on a fait des fugues dans le système que je viens
d'analyser. .J^usque là on n'avait eu que du contrepoint
yj/^«c', c'est-à-dire du contrepoint à quatre, cinq, six
ou sept parties , dont le sujet était pris dans les antiennes
et les hymnes du plain-chant, avec des imitations et des
canons. Ce genre de compositions fuguées se désigne sous
lenorade contrepointfl//^zy7a/<'j//"/rta,parcequ'un célèbre
copipositeur nommé Palestrina , qui vivait dans le sei-
zième siècle, en a porté le style au plus haut point de per-
fection. Dans ce genre de musique, en apparence si sec et
si peu favorable aux inspirations, Palestrina a su mettre
tant de majesté, un sentiment religieux si calme et si
pur, qu'il semble avoir écrit toutes ces difficultés scien-
tifiques sans peine , uniquement occupé de rendre digne-
ment le sens des textes sacrés. Lorsque ses motifs sonl;
exécutés avec la tradition parfaite d'exécution de la cha-
pelle Sixtine, l'impressiorj qu'ils laissent ne peut être
égalée par aucune autre, spus le rappQrt de la grandeur
des proportions. A l'époque où ce maître écrivait , on
C.BXP. \iJ.
9S
n'avait point encore imaginé de considérer la musique
sous le rapport drartii.lique. De nos jours, ce besoin de
dramatique se porte dans tous les styles, même dans ce-
lui de la musique d'église; il en est résullé de grandes
beautés d'un genre particulier, mais il me semble que,
sous le rapport de la convenance et de l'élévation des
sentimens religieux, le contrepoint fugué de Pàlestrina
est beaucoup plus convenable.
D'après ce qui vient d'être dit, on peut se former
une idée du mécanisme des compositions scientifiques,
et de l'utilité dont elles peuvent être. Si j'ai su nie faire
comprendre, bien des amateurs renonceront à leurs
préjugés contre la science, et avoueront que c'est un
ridicule de vouloir que les musiciens ne sachent pas ce
qu'ils font pour écrire de bonnes choses. Si l'art d'écrire
en musique est quelquefois entaché d'un air de pédan-
tisme, ce n'est pas la science qu'il en faut accuser, mais
des esprits mal organisés qui en ont fait usage. Et re-
marquez que la science n'a jamais cet air qu'entre les
mains de musiciens qui ne sont réellement point savans.
Cette science, pour être réelle, a besoin d'être tournée
en habitude, afin que celui qui la possède ne s'en sou-
vienne plus , ce qui ne peut avoir lieu que lorsqu'elle a
été étudiée dans la jeunesse ; car il est trop tard pour
songer à réformer par la science des habitudes vicieuses ,
quand elles sont contractées. Plus le compositeur dont
les études ont été mal faites a de talent naturel , moins
il peut se corriger quand il n'est plus jeune. S'il s'obstine,
il perd les qualités qu'il tient de la nature, il s'alourdit
et devient pédant.
#6 RAPPORTS DES SONS. SKCT. II.
CHAPITRE XIII.
De l'emploi des voix.
Quel que soit le degré de perfection auquel parvient
un instrumentiste, il sera toujours difficile qu'il exerce
sur des masses populaires une puissance égale à celle
qui est dévolue à la voix humaine, lorsque celle-ci sera
dirigée par un bon sentiment et perfectionnée par de
bonnes études. Il n'est même pas besoin de faire preuve
d'une grande habileté de mécanisme pour faire naître
dans l'ame des impressions vives et fortes par les voix;
l'harmocie même n'est pas nécessaire : l'unisson suffit.
Je citerai à cet égard un des effets les plus élonnans
qu'on puisse entendre : c'est celui de quatre ou cinq
mille enfans des établissemens de charité qui , à Lon-
dres, dans l'église de Saint- Paul, chantent à l'unisson
des cantiques, certain jour de l'année, avec simplicité
et candeur. Les plus grands musiciens, Haydn entre
autres, ont avoué (jue tout ce qu'ils avaient entendu de
plus beau n'approchait pas de l'effet prodigieux qui naît
de la réunion de ces voix enfantines à l'unisson le plus
parfait qu'on puisse imaginer '. Il y a quelque chose
d'attractif, de sympathique dans cet effet, car les per-
sonnes dont la sensibilité est la moins expansive n'ont
pu retenir les larmes qu'il leur arrachait. A cet exemple
de la puissance des voix à l'unisson, on pourrait en
(r) Remarquez que cet unisson devient parfait précisément par
le grand nombre des voix, car il y a enti e toutes ces voix une at-
traction sonore telle que les imperfections individuelles d'intona-
tion disparaÏBsent pour ne former que des sons homogènes.
i H\P. XIH. K>li>L01 DES VOIX. M 4
ajouter quelques-uns tirés des ouvrages dramatiques;
toutefois il est utile de dire que ces effets ne réussissent
qu'avec de grandes masses, el qu'en général l'harmonie
olfre plus de ressources.
Les chœurs à grand nomhre de parties étaient en
usage dès le seizième siècle, particulièrement en Italie';
plus tard, on imagina de diviser ces voix en plusieurs
chœurs de quatre parties chacun, et de placer dans les
grandes églises plusieurs orgues pour accompagner ces
chœurs; mais, outre qu'il est difficile de mettre de l'en-
semble dans l'exécution d'une musique si compliquée ,
l'effet qu'on en obtenait ne répondait presque jamais à
l'idée qu'on s'en était formée. On a fini par s'apercevoir
que des chœurs bien écrits à trois ou quatre parties
réelles ont plus d'énergie, d'exactitude et même d'har-
monie. En général l'usage des chœurs à quatre parties a
prévalu. Les genres de voix qui entrent dans leur com-
position sont le soprano ou dessus, le contralto ou
haute-contre, le tenore, qu'on appelait autrefois en
France la taille , et le basso ou basse.
La partie de contralto était chantée autrefois en Italie
par des castrats, dont le timbre de voix a quelque chose
de pénétrant que rien ne peut remplacer. Cependant la
coutume de mutiler des hommes pour en faire des chan-
teurs ne s'élant jamais établie en France, on y rempla-
çait le contralto par des hautes-contres, genre de voix
qui ne se rencontre guère que dans le Languedoc, et
particulièrement dans les environs de Toulouse. La même
(i) Ils le sont encore aujourd'hui en Espagne, où la musique d'é-
glise est presque toujours à douze ou à seize parties divisées en
trois ou quatre cbœura,
9
98 HAPPORTS DES SO>-S. SECT. II.
cause a fait disparaître presque entièrement de la mu-
sique les castrats et les hautes-contres; cette cause est la
révolution française, qui, nous ayant mis en possession
de l'Italie, a fait abolir la coutume barbare de la cas-
tration, et qui, ayant détruit les maîtrisés de cathédrales,
a privé les habitans du Languedoc de l'instruction musi-
cale qu'ils y recevaient sur les lieux.
De la disparition presque totale de deux espèces de
voix si utiles est résulté un assez grand embarras dr>ns
la disposition des chœurs et dans leur exécutiftir. L'essai
des voix de femme en contralto pour remplacer les cas-
trats ne fut point heureux, parce que ces voix manquent
de timbre dans le bas; et l'emploi des ténors poar tenir
lieu des hautes-contres ne le fut pas davantage, parce
que la musique écrite pour celles-ci se trouvait trop
haute pour le-* ptifres. Cette double difficulté a déterminé
ph»sieu»"s romj)ositPurs à écrire leurs chœurs à quatre
parties pour deux voix de femme, soprano et mezzo
soprano, ténor et basse. Par ce moyen, l'harmonie s'est
trouvée remplie sans sortir des bornes des voix : le ténor
s'est seulement élevé de deux ou trois notes au-dessus
des bornes étroites dans lesquelles il était autrefois ren-
fermé.
Dans le dessein de ne point appauvrir les dessus en les
divisant en deux parties, M. Chérubini a imaginé d'é-
crire dans quelques-nnes de ses messes des chœurs à
trois parties, composés seulement du soprano, du té-
nor et de la basse, et a sn tirer les plus beaux effets de
celte disposition, malgré sa pauvreté apparente; mais il
faut tout le savoir d'un maître tel que lui pour surmon-
ter les difficultés qui s'y rencontrent, et pour produire
de pareils effets avec des moyens si bôriiés.
CHAP. XIII. EMPLOI UtS VOIX, 9U
Rossini et ses imitateurs, n^iis p?ir Ije désir dtj remplir
leur harmonie, ont pris un autre pa^li ^ l'égard de?
chœurs : il consiste à les écrire presque toujours à cinq
ou six parties, savoir, deux basses, deux ténors, pre-
mier et second dessus. Cette abondance apparente n'est
toutefois qu'une véritable stérilité, car les voix iotermé-
tliaires redoublent à chaque instant les mêmes notes et
les mêmes mouvemens. Une pareille méthode n'est ap-
plicable qu'à des chœurs dont l'harmonie sans raou\e-
ment se désigne sous le nom à' harn^onie plaquée : çest,
en effet celle qui est en usage dans celte école. l'A\e
séduit la multitude par son remplissage j mais les oreille^
exercées et délicates sont à chaque instant blessées de
ses imperfections.
L'emploi des voix dans la distribution des rôles de
théâtres se fait toujours en Italie de la manière la plus
convenable pour obtenir le meilleur effet possible dans
les morceaux d'ensemble. Ainsi l'on trouve dans presque
tous les ouvrages deux basses, un ou deux ténores, une
prima donna contralto ou mezzo soprano et un so-
prano^ ce qui, dans la réunion des voix, offre l'en-
semble d'harmonie le plus complet. Il n'en est pas de
même en Fji-ance, où c'est presque toujours le poète qui
décide du choix des acteurs, en raison du physique et
de certaines qualités qui n'ont point de rapport à la
musique. L'habitude que l'on a d'ailleurs de désigner
les emplois par les non^s des acteurs qui s'y sont distin-
gués encombre nos théâtres de voix de même espèce ,
parce que ces emplois ne diffèrent que par des nuances
indifférentes pour la musique. Ainsi l'on a des Elleviou,
des Philippe, des Gavaudan, des Laruette et des Trial,
qui étaient des amoureux ou des comiques, et dont les
i);ILIOTHECA
100 RAPPORTS DES SOKS. SECT. II.
voix étaient des ténors; tous les emplois ont des dou-
bles, en sorte que les ténors abondent dans nos grands
théâtres, tandis qu'on n'y trouve qu'une ou deux basses.
Or, celte dernière espèce de voix étant destinée aux
rôles de pères ou de tuteurs, il en résulte que s'il n'y a
point de personnages de ce genre dans un ouvrage, le
compositeur est obligé d'écrire la musique pour des té-
nors et des dessus. Avec ces moyens bornés on peut
faire de jolis couplets, des romances, des airs et des
duos agréables, mais jamais de bons morceaux d'en-
semble; jamais il n'y a d'harmonie dans les voix. Telle
est l'origine du peu d'effet de la plupart des finales de
nos opéras-comiques, et de l'infériorité où la musique
française se trouve à l'égard de l'italienne sous ce rap-
port. 1,'harmonie vocale est une source d'effets char-
mans, mais on ne peut l'obtenir avec des voix de même
espèce.
On trouve en Italie comme en France une sorte de
voix de basse qu'on désigne sous le nom de bariton ;
elle tient le milieu entre la basse grave et le ténor, et
produit un fort bon effet quand elle est employée dans
son véritable caractère ; mais dans nos théâtres on s'est
obstiné à en faire aussi des ténors. Martin, Solié et
Lays, qui possédaient des baritons, ont beaucoup con-
tribué à en altérer le caractère. On semble revenir main-
tenant à des idées plus saines, et sentir la nécessité de
renfermer les voix dans leurs bornes naturelles.
L'art d'écrire convenablement pour les voix et d'une
manière favorable aux chanteurs est mieux connu des
compositeurs italiens que des Allemands et des Français;
la cause de cette différence réside dans les études de
chant qui font partie de la première éducation descom-
CHAI». XIII. EMPLOI DKS VOIX. 101
positeurs en Italie, tandis que les Français et les Alle-
mands les négligent absolument. Sans parler desavantasies
de la langue italienne, qui sont incontestables, on trouve
je ne sais quoi de facile et de naturel dans la disposition
des phrases, dans le caractère des traits, dans leur en-
chaînement et dans l'analogie du rhylhme poétique
avec le rhythrae musical , qui favorise l'émission de la
voix en même temps que l'articulation du gosier et
de la langue dans le chant italien; avantages qui ne
se rencontrent que bien rarement dans la musique fran-
çaise et plus rarement encore dans l'allemande; car
celle-ci est souvent chargée de modulations qui rendent
les intonations fort difficiles. On attribuait autrefois la
facilité du chant italien au cercle étroit de ses modula-
tions et de ses formes; mais Rossini a démontré par ses
ouvrages que ce cercle peut s'agrandir sans que le chant
perde de ses avantages. Il est vraisemblable que la po-
pularité que sa musique a acquise en France contribuera
à améliorer notre système de chant; mais pour que la
réforme soit complète, le concours des poètes et des musi-
ciens sera nécessaire, comme je le démontrerai ailleurs.
Il est un point sur lequel les compositeurs italiens
portent toute leur attention , pour éviter la fatigue aux
chanteurs; c'est celui du degré d'élévation dans lequel
ils maintiennent les voix. Dans leur musique, chaque
genre de voix parcourt une étendue au moins égale à
celle qu'on lui donne dans la musique française; mais
les traits de grande extension, soit à l'aigu, soit au grave,
ne s'y présentent que de loin en loin, et la voix reste
ordinairement dans son médium , tandis qu'on rencontre
dans les partitions françaises des morceaux qui, sans
parcourir une grande étendue, font éprouver beaucoup
9-
JO^ RAP*t>UTS Lits StfKS. Stî.T. H.
de fatigue au chauteiir, parce qu'ils reppsept longrteinpa
sur des notes peu favorajjles. Les ouvrages de Gpptry
offrent beaucoup d'exeinplps de ce dpfi^Ut? Une cantatr
trice inonf.efa s;ins fatigue aijx son^ les plus lâlevés de sa
voix, lels que ut ou ré, tandis qu'il lui ipv4 très pénible
de chanter jpiig-temps sur ml, fa, iOl.lX eu e^l de u»é»ue
des ffînprs, qui se partagent ep des*» sor^ei^ de ^op ti'è*
distincts, savoir, les ifons dff noifrina et, ifis sop.s fie
tétc , qu'on désigne quelquefois S(/us |p no)n de MotVr
jnixt(;\ Il faut beaucoup d'art au «.lianteur pour aliaihlir
autant que possible le passage des ^pi)s de poitrine k )a
vois lUfxte, et de G^l|^-ci ^un non» dft pojltriiie, tjf ma-
nière à rendre peu sensible la d'Oéi'en«e des timbres :
ce passage a Ijpn dans la plupart de^ voix de ténor entre
ley<^j et le sol, Or, qi\ çQuçoit q|ie sj je compositeur fait
reposer le ciiant sqr cps notes, ji fi^il éprouver «TU ciian-
leur une fatjgue qui nuij, aq déve|)^ppement de ses
înoyens , et qui lui est beaucoiqj pj'.fs péuiblp qup pe |^
serait j'ql^ligatiou de iiuii]ter aux sons ïa^ pius MJpvés de
la voix dp têtp. 1} arrive ^qqv^ot a<'x c|ianîe;qf^ des î^çei-
tleus dont ils sont bieo niojns coupables qqç }e couijjp-
slieur qui les y a exposés.
Il est des intervalles que la vqix ne peut franchir
qu'avpc be^ucQup de peiqe, et que Ip cjhanteur ne fait
entendre qu'avec tip^idilé, parce qu'il est (qrt difficile
de les entonner avep justesse. Ces intervalles sont ceux,
de quinte mineure, de quipte augmentée, dp quarte JH^^r
jeure ou triton, de quarte diminuée et de ^i^çon^^ ^^è~
(l) M. Bennatî a déinonfré, dans ses Recherches sur le mècanùme
de la voix humaine ( Paris, i832, in-8" ), que le nom véritable de ces
sons doit être surlarjmgien», pacce qae le nom indique la manicre
dont iU oe forment,
(.JiJAP. Mil. tiU'iOl uts VOIN. lOS
nicntée; le passage de l'une » l'.TUtre note qui forment
ces intervalles n'est pas naturel aux mouvcmcns du go-
sier, ce qui n^ligç le chanteur à des préparations fiu'il
n'a point le teinps de faire dans les Irajts rapides. Si
quelque circonstance met le compositeur dans la nécs-
sité d'en faire usage, il faut que ce snii au moyen de
notes d'une certaine durée.
Ce ne sont pas seulement les sons que le chanteur ar-
ticule qui peuvent opposer des obstacles à la justesse de
son chant; il suffit que son orejUe soit affectée d'une
iiarmonie étrangère à l'intonation qu'il doit attacjuer,
l)0ur qu'il n'aborde cette intonation qu'avec incertitude.
Par exemple, s'il doit faire entendre ut tt et si l'accprd
qui précède renferme ut ^ dans d'autres parties vocales
ou dans l'accompagnement, le souvenir de cet ul ^ occu-
pera l'oreille du chanteur, de telle sorte qu'il ne prendra
Vut ti qu'avec timidité, et rarement avec justesse. On a
donné le nom (\efaus':es relations à ces successions de
sons qui n'ont point de rapport entre eux. Les compo-
siteurs anciens de l'école italienne les évitaient avec soin;
on les trouve quelquefois dans la musique de l'école aç-r
tuelle.
Le choix des mots influe aussi beaucoup sur l'émission
des sons de la voix , et l'art du compositeur consiste à ne
placer certains traits, çertames notes que sur des syl-
labes qui en facilitent l'exécution. Tel trait, telle note ,
qui coûtent beaucoup de peine au chanteur sur une syl-
labe, lui deviennent faciles sur une autre. Il est d'autant
plus nécessaire d'être en garde sur ce point, lorsqu'on
écrit de la musique sur des paroles françaises, que notre
langue abonde en svllabes sourdes et nasales qui dé-
tournent le son de sa roule naturelle. Par exemple, on
104 RAPPORTS DES SONS. SECT. II.
ne pourra jamais donner des sons de bonne qualité , ni
articuler du gosier d'une manière facile sur les syllabes
on , an , en, ein , if, etc.; il faut donc, lorstjiie ces
sortes de syllabes se rencontrent dans les vers lyriques ,
que le musicien les place dans le médium de la voix
et qu'il évite d'y adapter des traits ou des sons soutenus.
CHAPITRE XIV.
Des instrumens.
La nature a établi des nuances très diverses dans les
différens timbres de voix ; l'art est allé plus loin dans la
fabrication des instrumens, qui, dans l'origine, ont été
construits à l'imitation de ces mêmes voix. Le son,
comme on sait , n'est que la vibration d'un corps sonore
transmise et modifiée par l'air; mais que de variété dans
ces modifications d'un principe si simple! Quelle dif-
férence entre la nature du son d'une cloche et celle des
instrumens à vent, à claviers, à archet, à cordes pin-
cées et à frottement ! Enfin , dans chacune de ces grandes
divisions, que de nuances dans la qualité des sons! Et
cependant, tout n'est pas fait encore, et chaque jour de
nouvelles découvertes, de nouveaux perfectionnemens
ouvrent de nouvelles routes où d'autres découvertes
restent à faire et de nouveaux perfectionnemens à in-
troduire.
Les instrumens les plus anciens dont il soit fait men-
tion dans l'histoire sont les instrumens à cordes pin-
cées , telles que les lyres , les cythares et les harpes. Les
monumens de l'antiquité nous en offrent de nombreux
CHAP. XIV. INSTRtJMETfS. 105
modèles ; mais les formes sont différentes et caractéris-
tiques chez les divers peuples. Ainsi les lyres et les cy-
thares appartiennent particulièrement aux Grecs, aux
habilans de l'Asie mineure et aux Romains; la harpe
semble être le partage des habitans de la haute Asie,
de l'Egypte et du nord de l'Europe.
La fable, qui se mêle en tout à l'histoire dos Grecs ,
attribue à Mercure l'invention de la lyre, qui n'eut
originairement que trois cordes. Le nombre de ces
cordes fut successivement augmenté, mais il ne fut ja-
mais porté au-delà de sept , ce qui en faisait un instru-
ment fort borné, puisqu'il n'avait point de manclie ,
comme nos guitares, pour qu'on pût y modifier les inîo-
nations de ces sept cordes, lesquelles conséquemment
ne pouvaient rendre que sept sons différens. Il résultait
de là qu'un musicien ne pouvait changer de mode sans
changer de lyre. Les variétés de la lyre se désignaient
par les noms de cythare , de chélys , et ùe phonninx.
Ces instrumens se pinçaient autrefois avec les doigts ,
mais plus souvent avec une espèce de crochet qu'on
appelait plectre, ce qui prouve qu'on ne faisait sonner
qu'une corde à la fois.
L'origine de la harpe est environnée d'obscurité. On
la trouve dans l'Inde , en Egypte , sur les monumens les
plus antiques, chez les Hébreux, en Italie, chez un an-
cien peuple nommé Arpe , chez les Scandinaves et dans
l'ancienne Angleterre, sans pouvoir découvrir si tous ces
peuples l'avaient reçu* par communication ou s'ils
l'avaient inventée simultanément. L'usage de la harpe
chez les anciens peuples de l'Inde et de l'Egypte fait
présumer que les Grecs et les Romains en ont eu con-
naissance , et qu'ils s'en servaient ; mais le nom que nous
106 RAPPORTS DES eOKS. »ECT. Il»
lui doqaoos ne $e rencontre chez aucun djes écrivains 4«
l'antiquité. On cfoit généralement que |e trigone ojj la
sambuque n'était que cet instrument. Un savant cooit
mentateur des poésies de Callimaque a prouvé que toiJ^
les instr^mens ù cordes obliques, tels qwe le nutdum , le
harbitos , le magade , Je psalieriutn et la sainluiCjue ,
dont il est parlé dans l'Écriture sainte et dans les écrits
de l'antiquité , étaient du genre de la harpe et d'origine
phénicienne, chaldaïqjie ou syrienne. A l'éj^ard des Ro-
mains, on ç,TQ}^ que n^jS^rument qq'U$ nomment ^iVzAfû/a
n'est autre chose que la harpe , et que ce nom n'.est que
la traduction de hynnor ou hinnar, qui, dans le texte
hébreu de l'Écriture sainte , désigne la harpe de David,
Le nombre de^ cordes de la harpe antique était de treize
dans l'origine; niais ce nonibre s'est succ«ssiv«»neot
augmenté jusqu'à vingt, et mèipe jusqu'à quarante, Cps
cordes étaient faites de boyaux comme celles de nos
harpies, ainsi qij'oq le voit par jjne épigramme griecque
de l'Anthologie. Les p/eupies de l'antiquité pe paraiss/snt
pas avoir eu connaissance de.s cordes d'a'^ier ni de )aj.T
ton ;mais plusieurs auteurs assurent qn' ils faisaient usage,
dans l'origine, des cordes de lin, ce qni e$t di'fi'-ije à
croir.e, c^ (cje pareiJJ^ cordes pe pquvaiept; produire
qu'un son sourd et presque nul.
D'abord la harpe p'eut aucuri mojjen de n7Q4ulatipp ,
parce qu'il était jjnpossible d'y mettre WP assez grai)4
nombrp de cjprdps pour représenter tous les soqs qui
correspon4ent aux notes exprirpécs par les dièses et les
bémols. Ce ne fut (jue vers 1660 qu'on imagina, dans
le Tyrpl, dajpMter des crochets à l'insfr^pient pour
éleyej* l'intopatlOD des cordes lorsqije çe|3 ^^9^\\ i?éçe§r
sairp \ mais l'obligation de se servi}- d.c^ plains pour faire
(^xi. Kiv. iNSTfii!A<ei»s. 107
momoir les cfôchéls était fort gênante ; ttn (utbiér de
bonaWeHh , nArtimé Hochbfucker, inventa^ erf 1720 nne
inécartîrjue qn'ort faisait montoif avec lés pfîed*, et qui
de là prit le nom de pédale. Qtioi(jnc fort imparfaites,
les pédales étaient nfiles; mais la difficulté de mouvoir
les pieds en même tenijis qtie les mains , difficulté à la-
quelle on n'était point habitué, fit rèntoftti'er beaucoup
d'obstacles à l'inventciir. En 17*40, la hàrj^e à pédales
n'était point encore connue en France ; ce fut un musi-
cien allemand, rtommé Stecht, c(ui l'y irttroduîsit. Hoch-
brucker, neveu du l'nthiér, et bon harpiste pour le temps,
en perfectionna l'nsage vers 1770. Mais ce fut Surtout
Naderman, luthier de Paris, qui dorina an mécanisme
de la harpe à crochets toute la perfectiort dont il était
stisceptibïé; Cependant lé principe de té mécanisme était
vicieux et sujet à beaucoujt) d'accidens; c'est ée qui dé-
termina M. Sébastien Erard à le remplacer par un méca-
nisme mieinj conçlr, dalis lequel une fotfrchette pirtçail
la COT'de sans la tiret hors de la lign^ perpenditulaire ,
canirrre cela aVait lieu dans Irt harpe à crochets. JLe stic-
cèâ de son invention le conduisit ensuite a compléter les
améliorations dont la harpe était susceptible, en donnant
à chaque corde la possibilité de fournir trois intonations,
savoir, le k le tf et le i^, ce qu'il fit au moyen d'un
mécanisme à double inom>einent. Il ne par.iît pas qiî'on
puisse rien ajouter à ces harpes; toute la perfection dé-
sirable s'y trouve.
J'ai dit qu'on n'a point connu chez les Grecs les
instrumens à cordes pincées ayant un manche sur lequel
on appuie les cordes en divers endroits pour en modifier
le» intonations; ttrti* tes wi6'n*mén» égyptiens offrent
quelques exemples de cette espèce d'instrumensj ce qui
108 B APPORTS DES SONS. SECT. II.
pourrait faire croire que ce peuple a été assez avancé dans
la musique. L'origine des instrumens à cordes pincées et
à manche parait se trouver dans l'Orient. La wina de
l'Inde, qui consiste dans un corps de bambou attaché
à deux grandes courges , et qui est monté de plusieurs
cordes qu'on appuie sur des chevalets avec les doigts,
parait être le type de ces instrumens ; mais c'est surtout
Veoud ou luth des Arabes , importé en Europe par le»
Maures d'Espagne, qui a servi de modèle à tous les ins-
trumens de cette espèce, car ces instrumens n'en sont
que des variétés plus ou moins compliquées.
Le corps du luth, convexe du côté du dos, et à table
plate , a un manche large garni de dix cases pour poser
les doigts aQu de varier les intonations. Il est monté de
onze cordes, dont neuf sont doubles, trois à l'unisson
et six à l'octave. Les deux premières, ou chanterelles ,
sont simples. Cet instrument est oifûcile à jouer et
demande beaucoup d'étude. Il était autrefois cultivé
avec succès; Bérard , en Allemagne, et deux musiciens
nommés Gaultier, en France , s'y sont rendus célèbres
dans le dix-septième siècle. Du nom de luth on a fait
luthier, qui signifia d'abord un fabricant de lullis, et
qu'on a appliqué depuis à tous les facteurs d'instrumens
à cordes, et même à ceux qui construisent des instru-
mens à vent.
Une imitation du lulh , de proportions beaucoup plu»
considérables, et monté d'un plus grand nombre de
cordes, a été nommé autrefois archiluth. De tous les
instrumens du même genre , celui-là avait le son le plus
volumineux; mais la largeur excessive de son manche,
qui le rendait fort incommode à jouer, l'a fait abau-
donner.
HaP. \IV. INSTBUMENS. 109
Le théorie élait aussi une espèce de luth qui avait
lenx manches accolés parallèlement ; le plus petit de
•es manches élait semblable à celui du luth, et portait
c même nombre de cordes ; mais le second , qui était
)eaucoupplus grand, soutenait les huit dernicves cordes,
|ui servaient pour les basses.
Deux autres sortes de luth ont été fort en usage vers
e commencement du dix-huitième siècle; le premier
le ces instrumens s'appelait la pandore. Il y avait le
néme nombre de cordes qui s'accordaient de la même
nanière; mais au lieu d'être faites de boyau, ces cordes
îtaient de métal. Une autre différence se faisait aussi
emarquer dans sa forme. Au lieu d'être convexe, le dos
le la pandore était plat. Le second instrument du genre
lu lulh était la mamlore. Celui-ci n'avait que quatre
•ordes qui étaient accordées de quinte en quarte. On
[baissait quelquefois la corde la plus haute ou cliante-
elle d'un ton pour obtenir d'autres accords ; cela s'ap-
jelait jouer a corde avalée. Ces deux instrumens ont
essé d'être en usage depuis long-tenqjs.
Ënhn , un petit instrument qui appartient à l'espèce
iu luth se nomme mandoline. Le corps est rond
:omme le lulh, mais le manche a plus de rapport avec
?L ^uilare , dont je parlerai tout à l'heure. La man-
doline se lient de la main gauche, et l'on en lire des
sons par le moyen d'une plume tenue avec l'extrémiié
du pouce et de l'index; mais II faut que l'index soit tou-
jours au-dessous du pouce sans serrer la plume. Les
quatre cordes de cet instrument sont accordées à l'unis-
son de celles du violon. En Italie il y a des mandolines
à trois cordes, d'autres à cinq, dont l'accord varie selon
le caprice des maîtres. Le calascione ou colascione ,
110 RAPPORTS DKS SO>'S SECT. II.
petit instrument avec un très long manche, dont le peu-
ple napolitain se sert, est une espèce particulière de
mandoline qui se joue aussi avec une plume. Il est ordi-
nairement monté de trois cordes, mais quelquefois il
n'en a que deux.
Toute cette famiHe du luth a disparu de la musique
européenne et ne se retrouve plus que dans l'Orient ,
où elle joue un grand rôle dans les concerts. Aux
seizième et dix-septième siècles elle tenait la première
place dans ce qu'on nommait les concerts de chambre
{^viuHca da caméra) y et c'était avec ces mêmes instru-
mens qu'on accompagnait les madrigaux, villanelles,
chansons de tables et autres , qui étaient toujours chan-
tés à plusieurs parties. Tous les concerts que représen-
tent les tableaux du Titien , de Valentin , et des autres
peintres anciens de l'école italienne, offrent de ces réu-
nions d'instrumens à cordes pincées et de chanteurs.
Quoiqu'ils n'eussent qu'une qualité de son peu éclatante,
ces mêmes instrumens faisaient aussi partie des orchestres
dans l'origine de l'opéra. On en voit un exemple dans le
drame musical intitulé : // S. Alessio , composé par
Etienne Landi, en 1634. L'instrumentation de cet ou-
vrage était composée de trois parties distinctes de vio-
lons, de harpes, de luths, de théorbes , de basses de
viole, et de clavecins pour la basse continue. Un pareil
orchestre paraîtrait aujourd'hui bien sourd, mais l'effet
en serait original.
La guitare paraît être originaire d'Espagne, quoi-
qu'on la trouve dans quelques parties de l'Afrique. Elle
est connue en France depuis le onzième siècle; on lui
donnait alors le nom de guiterne. C'est à peu près le seul
des instrumens à cordes pincées et à manche qui soit
CHAP. XIV. INSTRtMENS. 111
resté en usage. On sait que le corps de la guitare est
aplati des deux côtés; elle est montée de six cordes, et
son manche est divisé par cases pour y poser les doigts.
En France, en Allemagne et en Angleterre, l'art de
jouer de la guitare est porté à un très haut point de per-
fection ; dans ces derniers temps, MM. Sor , Aguado,
Hiierta et Carcassi en ont fait un instrument de concert ,
et sont parvenus à y exécuter de la musique très compli-
quée à plusieurs parties; mais en Espagne, pays origi-
naire de cet instrument, il ne sert qu'à accompagner
les boléros, les tirannas et autres airs nationaux, et
ceux qui s'en servent en jouent d'instinct en frappant
les cordes ou les raclant avec le dos de la main.
Toutes les recherches qui ont été faites pour décou-
vrir si les peuples de l'antiquité ont eu connaissance des
instrumens à archet ont été infructueuses, ou plutôt il
est à peu près démontré qu'il leur a été complètement
inconnu. Il est vrai qu'on a cité une statue d'Orphée qui
tient un violon d'une main et un archet de l'autre ; mais
en V regardant de près , on s'est aperçu que le violon et
l'archet sont de l'invention du sculpteur qui a restauré
la statue. On a cité aussi des passages d'Aristophanes ,
de Plutarque, d'Athénée et de Lucien, où l'on préten-
dait trouver la preuve de l'existence de l'archet chez les
Grecs ; mais le moindre examen fait évanouir toutes ces
prétendues preuves.
Nul doute que les instrumens à table d'harmonie, à
manche, et à. cordes élevées sur un chevalet et mises ea
vibration par un archet ne soient originaires de l'Occi-
dent; mais à quelle époque, et dans quelle partie de
l'Europe ont-ils été inventés? voilà ce qu'il n'est pas
facile de décider. On trouve dans le pays de Galles un
118 * RAPPORiS DES SONS. SEtiT. II.
instrument de forme presque carrée, ayant un manche
et des cordes élevées sur un chevalet; cet instrument, qui
parait exister dans le pays de toute antiquité, se nomme
crwlh et se joue avec un archet. On le regarde en An-
gleterre comme le père des diverses espèces de violes et
du violon.
Les monuraens gothiques du moyen-âge, et particu-
lièrement les portails d'église du dixième siècle, sont les
plus anciens où l'on trouve des instrumens de l'espèce
générique qu'on nomme viole; mais on serait encore
dans l'incertitude sur les divisions de ce genre d'instru-
mens, si le manuscrit d'un traité de musique composé
par Jérôme de Moravie , au treizième siècle , n'avait levé
tous les doutes à cet égard. On y voit que la viole se di-
visait en deux sortes d'instrumens: la rubebbe et la viole y
ou vielle'^. La rubebbe n'avait que deux cordes qui s'ac-
cordaient à la quinte ; la vielle en avait cinq dont l'ac-
cord se faisait de différentes manières. Ces instrumens
n'avaient pas précisément la forme de nos violons et de
nos violes; la table d'harmonie ou dessus, et le dos de
l'instrument n'étaient point séparés comme dans ceux-ci
par la partie intermédiaire qu'on nomme éctisses ; le
dos était rond comme celui des mandolines, et la table
était collée sur les bords. Plus tard , ces rubebbes et ces
vielles subirent diverses modifications, et donnèrent
naissance aux différentes violes, savoir : la viole pro-
prement dite, qui se plaçait sur les genoux et qui était
montée de cinq cordes; le pardessus de viole, qui avait
aussi cinq cordes accordées à la quinte de la viole, la
(i) La vielle dont il s'iigit n'avait point de rajjpoit avet: riustiu-
meut qu'on appelle aujourd'hui du ce uoui ; celui-ci s'appelait
ref« dan» l'ancieu langage français.
CHAP. XIV. IWSTRUMEIfS. 118
basse de viole , que les Italiens nommaient viola du
gamba, j)oiir la distinguer des antres qu'on désignait
souvent par le nom de viola da braccio : la basse de
viole était montée tantôt de cinq cordes, tantôt de six ;
le violone , ou grande viole, qui était posé sur un
pied, et qui était monté de sept cordes ; et V accorda ,
autre espèce de î'/o/o.'/e qui était monté de douze cordes,
et même de quinze, dont plusieurs résonnaient à la fois
et faisaient harmonie à chaque coup d'archet. I.e violone
et l'accorda avaient un manche divisé par cases comme
le luth et la guitare; on ne pouvait les jouer qu'en se
tenant debout, à cause de leurs grandes proportions. Il
y eut encore une espèce de viole, qu'on appelait 7h'oI('
d'amour. Ses proportions étaient à peu près celles du
pardessus de viole ; elle était montée de quatre cordes de
boyau attachées comme aux autres instrumens, et de
quatre cordes de laiton qui passaient sous la touche, et
qui, étant accordées à l'unisson avec les cordes de bnyau,
rendaient des sons doux et harmoniques quand l'instru-
ment était joué d'une certaine manière. La viole d'a-
mour est un instrument plus moderne que les autres.
Vers le quinzième siècle, il parait qu'on réduisit en
France la viole à de plus petites proportions pour en
former le violon tel qu'on le connaît aujourd'hui, et
pour borner cet instrument à quatre cordes. Ce qui peut
faire croire que cette réforme se fit en France, c'est que
le violon est indiqué dans les partitions italiennes de la
fin du seizième siècle sous les noms de piccoli violim
alla franccse (petits violons à la française ). I.e violon
est monté de quatre cordes accordées par quintes, uii ,
la, ré , sol. Il sert pour les dessus. La supériorité des
5ons du violoa sur ceux dts violes lui fit bientôt donner
114 RAPPORTS DES SO^■S. SECT. II.
la préférence , et il devint d'un usage général. D'habiles
luthiers se formèrent en France, en Italie et en Alle-
magne , et de leurs ateliers sortirent d'excellens violons
qui sont encore très recherchés j>ar les virtuoses. Parmi
ces luthiers on remarque Nicolas et André Amati, de
Crémone , à la fin du seizième siècle ; Antoine et Jérôme
Amati , fils d'André ; Antoine Stradivari , élève des
Amati , ainsi que Pierre -André Guarneri et Joseph
Guarneri ; Jacques Steiner, tyrolien, également élève
des Amati, et plusieurs autres. Les violons de ces habiles
artistes se vendent depuis cent Louis jusqu'à six mille
francs. On en fait aujourd'hui des imitations qui sont
fort bonnes , et qui même , par leur parfaite ressemblance
avec les instrumens anciens, trompent d'habiles con-
naisseurs. Ces imitations ne coûtent que trois cents
francs.
De toutes les anciennes violes , on n'a conservé que
celle qu'on nomme proprement viole, on alto, ou quinte,
et qu'on a réduite à (juatre cordes, qui sont accordées
une quinte plus bas que les cordes du violon. Cet instru-
ment fait l'office du contralto dans l'orchestre.
La basse de viole, instrument difficile à jouer et dont
les sons étaient un peu sourds, a disparu pour faire
place au violoncelle, moins séduisant peut-être dans
lessolos, mais plus énergi(iue el plus propre aux eflets
d'orchestre. Il fut introduit en France sous le règne de
Louis XIV par un Florentin nommé Jean Batistini;
mais il ne fut déûnitiveinenl substitué à la basse de viole
que vers 1720.
Le violone et V accorda , instrumens dont on se ser-
vait dans les orchestres pour jouer la basse de l'har-
monie , avaient le défaut de toutes les espèces de violes,
(.11 VP. XIV. INSTRUMENS. 1 15
celui de ne produire que des sons sourds et d«'^pourvus
d'énergie. A mesure que la musique eut plus d'éclat, il
fallut songer à donner plus de force à la basse. C'est
pour arriver à ce but qu'on construisit en Italie des con-
trebasses au commencement du dix-huitième siècle. Ces
instrumens , qui sont aujourd'hui le fondement des
orchestres, ne furent adoptés en France qu'avec beau-
coup de difliculté. La première contrebasse fut introduite
a l'Opéra en 1700; ce fut un musicien nommé Monté-
clair qui la jouait; en 17Ô7 , il n'y avait encore qu'un
de ces instrumens dans l'orchestre de ce théâtre, et l'on
ne s'en servait que le vendredi, qui était le beau jour de
ce spectacle. Gossec en fit ajouter une seconde; Plùiidor,
compositeur français, en mit une troisième dans l'or-
chestre pour la première représentation de son opéra
à' Emelinde , et successivement le nombre de ces instru-
mens s'est augmenté jusqu'à huit. La contrebasse est
montée avec de très grosses cordes qui sonnent à l'octave
inférieure des sons du violoncelle. Ces cordes sont au
nombre de trois aux contrebasses françaises , et sont,
accordées par quintes ; les contrebasses allemandes et
italiennes sont montées de quatre cordes, accordées par
quartes; ce dernier système est préférable, eu ce qu'il
rend l'instrument plus facile à jouer.
La troisième espèce d'instrumens à cordes est celle où
les cordes sont mises en vibration par le moyen du cla-
vier ; ces instrumens sont de deux sortes. La première a
pour origine l'imitation des luths et sutres instrumens
dont les cordes étaient pincées par une plume ou par un
morceau d'écaillé de tortue; imitation qui se fit par \\a
mécanisme, et qui avait l'avantage d'offrir les moyens
ji'embrasser une plus grande étendue de sons qu'on qe
116 RAPPORTS DKS SONS. bECT. II.
pouvait le faire sur toutes ces variétés de luiii. Le pre-
mier instrument de cette espèce qu'on fabriqua fut le
clavicithcrium , qui était monté de cordes de boyaux
qu'on mettait en vibration au moyen de morceaux de
buffles poussés par les touches du clavier. La virginale
était aussi un instrument à cordes et à clavier. On a ré-
pété souvent que !e nom de cet instrument était une flat-
terie pour Elisabeth, reine d'Angleterre, qui en jouait
et (jui l'aimait beaucoup ; mais c'est une erreur, car la
virginale existait déjà en lâSO et portait le même nom.
Le clavecin était aussi déjà inventé à cette époque. Cet
instrument, le plus grand de tous ceux de son espèce,
avait à peu près la forme des pianos à queue de nos
jours. Il avait souvent deux claviers qui pouvaient être
joués ensemble et qui faisaient sonner à la fois deux
notes accordées à l'octave pour chaque touche. Les
cordes du clavecin étaient mises en vibration par des
languettes de bois armées d'un morceau de plume ou de
buffle qui étaient soulevées par les touchés du clavier.
Le bout de plume ou de bufile ployait en appuyant sur
la corde et la faisait résonner en s'échappant. ISepinettCy
qui n'était qu'un clavecin carré, était construite sur le
même principe. Il y en avait d'une espèce particulière
dont le son était fort doux , et qu'on appelait à cause de
cela sourdines. Le clavecin , l'épinette et le clavicorde
ont continué d'être en usage jusque vers 1 785.
L'autre genre d'instrumens à clavier avait eu pour
modèles les instrumens orientaux appelés canon et
psalteriiun ou psaltérion. On sait que le psaltérion
dont on se servait beaucoup autrefois était composé
d'une caisse carrée, sur laquelle une table de sapin était
collée. Sur celte table, des cordes de fd de fer ou de
1.J1A.1>. SIV. ïîiSTRUMENS. 117
laiton étaient tendues par des chevilles et accordées de
manière à produire tous les sons de la gamme. Celui
qui jouait de cet inslruuiont avait dans cliaque main une
petite baguette dont il frappait les cordes. Un pareil
instrument était à la fois incommode et borné dans ses
moyens; on songea à le perfectionner, et des recherches
qu'on fit à ce nujet naquit le clai'icorde , qui consistait
en une caisse d'harmonie de forme triangulaire, avec une
table d'harmonie, des chevilles auxquelles étaient atta-
chées des cordes de laiton, et un clavier qui faisait mou-
voir de petites lames de cuivre, lesquelles frappaient les
cordes.
Ce fut ce même instrument qui plus tard donna l'idée
du piano. Le son grêle et quelquefois désagréable du
clavecin , de l'épinctte et même du clavicorde , avait dé-
terminé depuis long -temps quelques constructeurs de
clavecins à chercher les moyens d'en produire de plus
doux; déjà, en 1716, un facteur de Paris, nommé
3Iarius, avait présenté à l'examen de l'Académie des
sciences deux clavecins dans lesquels il avait substitué
des petits marteaux aux languettes pour frapper les
cordes. Deux ans après, Christoluica, Florentin, peifec-
tionna celte invention et fit le premier piano qui a servi
de modèles pour ceux qu'on a faits depuis lors; mais il
paraît que les premiers essais de ce genre lurent reçus
froidement, car ce n'est que vers 1760 que Zumpe, en
Angleterre, et SUbeiuttann , en Allemagne, eurent des
fabriques régulières, et commencèrent à multiplier les
pianos. En 1776, MM. Erar.d frères fabriquèrent les
premiers instrumens de celte espèce qui aient été con-
struits en France , car jusque là on avait été obligé de les
faire venir de Londres. Les premiers pianos qu'on
118 RAPPORTS DES SONS. SECT. II.
construisit à cette époque n'avaient qu'une étendue de
cinq octaves , et les marteaux frappaient sur deux cordes
à l'unisson pour chaque note. Dans la suite l'étendue du
clavier fut successivement portée jusqu'à six octaves et
demie, et le nombre de cordes appartenant à chaque note
s'éleva jusqu'à trois, afin que le son eût plus de corps
et de force. De nombreux changemens ou perfectionne-
mens ont été faits dans la fabrication des pianos. Leur
volume a été augmenté, leur mécanisme a subi mille
transformations, leur qualité de son a cessé d'être mai-
gre et criarde jiour devenir moelleuse et puissante. La
forme même de l'instrument a beaucoup varié; on en a fait
en carré long, qui sont ceux dont l'usnge est le plus com-
mun ; à queue, c'est-à-dire dans la forme des clavecins;
verticaux, dont les cordes sont verticalesou obliques, et
de beaucoup d'autres formes qu'il sérail trop long de dé-
tailler. Les pianos anglais ont eu lo;ig-temps une supé-
riorité incontestable sur les autres, principalement les
pianos à queue; maison en construit maintenant à Paris
qui peuvent lutter avec eux sous le rapport de la qualité
des sons et sous celui du mécaiiisme. Les pianos alle-
mands, et surtout ceux de Vienne, sont aussi fort agréa-
bles, mais leur son est mpins^jubsant. Leur mécanisme
est très léger et facilite l'exécution des difficultés.
De tout ce qui vient d'être dit , il résulte que les ins-
trumens qui ont pour principe des cordes flexibles et so-
nores sont susceptibles de beaucoup de variété, et qu'ils
ont subi des modifications de tout genre, comme tout ce
qui appartient à la musique; les mêmes circonstances se
font remarquer dans les instrumens qui ont pour principe
sonore l'air insufflé. Ces instrumens se divisent en trois
espèces principales : 1 " les flûtes qui résonnent au inoven
CIIAP. XIV. INSTRUMRNS. 119
de l'air introduit dans un tube par un orifice latéral ou
supérieur; 2" les instruinens à anches, dans lesquels les
battemens d'une languette flexible produisent le son ;
3" les instrumens à bocal, oîi les intonations se forment
par les modifications du mouvement et de la position des
lèvres.
Les flûtes d'une forme quelconque se trouvent chez
tous les peuples qui ont cultivé la musique. L'Inde, l'E-
gypte, la Chine, nous en offrent des variétés qui re-
montent aux temps les plus reculés. Les Grecs et les Ro-
mains avaient des flûtes de formes différentes pour la
plupart de leurs cérémonies religieuses, pour les festins,
les mariages, les funérailles, etc. La flûte à plusieurs
tuyaux de diverses longueurs, qu'on voit encore entre
les mains de quelques musiciens ambulans, parait être la
plus ancienne dont les Grecs aient fait usage; ils attri-
buaient son invention à Marsyas. Après celle-là venait
la flûte phrygienne , qui n'avait qu'un seul tuyau percé
de trois trous, et qui se jouait en mettant un des bouts
de l'instrument dans la bouche; la flûte double, compo-
sée de deux tuyaux percés de trous, lesquels se réunis-
saient vers un seul orifice qu'on appelait embouchure , se
tenait des deux mains. C'est le seul instrument de l'an-
tiquité qui puisse faire croire que les Grecs et les R.o-
mains ont connu l'harmonie; car il n'est pas présumable
que les deux tuyaux fussent destinés à jouer à l'unisson.
Quelques critiques ont cru que les deux tuyaux de cette
llùte ne jouaient point ensemble, et qu'ils ne servaient
qu'à passer d'un mode dans un autre. Tout cela est fort
obscur. Les trois espèces de flûtes principales dont il
vient d'être parlé se divisaient eu une infinité d'autres;
120 RAPPORTS DFS SOWS. SECT. II.
les archéologues prétendent que le nonthre âe-< variétés
était de plus de deux cents.
On a souvent agité cette question : si les Grecs et les
Romains ont connu laj^ûte traicrsière , qui est la seule
dont on se sert maintenant dansla musique régulière? Des
monumens antiques récesnmeul découverts ont résolu la
difficulté en montrant sur un bas-relief un génie qui joue
de cette flûte. Cela explique les passages des écrivains de
Tanliquilé, qui établissent en beaucoup d'endroits les
différences de \^Jlûle droite avec Vàjlûie oblique. Cette
flûte oblique n'était que \zjlute traversière.
On ne se servait autrefois en France que de XaJliUe à
bec, c'est-à-diie dont l'embouchure était placée à l'unt*
des extrémilés. Toutes les parties de flûte qui sont indi-
quées dans les opéras du siècle de Louis XIV se jouaien;
avec des flûtes de celle espèce. On l'appelait ausû flûte
dnnce on flûte d' Angleterre. Dans la nouveauté, on
donna le nom ùej/ûîe allemande à la flûte traversière,
parce queson usage se renouvela d'abord en Allemagne;
jusque vers la fin du dix -huitième siècle, elle n'eut qu^
six trous, qui se bouchaient avec les doigts , et un sep-
tième, qui s'ouvrait par le moyen d'une clef. Comme la
plupart des instrumcns à vent, celui-là était imparfait
dans plusieurs noies, qui manquaient de justesse; ces
défauts ont été corrigés par les clefs qu'on y a ajoutées, et
qui se trouvent maintenant au nombre de/i«/V^.
Ces clefs ont d'ailleurs prociu'é la facilité d'exécuter
(i) On a même fabriqué en Allemagne des flûtes qui ont jus-
qu'à dix-sept clefs; elles ont une étendue plus grande que les au-
tres; mais cette multiplicité de clefs est embarrassante, «t la sono*
rite (le l'iDstrument en est altérée.
IMAH. \l\. l>STRt>IF.?rS. 1 1' t
beaucoup de tiaits qui ne pouvaient se taire sur l'an-
cienne flûte.
I-a ttùle est naturellement clans le ton de }é ; ce qui
n'empêche pas qu'elle soit susceptible d'être jouée dans
tous les autres tons. On se sert, dans la musique militaire
et dans la musique d'instrumens à vent qu'on nomme
inii.sique d' hannonle , de fliiies un peu plus petites; cel-
les-ci sont accordées en Jiii b, enja, etc. Une autre es-
pèce de petite fliile qui se nomme octavin on piccolo sert
aussi dans l'orchestre, lorsqu'on veut obtenir des effets
brillans ou lorsqu'on veut (aire des imitations matérielles
telles (pie le siitlementdes vents dans la tenqjèle. Le /jic-
colo , dont les proportions sont de moitié plus petites
que celles de la flûte ordinaire, soiuie une octave plus
haut , ce qui rend la qualité de ses sons criarde et sou-
vent désagréable. Les compositeurs de l'école actuelle
poussent l'emploi de cet instrument jusqu'à l'abus.
La matière des flûtes est ordinairement le buis, l'é—
bène, ou l'érable, etc.; mais tous ces bois ont l'incon-
vénient de s'échauffer par le souifle et de faire varier I in-
tonation de l'instrument. Pour obvier à ce défaut, on a
fait des flûtes de cristal qui étaient à peu près invaria-
bles, mais leur poids, incommode dans l'exécution, et
leur fragilité, les ont fait abandonner. On a trouvé plus
simple et plus utile d'adapter à la flûte ordinaire un
corps à pompe qui se tire lorsque la flûte s'échauffe, et
qui rétablit l'équilibre en allongeant le tube.
De toutes les anciennes fliites à bec, une seule est
restée en usage ; c'est le flageolet^ dont l'effet est agréa-
ble dans les orchestres de bal. Cet instrument était au-
trefois fort défectueux sous le rapport de la justesse, et
fort borné qiinnt à ses movens d'exécution ; maison l'a
122 RAPPORTS DES SONS. SECT. II.
beaucoup perfectionné depuis quelques années , par le
moyen des clefs qu'on y a ajoutées.
De toutes les variétés d'instrument à anche dont
on a fait usage à diverses époques, on u'a conservé que
le hautbois , le cor anglais , la clarinette et le basson.
Le plus ancien de ces instrumens est le hautbois; car
les ménétriers s'en servaient déjà vers la fin du seizième
siècle. A. cette époque c'était un instrument grossier,
d'un son dur et rauque , qui n'avait que huit trous, sans
clefs. Sa longueur totale était de deux pieds. Il resta long-
temps dans un état d'imperfection qui ne permettait de
l'employer dans l'orchestre que pour la musique cham-
pêtre. On ne commença à lui ajouter des clefs que vers
1690. Les Besozzi , qui se rendirent célèbres par leur
talent sur cet instrument, s'attachèrent à le perfection-
ner; un luthier de Paris nomuié De Lusse y ajouta une
clef vers 1780; et quelques autres améliorations faites
dans ces derniers temps l'ont porté à un point de perfec-
tion qui ne laisse rien à désirer. Son étendue est mainte-
nant de plus de deux octaves et demie.
La qualité de son du hautbois se prête merveilleuse-
ment à l'expression quand il est bien joué; ce son a plus
d'accent , plus de variété que celui delà flûte. Quoiqu'il
soit le produit d'un petit instrument, il a beaucoup de
puissance et perce souvent au-dessus des masses d'or-
chestre les plus formidables. Le hautbois était l'instru-
ment à vent aigu dont les compositeurs faisaient le plus
fréquent usaj^e il y a quarante ans. Il convient également
aux effets de l'orchestre et aux solos.
L'instrument auquel on a donné improprement le nom
de cor anglais peut être considéré comme le contralto
du hautbois, dont il est une variété. Ses dimensions sont
CHAP. XIV. INSTRUMENS. 123
beaucoup plus grandes, en sorte que, pour en faciliter le
jeu, on a élénl)Ii{;é de le courber. Le cor anglais sonne
Tine quinte plus bas que le hautbois, à cause de la lon-
gueur de son tube. Le son en est plaintif, et ne convient
qu'aux mouvemens lents, aux romances, etc. C'est un
instrument moderne, et qui était inconnu il y a soixante
ans.
Le ba<!Son, qui appartient aussi à la famille des haut-
bois, et qui en est la basse, a été inventé en r53â_par
un chanoine de Pavie nommé Ajrânifl. Les Italiens l'ap-
\\Q:\\ej\\.fngntto , parce qu'il est formé de plusieurs pièces
de bois réunies en faisceau. Son étendue est de trois oc-
taves et demie environ; sa note la plus grave est le si |>
au-dessous de la portée, à la clef de fa. La forme de cet
instrumenta subi beaucoup de modiflcations, et malgré
les travaux de beaucoup d'artistes et de luthiers habiles,
il est loin d'être arrivé à la perfection. Plusieurs de ses
notes sont fausses, et ne peuvent être corrigées jusqu'à
un certain point que par l'adresse de l'artiste qui en joue.
Presque tous ses sons îjraves sont trop bas , comparés aux
sons élevés. On a multiplié ses clefs jusqu'au nombre de
quinze, et ses moyens d'exécution en sont devenus plus
riches, mais tous ses défauts n'ont pas été corrigés. Plu-
sieurs sons n'ont pas cessé d'être sourds ; d'autres sont res-
tés faux, principalement dans le bas. Il est vraisemblable
qu'on ne vaincra ces défauts qu'en perçant l'instrument
sur de meilleurs principes et dans un système nouveau.
Peut-être faudra-t-il changer sa forme et recourber son
extrémité inférieure, afin de l'échauffer plus promptement.
Les défauts que je viens de signaler dans le basson
sont d'autant plus fâcheux que c'est un instrument in-
dispensable dans la composition des orchestres. Il rem-
I 24 RAPPORTS DES 50MS. SECT. II.
plit à la fois l'office de ténor et de basse des instrumens
à anche, et lie les différentes parties de l'harmonie. Son
emploi est d'un nieillpiir effet dans l'orchestre cpie dans
le snlo. Sfs accens sont tiisles et monotones lorsqu'il
chante seul.
On se sert quelquefois en Allemagne d une contre-
basse de basson qu'on appelle conlrebassnn ; ses propor-
tions sont plus grandes que celles du basson, dont il
sonne l'octave grave. Cet instrument est difficile à jouer,
et exige que l'exécutant soit constitué d'une manière
robuste. Il a le défaut d'articuler lentement les sons.
La clarinette est un instrument beaucoup plus mo-
derne que le hautbois et le basson; car elle n'a été in-
ventée qu'en 1690, par Jean-Christophe Deuner^ luthier
de Xaremberg. Elle n'eut d'abord qu'une seule clef, et
ne fut que dun usage fort rare, à cause de ses nombreuses
imperfections; mais la beauté de ses sons détermina
quelques artistes à chercher des améliorations dans sa
construction. Insensiblement , le nombre de ses clefs s'ac-
crut jusqu'à cinq; mais arrivée à ce point, elle n'olfrait
encore que peu de ressources. Cependant elle resta dans
cet état depuis 1770 jusqu'en 1787, où une sixième clef
lui fut ajoutée. Enfin, le nombre de ces clefs s'est suc-
cessivement élevé jusqu'à quatorze; mais tous les dé-
fauts n'ont pas disparu. Outre les difficultés d'exécution,
qui existent encore, plusieurs notes manquent de jus-
tesse et de sonorité. Il en est de la clarinette comme du
basson; il faudrait que son tube fût percé d'après un
meilleur système acoustique. La multiplicité des clefs
dans les instrumens à vent corrige les défauts de justesse,
mais nuit à la sonorité.
Les difficultés d'exécution sont telles sur la clarinette,
CHAP. XIV. INSTRUMEMS. 120
que le même instrument ne peut pas servir pour jouer
dans tous les lon.i. Les tons clans les(juels il y a beauroiip
de dièses exigent une ciarinelte parlicidière; il en est de
même des tons dans lesquels il y a beaucoup de bémols.
Pour comprendre ceci, il faut savoir que plus le tube
d'un instrument à vent est court , plus ses intona-
tions sont élevées, et que ces intonations s'abaissent à
mesure qu'on allonge le tube. Il résulte de là que si
l'on allonge une clarinette de telle sorte que son ul soit
à l'unisson de si^, il suffira de faire l'instrument de
celte dimension pour que l'instrumentiste produise l'effet
du ton de si l> en jouant en ul ; il sera donc dispensé
d'exécuter les notes qui offrent des difficultés à vaincte
dans l'exécution. Si l'on continue à allonger la clarinette
de manière que son ;// sonne comme la , l'effet que pro-
duira l'artiste en jouant eu ut sera comme s'il jouait eu
la , avec trois dièses à la clef. Telle est l'explication de
ces mots dont les musiciens se servent : clarinette enut ,
claiinette en si L, clarinette en la.
La clarinette n'a été introduite dans les orchestres
français qu'en-iXiX^ elle est devenue depuis lors d'un
usage général, non-seulement dans les orchestres ordi-
naires, mais dans les orchestres militaires, où elle joue
la partie principale. Le son de cet instrument est volu-
mineux, plein, moelleux, et d'une qualité qui ne res-
semble à celle d'aucun autre instrument, particulière-
ment dans la partie grave, qu'on nomme le chalumeau.
On se sert dans la musique militaire, pour les solos, de
clarinettes en mi t» ou en fa, dont le son aigu et per-
çant convient à ce genre de musique, destinée à être
entendue en plein air. Il y a aussi de très grandes cla-
rinettes qui sonnent une quinte plus bas que les clari-
ir.
126 RAPPORTS DES SONS. SECT. II.
nettes en ut ^ et qui ont une qualité de son concentrée;
on les nomme cors de bassette. Ce sont les contraltos
de la clarinette. On a construit depuis peu une clari-
nette-basse qui n'offre pas plus de ditficultés dans l'exé-
cution que la clarinette ordinaire et qui complète cette
famille d'inslrumens.
Dans la troisième espèce d'instrumens à vent, qui se
jouent avec une embouchure ouverte ou bocal, sont
compris les cors, les diverses sortes de trompettes , les
trombones , le serpent et les ophicléides.
Les airs de chasse ne furent joués dans les premiers
opéras que par des cornets faits eu corne et percés de
trous : on appelait ces instrumens grossiers des cornets
a bouquin. Le cor de chasse fut inventé en France eu
1680, mais il ne servit d'abord que pour l'exercice dont
il porte le nom. Transporté en Allemagne, il y fut per-
fectionné, et fut appliqué à l'usage de la musique. Eu
1730, on commença à s'en servir en France, mais il ne
fut introduit dans l'orchestre de l'Opéra qu'en 1757.
Les sons qu'on en pouvait tirer alors étaient en petit
nombre, mais en 1760, un Allemand nommé Hamvl
découvrit qu'il était possible de lui en (aire prodiï* ■•
d'autres en bouchant en partie avec la main la [«••!•
tion ouverte de l'instrument qu'on nomme le pavil-
lon. Cette découverte ouvrit la carrière à d'habiles ar-
tistes qui se livrèrent à l'étude du cor. Un autre Alle-
mand, qui se nommait Haltenhofi , compléta les amélio-
rations de cet instrument en y ajoutant une pompe à
coulisse, au moyen de laquelle on en règle la justesse
lorsque les intonations s'élèvent par la chaleur.
Il est dans la nature du cor de ne donner que de cer-
tsijnçs noies d'un son pur, franc et ouvert ; les autres
i;HAP. XIV. INSTUUMENS. 127
sons ne s'obtiennent que par l'arlifice de la main et sont
beaucoup plus sourds; on les nomme sons bouchés.
Mais couAiMc il est des tons où ces sons bouchés sont
piécisément ceux qu'on enlendiait le plus souvent, ce
qui serait sans effet, on a imaj^iné d'ajouter au cor des
tubes d'allonge dont les fonctions sont de changer le
degré d'élévation de rinstrumenl, comme on change
celui de la clarinette en allongeant son tube. Par exemple,
si l'on suppose que le cor est en iit, on conçoit qu'en
y ajoutant un tube qui baisse ut d'un ton , le cor sera en
si 1?, et tous les sons ouverts du ton iVut seront des sons
ouverts du ton de si \>. Si le tube ajouté est plus grand,
il mettra le ton du cor en la ; s'il est plus grand encore,
il pourra le mettre en sul, et ainsi de suite. Il résulte de
là que l'artiste joue toujours en ut, et que le tube ajouté
opère la transposition nécessaire.
Ce système est ingénieux, et satisferait à tous les be-
soins, si la musique ne modulait pas, ou si, en modu-
lant , elle laissait le temps de changer le tube transposi-
teur; mais il n'en est pas toujours ainsi. Le compositeur
se voit donc obligé de supprimer les parties de cors dans
de certains endroits où elles produiraient de très bons
effets, ou de les écrire en sons bouchés qui ne rendent
point sa pensée. Frappé de cet inconvénient du cor or-
dinaire, un musicien allemand nommé .Sto/zf/ imagina
d'y ajouter des pistons par lesquels il mettait à volonté
la colonne d'air du cor en communication avec celle de
tubes additionnels, et par-lù obtenait des sons ouverts à
toutes les notes. Cette amélioration, perfectionnée par
plusieurs facteurs d'instrumens de cuivre, sera quelque
jour d'une grande ressource, mais n'est pas encore généra-
lement adoptée. 11 faut avouer d'ailleurs que le défaut des
12S 1;AP10RT5 Dt3 6U>.i. SEtT. II.
pistons est de détériorer la belle qualité de son du cor.
Le cor est un instrument précieux par la variété de
ses effets : tour à tour énergi(|iie ou suave, il se prête
également bien à l'expression des passions violentes et à
celle des sentimens tendres. Aussi bien placé dans les
solos que dans les remplissages d'orchestre, il se modifie
de mille manières, mais il faut le bien connaître pour en
tirer tout le parti possible. L'art d'écrire les parties du cor
avec les développcmens de toutes ses ressources est un
art tout nouveau que Rossini a porté à sa perfection.
La trompette est le soprano du cor, car elle sonne
un octave plus haut que cet instrument. Plus bornée
que le cor, puisqu'elle n'a pas les sons bouchés avec la
main , elle n'est pas moins utile dans beaucoup de cir-
constances. Sa qualité de son est plus argentine, plus
claire, plus pénétrante, et les effets d'un de ces instru-
mens ne peuvent être remplacés par ceux de l'autre.
Leur réunion offre quelquefois des combinaisons fort
heureuses. On ne connaissait point autrefois d'autre
trompette que la trompette de cavalerie; pendant bien
des années, il n'y en eut pas d'autres à l'Opéra. Enfin
des trompettes perfectionnées furent apportées d'Alle-
magne par les deux frères Braun, vers 1770, et depuis
lors, la trompette de cavalerie a disparu des orchestres.
Au commencement de ce siècle, on fit des trompettes
semi-circulaires, qui n'étaient à proprement parler que
de petits cors; mais le son de ces trompettes n'avait pas
l'éclat des autres. On est revenu à l'ancien modèle depuis
quelques années.
Les intonations de la trompette se modifient pour les
changemens de tons de la même manière que dans le
cor; c'est-à-dire, par le moyen de tubes additionnel:..
CHAP. XIV. INSTRUMEIfS. î2!)
Divers essais avaient été faits il y a environ vingt-
cinq ans, pour aiigmenlerles ressources delà trompette,
niais sans (pie le résiillal eùl répondu à ce qu'on en at-
tendait; enfin un Anj^lais a imaginé d'y ajouter des clefs
comme aux clarinettes ou hautbois, et ses reclierches
pour y parvenir ont été couronnées parle succès; mais
il s'est trouvé qu'il avait créé un nouvel instrument donl
la qualité de son a peu de rapport avec le son de la trom-
pette ordinaire; c'était une acquisition, mais non un
perfectionnement. L'inventeur désigna sa trompette à
clefs sous le nom de Hotn-bugle. Cet instrument, sur le-
quel ou peut exécuter des chants comme sur la clari-
nette ou le hautbois , est maintenant employé avec succès
dans la musique militaire, et même dans l'opéia. Pios-
sini en a fait un heureux essai dans le premier acte de
Semiramide.
Le principe de la construction des trompettes à clefs
une fois découvert, on en a conclu qu'on pouvait l'appli-
quer à des instrumens de même nature, mais de plus
grandes dimensions, qui seraient l'alto, le ténor et la
basse de cette même trompette. On a donné à celte fa-
mille nouvelle d'instrumens de cuivre le nom CCophi-
cléide. L'étendue de ces divers instrumens est à peu
près celle des voix auxquelles ils corresj'ondent. Leur
réunion produit d'heureux eifets, qui ne peuvent être
remplacés par les autres instiumens de cuivre qui n'ont
pas les mêmes moyens de modulai ion.
Il est un autre genre d'instrumens qu'on nomme trom-
bones, et qui est aussi susceptible de donner toutes les
notes en sons ouverts, par le moyen d'une coulisse que
l'exécutant fait mouvoir pour allonger ou raccourcir le
tube sonore. Cet instrument se divise en trois voix , sa-
130 RAPPORTS DES SO>'S. SECT. II.
voir : l'alto, le ténor et la basse. Le son des trombones
est plus sec, plus dur et plus énergique que celui des
opliicléides; mais ces instru-nens ont des effets qui leur
sont propres, et qui ne ressemblent à ceux d'aucun autre.
Toute cette grande division d'instrumens de cuivre se
met en vibration par le moyen d'une emboucbure coni-
que et concave contre laquelle on applique les lèvres
plus ou moins rapprochées, en soufflant et en marquant
la note par un coup de lani;ne. Cet exercice est fort dif-
ficile, et exige autant de dispositions naturelles que de
travail. Il est des personnes dont la conformation des
lèvres est un obstacle insurmontable pour bien jouer du
cor ou de la trompette.
Aux instrumens à embouchure ou hornf. qui viennent
d'être nommés, il faut ajouter le serpent, instrument
barbare qui fatigue l'oreille dans nos églises, mais qui
n'est pas aussi désagréable dans la musique militaire,
lorsqu'il est uni aux autres basses telles que le trombone
et l'ophicléide. Cet instrument fut inventé en 1590 par
un chanoine d'Auxerre, nommé Edme Guillaume. Sa
construction est vicieuse de tous points; beaucoup de
ses intonations sont fau.sses, et à côté de notes très fortes
on en rencontre qui sont très faibles. L'expulsion du ser-
pent des églises sera un pas de fait vers le bon goût en
musique.
Le plus considérable , le plus majestueux , le plus
riche en effets divers et le plus beau des instrumens à I
vent est l'orgue. On a dit que c'est plutôt une machine
qu'un instrument; cela peut être vrai; mais de quelque
manière qu'on le qualifie, il n'est pas moins certain que
c'est une des plus belles inventions de l'esprit humain, j
Quelques passages des écrivains de l'antiquité, et no- '
riIAP. XIV. INSTRUMENS. l3l
tammentde Vitruve, ont mis à lalorture les commenta-
teurs qui voulaient éclaircir ce que ces écrivains enten-
daient par Voi^ite hydraulique , dont ils attribuent
l'invention à Ctésibius, niutliéiuaticien d'Alexandrie,
qui a vécu du temps de Ptolémée-Évergète. Tout ce
qu'en ont dit ces commentateurs n'a servi qu'à prouver
qu'ils étaient complètement ignorans de l'objet en ques-
tion. Vraisemblablement on ne saura jamais quel était
le mécanisme de cet orgue hydraulique. Quant à l'orgue
pneumatique , c'est-à-dire celui qui est mis en vibration
par l'action de l'air, qu'on dit aussi avoir été connu des
anciens, sans autre garantie que quelques passages ob-
scurs de poètes, il est vraisemblable que ce n'était que
l'instrument rustique des Ecossais et des Auvergnats,
que nous nommons cornemuse.
L'orgue le plus ancien dont il est fait mention dans
l'histoire est celui que l'empereur Conslantin-Copronyme
envoya en 757 à Pépin, père de Charlemagne. Ce fut le
premier qui parut en France. On le plaça dans l'église
de Saint-Corneille, à Compiègne. Cet orgue était exces-
sivement petit et portatif comme celui qui fut construit
par un Arabe nommé Giafar, et qui fut envoyé à Char-
lemagne par le kalife de Bagdad.
Grégoire, prêtre vénitien, parait avoir été le premier
qui ait essayé de construire des orgues en Europe. En
826, il fut chargé par Louis-le-Pieux d'en faire un pour
l'église d'Aix-la-Chapelle. Les progrès furent peu ra-
pides dans l'art de construire cet instrument; il paraît
même que ce ne fut qu'au quatorzième siècle que cet
art commença à se développer. François Landino, sur-
nommé Francesco d'egli organi, à cause de son habi-
leté sur cet instrument, y fit beaucoup d'amélioratiosa
132 RAPPORTS DES SONS. SECT. li.
vers 1350. En 1470, un Allemand nommé Bernard,
organiste à Venise, inventa les pédales.
L'orgue se compose de plusieurs suites de tuyaux,
dont les uns sont en bois ou en mélange d'etain et de
plomb, qu'on nomme étoffe , à bouche ouverte comme
les flûtes à bec, et dont les autres portent à leur em-
!)OUchure des languettes de cuivre ou anches. Ces tuyaux
sont placés debout, du côté de leur embouchure, dans
des trous qui sont pratiqués à la partie supérieure de cer-
taines caisses de bois qu'on appelle sommiers.De ^vands
soufflets distribuent le vent dans des conduits qui com-
muniquent avec l'intérieur des sommiers. A chaque ran-
gée de tuyaux correspond une réglette de bois qui est
aussi percée de trous à des distances égales aux trous du
sommier. Cette réglette s'appelle registre. Le registre est
disposé de manière à couler facilement lorsqu'il est tiré
ou poussé par l'organiste. Si le registre est poussé, ses
trous ne correspondent point à ceux du sommier dans
lesquels les tuyaux sont placés, et dès lors le vent ne peut
entrer dans les tuyaux; mais s'il est tiré, ces trous se
trouvent dans une correspondance parfaite, et l'air peut
pénétrer dans les tuyaux. Alors, quand l'organiste pose
le doigt sur une touche, celle-ci , en s'enfonçant, tire une
baguette qui ouvre une soupape correspondante au trou
du registre, le vent y pénètre, et le tuyau de la note rend
le son qui appartient à cette note. Si plusieurs registres
sont tirés, tous les tuyaux de ces registres qui corres-
pondent à la note touchée résonnent à la fois. Si le tuyau
est une flûte, le son est produit par la colonne d'air qui
vibre dans le tuyau; si c'est un jeu d'anche, le son ré-
sulte des battemens de la languette qui brise l'air contre
les parois du bec du tuyau.
«MAP. XIV. INSTRUMEWS. 1 3 :i
Outre la variété de sons qui provient de cette diver-
sité de principes dans leur production , l'orgue en a
d'autres qui sont le résultat des différentes formes et
dimensions des tuyaux. Par exemple, si le tujau de la
note qui correspond à Vutde la clefdeya au-dessous de
la portée est un jeu de flûte de huit pieds de hauteur, on
lui donne le nom débute ouverte; ce jeu est dans toute
l'étendue du clavier à l'unisson des différentes voix que
rfnferme cette étendue, savoir la basse, le ténor, le
contralto et le soprano le plus aigu. La hauteur des
tuyaux décroît à mesure que les notes s'élèvent. Si le
plus grand tuyau n'a que deux pieds, et s'il est de l'es-
pùce des flûtes, on lui donne le nom depresiant, qui
veut dire excellent, parce que c'est le jeu qui résonne
avec le plus de netteté et qui perd le moins son accord.
Ce jeu est plus élevé d'une octave que la flûte ouverte.
.Si le tuyau n'a qu'un pied hauteur à la note la plus
grave, il résonne à deux octaves au-dessus de la flûte
ouverte : on nomme flageolet l'ensemble de ses tuyaux.
Ln jeu de flûte qui a huit pieds dans son ut grave ré-
sonne à une octave plus bas que la flûte de quatre. Il y
a des jeux de seize et même de trente- deux pieds. Lors^
que l'espace dont on peut disposer n'est pas assez vaste
pour qu'on puisse faire usage de tuyaux d'aussi grandes
dimensions, on se sert d'un moyen ingénieux qui con-
siste à boucher l'extrémité du tuyau opposée à l'embou-
chure; la colonne d'air sonore ne trouvant point d'is-
sue est forcée de redescendre pour sortir par une
petite ouvertuie qu'on nomme /« lumière, et de cette
manière, parcourant deux fois la hauteur du tuyau,
elle sonne une octave plus grave que si elle était sortie
jmnaédiatement par le haut de ce même tuyau. Cette
134 RAPPORTS DES SOBS. SECT. II.
espèce de jeu de flûte se norame bourdon. Si c'est un
jeu de quatre pieds bouchés, on l'appelle bourdon de
huit; s'il est de huit pieds, c'est un bourdon de seize.
Parmi les jeux de flûte, il y en a en étoffe, dont le tuyau
se termine par un tuyau plus petit qu'on nomme che-
minée ; d'autres ont la forme de deux cônes renversés
et superposés; chacun de ces jeux a une qualité de son
particulière, etc. Les jeux d'anches, qu'on appelle trom-
pettes, clairons y bombardes , voiv humaine, se pré-
sentent sous la forme d'un cône renversé ouvert. Les
tuyaux du chromorne, autre jeu d'anche, sont des cy-
lindres allongés. La fantaisie des facteurs d'orgues peut
varier ces sortes de jeux à volonté.
On trouve dans l'orgue une sorte de jeu dont l'idée
est très siti|;ulière, et dont l'effet est un mystère. Ce jeu,
qu'on dési{!;ne en f^onéral sous le nom de /eu de muta-
tion, se divise en fourniture ou mixture et en cymbale.
Chacun de ces jeux se compose de quatre , ou cinq ou
six , et même dix tuyaux pour chaque note. Ces tuyaux,
de petite dimension et d'un son aigu, sont accordés en
tierce, quinte ou quarte, octave, double tierce, etc.,
en sorte que chaque note fait entendre un accord parfait
j)lusieurs fois redoublé. Il en résulte que l'organiste ne
peut faire plusieurs notes de suite sans donner lieu à dos
suites de tierces majeures , de quintes et d'octaves. Mais
ce n'est pas tout: si l'organiste exécute des accords, cha-
cune des notes qui entrent dans sa composition fait
entendre autant d'accords parfaits redoublés ou tri-
plés, en sorte qu'il semblerait qu'il doit en résulter
une cacophonie épouvantable; mais, par une sorte de
magie, lorsfjne ces jeux sont unis à toutes les espèces
de jeux de flûte, de deux, quatre , huit , seize et trente-
THAP. XIV. INSTmiMKNS. f35
deux pieds, ouverts ou bouchés, il résulte de ce mé-
lange, qu'on nomme plein jeu , l'ensemble le plus
majestueux et le plus étonnant qu'on puisse entendre.
Aucune autre combinaison de sons ou d'instrumens ne
peut en donner l'idée.
Outre les solos de flûte, de hautbois, de clarinette,
de basson et de trompette qu'on peut exécuter sur l'or-
},Mie, le jeu de cet instrument peut se diviser en trois
{grands elfets, qui sont : 1° la réunion de tous les jeux
de Uûte, qu'on appelle fonds d'orgue; 2" la réunion
de tous les jeux d'anches , qui prend les noms de grand
'eu ou grand chœur, et le plein jeu.
Un grand orgue a ordinairement quatre ou cinq cla-
viers pour les mains, et un clavier aux pieds, qu'on
nomme clavier de pédale. Le premier clavier appartient
à un petit orgue séparé, dont le nom est positif. Le
second clavier est ordinairement celui du grand orgue ;
il peut se réunir au premier pour jouer les deux orgues
ensemble. On y ajoute quelquefois un troisième clavier,
t|u'on nomme clavier de bombarde , sur lequel on joue
les jeux d'anches les plus forts. Le quatrième clavier sert
pour les solos ; on l'appelle clavier de récit. Le cin-
t|uième clavier est destiné à produire des effets A' écho.
Quant au clavier des pédales , il sert à l'organiste pour
jouer la basse, lorsqu'il veut disposer de sa main gauche
])Our exécuter des parties intermédiaires.
On a long-temps regretté que l'orgue, qui est pourvu
de tant de moyens de variété et d'une si grande puis-
sance d'effet, ne fût ^o'mi expressif , c'est-à-dire qu'on
ne pût lui donner les moyens d'augmenter et de dimi-
nuer graduellement l'intensité du son. Quelques facteurs
anglais et allemands avaient d'abord imaginé de faire
186 RAPPORTS DES SOÎfS. SECT. !l.
ouvrir ou fermer par une pédale des trapes qui permet-
taient au son de se produire avec force, ou qui le con-
centraient dans l'intérieur de l'inslrument; mais ce genre
d'expression avait l'inconvénient de ressembler à un long
bâillement. Avant la révolution , M. Sébastien Erard
entreprit de construire un piano organisé, dans lequel
les sons étaient expressifs par la pression du doigt sur
la touche ; il avait réussi complètement lorsque les trou-
bles de la révolution se manifestèrent, et les choses en
demeurèrent là. Depuis lors, un amateur instruit,
nommé M. Grenié, a imaginé de rendre l'orgue expressif
au moyen d'une pédale dont la pression plus ou moiiis
forte donne aux sons une intensité plus ou moins grande.
Il a prouvé la réalité de sa découverte d'abord dans
quelipies petites orgues, ensuite dans des instrumens
de plus grande dimension à l'École royale de musique
et à la Congrégation du Sacré-Cœur, à Paris. L'effet de
ces orgues est de la plus grande beauté. M. £rard a mis
le comble à la perfection de l'orgue en réunissant, dans
un instrument qu'il a construit pour la chapelle du roi,
le genre de l'expression de la pédale sur les deux claviers
du grand orgue, à l'expression par la pression du doigt
sur un troisième clavier. Dans cet état, l'orgue est vrai-
ment l'instrument le plus beau, le plus majestueux, le
plus puissant qui existe, et, l'on peut le dire, un des
chefs-d'œuvre de l'esprit humain.
Les plus célèbres facteurs d'orgue ont été, en France ,
les Dallery, Clicquot, MM. Erard et Gren'é; en Italie,
Azzolino (lella Cinjci de Sienne, les Tronci dePistoie,
Eugène Biroldi, Jean-Baptiste Ramaî, les Serassi de
Bergame, un prêtre dalmate nommé Nanchini, et son
élève Callido ; en Allemagne, Jean Scheibe, Godefroi
CHAP. XIV. INSTRtJMENa. 137
Silberinann, Jean-Jac(|iies et INIichel Wagner, Sclirœt-
ker, Ernest Maix , Galder, J.-G. Taasclier et l'al)l)é
Vogler. Ce dernier s'est fait remarquer par un système
de siinpUficdllon dont l'objet est de faire disparaître de
l'orgue lesyVuo: dt mutation.
Les orgues à cylindre, dont les musiciens ambidans
font usage, et la serinette, sont construites d'après les
mêmes principes que le grand orgue. Un cylindre piqué
avec des pointes de cuivre tient lieu d'organiste et fait
mouvoir les touches. L'art de piquer ou de noter ces
cylindres se nomme la tonotecknie.
Dans ces derniers temps, on s'est servi de l'action de
l'air comprimé pour établir un nouvau système d'instru-
niens. Ce système consiste à faire agir le vent par un
orifice très petit, qui s'ouvre graduellement sur des lames
métalliques très minces, qui entrent en vibration dès
que l'air les frappe, et qui sonnent des sons graduelle-
ment plus forts, à mesure que l'action du vent se déve-
loppe. Ces instrnmens ont été inventés en Allemagne
depuis peu d'années. Leurs variétés se nomment j'hys-
hannonica , éoli/ie , éolodion , etc.; ils n'ont point
assez de force pour produire de l'elfet dans de grandes
salles; mais ils sont fort agréables dans un salon.
M. Dielz, facteur de pianos à Paris, a perfectionné ce
système de résonnance dans un instrument qu'il a nommé
aéréphone.
I/effet de ces instrumens est analogue à celui qui se
manifeste dans l'harmonica , dont le principe est le
frottement. Un Irlandais, nommé Puckeridge, paraît
avoir été le premier qui imagina de réunir un certain
nombre de verres à boire, de les accorder en variant
leur intonation par la quantité d'eau qa'il y mettait, et
138 RAPPORTS DES SO^S. SRCT. 11.
d'en tirer des sons en frottant leur bord avec les doigts
légèrement mouillés. Le célèbre docteur Franklin fit
quelques perfeclionnemens à cette découverte, princi-
palement en indiquant des procédés pour fabriquer des
verres propres à fournir des sons purs. L'instrument
ciinsi perfectionné fut apporté en Europe, et deux sfturs
anglaises, mesdemoiselles Davis, le mirent en réputation
par leur talent à le jouer. Plus tard , on a perfectionné
l'harmonica en le construisant avec des cloches de verre
traversées par un axe en fer, et mises en mouvement
j)ar une roue. Un clavier d'une espèce particulière fai-
sait avancer sur le bord des cloches un tampon en peau
qui remplaçait le doigt, et de cette manière on put exé-
cuter des pièces régulières sur l'harmonica et y faire
des accords. L'effet vitreux de cet instrument est nui-
sible à la santé parce qu'il ébranle le système nerveuK
avec trop de force.
Divers instrumens à frottement ont été faits à l'imita-
tion de l'harmonica ; le plus célèbre est le clavicylindre
que le physicien Chladui a fait entendre à Paris vers
1806. Bien que l'inventeur de cet instrument ait gardé
le secret de sa construction, on a cru découvrir qu'il
consistait en une suite de cylindres métalliques sur les-
quels une manivelle faisait agir des archets qui étaient
mis en contact avec eux par Je moyen des touches d'un
clavier.
Il me reste à parler de la dernière et de la moins im-
portante espèce d'instrumens, ceux de percussion. Ces
instrumens sont ceux dont les formes et l'usage laissent
le moins de doute dans les représentations que nous en
offrent les monumens de l'antiquité. Ils se divisent en
deux classes principales : les sonores et le» bnijans-
CHAP. XIV. INSTRIIMENS. 139
Parmi les inslruniens de percussion sonores , qui ont été
en usage en Egypte, en Grèce et à Rome, il faut ranger
lo sistre, qui consistait en une espèce d'ellipse en
cuivre, traversée par des tringles sonores qu'on frappait
avec une baguette pour les faire résonner; les cymbales,
formées de deux plateaux sonores qu'on frappait l'un
contre l'autre, et les crotales ou grelots. Un seul instru-
ment bruyant se fait remarquer dans les peintures et les
bas-reliefs antiques; c'est le tambour à grelots que nous
appelons tambour de basque. On en jouait comme de
nos jours, soit en le frappant avec la main, soit eu l'a-
gitant.
La musique moderne admet un grand nombre d'in-
slrumens de percussion. Parmi les sonores on remarque
le triangle, qui tire son nom de sa forme, et qui con-
siste en une verge d'acier qu'on frappe avec un mor-
( tau de fer. Ce petit instrument, qui est originaire de
l'Orient, produit un assez bon effet dans certains mor-
«eaux, lorsqu'on n'en prodigue pas l'usage. Il s'unit
bien, dans la musique militaire, aux autres instrumens
de percussion sonore. Le chapeau-chinois ou crotale et
les cymbales viennent aussi de l'Orient où l'on fabrique
les meilleurs. Ces instrumens ne servaient autrefois que
dans la musi(pie militaire; mais Rossini et ses imitateurs
en ont transporté l'usage, ou plutôt l'abus, au théâtre,
en l'unissant au plus bruyant des instrumens de percus-
sion, cette grosse cfm\?e étourdissante, qui n'est bien
placée qu'à la tête d'une troupe de soldats dont elle guide
les pas.
Au nombre des instrumens bruyans de percussion se
trouvent les timbales, qui se distinguent des autres par
la possibilité de varier leurs intonations et de pouvoir
140 RAPPORTS DES SOMS. ÎECT. II.
s'accorder. Les timbales consistent en deux bassins de
cuivre recouverts d'une peau tendue par un cercle de
fer qui se serre par des vis Cliai|ue timbale rend un son
différent, et ces sons se modifient en serrant ou desser-
rant le cercle de fer. Les deux timbales s'accordent ordi-
nairement à la quinte ou la quarte l'une de l'autre ; mais
il est des cas où cet ordre est interverti. Bien que l'into-
nation de la timbale ne soit pas d'une perception facile,
cependant une oreille attentive parvient à la discerner
quand l'inslrument est bien accordé.
Deux autres instrumens du même genre s'emploient
dans la musique militaire; l'im est le tambour propre-
ment dit , qui n'est que bruyant, et qui sert à marquer
le rbylhme de la marche des soldats; l'autre est la caisse
roulante, quiconsistedans une caisse plus allongée que le
tambour, et qui rend un son plus grave et moins fort. Ou
les introduit quelquefois dans les orchestres ordinaires.
Dans la récapitulation que je viens de faire des instrti-
mens de musique, j'ai négligé quelques variétés qui
n'ont eu qu'une courte existence, ou qu'on ne peut
considérer que comme des instrumens de fantaisie.
Toutefois je ne dois point passer sous silence ceux de
cette espèce qui ont eu pour objet de résoudre deux
problèmes difficiles, en enrichissant la musique d'un
système d'effets qui n'existait pas, et en fournissant aux
compositeurs les moyens de conserver leurs improvisa-
tions. Je veux parler des instrumens qui réunissent le
clavier à l'archet, et Aes pianos mélographes.
Il y a plus d'un siècle qu'on a essayé pour la première
fois de donner aux instrumens à clavier la faculté de
soutenir les sons à l'exemple des instrumens à archet.
Vers 1717, un facteur de clavecins de Paris essaya de
fUAP. XIV. 1NSTRCMEN3. 141
résoudre la difficulté dans un instrument qu'il nomma
clavecin vielle, parce qu'il ressemblait à une vielle
posée sur une table, parce qu'au lieu d'archet il y avait
mis une roue, et parce que le son était semblable à celui
d'une vielle. Cet instrument fut approuvé par l'Acadé-
mie des sciences. Il parait qu'il se passa beaucoup de
temps avant qu'on songeât à pei Teclionner l'invenlion de
ce fact'?ur. Vers la fin du dix-huilième siècle, un méca-
nicien de Milan, nommé Getii ^ fit entendre dans plu-
sieurs concerts et dans des églises un instrument qui
avait la forme d'nn clavecin , et qui était monté de cordes
de boyau, lesquelles étaient jouées par des archets de
crin, selon ce qui est rapporté dans les journaux italiens
de ce temps.
Lors de l'exposition des pincbiits de l'industrie qui
eut lieu aux Invalides, en 1806, Schimdt, fadeur de
pianos, à Paris, présenta un instrument qui avait la
forme d'une longue caisse carrée; à l'une de ses extré-
mités se trouvait un clavier avec un mécpnisme de piano
ordinaire; de l'autre côté était un antre clavier destiné
à faire mouvoir de petits archets cylindriques qui faisaient
résonner des cordes de boyau. Les sons qu'on obtenait
par ce mécanisme avaient l'inconvénient de ressembler
à ceux de la vielle.
Divers autres essais ont été tentés et ont plus ou moins
réussi. Un mécanicien, nommé Pouleau, a fait, vers 1810,
un orchcslrino qui était du même genre que Tinslru-
ment de Schmidt; les sons en étaient assez agréables,
mais faibles. L'abbé Grégoire Trentin a construit ensuite
un violin-cetnbalo qui était de la même espèce. Il en est
de même d'un sostfnante- piano- furie inventé par
M. Mott , de Brighton , et du plectro-euphone que
142 RAPPORTS nF.S SOXS. SECT. II.
MM. Gama, de Nantes, ont fait entendre à Paris en
1828. Enfin , M. Dietz est arrivé aussi près que possible
de la solution du problème, dans son polyplectron ,
qu'il a fait connaître dans le même temps. Les prin-
cipes d'après lesquels M. Dietz a construit son instru-
ment sont plus conformes à ce que l'observalion enseigne
sur la résonnance des instrumens à archet, que ceux qui
avaient été adoptés par ses prédécesseurs. Le polyplec-
tron est susceptible de produire une foule d'effets fort
jolis; mais ce sont ceux d'un instrument particulier plu-
tôt que des imitations du violon et des alitres instrumens
à archet.
L'idée de construire un clavecin ou piano au moyen
duquel on conserverait les improvisations d'un compo-
siteur a beaucoup occupé plusieurs mécaniciens. Un An-
glais, nommé Creed , fut le premier qui écrivit, en
1747, un mémoire où il prétendait démontrer la possi-
bilité de cette invention. On assure que le moine Engra-
melle exécuta, vers 1770, une machine de cette espèce
dont le succès fut complet ; mais les explications qu'on
en donne sont fort obscures , et de nature à faire naître
des doutes sur la vérité des faits. D'un autre côté, Jean-
Frédéric Ungher, conseiller de justiceà Brunswick, a ré-
clamé, dans un ouvrage allemand imprimé en 1774, l'in-
vention de la machine attribuée à Creed, et a prouvé qu'il
avait exécnté antérieurement un instrument semblable.
Au mois d'août 1827 , M. Carreyre a fait, devant
l'Académie des beaux-arts de l'Institut, l'essai d'un
piano mélogniphe qui consistait en un mouvement
d'horloge, lequel faisait dérouler d'un cylindre sur un
autre une lame mince de plomb où s'imprimaient, par
l'action des touches du piano , certains signes particu-
i:HAP. XIV. INSTRUMENS. 143
liers qui pouvaient se traduire en notation ordinaire, au
moyen d'une table explicative. Après l'expérience , la
bande fut enlevée pour en opérer la traduction, et une
commission fut nommée pour en faire le rapport ; mais
ce rapport n'ayant point été fait, il est vraisemblable que
la traduction ne s'en est point trouvée exacte. Dans le
même temps , M. Baudouin a lu à l'Académie un mé-
moire, accompagné de dessins, sur un autre piano mé-
lographe ; mais l'Institut n'a point prononcé sur le mé-
rite de cette découverte. Il résulte de tout cela que le
problème reste encore à résoudre.
Dans l'exposé rapide qui vient d'être fait de ce qui
concerne les instrumens et leur fabrication , on a pu re-
marquer la prodigieuse fécondité d'imagination qui s'est
nianifeslée dans toutes ces inventions. Les choses en
resteront-elles où elles sont à cet égard? Cela est incer-
tain. L'imagination des honuDes aimera toujours à s exer-
cer ; mais on peut mettre en doute que l'on produise
désormais des effets beaucoup meilleurs que ceux qu'on
obtient maintenant. Tous les hommes de mérite qui se
soutoccuj;és de la construction des instrumens ont voulu
les perfectionner par une aj)plicalion plus sévère des
principes de la théorie ; mais dans la pratiqiie les résul-
tats n'ont point été ce qu'ils espéraient, soit par des
causes inconnues, soit qu'on n'eût pas pris les précau-
tions nécessaires. La théorie s'est trouvée quelquefoi;; en
opposition avec la pratique. Par exemple, les principes
de la résonnance des surfaces \ibrantes démontrent {[ue
les violons, violes et basses sont construits sur des don-
nées arbitraires plutôt que fondées en raison ; mais dans
l'application de ces principes on n'est point parvenu à
faire des instrumens aussi bons que ceux qu'on fabrique
144 RAPPORTS DES SONS. 8ECT. IX.
par des règles dont l'origine est inconnue. Même chose
se remarque dans les pianos. Le temps portera la lu-
mière dans ces faits mystérieux.
CHAPITRE XV.
De rinstrumcntation.
\J Instrumentation est l'art d'employer les instrumens
de la manière la pins utile pour en tirer le meilleur effet
possible dans la musique. Cet art peut s'apprendre avec
le temps et l'expérience des effets ; mais il exv^c ,
comme toutes les autres pariies de la musique, une dis-
position particulière, un certain pressentiment du résul-
tat des combinaisons. Le compositeur, en disposant
l'ensemble de sa musique , en faisant en un mot ce qu'on
appelle lu ])n>l'iii(in, c'esl-à-diie la réunion de toutes les
parties qui doivent concoiu'ir à l'effet, ne pourrait écrire
qu'au liasard , s'il n'avait présens à la pensée la qualité
des sons de chaque instiumenl, leur accent et les effets
qui résultent de leurs combinaisons partielles ou totales.
Quelquefois, il est vrai, on obtient des résultats qu'on
n'avait point prévus; dans d'autres circonstances, ceux
qu'on s'était efforcéde produire ne réussissent pas; mais,
en général, un compositeur habile parvient au but qu'il
se propose dans l'arrangement de l'instrumentation.
Ce n'est pas une des moindres merveilles de la mu-
sique que celte faculté de prévoir parla seule force des
facultés intellectuelles l'effet d'un orchestre dont on dis-
pose riustrumenlalioû, comme si cet orchestre jouait
ClIA!'. W. INSTRUMKNTATIO^. J 45
réc'IleiiK iil j>ciu!ai!î; le travail de l'arliste ; c'est cc|!en-
cUnt ce qui a lieu chaque fois qu'un compositeur ima-
gine un morceau quelconque; car le chant, les voix qui
l'accompagnent, l'harmonie, l'effet des instrumens, tout
enfin se conçoit d'un seul jet, toutes les fois qu'un musi-
cien est né véritablement digne de ce nom. Quant à ceux
f|ui n'imaginent les choses que successivement, on peut
assurer que leurs conceptions musicales resteront tou-
jours dans des bornes étroites. Tel était Grélry, qui avait
le génie de l'expression dramatique et celui des chants
heureux, mais qui , n'éitantqiie médiocrement musicien,
ne pouvait se former tout d'un coup lidée de l'ensemble
d'un morceau. Mais Haydn, Mozart, Beethoven, Ché-
rubini, Rossini, n'ont jamais été forcés d'y revenir à
deux fois pour comprendre les effets qu'ils voulaient
produire.
11 est un genre de connaissances matérielles qui n'est
pas moins utile au compositeur; c'est celui des moyens
propres de chaque instrument, des traits qu'ils peuvent
exécuter et de ceux qui leur offriraient des difficultés in-
surmontables. Ce genre de connaissances peut facilement
s'acquérir ou par la lecluie des partitions, ou par les le-
çons d'un maître, ou, mieux encore , par la culture de
quelques-uns de ces instrumens. Le soin que prend le
compotileur de ne mettre dans chaque partie que ce que
les artistes peuvent jouer avec facilité tourne au profit
de l'exécution de sa musique.
Rarement on fait usage d'un seul instrument de chaque
espèce dans l'instrumentation; presque toujours les cla-
rinettes, les hautbois, les bassons, les cors, les tiom-
peties s'emploient deux à deux ; cependant on écrit
quelquefois uue partie de flûte seule, lorsqu'elle doit
i3
146 RAPPORTS DES SONS. SECT. H.
s'unir à des parties de clarinettes ou de hautbois. Quel-
quefois aussi les cors sont au nombre de quatre ; mais
dans ce cas on les dispose de telle sorte que deux jouent
dans un Ion et deux dans un autre. Dans les morceaux
qui demandent de l'éclat et de la force, on ajoute deux
parties de trompettes aux parties de cors. Le trombone
ne s'emploie point seul ; il est ordinaire de réunir le
trombone allô, le ténor, et la basse. Le système général
des instrumens à vent, dans une ouverture ou dans un
autre grand morceau dramatique, se compose de deux
flûtes, deux hautbois, deux clarinettes, deux ou quatre
cors, deux trompettes, trois trombones et deux bassons.
On y joint presque toujours deux timbales.
Deux parties de violons, une ou deux parties de violes,
violoncelle et contrebasse composent l'ensemble des in-
strumens à cordes d'une symphonie, et de toute espèce
de musique à grand orchestre. Le nombre d'instrumen-
tistes qu'on réunit à chaque partie de violon est indéter-
miné. Il peut être de huit, dix , douze et même de vingt.
Les parties de violes, de violoncelle et de contrebasse
sont jouées aussi par un certain nondjre d'artistes.
Mozart, Haydn et quelques autres compositeurs dis-
tingués variaient le système d'instrumentation de leurs
morceaux ; quelquefois ils n'employaient que les hautbois
et les cors comme instrumens à vent; d'autres fois les
ilûteset les clarinettes remplaçaient les hautbois; d'autres
fois enfin toutes les richesses de l'orchestre étaient réu-
nies. D'heureuses oppositions d'effets résultaient de cette
variété. Dans la nouvelle école, tous les moyens sont
toujours réunis poiu' obtenir le plus grand effet po>sible,
quel que soit le caractère du morceau. Chaque partie
de la composition, prise isolément, est plus brillante,
CHAP. XV. INSTRUMENTATION. 147
grâce à cette profusion de moyens ; mais une certaine
monotonie est la suite inévitable de l'uniformité de ce
sysième. ÎMaiheuieiiseiiient il en est de ce défaut comme
de celui de l'abus du bruit; il a fini par devenir un mal
nécessaire. Accoutumée à ce luxe d'instrumentation ,
l'oreille, bien ((u'elle en soit souvent fatiguée, trouve
faible ce qui en est dépourvu. Rien n'est funeste comme
de fatiguer les sens par des sensations fortes trop prolon-
gées ou trop répétées; le palais d'un gourmand, lors-
qu'il est usé par les sauces relevées et par le piment,
trouve que les mets simples et naturels manquent de
saveur.
Les ïiccompagnemens d'une musique bien faite ne se
bornent point à soutenir le chant par une harmonie pla-
quée; souvent on y remarque un ou deux dessins qui
semblent au premier abord devoir contrarier la mélodie
principale, mais qui , dans la réalité, concoui-ent à for-
mer avec elle un tout plus ou moins satisfaisant. Ces sys-
tèmes d'acconqiagnemens figurés peuvent importuner
une oreille peu e\ercée, mais ils complètent le plaisir
des musiciens instruits et des amateurs éclairés. Quel-
quefois ils deviennent la partie la plus importante du
morceau , et les voix leur servent en quelque sorte d'ac-
lompagncmenl. Cela se remarque dans ces airs bouffes
italiens qu'on désigne par ces mots : note et parole , et
dans les chœurs. Dans ces circonstances , il est nécessaire
que les formes de l'accompagnement soient gracieuses et
chantantes, ou sémillantes et vives. Les œuvres de
Mozart, de Cimarosa et de Paisiello renferment des
choses charmantes en ce genre. Parmi les ouvrages fran-
«^ais, les opéras de M. Boieldieu sont remplis deces sortes
d'accompagnemens spirituels.
148 noppoivTs DES sons. stCT. ir.
Les instrumens de cuivre, tels que les cors, trom-
pettes, trombones et ophicléides ont accjuis une impor-
tance qu'ils n'avaient pas autrefois ; Jléhiil et ^l. Chéru-
Ijiiii ont commencé à la lui dormer; Rossini a achevé
1,1 ré\o!ution, et a enrichi l'emploi de ces instrumens
d'une foide de combinaisons et d'effets qui étaient incon-
nus avant qu'il écrivît. Employés avec sobriété, ces
mêmes effets augmenteront beaucoup la puissance de la
iuusi({ue dans certaines circonstances où l'emploi des
moyens ordinaires est insuflisant.
Après avoir jeté un coup d'œil sur les riches combi-
naisons d'effets dont on a poussé l'usage jusqu'à l'abus
depuis quelques années, une question se présente; la
voici: Abstraction faite des créations du génie, quefera-
t-on maintenant pour continuer la marche progressive des
effets dont on est devenu si avide? Espère-t-on en obte-
nir de nouveaux en augmentant le bruit? Non, car la
sensation du bruit est celle qui est le plus promptement
suivie de fatigue. D'un autre côté, il y aurait peut-être
beaucoup de difficulté à ramener le public à la simpli-
cité d'instrumentation de Cimarosa et de Paisiello, car
il faudrait bien plus de génie pour faire adopter cette
marche rétrograde qu'il n'en a fallu pour nous conduire
au point où nous sommes. Que reste-t-il donc à faire ? Il
me semble qu'on peut l'indiquer; voici mes idées à cet
égard.
La variété, comme on sait, est ce qu'on désire le plus
dans les arts et ce qui est le plus rare. Le moyen d'obte-
nir le meilleur effet de l'orchestre serait donc d'établir
cette variélé dans l'instrumentation , au lieu d'adopter un
système uniforme, comme on l'a toujours fait. Tous los
opéras du dix-septième siècle ont pour accompagnement
CHAi». XV. INSTRUMENTATION, 149
des violons, des violes, et des basses de viole. An com-
mencement du dix-luiitième siècle, l'accompagnement
consisteen violons, basses, flûtes ou haulbois; successi-
vement les ressources augmentent, mais les formes de
rinstrumentation sont toujours les mêmes tant qu'un sys-
tème est en vigueur. De nos joins il est rare de trouver
un air, un duo, une romance même qui n'aientpour ac-
compagnement deux parties de violons, altos, violoncelles,
contrebasses, flûtes, hautbois, clarinettes, cors, trom-
pettes, bassons, timbales, etc. Quelle source de mono-
tonie qu'une semblable obstination à reproduire sans
cesse les mêmes sons, les mêmes accens, les mêmes as-
sociations! Pourquoi, avec des moyens bien plus déve-
loppés, ne donnerait-on pas à chaque morceau une phy-
sionomie particulière, par la différence de sonorité des
instrumens? On aurait des airs, des duos, des romances,
des quatuors même accompagnés par des instrumens à
corde de différentes espèces , ou même d'une seule , telle
que des violoncelles ou des violons et altos; on pourrait
diviser le système des instrumens à cordes en deux: une
partie serait à sons soutenus, une autre à sons pinces.
On pourrait également employer des flûtes ou des clari-
nettes seules; des hautbois avec des cors anglais et des
bassons ; des associations d'instrumens de cuivre, tels
que les trompettes ordinaires, trompettes à clefs, cors,
ophicléides et trombones. Cette variété que je propose
pourrait être établie non -seulement dans des morceaux
différens, mais même dans le cours d'une scène. La réu-
nion de toutes les ressources aurait lieu dans les situa-
tions fortes, dans \esjina[c\', etc. , et l'on en tirerait d'au-
tant plus d'effet que cette réunion serait plus rare.
Tout cela, dira-l-on, n'est pas le génie. Je le sais; il
15b BAPPORTS DES soirs. SECT. II.
est heureux qu'il en soit ainsi; car s'il) avait des procédés
pour faire de bonne musique, l'art serait peu digne de
fixer l'attention des esprits élevés. Mais pourquoi n'of-
frirait-on pas à ce génie, sans lequel on ne peut rien,
toutes les ressources que l'expérience ou la réflexion font
trouver? Pourquoi borner son domaine? Réduisez Mo-
zart et Rossini au quatuor de Pergolèse, ils trouveront
de beaux chanta, une harmonie élégante, mais ils ne
pourront produire les effets si énergiques que vous ad-
mirez dans leurs compositions. Comment supposer l'exis-
tence de Don Juan et de Moïse avec violons, altos
et basses? N'en doutons pas, les beaux effets qu'on y
trouve sont le résultat d'un orchestre formidable et du
génie qui a su le mettre en œuvre. Les grands maîtres
des anciennes écoles ont aussi inventé des effets d'un au-
tre genre avec des moyens bien plus simples; et voilà
pourquoi je demande qu'on ne renonce point à ces
moyens. Je désire f|u'on use de tout ; le reste est l'affaire
du talent. Tout le monde a remarqué qu'au théâtre les
morceaux sans accompagnement plaisent toujours quand
ils sont bien chantés; cet effet est une conséipience na-
turelle d'un changement de moyens indépendant même
de la nianière plus ou moins heureuse dont le composi-
teur les emploie. Qu'on essaie du mêiTie prorédé à l'é-
gard de l'instrumentation , et l'on verra disparaître cette
fatigue qui se fait toujours sentir vers la fin de la repré-
sentation d'un opéra de longue durée, quelque beau
qu'il soit.
CHAP. XVI. MUSIQUE SACK^E. 151
CHAPITRE XVI.
De la forme des pièces dans la inusi(jue vocale et dans l'instru-
mentale.
La musique, soit vocale, soif instrumentale, à diver-
'ies destinations q'ii établissent des différences naturel-
les dans la forme des morceaux. Quatre grandes di-
visions s'établissent d'abord dans la musique vocale* ce
sont: 1" la musique sacrée, 2^ la musique dramatique;
3" la musique de chambre; 4° les airs populaires. La
musique instrumentale ne se divise qu'en deux espèces
principales: 1" la musique d'orchestre; 2° la musique
de chambie. Ces genres caractéristiques se subdivisent
eux-mêmes en plusieurs classes particulières.
Dans la musiqiie d'église, on trouve les messes entiè-
res, les vêpres, les motets. Magnificat^ Te Deuin et
litanies. Les messes sont de Jeux espèces, ou brèves ou
solennelles. On appelle messe brève celle où les paroles
ne sont presque ])oint répétées. Dans celles-là, le Ky-
rie, le Gloria, le Credo, le Sanctiis et Yrigjius Dei ,
qui sont les divisions principales, ne forment qu'un
morceau de peu de durée. Il n'en est pas de même des
messes solennelles ; celles-ci ont quelquefois un déve-
loppement si considérable que leur exécution dure deux
ou trois heures. Dans ces messes, le Kyiie, le Gloria,
le Credo se divisent en plusieurs morceaux, qui sont in-
diqués par la nature des paroles. Par exemple , après
l'introduction du Credo, qui est ordinairement pom-
peuse, viennent Ylncarnatiis est, qui doit former un
inorceau religieux, le Crucijixus, dont le caractère est
152 RAPPORTS DES SO^•S. SECT. ir.
sombre ou inélancoIi'|ue, et le Resurre.vk, qui annonce
la joie. Les messes solennelles de Pcrgolèse, de Léo, de
Durante et de Jomelll ' n'avaient pas autant de dévelop-
pement qu'on leur en donne aujourd'hui. La raison de
cette différence consiste dans la manière de concevoir la
musique d'église. Les anciens maîtres croyaient que ce
genre de musique devait être pompeux ou religieux;
mais ils ne pensaient point à le rendre dramatique. Nos
compositeurs modernes, Mozart et M. Chérubini, par
exemple, ont conçu la musique d'église d'une manière
toute dramatique, ce qui exige bien plus de dé\elop])e-
ment, puisqu'il faut peindre une foule d'oppositions in-
diquées par les paroles sacrées.
Lorsque les églises étaient frétjuentées par la haute so-
ciété pendant presque toute la durée des fêtes et diman-
ches, comme cela se pratiquai! il y a environ cinquante
ans, on écrivait beaucoup de vêpres en musique; mais
depuis que les églises sont peu fiéquentées, les composi-
teurs ne se livrent plus à ce genre de travail, qui était
très long. Les Magnificat, qui faisaient partie de ces
vêpres, sont abandonnés ainsi que les litanies. Les Te
Dewn, qui servent aux réjouissances publiques, et les
motels, sont les seules pièces détachées de musique d'é-
glise auxquelles les compositeurs travaillent encore. Leur
développement plus ou moins grand dépend de la fantai-
sie du musicien.
Dans les usages des églises catholiques on ne connaît
que deux manières de chanter les prières, savoir: le
plaln-chant el la musique solennelle. Le plain-chant,
(t) Maîtres napolitaio^ qui écrivaient Tei's le milieu du dix-huj-
tiem* siècle.
CUAP. XVI. MUSIQUE SACRÉE. 158
tel qu'on l'entend dans les églises de France, est horri-
•^blement défignré par nne mauvaise exécution; l'usage de
la miisii|ue solennelle y devient chaque jour plus rare,
en sorte (|u'une oreille un peu délicate est sans cesse ex-
posée à être déchirée par les hraillemens des chantres,
qui ne comprennent ni les paroles qu'ils prononcent, ni
le ch'int qu'ils exécutent. Il est fâcheux qu'on ne puisse,
à l'imitation des églises |)rotestantes d'Allemagne, intro-
duire dans les nôtres un genre de musique simple et fa-
cile qui soit chanté par le peuple , sans autre accompa-
gnement que les jeux doux de l'orgue. Il y aurait dans
une musique usuelle semblable, et plus de recueillement
religieux, et plus de satisfaction pour l'oreille. Ce genre
de musique aurait d'ailleurs l'avantage de former le peu-
ple à un meilleur goût, et de lui faire perdre l'habitude
de ces cris inhumains qui rendent les chants populaires
odieux à une oreille délicate.
L'oratorio , en Italie, en Allemagne et en Angleterre,
fait partie de la musique religieuse; mais en France, ce
n'est que de la musique de concert, car jamais on n'y
exécute d'oratorio dans les églises. Lorsque les compo-
siteurs français se livraient à ce genre de travail, ils fai-
saient toujours entendre leurs productions au concert
spirituel. Haendel, célèbre musicien allemand qui a passé
la plus grande partie de sa vie en Angleterre, a composé
de magnifiques ouvrages en ce genre sur des paroles an-
glaises; le Messie, Judas Machabée , Athalie , Samson
et la cantate des Fêtes d'Alexandre sont cités surtout
comme des modèles du style le plus élevé. Quels que
soient les progrès de la musique à l'avenir, Hsendel sera
toujours cité comme un des plus beaux génies qui ont
illustré cet art.
154 RAPPOBTS DES SONS. SECT. II.
Le genre de musique qui est le plus généralement
connu est celui du théâtre. Tout le monde juge la nuisi-
que dramatit|ue, tout le monde en parle, et ses termes
techniques ne sont plus même inconnus aux personnes
les moins versées dans l'art. Mais tout le monde ne con-
naU pas l'origine et les variations des divers morceaux
qui entrent dans la composition d'un opéra ; je crois
donc nécessaire d'entrer à ce sujet dans quelques dé-
tails.
La musique était réduite aux formes symétriques du
contrepoint, qui ne trouvaient leur application que dans
la musique d'église et de chambre, lorsqu'une réunion
de littérateurs et de musiciens italiens, parmi lesquels
on distinguait Vincent Galilée, 31ei et Caccini, imagina
de se servir de l'union de la poésie à la musique pour
faire revivre le système dramatique des Grecs où la poé-
sie était chantée. Galilée fit entendre comme premier
essai de ce genre de pièces l'épisode du Coinle U{;olin ,
qu'il avait mis en musique. L'acoueil qui fut fait à ce
premier essai détermma le poète Rinuccini à composer
un opéra de Daine (vers t590j , qui fut mis en musique
par Péri et Caccini. Cet ouvrage fut suivi ^' Euritlice ,
et tous deux obtinrent un grand succès. Telle est l'ori-
gine de l'opéra.
La partie la plus importante de ces ouvrages consistait
en récits, qui quelquefois étaient mesurés, et quelque-
fois libres de toute mesure. Ces récits prirent le nom de
récitatif. La marche de ces récitatifs anciens était moins
\ive, moins sjllabique que celle du récila'if de nos opé-
ras; c'était plutôt une espèce de chant languissant, dé-
pouillé de mesure en plusieurs endioits, qu'un récitatif
véritable; mais c'était cependant à celte époque une in-
CHAf. XVI. MUSIQUE DRAMATIQUE. l5^
iiuvatioii remarquable, |iuis(itif rien de ce qui en avait
préféilé l'invention n'en pouvait donner l'idée.
Dans l'Dpéra (ï Euridire , qui fut le second qu'on
écrivit, un des personnages chante des stances ana-
créoiitiqnes qu'on peut considérer comme l'origine
de ce qu'on nomme un air. Une petite ritournelle pré-
cède ce morceau. Les mouvemens de la basse suivent
note pour note ceux de la voix, ce qui donne de la lour
deur au caractère du morceau, mais ce qui établit une
différence notable entre ce genre de morceau et le réci-
tatif, où la basse fait souvent des tenues. Au reste, le
modèle des airs d'opéras existait auparavant dans les
chants populaires qui étaient connus depuis long-iemps.
Les airs prirent une forme un peu plus arrêtée dans un
drame musical d'Etienne Landi , intitulé II Sunlo Ales-
sio, qui fut composé et représenté à Rome en 1634.
Celui qui se trouve au premier acte de cet ouvra{,e, sur
les paroles : .ye L'hoie vulano , est remarquable non-
seulement par le rhvlhme de la première phrase du
chant, mais aussi par un trait de vocalisation assez
étendu sur il volo; mais, comme tous les airs du dix-
septième siècle, il a le défaut de contenir des change-
mens de mesure et de passer alternativement de trois k
quatre temps. Une monotonie de forme se trouve dans
tous les airs de cette époipie : ils sont tous cou|<és en
couplets comme nos vaudevilles ou nos romances. Cette
habitude se retrouve encore dana tous les opéras de
CavaHi,(|ui en composa près de quarante, et particu-
lièrement dans son Jasoii , qui fut représenté à Venise
en 1649. Par une singulière disposition , tous les airs de
ce temps étaient placés au commencement des scènes et
noa vers la fin , comme dans les opéras modernes.
156 RAPPORTS UES SONS. »ECÏ. 11.
Dans la seconde moitié du dix-sej>lième siècle, la
coupe des airs fut changée, et les plus habiles composi-
teurs en adoptèrent une qui était ce qu'on pouvait ima-
giner de plus défavorable à l'effet dramatique et à la
raison. Ces airs commençaient par un mouvement lent
qui se terminait dans le ton du morceau; puis venait un
mouvement vif, conçu dans un système d'expression
scénique, après quoi l'on revenait au mouvement lent,
qui était répété en entier. Le moindre défaut de ce re-
tour était de détruire l'effet musical qui venait d'être
produit par V allegro; car il arrivait souvent qu'il était
un coniresens. Par exemple, dans l'air de VOlyrnjiiade ,
où Mégaclès, déterminé à s'éloigiier d'Aristée qu'il aime,
pour la céder à Licidas , son ami , adresse à celui-ci ces
vers louchans :
Se cerca, se dice :
L'iiinico tlovV: ?
L'iimico infelioe,
Rispondi, rnori.
C'est-à-dire : «Si elle cherche, si elle dit : Où est
« ton aini? réponds : Mon inallieureux ami est mort.
« Ah ! non ; ne lui cause point une si grande peine pour
« moi; réponds seulement en pleurant : Il est parti.
« Quel abîme de maux ! quitter ce qu'on aime, le quitter
« pour toujours, et le quitter ainsi ! «
Tous les compositeurs qui ont écrit de la musique
sur ces paroles n'ont pas manqué, après le mouvement
vif et dramatique qu'ils plaçaient sur ces mots, quel
abîme de maux! de revenir froidement au commence-
ment, et de reprendre le mouvement lent des mots, si
elle cherche , etc., comme s'il était possible que Méga-
clès se calmât subitement après une explosion passion-
OHM». \VI. MlîsI.M'E l»li\>I ATIQIJK. i'if
rioe. .lomclli est le premier i]ui ait senti la tiéeessité île
fiiiif p;ir les ijimtre ticriiiei s vers
L'usage de la coupe d'airs dont je viens de parler
s'est perpétué jusqu'à Piecini et .Sacchini. On en écrivit
aussi i)eaucoup dans le cours du dix-huitièine siècle qui
n'étaient composés que d'un seul mouvement très lent et
très développé: de pareils morceaux, mnigré tout leur
mérite, ne pourraient j)lus réussir aujourd'hui, où l'on
s'est habitué aux rhythmes plus ou moins rapides et
prononcés. De simples cavntines , d'une courte durée,
peuvent seules être écrites dans celte manière.
Parmi les formes d'airs qui ont eu le plus de succès,
\ii rondeau , qui consiste à reprendre plusieurs lois la
première phrase dans le cours du morceau, tient la pre-
mière place. Son invention parait appartenir à un com-
positeur italien nommée Buononcini, qui vivait au com-
mencement du dix-huitième siècle. Plus tard, Sarti,
autre maître renommé, imagina le rondeau à deux
mouvemens, dont il donna le premier exemple dans
l'air un amante iventurato , qu'il écrivit à Rome pour
le chanteur Millico, et qui eut un succès prodigieux.
Un compositeur du plus beau génie, nommé Majo,
qui ne vécut point assez pour sa gloire, donna le pre-
mier exemple d'un air à un seul mouvement allegro
sans reprise, dans celui dont les premiers mots sont, ah!
non parla. Cette coupe d'air a eu plus de succès en France
qu'en Italie, car presque tous les airs d'opéras français
des anciens compositeurs ont été faits dans celte forme.
Paisiello, Cîmarosa , Mozart, Pa«"r et Mayer ont écrit
beaucoup d'airs de demi-caractère compo.sés d'un mou-
vement lent suivi d'un allegro, et quelques-uns de ces
airs sont des chefs-d'œuvre d'expression ou passionnée
16S RAPPORTS UEb SONS. SECT. II.
uu comique. Leur coupe paraît cire la plus favorable à
l'effet musical. Rossini a fait adopter une autre disposi-
tion, qui consiste à faire un premier mouvemeiil allegro
modéré, suivi d'un andantc ou d'un adagio, et à ter-
miner le morceau par un mouvement vif et rhythmé.
Cette disposition serait bonne, quant à l'effet, si elle ne
donnait aux morceaux un développement trop considé-
rable, qui souvent fait languir la situation dramatique.
La gradation des mouvemens de plus en plus précipités
est un moyen presque infaillible de ranimer l'attention
de l'auditoire : les imitateurs de Rossini, qui n'ont pas
son génie, s'en servent souvent pour cacher la nullité
de leurs idées. Il en est de ces coiqies d'airs comme des
moyens d'instrumentation ; on peut s'en servir avec avan-
tage, pourvu que ce ne soit pas un thème tout fait qu'on
présente toujours de la même manière. Toutes les dis-
positions d'airs dont il vient d'être parlé sont admissi-
bles, si l'on sait les employer à propos; il doit résulter
de leur mélange une variété qui n'existe plus, et dont le
besoin se fait sentir chaque jour davantage.
Une sorte de petit air, qu'on nomme couplet quand le
caractère en est gai, et romance lorsqu'il est niélanco-
liquc , appartient origmairement à l'opéra français.
Dans sa nouveauté, l'opéra - comique , tel qu'il pa-
rut aux foires Saint- Laurent et Saint - Germain ,
n'était que ce qu'on nonune maintenant If vaudc-
i'ille. Les couplets en faisaient tous les frais. Ce pe-
tit genre de musique, né du goût fort ancien des
Français pour les chansons, est encore fort à la mode
dans le public, et souvent les compositeurs qui veulent
lui plaire en fout usage jusqu'à l'abus. Cependant, tout
en condamnaat cette profusion de petits morceaux, je
CHAP. TVI. MtrsiQTJE DRAMATIQtTB. 1 59
suis loin d'en blâmer absolument l'usage. Les couplets
et les romances, qui cxi^ont tle la |>art du musicien de
l'eprit et du goût, ont l'avanta-îe de ne pas ralentir la mar-
che scéni(|ue, comme le ferait un grand air, et l'on peut
y mettre des mélodies aussi suaves, aussi élégantes que
dans celui-ci. Toute la difféience consiste dans les pro-
portions qui sont plus petites. Les couplets et les ro-
mances ont d'ailleurs l'avantage de varier les formes.
Les compositeurs italiens ont senti qu'il était possible
d'en tirer bon parti; depuis peu d'années ils ont intro-
duit dans leurs opéras des romances qui ont toujoiu's été
bien accueillies, même par les Italiens. A la tête de ces
morceaux il faut placer la romance A^Olello.
Après l'air, le genre de morceau qu'on trouve le plus
communément dans la musique de théâtre est le duo.
Ses formes ont subi à peu près les mêmes variations que
celles des airs. Le premier exemple d'un duo se trouve
dans le drame d'// Santo Ale<;sio , dont j'ai déjà parlé ;
mais c'est surtout dans l'opéra bouffe italien qu'on le
trouve le plus souvent emplové. Les anciens opéras sé-
rieux italiens n'en contenaient autrefois qu'un seul, qui
était toujours placé dans la scène la plus intéressante,
aujourd'hui on n'écrit guère d'opéra (|ui ne renferme
plusieurs duos , ou comiques, ou sérieux, ou de demi-
caractère.
Les compositeurs italiens n'écrivent plus que des duos
dont ils semblent mesurer le mérite à la taille; ce sont
toujours les mêmes patrons, c'est à-dire les trois inter-
minables mouvemens ; et l'on se croirait déshonoré si
l'on composait un duo court et gracieux comme ceux du
Mariage de Fl^dvo et de Don Juan , Su l'aria ; Crudel,
perche fin ora ; ou La ci darem la mano. Il faudra
160 RAPPORTS DES SONS. 8ECT. II.
pourtant en revenir à user quelquefois de ces propor-
tions, qui, quoi qu'on en dise, sont plus dramatiques
que la plupart des longs morceaux qui leur ont succédé.
Les trios d'opéras sont nés en Italie, comme tous les
morceaux d'ensemhle. C'est dans l'opéra bouffe que Lo-
groscino, compositeur vénitien, en fit le premier essai
vers 1750. Il fut surpassé dans ses effets par Galuppi,
son compatriote; mais ce fut surtout Piccini qui, dans
sa Buoiia Figliola , porta ce qu'on appelle en général
des morceaux cT ensemble à un point de perfection
très remarquable. Les finale ^(\\n n'en sont que des mo-
difications très développées, devinrent aussi nécessaires
pour les terminaisons d'actes. On sait tout l'intérêt que
Paisiello, Cimarosa et Guglielmi surent répandre sur
cette partie de la musique. Le fameux septuor du Roi
Théodore fut un pas immense fait dans l'art de jeter de
l'intérêt sur les scènes lyriques à personnages nom-
breux; Mozart compléta ensuite cette grande révolu-
tion musicale par ses merveilleux trios, quatuors, sex-
tuors et finales de la Flûte enchantée , de Don Juan et
du Mariage de Figaro. Rossini n'a point inventé dans
la forme des morceaux d'ensemble ; mais il a perfec-
tionné des détails de rhylhme, d'effets de voix et d'instru-
mentation.
Les anciens compositeurs français ne comprenaient
pas l'utilité des grandes réunions de voix qui n'aura-ient
peut-être pas été à la portée de leur auditoire. D'ailleurs
les sujets d'opéras-comiques étaient trop légers , et le
nombre des peisonnHgcs trop peu considérable pour
qu'on pût rien écrire de semblable. Cependant Pbiiidor
saisit l'occasion qui lui fut offerte dans Tom Joncs pour
faire un bon «juaîuor ; Monsigny, dont le savoir en mu-
CilW.Wl. -'lUSlyLE lUVAMATIQUE. I (j J
si-i.ie émit fort médiocre, mais qui possédait une imngi-
nniion très vixe el hcauco.ip de sensibilité, fit aussi diuis
Fc.',.c ou l' Enfant trouve un trio, sinon fort bon, du
moins fort expressif.
Q..antà l'opéra sérieux français, Gluck, qui en avait
fixe la forme, ne fit entrer dans sa composition que le
récitatif porté à sa plus grande perfection, les chœurs,
les airs, rarement les duos, et presque jamais les trios'
quatuors ou morceaux d'ensemble. Les formes un peu'
compliquées de ce genre de musique ne commencèrent
ase naturaliser en France que par les travaux de MéhuI
et deM. Chérubini. Concevant les développemens de la
scène lyrique sur un pian plus vaste que leurs devan-
ciers, ces deux grands musiciens appliquèrent à la scène
française les améliorations de l'opéra italien, en les mo-
difiant par les qualités particulières de leur génie. Leurs
productions eurent un degré d'énergie de plus que celles
de Paisiello et de Cimarosa; ils exagérèrent même la n-
chesse d'harmonie dont l'école allemande avait donné le
modèle; ils firent des découvertes dans l'instrumenta-
tion, decouverles dont Rossini a profité depuis lors; il.
fnrent enfin plus observateurs de l'exactitude drama-
tique; mais ils chantèrent moins heureusement , et firent
quelquefois consister un peu plus le mérite de la musique
dans l'arrangement que dans l'inspiration. Quoi qu'il e.i
sou de l'opinion qu'on peut se faire du genre qu'ils
a^alent adopté, on ne peut nier qu'ils aient rendu de
grands services aux progrès de leur art; ce sont eux qui
ont fait enfin pénétrer dans la musique des proportions
musicales plus grandes que celles dont les Français
avaient l'habitude, et qui ont écrit de vrais morceaux
d'ensemble, ^!c vrais finales dignes de fix.r l'artcntion
162 RAPPORTS DES SOIfS. SECT. II.
des musiciens instruits et des gens de goût. Leur exemple
a Iracé la roule à d'autres compositeurs haiiiles qui leur
ont succédé : MM. Boieldieu , Cale!, Auber, Hérold et
d'autres, se font gloiie d'avoir reçu leurs conseils et suivi
leur exemple. M. Boieldieu s'est particulièrement distin-
gué par la grâce, l'élégance et l'esprit qu'il a su allier
avec les formes musicales dévelfjppées.
Une des qualités par lesquelles l'école française s'est
distinguée le plus est celle d'avoir produit des chœurs
excellens. Rameau fut le premier qui fit briller les opéras
français par la beauté de ce genre de morceau. Si son
mérite est inférieur à celui de Ilaendel sous le rapport de
la richesse des formes saxantes et de la modulation, on
ne peut nier du moins qu'ii n'ait su donner aux chœurs
de ses opéras une grande force dramatique. D'ailleurs,
les formes savantes des chœurs d'oratorios et les fugues
dont ils sont remplis ne conviennent |>oint à la scène;
car il ne faut point détourner l'attention de l'objet prin-
cipal, qui est l'intérêt dramatir|ue. Depuis Rameau, une
immense quantité de chœurs français ont été écrits par
Gluck, 3Iehul, M. Chérubini, et toute leur école.
Celte portion de l'opéra était autrefois la plu-; faible
en Italie, parce que les spectateurs italiens n'y atta-
chaient aucune importance. MM. Paêr et Mayer ont été
les premiers a rendre aux chœurs l'éclat qu'ils doivent
avoii dans la musique draiTiatir|ue ; Rossini est venu après
eux enrichir cette partie 'lu drame de formes mélodiques
qu'on ne lui avait pas données auparavant; il en résulla
des effets nouveaux auxquels on n'était pas accoutumé,
et qui ont eu de brillans fuccès. Les chœurs de WebrT
sont distribués d'une manière pittoresque et drauiatique
L'ouverture des opéras, que le» Italiens nomment sin
CHAP. XVI. MVSIQUE DRAMATIQVE. 16S
f'oni'n, estronsidéiéepar quelques personnes comme une
j)<Trlie importante de la musique d'un drame ; dautres
en font peu de cas. La première ouverture qui ail joui de
quel<|ue réputation en Italie est celle de la Fra\ciitana
de Paisiello. L'ouverture à'iphigcnic en JuUde, de
(•luck, fit un effet prodiijieux lorsiiu'ou l'entendit pour
la première fois, en 1773, et depuis lors elle n'a cessé
d'exciter l'admiration par le mélange de majesté, de dés-
ordre et de pathétique dont elle est empreinte. L'ouver-
ture de Df'innpiion , de Vogel , est aussi fort belle dans
son début et dans toute sa première partie, mais la fin
est indigne du commencement. Deux autres ouvertures
ont eu aussi beaucouj) de réputalion en Fi-ance ; cesont
celles de la Ceiren-nne et de Panitr^c, composées toutes
deux par Grélry. Elles contiennent des phrases d'un
chant heureux, mais elles ne méritent point leur réputa-
tion, car elles sont mal faites. Dénuées de plan, de fac-
ture et d'harmonie, ces ouvertures n'ont pu obtenir leur
succès que lorsque le goût du public français était encore
à former. I^L Cherubini a fait jiliisieurs ouverluies dont
le mérite est très remar(|ualile ; elles sont devenues clas-
siques dans presque tous les concerts de l'Europe ; on les
joue avec un éj;al succès en Ani;lelerre, en Allemag;ne
et en France. Les plus belles sont celles de V Hôielleric
portiif^aise et d\Jnacrt'on ; leur plan , leur facture et
leur instrumentation sont éj^alement admirables.
Parmi les morceaux «le ce genre, il en est im qui est
considéré comme ce qui existe de plus beau . sous quel-
tjue aspett qu'on veuille l'examinei- ; l'est l'ouverture de
la Flûte etichiuilce , de 3Li/.art, clief-d'œu\re inimitable
qui sera éternellement le modèle des ouvertures et le
désespoir des compositeurs. Tout se trouve réuni dan"i r?
164 RAPPORTS DEi) SOKS. Si.CT. II.
bel ouvrage; début large et magnifique, nouveauté des
motifs, variété dans la manière de les reproduire, science
profonde dans le plan et dans les détails, instrumenta-
tion piquante , intérêt croissant et péroraison pleine de
chaleur. On peut encore citer comme des modèles d'in-
térêt dramatique les ouvertures A'E^mont et de Pro-
méthée, de Beethoven. Rossini , dans ses ouvertures de
Tancrcde , d'Otello, du Barhier de Sévllle et de Se-
inirarnide, a multiplié les mélodies les plus heureuses et
les effets d'instrumentation les plus séduisans; mais il y
a fait voir que le génie le plus heureusement organisé
ne suffit pas toujours pour tirer parti des idées les plus
favorables. En effet, tout morceau de musique instru-
mentale se divise ordinairement en deux parties. La pre-
mière contient l'exposé des idées de l'auteur et module
dans un ton relatif au ton principal; la seconde partie
est consacrée au développement de ces idées, au retour
dans le ton primitif, et à la répétition de certains traits
de la première. Le développement des idées dans la
seconde partie est ce qu'il y a de plus difficile dans l'art
de traiter une ouverture; il exige des études prélimi-
naires dans la science du contrepoint, et du soin dans
les combinaisons. Rossini a coupé le nœud gordien; il
n'a point fait la seconde partie, et s'est borné à quel-
ques accords pour rentrer dans le ton primitif, et à ré-
péter à peu près exactement toute la première partie
dans un autre ton. Dans l'ouverture de Guiilanine Tell
il s'est livré à de plus grands développemens et a pro-
duit un ouvrage plus digne de sa brillante réputation.
On a répété souvent qu'une ouverture doit être un
résumé de la pièce, et qu'elle doit rappeler quelques
traiîs des situations primipnlcs qui s'y trouvent. Plu—
CHAP. XVI. MUSIQUE UnvMATIyUK. 165
sieurs musiciens ont adopté celle idée, et n'ont l'ail
qu'une espèce de pot-pourri de l'ouverture de leur
opéra; celte idée me paraît bizarre. Qu'un résumé de
l'opéra soil nécessaire, à la bonne beiire ; mais ce ré-
sumé devrait se trouver à la fin de la pièce , où le spec-
tateur peut sentir le mérite du retour de certaines phrases
qui lui rappellent des situations de l'ouvrage. Si, au con-
traire, ces phrases sont entendues par lui avant qu'il ait
pris connaissance des situations , elles ne lui rappellent
rien et n'attirent pas plus son altenlion que d'autres phrases
ne pourraient le faire. Au reste, il est bon de se rappeler
qu'aucune ouverture justement estimée n'est faite dans
ce système. Les ouvertures à^ If>hii;érne , de Détnophon,
de Don Juan, de la Flûte cnchanl'fe , (ï Egmont , de
Prométhée , de V Hôtellerie portugaise et ^ Anacréon
ne sont que des symphonies dram.Ttiques , et non des
pots-pourris.
Quoique l'ouverture appartienne à la musique instru-
mentale, j'ai cru devoir en parler à propos du drame
musical. Je reviens à ce qui concerne la forme des pièces
vocales.
Dans le cours des seizième et dix-septième siècles il
y eut de véritable musique de concert privé, laquelle
consistait en une sorte de pièces vocales à quatre, cin([
ou six parties, et qu'on nommait luddricaux et chan-
sons', l'usage de ce genre de Tnusi(|ue a diminué dès que
l'opéra fut devenu assez intéressant pour attirer l'atten-
tion des amateurs; insensiblement les airs d'opéras ont
pris la place de ce qu'on nommait la musique de cham-
bre , et celle-ci a fini par disparaître presque entière-
ment. On n'en a conservé que les canzonctte , en Italie;
les lieder ^ en Allemagne, et les loinances pour une ou
166 RAPPORTS DES S0:NS. 8ECT. II.
deux voix , en France. Ces différentes pièces participent
du goût national empreint dans les autres parties de la
mnsiiiiie de chacun de ces peuples ; ainsi le goût des
Italiens pour le chant élégant et embelli <\e fioritures
se remarque dans les conznnette ; les licderou chansons
allemandes se distinguent par «ne franchise de ton re-
marquable uni à un sentiment d'harmonie recherché;
les romances françaises brillent surtout par une expres-
sion ou dramatique ou spirituelle des paroles. On donne
souvent le nom de nocturnes aux romances à deux
voix.
Ces petites voix ont quelquefois une vogue prodigieuse
dans la nouveauté, et leurs auteurs jouissent pendant
dix ou douze ans de réputations de salons fort brillantes,
qu'ils perdent par suite de l'engouement qui se manifeste
])Our quelque nouveau venu. Un musicien devenu cé-
lèbre dans un genre plus élevé, M. Boieldieu,a fait des
romances charmantes qui ont été fort recherchées;
après lui est \enu Garât , puis Blangini , puis M™" Gail,
à qui M. Romagnési a succédé; M. Amédée de Beau-
plan a joui d'un instant de vogue; aujourd'hui MM. La-
barre, Panseron et Masini sont à la mode.
La musi(|ue instrumentale se divise en plusieurs bran-
ches qui se rattachent à deux espèces principales : 1° la
musique de concert; 2° la musique de chambre.
La symphonie lient le premier rang dans la musi(jue
de concert. Son origine remonte à un certain genre de
pièces instrumentales qu'on nommait autrefois en Italie
ricercari da sunnare , et en Allemagne pnrtit'n^ les-
cjuelles se con)posaierit de chansons variées , d'airs de
danses et de fugues ou morceaux fugues, destinés à être
exécutés par des violes, des basses de violes, des luths,
CHAP. XVI. MtSlQtE HE CONCERT. IC7
ihéorbcs, elc. Lorscjuc ces pièces passèient de mode, on
leur substitua des morceaux coupés en deux parties,
d'im mouvement assez vif, suivis d'un autre morceau
d'un mouvement plus lent, et d'un rondeau qui tirait
sou nom de la répétition d'une phrase principale. Les
premières symphonies ne furent d'abord composées cpie
de deux parties de violon , alto et basse. Un nmsicien al-
lemand nommé Vaidiall commença à perfectionner la
symphonie, en y ajoutant deux hautbois et deux cors;
il fut imi.é par Toesky , Van-Malder et Stamitz. Gossec
ajouta les parties de clarinettes et de bassons aux autres
instrumens, et les menuets avec les trios augmentèrent le
nombre des morceaux cpii existaient déjà dans la sym-
phonie. Le menuet tire son nom de la mesure à trois
temps dans laquelle il est écrit. Il était autrefois d'un
mouvement presque aussi lent que ia danse dont il porte
le nom: mais insensiblement sa vitesse a augmenté, et
Beethoven a fini par en faire un presto. C'est à cause de
cela qu'il lui a ôlé son nom de menuet, pour lui substi-
tuer celui de scherzo T badinage]. Je n'ai pu découviir
ce que signifie le nom de trio qu'on donne à la seconde
partie du menuet. Il se pourrait qu'il vînt de ce qu'on
supprimait quelquefois un instrument dans celte seconde
partie.
On ne peut guère prononcer le nom de symphonie
sans réveiller le souvenir de Haydn. Ce grand musicien
a si bien perfectionné le plan et les détails de ce genre de
musique qu'il en est en quelque sorte le créateur. L'his-
toire des progrès du génie et du talent de cet homme éton-
nant est l'histoire même des progrès de l'art. Déjà ses
premiers ouvrages annonçaient sa supériorité sur ses con-
temporains; mais ils étaient bien inférieurs à ceux qui.
168 RAPPORTS DF.S SOXS. SE<;T. II.
l'opuis, sont sortis de sa plume. Si l'on n'oublie pas que
ces mêmes ouvrages ont toujours été mesurés au degré
d'habileté des exécnlans, habileté (ju'il a lui-même pro-
voquée et dont il est en partie cause, on concevra sans
peine quelle profondeur de talent il a fallu pour pro-
dtiire des chefa-d'œuvre en se conformant ainsi à des en-
traves et à des considérations particulières. Si Haydn
éiait venu dans un temps où le savoir des exécutans eût
élé ce qu'il est aujourd'hui , il n'aurait rien laissé à faire
à ses successeurs. Le talent principal de Haydn consiste
il tirer parti de l'idée la plus simple, à la développer de
hi manière la plus savante, la plus riche en harmonie,
la plus inattendue dans ses effets, sans jamais cesser
ti être gracieux. Une autre qualité le distingue, c'est la
rectitude et la netteté du plan , qui sont telles que l'ama-
Irnr le moins instruit en suit sans peine les détails comme
le musicien le plus habile.
Mozart, toujours passionné, toujours mû par un sen-
timent profond, a moins brillé que Haydn dans le déve-
loppement de la pensée de ses symphonies; mais il a
trouvé, dans cette scnsibilitéexquise dont il était si abon-
damment pour\u, une puissance d'émotion qui entraîne
toujours l'audiloire et qui lui fait j)artager sa passion.
Beethoven , dont le talent fut long-temps méconnu en
France, règne maintenant dans la symphonie. Plus hardi
que les deux grands artistes que je viens de nommer, il
ne craint pas d'aborder les plus grandes difficultés, et
souvent il en trionqilie avec bonheur. Son génie s'élève
aux plus hautes régions, nul n'a connu mieux que lui
les effets de l'instrunicntaiion, dans lesquelles il a fait
beaucoup de découvertes; mais il est souvent bizarre,
incorrect , et semble plutôt improviser que suivre un plan
( M\i'. XVI. Ml ^loi r i>v i.HwmRE. Kî!)
:nrclé. Du reste il partaj;o li; sort de tons los iiomirrs ;! ■
génie, en occnpant l'allcnlion plntôt des beautés qu'il
prodigue qne des défauts c|ui les déparent.
Les quatuors, quinteltis, sextuors, etc., sont des di-
minulirsde la svniplionie; ils sont destinés à en tenir lieu
d::ns les concerls privés. Havdn , Mozart et Beethoven
sont encore les chefs de ce genre de symphonie en minia-
ture, et souvent le talent qu'ils y déploient est tel qu'ils
foîil oublier les étroites proportions des moyens qu'ils
nultent en usage. Les mêmes qualités que ces trois
gr;inds artistes ont mises dans la grande symphonie se
reîrouvent dans le genre du quatuor.
Un homme qui a vécu pauvre, isolé et méconnu en
Espagne, a aussi cultivé ce genre, et particulièrement
le quintetto, avec un rare bonheur d'inspiration; cet
homme est Bocchérini. N'ayant point assez de connnu-
nicalions avec le monde pour être informé des progrès
de la musique et des variations du goût, il composa
pendant près de cinquante ans sans renouveler ses sensa-
/ tions musicales par l'audition ou par la lecture des
œuvres de Haydn ou de Mozart; il tira tout ce qu'il
écrivit de son propre fonds; de là l'indépendance de
manière et de style, l'originalité d'idées, et le charme
(le naïveté qui caractérisent ses productions. On peut
d. sirer plus d'acquis, plus de richesse d'harmonie et
quelque peu moins de vieillesse dans les formes de la
musique de Bocchérini, mais non plus de véritable
inspiration.
L^sonate, pour un instrument seul ou pour plusieurs
récnis, est encore une sorte de symphonie. Son nom
vient de suonare , qui signifie jouer d'un ou plusieurs
instrumens. Ce mot ne s'appliquait autrefois qu'aux
170 RAPPORTS DES SO^S. SECT. II.
instrumens k cordes ou à vent ; en parlant des instru^
mens à clavier on disait toccare, d'où l'on avait fait
tuccata, qui signifie une p.èce à tout/ie/-; depuis près
d'un siècle, sonale se dit de toutes les pièces de ce
genre, pour quelque itistrumenl que ce soit.
Comme la sym|>honie ou le quatuor, la sonate se di-
vise eu plusieurs morceaux, qui consistent en un pre-
mier mouvement , un adagio et un rondeau ; rarement
on y joint un menuet. Les sonates accompagnées par un
ou deux instrumens prennent ordinairement les noms de
duos ou t'ios. Il y a des sonates de piano composées
pour être exécutées par deux personnes. Les quatre
mains embrassent toute l'étendue du clavier et rem-
plissent l'harmonie d'une manière riche et intéressante
de formes, quand ces pièces sont écrites par un com-
positeur habile.
Les meilleures sonates de piano ont été écrites par
Ch.-Ph -Em. Bach , Haydn , Mozart, Beethoven, dé-
menti, Dusseck, Cramer; les sonates fuguées de .lean-
Sébaslien Bach pour clavecin et violon sont des chefs-
d'œuvre. Krumphollz a été pour la musii|ue de harpe
ce que démenti fut pour celle de piano, c'est-à-dire le
modèle de ceux qui ont écrit ensuite pour cet instru-
ment. Une élévation de style peu commune et des effets
d'une harmonie piquante sont les qualités par lesquelles
ce composileiu- s'est distingué. Corelli, Tartini , Loca-
felli , Leclair sont à la tête des auteurs qui ont composé
les nseilleurs sonates de violon. Francischeîlo et Duport
se sont distingués dans la composition des sonates de
violoncelle. Quant aux sonates d'inslriunens à vent, il y
enapeu qui méritent d'être citées. En général, la musique
destinée à ces instrumens est lestée dans un état d'infé-
CMAP. XVI. MUSIQUE DE CHAMBRE. 171
riorité très sensible ; un compositeur habile pourrait y
acquérir de la répulalion , par cela seul qu'il mettrait ce
genre de musique à la hauteur des pièces qui ont été
écrites poiu* tous les autres iustrunu-ns. On ne jjossède
en ce genre qu'un ou deux beaux morceaux de Mozart
et de Beethoven. Kronnner a écrit aussi de la musique
d'instrumens à vent dans lacpielle il y a de l'effet, et
M. Reicha, venu après lui, a écrit les meilleurs ou-
vrages en ce genre qui soient connus en France.
Depuis plusieurs années, la sonate est tombée dans
le discrédit. Certaine futilité de goût, qui a fait invasion
dans la musique, a substitué aux formes sérieuses de ce
genre de pièces des ouvrages plus légers auxquels on
donne les noms de/a/it(ii.\ies , d'airs varies, de ca-
prices, etc. La fantaisie, dans son origine, était une
pièce où le compositeiu* se livrait à toutes les saillies de
son imagination. Point de plan; point de parti-pris ^
l'inspiration du moment, de l'art, de la science même,
mais cachée avec soin, voilà ce qu'on trouvait dans la
fantaisie telle que Bach, Handel et Mozart savaient la
faire. Mais ce n'est point cela qu'on entend aujourd'hui
parce mot. Jamais fantaisie ne fut moins réelle que ce
qu'on trouve dans les pièces qui portent ce nom. Tout,
excepté l'art et la science, y est réglé, compassé, arrangé
sur un plan qui est toujours le même. Entendre une fan-
taisie moderne, c'est les entendre toutes, car elles sont
toutes faites sur le même modèle, sauf le thème princi-
pal, qui n'est pas même d'invention; car c'est presque
toujours le chant d'une romance ou d'un air d'opéra qui
en fait les frais. La fantaisie se terminant toujours par
des variations sur ce thème, l'air varié n'en difière point.
Il n'est pas possible que le dégoût et la satiété ne soient
IT2 KAPPORTS DES SONS. 8ECT. II.
la suite de l'abus qu'on fait de ces formes ; alors on re-
viendra à de la musique plus réelle , et l'art rentrera dans
son domaine.
Ces tristes fantaisies, ces airs variés si monotones,
ont aussi usurpé la place du concerto, sorte de pièce qui
n'est pas sans défaut, mais qui a du moins l'avantage c!e
montrer le talent de l'artiste sous un aspect de grandes
proportions. Concerto, mot italien qui signifiait autre-
fois un concert, une assemblée de musiticns qui exé-
cutent divers morceaux de musique (on dit maintenant
acadania), s'écrivit d'abord concento. Dans le dix-
septième siècle on commença à donner le nom de coi.~
ccrto à des morceaux composés j^onr faire briller i;n
instrument principal que les antres accompa^ndienl ;
mais ce ne fut que vers le tonqjs de Corclli, célèbre vio-
loniste romain, fjue ce genre de pièce devint à la mod..
On croit généralement qu'un autre violoniste, nommé
Torelli, qui ne le précéda que de quelques années, donna
au concerto la forme qu'il a conservée jusque vers 1760.
Le concerto, lorsqu'il était accompagné d'un double
quatuor de violon, viole et basse, s'appelait concerta
grosso, grand concert. Le concerto grosso avait des
espèces de tutli où tous les instrumens étaient employés ;
mais un auti'e genre de concerto, qu'on appelait con-
certo cla caméra, n'avait qu'une partie principale avec
de simples accompagnemens. Il n'y eut d'abord que des
concertos de violons, mais par la suite on en a fait pour
tous les instrumens, et l'on y a joint des accompagne-
mens d'orchestre complet.
Les concertos de violon composés par Corelli, Vivaldi
et Tartini furent autrefois célèbres dans le monde; ils
le sont encore dans l'école, et méritent la vénération
i.
<:'IU'. \vi. Wl!Sl,^)tii i)i.: tUA-MBRE. J 73
des artistes par la grandeur des pensées et la noblesse d,.
le S,a,n.,., Lolli ot Ja.nnwick, bien qu'ils ne f«s-
t pa. dépourvus de n^é.ite, ne su.ent point conser-
n concerto son caractè. e d'élévation. Leurs efforts
e ent pour but de se „.ettre à la portée du public par
d s choses ag..ables, et l'on doit avouer qu'ils' y réu'i-
nt souvent. Le prenuer de ces violonistes, ,ui était ne
n Bohen,e, et qu. brilla à la cour de Manhein., vers
mo redu.su a deux le no.nbre des n.orceaux qui en-
fa.ent dans la coniposition du concerto, c'est-à-dire à
un pre„.er ..orceau et au rondeau ou rondo, et divisa
hncun de ces morceaux en trois solos, entrecoupés d.^
succès. EnhnparutVaotti, qui, sans rien inventer quant
a la onne du concerto, se „.ontra tellement inventeur
lan. le chant dans les traits, dans la forme des accon.
P «nemens, dans l'harmouieet dans la modulation, qu'il
fit b.entot oublier ses devanciers, et qu'il laissa s^s ri-
vau.x sans espoir de soutenir la comparaison. Viotti ne
bnlla.t point par le savoir ; ses études avaient été mé-
d-ocres; mais sa richesse d'imagination était telle qu'il
n avait pas besoin de songer a économiser ses idées H
composait bien £lus^£arJ„syrM..que„. par réflexion;
mais cet instinct le guidait à n.erveille, et lui" faisait
rencontrer juste , même dans l'harmonie.
On ne s'est avisé de faire des concertos de clavecin
que long-temps «près les premières compositions du
même genre pour le violon, et plus tard encore on en
a eu pour les instrumens -i vent; mais les uns et les
autres ne furent que des imitations des formes arrêtées
du concerto à la Stamitz. Cependant ce sont précisé-
n^enl ces formes qui me semblent vicieuses et qui me
1 74 RAPPORTS DES SO«S. SECT. 11.
paraissent causer l'ennui de l'audiloire. Comment se
fait-ii qu'on soit resté jusqu'aujourd'hui altaclié à une
coupe aussi défectueuse que celle de cr-s concertos où
le premier fulti fait entendre exactement les mêmes
phrases que le premier solo? où il suit la même modu-
lation de la tonique à la dominante pour revenir ensuite
à la tonique et recommencer la même marche? où trois
solos, qui ne sont que le développement des mêmes
idées, les rejiroduisent sans cesse en variant seulement
le ton? où les cadences de repos, mullipliées à dessein
pour avertir le public qu'il doit applaudir l'exécutant,
contribuent à rendre le morceau pins monotone? enfin,
où le morceau final reproduit à peu près le même sys-
tème et tons les défauts du premier tillef^ro? 11 serait
temps de chercher les moyens d'éviter ces défauts et de
ne plus avoir de ces cadres tout faits pour toute espèce
de sujets. La fantaisie d'un compositeur doit être libre,
et les idées ne doivent pas êtie accommodées à la forme,
mais la forme aux idées.
Il est un genre de musique instrumentale qu'on peut
considérer comme une branche de musique sacrée : je
veux parler des pièces d'orgues. Outre que les ressources
immenses de l'instrument invitent le génie de l'organiste
à la variété, la diversité des cultes et des cérémonies de
chaque rite occasionnent l'emploi de beaucoup de stxles
différens. Par exemple, dans les églises protestantes,
l'organiste doit savoir accompagner par une haimonie
riche d'effet et de modulation les chorals et cantiques.
De plus, il doit posséder une imagination féconde pour
les préludes de ces cantiques, qu'il faut savoir varier
avec élégance sans nuire à la majesté du temple et sans
négliger la science. La fugue, véritable fondement de
CHAP. XVI. MLSIylJE 1)E CUAMUKE. 175
l'art de toucher tle l'orgue, doit être familière à l'artiste;
enfin il est néressaire (|u'il possiile la cotinaissance des
anciens styles pour en tirer parii dans les circonstances
favorables. L'Allemagne a produit une quantité piodi-
giense de grands organistes; depuis SanuK'l Scheidt, qui
vivait à Hambourg au commencement du dix-septième
siècle, et qui posséda un talent de premier ordre, on
compte Buxtehude , Reinken , Jean-Sébastien Bach,
Kittel, etc., qui ont écrit dans tous les genres des pièces
d'orgues qui seront long- temps encore considérées
comme des modèles de perfection.
L'art de l'orgdniste catholique est encore plus étendu.
La nécessité de bien connaître les plains-chants ro'iiain
et parisien , ainsi que les différentes manières de les
accompagner, soit en les plaçant à la basse, soit en les
mettant au-dessus; l'art de traiter les messes, vêpres,
Mofinificot, hymnes, antiennes et yf/^e^/w selon l'impor-
tance des lêtes, les offertoires et antres grandes pièces,
les fugues ou le style fugué; tout cela, dis-je, appar-
tient à cet art de l'organiste , dont on ne soupçonne point
en général la difficulté. Dans les préjugés ordinaires, un
organiste est un artiste vulgaire, au(|uel on donne peu
d'attention; dans le fonds cependant, un organiste qui
possède toutes les qualités de son art devrait marcher
de pair avec les compositeurs les plus renommés, car
rien n'est plus difficile ni plus rare que de rencontrer
celte réunion de qualités.
Il s'en faut de beaucoup que le répertoire de l'orga-
niste catholique soit aussi riche que celui de l'organiste
protestant. Après Frcscobaldi et un petit nombre d'an-
ciens organistes italiens et Irançais qui ont laissé de
beaux ouvrages, on ne trouve rien. Malheureusement il
|7o RAPi'OUTs UEb SO«S. SKCT. II.
n'y a point une seule place d'organiste en France qui
offre des ressources suffisantes pour vivre; il n'est donc
point étonnant que l'émulation des art sles ne soit point
excitée, et que l'art d'écrire pour l'orgue se détériore de
plus en plus. Il est douteux que cet art se régénère, si
le talent ne peut espérer une existence honorable.
Dans l'aperçu qui vient d'être fait de la forme des
pièces de musique, quelques genres secondaires ont été
négligés, parce qu'ils ne sont que des divisions, ou
plutôt de légères modifications de genres plus impor-
tans; mais rien d'essentiel n'a été oublié.
TROISIEME SECTION.
DE L EXECUTION.
CHAPITRE XVII.
Du chaut et des chanteurs.
Lorsqu'un chanteur, cloué d'une belle voix, d'intel-
ligence, de sentiment, et qui a consacré plusieurs années
de sa vie à développer par l'étude les qualités dont la
naiure l'a pourvu, lors, dis-je, cjue ce chanteur vient
essayer pour la première fois en public l'effet des avan-
tages qui semblent devoir assurer son succès, et qu'il
voit tout à coup ses espérances déçues, il accuse ce même
public d'injustice, et celui-ci traite le chanteur d'igno-
rant et de cuistre. En pareil cas tout le monde a tort;
car, d'une part, celui cjui ne connaît ses moyens que
par l'effet qu'ils ont produit dans une école est hors
d'état d'en régler l'usage devant une grande assem-
blée et dans un vaste local ; et , d'un autre côté, le pu-
blic se presse trop de juger sur ses premières impres-
sions, n'ayant ni assez d'expérience, ni assez de savoir
pour discerner le bien qui se trouve mêlé au mal, ou
pour tenir compte des circonstances qui peuvent s'op-
poser à l'effet des talens du chanteur. Que de fois le
public a lui-même réformé ses jugemens, faute de les
avoir portés d'abord avec connaissance de cause! Tant
de choses sont à examiner dans l'art du chant qu'à
178 DE l'exécution. SECT. III.
moins d'en avoir fait une étude particulière, ou d'avoir
appris par la réflexion et l'expérience en quoi cet art
corisisie, il est bien difficile de ne point se tromper à
la première audition d'un chanteur, soit en bien, soit
en mal.
Pour chanter, il ne suffit pas de posséder une belle
voix, quoique ce don de la nature soit un avantage pré-
cieux que toute l'habileté possible ne peut jamais rem-
placer. Mais celui qui possède l'art de poser sa voix
avec aplomb et d'en ménager les ressources, tire quel-
quefois meilleur parti d'une voix médiocre, qu'un chan-
teur ignorant ne peut faire d'un bel organe.
Poser la voix, c'est coordonner aussi parfaitement
que cela est possible les mouvemens de la respiration
avec l'émission du son , et développer la puissance de
ce son autant que le comportent le timbre de l'organe et
la conformation de la poitrine, sans arriver jusqu'à l'ef-
fort qui fait dégénérer le son en cri. Lorsqu'il existait en
Italie de bonnes écoles de chant, la mi.sedevoix, comme
disaient les chanteurs de ce temps, était une étude de
plusieurs années; car on ne crojait point alors comme
aujourd'hui que le talent s'improvise. On jieut juger du
soin que les maîtres et les élèves mettaient à cette étude
par l'anecdote suivante.
Porpora, l'un des plus illustres maîtres de l'Italie,
prend en amitié un jeune caslralo son élève. Il lui de-
mande s'il se sent le courage de suivre constamment la
route qu'il va lui tracer, quehpie ennuyeuse qu'elle puisse
lui paraître. Sur sa réponse affirmative, il note sur une
page de papier réjilé les gammes diatoniques et chroma-
tiques, ascendantes et descendantes, les sauts de tierce,
de quarte, de quinte, etc., pour apprendre à franchir le«
CHA>. XVII. un CHAITT. 170
intervalles et à porter le son; des trilles, des groupes,
des ajipogiatures et des traits de vocalisation de diffé-
rentes espèces.
Celle feuille occupe seule pendant nn an le maître et
l'écolier; l'année suivante y est encore consacrée; à la
troisième, on ne parie pas de la changer; l'élève com-
mence à murmurer; mais le mai Ire lui rappelle sa pro-
messe. La quatrième année s'écoule, la cin([Liième la suit,
et toujours l'éternelle feuille. A la sixième on ne la
quitte point encore, mais on y joint des leçons d'articu-
lation, de prononciation et enfin de déclamalion; à la
fin de cette année l'élève, qui ne croyait encore en être
qu'aux élémens, fut bien surpris quand le maitre lui dit :
« Va, mon fils, tu n'as plus rien à apprendre; tu es le
« premier chanteur de l'Italie et du monde. « Il disait
vrai, car ce chanteur élaU_CiUlax:£jlj.
Ce n'est plus ainsi qu'on s'y prend maintenant. Un
élève qui se confie aux soins d'un maître ne se rend au-
près de lui que pour apprendre tel air, tel duo; lecravon
du maître trace quelques traits, quelques ornemens ; le
chanteur en herbe en attrape ce qu'il peut, et bientôt il
se compare aux pi emiers artistes. Aussi n'avons-nous
plus de Caffarelli. Il ne reste pas maintenant en Eut ope
une seule école où l'on emploie six ans à enseigner le
mécanismedu chant. Il est vrai que, pour y consacrer un
temps si considérable, il faut pren Ire les élèves dans une
extrême jeunesse, et que les chances désavantageuses de
la mue peuvent rendre inutile tout à coup le travail de
plusieurs années. La voix des castrats ne présentait point
les mêmes înconvéniens ; elle avait d'ailleurs l'avantiijçe
d'une mise de voix naturelle; aussi ces êtres infortunés
ont-ils été les chanteurs les plus parfaits qu'il y ait eus.
180 T)K l.'KXKCrTJO>. SECT. m.
lorsque l'opération n'a point été suivie d'accidens. Si
c'est un triomphe pour la morale que l'humanité ne soit
I plus soumise à ces honteuses mutilations, c'est une cala-
milé pour l'art que d'être privé de? ces voix admirables.
Ou ne peut se faire d'idée aujourd'hui de ce que furent
des chanteurs tels que Ballhasar Ferri, Sénésino, Fari-
nelli et plusieurs autres qui brillaient dans la première
moitié du dix-huitième siècle. Crescentini, qui a terminé
sa carrière de chanteur à la cour de Napoléon, et qui est
maintenant professeur de chant au collège royal deNa-
ples, est le dernier virtuose de cette belle école ita-
lienne.
Après les voix de castrats, les voix de femmes sont
cilles qui ont le moins à redouter la mue. Le seul effet
qui résulte de l'approche de la nubilité est un certain
amaigrissement du timbre, qui dure ordinairement deux
ou trois ans, aju'ès quoi la voix reprend son éclat et ac-
cpiiert une qualité plus pure, plus onctueuse qu'avant son
ailération. C'est depuis lâge de dix-huit ans jusqu'à
trente que les femmes jouissent de toute la beauté de
leur voix, quand des études mal dirigées n'ont point dé-
t rioré les dons de la nature.
On se rappelle ce qui a été dit concernant la voix de
j;oiLrine et la voix mixte ou de tète des hommes; les
femmes ne possèdent jias ce dernier genre de voix, ce
qui fait qu'elles ne peuvent monter avec autant de faci-
lité que les ténors. 3Iais si cet avantage ne leur est point
dévolu, elles ont celui d'avoir pi :;s d'égalité. Les voix de
femmes sont naturellement moins bien posées que celles
des hommes. On y remarque en généial une sorte de
petit silflemeut sourd qui précède le son et qui fait naître
l'habitude de prendre le son un peu en dessous pour le
CHAI", xvii. un CHAWa. 181
porter ensuite à son intonation réelle. Les maîtres ne
sont point assez î-.ttentifs à coirij^cr ce Jélaul; dès que
riiahitucie en a été contractée pendant un an ou deux,
le mal est sans remède. La rareté des voix de femmes
très jiures ajoute à leur mérite. Madame Eariili en élait
douée; madame Damoreau possède le même avantage.
Le travail le plus utile de l'art du chant, pour les
femmes, consiste dans le développement de la respira-
lion, qui est chez elles plus courte que chez les hommes,
ce qui est cause qu'elles respirent souvent mal à propos,
soit en altérant le sens de la phrase musicaîe, soit même
en nuisant à la prononciation.
Je me suis servi des termes porter le son, trilles,
groupes^ appo'^iatuie'', fioritures, etc.j il est nécessaire
que j'explique leur signification.
Si deux sons se succèdent en frappant sur chacun
une articulation du gosier, sans aucune liaison entre eux,
on nomme cet effet un détaché ou staccato. L'cirlicula-
tion de deux sons qui se font en unissant le premier au
second par une liaison du gosier, se \ïO\nn\e port de
voir. Porter le son, c'est unir un son à un autie par le
mouvement du gosier.
Le trille, qu'on appelle souvent improprement ca-
aence, est le passage alternatif et rapide d'une noie à la
note voisine. C'est un des effets les plus difficiles de l'art
du chant. Quelques chanteurs ont naturellement \c trille
dans la voix; d'autres ne l'acquièrent que par un travail
long et pénible.
he g/oupe est une suite rapide de trois au quatre sons
qui sert de broderie aux notes que le chanteur croit être
trop simples pour l'effet du chaut. Le groupe est un cr-
ie
183 DE l'exécutiom. sect. m.
neinent utile; mais certains chanteurs le prodiguent trop
et fiiiissent par lui donner un air commun,
\S<i/t o^idliLie est luie note lie goiit (|Mi se joint qiicl-
qiiel'ois à une note écrite et (jui prend la moitié de sa
valeur. L'ajjpo^ialure peut être pris en dessus ou en des-
sous de la note réelle; le goiU et le discernement du
ciianteur doivent le guider dans le choix de cet orne-
ment.
Fia ri litres est un mot qui désigne en général toute
espèce d'ori)enien(, et en particulier certains traits «om-
posés de gammes diatoni:(ues ou chromatiipies, de traits
en tierces ascendantes ou descendantes, elc. Les fiori-
tures sont indispensables dans le chant; mais il ne faut
point en abuser. Le mérite de la plupart des chanteurs
de l'école a- lueile se borne presque au talent d'exécuter
les fioritures a\ec rapidité. Autrefois le compositeur
écrivait le chant simjile et laissait à la saga<i!é des chan-
teurs le choix de ces fioritures, ce qui contribuait à la
var'éié de la musique; car tous les exécutans n'étant
point guidés de la même manière, ils choisissaient leurs
traits selon l'inspiratijn du moment et le même morceau
.s'offrait presque loiij;)nrs sous un aspect différent. Lois-
quci les écoîes de chant commen'èrenl à sedéléi iorer, les
clKinteurs furent moins capables de choisir "ux-mènies
les ornemcns convenables à chaque genre de morceau;
la chose on vint au point q'ie Rossini se crut obligé d'é-
crite pres(|ue toutes les fioritures dont il voulait em-
bellir ses mélodies. Cette méthnde eut d'abord un résultat
assez avantageux, relui de dissimuler la faiblesse des |
chnnteurs en leur faisant débiter une leçon toute faite; |
mais, en définitive, elle eut l'inconvénient de rendre
CHAP. XVIT. nu CHANT. 183
la musique monotone en la présentant tonjonrs sous
le même aspect, et de plus, el'e li:il)itiia les clianteiirs
à ne plus se ineltie en peine de oherelier des foimes
nom elles d'oineinens, puisiin'iU en trouvaient de tonles
faites à la lianlenr <Ie lenrs moyens d'exécntion. Cela
acheva de ruiner l'école dont il ne reste presque plus de
traces.
Le mécanisme (]u cliant, même le plus parfait, est nnc
partie indispensable du méiile d'un bon chantei;r; mais
ce n'est pas tout. La mise de voix la plus sati^faisanie,
la respiialicm la mieux réj;lée, l'exécution la plus pure
des ornemens <\y\ diant, et, ce qui est bien rare, l'intona-
tion la plus parfaite, sont les moyens par lesquels un
grand chanteur exprime le sentimceit dont il est animé,
mais ce ne sont que des moyens; celui (jui se persuat!e-
rait que tout l'art du chisnteur y est renfermé pourrait
quelcpiefois causer un plaisir tran(piille à son auditoire,
mais ne lui ferait jamais éprouver ;le vives émoticins. I.e
granJ chanteur est celui qui s'identifie au personnage
qu'il représente, à la situation où il se trouve et aux
sentimens qui doivent i'agiler; (pii s'abandonne à des
inspiratioris mouïcnlances, comme a dû faire le conipo-
sitcur en écrivant la muii(jue rpTil exécule, et rpii ne né-
glige lien de ce cpii peut contribuer à l'effet, non d'un
morceau isolé, mais d'un rôle entier. La réunion de
toutes ces qualités compose ce qu'on nomme rr.r/;/".v-
slon. Sans expression, il n'y a jamais eu de grand chan-
teur, quelle que fût la pcriection du mécanisme de son
cliant; l'expression, quand elle était réelle, et no^i inie
espèce de charge telle (pie la font quelques acteurs, a
souvent lait pardonner une exécution incorrecte.
Les chanteurs célèbres du dix-huitième siècle ne fu-
184 DE l'exécution, 8KCT. III.
rent pas moins renommés pour leur faculté d'exprimer
que pour la beauté de leur méranisme. On en rapporte
des choses qui paraîtraient fai)nleiises aujourd'iuii. On
connaît l'histoire de Faririelli, dont la voix et i'expi'ession
loucliantes guérirent le roi d'E-^pagne, Philippe V, d'un
accès de mélancolie no'rre qui Taisait craindre pour sa
raison. Raff, sauvant la vie de la princesse Bdinonte,
mise en danger par les suites d'un chagrin violent, en
lui faisant répandre un torrent de larmes, atteste encore
quelle était la puissance d'expression de ces chanteurs
prodigieux. Sénésino, chanteur d'un mérite extraordi-
naire, oubliant son rôle pour embrasser Farinelli qui ve-
nait de chanter un air avec une perfection miraculeuse;
la Gabrielli, toucliée jusqu'à laisser paraître l'émotion
la plus vive, après avoir entendu Marchés! chanter un
canlahilc^ et Crescenliui faisant verser des larmes à Na-
poléon et à toute sa cour dans Romeo et Julielle, sont
encore des preuves de la ]juissance d'expression que pos-
sédaient ces dieux du chant. Quelques momens où ma-
dame Malibran sait éviter l'exagération, pour rester dans
l'expression vraie et dans lesquelles son exécution eslir-
réj)ro( hable, ont pu donner l'idée de ce genre de mérite;
mais si j'en juge par Crescenlini, que j'ai entendu, les
chanteurs dont je viens de pailer soutenaient, pendant
toute la durée d'un rôle, cette perfection que madame
Malibran ne nous a fait entendre qu'à de certains in-
tervalles.
Les chanteurs français n'ont jamais eu la réunion de
qualités qu'on a admirées dans les Italiens; un seul,
doué d'une chaleur, d'une verve entraînante el d'un
goût délicat, en a beaucoup approché sous de certains
rapports et possédé des qualités particulière» qui, dans
CHAP. XVII. l)li CHANT. 185
un aulre genre en ont fait un des chanteurs les plus
étoniians qui aient existé. Ce chanteur était Garât. Ja-
mais ou ne fut organisé plus henreusement et jamais on
ne courut l'art du chaut d'une manière plus large. La
pensée de Garât était toujours ardente; mais il savait
toujours la i-égler par l'art et par la raison. Un air, un
duo ne consistait pas, selon ce grand chanteur, dans une
suite de phrases bien exécutées et même bien senties; il
lui fallait un plan, une gradation, qui n'amenât les grands
eflets que lorsqu'il en était temps, et lorscpje la jiassion
était ai rivée à son développement. Rarement on saisissait
sa pensée lorsque, discutant sur son art, il parlait ilu
plan d'un morceau de chant; les musiciens même se per-
suadaient qu'il y avait de l'exagération dans ses idées à
cet égard; mais lorsqu'il joignait l'exemple au précepte,
et que, voulant démontrer sa théorie, il chantait un air
avec les difCérentes couleurs qu'on pouvait lui donner,
on comprenait tout ce qu'il avait fallu de réflexions et
d'études pour arriver à celle perfection dans un art qui
ne semble destiné, au premier aperçu, qu'à procurer des
jouissances à l'oreille.
Une des qualités les plus précieuses de Garât était la
beauté de sa prononciation ; ce n'était pas seidement
une netteté parfaite d'articulation, sorte de mérite fort
rare, c'était en lui un moyen puissant d'expression. Il
est juste de reconnaître que cette qualité appartient pUis^
à l'école du chant français qu'à tout^e^autre, et que Gluck
V avait trouvé le principe du genre (ju'il adopta pour
notre opéra. Il y a, dans la prononciation de la langue
I française, quelque chose d'éner|^iqiie qui n'est peut-être
j pas favorable à l'émission douce et gracieuse de la voix,
mais qui est très jroju'e à l'e.pression dramatique, vîal-
^-. _ ......._.^„.
156 DE l'exécution. sect. m.
heureusement quelques acteurs de l'Opéra, tels qu^
Laine et Adrien, orM abusé de ce caractère particulier de
la langue française et ont fait dégénérer en charge celte
expres-inn dramatique. Dans leur manière de sc^Uilei: in
parole, la voix ne sortait que pai' éclats et avec effort, ev.
sorte qne les sons ne se prodnisaient plus que sous l'as-
pect de cris souvent fort désagréables. Aucune appa-
rence de mise de voix ni de vocalisation, aucune trac-
de ce qu'on nommait en Ilaîîe l'art du chant, ne se fai-
saient apercevoir dans la manière qui s'était établie •.
l'Opéra. C'était, si l'on veut, de la déclamation-jxotée ;
mais ceux qui bornaient leur art à celle déclamation n-
pouvaient passer pour cliantenrs. Haratseid sutpronoii-
rer d'une manière dramatique sans s'éloigner des bclle-i
traditions de l'écnlf véritable i\n chant, et sut dotuier i
son chant une grande expression dramnlifpie sans né
gliger tontes les ressources de la vocalisation.
Les conditio?is du chant français diffèrent à certains
égards de celles du chant italien. Une voix pure et so-
nore, une proimncialion nette et régniière et de l'expres-
sion dramatique, xoilà tout ce qu'on a demandé pendant
long-temps aux chantcius français. Un piéjngépeu rai-
sonnable avait fait considérer les traits et les ornemens
comme peu convenables à notre langue; insensiblement
l'Opéra -Comique s'est aflranchi des obstacles qu'on lui
opposait sous ce rapport ; mais l'Opéra avait toujours ré-
sisté; enfin il a Cvîdé a l'enqjire de la mode et ses progrès
ont été rapides en ce genre. On doil l'en féliciter, puis-
que le moment était venu où la déclamation lyiique
n'intéressait plus les spectateurs dont le goût avait pris
une autre diieclion depm's qu'ils s'étaient accoutumés à
la, musique italienne.
CHAP. XVII. DU CHANT. 187
Cependant il faut seganlcr de tomber d'un excès dans
un autre; il csl lion de coiisei-.er îi la iniisicjiie d'un pa^s
sa physionomie parlieulière ; une iuiilation servile n'est
ianiais une conquête. L'nsaf;e raisoruiable des ornemcns
di! chant d;ti)S le style français est nécessaire; l'excès se-
rait nuisible. Il y a dans nos iiahitndes tliéàlrales un
penchant.i\_la lai.son tpji ex( lut ces niorceinx de placage
qui n'ont d'arlrc !)nt que de faire admirer la flexibilité
d'mi gosier. Admettons les traits et lonle espèce d'orne-
niens, mais ne bannissons pas nos formes dramalifi'.ies
auxquelles il ne man(]ualt qisedes chants plus faciles et
plus élé^ans. Ne perdons pas surtout la tradition de ce
beau i:écii,;vliCà la manière de GIih k, dont les composi-
teurs italiens reconnaissent aujourd'hui si bien le niéiite
qu'ils cherchent à s'en rapprocher autant ([u'ils peu-
vent.
Il est un point sur lequel rautorilé qui a régi jusqu'ici
lesartsen France n'a point encore porté un coup d'oeil
assez atlenlil; c'est la préparation et la conservation des
chanteurs. Ce que je r.onnne la préparation des chan-
teurs consiste dans le choix des sujets et dans leur édu-
cation hygiéni(pie. Si les sujets qu'on choisit pour en
faire des chanleîirs se pré-^enlaicnt avec des voix tciites
faites, à l'abri des révolu.tions p!iysi(jues qui modifiant
les individus dans la jeunesse, rien ne seiail plus faciie
que de faire ce choix. ?]ais il n'en est point ainsi; sur
cent individus qui ont une jolie voix dans leur enfance,
quatre-vingt-dix la perdent dans la mue, ou ne la re-
trouvent que médiocre quand elle a changé de timbre;
et sur les dix (jui ont été plus favorisés par le sort, on
n'est pas toujours certain iVen remontrer un qui réu-
nisse à 1.1 beauté de son organe un sentiment assez \if^
188 DE L EXÉCCTION. 9ECT. lit.
assez profond pour qu'il devienne ce qu'on appelle à
jn?te litre un chanteur. Ce senlitnent se manifeste dans
renfnnce de manière à cire facilement aperçu par un
maître pourvu des qualités nécessaires à l'exercice de
snii arl; deux sons sulfisenl poiu* le faiie reconnaître.
]\lais celui chez lequel on le découvre sera-l-il un de
ceux qui conserveront leur voix? Voilà ce que nul signe
extérieur ne fait apercevoir. C'est cette incertitude qui
a été l'origine de la castration des individus du sexe mas-
culin.
Rebuté par une multitude d'essais infructueux faits
sur des enlans de ce sexe, on a pris le parti de ne plus
admettre dans les écoles publupies de chant que des
adultes, avec Icsipiels on n'a point les mêmes risques à
courir. Mais ici une nouvelle difficulté se présente, dif-
ficulté plus Jurande parce qu'elle est sans remède et pres-
que sans exce|)lion; c'est que les individus qui arrivent
à l'âge de jiniierlé sans avoir jiosé les bases de Jeur édu-
cation musicale par de longues études ne parviennent
presque jamais à .«eNenir musiciens, soit sous le rapport
de la l'ctiue de la musirpie à première vue, soit sous
celui du sentiment de la mesure. Quelle que soit la beauté
de la voix, sa flexibilité, son timbre et même quel ([ue
soit le sentiment de justesse d'intonation et d'expression
dont un chanteur commencé dans l'adolescence soit
pourvu, il ne sera jamais qu'un artiste incomplet, dont
l'cxéculion n'offiira point de sécui ité, parce qu'il ne
sera guidé que par une sorte d'instinct qui peut être
souvent en défaut.
Placé entre dcuxécueils également redoutables, il est
nécessaire que le gouvernement, qui fait les frais de l'é-
ducation musicale des chanteurs, ne néglige aucune
C0A1». XVII. UU CUANT. 185)
chance de succès et qu'il coure beaucoup de risques en
pure perle pour trouver quelques résultats heureux.
Mais il ne faut pas qu'il s'en remette au hasaicl pour se
proi'iu'er les sujets sur lesinieLs on doit faire les essais,
car il pourrait être long-temps déçu dans ses espérances.
Voici comment il fautirait cpi'il s'y prît.
L'expérience a démontré (pie les voix sont, eu géné~
rai, distribuées en France par cantons, comme les vi-
gnobles. La Pi(jardi£_Xauiuiil,-des basses plus belles et en
])lus grande quantité qu'aucune autre province; presque
toutes les belles basses qui ont brillé à l'Opéra et dans
les autres établissemens musicaux étaient picardes. Les
ténors, et particulièrement ceux qu'on nomiue haute-
contres, se rencontrent en plus grand nombre dans le
Languedoc, et surtout à Toulouse et dans ses environs,
qu'en aucun autre lieu de la France. Les voix de cette
espèce y sont d'une beauté singulière, et les chances de
conservation, après la mue, y sont beaucoup plus favo-
rables qu'ailleurs. Enfin, dansIti.Boiu'gngncct la Franche-
("omlé, les voix de l'ejimies ont jjIus d'étendue et un tim-
bre plus pur que dans toutes les autres provinces. Sans
cherrher à explicpjer cette singularité, il suffit de la con-
stater pour se convaincre de la nécessité d'aller chercher
dans les diverses parties de la France qui viennent d'être
indicpiées les enfans qu'on destine à la profession de
chanteurs, et de confier la recherche de ces sujets aux
soins d'un homme éclaiié qui sente bien l'importance de
sa mission. Nul doute qu'au moyen de semblables pré-
cautions on n'obtint, au bout de sept ou huit ans, un
certain nombre de bons chanteurs dont le besoin se fait
sentir davantage chaque jour.
Pour parer à ce besoin de chanteurs, on s'empresse
190 X)£ l'exécution. »ect. m.
ordinairement de produire sur la scène des élèves dont
l'édnralion musicale est à peine ébau<liée; celte fimeste
niélliode se prati(]ue non-setilemcnt en France, mais en
Italie; et tel chanteur reste dans la médiocrité toute sa
vie, faute d avoir employé deux ou trois années à per-
fectionner ses éludes. Ainsi l'on dissipe infruclueuse-
ment ce qui aurait pu fournir des ressources durables.
C'est à metire un terme à ce mal déplorable que les
gouvernemens qui se font les prolecleuis des ai ts de-
vraient s'appliquer; en un mot, il ne suffit pas de pré-
parer des chanteius, il faut les conserver, ce qui exiye
des soins de plus d'une espèce. Autrefois la métliot'e
suInIc par Laine, Adrien et tous ces maitrrs qu'on appe-
lait/>7v</l?.y.icM/.v (le flc( [(irnation lyrique, avait pour cllet
inévitable de détruire les voix dans leur principe, par
l'ignorance où l'on était de ce (|ui concerne la mixe ilc
voix, lu vocttlixalio/i, et plus encore par l'exagération
de force qu'on exigeait d'élèves dont la constitution
physique était à peine formée. L'émission du son ne se
yfaisaut jamais d'une manière naturelle et la force des
poumons étant mise sans cesse en jeu, les voix plus ro-
bi:slcs ne pouvaient résister à la fatigue d'un trav.iil
pour lequel les forces herculéennes d'Adrien avaient éié
insulfisantes ; aussi a-t-on vu pendant plusieurs années
f|ne des voix franches et bien îimbiées, ()u'on n'était
parvenu à se piocurer qu'avec beaucoup de peine, ex|)i-
ra eut avant d avoir pu sortir de lEcoie roynie de Mu-
sique. Enfin ce mal a disparu avec la musique qui y
donnait lieu et avec les professeurs (|ui étaient chargés
de propager la tradition de celle-ci. Mais tout n'est jj.'.s
fait.
Les soins qu'exige la conservation de la voix doivent
CUAP. XVII. DL' CUATVT. 191
commencer du moment de sa première émission; or il
esl à rein:\rqier (|ireti dehors de i'arl du chant il y a une
pirlie préliminaire de la musi((ue qu'on nomme la sol-
inisa/iori, la(]uel!e est destinée à former «\'!ial)iles lec-
tcins, par l'exéc-lion de certains exercices gradués, sur
tontes les dilticullés de la mesure et de l'intonation. L'é-
lude de ces exercices se fait ordinairement dans l'en-
îaïue, sous la direction de mallies qui, pour la plupart,
sont étrangers à l'art du chant. Aucun soin n'est apporté,
soit dans la rédaction, soit dans le choix de ces exercices,
sous I» rapport de l'étendue des voix; en sorte qu'il ar-
rive pres(|ue toujours qu'on fait chanter les enfans hors
des limites que la nature leur a assignées. Les efforts
(lu'ils sont ohligés de faire pour atteindie aux intonations
aij^uès (pi'on leur fait chanter ont hienlôt détruit le prin-
( i]>e de la voix et forcé les ligamens du gosier. Quand
ce mal esl fait, il n'y a plus de leniède, et tout l'art du
ir.ondc ne peut rendre à ces enfans le velouté de la voix,
car ils l'ont perdu pour toujours. Ajoutez à cela que les
j)rccantions nécessaires pour apprendre dès l'origine à
poser le son avec la respiration, à ne point respirer trop
souvent et à ne pas fatiguer la poitrine par une tenue
trop piolongée de Ihaleins, tout cela, dis-je, est com-
plètement ignoré de la plupart des maîtres de solfège.
A])rès deux ou trois années d'exercice, ils arrivent à for-
mer de bons lecteurs de musique; mais ils ont détruit ou
alieré la voix de leurs élèves, et c'est en cet état qu'ils les
livrent aux soins des professeurs de chant, dont l'ai t ne
peut rendre à ces pauvres jeunes gens ce qu'ils ont perdu
sans retour.
Ce qk'il faudrait faire pour mettre un terme au mal
que je viens de signaler, le voici : la lecture de la mu-
11)2 DE v'EXÉCrïIOÎC. SECT. 111,
sique e»t indépendante de l'art du chant; il est donc-
inutile de réunir dans l'élude deux choses qui se sépa-
rent naturellement. Les leçons du professeur de solfège
se bornant à faire tire la musique en nommant seulement
les notes au lieu de les chanter, et à diviser avec exacti-
tude tous les temps de la mesure et toutes les combi-
naisons des notes, atteindraient sûrement le but qu'on
se propose dans cette étude préliminaire. A. l'égard dtf
l'intonation, à laquelle il faut accoutumer l'oreille, ce se-
rait l'affaire du professevir de chant, qui y disposerait
ses élèves avec les précautions convenables. Dès le pre-
mier moment qu'un enfant essaierait d'émettre des sons
avec la voix, il serait prémuni contre les écarts d'une mé-
thode vicieuse, et tout concourrait a tirer le meilleur
parti possible des disjiosilions primitives de l'organe.
Qu'on ne croie jjoint, au reste, qu'il s'agit ici d'une
théorie nouvelle de la division des études musicales; car
c'est ainsi que ces études se faisaient en Italie, quand
l'art du chant y était cultivé avec succès. L'expérience
autant que la raison déuionire la nécessité d'adopter
cette méthode. L'intérêt seul des maîtres de solfège, pour-
rait en souffrir, car ils aiment assez qu'on les prenne
pour des maîtres de chant. Je ne doute point que le
temps n'amène cette amélioration importante dans les
études musicales, qui ont fait de fort giands progrès
en France depuis plusieurs années.
«UAP. XTUI. JEt irt»Thl MENTAL. 193
GHAPITRy: XVIII.
De rexéciitioD instrumentale.
§1.
De l'iiit déjouer des instrurnen».
L'exécution inslriiinontale se divise naturellement en
indivitluelle et en collective. Elle se compose de l'art de
jouer des Instrumens, et de celcii d'accorder, par la me-
sure et le sentiment, un certain nombre d'exéculans
réunis. Il est nécessaire de traiter séparément de chacune
de ces choses.
On sait que les instrumens se divisent en cinq espèces
principales: la première se compose des instrumens à
archet; la seconde, des instrumens à cordes pincées; la
troisième , des instrumens à clavier; la quatrième, des
inslriunens à vent, et la cinquième, des instrumens de
percussion. Chaque f^enred'instrinnens exige de? qualités
parlicullères pour être bien joué; ainsi les instrumens
à archet demandent avant tout une oieille délicate pour
la justesse des intonations, qui ne se forment qu'en
appuyant les doigts sur les cordes, et beaucoup de sou-
plesse dans le bras pour le maniement de l'archet. On
ne peut parvenir à une bonne exécution sur les instru-
mens à cordes pincées qu'autant que les doigts sont
pourvus d'une grande énergie pour résister à la pression
des cordes et pour en tirer de beaux sons. Les instru-
mens à clavier , dans lesquels les intonations sont toutes
faites, exigent surtout des doigts longs, soupirs, agiles
194 DE l'eXÉCUTIOIT. 8ECT. lU.
et forts. Pour acquérir une certaine habileté sur les in-
striiinens à vent, il faut la même justesse d'oreille que
pour les instnimens à conles, et , de plus, la lacnlié de
iiiOU'oir les lèvres avec facilité , d'en modifier la pression,
et de régler la force du souffle, (pialités qu'on nomme en
général Vonboachiiie. Quant aux instrumens de percus-
sion , il semble au premier aspect que tout homme ro-
buste doit être pourvu des qualités nécessaires pour en
jouer; oependanl on remarque des différences notables
entre tel ou tel tiud)alier, bien qu'ils aient fait les
mêmes éludes; il est nécessaire de pos-^éder, pour jouer
de la timbale, une ccriaine souplesse de poignet et un
certain tact qu'on ne peut analyser, mais qui ne sont pas
moirs réels.
Dans l'énumération des qualités nécessaires pour bien
jouer des instrumens , je n'ai point parlé de la sensibilité
ni de l'imagination, principes de tout lalenl, parce qu'il
ne s'agit en ce moment (|ue des dispositions physiques;
en vain un pianiste ou im hautboïste seraient-ils pour-
vus de la sensibilité la |)lus exquise, si l'un a des doigis
raides ou mous, et l'autre des lèvres ])lates et sèches; ils
ne deviendront pas plus dé grands instrumentistes que
t'hounne le mieux organisé ne de\iendrait un chanteur
s'il n'avait pas de voix.
L'exécution des instrumens à archet, tels que le violon,
l'alto, le violoncelle et la contrebasse, se compose de
deux parties distinctes : le doi^lé et /t? niaiiieincut de
l'arc/i( t. Le doigté est l'art de former les intonations
par la pression des doigts sur les cordes contre la partie
supérieure du manche, qu'on nomme lu louche. Cette
pression, qui raccourcit plus ou moins la longueur
vibrante de la corde, ue peut produire des sons purs
CBAP. XVm. JEU INSTRUMENTAL. 195
qn'aninut qu'elle est trt-s énergique, car une corde ne
vibre d'ime maiiii-re salisfaisniitc (|ue lorsqu'elle esl fixée
très solideinenl sur ses points d'altaclie. Il est donc né-
cessaire qu'un violoniste, i\n vioIouK'llisIe, appuient les
doij;lsavec i)eauiou|) de force sur les cordes, malgré la
sensation douloureuse que leur fait éprouver cet exercice
dans le coinmeocemeut de leurs éludes. Il est des artfsles
dont le l)OUt des doigts finit par se garnir d'une sorte de
ca!us ou de durillons par un long usage de leur instru-
ment; il ne parait pas qu'il eu résulte d'inconvénient
pour la nature du son.
Un autre point important du doiglé est ]a /'r/x/esve ,
c'est-à-dire l'art de placer les doigts sitr les cordes de
manière à rendre les intonations justes. Tous les violot;s
ou tous les violoncelles n'ont pas les mêmes dimension.^;
certains luthiers ont adopté pour ces instrumens des
formes plus grandes que d'autres; or l'écavtement des
doigts pour former les intonations est toujours en raison
de la longueur du maiiclie du violon, de l'alto ou du
violoncelle; car il est évideiit (pie la longueur des cordes
est proporlinnuelle aux diniensujus de l'instruiiient. Plus
celie longr.eur est considérable, plus l'écarlement doit
cire grand pour passer d'un sou à un autre; moins elle
est étendue, plus il faut rapprocher les doigts. Une
oreille délicate avertit prompteuienl l'exécutant des fautes
qu'il commet contre la justesse; mais cela ne suffit pas :
pour jouer toujours juste , il faut être |)Ourvu d'une cer-
taine disjjObUioii d'adresse, et avoir fait un long exeicice
des intonations. Il y a divers degrés dans la manière de
jouer jii.slc ou faux. Une justesse approximative est la
seule il îacjuelle parviennent les intrumentistes ordinaires;
la justesse absolue n'est le partage que d'un très petit
it^
19G DE l'EXÉCUTIOW. SECT. III.
nombre d'artistes. Elle est surtout difficile à acquérir
dans ce qu'on nomme les passages à dnithle cnrâe.
Dans ces sortes de traits, c|ui produisent l'effet de la
rétuiion de deux voix, l'archet est j)osé sur deux cordes
et fait résonner à la Icis deux intonations qui sont le
résultat de la combinaison des doigts de la main gauche.
Outre l'influence nécessaire des doigts sur la justesse, il
parait que l'archet en exerce une autre par la manière
d'attaquer la corde , et que la position de la main gTuche
étant fixée pour un son d'une manière invariable, l'into-
nation peut être ou plus haute ou plus basse en raison du
mode de pression de l'archet. C'est du moins à celte in-
fluence de J'archet^ue le célèbre violoniste Paganini
attribue la justesse fort remarquable de son jeu.
L'action des doigts de la main gauche sur les cordes
n'a d influence que sur la justesse des intonations et sur
la pureté des vibrations; ipian; à la fpialité des sons, plus
«)U moins douce ou foite, plus ou moins dure ou moel-
leuse, elle est le résultat du maniement de l'archet par
la main droite. Ce maniement, qui, en apparence, se
borne à tirer et pousser alternativement la Irèle machine
sur les cordes, est d'une diffiçullé excessive. D'abord
l'expérience a démontré qu'on ne peut mettre dans un
\ ensemble parfait les mouvemens de l'archet et ceux des
doigts qu'en affaibjissant autant que possible l'action
du bras qui dirige cet archet , de iïianière que le poignet
agisse librement et sans raideur. Si l'on examine les
mouvemens d'un violoniste habile, rien ne paraît plus
facile que cette indépendance du jioignet; mais il faut
plusieurs années d'études pour l'acipiérir. Ce n'est pris
tout : le lire et le pnu^sè de l'aichet sont susccptil)lc3
d'une multitude de combinaisons qui ont aussi leurs di(-
l:ii.\l-. WUl. JEU IKâTRVMJiNTAl,. 197
ficiiltés. Quelquefois plusicitrs sons se covilent par le
inèiiie (OUI» (rarrliel, ce qui exi^e beaucoup de ménage-
ment tians le développement du bras; eu d'autres occa-
sions, toutes les noies se font dans un mouvement rapide
par un nombre de coups d'archet éj^al à celui des notes,
( e (|ui demande beaucoup d'ensendîle entre les monve-
liiens des doij^ls de la main gauche et ceux de la main
droite; d'autres combinaisons olfrent des suites de sons
.illernalivement coulés et détachés; enfin il est des suc-
cessions de notes qu'on détache d'un mouvement rapide
par un seul coup d'archet tiré ou poussé : ce dernier
genre de trait, (pi'on nonuiie staccato, demande une
habileté particulière.
Ce n'est point seulement à vaincre ces difficultés de
mécanisme que l'artiste doit s'atlacher; l'art de modifier
la qualité des sons doit être aussi l'objet de ses études.
On croyait autrefois ne pouvoir obtenir une bonne exé-
cution (|u'au moyen d'un archet très rigide, parce que
les effets étant peu variés, on n'exigeait de l'instrumen-
tiste qu'un jeu large et franc, où prestpie tous les sons
étaient détachés. Pour obtenir cette rigidité nécessaire,
on avait imaginé de donner à l'archet une courbe con-
vexe, à peu près semblable à celle d'un arc, dont le crin
formait la corde. Plus lard on s'aperçut qu'un archet
flexible est plus propre à produire des sons moelleux et
purs qu'un archet raide et tendu; la baguette fut d'abord
remise en ligne d'oite, et finit par prendre la courbe
concave qu'on lui voit aujourd'hui. Les artistes modifient
maintenant la légère tension de leur archet par le moyen
d'une vis, en raison de la qualité de leur jeu et des traits
avec les(piels ils se sont familiarisés. Au moyen de cet
arche! flexible et léger, les effets qu'on peut produire
19S DE l"kxecutio>. sect. m.
sur le viulon ou sur le \ioIonrelle sont de beau'-oup d'es-
pèces. Près du chevalet , les cordes ayant une tension
très énergique, l'anhet ne les peut mclîre dans un élat
de \ibralion complile qu'avec beaucoup de difCcidté, et
les sons qu'elles profluisent, quand elles sont touchées
dans cet endroit, ont quelejuc chose de nasoi^d et de res-
semblant à la vielle. Si l'on écarte un peu l'archet de
cette position, les cordes rendent un son volumineux,
ninis peu agréaijie et même dur; cependant on lire bon
pirli de ces sons dans les trnits délachés qui demandent
de la force. Plus l'arclict se rapproche de la touche, plus
les sons prennent une qualité moelleuse, mais m(<ins ils
ont d'inlensilé. On joue aussi quelquefois sur la louche;
dans celle position de l'archet, les sous deviennent Irès
doux, mais ils sont sourds. A. mesure que l'archel s'éloi-
gne du chevalet, l'aitisle diniinue la foice de pression
sur les cordes. L'inclinaison plus ou moins considérable
de la baguetle sur les cordes , modifie aussi la ipialilé des
sons. De tous ces faits, qui ont été successivement ob-
servés, résidie la variété inépui.sable d'effets ([u'un {rrauf!
artiste parvient à tiier de son instrument. Peut-ètr;-
reste- t-il encore beau(Oiip à découvrir pour porter
l'exécution des inslrumens à archet aussi loin qu'tllc
peut aller; cependant sous le rapport de la variété d'et-
fets et de la difficulté vaincue, Pjigaiiini parait avoir
porté l'art déjouer du \iolon à ses dernièies limites.
Le violon ne fut pendant long; temps q-i'un instru
ment de ménétrier; son u.sage se boriuiil à jouer des airs
populaires ou à faire danser. Phis lard on linlroduisil
dans l'orchestre , où il tient maintenant la première
place; mais ceux qui en jouaient avaient si peu d'habi-
leté que T.nl'v s? p'.i'g':nit c!r r.c pou'o'r hrsardo»' de
C:UAI'. XVIIJ. JT.V INSTRUMENTAL. 199
placer les passages les moins d-lficiles dans ses compo-
silions, ilans la crainlo qiu: les synijilionisles ne pussent
les e\éciHrr ].a Tiance, l'ilalie et l'Allemagne ne possé
(laiertl pas luie seule éio'c de vi< Ion, Le premier (pii
rom|)rit ce qu'on pouvait faire de cet inshumeiit fut
Corelli. Ce violoniste italien 'écul à la fin du dix-sep-
tième siècle et au eommeruemeni du dix-hnilième. Ses
sonates et ses rofici r/os sont enroie considérés connue
des modèles classiques. Il y inliodiiisit une multitude
de traits et de combinaisons de doif^lé et de coups d'ar-
chet dr)nl on n'avait pas d'idée avant lui. Ses successeuis.
Viv^aldi et X<J£tini, étendirent le domaine de rinstiument
(ju'il venait en quel(|ue sorte de créer; Nardini, Pujjuani,
et beaucoup d'autres violonistes italiens, qu'il serait
trop long de nommer, perleclionnèient successiveinen!
l'ait de manier l'archet et celui du doiglé. Enfin A iotti
recula les bornes qu'on avait assi^n;^es au violon, tant
par son exécution prodigieuse fpie par la beaulé de ses
compositions, qui réunissent la nouveauté et la grâce
des chants, l'expression, la largeur des proportions et
le biillant des trails. Les concertos de Violti sont les
plus beaux qu'on connaisse.
Les violonistes allemands se dislinguent dejiuis le mi-
lic!) du dix-huitième siècle par Ihabilelé de leur main
ganch.e; mais ils tirent peu de son de l'inslruinent , et
leur maniement d'archet est en général peu développé."
L'Italie et la France possédaient de grands violonistes
long-temps avant que l'Aliemagne en eût de remarcpia-
bles. Le premier qui fonda une école allemande du
violon lut Benda. Vers 1790, Eçk se plaça à la tèle des
violonisles allemands. On ciiait aussi dans le même
temps rra?nzel, dont îe talent agréable était renfermé
200 DE L l:XtCLT10X. Sh-CT. III.
dans de plus jjelites proportions. Aujourd'hui, Spnhr
passe pour être le chef des vicdonisles de l'Allemagne;
il possède en effet beaucoup d'habilclé; mais son exé-
cution uiL^ii.U.uide n'a pu obtenir de succès en France,
pays où les violonistes sont jugés le plus sévèrement.
Les violonistes français sont célèi)res dans ioute l'Eu-
rope depuis plus d'un siècle. Lecicre, dont la manière
appartenait à l'école de Corelli, fui le premier qui par-
vint à lutter sans désavanlagc avec les grands artistes
italiens. La musiipie qu'il composa pour son instrument
fut considérée long-lemps comme un modèle classique;
elle n'est pas sans difficultés pour les violonistes de nos
Jours, malgré les progrès immenses qu'on a faits dans
l'art déjouer du violon. Guillcmain, Pagin et quelques
autres (pii vinrent après Lcclere, eurent plus de grâce
dans leur jeu, mais moins de largeur dans le sl\le et
dans le son. Gaviniès, qu'on a surnommé le Tarluii
fianrais, fut digue de ce nom par les grandes projmr-
lioiis de son jeu. L'art du maniement d'archet, qu'on
avait négligé en France jusqu'à lui, pour s'occuper de
la main gauche, atliia son attention, et il y acquit une
habileté t|ue Violti lui-même admirait. Les éludes (pi'il a
publiées, sous le litre des v n.^'.-quatre mcilinces , res-
teront comme un monument de son talent.
Après lui commence ce qu'on peut appeler l'école mo-
derne. Kreut/cr, Rode et Eaiilot en sont les chefs. Le
premier n'avait point fait d'études cla>siques; mais son
heureuse organisation lui révéla le secret d'une sorte de
style chevaleresque, brillanl, léger et plein de charmes.
Plus correctj plus pur, le talent de Roçjje fut un modèle
de peifeclion. Admirable par la justesse de ses intona-
tions et l'art de chanter sur son ins'rument, il se faisait
C:nAl». XVlir. JEU INSTRUMENTAL. 201
aussi remarquer par la prestesse de son doigté; on ne
pouvait lui reprocliei que de manquer un peu de variété
dans le maniement de son arcliet. I^es deux granils ta-
lens que je \iens de citer ne sont déj » plus que des sou-
venirs ([iM appartiennent à l'histoire de l'art, et Baillot,
leur contemporain, Baillot, répertoire vivant de toutes
/ les traditions classiques de la France et de Pltalie,
' Baillot est encore debout, brillant de jeunesse et de
verve, grandissant avec l'âge, et semblant défier à la
lois et le siècle qui le fuit et celui qui s'avance. C'est à
ce grand artiste f|u'apparlient surtout la gloire d'avoir
établi en France l'école de violon la plus brillante qu'il y
i^^it en Europe, tant par les élèves qu'il a formés que par
l'exemple qu'il donne d'un mécanisme admirable et du
style le plus élevé. Sa variêJjè çL'ai'cbet est prodigieuse;
mais son habileté n'est en lui cpi'up moyen de seconder
ses inpirations, qui sont toujours piolondes ou passion-
nées. Baillot donne surtout l'essor à son talent lorsqu'il
exécute la musique des grands maîtres, et lors(jue son
auditoire partage ses émotions. Nul n'a aussi bien ana-
Ivsé que lui les qualités de style propres à l'exécution
delà musique des grands maîtres; aussi peut-on alfirmer
qu'il pst Jp plus varié dps-viftLjni.'Upf; ^ lorsque dans la
même soirée il fait entendre des quatuors ou des quin-
tetlis de Bocchérini , de Haydn, de Mozart et de Beetho-
ven. Chacun de ces compositeurs prend sous sa main le
caractère (|ui lui appartient, et l'on croit entendre suc-
^ cessivement des vinlonistes différens.
Aux trois grands artistes que je viens de nommer, il
faut joindre Lafont, (pu, sans avoir ce qu'on nomme
communément </t; Cccole, c'est-à-dire, une théorie de
l'archet et du doigté, s'est fait, par un travail assidu.
202 DE l'eXÉCUTIO». «ECT. III.
un jeu fort agréable sons le raj porl de la justesse et de
la douceur des sons.
Les violonistes que je viens de noniincr ont fnrtr.é
une nïullitude d'élèves (|ui sont devenus des aiiislcs dis-
tingués, et qui assurent aux orcliestres fiançais une su-
périorité inronleslable.
Une nouvelle ère a coinnirncé pour le violon : c'est
celle c!e la dilficullé vaincue. Pj^/um., doué d'une or-
ganisation nerveuse et [Icsible, possédanl ujjjjijijin pro-
clJj^eiJSËnipnL.j>auple^ qui lui offre les moyens d'exécu-
ter des passages que nul autre ne peut faire comme lui,
a dû ù ces av^iiiagcs, au travail le plus Ojwjwdtre et à quel-
ques circonstances particulières une habileté qui tient
du merveilleux. iN'avant eu en qtu'lque sorte d'antre
mailrp que lui-niffnVj il parait avoir compris sa desti-
nation par la vue de quelques œuvres de Loc.itelli , vio-
loniste italien di\ dix-bnitième sièdc (pii avait tourné .ses
idées vers la production d'effets nouveaux, et dont les
Cûy?m e.y semblent avoir servi de modèles aux premiers
exercices dePagni.ini. Locatelli faisait un fréi|nent usage
des .iu//s /tannn/iifjuc.'i ; Paganini s'est attaché à pei fec-
tionner ces sons, à les produite dans lonles les positions
et dans tons les ions ; enfin à les (aire en double corde,
et à les marier aux sons ordinaires de l'instrument. Le
doigte du violon offre quelquefois des diilicullés insur-
montables pour certains passages; Paganini a éludé ces
didicultés en variant rjucord de l'instrument , de ma-
nière à se plarer dans les conditions les plus avanta-
geuses pour l'exéi uliun des passages (ju'il niédiiail. C'est
par le moyen de ces variétés d'accord «pi'il a aussi pro-
duit des effets de sonorité qui n'existeraieul pas sans
cela. Ainsi il joue un concerto en mi bémol mineur ^
CHAP. \T11I. lli.L INSTRLJIENTAI.. 203
dans lei|uel il a mnlliplié les tours de force; cela semble
tenir du >)r()iliL;e; niais le seccct de celle merveille con-
siste à laire |oner l'oreiiesUe en //// hcinol iinn'ur, tandis
qtie le violon Mil» est monlé un demi-ton [tins lianl que
laccoid ordinaire, et que rexéculant ne joue réellement
qu'en rc //lificiir.L.^ tliliicnlté disparaît donc en partie;
mais l'eflet n'en est pas moins satisfaisant. Pii;:;anini est
le premier qui ait exécuté des traits dans lestpiels la
main i^auclie pince certaines notes tandis que l'archet
en joue d'autres , et qui ait trouvé le moyen de jouer
sur la quatrième corde des morceaux entiers qui sem-
bleraient exiger les quatre cordes de l'instrument. On
ne peut donc nier (|ue ce virtuose ait étendu les res-
sources du violon; malheureusement le désir de se faire
applaudir par ses tours de foice lui en lait faire un abus
qui le place souvprit en dehors du domaine de l'art.
L'habileté de l'artisie se fait toiijours admirer, mais le
^^;aùt n'est pas toujours satisfait. Quoi qu'il en soit, on
doit avouer que Paganini est le violoniste le plus extraor-
dinaire qui ait jamais existé; c'est aussi celui qui a
excité le plus généralement l'enthousiasme, et dont la
fortune est la plus brillante.
Dans la nouvelle école, il est un autre violoniste qui,
quoi(|ue jeune, s'esl fait une grande réputation par la
pureté de son talent; ce violoniste est jje^ Bériot. Possé-
dant un son superbe, un archet flexible et varié, une
intonation irréproch ii)le et beaucoup de goût, il ne lui
man |uait que d'agrautlir les proportions de son jeu, et
de ne pas se borner au geiue un peu rétréci de l'air
varié; ses derniers travaux ont lait soir qu'd a conq)ris
ce qui lui reste à faire , et l'oa peut espérer qu'il se pla-
204 »E l'ïxécutio??, »kct. m.
cera quelque jour à un haut degré de l'échelle des vio-
lonistes.
Autant le violon est un instrument brillant et puissant
dans le solo, autant la viole ou alto paiait destinée à ne
se faire entendre que dans les morceaux d'ensemble et
comme partie d'accompagnement. La qualité de son de
cet instrument, mélancolique et concentrée, le rend peu
pi'Opie à satisfaire lotig-lemps l'oreille. Dans le quatuor
ou dans la symphonie, il dialogue bien avec les autres
instrumens; mais il devient monotone lors(prilse fait en-
tendre seul. Il n'est donc point étonnant (pi'on ait écrit
peu de solos pour l'alto, et (|ue peu de violonistes aient
songé à cultiver parlicidièrenient cette variété du violon.
Alexandre Rolla, chef d'orchestre du théàlre de la
Scala, à Milan, et M. Ui han , professeur de Paris, sont
à peu près les seuls qui, dans <es derniers temps, s'y
sont distingués. Le doigté et le maniement lîe l'archet
étant les mêmes pour cet inslniment et pour le violon,
tout violoniste peut jouer de la viole.
Il n'en est pas de même du vi loncelle, qui se place
entre les jambes de l'exécutant et cjui exige un doigté
particulier. L'écartemenl des doigts, pour former les
intonations, étant toujours en raison de la iongnear des
cordes, on conçoit qu'il doit être beaucoup plus consi-
dérable sur le violoncelle î|ue sur le violon. Il suit de là
qu'on ne peut faire sur cet inslnnnput les notes de même
dénomination, affectées de dièses, de bémols ou de bécar-
res, avec les mêmes doigts, comme cela se prali(|ue sou-
vent sur le violon. En outre, l'ohligalioii de (|uitter le
manche pour appuyer le4iûjice..sur la touche, lors(|u'on
veut atteindre aux inloaaliond aiguës , n'a aucune analo-
»H\P. XVI II. iEU INSTIll.'MKNTAL. ^O-'i
gie avec ce qu'on nomme le démcnclié du violon : ces
lieux instrumens sont tlonc aussi différens sons le r<ip-
jioit de l'exécution qu'ils le sont sous celui de leurs
dimensions.
Le violoncelle est susceptible de produire de grands
effets dans les solos comme dans l'orchestre; sa qualité
de son est pénétrante et a beaucoup d'analogie avec la
voix humaine. Aussi la destination naturelle de cet ins-
trument dans les solos paraît-elle être de chanter, c'est-
à-dire d'exécuter des cantilènes. Toutefois, la plupart
des violoncellistes font consister leur habileté à jouer
beaucoup de passages difficiles, parce (|ue ces dilficultés
leur prorurenl les applaudissemens du public.
Le premier qui introduisit le violoncelle dans l'or-
chestre de l'Opéra fut un musicien nommé Battistini , de
Florence, peu de temps avant la mort de Lulli. Avant
lui on ne se servait que de la basse de ri>te (qui était
montée de s_e(iL cordes) pour accompagner le chant
comme pour la musique instrumentale. Franciscello ,
violoncelliste romain, fut le premier qui se rendit célèbre
dans l'exécution des solos; il vivait vers 1725. Deux
virtuoses allemands, Quanz et Benda, qui l'entendirent
à Naples et à Vienne , s'accordent , dans les éloges qu'ils
lui donnent, à le ranger à la tète des artistes les ])lus ha-
biles de leur temps. _Eeï:liiau£l, né à Valenciennes au
commencement du dix-huitième siècle, doit être con-
sidéré comme le chef de l'école française du violoncelle.
Parmi ses éièves on remarque les deux frères Janson,
Duport l'ainé, et surtout Louis Duport le jeune, qui
jus(|u'ici n'a point été surpassé sous le double rapport
de la beauté du son et de la dextérité d'archet. A l'égard
de l'élégance du style et de l'habileté du doigté, La-
i3
206 DE L EXF.CVTlOJf. StCl. III.
lïiarre parait être le violonrelliste qui s'est élevé le plus
haut; mallienreuseinent son jeu laissait souvent à di'sirer
un son plus voliimiiietix et plus mordant, particulière-
ment sur la troisième et la rpialrième corde. L'école
française compte aujourd'hui plusieurs artistes de beau-
coup de talent.
L'école allemande s'est distinguée par cjHelquos \;o-
lonrellistes «.î'im grand mérite. Le premier en date est
Bernard Romberg, dont les compositions ont servi de
modelé pour la facture des concertos à la plupart de ses
successeurs. Une manière large et vigouieuse était ce
qu'on remarquait surtout dans son talent. Après Rom-
berg est venu Maximilien B.oiîjer , qui s'est fait une
grande réputation par son hab leté à se jouer des plus
grandes difiicultés, sa justesse d'intonation et l'élégance
de son jeu. Sans être aussi remarquable sous le rapport
de l'exécution, J^ûLouév miri e d'èlre cité pour ses
compositions, qui sont d'un très bon style.
Les Anglais, qui n'ont point eu de violoniste qu'on
puisse citer, coinpfeni parmi leurs musiciens deux vir-
tuoses sin- le violoncelle. L'un est Crossdill, qui se dis-
tingua par une exécution vigoureuse et large, rauli'ee<ît
I.iiiley. Une belle qualité de son , beaucoup de prestesse
d'archet et une grande netteté d'exécution lui ont pro-
curé une réifulalion méritée. Malheureusement son jeu
est absolument dépourvu de style, et sa manière est
vulgaire.
La contrebasse, instrument gigantesque qui est monté
de quatre cordes en Allemagne, et qui n'en a que trois
^en France, en Italie et en Angleterre, est le fondement
des orcîicstres. Aucun autre instrument ne peut le rem-
placer pour l'iatensité et la puissance du son. La Ion-
11
t:nAP. X\III. JSU INSTRUMENTAL. 207
gueur de ses cordes csl telle que l'écartement esl consi-
dér<d>le cnlie cha(|ue noie, ce (nii oblige celui qui en
joue à ciianj^cr à cii.uiue instiinl la position de sa main,
en sorle (|ue les liaits rapides y sont d'inie exéeulion
fort dilTi( ile. Rarement cette exécution esl salisfaisanle,
car, parmi les contrebassistes, les uns se bornent à jouer
les n(»tes principales, en négligeant ce qui leur send)le
moins nécessaire, et les antres, plus exacts, ne tirent que
peu de son dans la rapidité des notes. L'ensemble du
doigte et de l'archet est fort difficile à acquérir. La des-
tination de la contrebasse parait être uniquement de
compléter par ses sons graves le système d'un orchestre;
cependant, malgré ses dimensions colossales, malgré la
rudesse de ses sons et les difficultés qu'il oppose à un
jeu délicat, on esl parvenu à y jouer le solo de manière
à faire naître au moins l'élonneuicnt , si ce n'est à char-
mer l'oreille. Dragonetli, premier contrebassiste de l'O-
péra et du concert philharmonique de Londres, est par-
venu à un degré d'habileté en ce genre qui surpasse
tout ce qu'on peut imaginer. Né avec un sentiment mu-
sical très énergi(pie, Dragonelli possède un aplomb dans
la mesure et une linesse de tact (jui le font dominer tous
les artistes qui l'environnent dans un orchestre; mais ce
n'est là qu'une portion de son mérite. Personne n'a poussé
aussi loin que lui l'art d'exécuter des dilficiillés et de
manier avec dextérité le lourd archet de son instrument.
Ce qu'il fait tient du prodige. Tous ceux qui ont tenté
de l'iiiiiler n'ont point a]i))ro( hé de sou talent et n'en
ont reproduit que de faibles copies.
Tous les insirumens à cordes et à archet dont il vient
d'être parlé composent la base des oielustres; ils furent
iitéiue les aeuis qu'où y employa dans la première moitié
208 Dfc l'exïcl'tiok. sect. m.
du dix-huitième siècle, soit dans la musique dramati-
que, soit dans le style religieux. Les opéras de Pergo-
lèse , de Léo, de Vinci, de Poroora, n'ont point d'autre
instrumentation que celle des violons, violes et basses.
Les accoinpagnenicns du chant n'étaient alors qu'un ac-
cessoire peu remarquable; tout le niérile de cette mu-
sique consistait dans la grâce des mélodies, et dans l'ex-
^pression des paroles. Les instrumens à veni, qui, par
les caractères divers de leurs sons, forment des opposi-
tions heureuses avec les instrumens à cordes, et colo-
rent la musi(|ue de teintes variées, n'avaient point en-
core pris place dans Torcheslre, du moins y étaient pres-
que inaperçus, parce qu'ils n'y étaient employés que de
loin en loin et avec maladresse. Ce penre d'instrument a
acquis successivement une plus grande importance dans
les divers styles; mais les violons, violes et basses sont
restés et resteront toujours le fondement des orchestres,
parce que ces instrumens sont à la fois les plus éncrgi-
I ques, les plus doux et les plus susceptibles de vaiieF
^leurs accens.
Mais pour tirer des instrumens à cordes fout l'effet
dont ils sont susceptibles dans de grandes masses d'or-
chestre, il faut qu'il y ait unité dans le mode d'exécu-
tion , c'est-à-dire que les mêmes traits soient exécutés de
la même manitve par tous les instrumentistes; que tous
les archets tirent et poussent en même temps; que les
détachés et les liés se fassent aux mêmes endroits; que
les accens du fort et du faible soient exprimés sur les
mêmes notes; en un mot, qu'il semble n'y avoir qu'un
violon, une viole, un violoncelle, une contrebasse. Il n'y
a point de pays où ces conditions sont aussi bien rem-
plies qu'en France; les orchestres de Paris sont surtout
L.n\V. \.V1II. JliU iNàïftLMKXTAI.. 20D
remarquables sous ce rappoil. II en faut atlribucr la
cause à la supérii rilé d'éinle f|ui existe au Clonscrxa-
toire, cl à la sùielé de piiucipcs rpTon y pi'oIVsse. On
a <|uel(|uefois leproclié à celle école de jeier lou3 ses
inslruuienlistes dans le même moule; ce re|)roclie me
pnraîl èlre piulùt un élo;;e (pi'une crilirpie à régar»'. des
violonistes d'orchestre. Quant à ceux cpie la nature ap-
pelle à se distinguer dans le solo , s'ils ont reçu d'elle les
qualités (jui lout le g;rand artiste, c'est-à-dire un senti-
ment énerj^icpie et le i^erme d'une m;iuiîre |)ailicul.èrc,
1,1 réj^ularilé des principes qu'ils reçoivent dans une
école ne peut être un obstacle au développenu-nl 'le
leur talent naturel; ils sauionl toujours secouer les en-
traves du maître, (piaud le tenqis sera veini , et il leur
restera l'avantage d'un maniement raisonné d'archet. Tous
les compositeurs étrangers qui ont visité la France, et par-
ticulièrement Rossini , ont admiré les violonistes français.
Bien que la France ait piodnit plusieurs virtuoses
pour les instrumens à vent, elle n'a point la même supé-
l'iorilé en ce genre que dans les instrumens à cordes; en
général, l'aUJeiria^ne l'emporte sur elle à tel égard. Une
des plus grandes difficultés rpi'il y ait à vaincre .sur
celle sorte d'inslrumens est d'en adoucir le son, et de
jouer piano ; les instrumens à vent jouent généralement
tro^fort dans les orchestres français. L'obligation de
jouer /;irt«o est cependant devenue d'autant plus iuqié-
rieuse, que la musiipic delà nouvelle école admet l'usage
presque continuel de tous les inslriunens par masse,
pour en tirer du coloris, et que ces masses étouffent le
chaiil lorsqu'elles ne sont point adoucies à l'excès.
Les instrumens à vent employés dans l'on hestre par
les compositeurs de l'école actuelle sont : deux flûtes,
210 DK l'kMCLTÎON. SVA.r. III.
deux liautbois, deux clarineltes, deux bassons, deux ou
t^uatre cors, deux trompellcs, auxquels on njoiite quel-
cjuelois trois troml)onps, plusieurs ophicléide», un bujjie
ou Irompelte à tiers, elc.
La qualité la plus nécessaire pour bleu jfKier de la
flùle est une bonne embouchure, c'esf-à-dire une <er-
laine disposition des lèvres propre à faire enlrer dans
l'instrument tout le soufûe qui sort de la bouche, et à
ne pas faire entendre une sorte de sifflement qui pré-
cède le son, et qui est fort désagréable dans le jeu de
quelques flùlistes. La construclion de l'instrument a été
beaucoup améliorée depuis vingt-cini| ans; néanmoins
elle n'est pas parfaite, et sa justesse est loin d'être
irréprochable; l'artiste seul peut lui donner celle jus-
tesse si nécessaire par la modification de son souffle,
et quelquefois par de certaines conibinaisf)ns de doigté.
Les notes détachées se faisant au moyeu d'une arlicula-
tion qu'on appelle roi/p fie hir/f^iie, il est indispensable
(jue l'artiste possède beaucoup de volubilité dans l'or-
gane de la parole pour exéciilei' avec nellelé les traits
rapides, et surtout il faut cpi'il s'accoutume à mellie un
ensemble parfait entre les mouvemens de la langue et
ceux des doigts.
Le premier flûtiste qui eut quelque mérite en France
fut Blavet, directeur de la musique du comte de Cler-
mont : il brilla dans la première moitié du dix-huitièm^
siècle; mars il fut inférieur à Quanz, compositeur de la
cour de Prusse, et maître de flûte de Frédéric IL Quanz
fut non-seulement un virtuose, mais un grand professeur
qui a écrit un livre élémentaire excellent sur l'art de
jouer de la flùle, et qui a commencé à perfectionner cet
instrument en y ajoMiTnt une clef; la flûte n'en avait
rUAi'. xvm. ir.i iNsniLMENTAi.. 211
qu'une seule .ivaul lui. Aucun flûtiste rcniarquahlo ru*
s'était fait connaître depuis Quanz et Blavcl , I<)rs(|uc
Htigot , artiste Iraiiçais, se fil une brillante répulaiioii
\ers 1 790 par la beauté du son qu'il tirait de la flùti" et.
par la netteté de son exécution. Quant à son st\Ie, il
était vulgaire comme celui de tous les joueurs J'iuslru-
mens à vent de son temps. Cet artiste recommandalile,
(!aus lU) accès de fièvre chaude, s'échappa de sou Ht et
se précipita par sa fenêtre, au mois de septembre 1803.
Aucun flûtiste n'avait pu remédierau défaut principal
Je la flûte, qui est la monotonie, quand Tulou, encore
enfant et élève du Conservatoire, manifesta un géaiepar-
licidier qui devait réformer à la fois et l'instrinnent, et
l'art d'en jouer, et la musique qui lui était destinée. Le
premier il reconnut que la flûte est susceptible de va-
i ier ses accens et de fournir diverses qualités de son par
le moyen des modifications du soûl fie. Celte découverte
ne fut pas le résultat de ses recherches ui de ses lé-
Uexions , mais d'une soiie d'instinct qui fait les grands
artistes. La flûte, sous les doigts de Tulou, a souvent des
inflexions dignes de rivaliser avec la voix humaine, et
cela donne à son jeu une fpialité d'expression qui n'a été
égalée par aucun flûtiste, bien que d'autres virtuoses
aieiU pris sa manière pour modèle , au moins en certaines
choses. Drouet et Nicholson tiennent le premier rang
parmi ceux ci. Le premier se distingue par une exéctit ion
biillanleet par une volubilité de langue plus étonnante
que tout ce qu'on avait entendu jusciu'à lui; mais son
style est froid et son jeu ressemble plus à des tours de
force qu'à de la musiijue véritable. Nicholson est le pre-
mier flûtiste de l'Angleterre, et serait partout un aitiste
distingué. Il y a bien quelques traces de mauvais goût
212 DE l'exécutiOs. »ecï. m.
dans son jeu , et surtout dans sa musique; mais son exé-
cution est nette et brillante, sa qualité de son, pure et
volumineuse, et son habilelé à passer «l'un scn à un
autre par des nuances insensibles fort remarquable.
C'est eu Italie que l'art de jouer du liaulbois a pris
naissance, et que l'on a fait d'un instrument grossier,
destiné aux bergers, l'instrument le plus parfait de la
famille des pneumatiques. La difficulté la plus considé-
rable qu'il y ait à vaincre pour bien jouer du hautbois
consiste dans l'obligation de retenir le souffle pour adou-
cir le son et pour éviter les accidens (|u'on nomme vul-
gairement des couacs; accidens qui ont lieu lorsque
l'anche seule entre en vibration, sans faire sortir le son
de l'instrument. Cependant il est nécessaire de prendre
certaines précautions lors(|u'on joue avec beaucoup de
douceur, parce que l'instrument peut quehiuefois ocla-
uier, c'est-à-dire faire entendre l'octave aiguë du son
qu'on veut produire.
JFilidoii, hautboïste né à Sienne, contemporain de
Louis XIII, qui l'entendit avec admiration, e^t le pre-
mier qui soit mentionné dans l'histoire de la musi(|ue
pour son talent à jouer de son instrument. Une famille
originaire de Parme, nommée Bésozzi , a produit ensuite
olusieurs artistes célèbres en ce genre, qui ont brillé eu
Italie, en Allemagne et en France, pendant toute la du-
rée du dix-huitième siècle. Alexandre Bésozzi , aine de
quatre frères, vécut à la cour de Sardaigne, et y con-
sacra sa longue vie à perfectionner son talent et à com-
poser de bonne musique pour son instrument. Antoine
s'établit à Dresde, et y forma des élèves qui ont ensuite
propagé sa méthode. Gaétan brilla à Londres jusqu'en
1793. Charles Bésozzi, fils d'Antoine, fut élève de son
cnAP. xviij. jr.v msTntMEHTAL. 213
père pour le hautbois, et le surpassa en habileté. Knfin
Jéiômc, fils de Gaêlan, entra au service tlu roi de France
en 1769, et y rosia jiis(|M'à sa mort. Un liautljnîsle alle-
mand, nnmnié Fischer, fut le rival des Iiés'.zzi , cl par-
vint à jouer du liaulbois avec une légèreté et une dou-
ceur inconnues jusqu'à lui. L'école de lianlhois fondée
eu Fiance par Jérôme Bcsozzi a produit riainier et Sa-
lenlin. M. Vogt, élève de ce dernier, se distingue main-
tenant par une puissance d'exéculion très reuinrcpinble;
on ne peut lui reprocher que de ne pas adoucir assez le
son de son instrument. M. Brod , élève de M. Voj;f, a
éviiéce défaut de son maître, et joue avec une léj^èrelé
et un goùl parfaits; mais il lomhe quelciuelois dans le
défaut contraire à celui de M. Vo<;t, car, eu jouant avec
douceur, il lui ar:ive quelqucicis d'oclavier.
La clarinette, instrument dont la (|ual;lé de son ne
ressemble ni à la flûte, ni au hautbois, est d'une grande
utilité dans l'orchestre. Malheureusement sa construc-
tinin est encore imparfaite sous le double rapport de
la j.yitesse et de l'égalité des sons; mais le talent de
l'exécutant peut parvenir à faire disparaître ces défauts,
au moins en partie. Les clarinettistes allemands ont une
supériorité incontestable sur les Fiançais. Quelques-uns
de ceux-ci se sont distingues par un jeu biiilant, mais
ils n'ont jamais pu af()uérir le son doux et velouté de
leurs rivaux de rAlleniagne. Divers préjugés les en ont
empêchés; par exemple, ils font consister une partie
du talent à tiier de leur instrument un son puissant et
volumineux , qui est incompalilile avec la douceur; île
plus, ils s'obstinent à presser l'anche par la lèsre supé-
rieure, au lieu de l'appuyer sur l'inférieure, qui est à
la fois plus ferme et plus moelleuse. Joseph Béer, vir-
Î14 Dt l'exkcltio?;. stcx. lU.
tuose au senicedu roi de Prusse, a fondé, dans la se-
conde moitié du dix-huilième siècle, une école de cla-
rinette de laquelle sont sortis pUisieiiis artistes remar-
quables, parmi lesquels on dislinj^ue Baerniann , qui s'csl
fait entendre à Paris avec beanconp de succès eu 1818.
Un son doux et velouté, unearticulation nette cl fra:iclie
dans les difûcultés, et un style plus élégant que celui
des autres clarinettistes connus, ont placé cet artiste au
premier rang, même en AUemaj^ne. M. Vtillman, de
Londres, est aussi un artiste d'un mérite fort rare; enfin
M. Berr, de l'orchestre du théâtre Italien , se fait remar-
quer par sa belle qualité de son et le fini de son exécu-
tion.
On a vu '^chap. XIV) quels sont les défauts du bass')n;
soit par l'inQuence de ces défauts, soit par toute autre
cause, il a'est guère de bassoniste qui ait mérité d'être
cité pour un talent supérieur. Ozi et Dclcambre pos.é-
daient un beau son, mais n\an(|!i-iienl de goût, et ont
retenu l'iiislrument dans des Itorues étroites, quant aux
difficidtés. Un Hollandais, noiinné Mann, eut un talent
j)lus remarquable pour l'art de chanter et pour la netteté
du jeu; nuiis il ne chercha point à se faire connaître et
resta dans l'obscurité. Le réformateur du basson n'est
point encore venu. £n. France, les bassonistes ont un sq»
assez joli, n»als dépourvu d'intensité; il n'en est pas dtf
I même en A-llemagnCi où le son a généralement plus de
rondeur.
Les instruinens.de cuivre sont fort difficiles à jouer,
particulièrement ceux dont les intonations ne se modi-
fient (|ne par le mouvement des lèvres, comme le cor et
la tromjielte. Ctttc dilficul.é est si grande sur le cor
qu'il a été ncccssaiie de boii.vr, po'ir la plu,jjiart des
CUAl'. \fill. Utï. l.'^iTR.tMtNTAI.. 214
e\èculans, l'étendue de l'éclielle des sons i|u'ib doivent
panoiii ir.Tc^l arlislc qui joue avec faiililé les sons graves
cl ct'ux du médiiiiii nu jhmU parvenir à joner les sons
aig,iis, et lu'cc versd. La dilatation consiilérablc des lè-
vres (]ni est nccissairc ponr les uns est ineompatibleavet:
la eontiaction par laqiulle on exécute les autres. D'ail-
leurs l'eniboueliure varie d'ouverture à son orifice selon
la gravité ou l'aigu des sous de l'instrument. Pour les
sons graves il faut une euibouclune évasée, et pour les
sons aigus il faut qu'elle soit beaucoup nioins ouverte.
Ces considérations ont fait diviser le cor en nreinier et
ifco/ul cor, que M. Dauprat, professeur au Conserva-
toire, a nommés avec plus de justesse cuf allu et cor
liasse, parce que le diapason de l'instrument divisé de
cette manière a de l'analogie avec les voix de contraho
et de basse. Les artistes qui jouent la partie de cor a'io
he peuvent jouer celle de cor basse, et réciproqueuient.
Oulre les deux divisions du cor dont il vient d'èîie
parlé, il en est une autre à îacjuelie on a donné le nom
de vor tnixtf , parce qu'elle participe des deux pre-
mières, sans alteindîe aux extrémités graves ou aiguës
de l'une ou de l'autre. Cette division est celle où il est
le plus lacile d'acquérir une exécution nette et sûre.^
parce qu'elle s'éloigne égaienieiU et des inconvénieiis
d'une troj'i grande dilatation des lèvres, et de ceux d'ure
contraction exagérée. Les cors d'orchestre sont toujours
rangés dans l'une ou l'autre des deux premières catégo-
ries; mais que'ques cornistes soios ont adopté la troi-
sième. Celle-ci est la n»oins estimée, parce qu'elle est
bornée à un petit non>bre de notes, et parce qu'elle est
plus facile que les deux autres. Frédéric Duvcnioy , qui
a joui d'une grande réputation, il y a vinj^l cinq ans,
2!fi v% L'KxicuTioN, »%cr. lu.
était un cor mixte; il nçsorlait jamais de l'étendue d'un*
octave du tnnh'uin.
Après la (lifliciiilé d'altaquer les sons avec netteté et
celle d'exécuter les traits avec facilité et volubililé, il
n'en est pas de plus grande que d'égaliser la force des
sons ouverts et des sons bouchés. Ceux-ci sont presque
toujours sourds, pendant que les autres ont de la ron-
deur et de l'éclat. Personne ne parait avoir possédé aussi
Lieu queM-^^llay cette égalité si nécessaire. Il est fort
dnfuile de distinguer dans son jeu ces deux espèces de
sons, tant il a d'habileté sous ce rapport. On doit le pro-
poser pour modèle aux jeunes cornistes.
Après Hasnpl, le premier corniste qui acquit de la
célébrité, fut Piuilo, son élève, né à Teschen en Bohème,
vers 1755 Cet artiste, dont le véritable nom était .S//cA,
qui signifie jiijûic {jjiinlo en italien , eut un talent ad-
mirable pour tirer de beaux sons du coi" dans les notes
aiguës, et pour exécuter les traits et le trille counne au-
rait pu le faire un violoniste sur son instrument. Il se
servait habituellement d'un cor d'argent, qui, disait-il,
était d'une ((ualilé de son plus pure que ceux de cuivre.
Lebiun, corniste français au service du roi de Prusse,
fut l'émule de Punto et l'emporta sur lui dans l'art de
chanter avec grâce sur s(in instrument. Ce fut lui tpn , le
prei:iii-r, imagina de se servir d'une boite conique en
carton , percée d'iui trou , pour faire les effets d échos.
Plusieurs autres cornistes français se sont distingués par
des ipi.ililés p;;rliruliercs; j'ai cité Duveruoy et Gallay;
ou peut ii(im:ner aussi Al. Daupiat, (pii, connue pro-
fesseur, a beaucoup amélioré l'école du cor au Conser-
vatoire,
Dans les orchestres oo remarque souvent qu'il arrive
CHM>. Wlll. Ji:U INSTRUMENTAL. 217
aux coniisles de maïujuer leurs intonations et de faire
ce qu'on uon'.nie vulj;aiicinent un couac j ces accidens
proviennent presque toujours de ce que l'artiste néglige
de retirer l'eau (jui s'amasse dans le tube par l'effet de
la respiration; la moindre bulle suffit pour arrêter l'air
au passage et l'cmpèchcr d'articuler les sons. On serait
jBoins exposé à ces accidens si l'on adoptait l'usage des
cprà à_pistous.
La trompette, instrument du mênia genre que le cor,
est aussi fort difficile à jouer, et les fautes que fait l'exé-
cutant y sont plus facilement senties , parce que les sons
ont une qualité plus pénétrante et plus aiguë. Il est sur-
tout difficile d'en jouer avec douceur et pureté. Les ar-
tistes français qui jouent de cet instrument n'ont pas l'ha-
bileté des Allemands, ni même des Anglais. On cite en
Allemagne les deux Altenburg, père et fils, qui furent
des virtuoses de premier ordre, et beaucoup d'autres qui
exécutent avec douceur et piécision des passages singu-
lièrement difficiles. Quelques ouvrages de Haendeî con-
tiennent des parties de trompette si difficiles qu'on peut
à peine comprendre comment on pouvait les jouer ; elles
font présumer qu'il y eut en Angleterre dans ce temps-
là quelque trompettiste doué d'un talent extraordinaire.
Aujourd'hui M. Harper se fait remarquer par l'art de
modifier la douceur et la force des sons, par la précision
avec laquelle il exécute les difficultés, et par l'heureuse
disposition de ses lèvres qui lui permet de monter sans
peine aux sons les plus aigus.
Les instrumens de cuivre dont les intonations se mo-
difient par des moyens mécaniques , comme la Irompeite
à clefs, les ophicléides et les trombones, ont aussi leur
genre de difficultés; mais ils ont l'avantage de ne point
'y
218 DE l'kxécutioi». skct. m.
exposer rexécutant à manquer ies noies. Le mouvement
continuel de la coulisse des trombones, et les ouver-
tures des clefs des hornbugles et des ophicléides, jointes
à leur large diamètre, ne permettent pas à l'eau de s'y
condenser en bulles et d'empècber la colonne d'air de
vibrer dans le corps de l'instrument. Pour bien jouer de
ces instrumens, il faut seulement être bon musicien,
avoir des lèvres fermes et une poitrine robuste. Il y a
quelques artistes qui se distinguent par les tour.s de force
qu'ils exécutent sur le trombone; mais ces difficultés
vaincues sont plus singulières qu'utiles dans l'orchestre,
où la place de cet instrument est marquée.
Jusqu'ici je n'ai parlé que de l'exécution sur les ins-
trumens qui se réunissent en collection plus ou moins
nombreuse dans les orchestres grands ou petits ; il me
reste à parler de ceux qui se font le plus souvent en-
tendre isolément , tels que l'orgue , le piano , la harpe et
la guitare.
A l'énoncé des difficultés qui se rencontrent dans
l'art déjouer de l'orgue, et surtout d'un grand orgue, on
conçoit à peine (ju'il se trouve des hommes assez bien
organisés pour y parvenir. En effet , outre que cet art se
compose d'abord de l'articulation libre des doigts et des
règles du doigté comme pour les autres instrumens à
claviers; outre que la difficulté se complique de la ré-
sistance des touches, qui exigent quelquefois chacune
l'effort d'un poids de deux livres pour fléchir sous le
doigt, il faut que l'organisle apprentie à mouvoir les pieds
avec rapidité pour jouer les basses siu' le clavier des pé-
dales, lorsqu'il veut laisser à la mair gauche la liberté de
jouer des parties intermédiaires, et cette double attea-
Jion e^t fort pénible; il faut qu'il sache se servir à propos
CH&P. XVIII. JEU INSTRnMSNTAL. 219
du mélange des claviers , les réunir , les séparer , passer
de l'un à l'anlre sans interruption dans son exécution;
qu'il <«it l'intellipence des effets des différens jeux et du
g;oùt pour inventer de nouvelles condjinaisons ; enfin
qu'il pnsH'de à la fois de la science et du génie pour
traiter les chants de l'église avec majesté, et pour impro-
viser des préludes et des pièces de tout genre. Mille au-
tres détails entrent encore dans les obligations de l'orga-
niste; par exemple, il faut qu'il ne snit pas étranger à la
connaissance du plain- chant, qu'il en sache déchiffrer
la notation, qui est différente de la notation ordinaire,
qu'il sache les usages de chaque localité pour les offices
de l'église, et qu'il puisse porter de prompts remèdes
aux accidens momentanés qui arrivent à son instrument.
Lorsqu'on considère cette complication de difficultés,
on n'est point étonné du petit nombre de grands orga-
nistes qui se rencontrent dans l'espace de trois siècles,
c'est-à-dire depuis le seizième jusqu'au dix-neuvième.
L'Italie et l'Allemagne sont les pays qui en ont produit
le plus. On cite parmi les organistes italiens Claude
Mérulo , qui vivait à la fin du seizième siècle, les deux
Gabrielli , ses contemporains , Antegnati et surtout Fres-
cobaldi, qui brillèrent depuis 1615 jusque vers 1640.
L'Allemagne a produit Froberger , de Kerl , Buxtehude ,
Pachelbel, Jean-Sébastien Bach et les élèves de celui-
ci. La plupart de ces organistes se sont distingués par des
qualités particulières; mais il en est bien peu qui aient
possédé toutes celles dont l'énumération vient d'être
faite; je crois même que Jean-Sébastien Bach est le
seul ([ui ait présenté ce phénomène. Ce grand artiste fut
un de ces rares génies qui sont comme des phares placés
au milieu des siècles pour les éclairer. Sa eupériorilé fut
220 DE l'exécutiow. sect. m.
telle, comme compositeur et comme exécutant, qu'il a
servi de modèle à tous ses successeurs, et que l'ambition
de ceux-ci a consisté à approcher de son mérite le plus
près possible, mais non à l'égaler. Les organistes fran-
çais ont presque tous manqué de savoir ; mais ils ont du
goût dans le choix de leurs jeux et dans l'art d'en tirer
des effets. Les Couperin , Calvière , Marchand , Daquin ,
n'eurent point d'autre mérite; Rameau seul connut le
véritable style de l'orgue, c'est-à-dire le style grave et
sévère qui convient à cet instrument.
Le piano n'a guère d'autre rapport avec l'orgue que
celui d'un clavier sur lequel on fait mouvoir les doigts,
et les qualités d'un bon pianiste ne sont nullement celles
d'un organiste. Le tact , c'est-à-dire l'attaque des tou-
ches par des mouvemens fermes et souples des doigts , ce
tact indispensable pour bien jouer du piano, ne res-
semble point au toucher de l'orgue, qui doit «tre 4ié_
plutôt que brillant. L'une des plus grandes difficultés de
l'art de toucher du piano consiste à tirer un beau son de
l'instrument par une certaine manière d'attaquer les
touches. Pour acquérir cet art , il faut apprendre à
I rendre nulle l'action des bras sur le clavier , et à donner
aux doigts une souplesse égale à la force, ce qui de-
mande beaucoup d'exercice. Une bonne position de la
main, et l'étude constante de certains traits, exécutés
d'abord lentement avec égalité , et successivement plus
vite jusqu'au mouvement le plus accéléré, finit par don-
ner cette souplesse nécessaire. Ce n'est pas à dire toute-
fois que l'art de tirer un beau son du piano soit pure-
ment mécanique; il en est de cet art comme de tout
autre; son principe réside dans l'ame de l'artiste, et se
répand avec la rapidité de l'éclair jusqu'au bout de ses
CBAP. XVIII. JEU INSTRUMENTAL. 221
doigts. On a l'inspiration du son comme celle de l'ex-
pression , dont il est un des élémens.
Un heau son et un mécanisme libre et facile sont les
conditions indispensables d'un talent véritable sur le
piano ; mais ce ne sont pas les seules. Il faut aussi du
goût pour savoir se tenir également éloigné de deux ex-
cès dans lesquels tombent la plupart des pianistes ,
savoir : de ne faire consister le mérite de toucher l'instru-
ment que dans l'habileté de faire un grand nombre de
notes le jilus rapidement possible , ou de vouloir res-
treindre ce mérite au seul genre de l'expression , qui
n'appartient pas naturellement aux sons de l'instrument.
C'est le mélange bien combiné de ces deux choses qui
fait le grand pianiste.
On peut diviser en trois époques principales les varia-
tions de goût c|ue l'exécution des clavecinistes a éprou-
vées. La première renferme le style lié, où les doigts
des deux mains jouaient à quatre ou cinq parties réelles
dans un système plus harmonique que mélodique; cette
époque finit à Jean-Sébastien Bach , qui eut le plus beau
talent de ce genre qui ait existé. Pour être habile clave-
ciniste dans ce système, il fallait posséder une organisa-
tion forte sous le rapport de l'harmonie , et que tous les
doigts fussent également aptes à exécuter les difficultés.
Ces difficultés, d'une espèce particulière, sont si grandes,
qu'il existe fort peu de pianistes assez habiles de nos
jours pour bien jouer la nîusique de Bach et de Haendel.
La seconde époque, qui commence à Charles-Emmanuel
Bach, est celle où, sentant le besoin de plaire par la
mél.Qdje, les pianistes commencèrent à cpiitter le style
serré de leurs prédécesseurs, et introduisirent dans leurs
ouvrages les diverses combinaisons des gammes, (jni ont
'222 DE l'exécution. sf.ct. m.
été pendant près de soixante ans les types de tous les
traits brillans du piano. Les difficiillés étaient bien
moindres dans cette seconde manière que dans la pre-
mière; aussi le mérite des pianistes commeuça-t-il dès
lors à consister davantage dans l'expression et dans l'élé-
gance que dans les difficultés vaincues. Le chef de celte
nouvelle école fut, comme on vient de le voir, le fils de
Jean-Sébastien Bach, pour l'Allemagne ; après lui vin-
rent Mozart, 3Iûller, Beethoven et Dusseck. démenti,
né en Italie, marcha dans la même route et perfectionna
la partie dogmatique de l'art de jouer du piano. Ses
élèves ou imitateurs. Cramer, RIengel et (|uel(|ue3 au-
tres, ont fermé cette seconde époque. Sleibelt fut un
pianiste du même temps; mais son talent, qui était réel ,
bien que son mécanisme fût incorrect, fut d'une nature
particulière. Homme de génie, il n'avait songé à étudier
aucun mai Ire, à imiter aucun modèle; son jeu, comme
sa musique, n'appartenait qu'à lui. Ses désordres l'ont
empêché d'atteindre à toute la hauteur de sa portée;
mais, tel qu'il était, ce fut un artiste remarquable. La
troisième époque du piano a commencé avec Humme!
et IvaJLkbrenner. Ces grands artistes, conservant ce qu'il
y avait de large et de sage dans le mécanisme de l'é-
cole précédente, ont introduit dans le style du piano
un nouveau système de traits brillans , qui consiste dans
la dextérité à saisir des intervalles éloignés et à grouper
\ les doigts dans des traits harmoniques indépendans des
\ gammes. Cette nouveauté, qui eût enrichi la musique
du piano si l'on n'en eût point abusé, changea complè-
tement l'art de jouer de l'instrument. Dès qu'on eut fait
un pas dans les hardiesses de l'exécution , on ne s'arrêta
plus. Moschelos, eu qui le truvail a développé la soi}-
CHAP. XVIII. JEU INSTRUMENTAI.' 323
plesse, la fermeté et l'agilité des doigts jusqu'au pro-
dige, ne tarda point à affronter des difficultés plus
grandes que celles dont Ilumniel et Kalkbrenner avaient
donné le module; Herz renchérit encore sur les sauts
périlleux et le fracas de notes de la nouvelle école; à
l'exemple de Moscholès il obtint de {grands succès , et
tous les jeunes pianistes se mirent à la suite de ces vir-
tuoses. L'un de ces derniers , M. Schunck , a même ima-
giné des traits plus singuliers encore et plus difficiles
que ceux qu'on avait tentés jusqu'à lui ; enfin l'art de
jouer du piano est devenu l'art d'étonner; il s'est parfai-
tement assimilé à l'art de la danse, en ce qu'il n'a plus
pour objet d'intéresser, mais d'amuser. La pensée n'est
presque plus rien dans le talent du pianiste; le méca-
nisme en fait presque tout le mérite. Toutefois le ridi-
cule de cette direction de l'art a déjà fi-appé de bons es-
prits et des hommes d'un talent réel; Moschelès, plus
apte qu'un autre à vaincre toutes les difficultés de méca-
nisme, s'est arrêté dans cette roule et s'est attaché
depuis quelque temps au genre expressif dans lequel il
excelle maintenant comme dans les tours de force.
Kalkbrenner et Hummel ont résisté au torrent ; il est
vraisemblable qu'ils auront à la fin des imitateurs , et
que l'art de jouer du piano redeviendra digne de son
origine.
Chez les Grecs, les Romains, et en général chez les
peuples de l'antiquité de l'Orient ou du Nord, les ins-
trumens à cordes pincées ont tenu la première place, et
ceux qui en jouaient avec habileté furent regardés comme
les plus recommandables entre les musiciens. Dans la
musique moderne, ces instruraens ont perdu leur préé-
wiinencCj, parce qu'ils sonl bornes daus leurs moyens et
224 DE I/EXECUTIO?». SKCT. III.
peu propres à suivre les progrès constans de l'art musi-
cal. La harpe et la guitare sont les seuls inslrumens de
celte espèce qui ont survécu à tous ceux qui furent en
usage dans les quinzième et seizième siècles. La musi-
que de harpe fut long- temps composée seulement de
gammes et d'une sorte de traits qu'on nomme aj-pèges.
Les mêmes formes se représentaient sans cesse, parce
que la construction de l'instrument ne permettait guère
de les varier. Madame Krumpholz sut cependant tirer
parti d'un genre de musique si rétréci , et trouver des
accens expressifs dans des choses qui semblaient y être
si peu favorables; le vrai talent donné par la nature
triomphe de tous les obstacles. Vint ensuite M. de Ma-
rin, qui agrandit le domaine de la harpe et qui parvint
à y jouer de la musique d'un genre plus large que tout
ce qu'on avait écrit pour cet instrument jusqu'à lui. Sa
manière était élevée, son jeu passionné, son exécution
puissante dans les difficultés, et s'il ne fit pas davantage
pour affranchir la harpe de ses entraves, c'est qu'il était
venu trop tôt pour profiler des avantages que présenle
la harpe à double mouvement.
Le premier qui connut tout le parti qu'on pouvait ti-
rer de ce nouvel instrument, et qui sut s'en servir, fut
M. Dizi, célèbre harpiste belge, qui a vécu long-temps
à Londres et qui vient de se fixer à Paris. Ses études,
remplies de traits d'un genre neuf, ont fait sortir l'art
de jouer de la harpe des limites étroites où il était re-
tenu auparavant. Boc!isa, qui vint après lui, n'eut jamais
de netteté dans son exécution ; mais il donna une impul-
sion brillante à son instrument par l'élégance et l'éclat
du style de ses premières compositions; maintenant il
n'est plus qu'un harpiste ordinaire, et ses dernie»"S ou-
CHAP. XVIII. JEU INSTRUMENTAL. 225
vrages ne méritent aucune estime. Un jeune artiste fran-
çais, M. Théodore Labarre et mademoiselle Bertrand
ont porté l'exécution sur la harpe au plus haut point de
perfection qu'elle ait atteint jusqu'ici. Le plus beau son ,
le style le plus élevé, la nouveauté des traits et l'énergie
sont les caractères distinctifs de leur talent. Une gloire
solide sera le paitage de M. Labarre, s'il comprend
toute sa portée et s'il a le courage de lutter contre la
monotonie naturelle de son instrument.
Tout le monde sait combien la guitare est bornée
dans ses ressources; elle ne semble destinée qu'à soute-
nir légèrement la voix dans de petites pièces vocales ,
telles que les romances, couplets, boléros, etc. Mais quel-
ques artistes ne se sont point tenus à ce faible mérite;
ils ont voulu vaincre les désavantages d'un son maigre,
les difficultés du doigté et l'étendue bornée de l'échelle
de l'instrument. M. Carulli fut le premier qui entreprit
d'exécuter des difficultés sur la gnitaie , et qui y parvint
de manière à exciter l'éîonnement. M?*i. Sor , Carcassi
Huerta et Aguado ont porté cet art à un plus haut point
de perfection; si la guitare pouvait prendre place dans
la musique proprement dite, nul doute que ces vir-
tuoses n'eussent opéré ce miracle; mais pour une sem-
blable métamorphose les obstacles sont invincibles.
§ IL
De l'exécutiou en général, et de l'exécution collective.
Pour un musicien vulgaire la musique n'est qu'un
amas de notes, de dièses, de bémols, de pauses, de sou-
pirs ; jouer juste et en mesure lui semble le comble dç
226 DE l'exécution. sect. m.
la perfection; et comme ce mérite est assez rare, on est
forcé de convenir qu'il n'a pas tort de restimer. Mais
qu'il y a loin de cette exécution mécanique, qui laisse
l'anie de l'auditeur dans l'état d'inertie où se trouve celle
du symphoniste, à l accord de sentiment qui, de proche
en proche, se communique des exéculans au public; à
ces nuances délicates qui colorent la pensée du compo-
siteur, en montrent le sublime, et souvent lui prêtent
des beautés; à cette expression, enfin, sans laquelle la
musique n'est qu'un vain bruit !
Effet remarquable et qui prouve la puissance du vrai
talent ! Supposez un orchestre , une troupe de chanteurs
médiocres, qui, dans leur exécution terne , laissent nos
sensations en repos; qu'un chef ardent, un musicien
doué d'une organisation forte, arrive au milieu d'eux ;
tout à coup le feu sacré embrasera ces êtres inanimés;
la métamorphose opérée dans un instant pourra même
être telle qu'on aura peine à se persuader qu'on entend
les mêmes symphonistes, les mêmes chanteurs. Le ncc
plus ullrà de l'effet musical ne peut avoir lieu que lors-
que tous les exécutans possèdent non-seulement uno
égale habileté, mais une semblable flexibilité d'organes,
un pareil degré de chaleur et d'enthousiasme. De pa-
reilles réunions ont toujours été rares et ne sont que
des exceptions. La fameuse troupe des bouffons de 1 789
en a offert un exemple; depuis lors Viotti, accompagné
par madame de Montgeroult; Baillot, dans un trio joué
par lui , Rode et Lamarre au Conservatoire, ont donné
l'idée d'une perfection qu'on peut trouver dans des réu-
nions peu nombreuses, mais à laquelle il est bien diffi-
cile d'atteindre avec des chœurs ou des orchestres com-
plets. A défaut de ce beau idéal , on se contente du beau
CHAP. XVIII. ORCnESTRES. 227
relatif, parce qu'on n'en connaît point d'nutre. C'est,
comme je l'ai dit, cclni qui rcsnite de l;i réunion de
quelques artistes du premier ordre à d'autres moins heu-
reusement organisés. Tel, qui n'a pas été dolépar la na-
ture assez libéralement pour communiquer de vives sen-
sations à ce qui l'entoure, est du moins susceptible d'en
recevoir; c'est ce qui explique les transformations su-
bites qu'on remarque dans les individus, selon qu'ils
sont bien ou mai dirigés.
L'habileté dans le mécanisme du chant ou dans le jeu
dos instrumens est sans doute nécessaire pour atteindre
à une bonne exécution, mais elle ne suffit pas. C'est
dans sa sensibilité, dans son enthousiasme qu'un artiste
trouve le plus de ressources pour émouvoir ceux qui
l'écoutent, La dextérité peut quelquefois étonner par
ses prodiges; mais l'expression véritable a seule le privi-
lège de toucher. Ce que j'appelle expression n'est pas
ce jeu grimacier qui consiste à se tordre les bras, à se
pencher avec affectation, à agiter le corps et la tête,
so? te de pantomime dont quelques musiciens font usage
et dont eux seuls sont dupes ; l'expression véritable se
manifeste sans effort par les accens de la voix ou des
Instrumens. Le musicien qui en a le sentiment le trans-
met comme par enchantement de l'ame au gosier, au
bout des doigts, à l'archet, à la corde, ati clavier. Le
timbre de sa voix, sa respiration, son toucher en sont
empreints; pour lui il n'y a pas de mauvais instrumens,
parce qu'il améliore tout ; j'oserais presque dire qu'il n'y
a pas de mauvaise musique, quoiqu'il soit plus sensible
qu'un autre aux beautés de la composition.
On serait dans l'erreur si l'on croyait qu*il n'y a d'ex-
pvçs^ioii possible que celle de la tristesse ou celle de I»
228 DE l'eXKCCTION. SECT. 111.
mélancolie; chaque geni'e a des acccns qui lui sont pro-
pres; le talent consiste à s'identifier au stjle dumorceau
qu'on exécute, à être simple dans la simplicité, véhé-
ment dans la passion , avare d'orneinens dans la musique
sévère, brillant de fioritures dans les élégantes folies à
la mode, et toujours grand, même dans les petites cho-
ses. Il n'est pas besoin de beaucoup d'efforts ou de grands
développemens pour nous procurer des émotions de di-
verses espèces; une phrase de canlabile , un motif de
rondo suffisent. Que dis-je? une simple note, un ap-
pogiature bien senti , un accent , tirent quelquefois des
cris d'admiration de tout un auditoire. Dût-on m'accu-
ser d'exagération , je dirai même qu'on pressent sou-
vent le grand artiste à la manière dont l'archet attaque
la corde ou dont le doigt frappe la touche en s'accor-
dant. Je ne sais quelle émanation se répand alors dans
l'atmosphère pour annoncer la présence du talent; mais
on s'y trompe rarement. Je me persuade que je serai
compris par quelques-uns de mes lecteurs.
La nature a placé dans tous les pays des êtres heureu-
sement organisés pour les arts; mais leur nombre diftère
selon que les circonstances, le climat, ou d'autres causes
difficiles à apprécier sont plus ou moins défavorables.
Ainsi, parmi les exécutans , la Fiance a produit Garât,
Kode , Baillot, Kreutzer, Duport, Tulou et beaucoup
d'autres qu'on pourrait citer, et qui rivalisent avec les
plus grands artistes de l'Italie ou de l'Allemagne; ce-
pendant les dispositions naturelles de la nation fran-
çaise ne sont pas favorables à la musique; l'état florissant
dans lequel y est cet art est plutôt le fruit de l'éducation
que celui d'un goût inné. Les Français connaissent la
perfection et la cherchent; mais quoique leur goût soit
riiAP. xviii. oncHKvrRKs. 'J'2Û
exij^eant, ils n'obtieiiDent pas toujours de bons résultiit;;
dans leur nuisi(|uc tl'enscinhlc, parce qu'il n'y a^tpiat
d'unité dans^leur manière de sentir. Les Italiens, au con-
traire , s'accordent assez facilement de la médiocrité;
on les voit assister patiemment, pendant toute une sai-
son, à un mauvais opéra, mal exécuté, pourvu qu'il y ait
dans le cours de la représentation une cavatine, un duo,
un air, assez bien chantés pour les indemniser du reste.
Mais ce peuple, indifférent en apparence sur le mérite
de l'exécution, est susceptible d'atteindre aux plus beaux
effets d'ensemble par l'unanimité de sentiment qui di-
rige les chanteurs et les instrumentistes. L'expérience
prouve que quatre ou cinq chanteurs médiocres, pris au
hasard parmi les Italiens, et soutenus par un accompa-
gnateur qui pourrait jouer à peine une sonate de Nico-
laï, ont une verve, un brio qu'on ne trouverait pas dans
le même morceau exécuté par d'excellens chanteurs
français, et accompagné par un virtuose, bien qu'aucun
des Italiens ne put soutenir la comparaison avec les
Français pris individuellement. Il y a chez nous je ne
sais quelle distraction qui s'oppose, en général, au con-
cours d'intentions nécessaire pour obtenir de grands
effets d'ensemble , tandis que les Italiens sont évidem-
ment captivés par la puissance de la musique.
Il faut l'avouer, ce que la nature nous avait refusé,
l'éducation l'a conquis. L'institution du Conservatoire
a fait faire d'immenses progrès à la musique en France ;
non qu'il s'y soit formé de plus grands talens que ceux
qu'on admirait avant son établissement ; car Rode ,
Kreutzer, Baillot, Duport, sont encore les modèles de
nos jeunes artistes; mais le nombre de gens habiles s'est
beaucoup augmenté; plusieurs se sont dispersés dans
230 DR L EXÉCUTION. SECT. III.
les provinces, y ont excité une émulation inconnue au-
paravant, et celles-ci renvoient maintenant en échange
dans la capitale des élémens de talens nouveaux. L'étude
de riiarmonie, devenue générale, commence à familia-
riser les amateurs avec des combinaisons qu'on aurait à
peine supportées autrefois. L'organe auditif des exécu-
lans, rendu plus sensible par celte étude, saisit beau-
coup plus promptement les intentions du compositeur,
(•r par cela seul ils s'y prêtent davantage et les rendent
mieux. Si, nonobstant ces améliorations , l'on remarque
souvent un défaut d'ensemble dans les masses, si même
des artistes distingués laissent à désirer dans l'ensemble,
c'est , ce me semble , parce qu'on ne porte point assez
d'attention à des dispositions préliminaires d'une grande
importance, et parce que certains préjugés ont retenu
dans un état d'infériorité des parties essentielles qu'il
serait facile de perfectionner. Les objets qui , dans l'état
actuel des choses , méritent le plus d'attention, sont :
1 La disposition des orchestres;
2" Les proportions de ces mêmes orchestres, soit à
l'égard des voix, soit par rapport aux instrumens entre
eux;
3° L'exécution vocale dans les chœurs et dans les
morceaux d'ensemble ;
4° L'accompagnement ;
5° L'ensemble;
Les orchestres des concerts et des représentations
théâtrales ne se disposent pas de la même manière ,
quoiqu'on n'aperçoive pas trop la cause de cette diffé-
rence. La place du chef y est surtout choisie d'une ma-
nière toute opposée, excepté au Théâtre Italien. Tout le
inonde avoue qu'il faut qu'un chef d'orchestre ait sous
CHAP. XVIII. ORCHESTRES. 281
ses yeux les musiciens qu'il dirige, et néanmoins l'on
s'obstine à le placer près de la rampe; de manière que
tous les iiistriimenlisles sont derrière, et qu'il doit se
toiuner pour les voir; c'est du moins ainsi .[u'on en use
dans la |)lupart de nos tliéàlres. Cependant, oiilre l'avan-
tage qu'il y a pour un chef de voir sessubordonnés pour
les surveiller, exciter leur attention et les ramener
promptement au mouvement qui a subi quelque altéra-
tion , il est aussi fort important que les musiciens puis-
sent rencontrer quelquefois les yeux de celui qui les
dirige ; car le moindre signe de tête est souvent significa-
tif, et détermine avec promptitude une intention d'effet
qui est comprise à l'instant par tout le monde. D'ail-
leurs il est presque impossible qu'un orchestre reste in-
différent ou froid lorsqu'il voit son chef attentif et plein
d'ardeur. La disposition du Théâtre-Italien, et la place
qui était occupée par M. Grasset, rappelaient à peu
près l'arrangement du théâtre Feydeau , à l'époque oià il
était dirigé par La Houssaye. Cette disposition, qui
place le chef vers l'un des côtés de la scène et qui range
tous les musiciens devant lui, est excellente quant à la
partie instrumentale ; mais elle paraît moins heureuse
en ce qui concerne le théâtre, parce qu'elle isole le chef
des acteurs et des choristes, et parce qu'elle l'oblige à
tourner la tête pour voir la scène. La meilleure disposi-
tion paraît être celle où le chef d'orchestre est placé en
face de la scène , un peu en arrière et au centre des
musiciens, parce qu'il peut y voir d'un coup d'œil et
les chanteurs et les symphonistes. C'est celle qu'on a re-
prise au Théâtre Italien; il est vraisemblable qu'on finira
par l'adopter dans tous les spectacles lyriques.
Quant aux orchestres de concert , nul doute que les
232 DE l'exécution. sect. m.
pupitres de violons ne doivent être placés perpendiculai-
lement à la salle , les premiers en regard des seconds,
les violes dans le fond , et les inslrumens à vent en am-
phithéâtre avec les basses derrière. Le chef, placé en
lèle des premiers violons, à la gauche du spectateur, voit
sans peine tous les musiciens et en est vu de même. La
disposition du concert philharmonique de Londres sem-
ble être faite à dessein pour empêcher les symphonistes
de se voir et de s'entendre. Les basses sont en avant, les
premiers violons derrière, les seconds au-dessus de ceux-
ci dans une espèce de galerie , les flûtes et hautbois vers
le milieu , lés bassons dans une galerie correspondante à
celle ou se tiennent les seconds violons avec les altos, les
cors d'un côté, les trompettes de l'autre; enfin nul en-
semble, nul plan. Le chef d'orchestre^ placé en avant
et en face de l'auditoire , est dans l'impossibilité de voir
les musiciens qu'il dirige. En fait de musique, les An-
glais font toujours le contraire de ce qu'il faudrait faire.
Les proportions des orchestres de théâtres sont rom-
pues depuis quelques années; le nouveau système de
musique dramatique, en multipliant les inslrumens de
cuivre, a rendu trop faible la masse des instrumens à
archet, notamment des violons. Sans parler des orches-
tres de villes de province , ce défaut de proportion se
fait remarquer particulièrement au théâtre de l'Opéra-
Comique, où huit premiers et huit seconds violons ne
peuvent lutter contre le son puissant de deux flûtes,
deux hautbois, deux clarinettes, deux bassons, quatre
cors, deux trompettes, trois trombones et timbales.
Quoi qu'on fasse, les effets les plus vigoureux, les
plus brillans, les plus variés, se trouveront toujours
^ans les instrumens à archet. Je suis loin de condamner
CHAI*, Wni. ORGHESTBES. 233
l'usage des autres; ce sont eux qui colorent la musique,
et l'on ne peut disconvenir que, malgré tout le génie
des anciens compositeurs, on s'aperc^oit aujourd'hui que
cette ressource leur a manqué. Leurs ouvrages sont
riches d'invention et de mélodie, mais pauvres d'effets.
2ie bannissons donc pas des orchestres les nouveaux
moyens qui sont offerts aux compositeurs; mais faisons
remarquer qu'il est indispensable d'augmenter le nombre
des violons , des violes et des basses. Ce n'est pas seule-
ment quand ils sont accompagnés de toute la masse des
instrumens à vent, de ceux de cuivre et de percussion,
que les autres paraissent faibles; l'impression que laisse
tout ce bruit dans l'oreille , quand il cesse, diminue
l'effet produit par les instrumens à archet. ï^es piano pa-
raissent maigres et dénués de son après \esJ^orte formi-
dables de tout l'orchestre. Vingt-quatre violons, huit
violes ou altos, dix violoncelles et huit contrebasses,
sont nécessaires pour faire équilibre avec tous les instru-
mens dont on vient de voir l'énumération. Les bonnes
proportions dans la force sonore des diverses parties d'un
orchestre sont indispensables pour produire des effets
satisfaisans d'exéculion.
Il y a trop souvent deux directions imprimées à l'exé-
cution, lorsque des masses vocales sont réunies à l'or-
chestre , principalement au théâtre. Rien de plus difficile
et de plus rare que l'unité de sentiment entre les chan-
teuis et les symphonistes, particulièrement en France,
où tout ce qui n'est pas air ou duo est considéré par les
acteurs comme des accessoires de peu d'importance. La
conscience d'un chef d'orchestre, son amour pour l'art
et son habileté viennent échouer contre ce préjugé des
acteurs. En vain cherclie-t-il à communiquer le tienlj-
30.
234 DE l'exécution. SECT. III.
ment dont il est animé aux musiciens qu'il dirige; en
vain veut-il obtenir des nuances de piano , àe/orte , de
crescendo , de dbninuendo; les distractions des chan-
teurs, leur froideur, leur insouciance, résistent à ses ef-
forts, font d'abord disparate avec ce qui se passe dans
l'orchestre, et finissent par y faire pénétrer le désordre
et le laisser-aller.
Cependant quels résultats peut-on espérer quand tous
ceux qui concourent à l'exécution d'un morceau ne sont
pas animés du même esprit? L'indifférence, l'attention
ou l'enthousiasme des exécutans rendent le public indif-
férent, ou attentif, ou enthousiaste; car il y a une action
réciproque de l'auditoire sur les artistes et de ceux-ci sur
l'auditoire, qui fait le charme ou le supplice des uns et
des autres. Que de fois il est arrivé qu'un virtuose ayant,
par un accent heureux et inattendu, arraché tout à coup
à ses auditeurs un cri d'admiration , s'est senti lui-même
comme transporté dans une sphère nouvelle par l'effet
qu'il venait de produire, et a découvert en lui des res-
sources qu'il n'y soupçonnait pas auparavant! C'est dans
ces sortes d'occasions que la musique est un art divin au-
quel nous devons les plus vives jouissances; mais hors
de cela ce n'est rien. Que dis-je? elle devient un tour-
ment. Quand la musique n'émeut pas, elle est insuppor-
table, et l'on est tenté de lui dire comme Fontenelle à l;i
sonate : Que me veux-tu? O vous qui désirez obtenir des
succès, vous qu'une louable ambition porte à vouloir
sortir de la foule, ayez vous-mêmes la conviction de ce
que vous faites si vous voulez convaincre les autres ;
soyez ému si vous voulez émouvoir , et croyez qu'on n'a
jamais excité dans autrui des impressious qu'on ne res-
sentait pas!
CHAP. XVIII. ORCHESTl\K5. 285
Un chanteur peut obtenir des applaïulissemens dans
nn air, une cavatine, une romance, par le seul fait de
son habileté dans le niéc;niisme du chant ou parla beauté
de sa voix; mais dans les morceaux d'ensemble il faut
autre chose. Chacun y perdant le droit de fixer rallen-
lion sur lui-même exclusivement, concourt à transporter
celte attention sur la musique, qui devient l'objet prin-
cipal; les individus s'effacent pour ne laisser apercevoir
que le tout; l'ensemble gagne ce que chacun perd en par-
ticulier. Les qualités premières d'un morceau d'ensemble
sont nnp jii<fp<;>;p alisnlnp et l'unité de mesure. Ce que
j'appelle /a mesure n'est pas ce qu'on décore ordinaire-
ment de ce nom, c'est-à-dire un à-peu-près oia l'on se
contente, pourvu qu'on arrive ensemble au temps frappé;
mais un sentiment parfait du temps et du rhythme, qui
se fait remarquer jusque dans les moindres divisions et
dans les durées les plus fugitives, sans que cette exacti-
tude nuise à la chaleur ou à l'abandon. Quant à la justesse,
on la régularise dans l'orchestre en s'accordant avec
soin ; mais , dans l'ensemble des voix , elle peut être com-
promise à chaque instant , presque à chaque note. Aussi
rien n'est-il plus rare que d'entendre exécuter un mor-
ceau d'ensemble qui ne laisse rien à désirer sous ce rap-
port. Plus le nombre des voix est considérable, plus le
défaut de justesse est à craindre ; dans les chœurs il est
presque permanent, surtout au théâtre. Il y a cependant
quelques exceptions d'après lesquelles on peut juger de
l'effet que ceux-ci produiraient s'ils étaient toujours bien
exécutés. On peut citer comme exemples les chœurs de
Mocse aux premières représentations, ceux de la Muetle
de Poftici, de Guillaume Tell, et quelques-uns de
ccu.\ (|u'ua chaule ai? Tliéùtrc-Ikdien. A. l'Opéra -Conii-
236 LtE LEXtCLTlON. SKCT. III.
que , on ne trouve ni soin , ni justesse , ni ensemble parmi
les choristes. Dans l'Institution royale de Musique reli-
gieuse dirigée par 31. Choron , on entendait des chœurs
qui approchaient quelquefois de la perfection.
Les proportions qu'il faut donner aux voix dans les
chœurs ont été l'objet des recherches de plusieurs maîtres
de chapelle. On conçoit qu'elles peuvent varier à l'infini
comme les masses. Je suppose, pour prendre un terme
moyen à peu près semblable à celui de nos théâtres,
qu'il soit question d'un chœur de soixante voix. Dans
l'ancien système on l'aurait divisé comme il suit :
1° Vingt-quatre dessus ou soprani; 2° dix hautes-
contres; 3° douze ténors; 4" quatorze basses. Mais la
rareté des voix de haute-contre, qui ne sont qu'un cas
particulier du ténor, a produit depuis vingt ou vingt-cinq
ans des changemens remarquables dans la disposition
des chœurs. Au lieu de hautes-contres on a des seconds
dessus, autrement dits mezzo soprano ou contralto.
Rossini et tous ses imitateurs ont divisé la partie de ténor
en deux , en sorte que tous les chœurs sont maintenant
écrits à cinq parties; il en est résulté qu'il a fallu aug-
menter le nombre des ténoristes , parce qu'ils auraient
été trop faibles dans l'ancienne proportion, étant divisés
en deux parties distinctes. Le contraire a eu lieu pour
les dessus; car l'obligation de former une partie de
contralto sans augmenter le nombre des voix, pour se
conformer au budget des théâtres, a fait diminuer le
nombre des dessus, et l'on a établi la proportion sui-
vante : 1° Seize dessus ou so]>rani ; 2° douze contralli ;
3° dix premiers ténors ; 4* dix seconds ténors ; 5° douze
basses. On conçoit que tout cela n'est pas invariabie ,
car la qualité des voix a beaucoup d'inQuence sur Its
CHAI'. XVIII. ORCHESTRES. 337
proportions. Il se peut que les dessus ou les ténors soient
trop biillans pour les confralti, on que les basses étouf-
fent les sons des ténors. Eu général ce sont ceux-ci qui
sont les plus faibles.
Tel chanteur, dont la voix est faiblement timbrée,
peut racheter ce désavantage dans un air ou dans un duo
par la bonté de sa méthode et de son goût ; mais dans un
morceau d'ensemble rien ne peut tenir lieu de voix so-
nores. Avec des voix faibles il n'y a point d'effet à es-
pérer. A rOpéra-Comique, par exemple, Ponchard et
madame Rigaut étaient des chanteurs excellens dont le
goût, la méthode et la brillante vocalisation se faisaient
remarquer dans les airs, les romances, les cavatines et
les duos, mais leurs voix manquaient de mordant et de
force dans les morceaux d'ensemble. Ces sortes de mor-
ceaux sont toujours ceux qui produisent le plus d'effet
au Théâtre-Italien ou à l'Opéra ; mais sur la plupart des
autres théâtres lyriques de France ils sont la partie la plus
faible de l'exécution.
Malgré les progrès que la musique a faits parmi nous
depuis quelques années , le public conserve toujours
quelque chose de son penchant pour la chanson; caries
Français sont naturellement plus chansonniers que mu-
^ siciens. Les rondes, les romances, les couplets sont ce
qu'on applaudit le plus dans les opéras-comiques ; ce
goût est à la fois la cause et l'effet du mal qui vient
d'être signalé. Avec cette habitude de petites proportions,
on ne songe point à ce qu'il y a d'élevé dans les arts; le
mesquin d'une composition entretient le laisser-aller
d'une exécution mesquine , et celle-ci s'oppose à l'éman-
cipation de l'intelligence musicale du public. N'en dou-
tons pasj c'est là le mal radical de l'opéra-coraique
Î38 DE l'exécctiok. sect. m.
français. Il ne prendra le rang qu'il doit tenir dans
l'art musical que lorsqu'une réforme complète de son
système, qui est encore jusqu'à un certain point celui de
la comédie à ariettes, sera faite , et lorsqu'à un air bien
chanté succédera un quintette ou un sestetto tels que
ceux qui produisent tant d'effet dans le Barbier de Sé~
ville, la Cenerentola ou la Gazza Ladra , et que nos
acteurs auront appris à les chanter avec l'ensemble, la
verve et le soin des Italiens. Une semblable réforme s'est
opérée à l'Opéra; on peut juger par le bien qui en est
résulté de ce qui arriverait à l'Opéra-Comique.
Il V a d'excellens orchestres en France; il pourrait
V en avoir davantage avec les élémens qu'on possède.
Dans la symphonie les musiciens français n'ont point de
rivaux, surtout pour la verve et la vigueur. Cette verve
les entraîne seulement quelquefois à donner trop de rapi-
dité aux mouvemeus vifs, ce qui nuit à la perfection des
détails; mais ils rachètent ce défaut, facile à corriger,
par tant de qualités, qu'ils n'en ont pas moins de droits
à occuper la première place parmi les symphonistes du
reste de l'Europe, lorsqu'ils sont bien dirigés. On sait
quelle réputation s'était faite l'orchestre composé des
élèves du Conservatoire dans les exercices de cet établis-
sement ; la supériorité de cet orchestre sur tous les autres
est encore devenue plus incontestable dans les nouveaux
concerts de l'École royale. Celte supériorité est due prin-
cipalement au rare talent de M. Habeneck, le meilleur
directeur de concerts qui ait peut-être jamais existé.
Sous le rapport de l'accompagnement du chant , on
faisait autrefois à cet orchestre, et en général à tous ceux
de la France, le reproche de jouer trop fort et de négliger
les nuances : ce reproche a cessé d'être mérité. Il y a
CHAP. XVIII. OUCHESTRES. 239
même depuis quelques aiiuiies une délicatesse remar-
quable dans la manière d'accompagner des orchestres de
l'Opéra el de l'Ecole royale de Musique. Celui du Théâtre-
Italien a perdu, il est vrai, quelque chos^ de sa légè-
reté et de son ensemble; mais cela tient à des circons-
tances particulières qui peuvent disparaître d'un instant
à l'autre, et qu'il est inutile d'examiner d'ici, parce
qu'elles n'ont point de rapport avec l'état actuel de l'art.
Tout en accordant aux orchestres qui viennent d'être
cités de justes éloges sur l'effet général de leur exécution,
on ne peut dissimuler qu'il est une foule de nuances qu'ils
négligent, et qui pourraient ajouter beaucoup à l'effet
des morceaux. Par exemple, les piano et \e^ forte ne
sont que bien rarement le maximum de ce que devraient
être ces nuances; les uns ne sont pas assez doux, les
autres pas assez forts. Lorsque le passage de l'un à l'autre
de ces effets n'est pas rempli par un crescendo ^ il fau-
drait que leur succession fût beaucoup plus tranchée
([u'elle ne l'est ordinairement, ce qui ne peut avoir lieu
qu'en portant à l'excès le caractère de chacun d'eux. Le
crescendo et le decrescendo sont encore des nuances qui
laissent souvent beaucoup à désirer, parce qu'elles ne
s'exécutent pas d'une manière assez graduée. Souvent on
hâte trop le renflement du son , et la fin de l'effet se
trouve affaiblie et manquée ; d'autres fois ce renflement se
fait trop attendre, en sorte qu'on n'obtient qu'un demi-
crescendo, dont l'effet est vague et peu satisfaisant;
enfin il arrive que le crescendo se fait inégalement et
sans ensemble. Tous ces défauts se remarquent aussi
dans le decrescendo. Ln bon chef peut les éviter; son
geste, son regard, sont des indications sûres pour les
240 DE l'kxécuttox. sect. tïi.
musiciens; tout dépend du plus ou moins de sensibilité
de ses organes, de son intelligence et de son savoir.
Une certaine nonchalance naturelle fait que les exé-
cutons donnent généralement peu d'attention à la valeur
réelle des notes; rarement on rend cette valeur comme
elle est écrite. Par exemple, dans les mouvemens un peu
vifs, une noire suivie d'un soupir s'exécute comme une
blancheparun grand nombredemusiciens; et cependantla
différence est très notable pour l'effet, bien qu'elle soit
indifférente pour la mesure. Ces sortes de faute se mul-
tiplient à l'inGni, et l'on en tient peu de compte; néan-
moins, elles nuisent beaucoup à la netteté des percep-
tions du public. Pour sentir la nécessité de s'en abstenir,
les exéculans devraient se souvenir qu'ils sont appelés à
rendre les intentions des auteurs sans aucune modifica-
tion : l'exactitude est non-seulement un devoir, elle est
aussi un moyen fort commode de contribuer, chacun en
ce qui le concerne , à une exécution parfaite.
Les belles traditions de l'école française de violon
ont donné naissance à un genre de beauté d'exécution
qui était autrefois inconnu : je veux parler de la régu-
larité des mouvemens d'archet qu'on remai-que main-
tenant parmi tous ceux qui jouent la même partie; régu-
larité qui est telle que, sur vingt violonistes qui jouent
le même passage, il n'y a pas la plus légère différence
dans le temps où l'archet est tiré et poussé. Si l'on exa-
mine attentivement tous ces violonistes, on verra tous
les archets suivre un mouvement uniforme, comme si le
tiré et le poussé étaient indiqués par des chiffres. Le pu-
blic ne remarque pas ces choses et ne doit pas les voir;
mais il en éprouve le résultat à sou insu; car il y a un ac-
t HAP. XVIII. ORCHKSTBKS. 2'll
i-ent différent de l'archet près de la Iiausse ou près dt-
la pointe. Ce qui détermine le choix du poussé ou du
tiré est d'abord un instinct irréfléchi; mais l'observation
régularise ensuite ce qu'elle a reconnu bon et avantageux.
Il Y a dans toutes ces remarques bien des faits minu-
tieux; mais c'est de l'attention plus ou moins scrupu-
leuse qu'on leur accorde que dépend souvent le succès
d'un morceau ou même d'un opéra. Le musicien qui aime
son art ne les néglige pas, parce qu'il y trouve du charme.
Tel est le secret d'une bonne exécution : aimer la musique
«m'on joue ou chante, s'y complaire, s'en occuper à
l'exclusion de tout autre objet et y intéresser sa con-
science, voilà ce que fait l'artiste qui a le sentiment de
sa vocation. On dit que cette conscience n'accompagne
p'is toujours le talent; je crois cependant qu'elle en est
le signe. On contracte l'habitude d'une attention scru-.
puleuse comme celle du laisser-aller; tout dépend des
circonstances où l'on se trouve et de la place qu'on
occupe. Tel musicien qui n'est qu'un croquenote en
j)rovince devient un homme habile à Paris , par cela
seul qu'on exige davantage de lui. Ce qui a lieu pour les
individus arrive aussi dans des réunions nombreuses.
Un orchestre est excellent; confiez -le à un chef inhabile,
eu peu de temps il deviendra l'un des plus mauvais qu'on
puisse entendre. On a plus d'un exemple de semblables
métamorphoses.
Une dernière observation sur ce qui concerne l'exé-
cution. Il est rare qu'un auteur soit satisfait de la ma-
nière dont on rend son ouvrage; presque jamais ses
intentions ne sont complètement senties; il en résulte
qu'on entend rarement la musique dans toute sa puis-
sance. Quand un compositeur dit qu'il est satisfait, ce
242 »i l'exécutiow. sect. m.
n'est que relativement et dans la persuasion qu'il ne
pourrait obtenir davantage. Il y a cependant des momens
d'inspiration où les exéculans vont au-delà de la pensée
du compositeur; alors la musique atteint le plus haut
degré de sa puissance; mais de telles circonstances sont
bien rares.
QUATRIÈME SECTION.
COMMENT ON ANALYSE LES SENSATIONS PRODUITES PAR LA
MUSIQUE, rouR i'Ortjlr des jugemens sur celle-ci.
CHAPITRE XIX.
Des préjugés des ignorans et de ceux des savans en musique.
Il est plus d'un degré dans l'ignorance des arts. Le
premier est incurable; c'est celui qui consiste dans la
répugnance qu'ils inspirent : celui-là est le plus rare.
Les individus nés dans une classe obscure et loin du
séjour des villes sont au second degré; leur ignorance
est absolue, mais leur rapport négatif avec les arts peut
n'être qu'instantané et ne suppose pas nécessairement
de l'aversion pour eux. Au troisième degré est placé le
peuple des cités, qui ne peut faire un pas sans se trouver
en contact avec les résultats de la musique, de la pein-
ture ou de l'architecture, mais qui n'y prête qu'une
attention légère, et qui n'en remarque ni les défauts ni
les beautés, quoiqu'il finisse par en recevoir de certaines
jouissances irréfléchies. Les gens du monde, tous ceux
qu'une éducation libérale et une position aisée mettent
à même de voir beaucoup de tableaux et d'entendre
souvent de la musique, n'acquièrent pas précisément
du savoir, mais finissent par avoir des sens exercés qui,
jusqu'à certain point, leur tiennent lieu d'instruction.
Si l'on excepte les individus de la seconde classe, qui
244 SENSATIONS MUSICALES. SECT. IV.
n'ont point d'occasions de sortir de leur ignorance ab-
solue sur des choses qui ne sont point en rapport avec
leurs besoins, il ne se trouvera dans les autres catégories
que des gens qui s'empresseront de prononcer sur les
sensations qu'ils reçoivent des arts , comme si ces sen-
sations devaient être la règle de tous, et comme si ces
individus possédaient les lumières nécessaires pour dé-
velopper et appuyer leur opinion. Remarquez que per-
sonne ne dit : Ceci me plaît ou ceci me déplaît; on
trouve plus convenable et plus digne de dire nettement :
Ceci est bon ou ceci ne vaut rien. Il n'y a pas jusqu'aux
êtres assez malheureusement organisés pour être insen-
sibles à ces arts que la nature nous a donnés pour adoucir
nos peines, qui n'aient aussi leur avis sur les objets de
leur antipathie et qui ne le disent avec assurance. Ils ne
se dissimulent pas que leur état normal présente quelque
chose d'incomplet et d'humiliant; mais ils se vengent en
affectant du mépris pour les choses qui ne sont point à
leur portée , et même pour ceux qui y sont sensibles. A
l'égard du peuple, il a aussi son avis et l'exprime à sa
manière. Ce ne sont point les délicatesses des arts qui le
touchent; il ne connaît de ceux-ci que certaines parties
grossières. Par exemple, l'imitation plus ou moins exacte
des objets matériels est à peu près tout ce qui le frappe
en peinture; ce qu'il admire dans une statue, c'est
qu'elle soit de marbre; ce qu'il aime en musique, ce
sont les chansons et les airs de danse. On ne discute
guère avec ces deux classes d'individus; les gens du
monde se moquent de la première et dédaignent l'autre.
Les disputes n'ont lieu que dans le monde sensible et
bien élevé, qui prend ses préjugés pour ses opinions et
celles-ci pour la vérité,
tJHAP. XI\. l'Rj'jUGÉS. 245
Quiconque cesse d'être en bonne santé n'a pas besoin
de savoir le nom ni la cause de sa maladie pour être
certain qu'elle existe ; la sensation du mal l'avertit suf-
fisamment. Il en est de même de la musique. Il n'est
point nécessaire de savoir comment on l'écrit ni com-
ment on la compose pour avoir la conviction du plaisir
qu'elle fait éprouver ou de l'ennui qu'elle cause. Mais
s'il faut avoir étudié la médecine, vu beaucoup de ma-
lades, fréquenté les hôpitaux, et perfectionné, par l'ob-
servation et la comparaison, Taptitude à reconnaître les
symptômes des maladies, pour décider de leur gravité et
des remèdes qu'on peut y apporter, on doit convenir
qu'il n'est pas moins nécessaire d'avoir appris les élé-
mens de l'art musical, d'avoir étudié toutes ses ressour-
ces, les variétés de ses formes, et de savoir discerner les
défauts de l'harmonie, du rhythme et de la mélodie, pour
être en état de prononcer sur le mérite d'une composi-
tion. De même qu'on se borne à énoncer le mal qu'on
ressent en disant : Je souffre , on doit dire seulement :
Cette musique me plaît, ou ne nC est pas agréable.
Ou serait moins disposé à donner d'un ton tranchant
son avis sur la musique si l'on i-emarquait qu'on en
change plus d'une fois dans le cours de la vie. Qu'on
me montre celui qui n'a point abjuré ses premières ad-
mirations pour se livrer à de nouvelles , et qui ne soit
au moment de renoncer à celles-ci pour des choses qui
d'abord lui étaient antipathiques. Que de partisans for-
cenés des ouvrages de Grétry, qui d'abord repoussèrent
avec horreur les brillantes innovations rossiniennes, et
qui par la suite ont oublié leurs vieilles prédilections et
leurs nouvelles antipathies au point de devenir les plus
ardens défenseurs du rossinisme ! Comment pourrfiit-îl
246 SENSATIONS MUSICALES. SECT. IV.
en être autrement? Les arts appartiennent à la perfecti-
bilité humaine et doivent en suivre la marche ascen-
dante; les choses et les événemens changent : on est
donc forcé de changer aussi. D'ailleurs l'éducation plus
ou moins avancée, l'habitude d'entendre certaines choses
et l'ignorance où l'on est à l'égard de certaines autres,
doivent modifier les opinions et la manière de les sentir.
On voit donc que c'est à tort qu'on se prononce d'une
manière si positive qu'on le fait habituellement, puis-
qu'on est exposé sans cesse à se contredire. En général
on se presse trop de conclure.
Les artistes, les savans en musique ou en peinture, ne
sont pas plus exempts de préventions et de préjugés que
lesignorans; seulement ces préventions et ces préjugés
sont d'une autre espèce. Il n'est que trop ordinaire d'en-
tendre les musiciens soutenir sérieusement qu'eux seuls
ont le droit, non-seulement de juger la musique, mais
même de s'y plaire. Etrange aveuglement, qui fait qu'on
croit honorer son art en limitant sa puissance! Eh! que
seraient la peinture ou la musi(|ue, si ces arts n'étaient
qu'une langue mystérieuse qu'on ne pût entendre qu'a-
près avilir été initié dans leurs signes hiéroglyphiques? A
peine mériteraient-ils qu'on voulût les étudier. C'est parce
que la musique agit presque universellement et de di-
verses manières, quoique toujours vaguement, que cet
art est digne d'occuper la vie d'un artiste heureusement
organisé. Si son action se bornait à intéresser seulement
un petit nombre de personnes, où serait la récompense
de longues études et de plus longs travaux? Autre chose
est de sentir ou de juger. Sentir est la vocation de l'es-
pèce humaine entière; juger appartient aux habiles.
Mais il ne faut pas que ceux-ci se persuadent que leurs
CHAP. XIX, PRÉJUGÉS. 247
jiigemens sont toujours irréprochables; l'amour-propre
blessé, l'opposition d'intérêt, les inimitiés, les préven-
tions d'éducation et de nation, sont des causes qui les vi-
cient souvent. L'ignorance est du moins exempte de ces
faiblesses, dont les artistes et les savans ne se défient
pas assez. Il y a tant d'exemples d'erreurs occasionnées
par elles que l'on devrait toujours s'abstenir de juger
avant d'avoir examiné sa conscience et d'avoir écarté de
son cœur et de son esprit tout ce qui peut paralyser l'ac-
tion de l'intelligence. Que de palinodies on éviterait
avec cette sagesse !
Il est une classe intermédiaire entre l'homme qui s'a-
bandonne simplement à des sensations épurées par l'é-
ducation et l'artiste philosophe; c'est celle qu'on pour-
rait appeler des jugeurs. Ce sont d'ordinaire les littéra-
teurs qui se chargent de cet emploi, bien qu'ils n'y soient
pas plus aptes que tout homme du monde dont les sens
ont été perfectionnés par l'habitude d'entendre ou de
voir. A l'air d'assurance dont ils donnent chaque malin
leurs théories musicales dans les journaux, on les pren-
drait pour des artistes expérimentés, si leurs bévues mul-
tipliées ne montraient à chaque instant leur ignorance
du but, des moyens et des procédés de l'art. Ce qu'il y a
de plaisant, c'est que leurs opinions sont complètement
changées depuis dix ans, et que leur langage est aussi
superbe que s'ils avaient eu une doctrine invariable.
Avant que Rossini fût connu en France, avant qu'il eût
obtenu ses grands succès, on ne cessait de s'élever contre
la science en musique, c'est-à-dire contre l'harmonie,
contre l'éclat de l'instrumentation qui brillait aux dépens
de la mélodie et delà vérité dramatique, et l'on débitait
sur tout cela autant d'erreurs que de mots. Aujourd'hui
248 SENSATIONS MUSICALES. SKCT. IV.
tout est changé; les savans de journaux ont pris la mu-
sique de Rossini pour de la musique savante, et depuis
ce temps chacun s'est mis à affecter un langage scienti-
fique dont on ne comprend pas les élémens. On ne parle
plus que déformes de l'orchestre, de modulations^ de
strettes, etc. ; et sur tout cela on bâtit des systèmes de
musique aussi sensés que ceux d'autrefois. La seule dif-
férence que j'y trouve c'est qu'au lieu de proclamer les
opinions qu'on se forme comme des principes généraux,
on s'est fait une espèce de poétique de circonstance qu'on
applique selon les cas et les individus; de celte manière
on croit éviter les contradictions. Mais les préventions
favorables ou contraires, les sollicitations, les haines on
les complaisances ont tant d'influence sur des jugemeiis
déjà entachés d'ignorance, que si l'on compare tout ce
qui s'écrit sur un ouvrage nouveau dans les feuilles quo-
tidiennes ou périodiques, on y trouve le pour et le contre
sur toutes les questions. Ce que l'un approuve, l'autre le
blâme, et vice versa ; en sorte que l'amour-propre d'un
auteur est toujours satisfait et blessé en même temps ,
s'il est assez fou pour attacher quelque importance à de
pareilles fadaises.
Parler de ce qu'on ignore est une manie dont tout le
monde est atteint, parce que personne ne veut avoir l'air
d'ignorer quelque chose. Cela se voit en politique, en
littérature, en sciences, et surtout en beaux-arts. Dans
les conversations de la société, les sottises qu'on débile
sur tout cela ne font pas grand mal, parce que les paroles
sont fugitives et ne lai.ssent pas de traces; mais les jour-
naux ont acquis tant d'influence sur les idées de tout
genre que les bévues qu'ils contiennent ne sontpassans
danger; elles faussent d'autant plus l'opinion que In plu^
CHAP. MX.
249
j)ait des oisifs y croient aveuglément, et qu'elles pé-
nèlient partout. Il faut l'avouer cependant, depuis quel-
que temps on a compris la nécessité de diviser la ré-
daction des écrits périodiques entre les hommes que leurs
connaissances spéciales mettent en état de parler conve-
nablement des choses ; aussi remarque-t-on que l'on ac-
(juiert dans le monde des idées plus justes des choses et
qu'on en parle mieux.
CHAPITRE XX.
De la poétique de la musique.
S'il n'y avait dans la musique qu'un principe de sen-
sation vague, fondé seulement sur un rapport de conve-
nance entre les sons, ayant pour unique résultat d'af-
fecter plus ou moins agréablement l'oreille , cet art
serait peu digne de l'attention publique; car, n'étant des-
tiné qu'à satisfaire un sens isolé, il ne mériterait pas
plus de considération que l'art culinaire. Il y aurait en
effet peu de différence entre le mérite d'un musicien et
celui d'un cuisinier; mais il n'en est point ainsi. Ce
n'est pas seulement l'oreille qui est affectée par la mu-
sique; si celle-ci réunit certaines qualités, elle émeut
l'anie, d'une manière indéterminée à la vérité, mais plus
puissamment que la peinture, la sculpture ou tout autre
art.
Pourtant il faut avouer qu'il fut un temps où l'on
croyait que satisfaire l'oreille était l'objet unique de la
musique ; ce temps fut celui de la renaissance des arts,
550 SENSATIONS MUSICALES. 8ECT. IT.
Tout ce qui nous reste de monumens de celui-ci, depuis
le milieu du quatorzième siècle Jusqu'à la fin du seizième
siècle, n'a été composé évidemment que pour l'oreille.
Mais que dis-je? ce n'était même pas pour elle que les
musiciens écrivaient alors; c'était pour les veux. Tout
leur génie s'épuisait à arranger des sons dans des formes
bizarres qui n'étaient sensibles que sur le papier. Les
madrigaux, les motets, les messes, toute la musique en-
I fin de ces premiers temps de l'art trouvait cependant
des admirateurs, parce qu'on ne connaissait rien de
mieux; il ne faut jamais arguer des premiers essais d'un
art pour en poser les règles.
Plus tard la musique devint plus agréable et plus faite
pour flatter les sens; tous les genres se ressentirent de
celte tendance vers le gracieux. On la remarquait dans
'a musique instrumentale comme dans la vocale, et sur-
tout dans l'opéra. Des airs et puis des airs composaient
alors toute la durée d'un spectacle de plusieurs heures.
C'est de cette musique prétendue dramatique qu'on a
dit qu'elle était un concert dont le drame était le pré-
texte. L'art s'y était amélioré, mais n'était point arrivéà
son but. Pourtant cette musique plaisait à l'oreille, mais,
ne faisant que cela, elle ne remplissait qu'une de ses
conditions.
Dans la seconde moitié du dix-huitième siècle, les
idées se tournèrent vers la vérité de déclamation; alors
on voulut que la musique fût une langue, et léchant fut
négligé pour le récitatif. Cela était bon en soi; mais à
force de chercher la vérité de ce langage, on ne vit plus
qu'une des facultés de ia musique; on négligea les autres,
et au lieu d'opéras on eut ce qu'on appelait des trag^édics
lyriques. Dans cette révolution, l'art avait évidemment
CHAP. XX. POÉTIQUE. 251
changé d'objel; il n'était plus possible de dire qu'il fût le
plaisir de l'oreille : il fut décidé qu'il doit être celui de
l'esprit; car le principe fondamental du nouveau genre,
celui qu'on opposait sans cesse à toute réclamation, était
celui-ci : la r>érlté. Or, il est évident que la vérité ne
s'adresse point à l'oreille ; l'esprit seul en jouit. Heu-
reusement Gluck , qui mit ce système en vogue, était
plus homme de génie que philosophe; en cherchantcette
vérité, jouissance de l'esprit, il trouva V expression ^ qui
est celle du cœur. L'art se trouva par-là plus près de son
but.
Une fois qu'il fut convaincu que la vérité est le prin-
cipe de la musique comme de tous lesarts, on voulut être
toujours vrai. La musique est susceptible d'imiter cer-
tains effets, tels que le mouvement des flots, la tempête»
le ramage des oiseaux, etc. ; on en conclut qu'elle est es-
sentiellement imitalise, et l'on ne vit point que cette fa-
culté d'imiter n'est qu'un des cas particuliers de ses
fonctions; on ne remarqua point qu'elle est plus sa-
tisfaisante quand elle exprime les passions, la douleur,
la joie, en un mot, les diverses émotions de l'arae. Des
milliers d'exemples auraient dû démontrer qu'elle est
un art d'expression; au lieu de cela chacun en fît ce
qu'il voulut.
Exprimer, dans le sens le plus étendu , c'est rendre
sensibles les idées simples ou complexes et les affections
de l'ame. La musique n'est guère susceptible que de la
transmission de ces dernières; cependant elle n'y est pas
absolument bornée, comme on le verra par la suite.
Quand on dit que !a musique exprime les affections
de l'ame, on ne prétend pas qu'elle soit capable de ren-
dre compte de ce qu'éprouve toi ou tel individu; ellefait
âSi SENSATIONS MUSICALES. SECT. iV.
plus : elle émeut l'auditeur, fait naître à son gré des im-
pressions de tristesse ou de joie, et exerce sur lui une
sorte de puissance magnétique au moyen de quoi elle le
met en rapport avec les êlres sensibles extérieurs. La
musique n'est donc pas seulement un art d'expression,
•/c'est aussi l'art d^mouïoir. Elle n'exprime qu'autant
qu'elle émeut, et c'est là ce qui la distingue des langues,
qui ne peuvent exprimer que pour l'esprit. Cette dis-
tinction fait voir en quoi consiste l'erreur de ceux qui
ont cru qu'elle est une langue analogue à toute autre.
La musique émeut indépendamment de tout secours
étranger; la parole, les gestes n'ajoutent rien à sa puis-
sance, seulement ils éclairent l'esprit sur les objets de
son expression. Je sais qu'on m'objectera la force que
reçoit l'expression musicale d'une prononciation nette et
bien articulée de la parole ; mais il faut distinguer. S'il
s'agit d'un mot, d'une exclamation qui peignent un sen-
timent vif ou une sensation profonde, l'accent que le
chanteur y met en prononçant devient un moyen d'ex-
pression très actif; moyen qui suffit pour émouvoir l'au-
diteur et qui affaiblit conséquemment l'action de la mu-
sique; car nous ne sommes pas organisés de manière à
percevoir plusieurs sensations à la fois par le même sens;
un effet ne peut se manifester en nous qu'aux dépens
d'un autre. La puissance des paroles dans la musique,
dont je viens de parler, se remarque surtout dans le ré-
citatif. Là, il y a une alternative de victoires remportées
par les paroles et par la musique ; c'est presque toujours
dans les ritournelles que celle-ci reprend sa puissance.
Si les vers qui servent de base à la musique n'ont point
pour objet un de ces sentiraens vifs et profonds qui se
peignent par quelques mots; s'ils ont besoin de longs dé-
t.lIAÎ'. \X. POl^TIQUK. 253
Vf!(ij)j)ciiicn5, la musique rcpi\ntl toute sa supériorité;
alors, comme je viens de le dire, les j)aroles n'ont d'uti-
lité (jiie pour éclairer l'esprit. Dès que celui-ci est initié,
CCS paroles deviennent inuliies pour l'expression et ne
servent plus qu'à facditer rarticulation de la voix. La
musique domine, et l'on n'écoute plus celle suite de syl-
labes qui frappent l'air sans s'adresser à l'auditeur. Ceci
démontre que le reproche qu'on adresse queUinelois aux
compositeurs de trop répéter les paroles n'est point
fondé lorsque les répétitions ont pour but de donnera
la musique le temps de passer par tous les degrés de la
passion, ce qui est le point important; remarquez qu'en
parlant de l'elfet de la musique sur l'auditeur, en pareille
circonstance, je suppose que les sens de celui-ci sont
assez exercés pour comprendre les intentions du musi-
cien et les transmettre à son ame.
De tout cela on peut tirer plusieurs conséquences : la
première est que ce qu'on appelle communément Vcj:-
prcssion (les pdvoles n'est point l'objet essentiel de la
musicpie. Je m'explique : ce que le poète lyrique met
dans la bouche des personnages de son drame est la
manifestation de ce qu'ils éprouvent; mais de deux cho-
ses l'une : ou ees personnages ressentent une passion
qu'il faut faire partager à l'auditoire, ou ils sont en
danger, et il faut intéressera leur sort. Dans l'un et
l'autre cas il faut émouvoir; or, de tous les arts, le plus
puissant pour y parvenir est la musique. Les paroles
ne peuvent lui prêter qu'un faible secours ; il suffit que
le public soit instruit dé la situation des choses. S'il s'a-
git au contraire d'un état mixte où l'ame n'est point
inerte, quoiqu'elle ne soit pas vivement émue, la mu-
sique se met en harmonie avec elle par la suavité de can-
lS4 St5»ATI(J?fS MtSlCALtt. SECT. iV.
/ilènes un peu vag;ues , par la ridiesse des accompagne-
ment et par la nouveauté de l'harmonie, qui produisent
plutôt des sensations que des émotions. Dans ce cas l'ac-
tion dt;s paroles est encore plus faible. Enfin, s'il faut
que la m^isique soit l'interprète de bons mots, de plai-
santeries et de quolibets, on s'apeiroit au premier abord
qu'elle y est compiètcmenl inhabile. Si le musicien ne
veut rien dérober de l'esprit du poète , il s'efface pour le
laisser paraître, et dès lors il est faible et conlntint; s'il
6 obstine à y mettre du sien , il devient imjjortun.
Je prévois des objections, car tout ceci n'est pas dans
les idées reçues. Essayons d'aller au-devant et de les ré-
soudie.
a Gréiry, dira-t-on, Grétry, l'idole des Français pen-
« dant jjrès de soixante ans , brilla pi écisément par cette
« faculté que vous refusez à son art, celle d'exprimer
« des paroles. Il mit souvent plus d'esprit dans sa mu-
t sique que le poète dans ses vers, et c'est surtout par-là
« qu'il s'est fait une brillante lenommée. » Distinguons.
Gréiry, quoicjuc fjible harmoniste et musicien médiocre,
avait reçu de la nature le don d'inventer des chants heu-
reux , beaucoup île sensibilité musicale, et plus d'esprit
que ses livres ne semblent l'indKjuer. Ce qui reste de
lui maintenant, ceque les connaisseurs admireront encore
quand les profjrès de l'art et la mode auront fait dispa-
railre pour toujours ses ouvrages de la scène, ce sont
_se&-mélodics, véritables inspirations d'un instinct créa-
teur, et cette sensibilité cpii lui faisait trouver des accens
pour toutes les passions. Quant à l'esprit qu'il se piquait
d'avoir et qui consiste à faire ressortir un mot, à cher-
cher des indexions comiques, à sacrifier la phrase ou la
période musicale pour ne pas nuire à la rapidité du
CHAP. XZ. FOÉTI^UK. i$&
dialowne, c'est pent-ètre quelque rhose de fort bon dans
un ceilain SNSlcme, mais ce n'est pas de la mnsi(nie.
Cela plaisait aiilrtfois à des spectateurs français, qui ne
cherchaient que le vaudeville dans leurs opéras-comi-
ques, et dont les organes n'étaient point façonnés pour
entendre autre chose; mais à l'époque même où Giétry
écrivait, les autres peuples de l'Europe entrevoyaient
dans la musique un but p'us noble que de se rapprocher
de la parole, et d'aflaihlir l'une pour se mettre à la
portée de l'autre. « Tu pai les trop pour un homme qui
ft chante, tu chantes trop pour un homme qui parle v,'
disait Jules César à certain professeur de déclamation
qui roulait faire servir la musique à seconder la parole:
celte criti(|ue est applicable à tous les musiciens qui ont
eu la faiblesse de se laisser diriger par des gens tle lettres
jaloux de la gloire de leurs héîiiisliches , et qui se per-
suadaient que leurs vers étaient ce qu'il y avait de plus
important dans un opéra.
Ce n'est pas qu'on doive bannir l'esprit des paroles
destinées à la musique, ni même de l'œuvre du musi-
cien; les meilleurs opéras italiens, français et allemands
offrent des traits où l'intonation musicale seconde heu-
reusement la parole; il sulfîl de se souvenir que ce n'est
point I objet essentiel de la n.usique. D'ailleurs, ces
traits où la musi(jue partage l'eflel de la parole sont tou-
jours de courte durée. Le musicien ne fait jamais bi i!ler
le poêle sans délourner l'atlenlion de sa musique.
On m'objectera encure qu'il y a beaucoup de mor-
ceaux comitpies où l'an iculal ion précipitée des paioles
produit un bon effet; on pourra même m'opposer des
narrations qui n'ont pas empéclié les hommes de géui^
256 SENSATIONS MUSICALES. »ErT. IV.
de faire t'e bonne musique : ceci mérite d'être examiné.
Les opéras boulfes italiens sont remplis de morceaux
qu'on ;q)[)elle noie et parole ; leur effet est vif, piquant,
spirituel; mais il ne faut pas s'y tromper : dans ces mor-
ceaux, la qualité des Idées musicales est moins impor-
tante que le rhythme. Les ouvrages de Fioravanti sont
pleins de ces choses dont l'effet est parfait, quoique les
pensées du musicien soient communes ; c'est que le
rhythme en est excellent. Ce rhythme est tout ce qu'on
remarque. L'arrangement plus ou moins comique des
paroles attire ensuite l'attention, et l'on finit par penser
à peine à la musique, qui n'est plus qu'un accessoire.
Remarquez d'ailleurs que l'accent bouffon de l'acteur
et ses lazzi sont pour beaucoup dans l'effet de ces mor-
ceaux. Tout cela est bon à sa place; mais, encore une
fois, la musique n'y joue qu'un rôle secondaire.
Quant aux narrations , elles sont de deux espèces.
Dans la première, le compositeur ne voulant point met-
tre obstacle à l'articulation des paroles, évite de donner
à la voix la piirase mélodique, jette l'intérêt dans l'or-
chestre sur un thème caractérisé, et ne donne à la voix
qu'un débit presque monotone qui permet d'entendre
distinctement ce que dit l'acteur. Dans ce cas l'effet est
complexe pour les auditeurs dont l'oreille est exercée,
et leur attention se partage entre la scène et la musique;
les autres n'entendent que les paroles et peu ou point la
musique.
L'autre manière de traiter la narration consiste à ne
prendre du sujet que .son caractère gai ou triste, tran-
quille ou animé, et à faire un morceau de musicpie où
les paroles n'ont qu'une action secondaire, tandis que
cu.-vi'. XX. ruhTiyi-'i:. 2.'>7
l'attention se porte sur l'œuvre du musicien; tel est
l'air admirable Pria c/ic spu/ili du Malriinonlo se-
greto.
De quelque manière qu'on envisage l'union de la mu-
sique aux paroles, on voit qu'on ne peut sortir de cette
alternative : ou la musique domine les paroles, ou les
paroles dominent la musique. Il n'y a point de partage
possible entre elles, à moins (ju'elles ne soient assez fai-
bles pour qu'onsoitindifierent àl'une comme aux autres.
La musi(|uc qui émeut exprime des situations et non des
paroles; quand celles-ci se font remarquer, l'autre n'est
plus qu'un accessoire; dans le premier cas, l'ame est
émue; dans le second, l'esprit est occupé. L'une et l'autre
choses sont bonnes quand elles sont employées à propos,
car il n'est pas donné à l'homme d'être continuellement
ému; les émotions fatiguent; il faut des repos, et sur-
tout de la variété dans notre manière d'être.
Rien ne prouve mieux la faculté d'émouvoir que
possède la musique, indépendamment de la parole, que
les effets produits par la musique instrumentale. A la
vérité, ces effets n'ont lieu que pour ceux dont l'éduca-
tion a été bien faite; mais cela ne conclut rien contre
celte proposition, car nous n'avons d'idées que par l'é-
ducation. Quel est l'homme, quelque peu initié à cet
art , qui n'ait été ému par les accens passionnés de la
symphonie en sol mineur de Mozart? Qnel est celui qui
n'ait senti de l'élévation dans ses idées par le grandiose
(!e la marche de la symphonie en ut mineur de Beetho-
ven ? On pourrait citer des milliers d'exemples sembla-
bles.
Mais, dira-t-on, la nature de ces émotions est vague
et n'a point d'objet déterminé, v'^ans doute; c'est prr* isé-
258 8EXSATI0N.S MUSICALES. SECT. IV.
ment pour cela qu'elles ont tant d'action sur nous. IMoins
l'objet est évident, moins l'esprit est occupé, plus l'anie
est émue; car rien ne la distrait de ce (ju'elle éprouve.
Nos perceptions s'affaiblissent par leur multiplicité;
elles sont d'autant plus sensibles qu'elles sont plus
simples.
Perdons l'habitude de comparer ce qui n'a point d'ar-
nalogie, et de vouloir que tons les arts agissent de la
même manière. La poésie a toujours un obj^t dont l'es-
prit s'empare avant que le cœur soit ému; la peinture n'a
d'effet qu'autant qu'elle nous présente avec vérité les
scènes ou les objets qu'elle veut reproduire, et qu'elle
attaque notre conviction. On ne demande rien de tout
cela à la musitjue : qu'elle nous émeuve, et c'est assez.
— Mais sur quel sujet? — Peu m'importe. — Par quels
moyens? — Je l'ignore; je dis plus : je ne m'en inquiète
guère.
Dira-t-on que cet art serait réduit à n'être qu'un
plaisir des servs , s'il en était ainsi ? ce serait une erreur.
Ainsi que l'amour, s'il a une action physique, il en a
une morale aussi. On a souvent eu la fantaisie de com-
parer la musicpie à cjuelque chose, et personne n'a songé
à la seule passion dont les symptômes et les effets sont
analogues aux siens. Ainsi que l'amour, elle a ses dou-
ceurs voluptueuses, ses explosions passionnées, sa joie,
sa douleur, son exaltai ion, et le vaj;ue, ce vague déli-
cieux qui n'offre aucune idée déterminée, mais qui n'en
exclut aucune. De ce qu'elle ne s'adresse pas à l'esprit,
il ne s'ensuit pas qu'elle se borne à satisfaire l'oreille;
car l'oreille n'est que l'organe, et l'ame est l'objet. La
musique n'a point par elle-même les moyens d'exprimer
les nuances des passions fortes, telles que la c(»lère, la
CHAP. XX. POÉTIQCB. 250
jalousie ou le désespoir; ses accens tiennent de tout cela,
mais n'ont rien de positif. C'est aux paroles à éclairer
randileiir; sitôt que ceUii-ci est instruit, la musique
suffit, car elle émeut. Le musicien ne doit donc pas per-
dre son temps à chercher les limites de nuances qu'il
n'est pas en son pouvoir il'exprimer. Tous les conseils
que Grélry a donnés à cet égard, dans ses Essais sur la
JlJirsiquc , sont illusoires.
Les principes de la poétique et de la pln'losophie de
la musique sont très déliés, très difficiles à saisir, plus
difficiles encore à présenter avec évidence; de quelque
manière qu'on les considère, on arrivera à cette conclu-
sion que la musique n'est ni un art d'imitation ni une
langue, mais l'art d'exprimer ou jjlutùtd'émouvoir.
Ceci posé, il devient évident c|ue les enthousiastes de
telle ou telle manière, de telle ou telle école, de te! ou
tel genre, ne comprennent point le but de la musique.
Les préférences que certaines personnes manifestent
pojr la mélodie, ou pour l'harmonie, ou pour les moyens
simples, ou pour les modulations recherchées et multi-
pliées, sont autant d'erieui's par lesqiielles on prétend
limiter l'action de l'art qui a besoin de toutes ces choses
et de beaucoup d'autres. Gluck croyait qu'il est néces-
saire de lier si bien le récitatif aux airs qu'on ne pût
presque pas sentir où commencent ceux-ci. Le résultat
de son système devait être une certaine monotonie qui
a peut-être fait vieillir trop vite ses chefs-d'œuvre dra-
mnli(|ues; dcpui-. quelques années on a reconnu que
l'etfet des morceaux gagne à ce (pi'on sente bien où ils
commencent, parce que ratieulion de l'auditoire est
plus grande, et l'on a cherché à les séparer du récitatif
PiUtant qu'on l'a pu. On n'a fait en cela que recotamence?
260 SENSATIONS MUSICALES. SECT. IT.
ce qui se pratiquait avant la révolution opérée dans la
musique dramatique par le grand musicien qui vient
d'être nommé. Mais de ce que la mode a changé, il ne
faut pas croire que le système de Gluck fût absolument
mauvais; car, à la monotonie près, il y a dans ce système
une vivacité d'expression dont l'application peut être
excellente en beaucoup de circonstances et qui est du
domaine réel de l'art. La simplicité d'instrumentation a
fait place à une richesse qui tient quelquefois de la pro-
fusion ; faut-il condamner l'une ou l'autre? Non; car
il est de certaines situations qui demandent delà simpli-
cité et d'autres qui exigent un plus grand développe-
ment de moyens. Enfin, tous les compositeurs de l'an-
cienne école ont considéré le luxe des fioritures comme
destructif de l'expression dramatique; dans la musique
de nos jours, au contraire, on les multiplie à l'excès.
Les partisans de l'ancienne tragédie lyrique affirment
que cette dernière méthode est ridicule, en ce qu'elle
est souvent en opposition avec les senlimens dont les
personnages sont animés, et les amateurs de la musique
nouvelle traitent de gothique celle qui n'est pas enrichie
de ces biillantes fantaisies. Les uns et les autres ont
tort; les premiers, parce que la musique doit avoir des
momens de repos et ne peut pas toujours exprimer ou
émouvoir; les autres, parce qu'il est telle situation oà
l'on ne pourrait employer les traits, les trilles, les grou-
pes et les points-d'orgue, sans détruire tout principe de
vérité Rossini, qui a nudtiplié dans sa musique les choses
de ce genre plus qu'on ne l'avait fait jusqu'à lui, a fait
voir qu'il sait y renoncer quand il en est temps, particu-
lièrement dans le beau trio de Guillaume Tell. En un
mot, émouvoir l'ame ou plaire à l'oreille étant le but.
iiiAi'. XX. poKTryuK. 261
tous les moyens sont bons pour y parvenir; il ne s'agi^
(]iie de les employer à propos. .Je ne connais aucun sys-
tème, aucun procédé ([ui ne puisse avoir son effet; l'a-
vantage qu'il y aurait à n'en rejeter aucun serait d'ob-
tenir une variété qu'on ne rencontre à aucune époque de
l'histoire de l'art, parce qu'on s'est toujours attaché à tel
ou tel système à l'exclusion de tout autre.
A l'égard de la musique instrumentale, la carrière est
encore plus étendue parce (jue l'objet est plus vague.
Pour y réussir ou pour en juger, il est indispensable de
se défendre aussi de ces penchans ou de ces aversions
qui ne prennent leur orii|;ine que dans nos préjngés. Il
faut de la science, disent les uns; il faut de la grâce sur-
tout, disent les autres. — Moi j'aime le brillant et les
traits en notes rapides. — Moi je les déteste. — Vive la
musique sage et pure de Haydn! — Non; vive la péné-
trante passion de Mozart! — Eii non! vive la verve ori-
ginale de Beethoven! Que signifie tout cela? est— ce à
dire que chacun de ces grands artistes, en ouvrant des
routes nouvelles, ail eu moins ou plus de mérite que les
autres? et parce qu'il en est un qui est venu le dernier
et qui a fait des choses dont on ne sentait pas le besoin
auparavant, faut -il en conclure que lui seul a connu le
véritable objet de l'art? Ne voulez-vous qu'un genre?
vous serez bientôt fatigués de ce qui d'abord aura fait
vos délices. Quelque autre nouveauté viendra qui mettra
en oubli l'objet de vos affections, et de cette manière
l'art musical sera comme Saturne qui dévoiait ses en-
fans. En marchant sans cesse vers lui but qu on n'attein-
dra jamais, on perdra sans retour le souvenir des routes
qu'on aura suivies. Quelle extravagance de ne croire
qu'en soi, et de s'imaginer qu'on a des sens plus perfec-
263 SENSATIONS MUSICALES, 8ECT. IV,
tjonnés ou un jugement plus sain que ceux par qui l'on
a été précédé! On sent autrement, on juge d'autre sorte,
et voilà tout. Les circonstances, l'éducation etsintoul les
préjugés nous obsèdent en tout ce que nous faisons, et
ce sont les résultats de leur action que nous prenons
pour ceux d'une raison supérieure. Encore une fois, ne
rejetons rien de ce qui esta notre disposition; usons de
tout en temps et nous en serons plus riches.
Pour jouir des beautés passées de mode et pour en
sentir le mérite, plaçons-nous dans la position où était
l'auteur lorsqu'il écrivit son ouvrage; rappelons-nous
ses antécédens; peignons-nous l'esprit de ses contempo-
rains et oublions pour un instant nos idées habituelles;
nous serons étonnés d'être devenus sensibles à des choses
dont nous n'aurions pu reconnaître le mérite si nous
nous fussions obstinés à prendre pour objet de compa-
raison les productions qui sont plus en rapport avec
l'état avancé de l'art et avec nos penchans. Par exemple,
si l'on veut juger du mérite de Haydn et de ce qu'il a
fait pour les progrès de la musique, qu'on se fasse jouer
une symphonie de Van Malder ou de Stamitz, ou un
quatuor de Davaux ou de Cambini, et l'on verra un
génie du premier ordre créer en quelque sorte toutes les
ressources dont les compositeurs usent aujourd'hui. Que
revenant ensuite à Beethoven pour le comparer au père
de la symphonie, on examine les qualités qui brillent
dans les ouvrages de l'un et de l'autre, et l'on se con-
vaincra que si Beethoven l'emporte sur Haydn pour la
hardiesse des effets, il lui est bien inférieur sous les rap-
ports de la netteté de conception et de plan. On verra
Haydn développant avec un ait inOni des idées souvent
médiocres et en faire des merveilles de forme, d'él<^-
iHAP. \\. l'OKTlQUE. 263
gunce et de majesté, tandis qu'on remarquera dans les
productions de Beethoven un premier jet admirable et
des pensées giganlesf[ucs qui, à force de développemens
puisés dans une vague fantaisie, perdent souvent de leur
effet en s'avanrant, et se terminent en faisant regretter
que l'auteur n'ait pas fini plus tôt.
Avec cette sage direction de ses impressions, chacun
parviendra à se défaire de ses préjugés et de ses penchans
exclusifs : l'art et les jouissances qu'il procure y auront
gagné. Les artistes éclairés ont un avantage incontesta-
ble sur les gens du monde : celui de se plaire à entendre
la musique des hommes de génie de toutes les époques
et de tous les systèmes, tandis que les autres n'admet-
tent que celle qui est en vogue et ne comprennent que
celle-là. Les premiers ne cherchent dans la musique
ancienne que les qualités qui sont de son essence; mais
les autres, n'y retrouvant pas leurs sensations habituelles,
s'imaginent qu'elle ne peut en procurer d'aucune espèce.
Il faut plaindre les hommes qui mettent ainsi des bornes
étroites à leurs jouissances, et (jui n'essaient même pas
d'en agrandir le domaine; il est vraisemblable que leur
nombre diminuera dès que les compositeurs auront com-
pris que tous les styles avec tous leurs moyens sont bons
à employer, et lorsqu'ils se seront déterminés à refaire
dans leurs ouvrages l'histoire des progrès de leur art.
CHAPITRE XXI.
De l'analyse des sensations produites parla musique.
rimagine qu'en écoutant de la musique l'homme c^ui
2o4 SENSATIOSS MUSICALES. SI?CT. IV.
n'a point, étudié cet art et qui ignore ses procédés n'en
reçoit qu'une sensation simple. Pour lui, uu chœur
composé d'un grand nombre de voix n'est que comme
une voix puissante, un orchestre n'est qu'un grand ins-
trument. II n'entend point d'accords, point d'harmonie
ni de mélodie, point de flûtes ni de violons : il entend
de la musique.
Mais à mesure que cet homme écoute, ses sensations
se compliquent. I,'éducation de son oreille se fait insen-
siblement; il finit par discerner le chant de l'accompa-
gnenient et se forme des notions de mélodie et d'harmonie.
Si son organisation est favorable, il arrivera au point de
distinguer la différence de sonorité des instrumens qui
composent lorchestre, et par rcconuaître dans les sen-
sations qu'il recevra de la musique ce qui appartiendra à
la composition et ce qui sera l'effet du talent des exécu-
taus. L'expression plus ou moins heureuse des paroles,
les convenances drauiatiques et les effets du rhjlhme
sont encore des choses sur lesquelles il apprendra à for-
mer des jugemens; son oreille ne sera insensible ni au
défaut de justesse, ni au manque de mesnre; mais il ne
sera affecté de toutes ces choses que par instinct et par
habitude de comparer ses sensations. Parvenu à ce point
il sera comme tous les hommes bien élevés qu'on rencon-
tre dans les salles de spectacles; car le public éclairé qui
fait les réputations des artistes n'en sait pas davantage
et ne peut porter plus loin ses analyses. Dans l'harmonie,
ce public n'entend point d'accords; une phrase qui se
représente à lui accompagnée de diverses manières est
toujours la même phrase. Les nuances délicates de forme
qui composent une grande partie du mérite d'une com-
position n'existent point pour lui; en sorte que s'il est
llllAP. XXI. l.Ktli A^^Al.YSr.. tiCiÔ
moins choqué que les artistes des défauts d'une compo-
sition incorrecte, il est moins louché des beautés de la
perfection.
N'est-il donc aucun moyen d'aller au-delà de celte
perception incomplète de l'effet des sons, à moins de se
faire initier à la science de la musique? et faut-il absolu-
ment faire une étude longue et fastidieuse des principes
et des procédés de celte science pour en goûter tous les
résultats? Si je parlais en artiste, je répondrais affirmati-
vement, et je dirais avec orgueil qu'il est pour moi de
certaines jouissances dans la musique qui ne seront jamais
le partage des gens du monde; je soutiendrais même que
ce sont les plus vives, afin de faire mieux ressortir cette
espèce de supériorité que me donne un savoir spécial.
Mais ce n'est pas pour cela que j'ai entrepris d'écrire
mon livre. Indiquer les moyens d'augmenter les jouis-
sances et de diriger le jugement sans être obligé de se
soumettre à un long noviciat qu'on a rarement le temps
et la volonté de faire, tel est mon but : voyons donc par
([uoi l'on peut remplacer, jusqu'à certain point, l'expé-
rience de l'artiste et le savoir du professeur.
Je suppose qn'un auditoire sensible aux accens de la
musique assiste à la représentation d'un opéra nouveau ;
(jue le nom du compositeur lui est inconnu, et que le
genre de la musique est neuf et d'une originaliié telle que
toutes les habitudes harmoniques et mélodlipies de cet
auditoire sont troublées. D'après ces données, voici ce
que je crois convenable de faire poiu' analyser la nou-
velle composition.
Le premier effet d'un nom célèbre d'artiste est d'ins-
pirer de la confiance et des préventions favorables; par
un effet contraire on éprouve je ne sais quelle défiance
266 SENSATIONS MlSlCALES «CT. JV.
d'un nom inconnu , et le premief mouvement est de
condamner les choses qu'on ne connaît pas. On désire
de la nouveauté , mais il faut juger ce qui est nouveau;
on craint de se comj)rometlre, et comme en général il y
a moins de bonnes choses que de mauvaises, on croit
qu'il est plus sur de condamner au premier abord que
d'approuver. 11 y a bien plus de séiurité avec les célé-
brités; elles dispensent d'énoncer une opinion générale,
et c'est déjà quelque chose; ensuite il est à peu près
certain qu'il se trouve dans l'opéra des beautés à peu
près égales aux défauts; il est donc permis de porter des
jugemens qui ne compromettent point pour l'avenir.
Telles sont, on ne peut en douter, les causes des opi-
nions prématurées qu'on énonce chaque jour dans le
monde. Ces choses sont les conséquences de l'organisa-
tion humaine et de la société. La première règle qu'il
faut se faire, pour procédera l'anaKse des sensations
qu'on éprouve à l'audition d'un ouvrage nouveau, est
donc de se défier de ses piévenlions , et d'être convaincu
qu'il arrive rarement de n'èlre pas trompé par elles au
premier abord. La difficulté de ne point se tromper est
d'autant plus grande que le genre de la musique est plus
nouveau; car il est bien rare que l'extrême originalité
ne blesse pas d'abord. Qu'on se rappelle les jugemens
défavordbles qu'on a portés de la musique du Barbier
de Séi'il/e k sa première représentation, et des compo-
sitions de Beethoven, quand on les entendit la première
lois : ces exemples doivent servir de leçon. On aura
beaucoup fait quand on se sera défenxlu de la précipita-
tion des jugemens ; car il coule bien moins de suspendre
son opiuion que de revenir sur ce qu'on a dit. Que de
fois il est arrivé de persister dans des erreurs manifestes,
CHAP. XXI. LEUR ANALTSK. 267
uniquement parce qu'on les avait professées et par un
intérêt d'amour-propre mal entendu!
D'autres motifs doivent nous mettre en garde contre
notre penchant à nous prévenir pour ou contre. Quelle
musiipie, si bonne qu'elle fût, n'a point perdu son charme
par l'effet d'une mauvaise exécution? Quelle platitude
n'a point fasciné les sens, lorsque de grands artistes en
étaient les interprèles? La musique, telle qu'elle sort
des mains du compositeur, est une table rase; l'exécu-
tion benne ou mauvaise en fait quelque chose ou rien.
C'est encore une suite de la conformation humaine de
croire que tout va s'amélioranl dans les arts et dans la
littérature comme dans l'industrie. Il en résulte qu'on se
croit, en général, appelé à remettre en question les
vieilles renommées, et à prononcer en dernier ressort.
Mais dans ces singuliers arrêts de cassation, où l'on
penche ordinairement à décider que les générations pas-
sées ont eu tort d'admirer les productions de leur temps,
on ne tient pas compte delà différence des circonstances,
des formes de mode qui emportent le fond, nî des tradi-
tions d'exécution qui sont perdues. On se croit suffisam-
ment instruit après une mauvaise audition dans laquelle
on était bien plus disposé à chercher le côté ridicule
qu'à écouter véritablement. Que de jugemens de cette
espèce ! On en a vu un exemple frappant de nos jours , à
propos du fameux ^//( /«/«deH^endel. Ce beau morceau,
après avoir été étudié avec une attention religieuse dans
l'Institution royale de Musique classique dirigée par
M. Choron, y fut exécuté avec une con\iction qui en-
traîna celle du public, et qui fit naître le plus vif enthou-
siasme dans l'auditoire. Quelque temps après, le même
morceau fut donné par la Société des concerts à l'École
_u5 SENSATIONS MUSICALES. «ECT. IV.
royale de Musique ; on devait tout attendre des chœurs
et de l'orchestre admirable de ces concerts; mais la plu-
part des artistes qui en faisaient partie, admirateurs
exclusifs de Beethoven et de l'école moderne, n'exécu-
tèrent le chef-d'œuvre de Haendel qu'avec des préven-
tions défavorables, en ricanant et sans soins; l'ouvrage
ne fit point d'effet , et il fut décidé que cette musique for-
midable était une perruquerie.
Que si l'on parvient à se défendre de toutes les fai-
blesses qui faussent le jugement et gâtent les sensations,
alors commencera réellement l'action de l'intelligence
jjour l'analyse des sensations, et pour juger de leur na-
ture. La première chose qu'il faudra examiner seia l'objet
du drame, si, comme je l'ai dit, il s'agit d'un opéra. Si
le sujet est historique, on pourra reconnaître au premier
abord si l'ouverture est analogue à son caractère; s'il est
de fantaisie, il sera seulement possible de juger si elle
est agréable et bien faite. Agréable? c'est ce que tout le
monde est appelé à juger; bien faite? c'est le point de
la difficulté. La bonne ou mauvaise facture dépend de
l'ordre qui règne dans les idées. Une ouverture peut être
riche d'invention et être mal faite; car si les idées abon-
dantes n'ont point de liaison entre elles, elles fatigue-
ront l'attention sans charmer l'oreille. C'est une chose
d'expérience qu'une phrase, (juel que soit son agrément,
n'est point comprise à la première audition. Ce n'est
qu'après avoir été répétée plusieurs fois cju'elle se grave
dans la mémoire et qu'on en remarque toutes les qua-
lités. Mais s'il y a beaucoup d'idées dans un morceau
et si chacune d'elles est répétée plusieurs fois , le morceau
sera très long et fera naître la fatigue. D'ailleurs, il serait
difficile de bien retenir et de bien saisir également beau-
tllAP. XXI. LELU ANALYSE. 2G9
coup de phrases différentes. Il faut donc qu'il n'v ail pas
plus d'idées dans un morceau que ses dimensions n'en
peuvent comporter sans fatijiutr raltcnlion de l'auditoire;
d'où il suit qu'un petit nombre de phrases bien disposées
et ramenées avec adresse composent un morceau bien
lait et facile à comj)rendre. D'un autre côté, si les idées
principales d'une ouverture se représentaient toujours de
la même manière, l'ennui naîtrait de cette uniformité.
L'ouverture sera donc d'autant mieux faite que les idées
seront présentées successivement avec des formes plus
riches d'harmonie ou d'instrumentation , de manière
qu'elles se termineront par une péroraison brillante où
le compositeur fera entrer des modulations inattendues
qu'il aura réservées pour ce moment final; car, s'il en
usait plus tôt, il finirait plus faiblement qu'il n'aurait
commencé, ce (]ui , en toute chose, est contraire à la gra-
dation des émotions.
Une fois instruit de ces choses, si l'on se donne la
peine d'en suivre les détails, on finira par s'habituer a
les distinguer promptement, et par sortir de ce vague
qui traîne l'indécision à sa suite. Il sera dès lors facile de
se former une opinion d'un morceau de ce genre. Sans
doute, on ne parviendra jamais sans être profondément
musicien à discerner dans la rapidité de l'exécution un
accord d'un autre; à reconnaître l'avantage qu'il y aurait
eu à faire usage de telle harmonie sur tel passage au lieu
de telle autre; à sentir l'élégance de certains mouvemens
harmoniques ou les défauts de certains autres; de lon-
gues études peuvent seules don er la promptitude de
perception nécessaire pour porter des jugemens de cette
espèce; mais on peut augmenter ses jouissances musica-
les, sans arriver à ce point de connaissances positives,
270 SENSATIONS MUSICALES. 6ECT. IV.
Le plaisir on la froideur qu'on éprouve en écoutant un
air, un duo, un morceau d'ensemble ou un finale, ne
dépendent pas lonjours des qualités de la musique; la si-
tuation dramatique est pour beaucoup dans l'effet que
ces morceaux produisent sur nous. Cet effet est satisfai-
sant ou défavorable, selon qu'il y a convenance ou incon-
venance avec l'objet de la scène. De là vient que certains
morceaux plaisent beaucoup dans un salon avec un simple
accompagnement de piano, et déplaisent au théâtre. Le
mauvais effet d'nn air, d'un duo, ou de tout autre mor-
ceau, peut venir de ce que le caractère n'est point ana-
logue avec l'objet de la scène, ou de ce qu'ils prolongent
trop une situation languissante, ou enfin de ce qu'une
idée principale et saillante n'a pas assez de développe-
ment. La première chose, lorsqu'on veut jugei' d'un
morceau scénique, est donc de faire la part du mérite
dramati(|iie, et celle de la musique proprement dite. Jl
est vrai que cette musique, si bonne qu'elle puisse être,
ne l'est qu'autant qu'elle est convenable pour la place
qu'elle occupe; mais cela ne conclut rien pour ou contre
le mérite du compositeur; car il est des musichens de
génie qui ne sotit point nés pour écrire de la musique
scénique, quoiqu'ils soient capables de produire de belles
choses d'un autre genre; tandis qu'il en est d'autres dont
les idées sont communes, quoiqu'ils aient le sentiment
des convenances de la scène. Cette distinction est une
des plus difficiles à faire; car il faut, pd^ur y parvenir,
résister à des impressions puissantes par lesquelles on est
dominé; il ne faut même pas se persuader qu'elle soit
possible à une première audition. Les musiciens de pro-
fession, les plus expérimentés même, sont rarement capa-
bles d'un pareil effort. Cela fait voir qu'il faut nous dé-
CHAP. XXI. LECn ANALYSE. 271
fier des jngemêns précipités que l'amour-propre nous
portf souvent à faire.
Dès qu'on est parvenu à dis'.ingiier ce qui concerne le
mérite scénique de celui de la musique en eUe-même, il
faut procéder avec ordre à l'examen de celle-ci. Parmi
ses qualités, une des plus importantes doit être la va-
riété; il faut donc considérer d'abord si elle s'y trouve.
La variété, comme la monotonie, peut exister de beau-
coup de manières, f^lle est remaî'qnable surtout dans la
forme des pièces. Les airs d'un opéra , par exemple , peu-
vent, comme on l'a vu précédemment, se présenter sous
la forme du rondeau , de la cavatine ou air sans reprise ,
de l'air à un seul , à deux ou à trois mouvcmens , alterna-
tivement vifs et lents, ou enfin sous l'aspect de la romance
ou desimpies couplets. Si toutes ces formes, ou du moins
la plupart d'entre elles, se présentent dans le cours d'un
opéra , on éprouve, sans en remarquer la cause , l'effet
de cette variété; mais si les mêmes formes se reprodui-
sent sans cesse, comme celles des airs à trois mouve-
mens, dans la plupart des opéras italiens modernes, ou
des couplets et des romances dans beaucoup d'opéi"as
français , l'effet inévitable sera la monotonie , et par
suite le dégoûi.
Ce sera pis encore si les duos sont coupés dans la
forme des airs; enfin, si la nature des idées a de la si-
militude, si les mélodies sont d'un caractère uniforme,
si les moyens de modulation, d'harmonie ou d'instru-
mentation ont de l'analogie, l'ennui naîtra sans mil
doute d'une composilion dont chaque ]iarlie, considérée
isolément, serait cependant digne d'éloges. Cet effet est
plus commun qu'on ne pense. Il y a des multitudes de
jolis airs qui ont du succès lorsqu'ils sont exécutés isolée.
272 SL>5ATiONS JltSlCALES. SECT. IV.
ment , et qui perdent tout leur effet au théâtre , à cause
de leur ressemblance avec d'autres morceaux du même
ouvrage. Après Texamen des convenances dramatiques ,
celui de la variélé ou de la ressemblance des formes est
donc un des plus nécessaires pour juger du mérite d'une
composition.
Les qualités mélodiques d'un air ou d'un duo sont,
comme celles de la conception dramatique, du domaine
du génie, et ne sont soumises qu'aux seules conditions
de plaire ou d'émouvoir; pourvu que le rhylhme et la
quantité périodique des phrases en soient régulièrement
construits, le reste est du ressort de la fantaisie, et ne
peut être limité par l'autorité de qui que ce soit. Moins
l'œuvre du musicien a de rapport avec ce qu'on a fait
précédemment , plus il est prêt du but qu'il veut attein-
dre. Il ne peut plaire à tout le monde , car il n'est point
d'artiste qui ait joui de cet avantage; mais personne n'est
en droit de discuter le penchant ou l'éloignement qu'on
éprouve pour ses productions , car c'est involontaire-
ment qu'on se plaît ou qu'on se déplaît à entendre une
mélodie. Il est pourtant un signe certain de la bonté de
celle-ci ; c'est l'approbation du plus grand nombre
qu'on appelle communément l'ajjprobalion générale. Je
n'entends point par-là le suffrage des habitués de cer-
tain théâtre, de certaine ville, de certain pays; mais
celui de toutes les populations policées, consacré par
le temps. Ce genre d'approbation n'a jamais été donné
aux choses médiocres, et c'e=t en ce sens qu'on dit avec
beaucoup de justesse que l'opinion publique est tou-
jours équitable.
Le simple amateur de musique, c'est-à-dire celui qui
n'a de rannori avpr cet ar' r[\ip p?r les sepsnfinns riu'il
CHAP. XXI. LEUR ANALYSE. ' 273
lui procure, uianque de l'érudition nécessaire pour sa-
voir si l'invention de certaines mélodies apparvieni à
l'auteur d'un opéra où elles se trouvent placées, oy si
elles ne sont qu'un plagiat; mais c'est un soin dont il ne
doit guère s'embarrasser. Les plagiats peuvent se diviser
en deux espèces : dans la première se rangent ces rémi-
niscences vulgaires où l'auteur reproduit sans pudeur ce
ijiie vingt autres ont fait avant lui, sans se donner la
peine de déguiser ses larcins, ou peut-être sans pouvoir
le faire. Le mépris public est ordinairement le prix de
ces choses, et l'oubli profond dans lequel elles ne tar-
dent pointa tomber est le juste châtiment de ceux qui
méprisent assez leur art pour le traiter avec si peu de
conscience. L'autre espèce de plagiat est celle que les
plus grands génies n'ont point dédaignée. Elle consiste à
prendre dans des ouvrages ignorés de bonnes choses
dont l'art peut s'enrichir, et à les utiliser en les animant
comme fait le î,énie de tout ce qu'il entreprend. Les
érudits, ou si l'on veut les pédans, ne manquent jamais
de découvrir les sources où l'on a puisé, et d'en faire
grand bruit; mais le public n'y prend point garde pourvu
qu'on l'amuse, et il a raison. On n'a que trop délaissé
de belles phrases et des mélodies auxquelles il ne man-
que que d'être habillées un peu plus à la moderne pour
produire les plus beaux effets ; c'est les sauver du nau-
; frage c|ue de les reproduire dans de nouvelles composi-
tions en leur prèlanc des grâces nouvelles. Quoi qu'eu
puissent dire les savans, un amateur qui ne veut ana-
lyser ses sensations que pour leur donner plus d'activité
fera donc bien de ne point mettre sa tête à la torture
pour découvrir des ressemblances qui troubleraient inu-
274 «ENSATIONS MUSICALES. SECT. IT.
tilement ses plaisirs , el qui finiraient par lui en faire
trouver d'imaginaires.
Une des erreurs dans lesquelles tombent le plus com-
munément les gens du inonde, lorsqu'ils assistent à U
représentation d'un opéia nouveau, consiste à confon-
dre les ornemens que les chanteurs ajoutent aux mélo-
dies avec ces mêmes mélodies, et à se persuader que
c'est dans ces ornemens que consiste le mérite de la mu-
sique. Le fond sur lequel ces broderies sont placées
reste souvent inaperçu, jusque là qu'il est arrivé à cer-
tains habitués d'un théâtre de ne plus reconnaître un
air, parce qu'il était chanté d'autre manière que celle
qui leur était familière. Un peu d'attention accordée k
la contexture des piirases mélodiques donnera bientôt
l'habitude de les séparer de toutes les fioritures dont
elles sont habillées par les chanteurs; car ces fioritures
n'ont aucun sens musical. Lorsqu'on applaudit à ou-
trance un chanteur pour ses tours de force, ce n'est
pas qu'elles procurent le moindre plaisir, mais c'est
parce qu'elles étonnent. Il ne s'agit donc que de remar-
quer dans le ciiant ce c|ui présente à l'oreille un sens
complet, susceptible d'être du moins décomposé en élé-
uiens de phrases. Avec cette habitude, on ne confondra
pas ce qui n'est que le résultat de la flexibilité du go-
sier avec ce qui appartient au génie du compositeur. Il
est des musiciens qui affirment que les mélodies vagues
et peu remarquables sont les seules qui se prêtent à re-
cevoir les broderies des chanteurs, et ils citent pour
preuve de la réalité de leur opinion la musique des opé-
ras de Mozart , dans la(|uellc le plus intrépide faiseur de
notes ne peut rien introduire d'étranger; mais c'est tou-
C:U\f. \X1. LE1 r. ANALTSK. 275
jours par un Taux raisonnement qu'on conclut du par-
ticulier au e;énéral. Les mélodies de Mozart, qui sont
ravissantes d'expression , sont presque toutes empreintes
d'un caractère harmonique; c'est-à-dire qu'elles lais-
sent soupçonner par la succession de leurs sons l'har-
monie dont elles doivent être accompagnées; il en ré-
sulte que le chanteur est retenu dans des bornes étroites
par la crainte de faire entendre dans ses fioritines des
sons étrangers à cette harmonie. Ajoutez à cela que ces
mélodies, tout admirables qu'elles sont, n'ont pas
une construction favorable à l'émission libre et na-
turelle de la voix, comme les canlilènes italiennes; le
génie prodigieux du compositeur s'y manifeste toujours,
mais on y voit jusqu'à l'évidence que l'art du chant ne;^
lui était pas familier. En résumé, il n'est point vrai
qu'une mélodie est médiocre par cela seul qu'on peut la
broder et la varier avec facilité. Il y a sans doute d'ex-
cellente musique qui n'admet point de broderies, mais
c'est par d'autres motifs que cette règle qu'on veut don-
ner. Il serait plus juste de dire qu'il est des mélodies
qui n'ont pas été composées pour admettre des fiori-
tures, et d'autres qui ont été faites pour favoriser le
chanteur; les unes et les autres peuvent être excellentes,
chacune en son genre; un amateur attentif ne s'y
trompera jamais. Si le chanteur se borne à faire enten-
dre la mélodie dans toute sa simplicité, il pourra en
conclure qu'tlle n'est point de nature à être ornée; car
les exécntans résistent rarement au désir de faire briller
leur habileté. Il est cependant des cas où ils ont assez
de goùl pour sentir que le chant simple vaut mieux que
ce qu'ils pourraient y mettre; mais cela est fort rare.
D'après tout ce qui vient d'être dit, on voit que,
27G ïESliATIOS^S MUSTCAl.lîS. srCT. IV.
pour se former une opinion des qualités d'un air ou
d'un duo, il est nécessaire: 1° de le considérer d'abord
sous le rapport des convenances scéniques ; 2° d'en com-
parer la forme avec celle des autres morceaux du même
{:enre qui se trouvent dans le même ouvrage , pour s'as-
surer que les conditions de la variété y sont; 3° d'en
constater la régularité de rhythme et de quantité symé-
trique; 4» de remarquer si la mélodie laisse des im-
jîressions de nouveauté ou de banalité; 5° et enfin d'en
séparer l'œuvre du compositeur de ce qui n'est que
l'effet de l'habileté du chanteur. Au moven de ces ana-
lyses on pourra raisonner de la bonté ou des défauts
d'un morceau de cette espèce de manière à n'émettre
([ue des opinions fondées. Il est sans doute d'autres cho-
ses qui entrent dans la conception d'un air ou d'un duo :
l'harmonie plus ou moi-ns bien choisie, le système d'ins-
irumcnlption plus ou moins élégant et convenable, sont
aussi des qualités qui méritent d'être examinées; mais
elles ne peuvent entrer dans l'éducation de l'oreille qu'a-
près les objets dont je viens de parler; car les percep-
tions de ceux-ci sont plus simples que celles des autres.
Je ne doute pas qu'en habituant l'oreille et le jugement
;i faire ces analyses avec promptitude, on ne parvienne
a les familiariser avec les combinaisons de l'harmonie.
Ouant au svstème d'instrumentation, il se trouvera sans
doute parmi mes lecteurs quelque habitué des théâtres
lyriques doué de sensibilité musicale; eh bien! qu'il exa-
mine ce qui s'est passé en lui depuis le temps où il en-
tend de la musique dramatique; il verra que son oreille
distingue maintenant dans l'orchestre une foule de dé-
tails qui étaient nuls pour lui dans l'origine, et qu'il
jouit des jolis traits de violon, de flûte ou de hautbois,
»tiAi'. XXI. Ltun ANAi.ysK. 27 >
qui d'abord frappèrent inutilement son ouïe. Il n'est
rien que nous ne puissions apprendre à voir ou à en-
tendre, par le seul fait de la volonté de regarder ou d'é-
couter.
A mesure que les voix se multiplient avec les person-
ur.ges et que les combinaisons se compliquent , il devient
plus difficile d'analyser les sensations; de là la peine
(pTon éprouve à se faire une opinion des quatuors ,
n.orceaux d'ensemble et finales, aux premières repré-
stnlations d'un opéra; on n'y est ordinairement frappé
qr.e d'une seule chose, l'intérêt général; mais le plus
souvent ce sont des considérations dramatiques qui dé-
terminent les jugemens qu'on en porte. Ces considéra-
li ns sont en effet d'une haute importance; car plus le
nombre des personnages qui sont en scène devient con-
sidérable, plus il est nécessaire que la scène soit animée.
A cet égard, il est bon de faire quelques observations.
Depuis qu'on a imaginé les morceaux d'ensemble et
les finales, on a varié sur leur but dramatique ; mais, en
général , on les a considérés comme des moyens d'ac-
noîîre l'intérêt par des oppositions de caractères et de
jiassions. D'accord sur ce point, les musiciens ne l'ont
pas élé sur les moyens. Les uns, considérant que l'action
doit être d'autant plus languissante que le nombre des
jicrsonnages mis en scène est plus grand, si ceux-ci n'y
prennent une part active , ont voulu que les quatuors ,
sextuors ou finales eussent une marche rapide : tel est
le système des compositeurs français et allemands; les
autres, au contraire, ont pensé qu'il est nécessaire de
j.rofitcr de l'occasion où beaucoup de chanteurs sont
réunis pour produire de beaux effets de musique, au
lisijue de l'aire languir l'action dramatique; de là les
2-i
278 SENbATlOWS MUSICALES. SECT. lY.
longs concei'ts qu'on trouve dans les finales ou les autres
morceaux d'ensemble de l'école italienne moderne. Ces
deux systèmes ont, parmi les amateurs et les artistes,
beaucoup de partisans et de censeurs ; les uns, entraînés
par leur goût pour les convenances dramatiques et leur
pencbant pour ce qui est raisonnable, les autres, domi-
nés par leur sensibilité pour la musique; car toute la
différence d'opinion réside en deux systèmes différens,
qui ont leurs qualités et leurs défauts. Le système dra-
matique est d'un effet plus sur à la première représenta-
tion d'un opéra, surtout en France, parce que l'on s'y
occupe pi js du sujet de la pièce et de la marche de l'ac-
tion que de la musique; mais dans la suite on voit sou-
vent que le système musical l'emporte, et qu'il donne
aux succès plus de consistance.
D'après ce qui vient d'être dit, il est évident que les
sensations sont complexes dans l'audition des morceaux
d'ensemble et des finales; il est donc à peu près impos-
sible de les analyser d'abord; les artistes les plus expé-
rimentés n'y parviennent pas toujours; il leur arrive
même souvent de prononcer à ce sujet des jugemens
qu'ils désavouent ensuite. Ce n'est qu'après avoir en-
tendu deux ou trois fois les morceaux de cette espèce
qu'on peut se faire une idée nette de leur construction
et en apprécier le mérite. Tout ce qui concerne leur
partie mélodique s'analyse de la même manière que dans
les airs et les duos; mais il est une condition de per-
fection pour ces morceaux qui doit offrir plus de diffi-
cultés à quiconque n'a point fait une élude sérieuse de
l'art; c'est la disposition des voix et les mouvcmens con-
trastés qui en résultent. Pour vaincre cette difficulté, il
sst nécessaire de séparer d'abord ce qui appartient à
CHAP. XXI. LEUR ANALTSE, 279
l'expression dramatiqne et à la mélodie du reste des par-
ties constitnlivcs du morceau, et de fixer son opinion sur
CCS objeîs; portant ensuite et successivement son atten-
tion sur les détails du mouvement des voix, des oppo-
sitions de caractère, d'harmonie et d'instrumentation,
on pourra se former peu à peu des notions de toutes ces
choses, et l'on finira par être si bien familiarisé avec
elles qu'on n'éprouvera plus de difficulté à les réunir et
à en apprécier l'ensemble, au lieu de n'en recevoir qu'un
plaisir vague, tel que l'éprouve le public, qui n'a point
appris à réfléchir ses sensations.
La nuisique d'église est plus simple que la musique
dramatique sous de certains rapports, et plus compliquée
sous d'autres points de vue. Dans son origine, ce n'est
que l'expression d'un sentiment religieux dégagé de pas-
sion, et conséquemment fort simple. Mais le besoin que
nous avoiis d'émotions n'a pas permis aux musiciens de
rester long-temps dans des limites si étroites. Les textes
sacrés , les ])saumes, les proses contiennent des récits
douloureux, des élans de joie, et un langage figuré em-
preint de toute la pompe de l'Orient; le sentiment pieux
qu'enveloppent ces figures et ce langage a disparu aux
yeux de beaucoup de compositeurs pour ne leur laisser
apercevoir que la possibilité d'exprimer ces douleurs,
ces joies du roi-prophète , ou les événemens retracés
dans le symbole des apôtres. Dès lors, il a fallu avoir
recours aux moyens ordinaires employés dans la mu-
sique dramatique , et s'en servir avec les modifications
d'un style plus sévère. Ces innovations ont trouvé des
censeurs et des partisans comme toutes les nouveautfe
qu'on introduit dans les arts. Le parti le plus sage , dans
res sortes de disputes , est de considérer <iu'il y a de^
280 SENSATIONS MUSICALES. SECT. IV.
beautés et des défauts inhérens à cha(|ue genre, et qu'il
n'est rien dont un homme de génie ne puisse tirer parti.
Il ne peut pas exister de musique qui ne suive la marche
du goût général et qui soit absolument étrangère aux
progrès du genre dramatique ; car cekii-ci est d'un usage
si général qu'il est connu de tout le monde, et qu'il est
nécessairement le régulateur des autres. Après avoir
éprouvé toutes les émotions du théâtre, on est peu disposé
à goûter une musique simple et calme pendant toute la
durée d'un office; les compositeurs ont été entraînés par
la nécessité à faire passer dans leur musique sacrée un
peu de l'expression mondaine de l'opéra. Toutefois, il
ne faut pas croire que la musique d'église calme et ma-
jestueuse ne puisse être goûtée aujourd'hui. Qu'on
prenne, par exemple, les nicsscs ou les motets de Pales-
trina, ou, dans un autre genre, les psaumes de Mar-
cello, et l'on verra qu'avec une bonne exécution celle
musique agira sur un auditoire sensible, comme pourrait
le faire un style plus moderne, mais avec des effets dif-
férens.
Pour se disposer à goûter de la musique religieuse
d'un caractère grave et antique, il faut d'abord se dé-
pouiller de ses habitudes et se bien pénétrer de cette
vérité que l'art a plus d'un moyen pour arriver jusqu'au
cœur; car les obstacles que nous opposons par notre vo-
lonté à certaines émotions contre lesquelles nous avons
des préjugés les empêchent de naître. Une fois mis dans
une disposition d'attention et de désir d'éprouver du
plaisir, nous ne tardons guère à en ressentir si l'ouvrage
que nous écoutons renferme des beautés réelles, quoiqsie
ces beautés soient d'un ordre étranger à nos idées ordi-
naires. II ne s'agit doue plus que d'analyser nos sensa-
CHAI'. \\I. 1.KUR ANALYSE. 281
lions, et pour cela nous devons procéder comme pour
la inusii|iie d'un autre genre.
Les cauliKnes de la niusi(|ue religieuse sont rarement
aussi faciles de perception (|iie celles de la musique di a-
mali'pie, parce qu'elles sont plus intimement liées à l'har-
monie. Ajoutez à cela qu'elles sont le plus souvent mê-
lées d'imitations, de fugues et de toutes les formes scien-
tidcpies dont on a vu le détail précédemment ; aussi n'est-il
guère possible de classer dans la mémoire celte espèce de
mélodie, comme on le fait de celles des opéras. A cause
de cette difficulté, il faut percevoir en masse les impres-
sions de la musique religieuse, c'est pourquoi elle exige
plus d'aptitude à analyser l'harmonie. Ce n'est donc pas
par ce genre de musique qu'il faut commencer l'éduca-
tion de l'oreille. Celle-ci ne pouvant devenir habile que
par degrés, il est nécessaire de ne lui faire contracter
l'habitude de porter des jugemens sur la musique sa-
crée qu'après qu'elle se sera familiarisée avec le style
dramatique. Aux études sur les masses d'harmonie suc-
céderont insensiblement les observations sur les formes
scientiSques; et pour peu qu'on y prête d'attention , ou
finira par avoir des notions suffisantes de ces combinfà-
sons, qui sont caraclérislicpies du style religieux.
Le dernier degré de l'éducation musicale d'un ama-
teur qui n'a point fait d'études sérieuses de la musique ,
est le style instrumental. Aussi voit-on peu de personnes
étrangères à cet ait qui aiment à entendre des quatuors ,
quinieltis ou autres morceaux qui n'ont pas pour objet
de faire briller l'habileté de l'instrumentiste. Dans ce
genre de musique, le but n'est point marqué, l'objet n'est
pas sensible. Délecter l'ouïe est certainement l'un des
principes de la mus^ique inâtrumenlale comme de toute
21.
282 SENSATIONS MtrsiCALES. 8ECT. IV.
autre; mais il faut aussi qu'elle émeuve; elle a son lan-
gage d'expression particulier qu'aucun antre n'inter-
prète; il faut donc deviner ce langaf^e au lieu de le com-
prendre, et cela demande de l'exercice. Je dirai de la
musique inslrumc rtile ce que j'ai déjà eu occasion de
répéter plusieurs fois: il faut avoir la patience de l'écou-
ter sans prévention , bien même qu'on ne s'y plaise pas;
avec de la persévérance on finira par la goûter, et dès
lors on pourra commencer à l'analyser; car ce genre dé
musique a aussi ses mélodies, son rhythme, ses quantités
symétriques, ses variétés de forme , ses effets d'harmonie
et ses modes d'instrumentation. En y appliquant les pro-
cédés de l'analyse diamatique, on en acquerra des no-
tions comme de toute autre espèce de ïnusique.
CHAPITRE XXII.
S'il est nlile S'analyser les sensations quela musique faft naître.
Je *uis certain que Ijeauconp de lecteui-s, en parcou-
rant le chapitre qui précède, se seront dit : « Que pré-
« tend cet homme avec ses analyses? Veut-il donc gâter
« nos jouissances par un travail continuel, incompatible
« avec les plaisirs que procurent les arts? Ceux-ci doivent
« être sentis et non analysés. Loin de nous ces observa-
« lions et ces comparaisons, bonnes tout au plus pour
« ceux d.Tnl l'ame sèche ne peut trouver autre chose dans
« la musifiue, ou pour des professeurs de contrepoint.
« Nous voulons jouiret non juger ; doncnous n'avons pas
« besoin de raisonnemens, x C'est fort bien. A Dieunçi
r:nAP. XXII. VTiLiTK Dï, l'analysf.. 283
plaise que je veuille troubler vos plaisirs; mais à peine
aiirez-vous prononcé ces paroles que, si vous allez au
théâtre, vous allez vous écrier: Quelle charmante mu-
sique! ou bien: Quelle déleslahle composition! C est
ainsi qu'on prétend jouir d'ordinaire sans porter de ju-
geniens. L'orsjueil des ij^norans n'est pas moins réel que
celui des savans; mais il se cache derrière le manteau de
la paresse.
Se persuaderait- on, par hasard, que je suis assez privé
de sens pour vouloir qu'on substitue l'analyse des pro-
duits des arts aux plaisirs qu'ils donnent? Non, non,
telle n'a point été ma pensée; mais certain qu'on ne voit
que ce qu'on a appris à regarder, qu'on n'entend que ce
qu'on sait écouter, que nos sens, enfin, et par suite nos
sensations, ne se développent que par l'exercice, j'ai
voulu démontrer comment on dii ige celui de l'ouïe pour
le rendre plus habile à saisir toutes les impressions de la
musique; je n'ai pas cru devoir ajouter que les exercices
cessent d'eux-mêmes dès que l'organe est instruit, parce
que cela s'entend de reste; il n'est plus question de se
guider par des lisières ni de s'appuyer sur les meubles dès
qu'on sait marcher. Ces analyses que j'ai présentées
comme nécessaires pour juger des qualités de la musique
ou de ses défauts, ces analyses, dis-je, se font avec la
rapidité de l'éclair, dès qu'on en a contracté l'habitude;
elles deviennent inhérentes à notre manière de sentir,
au point de se transformer elles-mêmes en sensations.
Eh ! qu'est-ce, je vouis prie, que ces analyses en compa-
raison de celles que fait un musicien habile? Il ne se
borne point, lui, à saisir quelques détails de formes, à
distinguer des mélodies plus ou moins bien rhythmées,
une expression plus ou moins dramatique, etc.; le mu-
284 SENSATIONS MUSICALES. 6ECT. IV-
sicien entend tous les détails de l'harmonie, remarque
un son qui dans un accord ne se résout pas cnnvena-
hlemer.t, ou un heureux emploi d'une dissonance inat-
tendue, d'une modulation inusitée, etde toutes les finesses
de la simultanéité ou de la succession des sons; il distin-
gue les diverses sonorités d'instrumens, applaudit osi
censure des innovations de formules ou des abus de
moyens; enfin, les immenses détails de tout ce qui com-
pose les grandes masses musicales sont présens à son ci-
prit comme s'il les examinait avec réUexion sur le papier.
Croit-on qu'il fasse pénibleuient toutes ces remarques,
que cela l'empêche de goûter l'effet général de la com-
position, et qu'il eu éprouve moins de plaisir que celui
qui s'abandonne en aveugle à ses sensations? ?Jul!e-
ment. Il ne pense seulement pas à toutes ces choses;
elles sont présentes à sa pensée, mais comme par enchai;-
tement, sans qu'il le sache, sans même qu'il s'en oc-
cupe.
Merveilleux effet d'une organisation perfectionnée j).ir
l'élude et par l'observation! Tout ce qui semblerait de-
voir affaiblir la sensation, pour augmenter la part de l'in-
telligence, tourne au profit de cette même sensation. TS'ni
doute qu'une musique médiocre ou mauvaise ne soit
plus pénible à entendre pour un artiste habile que pour
l'homme du monde incapable d'en apercevoir les dé-
fauts; sous ce rapport celui-ci a l'avantage; mais aussi
combien les jouissances du premier sont plus vives, si
toutes les conditions désirables se trouvent réunies da.ns
une composition! Ces conditions ne sont nécessaires
qu'autant qu'elles concourent à la perfection; mais la
perfection résulte de choses si délicates, si fugitives,
qu'on ne peut la sentir qu'autant que ces choses sont à I51
( u\f. \xii. liTii.iTi' DE i,'a:<altse. 28,>
portée tle l'iiilelligeuce et iju'on s'est familiarist; aNcc
elles. De là vient (jiie les simples cm ieiix n'aperçoi\ent
point la clilTéience ([iii se trouve entie un tableau de Ra-
pliaël et un ouvrajje du Coiiége ou du Guide. On ne
peut nicllre en doute (jue la perfection ne procure des
plaisirs plus purs que ce(jui n'en n'est que l'à-peu-près;
mais la perfection ne se voit que lorsqu'on a appris à la
voir; il faut donc l'apprendre. Qu'on retourne la ques-
tion comme on voudra, il faudra en venir à cette con-
clusion.
Apprendre à faire des analyses du principe des sensa-
tions musicales est sans doute une étude qui détourne
rattention de ce qui pourrait flatter les sens; cette élude
trouble le plaisir qu'on éprouverait à entendre delà mu-
sique; mais qu'importe, si l'on ne fait que suspendre ce
plaisir pour le rendre plus vif? Chaque jour l'étude de-
viendra moins pénible, dès qu'on en aura contracté
l'habitude, et le moment viendra où l'analyse se fera
sans (ju'on y prenne garde, et sans que les sensations en
soient troublées. Si l'on pouvait se rendre compte des
changemens qui s'opèrent dans la manière de sentir et
apprécier les beautés et les défauts des œuvres musi-
cales par le seul fait de l'habitude, et indépendam-
ment de toute connaissance positive, on remarquerait
que, non-seulement le goût se modifie, mais qu'on finit
par faire jusqu'à certain point de ces analyses dont je
viens de parler, sans le savoir, et sans en connaître les
règles. De là vient que des habitués des théâtres lyri-
ques ont un jugement plus sûr que ceux qui n'assistent
aux représentations d'opéras que de loin en loin. [I est
évident que ce qu'on fait sans guide, ou peut le faire
mieux si Ton est guidé. Tout ce qu'on débite dans le
58B fEïTSATTO!<S MfSICALKS. »ECT. It.
monde et dans les livres sur la sensibilité naturelle pour
les arts, et sur. l'altération de celte sensibililë par l'ob-
servation, n'est ni fondé, ni raisonnable; mais la paresse
s'accommode de ces niaiseries.
CONCLUSION.
Ai-je mis dans ce livre tout ce qu'on espérait y trou-
ver? je l'ignore. Cela est d'autant moins vraisemblable
que tout le monde n'y cliercbera pas les mêmes choses.
En commençant à le parcourir, la plupart des lecteurs
auront des opinions , des préjugés, des affeclions ou des
antipathies. Comment espérer de réformer tout d'abord
ce qui ne s'use qu'avec le temps ? Mais ce qui ne sera pas
l'effet immédiat de la lecture du livre sera le résultat
des réflexions qu'il auia provoquées. Je crois avoir pé-
nétré dans les causes de l'ignorance volontaire où l'on
reste à l'égard delà musique; pour la faire disparaître,
je n'ai demandé qu'un peu d'attention; les plus rebelles
iinirontpar me l'accorder, fût-ce même sans le savoir.
rtw.
DICTIONNAIRE
DES MOTS
DONT L'USAGE EST LE PLUS HABITUEL
DANS LA MUSIQUE.
A
ABRÉVIATIONS. Signes par lesquels on représente dan? la nota-
tion de la musiejrie cerfaiiies suites de sons et même des phrases
entières. Les abréviations diminuent le travail du copiste, et fa-
cilitent quelquefois \,i lecture de la musique.
ACtlOCATURA. Mot italien qui n'a j)oiut d'équivalent dans la lan-
gue française; il indique une sorte d'ornement employé dans
l'exécution de la musique de piano ou de liarjie, lequel consiste à
faire entendre suircessivement et rapidement les noies d'un ac-
cord au lieu de les frapper enseuibie.
ACCIDEINTEL (signe). On appelle si\^nes accidentehles^, [,,ou t],
qui, n'étant jioiut placé.s près de la clef, se rencontrent dans le
cours d'un morceui de musique.
ACCOMPAGNATEUR. Celui qui accompagne nn chanteur ou un
iusti'umeutiste sur le piano ou sur l'orgiie.
ACCOMPAGNEMENT. Art d'accompagner. Il se divise en plusieurs
espèces. La j)reunèie est VaccompagnemenC plaqué, qui consiste
à jouer avec la mi)in gauche sur le ilavier la basse écrite .•sur le
papier de musique ( voy. basse ), pendant qu'on exéoiife aver la
main droite les accord, indiqués par des chiffres au-dessus de
cette basse (voy. accoidt et cMffies), La deuxième est Vacçompa-
238 DicTio>r?A(Ri
gnementfiguri dan» lequel la mélodie se joint à l'harmonie (voy.
'mélodie et harmonie). L;. troisième est Y accompagnement de la par-
ttion (voy. parution), qui consi-te a j.-uer sinmllani-raent sur le
piano Inu'tes les parties d'orchestre (voy. orch?stre).
Accompagnement. On appelait aussi autrefois de ce nom ce qu on
désigne aujourd'hui par celui d'inslrumenlalion (voy. mslrumen-
tuliun). ,
ACCORD. Réunion de plusieurs sons qui s'accordent ensera.ile, qui
pl.iisent à l'oreille.
ACCORDS C0^SO^KA^'S.Les accords consonuaossontceuxdans
lesquels il n'entre que des intervalles agréables ai)pelés conson-
nances (voy. intervalle et consonnanvei).
ACCORDS DISSONANS. Les acords di sonans sont ceux qui pro-
curent à l'oreille une sensariou inoius douce que les accords
consonuans, et qui sont composés de dissonances (voy. ce
mut).
ACCORDS FONDAMENTAUX. Les accords fondamentaux sont
ceux dans lesquels ou dispose les .sons dans l'ordre le plus
simple, c'est-a-dire i> la tierce l'un de l'antre (voy. tie,-c^). U n'y
en a que deux, l accord par/ail (voy. ce mot), et l accord de
septième {vn\. tepli'me)
ACCORDS DERIVES. Accords tirés des fondamentaux, et dans
lesquels on ne dispose pas les sons daus l'ordre le plus di.ect.
ACCORD l'ARFAir. A.cord composé de trois sons accordés a la
tierce l'un de l'autre. Cest le pins doux a l'oreille, et le seul qui
donne la sensatiou d'une conclusion harmonique.
ACCORDER. C'est mettre dans un n.pport satisfaisant de justesse
pour l'oreille les sons d'un instrument avec lui-même on avec
d'autres instrum.-ns, soit en augmentant ou diminuant la IenM..n
des cordes dun violon, d'une basse, d'une guitare on d'un piano,
soit en allongeant ou raccourcissant le tube d'un instrument à
Tcnt, comme la flûte, le cor, etc.
ACCORDEUR. Celui qui accorde les inslrumens; ce nom ne se
donne qu'a ceux dont l'état est daccorder les pianos ou les
orgues. . / 1- 1
ACOCSTîQUF. Science du son; ce mot est dérive d un ver.)e
grec qui signiCe en<eP(/re. L'acoustique se iiartage en deux par-
ties distinctes; l'uue est relative aux phénom.-nes qui se mani-
lestcut d.nslarésonnanre des corps sonore,, l'autre se compose
DK MUSIQUE. 289
lie liiliiils qui ont pour olijet de dctertniner les rapports des
sons entre eux. Lu |,rernière se nomme acoustique expérimentale
l'autre est Vacoustique arithmilique ou canonique.
Acoustique. S'emploie quehjuefois comme adjectif. Ainsi on
dit un instrument acoustique, un phénomlne acoustique, etc.
AD LIBITUM. Mots latins qui siguilient à volonté. Lorsqu'on les
trouve plarés sous un trait de vocalisation ou sous un point
d orgue (voyez Vocalisation et Point d'orgue ), ils indiquent
qu'on peut jouer ce qui est écrit ou le supprimer si on le trouva
Lou.On trouve aussi quelquefois ces mots placés au commence-
ment d'une partie d'accompagnement de violon, de basse, eic-
cela signifie que ces accompagnemens ne sont pas indispen-
sables.
ADAGIO. Mot italien qui signifie posément. Ou l'écrit au com-
mencement des morceaux de musique pour indiquer un mouve-
ment lent.
Adagio se prend quelquefois comme le nom du morceau dontil
indique le mouvement; c'est ainsi qu'on dit: Un bel adagio ,w
adagio de Beethoven, etc.
AFFETTUOSO. Mot dont on se servait autrefois i>our avertir le
chanteur ou l'instrumentiste qu'ils devaient jouer ou chanter
avec une expression douce et mélancolique. L'emploi de ce mol
et de plusieurs autres du méraegenre est devenu moins fréquent
.lepuis qu'on indique les différens degrés de lenteur ou de vi-
tesse, par les numéros du métronome de Maelzel.
AFFINITÉ dîiOTj.». Tendance qu'ils ont les uns vers les autres. La
no'e sensible (voy. ce mot.) a de l'affinité avec la tonique; le
quatrième degré (voy. ce mot) en a avec le troisième.
AGILITE, s. f. Se dit de lu facilité possédée par un chanteur ou
par un instrumentiste à exécuter e-îes suites rapides de sons.
AGITATO. Mot italien qui, placé en tête d'un morceau Je musi-
que, est le signe d'un caractère d'expression passionnée joint à
la vitesse.
AGRÉMENS. On donnait autrefois ce nom à certains traits im-
provises ou écrits dont on ornait les mélodies; on l'a remplacé
ensuite par celui û'ornemens (voy. ce mot.), et, de nos jours,
par le mot n.i\ieu fioruure qu'on a francisé (voy. ce mot).
AlGt . Se dit d'un sou élevé de l'échelle musicale (vov. Son).
290 DICTIOIiAIRF.
AiGC se prend quelquefois substantivement, et s'emploie pour dé-
signer par comparaison lu partie élevée d'une voix ou d'un ins-
trumeat. Ou dit : Aller du graje à Vai^u , pour passer des sous
bas aux sons élevés.
AIK. Nom générique par lequel on désigne toute pièce de musique
pour une voix seule. La forme des airs est fort variée. Les airs
;• les plus anciens sont les chansons ^ opulaires (voy. Chanson) qu'o n
appelle aussi airs nationaux. Cliaque peuple en a de particuliers ;
ou cite les barcarollis de Venise, les tarantelles et les viUanellt^
de Naples, les lieder de l'Aliemagne, les Ranz-de-faches de la
' Suisse, les boléros, séguedilles et tirannas de l'Espagne, les songs
de l'Ecosse et de l'Irlande (voy. tous ces mots). Chaque pro-
vince de France a les siens; dans l'Auvergne, on trouve les
bourrées ; dans le Poitou, les branles i dans la Bourgogne, les
Noêls, etc. (voy. ces mots). Il y a des airs qui , sans être popu-
laires, ont des formes particulières à certains pays; en France,
ou a la romance { en Italie, la canzone, etc. (voy. ces mots). I^es
airs d'opéras sont de plusieurs espèces : le premier air que chante
uu acteur, dans la pièce, s'ajipelle cavatiiief les airs d'un seul
mouvement j dont la phrase principale est ramenée plusieurs
fois, portent le nom de rondeau. Il y a des airs d'uu seul mou-
vement, d'autres qui ont deux mouvemeus : l'un modéré ou
lent, l'autre vif. Enfin, il en est qui sont composés de trois inou-
vemens: le premier modéré, le second lent et le troisième vif.
Quelquefois ces airs sont j)récédés d'un rècilatif. On leur donne
en général le nom de grands airs, et celui de scène quand ils
remplissent en effet toute nue scène. La forme des airs d'opéra
a varié selon les temps et les lieux (voy. cavatine, rondeau, réci-
Les petits airs d'opéras français prennent le nom de couplets,
d'après celui de la petite pièce de poésie sur laquelle ils sont
placés.
Les airs de danse font partie des airs nationaux de différens
peuples. Il y avait autrefois des airs de danse d'un caractère
déterminé, qu'on appelait gigue, courante , allemande , anglaise,
menuet , etc. (voy. ces mots); il n'y a plus aujourd'hui que des
contredanses dont les thèmes sont pris dans des airs d'opéra (voy.
Centredanse). L'Allemagne a donné naissance à une sorte de
DE MUSIQUE. 291
tianse dont l'air est en mesure teru.iire et qu'où appelle valse
(voy. ce mot). Le fandans'o des Espagnols est aussi un air de
Hanse d'un mouvement vif en mesure ternaire (voy. Fandangoy;
enfin les Polonais ont la danse grave à trois temps, fju'oa ap-
pelle polonaise (voy. t:e mot). L'air de danse appelé galope ou
galopade est une valse ra[)ide et sautée à deux temps,
ALLA BREVE. Mots italiens qu'on trouve quelquefois au com-
mencement des morceaux de musique d'église, et qui indi-
quent un mouvement rapide d'une mesure à deux temps, com-
posée d'une ou de deux rondes.
ALLA ^IILITARE, à la miltiaire. Ces mots, placés au Commence-
ment d'un morceau de mus'que, indiquent qu'il faut donner à
son exécution le caractère des manlies militaires.
ALLA PALESTRINA. Se dit d'un style de musique d'église et de
chambre, traité avei tant de perfection, dans le seizième siè-
cle, par un compositeur de l'école romaine, nommé Pierre-
Louis de Palestriaa , que ses ouvrages sont devenus les mo-
dèles du genre.
ALLA POLACCA, c'est-à-dire, dans le mouvement de la polo-
naise, en mesure ternaii'e modérée.
ALLEGRO. Mot italien, qui signifie gai, maïs qu'on emploie
plus communément en musique pour désigner un certain de-
gré de vitesse dans le mouvement des morceaux, abstraction
faite de leur caractère gai ou triste. TJalh'gro est le mouve-
ment intermédiaire entre le preiîo, qui «st l'excès du vif, et l'a-
dagio, qui est l'excès du lent. On indique ses différentes
modifications de lenteur ou de vitesse, en joignant au mot a^-
legro quelque épithète qui indique le caractère de chacune de
ces modifications. Ainsi, dans la gradation de l'allégro de plus
en plus vif, on écrit allegro con moto ou allegro mosso , a'iegro
con brio, allegro animalo ou con animo, allegro assai et allegro
vivace ; dans la vitesse décroissante on trouve allegro giuslo, al-
legro commodo , allegro moderato et allegro maesCoso. Entre les
deux extrêmes a//egTo maeî/oio et allegro vivace, la différence
de mouvement est très grande.
ALLEGRETTO. Diminutif d'allegro, indique un mouvement
moins vif, quoique d'un caractère léger et marqué.
ALLEMANDE. Air de danse à deux teni'ps composés de la valeur
392 DICTIONÎîAIRlî
de deux noiies dans ane mesure, et dont le niouveineiit est
«.•eliii d'un allegretio un ]>eu animé. Autrefois, lorsque les termes
italien'^ a//(?i/-o , a/lrgrello , etc., n'étaient point encore en us:ige,
ou désigniiit les mori^eanx de musique instrumentaleà deux tein|;s
correspondans au mouvement de l'allégretto par le mot alle-
mande, l)iea que ces morceaux ne fussent pas des airs de danse.
En général, on se servait des noms des airs de danse pour l'in-
dication des mouvemens, parce que l'allure de ces airs était con-
nue de tout le monde.
ALTÉRATION, s. f. Nom qu'on donne en général aux cliange-
mens accidentels d'iutonation qu'uue note éprouve par l'effet
d'un signe d'élévation ou d'abaissement. L'altération a toujours
pour effet de réduire à un demi-ton les passages d'uue note à
une autre.
On distingue les altérations en ascenr^antes et descendantes;
les altérations ascendantes transforment la note altérée en note
sensible accidentelle; les altérations descendantes en font un qua.
trième degré momentané.
LTÉRÉS , ALTÉRÉES. Les intervalles altères sont ceux que l'alté-
ration d'une note tirent de leur (-onfornialion naturelle au ton
et au mode d'un morceau de musique; les notes altérées devien-
nent telles par l'addiliou d'un signe étranger an ton.
ALTISTE. Chanteur qui exécute la partie d'a/(o dans les chœurs
(voy. l'article suivant).
ALTO. Nom qu'on donnait autrefois à la voîx de castrat qui cor-
respondait à la voix grave de femme appelée co/iira//o, ou aux té-
nors élevés des chœurs; dans ce dernier cas, Vallo était syno-
nyme du mot français haute-contre (voy. ce mot).
ALTO VIOLA, c'est-à-dire, viole qui correspond à la voix à^allo,
qui remplit dans la musique instrumentale le même office que
la voix (Talto dans la vocale. Aujourd'hui on indique plus <:om-
muiiémcnt cet instrument par le simple mot de viole, ou viola.
AMABILE. Mot italien qu'on trouve quelquefois dans la inusitjue,
et qui indique que le caractère de l'exécution doit être doux et
gracieux.
A^IK, petit morceau de bois cylindrique qui, placé dans l'inté-
rieur du violon, de la viole ou de la basse, sert d'une part à
soutenir la table sous la pression des cordes, et, de l'autre, à
mettre en communication de vibration toutes les parties de
l'instrument.
Amk se (lit niissi «le la faculté d'expression qui réside dans la sen-
siiiilité d'un cliantenr ou d'un instrumentiste. On dit de celui
dont le cli:int ou le jeu décèle une grande énergie d'expression,
qu il a de lame.
A-MI-LA. On appelait ainsi autrefois la note /a. Quelques musi-
ciens de province se servent encore de cette expression su-
rannée.
.V-MI-LA se disait aussi du petit instrument d'acier à deux hran-
clics, qu'on nomme aujourd'hui diapason (voy. ce mot).
.VMOROSO. Mot qui se place quelquefois au uommeucement d'un
mor<-eau de musique, et qui indique à la fois une certaine
uuan<'e de lenteur dans le mouvement et un caractère de douce
langueur dans la mélodie.
Chanter amoroso se dit dans une acception grotesque et jjour
désigner une manière de rhanter affectée et langoureuse.
ANCHE, s. f. Languette simple ou double qui vibre par l'action
de l'air, et dont les battemens sont les agens du son dans cer-
tains instrumens à vent. Ces instrumens sont le hautbois, le cor
anglais, le basson, \d clarindte et le cor de bosselle. L'an<be du
hautbois, du cor anglais et du basson consiste eu deux lan-
guettes de roseau, amincies par l'extrémité qui doit être pres-
sée par les lèvres, et ajustées de l'autre sur un petit tuyau cy-
lindrique, en cuivre, qui s'adapte à l'iintrument (voy. Hautbois,
Cor anglais , Uasson). L'anche de la clarinette et du cor de bas-
sette n'est composée que d'une seule languette mince, égale-
ment en roseau, qui s'applique .i la partie sujiérieure de l'ins-
trument appelée le bec (voy. Clar nette et Cor de bassetle). La
beauté du son qu'on tire de ces instrumens dépend à la fois de
la qualité de l'ancbe, de la <onformation des lèvres qui la pres-
sentj et de la quantité d'air qu'on y introduit.
.4îrCHE est aussi le nom d'une petite languette de lailon qui s'ap-
plique à de certains tuyaux d'orgue et qui produit le son par
sa vibration (voy. Jeux d'anche).
ANDAM'E. Mot italien qui indique un mouvement modéré,
mais d'un rhythrae sensible. C'est le participe du verbe andare.
294 DICTIOIWAIRI
Ahdante se preud quelquefois substantivement lorsqu'on dit un
andan te de quatuor on de sjmphonie.
ANDA?«TINO. Modification du mouvement andante ; littéralement,
andantino signifie allant un peu; c'est donc à tort que quelques
écrivains ont cru que le mouvement andantino doit être plus
animé que l'andante.
ANGELIQUE , s. f. Instrument à clavier du genre du clavecin
ou de l'épinette (voy. ces mots). On croit qu'il a été inventé
à Mulhausen , au commencement du xvii* siècle, par un fac-
teur d'orgue nommé Ratz.
A^ïGÉHQUE (voix). Sorte de jeu d'orgue composé de tuyaux cylin-
driques à anclie (voy. Jeux d'anche).
ANGLAISE , s f. Air de danse à mesure binaire, d'un mouvement
animé et d'un rliytlime égal.
ANIM.\TO , animé. !Mot qui indique l'accélération d'un mouvement
donné. Il se joint ordinairemeut à un autre mot qui détermine
le caractère du morceau, comme allegro animato.
ANIMO, con animo. Exj)ressions qui se trouvent quelquefois dans
la musique, et qui indiquent la nécessité d'un caractère d'éner-
gie daus l'exécution.
ANIMOCORDE ou ANÉMOCORDE. Instrument à clavier dans le-
quel les cordes résonnent par le moyen d'un courant d'air qui
les frajipe. Cet instrument fut inventé à Paris, en 1789, par un
Allemand , nommé Jean Strbnell. Il n'est plus en usage.
ANONNER. Lire avec {icine, exécuter avec embarras la musique
qu'on a sons les yeux.
ANTICIP.iTION. ilanifestation prématurée dans une harmonie
d'un son qui appartient à l'harmonie de l'accord suivant. Quel-
quefois l'anticipation est dans la mélodie; d'autres fois elle est
dans les parties qui l'accompagnent.
ANTIENNE, s. f. Chant d'église divisé en strophes, qui sont réci-
tées alternativement par une partie des chantres du chœur, pen-
dant que l'autre se tait, ^/i/ienne, en latin antiphona , est formé
de deux mots grecs, àvTi, contre^ et atà^ir,, voix, c'est à-dire
voix mises en opposition. Les prières si connues Ave maris Stella ,
Salve Regina , et Regina cœli, sont des antiennes.
ANTIPHONAIRE ou ANTIPHONIER, s. m. Recueil des antiennes
{lotées en p.ain-chant (voy. ce mot).
DE MUSIQDE. 295
APOLLON. Instrument de musique, de l'espèce du luth, monté
de vingt cordes, inventé à Paris eu 1(578, par un musiciea
nommé Promt.
APOLLGINICON. Grund orgue perfectionné, inventé par mes-
sieurs Flight etllobsou, à Londres, vers i824' Cet orgue peut
être joué à volonté par uu orgauiste ou par un mécanisme au
moyeu de cylindre» notés.
APOLLOINION. Instruineut à clavier inventé par Jean Vœller, à
Darmstadt , vers la lin du dix-huitième siècle. Cet instrument
était un piano à deux claviers avec plusieurs jeux d'orgue, et
surmonté d'un automate qui jouait divers concertos de flûte.
APPASIONATO. Mot italien qui indique la nécessité d'une ex-
pression paisiounée daus l'exécution de la musique.
APPOGIATURE, s. f. Mot italien francisé et qui vient du verbe
appogiare , appujer. L'ai)p()giature est un ornement de la mélo-
die qui consiste en une note sans valeur réelle dans le chant
qu'on ajoute au-dessus ou au-dessous d'une autre note essen-
tielle. Le caractère de la phrase , les circonstances et le goût du
chanteur ou de l'instrumentiste déterminent la durée de la note
d'appogiature ; quelquefois elle est assez rapide pour n'avoir
qu'une valeur inappréciable; d'autres fois elle enlève à la note
essentielle la moitié de la durée; il arrive même qu'on lui donne
une valeur plus -grande. Il est des cas où le compositeur écrit
la note d'a])pogiature; il en est d'autres où il abandonne à l'exé-
cutant le soin déjuger de sa nécessité.
AllCHET, s. m. Baguette flexible en bois, à laquelle sont atta-
chés des crins qu'on enduit d'une résine préparée (voy. Colo-
phane) , et qui sert à faire résonner les cordes du violon , de la
viole, du violoncelle et de la contrebasse. Le nom à''archet vient
de ce qu'origiiiairenientla baguette était courbée eu forme d'arc.
En italien on dit arco. Les crins de l'archet se tendent à volonté
par le moyen d'une vis placée à l'une des extrémités.
ARCHILUTH, s. m. Sorte de grand luth qu'on a confondu quel-
quefois avec le théorbe, quoique ce lussent deux instruniens
différens. L'archiluth était monté de vingt cordes accordées
deux par deux à l'unisson. C'était un instrument difficile à jo uer
ARCO. ÎNlot italien qui signifie archet. Lorsqu'il est écrit sous une
partie de violon, de viole ou de basse, il indique qu'il ne faut
j,>as pincer les cordes, mais jouer avec l'archet.
298 DïCTïoïiWAiftE
ARTA, s. m. Ce mot, qui .«ignifie air dans la laugne italienne, ne
se dit en France que dans une acreption ironique, par les per-
sonnes qui sont peu seiisililes à la musique. On dit de garantis
aria, pour dire des airs longs et ennuyeux.
ARIETTE, s. f. , diminiitir d'a.r. Une ariette devrait donc être un
petit air, cependant un nommait ainsi tous les airs grands et
])etits. /trietie est maiutenant un mot vieilli qui ne se dit ])lus.
ARIOSO. Adjeitif qui, lorsqu'il est pris substantivement , indique
que l'exécution d'une j)ièce de musique doit être d'un caractère
large et passionné.
ARMER LA CLEF. C'est mettre auprès d'elle le nombre de dièses
et de bémols convenalde pour le ton d'un morceau de rau'.lque.
ARPEGGE, s. m. , en italien ar/jpo-gio. Manière de faire entendre
successivement les notes d'un accord, particulièrement sur les
iustrumens à archet. Ce mot vient de l'italien arpa, harpe,
parce que cet instrument parait avoir donné lieu aux premiers
arpèges qu'on ait faits.
ARPEOER, V. n Faire des arpèges.
ARRANGER, v. a. C'est réduire la partition d'un opéra, d'une
ouverture, d'un air, ou de tout autre morceau de musique pour
un petit nombre d'instrumens ou pour un seul, ou seulement
en changer la nature, comme lori^qu'on arrange un conceito de
violon pour piano, et vice versa. Il serait j)lus exact de dire
déranger qu'arranger, car on ne change guère la disposition
primitive d'un bon morceau de musique sans eu altérer le ca-
racrtère et l'effet.
ARTICULER, v. a. C'est faire entendre distinctement les paroles
dans le chant, et rendre les notes avec précision et netteté, soit
avei: la voix, soit sur un instrument.
ASCENDANT, TE, adj. Se dit d'un intervalle (voy. ce mot) ou
d'une note dont la destination est de se résoudre en montant.
ASPIRATION, s. f. Action de respirer dans le chant. Lorsque
l'aspiration est bruy.inte ou seulement sensible, il en résulte un
effet désagréable à l'oreille des auditeurs.
ASPIRER, V. a. Prendre la respiration.
ASSAI. Adverbe italien qui signifie beaucoup. Il indique une aug-
mentation de lenteur, de vitesse, de force ou de douceur, lors-
qu'il est joint à d'autres mots, tels que largo, allegro, farte '
piano />'oy. ces mots).
ATTACCA SUBlTO. Mots it:iliens qu'on trouve quelquefois à la
fin iWin morceau de musique; ils indiquent qu'il faut commen-
cer iinniédiatemeiit le morceau suivant.
ATTAQUE, s. f. Action d'uu musicien qui commence un mor-
ceau, un trait après uu repos, avec |)ré<'isiou et hardiesse. Dans
les chœurs des théâtres, il y a des chefs d'attaque qui guident
les autres chanteurs lorsque ceux-ci ne sont que des musiciens
médiocres.
ATTAQUER, v. a. Faire l'attacjiie avec précision.
AUBADE, s. f. Concert qui se donne à l'auhe du jour, en plein
air, sous les fenêtres de quelqu'un. L'auhade n'est guère en
usage que dans les corj)s de musiqui; militaire; ou la donne aux
princes, aux autorités militaires, etc.
AUGMENTATION, s. f. Se dit de l'agrandissement de la valeur
des notes d'un thème ou d'un sujet de fugue; sorte d'artifice
dont on se sert quelquefois pour donner de la variété à ce geure
de morceau (voy. Fugue).
AUGME1NTF,,.EE. Adj. qui se joint au nom d'un intervalle lorsque
sa note supérieure est élevée, ou lorsque la note inférieure est
biiissée j)ar l'effet de dièses, de bécarres ou de. bémols {y o')'. c:es
mots) qui n'u[>partienneut ni au tou , ni au mode du morceau ou
du passage.
AUTHENTES ou AUTHENTIQUES. Nom de certains tons de
plain-chunt (voy. ce mot).
lî
BAISSER, V, a. C'est descendre l'intonation d'une note, ou parce
qu'elle est trop haute ou parce que la voix manque d'énergie.
BALLADE , s. f. Chanson dont l'origine remonte au douzième
siècle, et dont l'usage s'est conservé en Angleterre, en Irlande
et en Ecosse. Dans les manuscrits des anciens trouvères ou trou-
badours on trouve des ballades et des chansons balladèes avec le
chant noté. Le sujet de la ballade est ordinairement un trait
d'histoire vrai ou romanesque , développé sous la forme d'une
ode, et divisé eu plusieurs strophes. Les mélodies de ballades
écossaises et irlandaises sont d'un caractère mélancolique; il y
eu a de charmiutcs.
298 mCTIOHNMRE
BALLET, s. m. Ce mot vient de l'italien ballo, danse. Sa signifi-
cation exacte a varié. Au quinzième siècle il y avait des ballets
composés de danses graves, de personnages historiques, m y-
tbologiquesou même bibliques; ces ballets étaient dansés par les
rois, les princes et leurs courtisans. Plus tard on eut des ballets
mêlés de chant; tel était le ballet comique de la ro/ne , composé
par Balthasarini, pour les noces du duo de Joyeuse, en i58i ;
puis vinrent les hallels-opèras et les ballets pantomimes. Ces der-
niers sont composés d'une action dramatique à laquelle la danse
est mêlée.
BANDE, s. f. Mot qui a passé depuis peu de la langue italienne
en français, et qui signifie un corps de musique militaire. Il n'a
point de synonyme dans la langue française.
BARBITON, s. m. Nom d'un instrument à cordes de la musique
grecque. On croit que c'était une variété du genre delà lyre.
BARCAROLLE, s. f. Chanson de gondolier, en dialecte vénitien.
Les mélodies en sont généralement agréables. Leur mouvement
est modéré , en mesure binaire à divisions ternaires. Barcarolle
signifie chanson de barque, et vient de barca.
BARDES, s. m. Poètes et chanteurs chez les anciens Gaulois,
Germains et Bretons. C'étaient eux qui entonnaient les chan-
sons guerrières, et qui étaient chargés d'exciter le courage des
héros. Les Bardes les plus célèbres sontFingal et son filsOssian.
BARITON, s. m. Genre de voix d'homme qui tient le milieu entre
la basse et le ténor. «
Bariton est aussi le nom d'un instrument à archet d'un genre de
la basse de viole, qui fut inventé vers 1700. On l'appelait, en
Italie, note di bordone. Cet instrument était monté de sept i:or-
des de boyaux, qu'on jouait avec l'archet, et de seize cordes d'a-
cier qu'on pinçait avec le pouce.
BARRÉ, s. m. Position des doigts en travers du manche de la
guitare sur toutes les cordes, ou seulement sur quelques-unes.
BARRES , s. f. pi. Traits perpendiculaires j)ar lesquels on sépare
la quantité de notes dont la valeur forme ce qu'on appelle une
mesure. Ces barres ont été imaginées pour faciliter la lecture de
la musique et lu division des temps. Elles ne furent point en
usage jusqu'à la fin du seizième siècle. D'abord on nelesjilaca
qu'après un certain nombre pair de mesures, tel que quatre ou
huit ; plus tard on les posa de deux eu deux , et l'on finit par en
DE MUSIQUE. 299
luettie à la fin de <'liaqiie mesure, soit binaire, soit ternaire.
On se sert aussi dans I;i musique de l)arres obliques, simi)les,
doubles, triples ou quadrui)les Placées après des traits en ero-
tlios simples, douilles , tii])les ou quadruples; elles indiquent
qu'il faut les répéter autant de fois qu'il y a de groupes de bar-
res. Les barres obliques sont une des abréviations de la mu-
sique.
BAS, adj. Synonyme comparatif de grave, se dit d'un son par op-
position a Aaut ou atgu. Chanter bas n'a pas une signification
analogue à parler bas, c'est-à-dire demi-voix ; mais chanter au-
dessous du ton.On disait cependant autrefoiscAanier à voix basse
{jour chanter doucement , piano ; cette expression n'est plus eu
usage.
BAS-DESSUS, voix de femme d'une élévation moyenne, qu'on ap-
pelle, en Italie, mezzo soprano.
BASSE, s. f. \oix la plus grave de toutes. On donne aussi ce nom
au violoncelle (voy. ce mot) qui, dans ses quatre cordes, sans
démancher, a à peu près l'étendue delà voix de basse. Par ana-
logie ou appelle basse la parlie la moins élevée de toute espèce
de musique, celle qui sert de base à l'harmonie. Par exemple,
on dit: Je chanterai le dessus , vous ferez la basse sur le violon,
bien que le violon ne s©it pas une basse et n'ait pas la gravité de
ses sons.
BASSE CHAiVTANTE, en italien basso cantante. La partie la plus
grave de la musique vocale.
BASSE CHIFFREE. Partie de basse surmontée de chiffres sur la-
quelle les organistes accompagnent l'harmonie de la musique
d'église et qui servait autrefois à l'accompagnement de toute
espèce de musique sur le clavecin ( voyez l'article suivant ).
BASSE CONTINUE. Partie de basse instrumentale surmontée de
chiffres indiquant les accords qui doivent être joués par l'accom-
pagnateur. L'invention de ce genre de basse remonte au com-
mencement du dix-septième siècle; on l'attribue à Louis Via-
dana, compositeur italien. On lui donna le nom de basse con-
tinue parce qu'elle n'était pas interrompue comme la basse
vocale. On disait autrefois enseigner la basse continue pour dire
enseigner l'harmonie ou l'art de l'accompagnement. L expression
de basse continue a cessé d'être en usage.
BASSE CONTRAINTE, en italien basso' ostinato.[Tormu\e de
300 niCTioN>:.\iRF.
basse que les anciens compositeurs se proposaient avec l'obli-
gdtion de changer saus cesse le cbanl et l'harmonie.
BASSE-CONTRE, s. f. Variété de la voix de basse dont le timbre
( voyez ce mot) est plus fort que celui de la voix de Ijasse
moyenue, appelée basse-taille, qui est moins étendue dans le haut
et qui a quelques notes de plus dans le bas.
BASSE FUISD.AME>T.\LE. IN'oin imagiué par un compositeur
fr.incais, nommé Rameau, pour une basse rationnelle composée
des notes graves de certains accords, laquelle servait de j)reuve,
selon lui, de la régularité de l'Iiarmouie. Le sfSlt-me de la bassp
fondamentale a eu beaucoup de vogue en France pendant une
partie du dix-huitième siècle; mais il n'a jamais été adopté que
dans ce pays; il est maintenant oublié.
B.\SSE-DE-HAUTBOIS. Ancien nom français du basson (voyez ce
mot).
PiASSF.-TAILLE. Voix de basse moyenne, moius grave que la
bass -contre ( voyez ce mot), et moins élevée que le bariloti
( voyez ce mot ). Basse-taille est particulièrement le nom de la
voix de basse des chœurs ; la voix de basse des chœurs s'appelle
hasse-chanlanie.
u ^SSE-DE-VIOLE, en italien viola da gamba. Instiument qui ser-
vait à faire la partie de basse de la musique instrumentale avant
l'invention du violoncelle (voy. ce mot). Après l'introduction
de irelui-ci dans les orchestres, la basse-de-viole servit encore
long-temps pour jouer des solos. Elle était montée de six cordes
et quelquefois de sept.
TASSE DE VIOLON. On donnait antiefois ce nom au violoncelle,
à une ancienne basse moyenne appelée aussi basse-de-chaur , et
même à la contrebasse (voy. ce mot).
1>.\SSISTE, s. m. Musicien qui joue du violoncelle.
15 ^SSON, s. m. Instrument à vent composé de plusieurs pièces de
bois percées de trous et armées de clefs, qui se joue avec une
anche (voy. ce mot) , adaptée à un canal de cuivre appelé bocal.
r.ASSos. Jeu d'orgue composé de tuyaux à anches, qui imitent le
son de l'instrumeut du même nom.
BA.SSONISTE, s. m. Musicien qui joue du basson.
BATON DE PAUSES. Barre épaisse qui est renfermée dans l'es-
pace de deux ou trois lignes de la portée, et qui représente un
silence de deux ou de quatre mesures.
DE MUSIQUF. ..or
HATON DE MESURE. Moneau de hois court cl roud avecleqii. 1
IfS iliefs d'oiH-licstres hiÉttent la mesure qtinnd ils ne se servent
pas d'un violon pour diiigorlos musiciens.
BATTERIE, s. f. Passage composé des notes d'un accord qu'on
fait ente.idre sueeessivement sur un instrument , et qu'on répète
plusieurs fois dans uu mouvement j>lus ou moins rapide.
T5ArTlMENTO,fca«.'m<;.'ii. Sorte d'ornement du chant analogue au
mile (voy. ce mot), mais qui en diffère en ce que la première
note est inférieure à la seconde au lieu d'être supérieure.
RATTRE LA MESURE. C'est en marquer les jirincipales divi-
sions binaires ou ternaires avec la main ou avec le pied (voj'ez
Mesure et Temps).
BEC, s. m. Partie de clarinette qu'on met dans la bouche pour
jouer de cet instrument.
EECCO POLACCO. Nom d'une très grande espèce de cornemuse,
<lont se servent les paysans dans quelques parties de l'Italie
(voy. Cornemuse).
DECARRE. Caractère de musique fait dans cette forme b , et qui
se place à la gauche d'une note j>our indiquer l'élévation de cette
note à un demi-ton supérieur si elle était précédemment af-
feitée d'un bémol, ou l'abaissement à une distance semi)lal>le si
elle était accompagnée d'un dièse (voy. bémol, dièse et demi-ion).
VjY.MO'L, s. m. Cara(!tère de musique fait dans cette forme U, et
qui indique la nécessité de baisser une note d'un demi-ton lors-
qu'il est placé à sa gauche.
BERGAMASQUE, s. f. Ancien air de danse originaire de Ber-
game, dont on trouve des exemples dans quelques œuvres de
sonates composés en Italie au dix-septième siècle.
BINAIRE {mesure) Division de la durée musicale en temps pairs,
c'est-à-dire ])ar 2 ou par les multiples de 2 , comme 4, 8 , 16, etc.
Les mesures binaires de la musique sont de deux espèces : la
première renferme celles dont les divisions de chaque temps
sont aussi binaires, telles que (t , ? et R. L'auti-e espèce com-
prend les mesures binaires à temps ternaires comme ^ G 6
BINAIRE (temps). Partie delà mesure qui se subdivise eu nom-
bres paiis, c'est-à-dire par deux ou par lesmiitiples de deux.
BIS. Mot latin qui si°niiie deuj fois et qui indique, lorsqu'il est
placé à la fin d'un morceau, qu'il faut le recommencer. Le [)ublic
2ti
302 DICTIONNAIRE
se sert fréquemment de oe mot pour témoigner le plaisir que lui
a fait un morceau de musique, et pour demander qu'il soit dit
une seconde fois.
BISCROMA. Nom itulien qui signiRe double croche (voy. ce mot).
BISSEX, s. m. Instrument de la famille de la guitare, inventé, eu
1770, par un musicien de Paris, nommé Vanlioeke. Cet instru-
ment était monté de douze cordes, et son étendue était d'une
octave et demie.
BLANCHE, s. f. L'un des caractères de la notation de la musique;
il est fait ainsi P. Sa durée dans la mesure est de la moitié
d'une ronde (voy. ce mot), du double de la noire et du quadru-
ple de la croche (voy. ce mot). Il appartient à la division binaire
de la mesure.
BOC.^L , s. m. Tuyau courbe de cuivre qui s'ajuste sur le basson,
et auquel on adapte l'anche pour transmettre le vent à l'instru-
ment.
BOBISATIOX, s. f. (voy. Solmùation). '
BOLERO, s. m. Air espagnol qui sert à la fois de chanson et d'air
de danse. Cet air est souvent en mode mineur et son rhythme
est en mesure ternaire. Cet air s'accompagne avec la guitare. 11
y a en Espagne une multitude de boléros.
BOMBARDE, s. f. Instrumenta vent en bois, percé de trous, dont on
faisait beauroupd'usage dans les seizième et dix-»eptièrae siècles.
Cet instrument était de l'espèce du hautbois, et se jouait avec
une anche. Il se divisait en plusieurs sortes : la premièreétait la
contrebasse de bombarde ou bombardone, qui avait une étendue
de deux octaves, depuis le contre fa 5 jusqu'au /a
~^'- P ; elle avait quatre clefs et se jouait avec un bocal J
comme le basson. La seconde bombarde était la bombarde pro-
prement dite, qui avait aussi quatre clefs et une étendue de
--= ^
deux octaves, depuis ut -<^ \ - jusqu'au/ y \ . Lk
DE HUSIQUK. 803
ti'oisième , appelés bombarde ténor, avait trois clefs , «t s'éten-
dait d
epuis le sol—-/' \— jpsqu'au ^"^^T^^^^zzjz - LeNicolo,
quatrième sorte de bombarde, n'avait d'étemhie qu'une octave
et demie, depuis u/ "^^~1~T jusqu'à jo/ ;_xL — . Cet ins-
trument n'avait qu'une clef. La cinquième sorte, appelée petite
bombarde, n'avait aussi qu'une clef et s'étendait depuis le sol
Ah) — T" iusau'aure' ~m\—h~ ; enfin, la sixième bombarde,
appelée quelquefois chalumeau , n'avait point de clef, ou quel-
quefois n'en avait qu'une, et s'étendait depuis \efa _
jusqu'au /a —«^HfH. Cette famille d'instrument avait le son
rude et très fort; elle a donné naissance aux variétés du haut-
bois.
BOMBARDE, s. f. Le jjIus grand et le plus fort des jeux d'an-
ches dans l'orgue.
BOUCHE, s. f. Nom qu'on donne à l'ouverture horizontale pra-
tiquée au bas d'un tuyau d'orgue, immédiatement au-dessus de
la soudure du pied. L'air introduit par le pied du tuyau se
brise sur la lèvre de cette boui:he et produit le son. On divise
les jeux de l'orgue en deux espèces : les tuyaux à bouche et les
jeux d'anche. Les tuyaux à anche n'ont point de bouche (voy.
Jeux de l'orgue et Tu;yaux).
BOUCHE. Se dit d'un tuyau d'<jrgue en ctain ou en bois, qui est
fermé à son extrémité supérieure. Ces tuyaux rendent des sons
plus bas d'une octave que s'ils étaient ouverts , parce que l'air
304 DICTIOIÏNAIRE
est oljligé de parcourir deux fois leur longueur, eu montant et
en desceudant, avant que de résonner à sa sortie.
BOUCHES [sons). Ce sont les sons qu'on tire du cor en introdui-
sant la main dans le pavillon (voy. Cor).
BOURDON, s. m Nom d'un jeu d'orgue à l)ou<-he dont les tuyaux
sont Ijoucliés à leur extrémité supérieure, et qui a des sous de
flûte doux et sourds.
EouRDOW. Nom du grand tuyau de la musette ou de la cordi;
grave delà vielle, qui donnent toujours le même son.
BOURREE, s. f. Air de dause à deux temps qui est originaire de
l'Auvergne , et qu'on d. insait autrefois , même à la rour.
BRAILLER, V. n. Crier en chantant et forcer le volume naturel
de la voix.
BRANLE , s. m. Air de Janse fort en usage en France aux seizième
et dix-septième siècles. Il y en avait de deux sortes; l'un origi-
naire du Poitou était fort gai et avait la forme d'uu rondeau;
on le dansait en rond; l'autre, moins vif, avait pris naissauce
dans la Bretagne.
BR.VVO, BRAVA. Adjectif italien, qui signifie bon, bonne, et
dont on a Tiit une exclamation admiralive. Les Italiens y joi-
gnent souvent le nom du cotn])ositeur, du chanteur ou de l'in-
strument auquel ils adressent l'applaudissement, comme bravo
liossiiil bravo Ruhini ! bravo ilfagotto ! Cette expression est aussi
employée quelquefois comme critique. Par exemple, si l'on
trouve dans un opéra d'uu compositeur moderne des réminis-
cences d'un amien maître, comme Cimarosa ou Paisiello , le
parterre s'écrie: bravo Cimarosa I bravo Vaisiello I
BRAVOURE (air de). On apj)elle ainsi un air dans lequel le com-
positeur introduit Beaucoup de traits difficiles pour faire Briller
l'hahileté d'un chanteur. Les airs de bravoure étaient autrefois
fort en vogue ; ils devinrent plus rares à mesure que le f entiment
dramatique domina davantage dans la musique de théâtre.
BRÈVE , s. f. On appelait autrefois de ce nom une note carrée qui
valait lieux rondes de la musique moderne.
BRIOSO ou CON BRIO. Expression qui se joint quelquefois
au mol allegro , et qui indique une augmenti.tion de vitesse de
ce mouvement.
BRODERIES , en hAien , forilur^. Se dit des traits JjIus ou moins
rapides et brillaus qu'un chanteur ajoute à la musique éciite,
DK MUSIQUE. 305
afin de faire briller son habileté dans l'iraprovisatiou et dans
l'cxérution.
BRUIT, s. m. Commotion de l'air dont l'oreille est frapiiée sans
. en apprécier les vibrations ; c'est en cela qu'il diffère du son. On
donne quelquefois par mépris le nom de bruit à la musique in-
signifiante et dépourvue de charme.
BUCCIN , s. m. Sorte de trom'.one dont le pavillon est taillé eu
forme de gueule de serpent. Le son en est sec et dur.
BUCCINA, s. f. Grande trompette de guerre des Romains. Elle
étiiit de forme conique.
BUGLE, ou BUGLE-HORN. Trompette à clefs dont on se sert
maintenant beaucoup dans la musi(jue militaire et même dans
l'opéra. On attribue l'invention de la trompette à clefs à M. Hal-
liday Weidinger, musicien de la cham-lire de l'empereur d'Au-
triche; cependant M. Halliday, fal)ricant d'instrumens de cuivre,
à Londres, passe généralement pour l'inventeur du buglc-hotn
à six clefs.
BURLETTA, bourlelte. Nom qui se donne à une sorte de petit
opera-comique ou àe/arce en musique.
C. Cette lettre, placée au commencement d'un morceau de musi-
que, indique que la mesure doit se diviser en quatre temps. Si
le C est traversé par un trait vertical , de cette manière Ç >
on l'appelle Q, barré ^ il est le signe de la mesure à deux temps.
CABALETTA, s. f. Phruse courte, d'un retour périodique et d'un
mouvement animé qui se place à la fin des airs, des duos, et
d'autres morceaux d'opéra. La cabalette, établie ordinairement
sur une de ces formes de convention qu'où appelle dans les arts
des i>onsi/s , est un moyen dont les compositeurs de l'école ac-
tuelle abusent pour indiquer la fin d'un morceau et provoquer
les applaudissemens.
CACOPHONIE, s. f. Musique dans laquelle les voix ou les instru-
mens ne s'accordent jias; la cacopiiouie est plus souvent l'effet
de l'exécution mal réglée que de la composition.
CADENCE, s. f. Terminaison d'une phrase en mu'.ique ou repos
7.«,
306 DICTIOITMAIRE
momentané. On doune aussi le nom de eadente à certaines sac
cessions d'accords qui indiquent une conclusion finale ou acci-
dentelle de l'harmonie. On employait autrefois, en France, im-
proprement le terme de cadence pour celui de (rille (voy. ce mot).
Caderce (la) est, dans un sens absolu, le sentiment bien réglé de
la mesure à l'égard du rapport de la musique avec la danse.
Cadence, en italien cadenza, est synonyme de point d'orgue (''oy.
ce mot); c'est une suite de traits de fantaisie qu'un instrumen-
tiste ou nn chanteur improvise quelquefois sur un repos d'har-
monie vers la fin d'un morceau.
CA1>"0RFICA, s. f. Instrument a clavier inventé il y a quelques
années par M. Rœllig, facteur d'instrumens à Vienne. II a la
forme d'une harpe; les cordes sont jouées par des archets cy-
lindriques qui se meuvent par le pied et qui augmentent ou
diminuent la force du son en raison de la pression du doigté
sur la tuuclie. Il y a plusieurs instrumens de cette espèce.
CAISSE ROULAISTE. Tambour (voy. ce mot) plus grand que les
tambours ordinaires, d'un son assez doux, et dont on se sert
dans la musique militaire pour exécuter des roulemens et mar-
quer le rliytlirae.
CALARE. Se dit en italien quand l'iutouation d'un chanteur ou d'un
instrumentiste est trop liasse.
CALASCIOE ou COLASCIOIN'E. Sorte de luth monté de deux
cordes, dont le corps est très jietit et dont le manche est fort
long. Les habilaus du royaume de Naples font usage de cet in-
strument.
CANARDER, v. n. C'est tirer un son criard et rauque du haut-
bois, semblable au cri du canard; c'est un défaut fréquent chez
les coraraencans.
CA>'ON, s. m. Pièce de musique dans laquelle la mélodie s'accom-
pagne par elle-même, étant prise successivement par deux, trois
ou un plus grand nombre de voix ou d'instrumens, à la distance
d'un certain nombre de temps ou de mesures, de telle manière
que ces voix ou ces instrumens forment une harmonie agréable
et correcte. 11 est des canons où la mélodie est imitée par mouve-
ment contraire; d'autres où l'imitation se fait à reculons: on
nomme ceux-ci canons en écrcvisse; d'antres, cufin, où différentes
mélodies marchent ensemble ; on les appelle doubles, triples ca'
nom, etc.
DK MUSIQUE. 807
CANON ÉNIGMATIQUE. C'est un canon dont on ne fait connaître
que la mélodie, sans indiquer où doivent se faire les entrées des
différentes voix. L'énigme consiste à découvrir la place et le
mode de ces entrées.
CANON FERMÉ. Canon éoigmatique dont la résolution n'est
point trouvée et dont la mélodie seule est écrite.
CANON OUVERT. Canon dont la résolution est faite et dont
toutes les parties sont écrites.
CANTABILE. Adjectif italien pris substantivement. Ce mot indi-
que, en général, une mélodie d'un caractère doux et gracieux
et d'un mouvement lent.
CANTATE. Ce mot a deux significations. Par la première il indique
un petit poème mis en musique, composé de récitatifs, d'airs,
de duos, etc.; en ce sens la cantate appartient aux concerts.
L'autre espèce de cantate est une sorte d'opéra ou d'oratorio
qu'on représente quelquefois sur la scène ou qui requiert l'em-
ploi d'un grand nombre de chanteurs, de choristes et d'instru-
mentistes. La Création du Monde, de Haydn, est une cantate.
CANTATILLE, s. f. Petite cantate qui a été en usage en France
dans la première moitié du dix-huitième siècle.
CANTATRICE, s. f. Ce mot a remplacé celui de chanteuse qu'on
employait autrefois en France pour désigner une femme qui
chante an théâtre ou dans les concerts; cependant on appelle
encore chanteuses les actri( es dont le talent est médiocre, et l'on
ne donne le nom de cantatrices qu'à celles qui se placent au
premier rang par leur haijileté (voy. Chanteuse").
CANTILÈNE , s. f. Mot traduit de l'italien et qui est synonyme de
mélodie (voy. ce mot). On dit une douce cantilène pour une agréable
mélodie.
CANTIQUE, s. m. Hymne religieux. Les cantiques font partie de
la liturgie de la religion réformée. Leurs mélodies varient selon
les nations, les langues et les usages particuliers de chaque
église. Les cantiques de l'église anglicane ne sont pas les mêmes
que ceux de la n-ligion luthérienne.
L'église catholique n'admet que sept cantiques: les trois prin-
cipaux sont celui de la Vierge [Magnificat) qui se cl/ante aux
vêpres, celui de Zacharie {Uenediclus), et celai de Siméon (^Ntinc
dmdliis) par lequel les compiles se terminent.
A l'cg.ird des cantiques en usage dans quelques congrégations
d08 DlCilôNKAlKE
et qui sout écrits en langue vulgaire, on ne les tronve ui dans
le Graduel ni dans l'Antiphonaire. On les chante sur des airs de
vaudeville ou d'opéra.
CANTO FERMO, s. m. Expression italienne dont on se sert souvent
dans la musique comme d'un synonyme de plain-chant (voy. ce
mot).
C.IKZONE et CA^ZONETTA, s. f. Mots italiens qu'on trouve
souvent au commencemeut de certaines petites pièces de mu-
sique du genre de la romance. La eanzone est d'un développe-
ment plus considérable que la romance fiançaise; la canzonet'a
a de l'analogie avec notre cliansoii.
CAPO-TASTO, s. m. Petite pièce de hois ou d'ivoire qui se fixe au
manche de la guitare au moyeu d'une vis , et qui fait Toffire d'un
sillet mobile di.nt l'effet est d'élever ]'ai:cord général de l'in.stru-
ment d'un ou de plusieurs tons, afin de ne point obliger l'in-
strumentiste à faire le barré (voy. ce mot) avec la main, et laisser
p'iis de liberté à celle-ci.
( APRICE , s. m. Pièce de musique d'un style libre et dont le plan
n'est pas déterminé. Ce genre de musique a eu de la vogue au-
trefois, surtout pour le «riavecin et le violon. Les caprices de
Locatelli et ceux de Fiorillo pour ce dernier instrument ont eu
de la célébrité.
(CARACTERE de la musique. Se dit du genre d'expression que le
musicien donne à sa composition et de la convenance du style
.1 l'ég.ird de l'objet qu'on s'est i)roposé. On dit de la musique d un
beau caractère, d'un grand caractère. Lorsqu'il s'agit de musique
légère et agréable, on se sert de préférence du mot style, et l'on
dit de la musique d'un slj le gracieux , élégant, etc. (^oy. Stj-le).
':ARACTÉRES de musique, signes de la notation (v. Notation).
CARACTÈRES DE MUSIQUE (Voy. Tj-pographie de la musique).
';.\R.\MILLO, s. m. Sorte de flageolet espagnol.
(CARILLON, s. m. Collection de cloihes accordées de manière à
former une échelle chromatique d'environ deux octaves et demie
ou trois octaves. Ces cloches sont suspendues dans un clocher et
sont mises en vibration au moyen de ressorts qu'un double cla-
vier fait mouvoir. Le clavier supérieur est destiné à jouer les
notes intermédiaires en frajipant les touches avec les poings; le
clavier inférieur se joue avec les pieds, et sert pour les notes
graves, Les meilleurs carillons sont dans la Belgique et dans la
DU. MUSIQUE. 309
Hollande; ou y trouve iinssi d'iiabilrs carillonneurs ou joueurs
de ces instruinens gigantesques. Les timbres ou les airs qui pré-
cèdent la sounerie des iiirs sont joués par des cyliudres piques
qui remplacent le carilloiineur.
Les carillons placés dans les socles de pendules, dans les ta-
batières, les montres et les cachets sont composés de ressorts
élastiques et sonores qui remplacent les cloches.
CARILLONNER, v. a. Jouer du carillon.
CARILLONNEUR, s. m. Joueur de carillon. Il y a des artistes
fort habiles qui exécutent sur le carillon des pièces à trois par-
ties fort di^tinctes.
CARREE, s. f. On appelait autrefois carrée une figure de note
désignée aussi sous le nom de brève à cai.je de sa forme qui of-
frait en effet un carré régulier. La durée de cette note était
égale à celle de deux rondes qu'on appelait alors semi-brèves.
CARRURE des phrases. Disposition symétrique du nombre de
mesures qui entrent dans la formation de deux phrases de mé-
lodie qui forment une période. Le nombre de mesures qui en-
trent dans les phrases est communément de quatre; c'est de la
qu'est venue l'expression carrure des phrases; cependant deux
phrases de trois ou de six mesures sont carrées ])ar(e qu'elles
ont la symétrie de nombre (voy. Phrase, Période et Rhj-thme).
CASTAGNETTES, s. f, pi. Instrument d'origine espagnole, com-
posé de deux |)etites pièces concaves faites en forme de co-
quille. Ces coquilles s'attachent aux doigts au moyen de cordons
qui les réunissent. On les frappe l'une contre l'autre en mar-
quant la mesure, et quelquefois en les agitant avec rapidité.
C.4.6TP1AT, s. m. Chanteur en voix de contralto ou de soprano qui,
dans son enfance, a été ])rivé des organes delà génération dans
le but d'empê<her le développement physique de l'individu à
l'âge de la puberté, et la mutation de la voix qui eu est la con-
séquence. La voix de ces chanteurs avait un timbre et un accent
lieaucoup plus pénétrant que les voix de femmes. La plupart
des grands chanteurs du dix-huitième siècle, tels que Senesiuo,
Farlnelli, Cafarelli, Gudagni et Manhesi ont été des castrats;
Crescenfini et Veluti sont les derniers qui ont joui d'une brillante
renommée. On tolérait autiefois dans l'Etat Romain l'opération
de la castration ; elle était surtout fréquente à Maccrata. Elle est
maintenant sévèrement défendue.
310 DICTIONIfAIKE
CATACOUSTIQUE, s. f. Scieure des sons répercntés, d'où dé-
pend celle de la construction des salles de spectacles et de con-
certs.
CAVALQUET, s. m. L'une des sonneries de trompettes de la ca-
valerie française.
C.WATI^S^E, s. f. Air que chante un acteur lorsqu'il paraît pour
la première fois sur la scène dans un opéra. Ce nom vient de
l'Italien cavare, sortir. Les cavatiues étaient autrefois des airs
d'un seul mouvement sans i-eprises; aujourd'hui elles sont sou-
vent i;omposées d'un récitatif et de deux ou trois mouvemens
alternativement lents et vifs.
CELESTINO , s. m. Sorte de clavecin à archet qui fut inventé en
Allemagne, par un inécanicieu non^mé Walker, vers 178/f. Un
cordon de soie, placé sous les cordes, était mis en mouvement
au moyen d'une roue de pédale, et de petites poulies, mises au
bout de chaque touche, approchaient ce cordon des cordes , et
les fai.saient résonner avec expression, crescendo et decrescendo.
CEMBALO ou CLAVICEMBALO , s. m. Nom italien du clavecin
(voy. ce mot).
CEMBALO AÎS'GELICO. Sorte de clavecin inventé à Rome et qui,
au lieu de plumes aux sautereaux, avait des morceaux de cuir
revêtus de poils , lesquels imitaient la mollesse des doigts et mo-
difiaient le son avec douceur.
CEMBALO DA ARCO (voy. Clavecin à archei).
CEMBALO ou NICORDO, appelé nuaiprotce. Instrumenta corde
inventé, en iG5o, par un Florentin, nommé François Kigelli.
CEMBALO ORGANISTICO. Piano-forté avec un clavier de pé-
dale, inventé par l'ahbé Trentin, à Venise.
CHACONE, s. f. Air de danse d'une é'endue assez considérable,
qui serviiit autrefois de finale aux opéras ou aux ballets. Il n'est
plus en usage.
CHALUMEAU, s. m. Flûte champêtre des peuples de l'antiquité.
Ou lui a donné le nom de ca/amau/e, tiré du latin calamus. Dans les
douzièmeel treizième siècles, on l'appelait cAa/em je. Le chalumeau
est encore en usage dans les campagnes du raidi de la France.
Chalumeau est aussi le nom des grands tuyaux extérieurs delà
mu5ette ou cornemuse.
Chalumeau. On donne ce nom aux sons graves de '.a clarinette,
c'est-à-dire à ceux de la dernière octave et demie.
DK MUSIQUt. 311
CHANSON, s. {. Petit po<ine divisé en «ouiilets ou stroplips au-
quel on applique au air de mélodie simple , fucile à apprendre
et à retenir. La chansfju est originaire de France'; elle y prit
naissance vers le huitirnie siècle, et s'est maintenue en faveur
jusqu'aujourd'hui. La clianson la plus célèbre du moyen-Age fut
celle de Roland; elle était chantée à la guerre par les soldats.
Les trouvères et les trouljadours en ont composé des multitudes
dans les douzième et treizième siècles; ils écrivaient et les paroles
et la musique. De tous temps les Français ont fait beaucoup de
chansons satiriques sur les événemens politiques et sur les jjrin»
cipaux personnages de l'Etat; on en connaît un très grand nom-
bre qui ont été faites aux temps de la Ligue, de la Fronde, de
la Régence, etc. Dès le quinzième siècle, les chansons à plusieurs
parties étaient fort recherchées, et les plus habiles musiciens s'oc-
cupaient de ce genre. On les chantait à table, et on les accom-
pagnait avec les instruraens. Plus tard, les chansons de table
ou à boire , à voix seule, les ont remplacées. Plusieurs provinces
de France eut des airs d'im caractère particulier; on remarque
principalement ceux de la Provence, de la Bourgogne, de l'Au-
vergne et de l'Alsace (voy. Air-).
CHANSONNETTE, s. f. Petite chanson.
CHANT, s. m. Émission des sons diversement modifiés de la voix
de l'homme et des oiseaux. Le chant se produit par instinct dans
la race humaine; mais en perfectionnant l'organe de la voix par
l'exercice on en fait un art (voy.foi'x).
Chant est quelquefois synonyme de mc7orf('e ; c'est en ce sens qu'on
dit de beaux chants , des chants dépourvus de grâce.
CHANT AMBROISIEN. Gisant ecclésiastique foriaé, par saint Am-
broise, de quelques fragineus de l'ancienne musique des Grecs.
Ce chant est encore eu usage dans quelques églises de Milan ,
mais sa tradition d'exécution s'est beaucoup altérée.
CHANT GREGORIEN. Chant ecclésiastique réglé par saint Gré-
goire , au sixième siècle. Ce «liant est celui dont on se sert dans
la plupart des églises catholiques. II diffère du chaut ambroisien
dans quelques détails de forme plutôt que dans la tonalité. Dans
son origine, le chant ambroisien était rhythmé, le chant gré-
gorien ne l'était pas (voy. Plain-chant).
CHANT PARISIEN. Sorte de chaat d'église en usage dans le dio-
312 DICTIONNAIRE
«•<-se de Paris. Il est moins simple el moins beau que le «-liant
CHA>T SLR LE LIVRE. On appelle ainsi une liaimonie impro-
visée sur le ch.:nt eotlésiastique, par les rliantres réuuis autour
ilu lutrin. Quelques auteurs assurent qu'on faisait autrefois de
tort bonnes choses en ce genre dans les églises d'Italie, i)articu-
lièrement à Rome; mais eu France cette musique était fort mau-
vaise. Elle n'est plus en usage.
C'IL-^NTAINT , TE. Adj. dont on se sert quelquefois comme syno-
nyme de me/odj^uJ", me Wteufe. Ce'a esl chantant , cette musique
est chaulante , signifient qu'une musique est plus riche de mélo-
die que d'harmonie.
CH.VISTERELLE , s. f. La corde la plus élevée et la moins grosse da
violon et de la guitare. Cette corde {luî), fournit les sons les plus
iiigus de l'instrumeut lorsqu'on y applique les doigts.
CHANTEUR, s. m. Homme qui connaît l'art du cb.iot et que la
uature a pourvu d'une voix |)lus ou moins belle (voy. Voix, Cas-
trat, Haule-contre , Ténor et Basse).
CliAÎSTEUSE, s. f. Ce nom ne se donne jilus qu'aux femmes qui
ont peu de talent dans l'art du chaut, dej>uis que celui de can-
tatric:e a prévalu. Cependant on s'en sert encore dans le langage
des tbéàtfes de province, et l'on dit: Une première chanteme ,
une chanteuse a roulades , une ciia?îT£Use sans roulades!
(Ml ANTRE, s. m. Homme qui chante au lutrin le ]ilain-cliant des
offices. Ce mot se prend quelquefois en mauvaise part, et l'on
dit d'un chanteur sans goût : C'est un chanire de paroisse.
('li.APE.^U CHINOIS. Instrument de j)ercussiou dont on fait usage
d.ms la mu.'ique militaire. II a la forme d'une sorte de coiffure
chinoise, en l'uivre, et plusieurs petites sonnettes ou grelots sont
suspendus à ses bords. On le fait résonner en l'agitant j)ar se-
cousses.
CHAPELLE. Se dit delà réunion des musiciens qui exécutent de
1.1 musique dans une église ou dans la cha]>elie d'un prince.
C'est ainsi qu'on dit : La chapelle pontificale , la chapelle du roi de
liavilre , etc.
CHEF D'ATTAQUE. Musiiien qui dirige dans un chœur toutes les
voix de même espèce. II y a un chef d'attaque pour les basses,
un autre pour les ténors, etc. Si tous les choristes (voy. ce mot)
Vr. MUSIQUE. SI 3
ctiiient des miisiciL-iis suflis.imment liahiles, les «.liefs d'altafiue
sernient inutiles, et il ne faudiiiit <]u'uii diicclciii- ile toute la
musique.
CHEl'" DE MUSIQUE. Nom du musicien qui dirige un corps de mu
sique militaire.
CHEF DE PUPITRE. Celui qui dans un orcOiestre dirige tous les
instrumens de même e^])èce.
<:HEF D'ORCHESTRE. Nom qu'on donne au musicien qui dirige
l'exécution d'une réunion d'instrumentistes et quelquefois de
clianteurs. A l'opéra de Paris on donne le nom de chefs ilu chant
à des musiciens qui sont chargés de diriger l'exécntion des
(liœurs.
CHEVALET , s. m,, en italien ponticef'o. Petit pont, ou morceau
de bois peu épais, légèrement arrondi, sur lequel on élève les
tordes des instrumens à archet, afin de les éloigner de la touche
et de leur donner plus de raideur et de sonorité.
CHEVILLE, s. f. Morceau de bois ou de fer cylindrique sur le-
quel on roule les cordes des instrumens afin de leur donner le
degré de tension nécessaire pour les accorder.
Cl-TEVROTER, v. u. C'est exécuter, d'une manière défectueuse,
avec la voix, les deux notes d'un Iri/le (voy. ce mot) , sans mar-
«juer l'articulation de chacune et eu imitant le bêlement des
chèvres.
CHIFFRER nne basse. C'est déterminer jiar signes et des chiffres
l)lacps au-dessus de chaque note l'anord qui doit l'accompagner.
(^HIKFRES. Signes qui, j)lacés au-dessus des notes d'une paroe
de basse , indiquent aux accompagnateurs les accords dont ils
doivent l'accompagner sur l'orgue ou sur le piano. La collection
de ces signes n'est pas uniforme dans toutes les écoles; les va-
riétés qui existent à cet égard jettent souvent de l'incertitude
dans l'esprit des accompagnateurs (v. Accompagnateurs et Accom-
pugnemeni). Depuis qu'on a pris l'habitude d'écrire les accompa-
gnemens de piano ])our les morceaux de chant, la méthode de
chiffrer la basse a été abandonnée; elle n'est plus d'usige que
dans les études d'harmonie. Cependant la connaissance des chif-
fres est nécessaire pour accompagner lif musique ancienne.
CKIROPLASTE, s. m. Machine en cuivre ou en bois qui s'adapte
au clavier des pianos et qui est destinée à donner une bonne po-
sition aux mains des élèves coinmençans, ainsi qu'à guider les
87
314 DICTIONNAIRE
mouveraens de leurs doigts. Cette machine a été inventée à Du-
blin, par M. Logier, qui en a fait ensuite l'oljjet d'une méthode
d'enseignement à Londres. Chiroplaste est formé des deux mots
grecs, y 5(3 , main , et TrXâarfiÇj qui façonne , c'est-à-dire qui forme
la main.
CHOEUR, s. m. Dans l'acception la plus générale, c'est une réu-
nion de personnes qui parleutou qui chantent. Dans la musique,
le chœur est ordinairement composé de quatre ou de cinq es-
pèces de Toix , c'est-à-dire de voix de femme aiguës, appelées
dessus ou soprano, de contralto, ou voix de femme graves, de ténor
et de basse (voy. tous ces mots). Dans les chœurs il y a toujours
plusieurs j)ersonnes pour chanter chaque partie. On met des
chœurs d.ins les opéras et dans la musique d'église. Quelquefois
ils chantent seuls ; d'autres fois ils accompagnent une voix isolée
qu'on nomme solo. L'opposition de ces masses vocales avec le
solo produit de beaux effets.
CHORISTE Homme ou femme qui chante dans les chœurs. On
prononce coriste.
CHORUS. Se dit du refrain d'une chanson qu'on chante quelque-
fois en chœur à l'unisson , soit à table, soit dans l'espèce de danse
chantée qu'on nomme ronde.
CHROMATIQUE , adj. Genre de musique où les modulations
(voy. ce mot) sont fréquentes et rapides. On distinguait autrefois
trois genres de musique: le diatonique , qui modulait peu ou ne
modulait point, le chromatique où les modulations étaient mul-
tipliées, et Venharmoniqu^pii les modulations se faisaient par uu
mode particulier (voy. diatonique et enharmonique); mais ces dis-
tinctions ne se font plus, parce que la musique de nos jours est
un niéln'mge <-ontinuel des trois genres.
Chromatique se prend quelquefois substantivement, et l'on
dit le chromatique pour le genre chromatique.
Une gamme chromatique est une gamme formée de demi-
tons.
CHROMAMETRE , s. m. Instrument composé d'un petit corps
sonore avec un long mambe divisé par demi-tons, et monté
d'une corde sur laquelle ou fait glisser un capo-tasto mobile qui
varie les intonations selon les divisions du manche. Une touche
de clavier ordinaire fait mouvoir un marteau qui frappe la corde
et la fait résonner. Cet instrument, destiné à faciliter l'accord
0E MUSIQUE. 315
du piano aux personnes qui n'en ont pas l'tial)itade, a été in-
veuté piir INl.Roller, facteur de piiiuos, à Paris, en 1827.
CHRONOMETRE, s. ni. Instrument qui sert à déterminer la me-
sure du teui[is en musique, et à indiquer les diverses nu.inces de
lenteur et de vitesse. 11 y en a de plusieurs sortes; le meilleur
est celui qui est connu sous le nom de métronome (voy. ce mot).
CLAIRON, s. m. Petite trompette dont ou fais.iit usage dans la
musique au moyen-âge. Cet instrument sonnait l'octave aiguë de
la trompette ordinaire.
Clairon, jeu d'anclie eu étain, qu'on emploie dans les orgues de
France et des Pays-Bas , et qui soune l'octave du jeu de même
espèce appelé trompette.
Clairon, nom delà partie aiguè de la clarinette.
CLARINETTE, s. f. Instrument à vent composé d'un tube en bois
ou en ébèue, terminé par un pavillon évasé, et qui se joue en
soufflant par un bec auquel est ajustée une languette mince de
roseau appelé l'ancAe. Le tube est percé de trous qu'on boucbe
avec les doigts ou avec des clefs (v. ce mot), et qui servent à modi-
fier les intonations, La clarinette a des sons plus graves que la
flûte et le hautbois, et son étendue est j)lus grande que celle de
ces instruraens. Le doigté de la clarinette étant difficile et com-
pliqué, il est de certains tons dans lesquels on ne pourrait jouer
si l'on n'employait des iustrumens de différentes longueurs qui
haussent ou baissent le ton, en raison de la longueur du tuije.
CLARINETTISTE. Musicien qui joue de la clarinette.
CLAQUEBOIS ou REGALE. Instrument composé de morceaux de
bois dur et sonore dont chacun fait entendre les sons d'une des
notes de la gamme, quand on les frappe avec un marteau.
CLAVECIN, s. m. Instrument à clavier dont l'usage a précédé ce-
lui du piano (voj". ce mot). Le clavecin n'était point un instru-
ment du même genre que ce dernier, car ses cordes, au lieu d'ê-
tre frappées par des marteaux, étaient pincées par des plumes
attachées à une sorte de leviers , qu'on appelait sau/ereau.v. De là
vient qu'il était rangé dans la classe du Inth, de la mandoline,
et des autres instrumens qu'on ajipelait slromenli da penna (iu-
strumens de plume).
CLAVECIN A MARTEAUX. Instrument qui doit être considéré
comme l'origine dn piano , et dont la première invention est due
à un facteur de Paris nommé Marius. '
316 DICTIONNAIRE
CLAVICYLINDRE , s. m. Instrument à clavier et à frotteraeut
d'un cylindre de verre, dans la forme d'un clavecin, inventé par
le physicien Chladni , en 1793.
CLAVICITHERIUM. Espèce de harpe à clavier, dont les cordes de
boyau étaient verticales. Il est parlé du clavicitkerium , non
comme d'un instrument nouveau, dans la Muiurgia de Nachti-
gall, imprimée dans la première moitié du seizième siècle.
CLAVIER, s. m. Assemblage des leviers a|)])elés (ouc/ie; qui ser-
vent à faire résonner les cordes du clavecin, du piano et des
autres instriimens du même genre, ou les tuyaux de l'orgue.
Clavier vient du mot latin clavis . qui signifie clef ou touche.
CLAVIHARPE, s. m. Instrument du genre de la harpe, à cordes
de boyau verticales, qui résonnent au moyen d'un clavier. (Jet
instrument a été inventé à Paris, vers 1812, par M. Dietz
le père.
CLAVILYRA, s. m. Instrument du même genre que le précédent,
qui, depuis environ dix ans, a été fabriqué eu Angleterre par
M. Bafeman.
CLEF , s. f. Signe qui se met au commencement des portées (voy.
Porùe) pour indiquer le degré d'élévation ou de gravilé des no-
tes qui y sont placées et le genre de voix ou d'instrument au-
quel ces notes a])partiennent. D.ins la musique moderne il y a
tiois rlefs qu'on nomme clef de sol , clef d'ut et clef de fa. La jio-
sition de ces clefs , sur les lignes de la ])ortée, est vertiiale; les
noms des notes changent en raison de la position des clefs. Les
clefs de sol el d'uf , posées sur la première ligne de la portée,
servent pour les voix et les instruraens à sons aigus; les clefs
d'ut, placées sur la de-uxième, la troisième et la quatrième li-
gne, ajipartiennent aux voix et aux instrumeus intermédiaires,
entre les plus graves et les plus aigus ; la clef de/a est celle des
voix graves (voy. le chap. 111 ).
Clef est aussi le nom de certaines pièces mécaniques qui ser-
vent à boucher ou à ouvrir les trous des instruinens à vent que
les doigts ne peuvent atteindre.
CLOCHE , s. f. Instrument composé d'un mélange de cuivre, d'étaiu
et de zinc, dont le son se pro|)age au loin , et qu'on fait résonner
au moyen d'un morceau de fer susjjendu entre ses parois, ou en
fra])pant dessus avec uu marteau. Les grosses cloches se susj)en-
dent d'ordinaire dans le haut des clochers afin qu'elles agitent
DE MU51QUH. 317
l'air avec plus de facilité et transmettent le son au loin (voy. Ca-
ri/ton).
CLOCHETTE. Petite cloclie.
CODA. Mot italien qui signifie queue ou terminaison , et qui s'ap-
plique à certaines phrases musicales ])ar lesquelles on finit un
morceau de musique. La coda ne fait pas essentiellement partie
du morceau et pourrait quelquefois être supprimée.
COLOPHANE , s. f. Résine préparée qui sert à froi ter le crin des
arcliels d'instrumens afin de leur donner du mordant sur les eor-
des. Le nom véiitable de la résine est colophone , mais l'usage a
fait ])révaloir celui de colophane.
COMMA , s. m. Petit intervalle dont on ne peut faire usage dans
la musique pratique, mais dont les théoriciens sont ohligés de
tenir comiife dans le calcul des proportions de l'échelle musi-
cale. Il y a plusieurs sortes ilecomma. Le premier, qu'on nomme
comma sjnlonir/ue , est la différence qui existe entre le ton ma-
jeur représenté par la j)r<>portiou Ç) : 8 , et leton mineur qui
s'exprime par 9 : 10; différence qui ei^t la neuvième partie d'uu
tou et qui se représente par la ])roportion 81: 80. Le second
comma s'appelle comma diatonique; c'est la diflérence qui se
trouve entre l'octave juste, représentée par la proportion r : 2 ,
et le dernier terme de douze quintes successives, différence ex-
primée par les nombres 53r44i- 5^4288. On donne aussi à ce
comma le nom de commade Pj thagore.he troisiînne comma, appelé
d.esis par les anciens tliéoriciens , est la différence qui se trouve
entre deux sons analogues comme ré U et ut >i, différence qui
s'exprime par la proportion 128: i25. Tous ces commas s'éva-
nouissent dans la division de l'octave en douze parties égales.
COMMODO. Mot italien qui indique un niouvemeut intermédiaire
entre la lenteur et la vitesse.
COMPLAINTE , s. f. Sorte de romance populaire qui a pour ob-
jet un événement public , et dont l'air est d'un caractère pathé-
tique.
COMPOÎSIUM. Instrument inventé vers 1820 par uu mécanicien
hollandais , nommé Viukel, et dont le mécanisme est resté un
secret. Cet instrument , par une combinaison admirable, im])ro-
Tise des variations que MM. BiotetCatel ont dit être inépuisa-
bles, dans un rapport qu'ils ont fait à l'Institut. L'orgue auquel
318 DICTIONHAIRE
ce mccauisme est appliqué est d'ailleurs remarquable par sa
beauté.
COMPOSER, V. a. Action d'inventer de la musique et de l'écrire
selon les règles de l'art.
COMPOSITEUR , s. m. Celui qui invente de la musique, et qui
sait les différentes parties de l'art de l'écrire , telles que l'hArmo-
nie, le contrepoint, les effets de voix et des instrumens, etc.. Il
est beaucoup de faiseurs de musique qui ignorent une partie de
ces choses. En Italie, on se sert du mot maestro, pour désigner
un compositeur.
COMPOSITION, s. f. Art d'inventer et d'écrire de la musique.
On se sert en général de mauvaises locutions lorsqu'on dit qu'on
apprend ou qu on enseigne la composilion. Composer, c'est inven-
ter, ce qui ne se peut enseigner; mais on apprend l'art d'écrire,
c'est-a-dire le contrepoint et l harmonie.
CON A?*IMA, avec ame, avec expression. Locution italienne qui se
met quelquefois sur la musique pour indiquer le caractère de
l'exécution.
C0>' BRIO, avec un caractère brillant, avec éclat. Expression qui
se place au commencement de certains morceaux d'un mouve-
ment vif.
CON ESPRESSION. Qui doit être joué ou chanté avec expres-
sion.
COÎf MOTO. Qui doit être exécuté dans un mouvement décidé.
CONCERT, s. m. Réunion de musiciens qui exécutent des mor-
ceaux de musique vocale et instrumentale. Ce mot vient du la-
tin concinere. En Italie un concert se vomme academia.
CONCERrO SPIRITUEL. Concert où l'on ne chante que de la mu-
sique d'église, et d'où l'on exclut les morceaux d'opéras.
CONCERTANT. Adj. pris substantivement, se disait autrefois du
chanteur ou de l'instrumentiste qui exécutait dans un concert;
on dit aujourd'hui concertiste.
CoxCERTAîfT se dit particulièrement d'un morceau de musique
dans lequel les différentes parties brillent alternativement. Ainsi
l'on dit un duo , un quatuor concertant pour indiquer des pièces
dans lesquelles deux ou quatre parties concerteut. Vae sympho-
nie concertante est un morceau qui sert à faire briller le talent de
quelques iastrunicntistcs, pendant que les autres accompagnent.
Il y a de ces symphonies pour divers genres d'iustrumens.
DE MUSKjUE. 319
CONCERTÉ, utij. Mot qui vient de l'italieu et qui signifie uu
style de musique d'église^ plus brillaut que le style sévère ap-
pelé a capclla (tie cliapelle). Une messe concertée, ua psaume con-
certé sont accoinpagués avec l'orchestre.
CONCERTISTE , adj. pris substantivement. Celui qui joue ou qui
chante dans un concert.
CONCERTO, s. m. Sorte de pièce de musique qui sert à faire
briller le talent d'un instrumentiste, pendant que plusieurs au-
tres raccompagnent. Ce mot est italien. Il y a des concerto de
violou, de piano, de flûte, de hautbois , etc.
CONCERTO UA CAMERA. C'était autrefois uu concerto qui n'é-
tait accompagné que par uue basse.
CONCERTO GROSSO. Expression ancienne par laquelle on dé-
signait un concerto pour plusieurs instrumens.
On se sert quelquefois du diminutif conceilino , pour désigner
un [)etit concerto.
CONCORDANT, s. m. Voix d'homme composée des sons les moins
élevés du ténore et les moins graves de la basse. Ce mot n'est
plu.s guère en usa.ge. On dit aujourd'hui un bariton (voy. ce
mot).
CONSERVATOIRE, s. m. Ecole publique de musique, entrete-
nue aux dépens des gouvernemens ou par des fondations parti-
culièv:'s. Le premier conservatoire fut fondé à Naples, en i53-,
sous l'ivocation de Sanla-Maria-de-Loro. Il y ea eut depuis lors
plusieurs autres dans la même ville et à Venise. La conserva-
toire de musique de Paris a été établi en 1793, eu vertu d'une
loi du 16 thermidor an III. Dans ces derniers temps, il en a été
foudé sous divers titres , à Vienne , Prague, Berlin, Londres et
Bruxelles.
CONSOLE, s. f. Partie supérieure de la harpe qui contient la por-
tion la plus compliquée du mécanisme des pédales, et àlaquelle
tiennent les chevilles qui servent à attacher les cordes.
CONSONNANCE , s. f. Réunion simultanée de deux sons qui s'ac-
cordent ensemble, et dont l'effet est agréable à l'oreille. Les
consonnances sont la tierce, la quarte, la quinte, la sixte et
l'octave.
CONSONNANT, adj. Intervalle ou accord composé de sous qui
forment des consonnances.
CONTRALTO, s. m, Voix intermédiaire entre le soprano ou voix
320 DICTIONNAIRE
aiguë de femme, et letênore ou voix aiguë d'homme. Il v a des
femmes qui ont naturellement la voix de contralto ; les eiivirons
de Toulouse fournissent aussi des hommes qui possèdent le
genre de voix un peu plus borné à l'aigu, mais plus étendu au
grave. Ou donne à ces voix le nom de haute-conlre. En Italie ou
obtenait autrefois artificiellement de belles voix de contralto , au
moyen de la castration.
CONfRAPUNTIST£,s. m.(voy. Conirepointisie).
CONTREBASSE, s. f. Grand instrument à archet qui, par la di-
mension de ses cordes, sonne l'octave grave du violoncelle. Cet
instrument est un des plus nécessaires dans la composition d'un
orchestre, à cause de son énergie. En France, la contrebasse est
montéede trois cordes, qu'on accorde à la quinte et dont la plus
haute est la, l'intermédiaire ré , et la plus basse soL En Allema-
gne, elle a quatre cordes qui sont accordées à la quarte l'une
de l'autre, ce qui rend le doigté plus facile.
CONTREBASSISTE, s. m. Celui qui joue de la contrebasse.
CON TREBASSON , s. m. Instrumeut à vent et à znche , du genre
l du basson (voy. ce mot), et qui par ses dimensions sonne Toc-
tave du basson.
CONTREDANSE, s. f Sorte de danse qui a succédé à toutes les
danses autrefois en usage, et qui se danse maintenant dans les
salons comme d.ins les guinguettes. Ce mot vient de l'exjïres-
sion anglaise countrjr-dance , danse de la campagne. La musique
des contredanses est d'un mouvement animé, en mesure à deux
temps , à division binaire ou ternaire. La ('ontredanse est for-
mée de diverses figures résultant des positions des d.in>eurs. O.i
a donné à ces figures les noms de pantalon , été , trénisse , pas-
tourelle, chasse-croisé , etc. (voy. ces mots).
CONTREPOINT, s. m. Art d'écrire la musique suivant de certaines
conditions (voy. le chap. xri ).
CONTREPOINT DOUBLE. Contrepoint susceptible d'être ren-
versé ou dans lequel ce qui est au-dessus peut être transporté a
la basse, et réciproquement.
CONTREPOINT FUGUÉ. Contrepoint dans lequel il y a desimi-
lalions , de^ canons el d'autres artifices de l'art d'écrire.
CONTREPOINT SIMPLE. Contrepoint qui n'est pas susceptible
d'être renversé.
CONTRE-SUJET, s. m. Phrase (J'accompagnemeat qu'on intro»
DE MUSIQUE. 331
duit dans les fugues ])oiir former avec le sujet un contrepoint
doul)le, susceptible d'être renversé.
COINTRE-TEMPS, adv. Aller à contre-temps, c'est manquer à la
mesure, ne point attaquer en temps.
Un morceau de musique est a contre-temps quand son rotn-
mcn<-euient n'est point établi sur le temps fort ou faible auquel
il appartient; l'effet d'un tel morceau blesse une oreille exercée,
quel qu'en soit d'ailleurs le mérite.
COPISTE , s. m. Celui qui copie de la musique. Le copiste doit
être bon musicien, car il ne se borne point à copier exactement
ce qu'il a sous les yeux; quelquefois il est obligé de tiansposer
(voy. ce mot) , d'extraire des parties séparées d'une partition et
de faire d'autres opérations qui exigent de l'intelligence et la
connaissance des diverses parties de la musique.
COR, s. m. Instrument à vent, en cuivre, qui se joue avec une
embouchure (voy. le ch.ip. xix).
COR ANGLAIS. Instrument à vent et à anche , du genre du haut-
bois (voy. cl), xix) , et qui, à cause de sa longueur, sonne une
quinte au-dessous de celui-ci.
On appelle aussi cor anglais un registre de l'orgue , à anche,
a tuyaux ouverts de deux ou de quatre pieds et de forme cy-
lindrique.
COR DE BASSET ( en allemand bassec-hom). Instrument à anche
du genre de la clarinette, et qui est à (-elle-ci ce que le cor au-
glais est au hautbois.
COR RUSSE. Instrument à vent en cuivre, qui se joue avec une
embourluire, et qui est de forme conique. Le tube ne fournit
qu'un son; pour avoir quelques octaves de tous les demi-tons,
il faut avoir autant de tubes qu'on veut em])loyer de sons, eten
proportionner la longueur au degré de grave ou d'aigu qu'on
veut obtenir (voy. le cii. xix ).
CORDE SONORE. Corde tendue dont on peut tirer du son (voy.
Monocorde^ Il y a i>lusieurs genres d'instrumeus dont la produc-
tion du son se fait au moyen de cordes tendues sur une caisse
sonore. De ce nombre sont les instrumens à cordes frappées , tels
que le clavecin, le piano et le tyrapanon ; ceux à cordes pincées
])ar des corps élastiques ou par les doigts, tels que le luth, la
mandoline, le clavecin, la guitare, la harpe, etc.; les iustrumeus
à archet , etc. (voy. le chap. xix).
322 DlCTIONNAïaE
CORDES. Les cordes des instruraeus à archet, et à pincer avec
les doigts, sont fuites avec des intcstius de brebis et d'agneau,
qui sont dégraissés dans la lessive et filés ensuite. Les meilleures
cordes fines, telles que les chanterelles du violon , se fubriqueut
à iSaples, parce qu'on y possède une sorte d'agneau qui fournit
les meilleurs intestins; les cordes françaises sont mieux fabri-
quées que les cordes de Ka[)les, mais leur qualité est inférieure
dans les cordes fines. Le piano est monté de cordes d'acier et de
Ijiton. Presque toutes les cordes de ce genre sortaient autrefois
des fabriques de Nuremberg ; plus tard, les cordes de Berlin ont
obtenu la préférence; aujourd'hui les cordes anglaises sont les
meilleures.
Les grosses cordes des instrumens à archet sont eu boyaux re-
couverts d un fil de laiton très mince. Les grosses cordes de la
barpe et de la guitare sont en soie recouverte d'un fil de laiton
semblable.
CORNE-MUSE , s. f. Instrument à vent composé de chalumeaux
percés de trous qu'on fait résonner au moyen de l'air contenu
dans une outre. Cet instrument était connu des peuples de l'an-
tiquité. Les Romains l'appelaient utriculaiium ou tibia utricu-
lar.t.
CORNET, s. m. Petit cor dont se servent les postillons en Allema-
gne, et qui remplace quelquefois le tambour pour guider la
marche des soldats.
CoRS^ET. Jeu d'orgue composé de quatre tuyaux qui résonnent à
la fois sur chaque touche, et qui sont accordés à l'octave , à la
douMe quinte et à la triple tierce.
CORONA ou CORONELLA (voy. Point d'orgue).
CORPS SONORE. On donne ce nom à tout ce qui produit des sous,
comme une corde tendue, une cloche, un tuyau d'orgue, etc.
CORYPHEE, s. m. Chef de choristes, qui chante les solos qui se
détachent du chœur.
COULE. Trait composé de plusieurs notes, qui se fait d'un seul
coup d'archet sur le violon, l'alto et la basse, ou sans renouve-
ler le coup de langue sur les instrumens à vent. Le coulé se
marque par une liaison qui couvre toutes les notes du trait.
COUPE, s. f. Disposition des jiarties d'un morceau de musique,
et retour périodique des idées principales.
COUPLET, s. m. Strophe qui se chacte sur une mélodie d'un mou-
DE MtlSIODE. 228
vement animé. Il y a ordinaiveinent plusieurs couplets qoi se
t'hantent sur le même air et dont les vers sont rhytlimés et dispo-
sés d'une manière uniforme (voy. Chanson et Vaudeville).
COURAÎNTE, s. f. Air de danse en mesure ternaire, qui était au-
trefois usité dans les bals et qui a passé de mode. La courante
suivait ordinairement l'allerainde; elle était à deux reprises.
CRESCENDO. Mot italien qui indique que la force du son doit
être augmentée aveu gradation Le crescendo est un des effets les
plus actifs delà musique; on l'emploie ordinairement vers la
terminaison des morceaux.
CRIBLE, s. m. Planche percée de trous qui est destinée à main-
tenir les tuyaux dont les embouchures sont placées dans le
sommier de l'orgue.
CRIER, V. act. C'est exagérer la force des sons de la voix en clian»
tant. Ce défaut est celui des chanteurs dont la voix ne se pro-
duit point avec facilité.
CROCHE, s. f. Caractère de musique fait de cette manière J ; il
représente la durée d'un son égal à la huitième partie d'uue ronde
(voy. ce mot). Cette durée n'est que relative et dépend de la
rapidité ou de la lenteur du mouvement.
CROMORNE, s. m. Nom tiré de l'allemand krumphorn , qui signi-
fie cor tordu. C'était un instrument en usage dans les xv^ et xvi"
siècles,et qui est oublié depuis long-temps.
Cromorke. Jeu d'orgue composé de tuyaux cylindriques à anches .
Sa qualité de son a quelque rapport avec le violoncelle.
CE.OQUE -NOTE , s. m. Musicien qui sait lire la musique avec fa-
cilité, mais qui est dépourvu de goût et d'expression.
CROTALES, s. f. plur. Instrument de percussion du genre des
cyraljales et dont se servaient les peuples de l'antiquité. Dans la
musique militaire on donne quelquefois le nom de crotale au
chapeau chinois garni de sonnettes et de grelots.
CUVETTE, s. f. Partie inférieure de la harpe où sont placés les
ressorts des pédales , et dans laquelle sont attachées les tringles
qui font mouvoir le mécanisme de la console (voy. Console,
Harpe, Pédales).
CYMBALE, s. f. Jeu d'orgue aigu, placé au nombre des jeux de
mutation. Il est composé d'au moins trois tuyaux à bouche en
étain, sur ch.ique note, et quelquefois de cinq, six, sept ou da-
vantage. On les accorde à la tierce , à la quinte, à l'octave, avec
• 24 DlCTlONNAlRfc
des redouUemeus. La cymbale se joint k U foumiuire , '^ la dou-
hletle (voy. ces noms) , et à des feux de fonds , pour compose r
ce qu'on api.elle \e ph.n-jea de l'orgue.
CYMBALES, s. f. plur. Instrument de percussion, compose de
deux pl.teaux circulaires en métal sonore , de onze a quatorze
p„uces de diamètre, d'environ «ne ligne d'ép;..sseur, et qu. ont
a leur centre une cavité qui sert à faciliter la production du son.
Ou frappe ces plateaux l'un .outre l'autre, et le son produit par
ce choc est éclatant. Ce genre d'instrument, qui se jouU ordi-
nairement a la grosse caisse pour marquer le rhythme. ne ser-
vait autrefois que dans la musique militaire, mais Rossiui en a
introduit l'usage dans l'orchestre de l'Opéra.
CZA-CAN , s. m. Espè.e de flûte en forme de canne, qu. a eu de la
vogue en Allemagne , vers 1800, et pour laquelle on a ecr.t beau-
, oup de musique. Le son en était doux.
D
D T A RÉ. Cette expression , qui dérive de l'an.ienne manière de
solfier (voy. ce mot), servait autrefois à désigner la note re , on
„e s'en sert plus aujourd'hui. r • ' 1, fin
DV CAPO, et par abréviation D. C. Se met quelquefois a la hn
aes'morceauxdemusiquepourindiqnerqu'ilfautles reprendre
,. commencement jusqu'à un endroit où est la C". -"'"^^•
DI':(:AC0RDE, s. m. Instrument antique monte de dix cordes, ne
IVsnèce de harpes simples ou trigones.
T)FC1 ANT s. m. Nom qui vient du latin discantus, et qu on don-
;^.t dansles treizième et quatorzième siècles, au contrepoint
, plusieurs parties sur le plain-chant (voy. Conlrepo.n,)
DECHIFFRER, v. act.Lire de la musique. On ne se sertde ce mot
nue dans le sens d'une lecture difficile et pénible.
DKRESCENDO. Mot italien qui indique une diminution pro
"^iesSe d'Intensité des sons dans l'exécution delà musique.
DiGRÉ s m Pc...ltion relative de chaque son de la gamme sur
"^ e.^i!:esrelaportée(v.Ca.n,O.P-exemple,dans la ga.^e
les lignes a . .„..,,,, ^é le second, mi le troisième, etc.
f'^'V^^Ti: ' D^lan. et ^.e .n.Ve). On dit que
DE MUSIQUE. 325
vont d'une note quelconque à la plus Toisine, soit inférieure, soit
supérieure, dans leur succession, et qu'elles v(,nt par defruS
disjoints ou par sauts lorsqu'elles font des mouvemens de tierce,
de quarte , de quinte, etc.
DÉMANCHER, V. ac. Action de changer la position de la main
sur le ra.m.hedu violon, delà basse, de la guitare, etc.Déman-
cl.er est une des plus grandes difficultés de ces instruraens parce
qu'en portant la main avec rapidité d'une position à une autre,
ou plus haute ou plus basse, il faut tomberavec justesse à l'en-
droit qu'indiquent les règles du doigté.
DEMI-JEU. Jouer à demi-jeu d un instrument, c'est ne point
donner aux sons toute l'intensité dont ils sont susceptibles Le
demi-jeu tient le milieu eutre le fcrt et le doux absolus. Les Ita-
liens indiquent le même effet par les expressions solto voce ,
mezza voce, mezza forte,
DEMI-PABSE, s. f. Signe de la notation musicale qui indique un
silence d'une durée égale à une blanche (voy. Hlanche)
DEMI-SOUPIR, s. m. Signe de la notation qui indique un silence
égal a la durée d'une croche (voy. Croche).
DEMI-TON, s. m. Distance d'une note à la note la plus rappro-
chée; c'est l'intervalle le plus petit qui soit employé dans la
musique des Européens modernes. Par la théorie ordinaire, on
distingue deux sortes de demi-tons : l'un majeur, qui se forme
de deux notes de dénominations différentes comme ufetre bé-
mol; l'autre mineur, qui consiste en une note dans sa jjosition
naturelle au ton et la même note modifiée par un dièse, un bé-
mol ou un bécarre, comme ul h et ul W.
DENIS D'OR. Nom d'une sorte de clavecin avec pédale, inventé
au commencement du dix-septième siècle par un prêtre de
Predmitz en Moravie, nommé Difis.
DÉSACCORDER un instrument, c'est en détruiie l'accord, soit en
tournant les chevilles qui tendent les cordes, soit par des secous-
ses qui l'agitent, ou par toute autre perturbation.
DESCENDRE, v. ac. C'est passer d'un son aigu à un plus grave.
Descend, e est aussi baisser iuseDsiijleraent l'intonation d'une
note, ou parce qu'on a reconnu qu'elle est trop élevée, ou à
caus» delà faiblesse de l'orgrme vocal.
DESSIN,. s. m. Le dessin d'un morceau de niuvque est la disposj-
a. S
326 DICTIONNAIRE
tioa de "ses différentes parties et particulièrement des phnises
mélodiques.
DESSUS, s. tn. On appelle de ce nom , éii France, lés voix de
femmes et d'eufaus les plus élevées. Ce nom répond au mot ita-
lien soprano.
Dessus, est aussi le nom de la partie la plus élevée de la musi-
que vocale. Lorsqu'il y a deux parties aiguës dans la musi-
que, on les divise en premer et second dssus. Autrefois les par-
ties iastrumeutales se divisaient de la même manière, et l'on
avait des dessus ou des pardessus de viole , et des dessus de violon.
DEFACUE, part. Pris substantivement, en italien, Uaccalo ; mode
d'exécution de la voix ou des instrumeus dans lequel on sépare
tous les sons par une émission brève et non prolongée. Le dé-
taché est l'opposé du//e.
DETONNER, T. n. Chanter faux; manquer à la justesse des in-
tonations.
DEUX-QUATRE ou DEUX-QUARTS. Mesure à deux temps qui
renferme la valeur de deux noires, et qui est marquée près de la
c/e/(v(iy. ce mot) par cesigne .
D1AGKAM_ME des sous. Etendue générale des sons du système des
Grecs.
DIAPASON'. Nom grec de roctave. On appelle aussi de ce nom
l'étendue d'une voix ou d'un instrument.
DlATASOS est enfin le nom d'un petit instrument d'acier qui donne
le sou fixe d'après lequel on accorde tous les autres iustrnmcns.
Lediap.ison s'appelle C(;/ï>/a en italien. Eu France, le diapason
sonne le la ; en Ilalie il sonne Vut.
DIAPHONIE , s. f. Sorte d'harmonie corajjosée de quartes ou de
quintes et d'octaves, qui était en usage dès le dixième siècle, et
dont les successions étaient fort dures.
DIATONIQUE, adj. Mot tiré du grec et qui signifie pa»- «on^. Ce
mot avait une signification juste dans la musiijue des Grecs, parce
que ce peuple avait un genre de musique qui ne j>rocédait que
par des intervalles de tons; mais il est vide de sens dans ia mu-
sique moderne, parce que l'éclielle naturelle des tons de cette
musique renferme des intervalles de demi-tons. Kous ne possé-
dons point de véritable gamme ni de genre diatoniques,
DIAULE. Flûte double des Grecs, appelée ainsi par opposition à
ptonaul , qui était la ilîite simple.
i
DE MUSIQUE. 327
DICORDE, s. m. Instrument des peuples de l'antiqnîtc, particu-
lièrement des Égyptiens. II aviiit la forme d'un lutli aplati aveu
un long manilie , et il était monté de deux l'ordes.
DIESE, s. m. Signe qui est f.iit d.ins cette forme tt, et qui , ctaat
placé à la gam-lie d'une note , indique lu nécessité d'élever l'into-
nation de cette note d'un dcrai-ton.
DIESIS était dans le système théorique de la musique des anciens
un petit intervalle que nous appelons comma. Cet intervalle ré-
sultait de la différence de deux sons approximatifs comme ré L
et ut ji; ses proportions se déterminent par 128 : 125 (voy Comma)-
PJJjETTAIVTE. Amateur de musique; ce mot a passé de la langue
italienne dans la française.
DIMINUÉ , adj. Se dit d'un intervalle de deux sons qui n'est
point conforme à la constitution d'un ton; ainsi on appelle tierce
diminuée une tierce composée de u< <lièse et de re Ijémol, parce
qu'il n'est aucun ton dans lequel on puisse trouver à la fuis des
dièses et des bémols. Un intervalle de celte nature n'est qu'une
altération momentanée d'un intervalle naturel.
DIMINUENDO, en diminuant. Mot italien qu'on emploie pour in-
diquer Mlle dimirtution graduée du son, dans l'exécution di\ son.
DIMINUTION, s. f. Synonyme de variations d.ins les dix-septième
et dix-liuitième siècles. Ou appelait aussi quelquefois doubles
les diminutions, ce qui semblait impliquer contradiction.
DIRECT, adj. (voy. accord et IHout'cmen').
DIS. Nom allemand de ré dièse.
DISCANT. Nom anglais de la voix de soprano dans la musique
d'église. Ce nom vient du latin discanlus (douljle chant), parce
que le chant éti.if ordinairement au tcnor dans l'ancien contre-
point, tandis que le double chant ou l'accompagnement était
au-dessus. Dans la musique ordiuaLie les Anglais appellent ireA/a
la voix de soprano.
DISCORD, adj. Se dit d'un instrument à cordes qui n'est pas
d'accord.
DISCORDANT, adj. Qui choque l'oreille par des sons faux ou
par un défaut d'accord dans l'harmonie.
DISJOINT, adj Intervalle où les sons ne se touchent pas, comme
la tierce, la quarte, etc.
DISSONANt^.E , s. f. Réunion de deux sons rjui ne s'accordent pas
d'une manière parfaite et qui ne pgyt §f r^jp qi4e de passage à
328 DICTIONNAIRE
une eonsonnance, c'est-à-dire uue réuuiou de sons plus agréables
à l'oreille. Les dissouauccs sout la seconde, la septième, et la
neuvième de plusieurs espèces.
DISSO^AKT (voy. Accord, Intervalle).
DITALE-HARPE (voy. Harpe).
BITTANKLASIS. jN'om donné par le mécanicien Muller, de Vienne,
à on clavecin inventé par lui en iSoo. Cet instrument était com-
posé de deux claviers dont les cordes étaient accordées à l'oc-
tave l'une de l'autre. Il s'y trouvait en outre une lyre avec des
cordes de Ijov.tux.
D1VERTISSEME>T, s. m. P.irtie de la/ug-ue qu'on désigne aussi
quelquefois sous le nom d\'pisode (voy. le cli. xii).
Divertissement. Sorte de pièce de musique instrumentale qui a
eu de la vogue depuis 1790 jusqu'en 1810 environ. Elle con-
sistait en un genre facile el léger, et quelquefois eu un mélange
de différens thèmes variés.
DlVERTissEME>-T. On donne quelquefois ce nom à de petits inter-
mèdes, composés de danse et de musique, qui terminent des
représentations dramatiques.
DIXIÈME, s. f. Octave de la tierce.
DIX-SEPTIÈME , s. f. Double octave de la tierce.
DO. Nom substitué, en Italie, dans le dix-septième siècle à celui
d'ut, pour la désignation de la première note de la gamme, dans
la solmisation.
DOIGTER, V. n. Diriger les doigts sur les instruraens par de cer-
taines règles qui ont pour but de faciliter l'égalité et la rapidité
de l'exécutioi).
DOIGTER. Verbe pris suljstantivement pour indiquer le résultat
du mécanisme des doigts sur les instrumcns. On dit : Ce doigter
ne faut rien; Kalkbrenner possède le meilleur doigter sur le piano.
Quelquefois on écrit duigié au lieu de doigter.
DOLCE (par abréviation dol).Ce mot italien écrit dans la musique
indique un mode d'exécution doux et suave.
DOMINANTE, s. f. Cinquième note de la gamme d'un ton; dan»
le ton d'ut, sol est la dominante. On donne le nom de domi-
nante à celte note parce qu'elle se trouve dans la plupart des
accords naturels.
DoMrNA::<TE. D.ins le plain-cbant la dominante est la note qui se
fuit entendre le plus souvent.
I>K MlJSIyLK. 329
DOQÎJJîT ou TOQUi-T, s. m. Nom de lit trompette qui fait la par-
tie grave dans les fanfares harmoniques de cavalerie.
DOUBLE, s. m. On donnait autrefois ce nom aux variations d'un
thème.
Double est aussi le nom des chanteurs qui, daus les grands théâ-
tres, remplacent les premiers acteurs dans leurs rûles.
DOUBLE-BASSE, s. f. Nom qu'on donnait autrefois à la contre-
basse en France. Cette expression est encore en usage en An-
gleterre.
DOUBLE- BEMOL. Signe par lequel on indique rabaissement
d'une note à un ton au-dessous de son intonation naturelle. Le
(loui)le-bcmol se ligure ainsi : UL.
DOUBLE- CORDE. Manière de jouer deux cordes à la fois sur le
violon, la viole et le violoncelle. La plus grande difficulté de la
double-corde <onsiste à jouer avec justesse.
D{.)UBLE-CROCHE, s. f. Figure de note qui représente un son
d'une durée égale au seizième delà ronde. Ce nom, qui vient du
double crochet qui termine la queue de la note, donne une idée
fausse de la durée de la note , qui n'est qu'une demi-croche (voy.
le (h. VI. )
DOUBLE-DIESE. Signe qui sert à indiquer la nécessité d'élever
d'un ton l'intonation d'une note. Le double dièse est fait ainsi :
DOUBLE-FUGUE. IVom mal approprié par quelques auteurs, et
surtout par les Allemands, à une sorte de fugue à deux sujets
(voy. le ch. xti).
DOUBLE-NOTE. Note douljlée à l'unisson sur deux cordes d'un
violon, d'uue viole ou d'uue basse. On l'indique par une note à
laquelle on met deux queues, l'une tournée vers le haut, l'autre
vers le bas du papier.
DOUBLETTE, s. f. Jeu d'orgue aigu, à bon<he, qui sonne l'oc-
tave da preslant (voy. ce mot) , et dont le tuyau le plus long n'a
qu'un pied de long.
DOUZIÈME , s. f. Octave delà quinte.
DUO, s. m. Composition pour deux parties concertantes vocales
ou instrumentales. Le duo instrumental est toujours pour deux
instrumeus seuls; le duo vocal est souvent accompagné par un
orchestre, un piano, etc. Eu italien, ou dit duelto.
a8.
SSÇ DICTIONNAIRE
DTJLCIAN, t. m. Ancien nom du basson (voy. ce mot), dans les
quinzième, seizième et dix-septième siècles.
DuLCiAJt est aussi le nom d'un jeu d'orgue à anche, qui n'est d'u-
sage qu'en Allemagne. Il ressemble au jeu du basson des orgues
françaises,
DUR, adj. Se dit d'un accord ou d'une harmonie qui blesse l'o-
reille.
Daa est qussi le nom ])ar lequel on désigne en Alleiqagne les tons
majeurs. Ainsi le ton de ro majeur s'appelle D dur.
DUTKA, s. f. Double flûte des paysans russes, composée de deux
rospaux d'inégale longueur, percés chacun de trois trous.
E LA FA. Ancienne dénomination du mi [>, dans la solmisation.
£ SI Ml. Ancien nom delà troisième note de la gampie, appelée
aujourd'hui simplement mi. £n Italie on raj)pelait £ la mi.
F-CHELLE, s. f. ISom qu'on donne en général au système des sons
de la musique des divers peuples. Plus particulièrement on ap-
pelle aussi échelle la gamme des sept sons, ul, rè, mi, fa, sol, la,
si (voy. Gamme^. Ce nom d'échelle vient de la position graduée
des notes sur la jjortée (voy. Portée j ; il répond au diagrame des
Grecs.
ECHO, s. m. Réflexion du son ])ar un corps dur, et qui se répète
à l'oreille après avoir été déjà entendu. Les angles par lesquels
le son est renvoyé sont égaux à ceux de la lumière lorsqu'il
fra|)pe une surface plane et polie. On donne aussi le nom d'tcAo
au lieu où l'effet se fait entendre. Il y a des dispositions de lieux
telles que le son et même des phrases entières sont répétées.
Dans un endroit nommé la Simonelte , à deux milles de Milan , il
y a un écho qui répète jusqu'à vingt fois.
Les effets de l'écho s'emploient quelquefois avec avantage dans
la musique. 11 y a un double trio de Haydn composé tout entier
dans ce but.
Ecfio est aussi un jeu d'orgue, ou plutôt un petit orgue particu-
lier , qui se joint 9{i\ grands ipstrumeus de pelte espèce , e\. pour
lequel ij y a un clavier particulier.
DE MUSIQUE. 331
ECLTSSES, s. f. plar. Planches minces et courbées, qui forment
l'épaisseur des violons, des violes, des liasses, etc. , et sur les-
quelles reposent lu laMeet le fond de ces instrumens.
ECOLES, s. f. INoiii par lequel on désigne les divers systèmes de
composition, et certains peni'lians qui se manifestent dans les
produits de l'art. U y a des écoles générales telles que l'école ita-
lienne, l'école allemande et l'école fraiic:iise; puis des écoles
particulières dé certains maîtres, coqipie l'école de Palestrina,
l'école de Durante, etc.
EFFET. L'effet eu musique est le résultat des inspirations du gé-
nie et des combinaisons de l'art. Les effets particuliers sont le
produit de certains systèmes, de certaines formes; ils varientse-
lon les temps et les caprices de la mode.
EFFORT, s. m. Défaut qui se manifeste dans l'émission de la voix
chez certains chanteurs. Quelquefois ce défaut résulte de la mau-
vaise direction donnée aux études de vocalisation; mais souvent
il est causé par la nature ingrate de l'organe vocal.
ELODICON, s. m. Instrument inventé il y a environ quinze ans,
par M. Escheuhach, et fabriqué par M. Voigt, facteur d'instru-
mens à Scliweinfurt. Le principe de cet instrument consistait à
faire vibrer non les cordes tendues , mais des lames métalliques ,
au moyen d'un soufflet artificiel. On y avait réuni les effets du
clavicorde avec ceux de l'orgue. C'est le même principe de vi-
brations de lames métalliques, par l'action de l'air, qu'on a re-
produit de|)uis lors dans plusieurs autres instrumens.
EMBOUCHURE, s. f. Là par où l'on introduit le souffle dans les
iusfrumens à vent. L'cmboui.-Iiure de la flûte est un trou percé
latéralement dans l'instrument. L'embouchure du cor est coni-
que; celle t)e 1» trompette, du trombone, du serpenta la forme
d'un entonnoir; celle de la clarinette est un bec armé d'une an-
che ; le hautbois, le cor anglais et le basson n'ont qu'une anche
double pour embuucbure.
Embouchure se dit aussi de la disposition naturelle des lèvres de
l'exécutant pour jouer de son instrument; ainsi l'on dit que tel
flûtiste a une bonne ou une mauvaise embouchure.
EKHARMOIV'IE, s. f. L'enharmonie, dans la musique moderne,
consMte dans )e change.Tient de desfination d'un accord par le
changement d'une ou de plusieurs notes d'une dénomination
dans une autre, ç^^ppgentent qui déte^'iuine tiQP o^utatioa .d$
332 DICTIOSNAIRE
gamme. Par exemple, si nn trait mélodiqne semble appartenir
au ton de sol par fa dièse, et si ce fa ^ est changé en sol bé-
mol par l'harmonie dont il est accoiuiiagné, ce sol bémol de-
viendra le quatrième degré du ton de ré bémol , et il y aura en-
harmonie dans ce changement. Il est au reste à remarquer que
ce mot a été transporté de la musique des Grecs dans la musi-
que moderne sans application juste.
ENSEMBLE, adv. Aller ensemble dans l'exécution de la musique,
c'est régler convenablement le mouvement, le rhythme et les
nuances de fort et de doux de toutes les parties. Ce mot est pris
quelquefois su'ostanlivement, et l'on dit: Il j- aeude l'ensemble
dans cemorce.u, ce quatuor a manqué d'ensemble.
EA'SEMBLE (MORCEAU D'). On appelle ainsi les morceaux de
musique vocale et dramatique dans lesquels il y a plus d'une ou
deux voix, tels que les trios, quatuors, quintettes , etc. (voy. tous
ces mots). Les chœurs sont aussi des morceaux d'ensemble ; ce-
]>eiidant on les désigne en général par leur nom spécial.
ENTONNER, V. a. Signifie à la lettre prendre le ton, saisir l'inlo-
nation. Cette dernière locution est plus habituelle et l'on dit :
Celte in'onation est difficile à saisir, aa lieu de dire: Celle note est
difficile à entonner.
EsTOXXER ne se dit guère que pour le prêtre ou le chantre qui
donue le ton d'un psaume , du Magnificat , du Te Deum ou de
quelque autre pièce de plainchant. On dit aussi entonner un
refrain de chanson.
ENTR'ACTE, s. m. Morceau de musique instrumentale qui se
joue dans l'intervalle de deux actes d'un opéra, d'une tragédie ,
d"un ballet, etc.
ENTREE, s. f. Commencement de chaque partie dans un mor-
ceau de musique, après un repos ou dans les répercussions
d'une figure (voy. Bépercussion). C'est en ce sens qu'on dit : La
flûte a manqué son entrée ; les basses n'ont pas bien attaqué leur
entrée.
EtîtrÉe se dit aussi des parties d'un ballet qu'on désigne sous le
nom de scènes dans un opéra. Cepend.iut ce nom a vieilli, et l'on
donne aujourd'hui le nom de scène aux entrées de ballet.
ÉPIGONE. Instrument de musique des Grecs, qu'on croit avoir
été monté de quarante cordes.
£l?OEHE, s. f. Instrumenta clavier et à cordes pincées par des
DE MUSIQUE. 333
morceaux de plume, qui fut en usage vers la fin du seizième
siècle (voy. le ch. xv ).
ÉPISODE , s. m. Partie de la fugue qu'on appelle aussi quelque-
fois «/(«'er/iwe/nent (voy. le cl). XII ).
ESI'ACE , s. m. lutervalle qui se trouve entre les lignes de la por-
tée où l'on écrit de la musique (voy. Portée. — Voy. le ch.
r.SPRESSIVO. Mot italien qu'on écrit dans la musique, et qui in-
dique qu'il faut jouer ou chanter avec expression.
KTEISDUiî, s. f. Se dit de la distance plus ou moins considérable
qu'il y a entre le son le plus grave et le plus aigu d'un instru-
ment ou (l'une voix.
KTOUFFOIR, s. m. Appareil raécaniijue destiné à arrêter à pro-
pos les vibrations des cordes dans les instrumens à clavier (voy.
le cL. xv).
E rUDES, s. f. plur. Pièces de musique destinées à faciliter le mé-
canisme de la voix ou du jeu des iustrnmens. Les compositeurs
donnent à ces pièces un caractère mélodique afin d'éviter le dé-
goût du travail. Les études pour la voix s'appellent particulière-
ment vocalises (voy. ce mot).
ELPH03SE, s. m. Instrumenta frottement du genre de Vhurmonica
(voy. ce mot), inventé par le docteur Cliladui,a VNittemberg,
en 1790. Il consistait en une caisse carrée d'environ trois pieds
et haute de huit pouces, qui contenait 42 petits cylindres de
verre donl le frottement, et par suite la vibration, s'opérait par
un mécanisme intérieur.
EVITEE (voy. Cadence].
EXÉCUTANT, part, pris substantivement. Musicieu qui joue ou
«hante de la musique.
EXÉCUTER, V. ac. Jouer ou chanter de la musique écrite par un
compositeur.
EXECUTION, s. f. Action de jouer ou de chanter de la musique
(voy. la troisième section, ch. xvm et xix ).
EXERCICES, s. m. plur. Recueils de traits difficiles destinés à l'é-
tude du chant ou du jeu des insti umens. Les exercices diffèrent
en général des études en ce qu'ils ne sont point arrangés dans
une forme de pièce plus ou moins mélodique.
EXPRESSIF, IVE, adj. Caractère pas>ionué de la musique, sui-
vant de certaines nuances.
334 DICTIOITNA.IRE
EXPRESSION , ». f. Qualité par laquelle le innsicleB émeat cenx
qui l'écoutent (voy. ch. xviir et xix ).
EXTENSION, s. f. Faculté relative d'allonger les doigts sur le
manche ou sur le clavier des iostruraens pour y saisir de grands
intervalles. L'exercice développe cette faculté.
F. Cette lettre placée sons un trait , dans la musique , signifie/orfe ,
fort. Deux FF indiquent l'excès de la force, fortissimo.
F. Placée à la tète de la portée dans la musique du moyen-âge ,
était le signe de la clef deya.
F est le signe de la quatrième note de la gamme d'ut. On disait
autrefois, en France, F ul fa, pour désigner cette note; dans
l'ancienne solmisation italienne, on disait F /a ut.
FA. Nom de la quatrième note de la gamme d'u<.
FACTEUR d'orgues, de pianos, de harpes, ou d'instrumens à
vent. On donne ce nom k l'artiste qui construit ces instrumens.
Le facteur d'orgues faljriqiie quelquefois des ])ianos; néanmoins
la fabrication de ces instrumens exige des connaissances diffé-
rentes et des travaux qui n'ont point d'analogie. La coustruc-
tion de la harpe est aussi un art spécial. Les facteurs d'instru-
mens de cuivre font les cors, les trompettes , les trombones, les
ophic léides, etc.; les facteurs d'instrumens à vent en bois font les
flûtes, les hautbois, les clarinettes, les flageolets et les bsssons.
FACTUPiE, s. f. Manière plus ou moins scientifique d'écrire la
musique; par facture on entend plutôt la ])artie harmonique de
la musique que la mélodique. On dit: Ce morceau est d'une bonne
facture; la facture de celte sj-mphonie est médiocre. En général ce
mot ne s'applique qu'aux compositions d'une certaine impor-
tance.
FAGOTTO , s. m. Nom italien du basson (voy. ce mot).
FAIBLE, adj. (voy. Temps).
FAIRE DE LA MUSIQUE peut se dire et de l'acte de la compo-
sition, et de celui d'exécuter de la musique écrite; cependant
l'opération du compositeur se désigne plutôt par com^joier ou
écrire de la musique. Ainsi , quand on dit ; Nous feront de la mu'
DE MUSIQIJK. 335
siquc ce soir, cette phrase s'enteiiil dans le sens de l'exécution.
FANDANGO, s. m. Ancien ;iir de d.inse à trois temps d'un mouve-
ment animé, originaire de l'Espagne où il est eni;ore en usage.
On le danse en jouant des castagneHes {voj. ce mot).
FANFARE, s. f. Air militaire qui est exécuté par plusieurs trom-
pettes, ou par une coraliinaison de trompettes, de cors, de
trombones et d'opliicléides (v. tous ces noms). On produit des
effets agréïbles et des modulations varices dans ces sortes de
morceaux, au moyen d'instrumens en difféiens tons.
On joue aussi des fanfares avec les trompettes de chasse.
FANTAIS'E, s. f. Pièce de musique dont l'origine date du seizième
siècle. Ce fut d'abord une composition où, suivant le titre, le
compositeur s'abandonn.iit aux caprices de son iinaginatiou.
C'est ainsi que la fantaisie fut comprise par les grands musiciens
allemands, jusqu'à Mozart; mais depuis environ vingt ans, rieu
n'est moins libre que la fantaisie; on ne la fait plus que sur un
modèle donné qui est toujours le même, et dans lequel l'ima-
gination n'est pour rieu. Elle a toujours pour thème quelque air
d'opéra dont le motif est varié.
FANTASTIQUE. Ce mot s'est glissé jusque dans la musique. La
musique fantastique est composée d'effets d''instrumentation .sans
dessin mélodique et avec une harmonie incorrecte.
FARANDOULE , s. f. Air de danse d'un mouvement vif à six-huit,
sur lequel un grand nombre de personnes dansent en se tenant
par la main, ou avec des mouchoirs et en faisant diverses figures.
FARCE EN MUSIQUE. Sorte d'opéra plus gai e. moins raisonna-
ble que l'opéra bouffe, en usage eu Italie.
FAUSSE QUINTE, s. f. Expression inexacte par laquelle on dési-
gnait autrefois la quinte mineure (voy. Quinte diminuée et Quinte
mineuie).
FAUSSE RELATION. Relation de deux notes qui se font enten-
dre successivement dans des parties diff-érentes, comme le dessus
et la basse, et qui donnent la sensation de deux tons sans ana-
logie; par exemple, ut dièse et ut jiécarre.
FAUSSET ou FAUCET, s. m. Voix sur-laryngienne ajipelée plus
exactement voix de tête. Ce genre de voix n'existe guère que
chez les hommes et particulièrement chez les ténors.
FAUX, adj et adv. Intonation qui n'est pas juste à l'égard des
autres sons. Chanter faux, c'est chanter ou trop haut ou trop
336 DICTIOKNAIRE
bas, et ne pas s'accorder avec d'autres voix ou avec le» instru»
mens qui accompagnent.
Oa a mis souvent en question s'il y a des voix fausses ou si l'on
nechantefaux que par suite d'un défaut dans l'orgnisation de l'o-
reille; il y a lieu de croire que ces deux causes exercent de l'in-
fluence sur la justesse dans le chant; on a vu des voix justes se
fausser après un exercice trop violent ou trop prolongé.
FAUX-BOURDON, s. m. Contrepoint sur le plain-chant à trois ou
quatre parties, et à notes contre notes dont on f:iit usage aux
fêtes solennelles dans quelques églises de France et d'Italie.
FF.PM.VTA, s. f. Mot italien synonyme de comune ,\orona et de
pauta gtneralt, et qui signifie un arrêt dans la mesure.
FIFRE, s. ra. Petit instrument à veut, du genre de la flûte et d'un
son perçant. Il fut inventé en Suisse et était déjà en usage parmi
les soldats dans la première partie du seizième siècle, à la b;i-
taille de Marignan.
FIGURE, s. f. Grou])e de notes qui forme un certain dessin. C'est
delà qu'on a appelé f^oH/ _/î^uie et musique figurée tout ce (pii
n'est pas du ])lain-cliant.
FIGURE, adj. (voy. Conlrepoint).
FILER UiV SON. C'est le poser doucement avec la voix, puis
l'enfler peu à peu et après qu'il a acquis le plus grand degré de
force, et le diminuer de la même manière.
FIN.\.LE,s m. Note par laquelle se termine une antienne, une
hymne, ou une autie pièce de plain-chant.
Finale, s. m. Morceau d'ensemble très développé qui termine
un acte d'opéra. Un finale renferme quelquefois des airs, des
duos, des trios, ou quatuors, ou quintettes et des chœurs.
FIORITURES, s. m. plur. Mot italien francisé qui signifie ornemens
du chant.
FLAGEOLET, s. ra. Sorte de flùtc à bec, percée de six trous et
armée de clefs (voy. le oh. xix).
Flageolet. Jeu d'orgue très aigu dont les tuyaux à bouche sont
composés d'étain, de zinc et de plomb. Le tuyau le plus long n'a
que six pouces.
Flageolet (Jlagiolctto) se dit aussi, en Italie, du jeu en sons har-
moniques sur le violon.
FLAUTINO, s. m. Mot italien qui sigaiCie petite fût*. Cette flùie
DE MUSIQUE. 337
sonne l'octive delà flûte ordinaire (voy. Oitave, Petit» flûte, -Pic-
colai).
FLEBILE. Adjectif italien qui se joint quehfiiefois à l'indication
d'un mouvement; il signifie plaintif, ^«(/an^e yZcii/e , andanto
plaintif.
FLOTTA , s. f. Nom d'un chœur chanté autrefois par un grand
nofulire d'élèves des conservatoires de N.iples à la procession
de saint Janvier.
FLOT POLE. Sorte de cantique d'une mélodie douce, que les élè-
ves des conservatoires de Venise chantaient dans les processions
des saints.
FLUTE, s. f. Instrumenta vent dont les formes ont été très va-
riées depuis l'antiquité jusqu'aujourd'hui (voy. le ch. xix ).
Il y a en des flûtes simples, doubles, égales, inégales, à bec,
à une embouchure latérale, etc. Les flûtes sont faites en l)ois,
en cristal , en porcelaine , eto.
FLUTES. Plusieurs jeux d'orgues portent ce nom. Il y a âesjlùtes
ouvertes, bouchées, coniques , à cheminée; elles diffèrent autant
par la qualité du son que parla forme.
FLUTE, EE, adj. On dit: un son flùlé , une voix flùtèe , pour indi-
quer que ce son ou cette voix ont la douceur de la flûte.
FLUTET, s. m. (voy. Galoubet).
FOGLIETTO , s. m. On appelle de ce nom , en It^ilie , la partie de
premier violon qui contient les solos et les rentrées des autres
parties de l'orchestre; celte partie est une espèce de partition
obligée.
FOLIES, s. f. plur. Air qui se dansait autrefois en Espagne avec
des castagnettes du même nom. Cet air est à trois temps,
d'un mouvement modéré et d'une mélodie simple; il est connu,
en France, sous le nom de Folies d'Espasne.
FOlSDAMElS'TAL, adj. Qui est la hase de Tharraonie. On appelle
son fondamental le son le plus grave de l'accord parfait ou de l'oc-
cord de septième {voy. Accoid). Un acccord fondamental est celui
dont les autres dérivent par renversement (voy. Dérivé et Renver-
sement. Voy. aussi le ch. x ).
FORCE, s. f. {\oy. Intensité).
FORCER LA VOIX. Pousser les sons avec effort; sortir de son
étendue naturelle; crier. Ce défaut prive l'organe vocal de sa
flouceur et de sa justesse.
=9
338 DICTiONlTAlRE
FORLA.NE , s. f . Danse gaie et vive du Frioul , daus l'État véni-
tien , dont l'air est iiiiix-kuit.
FORT, adj. (voy. Temps).
FORT, TE, adj. pris substantivement comme synonyme d'habile.
On dit: Ce violoniste est fort; cette dame est forte sur le piano,
FORT BIEN, s. m. Nom d'une sorte de piano inventé, en 1758, à
Gira , par un facteur d'instrumens nommé Federici.
FORTE, adv. italien (prononcez /orte) , /ort. Nuance d'intensité
dans l'exécution delà musique. On l'indique par une F dans la
mnsique.
FORTE-PIANO, s. m. Ancien nom de l'instrument qu'on appelle
aujourd'hui /);ono (voy. ce mot).
FORTISSIMO. Superlatif de forte , très fort. On l'indique par FF.
dans la musique.
FOURCHETTE , s. f. Partie du mécanisme de la harpe, inventé par
Séb.istien Erard, pour élever les cordes d'un demi-ton (voy. le
ch. XV ).
FOURNITURE, ». f. Jeu d'orgue qui entre dans la composition du
plein-jeu et qui est composé de plusieurs tuyaux d'un son
aigu, accordés à la quinte, à l'oi tave de la tierce, et à 1^ double
octave du son principal , avec des redoublemens.
FRAGMENS. On appelait ainsi à l'ancien Opéra de Paris nn choix
de plusieurs actes de ballets ou d'opéras, qui n'avaient point de
rapport l'un avec l'autre, mais qui formaient un spectacle varié,
d'une durée ordinaire. Il y avait aussi des fragment composés
exprès.
FREDONS, s. m. plur. Ornemens de l'ancien chant français. Ce
mot ne se prend que dans un sens ridicule.
FREDONNER, V. ac. Chauter à voix basse et entre les dents quel-
que passage d'air ou de clianson.
FUGUE, s. f. Morceau de musique établi sur une phrase donnée,
qui passe alternativement dans tontes les parties, par une imita-
tion périodique (voy. le ch. xil ).
FUGUÉ, adj. (en italien /ug-ofo). Qui est dans le style delà fugue.
he contrepoint fugué est un contrepoint par imitation (voy. le
ch. xii).
FUSA , s. f. Ancien nom italien de la croche (voy. Croche).
FUSÉE, s. f. Trait rapide en montdui: ou descendant. Ce mot était
en usage dans l'ancienne musique française ; on ne »'en lert plus
aujourd'hui.
DE MUSIQUE. 339
G
G. Cette lettre est le signe par lequel on désigne en(;nre la cîn-
quic'ine note de la gamine d'ut, dans la solmisation allemande et
anglaise.
G RE SOL. Ancien nom àesol , dans la solmisation française; les
Italiens disaient : G sol ré , ou G sol ré ut.
GALIARDE, s. f. Ancien air de danse d'un mouvement animé eu
mesure ternaire. Il se jouait dans les seizième et dix-septième
siècles, après la Pavane et autres danses lentes.
GALOUBET ou FLUTET, s. m. Sorte de flûte à bec en usage dans
la Provence, et nui, étant accompagnée du tamljourin, sert à faire
danser les paysans. Ses sous sont aigus. Il n'est percé que de
trois trous et on le joue d'une seule main Celui qui enjoué, bat
de l'autre m.iin, avec une baguette , sur le tambourin, long tam-
bour qui fait peu de bruit.
GAMME, s. f. On appelle de ce nom la série des sons de la musi-
que européenne, qui est disposée de telle sorte qu'il y a un ton
entre la jjremière note et la seconde, un ton entre la seconde et
la troisième, un demi-tou entre celle-ci et la quatrième, un ton
entre la quatrième et la cinquième, un autre ton entre ceile-ci
et la sixième, enfin ni} ton entre la sixième et la septième, et un
demi-ton entre la sej>ticme et la huitième, a]îrès quoi la série
recommence dans le mêine ordre, une octave plus haut et de
même jusqu'aux sons les plus aigus.
Le nom de gamme vient de ce que l'on représentait autrefois
la note la plus grave de l'écbelle des sous par la troisième lettre
de ]'al|)l)al?et grec appelée gamma. On attribue l'usage du gam-
ma, et le nom àe gamme, à un rnoine italien du onzième siècle,
nommé Gui d'Arez:,o; mais lui-même en parle comme de choses
connues avant lui (voy. iTeracortie. Yoy. aussi lech. iv, intitulé:
De la différence des gammes).
GAVOTTE, s. f. Air de danse en mesure à temps binaires et d'un
mouvement modéré. La gavotte n'est plus en usage que dans les
ballets.
GENRES, formules de successions harmoniques et mélodiques.
Les Gi'ecs avaient trois genres: i° Le rftatonijue, dans leque)
3-10 UXCTIOMNAIRE
tous le5 S0D5 étaient à la distance d'un ton, suiraut lu sigai£ea-
tiou exacte du mot diatonique; 2° le chromatique où l'on ein-
jilovait des demi-tons et quelquefois des quarts de tons; 3° Fcn-
hannonique , dont_ nous n'avons qu'une idée imparfaite et sur
lequel les écrivains grecs eux-mêmes ne sont pas d'accord. Ces
expressions, transportées d^rns la musique moderne, «ont ou in-
signifiantes ou complètement fausses. Ainsi nous n'avons point
de gamme diatonique puisqu'on y trouve des demi-tons ; les
mots chromatique et enharmonique n'expriment rien dans notre
langage musical, ^ous n'avons pas de genre d'ailleurs propre-
ment dit, dans notre musique, car ils y sout tous mêlés.
(ilGUE, s. f. Air de danse d'un mouvement vif à mesure bioaire
et à division ternaire. Le mouvement de cet air a été employé
])ar un grand nombre de compositeurs du dix-septième et du
(!ix-liuitième siècle, dans leurs pièces instrumertales.
GlUSTO (TEMPO). Expression italienne dont on se sert pour in-
diquer un mouvement qui n'est ni trop vif ni trop lent.
('■LOTTE, s. f. Embouchure des instrumens à vent chez les
Grecs.
Glotte, s. f. Partie charnue de l'organe de la voix dont les mou-
vemens contribuent à l'articulation des sons.
GORGHEGGIO. Mot italien par lequel on désigne un passage ra-
pide exécuté avec la voix. Ce mot est en usage partout.
GRADUEL, ». m. Chant qui se récite dans l'office solennel de la
messe après l'épître. On appelle aussi g^raifue/ le livre de plain-
chant qui contient l'office du matin.
GRA>'D JEU ou GRAND CHOEUR. On appelle de ce nom une
pièce di)rgue qu'on exécute sur les claviers réunis du grand or-
gue et du positif avec les pédales, et dans lequel on réunit tous
les jeux d'anches, tel que les trompettes, ilairons, l>om-
bardes , chromornes, auxquels on joint quelquefois des jeux de
mutation, tels que les cornets et les nazards, et même, lorsque
la soufflerie fournit du vent en abondance, les jeux de fonds,
c'est-à-dire, les bourdons, flûtes et montres (voy. tous ces
mots).
GR.A.ÎV'D-OPERA, nom par lequel on désignait autrefois l'Opéra
de Paris, ])our le distinguer de V Opéra-Comique On dit main"
tenant YOpèra.
GRAVE, adj. Qualité des sons produit? par les instrumens de
Pt MlSIQl'E. 341
grandrs dimensions et par les voix de Lasse. Un io/i grave est
l'opposé d'un son aigu.
GR.WE (prononcer grave) , adv. italien, graTement. On le met à
la tête des morceaux de musique dont le mouvement doit être
très lent.
CPiAVEUR, sabst de deux genres. Artiste qui grare de la musi-
que sur des planches d'étain , en y imprimant des empreintes de
poinçons à coups de marteau.
OîIaVITÉ des sons. Intonation des cordes et des tuyaux de gran-
des dimensions ou des Toix de bdsse.
GHAVURE, s. f., de la musique. Art du graveur.
GRAVURES, s. f. plur. Rainures pratiquées dans le sommier de
l'orgue, pour la circulation du vent jusqu'à l'orifice inférieure
des tuyaux.
tjR-AZIOSO. Acj. italien qui signifie gracieux et qu'on met en
tête de certains morceaux de musique pour indiquer un carac-
tère d'exécution doux et agréable.
C-ROUPE, s. m., en italien grupetto. Ornement du chant composé
de trois on quatre noies de peu de valeur, et qui précède quel-
quefois l'attaque d'une autre note de durée jilus longue. 11 y
a différentes formes de groupes; le goût du cbanteur le dirige
dans l'emploi qu'il en fait.
GUDDOK. TSota d'un violon rustique à trois cordes , en nsage
parmi les paysans russes.
GUIDE ou GULDO!N , s. m. Signe qui se mettait autrefois an bout
de la portée sur le degré ou devait être placée la note de la por-
tée suivante, afin de faciliter la lecture de la musique. Ce signe
n'est plus en nsage.
GUITARE, s. f. Instrument à cordes avec un manclie sur lequel il
y a des cases marquées pour poser les doigts. Les cordes de cet
instrument se pincent avec la main droite. La guitare est mon-
tée de six cordes; on l'appelait ^iferne dans les quinzième et
seizième siècles (voy. le cb. xrx).
GUITARISTE, s m. Musicien qui joue de la guitare.
GUZLA, s. f Instrument champêtre des Morlacqnes sur lequel il
n y a qu une corde de crins tressés. Cet instrument sert a ac-
compagner les chants nationaux appelés /)iinie.
39.
342 DICTIONNAIRS
H
H. Lettre qui, dans la désignation des notes, indiqne en Allema-
gne le si bécarre.
HALALI , s. ni. Nom d'un air qui se joue sur les trompes de chasse
lorsque la bête se rend.
HARMOÎSICA, s. m. Instrument composé de cloches, de gobelets
de verre qu'on accorde au moyen de l'eau qu'on y verse avec
plus ou moins d'abondance, et dont on frotte les Ijords avec les
doigts pour les faire résonner, ou formé avec des cloches de
même matière, traversées par un axe mobile et qu'on met en
mouvement par nue péd.ile (voy. le ch. xv).
Harmokica. On appelle aussi de ce nom un instrument composé
d'uue éclielie chromatique plus ou moins étendue, de lames de
verre fixées par un bout, libres par l'autre, et qu'un frappe
avec de petites baguettes flexibles terminées par un morceau de
liège.
HARMONIE, s. f. Résultat de plusieurs sons entendus ensemble
et qui s'accordeat.
Harsiowie. Doctrine des accords ; système de leur classification
(voy. le ch. x). C'est en ce sens (ju'on dit: J'apprends l'harmo-
nie; on enseigne l'harmonie au Conservatoire,
Harmonie. Musique d'instrumeus à vent où l'on n'introduit pas
les instrumens de peri'ussion. C'est par ce nom qu'on distingue
ce genre de musique de la musique miliiaire (voy. ce mot) ; cepen-
dant les musiiieus confondent assez souvent ces deux choses.
HARMOiriE.Les facteurs d'orgue désignent par ce mot la qualité
propre du son de chaque jeu de cet instrument. Ils disent: Celle
flûte , ce hautbois, cette trompette sont d'une bonne harmonie, c'est-
à-dire d'une bonne qualité de son.
HARMONIEUX , adj. Ce qui a de l'harmonie. Cette musique est har-
monieuse, l'ensemble de ces voix est harmonieux.
HARMONIQUES. Sons qui résonnent faiblement à l'octave de la
quinte et à la double octave de la tierce d'un son grave lorsqu'on
fait vibrer avec force une corde de grande dimeasiDi) (voy. le
ch. jç ).
HARMONIQUES (SONS}, (voy. Sons harmoniques).
DE MUSIQUE. 343
HARMONISTE, s. des 2 g- Musicien qui sait la science de l'har-
monie.
HARPE, s. f. Instrument de grande dimension, monté de cordes
de boyaux, qu'on pince avec les deux mains pour en tirer des
sons (voy. le ch. xv).
Voy. aussi Colonne, Console, Cuvette, Fourchette, Pédale, Sabot.
HARPE-DITALE. Petite harpe d'une étendue de quatre octaves,
construite par M. Pfeiffer, à Paris. Le mécanisme des pédales de
la grande harpe est placé sous les doigts dans celle-ci.
HARPISTE, s. des 2 g. Musii-ien qui joue de la harpe.
Haut, adj. Sedit de l'intonation du son, et signifie élevé, aigu.
Cette femme a la voix haute est une locution dont on se sert pour
dire qu'elle a des sons aigus dans la voix. Chanter trop haut,
c'est chanter au-dessus du ton , chanter faux.
HAUTBOIS, s. m. Instrument à veut et à anche, percé de trous
et armé de clefs, qui tient une place importante dans l'orches-
tre (voy. le ch. xv).
Hautbois. Jeu d'anche de l'orgue qui se divise en deux parties ,
dont la supérieure s'appelle hautbois et l'inférieure basson. Les
f.icteurs d'orgues jjlaccnt ordinairement ces deux parties de
l'orgue sur deux registres diflérens , afin de pouvoir les réunir
ou les séparer à volonté.
HAUBOISTE, s. des deux genres. Musi<ien qui joue du hautl)ois.
HAUTE-COÎNTRE, s, f. Ancien nom français d'une voix de ténor
élevé, appelée en Italie lenore conlraltino. Ce genre de voix ne
se trouve communément en France qu'à Toulouse et dans ses
environs (voy. Contralto et Tenore).
HEX.\C'ORDE, s. m. Gamme du piain-chant composée de six no-
tes qu'on croit généralement avoir été inventée par un moine du
onzième sièile, nommé Gui d'Arezzo , mais qui n'a été mise en
usage qu'après lui (voy. Gamme, Muances et So/misation).
HUIT-PIEDS. Nom par lequel on désigne communément les or-
gues dont le tuyau le plus grand du jeu de flûte ouverte a huit
pieds de longueur. Le tuyau de huit pieds ouvert est censé son-
ner à l'unisson de la quatrième corde à vide du violoncelle;
mais ces proportions ne sont plus exactes depuis que le diapa-
son s'est élevé (voy Diapason).
HUIT PIEDS BOUCHÉ. Jeu d'orgue de l'espèce des flûtes , com-
posé de tuyaux à bouche fermés par leur extrémité. On donne
344 DICTI05KA1BK
aussi à ce jeu le nom de bourdon de seize (voy. Bourdon, Tujau ,
Orgues. Voy. aassi le ch. xv).
HYMNE, s. m. et f. Chant triomphal ou patriotique. En ce sens,
hjmne est du genre masculin. La MarseiHane est un hjrmne de la
révolution française. Hjrmne, chant d'église, est du genre féminin.
I
IMITATION, s. f. Phrase mélodique qui passe alternativement
d'un instrument ou d'une voix à un autre, et qui sert d'accom-
pagnement à d'autres phrases, au moyen de certains procédés de
l'art d'écrire. Il y a plusieurs sortes d'imitations dont on peut
voir l'iudicatien au ch. xii).
1511 TATIVE ( MUSIQUE ). La musique imitatùe est celle qui a
pour objet de produire des effets semblables ou analogues à
ceux qu'on remarque dans la nature , tels que le bruit de la
tem])ète, le mouvement des flots, relui d'une chasse, le galop
<les chevMux, etc. Ces sortes d'imitations sont fort imparfaites et
ne produisent guère que des effets de convention. Ce|)endant
elles sont quelquefois nécessaires.
r TPROVIS.^TION , s. f. Invention spontanée d'un morceau de
musique pendant qu'on joue d'un instrument. Il y a peu d'exem-
ples d'improvis.itions réelles; souventce qu'on donne comme
tel n'est que le remplissage d'un cadre préparé à l'av.mce, et
dans lequel on fait entrer beaucoup d'idées arrêtées. Ce n'est que
lorsque l'artiste n'a que lui pour auditoire qu'il improvise à la
lettre; alors, eu milieu de pensées vagues ou insignifiantes, il
s'en produit quelques-unes qui ont le caractère de l'inspira-
tion.
riPROVISER, V. n. Faire acte d'improvisation.
1 -GANNO, s. m. Met italien qui signifie tromperie. On l'emploie
dans la musique pour indiquer une modulation inattendue et
différente de celle que semblait indiquer la préparation (voy.
Cadence et Modulation).
INSTRUMENS. s. m. plur. Appareils deatinésà produiredes sonsà
l'imitation de la voix huiuaine, et a former des concerts par la
réunion de leurs timbres. On divise communément les instru-
mens eu quatre sections principales, savoir : i° Les instrnmeos
nR MUSIQUE. 345
à cordes; 2" idem à vent; 3» idem à percussion; 4° idem à frot-
tement et II corps métalliques ou vitreux. La classe des iiistru-
mens à cordes se subdivise en instrnmens h cordes pincées, à
archet et à clavier. Pnrmi les instrumens à vent on remarque
ceux du genre des flûtes à tuyaux, à bouche ou à bec, ceux qui
se jouent avec une anche ou languette vilirante, et ceux à em-
bouchure en cuivre. Les instrumens de percussion renferment
deux classes, les tambours ou instrumens à peaux tendues et les
timbres de diverses formes. Enfin les instrumens à frottement
sont les harmonicas, \e% fers harmonique! , les plaques , etc. Pour
plus de détails, voy. le chapitre xv.
INSTRUMENTAL, ALE. adj. Qui se rapporte aux instrumens.On
dit un concert instrumental , pour un concert où l'on n'entend que
des instrumens; on appelle composition instrumentale la musique
qui est écrite pour les instrumens. Quelquefois, par voie de cri-
tique, on appelle chant instrumental celui où le chanteur, abu-
sant de sa facile vocalisation, imite les traits des instrumens,
au lieu de conserver à son organe le caractère d'expression qui
est dans sa nature.
INSTRUMENTISTE, s. des 2 g. Musicien qui joue d'un ou de plu-
sieurs instrumens.
INTENSITE, s. f. Qualité énergique des sons; force de leur vibra-
tion.
INTERMEDE , s. m. Petite pièce mêlée de vers, de musique et de
danse qui se jouait autrefois entre les actes d'une tragédie, d'un
opéra sérieux ou d'une comédie de caractère. Le genre de
ces intermèdes était presque toujours gui ou bouffon. Eu Italie
on donnait autrefois le nom (Vinlemie^zo (intermède) à de ])etits
opéras tels que la Serva Padrona, de Pergolèse, bien qu'ils ne
fussent pas toujours joués dans les entr'actes des autres pièces;
on les ajjpelle aujourd'hui Aes farces. Les intermèdes sont passés
de mode en France.
INTERVALLE, s. m. Distance qui se trouve entre un sou et uu
autre.
INTERVALLE CONSONNANT. Relation de deux sons d'intona-
tions différeutes et agréables à l'oreille.
INTERVALLE DISSONANT. Relation de deux sons d'intonations
différentes, et qui affecte l'oreille du besoin d'entendre ensuite
un intervalle consonnant (voy. le ch. x ).
346 DICTIONNAIRE
INTERVALLE REDOUBLÉ. Distance plus grande que l'oetaTC
entre deux sons; la neuvième est un intervalle de seconde re-
doublée; la dixième est un intervalle de tierce, etc. (voy. le cb.
X).
INTERVALLE SIMPLE. Distance de deux sons renfermés dans
les limites de l'octave (voy. le cb. x ).
INTERVALLE RENVERSÉ (voy. Renversement).
INTRODUCTION, s. f. Commencement d'un opéra dans lequel
la musique n'est point interrompue, et qui renferme quelque-
fois plusieurs scènes et plusieurs morceaux. L'introduction est
au noraljre des formes les plus modernes de l'opéra; elle est
maintenant ol^ligatoire.
On appelle aussi inlioduction un mouvement lent et assez court
par lequel commenceut quelquefois une sympbonie, un qua-
tuor, une ouverture, et qui est immédiatement suivi d'un mou-
vement plus vif.
INVERSE (CONTREPOINT) est le nom d'une sorte de composi-
tion svstématique dans laquelle une ou plusieurs parties prennent
à rebours, c'est-à-dire en mouvement rétrograde, le« pbrases
que d'autres parties ont fait entendre dans un mouvement direct
(voy. Mouvement rétrograde. Voy. aussi le ch. xii).
INVERSE CONTRAIRE (CONTREPOINT ou IMITATION).
Contrepoint dans lequel une ou plusieurs parties prennent par
mouvement rétrograde et par mouvement contraire ce que
d'autres ont fait entendre par mouvement direct (voy. le cli. xii).
IRRÉGULIERS (TONS). C'eit dans le plain-cbant une antienne,
une hymne, ou toute autre pièce dont le cbant participe de plu-
sieurs tons à la fois (voy. Tom du plain-chani).
JEU, s. m. Manière déjouer d'un instrument. On dit : Le jeu de c e
violoniste est brillant.
Jeu, s. m. Collection de tuyaux d'orgues d'une certaine forme,
d'une certaine espèce, établie sur toutes les notes dont se com-
pose l'éclielle générale de l'in>trument. Un jeu de Jliie ouverte de
quatre piedi est un jeu dont le tuyau le plus grand a quatre pieds
HE MUSIQUE. 347
de liaiitcur; un jeu de liaiitbois est un jeu compose de tuyaux à
anches qui iuiitent le sou duhaulLois, eti: Ou distingue les jeux
de l'orgue ea jeux à^bouche , jeux d'anches et jeux\de mulaùon
(voy. le ch. xv ).
JEU CELESTE. Norn d'une pédale du piano qui fait avancer sonï
les cordes des morceaux de buffle pendant qu'une autre pédala
lève les étouffoirs (voy. Piano).
JOUER des instrumens, c'est eu tirer des sons de manière à satis»
faire plus ou moins l'oreille , et les coordonner daus un ordre
mélodique ou harmonique. On disait autrefois toucher du piano,
pincer de la harpe el de la guitare, donner du cor, sonner de la
trompette, etc. On dit maintenant^ouerde tous les instrumens.
JUSTE, adj. Une intonation est juste quand elle est dans un
rapport convenable avec les autres notes du ton et du mode (voy.
ces mots). Une octave est juste quand elle n'est point altérée par
un signe d'élévation ou d'abaissement accidentel.
JUSTE, adv. Jouer juste, chanter juste , c'est faire entendre dans
son jeu ou dans sou chaut des intonations d'une justesse conve-
nable.
K
Kyrie est un mot grec qui sert à invoquer le nom du Seigneur
au corameni émeut de la messe. Les compositeurs font quelque-
fois de longs morceaux, dans les messes eu musique, sur ces
mots seuls : Kjrie eleiion , Chrisie eleiion. Kyrie est le nom de ces
morceaux, et l'on dit : Un beau kjrrie, un long kjriel
LA. Sixième note de la gamme moderne et de la gamme du plain-
chant.
LAMENTABLE. Epithète qu'on donne quelquefois à la musique
triste et lugubre; elle se prend toujours en mauvaise part.
LARGHETTO. Mot italien qui sert à indiquer une nuance de lea-
348 DICTIO^NAIKK
leur plus prononcée que Vandante et moius lente que Yadagio
(voy. ces deux mots).
LARGO, large, adv. Le plus lent de tous les mouvemens de la
musique.
LARIGOT, s. m. Jeu d'orgue à bouche qui sonne !a quinte au-def-
sns de la doubhtle (voy. ce mot). Ce jeu est un des plus aigus de
l'orgue.
LEG.ATO, adj., lié. Mot italien qui s'emploie pour indiquer un
mode d'exécution dont tous les sons sont liés avec soin.
LE]NTO, adv. lenlemeni, indique un mouvement très lent dans la
musique.
LIAISON, s. f. Arc de cercle qu'on met entre deux notes de même
intonation, pour les lier l'une à l'nutrede manière à n'en faire
qu'une d'une durée égale à la valeur de toutes deux.
LiAiso:» est aussi unecouriie qu'on met au-dessus de plusieurs no-
tes d'intonations différentes pour qu'elles soient exécutées par un
seul coup d'archet ou par un seul coup de langue de manière à
être liées.
LICENCE, s. f. Incorrection qu'un compositeur se permet dans sa
manière d'écrire l'harmonie de la musique, et dans laquelle il
viole mf)mcntanément la règle de l'école et par suite celle de
l'oreille.
LIGATURE, s. f. Synonyme de haison (voy. Sjrneope).
LIGNE, s. f. Traits horizontaux qui composent la portée sur la-
quelle est écrite la musique. Ces lignes sont au nombre de
cinq dans la musique ordinaire et de quatre dans le plain-chant.
Le nombre de ces lignes a varié dans le moyen-âge; à la fin <lii
dix-septième siècle et au commencement du dix-huitième , la
portée était composée de huit lignes pour la musique d'orgue
et de clavecin.
LIVRE OUVERT. Lire à livre ouvert, o'est lire la musique avec fa-
cilité.
LOCO. Ce mot italien indique j après un passage marqué pour être
joué à une octave supérieure ou inférieure, le retour à la jjosi-
tion naturelle des notes.
LONGUE , s. f. Figure de note qui , dans l'ancienne notation, éfait
le signe d'une durée double de celle de la brève ou ronde (vov.
ces mots). Dans la mesure ternaire, la longue valait trois brèves.
I.OURE, s. f. Air de danse en mesure binaire à temps ternaire qui
DE MUSIQUE. 349
était autrefois en usage dans le midi delà Franc(\ Son ili\ tliine
avait de l'analogie avec celui de l'air appelé Sicilienne.
LUTH, s. m. Instrument originaire de l'Orient, oîi il est encore
connu sous le nom d''éoud. 11 était particulièrement en usage aux
seizième, dix-septième et dans la première moitié du dix-hui-
tième siècle. Son corps était arrondi comme celui de la mando-
line qui en est le diminutif, et la partie sui)érieure de son man-
che, qui était très large, était renversée. 11 était monté de vingt-
quatre rordes. Huit de ces cordes étaient placées en dehors du
manche et se pinçaient à vide pour faire les hasses ; les seize autres
étaient accordées par couples à l'unisson, et fournissaient huit
sons à vide. Dans les seizième et d'x-septième siècles, le luth était
l'instrument principal de toute musique de chambre ( voy. ces
mots ).
LUTHIER, s. m. On donnait autrefois ce nom à l'artiste qui cons-
truisait des luths et des iustruraens de la même espèce, tels
que Varchiluih, le ihéorbe et la mandoline. Par la suite, on a
étendu ce nom à tous les fabricans d'instiumens à archet, ou
même à ceux qui faisaient des guitares et des harpes. Dans quel-
ques villes de province on voit même des enseignes de luthier au-
dessus de la porte des fabricans d'instrumcns à veut.
LUTRIN, s. m. Pupitre de chœur sur lequel on place les livres de
plain-chant dans les églises c^itholiques.
LYRE, s. f. Nom générique des instrumens à cordes pincées de
l'antiquité, qu'on désignait par des noms particuliers, tels que
ceux de cjthaie, cheljs, de phorminx , etc. (voy. le ch. xv ). On
attribuait son invention à Mercure. Elle était composée d'un
corps sonore, surmonté de deux branches attachées par une
traverse à laquelle on fixait les cordes.
Lyre, s. f. On a donné ce nom à une variété de la guitare qui a
eu quelque vogue depuis 1795 jusqu'en 18 10. Cette guitare
avait en effet quelque analogie de forme avec la lyre antique,
et n'en différait que par le manche qui permettait de varier
les intonations de chaque corde. Cette forme était peu favorable
à la production du son ; c'est ce qui l'a fait abandonner.
LYRIQUE, adj. Expression qui s'appliquait autrefois à la poésie
destinée à être chantée avec l'accompagnement de la lyre. Au-
jourd'hui on ajjpelle poésie lyrique tout ce qui est destiné à
être piis en musique, bien que }a lyre soit oubliée. C'est ainsi
350 DICTIONHAÎRE
qu'on désigne aussi quelquefois un opéra sous le nom de drame
Ijrique, et qu'un tliéâtre où l'on représente des pièces en musi-
que s'appelle thcàtre Ijrique.
M
MADRIGAL, 3. m. Pièce composée pour les toÏx, sans accompa'
gnement, qui était fort en usage dès le coraraencement du sei-
zième siècle, et qui ne cessa d'être à la mode qu'après le triom-
phe de la musique dramatique. Les madrigaux étaient éi-rits pour
quatre, cinq, six ou sept voix, diins un style rempli de comljinai-
son» recherchées et d^imitalions (voy. (-e mot). Les compositeur.s
italiens et belges se sont surtout distingués dans la composition
des madrigaux; à l'époque où ce genre de musique était en vo-
gue, les musiciens français écrivaient dans un si vie plus liljre
leurs chansons à plusieurs voix.
MADRIGALESQUE, adj. Se dit du style du madrigal.
MAESTOSO, adj. italien qui désigne uu mouvement lent et ma-
jestueux de la musique.
MAESTRO, maître. Ce mot a passé de l'italien dans la langue
française. On dit aujourd'hui le grand maestro pour désigner
un compositeur distingué.
MAESTRO Dl CAPELLA (voy. Maure de chapelle).
MAIN HARMONIQUE. Rom que les anciens écrivains sur la mu-
.sique donnaient à la figure interne dont les doigts portent les
noms des notes ut, ré, mi, fa , sol, la , disposés de manière à fa-
ciliter aux élèves la solmtsation (voy. ce mot) dans les trois gen-
res innielésparbémot , par bécarre et par nature , selon la méthode
des muances (voy. ce mot). L'invention de la main harmonique est
communément attribuée au moine Gui d'Ârezzo , qui vivait dans
le onzième siècle j cependant on n'en trouve nulle trace daus ses
ouvrages.
MAITRE DE CHAPELLE. On ne donnait autrefois ce nom qu'aux
musiciens attachés au service d'une église pour composer de la
musique sacrée. On appelle aujourd'hui maître de chapelle tout
compositeur qui écrit pour le théâtre.
MAITRE DE CONCERT. Nom qu'on donne en Italie et en Alle-
magne au musicien qui dirige l'exécutiua de la musique daus
DE MUSIQUE. 351
les cours ; eu France ce nom u'est puiut en usage ; on dit mailie
de musique , ou chef d'onlieslre.
MAITRE DK MUSIQUE. Musicieu qui dirige la musique d'une
église et qui donne des leçons aux cnfans de il)œur.
Maître de musique se dit aussi d'un musicien qui enseigne les
principes du solfège (v.oy. ce mot).
Maîtue de musique entin est le nom du musicien qui dirige la
musique d'un régiment,
MAITRISE , s. f. Institution de musique dépendante des églises
cathédrales ou collégiales. Les maîtrises se composent du maî-
tre de musique et d'uu certain nomljre d'enfans de chœur placés
sou» sa discipline. Le nomlire des maîtrises était autrefois en
France d'environ 45o, et celui des élèves qui y étaient élevés
était de quatre à cinq mille; la plupart de ces établisseraens
ont été supprimés après la révolution de 178g.
MAJEUR, adj. qui indique la qualité d'un intervalle plus grand
que le mineur de même dénomination. Ainsi la seconde majeure
estcom]>osée d'un ton, et la seconde mineure d'uu demi-ton.
Cet adjectif s'applique aussi au mode d'un ton (voy. Mode et
Ton), qui est majeur quand la tierce et la sixte de la tonique (voy.
ce mot) sont dans leur plus grande extension relative au ton , et
mineur quand ces intervalles ont une étendue plus petite d'un
demi-ton.
MANCHE, s. m. Partie supérieure des instrumens à cordes pincées
ou à archet, qui sert à tenir ces instrumens. Les cordes sont ten-
dues sur le manche par des chevilles, et l'on eu modifie les in-
tonations en les pressant avec les doigts contre ce manche en
divers points de leur longueur.
MANDOLINE , s. f. luslrunient à cordes pincées, de la famille du
luth et de plus petite dimension. On l'accorde comme le vio-
lon. Sa chanterelle est simple, mais les trois autres cordes sont
douilles. Ces cordes doubles sont accordées à l'unisson pour le
la et le ré , et celles du sol sont à l'cctave. On pince les cordes de
la mandoline avec un morceau d'écaillé de tortue, un bout de
plume d'aigle, on un morceau d'éeoree de cerisier (voy. le uh.
XV).
MANDOR, s. f. Instrument à cordes pincées de la famille du luth,
monté de quatre cordes doubles, accordées de quinte en quarte
(voy. le ch. xv).
352 DICT10NNA.IRE
MARCHE, s. f. Pièce de mnsiqae composée pour des instrumens
à vent et de percussion, destinée à régler le pas d'une troupe
militaire. Les marches s'emploient quelquefois dans la musique
théâtrale, et souvent on y joint un chœur. Le mouvement de la
marche est à quatre temps, d'un caractère bien déterminé, mai^
modéré.
MARCHE D'HARMONIE se dit quelquefois d'une progression
régulière et uniforme d'accords sur un mouvement de basse
quelconque (voy. Progression).
MARCHES , s. f. pi. On donnait autrefois ce nom aux touches des
divers claviers de l'orgue. Ou appelle aussi marches les touches
de la viille par lesquelles on forme les intouations en les ap-
l)uyant contre la corde.
MASURKA , s. f. Air de danse qui est en usage dans la Pologne.
Le mouvement de cet air est animé.
M.iXIME, s. f. Note de musique dont la forme est un carré long
terminé par une queue verticale au côté droit. Cette figure de
note, dont la valeur était de huit rondes dans les mesures bi-
naires et de douze dans les ternaires, a disparu de la musique
moderne.
MEDIANTE, s. f. Troisième note de la gamme d'un ton quelcon-
que (voy. Gamme et Ton).
MEDIUM, s. m. Portion moyenne de l'étendue d'une voix ou d'un
instrument , également éloignée des extrémités grave et ai-
guë.
MELODICA. s. f. Instrument à clavier dans la forme d'un clave-
cin avec un jeu de flûte, inventé, dans la seconde moitié du dix-
huitième siècle, par Jean-André Slein, d'Augsbourg.
MELODICON, instrument à clavier, inventé par le mécanicien
Pierre Rieffelsen , à Copenhague. Le son était produit dans cet
instrument par le frottement de pointes métalliques sur un cy-
lindre d'acier.
MELODIE, s. f. Succession de sons qui forment un sens musical
plus ou mois agréable à l'oreille. La mélodie est une des parties
les plus importantes de la musique. Ses élémeus sont la succes-
sion des sons et le rhytbme (voy. Bhjthm").
MÉLODIEUX, adj. Qui a de la mélodie. Ou dit : Une musique mé-
lodieuse , un chœur mélodieux.
MÉLODION, s. m. Instrument iuventé en Allemagne , par M. Di&tz
va. Mi'SiQi'h. 353
le père. Les «ons de cet instrument étaient piuJuits par le frot-
tement de petit» cylindres métalliques.
MÉLODISTE, s. m. Musicien qui est doué delà faculté d'inven-
ter de la mélodie. On appelle aussi mélodiste l'amateur de musi-
que qui a un goût passionné pour la mélodie. Il y a eu Augle-
• terre une société de mélodistes qui a j)our Lut d'encourager la
production des airs populaires.
MÉLODRAME, s. m. Dans son acception la plus exacte, ce mot
signifie drame en musique. Un opéra est un véritable mélodrame ;
cependant l'usage a j)révalu d'appeler meVorframej certaines piè-
ces dialoguées oîi la musique n'est employée que pour la danse
ou j)our annoncer des entrées et des sorties d'acteurs.
MÉLOMANE, s. m. Amateur passionné de musique. Le mélomane
diffère du mélodiste en ce qu'il aime la réunion de toutes les par-
ties de l'art, au lieu que le mélodiste n'aime que la mélodie.
MÉLOMAjN'IE, s. f. Manie de la musique.
MÉLOPÉE, s. f. Art de la composition du oliant cliez les anciens.
Cet art avait des règles sévères et multipliées. Il n'y a point de
mélopée dans la musique moderne , la composition de la mélo-
die élaut j)resque entièrement livrée aux fantaisies de l'imagina-
tion.
MÉLOPLASTE, s. m. Tableau composé des cinq lignes delà por-
tée, avec quelques lignes additionnelles (voy. Portée') au-dessus et
au-dessous. Ce tableau , sur lequel le professeur de musique pro-
mène une baguette terminée jiar une petite boule, sert à repré-
senter par une notation mobile des (liants qui sont cliantés par
les élèves au fur et à mesure que la baguette leur indique de nou-
veaux sons, ce qui les dispense d'apprendre à lire les signes ordi-
naires de la musique, de connaître les clefs et tous les acces-
soires de la musique écrite. Cette méthode du méloplaste a été
inventée vers 1817 , par Pierre Galin, de Bordeaux.
MÉNESTRELS ou MÉNÉTRIERS. Musiciens poètes, ou quelque-
fois simplement joueurs d instrumeus, qui allaient, dès le orzième
siècle, de ville en ville et de châteaux en ch.îteaux, chantant et
s'accompagnant. Les rois , les princes et les grands vassaux de la
couronne avaient presque tous des ménestrels a leur service. Il y
a lieu de croire que le nom de ménestrel a jiassé dans la langue
française de l'anglais minstiil. Les noms français par lesquels on
désignait auparavant les musiciens étaient troubadours dans le
354 DICTIONNAIRE
midi de \a¥rance , trouvères dans le nord, chanterres, etc. Mène'
/Wer est aujourd'hui pris en mauvaise part; ce nom ne se donne
qu'aux jo eurs d'instruraens qui ne savent pas la musique, et qui
ne servent qu'à faire danser dans les guinguettes.
ME]?«UET, s. m. Air à trois temps d'un mouvement modéré qui
tire son nom d'une danse autrefois en usage. On appelle aussi
menuet certain morceau en mesure ternaire qui, dans les syra-
])hunies, précède ou suit Vadagio ou Vandanle. Autrefois ce mor-
ceau avait à peu près le mouvement de l'air de danse du même
nom; peu à peu ce mouvement s'est accéléré II est en général
maintenant très rapide; c'est à cause décela qu'on lui donne au-
jourd'liui le nom de scherzo (ijadinage), préférablement à relui
de menuet. Le menuet ou scherzo est ordinairement composé de
deux parties, chacrune divisée en deux reprises. La première
partie a proprement les noms de menuet ou de scherzo ^ la se-
conde s'appelle trio (voy. ce mot).
MERLINE, s. f. Orgue a cylindre qui sert à instruire les merles et
les bouvreuils. Le son de la merline est plus fort que celui delà
serinette qui est employée pour les serins et les chardonnerets.
MERULA. Ancien registre d'orgue qu'on appelait quelquefois en
France cossignol.ll consistait en une hoîte d'élain remplie d'eau,
avec deux ou trois tuyaux dans lesquels l'eau était agitée par le
vent; ce registre imitait le gazouillement des oiseaux. Il est main-
tenant hors d'usage.
MESURE, s. f. Division du temps dans la musique en un certain
nombre de parties égales. Les musiciens considèrent comme
unité de temps certains signes de durée qu'ils divisent en par-
lies plus petites; mais la vérit.il)le unité de durée, en musique
lomme en astronomie, c'est la minute (j)our la théorie de la
mesure, voy. le cb. vi. Voy. aussi Métronome et Mouve-
ment).
MESURÉ, part. Ce mot indique certaines parties du récitatif qui
ne se disent pas librement et sans mesure comme le reste (voy.
Récitatif).
MÉTHODE, s. f. Manière de chanter on de jouer d'un instrument
d'après de certains principes plus ou moins rationnels. On dit
d'un chanteur dont la voix est bien posée, dont la vocalisation
est correcte et dont la prononciation est bien articulée , qu'il a
une bonne mélhodi.
nr. MUSIQUE. Séià
Mktpode, s. f. Se dit aussi du recueil de préceptes et de règles
propres à former de bons chanteurs, de bons instrumentistes,
ou de bons lecteurs de musique, U y a des méthudes pour cha-
que instrument, pour chaque partie de la musique.
MÉTRONOME, s. m. Instrument propre à mesurer le temps mu-
sical, inventé par le mécanicien Winckel, d'Amsterdam, et pcr-
f'ectiouné par Maelzel , qui lui a donné son nom (voy. le ch.
VI)-
MEZZA, MEZZO, adj. italien qui signifie demi. Mezzo voce, à
demi-voix; mezzo forte, à demi fort.
MI. Nom de la troisième note dans l'ordre de l'échelle musicale ut ,
ré , mi , fa, etc.
MINEUR, adj. Intervalle de deux sons, plus petit d'un demi-ton
que l'intervalle majeur de même dénomination (voy. Majeur),
Uue tierce mineure renferme l'intervalle d'un ton et demi; une
tierce majeure est formée de deux tons.
MINIME, s. f. Signe de la moindre de toutes les durées en notes
blanches dans l'ancienne musique. Elle a\ait la forme de la blan-
che de la musique moderne.
MINUETTO. Voy. Menuet.
]\I1SE DE VOIX , en italien messa di voce. Art de poser le son de
la voix d'une manière pure et libre, et de régler la respiration
dans le chant.
MIXTE , adj. Se dit des sons sur-laryngiens appelés communé-
ment voi.T de lele ou fausset. La voix mixie n'existe presque pas
chez les femmes, mais elle se rencontre chez presque tous les
hommes, et ])articulièrement dans la voix de ténor,
MODE, s. m. Manière d'être d'un ton (voy. Ton') Dans la musique
des anciens, il y avait un assez grand nomijire de modes ; dans la
musique moderne, il n'y en a que deux, et le mot n'a pas la
même accejition Ces deux modes sont le majeur et le mineur. Le
mode est majeur quand la troisième note de la gamme (voy. ce
mot) d'un ton quclcoucpie est à la distance de deux tons de la
première, et la sixième à l'intervalle de quatre tons et demi; le
mode est mineur quaud ces deux intervalles sont plus petits d'un
demi-ton.
Mode était aussi, dans la notation, en usage depuis la fin du on-
zième siècle jusqu'au milieu du dix-septième, une manière de
fixer par des signes la valeur relative des notes et des silences.
356 DICTIONNAIRE
Le mode se marquait après la clef par des cercles ou des demi-
cercles, BTec ou sans point à leur centre, accompagnés des
chiffres 2 ou 3, selou que la mesure était binaire ou ternaire.
C'est de cet usage qu'est resté dans la musique moderne celui
d'employer le Ç ou le (C pour indiquer la mesure à quatre ou
à deux temps (voy. le § prem. , cli. vi).
MODERATO, adv. italien, modéré. Mouvement ni trop vif ni trop
lent dans une pièce de musique.
M0DUL.4.TI0N , s. f. Manière de changer de mode ou de ion (voy.
ces deux mots), dans le cours d'une pièce de musique (voy., pour
plus de détails, le ch. ix ).
MODULER, V. act. Faire des modulations suivant de certaines
règles.
MONAULE, s. m. Flûte à un seul tuyau qui était en usage chez
les peuples de l'antiquité.
MONFERINE, s. f. Air de danse en ', d'un mouvement vif et gai,
en usage dans le Piémont et dans la Lombardie.
MONOCORDE, s. m. lusfrument monté d'une seule corde dont on
v-irie les intonations au moyen de chevalets mobiles, et qui sert
à mesurer les proportions des intervalles des sons.
MONOLOGUE, s. m. On donnait autrefois ce nom aux scènes d'o-
péra comi>osées de récitatifs et d'airs où il n'y a qu'un seul ac-
teur. Ce terme n'est plus en usage, bien qu'il n'ait pas d'équi-
valent, et l'on se sert, selon les circonstances, pour désigner les
monologues de musique, des noms de scène, cavaline , ana con
recilalifo , air de sortie, etc., etc.
MONTER, V. u. Se dit de l'effet par lequel un instrumentiste ou
un chanteur ])asse gri.-duellement des sons graves aux sons élevés.
Monter est aussi manquer à la justesse des intonations en les
élevant au-dessus du point exact qui leur convient, ou élever ce.
qui est trop bas.
MONTER UN INSTRUMENT. C'est le mettre en état d'être joué.
Ainsi, monter un instrument à cordes et à archet, tels que le
violon et la basse , c'est non-seulement y mettre des cordes et
proportionner la grosseur de celles-ci, c'est aussi les garnir de
leurs accessoires, tels que les chevilles, le cordier ou le che-
valet, et donner à celui-ci la courbe et l'inclinaison convenable;
monter un orgue, c'est disposer convenablement chaque pièce du
mécanisme dans un emplacement donné.
DE ML» QUE. 3.')7
MONTER UN OPÉRA. C'est distriliuer les rôles, faire les études
et les ropétitioiis nécessaires, et préparer les accessoires , tels que
la mise en scène, les décorations et les costumes.
MONTRE, s. f. Jeu de l'orgue dont les tuyaux en étain poli sont
placés à la façade de l'instrument. La montre appartient à l'es-
pèce des jeux d;Jlàte ; lorsqu 'elle est bien faite sa qualité de son
esta la fois douce et pénétrante.
MORCEAU, s. m. Portion d'un opéra, d'une symphonie, d'une so-
nate, etc. On dit d'un air, d'un andatite de symphonie, d'un ron-
deau, d'un quatuor, que ce sont de bi^aiix morceaux.
MORDANTE, en italien rnordente. Ornement de la me'Iodie com-
posé de deux ou trois petites notes et dont on peut Tarier la
forme.
MORENDO. Mot italien qui signifie en mourant j c'est-à-dire en ra-
lentissant un peu le mouvement, et diminuant la force du son
jusqu'au degré le plus faille.
MOSSO. Più mosso , c'est-à-dire plus anime, plus accéléré dans le
mouvement.
MOTET, s. m Morceau de musique pour une ou plusieurs voix,
avec ou sans accompagnement d'orgue ou d'ordiestre, composé
sur des paroles sacrées, et destiné à être exécuté pendant la
messe ou dans quelque autre cérémonie de l 'église.
MOTIF, s. m. Idée principale d'un morceau de musique, considé-
rée sous ses trois aspects de la mélodie , de l'harmonie et du rliy-
thme. On dit d'un air, d'un duo, d'un chœur, ou de tout autre
mori-eau de musique, que le motif en est heureux ou mal choisi.
Lorsque le morceau est com|)osé de plusieurs mouvemens, cha-
cun de ces mouvemens a ordinairement un motif particulier.
MOTO (CON), avec mouvement , c'est-à-dire avec une sorte de ra-
jiidité.
MOUVEMENT, s. m. Mode de vitesse ou de lenteur d'un morceau
de musique. Ses diverses nuances s'indiquent jiar des mots,
comme adagio, allegro , andanle , ou par les signes dumétronome
(voy. ce mot).
MOUVEMENT. Progrès ascendant ou descendant d'une basse ou
de toute autre partie de l'harmonie, selou ds certaines formes.
Le mouvement relatif de deux parties s'appelle mouvement
semblable lorsque ces parties montent ou descendent ensemble;
mouvement oblique lorsqu'une des jiartie» monte on descend
358 DICTIONNAIRE
tandis que l'autre soutient la même note ; mouvement contraire
quand une des parties monte tandis que l'autre desiend.
MUANCES, s. f. Changemens du nom des notes dans la solmisa-
tion (voy. te mot) du plain-cbant, lorsque le chant sort des bor-
nes de Vhexacorde (voy. ce mot). Les chanteurs ont pour règle,
dans ces changemens, d'appeler mi /"a, en montant, les deux no-
tes entre lesquelles il y a un demi-ton , et fa la , en descendant,
les notes qui forment le même intervalle, lorsque le mouvement
descendant se prolonge.
MUE de la voix, s. f. Changement qui s'opère dans la voix, à l'âge
de puberté. Ce changement dans la voix des hommes se fait en
substituant des sons graves et mâles aux sons aigus de la voix
enfantine, de telle sorte que l'ensemble de la voix se trouve
baissé d'une octave ou d'une octave et demie. Chez les femmes, la
mue est presque insensible, et ne se manifeste que par une plus
grande intensité dans le timbre après qu'elle a cessé. Pendant la
mue jiroprement dite, et dans le moment de la crise, la voix
est rauque et l'émission du son |)énil)le, ou même tout-à-fait
impossiifle. Il est nécessaire de suspendre pendant cette crise
toute étude de chant.
MURKY, s. f. Ancien air de danse du Nord, à l'imitation duquel
on a fait autrefois des p.èces de clavecin.
MUSETTE, s. f. Instrument qui, dans son état grossier, s'appelle
cornemuse Çvoj. ce mot). Il est composé d'un ou deux tuyaux
percés de trous qu'on boui-he avec les doigts, d'un tuyau |)lus
^rand qui ne rend qu'un son et qu'on appelle bourdon, d'une
espèce d'outre en |)eau de mouton qui contient le vent et qui le
communique aux chalumeaux, enfin d'un petit tuyau qui sert à
introduire le vent dans l'outre. Cet instrument a été fort en
usage en France vers le milieu du dix-huitième siècle.
Mlsette, s. f. Air pastoral qui tire son nom de l'instrument sur
lequel on le jouait. 11 était ordinairement en mesure à f, d'un
mouvement assez lent, avec une basse en pédale soatenue. Cette
espèce d'air n'est plus guère eu usage.
MUSICAL, ALE, adj. Qui appartient à la musique, La déclamation
musicale est le récitiitif.
MUSICALEMENT, adv. Conformément aux préceptes de la mu-
sique.
MUSICIEN, s. m. Qui sait la musique, qui sait chanter ou jouer
DE MUSIQUE. 359
d'un instrument, qui compose (voy. Chanteur, Instrumentiste,
Compositeur).
MUSICO, s. m. Nom qu'on donnait autrefoi» aux castrats et qu'on
donne encore quelquefois aux femmes qui chantent en voix de
contralto (voy. ce mot).
MUSIQUE, s. f. Résultat de la combinaison des sons dont l'objet
est d'émouvoir l'nme de manières diverses et de plaire à l'o-
reille.
La musique, considérée comme art, renferme plusieurs parties
dont les principales sont: Wnvention formant un tout mélodique,
harmonique et rhythmique ; la technologie , ou l'art d'écrire et
de lire les combinaisons des signes; Vexécution, ou l'art de
chanter et de jouer des instrumens.
MUSIQUE D'ÉGLISE. Musique écrite sur les paroles de la Messe,
des Vêpres, des Complies, des Antiennes, Hymnes, Lit-inies,
Psaumes, etc. Il y a de la musique d'église pour les voix seules,
il y en a avec accompagnement d'orgue et avec orchestre. Le
plam-chant (voy. ce mot) est la musique primitive de l'Eglise.
MUSIQUE DRAMATIQUE. C'est celle qui est destinée au théâtre
(voy. Mélodrame, Opéra, Opéra-comique, Opéra-boujj^e). On dit
quelquefois que la musique insti umentale , et même la musique
d église, est dramatique lorsqu'elle exprime des affections pas-
sionnées de l'ame et lorsqu'elle fait naître de vives émotions.
MUSIQUE INSTRUMENTALE. Celle qui est destinée aux instru-
mens.
MUSIQUE MILITAIRE. Marches, pas redoublés (voy. ces mots)
écrits pour être joués sur des iustrumens à vent et de percussion
à la télé des troupes.
MUSIQUE VOCALE. Musique écrite pour les voix.
MUTATION (JEUX DE). On ai)pelle ainsi les registres de l'orgue
dont les tuyaux ne sont point accordés au diapason des jeux de
fonds et qui sonnent ou la tierce, ou la quarte, ou la quinte de
ceux-ci, et quelquefois plusieurs de ces intervalles à la fois (voy.
Corntt, Cjmbals, Fourniture, Larigot, Nazard, Tierce, etcVoy.
aussi (h. XV ).
MUTATION, s. f. (voy. Muances).
860 incTioim\iSK
N
N AZARD, s. m. Jea d'orgue qui tire son nom de sa qualité de son
nazillarde. Il sonne la quinte du prestant (voy. ce mot), c'est
pourquoi on lui donne quelquefois le nom de quinte. Le nazard
est de l'espèce de jeux d'orgues qu'on appelle jeu j- de mutation.
NATUREL. Adjectif dont on se sert souvent en musique d'une
manière impropre en ajipelant ton naturel d'une note l'état de
cette rote lorsqu'elle n'est accompagnée d'aciin dièse ni bémol.
On trouve d.ins la plupart des méthodes de musique que le dièse
hauise la note d un demi-ton, que le bémol la baisse d'autant, et
que le bécarre la remet dans son ton naturel. L'erreur est évidente,
car il est naturel à une note d'être accompagnée d'un dièse ou
d'un bémol lorsque le ton et le mode l'exigent.
NEUVIEME, s. f. Intervalle de deux notes dont la plus haute est
à l'octave supérieure de la seconde. La neui'ilme peut être ma-
jeure on mineure; en l'un ou l'autre cas elle est une dissonance
(voy. Dissonance^
NICOLO, s. m. IVom d'une ancienne sorte de hautbois qui était à
la quinte inférieure du hautbois ordinaire et qui n'est plus en
usage.
NOCTURNE, s. m. ÎS'om qui dans l'origine se donnait à de certaines
pièces qu'on jouait la nuit dans des sérénades (voy. ce mot), et
qui ensuite a passé à de petits morceaux à deux, trois ou quatre
■voix, mais plus communément à deux. Le style du nocturne est,
comme celui de la romance, doux et gracieux. On écrit ordinai-
rement ce genre de morceau pour un soprano et nn ténor, ou
pour deux soprayi.
NOELS, s. m. Mélodies simples de quelques cantiques qui se chan-
tent à l'église pendant les fêtes de jSoèl. Ces vieux airs sont ori-
ginaires de la Provence et de la Bourgogne. Les Français aiment
beaucoup les Noèls, et les organistes en jouent souvent en dis-
posant les registres de leur instrument de manière à imiter la
musette; les plus habiles les varient et y introduisent des diffi-
cultés. Les IS'oèls de ûaquin ont eu autrefois de la réputation.
NOIRE, s, f. Figure de note qui a cette forme ]• , et qui représentt
DK MUSIQtJK. 3 (il
la diii'ée tle SOU égale au quart de la ronde et à la moitié de la
Itlanclie.
NON TROPPO. Expression italienne qui se joint aux indications
de moiiTeinent, de vitesse ou de lenteur, ou aux modifications
de force et de douceur. Ainsi Non troppo allegro veut dire pas
trop vite; non troppo adagio, pas trop leut; non troppo forte, pas
trop fort.
NOTATION. Système d'écriture de la musique par des caractères
spéciaux.
NOTE, s. f. Caractère de musique qui indique à la fois le son qu'il
faut produire et la durée de ce son.
Note est pris aussi souvent par abstraction comme le nom d'un
son qui peut être représenté par un signe; c'est ainsi qu'on dit
qu'il y a sept notes dans la musique qui sont ut, ré, mi, fa, sol,
ta, si. Dans ce ca^note est S3'nonyiTie de son.
NOTE SENSIBLE. On appelle ainsi la septième note d'une gamme,
lorsque, par de certaines combinaisons, elle est appelée impé-
rieusement à monter sur la huitième appelée tonique ( voy. ce
mot). Elle fait pressentir cette tonique, elle en fait sentir la pré-
sence future; de là lui vient le nom de note sensible.
NOTER, V. a. Action d'écrire la musique avec les notes et les autres
laractèies nécessaires pour l'intelligence de la pensée du com-
positeur. On se sert plus souvent du verbe copier, mais ce terme
est impropre à l'égard des musiciens qui ne copient pas les ou-
vrages des autres, mais qui éirivent ceux qu'ils inventent. Noter
est pour ce cas le mot convenable.
NOTES DE PASSAGE. On appelle de ce nom les notes qui ne
font point partie de l'harmonie et qui ne sont que des points ia-
termédiaires entre les notes essentielles des a<'cords.
NOTEUR, s. m, On appelait ainsi autrefois les musiciens qui étaient
employés dans les chapelles à écrire la musique qu'on distribuait
aux exécutans. Ce nom n'est plus eu usage; on l'a remj)lacé par
celui de copiste (voy. ce mot).
0
OCLÏGE. Adjectif qui indique qu'on ne peut pas refranch* r cer-
taines choses dans l'exécution de la musique; ainsi une /laitte
362 DICTIONNAIRE
obligée est uae partie de <-'hant ou d'instrument nécessaire, qui
n'est point de remplissage, ou qu"on ne peut exécuter à volonté
(al libitum). Par syncope on appelait autrefois récitatif obligé
celui dont l'accompagueinent devait être exécuté par tout l'or-
chestre au lieu de l'être seulement par des accords plaqués sur
le clavecin. Cette expression ne s'emploie plus que rarement,
OCTAVE, s. f. Intervalle qui renferme cinq tons et deux demi-
tons, et au-delà duquel les sons se reproduisent dans une dis-
position semblable à celle des div-ers degrés contenus dans
l'octave. L'octave est considérée comme la plus parfaite des cori'
sonnances (voy. ce mot). Les diverses modifications de l'octave
s'appellent octave juste, octave diminuée, octave augmentée.
OCTAVE ou OCTAVIN. Petite flûte qui sonne l'octave de la flilte
ordinaire. Les Italiens appellent cet instrumeut^auti'no et quel-
quefois/j/cco/o.
OCTAVIER, V. n. Lorsque le souffle s'introduit avec tro]) de force
dans un instrument a vent, au lieu de produire le son que vou-
lait faire entendre l'exécutant, il donne l'octave supérieure;
c'est ce qu'on aj)pelle octavier. Il en résuite un effet désagréable
à l'oreille. Ce n'est que par un long exercice que les instru-
mentistes j)arviennent à ne pas octavier. La clarinette n'octavie
pas, elle fait entendre lu quinte au lieu de l'octave lorsqu'on
force le vent.
ODEOPHONE, s. m. Instrument inventé à Londres par un Vien-
nois nommé Vanderburg. Ce n'était qu'une modification assez
bien imaginée du clavi-cylindre de Chiadin. Le son se tirait de
petits morceaux de métal, au moyeu d'un clavier ou d'un cy-
lindre.
OEUVRE, s. m. Ce mot, dont on se sert pour désigner les ouvra"
ges de musique d'un auteur, est masculin en français. On dit
l'œuvre IV de Mozart, l'œuvre LV de Beethoven. Cette indica-
tion des ouvrages par numéros de production est commode
et f.icile.
ONZIÈME, s. f. On appelait autrefois de ce nom le redoublement
de la quarte à l'octave, et l'on appelait accord de omième un
accord qu'on désigne maintenant par le nom d'accord de quarte
et de quinte.
OPÉR.i, s. m. Drame eu musique (voy. l'Histoire abrégée de l'o-
piraj cliap. xvii ). L'opéra italien se divise en trois genres :
DE MUSIQUE. 363
Yopéra tèrieux, le semi-sèrieux et le bouffe. L'opéra français est
de deux genres : le grand opè'V, chaîné d'un bout à l'autre,
et Vovéi a-comique , où les acteurs [jurlent et chantent tour à
tour.
Oi'KRA, s. m. Se prend souvent dans le sens de spectacle et même
de s;ille où l'on joue des opéras. Ainsi quand on dit qu'on va à
V Opira, cela veut dire qu'on se rend dans la salle de l'Opéra,
mais non à tel ou tel autre ouvrage qu'on doit représenter.
OrÉRA, mot italien qui signifie auvre, et par lequel on désigne
le numéro des ouvrages d'un musicien.
OPÉRA-BALLET. Spectacle mêlé de chant et de danse qui fut fort
à la mode en France jusqu'en 1775 et qui est maintenant à peu
près oublié.
OPÉRETTE, s. f. Mot qui a passé de la langue allemande dans le
français, et par lequel on désigne de petits opéras sans impor-
tance sous le rapport de l'art. Ces opéras s'appellent en Italie
des farses.
OPHICLEIDE, instrument à vent qui peut être considéré comme
Yalto, le ténor ou la basse de la tompette à clefs, selon les di-
mensions qu'on lui donne.
ORATORIO, s. m. Drame en musique dont le sujet est pris dans
la Bible ou d.ins les légendes des saints. L'invention de l'oratorio
est attriliuée à saint Philippe de INéri, fondateur de la congré-
gation de l'Oratoire, dans la première moitié du seizième siècle.
ORCHESTRE, s. m. Se disait oiiginairement du lieu où les musi-
ciens étaient réunis pour l'exécution de la musique, mais ce mot
se prend plus souvent aujonrd'jiui dans l'acception de la réunion
même de ces musiciens et de l'effet qu'ils jiroduisent. On dit
qu'un orchestre est bon ou mauvius selon que les musiciens qui
exécutent la musique la rendent bien ou mal (voy. sur la com-
])ositicu et les qualités des orchestres, chap. xix).
ORCHES TRINO, s. m. Nom donné par M. Poulleau, de Paris, en
i8o8, à un piano à archet de son invention, lequel imitait le
viohm, la viole d'amour et le violoncelle.
OPiCHES TRION, s. m. Nom de deux instrumens à clavier qui ont été
inventés vers la fin du dix-huitième siècle. Le premier est unor<Tiie
portatif composé de quatre chiviers , chacun de 63 touches , et
d'un clavier de pédales «le 3i) touches. L'ensemble de l'instru-
ment présente un cube de g pieds. Cet instrument fut construit
364 DICTIONNAIRE
en Hollande sur le jilau qui en fut donné par l'abljé Voglcr, et
fut rendu public au mois de novembre 17S9 à Amsterd.im. Ou
y trouve un mécanisme de crescendo et de decrescendo, et l'in-
tensité de ses sons était semblable à celle d'un orgue de 16 pieds.
L'autre instrument du même nom, inventé par Thomas-Antoine
KuDZ, à Prague, en 1796, était un piano uni à quelques registies
d'orgue.
OREILLE, s. f. Est pris souvent pour le sens de l'ouïe à l'égard
des perceptions de la musique. Avoir de l'oreille, c'est avoir
l'ouie sensible et capable d'appréi ier les moindres différences
d'intonation et de mesure. Avoir l'oreille fausse, c'est être privé
de cette senbil)ilité d'organe.
ORGANISTE. Artiste qui joue de l'orgue (voy. cli. xix, quel-
ques renseignemens sur les organistes les plus célèbres et sur
la difficulté de jouer de l'orgue).
ORGA?<0-LYRICO!X. Instrument inventé à Paris, en 1810, par uu
français nommé M. de Saint-Pern. Sa forme était celle d'un se-
crétaire à cylindre; il contenait un piano ordinaire autour duquel
se groupaient quelques instruraeus à vent.
ORGUE, s. m. au sing. et f. au plur. Le plus grand de tous les
instrumens, composé du mécauisme d'un ou de plusieurs cla-
viers et de plusieurs rangées de tuyaux qui vibrent au moyen
de l'air fourni par des soufflets ( voy. chap. xv, l'analyse abré-
gée de la construction de l'orgue et l'indication des meilleurs
facteurs de cet instrument).
ORGUE A CYLirSDRE. Instrument du genre de l'orgue ordinaire,
mais dans lequel un cylindre, armé de petits morceaux de métal,
remplace les doigts de l'organiste pour faire mouvoir ce clavier.
Ce cylindre est mû par une manivelle ou par un mouvement
d'borlogerie. On donne souvent les noms d'orgue d Allemagne
ou (Vorgue de Barbarie à l'orgue à cylindre.
ORGUE HYDRAULIQUE. Instrument dont il est parlé par quel-
ques auteurs de l'antiquité; mais les descriptions qu'ils en ont
données sont trop obscures pour qu'on puisse savoir quels étaient
son mécanisme et sa forme; on sait seulement que les sons y
étaient produits au moyen de l'eau.
ORPHEOREON. Instrument de la famille des lutLs, armé de huit
cordes de métal. Il n'est plus en usage.
ORPHICA. Instrument à clavier inventé par M. RuUig. Les touches
1)K MISIQUE. 365
ont si peu de largeur que cet instrument ne peut être joué que
par des mains d'enfiint.
OUVERTl'RK, s. f. Symphonie qui prcii'de le commencement de
l'action tliéàtrjle d'uu opéra on d'un ballet.
P. Cette lettre, ])ar abréviation, signifie /jiano, c'est-à-dire doux.
PANAULON. Flûte traversiire qui descend jusqu'au sol du violon,
imaginée par M. Trexler, de Vienne.
PANDORE, s. f. Instrument à cordes dont le chevalet était oblique
et dont la forme avait quelque analogie avec celle du cistre.
Les cordes se ])iu<'aieat avec une plume. Cet instrument est
maintenant hors d'usage.
PANDURA, s. f. Instrument dont on se sert dans le royaume de
Naples. Il est peu différent de la mandoline, mais il est plus
grand ; il est armé de huit cordes de métal qui rendent une har-
monie agréable et qu'on pince avec une plume.
PAN-MELODICON. Instrument inventé, en 1810, par M.Xeppich,
à Vienne. Il consiste en un cylindre conique, mû par une roue,
quimet envil)ration de petits morceaux de métal courljés à angles
droits, lesquels sont touchés légèrement au moyen d'un clavier.
PAISTALO^X , s. m. Instrument à cordes du genre du tympanon,
inventé par un musicien allemand nommé Pantaleon Hebeustreit,
au commencement du dix-huitième ;itcle. Cet instrument avait
l'étendue du clavecin et était monté de deux rangs de cordes, les
unes en métal, les autres en boyaux. Ses sons étaient majestueux,
surtout dans la basse.
PAPIER RÉGLÉ. On appelle de ce nom le papier sur lequel des
portées de cinq lignes sont tracées à de (certaines distances par
des procédés mécaniques, pour y écrire la musique. On appelle
papier à la française celui qui est réglé dans sa hauteur, et papier
à l italienne celui qui est oblong.
PARODIE, s. f. Signifie littéralement imitation burlesque , mais on
doune quelquefois ce nom à des morceaux de musique dont on
a cliangé les paroles ou même des pièces instrumentales, dont
3i.
366 DICTIONNAIRE
on a fait des airs, des duos, etc. Autrefois on appelait impro-
prement/)arorfi«T les traductions d'opéras.
PARODIER, V. a. Faire des parodies eu changeant la nature pri-
mitive des compositions musicales.
PARTIE, s. f. On appelle de ce nom la portion de musique appar-
tenant à chacune des voix ou à chacun des instrumens qui con-
courent à former l'ensemble d'un morceau de musique. Ainsi,
quand on dit une partie de hautbois , de cor, de violon, ou de
ténor, de soprano, on parle de la musique destinée à ces instru-
mens ou à ces voix pour l'exécution d'une symphonie, d'une
ouverture, d'un chœur, etc.
Partie, s. f. Est aussi la portion d'un morceau de musique séparée
d'un autre par une double barre verticale accomjiagnée de
])oints qui indiquent l'obligation de recommencer chacune des
deux parties. Presque tous les premiers morceaux des sonates ,
des symphonies, des quatuors, etc., sont coupés eu deux parties.
PARTIMENTI, s. m. pi. Nom italien de certains exercices préparés
pour l'étude de l'accompagnement et de l'harmonie, dont on
fait usage dans les écoles d'Italie. Ces exercices sont composés
de parties de basse où les accords sont indiqués p^r des chiffres
placés au-dessus des notes, et ces accords doivent être joués
par la main droite des élèves pendant qu'ils jouent la liasse avec
la gauche. Il y a plusieurs recueils de ces exercices qui sont de-
venus classiques.
PARTITION, s. f. Réunion de toutes les parties instrumentales
et vocales qui entrent dans la composition d'un morceau de
musique. Toutes ces parlies sont superposées sur la même page
de papier réglé afin que le compositeur puisse juger de l'effet
de sou ouvrage en l'écrivant, et que le chef d'ori.-hesfre puisse
saisir d'un coup d'oeil l'intention de l'auteur. Les voix et les
instrumens sont disposés dans la partition selon leur degré d'é-
lévation ou de gravité, les plus aigus aux lignes supérieures, les
moyens au milieu, et les ])lus graves aux lignes inférieures. Il
y a cependant des partitions où cet ordre rationnel n'est pas
suivi.
P.iRTiTioiN', S. f. Est aussi une certaine règle d'après laquelle les
accordeurs d'orgue et de piano accordent ces instrumens. Cha-
cun a sa méthode à cet égard ; la meilleure est celle qui permet
DE MUSIQUE. 3G7
de comparer le plus souveut et le plus sûrement les différens
sous qu'où accorde entre eux avec celui qui a servi de point do
dé|>art, parce que celle-là permet de rectilier avec promptitude
les erreurs de l'oreille.
PAS-REDOUBLK, s. m. Sorte de marche militaire d'un mouvement
plus rapide que la marche proprement dite. Le pas redoublé est
toujours en mesure à 4 ouà^*.
PASSACAILLE, s. f. Air de danse d'un caractère un peu mélan-
colique et d'un mouvement modéré, dont on faisait autrefois
beaucoup d'usage dans les opéras et les ballets, mais qui est
tuaintenaut passé de mode.
PASSAGE, s. m. Ce mot a plusieurs acceptions: dan> l'une il est
pris comme synonyme de phrase : ce passage ett joJi, je n'aime
point ce passage ; dans l'autre il signifie un trait de notes rapides,
par exemple une gamme d'un mouvement accéléré.
PASSEl'IED, s. m. Air de danse à trois temps qu'on employait au-
trefois dans les ballets et les opéras. Il n'est plus en usage.
PASTICHE, en italien PASTICCIO, s. m. Opéra formé de la réu-
nion de morceaux de musique pris dans plusieurs autres ouvrages
dramatiques. Ou faisait autrefois de ces pastiches en Italie lorsque
l'opéra préparé pour la saison dans une ville ne réussissait pas.
Presque toujours ils étaient bien accueillis parce que chaque
chanteur y faisait introduire les morceaux qui étaient les plus
favorables à son talent.
PASTORALE, s. f. Opéra dont les personnages sont des bergers.
Ce genre d'ouvrage a eu autrefois de la vogue, mais la fadeur du
lang.ige des amans qui en étaient les héros a fait bannir depuis
ces pièces de la scène. On donne quelquefois aussi le nom de
pastorales à de certains morceaux de musique d'un style naïf et
champêtre. On connaît la sjniplioide pastorale de Beethoven, chef-
d'œuvre du genre.
PATTE A REGLER, s. f. Petit instrument de cuivre, composé de
cinq rainures également espacées, attachées à un manche, au
moyeu duquel on trace d'un seul coup les cinq lignes qui for-
ment la portée de musique.
PAUSE, s. f. On donne ce nom à certain silence de la musique et
au signe de ce silence (voy. ch. vi ).
PAVA?(E, s. f. Air de danse qui fut fort à la mode dans les sei-
368 DICTIONNAIRE
zième et dix-septième siècles. Cet air est originaire «l'Espagne ;
il était d'un caractère grave et d'un mouvement lent.
PAVILLON, s. m. Partie inférieure et évasée de certains instrumens
à vent, tels que le hautl)ois, la clarinette, la trompette et le cor.
PAVILLON CHINOIS. Instrument de percussion dont ou se sert
dans la musique militaire. Il est composé d'une sorte de chapeau
conique en cuivre auquel sont attachés des grelots et des son-
nettes, et qu'on agite au moyen d'un long bâton auquel l'appareil
est attaché.
PECTIS. Instrument à cordes des anciens Grecs, dont l'invention
est .Ttlril)uée à Snpho.
PÉDALES, s. f. Touches du clavier qui est jdacé aux j)ieds de
l'organiste; elles servent à faire entendre les notes de basse
pendant que les mains exécutent d'autres parties sur les claviers
supérieurs (voy. ch. xix ).
Les pùdalts sont aussi des leviers de cuivre qui servent à
élever d'un demi-ton les cordes de la harpe simple, ou d'un
ton, à volonté, dans les harpes à double mouvement (voy. ch.
x.x).
Enfin les pédales du piano sont des moteurs de certains mé-
canismes au moyen de quoi on modifie à volonté la qualité de
sou de l'instrument, soit en levaut les étoulfoirs, soit en faisant
mouvoir le clavier et portant les marteaux sur une ou sur deux
cordes, soit enfin en interceptant les vibrations des cordes par
l'attoucliement de morceaux de buffle, etc.
PÉDALE, s. f. Note soutenue à la basse ou à toute autre partie,
sur laquelle plusieurs accords se succèdent sans être même en
rapport direct avec elle (voy. ch. x).
PilRCUSSION (instrumens de). Ce sont ceux qui résonnent lors-
qu'ils sont frappés (voy. ch. xv ).
PERDENDOSI (en se perdant). Ce mot italien indique que, dans
l'exécution, le son doit diminuer graduellement d'intensité jus-
qu'à ce qu'il devienne presque imperceptible.
PERIODE, s. f. Phrase musicale d'un sens complet, qui se divise
en plusieurs autres phrases d'un certain nomiire de mesures uni-
formes et régulières (voy. ch. ix).
PERPETUEL (Canon). Canon qui n'a point de fin et qu'on peut
Joujours recommencer (voy. ch. xii).
DK MUSIQUE. 369
PHRASE, 5. f. Fragment de mélodie qui a ordinairement pour
fragment eorrespoudaut une autre phrase d'un nombre égal de
mesure, de même rliytlime et de même <-araetère (voy. cli. ix ).
PHRASKR, V. a. C'est donner à cliaque phrase, dans l'exécution
de la musique, le raraetère eouvenable, et l'a(.'compagncr de tout
ce qui peut en augmenter l'ell'et.
PHVSUARMOMICA, s. m. Instrumenta lames métalliques qui vi-
brent par l'action de l'air aliuicuté par un soultlet. Cet instru-
ment a été inventé par M. Antoine Hackel, de Vienne (v. ch. xv ).
PIANISSIMO, très doux. Ce mot se marque en al^régé par un dou-
ble PP dans la musique.
PLANISTE, Musicien qui joue du piano.
PIANO, doux. Ce mot se marque par abréviation, c'est-à-dire par
un P dans la musique. 11 indique la nécessité d'adoucir les
siins.
Piano, s. m. Instrument à clavier (voy. chap. xv).
PINCER, V. a. Se dit de l'action de jouer des instrumens dont les
lordes se pincent avec les doigts.
PIQUE, ËE; adj. Le coup d'archet piqué est celui par lequel on dé-
tache les notes avec sécheresse; les noies piquées sont celles qui
sont surmontées de points ronds ou allongés, et qu'on rend
d'une manière sèche et non soutenue.
PIZZICATO, /Ji'nce. Ce mot se place quelquefois sous les parties de
violon, de viole et de basse pour faire connaître que les cordes,
au lieu d'être jouées avec l'archet, doivent être pincées avec les
doigts.
PLAGAL , adj. Se dit d'une c'ertaine forme des tons du plain-
chant, qui est opposée à la forme des tons authentiques (voy.
ce mot ).
PLAIN-CHANT, s. m. Chant des antiennes, des hymnes, des psau-
mes, des répons, des proses et de quelques autres pièces de l'office
des églises catholiques. Ce chant n'est pas mesuré, et sa tonalité
diffère en plusieurs j)oints de la musique profane. Dans le qua-
trième siècle de l'èie chrétienne, saint Ambroise, archevêque de
Milan, donna au plain-chant sa forme primitive en se servant
pour cela de quelques anciennes mélodies grecques. Plus tard,
le pape Grégoire-le-Grand réforma ce premier plain-chant et
lui donna le caractère qu'il a conservé jusqu'ici sous le nom de
370 DICTIONNAIRE
chant grégorien.^ ers le milieu du dix-huitième siècle, un plain-
cbaDt plus orné fut introduit dans les églises de Paris et prit le
nom de plan-ckant parisien. Chaque ordre monastique a eu aussi
son plain-cbant particulier.
La tonalité du plain-chant diffère de la tonalité de la musique
ordinaire en ce qu'il ne se compose pas d'un mode mineur et
d'un mode majeur. Elle se divise en huit tons dont quatre sont
appelés aulhentiques , et quatre plagaux. Les tons authentiques
sont ceux dont la dominante est à la quinte supérieure de la to-
nique ; les plagaux sont ceux dont la dominante est à la quarte
supérieure de la tonique.
PLA>'CHE, s. f. On appelle de ce nom les lames d'étain ou de
cuivre sur lesquelles ou grave la musique. Il y en a de deux for-
mats. Les plus petites se nomment planches d'opéra, \es plus
grandes planches de symphonie. Pour quelques ouvrages de
luxe, on fait même usage de planches très grandes appelées
grande sjmphonie.
PLECTRE, s. m. Morceau de bois ou d'ivoire terminé par un cro-
chet à ses extrémités, dont on se servait dans l'antiquité pour
pincer ou pour frapper les cordes de la lyre et de la cytliare.
PLEIN-JEU. Sorte de jeu d'orgue composé des jeux de mutation
ai>pelcs cymbale et fourniture; ou joiut à cette combinaison les
jeux de fonds tels que les bourdons, flûtes et prestans. Ce jeu
a de la puissance et de la majesté.
PLEXIMETRE, s. m. Instrument du genre du métronome, in-
venté ])ar le docteur Jean Finazzi d'Oraegna , en Sardaigne , fixé
à Milan. Le pleximètre diffère des premiers métronomes de
Maeizel en ce qu'il marque les premiers temps de chaque me-
sure par un é(baj)pement. Les métronomes construits par
M. Bienaimé, d'Amiens, sont établis d'après le même système.
M. Wagner, mécanicien de Paris, a aussi introduit un échappe-
ment analogue dans les métronomes de Maelzcl (voy. ch.vi).
POCHETTE, s. f. Petit violon de poche dont les maîtres de danse
se servent pour donner leurs leçons. La pochette sonne une oc-
tave ])lus haut que le violon.
POINT, s. m. Le point placé avant, après, ou entre deux notes, mo-
difiait autrefois la valeur de ces notes de plusieurs manières;
dans la musique moderne, le point n'a d'autre effet que d'aug-
DE MUSIQUE. 371
menter de mokié \;\ valeur de la note après laquelle il est j)lncé.
Les i)oinl.<! placés au-dessus dos notes indiquent qu'elles doivent
être délacliées.
POINT -D'ORGUE. Arrêt indiqué de cette manière dans la musi-
que /'T\ , pour marquer un re])os pendant lequel l'exécutant
déploie toute son habileté dans d es traits de fantaisie que lui
inspire son imagination. Cet artifice, appelé parles Italiens ca-
denza , s'introduit ordinairement dans les concertos d'instru-
mens ou dans les solos de chant.
POLONAISE, s. f. Air à trois tem])s, d'un mouvement lent, en
usage dans la Pologne, et dont on fait des chansons et des airs
de danse. Les morceaux qui portent le nom de polonaises dans
les sonates, les concertos, etc., se prennent d'un mouvement
plus animé que les polonaises véritables.
POLYCORDE, s. m. Instrument à archet, inventé en 1799, P'"'
M. Hilmer de Leipsick. Il ressemblait à la contrebasse et pou-
vait en tenir lieu, bien qu'il n'eût que i6 pouces de longueur
sur 10 et demi de largeur. Sur son manche, long de 11 pouces,
et large de 4) étaient tendues dix cordes qui fournissaient à une
étendue considérable. Lepolycorde était fourni de touches pour
former les intonations.
POMPE, s. f. Partie de tuyau en fer à cheval, qui s'emboîte à
coulisse dans d'autres tuyaux pour baisser ou hausser à volonté
l'intonalion du cor et de la trompette , par l'allongement ou le
raccourcissement de la colonne d'air. La flûte et la clarinette
ont aussi une pompe formée d'une emboîture en métal , dont
l'emploi est le même que celui de la pompe du cor ou de la
trompette.
PONTICELLO, s. m. Nom italien du chevalet des instrumens à
archet.
PONT-NEUFS, s. m. On appelait autrefois de ce nom les airs des
cluinsons vulgaires et des vaudevilles. Ce nom leur venait de ce
qn'autiefois les marchands de ces chansons se plaçaient sur le
Pont-Neuf, à Paris, pour chanter et débiter leur marchandise.
On dit encore aujourd'hui, par mépris de certains airs dont la
mélodie est commune, que ce sont des ponts-neufs.
POPiT-DE-VOIX, en italien, /)or;a;nen(o. Accent de la voix dans la
succession des sous, soit en montant, soit eu descendant. Il se
372 UICTlON\AlRK
f .it en poi;ant la voix soit au-dessus, soit en dessous du son qui
doit être .ittaqué et en glissant sur les sons iaterinédiaires jus-
qu'à ce qu'on arrive à l'iutonation voulue. Le port-de-voix pro-
duit un bon effet lorsqu'il est employé à propos, mais il devient
fatigant si oa en use trop fréquemmeat.
PORTEE, s. f. Piéunion de cinq lignes sur lesquelles on écrit la
musique.
P9SIT1F, s. m. Petit orgue avec lequel on accompagne le chœur,
et qui est ordinairement placé en avant du grand orgue (voy.
fh. xv).
POSITION, s. f. Ce mot a plusieurs acceptions en musique Dans
la science de l'harmonie les positions des notes des accords se
distinguent en raison de leur rajiprocheraent ou de leur éloigne-
ment de la Lasse. Dans les accords composés de trois notes , cha-
cune pouvant être la plus rapprochée de la basse, la moyenne
ou la plus éloignée , il y a lieu à trois positions. Ceux qui sont
composés de quatre notes peuvent se présenter sous l'aspect de
quatre positions différentes On appelle aussi positions les divers
j>lacemens de la main sur le manche des instrumeus à cordes pin-
cées ou à archet. La première position est celle qui est la plus
rapprochée des chevilles; les autres, à mesure qu'on s'élève vers
les sons aigus, s'appellent seconde, troisième position , etc.
POT-POURRI , s. m. Sorte de pièce de musique instrumentale qui
a eu autrefois beaucoup de vogue et qui est maintenant oubliée.
Elle consistait en un certain nombre d'airs connus, enchaînés au
moyen de quelques traits intermédiaires et parfois variés.
PRELUDE, s. m. Fantaisie courte par laquelle les instrumentistes
se préparent quelquefois à jouer le morceau qu'ils ont sous les
yeux. Il faut être avare de ces fantaisies, et les préludes doivent
être courts.
PR.ELUDER., V. act. Jooer des préludes.
PRÉPARATION, s. f. Effet d'une note qui est entendue dans l'é-
tat de con'ionnance avant de devenir dissonance (voy. ch. x).
l'RÉP.iRATION AU CHANT (voy. Solfège et Focalisation).
PRESTANT, s. m. Jeu d'orgue de l'espèce des flûtes, dont le plus
grand tuyau a 2 pieds de longueur (voy. ch. xv).
PRESTO, adv. Mot italien qui indique un mouvement vif dans
l'exécution d'un morceau de musique.
i)F. iviusioiiF.. :i7:)
l'ROGRESSlON , ». f. Miuiveniens rt'grili<'rs d'iiarmonie dans une
forme déleriiiiiiée et j)rol()n^(!'t'.
PROLOGUK), s. m. Introduction d'(>i)éru autrefois en usage, dont
le sujet n'avait aucun rapport avec celui delà pièce. Quelquefois
le prologue était assez développé j)our être lui-même une es-
pèce de petit opéra. Le prologue n'est plus de mode.
PilOLOINGATION, s. f. Note qui, ayant été entendue dans uu ac-
cord, se prolonge par une liaison sur l'accord suivant.
PRONONCIATION, s. f. Art d'articuler les paroles dans le chant.
Une bonne prononciation est un grand moyen d'effet pour les
chanteurs, mais c'est une qualité fort rare.
PROSE, s. f. Pièce deplain-chant qui se chante en certaines cir-
constances Le Dies irœ est la prose des morts.
PSALMODIE. Chaut des psaumes sur une seule intonation de la
voix, en sons soutenus et avec l'accent oratoire.
PSALTÉRION, s. m. Instrument à cordes qui n'est presque j)lus
en usage. Il a la forme d'un triangle et est monté de cordes mé-
talliques qu'on frappe avec de petites baguettes.
Q
QUADRUPLE CROCHE, s. f. Figure de note représentant un sou
d'une durée égale à la huitième partie d'une croche. La quadru-
ple croche est faite ainsi m ; quand il y en a plusieurs ensemble
elles sont réunies par quatre barres qui traversent la queue des
notes.
QUART DE SOUPIR. Silence qui a la durée d'une double croche
et qui équivaut au quart du soupir.
QUART DE TON. Quatrième partie de l'intervalle d'un ton. Notre
oreille n'est point habituée à mesurer de si petits intervalles ;
c'est pourquoi celui-ci n'est employé ni dans la mélodie, ni dans
l'harmonie. Les peuples orientaux, habitués à faire usage de
beaucoup de petits intervalles dans la musique, ont une gamme
chromatique par quarts de ton.
QUARTE, s. 1. Intervalle consonn.int qui se peut présenter sous
divers aspects. La quarte juste est composée de deux tons tt un
32
374 DICTIONTÎAIRE
demi-ton; la quarte majeure renferme trois tons et prend quel-
quefois, à cause de cela, le nom de triton ; la quarte diminuée est
composée d'un ton et de deux demi-tons.
On a long-temps considéré la quarte comme une dissonance,
mais, étant un renversement de la quinte, elle ne peut être
qu'une consonnance.
QUARTE DE NAZARD. Jeu d'orgue fait d'un mélange de plorab
et d'étain qui sonne la quarte supérieure du nazard ou l'octave
aiguë du prestant.
QUARTETTO (voy. Quatuor).
QUATUOR, s. m. Morceau de musique pour quatre voix ou quatre,
instrumens. Dans la musique moderne, le quatuor vocal est sou-
vent accompagné par des instrumens.
Le quatuor instrumental est un genre de composition qui a
fourni à beaucoup de grands compositeurs, tels que Haydn,
Mozart et Beethoven, l'occasion de déployer toutes les ressources
du génie et du talent, et de produire des effets qui ne semblent
j)as pouvoir être trouvés dans les combinaisons d'un si petit
nombre d'instrumens (voy. ch. xix).
QUEUE, s. f. On appelle de ce nom le trait vertical qui est attaché
à la tête des notes de musique.
QUEUE, s. f. Partie du violon , de l'alto, du violoncelle et de la
contrebasse à laquelle l'extrémité inférieure des cordes est atta-
chée. On lui donnait aussi le nom de cordier.
QUINTE, s. f. Intervalle consonnant qui peut se présenter sous
plusieurs aspects. La quinte juste est composée de trois tons et
demi ; la quinle mineure, appelée par quelques musiciens quinte
diminuée et par d'autres/auMe quinte, est composée de deux tons
et de deux demi-tons; la quinte augmentée est composée de trois
tons et deux demi-tons. Ou appelait autrefois cet intervalle quinle
superjlue.
QULNTE. Jeu d'orgue qui sonne la quinte du prestant. On lui
donnait autrefois le nom de natard (vny. ce mot).
QUINTE, s. f. Kom par lequel on désigne quelquefois la viole ou
alto.
QUINTES CACHÉES. On donne ce nom en musique à des succes-
sions harmoniques qui fout pressentir la succession de deux
quintes conse'cutives.
QUINTETTE, s. m. Morceau de musique composé pour cinq voix
DE MUSIQUE. 375
oa cinq înstramens. Le quintette vocal est souvent accompagné
j);ir l'ori-liestre. Il y a , dans des genres différens , d'admirables
quintettes d'instruniens tomposés jiar Bocclierini, Beethoven,
Moziirt et Onslow. M Reiclia en a composé pour des instruraens
à vent; leur facture est élégante.
QUODLIBET, s. m. Pièce de musique autrefois en usage en Alle-
m.igne, et qui était composée pour les voix sur des paroles co-
miques et quelquefois grivoises.
R
RACLER, V. a. Terme de mépris par lequel on désigne la mauvaise
manière de jouer d'un instrument, tel que le violon ou la basse,
en faisant crier les cordes sous l'archet.
RACLEUR, s. m. Musicien qui joue avec dureté du violon ou de
la basse.
RALLENTANDO, en ralentissant. Ces mots se mettent sous les
passages d'un morce.TU de musique dont l'expression exige que le
mouvement soit ralenti dans de certains endroits.
RAMAGE, s. m. On désigne par ce nom le chant modulé et jihrasé
des oiseaux chanteurs, tels que le rossignol, la fauvette, le se-
rin, etc.
Ramage se prend en mauvaise part lorsqu'il s'agit d'un chanteur
qui ne plaît pas. C'est en ce sens qu'on dit: L'ennuyeux ramage
de cet homme me fatigue.
RANZ DES VACHES. Airs populaires des montagnes de la Suisse.
Il y en a d'historiques dans chaque canton , mais les musiciens
du pays en composent chaque jour, hesranz des vaches se chan-
tent ou se jouent par les pâtres sur le cor des Alpes (^Halp-
Horn).
RAPPORTS DES INTERVALLES. Calcul exact des distances des
sons entre eux (voy. ch. xr).
RASGADO, s. m. Prélude des boléros et des séguedilles que les Es-
pagnols exécutent en faisant sonner rapidement toutes les notes
de la guitare avec le pouce.
RE. Nom de la deuxième note de la gamme du ton lïut. Chez les
Allemands et les Anglais on l'indique par D.
376 DICTIONNAIRE
REBEC. Instrument d'une forme à peu près semblable à celle du
violon, dont on faisait usage en France dans le moyen-âge, et
qui ne fut abandonné qu'a la fin du dix-septième siècle par les
ménétriers. Le rebec était monté de trois cordes; il y avait des
dessus, des quintes, des tailles et des basses de rebec.
RECIT, s. m. Ou appelait autrefois de ce nom tout morceau do
musique à voix seule. On disait un récit de taille, de basse ou de
haule-conlre, pour un air, un motet écrit pour ces voix.
RECITANT, part. Celui qui clianle un récit.
RECITATIF, s. m. Partie de la musique dramatique qui n'est point
mesurée et que le cbanteur exécute à volonté en tirant ses prin-
cipaux moyens d'effet de l'arliculatiou et de l'accent qu'il donne
aux paroles. Cette partie des scènes d'un opéra est ordinairement
suivie d'un air, d'uu duo, ou de tout autre morceau de musique
mesurée.
Le récitatif n'est quelquefois accompagné que par la basse et
le piano ; on lui donne le nom de récitatif libre- On s'en sert
principalement dans l'opéra bouffe italien. Le chanteur le débite
rapidement et donne aux jiaroles moins d'accentuation qu'à tout
autre récitatif.
Le récitatif accompagné par l'orchestre, et qui se chante avec
force et accent, s'appelle récitatif obligé ; on en fait particuliè-
rement usage dans les opéras sérieux et dans ceux de demi-
caractère.
RÉCITER, V. a. Chanter un récit.
PiEDOUBLE, adj. L'intervalle redoublé est celui qni, dans uu ac-
cord, est fait par deux parties, soit à l'unisson, soit à l'octave.
Dans un accord de sixte, par exemple, on redouble ou la tierce,
ou la sixte, rarement la basse.
RÉDUCTION, s. f. Musique à grand orchestre, de quelque nature
que ce soit, arrangée pour le piano ou pour un petit nombre
d'iustrumens. Au lieu de réduction on se sert quelquefois du
terme d^arrangement.
RÉDUIRE. Arranger une partition pour le piano ou pour un petit
nombre d'iustrumens.
REFRAIN, s. m. Terminaison d'un couplet ou d'un air de vaude-
ville qu'on répète ordinairement deux fois et qu'on chante quel-
quefois en chœur.
RÉGALE, s. f. Le plus aucieu des jeux d'orgue, composé seule-
DE MUSIQUE. 377
ment d'anches montées sur leurs pieds. Ce jeu n'existe plus dans
l'orgue.
RECîlSTRK, s. m. Les registres sont des règles de bois que l'orga-
niste tire ou pousse, et qui font agir de certains mouveinens pour
ouvrir ou fermer les jeux de l'orgue selon qu'il éprouve le hesoiu
de les faire chanter ou de les réduire au silence. La poignée par
laquelle l'organiste ouvre ou ferme un registre s'appelle tirant.
REGISTRES DE LA VOIX. Etendue naturelle de chaque genre de
voix. La voix de poitrine est un registre ; la voix de tête, commu-
nément am^clée fausset , et plus exactement sur-Zar^no'tenne, est
un autre registre. L'égalisation de l'intensité et de la qualité du
son dans le passage d'un registre à l'autre est une des plus
grandes difficultés de l'art du chant.
REGLE DE L'OCTAVE. Succession naturelle d'accords sur tou-
tes les notes de la gamme, tant en montant qu'en descendant,
; sans altération, substitution ni retardement. La règle de l'octave
est le fondement de tente harmonie.
REGLER le papier de musique, c'est y tracer les parties néces-
saires pour écrire les notes et les autres signes.
RÈGLES DE LA COMPOSITION. Collection de préceptes dictés
par l'expérience acquise dans l'art d'écrire la musique (voy.
ch. XI i).
REGLEUR, s. m. Ouvrier qui trace les portées sur le papier pour
écrire la musique.
REGLURE, s. f. Manière dont le papier est réglé. Il ne faut pas
que la réglure soit trop noire ni trop serrée.
RÉGULIER, adj. Un mouvement d'harmonie est régulier quand
il ne donne lieu qu'à de bonnes successions d'intervalles; dans le
cas contraire il est trrégutier.
RELATIF. Un ton est relatif d'un autre quand il offre à la clef
les mêmes signes de tonalité. En pareil cas, l'un des tons est un
mode majeur, et l'autre un mode mineur.
RELATION, s. f. Rapport entre un son qui vient d'être entendu
dans une partie vocale et instrumentale, et un autre son qu'on
entend actuellement dans une autre. Lorsque ces deux sons con-
courent à laisser dans l'oreille la sensation d'une consonnance
exacte, la re/ation est bonne; quand il résulte de leur rapport
une consonnance altérée, la relation est fausse. Les fausses rela-
tions sont proscrites en composition.
32.
378 DICTIONNAIRE
REMPLISSAGE, s. m. On appelle parties de remplissage celles
qui, dans un contrepoint, ne rem])lissent pas les conditions de
canon, de l'imitatioû, ou du contrepoint doulile ( 'voy. ch.
XII ). On appelait aussi autrefois parties de remplissage ( di ri-
pieno) celles qui dans les concertos ne jouaient que dans les
tutli (vor. ce mot) pour donner plus de force à l'ensemble.
RENTRÉE, s. f. Se dit en général d'un instrument ou d'une voix
qui, après un silence, se fait entendre de nouveau. Ce mot
s'applique particulièrement au sujet et à la réponse d'une fugue
(voy. ces mots).
RENVERSÉ, ÉE, adj. Un intervalle ou un accord renversé sont
ceux dans lesquels l'ordre des parties est interverti de telle sorte
que les notes graves sont transpoitces aux ])arties supérieures ,
et que celles-ci passent aux notes graves.
RENVERSEMENT, s. m. Changement de disposition dans les no-
tes qui composent un accord et dans les parties qui forment
une harmonie.
RÉPERCUSSION, s. f. Mot nouvellement introduit dans le lan-
gage de la science musicale, et qui signifie la même chose que la
rentrée des parties dans la fugue.
RÉPÉTER, V. act. Faire une répétition.
RÉPÉTITION, s. f. Étude d'un morceau de musique ou d'un
0|)éra j)ar ceux qui doivent l'exécuter. I-es répétitions sont par-
tielles ou générales selon qu'elles ont lieu seulement entre un
petit nombre de musiciens, ou que tout l'orchestre, les chan-
teurs et les choristes sont réunis.
RÉPLIQUE, s. f. Signifie oc/oie quand il s'agit d'un son redouljlé,
et reprise du sujet lorsqu'on parle d'une fugue.
RÉPONSE, s. f. Imitation d'un sujet de fugue dans laquelle on
altère quelque intervalle de ce sujet (voy. ch. xil).
REPOS, s. m. Terminaison d'une phrase, d'une période, etc.,
dans un morceau de musique; on distingae les repos incidens des
repos finals.
REPRISE, s. f. Première et seconde moitié d'un morceau de mu-
sique dont la séparation est marcjuée d'une double barre accom-
pagnée de points comme ceci II Cette séparation indique que
chaque moitié de ce morceau doit être chantée ou jouée deux
DE MUSIQT3E. 379
REPRISE D'UN OPÉRA. Représentation qu'on donne après
;ivoir été jjIus ou moins long-temps sans le jouer.
REPRISE DU SUJET. Rentrée, par le tbème d'une fugue, d'une
partie qui a fait un repos.
RESOLUTION. Succession d'un intervalle ou d'un accord conson-
naut à un intervalle ou à un accord affecté de dissonance.
RESONNANCE, s. f. Production du son par la mise en vibration
d'un coips sonore tel qu'une corde, une table harmonique,
nn tuyau , une plaque métallique, etc.
RESP1R.4.T10N, s. f. Action des poumons lorsqu'ils se remplissent
d'air et qu'ils le re|)oussent ensuite. Cette action se compose de
Vaspiratian , c'est-à-dire, de l'atlniclion de l'air, et de l'expira-
tion , c'est-à-dire la ré|)ulsion de l'air. L'art de respirer à propos
etde ménager la respiration est une des parties les plus difficiles
du chant.
RESSERRER L'HARMONIE. C'est rapprocher autant que possible
les uns des autres tous les sons qui entrent dans sa compo-
sition.
RETARD, s. m. Le retard d'une note d'un accord résulte de la
pio/ongation d'une autre note qui lui est étrangère (voy. Piolon-
gation').
RHYTHME, s. m. Combinaison symétrique des durées longues et
brèves des sons (voy. ch. xi).
RHYTHMIQUE (musique). Qui est ordonné dans un ordre symé-
trique de durées.
IIICERCARE oc RICERCATA (recherche ou recherchée). Morceau
de musique h.isé sur l'imitation d'un ou de plusieurs tlièmes
qui concourent à former un ton mélodique et liarmonique. Les
duos et le» trios de Clari, de Steffani, de Durante et de Haudel
sont des ricercari.
RIGODON ou RIGAUDON. Air de danse à deux temps, d'un
mouvement vif , qui n'est plus en us:ige.
R.1jNF0RZAND0 , en renforçant. Mot italien qui indique une
nu.ince de force croissante des sons dans l'exécution de la mu-
sique.
V\W\\LSO , TempUssaae. Violino di ripieno , violon de remplissage,
c'est-à-dire partie de violon non oi>ligée.
RISOLUTO, c'est-à-dire d'une manière résolue. Indication de
mouvement décidé dans la musique.
380 UICTIONAIF.E
RIT ARDAHWO, en retardant. Mot qui indique l'obligation de ra-
lentir dans l'exécution de la musique. Ce mot est s.yuonyrae de
ral'enlando.
RITOURNELLE, s. f. Prélude instrumental qui précède le début
du chanteur dans un air ou dans tout autre morceau.
ROLE, s. m. Chanter un rôle c'est exécuter tous les moreaux qui
sont mis par le poète et le musicien dans la bouche d'un person-
nage d'un drame.
ROMANCE, s. f. Petit air avec ou sans paroles, d'un caractère sim-
ple et mélancolique, et d'une mélodie douce et pure.
RONDE , adj. pris subst. Nom d'une note de musique de forme
circulaire, sans queue, dont la durée est douljle de la blanche et
quadruple de la noire. Ou l'appelait autrefois semi-bieve.
IlONDK, s, f. Air de danse composé pour être chanté, divisé en
couplets avec un refrain qui souvent se répète en chœur et sur
lequel les danseurs sautent en cercle, se tenant parla main.
IlONDEAU, s. m. Morceau de musique dont le thème se reprend
deux ou trois fois, et qui peut élre d'uu mouvement lent ou vif.
Il y a des rondeaux pour la voix et pour les instrumens.
ROSALIE, s. f. Nom d'une phrase répétée plusieurs fois, en mon-
tant chaque fois d'un degré. Les rosalies sont considérées comme
des phrases défectueuses, parce qu'elles laissent trop prévoir
leur marche mélodique et harmonique.
ROSE, s. f. Nom des ouvertures circulaires pratiquées dans la ta-
ble des clavecins, théorlies, luths et guitares.
ROULADE, s. f. Nom vulgaire des traits rapides dans le chant.
ROULEMENT, s. m. Succession rapide de percussions sur la peau
tendue des tambours et des tjmbales.
SABOT, s. m. Sorte de crochet qui, dans les anciennes harpes,
pressait la corde pour l'élever d'un derai-ton lorsque le \neA de
l'exécutant s'appuyait sur la pédale qui correspondait à cette
corde. Ce mécanisme était défectueux et se dérangeait souvent;
Érard lui a substitué avec succès celui d'une fourchette qui
saisit la corde et la racourcit en tournant sur elle-même.
DE MUSIQUE. 381
SAGUEBUTE, s. f. Ancieu nom fiiinrais du trombone.
SALTARELLE. Air de dause italien à trois temps, en rhythm»;
boiteux de notes inégales.
SARABANDE, s. f. Air de danse espagnol, à trois temps, d'un
carartcre grave, et qu'on chantait quelquefois avec des paroles,
au lieu de le jouer avec les iustrumens.
SAUT, s. m. Toute succession de notes qui ne se suivent pas im-
médiatement dans l'ordre de la gamme ascendante ou descen-
dante est un saut. Dans l'art d'écrire, ces successions sont pros-
crites lorsqu'elles donnent lieu à des intonations difficiles ou à
des dissonances irrégulièrement attaquées ou résolues.
SAUTEREAU, s. m. Lame de bois mince, armée d'un morceau di.'
plume ou de buffle, qui, dans les clavecins, était poussé contre
les cordes par la touche; la plume ou le buffle, faisant l'effet
d'un ressort, produisait le son de la corde en s'éi happant.
SAUTEUSE, s. f. Valse d'un mouvement rapide, à deux temps.
SAUVER (^!a dissonance). C'est la résoudre en la faisant descendre
d'un degré sur la note suivante.
SCÈNE, s. f. On donne ce nom en musique à un air à plusieurs
mouvemens, précédé ou coupé de récitatifs.
SCHERZANDO. Mot italien qui indique un mode d'exécution lé-
gère et badine.
SCHERZO, badinage. Ce nom se donne maintenant aux morceaux
h trois temps des symphonies, quatuors, etc., qu'on appelait
autrefois menuets. Le nom de scherzo leur a été appliqué depuis
que leur mouvement s'est considérablement accéléré.
SCORDATURA. Mot italien qui n'a pas d'équivalent en français,
et qui signifie l'action de désaccorder les instrumens pour pro-
duire des effets particuliers. Paganini fait souvent usage de la
scordature; les guitaristes y ont aussi recours.
SEC, adj. Un son sec est celui qui n'est pas prolongé.
SECONDE, s. f. Intervalle dissonant de deux notes voisines. Il y a
trois sortes de seconde ; la seconde mineure , formée d'un demi-ton ;
la seconde majeure, formée d'un ton; la seconde augmentée , com-
posée d'un ton et demi.
SEGNO {al). Ces mots, placés près d'un signe quelconque à la fin
d'un morceau, indiquent qu'il faut recommencer à l'endroit où
ce signe est placé.
SEGUE, juiVeî. Ce mot, placé entre deux morceaux de musique,
383 DICTIONNAIRE
fait connaitre que le second doit suivre immédiatement le pre-
mier.
SEGUEDILLE ou SEGUIDILLE. Air de danse espagnol, à trois
temps, d'un mouvement ra])ide.
SEMI-BREVE, s. f. Ancien nom delà figure de note qu'on appelle
maintenant ronde.
SEMPLICE, avec simplicité. Indication d'un mode d'exécution
qu'on trouve quelquefois dansla musique.
SEPTIEME, s. f. Intervalle dissonant formé de deux notes qui sont
a la distance de six degrés diatoniques. Il y a trois sortes de sep-
tièmes: la septième mineure, composée de quatre tons et deux
demi-tons inégaux; la septième majeure, composée de cinq tons
et un demi-ton ; la septième diminuée, composée de deux tons et
trois demi-tons inégaux.
SEPTUOR, s. m. Composition pour sept voix on sept instrumens.
SERENADE, s. f. Concert qui se donne le soir sous les fenêtres de
quelqu'un, et qui est composé de voix ou d'instrumens.
Sérénade est aussi le nom de certains morceaux de musique oîi
le compositeur a fait des associations d'instrumens peu usitées ,
et dont la forme diffère en quelques points des autres pièces ré-
gulières.
SERINETTE, s. f. Très petit orgue à cylindre dont on se sert pour
l'éducation des serins.
SERPENT, s. m. Instrument à vent dont on se sert particulière-
ment dans les églises et dans la musique mililaireoù il forme la
Lasse avec le trombone et Vophiclèide. Le serpent se joue avec une
large embouchure qu'on apj>ellc èoca/. Cet instrumenta été long-
temps fort imparfait; on l'a perfectionné en lui ajoutant des
clefs.
SEXTUOR, s. m. Composition pour six voix ou six instrumens.
SFORZANDO, en renforçant. Ce mot italien indique une nuance
d'expression dans l'exécution de la musique, où l'intensité des
sons est augmentée graduellement.
SI. Septième note de la gamme d'u<, et l'un des noms dont on se
sert pour jo//îer (voy. ce mot).
SICILIENNE, s. f. Air originaire de Sicile, à ,,, d'uu mouvement
modéré. Chaque mesure de cet air commence par trois croches
dont la première est pointée.
SIGNES, 5. m, Caractèies qui servent à écrire la musique , et qui
DE MUSIQUE. 383
se composent des notes, des rlcfs, des dièses, bémols, béc.ir-
rcs, pauses, etc., etc.
SILENCES, s. m. Interruptions dans l'audition des sons, qui sont
mesurées coinine les sons eux-mêmes. Ou donne aux signes de
ces interruptions le nom de silences (voy. cli. vi).
SILLET, s. m. Petite pièce d'ivoire ou de bois dur placée à l'ex-
trémité supérieure du manche des instruniens à cordes piucées
ouàar'.bet, qui sert de point d'appui aux cordes, et qui les
élève de manière qu'elles ne posent pas sur la touche.
SISTRE , s. m. lastrumeut de percussion , en usage dans l'ancienne
Egypte. Il était composé d'un corps sonore de métal, d'une
forme à peu près ovale, qui était percé de trous pour y poser
des baguettes métalliques, sur lesquelles ou frappait pour en ti-
rer des sons.
SIXTE, s. f. Intervalle consonnant qui tire son nom de la quantité
de degrés compris dans leurs extrémités. Il y a trois sortes de
sixtes: la sixte mineure, composée de trois tons et deux demi-
tons inégaux; la sixle majeure, composée de quatre tons et un
demi-ton; la sixte augmentée , composée de quatre tons et deux
demi-tons inégaux.
SMORZANDO (voy. Diminuendo). ,
SOL. Cinquième note de la gamme d'uf et l'un des noms dont on
se sert pour solfier.
SOLFEGE ou plutôt SOLFEGES, s. m. Collection d'exercices des-
tinés à faire solfier les élèves, c'est-à-dire à chanter en nom-
mant les notes. On donne généralement le nom de solfèges aux
livres élémentaires qui contiennent les principes de la musique,
et des leçons propres à solfier, disposées dans un ordre systé-
matique.
SOLFIER, V. n. Chanter des exercices de solfège en nommant les
notes.
SOLO, s. m. Mot italien francisé qui, ap|)liqué à la musique, si-
gnifie un morceau joué par un seul instrument, communément
accompagné par un orchestre plus ou moins considérable. Ce
mot s'applique aussi à l'artiste qui, dans une chapelle, un or-
chestre, ou toute autre assemblée de musiciens, joue les solos
écrits pour son instrumeut; ainsi on dit un violon solo, un r/o-
loncelle solo , etc.
384 DirTioNX/viRt
.'jOf.MiSATION, s. f. A<tion de solfier (voy. Solfer pt Solfège).
SOLUTION, s. f. Se dit d'un c:iuoii énigmutique dont on a trouvé
la clef, la solution.
SOMMIER, s. m. Espèce de coffre dont la table supérieure est
percée de trous, dans lesquels se place l'orifice des tuyaux
d'un orgue dont le registre est ouvert, et les fait sonner lorsque
l'organiste ouvre leur soupape en pressant avec les doigts le^
touches qui leur correspondent.
Le sommier d'un piano est la pièce de bois solide sur laquelle
s'appuie la table à l'endroit où sont placées les chevilles des
cordes.
.SON, s. m. Sensation qui se produit à l'oreille lorsqu'un corps
sonore est rais en vibration (voy. Corps sonore et Vibration). La
musique est le résultat des diverses modifications et combinai-
sons de la sensation du ton.
SONORE, adj. Qui a du son, un son volumineux. On dit d'une
voix bien limlrèe (voy. ce mot) ou d'un bon instrument, qu'ils
sont wnores. Cela se dit aussi d'une salle de concert ou de spec-
tacle quand elles sont favorables à la propagation du son.
SONORITÉ , s. f. Qualité de ce qui est souore.
SONS HARMONIQUES. Ces sons se produisent lorsqu'une partie
seulement d'une corde ou d'une colonne d'air entre en vibra-
tion de manière à faire entendre ou la tierce majeure, ou la quinte,
ou l'octave de la corde totale, ou de toute la colonne d'air. Les
sons harmoniques ont une qualité plus donce, plus pure, plus
moelleuse que lesautres sons; on en fait maintenant un fré-
quent usage sur le violon, la harpe, la guitare, etc.
SONATE, s. f. Composition instrumentale, formée de trois ou
quatre morceaux de caractères différens, dont le nom vient de
l'italien Juonare, qui signifie jouer d'un instrument. La sonate est
fjite quelquefois pour un instrument et quelquefois pour plu-
sieurs. Ce genre de pièce, qui a eu autrefois un succès de vogue,
est maintenant presque abandonné.
SONATINE, s. f. Petite sonate, sonate facile.
SONNER, V. act. On disait autrefois sonner de la trompette; on
dit maintenantjoue»- de cet instrument comme de tous les autres.
SONNERIE , s. f. Air ou trait destiné à être joué sur la trompette,
pour indiquer les diverses parties du service de la cavalerie mi-
«F- MUSIQUE. 385
litaiii'. Il y .1 viiiot-hiiit soîinrries prescrites i)P.r rorcloi)!!:!m'c
pour li; servie»;.
SONOMÈTRE, s. ra. Instrument destiné à mesurer l'intensité du
son. M. Montu a présenté à l'Institnt, il y a quelques années",
nn sonomètre d'une autre esj)èce; c'était une sorte de piano des-
tiné à mesurer tous les intervalles admissibles dans la musique.
SOPRANO. Voix de femme, d'enfant ou de castrat, appelée en
français dessus. Primo soprano , premier dessus ; seconda soprano,
deuxième dessus. Soprano fait soprani au pluriel.
SOSTENUTO. Soutenu, d'un mouvement et d'un caractère larges.
SOTTE VOCE. Ces mots écrits dans la musique indiquent un
mode d'exécution à demi-voix ou à demi-jeu , c'est-à-dire avec
j)eu d'intensité de son.
■SOl^FFLERIE, s. f. L'ensemble des soufflets d'un orgue. On donne
aussi ce nom au local oii est placé l'appareil de la soufflerie.
SOUFFLETS DE L'ORGUE. Appareils co~miiosé de planches réu-
nies par des peaux collées, qui fournissent le vent aux sommiers
de l'instrument, pour être ensuite distribué dans les tuyaux
(voy. cil. xv).
SOUFFLEUR, s. ra. Musicien qui, ayant la partition de l'opéra
qu'on exécute sous les yeux, guide les acteurs et soulage leur
mémoire en leur indiquant les parolesdes morceaux qu'ils chan-
tent.
SOUFFLEUR D 'ORGUE. Homme qui fait mouvoir les soufflets de
cet instrument.
SOUPIR, s. m. Signe de silence dont la durée est égale à celle
d une noire.
SOURDINE, s. f. Espèce d'épinette d'un son sourd et agréable,
dont les cordes n'étaient pas pincées par des plumes, mais étaient
to:ichées par des sautereaux garnis de drap.
SoLS'vDiNE, s. f. Morceau de bois préparé pour être placé sur le
chevalet du violon, de la viole et de la basse, afin d'en amortir
les sons dans certains effets indiqués par le compositeur au
moyen de ces mots : Con sordini. Pour les sourdines du hautbois
et de la clarinette, on a imaginé de faire des pavillons rentrans
eu dedans et n'ayant qu'une petite ouverture. La sourdine des
cors est un cone en carton, percé d'un trou à sa base et qu'on
place dans le )iavillon.
SOIIS-DOMIIVANTE. Nom générique de la quatrième note d'un
33
386 DICTIONNAIRE
ton quelconque. On désigne quelquefois cette note sons le nom
(le quatrième degré.
SPIRITÛSO, avec feu. Ce mot se place à la tête de certains mor-
ceaux pour indiquer le mode d'exécution.
STACCATO, détaché. Ce mot indique que l'archet doit détacher
toutes les notes.
STRETTE, s. f., en italien STRETTO. Partie dune fugue où le
sujet est traité d'une manière plus serrée qu'au commencement.
Ce mot vient de reUretlo , serré (voy. ch. xii).
On se sert aussi du mot slrelte pour indiquer le mouvement ac-
céléré des finales d'opéra.
STYLE, s. m. On se sert de ce mot, en parlant de la musique, pour
désigner le caractère distinctif d'uue composition ou du talent
d'un exécutant. A Tégard de la composition, le sljle consiste
particulièrement dans la propriété des idées par rapport au
genre du morceau et « la pureté dans la manière d'écrire. A l'é-
gard de rexé<'Ution, c'est une certaine manière individuelle que
l'artiste s'est faite, et qui est le fruit de son organisation et de ses
études.
SUBSTITUTION, s. f. Changement de note dans un accord (voy.
ch. xi).
SUITE, s. f. Nom ancien d'une certaine collection des morceaux
pour le clavecin, l'orgue, etc. Ces suites contenaient des fugues,
des préludes, des gigues, allemandes, etc. On a les .«uites de
Haendel et de Bacli, qui sont des modèles de beautés instrumen-
tales.
SUJET, s. m. Thème sur lequel on écrit une fugue {-noy. ch.
xii).
SUPPOSITION {accords par). Nom par lequel on désignait, dans
le système de la iaMe/onciamfnïa/» de Ran.eau, certains accords
qu'on faisait provenir de notes ajoutées au-dessus de certains
autres.
SUSPENSION, s. f. Retard dans la résolution d'une ou de plu-
sieurs notes d'une harmonie ou même d'un accord entier (voy.
Pivlongation et Retard. Yoy. aussi le ch. xi)-
SYMPHONIASTE, s. m. Compositeur de plain-ciiant.
SYMPHONIE, s. f. Dans l'acception générale de ce mot, il signifie
une composition pour plusieurs inslrumens; mais dans l'usage
habituel, c'est le nom d'une œuvre divisée en quatre morceaux
DE MUSIQUE. 387
pour un orchestre complet. Les symphonies de Haydn, de Mo-
zart et de Beethoven sont connues de tout le monde (voy.
cb. XTii).
Les Itiiliens donnent le nom de simphonia (symphonies) aux
ouvertures de leurs opéras.
SYMI'HO.ME CONCERTANTE, s. f. Morceau concerté pour
plusieurs instrumens obligés avec accompagnement d'orchestre.
SYAlPHOMSTE,s. m. Musicien dorchestre.
SY>'COPE, s. f. Liaison de deux sons semblables dont le premier
se trouve au temps faible et le second au temps fort de la me-
sure. On donne quelquefois à la syncope le nom de ligature.
SYSTEME, s. m. Ce mot a deux acceptions. Dans la première, il
signilJe doctrine de l'ensemble des connaissances musicales ou
de quelque partie de la musique; dans l'autre, c'est la disposi-
tion de l'échelle musicale d'un peuple ou d'une époque.
TABLATURE , s. f. Manière de noter la musique de certains ins-
trumens, tels que le luth, le clavecin, l'orgue, dans les seizième
et dix-septième siècles, afin d'en faciliter l'impression, la com|>li-
cation de ce genre de musique offrant de trop grandes difficul-
tés par les caractères ordinaires de musique, à une é|)oque où la
typographie n'était pas avancée sous ce rapport.
Tablature est aussi le tableau de l'étendue des instrumens à
vent et à trous latéraux , et du doigté de ces instrumens.
TABLE D'HARMOjVIE. Partie sonore delà caisse des instrumens
à claviers et à cordes pincées. La partie sur laquelle on appuie le
chevalet des violons, violes et basse, en est la table d harmonie.
Ou l'appelle simplement /a table.
TABLER , V. act., un violon , une basse, etc. C'est coller Id tablesur
les éclisses (voy. ce mot). Détabler, c'est décoller cette table pour
corriger quelque défaut de l'instrument.
TACET. Mot latin qu'on écrit dans la musique pour indiquer le si-
lence d'une partie pendant un morceau.
TAILLE, s. f. Nom qu'on donnait autrefois eu France à la voix de
ténor. On dit encore basse-taille, qui signifie ténor grave , au lieu
de dire simplement comme les Italiens basse.
388 DICTIONNAIRE
TAMBOUR, s. m. Instrument de percussion dont on fait particu-
lièrement usage dans la musique militaire, où on lui donne le
nom décaisse pour le distinguer de celui qui en joue, et auquel
on donne aussi le nom de tambour. Le tambour est composé d'une
caisse ronde en cuivre ou en l)ois, dont les extrémités sont cou-
vertes d'une peau tendue au moyen de cerceaux et de cordes.
On joue du tambour en le battant avec deux baguettes.
TAMBOUR (gros) ou grosse caisse. Tambour de grande dimension
qui , réuni aux cymbales et au pavillon chinois, marquetés temjis
de la mesure et le rhythme dans la musique militaire. Celui qui
en joue le porte suspendu horizontalement et frappe une des
peaux dont il est recouvert à ses extrémités avec une baguette
garnie d'une balle de peau.
Rossini et les musiciens de son école ont introduit le gros
tambour dans les finales et dans certains autres morceaux d'o-
péra.
TAMBOUR ROULANT (voy. Caisse roulante).
TAMBOUR DE BASQUE. Petit tambour composé d'un cercle de
bois, de deux à trois pouces de largeur, avec une peau tendue
d'un côté du cercle, auquel sont attachés des grelots et des lames
de métal. La peau du tambour se frappe avec le dos de la main,
et l'on fait résonner les grelots soit en glissant le doigt sur la
peau du tamijour, soit en agitant celui-ci.
TAMBOURIN, s. m. Tambour d'un diamètre étroit, mais j)lus
long que le tambour ordinaire, dont on joue dans la Provence
pour marquer le rhythme de la danse. Celui qui en joue avec
une seule baguette le tient suspendu à la main qui tient aussi
le galoubet sur lequel il exécute les airs de danse.
Tambourin, s. m. C'est aussi le nom d'un air de danse qui n'est
plus en usage.
TAM-TAM, s. m. Instrument de percussion originaire de la Chine
et de l'Inde, composé d'un grand plateau de mélauge métalli-
que dont le son est très fort et se fait entendre long-temps. On
s'en sert dans certains effets sombres de la musique dramatique.
TARENTELLE, s. f. Air de danse napolitain d'un caractère gai,
en mesure à deux temps. Cet air est court, mais on le recom-
mence plusieurs fois.
TARENTISME , s. m. Maladie qu'on suppose être occasionnée par
la piqûre d'une sorte d'araignée, nommée tarentule, qui se trouve
DE MUSIQUE. 389
dans le royaume de Naples, et qui, dit-on, ne peut être guciio
que par la musique. Les dernières observations des médecins
ont démontré que la maladie et la guérisou ne sont que des
spéi'idations de charlatans.
TASTO SOLO (<i louche seule). Mots italiens qu'où écrivait autre-
fois dans la partie de l'organiste, pour lui faire connaître qu'il
ne devait pas accompagner la basse par les accords de la main
droite.
TEMPÉRAMENT, s.' m. Égalisation approximative des demi-
tons chromatiques de l'éclielle musicale, que les accordeurs de
pianos et d'orgue obtiennent en altérant un peu la justesse ab-
solue de tous les intervalles (voy. ch. xi).
TEMPO DI MARCIA. Moiwement de marche; — DE MTNUETTO,
de menuet ; — GIUSTO, modéré. Indications de mouvement
qu'on place en tête de quelques morceaux de musique.
TEMPS , s. m. Durée d'une certaine portion de la mesure musicale.
Une mesure est à deux, à trois ou quatre temps, selon qu'où
mesure une certaine quantité de notes d'une valeur déterminée,
en deux, trois ou quatre parties. La rapidité ou la lenteur des
temps dépend du moucemeril (voy. ce mot. Voy. aussi Mesure et
ch. vi).
TEMPS FAIBLE. On appelle ainsi les temps pairs de chaque me-
sure; ainsi, dans les mesures à deux et à trois temps, le second
est le temps faible ; dans la mesure à quatre temps, le second
et le quatrième sont fiiililes.
TEMPS FORT. Temps impairs de chaque mesure; ainsi dans la
mesure à deux temps, c'est le premier qui est fort; dans la me-
sure à trois et quatre temps, le premier et le troisième sont
forts. C'est sur le temps fort que se placent les syllabes longues et
accentuées.
TENOR, s. m. Voix d'homme dont l'étendue est la même à peu
près que le soprano , une octave plus bas. Au reste , cette étendue
varie selon les individus.
TENUE , s. f. Note soutenue pendant un certain nombre de me-
sures.
TERNAIRE, adj. Composé de trois unités. La mesura lema&e est
celle qui est divisée en trois temps ; le temps ternaire est celui qui
est fractionné par trois notes (voy. ch. vi).
TERPODIUM, s, va. Instrument de l'espèce des clavi- cylindres.
390 DICTIONNAI&E
inventé vers 1817, par M. Jean David Bascbmano de Friede»
ric-hsrode, près de Gotba.
TERZETTO, s. m. (voy. Trio).
TÉTRACORDE, s. m. Suite de quatre sons par laquelle les Grecs
divisaient l'étendue générale de leur érbelle musicale. Par cxem~
pie, lU, rè, mi, fa , composaient un tétracorde.
THEME, s. m. Sujet que le musicien entreprend de traiter dans
une composition. La première phrase d'un air en est le thème.
Le thème d'une fugue s'appelle sujet (voy. ce mot).
THÉORBE, s. m. Instrument à cordes de la famille des luths, in-
venté au commencement du seizième siècle, par un musicien ita-
lien nommé Rardella. Le théorhe est jilus grand que le luth et a
deux têtes, l'une pour les cordes qui se doigtent sur le manche,
l'autre pour les grosses cordes qui servent pour les basses et
qui se pincent avide. Le dictionnaire de l'académie a con-
servé l'ancienne manière d'écrire le nom de cet instrument:
tuorbe.
TIERCE , s. f. Intervalle consounant qui se divise en quatre sortes :
1° la tierce mineure, formée d'un ton et demi; la tierce majeure,
iomposée de deux tons; la tierce augmentée , qui renferme deux
tons et demi, et la tierce diminuée , composée de deux demi-
tons inégaux.
TIERCE DE PICARDIE. On donne quelquefois ce nom à la tierce
majeure qui terminait souvent des morceaux de musique d'é-
glise en mode mineur.
TIERCE. Jeu d'orgue qui sonne la tierce au-dessus du prestant.
TIMBALES, s. f. pL Bassins semi-sphériques en cuivre, recoa-
verts d'une peau qui se tend par un cercle en fer et des vis. C'est
par ces vis que se change l'intonation des timbales au moyen
d'une tension plus ou moins forte des peaux. Les timbales se
jouent avec des baguettes de bois dur pour obtenir des sons
forts; pour les effets doux on a des baguettes recouvertes en
jjeau. Les timbales sont ordinairement au nombre de deux ;
on les accorde de manière à souuer la tonique et la dominanlt
fvoy. ces mots) des morceaux où on les emploie.
T[.MB.VLIER, s. m. Musicien qui joue des timbales.
TIMBRE, s- m. Son d'une cloche , d'une lame métallique ou d'un
ressort dont l'intonation peut être appréciée.
TIMBRE est aussi la qualité sonorç d'un instrument ou d'une ?oin.
DE MUSIQUE. 391
On dit : Ce violon a du timbre; cette voix est bien timbrée. On dit
aussi d'uuu voix pénétrante, qu'elle a un timbre métallique.
On donne encore le nom àe timbre ?i. la double corde à boyau
• jdacée contre la peau inférieure du tambour et qui vibre avec
elle.
TIMBRES, s. m. Nom que les vaudevillistes douneut aux airs
connus sur lesquels ils composent leurs couplets.
TIRADE, s. f. Ancien nom d'une suite de plusieurs notes diato-
niques de même valeur, en montant ou en descendant.
TIRANA, s. f. Cliauson espagnole, à trois temps, d'un raouve.
ment modéré et d'un rliyllime syncopé.
T1R.A.SSE, s f. Clavier de pédale d'orgue qui n'a point de som-
mier particulier, et qui ne parle qu'eu accrochant les notes de
la basse du clavier à la main.
TIRA-TUTTO. Registre qui ouvre tous les jeux de l'orgue à la
fois et qui épargne à l'organiste la peine de les ouvrir succès-
sivement.
TOCCATE, s. f. Pièce composée pour le clavecin ou le piano. Ce
mot vient de toccare ( toucher). La toccate diffère de la sonate
en ce qu'elle n'est souveut composée que d'un seul morceau.
TON, s. m. Ce root a plusieurs acceptions en musique. Dans la
première, c'est la distance qui se trouve entre deux notes dia-
toniques, comme ut et ré. Le ton se divise en deux demi-tons.
Dans la seconde, c'est la constitution d'une gamme quelconque
avec les signes qui la caractérisent, tels que les dièses elles
bémols. Ainsi l'on dit qu'une musique est dans le ton de ré ou
de /a, etc., selon qu'elle est écrite dans les conditions des
gammes de ré ou de fa; enfin, le ton est le degré d'élévation
ou d'al)aissement d'un instrument résultant de sri construction
ou de son accord. Quelques personnes, peu familiarisées avec le
vocabulaire de la musique, se servent aussi du mot ten dans
une fausse acception en le jjrenant pour synonyme de fon. C'est
ainsi qu'elles disent un ton faux pour un son faux.
TONAL, ALE, adj. Qui estçonforme au ton. Une fugue tonale est
une fugue qui fiiit entendre dans le sujet et la réponse les notes
principales du ton, c'est-à-dire la tonique et la dominante ( voy.
ces mots ).
TONALITE, s. f. Propriété constitutive des tons et des modes qui,
dans la musique modeiuc, résulte, quant au ton, du nipport de
392 DICTIONNAIRE
la noie sensible ( voy. ce mot ) avec le quatrième degré, et,
quant au mode (voy. ce mot), de la nature de la tierce et de
la sixte de la tonique (voy. ce mot). A l'égard du plain-cliant,
la tonalité se détermine par la position de la dominante ( voy. ce
mot) et de la finale ( voy. Plain-chanl).
TONIQUE, s. f. Première note de la gamme du ton dans lequel
est composé un morceau de musique.
TONS DU PLAIN-CHANT. Ils sont au nombre de huit, dont
quatre ont la dominante à la quinte supérieure de la tonique et
sont appelés authentiques ; ce sont les lef, 3e, 5e et ^e tons;
et quatre ont la dominante à la quarte supérieure de la tonique
et sont appelés plagaux; ce sont les 2e, 4^; 6e et 8e tons (voy.
Plaùi-chant^.
TONS DU COR ET DE LA TROMPETTE. Les tons du cor et de
la trompette sont des tubes qu'on ajoute à l'instrument et dont
le développement plus ou moins grand hausse ou baisse le ton
général de manière à fournir des gammes en ut, ré, mi V , etc.
( voy. chap. xix).
TOUCHE, s. f. La touche des instrumens à archet est la jiartie
supérieure de leur manche recouverte en ébène, et sur laquelle
les doigts appuient les cordes pour varier leurs intonations.
Les touches du clavier du piano ou de l'orgue sont les leviers
sur lesquels les doigts agissent pour faire parler les notes.
Les touches de la guitare sont les filets d'ivoire qui traversent
le manche et qui marquent les positions où il faut mettre les
doigts pour former les intonations.
TRAIT, s. m. On donne ce nom à certaines suites de notes ra-
pides qu'on exécute sur les instrumens ou avec la voix. C'est eu
ce sens qu'on dit des traits bnllans, des traits difficiles.
On donne aussi le nom de traits à des phrases mélodiques ou
à des successions d'harmonie. Ce trait de chant est joli; ce trait
d'harmonie est bien écrit.
TRANSITION, s. f. Passage inattendu d'un ton à un autre. La
transition est une des parties de la modulation.
TRANSITION ENHARMONIQUE. C'est celle dans laquelle une
ou plusieurs notes, après avoir été entendues comme apparte-
nant a un ton, changent tout à coup de nature et se transfor-
ment en notes d'un autre ton.
TRANSPOSER , v. a. Noter ou exécuter à première vue un mor-
DE MUSIQUE. 393
«•eiiu de musique dans un autre ton que celui où il est écrit,
TUAISSPOSITIDN, s. f. Opération jiar laquelle on change de ton
un morceau de musique. Cette ojiératiou offre quelques diffi-
cultés et exige de l'habitude pour être bien faite,
TREMOLANDO. Mot italien qui indique la nécessité de mouvoir
rapidement l'archet sur une même note.
TREMOLO {iremblement) . Mouvement rapide et continu sur
une note.
TRIANGLE, s. m. Instrument de percussion formé d'une tringle
de fer pliée en forme de triangle, sur laquelle on frappe avec
une verge courte de même métal et dont le son a quelque rap-
port avec celui d'une sonnette.
TRILLE, s. m. Mouvement accéléré de deux notes voisines dans
lequel l'instrumentiste ou le chanteur passe avec; rapidité de
l'une à l'autre. On donnait autrefois improprement au trille le
nom de cadence, et quelques personnes ont conservé cette ha-
bitude vicieuse.
TRIO, s. m. Composition pour trois voix ou trois instrumeîis. Le
trio instrumental est difficile à traiter pour produire de l'effet.
Le trio vocal est presque toujours accompagné.
Trio. L'un des quatre morceaux de la symphonie.
TRIOLET, s. m. Groupe de trois notes représentant une division
ternaire de temps musical.
TRITON, s. m. Nom de la quarte majeure, composée de trois tons,
et de l'accord dans lequel cet intervalle entre comme élément.
TROMBA. Nom italien de la trompette.
TROMBONE. Nom d'un instrument du genre de la trompette,
mais beaucoup plus grand, et dont on modifie les intonations
en allongeant ou raccourcissant son tube au moyen d'une
pompe à coulisse. Il y a trois trombones; le plus petit est le
trombone alto, le moyeu le trombone ténor, et le plus grand le
trombone basse; trombone est l'augmentatif de tromba.
TROMBONISTE, s. m. Musicien qui joue du trombone.
TROMPE, s. m. Cor dont on se sert à la chasse; le ton en est dur
et rauque. On donnait autrefois à cet instrument le nom de cor
de chasse.
TROMPETTE, s. f. Instrument de cuivre qui servit d'abord à la
guerre et qu'on a introduit ensuite dans l'orchestre. Ainsi que
le cor , la trompette peut changer de ton au moyeu de tubes
894 DICTIONHAIRE
supplémeDtaires appelés tons (voy. ce mot); mais chaque ton ne
fournit qu'un c-ertain nombre dénotes; les autres ne se trouvent
pas dans l'instrument. Pour olivier à cet inconvénient, M. Hal-
liday. Anglais, a imaginé d'adapter des clefs à la trompette (voy.
Bugte-Horn). Cette addition de clefs ayant changé la nature de
l'instrument, ou a essayé depuis de faire une trompette à cou-
lisse, dans le genre du trombone; mais le meilleur moyen dont
on s'est servi est celui du piston qui permet de faire toutes les
notes de la gamme chromatique en sons ouverts.
TROMPETTE. Jeu d'orgue de la classe des jeux d'anches. Les
tuyaux de ce jeu sont en étain et d'une forme conique; le
son qu'ils rendent a delà force et du mordant, (voy. chap. xv).
TROMPETTE, s. m. Nom de celui qui joue de la trompette dans
la cavalerie,
TROMPETTE MARINE, s. f. Instrument monté d'une seule corde
très grosse qa'on joue avec un archet en appuyant dessus le
pouce de la main gauche; la forme de cet instrument est fort
allongée et son dos est arrondi en poire.
TROMPETTISTE, s. m. Musicien qui joue de la trompette dans
les orchestres.
TUTTI {tous). Mot italien par lequel ou distingue dans lu musique
ce qui doit être exécuté par tous les instrumentistes ou tous les
chanteurs de ce qui est réservé comme solo.
TUYAUX D'ORGUE. Tubes de bois, d'étain ou d'un mélange mé-
tallique appelé étoffe, qui rendent des sons lorsque le veut des
soufflets y est introduit (voy. cliap. xv).
TYMPAINON, s. m. Instrument à cordes ayant la forme d'un tra-
pèze. Il est monté de cordes d'acier qu'on frappeavecde petites
baguettes recourbées vers le bout.
TYROLIENNES, s. f. Mélodies originaires du Tyrol, dont toute
l'harmonie ne consiste qu'en deux accords. Son mouvement est
modéré, et sa mesure est à trois temps.
u
UNDA-MARIS. Nom de registre d'orgue de huit pieds, accordé
un peu plus haut que les autres jeux et formant à cause de cela
une sorte de battement avec eux, qui a quelque analogie avec le
tnouvemeut des floti.
DB MUSIQUE. 395
UNISSON, ». m. Harmonie de deux sons dont l'intonation est
absolument la mûrae. On plaçait autrefois l'anissoo parmi les
intervalles; c'éliiit une erreur, car il n'y a point de distance entre
deux sons semlilables.
UNISSOINI, ou en abrégé UNIS, écrits dans une partition à la
partie vide du second violon, de la deuxième flùte, du second
hautbois, etc., indiquent que ces parties doivent jouer à l'unis*
son avec la première partie de Tinstrument de leur espèce.
UOMO (primo). Nom par lequel on désigne quelquefois un so-
praniste castrat.
URANION, s. m. Instrument à clavier inventé en 1810, dans la
Saxe, par un musicien nommé Buscliiiiann. Cet instrument a
quelque resseml)liiiice avec le mé/odion ; sa longueur est de quatre
pieds, sa largeur de deux, sa bauteur d'un pied et demi; son
étendue totale est de cinq octaves et demie; son cyliudre, couvert
en drap, est mis en mouvement par une roue.
UT. Première note de la gamme de ce nom, et l'una des syllabes
qui servent à la solmisation. On la remplace souvent par do,
qui est plus doux à prononcer en chantant.
VALEUR DES NOTES. Durée relative de» sons résultant de la
figure des notes. C'est ainsi qu'on dit que la ronde vaut deux
blanches, la blanche deux noires, etc., etc. (voy. cb. ti).
VALSE, s. f. Air de danse à trois temps sur lequel deux danseurs,
qui se ticnuent embrassés, pirouettent saus cesse. La valse est
originaire de l'Allemagne.
VARIATIONS, s. f pi. Broderies de différens genres qu'on fait
sur une mélodie de choix. Les variations sont à j)eu près la $eule
musique de piano qui, aujourd liui, a quelque chance de succès;
mais il y a lieu de croire qu'on reviendra à des choses plus
sérieuses.
VAUDEVILLES, s. m. Airs qui servent à chanter des couplets dans
les pièces auxquelles ils ont donné leur nom. Oa dit que ce genre
d'air français fut inventé par un maître de moulin à foulon,
nommé Basselin, du Val-de-Vire ; qu'on appela ensijtite ces air»
vanx-dt-virt, d'où est venu vaucffville.
396 mcTioîfNAir.T'
VEîfTRE, s. m. Point central de la viùialiou ùuue oonL' k,;. it.
Yir.RATION, s. f. Ebranlement des diverses parties d'un corps
sonore qui, se propageant dans l'air, procure à l'oreille la sen-
sation du son. L'éljraulement dont il s'agit établit un mouve-
ment de va et vient; chacun de ces mouveniens est une vibration,
VIELLE, s. f. Instrument à corde dont l'origine est inconnue. Il
se joue au moyen d'une roue enduite de colophane qu'on fait
tourner plus ou moins rapidement par une manivelle. Ses into-
nations se font an moyen des touches d'un clavier qui presse les
cordes contre la touche. La vielle fut un instrument fort à la
mode vers le milieu du dix-huitième siècle.
VIELLEUR, VIELLEUSE. Celui ou celle qui joue de la vielle.
VILLANCICO, s. m. Air espagnol d'un caractère animé.
VILL.OELLE, s. f. Air à voix seule ou à plusieurs parties, origi-
naire du royaume de Naples. Il y a des villanelles composées
pour être chantées et d'autres pour la danse.
VIOLE, s. f. Instrument de musique divisé en plusieurs espèces
au on appelait j>ardeisus ou dessus de viole , viole , pToprement
dite, viole bâtarde, basse de viole et violone. La viole ou basse de
viole fut celui de ces instrumens dont on fit le plus long-temps
usage. Elle était montée de sept cordes accordées en accord par-
fait.
VIOLE (quinte ou alto). Instrument accordé à la quinte inférieure
du violon, et qui est intermédiaire entre le violon et la basse. On
s'en sert communément dans l'orchestre.
VIOLE D'AMOUR. Instrument à archet, monté de sept cordes
accordées en accord parfait de re majeur. Il a en outre sons la
touche et sous le chevalet cinq ou six autres cordes d'acier ou de
laiton qui vibrentlorsqu'onjoue à vide les autres cordes. Les sons
de cet instrument oat quelque rapport avec ceux de Vharmonica
et sont agréables à l'oreille.
VIOLON, s. m. Instrument à arcliet, monté de quatre cordes, ac-
cordées ainsi : mi , la , ré, sol (voy. ch. xv).
VIOLONISTE, ou VIOLINISTE. Musicien qui joue du violon.
VIOLONCELLE, s. m. Instrument à cordes et à archet, qui sert
de basse au violon. Il est monté de quatre cordes accordées, la,
ré, sol, ut, a la clef de/a (voy. ch. xv).
VIOLONCELLISTE , s. m. Musicien qui joue du violoncelle.
VIOLONE, s. m. Instrument de grandes^ dimensions, qui ser-
DE MUSIQUE. 39 1
vait autrefois de contrebasse aux différentes espèces de violes.
VIVACE, vivement. Ce mot, placé au commencement d'un mor-
ceau de musique, iudique un mouvement rapide.
VOCAL, ALE , adj. Qui appartient à la voix. Musique vocale, mu-
sique pour les voix.
VOCALISATION, s. f. Art de diriger la voix dans le mécanisme du
rliant, au moyen d'exercices exécutés sur une voyelle.
VOCALISER, V. a. Exercer la voix à exécuter avec aisance les dif-
ficultés de l'art du chant.
VOILE DU PALAIS. Partie suj>érieure de l'intérieur de la bou-
ille , dont l'action modifie la uatuie des sons.
AOILE, VOILEE. Se dit de l'organe de la voix dont les sons
manquent naturellement d'éclat. Cela se dit aussi des instru-
meus : Ce violon a un timbre voilé.
VOIX, s. f. Organe qui produit le son de la parole et du chant, et
dont le siège est placé dans le larynx.
A'OIX ANGELIQUE. Ancien jeu d'orgue à anche qui a été aban-
donné a cause de sa qualité de son criarde.
\ OIX HUMAINE. Jeu d'orgue ainsi nommé à cause de sa res-
semblance avec la voix de l'homme (voy. ch. xv).
VOLATE,s. f. Nom d'un ancien ornement du chant qui n'est plus
en usage.
V. S. Ces deux lettres, placées an bas d'une page de musique,
sont l'abrégé des mots ; volll subito (tournez vite).
Z\. Syllabe dont ou se servait autrefois pour nommer le si hémol.
fîJt DU niCTrONNAtRE.
34
AVERTISSEMENT.
FoRKEL et M. LiCHTENTHAt oat publié des espèces
de Catalogues raisonnes de tout ce qui a été écrit sur la
musique dans les langues anciennes et modernes, sous
le titre de Littérature générale de la Musique *. La dis-
tribution qu'ils ont adoptée pour l'ordre systématique
des matières n'est pas exempte de défauts; cependant
j'ai cru devoir la suivre dans ce Catalogiie des livres fran-
çais qui traitent de la musique, afin que les personnes
qui voudront étendre leurs connaissances dans la littéra-
ture musicale, et qui auront recours aux auteurs dont je
viens de parler, n'éprouvent point d'embarras dans les
recherches qu'elles pourront faire dans leurs Bibliogra-
phies.
Le Catalogue que je donne ici offrira, j'espère , des
renseignemens utiles à beaucoup d'amateurs de musique ;
j'ai reçu si souvent des demandes d'indications partielles
sur les diverses branches de l'art que j'en ai reconnu la
nécessité.
(i) Allegemeine Litteratur di;r Musik odcr Ànhitung zur Keuntniss
Musikalischer liucher (Littérature générale de la iniisique ou intro-
duftioQ à la connaissance des livres de musique, pjr Forkel). Leip-
slck, Schwikert, 1792, in-80.
Dizzionario e bibliographia delta musica deldoUore PielroLichten-
thal. Milan, Âut. Foutana, 1S26, 4to1. ia-S°.
CATALOGUE SYSTEMATIQUE
DES
PRINCIPAUX OUVRAGES FRANÇAIS^,
su R LES DIVERSES PARTIES DE LA. MUSIQUE.
CHAPITRE I.
ORIGINE, ÉLOGE, UTILITE, EFFETS DE LA MUSIQUE.
GRESSET (Jean-Biiptiste-Louis), né à Amiens en 1709, mort à
Paris en 1777. Discours sur l'harmonie (la musique en général),
Paris, 1737, in-S". Ouvrage de peu de -valeur
TELTN (Guillaume), né à Cusset, en Auvergne, dans les premières
années du seizième siècle: la Louange de la Musique. Paris,
i533, in-40.
YPiIARTE (D. Thomas de). La Musique, poème traduit de l'espa-
gnol par J.-R.-C. Grainville, et accompagné de notes par Langlé,
membre et Lihliothécaire du Conservatoire. Paris, 1799, >i-i2.
BORDENAVE (M.). La Musique, poème eu quatre chants. Paris,
Lenormarid, i8fl,in-8°.
— Réflexions sur la musique, ou Recherches sur la cause des ef-
fets qu'elle produit, par Y... Paris, Nyon, 1785, în-12.
BRIJON (E.-R.). L'Apollon moderne, ou développement intellec"
tuel par les sons de la musique. Paris et Lyon, 178 1, in-8o.
Livre de peu de valeur, mais basé sur une idée assez originale.
OLIVIER. L'Esprit d'Orphée, ou l'Influence de la musique sur la
morale et la législation. Paris, Pougens, 1798, 92 pages in-80.
Brochure où se trouvent des vues utiles.
ROGER (Joseph-Louis), né à Straslionrg, médecin à Montpellier.
Traité des effets de la musique sur le corps humain, traduit du
latin, et augmenté de notes par Etienne-Marie de Saint-Ursin ,
(l; P.ir les pi inripnuxouvrogesy on u'tntend point p.irlcr des plus yolumlneuï,
niait d< ceux 4ui reufernieot le plut de faits, de renteiguciuens ou de tu«9 utiles.
400 CATALOGUE
niéJecin de]MontpelHer. Paris, Treuttel et Wiirtz, i8o3, in-S".
Excellent ouvrage qui contient ce qu'on a écrit de mieux sur
cette matière.
DEBOUT (Louis). Sur l'effet de la musique dans les maladies
nerveuses, traduit de l'italien. Pétersliourg, 17S4, in-S».
GTJIAUD fils, docteur en médecine de la faculté de Paris. Consi-
dérations littéraires et médicales sur la musique, lues à la séame
publique de la société de médecine de Marseille. Marseille,
i8t6, in-i2.
MAJON (Benoît). Mémoire sur l'utilité de la musique dans l'état
de sauté et dans celui de maladie, traduit de l'italien par le doc-
teur Muggetti de Pavie. Paris, i8o3, in-80.
Bon ouvrage de peu d'étendue.
CHAPITRE II.
LITTÉRATURE DE l'hISTOIRE DE LA MUSIQUE.
I. Histoire générale.
BONNET (Pierre) et BOURDELOT. Histoire de la musique de-
puis son origine, les progrès successifs de cet art jusqu'à présent
et la comparaison de la musique italienne et de la musique
française. La Haie, 1743, 4 '^'ol- in-i^.
Ouvrage superficiel et mal fait, si on le considère comme une
histoire de la musique, mais qui fournit desrenseignemens utiles
sur la musique du temps de Louis XIV et particulièrement sur
Lulli. La Comparaison de la musique italienne avec la mu.sique
française, qui forme les deux derniers volumes, est d'un autre
auteur nomme Lecerf de la Vieuvillede Fresneuse.
BLAINVILLE (Charles-Henri de). Histoire générale, critique et
philologique delà musique. Paris, Pissot, 1767, in-4°.
Livre rempli de préjugés et dépourvu de critique, mais quia
conservé quelque valeur dans le commerce.
ROUSSIEPi (l'abbé). Mémoire sur la musique des anciens, où l'on
expose les principes des proportions authentiques, dites de Py-
thagore, et de divers systèmes de musique chez les Grecs, les
, Chinois et les Egyptiens. Paris, Lacombe, 1770, iii-4o>
SYSTÉMATIQUE. 401
Ouvrage où il y a de l'esjirit de recherclie, mais qui a pour
base un système faux.
LA BORDK (Jeaii-Beujamiii de), premier valet de cliamlirc de
Louis XV, né en I7')iîi mort le 20 juillet 179.1. Essai sur la mu-
sique ancienne et moderne. Paris, Onfroy, r7So, 4 vol. iu-',".
rollertiou de 1 fnseigiiciiKJiis sur toutes les iKirlies de la mu-
sique, faite sans ordre et remplie d'erreurs, mais oîi l'on trouve
beaucoup de elioses curieuses et utiles.
RALKBEîNiNER (Chrétien), i-ompositeuretécrivaiusur la musique,
né à Cassel en 1755, mort à Paris en 1806. Histoire de la mu-
sique. Paris, Delavau, 1S02, 2 vol. iu-So en un.
Cet ouvrage est particulièrement relatif à la musi<iue des Hé-
breux et des Grecs.
BAWR (Madame de). Histoire (al)régée) de la musique. Paris,
182'i, Andot, I vol. in-r2.
Ce petit volume fait partie de V Encyclopédie des Dames.
EETIS (Franc. -Jos.). Curiosités liistoriques de la musique, complé-
ment nécessaire de la Musique mise a la portée de tout le monde,
Paris. Janet et Cotelle, i,S3o, in-Sn.
STAFFORD. Histoire delà musique, traduite de l'anglais par ma-
dame Adèle Fétis, ave<; des notes, des additions et des correc-
tions par M. Fétis. Paris, Paulin, 1802, i vol. in-12.
II. Histoire de la musique des peuples anciens.
VILLOTEAU (.I.-A.). Mémoires sur la musique des anciens Egyp-
tiens et sur les instrumens de musique du même peuple.
Ces Mémoires, remplis de reclierclies et de choses excellentes,
se trouvent dans les deux éditions de la Description delEg/pte,
etc., publiée aux frais du Gouvernement fr.incais et [>ar M. Pan-
kotike.
AMIOT (le P.), jésuite, missionnaire <à la Chine. Mémoire sur la
musique des Chinois tant anoiciis que modernes. Paris, l'^So,
in-40.
Cet ouvrage forme le (ie volume de la <iillectiou qui a pour
titre : Mémoires concernant l'hisloire, les sciences, les arts, etc., des
Chinois, par les missionnaires de Péhin.
CALMET (Augustin). Dissertation sur lu musique des anciens et
particulièrement des Hébreux.
34.
402 CATALOGUE
Cette dissertation se trouve dans le Commentaire littéral sur
la Bible, de cet auteur. Amsterdam, X723, in-S", t. IV, p. 46-52.
COISTAINT DE LA MOLLETTE (Philii.pe). Traité sur la poésie
et la musique des Hélireux, pour servir d'introduetion aux
psiiuraes expliqués. Paris, Moutard, 17S1, in-So.
Ouvrage très faible.
GIRAL'LT (Claude-X;ivier). Lettre à Millin sur la musique des
Hébreux et sur l'iincienneté de la musique dans les églises.
Dans le M:igasin encyclopédique, 1810, t. I, p. 3l5.
FRAGUIER (l'abbé Claude-François ). Examen d'un passage de
Platon sur la musique. Dans les Mémoires de l'Académie des
inscri|)tious et belles-lettres, t. IIL p. rrS.
BURETTE (Jean-Pierre). Mémoires et dissertations sur la mu-
sique des Grecs. Dans les Mémoires de l'Académie des inscrip-
tious, t. IV, p. ir6; t. V, p. i33, iSa, 169, 200; t. VIII, p. 1,
44. 63, 80; t. X, p. 3, i8o-3io: t. XVII, p. 61-106, 106-126.
Toutes ces dissertations contiennent d'excellentes choses sur
le sujet dont il s'agit, et l'on y trouve une érudition ])rofonde.
CHATEAL"ISEUF (l'abbé de ^. Dialogue sur la musique des an-
cieus. Paris, 1725, in-12.
Ouvrage superficiel.
— Observations sur la musique, la flûte et la lyre des anciens.
Dans la Bibliothèque française publiée par l'abbé Goujet, t. V,
p. i07-ic>.5. Ces observations sont relativesà l'ouvrage précédent.
BOURGEAUT ( le P. Guillaume Hyacinthe ), jésuite. Nouvelles
conjectures sur la musique des Grecs et des Latins ( dans les
Mémoires de Trévoux, t. XLIX Juillet 1725, et dans le t. VII
de la Bibliothèque française ).
BARTHELEMY ( l'abbé Jean-Jacques ). Entretiens sur l'état de la
musique grecque vers le milieu du quatrième siècle avant l'ère
vulgaire. Paris, Debure, 1777, in-S".
DU CERCEAU ( Jean-Antoine), jésuite. Dissertation adressée au
P. Sanadon, où l'on examine la traduction et les remarques de
M. Dacier sur un endroit d'Horace, et où l'on explique par oc-
casion ce qui regarde le tétracorde des Grecs (dans les Mé-
moires de Trévoux, t. LU, p. loo, 284, 6o5; t. LUI, p. 1223,
i42o;t. LV,p 2oS5, 2189; t. LVI, p. 69,234).
ROUSSIER. (l'abbé). Lettre à l'auteur du Journal des beaux-
arts et des sciences, touchant la divisioa du îodiaque, l'mstitu-
SYSTEMATIQUE. 403
tion de la semaine plimétaire, relativement à une progression
géométrique d'où dépendent les proportions musicales. Paris,
l-j'i, in-i2, -i-J pages.
LA SALETTE ( V. Joubert de), ancien général de brigade, ins-
pecteur d'artillerie. Considérations sur les divers systèmes de la
musique ancienne et moderne, et sur le genre enliarmonique
des Grecs, avec une dissertation préliminaire relative à l'origine
du chant, delà lyre et de la flûte attribuée à Pan. Paris, Goujon,
i8iu, a vol. iu-S".
PERZnE ( François ). Dissertations et Mémoires sur le système
musical et la notation de la musique des Grecs ( dans la Rei'ue
Musicale, publiée par M. Fétis, t. III, p. 433, 481 ; t. IV, p. aS,
219; t. V, p. 24 r, 553; t. VIII, p.97; t. I.X, p. 129 ).
Travail excellent qui contient des vues neuves et beaucoup
de faits intéressaus.
SPON ( Jacques). Dissertation des cymbales, crotales et autres
instrumens des anciens ( dans les R echerches curieuses d'anti'
çufVe'^.Lyon, i683, p. i4*i-i5S).
FÉTIS ( Franr.-Jos. ). Esquisse de l'histoire des instrumens à
cordes pincées (dans le g« vol. de la Reçue Musicale, p. I, 1 1 ).
Cet article est seulement relatif aux lyres et aux cythares des
anciens.
Sur les diverses espèces de flûtes de l'antiquité et des temps
modernes (dans le] (3^ vol. de la Reçue Musicale, p. 8, 4q,
iSa).
Les trois articles dont il s'agit ne concernent que les flûtes
des anciens; la partie relative aux flûtes du moyen-âge et des
temps modernes n'a point été publiée.
Dissertation sur la connaissance que les anciens ont eue de
l'orgue pneumatique ( dans le 3* vol. de la Revue Musicale, p.
193)-
BOTJGEA??T (le P. Guitl. -Hyacinthe ). Dissertation sur la récita-
tion on le chant des anciennes tragédies des Grecs et des Ro-
mains (dans les Mcmoires de Trévoux, t. LXVIII, 1735, p. 24 S-
279)-
VATRY ( l'abbé ). Dissert.ition oii l'on traite des avantages que
la tragédie retirait de ses chœurs ( Voy. Mémoires des inscrip-
tions et helles-lelires, t. VIII, p. 199).
PERRAULT ( Charles ). Parallèle des anciens et des modernesen
ce q«H regarde les arts et les sciences, Paiis, lôgS, in-8".
'404 CATALOGUE
BEAUMONT ( Saunier de ). Lettres sur la musique ancienne et
moderne. Paris, i743, in.12.
BRUAUD ( Anne-Joseph ). Essai sur les effets de la musique chez
les anciens et chez les modernes. Tours, iSiS.in-S".
CHABAXON ( de ). Conjectures sur l'introduction des accords
dans la musique des anciens (dans les Mémoires de l'Acadcmie
des inscriptions et helles-lettres, t. XXXV, 1770, p. 36o ).
ROCHEFORT ( Guill. de). Recherches sur la symphonie des an-
ciens (dans les Mem. del'Acad. des inscriptions et belles-lettres,
t. XLI,p. 365).
JII. Histoire de la musique du moyen-âge.
Snr les bardes et les ménestrels irlandais ( dans la Revue Musiiale,
t. III, p. 393, 5o5 ).
Sur la notation musicale des treizième et quatorzième siècles ( dans
la Rei/ue Musicale, t. III p. 457 ).
PERNE ( François). Sur des instrumens de mnsique du moyen-
âge et sur un ouvrage manuscrit de Jérôme de Moravie ( dans la
Revue Musicale, t. II, p. 457» 4^1 )•
— Sur l'ancienne musique des chansons du châtelain de Coucy
(dans l'édition des Chansons de ce poète musicien, publiée par
M. Francisque Michel. Paris, i83o, grand in-S° ).
PEGERINS ( Boneton de Moranges de ). Dissertation sur l'origine
et l'utilité des chansons, particulièrement des vaudevilles ( dans
le Mercure de France, décembre 1704, p. 2645, 2661 ).
L'ÉVESQUE DE LA RAVALIÉRE. Discours sur l'ancienneté des
chansons françaises ( dans les Poésies du Roi de Xai'arre. Paris,
I745,t. I, p. 183 ).
FEÏIS ( Franc -Jos. ). Mémoires sur cette question: Quels onl éléles
mérites des Néerlandais dans la musique, principalement aux qua-
torzième, quinzième et seizième siècles? etc. Question mise an
concours pour l'année 1828 parla quatrième classe de l'Institut
des sciences littéraires et beaux-arts du royaume des Pays-Bas.
Amsterdam, J. MuUer et com])agnie, 1829, in-4° de 56 pages.
— Sur la vie et les ouvrages d'Adam de le Haie, trouvère du trei-
zième siècle ( dans la Revue Musicale, t. I, p. 6 ).
— Sur les anciens airs français ( Revue Musicale, t. III, p. 36l ).
-— Sur un manuscrit de la bibliothèque du roi, qui contient de 1^
musitjue du quatorzième siècle (Revue musicale, t. XII, p. 266).
SVSTLMATlQtlE. 403
— Recherches sur la musique des rois de France ( Revue Musicale,
t. XII, j). i()3, 218, 233, 242, 257 ).
— Découvertes sur le musicien belge Roland Lassus (ihid., t. XII,
p. 239).
— Sur les anciens airs écossais ( Rei'ue Musicale, t. XII, p. 261 ).
IV. Histoire de la musique moderne. *
GANTEZ (Annilial). Eiilielicn faniilirr des musiciens. Auxerre,
i<i/j3, iu-8°. Ouvrage curieux qui contient des reiiseigncmeiis
intéressaîis sur la musique du ilix-.scj)tième siècle.
BURNEY (Charles). Etat présent de la musique en France, en Ita-
lie, en Allemagne et dausles Pays-Bas; traduit de l'anglais, par
Brack. Gênes, 1809, 1810, 3 vol. in-8°.
Mauvaise traduction d'un livre rempli de faits intéressans et
de vues judicieuses.
ORLOFF (le comte Grégoire). Essai sur l'histoire de la musique en
Italie, depuis les temps les plus anciens jusqu'à nos jours. Paris,
Dufort, 1822. 2 vol. in-S".
Livre de peu de valeur. )
FETIS ( François-Joseph ). Etat actuel de la musique en Italie
(dans la Revue Musicale , t. I, p. 11, 63, 80, lAg)-
KANDLER. Sur l'état actuel de la musique à Rome; traduit de
l'italien (dans la Revue Musicale, t. III, p. 49. 73, 97).
— Etat actuel de la musique à INaples; traduit de l'italien [ibid. t.
IV, p. r, 49, 145).
FETIS (François-Joseph). Etat actuel delà musique en Allemagne
(^ibid. , t. 1 , 221 , 2y3 , 347).
STOEPEL (Fraucois). Eitat actuel de la musique en Allemagne
(ibid.,t. VI, p. i).
— Ohservations sur l'état actuel de la musique à Dresde (ibid. , t.
II, p. 234).
— Sur l'état actuel de la musique à Vienne {ibid., t. III, p. 121).
— Etat actuel de la musique à Breslau (_ibid., t. VI, p. 217).
FETIS (François-Joseph). Etat actuel de la musique en France
{ibid., t. I, p. 446, 485, 533, 55:).
CASTIL-BLAZE. La chapelle-musique des rois de France. Paris,
Paulin, i832, I vol. in-i2.
MÉNESTRIER (Le P. Claude-François). Des représentations ei»
lousique, auciennes et modernes, Paris, x68i], ia-X2.
406 CATALOGDS
— Lettres historiques sur tous les spectacles de Paris, Paris
1719, in-i2.
Titres concernant l'Académie royale de musique. Paris, iiZi, '
in-4°.
DUPDY. Lettres sur l'origine et les progrès de l'opéra en France
(dan? les Àmusemens du cœur et de l'esprit, par le même au-
teur. La Haye, 1741 > in-12).
N0I3SVILLE (le président Darcy). Histoire du théâtre de l'Acadé-
mie royale de Musique, depuis son établissement jusqu'à pré-
sent (1707); seconde édition. Paris, 1757, 2 toI. in-8°. La pre-
mière édition, eu un vol. io-8°, est de 1753.
COKT.\>T D'ORVILLE. Histoire de l'Opéra-Bouffon, contenant
les jugemeus de toutes les pièces qui ont paru depuis sa nais-
sance jusqu'à ce jour. Amsterdam et Paris, 1768, in-12.
DESEOULMIERS. Histoire du théâtre de l'Opéra-Comique. Pa-
ris, Lacombe, 1769, 7 vol. iu-12.
— Histoire auecdotique et raisonnée du Théâtre-Italien, depuis
son rétablissement en France jusqu'à l'année 1769. Paris, La-
combe, 176g, 7 vol. in-12.
ORIGIN'Y (M. d'). Annales du Théâtre-Italien, depuis son origine
jusqu'à ce jour. Paris, Duihesne, 1788, 3 vol. in-S".
DES ESS.\RTS (M ). Les trois théâtres de Paris, ou Abrégé histo-
rique de l'établissement de la Comédie-Française, de la Comé-
die Italienne ( Opéra-Comique ) et de l'Opéra. Paris, Lacombe,
1777, iu-8°.
FETIS (François-Joseph). Histoire de l'Opéra-Comique (dans la
Revue Musicale, t. III, p. Sag, 553).
LAPORTE (l'abl)é de). Bibliothèque des théâtres; Dictionnaire
dramatique contenant le catalogue alj)habétique des pièces
aramatiques, opéras, parodies et opér;.s comiques, avec des
aneidotes sur la plupart des pièces et sur la vie des auteurs mu-
siciens et ai-teurs. Paris, Duchesne, 1784, 3 vol. in-12.
GÉRARD. Tables chronologiques des pièces de l'Opéra. Paris,
1733, in-8°. — Tables chronologiques des pièces du nouveau
Théâtre-Italien (Jbid., i738,in-8°). — Tables chronologiques
des pièces représentées sur l'ancien Théâtre-Italien (lôjrf., l75o,
in-8°).
■ — Etat actuel de la musique du roi et des trois spectacles de
Paris. Paris, 1759-1777, 19 vol. iii-12.
SYSTÉMATIQUE. 407
Les années 1759 et 1760 ne sont que le même wilume dont
on :i clinngé le frontispice. Les premières années sont en grand
format, les autres, en petit. Eu 174J et 1744 > '1 avait déjà paru
un très petit volume , qui avait pour titre : Etat de la musique du
roi. On n'y trouvait que la composition de la chapelle, de la
musique particulière du roi et du concert spirituel.
Les spectacles de Paris, calendrier historique et chronologique
de tous les théâtres, commencé eu I75l, par l'abbé de Laporte,
et continué par lui jusqu'en 1778. Les huit années suivantes fu-
rent rédigées par un commis de Duchesne, le libraire, nommé
Androle. On ignore qui a continué cet almanach jusqu'en I79'i,
époque où sa pulilication fut interrompue. M. Guilbert Pixéré-
court le reprit en 1799 et publia aussi les deux années suivantes.
Ce recueil ne parut plus en 1802, mais on donna un volume
sous le même titre en 18 16. Depuis lors il a cessé de paraître.
La collection complète renferme 47 vol. in-i8. Paris, Duchesne,
1751-1816.
LUNEAU DE BOISGERMAIN. Almanach musical, 1782, 1783,
1784. Paris, 3 vol. in-12.
Petit ouvrage fait sur un bon plan.
FRAMERY (Nicolas-Etienne). Calendrier musical universel, con-
tenant l'iudieation des cérémonies d'église en musique, les dé-
couvertes et les anecdotes de l'année, un choix de poésies
adressées à des musiciens, la notice des pièces en mu.eique re-
présentées à Paris, à Versailles, à Saint-Cloud, sur les différens
théâtres de l'Europe, etc., pour^ l'année 1788. Paris, Prault,
I vol. in-12.
NOUGARET. Spectacles des foires et des boulevards de Paris, on
Calendrier historique et chronologique des théâtres forains.
Paris, 1773-1788, 8 vol. in-24.
— Almanach général de tous les spectacles de Paris et des pro-
vinces, pour l'année 1791, par une société de gens de lettres.
Paris, 1791, 1 vol. in-12.
Cet ouvrage était beaucoup mieux fait que celui que Duchesne
publiait ; cependant il n'eut pas de succès et ne parut que
cette fois.
VALLERON (M.). L'opinion du parterre, ou Revue des Théâtres
français, de i'Opéra, de rOpéia-Cumique national, de Louvois,
408 Catalogue
de l'Opcra-Buffa et du Vaudeville. Paris, MartiDCt, i8o4-i3i3,
g vol. in-i2.
Cet almanach de spectailes fait suite à un autre qui avait été
publié par Clément Courtois sous le titre de VOpmion du par-
terre ou censure des acteurs, auteurs et spectateurs du Théâtre-
Français. Paris, Martinet, gerra. an X[. La collection, y compris
ce volume, doit être de lo vol.
lUGUENAUD et AUDIFRED. Annuaire dramatique. Paris, ma-
dame Cavanagli, i8o5-iSiS, i3 vol. in-Sa. On y trouve des no-
tices assez bien faites sur quelques musiciens.
liOCQUET (J.-M.). Mémorial dramatique ou almauach théâtral,
depuis 1S07 jusqu'en 181 8. Paris, Hocquet, 12 vol. in-24-
(' VRDETOIS' (César). Annales de la musiijue ou almaiiacb musical
pour l'an 18 19. Idem pour l'an 1820. Paris, 2 vol. in-i8.
— Almanacli des spectacles, i822-i83i. Paris, Barba, 10 v. in-12.
L IICLERC (J.-B.). Riipport fait au conseil des Cinq-Cents sur l'éta.
biissement des écoles de musique. Paris, 1799, iu-S°.
Ml-IHUL (Etienne-Henri). Rapport fait à l'Institut sur l'état futur
(le la musique en France. — Idem sur les travaux des élèves du
Conservatoire qui sont pensionnaires de l'académie des Beaux-
Arts à Rome (dans le Magasin encjciop., 1808, t. V).
— • Règlement du Conservatoire impérial de musique et de décla-
mation. Paris, 1808, 4^ P^g- in-8°.
— Observations sur le Conservatoire de musique de Paris, dans
lesquelles on démontre les vices de cet établissement, et où l'on
|>ropose les moyens d'en améliorer le service et d'en diminuer
!es dépenses. Paris, madame veuve Courcier, i8i5, in-S".
CHAPITRE III.
POLÉMIQUE SUR tA COMPARAISON DE LA MUSIQUE ITAtlEWKK ET
DE LA MUSIQUE FRAITÇAISE.
RAGUENET (l'abbé). Parallèle des Italiens et des Français en ce
qui regarde la musique et les opéras. Paris, 1702, )n-i2. Ams-
terdam, 1704, 124 p.
DE FRF.S?iEUSK (.Fc:Mi-I.:iurPnt T.c Cc;f de 1.; Viru, ilir). Coinpa-
SYSTÉMATIQUK. 409
i'iiist)n «le 1« musique it.ilitJiine et de la musique frnnraise.
Bruxelles, i7o5, 2 vol. in-i2.
L'ablié Riigueoet s'était prunoncé en faveur de la musique
italienne contre la musique française. De Freneuse prit la dé-
fense de celle-ci. Sou ouvrage a été réimprimé avec la deuxième
édition de l'Histoire de la Musique, <le ISonnet.
U.VGUENET (rai)l>é). Défense du j)arallèie des Italiens et des
Français en ce qui regarde la musique etlesopéras. Paris, l7o5,
174 p- iu-i2.
Di: FRENEUSE (J.-L. Le Cerf de la Vieuville). L'art de décrier
i.e qu'on n'entend pas, ou le Médecin musicien. Paris, 1706, in-S".
C'est une réponse virulente au rédacteur du Journal des Sa-
vons, qui s'était pronoucé en faveur de l'aljbé Raguenet dans
cette dispute (ann. 1703, p. iig4).
.SFRRE (M. de), La Musique, poème enquatre chants. Lyon, 1717,
in-4o-
L'auteur traite, dans le premier chant, de la corruption du
goût de la musique française; dans le second, il fait la critique
de l'opéra français ; dans le tioisième, il fait un aperçu histo-
rique de la musique italienne, et, dans le quatrième, une com-
jiaraison entre la musique française et la musique italienne.
KRAUSE (Chr.-G.). Lettre sur l.i différencie entre la musique ita-
lienne et française. Berlin, 1748, in-S°.
CKIMM (F.-M., baron de). Le petit Prophète de Bohemichbroda,
in-80 de 48 pag. Sans date ni uom de lieu.
C'est une <:ritique mordante de l'opéra français. A la suite de
la publication de cet opuscule, il se forma deux [jartis, l'un com-
posé desamateurs de musique française, qui se rangeait à l'Opéra
«lu côté de la loge du roi, et qu'on appelait le coin du roi;
l'autre, formé des admirateurs de la musique italienne, qui se
mettait près de la loge de la reine, et qu'on désignait à cause de
cela sous le nom «lu coin de la reine. La première troupe de chan-
teurs italiens qu'on eût entendue en France depuis le cardinal
Mazarin était alors à Paris et jouait alternativement avec l'opéra
français. On appelait ces chanteurs les bouffons. Grimm et J.-J.
Rousseau étaient à I.t tête de leurs partisans et des détracteurs
delà musique française.
VOtSENON (l'abbé «le). Réponse du Coin du roi au Coin <'c l.i
reine. Janvier r7.'ii'), \ feuilles in-S".
35
410 CATALOGUE
OLBACH (le baron d'). Arrêt rendu à l'amphithéâtre de l'Opéra,
sur la plainte du milieu du parterre, intervenant dans la guerre
des coins. Paris, 1753, i feuille in-8o.
JOURDAN (...). Le Correcteur des bouffons à l'écolier dePrague.
Paris, 1753, în-8° de 20 pag.
PARISOT (A). Apologie du sublime bon mot. Paris, 1753.
Relation véritable et intéressante du combat des Fourches
caudines, livré à la place Maubert, au sujet des bouffons. Paris,
17.-J !, in-i2.
.TOURDAN (...). Seconde lettre du Correcteur des bouffons à l'éco-
lier de Prague, contenant quelques observations sur l'opéra de
Titon, h Jaloux corrigé et le Devin du village. Paris, le jour de la
reprise de Tilorij vendredi 4 mai 1753.
L'HERITIER (...). Lettre critique et historique sur la musique
française, l.i musique italienne et sur les bouffons, à madame D.
Paris, 1753, in-So.
— La nouvelle bigarrure. La Haye, 1753,140 p. in-ra.
— Epître aux Ijouffonistes, en vers. Paris, février 1753.
— La réforme de l'Opéra; sans nom de lieu. 1753.
MAIROBEPvT ( ... ). Les prophéties du grand prophète Monnet.
1753, I feuille in-S".
— Réponse au grand et au petit Prophète. 1753.
— Lettre écrite de l'autre monde par l'A. D. F. ( l'abbé DES-
FOATAINES ),à M. F. ( Fréron ). Paris, 1754, in-S".
Barbier, dans son Dictionnaire des Anonj-mes, etc. t. Il, p. 25 J,
attribue cet écrit à Suard; c'est certainement une erreur; Suard
n'écrivait point encore à celte époque.
ROUSSEAU ( Jean-Jacques ). Lettre d'un symphoniste de l'Aca-
démie royale de musique à ses camarades de l'onhestre.
Cet opuscule se trouve dans tjutes les éditions des œuvres de
l'auteur parmi les écrits relatifs à la musique.
SONNETTI (Jean-Jacques ). Le brigandage de la musiqae ita-
lienne. Amsterdam et Paris, 1780, I73 pages iu-12.
Le nom de Sonneui est à la signature de l'épître dédicatoire;
il y a lieu de croire que c'est un pseudonyme.
SYSTÉMATIQUE. 411
CHAPITRE IV.
rOLÉMIQUE SDR LA MUSIQD8 FRANÇAISE.
ROUSSEAU ( Jean-Jacques ). Lettre sur la musique française.
Paris, i753,in.S''.
Cet écrit, où brille le talent admirable de l'écrivain, fit une
sensation très vive au milieu de cette multitude de pampLlets
dont onlctait accablé. La question i.liangea après sa j)ublication.
Il ne fut plus question d'attaquer les bouffons, mais de défendre
la musique française contre les attaques de Rousseau, et de
nouvelles brochures furent encore lancées chaque jour dans la
circulation. Il serait trop long de les citer toutes; voici les titres
de celles qu'on remarqua plus que les autres.
1° La Guerre de l'Opéra, ou Parallèle de la musique française
et de l'italienne ( par Cazotle ). Paris, 1753, in-S"; 2° Justifi-
tion de la musique française contre la querelle qui lui a été faite
par un Allemand et un Allohroge ( par Morand). Iliid., 1754,
in-8°; 3° Constitution du patri.irclie de l'Opéra et lettre sur l'o-
rigine et les progrès dej l'Académie royiile de musique. Ibid.,
1754 ; 4° Réflexions sur les vrais principes de l'harmonie, con-
damnés par la constitution du patriarche de l'Opéra. Ibid., 1754;
So La Galerie de l'Académie royale de musique, contenant les
portraits en vers de ceux qui la composent en la présente année
1754, dédiée à J.-J. Rousseau de Genève ( par Travenol ). Paris,
1754, in-S"; 6° Supplique de l'Opéra à l'Apollon de la France.
Ibid, 1754; iu-l2. 7^ Deux Lettres sur la musique française ea
réponse à celle de J.-J. Rousseau. Paris, 1753, iu-S" ; 8° Apologie
de la musique et des musiciens français contre les J.ssertions peu
mélodieuses, peu mesurées et mal fondées du sieur Jean-Jacques
Rousseau, ci-devant citoyen de Genève ( par de Bonneval). Paris,
1754? in-8° ; 9° Apologie de la musique française contre
M. Rousseau ( par l'ahhé Laugier). Paris, i754,in-8°; 10° Arrêt
du conseil d'Apollon, rendu en faveur de l'orchestre de l'Opéra,
c.ontre le nommé J.-J. Rousseau, copiste de musique (par Tra-
venol). Paris, 1754, in-i2 ; 11° L'inipaitia'ité sur la musique,
épîtreà M. J.-J. Rousseau, par D. fi. ( Dandré Baidoii ), sans in-
dicatioade lieu, 1754, petit iu 4° <ie 3(5 pages; la" Lettie d'un
412 CATALOGUE
snge a un homme respectable et dont il a besoin ( par La Slcr-
//eVe ). Paris, 1734, in-S"; i3^ Examen de la lettre de M. Rous^
seau sur la musique française ( ]>ar Bâton jeune). Paris, 1704,
in-S° ; 14° Lettre d'un Visigoth a M. Fréron sur sa dispute har-
monique avec M. Piousseau (par l'alibé de Cateirac). Septiraa-
niopolis ( Paris), 1754, in-8°; iS" Oliservations sur la lettre de
J -J. Rousseau (par Cazoite). Paris, 1754, in-S" ; iC Doutes
d'un ])yrrlionien, proposés amiralement à J.-J. Rousseau ( jiar
Cosie d'Airobat"). Paris, 1754; 17° Lettre d'un Parisien, conte-
nant quelques réflexions sur celle de M. Rousseau ( par M. Eo-
binol, ancien notaire). Paris, 1754; 18° Lettre d'un académi-
cien de Bordeaux sur le fond de la musique, à l'occasion de la
lettre à M. J.-J. Rousseau contre la musique française ( par le
P. Casiel). Bordeaux et Paris, 1754, in-12; 19° Réponse criti-
que d'un académicien de Rouen à l'académicien de Bordeaux, sur
le plus profond de la musique ( par le P. Castel. L'auteur se
répondait à lui-même ). Paris, 1754, in-8° ; 20" Réfutation sui-
vie et détaillée des principes de M. Rousseau de Genève tou-
chant la musique française, adressée à lui-même en réponse à sa
lettre ( par M. Aubert ). Paris, 1754, in-8°; 210 Lettre sur celle
de M. J.-J. Rousseau, citoyen de Genève ( par M. Yzo ). Paris,
17D4, in-8o; 22° Apologie du goût français relativement à l'O-
péra, poème, a\ec les discours a|)ologéliques et les adieux aux
Bouffons ( par Caux de Capeval ). Paris, 1754, in 8°.
CHAPITRE V.
POLÉMIQUE SDR LA. MUSIQUE DE GLUCK F.T LA DISPUTE DES
GLUCKISTES ET DES PICCINISTES.
Les écrits les plus importans relatifs à cette dispute, la plu-
part extraits des journaux littéraires et autres de l'époque, ont
été recueillis et publiés par Pabbé Lei)lond, sous le titre de
Mémoires pour servir à l'histoire de la révolution opérée dans
la musique, par M. le chevalier Gluck, à Naples, et se trouve à
Paris chez Bailli, 1781, r vol. in-80 de 491 pages.
Les pièces qui n'ont point trouvé place dans ce recueil sont :
SYSTÉMATIQUE. 4t3
lo Lettre sur les propriétés de la langue française ( par C/ja-
hanon, dans le i)/e/-cu;e de janvier 1773, p. 171.)
2o Dialogue entre LuUy, Hameau, etc., ibid. ,177'i, vol. r,
1>. 74. C'est un éloge de la musique de Gluck.
3" Lettre à M. de Cliabanon pour servir de réponse à celle
qu'il a écrite sur les propriétés musicales delà langue française,
par M. le C. de S.-A. ( le cbevalier de Saint-Alban ). Ihid., fé-
vrier 1775, vol. 2, p. 192.
4° Lettre à M. le cLev. de sur l'opéra d'Orphée. Paris,
1774, in-So.
5» Lettre à M.... sur l'opéra diphigènie en Aulide. Paris,
1775, in-So.
6" Lettre à madame la marquise de... dans ses terres près de
Mantes, sur l'opéra d Iphigénie. Paris, X']'5, 3l p. iu-80.
7° Réflexions sur le merveilleux de nos opéras française! sur
le nouveau genre de musique. Paris, 1775, 4^ F- in-So.
8° Lettres sur les drames-opéras. Amsterdam et Paris, 1776,
55 p. in-8».
90 Réponse à l'auteur de la lettre sur les drames-opéras.
Londres et Paris, 1776, in-S».
100 Lettre sur la musique dramatique, par Camille Trillot,
fausset de la i^atbédjale d'Auscb. Paris, 1777, 43 p- in-80.
Camille Trillot est un pseudonyme.
no Lettre à M. le baron de la Vieille-Crocbe, au sujet de
Castor et Pollux, donné à Versailles le 16 mai 1777 ( dans le
Meicure de France, juillet 1777, p- 146 )■
120 ROUSSEAU ( J.-J. ). Lettre à M. Burney sur la musique,
avec des fi agmens d'observations sur VAlceste Italien de M. le
chevalier Gluck.
i3o Extrait d'une réponse du Petit Faiseur à son Prête-Nom,
sur un morceau de ÏOrphée de M. lecliev. Gluck.
FETIS ( Fr.-Jos. ). Sur Gluck, son génie, ses opinions et son in-
fluence dans la musique dramatique ( dans la Revue Musicale,
t. VL p- 385, 409, 481 ).
Ces deux morceaux se trouvent dans toutes les éditions com-
plètes de l'auteur parmi les écrits sur la musique.
UEncide, opéra français, pour être représenté quand il sera
en état, suivi A''Armide à son tailleur, Héroïde. Londres, et se
trouve à Paris chez J.-F. Bastien , r778 , in-S".
C'est une critique plaisante de la musique de Gluck.
35,
414 CATALOGUE
CHAPITRE VI.
BIOGRAPHIE DES MUSICIENS.
TITON DU TILLET (Evrard). Parnasse français. Paris, 1778,
in-fol.
On trouve dans cet ouvrage des notions biographiques et
quelques portraits de musiciens célèbres qui vécurent sous les
règnes de Louis XIII et Louis XIV.
CHORON ( Alex.-Étienue ) et FAYOLLE ( François-Joseph ). Dic-
tionuire historique des musiciens, artistes et amateurs, morts
et vivans , qui se sont illustrés en une partie quelconque de la
musique et des arts qui y sont relatifs , tels que compositeurs ,
écrivains didactiques, théoriciens, poètes, acteurs lyriques,
chanteurs , instrumeutistes, luthiers, facteurs, graveurs, impri-
meurs de musique, avec des renseignemens sur les théâtres, con-
servatoires et autres établissemens dont cet art est l'objet; précédé
d'nn sommaire de l'histoire de la musique. Paris, 1810, 1811,
2 vol. in-S°.
Le troisième volume de l'Essai sur la musique, de Laborde,
contient de nombreux articles biographiques de musiciens an-
ciens et modernes. On peut aussi consulter : 1° La Biographio
universelle des frères Mi<:haud. Paris, 52 vol. in-8°; n^ \à Bio-
graphie universelle portalii/e des contemporains. Paris, 2 vol. in-S"
et supplément; 3° le Dictionnaire des artistes de l' école française
au dix-neuviem» siècle, par M. Gabet. Paris, madame Vergne,
i83i, I vol. in-S".
FETIS ( Franc. -Joseph ). Galerie des musiciens célèbres, avec des
portraits lithographies par les meilleurs artistes. Paris, 1827-
1828, 3 livraisons gr. in-fol.
La premicre livraison contient les portraits de Gluck , Mèliul ,
Viotti et Garât, avec leurs biographies et des fac-similé de l'écri-
ture et de la notation de Gluck et de Méhul.
La deuxième livraison renferme les portraits de Gritry , de
Bach , de Corelli et de Dussek, avec leurs biographies et le/ac-
ttmile de l'écriture et de la notatiou de Grétry.
La troisième livraison est composée des portraits de Lulli ,
madame Catalani, Becihoi-cn, Pa'estrina ^avec leurs biographies.
SYSTEMATIQUE. 415
LE BRETON ( Joachlm). Notice sur la vie et les ouvrages tle Gré-
trj , lue à la séance pulilique de la classe des beaux-arts de l'Ins-
titut. Paris, 1814. iu-4°. On trouve aussi cette notice dans le
Magasin enc/clopédique, 1814» t. IV, p. 273.
Le premier volume des Essais sur la musique, de Grétry, con-
tient des détails étendus sur sa vie et sur ses ouvrages.
GRETRY ( A. ), neveu. Grétry en famille, ou Anecdotes littéraires
et inusi(;ales relatives à ce célèbre compositeur, précédées de
son oraison funèbre. Paris, Cbaumerot, i8i5, in-ia, avec le
portrait de Grétry.
Rapsodie sans aucune valeur.
LIVRY ( Hypolite de ). Recueil de lettres écrites à Grétry ou à son
sujet. Paris, Ogier,sans date, i vol. in-8°.
Anecdotes sur feu Mozart, compositeur allemand ( dans le
Magasin encyclopédique, 1798, t. VI, p. 3G8 ),
Ces anecdotes sont peu exactes.
FRAMERY (Nicolas-Etienne). Notice sur Josepb Haydn, conte-
nant quelques particularités de sa vie privée, relatives à sa per-
sonne et à ses ouvrages , adressée à la classe des-beaux arts. Paris,
Barba, 1801 , in-8°.
LE BRETON ( Joai bim ). Notice bistorique sur la vie et les ouvra-
ges de Josepb Haydn, membre associé de l'Institut de France ,
lue dans la séance publique du 6 octobre 1810. Paris, Baudoin,
18 10, in-4''.
— Essai liistorique sur la vie de Josepb Haydn, ancien maître de
cbapelle du prince Esterbazy. Strasbourg , imprimerie de Pb.-J.
Daunebacii, 18 12, 10-8°.
BOMBET( Louis-Alexandre-César). Lettres écrites de Vienne eu
Autricbe sur le célèlire compositeur Joseph Haydn , suivie d'une
vie de Mozart et de cou.sidératious sur Métastase, et l'état pré-
sent delà musique en France et en Italie. Paris, imprimerie de
Didotaîné, 1814, r vol. in-8°.
Ces Lettres sont un plagiat; elles sont traduites littéralement
de celles que Carpani avait publiées à Milan, en 1812, sous le
titre de LeHajdine , owero Lettere su la vita et le opère del célèbre
macstio Giuseppe Hajdn. M. Beyie, plus connu sous le nom de
Stcndhalt , s'est cacbé sous c-elui de Bombet.
WINKLER ( ... ). Notice sur WolfgaDg-Tbcopbile Mozart ( dans le
même recueil, 1801 , t. III, p. 29-73).
416 CATALOGUE
CRAMER ( Charles-Frédéric ). Anecdotes sur W.-A. Mozart. Paris,
iSor ,iri-8°.
SUARD ( Jean-Bnptiste-Antoine ). Anecdotes sur Mozart ( dans les
M'-h:iges de litléraluie de i-et auteur, t. If, n° 5, p. 337-347 ).
C:^(iUE!^'F. ( Pierre -Louis). A'otice sur Mozart (dans la Dé-
cade philosophique, t XXXI ).
SEVELINCES ( de ). Notice sur Mozart ( en tête de l'édition du
Retjuiem de Mozart, publiée au magasin de musique du Conser-
vatoire ).
— Lettres écrites par Mozart à son père pendant le voyage qu'il
fit avec sa mère en 1777 ( dans la Revue musicale , t. YII , p. i6r,
225, aSc), 36i ).
— Sur le Requiem de Mozart. Histoire de cette composition ( dans
la Revue musica'e, t. I , p. 26 , 23o, 447 î t. IV, p. 121 ).
CHABANON ( de ). Eloge historique de M. Rameau. Paris, 1764»
in-i2.
MARET ( Huglus ). Éloge historique de M. Rameau , 1767, récité
à la société des Ijelles-leltres de Dijon.
DE CROIX ( ... ). Biographie de Rameau ( dans l'ouvrage de cet
auteur inthu\éV^ mi fies aiis, Paris, 1776, p. 95-124 )•
Voyez aussi la hiogra]>hie de Rameau dans la Bibliothèque des
aut'urs de Bouri:opne , par Papillon.
LOYER ( Pascal ). Notice sur la vie et les ouvrages de Pergolèse
( dans le Mercure de France, juillet , 1772 , p. 191 ).
GINGUENE (Pierre-Louis). Notice sur la vie et les ouvrages
de Nicolas Piccini. Paris, Paukouke, 1801 , in-8° de i44 pages.
I A'j OLLE ( Fiancois-Joscph ). Notices sur Corelli , Tartini , Ga-
viniès, Pugnani et Viotti, extraites d'une histoire du violon. Pa-
ris , Dentu, iSio, in 8°.
QUATREMÈRE DE QUINCY ( ... ). Notice historique sur la vie
et les ouvrages de Paisicllo , lue à la séance publique de l'Aca-
démie des i)eaux-arts le 4 octobre 1817. Paris, Firmin Didot,
in-4" de 18 |)ages.
QUATREMÈRE DE QUINCY ( ). Notice historique sur la
vie et les ouvrages de M. de Monsigny, lue à la séance j)U-
Llique de l'Académie royale des beaux-arts, le samedi 3 octobre
r8l8. Paris, Firmin Didot, 181S, in-40 de 12 pages.
HF.DOUIN (Pierre). Notice historique sur P,-A. de Monsigny. Pa-
ris, Laffillé, in-80.
SYSTÉMATIQUE. 417
QUATREMÈRE DE QUINCY ( ). Notice historique sur la
vie et les ouvrages de M. Méliul, lue à la séauce publique de
l'Académie royale des beaux-arts, du i octobre 1819. Paris,
Firmin Didot, 1819, iu-40 de n pages.
GUILBERT (vicomte). Notice historique s.ur le citoyen Broclie ,
organiste à Rouen. Rouen, iSo.'v, in-S" de 3o pages. Celte no-
tice se trouve aussi dans les Mélanges biographiques et litté-
raires de Giiib<?rt , t. I , p. 522.
l'IXÉRÉCOURT(Guilbert de). Essais sur la vie et les ouvrages de
Dalayrac. Paris, Barba, 1810, i vol. in-80.
DE LA CHESNAYE ( ). Éloge funèbre du T.-. R.-.F.-. Da-
layrac, chevalier de l'Empire, ancien dignitaire de la R.-. Loge
des Neuf-Sœurs, lu dans cet atelier. Paris, Egron, 1810, une
feuille in-80.
STENDHAL (M. de). Vie de Rossini, ornée des portraits de Rossini
et de Mozart. Paris, Auguste Boulland et compagnie, 1824, 2*^
édition (fictive) , 2 vol. in-8''.
FRAMERY (Nicolas Etienne). Notice sur le musicien Della Maria,
mort depuis peu, et membre de la société philotechnique. Pa-
ris, 1800, in-8''.
DUVAL (Alexandre). Notice sur le compositeur Della Maria (dans
la décade philosophique, an vui, t. XXV, p. 25).
— Notice sur Guglielrai ( dans le Magasin encjrclop., 1806, t. VF,
p. 98).
BAILLOT (Pierre). Notice sur J.-B. Viotti , né en 1755, à Fonia-
netto, en Piémont, mort à Londres, le 3 mars 1824. Paris, im-
primerie de Hocquet , i825, une feuille iu-80.
MIEL ( ). Notice historique sur J.-B. Viotti, tirée de la
Biographie universelle , t. XLIX; une feuille in-S", à deux c(j-
lonnes. Paris, imprimerie d'Éverat. Sans date.
EYMART (A-.M.). Anecdotes sur Viotti, précédées de quelques
réflexions sur l'expression en musique. Milan, sans date, 46 p.
petit in-80.
LMBERT DE LAPHALÈQUE (G.). Notice sur le célèbre violoniste
Nicolo Paganini. l^aris, E. Guyot, i83o, in-80 de 66 pages.
ANDERS (G. -E.). Nicolo Paganini. Sa vie, sa personne, et quel-
ques mots sur son secret. Paris, Delaunay, i83i, in-S" de 42
pages.
FÉÏIS (François-Joseph). Notices diverses dans la Revue Musicale y
418 CATALOGUE
dont : T. I, Allegri (Grégorio), p. 570. Beethoven (Louis Van),
Il4- Billington (madame Elisabeth), 334. Candeille (Pierre-Jo-
seph), 3io. Conti (François) , 92. Dragonetti (Dominique), 43i.
Fesca (Frédéric -Ernest), 56. Oltani (Bernard), 362. Scarlatti
(Alexandre), 5 16. T. II, Burney (Charles), Sag. Cerone (Domi-
nique-Pierre), 39g. Cimaiosa (Dominique), 433. Dalnyrac (Ni-
colas), 187. Delcambre (Thomas), 566. Délia Maria, 34g. Via-
dana (Louis), i3. T. III, Albrechtsberger (Jean-Georges), 5go.
Duporf (Jean-Pierre), 173. Duport (Louis), 174. TamLurini (An-
toine), 66. Veirhi (Horaee), 443. Vinceutino (Nicolas), 445. T.
IV, Agostino (Paul), ii. B:ich (Charles-Philippe-Fraraanuel), 209.
Braham (Jean), 1-24. Caccini (Jules), 417. Garissimi (Jean-Jac-
ques), 4ig. Devienne (François), 5l2. Durante, 579. T. V, An-
fossi (Pascal). 2g7. Bird (William), 488. Bishop, 434- Bonon-
ciui (Jean) , 464. Bocclierini (Louis), 536. Ferrari (Jacques-Go-
dcfroij, i5j. Gossec (Fr.iuçois) , 80. T. VI, Bemetzrieder (N.),
488. Blonde! ou Blondiaux de Nesle, (troubadour), 556. Exi-
nieno (D. Antoine), i5. Maupin (Mlle), 344. T. VII, Méhul
(Heuri-Etienne), icj'i. Pistocchi (Francois-.4.ntL»ine), 296.T.VIII,
Pliilodème, 7g Berardi (Angelo) , 249. Britton (Thomas), 3oo.
T. IX, Colasse (Pascal), 22. Clairval (René-André), 24- Champeia
(Stanislas), rgg. Benda (François), 216. T. X, Catel (Charles-Si-
mon), io5. Grétry (André- Erneste-Modeste), i35. T. XI, Conti
(Joachim), 5r. Dibdin (Charles), 81. Fiorillo (Ignace), 189.
Floquet (Etienne-Joseph), 281. Lays (François), 75. Erard (Sé-
bastien), 2i3. Nourrit (Louis), 273. Pleyel (Ignace), 344- T. XÎI,
Allégri (Grégorio). nouvelle biographie, 214. Gluck (Christo-
phe), 394. Perne (François-Louis) , i45. T, XIII, Hérold (Louis-
Josepb-Ferdiuand) , 2. Garât (Pierre).
CHAPITRE VII.
BIBLIOGRArHIE DE LA MUSIQUE.
EPiOSSAB-T ( Sébastien de ). Catalogue des auteurs qui ont écrit
de la musique , à l.i suite de sou dictionnaire de musique. Ams-
terdam, 1703, in-fol.
SYSTÉMATIQUE. 419
r.OTVI'N' ( Jran ). Catalogne général des livres de musîqne. Paris,
I7?.(), iii-S".
— Auteurs grecs et romains qui ont écrit sur la musique ou parlé
des musiciens ( dans l'Essai surla musique, de Laborde , t. III,
chap. m , p. i33 ).
. — Auteurs qui ont écrit sur la musique eo latin et en italien
( dans le même ouvrage, t. III , chap. vu, p. 33 1 ).
— Auteurs français qui ont écrit sur la musique ( dans le même
ouvrage, t. III , cliap. x,p. 54o ).
GARDETON (César). Bibliographie musicale de la France et de
l'étranger, ou Répertoire général systématique de tons les traités
et œuvres de musique vocale et instrumentale. Paris , Niogret ,
1S22 , I vol. in-8° de 608 pages.
Ouvrage détestable dout le titre est un mensonge , car on n'y
trouve que l'indication d'un très petit nomjjre de livres , dont
les titres sont défigurés , et un catalogue de musique excessive-
ment incomplet.
CHAPITRE YIII.
DICTIONNAIRE TECHNIQUE DE LA MUSIQUE.
BROSSARD ( Sébastien de ). Dictionnaire de musique, contenant
une explication des termes grecs, latins, italiens et français les
plus usités en musique, etc. Amsterdam, Roger, i73o, i vol.
in-8°.
Cette édition est la troisième du livre de Brossard. La pre-
mière , publiée en 1701 , est in-fol. , et la seconde in-S".
LACOMBE (Jacques). Dictionnaire portatif des beaux-arts, ou
Abrégé de ce qui concerne l'architecture , la sculpture , la pein-
ture , la gravure et la musique, etc. Paris, i752,in-8<'.
ROUSSEAU (Jean -Jacques ). Dictionnaire de musique. Paris,
veuve Duchesne, 1768, i vol. in-40 de 5+8 pages. Amsterdam,
Marc-Michel Rey , 1772, 2 vol. in-S".
Cet ouvrage se trouve dans toutes les éditions complètes des
oeuvres de l'auteur.
420 CATALOGUE
MEUDE-MONPAS (J.J.-O ). Dictionnaire de musique , dans le-
quel on simplifie les expressions et les dcfinitioiis mnthématiques
et physiques qui ont rapport à cet art, avec des remarques sur
les poètes lyriques, les compositeurs, etc. Paris, Kuappen,
1788, in-8°.
Mauvais ouvrage dont on ne peut tirer aucune utilité.
— Encjclopédie méthodique. Dictionnaire de musique, t. I, A.-G.,
publié par MM. Framery et Ginguené. Paris, Pankouke, 1791,
111-4°; t. II, H-Z, publié par M. de Momigny. Ibid., madame veuve
Agasse, 18 18, iu-4''.
Cet ouvrage contient tout le Dictionnaire de musique de J.-J.
Eousseau, avec des additions très nombreuses et très étendues.
Ginguené y mit beaucoup d'articles historiques qui sont fort
bien faits; mais la partie théorique n'offre rien de satisfaisant
]>;irce que tous ceux qui ont concouru à sa rédaction professaient
des doctrines opposées.
MILLIN (Aubin-Louis). Dictionnaire des beaux-arts. Paris, 1806,
3 vol. in-80.
Cet ouvrage , composé sur le Dictionnaire allemand de Sulzer,
e.-t fort estimé et contient de bonnes choses sur la musique.
CASTIL-BLAZE (...,). Dictionnaire de musique moderne. Paris,
1S21 , 2 vol. in-So.
Une nouvelle édition de cet ouvrage a étépubliéeà'BruxelIes,
ji:ir M. Mées, en 1828, i vol. in-80. L'éditeur y a ajouté un
yibrègè historique de la musique moderne depuis le quatrième siècle ,
et spécialement relatif à l'école flamande , suivi d'un catalogue bio-
graphique des théoriciens, compositeurs et musiciens morts qui se sont
H'ustrés dans h royaume des Paj's-Bas. Cet ouvrage se termine
j):ir une instruction abrégée sur l'organisation et la conduite
d'une école de musique, spécialement pour le solfège et le
(liant , avec des réflexions et des observations sur les divers mo-
des d'enseignement mis en pratique depuis le commencement
du dix-neuvième siècle.
SYSTÉMATIQUE. 421
CHAPITRE IX.
THÉORIE DU SOÎÎ.
Traités généraux.
CASTEL ( le P. Louis-Bertrand ), jésuite. Nouvelles expériences
d'optique et d'acoustique adressées à M. le jirésident de Montes-
quieu ( dans les Mémoires de Trévoux , t. LXIX , 1735, p. 1444-
1482, 1619-1666. Suite et troisième partie, ibid, 2335-2372. Der-
nière partie , ibid., 2642-2768 ).
RAMEAU ( Jean-Baptiste). Lettre au R. P. Casfel au sujet de
quelques nouvelles réflexions sur la musique , que le R. P. Castel
a insérées dans les mois d'août ( deuxième partie ) et de sep-
tembre 1735 des Mémoires de Trévoux, t. LXXI, 1736, p. 1691-
1709.
M.A.IRAN ("Jean-Jacques Dortous de ). Discours sur la propagation
du son dans les différens tons qui la modifient ( dans les Mé-
moires deV Académie des sciences, 1737, p. l-20 ).
— Eclaircissemens sur le discours précédent , ibidj 20-58.
DIDEROT ( Denis ). Principes d'acoustique. Paris, 1748, i vol.
in-So.
SUREMAIN DE MISSERY ( Antoine ). Théorie acoustico-musi-
ciile , ou de la doctrine des sons , rapportée aux principes de
leurs comljinaisons. Paris, Didot, 1793, in-S°.
CIILADIS'I ( Ernest-Floreut-Frédéric ). Traité d'acoustique, traduit
de l'allemand par l'auteur. Paris, i8io, in-8°.
PiAYMOND ( G.-M. ). Déterrainaisons des bases physico-mathéma-
tiques de l'art musical , ou Essai sur l'application des nouvelles
découvertes de l'acoustique à l'art musical , suivi d'un appendice
sur quelques systèmes d'écriture musicale. Paris, madame Cour-
cicr, 18 13.
MÛREL (Alexandre-Jean ). Principe acoustique, nouveau et uni-
versel, de la théorie musicale, ou musique expliquée. Paris,
Bachelier, l8l6, 10-8".
AZ.4.YS ( II. ). Acoustique fondamentale, ou bases physiques de la
musique ; lettres à M. Fétis ( dans la Revue musicale, t. II, 11. 3o'|,
317, 333 , 365, 390 ; t, XII , p. g, 180, 204 ).
3G
422 CATALOGUE
BLEIN (le baron), ancien officier général du génie. Exposé de
quelques principes nouveaux sur l'a^ oustique et la théorie des
vibration?, et leur application a plusieurs phénomènes de la
physique. Paris, 1827, in-4o de 44 pages, avec 2 planches.
CHAPITRE X.
Dt l'ouïe et de la voix humaine.
E. De l'ouïe.
HAUTEFEUILLE (l'abbé de). Lettre à M. Bourdelot, premier
médecin de madame la duchesse de Bourgogne, sur les moyens
de perfectionner l'ouïe. Paris, 1 702, in-4°.
TICQ D'AZYR (Félix). De la structure de l'organe de l'ouïe des
oiseaux, comparé avec celui de l'homme, des quadrupèdes, des
reptiles et des poissons (dans les Mémoires àe l'Académie des
sciences, 177S. Hist. 5. Mém. 38i).
SAVART (Félix). Recherches sur les usages de la membrane du
tym])an et de l'oreille externe, lues à l'Académie royale des
sciences de Paii-, le 2g avril 1822 (dans les Annalfs de chimie et
deph/sique, t. XXVI, mai 1824, p. 5).
— Note sur la sensibilité de l'organe de l'ouïe (dans la Bévue mu-
sicale, t. X, p. 356).
Voy. aussi le Mémoire d'acoustique, du même auteur, dans le
Bulletin des sciences dt la société philomalique, 1822, p. 90, où il
traite de l'organe de l'ouïe.
On peut aussi lire avec fruit sur cette matière les Traités de
physiologie, de Magendie, d'Adelon, et des autres jjhy.siologisles
français.
II. De la voix humaine.
DODART (Denis). loMémoire sur les causes delà voix deThomme
et de ses différens tous (dans les Mémoires de V Académie rojrale
des sciences, 1700, p. 238); 2° Note sur le mémoire précédent
{Ibid, p. 268-287); 3° Supplément au mémoire sur la voix et sur
ses tons {Ibid., 1706, p. i36); 4» Suite de la première partie du
SYSTÉMATIQUE. 423
Supplément au mémoire sur la voix et sur ses tons. Quatrième
addition. De la différence des tons de la parole et de la voix du
chant, par rapport au récitatif, et par occasion des expressions
de la musique antique et de la musique moderne (^Ibid., p. 388);
5» Su])pléraent au mémoire sur la voix et sur les tons, Seconde
])artie. (Mém. de 1707, p. 66)
FERREIN (...). Delà formation de la voix de l'homme (dans les
Mémoires de l'Académie rojale des sciences, 1741, p- 409)-
EERTiN (M,), médecin. Lettre à M. D.... sur le nouveau système
de la voix (celui de Ferrein). La Haie, 1745, in- 12.
MO>TAGNAT (...), médecin, élève de Ferrein. Lettre à M. l'abbé
D F. (Desfontaines), ou Réponse à la critique que fait M. Burlon
(dans ses Jugeraens sur quelques écrits nouveaux) du sentiment
de M. Ferrein sur la formation de la voix humaine. Paris, David,
1745, in-i2.
— Eclaircissement en forme de lettre à M. Bertin sur la décou-
verte que M. Ferrein a faite du mécanisme delà voix de l'hom-
me, ou réfutation d'une brochure qui a pour titre : Lettre sur
le nouveau système de lavoix. Paris, David, 1746, in-12.
— Lettre à M. Bertin, médecin, au sujet d'un nouveau genre de
vaisseaux découverts dans le corps humain, ou Réponse à la di-
gression que fait l'auteur anonyme de la Lettre sur le nouveau
système de la voix, etc. Paris, David, 1746, in-12.
Cet écrit est étranger à la théorie de la voix, mais il est pré-
cédé d'un avant-propos de 12 pages où se trouve l'exposé des
discussions relatives à la doctrine de Ferrein sur cet organe.
BERTIN (...). Letires sur le nouveau système de la voix et sur les
artères lymphatiques. Sans nom de lieu, 1748, in-12.
La première de ces lettres, publiée pour la première fois, est
adressée à M. Guns, professeur d'anatomie à -Leipsick; la seconde
est la lettre à M. D..., déjà imprimée eu 1745, mais avec beau-
coup de notes nouvelles ; la troisième n'a aucun rapport à la
théorie de la voix.
MOREL (...). Nouvelle théorie jihysique de la voix. Montpellier,
1746, in-12.
VICQ-D'AZYR (Félix). Mémoires sur la voix; de la structure des
organes qui servent à la formation de la voix, considérés dans
l'homme et dans lus différentes classes d'animaux et comparés
424 CATALOGUE
entre enx (dans les Mémoires de l'Académie des sciences^ 1779.
Hist. p. 5, Mém. p. 178).
DESPIKEY (Félix). Mélanges physiologiques. Lyon, 1822, in-S"
de 80 pages.
Le premier morceau de ce recueil contient des Recherches sur
la -voix et une théorie de cet organe en 38 pag. Il est suivi de
Considérations générales sur la voix, et de deux articles, l'uu sur
Y Art du ventriloque, l'autre sur uos instrumens comparés au larynx.
SAVART (Félix). Mémoire sur la voix humaine (dans le Journal de
physiologie expérimentale, iSîS, n. 4)-
GERDY (le doct.). Note sur les raouvemens de la langue et quel-
ques mouvemens du pharynx (dans le Bulletin universel des scien-
ces, puhlié sous la direction de M. de Férussac, janvier i83o ,
sect. lll).
MALGAIGNE (J.-F ), de Charmes, docteur en médecine, chirur-
gien à Thùpital militaire d'instruction du Val-de-Grace.
Nouvelle théorie de la voix humaine, mémoire couronné par
la société d'émulation médicale. Paris, Béchet jeune, i83r,in-So
de 69 pages.
Ce mémoire est extrait des Archives générales de médecine.
BENNATI (le doct. François). Recherches sur le mécanisme de la
voix humaine, ouvrage qui a obtenu un prix à la société des
sciences physiques et chimiques de Paris, précédé du rapport
de MM. G. Cuvier, de Prony et Savart à l'Académie des sciences.
Paris, Baillière, iSSa, in-80 de 160 pages, avec une planche.
— Recherches sur les maladies qui affectent les organes de la voix
humaine, lues à l'Académie royale des sciences, et couronnées
par la société des sciences physiques et chimiques de Pans. Pans,
Baillière, 1882, in-80 Je rSa pages, avec 2 planches.
Les deux ouvrages de M. Bennati, qui sont d'une importance
considérable, à cause de la nouveauté des faits qui y sont con-
signés, ont été réunis dans une nouvelle édition, sous le titre
suivant -.Etudes physiologiques et pathologiques sur les organes de
la voix humaine, ouvrage auquel l'Académie royale des sciences a
décerné un des prix de médecine/ondes par M. de Monthjon. Paris,
Baillière, i833, i vol. in-8<'.
On doit aussi consulter sur cette matière les Traités de phjsio-
logie, de Magendie, d'Adelon, et d'autres savans médecins.
SYSTEMATIQUE. 425
CHAPITRE XI.
DU SON ET DE SES MODIFICATIONS.
BURJA (Abel). Remarques sur la musique (dans les Mémoires de
r Académie des sciences et belles-lettres de Berlin, 1796. Classe de
math., p. 1-16), i" sur les sons qu'on tire des plaques ou car-
reaux de verre; 2° sur l'usage du verre dans la musique; 3° Des-
cription d'un nouvel instrument de musique fait de plaques
de verre qu'on touche avec deux archets.
GAUTHEROT (...). Sur la théorie des sons. Paris, rSoo, in-80.
TREMBLY (Jean). Observations sur la théorie du son (dans les Mé-
moires de l'Académie de Berlin, 1801. Philos, expérim. p. 33).
CHAPITRE XII.
•• DE LA VÉLOCITÉ DU SON.
CASSINI ( de Thury). Sur la propagation du son ( dans les JJfe-
moircs de V Académie rojale des sciences, 1738, p. I,etmém. 24).
— IVouveiles expériences faites en Languedoc sur la j)ropagation
du son, qui confirment celles qui ont été faites aux environs de
Paris (dans les Mémoires de 1743, p- 199)-
NOLLET ( l'abbé ). Mémoires sur l'ouïe des poissons et sur la
transmission des sous dans l'eau ( dans les Mémoires de l'Aca-
démie royale des sciences, 1743, p. 199 ).
EXILER ( Léonard ). Eclaircissemens détaillés sur la génération
du son, sa propagation et sur la formation de l'écho ( dans les
Mém. de l'Académie royale des sciences Ae^evWn, 1765, p. 335).
LAMBERT |( J. -Henri ). Sur la vitesse du son ( dans les Mém. de
r Académie royale des sciences, 176S, p. 70 ).
LAGR.'V^NGE (Louis de). Redierches sur la nature et la propaga-
tion du son ( dans les Mém. de l'Acad. de Turin, t. I, p. I ).
— Nouvelles recherches sur la propagation du son [Jbid. t. IF,
p. 323 ).
36.
426 CATALOGUE
— Solution de différens problèmes de calcul intégral ( Ibid. t. III).
L'auteur traite, dans ce mémoire, de plusieurs choses relatives à
la vitesse du son.
PÉROLLE ( ... ), professeur de médecine à l'université de Mont-
pellier. Expériences physico-chimiques relatives à la propaga-
tion du son dans quelques fluides aériformes (dans les Mèm. de
l'Acad. rof. de Turin, 1786-87. Mém. desCorresp., p. i, 10 ).
— Mémoire physique , contenant des expériences relatives à la
propagation du son dans diverses substances, tant solides que
fluides; 2° Essai d'expériences qui tendent à déterminer la
cause de la résonnance des instrumens de musique ( Ibid. 1790-
91, t. V, p. 195, 280 ).
PORLETTI ( Modeste ). Recherches sur l'influence que la lu-
mière exerce sur la propagation du son ( Ibid. i8o5-i8o8, p. r,
p. 141, 109).
BIOT (...]. Expériences sur la propagation da son à travers les
corps solides et à travers l'air dans des tuyaux cylindriques très
allongés ( dans les Archives des découvertes dans les sciences et les
Ans, pendant l'année 1808).
LÂPLACE ( ). Développement de la théorie des fluides
élastiques et application de cette théorie à la vitesse du sou
( dans le Bulletin de la société philomallque, 1S21, p. iGi ).
CHAPITRE XIII.
DK3 VIBRATIONS DIS CORDIS ET d'aUTRES CORPS.
BERNOULLI (Daniel ). Réflexions et éclaircissemens sur les vibra-
K tious des cordes (dans les Mém. de l'Acad. de Berlin, 1753).
— Sur les vibrations des cordes d'une épaisseur inégale ( ibid.
1765 ).
EULER( Léonard). Sur les vibrations des cordes (dans les Mém.
de l'Acad. de Berlin, 174S-1753).
— Sur le mouvement d'une corde qui, an coramemement, n'a été
ébranlée que dans une partie ( Ibid. 1765 ).
BER.NÛULLI (Jacques). Essai théorique sur les vibrations des
SYSTÉMATIQUE. 427
plaques élastiques rectaugulaireset libres ( daus les Méin. do l'A-
cadémie Ae Pétersbourg, 1787 ).
PERROLLE (.-.). Sur les vibrations totales des corps sonores
( dans \e Journal de Physique, 1789, t. XXXVII ).
OSTED ( J.-C. ). Lettre au professeur Pictet sur les vib»utions so-
nores ( dans la Bibl. Britan., t. XXX, Genève, i8o5, p. 364»
372 ).
POISSON ( ...). Traité sur le mouvement des fluides élastiques
dans les tuj'aux cylindriques et sur la théorie des instruraens à
vent ( dans les Mèm. de l'Âcadèm, rojr. des sciences de Paris,
1817).
GERMAIN ( mademoiselle Sophie ). Recherches sur la théorie des
surfaces élastiques. Paris, madame Courtier, 1821, in-4" de yG
pages avec uue planche.
— Remarques sur les bornes et l'étendue de la question des sur-
faces élastiques. Paris, Baciielier, 1828, in-4<'.
POISSON ( ). Sur la propagation du mouvement dans
les fluides élastiques ( dans les Annales de chimie et de physique,
t. XXII, p. 25o ).
SAVART ( Félix ). Recherches sur les vibrations de l'air [Ibid.,
t. XXIV, septembre 1823, p. 56 ).
SAVART ( Félix ). Mémoires sur les vibrations des corps solides,
considérées en général ( Ibid., t. XXV, janv. 1825, p. 24 ).
Ou peut lire aussi avec fruit sur ces matières les Traités géné-
raux de physique de Haiiy, de Libes, de Biot et autres.
CHAPITRE XIV.
DE L ECHO.
HAUTEFEUILLE ( l'abbé de ). Dissertation sur la cause de l'écho,
couronnée en 1718 par l'Académie des belles-lettres, sciences
et arts de Bordeaux. Bordeaux, Brun, 1718, 48 p. iu-12.
Un extrait de cet écrit a été imprimé à Paris, chez Varin,
1788, in-8o.
— De la manière dont se forme l'évho ( dans les Mém. de Trévoux,
t. XXXV, p. 167, 171 ).
428 CATALOGUE
QUESNET ( (loin François ). Observations sur un éclio singulier
près de Rouen ( dans les Mèm. del'Acad. roy. des sciences, t. Il,
]'• 140).
GALLOIS ( Jean le). Extrait d'un écrit composé par D. François
Quesnet, touchant les effets extraordinaires d'un écLo ( ibid ,
t. X, p. 187 ).
CHAPITRE XV.
SUR LA SYMPATHIE DES SONS.
ROMrEU( ... ). JfouvcUe découverte des sons harmoniques graves,
dont la résonnante est très sensible dans les accords des instru-
mens à vent ( dans le recueil intitulé: Assemblée publique de la
société rojale de Montpellier, i~St ).
RAMEAU ( Jean-Baptiste). Lettres aux philosophes, sur la réson-
nance des corps sonores ( dans les Mém. de Trévoux, 1762,
p. 465).
— Observations sur les principes d'oîi M. Rameau fait descendre
les deux accords parfaits, l'un majeur, l'autre mineur ( dans le
Journal des savans, août 1769, p. ri2, l3() ).
TESTA ( Dominique ). De la résonnance des corps sonores (dans
le Recueil de pièces intéressantes concernant les antiquités, les
beaux-arts, etc. Paris, 1788, t. III, p. 167, traduit de l'italien ).
CHAPITRE XVI.
DE LA DKTER3IINATI0ÎÎ d'uîT SON FIXE.
DOD ART ( Denis ). Sur la détermination d'un son fixe ( dans V His-
toire de V Académie royale des sciences, 1700, p. l3l-l4o )•
LA SALETTE ( P. Joubert de ). De la fixité et de l'invariabilité des
sons musicaux, et de quelques recherches à faire sur ce sujet
dans les écrivains orientaus. Paris, Dondey-Dupré , 1824, iu-S" .
SYSTKMATIQUE. 429
CHAPITRE XVII.
DES PI'.KNOMtNES ACOUSTIQUES.
H.VUTEFEUILLE ( l'abbé de ). Explications de l'effet des trom-
pettes i)arlaiites , on l'ou voit quelle est leur projjortion , leur
ligure, leur matière , leur sphère d'activité, les expériences qui
ont été faites, et quelques trompettes de nouvelle invention.
Paris, 1673, in-4o; deuxième édition, 1674, in-4o-
LA HIRE (Philippe de ). Explic'ations des différens sons de la
corde tendue sur la trompette marine ( dans les Mémoires de l'A-
cadémie roj-ale des sciences , t. IX, p. 5oo, et Mémoires demathé-
Tnaliques, 169+ )•
HAUTEFEUILLE ( l'abbé de ). Problème d'acoustique «'urieux et
intéressant. Paris, Varia, 1788, in-So.
CHAPITRE XVÎII.
APrUCATION DES MATHÉMATIQUES A LA MUSIQUE.
DESCARTES (René). Abrégé delà musique, avec les éclaircisse-
niens nécessaires (traduit du latin par le P. Poisson). Paris, in-4°.
SAUVEUR ( Joseph ). i» Système général des intervalles des sons,
et son application à tous les systèmes et à tous les înstrumens
de musique ( dans les Mémoires de l Académie royale des sciences,
1701 , p. 297-364 ); 2° Application des sons harmoniques à la
composition des jeux d'orgue (ièid., 1702, p. 3o8); 3 "Méthode
générale pour former le système tem>péré de musique, et du
choix de celui qu'on doit suivre ( Ibid., 1707, p. 2o3 ) ; 4" Table
générale des systèmes tempérésde musique ( Ibid., 171!) p. 3o9 ):
5" Rapport des sons des cordes d'instrumens de musique aux
flèches des cordes , et nouvelle détermination des sons fixes
{Ibid., 1713, p. 324).
EULER ( Léonard ). Conjectures sur la raison de quelques disso-
nances généralement reçues dans la musique ( dans les Mémoires
de l' Académie de Berlin, 1764 )■
■ — Des véritables caractères de la musique moderne ( liid. ).
480 CATALOGUE
— Lettres à une princesse d'Allemagne sur divers sujets de physi-
que et de philosophie. Pétersbourg, 1768-73, 3 vol. iu-80, léiin-
primés plusieurs fois.
Les lettres 3 à 8, l34, i36 et 187, traitent de divers objets re-
latifs à la miitique.
GALLIMARD ( .... ). Arithmétique des musiciens, ou Essai qui a
pour objet diverses espèces de calcul des intervalles, le déve-
loppement de plusieurs systèmes des sons de la musique, etc.
Paris, 1754 ; in-S".
MONTU ( A. ). Numération harmonique, ou Echelle d'arithmé-
tique pour servir à l'explication des lois de riiarmoiiie. Paris,
l8o2 , in-4o-
DELEZEUNE (...). Mémoires sur les valeurs numériques des notes
de la gamme. Lille, 1827, iu-S".
MONTVALLON ( M. de ). Nouveau système de musique sur les
intervalles des tons et sur la proportion des accords, où l'o»
examine les systèmes proposés par divers auteurs ( dans les Mé-
moires de T^carf miV rojale des sciences , 1742, p. 117)-
BLEIN (le baron ). Principes de mélodie et d'harmonie, déduits de
la théorie des vibrations. Paris, Bachelier, i832, in-8".
LAMBERT ( Jean-Henri ). Remarques sur le tempérament en mu-
sique ( dans les Mémoires de l'Académie de Berlin , 1774 )•
LOUET ( Alexandre ). Instructions théoriques et pratiques sur
l'accord du pi.mo-fnrté, etc. Paris, 1798, in-S» de 63 pages.
LA SALLETTE ( P. Joubert de ). Lettre sur une nouvelle manière
d'accorder les forté-pianos, ou plus généralement les instrumeus
à clavier. Paris , 1808, in-80.
BLANCHET ( .4.-F.-N. ). Méthode abrégée pour accorder le forte-
piano. Paris, Brianchon , in-8°.
STEUP ( H.-C. ). Méthode pour accorder le forté-piano. Amster-
dam , iSti , in-S°.
CHAPITRE XIX.
DE LA CONSTRUCTION DES INSTRUMENS.
CARRR (Louis). 10 Traité mathématique des cordes par rapport
aux instruincus de musique (dans les Mimvi e: de V Académie
SYSTEMATIQUE. 48t
royale dti sciences , 1706, p. 114). 2° De la proportion que doi-
vt'iit avoir les cylindres pour former par leurs sous les accords
de lu musique {ibid., r^oy, p. 47)-
MAUPERTUIS (S. Baptiste Drovel de). Sur la forme des instra-
mens de musique (ibid., 1724, p. 2i5-226).
LAMBERT (Jean-Henri). Sur les tons des flûtes (dans les Nouveaux
Mémoires de l'Académie de Berlin , 1775).
SIBIRE (l'abljé). La Chélonomie, ou le Parfait luthier. Paris, 1806,
in-i2 de 288 pages.
Lupot, luthier de Paris, a fourni les matériaux de cet ou-
vrage.
SAVART (Félix). Mémoire sur la construction des instrumens à
cordes et à archet, etc. Paris, Déter-ville', iSrp, in-8°.
— L' Art du. luthier ( dans V Encyclopédie méthodique, avec des
planches).
FÉTIS (François-Joseph). Sur la construction des violons, altos et
basses (dans la Reme Musicale , t. II, p. i5).
CAUX (Salomon de). Les raisons des forces mouvantes avec di-
verses machines. Francfort, i6i5, in-fol.
Le troisième livre traite spécialement de la construction de
l'orgue.
BERNOULLI (Daniel). Recherches physiques, mécaniques et ana-
lytiques sur le son, et sur les tons des tuyaux d'orgue différem-
ment construits (dans les Mémoires de P Académie royale des scien'
ces, 1762, p. 43i-'i85, avec deux planches).
BEDOS DE CELLES (D. François) L'art du facteur d'orgues.
Paris, 1766-1778 , 4 parties grand in-fol.
Ouvrage très important et le plus considérable qui existe sur
ce sujet.
FETIS (François-Joseph). Sur l'orgue ex2)ressif perfectionné par
Érard (dans la Revue Musicale, t. II, p. i28-i35 ; t. VI, p. 104,
129).
WEBER (W.). Du système de compensation dans les tuyaux d'or-
gue (dans \a Revue Musicale , t. VII, p. 353).
ROUSSIER (l'abbé). Mémoire sur la nouvelle harpe de Cousineau,
Paris, Lamy, 1782, in-12.
NADERM.4.1NN (Henri). Oliservations de MM. Nadermann frères
sur la harpe à double inouveineut, ea réponse à M. de ProiiT
432 CATALOGUE
membre de l'Acailémie des sciences. Paris, veuve Nadermann,
lSi5, in-4° de 4 feuilles, avec g plaucli.
FÉTIS (Franc. -Joseph) Sur la harpe et particulièrement sur celle
<i'Erard à double mouvement (dans la Revue musicacle, t. II,
p. ;î37-34f)).
IvADERMA?<N (Henri). Réfutation de ce qui a été dit en faveur
des différens mécanismes de la harpe à double mouvement, ou
Lettre à M. Fétis. Paris, janvier 1828, in-S".
rÉTIS (Franc. -Jos.). Lettre à M. Henri Naderraann, au sujet de sa
réfutation d'un article de la Rerue musicale sur la harpe à double
mouvement (daus la Revue musicale, t. III, p. l).
KADERMA>'X (Henri). Supplément à ce qui a été dit en faveur
des différens mécanismes de la Iiarpe à doui.)le mouvement.
Paris, avril 1828, in-S" de 32 pages.
FÉTIS (Franç.-Jos.). Mon dernier mot sur la harpe à doul)le mou-
vement (dans la Revue musicale, t. III, p. 2G5).
Desc ription du clavi-harpe inventé par M. Dietz père. Paris,
Dietz. fils, 1821, 19 p. in-8°, avec une planche.
FETIS (Franç.-Jos.). Sur les perfectionnemens importans qui ont
été faits depuis peu d'années dans la fabrication des pianos (dans
la Revue musical?, t. I, ]). 32).
— Sur les pianos de MM. Pfeiffer, RoUer, l'Ieyel, Dietz, Kleti-
fer, etc., etc. {Ibid., t. II, p. 82-97).
— Sur le polfpleciron, instrument nouveau, inventé par M. Dietz
(ibtii., t. m, p. 593).
LARORDE (le P. de). Le Clavecin électrique, avec une nouvelle
théorie du mécanisme et des phénomènes de l'électricité. Paris,
I7(jr, in-i2.
CHAPITRE XX.
nu CnROXOMÈTRE ET DES DIVERS ISSTRUMENS PROPRES A
MESURER tE TE5IPS EW MUSIQUE.
D.VVOUX (...). Lettre sur un instrument ou pendule nouveau qui
a pour but de déterminer, avec la plus grande exactitude, les
dilférens degrés de vitesse ou de lenteur des temps dans une
SYSTÉMATIQUE. 4.33
pièce de musique, depuis le prestissimo jusqu'au lar^o (dans h;
Journal encyclopédique, juin 1784, p. 534)-
THIEME (Frédérii). Nouvelle tliéorie sur les diffcrens mouvemens
des airs, fondée sur la pratique de la musique moderne, avec le
projet d'un nouveau chronomètre, etc. Rouen et Paris, 1801,
in-S" de 70 pag.
— Notice sur le métronome de J. Maelzel. Paris, Callard, sans
date, in-80.
FETIS (Franç.-Jos.). Sur le métronome de Maelzel, avec l'histoire
du chronomètre (dans la Revue musicale, t. II, p. 3Ci).
— Notice sur le métronome perfectionné de Bienaimé. Paris, sans
date, une feuille in-So.
■^ Sur le métronome perfectionné de Bienaimé (dans la Revue mu-
sicale, t. II, p. 534).
CHAPITRE XXI.
ART DE KOTER LES CYLINDRES d'oRGUES ET DE SERINETTES.
ENGRAMELLE (le P. Marie-Dominique-Joseph). La tonotechnie,
ou l'art dénoter les cj'lindres. Paris, 1775, un vol. in-S".
FIN DU CATALOGUE STSTEMATIQIE
TABLE
UIÎS MATIÈRES PRINCIPALES
CONTENUKS DA?fS CF. VOLUME.
INTRODUCTION.
Nécessité d'apprendre tout ce qu'on veut savoir. — Le senti-
ment des arls n'est que le résultat de l'éducation des or-
ganes. — Utilité d'un livre qui faciliterait cette éducation, sans
obliger à des études techniques. — Objetde celui-ci. page j
PREMIÈRE SECTION.
1)D SYSTÈME MUSICAL, CONSIDÉRÉ DANS tES TROIS QUALITES DES
soifs, SAVOIR : l'intosation, la durée et l'iktensité.
CHAP. I. objet de la musique. Son origine. Ses moyens, p. i
La musique a une double actiou sur les hommes: l'une phy-
sique, l'autre morale.
CHAP. IL De la diversité des sons et de la manière de les
exprimer par des noms. p. 5
Il y a une infinité de sons possibles entre les plus graves
d'une voix d'homme et les plus aigus d'une voix de femme ou
d'enfant; on peut les désigner par des noms. — Quels sont ces
noms, cliez les peuples modernes.
CHAP. in. Comment on représente les sons par des si-
gnes, p. 9
Eiiplication des signes de la notation et de leur effet.
CHAP. ÎV\ De la difféi'enre des gammes; des noms qu'on
ÏMiLE DES MATIÈRES. 435
leur donne , et de l'opéralion qu'où nomme ininsposi—
u'on. page 19
Contiuuatiou du dcveloppeineiit du système de la uotatiou.
CHAP. V. Tous les peuples ne se servent pas de la même
gamme. — Il n'est pas prouvé que celle des Européens
soit parfaite, mais elle est la meilleure. p. 23
CHAP. VI. De la durée des sons et du silence en musique;
comment on la représente par des signes et comment on la
mesure. P- 27
Suite du développement du système de la notation.
CHAP. VII. De ce qu'on appelle expression dans l'exécution
de la musique ; de ses moyens et des signes par lesquels ou
l'indique dans la notation. p. 36
Fin du développement du système de la notation.
DEUXIÈME SECTION.
UES SONS CONSIDÉRÉS DANS LEURS RAPPORTS DE SUCCESSION ET
DE SIMULTANÉITÉ ; DU RÉSULTAT DE CES CHOSES.
CHAP. VIII. Ce que c'est que le i-apport ou la relation des
SOUS. p. 43
Les sons ont trois espèces de r.ipports , savoir : la succession,
d'oii nait la mélodie i la simultanéité, principe de Vharmonie ; et
l'intensité, ou le degré de force.
CHAP. IX. De la mélodie. p. 4 j
Les qualités principales de la mélodie sont la convenance dans
la succession ôes sous et le rhythme. — La mélodie se compose
des parties qu'on nomme phrases. — Ce que c'est que la carrure
des phrases. — Ce que c'est que la modulation. — La mélodie,
bien qu'elle soit le fruit de l'imagination , est soumise à trois cou-
ditioDs qui limitent sa liberté.
Ces règles sont la sjmctrie de rhythme, l.i srmélric de carrure
ou de nombre , et la ré^ularilo du modulât on.
436 TABLE
CHAP. X. De l'harmouie. page 62
Les peuples de l'jiitiqulté n'ont point? connu l'harmonie. —
Elle est née d.ins le moyen-âge. — Les élémens de Tbarmonie
se nomment accords. — Accords agréables nommés consonnans;
accords moins agréables nommés dissonans. — Les accords re-
présentés par dos chiffres; accompagnent. — L'histoire de l'har-
monie est une des parties les plus intéressantes de l'histoire gé-
nérale de la musique. Abrégé de cette histoire.
CHAP. XI. De l'acouslique. p. 76
CHAP. XII. De l'art d'écrire la musique. — Contre-point.
— Canons. — Fugue. p. 80
Explication de ces choses; leur usage; leur utilité; abus qu'on
en a fait.
CHAP. XIII. De l'emploi des voix. p, 96
Classement des voix; conforme à la raison en Italie; vicieux en
France. — L'art d'écrire pour les voix est mieux connu des com-
positeurs italiens que des Allemands et des Français. — Ce qui
est favorable ou défavorable dans le chant à l'émissioa de
la voix.
CHAP. XIV. Des iuslruuiens. ! p. 104
lustrumens à cordes pincées dans l'antiquité. — Histoire de
la harpe. — Du luth et de ses espèces. — Instrumeus à archet :
la viole et ses espèces; le violon; le violoncelle; la contrebasse.
■ — Instrumeus à claviers. Leurs variétés. — Instrumeus à vent :
flûtes, hautbois, cor anglais, clarinette, basson. — Instrumeus de
cuivre: cors, trompettes, trombones, ophicléides. — Orgue. —
lustrumens à frottement : harmonica. — Instrumeus de percus-
sion. — lustrumens de fantaisie.
CHAP. XV. De l'instrumenlaliou. p. i44
Emploi des instrumeus dans la musique. — Systèmes d'ao-
compagucmeut. — F^ffets qu'on tire des divers souorités.
DES MATIÈRFS. 437
CHAP. XVI. De la forme des pièces daus lu musique vocale
et dansl'iustrumeutale. page i5i
. Quatre divisions de la musique vocale : i° la musique sacrée;
2" la musique dramatique; 3*^ la musique de chambre; 4" '^s
airs populaires. — Deux divisions delà musique d'église, savoir:
\e plain-chant et la musique solennelle. — Divers genres de mu-
sique solennelle. — Opéra : sou histoire abrégée. —Coupe des airs.
— Duos, trios et morceaux d'ensemble. — Chœurs. — Ouver-
tures. — Chansons, romances, couplets. — Deux divisions de
la musique instrumentale : 1° musique de concert; 2° musique
de chambre. — Symphonie. — Quatuors, quiutettis, etc. —
Sonates. — ■ Fantaisies , airs variés , etc. ■ — Concertos. — Musi-
que d'orgue.
TROISIÈME SECTION.
DE l'exécution.
CHAP. XVII. Du chaut et des chanteurs. p. 177
Direction de la voix. — Exercice du chant. — Grands chan-
teurs italiens. — Explication des termes de l'art du chant. — Ce
que c'est que Vexpression. — Chanteurs français. Garât. — Con-
ditions du chaut français différentes de celles du chant italien.
— Du choix des voix; de leur conservation; de leurs maladies.
— Education physique et morale des chanteurs.
CHAP. XVIII. De l'exécution instrumentale. § I. De l'art de
jouer des iuslrumens. § II, De l'exécution en général et de
l'exécution collective. p. ig3
§ I. Qualités nécessaires pour bien jouer de chaque espèce
d'instrumens. — Du jeu des instrumens à archet. — Violonistes
célèbres. — École italienne du violon, autrefois la meilleure. —
École française, maintenant supérieure. — Violoncellistes et
contrebassistes. — lustrumens à cordes, fondement des or-
chestres. — Du jeu des iustrumens à vent. — Flûte et flûtistes
célèbres. — Hautbois et hautboïstes. — Clarinette et clarinet-
tistes.— Basson et bassonistes. — Cor et cornistes. — Trompettes et
trompettistes. — Du jeu desinslrnraens à clavier. — Orgue; diffi-
438 TABLE
«•ulté d'en jouer; organistes célèbres.- — Piano: différentes ma-
nières d'en jouer à diverses époques; pianistes célèbres. — Art
de jouer de la harpe ; harpistes. — Guitare, guitaristes.
§ II. La perfection de l'exécution collective dépend d'un chef
d'orchestre. — Habileté dans le jeu des instrumens et dans le
chant insuffisantes pour nne bonne exécution; qualités qu'il
faut y joindre. Certains peuples possèdent naturellement ces
qualités ; l'étude les développe chez d'autres. — Dispositions
des orchestres , leurs proportions. — Orchestres français supé-
rieurs aux autres. — Perfectionnemens qu'on peut introduire
dans l'exécution colIectÏTe.
QUATRIÈME SECTION.
COMMENT OK ANALYSE LES SENSATIONS PRODUITES PAR LA MU-
SIQUE, PODR PORTER DES JUGEMETfS SUR CELLE-CI.
CHAP. XIX. Des préjugés des ignorans et de ceux des sa vans
en musique. page 243
On se presse trop de porter des jugemens sur ses sensations.
— Les musiciens ne sont point fondés à se croire seuls juges de
la musique. — Les journalistes et les littérateurs n'ont pas les
connaissances nécessaires pour donner, comme ils le font, des
théories de musique.
CHAP. XX. De la poétique de la musique. p. 249
La musique n'est pas seulement un art de sensation physi-
que; son objet est aussi d'émouvoir. — C'est à tort qu'on en a
fait un art d'imitation. — Elle exprime indépendamment de la
parole. — Tous les styles et tous les moyens sont bons lorsqu'ils
sont employés à propos. — Les faux jugemens résultent de l'ad-
miration qu'on professe pour certaines manières à l'exclusion de
certaines autres.
CHA.P. XXI. De l'analyse des sensations produites par la mu-
sique. !'• ^"^
Dans l'origine des sensations musicales on n'en aperçoit pas
le principe. — L'halûlude d'entendre de la musique, sans en
DKS MATIF.r.F.S. 439
analyser les dét;iils, n'en donne que «les notions et des sensa-
tions incomplètes. — On juge en général sur la foi d'autrui. —
Nécessité de se défendre des préventions favorables ou contraires
pour sentiret pour juger. — Analyse de la musique dramatique.
Idem de la musique religieuse. — Idem de la musique instru-
mentale. — Par l'analyse des sensations on peut parvenir à ju-
ger sans connaissances tecliniques.
CHAP. XXII. S'il est utile d'analyser les sensations que la mu-
sique fait naître, page 282
C'est une erreur de croire qu'on affaiblit la sensation en ré-
fléchissant sur elle; comment cela peut se démontrer. — La pa-
resse est l'origine de l'éloignement qu'on montre pour l'analyse
des sensations.
CONCLUSION. p. 286
DICTIONNAIRE
DES MOTS DONT l'cSÀGE EST LE TIVS HABITUEL DANS LA
MUSIQUE. p. 287
CATALOGUE SYSTÉMATIQUE
DES PRINCtPAUX OUVRAGES FRANÇAIS SDR LES DIVERSES PARTIE?
DE LA MUSIQUE.
CiiAp. I. Origine, éloge, utilité, effets de la musique. Page 899
Chap. II. Littérature de l'histoire de la musique. 400
Chap. III. Polémique sur la comparaison de la musique
italienne et de la musique française. 408
Chap. IV. Polémique sur la musique française, 411
Chap. V. Polémique sur la musique de Glurk et la dis-
pute des Gluckistes et des Piccinistes. 412
Chap. "VI. Biographie des musiciens. 4^4
440 TABLE DES MATIERES.
Chap. VII. Bibliographie de la musique. Page 418
Chap. Vin. Dictionnaire technique de la musique. 419
Chap. IX. Théorie du son. 421
Chap. X. De l'ouïe et de la voix humaine. 422
Chap. XI. Du son et de ses modifications 425
Chap. XII. De la vélocité du son. Id.
Chap. XIII. Des vibrations des cordes et d'autres corps. 426
Chap. XIV. De l'écho. 427
Chap. XV. Sur la sjrropathie des sons. 428
Chap. XVI, De la détermination d'un son fixe. Id.
Chap. XVÏÏT. Des phénomènes acoustiques. 429
Chap. XVIII. Application des mathématiques à la
musique.
Chap. XtX. De la construction des instrumens. 4 3o
Chap. XX. Du chronomètre et des divers instrumens
propres à mesurer le temps en musique. 432
Chap. XXI. Art de noter les cylindres d'orgues et de
serinettes. 433
FrX DE LA TABLE.
Id.
La Bibliothèque
Université d'Ottawa
Echéance
The Library
University of Oi
Date Due
57?
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au'8i
I Cf.
muGioigaî*
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2 1 AVR. 1992
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