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PERPETUITE'
DELA FOY
DE LEGLISE
CATHOLIQUE
TOUCHANT
LEUCHARISTIE^
DE' FENDUE
Contre les Libres du. Sieur Claude , Minifire de Charenton.
TOME TROISIEME.
Contenant laRtponfe auxPafTages difficiles des Pères objedez par lesMiniftres,
E T
La Confirmation de l'Union des Eglifes Orientales avec l'Eglife Roma.'ne fur
la Prcfence réelle , la TranlTabftantiation , & autres points , par les Attefta-
tions authentiques de tous les Patriarches , & de la plupart de s E vêques de
CCS Eglifes, & par un grand nombre d'autres preuves.
A P A RI S^
Chez H I L A I R E Foucault, raë faine Jacques , dans la
vieillePofte , au fond de la Cour.
M. DCC. XlII.
AVEC PRIVILEGE ET A P P KO B ATI ON,
z^aSô /s
I/-3
=T^^±3:rr^^-T.T VH - ï\l-^^I-f^ in -FPr
PREFACE-
%'ÀSK^^i ^^^^ ^°"^ les hommes ne font pas également
7i.^ ':"®1^^ éclair £z en toutes chofes , & qu'ils ne regaf-
^ ^' ■ ' ' s mêmes objets par Ici mêmes
Il C ^pencpas cous
'iMi^;^,p^^'lfa':es, il eft vifibie qu'on ne fçauroïc les concen-
^U-'^'-'^^ j tvf cous en quoy que ce C<At , puifqu'il faut en
agiiïànc le réduire à une certaine mani-ere , & qu'il efl comme
ïmpoffible que cette manière s'accommode à tant d'inclina-
tions différentes.
C'eft lafource ordinaire des plaintes que chacun fait contre
les Auteursflui ne fuivenc pas la voye qu'il auroit voulu pren-
dre , ce qu'il j ige la meilleure par rapport à fa difpolition
particulière 5 &: je ne doute point que plufieurs perlonnes
ft'ayent attaque par là les deux Tomes de la Perpétuité qu'on
a déjà publiez , &: n'ayent trouvé à redire A l'ordre & à la mé-
thode qu'on y a (uivie. Mais on a répondu à ces plaintes par
cette raifon d'équité, qu'eftant impoilîble de contenter tout
le monde, on ne peut faire autre chofe dans les Livres , que
de choifîr l'ordre le plus naturel en foy , £c le plus conforme à
la difpofition la plus commune 5 ce qu'on prétend avoir
fait.
On eft bien aife néanmoins, en produifancletroiiîéme Vo.
lume de cet Ouvrage, de pouvoir encore fe défendre fur ce
point d'une manière dont on croit que plus de gens feront fa-
tisfaits.
Car encore que les plaintes qu'on a pu faire contre la me-
thode des deux premiers ne foienc pas tout-à-fait juftes par
la raifon qwe je viens de dire , elles font pourtant fondées fur
une imperfeclion de cette méthode , inévitable à la venté ,
âij
P R E î A C E.
îTiais réelle , qui eft qu'elle n'efl: pas conforme au goût & à l'in-
clination de routes fortes d'efprits.
Il y en avoit qui auroient voulu qu'on eût Commencé par
les preuves qui font contenues dans le fécond Volume ,c'eft:-
à dire qu'après avoir établi la vérité de la dodrine de l'Eglife
par l'examen des paflages de l'Ecriture , on paflàt enfuite à
celui de la créance des Pères des fix premiers fiecles, pour finir
par la difcufTion delà Foyde toutes IciEglifesdu monde de-
puis lefîxiéme fiecle.
D'autres n'eftant retenus dans le parti des Calviniftcs que
par certains paiïâges difficiles, auroienc voulu qu'on fut en-
tré d'abord dans la difcufllon de ces paflages , qui les ont tel-
lement frappez, qu'ils font incapables d'écouter toutes les au-
tres raifons qu'on leur peut alléguer j tant que celles-là fubfi-
ftentdans leurefprit.
On n'a pas crû néanmoins devoir fuivre ni l'un ni l'autre de
ces deux ordres par les raifons qu'on a marquées dans les Vo-
lumes precedens 5 & on a jugé qu'il eftoit tout autrement na-
turel de commencer par ce qu'il y a de plus clair & de plus in-
conteftable , qui eft la dodrine de toutes les Societez Chré-
tiennes depuis mille ans , pour pafler enfuite à ce qui eftoit plus
combattu , qui eft celle de l'Eglife des fix premiers fiecles.
Mais quoique cette dernière méthode ait aflurément quel-
que avantage fur ces deux autres qu'on auroit pu fuivre, on
avoue qu'elle ne les furpafle pas en tout , puifqu'elle n'eft pas
proportionnée aux pcrfonnes dont nous avons parlé , qui fè fe-
roient mieux accommodez des autres 5 &ainfi après l'avoir
gardée par neceffité dans le cours de cet ouvrage , on eft bien
âife prefentement qu'il eft achevé, d'en pouvoir laiflèr le
choix aux Ledeurs, qui n'auront qu'à difpofèr ces trois To-
mes, félon la méthode qui fera la plus à leur goût.
S'ils aiment cet ordre de nature & de raifon qui conduit l'ef-
prit des chofes claires à celles qui le font moins , ils n'ont qu'à
(ûivre celui auquel on a pubUé ces Volumes , fans y rien chan-
ger.
S'ils font attachez à l'ordre Chronologique , & qu'iîs ne
trouvent pas bon qu'on ait commencé l'Examen de la tradi-
tion de l'Eglife fur l'Euchanftiepar les derniers temps ^ilsont
moyen de contenter leur inclina» ion , en faifant du fécond Vo-
lume le premier , du trojfiéme le iecond , & en finiiTanc ainfi
par le premier.
Préface.
Enfin ceuxiqui ont fouffèrtavec peine qu'on aie différé juf-
Gu'àcecroifiéme Volume, réclaircifîemencde certaines diffi-
culté! & de certains pafTages qui les arreftent , ont moyen
maintenant de fatisfaire leur impatience, en fefaifanc un nou-
vel ordre , qui feroit de prendre ce dernier Volume pour le
premier, 5c de donner aux deux autres tel rang & tel ordre
qu'il leur plaira.
Je fçai bien que ces autres ordres n'edantpas celui auquel
on s'eft attaché , ne feront pas fi juftes ni fi luivisquele pre-
mier, & que l'on n'y trouvera pas toutes chofès traitées dans
leurplace naturelle. Je fuisperfuadé néanmoins que cela ne
va pas bien loin , & qu'ils pourront fort bien fuivre dans la le-
â:ure de cet Ouvrage l'ordre qui fera le plus conforme à leur
inclination , d'autant plus que les citations qui font à la marge,
& la Table qui réunit tous les trois Volumes en un corps , les
avertit de ce qui pourroit eflre traité dans un autre Volume
que celui qu'ils auront entre les mains.
Il feroit àfouhaiter que cet Ouvrage fût auiïî en e'tatd'a.
gréera tout le monde , à l'égard des chofes de de la manière
dont elles font traitées , qu'en ce qui regarde la méthode.
Mais c'eft ce que je fuis bien éloigné de prétendre. Jerecon-
nois au contraire qu'à l'égard de l'un &de l'autre il ne répon-
dra nullement à l'idée que les perfonnes éclairées auront de ce
qu'on pouvoit faire , 5c qu'ils y pourront remarquer avec jufl
ticeun grand nombre de défauts. Mais afin qu'ils en puifTent
mieux juger , j'expoferai fîmplement ici les vues qui m'onc
porté à le mettre dans l'état où il efl , & à le renfermer dans
les bornes que je m'y fuis prefcrites.
Il m'a paru que c'étoient des défauts prefque également à
éviter de traiter les matières avec trop de brièveté , ou de les
étendre trop > defe contenter de propoferles principes géné-
raux, pour refoudre les objedions , ou de defcendre dans un
détail qui fatigue inutilement lesLeûeurSjd'obmettrelesdif-
fîcultez importantes ôc efTentielIes , ou de n'en négliger aucu-
ne pour petite & légère qu'elle foit -, & qu'ainfi il falloit pren-
dre un milieu qui pût fatisfaire les perfonnes de bonne foy,&
qui ne rebutât pas le commun du monde par une longueur en-
nuyeufe.
Il efl certain , comme dit S. Auguflin , que ceux qui font in- *' ^'^.c*"'^-
flruits de la vérité, n'auroient pas befomde beaucoup de dif- *'c.i.' '
3»
3}
5)
51
P R E î A G E.
cours pour faire voir la taufTecé de quelque erreur que ce foif;,
fi l'efpric de ceux à qui lU ont affaire ne refiftoic point à la lu-
mière de la venté , & s'ils écoutoient avec dotilirc la dodri-
ne falutaire .jufqu'à ce qu'il: fuiïènc guérie par le fecours de la
grâce, qu'ils attir^roient par leur toy &: leur pieté.
Mais il efl: vray auiFi , comme dit ce même Père , que la'
plupart de ceux qui font dans l'erreur, ne font pas dans une dif-
pofition Cl heureufe. ïls fuivent aveuglement leurs paffion^ &c
leurs prejucrez , après même qu'on leur en a fait voir la fau^
fêté. Leur aveuglement les empêche de voir des chofes tres-
claires ,& leur opiniaftreté fait qu'ils nefe rendent pas à cel-
les mêmes qu'ils ne fi^auroient s'empêcher de voir : & c'tfl: ce
qui oblige, dit il, de s'étendre (ur des chofes qui font d'elles-
mêmes claires , afin de ne les expofer pas feulement aux yeux
de ceux qui les voudroient regarder , mais de les faire en quel-
que forte toucher à ceux mêmes qui ne les veulent pas voir.
J^it ncce.fjïtas copiofms ducndi plcrumque res dards , veht eas non
fpeciantihus intuendas ,fedquodammodo tangendas falpantibus^ô^
conniventibus offerumin .
Il y en a même qui n.'eftanc pas en une fi mauvaifedifpofi-
tion , méritent encore mieux cette déférence. Car comnieil
y a des difficultez dans tous les myfteres, il ne faut pa. rout-
à fait s'étonner que certains efprits en foient embarafïez 5 & la
charité ne permettant pas qu'on néglige le falut de perfonne,
il faut par neceffité s 'appliquer à refoudre ces difficulté/., puifl
qu'il y a peu de gens qui en trouvent l'éclaircifiTement dans les
folutions générales.
Or pour le faire comme il faut , & ne donner pas lieu à des
répliques , qui portent encore la difpute à une plus grande'
longueur , il faut traiter les chofes exadement , & avec une
étendue raifonnable , autrement on ne termine rien. Un écrie
n'efl: que la femence d'un autre, & on laifle à ceux qui font
dans l'erreur un prétexte apparent de fe flatter, qu'ils ontrai-
fon de demeurer dans leurs fèntimens ,puifqu*onne leséclair-
cit point fur ce qui les y arrefle.
C'eft ce qui a obligé d'expliquer en détail ces fameux pafl,
iages deTertullien, de S. Auguflin , deFacundus, de Theo-
doret, de Theodotus d'Antioche,deGelafe, de S. Ephr.m ,
& de quelques autres Auteurs , dont les Miniflre-s rempliirent
tous leurs Livres 6c cous leurs difcours , 6c donc ils foncier eni -
Préface.
part du Calvinifmc , 6c le fondement de toutes leurs folu-
tions.
Ces pafîàges fe trouveront traitez dans ce Volume ici avec
tout le foin & toute la netteté qu'on a pu , mais fur tout avec
lîne entière finceritë. Il ne s'y verra point qu'on ait tâché
d'ebloiiir le monde , en feignant de méprifer ce qu'on auroic
eu peine à éclaircir. On n'a ni diffimule , ni obfcurci les diffi-
cultez &: les réponfes ordinaires des Miniftres , & on leur a
donné de bonne foy toute la force qu'elles ont dans leurs
écrits.
Ileft vray que l'ordre dans lequel elles font propofées , Se
les principes de vérité qui les précèdent èc les environnent, en
font difparoiftre la plupart. Mais il n'eftpas moins permis de
détruireune objedionpar avance, qu'après l'avoir propofeei
&ce n'eft pas ce qu'on appelle éluderune difficulté par adrelîe
& de mauvaife foy j c'eft au contraire la dilîiper par la lumière
de la vérité.
Ce font-là les raifons qui m'ont porté à m'étendre , comme
j'ay fait , fur certains pafTdges célèbres : mais j'en ay eu d'au-
tres qui ne font pas moins confiderables, pour me renfermer
dans certaines bornes , & ne pas piuifler cet examen jufqu'à
un dérail ennuyeux de petits paflages &C de légères difficultez ,
qui font fuffifamment éclaircies par la folution des autres.
Il n'y a que trop de gens qui fe plaignent déjà de la longueur
de ces Volumes , & qui en font rebutez. Il n'y en a que trop
qui fe perdent dans ces difcuflions embarafrées,& qui n'ont ni
alfez de temps, ni aflez de capacité pour fuivre le fil de cette
difpuce. Queferoit-ce donc fl on les avoitvculu conduire pr
un chemin infini , en les accablant de la réfutation d'un ta- de
vaines chicaneries , qui ne font point pour l'ordinaire ce qui
attache les gens au Calvinifme ?
Comme la vraye Religion n'efl que pour les perfbnnes de
bonne foy , ce n'eft proprement qu'à ceux là qu'il faut fonger,
en tâchant d'éclaircir ce qui les peut retenir dans l'erreur : mais
c'eft fe charger d'un travail également ujfini 6c inutile, que
de prétendre repouflèr ou prévenir tous les reproches , 6c tou-
tes les objeclions de ces fortes de gens , qui tont gloire de ne
fe rendre jamais à la vérité , & qui n'ont pas pour but de la
trouver, mais de la combattre.
C'eft pour cette ralfon que S, Auguftin déclare que ceux
Dei ly. c.
P R E FACE.
" qui défendent la vérité , ne doivent point fe croire obligez de
" répondre à tout ce qu'on peut oppofer à leurs écrits. Carquel-
" les bornes, dit-il,anroientles difputes ,6c quand pourroit. on
" ceiîèr d'écrire , s'il falloit toujours répondre aux adverfaires
>' de la vérité jufqu'à ce qu'ils ne répondirent plus ? Ne Tenait on
" pas qu'il y en a , qui par défaut d'intelligence j ou par une aver-
»' fion opiniaftre qui les empêche de fe rendre aux chofes mê-
^' mes dont ils font convaincus , ne demeurent jamais fans ré-
" ponfe, & ne fe laflent jamais de produire de vaines objections?
r'" Qiie fi on les vouloit réfuter autant de fois qu'il leur plairoic
5' d'attaquer la vérité par ces fortes de difcours, où fans avoir
5' égard au bon fens , ils n'ont pour but que de contredire ce
,' qu'on a dit ,ce feroit fe charger d'un travail le plus grand , le
j' plus pénible &: le plus infrudueux qu'il foit pofliblede s'ima-
>' giner.
Decivit, ^, Il eft aifé , dît encore ce même Père, à ceux qui ne veulent
j, pas fe taire , de produire des écrits pour faire croire qu'ils onr
,5 répondu. Ne fçait-on pas que le menfonge ne tarit point. Mais
,j s'il fçait faire, quand il veut, plus de bruit que la vérité , il
„ ne faut pas croire pour cela qu'il ait autant de force que la ve-
„ rite. Facile efi cuiquam videri refpondijje.j qui tacere noluent ^
aut quid efi loquacius vanitate , qu^ non ideo potefi quod v«-
ritar , quia Jî voluerit etiam ^lus -potefi clamare ^ quam Veri-
tas ?
Un homme de fens nefe doit donc jamais promettre que fès
écrits puiflent étouffer toutes lesréponfes. Ce feroit mal con-
noiftreceque peuvent l'engagement 6c la paffion. Mais l'on a
droit d'exiger de tous ceux qui écrivent, 6c principalement
en des matières importantes pour le iàlut ,, qu'il n'y ait rien
que de fincerefcde folidc dans leurs preuves: qu'ils nepropo-
pofent jamais comme certain ce qu'ils fçavent leureftre nié
avec quelque apparence par ceux qu'ils combattent: qu'ils ne
prétendent pas payer le monde de déclamations, au lieu de
railons, ni cacher leur foibleflè fous une abondance de paro-
les inutiles , qu'ils ne fuppolént pas groffierement ce qui efl:
en queftion ^ & enfin qu'ils accompagnent ce qu'ils difent de
preuves afîèz fortes, pour en perfuader les perfonnes raifonna-
bles, 6c pour faire croire au moins qu'ils en font eux-mêmes
perfuadez.
C'eft-là ce qui diftingue les gensfînceres & de bonne foy
de
Préface.
• de ceux qui ne le font pas. Je f^ai que chacun en particulier s'at-
tribue ces qualiteZj & les ote à Ton adverfaire , mais il n'en
faut croire perfonne fur Ton propre témoignage. C'eft à ceux
qui lifent ces Ouvrages à en juger , & c'eft par là qu'ils en doi-
■ vent commencer l'examen pour en juger équitablement.
i Car en vérité quand on n'aime qu'à déclamer , on en devroit
chercher d'autres fujets que ces queftions , où il ne s'agit de
rien moins que du fâlut éternel 5 & il n'eft pas rupportable
qu^on en veuille faire un jeu Si. un exercice d'efprit , & qu'on
. ait pour but en les traitant , non pas d'éclaircir la vérité , maiç
de Tobfcurcir , pour faire paroiftre de la fubtilité ^ & de l'élo-
quence,
•^ Ainfî comme il n'y a rien déplus jufte que de juger les Ou-
vrages où l'on reconnoiftroit cet efprit, indignes d'eftre lus,
je confens de bon coeur qu'on ufe de ces règles dans l'examen
de ce Volume ici ,aullî bien que des precedens , &:fansm'ar-
•rêter à prévenir les Lecteurs en ma faveur^ je les renvoyé à l'ou-
vrage même,& c'eft par là que je confens qu'ils me juftifienc
ou me condamnent.
Ils y trouveront , comme j'ay dit , les principales difficultez
que les Miniftres forment fur cette matière , Se les principaux
•paflàges traitez dans une jufte étendue , mais ils ne trouve-
ront pas ces paflàges difpofez dans un ordre chronologique j
* cet ordre ne donnant par lui même aucune lumière, éc obli-
geant à des répétitions inutiles , parce qu'il arrive fouvent
que les paflàges d'un Père du 2. ou du 3. fiecle ne contiennent
que la même difficulté que celle d'un Auteur d'uniîecle plus
reculé.
11 fuffit, pour avoir droit de les propofer fans diftinclionde
fîecles, que les Miniftres demeurent d'accord qu'ils ont tous
eu le mêmefencimenr fur l'Euchariftie, & qu'il n'y en a point,
excepté Zuingle,qui place Ci haut ce prétendu changem'ent,
qu'ils prétendent eftre arrivé dans la doclrine de rEglifefurce
Myflere.
On peut donc avec raifon les confiderer tous comme un
même Auteur, & réduire enfuire leur doclrine à certains chefsi
ce qui abrège & éclaircic la difpute , & qui a efté même prati-
qué par plufieurs des Miniftres qui ont traité cette matière,
& entr'autres par le Sieur Blondel, qui tient avec raifon un des
premiers rangs parmi eux.
c
Préface.
Il arrivera fouvent que j'employeray en preuve ce que les
Miniilrcs propolent comme des objections confîderabies, par-
ce qu'il y a ées chofes qui peuvent paroillre difficiles , elîanc
conllderées fcparément, iic iiorsde leur place, Se qui ne laillcnt
pas de conrribaer fouvenc à faire paroiftre )a vericë avec plus
d'éclat , lorfqu'elles font regardées dans un certain jour , ôc
jointes aux principes dont elles dépendent.
Au rede quoiqu'on n'ait point fait profelTionde fuivre Mon-
(leur Claude pas à pas , Si. que l'on (e foit cru obligé de né-
gliger une infinité de petites objections qu'on auroit pu. rele-
ver: tout ce qu'il y a néanmoins de plus confiderable dans Tes
trois rcponfes eft tellement renverfé dans les trois Volufnes
de cet Ouvrage , que ceux qui prendront la peine de les com-
parer , n'auront gueres d'égard aux plaintes qu'il pourroic
faire , qu'il y a beaucoup de chofes à quoy on n'a pas ré-
pondu.
Je les avertirai feulement , que quoique les principes de fâ
troifiéme réponfe foient détruits danslefecond Volume, com-
me on a eu foin de le remarquer , & que tout le huitième Li-
vre de celui-ci combatte diredement ce qu'il a prétendu y
établir touchant lesSocietçzd'Orient, néanmoins pour avoir
une réfutation exacHie des preuves qu'il employé fur le fujet
des Grecs , 6c des autres Chrétiens Orientaux , il faut joindre
à ces trois Volumes , outre la Réponfe q^cnende , l'excelleni:
Traité du R. P. Paris Chanoine Régulier, &; Profefleur en
Théologie de laMaifon de Sainte Geneviève , quiabien vou-^
lu fe charger decettepaitiedelâ|refutation de M.Claude, &
qui s'en efl: acquitté avec toute la folidiîé , la netteté & la, fîn-
cerité que l'on pouvoir fouhaiter.
C'cft ce qui donne encore plus de lieu de regarder cette dii^
pute comme terminée jcequel'on pourroit ajouter aux preu-
ves dont on s'eft fervi , paroiiTant peu neceflaire , & ce qui
pourroit yeflreoppoféaprés les écUircilîèmensquel'ona don-
nez, ne pouvant plus eflre que de fauffes vues que l'opiniaftreté
ne ceiîe jamais de produire j&: que S. Augu/lin nous apprend à ,
mépril^r.
II y a divers partages , 6: principalement de S. Auguftin, dont .
je n'ai pas crû devoir grolTir ce Volume, parce qu'ils ne con-
tiennent aucune difficulté, qui ne foit fuffifamment éclaircie
par ceux qu'on y a traiccz,&; qu'il ii:i'a femblé qu'il yaloit mieux
P R E I A C E.
y difcucer dans une jufte étendue les paflages que j'y rapporee,
ique d'y entaller confulemenc, à l'imitation de M. Claude, une
foule de citations inutiles.
11 y enaauffi que j'ai crû devoir obmettre, parce qu'ils ont
efté fi nettement expliquez par d'autres Auteurs , & fur tout
par M. le Cardinal du Perron, qu'il auroit efté inutile d'y vou-
loir rien ajouter.
Tout ce que l'on pouvoit faire , c'eftoit de reprocher à M.
Claude d'avoir ofé les alléguer fans répondre aux raifons de ce
Cardinal. Mais comme ces reproches euflcnt efté trop frequens;
parce que c'eft fa coutume de ne fe pas fatiguer à examiner les
réponfes des Catholiques , &: de propofer despaftages très-
communs , ¢ fois détruits, comme fi jamais on n'enavoit
parlé , j'aime mieux y fuppléer par cet avertifiTement gênerai ^
& par deux ou trois exemples particuliers que je crois en de-
voir rapporter ici.
Les anciens Miniftres avoienr extrêmement fait valoir un
certain paftage de S. Auguftin , tiré du Traité 59. fur S. Jean ,
011 ce Père dit, en comparant les Apôtres à Judas , qu'au lieu
^ue les Apofires mangèrent un fain qui cfioit le \Sciyieur ^ Juda-f
mangea le pain du Seigneur contre le Seigneur : que les uns ret^ùrent
la Vie , l'autre le fupplice , parce que ccluy qui tnange indignetntnt ,
mange fon jugement félon l'yipojhe.
Mais M. le Cardinal du Perrcma fi bien fait voir que S. Au-
guftin n'entend point l'Euchariftie par ce pain du Seigneur ,
qu'il dit en cet endroit que Judas mangea , mais un morceau
de pain trempé , après lequel le Diable s'empara de lui, & que
S. Auguftin diftingue expreflément de l'Euchariftie dans le 6%.
Sermon fur le même Evangile , qu'Aubertin cftant convaincu
par les preuves de ce Cardinal, n'a pas ofé employer ce paflàge
contre les Catholiques, Se s'eft même cru obligé dcreconnoî-
tre que c'eft le morceau trempé donné à Judas , & non l'Eu-
chanftie, qui eft marquée ence lieu de S. Auguftin par les mots ^'■^' ^' ^^*'
à.Q panem jDomini,
Mais M. Claude qui n'y regarde pas de fi prés ne s'cft pas
embarafle déroutes ces dilcuflions^ & il produit hardmicnc
cepaflage de faint Auguftin, pour prouver que l'Euchariftie
y eft appel lée Pain^ 'Se qu'elle y eft diftinguée du vray Corps
de J. C. Et ce qui eft de plus rare , c'eft que pour mieux faire
<iire à faine Auguftin ce qu'il prétend , il y ajoute une li-
€ij
P R É f  C É.
*hèétitiéré de fa façon. Les Pcres ^ dit- il , Comparéfit le fâîn
après la conjecraîion avec le corps du Seigneur , o"" >ls dtfent que
l'unejt le pain du Seigneur ^ue lesmkham mangent 3 ^ l'autre le
■pain qui efl le Seigneur même , que les mèchuiiS ne peuvent man-
ger ^ ^ que les Fidèle^ reçoivent. Le paflàge de S. Aiisriftin qu'il
M. Claude cicc à la marge , porte fimplement : //// manduc.ibant panem
R.eip.p.;4. Dominum ., lUe panem Domtni contra, Do^ninum ^ iUi vitam^iUe
fœnam 3 qui enim tnanducat indigné , ait Apojiolus , judicium fil>i
manducat (j^ hibit : de force que ces paroles ici , qud les mèchans
ne peuvent manger., (^ que les Fidèles ret^oivent, font de M. Clau-
de, & non de S. Auguftin. 11 appellera cela comme il luiplal-
i-a , mais il aura peine à faire approuver ce procédé par lés
perfonnes finceres.
Tous ceux qui ont traité la matière de l'EuchariftiCjtant Ca-
tholiques, que Protellans, citent auffi ordinairement deuK
palTIiges deS. Augudin , cirez des deux Sermons qu'il a faits
fur le Pfeaume 33. 11 dit dans le premier abfolument que J. C.
s'eftoit porté dans fcs mains, lorfque donnant /o« Corps même
à [es Bifciples , il dit , Cecy eft fnon Corps : Et dans le fécond il
dit qu'il fe porroiten quelque façon dans fes mains : Quodam-
modo ferehatvr in manibus fuis.
Le Cardinal du Perron prouve par des raifons très folides ,
que le fécond ne détruit point le premier : que le fens littéral
de ces paroles, que J. C. efioit porté dans fes mains .^ efl: établi
par diverfes circonfl:ances du premier pafTage , & entr'autres
par la remarque que S. Augufl:in fait, qu'il eft impoflible de con-
cevoir que ce qui eft exprimé par ces termes s'accompiiiTe dans
un homme , quoiqu'il prétend'e que ces paroles fe font vérifiées
félon la lettre dans J. C. Hocvero fratres quomodo fieri pojjît in
Qiiomoio in- domine quis intelUqat. A quoi Aubertin n'a pu répondre autre
tcUiçatur 111 , ^ ^^ 1/1 • I nv 1 ■ „
ipfo Davidfe- ciioie , liHon que C clt une exagération de Prédicateur, Con-
cuiidum litre- cionatorum ^ dcclamatorum more difficultatem quantum potcjl an.
"mûrii"''' g^^: c'eft à-direque c'eftunepenfée fansfolidité , par laquelle
chriftô autcni S. Auguftin relevé fans raifon une difficulté chimérique, qui
'"^r'vT^' n'eftoit fondée que fur un fens auquel on ne doit point prendre
"' ' ces paroles. On jugera s'il n'eft point plus vrai, femblable que
ce Miniftre impofe à S. Auguftin un faux fens , que nonpas que
ce Saint ait parlé d'une manière fauffe & ridicule.
Ce Cardinal prouve encore qne ces termes qui fc trouvent
dans le fécond paftàge, que J. C. fc portait en quelque forte eit
Préface.
fef mains ,qttodammo do , ne nient pas la vérité littérale & réelle
de la première expreffion : de même qu'en difant avec faint
Auguftin, que Dieu s'eftuniàla nature hum^mc quod.immodo y
que l'ame ell immortelle en quelque manière , fecnndumquem-
dam modunf-, Et avec Théophile d'Antioche , que la matière a
efté créée de Dieu en quelque manière , materiam a Dca cjfe
quodammodo facljfn ; on ne prétend pas dire que ces propoll-
tions ne foient vrayes qu'en un fens métaphorique , mais on
veut feulement en attacher le fens littéral à une certaine ma-
nière particulière : ce que S ^luguftin a eu grande raiion de
faire , en exprimant cette pcnfée , que J. C. s'efi porté luy -même ^
puifqu'encore qu'il l'ait fait réellement , c'a efté néanmoins
d'une manière toute différente de celle dont on porte les au-
tres corps.
En effet on ne dit gueres que l'on porte les âmes, quand
on porte des hommes vivans, quoique ces hommes ne foienc
pas fans ame. Et ainli le corps de J. C. ne faifant pas plus d'im-
preflion fur nos fens qu'une ame fpiritucUe, & n'eftant porté
en effet , que parce qu'il eft réellement dans le Sacrement qui
eft porté , on ne doit pas trouver étrange que S. Auguftin dé-
termine le fens vague & gênerai de ce terme de porter , qui
pourroit donner l'idée d'un corps porté de la manière ordi-
naire à cette manière particulière, qui ne convient qu'au corps
de J. C. & qui eft une fuite de l'état incomprehenfible oià il eft:
dans ce Sacrement.
Tout cela eft entièrement conforme au bon fens, &:aeftc
fouvent allégué par les Ecrivains Catholiques ; mais il ne plaift
pas à M. Claude d'y avoir égard. Il écrit comme fi c'eftoitpar
lui que cette controverfe commençât à eftre traitée j êi: fans
comparerces deux paffàgesenfemble, fans dire un mot de ces
remarques & de ces reflexions fi naturelles , fi juftes 6c Ç\ com-
munes, il croit en eftre quitte pour citer feulement le fécond
paffage avec une petite interrogrition. J. C. dit- il. fe portait en
quelque forte , quand il di fait: Cecy efimon Corps ^ que veulent dire
ces correclions (^ ces adouci ffcmens ?
Voici encore un exemple confiderable de ce procédé fi or-
dinaire à M.Claude. LesMiniftresontlongremps fait valoir
dans leurs écrits & dans leurs difcours ces paroles de faint Au-
guftin, tirées du 25. Sermon fur S. ^ean. Pou^quoy prrp.irez^
vous les dents é^ le ventre .«' croyez^^ é^ vous aurcx^manq^è , pour
Préface.
en conclure que l'on ne mangeoic le corps de J. C. que par 1
foy.
Ce pafTage leur fcroit inutile, quand il s'entendroit du Corps
de J. C. & qu'il s'y agiroic de rÉuchariftie^ parce que l'on au-
roic fujet de dire à des gens qui la rfgarderoienc comme une
nourriture corporelle, que ce n'eftpas en cette manière qu'il
la faut conlîderer : qu'elle n'eft pas deftinée à nourrir le corps
mais à nourrir l'amei & que c'eft pour cette raifon qu'on en
prend fi peu : Moiicum quiâ accipirmis , ^ in corde fapnamur.
Et il n'y auroit nul inconvénient pour reprimer ces penfëes
charnelles , de fe fervir des termes de Taint Augultin -.IJtquid
paras dentem d" ventrcm / crede ^ manducafii , comme l'Auteur
du Livre (i^ Cœna Domini , reconnu pour TranlTubUantiateu-r
par Aubertin,& par les nouveaux Miniflres, ne cramtpasde
dire : N'on dentés ad ynordcndum acuimus , fcd fide fincera panem
fanchm frangimus d?- partimur: par où cet Auteur ne veutpa^
dire que l'on ne reçoive point le corps de J. C. dans la bou-
che , ni qu'on ne le ret^oit que par la foy, mais feulement
qu'on ne fonge point , en prenant le corps jEsus-CHRiST,à fa-
tiifaire legoûcdu corps, &; qu'on n'eft attentifqu'à le goûter par
Ja foy.
C'eft cequ'onleur diroit avec juftice, quand ce paffages'en^
tendroit de TEuchariftie. Mais il eft fi certain qu'en ne l'en doit
pasentendrcj &que S. Auguftin n'adrefl'e point ce difcoursaux
Chrétiens , mais auxjuihqui fuivoient J. C.pt>ur en recevoir'
une nourriture corporelle, q"u'Aubercin ne Ta ofé alléguer con-
tre la manducation réelle. M. Claude néanmoins qui ne né-
glige rien, parce qu'il a befoin de tout, & qui ne fe pique pas
d'exacfticude , n'a pas cru devoir obmettre ce paCage , & le
cite exprefi^ement dans la page 58. de fon Livre.
Ce procédé , comme j'ai dit, eft fi ordinaire à M. Claude,
igu'il faudroit à tous momens lui faire de ces fortes de repro-
ches : mais comme cela nous auroit mené trop loin, & nous au-
roit obligé pour le réfuter de grofiir ce Volume d'une partie
de ce qu'on peut aufiî bien lire dans les Livres du Cardinal
du Perron , on a mieux aimé épargner Eout enfemble M.
Claude &: les Lecteurs , d'autant plus que l'on n'a pas eu defiein
dciendre inutiles lesautres Auteurs qui ont travaillé fur cette
matière, &: que l'on a crû fe devoir borner à éclaircir à fond
leii principaux paftages, dont la foiution enferme celle de tous
icsauLre.s moins cûnûderables.
Préface.
Tout "ce que j'aiMic jufqu'ici a principalement lieu pour les
iepc premiers Livres de ce Volume, qui appartiennent pro-
prement au deflein particulier qu'on y a eu, de repondre aux
difficultez des Minnîres. Le huitième eiï tout d'un autre genre,
puifqu'il n'efb prefque'compofé que d'ades d'atteftations&i de
preuves nouvelles de la créance des Societez Orientales. Mais
il C2 Livre efl en quelque forte hors d'œuvre à i'cgard de ce
Volume ici , il nel'eftpas à l'égard de tout l'ouvrage, Se l'on
peut dire au contraire que c'en eft une conclufion très jufte Si
très naturelle.
Car il faut fe reflouvenir que lorfque l'un propofa dans le
premier Traité qui a donné lieu à cette contcftation , l'argu-
ment qui prouvoit la perpétuité de la dodrine de la prefence
réelle par i'impoflibilité du changement de la créance deT'E-
glife fur ce point , & qui établifloit cette impoffibilité fur ce
fait conftant,que toutes les Societez Chrétiennes eftoient dans
la doiflrine de la prefence réelle au fiecle de Berenger , M.
Clau^e&les autres Minières ne crûrent pasavoir de meilleur
moyen pour éluder la force de cette preuve, &: pour empêcher
l'impreiîîon qu'elle pouvoit faire fur les efprits, que de la faire
paffcr pour un détour & pour une voye indirecte , & d'y oppo-
ferles preuves par lefquelles Aubertin prétend avoir fait voir
que les Pères des fix premiers fiecles font contraires à cette
doctrine , qui leur donnoit , difoient ils , droit de conclure
que ce changement qu'on reprefentoit comme impoflible
eftoit effeclivement arrivé. M. Claude n'a point fait de Livre où
il ne fe foit fervi de cette voye artiiicicufe, & où il n'ait fait
même de longs difcours pour la juftifier : &il faut avouer que
<^uelque injufte qu'elle foit, elle n'a pas laiiïe de produire fur
quelques efprits l'effet qu'il en prctendoit.
Il y a des gens qui jugent des argumens fur l'étiquette, pour
ufer de ce mot , & fur la forme, 5c qui prennent pour également
forts tous ceux qui concluent directement, fans confiderer fi
les principes que les argumens fuppofent font également véri-
tables. On dit aux Miniftres que toutes les Societez Chrétien-
nes s'eftant trouvées dans la dodrine de la prefence réelle
dans l'onzième fieclc,il eft impoffible qu'elles y foient venues
par changem'int ,& qu'il fautainil que cette dodrine ait toû.
jours efté dans l'Eglife ,5c M. Claude réplique que les Pères
n'ayant jarpais crû la prefence réelle durant les fix premiers
P R E T A C E.
fiecles, il faut bien que cette doiflrine fe doit introduite par
changement , puifqu'ellen'a pas toujours efté crue.
L'un fans doute conclut auffi bien que l'autre : mais il y a
cette différence , que le premier eft fondé, tant fur un fait cer-
tain , qui eft l'union de toutes les Societcz Chrétiennes dans
la doctrine de la Prefence réelle depuis Berenger jufqu'àpre-
fent , que fur le fens commun , qui conçoit avec tant dévi-
dence , qu'il s'enfuit de laque cette doctrine nes'efl point éta-
blie par innovation , que M. Claude lui-même n'a ofé nier
cette confequence.
L'autre au contraire n'eft fondé que fur la témérité d'un
homme, qui veut faire paffer pour clair ôc pour certain tout
ce qui lui pLiift , n'y ayant rien au contraire de plus mal prou-
vé, ni de plus faux que cette contrariété prétendue des Pères
avec l'Eglife [Romaine fur la Prefence réelle.
Mais comme ceux que M. Claude a par là abufez, ignorent
ou veulent ignorer cette différence, il eftoit necefl'aire de les
en convaincre i ce qui obligeoit par neceffité de leur montrer
l'inévidence de ces preuves On a mcmepafle plus avant J car
on a pofitivement montré que les Pères eftoient clairement
pour nous , 5c que la Dodrine de l'Egliie Catholique paroilToit
avec éclat dans les fix premiers fiecles, auflî bien que dans les
derniers.
Et c'efl ce qui nous donne lieu maintenant de reprendre
avec plus de force le premier argument ^ l'imprefîlon n'en pou-
vant plus eflre afToiblie par cette chicanerie des Minières.
Que fi cet argument n'eft plusabfolument necefTaire à ceux
qui leroient demeurez entièrement perfuade/. du fennmentde
l'ancienne Eglife , il î'eft à l'égard de ceux a qui il feroit encore
reflé quelque doute dans l'efprit , comme nous avons dit ail-
leLirsi &il eft toujours utile, pour faire paroiftre la vérité dans
un plus grand jour par cette union de preuves & de lumières.
On l'auroitpû faire , en faifant fîmplement rciTuuvenir les
Leifleurs de l'origine de cette difpute , & en leur remettant de-
vant les yeux quelques-unes des preuves dont on a appuyé le
fait qui fort de fondement à l'argument de la Perpétuité , qui
eft cette union de toutes les Societez Orientales dans la foy de
la Prefence réelle. Mais il eft bien plus avantageux à la véri-
té, & il doit eftre beaucoup plus agréable auxLedeurs, qu'on
l'ait fait par des preuves toutes nouvelles j & qui n'avoienc
point
Préface.
point: encore efté prodmces dans aucun ouvrage.
Il eu. difficile que le monde en attende de pius fortes que
celle qu'un a déjà alléguées^ tant dans le premier Volume
que dans la rcponreg'inerale. Cependant je croy leur pouvoir
dire, que celles que l'on verra dans ce dernier livre, lent en-
core plus confiderables. Ce ne lerontplus des preuves, ce fe-
ront des airefls, des jugemens donnez avec connoiflance de
caule, &. des condamnations formelles de M. Claude.
JLa conreftation qui s'eft élevée en France fur le fujet de la
créance des Orientaux , leur a efté expofée de cofte & d'au-
tres. On l'a fait par des Mémoires que l'on leur a envoyé, & il
y a aulli des Miniftres qui ne s'y font pas épargnez. Les Eglifes
d'Orient en ont jugé, & ce font ces jugemens c|ue nous repre.
fenterons icy. On en verra prefque de tous les endroits de l'O-
rient: de Conft;antinople,derA{ic mineure, de l'Archipel, de
Jerufalem, d'Alexandrie, de Damas , de Syde, deMingrelie,
d'Arménie, de Perfe. On y verra tous les Patriarches, & pref-
que tous les Evefques de l'Afie, On y verra des gens , qui re-
fufant leur attcftation à ceux qui la leur ont demandée, con-
damnent néanmoins le Calvinifme avec toute la force qu'on
fçauroit defirer.
On a joint à ces adies quelques lettres & quelques relations
de M.deNointel Ambaffadeur defaMajeftéTres Chreftienne
à Conftantinople, tant parce qu'elles fervent à les authorifér,
& à en éclaircir quelques particularitez, que parce qu'on a efté
bien aife de faire connoiftre à tout le monde avec combien de
zele& d'exadlitude il a exécuté l'ordre qu'il avoir receu de Sa
Majefté, d'avoir un foin particulier de tout ce qui regarderoic
la religion dans l'employ qu'Elle luy a confié.
Je ne croy pas que M Claude ofê attaquer la foy de ces
aÂes fur ce prétexte, qu'ils ont cfté procurez par l'Am-
baffadeur de Sa Majefté. Il a fans doute non feulement trop de
refpecT: pour Elle,mais aufTi trop de ,bon fens pour fe fe,rvir d'ur
ne fî mauvaife raifon, & pour vouloir faire croire que le Mi-
niftre du Roy du monde le plus ennemi des impoftures2cdes
fourberies, ait eu recours à de mauvais moyens dans une
matière auffi importante que cède- cy , & où il luy auroit efté
auffi difficile, de les cacher, eftanr environné de Miniftres Se
de Princes Proteftans, qui auroient.pû découvrir^, §c rendre
Préface.
publiques les voyes par lefquelles il auroic obtenu ces attefla-
tions, 5c qui en pourroienc même tirer de contraires, fi elles
ne conrenoient pas les véritables fentimens de ceux qui les
ont données.
Mais quoy qn'i, n'y air rien de moins raifonnable que ce
foup(^on, &, qu'il y euft même de la folie à croire qu'un feul
Ambafladeur air pu obliger tous les Evelques d'Orient à tra-
hir leurfoy, au même temps qu'il paroift que les Ambafiadeurs
de plufieurs autres EAats n'ont pu rien obtenir d'eux qui favo-
rïfàÙc le Calvinifme , nous produirons encore dans ce mê-
me livre des ades , qui font abfolument à couvert de ce repro-
che fi ptii /enfé Car il y en a d'anciens qui font voir ce qu'on
croiûirdans l'Orient au dixième & au douzième fiecle. Il y a
dci extraits de àiverfes liturgies chaldaïques & fyriaques,6c des
paflage^ tirez de divers manufcrif; anciens de la Bibliothèque
du Roy, qui prouvent la foydeces peuples. 1! y a destémoigna-
ges recens de lafoy des Grecs, donnez fans follicitation , &
envoyez par des Patriarches pour Tinftrudion des Eglifes de
leur communion.
Ce feroit tout-à fait manquer à la reconnoifTance & à la
juftice, que de ne rendre pas un témoignage public de l'obli-
gation qu'on a à celuy qui a rendu la plu(part de ces a(ftes u-
tilcs à l'Eglifepar la traduction qu'il en a faite, & qui a pris
la peine d'extraire luy. même des livres Orientaux tous ces
pafTages qui en font rapportez dans cet Ouvrage. Il fuffit de
dire que c'eft M. l'Abbé Renaudot. Sa modeftic ne permet
pas qu'on en dife davantage : mais la diverfité de ces ades
6: des livres dont ces extraits ont efté tirez, qui font écrits les
uns en Grec vulgaire, les autres en Arab'*, les autres en
Syriaque, les autres en Cbphte, les autres en Ethiopien, font
connoiftre l'intelligence extraordinaire qu'il a de toutes ces
langues II fera toujours preft de repeindre à tout le mondi' de
la fidélité de (escradudions : & '^'il y iena qui veulenr conful-
terles originaux, on les tlrouver^i ou dans la Bibliothèque du
Roy, où l'on garde les plus ronfidcrables de ces atteft?!tions,
qui ont efté envoyées à fa Majefté même par les Patriar-
ches qui les ont faites, ou dans celle des Religieux de faine
Germain des Prez, où l'on a mis celles que l'on avoir receuës
par dfverfes voyes , & quelques unes même de celles qui ont
Préface.
eflé envoyées par Monfieur i'Ambalîadeuf,
Il me rell:ereulemencde luppher ceux qui liront ce Volume
de ne paflerpas fi légèrement lur tous ces ades, &c de faire re-
flexion fur i évidence de ce que l'on établit par ces pièces au-
tentiques- fur la hardieflè avec laquel M. Claude a nié ce fait
dans trois livres difFerens faits endiverfes années ^ fur la fier-
té extraordinaire avec laquelle il en parle encore dans fa troi-
fîéme réponfe, qui eft prefque uniquement employée à le
combattre. Se fur toutes les confequences qui naifTent de la
convidion pleine & entière de ce Miniftres, qui feront re-
prefentées en abrégé à la fin du huitième livre. ;
i«)
- ' • 'approbation de Monfeigneur l' Archcvefque de Sens.
^'J Ous ne pouvons mieux exprimer le jugement que nous
^ talions de ce troifiéme volume de la Perpétuité, ny en
donner une idée qui réponde mieux à celle que nous en avons,
qu'en déclarant qu'il ne cède en rien aux deux autres qui ont
paru avec tant d'ecJat & dont l'Egiife Catholique a déjà tiré
défi grands avantages pour la défenfe delà foy contre les Hé-
rétiques de ces derniers (lecles. Nous eftimons donc qu'il doit
eftre receu de tous les fidelles avec la même reconnoilîànce
po'.ir Ton Auteur ;& que toute rEglifej dont il a achevé de ju-
ftifier les fentimens d'une manière fi claire &. Ci convaincante,
doit renouveller Tes vœux & Tes prières, afin qu'il plaileàDieu
de détraire dans le cœur & dans l'efpritdefes enfans rebelles
qui demeurent feparez de Ton fein les obftacles qui peuvent
les empefcher de fe rendre à de fi viveslumieres, Scà deséclair-
cifi!èmens fifolides desdifKcultezqui leur pouvoient encore re-
fter fur le myn:ere de l'Euchariftie. Donné à Sens le 13. Jan-
vier. 1674.
Louis Henry de Gondkin, Arch. de Sens.
;•^J••^j•■9•-!{^4••^^4"■9••4'•■$•4•4■■0■•4^•H'■■'?■■'î'■■^'■■'!'"■^■'î'■"fr■v^
li
^Approbation de Monfeigncur H Eve [que de Condom , Précepteur de
ivLo7ijeiyneur le Dauphin.
ib T 'Ay lii avec artenrion le livre qui a pour titre , la, Perpétuité
' J de la foy de l'E^^Ufe C'ithohque, touchant l' EnchcirijTie ^défen-
due contre les livres du Sieur Claude Afinijirc ac Charcnton ^to-
me troijième. L'Auteur après avoir établi la Doclnne Catholi-
que par la tradition conftantc de tous les fiecles dans les deux
^\ Volumes precedens, répond dans celuy-cy aux objevl:ions que
les ennemis de l'Eglile tirent du témoignage des SS. PP. lia
fallu oppofer une extrême exaditude aux fubtilitez des Hé-
rétiques, & une Dodrine profonde autant que folide à leur
érudition affectée. C'eft ce qu'a fait cet Auteur^ & on trouvera
iês réponfes claires, pourveu qu'on ne ioit pas du nombre de
ceux qui veulent entendre les chofes fans fe donner la peine de
les confiderer de prés, & de les pénétrer dans taute leur luite.
Donné à Verfailles le zo Février 1674.
J. Bénigne A. E. de Ccndom.
^KJyJLEGE DV T^OT.
LOulS PAR LA GRACS DE DiEU RoY DE FRANCE ET DE NAVARRE : A IIOS amés
Ji leaux Car.fi:iUers , L-s Jcas ttiiaiis nos Co>irs Uc l'-irlcment , M litres des Re-
queftes ordinaires de noti> Hôtel, grand Confeil , I-'révôt de P.iris, Bailhfs, Senccliaux,
leurs Lieutenins Civils, & autres r.os Jiiîlu-ifts qu'il apparriendra, S'alut. Cath£Rins
Mangeant Veuve du fieur Guillaume Oesprez noltre Impnm.ur & Libr.iure ordi-
naire a l'arisj Nous ayant fait remontrer, qu'il lui avoit été mis entre les mains un Livre
qui a pour titre S.tncit Projperi yjquit.tni opéra j cjuét exfant omnia ad manufctiftos co^
dices ^ edittones antiquiores emendtita , ^c, lequel elle deûreroit fare imprimer , pour
enrichir davantage la Republique des Lettres; mais parce qu'elle ne peut donner cette
nouvelle édition plus parfaite & plus complette que celles qui ont ci-devant paru , (ans
s'en<»ager à une très-grande dépenle , Nous, voulant favorilér le zèle de la Veuve
Desprez , lui donner aulli bien qu'a fesenfans , les moyens de mettre cet Ouvrage
dans fa dernière perfeétion , encourager les Imprimeurs à entreprendre des éditions
des Livres utiles à l'avancement des Sciences & belles Lettres qui ont toujours été flo-
rilfantes dans notre Royaume, foutenir en même temps l'Imprimerie, qui a été
cultivée par nos Sujets avec tant de réputation & de lucccs, & recompenfer ceux qui
fe diftinguent dans cette profedion parles éditions des bons Livres, Nous luy avons
permis & accordé , permettons & accordons par ces Préfentes, d'imprimer ou faire
imprimer ledit Livre inl'nuM jSanélt Profperi ^tjuituni Ofera, qut ext.int omniA ad
manufiriftos codices Ç^ editiones antiquiorei emendata, ^c. & de reimprimer ou de
faire réimprimer les Li-ures Çmyi\\%: La Religieufe farfaite ^ tmfayfaife, Hi^orUÇ^
concordiu E-u.tngeiicit, Perpétuité de ta foj contre le Minifire Claude. Préjugés légitimes
eontre les Cal-uinifles. Di-uers ouur^ges de pieté tirés des Jaints Pères. Inflruélions de Tttu~
l:re, La folitudc Chrétienne. Coi^duite Canonique pour lareception des Filles dans les Mo-
najleres, Dijfertations fur Chemine de -vin Ç^ Jurla li-vre de pain de s anciens Moines, Con-
(îderations Jiir l^s Dimanches Ç£ Fêtes. Lettre de Nôtre-Seigneur J C- à l'amede-vote par
Lanf'pegius, La -vie de faintjean Chryjoflome. De la bonté Ç£ de la mifericorde de Dieu,
Ç^ de notre mifere , tr.iduit de l' EffagnoldeJ^an Palafox. Hijloire Ç^ concorde des quatre
E-vangeliliss , Trattté de l' équilibre des liqueurs , ^ de la pefanteur de l'air, par Mon-
(îeur P.ijch.tl. Nouvcauxélemens de Géométrie. De l'iifagedes Sacremens de Pénitence
Ç£ d' Eucharijlie, Oeu-ores Poflhumes de Monjlear Rohault, Mémoire de Pontis. Renou-vel-
le ment des ^ceux du Batêmc ^ des Vœux de Religion. Tr.t té du culte des Saints, par Mon-
peur tEiiéque de Cafiorie. L' Abrégé de i'Hifloire Ecckji.ijli^ue, par Monfieur Le Bref.
Saint u4uguj}in du Don de la perje-uerance ^ de la prêdeflination des Saints. Les Con-
férences de Cajften, L'Imitation de J. C. pardu Beuil. Soliloques, Manuel, Méditations
de faint Augnflin , aiiec /on Efp'it. De la Pieté des Chrefliens en-vers les Morts. Penfées
de Monfieur Pafcal, La Logique, ou l'art de pe» fer, Inflru/f ion fur la Pénitence Ç^ l' Eu-
ch.trijhe , Ep'itres Ç^ E-jangites p.tr h fleur de Bonneval. abrégé de l'inftrufiion fur la
Vénitence gf l'Euchanftte, Examen des ét.its Ç^ conditions, par le fleur de Saint Germain,
Confiderations fur laiKOrt. Traité de Phyfique. par Monfieur Rohault. Morale Chrétienne
fur le V cLtet , par \îr Fleuriot, Inflruftions de Cafpen Sainte- Rcu-oe de Confrmatione
^ Extyema-IJnflione. Hifoire des Vari.itions, par Monfieur de Meaux Les Avertif'
jemens aux Pnteflans, par le même Auteur. L'Expofltion de la Foi, du même, Owvraues
de Piete,de Monfieur H.tmon. Epigrammatum Deleflus, Po^me furie Sacrement de l'Eu-
charjffie. Règles de S. Augufiin , p.tr Hugues de faint Vu'ior, M.tniere de remplir les
de-uoirs de la -vie Chrétienne, Cérémonies de l'Egli/e. Règles du Mariage, Litanies ttrées
de l'Ecriture Sainte Poème de S, Profpert En telle marge , forme, caraftere; en tant
de volumes , & autant de fois que bon luy feniblera , pendant le temps de quinze
aun Jï^s confecutives , à compter du jour de la datte des Prcfentes, & fans tirer à
conft()ucnce ; à condition néanmoins que l'imprellion dudit Livre Sàneii Profperi
Aqui^wi Opéra, ^c. fera achevée dans le temps de deux ans à compter pareillement
Icflits deux an<: de la d.itre des Prcfentcs, Fuirons défcnfe à tons Impiimcuts, Libraires
& autres, d imprimer , foire imprimer, vendre & débiter lefciits Livres , fous quel-
Que prétexte que ce (oit, même d'impreflion étrangère & autrement, fans le ton-
leutemeiit de l'Expofaiitc ou de tes ayms cauTc, fur peine de coiitifcation des Exem-
plaires contrefaits, de trois mille livres d'amende contre chacun des contrevenans,
applicable un tiers à nous , un tiers à l'Hôtel-Dieu de Paris, l'autre a ladite expo-
ÉiiKC ; & de tous dépens , dommages & interefts ; à la charge que ces prclentcs feront
enrcgiftrces tout au long fur le Rtgiftre de la Communauté des Imprimeurs & Li-
braires de Pans5&: ce dans trois mois de la datte d'icelles : que i'impreflion defdits
Livres fera faire dans notre Royaume & non ailleurs ; & ce en bon papier & en beaux
caraifteres , conformément aux reglcmens de la Librairie , & qu'avant de les expoler
en vente j il en fera mis deux Exemplaires dans notre Bibliothèque publique, un
dans celle de notre Château du Louvre , &un dans celle de notre très-cher Se féal
Chevalier ChanccUier de France le Jîcur Phelipeaux Comte de Pont-chartrainj Com-
mandeur de nos Ordres ; le tout à peine de nullité des préfentes ; du contenu def-
quelles Vous mandons & enjoignons de faire jouir l'Expofante, oufesayans caufe,
pleinement & pûifiblement , fans fouffrir qu'il luy foit fait aucun trouble ou em-
pêchement. Voulons que la copie des Prélêntes qui fera imprimée au commence-
ment on à la fin defdits Livres, foit tenue pour duement Cgnifiée^ ai qu'aux copies
coilacionnées par l'un de nos amés & féaux Conleillers Secrétaires j foi foit ajoutée
comme a l'Original. Commandons au premier notre Huiiïier ou Sergent de faire
pour l'exécution d'icclies tous adles requis & necelfaires, fans demander autre per-
miflion , nonobftant Clameur de Haro , Chartre Normande , & autres Lettres
à ce contraires : C a R tel eft notre plaifir. D onné à Vetfailles le quatorzième
jour de Décembre, l'an de grâce mil (èpt cens neuf, & de notre règne le foixante
& feptiéme. Si^nè Par le Roy en fon Confeil. Lauthier.
Regijlré fur le Regiflre de la Communauté numéro l, des Libraires Ç^ Imprimeurs de
Vans ^ fag. f 17. Ç^ ^\%. numéro 959 conformément aux Replemens, Ç£ nottamment
k L'^rrèt du Confeil du ij. ^oufl 1703 ^ Pans le z]. Décembre mil je ft cens neuf.
De Launay, Syndic.
Et ladite Veuve Desprez a cédé & tranfporté fon droit du prefentPrivilege à
Guillaume Desprez, Imprimeur & Libraire ordinaire du Roy, fon fils ; & à Jean-
Baptiste Desessartz aurti Libraire à Paris, pour en jouir fuivani & conformément
au traité fait entr'eux.
Kt le/dits Sieurs DeffreK. ^ Defejfarts on cédé leur droit du frefenf Privilège aux
Sieurs Foucault, Da-vid l'aine ,Clot,i^ier , Nion l'a'iné, Cojfelin Ç£ Da'oi-i fis Libraires
à Pans , tant pour la Perpétuité^ de la Foj , m 40. } iiol, la Perpétuité mil. la
Morale Chrefi lenne m 40, ^«e les Mémoires de Pontis in ii. 1. ■vol. feulement poure»
jouir fui-vant l'accord fait emr-eux Ç^ fendant tout U temps dttdit Privilège, iMt *
Vnris (t deuxième Maj 171J.
TABLE DEîS CHAPITP.hS,
CONTENUS DANS CE TROISIEME TOME
de la Perpecuicé.
LIVRE PREMIER.
Des noms tire:!, de la partie extérieure de l'Eucharifiie.
CnAp./^ U'on n'a pas du craiccerplûtofl: quelques paiïâges
I. \^ des Pères que les Calvinifles allèguent lanscef-
fe, & quw- ce qu'on a établi jufqaes ity fait voir qu'ils n'en
fçauroient tirer avantage. pag. i
Chap. II. Que la Dodrine Catholique porte necefîairement à
fe former l'idée de deux chofesdifFctentes dans l'Euchari-
fiie. Que le palEige de S Irenée , qui marque ces deux cho-
fes , prouve clairement la Prefence réelle. p. 8
Chap. IIÏ. Que c'eft une fuite naturelle de la manière donc
les Catholiques conçoivent l'Eucharillie , d'y confiderer un
figne & une figure, &; de l'exprimer par des mots qui ne fî-
gnifîent précilément que figne & figure, quoyqu'ils repre-
fentent à l'efprit toute l'efience de l'Euchariftie. p. 14
Chap. IV. Qu'il paroifl: par les Pères mêmes que par les ter-
mes As Jj^me, d'imaqe ^ de type, de facrement , de myjîere, ils
ont entendu des images, des types &c. joints aux chofès,
& contenant les chofes mêmes. Reflexion fur 1^ 4, cathe-
chefe de S. Cyrille de Jerufalçm. p. 38
Cka>. V. Que la preuve que M. Claude tire des occafions
où les Pères fe font fervis des mots d' antitypes é- d'image^eO:
entièrement vaine. Sophifmes d'Aubertin, qui font éclaircis
par la même remarque. _^ p. 44
LIVRE
l
Table des Chapitres»
LIVRE SECOND.
BxpîicAtion particulière de quelques pacages y
où l'Euchariftie eft appelléc Image ,
. . Figure j Myii ère y i^c.
CHAP.y'^UE M. Claude place en quelques lieux
I. V^le mot à^ figure ^ où l'EucharilHe n'eft
- point appeile'e figure : ou fi elle eft appelle'e de ce
nom , c'eft par des raifons particulières , qui ne
font rien à cette dilpute. Explication du paftage
, de Tertulliea du troifie'me livre contre Marion
Chap. II. Que les Calviniftes ne fçauroient rien con-
clure raifonnablement du célèbre pafTage de Ter-
tuilien , tiré du 40. Chapitre de ion 4. livre con-
tre Marcion. p. 62..
Chap. lil. Explication du fèns que le Cardinal du
Perron, &; d'autres Théologiens cathohques , ont
donne' à ce palTage de Terrullien. p 76.
Chap. IV. Autre lens naturel , que Ton peut donner
au palTage de Tertullien, qui ruine \q^ avantages
que les Miniftres en rirent. p. yo.
Chap. V. Refiitation des railonsd' A uber tin, contre
le lens auquel le Cardinal du Perron prend le
paflage de TertuUien* p g»,
111 O *-
Table des Chapitres.'
Chap. VI. Examen de 3. pafTages. Le i. de Pachy-
more-, le z. de faint Auguftin contre Adimante^
& le 3. dumêmefaint Auguftin dans ia lettre à
Boniface. On fait voir que ,les Minières en abu-
fent demême que du paflage de TertuUien. p. 91.
Chap. VIL Explication du pafTage de Facundus,,
pag. loi.
Chap. VIIL Que l'on ne fçauroit plus mal inftrui-
re les peuples de la dodrine Calviniile , que par
le Sermon de faint Auguftin aux nouveaux bap-
tizez , quoy que M. Claude le propofe pour mo-
dèle d'une mftrudlion Calvinifte. p. 110.
Chap. IX. Explication (incere & véritable du Ser-
mon de faint Auguilin ad infantes^ p^ ii^y
LIVRE
Table des Chapitres.
LIVRE T R O I S 1 E' M E.
Rè^onfe aux obje citons tirées des rampons de la matière de l'Eacha-
r'ijiie , d" des différentes manières de eoncevjir ce Myftere.
Chap. f^\ UE les rapports de la matière du Sacrement au
I. V^ corps myftique dej. C. n'empêclioient pas que les
Fidèles ne compriflènt facilemenr^qu'il n'y avoic que \t corps
eiîentiel de J. C. qui fût réellement contenu dan^ le Sacre-
ment. Abus que M. Claude fait de divers pafTages àzs Pè-
res, qui marquent ces rapports. pag. 136
Chap. II. Examen de la Philofophie des Minières fur la diftin-
Aion des Images ôc de leurs originaux. p. iji
Chap. III. Sophifmes d'Aubertin contre les maximes établies
dans le Chapitre précèdent. p 157
Chap. IV. Explication d'un palTage difficile de Theodote
d'Antioche. p. 161.
Chap.V. Que la nature nous porte à concevoir &: à exprimer
le Myftere de l'Euchariftie félon les manieras ordinaires
dont les hommes conçoivent &: expriment les autres objets.
Première manière defeparation d'un même objet en diver-
fès idées. Sophifmes greffiers d'Aubertin,nez de l'ignorance
de cette manière ordinaire de concevoir les objets, p. 165.
Chap. VI. Seconde manière dont les hommes conçoivent les
objets , qui eft de raffembler en une même idée ceux en qui
ils ne remarquent aucune différence fenfible. Ufage qui a
efté fait de cette manière de concevoir à Tégard de l'Eucha-
riftie par {t% Auteurs les plus attachez à la TranlTubrran-
tiation. p. 171, .
Chap. VII. Exemples de divers fophifmesdesMiniftres, fon-
dez fur l'ignorance de cette manière de concevoir la doctri-
ne de la Tranftùbftantiaîion. p. \-6
Chap. VIII. Conf?quence importante de cette manière de
concevoir le pain &: le corps de J. C. comme un feul fujet ,
pour entendre le véritable fens d'un paftàge d'Origene ,qui
afTujetcit 1 Euchariftieà lacondition des viandes communes.
p. 185
o
Table des Chapitres.
LIVRE Q^U A 1 K 1 l' M L.
Que les noms de pain é' de vin donnez, a l'EucbariJIie font une
fuite de la Tranffubfiantiation.
Ch AP, /^ ^ E c'efl: une faire naturelle de la dcclrine de la
I. V^ prefencer eilo, quel'Euchariftiefoitfouvencap,.
pellëe u^.. noms de pai i ^ ie vin ,dc -iucres termes fynony-
mes. Défenfe de ce qu'on aditdans le premierTomede la
Perpétuité touchant le id i^igedesfèns. p. 191
Chap. II. Ufage perpétuel cie ce langage dans les Auteurs les
plus perfuadez de la prefenre réelle, & de la tran(rubftantia-
tion depuis Berenger ju'q 'i prefenr. Règles pour juger
feurement en quel {^^i.^ le^ Pères s'en lont fervis. p. zoy
Chap. III. Que les Pères fe font icrvis de ce langage des ièns
avec toutes les circonftances quile déterminent au fens Ca-
tholique. Première circonftanr' . Réponfeàceque les Mi-
niftresobjedentj que les Perei di cnt que TEuchariftien'efl:
pas un pain commun. p. 214
Chap. IV. Autres circonftancesqui déterminent les mots de
■pain & de vin à ne fignifier qu'un pain ôcun vin apparent.
Compiraifon del'Euchanftie avec le Sacrifice deMelchife-
dech. p. 219
Chap. V. Abusqu'Aubertin&M. Claude funt d'un pafTage de
Clément d'Alexandrie ^ Scd'un autre d'Origene. p. zzg
Chap. VI. Examen d'un pailage de S. Jérôme tire de la lettre
à Hedibie. P-33^
LIVRE CINQ^UIE'ME.
Explication despaffuges de Theodoret , 4Jr des autres Auteurs qui
ont parle coynme lui.
Chap. T^ Euxinjufticesdes Minières fur le fujetde Théo.
I. \^ doret. p. 241
Chap. II. On rapporte au long les deux paflages de Theodo-
ret . tirex de Ton premier & de Ton fécond dialogue, p. 24(j
Chap. îU. Que ces paffages deTheodoret bien entendus éca-
bliiTes-ît clairement la prefence réelle. p. 2«2
Chap. ly. Refiitation de la principale objeclion d'Aubertin, 6c
Table des Chapitres,
de M. Claude contre le fens que nous avons donné à ce pafl
fage de Theodoret. p. 264
Chap. V. Autres fophifmesd'Aubertin dans ce qu'il a écrit fur
Theodoret. p. 270
Ghap. VI. Examen des mêmes paflàges de Theodoret par rap-
port à la TranflTubftantiation. p. 27-7
Chap. VIÎ. Explication fincere du paflage de Theodoret, tiré
, de fon fécond dialogue, par laquelle on fait voir qu'il ne
blefle en rienladodrinede laTranflubftantiation. p. 281
Chap. VIII. Delà fîgnification véritable des mots de çv^n Se
d'y'ff/ct , 6c de «<«/ar^ dans Theodoret , £c dans d'autres Au-
teurs. P- ^92
Chap. IX. Autre folution du même paflage de Theodoret ,
fondée fur le fens auquel les mots de nature & A'oujïe font
pris par les Auteurs Ecclefiafliques , & par Theodoret mô-
me. P-309
Chap. X. Qu'après ces éclairciflemens il ne refte plus de
difficulté dans les paflàges de trois Auteurs qui ont parlé de
l'Euchariftie comme Theodoret. p. 314
Chap. XI. Que les Eutychiens n'ont point nié abfoîument que
J. C. eût un corps , & qu'ils n'ont point prétendu qu'il fût en-
tièrement immatériel. P- 325
Chap. XII. Réfutation de quelques autres obje<flions que M.
Claude tire de l'herefie des Eutychiens , & de la manière
dont elle a efl;é combattue par les faints Pères. p. 334
LIVRE SIXIE'M-E.
Que l'on reçoit J. C. corporellement dans l' Eucharifiie.
Chap. T^Ivers fens du mot de manger. Expreflîonsdiffe-
Dlve
re
I. A^ rentes qui en doivent naiftre à l'égard de l'Eu-
chariftie, fuivant la dodrine de la prefence réelle , &; delà
Tranflubftantiation. p. 346
Chap. II Que tout le fécond tome de cet ouvrage contient
une preuve de la vérité de la manducation corporelle. Exa-
men des vaines folutions, par iefquelles les Miniftres pré-
tendent éluder quelques pafl^ages. p. 350
(5 ij
Table des Chapitres,
Chap. III. Saint Ephrcm Diacred'EdelIe, & Saint Epiphane.
p. 364
Chap. IV. S. Ambroife, ou l'Auteur du Livre des Sacremens.
p. 371
Chap. V. Pacages de faint Auguftin , qui prouvent clairemenc
la man.iucâciun corporelle du corps de J. C. p. 376
Chap. VI. Que les Pères en (uivai.rla doclunede la prtlence
réelle, ont dû dire que l'on mange , 6c que Tonne mange
pas J C. P ^^^^
Chap. VIL Eclaircifîèmencdu paiîage de S. Auguftin, tirëdu
98 Pfeaume. p. 403
Chap. VIIÏ. Explication du paflage de S. AuguHin, tiré du 3.
Livre delà Dodrine Chrêcienne , chap. 16. p-407
Chap IX, Que toutes les expreffions où les Pères difent , tan-
toll que les méchans mangent le corps de J. C. &. tantofl:
qu'ils ne le mangent pas , font des fuites naturelles de la
prefence réelle. , P-4i7-
Chap. X. Qj^i'il efl: naturel que l'on dife , fuivant la doctrine
de la prefence réelle , que J. C.eft prefent fur la terre , 6c
abfent de la terre. p. 433
Chap. XI Qiie la confideration de TEuchariftie^ comme mé-
morial de la Paffion dej. C. n'efl: point contraire à la pre-
fence réelle. p. 441
LIVRE SEPTIE'ME.
Examen des argumens négatifs , (^ des difficultexjirèes
des fins.
Chap. f^ UE M. Claude juge fort mal de îa force & de la
L v.^ foiblefle des argumens negarifs. Deux exemples
importans de fon peu de difcernement fur ce point, p. 455
Chap. IL Que M. Claude fuppofè témérairement que les
Payens ayent connu la doclrine des Chrétiens fur l'Eucha-
riftie. P-46î-
Chap. III. Examen particulier de ce que M. Claude avance
touchant les Livres de Celfus. p. 479
Chap. IV. Qji'il n'y a aucun fujet de s'étonner que les Apolo-
Table des Chapitres,
gifles de la Religion Clirêcienne n'ayenc point parlé de l'Eu-
chariftie. p. 484.
Chap.V. Que le filence de Julien l'Apodac fur l'Euchariflie
ne donne point lieu à M. Claude de conclure que l'Eglife du
temps de cet Empereur n'en avoit pas la même cieanceque
TEglife Romaine en a maintenant. p- 49*^
Ch AP. VI. Que l'objedion tirée du filence des Payens regarde
. auffi.bien les Calvinilles que les Catholiques , &c qu'ils n'y
fçauroient fatisFaire que parles mêmes folutions que les Ca.
tholiques y apportent. p. 505
Chap. VII. Que l'argument négatif tiré du filence des Pères
fur les difficulcez de l'Eucharillie , a efté abfolument détruit
• dans le cours de cette conteftation. p. 513
Chap. VIII. Qye la maxime des Pères eft de s'attachera la foy,
fans écouter les raifonnemens humains. Qu'ils ont appliqué
cette maxime à l'Eucharifiie , & qu'elle a dû les portera
n'en reprefenter les difiîcultez que d'une manière confufe de
générale. p. yio
Chap. IX. Queles Pères ont quelquefois marqué les vérita-
bles difficultez de l'Euchariftie , mais qu'ils n'ont jamais
parlé des prétendues merveilles que les Calvinifies y trou-
vent, p. J29
Chap. X. Réponfe à ce que dit M. Claude , que les Pères
ont établi des principes de Philofophie contraires aux mer-
veilles que les Catholiques reconnoifi^ent dans l'Euchari-
ftie. p. 533
Chap. XI. Que la doctrine de l'Eglife fur l'Euchariftie n'eft
point contraire au témoignage des fens ^ ni à ce que les Pe. .
les en ont dit. p. 540
LIVRE HUITIE'ME.
preuves authentiques de l'union des Eglifes d'Orient avec l'EgliJè
Romaine fur l'Eucharifiie.
Chap. /^ Riginc & progrés de ce différend avecM. Claude.
I. V^Son opiniaftreté à nier que les Societez d'Orient
croyent la prefence réelle. Confpiration àts Miniftres i
oïï)
Table c^es Chapitres,
nier ce même fait. Utilité du defTein de les convaincre plei-
nement, p. 561
CHAP.II.Unionde l'Eglife Grecque avec l'Eglife Romamefur
l'Euchariftie prouvée par l'atteftation de fept Archevêques
d'Orient. p. 568
Chap. III. Union de l'Eglife Grecque avec l'Eglife Romaine
fur l'Euchariftie prouvée parles atteftations des Egiifes de
l'Archipelage. p. 572
Chap. IV. Union de l'Eglife Grecque avec l'Eglife Romaine
fnr l'Euchariftie prouvée par les témoignages de plufieurs
Abbez , Religieux &; Papas Grecs , contenus dans quelques
Relations de Monfieur de Nointel , Ambaflàdeur de Sa Ma.
jefté à la Porte , & par la lettre de Monfieur Panajotti pre-
mier Interprète du Grand Seigneur. p. 586
Chap. V. Union prefente de l'Eglife Grecque avec l'Eglife
Romaine prouvée par divers autres témoignages d'Abbez,
Religieux oc Papas Grecs, contenus dans une Relation de
M l'AmbafTadeur. P- 59^
Chap. VI. Union de l'Eglife Grecque avec l'Eglife Romaine
fur l'Euchariftie prouvée par une atteftation authentique du
Patriarche de Conftantinople fignée de crois autres Patriar-
ches qui l'ont efté avant lui, du Patriarche d'Alexandrie ,
£c de trente-cinq Métropolites. p. 6zi
Chap. VII. Union del'Eglife Grecque avec l'Eglife Romaine
fur l'Euchariftie prouvée par l'atteftation des Egiifes de Min-
grelie , de Géorgie 6^ de la Colchide. p. 634
Chap.VIîI Union de l'Eglife Grecque avec l'Eclife Romai-
ne fur l'Euchariftie prouvée par les atteftations du Vicaire
Apoftolique , des Refidens de plufieurs Etats, 6i delacom-
.munautédes Pérores. Lettre de Monfieur de Nointel Am-
' bafi^ideur de Sa Majefté Très. Chrétienne. p 638
Chap. IX. Union de l'Eglife Grecque avec l'Eglife Romaine
fur l'Euchariftie prouvée par le peu de difficulté que les
Grecs font de communiquer avec les Catholiques Ro-
mains en même temps qu'ils excluent abfolumenc les Cal-
viniftes. p. 648
Chap.X. Union del'Eglife Grecque avec l'Eglife Romaine
fur l'Euchariftie prouvée par une lettre de Nedarius Pa-
triarche de jerulalem au Patriarche d'Alexandrie , & par
Table des Chapitres,
le témoignage du même Patriarche d'Alexandrie, touchant
les Mofcovitcs. p. 652
Chap. XI. Union de l'Eglife Grecque avecTEglife Romaine
prouvée par la décifion de quelques points , envoyée de
Conftannnople en Mofcovie. p. 660
Chap. XII. Union de l'Eglife Grecque avec l'Eglife Romaine
fur l'Euchariftie , prouvée par la réponfe d'un Grec à M.
Claude. p. 664
Chap. XIII. Union de l'Eglife Grecque avec l'Eglife Ro-
maine , prouvée par l'aveu de ceux de la Religion Préten-
due Reformée qui font à Conftantinople. p. 674
Chap. XIV. Union de l'Eglife Grecque avec l'Eglife Latine ,
prouvée par ce qui eft arrivé au fujet du terme de Tranflub-
ftantiation inféré dans la confeiîion orthodoxe. De quelle
forte cette confefTion a eflé imprimée en Hollande aux dé-
pens des Eftats. p. 680
Chap. XV, Seconde impreffion du Livre de la confeffion
orthodoxe. Approbation nouvelle du Patriarche de Con.
ftantinople. Original de cette confeffion envoyé au Roy
en Grec 6c en Latin. Article de i'Ecuhanftie en Latin.
p. 685
Chap. XV. Ce Chapitie par une faute d'impreffîon'n! cft encore que
le quinzième , quoique ce fait le feiz^éme , la même faute conti^
nue dans les fuivans. L'union de l'Eglife Grecque avec l'E-
glife Romaine fur l'Euchariftie , prouvée par l'Acte Syno-
dal fait par le Patriarche dejerufalem& toute fon Eglife
contre les calomnies des Calviniftes. p. 690
Chap. XVI. Union de l'Ecrlife d'Orient avec l'Eçrlife Romai-
ne fur l'Euchariftie 8c autres points, prouvée par un Acle ou
Traité du Patriarche des Maronites d'Antioche, fignéde
pluiîeurs Métropolites ScPreflres de fonPatriarchat. p. 711
Chap. XVII. Union de l'Eglife Grecqueavec l'Eglife Romai-
ne fur l'Euchariftie & autres points, prouvée par deux con-
damnations des erreurs des Calviniftes faites par deux Pa-
triarches d'Antioche. p. 71%
Chap. XVIII. Union des Eclifes d'Orient avec l'Ecrlife Ro-
maine fur l'Euchariftie & autres points, prouvée par la con-
damnation des Calviniftes par l'Eglife des Syriens de Da-
mas, p. 758
Table des Chapitrés.
Chap. XIX. Union des Eglifes d'Onencavec l'Eglife Romai-
ne fur l'Euchanftie prouvée par deux atteftations anthenci-
ques du Patriarche des Coplires. p. -763
Chap. XX. Union des Eglifes d'Orient avec l'Eglife Romai-
ne fur rEuchariftie &; autres points , prouvée par diverfes
atteftations des Patriarches , Evêques de Prêtres Armé-
niens, p. 769
Chap. XXI. Qu'on ne fçauroit dire fans extravagance que la
dodrine de la prefence réelle ait pu s'introduire dans les So-
cietez d'Orient depuis Berenger jufqu'à ce temps ici. Con-
feffion de foy de Sotherius Patriarche d'Antioche , & autres
pièces p. 786
Chap. XXII- Union des Societez Orientales avec l'Eglife Ro-
maine fur l'Euchariftie , prouvée par l'extrait d'un Manuf-
crit Arabe de la Bibliothèque du Roy. p. 797.
Chap. XXIII. Union des Eglifes d'Orient avec l'Eglife Ro-
maine fur l'Euchariftie, prouvée par les Liturgies des Nefto-
riens , Eucichiens & Maronites, P- 799
Chap. XXIV. Conclufîon. p. 804
J^in de la Table des Chapitres,
LA PERPETUITE'
LIVRE PREMIER.
DES MOTS DE FIGURE, TYPE E Xi
autres noms tirez de la partie extérieure
de l'Euchariltie >
■ f i
Qiion n'a pas du traiter plùtoj} quelques paffages des Pcrcs que~
les Calvinifies allèguent fans ccjje : O- 1^^^ ce qu'on a étably
jufques icy , fait voir qu'ils n'en f^auroient tirer avantage.-
E ne douce point que la promefTe qu'on a ^ -er
faite d'expliquer dans ce Volume icy les
principaux palTsges des Pères que les MiniT
cres ont accoutumé d'alléguer contre la Foy
de l'Eglife , ne l'ait fait attendre à plufieurs
de ce parti avec plus d'impatience que le-
précèdent. Car outre qu'il eft naturel à ceux qui font pré-
venus de ne conter pour rien tout ce qui ne répond pas pré-
cifément aux raifons dont ils ont efté frappez, quoy que'
bien fouvenc ce ne foient pas les meilleures ; il arrive encore-
que CCS fortes de conteftations étant rarement épurées de roue
intereft humain, on efi bien aife que la difpute fe porte (ur
des matières oùron croit avoir plus d'avantage que fur les au-
tres.
Je n'ay pas ignoré en entreprenant d'écrire fur ce fujer^
A
X L I V. I. Dûs mots défigure , type (B^ autres
Ch. I. quelle eftoic en cela l'inclination des Minifbres. Mais je n'ay
pas cril qu'il fiid jufte de la contencerplutoft, parce qu'elle m'a
para contraire au véritable ordre , qui eft la lumière des did
putes.
Car cet ordre demande qu'on établiiTe premièrement les
principes dont on a befoin pour éclaircir les difficultez , afin
qu'on ne foit pas obligé, ou de fuppofer des chofes non prou-
vées , ou de répéter fouvent les mêmes chofes , faute de les
avoir traitées une bonne fois dans leur place naturelle.
C'eft ce qui nous a obligé de ruiner d'abord, commç nous
avons fait dans le fécond Volume , ces folutions chimériques
àe figure & de vertu , de corps fimboliquc , Aq figure efficace , qui
font les fondemens de la doctrine des Calviniftes , Se qui font
fuppofées dans tous leurs argumens. Caria réfutation de ces
notions imaginaires obligeant de prendre les termes dont les
Pères fe fervent à l'égard de ce Myrtere , dans le fens naturel ôc
littéral , elle ruïne par avance tous les raifonnemcns par lef-
quels les Calviniftes les voudroient détourner à un autre fens^
Il faut confiderer de plus , qu'après s'eftre inflruit de la do.
t^rine d'un fiecle par l'examen 6c la comparaifon de tous le s
partages des Auteurs de ce temps- là , on a droit d'expliquer les
pallagcs particuliers de chaque Auteur,par la connoillance gé-
nérale de la dodrine de fon fiecle. Car l'expérience fait voir
auffi bien que la raifon , que lorfque des perfonnes parlent ou
écrivent fur des matières communes , & qu'ils fuppofent eflre
entendues de tous ceux à qui ils parlent , ils n'ont pas le même
foin d'exprimer exadement toutes choies , que s'ils parloienc
à des gens qui n'euiîent aucune connoillance de ce qu'ils
traitent. Et ainfî pour les bien entendre, il faut premièrement
eftre inftruitde ces notions comanunes qu'ils fuppofent. C'eft
même une condition infeparabledu langage humain, de n'ex-
primer pas toutes les idées qu'il imprime dans l'efprit , parce
qu'v ayant bien plus de chofes que de mots, il faut par necefîîté
laifler plufieurs chofes à fupplcer. Il y en a que l'on ne marque
Pfrp. 1. 1. 7. que par une de leurs parties, lors même qu'on les veut faire con-
C.7.P. 55+- & cevoir toutes entières, parce qu'on fuppofe que chaque idée ex-
gen.i.r.c.if. citc dans i clprit toutes celles qui y lontordmairementjomtes..
C'eft ce qu'on a prouvé dans le premier Volume , &;tlans la ré-
ponfe générale, d'uncmanierequeM.Claudeapparemment'
n'entreprendra plus de tourner en ridicule, après avoir v\l le
tire\de h partie extérieure de TEuchariJUe. 3
mauvais fuccés tles railleries qu'il a faites lur ce lujet dans fa Ch.I.
troifiëme réponfe.
Ainfi ce que doit faire d'abord une perfonne qui clierche
ferieufemenc à s'éclaircir du véritable fentiment des Pères fur
quelque matière, cen'eft pas de s'attachera un petit nombre
de leurs palîages,parce qu'il fe pourra faire que le fens en dépen-
dra de tout lé corps de la doclrine des Pères de ce temps-là.
Mais il faut qu'il s'applique d abord à confiderer en gros tous
les lieux où ils ont traité de cette matierejqu'il s'attache à s'af-
furer en les comparant enfemble de leur véritable fentiment;&
qu'il fe ferve enfuite de cette lumière, pour éclaircir les difficui-
tez qui peuvent refter dans quelques endroits qui ne paroiflent
pas d'abord conformes à l'idée que l'on aura pnfe fur tous les
autres.
C'eft proprement la méthode que nous avons fuivie dans tour
cet ouvrage. Car nous y avons prouvé d'abord par une foule de
palTages & de raifons qui produifent une entière certitude^que
les Pères des fix premiers fiecles ont pris ces paroles de l'inftitu-
tionde rEuchariftie,C^9'f/»zraC<?r/'/,dans le fens littéral 6: na-
turel des termes : Que les fens détournez deTf^z/y^^v de ^'f^'/^■|r,
ne leur font jamais venus dansl'efprit -. Qii'ilsont reconnu un
véritable changement de la fubftance du pain en celle du
CorpsdejESus-CHRisT,& enfin qu'ils ont crû la préfcnce réel-
le 6cla tranfÎLibftantiation comme l'Eglife Romaine les croit.
Nous avons en même tems refuté toutes les vaines fubtilitez
qu'Aubertin employé pour éluder la force & la clarté de ces
preuves. Et ainll le fentiment des Pères demeurant confiant ,
nousfommesen droit de nous en fervir pour l'éclairciffemcnt
de quelques pafîages qui refient encore à traiter , ôc que nous
avons refervez pour ce troifiéme Volume.
Mais le principal avantage de cet ordre, c'eft qu'en préparant
àl'examen de cespafïages parl'établifTement des principes dont
ils dépendent,il fait en même temps que cet examen n'efl plus
necefraire,&que ceux qui veulent uiivre la raifon s'en peuvent
fort bien pafTer.Et c'efl en cela que j'ay dit qu'il étoit plus avan-
tageux aux Calvinifhes , que celuy qu'ils auroient voidu qu'on
fiiivît.
Car leur véritable intereft dans ces difputes , n'eft pas de
contenter leurcuriofité, ni de s'inftruire du fens précis d'un
petit nombre de pafTages. C'efl: de fcavoir à quov ils s'en doi-
Ai]
4 Liv. I. Des mots défigure ^ types ^Autres
Ch,I. "V^"^ tenir, &;à quel parti ils fe doivent ranger dans ce grand
dilfcrend qu'ils ont avec l'Eglife Romaine. Or pouveu qu'ils
veuillent confiderer de bonne fo y toutes les preuves delà
dodirine Catholique, que nous avons ramafTées dans les deux
premiers Volumes^ils y trouveront beaucoup plus de lumière
qu'il n'en faut pour fe déterminer dans ce choix , en laiflant
même (ubfifter les difficukez qui leur peuvent refter fur quel-
ques points.
Dieu ayant voulu faire grâce aux hommes, & les appeller
au falut , en les obligeant pour s'en rendre dignes de fuivre la
Religion veritable,leur doit,pour ainfi dire,par la même mife-
ricorde , que les preuves de cette Religion eftantconfiderées
toutes enfemble , foient beaucoup plus fortes que celles dont
les fedes hérétiques peuvent appuyer leurs erreurs. Mais il ne
leur doit point que l'avantage de la vraye Religion fur les fauf-
ks paroi{Ie à tout le monde dans toutes les preuves particu-
lières ; nique fa lumière foit fi vive qu'elle diiîîpeabfolumcnt
tous les nuages de l'erreur. Les hommes n'ont donc pas droit
d'en demander davantage,ni de chercher une plus grande af-
furancedans le choix d'une Religion. Et comme nous avons
dit à la fin du Volume précèdent , lors qu'ils font parvenus
jufqu'à ce point que de voir beaucoup plus de preuves de vérité
d'un côté que d'un autre , la raifon les oblige de fe détermi-
ner fans attendre l'entier éclaircifiement de toutes leurs diffi-
cul tez. Autrement il n'y auroir perfonne qui ne fuft prévenu
de la mort avant que d'avoir pu faire ce choix.
S'il efb donc vray, comme on le prétend, êc comme l'é.
quité & le bon fens les doivent obliger d'en convenir, que les
preuves de la dodrine Catholique qu'on leur a propofées
dans les deux premiers Volumes de cet Ouvrage l'emportent
de beaucoup fur les difîîcultez qui refient à éclaicir , ils fe-
roient injufl:cs envers eux-mêmes , fi ces difîîcultez leur fer-
voient de prétexte pour demeurer encore dans une parti que
leur confcience condamneroit efFedivement , puifqu'elle en
jugeroit les raifons moins fortes que celles des Catholiques.
Ainfi quand j'en demcurerois là, &que'je|leur declarerois
que je ne veux point entrer du tout dans l'examen de ces paf-
fages ; que je les laifle pour tels qu'ils font j que je ne me croy
f)oint obligé de les éclaircir 5 cela ne devroit rien changer »
a réfolution qu'ils doivent prendre , puifqu'ils feroicnt toii-
Jours obligez de faire k comparaifon ^^i preuves que nout
tîreT^de la. pa.nte extérieure de tEucharifiie. j
avons proporëes, avec ces difficulrez, Scdefe déterminer par Ch. lu
ce qui leur paroîcroic plus évident & plus folide. Or on n'a
pas lieu d'appréhender, que pourveu qu'ils agiffenc de bon-
ne foy dans cette comparaifon, ils hefitenc tant Toit peu fur
le choix qu'ils doivent faire.
Car feront-ils aflez hardis pour prétendre que Dieu après
leur avoir fourni tant de preuves éclatantes & fenfibles de ce
qu'il les oblige de croiredel'Eucharifl;ie,a du de plus tellement
régler les paroles des Saints Pères , qu'il ne leur en ait laifle
échapper aucune qui pût faire de la peine fur cette matière ;
& qu'encore qu'il n'y ait prefque point de Myftere fur lequel
il ne fe trouve des paflages difficiles , il a dû excepter celuy-
cy de cette loy générale, quoy qu'il ait voulu expreflemenc
qu'il fervît à exercer nôtre foy , &à humilier nôtre efprit ?
Ce n'efl: donc que par une condefcendance charitable que
nousfommes refolus de les fuivre dans leur voye, & non par
une neceiïîté abfoluë. Et l'on va voir de plus que ce qui reftoit à
faire,eft beaucoup moins confîderable qu'ils ne fe l'imaginent.
Car de cet amas de difficultez, que M. Claude étale avec
tant d'éclat dés l'entrée de fa féconde Réponfe, il y en a
déjà plufieurs qui font entièrement diffipées dans les Volu-
mes precedens : comme par exemple ce qu'il avance du fi- ^- ciaada
lence de l'Ecriture fur la prefence réelle,& fur la tranflubftan- y^Jç^'ie" l'-*
tiation,&tout ce qu'il dit dans fon Livre contre le P. Noiiet, vre i.&i.diî
pour prouver que les paroles dont Jesus-Chuist s'eft fervi ^-Volume.
pour établir ce Myftere , ne peuvent recevoir le fens que les
Catholiques y donnent. Car tout cela eft refuté amplement
dans deux Livres entiers du fécond Volume.
Tout ce qu'il allègue des Pères pour montrer qu'ils ont m. clause
donné à l'Euchariftie les noms àç pain & àtvin , eft fuffifam- ^- R<p- p- f'.
ment éclairci dans un endroit exprés du premier Volume,où '^'/y'^p Vii.'
l'on a montré que les Pères n'ont point dû parler un autre lan-
gage que celuy-là, êc l'on le fera voir encore plus amplement
dans celuy-cy. ^o
Il ne feroit prefque pas befoin d'autre éclairciflement furies 1.7.0,7. p." *
m&tsâ'imai^e^àQtype & àe fizure ,c\ue. quelques Pères ont don- îh- «£ C^^y.
nez à l'Euchariftie, que de celuy qui eft contenu en divers lieux ^^'cfi P"' *
du premier Volume, où l'on a fait voir , que ces expreffions
croient fupléées dans l'ufage par la connoiflance que les fidel-
ÏQs avoienc delà dodrine de TEglife j 6c que ne fignifiant l'Eu-
A iij
é . L I V. I. -D^j- mots défigure , type ^ autres
Ch.T. chariftie que par une de Tes parties , elles imprimoienc l'idée
entière de tout ce qu'elle contient.
rcrf. tom. I. Tout ce qu'il avance dans (a fixiéme difficulté , & dans plu-
a la fin de la /^^yj-^ autres Heux , Sc Qu'Aubcrtin avant luy a fi fouvent re-
1. diliert liir r • i n 1 J r i i r- i
k Livre Je battu , Içavcir que les Pères en parlant des Symboles Eucha-
Bcrtram. rifliques , ne les écabliflent point dans des accidens fans rujet,
mais qu'ils difent formellement que c'cfi: le pain & le vin qui
font fignes, images , & figures, eftfuffilamment renverfépar
la remarque que l'on a faite , que les Pères ont conçu &: ex-
primé les Symboles par des idées populaires, & non par des
idées philolophiques 5 &:qu'ainfi ils les ont dû appeller pain
&; vin, &les concevoir comme pain &vin, mais changé &
tran(rubft:antiéauCorps&; au SangdeJssus-CHRisT, comme
ilsenfeignenten une infinité de lieux , que nous avons rappor-
tez dans le fécond Volume.
On a refuté auffienpaflant en quelque endroit l'argument
qu'ils tirent de ce que l'Euchariftie eftappellée gage, mémo-
rial ; de ce qu'elle eft oppofée par laint Ambroile à la vérité
qui eft dans le ciel ^ c'eft. à-dire, comme onl'a montré-j à la
manifeftation de la vérité qu'elle contient.
, On peut trouver dans le chapitre 2.. du 8. Livre du pre-
c. If. p. u+. niicr Volume , des principes fuffifans pour répondre à tous
&i.tf.c.io. les paflages des Pères, dans lefqtiels regardant le Sacrement
^" '*''^* feparément, ils n'en ont affirmé le Corps de Jésus Christ
qu'indirectement, & avec quelque modification , commeils
eltoient obligez de lefaire, s'ils vouloient parler comme les
autres hommes.
On a découvert cxpreflementl'illufion où M. Claude eft
tombé en divers lieux , &; principalement dans la page 69. &
80 de fa 2. Rcponie , en prenant les raifons myfterieufes que
les Pères apportent du choix que Jesus-Christ a fait de la
matière du pain & du vin , pour des explications du fens , fé-
lon lequel ils leur donnent le nom de Cor^s &de San'^ de
Jesus-Christ.
Les paflages fur lefquels M. Claude établit avec Aubertin
fa grande folution de la venu feparée , ont efté traittez aflèz
amplement dans un Livre entier du 2. Volume , pour ne
pas craindre que M. Claude fe plaigne qu'on ait négligé d'y
répondre.
Toutes ces difficultez philofophiques , dont il prétend que
■tirei, de h partie extérieure de rEuchxrifiie. ^
les Pères auroienc du entretenir conrmiiellement leurs le- Ch. î,
cleurs &: leurs auditeurs, & félon krquellcs il s'imagine qu'ils
dévoient régler tous leurs dilcours, ont efté Tuffifammentre-
jettées,&: parce que l'on a dit dans le 7. Livre du premier Vo-
lume fur le fujec de Saint Jean de Damas, & par la preuve fen- p , ^
fible que l'on a tirée dans le 10. déroutes les nations d'Orient , c.4.p. 4!)3-
qui croyant les mêmes chofes que nous , ne parlent prelque '^- ^' P- 7^'*
point de ces difficultez, &; de ces fuites philofophiques.
Cette reveuë que M. Claude fait dans fa 14. remarque flir
tous les commentateurs de ces paroles ; Cecy e(i mon corps ,
& ce catalogue de 16. Auteurs qu'il prétend les avoir expli-
quées dans un fens de figure , a efté tellement renverfé dans le
3. Liv. du 2. Volume, qu'il y a apparence qu'à l'avenir il fera
plus refervé à nous produire des catalogues de cette forte.
Enfin il y a peu de ces difficultez que les Miniftres ont tant
fait valoir, aufquelleson n'aitdéja donné quelque atteinte,&
que l'on n'ait prelque fuffifamment éclaircies pour les perfon-
nes intelligentes.
On a dejfîein néanmoins d'y répondre dans ce Volume icy
d'une manière encore plusexprefle , Se plus proportionnée à
toutes fortes d'efprits, & dctraitrer même en particulier ces
fameux partages qui font fi fouvent répétez par les Miniftres.
Mais i'ofe dire par avance qu'il y aura plufieurs de ces diffi-
cultez qu'on aura peine iappercevoir^ &que le monde trait-
tera avec raifon de vaines & de frivoles , &; que l'on s'éton.
nera fur tout que les Miniftres en puilTent faire tant de bruit,
& qu'ils ofent les oppofer à cette foule de preuves invincibles,
fur lefquelles la dodrine Catholique eft appuyée.
On prétend faire voir fur la plufpart , qu'elles ne naifTent
que d'une ignorance allez grolîîere de la manière dont l'efprit
conçoit les chofes , bc les exprime après les avoir conçuesj&
qu'ainfi il eft arrivé par un jufte jugement de Dieu, que ces
gens qui ont eu allez de prefomption pour donner des bornes
à fa toute- puiflance , &: qui fe font crus capables de fonder
les abyfmes de fa fagefle , &: de juger des moyens qu'il devoit
choifir pour fauver les hommes , n'ont pas eu aflez de lumière
pour comprendre ce qui fe pafle dans leur propre efprit, &
dans celuy de tous les autres ^ & s'en font formé des idées fî
bizarres par une vainc metaphyfique, qu'elles les ont empê-
chez d'entendre ce que les enfans entendent fans peine. Voilà
s Liv. I. Des mots de figure , type (^ autres
Ch II. quel eft le deflcin de cet Ouvrage. On verra dans la fuite,
fi on l'a bien exécuté.
CHAPITRE II.
Que la doBrine Catholique porte neceffairement a fe former l'idès
de deux chofes différentes dans l' Euchariftie. Que le paffay: de
faint Irenée qui marque ces deux chofes , prouve clairement
la prefence réelle.
ON ne f(^auroit fans doute prendre une méthode plus
naturelle , pour découvrir lî des expreffions que l'orï
trouve dans les Pères , font conformes , ou contraires à la do-
drine delà prefence réelle , &; delà tranifubdantiation , &
peuvent eftre raifonnablement employées , ou à l'établir^ ou
à la détruire , que de confidercr premièrement quelles idées
cette doctrine imprime dans l'efprit , & quelles expreffions
ont dû eftre produites par ces idées ; & de palTèr enfuite à
l'expérience , c'eft-à-dire , de confulter de quelle forte cette
doclrine a efté conçue , & exprimée par ceux qui en ont efté
perfuadez. Car s'il fê trouve que laraifon Scl'ufage s'accor-
dent à autorifer quelque expreffion , bc à l'employer pour
exprimer cette dodrine, il fcroit vifiblement contre le bon
fêns, de conclure fur une expreffion de cette nature , que les-
Pères qui s'en font fervisonteuune dodrine différente.
C'eft la méthode que nous avons defléin de fuivre dans
l'examen de la plufpart des paffages conteftez. Et pour com-
mencer à en faire Teflay , je dis qu'on ne fçauroit s'appliquer
à comprendre ce que l'Eglife Catholique enfeigne du Myfte-
re de l'Euchariftie, que l'on n'y confidere deux chofes diffé-
rentes , qui donnent lieu d'en former deux idées diftmcles 6c
fcparées. Car on ne fçauroit n'y pas concevoir le Corps de
Jésus Christ , qui en fait la partie principale. Et comme il
eft clair que le Corps de J. C n'a pas cette étendue, & cette
forme qui font l'objet de nos fens , il eft impoffible que nous_
ne regardions cette apparence de pain que nous appercevons,
comme quelque chofe, & que nous ne la concevions par une
idéefeparée de celle qui nous reprefente le Corps même de
Jesus-Chkist,
tire\de h punie extérieure de PEuchariflie 9
Je n'examine pas prefentement quelle eftli nature de cétre Ch. IL '
apparence •> Ci ce font des accidens qui fubfiftenr par miracle ,
comme des fubftances, ou fi ce n'eft qu'une fimple apparen-
ce de pain. C'efl: une autre queftion qui fe doit traiter fepa-
rément pour ne' pas embarafler les chofes. Il me fuffit pre-î
fentement que ces idées foient difl:ini5l:es,'ôc que comme je
puis me former Tidée du Corps de J. C. fans me former l'i-
dée de cet objet fenfible, je puifie aulTi concevoir cet objec
fenfible fans concevoir diftindement le Corps de J. C.
Cette diverfité d'idées doit produire par neceflltc une di-
verfité de mots qui y répondent , dont les uns fignifientcét
objet fenfible , & les autres le Corps de J. C. Ainfi les mots
de Corps de J. C. de Sang de J. C. de chair de J. C. font deftinez
à fignifier expreifément le Corps &: le Sang même de J. C. fans
marquer precifément cet objet fenfible : &: les mots de pain 6c
de vin , de Symbole , de Sacrement , àtjtgne , àa figure , à'efpece ,
à.'hofiîe, à'ohlation ^ÀQ don ^ représentent diredement l'objet
fenfible, fans marquer dire<3:ement le Corps de J. C.
Je n'ay pas befoin de prouver que c'eft le langage ordinaire fttruspi^t*».
des Théologiens les plus perfuadez de la prefence réelle, & '"xl*." ^^'
qu'il n'y en a aucun qui ne s'en ferve. M. Claude eft trop ha- //«/» de s.
bile pour contefter unechofê fi confiante. Il me fuffit de re- ^'^"'' '"J}'-
marquer que c'e(\: le fondement de cette dodrine fi commune MÙ^i'fl. ' fent.
dans tous ceux qui ont écrit depuis Berenger, fçavoir que l'on ^-4 -^'Z. 8•
peut confiderer trois chofes dans ce Sacrements l'une qui ^*'"''"-^''^"^
n'eft que Sacrement fans être la chofe du Sacrement, &: c'elt
{)roprement ce que I'otî appelle l'objet fenfible , qui efl: tel-
ement figne qu'il n'eft point fignifié; l'autre qui eft; Sacre-
ment & chofe fignifiéc 5 & c'eft le Corps' de J. C. fignifié par
les efpeces fenfibles , & fignifiant le Corps Myftique : La troi-
sième , qui efl chofe fignifiée fans eftre Sacrement, c'efl à
dire , fans en fignifier uneautre : & c'eft la focieté des juftes
& des membres vivansde J. C. Mais cette dernière n'eftanc
que fignifiée & iion contenue dans l'Euchariftie j il ne refte
quedeux partie qu'elle contient effedivement, fçavoir celle
qui n'eft que Sacrement, c'eft à dire, l'objet fenfible 5 l'autre
<juieft la chofe fignifiée dans le Sacrement',-&îc'eft le corps
natureideJ.C. qui nous donne de plus par la diOcrfîtcde fes
membres , & par le voile dont il eft couvert, l'idéede céciau- .,3.^; i^^j^t
tre Corps qui lu y a efté fi cher, qu'il a donné 'pour lé fauver-,
Ja vie de Ion propre Corps. ' ...B, ....
i
lo Liv. I. T>es mots de figure^ type f^) autres
Ch. II. ^^ v\y^ rien encore en tout cela que de très- confta"t,& les
Minières ne nieront pas fansrdoure que l'on ne trouve dans
tous les Pères cette même diverfitc d'idées & de termes ^ 6c
qu'il ne s'y en voye beaucoup qui fignifient literalement le
Corps de J. C. fa Chair ôc fon Sang j & d'autres qui marquent
l'objet fenfible, qu'ils appellent pain, vin, image, antitype,
fymbole. Car c'eft du Sacrement même de l'Euchariftie que
Saint Auguftin dit dans un Sermon qu'il a fait aux nouveaux
baptifez , rapporte par Saint Fulgence & par divers Auteurs»
Que ces chofes font appellées Sacrement parce que l'on y voit une
chofe , é'que l'on y en conc^oit une autre . Ifta fratres ^ ideodicun-
tur Sacramenta , quia aliuâ videtur , aliud intetltgitur.
Nous verrons en un autre lieu ce que Saint Auguftin en-
tend par cette chofe conclue -, mais je n'allègue présentement
ce paflage que pour montrer que Saint Auguftin a confideré
dans l'Euchariftie un objet vifîble différent de la cho-fe que l'on
n'y voit pas , & qu'on y doit concevoir -, & pour conclure que
ce langage eft tres-conforme à celuy de tous les Théologiens
de rEglileCatholique,qui ont emprunté ces paroles de Saine
Auguftin , &qui n'en ont point trouvé de plus propres pour
exprimer leur fentiment.
Mais celuy de tous les Pères qui a le plus expreflêment mar-
qué que l'on doit confîderer deux chofês dans l'Euchariftie,
eft Saint Ircnée , dont l'autorité eft d'autant plus confiderable
qu'il eft un des plasproches du temps des Apôtres , n'y ayant
entre luy & Saint Jean que Saint Polycarpe dont il eftoit Dit
ciple. Car c'eft luy qui nous dit en termes formels , que
l Eucharifiie efi compofèe de deux chofes , l'une terrefire ^l'autre
celefie. Mais comme ce paflage eft un grand fujet de contefta-
M. Claude tion , & que M. Claude s'en fert avec tant de confiance , qu'il
». Rcp.pji. ne craint pas de dire, qu'il efl fi dhnonfiratif^oyxtiono^vciion^
qu'il ne peut recevoir aucune réponfe folide'À\&^ bon de le rappor-
ter icy tout entier , & d'examiner ce fêns que les Miniftres y
donnent,pour juger (î M. Claude a eu raifon d'en parler d'une
manière fi decifive.
Ce Père après avoir expofé l*herefic des Valentiniens, qui
ëifotent que J. C. n'étoit pas Fils du Créateur du Monde,mais
d'un autre Dieu ,lcs réfute par ces paroles.
AdTcrf Hatr, Comment pourront-ils croire que le pain fur lequel on aura rendu
• 4- C. 34« grâces , /ait le Ûorps de leur Seiq^nrnr^ ^ que ce fait le Calice de fon
San^ { que l'on offre) i'ili ne - ccmoifcnt pas qu'il foit F ils dm
tirez, de lu p.irtie extérieure de tEuchxriflie, n
Créateur du monde ; c'eft à dire , le p^erbe de celuy qui fait porter des Ch. 1 1,
fruits aux arires y qui fuit couler les fontaines , ^ qui fait que la.
terre pouffe premièrement l'herùe , enfui te l'épi , ^ puis le froment
dans l'épi'i Et comment d'autre part peuvent-ils dire que la chair
/loive eftre réduite k la corruption, é' ri avoir point de part à L- vie y
€lle qui eft nourrie du Corps ^ du San^ du Seizntur ? Il faut donc ou
qu'ils abandonnent leur erreur^ ou qu'ils ce fjent d'offrir le Myfiere
dont j'ay parlé. Mais pour nous nofire doUrine efi entièrement con^-
forme a l Euchariftie , ^ l'Eucharifie confirme nofire doUrine.
Car nous offrons à Dieu des chojcs qui font à. luy^ publiant par ce
Myfiere d'une manière convenable , funité de la chair ^ de
l'ef'^rit. Car comme après que nous avem invoqué Dieu fur le pain
qui efi une fnb fiance qui suient de la terre , il ceffe d'efire un pain
commun , & devient Eucharifiie qui efi compofée de deux chofes ,
Pune celefie ^ P autre terre fire > ainfi nos corps en recevant l' Eu-
charifiie ceffcnt d'efire corruptibles , puis qu'ils reçoivent l'efpe-
rance de la refurreiiion. ,
Aubertin fe démêle de ce paflâge en y employant tout à la •* •?• '^
fois Tes deux clefs de vertu & de figure. Ainfi quand S. Irenéc
<lit , Comment pourront ils croire que le pain fur lequel on a rendu
grâces ,foit leCorps duSeigneur'i il veut que cela fignifie , Com-
ment pourront ils croire , que le pain foit la figure du Corps
de leur Seigneur, ou, fon Corps Sacramentalî
Quand ce Père ajoute .- Comment peuvent-ils dire qne la chair
doive tomber dans la corruption , ^ n'avoir point de part à la.
•vie y elle qui efi nourrie du Corps ^ du Sangdu Seigneur} il veuc
que cela fignifie que nôtre chair eft nourrie de la figure du -
Corps §»: du Sang du Seigneur.
Et quand il eft dit enfin , que l' Eucharifiie eft compofée de deux p. jor.
chojes . l'une terrefire fi' autre celefie , il veut que cela puiflè (Igni-
fier qu'elle eft compofée de pain & du Corps de J. C. abfenr,
comme l'explique Pierre Martyr, & plufieurs autres Mini-
ftres ; ou plutôt félon une autre opinion qu'il juge plus pro-
bable , qu'elle eft compofée de pain qui eft la chofecerreftre, P- J^»
& de./rf vertu feparée du Corps de J. C. jointe au pain, qu'il
veut que Saint Irenéc ait defignce par le mot gênerai de
chofe celefte.
Mais comme cette explication n'eft fondée que fur cet
fuppofîti VIS .q^i2 le mot de Corps de J. C. fignifie dans les
'^sx^i.lufiyirede ce Corfs^ & qu'il y a dans i'Euchahftic unf
t«?Cli .8[,t"
Il L I V. T. ^Ves mots de figure , type , ^ autres
Ch. il certaine vertu feparée du Corps de J. C. nous l'avons déjà
ruinée en réfutant ces deux chimères.
Et quand, même nous n'aurions fur cela d'autres lumières
que celle que nous trouvons dans ce paflage, & dans quel-
,que autre de ce Père , il y en a plus qu'il n'en faut pour faire
;voir rabfurdité de ce fens , àc de tout ce qu'Aubertin allègue
pour le foutenir.
- Il prétend que le mot de Cori)S de J. C en cet endroit figni-
iie un corps typique , un Corps Sacramentel , c'eft à dire , une fi-
gure du Corps de J. C. Mais S. Irenée expliquant luy même
en un autre endroitde quelle manière lepamEuchariftiqueeft
le Corps de J. C. il nous afllire que c'eft fon propre Corps.
J t e 1 jESVS-CHRISTy à\t-'\\yaj'fure pojîtivement que le pain ^ qui efi
une cnature ^efi fon propre Corps.
Je f<^ay bien qu'Aubertin pour éluder ce paflage, rapporte
quantité d'exemples où le mot ^ç. propre ^ ÏS^ka , cft jointàdes
termes métaphoriques , comme lors que Clément d'Alexaru
drie dit, que /. C. a eu l'Eglife pour fa propre Epoufe j t<. Saint
Grégoire de Nyfle , qu'il a formé notre corps de fa propre main.
Mais nous avons déjà découvert l'illufion & le fophifme de
cette réponfe, qui confifte en ce qu'il confond mal à propos
les proportions métaphoriques avec les propofîtions figurati-
ves. Car il eft bien vray que le terme de propre peut eftre
joint à des mots vrayement métaphoriques ^ c'eft à dire, où
l'attribut fe prend pour quelque qualité de la chofe figuréej
qu'ainfi l'on a bien pu dire que Dieu a formé le corps de
l'homme de fa propre main-, c'eft à dire, par fa propre puit
fance: mais il eft certain auffi qu'Aubertin n'a pu alléguer
d'exemple où ce terme foit employé dans des propofitions
figuratives 5 c'eft à dire, dans celles où le Signe eft appelle
du nom de la chofe fignifiée ^ & que l'on ne trouve- nulle
part que la pierre du defert , le Sacrifice de Mekhifedech ,
l'Agneau Pafcal, ayent efté appeliez le propre Corps de J. C.
«■^^ pour marquer qu'ils le fignifioient. Ainfi cet ufage qu'il veut
que Saint Irenée ait fait du mot de propre en cet endroit, eft
également contraire au bon fcns, & à Tufage de tous les
autres hommes j 6c c'eftlà un des caraderes des folutions
•d'Aubertin,
■ hes mots de confe.fer^d'a furer pofîtivement J^itC«,3Aiac7a7o dot
iê ferc Saint Ir ence en difant , que J. C. a confejfè que le Calice
tirc^de îa partie extérieure de T Eucha,riflie . rj
qui eft une créature , eft [on propre Sang ; & qu'il a ajjuré pofitive- Cjj. 1 1.
Tnent que le pain, qui eft une créature^ eft fan propre Corps , font
voir encore manifertement que le mot de Corps de y. C. ne
peut eftre pris pour une fimplc figure de ce corps. Car com-
me l'on l'a déjà remarqué, ces termes donnent l'idée d'une
chofe difficile à croire, que Ton veut perfuader, en l'aflèu-
rant fortement j au lieu que l'efprit ne conçoit rien que de
très-facile à comprendre , quand il n'a qu'à fe reprelénter
qu'un être corporel eft devenu la figure d'une autre chofe :
Comme l'efprit ne fe force point pour le croire , il ne fait
point auifi d'effort pour le perfuader aux autres ; & par con-
lequent pour n'imprimer que cette idée , ce Saint n'auroit ja-
mais eu recours à ces termes : Que J, C. a confeflTé que le Ca-
lice eftoitlafiyire de [on propre Sang : Qu'il a pontivement alTu-
ré ^«1? le pain efttit la figure de fon. propre Corps. Il faut n'avoir
gueres de jufteflè d'elprit pour n'eftre par choqué d'une ex-
preflîon fi bizarre.
Le Cardinal du Perron remarque judicieufement fur ce
paflage que Saint Irenée dit que J. C. a ajfuré que le pain eft oit
fon Corps , de même qu'il dit trois lignes après , qu'ilaaffuré
qu'il eftoit homme. Ce qui marque qu'il propofe ces deux ve-
ritez , comme eftant également At^ objets de foy , Se comme
les voulant faire également recevoir par l'autorité de J. C,
fc qu'ainfî il n'y a point d'apparence de vouloir faire de la
première une propoficion figurative, puis que ce feroit don-
ner lieu d'en faire autant de la féconde, êc de faire palier
l'Humanité de J. C. pour une Humanité phantaftique, com-
me faifoient les Marcioniftes.
Et la réplique qu'Aubertin fait fur ce fujeteft entièrement
vaine. C'eft, dit-il, qiCon eftoit fuffifamment averti par la dife-
rence qu'il y a entre un pain é" le Corps de J. C. d'entendre la pre-
mière en un fens figuré. Car c'eft au contraire, cette différence
qui formant une difficulté confîderable, donne lieu à cette
exprefllon de Saint Irenée que J. C. a affuré qui fait naître
l'idée d'une chofe difficile à croire. De forte que non feule-
ment cette difficulté n'empêche pas de prendre cette pro--
pofitionen ce fens, mais c'eft au contraire ce qui y oblige.
Auffi cette différence entre le pain & le Corps de J. C. eft
Ç\ peu une raifon de ne pas entendre en ce lieu le vray Corps
<ie J. C. par le mot de corps., que c'eft ce qui y oblige. C'eft
h iij
Ch. II.
Aub, p. }U.
Coar. Adim.
I4 L I V. I. Des mots âe figure^ type ^ ti autres
l'obftacle que la foy a à furmonter, & qu'elle fùrmonce, félon
S. Epiphane , dans cous ceux qui font fauvez j puisque ceux en
qui elle ne lefurmonte pas, font exclus du faluc.
Je ne m'arrêteray pas non plus â réfuter icy quelques
exemples > dans Icfquels Aubercin prétend que les Auteurs
ont joint ces termes de confejfer & d'ajfurer à des termes mé-
taphoriques. Car on a fait voir ailleurs , qu'il confond tou-
jours les cxprefiîons figuratives avec les métaphoriques , 5c
que la même raifon qui fait que ces termes peuvent avoir
lieu dans les expre^ons métaphoriques , qui eft que la chofc
exprimée par métaphore, peut eftre grande ÔC difficile à croire,
fait qu'ils ne peuvent avoir lieu dans les propofîtions figurati-
ves, parce qu'il n'eft jamais difficile à croire qu'un être corpo-
rel foit deftinc à eftre le figne de quelque chofe excellente -,
que l'efprit n'y a aucune répugnance, & qu'ainfi il eft ridicule
de faire effort pour la furmonter par une affirmation qui mar-
que que l'on craint de n'eftre pas crû.
J'ajoûteray feulement qu'Aubertin , outre ces exemplei
d'expreflîons métaphoriques qu'il compare mal à propos avec
celle de S Irenée^en allègue encore une de S. Auguftin, qui
paroiffant plus vraifemblable que les autres , eft en effet la
, moins jufîe de toutes. C'eft , dit-il , que S. Auguftin fe ferc
, de cette même expreffion dans le livre contre Adimantc.
, Le Seigneur^ die il , n'a f as fait difficulté de dire , cecy eft mon
, Corps , en donnant le fiyfie de fon Corps. Or que veulent dire
, ces paroles, n'a pas fait difficulté ^ finon a confirmera affurè
, pofitivementl
Nous traitterons ailleurs exprjeflemcnt de ce pafïâge, &
nous ferons voir qu'il ne fîgnifie autre chofe, fînon que Je-
sus-Christ, donnant à {t% difciples un Sacrement de fon
Corps, dans lequel le Corps eftoic réellement contenu, n'a
pas fait difficulté de donner le nom de Corps à ce Sacrement,
qui le fignifioitôc lecantenoit j comme l'Ecriture ne fait pas
difficulté de donner le nom d'ame au fang qui U contient &
la fîgnifie. Mais il fuffit prcfcntemcnt de découvrir l^abus qu'-
Aubertin en fait en ce lieu icy, Darce qu'il eft afièz fubtil.
il confîfte en ce qu'il n'a pas remarqué qu'il y a de deur
fortes de difficulté! j l'une qui ne regarde que l'expreffion ,
l'autre qui regarde les chofes mêmes. Car quelquefois les
choies Mac ea cllet'Cnêmei difficiles à€roiFei& quelque-
tirez, de la punie extérieure de tEuchmJîie. i^
fois les choies eftant d'elles-mêmes communes & faciles à C". IL
concevoir, i'expreflîon qui les reprefence ne laiflé pas d'ê-
tre extraordinaire i de force que ces mors qui affirment plus
fortement que d'autres , font quelquefois deftinez pour faire
croire la chofe même qui eft regardée comme difficile, &
quelquefois pour autorifer l'expreffion qui a quelque cho(e
d'extraordinaire.
S. Irenée fe ferc de ces mots de confejfer Si. ^ajfurer pojîtive-
ment I^ta.Qt^a.tei(Talo en la première manière. Car quand il dit,
qneJ.C.aaJfurépoJttivement^uelepaineJioitfon Corps ^ c'eft
la chofe même qu'il veut faire croire , & non l'expreflioa
^u'il veut autorifer.
Mais S. Auguftmne s'en fert qu'en la 2. manière, c'eft à
dire , pour montrer que c'eftoit une expreffion autorifée par
l'Ecriture de donner aux fîgnes le nom des chofes fignifiëes.
Car c'eft pour prouver cela qu'il allègue cette expreffion :
Cecy efi mon Corps : & il veut dire feulement que J. C. n'a pas
fait difficulté de ie fervir d'une expreffion , où le nom de la
chofe fignifiée eft donné au figne qui la fîgnifîe 6c la contient.
Ainfî il n'^y a nul rapport entre le paflage de S. Auguftiti
& celuy de S. Irenée. Il s'agit dans celuy de S. Auguftin
d'une difficulté d'expreffion , qui eft oftée par le mot, non
duhitavit: il s'agir dans celuy de S. Irenée d'unedifficultéde
chofè, qui eft oftée par le mot de confejfer Se de ha.Qtfliiuaa.l9
il a ajfuré pofitivement .^ qui nous porte à croire malgré la re-
fiftance de nôtre efprit. Voilà comment on trompe le monde
par ces fauflcs refïèmblances d'expreffions , qui font les plus
grandes fources de fôphifmes 6c d'illufion qu'il foie poffible
de s'imaginer.
Que M. Claude cependant ne fè promette pas grand'cho-
k. de l'aveu que je luy fais que S, Auguftin a reconnu en cec
endroit , que le nom de la chofè fignifiée eftoit donné au fi-
Î;ne dans cette propoficion , Cecyeft mon Corps -. il verra dans
a fuite , que ce Père l'a dit, Ôcl'a pu dire fans s'éloigner en
effet du fens de tous les autres , & fans donner aucune attein-
te à la dodrine de la prefênce réelle.
Aubertin fait donc un tres-mauvais ufage delà clef de P* '"'*
figure en expliquant les mots de Corps & de Sang de J. C. de
la figure de ce Corps & de ce Sang. Mais la manière dono
il veut que l'on entende ces autres paroles de S. Irenée ,
î^ Liv. î. T>^s mots de figure , type ^ & autres
Ck. 1 1. Que l'Euchanflie efl compofée de deux chofes , l'une teneflre ^
l'autre celefte^ eft encoreplus contraire au bon fens& à la raifon.
Il veut pren:îierement foùtenir contre Bellarmin rexplication
<]ue Pierre Martyr y avoit donnée , qui efl: que cette chofe ce-
Iefl:e marquoit le Corps de J. C. abfènt , & que S. Irenée avoit
voulu dire qu'il fixlloir confiderer deux chofes dans l'Eucha-
riflie, le fignc,c'efl:à dire le pain , & lacliofe fignifiée,c'eft:à
dire le Corps de J. C. qui efl; dans le Ciel. Etcomme ce Car-
dinal fe fert fur cela de cette maxime tirée du bon fens , que
l'on n'a jamais dit qu'une chofe efl: compofée d'une autre cho-
fe qui efl: hors d'elle i Aubertin s'élève fièrement contre luy ,
Aub.p.joj. ^ jg jj-aite de ridicule. Ily a^ dit-il, //«x de hardieffe que de
vérité en ce que ce Cardinal avance , que l'on ne peut dire qu'une
chofe eft compofée de parties qui ne font pas pre fentes toutes enfem.
hle. Car Clément Alexandrin ne dit-il pas que toute l'Eglife, auffî
bien qu'un homme ^eft compofée de plufîeurs membres 1 dr- S. Chry-
foftome ne dit-il pas aujjî en parlant des Corinthiens : Z'£glife qui
eft parmi vous eft une partie de l' Eglife qui eft par tout , & ^»
Corps qui comprend toutes les Eglifes.
Que cet exemple fait bien voir combien il efl: dangereux
d'oppofer à l'autorité de l'Eglifc des fubtilitez de Logique ,
puis que ceux qui s'en piquent le plus , & qui ont tant de con-
fiance en leurs raifonnemens qu'ils en font le fondement de
ieur foy &: de leur falut, ne laiflènt pas de s'éblouir d'une
manière fi groffiere : Car qui a-t-il de plus groflïer que cette
erreur d'Aubertin qui n'a pas fceu diftingucr ce que l'on ap-
pelle un Tout colleftif de ce que l'on nomme dans la Logi-
que un terme ou un Tout connotatif ?
Un Tout colledif efl: un amas de plufieurs chofes confide-
rées diredemenc & renfermées dans un même mot , à caufe de
quelque rapport qu'elles ont enfemble , comme une armée,
un peuple, un Parlement ,une Eglife. Mais un terme ou un
Tout connotatif au contraire n'eft qu'une chofe unique en elle-
même, mais dans laquelle on conçoit quelque rapport à quel-
qu'autre chofe qui n'cft: fignifiée qu'indiredement. Tels font
les mots Acfigne , de Sacrement , de tableau. Car outre l'être
* «lu figne, j'y connois encore un rapport aune autrechofe mar-
quée par CCS fignes , mais marquée obliquement.
Il n'eft nullement étrange que le premier genre de Tout^m&
«ftrc compofé de parties feparées Se abfentcs les unes des au-
tre»
tire-z^de partie extérieure de tEuchanfiie. ly
très , puis que ce Tout n'a point d'unité réelle , & que ce font Ch. 1 1.
en effet piufieurschofès exprimées directement par un même
mot. Or il n'elT: pas étrange que pluiîeurs chofes foient com-
pofées de ces mêmes plufîeurs chofes qui font renfermées fous
un même terme.
Mais il n'en efb pas de même de la féconde efpece de Tout.
Car comme l'efprit n'y conçoit direcTiement qu'une chofe ,
quoy que cette chofe fe rapporte indirectement à une autre, on
ne dit jamais quelle eft.compofée de ces deux chofes. Amfi
perfonnen'a jamais dit qu'un tableau d'Alexandre fût compo-
fé des chofes prelentes, qui font la toile &. les couleurs , &:
d'une chofe abfenrc qui eft Alexandre 5 ny qu'un olivier fuft
compofé d'arbre ik" de paix. Perfonne n'a jamais dit aufîî qu'un
père fuft compofé de luy & de fon fils. EtlesMiniftres mêmes
ne difent pas que l'Euchariftie foit compofée de pain 5c du
peuple , quoy que le pain figure le peuple félon les Pères.
Apre"; ces éciaircifTcmens, la furprife d'Aubertin eft toute vi-
fîble: Car quand Bellarmin foûtient qu'on- ne dit pas qu'un
Tout loitcompofc de parties abfentes 6c feparées, il parle non
du Tout coUedif , c'eft à dire , de plufîeurs chofes renfermées
fous un même mot , mais d'un tout connoratif ou relatif.: Gr
l'Euchariflie felonla prétention des Miniftresmêmesn'eft pas
un Tout collectif comme une armée, un peuple, &c un Parle-
ment; C'eft un Sacrement, c'eft à dire, une certaine chofe
unique , à laquelle on ne peut donner d'autres parties que cel-
les qu'elle enferme réellement. Ainft prétendre comme fait
Pierre Martyr &; Aubertin , que quand S. Irenée a dit que
l'Euchariftie eftoit compofée de deux chofes , l'une rerrcftre,
& l'autre celefte, il a voulu dire qu'elle eftoit compofée de
pain & du Corps de J. C. abfent, c'etl le faire parler d'une
manière aufh extravagante que fi l!6n.difûit , Le cheval de
bronze eft compofé de metail 6c d'un Roy de France , ou que
l'agneau pafcal eftoit compofé d'animal k de pafTage.
Il n'y a donc pas moyen de foûrenir ce premier fens que les
Miniftresont donné zxxmoXi à^ chofe cele/h .^nÏQ prenant pour
le Corps de ]. C. abfent. Et c'eft neut-eftre dans cette vue
«^u'Aubertinnousen fubftituëunat tresqui ift, dit-il, que l'on
peut entendre par cette chofe celefte une certaine vertu fepa-
rée duCorps de J. C. qui eft jointe au pain Euchariftique félon
S. Irenée Ôc les autres Pères.
C
i8 Liv. I. Des mots de figure ^ type (^ autres
Ch. II. Mais avanc que d'avoir droit d'appliquer un mot gênerai,
comme celuy de chofc cclcjle , a cette idée particulière de vertu,
feparêe^ il faudroit qu'il euft bien prouvé cette vertu (eparée, ôc
qu'il euft fait fait voir que c'eftoit une chofe fi notoire , qu'on
pouvoit ruppofer , que tous les fid. les laconnoiifoient dilbnc-
tement. Or tant s'en faut qu il l'ait prouvé, que nous avons
montré au contraire que c'eft la plus improbable de toutes les
chimères , & que tous les partages dont il prétend la tirer , ou
ne prouvent rien du tout, ou prouvent le contraire de ce qu'il
Vovezi. V. 1. prétend. Ainiî comme il ne fonde en ce lieu cette prctenduë
f,c, IO.& II, vertu que fur ces mêmes partages , il n'y a qu'à renvoyer à l'en-
droit du fécond volume oÎmwus les avons réfutez.
2. Il faut n'avoir point de difcernement pour ne pas recon-
noître que les mots rcs temna S>c rcs cclefiis , qui (ont gcnerau?c,
font relatifs aux mots particuliers qui les précèdent. Or com-
me le mot res terrena fe rapporte manifcflement au pain , il
faut que le mot de res celcjtis fe rapporte au Corps de J. C.
Je içay bien que le Cardmal du Perron entend par le mot de
tes cclefiis ^ l'efprit de J. C. mais c'efl: en entendant par celry
de ras terrena le Corps de J. C. &.en rapportant amfi ces deux
termes généraux à deux autres termes particuliers^ dont S. Ire-
nee ic ert auparavant, qui iont ceux de chair bi d'c/prit ,^cit
lefquels il entend encore la chair & l'cfprit de J. C.
Je diray de plus en partant que l'explication de ce Cardinal
eil très mal refutée par Aubertin , qui le contente de dire qu'il
s'enluivroit que S. Irenée n'auroit point reconnu dertgne dans
rEucharifl:ie , puifqu'il ne compofoit l'F.uchariftiie que du
Corps de de l'elprit de J. C. Car ce Minirt:re devoir fçavoir
que l'on defigne & que l'on définit fouvent leschofes par le rs
feules parties principales & fubftantielles , (ans exprimer c. .
les qui ne (ont qu'accidentelles ^ quoy que l'on n'ait pas def.
fein de les nier.
Parext^mple, ErtienneEvêqued'Autunnepretendoit point.
du tout nier qu'il n'y eull: un figne externe dans l'Euchariftie
Tr. de Sacr. lors qu'il dit qu// n'y a qu'unefeuie chofe dans le Sacrement ^ À.
^'^^- fi^avoir J. C. Dieu dr- homme.
Et S. Anfelme avoitauffi peu cette intention lors qu'il dit;
& s % D^' -^^^'y ^^^ Prefent fur la table de l'autel que le Corps du Seigneur^
° ^ dans lequel la vraye fub (lance du pain a efiè véritablement changée.
Ce nefut jamais auffile delTein de Geoffroy de Vendôme, qui
' tirez^de lit pa.rtie extérieure de rEuclmr'ifiie. I9
dit , Qjie ce que l'on prend fur l'autel après la confccration , n'efi Ch . î T.
rien autre chofe , ^ ne contient rien autre chefe , que ce que la ve- '^^- ^'^ Corp.
> , , I ^ n ^ & Sang. D.
rite déclare par ces paroles : Cccy ejt mon Corps.
MaislaifTincà parc l'opinion de ce fçavantCardinal, qui quoy
qu'in^enieufe, n'eft pas fuivie par le commun des Théologiens,
parce que concevant félon la doctrine de l'Fgliledcux chofes
dansl'Euchariftie, l'une terreftre, quieft l'objet fenfible ; l'au-
tre celcfte, qui eft le Corps de J. C. ils ne croyenc pas avoir
befoin de chercher un autre fens dans les paroles de S. Irenée,
qui exprime iî narureliement ces deux idées ; je dis qu'il efl:
clair que le fens d'Auberc:n ne peut aucunement fubfifter,
puifqu'il fait tomber S. Irenée dans cette abfurdité d'exprimer
une certaine vertu inconnue par un mot gênerai fans la
deligner par aucun terme particulier ni dansce qui précède ni
dans ce qui fuit ; de forte que ce feroit proprement une énigme
dont l'explication auroit efté refervée au fieur Aubcrtin.
On pourroit encore avec juftice demandera Aubertin & aux ;.
autres Minières , des exemples où il foit dit , lorfque des cho-
fes ont une certaine force & une certaine vertu , qu'elles font
compofées d'une chofe t(?rrefl:re 6c d'une chofe celcfle ou fpi-
rituelle- Car ils allèguent bien des Pères qui difénc que l'eau
du baptême reçoit une vertu par la confecration , qu'il y a de-
dans une vertu cachée: mais il n'eft dit nulle part que l'eau du
baptême foit compofée d'eau & de vertu;& encore moins qu',
elle foit compofée d'une chofe rerreflrc &: d'une chofe celefte;
ce qui donne l'idée de deux chofes feparées,£c dont l'une n'efl
pas accident de l'autre.
Ainfi l'ufage, la raifon^ & l'autorité des Pères dccruifant
également ces fens chimériques d'Aubertin,il doit demeurer
pour confiant que S. Irenée enfeigne danscepaflagela prefen-
ce réelle du Corps de J. C. dans l'Eue hariftie.
Il l'enfcigne endifant que l'Euchariftie efl compofée de deux
chofes, l'une terr-^ftre 6c l'autre celefte, puis que cette chofe
celefte ne peur cflre que le Corps de J. C. & qu'il ne fçau-
roit faire partie «le l'Euchariftie s'ii n'y eft prefent.
Il l'enfeigne en marquant qu'il faut croire que le pain confa-
cré efl le Corps de J. C. ce qui ne. fe peut entendre que de
ion propre Corps . comme nous l'avons prouvé.
Et il l'enfeigne cni^ore en tirant de la participation à l'Eucha-
riflie une picr\ice la refurreclion des corps j & de leur in-
corruptibilité après la refurrcction. C ij
lo Liv. I. Des mots de figure ^ type & autres
Ch. 1 1. Car cette penfée de S. Irenée ci\ tres-r..i(onnable en fuppo»
Tant qu'il ait crû que l'Eucharillie contenoit réellement le
Corps &c le Sang de J. C. & tres-dëraifonnable en fuppofanc
qu'il ne l'ait pas crû. Et en effet comme nous avons dit ailleurs,
per. 1. 1.6.C. iln'eft pas étrange que l'autheurde la vie communique la vie,
•'i-P-7"5. que le Corps incorruptible dej. C. communique l'incorrupti-
bilité: &: le Myffcere étonnant de l'unioii de ce Corps divia
avec nos corps mortels donnant l'idée de quelque fin très gran-
de & de quelque effet extraordinaire, nous avons grand fujec
de croire que c'eft par là que nous acquerrons l'immortalité
qui nous eft promife. C'eft pourquoy comme il y a quelque
Gliofe de fort plauiîbl-e dans cette preuve, on ne doit pas s'c-
^^'^'^iJ' l'^ tonner, nique S. Irenée l'ait répétée plufieurs fois dans cec
£. i5.fp, 704' Ouvrage ,ni qu'il ne foit pas le feul qui l'ait employée , & que
d'autres , comme S. Grégoire de Nyfle , S. Chryfoftome & S.
Cyrille d'Alexandrie l'ayent empruntée de luy ^ comme nous
l'avons fait voir. '
. Mais il l'on fuppofoït que S. Irenée &ces autres Pères onc
efté dans le fentiment des Miniltres, il n'y auroit rien d'égal à
l'abfurdité de leur raifonnement. Nous fommes nourris, leur
fait dire Aubertin, de la figure de J. C. Donc les Valentinien s
ont tort defoûtenirque notre chair nereifufciterapoint.Donc
il eft affuré que nous reffu (citerons. Quelle confequence, quelle
liaifon y a-t-il de cette figure à la refurredion ? Pourquoy ces
Pères n'auroient-ils pas dit de même:Nous fommes oints de la
figure du S.Efprit : Donc nous relTîilcitcrons ! Pourquoy n'au-
roient-ils pas dit: Les Juifs ontprrsdanslama-nnela figure de
J. C. donc ils reffufciteronr? Pourquoy de toutes les figures de
J. C. & du S. Efprit dont l'Ecriture eft pleine, n'auroient-ils
conclu la refurrecfion que de celle-là?Pourquoy autoienr.ilsfup-
pofé que cette confequencequ'ils rirent de la réception de l'Eu-
chariftie à la refurredion, eft Ci claire qu'ils ne fe mettent jamais
en peine de la prouver? C'eft , dit Auberrin , que ielon les Pè-
res, l'Euchariiiieeft le gage de la refurrecl;on. Mais fi c'eftoit là
leur principe &; le fondement de leur argument-, en vérité il au-
roit efté neceflaire de le marquer au moins quelquefois, &: de
ijeftippoTerpas toujours qu'il eftoitaifé à deviner. Cependant
Is ne l'ont fait dans aucunsdes lieux où ils conclucnr que nous
JrefiTufciteronsdeceque nous participons à la chair de |. C Eft-
-çequece principe que l'Euchariftie eft: le gage de larefurrec*
tire'^ de lapartie extérieure de l' Eucharifi'te . m
tion , eft une de ces preniieres verkez que l'on fuppofe eftre Ch. I L
connues de tout le monde j & qui n'ont pas befoin d'eftre ex-
primées ? Mais de plus , comment S, Irenée euft-il pu raifonna-
blement fuppofer que les Valentiniens qui nioient la refurrec-
tion, demeureroient d'accord que l'Euchariftie en fuft le gage?
Si cette abfurdité efl incroyable dans un homme tant foit peu
fenfé, combien reft-elle plus dans un aufli grand homme que
S. Irenée? que fera-ce donc de l'attribuera tant de Pères tout
à la fois? Et comment les Miniftres n'ont-ils point de honte
de vouloir quêtant de grands Se de faintsDodeursayent pref-
que toujours penlë & fe loicnt toujours exprimez d'une maniè-
re extravagante >
On examinera dans un autre endroit l'objeclion que les Mi-
niftres tirent de ce que-S. Irenee dit que nous fommes nourris
du Corps de J. C. mais je répondray dés icy à une autre ob-
jection que M. Claude propofe avec une extfême confiance,
& qu'il appelle demonftrative. Etquoyqu'elle foit un peu hors
de l'ordre que je me fuis propofé , je veux bien m'en écarter
pour luy témoigner la déférence que j'ay pour luy.
Cette prétendue démonftration eft que faint Irenée veut non M- Claude s»«
feulement quele pain recevant la confecration figure vos corps re. ^'^P'P*^ '
cevant l' incorruption 5 mais il veut , dit- il , qutl. les figure formel,
lement par lafubfifi-ance de fon être fous la qualité de Sacrement ^
que l^ invocation ^ la confecration luy donnent.
Ainfi bien loin que le Myftere en détruife la fubftance , qu'au
contraire il faut par la rai fon du Myftere qu'elle ne foit pas
détruite , pour reprefencer la chair qui n'eft pas détruite par
la grâce de l'efprit.
Ce raifonnement peut eftre éclairci en le reduifant en forme.
Car ce]queM. Claude veut dire que eft S. Irenée ne fçauroic
prouver par l'exemple du pain Euchariftique que la chair ne
fera pas détruite qu'en fuppofant que ce Pain n'eft pas détruit.
•Or il le prouve par cet exemple. Donc il fuppoie que le pain
demeure.
Mais en le reduifant à ui"ie forme plus claire., on en décou-
vre en même te;Tipstres-clairement lafoiblcile. Car on voit
-que M. Claude attribue à S. Irenée une intention qu'il n'eue
jamais. Il eft certain que l'erreur que S. Irenee réfute dans
l'endroit dont il s'agit, eft qu'une chair corruptible (oit inca-
pable de recevoir la vie éternelle ôc l'immorraJifé.
Cii>
zz Liv. I. Des mots de figure ^ type (dp- autres
Cm. II. •' Il pi'ecend au contraire leur faire voir que la chair n'eil pas
incapable de devenir incorruptible,, & il allègue pour cela,
non comme une preuve , mais comme un exemple ôi une
comparaifon, le Pain Euchariftique^ qui eftant une matière
tcrreftre devient le Corps de J. C. Or qui ne voit que plus
le changement qui arrivera à ce pain fera grand , plus il fera
capable de reprefentcr l'eftat d'incorruption où nos corps
arriveront après la re'urredlion ? Et qui ne voit au contraire
qu'il n'y a aucun rapport du changement de l'état de pain
commun à l'état de figure admis par les Miniftres avec le
changement qui arrivera à nôtre chair après la refurredlion,
puifque le pain dans cet eilat de figure demeure toujours cor-
ruptible?
Un changement fubflantiel peut bien fervir d'image d'un
changement très grand , & très- réel , quoy qu'accidentel , tel
que celuy qui arrivera à nos corps ; mais un changement fi-
guratif ne le peut eflre, parce qu'il ne confifte qu'en ima-
gination , &: qu'il n'efl pas dans larhofe même.
Et il ne fert de rien de dire que félon le fens que nous at-.
tribuons à faint Irenée , le pain ne fubfifle pas dans le chan-
gement , & qu'ainfi il ne reprefentera pas bien la chair qui fub-
fifle en devenant incorruptible. Car où efl-ceque M. Claude
a trouvé ce principe, que toutes les comparaifons deuflent
' eflre parfaitement juftes ? & comment ne s'efl.il pasfouvenu
qu'Aubertin fe fert d'un principe contraire pour fe démêler
des pafTàges qu'on luy objedle, &: qu'il prouve par divers exem-
ples des Pères, qu'il n'eft pas neccffaire queles chofcs com-
. parées potîedent en la même manière la qualité dans laquelle
on les comparé? Il fuffit doue qu'il y ait de la reflèmblance
dans les deux membres de la comparaifon. Or il y en a cer-
tainement icy, puifque dans l'un &:dans l'autre, une matière
corruptible efl changée en une chofe incorruptible.
Mais pour ôter à M. Claude tout prétexte de chicaner fur
ce point, je luy vay faire voir cette comparaifon avec les
Aubert.p. i;5, mêmes défauts dans des Auteurs qu'Aubertin même avoiic
eflre dans la doctrine des Catholiques.
Le premier efl Pierre de Damien qui parle de cette forte
après Rcmy d'Auxerre, fans le citer, dans le traité qu'il z
fait fur ces paroles, Dominus vohifcttm\ Comme ce pain (^ ce
Sang ont^ dic-il , ejiè changez^eritablemcnt au Corps du Seigneur^
nrez.de U partie extérieure de V Eucharifiie. a.^
de même tous ceux qui le reçoivent dans l'Eqlife deviennent indu- Ch. IL
bitabhment un même corps avec Y C.
On peur remarquer dans cette comparaifon tout ce que les
Miniftrcs remarquent dans celle de S. Irenée. Car comme S.
Irenée compare le changement du pain au Corps de J. C.
avec le changement du corps des juftes en un état immortel 5
de même Pierre de Damien compare le même changement
du pain , avec l'union des fidelles au Corps de J. C. Or com-
me ceferoittrés-mal conclure que de dire: Ce dernier chan-
gement qui arrive aux fidelles par l'incorporation au Corps
Myftiquede J. C.n'eft qu'un changement accidentel, Si n em-
pêche pas qu'ils ne fubfiftent dans leur propre être :donc félon
Pierre de Damien le changement du pain au corps de J. C-
n'efl: qu'un changement accidentel, 6c n'empêche pas que le
pain ne fubfifte dans fon propre être ; de même c'efl tres-mal
raifonner à M. Claude de vouloir que le pam lubfifte dans fon
être propre félon S. Irenée, parce que ce Saint employé le
changement qui arrive pour fervir d'miageàun changement
quin'cfl pas fubflantiel.
Le fécond eft S. Bernard qui compare l'entrée du Sacrement
dans nos corps, avec la manière dont J.C. entre dans nos âmes
par l'exemple de fa vie. Comme l'on voit ^ dit-il au fermon 3.
fur le V (t3i\xxwQ Qui habitat ^qtie cette forme de pain entre en nous^
de même J. C. entre en nous far l'exemple de fa vie qu'il a menée
fur la terre , pour habiter dans nos cœurs par le moyen de fa foi. M.
Claude conclura-t-il de là que, félon S. Bernard , la forme
du pain n'entre pas réellement & fenfiblement dans nos corps ,
quifque J. C. n'entre en nous par la foy que d'une manière
métaphorique &c fpirituelle? Qu'il apprenne donc de ces exem-
ples à eftrc plusrefervé dans l'ufage de ces termes ^ de preuves
demonftratives , a laquelle on ne fauroit rien répondre de folide ,
puifqu'ilefl vifîble que fa prétendue demonftration ne mcri-
toit pas feulement d'eftre mife au rang des plus légères objec-
tions.
Ch. III.
14 Liv. I. Des mots de figure :, type ^ Autres
CHAPITRE III.
Que c'efi une fuite naturelle de la manière dont les Catholiques
conçoivent l' Eucharifiie ^ dy confiderer un fiyîe <^ une fiyiire ^
^ de l'exprimer far des mots qui nejignifientprecifémentqucji^
gne O" figure ^ quoy qu'ils repre [entent à l'ejprit toute l'ejfence de
L' Eucharistie.
COmme ce Corps de Jesus-Christ ne fe fait point voir
dans l'Euchariftie fous fa forme naturelle , & qu'il y a un
objet fenfible, c'eftàdire, une apparence de pain qui fait im-
preffion fur nos fens , nous ne recevons pas feulement l'efpece
& Timpreffion de cet objet, mais il nous conduit de plus par
les inftrudions que la Religion nous en donne, à la connoiC
fance de quelques autres objets qui ne frappent pas nos fens.
Il nous marque & nous fignifîele Corps de Jesus-Christ j
puifque la foy nous affure qu'il efl caché fous ce voile myfte-
rieux , & que nôtre raifon aidée de cette foy découvre du rap-
port entre la force que le pain, dont cet objet imprime l'image,
a de nourrir & fortifier le corps, & la vertu fpiricuelle que le
Corps de Jesus-Christ a de fortifier & de nourrir fpirituel-
lement nos âmes , ôc même de détruire dans nos corps la cor-
ruption Se la mortalité.
Il nous marque & nous reprefente encore plus vivement l''u-
nion des membres vivans del'Eglifeentr'eux&iavecJ. C. qui
les fait un même corps, comme le pain efl: compofé de plu-
ficurs grains.
Or comme ce que l'on appelle un figne n'eft autre chofe qu'un
objet, qui imprimantdans les fens une certaine efpecc,en fait
concevoir une autre à l'efprit , il eft impoffible que cet objet
prefent &: fenfible,qui frappe nos fens de l'image d'un pain ma-
tériel , & qui fait concevoir à nôtre efprit le Corps de J. C.
naturel & myftique, ne foit pas un figne ; & les objets qu'il fait
concevoir eflant facrez , il eft impoflible que ce ne foit pas un
figne d'une cbo(ê facrée : ce que les Latins ont appelle Sacre-
ment ^ & les Grecs Myflere.
Or s'il eft figne , il peut eftre appelle fipie ; s'il efl: figure Se
type , il peut eftre appellé/g»/^ c^ type j s'il eft image , il peut
eftre
tirez.de h partie eaterieure de F Eucharijîie , zj
eftre appelle image. S'il eft Sacrement êc Symbole, il peut eflre Ch. 1 1 1.
s.p^e\\é Sacrement &C Smèo/e ., puifquel'on peut donner aux cho-
fes des noms qui expriment ce qu'elles font efFedivement,quoy
qu'ils n'expriment pas tout ce qu'elles font.
Ainfî non leulcment les mots de /%w, àtfiyirc , d'ima'ie ^ de
type , ai antitype , de Sacrement ^ de Myftere , de ^vmhcle , n'ont
aucune contrariété avçc ce que les Catholiques croycnt de l'Eu-
chariftie , mais encore leur créance les y conduit d'elle-même,
elle les exige , & ne fe peut exprmier parfaitement fans l'ufage
de ces termes.
Mais comme dans refprit des Catholiques cet objet fenfible
qui (ert de fondement à tous ces mots , eft joint avec le Corps
mêmede Jésus Christ , auquel il fert de voile, Se qu'il cache
à nos yeux, il arrive auiïi par neceffité que l'idée de ce figne &
diiCorpsdeJ. C. fe joignent enfemble dans nôtre efpritj c'efl:
à dire , que l'on regarde le Corps de J. C. comme contenu fous
ce figne. Et c'eft encore une fuite de l'union de ces deux idées,
que l'une excite l'autre, & que comme on connoît cet effet ,
& qu'on le fcnt en foy, on le fuppofe dans les autres, & lors
on (econcenre fouventd'en exprimer une, quoy que l'on ait
deiïbin de faire concevoir toutes les deux.
Car la neceffirc de fe fervir de mots pour exprimer fes pen-
fées eftant un défaut à l'homme, elle l'incommode effective-
ment ;i! votj droit s'en paffer s'il le pouvoit. Ainfi lorfque par
un feul m<itil peut exciter deux idées, il fe difpenfe de le faire
par deux expreffions feoarées.
Ce font ces termes qu'on a appelle dans le premier Tome de "^°y" P'""?»
la Perpétuité des termes abrcie-::^^ c'eft àdire, qui ne fignifiant p'^j'/^. r-I'
pnr eux- -nêmes qu'une certaine chofe , ne laiffent pas d'impri- gen.i, i.c.i'j.
.mer une iiée plus étendue. Et s'il eft clair par la raifon que les
mots de S icrement ^ àz Symbole ,àe Mvfiere , & les autres fem-
bia'bles appliquera l'Euchariftie doivent eftre de ce nombre,
il eft encore- plus (rnfih'e par l'expérience déroutes les nations
du mon leq l'ils en f^nt effectivement.
Qui e'I-te d'entre les Catholiques qui entendant nommer
/(? S tint S cr entent , le Sacrement de l'Autel , les ficre^Symboles ^ la.
faivtr H'.'fie , borne fa ponfée precifément à un certain objet
fenfible? Qui d'entr'eux ne conçoit le Corps de J. C. réelle-
ment prefentdans ce Sacrement, dansce Symbole, dans cette
Hafbe ? Qui d'entre les Grecs entendant parler de participer
j^ X i V . I. Pes mots défigure , type (^ Autres
Ch. III, aux myfteres , ne fe forme incQncinçnt l'idée au moins confiifc
4e tout ce qui efl: contenu dans ces myfteres félon le fenti-
ment de fon Églifè ? Ce n'eft pas que fi l'on demande aux Ca-
tholiques ce quefignifîe le mot de Sacrement ,ilspui(îènt répon-
dre autre chofe que ce que S. Auguftin répond ^ que c'cfl le ^\-
gne d'une chofe facrée. D'où il s'enfuit que Sacrement wi^Çx^px-
lie precifément & grammaticalement qu'un figne facré : mais
ç'eft que l'efprit ne demeure pas aux feules idées exprimées,
& qu'il paflê à toutes celles qui y font jointes, principalement
lorfqu'il s'apperçoit que l'intention de celuy qui parie, eft de
\q.s f.;ire concevoir.
Je ne croy pas que les Minières nous veuillent engager à
la preuve d'une vérité fi certaine j & quand ils le voudroicnt, il
feroit bien aifé de les fatisfoire. Car fi ce n'efl: afil^z de l'ex-
périence de tous \qs Catholiques qui font prefentcment au
monde , on leur peut produire une infinité de paflàges tirez
des Auteurs qui ont écrit depuis Bercnger , où ces termes
font employezd'unemaniere quifaitvoir qu'ils ont plus voulu
fignifier par ces termes que ne porte leur fignificationliterale
Et cela n'a pas lieu dans le feul Myftere de l'Euchariftie, mais
aufiî dans tous les autres , comme on l'a prouvé dans la rcponfe
générale.
Mais Ç\ c'efl: la nature même qui a introduit ces exprefiîons
parmi les Catholiques , pourquoy n'auront-elles pas eu lieu par-
my les Pères , en luppofant qu'ils ayent con(jû le myftere en
la même forte que les Catholiques le conçoivent, en ce qui re-
garde la prefence réelle &: la tranflubftantiation ?
La raifon ne fouffre pas fans doute qu'on fafie une difFe'rence
ij bizarre entre desperfonnesque l'on fuppole dans un même
ièntiment. Et tant s'en faut qu'il y ait moins d'apparence que les
Pères s'en foient fervis, qu'il efl: en quelque forte plus éton-
nant de voir cet ufâge établi parmy les Catholiques d'aprer
fent , que de le trouver dans les Pères.
Car depuis qu'il s'efi: élevé des gens aflez téméraires pouf
vouloir changer la foy de l'Eglife fur ce Myflrere , en reduifant
l'efi^nce de ce Sacrement à n'eftre qu'un fimple figne , le mau-
vais ufage qu'ils ont fait de ces mots a fans doute obligé l'E--
glife d'y efl:re plus circonfpede , & de s'exprimer plus precifcr
ment 8c plus exadement.
Ncanmoins toute cette précaution s'eft réduite à ufçr moiM
?. ;i<.
tire'z^ de la, punie extérieure de fEuchariJîie. zj .
ordinairement de quel-ques-uns de ces termes , comme de ceux Ch. 1 1 î.
àtfiyire ^ ai image , àt fignt j ôc l'Eglife en même temps n'a pas
lailTéd'en retenir plufîeurs autres qui ont le même fens, com-
me ceux A^ Sacrement ^ de Sacrement de l'Autel , à'ef^ece ,àc
facrez^Myferes ^ de Svmhole ^ àHloJlie.
Et il eft arrivé delà, comme on l'a déjà remarqué , que ce
qui manque à ces termes moins ordinaires n'eflant pas /uppléé
par l'intelligence commune , ils font demeurez dans leur figni-
fication littérale &. imparfaite, & font icy devenus fufpecls ; au
lieu que Tufage fuppléant aux autres, ils impriment dans Tef-
prit des Catholiques une idée auffi pleine que fî rien ne man-
quoit à l'exprelfion. Mais la même raifon fait voir au contraire
que ce Myftere n'ayant pas efté attaqué du temps des Pères ,
ils ont pu eftre plus libres dans l'ufage de ces termes ,& qu'ils
ont dû eftre plus accoutumez à y fuppléer, bc à concevoir ou-
tre l'idée qui fait la fignification precile de ces mots , celles
aufquelles elles eftoient jointes par la doctrine de. l'Eglife.
Il y a une imperfedion naturelle & neceifaire dans nos ex-
preffions & dans nos penfees. Ce défaut des langues fait que nos
expreflîons n'égalent pas l'étendue de nos penfées : & celuy de
nôtre efprit fait que nos penfées n'égalent pas l'étendue dts ob-
jets. Nous nous reprefentons quelquefois le même objet, quel-
que fimple qu'il foit, par diverfes penfées , & nous nous en for-
mons diverles idées. Et fouvenc la même penfée eft l'objet de
lufieurs exprelfions, qui ne la marquant que par une partie,
a font néanmoins concevoir toute entière.
C'eft donc un fophifme vifîble que de conclure généralement
de l'expreffion à la penfée , & d'une penfée feparée , au dogme
entier; parce que l'expreffion peut ne reprefenter pas toute la
penfée qu'elle a pour objet , & que fouvent la penfée n'égale
pas l'étendue du dogme.
Aind la raifon veut que l'on fupplée à certaines expreflîons
par les autres expreffions qui nous font voir la penfée toute en-
tière i &à l'imperfedion de certaines penfées par l'amas de
toutes les penfées qui compofent le dogme total. Il faut fouvenc
joindre plufieurs expreffions pour trouver la penfée totale qui'
répond à une certaine expreffion : & il faut de même joindre
fouvent plufieurs penfées pour concevoir le dogme total , donc
chaque penfée ne contient qu'une partie.
Cette confideration fuffit pour prouver que la voye que les
Dij
l
ii L I V. I. Des mots défigure , type ^ autres
Ch III. Miniflresfuivent en ce point, en prerendancdetcrminer par le
moyen de ces termes AQfiziire , à'imaae . de Sacrement , de type^
à' antitype , quel cO: le fentiment des Pères fur l'Euchariftic, cft
une voye d'illufion &; de tromperie. Car comme on peut fup.
pléer à ces termes, oun'y fuppléer pas, ôcqu'ainfi ils peuvent
imprimer ou l'idée d'un fimple fîgne,d'un fimple Sacrement,
ou l'idée d'un figne, joint à la choie fignifiée, l'idée de l'objcc
fenfible joint au Corps de J. C. réellement prefent, il n'y a
point d'autre moyen de s'en écUircir , que de s'afTurer par ail-
leurs de la doiflrine des Pères.
Et comme il efl: certain que fi l'on avoir prouvé qu'ils n'ont
point crû la prefence réelle, on auroit droit de conclure qu'ils
ont pris cts termes dans leur fignification littérale fans y rien
fuppléer:de même fi l'on prouve qu'ils ont efté perfuadez de
cette doétrine, on prouve par une confequence neceflaire qu'ils
ont fupléé ce qui manquoit à tous ces termes ; que la nature les
y a portez , & qu'ils ont agv tres-raifonnablement en concevant-
par ces termes l'idée entière de ccMyflere, telle que leur foy
les obligeoit de le concevoir.
Quiconque prouve que les Catholiques croyeht la prefence
réelle dej. C. furies Autels, prouve que par le mot àt Sacre,
ment de l'Autel i\s entendent un Sacrement qui contient réeî-
ment J. C. il n'eft pas befwin d'en alléguer d'autres preuves:
ce n'eft point par ces mots qu'il faut juger de leur foy -, c'eft
par leur foy qu'il faut juger du fens de ces mots:6cIaconnoif-
fance de leur foy joj^nteà celle de la manière dont les hom-
mes parlent, donne droit de conclure qu'il doit y avoir dans
leur langage des exprefïïons de cette forte, qui ne marquant
le Myftere que par une partie , le fout concevoir toute entier,
& que celle là eft de ce nombre.
Or ce qu'il n'eft pas neceflaire de prouvera l'égard des Ca-
tholiques d'aujourd'huy ,nous l'avons prouvé à l'égard des Pè-
res morts, en faifant voir dans la plus grande partie du fécond
Volume qu'ils (mt crcu la prefence réelle. Cette preuve déter-
mine donc par neceffitc les termes dont il s'agit , quand on les
trouve dans leurs Ecrits; & puifqu'ils ont eu la même créance
quel'Eglife Romaine, il faut par necefîîté qu'ils les ayentpris
au même fens qu'elle les prend, Il n'eft pas befoin d'autre raifbn
pour le prouver-, il iulfitde fuppofèr qu'ils eftoient hommes &
qu'ils parloient comme des hommes ont coutume de parler.
M. Claud.
1- p.p. <••
tire\de h partie e^cteneure de rEucha.rifiie. 29
A quoy donc apenléM. Claudijqiiand il a misau rangdeles Ch. III.
principales preuves contre la prefence réelle la remarque qu'il
fait que les Pères nous difenc, que ce font desy/g«rj-,des Sym-
holci , des images , des types , des figures , des mémoriaux , des re~
pcfentations ^ des rejcmblances , des gages ^ de énigmes, des ex-
prc/Jions ^ àt^voiles matériels ^ des apparences ^^ ^ts -portraits du
Corps 6c du Sang de J. C ? Et pourquoy a t il chargé inucile-
menc les marges de fon livre de la citation des endroits où cz%
termes fe rencontrent ? Ne devoic-il pas avoir vûdeluy-même
qu'il efl contre la fincerité &le bon fens d'employer en preu-
ves , des termes dont le fens dépend de la décifion de la quefl
rions, bL qui fuivent,pour ainiî dire, le parti viélorieux ? S'il
avoir prouvé que les Pcres n'ont pas crû la prefence réelle, il
auroirdroit de prendre ces termes dans le fens des Calviniftesj
maiseftant bien éloigné de l'avoir fait,& eftant au contraire
dans l'impuiffance de répondre à la foule des preuves par
lefquclles on a juftifié lafoy des faints Pères fur ce point, il
efl: vilîble que ces termes doivent eftreconfiderez comme com-
muns, ôc qu'il n'en fçauroit tirer aucun avantage.
Je l'avertis de plus, qu'outre l'infuffifance & llllufion de cette
preuve , il y a encore une efpece defauffeté &, d'injuftice dans
la manière dont il traduit quelques-uns de ces mots. Carcom-
meil y en aquel'herefie des Sacramentairesarendu odieux &
aufquels les Catholiques ne font plus accoutumez de fuppléer ,
quoyqu'ils fuppléent à d'autres demême fens; c'cft une efpece
d'infidélité de rendre un mot qui n'eflioit point odieux du tems
des Pères ,&qui excitoit l'idée entière de tout ce qui efl: con-
tenu dans ce Mvfteres, par un mot qui n'ayant que le même
fens, félon le fon, n'efl:plusle même félon le fens, parce qu'-
efl:ant devenu odieux , il n'imprime plus qu'une partie de l'idée
qu'il imprimoic autrefois.
D ii)
Ch.I\^.
50 L I V. î. D^s mors défigure , types ^ autres
CHAPITRE IV.
Qu^il paroit par les Pères mêmes que par les termes de figure,
(af'image, de type , de Sacrement, de Myftere , ils ont entendu
des images , des types ^ ^c. joints aux chofes , C^ contenant les cho-
fes mêmes.
Réflexion fur la ^. Catechefe de 5. Cyrille de Jerufalem.
J'En pourrois demeurer là, 6c obliger M. Claude, s'il vou-
lolc fuivre la raifon , de retrancher de fon livre tous les paf-
i'a2,es qu'ilacrii luy eftre avantageux, parce qu'ils contenoient
cts fortes de termes. Mais je veux pafTer plus avant, & luy
rnontrer pofîtivement, que non feulement ces termes n'ex-
cluent point dans les Pères la prefence réelle &; efFedive du
Corps de J. C. dans les fymboles , mais que même ils la ren-
ferment comme les mots de Sacrement & d'hofiie dans la bou-
che des Catholiques.
Pour s'en éclaircir de bonne foy il faut agir de la même
forte que fi l'on vouloit découvrir , fi un homme qui diroic
qu'il a participé plufieurs fois au faint Sacrement fêroit Cal-
vinille ou Catholique. Car s'il efi: Calvinifte il ne', doit rien
dire ni devant ni après qui enferme la dodrine de la prefen-
ce réelle. Celuy qui ne la croit point ne l'explique point : il
ne dit rien dont on la conclue neceflTairement : il dit toujours
quelque chofe qui fait voir qu'il ne prend ce mot que pour un
figne. Mais un Catholique qui prendroit ce mot de s-tcrement
pour un figne qui renferme &; qui contient le Corps de J. C.
âgiroit tout autrement. II découvriroit fa créance en plufieurs
manières , ce qu'il auroit appelle une fois Sacrement, il l'ap.
pelleroit une autre fois Corps de J. C. Sang de J. C. & il don-
neroit diverses marques qu'il entendroit parler du Corps véri-
table de J. C
•■ Pour luivre cette voye, qui eft fans doute très naturelle,
imaginons-nous que S. Cyrille de Jerufalem efl: cet homme
de la créance duquel nous fommes en peine, & qu'il nous «
donné lieu d'en douter par un mot dont il fe fert dans fa cin-
«juieme Catechefe , oià il parle de cette forte : On ne vaut
tini^de h punie extérieure de l'Euchuriftie. yt
commande p 04- ^ dit-il, de goûter du pain é" du vin^ mais l'an- Qa. IV.
titype du Corps df du san^dej. C. Voilà ce mot qui caufe le
doute, &C qui eft la même chofe que celuy de t/pe, d'image ,
de fiyire ^ àtfiyieî ainfî en l'expliquant il expliquera tous les
autres.
Tous cts, mots font capables de deux fens , comme nous avon$
dit. Ils peuvent fignifier un pur iîgne, une limple figure, une
image exclufîvc de la vérité. On y peut aufîl fuppléer par la
doctrine de l'Eglife , & en ce cas ils imprimeroient non par leur
Cgnification littérale , mais par i'ufage particulier , qui naift de
la doctrine receiie dans l'Eglise où Ton s'en fert, l'idée d'un
Myftere qui contient ^renferme réellement le Corps même de
J. C. Il eft queftion de fçavoir en quel fens ce Père s'en eft fer-
vi. Mais il décide bien toft cette queftion^parce qu'il ajoute im-
médiatement après. Lors t^ue voné en approcherez^^ dit-il , n'ayet^
pas les mains étendues , ni les doigts écartez^^mais appuyant de vè-
tre main gauche la main droite , comme celle qui doit recevoir le Roy ,
recevez^ le corps de J. C. en difant ^ Amen.
Cet antitype contient donc le Roy , félon S. Cyrille. Il con-
tient le Corps de J. C. & il en faut faire une folemnelle profef-
fion en difant que cela eft vray. Cen'efl pas là le langage d'un
Calvinifte, ni d'un homme qui prendroit cet antitype pour un
pur figne 5c une fimple figure. Jamais Calvinifte n'appela le Sa-
crement , fon R oy , jamais il ne fit profeffion de croire que c'eft
le vray Corps de J. C.
Mais les auditeurs de S. Cyrille n'auroient pas eu befoin de
cet cclairciiîèment pour comprendre que cet antitype n'eftoic
pasune pure image : ils enauroient eftë pleinement inftruits ,
& éclaircis auparavant, êc ils n'auroient pas même cfte (ufcep-
tibles d'un doute fi peu raifonnable. Ce Père leuravoit fait le
jour d'auparavant, qui eftoit lejeudy delafemainede Pafques,
une inftrudion pleine de l'Euchariftie , qu'il leuravoit promifc Citechef. »>
avant Pafques: Et c'eft de cette inftruclion qu'il faut apprendre ii^"«i*
ce qu il croyoit de ce Mvfterej & ce qu'il vouioit que les Néo-
phytes en cruftènr -, c'eft là aulTi que s'il euft efté dans les fenti-
mens des Calviniftes, il leur euft expliqué les principes de
cette doftrine, que le nain hi le vin ont efté faits par l'infticu-
tion de J C la figure de fon Corps & de fon Sarg; Qu'il faut
en mangeant ce pain fongerà la mort de |. C & que c'eft
parlameditacion de cette more que l'on mange fpiricuellemeoc
34 Lî V. i. T>es mots de fgure ^ type ^ fS Autres
Ch. I V. J- C. Voilà ce qu'il leur auroit dû dire , i'il avoir efté perfuadc
de certe dotflnne, &: s'il avoir pris le mot à'antitype ou àtfipire^
dans la Catechefe fuivante, pour une figure fimple &:exclufi-
ve de la realirë du Corps ^ mais il leur parle bien un autre lan-
gage. Participons , dit il , ^zvec une pleine foy au Corps ^ au Sang
de /. C. Cardans le lyp-c du ^uin le Corps vous eft donné ^ ^ le Sang
dans le type du vin '■> afin quevnts fiiffic^participans de [on Corps
(^ de jon San^^ (^ que votis neufjîcz^quun même corps (^ un mê-
me Sançr^ avec luy C'e/i amft que 7ious devenons porte - Chrifl , fon
Corps ^ (on Sano:^ e/iant difirihuez^dans nos membres.
Qviel eft ce Corps de ) C. qui nous eft donné dans le type du
pain, félon S. Cyrille? eft-ce un Corps en figure & en image?M.
Claude auroit honte ians doute d'attribuer à ce Père une telle
abfurdité. Car qui auroit il de plus ridicule que de dire que la fi-
gure du Corps nous eft donnée dans la figure du Corps ? C'eft
donc le Corps véritable Mais peut-eftre ne nous eft-il donné
querpirituellement ! C'eft cequeS.Cyrilleexclut pcfitivement
en marquant que ce Corps bc ce Sang qui nous font donnez
dans la figure du pain fe diftribuent dans nos membres.
pou voit-il exprimer plus clairement que cette figure &; ce type
qu'il reconnok, contient réellement le Corps mêmede J. C ?
Il faudroit rapporter la Catechefe entière fi l'on vouloir mar-
quer tous les lieux qui prouvent que le Corps de J. C que nous
recevons en nous félon S. Cyrille, âc auquel il applique ces pas
ro'es, Cecy efi mon Corps , n'eft point un Corps en figure. Puif»
que J. C. dit il , noiuaffure de ce pain que c eft fon Corps , qui ofera
en douter} Puifquil confirme , (^ qu'il dit , Ccfl mon Sang, qui en
doutera ^ (jr qui dira que ce n'efl pas fon Sang ?
Saint Cyrille combat un doute, & il veut empêcher les Neo-
phites d'y tomber. Et nous avons fait voir qu'on ne fcjauroit fup-
pofer avec la moindre apparence que cefuft un doute de figure ,
c'eft à Atq.^ Ci !e pain eft la figure du Corps de J.CSi pourrc-
connoîrre clairement l'abfurdité de ce fens , il n'y a qu'à (ubfti-
tuer les explications des Calviniftes aux termes de S. Cyrille.
Carvoicy ce que les Calviniftes luy feroient dire (elonce fens :
Puifque J. C. nous a dit du pain, c'eft mon Corps, qui ofera
douter que ce n'en foit la figure rPuifqu'il a dit , c'eft mon Sang,
qui en dortera , 8c qui fouriendra que ce n'eft pas la figure dé
fon Sang? M. Claude peut-il dire de bonne foy qu'il y ait du
fcns commun dans ce dikours , & que S. Cyrille ait pii fuppo-
fcr
35
tirôi de U pxn'ie extérieure de ÎEîichariflie.
fer que les .ludicetirs fullenc capables de tomber dans un douce Ch. I V.
fj extravagant.
Qii'on (ubdituë de même les explications Calviniftes à ce
que ce Père ajoute dans la fuite de cette Catechele, Se l'on en
fera un difcours plus propre à un infenfé qu'à un Père de l'Eglife.
' J ESV S-C HRI ST ,^\z\\, eftant à Cana de Galilée, a,
autrefois changé l'eau en vin qui approche affc:^ du Sa-n<^ , ^ il ne
méritera pas d'être cru ^ lors quilchaijge le vin en fon Sang? C'cft
à dire , félon les CalvinifteSjil a autrefois change l'eau en vin^ &:
il ne méritera pas d'être cru lors qu'il change le vin dans la figu-
re de fon Sang. Ce difcours eft il iupportable ? Et les Minières
nedevroient-ils pas rougir de rendre les Pères les plus ridicu-
les hommes du monde par des explications fi déraifonnables ?
Mais que dira- 1- on de ce quife trouve à la fin de cette Cate-
chefe , fi Ton y applique les idées Calvinifles ? Scachez^^ dit S.
Cyrille , (^ tencT^pour très -certain , que ce pain qui vous paroifl ^
n'efi pas du pain , quoy que le go lit juge que c'efi du pain , mais le
Corps de J. C. (^ que ce vin que vous voyesji'eji pas du vin , quoy
que le goiit le dtcie , mais le Sang de Chri/î. A-t-on jamais dit
d'un portrait du Roy: Sçâchez que ce que vous voyez, n'eft
pas, du bois , ni de la toile , mais que c'eft le Roy • ou de l'a-
gneau Pafcal : Sçachez que ce n'eft: pas là un agneau, quoy que
vos yeux vous le rapportent, mais un pafTage? Qui pourroin
croire que les Pères ayenc parlé d'une manière donc aucun
homme fenlé ne voudroit parlera
Il n'y a donc pas le moindre doute que S. Cyrille n'ait pris
le mot à'antaype pour une figure qui contient réellement le
Corps de J. C. qu'il n'ait crû que le Corps de J. C. nouseftoit
donné réellement dans ce type ou antitype, comme il le dit
luy-même Et comme il ne prenoit pas ce terme en un autre
fens que tous les autres Chreftiens de fon temps , il doit pafiler
pour confiant, qu'ils entendoient tous parle vc\oz à' antitype la
mêmechofe que l'on entend prefentement dans l'Eglife Ro-
maine par le mot de S. Sacrement ^ & qu'ils croyoient tous com-
me luy, que dans l'antitype du pain, k Corps de J. C. nous
eftoit réellement donné.
Si l'on veut içavoir de même ce que fignifioïc dans les écrits
des Pères le terme de Sacrement du Corps deJ.C &; s'ils s'en
iervoient pour marquer un fimple figne facré , ou pour expri-
mer un figne qui contient fon véritable Corps, on n'a qu'à
confulter S- Ambroife. E
j4 Liv. I. Des mots de figure ^ type ^ mtres
Ch. V I. Il employé cette expreffion dans le traité qu il a fait pour
les nouveaux baptifez. CVy/, à\t-\\ , vraymcnt le Sacrement de fit
De Init. c. 9. (hair. V £ R. E ergo carnis illius Sacramcntum eji.
Mais n'eft ce qu'un Sacrement fimple & vuidc? Ne con-
tient-il point le Corps de J. C? Demandons-le au même S.
De Init. c. 10. Ambroife. J.C.efidans ce Sacrement parce que fin Corps y eji: In
illo Sacramento Chrijius ejf , quia Corpus efi Chrifli.
Je n'ay pas befbin de repeter icy tout ce que l'on a dit
dans le z. Volume, pour montrer que S. Ambroife enfeigne clai-
rement dans tout ce chapitre la prefence réelle & la tranflub-
Voyei perp. ftantiation : il me fuffit d'y renvoyer les ledeurs , & de leur mar-
x.i.é.c.5.p.i. querquel'ona prouvé invinciblement que le changement du
*97.&.iuiv. p^-|^ au Corps de J. C. queS. Ambroifeétablit là par l'exemple
des plus grands miracles de Dieu ,eft: un changement très- réel
&: tres-effedif , & non un changement métaphorique 6c imagi.
naire : que ce changement n'a pour terme , ni que le pain foit fi-
gure du Corps de J.C. ce qui ne demande point de changement
réel J ni qu'il foit rempli d'efficace, ce qui ne peut eftreni prou-
vé par les raifonsque S. Ambroife allègue pour juflifîer le
changement dont il parle, ni exprimé par les paroles donc il le
fer t.
Car la raifon qu'il apporte pour prouver que le pain eft: chan-
gé, c'eft que J.C. a dit, Cr^/f/) mon Cor//, & que les paroles de
J. C. font efficaces. Or jamais homme railonnable ne conclura
de ces paroles que J. C. ait voulu donner quelque efficace au
pain.
Et les expreffions qu'il employé font que l'Euchariflie eft la
chair de J. C. le Corps du Créateur ^ &; qu'elle l'cft par oppofi-
tion à la manne qui n'en eftoit que l'ombre & la ligure : Qiie
nous recevons le Corps de J. C quoyque nous voyions aurre
chofe. Que cen'eft pas ce que la nature a formé , mars ce que
la benediétiona confacré, c'eft à dire, le Corps de J. C. Que
ce Corps que l'on forme eft le Corps né de la Vierge. Qu'il ne
faut pas prétendre que l'ordre de la nature foit gardé dans le
Corps de J. C. puifque J. C. eft né d'une Vierge contre l'ordre
de la nature. Que puifque l'on donne au pain après la confecra-
tion , le nom de Corps de J. C. &: que l'on avoiie que cela eft
vray , il le faut donc croire , ôc en eftre entièrement perfuadé.
Or jamais perfonnene s'eft fervi&i ne fe fervira de ces expreC
fions pour marquer qu'un eftre corporel a eftc faitleiîgne du
Corps de J. C. & qu'il t receu quelque vertu.
tiret, de h piirtie extérieure de fEucharifiie. 35
Mais il n'eft pas neceflairc, comme j'ai dit, de prouver icy C h. IV".
cela en particulier, p^iifqu'on l'a prouvé fî amplement en Ton
lieu. Il luffit donc de conclure que bien loin que le terme de
Sacrement dans S. Ambroife exclue la prefencedu Corps de
J.C. il eft clair au contraire qu'il la renferme.
Il fuffit pareillement de dire que le mot de type fe trouve
dans S. Cyrille d'Alexandrie pour juger de ce qu'il fignifie , &
de ce qu'on y fuppleoitpar la créance commune de l'Eglife
de Ion temps. Car c'efl ce même S. Cyrille qm nous dit en tant Comm. i«
de manières , que nous recevons en nous J.C. afin que nous lom.p. 1104,
recevions une nouvelle vie par fa. fainte Chair Se Ton faint Sang.
C'eft luy qui nous d\tc/ue l'EuIogievivi^ante , qui comprend Deador.i.ii-
ce type dont il efl: queftion , e/ la Chair de J. C. Il nous fait la ^' *'''
grâce ^ dit- il, de nous faire participans de L'Eulogie vivifiant*^
c'ejl a dire , de fa fainte Chair.
C'eft luy qui nous dit que J.C. ne nous vivifie pas feulement Dui.de Incir.
comme Dieu par la feule participation du faint Ejprit , mais en ' ' '
frefentant auljî à notre table la chair qu'il a prife .^ afin que nous
la m.tny.oni félon ce qu'il efi écrit , 6"/' vous ne manqezjla Chair du
Fils de l^ Homme y ^ ne bcuvez^fon Sang , vous riaurex^pas la,
vie en vous.
C'eft luy qui nous die que J. C. nous donne fon Corps comme Hoai.inMyft.
du pain, (^ fon Sang comme du vin. Ce qui ne fe peut enten- Cen.
dre d'un pur type , perfonne n'ayant jamais dit en envoyant
fon portrait à fon ami, qu'il luy envoyé fon Corps comme de
la toile, on ne peut dire auffi raifbnnablemenc qu'on donne fon »
Corps comme du pain , s'il y avoit du pain & point de Corps :
car ce feroit donner le pain comme eftant le Corps , & non le
Corps comme eftant du pain.
C'eft luy qui nous dit que nous mangeons J. C. non que nous ^- 4.a'i^f"^
tonfommions la Divinité , ce qui ne fe peut penfer fans impiété ,
mais nous mangeons la propre chair du Verbe rendue vivifiante ,
farce qu'elle luy efl unie J C'eft à dire , que nous mangeons la
Chair J. C. d'une manière que l'on ne peut attribuer fans im-
λietë à la Divinité , parce qu'elle eft incorporelle, comme il
e dit en un autre lieu.
C'eft de luy que.Severe avoit tiré cette même doiflrine. l^ous Ei caten*. U
fie manque on s pas le Verbe en fa propre nature de Verbe: car le moyen ^o»"- Antue-
que cette action fe put exercer fur un être incorporel , incapable d'è- is^o,
tre pris , (^ que les yeux ni les dents ne peuvent atteindre : mais
Eij
36 Liv. I. Des mors de figure , type (^ autres
C H. IV. ejlantunik la chair d'une union trcs-ctroiic , quoy que la chair foit
demeurée ce quelle e fiait ^ é- n'ait pas cfié cl»any;e en la nature du
Verbe , nom many:ons le Verbe en mangeant la Chair vivifiante
du Verbe. Cependant fi nous ne mangeons que la fimple figure
de cette chair , il feroit tout auffi aiié d« manger le Verbi mê-
me dans fa figure que de manger fa chair en cette manière.
Contra Neft. C'cft ce même S. Cyrille qui nous enfeigne que le Verbe ne
■ ■*■ demeure pas feulement en nous d'une manière divine par le S. £/-
frit^ mais au(Ji d'une manière humaine far fa fa inte Chair ^ fat
fon précieux Sang.
C'cft luy qui parlant de l'Eulogie Myftique, c'cft à dire du
S. Sacrement , dit , que J. C. s' introduit par fia Chair en ceu.x qui le
manient.
In loan. P. <^, n i . \- i /• /-
}i4. ^ eit Juy qui nous dit, que le faint Corps de J, C. vivifie ceu:i
en qui il cfi , efiant m'elè dans nos corps-
Ibid. jifj. C'eft luy qui nous dit, que parce que J. C. efir en nous par fit pro-
pre chair.^ ilefit afjuré que nous rcfiuficiterons , efiant impo.ijîble ^ in^
croiable que la vie ne communique pas la vie à ceux en qui elle efi.
l.io.p. 861. C'eft luy qui nous dit, que l'Eulogie Myfiique nous efi donnée
afin que J. C. habite en nous corporellement par la participation dj^
la communion de fia fiainte chair.
"^^^' C'eft luy qui nous dit, qu'une nature corruptible comme la notre
ne peut efire autrement vivifiée qu efiant corporellement unie an
Corps de celuy qui efi la vie par fia nature.
!'■ 990. C'eft luy enfin qui nous dit , que J. C, s'efi fervi de l'Eulogie
four bénir ceux qui croyent en luy , far fion Corps unique. Que nous
fiommes réduits en unité avec J. C. far cet unique Corps 3 (^ que
■nous luy fiommes unis en recevant dans le notre , ce Corfs unique
^ indivifible.
Tous ces paflàges 5c plufieurs autres du même Père ont efté
rapportez ailleurs, 5c l'on a ruiné toutes les défaites dont les
Calviniftes fe fervent pour les éluder i de forte que nous avons
droit de les produire comme abfolumentconvainquans ôcde-
cififs. Et comme ils font voir manifeftemenr que félon ce Père
par l'Eulogie ou l'Euchariftie nous recevons réellement la pro-
pre Chair de J. C. ils font voir en même temps qu'il ne l'appelle
► point type pourexckire la realité de cette Chair , & qu'il n'en-
tend autre chofe par ce mot, que ce que les Catholiques enten-
dent par celuy de Sacrement, qui leur reprefente tout cequela
;, fuy les oblige de croire de ce Myftere , c'eft à dire, que c'eft un
tirec^de U partie ester'nwe de l'Euchafifiie 37
voile exteneur qui couvre à nos yeux le Corps de J/G/pr^fenc Gh. IV. ^
réeliementSc fubftanciellement fur nos Autels & dans ncV^ corps.
Mais il n'eft beloin même que du palfage où S. Cvn'le em-
ployé le mot de type pour découvrir comme il l'enrend C'eft-
dans le dernier livre de Ton Commentaire fur S. Jean, où fai-. i_ n.p. no*.
fant comparairon de l'apparition de J. C. à Tes Difcrples- ,' lors
qu'il fe trouva au milieu d'eux , les portes fermées, avec le^at
femblées qui retiennent le Dimanche dans l'Eg'ifedonton fer-
moit aufli les portes lorfque l'on celebroir l.-s Myfteres , ].Q.
dit \\^y furvicnt auM Ô" y apparoi/f invifihlement comme Dieu}
^ vijiblcment dans fan Corps -, (^ il nous donne aufjï à toucher fie
faintc Chair , ©> nous nous en approchons par une faveur fiti^uliere
de Dieu en recevant par l' Eulop'e jnyftique J. C. en nos mains j afin
que conformément a ce qui nous eft enfeiyiè par ce myflere , nout
croiïons qu'il a reffufcité fon temple , ( ceji à dire , fon humanité )
Car ce que noire Seigneur dit lors qu'il fit parluy-mhne le type de
fon Myfiere ^ montre clairement que la communion de l'Eidoyi
myjliquc eflune confejjîon de la refarrecHon 'de 'J. C.
Qu'eft-ce donc que ce type du Myflere que J. C. fît par luy-
même ? C'eft l'Eulogie myflique , c'eft le Sacrement myfle-
rieux. Etqu'efb-ce que contient ce type? Il contient J^C. c'eft
pourquoy en le recevant dans nos mains , nous y recevons J. C.
en le voyant nous voyons fon Corps, & J. C.nous y apparoift
vifîblementdans fon Corps: il s'y donne à toucher comme aux
Apôtres. Et tout cela confideré félon le bon fens , &: joint avec
tous ces autres lieux de S. Cyrille, fait voir plus clair que !é
jour que le mot de type & de figure ne fignifie point dans ce
lieu une pure figure , mais un fïgne & un Sacrement qui con-
tient réellement la Chair même de J. C.
Quoy que les mots de figure & d'image n'ayant point d'au-
tre fens que celuy de' type, d'antirype& de Sacrement ■•foiêrit
fiiffifamment expliquez par réclaircifîement de ces autres ter-
mes-, fi l'on veut fçavoir néanmoins en quel fens les Pères les
ont appliquez à l'Euchariflie, 6^ s'ils on prétendu parla en ex-
clure fon véritable Corps, on n'a qu'à confu'ter S. Gaudencc
Evêque de BrefTe qui employé ces termes de figure & d'image
dans fon fécond traité fur l'Exode, & qui y joint encore plu-
iîeurs autres dont les Ca'viniftesabufentde même que de ceux-
là. Car il dit que le vin Euchariflique efl: offert en figure de- la
J?affîon : il appelle exprelTément l'Euchariflie/w^gj de la pajfion^
E iij
38 Liv. I. T)es mots de figure , type ^ 6" autres
Cil. IV. en difânc que nous Tommes fandifiez per imaginent propriè Paf-
fionis. Il dit qu'elle eft le legs héréditaire du Nouveau Tejlamenty
que J. C. nous a laijfé la nuit qu'il a efiè livré four eftre crucifié ,
afin qu'il nous fervift de gage de fa prefence, Tanqua?n pignus
fuaprafentia: dereliquit. Il l'appelle les Myfieres de la vie éter-
nelle , a:terna: vit^e myfieria : les Myfleres de la PaJJton de J. C.
le Sacrement du Corps du Seigneur.
Jamais perfonne, non pas même un Miniftre, n'employa tant
de ces forces de termes dans un fi petit difcours , & jamais per-
fonne ne fit mieux voir aufli combien il eftoit éloigné de préten-
dre exclure par ces termes la prefcnce réelle du Corps de J. C.
dans cette image & dans cette figure de la Paffion , dans ce
Myftere , dans ce Sacrement , dans ce gage , dans ce legs tefta-
mentaire. Car c'eft ce même faint Gaudence qui dans ce mê-
me difcours en oppofant l'eftat de grâce à celuy de la loy,
comme un eftat qui contient la vérité , à celuy qui ne conte-
noit que des figures , s'exprime de cette forte. En cet ejîat
de vérité dans lequel nous fommes , un feul efi mort pour tous^
Et le même J. C. nous nourrit efiant immolé dans chaque Egli-
fe particulière au myficre du pain ^ du vin. il nous vivifie
efiant cru : /'/ fantifie efiant confacré , ceux qui le confacrent. C'efi-
la la chair de l'agneau , c'efi fon Sang : car c'efi le pain defcendu
du Ciel qui dit : Le pain que je donneray eft ma Chair pour la
vie du ficelé- Cefi avec rai fan qu'il a voulu que parl'efpece de
lîrencl raifon "vin fon Sangfufi repre fente: car difant comme il fait dans l'E^
du choix de vangile ^ Je fuis la vraye vigne, // nous fait affez^voir que tout
Sicremenc " ^^ '^"^ ^^^ ^'"^ "ïï^''^ i^»/«J l'Eglife en figure de fa Paffion efi fon
Sang Luy donc qui efi Créateur (^ Seigneur de toute la natu-
re^ Q^qui de la terre produit le pain , fait en fuite du pain fon propre
Corps , parce quil le peut é^ l'a promis. Et comme de l'eau, il fait du
vin ( dans l'ordre de la nature ) il fait auffî du vin, fon Sang.
Nous avons fait voir que ce changement qui fc fait félon S.
Gaudence, du pain au Corps de J.C. paruneadion réelle ôc.
par un effet de la toute- puiflànce de Dieu , ne peut fans extra-
vagance eftre rapportée à l'inftitution d'un fîgne, eftantvifible
que ce n'eft pas un difcours raifonnable que de dire que celuy
qui eftant le Créateur de la nature produit le pain de la terre,
fait en fuite du pain la figure de fon Corps , & qu'il le fait
parce qu'il le peut , & qu'il l'a promis : n'y ayant aucun
xapporc encre cette adion cres-rcclle de faire que la terre
ttrez.de la, punie exterîture de tEHcharifiie. 39
produife du pain, ôc cette inftitution du pain pour figne& pour Ch. IV.
figure du Corps qui ne marque aucune puiflance. Outre que
le mot de propre Corps détermine clairement tout cepaffàgcau
Corps véritable de J. C. comme nous l'avons encore montré. P^rpï^ I. .♦<
Et s'il en pouYoit refter quelque doute, ce qui luit dans la même ^' '"*
Homélie eft capable d'en convaincre les plus opiniâtres, pour-
veu qu'ils ne veuillent pas renoncer vifiblemenc au fens com-
mun.
Ne prenei^fas , dit- il, ce Sacrement pour une chofe commune (^ TraA. ». ;»
terre ftre : Mais croyez^quil a efté fait par le feu du faint Efprit ce ^^^^'
qu'on vous dit qu'il cf. Car ce que vous recevez^eft le Corps de ce
Pain celé fie , c'eft le Sang de cette vigne facrêe. Car lors quilpre^
fente à [es T)ifciples le pain ^ le vin confacrè , il leur dit , Cecy eji
mon Corps , Cccy efl mon Sang. Croyons , je vous prie , celuy que
nous avons crii. La vérité eft incapable de menfonge Croyons
tout ce qui nous a efrè enfeigné , (^ de la manière qu'il nous a eftè
enfeignè .^ en nous gardant bien de rompre cet os tres-folide , Cecy
efl: mon Corps , Cecy eft mon Sang. Que s'il refte encore quel-
ques doutes à quelqu'un qui n'aycnt pas efté levez^par cette expli-
cation , qu'il les confume par l'ardeur de la foy.
Il n'y arien dans cepaflage que de decilîl:* pour la foy de la
prefcnce réelle. S. Gaudence infifte fur la vérité de ces paro- Vavez pçrp,
les , Cccy eft tnon Corps , & il fait voir par là qu'il les faut pren- -• ^- i- e. s.
dre à la lettre comme nous l'avons prouve.
Il reprefente le fens de ces paroles comme difficile , êc il s'en-
fuit de là qu'elles ne fe prennent ni en un fens de figure , ni en
un fens d'efficace , comme nous l'avons encore prouvé. Ainfi Pcrp. 1. 1. z^
il détermine clairement tous ces mots de (ïgure & à' image , c. i.
dont il fe fert,&il fait voir qu'ils font très compatibles avec
Ja créance de la prefence réelle &: de la tranffiibftantiation.
Ce n'efl: pas que ces mors enferment d'eux-mêmes cette
doctrine , ni qu'ils la fignifient littéralement & grammatica-
lement j &: c'eft ce que je fupplie M. Claude de bien remarquer.
Car il eft très- vrav que figure comme figure, image comme
image, n'enferment point la vérité j de forte que l'on n'a ja-
mais droit de conclure , c'eft la figure , donc elle contient la
vérité. Tant s'en faut que cette conclufion foit jufte , que lors '
que l'on ne fçait rien d'une chofe, finon qu'elle eft figure d'u-
ne autre, on adroit de conclure qu'elle ne la renferme pas.
C'eft ainll que l'on a conclu que tout ce qui eftoit dans l'ancien
40 Liv. I. "P^i" mots, de figure , type , t^ autres
Çh/IV.') Teftament eftanc fiirure, n'edoicoas la vérité même. Mais ce
raifonnement eltoic fondé fur ce qu'il ne paroifToit par aucune
autre preuve qu'il continfl: la vérité ; &; le titre de figure ne la
,, renfermant pas, on avoit droit de prendre ce^ figures pour des
. figures ext lufives. Ainfi c'efl. très- bien conclure que de dire j
C'eH: la ftatuë du Pape , donc ce n'eft pas le Pape même.
Mais comme ces termes n'enferment nullement par eux-
mêmes la prefence réelle de la cholè figurée, ils ne l'excluënc
auffi nullement. De forre que fi l'on f(,ait par d'autres preu-
ves que ceux qui s'en fervent la croyent, on a droit de con-
clure qu'ils renferment.
On peut taire les mêmes reflexions fur les autres termes dont
le Minières abufent. S'il cfl queftion par exemple du mot de
Symbole ^ on peut voir en quel fens il eft donné à l'Euchariftie
par S. Chryf >n;(une , &: juger par là de fa fignification. Il s en
fertdans l'Homélie 83. fur S. Mathieu,c'eftà dire , dans un des
lieux de toute l'antiquité où la prefence réelle eft le plus forte-
ment établie. Il reconnoît que les chofes qui fe pafTcnt dans
Je Sacrifice font les Symboles de Ja mort de J. C. Si J. C.
dit il , n'ejî point ynort ? dcquoy nos Myftcrcs font-ils Symboles
T/yV'S ffu'/iÇoAtt Tct reAa'/u.em; Mais c'efl le même S. Chryfoftome
qui avoit dit auparavant à fon peuple:
Croyons Dieu en tontes chofes ^ (^ne le contrcdifons point ^ encore
que ce qu'il nous dit femble contraire à nos penfèes (^ à nos yeux.
Bt que l' autorité de [a parole fait plus forte fur nous que nos yeux
^. nas penfèes. Pratiquons cela dans nos Myfieres : ne regardons pas
feulement les chofes offertes , fiiais attachons-nous a fa pttrole : car
fa parole ne nous peut tromper ^au lieu qtci nos fcns s' abufent facile-
ment. Puis donc que fa parole nous dit .^ Cecy efi: mun Corps,
foyons-en perfuades.^.^ croyons -le , voyons le avec les yeux de la foy.
. C'çfl le même qui leur avoir dit : Combien y en a-t il qui di'fcnt^
fe yoiid,rQis bien voir fyi vifgc, fa foiTne .^ fes. habits. r^Vous le
Vûyg%^luy-mè-ms , vous le touchez^, vous le mangez^ ■ • .
C'cll le même qui leur avoit dit : J.C. ne s' e fi pas contenté
de. fc faire homme , d'eflre foiietté , d'cjîre crueifiè pour nous ; mais
il Ce mêle luy même en nous , ^ // nous rend fon propre Curps , non
feulement par la foy , mais en effet ^ rèelie rient.
Enfin c'eftice même S. Chryfoflome q,ui donne dans tousfês
ouvrages tant de preuves éclatantes de la foy fur la prefence
réelle, que l'on peut dire avec vérité qu'il n'y a point d'Au.
teur
tirei, de lu punie extérieure de tEucharifiie. 41
teur Catholique des derniers temps où elle foie plus fortement Ch, IV.
exprimée , bc par un C\ grand nombre de palTages , nous avons
d'autant plus dedroitde le dire , qu'une grande partie de ces
palTages a eflé alléguée dans le fécond VolumCjôcmile à couvert
àts vaines diftinctions des Miniflres.
Ain fi il faudroit eftre bien déraifonnable pour ne pas avouer
_que le mot de Symbole ne peut fignifîer dans les Ouvrages d'un
Auteur qui s'explique fi clairement fur la prefenceréellej qu'un
Symbole joint à la chofe fignifiée.
hQs Pères que nous venons d'alléguer ne fuffifent que trop
pour nous alTurer du fens de ces termes. Car eftant pa'ï leur na-
ture fufceptibles de ces différentes déterminations que nous
avons marquées, &: ayant eftc déterminez à fignifier non de pu-
res figures &: de purs fignes, mais des figures éc des fignes de J.
C. prefent , par l'ufage de tous les Auteurs qui ont écrit depuis
mille ans, on ne fçaur'oit prétendre que les Pères les ayent pris
en un autre fens à moins que d'en avoir des preuves demonflra-
tives.Il eft fi naturel qu'un même terme fignifie toujours la mê-
me idée : Il efb fi difficile que des mots changent de fens par tou-
te la terre : Il efl fi peu probable que ceux qui ont eflé les difci-
ples des Pères fe foient tous trompez dans l'intelligence de leurs
termes , qu'il n'en faut pas davantage pour former une demonf-
tration morale que cela n'eft point arrivé. Que doit - on donc
dire en voyant de plus que les principaux d'entre les Pères les
ont pris certainement dans le même fens? Et qui aura-il de cer-
tain au monde fi cela ne l'efl ?
Quand aucun des autres Pères ne fe feroit expliqué fur cqs ter-
mes , un homme tant foit peu raifonnable n'en feroit pas le
moins du monde ébranlé. Cependant il efb arrivé par un effet
de la Providence qu'ils font connoître afïez clairement leur
fêns dans la plufpart des lieux oii ils en ufent.
Si S. Denis appelle ce qu'il y a d'extérieur dans l'Eucharifliie De Eccief
des ifnages (jS des Symboles ^ il dit (\\.\Q par ces vcneniblcs Symboles Hier. c. 4. c.
7. C. efi fimifiè é" participe Aq. même que Vidor d'Ancioche dit v
que par le Symbole du pain nous jotnmes faits tous participatif du 1. l.j. c, 4. p.
Corps dej. C. i^ de fon Sangpar le Symbole du vin. Or nous avons ^^°-
fait voir que ces termes s'entendent d'une participation réelle,
qui fuppofe une véritable prefence.
Si cet Auteur reconnoît dans i'Euchariflie des voiles énisima-
tiques,il reconnoît auffi qu'ils couvrent une chofe divine, à qui
F
J.8.C.U.
"ult "L I V. h T>^s mots de figure , type , g^ autres
Ch. IV. il adrefle ces paroles qui ne conviennent qu'à J. C. 0 fainté'
divin Sacrifice : ofiez^ ces voiles d' énigmes (jr de fj/mboles qui vous
environnent , (jr- vom niontrexj:laircmcnt à nous en éclairant les yeux
de nofire cjf rit par une lumicre vive & éclatante.
Si l'Auteur des Conftitutions Apolloiiques ufe quelquefois
1. 5 . c. -,. 1 < des termes de Myfiere , à' antitype du précieux Corps de /. C. d'Eu-
c. 1^. jbid. c. charifiie antitype , àQ fymbole ^ il fait voir clairement ce qu'il en-
tend par ces termes lors qu'il rapporte cette prière célèbre de la
Litur2;ie: Envoyez^ôtre faint Efprit fur ce facrifice , afin qu'il fa f~
fie ce pain le Corps de votre Chrifi.^ (jr- ce calice le Sang de votre Chrifi,
perp. 1. 1. <r. Car on a montré ailleurs que cette prière contient une preu-
*^' '• vë convainquante de la preîence réelle&: de la tranfTubftantia-
tion 5 &: qu'on ne fçauroit dire avec la moindre apparence que
l'on y demande à Dieu , ni qu'il rende le pain'figure de J. C, ce
qui n'a point befoin de l'opération du S. Efprit i ni qu'il le rem^
plifTe d'efficace, ce qui ne s'exprima jamais en ces termes ^ auf-
quels néanmoins toutes les nations du monde fe font portées
d'un commun corifentement.
Et lorfque prefcrivant la manière dont il faut s'approcher de
rEuchariftiCjil dit que chaque ordre prenne chacun a part le Corps
du Seigneur ^ le précieux Sang.^ en s'en approchant avec crainte S*
révérence , comme du Corps du Roy. Car c'eft en vain qu'Aubertin
prétend éluder ce paflàge par fon explication chimérique de
Corps typique &: de Corps fymbolique ; puis qu'outre que cet-
te diftindtion eft entièrement vaine , & qu'elle a déjà efté dé-
truite par une infinité de preuves dans le fécond Volume j il efl:
vifible de plus qu'elle efl: mal appliquée à ce lieu- là. Car on ne
dirajamais d'une image dej. C. qu'il s'en faut approcher com-
me du Corps de J. C 6c fi l'on le difoit , chacun entendroit par
là que l'on voudroit faire rendre à cette image le même refped
qu'on rend à J. C. même. Ce qui ne fe pourroit dire fans im-
pieté de l'Euchariftie, d elle ne contenoit réellement J. C.
Enfin il marque clairement ce qu'il entend foit en ce qu'il ufe
fou vent des mots de Corps de J. C. en difanz que nous participons
au Corps de J. C. que nous le prenons 5 de même que les Catholi-
ques après s'eflre fcrvis des mots de Sacrement .^d'efiece Se de
rymbole , employent fouvent auffi ceux de Corps ôc de Sang de J.
C. par la pente qui vient de leur dodlrinc, qui les porte à me-
Conflit 1 S. ^^^ ^^^ fortes d'expreffions j foit en ce qu'il dit que ceuxquicom-
e, 13. munioient confirmaient parY Amen ces mots de Corps de J. C. que
tire'zjie la, partie extérieure de ÏEuchafiJiie, 4.3
lePrellre leurdifoit en Jeurprefentanc la communion. Car .cette Ch. IV.
confeflîon jointe à ce que le Preftre difoic en donnant l'Eucha-
riftie^tormoit cette propofition entière ; c'eji le vmy Corps de J-
C. Et cette propolition contient un aveu folemnci de la doc-
trine delà prerenceréelle,eflant deftinée pour étoufFerôc pour
delâvoûer non ces doutes chimériques ^fl'Euchariftie cfifigtire,
ou fi elle a quelque vertu 5 mais le doute naturel que la difficulté y^''^'" P^''?-
du Myftcre produit d'elle-même ^ à fçavoir que le panifoitef- s. & "y. " ^
ficacement changé au Corps même de J. C
\^&s autres Pères quife fervent de ces termes en font de mê-
me. Eufebe appelle à la vérité r£ucharift:ie/^W(?;H^//^?/du Corps '^ i- ^e prcp-
êc du Sang dujSeigneuT : mais il témoigne au même endroit que "''^"S- '^- '^
c'efb un mémorial qui contient la vérité même, au lieu que les
anciens Sacremens ne contenoicnt que des images toutes pures,
Il \'a.ppeUe/ymi>ole (jj- image du propre Corps de J. C. auffi bien Demonft.
que Procope de Gaze , c'eft à dire , Sacrement du propre Corps p^"^"»- ^- *•
de J. C. Mais l'un 6c l'autre témoigne au même heu , que c'eft iii°Gtnèf.
dans i'Euchariftie que s'accomplit cette prophétie célèbre de
David J I^ous navez^pûint voulu de facrifice (j;- d' ablation , mais
vous m'avez^ formé un Corps. C'eft à dire que l'on offre dans
l'Euchariitie l'unique Corps de J. C. au lieu de tous les facri-
fîces de l'ancienne Loy. Et Eufebe enfeigne de plus qu'on l'of-
fre en facrifice propitiatoire, en difant exprelîement dans la
vie de Conftantin.qu'à la dédicace de l'Eslife de Terufalem une ^ ,
■ J r: ^ n. • ^ ■ ^ J -rT- DevitaConr.
partie des hveques eltoient occcupez a rendre Dieu propice par tan.i.4.c,4f.
des facrifices non fanglans.
Gelafede Cyzique fe fert du motde/y;HW(fj',mais il témoi-
gne en même temps que ces fymboles font le Corps véritable i" diatyp.
de J. C. // ne faut pas ^ dit-il, dans cette table divine eftre baffement
attentifs au pain Q- au calice qui font propofez^. mais en élevant no-
tre efprit il faut contemplerpar la foy l' Agneau de Dieu qui o(ic les
péchez^., gifantjur cette table , ^ immolé fans efufion de fing : e^-
prcnantvcritablcment fon précieux Corps ^ fon Sang , il faut croire
que ce font les fymboles de la refurreclion. Eft- ce le Corps dj^J. C.
dans le Ciel qui eft le fymbole de la refurreclion ? Ce feroit une
penféefî ridicule, que M Claude n'oferoit ledirCj outre que ce
Corps de J. C. dans le Ciel n'eft pas pris, &: que le mot de
A«t;HjSctigV , dont cet Auteur fe fert, ne s'applique pas à un ob-
jet de i'efprit. Eft-ce une figure de J. C. Mais le mot de vere
F ij
44 ^^v. I. Des mots de figure ^ type ^ autres
Ch. I V. qui y eft joint j exclut le fens de figure, puis qu'il n'eft employé
que pour prévenir un doute, Se que jamais perfonnene douta
vojez perp. que le pam pût eftre la figure de J. C.
1. .4.C.4.C. . Je lie croy pas eftre obligé de refutericy le fens qu'Aubertin
donne au mot de verè ^ dans le paffage de Gelafe, en préten-
dant que cet Auteur l'a pris pour dévotement ^ fincerement. Car
commeil n'a pûauthoriferce prétendu fens par aucun paifage,
où le mot de vcrè foit employé en ce fens , & qu'il eft contraire
à l'ufage & à l'impre/îion commune , il ne peut que fervir d'e-
xemple de la hardieflè de ceMiniftre à fe joiier des paflàges des
Pcres qui détruifent fon erreur.
Tradi- de na- L'Euchariftie eft une figure félon S. Ephrem , qui dit que J. C.
turâ Dci non bénit Ic pain en figure de fon Corps ^ le Calice en figure de fon Sang.
cunosc fcrut. y[^\^ qu'eft-cc qu'enferme cette figure, félon ce même Saint? Il
le déclare dans la fuite de ce traité par ces ^zroïei: participez^
au Corps immaculé (3^ au Sang du Seigneur avec une foy très. pleine^
vous tenant affurè que vous mangez^ l' Agrieau même tout entier.
1 I 4 c. Cette foy très, pleine qu'il exige pour bannir le doute qui peut
1. 63. '■ s'élever fur ce Myftere: cette remarque qu'il fait que le Corps
pcrp. 1.1,7. c. de J. C. cft entier dans l'Euchariftie , excluent manifeftement
i^"c!^9'Vï4^. '^ àQ figure de de vertu ^ qui ne produifant point ces fortes
de doutes , ne portent jamais les Pères à fe fervir de ces termes
pour les prévenir.
C'efl le Myftere du Corps & du Sang, félon S. Jérôme. Le
Kz "h'" ^^' ^^igncur^ dit-il, fit la Pafque du Genre humain dans le Cénacle^
^ dans un large ^ (pacicux Cénacle , furiflé de toute fouUleure ,
orné ^ préparé pour le banquet fpirituel , où il donna àfcs Difciples
le Myficre de fon Corps (j^ de fon Sang , & nous laiffa la fefte éter-
nelle de l' Agneau immaculé. Maisfi quelqu'un pouvoit douter fur
ces paroles de la foy de ce Père , il ne faudroit que le renvoyer
à fa lettre à Hebidie, où il pouffe plus loin cette reflexion fur
le Cénacle. Ecoutons^ dit- il, avec docilité ce qui efl dit ^ que le
pain que le Seigneur rompit ^ qu'il donna à. fcs Difciples , ej} le
Corps de notre Sauveur.^ luy -même leur ayant dit ., Cecy eft mon
Coi^s Si donc le pain qui eft défendu du Ciel eft le Corps
du Seigneur , ^ le vin qu'il donne à fes Difciples eft (on Sang , le
Sang du nouveau Tcftament verfépour pluficurs , méprifons les fa-
bles Judaïques , ^ montons avec le Seiqrieur dans ce grand Cénacle
préparé é^ nettoyé pour recevoir Àans ce lieu élevé le Calice du nou-
veau Tcftament.
tirez, de h punie extérieure de tEucharifiie, 45
Theodorec appelle le pain & le vin après la confecration les Ch. IV.
fymboles myftiques. Mais en recevant ces fymboles on reçoit Diaiog.».
le Corps 6c le Sang de Chrift , félon cet Auteur. Crois- tu , dit
l'Eranifte, recevoir le Corps é" Is Sang de Chrift i Ouy ,jele croy ,
répond l'Orthodoxe. On croit , dit il encore , que ces fymboles
font ce quils ont cfté faits , ( c'eft à dire Corps de J. Q. )& on les
croit ^ les adore comme eftans ce qu'ils font crûs.
L'Euchariflie eft un Sacrement Talutaire , félon le même Au- .^, , , ,
ri T r ■ • 1 o |j I Theoo.oret. In
teur. Mais ce Sacrement lalutaireelt 1 ongmal ce 1 archétype Epiii. ad co-
des figures de l'ancien Teftament & le Corps J. C. L'^pbtrc , nnûi.
dit-il , les fait reffouvenir de cette trés-fainte nuit., dans laquelle le
Seigneur mit fin à la Pafque typique , ^ montra l'original de cette
figure : // ouvrit la porte du Sacrementt falutaire , ^ donna fon pré-
cieux Corps & fon précieux Sang , non feulement aux onx^ Afotrcs^
mais aujjî à celuy qui le trahijfoit.
C'eft le Sacrement du Corps de J. C félon S. Ifidore, qui en- iaExod.c.15.
feigne que ce que Moife dit qu'il eft oit défendu aux étrangers
de manger l' Agneau Pafcal , éî' qn-'il dcvoit cfire mangé dans une
même mai fon ^ ^ qu'on ne devoit point porter de fa chair de-
hors ^ s'entend proprement du s-tcrernent du Corps de J. C, Mais la
fuite fait bien voir ce qu'il renferme fous ces mots de Sacrement
du Corps de J. C. il nozis eft commandé , dit- il , de manger ce orps
^ ce Sang dans une même maifon , c'eft à dire , dans la même JEgli-
fe., C^ denc le point porter dehors , c'eft a dire , parmi les Hérétiques
qui fe font retirez^de l'unité de l'Eglife Catholique. Il efb bien vi-
fible que par les mots de sacrement du Corps du Seigneur ., il
n'entend pas un fîmpleSacrement & une fimple figure du Corps,
puis qu'il ajoute que ce Corps eft mangé dans l'Eglife, & qu'il
prend fans doute le mot de Corps au même fens lors qu'il dit
qu'il eft mangé , que dans ccittex\<rcÇ[\oï\ .^Sacrement du corps du
Seigneur. Or quand on parle du Sacrement du Corps du Seigneur.^
le mot de Corps eft pris proprement , & par confequent ce me-
me mot répété une ligne après doit aufTi eftre pris pour le vé-
ritable Corps du Seigneur, 6c non pour une figure de ce Corps.
Quod ait de agni illius efu : Omni s alienigena non manducahit ex eo.
In unk domo comedetis , nec efferetis de carnibus ejus foras : Hoc
de corporis Chrift i Sacramento , cujus agntis ille figuram obtinuit,
fropriè tenetur fcriptum. Cujus Corpus d^ Sanguis in una domo j id
cfiin una Le de fia vefci praciptur , nec efferri foras in plebibus fci-
lie et Hareticorum.
F iij
46 L IV. I. Des mors défigure , types ^ Autres
Ch. I V. Qiii s'éconnera après cela que quelques Pères fe loient fervis
en quelques endroits de cç.s mêmes termes fans les expliquer ?
Les Catholiques prennenc-ils la peine de s'expliquer toutes les
fois qu'ils appellent l'Eucharillie'/ri/;;/- Sacrement, ow fymbole ,
ou efpcce , ou hofiie ? N'eft-ce pas au contraire un effet necefîài-
re que l'ufage rende ces fortes d'explications inutiles , parce
qu'il imprime deluy-mcme dans l'elprit les mêmes idées que
l'on imprimeroit par une explication cnnuyeufe?
c- 5^. QS'^ M- Claude ne nous dife donc plus que S. Jérôme dans
Ton Commentaire fur Jeremie , dit que ceBle vin dont on ace om.
In piai. 5, -plitlc de type fon Sjng. Qi.ie S. Auguftin 2v Bede après 1 uy difent
que J. C. tèmoigncî une fatience admirable quand il admit Judas-
au banquet où il donna à fes Difciples la figure de fon Corps ^ de
nir.côiur. f"^ Sang. Qii'il ne nous dife pIus qu'Euftathe , S. Bafile & S.
Ncrt, & Eu- Grégoire de Nazianze fe fervent du mot à'antitype. Que Ge-
lafe dit que l'on célèbre dans le Myflcre la reffemblance du Corps de
Macar Hom ?• ^- Qh'^^ "^ faflepoint Valoir ce que dit S. Macaire, f«V/ rCef-
17. toit point encore venu dans l'efprit des Patriarches qu'on deufi offrir
dans l'Eglife le pain ^le vin antitype de la chair ii^- du Sav.g de I.
C. &C qu'il reconnoiffe que ces fortes d'objections font entière-
ment vaines & inutiles. Car pourquoynefeleroient-ils pasfer.
vis de ces termes ? La nature du Myftere de i'Euchariftie, tel-
le que les Catholiques la conçoivent , les y portoit. L'ufâge les
autorifoit. Ces termes n'eftoienr point devenus odieux par au-
cune herefie qui en euftabufé. La foy de l'Eglife fur ce Myf-
tere efloit marquée par une infinité d'expreffions qui determi-
noient le fens de celles-là. Iljeftoit donc impofTible qu'ils ne
s'en fêrvîfTent, &: l'on doit plutoft admirer comment ils s'en
font fervis fi rarement, qu'il y a peu de ces pafi[ages qui ne foienc
joints à quelque explication qui fait clairement voir leur fenti-
ment. Il faudroit avoir cette équité dans les difputes de ne
remplir pas les livres de ces vains argumens , qui marquent un
delfein d'éblouir les fimples par ces amas trompeurs de paflà-
ges , où il n'y a ni folidité ni apparence dans le fond. Mais fur
coutil faudroit éviter certaines fuppofitions captieufes ou en-
tièrement faufies, comme celles que fait M. Claudeen avan-
çant généralement, que quoy qu il ne foit pas tout a. fait hors d' ap..
farenceque des ç^ens qui croycntla tranffubfiantiation ufent quelque-
fois de termes de fî<znc , d'image C^- de figure ^ c'efi néanmoins rare-
ment lors que la di [pute les y contraint .^(j;' que la fuite du raifonne.
tirû'^de la partie extérieure de t Euclmifiîc , 47
ment les y conduit- Car il eft bien vra^r qu'il y a quelques - uns Ch, I V»
de ces tv'rmes qui lonc devenus odieux par Je mauvais ufage
que les Sacramentaircs en ont fait: : mais il eft: certain que le
fens de ces termes en (oy eft fi neceifaire à l'explication du Aly-
ft:ere, qu'au même temps qu'on en évite quelques-uns, parla
railbn que nous venons de marquer , on en conlerve d'autres
qui ont le même fens.
Que l'on demande à tous les Théologiens ce que fignifie le
mot de Sacrement, ils répondront tous avec S. Auguftm qu'il ne
fîgnifîe rien autre chofe qu'un figne facré , & fouvent même ils
prennent ce terme dans cette lignification precifeôc gramma-
ticale qui n'enferme rien que d'eftre figne d'une choie facrée.
C'eftainfi que le Cardhial Pullus parlant des figures ancien-
nés de l'Euchariftie qui avoientefté dans la loy écrite, \qs ap- c."i"
pelle les s^cremcns du Cors (^ du Sang du Seiqv.eur. Les Sacrcmcns ,
dit il , du Corps (^ du Sani^ du Seigneur ont précédé dans l'ancien
peuple , ^ ont fait le même effet que les nôtres , dans ceux qui croyent^
non que la figure ait la force de la chofe même 5 mais parce que Dieu y
qui peut tout ^ a voulu donner par l'ombre ^ ce qu'il nous donne pre-
fentement par la ueritè.
Cependant quand ce même terme eft appliqué à l'Euchariftie,
aucun Catholique ne fait difficulté de s'en fervir, & n'a befoin
d'y eftre conduit par la difpute & par la fuite du raifonnementj
parce que l'on y joint auffitoft: l'idée entière duMyftere.
L'Eglife ne difpute ni ne raifonne quand elle chante à l'hon-
neur de ce Myflere , Tantum ergo facramentum veneremur ccrnui.
Hugues de S. Vidor ne difputoit point lors qu'il dit , que le De fyçchiï-
Preflre après des figne s de croix élevé avec l'une (j;- l'autre main le '^"'^ Mi'I-j^ ob-
Sacrement du Corps ^ du Sang dej. C. (j^^ le ?net en fui te fu l'Au-
tel pour fignifer l'élévation du Corps de J. C. fur la Croix.
Saint Edmond Archevêque de Cantorbie ne difputoit point Tom. bi-
lors qu'il appelle tellement l'Euchariftie unSacrement dans une biior.
inftrudion envoyée aux Moines de Pontigny , qu'il ne la décrit
du tout que parfes efFetSjfans faire mention de ce qu'elle enfer-
me, parce qu'il fuppofoit que ces Religieux le fçavoienc. afîèz.
Ze quatrième Sacrement ^ dit-il, f/?/f Sacrement de L'Autel qui
confirme ^ fortifie le pénitent , l'aide à éviter le péché , le réconcilie,
le foûtient. Car dans la dernière Cène que J. C. fit avec fes Dif-
ciples bien-aimex^, il établi} ce Sacrement en mémoire de fia Pafi-
fion.
48 Liv. I. Des mots de figure , type ^ & autres
Ch. I V. Qi^e ne diroic point M. Claude,s'il avoir trouvé ce paflàge dans
quelque ancien Auteur, & combien feroit-il valoir que dans
un difcours qui a pour but d'inftruire des Religieux de ce Myf-
tere , on ne leur en apprenne autre chofe , fmon que c'eft un
Sacrement, c'eft à dire un figne facrc quiefl: établi en mémoire
de la Paffion , Se qu'il a plufieurs effets fpirituels? Mais les hom-
mes ne parlent point du tout félon Tes fantaifies. Ils ne s'atta-
chent point fervilement à la fignifîcation grammaticale des
mots. Ils y joignent les idées qu'ils tirent de la dodrine de TE-
glife de leur temps • Se comme ils fuppofent que tous les autres
en font de même , i]s(edifpenfent de la peine de les exprimer.
C'efb ainfi que S. Anfelme ne s'en eft pas mis en peine , lors
Math. c. 20. «l^iil nous dit que J. C ayant rait la lolemnite de la Pafque an-
cienne, paffa à la nouvelle, qu'il voulut que fon Eglife célébrât
en mémoire delà rédemption qu'il leur avoit procurée,&: qu'-
au lieu de la chair & du fang de l'agneau ,il inftituale Sacrc-
„., ,. ment de fon Corps &c de fon San^.
p. nsij. il n y a pomt non plus d ancien Théologien qui rafle difnculte
de fe iervir du mot à'obUta & devant & après la confecration ,
de dire qu'on la rompt, qu'on la recjoit, qu'elle fîgnifie J. C. Sc
cela fans s'expliquer davantage, fi ce n'eft par rencontre-
ObUta^ dit l'Auteur d'un livre intitulé, GEMMA ANIMjE^
non intégra fumitur , fed in tria dividitur: nnum in caliccm mitti~
tur , aliud ci faccrdotc confumitur^ tertium in pixidem nioriîur ad via~
ticum reponitur, quia Corpus Domini efi priforme. Pars in calicem
mijfa , cfl Corpus Domini jamaffumptum in iloria j pars comefla ,eji
Corpus Chrifii , id efi Ecdcfia. Qu'eft ce que cette oblation qui
fe divife &:que l'on compare avec le Corps de J. C. oc avec l'E-
glife, comme fîgnifïant l'un &: l'autre? C'efl le Sacrement ex-
f. ,j, terieur qui cache le Corps de J. C. Cet Auteur le croyoittres-
réellement prefent , comme il paroît par ces paroles , De même
que par la parole du Seigneurie monde a efiè créé de rien ^ainjî par
la même parole du Seigneur^ ces efpeces de chofe s font changées véri-
tablement au Corps gS au Sang du Seigneur. Mais c'efl cette créan-
ce même qu'il avoit &: qu'il fçavoit que tous les autres avoient
qui l'empêche de s'expliquer plus preciiément.
In ExpoCt On ufe avec la même liberté du mot d'/^i?//^. On appelle
MiiKe. hoftiece que l'on offre même avant la confecration. Lhofiie ^
dit S. Bonaventure , efi mife proche du Calice , parce que J. C. efi
immolé pour l' Eglife,
CHAP.
tirc^de h partie extérieure de ÏEuchciriflie, 49
Cii.
CHAPITRE V.
Qu! la -preuve que JVf. CUude tirée des occajîons où les Pcres
Ce font fervis des mots d' antitype d^ d'image , e/^ entièrement
vaine. Sophifmes d'Auhertin qui font éclairas par la même
remarque.
CE que nous avons dit clans les Chapitres precedens , de la
manière dont l'efprit fupplée à l'imperfcclion de certains
termes , en ne demeurant pas dans l'idée precife qu'ils excitent,
mais en y joignant toutes celles que la foy a de coutume d'y
joindre , fait voir combien il y a peu de foliditë dans la cinquiè-
me des preuves que M. Claude propofe contre la doctrine de
l'Egiife j quoy qu'il la pouffe avec fa véhémence ordinaire , &:
qu'il en paroilfe fort Satisfait.
„ J'ajoûteray , dit- il , pour une cinquième preuve , qu'il y a
j, certaines occafions fortes oii il n'efl pas concevable, que fi les
„ SS. Pères euffent eu la croyance de la Tranifubftantiation, ils
„ n'euiTent die réalité .^ au lieu de dire figure ^fignc : ôc nean-
„ moins ils onx. à'xx. figure ^ figne ^-sm lieu de dire/'^<;^//Vf. En voicy
„ quelques exemples L'Auteur des Conftitutions Apoftoli-
„ ques nous donne un formulaire d'aclion de grâces pour la
j, communion où il nous fait dire : O notre Père , nous te rendons
,, grâces pour le Sangprecieux de J. C. quia eflé répandu pour nous j
„ Ô" po^-r [on précieux Corps dont nous célébrons ces figures , luy-
,, même nous ayant comm.nidè d'annoncer fa mort. En bonne foy
„ eftoit-ce le lieu de à\rQ figure ^ s'il euft crû. realité 'i Qui ne
,jfçait que dans l'ardeur de la dévotion, l'ame d'un commu-
„ niant qui croit la réalité ^ n'a garde de quitter fon principal
„ objet, la perfonne même &; la fubftance de fon Sauveur
„ pour s'amufer à des figures ? Saint Grégoire de Nazianze
, raconte la euérifon miraculeufe de Gor2:onie fa fœur, 6cla
» ■ • I
„ rapporte au S. Sacrement en ces termes: T^erfant ., dit il , un
,„ torrent de pleurs , kl' exemple de celle qui arrofa defes larmes les
^..^ pieds de'}. C. elle déclara qu'elle ne bougeroit de la qu'elle n'eufi
,, obtenu la fanté. Ses pleurs jurent le parfum qu'ellcyrépandit fur
,j tout fon Corps. Bile les mêla avec les antitypes , ou les figures du
g, Corps ^ du Sang de J. C. autant que fa main en avoitpù refer-
G
jo Liv. I. 'Des mots défigure , tjj?c (§/- autres
Ch, I V. j, ver. Et incontinent ., b miracle ! elle fc feniit yierie & fe retirât.
„ Si S.Gregoirecroyoit qu'il y avoir deux chofesau Sacrement,
j, la figure & la realicé, n'cffcoic-ce pas la dernière de toutes les
,, impertinences de rapporter ce miracle à la figure ^ fans rien
5, dire de la realité ? Je fuis perfuadc que l'auteur n'en uferoit
„ pas de la forte. Il n'auroit garde d'appeller dans cette oc-
„ cafion le S. Sacrement /f-^ar^. Il ne manqueroit pas de rap-
,, porter ce miracle au Corps même, & d'en tirer une preuve
„ de fa prefence.
„ Cependant vous voyez de quelle manière faint Grégoire
„ en ufe. Je trouve dans les œuvres de ce même Père une
j, Oraifon fort éloquente & qui facistait bien à la neccf-
,j fitc de fon fujet. Car il s'agifToit de fauver la ville de Na.
„ zianze que le Préfet de l'Empereur menaçoit de (accagemenc
^, &: de ruine. Ce bon Prélat qui en eftoit Evêque Coadjuteur
j, de Grégoire fon père, follicitele Prefetàufcrde mifcricorde
„ avec une véhémence incomparable. Il le prie. Il le conjure..
„ Il lui met devant les yeux tout ce qu'il y a de touchant dans
„ la Religion : & entre autres chofes , il luy parle du S. Sacre-
„ ment. 'Je mets , dit.il, devant ijos yeux cette table où nous com-
,, munions enfcmhle , (y- les figures de mon fa lut , que je confacie de
j, cette même bouche , dont je vous offre ma requeftc. Ce Sacrement ,
„ dis-je ^ qui nous élevé au Ciel. Sans mentir Ci le Sacrement eft
„ le Corps même de J. C. en fubflance , on ne vit jamais une
„ expreffion ni plus lâche ni plus froide, ni qui reponde moins
jj au zèle & au deflein de Grégoire. QLielle apparence y a-t-il
„ qu'il euft parlé de la forte, fi dcflors on euft crû ce que l'Eglife
„ Romaine croit aujourd'huy ? Mais pliitofb n'eût il pas dit .-
,, Je mets devant vos yeux cette table où nous communions
„ enfemble, 6cle Corps même de mon Sauveur que je fais de
,, cette même bouche dont je vous prie ? Mais au lieu de cela ,
„ il ne luy parle que àc s figures de fon falut.
Aubertin propofe le même argument & avec la même for-
ce en divers endroits, 6c entr'autres fur ce même pafiagc de
"iaint Clément. Le Cardinal du Perron , dit-il, ne f rend pas garde
quil rend par là ridicule le di (cours de cet Auteur 5 je dis quil
le rend ridicule. Car fi fa penfce avoit efiè que J. C. eufi donné à
fies Difciples fon Corps d^ fion Sang couverts des accidens du pain
^ du vin, il n\turoit jamais dit qu'il leur donna les antitypes d^
les fiymboles di fion Qor^s é' de fion Sang: Car ne fie rendroit-on
tirez.de partie extérieure de tEnchurifiie. ^i
pas ridicule ji pour (îyiifier qu'un époux a donne fon corps à ion
éponfe , on difoit qu'il luy a donné fon habit , fipire de fon corps \
Ou (i pour marquer qu'un Roy auroit donné à quelqu'un une
bourfe de centpifioles , on difoit qu'il luy a donné une bourfe jjzure de
cent pifioles ?
Mais toutes cq^ déclamations s'cvanouiflent d'elles-mêmes
quand on a compris le prmcipe que nous avons étably. Elles
auroient quelque lieu fi l'eTprit demeuroit dans la fignification
grammaticale des mots de Sacrement^ de figure ^ à' antitype ,
d'image: mais il n'y demeure pas. La foy qui unit dans refpric
des fidelles cette idée de figure avec celle de |. C. réellement
prefcntj ne leur permet pas de les feparer. Car lorfquecesex-
preffions excitent l'idée qu'elles marquent prccifcmcnt , toutes
les autres qui y font jointes fe prefentent en même temps à l'ef-
prit. On conçoit donc par le mot de S.Sacrement,non un fimple
Jîgne , mais tout ce qu'enfisrme le Myfiere de l'Eucliarifi:ie j
c'eilr à dire le Corps de ]. C. couvert d'un voile qui le cache.
Ainfi comme l'effet des expreO'ions fc doit juger non par la
fignification precife des termes, mais par l'nnprelfion qu'elles
font fiir l'efprit; il n'cftpas eftrangeque des Auteurs Catholi-
ques le iervent mdifferemmenc de celles qui font par elles-mê-
mes dëfeclueufes, &c de celles qui ne le font pas , lors que les
unes & les autres propofent à l'efprit le même objet , qu'elles y
font la même imprellîon , 6c qu'elles font par confequent égale-
ment capables de toucher le cœur.
C'eft ce que M. Claude n'auroit pas manqué de reconnoître
s'il luy eut plu de faire reflexion fur le langage dont l'Eglife Ro-
nnain^; feferc dans les occafions où elle a plus d'intention d'ex-
citer la dévotion Scia révérence defesenfans pour ceMvilrere.
Car il auroit veu qu'elle employé fort fouvent ces mêmes ter-
mes qui n'en fignifient d'eux-mêmes qu'unepartie, Se qu'elle
les croit auifi propres que les autres pour nous porter à l'amour
& à l'adoration de |. C. comme prefent dans l'Eucharifiie.
Cela paroifl; par l'ofiîce qu'elle a compolé à l'honneur de ce
Myftere. Car dansl'Oraifon qu'elle répète à toutes les heures
de cet Office , elle n'appelle l'Euchanftie que des noms de Sa-
crement merveilleux & de Myftere du Corps (^ du Sang du Sei-
Ch. I V.
ineur.
Elle témoigne une révérence particulière à ces vers d'une
Hymne qu'elle chante en cet Office, Tantitmergo Sacramentum
G ij
ji Liv. I. Des mots de figure , type ^ autres
Cil. V. vcncrcmur cernui ^ & les choific d'ordinaire quand on ne la rc-
cire pas coûte entière. Cependant fi l'on s'arrefte à la lettré, l'Eu-
chariftie n'y eft appellée que du nom de gnind Sacrement , c'cd
à dire de grand figne. Elle va même plus loin: car parmy les
Antiennes, qui font des Verfets qu'elle choilît pour s'y appli-
quer en particulier, on en trouve plufieurs où l'Euchariftieen:
marquée par les mots de bled , de froment & de vin. AfruHu
frunicnti (y- vini multiplie ati fidèles ^ in pace Chrifti requicfcmit.
Ze pain de J. C. eft délicieux, dit- elle dans un autre , C^ il comble-
ra les Roy s de délices.
Les fiiints Prcftres , dit- elle encore , offrent de l'encens é" des
pains au Sciç^icur.
Il les a nourris de la fleur du froment ^ & les a rafiafiez^âu miel
de la pierre.
Si les déclamations de M. Claude eftoient fuftes, elles au-
roient autant de lieu contre ces endroits de l'Office de l'Eglife,
que contre les Pères qu'il accufe. Et il en pourroit conclure de
même qu'il n'eft point croyable qu'elle les prenne au (ens de la
prefence réelle. Mais comme il eft certain néanmoins qu'elle
les y prend , il doit apprendre de là qu'il ne juge pas bien de la
lignification de ces termes ,& que pour en trouver le véritable
lèns, il faut joindre à leurfignification grammaticale & litté-
rale, celle qu'ils tirent de la créance àz ceux qui s'en fervent.
De forte que pour prouver que les Pcres ne les ont pas pri's aa
même fens c)ue les Catholiques ^ il taudroit qu'il eull prouvé
qu'ils n'on pas eu la même créance qu'eux.
On doit conclure du même principe, quec'efb très mal juger
de la fignification des termes dans une matière particulière que
de s'arrefter à la fignification générale que ces termes peuvent
avoir dans les autres matières 5 parce que les opinions que l'ef-
prita furunfujet particulier, peuvent changer Se déterminer
cette fignification générale-
Ainfi il efb certain que quand les Théologiens latins fe fer-
vent des mots de confacrer & deconfecration dans toute autre
matière que celle de l'Euchariftie , & quand les Grecs fe fer-
vent de ceuxd'ct'>jaT«ii' & d'c(.'y;A(7;Uo4 ils n'entendentque la de-
ftination d'une choie au ferviceSc au culte de Dieu, qui les tire
de l'ufage commun & profane. Mais quand ils appliquent ces
termes à l'Eue hariftiejils entendent le changement réel du pain
au Corps de J. C.
tircT^ de U punie extérieure de V Euchiriflie . 55
G'eft donc un pur fophifme d'argumenter de la fignification Ch. V.
generaie de ces rerJTies,à la fignificadon fpecifîque & particuliè-
re qu'ils- font dans la matière de l'Eùchariftie: c'efl néanmoins
un lophiimeoù Aubercin tombe fortfouvent. On prouve^ dit-il
en un endroit, invinciblement que le pain n'a pas changé de
nature -parle mot mime de fanciification dont fe fertS.Auyiftin. Car
fantifier quelque chofe , nejîgnijîe jamais .changer fa fubjlance , ny
l'anéantir.
Ce qu'il prétend faire voir par pludeurspaflages où ce mot efl:
employé par les Pères en d'autres matières fans qu'ils y conçoi-
vent aucun changement. Il prétend conclure de là qu'il ne il.
gnifîe donc pas un changement de iubftance dans la matière de
i'Euchariftie. Mais cette conclufion eft fauffe &: fophiftique.
Car fi S. Auguftin a cru autre chofe du Sacrement de l'Eucha-
riflie» que des autres Sacremens , il a fans doute pris ce mot en
un autre fens en parlant de ce Sacrement qu'en parlant des
autres : comme tous, les Catholiques le prennent en un autre
fens quand ils l'appliquentà l'Euchariftie que quand ils s'en fer-
vent en d'autres matières. Tout dépend donc de s'affurer dir
ientiment de S. Auguftin. C'efI: fa docfïrine qui doit régler la
fignification de ces teraies. Ec fi M. Claude en veut tirer avan-
tage, il faut qu'il ait prouvé auparavant que S. Auguftin ne
croyoit pas la prefence réelle. Autrementil ne fera propremenc
que fuppofer ce qui eft en queftion.
On peut voir encore une illufion toute femblable dans la page
699. du livre d'Aubertin, ou de ce que S. Auguftin appelle
Vï.\xc\\'xx\Çi\t ^Sacramentummenfa: fua^comvcizW appelle le Bap-
tême Sacra'rnentum lavacri .^ il forme cet argument fophiftique:
S. Auquftin prend le mot de Sacrement lors qu'il parle de l'Eucha-
riflie. comme il le prend lorfqu il parle du Baptême. Or quan d il par-
le du Baptême, il entend parcetermeunfigne, c'eft à dire l'eau
fîgnedu Sangde J.C. donc parle Sacrement de la table, il en-
tend le pain & le vin Sacremens du Corps & du Sang de J. C.
Pour y répondre nettement ^ il n'y a qu'à luy dire, que Ç\ S.
Auguftin a eu une autre idée de l'Euchariftie que du Bap-
tême, il a pris le mot de Sacrement appliqué à l'Euchariftie
d'une autre manière, qu'en l'appliquant au Baptême, n'y ayant
rien de fi commun que de déterminer ainfi la fignification gé-
nérale des termes parla matière à laquelle on les applique.
Son raifonnemenc ne conclut donc qu'en fuppofant que faine
G lij
ChV y.
l'eft
54 Liv. I. Des mots de figure , type (^ autres
Auguftin n'a pas eu la doctrine Catholique dansl'efprit, c'ed
à dire qu'Aubercin ne conclut qu'il a raifon , que pourveu qu'il
ait auparavant prouvé qu'il l'ait. Voila dequoy il a remply
ce grand Livre , donc les Miniftres font tant de bruit.
F in. du premier Livre.
f'bs'.
55
LIVRE SECOND ■;
EXPLICATION PARTICULIERE
de quelques paflages , où l'EuchariiIie eft
appellée Image , Figure, Myftere, :^'c. .,
CHAPITRE PREMIEPv.
Que iVf. Clitude place en quelque s lieux le mot de Figure , oùl[£i(- Ch. I.
. .charr/iie n'e/t foint appellée figure , ou fi clic efi appellée de rh
norn , c'cfi par des rai fions particulières..^ qui ne font rien îi cetîs
difpute. ' : ■ ' ' '.
Explication du paJJage de Tertullien du troifième livre
contre Marcion.
U O Y que tous ces paflàges où ies Pères fe fen-
vent des mots àe figure & de (îgne , foient fort inu-
tiles à M. Claude, cormrre nous venons de voir,
il eft bon de remarquerneanmoins qu'outre l'il-
lufion générale de cette preuve, il enj^ùfcavec
.une certaine adrcfle qu'on pourroit nommer au-
trement, &; qui donne lieu de juger qu'il fe fert de toutes
fortes de moyens pour venir à bout de ce qu'il prétend.
Ilauroit mieux fait, par exemple, de ne pas alléguer cepafTa-
•ge de Tertullien ipfium fum Corpus reprecfievtat.j -ni celuyde S. Lihr.i. contra
Jérôme ipfequoque veritatem fui torporis repr^rfentavit. Le (tv\i ^^^'^*^- '•'■*•
de cespalFages eft trop contefté pour pouvoir eftre déterminé
à l'avantage de la caufe des Calviniftes par la feule authorité voyez perp.z.
de M. Claude. Et nous avons fait voir de plus qu'on ne le peut i.s-cj.p-iSo.
^6 ' L I V. II. D{'s mots défigure , type (B/- autres
Cii. r. ■ t-'cure'faifonnablement, ^ que ces pad'ages prouvent au con-
traire que J. C. rend fon Corps prefent dans TELichariftic ,
félon l'ufage le plus ordinaire du mot de reprxfcntarc ^ auquel
toutes les circonftances de ces deux pafTages appliquent l'et
prit.
Le paflcige tiré des Ol^ces de i^unt Ambroife devoit aulîî
Pcrp. î. 1. <r. eftre omis. Car nous avons fait voir ailleurs que quand ce Pc-
c. 10. p. 74. ^^ ^.^^ queJ.C. c(i- offert en image , cela ne veut pas dire qu'il
eft offert dans l'image de fon Corps, mais en image de la clarté
avec laquelle il s'offre luy-mêmc à Ton Père , &: s'offrira dans
toute l'éternité j S. Ambroife ayant diftingué trois eftats avec
quelques anciens Auteurs-, l'un qu'il appelle à.'ombre qu'il at-
tribue à l'état de la ioy , & qui n'avoit que des figures toutes
pures 5 l'autre qu'il nomme ài'imay: ^ qui eftoit méfié de figure
&: de vérité ; l'autre qu'il appellede ^'mJ'f', c'eft àdire de véri-
té fans figure. C'efl: en ce fens qu'il dit que J. C. efl: offert en
image, c'efl à dire qu'il n'y eft pas offert à découvert comme
dans le Ciel.
..; Laplufpart des paflages que M. Claude rapporte de S. Denis
font aufîî très mal alléguez , comme il eft facile de le luy faire
voir en les parcourant.
Le premier eft celuycy : u^Si^yu -rà. ^tloTaxa.^ ^ vTt' o-^" âyi tÀ
Dionjf. de J^vviAtV //et tV '«fî^ï ■zcfozti/iSj'av avfiCÔAov, il confacre Us f^icrcz,_ mj-
Jiercs ^ les révérant par fes louanges , il les expofe à la viie du peu-
ple par le moyen des Symboles facrez^ qui font propofez^ Car il eft
clair que dans ce paifage les myfteres divins qui font exprimez
commede terme de l'adion du Prêtre, [epyyerrct 'j-hùtclta font
quelque chofe d'invifible qui n'eft rendu vilîble que par les
Symboles. Ce qui eft très-propre pour donner l'idée du Corps
de J. C. rendu prefent par le Prêtre, & rendu vifible par les
Symboles. _,j
Le 1. dont M. Claude ne cite que deux paroles, Jua tru%|SoA(t,
eft celuy où cet Auteur dit que plufieurs ne s'arreftent qu'aux
divins Symboles. Et ce paffage marque feulement qu'il ne faut
pas s'y arrefter, & qu'il faut pénétrer les myfteres qui y font
x.uno3 . r.ir, ' cachez, & qui (ont produits par l'adion du Sacrifice. Qu'il faut
•^' -^ •'"• aller jufques aux prototypes , c'eft à dire au Corps S" ^« Sang de
J. C. comme le dit Pachymerej en croyant, dit ce Commenta-
teur de S. Denis , que les chofcs propofées ont eflè changées au
Corps é^ au Sang de J. C.
Pour
eft appellée type j image ^figure. ^7
Pourle3.quieftcequeS.DenisappellelalainteCenequeNô- Ch. I.
cre Seigneur célébra, <z,p;)(^/(n-'ftCoAoi' , il ne faut que le renvoyer m. chud. i,
au même Pachymere interprète de S. Denis qui explique ce ^^^' ^' '''
terme par celuy de ap^ix.o/Fa'j^oi' , c'eft à dire, l'origine écla four-
ce de cette fainte communication des fidelles , qui eft marquée
dans l'Euchariftie. Ainfi cela ne fait rien du tout pour prouver
quel'Euchariflien'eftle Corpsde J. C. qu'en figure.
M. Claude fe trompe encore plus vifiblement dans le 4. qui
efl: que l'ablution du Pontife fe fait devant les facrez^ Symboles.
Car il prend en cet endroit les Symboles non confacrez , dont
parle cet Auteur , pour les Symboles confacrez i 5c pour fe dé-
tromper il n'a qu'à lire 3. pages après le lieu où il eft parlé de
cette ablution j car il y trouvera la confecration de ces Sym-
boles.
Il eft vray que ce qu'il cite après cet Auteur, que le Ponti- «
fe reprefente d'une manière fenfible par la découverte & la di- u
vifion des Symboles , J. C. noftre vie fpirituelle, s'entend des ««
Symboles confacrez. Mais le fens n'a aucun rapport à ce que
M. Claude prétend. Car cet Auteur veut dire feulement que le
Prêtre en découvrant les dons , & les divifant en plusieurs par-
ties, reprefente la manifeflation du Verbe, qui eft forti en quel-
que forte de l'unité facrée du fein de fon Père, pour s'engager
parmi la multiplicité des créatures. Il s'agit donc non de l'ef.
(ènc€ de ces Symboles , mais de ce que fignifie l'aclion du Prê-
tre qui les découvre & qui les divife.
Le pafTage de S. Maxime Commentateur de cet Ouvrage ,
que M. Claude allègue enfuite , n'cft pas plus à propos. Cet
Auteur expliquant le mot d'image dont S. Denis s'eftoit fervi ,
dit qu'il appelle du mot d'image des chofes véritables ^ ce qui fe
pajfe dans la Liturgie : par où il entend généralement toutes
les cérémonies qui fe pratiquoient dans le Sacrifice , & non pas
feulement le pain êclevin, comn>e M. Claude le fuppofe. Il
-eft donc vray que cet Auteur reconnoift qu'il y a dans cette
action fainte divers Symboles & diverfes images ^ mais il ne
prétend nullement dire par là qu'il n'y ait rien de prefent de
ce qui eft reprefente par ces Symboles & par ces images. C'eft
à quoy fè réduit tout ce qu'il enfeigne en divers lieux fur cet-
ce matière.
M. Claude infère auffi entre les paflages où il prétend que
les Pères ont donné à l'Euchariftie le nom de figure, un lieu de
H
fi Liv. II. Expl. des Tajfages ou i'Eucharifiie
Tertullien ciré du t roi fié me livre contre Marcion^ qui mérite
d'aLicanc mieux d'eftre examiné, que quoy qu'il n'ignore pas
que M. le Cardinal du Perron, ôcplufieurs autres Auteurs Ca-
tholiques y donnent un fens tout différent, qui détruit cette
prétention , il ne lailTe pas de le produire quatre fois, en le dé-
terminant toujours au fens qu'il croit Uiy eftre avantageux, fans
prendre la peine de réfuter l'explication de ces Auteurs j com-
me ne méritant pas de l'eftre.
Mais comme je ne fuis pas en cela de fon fentimcnt , & que ce-
procédé de fe donner gain de caufe par fon propre fufFrage , ne
me femble pas oacz équitable , je nelaifleray pas de remettre
en queftion ce qu'il fuppofe fi hardiment , ôc de luy foûtenir
que le fens auquel il prend ce paflage eft: beaucoup moins pro*
bable que celuy auquel il eft: pris parle Cardinal du Perron.
Je rapporteray donc d'abord le paflage en latin, parce que le
différend con /ifle dans la manière dont il doit eflre traduit.
Hoc liyium ^ Mieremias tibi infinuat , duiuris fradicans "Ju-
dais : Venite^ mittamus liffiunv in panem ejus 3 U tique in Corpus.
Sic enim Deus in Evangelio quoque veftro revelavit , fanem Cor~
■pus fuHm appellans h ut ^ hinc j am eum intelligas Corporis fuijjpt-
ram pani dedijje .^ cujus retrb Corpus in pane Propheta fipirauit ^
ipfo 'Domino hoc Sacramentum pofiea interpretattiro .
On convient de part & d'autre que le but de Tertullien en
cet endroiceft derefuter les Marcionites qui pretendoient que
le Dieu de l'ancien Teflamenc eft:oit contraire au Dieu Père de
J. C. Auteur du nouveau, & que c'eft ce que Tertullien y
combat , en faifant voir un parfait accord entre les deux Tefta-
mens, & que J. C. avoic fouvent accompli & éclairci les figu-
res qui fe rencontroient dans l'ancien , ce qu'il ne pouvoit faire
fans l'approuver. Un des pafTages qu'il employé pour prouver
cet accompliffement ôccetéclaircifTement des figures de l'an-
cien Teflament par J. C. efl celuy de Jeremie , Mïttamus li~
qnum in panem ejus^ en prétendant que ce paflage s'entend des
juifs , qui ont attaché au bois le pain de J. C. c'efl à dire fon
Corps. Et comme cette explication dcmandoit que l'on fïfl
voir que par le mot de /'^r/>2 Jeremie avoir pu entendre le Corps
de J. C. il fe fert des paroles de l'inflitution de l'Euchariftie
pour le prouver.
Cedénouemensde l'argument de Tertullien efl commun à
tous les deux fens. Ainfî en le fuppofant , il n'y a pour enten-
efi cippellée type , ima,ge , fgure , ^c. ^9
dre en quoy le difFerend confifte, qu'à rapporter la manière Ch. î.
dont M. Claude traduit ce pafllige, en y oppofant enfuite cel-
le dont on croit qu'il le faut traduire.
Voicy celle de M. Claude. />/>», dit-il, a appelle le pain fon u.cuuie i
Corps ^ afin que vous reconnoijjzez^que ccluy dont le Prophète avait ^'^P- P- '*•
anciennement figuré le Corps par le pain , a maintenant denné au
pain la figure de fon Corps.
Etvoicy celle dont je prétends qu'il le faut traduire. C'efi ce
que Dieu a révélé dans voflre Evangile même en appe liant le pain
fon Corps , afin de faire conyioifire par là.que celuy dont le Prophe-
te avoitrepre fente le Corps par le pai'd longtemps avant qu'il ac-
complit cette figure , avait voulu dés ce temps, là même que le pain
fervifl à figurer & à fignifier fon corps.
Ileft vifible que comme de la première manière de traduire
ce pafîâge, il s'enfuivroit que TertuUien y auroit appelle le
pain Euchariftique figure du Corps de J. C. ce qui ne feroic
néanmoins de nulle importance 5 il s'enfuit de la féconde qu'il
ne l'a point fait, puifquc cen'efipas au pain de l'Euchariftie
que TertuUien entend que J. C. a donné la figure de fcfn Corps,
mais au pain dont parle le Prophète Jeremie, c'eft: à dire au
pain en gênerai : & que le mot de figure ne fe rapporte pas au
temps de J. C. mais au temps de ce Prophète.
Si l'on confidere la feule lettre de ce paflage, il faut recon-
noiflre de bonne foy qu'il peut foufFrir l'un & l'autre fens. Car
c'eft une objedion tout à fait frivole que celle que fait Auber-
tin contre le fens du Cardinal du Perron, qu'il y auroit une
tautologie , c'eft à dire , une répétition ridicule de penfces à fai-
re dire d'une part à TertuUien que J. C. a donné au pain la fi-
gure de fon Corps dés le temps de Jeremie , ut hinc jam eum
intelligas Corpons fui figuram pani dedijfe .^ & d'ajouter enfuite
que le Prophète avoit figuré fon Corps par le pain , cufiis
rétro corpus in pane Propheta figuravit'-, & que TertuUien au,
roit cCtéftupide s'il avoit parlé de la forte, Certè fiupidus omni-
nh fuijfet > fi fie effet locutus.
Mais cette ftupidité n'eft que de la part d'Aubertin qui n'a
pu comprendre que ce font deux penfées toutes différentes, de
dire que J. C. avoit voulu dés le temps de Jeremie que le pain
fignifiaft fon Corps , SiC de dire que Jeremie avoit effective-
ment figuré ce Corps par le pain. L'une marque que J. C. avoit
réglé & ordonné ce qui s'eftoit fait dans l'ancien Teftamenc j
Hij
6 o L I V . 1 1. Explication despaptges, ou rEuchurifiie
l'autre que !e Prophète avoit execut-j la vvDloncé de J. C. La
premicre reprefente J. C. comme mAiftre; ôi la féconde Jc-
remie comme miniftre. Et cert::; rabordinacion de jeremie à
J.C. marque bien mieux l'accord de J. C. avec l'ancien Te-
ftament, que le limple rapport d'une parole de J. C. avec la
pnrole d'un Prophète.
Cette raifon ne prouve pas feulement que le fens du Cardi-
nal du Perron n'efh pas détruit par l'objection d'Aubertin^ mais
elle prouve de plus que c'eft le véritable fens du paflage dont il
s'agit; parce qu'il paroift clairement par TertuUien même qu'il
n'a pas feulement voulu prouver que l'expreflîon de J. C.
ëclaircifToit celle du Prophète, mais qu'il a voulu de plus mar-
quer que Jeremie avoit parlé par l'ordre de J. C. & que c'eft
J. C. qui avoit voulu qu'il fefervift du mot de pain pour fîgni-
lier fon Corps.
Cela paroifl. manifeftement par un autre lieu de Tertullien ,.
où il rapporte le même paflage dans le même deflein , &c pour
en tirer la même conclulîon. C'efl; dans le livre fuivant, où il
parle ainlî.
Mais pourquoy efi.ce que ce fut du pain que J. C. appella fon
1. *.. conr. Corps , ^non pas une citrouille^ Certes ,. il faloit que Marcion en
Marc. c. 40, g^fj} ^jjg ^^ [jg^ ^g ^gjj-g ^ ^^ rC avoir pu. comprendre que la raifon de
choix dej. C, gj} ^ que le pain eftoit une ancienne fgure du Corps
de J. C. qui dit par la bouche de Jeremie : ils ont conceu de mauvais
de (feins contre moy , difant: Allons , mettons le Bois en son
PAIN, c'ef adiré, attachons la croix h fon Corps. Et c' e fi pourquoy
J. C. qui s'efi plu à éclaircir les anciennes Prophéties , nous a dé-
claré affezjnanifefiement ce qu'il avoit voulu que le pain (iiiriifiafi
d^s ce temps -là ( c'eft à dire dés le temps de Jeremie j en appel-
lantlepainfon Corps àiins l'inftitution de fon Myftere.
Le rapport ft précis de ces deux paflages , & des claufes qu'ils
contiennent, ne permet pas de leur donner un fens diffèrent.
Dans l'un & dans l'autre c'eft J. C. qui révèle & qui déclare
par ces paroles : Hoc efi Corpus meum, le fens de l'ancienne Pro-
phétie de Jeremie. Sic enim Deus in Evangelio quoqne vefiro
revelavit , panem Corpus fuum appellans, dit Tertullien dans le
premier. Satis declaravit Corpus fuum vocans panem , dit- il
dans le fécond. Nous devons donc croire que c'eft la même
ehofe qu il révèle , &: qu'il déclare dans l'un &: dans l'autre. Or
tju'eft-ce qu'il déclare dans ce fécond paflfage félon Tertullien?
efl AppelUe type , imcige ^figure , î^c. éx
Il déclare qu'il avoir voulu que dés le temps de Jeremie le pain Ch. I.
(igniliaft fon Corps. ^/(.■^ tune •voluerit (iyiificafj'c pancm fatis
dcci.ravit. On doit donc croire que Tercullien aura fait révé-
ler la même chofe à J. C. dans l'autre paffage , pourvu que
les paroles iepuiflent fouffnr. Or non feulement elles le fouf-
frent, mais elles l'expriment clairement. Ut ^ hinc jam eum
intelliyts Corporis fui figurant pani dediJTe. A F i N ^ dit-il , que
l'on entende par là ^ que dès ce temps-là. , Jam, c'eftàdirej dés le
temps de Jeremie , /'/ avoit voulu que le pain fuft filtre , su fi.
gnifiafi fon Corps.
La féconde objeclion qu'Aubertin fait contre ce fens ne
vient encore que d'un défaut d'mtelligence. Elle eft fondée
fur le mot de rétro', dont TertuUien fe fert dans la dernière
elaufCj en difant: cujus rétro corpus in pane Prophetafiyiravit.
Or ce mot , dit Aubertin , fignifie /^»g^ antè , dans l'ufage de
TertuUien. On avoue que c'eft en effet le fens du mot de ré-
tro. Mais afin de luy conferver ce fens &: cet ufage, il n'y a
qu'à concevoir que Tercullien compare enfemble deux temps 3
l'un , celuy du Prophète Jeremie j l'autre, celuy de J. C. &
que c'efl: à l'égard du temps de l'avènement de J. C. qu'il dit ,
quéle Prophète avoit fi^guré par le pain le Corps de J. C. retro.^
c'eft à dire, long-temps avant cet avènement.
. La conformité de ces deux paflages jointe à l'évidence qu'il y
d que TertuUien a cru important de marquer non feulement
que J. C. avoit voulu expliquer une figure ancienne -, mais qu'il
eftoit l'auteur de cette ancienne figure , & que c'eftoit par fon
ordre & par fa volonté que Jeremie avoit parlé de la forte, don-
ne un tel avantage au fens du Cardinal du Perron fur celuy des
Miniftrcs , qu'un homme judicieux ne fcjauroit prendre ce paf-
fage dans un autre fens. Car quoy que je ne le propofe que
comme plus probable, & que j'avoue qu'il n'y a pas une certi-
tude entière , que c'ait efté la penfée de TertuUien j néanmoins
il n'eft pas feulement plus probable, mais il eft abfolument cer-
tain que de deux fens il faut préférer le plus vray-femblable 3
& par confequent que c'eft une injuftice vifible d'employer
quatre fois ce pafTage dans le fens qui a le moins d'apparence,
comme fi ce fens eftoit abfolument certain &inconteftablc.
Mais fi l'éclaircifiement de ce paffage eft utile pour faire con-
noiftrc le peu d'équité de M. Claude , il n'eft pas fort necefiliire
pour la caufe que je foutiens •, puifque quand Tertullienauroic
H iij.
6i, Li V. 1 1. Explication despajfages , où fEuchariJ^ie
dit que J. C. cninftituant l'Euchariftie avoic donné au pain la
figure de Ton Corps, cela ne voudroicdire autre chofe, finon
qu'il auroit fait du pain le Sacrement de Ton Corps, & que
l'on devroit toujours fuppofer que ce terme eftoit expliqué
par la doélrine commune de TEglife de fon fiecle , comme ce-,
lu y de Sacrement l'eft prefentement.
CHAPITRE II.
Que les Caîvini/Ies ne f^auroient rien conclure raifonnablement du
célèbre pajfage de TertulUen tire dît ^o. Chapitre de fon
^. livre contre Marcion.
QUoYQUE M. Claude ne rapporte pas au lieu où il entaC
fe lespaflages des Pères qui ont appelle l'Euchariftie fi-
gure du Corps de J. C. ce célèbre paiTage du 40. Chapitre du
livre 4. contre Marcion, dont les autres Miniftres font leur
principal appuy ; néanmoins parce qu'il le rapporte en d'autres
endroits, & qu'il a beaucoup de conformité avec celuy que
nous venons d'éclaircir, j'ay crii qu'il eftoit plus naturel de les
joindre enfemble.
Je le confidereray en trois manières. Premièrement félonie
fens auquel il eft pris par les Miniftres , en leur faifant voir
que les conséquences qu'ils en tirent font entièrement vaines.
Secondement félon le fens auquel il eft expliqué par le Cardi-
nal du Perron , & par divers autres Auteurs Catholiques, où je
montreray que s'il n'eft pas abfolument certain que ce foit le
fens de Tertullien , il eft certain néanmoins que toutes les rai-
fons dont Aubertin fe fert pour le combattre , font non feule-
ment frivoles, mais ridicules, & qu'ainfi il eft entièrement
contre la raifon de faire tant valoir un pafiage qui re(joit très-
probablement un fens par où toutes les confequences des Mi-
niftres font anéanties. Et je montreray en troificme lieu ,
qu'on peut encore entendre ce paflage dans un fens un peu
différent de celuy du Cardinal du Perron, &: qui ne renverfc
pas moins les avantages que les Miniftres en veulent tirer.
Mais avant que d'entrer dans cet examen je propoferay d'a-
bord quelques eonfiderations générales , dont on verra l'ufa-
ge dan* la fuite.
efl appellée type , image , pgure , t^c. 65
PREMIERE CONSIDERATION.
Comme l'équité 6c la raifon doivent régler toutes les dif-
putes qui tendent à réclairciflement de la vérité , il faut fur
tout éviter les preuves dont on ne fçauroit rien conclure qu'en
/uppofant la queftion même. C'eft ce qu'on appelle des péti-
tions de principe. Et quoy qu'il n'y ait rien de plus décrié fous
ce nom, il eft néanmoins très-facile d'y tomber fans s'en ap-
percevoir. Car, fi l'on y prend garde, toutes celles que les
Miniftres tirent des mots de figure &: de fîgne pour en con-
clure que les Pères n'ont pas cru la prefence réelle, font ab-
folument de ce genre. Et quoy qu'en s'en fcrvant ils ne s'i-
maginent pas fuppofer la queftion, il elt bien aifé de les en
convaincre. Car toutes les fois qu'un terme efl: tel qu'il peur
efFedivement recevoir deux fensdifFerens, & imprimer deux
différentes idées, dont l'une établit, &; l'autre détruit ce que
l'on prétend prouver par ce même terme, il efl: vifible que
c'eft tomber dans ce défaut, que d'en tirer une confequence
précife pour fon fentiment, en fuppofant gratuitement qu'il
fignifie ce qui nous efl: avantageux.
Or nous avons fait voir que les termes de figure , de fizne ,
âe Sacrement ^ peuvent efFecT:ivement efl:repris en divers fens,
& imprimer diverfes idées, félon qu'on s'arrête à leur fens
grammatical , ou que Ton y en ajoute d'autres tirées de la do-
drinedont on fait profeffion , & qui eft reconnue dans l'E-
glife où l'on eft: : Qu'ils peuvent donner l'idée d'une figure &
d'un Sacrement qui contient la chofe même , ou d'une fimple
figure qui ne la contiendroit pas. Et l'expérience faifanr voir
de plus qu'ils font prefentementprisau premier fens partons
les Chreftiens du monde , il n'y a rien de plus ridicule que
de prétendre fans preuve que les Pères les ont pris dans le fé-
cond i c'eft à dire, qu'ils n'ont entendu par ces termes qu'u-
ne figure toute pure.
Cen'eft pas ainfî que nous nous fommes pris à montrer que
ces expreflions fe doivent entendre en un fens Catholique,
nous n'avons point fait de fuppofition en l'air, ti. nous avons
fimplement ufé du droit que la raifon nous donne d'apuyer
des confequences fur des principes déjà établis.
Car s'il eft vray que ces termes peuvent eftre difFeremmenc
Ch. I I.
64 Liv. II. Explication despajfages^ ou l Eucharijîie
entendus, félonies divers fentimcns que l'on peut avoir, qui-
conque a prouvé , comme nous avons fait , que les Pères ont
crû la prefence réelle , &; que cette do(5lrine a fait partie de
leur foy, a droit de conclure qu'Us ont donc fuppléé à l'im-
perfedion de ces termes, 8c qu'ils les ont pris dans le même
îèns que les Catholiques les prennent prefentement
Il y a des rencontres où il fuffit de prouver qu'il eft poflî-
' blede donner un fens à des expreflîons pour conclure qu'el-
les l'ont efFedivement ; & celle cy en eft une. Parce qu'après
avoir montré que dcsperfonnes ont eu conftamment une cer-
taine dodlrine, il eft jufte de donner à toutes leurs expreffions
qui font capables de divers fenSj celuy qui s'accorde à cette
doclrine confiante, &c d'exclure celuy qui y eft contraire.
Tout confifie donc à bien s'afTurer du fond de la dodrine
qui doit déterminer les expreffions douteufes. Mais de pré-
tendre par les expreffions ambiguës déterminer la dodrine
confiante, c'eft choquer les plus claires lumières de la raifon. .
SECONDE CONSIDERATION.
Nous ferons voir dans la fuite que ce qui efl arrivé aux Cai-
viniftes dans l'ufage qu'ils ont fait en gênerai de ces mots de
type & àa figure , leur arrive en particulier à l'égard de deux
paflàges des Pères , oià ils foutiennent que ces paroles : Cecy
eft mon Corps ^ font expliquées par ces termes : Cecy eft la fi~
ytre de mon Corps.
Plufîeurs Auteurs leur conteftent tous ces deux pafîages, &
je montreray que la prétention des Miniftres eft injufle au
moins à l'égard de l'un des deux, qui eft cekiy deTertullien.
Mais pour n'entrer pas prefentement dans cette queftion de'
fait , je veux bien fuppofer icy que ces paroles Cccy eft mon
Corps j ont efté expliquées par Tertullien de la manière qu'ils
difent, &;jene m'arrêteray qu'à faire voir leur illufion dans
Ja coniéquence qu'ils en tirent.
Pour la mieux comprendre il faut confiderer que la dodrine
de la prefence réelle ne porte pas fîmplement à confiderer deux
objets & deux chofes dans l'Euchariftie ; l'une extérieure ,
l'autre intérieure ^ l'une terreftre , l'autre celefte^ l'une vifî-
ble, l'autre invifible : Qu'elle ne porte pas feulement auffi à
confiderer la partie fenfîble comme/gar^j type i antitype ,fi-
efl cippelUe type , ima.ge , figure , t£c. 6 j
yie^ image , Sacrement de la partie invifible & intérieure j mais C h, I !.
qu'il arrive de plus par necefllté que ces deux cliofes jointes
enfemble devenant l'objet de nôtre efprit, donnent lieu à di-
verfes propofitions, félon les diverfes faces par lefquelles il les
regarde.
Car, comme nous avons dit ailleurs, refprit s'attache quel-
quefois direclement au Corps de J. C confideré comme fub-
flance prefente, quelquefois il regarde directement l'objet fen-
fible , qui eft ce qui s'appelle voile & Sacrement j 5c quelque-
fois il regarde direclement &: le voile &: le Corps de J. C. de
mcme que l'homme étant compofee d'ame 6c de corps, l'ef-
pric le peut regarder ou comme un efprit qui gouverne un
corps , ou comme un corps régi & animé par un efprit, ou
comme un efprit &: un corps qui forment un même tout.
On a déjà amplement expliqué ailleurs la contrariété appa-
rence qui fe doit trouver neceflairement entre les propofitions
qui nailîènt de ces difFerens regards. Je n'en repeteray icy que
ce qui efl necelîàire pour l'intelligence des paflages dont il
s'agit.
C'eft qu'étant poflîblc , comme nous venons de dire, d'at-
tacher (x penfée ou à ce qu'il y a de principal 6c d'intérieur
dans l'objet prefent , ou à ce qu'il y a de viiîble, d'extérieur
&defjnlîb!e, confideré feparément, il en naiftra neceflaire-
ment, félon la'doclrine delaprefence réelle, des propofitions
qui paroiftront contraires en apparence, 6c qui le ne feront
point en effut.
Car fi j'attache ma penfée à ce qu'il y a de principal & de
caché dans cqz objet, & que l'on me demande ce que c'eft? je
dois dire que c'eft le Corps de J. C. que c'eft la victime qui
a effacé les péchez des hommes ^ que c'eft le propre corps , le
vray corps , la vraye chair, la chair même de J. C. C'eft le
langage naturel que cette vue doit produire.
Mais a ma penfée fe porte diredememt à l'objet extérieur ^
c'eft à dire au voile 6c aux fymboles qui nous cachent le Corps
de J. C. quoy que cette même penfée regarde en même tems
le Corps de ]. C. comm.e prelenr, èc qu'elle enferme tres-
exprcllemcnt la doctrine delà prefence réelle, elle produit
neanm -lins des propofitions toutes contraires dans les termes.
Car C\ l'on me demande alors ce que -c'eft que cet objet de ma
penfée, Se ce voile qui frappe mes fens , je dois dire que ce
^(, Liv. II. Explication des pajfagss ou tEuchxrijîic
n'cft pas le Corps de J. C. mais que c'eft fa figure, Ton type ,
Ton Sa:remenr,
Comme ce regard eftune fuite de la doctrine de la prefence
réelle , 6c de la nature de l'efprit , & que ces fortes de propo-
fitions font des fuites naturelles de ce regard, on ne manque
pas de les trouver très fouvent dans ceux qui croyent^ôc qui dé-
fendent cette doclrine.
On y trouve tresfouvent que cet objet extérieur eft diffé-
rent du Corps de J. C.
G-mmi ani- On appelle Myftere ^ dit l'Auteur d'un livre intitulé. Gemma
'" '^'- * A N I M ^ , quand on voit une choj^e , ^ que l'on en coni^oit une autre.
On voit l'apparence de pain ^ du vin j on croit le Corps ^le Saîig
de J. C.
f ulo L'efpece vijîble qui arrefie nofire veu'è ^ dit Hugues de S. Vic-
tor , efi une autre chofe que la vérité du Corps C/"^ du Sang de J. C'
que nous croyons fans la voir.
Traa.de Sa- L'efpece dupain d^" di^ "^in • dit Eftienne Evêque d'Autun , ej?
cram. ait ans. feulement Sacrement , c'efi à dire , Jigne vifihlc d'une chofe invifhle
dr- ficrée. L'Auteur du fermon de l'excellence de l'Eucharif-
tie & de la dignité des Preftres , qui eft entre les Oeuvres de
S. Bernard, fe fert des mêmes termes, Autre chofe eft , dit il ,
l'efpece vifihlc , qui 'eft apperi^uë par lavué. Autre chofe eft la vé-
rité du Corps que l'on croit cftrc invifiblcment fous cette efpece vi-
fihk.
Et non feulementon diftingue ces deux cliofes l'une de l'au-
tre , mais on nie le Corps de J. C. du Sacrement & du voile ,
c'eft à dire que l'on nie que le Sacrement foit le Corps de J. C.
T A d Cette reffetnb lance du pain^ dit S. Anfelme,^»/' fe pre fente k
Corp."& nos yeux fur l Autef eftant confiderèe en elle-même ,n' eft pas le
Sang, Dom. c<?r/'.f du Seigneur.
Et en un autre endroit du même Traité : Vefpece vifihle du
fain , dit- il , eftant regardée en elle même C^ fe parement , n eft pas
la chair d" le Corps dej. C. d" ^l^^ n'en porte le nom que par une
manière de parler commune dans l'Ecriture , félon laquelle on don-
ne aux Sacremcns les noms des chofes qu'ils fignifient.
C'eft ce qui eft auflî compris dans cette doétrine fi commu-
ne parmi les Théologiens tant anciens que nouveaux, que i'ef-
pece (enfible eft Sacrement, fans eftre la chofe du Sacrement , Sa-
CR.AMENTUM é^ non res Sacramcnti i car cette chofe du Sacre-
ment eftant le Corps de J. C. dire que l'objet fenfible n'eft pas
efl appellée type , image ^ figttye ^ t3c. 67
la chofe du Sacrement ,c'ell dire qu'il n'eft pas le Corps de J,C. Cii. 1 1.
Enfin Thomas Valdenfis témoigne que XY^iclef ayant pro- p. «s.
pofc à Londres par des affiches publiques cette queftion : Sca-
voir jî cctt£ chofe ronde (> blanche , qui cfi vue entre les mains du
Preftrc , eft le vmy Corps de J. C. les Dodeurs Catholiques de
cette ville-là répondirent que non 5 5^ il approuve luy-même
cette rcponfe , qui ne fignifîe autre chofe, finon que le voile
qui couvre le Corps de J. C. prefent , eflant conlideré Tcparë-
ment,n'eri: pas le Corps de J. C.
C'efl cette même vue qui produit toutes ces exprefîîons or-
dinaires, de S-tcrement du Corps de J. C. de ?n)'J}ere , de fymholes du
Corps de J. C. & qui fait dire 5 Que l'on divife le Sacrement î
Que l'on èlcve le Sacrement ^ Que l'on rompt le Sacrement 3 Que l'on
diftribué le Sacrement du Corps de J. C. Car toutes ces expref-
ilons mettent quelque différence entre le Sacrement & le Corps
de J. C.
On parlera ainfi tant que l'on croira la doctrine de la pre-
fence réelle, parce que ces expreffions naiiTent des idées na-
turelles que cette doctrine imprime. Et c'efl: n'avoir aucun dif-
cernement, ny aucune équité que de prétendre s'en fervir
pour la détruire.
III. CONSIDERATION.
Quoyque les propofitions qui naiflent de ces differens re-
gards n'ayent aucune contrariété dans le fond , elles peuvent
avoir néanmoins une contrariété apparente dans les termes ,
comme nous l'avons déjà dit. Et cela arrive de ce que l'objet
de la penfée efliant tantofl: l'efpece extérieure ou le voile, tan-
toft le Corps de J. C. ou la fubfliance prefentc confufément
conceuë, ces deux objets conviennent en certaines idées con-
fufes qui fervent de fujet à ces propofitions. Car le Corps de
J. C. conçu fous l'idée de fubfl:ance prefcnte, efl: un objet pre-
fent , une chofe prefente j de le voile extérieur eft auffi un ob-
jet prefent, & une chofe prefente. Ainfi l'un & l'autre peut^
eftre exprimé par le mot de Cecy , qui fignifie proprementr;
une chofe prefente. Et l'efprit peut rapporter ce terme, ou
au voile fenfible , ou au Corps de J. C.
En le rapportant au voile il doit dire : Cecy eft le Sacre-
ment du Corps de J. C. en le rapportant au Corps de J. C. il
68 Liv. II. Explicmondes p.tjfiges ^ou l'Euchirifi i
doit dire : Cecy eft: le Corps de J. C.
En le rapportant au voile il doit dire : Cecy n'ert: le Corps
de J. C qu'improprement. En le rapportant au Corps de J. C.
confufément conçu il doit dire.- Cecy eft proprement le Corps
de J. C.
En le rapportant au voile il doit dire : Cecy eft la figure de
J. C. & le contient, Enle rapportant à la fubftance prefente, il
doit dire : Cecy n'eft pas la figure,mais le Corps même de J. C.
Et non feulement il peut fe fervir de toutes ces expredîons
fans rapport aux paroles de l'inftitution de l'Euchariftie, mais
il les peut aufîî faire fervir d'explication à ces paroles : Cecy
ejl mon Corps. Et toutes ces propofitions eftant àt% fuites de
ces difi'crentes vues, n'ont toutefois qu'un même objet , fcja-
voir le Corps de J. C. réellement prefent fous les Symboles du
pain &: du vin.
IV. CONSIDERATION-
On ne peut croire raifonnablement qu'il y ait eu entre les
Pères aucune différence réelle de dogme fur le fond du My-
ftere de l'Euchariftie j ce Myftere eftant trop important pour
pouvoir fuppofer cette divifion. Et comme les Catholiques 8c
les Proreftans conviennent réciproquement de cette fuppofî-
tion commune , que les Pères font d'accord fur ce point , cri
la peut prendre pour un principe conftant;
Mais cette union de fentimens dans le dogme n'exclut pas
toute diverfîté dans les manières de concevoir S: d'exprimer
les mêmes chofes. Et il eft au contraire très . croyable que
Dieu ayant lailfé agir l'efprit des Pères d'une manière natu-
relle, ils auront conceu par des biais difFerens les chofes qui
pouvoient eftre regardées par diverfes faces.
Ainfi comme nous avons montré que quoyque l'on croye le
Corps de J. C. réellement prefent dans l'Euchariftie, on la peut
néanmoins confiderer en deux manières i & que l'efprit peut
s'attacher tantoft directement au fimple voile, Se tantoft à ce
qui eft contenu fous ce voile ^ il eft fans anparence qu'il ne pa-
roifîe aucune trace de cette diverfîté d'idées dans les Ouvra-
ges des Pères.
Ils nous difent en cent manières différentes que l'Euchariftie
eft le Corps de J. C. que ce que J. C. donna à fes difciples eftoit
eft appellée type , image , figure , g/V. é 9
Ton vray Corps , ion propre Corps , fa chair même i & qu'il n'en Ch. IL
falloic pas douter. C'eflTeftcc 6c la fuite de l'une de ces viies,
qui attache l'efprit diredemenc au Corps de J. C. conçu fous
l'idée de fubftance prefente. Seroit-il doncpoffible que l'autre
manière de concevoir ce Myftere, qui eft de regarder le voile
direcl:ement>&;le Corps de J. C. comme contenu fous ce voi-
le, laquelle renferme également laprefence réelle dans l'idée,
quoyqu'elle la renferme moins clairement dans l'expreffion ,
ne fe trouvaft jamais dans leurs Ecrits ? Ce feroit une efpece
de miracle, que l'on ne doit pas efperer du cours ordinaire de
la providence divine , qui laifle parler les hommes en hommes.
On s'y doit donc attendre , & ne pas s'étonner quand on trou-
vera de ces fortes de propoftions.
La raifon faifant donc voir qu'il efl tres-poffible qu'entre '
ceux qui croyent également la prefence réelle , les uns expri-
ment l'idée qu'ils tirent de ces paroles : Cccy e^mon Corp ,pa.r
celles c y , Cccy efi mon propre Corps , mon Corps véritable 3 £c les
autres par celles-cy -, Cecy eft la figure de mon Corps, ou le
Sacrement de mon Corps j il s'enfuit que cette dernière ex-
preiîlon eft du nombre de celles que l'on doit regarder com-
me indéterminées, &: fur lefquelles on ne doit fonder aucun
jugement fixe du fentiment de celuy quis'en feroit fervi. Car
comme l'efprit y peut fuppléer ou n'y pas fuppléer, & comme
elle peut fignifier , Cecy eft le figne de mon Corps prefent, ou
Cecy eft le figne de mon Corps abfent, ce n'eft point par la^
feule exprelfion qu'il faut juger de l'idée totale qui y répond,
mais par toute la dodrine de l'Auteur, 6c de ceux avec qui
l'on fuppofe qu'il convient de fentiaient.
Car s'il fe trouvoit qu'en prenant en un certain fèns les ter-
mes du Père dont ils'agiroic ,il fuft parfaitement d'accord avec
luy même,6c avec tous les autres 5 6c qu'en les prenant autre-
ment, il fût contraire ou à luy même , ou aux autres , il eft in-
dubitable que la raifon veut en ce cas qu'on prenne pour véri-
table le fens qui réunit tous les Pères dans un même fentimenr,
6c qu'on rejette comme faux celuy qui les divife ôc les oppofe
les uns aux autres.
De forte que comme cQt examen eft déjà fait , ^ que nous-
avons montré par un amas de preuves , aufquelles on ne peut
raifonnablement refifter, que les Pères des 6. premiers fiecle*
ont efté perfuadez de la doctrine de la prefence réelle 6c de
liij
yo Liv. II. ExpUciition des pajfagcs ^ où rEuchurifîie
]a Tranflubftantiacion , la raifon veut qu'on prenne dans un
fens conforme à cette doctrine toutes ces forces d'expreffions,
au cas qu'on les trouve dans les Pères, & que l'on n'y voye
rien d'ailleurs qui les détermme necelHiirement à un autre
fens 5 puifque par ce moyen on conferve cette union de fenti-
mens, qui efl: le caraélere de la vérité, qui ne peut cflre con-
traire à elle-mcme.
Il n'y a rien que de tres-jufte dans cette préparation. Il eft
jufte de prendre pour ambiguës toutes les expreffionsaufqueL
\qs on peut jomdre l'une ôc l'autre doctrine de la prefence £c
de l'âbfence réelle.
Il eft jufte de mettre de ce nombre toutes lesexpreffions où
l'Euchariftie efl. appellée /f^art" , Sacrement , Jîgne du Corps de
J. C. parce que les fignes pouvant eftre également de chofes
prefentes ou abfentes, on ne voit pas par l'expreffion même de
quelle forte de figne l'on parle.
Il eft jufte de regarder ccrte propofition: Cecy efl la fiqure de
7non Corps , comme ambiguë, puifque nous avons tait voir que
la ductrine de la prefence réelle la peut produire.
Il eft jufte de déterminer ces expreflions ambiguës & indéter-
minées par la dodrine conftante & déterminée de l'Eglife du
temps où ont vefcu les Auteurs qui s'en font fervis.
Ainfi ayant prouvé que la prefence réelle a efté la dodrine
conftante de l'ancienne Eglife , il s'enfuit que toutes ces expref-
fions doivent eftre fuppléées & déterminées par cette do<ftrinc,
&: que fi quelque Père a dit ians s'expliquer davantage, que
par ces paroles : Cecy cflmon Corps , il faut entendre , que c eft le
Sacrement du Corps deJ.C. cela veut dire que c'eft le Sacrement
du Corps de |, C. prefent j que c'eft le figne de ce Corps , com-
me le Sang eît le figne de l'ame, comme l'ablution extérieure
du baptême-, l'eft de l'ablution intérieure du cœur , &. comme
la Colombe & les langues de feu l'eftoient du S. Efprir,
Que les Miniftres oppofent prefentement leur paflage d c
TertuUien à des gens qui auront dans l'efprit ces principes du
bons fens. Quel avantage en tireront-ils?Ils diront que Tertul.
lien explique ces paroles: Cecy eft mon csrps ^ parcelles-cyjf'^T?
a dire la figure de mon Corps ,$^'\\è\q montreront par ce paflàge
du quatrième livre contre Marcion chap. 40. Jefus-Chrifi ayant
pris le pain , ^ l'ayant diftrihué à fes Dtfciples le fit fon Corps ,
en di fiant: Cecy eftmon CorJ^s , c'eft à dire , la figure de mon Corp.
cfi appelée type ,ir,uge, figure, î£c. yr
Mais quand ce feroic-lale véritable lèns deTeitiiIlien,n'efi; il Ch. 1 1.
pas facile de leur répondre , que le iens des Calviniftes ne
confiftepas dans ces mots précis , puifque les Catholiques s'en
peuvent fervir comme eux, t?>: qu'ils diront (ans peine , quej.
C. fie le pain fon Corps , c'eft à |dire le Sacrement de fon
Corps ? Ce qui nous rend differens eft le fensque les Cal vini-
fies donnent aux{ mots âefigtire èi. de 6'^rrf;?/f«/j par lefqueis
ils entendent le figne d'une chofe a'ofente. Qu'on ajoute à ces
termes , l'idée de la prefence du Corps de J. C. Se que l'ondi-
fe que J. C. fit le pain le Sacrement de fon Corps prefent ,*cç
n'eft plus le fens des Calviniftes. Or qui a dit aux Miniftres que
cette idée n'a pas efté jointe au terme de figure dansl efprit
de TertuUien ? Et comment le peut on fçavoir qu'en conful-
tant la docT:rine de l'Eglife de (on temps, Se de tous les fix
premiers fiecles , qui eft la même?
C'efl: l'unique moyen de le fcavoir, & Tans cet examen on
ne fçauroit juger du fens de l'expre/fion de TertuUien j mais
avec cet examen on juge qu'il a certainement eu cette idée,
comme l'on juge qu'un Catholique qui fe fert du mot de Sa-
crement , &: qui dit qu'il a receu le S. Sacrement , ajoure à
l'idée 2;rammacicale& littérale de ce terme , toutes celles que
ion Egliie y ajoute.
Si TertuIIien avoit dit que J. C. fit le pain fon Corps, c'eft
à dire la figure de fon Corps, mais que ce Corps nous ell:
donné certainement dans cette figure, que nous ne devons
point douter que nous recevons le Corps même de J. C. qu'il
entre dans noflre bouche, Se dans nos entrailles, &C qu'il eft
en nous par fa chair, &c par fa propre chair 5 qui des Mini-
ftres feroit aflez hardi pour tirer encore avantage de ces pa-
role ? Or que nous importe qu'il l'ait dit, puifque nous fom-
mes a(rurez qu'il l'a penfé, & qu'il a eu toutes ces notions &c
toutes ces idées dans re(prit ?
Il a penfé comme S. Cyrille de Jerufalem, que dans le type Cacech. 4.
du pain le Corps nous efi donne , ^ le Sanv^ dans le type du vin , (^^ Myftagog.
que ce Corps cS ce Sang font receus dans nos membres.
Il a penfé avec S. Cyrille d'Alexandrie, qu il entre en nous par
ja propre chair, qu iL e/t efi nous , qu il eft mêle dans nous. , j
Il a penfé avec S. Grégoire de Ny(Iè^»^7- C. s' introduit par in joan. p.
fa chair dans ceux qui le croyent .^ afin que l'homme devienne in- o^'^r^'^h*
corruptible par fon union avec ce Corps immortel. Je dis qu'il l'a c, 57.
yi Liv. II. E^cplicittion des pa (figes eu tEuchmflie
penfé , puifqu'il a eu les mêmes fentimens que ces Pères , com-
me les Miniftres mêmes le ruppofent; Se s'il les a eus, il a peu (è
fervir de toutes ces expreflions fans contredire fes fèntimcns.
Mais fans avoir recours aux^pafîages des autres Pères,
^quoy que l'union de leurs fencimens fur le point de TEucha.
riftie nous donne droit de regarder tous leurs Ouvrages com-
me un livre qui auroiteflécompofépar un même Auteur^' que
Ton joigne feulement à ce paflage ce que Tertullien dit en di-
vers autres lieux, & que l'on fuppofe qu'il y ait ajouté, que
par le moyen de cette figure ou Sacrement du Corps de J. C.
de Refur. notre chair mange la Chair ^ le Sang de J. C, Et que notre efprit
earn. c. ». y^ nourrit de Dieu , qu'ainfi ceux qui étant indignes de toucher
ce Corps ne lailfent pas de le manier tous les jours , font pires
it Idolol c ^^^ ^^^ 3*^^fi f*' n'ont mis les mains fur J. C. qu une feule fois ^ au
7. lieu que ceux là outragent tous les jours fon Corps ; que ce Corps efi
crû f^-^ reconnu eftre dans le pain. Corpus cjus in pane cenfetur j
de Orat. c. 5. q^ç nousen faifons profeflîon en difant ; Amen fur le Saint ^ c'eft
à dire en reconnoiillxnt quec'efl: le vray Corps à^y C. qu'on
ajoute , dis-je, tout cela , &: l'on n'aura plus aucun prétexte
d'en abufer. Car encore que les Miniftres prétendent éluder
tous ces partages par leurs clefs de figure èc de vertu , nous
avons néanmoins tellement détruit ces vaines folutions , que
tous ces partages fubfirtient dans leur fens littéral , &l font voir
clairement le fentiment de Tertullien.
Toutes ces idées donc ayant erté jointes dans fon efprit, il
n'y a qu'à les ajouter au mot de figure dans fon exprertîon,&
l'on verra clairement qu'il n'a pii entendre une figure dej, C.
abfent,mais un Sacrement quile contenoit comme prefenr,
& par lequel nôtre corps le recevoir, félon la profeflion pu-
blique qu'on en faifoit en difant : Amen.
C'ert; ainfi qu'agiront tous ceux qui ne chercheront pas à
fortifier leurs préoccupations par des mots écartez qu'ils ra-
mart!ent où ils peuvent, mais qui voudront juger de bonne foy
du fens des Auteurs par tout ce qui fertà le faire entendre.
Afin neanmois que les Miniflires ne fe plaignent pas que
l'on dirtimule leurs raifons, je veux bien leur en fournir une
qui efl:la feule qui ait quelque forte d'apparence, 2^ qu'Auber-
tin infinuë en quelques endroits.
Ils peuvent donc alléguer que quand il fefoit vray que le
mot à^fi'^K n'cxcluroit pas la vérité de lachofcfignifiée, &
que
efl appellce type , inuige , figure , (^c. 73
«jue cette vérité y pult eftre jointe i il eft certain nean- Ch. I î.
moins qu'il ne l'enferme pas par liiy-mêmej & que c'eft
une faufîè confequence que de dire .• C'efl: la figure d'une
telle chofè j donc elle la contient réellement. Qui ne f^ait
donc rien d'une chofe , fînon qu'elle eft la figure d'une autre,
ne peut conclure de là qu'elle la contient réellement. Or les
Pères qui ont expliqué ces paroles : Cecy efi tnon corps , par
celles-cy : Cecy efi la figure de mon Corps ^ n'ont rien confia de
l'Euchariftie, finon qu'elle eftoic la figure du Corps de J. C.
puifque ces paroles de J. C. contiennent tout ce qu'il en faut
croire. Donc ils n'ont pu conclure qu'elle fuft réellement le
Corps de J. C. donc ils ne l'ont pas conclu.
Mais ce raifonnement qui a quelque chofe de fpecieux , n'a
en effet rien de folide. La foy de ce Myftere ne s'apprend
point du tout félon l'ordre qui y eft marqué. On en reçoit
les premières inftrudions par leminiflere de rEglife5 c'eft fon
autorité qui y attache d'abord. Et l'on la trouve enfuite
confirmée par la parole de Dieu. Ainfî les Pères ont re-
ceu d'abord de l'Eglife les dogmes de la prefence réelle ôc de
la Tranlfubftantiation -, car ils ont paffé pour l'ordinaire par
les mêmes degrez que les autres. Ils ont crû ce que l'on y
croyoit de leur temps, &: enfuite par leur étude ils ont ap-
pris les preuves que l'Ecriture en fournit.
Il eft vray que la principale eft tirée de ces paroles : Cecy
efi mon Corps. Car nous avons prouvé qu'elles forment net-
tement l'idée de la prefence réelle, &: qu'elles y avoient por-
té naturellement toutes les nations du monde. Mais il faut
bien diftinguer l'impreiTion qui fait comprendre la vérité
en elle-même, des diverfes manières de développer cette
impreffion.
Car il arrive fouvent que l'impreflîon étant la même, les
hommes ne laiffent pas de fe partager quand ils viennent à
l'expliquer. Il n'y arien , par exemple, qu'ils entendent mieux
que le mot de temps , quand on en parle fans le définir , com-
me quand on dit que deux perfonnesont eftéde même temps,
ou que l'une a vécu plus long-temps que l'autre, 6c néan-
moins ils fe brouillent auffi-côc qu'ils veulent développer
l'idée uniforme qu'ils en ont, par des définitions plus étendues.
Ils n'eft donc pis étrange que quoy que ces paroles ; Cecy
efi mon Corps , ayent formé dans l'efpric de tous les Pères la
K.
74 Liv. 1 1. Explication des pajfagûs^ ou F Euchariflie
même impreffion & la même idée, &. qu'elles leur ayenc fait
concevoir le Corps de J. C. couvert fous les apparences du
pain ^ il leur foie néanmoins arrivé , lorfqu'ils font venus à
vouloir développer cette idée, ce qui arrive à tous les hom.
mes , qui efl de regarder de divers biais & par diverles faces
les objets compofez de diverfes parties.
Aiiifi il eft arrivé que quelques-uns ont dit que le pain
confacré était le Corps de J. C.m'eme^ en attachant , comme
j'ay die, leur penfée à ce qu'il y a de principal &; d'inté-
rieur dans l'objet prefent. Les autres en très-petit nombre,
comme nous le verrons en fon litu, l'attachant à l'objet fen-
fîble, ont dit que c'étoit le Sacrement ou le figne du Corps
de J. C. en concevant en même temps que le Corps y
étoit joint. Les uns ont rendu ces ^o.vo\qs -.Cecy efi mon G orps^
par la première expreffion ^ les autres par la féconde : mais
les uns & les autres n'ont exprimé que la même vérité , la
même doftrine , le même fens, & la même impreffion.
Il ne faut donc pas dire qu'on ne fçauroit tirer la dodrine
de la prefence réelle de ces paroles : Cecy efl mon Corps , expli-
quées par celles-cy : Cecy efl la figure de mon Corps. Car on
l'en tire fort bien, en ne prenant pas ces termes félon leur Ct-
gnifîcation grammaticale , mais félon leur fignificationTheo-
logique j c'eft àdire avec toutes les idées que l'ufage de l'E-
glife y joignoit : comme on ne fçauroit conclure à la vérité
, qu'un homme ait crû recevoir le Corps de J. C. de ce qu'il
dit qu'il en areceu le Sacrement, mais on le conclut fort bien
quand on fçait qu'il prend ce terme comme ilfe prend com-
munément dans l'Eglife Catholique,
Enfin pour ne rien oublier, on demandera peut- eftre pour-
quoy Tertullien auroit ajouté cette explication, c'eft à dire
la figure de mon Corps ., puifque fûppofé que l'on cruft de fon
temps la prefence réelle , cette expreffion que l'Euchariftie
eft le Corps de J. C. étoit du moins auffi intelligible que ce
qu'il ajoute pour l'éclaircir qu'elle eft la figure de ce Corps.
Mais la folution de cette difficulté eft clairement contenue
dans le pafTàge même de Tertullien, qui marque, comme le
AmIs. }z8. dit Aubertin, quec'eftoit une des erreurs desMarcionites.de
prétendre que J. C. n'ayant point de Corps véritable, il avoit
adopté le pain pour en faire fon Corps 5 de forte que félon la
penîce de Marcion il y avoit bien dans l'Euchariftie un ve-
efl appellée type , imuge ^ figure ^ ^c. 75
ritableCorp de J. C. quieftoitlepain, mais il n'y avoit point Ch. III.
de Sacrement de ce Corps , parce que ce pain n'eftoit point
la figure du Corps , mais le Corps même , non par nature, mais
par adoption. Il femble, dit Aubertin, que Marcion ait nié
qu'il y euft dans l'Eucliariftie une figure du Corps de J. C. &:
qu'il ait crû que le Seigneur avoit pris le pain , non comme la
figure de Ton Corps, mais au lieu de Ton propre Corps , & com-
me un Corps emprunté, parce qu'il n'en avoit point de vérita-
ble. Car c'eft ce qui eft marqué par ces paroles de Tertul-
lien. Que fi l'on dit que du painj. C. s'eft fait un Corps ^ par-
ce qu'il n'en avoit point de véritable, c'eftoit donc aufli du
pain qu'il devoit livrer pour eftre crucifié pour nous.
Tertullien a donceûintereftde diftinguer la créance del'E-
glife de celle de cet hérétique , & de ne dire pas feulement que
J. C. avoit fait du pain fon Corps, ce qui eftoit une expreffion
commune aux Catholiques & aux Marcionites , mais de mar-
quer clairement que ç'avoit efté en rendant le pain Sacrement
de ce Corps 5 ce que les Marcionites ne pouvoient dire félon
leurs principes. Mais enfe fervant de ces termes, qui feparenc
le fens des Catholiques de celuy des Marcionites , il y enfer-
me tout ce que les Catholiques y enfermoientj & fi l'cxpreffion
efl:oit imparfaite, l'idée qu'elle imprimoit ne l'eftoit point, par-
ce qu'il y ajoûtoit tout ce qui y eftoit joint par la connoifiance
que tous les fidelles avoient de la dodrine de TEglife.
C'eft ce que l'on peut dire fiir ce paftâge de Tertullien en
s'arreftant au fens que les Miniftres y donnent , & que les paro-
les prefentent d'abord. Et comme cet éclairciiTement ne laifiTe
aucun doute raifonnable , il ne feroitpas neceflaire d'exami-
ner l'autre fens que plufieurs Théologiens Catholiques ytrou-
ven , fi la prcfomption &la fierté avec laquelle les Miniftres
ont fait valoir ce paflage dans tous leurs Ecrits ne meritoit
d'eftre reprimée.
Kij
j(t Li V . n. Bxplkiîion des pajpiges , oti tEucha.n[iie
CHAPITRE III.
Explication du fcns que le Cardinal du Perron , (^ d'autres
Théologiens Catholiques ont donné a ce pajjage
de Tcrtullien.
O M M E le Sens que le Cardinal du Perron 8c plufîeurs
autres donnenc à ce pafTage deTertullieneft tiré de tou-
te la fuite de Ton difcours, il eft neceflairepour le faire enten--
dre de rapporter cepalTageplusaulong; & jepourroisoire que
c'efl: une efpece d'infidélité à M. Claude de ne l'avoir jamais
cité qu'en abrégé, puifqu'il ne peut ignorer que ces Auteurs
croycnt cette fuite necelîaire pour en déterminer le fens.
Le voicy dans une jufte étendue. De tant de fcjles des Juifs ,
dit-il , 7- C. choifit celle de Fafque , parce qua c'efi dans la vue de-
ce Sacrement que Moyfe avoit dit : Ccfi la Pafque du Seigneur.
C'efi four cette raifon qu'il fit paroijire un defirjï ardent de la cé-
lébrer. J'ay .^ dit- il , ardemment de(irè de manger cette Pafqne avec
vous avant que de fouffrir. Efi-ce-là détruire la loy que de fouhaiter
avec tant d' ardeur d' ob ferver la P a fque ? Dira- 1. on que c'efi qu'il
aimoit la chair d'agneau , dont les Juifs mangeoient en ce temps-
la? Et n'efi-il pas vifible que la véritable raifon de ce d.efir efi
qu'il eftoit luy-mcme cet agneau qui dcvoit efire conduit pour cftre
immolé fans jetter un cri non plus qu'une brebis entre les mains de
ceux qui la tondent , voulant accomplir ainfi cette figure ( légale )
de fon Sang falutaire.J. C. pouvait efire trahi par un cft ranger:
mais il eu fi fallu effacer ce verfiet du Pfieaume : Q^Xw^ qui mange
avec moy lèvera le pied contre nioy. Il pouvoit efrc livré aux
Juifs fans que ctluy qui le trahiffoit en tirafl de- recompenfe. Car
quel h e foin les Juifs avoicntils du 7ninifiere de ce traifire pour fie
fiai fir d'un homme qui fe preficntoit de luy-mcme au peuple'', il pouvoit
rftre fai fi ouvertement fans qu'il fu fi befoin que quelqu'un le li-
vrafi par adrefie. Mais cela eufi cfié bon pour un autre Chrifi , ^
non pour celuy qui avoit defiein d'accomplir les prophéties , dans
Ufiquellcs il cft dit .^ qu'ils avoient vendu le jufte. Jeremie même
avoit marqué la fiomme prccife pour laquelle il fut livré ■> & l'ufa-
gs qu'on en fit., lorfque Judas qui s'efioit repenti de fion crime .,
ay.ant renoncé au profit de fion traité , cet argent fut employé *
ejî appellée type ^ image ^figure ^ ^c. 77
V achat du champ £ un potier ^ comme lEvanyle de S. Matthieu le Ch. lîî-
rapporte. Ils ont pris , duce Prophète , les trente pièces d'argent ,
qui eftoient le prix de celuy qui a efté mis à prix , ^ ils les ont
employez à acheter le champ d'un potier. 7- C ayant donc té-
moiriié qu'il avait ardemment defirè de manqet la Pafque com-
me (ïcnne ( car il efloit indiqrie d'un Dieu de defrcr quelque cha-
fe quine luy appartint pas ) Il prit LE PAiN , et le distri-
buant A SES Disciples , il le fit son Corps en disant j
Cecy est mon corps , c'est a dire , LA figure de mon
Corps. Or il n' aurait pas cftè fiyire du Corps de J. C. fi ce
Corps n'eufl pas été véritable. Car un chofe vuide de réalité ,
co7nme un phantbme\^ ne fcauroit pas eflre reprefcntéc parnnc fiyire.
Que Jî l'on dit que du pain ^J. C. fe forma un Corps , parce qu'il
n'en avoit point de véritable , c'cfl donc au/Ji du pain qu'il de-
vait livrer pour nous. C'aurait cflé un chofe ajjez^ conforme à la
folie de Jifarcion qu'un pain eufi efté crucifié pour nous. Mais-
pourquoy appella-t-il le pain fon Corps ^ ^ non pas une citrouille ,
que Marcion avoit fans doute au lieu de tejie , pui [qu'il n'a pà
comprendre que le pain cftait une ancienne fipirc du Corps de J. C.
qui avoit dit par Jercmie : Ils ont confpiré contre moy , <^ ont
dit : Venex^, mettons le bois en fon pain , c'efi a dire\ ta croix en
fon Corps. Ain fi J. C. éclairciffant les figures anciennes a affe:::^
déclaré ce qu'il ajwit voulu que le pain ftznifiaji dés ce temps de
Teremie, en appellant depuis le pain fon Corps.
Voila le pafluige cjui fert de fujet à tant de conreftations.
Nous avons déjà vu qu'il eft inutile aux Calviniftes , en leur
accordant même que Tertnllien ait expliqué le mot de Corps
par ceux de fiyire ou de Sacrement du- Corps. Mais plufieurs
Auteurs , 6c fur tout le Cardinal du Perron, ont prétendu
prouver de pins que l'on peut raifonnablement y donner un
autre fens , éc qu'il peut fîgnifier que \. C prit le pain , c'cfi a
dire Ut fiiqure de fon Corps , (fi le fit fon Corps , 6c: cela en rappor,
tant ces paroles , Hoc c fi figura^ non au mot de Corps qui eil:'
l'attribut de lapropofitionj mais au motdeC^ry, qui en eft le- .
fujet. Ce qui le fait par une efpece de figure que Ton appelle
Jiypcrbate .^ allez commune dans les Auteurs.
La raifon qui fembie aurorifer ce fens, eft qu'il paroift par'
toute la fuite du paifage que le but de Tertullien eft de mon-
trer que J. C. n'eft point contraire à la loy , puifqu'iî en a ac-
compli les figures. Ce qu'il prouve, ôcpar la Pafque accom-
K iij
\
7? Liv. II. ExplicAtiondespalfiges ^oà ÏEucha,riflie
plie par J. C.&: parla qualité de celuy qui lerrahic, qui dcvoit
eftre un de fesdomeftiques, fuivant les Prophéties j ôc par le
prix pour lequel il fut livré, prédit par un Prophète.
Cette preuve continue fans interruption jufqu'à ces paroles,
Profiijus itaquc fe concupifccntià concupijse edere Pafcha^ JesuS-
Christ ayant donc thnoi'ine qu il avait ardemment defirè de
many:r la Pafque ^ qui ne marquent en aucune forte qu'il
palTe à une autre matière, & qui donnent clairement l'idée
de la continuation du même raifonnemcnt.
Il faut donc que ce qui fuit immédiatement, fc^'avoir ^«-^
y. C. fit le pain [on Corps ^ contienne une preuve femblable à
celles qui précèdent. C'eft à dire, qu'il faut que Tertullien
prouve que J. C. a accompli les prophéties & les figures , en fai-
fant le pain Ton Corps. Or il ne le fcjauroit prouver qu'en fuppo-
fant que dans l'ancienne loy , le pain eftoit une figure du Corps
4e J. C. Et comme cette propofitioneffc celle fur laquelle tout
le raifonnemcnt eft fondé, & qu'elle ne peut eftre fuppofée j il
faut encore que Tertullien l'ait exprimée. Et c'efl ce qu'on ne
fçauf oit trouver qu'en rapportant ces mots , Hoc id cfi figura
corporis ^ au fujet delà propofition, c'eftàdireau mot C^fy, & en
traduifant route cette claufe. Acceptmnpanem (^ difirihutum dif-
cipulis , Corpus fuum. , illum fecit , IPoc efi Corpus meum , dicendo ,
idefl figura Corporis mei , en cette manière : '/. C. prit le pain é" le
difiribuantàfes difciples il le fit fonCorps en difant , Cecy ( c'efi
À dire, La figur-e DE mon Corps) est mon Corps.
En un mot le raifonnement de Tertullien demande necef-
fairement ces propofitions : J. C. a fait le pain fon Corps. Le pain
eftoit une figure légale du Corps de J. C. Donc il a accompli les fi-
gures. Aucune des deux premières propofitions ne peut eftre
oubliée , n'eflant pas aflèz claires pour eftre fuppofées. On
trouve la première dans ces paroles : J. C. fit le pain fonCorps.
Il faut donc que celle-cy : Hoc cft figura Corporis met ^ contien-
ne la féconde , qui eft que le pain efioit la figure légale du Corps
de 7. C. puifqu'on ne le fçauroit trouver jailleurs.
Rien ne s'oppofe à ce fens que l'hyperbate qu'il faut admettre,
qui eft une figure un peu extraordinaire , mais elle ne l'eft point
fi fore qu'on ne foit obligé de l'admettre en plufieurs rencon-
tres. On en produit ordinairement cesexemples de Tertullien
Cont. Prax. même : Qhrifius mortuus ef , id ejl uniius^ où le mot unHus fè rap-
«^- 19. porte à Chrifius 5 ôc cet autre du même Auteur j Aperiam in pa^
efl appellée type , mage , figure , g/V. 79
raholam aurcm mearn^ id ei'i^jîmilitudiiiem., où le iuoc à<t Jîmilttu- Ch. I Î I.
dinem efl l'cixplicacion de paraholam , Ôc non dV/^/r^-w. Er cet au- ^'^•"- •'^■^- '^•
tre de S. Chryfoitome ;, Super hanc fctram adificjho Eccicjîam •''■•'^''''
menm , idefl^fidem ^ confe/^onem, où les deux mots de fidon (j,-'
confedisnon font l'explication de celuy àt fetram^ £c non d'£c-
clejicim.
Mais en voicy encore un plus précis & reconnu par Au-
bertin même , dans la propre efpece du pafTage de Tertul-
lien , c'efl à dire ou un mot ajouté après ces paroles 5 Cccy efl
mon S.rng^ eft pris pour l'explication dn Tujet, & non pas
de l'attribut. Il eft tiré de Clément d'Alexandrie, lequel ayant
cité ces paroles , rVro jX^ iaxt ro eiip.a.. ^ecy efl mon Sjti'Z^ :
ajoute tt/^cît TY\i dfi'TCÎXy , le Sang de la vigne. Or Aubeitin
prétend que ces trois derniers mots, £uix tjTî cLfj-T^iAy , fe
rapportent au fujet de la propofition , & qu'il faut tradui.
re toute claufc en cette manière -. O9/, c'efl a dire , le Sang de
la Vigne ^ eft mon Sang. Car c'eft ainfi qu'il le traduit luy
même.
Le rapport parfait de cts deux pafTages ofle certainement
tout droit aux Calviniftes de fe récrier contre l'hyperbate
attribué à Tertullien. Et comme le fens du Cardinal efl d'ail-
leurs tres-conforme à toute la fuite , pour peu qu'ils euflènt
d'équité & de bonne foy, ils reconnoiflroient que s'il n'efl:
pas certain que Tertullien ait eu ce fenSj il eft encore moins
certain qu'il ait eu. celuy auquel ils l'expliquent ; & qu'ainfî
la raifon veut qu'on mette ce paftage à l'écart , comme n'é-
tant propre qu'à éblouir les yeux des fîmples.
CHAPITRE IV.
Troifihne fens naturel que l'on peut donner au pajfage de Tertullien
qui ruine les avantages que les Miniftres en tirent.
MAis afin de montrer encore mieux combien les Cal -
viniftes ont peu de raifon de faire tant de bruit de ce
paflâge, je propoferay encore une autre manière de l'expli-
quer , qui eft pour le mpins auffi probable que la leur.
Chacun f(^ak qu'il arrive quelquefois non feulement à ceux
qui parlent , mais auflî à ceux qui écrivent , de commeo-
s o Li V . 1 1. Explication despcijjligcs , oit ï Euchmflie
cer une période, 6c de l'inrerrompre enfuice par une penfée
incidente , qui efl une efpece de parenchefe. Que^fi cette pa»
renthefe devient trop longue lorfqu'il efl; queflion d'achever
la propolltion commencée , il arrive quelquefois ou par négli-
gence ou par quelque veuë , qu'on le fait par un autre tour qui
ne s'accorde qu'avec les premières paroles. Ainfî elles de-
meurent fufpenducs Scdefliituces de leur fuite naturelle.
C'eft ce que les Grammairiens appellent , tt>'ax,«'A»}-oi', ou difl
cours fans fuite. Et il y en a des exemples dans Ciceron même.
En voicy entr'autre^untres-propre pour éclaircirceluy que je
feray remarquer dans TertuUien. Il efl; tiré du fécond livre des
Tufculanes , où Ciceron parle de la forte : Btcnimfi orationes
quas non multiiuiinii judicio probari volebamus , fopularis
efi enhn illa facultas , & ejfeïius éloquent i,i: tfl audicntium
approbatio. Seâ Jl rcpcriebantur nonnulli qui 7ïihil laudarent ,
nifi quod fe imitari poffe confidercnt. On peut remarquer dans
ce paiïàge trois claufes qui forment cette figure. La premiè-
re confifte dans ces paroles qui demeurent fufpenducs.- Ete-
nimjî orationes qu.ts nos multitudinis judicio probari volebamus.
La féconde dans la parenthcfe qui interrompt la fuite :
Popularis efi eniyn illa facultas , (^ effccius eloqucntia efi aiidien-
tium appfcbatio. La troifiéme conflfte dans la reprife qui fuit
Ja parenthefe, & qui continue la première claufe, mais par un
autre tour , qui ne fe peut joindre avec cette première dans une
conflrudion régulière 5 Scd fi reperiebantur nonnulli qui nihil
laudarent , nifi quod fc imitari pojfic confidcrent.
Que fi l'on trouve de ces fortes de figures , ou plûtofl: de négli-
gences de flile dans Ciceron qui écrivoit fi exactement j il n'y a
pas lieu de s'eftonner qu'on en voye dans TertuUien qui efl un
Ecrivain impétueux , Û. qui fuivant la chaleur de fon efprit , ne
s^afllujettit pas Ç\ precifément aux règles de la conftrudion.
Aulfi ne faut-il pas en aller chercher bien loin des exemples
dans cet Auteur. Car qui ne voit que dans cette période : Poiir-
quoy donc appcllc-t-tlle pain fon Ccrps ^ (^ non pas une citrouille
que Murcion avait au lieu de te fie , n'entendant pas que c'cfioit une
ancienne fi'^ure du Corps de'j.C. CuB. autem panent Corpus fuum
appellat , £?> nonpotius peponcm , quem M arc ion cordisloco habuit^
non intclligcns vétéran fuifje ijlam fiyiram Corporis chrifiij(\\n
ne voie, dis-je^ que ces paroles ^ P^urquoy appelle-t-il le pain
fon Corps, Cu». autem panem Corpus fuum appcllat ^ demeu-
rent
efi appellée type , image , figure ,(^c. 8 1
renc fufpenduës, 6c n'onc point de luice direclc, mais que s'c- Ch. VI.
tant détourné pour faire une raillerie de Marcion en difant
qu'il avoir une cirroiiille au lieu de teftc , il attache à la fin de
cette raillerie la réponfe qu'il devoir faire dirticlement à la que-
flion propofée, 6c il l'y attache par un tour qui ne (e lie pas
bien avec cette queilion. Car ce n'ell: pas un difcours raifon-
nable que de dire : Cur autem pancm corpus ftium appelLit ^ Q-non
fotius peponem , no7i inteUigcns vetercm fuiffc tfiam figuram Corpo,
ris Chrifin.
Il eft certain de plus que dans le pafTage même dont il s'agit
il faut admettre un difcours interrompu. Car il eft vifible que
ces ^a.To\es:J.C. ayant donc témoigné qu il avait ardemment fou -
haité de manger lapafque comme jienne^ frit le pain ^ ^ le diji ri huant
à [es difciples il en fit [on Corps en difant;, Cecy cfi mon Corps , appar-
tiennent à la principale preuve que Tertultien traite en ce lieu-
là , qui eft de montrer que j. C. a accompli les Prophéties. Ec
il eft certain de plus qu'elles ne contiennent que le commen-
cement de cette preuve , &; que TcrtuUien ne la reprend & ne
l'achevé qu'après une parcnthefede fix lignes, par cette que-
ftion : Pourquoy appelle- 1 illepainfon corps, Q;- non pas une citrouil-
le^ que Marcion avoit au lieu de tejle : n^ entendant pas que c" eft oit une
ancienne figure du Corps de J. C. De forte que tout ce que Tertul-
lien dit incidemment contre l'erreur des Marcionites, qui n'ad-
mettoienten J. C. qu'une chair phantaftique, eft une interru-
ption de cette première preuve, qui demeure imparfaite Sc/uf-
penduc par cette longue parenthefè.
Et l'on peut encore remarquer furcefujct, que lors que Ter-
tuUien reprend cette première preuve qu'il avoit commencée,
ce n'eft point en la continuant par une fuite qui y puft eftre
jointe directement , mais en y ajoutant ce qui y manquoitpar
un autre tour 5 & c'cft-là proprement ce qu'on appelle interru-
ption ou oLya.y.câAyJov.
Le bon fens donc obligeant d*a<lmettre un difcours fufpcndu
en cet endroit, il n'y aucun inconvénient de l'admettre de la
manière que je vay dire.
Ilfaut fuppofer,ce qui eft très - certain , que Tertullien veut
montrer que J. C. a accompli les figures de l'ancienne loy en
faifant le pain fon Corps , & que c'eft dans cette vue qu'il dit ,
7. C. ayant donc témoigné quil avoit ardemment fouhaité de manger
UP afque (ojwne fiennc ^ prit le pain ^ le difinbuant à. fie s dificiples^ il
L
Sx Li V. 1 1 . Explication despa,Jfiiges , ou t EuchuriHie
en fit [on Corps en difant ^ Cecy efimonCorps. Or pour rendre ce
raifonnement concluant Tercullien dévoie montrer que dans
l'ancienne loy le pain que J. C. fit Ton Corps eftoit la figure de
fon Corps. C'eft: auflî ce que l'on peut croire avec raifon qu'il
avoit deilein d'exprimer immédiatement après par ces paroles
ou autres femblaoles : C'cfi à dire la figure de mon Corps mar-
quée dans l'ancienne loy , efl maintenant mon Corps.
On a raifon de fiippofer que Tertullien avoit toute cette fi.iite
dans l'efprit, puifqu'on la trouve effedivement fix lignes
après : mais ayant commencé à propofer les premiers mots de
cette preuve, qui font, ^'efl a. dire la figure de mon Cotps , Id efi
figura Corporis met ^ au lieu d'achever comme il avoit defi!ein
de faire, & de dire tout d'une fuite , Ceft à dire la figure de mon
Corps qui a cfié marquée par le Prophète Jeremie, e^ mon Corps'j
le mot ât figure luy ayant ouvert un moyen de réfuter en paf-
fant l'erreur des Marcionices contre la chair de J.C. il fe détour-
ne de la fuite de fon raifonnement par une longue parenchefe ,
pour entrer dans cette preuve incidente , 6c enfuite il achevé
ce qu'il avoit commencé j mais il l'achevé comme l'on fait en
cesoccafions en reprenant ce qu'il avoit commencé par un au-
tre tour indépendant du commencement , l'interruption
ayant elle trop longue pour prétendre joindre le commence-
ment de la propofition , Se la reprife dans une même conftru-
élion , &: pour fuppofer qu'on s'en fouvint.
Ainfi félon ce fens, ces paroles, Pourquoy appelle-t-il le pain
fon Corps , é^ non pas une citrouille que Marcion avoit au lieu de
icfie , n'entendant pas que c' eftoit une ancienne figure du Corps de
J. C. qui fe trouvant immédiatement après la réfutation inci-
dente de l'herefie desMarcionites contre la Chair de J. C. ne
font qu'une reprifè qui achevé une propofition qu'il avoit
commencée, & qui forment avec cette première propofi-
tion un raifonnement entier qui ne fuppofe rien que de
clair.
La première propofition qui efl que y. C.fitle pain fon^-orps^
efl: contenue dans la première claufe.
La féconde, que le pain eftoit une figure légale v orps de J. C.
'commence dés cette première claufe, & efl reprife & achevée
dans la dernière.
' Et entre cesdeuxclaufesil y aune longue parenthefe , dans
laqiielleTertuUien réfute en pafl!ant l'erreur desMarcionites,
f/? appelles type ^ imuge , figure ^ ^c. S5
qui enreignoient que J. C. n'avoir point un vxay Corps. Ch. IV.
Ce fens convient avec ceiuy de M. du Perron en ce que
l'on entend par ces mots, Cefi à dire la figure de mon Corps ^
que le pain qui eftoit figure légale du Corps de J. C. a eftë fait
fon Corps. Mais il en eft différent en ce que M. du Perron
prétend que ces mots , c'cfi à dire la figure de mon Corps , font
partie de la période précédente, au lieu que l'on en fait, félon
cette explication, le commencement d'une nouvelle période,
qui efbant interrompue par une longue parenthefe, ne s'achè-
ve que fîx lignes après. Et ce qui femble l'autorifer davantage,
c'eft que la reprifefe trouve juftement au bout de la parenthe-
fe , ce qui eft le caradere de cette figure que l'on appelle «,'1 b)c«-
Voila donc deux fens difFerens de celuy des Miniflres, auf-
quels on peut entendre ce paflage de TertuUien , 6c qui font
plus probables que le leur , comme on va voir par la réfutation
des objedions d'Aubertin, Car quoyqu'il fe vante d'avoir re-
futé Tes adverfaires par de forts argumens ramalfez de toutes
parts , "validis rationibus undequaque conquifitis , je prétends
faire voir qu'il avoit plus de fierté que de force , & plus de fauf-
fè fubtilité que de véritable lumière.
CHAPITRE V.
Réfutation des raifons d'Aubertin Contre le fens auquel le Cardinal
du Perron prend le paffage de TertuUien.
PREMIERE OBJECTION D'AUBERTIN.
A Ubertin tire fa première preuve contre le fëns du Car-
X5v, dinal du Perron du pafTage de TertuUien que nous avons
expliqué avant celuv-cy. Hocliyium^ dit cet Auteur, e^///(r-
remiai ttbi infînuat diHuris pr.-vdicans Judais , Venite^ mittamus
lignum in panem ejus\ u tique in Corpus. Sic enim Deus in Evan-
felio quoque veftro rcvelavit , pane?n Corpus fuum appellans , ut
hinc jam eum intelliqas , Corporis fui fiyiram pani dedijfe , cujus
retrb Corpus in pane Propheta figuruvit , tpfo Domino hoc Sacra^
mentum poflek interpretaturo.
On a déjà fait voir qu Aubertin n'a point entendu ce paflàge.
§4 Liv. 1 1. Explic'.ttion des pa.Jfa.ges , ou V Euchari/iie
èi. que le (ens de TertuUien eft que J, C. avoir voulu que dés
le temps de Jeremie le pain fuft figure de fon Corps ^ ce quiau-
torife encore le fens du Cardinal du Perron qui eft fondé fur
cette remarque de TertuUien. Mais l'ufage qtf Aubertin en
fait en cet endroit icy cft tout à fait rare.
'jMh. p. 351. Il f dut remarquer , dit il, que dans ce lieu de 'jeremie ce n'efi
pas le pain qui cft figure du Corps de J. C. en parlant exaïiement ^
fui [que Jeremie n avait pas un pain entre les mains , mais que
c'eft le motdeV K\w qui cft félon TertuUien fîqtire du Corps de J.
C. CarTertulken dit que le mot de P Ain cft mis pour celuy de Co R.P y.
dans ce pajfaqe: Mettons le bois dans fon pain , c'cft a dire dans
fon Corps par une métaphore cachée dans le ?not de pain. Si donc lorf-
qu'il fait dire cnfuiie à 7\fo[ire Sei'gncuj : Cecy eft mon Corps,.
c'efi à dire , la figure de mon Corps , il rapportait les mots de
FIGURE DE MON CoRPS ail mot de CtCY , ^ qu il l'entende de
te pain dont il efl parle dans 'jeremie , le fens de ce difcours feroit
neccijaircmcnt : Cecy , c'eft a dire le ynot de Pain , lequel fous la
loy eft ou la fiyire de mon Corps , eft mon Corps -, ce qui eft le comble
de l'abfurdité : carefl-ce le mot de Pain qui a efté fait le Corps de:
J. C. dfins l' Evanyle ^'
REPONSE.
Il eft difficile de s'imaginer une plus fauffe fubtilité que cel-
le qui fait le fondement de cette objection d'Aubertin. Il eft
vray que Jeremie n'avoit pas du pain devant les yeux quand
il fait dire aux Juifs: Mettons le bois en fon pain -^ mais il eft.
très- faux que ce foit le mot de pain qui foit la figure du Corps
de J. C. c'eft la choie fignifiéeparce mot, c'eft à dire, du pain.
Ce. Mmiftre, quelque habille qu'il fuft, n'a pu comprendre en
cette rencontre qu'il falloit confiderer deux chofes dans les
mots, le fon &: la chofe fignifiée. Selon le fon il n'y a nul rap-
port du mot de panis au mot de Corpus -, & ainfi ce mot confi-
deré comme mot , n'a pu eftre figne du Corps de J. C. Tout
le rapport eft entre les chofes fignifiées. Et c'eft ce rapport du
pain au Corps de J. C. qui fait que le mot de/»///» peut eftre mis
par métaphore pour celuy àt Corps -.^ de même qu'afin que le
mot de lion puifle eftre mis pour un vaillant homme , il faut
que l'animal , que ce mot fignifîe , foit l'image de la va-
leur.
J
eji appellée type , image , figure ^ (^c. 85
En un mot la métaphore confifte non à fe lervirdes mots & Ch. V-
des fenspour repreienter les choies que Ton veut faire enten-
dre j mais à prelenter à l'elpric par le moyen des fens^ les ima-
ges de certaines chofes pour en faire concevoir d'autres. Le
mot ne fert qu'à peindre l'image de la chofe dans rcfprit.
Mais c'eft la chofe même peinte dans l'efprit qui en reprelcn-
te une autre. De forte qu'il n'y a point d'autre différence en-
tre une métaphore & un tableau dont on fe ferviroit pour re-
prefenter quelque chofe , finon que le tableau eft extérieur
& expofé aux yeux du corps, au lieu que la métaphore eft
un tableau intérieur qui ne s'apperçoit que par l'efprit.
On ne fçauroit donc plus mal raifonner qu'Aubertin fait
en cet endroit , en prétendant que ce n'eft pas le pain même ,
mais le mot de pain qui eft figure du Corps de j. C. dans Je-
remie. Car puifque félon Tertullien ce Prophète s'eft fervi de
ee mot de /'.-//« pour fignifier le Corps de J. C. il a donc peint
le Corps de J. C. dans l'elprit de fes lecteurs fous l'image du
paini éc par confequent c'eft le pain conçeu par l'efprit qu'il
a fait fervir de figure au Corps de J. C.
Ce que ce Miniftre ajoute que félon ce fens Tertullien aura
voulu expliquer de cette forte ces paroles de J. C. Cecy efl
mon Corps , c'ejî à. dire ^ le mot de fain qui fous la Loy eftoit fi'iiirc
de mon Corps , eft mon Corps-^ eft une continuation de la même
abfurdité & de cette fauffe fuppofition que ce foit le mot de
fain qui foit figure de J. C. & non pas la chofe fignifiée par ce
mot. Et comme cette fuppofition eft ridicule, laconfequence
Teft aufïï. Ainfi le fens^de cettep ropofition deTertullien eft que,
Cecy, c'eft à dire ce pain, lequel avoir fervi à Jeremie à fi-
gurer mon Corps, eft mon Corps. Et ce fens eft tres-raifonna-
ble , ôc n'eft nullement embarairé.
IL OBJECTION.
La deuxième objedion eft tirée du lieu même dont il s'a-
git. Car ^ dit-il, Tertullien y dit que J. C. ayant pris le pain le
fit [on Corps , en difant : Cecy efl mon Corps , c'eft h dire , la fi.
yire de mon Corps. Or à quoy fe peut rapporter le pronom , Cecy ,
finon au pain que J. C. avoitpris , puifqu'tl fuppofe manifcfctncnt
un terme précèdent auquel il foit relatif Or dans tout ce livre
de Tertullien il.n'avvit encore eflè fait aucune mention de ce pain
L iij
86 hiv. II. Explication des pa.Jfa.ges ^ oui" Euchariftie '
dont parle Jeremie-^ ^ il avait au contraire marqué tres-diflinBe.
ment le fain que J. C. avait fris d^ qu'il diftrihua â fes Apôtres ■
(^parcanfequent c'efi de ce pain Eucharifiique qu'il dit que c'efioit
la figure de fon Corps.
R E' P O N S E.
Ce n'efl: encore icy qu'une fubtilité fophiflique, qui ne vient
que de défaut d'intelligence. Il efl: certain que ie pronom ,■ Cecy
£e rapporte au pain qui efboit prefent devant J. C. mais cela
n'empefche pas que ce pain eftant du pain, c'eft à dire pofle-
dant les qualitez qui conviennent au pain en gênerai, Tertul-
lien n'en ait pu dire qu'il efioit figure dès le temps dejeremie.
Aubertin ne fçauroit nier qu'il ne le dife dans la fuite du paC
/âge en ces termes, intelligens veterem hanc figuram Corporis
Chrifii: car cela s'entend aufli de ce pain que J. C. tenoic
dans fes mains. Ce n'efl: pas que ce pain que J. C. tenoit , eufl:
efl:ë individuellement du temps de Jeremie , mais c'eft que le
pain en gênerai ayant efté employé par ce Prophète pour fî-
gnifier le Corps de J. C. on peut dire enfuitede chaque pain
particulier qu'il a fervi de figure du CorpsdeJ. C. dësle temps
de Jeremie, comme l'on peut dire d'un Lion particulier qu'il
cfl: l'image de la valeur, parce que le Lion en gênerai en efl:
l'image.
Il efl encore vray queTertullien n'avoir point jufqucs-là par-
lé dans ce livre contre Marcion , de ce pafîàge de jeremie où
le pain eft employé comme figure du Corps de J. C. mais
c'eft: qu'il avoir delTein d'en parler immédiatement après ces
paroles, Moc eft figura Corporis mei ^ quoyqu'ayant interrom-
pu fon difcours par uneparenthefe, il ne l'ait fait que fix li-
gnes après.
III. OBJECTION D' AUBERTIN.
La troifiéme objedion fe peut réduire à ce raifonnement.
TertuUien témoigne un peu après ce pafîlige même , & dans
le livre (uivant qu'il avoit refuté l'erreur des Marcionires tou-
chant la chair de J. Cpar le Sacrement du pain ^ aufli bien
que parceluy du C.'.Iice ; ce qui ne fe peut entendre que du
pafîagedonc il s'agit. Or il n'auroit point refuté l'erreur des
efi dppellée type , imdge , figure , t^c. îj
Marcionites parle Sacrement du pain dans ce paiïage , à moins
que d'entendre ces paroles , id efi figura Corporis mei , dans ce
fens , que le pain a été fait par J. C. la figure de fon Corps ,
puifque la preuve de Tertullien eft fondée fur cette maxime ,
qu'une figure fuppofe que la chofe reprefentée eft réelle. Donc
c'eft en cette manière qu'il faut entendre ce paflage.
REPONSE.
Il y a trois chofes vraies dans cette objection , mais la con-
fequenceeneftfauire. Il eft vray que Tertullien prouve la réa-
lité de la chair de J. C. contre les Marcionites /'^r/é- Sacrement
du pain. Il eft vray encore que fa preuve eft fondée fur ce prin-
cipe , qu'une figure fuppofe la vérité de la chofe figurée. Enfin il eft
encore vray qu'afinque le pain du Sacrement prouve la vérité
delà chair de J. C.en vertu de ce principe, il faut que l'on
prouve qu'il eft figure de cette chair.
Tout cela eft vray. Mais il n'eft pas neceflaire pour rendre cet-
te raifon concluante que l'on mette en fait que le pain eft une
figure Evangelique de cette chair. Il fuffit que l'on prétende
qu'il en eft une figure légale ^ une figure prophétique, & qu'il
aferviau Prophète Jeremie pour figurer la chair de J. C. Car
ce principe deTeituUien, que la figure fuppofe la vérité delà
chofe figurée, eft auflî vray d'un genre de figure que d'un autre.
Et il n'eftoit point neceffaire à Tertullien, qui eftoit porté par
la fuite de fon raifonnement à faire remarquer que le pain dont
J. C. s'eftoit fervi, eftoit une figure de fon Corps employée par
Jeremie, de remarquer de plus qu'il en eftoit figure dans le
temps même de la loy de grâce ^ puifque l'argument qu'il tire
contre les Marcionites de cette qualité de figure eft tout auffi
bon pris d'une figure ancienne que d'une figure nouvelle C'eft
pourquoy c'eft tres-mal raifonner à Aubertin d'alléguer que
quelques Auteurs fe font fervis de même de la qualité de figu-
re que le pain a par l'inftitution de J. C. pour prouver la véri-
té de fa chair , afin d'en conclure que Tertullien a confideré
dans ce paiïage le pain comme figure Evangelique du Corps de
J. C. Ces Auteurs qui fe font fervis de cet argument n'avoient
point été portez par la fuite de leur difcours à confiderer le pain
comme figure légale du Corps de J. C. Etainfi ayant eu fim-
plement befoin de faire remarquer dans le pain du Sacrement
88 Liv. 1 1. Expl. des Paffages où l' Euchuriflle
la qualité de figure, ils l'ont fait de la manière la plus com-
mune. Mais comme le delTein de TerCuUien eftoit de montrer
que J. C. avoit accompli les Prophéties , & que la raifon qu'il
avoiteuc dechoilîr le pampouren faire (on Corps, c'ert que
Je pain avoit efté dans l'ancienne loy, figure de Ion Corps-,
ce delTein , dis-je, l'ayant obligé de coniîderer le pain comme
figure légale du Corps de J. C. il n'avoit plus beioin de mon-
trer que le pain eftoit encore en une autre manière la figure de
ce même Corps j puifque de quelque manière qu'il le fuft ,
l'argument qu'il en tiroit pour prouver la réalité de la chair
de J.C. n'eftoit pas moins concluant. De forte que tant s'en
faut que cette railon prouve ce que prétend Aubertin , qu'elle
prouve tout le contraire , puifqu'il eftoit eflentiel au deffem de
Tertullien de confidcrer le pain comme figure légale du Corps
de J. C. &. que cela (uppofc il auroit efté ridicule à luy d'avoir
recours à l'autre manière dont le pain eft figure, puifque la
première eftoit tout aufli forte que la féconde pour en con-
clure ce qu'il pretendoit.
IV. OBJECTION.
^^^ Je rapporteray comme une quatrième objecflion le repro-
che qu'Aubertin fait au Cardinal du Perron d'avoir fait deux
aryimens monflrucux 6c plus dignes d'un homme endormi que
d'un homme éveillé, & qui ufe de ^z. raifon. Le fondement
qu'il en prend, eft que ce Cardinal avoit réduit le raifonne-
ment que Tertullien fait dans ce paflagc cà ces deux argumens :
Jcfiis-Chri/la fait le pain fon Corps. Or le pain ejîoit la fipire leyile
de ce Corps, jl a donc accompli les figures légales. Ou hten , dit-il,
en renverfant l'argument , J. C. devait accomplir les fiyircs léga-
les. Or le pain eftoit la figure légale du Corps de J.C. Il ^ donc fait
ce qti'il devoit en fai fiant le pain foji Corps.
Sur cela Aubertin fe récrie, qu'il ne fiait fi le Cardinal du
'Perron a cent cela par jeu ou ferieufimcnt , s'il eftoit éveillé ou en.
dormi , mais que ces deu\ argumens font des monftrcs tres-mon-
firueux dans le genre d' argumens .^ neftant dans aucune figure ni
dans aucun mode : monstra funt monftrofi./Jima in génère aryi-
mentormn , figura ^ modo carentia.
REP^
êfi Appellée tjfe , imagi , figure , &c. S9
RE'PONSE.
Je fuis fiché d'eftrc obligé d'ofter à Aubertin la gloire d'a-
Yoirefté ^rand Logicien , que je luy laifTerois bien volontiers.
Mais en vérité rinfolenceaveclaquelle il traite un homme auflî
célèbre que le Cardinal du Perron, force en quelque forte de
luy montrer qu'il n'étoic pas difficile d'en fçavoir plus que
Itiy dans cette fcience, quelque habile qu'il s'y cruft, bien qu'il
en ait pris fujet d'infulter à un homme que fa dignité & fon
mérite luy dévoient faire refpeder quand même il auroit eu
quelque tort. Car la chaleur de la difpute 5c la différence des
Religions n'ont jamais dû faire oublier à Aubertin & à (es
femblables qu'ils écrivoientdans un Royaume Catholique, oii
toutes fortes de loix les obligeoient à une retenue toute autre
que celle qu'ils gardent dans leurs Ecrits. Mais quoyqu'il en
foit, il eft facile de faire retomber ce reproche fur celuy- mê-
me qui l'a fait , en montrant qu'il n'y a rien de monftrueux dans
les argumens du Cardinal du Perron , mais qu'il y a quel-
que chofe de fort extraordinaire dans l'aveuglement de ce-
luy qui a eu la hardiefle de luy faire des reproches fi bas 5c
fi mal fondez.
Car c'eft une chofe afiêz étonnante qu'à l'âge où eftoit Au-
bertin il ne fçuft pas encore diftinguer une Enthymeme d'un
Syllogifme \ éc qu'il fe foit récrié que des argumens eftoienc
monfirueux , parce qu'il luy a plu de chercher ridiculement
dans deux entymeme* très bons &: très, fôlides , les conditions
& les règles des Syllogifmes catégoriques.
Il n'eft donc befoin pour faire connoiftre fonillufion que de
prouver fimplement que les argumens qu'il a pris pour des
Syllogifmes ne font que des Entymemes, & que ce qui l'a trom-
pé eft que la première propofition n'en eftant pas fimple , mais
compofée de deux propofitions , il a crû que ce devoit eftre
une majeure & une mineure, au lieuqueccn'eftoient que des
parties d'une même propofition.
Or cette preuve eft bien aifée. Car n'y ayant point d'autre
différence entre un enty même & un Syllogifme, finon que dans
l'enrymemeil y a une propofition omife , & qu'elles font tou-
tes experimées dans un Syllogifme, il s'enfuit que tout argu-
ment qui par l'adition d'une propofition devient Syllogif.
M
Ch. V.
90 Liv. IL Explication despa.Jfa,ges^ ou rEuchar'ifiie
me parfait, eft un enthymeme lorfque cette propofition n'cfl
pas exprimée.
Qlic ceux qui s'intereflênt à la réputation d'Aubertin pren-
nent donc la peine d'ajouter cette majeure au premier argu-
ment du Cardinal du Perron : Quiconque fait fon Corps , d'une
fiyirc ley.de de ce Corps ^ accomplit les figures légales ^ & il verra
s'il ne fera pas en forme eftanc exprimé &dirporé en cette ma-
nière 5
Quiconque fait fon Corps , de ce qui en efloit dans la loy une figu-
re , accomplit les figures légales.
Or fi J. C.afaitfion corps du pain: é^ fi le pain en cftoit une figure
légale.
Donc J. C. a accompli les figures légales.
M. Claude eft: fans doute trop habile pour ne pas recon-
noiftre tout d'un coup que cet argument eft tres-bon &: tres-
concluant, qu'il eft de la première figure du premier monde ,^
parce que la féconde proportion eftant non particulière mais
iîngulierej eft équivalente à une univerfelle , &; que bien loin
d'eftre monjhueux^ il n'y a rien au contraire de plus ordinaire
dans les Auteurs que ces fortes d'argumens.
Il n'y a qu'à en faire autant du fécond argument en y ajou-
tant de même une majeure en cette manière.
Celuy qui devant accomplir les figures de la loy , fait fon corps de
ce qui en efioit une figure légale ^ fut juftement ce qu'il avait deffein
de faire.
Or J. C. devait accomplir les figures de la loy , (jr- le pain dont
il fit fon corps en efioit une figure légale.
Donc en le changeant en fon corps il a accompli ce qu'il devoit
faire.
Qu'eft-ce qu'il y a de monfirueux dans ces argumens ? Ce-
pendant ils ne font difFerens de ceux du Cardmal du Perron
qu'en ce que l'on ajoute à chacun une majeure que ce Cardi-
nal n'a omife que parce qu'elle eftoit trop claire. Donc avant
cette addition ce n'eftoient que à.ts enthymemes, qu'Auber-
tin par une erreur que je neveux pas nommer du nom qu'elle
mérite, a pris pour des w^»/?r^/ , en les prenant pour des Syllo-
gifmes. Voila ce que c'eft que de faire vanité de ces connoif-
fances puériles. Car une faute de ce genre ne feroit rien à un
homme que le hazard feul y auroitfait tomber, mais elle n'eft:
pas pardonnable à un Miniftre, qui ayant gris fujet d'une chi-
cfl appellée type ^ image ^ figure , t^c. 91
canerie de Logique d'infulcer outrageufement à un Cardinal, Ch. V.
fe trompe Iny. même tres-groffierement, èc fait voir qu'il
ignore les principes les plus communs d'une fcience dont il fe
pique.
C'eft à quoy fe reduifent ces terribles argumens recherchez
de toutes parts, Vjlidis r.itionibus uniequaque conqutfitis ^ par
lefquels Auherrin devoit faire voir la fauflèté du fens que le
Cardinal du Perron donne à ce paiîage de Tertullien que nous
avons examine. Et comme il a paru que ce n'eftoient que de
purs Sophilmes, il doit maintenant paiîer pour confiant que ce
fèns eft très-probable, & que s'il n'eft pas abfolument certain
que ce foit celuy de Tertullien , il eft au moins certain que les
Miniftres fonttres-injuftes d'avoir tant fait de bruit par toute
l'Europe fur un paflage de cette nature ^ c'eft à dire qui peut
eftre expliqué tres.probablementen deux manières quileur font
entièrement contraires , &; qui ne leur fêroit pas même favo-
rable eftantexpliq lé félon leur fens, parce que ce fens eft en-
core ambigu, & ne peut eftre déterminé que par la docTirine
de l'Eglife de ces fiecles là , que nous avons montré eftre tres-
conftamment celle de la prelênce réelle 6c de la tranftubftan-
tiation.
CHAPITRE VI.
Examen de trois Paffaz^es-^ le premier de Pachymcre : le fécond de S.
Auqufiin contre Adimante: le troifiéme du même S. Augufiin
dans fa Lettre a, Boniface. On fait voir que les Miniftres en abu-
fent de même que du paffage de Tertullien.
RI E N n'eft plus capable de nous affurer que des Auteurs
ont efté effectivement dans un fentiment , que lors qu'on
voit qu'ils difent precifément ce qu'ils ont dd dire , fuppofé
qu'ils ayent efté dans ce fentiment, &. qu'ils ne difent jamais
ce qu'ils n'ont pas du dire , & ce qu'ils n'auroientpas manqué
de dire, s'ils en avoienteu un autre. Qu'ils difent fouvent ce
qu'ils ont dii dire fouvent-, rarement ce qu'ils ont dû dire ra-
rement, & que toutes ces expreffions font accompagnées des
circonftances naturelles , que. la raifon 6c la nature y dévoient
joindre.
M ij
^t Li V. W! Explication des pA^ages , oà ÎEuehxriJïis
Nous avons déjà vérifié la pluiparc de ces remarques dr.ns
les expreflions des Pères qui contiennenc la doctrine de la pre-
fcnce réelle. Car nous avons montré qu'ils fe fîmt juftement
exprimez comme ils le dévoient pour nous perfuader qu'ils
avoient efté dans cette dodrine, en nous difant fi fou vent que
ce que nous recevons à la Communion eftoit le vray Corps ^ U
propre Corps , le Corps même de J. C. qu'il efioit en nous par luy-
mème , par [on propre Corps , par fa propre Chair i &: que toutes ces
expreffions,& mille autres femblables qui fe trouvent dans leurs
Ecrits, font toutes accompagnées de fuites naturelles qu'elles
dévoient avoir félon la doétrine de la prefence réelle;
On a fait voir qu'ils le font exprimez de cette manière dans
les occafions où ils le dévoient faire naturellement ; comme
en inftruifant de nouveaux baptilêz de ee qu'ils dévoient croi-
re de l'Euchariftie : en parlant à des perfonnes qui n'euflent pu
entendre la bizarrerie de leur langage , s'ils n'eufifent pas vou-
lu eftre entendus à la lettre .-En commentant l'Ecriture Sain-
te : En combattant les doutes qu'ils ont cru pouvoir naiftre de
cette dodlrine : En traittant dogmatiquement de l'Euchariftiej
& qu'ils n'ont jamais parlé fi clairement quelorfques'arreflans
long tenn-ps fur ce fujet, ils ont eu moyen de nous inftruire plus
à fond de leur fentiment.
Nous avons fait voir qu'ils n'ont jamais dît ce que Fa do-
drine de la prefence réelle les devoit abfolument empêcher
de dire : Qu'ils n'ont jamais repris perfonne de croire que J.
C. fuft prcfent : Qu'ils n'ont jamais craint ny que les paroles
de l'Ecriture, ny que les leurs mêmes fufifentprifes parleurs
auditeurs en un fens trop littept^ trop g-roffier : Que la pré-
caution qu'ils ont eue pour empêcher qu'on ne prift à la lettre
mille métaphores de l'Ecriture qui n'ont jamais trompé perfon-
ne , n'a jamais efté obfervée par eux à l'égard des expreflions
qui marquent fi precifément la prefence réelle: Qu'ils n'ont
jamais dit que le Corps de J. C ne fi.ift pas contenu dans les
Myfteres du pain & du vin ,& que ce Corps ne fuft pas recea
dans les noftres .• Qii'ils n'ont jamais exprimé ces prétendus
doutes Calviniftes, fi le pain peut eftre rendu figure du Corps
de J. C. Si le Corps de J. C eftant dans le Ciel peut impri-
mer fa vertu au pain qui eft fur la terre. Tout cela ne fe trou-
ve point dans les Pères, parce que c'eflrla dodrine de l'abfên-
ce réelle qui devoit produire ces difcours , 5c que cette do,^
cjî a.ppellée type ^ imige ^ figun, ft)c. 93
Arine a toujours efté tres-ëioigné de leivr pcnfee. Ch. VI.
Il ne refte plus que de faire voir icy qu'ils ont dit de même
rarement < ce qu'ils dévoient dire rarement, & qu'ils l'ont dit
de la manière qu'ils le dévoient , & avec les'circonftances qui
s'y dévoient rencontrer.
Car il y a certaines expreffions ambiguës que la dodrinc
de la prefencc réelle peut produire , Se qui peuvent ainfi (e ren-
contrer dans les Pères ; mais qui n'y peuvent néanmoins être
que rarement , parce qu'elles nous font regarder ce Myftere
d'une manière moins naturelle & moins conforme aux idées
communes que lafoy & la pieté en donnent.
L'idée qui porte à prendre dans cette propofîtion ^Cecy cfi
mon Corps , le mot de Cecy pour le voile extérieur , le figne 6c
le Sacrement, eft proprement de ce genre. Car l'Euchariftie
comprenant j comme nous avons déjà dit , & le Corps de J. C. .
& le voile extérieur qui le cache à noftre vu<;, l'un & l'autre
peut eftre exprimé & entendu par le mot de Cecy ; puifquc ,
comme nous avons déjà dit, le Corps de J. C.&le voile exté-
rieur conviennent dans cette idée confufe de chofe prefentc
qui s'exprime par ce mot. Mais il eft vray qu'on a beaucoup
plus de pente a expliquer le mot de Cecy de la fubftance pre-
fènte , & de ce qu'il y a de principal dans l'objet prefent , que
d'une apparence qui n'y eft que pour luy fervir de voile. Mais
quoy que l'autre idée foit moins naturelle, elle a pourtant
auffi fa vray femblance, parce que le mot de Hoc a quelque
rapport à ce qui frappe les fens. Et c'eft pourquoy Jacques de
Vitri remarque exprefîement qu'il y en avoit parmi les Scola-
ftiques qui les expliquoient en ce fens. Quibufdafn vidctur quod
forma panis iemonfiretur ut Jit fenfus , Hoc , idefi fub hoc , ejl Cor- c] r^^'°^^j^t'
fui meum.
Il ctoit difficile, pour ne pas dire moralement impoffiblc ,
que tous les efprits du monde confpiraflent tellement à pren-
dre le mot de Cecy dans un de'ccs fens, que l'autre fuft généra-
lement abandonné. Cela ne fe rencontre prcfque jamais dans
les idées mêmes les plus bizarres & les moins raifonnables , 6c
ç'auroitefté mal connoiftre l'efprit des hommes que de s'y at-
tendre en un fujet comme celuy-cy. Mais il eft vray pourtant
que l'on n'auroit pas dû efperer , ce qui eft effedivement arri-
vé 5 c'eft que tous les Auteurs Ecclefiaftiques_, à l'exception de
Mois dont nous traiterons l'un après l'autre , priilènt generale-
M iij
94 Liv. II. Explication des pajfages ^ oit l'Sucharifiie
mène ces p?.roles dans le premier de ces deux fens ^ c'efl; à dire
qu'ils entcndiiîènc par ces termes -, Cecy efi mon Corps , que l'ob-
jet prefent efl; efFedivement le Corps de J. Q fans faire pafTer
l'efprit par cette 'idée de figne & de figure. Car il n'y en a que
trois qui s'y fuient arreflez , qui iont S. Auguftin, Facundus,
& Pachymere , commentateur de S. Denis , dont nous exami-
nerons lespafTages feparément, en avoiiant d'abord à Tégard
de tousles trois qu'ils ont entendu par le mot de Cecy , la figure
ou le Sacrement du Corps.
Qiiandles Miniftres auroient plufieurs paffages de cette for-
te, leurcaufe n'en feroit pas mieux appuyée, puifque, comme
nous avons montré, la doctrine de la prefence réelle pouvant
produire cette exprefîion , il la faudra déterminer par la docT:ri-
ne confiante de ces fiecles-là, qui neleureft pas f^ivorable.
Mais n'ayant que ces palîages à oppofer «à ceux de tant de Pères ,
c^ui concluent de ces paroles i Cecy e^ mon Corps ^ que le pain
conlacré eft le Corps même de ]C. dont nous avons montré
que les paroles ne fe pou voient détournera un fens de figure j
il feroit non feulement déraifonnable, mais ridicule de préten-
dre qu'il y euft quelque égalité.
Nous commencerons par Pachymere, parce quelafoy de cet
Auteur ne pouvant eftre douteufè, pui(qu'il eftoitdu temps où
l'on fignoit en Grèce la Tranflubftantiation, il en eft d'autant
plus propre à faire voir qu'on peut expliquer cette propofition,
Cecy efl mon Corps ^ comme nous verrons que S. Auguftin bc
Facundus l'ont expliquée, fans rien dire de contraire à la do-
ctrine de la prefence réelle, ôcen fuppofant que les fignes font
réellement joints avec le Corps de J. C.
Il ne faut pour eneftreperfuadé queconfiderer lepaflage de
cetAuteur. C'efb dans fiParaphrafe lur S. Denis, où après avoir
rapporté ces paroles de S.[Denis,'iepfe'p8? rà ^êiTccrct, ^ ùw' (^jv
âyi Tct, J,u,vn/4<''* 5 il ajoute 5 C!L<^\)^i(ai cei VpiT'oC ê('<ji' tol' toiolutcc
cTuVCoActjOTi ^êTct Toc^ÉiTfvOK Actba» «.'pTOF ^ Ttt e|»^j C'eft à ditC : jLe
Prejhe confacre les divins Myftercs ^ (^ il montre ce qu'il a célébré
par fes loiian'ies , déclarant que ce font les Cymbales de J. C. parce
qu'ayant pris du pain après la cène il dit : Cecy eft mon Corps.
Ainfi félon Pachymere, ces paroles de J. C. Cecy eft mon corps
aufquelles il fait vifiblement allufion , ne font qu'une déclara-
tion que le pain & le vin font les fymboles de ]. C. N*eft-ce pas
Uj diront les Miniftres, noftre fens d-efigure ? ÎM'eft-ce pas à di-
efl dppellée type , whige , fignre , ^c. 9;
re que ces paroles: Ceiy efi mon corps , fignificnt, c'efl: le Tym- Ctj. Y. JE
bole S^ le type de mon Corps, puifque Pachymere aiïurc que / <^P,
Je Preftre déclare par ces paroles, non que le pain confacré '^Él
efl le corps de J. C mais que le pain & le vin font les fymboles J
de J.C'i En effet la confequence cft bien tirée jufques là. Maiy
pour faire voir que quand cet Auteur dit que le pain 5c le vin
font les fymboles du corps de J. C. ^ que c'efl ce qui efl: mar-
qué par ces paroles : Cccy efi mon corps , cecy cfi mon Saw^^ il
n'entend pas des fymboles feparez du corps de J. C. mais des
fymboles qui font le corps même de J. C. il ne faut que con-
fiderer ce qu'il dit un peu plus bas.
Au lieu , dit- il , que plujîeurs ne s'arrefient qu'aux divins fymbo-
les , ne pouvant conjïderer rien de plus haut j l'Hiérarque porte la
veu'é de fon efprit jufques aux Prototypes de ces fymboles , qui font
le (orps même & le fang vicme du Seigneur, croyant que les chofes
propopes , c'efl a dire le pain ^ le vin , ont efté changées en ce corps
ér- en ce fing par l' Efprit fiint ^ tout-puiffant. Ainfî cette ex-
preflîon que le Prêtre déclare par les paroles de l'Evangile que le
pain dj' le vin font les fymboles de J. C. eft compatible avec la
créance que ces fymboles font changez par le S. Efprit au corps
& au fang de J. C. & ces fymboles du corps & du fangde |. C.
font en même temps fon corps & fon fang , ou contiennent fon
corps S: fon fang. Car l'une & l'autre exprefTion ne fîgnifîe que
la même chofe , quoyque par différentes manières de la con-
cevoir. Si par le mot de fymbole on entend la fubftance pre-
fente reprefentant par fon voile extérieur le corps de J. C.
alors les fymboles font J. C. même ; fî l'on entend le feul voi-
le , les fymboles contiennent le corps de J. C. &; font fymbo-
les du corps de J. C. prefent.
Ce pafTage peut fervir d'éclaircifîèment à celuy de S. Augu-
flm qui efl tiré du livre qu'il a fait contre Adimante, & dans
lequel on doit remarquer d'abord qu'il eft muni des circon-
ftances qui font prefque toiijours jointes aux exprefTions extra-
ordinaires.
S. Augnflin n'a eu defTein dans cet cndroit-lA d'inflruire
perfonne de ce qu'il falloit croire de l'Euchariflie. Ainfi on ne
doit point s'étonner qu'il n'en dife preciféjnent que ce qui étoic
neceffaire à fon fujer.
De plus la matière qu'il traitoit le portoit à chercher des
exemples où le fîgne extérieur full nommé du nom de I4 chofe
çé Li V. II. Explication despajfdges^ où ÏEuchmflie
fîgnifiée. Et l'on fçait combien ces fortes de vues font capables
d'engager les Auteurs à des expreflîons &: à des raifonnemens
moins ordinaires.
Voicy l'occafion qui a porté S. Auguftin à celle cy Le Ma-
nichéen Adimante pour montrer que le Dieu de l'ancien Tc-
ftament étoit contraire à ccluy dunoveau , avoir al légué que
le Dieu de l'ancien Teftament avoit deffendu de manger du
fang, par cette raifon que le fang eft l'ame de la chair J ce qui
fuppofoit qu'on pouvoir nuire à l'ame, au lieu que J. C. avoic
déclaré dans l'Evangile qu'on ne pouvoir nuire à l'ame.
Comme cette objeclion n'étoit fondée que fur ce que le fang
cfl: appelle ame dans le DeuteronomC; S. Auguftin y répond
d'abord qu'il ne s'agit dans le pafliige du Deuteronome que de
l'ame des beftes , au lieu que J. C. parle de l'ame de l'homme.
Mais pour achever de defarmer le Manichéen, il répond en
fécond lieu que le fang eft appelle ame, purce qu'il en eft le
fisine. Et comme il avoit befoin d'exemples où le fii:;nefuft ap-
pelle du nom de lachofe fîgnifiée, il allègue & celuy de l'Eu-
chariftie, où le Sacrement, félon luy, eft appelle Corps de J.C.
& celuy de la pierre du defert qui eft appellée Chnft par l'A-
potre. Le Seigneur, dit-il , n'a point fait difficulté de dire : Ceey efi
mon Corps , lorfqu^il donna le figne ou le Sacrement de fin corps
Non eni!n Deus duhitavit du ère : Hoc èfi corpus mcum^ cùmjt-
qrium d.trct f^r/mj /a/. Et plus bas. Le Sang efi l'ame , comme la
pierre étoit Chrifi. Sic efi Sanyiis anima , quomodo petra erat
Chrifius.
Les Miniftres qui prétendent avoir droit d'expliquer tout à
leur avantage, au lieu de conclure feulement que S. Auguftin
a cru que le Sacrement eftoit figne du Corps de J. C. prefent,
comme le fang eft figne de l'ame prefente, en concluent qu'il
eft figne de J. C. abfent , comme la pierre du defert eftoit fî-
gnede J. C. abfent: mais ils le concluent contre la raifon ^ôc
par un caprice fans fondement.
Car ces deux exemples de S. Auguftin , du Sang qui eft ap-
pelle ame , de la pierre appellecChrift, prouvent qu'il y a de
deux fortes de fignes.
Il y a des fignes conjoints iiux chofes , comme le vifage fi-
gne de l'eTprit, eft conjoint à cet efprit. Les fignes des ma-
ladies ^ aux maladies , 6c le fang à l'ame des beftes, félon l'o-
pinion de S. Auguftin.
ifi appellée type ^ image ^ fgare^ ^c. 97
. ïl y en a defeparez des chofes ; comme la pierre du défère, Ch. VL
qui étoïc feparée de J. C. félon fon humanité , quoy qu'elle
JuY fuft jointe félon fa divinité, qui eft éternelle & qui rem-
plie toutes choies.
Ces fignes conjoints & ces lignes feparez conviennent dans
cette qualité commune que l'on donne quelquefois aux fignes
le nom de la chofe fignifiée. On dit que le iang cil l'ame i on
dit que la pierre eftoïc Chrifl. On ne peut donc conclure pre-
cifément de ces expreiTions ni que la choie eft prefente m
qu'elle eft ab fente.
Si on conclut de cequ'il eft dit, que le fang eft l'ame , que
l'ame eft abfente , c'eft mal conclure.
Si on conclut de ce qu'il eft dit , que la pierre éroit Chriftj
que J. C. étoit prefent ou joint à cette pierre , ce fera encore
mal conclure.
Saint Auguftin dit que dans'ces paroles ^ Cecy pft mon Corps ,
la chofe fignitiée eft affirmée du figne , & il n'ajoute rien da-
vantage. Que s'enfuit-il de là ? Qi-ie le corps de |. C. y eft
prefent ? Non. Qii'il en eftabfent ? Non. Ni l'un ni l'autre ne
s'enfuit precifément de ces paroles ^ & le paflàge ne prouve
rien direirtement,ni pour les Catholiques ni pour les Calvini-
ftes. C'eft un paifage indéterminé, dont il faut chercher le fens
dans le grand livre de la Tradition de ce fiecle-là, & dans les
autres ouvrages de S. Auguftin. Car comme ce Père en di-
fant que le Sang eft l'ame, parce qu'il en eft le figne, a joint
dans Ion efprit à cette expreflîon, l'idée que ce fang eftoituni
à l'ame , fuivant le fentiment qu'il avoit de l'ame des beftes
quoy que cette union de l'ame avec le fang ne foit point mar.
quée dans cette expreffion -, Le fling efi jîyie de lame h de mê-
me en concevant que le Sacrement eftoit appelle Je corps de
J. C. comme fon iîgne , il a pu joindre à ces idées celle de
l'union de ce Sacrement au corps de J. C. en la tirant de la
doclrine conftante de l'Eglifede fon temps. Il l'a fait fans dou-
te s'il a efté perfuadé de cette docT:rine. Or il l'a efté, & on n'en
fçauroit douter après les preuves que nous avons produites du
fentiment des Pères des Ç\-% premiers fiecles.
Mais au moins, dira- t-on, il s'enfuit que j félon S. Auguftin,
onnefçauroit prouver la prefence réelle par ces paroles j Cecy
efl mon Cozps^ puifqu'il les explique en ce fens 5 Cecy efi lafiyi-
rede mon corps -^ èc que fi ce fens ne l'exclut pas, au moins il ne
N
9? Liv.ll. BxpUcdtion des po-lfages y où VSuchariflie
Ctî. IV. l'enferme pas. Je pourrois répondre que quand S. Aiignflin
n'auroic pas vu toutes les confequences de cette explication
qu'il propofe une fois en paifant , on ne s'en devroit pas éton-
ner. L'efprit des hommes, quelque grand qu'il foit , n'eft pas
capable d'une prévoyance fi étendue .- Se vouloir impofer cette
loy à ceux qui écrivent, en concluant qu'ils ont admis toutes
les confequences qui femblent naiftre de ce qu'ils avancent,
c'eft mal connoiflre la portée de l'eTprit humain. Saint Au-
guftin a eu befoin d'un exemple pour autorifer une maxime
qu'il avancoit. L'Euchariftie s'eft prefentée : Il s'y cft arrefté
autant de temps qu'il faut pour écrire une ligne : il s'en eft fer-
vi. Donc il a prévu cette confequence , qu'il rendoit par Là ces
paroles , Cecy efl mon corps , inutiles à la preuve de la pre-
ience réelle. Efk-ce-là juger équitablementde la manière dons
les hommesparlent ? Peut-eftre que s'il eût prévu cette conle-
quence, il auroit cherché un autre exemple. Tant y a qu'il
n'y a tait aucune reflexion , ôc qu'on n'a pas droit de fuppo.^er
qu'il l'ait préveuc.
Mais je dis de plus que cette confequence eft faufTe, 6c que
fouvcntlors même que l'on nomme le fignedu nom de la cho-
fe, on peut conclure que cette chc-fe eft prefente, non par la
nature de rexpre(îîon,mais par les circonftanccs qui l'accom-
pagnent, qui donnent l'idée de cette prefence Car fi j'entends
un médecin dire d'un malade 5 cette rougeur qui paroît fur
fonvifageen: la fièvre , c|uoyqu'il donne au figne le nom de la
chofe , ne me donnera- 1- il pas lieu de concevoir cette fièvre
comme prefente? Or comme nous avons montré amplement
ailleurs, les circonftances particulières dans lefquelles J. C.
prononça ces paroles : Cccy cfl mon corps , porroient de même
les Apôtres à concevoir qu'il leur donnoit cïFecTiivement fon
Corps , &: ils n'ont pu s'en former une autre idée. Ainfi en-
core que S. Auguflin ait dit en cet endroit , que J. C. avoic
donné le nom de fon Corps au figne , il ne s'enfuit pas que fclon
luv, cette cxpreiïîon ne marque pas par les circonftances avec
lefquelles elle a efté prononcée , la prefence du Corps de J. C,
dans ce figne. Car l'on peut bien dire d'un figne connu êc éta-
bly , Cccy efluïie telle chofe , encore que cette chofe foit abfen-
te. Mais l'on ne peut dire raifonnablement, d'un figne incon-
nu & que l'on établit fur l'heure mefme ^ Cecy efi une telle cho-
fe ^ à moins que cette chofe ne foie efR^diveuient prefente Se
jointe au figne.
cfi appellée type , bn-ige , fguy-e ^ (^-c. 99
Il faut le fouvenirfLir ce iujccde ce que nous avons déjà dit, Ch. V î.
■qu'il eft contre toute apparence que S. Auguftin ait eu une au-
tre impredîon que les autres Pères , de la vérité fignifiée par
ces paroles : Cccy cfimon corps ; mais qu'il eft tres-polFible qu'il
ait développé cette imprefllonparun autre tour & par une ex-
preiîion diftcrente des leurs, en concevant néanmoins la mê-
me chofe ; &; qu'il eft encore très poffible que cette exprefllon
ne rcprefente pas par la force des paroles tout ce qu'il conce-
voit. De forte qu'il en faut toujours revenir à examiner la
doctrine de ce Père &: de tous les autres des fîx premiers (îecles ,
puilque c'eft par là feulement qu'on peut fçavoir ce qu'il a , ou
n'a pas fupplcé à cette expreffion.
Ainfi la queftion fe réduit toujours à fçavoir, fi S. Auguftin
a cru que l'on prenoit la vraye Chair de J. C. dans l'Euchari-
flie par la bouche du corps. Car s'il l'a cru, il eft indubitable
que quand il a dit^*^7- C. avait donne le Sacrement de [on corps
à fesdifciplcs, il a entendu parler d'un figne & d'un Sacrement
joint à la chofe. Or c'eft une queftion déjà décidée , & qu'il
eltbien aifé de décider par S. Auguftin même, comme nous
le ferons voir en traittant des cxpreffîons de ce Père fur la
manducation de la chair de J. C.
On produit encore un paflage de S. Auguftin tiré de fa lettre
à Boniface, qu'il eft bon de joindre à celuy contre Adimante
que nous venons d'expliquer, parce qu'il n'a befoin que du
même éclaircilîémcnt. Voicy tout ce qu'il a dit en ce lieu.
Ze Sacrement du corps de J. C. eft le corps de J. C. en quelque ma-
ni ère i comme le S.tcremcnt de Li foy eft la foy. SicuT ery) fecundùm
quendam modum^ Sucramentum corporis Chrifti , eft corpus chrifti , '
Sacramcntum SanguinisChrifti eft^fanyiis chrifti eft^itu S-icramen^
tum fidei fides eft.
On peut remarquer fur ce paffage , comme fur l'autre , que
S. Auguftin ne traite point encore expreftement dans ce lieu de
l'Euchariftie , &: qu'il n'a aucun deltein de marquer precifé-
ment ce qu'il en faut croire. Qu'il eft attiré à confiderer dans
l'Euchariftie la qualité de figne & de Sacrement, parce qu'il
avoir befoin d'expliquer en quel fens on peut dire que les en-
fans croyent, quoy qu'ils n'ayentpns de foy acluelle 3 fie qu'il
vouloit prouver que l'on pouvoit dire que lesenfansont lafoy,
parce qu'ils ont le Sacrement de. la foy. Il falloit pour cela
iîiontrer que l'on donne aux fignes les noms des chofes figni-
N ij
Tiaft. de
loo Liv. II. Explîcdtîou des pAJpigcs ^oû T EucToariflie
fîcfes j& c'cftceciui le porte à alléguer l'exemple de l'Eiicl-iâ-
riftie, dans laquelle on donne fonvent au Sacremtjit extérieur
Je nom de corps de J.C. comme quand on dit, ^ae l'on divi/ê-
le corps de I. C. que nojire langue efi roupie du Sang de I. C. que
nous qoîi fions le corps de I C.
Il cft donc vray que S. Auguflin dit dans ce pa(îàge que le
corp. & ftng. Sacrement eft appelle le Corps de J. C. parcequ'il en eft le
Domini» figne , ôî. qu'il eft le Corps de J. C. en quelque maniere,comme
S. Anfelme dit que I^cfpecc du pain efiant regardée en elle-même ,
Ô" feparément^ ncfl pas la chair (^ le corps de J.C. ô' qu'on ne l'ap.
pelle ainjt que par une manière de parler commune dans l'Ecriture ,
félon laquelle on donne aux Sacremens les noms des chofes qu'ils fi.
gnifient'iEx. comme tous les Théologiens enfeignent que l'efpece
vifible eft Sacrement fans cftre la chofe du Sacrement id'où il
s'enfuit qu'elle n'en peut recevoir le nom qu'en quelque manière
& comme Ton fîgne. Tout cela n'eft que l'cfFet de ce regard
que la nature de TEuchariftie produit, par lequel on n'attache
fa penfce qu'au feu! fîgne extérieur 3 auquel cas fî on vient
à le comparer avec le Corps de J.C. on ne le peut regarder
que comme Ton fîgne.
Je ne fçay files Miniftres voudront infifter fur ce que Saint
Auguftin compare la manière dont le Sacrement eft appelle
Corps de J. C. avec celle dont le Sacrement du Baptême eft
appelle foy , pour en conclure que comme faint Auguftin n'a
pas crû que le Sacrement de la foy fuft joint dans les enfans
avec une véritable foy, il n'a pas cru aufli que le Corps de J.C.
fût joint au Sacrement. Mais je fçay bien que cctteobjediorr
eft tre vaine, &; très peu digne d'eftre propofée. Car lorfque
S. Auguftin veut juftifier que les fignes reçoivent le nom des
chofes fignifiées, il rapporte indifféremment des exemples de
fignes joints aux chofes , &: de fignes feparez ^ parce qu'il n'y
regarde que cette unique qualité, de recevoir le nom des cho-
fes fignifiées dans laquelle ils conviennent.
Ainfi ayant defTèin de montrer dans le livre contre Adi-
mante, comme on l'a déjà remarqué, que l'on pouvoir donner
au fang le nom d'ame , parce qu'il en eftoirle figne, il rappor-
te l'exemple de la pierre qui cft appellée Chrift ^yfr efi fanguis
anima quomodo pctra erat Chrifius ^ fans confiderer cette diffé-
rence, que le fmg eft figne d'une chofe prefente, ôc que la pier-
le L'eftok d'une chofe ab fente.
cji appellée type , image , figure , f£c. jor
C'efl: donc en cette manicre, mais dans un fens contraire , C H. VI.
qu'ayant à montrer que le Sacrenlent de la foy peut eftre ap-
pelle' foy, il apporte l'exemple'du Sacremct du Corps de J.
C. qui eft apellë Corps de J. C. Tans avoir égard à cette dif-
férence dont il n'eftoit pas queftion, que le Sacrement du
Baptême efl: le Sacrement de la foy actuelle abfente , & que
]e Sacrement du Corps de J. C. eft le Sacrement du Corps de
J. C. prefent.
Si on prerendoit avoir droit de fuppofer que les comparai-
fons des Pères font parfaitement fcmbl blés, & qu'il leur en
faut imputer les conièquences, il n'y a point d'herefie qu'on
ne leurpuft attribuer. Et pour nem'éloigner pas de cet exem-
ple de la foy , je dis qu'on s'en pourra fervir pour conclure que
S. Auguftin a nié le péché origmel , 6c l'a réduit à une pure im-
putation , fi l'on veut infiller fur une comparaifon qu'il en fait
aveclafoy dans un de les livres contre les Pelagiens , où il parle
en ces termes de l'un &; de l'autre. T)e même que l'efpnt de juftice p„ ^^^^
nfidant en ceux par qui les enfans renaiffent , fait pajfer en eux m. i, j.c. r.
la foy qu'ils, ne fewvent encore avoir -par leur propre uolonté j de
même la chair de péché de ceux par qui ils naijfent , fait pt^fTcr tn
eux le crime qu'ils n'ont pii contraFier par des actions qu'ils aycni
faites dans leur vie. Car on pourroit conclure félon cette bel-
le manière de raifonner , que comme la foy acluelle dont S.
Auguftin parle, n'efl point réelle , mais en quelque forte im-
putative dans les enfans 5 de même le péché originel n'efl:
qu'une pure imputation de celuy d'Adam.
Mais toutes ces fortes d'argLimens fuppofent, que qui com-
pare deux chofes enfemble , les compare en tour. Et c'efl: lai
plusfauflè de toutes les maximes, & la plus contraire à la na-
ture de l'efprit humain, qui aimant naturellement lescompa-
raifons , 6c n'en trouvant prefque point de parfaitement juftes,
efl obligé par necefllté de fe fervir des plus approchantes , en
ne s'appliquant qu'à ce qu'elles ont de femblable, fans avoir
égard aux différences.
Nii|
loi Liv. lî. Eicplication des pa (piges où lEucha.riJiie
L
CHAPITRE VII.
Explication du faffaqe de Facunins,
E célèbre paffige de Facundiis ne contient pas une diffi-
culté différente de celle deceuxdeS. Aiiguftin que nous
venons d'examiner. Et ainfi il n'y a qu'à y appliquer ce que
nous en avons dit.
Il eft certain que i'efpritpeut s'attacher au Sacrement fepa-
'rément du Corps de J. C. quoyque l'onconfidcre l'un ScTau,
tre comme joints enfemble. Et il cfl: certain que dans cette
comparailon on doit dire en parlant exactement que le Sacre-
ment n'efi pas proprement le corps de J. C. mais quil le contient.
Tous les Auteurs Catholiques parlent de la forte, quand ils
parlent du Sacrement feul & feparé du Corps de J. C. par la
penfce, comme nous l'avons fait voir.
Facundus ne dit rien davantage , & il n'y a qu'à fe mettre
cela dans l'cTprit pour n'y trouver plus de difficulté.
Cet Auteur avoit entrepris de juftiiier une expreffion de
lacund. 1 9. ^i^el^"es ancicns qui avoient dit, que J. C. a reccu l'adoption
p, 40*. des enfans -, d'où il lémble qu'on pouvoit conclure qu'ils n'a-
voient donc confideré J. C. que comme fiis adoptif.
lia recours pour cela à la même folution que S. Auguftin,
dont il avoit beaucoup lu les Ouvrages, a employée dans fa
lettre à l'Evêque Boniface , qui cfl que l'on peut dire qu'on
recjoit une ciiofc quand on reçoit le Sacrement, parce qu'on
donne au Sacrement le nom delà chofe^Sc qu'ainfiJ.C. ayant
receu le Sacrement d'adoption dans fa Circoncifîon & dans
fon Baptême, on pouvoit dire qu'il avoit receu l'adoprion.
Sacramcntum adoptionis fufcipere dic^natus efl Chrijius ^ quando
tircuncifus eft , O" quando baptifatus efi j O' potejl Sacramcntum
sdoptioyus adoptio nominari.
Toute la difficulté de cette preuve confifioit à montrer que
les Sacremens prenoient le nom de la chofe flgnifiée, les exem-
ples en eftant afTez rares. Il a donc recours pour cela àl'Eucha.
riflie en comparant les efpcces viflbles avec le Corps de J. C.
qu'elles fignifient & qu'elles cachent , &; il en parle de cette
forte : Le Si*(rerriehtde l'adoption peut ejhe appelle adoption , corn-
efi appellée type , image , figure , ^c. 105
Hte le S'icrcment du corps érdufiin'^dc'j.C.quiejt daHslcpain(^ Ch. VII.
if calice confacrc,efi appelle fon corps & fon fang. 2^on que ce pain
^ ceculue [c'eH à dire l'objet ienfible ) foicnt proprement corps é"
fanz , mats parce qu'ils contiennent le myfiere de ce corps é" de ce
fang. C'eft à dire , que cet objet extérieur qui s'appelle pain 8c
vin dao^ le langage commun , n'efl: pas proprement le corps de
J. C. & qu'il n'en efl: que la figure & le Sacrement , quoyqu'on
ne Uiire pa> de l'appeller Corps de J. C. comme quand on dit
que l'on rotnpt , que l'on divife , que l'on unit le corps de J. C. au
yT/ffg, quoyque ces actions ne s'exercent que furies fymboles.
C'eft dans ce même iens que Facundus prenant toujours le
Sacrement pour le ieul ob|ct exteneur, ajoute ^«ir J. C. avait
appelle le pain & li-' calice qu'il avoit béni ,fon corps é" [on fang.
Et que comme l'on dit fort bien que les fidelles qui re(^oivcnt le Ca-
çrement du corps (^ du fang^ reçoivent le corps deJ.C.de même
l'on a pu dire que J. C. ayant receu le Sacrement de l'adoption , a
r-eceu l'adoption. 1 .
Mais les fidelles ne re<joivent.ils point le Corps de , J. Ç^ en
une autre manière qu'en recevant fon Sacrement ? Ne le re-
coivent-ils pas luy- même ? Ouy, ils le re<^ôivent, & Facundus
ne le nie pas. Mais comme l'aclionde recevoir fe termine
pjus proprement au Sacrement, qu'au Corps de J. Ç, parce
que le Sacrement agit fur les (ens , au lieu que le Corps de J. C.
n'y agit point, Facundus a crû devoir fuivre ce langage en cet
endroit, parce qu'il luy eftoit utile de parler ainfi pour juftifier
cette exprciîîon , que J. C. a receu l'adoption des cnfans , 8c il ne
rapporte le morde recevoir qu'à la réception du figne. En une
autre occafioniln'auroit pas fait difficulté de dire que nous re-
cevons proprement le corps de J. C. 8cque nous, prenons I^
propre chair de J. C. comme tant d'autres Pères l'ont dit, &
comme on peutdire qu'il l'a dit en leurperfonne, parce qu'il
n'auroit pas eu le même engagement de prouver qu'on pouvoiç
direavec raifin que l'cm reçoit une chofe quand Qn en ref^oiç
le Sacrement. Ce n'efl que la neeeffîtédecettepr-euye:,qui l'a
déterminé à cette penfée , & à ces expreffions. ■jo-jux.': '
En un mot tout le Myfiere de ce paflage confiftes en ce que
l'efprit pouvant regarder 'la réception de l'EuchariRie par
deuxveuës différentes qui font toutes deux vrayes ^ Facundu^
s'attâche-à l'une , & laifTe l'autre, parce qu'il n'y en àvoic
qu'une qui fift à fon fujet. •; l'^wwçN
Î04 Liv. IL ExpUcitùon des p^iffiiges , oùtEuchariflie
Car I. on peut raporcer la réception , ou l'adion de recevoir,
à l'objet immédiat qui eft lefacremenc ^ Sccetteveuedei'efprie
fe peut exprimer par ces paroles, r<fcevoir/^ir(pr/'^</(? y. C parce
que les Sacremens reçoivent fouvent les noms des chofes dont
ils font Sacrement ; &: qu'ainfi le Sacrement du Corps dej. C.
efb le Corps de J. C. en quelque fens.
1. On peutraporrer cette même réception à l'objet médiat qui
efl: le Corps de J. C. caché fous le figne: & c'efl: de cette forte
que les autres Pères en parlent.
Ainlî il eft vray que ces paroles ont deux fensj & ces deux
fens font tous deux vrais dans le fentiment des Catholiques ,
qui peuvent dire ainfi que nous recevons le Corps de J. C. en
l'une & l'autre manière. Mais Facundus n'ayant bcfoin que de
la première manière , il s'y arrefte en cet endroit , en difant que
nous recevons le Corps de J. C. parce que nous en recevons le
Sacrement. Ce qui eft très- véritable. Et pour l'autre^qui eft cel-
le en laquelle les Pères prennent ce terme , il n'en parle point,
& ne l'exclut point aulTi.Et ce feroit une confequence tres-fauflè
que de conclure qu'il l'ait niée.
Que (î ce procédé paroift étrange , êc que l'on ait peine à croi-
re qu'un homme tel que Facundus ait pu être tellement poflèdé
dudefir de prouver ce qu'il avoir avancé, qu'il n'ait pas fait dif-
ficulté d'employer en argument une expreffion qu'il prend en
un fens extraordinaire & éloigné de l'ufage des autres Percs, en
omettant le fens ordinaire de cette même exprefïïon ^ comme
s'il l'avoit ignoré ; il eft facile de faire cefîèr cet étonnement par
l'exemple du monde le plus naturel, le plus fenfibieSc le moins
recherché , puifqu'il fe trouve dans Facundus même immédia-
tement après les paroles que nous avons rapportées-
Car il faut remarquer que cet Auteur ayant entrepris de mon-
trer qu'on pouvoir dire que J. C. avait re^ii l'adoption , farce qu'il
en avoitrecù le Sacrement ^ ne fe fert pas feulement de l'exemple
de l'EuchariAie , mais il en apporte encore un autre, dont on
devroit bien eftre plus choqué que de celuy-là, & où il s'éloi,
gne beaucoup plus du fens ordinaire des termes, pour les aju-
fter à fon deiTein. Voicy comme il parle.
S'il n'efi pas vray de dire que J. C ayant reçu le Sacrement de
l'adoption desenfans , a receu l'adoption , on ne pourra, pas dire de
nous-mêmes que nous ayons re^ù l'adoption des enfans , ou que nous
fommes rachetez^ ^ fauvez^, fuifque l'Apofire a dit : Nous au-
tres
eji dppellée type , im.igc , figure , &c. ïcj
très au (Tî qui polledons les prémices de l'cfprir, nous /ou- C'A. V\X.
pirons&nousgemiironsen nous mêmes, attendant l'adoption
divme, laredemption denos corps. Carnousavonscftë fauvez
parefperanceJ & cen'efl: plus efperance quand envoie ce que
l'on efpere. De même donc que quoy que nous Mtendions encore
i^ adoption , la rédemption ^ (jr le falut ^ néanmoins parce que nous
recevons le Sacrement de l'adoption , de la rédemption, ^ du falut^
nous fammes avec raifon appellez^cnfans de Dieu ^ rachetez^(jr ftu-
vez^-^ de même J. C. ayant reçu le Sacrement de l'adoption , non
pour fou utilité^ mais pour celle des autres félon l'Apofire, a pâ
jiijlement eftre dit par les anciens Pères avoir reçu l'adoption des
enfans.
Qui ne s'imagineroic d'abord à entendre parler Facundus
de cette forte, qu'il n'auroit point reconnu que nous fuffions au-
trement enfans de Dieuj adoptez, & rachetez, que parce que
nous avons receu le Sacrement d'une adoption & d'une rédemp-
tion future? qu'ainfî nous ne pofïèdons pas réellement la qualité
d'enfans adoptifs , comme J. C. n'eftoit point réellement en-
fant adoptif ? Ne dit- il ^ù.s dâirsment que nous fommes appeliez:^
enfans de Dieu (^-^ rachetez^^ parce que nous avons reçu le Sacrement
de l'adoption (^ de la rédemption que nous cfperons / Il ne fe con-
tente pas d'exprimer cela affirmativement , mais il l'exprime
même négativement 5 & ii s'avance jufques à foutenir, que f l'on
ne peut dire de J. C. qu'il a reçu l'adoption des enfans , il ne le faut
pas dire de nous même s- A L i o qu i n neque de nobis dicendum efi^ quo-
niamadoptionem fufcepimus fliorum. N'efl: ce pas dire que nous
n'avons pas plus receu l'adoption que J C. ? Cependant attri-
buer ce fens à Facundus, c'efl luy faire nier une vérité claire-
ment décidée par l'Ecriture, 6c qu'il eft impofTible qu'il ait igno-
rée. Car il eft trcs-conftant par tout le nouveau Teftament,
que nous ne lommes pas feulement enfans de Dieu & adoptez
parla réception dufignedela confommation de cette adop-
tion, mais que nous le fommes par l'infufion prefente de l'Efprit
de Dieu , qui nous rend enfans de Dieu & membres de J. C. Il
eft très conftant que nous fommes juftifiez 5c rachetez félon
Tame dés ce inonde même, par la réception réelle delà grâce
juftifi-inre, & de la charité que le S. Efprit répand dans nos
cœurs Et i! eftimpoffible qu'un homme équitable foupçonne
feuleii ent Fa' undus d'avoir ignoré desveritez llcommunes.
Car «uroit-il Ignoré ce que dit faine Paul aux Galates , que
O
io6 L I V . 1 1. ExpUccition despajfdges, où VEucharifiie
€il.A,^.u<'. 1- lorfque les temps ont cftè accomplis , Dieu a envoyé fon Fils formé
d'une femme ^ ajfujetti à la loy , pour racheter ceux qui e fiaient feus
la loy , jîn que nous receujjîons l'adoption des enfans ? Et parce que
vous efies enfans ^ "Dieu a envoyé en vos cœurs l'efprit de fon Fils ,
qui crie , Mon Père , Mon Père. Chacun de vous n'efi donc plus fer-
vitcur , mais Enfant. Que s'il eft enfant , il efl donc aulfi héritier
de Dieu par J. C.
Auroic-il ignoré ce que dit le même Apoflre dans l'Epiftre
Uey. it. -v. S' ^"^ Hébreux, Que Dieu nous parle comme ùfes enfans , (^ qu'il
s'ofre à nous comme à fes enfans ?
Auroic-il ignoré ce que die S. Jean : Confiderex^quel amour le
Père nous à témoigné^ de vouloir que nous foyons appeliez^ (^ que
eus soyons en effet enfans de Dieu?
Mes bien aimez^ , nous fommes dé] a enfans de Dieu j mais ce que
nous ferons un ■jour ne paroi fi pas encore ?
Enfin auroic-il ignoré ce que faine Paul dit dans ce chapitre
UiRom.c. 8, même qu'il cite: Que tous ceux qui font pouffe x^ par l'efpritde
Dieu, funtenfaris de Dieu^ &c ce qu'il ajoute : ^ous n'avez^point
receu l'efprit de fervitude pour vivre encore dans la crainte , mais
vous avet^ receu l'efprit d'adoption des enfans , par lequel nous
crions y Mon Père , mon Père. Car l' Efprit de Dieu rend luy.mcme
tétnoignage à nofire efprit , que nous fommes enfans de Dieu. Que
ft nous fomyne s enfans , nous fommes aujjz héritiers.
C'eft ce qui ne viendra jamais dans lapenfée d'un homme
fenfé. Pourquoy donc ne rapporte t-il dans cet endroit la qua-
lité de fils adoptif qu'à la réception du Sacrement de l'adop-
tion future &; parfaite que nous recevrons dans le Ciel ? C'eft
qu'il n'y avoir que ce/eul fenj qui ferviftà fon fujet, & qui puft
eftre employé à juftifier que l'on pouvoir dir^ de J. C. qu'il
avoir receu l'adoption des enfans.
Ainfi Facundus fuit la même méthode en l'un & en l'autre
de ces exemples. On peut dire en deuxfens que nous fommes
enfans adoptifs de Dieu-, l'un commun & ordinaire, qdi efl que
nous le fommes par l'efprit de Dieu que nous recevons par la
charité de Dieu répandue dans nos cœurs , par la juftice de
la foy qui nous efl: donnée actuellement dés cette vie : l'autre
très- extraordinaire , tres-peu commun, ôc dont peut eftre il
n'y a que Facundus qui fe foit jamais fervi , qui eft; que nous
fommes enfans de Dieu par la réception du Sacrement , ou du
Jg,ne de l'adoption parfaite que nous attendons dans le Ciel.
cfi appellce type ^ image ^figure ^ (^c. 107
Cependant parce que ce dernier fens failolc à Ton flijec , 6c qu'il Ch. V I.
a cru en pouvoir tirer un argument qui prouvoit ce qu'il pre-
tendoit , il l'allègue^, il s'en fert, U. femble méconnoître l'autre.
De même y ayant deux fens félon lefquels on peut dire que
nous recevons le Corps de J. C. l'un qu'il entre en effet dans
notre bouche j qu'il eft receu dans nos entrailles par fa pro-
pre chair ^ l'autre que nçus recevons un objet extérieur, qui
en eft la figure & le Sacrement , 6c à qui on en donne le nom j
quoyque le premier fens Toit le plus autorifé , le plus commun,
ôcpeut-eflre le feul auquel ces paroles font entendues par les
autres Pères, Facundus néanmoins s'attache au fécond, parce
qu'il eftoit le Ibul qui fervift à fa preuve : Mais comme ce fe-
roit eftreinjufte & ridicule que de conclure du choix que Fa-
cundus a fait de ce fécond fens de l'adoption è^t^ enfans^ qu'il
n'a donc point reconnu que nous fuffions réellement enfans
adoptifs dés cette vie, ny que nous y receuiîîons le S. Efprit,
la charité &Ia)ufticej en quoyconfifte cette adoption 5 de mê-
me c'eft une injuftce manifefle que de prétendre, que parce
qu'il ne s'eft fervi que d'un des fens de ces mots , Recevoir le
corps de J. C. il ait voulu nier l'autre. Quand ill'auroitmêmenié,
& qu'il auroit dit nettement &c négativement , ^ue nous ne re-
cevons le corps dej. C. que parce que nous recevons ce Sacrement ^
il ne faudroit pas conclure fî vifle qu'il fuft contraire aux autres
Pères ny à la doctrine catholique. Ces fortes de termes qui mar-
quent des actions corporelles, peuvent eflre pris quelquefois
avec une certaine rigueur qui donne lieu de les nier quand on
les rapporte au Corps de J. C.
Tous les Pères difènt que nous touchons ce corps j 6c néan-
moins les Scholaftiques foiitiennent fans eftre contraires aux
Pères que nous ne le touchons pas, & que nous n'en touchons
que le Sacrement. *
Tous les Pères difcnt que nous mangeons le Corps de J. C.
& ils font voir clairement qu'ils entendent que le Corps de
J. C, entre réellement en nousj &: néanmoins comme nous
•verrons en fon lieu, quelques-uns de ces mêmes Pères nient
que nous mangions le Corps de J. C. parce que nous n'exer-
çons pas à l'égard de ce Corps, les adions corporelles dans lef^
quelles ils font confifter la manducation, comme de divifêr^
de goûter 6c de digérer l'aliment. On pourroit doncdirede
même que Facundus a conçu par ce mot à'accipere ^ recevoir,
Oij
Iren. l. y. c. î,
1. 1. Ep, 109,
Exod,
1. 4. cont.
Neftor.p. 113,
di.il. j. iiiterr.
169.
voyez perp.
*• 1. 4. c, 8.
L6.
c. r.
i o 8 L I V . 1 1 . ExpUciition despcijfages , 07/ ÎEuchxriJlïe
cette adion corporelle que l'on fait en recevant le corps de J.C.
& que comme cette adion , qui eft un efpece de contact corpo-
rel , fe termine proprement au Sacrement , il a crû que c'eftoic
proprement le Sacrement qui eftoitreceu, &;que le Corps de
J. C. n'eftoit receu qu'improprement &: par le Sacrement; com-
me félonies ScholaftiqueSj il n'eft touché qu'improprement j
&de même que quoyque l'on dife proprement qu'on rec^oitle
corps d'un homme entre fes bras, on ne dit point que l'on y re-
çoit fon ame, encore que fon ame nefoitpas feparée de fon
corps.
C'cfl: donc une folie toute pure que d'employer une confe-
quence fî faulTe pour renverfer cent déclarations formelles d«s
Pères j dont on peut dire cç.Qfit6^\x.^3iC\i.x\à\is:Non}uvciny:nio~
. fum leHorem^ fcd potius IcHorem nonfafiidiofum nquirunt. A por-
ta res ac manifefia interpretatione ttUà non indiqet. Tantum efi ut
•uidercjam vclint qui claufis oculis vcritati rcjifimit.
Qi-ioy ! parce qu'un Auteur pofTedë d'une vue particulière Si
cherchant des preuves de toutes parts pour juftitier une expref-
fîon , aura employé des termes en un fensun peu extraordinai^
re , if ne /era plus vray que le Seigneur^ comme dit S. Irence ,
ait déclaré que le Calice qui cjî une créature , efi fon propre fanz.
Il ne fera plus vray , que le S. Bfprit ^ comme dit S. Ifidoré,
fajje le pain de V Eucharifiic le propre corps dont f.C. s" efi. rcvéttc
dam fon incarnation.
n ne fera plus vray , que le Créateur des natures , comme dit S:
Gaudence , falje du pain fon propre corps , parce qu'il le peut (^
qu'il l'a promis.
Il ne fera plus vray , que J. C. comme dit S. Cyrille , s'infînuè
dans nos corps par fa propre chair.
Il ne fera plus vray, que quoyque ce que l'on offre ne foitni fem.
blablc ni égaf c'efi néanmoins le corps divin proprement , comme
dit l'Auteur des Dialogues attribuez à Carfaritis.
Il ne fera plus vray , que ce que nous recevons dans f Eucharifiie
foit le vray corps d^ le vray fang de J. C. que ce (oit fon fon corps
dans la vérité., quoy que toutes les Eglifesdu monde fafîencuna
profcffion publique de le croire.
Il ne fera plus vray, quece foit favraye chair que Jiousrecevom.^
Ô-fon vray fing qui efi nofire breuvage ., comme dit l'Auteur du
livre des Sacremens.
Il ne fera plus vray , que le saint- Efprit faffe du pain Je corpi me-
efi appellée type , inuige , figure , (d^c. 109
me de J. C. comme Procle raifure dans ion craicé fur la Litur- Ch. VII.
aie. Chryfoll,
Il ne fera plus vray , f«i? nous voyons dans l'Euchariflie , corn- ep"V.ad cor.
me dit S. Chry foftome , ce même corps que les Mages ont adoré. Dans k chaî-
II ne fera plus vro-y .que nous ne pouvons . comme dit Severe, "e^^rS. jeaa
many:r Le Verbe en Luy-vie7ne .^ parce qu un a point de corps., maisque Anvers.
nous le ijianzcons en mangeant la chair que le Vcrhc rend vivifiante.
Il ne fera plus vray, que J. C. comme dit S. Cyrille ^éenifie i" Joaa. P.
tous les fidèles par un feui corps , qui eft le fien propre ., (^ que mus '^^"
prenions ce corps unique (^ iniivijible en 710 s propres corps.
Une fera plus vray ,^«r«oajr^^i'i/'/o/;j, comme dit S. Auguftin, '•-• <^°"".
avec un ceeur & une bouche fidèle , le Médiateur de Dieu (^ des ^ Pro'pk'^l 9
hommes J. C. homme., qui nous donne fion corps à manç^er^ fon fang
a boire , quoy qu'il femble plus horrible de manger la chair d'un honu
me que de la tuer., (> boire le fang d'un honmie que de le verfer.
Il ne fera plus vray de dire avec S. Cyrille, qu^un être corrup- injoana
tible , comme le noftre , ne peut eftre autrement vivifié , quefiantuni 861.
corporellemcnt au corps de celuy qui efi la vie par effcnce.
Il ne faudra plus faire cette profelîîon de foy que fait S. Gre- Orat.catech'
goire de Nide j Je croy que le pain fanclifié parle Verbe eft changé '^' ^7-
au corps de Dieu Verbe : ni dire avec l'Aurcirr des Homélies attri-
buées à Eufebe d'Emele^ Que le Sacrificateur invifible convertit ^
par fa parole plçmt d' une puijfance fecrete les créatures vifiiblcs en la Pa°"c^ ^' ''
fub fiance de fon corps d^ de fon fang.
Il faudra, (î Ton en croit les Miniftres, faire céder tous ce.spaf-
fagesj & tant d'autres que nous avons rapportez dans le deuxiè-
me volume, au feul paiHige deFacundus.
Mais s'il eft permis de fuivre cette méthode dans l'examen des
Pères, quelle vérité de foy ne pourra demeurer inviolable, puis
qu'il n'y en a point qui ne foit combattue par quelque oarfage
difficile ? C'eftpourquoy Facundus, dont les Miniftres fcroienc
bien de fuivre l'efprk dans l'explication des Père , n'attribue
ce procédé qu'auxHeretiques 6c il fait voir que les Catholiques
en ont toujours luivi un qui eft directement oppofé. Cermne ïl Facundus 9
TÛ appartient., dit-il , qu'à des Hérétiques pofiedex.fi e l'efprit de calom-
nie de vouloir d/ tourner de leurfens véritable des pafiage s clairs^
manifeftes par des pafjages obfcurs ^ambigus., la pieté ^ la prudence
Catholique doivent porter au contraire li éclaircir les fafiagcs ohfcurs
far la lumière de ceux qui font évidcns. Q u t m A D M o D u M calum-
niamitcm Jrîareticorum efi ex dubiis df obficurcis qua certa Q- niani-
O iij
110 Li V . I î. Expllc.ition despajfiges , ou f Euchurijîie
fttïit mdlè interpretari , ita folitumpriidenti^ ac 'ucritatis Cutholtca,
€x indubitatis atquc cvidentibus ambigua ^ latentia decLirare.
C'efl: luy-même qui nous apprend cette belle règle, <\wq félon
que des Auteurs traittciit des matières différentes , ils ont auljt des
viies différentes dans leurs paroles. Pro divcijiiate caufarumdiver-
fa femper efl diccntis intcntio 3 par où il nous montre à ne pas in-
iïfter fur le fens qu'il donne à une exprefîion dans la vile particu-
lière de la faire fèrvir de preuve àunechofe qu'il avoir avancée.
Enfin c'cft ce même Facundus qui nous apprend par fon exem-
ple à pratiquer envers luy ce qu'il a pratiqué envers les autres
Percs, 6c qui condamne par avance la témérité de ceux qui fe
fervent prefentement de ion nom pour combattre la dod:nne
de l'Eglife. Cefl ^ dit-il ,f« ces diverfesmanicres qu^unlcctcur pieux
^ intelligent doit entendre les paroles des anciens Pères Q" If s met-
tre à couvert des calomnies des Hérétiques. Mais lorfque des igno-
rans prejomptueux ^ qui condamnent tout ce quils n' entendent pas j
fe mettent à les lire , il efl comme inévitable que ces fortes de gens y
trouvent des fujets de fe troubler , (^ de troubler les autres j parce
que n'ayant pas affczjic lumière pour les entendre , ils ont; affez^ de
prèfomption pour ne pas vouloir que d'autres leur en donnent l'in-
telligence.
CHAPITRE VIII.
Que l'on ne fi^auroit plus mal inflruire les peuples de la doctrine
Calvinifle que par le fermon de S. AtigtijUn aux nouveaux bap.
tifc'z^^ quoy que Monfteur Claude le propofc pourmodelle d'une in-
flruîtion Calvinifle. '
OUtre les quatre paflages que je viens d'examiner , oii les
Calvinifles prétendent montrer que i'Euchariftie n'eft
que la figure du corps de J. C. 6c qu'elle ne le contient pas réel-
lement , ils en ont encore un qu'ils ne font pas moins valoir que
ceux que j'ay rapportez. C'eft un fermon de S. Auguftin , qui
nous a efté confervépar S.Fulgence, 6c que divers autres Au-
teurs ont enfuite inféré dans leurs ouvrages. Aubertin l'a crû G
avantageux à fa dodrine , que c'eft par là qu'il commence l'exa-
men de S. Auguftin. Et M. Claude qui vouloit trouver dans
l'antiquité un prédicateur de fa dodrine pour l'oppofer à celuy
que l'Auteur de la Perpétuité avoit introduit donnant aux Braf-
iiliens ou aux Chinois les premières mftrudions de ce qu'il
efi appellée type ^ inmge ^figure ^ Mc^ iri
faut croire de l'Euchariltie , par les termes mêmes dont S. Ch.VIII.
Cyrille de Jerufalem s'eftoit iervi pour en inftruire les Chré-
tiens de fon tempSj a crû qu'il ne pouvoit rien trouver déplus
propre que ce iermon à propofer pour modèle d'une inftru-
dion Calyinille', ny qui luy donnaft plus, d'occailon d'inful-
ter à cet Auteur.
Que fi Ton s'en veut rapportera ce qu'il en dit , on ne doit
point douter qu'il ne luy foit extrêmement favorable. Car
après en avoir cité la moitié , le tranfport le prend , & s'inrer- m. chude.p.
rompant luy-même : Peut-on douter ^ s'écrie-t-il , que des Ca- lyz.
thoUques Romains ne frijjent le prédicateur qui e?nprmitcra les ter-
mes de S. Awiufiin pour un Calvinifte tres-z^le qui voudrait
inflruire ces infidelles dans la foy de l'Eglife reformée} Mais parce
que les mouvemens des autres ne font pas toujours Ci vifs 5c fî
violens que ceux de M. Claude, &que fouventil paroit tres-
afTuré fur des chofès que les autres trouvent tres-douteufes,
nous ne lailTerons pas de mettre d'abord en queftion fi ce dif-
cours de S. Auguftin efi: fi propre à instruire des infidelles de la
créance des Calvinifires, 6c fi M. Claude a eu raifon d'en con-
clure fans preuve, 6c comme par uneefpece d'enthoufiafme,
que tous les Jîmples Catholiques frendroient un prédicateur qni fe fcr-
viïoit de ces termes pour tin Calvinifte obftiné , ou pour le plus i/npcr-
tinent de tous les hommes.
Et corne cette manière de décider des queflions importantes
par des exclamations en l'air, & des conclufions fans preij-
ves , me femble un peu trop abrégée, je tafcheray d'en fui-
vre une toute oppofée , en reduifant la quellion à des princi-
pes particuliers Se précis.
On peut avoir deux idées de ce Sermon de S. Augufiin.
Car on le peut prendre ou pour un difcours dogmatique, dans
lequel faint Auguftin ait prétendu inftruire ces nouveaux bap-
tifez de ce qu'ils dévoient croire de rEuchariftie, ou pour un
difcours moral, dans lequel j fuppofant qu'ils eftoient inftruirs
de la fubftance de la foy , 6c des dogmes renfermez dans ce
myftere, il tafche feulement d'édifier leur pictéen lesinftrui-
fanc des rapports myfterieux qui iê trouvent dans la matière
de ce Sacrement. ■ £| i^nib .0 J ob «mo'J «jî insTisî
On auroit tort de demander à ceux qui foutiénnent qu'on le
doit regarder en la féconde manière , qu'ils y montrafiént les
dogmes delà prefence réelle 6c de la tranfubftantiation claire-
m Liv. 1 1. ExpUùition des pciffages , ou ï Euchmflie
ment exprimez ^ puisqu'ils precendenc au contraire que ce n'eft
point uh diicours dogmatique^ 6c que fuppofant ces nouveaux
baptifez pleinement inftruits dans la foy de ce Myftere, il n'efl:
deftiné qu'à leur découvrir lesrailons divines qiie Dieu a eues
dans le choix des matières du pain & du vin pour en faire Ton
Corps & Ton Sang. Et comme c'efl: en cette feccnde manière
que nous foûtiendrons dans le chapitre fuivant qu'il le faut con-
fiderer j M. Claude n'a pas lieu de nous demander que nous y
faffions voir la prefènce réelle &: latranfubftantiation , puifque
nous luy déclarons d'abord qu'il n'efl pas fait pour cela.
Mais M. Claude n'eft pas de même condition que nous fur
ce point, non plus que tous les autres Miniftres. Il foûtient
quefaint Auguftin y a voulu inftruire ces nouveaux fidelles de
ce qu'il faut croire de ce Myftere: Qiie c'eft un difcoiirs dog-
matique propre à établir ceux qui l'écoutoient dans la foy des
Calviniftes. Il eftdonc oblige de nous y faire lire leurs dogmes.
Et puifqu'il fait de (aint Auguftin un catechifte de fa fede, il
doit montrer qu'il ait fatisfait au devoir d'un Catechifte , &
qu'il aitenièigné à fes auditeurs d'une manière claire 6c preci-
fe les principaux points qui compolent cette foy , 6c fans lef-
quels , félon eux-mêmes, on ne peut participer dignement à
ce Myftere.
C'eft par là qu'il doit vérifier cette étrange alternative ,
que ce Catechifte qui parleroit le langage de S. Auguftin de-
-vroit eftre pris ou pour un Culvinifte obfimé ou four le f lus imper-
tinent des hommes.
Or ces dogmes eftentiels à la créance Cal vinifte fe peuvent
réduire à quatre. Le premier eft, que le pain 6c le vin ont efté
établis par J. C. fignes, figures S: Sacremens de fon Corps
naturel.
Le fécond , que cesefpeces le figurent comme mort.
Le troifiéme , Qii'il s'eft engagé de remplir ce pain & ce vin
d'une efficace furnaturel le, c'eft à dire, de communiquer de
nouveaux rayons de lumière, ^-une augmentation de graxre
ceux qui y participent.
Le quatrième , Qii'il nous eft commandé de manger fpirituel-
lement le Corps de J.C. dans la participation de ce Sacrement^
& que cette manducation fpirituelleéonfifte dans la médication
de la mort de J. C. comme la chw^q àc notre îz\nt: La manduca-
tisn fpirittttlle , dit Aubertin , <?/? un aïie fpecial de foy qui a pour
objet
çy? appellée type , image , figure , ^c. 113
ebjet la chair de j. C. comme ayant joujjcrt ^ ^-^ comme eftatit Ch.VIII.
mort, dr- qui la regarde coynme le foiaien de ïiojlrc vie.
Si famt Auçruftin aenfcio-né clairement aux nouveaux fîdel-
les ces quatre dogmes qui compofent la créance Calvinifle,
c'eft avec raifon que M. Claude propofe Ton alternative, qu'à
faut le prendre ou pour un Calvinijle objlinè , ou pour le pins im-
pertinent hoynme qui ait jamais cfiè. Mais s'il fe trou voit qu'il ne
leureût enfeigné aucun de ces points, &: qu'il n'y eût pas mê-
me penfé j la raifon nous donne droit de faire une alternative
toute contraire, &. de conclure que faint Augufkmn'eflroit pas
Cahinifie , on qu'il e/ioit le plus impertinent des hommes. Car
il n'y a pas de plus grande impertinence que d'avoir pour bue
d'enfeigner les articles dans lefquels confifte la foy d'un My-
ftere j êc ^e n'en dire pas un feul mot. C'eft donc à quoy il faut
s'appliquer en lifant les paroles de ce Sermon que je rapporte-
ray félon la traduction qu'en fait M. Claude pour éviter les con-
teftations, après y avoir néanmoins remis la tefte, qu'il en a
oftée, parce qu'elle eft de quelque importance pour l'intelli-
gence du fcns,
yous avez^dèja vu , dit ce faint Doéleur , la nuit précédente les
chofes que vous voyez^prefentement -^ mais on ne vous a pas en-
tore dit ce 'Quelles efloicnt , ce quelles Jignifîoient y & combien celles
dont elles font Sacremens .^ font grandes ^ excellentes. Ce que vous
voyez^ donc efi du pain , (^ c'ejl aujjt ce que vos yeux vous dé-
clarent. Mais l'infimciion que voflre foy demande .^ ejl que le
pain eft le corps de J. C. ^ que le calice , ou ce qui efi dans le
talice efl fon fang. Cecy efi dit en peu de mots j g?- peut- efi re que
■ce peufujfiroit ù la foy . Mais la foy demande d'ejlre inftruite. Car
le Prophète dit : Si vous ne croyez^pas , vous nentendrez^point.
yotts me pouvez^ donc dire: Fui fque vous nous avez^ commandé de
croire , expliquez^ nous ce que c'efi , afin que nous entendions. Car
cette penfèe peut naifire d.tns l'efprit de quelqu'un. Nous ft^a-
vons de qui J. C. a pris fa chair, f avoir de la Vierge Marie.
J^ous fcavons qu'il fut alaitté en fon enfance ; qu'il fut nourri ,
qu'il devint grand 5 qu'il parvint a l'âge de l'adolefcence : qu'il
fouffrit les perfe eut ions des Juifs j qu'il fut pendu au bois 5 qu'il
y fut mis à. mort 5 qu'il reffufcita le troifième jour j qu'il monta au
Ciel lorfqu'il luy plut d'y monter .^ qu'il éleva là fon corps , d'où il
viendra pour fcger les vivans (^ les morts 3 d^ qu'il cfl mainte-
P
114 Li V. II. Explicuion des pajfiges , oti f Euchanfiie
nant iijjis a la dcxtredu Ferc. Comment dont le pain eji-il fon corps
^^ le calice fon fang /
Mes frères , ces cbofcs font appelle es Sacremens ^parce qi^ autre
cJjofe eji ce que nous voyons , autre chofe efi ce que nous concevons.
Ce que l'on voit , a une efpece corporelle , ce que l'on conçoit , a un
fruit fpiritnel.
M.Claude fait icy une petite interruption, comme pourlaif-
fer un peu évaporer par quelques exclamations iafatisfadion
que ces paroles luy donnent. Mais comme il y a fouvent autant
d'adrelîe que de chaleur dans fa rhétorique, il n'efi: pas mauvais
d'avertir le monde qu'il prétend auia couvrir parla un défaut
elfentiei de l'explication qu'il donne à ce pafTage de laine
Auguflin, en faifant confiderer cette première partie comme
feparce de la féconde qu'il rapporte enfuite 5 au lieu que non
feulement elle n'en efl: pas détachée dans faintAuguftui , mais
qu'elle y eft expreflèment attachée par une particule qui con-
tinue le dif.ours , &; qui empêche qu'on ne prenne les mêmes
mots qui fe trouvent dans la première & dans la féconde par-
tie en deux divers fens , comme on verra que le tait M. Claude.
Et c'eftpourquoy, afin qu'on s'apperceût moins de l'union de
ces deux parties , il a trouvé bon de retrancher dans fa tradu-
éli jn la particule^i'??^ qui les lie. Et au lieu que S. Auguftin dit: Si
vous voulez^ donc fcavoir ce que cejî que le corps de J.C.\\ luy fait
dire (implement fans cette particule de liaifbn: V^oulez^vous fa^a-
voir ce que ccjlque le corps de JC. ècoutez^l' Apofire S. Paul qui
dit aux fidelles 3 Vous ejlcs le corps de J. C. dr- fcs membres. Ko f-
ire myjlere e(l mis fur cette table , ^ vous y prenez^ le myjlere du
Sci'ipcur. ( Il faut traduire i Et vous avez^ pris voflre myfiere ,
Mystertum vcftrum acccpij'hs ., comme il y a dans le latin que
]V1. Claude met à la marge. ) Vous dites Amen k ce que vous efies.,
^ vous y foufcrivez^par voflre réponfe. On vous dit donc : Le corps
du Seigneur.^ ^ vous répondez^ Amen. Soyez^ membre du corps de
J. C. afin que voflre Amen fuit véritable . Mais pourquoy tout cela
au pain î N'apportons icy rien du nofhc, mais écoutons encore le même
Apofîre parlant de ce Sacrement. Nous qui fommes , dit il , plu.
fleurs , nous ne fommes qu'un feul pain ^ un feul corps. Entendez^
cecy , je vous prie , C^ vous en rêjoUifez^ Car ce n'efi icy qu unité ,
pieté , vérité , charité j un feul pain ^ un feul corps , quoyque nous
foyons plufieurs. Remarquez^ que le pain ri efl pas fait d'un feul
grain , mais de plufieurs. Quand on vous a exorcifez^., v.ous avez^
eji appellée type , image , figure , ^c. n j
faj[c fous la meule: quand ijous avcz^c/iè hapttfez^^ vous avci^ejié Ch. VIII.
arroufcz^d'eau : ^ quand vous avc\receu le feu du S. Efpru , on
peut dire que vous avcz^efic cuits comme un pain. S'jyez^donc ce que
vous voycz^^ (^ recevcz^ce que vous efies. Voila ce que l' u4p'otrc a
dit du pain ^ Par où il nous montre ajfez^ce que nous devons enten-
dre à l'égard du calice. Car comme pour faire cette efpece viftble du
pain plufieurs grains font réduits en un corps , pour reprcfenter ce
que l' Ecriture dit des fideles:^ ils, rC avaient qu'une avie (^ qu'un cœur
en Dieu j il en efl de même du vin. Remarquez^ comment il eft un>
rlufieurs grains pendaient au raifin , mats leur liqueur a cflé con-
fondue en un corps . Ce/} ainfi que 7- C'. nous a voulu reprcfenter (^
nous faire fien s , confier ant fur cette table le myfere de notre paix ©•
de notre unité. Celuy qui reçoit le myficre de l'unité , ^y ne conferve
pa.f le lien de la paix , ne reçoit pas un myftere pour fon bien , man
un témoign:xge contre luy-yn'cme.
Ceux qui auront efté attentifs en lifant tout ce Sermon ,
pour voir fi faint Auguftin y enfeigneroit les quatre dogmes
fondamentaux delà dodrine Calvmiftefur l'Euchariftie , re-
connoiftront d'abord qu'il ne s'y en trouve aucun formelle-
ment exprimé. Il n'eft dit nulle part en termes exprès, que le
pain de i'Euchariftie foir figure du corps naturel de J. C. Car
pour ces mots; Vous prcnez.^le myficre du Seigneur., que l'on y
lit dans la verfion de M. Claude, par où il pourroit peut-eftre
entendre que Ton y prend la figure du Seigneur , c'eft M. Clau-
de qui les y a mis j comme j'en ay averti ^ puifqu'il y a dans S.
Auguftin, Vo7(s avcT^receuvotre myficre .^ Mysterium vefirum
accepifiis.
Il n'y eft: point dit aufil que le pain & le vin reprefentent J.
C. comme immolé & comme mort.
Il n'y eft dit nulle part, que J. C. fefoit obligé dedonnerde
nouveaux rayons de lumière , o une ciuirnentation de grâce à ceux
qui y participeront, ny qu'il ait inondé ce pain d'une efficace
ipirituelle dérivée meritoirement de fa chair divine.
Il n'y eft dit nulle part, que la manducation fpirituelle de la
chair de J. C. nous loir commandée, ny que cette manduca-
tion confifte à méditer que la mort de J. C.eft la caufe unique
de notre ûluc. Quelle efpece de Catechifte eft- ce donc là, fî
l'on en croit M. Claude ? Il parle à de nouveaux baptifez, à
des gens qu'il fuppofe n'eftre pasinftruits de la foy , II leur fait
un SeriT.on tout exprés pour les en niftruin j Se cependant ii
Pij
116 Liv. 1 1. Expliciition des pnJpLges où t Eucha,nfl'ie
n'exprime en aucun lieu formellement aucun des points elFen-
tiels de la doctrine qu'illeur veut apprendre. C'eftàdire, qu'en
prenant faint Auguftin pour un Catechifte Calvinifte, il fau-
droit dire qu'il auroit fait comme un homme qui voulant ap.
prendre à des enfins le Myftere de la Trinité, ne leur parle,
roit ny de l'unité de Dieu , ny des trois Perfonnes. Comme un
homme qui voudroit inftruire de la paflîon de J. C. des gens
qu'il fuppoferoit n'en avoir jamais rien appris, & qui ne leur
parleroit ny des tourmens qu'il y a foufFerts, ny de fa croix,,
ny de fa mort.
En vérité M. Claude nous permettra de luy dire que fbn
alternative eft très. mal concertée, puirqu'elleeft compolée de
membres infeparables, 6cque bien loin qu'il faille prendre ce
Catechifle ou four un Calvinijh obftinê , ou four le plus imperti-
nent des hommes , S. Auguftin auroit efté au contraire le plus
impertinent des hommes, s'il avoitcfté Calvinifle. Mais com-
me cette épithete ne f(jauroit jamais s'allier avec l'idée que tous
le monde a de l'éminence de l'cfprit de ce grand Saint , il fauc
par neceiïïté que M. Claude celle de luy donner la qualité de
Calvinifle que l'on n'en pourroit leparer.
M. Claude prétendra peut- eftre que fi ces dogmes ne font pas
en termes formels & exprés danscefermon , ilsy font au moins
par des confequences neceflaires. Mais quand cela feroit, faine
Auguftin n'en fêroit pas moins tombé dans cette impertinence
fîgnalée. Car que pourroit- on s'imaginer de moins judicieux.
que d'entreprendre un difcours dans l'intention d'enfeigner à
des perfonnes ignorantes les dogmes renfermez dans un my-
ftere , dont la connoiiîance eftoit neceftaireà leur falut, &: de
ne leur exprimer formellement aucun de ces dogmes , mais de
les leur laifler à deviner , £c de vouloir qu'ils les tirent de fon
difcours par des confequcnces éloignées ? Ce procédé cft il
digne d un homme fage & judicieux? Y a-t-il quelque Mini-
ftreaffez ennemy du bon fens pour l'imiter? M. Claude voa.
droitil luy même le fuivre ? Comment ofe-t-il donc faire par-
ler faint Auguftin d'une manière dont aucun Calvinifte ne
voudroit parler, êc nous propofer enfuite cet exemple, qu'il
ne voudroit pas fuivre , comme le modèle du difcours d'un
Calvinifle obftinè.
Mais encore quelles font ces confequcnces? font-elles claires?
ibttt- elles faciles? lonc-elles fcnftbles ? Examinons ce que M.
cfl appelle e type , image , figure , t^c. 117
Claude nous dit lljr cepuinc, ou pliicoftcequ Aubertin nous Ch.VIII.
die pour luy.
Ce Miniftre ruppofe que ces nouveaux baptifez n'entendoient Aiîb, p. es
pas le (cns de ces paroles iZ^/^z/^^/ /^ror/'j- «^^^/.C. c'cft à dire
que ne concevant pas qu'il ne l'eftoic qu'en figure, ils propo-
ient une objection fondée fur les différences du pain 6c du corps
J. C. en cette manière. Comment: le pain peut ilefirecorpsde J. C.
O" le calice [on fmg^ puifque le corps deJ.C.efl ne d'une Vierze^
qu'il a efié nourri de lait ^ qu'il aefiê mis à 'mort , qu'il eft rc(Jufciîé\y
ce que l'on ne fçauroit dire du pain 6cdu calice ?
z II TuppoTe que la réponfe de S. Auguftin à cette queftion
propofce, eft uniquement contenue dan^ ces paroles: Ifta^ fra-
tres, ideo dicumur Sacrumcnta , quia in eisaliud vidctur , aliud in-
telliptu'r-^ quod vidctur^ fpccicm hjbet corporalcm-^quod intciligitury
frucium habit J^iritualcm. Ce qu'il glofe en cette manière : .S". Au~
gujîin veut dire , dit- il , que le pain (jr- le vin font appellcz^^ font
après la confecration le corps (^ le fanq^ de /. C. parce qu'ils en [ont
Sacyemcns -.que l'on ne leur donne pas ce nom comme ejiant propre-
ment ce corps ^ ce fang , mais parce qu'ils les fignificnt. Car c'cfi ce
qui arrive communément dans tontes les chofes qui font appellèes ^
qui font Sacrcmens , que/les reçoivent les noms des chofes figni--
fiêes. Si les Sacrcmens , dit ce Saint dans un autre lieu , n avaient
point de rapport aux chofes dont ils font Sctcremens , ce ne fcroient
pas des Sacrcmens ^ é^ c'eft a caufe de ce rapport ^ qu'on leur donne
fouvent les noms des chofes mêmes.
Que veulent dire ces paroles : On voit une chofe ^ on en conçoit
une autre , dit encore ce Miniftre, fînonque ce qui fe pre fente aux
yeux n' eft pas ce que l' c_f]>rit y conçoit ? Car le pain (j;' le vin font une
chofe , (^ ils en f^nifent une autre , f avoir le corps (^ le fin'g de
Jefus-Chrifl.
Il veut donc que ces nouveaux baptifez compriftènc par ces
paroles de S. Auguftin ^ cjue dans le S icrement onvoit unecbofe^
(ii-l'on en conçoit une autre , qui ne diient pas un feul mot du corps
naturel J & qui ne contiennent point ce principe, que les Sa-
cremens reçoivent le nom des chofes ftirnifiées 1 II veut, dis- ie
qu ils ent^^ndiffent, que le pain prenoit le nom du corps na-
turel, parce qu'il en eftoit la figure. Et il fait confiftcr dans
ces paroles tout l'cclairciftcment que S. Auguftin donne à la
queftion propofée.
Aubertin fuppofe en troifiéme lieu que le mot de corps de
Piij
ii8 Li V. 1 1. Explication despnjfages , ou tEucharifiie
J. C. s'entendant du corps naturel j jufqucs à ces paroles:
Ouod vidctur ^ fpccicmhahet curpyralcm , quod intclliytur ,frucium
h.tbet fpiritualem , ce terme change tout d'un coup de fens , 6c
s'entend du corps myftique dans celles qui iuivent immédia-
tement. Corpus cry} ChrijH fi vis intcUi'^erc ^ Apofiolorum audi
dicentem fidcùibiis : J^oi cftis corpus Chrifti-
Mais tout cet amas de fuppoficions n'efl: qu'un amas de fauf-
fetez, de temeritez, 6c d'iliufions. Il ne trouve ce dogme fon-
damental du Calvinifme , que le pain eft figure du corps natu-
rel que dans ces paroles -.Qes chofcs^ mes frères^ font afpcllccs Sa-
crement , parce qu'autre chofe efi ce que nous y voyons , autre chofe
ce que nous concevons , & ne l'y trouve qu'en fuppofant que par
cette chofis conceue ^ S. Auguftin a voulu marquer le cçrps na-
turel de J. C.
Mais il n'y a qu'à rapporter les paroles mêmes de S. Auguftiii
pour montrer que l'on ne Tçauroit faire une fuppofition plus ab-
furde. Voicy toute la fuite. Mes frères , ces chofes font appellces
Sacremens , parce qu'antre chofe ejl ce que nous voyons , autre chofe
ce que nous concevons. Ce que l'on voit ^ a une cfpece corporelle ^ ce
que Ion conçoit , a un fruit fpirituel. Voulezjvous donc fcavoir ce que
c'eji que le corps de J. C. ou, comme il y a mot à mot , fi vous
voulez^donc concevoir le corps de J. C. ècoutezj Apotrc S. Paul qui
dit aux fidèles: Vom efi es le corps de f .C & fis membres.
Qiii ne voit plus clair que le jour par cette fuite , que ces mots
de S. Auguftin: Ces chofes font appcUècs ^uremcns ^ parce qu'au-
tre chofie (f ce que nous voyons , & autre chofe ce que nous conce-
vons., ne contiennent qu'un principe gênerai Se indéterminé ,
qui fait le commencement de fa folution ^ &: que quand il vient
à déterminer qucUeefl: cette chofe qu'il faut entendre, il mar-
que cxpreiFement que c'eft le corps myftique de J C d'où il
eft clair qu'il ne s'agit en aucune forte dans ce qui précède ,
du rapport du Sacrement au corps naturel.
C'eft ce qui paroift encore manifeftement par le terme d'r;>^<»,
donc , corpus ergo Cbnjlifi vis intclli'iere Car ce terme fait voir
qu'il n'avance rien de nouveau, mais que ce qu'il ajoute eftoit
déjà contenu dans ce quiavoitefté dit,commeuneconclufion
particulière, dans une thefe générale. Il avance généralement
qtie dans les Sacremens on voit une chofie , d^ l'on en conçoit une au.
trc : &;il applique à l'Euchanft-ie cette maxime générale , en
marquant que cette chofie conceuë eft le corps myftique de J. C.
efi appelée type ^ image, figure ^ t^c. 119
de forte que le rapport du Sacrement au corps naturel n'efl Ch. VIII.
marqué en .meure (orte non plus dans le commencement qu'en
cet endroit. Le mot même à'nitclligere qui ell dans cette der-
nière claule , fait voir qu'elle fe rapporte à ce qui précède. Car
S.Auguftm dés le commencement du Sermon promet de don-
ner à fes auditeurs cet éclaircillement des veritez de la foy qui
s'exprime par ce terme, (uivant ce palîjge : Si vous ne croycz^^
vous n'entendrcz^pas.
Enfin pour faire comprendre combien le fens qu'Aubertin
attribue à S. Auguftin eft ridicule , en voulant qu'il ait palle
du corps naturel au corps myftique dans deux claufes conie-
cutives ; où, bien loin qu'il y paroifle aucune marque de paf-
fagedune idée à une autre, toutes chofes au contraire contri-
buent à appliquer Tefprit à la même idée, il n'y a qu'à repre:-
fenter tout cet endroit avec cette glofe. Car voicy de quelle
forte il veut que S. Auguftin ait parlé. Mes frères , ces chofe^j
font appcUées Sacremens , parce qu'autre chofe e fi ce que nous voyons,
fçavoir le pain , d^ autre chofe ce que nous concevons , Içavoir le
corps de j.C. ceque l'on voit^ qui eft le pain, a une efpece corporel-
le 3 ce que l'on coiK^oit^ fçavoir le corps naturel de J. Ç. a unfruif
fpirituel. Si vous voulez^ donc entendre le Corps myllique de 7- GT.
écoutez^ l'Aphtre qui dit aux fidèles : Vous efles vous-mêmes le
corps myftique de "ffus-Chrifl.
Il faut eftre fans iincerité ou fins lumière pour ne pas recon-
noiftre qu'il n'y a pas de fèns commun dans ce difcours, &: que
le feul moyen de faire parler S. Auguftin raifonnablement efl:
d'ofter cette glofe ridicule de corps «^z/^sr^/, & de réduire ces
deux claufes ci un même fens, en prenant la première pour une
maxime générale , que dans les Sacremens on voit une chofe, d^ l'on
en conçoit une autre > Se la deuxième pour l'application de cette
maxime qui marque que cette chofe que l'on conçoit dans.i^E^r
chariftie eft le corps myftique de J. C. - ', ;?
Mais en oftant cette idée du corps naturel àz J. C qu'Auber-
tin fait entrer ridiculement dans ce pafTage, on voit en même
temps qu'il n'en eft pas dit un mot dans tout le Sermon^ de for-
te que, félon les Miniftres, S. Auguftin voulant inftniire de
nouveaux baptifez de la doctrine de l'Euchariftie , n'a pas fon-
géà leur en dire la chofe capitale , qui eft la fource & le fon-
dement de toutes les autres.
M. Claude dira peut-eûre que cette preuve qui montre qu'on.
12.0 Liv. II. Explication des pa^liges ^ oîi T Euchari^'ie
ne doit point defunir ces deux cLuies , tv que la première ne
peut s'entendre du corps naturel , non plus que la féconde,
tombe autant fur le Cardinal du Perron que fur Aubcrtin , par-
ce que ce Cardinal prétend auffi que la première , qui eft, ces
chofes font appellèes Sacremcns , farce que l'on y voit une chofe , (^
que l'omn conçoit une autre ^ s'entend du corps naturel de J. C.
& qu'il rapporte la féconde au corps myilique.
Mais il y a une extrême difîl-rence entre la manière dont le
Cardinal du Perron explique ces deux claufes , & celle dont
elles font expliquées par Aubertin. Ce Cardinal atres-bien vu
qu'en l'cflat où nous avons ce fermon, il efboit impofîîble de
ne rapporter pas ces deux claufes confècutivesau même fujet.
C'eft: pourquoy pour avoir droit de les entendre difFeremment,
il a prétendu qu'il manquoit quelque chofe en cet endroit, &
<]ue ces paroles 5 Corpus ergo ChrijH fi vis int<:Uiy:re ^ n'avoient
aucun rapport à ce qui les précède.
Je n'examine point icy fi cette prétention eft foIide,mais au
moins elle ne choque point le fens commun. Il n'y a que cel-
le d'Aubertin qui le choque , en voulant d'une part , que ce fer-
mon (oit entier, 5c de l'autre, qu'il (oie parlé dans la première
partie du corps naturel , & dans la féconde du corps myftique,
fans qu'il paroilîe aucune trace dé ce changement d'idée.
Ce n'efl pas là la feule abfurdité du fens qu'Aubertin don-
ne à ce paOage. ïl fuppofe de plus que ces Néophytes, au doute
defquels faint Auguflin veut remédier , eftoient choquez de ce
qu'on appelloit \Qpain, le corps de J. C.a caufe de la diucrfité
de ces deux objets 5 & il veut que la folution que ce Père leur
donne foit, que le pain eft le Sacrement de ce Corps, &: que les
Sacremens prennent les noms des chofes (ïgnifîées. En effet il
exprime nettement ce principe dans la réponfe qu'il fait au nom
de faint Auguftin , &; (ans doute faint Auguftin l'auroit expri-
mé aufîï bien que luy, s'il av^it voulu remédier à cette forte
de doute. Car ce principe n'efl point (î clair qu'on doive le laif-
fer à deviner à des Néophytes. Cependant on le voit dans Au-
bertin expliquant S. Auguftin , mais on ne le voit point dans
faint Auguftin parlant à ces Néophytes. Il dit bien que dans
les Sacremens on voit une chofe , é^ l'on en con(^oit une autre j
mais il ne dit point que l'on donne au Sacrement le nom de
la chofe entendue \ èc la liaifon de ces deux maximes n'efl: pas
afiez claire pour prétendre que l'une emporte l'autre. On voit
-de
efi dppelUe type , image ^figure , i^c. m
de l'Caudans le 13aptême , & on y conçoit le Saint Efprit. Une Ch. VIII.
s'enfuit pas néanmoins que l'on puillè dire que l'eau eft le S.
Fjpnt. Cela dépend d'un autre principe.
Cette raifon fait voir que les Miniftres n'entendent ny le
doute propofé par faint Auguftin, ny la folutiondece douce j
&que le doute qu'il marque ne peut eftre fondé, comme ils le.
prétendent, fur l'ignorance du lens de ces termes. Le pain
eft le corps de '}.C. Nous verrons dans le chapitre fuivant en
quoy il confifte. Il me fuffît d'avoir prouvé que les MiniOres,
ne l'entendent pas.
Mais comment M. Claude ne s'eft il point élevé luy-mêmc:
contre la manière dont Aubertin explique ce doute ? car elle
•ompt toutes fes mefures , & mec tous fes principes & toutes
es fuppofitions en defordre. i . Si co.^ gens ignoroient encore le
fens de Hg;ure , comment les avoic-on fait communier la nuic
précédente , puifque c'eft par là qu'il falloit commencer aies
inftruire ? 2. Avec quelles penfées avoient-ils communié, &:
quelles autres idées pouvoient-ils avoir eues c|ue celle de la
prefencc réelle ?
Si faint Auguftin a craint, comme le fuppofe Aubertin , que
ces gens n'entendîiîént pas le fens de figure ^ il a donc jugé
<jue ce ièns n'eftoic pas fi clair, qu'il n'cuft befoin d'explica-
tion. Et fi cela eftj d'où vient qu'il l'explique icy fi obfcure-
tflent? D'où vient qu'il. ne l'explique ntdlepart ailleurs ? D'où
vient qu'aucun des autres Pères ne l'a éclairci.'' Eft-ce que les
Ghreftiens d'Afrique avoient l'efpric autrement fait que les au-
tres? Et comment S. Auguftin , en les fuppofant fî groffiers.qu'ils
r/entendoient pas ce qui ne doit jamais avoir efté regardé com-
me obfcur félon M. Claude , les fuppofet-il en même temps
afïèz fubtils pour entendre à demi mot , que le pain eft la figu-
re du corps naturel de J. C. quoyqu'il ne leur parle que du
corps myftique '■> Se que les fignes s'appellent du nom des cho-
ies , quoyqu'il ne prenne pas la peine de leur marquer ce
principe ?
•Il eft donc vifible que toute cette explication d'Aubertin
eft une pure vifion. Qu'il n'entend ni le doute que faint Au-
guftin a craint, ni la réponfe qu'il y a faite. Et fur tout il eft
clair que ce dogme capital du Calvinifme, que le pain eft la
figure du corps naturel de J. C. n'eft contenu en aucun endroit
de ce Sermon.
■iit Liv. 1 1. Expl. des Viiffciges oîi tEuchuriflte
Pour les trois autres dogmes, je ne (çay fi M.Claude voudra
feulement tenter de les tirer par confequences. Mais il eft bien
certain au moins qu'il ne le fc^auroit faire à l'égard de ces deux,
que le pain&: le vin rcprefentent le corps & lelangde J. C. en
eftat de mort , & que la manducation fpirituelle qui nous efl
commandée , efl un aiie de foy par lequel on regarde la mort de
J. C. comme la fource de notre vie. Car il n'eft pas plus parlé de
ces deux dogmes dans ce Sermon que de la création du mon-
de , ou de la prife de Jerufalem.
Ce feroit auflî vainement qu'il pretendroit tirer fon effica-
ce, ôc [es nouveaux rayons de lumière .^ de ce que faint Augutlin
ditj que ce que l'on entend dans l'Euchariftiea un fruit Ipirituel j
puifqu'il eft clair qu'il ne parle que d'un fruit d'édification qui
naift de la confideration d'une vérité édifiante. Se qu'il feroic
ridicule d'établir fur cela une promelTe d'une efficace particu-
lière à TEuchariftie. Toutes les veritez de Dieu ont des fruits
Spirituels J & l'on peut dire de même que h Ton confidere ce
que les créatures corporelles nous fignifient , nous y trouverons
un fruit fpirituel .^ fans que perfonne s'imagine fur cela c]ue ces
créatures foient des Sacremens. Ainfi l'efficace fecramencale
& particulière de l'Euchariftie n'eft marquée en aucune forte
dans ce pafîagej & par confequcnt on n'y trouve aucun des
dogmes qui compofent la créance Calvinifte.
Que M. Claude ju^e luy même ce que l'on devroit dire
d'un tel Catechifte : & fî eftant très certain qu'il feroit le
flus impertinent des hommes , pour u fer de fes termes , j'/7 efloit
Calvinifte , on n'a plus droit d'en conclure que fxint Augu-
ftin J à qui cette épithete ne peut convenir , ne l'eft donc
pas, & que les Miniftres luy font outrage lorfqu'ils le veulent
rendre partifan de leurs erreurs, & qu'ils prétendent les au-
torifer par ce Sermon , qu'ils n'entendent pas.
(fi appe liée type y image j figure j(^c. lij
_____________ ^"* ^ ^'
CHAPITRE IX.
Explication Jîncere ^ véritable du Sermon de S. Augufiin
ad Infantes.
QUand je ne m'engagcrois pas plus avant dans l'expli-
cation de ce Sermon, ïes Mir iftres n'auroient aucun droit
d'tn prendreavantage.il fuffir qu'il loir clair que faint Augu-
ftin ne leureft pas favorable ,& qu'il-n'enfeignc aucun de leurs
dogmes pour les obliger, s'ils ont quelque refte d'équité, de
mettre ce Sermon à part , & de chercher à s'éclaircir du fenti-
ment de ce Père par des pafHiges plus clairs.
Afin néanmoins de ne rien oublier de ce que je puis pour leur
fatisfaclion, je veux bien ne me pas contenter de ce qu'ils ont
droit de pretenJre,&: m'accommoder même à ce qu'ils peuvent
de/îrer, en expliquant en particulier ce qu'il y a de plus dif-
ficile dans ce Sermon.
Pour en trouver le véritable fens il faut d'abord établir ce
qu'il y a de certain , afin de s'en fervir comme de principe pour
l'etlaircidèmL'nt du refte.
Or il eft certain , i. Qu'il n'y a point d'apparence de prendre
ce Sermon pour un difcours dogmatique, où faint Auguftin aie
deflein d'mftruire ces nouveaux baptifez de ce qu'ils avoientà
croire fur l'Euchariftie. Car il paroift clairement par ce Ser-
mon même, & par un aurretout femblab'e qu'il fit aux nou-
veaux baptifez à un jour pareil & fur le même fujet, que ces
nouveaux b.iptifez avoient déjà participé aux myfteres. Vous Aug. fern».
avexjre(^ii vo/rre myjlere ^ dit S. Auguftin dans le Sermon dont ^^' ^ '^" '
il s'agit M\lierium veftrum accepijhs. Vous avez^déja efiè faits
pariictpam du Sacrement de la table du Seigneur^ leur dit il dans
l'autre.
Or s'ils avoient déjà participé aux faints Myfteres, il eft cer-
tain qu'on leur avoit déjà dit ce qu'il en falloit croire , eftant
incroiable qu'après leur avoir caché ces myfteres avec tant de
foin lorfqu'ils n'eftoient que Catéchumènes , on ne les en in-
ftruifit pas au moins lorfqu'ils eftoient fur Je point d'y partici-
per, pour lespreferverde faireunfacrilegeen communiant, 5c
les empêcher de tomber dans cette ignorance criminelle mar- ,
114 Liv. I î. ExpUcmon despdjf^gcs , ou l" Euchariftie
quée par HefychiuS) dont on le rend coupable en mangeant le
corps de J. C, fansconnoiftre fa vertu &. fa dignité^ c'efl à
dire, dit cet Auteur , fins favoirqiiil cfi le corp de Jefus-Chrifi
en vérité. ^
Ce n'eftpas feulement la raifon qui nous convainc que les Pè-
res ne pouvoient fe difpenfer d'un devoir fi preflant & fi ne-
cefTaire , mais c'eft la difcipline de l'Eglife marquée par S. Cy-
rille de Jerufalem dans fes Catechefes. Car il témoigne dans
Ja i§. qu'avant que de conférer aux nouveaux baptifez chacun
des Sacremens qu'ils recevoient le Samedy Saint , on leurfai-
fbit une inftruction fur ce que la foy les obligeoit d'en croire,
Se fur les difpofitions .avec lefqueîles ils les dévoient recevoir.
Xa veille du grand jour de Pafque , dit ce Père , ^ de voflre régé-
nération, nous vous enfeignerons ce qui fera convenable , avec quel-
le révérence ^ avec quel ordre il faut entrer dans le lieu où vous
ferez^ baptifez^ , quelles font les raifons de toutes les faintes céré-
monies que l'on y -pratique , avec quelle dévotion il faut au fortir
du Baptême s'approcher de l'Autel de Dieu d^ participer aux my-
fteres fpirituels ^ celefies que l'on y offre , afin que voflre ame étant
illuminée par nos injiruHions ^ nos di [cours , chacun de vous con^
tioiffe la grandeur des prcfcns que Dieu liiy fait.
Il eft donc confiant par cette difcipline que ces nouveaux bap-
tifez aufquels S. Auguftin parle , avoient déjà reçu une inftru-
âion dogmatique fur l'Euchariftie, qui leur faifoit connoifire Lt
grandeur du prefent que Dieu leur y faifoit. Cependant il témoi-
gne dans tous ces deux fermons , c'^eftàdiredans ce fermon',<?f^
/«/^ï^/^fj, rapporté par S-Fulgence^ &dans lefermon S^.dedi-
verfis ., qu'il pretendoit leur dire ce qui ne leur avoit point enco-
re efté dit. p^ous avez^., dit-il dans le premier, déjà vu la nuit
dernière fur l' Autef les chofes que vous voyez^prefentement : mais
on ne vous a pas encore dit ce qu elles étaient, ce qu elles fgnifoicnty
'^ combien les chofes dont elles font Sacremens font grandes d^ itn-
portantes. Vous voyez^., dit il dans le fermon de diverfis , le Sa-
crement de la table du Seigneur , ^ vous y avez^ déjà participé la
tiuit dernière. Mais vous devez^fçavoir ce que vous avez^re^ù, ce
que vous recevez^ , ^ ce que vous y devcz^ recevoir tous les jours.
Il eft donc évident que ces nouveaux baptifez ayant déjà efté
inftruits des dogmes eflèntiels, ce n'eftoit pas de ces mêmes
dogmes que S. Auguftin les vouloic inftruire , puifqu'il ne pour-
roit dire à l'égard de ces dogmes , qu'ils ne les avoient point oUis,
Nondum audiftis. . ^
^ efl a,ppellée type /image '^figare ^^c, " uj
Siippofons donc, conjme nous avons tout droit de le faire , Cn. IX.
qu'avant cette inftruclion que S. Auguftin leur donne le jour
dePafque, on leur en avoir fait une autre leSamedy Saint, ou un
peu auparavant, fur la fubftance même du Myftere. Suppofons
que l'on leuravoit dit ce que S. Cyrille de Jerufalem dit aux
nouveaux baptifez : /'«//^art'^y^ J.C. même qui nous ajjure ^ nous
dit du fain ^ Cecy eft mon corps ,. qui déformais en ofera douter / Et
fuifque c'cfl luy-m'eme qui nous confirme ^ nous dit que c'efi fou fan^^
qui ofera cn douter (y- dire que ce n'efi pas fon fang ? uéutrefois en
Cana de Galilée il changea l'eau en vin qui approche du fang , (^ '
on ne le jugera pas digne d'efre crû lorfqu' il change le vin en fon^
P^^ ■
Qu'on leur avoir dit ce que le même Père dit encore: Recevons
donc ces chofes avec une entière certitude comme le' corps ^ le fang^
de J. C. car dans le type du pain le corps vous eft donn'è , ^ le fang^
dans le type du vin.
Qii'on les avoit avertis^ comme il en avertit ceux de fon Eglife,
que le pain qu'ils voy oient n'efiojt pas du pain , quoyque le gouf rap-
portât que c'eftoit du pain , mais le corps de J. C. g?- que le vin qui
eft oit expofè à leurs yeux n'cfoit pas du vin , quoyqu'il paruft tel
au gouft, mais le fang de J. C.
Qii'on leur avoit dit ce que dit S. Gaudence des Chreftiens
qui eftoient dans la même difpofition que ceux à qui S. Auguftin
parloir .- Qu^e le Créateur des 7iatures qui de la terre crée le pain ,
fait enfuite du pain fon propre, corps , parce qu'il le peut ^ l'a
promis.
Qii'on leur avoit prouvé la venté de ce Myftere , & combaru
les doutes qui pouvoient s'élever dans leurefprit par les mê-
mes raifons dont S. Ambroife fefertpour affermir les nouveaux
fidelles dans la créance qu'ils en doivent avoir. Qu'on leur
avoit rapporté les miracles de latoute-puiftance de Dieu pour
leur rendre croyable ce changement du pain au corps de J. C,
Qu'on les avoit excitez à faire profeffion de la vérité de cette
foy en répondant Amen , c'eft àdirc, en vérité, au Preftre qui
leur doijnoit le corps de J. C. en les afturant que ce l'eftoir.
Voilà la difpofition où eftoient ces nouveaux baptifez à qui S.
Auguftin parle. Etainfi ne nous étonnons plus qu'il nefe met-
te pas en peine de les établir dans cette foy ^ qu'il ne leur en dé-
velope pas les dogmes, & qu'il prenne pour fujet de fon dif.
cours l'explication des rapports myfterieux de la matière du
Q^iij
iz6 Liv. 1 1. Explication despajfages , ou î Euchariftie
Sacrement au corps myftique de J. C.
Le deuxième principe que l'on doit avoir dans l'erprit en ex.
pliquant ce fermon , c'efl: que l'explication que Ton y donnera,
pour être folide & véritable, ne doit point feparer ces deux clau-
fes confecutives, dont la première eft : Ifta ^fratres , idco duun^
tur Sacramenta , quia aliud vidctur , aliud intelliytur. Quod vide^
tur fpeciem habet corporalem ■> quod intelliptur fruHum habet Ipiri-
tualem. Et la féconde; Corpus ergo Chrifii fivis intelligere ^ Apo.
fiolum audi dicentemfideltbus : Vos efiis corpus Chrifti.
Car l'opinion du Cardinal du Perron, qui veut qu'il y ait quel-
que interruption entre deux, eftant peu probable, puilque S.FuI-
gence qui rapporte ce fermon de S. Auguftm , témoigne qu'il
le rapporte tout entier: & celle d'Aubercin, qui rcconnoiffanc
que ces deux claufes fe fui vent immédiatement , entend néan-
moins la première du corps naturel , & la deuxième du corps
myftique eftant ridicu le , comme nous l'avons prouvé ; il s'en-
fuit que la véritable interprétation doit avoir pour caradere
de réunir ces deux claufes dans un même fens.
Enfin le troifiéme principe efl: , qu'eftant vifible que le fermon
83. de diverfis n'eft différent du fermon ad infantes que par
quelques termes, & que S. Auguftin s'y efl propofé de donnera
ces nouveaux baprifez les mefmesinftruélionsî il faut que le fens
qui conviendra à l'un, convienne à l'autre, & faire en forte
que ces deux difcours s'entr'éclaircifTent mutuellement
Nous commencerons donc par le fermon 83. de diverjis , dont
le fens réglera celuy du fermon rapporté par S. Fulgence. Voi-
cy de quelle manière S. Auguflin y parle.
Je me fouviens de lapromeffe que je vous ay faite Je me fuis en-
gagé de vous faire un difcours , à vous qui avez^eflê baptifez^^ pour
vous expliquer le Sacrement de la table du Seigneur , lequel vous
voyez^ prcfente7nent , (jS dont vous avez^ efîè parti cipans lu nuit
piffée.
Le fujet de ce difcours efl d'expliquer non les dogmes renfer-
mez dans ce Myllere, comme l'cfR^t de la confecration, le chan-
gement du pain au corps de J. C. S Auguflin fuppofe ks bapti-
fez inftruits déroutes ceschofes : mais c'eH: d'expliquer menfa
Dominicc S icruracnta ^ c'cfl à dire quelles font les chofes fïgni-
fîées par le pain &: le vin dont nn fe fert dans ce mvficre. C'cft
de faire voir poarquoy la matière de ce myflere cft le pain & le
vin. Curinpanc ^ commue il dit dans le même fermon. C'eft de
efi appellée type , image , figure , ^c. ti-j
montrer que ce pain èc ce vin fignifienc le corps myilique , Ch. IX.
comme il le dit dans la fuite.
P^ous devczi, ajoute S. Auguftin , [(^avoircc que vous avezjre-
çk , (^ ce que vous rccevez^^ (y- ce que vous devez^ recevoir chaque
jour , c'eft à dire , vous devez fc^avoir les myfteres renfermez
dans ces chofes que vous devez recevoir chaque jour. Voilà ce
qu'il veut expliquer. L'explication fuit immédiatement après
en ces termes :
Ce pain que vous voyez^fur l'autel efiant confacrê par la parole de
Dieu , efi le corps de J. C. Ce calice^ ouplutoft ce qui efi contenu dans
ce calice , efi lefang de J. C. il nous a voulu confier g^ donner dam ces
chofes le corps ^ le fang qifil a verfè pour la rcnuijion des péchez^,
pourveu que vous le reccviez^bien ^ car l' Apôtre nous dit : Quoyque
nous [oyons plu (leurs ^ nous ne fo-mmes qu^ un feul pain ^ un feuicorps .
S. Auguftin répète icy quelque chofe de dogmatique, en difant
que le pain efi le corps de J.C. é^ Is calice fin fiing ; ce qui eft
Tabregé des inftrutflions qui avoient efté données à ces nou-
veaux baptifez : mais il le répète non pour s'y arrcfter, mais
pour paflTer à l'inftruction principale, qui fait le fujet particulier
de fon fermon , qui eft de fçavoir pourquoy Dieu nous donne
ce corps ôccefang fous la forme de pain & de vin ^ & cette in-
ftru(ftion principale qu'il propofe enfuire par ces paroles.- J.C.
nous a voulu confier fion corps d^ fon fang par ces chofics , c'eft à dire ,
par le pain & le vin , ôc fous la forme du pain & du vin. Et pour-
quoy ? C'^j dit-il, ce que l'Apbtre explique par ces paroles: Quoy
que nous foyons plufieurs , nous ne fornmes qu'un corps & qu'un
pain. C'eft à dire en un mot que la raifon du choix que J. C. a
fait des matières du pain & du vin pour en faire Ion corps 6c
fon fang, eft principalement le rapport que ces matières ont
avec le corps myftique de J.C. Le Sacrement defigne princi-
palement l'uniré des fidèles , dit Thomas Valdenfis. C'eft ce
rapport avec le corps myftique qui fait que J. C nous donne
fon cor^js naturel & le iang qu'il a verfé pour nous fous ces ef-
peces fenllbles. Le rapport naturel du pain comme pain , & du
vin comme vin regarde diredement le corps niyftique. C'eft
le corps myftique qui eft reprefenté par cette diverfiré de grains
de bled qui compofent un même pain, bi. de grains de raifin qui
. compofent un même vin. Mais c'eft à caufe à^cç rapport que
J. C. qui vouloit fe fervir de fon propre corps nature! pour unir
tous les fidelles , a voulu nous le donner fous les efpeces du pain
& du vin.
li?' Li V. II. Explication despiiffiges , où l' EuchuriHie
Voilà ce que faine Auguftin appelle expliqtier les s^icrcmeni'
delà table du Seigneur^ & ce qu'il prétend que l'Apôrre a fait.
Ce n'efb pas en(eigner ce que le pain eft fait parla confecra-
tion. C'efl: faire entendre ce que le pain.Sd le vin fignifîent , ÔC
pourquoy T. C. s'en eft lervi dans (on mvftvjre.
£t c'eft ce que ce S. DoAeur dëvelope encore avec plus de clar-
té dans la fuite. Jefus-Chrifi^ dit-il , nous recommande par ce pain
d aimer l'unité. Ce pain ejl-il coiv.fiofe dttn fetil qrain^. Ny en avait-
il pas plufïeurs dans le froment dont il eft formé ? Mais avant qu'ils
entrafjent dans la cojnfojïtion du pain , Us ejioient feparei^ C'efl-
far l'eau qu'ils ont efté réiinis après avoir efté broyez^ Car fi l'on
ne broyé le froment , & que ton n'en fiffe de la pafte avec de l'eau ,
on ne le peut reduitr k cette forme qu'on appelle pain, il en eft de
m'eme de vous. T'^ous avez^ comme palfé fous la meule par l'humilia,
tion des jeufnes (jr- du Sacrement de l'ekorcifme. Enfui te vous avez^
ejîé arrofez^ de l'eau du baptême afn d'avoir la forme de pain,
Mais 'ne ce n'èft point encore du pain quand il n'a point encore
fa[fé par le feu. Que fgnifie donc ce feu ? C'eft le Chrefme. Car cette
huile de notre feu eft ù Sacrement du S. Efprit.
Il n'y a qu'à conlîderer toute cette fuite pour reconnoître
que le fermon ^td Infantes , rapporté par faint Fulgence ne
contient queles mêmes inftruclions.
S. Auguftin le commence en diiant aux nouveaux baptifez
qu'ils avoient déjà vu la nuit précédente ce qui eftoit lurrAutel,
c'eft à dire le pain &; le vin , mais qu'on ne leur avoir pas dit :
Quid effit ,quid fibi vellet,quafn ynayniC ret ficrayncntum contine-
ret\ Ce- que c'était que ces efpeces.^ ce qu'elles fî'inifioicnt .^ é^ combien
■l'a chofc dont cites eftoient Sacremcns .fftoit yrunde & excellente. Voi-
là donc le dèifein de S. Auguftin bien marqué. Il veut apprendre
à ces nouveaux baptifez, ce que ces efpeces eftoient ^ non dans la
nature, car il eftoit impodible qu'ils ne le fcùflent, mais dans
la religion j c'eftà dire qu'il leur veut apprendre ce qu'elles lî-
gnifîoient, & de quelle chofe elles eftoient Sacrement. Il les
veut faire connoître en qualité des fignes en marquant &: la
chofe fignifiée , &laraifc5n du rapport à cette chofe fignifiée.-
c'eft à dire en un mot qu'il leur veut apprendre , Sacramenta cœ,
nd Bominic^e , comme il parle dans l'autre fermon.
Et comme ce Sacrement àq la Cbne du Seigneur confiftej .
comme ndus avons vu, dans le rapport du paiiî au corps my-
ftiqtie qu'il reprefente par la multitude de ces grains unis tjui
ont
?/? appellce type , ima.ge ^ figure ^ (^c. 119
ont fervi de motif à J. C. pour nous donner Ton corps & Ton Ch. IX.
fang dans ces efpeces, noiLS ne devons pas acrendre que faine
Auguftin nous y donne une autre inftradion que celie-là. Elle
eH feulement un peu différemment propofée. ^
Ce que -vous voyci^^ leur dic-il ^ fur l' Autel ^ccfl du pain , ^^c'e/i
anjji ce que vos yeux vous déclarent: mais l'injfyuclion que votre
foy demande cft que le pain efl le corps de Je fus Chiifi.
Cette rcponfe de S. Auguftin ne contient pas encorel eclair-
cilîement qu'il avoit promis à ces nouveaux baptifez. Ce n'eft
pas encore ce qu'ils n'avoient jamais entendu dire , &; ce qu'ils
ighoroient. C'cft la répétition d'une vérité déjà connue , mais
connue imparfaitement, dont Saint Auguftin leur veut don-
ner uneconnoiftance plus entière & plus pleine.
Il faut- donc fuppofer que ces nouveaux baptifez ayant déjà
participé à l'Euchariftie f^avoient que le pain ejîoit le corps de
J. C. &C qu'ils le f(^avoient félon les idées que la dodrine de la
prefence réelle peut donner de ces termes ^ c'eft à dire , qu'ils
confideroient cet objet extérieur appelle/»;?/», comme un figne
facré ou un Sacrement qui contenoit réellement le corps de
J. C. & qui y eftoit joint comme le fang l'cft à l'ame. Voila
l'impreffion que CCS paroles de S. Auguftin formoient dans leur
efprit y & c'eft ce qu'ils concevoient par ces paroles j Pan/s
cjl Corpus Chrifti.
Comme cette dodrine ainfi conçue enferme deux vericez;
l'une de la prefence du corps de J. C. dans ce figne j l'autre que
cet objet extérieur appelle pain , eft Sacrement ou figne facré
du corps de J. Celle pouvoir auffi eftre combattue dans l'ef-
prit des auditeurs de faint Auguftin par deux fortes de diffi-
cultez.
Les unes , qui font les plus confiderables, regardoient le fond
même du myftere^ c'eft à dire le changement du pain au corps
de J. C. & ce font celles que S. Ambroife , que l'Auteur du li-
vre des SacremenSj que S. Cyrille de Jerufalem, que S. Epi-
phane , & plufieurs autres Pères combattent.
Ce font cesdifficultez que les Pères étouffent par la ferme- <
té immobile de la parole deDieu^ &: parles autres exemples
de fa toute-puiffance. Ce font celles que S. Ambroife en par-
ticulier condamne par l'exemple de l'Incarnation , en difant j
que ce corps que les Prejlres forment cfi le corps né de la Vicrqe.
Et hoc quod conficimus corpus ex Virqfne eft : Qifil ne faut pas
R
rjo L I V . 1 1. EspUcittion despxjjages, oà l EucJurifiie
cl.ccher l'ordre de la nature dans le corps de'}. C. puïfque J. C. cjf
luy-rn'eme ne d'une Vicri^^e contre l ordre de la nature. Quid hk
quarts natures ordincm in Chrifii corpore , cùm prêter naturam fit
ipfe Dominus "je fus partus ex Virynd
Mais comme ces fortes de difficulcez nailTent de ce qu'il
y a de principal dans ce Myftere, c'eft à dire de la prefence
réelle du corps de J. C. dans les fymboles , on les détruifoic en
propofant cette dodrine ôc en l'appuyant & la fortifiant de rai-
Ions. C'eft pourquoy comme ce fcrmon de S. Auguftin n'eft pas
deftiné pour donner à ces nouveaux baptifez cette forte d'in-
ftruclion , ce ne font pas auffilà les doutes contre lefquels il a
deft'ein de les fortifier. Il les fuppofe déjà détruits dans leur ef-
prit par les inflrudions précédentes.
Les autres difficultez naiflTent de la deuxième vérité, qui eft
que robjetexterieurappellé/'<^/«, eft le Sacrement du corps de
]. C. &ce font celles que S. Auguftin a dû combattre dans ce
lermon , parce qu'ayant eu defîèin d'y expliquer Sacramenta
Cœna Dominiez .^ les sacrernens de la table , comme il parle dans
le fermon 85. dedivcrjîs j cequejîgnifioient le pain & le vin y corn,
bien ils eftoient Sacrement d'une grande chofe ^ Quid fibi vcllei ,
quant maqiïarei Sacramemtm continerct ., comme il dit dans ce-
luy- cyjil eftoit obligé d'éclaircir les difficultez qui fe trouvoient
en particulier dans cette matière qu'il traitoit en particulier.
Or il nefepeut gueres élever qu'une difficulté fur ce point,
fçavùirqu'afin qu'une chofe foit Sacrement d'une autre, il fauc
qu'il y ait quelque reflemblance & quelque rapport naturel en-
tre ces deux cliofes. Car files Sacremens , dit le même faint Au-
guftin , n'avoient aucun rapport avec les chofies fipiifiées , ils n'en
Aug. ad Bo- ficroient point du tout Sacremens. Si eni^n Sacramenta quandam fi~
* ^ ' ^' ' militudinein earum rcrum quarum funt Sacrajnenta ^iion habereni.,
omnino Sacramenta non ejjent. Il faut donc felpn ce principe du
fens commun, que S. Auguftin avoit fort dans l'efprit, qu'afin
que robjct extérieur appelle /^/w foit Sacrement du corps de
J.C il ait quelque rapport avec le corps de J. C, Cependant
ce rapport eftoit aflez difficile à découvrir, parce qu'il n'eft pas
aifé de comprendre quel rapport ont des matières mortes & in-
fenfibles avec le corps Se le fang de J. C. ni avec aucune aâùon
de fa vie.
C'eft donc là le doute que S. Auguftin a deftein d'éclaircir
dans ce fermon } c'eft le doute qu'il veut exprimer j & toute la
efi dppellée type , lynAge , figure , t^c. 131
difficulcë confifte en ce que les termes dont il fe fert pour l'ex- C h. IX.
primer , & les raifons fur lefquelles il fe tonde , font en quelque
forte équivoques, 6c peuvent marquer par elles m.êmes ou un
doute de réalité , ou un doute de Sacrement. Car le fondement
de ce doute , comme Aubertin en convient , efî: la diverfîté qui
paroiil entre le pain d'une part, &: le corps de J. C. & toutes
its aclions de l'autre. Or cette raifon combat &!a réalité, par-
ce qu'il eft difficile de croire que cet objet fi différent de J. C.
contienne J. C. même ^ &: la qualité du Sacrement, parceque
l'efprit ne voyant de luy-mcmcaucun rapport entre un pam &:
J. C. confideré dans toutes Tes actions , il ne voit pas auflî tout
d'un coup par quelles raifons J. C'a plùtoft choifi le pain qu'u-
ne autre matière pour en faire le Sacrement de fon corps.
Comme la raifon du doute eft équivoque ^ l'expreffion du dou-
te Peft au(îî. Car une perfonne que la diverfité du pain 6c du
corps deJ.C. feroit douter delà prefence réelle, pourroit fort
i»ien exprimer fon doute par ces paroles: Comment le pain ejl-il
le corps de J. C? Quomodo cfi partis corpîis cjus^
Et de même une perfjnne qui auroit peine à comprendre
pourquoy J. C. nous donne fon corps fous la forme de pain ,
Cur in pane , parce qu'il ne luy paroiftroit aucun rapport entre
un pain & le corps de J. C quoy qu'il y en doive avoir entre
le Sacrement d'une chofe 6c la chofe fignifiée j cette perfon-
nCj dis-je , pourroit exprimer ce doute par ces paroles , Quorno.
dopanisefi corpus ejus'i pour fignifier feulement: Comment le
pain peut-il efire Sacremeyit de ce corps , puifque je n'y voy aucu-
ne reffemblance ?
Mais ces doutes équivoques dans l'exprelTion , 6c équivoques
dans le fondement du doute , peuvent eftre diftinguez par d'au-
tres circonftances ^ 6c c'eft faute de les avoir obfervées que
les Miniftres fe font égarez furcepaffage, en s'imaginant que
le doute qu'il contient eftoit propofé contre la prefence réel-
le, au lieu qu'il n'eft propofé que contre la qualité deSacrement.
Et c'eft pourquoy comme ils fè font formé une faulTè idée du
doute, il fe trouve auffi que la réponfe de S. Auguftin eft im-
pertinente félon leur fens, puifque pour répondre à cette que-
ftion • Comment le pain eft- il le corps de J. C? il fe feroit conten-
té de dire que le pain fignifie le corps myftique,cequi eft ri-
dicule. Corpus ergo Chri/h fi vis zntelligere , Apoftoliim audi di-
centem fidclibus : Vos eftis corpus Chrifii.
Rij
iJi Liv. 1 1. Explkiinon des p^Jfiges ^ où t Euchariflie
Mais en fe formant une autre idée de ce doute ,on ne trou-
ve rien que de raifonnable dans la rcponfe de S. Auguftin , & on
reconnoiftra qu'il y a un parfait accord entre la queftion, la re-
folution, l'objeclion , larëponfe , & toute la fuite.
La quellion traitée eft : Quid Jibi vellet -punis é^ calix , Q;- quam
mazrj.c rci Sucramcntum continerct^. Larefolution eft, que le pain
eft le Sacrement du corps de J. C. contenu réellement fous les
efpeces -. panis c/i corpus Chrifii. Mais ces paroles donnent lieu à
un doute & à une objection confiderable.
L'objeclion ou le cloute eft contenu dans ces paroles de la
traduftion de M. Q\l\xàc:Vous me pouvez^donc dire: Puifque vous
nous comryiandez^ de croire , expliquez^ nous ce que c'cfi , afin que
nom entendions. Car cette pcnfèe peut, naître dans l'efprit de quel-
qu'un: Nous f^avons de qui Notre Seiyieur a pris fa chair, fcavoir
de la Vierqe Marie: Nous fi^avons qu il fut alaité en fon enfance -^
Ou'' d fut nourri 5 Quil fc fit grand ^ Qu'il parvint u l'âge de l'a~
dolefcence j Qu'il fotiffrit les perfecutions des Juifs 3 Qjffl fut pen-
du au bois 3 Qîfil y fut mis ix mort '■> Qu^il rcffufcita le troifième
jour J Qtfil monta au Ciel lorfqu'il luy plut d'y monter \ Qjfil éle-
va la [on corps , d'où il doit venir pour juger les vivans é^ les morts 5,
(^ qu'il efi maintenant a.ljïs k la dcxtre du Père. Comment donc le
pain eft -il fou corps , é" le calice fon fang ? c'eft à dire, s'il y a donc
fi peu de rapport de toutes ces circonftances de la vie de J. C.
avec ce pain éc ce vin , comment peuvent- ils eftre les Sacremens
du corps de j. C. puifque cette qualité enferme quelque reflem-
blance & quelque rapport , & que nous ne voyons qu'une entiè-
re diverfité entre ces objets ?
Voilà l'objection &. le doute auquel S. Auguftin entreprend de
répondre. Et il le fait d'une manière auffi jufte & auffi précife
quand on l'entend de cette forte , qu'il l'auroir fait d'une ma-
nière extravagante , fi l'on prend &: le doute oc la réponfe félon
la penfée des Miniftres.
Car pour montrer à fes auditeurs que c'eftoit leur fliute de
ce qu'ils ne trouvoient pas de rapport entre le pain &: le corps
de J.C. qu'avoir i! autre chofe à faire que de leur découvrir un
rapport efteétif entre le pain &: ce corps > Mais pour cela il ne fa-
loitpasconfiderer ce corps feparémentde celuydes fidelles au-
quel il eft joint J c'eftàdire, qu'il faloitconfidercr le corps de
J. C. tout entier comme lachofe fignifiéeparle Sacrement, &
finie regardant de la forte, envoie tout d'un coup qu'il y a
eft appslléc type , hn âge ^ figure , (^c. 133
beaucoup de rapport entre le pain compoTé de plufieurs grains, Ch. I X.
& le corps de J. C. n'en failant qu'un avec celuy des fidelles ,
ce qui s'appelle Ion corps myftique. C'eft: l'abrégé de la rcponfe
de S. Augurtin qu'il exprime de cette forte.
Mes frères, ces cho je s font af^cllcts Sucremens , parce qu'autre
chofe eft ce que nous voyons , d^ autre chofe ce que nous concevons.
Ce que l'on voit a une efpece corporelle 3 ce que l'on conçoit a un
fruit fpirituel. Sivous voulez^donc concevoir le corps de JC. (.fî-
gnifie par le Sacrement, & auquel les efpeces ont rapport ) écou-
tez^ l' Apôtre S. Paul : Vous efies le corps de "J. C. (^ fes membres.
Voflre myftere eft mis fur cette table : Vous avezjeceu vofire myfte-
re. Vous dites Amen ace que vous efies , ^-^ vous y foufcrivcz^par ouare cr^o m
vofire rcponfe. On vous dit donc : Le corps de 1. C. ô' vous rè- T""^ '
pondez^: Amen. Soycz^ mcynbre du corps de J. C. afin que vofirs traduit : w.<is
AwE'H foit véritable. Fourquoy donc ce ynyfiere s'accomplit-il f<"*>-^,"'>jtc:<r
dans le pain ? N'apportons icy rien du nofire , mais écoutons encore ''^'' ^" ^^^^''
le même Apbtre parlant de ce ftcrement. Nous qui fommes , dit- mal traiimt :
il , plufieurs . nous fommes un feul corps. Entendez, cecy . je vous "'^^ "^^^ "^°^
J ' '■ ..,r À in- > ■ ^ , . marquent
en pne , & vous en rejoujjez^ Car ce n efi tcy qu unité , fiete , veri- y,,g rouvellc
^é, charité 3 Unfeulpain^ un feul corps ., quoyque nous foyons plu- qucftion, au
fieurs. Remarquez^ que le pain nefi pas fait d'un feul grain , mais ^^^^^Vf^'"
de plufieurs . Qiuindon vous a exorcifez^., vous avez^pajfè fous la ftin mamua
meule: Quand vous avez^été baptifezjvous avez^ctê arrofcz^d'eau^ qii- ce n'cft
(^ quand vous avez^recit le feu de S. Efprit , on peut dire que vous ^^^^^^ ^g^["
ofvez^ été cuits comme un pain. Soycz^ donc ce que vous voycz^ , qucftion pro-
^ recevez^ ce que vous elles. Voilà ce que l' Apbtre a dit du pain, V°^'^^-> 0^"-,
par ou H nous montre ajjez^ce cpue nous devons entendre aleyird ^i„.f„s chnfin
du Calice, Car comme pour faire cette efpece vifible du pain , plu-
fieurs grains font réduits en un corps , pour reprefenter ce que dit
l'Ecriture : ils n'avaient qu'une ame C^ qu^un cœur en Dieu 5 il en
efi de mime du vin. Remarquez^ comment il efi un. P lufieurs grains
pendaient au raifin , mais leur liqueur a été confondue en un
corps.
Qui-a-t-il de plus jufte que cette re'ponfe? Car n'eft-ce pas
comme fi S. Auguftin avoir dit à ces nouveaux baptiiez , qui ne
concevoient pas comment le pain pouvoit eftre Sacrement da
Corps de J.C. ne trouvanfaucun rapport entre ces deux objets :
Vous ne comprenez pas commenc le parn eft Sacrement du
Corps de J.C. parce que vous n'y voyez rien qui ait du rapport
cy avec ce corps de J. C. ny avec aucune des actions de fa vie.
Riij.
134 L^^- ^^' Explicj.tion des pxfpiges , ou l' Euçhxriflie
Je vay vous aider à le comprendre. Ces choies font appcl-
lées Sacremens, p;irce que l'on y voie une chofe, & l'on y en
conçoit une autre. On y voit le pain , on conçoit le corps de
J. C. Mais ce corps de ]. C. qu'il faut entendre comme la cho.
le fignifîée par le Sacrement* n'cft pas le feul corps naturel. C'eft
le Corps de J. C. tout entier, c'eft à dire le chef & les mem-
bres, qui s'appelle le corps myftique. Ecoutez ce que dit l'Apô-
tre : Vous efies le corps dcJ.C. Or ce rapport que vous ne trou,
vez pas entre le pain & le corps de J. C. confideré feul , vous le
trouverez entre le pain bL le même corps de |. C. joint à (qs
membres , c'eft à dire entre le pain & le corps myftique. Si vous
me demandez donc pourquoy J C. nous donne fon corps
dans le ^zm ,quarc in pane ^ ccn'e.'lpas moy, c'eft l'Apôtre qui
vous en découvre la raifon par ces paroles : Un feul pain c?- un
feul corps. Remarquez que le pain n'eft pas fait d'un feul grain,
mais deplufieurs. Remarquez que le vin ne fe fliit que de plu-
sieurs grains. Voila le rapport que vous cherchiez. Voila la
raifon du choix de cette matière. Voila po^irquoy J. C. nous
donne fon Corps (s'/wj /é'/'^?/». Voila comment le pain eft Sa-
crement du corps dej. C.
Cette explication n'eft pas feulement probable, mais elle eft:
certaine parplufieurs circonftances, i. Parce quel autre doute
que l'on attribue à ces nouveaux fidelles, qui eftdene fcavoir
pas le fens de ces paroles ^ Le p.iin efi le corps de 7. C eft contre
toute apparence , puifqu'ayant déjà communié ils avoient déjà
reçu cette inftrudion.
2. Les deux claufes de la réponfe de S. Auguftin , dont la pre^
miere eft -, Ces chofes font appellces Sacremens , parce qnon voit
une ^hofe ^ l'on en conroit une autre 3 &. la féconde , Si vous vou-
Icz^ donc concevoir le corps de J. C. écoutez, l'Arb'.re qui dit aux
fidcUes '■> Vous êtes le corps de J. C. qu'Aubertm fepare contre tou-
te~ib?te d'apparence , font réunies par cette explication , £c
font partie de la même folution.
3. Il eft clair que ces paroles: si vous voulez^ donc entendre le
corps deJ. C. font partie de la f)Iution de la difîiculté propo-
fée. Cependant l'explication d'Aubertin les en fepare abfolu-
ment, & celle qu'on a apportée les y rend cftentielles.
4. Il eft encore vifible que la qneftion propofée par ces pa-
roles : Quomodoefi panis corpus Chrilli^ eft la même que celle
qui eft exprimée plus bas par ces mots, quare crzp in pane ^ U
eji dppcllée type , image , figure ^ (^c, 13^-
particule cry) , marquant que ce!le-cy n cfl qu'une repeckion Ch. I X.
d'une quefrion déjà propofée. Or il n'y en a point d'autre
que celle-là. Il ne s'agit donc plus que de fçavoir le fens de cette
queftioni Ouare in pane ? Mais ce fens eft clair par lafolution que
S. Auguftiny donne, qui eft que le pain cftant fait de placeurs
grains reprcfence l'unité desfidelles: Ce qui t'ait voir que le fens
de laqueflion propolée eftoit : Maispourquoy le'corpsdej. C.
nous eft-il donné dans le pain ? Done c'eft aulTi le fens de cette
même queftion exprimée par ces autres paroles: Ouomodo eji
fanis corpus Chrifti ?
Enfin le rapport de cette queftion avec celle qui eft propo-
fée 6c refoluëdans le fermon 83. de diverfs ^ fait voir claire-
ment que S. Auguftin n'a prétendu autre chofe que de faire
connoîtreàces nouveauxChrctiensles raifons myfterieufesdu
choix de la matière du pain &: du vin , qui font que cesefpeces
reprefentent l'unité de tous les fidelles avec J. C. Car cette rai-
ion eftoitfi fortement gravée dansl'efprit de ce Père , qu'il ne
perd point d'occafion de la marquer, 6c qu'on ne voit point
qu'il en rende d'autre , lorfque la matière le porte à en alléguer.
On en voit encore un exemple dans le traité 16. fur S.Jean.
Notre Sciyficur J. C. dit - il , flous a laijjé fou corps & fon fing Epift. 6. & 7.
en des chofcs qui de plujteurs font rc dattes en un ; car le pain qui e-i
un , efl formé de pluficurs orains de froment ^ (^ le vin de plufieurs
yrains de raifin.
Auiïî avoit il empninté cette raifon de S. Cyprien , & peut-
être encore de S. Gaudence , qui s'en fert de même dans fon fé-
cond traité fur l'Exode. De forte que n'y ayant point de rap-
port plusautorifé queceluy-là, ny qui fût plus édifiant , puif-
qu'il tend à faire connoitre l'importance de l'union des fidelles,
qui eft une des finsdeTEuchariftie, il n'eft pas étrange que S.
Auguftin ait fait un fermon exprés aux nouveaux baptifez pour
les en inftruire j ny que S. Fulgenee,quin'y confideroitquecet
unique vérité de l'unité du corps de J. C. iignifiée par l'Eucha-
f iftie, ait appelle ce fermon , Admodum luculentum Q- aptum ^cdi-
ficationi fidelium. Car il mérite en effet cet éloge, en l'expli-
quant comme nous avons fait , & en leprenantnoncommeun
difcours dogmatique, maiscomme dit S. Fulgence, pour un dif-
cours moral , propre à édifier les fidelles : au lieu qu'il necon-
rienc qu'un amas de penfées & d'exprelTions déraifonnables
fi l'on y cherche , comme fait M. Claude , une inftruclion Cal-
tinifte. Fin du fécond Livre.
IJÔ
LIVRE TROISIE'ME-
REPONSE AUX OBJECTIONS TIRE'ES
des rapports de la matière de l'Euchariftie, &des
aifterentes manières de concevoir ce Myftere.
CHAPITRE PREMIER.
Q^e les rapports de la matière du Sacrement au corps myftiqut
de J. C. n'smpèchoient pas que les fidclles 7ie co/nprijfcnt facile-
ment qu'il n'y avait que le corps ejfenttel de J. C. qui fufi réelle-
ment contenu dans le Sacrement. Abus que M. Claude fait de
divers paffazes des Pères qui marquent ces rapports.
Ous avons fouvent remarqué que la cau(e or-
dinaire de Tcgaremenc des Miniftres dans l'in-
telligence des pafTages des anciens Pères , c'efl
qu'ils n'ont jamais tait allez de réflexion furies
diverfes manières dont les hommes penfenx
& expriment leurs penfées.
Comme leur préoccupation les attache fortement à regarder
la dodrine des, Catholiques d'un certain biais^& à la renfer,
mer fous certaines exprellîons , ils s'imaginent qu'on ne peut
i'avoir dans l'efprit fans la regarder de la même forte, & fans
repeter à tout moment ces expreffions fous lefquelles ils la
conçoivent.
Mais pour les détromper de cette imagination, il ne faut que
les rappeller à eux-mêmes, & leur faire confiderer ce qui fe paf.
fe dans leur propre cfprit, Se ils reconnoîcronc d'abord que lors
qu'ik
des rapports des matières de T Eucha.rijiie. 137
qu'ils font une fois perfuadez d'une vérité, &: qu'ils la fuppo- Ch. I.
fenc connue de ceux à qui ils parlent , ils fe mettent peu en pei-
ne de l'exprimer diftinciement , & que fans entrer dans le fond,
ils s'arreftent fouvent à en expliquer certaines circonftances
extérieures félon que le fujet les y porte. C'ell: un effet necef-
fàire de la crainte que nous avons naturellement de I aller l'ef-
prit en ne luy prefentant rien de nouveau , & plus encore de
la foibleffe de nôtre veuë , qui ne nous permettant pas d'envi-
Tagerun objet tout entier, & de comprendre d'un leul regard
tout ce qu'il contient, nous oblige de le feparer en diverfes idées
<5ui ne fe conçoivent & ne s'expriment que fcparément.
En appliquant ces principes du fens commun à la dodrine de
la prefence réelle^ il eft aifé d'en conclure qu'il ne faut pas
s'attendre que ceux même qui en auront efté les plus perfuadez
l'ayant deu mettre continuellement devant les yeux de leurs
auditeurs ou de leurs leCleurs. Quelque important que fufl: ce
myflere , il eftoit trop connu pour en uferde la forte. Etainfi
ilsenont deu parler comme l'on parle des chofes connues j c'eft
à dire, que comme ils l'ont deu exprimer diftinctement, lorf-
qu'il en a efté queftion , ils ont eu auffi une entière liberté de
ne parler fouvent que des circonftances qui l'accompagnent
fins en expliquer le fond.
- Or une circonftanceinfeparable de cette dodrine, c'eft que
J. C. eft prefent dans ce myftere couvert de voiles myfte-
'-rieux. Car l'état de foy qui eftceluy de cette vie , ne permet-
tant pas qu'il s'y montre à découvert , ne fouffre pas auffi qu'il
s'ycaclie tellement que rien de ce que nos fens y apperçoivent
ne puifle fcrvir à aider &; à édifier notre foy.
J. C. a choifi le pain 6c le vin pour en faire la matière de fon
Sacrement. Nos fens font toujours frappez de l'idée & de l'ima-
ge fubfîftante du pain &: du vin. Eft-ce fans raifon qu'il a fait
choix de ces matières terreftres &; de ces voiles fenfibles pour
-un ufage fî noble & fi divin? Et peut-on croire que n'ayant
rien fait dans l'œconomie de notre falut où il n'ait gardé des
proportions admirables des chofes fenfibles aux fpirituellesSc
intelligibles , il les ait entièrement negligéesdansje plus émi-
nenr de ces myfteres, & qui eft la fin 6c la confommaticn de
tous les autres?
L'analogie delà foy, 5c les plus communes lumières de la pie-
té ne nous permettant pas d'avoir cette penfée, nous portent
S
îi^S Liv. III. Kêponje aux ohJeStions tirées
par confequent à chercher ces rapports , & à nous perfuâder
après en avoir trouvé de raifonnablesôc dejuftes, que ce font
ceux que Dieu a pu avoir en veuë. Et comme ces rapports fer-
vent d'une part à fixer la matière de ce Sacrement & à empef-
cher qu'on n'en puifle fubftituer une autre eftant fondez fur la
qualité de cette matière ^ & qu'ils tendent de l'autre direde-
ment à l'édification des fidelles ^ il efl; clair que foit qu'il ait
eftéqueftion de la matière de l'Euchariftie, foit qu'on ait eu
en vue l'édification des peuples , il n'y a rien deu avoir de plus
ordinaire que l'explication de ces myfterieufes analogies.
Mais doit-on croire qu'en les expliquant & en déduifantles
raifons du choix que Dieu a fait de ces matières &de ces voi-
les , on ait toujours deu y joindre une explication diftinde de la
dodrine de la prefence réelle, enforte qu'il y ait lieu de con-
clure que ceux qui ne l'auroient pas ajoutée ne l'auroient pas
crue ?"
C'efl ce qu'il faut que tous les Miniftres ayent fuppofc , &
particulièrement M. Claude qui ramaffeavec foin lespaflàges
des Percs qui expliquent ces rapports pour en faire la fixiéme
preuve contre la prefence réelle. Ils defcendent ^ dit-il , jufques
1. tcp^p 64 ^ une particulière explication des rapports ou des conformitez^qui
font entre le pain (^ le corps de J. C. é^ qui fervent de fondement
à la fgnijîcation. Car ils difent que comme le pain efl fait de plu-
' fieurs yains , il en efl de même du corps de J. C. d^ quefnfang efl
comme un vin exprimé au preffoir de la croix qui efl reçu dans le
cœur des fidcIlcs comme dans des vaiffcaux ffatieux : Que comme
le pain ^ le vin fortifient , nourri ffnt (jr réjoii(fent noftre corps -y
de même J. C. augmente le bien qui efl en nous (jr nous réjoiiit
d'une véritable joie : Que comme dans l'aHion du Sacrement , ce
pain efl couvert ^ puis découvert j un ^ puis divifé , diflribué ^
mangé i de même J. C. a efté caché dans le feinde [on Père, ^puis
manifeflé au monde un en foy.mème , ^ fait divifible par l'afjom-
ption de noftre nature , (^ enfin communiqué aux hommes pour eftre
leur vie fpirituelle.
Ce difcours n'efl: qu'an tiflu que M. Claude fait à fa mode
des palTages de Bede , de Gaudence , de Valfridus , de S. Cy-
prien , de Théophile d'Anrioche, de S. IfidoredeScville, de
Raban&deChriftianDrutmar: &il prétend conclure de tout
cela que ces Pères ayant reconnu ces rapports dans l'Euchari-
ftie , n'y ont rien reconnu au delà , & qu'ils ne l'ont regardée
cp.
des rapports de U mAtiere de l'Buchmfiie. 139
que comme un figure des objets qu'elle reprefente, fans qu'el- Ch. I.
le contienne en aucune forte le véritable corps de J. C.
Mais cette confequence a fi peu de fondement , qu'après ce
que nous venons d'établir , il ne feroic prefque pas necelTaire
de le réfuter plus amplement , fi ce que nous avons à en dire
ne fervoic à donner encore plus de jour pour entendre le lan-
gage des anciens Pcres.
Car que pretend-il par cet amas de pafiàges? Eft-ce qu'il
veut que quiconque marque un rappport de la matière que J. C.
a choifie pour en faire fon Sacrement, ne reconnoifle dans
ce Myftere qu'un fimple rapport ? Mais qui luy a donné droit
de fuppofer une maxime fi déraifonnable?Cesrapp©rtsne font-
ils pas aufii des fuites necefiaires de la dodrine de la prefence
réelle ? Et faut il que J. C. foit abfent , pour faire que le pain
& le vin foienc des matières propres à reprefenter l'union de
plufieurs corps, parla multiplicité des grains qui les compo-
fent? Quoy ; s'il fe rencontre efRrd:ivement que J. C nous
donne fa propre chair fous le type & la figure du pain ôcdu vin,
ne fera-t-il plus permis de dire qu'il a choifi ces matières plutolt
que d'autres pour montrer par cet aflemblage de plufieurs
grains , qu'il ne fait qu'un corps arec tous les fidelies dont il efc
Je chef 5 ou que fon corps & fon fang font dans nos âmes les mê-
-mes effets que le pain &; le vin font dans nos corps ? Cela feroit
ridicule à penfer. Et par confequent les Catholiques ayant eu
droit de faire ces queftions ôdde demander .- Pourquoy J. C,
a choifi ces matières terreftres pltitoftque d'autres pour en fai-
re fon corps? pourquoy il l'aplûtoft couvert de ces voiles que
d'autres, dont il fepouvoitfervir? les Pères ont dcu leur répon-
dre comme ils ont fait 6c s'exprimer comme ils fe font exprimez.
Si M. Claude en doute , oc s'il prétend abufer de ce que les
Pères parlent toujours du pain & du vin comme s'ils fubfi-
ftoient dans ce myftere , parce qu'ils fubfiltent en effet à l'égard
dçs fens, & qu'il n'eft pas queftion d'expliquer en tous lieux le
changement intérieur qui s'opère par la puififancede Dieu ^ il
ne faur que luy montrer les mêmes queflions refoluës de la
même forte dans des Auteurs qui ne font a0urément pas de
fon parti.
Qu'il confulte donc les écrits que les Théologiens Latins les
plus déclarez pour la tranfTubftantiation ont fait contre \Qi
Grecs , ou ceux que les Grecs ont fait contre les Latins , il y
Sij
I40 Liv. III. Képonfe aux ohjeEiions tirées
verra non feulement que tous ces rapports y lent expliquez
dans les termes mêmes dciPeres, mais qu'ils fervent même de
principe & de fondement à toute cette difpute ; les uns & les
autres convenant dans ce principe commun, qu'il doit y avoir
un rapport & une analogie myfberieufe entre les fymboles &
la verifé de ce myftere.
C'eft fur ce fondement que Humbert , le grand adverfaire de
Berenger,fuppofant la neceffitë de ce rapport, veut qu'on exa.
Iii op. coiitt. xïï\nQ laquelle des deux Eglifcs repre fente la vérité ^ la froprie-
Grc-Ec. calum. ^^ ^^^ corps du Seigficur par un rapport plus exact ^ plus précis -^
4. p. 107, " ^ que pourfuivant dans la fuite l'explication de ces rapports^
il fe fert de tous les termes qui les marquent, comme ceux de
Ji'intficare^ajjîînilare , imitari ^ annuntiare , fans prétendre parla
exclure la vérité de laprefence réelle du corps de J. C. Et il
fait Çi peu difficulté d'appeller l'Euchariftie du nom de pain
dans cette difpute , qu'il dit clairement o^ç.c'eftoitdufain azy-
7ne que le Seigneur Je fus diflribua aux premiers fondateurs de fon
Jr.glife en mémoire de fa Paf/Ion 3 Azymum panem fuiffe quem ipfs
Dominus in cœna primis Ecclefa fua fundatoribus difiribuit^
in 7nemoriam fu^ Pa.dionis.
Que nie diroit point M. Claude s'il avoit trouvé un paflage de
cette forte dans quelque Ancien auteur, & avec quelle har-
dieffeenconcluroit-il, qu'il faloit bien, félon cet auteur, que le
pain demeuraft, puifque c'eftoit du pain que J. C. a diftnbué?
Cependant cette confequenceneferoit pas plus véritable à l'é-
gard de cet ancien qu'à l'égard de Humbert , dont le nom feul
la détruit, &peut faireconnoiftreà M. Claude quelles font les
expreffions qui peuvent fubfifter avec la plus forte perfuafion
■delà prefence réelle &: de laTranlfubftantiation. Humbert diz
que c'éroit du pain azyme que J. C. diftribua à ces difciples, c'efl:
à dire que J. C. prit du pain azyme pour en faire le Sacrement
de fon corps qu'il diftribua. Il eft vray qu'après l'avoir pris il le
changea 3 mais il n'eftoit point queftion d'expliquer là ce chan-
gement, 6^ ainfi il n'en parle point. C'eft ce qu'on a déjà montré
ailleurs ,& que Ton montrera encore plus amplement dans la
fuite.
L'Auteur du traité contre les Grecs qui eft dans la Bibliothè-
que des Pères, & qui a été fait par quelque Dominicain mil-
fîonaire, parle ainfi de ces rapports.
2^'y ayant rien, de fupierflu dans notre Sacrement à l'égard même
des rapports de la. matière de ÎEucharïflie. 14I
des (îonifications , on n'y trouve que trois chofes , la farine , l'eau (>■* Ch. I.
le feu qui fcrt a joindre l'eau ^ la farine. Za farine Jignifie la chair
de Je fus- Chrift ; l'eau fi'iriifîc [on ayne 3 é- le feu , la divinité qui a
pis l'un & l'autre en unité de perfonne. Donc , diroic un homme
qui raifonneroic à la mode d'Aubertin , la farine &: l'eau lubfi-
ftenc dans le Sacrement. Donc , félon cet Auteur , le corps de
J..C nes'y trouve pas, puifqu'il ne s'y trouve, lelon luy, que de
la farine, de l'eau & du feu pour fignifier le corps , l'ame & la
divinité de J. C Mais ceux qui parlent naturellement, comme
cet Auteur a fait, neprévoyent point ces fortes de chicaneries.
Ils difent qu'il fe trouve de la farine & de l'eau 6c du feu dans
le Sacrement ; parce qae pour le faire , il eft befoin de pain qui
eftfait d'eau & de farine par le moyen du feu. Ils difent qu'il
ne s'y trouve que cela , t'eft à dire comme matière de Sacre-
ment, quoyque cette matière eftant changée par l'opération
du S. Efprit , rien de tout cela ne s'y trouve en effet , mais feu-
lement le corps de J. C,
Que fi M. Claude veut qu'on luy montre dans des Auteurs
qu'il met luy- même au nombre des tranffuhftantiatcurs les mê-
mes rapports marquez par les Pères , il n'a qu'à confulter tous
ceux qui ont écrit fur la Liturgie , ou qui ont expliqué les ligni-
fications myfterieufes de ce Sacrement.
Il faut , dit Robert PuUus, un amas de plujîeurs grains pour ce
Sacrement., parce qu'il eft prépare pour divers fidelle s , é- que com- ^^"^^^ «• <:• ^•.
me plufeur s grains font unynèmcpain , de même les divers fidelle s a
qui cette nourriture eft deu'é , ne font qu'une Eglife.
Rien n eft plus propre .^ dit S. Bonaventure, pour fiqnifier l'unité in Brtviio-
tant du corps naturel de J. C que de fon corps myftique , que du pain l"'-" '^- 9.
fait de grains de bled très -purs , ^ du vin forme de grains de rai (in.
S. Thomas ramafTe auffi dans fa Somme tous ces divers rap-
ports marquez parles Pères. Enfin il n'y a prefque point d'Au-
teur qui ait écrit fur ce fujet, qui ne parle de ces analogies de
la matière Euchariftique au corps de J. C. & à l'Eglife dans
les lieux mêmes où ils foutiennent le plus fortement la vérité
de ce myftere.
Qiii s'étonnera donc de trouver le même langage dans les
Pères , puifqu'ils n'ont pas efté moins appliquez à découvrir
ces rapports, ou plûtoft, qui ne s'étonnera de voir que les
Miniftres ayent prétendu tirer avantage de ces exprelTions qui
s'accordent fi parfaitement avec la dodrine àes Catholiques
S iij
i4i Liv . III. Képonfe aux objectons tirées
Cependant il n'y a rien de d commun dans leurs Ecries ^ & il
ne faut que lire l'examen qu'Aubercin fait dupalfagede Saine
Cyprien à Ca;cilius qu'il divifèen dix argumeus, pour admi-
rer comment les Miniftres font valoir les moindres chicane-
ries. Je ne m'arrefteray pas à difcuter cette foule de petits ar-
gumens qui ne méritent pas d'être propofez.
Comme ce qu'il allègue que (aint Cypnen dit, que le calice
efi offert en commémoration de j.C. Ce qui u'eft que le langage
commun de tous les Catholiques du monde.
Qu'il conclut dje ce que J. C. dit : Je fuis lavrayevign^ , que
ce H efi pas L'eau mais le vm qui efi le fang de J. C. c'eft à dire ,
ce n'eft pas de l'eau mais du vin que J. C. a dit , que c'eftoit fon
fang.
Qu'il dit, que c^ efi par le vin que le fang de J. C. efifignijîé dr
montre j c'eft à dire , que le rapport qui doit être entre la ma-
tière du Sacrement &:la vérité , (e trouve non entre l'eau Se le
corps de J. C. mais entre le vin &ce même corps.
Qu'il dit , que notre facrifice apoit été auf^figuré par Melchifedec^
d^ que J. C. avait offert la même chofe que Melchifedec , c'efi à dire^
le pain é- le vin. Ce qui ne fignifie autre chofe fînon que ]. C.
a employé dans fon facrifice la même chofe que Melchifedec ,
fçavoir la pain & le vin , quoy qu'il en ait fait un ufage différent
en le changeant en fon corps , comme nous le montrerons ail-
leurs. Ainlî le facrifice de J.C. eftle même queceluy de Mel-
chifedec à l'égard de l'être original de la matière & dans l'ap-
parence qui en fubiîfte ; &il ne laifTe pas d'en être différent
comme la vérité le doit être de la figure. J.C. dit S. Jerofme ,
p^tffe au vray Sacrement de la Pafquc, afin que ce que Melchifedec
Prêtre du Très- Haut avait fait cnoffrant le pain d^ le vin enpréfi-
ytration de luy , il le fit aujjî en nous donnant la vérité de fon corps
^ de fon fang : Ut quo modo in prafiguratione cjus Melchifedec
fiimmi D^i Sacerdos panem g^ vinum offcrens fccerat , ipfe quo~
que veritatem fui corporis éf' fatiguinis reprafentaret. Ce qui eft
la même chofe que ce que faint Cyprien exprime en moins de
paroles, mais qui ont le même fens: Obtulit hoc idem quod Mel-
chifedec, id eflpancm & vinum , fuum filicet corpus d^ fanguinem.
Je m'arrefterav donc feulement à quelques raifonnemens qui
ne font pas plus folides que les autres ^ mais qu'Aubertin répète
fi fou vent qu'il les faut au moins réfuter une fois pour toutes.
Le premier efl; que tous les Pères , & entre autres faint Cy-
des rapports de h matière de FEucharifiie. 143
prien , établiOent coiijours le figne du corps dcj. C. tant natu- Ch. Î.
rel que miftique , dans le pain & dans le vin, & jamais dans les
accidens du pain & du vin. Il n'y a que de vray pain & de vray
vain qui foient compofez de plufieurs grains. Il n'y a que du
pain 6c du vin efflxlifs qui puiflent nourrir & fortifier le corps
de l'homme. Et tous ces autres rapports marquez par les Pè-
res ne retrouvent vrais que dans de vray pain & de vrai vin,Sc
nullement dans de fimples accidens du pain & du vin. Cepen.
dant félon ladodrine des Catholiques le pain Scie vin ne iub-
ilftent plus. Ce qui tient lieudefignene fubfil^e donc plusauf-
fi. Et par confequent cette dodrine détruifant tous ces rap-
ports , ne peut eftre celle des Pères.
Il fuffit de répondre en un mot à cette chicanerie , qu'il eft
vray que les rapports, marquez par les Pères, font entre le
pain Ôc le vin & le corps &; le fang de J. C & non entre les acci-
dens du pain bc du vin &: ce corps & ce fang : Mais qu'il n'eft
nullement neceflaireny pour établir, ny pour faire fubfifter
ces rapports , que le pain &: le vin fubfiftent fans changement
intérieur. Il fuffit pour l'établir que J. C. ait choifi le pain &
le vin pour eftre la matière de fon Sacrement. Car la raifon de
ce choix eft, félon les Pères , l'analogie que le pain & le vin ont
avec le corps naturel & le corps myftique de J. C. Ce choix
fuffiroit même pour le faire fubfifter quand i! n'en refteroit de
traces que dans la mémoire des hommes. Il fuffit donc, d'au-
tant plus que le pain ôc le vin fubfiftent fenfiblemenr. Car tant
que ces apparences demeurent & frappent les fens, l'eipritefl
toujours frappé de l'idée du pain Se du vin , & il eft conduit
par là à comprendre que comme le pain Scie vin fortifient ie
corps , de même le corps &, le fang de J. C. font la force bc la
joiedel'ame, &: que comme ces deux eftres matériels font
formez de l'union de divcrfes parties, de même le corps my-
ftique de J. C. eft compofé de tous les fidelles unis enfemble.
Il faut que ceux qui font ces fortes d'objedions n'ayent ja-
mais bien compris ce que c'eft qu'un fîgne , & qu'ils n'ayent pas
même fait reflexion fur la définition qu'on en donne dans les
Ecoles, & dont faint Auîruftin fe fert dansfcs livres de la Do-
ctrine Chreftienne. Le figne, dit-on, eft une chofe qui outre
l'idée qu'elle imprime dans les fens porte l'efpric à'tn conce-
voir une autre. Carilsauroient conclu de Là fans peine, quêtant
que l'idée imprimée dans les fensfubfîfte, il eft impoffible que
Ï44 ^iv. III. Uéponfe clî4.x ohjeEtions tirées
Je fîgne ne fuMfle auiïî j & qu'ainfi le pain &: le vin demeu-
rant félon l'apparence , &; la mêmcimpreffion (e faifant fur les
fensjle figne fubfifte tout entier, puifeiu'il ne confifte qu'à
exciter par cette impreffion qu il fait furies fens , l'idée des ob-
jets fîgnifiez.
Que le pain fubfifte ou ne fubfifte pas intérieurement, les
yeux en voient-ils moins du pain ? L'efprit le conçoit il moins,
& luy efl-il plus difficile de comprendre le rapport que ce pain,
a avec le corps desfidellcs ? Qiii ne voit donc que la iubfiftan-
ce intérieure du figne ne fert du tout de rien pour produire
cet effet dans l'efprit?
L'arc- en-ciel, par exemple, n'eflrant marqué dans les nues
que par la diverdré des couleurs que les reHexicns du Soleil y
forment, on peut dire que Dieu a rendu ces couleurs lignes de
la promefle qu'il a faite à Noéde ne détruire plus le genre hu-
main par un déluge femblable à celuy qui arriva de fon temps.
Qui ne fèriroit cependant d'un Philofophe, qui pour réfuter
l'opinion de ceux qui n'admettent point de couleurs réelles
dans les objets , allegueroit que cette opinion détruit la realité
du figne que Dieu a établi dans le Ciel? Car que les couleurs
foient réelles ou non réelles, ne iuffit il pas que nos yeux
foient frappez de la veuë de cette figure dans les nues , pour fe
fbuvenir delà promeiïe de Dieu ? Il en eft de même du ligne
qu'il a mis dans l'EucIiariftie , qui confifte à nous donner l'idée
de la nourriture &; de la force fpiritueîle que nous recevons
par le corps Se le fang de J. C. & de l'union des membres qui
font fon corps myftique. Sa fubfiftancc &; l'aneantiiTemenc de
la matière du pain 5c du vin n'y fait rien du tout; & pourveu
que nos fens foyent également frappez des impreffions du pain
te du vin , nôtre efprit fera également porté à concevoir ces
divins objets que le pain &: le vin luy reprefentent. Quoy que
ce foient les proprietez d'une vraie colombe qui ayent du rap-
port aux attributs du S. Efprit, & qui reprefentent fa douceur
& fi bonté ^ les Pères croient néanmoins que celle fous laquel-
le le S. Efpit fe fit voir au Baptême de J. C. n'eftoit point
,une colombe véritable & vivante. Mais en eftoit-elle moins
propre pour reprefenter le S. Efprit? Nullement, parce qu'elle
n'enformoit pas moins dans l'efprit l'idée d'une vraie colom-
be & de les proprietez , & ne conduifoit pas moins à concevoir
par là le S. Efprit, Et il n.; fert de rien d'alléguer , comme fait
Aubertin
des rapports de la, m.itiere de rEucljAr'iPàe. 145-
Aubertin, que cerne colombe étoit toujours une vraie fubftan- Ch. I.
cC; car elle ne reprefentoic pas le S. Efprit comme fubftance,
mais comme colombe. Or elle n'écoic pas plus réellement co-
lombe, que les accidens font pain.
Mais, dit M. Claude, que peut on répondre à cecy,que les j, RéDonfe
faint Pères veulent que le vin & l'eau meflez fïgnifient l'union p. «l*
de J. C. &: de fon peuple par la fuhjlance (jS la foliditè de leur
union , qui emporte neceffaircment la fubfîjrance de leur efire ? Sur
quoy il cite S. Cyprien qui dit, que ce mcla?ige de l'eau ck- du
vin au calice eft telle que ces chofes ne peuvent plus efire feparées i
d'où il s'enfuit que rien ne pourra feparer l'Eglife de la communion
^^ JesuS-Christ.
On y peut répondre que c'eft un fopIiifÎTie pitoyable, 6c que
M. Claude fe mocque de nous de le propofer de cet air. Quand
S. Cyprien dit que l'eau ne fe peut feparer du vin , il ne veut
dire autre chofc finon qu'on ne l'en voit jamais feparée j c'eft
à dire que l'on n'apperçoitjamaisunefeparationfènfible entre
l'eau & le vm : ce qui fuffit pour nous donner l'idée de l'union
indivifible de J. C. 6c de l'Eglife. Que l'eau &: le vin fubfiftenc
ou ne fubfiftent pas, quant à leur fubftance, cela n'y fait rien
du tout. Il fuffit qu'on ne lesvoye jamais feparez. L'efprit ne
forme l'idée de cette union fpirituelle que fur cette union fen-
fîble qui lubfifte, &: qu'il voir, &: non fur l'union aciuelle des
fubftances qu'il ne f(^auroit voir.
Le fecod raifonnement que nous réfuterons icy n'eft pas plus
folide. C'eft ccluy qu'Aubertin forme fur ces paroles de Saine
Cyprien 5 Que le peuple efi conçu par l'eau , (jS que le vin dcjiqne
le fang de J. C. Et fur ce qu'il ajoute enfuite , (\ut fi quelqu'un
ti offre que du vm , le fang de J. C. commence a efire feparé de
nous , ^ s'il n'offre que de l'eau , le peuple commence à efire feparé
de J. C, Mais quand on me Ile l'un avec l'autre , (^ que par ce mé.
lange on en fait un même corps , cefi alors qu'on fait un Sacrement
fpirituel. De là Aubertin prend fujet de conclure que S. Cy-
rille parlant de ]. C. &.du peuple de la même forte, & difanc
d'une part que par l'eau le peuple eft conçu, & de l'autre que
le (ang de j. C. eft marqué par le vin , il fait voir évidem,
ment qu'il n'entend pas que le propre fang de J. C. foit con-
tenu plus réellement dans le calice que le peuple , & qu'il veut
amplement que l'un 6c l'autre y foie contenu reprelentati.
vement.
T . • ■
146 Liv. III. Kcponfe aux ohjccîlom tirées
Mais c'eft encore icy un exemple de l'égarement des Minf-
ftres dans l'examen des Auteurs. Il ert: vray que le paflage de
S' Cyprien ne marque pas plus que le fang de J. G. foit réel-
lement dans le calice que le peuple-, Scfi nous voyions ce paf_
fâge détaché de toute fuite fans fçavoir de quel auteur il eft,
on ne pourroit juger de Ion Sentiment. Mais nous n'avons-
rien d'ailleurs, qui nous puifle déterminer à l'égard de S. Cy-
prien. Et Aubcrtin a t-il cfté en droit de juger par là de ce qu'il
croyoit de l'Euchariflie 5
Cette erreur, comme je l'ay déjà dit, ne peur venir que de
cette maxime particulière aux Mjniftres,,qu'unAuteureft: obli-
gé de dire en chaque lieu tout ce qu'il croit d'un fujet: ce qui
eil faux, impoffible oc contraire à la nature des hommes, comme
nous l'avons tant prouvé. Le corps de J. C. a cela de commun
avec le corps des fidelles félon la doctrine Catholique, qu'il
eftlignifié parla matière de l'Euchariftie. Mais il a cela de par-
ticuher, & qui ne convient qu'à luy feul & non au peuple ,
qu'il effc réellement contenu dans ce myftere. S. Cyprien ex-
prime en cet endroit la première de ces vcritcz. Donc, dit Au-
bertin , il ne croit pas la féconde. C'eft une confequence ridi-
cule , & le bon fens fait voir d'abord que ce n'cft pas par là
qu'on doit juger du fentimcnt de ce Père , &: que pours'en
aillirer il faut raffemblcr toute fa doctrine, & toute celle des
Auteurs des premiers (îecles , aufquelsil eft certain qu'il aefté
conforme en ce point.
Si l'on trouve qu'ilsayent mus 5i partout parlé delà même
forte dej. C.& du peuple à l'égard de l'Euchririftie, il faudra
conclure qu'ils ont crû que J. C. n'y eftoit prefent qu'en figni-
fication non plus que le peuple. Mais fi unilTant le peuple avec
J. C. dans cette qualité d'eftre figniiîé par l'Euchariftie , ils l'en
ieparent par plufleurs expreflîons qui marquent que l'Euchari-
ftie contient le corps de J. C. tour autrement qu'elle ne con-
tient le peuple, il faudra conclure que S. Cyprienn'explique
en cet endroit qu'une partie de fa doctrine j & qu'il a re-
connu dans ce myftere non feulement cette prefencede figu-
re & de fignification commune à J.C. & au peuple, mais enco-
re une prefence réelle qui convient à J. C. 6c non au peuple.
Voilà l'examen qu'il faut entreprendre pour décider cette
quelHon raifonnablement. Et commme nous l'avons pleine-
îpenc exécuté dans le fécond tome de la Perpetuitéj nous ayoïis
de^s rapports de h matière de tEuchuYÎflie. 14J
flroit de tirer icy cette conclu fîon, & de renvoyer le Ledeur Ch. II.
en chercher la preuve dans ce Volume.
Il luffit de remarquer icy à l'égard de S. Cypricn, que quoy
qu'il ait parlé en cet endroit de la même forte de J. C. &: du
peuple, il en a parlé fort difK-'remment ailleurs. Il n'a jamais
«<iit,parexemple,que ceux qui vouloicnt communier contre l'or-
dre de \'^<^\'ît pechoient cont7-c le peuple chrcticnpar leurs mains eS
far leur bouche • mais il dit d'eux par rapport à J.C qu'ils ccra- ^^'^^- ^•'"'^1?^^
mettent un plus grand crime contre le Seigneur par leurs mains Qj-
farlaur bouche que lors m'cme qu ils l'ont renie.
Il reproche bien à ceux qui communioient indignement <7<v 7//
recevaient le corps du Seigneur dans des mains pollues , eS qu'ils Lcu-
voient fon fang avec une bouche foiiillèe : mais il n'a jamais dit
qu'ils reçûfîènt li peuple dans leur main, ny dans leur bouche.
Il dit que nous touchons le corps de J. C. en communiant , mais
on ne trouvera point quil en ait autant dit à l'égard du peuple.
Que fi l'on ajoute encore cette foule d'autres expreffions, donc
Jes Pères, qui ont précédé ou fuivi S. Cyprien , fe font fcrvis
en comparant l'Euchariftie avec le corps de J. C. ôcdont ils ne
fe font jamais fervis en la comparant avec le peuple , Se que l'on
confidere que cesexpreflîons n'avoient pas juftement fini à S.
Cyprien pour recommencer incontinent après luy, on verra
que les fidèles dévoient eftre tellement accoutumez à diftin-
guer la manière dont le corps de J. C. eft dans l'Euchariftie ,
de celle dont on peut dire qne le peuple y eft i que S. Cyprien
a eu une entière liberté de marquer ce qu'il y avoit de com-
mun entre J. C. &: les fidèles , fans,en marquer les différences.
Car toutes les fois qu'une différence eft bien eftablie par les
exprefllons communes, Se que l'on n'a point lieu de foupçon-
tier qu'il y ait perlonne qui l'ignore, onledifpenledu foin delà
marquer , & la penfée même n'en vient pas.
Auifi ne trouvera t on pas un auteur grec ni latin qui n'ait
ufé de cette liberté aulfi bien que S. Cyprien , Se qui n'ait fou-
vent confondu dans rexpre!non,^des manières d'eftre tres-dif-
ferentes ^ parce qu'ils fuppof.Ment avec raifon que les lecteurs
fuppléeroient fans peine à ce oui manquoità ces paroles,&qu'ils
prendroient quelques unes de ces expreffions dans un fens de
j-éaliré , & les autres dans un fens de figure.
C'eft ainfi que Germain Archevêque de Conftantinopîe ,
Auteur de la Théorie des myfteres, qui apparemment a écrit
I48 Liv. III. Képonfè aux ohjeFiions tirées
au treizième iîecle, comme M. Claude luy-mêmc l'a reconnu,
& donc la foy fur ce Myftere ne peut cOre par confequent dou-
teufe, ne laifle pas en comparant les particules que les Grecs
offrent à l'honneur des Saints avec celles qu'ils offrent en mé-
moire de |. C. de les unir tellement par l'expreffion , que com-
me il dit en parlant de la grande portion quelle cfi le Seigneur
O" Is Roy 1 c'eft à dire J. C. il dit clés autres qu'elles font Icsmem-
Gernianus in hres de JefuS-Chrifi Ta, S^t ctAAct Ti/J-iX S'tJùÇj^ ix'iKy, ^pifoC. Etcom-
ftc^doruiir^' """^ ^^ ^^^ ^^^ '^""^ P^** l'apport à l'effet de la conlecration ,
que JC. y efl veu, £c qu'il fouffred'y eflre touché, il ditpareil-
lement en parlant des dons non confacrez qui font portez avec
grand refped: parmy les Grecs à l'Autel où l'on les doit con-
ïacrer, que le p-and Roy J. C. s'avance vers le jacrifice ynyÇtiquey
^ qu'il efi -porté far des mains mortelles.
Que comme il dit encore que dans le divin pain efi montrée
Ô' figurée la divine él" vivifiante Pafiion de celuy qui a efié im-
molé pour la vie de tout le monde • il dit de même que la triple
immerfion qui fe fait dans le Baptême figni fie les trois jours de fa
fepulture: Ce qu'il porte encore plus loin dans la fuite en expli-
quant les fignifîcations myftiques des habits Sacerdotaux &
de toutes les cérémonies de la Liturgie par les mêmes termes
qu'il employé pour marquer les rapports du pain confacré y
au corps de J. C.
C'eft la liberté qu'on prend naturellement quand on a rai-
fon de fuppofer qu'une docîlrine eft connue de ceux à qui l'on
parle. Germain fc^avoic bien que fes lec1;eurs ne luy impute-
roient jamais de croire que les petites portions fufîent auflî
réellement les membres de J. C. c'efl à dire les fidèles^ que la
grande efi véritablement fon corps.
Il fçavoit bien qu'ils diflingueroient fans peine la manière
donc on peut dire que J. C. eft touché dans les dons avant ôc
après la confecration i & qu'ils ne croiroient pas non plus que
J. C. ne fût que figuré dans les dons comme la fepulture de
J. C. n'efl que figurée dans Je Baptême.
Comme ces doutes ne fe formoient pas dans fon efprit , il
ne craignoit pas aufîî qu'ils s'elevaffent dans l'efprit des au-
tres J & bien loin qu'il crût bleffer, en parlant ainfî, la do-
drine de la prefence réelle , c'eft la ferme perfuafîon de
cette dodrine qui luy donnoic la liberté de parler de cette
iôrte.
des rapports de h matière de l'Eucharifiie. I49
Hugues de S. Vktor , dans le traité qu'il a fait fous le titre Ch. I.
de miroir de l'Eglifc^ parle de la même force que S. Cyprien ,
& avec auifi peu de précaution. Ze Frefire , dit.il , offre les dons
four le Sacrifice , [(Ravoir le pain é^ le vin , mais on ajoiae l'eau a»
vin. Et fi vous vous en ètonnet^ fiachca^ quec'efi un grand Sacre-
ment. Car l'eau méfiée au vinfi.<iure l'homme méfié a J. C.par le fang
de J. C. Celtiy qui fepare l'eau du vin rompt l'union de J. C. d^ de
l'Eglife. Ou voit que, félon cet Auteur, comme l'eau figure
l'Egliie, le vin figure J. C. 6c qu'il ne fait point en ce lieu là
de différence entre l'un êc l'autre, mais qu'il fuppofoic que les
lecteurs la feroient.
On pourroit rapporter une infinité d'exemples de cette forte.
Car il n'y a point d'Auteur Catholique qui ne tombe natu-
rellement dans ces expreflions , Se qui ne mefle indifférem-
ment à celles qui marque la prelence réelle d'autres expref-
fions qui marquent une autre iorte de prefence fans en mar-
quer la différence.
Je lifois , par exemple , il y a quelques jours un traité édi-
fiant fait par une perfonne qui n'a fongé en le faifant qu'à ex-
primer les mouvemens de fa pieté , où l'on lit ces paroles tres-
faintes à la vérité , mais fur quoy les Miniftres ne manqueroienc
pas de chicaner s'ils le trouvoient dans quelqu'un des anciens
Pères. J C. eft dans l'Eucharifiie pour eftre l'exercice de nô-
tre fov J &; il eft dans nos frères non feulement pour y eftre de
même l'exercice de noftre foy, mais auffi pour y eftre l'exer-
cice de noftre charité & de noftre patience. Nous n'avons rien
à fouffrir de J. C dans l'Euchariftie^ & il ne fait que nous y
confoler, ce qui nous rend peut-eftre fi ardens à l'y chercher,
au lieu que nous avons quelque chofe à fouffrir de luy dans nos
frères , & qu'il a fouvent befoin que nous l'y confolions ^ ce qui
ne vient néanmoins que du dcfir qu'il a de nous confoler nous-
mêmes avec plus de tendreflè. Il nous nourrit & nous fortifie
dans l'Euchariftie ^ au lieu qu'il veut que nous contribuions à
Je nourrir & le fortifier luy-même dans fes membres , pour le
moins par nos prières , par le témoignage de noftre bienveil-
lance, 6c par toute forte de bons exemples.
CoAime il fe cache dans l'Euchariftie, afin que nous n'ayons
pas horreur de manger fa chair ; il fe cache de même fons la
foiblefTêde fes membres , afin que nous ayons plus de zélé pour
l'afïîfter. Il nous eft avantageux qu'on ne puiffe s'appercevoir
T iij
Cl
ce
Ce
Ci
ce
il
ce
ce
(S-
c
ijo L IV, III. Képonfè auK objections tirées
de (a pr-efence d-ms fon Augufte Sacrement que par la foy., &
il nous cft utile, quand nous le regardons dans les membres,
que ce ne km point par le muxftere des (ens, qui nousébloui-
xoient par l'ecl t de la magnificence, & qui nous priveroienc
,, de la plus grande partie du fruit que nous en recevons.
On voie clairement que c'eft la nature qui a porté l'Auteur
de ce traitté aulFi bicnquc tous les autres , à ces -fortes de com-
piraifons &: d'expreffions. Car comme il y ^ an plaifîr à con-
lîdcrcr lesrefTemblances des cho/cs, parce que toute forte de
juftifle plaift à l'efprit ^ c'crt auffi un àss plus grands ornemens
de l'éloquence que de les taire remarquer aux autres. Mais
comme elles ne font jamais parfa-itcment jufles, on fe porte
naturellement à cet artifice de fupprimer ces différences , &:
d'unir dans l'cxprcffion les chofes dont on nous veut faire con-
naître le rappart , en Uiifant à l'efprit à concevoir ohfcurémenc
les diffcrenccs qui oderoienî tout l'agrément lî onlesmarquoic
fiexpreflement & (î clairement.
C'efl: donc une règle très fauffeê*: tres-trompcufe , que de s'i-
maginer qu'un Auteur ait eu les mêmes fentimensde deux cho-
ies, parce qu'il les a confondues dans quelques expreffions.
Pour avoir lieu de tirer cette conclufion, il faudroit qu'il les
euft: unies en toutes, Scqu'il n'euft rienditde l'une qu'il n'euft
auffi dit de l'autre. Mais quand il fe trouve que s'eftant (ervi
de quelques exprclTions communes à l'égard de ces deux fii-
jets, il vient à les feparer par une infinité d'expreffions parti-
culières qui déterminent cette expreffion générale, &: ne fe di-
fcnt jamais que de l'un de ces deux (ujets, il faut conclure au
contraire que l'exprefTion commune ne fe difoic pas de l'un &
de l'autre au niême fens. C'eftainfi , par exemple , que quoy
que Germain Patriarche de Conftanrinople déclare que j. C.
cfl: touché par des mains matérielles avant & après la confe-
crition ; il cil vifible néanmoins qu'il a entendu qu'on le trni-
choit réellement apréslaconfecration,& qu'on ne letouchoic
pas auparavant, parce qu'il dit un grand nombre de choies
de l'hoftie cok facrée , qu'il ne dit poinp ^ que perfonne n'a ja-
mais dres de l'hoftie non confacrce.
On ne dit point, par exemple, de l'hoftie non corifacrée
qu'elle foit changée au corps de J. C. On n'exhorte point les
Chrétiens à n'en point douter. On ne dit point que J. C. ait
dojiné aux Preftres la force d.ç rendre l'iiollie corps de J. C.
comme Q€C Auteur dit tout cela à l'égard de l'hoftie confacrée.
des nippons de la, matière de t€uch:trifiie, \^i
Voilà la règle qu'il faut fuivre & fur ces palfages de S. Cy- Ch. II.
prien, & fur tous les autres iemhlables,& non pas palier fa vie
à chercher un à un dans hs Pères quelques endroits écarter
où ilsayent parlé deTEuchariftie dans les mêmes termes donc
ils fe fervent à l'égard de divcrles chofes dans lelquelles ils ne
reconnoiirent point de prcfencc réelle, ou qui ne n'.arquent
qu'iiDC fimple reprefentation. L'importance cil' de découvrir
s'ils ne dilent pointdeceMyftere, de certaines chofes que l'on
ne fçauroic dire de ce quin'eft qu'image & figure. Et comme
nous avons fait voir dans le fécond Tome de rct ouvrage ,.
que cela leur arrive fouvent , c'en eft alfez pour montrer , que
toutes le expreffions communes & équivoques , telles que font
celles de S. Cyprien, fe doivent prendre au fens de la dodrine
Catholique j & que c'eft ce que le bon fens preft rit à tous ceux
qui ne veulent pas s'aveugler eux mêmes.
CHAPITRE IL
Examen de lu Philo fophic des MiniJIres fur lu dijlinclion des ma,
gcs , ô- de leurs eri^inaux^
SI l'on examine la diflinclion qui fe doit rencontrer entre
l'image ôcTorigma! par le feul fens commun ÎS: fans rap-
port à l'autorité , il n'y a point de gens de bonne foy qui ne
conviennent aifément de ce cju'on en doit croire.
Car il eft certain d'une part qu'il faut qu'il y en ait.^puifque
cette diftinciionell une efpcce d'oppofition relative, qui don-
ne lieu de conclure que l'image n'eft pas l'original , au moins
en tant qu'elle eft image.
Mais il eft certain aufli que cette diflinclion n'empêche pas
que l_a chofe reprefenrce ne puille eflre jointe à l'image qui là
reprefente i comme l'Arche ligure de l'Eglile eftoit jointe à
Noé &à les enfans qui eftoient la véritable Eglife de ce temps-
là, frgurée par l'arche , comme nos temples matériels font joints
à l'allèmblée des fidèles dont ils ne font que les images ^ com-
me le S. Elprit eftoit joint à la colombe & aux langues de feu
qui le figuroient; comme l'ablution extérieure qui fe fait dans
Te Baptême eft jointe à l'intérieure qu'elle figure j comme la
manducation corporelle du figne eft jointe félon les Calvinù
lyi Liv. III. Képonfe aux objections tirées
ftes , à la fpiricuelle qu'elle fignifie.
L'évidence de' cette vérité efl: telle, qu'Aubertin même n'a
pu la defa vouer entièrement. Car après avoir rapporté un ex-
cellent paflage du Cardinal du Perron qui diftingue deux for-
tes d'images, dont les unes font deftinées à fuppléer l'abfence
à.Qs chofes, &: les autres à fuppléer au défaut de l'apparence,
& allègue pour exemples de ce dernier genre d'image ,1e buif-
fon ardent que vit Moyfe, les figures d'hommes fous lefquel-
les les Anges apparoifToient , le ferpent dont le diable emprun-
ta la forme pour tenter Eve, il en demeure d'accord. Je con-
Aiiber. 794. viens , dit-il , qtie d'cfire (î'inc ^ fiqtirc , rC exclut pas far la force
de ces termes mêmes ^ la frefencc de la chofe Jipiifice.
M. Claude fait le même aveu en quelque endroit de ks li-
vres 5 car il a bien veu qu'il n'y avoitpas moyen de s'en defFen-
dre.
Mais il auroit bien fait, &: Aubertin auflî , de porter cet aveu
un peu plus loin, bc de reconnoiftre qu'il eft tres.pofîible non
feulement qu'une chofe foit jomte à fon image , mais audî qu'u-
ne chofe dans un certain eftat foit fi2:ure d'elle-même dans un
autre eftat. Car M. Claude , par exemple , eftant dans fa cham-
bre avec (es amis , ne peut-il par fe reprefenter luy-même prê-
chant à Charenton & imiter fon gefteSc fa pofture? Et n'y au-
roit il pas de la chicanerie à nier qu'il ne fût alors une figure
de luy même ?
Ne femocqueroit il pas luymêmed'un homme qui fefervant
de ce principe fi ordinaire aux Miniftres , que lien ne peut efire
figure de foy-mcme ^ luy feroit l'application par cet argument ,
Rien ne peut cftre figure d)^ image de foy-m'emc. Or cet homme efl
la figure de M. Claude , puifquil le repre fente prêchant. Donc ce
n' eft pas M. Claude-^ ou d'un autre qui tireroit une conclufion
toute différente du même principe par cet autre raifonnement:
Rien ne peut cftre figure de foy-mètne.
Or cet homme eft M. Claude.
Donc il ne repre fente pas M. Claude.
Ne fe contenteroit-il pas de leur dire qu'il fçait bien qu'il eft
M. Claude, 6c qu'il ferait bien encore qu'il fe reprefente luy-
même?
C'eft en vain qu'Aubertin prétend éluder cet exemple &
cent autres femblables qu'on peut apporter , en difant qu'u-
ne adion peut bien eftre image d'une aélion , mais qu'un
homme
des rapports de la, matière de l'EucharijUe, jjj
îiomme ne le Içauroic cdre de foy-même. C'eft n'entendre pas C h. IL
noême ce que l'on die que de repondre de la forte. Car on ne
fçauroic reprelenrer une aciion qu'on ne reprefence en même
temps celuy qui la fait, puifqu une aciion ell: un mode que l'ori
nefçauruit concevoir fans l'attacher à un Tu jet. Il efi: donc cer-
tain que lorfque l'on reprefente le geft & l'air de quelqu'un ,
on lereprelente luy-même, ce qui s'appelle en effet le con-
trefaire. Et qu'ainfi M. Claude reprefentant les acT:ions publi-
ques qu'il fait à Charenton, fe reprefente luy-même, 2c efl
très-proprement image de luy-même.
Il eft clair par là qu'il n'efï pas neced^iire qu'il y ait entre
l'image & lachofe reprefentce une dillinclion tL^le que celle
qui fe trouve entredes êtres feparez j mais qu'il fuftit en quel-
que rencontre qu'il y ait une difl:incT:ion de mode 6c de maniè-
re î comme M. Claude n'eft diftingué dans fa chambre de luy-
même préchant à Charenton , que parce qu'il eft d'une autre
manière dans fa chambre qu'à Charenton.
Il n'y a encore rien en tout cela qui reçoive la moindre dif-
ficulté raifonnable , non plus que dans la remarque qu'il eft ne-
celfaire d'y ajouter, & qui donne lieu de découvrir quantité
de fophifmes d'Aubertin.
C'eft que quand il arrive que le fig:^ne & la chofe (Ignifiée font
joi-ns enfèmble, l'efpnt les peur concevoir en deux manières
différentes. Car il peut concevoir le figne feparémcnr de la
chofe (îgnifiée , ou bien il peut réunir l'un & l'autre en une mê-
me idée, en faifant de la chofe fîgnifîée l'idée principale, &
du figne l'idée accelToire. Ainfi parce qu'un vertement eft joint
à un homme , on peut concevoir Se le veftement & l'homme
par deux notions diftincTies , ou l'homme & le veftement réiinis
dans une même idée, en concevant ijn homme veftuj ou une
chofe vcftuc.
Or quand il arrive ainfi que deux idées font confiderées com-
me un tout avec cette fubordinationj que l'une eft regardée
comuiefubftance& l'autre comme accident^ la nature du lan-
gage humain eft d'attribuer .1 lapartie principale de ce tour, ce
qui ne convient au tout que par la partie accciloire. Ainfi l'on
dit qu'un homme eft bien mouillé quoy qu'il n'y ait que ies
habits qui le foient, &: l'on ne Ir^iftèroit pas de dire qu'on voit
un (oldat, encore qu'il Fuft entièrement caché fous fes armes.
Les conclullonsqui fe tirent de ces principes à l'égard del'Eu-
V
JJ4 Liv. m. "Réponfe aux ohjeBions tirées
ch.iriftie ne font pas difficiics à découvrir. Car il s'cnlliit à la vé-
rité , que ce qui y tient precifément lieu d'image , ceft à dire le
voile extérieur, eft diflingué du corps de J. C. qu'il figure &
qu'il rcprefente : &. c'eft ce que perlonne ne nie j puifque nous
avons fait voir qu'on peut même dire , que ce qui eft image
n'cffcpas lecorps de J. C. Mais cela n'empêche nullement que
le corps de J. C. ne puifle eftre caché fous ce voile comme le S.
Efprit l'étoit fous la figure de la colombe, & la nature de Dieu
fous la forme de ce buifiTon ardent qui parut à Moyfe dans le
defert. Cela n'empêche pas non plus qu'on ne puifle regarder
J. C. dans cet eRat comme figure de luy-même dans un autre
eftat. Enfin cela n'empêche pas que par l'efprit on ne puiflè
faire un tout du corps de j. C. ôc du voile qui le couvre , &: que
par une faite naturelle de cette idée on n'actribvtë au corps de
J. C. ce quineluy convient que par ce voile, comme d'eftre
vifible &;d'efl:re lymbole de Ion corps naturel.
Toutes ces confcquences font fi juftes, qu'il efl: étrange que
des gensd'efpritayent pu entreprendre de les combattre. Ce-
pendant il n\ a gueres d'endroits où les Miniftres faflent de
plus grands efforts ^ &; oii par confeqnent ils tombent en un
plus grand nombre d'égaremens. Le livre d'Aubertin en eft
M. cbuie j.^yj. reuipii^ 2^ M. Claude n'a pas manqué de le fuivre en ce
'* ''^* point aulTi bien que dans les autres.
C'eft pour comt>atfre ces principes de fens commun qu'Au-
bertin par exemple, nous fait en plufieurs endroits des liftes en-
nuyeufes de paiTages des Pères, qui marquent qu'il y a de la dif-
férence entre l'image &: la chofe reprefèntée, que l'image n'é-
gale pas la vérité, qu'elle n'eft pas la chofe même qu'elle rcpre-
fente j comme s'il s'enfuivoit de là que les Pères euflent voulu
nier que la chofe reprefèntée peut eftre jointe à celle qui lare-
prefente,& qu'un homme peut imiter dans un certain eftat ce
ce qu'il fait dans un autre, & fe reprefenter ainfi luy- même ,
qui font deux chofes fi claires par elles-mêmes, qu'Aubertina
efté contraint de reconnoiftre la première, & qu'il ne combat
la féconde que par une diftindion chimérique, en foûtenant
qu'on reprcfente uneaclion fans reprefenter celuy qui la fait.
La raifon veut donc qu'on reduife les expreffions des Pères
touchant la diftindion des images & de leurs originaux, aux
bornes que le fens commun y met, puifqu'apparemment ils
n'en n'ont pas manqué.
des rapports de la, matière de tEuchar'iflte 1^5
Ainfi quand Tercullien nous dic que hmage rieyde pas la Ch. II.
venté , eS qu'autre chofe ejl d'cfire Li vcritè même , Q- autre chcfe
d'ejtre conforme u la vérité , il veuc dire fîaiplement que l'image
comme image n'eft pas l'original. Car ce (eroic une hère fie que
. de prétendre qu'une image ne puilTe égaler la chofe donc elle
«ft image, puiique le Verbe eft l'image de Ton Pcre,Sc égal
à fon Père.
Ainfi quand S. Athsnafe dit, que ce qui efi femblable à qucL
que chofe ncfl pas la chofe même a laquelle il eft femblable , il
veut dire qu'il ne l'eft pas entant que femblable ,& par la cho-
fe qui le rend femblable, quoy qu'il le puifle eftre ablolumenr.
Et c'eft ce qui fe prouve par l'exemple même qu'apporte faint
Athanafe. Car il eft vray d'une psrt, comme il le dit, que
l'homme eftant image de Dieu n'eft pas Dieu , c'efl à dire qu'il
ne Teft pas par l'ameSc l'intelligence qui l'en rend image .-mais
il feroit faux abfolument de dire que l'homme ne puilTe eftre
Dieu , puifque J. C. ell: Dieu &: homme tout enfèmble , ôc qu*-
ainfi il eft vray de dire que l'homnie eft Dieu.
Amfiil eft vray, comme ledit S. Ambroile, o^trienriefl ima-
fe de foy-m'eme ^ mais il faut entendre cela des chofes confTde-
rées abfolument & fans rapport à des eftats difftrens. Et c'cft
pourquoy comme ce n'eft pas par rapport à un certain eftar,
que l'on dic du Verbe qu'il eft image du Père , S. Ambnnle en
conclut fort bien qu'il en eft diftingué. Mais cela n'empe. he
pas qu'une chofe confidecéeenuneftat ne puifle eftre la figure
d'elle-même dans un autre eftat. Ainfi les Pères remarquent
que lorfque J. C. dans la croix convertie un des Larrons, &
rejetta l'autre, il eftoic une image de luy. même, lorfqu'il fera
dans fon dernier jugement le difcernement des Elus, 8c des re-
pr.^uvez- Jam fî'inijjcabat quod faclurus ef} de vivis ^ mortuis ^ Aug. traft. ^
alias pofiturus ad dexteram ^ alios ad finifiram. Cari! ne faifoic
pasconnoiftre cette feparation terrible, par ^ts paroles qui la
prédîiîènt, mais par une aciion réelle qui la reprelèntoic. Ec les
Anges mêmes avercirent les Apoftres^que J. C. moncant aux
Cieux eftoit l'image de luy même defcendant des Cieux pour
juger les hommes. Hi-c Je fus qui ajfumptus eflà v obis in ccclum^
fie veniet quemadmodum vidjfiis èum euntem in cœlum.
Ainfi il eft vray en un fens que l'tmaqe a des figures ^ non
pas des chofes , comme Theodorer dit, c'eft à dire que la qua-
lité d'image n'enferme point du tout d'eftre la chofe même , ÔC
Vij
1^6 Liv. III. Képonfi aux ohjeEtion tirées
que l'on ne peut conclure de ce qu'une chofeeft image, qu'elle
enferme la vérité de ce qu'elle rcprefente.- de forte que lorfque
nous ne fçavons rien d'une chofe (înon qu'elle eft image d'une
autre , nous avons droit d'en conclure qu'elle n'en contient pas
la vérité.
C'eft ainfî qu'il efl vray que l'image ne peut eftre la chofe
même, comme les Grecs orthodoxesie (oûtenoient contre les
Iconoclades ; mais celafe doit entendre de ce qui n'a point
d'antre qualité que celle d'miage , comme l'Euchariftie n'en
auroit point d'autre fi ces paroles : Cecy eft mo7i corps , ne fîgni-
fioict rien antre chofe ni par les termes ni parles crreonftan-
ces, finonqu-^c'ert Tmiagedu corps de |. C. Etc'cft pourquoy
ils avoienr raifon de conclure, que fi l'Eucharifte eftoit l'una-
ge , elle n'efioit pas. le corps même,c'eft à dire que fi elle n'c-
toit qu'une figure & une fimple image, elle ne pouvoit eftre
le corps même de J. C.
Comme le fens commun ne permet donc pas^ qu'on poufiTe
ces maximes des Pères dans les autres fujetsiulques à des con--
fequences qui feroient vifiblcmentou abfurdes ou hérétiques,
perfonne ne doit trouver étrange que le même lèns commun
les fafle auffi modérer à l'égard de l'Euchariftie j &. qu'encore
que l'on avoue que ce qui eft precifément image dans l'Eu-
chariftie n'égale pas J C. n'eft par J. C. eft différent de J C.
on ne laifle pas de foutenir que J. C. eft joint & uni à cette
image i & qu'eftant confi'ieré comme y eftant joint, de même
qu'un homme qui feroit enfermé dans fa ftatuë feroit j(»int à
û ftatuc, il peut eftre appelle image de luy même dans 1 eftat
de fa mort & de fa refiirreftion , & il peut même eftre concea
d'une connoifiànce confufe fous l'idée de fymbole, de Sacre-
ment & d'image :, quoy qu'il ne foit rien de tout cela que par
le voile qui le couvre.
Ainfi il fera vray de dire de cet objet, & qu'il eft le corps de
J. C. & qu'il en eft image toutenfemble, avec cette différence
néanmoins que l'un de ces attributs luy convient efiènrielle-
ment,& 1 autre feulement par accident, en tant qu'il eft re-
gardé comme failant un tout avec ces voiles myfteneux dont
il tir^ la qu^lire d'image.
des rapports des matières de tEucharifiie, jjj
Ch. m.
CHAPITRE III.
Sophifmcs i'Aubcrtin contre les maximes établies dans le Cha.
pitre précèdent.
COmxME il efb impofilble de combattre des maximes tirées
de la lumière du Icni com.mun , fans tomber dans desab^
furditez qui choquent le fens commun , on ne doit pass'cti-n-
ner de celles qu'on remarquera dans le raifonncmentd* Auber-
tin que nous allons rapporter. On doit s'y attendre , &; ailii-
rcment on n'y fora pas trompe 5 car il efi: difficile d'en trou-
yer de plus groffieres dans quelque Auteur que ce fojt.
Il ne Faut que l'entendre ddcounr fur ce iujct dans la page
274. pour s'allurer de ce que je dis. Car après y avoir propo-
fe cet amas de palTages lur la diilinclion qui fe doit rencontrer
entre l'image 6ci'original, dont nous venons de voir l'inutiiité,
il forme un nouvel argument lur la nature des images en cet-
te forte.
En fécond lieu, dit-il, l'image doit expofer aux yeux la chofe
dont elle ejl image. Mais comment le corps de J, C. invifible i^
caché fous les acetdcns du pain , pourra- 1 il démontrer fon corps ^'/-
fible étendu dans la croix î Qui a jamais oiii parler d'une irrut'i:e
invifible d'une chofe vijîhle ] Et comment, dit S. Grégoire de Niffe,
une chofe invifible pourra-t-elle r^ous conduire à la connoiffancc de
ce qui efi vifiblcl
Qui ne feroit renté-de rire en voyant un Miniftre qui veu)
faire lefubtil,propofer fericufementunfophifme 11 puérile? Cai
qui nefç it qu'une chofe invifible devenant vifible par quelque
chofe d'extérieur auquel elle eft jointe, peut eftre figne d'une
autre chofe ou vifible ou invifible. Les Penfees font invifible?
par leur nature, mais eflant revefluës de mots, elles devien-
nent les fignes de la qualité de ni flre elprir &: de nos moeurs.
Un difcours écrit ou imprimé, c'efl: à dire des penfées revê-
tues de caractères, fint des fignes de ce même difcours pro-
noncé, & donnent heu fjuvent de fe figurer l'adion de celuy
qui l'a fait.
Les Anges par lefque's Dieu manireftoir aux hommes fesvo-
lontez dans l'ancien Teftament eftoienc invifibles parleur na-
V iij
ij8 Liv.IIf. "Réponje dux objections tirées
turc , mais par le moyen des corps qu'ils empruntoient ils de-
venoienc les images Je Dieu le Pcre ôc de JesusCh-^ist.
Quelle difficulté y a t-il donc à concevoir que le corps de
J. C. eftanc invifible dans l'Eucharifte , mais y eflant couvert
d'un vuile lenfible, foit une figure ou de luy. même dans un
autre eilat , ou de Ton corps myftique? Et comment Aubertiii
a-t-il pu s'imaginer qu'il y euft de l'incompatibilité ?
Ce qu'il y a de plus étonnant efl: qu'il n'a pas tout à fait igno-
ré la réponfe qu'on pouvoit faire à cet étrange argument, 6c
qu'après le l'eftre propoféc il la r.jstre par un autre raifonne-
ment encore plus ridicule.
Il ne ferviroit de rien de répondre ^ dit-il , que Chrijî pour fe re-
frcfcnter comme étendu dans la croix fe fcrt des efpcccs du pain ^
du vin fous lefquelles il ejî caché , (^ quejiam conjtdcré avec ces ef-
fèces il peut fe reprefenterk nous.
Et pourquoy cela ne ferviroit-il de rien ? La raifon qu'il en
donne eft admirable. C'r//, dit-il, f«'<?w ne fcauroit dire que par
taillerie que J. C. prenne pour fe manifefter des ejpcces qui le cachent.
Ce feroit dire quil a pris les ténèbres pour éclairer ^ comme dit Ter..
tttllien , en parlant d'une phantaife femhlable de certains Héréti-
ques. Orpcrfonne , dit le môme Auteur, pour faire voirie vifay;
d'un homme ne luy met un cafque ou un mafque.
Cet argument paroift fans réplique à Aubertin. Mais il pour-
roit bien paroiftre fans railon à tout le refte des hommes. Car
pour me fervirde l'exemple que j'ay déjaallegué; Eft-ce qu'on
ne peut dire que par raillerie que les Anges pour figurer Dieu
qui efl: invifible , fe cachoient fous des formes vifibles ?
Ne fçauroit on dire que par raillerie , que Dieu fe rendoic
vifible fous la nature humaine de }. C. qui le cachoit ? S Paul
n'a t-il dit que par raillerie, que Dieu s'eft manifefté dans la
chair, Dcus manifcfiatusefi in carne} Y auroit il delà raillerie
à dire d'un homme caché dans fa (latuc , qu'il fefait voir par
ie voile même qui le cache? Y a-t il de la raillerie à dire d'ua
cafque qui cache le vifage d'un homme, qu'il le découvre fou-
vent en qualité de figne ? Et tous les habits qui font propres à
certaines perfonnes , ne font ils pas ce double effet de les dçj
couvrir & de les cacher ?
Que nous veut donc dire Aubertin avec cette plaifante ma-
xime? Et comment n'a~t il point veu que le delîein qu'a eu J, C.
en infticuant l'Enchariftie demandoic au contraire qu'il yfuft
des rapports de la matière de l'EuchariBie. 159
& caché 6c découvert tout enlemble? Cii. lH»
Il y devoit eftre caché aux fens, puifque c'efl: un myftere de
foy , & que la foy n'a point de parc à ce qui s'apperçoit par les
fens Mais comme la foy a befoin d'eftre excitée ,il falluitaul-
fiqu'ilyfuft découvert à noftre efprit par quelque image. Qu'y
a t-il donc de plus convenable à ce delTein que de s'eftre caché
aux fens ions des voiles, & de s'eftre découvert à nos efprits par
le moyen de ces mêmes voiles ?. Ce ne fera donc pasj dit il , le
corps de J. C. quieft invifible, mais lesacciJensdu pain Se du
▼in, qui auront la qualité de figne, puifqu'il n'y a que les ac-
cidens qui foient vifibles. Il efl vray qu'on les peut appeller lî-
2;nes, & qu'ils font tellement fgncs qu'ils font réelkmeut di-
ftin<5ts de ce qu'ils fignifient. Et ainfi Aubertin n'a qu'appliquer
à la lettre à ces accidens toutes fes maximes de la diflinction
qui doit eftre entre les figures & leurs objets.
Mais bien loin de conclure de-là, que la qualité d'image &
de figure ne peut donc convenir au corps de J. C. caché fous
ces figures, il en devoit conclure tout le contraire. Car dés là
que J. C. efl: joint à ces fignes,& qu'il leureft intimement pre-
fent, il devient capable de recevoir les noms qui ne convien-
nent proprement qu'au voile 3 comme dés lors qu'un homme
eft veftu , il devient capable de recevoir des attributs & des
noms qui ne luy conviennent que par fes hahits ou fes orne-
mens. On dira par exemple qu'un homme efl brillant de pier-
reriesjquoyqu'il n'y ait proprement que les pierreries qui bril-
lent. Et cela a encore plus de lieu quand le fujetn'efl; conçu
que confufément fous l'idée de chofe prefcnte & de fubflan-
ce prefente.
C'efl ce qui fait voir que non feulement les mots è^antityfe^
de fymbole , &de Sacrement , peuvent eflre pris pour le voile ex-
térieur, qui efl le fens dans lequel Eutychius Patriarche de
Conllantinople dit , que le corfi de J. C. cjî mis dans les anty- ^'"' *"^
tives ÀiTvTo'^oii îvTt}i[j.iHi' 5 mais qu'il efl auffi tres-naturel de
les prendre peur l'objet prefent, pour la fubflance prefente con-
^ fiderée comme image. Et félon ce fens les fymboles ne contien-
nent pas ]. C. mais font J. C. même. C'efl ce qu'il eft impor-
tant de remarquer pour démêler divers fophifmes qu'Auber-
tin fonde fur cette équivoque , & dont nous donnerons plus
bas des exemples.
Il n'y a rien en cela à quoy le fens commun ne nous coû^
j6o Liv. III. Képonfè aux obiccîicins tirées
duife de liiv-môme. Cependant Auberun croit avoir trouvé une
raifon admirable pour montrer qu'on ne {ïjauroit dire fans fè
rendre ridicule, cjue le corps de |. C. cil: figne p.ir les apparen-
ces qui le couvrent. Si cet y4titcur,à\K-\\ /ur un piijfc'ie attribué au
Pape MiLtire prétend que le corps ejt (î'iveparles accidens , il don-
nera U:z de le traitter de ridicule , ridenJum sepropinabit. Car
c'cfi de même que fi quelqu'un dif oit qu'un homme cfi fiq^ure de
luy -même a caufc des habits dent ilcji rcyejiu. Mais c'cfl: Au-
bertin luy même qui fe rend ridicule par le peu de difcerne-
ment qu'il témoigne dans cette comparailon. Car afin qu'une
chofe puillè eftre appellée figure par ia partie extérieure , il faut
qu'elle foit entièrement cachée. C'cd par le défaut de cette
condition qu'on ne dit pas qu'un homme Foit figure de foyinê-
nie à caufe de fes habits, parce que Tes habits ne le couvrent
point enrierement, 6c que l'cTprit ayant moyen de s'appliquer
à la chofe même, n'a cjue faire de tirer fon idée de fes vêce-
mens. Mais fi une chofe étoit entièrement cachée, comme fî
un homme étoit renfermé dans une ftatuë , & qu'il la fit mou-
voir, on appclleroic tantoft cet objet du nom d'image 6c tan-
tofl: du nom de la chofe même qui y feroit cachée. Ainfi le S.
Efpric defcendant fur J. C. fous l'imagede Colombe, cfl: ran-
rôi appelle Colombe, & tantôt S. Efprit. Ainfi Gabriel par-
lant à Daniel fous la figure d'un homme, c(l tantôt appelle
du mot de w>, & tantôt de celuy de Gabriel.
Ce qui a caufé cet obfcurcifiemcnt d'efprit à Auberrin, cft
q'il n'a pas compris de quelle manière le corps de J. Cclt ap-
pelle image de luy- même prefent dans l'Euchariftie. Ce n'cll
pas le corps de J. C. dirtinclement conçu comme corps de
J. C. 6c fans rapport au voile, C'cft le corps de J. C. conçu
comme objet prefent, comme fubftance présente. Etc'eftde
cet objet prefent conçu par rapport à fa partie extérieure, qu'on
afErme qu'il eft image, comme on affirme du S. Efprit cou-
vert de l'unage de Colombe 6c conçu non diftinclement com-
me S. F.fprt, niais confuiément comme objetprefent, quec'vfl:
l'image du S. Efprit. ^
Je penfe qu'il y a peu de perfonnes qui ne demeurent d'ac-
cord qu'on ne peut gueres raifonncr moins folidement qu''Au-
bertin fait en tous ces endroits. Cependanttout cela luy paroifl:
fi jufte, que c'eft d'ordinaire fur quoy il fe jette quand il rencon-
tre dans les Pères les mots de type^ à'ùntitype ^ àtfymhole-.
Comme
des rapports de la, matière de ÏEuchariflie. léi
Comme par exemple, ayant rapporté le paflage des Dialogues Ch.I II.
de S. Juftin avecTriphon , où ce Père dit, que J. C. nazis a com-
mande de faire le pain de l'EuchariJiie en mémoire de fan Incar-
nation, pour montrer qu'on ne fçauroit entendre par ce pain le
corps de j. C. il ne manque pasd'allegaer qu'une chofe qu'on
ne voit point ne peut eftre le monument de ce qu'on voit^ &de
rapporter encore fon palîagede S. Grégoire de Nyffe, quidir,
que ce qui ejt invijible ne nous peut conduire a la connotfjancc de
ce qui eflinvifihle. Aquoy Auhertin ajoute encore une autre fo-
phifme auffi grodîer que celuy dont nous parlons , &: qui n'efl:
appuyé que kir le même fondemC'ir. Le corps de J. C. dit-il,
eilant glorieux ne fçauroit eftre le mémorial de ce même corps
en eftat de foufFrance^ car il doit y avoir quelque reflemblan-
ce entre le mémorial & fon objet. Or il n'y en a point entre
un corps glorieux &: invifible , 6c un corps vifible ôc enfan-
glanté.
Je dis que ce n'eft encore que le même rophifme dont nous
parlons; Car il eft vray qu'il faut qu'il y ait quelque reflèm-
blance entre le figne 6c la chofe figniliée^ mais il n'eft pas ne-
cefTaire que ce qu'on appelle figne contienne en foy-même
cette reffemblance ; il fuffit qu'elle luy convienne par quel-
que autre chofe à laquelle il foit joint. Or quoy qu'il n'y ait
point de reflemblance entre le corps glorieux & invifible de
J. C. 6c un corps vifible ^ fanglant : il -y en a néanmoins entre
un corps glorieux couvertdefignes vifibles quireprefenrent la
mort, 6c ce même corps confideré dans l'eftat de fa paiïîon 6C
de fa mort. Ainfi l'un peut eftre le figne de l'autre.
Il fe fert encore du même argument fur un paflage d'Ori- j,_ ,^j_
gène , fur un autre d'Euftate Patriarche d'Antioche, fur un p. 3«9.
de S. Ephren, 6c fur deux deTheodorec, 6c toujours avec la ^"g^'^'g^,,,
même confiance, que fi c'eftoit une demonftration à laquelle
tout le monde fe deuft rendre. Tant il fe connoilloic peu en
bonnes 6c en mauvaifes râifons.
Quelle meilleure marque en peut on encore avoir que de
luy voir avancer ferieufement comme une raifon decifive cet
autre argument. Ze Jiq/ie efi inférieur à. l'objet fiyiific. Donc fi p^o-. ^j?.
le corps (glorieux de J C. efloit dans l'Eucharifiie figne de lùy-
mème , il ferait inférieur à ce mhne corps inanimé , ifumo/é- (^
mort 3 ô" par confcquent il rien efi pas figne. Mais comment n'a-
r-il pas veu qu'à prendre fon axiome à la lettre , on en conclu-
X
162, Liv. 1 1 1. Répon/e aux ohjeEtions tirées
roit une herefie , qui cft que le Fils de Dieu eft inférieur à fou
Père, puifqu'il eneft image -, que l'eau & le fang qui fortirent
du coftc de J. C. eftoient inférieurs aux Sacremens, puifqu'ils
en eftoient les figures félon les Peresi qu'un homme dans un
certain eftat feroïc mferieur à luy-même dans un autre eftat,
pirilque la raifon nous dicle qu'il fe peut reprefenter luy-
même.
Il faut donc par neceflité modérer cet axiome, ou en l'en-
tendant des lignes tout purs, qui n'ont point d'autre avantage
que d'eftre fignes^ ou en ne prenant pas le mot d'inférieur pour
une infériorité réelle, mais pour un certain ordre que l'eiprit
met entre les chofes, qui ne détruit point l'égalité. Et en ce cas
rien n'empêchera de dire que J. C. dans l'Euchariftie eft en
quelque forte inférieur à luy,même confideré dans d'autres
eftats ; puifqu'en effet il y a plus couvert fa grandeur , & qu'il
s'y eft , pour le dire ainfi , plus anéanti, que dans tous les autres
myfteres.
CHAPITRE IV.
Explication d'un fa[faqe difficile de Theodote
d'Antioche.
AUbertin &M. Claude rapportent chacun deux fois
un palFage d'un ancien auteur appelle Théodore d'An,
tioche, qui mérite qu'on y falle une réflexion particulière.- par-
ce que non feulement il appelle l'Eucharifiie antitype ^ c'eft à
dire image • mais qu'il le fait même d'une manière qui pourroit
paroiilre furprenante, fi l'on le feparoit àç.s, cclairciiTemens
que l'on y peur apporter par la doÂrine des Pcres.
- G^ paiîàge qui nous aefté donné par Bulinger porte expref-
fémenc , que comme le Roy Q- [on ima^e ve font f<.is deux Rois j de
même le corps pcrfonnclde J. C. qui ef} dans le Ciel ^ (^ le pain aui
en eft l'i?nagc , (^-^ qui eft béni dans les Eglifes pAT les Prcjlres (j^
diftrihuè aux fid^elles ne {ontpof deux, corps.
Auberrin ne manque pas de conclure nettement de ce paf.
fage, que comme l'image d'un R oy & un Roy font difiinguez
de lubfiance , & que l'image n'cfi: pas proprement le Roy;aiiiîi
le pain de l'Euchariftie n'eft pas proprement le corps de J.C,
■ des Y Apport s de Li mAtiere delEuchuriflie. 165
& en. eft. fubftanciellepaenc diftingué. , Ec M. Claude le cire C h. IV.
.jijfÇxiime un de cqs. paiîàges clairs pour l'apinion des Calvinides
qui pouvoiencdifllper les dçucçs qu.e les lieux où les Pères ap-
pellent l'Euchanftie corps £c fangde J. C. auroienc pu faire
naiflre dans les efprics.
Mais quoy qu'il y aie de la couleur dans le raifonnemcnt et Au.
bertm^ comme je l'ay déjà reconnu, &;que l'apparence de ce
pafîàge femble favorifer l'ulage que M. Claude en a voulu fai-
re ; je ne laiflèray pas de dire qu'ils ne l'ont pu alléguer qu'a-
vec beaucoup de mauvaife foy, &; qu'étant entendu dans fon
véritable fens,il n'efl: propre qu'à établir la doclrine catholique.
■ La raifon en eft qu'Aubertin n'ignore pas que ce principe,
^«1? le Roy Q- l'image du Roy ne font pt^f deux Rois , maii un Jeul
Gî' unique Roy ^ a eftë employé par les Pères fur d'autres fu-
jets que celui de l'Euchariftie , 6Î que le principal ufage qu'ils
en ont fait, eft qu'ils l'ont appliqué à la Trinité pour mon-
trer que le Père & le Fils ne font pas deux Dieux, mais un
même & unique Dieu. Car les Pères eftant en peine de prou-
ver contre les Sabelliens & les Arriens l'unité de la nature di-
vine dans la diftinclion des Perfonnes, &: que quoique le Fils
de pieu fqit par fa notion perfonnelle l'image 5c le caraûerc
de la fubftance de fon Père, il n'a néanmoins que la même
eflènce 6c la même nature 5 comme ils ne trouvoient point
dans les créatures de comparaifon qui peuft proprement expri-
mer cette unité, ils ont efté obligez de fc fervir de ce principe
& de cette comparaifon, que le Roy 5c l'image du Roy ne font
pas deux Rois , pour en. conclure que l,e Père i)i le Fils ne font
pas deux Dieux.
C'eft l'ufage qu'en fait S. Atbanafe dans fa quatrième orai-
fon contre les Arriens, 6c dans celle qu'il a faite contre les Sa^
belliens-, S. Bafile dans (aç^ livre du S. Efprit chapitre 18. &
dans fon Homélie contre les .Sabelliens page 524. S; Cyrille
d'Alexandrie dans ion threfor afF.ii. £c Nicephore Patriarche
de Conftanrinople dans fon livre des Images.
, Et il eft remarquable que tous ces endroits font rapportez
par Aubertin dans la même page , où il cite celui de Theodo-
rei mais qu'il le donne bien de garde d'avertir les ledeursque
tous ces Pères parloient de la divinité du Père & du Fils, &
ne fe fervoient de ceri-e comparaifon que pour prouver que ce
nt font pas deux Dieux.
Xij
164 L I V. 1 1 1. Reponfè aux ohjeBions tirées
Cependant il eft bien clair que dans cette comparaifon des
Pères, ce feroit une herefieque de tirer une confequeneè pa--
reille à celle d'Auberrin. LePcrcSi le Fils ont entr'eux la mê-
me unité qu'tm Roy 6c fon image. Or l'image n'eft pas pro-
prement Roy, 6c diffère fubllantiellement du Roy. Donc le
Fils diffère fubrtantiellement du Père , ôcn'eft pas proprement
Dieu.
Et il eft clair au contraire que les Pères employent cette
comparaifon pour établir l'unité individuelle , numérique,
réelle & fubflrantielle de la nature divine dans le Père & dans
le Fils j &: qu'ils ne confiderent point l'image d'un Roy & ce
même Roy dans leur fnbflance & dans leur eflre propre , en
quoy ils font alfeurémentdifferens, mais dans la notion de Roy
que ces deux idées de Roy &i d'image ne multiplient point dans
nos efprits. La comparaifon donc ne confifte point félonies
Pères, ni dans la fubflance & l'eftre de l'image &:du Roy , ni
dans la manière de participer à la Royauté -, mais dans l'unité
de l'idée de Roy, que l'image ne multiplie pas: c'eft à dire
qu'elle ne fait point qu'on fe reprefente deux Rois. Et cette
■comparaifon toute imparfaite qu'elle e{l:,eft employée par les
Pères pour nous faire entendre la plus grande, la plus réelle,
la plus individuelle, la plus fubftantielle, la plus parfaite de
toutes les unitez , qui eft celle de la nature divine dans le Père
& dans le Fils.
, Cette feule remarque diflipe entièrement toute la difficulté
apparente de ce paffige. Car quel fujet y a-t-il de s'étonner
<}ue TKeodote voyant cette comparaifon appliquée par les Pè-
res qui l'avoient précédé , à exprimer l'unité individuelle du
Père & du Fils dont l'un eft appelle image de l'autre, l'ait auiTi
appliquée pour exprimer l'unité individuelle du corps de J. C.
i5c,du pain Euchariftique, qui eft aiddi appelle l'image de ce
corps ? E't la confequence qu'en tire Aubertin^ que le pain con-
facrë n'eft' donc pas proprement le corpsdeJ.C. comme l'i-
mage d'un Roy n'eft pas proprement le Roy,eftaufîî faufïè
que fî l'on concluoitde ctitç. comparaifon dans l'ufage qu'en
ont fait les Pères , que le Fils de Dieu n'eft donc pas propre-
ment'&: fubftanîiellement Dieu , comme l'image du Roy n'eft
pas fubftantiellement le Roy, f 1 '2''^ :■ ;;.;■:■:/:
J'ay dit qu'il y avoit de la mauvaife foy à Aubertin 5 parce
qu'étant impoifible qu'il ait ignoré l'ufage que les Pères fout
desmpports de Li matière de fEuchariftie. 16$
de cette comparairon,puifqu'il cite les lieux où ils l'appliquent Ch V.
au Père 6c au Fils^ la fînceritci vouloit qu'il n'en recrancliaft
pas l'application comme il Fait. Il adonc voulu nous empêcher
de voir cette application , & nous porter à concevoir par la
différence fubftantielle qui efl entre l'image du Roy & le Roy,
une différence fubftantielle entre l'Euchariftie & le corps de
J. C. au Heu que l'application qu'il a retranchée détruit nette-
ment ôc precilément cette confequcnce.
M. Claude n'eltpas plus fincere ^ puifqu'il a vu cespaflages
dans Aubertin, 6c qu'il en citeluy-même quelques-uns, pag.
355. Et parconfequent la bonne f'oy l'obligeoit de ne pas rap-
porter ce pailage qui fous une apparence facheufe efl néan-
moins dans le fond très- favorable aux Catholiques. Car com-
me dans l'application ordinaire que les Pères font de ce prin-
cipe, ^«1? le Roy^fon im^igc ne font pas deax Rois ^ ils en con-
cluent que le Père & le Fils ne font pas deux Dieux , &: qu'il y
a une unité individuelle entre le Père & le Fils ; de même dans
cette autre application de ce même principe à l'Euchariflie
faite par Theodote à l'imitation des, Pères , où le painEucha-
riftiqueêc le corps de J. C. contiennent la place du Père 6c du
Fils, ôcfont comparez à la même ehofe, on en doit conclure
que cet auteur amis la même unité entre le corps de J. C. &:
l'Euchariflie , que les Pères mettent entre le Père & le Fils,
c'efl à dire qu'il y a mis une unité tres-parfaite.
CHAPITRE V.
Qice la nature noiis forte à concevoir ^ à exprimer le myfiere de
l' Etccharifiie félon les manières ordifj aires dont les hojnmes Con-
çoivent S^ expriment les autres objets. Première manière : Sé-
paration d'un même objet en divtrfes idées. . Sophifmcs yo_IJicrs
d' Aubertin nez^de l'iyiorance de cette manière ordinaire de con-
cevoir les objets.
QU £ LQJJ E difproportion que les myfleres de noflre reli-
gion aycnt avec l'efprit humain, dés lors néanmoins qu'ils
en deviennent l'objet, il faut qu'il s'y forme quelque efpecede
proportion avec fon intelligence : c'eft à dire qu'il faut que les
X îij
i(>6 Li V. 1 1 1. Képonfe aux objections thées
hommes s'en faflenc des idées conformes à celles qu'ils onc
des objets communs.
C'eft ainfi qu'ils fepnrent les cliofes fimples en divers attri-
buts j qu'ils renferment lous des idées finies, des objets im-
menfes &; infinis j & qu'ils conçoivent par des idées corporel*
Jes des objets purement fpirituel.v. Souvent même ils fontobli,.
gez de reconnoiftre& de corriger l'imperfeélion de leurs idées,
lorfqu'ils viennent aies conllderer plus exactement. Et c'eft ce
qui leur arrive fur tout à l'égard du myCcere de la Trinité, Se
de celuy de l'Incarnation. Car foie que l'on conçoive l'unité
de la nature divine dans les trois Perfonncs, foitque l'on con-
çoive la diflincflion de ces Perionnes dans la même nature , foit
qu'on fe forme une idée de la diflincftion des natures dans J. C.
foit qu'on s'en forme de l'unité de fa perfonnc , on ne réduit
gueres toutes ces idées à une exacTie vérité qu'en retranchant
ce qu'on y met du lien , &: en defavouant ce qu'on en peut re-
trancher.
Si nous ne concevons donc rien que nous ne rabaiflions , aju-
ftions, & proportionnioas à la portée de noflre efprit ; il n'eft
pas étrange que quoyque le myftere de l'Euchanflie foit fort
éloigné des idées communes, néanmoins lorfqu'il devient l'ob-
jet de l'imagination, de l'intelligence, & des paroles des hom-
mes , il foit conçu 6c exprimé par les manières ordinaires que
l'efprit a de concevoir & d'exprimer les autres chofes.
Il y en a plufieurs qui doivent eftre particulièrement confî-
derées fur ce fujet. Et l'on verra dans la fuite que le Miniflre
Aubertin bc plufieurs autres ne fê font engagez en divers fo-
phifmes peu dignes de gens habiles , que faute d'y avoir fait
afièz de réflexion.
La première eft Ç\ générale qu'elle s'étend prefque à toutes
fortes de jugemens &: de raifonnemens. C'efl: que quand on
conçoit' un objet quoyque prefent aux yeux, on ne le conçoit
pas toujours par tous ces attributs particuliers qui le diftin-
guent des autres • mais l'on s'en forme fîiuvent des idées con-
fufes, comme font celles qui ne le font connolflre que fous la
qualité d'eftre prefent, d'objet prefent, de fubflance prefente,
& qui n'excluent par elles-mêmes aucun des attributs parti-
culiers que l'on y peut joindre.
C'eft de là qu'il arrive que le même objet cftant prefent à
diverfes perfonnes, elles s'en forment une certaine idée con-
des di'Verfes manières de concc-voir ce Myflere. 167
fufe qui peut compatir avec des attributs particuliers incompa- Ch. V.
tibles entr'eux. Si plufîeurs perfonnes voyent de loin un corps
en mouvement, ib s'en formeront tons une idée de fubllance
qui le meut, de corps qui fe meut:Mais lesunsyjoindronci'idce
particulière d'un homme, en dilant : C'cjr~là un homme -^ les au-
tres celles d'un cheval, en difant: C efi un cheval iÏQs autres cel-
le d'un arbre agité par le vent , Rediront: C'cfi un arbre. L'idée
coniuielera la mêmeentous,6>: recevra dans leur ef prit tous ces
difFerens attributs qui (ont néanmoins incompatibles. Car un
mcmi eftre ne i<^aaroit eftre homme , cheval, &c arbre tout à
la fois.
C'eft encore de cette diverfité d'idées par lefquelles nous
nous pouvons reprefentcr un même objets qu'il arrive que nous
en pouvons faire diverlés propofitions dans lefquelles nous
n'en affirmons efFeclivement que fon propre eftre, fans que pour
cela la proportion foit ridicule. Et l'on peut dire même que
toutes les propofitions affirmatives font de ce genre , £c parti,
culierement les eflentieliesj c'eû à dire, celles donc rattribut
eft un terme eirentiel.
Car la nature de toute propofîtion affirmative , eft de mar-
quer que le fujet eft la môme chofe que l'attribut. Or, une
chofe n'eft une qu'avec elle-même j éc elle eft diftincT:e de
toute autre chofe.
Tant s'en faut donc que ce foit un défaut dans «ne propofî-
tion qu'une chofe foit affirmée d'elle-même, que c'eft une con-
dition générale de toute forte de propofition affirmative. Et
l'on peut dire que quiconque ignore ce prmcipe , ignore le
fondement de tout le langage humain & de toute la Logique.
Mais il eft vray que comme il eft neceiTaire qu'une choie fi-ic
affirinéed'ellemêmedans toute propofition affirmativei il eft
necelîaireaullîpouren eftre affirmée raifonnablement, qu'elle
foie conçue par difF.;rentes idées 5 ôc que c'eft cette diverfité
d'idées que nous nous formons d'une même chofe , qui empê-
che que les propofitions ne ioii;ntdu genre de celles que l'on
appelle identiques & vaines , c'eft à dire où Ton affirme une
chofe d'elle- mè»ne fans aucun changement d'idées.
Pour appliquerces principes à l'Fuchariftie, il s'enfuit que le
pain eftant change au corps de J. C. &: le corps de j. C. eftant
ainfî prefenc à nos fens fous ces voiles fenfîbles, l'efprir des
hommes ne le conçoit pas néanmoins toujours par ces attri-
buts diftincls ôc particuliers , de corps de J. C. de fang de J. C. de
i6S Liv. ni. "Réponfe aux objectons tirées
chair de J. C. mais qu'il le peur auffi concevoir fous des idées
plus confufes , d'objet prcfent , de fubflance fre fente , de chofc qui
frappe nos fcns ^ qui efl en un tel lieu ^ &c même fous l'idée de
fymbole, comme nous l'avons déjà dit.
Il n'y a rien en cela que de necefTaire, 6c qui ne foie une fuite
de la manière dont les hommes conçoivent les objets. Car il
faudroit qu'ils changealîentde nature, £c qu'ils liiflent des Aa-
ges ou plus que des Anges pour n'avoir que des idées diftincles
du corps de J. C. en cet état, & pour pénétrer par une feule viîë
tout ce qu'il eft^ians avoir befoin de le concevoir par différen-
ces idées qui s'éclaircilTent les unes les autres. Or, le concevant
par différentes idées, il faut bien qu'ils expriment l'union de ces
idées dans le même objet, en les affirmant les unes des autres.
Il efl clair par là qu'en concevant le corps de J. C. comme
objet prefent, c'eftune propofition fort raifonnable que de di-
re ; Cecy efl le corps de f. C Cecy efi la chair de J. C. Et quand on
conçoit de même cet objet prefent, comme marquant & figu-
rant quelque chofe, & qu'on exprime cette qualité par le mot
de fymbole, de Sacrement, ou de myftcre, on peut dire véri-
tablement : Ce fymbole cjî le corps de j. C. ou : Ce myftcre efi le
corps de /. C. ou : Ce Sacrement efi le corps de Jefus-Chrifi.
Il s'eft néanmoins trouvé des gens, qui, bien loin d'entrer
naturellement dans le fens de ces propofitions fi faciles, fi
communes & fi conformes à toutes les res-les du lançrao-e des
o ce?
hommes, ont prétendu y trouver des abfurditez, &; détruire
par là la dodrine des Catholiques. Cet égarement feroit in-
croyable, fi je n'en allois faire voir des exemples dans un des
hommes du monde qui s'efi: le plus piqué des fubtilitez de Lo-
gique. Je n'en choifiray que trois ou quatre entre plufieurs
qu'il a eu foin de nous fournir.
I. EXEMPLE TIRE' D'AUBERTIN.
Il examine dans la pag. 187. de fon Livre ces paroles de
S. Ignace Martyr. Ces Meretiques ri admettent pas les Eucha-
rifiies (^ les ablations : parce qu'ils ne confe[fent pas que l'Eucha-
riflie [oit la chair de noflre Sauveur J. C. qui a fouffert pour nos
pechez^^ ^ que le P ère a rcjjufcitè par fa bonté. Et après s'eftre
bien travaillé pour les tourner à fon fens, il prétend lever tou-
tes les difficultez par un argument clair & decifif Mais pour-
quoy ^ dit-il , mamufay je à perdre le temps dans une chofe claire>
Cu R
des dherfis marneras de concevoir ce Myjîerc. lé 9
Cor tempus ter.o in re perspicua ? Je nay qu'à rétorquer Ch. %.
contre mes adverfuires les paroles ctlyiacc. Cir quand il donne lieu
de conclure que l'a créance des Orthodoxes eftoic que l'Euchariftie
eft la chair de J. C. il entend par l' Eucbari/Iie ou le corps même
dej. C. ouïes accidens du pain , ou du pain proprement dit. Or il
n'entend point le corps de J. C. Car c'cfl une propojition vaine ©«
ridicule que de dire : Le corps de J. C. efl le corps de J. C. Ce ne
■jont pas aujji les accidens : car des accidens ne peuvent ejlrc appel.
lexjhairde J.C.que fiigurèment l Q- de plus noii-s foutcnons qu'au-
cun des anciens n'a entendu parle motd' Euchariftie des accidens fam
fubfiance. C'ejl donc du pain proprement.
■C'eftainfi queceMinirtrreraifonne. Et ce raifonnemenr, com-
me l'on voie, n'eft fondé que fur l'ignorance de ces deux ma-
nières de concevoir les chofes, l'une confufe , l'autre diftincle.
Car s'il les euft comprifes , il n'eufi: trouvé aucune difficulté
à concevoir , que le mot d'Euchariftie lignifiant le corps de
J. C. confufémenc , on en ait dit qu'elle eft le corps de J. C.
Et bien loin de traiter cette proportion de ridicule & vaine ,
J>arce qu"'on y affirme une chofe d'ellf-mcfme, il auroit reconnu
que ce qu'il y blafine , fe doit trouver par necefficé dans toutes
les propofitions affirmatives.
SECOND EXEMPLE.
Aubertin avoitce bizarre principe fi fortement imprimé dans
l'elprit , qu'il s'en (ert en je ne fçay combien d'autres occafions,
cpmme dans l'examen qu'il fait de ces paroles de S Cyrille de
Jeru falem : Puifque J. C. affirme ijr- dit du pain , que ccfi [on corps ^
qui en ofera douter? Surquoy il forme encore ce rare raiionne-
ment.
Je demande au x adverfaires s'ils prétendront que J. C- ait af-
firmé [on corps de la fi'iure extérieure du pain , c'efi à dire des
accidens du pain confacré , ou de la fubjlance mefme du pain ce-
le fié J c'efi a. dire de fon propre corps. S'ils difent le premier ., ce ,
[croit une fauffetè à. S. Cyrille de nous dire : Puifque le Seiyieur
nous affeure du pain que c'efi fon corps ., qui en a fera douter / Car
non feulement il eft douteux , mais il efi abfolument faux que des
accidens foient le corps même du Seigneur. S'ils s'arrefient au fé-
cond , /■/ nojis auroit dit que le Seigneur auroit affirmé fon corps
defijn cer£s , ^ qu'il auroit dit en e^et par une tantologie im^er-
Y
ijo Liv. Wl.'RéponJe aux ohj estions tirées
tinente : Ce mien corps cfi mon corps. Et ce feroit ainfienvain qu'il
exhorterait a. n'en point douter ^ puifquc ferfonnc ne fcauroit douter
que le corps de J. C. ne foitle corps dej. C. C'efl: à dire que félon
Aubertin on ne fçauroic affirmer le corps deJ. C. du corps de
J. C. fans impertinence 5 au lieu que félon tous les autres
hommes du monde on ne fçauroir fans impertinence affirmer
du corps de J. C. autre choie que le corps de J. C.
TROISIE'ME EXEMPLE.
Mais il triomphe particulicreraencfur ce même principe chi-
mérique dans l'examen de ce lieu de Theodoret: Ze Seigneu'r
ayant pris lefymbole , dit : Cecy rft mon corps. Je demande , dit-il ^
à du Perron ce quil prétend que Theodoret a voulu Jiqnifier par le
mot de fymbole. Puis ayant fait fon argument ordinaire , qu'il.
ne peut avoir entendu par cemotry les accidensdu pain qui
ne font pas le corps de J.C. ny le corps de J. C parce .^ dit- il,
que perfonne fans efire fou ne dira quej. C. ait honoré fon corps du
nom de fon corps , comme le dit Theodoret, il infulre à ce fçà-
vant Cardinal en s'écriant 3 Où/e tournera du Perron ? Quofe vtr-
iei Perromus}
On voit qu'il y va de bonne foy , & qu'il n'avoit aucune dé-
fiance de fon argument. Et c'eftce qui donne lieu d'admirer ,
ou pliitoft de plaindre la petitefîè de l'efprit humain , en voyant
un homme comme Aubertin ébloui par un fi ridicule fophifme.
Car pourquoy ne comprenoit-il pas que l'objet prefen't qui eft
pain avant la confecration, 6c corps cfe J. C. après la confecra- ■
tion , peucefh'econ(^u fous cette qualftë commune d'objet pre-
fent > que Ton y peut encore joindre la qualité de fymbole j &
qu'eftant conçu par cette double idée générale, on peut y ajou-
ter 1 idée du corps de J. C. & dire : Ce fymbole eft le corps de
J. C. Mais quoy qu'on affirme dans ces fortes de propofitions
une chofe d'elle-même, ce n'eft comme il a efté dit qu'en la.
concevant par des idées diflPèrentes. Par celle du fujet , on la
regarde comme objet prefenr, & comme figure. Parcelle de
l'attribut de corps de J. C. on conçoit ce même objet prefenr
fousl'idéediftinftedecorps de J.C. & l'on joint ces deux idées
par une affirmation régulière félon là loy générale de toutes les*
propofitions affirmatives.
Je n'ay rapporté ces trois endroits que pour montrer le cas
dti di<v^rfes mAnïent de eonanjoir ce Myfiere. i-ri
;qa.e l'on doit Faire de la confiance dont Aubercin propofè fes
iirgumens. Car d'ailleurs cectte illufion eft fi groflicre qu'il fuf-
droic del'avoirune fois démêlée pourempêcher queperfonne
îie s'y puft tromper.
CHAPITRE IV.
Seconde manicre dont les hommes conçoivent les objets , ^ui efi , de
, , rajj'embler en une ■)nème idée ceux en qui Us ne remarquent aucu-
ne différence fenjible. Vfu'i^e qui a eft è fait de cette manière de
■■{oncevoir , à l^ égard de l' Euchariftie far les Auteurs les plus
attachez^à. la Trunfiubftantiation.
LA (êconde manière que les hommes ont de concevoir,
qu'il eft important d'expliquer icy , 6c dont l'ignorance
a encore engagé Aubertin , & engage tous les jours les Mini-
tftres en une infinité de fophifmesj comme nous le ferons voir^
«ft plus fine & plus fubtile. C'eftque lorfque deux ou plufieurs
fujets fe fuccedent dans le même lieu fans qu'il y paroifle de dif-
férence ^quoy que les hommes les diftinguent quand ils les con-
iiderent exaÂement , ils ne les diftinguent point néanmoins
dans leurs difcours ordinaires, ils en parlent fouvent comme
<i""une même chofe,5^ les réunifient fous une même idée qui n'en
fait point voir la différence, & qui n'exprime que ce qu'ils ont
de fommun. C'efl ainfi qu'encore que nous changions d'air
prefquc à tout moment, nous regardons néanmoins l'air qui
nous environne comme cftant toiijours le même air, & nous
difons que de froid il efl devenu chaud , comme fi c'eftoit le
même j au lieu que fouvent cet air que nous (entons froid n'eft
pas le même que nous avions trouvé chaud.
Cette eau, difons nous aulFi en parlant d'une rivière, eftoic
trouble il y a deux jours , & la voilà claire comme du criftal.
Cependant combien s'en faut- il que ce nefoitla même eau?/«
idem flumen bis non defcendimus , dit Seneque j manet idem flu.
minis nomen , aqua tranfmiffa eft.
Nous confiderons les corps des animaux 8c nous en parlons
comme eflant toûiourslesmcmes,quoy que nous ne foyonspas
aiïurez qu'an bout de quelques années il refte aucune partie de
la matière qui les compofoit. Et le langage ordinaire nousper-
Yij
lyi Liv. II/. Képonje auxobjeSîions tirées
mec de dire : Le corps de cet animal eftoic compofé il y a dix
ans de certaines parties de matière, & mainrenarit il eftcom^
pofé de parties toutes différentes. Il femble qu'il y ait de la
contradidion dans ce difcours. Car (i les parties font toutes
diferentes, ce n'eftdonc pas le même corps. 11 eft vray ; mais
on en parle pourtant comme d'un même corps. Et ce qui rend
CCS propofitions véritables , c'efl que ce même terme efl pris
pour des fujets differens dans cette différente application.
■'' Il eft vifible par cette règle que le corps de J.C. fuccedantao
pain dans le même efpace , & n'en eftant diftingué par aucun
accident fcnfible ,lorfqu'il vientàeftre conçu-par une idée con-
fufe, d'objet prefent, de lubftanceprefente, cette idée ne le difl
tingue nullement d'un pain matériel , comme l'idée confufè
qu'on a d'eau prefente en voyant une rivière n'a rien qui di-
ftingué les eaux différentes qui paiîcnt & fe fuccedent conti-
nuellement. Et il arrive de là que les hommes concevant ainfi
deux chofes différentes par la même idée^en forment un certaifi
fujet confus à qui ils attribuent les qualitez différentes de ces
deux fujets. De forte que de même qu'on parle de cette eau
claire , comme fi c^ftoit la même eau qu'on a veuë trouble ; on
parle auflî & on raifonne du pain &: du corps de J. C. comme
il c'eftoitun même fujet qui fuft tantoftpain ôctantoft corps de
Jésus Christ.
C'cft ce qui paroîtra clairement parles exemples que nous
allons rapporter tirez des Auteurs les pluj déclarez pour la
tranlïïibftant'ation.
Gabriel de Philadelphie, dont l'opinion apparemmenrne fera
plusmife en doute par M. Claude après rimprcflion qui en a
cfté faite depuis peu,où le mot même de tranffubftantiation eft
employé 16. ou 17. fois , parle de cette forte dans ce Traitté.
Le pain que l'on fîcrifîe poffede&; reçoit trois dignitez.
Il pofîède la première par la nature.
Il reçoit la féconde par participation.
Et il eft revêtu de la troifiéme parla tranffubftantiation.
Ne femble t il pas que ce foit le même pain qui reçoit la
qualité de corps de J. C. par la tranflubftantiation&qui avoit
eu les deux autres auparavantAuffi ?M. Claude que les fubtilitez
de l'Ecole Cal vinifte ont rendu incapable d'entendre le langage
om*re*^ie^"p^ de la nature, fe récrie fur cela d'une étrange forte, si cette me-
Nouet p. ;<j. toufiofe , dic-il s eft la^ tranjfubftantiation Romaine , cet homme a-
des diwerfes ma. nier es de concevoir ce Myfiere. \ -j ?
p;rdule fens de dire , que le pain rci^oitune troijième dignité , lors Ch. V I.
qu de/} détruit^ & détniitde telle forte que ce n'cjl pltis le même
fujet qui cfioit auparavant. Jl cfi évident , dit il encore , que.
quand G abnel du que le pain fioffcdc trois dignitez^^ il veut dire que
ceft un mime Jram ^ un même fujet [uns ces trois diytircz^ diff'e-
rentes. •
Mais que M.Claude ne fe mertc point fi fort en colère con-
tre cet Archevêque. Il va voir qu'il n'a parlé que le laro-arredes
Théologiens Latins, & qu'il a confideré auflî bien qu'eux le
pain Sçle corps de J. C. comme un mêmefujet , non en effet,
mais en idée ; puifque les /ens n'y dëce uvrant point de dirtinc-
tion donnent occafion à l'efprit d'en former cette idée con-
fufe à qui l'on attribue ce qui convient bi. au pain & au corps de
Jésus Chr i st.
Car n'efl ce pas en fuivant cette idée qiie Geoffroy de Ven-
dofme dit , que le pain (jr- le vin avant la confccration n'ont rien [Twirtc «5-
que teur propre nature de pain ^ de vin '■> mats qu après la confe. "T" (^J'"-
gaine.
crationils ne retiennent pltis la nature de pain (f^ de vin. Quel Tom. ir. Bi-
efl: ce fujecqui ne rerient plus la nature du pain & du vin après '^''°'- p*'-
la conTecration ? N'eft ce pas le pain & le vin même ? AinH ce ^' ^'''^'
pain & ce vin font confiderez comme un même fujet , qui a !a
nature de pain & dé vin avant la confecration , & qui ne l'a.
pas après la confecration. Or ce fujet qui a la nature de pain
eft le pain. Ce fujet qui n'a plus la nature du pain cfl le corps
de J. C. Ce font donc deux (ujetsbien differens j mais qui efl
tant conçus fous la même idée ne font qu'un même fujet con-
fus.
Qiie veut dire de même Hildebert dans ces vers oii il
parle du pain & du vin offerts par Melchifedec.
U truque fuh typico rituformàque futuri
Melchifedec Domino ficrificaffe fcrunt.
U traque difcipuUs canantihti-s ipfc Rcdemptor
Tradidit in corpus utraque verfa fuum.
La rranffubflanriarion eft clairement établie dans ces Vers. Ce-
pendant qui voudroit chicaner à la manière de M. Claude , on
s'écrieroit comme luirCommentpeut il direque J. C. a donné à
its Difciples les deux mêmes chofes que Melchifedec avoic
offertes, puifque ce n'efloit plus du pain & du vin , mais fon
corps & fon fang, in corpus utraque verfa fuum ? C'efl qu'il
confideroic c€t objet comme un même fujet à qui ces qualitcz
Y iij
174 Li V . III. Képonfe aux objections tirées.
ci'eltre pain &; vin, &; d'cftre corps de |. C. convenoienc ea
divers temps.
C'efb encore de cette unitc d'idée qtic naiflent lesexpreffions
qui reprefencent la rran(ra'ofi.anciati()n comme l'acquificion
d'une nouvelle dignité & d'une nouvelle force au fujet que I on
coni^oit. On en peut voir un exemple dans ces vers du même
Hildebert.
Ncfcit homo , Lttct & fuperas qtio provehdt cfiui
GrMia vcrborum myjhriumquc crucis.
His verhis utrumque novas iicquircre vires
Ma'forefquc fiiis fcripta pobata doc en t.
' Comment fe peut il faire, dira M. Claude, qu'unechofeac-
quierre des forces lorfqu'elle efl: détruite? Elle n'en acquière
point en effet, mais on ne lailîè pas de parler ain fi ^ parce qu'on
ne fait point d'attention à cette dcftrudion , & que l'on regarde
le pain & le corps de J. C. comme un même lujet. Ainfi parc$
que cet objet prefent eft tantoft pain ,& tantoft corps de J. Q,
on en die & l'on en peut dire qu'il acquiert une dignité qu'il
n'avoit pas. Car M. Claude ne dira pas fans doute que cet Au-
teur ne croyoit point la tranlfubdantiation , &: s'il le prétend,
il n'a qu'à lire les vers qui fuivent ceux que fay citez.
Suh crticc , fub verbo natura novatur^ Q- aram
Pjïiis honorificat carne , cr~uore Cciltx.
Et CCS autres danslefquels il peut encore remarquer la confii-
fion de ces deux fujets en une même idée.
Fit cibus hic ex pane caro Dcus clemcnto^
Mvflerio (tmplcx , utiliiate triplex.
Car ne (érable t-il pas qu'il parle d'un même fujet qui foit pain
en un temps Se chair dans un autre, mais qui fubfifte dans
tous les deux temps?
Et que M. Claude ne s'imagine pas que cet Auteur n'ait ainfi
parié que parce qu'on appelle licence Poétique. Ceux qui
écrivent en profe &: d'une manière tres-fimple en font tout
autant.
Odon Evefque de Cambray dans fon Traité de l'Expcfi-
tion de la Meffe dit, quon ne doit point toucher la faints Sacri-
fices avant qu'ils ayent rei^ii une force fpirituellc y (^ qu'ils ayent
cftè changez^ au corps & au fang dcj. C. NECijaE enim contingi
debent priufquam fump forint virn fpiritualcm & converfa fue~
vint in Chrijii corpus (^ fanyiincm. Que M. Claude nous diie
des dinjcrfes manières de CGnce<voîrce My^ere ly^ '
après cela que la réception d'une force fpirituelle exclue là Cvi. VI.
ïranfTubftantiation.
Ce même Auteur dit encore quclefujct qui cfboitpain aupa-
ravant efl: fait chair par la benedidion j qu'il cft après cela chair
& non plus pain 5 Qui prnis cnn -pavis hcncdiHicnc facius efl caro.
Mais en parlant delà forte, il fait toiiiouriconfidcrerun mê,
me fujetfous cesdifFerenseftatsde pain &: de corps.
Un ancien Auteur qu'on voit dans la Bibliothèque à<is Pe- Tom. n.p-
res, dit en expliquant le facrifice de la Mcflèj qt^c la première "■''•
sraifon qui fe dit fur le futur corps de J. C. i appelle Secrctic.
Ainfi il appelle pain le corps de J. C. furur. Ce qui ri 'a enco-
re de fondement que dans cette unité d'idée dont nous par-
lons.
C'eft encore fuivanr cette même manrere de rciinir le
pain & le corps de ). C. dans une même idée , que l'Auteur du
Sermon de la dignité & del'excellencedes Preftte ^qui fe voiE
parmy les Oeuvres de faint Bernard, parle en ces termes : L'ho.
jlie que vous "voyezji'cjl plus a prefent du pain. H o s T J A qua7n vi-
dfi jamnon eft paim. Elle l'a donc efté autrefois félon luy >
Et ainfr il attribue au même fujet conçu comme l'hoftie d'a^
voir efté pain & de ne Tertre plus.
Robert Pullusen fait de même dans ces y^:ixo\t%: La (ubjl an-
ce du pain ^ du vin ceffe d'efire ce quelle ejloit , 0?- elle cjr faite
ce quelle n'efioit -pas auparavant.
Et Innocent III. dans celles-cy : Ce qui efloit pain quand J. C. '
le prit , eflûit [on corps quand il le donna.
Le même Innocent III. accorde cette propofîtion : id qttod'^
fuit panis , efl corpus Chrijli.
Il eftvidble que toutes ces expreffions font fondées furTuni-
té de cerre idée à laquelle on attribue tous ces differens cftats>._
qtioyqu'ils ne conviennent en effet qu'à des fujets diflfcrens^
Et elles font fi naturelles que les Minifl::'es s'en fervent eux-
mêmes quand ils veulent expliquer l'opinion des Catholiques ,.
comme on le peut voir par l'exemple de Zuingle qui exprime
ce que nous croyons par ces paroles : Ejl corpus fubito quodpa.
riis erat , où il efl: clair qu'il attribue au même fujÈt d'^eflr-e le
corps de J. C, & d'avoir cfté pain. ''; :^"'- '" ^ ' ''^""y \ ^''; i"^/
lyô Liv. III. Rcponfe aux objeSiions tirées
CHAPITRE VII.
Exemple de divers Sophifmcs des Minifires fondez^ fur l'iqnorance
de cette niiinicïe de concevoir la docinne de la trunjjubfian-
tiation.
J
E tireray de M. Claude même le premier de ces exemples,
&, l'on y pourra voir non feulement que le langage donc il
s'agit icy eft très-commun, mais aulll que l'ufage en eft lî na-
turel qu'on y tombe même en le reietcanr. Il examine dans (oa
Livre contre le Père Noiiet ce paliage de S. Irenée dont nous
M. ciauJc avons parlé dans le chapitre i. du premier Livre : Le painqui
contre le P. ,, , ', ). ■ i -,^ 'ni
Noiiftp. J40 ^P "-^ '"'■ ^^^^^ rccevcint l invocation de Dieu n ejt plus un pain
commun, mais l' Eucharifiie compofêe de deux xhofes , l'une terre -
flre , l'autre celejle. Ainfi nos corj)s recevante Euchanfiie ne font
plus corruptibles , mais ils ont l'efperance de la Refurretfion. Et il
l'explique à fa fantaifîe en entendant par cette chofe terreftre
le pain matériel , & par la chofe celefte la confecration. De
(onc que S. Irenée , félon luy, aura dit dans ce paûTage , que
t Eucharifti'e efl compofêe de pain matériel (^ de confecration ; ce qui
ell une idée &: un langage afTez bizarre. Mais ce n'cltpasàquoy
je prétends m'arrêcer. Comme j'ay traitté ce pafTage ailleurs, je
ne le propofeicy que pour avoir lujet de rapporter ce que M.
Claude dit en réfutant le Père Nouer. Voicy comme il s'y
prendi Que la préoccupation efi aveugle ! Pour peu que l'on conji-
dere ce pafjaq^e , // ruine de toutes parts l'opinion Romaine. Etpour-i\
tant le Père Noiiet en veut faire [on bouclier. On efl trop accou-
tumé à l'air de M. Claude pour s'étonner de ces exclamations
&de cespropoficions fi declGvesiJiû fieres. Il n'y. a doni; qu'à
continuer de récouter. • .,;jj . ■-![•>■'
Le pain qui -efi, de la terre re(^oitl'' invocation de 'Dieu. Deja cei~.
te fti^on de parler donne l'idée d'un chanq^ement qui fe fait par U
réception de la grâce dans un fujet., (jr- non par aucune dejlruïlion
de^ fuhfiancc. Ce .pafTage ne don.D.e cette idée qu'à ceux qui s'çti
fornient à leur fantaifîe j mais ceux qui ne vont pas fivifte que
M. Claude, attendent qu'ils ayént appris quel efl l'effet de cette
invocation fur le pain. Et quand ils ont appris de S. Irenée
même que cet effet eft de faire du pain le corps de J. C. ils fe for-
ment
des diverfès manières de concevoir ce Myflere. 177
mentavec raifon l'idée d'un changement fubftanciel , en con- Ch. VH'
cevanc que ce n'eft plus du pain , mais le corps de J. C.
// riefi pas un pam commun, pourfuit M. Claude. live ccjje
donc pa^f abfolument d' cjîre pain , mais feulement du pain ordinaire.
Ce qu'il perdift non la fuh/Ltnce , mais la qualité de pain ordinaire.
Nous avons déjà fait voir, ic nous ferons voir encore combien
cette confequence eft vaine. Et ainfi je ne m'y arrefterây pas
prefentement.
C'eft après cela qne M. Claude propofe fon fophifme que
voicy. Il eft tonde fur ces paroles de S. Irenée : Ce n'eft plus
un pain lommun^ mais l'Euch. m/lie. Le mhne fujet ^ dit il , qui
ejèoit pain commun ^fi Eucharifiie. Il n'a donc pas eflé détruit.
Je dis que c'efb là proprement le fophifme dont nous parlons. .
Il conclut que le pain n'eil pas détruit, parce que S. Irenée
parle de J'Euchariflie & du pain comme d'un même fujet. Et
moy je luy réponds qu'il ne s'enfuit nullement que le pain ne
foit pas détruit, de ce que S. Irenée en parle comme du même
fiijetque l'Euchariftie confacrée. Et pour faire voira M. Clau-
de combien ce langage eft naturel , je le prieray feulement de
remarquer qu'il s'en lertluy-mêmecinq ou fîx lignes plus bas,
& qu'il s'en lert lors même qu'il nous veut apprendre à l'éviter.
Qu'il fafîè , s'il luyplaift, reflexion fur ces termes que l'on lit
dans la même page dont nous avons rapporté les autres paro-
les que nous avons citées. L'explication du Père Noiiet , dit- il,
établit deux fujets où S. Irenée n'en établit qu'un. Il cufî fullu dire,
félon le fens du Père Noiiet bi. des Catholiques .- Le pain qui
efi de la terre eflant détruit par l'invocation n'cf} plus , il cf} fait
un nouveau fujet qui s'appelle Eucharifiie.
Le deflein de M. Claude eft de marquer par ces termes de
quelle forte S. Irenée auroitdû parler pour parler en Catholi-
que. Il veut marquer par fon expreffion deux fujets 5 '\\ veut
marquer que le pain n'eft plus, ^ il exprime l'un ôc /'autre
formellement. Cependant , en même temps qu'il marque la
deftruclion du pain & la duplicité des fujets, il ne laiftepasde
faire 6c du pain &de l'Euchariftieun même fujet par cette ex-
preffion 5 // cfi fait un nouveau fuiet qui s'appelle Eucharifiie .
Car cet // fîgnifie{le pain. Et ainfi c'eft du pain qu'il affirme
qu'il eft fait Euchanftie. Or" cette exprefiion enferme que le
pain eft Euchariftie, puifqu'il eft fait Euchariftie. Car il n'eft
Z
lyS Liv. III. Keponfe <tux ohjeEliom tirées
fait Eucliariftie qu'afîn qu'il le ibic. Ils Ibnt, dit Theodoret , ce
qu'ils ont efté faits.
Voila donc dans l'expreffion de M. Claude un même fujet
qui cft pain & Eucliariftie. lia beau dire que c'eft un autre fujet.
C'en efl: un dans la vérité^ mais non dans l'efprit & dans l'idée,
& dans la manière de le concevoir. En même temps que l'ef-
prit affirme pofitivement que ce font deux fujets, il ne Joifle
pas de reiiniren un, 6c d'attribuer à ce fujet, conçu comme un,
les qualitez de l'un &: de l'autre. Et c'eft le même fujet en idée,
qui eft appelle pain 6c Euchariftie , & par Saint Irenée & par
M. Claude.
Mais comme M. Claude qui parloir en cet endroit en Ca-
tholique ne l.iifloit pas de comprendre que c'en eftoient deux
réellement : ainfi quoy que S. Irenée ait parlé du pain & de
l'Euchariftie comme d'un même fujet, il concevoir neanmoms
que c'en eftoient deux , puifqu'il concevoir que le pain eftoit
changé au corps de J. C.
II. EXEMPLE.
Noftre efprit fe porte fi naturellement à cette manière de
concevoir 1 Euchariftie , &; d'exprimer ce qu'il en conçoit en
reiiniftant deux fujets réellement difFerens dans une "même
idée, que la plufparc des exprefîlonsqui marqucut la tranflub-
ftantiation ne laiftênt pas d'enfermer cette unité de fujet.
perp.i. 1. C'eft par là que nous avons démêlé dans le fécond Tome de
cet Ouvrage cet argument célèbre fi fouvent répété par Auber-
tin &: parles autres Miniftres ,que le mot de c^ryfignifiant du
pain dans cette propofitioni C(7c^ efi mon corps ^ il faut qu'elle
fait métaphorique , puifque le pain ne peut pas eftre propre-
ment .corps de J. C. Car \\ l'on y prend garde la réponfe qu'on
y trouvera dans le lieu où nous avons éclaircy à fond cette ma-
.dere , eft fondée fur cette manière naturelle aux hommes de
reiinir deux fujets differens en une même idée. On leur a dit
que quoy que le mQtde.f^'fj/figriifiaft du pain-, lorfque J. C fe
prononça, il le fignifioit néanmoins fous l'idée générale d'ob-
jet prefenc, &: quii s'enfuit de 'là que cette même idée qui re-
prefentoit le pain comme objet orefent, n'eftant point diftin-
guée de celle du corps de J. C. conçu auflî comme objet pre-
fent,refpric les pouvoit reiinir en une^ pour former cette pro-
1
C-3.P- 177
des dinjcrjes manières de concetoir ce Mjfltre. 179
pofition -.Cecy qui eft pain en ce moment , c/l le corps de J, C. dans Ch. VII.
celuy-cy. Où l'on voir qu'il va deux fujc.rs diftinds qui vç. fonc
confiderez que comme un , à caiife dé l'unité de leur idée ^ &
qu'ainfi retranchant de cette propofition les termes qui n'y
font pasnecelTaires , & qui fe (uppléent aifémentjOri en forme
celle dont J. C. s'eft efFcciivement fervi , fçavoir : Cccy efl mon
corps. Ec par là il paroift clairement que tous ces argumens
par où les Miniftres prétendent prouver que ces paroles de
J. C. ne peuvent eftre prifes dans le fens de la tranflubftantia-
tion , ne font fondez que fur ce qu'ils n'ont pas afîez conçu cet-
te matière fî ordinaire &:n naturelle à l'efprit humain de réu-
nir dans une même idée deux fujets réellement diflTerents ,
lorfqu'ilsfe fuccedent immédiatement, & de ne les confiderer
enfuite que comme un même fujet, en luy attribuant ce qui
convient à ces deux fujets difFerens , comme fi ce n'cftoient que
divers eftats d'un même fujet.
Aubertin employé une infinité de fophifmesqui ne naiflenc,
comme celuy-là,que de l'ignorance de ce même principe , tan-
toft à deflèin d'éluder les partages où les Pères expliquent le
plus nettement la dodrine de la prefence réelle & de latrans-
fubftantiationj & tantoft pour combattre ces dogmes par de
certains partages qui ne concluent proprement rien. Il ne fera
pas inutile d'en rapporter icy quelques-uns.
III. EXEMPLE.
S. Epiphane ,pour montrer qu'il y a è^ts cRofes qu'il faut croi-
re , quoiqu'on ne les comprenne pas , propofe en ces termes
l'exemple de l'Euchariftie. l<fous voyons ^ dit-il .^que le Seigneur
frit de certaines chofes entre fes mains , comme on le lit dans l'E~
vangile , qu'il fe leva de table , ^ prit ces chofes 3 (^ qu'ayant
rendu yaces , il dit : Cecy eft une certaine chofe , ( il parle ainrt
à caufe des non initiez. ) Cependant notes voyons que cette chofe
nefi ni égale ni femhlahle k l'image de la chair qu'il a prife , non
plus qu'à la divinité qui ne fe peut voir , ni aux Une amen s , ni aux
caraîteres des mer^bres : car cette chofe efl ronde-^^ quant à fa vertu
elle n'a point de fentiment. Et néanmoins par un effet de fa grâce
il a bien voulu déclarer que cecy eft oit une certaine chofe , Q- il n'y
a perfonne qui n'ajoute foy a fes paroles 3 (^ ccluy qui ne le croit
pas comme il dit y eft: déchii d^ la grâce (^ du filut.
i8o Liv. "Réponjs aux ohjeciions tirées
Il n'y a rien de plus clair 6c de plus précis que ce paflàge
pour la dodrine catholique. Ce Père propofe cette vérité , que
cette chofe ronde & inammce eft le corps de J. C. comme
j un objet de foy j & li porte l'efprit par là à prendre ces paroles
«.* 9. P-' 3'^' ^ '"^ lettre , comme nous l'avons prouvé ailleurs.
Il dit exprellemcnt qu'il faut croire cette vérité , quoiqu'il
n'y ait nulle reffcmblance entre cet objet rond Se inanimé, &
le corps de J. C. & par Là il fait voir que ce qu'il propofe à
croire choque également en apparence & la raifon & les fens :
d'où il s'enfuit qu'il ne pouvoit entendre ces paroles en un
fcns de figure , qui ne choque ni l'un ni l'autre , puifquc les
types 2c les lymboles, comme Aubertin même le remarque,
ne demandent point de rapport fenCble avec leurs originaux.
Aubertin qui a fenti la force de cette raifon, dont le Cardinal
du Perron s'cftoit fervi , s'eflaiifli efforcé d'y répondre 5 & fa
réponfe fe réduit à dire que quoique le fens de ces paroles , Ce-
cy cjl mon corps ^ n'ait aucune contrariété apparente avec les fens
ni avec la raifon , quand on l'entend , il y peut néanmoins fem-
bler contraire , quand on ne l'entend pas ^ mais cette défaite ne
fait que mettre dans un plus grand jour le raifonnement de ce
Cardinal. Car il n'y a qu'à confiderer de bonne foy tout cet en-
droit de S. Epiphane,6c ce qui luy a donné iîijec de faire ce dif-
cours,pourcfl:re perfuadé qu'il ne parle pas d'une contrariété 5c
d'une répugnance quinaiflè du deffaut d'entendre l'expreffioii;
de J. C. mais d'une répugnance qui fe rencontre entre le fens
connu de cette expredion , & ce cjiie les fens & la raifon nous
dictentipaifque fonintentioneftoit vihblement de prouver non
qu'il fallut croire une chofe que l'on n'entendoit po!nt,mais une
chofe qu'on entendoit, 6: qui fembloit contraire à la raifon.
C'eflcequi paroill: parle fu jet fur lequel il allègue l'exemple
de l'Eucharidie. Car il prétend qu'il faut croire que l'iiomme
eft image de Dieu, comme il faut croireque le painconfacré
cfl: le corps de J. C. Or dans ce premier exemple il s'agifToit
d'une difficulté prife de la chofe même, & non de l'expreiifionôc
d'une difHculté qu'il ne prétendoit point qu'on puû lever par
réclairciffement du fens de ces termes, puifqu'il foûtenoit qu'on
ne pouvoir aiîigner en quoy confîftoit l'image de Dieu ni dans
le corps ni dans l'ame, 6c que cependant il lefalloit croire.
Ainfi fuppofé qu'il n'ait reconnu dans l'Euchariftic qu'une
difficulté qui vint du défaut de l'intelligence des termes , quel
des dî'verfes manières de conccaioir ce Myfiere. i8i
exemple luy auroit efté moinsproprequeceluy là, s il n'yavofc Ch. VII.
qu'à luy repondre qu'il falloir croire e» effet que l'Eucharirtie
ertoïc le corps de J C. mais que cela n'eftoir nullement difficile
à croire , n'y ayant qu'à expliquer lefens de ces paroles, Cf 9- <y?
moncorps, &à les prendre en un fens défigure 5 &. qu'il nefija-
voit ce qu'il difbic , de vouloir prouver une vérité dont la diffi-.
culte iubfifle toute entière après l'explication des termes, par
l'exemple d'un palîâge^dont les termes étant une fois expliquez,
ne contiennentplus rien quipuilîe f;iire la moindre difficulté.
On voit par là combien Aubertin fe défend ma! de la. preuve
que ce lieu de S. Epiphane fournie aux Catholiques. Mais ce
qu'il y a de rare, eft: que par le moyen de fon argument ordi-
naire, qui trouve fon ufage par tout , il prétend en faire une
preuve contr'eux. Car, dit- il, il entend par cette chofe ronde ce
quej. C. avoir pris entre fes mains, comme la fuite de fon dis-
cours le fait voir. Or J.C-avoit pris de vray pain. Donc , dit- il,
cette chofe ronde eft de vray pain. Et de là conci uant à fon ordi-
naire, qu'il faut que S. Epiphane entende que l'Euchariftie n'efl:
donc le corps de J. C. qu'en figure , il triomphe félon fa coutu-
me; il reproche au Cardinal du Perron de l'avoir diiîîmule, par-
ce qu'il n'y pouvoir répondre : Perroyiius argumentwm iijjimuiat^
lion videns Qpinor quomodo illtid folveret ; il acculé le Cardinal
Bellarmin d'audace , d' imprudence C^" d\ibfurditè , parce qu'il
avoit répondu que lorique S. Epiphane dit que cette clicfc mide
eft le corps dej. C. i! ne faut pas entendre du pain véritable, iT;.jis
du pam apparent. Cependant toute cette fubtilitépar laquelle
Aubertin croit avoir éludé l'impreffion de la vérité, n'eft fondée
que fur l'ignorance du principe que nous avons établi. Et pour
la diffiper , il n'y a qu'à luy répondre en un mot , que ce que S.
Epiphane appelle une chofe ronde &infenjible ^ c'eft TEuchariftie
conque par fes accidens extérieurs: Qu'il dit deux chofes de cet-
te Euchariilie J'une que c'ell ce que J. C. a pris, c'eft à-dire du
pain 5 l^aurre, qu'elle eft lecorp^ de J.C. & qu'il le faut croire.
Ainfi il attribue au même fujet d'avoir efté pris par |. C. fie d'ê-
tre le corps de ]. C. quoique ces deux chofes conviennent
réellementà deux fujers différents. Nais c'eftque ces deux .Su-
jets quoique diffcrens f)nt réunis dans l'cfprit fous une même
idée qui fait qu'on en parle , comme fi l'on n'en connoiffoitpas
Ja diverfité. Qiiand on dit que cette chofe ronde fut prife par
J.C. ce mot marque du pain véritable confufement conçûu
Z iij
ijl Liv. III. Réponfe aux objectons tirées
Quand on dit quec'eft le corps, de J. C. il marque l'objet prc-
fenc qui efl: réellement le corps de J. C. Ce font donc deux fu-
jets. Mais parce que ce> deux fujetsfe fuccedant l'un à l'autre
font conclus par la même idée ^ l'elprit ne les diftingue pas , 6c
les exprime par un même terme.
Voilà tout le Myftere. EtainfîS. Epipbanen'adit en ce lieu-
là, quoiqu'en d'autres termes , que ce que dit Odon Evêque de
Cambray par ceuxcy , qui frius erat panis , benediciione fatius
eft caro. Car comme cet Evêque attribue au même fujet d'eflre
la chair de J. C. 6c d'avoir efté pain auparavant , ce qui ne con-
vient réellement qu'à deux flijers differens» aufli S.Epiphane
attribue à cette chofc ronde d'eftre , &; le corps de J. C. £c ce
que J. C. avoit pris , c'eft-à-dire du pain.
Ces chofes paroilfent difficiles , lorfqu'on les veut expli-
quer en particulier &: par àiÇ.s reflexions expreiTes ^ 6c cela ar-
rive , comme on l'a remarqué ailleurs . prefque dans toutes les
adions de l'efprit. Mais quand on fuit de bonne foy les im-
preffîons que les termes forment , on entre fans aucune peine
dans le fensdeces termes, 6c l'on conçoit feulement qu'en un
certain moment il n'y a que du pain devant nos yeux , 6c que
dans l'autre le corps de J. C. y eftprefent, fans qu'il refte rien
dupain.
IV EXEMPLE.,
Si l'on examine de même lesargumens qn'Aubertin tire de
divers partages de S. Auguflin , dont il fait fafîxicme oufeptié-
me preuve , pour montrer qu'il y a de vrav pain dans l'Eucha-
riftie , on trouvera que ce ne font que des fophifmes de ce
même genre,
Saint Aupiflin^ dit-il en un endroit, ;>^r/^ du pain qui ejl mis
fur la table du Seigneur , qui efl béni , qui eft confacrè , qui eft çon-
fumé , comme d'un même fujet. Nous entendons , dit ce Père , par
le mot de prières ce qu'on dit avant que ce qui efl mis (ur l'autel fait
béni : Nous entendons parle mot d'oraifon ce qui fe dit quand il
efl béni ^ conficrè^^.quon le rompt pour le diflrihuer. Or c'cft de
vray pain , conclut Aubertin , quand il eft mis fur la table; c'eft
donc de vray pain quand il eftdiftribué.
Il fuffir de répondre à cette petite fubtilité , qu'il eft vray que
S.Auguftin dit toutes ces chofes d'un même fujet 5 de même
des cifuerfes minières de concevoir ce Myflere. zt^
que tous les Auteurs Catholiques, en attribuant à l'EucKariftie Ch. VII.
d'avoir efté pain en ce temps, &: de ne l'eflre plus dans un au-
tre, en parlent comme H'un même fujet. Mais comme il ne s'en-
f^ur nas que tous ces Auceurs n'ayert point effectivement crû la
tranirubiiantiacion, puis qu'au contraire ils l'ont même expri-
mée par ces termes où cette unité de fujet fe rencontre , il eft
ridicule de conclure de là que S. Augufnn ne l'ait pas crue.
V. E X E M P L E.
On trouve les paroles qui fuivent en diverfes éditions du li-
vre des Sacremens attribué à S. Ambroife: Si ery) tantavis ejl
in fermonc Domini ut incipercnt effe qua non eriint ■> quanta magis
operatorius efi ^ utjîntqu^c erant (^ in aliud commutentim Lanfranc
témoigne qu'il y avoit des éditions qui portoient fimplement,
ut qu^ erant in alitid commutentur. Mais comme les Miniftres
prétendent avoir droit de choifir toujours entre les diverles
manières de lire des paflages, celles où ils trouvent plus leur
compte,iIs s'arreftent à la première. Et Aubertin prétend en ti-'
rer une grande preuve que le pain demeure, parceque cet Au-
teur di t ^wf ff qui cjîoit efi, dy qu'il cft change : Ut S i n t qu.v erant
(^ in aliud commutentur. Cependant ce n'eft encore qu'une faufle
fubtilité qui fe démêle par le même principe de la réunion de
divers lujets en une même idée.
Car, fuivant cette manière de concevoir les chofes, il n'y a
rien de plus naturel que de parler comme cet Auteur a fait. On
confidere & le pain & le corps de J. C. conçu confufémenc
comme un même fujet & un même eftrequi paffe d'un eftat à
un autre. Dn ne regarde donc pas ce fujet comme anéanti 5 on
le regarde comme fubfiftant daris cesdifferens eftats. Et ainfi
Tondit qu'il eft & qu'il efl: changé. On dit qu'il eft, parce que
nous le concevons toujours comme s'il eftoit ; de même que
nous concevons toujours l'air qui nous environne comme s'il
eftoit le même.
On dit qu'?7 efi change, parce que, comme dit ctx. Auteur, du
fainfe fait le corps de J.C DE PAN£ fiTCARO CnKisri.Ce n'était
pof , dit- il encore, le corps de ^. C. avant la confecration , niAis
après la confecration je voîisdis que c'efi le corps deJ.C Nonerat
corpus Chrifii ante confecrationem^ fed pofi confecrationem dico tibi
quodjam corpus Chrifii efi. C'eft la manière dont l'efprit conçoit
184 Lîv. ni. Kcponfè aux ohjcUions tirées
ces rortM de chofes. Quand on liiy demande expreirément (î
le pain eft encore pain , il die que non -, parce que c'efi: le corps
de J. C. Mais quand on luv demande s'il efl: 5 comme il ne le
conçoit pas anéanti , mais change , il répond qu'il eft, vC (]u'il
eft change : Scil eft même en ce qu'il cft change. Car , lèlon
■noftre manière de concevoir, c'cft un racme lujet que l'on con-
çoic dans des eftats difFerens.
VI. EXEMPLE.
Le Cardinal du Perron tire une preuve confiderable pour la,
prefcnce réelk de ce que Theodoret ayant fait dire à l'Era-
nite, c'eft-à-dire à l'Eutychien, qu'après la confccration le
Jymheie myftique change fon premier nom, qu'il ne l' appelle plus pain
comync auparavant ^ mais corps de J. C. l'Orthodoxe répond qu'//
ne l'appelle pas feulement^ corps mais pain de vie, (jr- que ccji ainfi
que le Seigneur même l'a nommé. Car, comme il eft certain que
Theodoret fait allufton, dans ce pailàgc, àceque J.C. dit dans
S. Jean , qu'/7 cfi le pain de vie , & que le pain qu'il donne efi fa,
chair pour la vie du monde '■> ce Cardinal conclut de là , que, (t-
lon Theodoret, l'Euchanilie eft cette chair que J. C. a die
.qu'il donner^ pour la vie du monde , puifque cet endroit de
S.Jean qui ne fe pcutentetidreque delà verita.bk^hairdej. C.
s'entend , félon Theodoret, de l'Euchariftie.
La preuve eft forte & concluante. Cependant Aubertin
croit la tourner contre les Catholiques par un raifônnement
iemblable à ceux que nous avons rapportez. Ce fymhole myfli.
que , dit-ilj dont parle Theodoret ^ efi un de ceux qu'il dit avoir efiè
honorez^ du nom de fon corps: c'efi. à-dire qu'il entend par ce fym-
hole, un pain vifihle. Cela ne fe peut nier. Ccjl donc , pourfuit ce
Miniftre , ff pain vifible qu'il dit avoir efi ê appelle pain de vie par
le Seigneur, Or un pain vifiblc ^ dit- il , n efl pus le propre corps du
Seigneur .^ mais il efl vray pain. Donc Theodoret ne l'appelle corps
de 7. C que par métaphore.
Ainfi ce Miniftre conclut de ce que Theodoret entend en
un lieu par le mot de fymbole un pain véritable, qu'il ne peut
plus entendre en un autre lecorps dej. C. par ce même terme:
Et c'eft juftement fon fophifme ordinaire. L'iiluftonconfifteen
ce que ce Miniftre n'a pas comprisque c'ctoienr deux fujets réii-
vi\s fous un même nom,
II
dus dinjerfes manières de concevoir ce Myfiere. lî^
Il n'y a donc qu'à luy répondre qu'il eft vray que le pain de- Ch. VIII.
(liné àla confècration c[ï appelle fymi?o/e par Theodorec , 6c
que dans cet eftac le mot ds Sj?ni?o/e fignifie un pain ver table,
Qiie ce piin ayant efté change par la confècration, &cfl:anc
ce qu'il a efté fait -, le mot de fymhole dans ce fécond eftat figni-
fie le corps de J. C. &: le pain de vie : Mais que fignifiant & le
pain matériel & le pain de vie, confuféiTient 5c par la même
idée, Theodoret ne fait de l'un & de l'autre qu'un feul fujec
conçu fous l'idée de fymbole, auquel il donne ces noms difFe-
rens de pain matériel par rapporta un certain eftat,& de corps
dej. C. par rapport à un autre. Nous avons montré que cette
manière de concevoir l'Euchariftieeftoit fi naturelle, & même
fi ordinaireà tous les Auteurs les plus perfuadez de la prefence
réelle qu'il n'eft pas necefTaire de nous arrefter davantage à
l'éclâircir.
CHAPITRE VIII.
Confequcnce importante de cette manière de concevoir le pain (^ le
corps de J. C comme un feul fujet , pour entendre le véritable
fens d'un paJfaged'Origene qui ajjujettit l'EuchariJiie à la condi-
tion de viandes communes.
COmme nous avons montré dans les Chapitres precedens,
que l'efprit humain eft naturellement porté à concevoir
le pain non confacré & confacré comme un feul fujet-, Se à at-
tribuer à ce fujet des qualitezqui ne conviennent qu'à l'un ou
à l'autre ; on a lieu de juger que cette manière de concevoir les
objets a dû s'étendre encore plus loin, & que comme nous di-
fonsque le pam ordinaire nourrit, quoyquece ne foit point en
demeurant pain qu'il nourrifle , quelqu'un aura pu dire en fui-
vant ces idées fi ordinaires que l'Euchariftie nourrit. Car de
quelque manière que fe fafle cette nourriture, 6c que ce foie
fi l'on veut quelque autre matière qui fuccede au corps de J. C.
il eft certain néanmoins que tout cela fe pafi[e d'une manière
abfolument cachée, 6c que comme le corps de J. C. prend la
place du pain, fans que les fens le découvrent, de même ce qui
nouriit proprement prend la place du corps de J. C. fans que
nous ayons de voye pour l'en juger.
i^- A a
1^6 Liv. III. Képonfè nux oBjecîions tirées
Il cft donc naturel aufli d'attribuer encore ce dernier effet au'
même fu jet , &: de regarder ce lujet rantoll: comme pain , tan-
toll; comme corps de J. C. ôi tantoft comme aliment. Et il y
auroit plus lieu de s'econner que perfonne n'eufb luivi cette
manière de concevoir & d'exprimer l'Euchanftie , que d'en
trouver quelques^ins qui Tayent fuivie.
Quelquefois les Auteurs en marquant clairement la prefence
réelle, ne laiiTent pas de dire que la chair de J. C. nourrit nos
corps. Comme on le peut voir dans le palTage d'Apollinaire rap.
Inc. (.. joan. porté dans une chaîne fur S.Jean imprimée à Anversl'an 1630.
^-^î' on ne f(^auroit jouir du Verbe de. Dieu pour l'éternelle vie que
par fa chair mais maintenant on nous a donné une chair
vivifiante qui nourrit les corps qui luy font femblables;
Cet Auteur parle clairement en cet endroit de TEuchariftie.
Il en parle comme de la chair de J. C. unie au Verbe. Il dit
qu'elle nous efl: donnée, 6c qu'elle nourrit nos corps qui luy
font femblables.
Jean Kulbroc dans le Traité qu'il a fait fous le titre àe Mi-
roir du. fulut éternel, exprime la foyde l'Egliié fur l'Euchariflie
d'une manière fî claire qu'on ne fçauroit douter que cène fois
la fienne. J. C dit il , s'efi donné luy. même tout entier (^ fans di-
vifion, c'cfi- à-dire [on corps Ions l'cfpcce dit pain , ^fon fangfous
tcfpcce du vin^ ^ foy-wèmetout entier fins divijïon fous l'une .^
fous l'autre.
Il y a encore plufieurs autres pa'dligesauffi précis &auffi'for-
mels que celuy-lc. Cependant il ne craint point dédire en un
endroit, que tous les Apojhes ont rci^ii J. C. dans la Cène , ce véri-
table Sacrement comme une viandequi nourrit le corps-^ d^ que dans
le Sacrement , ils ont recà par la foy , par l'amour, ^ par le defir,.
Ie> <^orps du seigneur comîne leur aliment éternel. Apostoli in
cœna cum Chrifio omnes 'uenerahile hoc perceperunt Sarcramenium^.
tanquamefcam corpus nutricantem j (jr in ipjo Sacramento Jinyilt
corpus 'Dominicum , ut sternum cibum fuum per fidcm , amorem ^
dcjiderium acceperunt.
Ainllj félon cet Auteur, le Sacrement de l'Euchariflie efl une
viande qui nourrit leeorpsj parce qu'en effet le corps efl nour-
ri en la prenant. Et cela fait voir que Thomas Valdenfis s'efb
fcandalifé (ans fujet d'une femblable exprefTion d'Honorius
d'Autun^ qui ditdans un Traité intitulé, Gemma anima, que le
Sacrement quiefb pris par labeuche paiïe en aliment : Sacra*
mentum quod ore^erci^iturjinalimcntumcorporisredt^itur. Car il
des ài'veYfes mcLvùcres de concenjolrce Myfl^re, \%-j
dévoie confiderer que cet Auteur reconnoiflant dans ceTrai- Ch, VlU.
té même la cranfrubllannation en ces termes formels 5 8c dé-
clarant que comme le monde awit cfié fait de nen , de même far
les paroles du Setyieur ces efpeces de matières font chanq^ccs veru
tàblement au corps du Sciznctir , il ne Vouloit dire autre chofe,
quand il s'exprime en ces termes, qae le Sacrement devient ali-
ment du corps^ linon qu'en prenant le Sacrement on eftoit nour-
ri, & qu'il avoit pu parler de la iorte en re^^ardant ce Sacre.
ment&: ce qui nourrie comm.e un mône fujct; parce qu'en ef-
fet les fens n'y appcrçoivent pas ces fortes de différences qui
obligent de regarder les chofes comme des eftres & des (ujeis
^ifFerens-
C'eft pourquoy comme les pafTages qu'on cite dêRaban Ar-
chevêque de Mavence , ne contiennent que la même exprefi
fîon, &: qu'il eft vifible qu'elle peuteftre employée par des Au-
teurs qui crovent la tranfTubftantiation , c'eft encore témérai-
rement que ce f(çavant Archevêque eft accufe tant par on cer-
tain Auteur anonyme de peu de poids, publié par le Père Ce-
lot, que par Thomas Valdenfis.&enfuite parAubcrtin& par M.
Olaude, d'avoir cru que l'Euchariftie nourrir proprement com-
me les autres viandes communes. Il faut d'autres fondemens
<jue des palTages de cette forte pour faire croire que des Au-
teurs célèbres ayent eu des fentimensqui ne s'accordent pas
-avec ceux des autres Pères, & le bon fens veut qu'on vrcduife
leurs paroles pourvu qu'elles le puiffent foiiffrir. Or certame-
Tnent elles le peuvent, comme nous Tavons fairvoir.
Mais pourquoy cette équité n'auroit elle pas auiîî lieu à l'é-
gard de quelques palli^ges desAnciens,que les Miniftres produi.
fent pour montrer que l'Euchariftie nourrit j comme celuv de
S. Juftin&celuy deS. Irenée? Car quand celuy de S. Juftin de-
vroit eftre traJuitde la manière dont lesMiniftres letraduifent
.pour y trouver que notre chair efi nourrie de l' Euchciriftie par le vovez r. Per.
changeme7it -^ au lieu que nous avons montré qu'il eft pour le i.'^-'^'^'
moins auiTi probible que S. Juftin ait dit cela; non de l'Eucha-
riftie, mais de l'aliment en gênerai: Quand ce que dit S. Irenée
que notre chair eft nourrie du corps &du lang de J. C. fe de-
vroit' entendre d'une nourriture palTagere pareille à celle qu'on
recoitdes âIimensordinaires,& non d'une autre qu'on peutap-
peller gne nourriture permanente, par laquelle le corps des ju-
ftss reçoit de l'union avec celuyde J. C. les feniences de l'in-
Aa ij
188 Liv. III. Képonje aux ohjeEiions tirées
corrnptibilicc & de l'immortalité glorieufe.-Toutceqne les Mf-
niftres devroient conclure de ces paflages, c'eft que les Pères
ont attribué l'efFet de nourrir à l'Euchariftie , comme tant de
Catholiques kiy attribuent les effets qui ne conviennent qu'au
pain noncon'acre: &;ce parce que l'efprit fe forme &du pain
nonconfacré & du pain confacré, &de ce quiluccedeà l'un &à
l'autre un certain lu jet confus, auquel il attribue ce qui con-
vient réellement à divers fujets. Il n'y a rien en cela, comme
nous avons fouvent dit, que de fort naturel , &: de fort confor-
me aux idées que l'efprit fe forme de ce myftere. On prend
l'Euchariflie & on eft nourri. On dit fur cela que 1 Euchariftie
nourrit, de même que parce qu'elle paroift pain , ôc qu'elle efk
faite de pain, on l'appelle pain, &; on dit qu'elle a eftc pain.
Il n'eft pas toujours queftion de parler félon la rigueur Schoj.
lan:ique5-& fouvent on n'en parle que mieux &: plus naturelle-
ment.. L'efprit fçait réduire ces exprefllons à la vérité , & n'y
entend que ce qu'il y faut entendre.C'efl: la chicannerie qui em-
brouille,&: qui fait naiftre des difficultez que ces exprcflionsne
produifent point quand on fuit fîmpicmentrimpreflion qu'elles
font. Les Miniftres voudroient que les Pères eufTent cfté Pro-
phètes dans tous leurs difyours; qu'ils euffent toujours elté en
garde contre Aç.s erreurs qui n'étoient point encore nées; qu'ils
eufTent tout exprimé r qu'ils n'euffent rien laifTé à fuppléer à
l'intelligence de leurs Auditeurs. C'eft vouloir qu'ils n'eufTent
pas parlé en hommes j & c'eft exiger d'eux fur le fujetde l'Eu-
chariftie, ce qu'ils n'ont pratiqué en aucune autre matière.
Enfin on doit mettre encore air nombre des pafîàges qui font
éclaircis par cette remarque cet endroit d'Origenefur S. Mat-
thieu que lesMiniftres ont rendu Ç\cQ.\tthvQiIIIc clbus qui fanBifi-
catur fer verhum Dei ^ orationem juxta id qtiod hubet materiale-^
in ventrem abité^in fecejjum qicitur. Car c'eft encore la réunion
de ces trois fujets réellement differens en un même fujet con-
fus, quia donné lieu à cette cxprefîlon.
Quand il dit, ille cibushA le regarde dans lé premier eftat où.
ee n'eft encore que du pain.
Qi-iand il dit , qui funHificatur fer vcrhum Dei ^ orationem , ïï
îe regarde dans le fécond.
Et quand il ajoute^, Juxta id quod habet materiale:, in ventrem
«ibit ^ in fecejfum ejicitur, il le regarde dans le troifîéme.
C'eft toujours dans ces trois états le même aliment enidée^.
des dwerfcs muni ère s de conceojotr ce Myfiere. 189
L'efpric les connoic tous lous le nom de Cibus ^ comme un Ch. VIIK
homme dans une eau courance coniîdere toutes ces différentes
furfaces d'eau qui s'appliquent à ion corps, fous l'idée géné-
rale d'eau.
Mais la foy nous apprend que dans le fécond érar , ce n'eft
plus le même aliment, & qu'il eft changé au corps de J. C. Il
eft vray. Et fi on l'avoir demandé à Origene, il en auroit parlé
comme les autres Pères.
Il auroit dit comme S. Cyrille cîe Jerufaiem, qac ce neft plrâ
du fainquoyque le goufi le juge tel , mais le corps de /. C.
Il auroit dit comme S. Ambroife, que cericfl plus ce que lana-
ture a formé _, mais ce que la bénédiction a confacrè.
Il auroit dit comme Theodoret , qu'ail eft conçu é^ crû eftre 1^9-
corps de J. C. d^ qu'il eft adoré comme eftant ce qu'il a eft é fait.
Il fe feroit oppofé au doute que le rapport des iens fonrr
contre ce myftere^ de la mcme forte que les autres Perefs
l'ont fait.
Il nous auroit dit avec S. Epiphane, que quoy quil n'y ait
aucun rapport de cette cbofe ronde (^inanimée avec le corps
de J. C. // fuut croire néanmoins que ce l'eft , parce qucjejus-
Chrift l'a dit. ,
Il auroit apporté tous les exemples que S. Ambrcife allè-
gue pour faire voir qu'il faut croire cette merveille, comme
l'on croit la création du monde & l'incarnation -, Se il nous au-
roit exhorté comme S. G ^udcnce à consumer les doutes qui nous
tn pourraient refier , par le feu du Saint Efprit (^ l'ardeur de
la foy..
Mais il h'étoit point queftion de tout cela, il parloir de TEiT-
chariftie par occafion , & il vouloit feulement montrer qu'elle
n'étoit pas du nombre de tes caules Phvfiques qui produifenx
leur effet neceffairement, &. qui agiffent indcpendemment des
difpofitions volontaires des fujccs , aufquels on les applique.
Car fi cela e/loit , dit- il , elle fancti-fîeroit atifjî ceu.-< qui la re-
cevroient indignement.
Pour le m>intrer donc encore plus particulièrement il la re-
garde comme un eftre matériel , ce qu'elle eft en effet dans ie
premier eftat , c'efl: à-dire avant la confecration , & dans le
troifiéme , lorfque le corps s'en nourrit i & après avoir con-
clu qu'elle ne fanctifie point comme matière , il dit qire
fclon ce q^u'elle eil par la confecration , juxta precationem
Aa ii.i
If o Li V . 1 1 1. Keponfe aux ohJeStionf tirées
qî(,c illi acccjjît^ elle n'eft utile qu'à proportion de k foy. D'où
il s'enfuit qu'elle ne Lindiiie donc pas de la rnème manière
que les caufes PhyGques produilent leur effet.
Il eft vray qu'il n'explique pas en ce lieu quel eft l'effet de
cette confecration qu'il appelle prière. Mais il le faut tirer de
la dodrine de l'Eglife de Ion otfnnps & de la fienne propre,
parce qu'on doit luppoferque ceux pour quril écrivoit l'enten-
doient de cette forte. Qu'on fuppole donc qu'à ces paroles , fé-
lon la prière qui cji jointe , Origene ait ajouté ces autres paroles
pnfes de la doctrine commune .de l'Eglife 5 far laquelle le -pain
(jj- le vin font chuniicz^ au corps mhnc (> au fan^ mcync de J. C.
ou quelqu'autrechote femblable, & il n'y aura plus de difficul-
£.é , ny pour la prefence -fceile qui y fera établie,, ny pour la
Tranlfubllantiationqui y fera reconnue.
Mais, dira t- on, cette addition n'eft pas dans Origene. 11 eft:
vray. Mais il ne l'exclue pasauffi. Elle eftfavorifée par d'au-
tres paflages d'Origene , comme par ce qu'il dit contre Celle,
^uc le pain par les prières s' e fi fait un certain corps faint , c'cft-à-
dire le corps de J.C. & par ce qu'il dit ailleurs -, quand vous re-
cevci^lc pain ^ le breuvay: de vie, oî^ que vous manqezj.e corps (^
heuvez^le fanq^ du Seiyîcur , a^ors le Seigneur entre dans vofire Mai-
fon. Jrîumilicz^vms donc À l'imitation du Centenicr , ^ditetluy.
Seigneur , je ne fuis pa-y digne que vous entriez^ dans ma maifon.
Car s'il ejl re(^ù indignement , // y entre pour la condamantion
de ccluy qui le reçoit. Enfin elle eft conforme à la doétrinc
commune des autres Pères. On doit donc croire qu'elle a
efté auffi dans l'efprir d'Origene , quoy qu^elle n^en foit pa«
lortie en cette occafîon.
Mais il faut de plus confiderer fur ce fujet qu'il peut bien ar-
-river que des Auteurs quoy que perfuadez de laTranifubflan-
tiation, regardant néanmoins l'Euchariftie comme un même
fujet & comme un même être dans tous ces divers états^ difcnt
que ce qu'il y a de terreftre , eft fujet aux accident des viandes
communes ; au lieu qu'il eft fans nulle apparence qtie des gens
qui auroient efté dans les fentimens des Miniftres ayent pu s'a-
vifer de vouloir exempter l'Euchariftie de cette condition
.commune des autres viandes.
Cependant il eft certain qu'ourre ceux d'entre les Pères qui
appellent l'Euchanûie viande incorruptible, du nomble def-
jquels eft Origene luy-raéme, nous trouvons formellement dans
des dinjcrjci muméres de concevoir ce Mjijiere. 191
trois Auteurs célèbres qu'elle n'efl: point fujette à cet accident. Ch. VÎII.
Le premier cft S. Cyrille de jerufalem,qui nous dit nette-
ment dans fa cinquième Catliechefe, que cq pain que nous de-
mandons dans l'oraifon Dominicale N O N o? fcceifui obnoxium.
0 ap"^' ^To4 o y.oivoi^yv^ 'é^i- '(rh'ytyloi , à^rci .Ts arc; o' siyioi 'blhydoi
'(t^J?, «,'yY/ T'a VMJ 'SiCl-Li TYii ■]>>J')0)i ^CLTXjmO/iê/-Oi' '^bTûf 0. dfTOt C6^i
il' itouA^çtF %i»pi?.s^ £i'f ettp/J^pfi^^oi iy^Qcc^iTa.1 o-W t]s TiO.'jxitj'^u'ûii-
■ Car il eft ridicule d'entendre ce paiîàge du S. ETpHt on du
Verbe, dont on voit aflez qu'on ne Tçauroit dire lans ab(ur-
dité qu'ils font diftnbuez dans toute la fubftancede l'homme
pour l'utilité de l'ame &c du corps. Outre que le mot, à'proc
\tos o a-yf^f , dont fê fert S. Cyrille, fe rapporte vifiblement à '
l'Euchariftie , que l'on appelle de ce nom.
Le fécond efi de S. Chryroftomequi nous dit en parlant de
l'Euchariftie 'vya p d> Aci'TtcLi (içJctiS ils cl<ptS^fcl7X ywc'^, cictayi ^<"n. <îe Fn--
' r. ' char, in En-
f^.^ T^rovoj.. ^ ^^; '^'^
Le troiûcme eft S. Jean de Damas, qui fe fert encore des mê-
mes termes dans Ton quatrième livre de la foy orthodoxe e. 14.
Comment une penfëe fi bizarre auroit elle pu venir dans i'tC-
prit de ces Pères , s'ils n'avoient regardé l'Euchariftie que com-
me la figure du corps & du Sang de J. C. Er comment l'ayanc
une fois admifeauroient-ils pu la bornera l'Euchariftie^ au lieu
de l'étendre à tous les autres Sacremens , puifqu'il y avoit au-
tant de raiion d'un cofté que de l'autre?
Les Miniftres démêleront cela quand il leur plaira. Mais
cependant je remarqueray qu'Auberrin expliquant ces paroles
à fa manière, a efté obligé d'imputer à S. Chryfoftome une
opinion qu'il prétend luy eftre particulière, ^ff^i'y^/;z£'/'?vf^/^
fuer.'t ejus ofinio , & qu'il ne fe fçauroit exempter d'en dire au-
tant de S. Cyrille & de S. |ean de Damas.
Ainfî il eft obligé d'admettre un partage d'opinions entre
les Pères fur ce que devient l'Euchariftie, quoy que cepartage
n'ait jamais efté remarqué de qui que ce foit.
Mais en expliquant Origene comme nous avons fait, tous
les Pères font d'accord dans lefond, quelque différence qui pa-
roifi^ dans leur langage. On n'eft point obligé de les oppofer
les uns aux autres, ny d'attribuer à aucun d'eux des fentimens
particuliers. Ils font tous d'accord: ôcc'eft la plus certaine mar-
que qu'on puiile avoir de la vérité.
Ein du troijïéme Zi-ure,
LIVRE QUATRIE'ME.
CHAPITRE PREMIER.
Que c'efi une fuite naturelle de la docirine de la frcfence réelle^
que l' Evchariftie fçit fouvent appcllée des noms de pain &
de vin (^ autres termes fynonymes. Dcffenfe de ce qu'on a
dit dans le premier Tome de la Perpétuité touchant le lan~
gaqe des [eus.
Ly a dans tous les mvflercs , & principalement
dans celuy de l'Euchariflie, de certaines difficuU
cezqvii eftant deftinëes deDiCu pour exercernô-
tre Foy, ne feront jamais Ç\ parfaitement ëclair-
^ cies, qu'on n'ait encore befoin de faire effort fur
nôtre raifon pour la foiimettre à l'autorité de
pieu & de fon Eglife. Quand les Hérétiques nous combattent
par les objedions qu'ils tirent de ces obfcuritez que l'on ne
peut entièrement diiliper 5 nous femme s obligez de les fouffrir
avec patience, & de leur répondre avec humilité, en taf^hant
de les faire entrer dans la voye de la Foy, qui enibralfe toutes
les veritez que Dieu propofe par fon Eglife, quelque incom-
prehenfibles qu'elles foient à nosefprits.
Mais il y en a d'autres qui ne font pas de ce genre, & qu'un
fieu de bonne foy retrancheroit de la difpute, pour donner
ieu cie pajOTer à celles qui mentent d'eftre examinées ferieu-
/ément.
Celles que les Miniftres tirent des lieux des Pères où i'Eu-
çjiariftie eft appel lée/^/w ôéx//«, Scdonr M. Claude forme fa
première preuve dans fa féconde Réponfçj a'eft que de cette
féconde
ou r Euchurifiie cjî appelléc pain ts l'in. i^y
féconde efpece j car l'Euchariftie ne paroilîant en rien differen- C H. I,
îe du pain i$c du vin , la nature & le lens commun ont du porter-
ies fidellesà luy en donner le nom , lorfqu'il n'a elle qucftion
que de la deiîgner , & non de faire connoiftre Ion ellcnce mce-
rieure. Ainfi comme c'eftoit bien alTez qu'il euH propole cette,
objection dans cet endroit de ion Livre , il y avoir lieu d'efperer
qu'après l'ëclaircillement qu'on y a donné dans le premier
Tome de la Perpétuité, endiflinguant le langage des fens >
deceluyde la vérité & de la foy , il ne nous y arreftcroit pas-
davantage, & nous donneroit lieu de venir plutoft aux princi-
fraies difficultez.
Mais fa troifiéme Réponfe, où il a prétendu réfuter le pre-
mier Volume de*la Perpétuité, a bien fait voir qu'il ne faut plus.
fe promettre de tirer de luy aucun aveu j & qu'il ell: relolu à:
quelque prix que ce foit de foùtenir tour ce qu'il a avance , io'it.
à- l'égard des faits, loit à l'égard desraifonnemens. II croit qu'il,
y va de Ion honneur de ne fe dédire de rien. D'autres pour».-
rx)ient croire le contraire. Mais quoiqu'il en foir, il nous a mis.
par là dans la neceffité de reprendra icy quelque choie de ce:
qui a efté dit dans ce premier Tome de la Perpétuité , & d'exa-
miner ce qu'il y répond pour mettre encore cette matière dans»
un plus grand jour , s'il elloit poffible qiul y reftaft quelque
obkurité;
Le principe dont on s'efl fervi dans ce Livre, c'éftque lorf- vnp i .om'
^2 le jugement de la raif)n ou de la foy font contraires aux.P» «s*,
iuéesqui naillent des lens ou de la cupidité , il fe forme par
neceffité deux forte«s de langages qui fubfiftent enfemble 3 l'un-
qui repond aux idées des lens& de la concupifcence J lautre.
qui repond à la raifon & à la foy-: & que le moyen-que ies--
hommes ont trouvé pour les accorder ,.n'eft pas d'abolir Tuiiv
par l'autre, mais de marquer ôidéOgner les chofes par dester^
n'.es conformes aux idées des fcns ou de la concupifcence, &:
d'y joindre enluire les idées de la foy ou de la railon , pour [qs^
corriger.
On avoir ajouré que ce double langage a êiçs racines natu-
relles dans l'elprit des hommes -, parce qu'ils ne font jamais li;
parfaitement pénétrez des idéesdela venté qu'ils puiilent ou-
blier celles qu'ils ont reçues par les /ens ou parla cupidité ; &.
qu'jinfitout ce qu'ils peuvent faire,c'eft de les corriger, ôc non.
de les anéantir éc de les détruire.
B b.
If 9 4 Liv. IV. Képon/è atix pcijpiges
On s'eftoic fervi de divers exemples cirez du laneaee des
hommes pour auconfer cette maxime.
On avoit remarqué c]ue parce que la Lune paroifl plus gran-
deànos fens que les étoiles, l'Ecriture rap,ielle <^r.ind /aw_
«.i/>f,quoiqu'elle foie en effet beaucoup moindre que les étoiles.
On avoit fait obferver qu'en appellanr biens lesrichefles 8c
lesplaifirs, & appellant;"» /«x les douleurs 8c la pauvreté , elle
avoit (uivi le langage commun des hommes,ô:nonceluy qu'on
pourroic former (ur les règles de la vérité.
On s'eftoit auffi fervi d'exemples tirez du langage des Phi-
iofophes Carceficns.rCopernic!cns ^l Thomiftes, qui ne fuivent
point dans leurs difcours i>rdinaires les opinions qu'ils ont tou-
chant la vérité des chofës , &; qui le contentent d'expliquer
leurs fentimens , quand il en eft quefbion , en parlant dans le
refte comme le commun du monde.
Et l'on avoit conclu de tout cela que le pain & le vin eflant
la matière de l'Euchariftie , & fubfiftant à nos fèns après la
confecration , il eftoit naturel , quand on ne vouloir que la dé-
fîgner, de luy donner le nom de pain &c de vin, en fe conten-
tant d'inftruire les fidèles en certaines occaflons de ce qu'il faut
croire de ce pain & de ce vin.
M. Claude ayant donc entrepris de contredire ce difcours à
quelque prix que ce fuft , s'y prend en cette manière. // me
, rep. p. Î05. Çemble , dit- il , que cette folution porte tous les caraHeres de la con-
trainte , (^ qu'on y voit les remarques d'un efprit qui s'cfl extraordi-
nairemcnt échauffe four fe délivrer d'un mauvais endroit , oit
il fe fcnt emharaffè , C^ dont naturellement il ne pouvoit for-
tir.
Comme il ne cite encore icy que fes propres pen fées , on
veut bien déférer au témoignage qu'il en rend 5 c'efl à- dire
qu'on veut croire que c'eft ce qui luy a paru. Mais il trouvera
"bon que je luy réponde qu'il a quelquefois d'affez étranges
penfées-, & c'eft ce que l'on va montrer par l'examen des rai-
fons qu'il allègue.
Il demande quel rapport il y a des idées de la concupifcence ^
de la r^lipon , & des fentimens Jinguliers des Thomfies é' des Co.
ferniciens , ofuec le difcours de ces bons Evèques Grecs qui vivaient
au huitième Jîccle ,é^ qui affeurément navoient pa-f toute cette Phi-
lofophie dans la tefle.
On luy répond que quand on n'auroit pas marqué le rapport
ou ÏEucharïflie ejl appeUée pain (^ tin. 195"
de ct% expreflions , il eft allez vilîble pour ne pas donner lien à ^^- ^v
cette demande; mais qu'on l'a déplus fi clairement marqué,
qu'on a peine à croire qu'il ne l'ait pas compris ,& qu'il faille le
]uy repeter.
Je Juy dis donc encore une fois que ces EvêquesGrecs, quoique
très- perfuadez avec toute l'Eglife de leur temps, que le pain Se
Je vin efloient changez au pr<^)pre corps de |. C. parlaconfe-
cration, ont pu néanmoins fuivant le langage des fens marquer
l'Eucharillie par \Qsmots de pain ^ de vin^ de fith/lance de pain ^
de vin ; parce qu'il n'eftoir point qucftion au lieu cùils en ont
parlé, d'expliquer foneirence iaterieure , mais feulement de la
défigner: Comme nous voyons tous les jours des gens perfua-
dez des veritez delà religion, ou d'opinions particulières en
Philofophie , fe fervir pour défigner certaines chofes du lan-
gage formé fur le rapport des fens , ou fur les idées que la cupi-
dité en donne, fans prétendre par là defavoiier les fentimens
que la vérité leur en fait avoir. Voilà en quoyconfif{:e ce rap-
port. Et comme rien ne peut eflre plus naturel ni plus jufle , il
eft mal aiféquc la figure de M. Claude le foit.
Mais la raïf )n qu'il infinuc icy mérite qu'on y fafîè quelqu»
réflexion. Car il eft vifible qu'elle luy a bien plu, quoique dans
la vérité ce ne foit tout au plus qu'une fort méchante plai'^
f;)ntcrie,, ou une grande marque de faufTeté d'efprit, s'il a parle
ièrieufement. Ajjcurèyncnt , dit-il , ces Evcques Grecs 7iavo;ent
pof toute cette Philofophie dans la tefie. Mais il n'eft nullement
necefîliire queces Èveques ayenteu ctiiQ Philofophie chms la
C^-fte , ni que leurs expreffions ayenr eftë formées fur le mod,; !e
de celles de ces Philofophes pour v eftre femblables. Il fufnc
que les unes & les autres foient fondées fur l'inftinâ: naturel à
tous les hommes , de défigner les chofes félon ce qu\"lles pa-
roifTent 5 £c il n'eftoit point hefoin pour cela que ces Eveques
euffent cette Philo fvphie dans la tejre 5 comme il n'efl point ne-
cefTaife que M. Claude fçache l'Arabe & le Perfàn pour em-
ployer dans fondifcours quantité de métaphores & de figures
qui kiy font communes avec les Arabes êc les Perfes. La natu-
re unit tous les hommes dans certaines manières de concevoir
ljschofes,&de les exprimer après les avoir conçues. Et il n'y a
rien de plus contraire au bon fens, que de vouloir qu'il ne puifîè
y avoir du rapport encre les expreffions de diverfes penonnes ., ,
à moins qu'elles n'ayent eu toutes le même maîtj-e , ou qu'elles
Bh ij
îïf6 \,\v.\Y.'R.éponfe aux -pnjf tiges
fe foient formées lur un même modelé.
Qui pourra s" nnayner ,^owï{\.\\t M.Claude ,que leurs expref-
Jîons qui font JÎMpUi t^ dehonnefoy , ay ant c fié formées (ur le ynodek
de ces doubles langjya , c'efi-à dire fur une obfcrvationqueperjunne
:ne s'cfioit encore avtfé de fuird Tant ces doubles langa^sfont èloi-
<Uiez^ de la vue & de l'uf^r'^^c ordinaire du ynrr/ide.
C'cft encore une continuation delà mêmeiliufion , par la-
quelle il piailla M. Claude de luppoferen l'air ,c[u'aiin que les
exprjffions de ces Evêques euiient du rapport avec celles de
ces Pliiloiophes , il falloit queles unes eufïcnc eftë formées fîj-r
Jes autres ^ au lieu c]u'il liiffit que les unes &; les autres ayenc
efté formées lur la nature même, qui ift^int la même dans tous
les temps, porte & portera toujours tousiesliomnies à s'expri,
iTicr de la forte.
Mais il enchérit de plus icy fur cette illufion par une antre
encore moins pardonnable, en attribuant à l'Auteur de la Per-
pétuité de vouloir que ces Evêques Grecs fe foient réglez dans
,ce qu'ils ont dit de l'Eucharillie fur cette obfervation du dou-
ble langage de la raifon & des fens ^ en quoyil téinoigneou
■peu d'intelligence ,ou peu de fincerité.
Car cette obfervation , au/Ti-bien que la plupart de celles
.que l'on fait furie langage des liommes , n'eft qu'une refle-
xion fur la manière de s'exprimer que la nature leur infpire à
touségalcment: comme la plupart des préceptes de l'éloquen-
ce ne lont , félon faintAuguftin, que des reflexions que l'on
a faites fur les difcours des perfonnes éloquentes Auffi com-
me ce Père a raifon de dire que ces préceptes fe trouvent pra-
tiquez par ceux qui font éloquens, quoiqu'ils n'y pcnfent pas
en les pratiquant : Implent quippe illa quiafunt éloquente^ , non
adhibeyit ut fint éloquentes h ce double langage de même a efté
foivi généralement par tous ceux qui ont parle depuis qu'on
parle dans le monde ,(ans qu'ils en ayentfciit l'obfervation,ni
même qu'ils l'ayent connue, & il apalTé des uns aux autres
avec Ips langues mêmes.
C'eft ce que le bon fens auroit fuggeré à M. Claude ,s'il avoic
pris la peine de l'écouterjquand même il auroit pu dire avec vé-
rité que cette obfervation eft nouvelle. Mais elle l'efi: fi peu^qu'il
n'y a point de livre de controverfe où l'on ne l'employé , n'y
en avant p int où l'on ne réponde aux Calviriftes , lorf.;U'ils
objeclentquc l'Euchariftie eft appellee pain, que l'un nomme
oà l'EucIurifiie efi appellée pa,'n f£ nj'm. 197
■Tonvent les choies félon les apparences extérieures. Etillapeuc Ch. I.
voie ençr'aucres dans Thomas Valdenfis 6c dans Bellarmin.
•CeU la coiaume de l Ecriture , dit ce Cardinal , de nommer les cho- X''-/^'P- *'•
r- , , , „ rr /^ .1 Bellarni. con*
jcs félon qn elles p.iroilfent extérieurement. Ce qu u répète encore deEuch. c. 4.
ailleurs. Ain (i quand on examine les réponfes de M. Claude , 1,5. crj.
on trouve qu'elles ne font fondées que fur de faux faits &; de
faux principes , & qu'il avance les uns auffi hardiment que les
autres. Cependant comme s'il ne reftoit pas un mot à dire à fon
adverfaire, il luy infulte , &; s'en joue d'une manière raillcufe,
fans fonger que rien ne fîed fi mal que la faulTe raillerie.
jlLt vérité , dit-il ,7V «1? mattendops p^x que les idées de lacon-
■cupifcence , ni les corps ynorts des Thoynifies , ni les impre.ffîons , ni les
auto7nates des Cartejiens , ni le fijiéme de Copernic , fe vinffent mè~
1er dans noflre difpute. Mais pourquoy nes'y attendoit il pas ?
Quis te coëgit filfu7n putare? Car s'agilfant de montrer que quel-
<]ue opinion que l'on ait touchant la venté intérieure des cho-
fes j on en parle (ouvent iélon les apparences extérieures, étoit-
il fi mal ailé de prévoir qu'on pourroit fe fervir contre luy de
l'exemple de tesPhilofophes quifuivent les apparences exté-
rieures dans leur langage , quoiqu'ils ne les fuivent pas dans
leurs fentimens, & qui ayant des opinions peu populaires,par,
Jent néanmoins comme le peuple ?
Ce qu'il ajoufteenfuiten'eftpasde meilleur (çn^. Que 3e appa-
rence ^à\t-û ^y a-t'ilque des Evêques ajfemblez^en Concile ,dontles
paroles doivent rcglcr la foy du peuple , ^ qui d'ailleurs dévoient
farler fuy:ment , ayant des adverfairef fur les bras comme ils en
avotent., eurent abandonné le Jiyle de la reliyon , jînotis en croy ons
M. Arn.iud, pour fuivre celuy des fens que la rehpon condcrmiie ?
Quand il eft de l'intereft de M. Claude de n'entendre pas les
chofes, on diroit que c'eft l'homme du monde qui a le moins de
pénétration. Il trouve des difficulté?, par tout 5 & on eft obligé
de luy expliquer jufqu'aux principes les plus communs du lan-
gage des hommes. Qii'i! apprenne donc, puiiqu'il veut faire
croire qu'il ne le (çait pas , que comme il n'y a point de fauffeté
dans les métaphores & dans les tropes , quoiqu'il y en paroifie ,
pnrceque l'eirrit le porte , non au fens qui eft marque parla
figniHcation pretifedes mors , maisàceluv que l'on a voulu fî-
gnifier : il n'y a point de faufteté non plus à parler des chofes
lelon l'apparence, lorfque ceux à qui l'on a atfaire fçavent bien
que c'eft lelon l'apparence qu oh en parle.
Bb iij
198 Liv. IV. 'Réponfè aux pa.Jfige5
M. Claude dira- il^par exemple, qu'il y a delà fauïïèté d.ins
l'EcricLire , par'.equ'elleappellcle ferpenc d'airain ,a«y2'r/'^«f i
les Anges qui paroilToienc lous la forme d'hommes, flW/)o»2wej3
Jes bœuts d'airain , des bœut< 5 & des fio;ures de «rrenadcs , des
grenades? Et n'eftil pas clair au contraire qu'il n'y en a point,
parce que cesexpreffions ne forment qu'un iens véritable dans
J'eTpric 'qui conçoit aifément qu'elle n'entend pas parler en ces
endroits-là ni du véritable ferpent, ni d'hommes , ni de bœufs,
ni de grenades véritables, mais d'un ferpent apparent , &;.
d'hommes , de bœufs , de grenades apparentes.
L'on fie peut pas dire avec plus de vraifemblance qu'il yatu
roit eu de la fauffeté dans le langage de ces Evêques afTemblcz
à Conftantinople, qui pour dëfignercequi eft image dans l'Eu-
chariflie, la nomment fuhftûnce de pain^ s'ils ne l'avoient crue cf-
fediveinenr d'.i pain Caril n'y en a point fans doute, fî ce difl
cours efloit rres-inte!iigibie. Or comme ce qui rend ces difcours
intelligibles 6c clairs, eft la créance diftinde & générale deU
dodrine de la prefence réelle & de laTranfubftantiation-, il fau-
droirque M. Claude nous euft prouvé auparavant que l'on ne
croyoitpas ces deux articles au tems oticeConcde fut tenu jc'eft
à direqu'afîn qu'il y aie quelque étincelle de bon fens dans fon.
difcours, il tant juftement qu'il luppofece qui efl en queftion.
Ces circonftancesqueM Claude prend la peine de remarquer,,
que ces Feresdevoicntregleylafoydespcwdcs^ qu'ils eflotent nfjcm.
hlez^en Concile , qu'ils avaient des ^dverfaires entefie , ne font pas,
feulement vaines , parce ^ue ce difcours eftoit fortintelligible,
&c que n'ayant point d'obfcurité, & ne pouvant ainfi fcandalifer
gerfonne,il n'avoitpar confequentbefoin d'aucune précautionj, ,
mais elles marquent de plus beaucoup de mauvaife foy.
Premièrement, parce que M. Claude ne peut ignorer que le».
Miniftresfes confrères ont fait de grands traitez, pour montrer
que lesexpreffions-metaphoriques ont lieu dans toute forte de
difcours, dans les articles de foy , dans les loix, dans les tefta-
mensjd'oùil pouvoitconclure facilement qu'elles peuvent bien
avoir lieu dans les difcours d'un Concile.
Secondement , parce qu'il n'eft point vray que lorfque ces
Evêques affembiez à Con{1;antinople ,ont appelle l'Euchariflie
fnbftancede pain , ils ayent eu en vue de régler la foy des peu-
pies : c'eftune fuppofition entièrement faufîe : car il faut extré-
jx.e^nsnt diftingusr dans les Conciles les matières conteftées c\m
ok r Eucharijlie efi appellce pain ^ fvïn. 199
font le principal objet de leor dëcifion , & celles qui ne le font Ch. I.
pas;&dont ils traitent leu'ement en paflant. Ils parlent à la vé-
rité des premières avec plus de rigueur &:d'exa6litudej mais ils
parlent des autres avec plus de liberté,& feulement pour fe faire
entendre. Or ce que les Evêques difent de l'Euchariftie n'cft
que de ce fécond genre : car ils n'en parlentque paroccafion,
ii pour montrer que J. C. n'avoir point autorifé d'autre image
<jue celle qui eft dans l'Euchariftie. De forte que comme ce
font lesfuhftances du pain &; du vin qui y tiennent lieu d'miages
félon les Pères , quoiqu'elles ne fubfiftent que félon l'apparen-
ce , il n'eft pas étrange que c es Evêques en parlant de ce qui eft
image dans l'Euchariftie , nous ayent parlé de ces iubftances
que Dieu a choifies pour figurer fon corps 5: fon fang.
Ainlnl n'eft pointvray encore, comme l'ajoiite M. Claude,
'<que ces Evêques ayent appelle l'Euchariftie lubftance de pain
fans neceffité. La neceffité y eftoitau contraire toute évidence,
puifqu'il s'agiftoit de marquer ce qui y tient lieu d'image. Or
ce font les fubHances du pain & du vin félon les Pères, qui con-
tiennent ces rapports, quoiqu'elles ne fubfiftent dans iTucha-
riftie que félon l'apparence extérieures comme c'eftune vraye
colombe qui a rapport avec le S. Eforit , quc)ique la colombe
qui le figuroit dans le baptême de J. C. n'euft que l'apparence
d'une vraye colombe, & non la realité.
Après que M. Claude a combattu le principe en la manière
que nous avons vu, il attaque les exemples dont on s'eft^ic
fervi pour l'appuyer , & il prononce d'abord qu'ils font dé-
fectueux. Mais parce qu'il y en avoir quelques-uns qu'il ne
pouvoit éluder par fes défaites , il a pris le party de n'en point
parler. C'eft ainft qu'il s'eft démêlé de ce qu'on avoit cité
d'Horace : micat interomnes Juliumjtdtis , velut inter ignés
luna minores ^ & de ce que l'on avoit rapporté que l'Ecriture
appelle la lune Jaminare majr/s , en la comparant aux étoiles:
ce qui n'cft vray qu'en fuppofant qu'elle a parlé félonie rap-
port des fens. Ainfi quand il auroit raifon dans les répon-
les qu'il fait aux autres exemples , le principe dont il s'agit
ne laifTeroit pas d'eftre fuffiflimment autorifé par ceux auf-
quels il n'a pu répondre, & par plufieurs autres femblables qu'on
peut rapportera de l'Ecriture & du langage des hommes.
Car c'eft , comme nous avons dit, en fuivant l'apparence ex-
térieure que l'Ecriture donne le nom d'hommes aux Anges qui
loo LtV. IV. "Réponfe aux pa.jfa.geT
paroifTentfous la forme humaine. Ec c'eftcn luivantcette mê-
me apparence, que Virgile die que les terres &: les Villes s'éloi-
gnent de ceux qui navigant , terra;que urbefque rccedunt J & que.
les étoiles palîencd'un.iieuenun a.nitQ^JieUafacemducens multa.
cum luce cucurnt.
Mais il fe trouve de plus qu'il n'oppofe que de vaines chica-
neries aux exemples qu'il contefte. Le plus grand nombre dc-
ceuxqu'ona rapportez eftoit pris des Philofophes. Etvoicy ce.
qu il y répond. Il ne faut pas trouver étrange, fi les Philofophes
i' accommodent aux lan^aqes des autres hommes , quoiqu'il fait con~
traire à leur hypothefe. Car ils n'en font pas les maifiris. La ne-
cejjitè de s'entendre les uns les autres dans le commerce , la crainte
de pajfer pour extravagans , s'ils affccloient 7nn nouveau fiyle , les.
oblige de parler comme le monde parle , pui [qu'ils ne peuvent pas
faire que le monde de [apprenne fon langage , ^ qu'il s'accoutume,
à parler félon leurs o^iinio^s. Cela fait voir que leurs opinions ne\
rey^oient pas lorfque le lanq^ay: humain s' e fi ,eftabli ^Q- qu encore au^
jourd'huy elles ne font point populaires. Mais cela ne montre pas qu'il,
eu eufi efié de même dans la Rcli(gion Chrcftienne u l'égard de l'Eu-
chari/iie. Le langage de l' Eglife n'a pas efié trouvé tout fait, il a~
efié formé fur les fentimcns qu' on a commencé d' en avoir dés qu'on (t..
commencé d'en parler.
A entendre parler M' Claudé,irreml->!e que ce n'éft que par po-
litique que lesCopernicienSj les Carcheiîens & lesThomiftes^
s'abftiennent d'introduire leur langage dans la vie commun^, &
que s'ils o(oient,ils ne s'accommoderoieat jamais au langage po-
pulaire. Mais d'où vient doncqu'ils s'y accommode nr,non ieulc-
ment en traitant avec le commun du monde , mais aufli avec
ceux qui ne feroientpas incapables d'entendre cet autre langa-
ge Philofophiqus ? D'où vient qu'ils ne font point difficulté de;
îefervir de ces termes populaires , lors même qu'ils inftruifent
Jeurs diiciples ? D'où vient qu'ils s'en ferventen parlant avec-
eux-mêmes, &:qu'un Cartefien formant un difcours dans fon^
efprit, y employera aufllbien tous ces termes qui femblenr con-
traires à Tes rentimens,que dans les entreriens qu'il auroir avec
le commun du monde?Si M. Claude en doute, qu'il prenne la.
peine de confulter ceux qui font profeffion' de cette Philoro-
phicj&il trouvera qu'aucun n'a fongc à cette politique qu'iL
leur attribue ■> &, que l'impreflion des fens &: de la coutume eft;'.
£forteiur eux, qu'ils felervent du langage qui y eft conforme
£in$.
ok (T Euchmflie efl appelée pain (^<vin, loi
fans reflexion &: par le feul inftind de la nature. Ch. I.
» Mais c'cfi , cHc M. Claude, qu'ils thc font p.zs Auteurs de ccLtn-
%^i%f , & qu^ils Tonc trouvé tout fait. Il fe trompe. Quand ils
en ieroient Auteurs, ils n'en auroient pas fait un autre que ce-
iuy qu''ils ont trouvé tout formé, parceque c'cftceluy où la
nature même nous porte. Car il n'y a rien de plus naturel
<que d'éviter les longs circuits de paroles , &. de tendre ai.tant
■qu'on peut à la breveté. C'ert: ce qui fait qu'on ne s'amufe
point à appeller totijours les tableaux & les ftatuës des noms
<^ui marquent que ce ne font que des tableaux & des flarucs,
& qu'on leur donne le nom de leurs originaux mêmes. On ap-
pelle du nom de Celar & d'Alexandre les ftatuës de Ceiar ôc
îl'Alexandre, & ainfi des autres.
C'eft-là l'unique fondement de toutes les métaphores qui
comprennent une grande partie des expreffions des hommes.
Car la métaphore n'eft autre chofe qu'une comparaifon abre-
gée. Quand on apelle un hojnme lion, tygre, renard , on veut
dire qu'il efl: femblable à un lion , à un tygre 5i à un rena rd Et
<ette reiîèmblance luffit pour luy donner les nomsm.êmesde
ces animaux aufquels on veut dire qu'il rcfF.mhlc,
Mais (î une reflemblance fi éloignée dans laquelle & le fens
& la raifon trouvent tant de différences, fuffit néanmoins pour
attribuer le nom même d^une chofe à ce qui y a quelque rap-
port: 6c 11 c'eft Là le fondement de tant d'exi^reflions authori-
lées par l'ufage de. toutes les langues î combien une reiîèm-
blance parfaite, qui ne fe diflringue point du tout par le Icns,
cftelle plus capable de produire le même effet?
Il eft donc clair que ce qui paroift pain 6c ce qui ne fediflin-
gue point du pain par les fens, doit s'appeller pain dans le lan-
gage des hommes, parce que c'eft: un tour trop long 6c trop in-
commode de le nommer toujours, une chofe qui puroijî pain ^
qui a cjlé pain ^ conferve les apparences du pain. On ne parle de
cette manière que dans les Ecoles, ou dans des difcours faits
expréspour expliquer la nature de ces apparences. Mais quand
il ne s'agit pas de cela, on revient à la nature 6c au langage
commun,
Ainfî quand M. Claude entreprend de combatte cette ma-
xime, que les chofes fe nomment fouvent félon l'aprarence &
félon qu'elles paroiflènt au fens, il attaque en effet le princi-
pe le plus commun j le plus certain & le plus univerfel du lan-
Ce
lOi Liv. IV. Kéfonfè aux pa,jfa.ges
gage de tous les peuples, qui efl; celuy qui fercde fondement à
toutes les métaphores , n'y ayant point de différence entre les
exprefîions dont il s'agit , que nous avons appellces le langage
des rens,6c les métaphores ordinaires, finon qu'elles ont un
fondement plus réel j & qu'ainfi l'on y eft encore plus porté
qu'aux autres.
Si M. Claude trouve encore quelque difficulté dans ce que je
luy dis, qn'il fe fcrve de f'es propres lumières pour l'ëlaircir ,.
& qu'il rapporte à la Religion^ ce qu'il dit de ces nouvelles
Philofophios Ellen'apas faïc le langagedeshommcs, non plus
que la Philofophie, elle l'a trouvé tout formé. Elle a trouvé
l'imagination des hommes portée à joindre le nom dQ pain Se *
de vin à tout ce qui paroift pain Se vin. Elle n'a donc pas entre-
pris de changer cette mclination qui eftoit trop naturelle, èc
trop profondement gravée dans l'efprit. Elle a eu foiii feule-
ment d'empêcher que ce langage ne trompait perfonne, ocelle
y a réiiiïi en apprenant aux fidelles que ce qu'on appelle pain
n'eft pas du pain j mais le corpsdeJ.C. qu'il eft changé &tranC
élementé en ce divin Corps. Par ce moyen, ce langage cefle
d'cflre contraire à, la Religion, parce qu'il cefîè d'imprimer
de faufTes idées ^ tous ceux qui font perfuadez, de ces veritez:
comprenant enfuite fans peine, qu'on ne conferveau paincon-
facré le- nom âe pain , que pour le deiigner, ôc pour marquer
qu'il en confei^e les apparences.
C'efl ainfî que l'Ecriture en a ufé à l'égard du nom de Dieu:
que l'idolatrie des Payens avoit donné à tant de viles créatu-
res. Elle nous, avertit fouvent que ces chofes que les Payens
appel loient Dieu ne font pas Dieu. Quelle nation , dit Jeremie,
a jamais changé (es Dieux} Cependant ce ne font pas des DicuK,
Si MUTAviT gens Deosfuos ^ ^ certè ipfi non fiint Dit: L'homme^
dit- il encore , efl il capable de fe faire des Dieux ? Cç ne font donc
point des Dieux. 'H\3^Qi2J\'0 faciet fihi homo Deos : ^ ipfi non funt'
%ii 6 ^19 ^''- (^orinoi [funt donc ., dit ^OlYMC ^ par toutes ces chofes que cène font
point des Dieux , n'en ayez^aucunc crainte. Scient es itaqueex his
quia non funt DU ^ ne timeatis eos. Mais après leur avoir ainfi^
ofté l'être de Dieu, elle s'accommode enfiiire au langage des-
peuples pour les defîgner, quoyqu'elle ne prétende pas qu'orv
les doive jamais regarder comme de vrais Dieux.
C'eft en fufvant ce langage qu'elle fe ferr^fouvent des ter-
mes de Dieux eflrangers & de Dieux des nations. Cepea"«
Jerem. i, n.
oît tUMchmîiîe efl appeîîce pa,în (^ fvin. zoj
ézTit ce n'eftoient point ces mots qui oftoient d'eux - mêmes Ch. I.
la divinité à ces faux Dieux dans î'efprit des Juifs , mais la
connoiiTance qu'ils avoient ,>• que les Dieux des nations n'ef-
toient pas des Dieux, mais des démons. Quoniam Dij ^entium
damonia.
Quand les habirans de Sephamain brufloient leurs enfans à
Adramelec 6c Anamelcc Dieux de Sepharuain , ils les rccon-
noifloient par cette idolâtrie fîicrilege pour Dieux véritables ;
& c'eft ce que ce mot fignifioit en leur bouche. Quand Rapfa-
cez pour infulter aux Juifs leur difoit j Oàcfl le Dieu d' Amuth
^ d'Arphad , ^ le Dieu de Sepharuain , ont- ils délivré Samarie!
il parloit d'eux comme de petits Dieux qui n'eftoient pas ca-
pables de refifterà la puiflance des AfTyriens. Mais quand les
Prophètes en parloient, ils n'entendoient par ces mots que des
idoles à qui l'erreur 5c l'aveuglement des peuples avoit attri-
bué le nom de Dieux.
Les'mots de Deus ôc de D//, eftofent les mêmes dans la
bouche de ces idolâtres & de ces Prophètes ^ mais leurs diver-
fes créances en changeoient la fig,nification dans leur efprit. Et
afin qu'ils changeaflfent de fens dans celuy d'une même perlon-
nc , il falloit lentement qu'elle changeaft d'opinion. C'eit pro-
prement ce que la Religion Chreftienne a fait à l'égard du pain
& du vin qu'elle employé dans Ton facrifice. Les fens & la rai-
fon ont joint à ces mots l'idée d'un véritable pain &: d'un vé-
ritable vin , quand on les regarde dans leur eftat naturel. La
confecration en change la nature , mais elle n'en change point
les apparences.
La Religion inftruit donc les fidelles de cette vérité ; &c cet-
te inftruclion fuffit pour flure que les mots de pain Se de vin , qui
avant la confecration imprimoient l'idée d'un pain commun Se
d'un vin commun , n'impriment endiite que celle d'un pain ap-
parentée d'un vin apparent qui contiennent réellement le corps
dej. C. Il n'eft point neceffaire pour cela d'abolir les mots que
l'ufage a reçus, ny de faire cette violence à l'imagination. Il
fuffit d'éclairer I'efprit par la connoiiîànce de la vérité.
C'eft encore vainement que M. Claude chicane fur les exem-
ples que nous av(.n> tirez du mot de l>/em appliqué par l'Ecri-
ture aux ricliefles & aux plaifirs, & fur ceux de /^avavs , & de
fages èc de frudens appliquez à la fcience & à l'habileté des gens
du monde. Car il faut qu'il avoue que quand lesperfonnes
Ce ij
204 Liv. IV. T^ponfi aux pcLJfdges-
charnelles donnent aux nchelles le nom de biens, ils ne de-
meurent point d.ns cette idée, que ce font des biens en eux-mê-
mes & par leur narur.r,q-uoy qu'ils deviennent de grands maux-
à ceux qui en ulcnt mil.
Ils les re2:ardent comme des cbofes qui rendent heureux ceux
qui les polîcdcnt de quelque manière qu'ils en uft-nt. Et com-
me ceux qui ont ce fentiment compofcnt prelque le monde en-
tier ,8c par confcquent font maiOrres du la-- gage, ils n'attachent
point fnnplement à ce mot de ^/i« appliqué aux richelîes &
aux autres avantages du monde, certe idéefpirituelle qui peut
fubfiller avec la penfée que ces preten-dus biens font réellement
de très- grands maux à ceux qui les poflèdent ; ils y attachent
une idée groffiere d'un bonheur réel Se folidej qui fait regar-
der comme heureux tous ceux qui les ont.
Les Payens auffi en donnant à certaines perfonnes des noms
de fages,de prudens,de fi^avans, ne bornoient point ce qu'ils
enfermoient fous ces mots à certaines connoilîlince.siiumai-
nes , baffes & inutiles, qui peuvent compatir avec une fouve-
rain efolie, une fouveraine miprudence, 6c une fouveraine igno-
rance dans les chofes capitales 8c edentielles. Aind ce que
l'Ecriture entend par ces mots effc fort différent de ce qu'on y
entend en fuivant la cupidité, 8c les ténèbres de l'efprit humain.
Cependant elle ne lailîepas de les apphquer aux mêmes objets.
Elle fe contente donc que nous changions 8c que nous refor-
mions nos idées , fans vouloir que nous changions ces termes.
Et c'efl: tout ce qu'on a voulu prouver.
Mais ce n'efl pas là, dira M. Claude, emprunter le langa.
ge de la concupifcence. C'eft. fubftiruer un nouveau fens aux
mots dont la concupiscence abufe. C'eft en retrancher les fauf-
fes idées 8<: laifler les véritables. Les richelîès font des biens, non
en la manière que le conçoivent les perfonnes charnelles , mais
en la manière qu'on le doit concevoir félon la Religion. L'E-
criture bannit le premier de ces fens ; elle laifle le fécond. El-
le ne fe fcrt donc point du langage de la concupifcence j mais
du iîen qui efV véritable.
C'efl le fens de la réplique de M. Claude , qui fait voir qu'il
n'^entend point de quelle manière l'Ecriture corrige ces faufTes
idées. Pour luy aider donc à le concevoir ^ je luy demande , (î
iorfque S. Paul dit qu'/7^ -plu a Dieude fauvcr ceux qui croyent^
far la folie de la ■prédication y^\ lorfqu'il dit^a^ la folie de. Dieu
oé tEuchariJiie eji appelTce pain ^ vin. 105
( c'efl: la ci-adLidion de Genève ) cfiplusfa'ie que les hommes '■> ii Cn. I-
lors qu'il dit , qite ccltiy qui veut cjlre fige entre von^r^ devienne fou
four efire fige , il entend parler d'une véritable folie ;■ C'efl: ce
que M. Claude ne dira pas, & il avouera fans peine que S Paul
n'entend parler que d'une folie apparente , ik: de ce qui pal-e
pour folie au jugement des Payens.
Il en eftdemême desmotsde/r.'gf/T^&deyT/g^rj. Quand il les
attribue aux Payens, il n'entend de même q'une lageile appa-
rente, une (agelîc félon l'opinion du monde. Et c'cft pourquoy
comme d foutient que ce qu'il appelle du nom de iolic en Dieu,
eft plus fage que les hommes, il (oûtienc auffi que Dieu a con-
vaincu cette fagelTe du monde d'cftre une véritable folie.
La raifonen eft que les mots à^ folie & de ftgelfe fignitient
d'eux-mêmes une véritable folie & une véritable fagcllc. Mais
quand l'Ecriture les applique à des fujets où l'efprit- ne voit pas
qu'ils conviennent- félon cette idée, il conçoit par là qu'elle ne
les prend que pour en marquer l'apparence, ou plutoft ce qai
paroift tel au jugement de ceux dont elle parle Et c'cft ce que
nous avons appelle , fe fervir du langage de la concupifcence
en le corrigeant.
Il en eft de même des mots de biens que l'Ecriture applique
aux commoditczde la vie, 5c aux plaifirsdes gens du monde.
Le S Efprir a bien fçû qu'il eft naturel aux hommes de conce".
voir par ces- termes des biens qui rendent réellement heureux
ceux qui les pofledent, &; qui ne s'en tiennent point à cette idée
raifonnée de M. Claude. Notre imagination n'eft pas alfez fle-
xible pour (e défaire ainfi tout d'un coup des idées qu'elle a
accoutumé de joindre aux mots. Ainfi la manière donc on ré-
duit à la vérité ces fortes d'expreffions, c'eft de concevoir que
les richclTes ne font des biens félon ce fens commun & ordinai-
re qu'au jugement corrompu des hommes charnels, & de nier
qu'elles en méritent lenom. Cequi donne lieu à Salvien pour
fîgnifier que lesenfans héritent plûcoft des vices de leurs pères Ad Eccie^
que de leurs biens, de s'exprimer en ces termes: Antequam Cathoi. k
habeant illa qu.t falso dicmitur bona^ arite habent iliaque vcrè di~
cuntur mala. Il ne ditpoint que les richeilès font devrais biens
à un certain égard. \\À\t qu elles ne font point des biens & qu'on
les appelle fliulVement des biens ^ parce qu'elles ne renfermene
point ce que l'on entend par le mot de bien.
Saint Auguftindic dansle même fens, pour expliquer le nom
C c iif
1,11. c. 27.
zo6 Liv. T V. "Rcponfe auii p^^Jf^gcs
DeCiv Dei. (\q m,mjntona iniqiiitatts<^\Q. l'Etrirure donne aux ricliefles, que
\ti richefles même bien acquifci ne fonc pas vrayes , èc i-]u'elies
ne fonr prifcs pour riclieïïês que par !e dérèglement des hom-
mes. Etiamfi bcnc non tamcnvcns , fed qViM iniquitas putut.ejps
divitia.r.
Mais fur tout il cfl impoffible de prendre autrement le mot
de bien dans le paOage de S. Luc que l'on a cité , où Abraham
dit au mauvais riche : Mon fils fouvenez^vous que vous avez^ re-
cil vos biens en votre vie , (^ que le Lazare y a reçu des mauxj (^
maintenant il eficon foie dj" vous ejhsdans les tourmens^ car ce n'eft
pas avoir mérité d'eftre puny après cette vie que d'y avoir pcf.
ledédes richefîes&des plaifirs, en les regardant d'une manière
chreftienne &; fpirituclle pour des bénédictions de Dieu donc
on peut faire un ufage légitime, puifque le mauvais riche euft
pu répondre à Abraham qu'il avoitreçu luymêine dans fa vie
ces mêmes biens. Mais c'eft une raifon fuffiiante pour eftre
tourmenté juflement dans l'autre moncle que d'avoir joiii dans
fa vie des richefles & des plaifirs, en les regardant comme Ton
bonheur, fa félicité, & Ton repos. Etamfi il fautneceflàirement
que le mot de bona Toit pris en ce lieu félon l'idée qu'en avoic
le mauvais riche, &;non félon cette autre idie de M. Claude
particulière aux Chreftiens.
Mais quoy qu'il en foit, il efl: fort inutile à M. Claude de s'ar-
refter à chicaner (ur quelques exemples, y en ayant une infini-
té d'autres aufquels il ne fçauroit rien répondre, qui autorifent
fuffifamment ce qu'on appelle le lan^a^e des fcns -^ c'eft à dire
toutes les expreffionsoù l'on appelle les chofes du nom de cel-
les à qui elles reiïcmblent, foit imparfaitement, comme dans
'les métaphores ordinaires, fait parfaitement comme dans celles
.où la chofe dont on parle a tellement l'apparence d'une autre
que les fens ne l'en fçauroient difcerner Or comme la méta-
phore ne fçauroit eftre plus naturelle ny plus necefi^iire qu'elle
j'eft en ce dernier genre, il n'y en a point par confequent de
plus conforme aux règles du langage humain cc à la manière
dont Pefprit des hommes conçoit les chofes, que d'appeller
l'Euchariftie coiifacrée du nom de pain & de vin , de (ubftanccde
■pain ^ de vin, de bled^ de fromentfiLc. puifque non feulement elle
a efté faite de ces matières terreftres, maisqu'elleen conferve
F«ême tellement les apparences, que les fens ne l'en fçauroient
diftinguer. De force que l'on peut dire avec vérité quç ce fe-
ou t Ettcharijîie efla,ppe liée pain ^ 'v'm. toy
roit mettre les hommes dans une gêne infiipportable, ou plu- Ch. I*
toft leur rcnverler abfolument l'eipric, que de leur interdire en
ce cas ces lortes d'exprellions.
CHAPITRE II.
Ijfage pcrpettiel de ce langage dans les Autctirs les plus perfuadei^
de la ptcfence réelle ^ de la TravjJ'ubfiantiaPion^ depuis Bcrcyi-
gerjufjues À prefent. Règles pour juger feuremait c?i quel f(?h les
lucres s'en font fervis.
APre's ce que je viens de dire^ je ne croy pas qu'on foie
furpris de trouver ce langage pratiqué & authorifé par
tous ceux qui auront efté les plus grands défenfeurs de la pre-
fence réelle, & de la tranfTubftantiation , ny qu'on ait grand
égard aux deffaites des Miniftres quiprétendenr qu'ils nel'onc
lait que par politique ^ ou pour tourner à leurs fens fcs cxpref-
fîonsdes Pères qui s'en font fervis. Il n'eft pas beioin de poli-
tique pour (uivre l'infl:incl& la pente delà nature^ & de plus il
eft ridicule de joindre dans un deffein de politique toutes le
nations du monde pendant plufieurs fiecles, comme il faudroit
que les Miniftres filfent , puifqu'ils ne fçauroicnt defavoiier
que tous les Auteurs de l'Eglife Latine ne fe foient fervis de ces-
cxpreffions, auffi bien depuis Berenger, que devant Berenger,
& qu'elles ne foient de même communes à toutes les autres na-
tions, dans le temps même où l'onajuftifîé leur confentemenr
avec l'Eglite Romaine fur ces dogmes, d'une manière qui ne
foufFre point de repartie.
Si M. Claude en demande des preuves,on s'offre à luy en pro-
duire tant qu'il en voudra Mais pour ne charger pas inutile-
ment les Lecteurs, j'en propoferay feulement icy quelques uneS'
qui ne font que trop fuffiianres.
Le Cardinal Humberr, par exemple^ pouvoit-il mieux témoi-
gner combien il avoit peu d'apprehenfïon que ce langage ne
nuifift: à la vérité de la dodrine de la prefence réelle 6c de la
tranffubftantiation, qu'en parlant aux Grecs en ces termes icy.
l>^ous ferc2^à\l-\\ ^ obligez^de confejfer avec nous ^ cjue ce fut du
fain azyme cjue N offre Seigneur Je fus - Chrifl difiribua dans la
CèneauJ. premiers F ondateurs de l'Eglife. Eftoit-ce donc du pain<*
zo8 Liv. IV. Hcponfe aux pnjfages
çiue J. C- diflribua félon le lentimcnt d'Humhert&cIe tous les
Catholiques ? N on fans douce : Ce n'écoic qu'un pain apparenti
mais cela futlit pour l'appellcr pain.
"La foy de l'Auteur du Microlige ne peut eftre douteufe ,■&
par la confideration du temps où. il vivoic, qui c(l:oit celuy de
Grégoire VII. condamnaceur de Berenger, & par les témoi-
gnages qu'il-cn rend dans Ton Ouvrage, où i!.rappt)rte en ces ter-
mes la, créance de l'Eglile de Ion temps: N'eus ne doutons point
qfie l* ablation ou le pai^ ne foit changé au vray corps de J. C. ô" l^ vin
au fang du Seigneur. Oblatam (ïve pancm ^ inverum Chrifti cor-
pus, (îcut ér vinurn in fanguincm Doniini, converti non dubitamus.
C'eft ainfi qu'il parle quand il s'agit d'expliquer la Foy.
Mais quand il n'a point cette vûë , il revieiit au langage des
fens comme plus propre à fe faire entendre. Il traite dans le
chapitre 14. des lignes de Croix qui fe font fur les fymboles
avant la. confecracion j ôc pour les marquer diftinctement, il
dit : Q^e l'on fait le figne de la Croix fur f ablation. Oblatio fi-
gnanda.efi'i que l'on en fait une fur le pain S" »w^ autre fur le ca-
lice. Q17AP.TA. crjix fuper panem ^ (^^ quinta fuper calicem fepa-
ratim imponitur.
Après a.voir parlé dans le quinzième de la confecration 6c
des cérémonies qui fe pratiquent enfuite, il ne change point
de la-ngage ; mais il dit premièrement que le Preftre prend le
/-;//« entre fes mains, &; qu'il le bénit avant que de le remettre
fur i'^^Aitel : où il efl: clair que félon les termes , c'eft le pain
qu'il dit que le Preftre remet fur l'Autel. Cependant.ee n'eft
plus alors du pain, félon la créance de cet Auteur Car comme
v»> dit Eftienne Evoque d'Autun ," c'eft la même chofe félon l'ap-
»» parence que l'on élevé &; que l'onremer, maisil y a bien de la
" différence .entre ce qui paroift, & ce qui eft caché au dedans.
>s On élevé de l'autel ui> pain co.mmun 5 ôc on y remet la chair
immortelle de J. C.
Ij continue de parler de la même forte dans la fuite. On fait.,
dit iJ , la quatrième croix fur le pain d^ l^t cinquième fur le calice
fcparcmeni.
Il fe fert indifféremment dans les chapitres 17. & 18. de ces
expreOions.
Que le corps de J. C. eft rompu : yîfîn , dit-il , de nous rendre
favorable celuy dont nous voyons ^ notfS croyons que le corps efi
rompu dans ce myfierg.
Que
oà t Euchurijiie eB appcîlée pain (^ <vm. 109
Que l'on fait des portions du corps du Seigneur. Le Preftre, Ch. 1 1.
<âic-il , rompt en deux la pins grande partie de l'hofiie ^ pour faire
trois portions du corps du Seigneur.
Que l'hoflie eft rompue. Le Pre/re ^âit-il, remet l'hofiie fut
l'autel pour l'y rompre.
Que le pain cfi rompu ^ qu'il eft mis dans le calice. C'eft pour-
quoy le Chapitre 1 8 . porte pour titre : De la fraciion du pain eS
de la Communion. Et il corn mence par ces mots , Après que l'on a
mis le pain dans le calice.
Ainfî dans l'efprit de cet Auteur, pain , hoftie, corps de J. C.
fîgnifient la même chore& le même objet, quoy que fous dif-
férentes idées. Cet objet prefent eft appellera;/'.? de J. C. parce
qu'il l'eft véritablement. Il eft appelle hofie, parce que c'eft îa
viclime du facrifice. Il eft Appelle pain , parce qu'il eft pain à
nos fens. Ilfaudroit fe forcer pou» ufer d'un autre langage. Et fî
Dieu faifoit la grâce à M. Claude de le rendre Catholique, il
verroit qu'il ne pourroit pasfe paiferde s'exprimer de la forte,
à moins qu'il ne fift une attention continuelle pour s'en em-
pêcher.
Il n'y a pas plus de fu jet de douter de la créance de l'Auteur
du Traitté intitulé: Gemma animée, attribué à Honoré d'Au-
tun. Il ne faut pour s'en aiîvirer que fçavoir qu'il a écrit après
Berenger, & voir ce qu'il dit dans le Chapitre 105. du premier
livre, où il parle ainfi fur les paroles de la confecration : Comme
par les paroles du Seigneur le inonde a efiè créé de rien : ainfi par
ces paroles d.u Seigneur ^ ces matières font changées veritablerncnt ait
corps du Seigneur. Et dans le Chapitre 7. On appelle , dit il , my-
fiere quand on voit une chofe.^ ^ que\l'on en conçoit une autre. On
•voit les efpeces du pain ^ du vin: on y croit le corps (jr- le fang de
J. C.
Mais comme il parle quand il faut le langage de la foy,iI par-
le aufli celuy des fens quand il le faut.* comme quand il dit de 1. 1. c. s;.
l'Euchariie confacrée >. Le painquiefl mis dans le vin fignijîe que
l'ame de J. C. eft retournée dans [on corps.
r C'eft en fuivant le même inftinclde la nature qui porte à ces
exprenîons,que Hugues de S. Viclordit, que le Prêtre divife le in fpecui» cf ,
faint Pain en trois parties: Panem SacrofanHum partitur.
Que S Anfelme au traité de fermento Q- azymo , dit , que l'on
facrifie ^ le pain ax^yync é^ le pain levé : Et que l'Auteur du
Commentaire fur S. Paul qui luy eft attribué, appelle plufieurs
fois l'Euchariftiedumotde/'rf;», Dd
iio Liv. IV. Képonfe aux pajfages
In CIO. & II. Mais il fe ferc de ce même terme d'une manière fort remar-
•^' ■ '' quable dans ce pafîage icy : Zcs jujhs ont 7nangé dans la manne la
même viande du, corps de f. C. que nous man'icons dans le famv
E A N D E M efcam corporis Chrifit quam nos in pane manducamus ^.,
îpj! manducavcrtintinmanna. Carquoyque le mot de manne Ci.
gniiieune manne véritable, le mot de pain ne fignifîe néan-
moins qu'un pain apparent. Et quoyque le mot de corps de}. C^
mangé par les Anciens dans la manne ne fignific le corps de
J. C.que comme objet de lafoyde même terme, dans le fécond
membre, figmfie ce même corps comme réellement prefenc
fous les apparences du pain. Et tout cela eftoit expliqué fans-
peine par la connoiilance de la vérité du myftcre , que cet Au-
teur fuppofe dans Tes Lecteurs.
Comme ces expreflions naiiîênr de la manière naturelle,
dont nous concevons le myftere & de l'inclination commune
à tous les hommes de defigncr les chofes, parce qu'elles pa-
roUTent, elles fe trouvent auffidan-J l'ufage commun de toutes^
les nations, fans qu'elles falîènt nulle part aucune peine à ceux
qui font le plus perfuadcz de la tranflubflantiation.
Ces Grecs que M, Claude appelle lacinifez , parce qu'il ne"
fcauroit nier qu'ils ne fadcnt une profefTîon publique de cette
doctrine, ne font aucune difKculté de s'en fervir. Et il y a en-
tr'autres plufîeurs exemples dans ce que Ton a rapporté d'Aga-
pius. Quand volts èpni feriez^, dit-il cnunendroit^ tout ce que l' art
des hommes peitt inventer^ vous nauynentcriez^en rien la grandeur
Q^ le prix infini de ce pain. Ce pain\ dit- il en- un autre , efi le my.
fi ère de l'union S" de la charité., S'^ c'cfipar fin moyen que les fi de lie s
fiont rendus participans d'une même nourriture . Et en un autre lieu,,
Ce pain , dit-il , efi la nourriture des Saints , la médecine des ma-
lades , la vie des vivans , la refiurrctiton des morts. C'efi ce pain qui
appaifi la révolte delà chair., (^ qui fortifie nofire ame parla pieté y
qui nous purifie de nos péchez^ qui augmente les vertus..
Ligardius Archevêque de Gaza contre qui M. Claude a té-
moigné tant de malignité, parce qu'il a rendu un témoignage
ii formel de la créance des Grecs qu'il n'a pu- l'éluder d'une
autre forte 5 ne laiflè pas de dire , que le corps de J. C. efi dans le
pain (^ dans le vin comme dans un Sacrement 5 In pane ^ in vino
tanquam inSacramento ■., Sc qu'il faut adorer Dieu dans le pain
de l'Euchariftie; adorandus Deus in pane Eucharifii,-e.
Grégoire Prêtre ôc Religieux Protorincelle de l'Eglife de
oïl tEucha,rifiie efl appUéepain ^ (vin. 2.11
Conftantinople, dans le Caceciiifme qu'il a dreiré pour Tin- Ch, II.
ftrudion des Grecs,approuvé par le Théologien de cette Eglife,
^Sc qui n'a jamais eftc combattu de perfonnCj comme il paroiftra
par les relations imprimées à la lin de ce volume^ ne fefert pas
îeulement de ce langage, en diiant c^uq d.ms le pain changé fc
trouvent trois chofcs ^ Zc pain qui tfi lu chair du Sauveur (^c. mais
il en fait une remarque cxpreire , &C en rend la raifon. C'cfi pcur-
quoy ^ dit - il , même après le changement le corps de I. C. s'appelle
pain, k caufe des accidcns du pain qui paroi jjcnt dans ce corps.
Les Grecs un peu plus anciens, mais qui ne lont pas moins
formels pour la préfence réelle & la tranirubftantiation que les
nouveaux, fe font fcrvis des mêmes termes aum bien qu'eux.
Simeon Archevêque deThclîalonique dans un traire qu'il a fait
du temple & de la Mclle, imprimé en partie en latin dans la bi-
blioteque des Pères, 6c depuis entier en Grec dans PEuchologue coat. p. n-.
du PereGoar, après avoir dit dés le commencement, que I. C.
eftant Dieu tout-pmjjant , change le pain & le vin en [on corps ^ en P- -'-7.
fonfang. Et qu'après lu eonfecration l' Eve (que voit devant luy I. C.
vivant qui efl le pain véritable 3 ne lailfe pas de parler de l'Eu-
•chariftie comme fi elle eftoitdu pain. Le Pre/hr , dit-il, efiant
preji de lever le vain, dr de le divifer en parties, il faut qu'il foit
revêtu de tous les ornemens facrez^d^ fa dignité. S'en efiant donc re.
vètu,S'^ ayant élevé le pain ^c. L'élévation du pain, dit- il encore,
marque l'élévation de J. C. fur la croix 5 (^ enfui te il divife le pain
tn quatre parti-es O" l^s difpofe en forme de croix. Et dans la page
fuivante. L' Evèque , dit-il , divifanl le pain en plufeurs parties
imite le facnficede J. C Et un peu après : ilcommu7Uque le premier
^u pain (^participe au terrible calice.
C'eft en fui vant cet inftincl de la nature qui nous porte à ces
cxpreflions que ny les Grecs ni les anciens Auteurs latins, quoy
<]u'ils ayentvêcu depuis Berenger , n'ont tait aucune difficulté
d'admettre cette propofitiom Le pain cft le corps de I. C. parce
c^u'ils ont crû que le mot à^ pain x\c fignitioit autre chofe que
l'objet vifible qui paroiftdu pain. C'efi une propofïtion véritable,
-dit Thomas Waldenfis, de dire que le pain eft le corps de L. C. p-75.
Le pain que nous divifons a plufieurs, dit l'Auteur du commen- ^'^ ^°''" ^'^°'
tzi^e 0Xiv\h\xék^. kn(^\m<t ,ei fie vry corps du Seiqneur. , , ^
Le pain, dit Simeon de Theiîalomque , efi le corps même de nuiVa,
lefusChrifi.
Le S. pain, dit Grégoire Procofincelle de Conûantinople, efi ^'^ Catech,
Ja chair de I. C, X) d ij
2Î1 Liv. IV. Képonfe aux pajfages
Metroplun ze païu facrtfiè , dit Metrophane, eft véritablement le corps
\°^l;^'-'-^" deJ.C.
Ze pain é^ le vin propofez^fur 1^ Autel , dit Jeremie Patriarche
ia 1. Kefpon. de Conftantinople , ne font pas des types du corps ^ du fang de
cap. de Sacr. j ^ ^^^-^ ^^ ^^^^^ ^^^^^^^ ^^ j q ^^^•^^_
Enfin c'eft en fuivant la même pente que Pafchafe , comme
on l'a remarqué ailleurs, dit que ce myfîere fe célèbre dans lepainr
Pafc. de cerp. MySTERIUM HOC IN PANE CELEBRATUR; qu'il cjî Célébré danS
e lo!!^ °'"' l-^ mbnc fuhftance : & qu'aprcs avoir dit que Melchifedech offrait
du pain d^ du vin , il dit, que nofire véritable Roy de paix ^ nofire
vray P ontife a offert LES MEMES choses. Et c'eft en fuivanc
Hincm. opuf. auffi Cette inclination naturelle que Hincraar àït^que I.C.nous
*. ad Carol. a donne le nouveau teflament dans le pain (^ le vin mêlé d'eau, SC
'■'"* que Walfridus Strabo qui nous airure que le pain efi véritable-
ment le corps de I. C. nous dit auiîi , que I. C. donna à [es difciplef
le Sacrement de fon corps (^dc fonfangdans la fub fiance du pain ^
du vin , & enfin c'eft en ce fens qu'Amalarius déclare , que le-
JPreJîre immole le pain O' le vin.
Il faudroit eftre bien déraifonnable après avoir conçu par la
raifon , combien la nature nous porte à ces exprefiions que nous
avons appellëes le langage des fens , & avoir vu l'effet de cet
inilinifl dans tous les Auteurs qui ont eu la doctrine de la rranf-
fubftantiation 6i de la prefence réelle le plus imprimée dans
i'efprit, pour prétendre encore en abufer, quand on les trouve
dans les Pères, 5c pour les faire fervir de preuves qu'ils n'ont pas
efté perfuadez de ces dogmes.
Mais le bon fens nous mené plus loin, &: après nous avoir
convaincusque d'appeller l'Euchariftie àt% noms de pain & de
vin , defubfiance de pain (^ de vin, &: autres termes Tynonymes,
eft un langage commun à ceux qui croyent la tranfilibftantia-
tion &: à ceux qui ne la croyent pas, il nous apprend à difcerner
dans l'ufage, quelle eft la créance de ceux qui s'en fervent.
Carquoyquece langage doive eftre commun anxuns & aux
autres, il doit néanmoins eftre joint à des circonftances diflTe-
rentes dans les uns & dans les autres.
I. Si les Pères ont cnî que l'Euchariftie eftoit réellement du
pain & du vin, ils n'ont jamais dû fe mettre en peine d'éclaircir
ces expreflîons, où ils l'appellent /-^/^ &:w'«, ny s'efforcer de
nous empêcher de croire que c'eft du pain ôc du vin.
2, lis n'ont point dû nous rien dire en appellant l'Eucha-
où r Eucharifiie efl appellée puin ^ qj'in. ziz
riftie faïn èc vin , qui nous dût faire juger qu'elle n'eft pas du
pain 6c du vin.
3. Non feulement ils ne l'ont pas dû faire dans le lieu même
où ils employoïent ces termes, mais ils ne l'ont dû faire en au-
cun lieu.
4. Ils ont dû lever la difficulté des termes qui nous pou-
voient faire juger que ce n'étoit pas du pain & du vin.
Mais on doit croire au contraire qu'ils n'ont appelle l'Ea-
chariftie pain &: vm , que pour deiîgner feulement ce qu'elle
paroifl, s'ils nous ont avertis quelquefois que ce n'eft pas aa
pain £c du vin. i
Sienappellant l'Euchariftie/'^/K&w;/, ils nous ont dit plu-
iîeurs choies qui donnent lieu de conclure que ce n'eft pas du
pain & du vin.
Si ne l'ayant pas fait en ces lieux- là mêmes ils l'ont fait en
d'autres.
S'ils n'ont jamais formé de difficulté fur les expreffions qui
marquoient que n'eft pas du pain &: du vin, ni déclare qu'ils ne
les entendoient pas littéralement.
C'eftparces difïerenres circonflances qu'on peut diflinguer
le fens auquel les Pères fe lont fervis de ces termes. C'ellpar là
qu'ils peuvent devenir àts preuves de leurs ientimens. Us ne
prouvent rien par eux mêmes 5 puifque quelque créance qu'il
ayent eue dans l'efprit, il efl; certain qu'ils ont du s'en fervir
fouvent ; mais ils prouvent avec ces circonfliances , & ils font
voir de quel cofté. les Pères font. Nous ne ferions pas obligez de
montrer icy qu^ils s'en font fervis avec les circonftances qui les
déterminent au fens catholique, puifque nous l'avons déjà fait
dans le fécond tome de laPerpetuité,où nous avons montré que
les Pères ont reconnu un changement réel &c fubftantiel dans
l'Euchariftie, &; qu'ils ont enfeigné dans- un fens propre, fimple
& naturel, fans figure 6c fans métaphore, qu'elle efl:oit le corps
même de J. C. Car ces preuves faifant voir que les Pères ont die
quantité de chofes contraires à la créance que l'Euchariftie foiî
effectivement du pain êc du vin , fuffilent pour déterminer ces
termes à n'en fignifier que l'apparence. Il ne fera pas néanmoins
inutile de faire voir en particulier qu'ils s'en font fervis avec
toutes les circonfcances qui peuvent marquer qu'ils ne croïoiene
pas que l'Euchariftie fuft réellement du pain,éc qu'ils n'ont obu
fervé aucune des chofes qui auroient pu faire croire le contraire,
Dd iij
114 1-Iv. IV. Képonfs aux pajfcges
CHAPITRE ï 1 1.
Q^e les Pcrts fc funt fcrvis de ce lanq^<^ige des fcns az'ec toutes les
circoiifiances qui le déterminent au fcns Catholique . Première cir-
xonjlance. ^Rcponfe a ce que les Miniftres objetient que les Perei
difcnt que l' Eucharijlie ricji pay un pain commun.,
LA principale êi la plus decifive des circondances que nous
venons de marquer, efi: que lesPeres qui appellent l'Eu-
chariftie pain^ nous ayenc averris quelquefois que ce que nous
voyons n'eft pas du pain , &; qu'il ne s'en faut pas rapporter au
gouft, ni aux autres iens.
S'ils avoient crii que ce fik du pain, cela ne 'Te devroit Ja-
mais trouver dans leurs écrits, mais il ne senfuivroic pas qu'ils
î'eufienL cru quand ils ne l'auroientpis fait, y ayant beaucoup
d'autres manières d'exprimer cette même vérité. Il fuffiroic
bien pour nous faire entendre que l'Euchariftie n'eft plus du
pain qu'ils nous ayent déclaré polîîtivement qu'elle eft le corps
dej. C. &:que le pain eft changé en celaint corps ^ mais il n'y
aura pas lieu de douter de leurs fentimens fur ce point, fi l'on
y trouve une decifion fi précife. Et c'eft néanmoins ce que l'on
y voit en plufieurs endroits.
-Catech. j. S. Cyrille dc Jerufalem cft du nombre de ceux qui appellent
Mj'it. l'Euchariûie ///M. Car quand il dit que le pain de 1 Eucha-
riftie eft le corps de J. C. ildefigne l'Euchariftie par le mot de
/'.'?/'«, & il fe fert encore de ce même mot plus exprelTément,
Cjtech. ^, lorfqu'il dit que ce pain ne defcend point dans le ventre, qu'il
■■'' '^' " „ ne va point au lieu des excremens , mais qu'il ell: diflnbué ea
' ,„ tout rhomme pour l'utilité de i'ame & du corps.
Voyons donc s'il s'enfuit que cet Auteur croyeque TEucha-
,€atec!i.4. riflie eft du pain, parce qu'il l'appelle ^^m. Il faut croire^ dit-
il, fermement que le pain que l'on voit n'eft pas du pain , quoy que U
^ottji le juge tel , mais le corps de J.C. & que le vin que l'on voie
n'eft pa-s du vin , quoy que le gouft le iule , mais le fang de Je-
jus Chrift.
Voilà la difficulté formée & réfoluë en la manière qu'elle le
.•devroit eflre par un homme perfuadé deiaprefence réelle & de
h. tranllubllantiation. Voilà ce qu'on ne devroit point trouver
ou ï Euchxriflie efl appellée pain ^ fvtn. 2.Î5
dans les Pères s'ils n'avoienteftë perfuadez de ces dogmes, &: Ch. III4
qui dtinnenc heu de conclure qu'il ne s'enfuie pas de ce que fé-
lon le rapport des {tx\s ils appellent l'Euchariftie/'^ww , qu'ils ne
creuflènc en même temps qu'elle n'eft pas du pain félon l'in-
ftruction de la foy.
C'efl: encore une déclaration exprene,qne ce que nous voyons
dans l'Euchanftie n'eft pas du pain , que ce que S. Ambroi-
fe dit dans le livre qu'il a fait pour les nouveaux baptifez : Vous'
vie dircz^peut-efire 5 /^ vcy autre chofe l comment me dites-vous que
j.e recoy le corpsdej. C? // faut donc que je vous prouve cette venté.
De combien d'exemples nous pouvons-nous fervir pour l'établir? Je
veux donc faire voir que ce n'e/i point ce que la iiaturc a formé, mais
ee que la benediHion a confacré.
Car il eft clair que dans ce pafîàge le fens de cette objecliom-
"je voy autre chofe h comment me dites- vous que je re(^oy le corps de
y. c ? eft. Je voy du pain; comment me dites-vous que je re-
eoy le corps de j-. C ? & qu'ainfi l'objeclion fuppofe que ce fonc
deux choies incompatibles, que l'on voye du pain,c'eft à dire
que l'objet que l'on voit foit du pain , ù. qu'ilfoit le corps de
Si S. An^broife avoit cfté Calvinifte , il auroir avoué la
première paitie de l'objrtiion ., £c auroit nié la féconde. C'eft à-
dire qu'il auroit dit : Il eft vray que vous voyez du pain , que
vous recevez du pain ; mais il n'eft pas vray aufîî que vous re-
ceviez le corps de J. C. vous recevez feulement fâ figure & fb*
vertu.
S'il avoit efté Luthérien, il auroit avoiié l'une & l'autre j &
û auroit dit : Il eft vray que vous voyez du pain : mais vous re-
cevez auffi le corps de J.C. Mais s'il a efté Catholique, il a du
nier que ce que l'on voit fuft du pain j & a dà ioutenir, que
cet objet eftoit le corps de ]. C. Et c'eft proprement ce qu'il a
fait, & ce qui eft enfermé dans ces paroles : Je veux , dit il ,
faire voir que ce n'cfi point ce que la nature a formée mais ce que la
bénédiction a confacré , <c^ que la force de la bénédiction ejl plus
grande que celle de la nature.
Car le fens de ces paroles eft , que ce n'eft point du pain que
la nature a formé, mais le corps de J. C. que la bénédiction a
confacré.
On peut trouver une femblable déclaration , dans cepafîage
d£ l'âuteur du livre des Sacremens : Avant la confecration c'e^-
ii6 Liv. IV. Répofîfè aux pa.[fiiges
du pain ; après quon a prononce les paroles de 7. C'. lefi le corps de
J. C. Car c'eft la même cho(e que s'il difoit : Avant la confe-
cration c'eftdu pain ^ mais ce n'en efl: plus après la confecra-
rion. Et quand il dit de m-cme: Avant qu'on pronocc les paroles
de J. C. £ejl un calice plein d'eau d^ de vin , mais quand les pa.
rôles de J. C. ont fait leur effet , le fa7ig qui a racheté le peuple e^
■produit dans le calice. Ceft comme s'il difoit J avant la confe-
cration le calice eft plein de vin, mais après la confecration il
ne contient plus devin.
Car il efl clair qu'il reprcfente dans ces lieux eflre pain ^
eflre corps de J. C. cftre vin & cfrc fang de J. C. comme deux pro-
poficions incompatibles , dont l'une exclut l'autre. Si c'eft du
pain avant la coui'ecration , ce n'eft donc pas le corps J. C.
Si c'efl: le corps de C. J. C. après la confecration , ce n'efl donc
pas du pain.
Je n'ay pas befoin de m'arrêrer icy à réfuter les vaines chi-
caneries, par lefquelles les Miniftres tournent ces paflàgesà
leurs (ens chimcriqaes de tîgure& de vertu, parce qu'on l'a fait
pleinement dans le fécond Tome. Et ainfi nous avons droit
d'en tirer maintenant les conclufions qu'ils nous fournilîènc
d'eux mêmesqui font que ceque les Pères appellent quelque-
fois pajn dans l'Euchariftie n'eft pas néanmoins du pain que la
nature a formé, mais le corps de J. C.que la confecration a
produit.
Saint Cliryfoftome auflî bien que les autres Pères appellent
1 Euchariftie du mot de pain & devin., comme quand il àitqae
Inpfalm.jio, Melchifcdech a au^ offert du pain (f;- du vin^ c'eft- à- dire qu'il en a
offert comme J. C. Si quand il appelle vin & fruit de vi^ne ce
Hom. S;, in quc J- C. donna à fes difciplesdans la dernière Cène. Maisde-
Matth. mandez luy exprelTément s'il faut croire que l'Euchariftie foit
du pain & du vin? &il répondra en termes précis : Ne regarde!^
Hom. de Eu- p^rf cela commc du pain. Ne croyez^pa^ que ce foit du vin. Car ces
chofes ne vont pas au lieu des excremens comme les antres viandes.
Je fçay bien que le Miniftre Aubertin s'infcrit en faux con-
tre cette trjlduclioD : Neregardcz^pas cela comme du pain, dC qu'il
prouve que cette exprefîion (mIS" oV/ ctp Vo/ t^\ 7J^»j" , ne quod
■panis efi afficias 5 peut fignifier 5 Ne faites pas reflexion que c'efl
du pain , èc r;ue fxint CKryfoftome s'en fert quelquefois , non
pour nier ce qui eft cffedivement , mais pour empêcher que
Ton n'y fafle réflexion. Comme quand ce même Saint dit en un
endroic
ciiar. in.Eu-
cxa.
ou tEucharifiie efi appcllce pain ^ njin, 217
endroit, ix-^l ^^(iç^X^ 0 XÇoi'oî '«"^is , c'eft-d-dire; Ne regar- Ch. III.
dezpas que le temps efl: court, il ne veut pas dire que le temps
ne foit pas court 3 il veut feulement qu'on n'y failè point re-
flexion.
Mais ce Miniflre auroit dû voir qu'il ne prouve qu'une partie
de ce qu'il devroit prouver ,&; que ce qu'il ne prouve point,
détruit ce qu'il prouve.
Car il faut remarquer que Saint Chryfoflomene dit pas feu-
lement , nequodfanis fit afpicia-s ^ mais qu'il dit de plus , nequod
vinumfit arbitreris. OrAubertin fait bien voir que la première
partie de ce paiTage peut fignifier , ne faites pas réflexion que
c efi du paini mais il ne prouve point, & ne fçauroit prouver
que ces paroles , yin^ oti uvoi 'éii vo/tiVn/ , puiiîènt fignifier autre
chofe , finon , ne croyez pas que ce foit du vin 5 nequodvinum
fit arbitreris. Il ne produit aucun exemple où ces paroles foienc
prifes en un autre fens. KO;UiTo , fignifie croire , penfer, juger,
& non faire reflexion. Si donc la première partie efi équivo-
que , la féconde détermine. Et comme elle lignifie clairement
qu'il ne faut pas croire que ce qui efi: dans le calice foit du vin,
elle oblige d'entendre la première dans ce lens ici , ne regardez^
■pa^s ceci comme du pain.
La réponle ordinaire qu'Aubertin fait à tous ces pafl!ages j
où les Pères nient abfolument que l'Euchariflie foit du pain, efl:
qu'ils entendent par là qu'elle n'efl pas du pain commun. Sur
quoy il a accoutumé de cirer quelques paiTages de faint Juflin , -
defaint Irenée&de faint Cyrille de Jerufalem , qui difentque
l'Euchariflrie n'efl: pas du pain commun. Ze pain ^^ le vin de ^^^r^^' *'
l'Euchariflie ^ ait faint Cyrille, devant la flacrée invacation de
l'adorable Trinité efloient de fimple pain ^ de fimple vinî mais
après cette invocation c'efl le corps de J.C ^ le vin efl le fang de
J.C Et ailleurs , comme le pain de l'Euchariflie après l'invoca.
tion du S. Efprit rH efl plus du pain commun , mais le corps de J. C. de
même le faint *• hrefme après l'invocation n'efl plus une huile fimple
^ commune ^mais le don du S- Efprit. D'où il conclut que puif..
que les Pères nous aflTurent que ce n'efl: pas du pain commun
6c du vin commun , ils entendent donc que c'efl: du pain 6c^
du vin.
Il appuyé cette confequencede quelques paflages des Pè-
res, qui parlant de l'eau du Baptême, diient, qu'ilnefaut pa^
la regarder comme de l'eau commune: D'où tant s'en faut , dit-
Ee
Car. j. Mj-ili
ilS Lîv. ly, Rcponfèaux pitlpiges
il , qu'on puifle conclure qu'elle n'eft pas de l'eau qu'il en faut
conclure au contraire que c'eftj'de l'eau.
Mais avec tout cela cette réponfe n'eft dans le fond qu'un fo-
phifme, comme il eft aile de le faire voir. Car cette exprel'-
iîon 5 Ce rCeJl pas du pain co7nmun ^ cftant compofée de deux
idées, elle peut eftre aulfi confiderée comme contraire à deux
propoficions , dont l'une eft ; Ce/I du paiti 5 l'autre : Ce pain eji
commun. En un mot , elle peut nier ou la nature du pain , ou la
qualité de pain commun.
Par exemple quand Ligaridius Archevêque de Gaza dit de
l'Euchariftie^i^fff ce rUcJlpafun^ain commun co7nmc ccltty qu'on man-
iée, ny un vin commun comme ccluj' qu'on boit , il entend que ce n'eft
point du tout du pain. Et au contraire quand les Percs nous
difent que l'eau du Baptême n'eft pas de l'eau commune, ils
entendent que c'eft de l'eau. On ne fçauroit donc juger pre-
cifément par l'expreflion mcine, laquelle de ces deux propo-
rtions on prétend nier. Mais on le juge par la fuite, & par
l'adverfativc que l'on y ajoute. Car fi elle ne détruit que la
qualité, on juge qu'il n'y a que la qualité niée. Et fi elle dé-
truit la fubftance même^on juge que la fobftance même eft niée.
Ainfi, parce que la raifon pour laquelle les Pères nient que
l'eau du Baptême, ou l'huile de la Confirmation, foient de
l'eau ou de l'huile communes, & qu'ils ont une eiîîcace fùrna-
Curelle,on a raifon de conclure que c'eft ncanmoinsde l'eau &
de l'huile en fubftance 5 parce que l'efficace n'exclut que la qua-
lité d'eau commune, 6c d'huile commune, & non la fubftan-
ce même.
Mais il n'en eft pas ainfi à l'égard de l'Euchariftie. Qiiand les
Pères n®us difent ,que ce n'cjl pas- du pain commun , (^ de Jîmple
vin , cela peut eftre équivoque. Mais quand ils ajoutent comme
ils font, mais le corps de J. C. l'équivoque eft levée. Car cette
addition détruit non la fimple qualité de pain commun & d'eau
commune , mais auiïi l'eftre même de pain & de vin. Et c'eft
pourquoy,au lieu que les Pères qui nous difent que l'eau du Bap-
tême n'eft pas de l'eau commune , ne nous difent jamais que
ce n'eft pas de l'eau, les Pères mêmes qui nous difent que ce
n'eft pas du pain commun & de fimple vin , nous difent abfo-
lument Scfans addition que ce n'eft pas du pain ny du vin.
où ÏEuchuriflie efi appellée pain ^ ^oîn. i\()
Ch. IV.
C H AP ITRE I V.
Autrei circonfiances qui déterminent les mots de pain ^ de vin
à ne Jîyiificr qu'un pain d^ un vin apparent. Comparai fon
de l'Eucharifiie avec le Sacrifice de Melchifedech.
CEt T E première circonftance qui détermine le fens des
mots de pain & de vin , quand les Pères les appliquent à
l'Eucharifl:ie,nous donnant déjà lieu de conclure abfolumenc
qu'ils ne les ont pu entendre que dans le Tens Catholique , elle
fera encore infiniment fortifiée par les autres que nous avons
remarquées.
La féconde de celles que nous devons confîderer, eft fi les
Pères enappellant l'Euchariftic/'i^/;? ôcx'/'w, ne nous ont point
dit plufieurschofes qui foient incompatibles avec les idées d'un
pain réel 2c d'un vin effedif. Ils ne l'ont pomt dû faire, s'ils les
ont entendus au fens des Calviniftes ^ Scils l'ont dû faire , s'ils
les ont pris au fens des Catholiques. Or nous ne femmes pas
obligez de prouver ici qu'ils l'ont fait, puifque tout ce que nous
avons dit du fentiment des Pères dans le fécond volume , en
contient la preuve. Car quand nous avons montré que félon les
Pères , le pain confacré étoit le corps même , le corps propre ,
Je corps véritable de J. C. &que nous avons refuté les fens de
figure &de vertu aufquels les Miniftres veulent détourner
leurs paroles, nous avons fait voir que félon les Pères l'Eucha-
riftie n'eft pas du pain 6c du vin , puifqu'eftre du pain &; du vin
enfubftance, &: eflre le corps même de J.C. font des chofes
incompatibles, & félon la vérité, £c félon le fentiment des Cal-
viniftes , & félon celuy des Pères.
Nous montrerons donc feulement ici que les Pères en
ont ufé de la forte dans les lieux mêmes ou ils appelloienc
l'Euchariftie du nom de pain & de vin : ce qui fuffit pour faire
voir qu'il n'étoit pas difficile aux Fidelles de prendre ces ter-
mes dans un fens conforme à la doélrine des Catholi-
ques.
S. Juftin par exemple eft un de ceux qui appellent le plus pre.
cifément l'Euchariftie confacrée des noms àepain & de vin jnon.
feulement dans fon dialogue contre Triphon , mais auffi dans
E e i j
110 Liv. IV. Képoufè aux p.ijfdges
ce lieu célèbre de fa féconde Apologie,oùilexplique la créance
des Chrétiens fur ce Myflere. Car il y die exprclTèmenc, ^?/^
ceux que l'on appelle Diacres parmi eux , donnent ù chacun de ceux
qui font prefens quand on célèbre , du pain (^ du vin eonfacrez^ Mais
Ç\ vous demandez au même S. Juftin ce qu'il faut croire de ce
pain &dece vin confacrez, il vous dira un peu après, que de la
même manière que J. C. noftre Sauveur qui a c (le fait chair par le
Verbe de Dieu , s'ej} revêtu de chair O- de fan^ pournojlre falut ■>
ainfi nous avons appris que cette viande & ee breuvage, qui parle
changement quils reçoivent en nojlre corps nourriffcntnojîie chair ^
ont la chair CT le fmg de ce ynumc Je fus incarne. .
Saint Gaudence appelle rEuchariftie, comme le remarque
Awhtxùnjes myfteres du pain 0 du vin. Maisil dit.dans le mênie
Traité, quej. C. nous fait connoiftrc que le vin que l'on offre en fi-
gure delà paljîoneft fon fang. Il die que le Créateur & le Seigneur
de toutes chofes qui produit le pain de la terre .,fait du pain fonpro.
fre corps .^parce qu'il le peut ^^ l' a pro^nis . Il dit qu'il ne faut point
douter que ce ne foitle corps de 7. C. parce que la vérité cfi incapable
de menfonge , ^ qu'il faut confu?ner par l'ardeur de la foy les doutes
qui pourraient re/rer fur ce point.
S. Chryfoftome, pour réfuter Tlierefie desAquariens , nous
afliireque lorlque Jesus-Chi<.ist donna les myfteres à fcs Apô-
tres , il leur donna du vin. Mais pour s'aifurer qu'il n'entend au-
tre choie par là, finon qu'il fe fcrvit de vin fie non d'eau dans les
myfteres , &: qu'il ne prétend nullement expliquer en cet en-
droit ce que J. C. fit de ce vin , il ne faut que faire réflexion que
ce lieu efl: pris de l'Homélie 83. fur S. Mathieu, c'eft à-dire d'un
difcours où la doélrine de la prclence réelle fie de la tranfub-
ftantiation eft très clairement filtres fortement exprimée, fie
qui contient toutes les propontions fuivantes -, Que ce quelafoy
nous en feigne de ce Myjlerefr,ihle contraire a la raifon (y- au fens.
Que ce qu'elle mus en feigne , efl que c'cjl le corps de J. C. Ô'
qu'il le faut croire.
Que nous avons dans ce J\/fyfcre plus que les vetemens de J. C.
•puifquc nous l'y touchons Q;- nous l'y mangeons luy. même.
Que J. C, s'y donne luy- ?nènic.
Que nou^ y fommes mclez^avec J. C.
Que J. C. eji l'unique Tafîcîir qui nourriffe fes brebis de fespro'
fres metnbres.
Qtftl nous y nourrit de [on propre fang , Ç;- qu'il n'y fait paf
où t LuchurijUe efl appellce pain (^ a;in. azi
comme les tncrcs qui donnent leurs cnfins à nourrir à d'autres. Ch. IV.
Tout cela efl die , répété , inculqué dans cette homélie d'une
manière (i vive ai. Ci forte , qu'on ne fçauroit comprendre com-
ment Aubertin , qui ayant rapporté ce palfage de cette même
Homélie, oùS. Chryfoftome , pour réfuter les Aquariens , dit
que j. C. donna du vin à fcs difciples dans ce My ftere , c'efl-à- di-
re qu'il y employa du vin 6c non de l'eau , a pu s'écrier comme
il fait , qu'il attefte la confeience de fcs adver [aires , s'il n'cfl fa^s .
vray que ce feullteu , où S .Chryfojlomc parle hiftoriquemcnt ^ do^..
matiquement , doit prévaloir à tous les autres où il fe fcrtd'cx-
•prc.fjions hyperboliques. Car quand on détacheroit ce pallage de
tout le refte de l'Homélie , on n'y verroit que le langage de
ceux qui voulant marquer la matière originelle de l'Eucha-
riftie , la défigneroient par le mot de vin. Mais fi on le regarde
avec toute la fuite de cette Homélie ; bien loin de pouvoir te-
nir lieu d'une objedion tant foit peu difficile , il fournit au con-
traire une preuve convaincante que ces fortes d'exprefîîons
n'ont rien d'oppofcà la doctrine delatranfrubftantiation.
Car il faut remarquer que tous les termes qui marquent fi for-
tement la prefence réelle dans cette Homélie , Scdans tous les
autres écrits de S. Chryfoftome, établifient en même temps
qu'il n'y a point de pain dans l'Euchariliie ; parce que ce Saint
ries propoiètous comme dcsconfequences du fens de ces paro-
les , ceci eft mon corps entendu fans figure & fans métaphore, qui
ne peuvent , fclon les Mmiftres , marquer la prefence réelle
qu'en marquant la rranffubftantiationj 6: qu'il enfeigne même
formelJement, que le pain cjlfait le corps de j. C. par changement.
De forte que c'eft en vain qu'Aubertin prétend que les expi-ei-
fions de ce Saint nefavorifent que les Confubfiantiateurs,puif.
qu'elles ne rendent point à nous faire croire que le corps de
J. C. eft avec le pam ; mais que le pain eft fait le corps de J. C.
& eft changé & transformé en ce corps.
Il n'y a rien aufîi de plus commun dans les Pères, que de com-
parer le facrificede J. C. avec celuy de Melchifedech,& de di-
re qu'il a offert du pain & du vin comme luy. Et c'eft en vain
qu'Aubertin fait une grande lifte de ces palTages^ puifqu'ils
nedifent en cela que ce que Pafcafeadit en ces termes; Parce Aubeit.j
que Melchifedecb avait offert du pain (^ du vin , // a eftc ne ce ([aire
que le vrav Rov de paix , C?- noflre Pontife félon l'ordre de Melchi»
fcdeeh , offrit les mêmes chofcs.
E e iij
lit Liv.IV, Réponje aux piijfages-
Et c'eflr ce qu'HiIdeberc a exprimé en ces vers ici :
■ Utraque fub typico ritu formkqtie fnturi ,
■Melchifedech Domino facrificajjc ferunt.
Utraque difcipulis cœ}if.mtibus ipfe Redemptor
Tradidit, in corpus utraque verfa fuum.
Mais Ç\ les Pères difent que J.C. ofFroit du pain & du vin
comme Melchifêdech avoic fait^ils ne nous laiflenc pas à deviner
ce qu'ils entendent par ces termesi& ils marquent bien claire-
ment que ce pain & ce vin font fon corps & fon Tang.
C'eft ainfii que S. Cyprien s'explique dans la lettre à Corci-
lius. 7- C". dit- il ^a offert la même choje que Melchifêdech ,f^avoir
du pain ^ du vin , c^efi à dire fon corps ^ fon fang.
Saint Jérôme fur laGenefê. Farces paroles , diz-iX ^ tu es Prê-
tre félon l'ordre de Mclchifcdech , noflre tninifierc efi fiqnifîè , parce
qu'on n'immole plus des victimes de hefies privées de rai fon , comme
fàifoit Aaron , mais qu'on offre le pain ^ le vin , ccfî à dire le corps
(jr- lefingde J. C.
Primafe nous dit de même que /. C. eflfait Prêtre , non tempo.
tel, mats éternel ^ (^ qu'il n'offre plus des victimes pareilles a celles
que l'on offroit fous la loy , mats qu'il offre du pain ^ du vin comme
Melchifêdech , cefi a dire fa chair ^ fon fang.
Que fi l'on veut (çavoir encore plus diftinâement ce qu'ils
croyoientde ce qu'ils appellent /^z/;; Se vin , & qu'ils difent que
J. C. offroit félon l'ordre de Melchifêdech; il ne faut que le de-
mander à S. Auguftin , qui après nous avoir dit que le Verbe de
Dieu nom a préparé une table avec dupain'^ij;' du vin félon l'ordre
de Melchifêdech , explique enfuite ce que c'eft que ce pain bc ce
vin , en difant , que le Médiateur du nouveau Teflament nous pre^
fente unfacrifîce félon l'ordre de Melchifêdech ^ qui conftjie en fon
corps (^ en fon fang ; que ce facrifice a fuccedé à tous les autres facri-
fices de l'ancien Teflament qui efl oient les figures du facrifice futur :
Et c' efi pourquoy , dit-il , nous reconnoiffons que c' efl par prophétie
que ce même Médiateur dit dans le ^^. Pfeaume : Vous rîavez^pas
voulu de facrifice ^ d'oblation , ynais vous -iriavcx^ormé un corps y
fuifquau Itcu de tous ces facrifices ^ de toutes ces eblations , c'efi
fon corps qu'on offre (j;' qu'on difiribue a ceux qui y veulent parti'
Ciper.
Ce Saint s'explique de même cîans le cinquième chapitre du
même livre. // rnarque , dit-il > très -élégamment far ces termes ,
mander le ^ain , le ^enre même dufairijics dont le Prêtre même
oîi l'Euch.iriftie cfl dppe liée pain ^ fin. izj ^1
llJUS a dit : Le pain que je donneray efi ma chair pour lavie du mon- C H. IV.
de. C'eji-là le fucrifice ^ non félon i.' ordre d'Aaron, mais félon celtty
de Melchifedech. Saint Chryfoftome enfcigne aufîi exprefle-
ment que l'Euchariftie efl: la vérité du pain &: du vin offert par
Melchifedech. Or elle ne le fcroit pas 11 elle n'efloit, non plus
cjue'le facrifice de Melchifedech, que du pain & du vin figure
du corps Se du_rang de J, C.
C'efl en vain qu'Aubertin tache d'éluder ces fortes de pafla-
ges, en difant qu'il ne s'enfuit pas que l'Euchariftie ne foit pas
du pain & du vin , pour avoir eftë figurée par le pain & le vin
de Melchifedech, puifqu'il ne s'enfuit pas que le Baptême ne fe
fafîè avec de l'eau pour avoir efté figuré par diverfes eaux
dont l'Ecriture parle.
S'il eufl raifonné plus juftement il auroitveu que ce qu'on ne
conclut pas à l'égard du Baptême, fe doit conclure à l'cgard
de l'F.uchariflie. Car il efl vray qu'il ne s'enfuit pas que le Bap-
tême ne fe faffe pas avec de l'eau pour avoir efté figuré par
diverfes eaux^mais il s'enfuit qu'il furpaflè de beaucoup toutes
ces eaux qui l'on figuré. Or fans cefîer de fe faire avec de
.l'eau , il les peut furpafTerpar l'efficace particulière que l'Ea-i-
ture luy attribue.
Il s'enfuit donc aufîî precifément de ce que l'Euchariftie eft
la vérité du facrifice de Melchifedech qu'elle furpafTe de beau-
coup ce facrifice. On ne porte pas plus loin la confequence im- '
médiate que l'ontirede cette qualité d'eftre la vérité de cette
figure. Mais cette première confequence en produit neceffai-
rement une autre, qui eft, qu'elle eft donc le corps de J. C.
réellement. Car en quoy fans cela furpaflèroit-t-elle le facri-
fice de Melchifedech? Seroit-ce en efficace? Mais il n'eft fait
mention nulle part de cette efficace. Toute fon excellence eft
renfermée dansces paroles : cecy eft mon corps. En les prenant
en un fens de figure, elle n'en aura aucun avantage fur le facri-
fice de Melchife Jech, car le facrifice eftoit aufTi figure du corps
Se du fang de J C. Il les faut donc prendre dans le fens littéral.
Ainfi l'excellé -ice du baptême au defTus de cts figures confî-
ftant dans fon efficace marquée par l'Ecriture, fubfifte fans
tranfTibftann.-'rion : & celle de l'Euchariftie au contraire ne
pouvant fu'^'lftcr fans prendre à la lettre ces paroles: cecy eft
mon corp- ^ l'enferme necefTairement.
Mais il n'cft pas befoin de raifonner pour fçavoir en quel
2,z4 Liv. IV. Képonje aux p.tjfigcs
fens TEuchariftie eil: appellée par faine Chryloftome vérité du
facrifîce de Melchifedech.
On ne dira pas fans doute qu'elle le foit autrement qu'elle l'eft
de tous les facrifices de l'ancienne Loy. Or elle ne rcft félon ce
Saint que comme corps & fang de J. C. <S/ la figure de ce fang ,
dit-il en parlant de l'Euchariftie , a eutat/t de forceda/is le'icm-
Homu"'4f ^^^ ^'^^ J"^fi ' ^^^^^^ /^^'^^ ^'^ f^'^^'^' ^^ ^'^ venié même de ce
fang?
lo pfalm. 110. Et c'efl: pourquoy ce Saint^qui dit en un endroit que J. C. efl:
Preftre félon l'ordre de Melchiredech,parce que Melchifedech
a offert à Abraham du pain & du vin, comme J. C. nous dit en
d'autreSj qu'on offre Je fus- chriftmème au lieu des vitiimes de l'an-
cienne Loy J Se ipftinijujjit offcrri.
Hom. 14. In S. Jérôme renferme 6c explique en même temps la penféede
t^',:"l*^ S. Chryfoflome dans ces paroles dont on a établi le véritable
lens ailleurs. Comme Melchifedech avait offert du pain & du vin
en figure de J. C, J, C. a aufjî emfloyè les mêmes chofe s fourrions
donner ht vérité de fon corps (^ de fon fang.
Enfin on ne peut pas marquer plus clairement en quel fens
on dit , que J. C. a offert du pain d^ du vin , comme Melchife-
dech,qu'il eft expliqué dans le Commentaire fur les Pfeaumes
qui fe trouvent parmi les Oeuvres de S. Jérôme. Comme MeL
chifedech Roy de Salem ^ dit cet Auteur, a offert du pain d^ du
vin , de même votis offrirez^vofire corps &voflre fangqui eft le vray
pain d" lo vray vin. C'eft ce Preftre félon l'ordre de Melchifedech
qui noîts a donne les myftcres que nous en avons : ou dans le Trai-
re que S. Ambroife a fait pour les nouveaux baptifez , dans le-
quel après nous avoir dit que ce Sacrement a efté offert par
Melchifedech qui a béni AhrdihdiTiwNon igiturhumani fed di~
vini d" muneris facramentum quod accepijli , ah eo prolatum qui
henedixit fîdci F atrem Abraham : Ce qui eft lamêmechofeque
s'il avoit dit que ce Sacrement efl du pain & du vin comme
celuy de Melchifedech -, il ajoute un peu après que ce pain eft
le corps de J. C- que c'efl la chair de J. C. le corps de la vie d^ du
Maître des Cicux , le corps de l'Auteur de la manne i que c n'eft
pas ce que la nature a formé , mais ce que la bénédiction a confacré,
(^ que cette benediclion eft plus forte qtie la nature , puifqu'ells
chany: même la nature.
Tout ce que les Miniflres peuvent dire , eft que les Pères ne
s'expliquent pas toujours fl clairement, 6c que comparant le ^z»
cnfîce
où V Euchansîie efl appellée pain ^ ^în. iiy
crifice de J.C. avec celuy de Melchifedecli, ils ne font quel- Ch. IV.
quefois mention que du pain 6c du vin^ comme quand S. Au-
guftin dit que l'on offre par tout fous le Sacerdoce de J. C. ce que
Melchifedech a off'ert: ce qu'il répète en plufîeurs endroits de
fes ouvrages.
Mais il n'y auroit rien de moins fenfé que cette repartie. Car
il auroit ofté ridicule aux Pères de ne fe fervir jamais de cette
expreffion , flmsl'accompngner d'une explication formelle. On
ne fe fert de ces terme que parce qu'on (uppofe qu'on les en-
tendi & en luppofant qu'on les entend, on ne fe croit plus obli-
gé de les expliquer.
Ce langage eft un efpece de métaphore & de métapho-
re très-naturelle j comme nous l'avons fait voir. Or il eft en
quelque forte contre la nature, d'expliquer les métaphores. Ce
feroit en perdre toute la grâce , &. les rendre foibles & languif-
fantes. Tout ce qu'on peut donc prétendre, eft, que comme
on revient fouvent du langage figuré au langage naturel ; les
Pères après avoir appelle l'Euchariftie des mots ào. pain êcde
vin nous ayent dit des chofes qui fiflentvoir qu'Us croyoienc
que c'étoit le corps de J. C. Orc'eftce que nous avons montré
qu'ils ont fait fouvent. Et cela fuffit pour en conclure qu'ils
l'ont toujours penfé. Au lieu qu'afin d'arrefter nos cfpnts dans
l'idée d'un pain &d'un vin matériel , tcrreftre, & (ubfiftant, il
faudroit qu'ils ne nous enflent jamais portez à regarder ce pain
& ce vin comme le corps & lefang de J. Cil faudroit qu'ils ne
nous euflent jamais dit, qu'ils font changez, convertis, tranfele-
mentez au corps de J. C. enfin il faudroit qu'on euft effacé de
leurs livres tous les partages que nous avons raircmblezdans le
1. Tome de la Perpétuité, qui peuvent tous fervir d'eclaircif-
fement au fens auquel les Pères ont appelle l'Huche rifl:ie/<«^« &
-y/w^puifqu'ils c rnciennent bc qu'ils marquent ce qu'ils croyoient
de ce pain &; de ce vin , 6c du changement qui y arrive. C'eft
même en quelque forte par des vues différentes que l'on ap-
pelle l'Euchariftie /^/Vz 6c ^'/«, en la comparant avec le facrifice
de Melchifedech , 6c que l'on marque qu'elle efl le corps de
J. C. 6c ces vues ne fe rencontrent pas toujours enfemble. Car
quelquefois on veut fimplement marquer le rapport de la fi-
gure à la vérité, 6c quelquefois on veut marquer l'excellence
de la vérité au deffus de la figure. La première de ces vues porte
feulement à dirCjque commeMelchifedech offroit du pam 6cdu -.
Ff
C. 14.
zz6 L 1 V. I V. Képonje aux pajfages
•vin j de même J.C, a offert auffi du pain èv du vin. Ccft la fé-
conde vue qui porte à remarquer que le pain & le vin quej. C,
offrit écoient changez en ion corps & en fon Tan g. Ainfi comme
le bon fens peut tairs juger que l'efprit doit fouver t demeurer
dans la première de ces vues, il doit aufli faire conclure que
les Pères ont deu (ouvent exprimer les rapports du facrifice de
Melchiledeclî avec celuy de J. C. fans en marquer les diffé-
rences.
On peut encore remarquer que quand unedodrine ell: éta-
blie dans l'Eglife & connue de tous les fidelles, il n'eft pas be-
foin de l'exprimer toute entière par des mots capables de la fai-
re entendre à ceux qui n'en auroient pointentendu parler. Il fuf-
fït d'exciter par quelque mot qui y ait rapport, toi.tes les idées
que les fidelles en ont. Or c'efl ce que les Pères ont encore fair
fouvent.
Aa. p.>i. Au'ocrtin croit eflre fort fubtil en concluant, de ce que Ter-
tullien dit , que f. C. n'a point rejette le pain p,,r lequel il rend fon
Cont. Marc, (-g^p^ prefcnt^ que le pain y demeure donc Mais il devoit pen-
fer que les fidelles entendant, que le pain rend le corph de j C,
preienr,concevoient incontinent qu'il ne'le rendoir prefentque
parce c^u'il . ftoitfait le corps de J^ C. & qu'il ell:oit changé en
ce corps félon rexpreiîion déroutes les Liturgies.
S. Ignace appelle l'Ecichariflie un pnin unique qui efi le remède
à'e l immortalité, l'antidote qui nous em^'cfche de monrir-^ mais il
marque allez par là^ que ce pain eft le corps de J C. puilqu'il ne
leroit point un remède & un antidote contre la mortalité s'il
n'étoit le corps de J. C. & que toutes cesqualitez que Saint
Ignace luy attribue, n'auroicnt aucun fondement dans l'Ecri-
ture, fî l'on expliquoit ces paroles : Cecy eft mon corps , dans le
fens de figure, qui ne les produit en aucune forte.
Le feul titre de pain unique montre que l'on ne peut entendre
ce pafTage que du corps de J. C. Car pourquoy les pains de la
communion qui font differens en nombre feroient- ils appeliez
un pain unique^ Et c'eft en vain qu'Aubertin réplique au Car-
dinal du Perron qui avoir fait cette obfervation^que S. Ignace
a bien pu appeller les pains de l'Euchariftie, un pain unique,
comme on dit qu'il n'y a qu'un baptême. La comparaifon eft
faufle. On ne dit point qu'il y a une eau unique dans le Baptê-
me,une huile unique dans la Confirmation. On n'a point dit des
Juifs qu'ils mangeoient un même agneau; mais on dit que nous
avons un feul BaptêmCj parce qu'on prend ce mot non pour la
oà tEuchxriflie efl appUéepain ^ <vin. zxy
matière qu'on employé qui eft différence, mais pour le lave- Ch. IV.
ment intérieur, qui eft un dans fa fin 6c dans Ton principe mé-
ritoire.
Origene nous dit contre Celfe , que nous mavy;oni dans l'E'
^life les pains qui font fervts aux fidèles -^ mais il ajoure, c^t ces
fains font faits par les -prières un corps faint , & fanclifiant ceux
qui le reçoivent avec pieté ^ coiJi-a.yivà/^Qi d^^ ilui lù-iyi à.ytô.Tt ,
■& il eftoit ailé aux fidèles d'entendre par ces paroles que c'é-
toit le corps de J. C. puifque c'cftoit ce que l'on demaiidoit
à Dieu par ces prières dont parle Origene , & dont il leur re-
nouvelle la mémoire , ce qui leur y remettoit toutes les expref-
fions àss Liturgies qui marquent fi bien la prelen^e réelle, que
les Minières n'ont point trouvé d'autre fecret d'en empêcher ^"^- '^°"^- '•
l'imprelfion que de les abolir autant qu'ils ont pu , comme nous AuU^iéi.
l'avons remarqué ailleurs.
Mais, dit Auberrin, le moyen qu'Origene ait pu dire en ce
lieu , que le pain eft fait par la prière le corps (ubll:antiel de J.
C. puifqu'au même temps c]u'il ccrivoit ces lettres contre Cel-
/è,il écrivoit aufii fes livres fur S. Matthieu, où il dit que le
pain eft fait typique?
La refolution de cette difficulté eft fort aifée.
C'eft premièrement, qu'Origene ne dit point ce qu'il fuppo-
fe qu'il a dit. Il appelle bien dans fes livres iur S. Matthieu
l'Euchariftie, corps typique, comme tous les Pères l'ont appelle ï? TAôrei
antitype ^ fans faire aucun préjudice à la réalité, comme nous A^^'' '^i tv
l'avons montré: mais il ne dit point que le pain c fi: fait un corps tu-tt^oJ x)
/y/'/'^wf comme Auberrin le luy fait dire.Orilya quelquediffe- ^duCoA^xoc)
rence entre ces deux expreflions. Mais quand il fe fcroit fervi ca'f^xToi.
de la dernière, cela fignifieroit feulement qu'il auroit eflé fait
Sacrement du corps de J. C. èc il refteroit a voir fi Origene fe-
roit demeuré dans la fignificationlirtcrale du mot deSacremenr,
ou s'il n'y auroit point fuppleé. Or nous avons montré qu'on
doit croire qu'il l'a fait.
On ne doit pas mettre entre les pafi^ages qui ne déterminent
la fignification des mots de pain & de vin que par des épithetcs
qui fillent reifouvenir les fidelles de la créance de l'Eglife, ce-
luy de l'auteur de la difpure contre Arriusqui fe trouve parmy
les Oeuvres de S. Athanafe J car il ne fe contente pas de dire
de J. C. qu'il nous a pre fente une table , ce^ a dire le faint Au-
tel, ^ qu'il y a mis le pain celefte incorruptible qui donne la vie «
Ffij
2i8 L I V. IV. Réponje aux pajfagsr
tous ceux qui y participent-, ce qui feroic du genre dont nous par-
lons i mais il ajoute expreflement que ce pain cft fon faim é^ très-
Jacrè corps : ce qui eft précis. Ni celuy de Julius Firmicus^ qui
nous exhorte à chercher le pain de'Jefus Chriji ^ le calice deJ.C. afin
que mèprifant les chofes terrcfires ^ frugiles ■, la (uh fiance de l'hom-
me [oit nourrie par cet aliment immortel. Car il ne fe contente
pas âuffi de nous faire connoiftre ce que c'eit que ce pain., par
ces mots aliment immortel ^ qui ne iuy conviennent que par ce
que c'eil: le corps de Jésus Christ. Mais il ajoute exprefTe-
menc dans la fuite ^a^" ce pain efi celuy dont il ejl dit ,f vous ne
mangez^la chair du. Fils de l'homme , & ne beuvez^ fon frng , vous
n'aurez^point la vie.
Tous ces paflages & plufieurs autres qu'on pourroit alléguer
fout voir fi clairement en quel fens les Pères ont appelle l'Eu-
chari(lie/'.z/?2&x'/«, qu'il eft inutile de s'arrefteren particulier
à quelques uns, où ils n'ont point ajouté ces éclairciflemens.
Car il ne faut pour en reconnoître le vray ièns, que fefouve-
nir de ce principe , que ce que les Pères ont exprimé en divers
lieux de leurs ouvrages comme leur foy & celie de l'Eglife, ils
l'ont toujours eu dansl'efprit lors même qu'ils ne l'ont pas ex-
primé; Qii'ainfi il eft permis de l'entendre par leurs expreC
fions ; ôd par confequent qu'on doit fuppofer que quand ils
nous parlent de pain & de vin, ils entendent ces mots d'un pain
changé & converti au corps de J. C. d'un pam qui n'eft plus
ce que la nature a formé , mais ce que la bénédiction a confa-
cré , & enfin d'un pain qui n'eft plus pain , quoy que les'yeux &;
le gouft le jugent tel , mais le corps de Jesus-Christ.
CHAPITRE V.
Ahus qu^Auhertiné-M. Claude font d'un faffage de Clément d'A-
lexandrie , ^ d'un autre d'Oriqene.
ON a fujet de craindre que les perfonnes judicieufes ne
trouvent qu'on s'eft troparrefté à la réfutation des confe-
quences que les Miniftres tirent des pafi!ages où les Pères don-
nent à l'Euchariftie les noms de pain & de vin , & qu'ils ne ju-
gent qu'une objedion Ç\ foible ne meritoitpas d'eftre repoufTée
avec tancde foin.Neanmoins comme ily a des gens qui s'imagi.
t
on tEuchurifiie eBappellée pain ^ <vîn. 12.9
nent toujours que c'eft par finefTe «qu'on ne rapporte pas certains Ch. V.
pallagestout au long , ôc qu'on n'y répond qu'en gros ^ Je veux
bien leur fa ire voir que l'on ne fe difpenle de lefaire, que pour
éviter la longueur extrême de cette méthode, & que fans cet
inconvénient qui rendroit les ouvrages inutiles au commun du
monde, on y auroit encore plus d'avantage qu'en aucune autre.
C'eft: ce qui paroiftra clairement par l'examen que nous al-
lons faire d'un palfage de Clément d'Alexandrie que les Mini-
ftres allèguent d'ordmaire comme un des plus forts & des plus
précis qu'ils ayent fur cette matière.
Monfieur Claude le cite trois fois pour fa part dans lechapi-
rre quatrième delà deuxième réponfe. Levoicydans toute ion
étendue. De quelle fone croyex^vous qu'a bcu le Seiqiiicur qui i'cjl
fait homme poumojhe falut ? Croyez^vou^ que ce fufi avec les mê-
mes emportemens que nous ? N'efioit- ce pas au contraire avec une
modération extraordinaire ^ une extrême bonne/} e té ! Car vous de-
vez^fcavoirquil a ufe de vin aufft bien que nous , puis qu'il efloit
homme comme nous^^ ce fut du vin qu'il bénit lorfqail dit : Prenez^,
beuvez^: Cecy eji mon fan'Z, , ce qu'il dtfoit du fang de la vigne , cet-
te liqueur' de joye qui fiyiifie le Verbe répandu fur plufîeurs pour la
rem' f ion des péchez^ Or que nous foyons obligez^de garder la fobrie-
té dans l'ufige du vin^cela paroifl cLtirement parles inflruU ions que
Jefus- Chrift donnait dans les fefiins. Car il ne les euft pu donner i' il
euji pris du vin avec excès.
il a fait voir aujji que c efloit du vin que ce qu'il bénit , en di-
fant a [es difciples , Je ne boiray plus du fruit de cette vigne ju fqu à
ce que j'en boive avec vous au royautne de mon Père. Et pour mon-
trer auffî que J. C bruvoit du vin , // ne faut que confiderer ce qu'il
dit de luy-mcme en reprochant aux 'juifs leur dureté : le Fils de l'hom-
me , leur dit- il , efi venu , (i^ ils difent : C'cft un homme qui aime a
manger , c'efl un beuvcur de vin , un ami de s publicains . C'efi ce que
nous établifons contre les Encratites.
Monfieur le Cardinal du Perron avoit répondu très- judicicu-
fementà ce palTage, que le but de Clément d'Alexandrie n'é-
toit aucunement de juftifier en ce lieu-là que ce qui étoit dans le
calice après la confecration étoit du vin, mais que c'étoit du
vin avant la confecration, &: non de l'eau pure.
Car, dit- il j ildifputoit contre les Encratites qui abhorroient l'u-
fage du vin comme impur <^ poilu en toutes chofes 5 ^pour les refu^
ter .^ il agi jf oit par deux argumens : l'un quenofire Seigneur avoit bien
F f iij
ijjo Liv. I V. Képonfe aux pajfciges
luy-mème du vin ; ^ cela il le vérifie 7wn par l' Eucharijîic, mais par
les reproches de ceux qui l'appc liaient hcuveur de vin: l'autre qu'il
avait béni ^ confacré du vin j (^ cela il le prouve par l' Eucharifiic
O" allègue les paroles que cite le fleur du PlcJJis , pour montrer que
c'ejloit du vin , ^ non de l'eau pure ijuil bentt.
Auberrin entreprend de refucer cette rcponfe , & il le fait par
quantité de fuppolîcions ou faulTes, ou incertaines, ou vaines ,
comme nous Talions montrer.
Il nie premièrement que le deflein de Clément fufi: de réfu-
ter les Encrantes, parce, dit-ii , qu'il n'en eft point parlé dans
tout le refte du livre. Mais il [v\^t. qu'il en (oit parlé dans ce
pafTage où il eft parlé de boire du vin. Or Clément ditexpreC
lement qu'il établit ces maxime contre les Encratites. Il les y veut
donc réfuter. Il eft vray qu'il ne les réfute qu'incidemment.
Ji'îais ce n'eft aufli qu'incidemment qu'il établit que J. C. a beu
du vin. Sans cette veiieil Tauroit lUppofé fans preuve, puifque
ce n'cftoit pas une chofe conteftee entre les Catholiques.
X. Il dit que le but dired de Clemert eft d'exhortpr àla fo,
bricté. Je fçay bien quil y exhorteen effet. Mais cela n'empê-
che pas qu'il n'ait eu auffi en veuë de réfuter en paûTant les En-
cratites , & que ce ne foit dans cette veiie qu'il s'arrefte à prou-
ver que J. C. a beu du vin : Scc'eft chicaner que, de n'en pas de-
meurer d'accord, puifque cet Auteur le dit en termes formels.
Voilà les premiers efforts d'Aubertin. Il entreprend enfuite de
combatre ce que le Cardinal avoir avancé, que Clcment ne prou-
ve point par l' Euchariflie que I. C. ait beu du vm, mats feulement
parles in fuite s de ceux qui l'appelloient beuveur devin. Mais il
«'y reuiTic pas mieux. Clément ,à\t'\\ ., avait k prouver deux cho.
fes i l'une que I. C uvoit beu du vin '■> l' autre qu'il en fallait ufer mo-
dérément. Or il prouve le premier par l' Euchariflie. Si^achez.^^ dit-
il , qu'il a tifédc vin cum-nc nous , parce qu'il étoit homme , (^ que ce
fut du vin qu'il bénit. Or Clément n'aurait- il pas efté un fiupide de
pouver par l' Euchar'ftie que 1. C. avait beu du vin , s'il n'eiit cru
que I. C. y avait beu du vi''' proprement ditt
Cet argument d'Aubertin efî encore une pure ilîufion ^ & il
p/elf fondé que fur un faux fens qu'il donne à ces paroles de Clé-
ment : fcache'z^ ^V^'^J ^- ^'- ^^"' ^" '^'" ■> ^" ^^^ rapportant à l'Eu-
c-iiariftie ^ au lieu qu'elles s'entendent de toute la vie dej. C.
dans laquelle Clément nous alTure qu'il a beu du vin. Et quant
à ces pa.roles : Et ce fut du vin qu'il henit , c'eft un nouvel argu-
ou ÎUuchdYÏflie eji appellée pain es* 'vin. 231
ment que Clément propcfe^ qui n'eft point du tout la preuve Ch. V.
que J. C. ait beu du vin.
Pour entendre cela, il faut fuppoferque Clément en cet en-
droit a deflein de réfuter en palfant l'herefie des Encracites,
comme il le dit luy-même en termes formels. Or ces Héréti-
ques nioient le fait 6c le droit. Je veux dire qu'ils diloient que
T. C. n'avoit point beu de vin , & qu'il n'en avoit point dà
boire , parce que c'ëtoit un eftre impur & poilu. Clément
foûtient donc le contraire de ces deux erreurs, par deux clau-
fes différentes. Il dit que J. C avoit beu du vin par ces paroles:
chez^quil a heu attjji au vin^ farce qu il ejioit ho7nme comme nous.
Et il combat le principe qui eftoit l'impUrecë du vin,/'^ra' que
ce fut du vin que J. C. henit. Or iln'auroit pas choifiun eftre im-
pur pour le bénir. Ainfî par la prem.iere raifon il détruit la
pratique des Encratites parcelle de J. C. & par la féconde il
détruit le principe des Encratites par la benediclion que J. C.
fit du vin. Mais ce tuntdeux raiions toutes différentes^ & Au-
bertin les confond, ridiculement. Quand Clément dit que J. C-
a beu du vin, il entend qu'il en a beu dans le cours de fa vie.
Quand il dit, qu'il en bénit dans l'Euchariftie, il prouve qu'il
n'etoit pas impur.
La fuite du palfage fait voir manifeftement la vérité du fens
que nous y donnons, & que ce font deux claufes feparées ; l'une
que J. C. a beu du vin, l'autre qu'il a béni du vin : que l'une fe
rapporte à toute la fuite de la vie de J. C. ôc l'autre s'entend de
l'Euchariftie. Car après avoir propofé ces deux claufes, il les
reprend toutes deux dans la fuite, quoyque dans un ordre ren-
verfé 5c les prouve chacune à part, en les prenant dans le fens
que nous avons marqué. Il prouve premièrement la dernière,
qui eftque c'étoit du vin que J.C. avoit béni, par ces paroles
qu'il ditdans la dernière Cène, Jcne hoiray plus du fruit de cette
vizne jufqua ce que f en boive avec vous dans le Royaume de mon
Père. Et il prouve la première, qui cft qu'il beuvoitdu vin or-
dinairement,par le reproche que les Juifs luy fa.iCoient d'efre un
beuveur devin ^ en propofantféparémentces deux points & les
preuves dont il les appuyé.
Ainfi le rapport qu'aubertin fait de qq.% paroles: Scaehcz^que
J. C.beuvoit du vin z l'Euchariftie eft une pure vifion ; auHl
bien cpe tout ce qu'il y ajoute, o^x^ Clément a voulu prouver que
z^r Liv .IV. Képonfe aux piijfiges
nous pouvons boire du vin ^ farce que J. C. en avait beu dans l^Eu-
charifitc : Qu'il faUoit donc que ce fuft du vin cfj'eciif qu'il y beut^
fuifqu' autrement on ne pourrait conclure delà que nvus en fui,IJions
boire. Car Clément n'employé, comme nous avons dit, la be-
nedidiondu vin que J. C. liten confacrant l'Euchariftie, que
pour montrer qu'il n'abhorroit pas le vin , puilqu'il le benif-
ioit : &: ce raifonnement n'a point du tout beloin que J. C. aie
bu du vin dans l'Euchariftie.
Le rroifiérae avantage qu'Aubertin prétend tirer de ce paf-
fage, efl; fondé fur ce que Clément alTure , que ce fut du favg de
la vigne, c'eft-à-dire du vin dont J. C. dit. Cccy e/lmon fang. D'où
Aubertin conclue à fon ordinaire qu'il n'a pu prendre ces pa-
roles: Cecyefl mon corps .^ en un fensde tranflubftantiation. Mais
nous avons refuté d'une telle forte ce fophilme , qui n'effc qu'un
argument à quatre termes, dans le fécond Tome delà Perpé-
tuité, que je ne fçays'il prendra encore envie à quelque Mi-
niftre de s'en fervir.
Celuy qu'il prétend tirer de ce que Clément dit , que le vin
figure le Verbe ., par allégorie , efl: encore détruit dans un autre
lieu du même Ouvrage où l'on montre que c'efl: un fophilme
vifible de prendre pour une explication de cette propofition :
Cccj cfi mon corps .^ & que les Pères difent des raifons du choix
que |. C. a fait du pain &, du vin pour en faire la matière de l'Eu-
chariftiej parce qu'il y a une extrême différence entre mar-
quer les rapports myftiques du pain &: du vin, & de l'eau, ou au
Verbe, ou au peuple & à l'Eglife, ou au fang de J. C. ôc expli-
quer littéralement cette propofition-. Cccy ejtmon corps.
Le cinquième efl: , dit il, que Clément prouve que c'était de
vray vin , quoyque confacré.,queJ.C. avait beudans la célébration de
L' Euchari(lie.^lorfqu il dit que le Seigneur l'a fait voir encore en di-
fant: Je ne boiray plus du fruit de cette vigne. Car ces paroles, ait il,
ne montrent pas que J.C.ait bit du vin dans lEucbar ifiiejî l'on n'en-
tend du vray vin par ce fruit de vigne.
Mais c'eft encore une fauiTeté d'Aubertin que cet argument
qu'il fait faire à Clément Alexandrin. Car comme l'a remar-
que le Cardinal du Perron , il ne veut prouver en aucune forte
que J. C. ait bu du vin dans l'Eucharifliie , mais que c'étoit du
vin qu'il bénir , comme le portent expreifcment les paroles
Grecques , en S^i oîvoe to eiiAoyîioS'É'' aTtiS^n^i Ttdxi. Il ne dit pas
<juej. C. fait voir, que c'étoin du vin qu'il avok bû, comme
Aubertin
euïEuchàriflie eji appellée pain 't£ <vin. 133
A'ubertinlLiy faic dirc.Maisiliiit quej. G. a fait voir que c'eftoïc Ch. IV.
du vin qu'il avoïc béni.
Qiie fi M. Claude réplique que l'on ne Tçaurcit faire voir
que J. C. a béni du vin par ces paroles : Je ne boiray point du fruit
de cette vi'ine ^ que l'on ne faflè voir en même temps que J. C.
en avoit bû ; puifque fi ce pailâge prouve par le mot de fiuit
de vigne que c'eftoit du vin que J. C. avoit béni, il prouve aufiî
par ceux de nonhibum^ qui fuppofent que J. C. avoit fait ce
qu'il dit qu'il ne fera plus que dans le Royaume de fon Père ,
qu'il en avoit bu effectivement : on luy répondra que cet ar-
gument propofé en cette manière feroit un peu plus fubtil que
ceux d'Aubertin , qui ne font que des falfincations vifiblesou
du texte ou du fens de Clément d'Alexandrie : mais qu'après
tout ce ne feroit qu'une faulfe fubtilité. Car ce paflage, je ne
hoiray point du fruit de cette viiine , prouve fort bien que c'eftoit
du vin que J. C. avoit béni , fans prouver que ce fufi: du vin
qu'il avoit bû.
La raifon en efl: , que fi ces mots de pain & de vin , de froment,
& de fruit de vigne , ne fignifient pas dans l'efprit des Catholi-
ques de vray pain & de vray vin , lorfqu'on les applique à l'Eu-
chariftie confacrée^ ce n'eft pas que de leur nature ils n'excitent
dans l'efprit les idées d'un vray pain Se d'un vray vin , mais
c'eft que la créance qu'ils ont , qu'il fe fait dans ce Myftere un
changement du pain au corps Se du vin au fang de J. C. les por-
te naturellement à bannir ces idées pour fubfîituer celle d'un
pain apparent ou d'un vin apparent.
La caufe de ce changement d'idée n'eft donc pas dans les
mots mêmes. Elle efl dans l'efprit de celuy qui les prononce ou
qui les entend.
Ainfi J. C. ayant formé l'idée de la prefence réelle Se de la
tranffubflantiation dans l'efprit de fes Apôtres par les termes
dont ilfe ferviten inflituant ce Sacrement: leurefprit conçut
fans peine qu'il n'appelloit fruit delà vigne , c'efl- à.dire vin^ ce
qui leur avoit dit eftre fon corps, que parce qu'il en avoit l'ap-
parence.
Mais fi l'on fe fert de ce même pafTage pour faire roir la na-
ture de la matière que J. C. avoit bénie , Se dont il avoit fait-
l'Euchariflie, l'efprit en conclut , non que c'efloit du vin appa-
rent, mais que c'efloit de vray vin , parce qu'alors l'impreffiorr-;
naturelle du mot de vin n'eft plus empêchée par aucune créan-i
,A^j
i34 Liv. IV. Képonfe aux pâjfages '
ce contraire. Audi n'yat'il poinc de Catholique qui ne crue
bien raifonner, s'il difoit en montrant une hoftieconfacrée: Il
paroift bien par ce pain que l'Euchariftie fe fait dans l'Eglife Ro-
maine,avec du pain Taiib levain , & non avec du pain levé. Ce-
pendant par le mot de puin ilentendroit la première fois un
pain qui neferoitplus pain , mais le corps de J. C. puifqu'ilap-
pelleroit de ce nom l'hoftie confacrëe , £c il entendroit de vray
pain, lorfqu'il le prononceroit la féconde &:larroifiémefois,
puifqu'il defigneroit la matière de l'EucharilHe avant la confe-
cration. Tout celafe palIe dans l'efprir , fans prefque qu'il s'en
apperçoive , 5c fans qu'il y trouve le moindre embaras. Et il y a
bien moins de difficulté à paflerainfi d'une notion à une autre
fans fe confondre, cp'il n'y en a à le démêler , ôc à Le faire com-
prendre.
Il efl: donc clair quel'unique but de Clément d'Alexandrie
efl de prouver que ce fut du vin que J. C. benic,"^ non de l'eauj
Oii'il ne prouve ni directement ni indirectement qu'il ait bu de
vray vin dans l'Euchariftie , & que ces argumens fi foiides 6c en
Çi grand nombre,qu'Aubertin reproche au Cardinal du Perron
<le n'avoir pas vus, ou d'avoir diniraulez , ne font que des fo-
phifmes de ce Miniftre.
Ce n'eft: pas qu'il eut fujet de tirer un grand avantage de ce
paiTage , <]uand Clément d'Alexandrie y auroit dit formelle-
ment que J. C. but du vin dans la célébration de l'Euchariftie.
La bonne roy voudroit toujours qu'on examinât par la dodrine
des premiers fiecle^, ce qu'il auroit entendu parce vin. Et ainfî
comme L'on trouveroit quel'on y croyoitque ce vin eftoit chan-
gé au fang de J. C. on en concluroit que c'eftoit en ce fens que
cet Auteur l'auroit pris j car cette créance n'empêche nulle-
ment que l'on nefejerve de ces termes. On dit que l'on boit
du vin dans l'Eucliaxiftie ^parce que l'on y prend une chofe qui
•ne fediftingue pas fenfiblement du vin, &; qui en a les effets.
Qiiand il eft queftion de marquer precifémentce qu'elle eft,
CD en parle félon la foy. Mais quand il n'en eft pas queftion,
.on par-lele langage où la nature nous porte.
Aubertinenpropofe iuy-même deux exemples qui îuy aa-
jroient pu apprendre de quelle forte on parle , quand on parle
.îiaturellement, fi la préoccupation ne l'avoit point porté à en
^ &bufer.
P'9++.1j II rapporte que l'Auteur delà viedeS. Genoulphequ'il place
à l'encrée de l'onzième fiecle , c'eft-à- dire en un temps où l'oja
oà t Euchariflie cB appelle e pain (^t'în. i^ç
brûloit ceux qui necroyoient pas la tranfTubltannation , &: où Ch. V.
. Berenger âÀ^oiz^que l' E'^Jife efiojt pcrie , pace que tout le mon-
de la croyoir, n'a pas laifTé d'écrire que ce Saint a pajfé le refleàe
fa vie devais fan ordination fans boire de vin , excepté ce qu'il en
prenait en célébrant le divin Sacrement. Et dans la page 958. il
cite les paroles d'une Chronique écrite à lafinde l'onzicmciie-
cle,c'eft:-à- dire après Berenger, par lerquelks l'Auteur dit qu'il
a vu dans un certain Monaftere un Moine nommé Littenus
d'une abftinence fî admirable , que par l'efpace de dix ans, // ne
but ni vin ni eau , excepte ce qu'il en prenait dans [''Eitcharifiie.
Eft-ce que ces Auteurs qui écrivoient en un temps où la
tranflubftantiation eftoit reconnue par toute l'Eglile, ne la
croyoiept pas eux-mêmes ? C'eft une confequence qu'Auber-
tinfeul eftoit capable detirer, mais qui ne viendra jamais dans
l'efprit d'une perfonne judicieufe.
Fuis donc qu'il eftvifible que la nature porte à ce langage,
aufîî-bicn ceux qui font perfuadez de cette doctrine , que ceux
qui ne le feroient pas,& qu'on n'a point fait difficulté de s'en fer-
vir dans les temps mêmes où l'erreur contraire eftoic punie des
plus rigoureuxiupplices, quel fujet y auroit-ilde s'étonner quand
Clément d'Alexandrie auroitufé de ce la^ngage ? Et quel lieu y
a t'il d'abufer, comraefait M. Claude^d'un paiTage d'Oxigene
qui s'en fert effcdivemenr , en difant que /. C.ne beutpaintdè Ong-Hom.^,
vin dans la célébration de l'Eucharifiie , farce qu'il approchait de
l'autel! Car n'eft- ce pas boire du vin félon le langage àzs honi-
mes que de boire l'Euchariftie , quoique l'Euchariftie ne foic
pas duvin ^comme c'eftofFnrdu pain que d'offrir l'EuchariAie
félon ce même langage, quoique l'Euchariftie ne foit pas du
pain ? Et comme tant de Pères nous aifurent que J. C. en of-
frant l'Euchariftie a accompli le iâcrifice de Melchifedech , 2^
celuy des pains de propofition qui la Hguroientjj quoiqu'ils nous
difenten même temps quece qu'il ofFroit eftoit fon corps même
qui a fuccedé à tous ces facrificesj il n'eft aufîî nullement étran-
ge qu'Origene aie crii par unepenfée qui luyeft particulière ,
que J. C. en s'abftenant de participera l'Euchariftie , lorfqu'iL
eftoit fur le point de fe facrifier luy-même, ait obfervé la dé-
fenfequi eftoit faite aux Preftres de l'ancienne loy de boire du
•vin, lorfqu'ils dévoient 5'approcherds l'autel, quoiqu'il ait re-
connu en même temps avec toute l'Eglife de fon temps que le
YÏndonc , ielon luy , J. C. ne voulut pas boire par cette raifon
ijé Liv. IV. Hépon/è aux pdjfagcs
Honi. f.accîi- rnyfterieufe , eftoic fonvray fang. Et c'ellauffi ce qu'il nous en-
yerC Evang. fgjgj-nj par c£s }^aro\QS czlçhr^s: Quand voî/s prencz^le faint ali-
ment (jj' cette viande incorruptible l quand vous jomjfez^ de ce pain
^ de ce breuvage de vie , vous mangezje corps <^ vous beuvez^ le
fang du Seiyievr. Mumiliez^ vous donc vous- mêmes , ^ imitant le
Ccntenicr , ditcs-luy : Scigfieur , je ne fuis pas digne que vous entriex^
ans ma mai [on. Car lorfquil eji rccjc indignement, ^il y entre pour
^ Londamnation.
J
CHAPITRE VI.
Examen du p^jf^-tge de Saint Jérôme tire de fa lettre
à Hedibie.
E ne fçay fi je dois nommer le dernier paflàge que nous
_ examinerons ici 5* une objection ou un éclaircillemenr. Si
l'on en croie Aubertin , c'eflun nœudGordten pour les Catho-
P' ^^'*' liques , Nodus hic Gordio firiHtor : mais je prétends au contrai-
re que c'cftun fophifme puérile, qui ne peut fervir qu'àéclair-
cir tout ce que nous avons dit fur cette matière. LeLedeur en
jugera.
Une Dame nommée Hedibie qui demeuroit aux extrémitez
des Gaules avoit envoyé un homme exprés en Jerufalempour
confulter S. Jérôme touchant quelques queftions, tant fur la-
vie d'une veuve Chrétienne ,quefurrEcriture..
La féconde de ces queftions regardoit ces paroles de J. C- Je
vous dis que je ne boiray plus de ce fruit de vigne , jufqu'au jour
que j'en boiray de nouveau avec vous dans le Roy^tume de mon
Père. S. Jérôme ayant deflein d'éclaircir ce paiTage com-
mence fa réponfe par cette remarque, dont Aubertin tire fon
nœud Gordien : Quelques-uns , dit-il , ont bâti fur ce paffage la fa-
ble de mille années.^ pendant lefquclles ils prétendent que J. C. re.
gnera corporellement fur la terre , ^ quil boira du vin qu il n'au-
ra point hù depuis ce temps -Ll , jufqu'u la confommation des fie.
des.
C'eft fur cela qu'Aubertin forme cet argument. Les défen-
deurs de cette opinion croyoient quej. C. boiroit durant mille,
ans du même vin dont il avoit bu dans TEuchariftie. Or le vin
qu'ils croyoient qu'il boiroit durant ces mille ans,eftoic de vray
ou t Eucha,riflie ejî appellée pain Csf ^in. i^y
?vin. Donc ils croyoienc que J. C. avoic bu de vray vin dans
li'Euchariftie. Cependant , ajoûte-t'il , plufîeurs des anciens
■Peres , comme Papias , S. Juftin , S. Irence , Tercullien , Apolli-
naire, Laclance, Vidorin , Severe ont efté du même fenti.
■ment qu'eux. Donc tous ces Peres ont crû que j. C. avoit bii
»<ie vray vin dansTEucharittiflie.
Il enchérit farce premier raironnement parce fécond. 5". e-
rhme , dit- il , efloit d'accord avec tous ces F ères touchant la nature
du vin que J. C. avait hà dans l' Euchariftie , ^ ne di{f croit d'eux
que dans la confequence qu'ils en tiraient. Or ces Peres croyaient
que J. C. avait bit de vray vin dans l' Eucharijiic . Donc S. J crame le
^croyait aujji.
Pour faire voir l'abfurdité de ce prétendu »ffaG<?r^/V«j il ne
faut que propofer un argument fembiable où la fauflètë foit tou-
te vifible. Suppofonspour cela qu'un homme partant pour aller
à la Cour, montre à fes amis le portrait du Roy , en difant qu'il
efpere avoirl'honneur dans deux mois de faluer ce grand Prince.
Je demande fi l'on ne fe mocqueroit pas d'un homme qui fur ce
difcours formeroit ce raifonnement.
Cet homme dit qu'il faluëra dans peu de temps le même Roy
qu'il a montré à fes amis. Or le Roy qu'il prétend faluer dans
peu de temps eft un Roy vivant, réel ScefFeclif, &: non pas une
peinture. Donc ce Roy qu'il a montré à les amis, efl un Roy
vivant , & non pas une peinture. Cet argument efl: fi ridicule ,
que perfonne ne voudroit prendre la peine de démêler la petite
fubtilité fur laquelle il efl fondé. Cependant il eft tout auffi
bon que celuyqu'Aubertinpropofe comme un nœu gordien.
L'illufion confifte en ce que le mot de Roy eft équivoque.
Car dans la première propofition l'efpritde ceux qui l'enten-
dent, eft déterminé aie prendre pour un Roy en peinture, par-
ce qu'on l'applique à un portrait que l'on montre , & il fe prend
pour un Roy véritable quand on en parle lans l'appliquer à
aucun fujet qui change la fignification naturelle.
Or cette mêmeillufion fe rencontre dans l'argument d'Au-
bertin. Car l'efprit de ces Peres dont il s'agit , eftoit déterminé
de même par la créance qu'ils avoient que le vin efloit changé
au corps de J.C. à prendre le mot àQ fruit de vigne -çonx un vin
apparent, quand on l*appliquoit à l'Euchariftie , & à le pren-
dre dans fa fignification ordinaire , quand on en faifoit un ufà-
ge qui ne les obligeoit pas d'en changer le fens.
Ggiij
Ch.VI.
2 3? Liv. I V. Képon/e atix paJpLges
M. Claude repondra peuc-ellre qu'on luppole la queftion, qui-
eft qu'il y eûc'une créance diftincle delà tranflubftantiation-
dans l'elprit des Pères qui les portât à prendre ces mots de
fruit de vigne en deux fens difFerens.
Je répons que je ne fuppole que ce que j'a.y droit de fuppofer,
6c que ce que j'ay prouvé d'une manière invincible. Mais fi l'on'
ne veut pas avoir égard a ce que Ton a prouvé ^ je dis qu'il efl:
toujours vifible par cette réponle , que fuppofé que les Pères
ayent eâ la rraniTubûantiationdans refpritj ils ont pu très- na-
turellement fe fervir de ce langage fiins y faire aucun préjudice.
Et parconfequentil nefçauroitrien conclure parcet argument,
qu'en fuppofant qu'ils n.e l'y ayenc paseuë , c'eft-à direenfup-
pofanr la queftion. jde force qu'il fe trouve que ce nœud Gordien
eft une pure pétition de principe qui ne peut rien prouver qu'en'
fuppofant que les Pères n'ay enc pas crû latranflubftantiation.
Aubertinefl d'autant plus inexculable dans l'abus qu'il fait de
ce paflage,qu'il avoit dans fon opinion même l'exemple de ce'
même mot pris en deux fens differens. Car il rapporte lui mê-
me le fentiment de plufieurs Pères , qui enk'ignent ^ ^ue quavd
J. C. diit qu'il ne boirait fins du fruit de la vigne ,iufquà ce qu'il en
bût de nouveau dans le Royaume de fon Père avec [es Apôtres , iP
n'entendoit point par. ce vinnouveau ^hn vin matériel &; {ênfi-
ble ,mais un vin métaphorique, c'eft-à- dire ce torrent de dé-
lices donc les Saints feront enyvrez dans le Paradis. S'il eft
donc poffible félon luy que ces mêmes mois àe fruit de vigne
foient pris dans la première partie pour un vin réd', & dans
la féconde pour un vin métaphorique , pourquoy ne fera-t'i!
pas poffible qu'ils ayent efté pris par ces Pères en deux fens dif-
ferens , c'eft-à dire dans la première partie pour un vin appa-
rent , & dans la féconde pour un vin véritable ?
Mais ce qui achevé de convaincre fa mauvaifefoy oufonpeu
d'intelligence , eft de s'eftre fervi de l'auroricé de S. Jérôme
pour- appuyer ce fophifme, & de nous avoir donné pour princi-
pe,que ce Père avoit le même fentiment à l'égard de l'Euchari-
ftie que les Pères qui ont efté dans l'opinion desMil lenaires.Car
au lieu qu'il forme de là ce raifonnemenc, S. Jérôme a eu le
même fentiment de l'Euchariftie que ces Pères qui onc été dans...
la doclrinedes Millénaires. Or ces Pères ontcrù qu'il y avoit
de vray vin dans l'Euchariftie. Donc S. Jérôme l'a crû auffi : il
nous donne fujetde faire un raifonnemenc tout contraire, mais
1
oà tEuchariflic efi appeUée pain ^ (vtn. 2,39
plus concluant que le fîen,en nous fervant de ce même principe. Ch. V I.
S. Jérôme a eflé du même fentiment à l'cgard de l'Eucha-
ri/lie que les Pères qui ont cfté dans celuy des Millénaires. Or
S. Jérôme a cru que le vin de l'Euchariftie efloit le fang même
de J. C. donc ces Percs l'ont auffi crû.
Ce raifonnement efl auffi bon que celuy d'Aubertin quant
à lâformejmaisil y a cecre différence quant à la mariere^qu'au
lieu que ce qu'Aubercin dit de ces Pères qui ontelté dans l'opi-
nion d'un règne temporeldej. C pendant mille années, qu'ils
ont crû qu'il y avoit de vrayvin dans l'Euchanftie, n'eft; fondé
9 que fur un fophifmc qui fuppofe la queftion, comme nous l'a-
vons montré j la propofition que j'ay avancée , qui ell: que S. Jé-
rôme a crû que le vin de l'Euchariftie eftoit le fang même de
J.C. eft fondée fur les paroles mêmesdeS. Jérôme. Car après
avoir rapporté l'ufage que ces Auteurs faifoientde ce paffage,
je ne boiray plus (^c. il ajoute ce qui fuit pour exprimer fon fen-
timent 6c celuy de l'Eglife. Mats poumons , dit il ^apprenons que
le pain que nojire Seigneur rompit , & quil donna àfes difciplcs.^ efi
le corps de noftre Sauveur , puifqu'il dit luy-m'eme à fcs difciplcs :
Prenez , mangez , cecy est mon Corps , é" que c'efi de
même de ce calice dont il efl dit, Bcuvez^en tous, cecy eftmon Sang
du nouveau Tcfiament qui fera ver fé pour pluficurs . C'efi ce calice
dont nous lifons dans le Prophète : jeprendray le calice du falut ^ ^
Ailleurs 3 que vofire calice qui enyvre de délices efi excellent \ Si donc
le pain qui efi def:cndu du Ciel efi le corps du Seigneur , ô' fi le vin
qu'il donna àfes difciples efi le fang du nouveau Tcfiament^ quia
cfiè verfè pour plufieurs en la remifiiondes péchez^, rejettons les fa-
bles judaïques , ^ montons avec le Sc-igneur dans le grand céna-
cle du nouveau Tefiament ^ four nous enyvrer en célébrant la Paf
que avec luy d'un vin de fohrietè. Carie Roy anime de Dieu n'cfi ny
viande ni breuvage ^- mais pifiice ^joye ^ paix dans le S. Efprit.
Et ce n' efi pas Moyfe qui notts adonne le pain véritable , mais le
Seigneur J. C. qui affifie luy. mèrae à fon fcfiin , ^ qui efi le fefiin
.rn'eme , qui mange (jS efi mangé. C'efi luy dont nous buvons le fang I
(^ fans luy nous ne le fcaurions boire. C'efi du fruit de cette véritable
vigne de Sorec , c^efl. a dire élue , que nous foulons tous les jours dans
nos facrifices un vin nouveau , pour le boire dans le Royaume de
fon Père , non dans la vieillcfe de la lettre , mais dans la nouveauté
de l'efprit.
Je ne f*jay ce qu'on pourroit defirer de plus formel 2c de plu*
z^o Liv. I V. Répon/e aux paJfagcT
précis que ces paroles de S. Jérôme , pour nous aflurer de ce
qu'il croyoic de ce vin , donî J. C. die qu'il ne boiroic que dans .
le royaume de fon Père. •
Il ne fe contente pas de dire que ce pain efl: le corps de J. C.
ôiquece vinenfonfang. Ilditquecepaineft defcendu du Ciel,
ce quieftrépithete propre de Jesus-Christ même , & qui ne
fe peut appliquer au pain, fuppofé qu'il demeurât pain. Il die
que ce vin eft le fruit de la vigne de Sorec,c'efl:-à- dire J. C. En-
fin il dit que J. C. eft lui-même le feftin qu'il nous tâit,ipfe
conviva é' convivium , c'eft-à- dire qu'il ne rjous y prefente que
fon corps , 6c qu'il le reçoit par nous.
Voilà l'Auteur qu'Aubertin a choifi pour l'interprète de l'o-
pinion des Millénaires-, il n'y a donc qu'à luy accorder fon prin-
cipe , qui eft que S. Jérôme avoit lemême.'fentimenc qu'eux
touchant la nature de l'Euchariftie. Mais il nous permettra d'en
conclure, que puifque S Jérôme marque fi clairement que ce
pain & ce vin font le véritable corps êc le véritable fang de J. C.
la raifon veut qu'on croye le même des Pères qui ont efté dans . j
rppinion des Millénaires» ,
Fin du quatrième Livrer.'
LIVRE
LIVRE CINQUIEME-
CHAPITRE PREMIER.
Ikux injujtices des M.nijîres fur le fujet
de XhoAjtet.
H Oas allons mciintcnant entrer dans ces faniea-
fes Objections que les Miiiiftres tirent de
Theodoret, Se de tj-ois autres Auteurs qui ont
parlé comme iuv, 6v nous taicherdn's de leur
rendre fur ce fujet toute la lu/lice oui leui; cVi
de
ue.
I
Car nous fommes perfuadez que la fincerité chrétienne ,.&
l'amour qu'on doit avoir pour la vericéj ne permettent jamais
qu'on fe difpenfe de parler des cliofes félon ce qu'cfles iontic'cil
à dire de traiter les chofes claires de claires , les obf.uresd'ob-
fcures , les raifons fcxrtes de fortes , 6c les fùibles de fojblés , eh
jdonnant à chacune le rangqu'clles méritent.
C'eft donc pour s'acquitter de ce devoir qu'on reconnoifl: de
-bonne foy que les objections dont il s'agit prefentement méri-
tent qu'on s'applique à les cclaircir, & qu'il n'eu pas 'étirâ^ge
que des gens prévenus contre la TranlTubCtantiation, s'imagi-
nent que ces paiTages y font clairement contraires.
Si lesMiniftres pouvoient s'aflujettir à cette règle, notre dif-
pute fepaiferoit dans un examen tranquille de ces difficultez,
& l'on tâcheroit d'y apporter tout l'éciairciflemént paîîiblë,
fans y mêler aucune plainte, ny aucun reproche contr'eux. ' '
On les prieroit feulement de confiderer que ces <liiïîcultez
^quelles qu'elles foientj ne font pas plus grandes que cellej
142, Liv. V. Explication des pa(figes de Theodoret
qu'on trouve dansTercuIlicn &:dans quelques Pères anciens
fur la Trinité, & fur plufieurs autres mylteres, &: qu'ëc.-nt de
l'ordre de Dieu qu'il yen ait ainfi fur tous les points de la foy,.
celuy de l'Euchariftie ne doit pas dire exempt de cette loycre-
ncrale,. puifque Dieu a eu un deiïein particulier de s'en (ervir
gour Kumdicr la raifon de l'homme , & la faire plier fous (où:
d'ororirë foàverain?. ' ' ••'
Mais comme ces Mefîienrs n'ont jamais penfé à fe tenir dans
les juftes bornes de la difputC; qu'ils triomphent toujours avec
hauteur , &: fouvenc même avec infulte j que leur coutume eft
de faire p a (fer les obfcuritez pour dp clartez, les conjedures
pour des demonftrations convaincantes 5 ils s'emportent tel-
lement fur le fujer de Theodorer, ils pouffent leurs raifonne-
niens fî fort au delà de ce que les pafîages leur donnent lieu
d'en conclure, que quoy qu'il y ait del'obfcurité dansces paf-
fages, on ne laiffe pas d'eftre en droit de fe plaindre de Tufage
qu'ils en font, comme d'une injuftice manifefte.
C'cft ceqwe '^Q. prétends faire voir nettement dans la fuite,
. où j'efpere montrâr premièrement que Theodoret établit clai-
rement la préfence réelle, 5: en fécond lieu qu'il ne dit rien de
contraire à la tranfliibftantiation, & que les Miniftres abufent
'dé Tes paroles, contre fon véritable fens.
. Mais avantque d'entrer dans cette difcuiïîon , jeremarque-
"ray d'abord deux injuflices confiderables que les Miniftres-
jGom mettent fur le fujet de cet Auteur.
La première efl: particulière à Aubertin qui abufe en un en-
droit avec beaucoup de mauvaife foy de ce que quelques Ca-
'tholiques ontdit de Theodoret, car ce Minidren'ignoroit pas
que fi quelques uns de ceux qui ont écrit pour l'Eglifè, onr
avoiié que Theodoret eftoit favorable au fentiment de ceux de"
"fafefte, ils ont tous borné cet aveu au feul point de la tranf-
fubftantiation ; & qu'aucun ne l'a étendu à la préfence réelle,.
Il rapporte luy-même leurs paffages p. 771. & il n'y en a au-
cun qui ne foit reftraint à la tranflubftantiation en termes for-
mels. Cependant il a la hardieffeen un autre endroit de rendre'
Ij'aveu de ces A,uteurs gênerai , & de s'en fervir à l'égard dès-
pacages, me inésmii ne regardent que ia préfence réelle. Car
pour montrer que ces paroles de Jlilius Firmicus; 7<roas hcuvons
le faille immortel de J.C. le fang de J. C. eft joint au noftre , ne s'en-
tendent pas du vray fang de J. C. mais d'un fang myftique6c
^ de trois Auteurs qui ont parlé comme Itiy. 145
•métaphorique, ce qui ne regarde que la queAionde la prefence Ch. I.
réelle, il allègue que Tlieodorec l'appelle des mêmes noms,en-
.core, dit-il, que les Auteurs Catholiques avouent qu'il a eu de
mauvais ientimens de l'Euchariftie: Voicy fes propres termes.
// ne s'i nfuit pas , dit il , que cet Auteur ait parlé en cet endroit du
propre Jung de I. C Car Théodore t qui par taveu même des Au-
teurs de la Préface de fes Dialogues dans l'édition de Rome , d'Ala- P- -i * ^*
K»/, de Grégoire de f^alence gS autres , fait voir dans fes écrits qu'il
a eu de mauvais fcntimens fur l' Eucharifie , c'efi - a- dire qu'il
a eu les mêmes que les Reformez^, ne laiffe pa^s de l'appcUer banquet
immortel ^ viande immortelle.
Il s'agit proprement de la prefence réelle en cet endroit,
& il n'allègue Theodoret qu'en luppolant qu'il ne l'a pas crue,
& que ces Auteurs l'ont reconnu. Cependant il fixait très bien
qu'ils n'ont jamais eu la moindre penfée d'attribuer cette er-
reur à Theodoret , & que pour le convaincre de faulTeté il n'y
a qu'à lire les endroits de leurs livres où il nous renvoyé. Mais
/î cette mauvaife foy eft particulière à Aubcrtin , l'autre inju-
ftice qui confifte à abufer de l'autorité de Theodoret ell com-
mune à tous les Miniftres. Il femble, de la manière qu'ils en
parlent tous, que toute la queftion qui eft entre l'Eglife & eux,
Te doive décider par cet Auteur : Qiie toutes les preuves que les
Catholiques apportent pour la tranlTubftantiation, ne doivent
«ftre comptez pour rien, fi Theodoret y eft contraire -, bc
qu'enfin en abandonnant l'examen de tout le refte de la tradi-
tion,il n'y ait pour trouver la vérité qu'à examiner lefentiment
decetAuteur. Maisquelleombre de juftice &de raifon y a-
t-il dans ce procédé? L'Eglile fait-elle dépendre fa dodri-
ne d'un feul Auteur-, ou même d'un petit nombre d'Auteurs?
Ne puife t-elle pas fes fentimens dans le corps entier de la
tradition i 6c la raifon fortifiée par l'expérience ne nous fait-
elle pas voir, qu'il eft très poffible que quelques Pères ayenc
efté moins exacfls dans ce qu'ils ont écrit fur de certains
points de foy, avant qu'ils eufient efte parfaitement éclaircis?
Pourquoy donc ne feroit-il pas permis dédire fur ce fujet ce
que S. Jerofme dit fur ces erreurs que Rufin pretendoit qu'on
euft ajoutées aux écrits d'Origene : Qu'il eft po.fjïble que les
pères aycnt crii avec (lynplicité ces chofes , ou qu'ils ayent eu un
autre fens que cchiy qui paroi fl dans leurs écrits , ou que ces écrits
ayent efié corrompus peu k peu par l'ignorance des Copi/les j eu
Hh ij
"144 L I V. V. Explication despajfages de Theodoret
qu'enfin avant la naijfance des hère fie s ils ayent parlé avec moins
de précaution.
Ec cela a particulièrement lieu dans les points qui font de \a.
nature de celuy de la Tranffubftantiation. Car comme nous
avons remarqué ailleurs, le principal objet de noftre foy étant
J. C. même refidant fur nos autels , l'efpri-t eil: moins porté à
Faire une reflexion expreffe ; C\ le pain y demeure ou s'il n'y de-
meure pas. Et quoy que toutes les expreflionsde l'Eglile por-
tent à croire qu'il n'y eft plus, néanmoins avant que la chofê
eulleftémifeenqueftion, il n'étoitpasimpofîîble qu'un Auteur
ie formafi: fur cela quelque opinion particulière , 6: qu'il l'ex-
primaft enfuite dans fes écrits.
Mais , dit Aubertin , quelle apparence, ou que Theodoret "
ait ignoré le fentiment de l'Eglile de Ton temps fur l'Euchari-
llie,ou que le fentiment de l'Eglife fuft douteux &. incertain fur
ce point? ■
je pourrofs renvoyer à M. Claude l'cclairciflement de cetce '
demande d'Aubertm , puis qu'il a prétendu prouver depuis par
ces fubtilitez, qu'il eftoit très, pofilble non feulement qu'un Au-
teur, mais que preixquetoute l'EgHfe eurt: demeuré pendant più-
ficursfiecles fans fçavoir expreilcment fî J. C. écoit ou n'étoic
pas réellement prefent dans l'Euchariflie. Mais pour en juger
lainement il faut rejcttcr le fentiment de l'un &. de l'autre
comme vifiblement exceffif.
Car il n'eft pas poffible à la vérité que dans un myftere capi-
tal comme celuy de la prcfence réelle de J. C. dans l'Euchari-
ilie, qui a du eflre le principal objet d'un culte pratiqué par '
tous lesfîdelles, & dont la créance-ou l'ignorance ont du ■
chan2;er toute la difpofition intérieure de Tefprit de chaque ■
Chrefticn , S: même leurs avions extérieures ^ il n'eft pas pof^
fible, dis-je, que toute l'Eglife, ou même un grand nombrede •
gens habiles, foient demeurez dans cette créance confufe,où ■
M. Claude met l'Egliïe pendant pluficurs fiecles. Mais il eft
rres-polîible que dans un autre myftere moins capital , qui n'a
pas dû par neceffité cftre exprcflement confideré par chaque
fidelle, dont la connoiiîance ou l'ignorance ne change rien
dans la difpofition intérieure ny extérieure de perfonne , un
Evêque fçavant & tel qu'étoit Theodoret fe foit formé des
penfées différentes de celles du commun de l'Eglife, qu'il les
ait exprimées dans un. livre, & qu'on les y aie laiÀees tres-loiïg-
f# de trois Auteurs qui ont parlé comme luy. i^^
remps fans y Faire aucune retiexion. 11 ne faut pas eftrefort in- Ch. Ï,
fbruit des fentimens des anciens Pères pour pouvoir douter
que ceia ne foie pollîblc dans des matières qui trapent bien au-
trement l'efpritque la Traniïlibftantiation, 6c dont il fembl'e
par confequent que la connoiilancedevoit eftre plus diftincle.
Origene témoigne plufîeurs fois dans (on Livre des Principes
qu'il n'a point eu deflein dé s'éloigner de la créance commune
de rEglire,& qu'il ne fe donne la liberté de propofer fes penfées
que fur les choies qu'il ne croyoit pas établies par un conferl-
tement univeriel. On a même eflé long- temps fans l'attaquer
fur plufîeurs de fes erreurs, au moins avec cette force, avec la-
quelle il a cfté depuis combattUj& il a reçu des grands hommes
de l'EgHfe pendant plus d'un fiecle plus de marques d'i.ltim'e
que d'improbation. Eft-ce qu'il faudra conclure de là qu'il n'a
point avancé d'erreurs, ou que l'Eglifede fonremps étoir dans
l'erreur aufîî bien que luy? Combien y a-c-il de même d'autres
opinions particulières dans les anciens Auteurs contre lefquels
il ne paroiftpas que perionneferoitélevé,ny durant leur vie ny
après leur morr? Et qui doit en eftre plus perfuadé que les Re-
ligionnaires , eux quionc tanrde foin'denous faire des catalo-
gues des erreurs de? Pères &; qui mettent entre ces prétendues
erreurs prefque tous les points que leur nouvelle Eglife a rè-
jettez, quoy qu'ils avouent fur la plupart que jainaris on n'en'a
faitde reprochesàceuxqui lesontenfeignez?
Qti'ils nous difent donc par quelle fantaifie il leurplaifr de
fuppoferqueTheodorct,&: deuxou trois autres Auteurs n'ont
pu avoir fur laTranirabftantiationdes fentimens difïerens de
celuy de l'Eglife ^ &c de quel droit ils nous veulent en même
temps perfuader que tous les dogmes qu'ils combattent dans
l'Eglife Romaine,ont elle d'abord propofëz par quelques Pères
contre le fentiment commun des autres fîdelles, fa,ns qu'ikfaf-
fent voir que ces Pères ayent été condamnez pour ces dog-
mes, ou feulement attaquez. Eft ce qu'ils n'auront jamais d'au-
tre règle dans leurs fentimens que leur intereft, leur^caprices,
ou leurs paffions?
Il fufîîroit donc de leur dire qu'on eft beaucoup moins obligé
de s'en rapporter à Theodoret fur la matière de la Tranllub-
ftantiation. qu'ils ne lefont, dereconnoiftre S. Grégoire de Na-
zianze, S. Grégoire de N y fTe, &S. Bafile pour juges, fur la ma-
tière du culte des Saints Se de leurs" reliques 5 S. Aiiguflin fur '
Hh il].
Z4Ô Liv. V. ExpUccitiondes pnjfkges deTheodoret
l'ecacdes entans des fidellesqui meurt ne fans Baptême, ^ S,
Grégoire le Grand fur le Purgatoire. Car au lieuqu'ih s'cloi-
gnenc de la dodrine de ces grands Sainti,iàns avoir de preuves
que les autres Pcras de leur ^emps ayent enfeignë le contraire;
nous n'abandonnerions Theodorei & ces deux ou trois Auteurs
s'il étùit vray .qu'il y eût^iuelque^hofe à redire à leur dodrine,
flir ce point, que pour nous attacher à l'autorité des autres Pa-
res qui compofentîe corps de la tradition, ôc qui font ainfî les
témoins légitimes de la doélrinc de rLglife.
li efl donc vifi'ble que la difpute touchant le fentiment de
Theodqret, n'eft ny capitale ny dccifive, ôc que ce n'eft point
ce qui doit détermmer un homme lage à prendre party dans ce
différend: que c'cft une injuftice aux Minières d'en faire tant
de bruit, & que quand même les fentimensde cet Auteur au-
roient été tels qu'il leur plaît de fe les imaginer, cela nelesju-
ilifîeroit point d'herelie non feulement fur la prcfence réelle,
mais même (ur laTranfrubflantiation,parce q^uel'Eglife a d'au-
tres régies pour en juger.
C'eft ce que la feule viië de la vérité m'a obligé de déclarer
.avant que d'entrer dans l'examen particulier des fentimens de
cet Auteur. Que fi M. Claude pnr le droit qu'il fe donne fou-
vent de pénétrer les penfées & les intentions des gens, prétend
prendre ce difcours pour une marque que l'on fe défie de pou-
voir répondre aux argumensqueTheodoret fournit aux Cal-
viniftes ^ je le prie feulement de furfeoif un peu fes conjedure.s
jufqu'à ce qu'il ait vii ce que j'ay à luy dire fur ce fujet, & peut-
eftre qu'il changera de fentiment.
CHAPITREII.
On rapporte tout au lon'i^ les deux Palfagcs de Theodoret
tirez^ de fon premier ^ de fon fécond Dialogue.
LE s Padages dont il s'agit font tirez des Dialogues que
Theodoret a faits contre les Eutychiens où il introduit un
Catholique, qu'il appelle orthodoxe, difputant avec un Euty-
chien,à qui il donne le nom d'Eranifte, c'eftà. dire mendiant,
parce que Tes opinions ne font qu'un ramas de diverfes hereiîes.
Dans le premier de ces dialogues qui a pour titre l' immeuble j
.& où il prétend prouver contre l'Eutychjen , que le Verbe n??
&de trois Auteurs qui ont parlé comme luy. 147
s'étoir point fait chair en Te changeant en chair, parce qu'il tfl Ch. \
immuable , mais en fe revêtant d'une chair , &: en prenant une
chair , il allègue divers paiîages de l'Ecriture pour montrer
que cette chair à laquelle le Verbe s'eft uni, eft toujours de-
meurée diftinfte du Veibe, & qu'elle ne luy tenoit lieu que de
voile £c de vêtement.
Il apporte pour prouver qu'elle luy tenoit lieu de voile, le
pafîage de l'Epiftre de S. Paul aux Hébreux, où il dit que J. C,
nous a tracé une voyc nouvelle par fon voile ^ c'eft - à - dire par fa
chair 3 oùilcfl: clair que la chair de J. C. eftappellêe voile.
Et pour prouver qu'elle tenoit lieu de vêtement, il allègue
ee pafTage tiré de la Genefe, où. Jacob en parlant du Meflie,dic
qu'il lavera fa robe dans le vin , é" fin manteau dans le fiing
(de la vigr.e , prétendant que par cette robe & ce manteau, ii
faut entendre le corps de J. C.
L'Eranifte ayant répliqué que cela s'entend non du corps de
J. C. mais de Tes vétemens, même à la lettre, il le réfute de la
manière qui fuit. ^^
L'Orthod. Puifque vous dites que par cette robe &: ce man ^^
feau, ii faut entendre les vétemens mêmes; montrez donc où ^^
il eft dit que J.C. a lavé fes vétemens dans le fang de la grape ^,
de raifin.
L'Er. Montrez- nous auffi de votre coté qu'il foit dit qu'il ait
lavé fon corps.
L'Orthod. Répondez-moy s'il vous plaifl en paroles myfti- ^^
ques & obfcures. Car il y a peut-eftre icy des gens qui ne font ^^
pas initiez aux myfteres. ^^
L'Er. Je vous entendray bi. je vous répondray dans cette ^^
veuë. ^ ,,
L'Orthod. Vous fçaveî que \. C. s'eft donné le r\ov!\<it vigne. ^^
L'Er. Oùy, je f<çay qu'il a dit ^je fins la vraye vigne.
L'Orthod. Mais comment nomme-t-on le fruit de la vigne ^^
quan
d il eft foulé ?
41
L'Er. On le nomme du vin, ^^
L'Orthod. Quand les fol dats ouvrirent lecofté du Sauveur ^^
avec uiie lance, qu'eft- ce que les Evan gélifies nous difent qu'il ^^
en coula ? \^
L'Er. du fang &: de l'eau. ^^
L'Orthod. Vous pouvez comprendre par là que c'efl le ^^
Sang du Sauveur qui eft appelle jang de la vigne. Car fi le
v
148 Liv. V. Explication des piijf'gjs de Thsodoret
Seigneur s'appelle vigne ^ ôc 11 le truie -ie la vigne s'appelle vin;
&; i\ du cote du Seigneur il coula des Fontaines de iang kir Le
refte de ion corps j c'efb avec beaucoup de raifon qtie le Pro-
phète a prédit qu'il laveroit Tes vétam:;ns dans le vin , 8c Ton
manteau da-nslefang delagtape. Car com:ne le fruit myfti-
que de la vigne s'appelle après la confecration fang du Sei-
gneur 5 de niêai-^ le Prophète a appelle fang de raifin , le fang
de la véritable vigne.
L'Er. Vous avez prouvé clairement ce que vous voûtez cjuoy
'qu'en paroles myftiques.
L'Orthod. Quoy que ce que j'ay dit jufques icy fuifife pour
prouver ce que j'ay prétendu, je ne lailferay pas d'ajouter en-
core une autre demonftration pour confirmer davantage cette
rerité. ^
L'Er. Je vous en feray fort obligé, c'efl encore un avantage
que je tireray de yotre entretien.
L'Orthod. Vous fçavez que J. C. a appelle fon propre
corps du nom de pain ?
Je le r<^ay.
L'Orthod. Et qu'ailleurs il donne à fà chair le nom de
froment ?
L'Er. Je le fçay aufli. Car il efl: dit dans l'Evangile: L'heure
ef} venue que le F~ils de l'homme doit efire glorifie, ^^ Jï le grain de
froment tombant en terre ^ n'y meurt ^ tl demeure Jlerilei mais s'il
meurt, il devient capable de porter beaucoup de fruit.
L'Orthod. Mais dans l'inftitutiondes myfteres ilappella le
pain fon corps, bL le vin fon fang.
L'Er. J'en conviens.
L^Orthod. Cependant, félon la nature, le corps s'appelle
corps & le fing fang.
L'Er. Oiiy fans doute.
L"Orthod. Mais notre Sauveur a changé les noms. Il a don-
né au corps, le nom de fymbole,6c au fymbole le nom du corps,
& s'érant donné à luy-mêmelc nom de vigne, il a donné au
fymbole celuy de fang.
L'Ojt. Ceque.vous dites.eft.tres-vray, mais jevoudrois bien
f^avoir quelle eflla caufe de ce changement des noms.
L'Orthod. La raifon en cft claire à ceux qui font initiez aux
myfteres; c'eft que J. C. vouloitque ceux qui participent aux
divins myfteres ne cojifideraflent pas la nature des cliofes qui
s'y
^ dé trois Auteurs qui ont parlé comm^ îuy: 249
s'y voyenc , mais que par ce changement de noms ils crûfîenc " Ch. il.
je changement qui fe fait par lagrace. Car J. C. qui appelle "^
fon corps Xïiit\ixt\ froment àcpain, &qui s'eft luy-même nom- "
mé wg»fj , a honoré- les fymboles vifibles du nom de Ibn "
corps & de fon fang, non en changeant la nature , mais en "
ajoutant la grâce à la nature. "
L'Er. Quoique vous ayez exprimé des chofes myftiques par "
des expreflions myftiques , vous n'avez pas lailTé d'expliquer "
tres-clairement des chofesqui ne font pas connues de tout le ''
monde. "■
L'Ofth. Puis donc qu'il eft confiant que c'efl: le corps du Sei- '''
gneurquieft appelle robhe^&c manteau par \e Patriarche , &que "'
nous avens com.mencé à parler des divins myfteres 3 dires-moy "
en vérité , dequoy vous croyez que la viande faince foit fym- "
bole & Sacrement) Eft-ce de la divinité de notre Seigneur '^
J. C. ou de fon corps & de fon fang ? «
L'Er. II n'y a pas lieude dçuterquecene foie des ehofesmê- ''
mes dont elle reçoit le nom. «f
L'Orth. Voulez-vous dire du t:orps& du.fang ? "
L'Er. Ouy fans doute. "
L'Orth. Vous parlez comme un homme qui aimez îa V(?ri- "■
té. Car J. C. ayant pris le fymbole , ne dît pas. Ceci eft ma di- ''
vinité 5 il dit , Ceey eftmon corps. Il dît, le fam que je donncray cfi f'
ma chair , que je dorrmray four la vie du monde. <•'
L'Er. Ce que vous dires eft tres-vray ,puifque ce font les ora- «
clés mêmes de l'Ecriture. "
L'Orch. Mais fi ces oracles font vrais^ il faut donc que J. C. «•'
ait un corps ? .'
L'Er. Eft ce que je dis qu'il eftoit incorporel ? ce
L'Orth. Vous confcftèz donc qu'il avoit un corps? ce
L'Er. Je vous dis que le. Verbe s'eft faJtchair 3 carc'eftceque c<-
l'Ecriture m'apprend. cc
Voilà mot à mot le pafÏÏige du premier Dialogue de Theo-
doret: Celuy que l'on cite du fécond regarde plus la rranlfub-
ftantiation que la prefence réelle. Mais comme il a beaucoup
de rapport avec celuv-ci , bc qu'ils s'entreclairciilent mutuel-
Jemenr , je les rapporteray tout de fuite. Theodoret y prétend
de même convaincre l'Eutx^chien que le corps de J.C. n'eftpas
changé en la divinité i Se il employé pour cela un argumenc
tiré de l'Euchanftie.
îi
zjo Li V. V. Explication des pajfdges de Theodoret
L'Ort. Dices-moy, je vous prie j les iymboles myftiquesqui
font ofFercs à Dieu par les Preftres , de quelle chofe font-Us
fymboles ?
L'Er. Du corps & du farsg du Seigneur.
L'Orth. Eftce de fon vray corps ou non ?
L'Er. De fon vray corps.
L'Orth. Fore bien. Car il faut que toute image ait fbtî
original , comme les Peintres ne font qu'imiter la natu-
re, & qu'ils tirent des chofes vifibles tout ce qu'ils reprefen-
rent
L'Er. Il efbvray.
L'Orth. Si donc les divins myfteres font les Anticypes d'un
vray corps , il faut que le coqjs du Seigneur foit encore corps,
& qu'il ne foit pas changé en la nature de la Divinité , mais
qu'il foit feulement rempli d'une gloire divine.
L'Er. Je fuis ravi que vous ayez ouvert les difcours des divins
myfteres. Car je prétends vous montrer par- là que le corps du
Seigneur eft changé en une autre nature. Répondez donc à la
queftion que je vous vais faire,
L'Orth. Dites.
L'Er. Comment appeliez- vous , avant l'invocation faccr-
dotale, le don que l'on offre ?
L'Orth. Il ne faut pas le dire ouvertement , parce qu'il fe
peut faire que nous foyons écoutez par des personnes qui pc
font pas initiées.
L'Er. Répondez donc en termes couverts, fi vous voulez.
L'Orth. Nous l'appelions un aliment fait de certains grains.
L'Er. Et comment nomme- t'on l'autre fymbole ?
L'Orth. On luy donne un nom commun qui marque une
forte de breuvage.
L'Er. Et après la confecration comment appellezvous ces
fymboles?
L'Orth. Le corps & lefangdej. C.
L'Er. Et vous croyez participer au corps 6c aufangde J. C?
L'Orth. Ouy je le crois.
L'Er. Donc comme les fymboles du corps 6i; du fang du Sei-
gneur font autres avant l'invocation facerdotale , qu'après 5 àc
que par la confecration ils font chaVigez &. (ont faits autres ^ de
même le corps du Seigneur après fon afcenfiona efté changé
en une eiîênce divine.
ce
<c
ce
<c
ce
et
ce
ce
gy? de trois Auteurs qui ont parlé comme îuy. zji
L'Orth. Vous vous enveloppez dans les filets que vous avez " Ch. IL
vous mêmes tilTus. Car les lymboles myftiques ne quittent "
point leur propre nature , ils demeurent en leur première effen- "
ce , & dans leur ficrureScdans leur forme. Ils font vifibles & "
palpables comme auparavant. Mais on conçoit par l'efprit qu'ils "
font ce qu'ils ont eflé faits : on croit qu'ils le font , & on les '*■
adore comme eftant ce qa'on les croit. Comparez maintenant
cette image avec fon original , & vous verrez le rapport qu'il y
a de l'un à l'autre. Car il faut que la figure refTemble à la véri-
té. Le corps donc dej, C. garde fa première forme, (a première
figure . fa première cir confcription , ôc pour le dire en un mot ,
il a l'efTence d'un corps. Mais après la refurrcclion il a eftc fait
immortel & incorruptible, il s'eft afîis à la droite de Dieu , &:
toute créature l'adore , parce qu'il eft appelle le corps du maî-
tre de la nature. "^
L'Er. Cependant le fymbolemyftique cliange fon premier '^
nom. Car on ne l'appelle pluscomme ob faifoit auparavant ; ''
mais on le nomme le corps de J. C. D'où il s'enfuit que la vé-
rité qui répond au figne , doit eftre appellce Dieu £c non plus
corps.
L'Orth. Vous vous trompez 5 car on ne l'appelle pas feule-
ment corps , mais ^.Vx^xpam de 'uie. C'cfl: le Seigneur mcrfie qui "^
l'a ainfi appelle. Et quant au corps même , nous l'appelions un '*
corps divin , un corps vivifiant , le corps du Seigneur ; voulant '^
dire par-là que ce n'eft pas le corps d'un homme ordinaire, ''
mais le corps de J. C. qui cfl Dieu 6c homme. ^^
Ces deux pafTages fournifient le fujet d'une difpute longue
& embarraffee. LesMiniftres font de grands traitez pour éta-
blir les confequences qu'ils en tirent, & s'emportent contre
ceux qu'ils réfutent avec une violence qui ne leur fiéroit pas
trop bien , quand ils auroient raifon. Aubertin appelle en un
endroit M de la Milletiere le plus ..mâotcictix & le pliis ipiomnt P'7S4>
de tous les hommes. Il dit qu'il n'y a rien de plus étonnant qtie
fon avev.'^lement ^ fon impudence. Stupendam hominis cacita.
tem é^ impudentiam : Il dit d'un Jefuite nommé Audebert , que
c'eft un prodige de hardiefl'e & de folie , audaci^c ne dixeriman P-7*X'
infaniiC prodiyum.W dit que les raifonnemens du Cardinal du
Perron ne font que des illufons d'un efprit fophifiique ^ fans
foltdité. P- 774.
M. Claude luy-même qui veut que les autres ayent de £
li ij
Ci
ce
ce
ce
t
M. Claude
i^i Li V. V. E.^pUciition âespdjfiges de Theodoret
grands égards pour luy,6c qui s'ofFenle des termes dont on s'efl:
toujours fervi dans les difpuces pour n-jarquer les défauts de rai-
^ fonnement, ne fait pas difficulté de dire d'un homme aufll ce-
oontie le p. lebre que le Cardinal du Perron , ■que c'<:fi un. c [prit qui ne i'eji
Nauct p. 48^. propofé que de fmirber [on advcr faire , ^ de luy faire illujion.
Mais la violence &; remporteme-nt de ces Minières ne m'em-
pêchera pas de leur foûtenir qu'ils le trompent dans toutes les
confequences qu'ils tirent de ces pafla2;es , (oit contre la pre-
le-ncc réelle , foit contre latranfTubftantiation. Et pour le faire
avec plus d'ordre Se de netteté ,Jetraireray feparémcnt de ce
qui regarde chacun de ces dogn^es ^ en examinant d'abord ces
paflagespar rapport àlaprcfenceréellej 5c eniuite par rapport
à la tranflubftantiation.
CHAPITRE III.
-^hie ces paffages de Thead.orct bien eyitendus êtabliffent
cUirerncnt la prefence réelle.
CE qui fait qu'on s'égare dans l'intelligence des paflàges
des Auteurs, c'eft qu'on les examine fans principes , fans
-xcgie &: fins équité , Se que l'on s'attache à un mot oc à une
-claufe (eparée, fans les confiderer par rapport^à tout le corps
de ladodrine de l'Auteur & de celle de fon fiecle.
La rai (on veut que l'on ùÇ^'o. tout le contraire. Car comme il
n'eil: nullement vraifemblable qu'un Auteur ait efté tantoft
d'an fentimsnc fur une matière importante , & tantoft d'un
autre i le fcns véritable de chaque palfage en particulier doit
ellire tel qu'il s'accorde avec toutes les autres expreffions du
..niême Auneur. Et de même parce qu'il n'eft pas auflî fort pro-
bable qu'un fçavant homme, tel qu'eftoit Theodoret, eût fur îç
fond du Myftere de l'Euchariftie des fentimens differens de
ceux delEg lie defon temps , principalement à l'égard de la
.prelen.erécUe 5 il faut encore que le kn^ de chaque lieu foie
conforme à la do^flrine du fiecle où il a vccu.
Ainfî la principale marque d'un fens véritable eft qu'il s'ac-
corde avec toutes les autres exprefllons, ou du même Auteur,
oi^ de cCiUX que l'on fuppoie avoir elle du nicmelenciment que
^) de trois Auteurs qui ont parlé comme luy, 155
l-jy. Et une grande marque de la Faufletc d'un fens.c'efl: qu'il ne Ch. IÏI.
convienne qu'à un lieu parcioilier , 6c qu'il foie contraire à rous
\ç.s autres ou du même Auteur^ou de ceux du même remps. De
forte que lorfque de deux fen% l'un convient à tous les paflages
généralement , l'autre ne fêpeut appliquer qu'à un lieu parti-
culier ; il eft indubitable que le fens gênerai ôc commun doit
eflre infiniment prei'erc au feni particulier.
Il faut encore conluierer. comme on l'a remarqué fouve'hc
ailleurs, que l'jdée qui répond aux mots dont on cherche le
fens , ne fè doit pas prendre precilément de*la figniiication lit-
térale de chaque terme , parce qu'il y en a beaucoup aufquels
l'eiprit joint d'autres notions, & qui ne marquant d'eux- mêmes
l'objet que l'on veut faire concevoir que par une de (es parties,
nous lereprefentent néanmoins tout entierpar l'habitude que
l'efprit a de joindre certaines idées.
L'Ecriture par exemple en nous difant que le Verbe s'eftfaic
chair, n'a pas defîéin feulement de nous faire entendre qu'il a
pris une chair fans ame^ mais elle veut dire qu'il a pris un corps
&:uneame. Or nous avons montré que les mots d'/»?./g(7, A\in-
titype , à^ figure , de jymbole , de Sacremev.s , àc myfierè eftoienc
de ce genre , 6c ceiuy de changement en eft aulTÎ ; parce qu'il eft
déterminé (ur le fujetde l'Eucha-iftie, à un changement fub-
flantiel , comme nous l'avons fut voir.
Si les Miniftres avoient fuivi ces règles , ils n'auroient pas
tant fait de bruit des objeclions qu'ils tirent d-e Theodaret con-
tr-ela pfefence réelle.
La plus apparente eft fondée fur ce que cet Auteur dit dans
fon premier dialogue , que comme le fniit myfiique de lavigne
s'appelle après la confecration fang du Seigneur , de même le Prophè-
te a appelle fanq^du raifîv , le fens de la verit.ible vigne.
Les Miniftres concluent de là, que comme le fàng de J. C.
n'eft appelle par Jacob y^/«g du raifin que par métaphore ;
demême^ félon Theodorer, lefruitde la vigne n'eft appelle
fang de J. C. que par métaphore , que l'une de ces cxprelîions
n'ell pas plus propre que l'autre , puifque Theodoret les com-
pareenfemble ^ eftant ridicule^ difent-ils, s'il eût cru que le
vinconfacré fut réellement le iang de J. C. qu'il eût compa-
ré l'expreffion qui l'affirme avec cette autre expr ifîion dejacol-,
où le fang de J. C. eftappellé vin 6c fmg du raifm ^ce qui n'eit
qae métaphorique 3 6c qu'il eût dit encore , comme il fait dans ..
li iij
ZJ4 Liv. V. Explication despa.ffciges deTheodoret
Ja lliice , que J. C- a changé les noms i quil a donne aux fymboles
le nom de [on corps ^ de [on fawz^ ,c^ à fon corps ^^ à fon fang le nom
des fymboles. Car il y a bien changement de nom ,à donner au
corps & au fang de J C. le nam de pain & de vin , puilqu'ils ne
font pas réellement pain & vin. Mais quel changement y a t'it
à appeller \qs fymboles, le corps & lefang de J. C. s'ils font réel-
lement ce corps bc ce fang ?
On leur répond queTheodorer compare ces expreffions dans-
ce qu'elles ont de femblable^mais qu'il n'en a pas pour cela igno-
ré les différences. Là reiP^mblance coniîfte en ce que comme
J. C. s'eft appelle luy même vigne &; froment ; & que le Pro-
phète appelle fon fang du nom de fang du raifini J. C. a de mê-
me donné le nom de fon corps &. de fon fang à ce qui étoit pain
£c vin par fa nature ^ ainfi comme le nom de froment fie de vi-
gne & de vin ne convient point par nature à J C. de même il
eft vray de dire qtie le pain & le vin qu'il a appeliez fon corps 6c
Ion fang, n'eftoient pas par leur nature fon corps 6c fon fang.
Mais la différence confifte en ce que J. C. en s'appellant vi-
gnen'z point efté réellement changé en vigne, en s'appellant
pain^ ne s'eft point rendu pain. Ecainfr il n'a point fait que les
noms de pain & de vigne luy convinffenr réellement 5 au lieu
qu'en donnant au pain le nom de f,')n corps ^ il 1 a réellement
changé en fon corps -, & en donnant au vin le nom de ion fang,
i! l'a réellement changé en fon fang. Et il a fait ainfi que les
noms de corps & de /C.;/g convindcnt réellement à ce qu'il a ap-
pelle fon corps êc fon fang : de forte que ces dernières expref-
iions font fondées fur un changement réel,& non pas les auti"esv
Il n'y a rien de moins imaginaire que la reffemblancc & la
différence de ces expreffions^ & l'on peut dire même en quel-
que forte que l'on conçoit l'une & l'autre par différentes par-
ties de l'ame. Car on conçoit la reffemblance en fuivantl'im-
preflion qui répond au fens. C'eft-à dire que l'on conçoit que
comme J. C. s'appelle vigne , quoique Ic^ fens mettent une dif-
férence réelle entre luy & une vigne 5 de même il appelle le
vin fon fang, quoique les fens nous reprefentent ces deuxcho-
fes comme deux eflres différents. Et c'eft en quoy confifte la
reffemblance de ces exprefUons.
Mais c'eft par la raifon éclairée des lumières delà foy que l'on
en conçoit la différence , parce que. la foy ne nous apprenant
point que J. C. foie changé en vigne, elle nous fait alTez com-
(^ de trois Auteurs qui ont parlé comme hy. 255
prendre qu'il ne s'appelle wg/^r que par meraphore^au lieu c]i;e C H. ÎII.
nous enfeignant que le vin eft réellemenr changé au fangde
J. C. elTe nous fait concevoir que ce que l'imagination nousre-
prefenre comme deux eflrres , n'efb qu'un même élire , qui gar-
de les apparences de vin, & qui eft réellement le fang Ac ]. C.
La queftion doit donc confifter uniquement à fçavoir fi Theo-
dorecquia marqué dans le paiîage allégué la refTemblance qui
fe trouve entre ces expreffions, a reconnu ou ignoré les diffé-
rences que les CathoHques y mettent. Les Catholiques font en
droit de iuppofer qu'il les a reconnues, puifque tous les Pères les
ont reconnucs;& que fçachant tous quej. C. s'eft appelle vigne,
ils n'ont jamais dit que J.C. feFùt changé en vigne. Us n'ont ja-
mais exhorté perfonne à croire que J. C. fi.it une vigne. Us n'ont
jamais dit qu'il n'en falloic point douter, malgré la répugnance
de notre raifon^ de nos fcns. Us n'ont jamais dit que depuis
qu'il s'eftoic appelle vio;ne,il n'eftoit plus celuy qui eftoit né
d'une Vierge^mais qu'il eftoit ce qu'il s'eftoit fait en fe donnant
ce nom. Us n'ont point entrepris de prouver la polFibilité du
chansiemenr de T. C. en viîrneiils n'en ont allégué aucun exem-
pie j au lieu qu'ils n'ont rien oublié de tout cela à l'égard de
i'Euchariftie : qu'ils nous ont avertis expreftement que le pain
eftoit changé au corps de J. C. & le vin en Ton fang^Sc qu'ils ont
marqué en une mfiniré de manières qu'ils entendoient par ce
chançemenc un chançrement réel &. fubftantiel.
U n'-y adôncqu'à demander aux Miniftres s'ils veulent join-
dre Theodoret aux autres Pères, ou l'en feparerj s'ils l'en fepa-
rent,quelle fera l'autorité & le poids d'un Auteur oppofé à tous
Jes Pères ? s'ils l'y veulent joindre, qu'ils nous permettent donc
d'attribuer à Theodoret lespenfées des awtres Peres,6cderup-
pofer qu'encore qu'il n'ait pas precifément marqué dans cet
endroit les différences qu'ils ont reconnues entre ces expref-
fioTîs, il n'a pas laiffédeles reconnoiftreauffi-bien qu'eux.
Qu'ils ajoutent donc à ce paftiige ce que l'on doit croire que
Theodoret a certainement penfé , êcils ven-ont fi leur difficul-
té pourra fubfifter.
Mais il n'cft pas bef^)in d'autres interprètes pour faire con-
noiftre la peniée & le véritable fens deTheodoret , que Theo-
doret même. Et pour en convaincre tout le monde, je demande
Ç\. l'on pourruit dire raifonnablement que ce pafTageeiit une
difficulté confiderabIe,Si qu'il fut contraire à laprefencercel-
.P^*" 1^6 Liv. V. Explication des pa^^ges de Theodoret
le , Cl Theodorec s'y eftoit exprimé de cette forte. J. C. a fair
un changement de noms. Il s'cfi: donné à lui même le nom des
lymbules de (on corps & de Ton Tang^ en s'appeliant pain , fro~
ment &c vigne. Si. il a donné ^ux fymboles les noms de fon
corps & de fon iang. Mais il y a cette différence qu'en s'appela
lant v/g?2e , il n*a point voulu nous faire croire qu'il fût en
effet une vigne , ni qu'il fût changé en vigne , ni queceluy qui
le reçoit , reçût une vigne: Il n'a point voulu eftre adoré com-
me eftant devenu vigne i au lieu quenoi>feulement ilaappellé
lepam fon corps de le vin fon fing, mais qu'il veut encore que
nous croiyons que le pain eflie corps dej. C. par changement»
& que par ce changement le pain cil: fait le corps de J. C.
De forte que nous fommes obligez de le croire corps de J. G.
de le concevoir comme corps deJ G. de l'ad<»rer comme corps
deJ. C. de le recevoir comme corps de J. G. Qu'ainflnonfeu.
lement ce changement effedif eft la caufede ce que nous ap-
pelions le pain corps de J. G. mais aufli de ce que J. G.s'efl;
donné les noms de vigne & de froment, &c de ce que Jacob ap,
pelle fon fang du norn de vin i ces CKprelTions eftant toutes fon-
dées fur ce qu'il devoit changer le pain & le' vin en fon corps 8û
en fon fang.
Je demande encore une fois aux Miniftresfi ce paflàge ain^
exprimé, leur fembleroit fort propre pour perfuader que Theo-
doretn'a point crii la prefence réelle, 6c qu'il a voulu que le vin
nefùtlelang de J. G. que comme J. G.eft une vigne? Gepen-
dant je n'y ay rien mis qui ne foit pris de Theodoret même
dans ces deux. Dialogues. Il eft vr?.y qu'il dit ^ue le vin myfli-
qitc e(l appelle fang de J. C. comme le- fang de J. C. cfl appelle vin ^
CS que le seiyieur a change les noms , en fe donnant les noms des fym-
Loles ^ dr- donnant aux fymboles les noms de fon corps éi" d^ fon fang^
Et cela prouve feulement qu'il a reconnu la rcffemblance de.
CCS cxprcfiions , ce qui n'eft pas en queflion.
Mais n'a- il pas auffi reconnu la différence ? Ne dit- il pas que
7. C^ a changé les noms , afin que par ce changement de noms ils cruf-
fent le changement qui fe fait parla qracel II veut donc qu'on re-
connoiife un changement pour fondement de ces exprcffions.
Mais où fe fait ce changement? Eft-ce dans J. C. afin qu'on-
Tappelle vigne , ou dans le pain &c le vin , afin qu'onles appelle.
corps & fang de J. G ?
^^hQs Miniftres mcines l'entendent d'un changement qui fe fait
dans
& des trois Auteurs qui ont pxrU •comme luy. t^j
<îans les Myfteres; ScTheodoretle déclare expreflemenc. Car Ch. IfC.
il parle de ceux qui participent aux myfteresj il leur deffcnddc
s'arrefter à la nature dzs chofes qui s'y voyenc, & il les oblige
de croire le changement qui -s'y fait.
Voilà donc déjà une différence reconnue par Theodoret.
J.C. ne s'eft: point appelle vigne pour nous obliger à crore qu'il
efl: changé. Et au contraire il appelle le pain Ton corps Se le vin
fon Tang, pour nous obliger à croire un changement.
Mais voyons quel eftce changement, &: par quels caracte-
resThecxloret le defigne. C'eft déjà félon luy, un changement
qui fe conçoit parTerpric. On conçoit^ dit-il , far l'cjpritque les
fymboles font ce qu'ils ont efiè faits , on croit qu'ils le font , ^ on les
adore comme efiant ce qu'on les croit.
Theodoret reconnoift expreiîement tout cela du pain &du
▼in , que l'on appelle corps &; fang de J. C. & il ne reconnoifl:
jien de tout cela à l'égard de J. G. qui s'appelle vigne &; fro- .
iTiCnt. Il ne concevoir point par l'efprit qu'il euft elle fait vigne
& froment. Il ne croyoit point par la foy qu'il eut été fait vigne
ou froment. Et s'il l'adoroit comme J. C. il ne l'adoroit poinc
comme ayant eité fait ny froment ny vigne. On ne peut donc
pas dire qu'il ne reconnut point de d fference entre ces ex-
preffions qu'il compare.
Mais ce n'eft pas encore tout. Il s'agit de fçavoir ce que
l'on conçoit que l'Éuchariftie eft faite félon Theodoret, ce que
Ton croit qu'elle eft faite & en quelle qualité on l'adore qu-and
on T adore comme ejiant ce que l'on croit qvS elle a ejré faite. Je ne
prétends pas icy faire fort fur le mot (^'adorer. Il eft équivo-
que dans les Anciens , auffi bien que celuy de vénérer. Et M.
Claude fe pouvait épargner la peine de fubftituer par tout avec
tant de foin le mot de vénération , au lieu de celuy ^'adoration.
C'eftpar l'objet qu'il faut juger de la fignifîcation de ce terme.
S'il fe rapporte à la chair de |. C. il fignifîe une adoration fou-
veraine. Si c'eft à. un fimple figne , ce n'efl: qu'une adoration
fubalterne, Se une vénération telle qu'on la peut rendre à des
créatures.
Ce qu'il faut donc premièrement décider, c'eft la nature de
cette chofèquel'on affirme des fymboles, èc dont Theodoret
dk^quel'o?: conçoit par l' efprit que les fymboles font ce qu'ils ont cfté
faits comme l'on croit qu'ils le font , ^ qu'on la adore ou rcvere
comme efiant ce qu'on les croit.
Kk . -
ijS LiY.y. E'xplicatio'/zdcspaJfagesdeTheodoref
Si on le demande à M. Claude^ la queftion fera bien-toft vui-
dée, car il s'en démêle bien facilement. // ne faut fas, dir il,
rêver longtemps pour le deviner^ c'efi quon conçoit par l'entende-
ment qu'ils font les myficres du corps de J, C. qu'on les croit tels ^
qu^on les révère en cette qualité. Mais il efl: à craindre aufli qu'on
ne devine mal , quand on ne rêve pas affez , & qu'on propofe
au hayard ces premières rêveries. Se M.Claude en peut fervir'
d'exemple en cette rencontre.
'Car il cft indubitable que quand Tbeodorét dit, que l'on con-
çoit qu'ils font ce qu'ils ont cft è faits , vmro.i a/Xi^ iy'ivtjo c'eft la
m-cme choie que s'il avoit dit. qu'ils ont efté faits le corps ^Ic
foig de J. C. ty~ que l'on conçoit qu'ils le font.
Que quand il dit, qu'on croit qu'ils le font .^ ^ Tf'i t'ouït a./, c'eft
comm'2 s'il avoit dit, qu'on croit qu'ils font le corps ^ le fing
de I. C.
Et que quand il dit, qu'on les adore comme étarit ce qu'on les
eroit, c'eft la même choie que s'il étoit ainfi exprimé ; On les
adore co7nme étant le corps é^ le fang de J. C. & l'on croit qu'ils le
font. En un mot, il efl: certain que les termes à quoy les pro-
noms relatifs fe rapportent dans l'expreffion de Theodorer,
font ceux de corps é^ de fang deJ. C & non pas ceux des myfleres
du corps é- au fang de J. C. donc M. Claude fe fert pour em-
brouiller ce palTage.
Cela eft fi vray & fi confiant qu'Aubertin même recoîanoiflr
que les mots qu'il faut Çm^^Icqt \ox\z cqvxx decorps éi- de fangde
J. C. Th EODO a ET, dit \\.,araifon de dire que l'on conçoit d^ que l'on
croit que les fymho'es myftiques font après la confecration ce qu'ils
ontctéfaits.^ c'eft Àdirele corps é^le fangdeJ.C. TheodoreTUS
verè ^quidcm ait fymbola myftica foft confecrationem intelliy.^^
credi i/Ia qua faHa funt , nempc Chrifti corpus ^ fanguinem.
Audi n'y avoit-il pas moyen de defavoiier que ce nefuft en
certe manière qu'il falloit fuppléer à cette propofition, ôcque
les mots que les pronoms relatifs rappellent dansla mémoire
ne fuflcnr ceux de corps ô- de fang de J. C. Car il eft clair que
cette expreflion deTheodoret, qu'on croit que les fymboles (ont
ce qu'ils ont été faits., eft prife du langage des Liturgies & de l'in-
vocation que le Prcftre fait, dont il eft fait mention trois !iw
gnes auparavant. Or par cette invocation on demandoit ex.,
preflement à Dieu , qu'il fit le pain é^ le vin le corps (^ le fang
de J. C. 6c non le înyfitre du corps é" au fmg. Ec c'eft ce <^ue
Ççf de trois Auteurs qui ont parlé comme luy, 2^9
l'on a prouvé amplement dans le fécond Tome de cet Ou- Ch. III.
vrage. 1.6. ci.
Il ne ferviroit de rien de difputer de l'antiquité des Liturgies
que l'on y cite ; puifqu'il paroift par les Coriflitutions de Clé-
ment, parEufebede Cefarée, par S- Cyrille dejenifalem , par
faint Gaudence , & par faint Auguilin, que c'étoit-Ià le langage
del'Eglife du temps de Theodoret.
Il eft donc certain que Theodoret ayant fait mention de la
prière , par laquelle le Preftre dcmandoit à Dieu , qu'il fiji le
pain (^le vin [on corps ^ [on fing , ou fon corps même fv^ fon finz
même , comme porte la Liturgie de S. Bafilc; Rajoutant en-
fliite qu^on conçoit ^ qu'on croit qu'ils font ce qu'ils ont hé fiiits^
portoit l'efprit de tous ceux qui le lifoient à fuppléer à cette
propofition par les paroles de la Liturgie, & à la prendre dans
le même fens que s'il eud: dit exprelTcment, que l'on conçoit (jr-
que l'on croit qu'ils font le- corps ^ le fang de Je fus Clrift qu'Us ont
été faits.
Cela paroift même évidemment par la fuite de Theodoret
fans ce rapport à la Liturgie. Car î'Eranifte ayant fait con-
feffer à l'Orthodoxe qu'après la confecration lesfymboles qui
s'appelloient pain ^ vin auparavant, s'appellent corps c^ fanz,
de J. C pour montrer que ce n étoit point d'un fimplenom qu'il
parloit, mais d'un nom joint à l'effet, il en conclut qu'il faut
donc croire que l'on reçoit le corps ^ le fani^dej. C. & il le fait
confeiler à l'Orthodoxe. Et vous croyez^ luy dit il , ^?^r vous
reccvez^le corps é" le fang dej. C. Oiiy Je le croy ^ répond l'Or-
thodoxe.
De cette première confequence l'Eranifte en tire une autre,
qui eftque le pain eft donc changé. Car il n'avoir fait avouer
à'Orthodoxeque l'on recevoir le corps de J. C. qu'afin d'avoir
droit de conclure comme il fait , que les fymbolc s font autres avant
la confecration^ d^ qu'après la confecration ils font changez^
Ainfi il y a félon Theodoret un ordre de confequence entre
ces trois propofitions.
Ze pain eft appelle le corps de J. C.
L'on reçoit le corps de J. C. en recevant le pain.
Le pain eft donc changé.
La première produit la féconde , &: la féconde produit la
troifiéme.
Cependanc il eft clair que l'on ne fcauroit conclure de ce que
Kkij
i6 o Li V . V. Explication des p^Jf^gês de Theodoret
Je pain eft appelle corps de J. C. que Ton reçoit le corps de J C,
en recevant le pain , fi l'on ne conçoit qu'il n'eft pas fimple-
ment appelle corps de J. C. mais qu'il l'eft réellement. Car qui
a jamais conclu de ce que l'Agneau Palchal étoit le myftereôc
la figure du paiïage, que l'on recevoitdonc \Qpaffuge en rîien-
geant l'Agneau ?
De même fi cette réception du corps de J. C. n'étoitqu'in-
telleduelie &: par le moyen de la foy, il feroit impertinent de
conclure de ce qu'on reçoit (pirituellement le corps de J. C. en
recevant le pain , que le pain eft donc changé. Car quel Mini-
ftre a jamais conclu de ce que l'on reçoit, comme ils difent,
J. C. en quelque forte en écoutant la-parole desPredicateursj
que cette parole eft donc changée?
Il s'enfuit delà, que quand l'Eranifte conclut que le pain eft
changé , il entend qu'il eft changé au corps de Jesus-Christ
félon le langage de tous les Pères, & qu'il faut fuppléer à ces
paroles dont il fe fert /xîxctyê liuû 'é^'x^w;»' jUêTctCotAAeTa.i; les
lymboles font changez après l'invocation ; & les entendre
comme s'il avoitdit,les fymboles font changez au corps de J.C.
piiifque, comme nous ayons remarqué, ces paroles ne (onrqu'u-
ne conclufion de ce que l'Eranifte avoic fait confefTer à l'Or-
thodoxe^ qu'il croyait recevoir le corps de I. C. Et cela eftant il efè
vifible que ce que Theodoret ajoute enfuite , que l'on croit qiae
les fymholes font ce qu'ils ont efiè faits , ne fignifie que la même
choie, que ce qu'il avoit exprimé par ce mot font change :}i^
Ainfi comme il eft clair que Theodoret a voulu dire que les
fymholes font changez au corps de J. C. il eft clair aufli qu'il a
voulu dire qu'ils font faits le corps de J.C. Tout cela a un rap-
porta une liailon indilfoluble de fens & d'expreffion.
Si l'on ajoute à cela l'éclaircilTement qu'on peut tirer de tous
Jes- autres Pères pour déterminer le fens de ces mots, que le pain
eji changé an corps de I. C. (y- qu'il eft fait le corps de Je fus. Chrift,
ii n'y a pas moyen de douter raifonnablement que Theodoret
n'ait reconnu auffi bien qu'eux , une réception réelle du corps
de C. J. & un changement réel du pain en ce même corps.
Car nous avons fait voir dans tout le fixiéme Livre du fé-
cond Tome de cet ouvrage, que ces termes ne fe pouvoient en-
tendre ny d'un changement de figure,ny d'un changement de
vertu, & que pour fignifier qu'une chofe eft rendue figure d'une
âutre^ou qu'elle eft remplie de fa vertu, on n'a jamais àiiqueL
t^de trois Aufeurs qui parlent comme luy. 16^1
le e fi fuite cette chofe , ou qu'elle ejt changée en cette chofe. Ch. IÏL
Mais je n'ay pasbefoin prefcntemeni: de repérer ces preuves.
Je prétends feulement que ces termes, qui le trouvent dans
Theodoret , que les fymboles font changez^^ èc que l'on croit qu'ils
font ce qu ils ont ejiê f lits ^ ont le même lens que s'il avoitdit, ils
font changcT^au corps de I.C. ils font faits le corps de I. C. Et cela
me Tuffit pour prouver ce que j'avois avancé, que quoy que
Theodores ait comparé ces deux propolkions : le fuis la vigne.
Le v-in cfl le fang de I. C. &C qu'il dilé que le Seigneur a change les
noms , & qu'il a donné au fymbole le nom de fon corps , ÔC qu'il s'ef
^ donné a luy. même le nom du fymbole , il ne les compare nean-
moinsqu'en ce qu'elles, ont de iémblable, 6c qu'il y reconnoift
en même temps de très- grandes différences.
Qu'il a regardé cette première propoiition : le fuis la vigne
comme une métaphore, dont il ne s'eniuivoit ny que J. C. fuil
changé en vigne, ny qu'en recevant J. C. nous reçullions une
vigne, ny que nousdulFions concevoir par l'entendement que
J. C. fuft une vigne , ny que nous le duflions croire vigne , ny
que nous leduùîons adorer comme une vigne. Theodoret n'a
jamais cru que rien de tout cela s'enfulvift de cette propoiition,
parce que perfonne ne l'a crû ni ne le croira.
J'ay pi\)uvé au contraire que de cette propofîtion : le vin <:fl
le fang de I . C. il a eru qu'il s en fuiw oit que notes recevions le f'.ng
de I. C. en recevant le vin confacré , que le vin était change au
fangde J. C qu'il étoit fait le fang.de J.C. que nous devions croire
qu'il avoit été, fait fangde I. G. que nous le devions adorer comme
fang ae T. C. Tout cela luit manifeflement du difcours de
Theodor-et de quelque manière qu'il l'ait entendu.
Voilà donc les différences de ces deux propofitions mar.
quéesSc rc-connui's par Theodoret. Et fuppofé ces diffcrenccs,
je dis qu'il ell ridicule de rien conclure contre la prefence réelle
de la'comparaifon qu'il en fait, & que ces différences jointes à
la compara4(ori^ ne (ont propres qu'à étabhr cette doclrine.
Aufll comme a~ Fort bien remarqué le Cardinal du Perron,
Theodoret ne compare pas ces propofitions: Je fuis la vigne ;
levincfi le fangde I. C comme deux propolltions qui arentune
vérité égale. Se dans lefquelles l'attribue convienne au fujec
également.
Il les compare au contraire comme étant fubordonnées l'une
à. l'autre, comme l'une étant la caufe de l'autre. Car H veut
K k iij
îéi Liv. V. ê xpUcmon des pajfiges deTheodoret
que J. C. fe foie appelle une viyie 6c qu'il aie appelle le via
fou fan'z^^ parce qu'il dévoie changer le vin en Ton t.mg.
Ec c'eft ce qui paroift n-ianifeftemenc par ces paroles de-
Tlieodorec dans ion premier dialogue. La raifon^ die il ^deçe
changement de noms ^ par lequel I. C. s'appelle vigne & donne
an vin le nom de fon Tang, efi claire à ceux qui font initiez^aux
myftcrcs. C'efi qucj. C. voulait que ceux qui participent aux divins
my fi ère s ne s'arrefiaffcnt pas a la nature des cbofics qui s'y voycnt^
mais que par ce chanzfrnent de noms ^ils crttffcnt le c banque ment qui
fe fait par la grâce. Car J. C. qui a appelli' fon corps naturel ^fro-
ment & pain , (j^ qui s'cfi luy- fnème nommé vigne , honore les fymbo-
les vifîbles du nom de fon corps f^ de fonfung , non en changeant la
nature , mais en ajoutant la grâce a la nature.
Ainii, félon Theodorec, la fin que J. C. a eue, non feulement
-en appellanc le pain & le vin fon corps & {owfmg^ mais aulFi en
appellanc (on cox^s froment èlpam^ fie. en s'appellanc luy- même
vigne , efl: de nous faire croire que le pain 6c le vin font chan-
gez au corps 6c au fang de J. C. Ce changement efl la caufe ôc
Je fondement de ces exprelhons. Mais comme ce fhafigement
n'efl: pas également fignitîc par ces expreffions , & que quand
J. C. a dit : cecy efi mon corps i cecy efi mon fang : il l'a marqué
direftement & clairement , au lieu qu'il ne l'a marqué que mé-
taphoriquement fie obfcuremént en di(anr : je fuis la vigne .^ il
5'enfuicque la vérité de l'une dépend de celle de l'autre, fie que
la première eft propre, & l'autre métaphorique.
On ne doit donc nullement conclure de la coxripamifon que
fait Theodoret entre ces proportions, qu'il les égale dans leur
vérité, ou dans leur manière de fignifîer, mais feulement qu'il
les rapporte à la même fin , qui efl: de montrer que par le fang
du raifîn dans lequel Jacob dit que le Mclfte lavera fon vejîcment^
il faut entendre le fang de J. C.
Aubercin qui s'cft propofé cette raifon de la part du Cardi-
nal du Perron fie M. de la Milletiere, s'efforce de les réfuter par
un raifonnement fi étrange qu'on peut dire avec vérité qu'il n'y
a pas la moindre étincelle de fens commun Si Theodoret,
dit il , pour prouver que par le vin &c le fing du rai(ïn dont il
.efi: parle dans la Prophétie de Jacob , il faut entendre le fang
de J. C. euft allégué que I. C. s'efl:oit appelle vigne ^ èc qu'il
eu fl: montré en fui te que y. C. s cftoit appelle vigne ^ parce que
dans rEuchariflie il devoit appellcr le vin fon lang j fon raifon-
(d^de trois Auteurs qui ont parlé comme luy. 163 '
ment auroit eftë impercinenc & ridicule. Car quelle raifon &. Ch. ÎII.
quelle fuite je vous prie y a t-il entre ces propofitions : J . C,
icfi appelle TJiqne. Donc par le mot de fai.gde layrappe , il faut
entendre fonfang dans la prophétie de Jacoh. Le Seiq^neu r devoit
dans l'EchariJlie , afpellcr le vin fou fun<z^. Donc c'efi a caufe de
cela qu'il s'efi appelle viqrici
Mais fi Aubertin n'a pas veu cette fuite, c'eft fans doute
qu'il avoic alors qyelque obicurcifiement d'efprit qui l'empë-
choit de voir une choie tres-claire d'elle-même. Car quand il
s'agit d'éclaircir le fens d'une meraphnre, il fuffic d'apporter des
convenances tres-raifonnables, £c que l'on n'en pui fie pas ap-
porter d'autres plus naturelles qui détournent Texpreffion à un'
autre fens. C'efl ainfi qu'on prouve & qu'on détermine ordi-
nairement le lens des mctaphores. Ec c'eftce qu'a lait Theo-
doret.
Il s'agifloitde prouver que quand Jacob dit du Meffie, qu^il
laverait fon vêtement dans le ftng du raijin , il falloit entendre
par ce fang du raifm , c'efl: àdire par ce vin , le fang de J. C.
dans lequel il devoit laver fon corps dans la pafilon. Or n'eft-
ee pas rendre ce lens fort probable que d'alléguer que J. C. s'effc
appelle wgwf? Car fi J. C s'appelle wg/?^, fon fang fe peut bien
appelicr vm, é^ fang du n/z/f;;, puifque le fangeftau corps, ce que
le vin eft à la vigne. Et n'efl ce pas rendre une raifon très forte,
pourquoy }. C.s'eft appclléx'/g«f, que d'alléguer qu'il a appel-
le; le vin fon fang , & qu'il a changé le vin en fon fang ? Cette
vérité literalé,que le vin efl changé au fang de |. C qui eft ex-
primée par ces paroles^ Cecy eftmon A?/?g, n'efl elle pas capable
de fonder ces deux métaphores : l'une donc |. C. .s'eflfervi en
s'appellantï^/gw • l'autre que Jaeob a employée en marquant
par le mot de fang du rai fin , le fang de J.C. Et le rapport de ces
deux exprcilîons à celi-c de Ja.cob , n'eft-il pas très-propre à en
faire voir le fens , non par une cDnfeqtience en forme, comme
Auberfin prétend ridiculemenrqu'onle doit faire,nuis pr une
convenance fenfible, qui eft la manière naturelle d'expliqués
les métaphores.
^■64 ' ^IV. V.-Repon/e aux pajfagûs
CH AP ITRE IV.
Réfutation de la principale obje'ciipn d' Auben'in , Q- de M.ClaK-
de contre le fcnsquc nous avons donné ùce pajfaze
■de Tljeodorct.
LA feule chofe qu'on peut objecter raifonnâbleraenr , eft
que Theodorec ne dit pas feulejr.enc que le changement
qui arrive dans l'Euchanftie fêtait par grâce, mais qu'il dit ex-
prelTëmenc que J., C. ne f/^^/«;^^ /.// la nature , ôc qu'il ajoute
ieulemenc la 'zrace a la nature , y i^jm çuaif p.ivxQoL^^v ctMa*
Il y a dans ce paflage une difficulté qui regarde la tranfTub-
ftantiacion\ & nous la traiterons amplenient dans les chapi-
tres fuivans , où nous ferons voir que Theodoret dit dans un
fens très. Catholique que J. C. ne change point la nature àes
fymboles. Mais parce que M. Claude abulè de ces paroles,^^^' le
changement fefa/t par la grace^ &iàe ces autres ^«^ J. C. ajoute la
grâce a la nature , pour en conclure qu'il ne fe fait point d'autrç
changement dans l'Euchariftic, que celuy de l'addition d'une
certaine vertu que nous avons pleinement détruite 5 &:qu'ainfî
on ne doit pas croire que le corps de J. C. foit réellement pré-
sent, c'ell ici lelieudeluy répondre, ce qui n'eft pas difficile.
Car pour la première claufe qui eft , que le changement fe fait
par lagr-ace ,\\ fuffitde l'avertir que l'argument que l'on tire de
ces paroles cil: d peu raifonnable qu'Auberti4i s'infcrit en faux
contre le Cardinal du Perron de ce qu'il avoit imputé aux Mi-
iiiftrcs de s'en eftre fervis : & qu il ne defavoiie pas que par le
mot de '2;r.,vT, on ne puillé fort bien eiuendre la caufe de ce
changement J c'efl: à dire , la puillancç de Dieu &: fa bonté
gratuite.
Pour la feconue claufc , i! eft vray que M. Claude eft uni à
Aubcrcin,6c qu'il l'imite dans la fréquente répétition de ce paf.
iage, &: dans la conclufion qu'il en tireif^avoir que,fclon Theo-
doret, le changement qui arrive à l'Euchariitie confifte dans
l'addition d'une certaine vertui mais cette imitation ne luy fait
pas d'honneur ; car il n'apporte aucune preuve du fens qu'il
tienne à Theodoret, 6t il s'en remet à celle d'Aubertin.
Cependant
^ de trois Auteurs qui ont parlé comme luy. 16$
Cependant il n'y a rien de plus pitoyable que touccequ'Au- Ch. IV.
bertin die pour l'appuyer. On en jugera par la comparaifon
que nous allons fa4re de l'explication d'Aubcrtin avec celle des
Catholiques. Ces paroles de Theodoret , que Dieu ajoute la
grâce à la nature , peuvent avoir deux fens conformes à la doc-
trine Catholique ^ l'un , celuy que le Cardinal du Perron y
donne , qui eft que le mot àegnice eÙ pris en cet endroit pour
la grâce elTentielle, c'eft à-dire pour j.C. même qui eft fouvent
marque parle mot degn/rr , comme les Anciens le remarquent
en expliquant cepalfage ; Zagmcedc Dieu agoti/é la mort , 6c
qui reçoit particulièrement ce nom dansTEuchariftie ^qui eft
fouvent appellce %r.ice par les Pères.
Ce Cardinal juftilîece fens par tant d'exemples,qu'Aubertiri Aag.p.^jiji "3
a efté contraint d'avouer que les Anciens ont quelquefois pris
k mot degn/fé-en ce fens. Il prétend feulement prouver qu'il
ne peut convenir à ce lieu de Theodoret , mais par des raifon-
nemens qui ne font que de purs fophifmes, & par quelques
palTages mal entendus , comme nous le ferons voir.
Le fécond fers eftencore plus naturel ^ c'eft que Theodoret
par le moiàtgrace n'entend precifémenc ni la grâce eOentiel-
le, ni la vertu chimérique de M. Claude i il entend l'effet fur-
naturel produit par la confecration , 6c ajouté à la nature fen-
/îble , fans déterminer en ce lieu quel il eft. Car c'eft fe trom-
per que de prétendre que les Auteurs fe doivent toujours ex-
primer par des mots particuliers êc précis, êc qu'ils ont eu en
rout temps & en toutes occafions des idées diftindes de toutes
chofes. Ce n'eft pas alîèz comprendre comment les hommes
penfent. Ils ne conçoivent fouvent les chofes que par des idées
générales & confulès, &: ils les expriment de même j & ces
mots généraux doivent eftre déterminez- dans les matières de
foy, non par leur fignitication precife ^mais fouvent par le fù-
jetdont il s'agit , & toujours parle fond' de la doctrine de TE-
glife , & de celuy qui s'en fert.
Il eft donc tres-vray-femblable que Theodoret en difant que
J. C. a ajoiitè la grâce à la nature ^ n'a rien conçu de diftincT; par
le mot de grâce ^ mais feulement en gros un effet furnaturel,
comme nous ne concevons rien de diftincl en difant que Dieu
ajoute à la nature dans l'Euchariftie , l'effet gratuit (j;- fumatu-
rd de fa pmffance. Mais qui luy eût demandé ce que c'eftoit que
cette grâce ,oucetefFet furnaturel & gratuit que J. C. ajoùteà
Ll
2l66 hiwV. Explictition despaJfagesdcTheodoret
la nature, iUuroit répondu comme nous rëpondri.)ns,& com-
me il répond luy.mcme ailleurs^ quec'eftde rendre les fym-
boles corps & fang de J. C. enforte qu'en les recevant, on re^d!-
ve lé corps 6c le fang de J. C.
Il n'y a rien de plus naturel que cette explication. On y rend
par des termes généraux !e mot de gmcc quieft fi general>qu'il
s'étend , comme l'avoue Aubertin ,&à la grâce clfentielle , &
aux grâces créées, &: qu'il comprend tout ce que Dieu accorde
.aux hommes par le pur motif de fa bonté. L'on yfuppofe que
Theodoret l'auroit déterminé comme l'Eglife de Ton temps le
déterminoit , & comme il le détermine luy-même ailleurs. Il
^ ^ , n'y arien en tout cela qui foitfuppofé en l'air ,& l'on prend '
''' * " tout dans l'Auteur qu'on explique, &: dans ceux qui ont eu le
même fentiment que luy.
Mais pour l'explication d'Aubertin 5c de M. Claude, qui en-
tendent par cette grâce ajourée à la nature, une certaine vertu
phantafi-ique leparéc, du corps de J. C._ & imprimée au pain,
elle a tous les défauts dont une explication eft capable.
Cette vertu eft fi chimerique,qu'au même temps qu'ils attri- '^
buent à Theodoret de l'avoir crue , ils-declarent qu'ils ne la
Aub.p.yjr. croyent pas. Nous ne femmes pa-s à It vérité^ dît Aubertin, /^^-/'^r.
vis de Theodoret fur ce fujet ^ mais cela ejî de peif d'importance.
Peut- être auffi que d'autres ne feront pas en cela de l'avis d'Au-
bertin ,& qu'ils trouveront afiez étrange qu'il n'ait pu ren-
dre, ni ce Père, ni les autres favorables aux Calviniftes, qu'en
,leur imputant une chimère qu'il a efté obligé de rejetter.
','^ Nous avons fait voir dans un livre entier que cette vertu fe-
f rrp. 1. \.u parée imprimée au pain qu'ils veulent que les Pères ayent en-
Min^z*"^' fcignée, quoiqu'ils ne la croyent pas eux-mêmes, eft un pur
fonge des Miniftres, qui n'a aucun rondement dans l'antiquité ,
,& qui n'eft appuyé par eux que fur quatre ou cinq paflages pris
à contre fens.
Aubertin aHcgue icy celuy deS. Cyrille rapporté parVidor
"aAntioche, êc celuy de l'Epitomede Theodotiis , que nous
avons déjà rcfurez: &'il n'y ajoute que celuy d'tphrem d'An-
' .tipche,oii il eft à'xtqne le corps de I. C reçu par les fdcllcs ve s'èloi-
'''<ine pa^ de fon cjlencc fcnfble , (^ demeure hifeparable de la yace
\ "tntclli<iible 3 ce qui ne prouve rien du tout , narce que le mot de
e;race intelligibleeftencore un motgeneral qui comprend tout
l'effet furnaturel opère par la coniecration. Et ainfi c'eft un
^ de trois Auteurs qui ont parlé comme liiy. 2.67
pafTagc c )uc Icmblable à ctluy deTheodoret , &: qui n'efl: pas Ch. IV.
propre a l'éclaircir.
Ccrre addition de la vertu feparée ne pouvoic avoiraucun
dci effccs qui lonc des fuites de ce que Theodoret entend par
cette gruce ajoutée à la nature.
Car p.ir cette addition reconnue par Tbeodoret , le paineft
fait le corps de J. C. Or on n'a jamais die, par exemple, que psr
l'addition d'une vertu aux eaux du Baptême , cette eau ait efté
faite lefang de J. C ou que le Crème de la Conlîrmation par
l'addition d'une vertu , ait efté faire S. Efprit.
En vertu de cette addition (elon Theodoret , on croit & oiî
révère les fymboles , comme eftant le corps de J. C. qu'ils onc
efté faits. Or quia jamais dit ny penfé que par l'addition d'une
vertu aux eaux du Baptême ou au Crème , ou<^n croye & on
révère & ces eaux, & ce Crème , comme eftant le fang de J. C.
ou le S. Efprit qu'ils onc eftc farts?
En vertu de cette addition on croit en recevant les rvmboles
recevoir le corps de }. C Or qui a jamais dit qu'en vertu de
cette qualité imprimée aux eaux du Baptême, on crût recevoir
le fang de J. C. & d'une réception femblable à celle que l'on
entend quand on p.irle de l'Eue hariftie, par laquelle on ait que-
J. C. ejl dans nos corps 1^ dans nos entrailles par fon propre corps (^
f ar fu propre chair , ^ qu'il y eftmèlè ^quil y eft diliriLuè.
Outre les trois paflagcs que nous avons marquez , Aubertin^
employé encore quelques raifonnemenspour prouver /./ xr?/»
feparée ajoutée à la nature, & pour réfuter l'expjication du Car-
dinal du- PerroUi^c quoiqu'on les pût négliger comme depurs
fophifmes du même genre que d'autres dont nous avons déjà
découvert l'illufion, je ne laifferay pas de les rapporter , pour
montrer,comme on le verra encore mieux dans la fuite , que
tout le Traité de ce Miniftre fur Theodoret, qui paife pour un
chef- d'œuvre parmi ceux de fon parti, n'eft dans le fond qu'ua ^
amas de lophifmes , qu'une faufle Logique Uiy a fournis.
Theodoret , dit- il , déclare que les fymboles vif.bles font hono-
rez^ des noms du corps (^ du fan'^ de J. C. à caufe de l'addition de
cette grâce dont je parle. Or cela ne fe peut dire félon le fenti-
ment des adverfaires , quoique ce (oit qu ils entendent par ces fym-
boles vifihles. Ctr s'ils ente/ident les Jimples accidens ^ ferait- ce
pas une folie de dire que des accidens font le corps de I. C. à caufe'
que le corps de I. C.y e fi joint ï S'ils entendent le pain é^ les ac-
Ll ij
468 Liv. V. ExpRcAtion des p/iJJa'T^es deTheodoret
cidens unix enjemble j c'efi encore une fini fc té que le pain d^ le vin
fuient le corps ^lefang de J. C. parce qu'ils font unis au corps ^ au
fanq:^ de 7. C.
Je réponds quecet argument n'efl: qu'un pur rophifme,êc que
nous en avons déjà découvert la fource , qui elt qu'Aubertm
ne s'efl jamais voulu merrre dans l'elpric, que' l'on conçoit fou-
vent les objets par des idées confules &: gênera les quife peuvent
appliquera divers fujets, & qu'ainfi i'clprit paiîelbuvenc d'un
liijec à un autre fans s'en appcrcevoir.
Les mots de fymboles vilîhles ne'fignificnt precifcment &
diftinftemenc ni le pain ni le vin , m les accidens , nile corps de
J. C. ils fignifîent l'objet prefent confiderc comme virible,& *
fîgnifiant : cet objet eft du pain & du vin avant la confecranon,
après la confecration c'eft le corps de J. C. Mais quoique ce
foient deux fujets en efFet , l'efprit ne les regarde que comme
un feul fujet auquel il attribue diverfes qualitez ielon divers
jcftats.
On dit donc de cet objet prefent qu'il efl: honoré du nom de
corps& de fang de J. C. à aufe de l'addition de lagraceà la
nature , c'eft adiré à caufe de l'effet furnaturel que Dieu y a
opéré , fans en changer la nature fenfible qui confifte dans cet
amas de qualitez qui font qu'on appelle deseftres pain & via
plikoft que pierre & métail. Qu'y a- t'il en cela de difficile, &
qui ne foit à couvert des chicaneries d'Aubertin ? ■■
Mais je veux que par cette grâce on entende le corps de J. C.
qui efl: la grâce efTentielle ; le raifonnement d'Aubertin n'en
lera pas meilleur. Cai- pourquoy ne pourra t'on pas dire alors ,
■quecet objet compofé du corps de J. C. qui y tient lieu defub-
ftance , &de la nature fenfible qui fefait paroiftre à nos fens,
comme du pain & du vin, eft appelle corps de J. C. à caufe d'u-
ne de fes parties ?Qui empêchera que comme on dit que J. C.
eft Dieu par la divinité , qui eft jointe en luy à l'humanité j ou
comme l'on peut dire d'un globe que c'eft une fubftance, parce
-que c'eft de la matière jointe à une certaine figure j on.ne puifle
dire auffi de cet objet, quec'eft lecorpsdej. C. parce que Dieu
a joint dans cet objet le corps de J.C. à une certaine nature
fenfible , c'eft à-dire aux apparences du pain & du vin ? Qii'y
a t'il en cela de contraire, non feulement au langage du com-
mun des hommes, mais mêmeàceluy de laPhilofophiela plus
■chicaneufe Se la plus exadC:, 6c qui ne s'étonnera que des gens
Gf de trots Auteurs qui ont parlé comme luy. 1^59
«fënt proporerdepareilsraifonnemens comme des demonftra- Ch. IV.
tions,6c plus encore que par de Ç\ mifèrables fubtilicez ils ac,
quierenti'eftime êc l'admiration de tous ceux de leur parti ?
j Avant que de finir ce qui regarde ce partage où Tlieodoret
dit que Dieu ajoute la grâce à la nature , il faut rendre julbce à
Mo Claude , êd reconnoiftre que toutes fespenfées ne font pas
empruntées d'Aubertin , & qu'il prend quelquefois une jurte L-
bertëd'enhazarderdefon chef, qui non feulement font difFe-
xentes de celles de ce tameux Miniflre , mais même qu'il a ex-
preflement rejcttces.
Car un des fondemens de la réponfe que M. Claude a faite
au livre de la Perpétuité , c'efl que la doctrine delà prefence
réelle;,& de la tranfîubftaniiation ^cfi unjî q^mnddhohr d'imagi-
nation , quelle n'a pu venir que dans fcfpru d'un Moine , u l'oynbre
duConvent de Corbie : Qu'ainfi elle n'a point eftéformellemcnc
rejettée par les Pères, parce qu!ils ne l'ont jamais conçue i
qu'ils n'ont eu befoin d'aucune précaution pour cmpê>.lier
qu'on ne prît lenrs paroles en un fens qui ne leur vcnoit point
dans Tefprit.
Cependant Aubertineftfi éloigné de cette penfée , qu'il die
exprcfïèmentque Theodoret a ajouté ces paroles . que Dnune
change point la nature , mais qu'il a feulement joint la grâce à la na-
ture , pour empêcher que les fimplesfidellesneconçûircnt que
lepaineftoit lubftantiellemenr changé au corps de J. C. &. il
avoue que cette penfée leur pouvoit venir dans i'efpnt.
// a voulu ^ dit-û , par cette addition prévenir (y- éloigner par
avance une penfée qxji pouvoit venir, dans l'ispiviTi^w Fi-
delles (impies f^peu intelligens ^ en entendant parler du changment
du pain au corps de Chrifi. Or cette penfée qui leur pouvoit venir ,
quand on donnoit devant eux au pain ^ au vin les noms de corps ^
de fang de J. C. en fuite d'un changement qui avoit précédé , ejîoit
que le pain cJloit fubfiantiellement changé au corps deClrijl.
Ainfi Aubertin fuppofc nettement que les Fidelles {impies^:
peu intelligenspouvoienteftre frappez par les paroles qui mar-
quent un changement de l'idée d'une prefence réelle & d'une
tranflubftantiation véritable : Se M. Claude prend pour fonde-
ment de fa réponfe que cela ne pouvoit eftre. \
Si l'on veut en fçavoir la raifon,c'eft qu'il a paru utile à Auber- |
tin de fuppofer l'un ,& à M. Claude de fuppofer l'autre. Leur |
intereft les unie , lors même qu'ils paroiflcnc di vifez. Ils ont eil •^
L 1 iij
x-jo Liv. V. Explication des pajfages de Theodoret
des vues contraires dans le même but Le mal eftque par cette
voyeon fait quelquefois defaulfes démarches ^ dont les confe-
qucnces font fàchcufès, parce qu'on ne prévoit pas allez àquoy
l'on s'engage par ces maximes que Ton avance dans la vûë d'un
intereft prefent.
On a déjà fait voir les abfarcJitez de la fuppofîrion de M^
Claude, Si il n'y en a pas moins dans celle d'Aubertin,qui veut
que quoique les fidcllesne cruilent pas la prcfence réelleni la.
tranliiibftantiatiori, ils s'en pouvoient néanmoins former l'idée
fur les paroles qui marquoient que le pain eftoit changé au
corps de J. C. Car s'il eft vrfy que ces paroles donnent l'idée de
la rranlTubftantiation, c'efl à dire félon luy, d'une dodrine
qu'il faillit bien fe garder de croire : d'oi!i vient que jamais
aucun Père n'apenfé à prévenir cette erreur? Pourquoy ont-
ils fait tout ce qu'ils auroient pu de mieux pour la faire naiftre
& pour l'entretenir ? Pourquoy ont ils appliqué tant de fois les-
mots de changement à l'Euchariftie, fans jamais aller au de-
vant de cette penfce ? Pourquoy auroit il fallu que ce fût
Theodoret qui l'eut fait le premier & le dernier, bi. encore
avec tant d'obfcuritéj que Ton diicoursefloit bien plus propre
à confirmer les fidelles dans cette peniée , qu'à les en détour-
ner, comme nous l'avons fait voir.
CHAPITRE V.
Autres fophjfmes â' Auhcriin dans ce qu'il a écrie
fur Theodoret.
E qu'Aubertin a écrit fîir le fujet de Theodoret contient
un figrand araasde fophifmes y qu'il les faut necelfaire-
ment partager en divers chapitres , encore n'"entreprens-je pas
de les rapporter tous icy, tant parce qu'il y en a que nous avons
déjà exprefTement refutex, que parce que M. le Cardinal du
Perron a tellement éclairci les autres , que Ton ne pourroit que
redire ce qu'il en a dit.
Aubertin répète ^ par exemple , trois ou quatre fois cet argu-
ment, qu"eTheodoret parle motdeC^O'^ entendu le pain dans
cette proportion : Cecy efl mon corps ; Scqu'ainfi , félon luy ,
c'eûdupainquej. C. a dit q[u'il eftoit fon cor s. D'oùilcon-
& de trois Auteurs qui ont parlé comme luy. 171
dut félon fa Logique que cette propofition ^Cccyefi mon corps ^ Ch.V.
fe doit prendre en un lèns de ligure. Cependant nous avons
fait voir que c'eft un argument à quatre termes ,6c un Tophif.
me indigne d'un homme de bon iens.
C'eft aulFi prmcipalement fur cet Auteur qu'il étale cesrai-
fonnemens fophiftiquestirezyle la diftincliun qui doit eftre en-
tre l'image &: l'original. Et il les reprend à tant dcdiverfes
fois , qu'il n'y a point de Ledeur, je crois mcme dans fon parti,
qui n'en loit ennuyé. Mais comme nous les avons réfutez dans
un chapitre exprés , il n'eft pas befoin d'en rien dire icy.
!• Je me contenteray donc d'en recueillir encore quelques-uns
qui méritent d'eftre remarquez. L'on peut mettre ceux qui
fuivent de ce nombre.
A pfés avoir rapporté l'endroit du premier dialogue oiiTheo-
ëoret dit , que le Sauveur a changé les noms , g^ qu'il a donné à fon
corps le nom du fymbolc , (^ au fymhole le nom de fon corps : il fait ■
cette reflexion, & la propofe comme un axiome. Il ejl très cer-
tain , dit il , que le changement de nom qui fe fait entre les fiyies, ^
les chofei fortifiées , ne marque pas pliitofl que les fzries (oient les
chofes fgnifiéeS , qu'il ne marque que les chofes fignifiées foient les
fîgnes i c'eft à-dire pour developer &; appliquer fa niaxime, qu'il
nes'enfuit pas pliitoft de ce changement de noms , que le pain
foit le corps de J. C. qu'il ne s'enluit que le corps de J. C. foit
du pain. Or il ne s'enfuit pas que le corps de J. C. foit du pain i
il ne s'enfuit donc pas auiïî que le pain foit le corps de J. C.
Mais cet argument n'eft fondé que ftir une fupprcffion infî-
delle dece qui fait voirie fens auquel Theodoret parle de ce
changement de noms. Car il eft vray qu'il ne s'enfuit pas prc-
cifément de ce que Theodoret dit que J. Q.. a changé le s noms
entre le fymhole (j;- fon corps ^ quelefymboie foit réellement le
corps de J. C.
Mais cela s'enfuit de ce qu'il marque que le changement de
nom à l'égard du fymbole , qui eft appelle corps de I. C. eft ac-
compagné d'un changemeut opéré par lapuiftancede Dieu ^
par lequel le pain & le vin (ont faits le corps & lefangde J. C.
fc de ce qu'il ne marque point que le changement de nom à l'é-
gard du corps de J. C. qui eft appelle /^/«d^/r^w<7«/ , foit ac-
compagné d'aucun changement.
Non feulement ce changement s'enfuit félon Theodoret dç%
cxprclîions par lefquelles J. C. nous aifure que le pain eft fon
lyi Liv. V. Explication des pajfages de Theodoret
corps Se le vin Ton fang , mais cela s'enkiit même de celles dans
lefquelles il eft appelle f/gwi', 6c Ton cor^s fromembi pain. Car
comme on a déjà remarque, quand Theodorec compare ces
propoficions: Le fang dcj. C. eft du vin h le vin ejl le fangcCe
7. C. Le corps de J. C. ejî du pain j le pain efi le corps de J. C. ce
n't'fh pas comme ayanc une vérité de même genre. Il veut au
contraire qu'on regarde celle où J. C. nous aillire que le paia
eft Ton corps & le vin Ton fang,comme la fource de la vérité des
autres , & ce qui a donné heu à les dire : & il prétend qu'elles
doivent toutes contribuer à nous faire croire le changementpar
lequel le pain eft fait le corps dej. C. Celles par lefquelles J. C.
nous dit .,que le pain efi fon corps gS le vin fan fang , y contribuent
diredement, parce qu'elles exprinientdiredement ce change-
ment. Et celles par lefquelles J. C. nous affure qu'il efi une vi-
gne, que fa chair efi un pain , que fon corps efi un froment ^ y con-
tribuent indiredementpar le rapport que ces termes. ont avec
l'inftitution de l'Euchariftie.
C'eft ce que Theodorer enfcigne nettement, lorfqu'aprés
avoir fait dire à l'Eraniftie qu'il voudroit bien fçavoir lacaufedé
ce changementde noms, il fait répondre parrOrthodoxe,^»^'
la caufe en efi claire à ceux qui font initiez^auxmyfieres ,^ que le
Seigneur a voulu que ceux qui y participant ne confiacraffentpas la
nature des chofes qui s'y voyent ,mais que par le changement de
fjoms , ils ajoùtajfcntfoy au changement que la grâce opère. Ce qu'il
étend expreflemcnt ,tant aux propoiitionsoù f. C. nous dit que
k pain efi fon corps ^ le vin fon fang, qu'à celles où il appelle
fon corps naturel froment ^ pain.
Toutes ces expreffions tendent ielon Theodorer à établir les
Fidelles dans la foy du changement qui rend le pain &le vin
corps é- fang de J- C c'eft la fin unique de ce changement de
Bomsi écil eft-bien clair que ces expreiïionsne tendent pas éga-
lement à cette fin, & ne contiennent pas cette vérité aufli for-
mellement l'une que l'autre.
Aubertin avoit fifortement dans l'efprit cette fauflêidcejque
Theodoret comparoit ces expreffions comme eftant de même
genre , & également figurées, qu'il ne s'en eft jamais pu défaire^
6c c'eft ce qui l'a engagé encore dans un autre fophilme. Il faut
„ neceftîlitrement, dit-il, queTheodoret compare ces expreffions:
,, Le fangdej. C. efi au vin: Le vin efi le fang de J. C. comme de
„ même genre j 6c comme eftant routes d-eux figurées. Autre-
ment
t^ de trois Auteurs qui ont' parlé comme îuy. 275-
mfnt l'Eranifie Iuy auroic pu répondre , que l'exemple de iTu-
chariftie qu'il allcyuoit four êclaircir lu frophctic de ^acob ^ où il
ptctendoii qwe !e fangde J.C. eftoic appelle X7'«, n'avoir rien
de femblable,& cela pour deux rarfons. La première efl qu'il y
auroit eu une différence coure entière entre ces expreHions ,
puifque le vin de l'Euchariftie félon cette h) pothefe efl: propre-
ment vin 5 au lieu que le fangde J. C. ne peu reftre appelle vin
que figurémenr. Secondement , fi le vin de l'Euchariftie efl pro-
prement fang; on ne doit point trouver étrange qu'on l'appelle
fang , puifque chaque chofe peurefbreappeilcepar fon nora.
Mais le fang de j. C n'eft poinr proprement du vin. Ainfl l'ex-
prelîîon n'eft nullement fémblable , ôê cet exemple auroir un
effet tout contraire au defTein de Theodorer. Afin donc qu'il"
ait pu s'en fervirjlfaucneceirairement fuppofer qu'il a regardé
coures ces exprelïïons comme également figurées.
On peut apprendre parce difcours qu'il y a une certaine fub-
tilité qui n'a pour effet que d'obfcurcir les lumières naturel-
les j & que plus on a de cetre forte d'efpric , moins on a de
celuy qui fait juger deschofes félon le bon fens.
Auberrin n'a pu comprendre queTlieodoreraicpn employer
l'expreflion de J. C. dans l'inflitution de I Euchariftie : Gecy eft
mon corps : Cecy ef}mon fmg, pour écIaircir le lieu de la Genefe
où Jacob dit du Mciîie qu'il /avcm fon vvtemtnt dans /«'x'/»,pour
montrer que le Pr.iphcce a voulu dire qu'il laveroïc fon corps
dans fon fang, & qu'airifr le fang de J. C. eft défigné dans cet-
te Prophétie par le mot de vin : Il n'a f<ju comprendre, dis- j^s,
que Theodorer airpn fe fervir de la première pour cclaircir la
féconde , à moins qu'elles ne foient également figurées. Ce-
pendant tant s'en faut qu'il foie neceiTaire que la propofition de
J; C. foitfigurée,afin d'éclaircir celle Jde Jacob, qu'elle l'éclair-
cit infiniment mieux, parce qu'elle ne l'efl pas. Car rien ns
nous fair mieux comprendre le fens d'une métaphore que
quand on de\'elope la vérité litreralequi en efl le fondement.
Il s'agifToit de prouver que dans ces^ paroles que Jacob dit du
Meffie : // Livira fon vêtement dans le vin ^ on devoit enten-
dre par ce vin le f^ng" de ce même Meflîe. Or le moyen de le
montrer plus folidemenr , qu'en faifanc voir que J. C. avoit
dit du vin que c'eftoit fon fang,& qu'il ravoitfairréellemcnt
6c véritablement fon fang , quoiqu'il confervaft les apparen-
ces du vin -^ Cette vérité littérale que le vin efl réellement 1«
Mna
Ch.V.
î. 74 L I V. V. Explication des p^Jfigss de Theodoret
fangdeJ.C. n'eft; elle pas très propre à nous perfuader que Ja-
cob a entendu fon fang par le mot de w«, & peut-on mieux
montrer, par exemple, qu'on a eu raifon d'appeller un homme
tygre ou lion par métaphore , qu'en montrant qu'il eft réelle-
ment ou cruel ou courageux , qui font les fondemens de ces
métaphores?
Une fimple comparaifon d'exprefîions également figurées
eft: une preuve trestoible Cari! ne s'enfuivruit nullement de
ce que J. C. auroit appelle le vin fon fang par une fimple
exprclfioD figurée, que le Prophète eût entendu parle mot de
vin le fang de ]. C. Mais quand on dit qu'il s'eft: fervi du vin
pour en faire eiïedivement fon fang,& que le fing nous efl:
donné fous le figne & le fymhole du vin ,on eft infiniment plus
porté à croire que Jacob s'eft fervi du mot devin pour fignifier
ce fang. Car ce myftere Q^x grand, qu'il eft comme impofîi-
ble que les Prophètes ne l'eulFent dansl'efprit, Se qu'ils ne
l'ayent marqué par quelque figure. Et ce rapport de la figure
à la vérité perfuade d'autant plus, que l'expreffion de Jacob
étant certainement figurée & myfterieufe , il ne paroift point
d'autre vérité ni d'autre myilere auquel on la puiffe rap-
porter.
Aub. p. -!%(!. Aubertin & M. Claude tirent encore une autre objecftion de
ce que Theodoret dit ^ I. C. a honore les fymboles vijïbles da
nom de fon corps ^^ de fon fang. Aubertin l'étend davantage , &
marque plus précifément fur quoy il la îowàt.On ne fe f en jamais^
dit-il ^dc cette manière de parler que dans les chofes qui rcc^oivent le
nom d'autres chofes ^fans efire changées fuhfiantiellement. C'cfipour-
quoy on ne dira jamais que la verge de Mo'ife ait eflé honorée du
nomde ferpent , ni l'eau de Canadunom de vin., parce qu'il fe fit un
changement fuhftantiel en ces chofes 5 mais on dit fort bien que
l'image d'un Roy efi honorée du nom de Roy.
M. Claude la propofc d!une manière plus abrégée, & avec un
certain dédain qui eft plus de fon air. Car après avoir rapporté
le même palîàge ,il fè contente de dire,^^^ S.Sacrement eji
réellement & fukftuntiellcment le corps de I. C. que veulent dire ces
gens avec leur Honoke' .^ en nous lailTant ainfi à deviner le
principe de fa confequence , qui ne peut eftre autre néanmoins
queceluy d'Aubertin.
Il eft vray que c'eft plùtoft par prudence que parfierté qu'il
iSn ufe aiafi. Car premièrement les exemples d'Aubertin ne font
M. Claude
p. 6ë,
g;7 de trois Auteurs qui ont parlé comme hif. Z75
©ropres qu'à faire rire. Ce n'dl point ia feule métaphore qui Ch. V°
iait qu'on fe peut quelquefois fervir du mot è.'Monorè. Il faut de
■plus que le nom foie honorable. Ainfi parce qu'on n'a jamais re-
garde le nom de ferpent comme un titre d'honneur, on ne dira
■jamais que dans cette exprellion , fuper Levi&than fcrpentem ^ *'" ^''•^'
/^ri*«'///w, l'Ecriture honore ie Diable du nom du ferpent, Et de
même parce qu'encore que les hommes ayenç établi quelque
preferen::e entre l'eau &: le vin , ce n'efl: pas néanmoins une
préférence qui s'exprime par le mot d'honneur ; on n'auroit ja-
mais dit de l'eau de Cana,quand elle n'auroit efté changée que
£î^urément en vin , que l'Ecriture l'honore du nom de vm.
Et pour le principe dont Aubertin conclut que cette expreffion
feroitablurde, fi lepain eftoit réellement changé au corpsde
J. C. il eil aulfi vifiblement faux & contraire à la raifon. Car
comme nol\re imagination ne nous repreienre point le pain
comme détruit , miâis comme élevé à un état plus excellent ,
on peut dire qu'il eft honoré par cet état.
C'eft ce q.u! a porté S. Fulbert à cette expreffion : Za matière'
terre ftre pjjjunt le mérite de fa nature efi chany:c au corps de lefus-
Chrifi.
Et à celle-ci S. Hiidebert ,
JsJefcit homo , latet (j^ fuperos quo frovehat efcaf
Gratta vtrborum mvfieriufnque crucis.
Et ailleurs encore parlant de l'élévation que le Preftrefait de
l'Jioftie.
Tollit vtrumcjue notans ^ quod Jît coynmunihîis efcis
Altior , S^ quiddam majus utrnmque ^erat .
Il dit même que le psin honore l'autel par la chair de J. C.
Siih cruce , fui? verbo natura iwvatur , ^ aram
Panis hovorifcat carne , cruore calix.
Et l'Auteur du Sernnon delà dignité dKprcftres ,qui fe trouve
parmi les oeuvres de S. Bernard, fe fert d'une exprefhon toute
iemblab'e , loriqu'il dit i:\ixe c'efk créateur du vin ,qui élevé Ig
vtna la. di^mtédefar.g de J.C. Ckeator vmi efl quivinumfro.
vehit in fanyjinern.
On ne doit donc point trouver étrange que le pain eon^icré fe
reprefentant encore à l'imagination auiîi-bien qu'aux fens fous
l'idée du pain,cm dife qu'il efi honoré du nom de corps de I. C.
Mais tant s'en faut que l'on prétende par là nier qu'il le foie
réellement , que c'eft ce que \q& Pères ont voulu marquer
M nv ij
i.y6 Li'V. V. Expliciition des pajfa,ges de Theodoret
par cette exprefTion. Car ayant un fouverain refpect pour la pa-
role de Dieu, ôieftant perfuadez quec'eft la même chofe à
Dieu de dire ôc de faire j quoniamipfe dixit (^ fatia funt , Scàt
plus n'ayant jamais eii la moindre penfëe (^ue ces paroles ^Cccy
^ wo«Ci?r/'j-, fe puflent expliquer en un fens de figure; ils ont
pris pour la même cliore de dire que le pain cfifait le corpi de
-î. C. & qu'il cjl appelle corps de 1. C & ils n'ont point tiré de
-cet te expreflion une conséquence grammaticale comme les Mi-
niftres, mais une confequencerëcUe, en concluant que fi I. C.
iivoit appelle le pain Ton corps , il falloit qu'il fut effeclivemeta:
fon corps ; & qu'il fut changé en Ion corps
C'efl: ce que S. Ambroilecn conclut exprclTement dans fon
livre pour les nouveaux bapcifez. Avant L bénédiction , dit-il ,
qui fe fait par les paroles celefles , on nomme -une autre efpece , après
2a confecnition , on marque que c'cfl le corps de J.C. Avant la confe-
cration on appelle ce -qui efl dans le calice d'un autre nom i après la
. confecration on l'appelle fan'^ , ^ vous rèponde%^. Amen , c'eji-k-
' dire , cela eft vray. Que vofiie cfprit foit perfuadé de ce que vojlre
houche eoîifeffè.
Theodoret enfeigne de même que le pain e fi appelle corps de
J. C. non par une fimple métaphore, mais afin que parce chan-
qerncnt de noms , notis cruffions le chan'îement que la ^ace opère,
Ainli comme ce changement, félon luy, efi que le pain efi fait
de corpsdeJ.C. dtCiSiMi^x félon luy ce que nous fommes obli-
gez de croire en vertu de cesparoles , par lefquelles J. C. a ho-
noré le pain du nom de fon corps.
De même dans fon fécond dialogue TEranifle ayant fait dire
à l'-Orthodoxe qu'après la confecration on appelloit le pain ,
corps de J. C. il en conclut qu'il faut donc croire que l'on reçoit
Apud Allât Je corps de J. C.
Nicephore Patriarche de Conftantinople pour marquer que
l'Eucharillie n'eft pas l'image , mais le corps même de J. C. ie
contente de dire que l'on ne l'appelle pas image, mais fon corps
mên>e. Nous n'appelions point , dit il , ces deux i7nages ^ fiyires
de fon corps , quoiqu'ils foient faits fous des fymbolcs ou des figures ,
7nais le corps 'ûièmc de J. C. Et le Diacre Epiphane dans le fécond
■Concile de Nicée, fe fert du même langage: Ni le Seigneur.^ ni
les Apofres , dit il , «/ /f/ Pères , n'ont point appelle image le Sa.
crifice non finilant , mais ils l'ont appelle le corps même ^ le fang
même. Et cela fufEt à ces Auteurs pour conclure que le pain con-
aiii
gj? de trots Auteurs qui ont parlé comme luy. i.-jj
facréeft véritablement le corps dcJ.C. parce qu'ils ne doucoient Ch. VT.
point que dire êc faire ne fufîènt en Dieu la même chofe.
Photius ne ie fert il pas auflî de ces exprefïions , que Itf ^ain ApudAUjt.
■^ changé au corps de J. C. & que le vin efi appelle fonfanz, com- fus chrci<fco«
me ayant la même force? 0 merveille! dit-il dans une lettre au PMij.
^ape Nicolas Je pain commun ejl changé au corps de y. C. ^ le vin
commun efi appelle fan fang.
Et Jeremie Patriarche deConftantinople , dont on ad biea
juftific la foy à M. Claude qu'apparemment il n'en doutera
plus j ne fe contente-t'il pas pour marquer que J. C. fit le pain
•ion corps, de dire qu'il le nomma fon corps > Après , dit-il , que
^. C. eût célébré laCene félon la loy de Moyfe . il donna à [es difciples ^" '^*'";" -»
un nouveau jacrifice. Il rompit premièrement Le pain , O' Le nomma
•fon corps.
Si M. Claude entroit un peu plus qu'il ne fait dans l'efpric
<3es Pères, & dans la foumiffion qu'ils avoient pour la parole de
Dieu , il trouveroit de luy même ce qu'ils ont voulu marquer,
quand ils ont dit que le pain efi honoré du nom du corps de J. C. 6c
il comprendroit fans peine , que comme Dieu fait tout ce qu'il
veut , &que fes paroles font toujours véritables , c'eft la même
chofe de dire , qu'il a appelle le pain fon corps , que de dire qu'il
l'a fait fon corps J comme c'eft la même chofe de dire qu'il a
commandé au Lazare de fortir du tombeau, & de dire qu'il lujr
a redonné la vie.
CHAPITRE VI.
Examen des mêmes pajfages de Theodoret par rapport
k la TranJJ'uhfiantiation.
NOUS venons de voir quels font les argumens que les
Miniftres tirent de Theodoret contre laprefence réelle;
& nous en pouvons dire avec vérité qu'ils ne peuvent furpren-
dreque des efprits précipitez, qui felaiflent éblouir par les plus
légères apparences, fans fe vouloir donner la peine de réunir
les divers endroits où un Auteur parle delà même matière ,
pour en tirer fon véritable fentiment.
Il efl: vray qu'il y a quelque chofe déplus fpecieux dans les
objedions que cet Auteur fournie contre la Tranflubftantia-
Mmiij
2.78 LiV. V. Explication des pâfigcs de Theodoret
tion ^ puifqu'il die d'une part^»^ J. C. a honoré les fymbotcs du
7iom de fon corps y non en changeant la nature , mais en ajoutant la
y-ace à la nature , d'où les Miniftres concluencque la nature du
pain n'eft donc point dvangée f & qa'il ajoute de l''autre que
les fymholes ?nvfiujiics ne quittent point leur propre nature^ ^ qu'ils
■demeurent en leur première ejfence & dans leur figure ij'^ dans leur
forme.
On ne s'arreftera pas icy à la remarque faite par le Cardinal
du Perron , qu'au lieu de traduire , comme les Miniftres font ,
que les fymbolcs myjliques demeurent en leur première fubftance ^
dam leur figure ^ dans leur forme., on pourroic fort bien traduire^
que les fymboles myftiques demeurent dans laforme ^ dans lafi^^
re de leur première fubftance : Non qu'ils ayefit des raifons con-
vaincantes pour combattre cette tradu(fi:icn j mais parce que
Theodoret dit en un iiutre lieu, que Dieu ne change point lana^
ture , & qu'il dit QX). ce\i}'^-C'^ j^ que les fj/mbsles 7nyftiques ne ^uit-
tentpoint leur propre nature , ttjs (pvuzas orA.iia.s cht «^ifetla^
On veut donc bien fuppofer qu'il ait dit encore ^a'/A demea.
rcnt dans leur propre fubftance ou cftence. Et l'on avertie feule-
ment les Miniftres que pour pratiquer envers nous la même
cquiîc que l'on pratique envers eux , ils ne dévoient point fe
ièrvir de ces palîag^es , fans avertir le monde que ces termes de
■^latureicàQ fubftance ou ejfence ontun ufage très- commun dans
les Pères, félon lequel il n'eft point contraire à la dodrine Ca-
tholique de dire que les fymboles , c'eft-à- dire le pain & le vin _,>
retiennent leur propre nature y(^ demeurent dans leur propre ejfence.
Carc'eft l'ignorance de cet ufage qui fait que Ton eft frappé de
CCS {0XIQ.S d'expreffions. Cependant ce double ufage eft fi con-
ContrelcP. (^atit, quclcs Miniftres foHt contraints d'en faire quelquefois
un aveu public, jeveux , dit M. Claude, tomber d'accordde cette
remarque ( que les mots de nature &L àe fubftance font équivo-
ques , & ne fignifient pas toujours ce que l'on a^^oW^ fubftame
dans l'a Philofophie de l'Ecole ^ ) (^ je "veux encore avouer ^de
""' boti'ie foy , que Ji mon argument eft oit fondé fur le term-e de fubjiance.^
le paftage de Theodoret me ferait inutile , puifque ceft un terme
équivoque qui peut fouffrir deux interprétations.
, Xe mot de ruii'are ., dit Anhertin , fè prefid très- jàuvent pour la
qualité ^ la condition. Et ainfi l'on dit qu'une chofe eji changée en
■iasATVKZ d'une autre .^parce qu'elle en acquiert les qualitez^ Ce
qu'iJ.prouve par 14. paflàges pris de divers Pères. Et félon «e
^ de trois nAuteurs qui ont parlé comme luy. ij^
fèns on peut bien dire que le pain ne change pas de nature ^^t Ch. VI,
la confecration , puifqu'il ne change pas de quaUtez.
// efi vray , dic-il en un autre lieu , que le mot de nature fe p-cnd p- 7*7.
.^uelqu.efois pour les qualitei^^ facultcz^^ proprietez^dc la fuhfiancCy
icommcil ejf clair par les p.ijfaqes d^Hilaire (^ de TertuÙien , cite?:^
far le Cardinal du Perron , (^par une infinité d'autres lieux que no^is
avons allegucz^ailleurs^ K'Liis locis quamplurimi s . Orunfensqui
fe prouve par une très-grande quantité de palfages , n'eft pas
fort extraordinaire.
Et de peur qu'on ne prétende que félon Aubertin il n'en efl: pas
ainfi du mot de fubftance ou de So-/*, il n'y a qu'à voir ce que
dit Aubercin fur le paffage attribué à Eufebe Evêquc d'Emefe.
ZlC mot de fubfiatice , dit il, comme le Cardinal du Perron l'a remar-
que ^ ne fe prend pas- toujours à la ri<^ueur pour une chofe fubjifiante-^
mais quelquefois il fe prend auffî pour les qualité'' gS conditions de
cette chofe : ce qu'il prouve par hùitpaflàges formelsjoutreceux
que le Cardinal du Perron avoit rapportez.
Il s'enfuit de là que comme ces Miniftres ne prétendent tour-
ner ces pafTages à leur fens , que par ce qui les précède , &: ce
<jui les fuit dans Theodoret,touces les fois qu'ils nous les repre-
fentent détachez , 6c qu'ils infiftent feulement fur cç$ termes ,
que le pain ne quitte point fa propre nature , qu il demeure dans fa
■première fubfiance ^ que Dieu ri enchante point lanature , ils trom-
pent le monde , 6c abufent delà pente que donne la Philofb-
phie Scholaftique à prendre aujourd'hui ces mots en un certain
lens qui n'eft pas néanmoins le plus commun dans les Anciens.
Ainfî pour retrancher ces avantages injuftes, 6c marquer pre-
cifément le véritable état de la queftion qu'on doit former fur
ces paroles de Theodorec, il eft clair qu'il ne s'agir pas de fça-
voir n ces termes détachez de leur fuite peuvent recevoir le
fens des Catholiques ,6c fi l'on peut dire fansblefler en rien la
doârine de la tranlÏÏibftantiation, que Dieu ne cha77^c point la
nature des fymholes ^ que les fymboles ne quittent point leur propre na-
ture. Car cela eftavoué 6c reconnu par Aubertin, par M. Clau-
dej6c par tous les Miniftres. Mais il s'agit de fçavoir s'il y a
quelque chofe dans la fuite du difcours de Theodoretqui em-
pêche de prendre ces termes dans un fens compatible avec la
dodlrine de latranflTubftantiation. ■'_'_ ^ '!.!■. 1
Le feul établifièment de la queftion doit donc ôSîiger la plu-
part des Calviniftes de fufpendre leur jugement fur le fens de
fasT. 8. c. j.
a, S o L I V . V. Explication despa.Jfiges de Théodore t
ccpa0age , & d'en parler avec plus de retenue qu'ils ne font,,
puifqu'ils ne fcauroient dire avec vérité qu'ils foienttousafler
informez de cette fuite du difcours, d'oii néanmoins , félon
leurs Miniftres mcmes^toute la force de ce paffage dépend. Er
s'ils ont quelque amour pour la vérité ,ilfautqu'ilss'accoxltu-
nient à regarder ces paroles comme pouvant certainement re-
cevoir un fens Catholique ^Sc qu'ils fçachentde plus que de-
puis même que l'herefie des Sacramcntairesa rendu certains
termes fulpeds , depuis même que par l'abus qu'elle en a fait,
elle a obligé les Catholiques d'efîre plus circonfpeéts dans
leurs exprellions , on trouve néanmoins qu'ils fe font encore
ièrvis des mots de nature dans ce fens , 6c qu'ils n'ont pas craint'
de dire que Li nature du pain (jr du vin demeurait dans l'Eucha^
rifiie. En voici quelques exemples.
Il ell confiant parmi lesft^avans que le Livre deCœna Dominiy
que l'onattribuoit autrefois à S. Cyprien,eft d'un temps beau-
coup pofterieur ,& les Mmiftres mêmes ont crû qu'il eftoit du'
bien de leur caufede foûtenir qu'Arnaud Abbé deBonneval,
contemporain de S Bernard en efloit l'Auteur. Il eft donc
jufte de les faire reflou venir prefentement que lorfque les Au-
teurs Catholiques leur alleguoicnc ces paroles de cet Auteur:
Panis ijie non effipe fcd natura miitatus , omnipotentia Verbi
façliis eft car» y, ils répondoient parla bonche de Saumaife, qu'rl
y avoit des manufcrits qui port oient , partis ijh ncc effipe necna-
turu piutatus. Et ainfi en prenant droit fur cette manière de
lire qu'ils ont voulu autorifer,& qui peut cftre véritable ; voi-
là un Auteur Catholique déclaré pour Ta tranflTubllantiation ,
qui au même temps qu'il l'établit , ^ ç\\\\\^\x.(\\it le pain efl fait
chair par la loute-puijjance deDieu^wQ laifl^ pas de dire en même
temps aulTi- bien que Theodoret , q^ue le pain ne change ni defor-
rae ni de nature.
Le Cardinal Pulius dit expreffement, que la naturedu painr
demeure , au même temps qu'il enfeigne quela fubfliance pafl!è,
tranfit itaque fubfiantia , fcd remanet forma , quamobrem non efi
fcnfuum delufio .^fed vera Dei comprehenfio , quod cum in Domini-
ca rnenfa fit Jolum caro ^ fanguis , nihilomintu vini N ATURA/'<rr-
cipiatur. Car puifque l'on fént la nature dvivin , félon cet Au-
teur ,& que les fens ne font point trompez , il faut que cette
nature demeure. Cependant félon luy-meTme lafubftance ne
(demeure poinc.
V Innocent
(^ de trois Auteurs qui ont parlé comme luy. 1 8 j
Innocent III. enfeigne que non feulement les accidens, mais Ch. VIT,
auflîles proprietez naturelles demeurent , natumles fropristates i-ib^;- mvft.
marient ut pane it m. Or, qui doute que les mots de proprietez ^'"^'^•'•
naturelles & àe pancité ne foient lynonymes avec celuy de na-
ture &c à'cjfcnce de pain?
Pourquoy donc ne trouveroit-on pas le même langage dans
les AncienSj ou pourquoy s'en étonneroit on quand on l'y trou-
ve ? Qu'on ne nous cite donc plus fi fouvent queTheodoret
àilyque les [y mb oie s ne quittent point leur propre nature. Car il eft
confiant que cela ne prouve rien, êc ce font les Miniflres mê-
mes qui nous l'apprenne it. Mais qu'on examine de bonne foy
* ce qui peut déterminer le fens de ces mots. C'eft ce que cous
allons faire dans les Chapitres fuivans.
CHAPITRE VII.
Explication Jtncere du pajfaqe de Theodoret tiré dr fon fécond Dia-
logue , par laquelle on fait voir qu'il ne hlcjfe en rien. la.
àoilrine de la Tranjfubftantiation.
LEs Miniflres ont mêlé dans l'examen de ce pafTàge de
Theodoret tant de termes Metaphyllques, dont on fera
obligé dedifcuter le fens avec une affez longue critique ; qu'a-
vant que de nous y engager, je croy devoir l'éclaircir d'une
manière plus populaire, 6c qui pourra fufîîre néanmoins à ceux
qui fe contentent de juger par le bon fens de ces fortes de cho-
k^, fans s'engagerdans ces recherches fi épineufes.
Tout le monde fçait que ce Dialogue de Theodoret a pour
but de réfuter l'herefie des Eutychiens, & que ces hérétiques
renouvellant en cejpoint l'erreur d'ApolHnaire, enfeignoient
qu'il n'y avoir qu'une nature en J. C.
Cette exprelîion leurétoit commune à tous,niais elle étoit
fort différemment expliquée.
Les unsdifoientque le Verbe étoit naturellement chair, &
que la chair étoit confubflantielle, & ne faifoic qu'une nature
avec la Divinité.
Les autres difoient , que le Verbe en s'incarnanc s'étoic
changé en chair, 2c que c'étoit en ce fens qu'il n'y avoit en J. C.
qu'une nature.
z8r Liv. V. Explication des pxJfdgesdeTheodoret
Les autres difoienc qu'il avoic pris une chair celefle ôc fpiri-
tuelle dans le ciel , avant que de naiflre de Marie.
Les autres vouloient que s'ctant uni à une nature prifede la
Vierge, il n'en eût fait qu'une nature avec la Tienne, &que la
nature divine eût ablorbé l'autre. C'cft particulièrement cette
manière d'expliquer l'hercfie Eutychienne que Theodoret
comb-^t dans Ton fécond Dialogue. Et comme elle pouvoic
cdrc encore différemment conçue , il rcprefence ces diverfes
manières, en les attribuant au mêmeadverfaire qu'il introduit
& tju'i! Fait parler; quoy qu'il ne loit pas probable qu'une même
pcrfonne pût avoir des (entimcns fî diffcrens.
Il {-ait voir d'abord que ceux qui difoient, quil n'y avoit qu'une
nature en J. C. ne laiiî-jient pas de reconnoiftre, que le Verbe
T)'cu avoit pris une chaire une ame raifonnablel & que s'ils re-
Theed.p jy. f^f^ji^nt; ,^q l'appel 1er /^^iww^, c'eH: qu'ils diCoient qu'il le falloic
nommer par ce qui a efté de plus excellent en luy.
^- ^^' Il fait voir encore que L C. elloit vraiment homme , (elon
ces Eutychiens, êc qu'ils cnfeignoient qu'il le falloit foûtenir
contre les hérétiques qui le nioient.
f. 7+. Qii'ils difoient que le Fils de D'eu s'etant fait homme avoic
tantoilfait paroiftre fa chair, & tantoft fa divinité.
^'l^' Qu'il y avoit en L C. une humanité parfaite.
f-77.. 0^1*^ Je corps de L C. n'étoit pas un vray fpetflre, comme les
Marcionites & les Valcntiniens l'cnfcignoienr.
Avec tout cela néanmoins cet Euty^hien ne laifîe pas de
foûtenir que la nature humaine de L C. avoit été abforbée par
la divine, &: que les proprietczde ces deux natures n'avoienc
point fubfiflé depuis l'union.
Il efi vray que pour ce dernier point qui efl: le changement
de la nature humaine en nature divine avec l'abolition despro-
prieceZj l'Eutychien l'ayant mis d'abord immédiatement après
l'union, lerecule enfin )nfqu'aprésrAfcenf!<^n. Etilparoiftmê-
m? après S. Athanafe , que c'ctoit là le fentiment de quelques
Apollinarifles, & qu'ainfi on ne fçauroit faire pafTcr cet état de
l'herefîe Eutychienne décrit par Theodoret , pour une pure
fiiftion comme Aubertin le voudroit.
C'efldonc ce dernier état de l'herefie Eutychienne qu'il faut
particulièrement confiderer icy.
Theod. f. 77. Lçs termes par lefquels il s'expr'me font, que la nature hu-
maine a eflé abforbée car la divine^ comme une 'goutte demiel jettée
dans la mer j efi abforbée ^arla mer.
ft) de trois Auteurs qui ont parlé comme luy. 183
Que L'humanité a perdu fa nature propre, Ch. VII.
Qu^elle a cfiè changée en divinité. p.? 9.
Que la nature humaine n'avait pat eftè détruite , mais qu^elle P- '''*•
avait efté chanzec en cfjencc divine.
Ce qu'ils entendoienc par làjou au moins ce queTheodorec
leur impuce d'entendre, c'eft que cette nature n'étoic plus fem-
blableà celle du refbe des hommes, & ne faifoic plus partie du
genre humain CCa. 'i'/j.i ro' d^'^fcùTtiiof ye'yoi.
Qu'elle n'avoit plus les mêmes bornes de Ton étendue, ifcu
Qu'elle n'avoir plus aucune des marques 6c des caraâeresdc
la nature humaine cxra. tîcd (JoV/» «TmAo?.
Que le corps de J. C. après l'Afcenfion ne s'appelloit plus
corps.
Voilà quel étoit le fens de cette expreffionque la nature hu-
maine ëtoitablorbée. Et ce que Theodoret prouve cft au con-
traire que même après la Refurreûion & l'Afcenfion , le corps p. %\.
dej. C. a une étendue bornée , qu'il efi vijthle, qu'il canferveles ca-
raBeres de la nature humaine.
En un mot les Eutychiens vouloient , félon l'idée que Theo-
doret donne de leurs fentimens , que l'elTence humaine fufl:
tellement abforbée, que le corps de J. C. full: invifible, impal-
pable, fans étendue bornée, fans forme humaine, bi. fans au-
cune des proprietez de la nature de l'homme. Et l'Eglife pre-
rendoit contre eux que le corps de J. C. cftoit encore vifible,
palpable, cjrconfcrit, qu'il avoir la forme & la figure humaine,
& qu'il confervoit l'effence d'un corps humain.
C'eft fur cette queftion que Theodoret ayant tiré un argu-
ment de l'Euchariftie, pour montrer que J. C. avoir encore un
vray corps , l'Eutychien en veut tirer un de fon cofté, ôc il le
fait en cette manière.
1. Il fait confeftcr à l'Orthodoxe, que les fymboles après
laconfccration s'appellent le corps & le fangde J. C.
2. Il luy fait confelTer qu'il croyoit recevoir le corps & le
fang de J. C.
Ècfur ce double aveu il forme cet argument. Comme donc les
fymboles du corps (^ du fan'i^duSei<incur font autres avant l'invoca-
tion facerdotale .^ mais après laconfccration ils font changez,, ^ font
faits autres j de même le corps du Seiyieur a efé changé en effence
divine.
Nn ij
"z?4 Liv. V. Expliciitiondes paJfagesdeTheodoret
C'eft là le raifonnement de l'Eucychien, & quoy qu'il ne foit
introduit dans ce Dialogue que pour eftre réfuté, il faut pour-
tant, afin de garder le caraderede la vray-femblance , quefi
fon argument eft faux , il ne foit pas tout- à fait extravaganr.
Or c'eft ce queTheodoret aura très mal obfervc , fi on l'expli-
que félon les hypothefes des Calviniftés. Car ils fuppofent que
lesEuthychiens &; les Catholiques convenoient que lesfymbo-
Ics n'étoient changez que de nom, de fignification & de vertu,
bL qu'ils ne recevoient aucun changement fubftantiel. Et cela
étant, l'argument que félon eux, Theodoret auroit fait faire à
l'Eutychien fe réduit à celuy-cy : Les fymboles de l'Encharifiie
chan<zent parla confccration de nam, de -figure (^ de vertu. Donc îe
corps de J. C. change de fubftance & de nature & devient in-
vifible &: impalpable: ce qui eft le comble de l'extravagance.
Il n'en eft pas de même en fuppofant que cat Eutychien con-
venoic avec l'Orthodoxe, que le pain éruit réellement changé
au corps deJ.C. & qu'il n'y avoir de difFcrence, que dans l'idée
de ce corpsj l'Orthodoxe l'entendant d'un vray corps, & l'Eu-
tychien d'un corps divinifé qui a perdu (ts proprietez naturel-
les Car alors fon argument ne fera pas fans vray (emblance, &
il confiftera à propofer le changement qui arrive dans TEucha-
riftie comme une image de ceîuy qu'il pretendoit être arrivé au
corps de J. C. après l'Afcenfion ; en quoy il n'y a rien qui cho-
que lefens commun. Car c'étoit comparer un changement mer-
veilleux &: inconcevable, avec un autre changement merveil-
leux & inconcevable. C'étoit comparer un changement qui fé-
lon luy faifoit perdre au pain le nom de pain, avec un autre
changement par lequel il vouloit que le corps de I.C. perdift le
nom de corps humain. C'étoit comparer un changement qui
. faifoit que le pain devenoit le corps de I. C. à un autre chan-
gement par lequel le corps de I. C. étoit fait une fubftance di-
vine.
Il y a dans tout cela beaucoup de rapport ^ & on ne voit pas
même d'abord comment Theodoret y pourra répondre.
Je demande donc fi , dans cette hypochefe, ce ne feroit pas
répondre conformément à cette créance, que d'accorder d'une
parc à l'Eutychien qu'il eft vray que les fymboles font faits le
corps & le fang de I. C. qu'on croit qu'ils le font , & qu'on les
adore comme tels:mais de luy dire en même temps que fa com-
paraifon prouve tout le contraire de ce qu il pretend;parce que
eommç ces fymboles ne perdent pointla figure du pain êc du vi%
^ de trois Auteurs qui ont parlé comme luy. 2^5
qu'ils lonc palpables/enfibles comme auparavant, & qu'jls con- C h. VI î.
fervent toutes les proprietez du pain & du vin; il faut conclure
en fuivant cette image, que le corps de J. C. n'a point au(îî per-
du la figure humaine, la forme humaine, Se enfin qu il n'a point
perdu les proprietez & les qualitez d'un corps humain.
Mais avant que d'ëclaircirde quelle manière il l'a fait : que
chacun prenne la peine de chercher en fov-même comment il
le devoit faire , en fuppofant qu'il crufl le changement réci
du pain au corps de J. C. comme on le croit dans l'Eglife Ca-
tholique. Que Ton fefouvienne feulement qu'il avoit affaire à
un homme qui vouloit prouver par cet exemple tiré de l'Eu-
chariftie, que le corps de J. C. avoit efté tellement changé en
une nature divine, qu'il n'avoitconfervény la figure, n\ la for-
me , ny les bornes de fbn étendue, ny aucune des proprietez
d'un corps humain.
Je demande, dis-je, s'il y a perfonnequi puft conclure de ce
difcours, que Theodoret ne croyoit pas laTranifubftantiation,
& fi l'on peut dire que faréponfe fbit extravagante. Cependant
la vérité efl: qu'il n'a rien répondu davantage. J'ay mis feule-
ment les motsfl'e pro^rietez^de pam ^ de vin au lieu de ceux de
nature , & d'efjencc du corps. Mais je ne l'ay fait qu'après l'avea
formel des Miniftres qui reconnoiflent que les mots de nature
& à'ejjence peuvent fignifier les proprietez 5c qu'ils les fignifient
tres-fouvent dans les Auteurs an-ciens. Je n'av donc ufé que
d'un droit qu'on ne fçauroit refufer à un interprète ^ & il fe
trouve néanmoins que la réponfe de Theodoret eft jufle,
qu'elle combat direclement les prétentions de l'Eutychien, &
qu'elle établit ce quel'Eglife foûtenoit contre luy Env^icyles
propres termes qui ne peuvent plus recevoir de diflicultez rai-
îbnnables après cet éclairciifement:-
Voîis vous efics envclopé dans les filets que voîis avez^ vous,
mêmes tendus. Car les fymboU s myfliques ne quittent point LEUR.
PROPRE NATURE après Li caufccration , puzs qu'ils demeurent
comme auparavant dans leur première ejjence , ^ en leur première
figure , ^ en leur , première forme, (^ qu'ils fiant vifibles ^ palpa-
bles. Mais on conçoit par l'entendement , qu'ils font ce quils ont efiè
faits. [ C'eft à-dire le corps & le fangde J. C. comme nous
avons prouvé queTheodoret ne pouvoit entendre autre cho-
ie. ] On croit qu'ils le font, (^ on les adore comme e fiant ce qu'on les
croit. Comparez^donc maintenant cette ima^e avec fon originAl'y ^
N n iij
tî6 Liv. V. ExpUciitiondes pajftges deTheodoret
vous vcrrez^lc rapport qudy a de l'un u l autre. Car il faut que la
fiyire rejjemblc a la vérité. Le corps donc de J. C . iTarde fa première
figure , fa première forme; ^ fa première circonjcnption^ ^pour le
dire en un mot il a l'ejfence d'un corps.
Quand il feroir même vray que par ces termes dont Theodo-
retu{e à l'égard deslymboles, il leur auroit donné trop de réa-
lité, cette expreffion fe trouveroit corrigée , parce qu'il dit en-
fuite , qu'ils font faits corps de "f. C. ^1" qu'on les adore comme efiant
ce qu'on léserait:^ par l'union de cette féconde vérité, il auroit
obligé de réduire la première claufe aune vérité exadle.
Car c'eft ce qui arrive d'ordinaire quand on parle des chofès
dont nous n'avons pas une idée bien nette dans l'cfprit. Il eft
difficile, par exemple, en parlant de l'unité de la nature divine,
de n'y pas mêler quelque idée qiù emporteroit l'unité même
des Perfones Mais pour la corriger l'on en confeiîè pofitivement
la pluralité. Il eft difficile de même qu'en concevant la pluralité
des Perfonnes, on n'y mêle quelque idée qui emporteroit divi-
fion d'elTence. Mais on la corrige en difant qu'il n'y a qu'une ef-
fence dans les trois Perfonnes. S'il y avoit donc quelque chofe
de trop fort dans ce que Theodoret dit de ce qui refte dans
l'Euchariftie, cet excès fe trouveroit corrigé par ce qu'il ajoute.
Mais il ne l'a pas fait. Il s'eft fervi de mots généraux qui par l'a-
veu même des Miniftres peuvent avoir le fens que les Catho-
liques y donnent, &: fe prendre pour l'amas des accidens.
Mais, difenc les Miniftres, quand Theodoret conclut que le
corps de J. C. conferve, v'clayffcùiJi.cLTos, il veut dire qu'il con-
ferve la fubftance paroppofition aux accidens. Or comment
tireroit-il cette conclufion.de ce qu'il avoit dit des fyroboles,
qu'ils confervcnt leur ou(ie, & qu'ils ne quittent point leur natu-
re , s'il n'entcndoit par ces mots appliquez à l'Euchariftie la
fubftance par oppofition aux accidens ?
L'on répond qu'ils fe trompent prefque en toutes les manières
dont on fe peut tromper fur ce fujet. Car premièrement il n'eft
pas vray que le mot d'«V/a. fignifieen cet endroit fubftance com-
me nous le ferons voir. Il fignifie l'eil'enceou les proprictez ef-
fentielles. Secondement Theodoret a eu droit de tirer la confe.
quence qu'iU luy imputent d'avoir tirée, & de conclure de l'e-
xemple de TEuchariftie, que non feulement les proprietez fen-
fiblesdu corps de J.C. fubfiftentaprésfon Afcenfion, mais aufli
la fubftance même de fon humanité. Car les Eutychiens,par l'a-
Çj' de trois Auteurs qui ont parlé comme luy. i%j
veu même d'Aubertin ,ne mecroient poinc de différence encre Ch. VI.
ces proprierez , & la lubllance de J. C. &: ils avouoienc que fi
les propriété'/, demeoroienc, la nature deraeuroic aiiiïi. Et par
confequenc Theodorec ayant droit parl'exempledel'Euchari-
ftie de conclure immédiatement &. directement que les proprie-
tez du corps de J. C. demeuroienr,S: qu'il a voit encore après Ta
Refurrcclion la figure ôc l'étendue humaine^il a pu porter fa con-
ckifion julqu'à la fubftance en vertu de l'aveu des EutychienSj
& ne feparer pas ce qui n'étoic pas feparé dans leur fentiraenc.
Mais quand cette lolution ne feroit pas aufll réelle qu'elle
l'eft, la vérité eft que le mot d'ouV/a. ne (igniiîe en aucun de ces
deux endroits lalubftance par oppofitionauxaccidenSjil fîgni-
fîe en tous les qualitez 6c les propriccezj &: Theodoret s'en
ferc dans le même iens, &; dans le principe &; dans la conclu-
fion. Le principe eiT: que lesfvmboies retiennent leur première
eifence, c'eft à-dire leo> propnetezdu pain & du vin. Et lacon-
clufion eft que le corps de J. C. coYikrvQl'eJJence de corps, c'eft-
à-direlcs prc^priecez d'un corps. Et c'cft ce qui paroifl: par Ton
expreffion même. Car après avoir dit, ^a^/é'^o/ypj^^J C. garde fa
frémi ère forme , fu premi ère f pire , fa première circonfnption , il
ajoute pour rafiembler en un mot toutes les autres proprietez
du corps humain, J.^x^x'iPJi îW^y -duj tv aounToi à'^ai'xv.
Par où il fait voir qu'il regardoit le mot d'ou/ie comme un
mot qui renfermoit , èc les propnecez déjà exprimées , &: celles
qui ne l'étoienc pas.
Ce n'efl: pa<; que Theodorec ne crût que le corps de J. C,
confei-voit fa fubftance aullî bien que fesproprietez. Maisquoy
qu'il le crûtjil ne l'exprime pas en cet endroit. Car on n'cxpri-
rnepas en tout lieu, tout ce que l'on croit. Et il luyétoit même
inutile de le faire , parce que les Eutychiens ne ciftinguoienc
pas ces deux chofes à l'égard de J. C. Ainfi comme c'ctoicpour
eux la même choie de dire, que la nature humaine étoit chan-
gée en Divinité, ou dédire, qu'elle n'étoic plus vifîbîe, palpa-
ble, 6c circonfcrite^ c'éroicauiiî la même chofe de dire contre
eux, que le corps de ]. C. avoic encore la figure humaine &L les
autres proprietez d'un corps humain, ou de dire nu'il avoir en-
core la fubftance même de la nature humaine par oppofirion
aux accidens. L'un étoit hé avec l'antre dans l'efprit des Eu-
tychiens. Et ainfiil fuffifoit de prouver 6c d'exprimer l'un^pour
les faire demeurer d'accord de l'autre,
i88 Liv. V. Explication despAjfAgssdeTheodoret
Je ne puis m'empêcher en finiflant ce chapitre de prier les
pciionnes cquicabJes de faire reflexion fur rinjuftice des Mi-
nières dans les raifonnemens qu'ils font lur ce palTage de Théo-
dore t.
A moins qu'on ne leur montre qu'il s'eTcfervi de termes dans
la propriété grammaticale , qu'il y a une juflefle de Géomètre
dans les conlequences qu'il tire , qu'il ne va point au delà de
ce qu'il avoir droit de conclure , ?f pour tout dire en un mot
qu'il a parle comme il auroit fait s'il avoit prévu, que ces écrits
tomberoient entre les mains d'Aubertin. Ils en concluent net-
tement qu'il a condamné laTranlfubdantiation^ & ils veulent
enfuite juger par ce fentiment qu'ils luy attribuent de celuy de
tous les Pères.
Mais quelle équité^ou plûtoft quelle ombre de fens commun y
a til dans ce procédé? Trouvera t-on quelque Auteur fi exad,
qu'il ne luy échappe jamais d'exprelTions ou de raifonnemens
qui ne foient dans la dernière exaélitude, qui n'abule quelque-
fois de certains termes en les prenant dans une fignifîcation
moins propre ? Et y a- 1- il aucune matière ou ces défauts foient
plus pardonnables que dans celle dont il s'agit?
Lafoy nous enfeigne que le pain cft changé au corps de J.C.
Les fens nous montrent qu'il refte quelque choie qui n'efl; pas
changé, &quia les qualitez Scies proprietez du pain &: du vin.
Jl falloit donner un nom à cequi refl:e,puifqu'il en falloir quel-
quefois parler. Il n'y en avoit point encore de déterminé dans
l'Eglife. Theodoret choifit entre tous les mots de fa langue,
les plus généraux qu'il ait pu trouver^ il en choifit qui convien-
nent auxfubflancesêt auxaccidensi il appelle cequi refte, ef-
fcnce cf nature: Il étoitdiflicile de mieux rencontrer. Et quand
il y auroit encore quelque impropriété dans ces termes, il la
corrige foffifamment par la déclaration ouverte qu'il fait , que
les fymholes font faits le corps de J. C. d^ qu'ille faut croire.
Les Miniftres exigent de plus qu'on fafîè voir précifément
que dans une confequence qu'il tire, ouplâtoft dans l'applica-
tion d'une comparaifon qu'il fait, il n'y ait rien qui ne foitpré-
cifément contenu dans les principes êcdans l'image qu'il avoip
propofce ; mais Ç\ la foy des Miniftres dépend de là, combien
d'erreurs n'attribueront - ils point aux Pères ? Car combien
.,rrouve r on dans leurs écrits de comparaifons inégales qu'il
faut expliquer favorablement?
Où
6f de trois nAuteuTs qui ont purU comme luy. 191
Oùlesmeneroit cet étrange principe , s'ils vouloient exiger Ch. VII.
une entière juftefie dans cette comparaifon dont tant de Percs
fe font fervis , que comme l'image d'un Roy , & un Roy ne font
pas deux Rois , ainfi le Père Se le Fils ne font pas deux
Dieux ?
Que concluroient-ils fuivant cette fau{Ieregle,de ceque S. i>rTnn. i.».
Hilaire compare l'union que les Fidelles ont entr'eux par la
foy & par le baptême avec celle du Père & du Fils , marquce
par ce paflage : Ey) ^ Pater unmn ftmms , & de ce qu'il luy
donne même le nom d'union naturelle ?
Qiielle confequence tireroient- ils de ce que S. Irenée compa-
re la verge de Moyfequi fut faite chair, lorfqu'elle fut conver-
tie en ferpent , avec le Verbe appelle par David la verge du
Père qui a eftc fait chair par l'Incarnation?
Combien trouve t'on d'Auteurs reconnus par les Minières
mêmes pour avoir tenu la tranlTubftantiation , qui fe font fer-
vis de comparaifons fur le fujet de l'Euchariftie qu'il ne faut
pas prendre à la rigueur , & dont les Miniftres mêmes fte pren-
nent pas fujet de leur attribuer un autre fentiment que celuydu
lefte des Catholiques ?
Diront-ils , par exemple , que S. Pierre de Damien ^ qu'Au-
bertin appelle ^owwt' â?f /'^g/z/î" iî^w^z/»^, ne la croyoit pas ,
parce qu'il a écrit, que comme le pain S'' le vin pajjent véritable-
ment au corps de J. C. de même tous ceux qui le reçoivent vérita-
blement dans L'E^life font faits indubitablement le corps de Je.
fm.Chnftl
Diront ils que Samonas qu'ils ont rejette eux-mêmes com-
me tranHubftantiateur , ne la croyoit pas j parce qu'il dit que
le."- Fidelles voyentj. C. dans l" Eucharifiie outre le pain , comme les
Fidelles voyent le Suint Efprit dans le Baptême outre l'eau .<*
Diront-ilsque S. Thomas , qui compare dans faréponfeaux
objecT:ions des Sarazins le changement du pain au corps de
J. C. par la tranlTubilantiation avec le changement des éle-
mens en d'autres élemens quant à la forme , ne concevoit rien
davantage dans le premier que ce qui arrive dans ces change-
mens fi naturels & fi ordinaires?
Que l'Auteur' du Commentaire fur S. Paul attribué à S. An-
felme,qui compare la tranfllibftantiation après plufieurs Pères
avec le changement de la viande en nos corps, par la chaleur
Oo
igi Liv. Y. Explication des pajfiges de Theodoret.
dereftomach , croyoitque ce n'cftoit que la mêmeefpeccde
changement ?
Pourqiioy donc Theodoret ne méritera- t'il pas qu'on luy ren-
de la même juftice , quand même fes paroles ne pourroient
avoir que le lens qu'ils prcrendenc ? Efr-ce-là la règle que leur
donne un Auteur qui a parlé de rEuchanftie dans les mêmes
termes que Theodoret , qui eft Ephrem d'Anrioche , qui les
avertie un peu avant le palîage qu'ils en cirent ;, qu'il ne faut
pas exig-er un entier rapport. ni une entière iuftefle dans les
comparailons, av^i çtccira, ra. e' <cr^à'uyix%Ti o(ptiAu x^ai t' t»
C'eft ce qu'ils devroient avoir dans l'efprit , quand même il
y auroit quelque défaut réel dans rexpre(îion.&: dansleraifon-
nement de Theodoret. Mais j'efpere que ceux qui examine-
ront fans paillon ce que nous en avons déjà dit , & ce que nous
en dirons encore dans la fuite , demeureront perfuadez que ces
défauts mêmes ne s'y trouvent pas.
CHAPITRE VIII.
jD^ la finifiîation véritable des mots de (^wa ^ d'oyalx , ^ de
natura dans Theodoret gS dans d'autres Auteurs.
'Est avec beaucoup de peine que je m'engage dans ces
difculîîo.ns de critique & de Philofophie. Je fçay qu'el-
les ne font au goufl: que de très- peu de gens,&. elles ne feroienc
pas même necedaires à l'examen de ces pailages , fi l'on fe laif-
îoit un peu plus conduire à la raifon &: au bon fens. Mais com-
me les Miniftres y ont eûrecours pour embrouiller cette ma-
tière , il faut les y fuivre malgré qu'on en ait pourdifTiper les
ténèbres qu'ils orrt tâché d'y répandre. Le principe fur lequel
ils fe fondent , & par le moyen duquel ils prétendent faire par-
ler Theodoret contre la dodrine de l'Eglife dans le lieu donc
il s'agit , cft que les mots de (lÙuu, , o^iia. , natura . ne font ia-
contre le P. ^^^^^ cmployez par cet Auteur , que pour iignmer La jubjtance
NoUecp. 47°. par oppoJttiùH aux accidens.
M. Claude qni fçait aflez bien ce qu'il doit fuppofer pour
donner de la force à fes preuves, ne manque pas d'établir ce
**'*■ fens pour fondement. Je joutlens , dit-il , q^uii n'efi fa<f foffîble
(^ de trois Auteurs qui ont parlé comme luy. 19 j :>
^entendre par les termcsde fubjtance que Theodoret employé ^ autre Ch. Vill.
chofe que ee que les Philofophes entendent , fcavoir lafu'oûance mê-
me par ofpojition aux accidens.
Aubertin foûtienc la même chofe , &: il la répète plunenrs
fois dans ce qu'il a écrit fur Theodoret. Mais s'il y a quelque
utilité à avancer hardunent de ces fortes de propofitions géné-
rales, parce qu'il yen a toujours qui s'y lailTent éblouir, & qui
s'arrellenr bonnement à ce qu'on leur dit j il ne lailfepasd'y
avoir auffi quelque danger , parce que d'autres eftant choquez
de cet air de confiance en prennent fujet d'examiner fur les
Auteurs mêmes , fi l'on ne leur impoie point.
J'ay donc voulu vérifier fur Theodoret même ce que c^s
Miniflres avancent, & j'ay trouvé qu'ils eftoient entrez très,
imparfaitement dans l'intelligence de ces termes. Aubertin en
a un peu plus approché jlorfqu'il dit en un endroit , que le mot
de NATURE fe prend pour un tout compofé de fuhflancc ^ d'acci-
dent^ T OTxj i^i complcxum tam fulf/}antiale quam accidcntale. Mais
cela n'eft pas encore afiez expliqué, & n'efl pas univerfelle-
ment vray , comme nous le montrerons.
Pour examiner donc à fond le fensde cestermes , il fautob-
ferver d'abord qu'Ariftote qui a fait un de l'es principaux foins
de diflinguer le fensdes termes, èc qui aeftéiuivi en ce point
par la plupart de ceux qui font venus après luy , remarque
expreffément dans fa Metaphyfique que le mot d'ouV/jt , a deux
principales fignificationsi l'une par laquelle il fignifie le fujec
Tu' \jsmLil(j^oi , & c'eften ce fens qu'il fignifie ce que l'on en-
tend ordinairement en François par le mot àç. fuh fiance par op-
pofition aux accidens ; l'autre par laquelle il fignifie l'efTence
des chofes qu'il appelle , ro' «Ter/ oy , ou -vC x\ v tutt< , ce que
chaque chofe efl.
La plupart des Philofophes de l'Ecole font la même remar-
que après luy. Et il eft encore certain que quand le mot coa/a ,
fignifie l'efîence , il ne s'entend pas feulement des fiibllances.
Et c'eft pourquoy Arill.ore dit en un endroit que l'airain n'efl
pas de l'efience d'un cercle d'airain , m^l^rrii t5 icûv-Afe" eju/aî
0' vctAxôs. Et ainfi le cercle qui n'eft ou'une figure , a félon Arift.i.j,M«-
Ariftote ce qu on appeiieaj/xv, une eilence. 1.7. &;.
Le mot de nature qui eft fynonyme a celuy d'ou'a/o, s'appli-
que de même aux accidens auffi- bien qu'aux fubftances. Cice-
ron , pour marquer l'eilènce de lajuftice ^ fe fert des mots, vis C'*- pror^".
Oo ij
194 L i V . V. Explication despxjf.iges de Theodoret
^ natura jufiiti^ : bi. pour exhorter les Juges à examiner refpç-
ce 8c l'eiïènce de certains crimes , il leur dit , prfcrutamini fe-
Quiatil. 1. 1. iiitus ïiaturam rationemque criminum.
cap. II. La qualité dé la voixell appeIléeparQiiintilien«^/«r<«x;of*f.
idem .1. L'elTènce des vertus Se des vices eft nommée par ce même Au-
teur, «^//-«n; virtutîim (^ vninruni.^x. l'on trouveroic une infi-
nité d'exemples de ce même fèns dans toutes fortes d'Auteurs ,
tant ecclefiaftiques que profanes.
Or pourfçavoir encore plus precifcment cequec'eftque ce
qu'on appelle nature , il faut remarquer que les Pères nous en-
feignent qu'il y a quantité d'autres mots qui ont le même fens
que celuy-Iàj & qui fervent à l'éclaircir.
Ephrem d'Antioche expliquant les mots àQ(tmu,^ d'o^îtri* ,
cJd"ijo°'' dit que félon S. Bafilc& Procle Patriarche de Conltantinople,
ils (îgnifîent la même chofe que celuy de iU.op?)i, forma. Vadmi-
rable Bufîle , dit il , qui a éclairé toute l' Ezlife , enfei<zne que les
mots de fJiof^^ & à'oCaia. ont le même fens : (^ Procle Archevêque
de Conftantmople dit lu même chofe de celuy de ç ôatç , nature j o jmV
Theodoret die la melme chofe dans fon premier Dialogue en
comparant les mots de nop^i\ & de çi/ai'/ ,c'eft à-dire ceux de
forme èc de nature. La forme de fervitcur ^ dit-il, c'eft la nature de
fcrvitcur , £omme la forme de Dieu eft la nature de Dieu.
Anaitafe Sinaïte y joint encore le mot de yt^oî Les mots, dit-
il, de (ptiirnd'oJff/*, de/xop(pyi& de •yif^s fontlamefme chofe dans
les dogmes Ecclefiaftiques. Et expliquant le mot de (Sfûais , il dit
que dans l'Eglifé il fignifie ce qui nous eft effentiel ^ & il ajoute
quepar le mot efTent iel, il n'entend que naturel Ht. ^ to 'ïv^aio»
xj ro* «/A^oTov TAVTdt 'é^. Et il tappotte pout exemple dc CCS
proprietezeifentielles la faculté que le feu a de brûler,
Pfellus ramalTc tout cela dans ce vers.
Mais comme il eft vray que les mots de nature & d'oyo-Zot,
fîgnifient la mefme chofe que celuy déforme, il eft vray auflî
qu'il ne faut pas entendre par le mot de forme, ni la feule fi-
gure extérieure , ni ce que l'on appelle dans les Ecoles des for-
mes fubftantielles.
F^rme , ejfence , nature., font des termes généraux & metaphy-
ftques qui comprennent tous les modes , déterminations, artri-
i>ut5 0u qualifications des eilres, tant fpirituels que corporels,
Viiduxc. I.
Csf de trois nÀuteurs qr4t ont parlé comme luy. 2.^j
mais qui les comprennencen deux manières. Car comme les m j- Ch. VIîI.
des fe peuvent coplîderer^ou comme des fujets modifiez 6c qua-
lifiez, quis'expriment par des termes que l'on appelle concrets ^
comme font ceux de curvum^ album ^jufium , ou comme des for-
mes abftraites, qui s'expriment par des termes que l'on nomme
abfiraits , tels que font ceux de blancheur^ de courbure & àçjufti.
ce : de même les mots de nature , d'ouïe , àc forme ^ fe peuvent
confiderer, ou comme des termes r<7«frf//, &en cecas ils figni-
fient des chofes & des eftres comme modifiez ôc qualifiez par
les atributs qui leur conviennent ; ou comme des formes ab-
ftraites , & alors ils fignifient les déterminations , les qualifica-
tions & les attributs qui conviennent aux eftre .
Dans le premier fens , ils ne s'appliquent qu'au» fubftances.
Car on peut bien dire que l'hommeeft une nature intelligente j
que l'ame eft une nature fpiritucllej que les arbres^lespierres,
les métaux font des natures corporelles : mais on ne dit pomt
que les vices ou les vertus , les blancheurs, les couleurs fuient
des natures.
Mais dans le fécond jc'eft à-dire lorfqu'on les regarde com-
me marquant les qualitez , déterminations & proprietez des
chofes,on les applique indifféremment & aux fubftances& aux
accidens, & comme l'on dit la nature de l'cfprit , la nature
de l'homme, des plantes j des animaux ^ on dit aufîi Unature
ÀQs vertus, des vices, descouleurs & des autres accidens.
C'eft en lesconfiderant comme des termes concrets, que S.
Juflindit, que la matière n eft- par elle-même 7ïi élément , m effcnce , Inrffp. ad
nioujie y mais qu en recevant la quantité ^ la qualité ^ elle dcviefit ^"^ '■ ^^^'
oysjE , ejfence. C'eft-à dire qu'afin qu'un eftre puiiîe eftre ap-
pelle oufie , il faut qu'il foit déterminé par certaines qualitez
ou attributs.
C'eft dans ce fens que Ciceron prend le mot de nature dans
le premier livre des Tufculanes, lorfqu'il djt : Ariftotcles cum
quatuor illa gênera principiorum effet complexns , è quibus omnia
orirentur , qutntam quandam naturam cenfet elfe , è qua fit mens.
Ca.vnatura eft mis là pour un eftre & pour un fujet fubftantiel ,
ayant certaines qualitez.
On peut accorder félon ce fens ce que dit Aubertin , que
le terme de %Cais fe prend pro toto complexo tàm fubftantiali
quàm accidentait i pourvu que l'on ajoute que les accidens
lonc compris dans cette définition , comme les détermina-
Oo iij
De anima c.
3^'
Z96 Liv. V. Explication des pâjfages de Theodoret^
lions du fujet , & la fubftance comme le fujer.
Et ainfiquoiqii'en cefens il foit vray que les mots de (ftW
d'oi>V/x, fignifîenc des ruhftances,ils ne les fignifienr pas néan-
moins comme fubftances feulement; mais, félon ce que je viens
de dire de S. Juftin , comme des fubftances qui ont certains at-
tributs qui ne font fouvent que des accidens.
L'autre ufage de ces mêmes mots^, félon lequel on les regarde
comme des termes abftraits qui marquent les attributs , quali-
fications , proprietez des fujets , que l'on renferme d'ordinaire
fous le mot A'effence-^ eft encore plus ordinaire ; ôcil a lieu par-
ticulièrement quand on compare ces termes avec un fujet , ôc
qu'on lesconfidere dansun lujec.
. Ainfi qua nd Tertullien dit, almd efl fubftantia^ aliudeft naîura
fubfiantia : fubfiantia eji lapis , ferrum : duritia lafidis ^ ferri ,,
• naîura fuhjîanti^ , il confidere le fer & la pierre comme les fu-
jets , & ce qu'il appelle natura comme la qualité & la détermi-
de Tnn.l. 10. nation de ces fujets. Et quand S. Hilaire dit , que dans la four-
naife de Babilone, lefeu &, les corps perdirent leurnature ^ il ne-
veut pas dire qu'ils perdirent leur matière ou leur fubftance ,
mais leur qualité
Sape:ir.7.io_ Ainfi quand l'Ecriture fait dire au Sage , que la fagefle luy
avoit fait connoiftre, naturas animalium ,^ ira-s hejîiarum ^é\\e
veut dire qu'elle luy avoit fait connoiftre leurs proprietez. Ec
quand elle dit ailleurs que l'eau sxtinquentis fu^v natura oblivif-
cebatur , elle veut dire que l'eau oublioit la propriété qu'elle a
d'éteindre.
Et quand il eft dit dans les Livres d'Efter que les méchans
abufcnt de la fimplicité des Princes qui jugent des autres par
leur nature , ex fua natura citeras icjHniantes '■> ce mot de natura
eft mis pour les qualitez de l'ame, auffi- bien que dans cette ex»
4. Efdras 14. prcffion du quatrième d'Efdras , excute taminfirmam naturam.
4.'Georo-. De même quand Virgile dit , mine âge naturas apibu-s quasju-
pitcrrpfc addidit , le mot de nature ne (xgnifie que les proprie-
tez des abeilles , parce qu'il confidere les abeilles comme le fu-
jet de ces proprietez.
Et quand il dic[, quippe folo natura fubefl ^ il prend le moc .
dénature pourîa feule fécondité delaterre.
ic fin. 1. f. Et quand Ciceron dit que Theophrafte/Z/'r/'/aw natura^ per-
fecuîus eft , il veut dire qu'il a écrit de leurs diverfes proprietez,
de leur forme , de leur figure 6c de tous leurs accidens.
^ de trois tAutcurs qui ont parlé comme Itty. 297
Et quand il die QncorQ^fi aliqui nacti fumuj cum cujus N atura Ch.VIII.
rnoribiis ^ vita conyruarmis ^ le mot de naturuy ne marque que
îes quaîitez de Pefprit.
Et quand Horace dit, 27atnram expeUa.r furca , tamen ufque
recurret ^ ce mot ne fignifie que les qualitez naturelles que l'on
regarde comme dans un fujet dont on les cliaflè,Scoù elles
reviennent.
On doitconcluredelà que le mot dew^t/ar^jnefeprend pas
au même fens dans ces expreffions : L'ayne e fi une nature fpiri -
tue Ile ^^ on connoift la nature de l' urne -^ ni dans celles-ci, /^.f/'/;^»-
tes font des natures végétantes : Sa/amon a écrit de la nature des
fiantes. Cardans les premières de celles-là & de celles cy , le
met de«<r?/»rifefl: un terme concret, comme on dit, qui fe joint
directement avec les mots d'ame & de plante ^ mais dans les
autres, c'eft un iQvmQ al>firait , qui ne fepeut lier directement
avec (on fujet , parce qu'il n'eftconfîderé que comme une for-
me de ce fujet. C'efl: dans le premier ufage qu'on peut dire
qu'il fignifie fubftancc 3 mais dans le fécond il ne fignifie que
proptietez & eflence.
Tant s'en faut que dans ce dernier ufâge , les mots ditnature
ou à'oujîe fignifient toujours des fubflances, qu'ils ne fîgnifient
ordinairement que des accidens dans les anciens Auteurs. Car
il eftfans apparence qu'ils ayenteftë dans ces principes de Phi-
lofophie qui ne font devenus les plus communs dans les Ecoles
que depuis trois ou quatre cens ans , fçavoir que les eftres natu-
rels foient compofez de deux eftres matériels, dont l'un eft ap-
pelle proprement matière & l'autre forme. On peut prouver
au contraire par beaucoup de raifons qu'outre la matière , ils
n'ont reconnu dans les eftres matériels, que des accidens. Et
nous avons vu. tout à l'heure que S. Juftin enfeignoit formel-
lement que la matière recevant laquantité & la qualité devient
fubftance , c'eft-à dire qu'elle devient ce que l'on appelle corps
naturel. Et ainfi les lubftances corporelles félon ce Sainte font
composées de matières fie de qualitez & accidens. Nous ver-
rons que c'eft auffi le fentimcnt de Tlieodoret. Et c'eft pour-
quoyil parle du changement du fable en verre, des pierres en
chaux , du vin en vinaigre , du miel en eau falée , comme la na-
ture de ces eftres eftant changée , quoiqu'elles ne cefTent pas
d'eftre matière , mais feulement d'eftre une telle efpece de ma-
tière. Et par confequent cette nature qu'ils quittent n'eft pro-
198 Liv. V. Explication des pajpiges de Theodoret ■
prement que l'amas des accidens qui tait qu'une matière ertap-
pellëe fable , pierre , vin , miel. Et cette nature qu'ils acquiè-
rent ^ n'ell: autre que l'amas des accidens , qui fait que des
eftres font appeliez , verre chaud, vinaigre ,eau falée.
Mais pour entendre ce que Theodoret dit (ur ce fujct,il faut
faire encore quelques remarques qui diffiperont une partie des
objedions de M. Claude.
La première, eft que les accidens que l'on appelle la naturct
d'uneltre, font en même temps & accidens SielTence. Ils font
accidens, parce qu'ilsfontconfiderezcommemodes, comme
qualitez de la matière. Ils font efTence, parce qu'on ne fçau-
roit les ofter de l'eftre où ils font , qu'il ne devienne un eftre
d'une autre elpece.
La féconde eft , que félon cet Auteur , quoiqu'il y ait beau-
coup d'accidens cfTenticls, il y en a qui ne le font pa*;. Car ceux
qui peuvent élire feparez du fujet , fans qu'il ceffe d'cftre un tel
cflre, font bien accidens, mais ils ne font pas partie de ce qu'on
appelle Vejfenceovi la nature ^ qui ne comprend que les détermi-
nations & les qualitez qui conviennent infeparablement aux
chofes,& qui les fait ce qu'elles font.
C'eftpar cette règle, comme nous verrons, queTheodoret
conclut quela maladie & la fanténe font pasde l'eflènce des
corps humains, parce que le corps humain eft appelle corps
humain , quoiqu'il palTe de l'état de la fanté à celuy de la ma-
ladie.
Latroifiéme eft , que les efpeces^ les diftindions des eftres
font ordinairement marquées par les Auteurs, non félon les rè-
gles d'une PhilofophiefubtileSc curieufe, mais félon les noms
qu'on leur donne & l'opinion commune que l'on en a. Ainfi
quand un eftre ne change point de nom , quelque changement
de qualité qui luy arrive, ce changement n'eft regardé que
comme un changement d'^m^^/^Mj : Mais s'il changcoit de nom,
iNi fi on le regardoit comme d'une autre efpece, on regarderoic
ce chanciement comme un changement de nature.
Ennnj'ajoûteray pour dernière remarque, que quoique les
mots de nature & à'cjfence, puifTent eftre pris quelquefois pout
l'amas de tous les attributs eflentiels, ils ne fignifient néan-
moins quelquefois qu'une partie de ces attributs. Car tantoft
ils nefignifientque les attributs fpecifiques 5 comme quand on
dit que du fable qui devient verre change de nature ^c'eftà-di-
re qu'il
C<f de trois Auteurs qui ont parlé comme Tuy. ' ^ 199
re qu'il perd ce qui lefaifoic précifemenc fable. Tancofl ils ne Ch.VIIT.
fignitienc que les attributs individuels,- comme quand on ap-
pelle les inclinations naturelles de chacunyT? nature. Tantofl ils
font déterminez pur le fujet dont il s'agit à fignifier une forte
d'attributs plûtofl; que d'autres, comme dans ce que nous avons
rapporté de Virgile 5 Quippefolo nutura fuhcfi; où ce mot ne fi-
gnifie que la fécondité.
Il n'y a plus qu'à faire voir dansTheodoret les mêmes ufa-
e;es de ces termesj 6c la vérité des remarques que nous avons
faites. j j ■ ji- 1.
Les Miniftres avouent que le mot de (p-jin? ou de nature a le
même fens dans tout le trairté de cet Auteur, que celuy à'oujiei
&Theodoret marque luy-même que le mot de ixof/pii ou ferme
a le même fens que celuy de (^vais. Ainfil'on doit dire que ces
trois mots fignifient la même chofe.
Or, comme nous avons remarqué que ces termes pouvoient
fe prendre, ou comme termes concrets, & qu'en cette manière
ils fignifient des fujets déterminez par certains attributs, for-
mes, proprietez, qualitez & modes; ou comme termes ab-
ftraits j Si qu'en ce fens ils fe prenoient pour ces attributs mê-
mes, ces qualitez, ces modes, ces proprietez qui déterminent
les fujets, il faut reconnoiftrc que c'eftde la première manière
qu'ils fe prennent le plus fouvent dans les Dialogues de Theo-
dorct: non que ce fens du mot de nature foit plus ordinaire que
l'autre, mais parce que fon fujet l'y portoit 6c l'y engageoit
neceifairement.
Il s'agifloit de montrer que l'humanité & la divinité demeu-
roient dans J. C. fans confufion ny mélange. Au lieu de ces
deux termes, il fe fert ordinairement des mots de nature hu-
maine & de nature divine. Et en les prenant ainfi, il eft certain
que ces termes fignifient la divinité & l'humanité comme fujets
de leurs attnlms & proprietez, 6c non pas ces proprietez, &
ces attributs confiderez iimplement comme des formes de l'hu-
manité êc de la divinité.
C'eft donc en ce fens qu'il définit J. C. un Dieu revêtu de p. i^,
la nature humaine, ©^sf cC^çùi'rrlitfv 'z^zût^ie %xica.
Qu'il dit que la nature des hommes vit peu x'réya'p (ftyViS «'Ai- p- J**
•yo GoJ".
Qu'il dit que la nature invifible a efté manifeftée par la chair
.J^<tx.f('»))* a}-.{Ara5 eVe^a''}) ^wiS.
Pp
30o^ Liv, V. ExplmHon des pJL(f,ige.s, de Theodoyief
a. Cefl; dàr«,(;è fens qa'i! veut hjire. confelïèr à l'Eranift?- les
' propriecez de l'une & de l'autre nature ?uject)? n&ti^s Toi lOt^.
Car dans tous ces lieux le mot de natura ficrnitie tout l'eftre-
de la chofe qui eft appcUée uuturc ^ 2c le fignifie commç f^jg^
àt% propriecez, ôc non, "corn me les proprietez mêmes., in-ir",
Il cftvray, comme nous avons remarqué, que le mot de na.
iffrr pris dans ce fens , '[\'^\-\\'à<i fuhjhmce. Mais il ne fignifie pas la
fubftance feule, il lafignifie comme- modifiée &. déterminée par
des attributs &: des qualitez. Et p^arc'eque la plupart des attri-
buts qui compofent la nature fpecifique des efîres matériels, 6c
qui Icsdiflmguent les uns des autre,s, ne foptqye des accidens
ou modes, il cfl clair que lorfque l'on applique ce terme aux
corps, il renferme ces accidens par lefquels ils font déterminez
à eftre une telle efpece de corps, ,1 , ,. ^^ „ ., .",( ..>
Cçll: ce que Theodorec enfeigne, exprefîeme-htdams ce Dialo--
guemême : Car marquant la diiïerç.oce qui efl: entre la nature
de la mer,6c celle d'une goutte de jniel,rl die qu'elles ne différent
qu'en quantité &. en qualité. cV vrîTarvivi la 2^^^<^î.\<i\ x^ ci\uUyi
•nraic'riir; ; que l'une eft grande &: l'autre petite 3 l'une douce,
l'autre falée: ?nazs iju.' I'u.v.Ç'..d^ l\.UirC' om une nature liquide ^
htnnide ^coulante. Ain G iil>e nature liquide, humide & fa.-
lée , c'eft la mer félon Theodorctî & une ncuure liquide , hu-
ytïide é^ douce ^ c'efl: du miet. Er il elt viiible par- là, comme
nous avons dit , que ce qu'il coni^evoir par une nature maté-
rielle, c^étoit une matière ^déterminée par certaines qualitez.'
Et c'eft pcsûrq'uoy il coneiuc'du changement de cçs.cjrUalitez un
changctncnt de nature.
Il dit quequand une goutte de miel eft jettée dans la mer,
fa nature eff ablorbée par cellede la mer. Cependant il n'y g;
que (es qualitez d'abforbées , 2c la matière en fubfifte toute
entière. \ -, : ;
,Mais il faut remarquer qu'il ne vouloir p<as que toutchatîm
géfiient de qualité fuft changement de natLire, 2c que pour dif-
cêrner quand on doit dire que la nature eft changée , &: quand
elle ne l'eft pas, il fe fert d'une règle facile 2v populaire.
C'eft quequand en changeant de qualité, la chofe change
aufli de nom, 2c qu'elle eft confîdcrée par le commun. du mon-
de comme un autre être , il dit que c'eft un changement de
nature.
Mais quand elle ne change point de nom, il dit que ce n'eft
pas un chaogemenc de nature ^ mais d'accidens.
^ de trois Auteurs qui ont parlé comme luy. îqi
-Ainfi , félon Theodorct, le changement de cette goutte de Ch. VIIL
miel en eau , celuy du fable en verre, du raifin en vin, des pier-
î-es en chaud , du vin^en vinaigre, font des changemens de na-
ture, parceque cesctres changent de nom, 6c font regardez
comme d'es êtres ditferens.
Mais fi le changement d'accidcns ne fait pas changer un être
•de nom , & qu'on le regarde encore comme étant de m,ême ef-
pece, il dit que ce n'efl pas un changement de 7iature. Et c'eft
"pourquoy, parce que le ferquoyque ronge s'appelle encore fer,
«c eft regardé comme du fer , il ne veut pas que fa nature foit
changée. Et d'e même parce qu'on donne le nom de corps hu-
Tnain'à tin corps malade bi à un corps fain, il n'appelle la ma-
ladie &: la fanté que des accidens.
Ainfi, félon Theodoret, il ne Faut pas dire que les mots d'^o-
y?V 8c de 72^?^«r^ enferment toutes fortes d'accidens. Il ne faut
pas dire auiïî qu'ils les excluent tous. Mais ils enferment les uns
tn excluant les autres.
Ils 'excluent ceux que l'on peur feparer du fujet fans luy faire
'changer de nom , Se fans qu'on les regarde comme un autre
être. Et c'eft par- là qu'il conclut que la maladie & la fanté
font accidens 5c ne font point partie de Voufie ou nature : parce
ïju&'ces qualitez arrivent aucorps& luy font oftées , fansqu'il
change de nom tfu/xC*(y<f ^ ra <3à>u.a.Tt tomto. \jzna\ùu.Ç,<i\^{ 5 5c
qu'un homme ne laiiFe pas de s'appeller ho mme quoy qu'il foit
malade ou fain.
Mais quand ces qualités ne peuvent pas eflre oflée's au fujet
fans qu'il charge de nom, Theodor(S,t ne les appelle plus alors
accidens, îTu.aCeCvi-.'sr» Etpar confequent il ie's reconnoi'ftcommé
ifaifaïit partie de la vature ^de Vcujte.
C'eft pourquoy on ne trouvera point dans cet Aureur que la
figure 2c la forme humaine^quela vifibilifé 6c l'étendue loienc
accidens du corps de l'homme.' ■■
'On ne trouvera point que d'eftre humide^ liquide,, faUè\ ce
Tbierit des accidens de la mer. C'eft au contraire ce qu'il ap-
pelle fa nature foV/s.
lieft vray néanmoins qu'en prenant les mots dei?u(T/Ç&: d'ouV*
pour des termes concrets, c'eft à. dire pour un fujet modifié par
certains attributs, ces accidens qui le modifient y font bien com,
pris , '6c font ce que Theodoret appelle'les caracle'rês'8c les pro-
ptfetùZj mais ilsne font pas tout c^eqûi eft compris dans le moè
Pp îj
302. I<^ V. y, SxpUcùition des pajfiges de Theodoret
^ àc<^wis, du de oJo-^x, qui marque de plus le fujet deces qualiccz
'' ^- ' ou attributs, qui cH: la fubftance. .
Mais fi l'on prend ces mêmes mots de /z^?«rf&;d'^/7^;zr£' com-
me des termes abftraits^ceft à dire comme des formes qui qua-
lifient les fujcts &qui ne les enferment pas i alors ces termes
ne marquent que les attributs, qui qualifient &: déterminent
chaque lujet , (oit que ces attributs foicnt accidentels, foit
qu'ils foienc fubftanti'ils. '
Et comme nous avons dit que dans les eftres corporels ces
attributs ne font d'ordinaire que depurs accidens &, des modes,
ce qu'on appelle ifu-r/j & onai^t dans les eftres corporels n'éft'
d'ordinaire qu'un amas de fimple^ accidens à qui l'on donne ce *
nom de nature.
L'ufasie des motsde;^.-///<'rf & à'oujîc en ce fens eft frequenr
d'ans l'es autres Auteurs^ & c'eft ce qui a donné lieuà Aubertiii
de dire qu'ils fè prennent fouvent pour les qualitez. des choies.
£r quoy qu'il foit plus rare dans Theodoret, parce que fon
fujet l'a porté à regarder plùtofl le mot de nature de l'autre
forte y & comme enfermant le (ujet 6c fes qualitez, il y en a
fHjurtant plufieurs exemples: comme quand il àh.quejî les corps
des Saints retiennent les caracieres de leur nature\ le corps du Sel.
qncnr retient aujji fa propre ousiE ou cjjejicc,'\\ eft elairquel'ou-
iîe eft la même chofe que ce qu'il appelle le caraclere de la. na-
ture^ S: que l'un & l'autre terme fignifie l'amas des proprietez-'
"du corps fans que le fujet en foit.
C'eft encore dans lem.ême /ensqu'ildit que l'eau de la mer
& le miel ont une nature fluide , liqmde (^ humide. Car confide-
rapt l'eau de la merêc le miel-commé fujetsdecette nature, il
ne conlldere ce qu'il appelle nature liquide , fluide ^ humide^ que
comme lesqualitex qui le déterminent.
Il prend encore le mot de nature dans le même fens, c'eft à
dire pour ràmas des attributs , quand il èi\t que l'humanité n'a
jroint- perdu après^ l'union fu nature CiTX à'^ iluS' olxilccv (fûat» « à>-
Tfa'nôryi': a.'TicJÀiïïi. Car l'humanité étant conliderce dans cette
.. exprelîion comme le iujer de cette nature, la nature qui y eft
marquée ne peut eftre que la forme , c'eft à dire l'amas, des at-
tributs qui la qualifient.
Il le prend au même fens, quand il dit que le feu s'unilTànt'
avec le fer n'en change point la nature. Car cette nature de fer
ne peut eftre dans cette expreiTion que l'amas des accidens qui
font le fer*
fe* d^e trois Auteurs qui ont pdrU com?ne luy, 503
Enfin on peut dire qu'il le prend encore en ce lens , dans !a
conclufion que tire l'Eranifte de l'exemple du changement qui
iêfaitdans l'Euchariftie, quieftque le corps du Seigncurn cilc
changé m walay -du, ')t\^i. Car cela ne veut dire autre choie^
quecequ'Anaftale Sinaïteexpnmeen ces termes, en attribuant
aux Eutychiensde dire que le corps de J. C. avoir eftc changé
dans les propnetez^del'abylme de la divinité lA-iTirci-KnaJ^yù; rÀ
Il s'enfuit delà, ainfî que nous l'avons déjà remarqué , que
comme les eftres corporels ne font diftinguez entre eux (i.lon
Theodoret,que par les qualitez 6i les accidens, leur elTence fpe-
cifique n'eft auffi que Tamasde ces qualitez. Ce qui leur con-
vient quand on les regarde comme matière, peut bien eftre
fubftantiel ; mais ce qui ne leur convient que comme telle ou
telle matière n'eft jamais qu'accidentel. Il ne refte plus que
d'appliquer ces principes aux pafTage.s de Theodorer qui re-
gardent TEuchariftie. Et l'on va voir qu'ils nous conduifent na-
turellement à en découvrir le fcns véritable.
Car l'Eutychien ayant prétendu, comm.eTheodoret le lu)'^
impute, que le corps de ]. C. avoir été tellement changé en la
divinité, qu'il avoit perdu les caractères & les proprietez de fa.
nature, qu'il n'avoit /'//^r/.-; yfg^r^ humaine }iy l'étendue hornèo
Ci un corps hum.tin ^ qu'il n'était -plus .ny vifthlc ny f.ilpublc'-) hi s'é-
rant fervy de l'exemple de l'Euchariftie où le pain eH: changé
au corps deJ.C. pour en conclure que le corps de J.C. avoit été
changé de la- manière que je viens de dire 5 Theodoret a pu &:
du luy répliquer , qu'il avoit tort de vouloir prouver que J. G.
eft devenu invilible, impalpable, fans figure, fans étendue bor-
née, par l'exemple des fymbolesEuchariftiques, puis que quoyt
qu'ils foient changez au corps de. J.C. ils ne deviennent néan-
moins ny invifîbles nv impalpables , & qu^ils confervcnt leur fi-
gure £c leurs autres propriété/, ôcqu'ainfienfuivant cette im»-
ge, il devoir plâtoft conclure, que comme ces fymboles ne per-
dent point leurs proprietez, & qu'ils confervent leurmême fi-
gure 6c leur même forme, qu'ils font vifibles & palpables com*
meaupara^-ant; de même le corps de J. C. conferve fa figure,
fa forme, fon étendue bornée , & toutes les autres qualité»
d'un corps humain. ,
On ne fçauroit nier que cette repartie ne foit jufte fc folide.
Et cela étant, q^ui peut raifonnablement douter qu'il n'aie ea
104 Li V. V. Explication des pajfagûs de Théodore t
droit de l'exprimer par les termes dont il 's'eft fervy, & qiiej'ar
déjà piiilïeur!) fois rapportez?
P^ous vmu tjics , lu y dit- il , enveloppé dans les filets que vom
avcz^voui -même tijjits. Car les fyynboles myftiques ne quittent point
leur propre nature après la confecration , puisqu'ils demeurent dans
leur première cffence^ en leur proniere figure S"" ^/^ leur première for-
me, ils font v:fihles (jS palpables tels qu'ils e fiaient auparavant.
l^Iais on conçoit par l'entendement qu'ils font ce qu'ils ont efté faits ^
Q- on les croit .^ t^ on les adore ^comme e fiant ce qu'on les croit.
Comparcz^d.onc cette image avec [on original.^ ^ vous vertex^le
rapport qu'il y a de l'un à l'autre. Car il faut que la figure rcjfemble
à la venté Le corps donc de I. C. garde fa première figure , fa pre-
mière forme , fa première circonfcnption. Et pour le dire en un mot,
l'cfjence d'un corps.
Je dis qu'il a eu droit de fe fervir de ces paroles pour expri-
mer ce que j'ay dit.
Car fe fervant des motsde«^^«r^& à'oufie en les comparant
avec des fujets qui font les fymboles , ces mots dévoient eftrc
pris comme termes abftraits, qui fignifient l'amas des proprie-
tez qui forment l'effènce.
Ainfî quand il dit que les fymboles ne quittent point leur
nature ?:<.\Qi\r ou fîe , cela ne veut dire autre chofe finon qu'ils ne
quittent point cet amas d'accidens & dequalitez qui font que
nous les appelions pain & vin.
Or comme nous avons montré que les eftrcs corporels ne
font didinguez que par l'amas des accidens, & que cet amas fait
leur nature félon Theodoret 5 il s'enfuit clairement que pour
marquer que les fymboles retenoient tous les accidens du pain
5c du vin , il a pu dire qu'ils en confervoient la nature J puis qu'en
effet ces accidens font leur nature félon luy, & qu'il n'en re-
connoilToit point d'autres dans les cftres corporels.
Et il s'enfu-ic encore que le mêmeTheodoret pour marquer
qre le corps de J. C. n'ctoit point devenu impalpable 6c invilî^
ble, qu'il n'avoit point perdu fa figure ni les bornes de fon éten-
due,8c qu'il avoit confervé généralement tous les accidens d'un
corps, a pu dire, qu'en un mot il avoit confervé l' ou fie d'un corps-.^
:ptfis qu'-en efl-et cet amas d'accidens & de proprietez fait l'ef-
fènce des corps félon Tbe©doret.
Il ne faut point que M. Claude réplique qu'il cfl certain qu'il
^iloit queIl:ion de la fubllanceôcnondes accidens, puifque lEr
(d^ dmroïs Auteurs qui ont parlé comme Inj. 305
ranifte avoir conclu que le corps -de J^ C. avoir ç{\.c change in Ch. VIII.
jubjlantiam diviniuitts. Car on a dcja remarque que ces mots
iii oôcr;=t!' ^É <s.' fignifienc, non en la fubftance divine, mais , com-
me s'exprime Anaftafe Sinaïce, in attributa diviniuitts ; & de
pins que ce changement ayant efté exph'qué auparavant par
Theodoret, comme un ciiangement qui enfêrmoit celuy de
toutes les qualité! des corps, ceft à cette unique circor.flance
qu'il s'attache , par laquelle il fait voir que l'Eranifte fe fervoic
mal à propos de l'Euchàriilie.
Je ne veux pasdifîîmuler une objedion raifonnable que l'on
pCTJtlaire fur ce fujet^ &: qui mérite d'cftreéclaireie. On pour-
roit donc dire que les mozs^Q n.itnre & d'(7?r^f, eft mt regardez
dans ce palTàge jcy, & dans tous les autres où Theodoret les ap-
plique aux fymboles, comme des termes abil:raits.& comme des
formes dont ceslymboles font lesfuiecs, puifqu'i! parle de la
nature c'^ de l'oufie des Cymbales^ ne /îgnificnt autre chofê enefFec
que l'amas des proprietez & desquahcez de ces fvmboles: c'eft
à dire du pain &: du vin ; mais que cela ne refouc nullement
l'objecliôn , parce que ces fortes de formes meraphyh.]ues,
comme w^/ar^, humanité^ elfcnce^ ne lo-ut pas réellement diflin-
guées de leurs lujets: qu'ainfî comme l'humanité , quoyqne
confîderée comme une forme donrrhomme efl: le lujet, n'eft
pas néanmoins diflinguéede l'homme; de mcme quoy que les
mots de nature S>iÀ\u fie dans l'exprelTion de Theodoret, figni,
fient l'edence ou l'amas des proprietez du pain & du vin, néan-
moins cette eflence 5c cet amas 4e proprietez n'eft pasdiflin-
gué du pain & du vin.
]'av appelle cette objeclion raifonnable, parce qu'elle efl:
fondée fur un principe véritable, qui efl: que ces fortes de for-
mes abftraites ne font pas toujours diftinguces de leurs fujets.
Et l'on doit aufîi demeurer d'accord que prenant le mot de na-
ture as pain dans toute fon étendue, il comprend désqualitez
& des modes qui font tellement cffentiels au pain, que l'on ne
peut conferver ces qualitez fans en confefver la fubflance mê-
me. Car comme il eft vray de dire que le pain efl; eflentielle-,
ment matière ; il efl vray dédire aulîî que la nature du pain 8c
l'effence du pain prile dans tL.ute fon étendue &; avec une ri-
gueur philofophique,ou plutôt fcholafi:ique,comprend ce qu'on
îippelle dans les Ecoles lacorporeité Se lamatenalitéj 6c qu'oa
3o6 Liv. V. Expltcxtiondes pnjfiiges dcTlj^odoret
ne peut fcparerque par la penfee de la fubftance même du
pain.
Mais cette objeclion qui feroit bonne (1 Thcodoret avoic
fait profeiTion de parler en Metaphyficien, eft nulle, parce qu'il
a parlé le langage commun du refte des hoijrmes. Or il eft
certain que comme on feroir trop geTné fi l'on ctoit obligé de
parler tovijours avec ccitç rigueur metaphyfiqujS on s'eft mis
plus au large dans l'ufage desexpreiïions , & on eft comme
convenu de donner tantoft une plus grande & tantoft une
moindre étendue à certains termes félon lebeloin qu'on enau-
roit, dans la penfée qu'on connôi{l:roi,t aiTez par les cir.con-
flances en quel fens on les prend roit.
Les mots àe nature Se d'oa/f^ font.proprementde ces termes
dont l'étendue varie félon les rencontres & les circonftances.
-Qiiand ils font pris généralement ils comprennent toutes les
qualitez &: proprietez du fujet tant accidentelles que fubftan-
tiellcs: mais l'on reflerre cette étendue par mille circonftan-
ces. Ainfi , comme nous avons remarqué , ce ternie de nature
n'eft pris fouvent que pour l'amas des qualitez qui forment l'ef-
pece & qui diftinguent un eftre d'un autre fans y comprendre la
matières comme quand on dit que du vin perd fa nature en de-
venant vin aigre -, car il ne perd du tout que certaines qualitez
qui le diftinguoient du vinaigre^ & il ne pert ny fà matière ny
rien de ce qui le fait matière.
Quelquefois même le mot de nature ne fignifie qu'une feule
qualité du fujet 5 comme quand Virgile dit, quippe folo natunt
fubefl ^ où il ne fignifie que la fécondité. F.t quand l'Ecriture
dit des .eaux quelles oubliaient leur nature éteignante, extin-
GuiNTls^natuK'C obUvifcebantur^ le mot de w<;//ar<? eft reft-raint
à ne fignifier qu'une feule qualité. Et quand on dit d'un homme
qu'il eft fçavanc dans la nature des plantes , des animaux , des
métaux, on ne veut nullement dire par-là qu'il fçait mieux
qu'un autre que tous ces eftres font des corps & des matières,
& qu'ils ont la matérialité pour propriété.
Ainfi donc, puifque les mots dénature &;d'<?»/fi? peuvent être
reftraints à ne fignifier que certaines qualitez &; qu'une partie
de l'effènce , comme tout le monde en demeure d'accordj Se
que l'on a droit d'ufer de cette ^reftriclion , lorfcju'on peut fiip-
pofer que ceux à qui l'on parle ne prendront pas ces termes
(Hans toute leur ctenduc3Je dis queTheodoxet aeu droit de pren-
dre
©• de trois Auteurs qui ont pxrU comme Itiy. 307
dre en cet endroit les mots de n^-rture èc d'ou/ie dans un lèns Ch. Vllî»
reftraint , èc pour n'exprimer que les feules qualitez , modes &c
accidens qui relient dans les iymboles après la confecration -,
parce que ces mots efboient ruffifamment reftraintsà ce fens
par toutes les circonftances de Ton difcours.
Ils y eftoient premièrement reftraints par la foy commune :
car nous avons droit de fuppofer queTheodoreteftoit dans la
créance des Catholiques , & il s'agit feulement ici de montrer
qu'il n'a rien dif dans ce p.fTage qui y foit contraire. Erparcon-
lequent on peut fuppofer auffi qu'il avoit dans l'efprit, & qu'il
voyoit dans l'efprit de celuy à qui il parloir ce que les Catl'o-
liquesy ont communément, & ce qui eft connu de ceux qui
fcavent leur doiftrine.
Or cette doiflrine conufte à croire quelepain eft'changé su
corps de J. C. quoiqu'il relie un objet dans lequel on apperçoic
toutes les qualitez du pain. Suppofé donc qUeTlieodoret eût
cela dans l'efprit , & qu'il vît cette même penfce dans ccluy
de l'Eranifte à qui il parloit ,pouvoitil douter que les mots de
nature ô: à'oujîe^àont la (îgnification eft tantoil: plus étendue 6c
cantoft plus relTerrée félon les rencontres, ne fulTent reftraints
dans l'occafion prefente àne fïgniner que cet amas d'accidens
& de proprietezqui reftent après là confecration ?
2. Ils eftoient reftraints en ce lieu par la profefîion exprefle'
qu'il fait de croire que les fymboks ont eftè faits le corps de J C.
ér qti'il le faut croire Car cette propofition n'ayant' point d'au-
tre fens que le littéral dans le langage commun du temps de
Theodoret , il s'enfuivoit clairement que le paiueftant fait' le
corps de J. C. ces qualitez &: ces accidens du pain qui rcftoient
n'eftoient pas la matière du pain commun , comme on Ic-leur
enfeignoit expreflemenr;
5. Ilseftoient reftraints par toute la fuite du difcours. Car
quoique la propoiltion immédiate de l'Eutychien foit conçue
en ces termes , que le coi-fs de J. €. avoit ejlè charivè en une cf-
fence divine 5 néanmoins ces fermes expliquez par tous les dif-
cours precedens forment cette idée , que le corps de J. C. p<ir
l'union avec la Divinité ayant perdu toutes les proprierez de fa
nature n'éftoit plus ni. palpable ni vifible, & n'avoit plus la fi-
gure humaine. C'eftoit-là ce que l'Eutychien appelloit eftre
changé en Divinité. Il ne fongeoit point du tout à prouver
difesâement l'abolition de l'eftre intérieur Se fubftantiel de.
3o8 Li V. V. explication des pi^Jpigos de Theodoret
l'humanité. Qu'il l'aie aboli par conie^uente,!! l'on veut, ce
n'ell: pas de quoy il ell queftion prelenccmenc: mais ce qu'il
avoïc en vue, eftoic de taire voir que les propriccez clloienc
abolies j &: ue même ce que Theodoret avoit en vue , eftoit de
montrer qu'elles ne l'eftoient pas. Ainlî employant contre TEu-
tychien l'exemple de l'Eucharilbe , il ne l'employé qu'en ce
qu'il eft propre à prouver que ces propriétés des corps demeu-
rent dans le corps de J. C.
Pour réduire donc en peu de mots ce que nous avons prouvé
dans tout ce chapitre^
Il efb clair que les mors de nature 6c à^oujîe ne fe prennent
certainement pour fubftance , que lorsqu'on s'en fert pour ter-
mes concrets , comme dans ces proportions; L'ame efi une na-
ture fpirituelle : Les dcmons ne font pas des natures corporelles -.La.
nature hurnaine efi unie à la divine dans J. C.
1. Qii'outre cet ufageil y en a encore un autre tres-ordinai-
re, où les termes de nature & à'oufie font pris comme termes
abUraits, c'eft a- dire comme marquant des formes qui font
conllderées dans un fujet.
3. Que dans ce dernier ufage ils s'appliquent & aux fubftan-
ces & aux accidens , & ne fignifîent que les proprietei.
4. Que la plupart de ces proprietez eftant des modes ou ac-
cidens , ces termes par confcquent figmfient ordinairement
des accidens.
5. Que les termes de nature & à'oufie appliquez à des eftres
matériels , ne (Ignificnt ordinairement que de fimples acci-
dens, parce qu'ils ne fignifîent que leur nature Spécifique qui
n'ell: compofee que de fimples accidens.
6. Que quoiqu'ils puiflent lignifier tous les attributs & les
proprietez des fujets dans lefqucls on les confidere , ils font
iouvent reftraintspar les circonftances à n'en fignifier qu'une
partie.
7. Qiie ces termes font employez par Theodoret , quand il
les applique aux fymboles comme abftraits , & par confequent
qu'ils ne lignifient que les proprietez.
8 . Qu'ils ne les fignifient pas même toutes , parce que les cir-
confiances dans lefquelles il s'en fert> fufîîfent pour en borner
l'étendue , & les réduire à ne fignifier que les feuls accidens du
pain qui refrcnt après la confecration.
C'efl à quoy fe doit réduire la recherche de k fignificatioa
^ de trois Auteurs qui ont parlé comme luy. 505
de ces termes employez par T heodoret, fi on y procède de bc>i^
ne foy. Que s'ils ne lailfent pas d'avoir je nefçayqiu y de cho-
quant, ce n'efl pas qu'ils foient capables par eux mcines de
donner cctta imprefiion , mais c'eft que l'abus que les Sacra,
mentaire^en ont fait ,pour exprimer leur erreur, &: pour la ré-
pandre dans l'Eglife, avant porté l'Eglifeà s'en éloigner, & à
les condamner dans la bouche 6c dans les ircrits de ces héréti-
ques j on a de la peine enluite à fe défaire de cette idée, ôc à
leur rendre leur fignification naturelle.
CHAPITRE IX.
Autre folution dy. même paff'a'ie de TheoAoret , fondée fur le fens
auquel les mots de nature (j- t^'oufie font fris par les Auteurs
Ecclejiajltques d^ far Theodoret même,
IL yadesgens fi peu équitables, quand il s'agit d'objeélions
contre la foy, que pour peu qu'on détourne les termes de leur
iîgnification precife pour juftifier quelque paflage, ils prennent
ce qu'on dit pour demauvaifes défflites,&: croyent même qu'on
s'écarte de la bonne foy. Ces fortes d'efprits trouveront fans
doute à redire que l'on ait prétendu que les mots de nature 8c
d'oufe (e doivent prendre dans une fignification plusreftrain-
te, quand Theodoret dit que lesfymbules demeurent dans leur
première eflence, &c qu'ils ne quittent point leur nature ; que
dans d'autres lieux où ils fignificnt tous les attributs générale-
ment tant fubftantiels qu'accidentels.
Or quoique cette diipofition foit tres-injufte , puifqu'iî ne
fé trouve point d'Auteur qui ait parlé dans bis autres matières
avec cette juftcfTe & cette ex^ditudequ'ils voudroient qu'on fift
voir dans ces palîàges difficiles, &: ou'ils foient obligez eux-
mefmes de s'en relâchera l'égard de plufieurs paflagcsqui re-
gardent d'autres Myfleresje veux bien neanrrioins m'y accom-
moder, en leur raifant voir que dans le fens auquel non feule-
ment Theodoret , nsis Ip plus grande partie de^ Pères Grecs
ont pris ces termes de<pU(T<5 & d'oiJa('o!.,c'cfc à dire nature &efién-
ce, il a pu direque les iymboies myfliques confervoient leur
propre natuie & leur première elîcnce , fans reftraindre la li-
gnification de ces termes.
Je n'aybefoin pour cela que de pouflèr plus loin JV>:pIicatio»
po Liv. V. ExpUcitlon despajfages deTheodoret
de ces mots, que nous avons commencée dans le chapitre pré-
cèdent,&: de faire remarquer que les Pères Grecs n'ont pas pris
feulement ces mets de (çmls , oùaU , f^-opt^vi pour termes fynony-
iTies,,6\: ne nous ont pas feulement avertis qu'ils entendoient par
ces termes un eftre déterminé &: qualifié par ccrtain^ttributs,
ou les qualifications & attributs des eftres 5 maisqu*'ils ontdc
plus marqué que tous ces mots ne fignifient que la nature com-
mune, &: non pas les natures .finguliercs, &: que c'ef} en cela
qu'ils les ont dilHnguez des mots à'Hypofi.tfe & àzperfonne.
Or quoiqu'cn appliquant ces mots à la Trinité ou à l'Incar-
nation, & en difânt , par exemple , que le Pere& le Fils & le
S. Efpritonr une mefme nature , ils ayent conçu efFe£tivemenc
qu'ils avoient une meîme nature finguliere ; ce n'eft pas néan-
moins par la feule force du mot d 'ouV/a, & de (^vcis ,Aox\x. ils re-
marquent exprefTément qu'ils ne fignifient que la naturje com-
mune i c'eft par la nature mefme de la Divinité qui eft fingu-
liere par elle mefme. C'eft pourquoy ils n'ont paslaifTédc dire
que le mot à'oujic ne fignifie que la nature commune. L'oujîe ou
Baf. cp. 369. l'cjfeyicc , dit S. Bafile , eji diftinyièe de l'hypofiafe , comme ce qui
cjl commun cft difiinyiè de ce qui efi fingulier. Ainfi chacun de nous
a [on ejjcncc commune , (^ ilcjl tel fi/- tel ^arfcs proprietez^particu"
■lieres.
CvriLdiai. I. Le mot d'oujte^àxt S. Cyrille d'Alexandrie, w^r^»f quelque
Jcjnnir» [Jjqj'^ ^^ comynuïi i maisceluy d'hypofiafefedit des Jin^ulicrs compris
fous ce mot commun.
X-'Aureur écs définitions , dont le traité fe trouve parmi les
^ œuvres de S. Athanafe,en parie dans le mefme ièns. L' oujïe ,à\x.-
11 ^legenre .^ la natur'Ja forme .^ ne font qu'une même chofei ^ an
contraire les mots de perfonne^ de cavaHere , d'hypoftafc, d'individu^
n'ont que le même fcns. Une nature peut contenir en foy plufeurs hy -
po[}afes. Car tous tant que nous fommes d'hommes qui avons une ame
^ un corps , nsus n'avons qu'une même nature , (^ une même oujïe î
mais nous fommes plufeurs hypoflafes. Et un .peu après , la nature
eft donc univerfcUe ^ l'hypofiafe particulière.
Diai.i.ae Le Martyr Maxime dit la mefme chofe en plufieurs endroits ,
I ^l'thin^T." comme dans le dialogue premier de la Trinité, où il enfeigne ,
14S.& iji. Q^\z\' humanité qui eft en plufeurs fnptlicrs , cft une ovsiv. ,^ que
,chi tque homme en particulier eft une h Y p o s T a s E .
La nature de chaque choft; .^ dit Anaftafe Sinaïte ^' cft quelque
via dux c. i. chofe de commun , O" l'hypoftafie eft ce qui eft particulier.
df de trois Auteurs qui ontpa rlé comme luy. 3 r r *
C'eft aulTi la doctrine de S. Jean de Damas, qui répète ces de- Ch. I X.
finitions enplufieurs endroits , de Théodore Abucara,d'Eu i.f.dciidc
thymius dans fa Panoplie, de Theorien dans le récit de Ton Abuc'.'opus i.
ambaiïadeaux Arméniens, où il dit nettement a^xxQlcmotd'ouJie Euthym.parr.
fe dit des chofcs univerfellcs é^ coynmunes^^ non des -particuliers d- ' "^ ^ ^^^ °"
individus ^ÀQ Manuel Calecas , de Michel Pfellus , qui a inefme Sar.do.c.U.
réduit cette do clrine en ces deux vers,-
V.'fi OV(jl<t, To' X^ifot \J^<rcil!iCiS itS^OS ^
w'iT'Ê 'XjiJ!S9j'cL<TlS nfÇO dCù'Tiov 19 fXiVOlf i.
C'eft-à-dire, ton[ïe eft l'efpece commune de l'hypodafe.
Et l'hypoftafeefl une perfonne feule &: ieparce.
C'eft: pourquoy au lieu qu'en prenant les mots de nature Sc
d'ef/encepour des natures individuelles , il faudroit dire que tii-
* vers hommes iïnguliers ont chacun leur nature, ces Pères nous
difent au contraire qu'ils n'ont qu'une nature &i une humanité :
Etmefme ilspafTent prefque jufqu'à dire que ce n'eft pas bien
parler que dédire que plulleursfinguJiersfoientpIulieurshom-
mes. Nous ne difons pas, dit S. Grégoire de Nyife, que Pierre,
Paul &: Barnabe foient trois eiîences rpusoùrlxi. Et en un au- ', ^ '^'""""«-
- m. notion,
tre endroit il dit , que pour parler exa'ciement , il faudrait dire
que divers hommes fnyilicrs ne font qu'un feul homme.
Il n'eftpaspermis, dit S. Cyrille, de dire des hommes qui ont Diai.dcTrU
une mefme elfence ^ que chacun a fon eifence, celui ci une & n::.
cet autre la Tienne.
Pierre & Paul , dit le Martyr Maxime , font deux perfonnes , Maxim. Mar-
Tnais ce ne font pas deux humanitez. tvr, Jiaiog.i.
Saint Tean de Damas Si Théodore Abucara difènt la mcihie ?°T'^/''''l
choie en termes exprès. c 8.
On ne peut pas dire que Theodoret ait pris le mot à^oufie & Abuc. opus 2.
de nature àzvi'?, un autre fens que celuy de ces Pères, puifqu'il
remarque expreflement que le mot dJoufïc fïgni fie quelque chofe de
commun , félon les Pères , & que c'efl en cela qiiil e/i diflinpié
de celuy d'hypofiafc. Et pour en apporter un exemple , il dit que
le mot èihomme marque la nature ou Vefence^ 5Î que ceux de ^'^'•'•?'^''
Pierre 8c de Paul ne marquent pas des natures communes ,
mais des hypodafes. Ainfi il efi: clair qu'il prend le mot de na-
iure pour la dernière elpece ^fpecies ultima ^ii^as^ qui fe divifc
enfuite en eftres individuels.
Cette fignification eftant reconnue 5c fuppofce, il n'eftpas
difficile de juger après cela en quel fens Theodoret a àïi^que la
311 Liv. V. ExpUcdtion despajpigesde Théodore f
jymboles myftiques ne quittent point leur propre nature , ^ qu^'ils
retiennent leur première cffence. Car qu'eft-ce que la nature du
pain &clu vin? Efl: ce l'eftre individuel de chaque pain & de
chaque vina Nullement, C'eft la nature commune^ c'eft-à-dire
ce qui eft commun à tout pain & à tout vin , & que les Peres-
concevoient 5 comme étant le même dans tous les individus.
Si Di.'ci changeoit donc un pain individuel en un autre pain ,
& un vjn individuel en un autre vin individuel, il faudroitdire
félon le langage des Grecs^qui a efté fuivi par plufieurs Latins,
&: particulièrement par ceux qui ont écrit contre les Euty-
chicnSj que ce pain tranlÏÏibflantié n'auroit point changé de ,
lubiLmce ni de nature ,& Theodorec répondroit fans doute
qu'il ne feroir point fjrtide fa propre nature, r^; oUûcts QiTts^
i'^l^fTcLvcii çvj-icùs ,&c qu'il feroit demeuré en fa première elfence,
fj.i,it 'ch' Tï\i Tcparip^s ovaist i parce qu'encore que ce fiit un au-
tre eftre individuel , néanmoins ce feroit la même nature de
pain , félon la Philofophie de ces Pères. Ainfi voilà une vraye
& réelle tranfTubftantiation ,qui n'empêche pas qu'on ne dife
que la nature &:l'eflence demeure.
Or ce qu'il au'roit dit certainement dans cet exemple de tranC
fiibn:antiation,il l'a pu dire de celle qui (e fait dans l'Euchanftie,
Gomme il eft facile de le faire voir. Il acruqr>e le painétojtrcel-
lement changé & tranlTubftantié au corps de J. C. & c'eft ce
cju'il exprime en difant, ^«i'/'o« conçoit que les fymboUs font ce
qu'ils ont cfiè faits ^ ^ qu'on les adore comme telsi c'eft- à- dire corn-
me corps de J. C. Ceft ladoclrine qu'il tiroit de la foy com-
mune del'Eglirejmais lesfensluy apprenoienten même temps
que ces fymbolesconfervoient toutes les proprietez du pain &
du vin ,& que nous ne connoiftansricn dans le pain 6c dans le
vin, qui ne nous paroifte dans ces (ymboles. lien conclut donc
qu'ils ne quittent point leur propre nature,^ qu'ils demeurent dans
lev.r première elîênce. Mais qu'eft ce que cette propre nature .
& cette première cf[e7ice? Eft- ce la nature individuelle du pain
Si du vin ? Non. Theodoret même nous averric en général
que ce n'eft pas le fcns de ce mot, & il nous avertir en parti-
culier que le pain eft fait le corps de J. C. ce qui emporte le
ehangement de la nature individuelle. C'eft donc la nature
fpccitique & commune. Tout ce que l'on peut donc conclure
dècepaifage , c'eft que félon Theodoret les fymbolcs ne chan-
genr point leur nature commune jC'eit à dire qu'ils ont encore
à
^ de trois Auteurs qui ont parlé comme luy. 315
îa nature de pain ôc de vin i mais non pas qu'ils ayenc encore la Ch. I X.
même nature individuelle de pain ôc de vin 6c la mêmematiere
qu'ils avoient auparavant.
La feule difficulté qui pourra refler , c'efl: de quelle forte l'on
peut dire que le corps de J. C. dans l'Euchariftie a la nature
ipecifique &; commune de pain. Mais cette difficulté eft encore
aifée à refoudre. Car pourquoy ne feroit il pas permis aux
hommes de dire d'un eftre qui a toutes les proprietez du pain ,
^u'il a l'elTènce commune du pain , puifque nous ne connoif-
ions cette effènce commune que par fes proprietez, 6c que ce
font ces proprietez que nous appelions fon elTence ?
Il ne fera pas même befoin dans ce fens de reftraindre ce
terme à'effince ou de nature aux feules proprietez accidentelles.
Car quoique le corps deJ. C. contenu fous le voile du Sacre-
ment , ne foie pas la même matière individuelle que celle du
pain , il eft pourtant matière , 6c matière de même efpece que
celle du pain , puifque J. C. eft confubftantiel aux hommes 6c
aux autres eftres matériels. En ioig-nant donc cette matière
avec les autres qualitez du pain 6c du vin qui paroilTent dans
cet objet, on y trouve tout ce que les hommes enferment ordi-
nairement fous ridée qu'ils ont delà nature du pain 6c du vin ,
6c ce n'eft point parler métaphoriquement que de dire qu'il en
a l'eiTence.
Il fuffit donc queTheodoret ait con<^û l'Euchariftie comme
tous les Catholiques la conçoivent, pour avoir parlé comme il
a fait. Car il s'enluit de l'opinion commune qu'après la confe-
cration il refte un objet lur l'autel qui eft un corps , puifque
c'eft le corps de J. C. 6c que l'on apperçoit dans cet objet tous
les acwidens 6c toutes les proprierez du pain :Et cela n'eft que
trop fuffifant pour donner lieu à un Auteur qui n'eft pas en gar-
de contre les chicanneriesd'un Miniflre, de dire que cet objet
eft du pain, qu'il a l'eftence du pain , 6c qu'il la conferve.
AinlîcepalTage de Theodoret n'a pas efteclivement plus de
difficulté que celui d'Hefychius, qui dit de ce myftere, qu'il efi
en même temps pain (j;- chair ^ mysterium quod Jîmul panis ^ ca-
ro. Et comme l'on entend fort bien quHefychius ne veut pas
dire que l'Euchariftie foit le même pain individuel qu'elle étoic
auparavant, mais feulement qu'elle a les proprietez du pain, on
doit entendreTheodoret au même fens , 6c croire qu'il n'en a
pas moins reconnu en même temps un changement delà na-
:? 1 4 L I V . V. Explication despa,Jpiges de Theodoret
tare individuelle des fymboles en celle du corps de J. C. Aiiffi'
dit- il formellement enfuite , que l'on conçoit, bi que l'on
croit que les lymboles font le corps de J. C.
Si l'on confidere mefme le but où Theodoret tend par cette
comparaifon , on verra que ce fêns y (atisfait entièrement. Car
les Eutychiensne difoientpas precifcment que J. C.eût perdu
l'eftre individuel de fa nature. Ce n'étoit pas là la queftion. Us
difoient , li l'on en croit Theodoret , qu'il avoit perdu les pro-
prietez fpecifiques & communes à tous les hommes, comme la
figure, la formej la vifibilité , la palpabilité^ l'étendue bornée.
Et c'eflpourquoy Theodoret leur fait dire qu'il n'a plusl'efpe-
ce humaine cht i-)({ '^ cLf^fcùTti-iOi yîvos Et ainfi il conclur
fort bien de ce que les fymboles confervenc les proprietez
communes du pain &: du vin , qu'il appelle'K///«r^ & effence^que
J. C. conferve auffi les propricrez communes de la nature hu-
maine &;d'un corps humain, qu'il appelle l'elTence d'un corps.
Il eft vray qu'il n'auroitpas prouvé parla la confervation
de l'eftrc individuel de l'humanité de j. C. mais ce n'étoit pas
auffi dequoy il étoit queftion. Et comme ce n'étoit pas pro-
prement ce que les Eutychiens nioient , ce n'éft pas auffi ce-
qu'il prouve dans ce lieu là, quoique l'efpric ne laifle pas de-
l'y ajouter.; comme nous rexpliquerons dans le chapitre fui-
vant.
CHAPITRE X:
Qu'âpres ces èclairci(}\~ryi(ns il ne rejîe plr/s de 'difficulté dans l'es
pajfazes de trois auteurs qui ont farlè de l' EuchariJîiS'
comme Theodoret.
Ou&avons déjà averti que la folution que nous donne-
rions aux paiïages de Theodoret feroit commune à ceux
des trois Auteurs qui ont parlé comme luy. Et l'on va voir en
effet que bien loinde contenir quelque difficulté particulière ,
ils éclaircifîent 2c confirment ce qui a été dit touchant celui
de Theodoret.
Le premier eft tiré d'une lettre que l'on prétend queS.Chry-
fcftoraea écrite à unMoine nomméCefariuSjdans laquelle pour
réfuter
.^ de trois Auteurs qui ont pa rU comme îuy. 3 15
réfuter l'herefie d'Apollinaire qui écoic la même que celle des Q h. X.
Eurychiensj il parle de cette forte : J. C. eft Dieu é- homme ^ Dieu
comme impalJi'oLe,^ ^ homme comme ayant fou jf en. Ce n'efi pourtant
qu'un fcul Fils é" «« /^'*/ Seigneur : JJn (^ le même fans doute , qui
far l'union de fci notâtes n'a qu'une feule domination (^ une feule
puijfancc'j quoy qu'elles ne foicnt puf confubfianticllai car chacune
d'elles conferve fans mélange les caraclcres qui la font connoi/ire.
Ce font deux natures unies fans confufîon. Car domine avant que
le pain fait confacré , ilfe nomme pain't mais quand la grâce divine
fa fanciifié par le minijhrc du Preftre , // efl libère du no7n de
pain , éî" il devient digne d'eflre appelle le corps du Seigneur , bien
^ue la nature du pain demeure en Iuy 5 ^ que l'on ne dit pof qu'il
y ait deux corps , mais un feul corps du Fils de Dieu j de même la.
nature divine étant jointe au corps , tous deux ne font qu'un feul
Fils ^ une feule pcrfonnê.
Comme c'étoit l'ordinaire des Auteurs qui écrivoient en
ces temps- là fur lamême^marierejde fefervir des mêmes com-
paraifons , fans fe foucier qu'elles fufTent fi juftes, ainfi qu'on
Ta pu voir par celle d'un Roy & de fon image, qui ne font pas " -
deux Rois, qui a été employée parplufieurs Pères pour mar-
quer l'unité de la nature divine dans le Père & dans le Fils, on
trouve aulîîqu'à l'imitation de S. Chryfoftome & de Theodo-
ret, deux autres Auteurs fe font fervis de l'exemple de l'Eucha-
jriftie pour éclaircir de quelle forte la nature humaine demeure
dans j. C. fans eftre abforbée par la divine.
Le premier de ces Auteurs eft le Pape Gelafe dont les Mi-
niftresdeBafleont fait imprimer un traité, ou plutoft un frag-
ment contre les herefies de Neftorius & d'Eutichez qui eft
tres-defedlueux & très- plein de fautes, comme Aubertin mê-
me eft obligé de le reconnoiftre. C'eft de ce traitté qu'on al-
lègue un paflage, où cet Auteur employé en cette manière l'e-
xemple l'Euchariftie. Certes les Sacumcns du corps (j;-du fangde
J. C. que nottS' recevons font une chofe divine , ^ ils nous rendent^
farticipans de la nature divine , i^ néanmoins la fubflance S- là
nature du pain & du vin ne ccffe point d'cftre. Or, on célèbre dans
l'aïlion des myflercs l'image ^ la reffemblancc du corps (^ du finz
de J. C. Et cela nous fait voir avec affez^d' évidence que ce que nous
croyons , célébrons & prenons dans l'image de J. C. nous le devons
croire en J. C. mhne. Et que comme par l'opération du S. Efprit ces
chofe s pajfcnt en cette fubjîance divine , quoy que leur naturs con~
Rr
3 lé Liv. V. Explication des pajfages de Theodoret
Icrve fes proprietez^^ elles nous marcjuent au.ffi que ce myftere princi-
pal ^ c'eft-à-dire l'Incarnation^ dont elles nous nnient pre fente s
l'efficace ^ la vertu , conjljle en ce que les deux natures demeu-
rant proprement , il ri y a quun Chnjl qui ejl un parce qu'il ejl en-
tier d^ véritable .
Ephrem Patriarche d'Antioche eft le dernier de ceux qui fè
font lèrvis de cette comparaifon -, &; il le fait de cette forte. Le
Fils du Toyincrre en nous difant qu'il a annonce' CE qn'iL a
vu, dr- ce que fes mains ont touche du Verbe de vie^ nous enfeigne
que la même perfonne aune nature palpable (y- une i7npalpable. Car
en difant qu'il a touché le Verbe , il ynarquc que ce qui efl impal-
pable a ejté touche 3 en difant qu'il l'a vu, il en feigne que ce qui
efl invijïble a cfté vu. Ain f il reconnoift un même J. C. dans une
double nature : l'une impalpable.^ l'autre palpable, l'uneviflble^ l'au-
tre invijîble. C^:r l'une (^ l'autre nature appartiennent a. lamente
perfonne. Et ce flcroit avoir perdu l'efprit que de dire que ce qui eft
■impalpable (^ invifîble efl de la même nature que ce qui efl ^ pal-
pable d/" viflble. C'cfl ainjî que le corps de J. C. qui efl reçu par les
baptifez^, ne fe départ point de l'cffence fenfible , ^ n'efl point feparé
de la grâce intelligible. Et de même quoy que le Baptême devienne'
tvut (pirituel (^ qu'il foit le même , il conferve néanmoins les pro-
priete-z^ de l'ejfence fenfible.^ c'cfl -à- dire de l'ean^ (^ ne perd pof pour
cela ce qu'il a eflè fait-
Pour ne trouver plus de difficulté dans ces paflâges, il ne faut"
que fe fouvenir de l'idée que les Pères nous donnent de l'he-
refîe des Eutychiens, & qu'ils tiraient de leur dogme capital,,
qu'il n'y avoit qu'une nature en J. C. c'eil que la nature humai-
ne de J. C. avoit perdu toutes les proprietez , qu'elle n'étoir
plus ny vifible, ny palpable, ny circonfcrite 5 qu'elle ne confer-
voit plus fon efpece tq' ct!ï^pca7r;i'ov^'eVo/j&: qu'elle avoit été chani
gée en la nature divine. Ainfi ce que lesPeres tâchoient par-
ticulièrement d'établir, étoit que J. C. n'avoit rien perdu de-
tout cela, qu'il étoit encore palpable & vidble, & qu'il avoic
toutes les autres qualitez d'un corps humain.
Ces trois Auteurs ayant donc ce même defîèin , allèguent"
tous trois, à l'imitation l'un de l'autre, l'exemple de l'Eucha-
riftie , dans laquelle les fymboles ne ceflent point d'eftre pal-
pables, vifibles & figurez comme auparavant, & retiennent
routes les autres qualitez de pain & de vin, pour en conclure
que le corps dej, C. retenoic. auilî ces mêmes qualitez. Er
''■^ de trois Auteurs qui ont parle comme luy. 317
c'efl: cette même penfée qu'ils expriment cous trois, quand ils qh. X.
difent que la nature du pain &; du vin ne ccfîc pas, & de-
meure,puifque cet amas de qualitez qui demeure dans l'Eucha-
jiftie s'appelle nature dans le langage des Anciens.
En un mot, leurargumentfereduifoit à cet Entymene-. Les
fymboles ne deviennent point invifibles, impalpables, fans fi-
gure, fans circonfcription. Donc le corps de J. C. n'eft point
devenu invifible, fans figure, fans circonfcription, &: fans les
autres qualitez d'un corps humain.
On peut encore appliquer à ces mêmes pafîliges la féconde
folution. Car il ne faut pas s'imaginer, que quand ces Pères di-
fent que la nature ou la fubfiance du pain &: du vm demeure,
ils entendent la nature individuelle du pain Se du vin. Ils en-
tendoient tous par le mot de nature ce qui eft commun , & non
ce qui efl particulier, c'efi à-dire l'efpeceôè la nature commune,
& non la nature finguliere.
Ephrem d'Antioche en fait une remarque exprefle dans ce
traitté même dont Photius a confervé l'abrégé. Après cela, dit
Photius, il traitte de la différence qu il faut mettre entre les mots
d'ejfence oCcia. ^de genre yéos , d'cfpcce ît^oç , drcclu^ d'hypoflafe-^
(^ il la fait confifier en ce cjtie ces premiers mots fignificnt ce qui
eft commun , au lieu que celuy cy marque l'eflre fuhfîftant , ^ ce
que les Auteurs -profanes appellent les (in'zuliers,pi.i-xâ. x-Lùra. /'/ t^
TX û/^Tofct.i wy n' orIcl'i.Xj Ta yîfai 19 t6 ilPos nrpès liu^ 'Ôstb ^'clcc iy\ ,
ù^\cL/ixQù:i j aTiTûi ixiy Tû xoi;i'/ cTiiAoi , Ta, J^e To ■a^[c7ai'7toy xj 0' Ae -
-yiTCLt TO/Ï i|<i), JCa^iX.ctç'fi».
Et il ne faut pas s'imaginer que ce langage foit particulier
aux Grecs. Les Latins qui ont été du temps des Eutvchiens
ont parié comme eux. J'ayfait voir, dit le Diacre Ruflique
dans fa difpute contre les Acéphales, que le mot de nature fl-
gnifie l'ejpece commune. Et ]ean Maxence dans fon Dialogue.
Ze mot de nature ^ dit- il , eft diftinpié de celuy de perfonne , parce
^ue celuy de perfonne marque une chofe individuelle^ au lieu que ce-
luy de nature marque l'efpccc commune qui comprend plujîeurs ftngu-
liers.
Ainfi quand Ephrem d'Antioche nous dit, que le corps de
J. C. ne quitte point la nature fenftble: Quand S. Chyfoftome
dit, que la nature du pain demeure après la confecration: Quand
Gelafe dit , que l'efence ou la nature du pain (^ de vin ne cejfe
pas d'eftrei ils n'entendent point que ce fujet, c'eft-à-dire les
Rr ij
5.i8 Liv. V. Explication des pajpigc s de Theodont
fymboles confacrez, confervent la nature individuelle & l'être
iîngulier de pain &; de vin. Ce n'eft point là le fens de ces ter-
mes , ny ce que ces Auteurs avoient dans refprit Mais ils veu-
lent dire qu'ils confervent la nature fpecifique de pain &: de vin.
Ec ils auroient fans doute uiëdes mêmes exprclfions, comme
nous l'avons déjà dit , quand il auroic cftë qucftion d'un paia
tranflabftaïuié en un autre pain; car le mot aùaU cjfcnce figni.
£ant la nature commune, ils auroient été obligez de dire que
ce changement n'empcchoic pas que la nature du pain ne de-
meuraft, ^cnefaifoitpas qu'elle ceflall d'être.
Ainfi, comme nous L'avons déjà remarqué, la difficulté
n'efl: pas d'accorder ces paflages avec la tranfllibftantiation.j
car il n'y a nulle contrariété. Elle conlille uniquement à Tçavoir
de quelle manière on peut dirjc que le pain &: le vin confacrez
confervent la nature fpecifique de pain &: de vin.
Mais tous ceux qui jugent équitablement des chofes, s'env
barrafferont peu de cette difficulté. Car cette nature commune
n'eft autre chofe que l'idée commune que nous avons de ce qui
fê trouve dans toutes les natures fïngulieres.. Et cette idée fè
forme fur l'amas des attributs que nous remarquonslesmêmeS'
dans chaque efpece. Or^deflors que le corpsôc lefangdej. C..
ont pris la place du pain & du vin, & qu'ils font revêtus de leurs
accidens , nous y appercevons tout ce que nous remarquons
dans le pain &: dans le vin. Nous les comprenons donc par la
mêmeidé£,.& nous leur attribuons par confequent. la mcnve-
Qature generiq-ue;
Des Metaphyficiens rigoureux y pourroient encore trouver
de la différence ; mais ceux qui penfent 6c qui parlent naturel-
lement n'y. en trouvent point, Qiiand ils voyent quedescorps^
ont toutes les qualitez du pain 6cdu vin, ilsdifentqu'ils ontla
nature de pain & devin. Et comme par le moyen de'certe idée
confufedont nous avons parlé, ils confiderent lesiymboles non
confacrez Se confacrez comme le même fuiet,& qu'ils y voient
u:)ûjour^ ces mêmes proprietez de pain & de vin avant & après
la confecration, ils doivent dire qu'ils en ont confcrvê la natuie-t
^quils ne l'ont pas quittée.
C'eft ainfique ces Pères ontparlé., & qu'ils ont dû parler en
fuivant fimplement le fens commun. Mais il ne faut pas conclu-
re de ce qu'ils ont reconnu que cette nature commune dcmcuEC
& n'eft point changée, que. la.nature individuelle du pain^cdu
^ de trois Auteurs qui ont parlé comme luy. ^ 9.
vin ne le foie point 3 au contraire, ils ont déclaré formellement Ch.X.
qu'elle l'étoir.
C'eftce que Gela/e exprime quand ildir, qnele pam(^ le vin
■paffent en cette divine fubfiance, c'efl: à dire au corps de J.C. reni^
pli de la divinité j &: ce que S. Chryioftomc marque par ces pa-
roles : l'on ne dit pas qu'il y ait deu< corps du Fils d,c Dieu , m.tis-
«« /î-a/j.c'ellàdire que le pain confacré &, le corps naturel de
J. C. ne font qu'un même & unique corps. Ce qui ne peut être
que parce que le pain eft change au corps de j. C. comme S.
Chryfofbome en feigne en tant d'autres lieux & par tant de diffé-
rentes expreffions.
Quand ils n'auroienr pas marqué ce changement dans ct%
palîages mêmes, on auroit droit de leur attribuer les expref^
' fions 6c les penfées de tous les Auteurs de leurs ficelés pour
déterminer leur fens: Mais l'ayant marqué, de quel droit les
peut- on feparer des aïKres Pères pour une expreirion qu'on
accorde 'ïx Facilement avec le fenciment commun de l'Eglife ?
M. Claude prétendra peuteftre détruire le fens que nous
avons donné à ces palTàges par une objeclion qui a quelque
chofe de fpecieux. C'eft qu'Ephrem d'Antioche dit, que le corps
dej. C. ceûàdire le Sacrement de l'Euchariftie, ne quitte poinC'
fafubftance fenfible, comme il dit enfuite que l'eau du Bap-
tême ne la quitte point: Se que de mêmetous ces crois Auteurs
difent que la nature du pain demeure d^ns l'Euchariftie, com-
me ilsdifentque la nature humaine de J.C. demeure dans J. C.
Cr^quandon dit que le Baptême ne quitte point fa Tubftance
cu.fon elfence- fenfible, on veut dire qu'il ne perd ni fa nature
ou Ion ellènce commune, ni fa nature individuellcj 5c de même
quand on dirquela nature humaine demeure dans J. C. on
veut dire que tant la nature commune que fi nature indivi-
duelle y demeurent. Et par confequent, dira- t-il, quand ces mô-
mes Pères difent quel'elîence du pain & du vin"demeure Se ne
ceire point, ils n'entendent pasceîa feulemenrde la nature com-
mune, mais auifi de la nature individuelle.
C'eft tout ce qu'on peut dire de plus apparent en faveur du
ientiment des Miniftres ; & néanmoins il n'y a rien de iolide en
effet dans cet a^rgument. Car pour y fatisfaire précifément,.il
n'y a qu'à répondre, que foirjque ces Auteurs difcntde l'Eucha-
riftie qu'elle ne quitte point (on eflence &: fa nature fenfible,.,
fcit c^u'ils le dilènt du Bapcêmej foit qu'ils ledilent de J. C. ils-
R r iij
3'i o L I V. V. Explication des pajfages de Theodoret
encendenc toujours les mots de çuV;; ôi d'ouVia dont ils fe fervent,
de la nature commune^ parce que ces termes, comme tous les
principaux d'entre les Pères Grecs nous en avertiiïent, nefi-
gnificnt d'eux mûmes que la nature commune. Ainiià ne ju-
ger du fensd'Ephrem d'Antiochequepar laleule force de l'ex-
pre(îîon,^il ne dit autre cliofe du Baptême, finon qu'il ne quitte
point la nature commune de l'eau , & il ne dit point précifé-
ment qu'il ne perde point la nature individuelle.
Mais parce que nous n^avons aucun lieu de croire que l'eau
du Baptême perde fi nature individuelle au cas qu'elle ne per-
de point la nature commune, la même cxprelTion qui nous fait
concevoir qu'elle ne perd j:\oint fa nature commune, nousaifu-
re auffi qu'elle ne perd point fa nature individuelle^ mais ce
n'cft pas par la force même de l'cxpreflion ; c^eft pafce qu'il n'y
a aucune raifon de feparer dan> l'eau du Baptême la nature
commune de la nature individuelle. Car il eft certain, comme
nous avons dit ailleurs, que toutes les idées qu'excitent les ter-
mes dans Fefprit, ne font pas pour cela contenues précifémenc
dans ces termes. Il y en a quantité au contraire que l'efprit
ajoute ou forme de luy même par la liaifon neceifaire qu'elles
ont avec ce que l'on exprime formellem-ent. Mais auffi comme
ces idées ne naiffent pas de la force des paroles mêmes, l'efprit
ne les (upplée point, lors qu'il ne voit plus cette liaifon qui le
■portoit plus avant que l'exprellion.
Les Pères nous en fournlifent un exemple remarquable furie
fuiet'dece même terme d'ûuo'/«.&:de?[/<ri.f, Car il leur eft a(îèz or-
dinaire de prouver que le Fils de Dieu a la même cfTence &;
ia même nature que fon Père, parce que parmy les hommes les
enfans ont la même elfence &. la; même nature que leur père.
Or, il eft certain que parmy les hommes quand on dit qu'un
fils a la même eftence & la même nature que fon père, on en-
tend feulement qu'il a la même nature & ia même eftence com-
mune, & non pas qu'il a la même nature individuelle. Et par
confequent quand on en conclut que le Fils de Dieu a la même
effence & ia même nature que fon Père, ces paroles ne figni-
fient par elles mêmesj finon qu'il a la même nature commune.
Mais parce qu'on ne fçauroit diftinguer en Dieu une nature
commune & une nature individuelle; & qu'il eft de la nature de
Dieu d'être parfaitement une 3 l'efprit porte neceftairement ce
terme plus loin à l'égard de Dieu qu'à l'égard de l'homme, 6c
Ç^ de trois Auteurs qui ont pa.rU comme luy. 311
il ne conçoit pas fcilemenc une unité fpecifiqne entre le Père Ch. X.
& le Fils, mais auffi une unité parfaite & individuelle.
Il en e(l de même dans la matière dont il s'agit: lors qu'E-
phrem d'Ancioche dit également: & de l'Euchariftie & du Bap-
tême, qiiils ne ^w tient point leur ejfence fcnjîble, cela fignine feu-
lement par la force des termes qu'ils ne perdent pas leur efTen- "
ce & leur nature commune. Et cela ne fignific nv à l'égard de
l'Euchariftieny à l'égard du Baptême qu'ils ne perdent pas leur
nature individuelle.
S'il n'y avoit donc rien qui feparafl: l'Euchariftie du B;iptcme
dans l'efprit des Chrétiens, on ne joindroit à cett^ exprciîion
commune aucune idée qui les dilHnguaft.
Par exemple, s'il étoit dit de l'eau du Baptême, commeil eft
dit du vin de l'EuchariCtie, qu'elle eft changée au fang de J. C,
qu'il le faut croire : que c'eft véritablement le fang de J.C. qu'il
ne s'en fautpas rapporter au fens: que quoy qu'elle paroilTe de
l'eau, c'ell néanmoins dans la vérité le farig de J. C. Si qu'on
ajoûtaft enfuite ce que dit S. Ephrem , que cette eau ne quitte
pas néanmoins fon effence fenfible, alors ces termes demeure-
roient dans leur fignificadonprécife'à l'égard du Baptême auffi-
bien que de l'Eucharifcie, & l'efprit ne concevroit autre chofe
fînon que ces fymbolesreriendroient la nture commune d'eau-
& de vin, quoy que leur erre individuel fufl: changé au (ani^ de
J-C- . . . .■
Et au contraire fi jamais perfonne n'avoitdicde ITAichariftie,
non plus que du Baptême, que le pain & le vin y fulîént'chan.
gez au corps & au fang de J. C. lorfqu'on entendroit dire de
l'un&: de l'autre qu'ils retiennent leur nature fenfible, on en-
tendroit par la force de ces termes qu'ils retiennent la nature
commune d'eau, de pain 5c de vin, & on ajoûteroit auffi bien à
l'égard de l'Euchariftiequ'à l'égard du Baptême qu'ils retien-
nent auffi leur nature individuelle, parce qu'il n'v aurcit point
de raifon de ne le pas ajouterj 6cde leparer des idées que l'eC
prit a coutume de joindre.
Mais l'efprit de tous le"; fiJelles étSL^x prévenu par les ex-
preiTions communes de l'Eglile, de la différence qu'il y a entre
i'Euchariftie & le Baptême, & avant reçu cette impreffion que
Je pain & le vin font Ghange7 ^m corps de I. C. & fort le corps
de J. C. après ce chançremcnr : &que l'eau au contraire n'elï
nullement changée au fang de J. C. c^uand il entend dire en-
■312- Liv. V. EspUciition des pnjfagt^s de Theodoret
iuire que tant l'EucharifHe que le Baptême retiennent leur eC
fence fènfible, il entend bien cette expreffion de la même forte
à l'égard de l'un & de l'autre Sacrement, & il conçoit que l'on
veut dire qu'ils conlervent toujours la nature 6c les propriétés
communes de leur nature. Mais comme il croit d'ailleurs à i-ë-
.gard de l'Euchariftie que le pain & le vin y font changez au
.corps de J. C. il allie enlemble ces veritez ^ & ainli il conçoit
un chano-ement réel de i'eftre individuel du pain & du vin
qui n'emmpechepas neanmoms que ce pain &;ce vin changée
ne retiennent la nature commune j c'eîl à dire qu'ils n'ayenc
routes les qualitez de pain bc de vin.
Au contraire, rien ne l'obligeant d'admettre aucun chan-
gement à l'égard du Baptême, il conçoit absolument qu'il ne
quitte ny fx nature commune ny fa nature individuelle, c'eft
à dire qu'il le conçoit tel qu'il eftoit auparavant 6c fanschan-
gement réel.
Cen'eft pas que TEfprit fe ferve de ces mots de nature ccmi-
■xnunc 6c de nature individuelle, ny qu'il appelle à /on fecours
les idées d'accidens 6c de fubftance.-Ce ne font que des termes
qu'on a trouvez pour développer davantage .autant qu'on a pti
ce qu'ils font concevoir dans ce myftere , & ce que l'efprit en
conçoit de lu.y.même, bc fans toute cette Philofophie.
On a toujours crû &; conçu la même chofede l'Euchariftie
dans tous les temps de l'Eglife. On y a toujours crû que ce.qu'on
regardoic avant la confecration comme du pain ôcdtivin, &
qui l'étoit en efïer,eft réellement après la confecration le corps
6c le fangde j. C. On a toujours crû, &i. plûtoft on a toujours
vu, que cet objet que l'on croit enfermer le corps 6c le fang de
J. C. avoit toutes les qualitez du pain 6c du vin 6c agidoit de
même fur nos fens. C'a été là lafoy univerfelleSc perpétuelle
de tous les Chrétiens du monde dans tous les fiecles. Mais
quand il s'cll agy d'exprimer ces veritez,il s'y eft mêlé quelque
diffcrence, non de (entimens, mais d'exprefTions. On a exprimé
dans l'ancienne Eglife la première de cesveritez, en difantque
le pain confacré étoit le vrjy corps , \c propre corps, le corps
même de J. C. 6c l'on s'y eft fe^vy de toutes les autres expref-
lions que nous avons reprefentées dans le fécond Tome de cet
Ouvrage.
On a exprimé la féconde en appeîlant le pain confacré
un pain changé , un pain apparent j en difanc que, quoy
qu'il
C^ de trois ^Auteurs qui ont parlé comme luy. 313
qu'il paroiffe pain, c'cft néanmoins le corps 2c lefang de J. C. Ck. YA.
en difant que les fymboles font le corps de J. C. qu'ils ont efté
faits, mais qu'ils retiennent néanmoins la naturel l'ellencede
pain & de vin. On s'eft fervi depuis d'idées &; d'expreffions plus
Philofophiques , principalement depuis que les Iierefies qui ont
attaqué ce myflrere ont obligé de defcendre à des explications
plus particulières. On a dit que la fubftance étoit changée &
que les accidens demeuroient. Mais l'idée de foy qui répond à
tous ces difFerens termes j fe réduit toujours à dire que le corps
&: le fang de J. C. font réellement prefens, que le pain &: le
vin font véritablement changez en ce corps &ence Tang , 6c
que cetobjetj qui efl; intérieurement le corps de J. C. ne laifle
pas de faire fur nos fens toutes les imprefTions du pain & du vin,
& d'en avoir toutes les proprietez. Ceft-là ce qu'on appelle
conferver la nature & reifence du pain 5c du vin.
CHAPITRE XL
Que les Eutychisns rCont -point nié abfohimcnt que J. C. cufi un
Corps J ^ qu'ils ri ont point prétendu qu'il fufi
entièrement immatériel.
J'Ay fuppofé jufqu'ici l'herefie des Eutychiens , telle que les^
Miniflresla reprefentent, & qu'on poarroit la concevoir eri
fuivant toutes les confequences que les Pères en tirent, 5c
qu'ils imputent à ceux qui la fuivoient. J'ay fait feulement re-
marquer que quelques fentimens que ces hérétiques euiient de
l'abolition ou de la fubftance 5c du fond intérieur delà nature
& du corps de J. C. ce que les Pères entreprennent particuliè-
rement de prouver contr'eux , c'eft que la nature Jiumaine de
J. C. n'avoit pas perdu fes proprietez, qu'elle les a confervées
après l'Incarnation ,5c les conferve même dans le Ciel.
Mais je crois que pour donner encore plus de jour à ce que
nous avons dit , 5c pour éclaircir même d'autres difficultez
qui font propofées par M. Claude avec beau-coup de pompe 5c
d'éclat, il eft important d'examiner fî les Miniftres ont raifon
de foutenir hardiment , comme ils font , que les Eutychiens
ayent abfolument nié que J. C. euft uncorps^ 5c qu'ils ayent
cru que fbn humanité étoic entieremcnc détruite. Car s'il fe
Sf
314 Liv. V. Esplicdùon des pajfages de Theodoret
trouvoïc que cela fuft faux , il y auroit bien des argumens &
bien des figures qui s'en iroienc en fumée dans le Livre de
Monfieur Claude.
Pour ne pas s'écarter delà vérité dans cette recherche, il eft
bon de remarquer que commelesEutychiensontété fort ex-
travagans dans leurs opinions , leurs expreffions ont été auflî
très- bizarresjde forte qu'il ne faut pas tout à fait juger de leurs
paroles , comme on juge de celles des autres hommes.
Auiïî l'unique moyen de pénétrer autant qu'on peut dans
les ténèbres de cette herefie , eft de ne s'arrêter pas a quelques
expreffions détachées , mais de les joindre toutes enfemble, &
de voir fur tout cela quel fenciment il eft jufte de leur attri-
buer.
C'eft encore un principe d'équité dans l'examen de ces for-
tes de faits , que lorfqu'un fentiment n'eft imputé à des héréti-
ques que comme une con'equence j & que non feulement ils
défavoiient cette confequence , mais qu'ils enfeignent pofiti-
vement le contraire , quoiqu'il foit jufte de fe fervir de cette
confequence pour montrer la faufleté de leurs fentimens , on
ne peut pas néanmoins foûtenir à la rigueur qu'ils l'ont tenue,
ni en faire un de leurs dogmes. v
Enfin on doit avoir dans l'efpritque ce n'eft pastme preuve
tout-à-fait certaine, que des gens n'ayent pas tenu deux opi-
nions tout à la fois de ce qu'elles font effectivement contrai-
res. Car l'entêtement & la petitefTe de l'efprir humain ne four-
nirent que trop dévoyés pour allier ces contradictions , & fur
tout dans les matières abftraites , & dont on n'a que des idées
confufes. Qn s'en fait à croire à foy-mêmcj on ne voit lescho-
fes qu'à demi ; & quoiqu'elles paroiflent contraires , on croit
que c'eft par fa faute qu'on n'en voit pas la liaifon. Et jamais
gens ne firent une profefljon plus ouverte de pratiquer cette
méthode que les Eutychiens.
Ces principes étant fuppofez , je rapporceray d'abord les rai-
fons qui femblent porter à croire qu'ils ayent nié abfolument
que J. C. euft un corps. Et je feray voir enfuite qu'il y en a infi-
niment davantage pour croire qu'ils ont toujours reconnu un
vray corps & une vraye matière en J. C.
Il eft certain que tous les Eutychiens difoient qu'il n'y
avoit qu'une nature en J. C. & qu'ils difoient que cette nature
ëtoit la divine. Je réponds , dit l'Eranifte , que U nature divi~
t^ dé trois Au teurs qui ont pa. rlé comme luy. 5 1 j
ne cfi demeurée , ^ que l'humanité efi abforbce. Ces expreflîons Ch, XI.
elloicnt communes à toutes les fedes d'Eutychiens. Thccd. .liai.
Pour exprimer cet engloutifTement delà nature humaine, ils '"P"^*
fe fervoient d'ordinaire de la comparaifon d'une goutte de miel
jettée dans lamer,qui s'évanouit fî toft qu'elle y eft mêlée. Et
fuivant cette comparaifon ils difoient que la nature humaine
avoit été changée en la divine , en l'efTence de la Divinité^en
Divinité. Ils concluoient de là que \ts proprietex de la nature
humaine eftoient abolies.
Vous ne confeffez^ donc pas ^ dit Theodorer ,^»^ chacune des
natures ait confcrvé fcs proprietezj T^on pas après l'union^ répond
l'Eutychien.
S'il ejloit demeure , dit encore l'Eutychien ^quelque chofc après
le chanqement de ce qui marque la nature humaine , elle ri aurait pas
efiè changée.
Theodoret luy fait même dire expreflement que la nature
humaine de J. C. n'avait plus les bornes de fan étendue , iIm
Il efl: certain encore que pour combattre leur herefie , il s'at-
tache principalement à prouver que J.C. avoit confervéfafor-
mCjfa figure , fa circonfcriprionScles autres proprietex d'un
corps , qu'il appelle l'effence d'un corps , par où il marque que
les Eutychiens le nioient.
On doitajoûter que tout ce que Theodoret impute aux Eu-
tychiens dans fes Dialogues leur a été imputé par d'autres
Auteurs. Car Théodore Preftre de Raite a dit d'eux à peu prés
\ts mêmes chofcs que Theodoret, en attribuant aux Juliamftes
qui étoient une fedte d'Eutychiens , de foûtenir que depuis ^^'J ^j"*
tunion les proprietez^de la nature corruptible avoient efié abolies 5 p.jn;.
que l'on ne cormoiffoit plus les différences effentielles de ces natures ,
d^ que la divine qui efi oit la plus exceUente ayant prévalu , avoit
transféré en un moment la nature inférieure aux proprietez^ de la
ftenne.
Vigile Evêque deTapfè en Afrique dans les Livres qu'il a
faits contre les Eutychiens, tire plufieurs fois de leurdodrine
cette mêmeconfequence.<S'//«/ a plus .,èi\x..'A , qu'une nature en ] j^
J. C. il faut qu'ilne foit plus que Dieu fans efîre homme , ou homme
fans efîre Dieu. Il dit qu'Eutychés a ofé nier la nature humai- i.t,
ne ,en voulant conferver l'unité delaperfonnede J. C.
Mais il n'y a gueres d'Auteurs donc on puiiTe mieux appren-
Ssij
3 té Liv. V. Explication des pacages de Thûodoret
dre leurs expreffions & leurs fentimenSj que d'Anaftafe Reli-
gieux du mont de Sina', qui dans Ton Livre intitulé k Guide ,
décrit plufieurs conférences qu'il a eues à Alexandrie avec
diverfes fedes d'Eutychiens , ôcqui rapporte mcme fouvent
leurspropres paroles. Et l'on y voit que non feulement Timo-
thée,un des plus emportez de ces Hérétiques, f lûtenoit que/^«
g- "'^g_ Divinité efioitla feulcmiture de J. C. mais que les Severiens mê-
mes qui vouloient paroiftre plus modérez fe fcrvoient de la
mêmeexpreffion. N ous ne recevons point , ditcet Auteur Japa~
rôle impie de Timothèe (^■^ de Severe , qtie la Divinité eft la feule
nature de J. C.
G.is. Ils difoient auffi, comme témoigne le même Auteur , ^;/(7
le corps de J. C par la participation delà Divinité avoit cfié fuit
Dieu.
Que la nature ayant efié changée , toutes les proprietez, naturelles
l'avaient .att.ljï efié.
Que la nature divine ayant efié la. plus forte , avoit donné fa.
Divinité a, la plus foible.
^•'5* Ils difoient , que la chair dej. C. avoit efié changée en la natu-
re de la Divinité.
Ils fe fervoient aufli delà comparaifon d'une goutte de miel
jettéedans la mer,qui s'évanouit & perd fa nature ,&ilsl'auto-
rifoientparS. Grégoire de Nyiïe dont elle eft empruntée.
Ce même Auteur en les réfutant leur impute de croire , que
le facré corps de J. C avoit efié rendu tel que le Verbe divin .^ en forte
qu'il n' avoit piUS les proprietez^de la nature humaine.
Il leur attribue de dire quil n'avait plus aucune propriété de la
nature humaine , ^ qu'il efioit paffè dans les attributs de l'immenfe
Divinité.
Il prouve en plufieurs endroits , comme Theodoret , que le
corps de J. C. n'eft niinvifible, ni impalpable, ni fans étendue
bornée.
Voilà ce qui a donné lieu à divers Auteurs de croire que les
Eutychiensavoient entièrement voulu détruire la nature hu-
maine deJ. C. 5c qu'ils prétendoient qu'il fût prefentement au
même état qu'il étoit avant l'Incarnation. Mais quoique ces
preuves foient fortes , fi on les confidere toutes feules , je crois
néanmoins qu'il eft difficile qu'un homme judicieux & fincere
y ait beaucoup d'égard , s'il prend la peine de les comparer
avec celles que nous y allons oppofer.
f" ^ de trois Auteurs qui ont parlé comme luy. 317
S' l'on veut remonter jufqu'à la fource de cette herede , qui Ch. XI.
eft celle d'AppoUinaire Evoque de Laodicce, tous les Pères qui
en ont écrit témoignent qu'il n^a jamais nié que J. C. n'euft une
véritable chair. S. Epiphane qui s'en eft informé , dit-il , avec
le plus de foin qu'il a nù.Scqui rapporte une lettre par laquelle
S. Athanafc a condamné cette berefie, luv attribue ou à fesdif.
ciplesde loutcnirque J. C. avoir apporté une chair du ciel. Il
dit que d'autres enfeignoienc que le corps de J. C. étoit con-
fublLintiel à la divinité. Mais afin qu'on ne cruft pas qu'étant
confubftantiel à la divinité, il ne fuft pas corps, ces mcm.es
Hérétiques, au rapport de S. Athanafè, difoient que le Verbe
avoit été changé en chair, en os , en cheveux , &. en tout le
corps de J. C. que c'étoit en ce fèns qu'il étoit confubftantiel
au Verbe. Et par une fuite de cette erreur ilsdiioient que ce qui
avoit été crucifie fur la croix étoit non un corps humain, mais
cette iubftance qui a créé toutes chofes.
Les autres , dit encore S. Athanafè, pafToient jufqu'A dire
que ce corps du Verbe étoit cocternel au Verbe , & avoit tou-
jours été.
Ils encherifloient fur cette extravagance, en difant que cet-
te chair ou effentielle au Verbe ^ ou prifèdans le ciel , étoit
d'une autre nature que la notre, qu'elle avoit des ongles dif-
ferens des nôtres, & de même de toutes les autres parties.
Et ils croyoient l'honorerheaucoup en l'exemptant de toutes
les necelîitez communes de la nature. S. Grégoire de Nazian- Grec. Naz.
ze, S. Grégoire de NyiFe, S. Ambroife,Leonce , S. Léon , laf&acT''
Gennadius, Facundus, en ont parlé de la même forte^fic leur cieàon.
imputent la même erreur. !^/'- ^\
n * • t « en • • > Theoiih.
Mais quelque extravagante que tuit cette opinion , & de Ambr. 1. de
quelque nature que fuft cette chair qu'ils donnoient au Verbe , i^^cam. c 6.
c'ctoit toujours une chair &un corps, ç'eft àdirequecen'étoic i^cen/de*
point un cilre purement immatériel. dogm. Facun.
Or c'eft proprement là l'herefie qui a étéemhraftee par Eu- ^•^•P-'t--
tyches , £«: par les purs Eutychiens. Car S. Flavian Archevêque
de Conftantinople qui a condamné cet herefiarque , dit de
luy , qud fuivoit en tout les dogmes de Valcntin ^ d'Apollinaire.
Et de même Theodoret Preftre de Raite dit qu'il enfergnoit
que le corps de j. C. efioit defcendu du Cul ^ ^ qu'il efioit pajfépar
layieriie comme Par un canal.
Anaftâfe Sinaïte rapporte fonherefîe en ces termes icy. Eu.
S s ii j
3i8 Liv. Y. Sxpîicationdespcijfagesde Theodoret
C. ;. tyche Supérieur d'un Monajhre de Conjtantinople , dijoit que le
corps de J. C. eftoit defcendu du Ciel , ^ qu'il e fiait différent du
noftre.
Que s'il luy impute dans le chapitre fuivant d'avoir cru avec
les Valentiniens 6c les Marcionifl:es,que le corps de J. C. n'é-
toit que phantaftique & apparent, il veut dire que félon luy ,
il paroiiîôit femblable au noftre fans l'eftre : mais il ne veut pas
dire que ce ne fuft pas un vray corps celefte.
C'eft auffi l'idée que Vigile Evêque de Tapfe nous donne de
cette herefie, lorfqu'il dit au commencement de Ton troifiéme
Livre , que l'herefie Euty chienne s'efi portée jufqu'à cette impieté
que defoutenir, non feuleynent que le Verbe ^ la chair ne font qu'une
nature dans J. C. mais au/Ji que cette même chair n'a pas efté prife
de Marie , mais du Ciel , ^ quelle efipaffèe par la Vierge , comme
de l'eàu qui pajfc par un canal.
Il eft clair que félon cette hypothefe les Eutychiens n'étoient
nullement embaraifez d'accorder le Myftere de l'Euchariftie
avec leur fentiment , puifqu'ils n'avoient qu'à dire , & qu'ils le
difoient en effet, que les fymbolesétoient cette chair celefte
& divine que le Verbe avoir prife dans le Ciel. Mais il faut re-
marquer que quoiqu'Eutyches reconnuft quej. C. avoir un-
corps, foit qu'il l'euft pris dans le Ciel, foit qu'il luy fuft coë-
rernel comme fa nature divine, il foùtenoit néanmoins qu'il
n'avoit qu'une nature. Et quoique S. Achanafe montre fort bien
dans fa lettre à Epidete qu'Apollinaire , dontEutyches avoic
emprunté cç.xx.q. opinion, admettoit efFedivement deux natures
dans J. C. néanmoins comme jamais gens ne s'embarafTerenc
moins des contradidions que luy & ceux de fa fcde , ils foûtin-
rent toujours opiniâtrement que ce corps celefte ôcle Verbe
ne faifoient qu'une nature.
L'Eutychien introduit par Theodoret propofe à peu prés ce
fyftême dans le premier dialogue intitulé l'immuable. Cari! y
ibûtient que le Verbe n'avoit pas pris la nature humaine , mais
qu'il s'étoit fait chair. Et quoiqu'il évite le terme de mutation ,
il paroift néanmoins qu'il vouloit que l'Incarnation confîftaft
dans le changement du Verbe en chair.
Mais dansle deuxième dialogue il prend un nouveau plan,
& joue un autre perfonnage. Car il avoue , comme nous l'a-
vons déjà dit , que le Verbe avait pris une ame gS un corps com-
me les nofires j & il die que fi on ne l'appelloit pas un homme ,
Cs? de trois ^Auteurs qui ont parle comme luy, 519
C(fl qu'il le fallait nommer far fa flus noble partie. Ch. X T.
Il dit que 7. C avait u?ie humanité parfaite ', qu'il n'ètoit point
un vainfpeclre , comme les Valentinicns (>"^ les Marcionijles l'en-
fcipioient.
, Il ne faut même pas s'imaginer qu'il ne reconnufl cette hu-
manité parfaite qu'avant que la nature fuft abforbëe, c'eft-à-di-
re avant la Refurrection ou l'Afcenfion. Car il loûtient d'abord
que c'eft dans le moment même de l'union que s'etoit fait le
changement de l'humanité en la divinité. Et c'eft néanmoins
de cette humanité abîmée , qu'il dit que lorlqu'eileaparu aux
hommes, elle n'étoit point un vain fpcclre ^ comme les M^arcio. p. 7f.
niftes le voulaient.
I C'eft de cette humanité abîmée qu'il avoue qu'elle a été cru- P-74.
cifiée.
C'eft de cette humanité abîmée qu'il dit que J. C. avoitfait p-?^-
paroiftre tantoft fa chair & tantoft fa divinité , rdrê 1^ tîco' ffotp-
;C90| ToTê f<^" 'dut ^eoTJiTo, S'uY.vmty Car après avoir dit toutes ces
chofes de la chair de J. C. il dit qu'elle avoit été changée au
moment de l'union dans l'eflence de la Divinité. Ftparconfe-
quentce changement n'empêchoit pas que cette humanité ne
fuft vifible & compofée d'un corps & d'une ame.
On dira pcut-eftreque l'Eutychien reconnoift enfuite l'in-
compatibilité de ces opinions 5 & qu'afin qu'il y euft quelque
liaifon dans (es fentimens,il eft obligé de reculer ce change-
ment de la chair en divinité jufqu'aprésrAfcenfion , afin de
pouvoir accorder qu'on avoit pu voir le corps de J. C. aupara-
vant, & qu'il avoit été capable de faire £c de foufFrir par ce
corps tout ce qu'en rapporte l'Evangile.
Mais il eft facile de voir que cet aveu queTheodoret tire de
TEutychien , n'eft qu'une fuite du deflèin qu'il avoit d'attribuer
à la même perfonne des opinions différentes j ce qui l'enga-
geoit à luy faire abandonner la première pour le faire pafTer à
une autre. Car il paroift que \qs autres Eutychiens n'abandon-
noient nullement ce point , & qu'ils enfèignoient en même
temps que le changement s'étoit fait au moment de l'union ,
que la nature humaine avoit été abforbée dés cet inftant , 6c
que néanmoins J. C. avoit un vray corps capable des actions
corporelles.
C'ctt)it dés le moment de l'Incarnation que Timothce & Se- c. 15.
vere diloient, au rapport d'Anaftafe Sinaïte , que la nature de
5p Li V. V. Explication des p-ijf'^g<^s de Thsodoret
Ibid. J. c. ètoit la feule divinité. C'ccoic par l'Incarnation même qu'ils
difoienc qu'elle avoit été ablorbée comme une goutte de vi-
naigre jecrëe dans la mer. C'ëtoit dans l'Incarnation même
qu'ils difoient que la nature divine avoit prévalu , & qu'elle
■"^' avoir déifié la nature inférieure.
Il n'y a donc plus qu'à examiner fi félon eux cette divinité
qui faifoit l'unique nature de J. C. &dans laquelle l'humanité
avoit été abforbée ôi déifiée , n'avoir point de corps. Or c'eft
ce qui paroiftra entièrement infoûtenable à tous ceux qui pren-
dront la peine deconfidererceque nousen allons citer.
/ Car Anaftafe Sinaïte témoigne , que tant les Sénateurs de
Severe^ que tous les autres Eutychiens difoient, que l'un/que na-
ture de J. C. ètoit compofèe de deux natures particulicrei , dont cha-
cune était imparfaite. Et pour montrer que ce n'étoit pas des
mots en l'air , il rapporte encore que quoique Severe refufaft
de donner au corps dej. C. le nom de nature., il le traittoic
néanmoins de pafjîble , de matériel , de terreflre , de fu je ta la faim-
^ aux travaux. Que quand ondemandoit à ceux de fs fecfte ,
comment il avoit pleuré, comment il avoit pu recevoir des
foufflets , comment il avoit enduré tant de travaux j iL répon-
doient qu'il avoit fait tout cela , par ce qu'il avoit r/^ terrcfire.^
de vifîhle , d'humain , en un mot par fon corps. A quoy Anaftafe
ajoute , qu'accordant tous ces noms à Inhumanité de J. C. ils luy re~
fufoient feulement le nom de nature.
Que fi l'on demande comment ils pouvoient allier ces expref-
fions avec celles qui femblent nier ces mêmes proprietez , la
vérité eft: qu'ils s'en tiroient afi[èz mal -, mais que néanmoins ifs '
les allioienc 5 & qu'une de leurs voyes pour cela , c'étoit de dire
que dans ces adions mêmes qui paroiffoient humaines , il y
avoit quelque chofe de divirt
s, 15'. C'eft ce que l'on voit par ces paroles qu'Anaftafe rapporte
d'eux. Si J. C. n'étoit point la divinité , co-mynent (a falive ren-
dait elle la vue aux avctiqles ^ Comment fcs larmes ont. elles pu
rcjju [citer le Zaz^tre ? Comment a-t'il pu s' empêcher de boire après
avoir dit a. la Samaritaine qu'il avoit foif ^ Comment efi.ce qu'il
ne mangea pax après avoir jeûné quarante jours ? Nous ne lifons
pas m'eme qu'il ait dormi , finon une fais dans le navire, il ne pa~
roifi pas non plus par l' Evangile , qu'il ait hit a l'ordinaire des
autres hommes. Et tout cela prouve que la nature humaine de J. C.
était devenue divine î que /le n'était plus fujette aux praprictex^
humaines
'^ de trois Auteurs qui ont parlé comme luy. 551
humaine , é^par confcquent qu'il n'y a en luy quune nature. Ch. X L
Ils ne nioienc donc pas que J. C. n'euft eu quelques-unes de
ces fondions humaines; mais ils difoienc qu'il les avoir eues
fans les necefîïtez humaines, &: avec quelques circonftances
qui luy eftoienc propres i & cela leur fuffifoic pour dire qu'il
n'avoit qu'une nature i & qu'elle n'avoir point les proprietezde
la nôrre.
Mais que pent-on defirer de plus précis que ce qu'en feignoic
Severe au rapporr du même Aureur , que comme l'ame eji une ds,
partie de la nature de l'homme ^ le corps l'autrei de mefme dans
J. C. é^ dans fa nature unique , la divinité fait une partie , & le
corps l'autre.
Que peut-on defirer de plus decifif que ce qu'il aflîire ail-
leurs, que lesMonophyfires eftanr prefTez dédire à quelle na-
ture de J. C. ils arrribuoienr ce qu'il y a d'infirme dans ce
qu'on rapporre de luy : eux ne voulanr pas appeller la chair
de J. C. du nom de nature, répondoienr que c'étoit a l' huma-
nité-,0, ce qii il avait pris ^ ace que l'on voyait en luy^ à fon corps, k fa
ehairi (^ qu'ils donnaient ainji une infinité de noms à l'humanité de
J. C. mais qu'on ne pouvoit obtenir d'eux qu'ils luy donnajfent ccluy
de nature.
Comment peur-on expliquer la divifion qui arriva entre les
Eurychiens , que nous apprenons du même Aureur , s'ils
croyoienr que J. C. n'eufl poinr de corps? c. is.
Severe f^ Gayen , dir- il , ef oient autrefois très- unis de fentimens^ Prcft're°dc
^ demeuraient enfemble dans la dix- huitième rue d'Alexandrie j Raitc, rappor-
mais un jour Severe demanda aGay en s'il fallait dire que le corps de "'"f'^'"'^."i^-
y. C-fnjr corruptible ou incorruptible 3 & Severe ayant dit qu'il dit que ce
eftoit corruptible avant fa refurreEtion, Gayen fe fepara de luy, dans ''"'ï'^rcnd am-
la penfée que de reconnoifre que le corps de I. C avait efiè corrupti. vere'&^unê»
ble y c'étoit rcconnaifire deux natures. Evclqu»
Les Gayaniftes croyoienr que le corps de J. C. avoir efté in- '!^H'^^i"™af.
corruprible dés le momenr de l'Incarnarion. Ils difoient que
J. C. n'avoit rien eu de ce qui nous eft narurel , comme le leur
reproche le même Aureur.
Us croyoienr que la narure humaine unie hypoftatiquemcnt
au Verbe avoir eflé changée dans les propricrez de la narure
divine. C'eft la manière dont ils s'exprimoienr. Mais avec cela
ils ne laifloient pas de reconnoiftre que J. C. avoit un vray
corps. Et pour marquer en quel fens ils difoient que cette
Tt
331 Liv. V. Explication despnjfigesde Théodore»
nature humaine avoir efté changée' dans les proprictez de fa-
nature divine , ils ajoûtoienc, qu'encore que I. C. eiift fleuré le
Lw^^ire , fes larmes néanmoins coynme incorruptibles & divines l'a-
voient rejfufcité : Que s'davoit craché ^ft fiUve avait rendu la vite
C. 15. aux aveu'llcs : Que quoy qv^il euft vcrfé fon fmg , ce fang avait
racheté le monde j ^ que quoy qu'il eiifi cflé crucifié , il avait cou-
vert le folcil de ténèbres comme JDicu^
Ce n'ccoic donc pas en niant le corps de J. C. qu'ils le di-
foienc incorruptible^ mais en luy donnant une qualité divine.
C'ctoit en ce (ens qu'ils le precendoient d'une autre fubftance
ii'^. que la noflre. Et enlin , quoy que leurs expreffions fuflenc ex-
travagantes, &: que ceux qui les on? combattues ayent eu rai-
fon d'en tirer les confequences qu'ils en ont tirées, il eft pour-
tant vray que dans'lefond les Eutychiensne poulToienrpas leurS'
fentimens auffi loin que leurs expreffions s'etcndoient; 6c qu'ils-
admcttoient quelquefois (î formellement l'humanité de J. C.
qu'ils obligeoient leurs adverfaires mêmes d'en convenir.
C'eft ce qu'on voit eii plufieurs endroits des livres de Vigile-
Evefque en Afrique.
Livre +. cou- Aumcfmc temps ^ d'\t'\\^quc vous tafchez^d'ofier a I.C. laJtature^-
Kc Eut/chez, humaine en faifant profcjjion de ne reconnoijlre en luy qu'une nature ^^
il femble que votis confeffcz^ce que vous niez, , puifque vous dites
que le Dieu né dans la chair, qui cjî le Verbe de Dieu:, a cflé fait
fans convcrfîon homme parfait ^ en demeurant Dieu h cjlant fcmbla-
hleuDieu par fon efîat d.e yrandcur (j?- de puiffanceyé^ à nous par fon
efiat d'infirmité.
Il rire la mêmeconfequence des paroles qu'il rapporte d'eux;
dans le même livre: Vous efîcs contraints, leur dit-il, de recon-
' noiflre la vérité que nnus enfeiqrions par les paroles mefmes dont
•vous vous fcrvct^ Noflre nature^ dite s -vous , fe glorifie d'avoir
efié élevée à cet honneur , lors qu'elle voit que ce luy qui efl de mef-
me fubjlance que fon Perc félon la divinité , (^ de mefme fub-
jtance- que nous félon la chair qu'il a prife de la Vierge, cfi ajfîs-
k la droite de la magnificence de fon Père. Si vous avez^fncere-
mcnt dans le cœur ce que ces paroles (ignificnt ^ on ne fcauroit nier-
qu'elles ne foient Catholiques. Et quand vous dites encore qus-
comme le Fils efl de 'mefme fubfanccqnc fon Père félon la divinité^,
il efl av,(fî de mefme fubflance que nous félon la chair qu'il a prife 3-
je n'ay rien à vous dire fînonquc vous reconnoiffez^dcux natures en:
fefus-Chrifl.
^ de trois Auteurs qui ont pArlé comme luy. 33 j
Mais on ne peuc rien dire de plus formel que ce qu'il rap- Ch. XL
porte dans le mcme livre comme avo.ué par les Eucychiens:
Vous reconnoijjez^, leur dit il , que le Verbe a c (te fait chair , mais
tn forte qu'il n'a poititejtè changé en chair ^ d;- qu'il a confervé les
fropriûtez^de fa nature^ ^ que la chair de même n'a -point fer du les
proprietczjie fa "nature par 1^ union qu'elle a avec le Verbe: ce qu'il
prouve par un pafTage pris d'un livre àç.s Eucychiens contre le
Concile de Calcédoine. Et il conclut de là à (on ordinaire^ que
c'écoic aller contre la profeiïîon qu'ils faifoient de ne croire
qu'une nature en J. C. & qu'on ne pouvoit pas mieux recon-
noifl-re Tes deux natures , gcminas profccio intégras , immutatas^
inconfufoé- Verbi (^ carnis fatemini efje naturas.
Cependant ce même Auteur , à l'imitation de tous ceux qui
ont écrit contre les Eucychiens, ne laifle pas de leur imputer
les confequences qui fe tiroient naturellement de ce dogme,
qu'il n'y a qu'une nature enj. C. Et on diroic même à n'en juger
que par ces pafTage^ qu'il a craque les Eutychiensadmettoienc
ces confequences, bc qu'ils nioient pofitivement l'humanité de
J. C. mais il paroiftpar beaucoup d'autres lieux qu'il n'y a rien
de plus faux.
La raifon veut donc qu'on diAingue dans ce que l'on leur
impute ce qu'ils avoûoient en effet, de ce qu'ils n'avouoienc
pas : quoy que les Auteurs qui en ont parlé n'ayent pas toujours
fait cedifcernement. Et en gardant cette équité, on fera obli-
gé de reconnoiftre qu'on neA'oit point qu'aucun Eutychien ait
enfeigné pofitivement, que J. C. fufl: maintenant purement
immatériel: Qu'il paroift au contraire qu'ils ont toujours re-
connu en J.C. un vray corps, &:unevraye matière. Et qu'en di-
fant que la nature humaine avoir perdu fes proprietez , ils en-
tendoient feulement que les propriétés de la nature humaine
avoient en J. C. quelque chofe de divin qui les dillinguoit de
celle des autres hommes.
Il eft vray que ce que The©doret leur impute d'avoir cru que
le corps de | C. n'étoit plus vifible ny palpable ny circonfcric
va plus loin que cela. Mais que fçait-on auflî fiTheodorec ne
porte point un peu trop loin fes confequences, & s'il ne fait
point avouer à l'Eranifte ce que les Eutychiens n'avoiioient pas?
Et de plus, que tireroic-on de- là fînon que les Eutychiens ont
pu avoir quelques imaginations femblables à celles des Luthé-
riens Ubiquiftes , 6c qu'ils ont cru que l'humanité de J. C. étoic
Tcij
354 Liv. V. Expûcution des pa.JfiigesdeTheodoret
par tout, Scqu'ainfi elle n'étoit pai renfermée en un lieu bor-
né , êc qu'elle étojc impalpable & invillble par tout ailleurs que
dans le Ciel ^ mais comme cette erreurdes Luthériens ne les em-
pêche pas de croire que J. C. a un corps , elle n'en a pas non
plus empêché les Eutychiens.
Cette explication de l'herefîe Eutychienne contribue véri-
tablement fort peu à l'éclaircilTement des pafTages de Theo-
doret que nous avons examinez , puifqu'il ne s'y agit pas tant
de ce qu'ils ont crû que de ce qu'il leur a impute de croire.
Mais on va voir qu'elle renverfe entièrement d'autres objec-
tions que M. Claude propofe, & d'un air à étonner ceux qui
ne font pas inftruits du fond de cette here/îe.
M. Claud, 1,
lep. p. ji.
CHAPITRE XH.
Réfutation de quelques autres Objections que M. Claude tire df
l'MereJîe des Eutychiens j (^de la manière dont elle a ejlé
combattue far les SS. Pères,
QUoY-que M. Claude ne fôit pas l'Auteur d'e cet argu-
ment que l'on tire de l'Hereiie des Eutychiens contre
]a prefence réelle , il fe l'eft néanmoins tellement rendu pro-
pre par le jour où il l'a mis, qu'il auroit quelque fujet de fe
plaindre û Ton ne le propofoit fous fon nom, & (T l'on ne le
rcprefento^avec toute la force qu'il a tafché d'y donner. Ainiî
pour kiy faire toute la juflice qu'il peutdefirer, je rapporteray
d'abord fes propres paroles.
M. CLAUDE..
Je viens enfin à la difpute contre les Eutychiens, où je pré-
tends que les SS. Pères fe font fi formellement déclarez qu'ait
n'y a plus rien à' contefter. Et voie y comment je le montre.
Ces Hérétiques foùtenoient que le corps de J. C. au moment
de fon élévation dans la gloire celelTe, avoir été changé en
la nature ou en la fabftance divine. Les SS. Pères employent
d'ivers moyens pour combattre cette erreur , & entre autres
ils fe fervent du S. Sacrement. Or il ne faut pas avoir l'efprit
fort pénétrant, pour reconnoiftre que s'ils euilent crû la TranC
m
& de trois Auteurs qui ont p^rlé comme luy. 355
fubfl-antiation &;la prelence réelle, lis euifcnt reproché auxHe- C^ Ai*.
retiques qu'ils aneanriflbienc la foy d'un Ç) grand Myftere, &. "
qu'ils comboient dans deux erreurs capitales, l'une contre la "
nature humaine du Sauveur confiJerée par rapport à l'union "
hyportatique, & l'autre contre cette même nature confîderéc ''^
à l'égard du Sacrement. Car fi la nature humaine aeftc en- "
gloutie par la divinité, 6c le corps du Seigneur changé en la "
fubftance divine , il n'y a plus de tranlTubftantiation ny de pre- "
fence réelle au Sacrement. Ces deux chofes iè renverfentmu-*'
tuellemenc. La prefence réelle détruit l'erreur Eutychiennej ^
& l'erreur Eutychienne combat la prefence réelle. L'incom- "
patibilitéeft évidente. Comment donc s'eft il fait que les Eu- **
tychiens, 5c les Orthodoxes n'ayent jamais eu rien à démêler "
enfemble fur le fujet de l'Euchariftie? Se peut- on imaginer "
que les Eutychiens ayenc crû que le corps de J. C. n'eil plus, "
ayant efté converty en la (ubftance divine, & que cependant "
ils ayent crû qu'il eft tous les jours fubftantiellement prefenc "■
fur l'Autel \ Mais iuppofons qu'ils foienc tombez dans cette "
manifefte contradiction : Peut- on s'imaginer que les SS. Pères "
ne s'en foient pas eux mêmes avifez, 6c qu'ils ne fe foient pas "■
fervisde ce dernier article pour impugner le premier , en leur '*•
difant : Vous croyez avec nous que le corps & le fang du Sau- "
veur font réellement &; fubflanticlfement prefens dans l'Eu- "
chariftie, &c. Pourquoy donc dites-vous que ce corps &; ce «<'
fang ne font plus & qu'ils ont cfÊé changez en la divinité ? Ce, "
pendant, ils ne l'ont pas fait. Ils font demeurez les uns & les "
autres dans une paix profonde à cet égard. En vérité cette "
paix efb une énigme & on myftere pour moy, dont je voudrois «
bien avoir l'intelligence. Mais ce n'eft pas tout. Ce que je vay «
dire eftencore plusfurprenant. Les SS. Pères employent po- '«-
lîtivement le S. Sacrement pour réfuter l'erreur Eutychienne «
en cette manière. Il faut qu'une image ait fon original: caries "
peintres imitent la nature &; peignent les images àt^ chofes ff
qu'on Toit. Si donc les divins myfteres font les figures d'un ««
vray corps , il s'enfuit que le Seigneur a encore maintenant un ««
corps, non changé en la nature de la divinité, maisremply de «^
la gloire divine. C'eft en propres termes le raifonnement de «
Theodoret dans le fécond Dialogue , &: il répète la même "
fhofe &; le même fens en deux autres lieux. Que veut- il dire '«-
d'alléguer le S. Sacrement comme une image &une figure q^LÙ '*
Tt il)
^''336 Liv. V. €splicxtion des pnjfages de Theodoret
j, prouve la vérité du corps de J. C fans le fouvenir que c'eft le
j, corps même réellement ? Si dans cette difpute il n'eult pas par-
„ lé de l'Eucharilliie, à la bonne heure, je dirois qu'il ne s'en efl:
pas fouvenu. Mais l'alléguer, 6c de deux argumensqui s'en
peuvent tirer, l'un à i'ufage de Rome & l'autre à la façon de
jj Genève, laifler celuy de Rome 6c choifir celuy de Genève, c'eft
5, fans mentir fcandalifer tous les Catholiques éc fe déclarer Cal-
,, vinifte trop ouvertement.
Je veux bien encore ajouter ce qu'il dit en un autre endroit
de ce même ouvrage.
N'eft ce pas auiTi une chofe fort furprenante , que les Euty-
chiens niant que J.C, euft un corps depuis (a glorification, &
difputant là.deflus fortement contre les Catholiques, les Ca-
tholiques ne fe foient point avifez de leur dire: Etqu'eft- ce
donc que vous adorez en commun avec nous quand vous ado-
î'féz le Sacrement? Voulez vous que le pain foit formellement
c'onverty en la nature divine, 6cque ce foit l'effence éternelle
immédiatement qui foit produite par cette converfion , pour
eftre adorée fous ces accidens ? Il faut avouer que fî le culte de
l'Euchariftie étoit en ce temps-là ce qu'il eft aujourd'huy dans
*là communion Romaine, la molefTe des Pères n'eft nullement
fupportable, de n'avoir pas fait expliquer les Hérétiques fur un
article fi important.
Mais après avoir écoute ces difcours de M. Claude 5 il eft
jufte auflï qu'il écoute à fon tour la réponfe que nous avons à
y faire , qui ne peuteftre plusprécife. Car il n'y a qu'à luy dire
en un mot , qu'il n'y a rien de vray dans tout ce qu'il avance {î
hardiment, ôc que ce n'eft qu'un amas de fuppoiitions faufles
& téméraires.
Il n'eft pas même neceflaire de le prouver, après ce qui a
eftcétably dans le chapitre précèdent. Car tout ce difcours a
pour unique fondement, que les Eutychiens foùtenoient que
J. C. n'avoit plus de corps, & qu'ils étendoient leur dogme,
d'une feule nature en J. C. jufqu'à cette confequence qu'il
étoit purement immatériel. Or, nous avons vu parleurs pro-
pres paroles , & par le témoignage des Auteurs qui ont conféré
avec eux , que ce principe eft faux, qu'ils vouloient que J. C.
fu[i Dieu parfait & homme parfait ^ qu'ils reconnoiftoient qu'il
avoit un corps , ?^ que ce n'étoit point un corps phantaftique
comme les Marcionites & les Valentiniens le pretendoient.
51
M'
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1'
S'
»»
il
SI
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&f de trois At^teurs qui ont parlé comme luy. ^^j
On ca fait voir aiilîidans la répcuife générale par le témoi- Ch. XH.
gnagede Nicephore,quefi quelques uns d'cntr'eux ont dit que
J. C. n'avoiceuque les apparences d'un corps^iis enrendoient
d'un corps mortel Sipalfible; èc qu'ils difoient en même temps
qu'il avoit pris dans le Ciel un corps immortel & incorruptible.
Ainfi tout ce que M. Claude baftit fur ce beau Fondement tom-
be par terre. Et il cft vifible au contraire que les Euty chiens
n'ont point efté obligez parla fuite de leur herefie à nier que le
corps de J. C. fuft réellenient prefentdans l'Euchariftie; qu'ils
ontpù l'y reconnoiftre comme ils l'ont reconnu dans toutes les
actions de fa vie , & que c'eft avec raifon qu'ils n'ont pas fait de
l'Euchariftie un point de conteftation entre eux èi, l'Egliie Ca-
tholique,
Que M. Claude ne demande donc plus fi l'on fe peut ima-
y,ner que les Euty chiens aycnt cru que le corps de I. C. n'ej} plus,
ayant efiè converty en la fubftance divine , ^ que cependant ils
ayent cru qu'il cfl tous les jours ftibflantielleyncnt prcfcnt fur l' Au-
tel. Ou qu'il fe réponde à luy- même qu'ils ne fe font point ima-
ginez que le corps de J. C. ne fuft plus , & que fa matière fuft
anéanties Se qu'après l'avis qu'on luy en avoit donné dans la
première partie de cet ouvrage, il eft étrange qu'il n'ait pas eu
plus de foin de s'inftruire du fond de leur herefie, & qu'il aie
continué d'en parler avecauffi peu delumiere dans fa troifiéme
rcponfe.-
La feule confequence qu'ils ont dû tirer de leurdodrine, à
Pégard de l'Euchariftie, c'eft, que la nature humaine qu'ils ad-
mettoient réellement enJ.C. ayant perdu félon eux fes proprie-
cez,6c ne faifant plus qu'une nature avec la divine} ilsdevoienc
dire auflî que le corps de J. C. qu'ils reconnoifl^)ient dans l'Eu-
chariftie étoit le corps de la divinité même. Auffi avons nous
fait voir que c'étoit là leur fentiment. Ce qui leur avoit attiré
ce reproche d'Eutymius, qu'il s'enfuivroitde leurdoélrine que le
Sacrement du pain qui eft la chair de I. C. ri eft pas le corps dej. C.
mais le corps de la Divinité ; c'eft-à-dire que c'eft un corps qui Voyez perp,
n'eft plus une nature à part, mais qui ne fait-plus qu'une même ^°"^ »' '• ^
nature avec la divine- Et cet autre d'Ifaac Catholique d'Armé-
nie qui les accufe de changer les truditions de l'Eglife Catholique^
^ de n'appeller pas la participation des myfieres ou le facrifîce du
pain qui eft la chair de J. C le corps de J. C. cormne J. C. mefmg l'd-
appelle , mais de le. nommer divinité.
558 Li V. V. Explication des pajfages de Theodoret
Mais ce leroic témoigner peu d'intelligence dans leur lan-
gage que de conclure de- là queJe corps qu'ils appelloient di-
vinité n'étoit donc pas un corps. Car comme ceux qui difoienc
que le Verbe avoit été changé en chair, vouloient en même
temps que cette chair fufl: & Dieu 6c chair-, de même ceux qui
renverfanc cette hypothefe , foùtenoient que la chair de J. C.
avoit été convertie en Dieu , enfeignoient en même temps
qu'elle étoit & chair bi Dieu, c'eft-àdirè que Dieu & cette
chair ne faifoient qu'une nature divine.
Les Eutychiens ont donc parlé de l'Euchariftie, comme leurs
principes les y obi igeoientjScl'on peut dire qu'il n'y a point de
matière où ils les ayent iuivis plusexaclement. Ils n'avoient au-
cun fujet d'embrafler fur cet article un autre (entiment que ce-
luy de rEglife,c'efl: à-direque celuy de la prefence réelle. Aufli
ne l'ont ils point fait. Mais la bizarrerie de leurs expreffions
devoit s'étendre jufques à ce myfterej & comme ils croyoienc
que le corps de J. C y étoit réellement prefent, ils dévoient
l'appeller des mêmes noms qu'ils donnoient au corps de J. C.
■confidcré dans le Cieli &,c'eft encore ce que l'on trouve qu'ils
ont fait. Ainfi jamais figures ny railleries ne furent plus mal
employées, que celles que M. Claude fait fur ce fujet.
Mais il raifonne un peu plus jufte à l'égard de la manière
dont i^l fuppofe que les Pères dévoient combattre les Euty-
chiens. Et l'on va voir qu'il nefe trompe que dans le fait. Peut-
4in s^imapner , dit- il , qu.e les F ères nefe foientpoi- Jervk de l'article
■de l' E-icbariftie pour impwincr l'erreur des Eutychiens , en leur di-
Jknt : J^o'iis croyez^ avec nous que le corps (^ le f-mz, du Sauveur
font réellement (^ fubfiantieUement frefens dans T Euchariflie. Et
fourquoy donc dites- vous que ce corps ç> ce fanq^ ne font plus , ^
qu'ils ont cfic changez^en la divinité] En effet , il y a quelque ap-
parence que les Pères dévoient employer contre eux cet argu-
ment tiré de rEuchariftie, ou quelque autre femblable. Caren-
core qu'il nefuft pas concluant-, puifque lesEutychiens^comme
nous l'avons fait voir, donnoient un corps à J. C. &. dans l'Eu-
chariftie &: dans le Ciel 5 néanmoins comme le procédé des Pè-
res en combattant ces heretiques,a été de leur imputer les fui-
tes naturelles & neceiîaires de leur opinion,& de les accufer ain-
fi de détruire l'humanité de J. C. parce que leurs principes la
^iétruifoient, quoy qu'ils la reconnuflfent en effet -, ils ont bien
pû en fuivant cette conduite les accufer d'anéantir le myftere
de
^ de trois auteurs quiontp^â rlé comme luy. 3 3 ^
es. l'Eucharillie , en iv'admectant qu'une nature en J. C. Ch. XÎÎ.
Mais comme M. Claude a fort bien jii2;e qu'ils pouvoient
Utilement employer cec argument, fuppofé qu'ils icvUTent la
prefence réelle , U doit juger auffi qu'ils n'ont pu remployer
I fans la croire.
' Il n'y a donc plus qu'à examiner ce qu'ils ontfait ; & d'a-
bord M, Claude qui difpofedes hi(l:oires& des livres félon fcs
j befoins , nous déclare qu'Us n'y ont pas penfé , qu'ils font de-
lîieurez les uns d^ les autres dans une faix profonde à cet é'iard^ û^v-t
cette faix efiune énigme pour luy , dont il voudrait bien avoir l'iris
uHigenee.
Mais jamais chofe ne fut plus facile que de démêler cette
énigme, ôc de faire entendre à M. Claude ce qu'il n'entend
pas. Car il n'y a qu'à luy dire que les Pères ont fait ce qu'il leur
impute de n'avoir pas fait ^ qu'ils onrprefle lesEutychiens par
lemyfterede l'Euchariftieen toutes les manières qu'ils le pou-
voient faire , & qu'il eft étrange qu'il art oie avancer lur la foy
ë'Aubertin une taufleté dont il ell: £ aifé de le ccovaincre.
Car n'eft-ce pas des Eutychiens que S. Léon parle en ces
termes dans une de fe5 Lettres : En quelles ténèbres d'^ignorance , %'*• *?"•
en 'quel engourdiffcment de Lâcheté ces gens (ont- ils f longez^ ,- d^
n'avoir pas ehcore af fris ni far l'ouyeni par la leclure «ne doEiri-
ne rct^ûe de tout le inonde d'une manière ji unifortne , que les langue.!
mêmes des en fans annoncent la vérité du corps ^ du fang de J. C,
en farticifant au Sacrement de la foy commune 'y puifque dans ha
diflribution myjiique qu'on nous fait de cet aliment fpirituel , on nous
le donne , & non^s le recevons , afin qu'en recevant la vertu de ce
fain de vie , nous foyons changezjjeureufement en fa chair , fuifque
luy m'crne a eftéfait nefire chair.
Ne font-cepas les mêmes Eutychiens qu'il avoit en viië ,
lorfqu'il dit. dans un de Tes Sermons : Fuifque le Seigneur nous • '^/ fjpjiajj
dit ffï vous ne mangezja chair du Fils de l'Homme , ^ ne bcuve-z^ mcnfi^
fonfang , vous n'aurez^ foint la vie en vous , nous devons de telle
forte nous approéher de lafacrée Table ^que nous ne témoignions at^
cun doute de la vérité du corps é^ dufang du Seigneur. Car l'on re-
trait far la bouche ee que l'on croit par la foy , ^ cefi en vain que .
ceux. U ré fondent A m E N , ^«/ combattent ce . qu'ils reçoivent.
Qui font ceux que ce faint Pape condamne en cet en-
droit, finon les Eutychiens ? Et par où les condamne t'il,finon
par la prefence réelle, en les accu(ant de parler contre ce qu'ils
Vu
340 Liv. V. ExpUcAtîondespa,Jfa,^esdeTheodoret,
reçoivent par la bouche, c'eft-à dire contre le corps de J. C. 5c
de rainer ainfi ce myftere par leur docflrine.
Si cela ne fulîit pas encore pour donner à M. Claude l'intel-
ligence de cette énigme fi terrible , qu'il écoute de quelle forte
AnaftalèSinaïte fe lert de l'Euchariftie contre Timothéeun
àcs chefs des Eutychiens.i"////)/ a , dit i! , que la feule divinité
en J. C. co7nmc la divinité ne peut cjire ni viic ^ni touchée , ni fa~
crifiée ^qu elle n' a point de parties , quelle efi incapable d'cjlre man-
gée , il s'enfuit elairement que Timothée nie atift- bien que les
Juifs la communion des myfleres fierez^ du corps <ér du fang de J. C.
ET- qutl ne croit ni ne confelfc que c'efi vcntablcment le corps (y le
fing vifble, créé ^ terre ftre dej. C.qui cfidifribué par celuy qui
l'offre en prononçant ces paroles : Le corps & le fang de nofire Sei-
gneur S- Sauveur J. C. Car foù tenant, comme il fait d'une part ^ que
La divinité efi la feule nature de J.C. ô- la nature divine eftant in-
capable d'eftre maniée , rompue , divifée , verfée , vuidée , changée ,
coupée par les dents j il faut par neccffîté que Timothée fe précipite
dans l'un de <es deux abîmes , ou qu'il dife que la divinité eftpaf.
fible ^ fujctte a changement ^ ou qu'il 7iie le corps (^ le fan'i^ de
J. C. qu'il offre ^ qu'il reçoit à la Table myftique , ^ qu'il diftri-
bue au peuple avec ces paroles : Le corps ^ le fang de nofire Seiyieur
J. C. car fuivant fes principes ^ ildevoit plufiofi dire , c'efi la feule
divinité de nofire Seiyieur.
Anaftafe ne fait-il pas juftement ici tout ce que nous^avions
prévu que les Pères auroient fait contre les Eutychicns -, fup-
pofé qu'ils ayent cru la prefence réelle? Il fe fert de l'Eucha-
riftie pour réfuter leur erreur. Il les accufe delà détruire ,de
nier le corps de J C. mais il les en accufe paruneconfequence
qu'il rire de leur dodrine i&il témoigne au contraire qu'ils de-
favouoicnc cçtzz confeqnence , puifqu'il lapropofe par une al-
ternative, & qu'il conclut ,. ou qu'ils admettoient une divinité
palTible, ou qu'ils nioient le corps deJ. C. ce qu'il n'auroit pas
fait , (î c'avoit efté formellement un de leurs dogmes , & qu'ils
eulfent nié la veriré du corps de J. C. dans rEuchariftie par
quelque doga->e formellement foûtenu.
Auflî ce même Auteur rapportant en un autre lieu ce que
les hérétiques cnfeig-noient dogmatiquement touchant cemy-
ftere , il leur fait faire une confeiTîon exprefle de la prefence
ré. 'Ile. A Dieu ne plaifc ^ fait-il dire à cet Eutychien , que notes
difions que la \jaerée communion n'efi que la figure de Chrifl ou de
Ê? de trois <îAiiteufs qui ont pxrlé comme luy. 34T
(impie pain. Mais nous y recevons ventahlcmtnt le corps mhne & Ch. Xllk
le fiiyi'^ même de J. C. Fils de Dieu inearnê , (^ né de la fainte
Mère de Dieu ^ toujours Vierge Mûrie. C efieeque nous croyons
Q- ce que nous confcjfons , félon ce que J. C. a dit ù fcs difciples
dans la Cène myfiique , en leur donnant le pain vivifi.mt : Cecy
eji mon corps.
Rien ne fait mieux voir combien il eft important pour en-
tendre les lentimens des Eutychiensde difiinguer les dogmes
qu'ils ont formellement foutenus , d^^s confequences qu'on en
a tirées , que les deux pallages que nous venons de rapporter ,
puifque dans le premier cet Auteur leur impute denier le corps
de J. C. dans TEuchariftie , &: qu'il le leur fait confclTer clai-
rement dans l'autre.
On peut encore juiz;er par là que 'à cet argument efloit afTèz
bon pour eftrc propole par quelques Pères ^il n'eftoit pas alfez
deciiif'pour faire que tous s'en fervilFent, puifqu'il n'eftoit fon-
de que fur une confequence que les Eutychiens faifoientpro-
feffion de defav.mer. Et c'eft ce qui a donné lieu à quelques
autres d'employer encore l'Euchariftie contre ces Hérétiques,
d-'une manière différente , mais qui n'eftoit pas moins forte , &..
de ne fe fervir que de la qualité d'image du corps de J. C,
qu'elle polîede par fa partie extérieure.
Car il n'eftoit pas tant queflion de prouver contr^eux qac.
J. C. avoir un corps, puifqu'ils Taccordoient , quede leur mon-
trer que ce corps n'eftoit pas changé en divinité , ôc qu'il n'é-
toit pas confondu avec la nature divine. Or c'efl ce que l'on
ne prouvoit pas diredlement en regardant rEuchariflie par fa
partie intérieure, & par ce qu'elle contenoit au dedans, pui/que
les Eutychiens pouvoient répondre, & qu'ils répondoient en
effet, qu'il eftvray qu'elle contenoit un corps , mais un corps''
divinifé & abforbé dans l'océan de la divinité, au lieu qu'en,
regardant l'Eucirarrftie commet antitype êc comme image ,oni
éombattoir direttement le fond de leur erreur.
Car on leur faifoit d'abord avouer que les fymboles myfli-
ques n'eftoient pas les fymboles de la divinité, mais du corps
& da fangde J. C. & c'efb ceque Theodoret fait dans :fx3a
premier Dialogue^ on il propole cet argument. Vous aye%J>tert
rcPovdu , dit-il à l'Eufvchien , &• en amateur de La 'veritè. Car
J. C. oyait pris le lymbole .^ ne dit pas : Ccjî ici ma divinité ^ mais-
i / dit -, Ccj efi mon corps.
Vu ij
I4i L I V. V. Explication des pajfages-âe Theodoret^
Et de ce principe on concluoic que J . C. avoit donc un vray
corps , c'eft-à dire un corps qui n'eftoir pas la divinité. Car
s'il eût efté la divinicémêmc,lcs Tymbolcs de ce corps aiiroient
anffi efté iyml)oles de la divinité.
C'eft leraifonnemeat qui ell contenu dans ce paffagede ce
Vw:(ii»xc.i5. dialogue de Theodoretdont M.Claudeaburc. Il faut que toute
ima^e ait fon ort<^iruil , comme les f cintres ne font qu'imiter la na-
ture y ^ quils tirent des chofcs vifhles tout ce qu'ils reprefentent^
Jdefi vray , dit l'Eranifte. Si donc , répond l'Ortlioxloxe, les
divins my/hres font des ftqnes d'un "jray corps , il faut que le corps
du Sauveur (oit encore un corps humain ,Q- qu'il n'ait pas efié
ckangé en la nature de la divinité. Car le principe de cela eft
<]ue les fymboles ne (ont pas figures de la divinité , mais d'un
vray corps, c'eft-à- dire d'un corps non diviniféi & l'Eutychien
ne defavotiant point ce rapport de l'Euchariftie comme figure
au corps de J. C. TJieodorec avoit droit d'en conclure la lub-
iîftance de ce corps.
C'eft en vain que M. Claude s'écrie fur cela de fa manière
enjouée ; Que vcvt. il dire d'alléguer le S. Sacrement ^ comme une
image ^ une fîiure qui prouz>e la venté du corps de J. C. fans fe
fûuvenir que c'eft le corps même réellement ■ ^i dans cette difpu-
te , il n'euft pas parlé de l'Euchariftie , a. la bonne heure , je di-
rais qu'il ne s'en eft pas fouvenu : mais l'alléguer , ^ de deux ar~
g4fmens qui S'en peuvent tirer , l'un à l'ufage de Rome , é" l'^tutre
k la façon de Genève , laifcr celuy de Rome , & choiftr celuy de
Genève yc'cfl fans mentir fcanda.li fer tom les Catholiques , ^ fe
déclarer Calvinjftc trop ouvertement. Si M. Claude eftoit hom-
me à profiter d'un avis charitable ,on l'avertiroit que rien ne;
' licd plus mai que la raillerie, lorfqu'elle eft Faufle. Ceft fa-'
faute , s'il n'a pas vu que l'argument de Theodoret eft plus à
l'ufage de Rome, ^ju'à la fa(^cn de Genève , comme il parle.
Il eft vray cju'il ne fe fert pas en cet endroit de celuy qu'il pou-
voit tirer de l'Euchariftie, comme eftant le corps même de
J. C. ainfi que S. Leon& Anaftafe Sinaïte ne fe font pas fer-
vis de celuy qu'ils pouvoient tirer de l'Euchariftie comme fi-
gure : mais ce que l'on doit conclure de là, c'eft qu'ils ont
tous efté dans le (entiment des Catholiques. Car au lieu que
la dodrine des Calviniftesne donne lieu d'employer l'Eucha-
riftie contre les Eutychiens qu'en qualité de figure , celle des
Catholiques donne droit de i'employercorame figure & conv
ff^de trots Auteurs qui ont parlé coffime luy. 543
•me réalité ; & c'efb juftemenc ce que les Pères ont fait. De Ch. XIL
force qu'il paroift par tout cet examen , que comme les Euty-
chiens ont parlé de l'Euchariflie de la manière qu'ils en dé-
voient parler en joignant la dodrine de la prefence réelle avec
leur erreur , les Pères an (îi les ont combattus par tous les ar-
gumens que Ja docl:rine Catholique leur pouvoit fournir rai-
lonnablement contreiesconfequenccsde cette erreur.
J'ajoûteray feulement ici , qu'encore queTheodorec appel-
le l'Euchariflie du mot d'/;«^zgf &de type , il nous avertit néan-
moins expreilement , qu'il faut ajourer un fupplément à ce
mot , & croire que cette image efl: l'original même, comme
nous l'avons fouvent remarqué, & qu'ileft encore vifible qu'il
fefertdece terme au même fens en un autre lieu dutroifiéme
dialogue ,dont les Minières abufent aulFi fort mal à propos.
Le voicy.
Theodoret ayant deflein de prouver à l'Eutychien que J. C.
n'avoic fouffert que dans fon corps , l'Eutychien réplique : Ccjl
donc le corps qui nous a procure le falut. Comme s'il eftoit ridi-
cule de dire qu'un corps pufteftre caufe de noflre falut. Pour
réfuter l'objeftion contenue dans ces paroles, Theodoret ré-
pond ce qui fuit : Ce rCeJi pas le corps d'un Jimplc homme , maif
le corps de Notre Seigneur I. C. Fils unique de Dieu. Que fi ce
corps vous femble mèpri fable ^ digne de peu d' honneur ^ comment
efiimez^vous que fon type cft Jalutaire ^ digne de refpefî! Et com-
ment fe pourrait- il faire que le type meritafi l" adora ti on ^ la vé-
nération , ^''que l" antitype même nefufi digne que de mépris .'
Les Miniftres infèrent de laque Theodoret comparant l'Eu-
chariflie comme image avec le corps de J. C. comme origi-
nal ,& concluant que fî elle eft digne d'honneur , fon origi-
nal l'eft auffi , il faut qu'il diftingue l'Euchariflie de cet ori-
ginal , 6c qu'il ait cru qu'elle ne contenoit point le corps de
J. C. parce qu'autrement il n'y auroit point de comparaifon
à faire entre l'un & l'autre: Mais ils fe trompent , & l'on doit
conclure tout le contraire de ce paflàge. Car ce que Theodo-
ret veut prouver , c'efl que le falut nous a eflé procuré par le
corps de J. C. Et quand il accufe les Eutychiens de l'eflimer
vil& méprifable, il veut dire qu'ils nel'efliment pas capable
de nous avoir apporté un fi grand bien. Le moyen qu'il prend
pour les convaincre, c'efl qu'ils croycnt que l'Euchariflie qui
efl l'image du corps, eft falutaire & digne de rcfped. Il fup-
V u iij
344 ^iV- V. Explication despajfages de Theodoret ,
pôle donc qu'ils diloienc de i'Euchariihe ce qu'ils nevouloient
pas dire du corps de J. C. & qu'ils avoiioient qu'elle eft caufe
de nôtre (aiuc en la manière que les Orthodoxes difoient que
le corps de J. C en efloir la caufe.
Or reconnoiftre que l'Euchariftie eft caufe du falut comme
le corps de J. C. c elt reconnoiftre proprement qu'elle eft le
vray corps de J. C. n'y ayant^fclon la Théologie des Peres^ que
la chair du Verbe qui ait cette torce j parce que , comme dit ici
Theodoret , & comme S. Cyrille le dit en tant d'endroits dif-
ferens, cen'eft pas la chair d'un (Impie homme, mais la propre
chair du Verbe. Ainfi l'argument de Theodoret eft que lesEu-
tychiens ne pouvoient refufer au corps dej. C. conlideré en
luy mêine^ la qualité de principe de vie qu'ils luy accordoienc
en le confiderant dans l'Euchariftie & couvert des voiles qui lui
font donner le nom d'image &: de type. Cet argument eftoic
bon , mais il n'eftoit pas abfolument convaincant à l'égard des
Eutychiens , qui pouvoient répondre qu'Us accordoient que
l'Euchariftie eftoit principe du falut , parce qu'elle contenoic
le corps de J. C. divinifé , &: qu'ils ne pouvoient dire la même
chofe du corps de J. C. confideré comme une nature feparée
de la divinité , tant parce qu'ils ne croyoient pas qu'il euft ja- '.
mais fait une nature feparée, que parce qu'une nature non;
divinifée n'eft pas capable d'eftre principe du falut.
Au rcfte comme la comparaifon qu'il vouloir faire en cet
endroit entre TEuchariftie ôi le corps de J. C. l'a porte à fe
iervirdu mot d'image , &:à la comparer avec le corps de J. C.
comme avec fon original , quand il a une autre vue , & qu'il
compare l'Euchariftie avec les fîmples figures du corps de
J. C- qui ne le contenoient point , il marque expreftemenc
qu'elle contient l'original même. C'eftce que l'on voit dans ce
pafTage de fon Commentaire fur l'Epiftre aux Corinthiens^
UApofire , dit- il :, fait re(fouventr les Corinthiens de cette très-
fainte nuit 'dans laquelle le Seigveur mettant fin à la fafque typi-
que , montra le vray original ou archétype de cette fi'iftre , ouvrit
les portes du Sacrement fulutaire , ^ donna fon précieux corps ^ fon
précieux fang , non feulement aux onz^ y4p>ofires , mais à Judas
mime.
Ainfi félon Theodoret l'Euchariftie eft tout en fembie ar-
chétype &type , original & figure Elle eft archétype ou origi-
Jiial à l'égard des fîmples figures de J. C. qui ne contenoient
(^de trots Auteurs qui ont pdrU comme luy. 545
poinc fon corps , parce qu'elle le contient , & que les médians Ch. XII.
mêmes, comme Judas, l'y reçoivent. Et elle efb type à l'égard
de luy-même confideré dans fon état naturel ^ parce que ce
corps y eft caché & enveloppé de voiles , qui ne font que le
fignifier fans nous permettre de le voir , & qu'il efl dans le
Ciel.
On a crû devair traiter avec étendue ce qui regarde cet Au-
teur, parce que les Miniftres en font le principal appuy de leur
herefie , & qu'on voit fes palfages à la tefte de tous leurs Li-
vres. Peut-eftre qu'ils y regarderont de plus prés à l'avenir,
& que ceux qui fe piqueront de quelque fîncerité changeront
de langage fur ce fujec.
Fin du cinquième Livre.
LIVRE SIXIEME-
QJJ E L'ON REÇOIT J £ S U S - C H R I S T
corporellcment dans l'Euchariftie.
CHAPITRE PREMIER.
Divers fens du mot de mander : BxprcJJions différentes qui eK
doivent naifire à l'éz^ard de l'Eticharifiie fuivant la. doHrint
de la frefence réelle ^ de la Tranffubjlantiation,
A plupart des difputes des hommes ne viennenc
que de l'ambiguité des termes , & cette ambi-
guïté vient ordinairement' de ce qu'y ayant plus-
de chofes que de mots , on efl: contraint de fe
fervir d'un même tesme pour exprimer diverfes
idées qui ont quelque rapport enfemble. Ainfî
ce même terme étant lié dans l'efprit avec ces différentes idées,
il arrive fouvent que l'on peut le nier & l'affirmer d'une même
chofe , parce qu'une de ces idées peut convenir à cette chofe,
êcque l'autre n'y convient pas ; ce qui formant une contradic-
tion apparentedans les termes, qui eft nulle dans le fond, en-
gage fouvent dans l'erreur ceux qui ne prenant pas gardeàces^
divers fens , veulentfe fervir de l'un pour exclure l'autre.
On verra dans la fuite que toutes les difficultez que les Mi-
niftres forment fur la manducation corporelle de la chair de*
J'. C. ne font fondées que fur des équivoques de mots, du gén-
ie de cellesdontnous parlons. Mais avant que de les propofer
en particulier , il eft bon de coniîdéreren gênerai les diverS'
fens
elî mungê corporelîement dans TEuchanfiie. ^^j
ièns aufquels le mot de nungcr ^eut eftre pris, & les diverfes Ch II.
expreiîlons qui en peuvent naiftre à l'égard de l'Euchariftie,
afin qu'on puiïïè prévoir ce qu'il faut s'attendre de rencontrer
dans les Pères, en fuppofant qu'ils ont parlé de rEuchariflie
dans le fèntiment des Catholiques.
Comme il n'y a gueres d'a<n;ion plus ordinaire dans la vie
que le boire & le manger, il femblerojt d'abord qu'il n'y deufl
rien avoir de plus connu & de moins équivoque que ces mots.
Et en effet, quand on s'en fert en gênerai , 6c fans les appliquer
à aucun fujet particulier , tout le monde prefque fe porte à la ^
même idée, &. conçoit cette f^uite d'aiflions corporelles qui s'e-
xercent fur les alimens.
Ainfi parce qu'on les divife & qu'on les coupe avec les dents,
qu'on les goufte, qu'on les avale, qu'on les reçoit dans l'efto-
mach, qu'on les digère, qu'on s'en nourrir i le terme de man-
ger nous reprefente toutes ces différentes actions &: les com-
prend toutes.
Mais parce qu'il arrive quelquefois que quelques-unes de ces
adions font empefchées &: ne s'exercent pas toutes fur l'ali-
ment j il doit arriver de là , ou que l'on reflêrre le fens du mot
de mangerpouT ne luy faire fignifier que ces acfiions qui ne font
pas empefchées 5 ou qu'en le laiffantdans fa fîgnification gène- -
raie on le nie des fujets aufquels on ne peut appliquer qu'une
partie de cesacflions, & non toutes celles que ce mot renferme.
Le langage ordinaire autorife l'un & l'autre ufage. Car, par
exemple, quoy qu'un brochet avalant un autre brochet ne le
brife pas avec les dentSj néanmoins parce qu'il l'avale, qu'il le
goufte & le digère, nous nelaiffonspas de dire qu'il le mange.
Au contraire, parce qu'on ne brife point les pillules dans la
bouche, qu'on tafche de ne les goufter que le moins qu'on
peut, qu'on ne les digère point, on dit bien que l'on prend des
pillules, mais on ne dit point que l'on en mange.
Qiie s'il arrive, que ce que l'on prend non feulement ne foit
point brifé ny goufté, mais qu'il ne faffe aucune imprelîion fen-
iîble fur nous, alors il eft très- rare qu'on fe ferve du mot de
manger^ & l'on dirabien plùroft que l'on ne le mange pas.
On neditpoint, parexemple, qu'un homme ait mangé du
plomb, parce qu'on luy en aura fait avaler des balles, comme
on fait en certaines maladies.
On ne dit point que l'on mange de l'air, quoy qu'il entre par
Xx
54^ Liv. VI. ^e le corps de Jefks-Qhriji
noftre bouche. Ecfi nn elprit prenant pcflèflion du corps d'un
homme entroit par fa bouche , on ne diroic point qu'il auroit
mangé cet efprit.
Cela fait voir que l'idée qui répond à ce mot de w/z»grr,enfer-
me ordinairement autre chofe que le feul palTage d'une matière
qu'on prend par la bouche &: qui paflè dans refl:omach,& qu'el-
le comprend cette fuite d'aclions dont nous avons parlé : de
forte, que s'il arrivoit qu'il y euft quelque chofe que l'on prift
feulement en cette manière^ 6c que l'on fift paffer de la bouche
dans l'eftomach , il arrivcroit fans doute q^uon diroit qu'on la
mange & qu'on ne la mange pas.
On diroit qu'on ne la mange pas, en renfermant fous cz^% ter-
me l'idée entière de toutes les actions qu'il comprend dans fa
fîgnificarion ordinaire. Car, comme il ne conviendroit pas au
fujet félon ce fens, on auroit lieu de le nier.
Et on diroit auffi qu'on la mange , en relTerrant l'étendue de
ce terme, 6c ne l'appliquant qu'à une de cesaclions, qui feroit
celle de faire pafler cette chofe de la bouche à l'eftomach.
Ce qui d'onneroit plus de lieu de tomber dans cette contradi-
(flion apparente, c'eft que quoy que l'idée totale qui répond aa
mot de manquer comprenne ces différentes acftions, néanmoins
l'es hommes ne font point convenus s'il n'y en a point quelqu'u-
ne qui y foirefTentielle. & dont les autres foient feulement des
préparations & des fuites. De forte que félon les différentes im-
prelîîons dont l'efprit c ft frappé fur cela, il peut regarder tan-
tort une de ces aclions comiTie cffentielle &; tantoftuneautre.
Trad:, de " Par exemple, Guillaume Evefque de Paris diren un endroit,,
que- manger c'eft propremer.t fe nourrir, &; que routes les au-
tres aclions qui fe font en mangeant ne font que des prépara;,
tiens : Incorporatio cibi , dit - il, verè comejîia efl\ catera antenv
qua ipfum-pracedîint fraparationes fiint ad comeftionem ^ Et fé-
lon ce fens cet Auteur doit nier que toutes les chofes qu'on ne
digère pas, & dont on ne fe nourrir point, foient effccli -
Suciur,
vement mangées.
Mais un Auteur qiii aura une autre vûë, ne laifîèra pas de-
dire des chofes mefmes dont on ne fe nourrit points qu'on les
mange.
Que fron prend' l'a peine d'appliquer ces notions à l'Eucha-
riftie, & de prévoir de quelle forte les Pères ont dû fe fervir
du mot de manger à cec égard en parlant conformément à la
êlî mangé corporeUement dans rEucharifiie. 549
dodrine delapreience réelle, donc on a prouve qvx'ils ont efté Ch II.
très perfuadez j A eft facile déjuger qu'ils ont pu dire que l'on
mange le corps de J. C. dans l'Èuchariftie , &:que l'on ne l'y
mange pas.
Ils ont pu dire qu'on le mange , parce qu'en efFetce facré
corps entre parla bouche dans l'eftoniach , &: qu'il y entre mê-
me revêtu d'un voile qui donne lieu d'exercer toutes lesaélions
ordinaires qui Te font en mangeant;, &. d'attribuer le tout au
corps de J. C.
Ils ont pu dire auffi que l'on ne le mange pas , parce que le
corps de j. C, n'eft ny brifé , ny rompu par les dents, ny gouftë
ny digéré en luy même ^ 5c que l'on ne dit pas ordinairement
que l'on mange les chofes lur lerquclles on n'exerce point ces
acliions.
Ainfi il y a un fens & un fens tres-commun & très ordinaire,
dans lequel on doit dire que nonfeulcment les méchans, mais
les bons mêmes ne mangent pas le corps de J.C.
Et comme les aftions corporelles font les images de celles de
l'ame, 8c que l'on ne fçauroit gueres exprimer celles- cy que par
des métaphores, il eft aife de juger qu'on doit dire que l'on man-
ge ou que l'on ne mange pas le corps de ]• C. félon que l'on
n'exerce pas les aclions fpirituellesqui répondent à ces actions
corporelles qu'on appelle du nom de manducation.
Ainfi comme manger corporeUement félon fon idée totale
c'eft prendre l'aliment par la bouche, le divifer avec les dents,
le goufter , le faire paflcr dans l'eftomach , le digérer & l'in-
corporer à la maflcde fon corps : manger fpirituellement c'efl:
s'unir à un objet fpirituel par la connoiflance, le feparer com-
me en diverfes parties par nos diverfes penfées, le goufter par
noftre amour, le fairepaffèr de noftre intelligence dans noflre
mémoire, en occuper noflre ame pour en tirer le fuc, & l'y
unir Cl étroitement qu'elle en reçoive une force & une vigueur
Ipirituelle.
Et de -là on conclut neceffairement que les juftes peuvent
manger fpirituellement le corps de J.C. lors même qu'ils ne le
reçoivent pas^Sc que les méchans ne le mangent pas lors même
qu'ils le reçoivent.
Que l'on peut nier de plus à l'égard tant des juftês que des
méchans , qu'ils mangent le corps de J. C. félon le fens le plu*
ordinaire du mot de manger. :i,i^:^
Xx ii
3_jô- Lïv. VI. ^e le corpss de Jcfks~-y[hrïfi'
.îl 'O • Ef 1"^ ^'"" P<^"^ affirmer aulîi cane des juftes que des mê-
chans qu'ils mangent le corps de J. C. puifqu'il encre dans la
bouche des uns Se des aucres: ce qui eu un autre fens du mot
de manger,
Voiià les diverfcsexprefll-ons que produit la doftrine Catho-
lique. Ec tant' s'en faut qu'on doive s'étonner de les trouver
dans les Pères , qu'il feroit tout à- fait étrange qu'elles ne s'y
trouvalîent pas.
Mais les Miniftres ont fi peu d'équité qu'au lieu de recon-
noiftre de bonne toy qu'elles s'accordent toutes parfaitement
avec la dodrine.de la prefencc réelle , tL qu'elles en font mê-
me des iuites neceflairesi ils précendent fe (ervir de ce que les
Pères difent quelquefois, ou que le corps de J. G ne peut être
mangue, ce qui eft vray félon l'idée la plus ordinaire de ce motj
ou que les méchans ne le mangent point, ce qui efl: tres-vray
ielon le fens métaphorique, pour en conclure , que quand ils
nous difent qu'il eft mangé , ils entendent fimplement qu i?l
l'efl: en figne & en vertu ,. 6c non pas réellement & corporel-
lemenc.
Ain fi pour rendre inutiles tous leurs efforts nous avons deux:
chofes à faire;. l'une de montrer que les palfages où les Pères en-
feignent que l'on prend le corps de. J. G. par la bouche du corps, ,
ne ic peuvent détourner raisonnablement à ce fens Calvinifte
d'une manducation en figne & en vertu ; l'autre, qu'ils n'allè-
guent aucun paiTage qui exclue, la manducation que l'Eglife
Catholique cr.oic ôcenfeigne...
,'. CHAPITRE II.
gjis^tout Ic.fccendTome de cet ouvrage contient uve preuve de lavs^
,jj, r^itè de la .manducation corporelle . Examen des vaines
foluiions parlefquellh les Afin/hes prétendent.
jj. éluder quelcj^ues p^ijjaq^es.
'■' ■.■■ ■ ■
* Cypr. de ^T /^.j Mii^jiflrcs ne fçauroient nier que l'on ne trouve danf
£
debl^uf ^V ^ ^ ^^s Perés, ^'que nous touchons le corps, de I . C.,^ avec nos
q.3. mains ^-^nvec nofirer langue j ç Quii nous le prenons ^ a ^«^ «''^-^
chryioft. ^^ manQeons abfolument (^ véritablement > e qtiil entre dans nos
liom.fi. m ^ /, 7 -111 ç !■> I ■
Matth.i.4. ia corps par vo^e. a aliment Q;- de breuvage 3 ^ que Ion boit ce qui
efl ruAngé corporellement dunî VEuchiirïflk. 35I
a' coule du cofié de}. C. J S qu'il norias donne fort corps à manquer., ^ Epift.ail cor.
[on fan^à boire i "^ que I. C. nous pre fente à 7?ianger la chair qu il^^^^^^^ lanati-
a prij'e J i que I. C. entre , s'introduit, s'injinuê , fe nielle dans nos v"- chr. Cj-
Cffrps par fa chair yp^r fa propre chair j k que nous fommcs unis " "'" '" J°^"'
corporellement au corps de celuy qui eji la vie par effence , &, que b chryihom.
leurs écries ne foient remplis d'un grand nombre d'autres ex. ^^- "^ ^piH,
preiFionsqui marquent toutes litreralîemenc une m.anducation-]-hom.'î4. j^
corporelle du corps de J. C. Ainfiils ne prétendent qu'on doive Ep. ad Cor.
donner à ces paflàges un fens métaphorique & les entendre j^^^ mjoan.
d'une manducation par lafoy , ou par la réception du ligne 6c Aug. in pf. ;;,
de la vertu du corps de J. C. que parce qu'ils fuppolent d'une^ ^"^^S- i^>''.
part que le corps de J. C, n'eft pas réellement prefenc dans-c. .^ "'^^'•^'
l'Euchariflie, & qu'ainlion ne l'y peut recevoir réellemenr, &/ ^"2;. contr.
qu'ils croyent de l'autre que leurs deux clefs à.Q fî'iures în: de J^""^' ' ''■'^*
vertu fe peuvent appliquer à ces exprelTions Si à tous les autres^ id. contr.
de même genre. *'^^"'- '^g- ^•
Ils ne fçauroient donc nier, que ruppofc la prefence réelle ^c^'niu'di'aL
du corps de I. C. dans l'Eucharillie, ôifuppofé encore que ces <ie mcar. p.
deux explications deyf^arf & de vertu foient vaines, frivoles, \°q[^„ ^ ç
Si. fans fondement , contraires à l'ufage &àla raifon, & mani- adcatecli. 57,
feftement détruites par- les Pères, il n'y aie aucune apparence cliryioftom.
que le corps ^
dans la bouche & dans le. corps des fidelles. ^iu joan. p.
Et par-là il eft clairque la preuve de la manducation réelle, ^^-•
eft infeparable de celle de. la prefence réelle, que qui prouve
l'une prouve l'autre, & que la réfutation des diiiicukez par où
les Miniftres tâchent d'éluder les expreflîons qui marquent
cette manducation , efi: comprife dans la réfutation de leurs
deux clefs de/gure & de vertu., à quoy toutes leurs defTaites le
réduifent. Il n'eff donc pas befoin d'entreprendre icynyl'un
ny l'autre, puifque c'eil: le fujet de touc le fécond Volume de
cet ouvrage, & qu'il n'y a qu'aie produire tout entier pour
établir la vérité de cette manducation , Se pour empeicher
qu'on ne puilTe détourner les endroits où elle eft marquée à un
autre fens que le littéral. le me réduiray doix: à quelques re-
flexions fur certains paiïàges qui n'ont efté a^îlegaez que dans,
la foule , afin d'avoir lieu de réfuter en particulier les répon-
fês qu'y font les Miniftres.
X X iij.
jji Li V. VI. ^e le (^orps de Jefus-Qjrifl
PASSAGE DE S. HILAIRE.
Je commenceray par le celcbre Partage de S. Hi'airetiréda
huiciéme livre de fon ouvrage fur laTrinicë, o{\ ce Père a 6.ç.{-
fein de montrer que l'union du Père & du Fils n'eft pas une
fimple union de volonté, mais une unité naturelle, par la com-
munication d'une même njture. Et parce que l'Ecrituienous
propofe pour exemple de cette unité celle que nous avons avec
T. C. par l'Euchariitie, il entreprend de faire voir que celle-
cy n'ell pas une (impie union de volonté, mais une veruabie
union naturelle, qui (e fait par la réception de la chair de
»> J. C dans nos corps. Voicy les paroles de ce Père. Je dcman-
\y de à ceux qui ne mettent qu'une union de volonté entre le
»> Père & le Fils, fi J. C. n'efl pas aujourd'huy en nous par la
>, vérité de fa nature, & s'il n'y eft feulement que par une union
>, de volonté? Car Çx le Verbe a véritablement efté fait chair,
jj & (î en recevant à l'Autel le pain du Seigneur, nous recevons
„ véritablement le Verbe fait chair, comment pouvons- nous
,> croire que J. C. ne demeure pas en nous naturellement, après
„ qu'en fe faifant homme, il s'eft: revêtu de la nature de noftre
„ chair pour ne s'en plus feparer jamaii, &a mêlé la nature de
>, fi chair avec la nature éternelle dans le Sacrement de fa chair
J, qu'il nous y devoit communiquer j Car c'eft ainfi que tous en-
«, femble nous ne fommes qu'un, parce que le Père eft en I. C. &
que J. C, eft en nous. Quiconque donc ne voudra pas recon-
noiftre que le Père eft en J. C. par nature , qu'il nie donc aupa.
ravant qu'il foit luy-même en J. C. par nature, ou que J. C.
foit en luy ; puifque ce qui fait que nous ne fommes qu'un dans
„ le Père &: dans J. C. c'eft que le Père eft en J. C. & que J C. eft
„ en nous.
,. Si donc J. C s'eft véritablement revêtu de la chair de nôtre
„ corps, & fi cet homme qui eft homme parce qu'il eft né de
Marie eft véritablement le Chrift ^ ôc fi fous le Myftere ( c'efi-k-
dire fouj le voile du Sacrement) nous recevons véritablement la.
chair de fon corps , ce qui fait que nous ne fommes tous qu'un
en luy, parce que le Père eft en luy & luy en nous: comment
peut- on foûtenir une fimple unité de volonté entre les Per-
fonnes divines , puifque l'union réelle & naturelle que le Ftls a.
avec nous par le Sacrement, efl: le iacrement d'une parfaite
unité avec fin Ferei
i»
■)•)
ejî mangé nr^orcllement dans l'EuchùirîJiie. 355' "
Gardons nous bien de parler des chofes de Dieu fuivantles '' Ch. II.'
penfées humaineij & de détourner par une inrerpretation for- "
cée & téméraire la doctrine celefte à un fens impie & étran- "
ger. Attachons nous à ce qui cft écrie, fi nous voulons accom- "
plir les devoirs d'une foy parfaite. Car il y a de la folie & de "
l'impiété à dire ce que nous dilons de la vérité naturelle de "
J. C. en nouSj à moins que iuy- même ne nous l'ait appris. "
C'eft Iuy qui nous dit: Ma chair cft vraycment viande ^ (jr 7iion '*
fatig efl vraycment breuvage : C(^luy qui tnange mu chair ^t- boit **
mon fang demeure en moy (jr-^noy en Iuy. Il ne lajiîe aucun lieu '*
de douter de la vérité de fa chair & de fon fang, puifque la **
déclaration du Seigneur & noftrefov portent que c'cfl vraye- ^
ment la chair &: vrayement fon fang, &: ces chofci eftanr pri- "
Tes 2c avalées font que nous Tommes en I. C. &: que I C. eft en "'
Bous. '*
N'eft ce pas. là la vérité pure ? Quecela ne foit pas vray pour '*
ceux qui nient quel. C. foie vray Dieu. Il efl: donc en nous par "
fa chair, Se nous lommes en Iuy , parce qu'il ell en Dieu avec la "
nature cp.ii nous eft commune. Or, que nous foyons en Iuy par "
le mvricre de la chair qu'il a prife, c'eft Iuy- même qui le té- "
moigne en dilant : Le mondx ne me voit pltts^ mais vous me ver- "
re\: (^ parce que je vis ^ vous vivret^ Car je fuis dans mon Perd "
^ vous en moy, gS ynoy en vous. *'
S'il avoit voulu marquer feulement une union de volonté, "
pourquoy diftinguoitil divers degrez d'unité pour parvenir à la "
fuprême '■: N'eftce pas pour nous moncrer qu'il eft dans fon "
Père parla nature de fa Divinité : que nous iomnres en Iuy par «
là nature corporelle qu'il a prifedansfanaiifance-, & qu'il cft en "
nous par le mvftere de fes Sacremens ? Et pour nous faire voir "
ainfi que le Médiateur formoit une parfaire unité, en ce que f
noftre nature étoiten Iuy, qu'il demeuroit dans fon Père, & que "
demeurant dans fon Père il etoit en nous, afin que nous fuf «
fions élevez par ce moven à cette unité avec le Pcre. I. C. étant «
dans fon Père naturellement, c'cft-à-dm félon fa nature par fa "
naiffance hemelle-^ & nous étant dans I. C. naturellement, cef. ^
a-dire félon noftre nature , qu'il a pri fe^ & Iuy demeurant en nous ^
naturellement , c\ft-a-dtie -par la nature d? fa chair. «c
Or, qu'il airavec nous cette union naturelle, il le déclare Iuy- ,£
même quand il dit : CcUiy qui mange ma chair C^ boit, moii Cang , ^^
demeure en moy ^ moy en. Iuy. Car perfonne ne fera en Iuy par ^
554 Li V. VI. ^e le corps de Jcfks-Qhri^
la nature humaine qu'il a prile, finon celuy en qui il aura'étë
^^p*trfa chair, parce qu'il n'a en luy que la chair de ceux qui au-
„ ront re^û la fienne.
„ Et pour le myfterede la parfaite unités ne l'avoit il pas déjà
„ expliqué en dilànt , coinmc mon Pcre qui eji vivant ma en-
^, voyè , ^ que je vis pour mon Père j de mtfmc ce luy qui me man^
^^vivra auf/i ponnnoy.. Il vit donc par fon Père, & comme il vit
,, par fon Père , nous vivons aulli par luy. Car le but des cora.
^, paraifens-eft de nous faire concevoir la chofe que l'or com-
,„ pare, fur le modèle de celle àquoy on la "compare. La caufe
,, donc de noftre vie eftque nous avons en nous charnels I. C.
„ qui y demeure félon fi chair, & qu'ainfi nous recevons la vie de
.,, luy comme il la re(^oit de fon Père. S'il efl: donc vray que nous
,, vivions naturellement parï.C. félon la chair, à caufe que nous
„ avons reçu la nature de fa chair-, comment peut-on dire qu'il
„ n'ait pas en luy naturellement fon Père félon l'efprit , puifqu'il
,, nous afTure qu'il vie par fon Père? Or, il vit par fon Père, parce
5, que fa naiffance ne luy donne pas une nature étrangère &: dif-
3, ferente de fon Père, parce qu'il reçoit de luy ce qu'il efV, &;
j, qu'il, n'en effcpas feparépar quelque différence de nature, parce
„<]a'il a fon Pereen luy-même par fa naiffance, dans l'eflencede
„ fa nature.
j, Nous avons allégué toutes ces chofes, parce que les hereci-
,^, ques foûcenant fauiTement qu'il n'y a qu'une union de volonté
„ entre le Père &. le Fils, fe fervoient pour le prouver de l'e-
^ xemple de l'unité que nous avons avec Dieu, comme fi nous
„ n'étions unis avec le Fils , &:par le Fils avec le Père, que par
^, une foùmilHon religieufe, 6c qu'il ne nous eufl point accordé
, d'union propre & naturelle par le Sacrement de fa chair 5c
de fon fang, au lieu que nous devons foutenir lemyflerede l'u-
^, nité parfaite & naturelle par l'honneur que Dieu a fait à noftre
j, nature de l'unir à fon Fils, & parce que ce Fils eft en nous fe-
^ Ion fi chair , & que nous luy fommes corporellement & infe-
^, parableiiient unis.
C'eft en quelque forte afFoiblir l'imprefîion que ce paffage
doit faire fur les efprits qui ne font pas entièrement prévenus,
que de faire remarquer en détail &: féparérnent les unes des au-
tres les preuves particulières qu'il fournit pour établir que le
corps de J. C. entre réellement Si corporellement dans le nô-
.Ere_,pournous communicperlavie de l'ame, puifqu'on voit q,ue
ce
efl niiings corporellemerit duns l'etichaviflie. 3^7
ce Père enfeigne &: inculque teilcmenc cette vericij que tout p„ j r
(on difcours ne roule que fur cet unique principe. Mais parce
qu'Aubertin tafched'en éluder la force par quantité de vaines
defFaites , ce font ces deffiiites que j'ay delTein de détruire
icy.
S. Hilaire nous dit ^uc_ nous prenons véritablement le Verbe
fait chair par le moyen de la viande du Sei<inetir. Aubertin de-
mande fur cela^ fï l'on croie que le Verbe fait chair ne puifTc
eftre pris que par la bouche du corps ; & il s'écrie d'une manière
pedantefque , ad populum phaleras ? Mais que la fierté fied mal
quand elle eft jointe à une lî grande foiblelle : Car il n'y a qu'à
luy répondre qu'on lecroicen effet , & qu'il eft déraifonnable
de ne le pas croire.
Je ftj'ay bien qu'il y a de certains mors qui marquent des
aciions corporelles, que l'on ne laifTepas d'appliquer à des ob-
jets fpirituels. On dit que l'amefe nourrit de la vérité, &
l'on peut dire auffi qu'on mange fpiricuellcmcnt le corps de
J. C. L'ufage Ecclefiaftique a authorifé ces façons déparier: Et
elles ontTnême leur railon, parce que ces termes reprcfenrenc
certaines actions corporelles qui peuvent fervir d'image à des
adions (pirituelles. Celuy qui mange goufte l'alimenr, s'y unit
d'une certaine façon, s'en fortifie. L'ame en fait de mcmc à
l'égard des objets qu'elle contemple. Mais c'ed: fe tromper grof-
Cerement que de conclure d'un terme à un autre, 6c de s'ima-
giner que parce qu'on peut prendre un certain mot en un fens
métaphorique, on en peut faire autant de tous ceux qui ont
une fignification approchante.
Il n'y a gueresde plus faux principe dans le langage que celuy-
là,ny plus capable d'engager à desexpreffions extravagantes. Il
nefautpas feulement qu'il y ait de la raifon dans les métaphores,
il faut aulîî que l'ufage les authorifé, ou dans l'application par-
ticulière que l'on en fait , ou par quelque exprefîîon à peu prés
iêmblable.
Or en quel Auteur M. Claude & tout ce qu'il y a de Mini-
lires au monde , montreront-ils que le mot de Sumeri , /'r(?«-
«^^rt", ait efté joint à quelque objet fpirituel pour fignifier que
l'on s'y unit £c qu'on le médite ? Dit-on fmncre Philofophiam^
pour fignifier méditer la Philofophie ? Dit-on fuviere mortem^
pour dire méditer la mort? 'D'xt-onvitam Chri/li vel pa.fjïoncm
fumerej pour dire que l'on s'entretient Sc que l'on fe nourrit de
Yy
350 Liv. V I ^e le corps de Jefus-Qorifl
de la vie & de la paflion de J. C? Ces exprelfions ne fontelles
pas abfolumenc fans exemple ? Et ceux qui içavenc de quelle
manière on parle, ne reconnoilTenc ils pas tout d'un coup que
rien de cela ne s'eft: die? Il y a même une raifon particulière
qui fait voir que ce mot de fumcrc , ne peut eftre employé rai-
fonnablement pour fignifier fc nounir fpiritucllcmcnt. C'eft
que les mots de 7nuny:r^ de fe nourrir font déjà mer<iphori-
ques dans cet ufage, & ne fignifient pas proprement ce qu'on
leur fait fignifier:delorcequc ceieroitune métaphore entée fur
une autre métaphore, fi l'on fe fervoit de ce terme pour exprimer
ce que les mots de manger & àc fe nourrir ne fignitîent déjà que
métaphoriquement. Il faudroit paffer par deux dcgrez pour ar-
river à cette Signification dernière que l'on auroit dans l'efprie,
&il efl: vifible que cela eft écarté. Auffi Aubertin n'en rap-
porte aucun exemple , ôc il eft contraint d'avoir recours à d'au-
tres métaphores toutes différentes.
Comme l'on ne die donc point, fumere Verbum carncm^ pour
lignifier que l'on s'en nourrit fpirituellement: l'on dit encore
moins verc fumere J^erbum camcm. Car encore que îe mot de
verè ne fignifie pas toujours que l'exprefllon où il entre foie
literalle, & quoy qu'il s'employe quelquefois pour marquer
lîmplement la vérité de l'exprefllon figurée; néanmoins quand
il eft joint à un terme qui ne fe prend pas ordinairement en un
fens métaphorique, il éloigne encore davantage l'idée delà mé-
taphore, &fon effet eft déporter l'efprit à concevoir plus for-
. rement la vérité de cette exprcfllon littérale.
Mais l'abfurdité du fens auquel Aubertin tache de détour-
ner ce paffage, eft encore bien plusvifible dans la manière donr
il eft obligé d'en expliquer la féconde claufe o\x S. Hilaire dit,
quil n'y a aucun lieu de douter de la ver' té de la chair & du
fang de I.C. de \ï.k\t: AT e carnis dj" fanguinis non cji reluius
ambigendi locns.
Voila un doute marqué & combattu par S. Hilaire. Il s'agit de
fçavoirenquoy il confifte. Aubertm demeure d'accord que ce
n'eft pas (ï I. C aune véritable chair. Dico primam illam intelli-
^cntiam , c'eft le fens que je viens de marquer , non valde elfe
ad Hilarii propofitum. Mais au lieu de ce doute là , il enfubftituë
un autre qui luy paroift plus probable. Ile/} clair, dit il , par la
fuite du di fours que S. Hilaire parle non de la vérité de lachair
fm^lcmcnt^comnc unie au Verbe ^ mais comme nous devant ejire
ejî mangé coYporellement dans tEucharifiié. 3^7
donnée à. manger d'une 'manière Jpirituel/e, c'cd à dire en un mot r
que ce que S. Hilaire nousenfeigne en ce lieu félon ce Mini-
ftre , ce n'eft pas que J. C. a une chair, mais qu'il nous fait re-
cevoir fpirituellemenc cette chair.
Les Catholiques prétendent au contraire qu'il s'y ap;it de la
vérité d'une manducation corporelle ,& que S. Hilaire veut
dire , qu'il ne faut poMit douter que ce que nous recevons cor-
porellement dans la célébration de cemyftere, ne foit efFedi-
vement la chair de J. !^.
C'eft à quoy fe réduit le différend qu'on a avecAubertin
furccpaflage. Mais ileftbien aifé à décider par S. Hilaire mê-
me, puifqu'il n'y a qu'à confiderer de quelle manière ces deux
differens doutes doivent s'éclaircir.
Un doute qui auroit regardé la manducation fpirituellefè
devroit refoudre en affirmant pofitivement que Ton mange la
chair de J. C. d'une manière fpirituelle, & en expliquant en
quoy confifte cette manducation, n'y ayant gueres que le dé-
faut d'intelligence qui puiffe faire qu'on en doute.
Mais le doute que les Catholiques croyenteftre combattu
par les paroles de S. Hilaire, fe doit refoudre au contraire, non
en expliquant de quelle manducation on entend parler, puif-
qu'ils fuppofent qu'il entend parler de la manducation corpo-
relle, mais en affirmant que cette manducation a pour objet le
corps de J. C. 2c qu'il eft effedivement mangé. Or que fait S.
Hilaire^ dit-il, 2Vunc autem c^ T)omini profcjjione ^ (^ fide nof.
tra^ vcrè manducamus fpiritualiter carncm Chrifii , c>r ? Nulle-
ment jil n'a donc point eu en veuë le doute marqué par Aubertin.
Il dit Nunc autem ^ Domini profe/Jione ^ fide nojira vcrè caro ^
fanyiis efi. Il levé donc le doute qu'i combat la dodrine des Ca-
tholiques.
Le bons fëns devroit apprendre aux Miniftres qu'il y a des
doutes qui ne font fondez que fur la qualité des expreffions,
ix. d autres qui naiflènt de la nature des chofes mêmes.
Les doutes de la première efpece n'ont pas beibin de preuves,
mais feulement d'éclaircifTement, Se les autres n'ont befoin
Cjue de preuves, & l'éclairciffement n'y fait rien. Or fi quel-
qu'un doutoit qu'on puft manger fpirituellement J. C. fon dou-
te ne pourroit eftrre fondé que fur ce qu'il n'entendroit pas
l'expreffioiv. Qu'on luydife que manger J. C. c'efl: le regarder
par la fov , & qu'on ajoute fi l'on veut, que c'eft le confiderer
Yyij
II.
3
58 Liv. VI. ^e le corps de Jefus-Chrifl
comme aliment de l'ame , ce douce s'ëvanoiiira. Que fait donc
S. Hilaire/ Donne-E-il quelque ëclairciflemenc à ces paroles
de manger la chair de J. C. Explique t il comment on peut
manger J. C.fpiricuellemenc? Faitil voirquecetce expreifion
quoy qu'extraordinaire, ne marque qu'une chofe fort commu-
ne , & que les fidelles ne fi^auroient manquer de pratiquer tant
qu'ils ne renoncent point à la foy ? Nullement. Il prouve par
l'Ecriture que nous mangeons effedivement la chair de J. C,
Il nous exhorte à croire ce que nous y lifons fans en corrom-
pre le fens par des adoucidemens humains. Il déclare qu'il n'en
faut point douter. Et après nous avoir d\t,^ue ccfi vraye-
ment de la chair <^ vrayemcnt du fang^ il en fait l'objet non des
actions fpirituellesdenoftre ame , mais des aiflions corporel,
les de noftre corps. J^eré caro gS vcrè fanguis cfi. Et h^tc acccp.
ta atque haufia id efficiunt ut ^ nos in Chrifto ^ ^ Chrifius in
Ttobis fit. Et il conclut que J. C. eft en nous par fa chair, comme
la nature humaine eft en luy par l'incarnation. Ffi cripin nobis
ipfe pcr carn,em^ (y- fumus in co dion hoc quodnos fumus in Deo cfi.
Peut-on douter après cela delà nature du douce qu'il a pré-
tendu lever.'' fut-il jamais un procédé comme celuv des Mini,
ftresplisnefë contentent pas de faire trouver aux Pcrés des fu-
jecs de douce , où il n'y en eut jamais ,ils veulent encore qu'ils
nefe foienc jamais mis en peine de les éclaircir. Car enfin
quelle difficulté y a-t-il à comprendre qu'on puifïe s'occuper
fortement delapcnféede J. C. s'apphquerà la méditation des
Bierveilles de fa vie, méditer fur fa mort, £c la regarder com-
me lacaufe de noflre falut ; Scqu'ainfi il foie l'aliment de noflre
ame ? Et qu'y auroit-il de plus ridicule à S. Hilaire que de
nous reprefenter cette docT:rine comme impie & comme extra-
vagante, fi elle n'eftoitauthorifée de l'Ecriture ,& défaire tant
d'efforts pour nous empêcher d'en douter ? Mais quand ilauroic
eflé capable d'avoir un doute fl bizarre ou de le fuppofer dans
les autres , pourquoy ne den>efle-t il pas au moins une chofe. fî
facile à éciaircir , 6c pourquoy après avoir fait naiftre ce doute
fe contente- C- il de repeter les paroles mcmes qui l'ont ex-
cité ?
Mais fî ce pafTage ed cres-mal appliqué par Aubercin dans ces
deux claufés qui decerminenc tout le refte, ce Miniflre n'efl
pas plus heureux à expliquer tout le corps du difcours & de
l'intention de S. Hilaire II s'imagine que l'an ne fonde les cou-
c^ mj.ngé coYporellement cia.niïEmhxnftîe. 359
fcquences qu'on en cire que fur le mot à' unité naturelle ^ de Ch. II.
qu'ainfi il luy fuffic de répondre que S. Hilaire admet de mê-
me dans tous les bapcifez une unité naturelle donnée par le Bap-
tême & par la foy, parce que le Baptême 6c la foy l'ont de mê-
me nature dans tous les fîdelles.
Mais q jand on fè fonderoit fur cela, la réponfe feroit encore
deffeclueufe. Car quoyqu'il ioit vray que S. Hilaire fc contente
qu'une cliofe foit la même en efpece en divers fujets, pour
trouver entre ce lujcc une unité naturelle, qui fer rem eandcm
unum funt, îiaturà unum funt non tantùm voluntate^_ il faut néan-
moins félon luy qu'elle fait réellement unie à chacun de ces fu-
jets. Ainfilafoy efl réellement unie à chaque Chreflien, êc cha-
que fidelleeft le fujet immédiat de fon Baptême 3 de force que
pour fuivre cette comparaifon^il faut que la chair de J. C. luic
reçue par chacun des tideliesauffibien que le Baptême & la fo y,
fi l'on veut qu'elle forme avec eux une union naturelle.
Mais ce n'eft pas néanmoins fur cela qu'on s'appuye. C'eft
fur la manière dont S. Hilaire exprime que J. C. eft en nous
par l'Eucharirtie , 5c fur les comparaifons dont ilfe fert. Car il
eft vray que l'on dit bien quelquefois, que nous recevons J. C.
en nous par le Baptême , que les Chrétiens font reveflus de J. C.
qttils portent I. C, caché en eux : quils font faits participans de
J.C.& delabrehy fpirituelle. Et la plufpart même de ces ex>
prefTionsne font pas métaphoriques, parce qu'il efl vray que
J. C habite par fa divinité dan^ tous les Chrétiens comme
dans fon temple. On trouve auffi deux palfages dont nous
avons parlé ailleurs , où il eft dit que nous participons à la chair
del. C. dans le Baptême,,& que cette parole : Si vous neman-
gez^la chair du Fils de l'homme (jS ne bcuvcz^fonfang , s'accomplit
dans ce Sacrement. Mais quel rapport ont ces deux expreffions
qui fe trouvent une fois en paflanc en deux Pères differens, avec
cette foule d'expreflîons encafTées les unes furies autres qui le
trouvent dans ce lieu de S. Hilaire fur le fujet de l'Eucha-
riftie?
Où eft ce que les Pères ont dit du Baptême, que par ce Sa-
crement I. C. eftoit en no\xs, per natura yeritatem, comme S.
Hilaire le dit de l'Euchariftie?
Qui a jamais dit du Baptême ce qu'il dit encore de l'Euchari-
ÏWQ^que de même que J. C. vit par fon l'ère , de même nous vivons
far fa chair^^ que la caufe de nojlre vie cji que nous avons dans
Y y iij
360 Liv. VI. ^e le corps de Jejus-Chrin.
noftrc chair ^j. C. qui demeure par fa chair. Quod/« nobis cama.
libus manentem fer carnem Chrifium hahcmus , viEiuris nobis fer
eam ek conditionc qua vivit i lie fer Patrem !
Quia jamais dit enfin d'un autre Sacrement ^ que le myflere
de la vraye ^ naturelle unité des Perfonnes divines doit efire re.
connu., farce que le pils demeure en nous fclon la chair, (S" que nous
Jo'mmes corforcllcmcnt ^ infefarablcment unis à luy\
Si ces paroles pouvoient eftre métaphoriques ,& fignifier
feulement que la chair de J. C. eften nous par Ton figne, ou
que nous luy femmes unis objedivcment, qu'y auroit-il d'alTu-
ré en ce que l'on fe fonde fur le témoignage des hommesi'
Cela fuffitpour repondre à ce que dit Aubertin,queS. Hilai-
re parle du Baptême comme il parle de l'Euchariftie. Et il n'y a
pas plus de folidité dans ce qu'il ajoute que S. Hilaire en difanr,
que nous recevons véritablement le Kerbe chair far la viande du
Seigneur diflinpie manifefiement l'Euchariftie., qui efl cette
viande du Seigneur., du Verbe chair. Car il l'en diftingue en ef-
fet, parce que ce font deux idées difFerentes, l'une confufe,
l'autre diftincfte^ l'une qui enferme outre le corps de J. C. les
accidens du pain & du vin , l'autre qui ne reprefente que J. C.
féul. Mais il ne diftinguepas ces deux idées comme reprefen-
tant deuxobjetsentierementdifferens, 6c il les unit pkiton:,
puifqu'il dit qu'en recevant l'un on reçoit l'autre 3 ce qui marque
Berp. toni i» qyg pm^ contient l'autre. On a refuté ce fophifme à fond dans
/. iV. * ^' ^' 1<^ fécond Tome de la Perpétuité, c'eftpourquoy on ne s'y ar-
reflera pas icy plus long-temps.
La troifiéme objeciion d'Aubertineft fondée fur ces paroles
de S . t-lWairé: 2^ on enim quis in eo^ erit nift in quo iffc fuerit , ejus
't'antùm ajiicmftaînhabens carnem qui fuam fumpferit. S. Hilaire,
dit- il, nous affure que far cette manducation J. C. eft en nous ., (^
nous réciproquement en J. C. Or il n'entend fas que nous foyons
en J. C far une union locale, il ne veut donc fas que J. C. ftoit aujjî
en nous 'far Une union locale. Et ainfi ce que dit S. Hila re ne
s'entend que d'une union ffiritue lie.
Mais ce que prouve cet argument , efl: qu'un efprit fortement
préoccupé eft capablede s'éblouir dans les chofes lesplus claires.
Car5. Hilaire ne compare point du tout en cet endroit la ma-
nière félon laquelle J.C. eft en nous par l'Euchariftie avec celle
dont on peut dire que nous femmes au ffi en luy par la réception
delamême Euchariftie, mais il la compare avec celle dont nô*
eji nmngé corporellement dans fEucbarifiic. ^-6t
cre nature eft en en luy par l'incarnacionj Ton fenseftant que j. G Ch. I I.
ellen nous par fa chair que nous prenons dans 1 Euchariftie,
comme nous fommes en luy par la nature humaine qu'il a prife
en s'incarnant. Ainfî tant s'en faut que l'on puiiTe conclure que'
cette union n'eft que fpirituelle, que c'eft tout le contraii e qu'il
faut conclure. Car la nature humaine que J. C. a prife repond
dans cette comparaifon àlachairde J.C.que nous prenons. Ain-
fî comme cette nature efl réellement unie à J. C. fans figure ni
métaphore, de même la chair de J. C nous doit eftre réellemenc
unie fans figure 2c fans métaphore : & cette chair doit eftre auf-
fi eflPeJtiveinent en nous, que la nature humaine eft en J. C.
Voila le fcns véritable de ce paiîage , qui paroift û claire-
ment par la fuite même , qu'il eft étrange que ce Miniftreaic
pii s'y tromper. Car S. Hilaire ne dit pas feulement^ que celuy là-ne
fera point en I. C. en qui J. C. ti aura point efiè-^ mais pour montrer
en quelque fens il ledit, il ajoute que I. C n'a en foy que la chair de
ceux qui auront pris la jîenne : Ejus tantjïm afjumptam habens car-
nem qui fuam fumpferit. C'eft à dire qu'il n'y a que ceux qui ont
pris la chair de J. C. qui ayent droit de prétendre que la nature
humaine de J. C. eft leur nature. Eril avoir déjà exprimé cette
même penfée troisou quatre fois en marquant exprefîèment que
c'eft par l'Incarnation que nous fommes en J. C. Car c'eft en
ce fens qu'il dit. Ilejl donc en nous , (^ nous fomtnes en luy , parce
quenojhe nature eft en Dieu avec luy. Efl erqo in nohis ipfe per cat-
nem^ d^ fùmus in eo dum fcctim hoc quod nos fmnus , in Deo eft.
C'eft encore dans ce fens qu'il entreprend de prouver que nous
lômmes en I. Q.per Sacramcntuyn co7nmnnicat.€ carnis ^ (anyii-
nis. Ce qui ne veut pas dire, comme l'a cru Aubertin , que nous
fommes en J. C. par le Sacrement de l'Euehariftieoii J. C. nous
communique fa chair , ou dans lequel nous participons à la chair
&au fang de I. C. mais que nous fommes en I. C. par la chair
& le fang de noftre nature aufquels I. C. a participé en fe les
uniflantpar l'Incarnation. Et cela paroift manifeftement parla
fuite. Car S. Hilaire ayant apporté pour preuve de cette vérité
ces paroles de I. C. Ego in Pâtre., e^> vosinme , ^ ego in vobis., il
ajoute enluite pour expliquer de quelle forte nous fon mes en
I. C. que nous y (omvaQS par fa naifjance corporelle., c'eft à dire par
l'^union qu'il a faite de la nature humaine à fa divinité. Nos con-
train eo per corporalem ejus nativitatem.
Etainft ces deux expreffions que nous fommes en I. Q.pcrS^
561 Liv. VI, ^le le corps de Jcfus-Qr/ifi
cramentum communicata carnis é^ finguinis ,ii. que nous fom,
mes en luy/fr corpomlemcjusnaùvùaicm-^ font entièrement (y
nonymes : êc comme la dernière fe rapporte manifcftcment à
l'Incarnation ^ non à l'Euchariftie , on doit dire la même chofe
de la première.
Il eft donc clair & qu'Aubcrtin n'a pas entendu ces pafTagesde
S. Hilaire^êc que toutes les comparaifons de ce faintDodeur,
bien loin de marquer une fimple union métaphorique, en mar-
quent une très réelle, 6c la plus grande qui puilTè eftre en-
tre des corps , c'eft à-dire une union corporelle. Car S. Hi-
laire compare l'union que la chair de I. C. aavec nous dansl'Eu-
chariftie, à l'union de I. C. avec Ton Pcre, qui eft la plus intime
& la plus parfaire de toutes les unions, puifque c'eft une unité in-
dividuelle. Il la compare encore <à l'union de la nature humai-
ne avec le Verbe^ qui crt: encore une union tres-fubftantielle. Il
exprime ces trois unions de la même forte. Illesi-eprefentecom-
me trois degrez qui ont beaucoup de rapports &. il fe fert mê-
me de l'union de la chair del C. avec nous dans 1 Euchariflie,
comme de moyen & de modelle pour prouver l'unité réelle de la
nature de I. C. avec celle de Ton Pcre // a , dit il , diflinyié di-
vers degrez^d' unité pour parvenir à la fuprème. Gradum qucmdam
co7ifummandv nnitatis expo fuit. llc(i naturellement dans fon Pc
wpar l'unité de fa nature. Nous fomme s aufji naturellement en luy
par l'union hypollatiquert^"- il deyneurc naturellement en nous pa.r
l'Euchariftie. Quelle apparencedonc que ce dernier degré qui eft
propofé comme le modelle Se la preuve des autres, ne foit que
figuratifSc métaphorique 5 &:queS. Hilaireait expriaK; parles
mêmes termes des idées aufîj différentes, que celles que les
Calviniftes ont de ces Myfteresi Rien n'eft plus aifé que de dire
en l'air que cela eft très pofl^ble ; mais il eft très difficile de fêle
perfuader finceremcntà foy-même, &. de le croire ferieufemenc.
PASSAGB DE S. CYRILLE. Catec/7. ^.
Participons y donc avec une entière certitude comme au corps ($^
au fang de J. C. Car dans le type du pain le corps vous cfi donné i le
fang vous cfi donné dans le type du vin , afin que vous foye::^ rendu
participant du corps ^ du fiang de J. C. n'ayant ainfi qu'un même
corps ^ un même fiang que luy. C'efi- ainfi que nous devenons porte-
Chrifis^ fon corps ^/-fion fiang e fiant difiribuezjians nos membres.
REELEXION
éjî mcingê corporellement dA72s tEuchariJiie. 365
Ch. II.
REFLEXION.
Ce paîTige ayant ç?té objecté par Bellarmin , & ce Cardinal
ayant remarqué que le corps de J. C. quinouseft donné dans le-
type du pain eltanc clairement diftingué du pain , ne pouvoit
eftre que ie corps vericable^par confequent que c'eftoit du corps
véritable que S. Cyrille die que nous y participons , & qu'il ell
diltribué dans nos raembres^eequimarqueclairement uflcman-
ducation corporelle: Aubertin rc^or^à qu'il y' étonne qae Bellar-
min ait ejiè affez^hefie pour ne pof voir ce que l'on pouvait répondre
à ce paffage 5 ce qui efl^ dit- il , très-facile : m i RU m e/l Bellarminum
adeo bardum fuifpc , ut deprèhenderc no7ipotuent quidadhac rejjj'on.
deri po_(lit , quod fane facillimum ejf.
Voyons donc en quoy confifte cette facilité. CV/,dit il,^»if
S. Cyrille en difant , dans le type du pain le corps vous efi donné , ^
le fang vous eji donné dans le type du vin , ve»t dire feulement que le
pain efi un corps typique.
Mais cette réponle qu'on nous veut faire pafTcr pour facile ,
efl: (î éloignée du fcns commun qu'elle ne peut pas même s'ap-
pliquer au palTagedont il s'agit. Il y eft parlé d'un corps deJ.C.
qui cjl donne dans le type du pain. Je demande ce que fignifienc
ces mots, Corps de j. C. Si c'eft le corps véritable , Bellarmin
a raifon de conclure de. là que c'efî: donc ce corps véritable qui
eftdiftribué dans nos membres • & (î c'eft un corps typique, en
vérité Anbertin croyoit.il fincerement que ce Pcre l'auroit
avoué de luv faire dire, que le corps tvpique nous eft donné
dans le type du pain, c'eft-à-dire dans un corps typique? A quoy
bon cette multiplication de corps typique? Et qui a jamais dit
qu'une image loit donnée dans une image , ôc un type dans
un type ?
On peut bien dire que l'original eft donné en quelque forte
dans fon image, parce que l'on poifede en quelque force l'ori- j^ ja:in.]. j.
ginal par l'image: Et c'eft dans ce fens que S. Cyrille d'Ale- c./.iesAoï.
xandrie dit que J. C eft la vraye manne , ^ qu'il a cfté donné aux • !■ • .
Anciens dans le type de la manne. C'eft dans ce kns qu il dit que Levu/'
7. C. i" eft offert pour tous dans l'image duveau\^c C'eft dans ce
ftnsqu'il dit encore, qu'ilaefté offert dans tous les ficrificcs an^
ciens. Mais dans tous ces lieux il eft toujours parlé de l'originak
C'eft cet original oui eft donné , qui eft facrifîé J bi 1! n'cft die
Z 2r
.lA
3^4 Liv. VI. ^e le corps de fc/ks-Chrifl
en aucun que l'image foie donnée ou facrifiée par l'image.
Ce pafllige de S. Cyrille dejerufalem fournit donc un ar-
gument fans l'eplique pour la manducation corporelle Levt)i.
cy. Il ne faut que deux chofes pour marquer une véritable
manducation corporelle du corps de J. C. l'une qu'il Toit cer-
tainement parlé du corps véritable deJ. C 6c non de fontype,
l'autre que ce corps véritable ne (oit pas feulement donné en
figure, mais réellement. Or quand S. Cyrille À\t que dans le type
du pain le corps nous cfi donne ^ il ell évident qu'il parle du corps
véritable ; &: quand il dit de ce même corps véritable,^»'// ^y^
diflrîbuè dans nos membres , Se qu'il veut qu'on en ait une entière
certitude, il marque clairement que la participation en efl:
réelle & corporelle. Et par confequent ce palfige prouve mani-
feftement la manducation corporelle ; puilque c'efl le même
corps félon S. Cyrille , C[ui e/t donné dans le type dupain , qui efi
difirihuè dans nos membres, par lequel nous fommes Porte-Chrifis^
&c qui eft pris avec U certitude avec laquelle ce Saint nous ex-
horte de le prendre.
CHAPITRE III.
Saint Ephrem Diacre d'EdeJJe , é^ S. Epiphane.
' AiNT Ephrem dans u n Traité qu'il a fait pour montrer qu'il
'ne faut pas fonder curieufêmcnt la nature de Dieu , tombe
lur le diicours de rEuchariffie,à l'cgard de laquelle il prétend
qu'on doit avoir la même retenue. Et après avoir exhorté les
Fideiiesà participer àce Sacrement, il marque que pour le bien
faire il faut fuivre J. C. par la foy dans tout ce qu'il a foufFert à
fa pafîîon , & l'accompagner en efpritdans fa refurreclion mê-
me. Après quoyil ajoute ces paroles: Confidcrei^toutes ces cho.
fes avec prudence , avec perfeition , avec foy , ^ croyezj^ermemcnt
qu'elles font toutes véritables en la rnhne manière qu elles font
toutes rapportées. Car fi vous ne les contemplcz^parles yeux de la
foy ^ il ne fera pas pojftble que vous foyez^élevé de la terre au ciel
pour y voir en efprit les fouffrances de J. C. C'cft la foy qui bril-
lant dans nos cœurs comme une vive lumière , leur donne des
y eux pour contempler avec pureté (^ fincerité l'apieau de Dieu qui
efi mort ^quia efie immole pour nous , C^ q^i nous a donne [on très-
efi mangé corporellcment diins tEuchtirifiie. 365
faim ^ ires-pur corps , afin que nous le mangions continuellement ,. Ch, I H.
^ que nous obtenions en y participant la remijjion de nos péchez^
Cclny qui poffcde cet œil de lafoy voit clairement le Seigneur, ^
avec une foy tres-pleinc ^ trcs- ferme il mange le corps ^ boit le
Ung de l'agneau immaculé Fils unique du Perc cel'efte ^ fans fonder
avec curiofitè la doctrine toute divine (j^ toute fainte que cette foy
notu enfcigne. Car c^cft la foy de Dieu qui opère en nous j ceji clic
qui voit de loin les chofe s futures , (jj^qui s'appelle toujours foy (j^
non curiofté. Vous croycz^^ mon cher fil f ^ ^nj. C. Fils unique de
'Dieu : Vous croyez^qu'il cji né pour vous fiir la terre dans la chair.^
Pourquoy voudricz^vous donc fonder un abîme qui n'a point de
fond , (^pénétrer des Mvfteres impénétrables ? Si vous recherchez^
de les connoiflre avec curiofitè , vous rtt ferez^flus fidelle , mais cu-
rieux. Demeuret^donc dayis vofire foy toute pure (jr toute fmple.
Participez^au corps fans tache (^ au fang du Seigneur J. C. avec
une foy très -pleine , e fiant tres-affuré que vous mangez^ l'agneau
même tout entier. Car les my fiera de Chrifi font un feu immortel.
Gardez^vous de les fondertemerairemcnt, de peur qu'en y participant
vous n'en foy ez^confumé. Le Patriarche Abraham [ervit des vian-
des terrcftres à des Anges du Ciel , ^ ils eyi mangèrent. Ce fut à
la vérité un grand miracle que des efprits qui n'ont point de corps
mangea ffent ftir la terre des viandes corporelles. Mais ce que J. C.
noflre Sauveur Fils unique de Dieu a fait pour nom- efi au def-
fus de f admiration , de l'intelligence (^ des paroles de tous ks hom-
mes. Car efiant reveftu de chair comme nous fommes , // vous 6i
donné à, manger un feu ^ un efprit , c'efl-à-dire fou corps d^.fon
fang.
REFLEXION.
Comme il y a pîufieurs choies dans ce paHaj^e qui n'accom-
modent pas les Minières , parce qu'elles forment clairemene
l'idée d'une mandueation corporelle, Aubertin fait anffi di-
vers efForts pour s'en tirer. Il y applique d'abord fes clefs de
figure & de vertu , &; il prétend que par le corps ô: le fang au-
quel S. Ephrem dit qu'il faut participer j on peut entendre ce
que ce Miniftre appelle le corps typique. Mais il n'yaprefque
rien dans cepafTage qui n'éloigne cette idée. Car S. Ephrem
d'it que l'ayieau immolé pour nous , nous a donné fon corps faim
^ immaculé ^ afin que nous le mangions continuellejnent. Or c'eft
Z z i]
56,6 Li V. VI. ^e le orps de Jefas-Chrifi
fon corps véritable qu'il nous a donné, puifquelelon les Ca'L
vinifies mêmes J. C. ne nous donne pas feulemencla figure de
fon corps , mais fon corps même.
N'eft ce pasencorele vray corps de J. C. dont il dit,^a*? f^- .
luy qui pfiffede l'œil de U foy , m.nigc avec une foy tres.ferme le
corps ires fiint de l'ayficau immaculé Fils unique du Père celejiel
Que les Miniftres difent s'ils veulent que le corps de J. C. fe
mange rpirituellcmenc, il efttoûjours certain félon eux mêmes
que ce corps de J. C. qui eH; l'objet d'une foy certaine &: très-
ferme, eft le corps véritable. Caria foy nes'arrefte pas ^ à.ç.s
fymboles. Elleie porte jufqu'au corps véritable de J. C.
C'eft aufîî du véritable corps que S. Ephremdit, qu'il faut
efbre affurez que l'on mange l'agneau même tout entier. Car le
Sacrement ne fe prenant pas entier, cette marque ne convient
qu'au vray corps de J. C.
Cependant s'il efi: indubitable que S.Epbrem parle du vray
corps, il ne l'eft pas moins que ce Samt ne parle pas d'une man.
ducation purement fpirituelle.
Cette feulé reflexion , que Von mar^e Vayieau même tout en^
ticr^ en eft une preuve convaincante ^ car jamais, par exem-
ple, perfonne n'a dit qu'il faîluft croire qu'en recevant le Bap-
tême on reçcic le fang de J. C. tout entier. ,
■Et l'on ne fçauroit même dire, félon l'opinion des Calvinif-
-res,ce que c^'eft que cette intégrité Aq l'agneau dont parle Saine
Ephrem , 6cdont.il exige la créance.
Eft-ce qiï'il faut croire que l'on reçoit toute la vertu du corps
& du fang de J. C? Mais ce feroit obligera croire unefa.«ïîeré ,
puifque nous ne recevons pas la vertu de ce fang dans toutefois
étendue.
Eft ce qu'il faut croire que la vertu imprimée au pain décou.-
ie de tout J, C. &non pas d'une de fes parties ? Mais ce feroit
une imagination fi ridicule que de croire que la vertu d'un Sa-
crement vint d'une feule partie de J. C. & non pas de J. C.
tout entier, qu'il eft fans apparence que ce Père fè ioit mis en
peine de la prévenir ,& encore plus qu'il l'ait fait en exigeant
bien ferieufement une certitude toute entière de ce poinr,com-
nie ''il eftoit très-difficile de ne fè laiiîèr pas aller à cette ex-
travagance.
Eft ce que la foy embraffe toujours tout J. C. & ne le con-
;te;mple jamais que tout entier £c tout à la fois ? Mais il n'y am-
ejî nmngé corporellement ânns î Etichuriflie . 567
-roic rien de plus faux que ce prétendu fens. Caria foynepro- Ch. III,
duic Tes actions que conformément à la nature de l'efprit hu-
main. Or l'efprit non feulement a le pouvoir de feparer les ob-
jets compofez, & de s'attacher à une partie fans regarder ex-
prelîement l'autre , mais ce luy eft même fouvent une neccflité.
Ainfi cette intégrité de la manducation de l'agneau ne fe
peut rapporter qu'à la manducation corporelle , où l'on pour-
rait croire que l'on ne mange qu'une partie deJ.C. parce qu'on
ne reçoit qu'une partie des fymboles i &; cen'eft qu'à l'égard
de la manducanon corporelle qu'on peut raifonnablement Perp. t.i.^.
avertir qu'on mange J. C. tout entier , comme nous l'avons '^•'^'
prouvé plus amplement ailleurs.
Toutes les autres rla'ules & routes les circonftances de ce pafi
fage portent à ce même fens , &: s'éloignent de celuy des Calvi-
niûes. Car quel fujet y auroit-il félon leur doclrine , de recom-
commander cette foy toute fïmple, & d'avertir fi exprefie-
mentdenepas fonder ce myftere avec curiofiré? Eft il difiici-
le de comprendre que J. C. inftituë une figure de fon corps &
de fon fang, qu'il nous oblige d'y participer en penfant à fa
mort X, & que par cette penfee nous participons au fruit de fâ
mort? Ne devroit-on pas recommander au contraire de fonder
ce myftere avec curiofité, puifqu'en ne le fondant point , on
s'en peut former de grandes idées, maisfaufres,&: qu'en Le fon-
dant on y découvriroit une vérité qui ne iéroit capable d'ef-
frayer perfonne, ni par confequent de brûler & de fcandali-
fer q'ii quecefoit.
Quel fens aura cette comparaifon des Anges qui manient
des viandes corporelles avec les h.onMï\çs ejui mangent le corps de
J.C. quiefiunfeu é- an efprit? Car Ci Von n'entend cela que de
la.raanducation du Sacrement , où efl cette merveille qui fur.
fajje , félon S. Ephrem , l'efprit , tadmiratton ^S les paroles de
tous les hommes ? Yit fi on l'entend de la manducation fpiritwei-
le du corps de J. C.quei rapport aura la manducation corpo-
relle & réelle des Anges avec cette manducation (pirituelle du
corps de J. C. quinefcroit quemetaphorique,& que S.Ephrem
prétend néanmoins eflre infiniment plus merveiileufe? A quoy
fervira dans ce léns la remarque que fait faint Ephrem, que
nous fommes revefius ete chair ? Eft-ce que le corps peut
eftre un obftacJe à une manducation qui ne fe fait que par
la foy i
Zz iij
3é8 Liv. VI. ^e le corps de Jejus-Chrifl
Pourquoy perfonne ne s'eft il jamais avifé de faire de fem-
blables comparaifons , en parlant de Tunion qu'on peut avoir
par la foy au corps de J. C. lorfqu'on médite ou qu'on écoute
la parole de Dieu?
Pourquoy n'a- t'on jamais exigé cette /ôy/î/f/w^ dansaucune
des autres occafions où la manducation fpiritaelle fe peuc
trouver , & qui font en grand nombre félon les Mmiftres ?
, Pourquoy n'a t'on jamais exigé en parlant de la manduca-
tion fpirituelle qu'on cruflque l'on mange l'agneau tout entier?
Pourquoy n'a-t'on jamais averti perfonne du danger qu'il y a
à fonder le myftere de cette manducation fpirituelle fi fré-
quente ?
Pourquoy n'en a-t'on jamais dit qu'il furpafTe toute admi-
ration ^ tout efprit, toutes paroles ?
Tout cela , qui s'efl: toujours dit de l'Euchariftie, ne luy con-
vient, félon lesMinin:res,que parce qu'elle enferme la mandu-
cation fpirituelle. C'eft- là l'unique fondement de toutes ces
exprelîîons. Et puifque cette manducation fe rencontre en une
infinité d'autres occafions ; commentée: il arrivé c]u'on ne luy
ait jamais attribué toutes ces merveilles qui luy conviennent
par elle même, &: qui en font infeparables, qu'en la confide-
rant dans l'Euchariftie, qui n'eft qu'une des moins communes
manières de la pratiquer ?
C'eft fans doute la vue de toutes cesabfurditez qui a obligé
Aubertin d'avoir recours à une autre folution ,6c de dire qu'il
ne s'agit point en cet endroit de la manducation du corps &: du
fangde J, C. qui fe fait dans l'Euchariftie, mais delà mandu-
cation fpirituelle qui fe fait par la méditation de la paffion de
J. Q. far laquelle ^ dit-il , on manque J. C. tout entier , von feulement
comme homme^mais comme Dieu. Et c'eft en cela qu'il fait confif-
ter la merveille de cette manducation , pane , dit il , que s'il
efi merveilleux que de purs efprits comme les Amics fe [oient nour-
ris de viandes corporelles , il l'cfl hecmcoup plus que des hommes
mortels fe nourrirent du pain des Anzçs qui ejl 7 C non comme
homme^ mais comme Dieu. Mais ce Miniftre ne pouvoic mieux
faire voir que tout luy eft bon , pourvu qu'il trouve moyen
d'échapperà la vérité qui le preiîe.
Car y eut-il jamais de paflage oii l'Euchariftie Ç\\x. plus claire-
ment marquée que dans celuy-làj H commence par l'explica-
non de l'inilitucion de l'Euchariftie, S.Ephrem y exhorte ex-
efi mmgé corporellemsnt dans V Euchmfite . 569
çreflemenc a participer aux Sacrcmens. Que s'il exhorte auffi à Ch. III.
méditer 1 1 paffion , c'eft que la participation des Sacremens
doit eftre accompagnée de ces penfées, félon que S.Paull'or-
donne , mais il revient enfuite à l'Euchariftie , & il fe fert de
tous les termes dont on la défigne ordinairement.
M. Claude répliquera peut-eftre pour Aubertin , que ces ■
mêmes termes peuvent auffi fignifîer la manducation fpiri-
tuelleen gênerai; & c'eftce que je nie paravancc. Mais quand
cela feroit , il ne montreroit pas par là qu'ils fe puifTent expli-
quer en ce lieu icy d'une autre manducation que de celle qui
ie fait par la réception de l'Euchariftie. Car quand des termes
ont une fignification propre , principale & éminente , ils ont
beau en avoir de moins propres & de moins ordinaires ,1a rai-
fon veut qu'on les prenne au fens propre & principal , lorfqu'il
n'y a rien qui les détermine precifément au fens moins propre
& moins ordinaire.
L'équité ou plûtoft la neceffité de ce principe eft toute évi-
dente, parce que quand l'efprit entend un mot,ilfe porte tou-
jours à fa principale fignification , à moins que d'cneftre dé-
tourné. Et comme tous ceux qui parlent ou qui écrivent fça-
vent cette inclination des hommes^&quec'eft la leur propre,
ils s'y accommodent naturellement &: fans art;îcainfi ils n'em-
ployent jamais les mots en des fignifications éloignées, rares,
extraordmaires , fans les y déterminer expreflemenr.
Il n'y a qu'à appliquer cette maxime du fens commun au paf-
fage de S. Ephrem pour en conclure qu'on ne le fçauroit expli-
quer d'une autre manducation que de celle qui fe fait par l'Eu-
chariftie. Car il eft certain d'une part que ces termes de Saint
Ephrem , participer au corps ^ au fang de J. C. manger le corps
immaculé , ^ boire fon fang, ynanger l\igneau tout entier^ le My-
fterede Chrift^ & quantité d'autres , ont pour fignification prin-
cipale & ordinaire la manducation Sacramentalej&ileft vifi-
ble de l'autre qu'il n'y a rien dans ce pafllîge qui détourne de
ce fens 5 &par confequent c'efl une chicanneiie honteufèque
d'en vouloir fubftituer une autre, 6c de rapporter ces paroles à
la fimple méditation àç.^ fouffrances de J. C.
JepaflTemême plus avant,& je foûtiens qn'Aubertin nefçau-
roic faire voir que ces termes ayent jamais eflé employez avec
quelque détermination que ce foit à la manducation fpirituelle.
Que l'on n'a jamais dit d'une autre manducation que delà Sa--
37© Liv. VI. ^e le corps de fefùs-Chrifi'
cramentale , que Dieu 7iuus a donné [on C'irps & fon f^ïng , iifin cte
nous en nourrir ^(^ que cette partieipaiion nous fervc pour la remiijion
dcnos pechez^Qt lont des expreffions cirées de la liturgie 'qui por-
tent l'efpric àla communion Sacramentale , bc qui ne fe dilenc
qu'en ce fensv
Je foùriens de plus qu'en prenant cette manducation pour
uns fimple méditation des foufïrances de J. C. il eft ridicule
d'exiger qu'an fe tienne pleinement afîuré , que l'on y mange
J. C. tout entier. Et il n^ a rien de plus impertinent que le lens
qu'Aubcrtin donne à ces paroles , en voulant qu'elles llgni^
fient que par cette manducation fpirituelle on mange J. C.
auffi bien lelon Ton humanité que félon (a divinité. Car puifque
manger fpirituellemenc la divinité & l'humanité de J; C. n'eft
autre chofe que d'embralfer par la foy & l'humanité & la divi-
nité dej. Cil eftimpoffible de le faire (ans élire allure qu'on le
fait , la connoiflance & la certitude de l'acftion eftanc infepara-
bles de l'action même. Ainfi comme il feroit ridicule de pref-
crire à un homme qui penferoitenDieu ,d'efl;re aflliréqu'il y
penfcjil eft ridicule aulFi deprefcrire à un homme qui s'unir par
îa foy à l'humanité &: à la divinité de J. C. qu'il foitafTuré qu'il
mange la divinité & l'humanité, puifque ce ne feroit en ceièns
que la même chofe.
Cette reiiexion qu'Aubertin veut que S. Ephremaiteu en'
vue, que c'eft une grande merveille que des homnVes corporels
fbient nourris du Pain des Anges, c'eft à-dire ielan luy, de la
divinité dej. C. eft une pure vifion. Car comme cette penfée
elT: extraordinaire , ceux qui la veulent faire entendre aux au-
tres ne manquent jamais de l'exprimer, &.ils ne (uppofenrpay
qu'on la devinera par des paroles qui ne la fignifient point.
S. Auguftin & S. Fulgence qui ont (ouvent marqué ce degré
de monter à la divinité par l'humanité , fe font fervis de paroles
très claires pour exprimer leur penfée. S. Ephrem en auroic
f-iic autanr.s'il avoiteûle même dcilcin j& de ce qu'il ne le fait
pas , c'eft une marque certaine qu'il ne l'a pas eu. Il ne parle ni
de l'humanité , comme degré , ni du pain des Anges , ni de la-
divinité de J C. ni duVerbe comme Verbe îl ne fiit point con-
fifterla merveille dontil parle, en ce qu'on mange la divinité,
mais en ce qu'on mange le corps& le fmgde j.C. &ainfiilfau-
droit qu'il n'euft pas eu de fens commun, s'il nous euft voulu
fairecomprendrepar là cette dodrine fi haute £c (i élevée , 65
qui
efi mitigé corpoYellemem dans lEuch.itiJîie. 371
qui il befoin poureftre cr.cenduc d'cftre fi precifcnient expn Ch. TH.
mce. A cepaflagede S. Ephr£m,on en peur ajouter un autre de r"'^°'^Pfl,
S. Epiphane dont Aubcrtin fe (auve par ies mcmesillufions. icd.'
Z'E'Z^l:fe , dit ce Père , e[l le port îrj.nqtdUe de la paix. C'eft une
l'igrie qui jette une odeur -paretllc à celle des utyies deCypre^d,^ qui
nous produit le raijin de l'Eulogie , (^ nous donne tous les jours un
breuvage qui foulage tcus nos travaux ^f^aveir le fan^ de I, C. pur
^ véritable.
Aubertin réplique que cela ne s'entend pas del'Euchaiinie ,
mais du corps &: du fang de J. C. qui nous eil prcfe:;tc , dit-il ,
par les indrudions de TEglife. Il ajoute que c'efi en ce fens que
S. Jérôme dit : Confuetudo y^cbis ifiius modi efi .^ ut bis qui hapti- AiJveif.Ert.
Z^andi funi , perquadraginta dies tradamus fancLtm Trinitaiem.
Mais ce Miniftre devroic avoir pris garde que fi l'on fe peut
fervirdu mot àttraderetn parlant d'inftrudion, il n'en efi pas
de même de celuy de Urpri^ ya.i/t^o.i.^ & qu'il n'y eut jamais
d'écrivain aflez impertinent, pour dire que l'on fait prefenc
aux baptifez de la Sainte Trinité , en voulant faire entendre
qu'on les en inflruir. Ainfi S. Epiphane difaot de l'Eglire,^//f//e
nous fait prefent du fang.de J. C. x'^a, ^j^f/yot) ')(aL?jQ).câyA , c'efï
le comble de l'abfurdité de rapporter cela aux inflruclions
qu'elle nous en donne. Outre que S. Epiphane n^ difant rien
qui puiiîè faire appliquer ce qu'il dit du corps & du fang de
J. C. â l'inftrudion , il eft ridicule de rapporter ces termes à
une autre ehofe qu'à l'Euchariftie qui fait leur propre Se leur
principale figniHcation.
Aubertin a encore recours à une autre défaire pour fe tirer Au6.p.4«<^-
de ce paflage , qui eft , dit il , qu'en cas qu'il faille l'entendre
de l'Euchariflie , on peut dire que S. Epiphane entend par ce
vrayfangyUn vruy Sacrement, Sc qu'il l'appelle vraj pour le dif-
tinguer des faux Sacremens des hérétiques. Mais c'eft encore
là une de ces vues éloignées qui ne fe fuppléenr point , & qui
ont necefTiirement befoin d'eftre exprimées pour eftre enten-
dues. Si S. Epiphane n'avoit eu deflein que de diftinguer par le
mot de verum^le Sacrement del'Euchariftie des faux Sacremens
des heretiques-j il en paroiftroit alTurément quelque chofe ;
mais comme il n'v a rien d'approchant, il eft vifible qu'il mon-
tre par là qu'il laiftc ce mot dans fon fens ordinaire,5v: qu'il l'op-
pofe au doute gênerai que le myftere même produit, ôc qui a.
befoin d'eftre détruitj en nous confirmant dans la créance , que
AAa
372- ^^iv. VI. j^<? le corps de yefm.Qmfi
ce que rF.glifj nous donne , eH: le vray (ang de J. C. comme on
raexplK]ué dans le iecond volume de cet ouvrage.
i.Perp. 1, f.
c. II p s^-)
CHAPITRE IV.
Saint Ambrai fe , ou l' Auteur du Livre des Sacremens.
N a rapporté dans le Tome précèdent , le premier cha-
pitre du fixicme livre des Sacremcns attribué à S. Am-
&iuiv/ broi[e,&ceux qui prendront la peine de lire les reflexions
qu'on y a jointes , y trouveront fans doute une preuve convain-
cante que la vraye chair de J. C. efk réellement prifè & mangée
dans l'Euchariftie. Je ne laifTeray pas néanmoins de l'inférer
icy, pour avoir lieu de réfuter la réponfe qu'y a fait Au-
bertin.
Comme noftre Sei<zneurJ. C. dit cet Auteur ,efi le vray Fils de
Dieu , C^ qu'il ne l'cft pas feulement par grâce comme les hommes , ^
mais quil l'cji comme Fils de la fubflance du Fcre l ainji cefi
fa vraye chair que nous recevons , ^ fou vray fang qui eft nofire
breuvage. Vous direz^ peut- efire ce que dirent quelques Difciplcs
de J. C. lorfquil leur dit : Ce lu Y qui ne mangera pas ma chair
^ ne boira pas mon fang ne demeurera pas en moy , ^ n'aura point
la vie éternelle : Feut ejirc , dis je , que vous dircx^: Comment
eft -ce fa vr-itye chair ^puifque je ne vois qu'une ^reffemblance de
fang , ^ non la vérité du fang l Je répons k cela premiererncnt , que
ici parole de Dieu eft fî efficace , quelle peut changer les loix ordi.
n ires de la nature. Je répons en fécond lieu , que c' eft pour empé.
cher qu'il r^ arrive ce qui arriva. , quand les Difciples ne purent
fouffrirles di (cours de J. C. ^ que luy entendant dire qu'il dennoit
fa chair k manger ^ fon fang à boire , ils fe retirèrent tous à la re-
fervc de s. Pierre , qui luy dit : Vous AVEZ les paroles de la vie
éternelle. Oà pourrions nous aller en vous quittant ? Pour empêcher
donc qu'on ne dife ce que dirent ces "Difciples qui abandonnèrent
J. C. dr pour faire en même temps que la vice du fang ne eaufafi p^M
de l'horreur , (^ que néanmoins la grâce que J. C. nous fait pour
noftre rédemption demcuraft entière , vous rccevezje Sacrement fous
la reffemblance du fang, mais vous obtenez^la grâce (^ la vertu de
la véritable nature.
On a fuit voir dans le lieu que j'ay cité, que cette exprcffion,
ejl mdr:gé corporellcment dans l Enchaviflie. 375
nous recevons la grâce Qr la venu de Li véritable na are ^ /îî^niiie Gh. IV.
cjue noui recevons la vcnrable nature pleine de vertu bL de
grâce , & il n'eft plus neceflaire de s'y arrcftcr icy.
Mais ce que je prétends faire remarquer, c'til: qu'Aubcrtin - ,^
pour répondre à ce pa{rage,invence une nouvelle lolutioDaulIi n4-5i;. "
contraire à ces propres principes , qu'au bon fens & à la vé-
rité.
Car on ne conçoit d'ordinaire, félon l'opinion des Miiîiftres,
que deux fortes de manducations h l'une corporelle , qui le rer-
•mine au figneou Sacrement 5 l'autre fpirituclle, qui fc te mi-
ne à la vraye chair de J. C. Cependant la manducation a la-
quelle ce Miniftre a recours pour expliquer ce paflôge ,n'c{ljii
de l'une ni de l'autre efpece, comme nous l'aîlons montrer.
Premièrement, il demeure d'accord qu'il cfl qucftion dans
ce paflagcde la vraye chair de J. C. que c'eft de la vraye chair
qu'il cft dit q^ùQ ^veru efi caro quam acci-pnnus ^Ç;- vtrtiS poius.
Ainfi c'efi de cette vraye chair que S. Ambroiié explique ces
paflages du (ixicme chapitre de S. Jean : Ma chair cjivraye"
ment viande , (^mon fan'i^efl vr.iycmcnt breuv.iq^e.
Il n'a ofé dire non plus qu'il s'agilfe en ce lieu d'une manda-
cation fpintuelle. Caril s'y agit d'une manducation qui excite
un doute qui s'exprime par ces paroles; J^ohs me direz^commcnf
efi ce devr.iye chair , fui [que je ne la vois pafl Or il fèroic ridi-
cule de s'imaginer qus parce qu'on ne voit pas le iang de J. C,
perfonne pull: douter qu'on le reçoive par la foy j puifqu'au
contraire pour le recevoir ainfi ,ileftde necelîité qu'on ne le
vove pas.
Il ell donc certain que cet Auteur parle d'une manducation
corporelles & par coniequent voilà une manducation corpo-
relle qui a pour objet la vraye chair de J. C.
Il (emble qu'il n'y ait rien de plus à délirer , mais cependant
ce n'eft pas afllzpour Aubertin II a recours à la deriiiere rei-
fource , qui eft la clef^iT vertu 5 &: chicannant fur ces dernières
^2iXo\ç.i ^ver^c nature qratiam virtttîcmqv.e confequimur , qu'il
entend contrela fuite de tout le palfage d'une vertu feparee de
la chair de j. C. il veut que la chair de |. C. foit mangée & re-
çue , non en elle-même , mais en ia vertu ,fic carnemQ- fungui-
nem Chrijli uccipimus ^ non rations materia ^fed ratione virtutis
abfque eo quod tilius honor fit manducationis earnis (^ potus fan-
yiinolenii.
A A a i j
574 Liv. VI. j^û le corps de Jejus-Qmli^
Par là il établit ce croiiiéme genre de manducation inconnu
jufqu'à luy, qui confifteen une manducation corporelle donc
l'objet efl: la vertu du corps de J. C. De force que comme cette
vertu du corps de J. C. efl: une qualité fpirituelle, ou plûcoft
qwe c'eft le S. Efprit même avec cous {qs dons , il faut qu'il foû-
tienneque nousman2;eonscorporellement le S. Efpric , malgré
le fens. commin & la doctrine Formelle des Pères, qui enlei-
gnencquela Divinité ne Içauroic eftre mangée.
On repondra peut eftre que comme lâchait de J. C. n'eftpas
ma'igéeen elle-même, mais par favertu^ de n>ême cette vertu
eft mangée par le Sacrement ,& non en elle-même.
Mais qu'y ac'il de plus ridicule que de faire faire tous ces
tours à noftre efprit pour parvenir à l'expredion de l'Auteur
dont il s'agit ! L'expreffion naturelle, félon Aubertin , efl: que
l''on mange le Sacrement , & qu'il n'y a que cela qui foie pro-
prement mangé. Il veut en fuite que le mot de manger s'éten-
de par métaphore jufqu'à dire que l'on mange la vertu du corps
de J. C. C'eft déjà un étrant^elaut qu'il fait faire à l'elprit 5 &
Ton ne fçait gueres ce quec'eft c^viQAcsvertus marigées. Néan-
moins il ne s'arrefte pas là 5 & comme fi cette manducation de
vertus eftoic la chofe du monde la plus claire & la plus éta-
blie, il veut encore que d'un fécond fautnoftre efprit aille dé-
couvrir l'idée de cette vertu mangée^ dans cette exprefîion, W;^«-
^er la chair de J. C. comme fi elle ne pouvoic avoir d'autre
fens.
Une faut pas que M. Claude prétende qu'on impofe icy à
Aubertin pour le rendre ridicule , parce que ce Miniflre ne fe
fert pas de l'expreifion de manger la vertu dcj. C.&i. que l'ex-
preffion de l'Auteur qu'il explique eft , nattira gratiam virtutem- '
que confequcris. Car ce mot de confequeris fignifie manger en cet
endroit, puifqu'il eft queftion d'expliquer ce paflàge : Nifiman-
ducavcritis carncm Filii Mominis. Or il eft certain , comme il a
efté prouvé ,que cet Auteur entend cette manducation d'une
manducation corporelle. Si donc par le mot àccarnem Filii
Hominis , il avoit entendu la vertu delà chair, il auroit voulu
qu'on mangcaft la vertu de la chair, &;ilauroitattribuéà J. C.
d'avoir exprimé cette étrange idée par cette exprefiion encore
plus étrange : Hijï manducaveritis carncm Filii Hominis , (^
Cp 7. p. i?5- bihcritis cjus (angiiinem , noïi habcbitis vitam in vobis.
Il eft bon de fe fouvenir icy de ce qu'on a remarque dans le
i. pcip.].;.
cji mungé corporellement da,ns TEucha.YÏÎlie. 37^
volume précèdent, que quand on objede à Aubertin le paflage Ch. IV. •
delà 46. homélie de S. Chryfoflome fur S.Jean ,oùilefl: dit,
qu'il ne fallait pas penfer que ce fufl par èniyfne (^ par parabole
que J. C. dit aux Juifs que SA CHAIR ry? vray entent viande , (^
fonfang vrayemcnt hrcuva<ie ; tnais qu'on devait croire qu il fallait
ahfolument manger fan corps , 'tcô.v^oû S^û (pa.yùv to <Tci)f/.<x, , il ré-
pond qu'il eft vray qu'il n'y a point d'énigme dans le comman-
dement que J. C. nous fait de manger fa chair , parce qu'afin
qu'il y ait énigme , il faut que nul des termes de la propofition '
ne fe prenne proprement Or , dit-il, cela ne fe rencontre pas'
dans la proportion de j. C. car les mots de chair & de fang ne"
font point métaphoriques , èi. ils fignificnt toujours la vrayç
chair de J. C. Il n'y a que le mot de manger. Cependant il eft
bien clair que cette réponfe ne peut avoir lieu , félon l'explica-
tion qu'il donne au pafTage-precedent , dans laquelle ni le mot
àtmangerviO. fe prend proprement, puifqu'on ne mange point
proprement des verttis ^\)\ celuyde r^^/>dej. C. puifqu'Au-
bertin veut qu'il foit mis pour la vertu delà chair, C'eft donc
faire du difcours de J. C. un difcours purement énigmatique
que de l'expliquer en cette manière , quoique S. Chryfoftome
déclare formellement qu'il n'y a ni énigme ni parabole dans ce
quej. C. nous dit de manger fa chair & fonfang.
Je ne puis m'empécher d'ajouter en pafTant une reflexion
fur ce paflage de faint Chryfoftome qu'Aubertin prétend élu-
der en difant que ce n'eft point changer les paroles de J. C. en
énigme que d'entendre par ces paroles , ma chatr eft vray ement
viande y (^ mon fang eft vrayement breuvage ^ une manducation
purement fpirituelle delà chair de J. C. C'eft qu'il eft fi faux
que ces paroles ne foient pointénigmatiques en ce fens, que
faint Auguftin après avoir diftingué dans le troifiéme livre de
la doctrine Chrétienne les énigmes des fimples métaphores,
apporte pour exemple de ce qu'il appelle énigme ces paroles de
J. C. T^iji mandttcaveritis carnem Filii Homrnis ^ O" biberitis
ejus fanguinem , non hdbcbitis vitam in vobis , en les appliquant
paruneraifon particulière qui l'y obligeoit à la manducation
fpirituelle , comme nous le ferons voir en traitant à fond de ce
paflage.
On peut réduire ces deux dernières remarques à un argument
aflez embaraffant pour les Calviniftes en cette manière. Ces
paroles de J. C. Si vous ne mangezja chair du Fils de l'Homme ,,
AAa iij
^.37^' 'Liv. VI. ^e le corps de Jeftis-Çhrifi "
' - ' ^ne keuvez^fon fm'^ , vous n'aurez^point U vie en vous , ovr cel-
le-cy : Ma chair eji vravment viande ^ ^ mon fanq^ efi vrayment
breuvage ^x\e (ont ^o'mz énigmatiques félon S. Jean Chryfofto-
me &: Aubertin.
Or ellesferoïent énigmatiques ,fî on fes enrendoir, ou de la
niandutation de !a vertu , ielon Aubertin même, qui n'exclut
l'énigme, qu'en prétendant que le mot àechatr de J. C. fè
prenne proprement, ou de la manducation fpiritueile de la
chair de J. C. comme S. Auguftin le déclare expreffement.
Donc elles ne s'entendent ni de Tune ni de l'autre manière.
'Il fli.ùt remarquer feulement que quand je dis que ces paflà-'''
ges ne s'entendent point de la manducation fpiritueile, je veux^
dire qu'ils ne s'entendent pas avec exclufion de la corporelle.
Car rien n'empêche que ce (ens fuppofé,on ne les rapporte en-
core à la manducation fpiritueile , & nous verrons que c'eft ce
qu'a fait S. Auguftin qui les entend de cette dernière manière
dans les Livres delà dodrine Chrétienne par une raifon par-
ticulière que nous éclaircironsen fon lieu.
CHAPITRE V.
Pajîages de S. Auqiiftin qui prouvent clairement la manducation
corporelle du Corps de 'je fus- Chnfi.
GOmme c'efl de S. Auguflin que les Minières rirent leurs
principales obiedions contre la manducation réelle du
Corps de J. C. il eftjnfte d'établir d'abord la doctrmede cefaint
Doi.T:earpar des padages claire êc décifîfs, & par la réfutation
^es délâites dont les Miniftres fe lervent pour les éluder.
' " .' ■■■■■■ V'--'- ■■■J'-' -
- -i FReMer PASSAGE,
Tire du Livre contre t Advcrfuirc de la JFoy ^ des
i.^;:; Prophètes , chap. 9.
' 'iTous recevons avec un cœur ^ une bouche -fidelle le Médiateur
de Dieu (^ des hommes J C. homme , qui nous donne fon corps à
l/nhiUgèr'^ &fon finq^ h boire , quoiqu'il fcmble plus horrible de man~
^erde la chair a un homme que de le tuer , ô" d^ boire dufang hu-
main que de le répandre.
«N
eji mungê corporellcment da,ns TEuchartfiie. yjj
R E F L E X I O W.
Tout ce qu'on peut fouliaiter pour rendre un pafiage formel
contre les Sacramentaires, fe rencontre dans celuy-cy. Il ne s'y
agit point d'une manducation purement fpirituelle, mais d'une
réception par la bouche , fufcipmus ore.
II nes'y agit point d'une figurée d'une vertu, mais d'une chaif
&; d'un fang capable de caulèr de l'horreur à ceux qui les reçoi-
vent 5 ce qui marque en même temps &; la realité de la chair,
& celle de la réception , puifqu'une chair en figure ou une ré-
ception en figure feroient incapables de produire cette horreur.
Cependant Aubertin y veut répondre, il y eftoit engage r
Mais c'eft une chofe tout à fait divertilTante que de voir com-
me il s'y prend.
Ilvoudroit bien d'abord fe contenter de dire que par cette
chair & ce fang du Médiateur que nous recevons -^v^f/^^o»-
the , S. Auguftin n'entend que le lèul figne de l'un 6c de l'autre.
Mais cette horreur de manger de la chair &; de boire du fang ,
& cette oppofition entre manger & tuer , boire & verfer, qui
regardent la même chair Si le même fang, rompent toutes for-
tes de mefures. Car je ne fcache pas que perfonne euft grande
horreur de manger l'image d'une chair , ni que jamais on aie
parlé de tuer l'image d'un homme , ou qu'il foit horrible de
verfer du fang en figure.
Aubertin pafle donc à un fécond fens qui a cel i d'admirable
qu'il n'eft fondé que fur un fouhait. C'eft, dit-il , qu'il eft pro-
bable qu'au lieu àt fideli corde c^ore^'û faut lire ^»rr. Mais
poiirquoy cela eft il probable ? Eft-ce qu'il y a quelque manuf.
critqui autorife cette manière de lire ce paiîage ? Non. C'eft
qu'Aubertm auroit bien fouhaicé qu'il s'en troiiyaft -^Utni^nn ,
dit il, liceret viicre flurcs ûcvemfios codices^'m^mv.fcrîptos: Mais
cependant il n'en a point vu qui euft cette correftion, qxibiqu'il
ait vu apparemment tous ceux de Paris ^ où il y en a plus qu'en
heu du monde.
Ainfi , comme j'aydit , ce fens n'eft fondé que fur un fou-
hait , ScileftdémentipaT tout ce qu'il y a dans Paris d'exem-
plaires imprimez &; manufcritsde S. Auguftin. Vit-on jamais
rien de moins iènfé ?
Il y a néanmoins encore quelque chofe de plus e'trange dans
Ck. V.
j7§ Liv. VI. ^e le corps de Je/ùs-Chrifi
le troifiéme fens,qui confifle à dire premièrement que cette
claufe ^fideli corde ^ ore , peut fignitîer fidclù ore cordis. Mais en
quelle langue ces mots ^fidcli corde & ore, fignifierent-ils jamais
fideLi ore cordis^ Il n'rmporte. Aubertin a befpin qu'ils lefigni-
fient , afin que fa folurion fubfifte , & cela luy fuffic.
Il me femble que j'entends M. Claude qui fe recrie qu'on ob-
met un exemple confiderable paroù Aubertin juftifie ce fèns
qu'on veut faire pafler pour extraordinaire; c'eft que S.Jean dit
aumcmefens dans l'Evangile que J. C. baptiferafesdifcipIesSc
par le S. Elprit & par le feu -.Ille vos Liptix^tbit in Spiritu fanîh
^ igné ; ce qui figmfie,dit il y par le feu du S. Efprit. Il eft vray
qu'Aubertin allègue cet exemple , mais il eft vray auffi qu'il
n'eft propre qu'à faire voir que ce Miniftreentroitfort impar-
faitement dans le fens des expreiKons, & qu'il s'arreftoit à la
moindre relîemblance , fans pénétrer les vrayes caufes qui por-
tent l'efprit à prendre certains tours, &à rejetrer les autres.
Premièrement ce prétendu fens qu'on donne à ce paflàge t
jUe vos baptiz^bit in Spiritu fanUo (y- iqric^ qui eft que cela figni-
fie iyie Spiritùs fanEli , eft fort incertain. Il y a bien plus d'appa^
rence que S. Jean prédit la manière dont les Difciples dévoient
eftre remplis du S. Efprit au jour delà Pentecofte. Et ainfi le
mot dQSfiritu fancio , marque la réception intérieure du S. Ef.
prie qui baptifa intérieurement les Apôtres,&celuyd'/g«f mar-
que le figne excerieurfous lequel le S. Efprit defcendit fur eux.
Mais (uppofons que cela (Tgnifîe iyfie Spiritus fancii^ s'enfuit- il
que l'on puilTe dire au mcrae fens , fidcli corde ^ ore ^owrfideli
ore cordis ? Nullement. Il s'enfuit tout le contraire. Car la rai,
fon pourquoy après avoir dit , Jlïe vos haptiz^tbit in Spiritu fan^
Ho , on peut ajouter cj- /g«^, eft que le mot de Spiritu fancio ne
marque pas diftinclement tous les attributs du S. Efprit qu'on
veut faire concevoir, &: que c'eft ajouter quelque chofe de con-
fiderable à l'idée qu'en donnent ces termes,de dire enfuite ô"
igné , pour marquer que cet Efprit eft un feu purifiant. Ainfî
l'efprit foufFre cette addition , parce qu'il y apprend quelque
chofe de nouveau. Mais par une raifon contraire^aprés avoir dit
que l'on reqoit la chair de J. C. par le cœur, corde fufcipimus , il
feroit tout à fait ridicule d'y ajouter é- ore ^ pour marquer que
c'eft par la bouche du cœur. Car cette métaphore ne fait rien
connoiftre de nouveau, ni que l'on defire de fçavoir. Des-là
^u'ona con^d que le corps de J. C. eftreçû dans le cœur , on a
conçd
ejl mangé corporeîlement dans TEucharifiie. '379
tfonçu qu'il y eft.Et fi l'on a conçu qu'il y eft entré, que peut- Ch. V.
on concevoir davantage par ces mots ore cordi s , puifque ore ne
/îgnifieque/V»/rfV ? Qui ne fent pas cela n'a ny difcernement
ny intelligence.
La quatrième folution qui a déjà eflc touchée en pafTant dans
1-e fécond Tome de la Perpétuité, & à laquelle Aubertin donne** P"P- ^ '^'
cet éloge qu'elle eft très folide , /î'//W//^w.?, mérite bien d'eftre
encore rapportée icy avec plus d'étendue , puifque c'efl: cel-
kà laquelle M. Ciaude s'arrefte dans fon livre contre le Père
Noiiet.
Cette folution confiée en ce qu'Aubercin prétend d'une
part que le mot de darc^ fignifieinftruire ou cnfeigner,&; qu'am-
iî dure CciTïicni mandncandam ^ c'eft enfeigner qu'il faut »?,««-
$;rr /^ r/'^i/r. Et en ce qu'il foûtient de l'autre que ces termes
fufciptre torde ^orc ^ peuvent fignifier approuver de cœur &
de bouche; & qu'ainfi ce paffage fignifie feulement que nous
reconnoillons de cœur & de bouche le Médiateur qui nous en-
feigne qu'il faut manger fa chair.
Il prouve le fens prétendu du verbe dare-^ parce, dit- il, que S.
Jerofme fe fert du mot de tradere San^him Trinitatem , pour
dire que l'on enfeigne la dodrinede la Trinité: Parce que S.
Paul dit, Sicvohis fotv.ni dcdi ^ pour dire qu'il a donné des in-
flruclions aux Corinthiens 3 êcqueTerence dit: Nunc quamob-
remhas panes didiccrim , faucis dabo.
■ Ce que Ton peut dire de cette folution /;r/-/2'//'fl'^, c'eft
qu'il eft difficile de rien inventer de plusabfurde^ & que tout
e€ qu'Aubertin fuppofe pour l'authorifer eft entièrement ridi-
cule.
Jamais le mot de dure ne fîgnifia par luy-même instruire &
enfeigner. Ce n'cft jamais que par ce qui s'y trouve joint ou
fous- entendu. Si ce qu-e dit S. Paul qu'il a donné du lait aux
Corinthiens fignifie qu'il les ainftruits, ce n'eft pas à caufeda
mot de dare ^ c'eft à caufe de celuy de /^rr qui fignifie métapho-
riquement des inftradions proportionnées à ceux qui com-
mencent. Il en eft de même des autres exemples, comme nous
l'avons fait voir ailleurs 5 &:il n'y a peuteftrc point d'enfant
au Collège qui n'en voye de foy même la différence. Ainfi
c'eft une pure vifion, que de dire que ces mots, mediatorem
curnem fuam manducandam dantem , puifTent fignifier que le
B B b
jHo. ^e le corps de Je/Hs-Chrift
Médiateur nous inltruità manger la chair, & j'ay honte pour
M. Claude qu'il aie pu approuver une penfée fi peurailonnable.
C'eft encore une autre vifion que de vouloir que fufcipcre
7nediatorem,ipu'\iVe Cighiûer , approuver le Mciiatcur. Aubertm
ne diftinguejamais entre ce que fignifient les verbes par eux-
mêmes, &: ce qu'ils fignifient par les mots fubftanrifs que l'on
y joint. Sufcipete fignifie recevoir. Et parce que recevoir une
i^TI"' ^'^' <ioâ:rine c'efl: rapprouver,c'efl: en ce fensque l'Ecriture dit: Ad
fufcipiendam erudl tionem docirina j Si- fufce péris fcrmones meoSi
fufcipiat verbameacortHum. Tous les exemples qu'il produira
la marge font de ce genre, c'efl à dire qu'il prouve juftemenc
ce qui n'efb pas en queftion. Car il s'agit de fi^avoir Ç\ fufcipere
joint avec ur\t perfonne ^ fignifie approuver. Erc'eft de quoy il
ne produit aucun exemple.Enfin il s'agit, Ci fufcipcre ore me-
diatorcm , peut fignifier approuver de bouche. Et il y a fi peu
de rapport de ce fensavec le fens naturel du mot àz fufcipere,
dt^ à.. àxvQ recevoir ^(\\x' on ne voit pas comment il eft poiTible
d'employer ce terme dans une fignification fi éloignée. Auflî
Aubertin n'a que fa feule authorité pour appuyer ce prétendu
fens. Car pour ce pafl^ige defaint Hilairequ'ilcite, wa«<^rf//(?-
nemafperjionis labiisjnw^is quàm corde fufcipicns ^ c'q^l une illu-
fion vifible. S. Hilaire expliquant le mot Zyphei , dit qu'il fi-
gnifie oris ajpcrjîoncs, &c que ces aiperfions fignifient la remif-
iion des péchez. Ainfi en fuivant cette figure, il dit qu'il yen
a qui reçoivent ces afperfions fur les lèvres Ht non dans le cœur:
2i/[undationcm afperjionis labiis magis quàm corde fufcipiens i c'eft-
à-dire qu'ils n'ont que les lèvres purifiées &non. le cœur. N'eflr-
ce pas fe mocquer du monde que de conclure de là que fufcipere
ore mediatoreni^ fignifie approuver de bouche le Médiateur?
Ce qu'il y a de pis encore eft que tous ces fonges ne fuffîfent
pas à Aubertin pour expliquer ce pafTage. Car en fuppofanc
routes ces fignifications bizarres, S. Auguflin nous dira encore
que nous approuvons de cœur ^ de bouche le Médiateur qui nous
enfcigne a manger sa chais, et a boire son sang. D'où
Ton peut encore conclure que nous mangeons danc cette chair,
6c que nous beuvons ce fang, puifque le Médiateur nous l'enfei-
gne , 6c que nous le mangeons d'une manière capable de caufër
quelque horreur, comme (aine Auguflin ledit enfuite Et c'efl
pourquoy Aubertin pour ajufler Ton explication, ajoute enco-
re que nous approuvons cet inJîruH ions fans les entendre.
cfi mungê corporellement dans l'Euchar/fiic. 3S1
^aoy qu'ih contiennent quelque chofe d'horrible félon les termes.
Verus Chrifii difcipulus débet ejus verha , licèt non intelleïia ^
licèt in fpeciem horrenda , tanquam veracia ^ divina corde reci-
fere (^- are fradicare. Mais c'eft encore uneillufion vifible. Car
il ne s'agit point en cet endroit d'expredîons non entenducsj
mais il s'y agit expreflement au contraire d'exprclTions enten-
dues, dont iaint Auguftin veut qu'on reçoive le (ens quoyque
choquant. Car il veut que l'on reçoive ce qui eft dit , de manger
Ja chair de J. C, comme on reçoit ce qui eft dit , que les deux
enfans qu'Abraham avoiteusde Sara &; d'Acar figuroientles
deux Tcftaments, 6c que l'union du mari 6c delà femme figure
l'union de J. C. 6c de l'Eglife. Or ces deux exemples n'avoient
rien qui ne hit pris dans fon vray ienspar les Manichéens mê-
mes. Ainll comme S Auguflinne pretendoit point qu'on les
deufl approuver en détournant la fignification literale à quel,
que fens myftique , de même quand il vent qu'on croye que
I. Cnous do-nnefon corps 6c fon fang, quoyque cela paroidè
horrible, il ne prétend point que nous croyons ces paroles, en
les dccoLirnant à un fens deiîgure, mais il veut que nous rece-
vions ce fens malgré ce qui nous y paroift d'horrible, 6c que ce
foit cela même qui foit l'objet de notre foy ^ de notre foû-
miffion. Car il n'y a pas grande difficulté à fe foûmettre à des
paroles qui ont une apparence iracheufe^ lorfque ce n'eft pas
dans ce fens qu'il les faut prendre 6c cju'on y en entend un au.
tre qui n'a rien de choquant.
SECOND PASSAGE DE S. AUGUSTIN",,
tiré du Pfcaiime ^9.
Zes Sacrifices anciens ont efié abolis comme rie fiant que de fim-
fles pro'meffcs^ ^ on nous en a donné qui contiennent l'accomplif-
fement^ Da.ta sunt completiva: Qucfice qu'on nous a don-
né pour dcco'mpliffcyncnt 1 Le corps que vous connollfiez, , mais que
vous ne connoiffcz^pas tous -^ ^ plu fi à Dieu qu'aucun de ceux
qui le coiwoiffent, ne le connoijfe à fa condaynnation. Vous n'avez^
f oint voulu, dit I.C. de facrifice & d'oblation. Quoy donc^fommes-
nous maintenant fins facrifice ? A Dieu ne plat fe. Mais vous m'a-
vez, formé un corps. Vous avet^e'yctté ces facrifice s, afin de former ce
eorps h (^9- devant qu'il fufl formé, vous vouliez^ bien qu'on vous
les offrill. L' accomplijfement des cbofes promifcs a fait ceffer les
fiB 1 j
jgi Liv. VI. ^e le corps de Jefus-Qoïïsi
fromcffes. Carji ces projncjjes fuhjïjiotcnt^ ce ferait une marque qu'el-
les ne feroient pas accomplies. Ce corps efloit promis par quelques fi.
qnes , lesfignes qui marquaient la prom.e[fe , ont efiê abolis , parce
que la venté promife a ejîê donnée. Nousfo?nmes dans ce corps , nous
en fommes participans.
V, REFLEXION.
Je propofe ce paflage, parce qu'Aubertin s*, n cire par la même
invention que du précèdent , qui eft d'attribuer aux mots , des
fens dont jamais autre queluy ne s'eftoit avifé. Comme il ne
pouvoit nier qu'il ne s'agifticy d'une participation corporelle
au corps de I. C ilchicanne fur le mot àc corps de J.C. 6c il pré-
tend que S. Auguftin ne parle que d'un corps en figure.
Mais quel moyen de croire qu'un corps en figure (oit la vérité
promile , e.xhihita efi veritas pro7niffa>Qy\.Q\ moyen de croire que
ce foit ce corps en figure que Dieu /?/^/>^/3«jF'/7i{uivant la pro-
phétie de Davidj cornus autem perfecifii mihi ? Quel moyen de
croire qu'un corps en figure puifle eftre l'accompliflemcnt de
tous les facrifices anciens, complctivum'». Aubertin ne dit rien
fur les deux premières confiderationsque nous n'ayons réfute
vo ezi perp. dans le deuxième Tome en traittantde la comparaifon des fa-
1. 6.C.9.&10. orifices anciens avec l'Eucbariftie.
Mais nous n'avons pas encore rapporté ce qu'il dit furie mot
V^"^"' P' de r<?w/'/f^/x'a/w,& ce feroit dommage de le perdre. Z)a<? funt ^
dit il , completivi fnodi j prior realis ac proprius j pofierior declara-
tivus ^ teftificativus. il y a deux manières félon lefquelles on peut
dire d'une chofe qu'elle efi l'accomplijjement d'une autrcj l'une réel-
le ^ propre-^ l'autre déclarative & par forme de têmoignaqx II n'y
a que le corps réel ^naturel de J. C. qui foit l'accompliffement des
Sacrifices anciens au premier fens: mais au fécond fens l'Euchari-
(îie peut eftre appcUéc actompliffcment , parce qu'^elle efi la marque de
l'accomplificment des figures.
Mais qui a donné droit à Aubertin d'établir ces nouvelles ma-
ximes, ces nouvelles diftinclions qui n'ontdufage ny d'exem-
ple que dans la bizarreexplication du pafifàge même pour lequel
elles font faites ? Qui luy a donné droit de faire un nouveau di-
£lionnaire, & d'attribuer aux mots les fens dont il a befoin fans
autre raifon finon qu'il en a befoin ? Qui luy a dit que la marque
de l'accompliflemcnt des chofes , indicium rerum, completarum^
e^ m^ngé -c^jrporellenmit d^mîtEuchariftie. 5^9
fenommoit l'accomplilTemenc mêmejr(jw,''/f^/t'aw?QueIexenî- Ch. V.
pie en apporce-t-il? Auciini luy qui n'en manque jamais : mais
ce qu'il y a de beau , c'eftquele partage même dont il s'agit dé-
truit ce iens. S. Auguftin ne reconnoiil que deux degrez, les
promcffes ^ l'acco'mpl:lfement ^ &i il prend l'Euchariftiepour cet
accompliflement. Pcrfcciio pnruifjionis ahjlttlit verba promitten~
ti.t. SacrificictilLi tanquamvcrha fromifjïvu ablata funt^data funt
co^ipletiva. Qu:d cfi qaod datuyn eji çompletivum ^corpus quod
mfiis.
Mais lelon les Miniftresily a trois degrez. Les facrifîces an-
ciens qui promectoient le corps de J. C. naturel. Le vray corps
de L C. formé clans le temps par le S. Efprit qui eft le propre
objet de ces promelTes : & le figne de ce corps 5 c'eft à dire
l'Euchariftie ; qui n'efl félon eux que l'objec impropre de ce*
promefTes & de ces fignes.
S. AugLiftin au contraire ne diftingue point ce fécond degré
du troifiéme. L'Euchariftie eft , félon luy, ce corps que Dieu a
fait pour abolir les fignes de promeiTes: Ideo ilLtvolmjliut hoc
pcrficercs. Entre la promeile & l'Euchariftie il n'y a point de
milieu. Il faut donc qu'elle contienne le corps naturel de
L C. qui eft l'accompliflement véritable des Sacrifices de l'an-
cien Teftament.
Cependant , dit Aubertin , l'Eue Iiariftie tk appellée par
fàint Auguftin , indicium complctarinn rerum.W eft vray, mais
cela ne prouve pas qu'elle foit appellée accomplilTement au
même fens, ny qv\e indicium compictarum rerum ^ completivum
foient des termes fynonymes. Ce font deux qualitez différen-
tes que l'Euchariftie poflede conjointement. Elle qÇz une mar-
que de i'accomplilîement des facriffces anciens, parce qu'elle
figure la pafîîon par fa partie extérieure. Elle eft l'accomplif-
fement même , parce qu'elle contient ce corps que Dieu a
fubftitué aux facrifices anciens. Sacnficium ^ oblationem noluijll^
tune dixi ecce venio.
S. Auguftin exprime l'une de c^s qualitez, par le mot /W/-
cium completarum rerum ^ & l'autre en l'appellant corpus com.
fletivum. Et il eft ridicule de vouloir détruire la dernière par
la première , puis qu'elles n'ont rien de contraire.
tbbii]
3 s 4 Liv.yi. ^e le corps de Je fus. Qmfl
TROISIE'ME PASSAGE,
tiré du?C^2.
le fus- Chïiji a pris la terre de la terre ^ puifque la chaire fi tirée de
la terre ^ (^ qu'il a tiré fa chair de celle de Marie : Et parce qu'il à
vécu dans le monde avec cette chair^ ^ qu'il nous a donné cette
même chair a manger pour noftre filut ^ perfonne ne mange tint cette
chair fans l' avoir premièrement adorée , on trouve par Ik comn^it
l'efcabeau des pieds du Seigneur cfi adoré , d^ que non feulement on
ne pèche point .en l'adorant , mais que l'on pèche en ne l'adorant pas.
Mais efi- ce la chair qui vivifie ? Le Seigneur même en nous exal-
tant cette terre , nous dit que c'ejî J'efprit qui vivifie (^ que la chair
nefert de rien. C'efi pourquoy en vous abaifant Q- vous profiernant
devant quelque terre que ce foit .^ ne la regardez^pas comme terre,
mais rcgardcz.~y ce Saint dont cette terre que vous adorez^efi l'efca.
beau. Car c'efi à caufie de luy que vous l'adorez^
On convient de part 6>i; d'autre fur ce pafTage qu'il s'agit de la
vraye chair de J. C. piiifque cette chair dont il eft parlé eft:
l'objet d'une adoration fouvcraine. La difpute n'eft que fur la
qualité de la manducation. Les Miniftres prétendent qu'il faut
entendre ce terme d'une manducationfpintuelle. On prétend
contr'eux qu'il faut l'entendre d'une manducation corporelle.
C'eft la queftion. Mais cette queftion feroitbien aifëeà vuider
s'il y avoitde la bonne foy. Car quand S. Augiiflin & les autres
Pères parlent ablolunient de manger la chair de J. C. ils n'en-
tendent point d'autre manducation que celle qui fe fait dans
l'Euchariftie j & celaparoift non feulement par un grand
Hombre de paflàgesdeS. Augu{î:in,où ces paroles font prifesen
«e fens, maisauffi en ce qu'il déclare formellement que les Ca-
téchumènes ne fçavoient ce qu'on difoic quand on parloit de
manger la chair de J, C.
Or Ci l'on euft parlé communément d'une autre manière de
tnanger la chair de L C. que de celle qui fe fait dans le Sacre-
ment, on ne l'auroit pas celée aux Catéchumènes, puifqu'on ne
leur cachoit qae ce qui regardoirlesSacremens. Etparconfc-
quent ils auroient pûfçavoirla fignifîcation deces mots,
s Decelafèul que ces paroles eftant employées fans explica-
ition, s'entendent toujours dans faint AuguOrin delà manduca-
tion quife fait dans l'Euchariftie , on en doit conclure que cette
eB mangé corporeîlement dans rEucharifiie. 58;
manducation eft réelle &: corporelle? & non purement fpiri- Ch. V.
ruelle. Carlî l'on ne mangeoic dans l'Euchariftie la chair de
Jésus- Ch rist que fpiricuellemenc ôc de la mcnne manière
qu'on peut dire qu'on la mange en une infinité d'occafions
par la méditation de la pafTion de |. C. hors de l'Euchariftie,
par quelle phantaiiîe ce Père , aulTi bien que les autres , auroit-
il réduit une exprellion qui marque d'elle-même un genre
^clion (î étendu ôc C\ commun à une certaine efpece d'action fi
nire & fi peu commune en comparaifon de toutes celles qui font
comprifes fous le même genre: Pourquoyne nous auroient-ils
donné nulle part cet avis fi important que l'on peut manger
en tout temps &en tous lieux la chair dcj. C. d'une manière
auflî véritable & auffî réelle que dans l'Euchariftie ? Et pour-
quoy auroient-ils caché aux Catéchumènes un devoir de Reli-
gion dont ils eftoient capables, & qui eftoit i\ necefi^ire pour
leur falut.''
Celaparoift encore par ce que S. Anguftin ^ontQ que perfofi-
ne ne viange cette chair fans t avoir adorée. Car ces paroles mar-
quent une action extérieure de Religion qui fe pratique dans
un certain ordre réglé, & elles fiûnt vrayes à la lettre en les
rapportant à la manducation corporelle c]ui fe fait dans l'Eucha-
riftie , perfonne ne devant s'approcher de ce Sacrement fans
avoir premièrement adoré la chair de J. C. Mais fi l'on rapporte
ces mêmes paroles à la manducation fpirituelle, le fens n'en fera
ny vraynyraifonnable, comme il eft facile de le reconnoiftre en
fubftituant la définition de la manducation fpirituelle au lieu du
terme même. Cette manducation eft lelon Aubertin une fen-
fèe par laquelle on reçoit la chair de J. C. comme ayant efiè li- "^' ''*
vrèe à la mort pour nofire falut^ & comme V ayant mérite en qua-
lité de caufe matérielle. C'eft ainfi qu'il la définit en parlant
de ce paflàge. le demande donc fi c'eft une penfée raifon-
nable que de dire qu'on ne conçoit jamais la, chair de J. C^
comme ayant ejié livrée à la mort \^ ^ comme ayant mérité
nofire falut en qualité de caufe matérielle.^ fans l'avoir auparavant
adorée.
D'où viendroit la necefiîté de cet ordre ? Pourquoy l'ado,
ration devroit-elle précéder la manducation par un ordre fixe
&; invariable ? N'eft-il pas au contraire plus vray femblable
que la penfée de la mort de I. C. précède ordinairement l'ado»
ration, puis qu'elle contient des motifs d'aimer & d'adorer I.C.
5S6 Liv. VI. ^e le corps de Jefm-Qmfl
On ne peut dor.c entendre railonnablemenc cette mandu-
cacion précedéeneceiïairemenc d'une adoration que delaman-
ducation quife pratique dans l'Euchariftie^ 6^ cet ordre mar-
que de plus qu'elle ne fçauroiceftre purement fpirituelle, par-
ce qu'il eft ridicule d'établir un ordre entre radoration & la
manducation fpirituclle, & de marquer précilëmentj comme
fait S. Auguftin, laquelle de ces deux adions doit précéder
l'autre.
Enfin cela paroift encore manifeftement par ces paroles d^.
K\i<^vS\^\w: Idco ad terrain quaniUbct cnm te inclin.is atquc pro-
//fr«/j-^ qui marquent que cette terre par laquelle il entend la
chair de I. C. comme Aubertin même le reconnoift, quoy
qu'une en elle-même, peut être multipliée par la divcrfiré des
lieux où elle eft reçue. Ce qui donne lieu à S. Auguftm d'en
parler comme s'il y en avoit plufieurs.
Aubertin quis'eft fenti preilé de cette preuve tache de s'en
échapper à (on ordinaire par une faufle critique. C'eft, dt-il,
que le mot, cjua-iulihet ^ n'cft pas en ce lieu un adjedit- \ mais un
adverbe quifigniEe, quamvis ^ &c qu'ainfi cela veut dire que
quoyque cette terre ne foitque cerre^ il ne la faui pas neanmoms
regarder comme terre.
Il s'efForce en fuite de juftifiercefens par quelques exemples.
Mais il n3 prend pas garde qu'il en abufe vifiblement , &:
qu'il donne lieu d'en conclure tout le contraire de ce qu'il
prétend. Car il paroifl: par ces exemples mêmes que le mot de
qu.imlibct n'eft jamais adverbe , que quand on le joint s un
adjectif, quamlibet exi'^uus corporis modulus i qnamlibet fplen,
didiljimus fulqor. Et la raifon en eft que l'on marque par ce
terme le fouverain degré de quelque qualité dans un (ujet. Mais
par cette raifon même on ne l'applique point aux noms fubftan-
i\h co\x\vc\e la terre ^ parce que la terre eft un fujet, 5<non pas
une. qualité qui puiiTe recevoir divers degrez.ih 5b ^.'o ofc
Il n'eft pas mêmebefoin de ce raifonnement pour faire voir
l'abfirdité du fens d'Aubertin à ceux qui ont quelque gouft
de la Langue Latine. Car quoy que faint Auguftm n'écrive pas
taûjours avec la dernière pureté, on ne trouvera jamais qu'il
aie prisuntour C-bizarre, &qu'il ait eftécapablede direct/ /^-r--
ram quamlibet cimi ff />/f/;>?^/ pour fignifier, lorfque vous vous
proftcrnez devant cette terre quoyque terre.
.Qiii a jamais die ^2lx e-x.em^\e^Kegem. quamlibet cum videam^
pour
éji mangé corportttement dans l'EuchariJUe^ 387
pour direqiioyquece foie le Roy que jevoy ? Qui a jamais dit Ch. V!i
-pour fjgnifier , quoyque ce foie le Soleil qui illumine la Luncj
'Sed quamlibet cum Lunam illuminât? Qui a jamais dit, pour ex-
primer, quoyque ce-foit Dieu qui donne la vie aux s(^nis-^Deru
quamltlx:t cum vitam animrs impertit.
Mais cen'eft pas une affaire à Aubercin quand il s'agit d'élu-
der un paflage, de faire un diclionnaire à fa phantaifie, ôc de
renverfer la langue & l'efprit de tous les Auteurs.
^Q;UATRIE*ME passage de s. AUGUSTIN. '
du Livre i.i. contre Faujle cli. lo.
Ze fang de J. C. eftant fur la terre a une voix forte ^ fuiffante^
'lorfque toutes les nations après l'avoir re(^û répondent Amen. C'eft Ik
lu voix haute de ceftng^ que ce fing forme luy-mefme dans la bou~
<he des fi de lie s qui en ont efté rachetez.^
Et dans le même livre, en parlant de l'EucIiariftie , S. Au-
-guftin l'appelle leSacrementd^efperance qui fait la liaijon des mem-
bres de l EgUfe pendant ^ue l'on boit ce qui a coulé du -cojié de
JeJfu.ChnJî.
REFLEXION.
Aubertin demande /ur ce dernier paflàge comment on peut
prouver que faint Auguftin ne parle pas là d'une manière ipiri-
tuelle de boire le fang de J. C. mais la réponfe efi: aifée. Cefl:
^ae-S.-Augufl:in attribue au temps prefent cette boiflbn du fang
<ie J. C. au lieu que la participation fpirituelle à ce fang n'y eft
point attachée, & qu'elle fera bien plus pleine Se plus entière
en l'autre vie, comme les Pères le déclarent fou vent. Ainfi ce
paflage s'entend certainement ^ du véritable fang de J. C. &
d'une manière de boire véritable &: réelle ; puifqu'il y efl: parlé
d'un fang que nous avons lur la terre, &qui eft néanmoins ce-
luy par lequel lésfidelles ont été rachetez j &que ce fang jette
une vaix de la bouche des fidelles où il eft par confequent rei^u,
comme les fidelles le reconnoiftent par le mot Amen , que ce
fang même leur fait prononcer.
Qui croiroit après cela qu'il reftaft encore quelque chofc à
prouver 5 & que faint Auguftin parlant vifiblement d'une man-
ducation corporelle qui a pour objet la ciiair de J. C. cène fulî:
CCc
38g Li v.VI. ^c le corps de fefas.(^hrifl
pas aflèz pour conclure que cette chair efl: véritablement
mangée ? Cependant Aiiberrin qui ne fe rend jamais, s'cft en-
core avifé d'un dernier retranchement. Et voyant qu il ne pou-
voit nier que ce Père ne parlaft d'une manducation réelle &:
d'une chair véritable , il Te réduit à dire que cette chair n'eft
mangée qu'en ligne , &C que c'eil ce qu'il entend par ce mot, in-
Siicrumento.
Mais ficela a licusoùenfommes nous?Etpourquoy leshonii
mes (e donnent ils la peine de parler? Qiiels termes nous re-
ftera-c il pour exprimer noftre dodrine, ôc où les Calviniftes
eux-mêmes en pourroient-ils trouver pour Te faire entendre?
Quand les Pères auroient dit mille fois, que noiis y cuvons far
la bouche (^ corporellcmcnt la propre fuhftance de J C. ne fe-
roient-ils pas auflî bien fondex à dire que cela fîgnifîe manger'
cette propre fuhftance en ligne àcen figure? fit quand ils n'au-
roicnt jamais ditaurre chofe finon que nous mangeons la chair
de J. C. en figne & en figure ^ pourquoy ne dépendra-c il pas
de nous que celapuifle aulFi fignifier , manger corporcllemenf
Ja propre chair de J. C ? Si les termes les plus oppofe2 font
fynonymes pour eux, pourquoy ne le feront ils pas pour nous?
Et où chercherons- nous déformais la décifion de nos difFe-
rens, à moins qu'elle ne nous vienne d'ailleurs que des hom-
mes ? Il feroit prefque aufTi honteux de réfuter ferieufement
ces fortes de chicaneries, qu'il Teft de lespropoler. Il fufEt
de dire qu'elles oftent aux hommes tout moyen de fe faire
entendre, &c qu'elles font de tous les Pères ou des trompeurs
s'ils ont voulu par là exprimer l'opinion des Galviniftes, ou
des gens fans efprit s'ils ne fe font pas apperçûs combien ces
termes étoient capables de donner d'autres fencimens ^ & qu'-
elles luppofent de plus une intelligence miraculeufe dans les-
peuples pour entrer tout d'un coup dans lefens decesexpret
fîons fi obfcures.
Il eft donc prefque inutile de dire que cette bizare folution"
d'Aubertin ne fçauroit s'appliquer aux autres pafiages que nous
avons produits dumêmeS. Auguftiii,oùileftparle d'une man-
ducation de la chair de J. C. qui peut faire horreur aux fens &-■
qui fe termine à un objet prefent & adoré fur la terre.
Et nous montrerons de plus qu'Aubertin prouve fort mal, que
manger la chair de J. C. inSacramento ,ce ioic la manger feule-
aienc en figne avec exclufion de la vérité.
icB mangé carporeUement dans! Eticha.rîHie. 3^9
Ch. V.
C I N Q^U I E' M E PASSAGE.
du Livre I. de Ftccat. mer. ch. io.
Ecoutons ce que le Sciyieur dit non du Sacrement de Baptcfmc,
mais de celuy de ft Table fainte , dont il n'y a que les baptifcz^
qui ayent droit d' approcher. Si vom ne mangcx^ ma chaire ne heu-
'vez^mon fanz vous n'aurez^ foint la vie en voits. Que cherchons -
nou-s davantaq^e ? Et que peuvent répondre les Pclaq^iens â une au-
thorité fi préeife.^ a moins qu'ils ne veuillent oppofer une opiniâtreté
inflexible à la lumière de la vérité ? Se trouvera- t-il quelqu'un affczj.
hardy pour ofer dire que ce pajfage ne regarde point les enfans , ^
qu'il efi pojjible d'avoir la vie fans la participation de ce corps (^
de ce fang?
Il ne s'agit point dans ce païïàge d'une manducation par la'
foy, puifque les enfans en font incapables, mais d'une mandu-:
cation corporelle , comme les Miniftres le reconnoifTenc. Il
n'eftdonc plus queftion que de montrer que par le mot de chair
<ie J. C. S. Auguftin entend la véritable chair de J.C.Aubertiii
le nie, & il prétend que quoy que S. Auguftin entende ailleurs
par ces paroles le propre corps & le propre fang de J. C. il n'en-
tend néanmoins icy que le pain Si le vin comme figures de ce
corps 6c de ce fang.
Mais il n'y a qu'à déveloperun peu ce qu'enferme cette pré-
tention pour en faire voir la fauilèté.
Premièrement, on peut bien dire qu'un Auteur prend ura
paflage en divers fens lorfqu'il y a quelque marque de cette di-
verfitc: mais quand il fe fert des mêmes termes, & qu'il ne die
rien en un lieu qu'il ne dife dans l'autre, c'eft une bizarrerie
dëraifonnable de s'y figurer des fens difterens. Cependant il eft
vifible que S. Auguftin ne fe fert d'aucun terme dans ce paflàge
c^ ne fe trouve dans ceux mêmes où Aubertin ne dit point
que les mots de chair & de fang de J C. fignifîent autre chofe
-que la véritable chair & le véritable fang de I. C. Pourquoy
donc expliquer les uns de la véritable chair &: du véritable
fang,& les au très d'un pain ôc d'un vin figures de cette chair 5c
de ce fang?
On ne fçauroit fuppofer que S. Auguftin ait pris dans cts
paroles de J. C. Nifi manducaveritis carnem Etlii Elomints (^
bibcritis ejus fanguinem , les mots de chair ôc de fang pour du
CCc ij
39» Liv. VI. ^e h corps de jfefus-Qjrifi
pain & du vin qui fuflenc de fimples figures avec exclufion de la"
réalité de cette chair 6c de ce fang lans luy attribuer d'avoir
expliqué les paroles de I. C. de la manière la plus contraire au
bon fens qu'on fe puiife imaginer. Car cette application iuppofe
quel. C.en parlant aux Iuifs&; à Tes Difciples leur auroit vou-
lu defigner par les mots de fa chaire à^ fonfang de fimples fi--
gnes 2c des figures qu'il n'auroit en aucune forte marquez, 6c
que pour faire entendre qu'on ne pouvoit eflre fauve fans par-
ticiper au pain & au vin fignesdefon corps & de fon fang, il au-
roit été capable de dire qu'on ne fçauroit être fauve fans man-
ger fa chair 6c fon fang. Or, oh ne trouvera point que jamais
perfonne ait ufé d'un tel langage ^ &; la licence même des Mi-
niflres à prendre les chofcs pour àz^ fignes ^ ne s'eft pas encore
portée jufqu'à cet excès. Car ils ont bien foûtenu qu'on peut
appeller un figne connu &, defigné du nom de la chofe figni-
fiée ^ mais ils n'ont point encore prétendu qu'on puiflè appel-
ler des fignes inconnus , & dont il n'a jamais été parlé, du nom
même de la chofe fignifiée^ fans marquer en aucune forte que
c'eft du figne & non de la chofe même qu'on parle.
Cependant, c'eftJà le feiis auquel Aubertin prétend que S.
Auguftinjou plàtoft: tous lePeres ont entendu.Ies paroles del.C.
& cela fans autre fondement finon qu'il en a befoin. Ainfi il
faut qu'Aubertin ait tort, ou que tous les Pères n'ayent pas eu
le fens commun, & qu'aucun d'eux n'ait vixcequine coûte pre-
fentement rien aux moins éclairés des Calvinifles.
On répondra peut- eftre pour Aubertin, que cet argument?
prouve bien que les Pères n'auroient pas dû expliquer en ce
fens Tes paroles de I.C. mais qu'il ne s'enfuir pas qu'ils ne l'ayenc
point fait : que ce faitefb certain, c'eft à-dire qu'il eft conftanc
qii'ils ont entendu de l'Euchariftie ce paffage de S. Jean: Sivous
ne mangez^ja chair du Fils de l'hommerqu'û ne faut donc point pré-
tend ne le renverfer par des raifons qui prouvent leulement-
q.u'ils ne L'auroient pas dû faire.
Maiscen'eft: là qu'une pure illufion. Car il efl; bien certain
qpe les Pères ont entendu ces paroles de l'Euchariftie ,&: du Sa-
crement j,&: c'eft. le fait qui eft conftant. Mais il eft très, faux
qu'ils les ayent entendues de l'Euchariftie en la regardant coniv
me un figne exciufif du corps de J. C. S>C c'eft ce qu'on prétend
cftre contraire au fens commun. Expliquer ces paroles de J. C.
^ijî.mandufavmik çarnonifilii hominis , du Sacrement de l'Eu-
ej^ mdngé corporellement dans VÈuchtirijiic. 391
chariftie, en fuppofanc que l'on y mange véritablement cette Ch. V.
chair , c'eft une explication cres naturelle & tres-julle; & c'ell
ce que les Pères ont fait : Mais les expliquer du pain 6c du vin
comme fîmples fignes de la chair &: du fang de J. C. & vouloir
ainfique ces fignes fans avoir eftë marquez en aucune forre
ayentefté défignez par les mots de chair &de fang,c'efl; ce qui
choque le fens commun j 6c qu'Aubercin attribue néanmoins
aux Pères fans autre raifon , fînon qu'il neiçauroit ailier autre-
ment leurs palTages avec fa doc'^rine.
Ce que l'on doit donc conclure de ce que les Pères dxpliquënc
ces paroles, Nifi mandy.caverith carnem filii hoininis , de i'Eu-
chariftie, n'eft pas qu'ils ne l'expliquent que du figne de la
chair de J. C. mais qu'ils l'expliquent de cette chair contenue
ckns l'Euchariftie. C'eft pourquoy quand Aubertin entreorend
de prouver que les Pères ont expliqué ces paroles ou de la
chair de J. C- ou de l'Euchariftie, &que cefonrdeux explica-
tions différentes, il dilTimule ce qu'il feroit obligé de prouver
pour conclure quelque chofe. Car il eft bien vray que comme
la chair de J". C. fe peut regarder ou abfolument , ou dans l'Eu-
chariil:ie:r on peut aulTi expliquer ces paroles, de fa participa-
tion à la chair de J. C, en eHemême , ou de la participation à
cette même chair dans l'Euchariftie. Mais il eft faux qu'on le?
puifte expliquer de l'Euchariftie en fuppofanfqu'elic n'eft que la-
iiguredu corps dej. C. C'eft auOi ce que les Percs n'ont jamais
fait , &; ce qu'Aubertin ne pfouve point qu'ils ayent fait. Il fe
contente de dire en l'air qu'ils ont donné deux explications à
ces paroles; ce qui ne luy fert de rien. Mais il ne fait point voir
qu'en les entendant de l'Euchariftie ils ayent jamais marqué'
que la chair de J.C. n'y fuft pas réellement contenue. Et nous 2. perp. i ,
avons prouvé au contraire qu'ils enferment la prelence réelle c. 1. p^gf.
dans cette explication', comme il eft impofflbie auiTide ne l'y ^ 'î^'v^nte;,.
pasenfermer, à moipsque d'attribuer à)-. C. un dilcours ft dé'-
^aifonnabk , que les Miniftres n'ont point trouvé d'autre
moyen pour éviter cet inconvénient, que de démentir tous les'
Pères, en foùtenant contr'eux , qu'il ne s'agit point de l'Eucha-
riftie dans tout le fixiéme chapitre de S.Jean,
C C c iij
- 392- Lrv. VI. ^e le corps de ^e fus- Qhrifl
SIXIE'ME ET SEPTIE'ME PASSAGES,
du Serm. \ï. de Vcrbis Domini.
S. Anc;ufi:in expliquant cette parole de l'Evangile : «9»/' hUf.
'phcmavcnt in Spiritum -fancium non habet remUJtonem 7« ictcr-
nuni , & voulant montrer qu'on ne la devoit pas entendre de
toute farce de blafphcme contre le S. Efprit , il apporte divers^
exemples d'expreffionsde l'Ecriture qui paroilFent générales^ Se
qui ne fe doivent pas néanmoins prendre généralement, 6c il
en tire un de ce que dit I. C. de la manducation de ion corps
.dans le fixiérae chapitre de S. lean. (Comment, dit il, entendrons-
noti-s auljî ce que dit nojlre Seigneur : Celuy qui mayiqe ma chair (^
boit mon fang demeure en moy ^ moy en luy ? Pourrons- noiis au£i
étendre cela a. ceux dont l''Apofire dit qu'ils mangent (^ boivent leur
jagefnem quoy qu'ils mangent LA chaib. mE5me ET boivent
LE SANG MESME DE Jesus ChR-ist ? Birons-nous aulJï que Ju.
dos , cet impie qui a trahi (^ vendu fon Maifire , eft demeuré en
J. C. & f «^ 7- C". efi demeuré en luy^ parce qu'il a mangé avec les
autres difciples le premier Sacrement fait des propres mains de J. C.
coinme l' Ev ange li fie S. Luc le marque plus ouvertement que les
autres ? Dirons -nous que ceux qui mangent cette chair ^ boivent
ce fing avec un cœur hypocrite , ou qui après avoir mangé cette
£hair(^ beuce fang tombent dans l'apofiafie , demeurent en J. C. (^
que J. C. demeure en eux / Mais c'efi qu'il y a une certaine manière
de manquer cette chair (jr de boire ce fang^ dont il efi vray de dire^
que celuy qui la mange ^ qui le boit, demeure en J. C. ^ I. C. en
luy II n'efi donc pas vray que tous ceux qui mangent U chair de
J. C. (j;- boivent [on fdng, demeurent en luy e>- luy en eux de quelque
manière qu'ils le fafi^ent -^ ^ ceU n'efi vray qu'a l'égard de ceux qui
le font d'une certaine manière qu'il avait en vite.
Toutes les chicaneries par lefquelles Aubertin prétend ob-
scurcir la clarté de ce palfage font détruites par avance. On a
fait voir dans le fécond Tome de cet ouvrage que ces paroles:
a pfip,i. 4 Ipfam carnem manducant é" ipfum fanguinem bibunt , ne pou-
c.ii. p. 416. voient s'entendre que du corps même &; du fang même de I.C.
& non d'une figure de I. C Et par confequent ce corps même
eftant reçu par ceux mêmes qui n'ont pas la foy , félon S. Au-
guftin , il ne peut l'eftre que corporellement.
Les Miniftres pretendrout-ils que quand S. Auguftin dit , que
eji mdngé corporellemem dans\r Eucharijîie. 39^
- j' C. demeuredans ceux qui rec^oivent fa chair d'une certoine Cii. V.
manière , il n'entend pas la chair véritable I. C ? Si cela eft, il
faut donc qu'ils luy attribuent d'avoir crà qu'il n'y avoit dan -^ ce
chapitre de S. lean aucun commandement de manc^er la
chair même de I. C. Car s'il ne le reconnoKl: pas même à
l'égard des bons, Une le reconnoift à l'égard de perfonne. Mais
quelle apparence d'attribuer à ce Père une penfce Ç\ extrava-
^"mte; quelle apparence, dis-je, qu'il ait cru que J. C. recom.
mandant dans tout ce chapitre en tant de manières différentes-
démanger la chair & de boire fon fang, &; ne parlant en au-
cune forte de mansier les fisines de fa chair & de fon fansr , ne
nous ait voulu néanmoins obliger que de manger ces fignes donc
il ne parle points & ne nous ait rien commandé à l'égard de fa
chair même dont il parle inceffimment. Eft ce là expliquer les
Peres, que leur imputer des penfées fi peu raif^nnables pour
les accommoder à nos fentimens ?
Que fi l'on avoue que c'ell lavraye chair de î. C. quiefl re-
çue parles bons ou fpintuellemenf ou corporellemenr ; (car
ce n'eft pas furquoy j'infifte prefentement^ ) peut on nier que ce
nefoit cette mêm.e chair qui ell: reçue par les méchansv,puirque
S. Auguftin ne les diftingue pas des bons, en ce que les bons
mangent la chair de I. C & que les méchans ne la mangent pas,
mais en ce que les bons la mangent d'une certaine manière qui
.n'eft pas commune aux méchans ! La différence n'cft pas dans
làchofe même.felon S, Auguftin,elle n'eft que dans lamaniere.-
Et p>ar confequent il y a une manière de manger la chair mime
deJ.C. qui efî: commune aux bons &: aux méchans.
Aubertin oppoie à cela, que S. Auguftin fait afîèz voir ce
qu'il entend par cette chair mè.-ne que les méchans reçoivenr,
puifque dans ce mêmepaftàgeil exprime la même choie en ces
termes, que Judas récrit le -premier Sacrement que J. C- fit de fes
propres mains ^ qu'ainii cettQ chair dont parle S. Auguftifl n'eft
autre chofe que le Sacrement de la chair. Et il croit cette ré-
ponfe fi ju(l:e & fi folide qu'il l'applique encore à un pafîage du
premier livre contre Crefconius , oii S. Auguftin parle ainfi;
Que dirons noris du cvrps mtsWE ô" du' fani^u. E s m E de noftre
Seigneur J. C. l'unique fucrifice pournofire faht! Car encore que le
Seigneur affurc que celuy qui ne mangera point fa chair, t>^ ne boira
po:nt fon fmg , n'aura pas la vie • l'Apoftre ne noîis affurc- 1. il pas
qu'il eft pernicieux à ceux qui en ufentmall Tuutcela ne veut rien
394 L^v. VI. ^e le corps de Jepds-Qjrifi
dire , félon Aubertin , iinon que les mcchans reçoivent 5e Sa-
icrcmcnt de la chair de J. C. parce qu'il le trouve un endroit
où S. Augiiftin explique les mots de chair même ^ par ceux de
Sacranent de la chair.
Mais qui ne voit que-ce Miniftre raifonne abfolument contre
Je bon iens, &qu'au lieu de conclure de ce que S. Auguftin ap-
pelle en un endroit S.urcment de la chair , ce qu'il appelle ea
d'autres la chair mcme, que cette chair même n'eft donc qu 15^
pur Sacrements il faut conclure au contraire que par ctS.tcre-
7nent de la chair .,x\ entend la chair même. Car les mots de chair
même , d'unique facrifice de noftre falut. , ne peuvent jamais fi-
gnifîer un pur figne. Mais les mats de Sacrement -de la chair de
I.C. peuvent fort naturellement fignifier la chair même de
L C. ou un Sacrement qui la contient , puifque le vc^otAeSacre^
ment eftun de ces termes généraux & de cesidëes confufes auf.
quelles l'on (upplée d'ordinaire (elon les fujets auxquels on le^
applique, comme nous voyons que tous les Catholiquesie font
à l'égard de ce mot même. Et par confequentce terme eftant
très-capable d'un fensplus étendu que celuy qu'il a naturelle-
nientJ & S. Auguftin marquant dans ce paflage même de quelle
manière il y fuppléoit , la raifon oblige d'entendre & dans ce
lieu & dans tous les autres par le mot de Sacre?nent du corps de
I. C. ce que tous les Catholiques entendent par ceux de Sacre-
ment de l'Autel ou de S. Sacrement, c'eft-à dire un Sacrement,
qui contient le corps même de I.C.
j'ayjquslque honte de m'arrefler icyàun fophifme dont Auber-
tin (e lert fur le fujet de ce même palfage ^ mais il le répète G.
fouvent qu'on eft obligé, malgré qu'on ert ait, d'y faire quelque
Scrm. rr. de reflexiou; il cfl fondé fur ce que S. Auguftin die que ludas reçut
vcrb.Domiii. /^ premier Sacrement du corps ^du fanz^ de I. Cquc I. C- avait fait
de fes propres mains : d'où Aubertin conclut que ce ne pouvoit
eftre le corps même de I. C.&; que le Sacrement eft là diftingué
de I. C. en ce qu'il eft ditqueL C. Ta fait: Abfurdi,fjimum autem
ejjet dicere Dominum proprium corpiis fiium , manibus fuis confc-
cilfe. Sacramentmn ergo corporif ^ ^anquinis cjus, corjytis tpjîus (j/*
fan'itiis non eft.
Mais cette conclufion eft vaine &fophiftique, comme nous
î. pcrp.p.jiiy. l'avons montré ailleurs fur un pareil argument. Car qui nefçaic
qu'une même chofe félon differens eftats&felon les différentes
iv inieresdont onla regaxde,peut eftre conçue -par différentes
idées
'efi mimgé corporellement dans rEucharifiie. 5 9/
•idées qui font qu'on la diftingue en quelque force d'elle- Ch. Yi
imême.
Qui ne fçaic encore que quoy qu'une chofe ne puifle eftre
caufe de foy même ahfolumenr, elle le peut néanmoins eftre
■à l'égard d'un certain eftar, c'eft à dire qu'elle peut eftre caufe
de ce qu'elle efl en cet eftat. Car c'eft ainfi que S. Paul dit que
y. C. a apparu par [on hofiie ^ & qu'il a offert une feule hoftie,
quoyque cette hoftie ne fût autre chofé que luy-mêrae offert en
iacrifîce à fon Père.
C'efl encore ainfî que S. Cyrille d'Alexandrie parlant de
l'Euchariftie l'appelle un pain qui cfl donné par J. C. quoyqu'il
entende que c'efl: fon véritable corps, llparoifi, dit il, par une ia.Ua.al. 4
preuve indubitable que le pain qui nous efi donné par J. C. c'ejl â
dire fon corps , eft un pain du ciel , puis qu'il fait vivre éternelle-
ment ceux qui le mangent.
C'eft donc auiE de cette forte que S. Auguftin dit que J. C.
fît le Sacrement de fon corps, c'efi à dire qu'il mit fon corps
fous le voile du Sacrement.Ce Sacrement eft le même en effet
que le corps de I. C. ou plûcoft il le renferme, mais l'idée en
efl différente: Elle efl plus confufe, 8c comprend même quel-
que chofe de plus que I. C. .Etainfil'efprit ne fçauroit s'empê-
cher de la diftinguerde I.C. conçu d'une autre manière. &il fè
porte naturellement à dire que I, C. eft^aufe de TEuchariffie &:
fait l'Euchariftie, parce que c'efl luy.même qui fe met en l'cflac
où nous le concevons par ces idées confufes de Sacrement du
•corps de I. C. & d'Euchariflie.
-On pourroit rapporter quantité d'autres patTàgcs où ce Pè-
re enfeigne que les bons & les méchans reçoivent le corps Scie
fang de I. C. Aubertin reconnoifl: luy- même qu'ils font en très- Aub. p. j^»
grand nombre à l'égard des méchans. Mais pour ne groflir pas
inutilement ce livre, je remarqueray feulement icy que tous
ces pafîages. font decififs en y joignant quatre remarques déjà
prouvées.
I. Que ces termes font déterminez à figniflerlevray corps&:
le vray fang de L C. par l'ufage confiant de toute l'Eglife du
temps de S. Auguflin que nous avons prouvé dans le fécond
Tome de cet ouvrage.
2. Qu'ils y font déterminez parle confentement de tous les
Chrefliens qui ont vécu après S. Auguflinj comme nous l'avons
DDd
^^^
396 Liv. Vl. ^e fe corps de hJiis-Qrrill
encore prouvé dans le premier volume de cet ouvrage, &parla
réponfe générale.
3. Qii'ils y font déterminez , parce que les fens de figure &c
de vertu font des chimères abfoinment inconnues aux Pères:
ce qui eft encore prouvé par tout le fécond Tome.
4 Qi-i'ils y font déterminez enfin par ces lieux de S. Augd-
flin & des autres Pères que nous avons rapportez dans ce vo^
lumeicy. De forte que les Minières nefçauroientnous ofterle
droit de les prendre en ce fens, qu'en répondant foiidemenc à
toutes ces preuves : ce qu'ils ne feront alTurément jamais.
CHAPITRE VI.
Que les Pères en fuivant la doFlrine de la frefcnce réelle ont dû
dire que l'on mange ^ que l'on ne mange pas J. C.
ON a veu jufques icy que la dodrine de la prefence réel-
le a porté les Pères à toutes les expreffions propres à
faire entendre que nous recevons réellement le corps & le fang
de I. C. par la bouche du corps. Mais ceferoit mal connoiftre
l'efprit des hommes, ou juger mal de celuy des Pères , que de
prétendre qu'on n'en deuft trouver que de cette forte dans
leurs écrits. S'il eft vrayen un fens que nous mangeons ce di-
vin corps, parce qu'il entre réellement dans les noftres , il eft
vray en un autre fens que nous ne le mangeons pasj &; même cela
eft vray dans le fens le plus ordinaire du mot de manger, qui
mettant devant les yeux de l'efprit toutes les adions qui s'exer-
cent fur les alimens, ne peut convenir à la manière dont nous re-
cevons le corps de I. C.
Car encore qu'il femble que quelques Grecs ayent crâ qu'on
le divifoit aduellement , ce n'ell pas néanmoins la dotflrine des
autres Pères, & leur fentiment au contraire eft qu'il demeure
tout entier, quelque divifion qui arrive aux fymboles.
Il n'eft pas vray non plus que l'on goufte proprement le corps
<le I. C. il n'eft pas vray que l'on le digère. Et comme divifer
l'aliment, le goufter, le digérer, eft ordinairement ce qu'on ap-
pelle manger, il eft certain que l'on ne mange pas le corps de
J. C. en ce fens- là.
Les Pères ontefté d'autant plus obligez d'exprimer cette ve-
efî mangé corporeUentent dans ÎEuchariflïe. 597
rite & d'éloigner par là ces idées balfes &; groflleres del'e/pnc Ch. VI
des Chreftiens , que c'eft ce qui fcandalifliles Carphanaïtes ^
quelques-uns des diiciples des J. C. &; qui leur fie dire du dif-
cours que J. C. leur avoitfait pour les exhorter à manger fa
chair & à boire fon Tang, que ces paroles eftoient dures -^durus
efi hic fcrmo.
Les î?eres nous déclarent en plufîeurs endroits,, que c'eftoit-
là la caufe de leur fcandale.
Les Juifs ^ dit S. Cyrille de Jerufalem ^n'entendant pas fe. Caccch. 4
l'on le [prit ce que J.C. leur avait dit démanger ff chaire de loi. ^'^^"
re fon /^^wg, en furent fcandahfez^^ Ô' f retirèrent en arrière , far-
ce qu'ils crurent que J. C. les voulait porter à manger de la chair
humaine y voix!(^o>Tti oTt 'tC^qS a aftioÇayicLv atÎTV^ 'TtpoTfî'KircLi. Ain-
fi ce Père condamne comme une penfée ludaïque ce qu'il
appelle Sarcophagie, c'eft à dire proprement la manière de man-
ger la chair humaine que concevoient les Carphanaïtes. j^ ,
Quelques-uns des Difciples du Seigneur jdit S. Cyrille d'Ale- p. 3-4.
xandrie , furent fcandalifez^ de ce qu'ili luy avaient ouy dire , que Jt
en ne mangeait fa chair Q- qu'on ne bcufl fon fi'ng^ on n'aurait
point la vie. Ils crurent par là. que J. C. les invitait â une cruauté
de befte s féroces .^ ^ qu'il leur commandait de manger inhumaine-
ment de la chair Qt' de boire du fang , ^ de faire d'autres actions
dont on ne f<^auroit parler fans horreur.
C'eftoient-là, félon ce Saine, les imaginations de ces luifs,
j6c en les leur attribuant il les condamne, &: les rejette.
S. Auguftin explique delà même forte l'idée qui fit fcûlc- îuPfai. ;>».
ver les luifs contre ce que I. C. leur enfeignoit: ils conçurent.^
àit-i\, ce que J.C. leur difoit d'une manière infcnfie-^ ils s'en for-
mèrent une idée toute charnelle , ^ ils crurent que noftrc Seigneur
devait couper des petites parties de fon corps .^ C les leur donnera
manger. C'ejl ce qui leur fit dire : Ce difcours cft dur.
Ils ne conscvoient pas , dit-il en un autre lieu, quily eiit rien Twâ:. %^ 'm,
de grand dans ce que 7. C. leur difoit .^ny que ces paroles couvriffeut î''*"-
quelque grâce qu'il leur voulait faire. Ils les entendirent Comme
ils voulurent Q^ k la faisan des hofnmes : ils crurent que J. C. pou-
vait , ^ avait dcffein de difinbuer fa chair coupée par morceaux â
ceux qui croyaient en luy.
Ils conçurent, dit il encore au même lieu, qu'il devait couper fa
chair par morceaux comme on coupe celle des corpsmorts, ^ comme j^y^
an expofe la viande dans le marché .^^'^ non pas qu'il la leur deufi
DDdij
398 Liv. VI. ^e le corps de jfeJus-Qjrifl^
donner vivante ^ animée far fou e [prit. Sic mtcUcxcnmt quomo-
do in cadavere dilaniatur aat in Macello vinditur , non quomodo.-
fpiriiîi vegetatur.
■. , Vous cioycz^^ dit- i 1 encore ailleurs , que je vais cotipermon corps.
veib.' Apft. i^n morceaux four vous le donner.
Ainfi l'Auteur du livre A^Cœna Domini ,n'a faic que fuivre-
le fensdes Per^s, Ibrfqu'il exprime en ces termes l'idée que s'ë-
toient formée les Capharnaïces. //j crurent., dkiï , que cejhif.
une chofe horrible & deteftahle de 7nangcr de la chair humaine., s'i-
maginant que J . C. entendait quils la dévoient manger rojlie ou\
bouillie ^ coupée far morceaux.
Les Pères eftoient donc oblieez de bannirces idées charnelles..
Et comme elles s'expriment naturellement par \çs\not^deman-.
fer delà chair & de boire dufang, ces mots pris en ce fens qui eft
ie plus ordinaire, ont dû eftre rejettez par les mêmes Pères. Aufli
. avons-nous veu que S. Cyril le de lerufalem con damne A^/2?rf<7-
fhagie ., c'cft: à dire, motà raor, la manducation de lacbair, &
que Si Cyrille d'Alexandrie rejette ce qu'il appelle aa.a%t<pyut.
manger de la chair, & ct/.u* pojh. c'eftà dire boire du iang.
Cependant il n'y a point de Pères qui ayent établi plus forte-
ment que ces deux, la manducation corporelle en un autre fensi
Cateclî, 4. Car S. Cyrille de lerufalem qui rejette la prr(7//'^/g;> ou man^
M}ft. ducation de la chair, comme une imagination judaïque, eft ce-
luy même qui enfeigne, que le corps 6cle fangdel. C font di-
Jlribuez^dans nos ryitmhres. C'eft luy qui nous exhorte k frendrs
avec une entière certitude le corf>s (^ le fang de J. C farce que fous
le type du fain le corps nous eft dènné , & le fang fous le tyfe du vini
afin qu'ayant receu le corps ^ le- fing dej. C. nous n'ayons qu'un
mhne corps (^ un 7ncme fang avMC luy^ ^ que nous devenions ainfi
F orte Chrtfts.
C'eft luy qui nous défend de juger far le goufl., & qui marque
par là que l'idée que l'on feformeroit en fuivant le gouft n'eft
pas conforme à celle que la foy veut que nous ayons. C'eft luy
Catech. r- ^"^ nous ordonne défaire un trofne denoftre maindroite fourrcce-
voir le Roy., (jr -de fanclificr nos yeux far l'attouchement de ce faint
corps. C'eft luy qui marque que le fing de J. C. laiffeune humidi-
té fur nos lèvres , & qui par tout cela fait voir & que ce que nous
recevons eft le corps de I. C. & que nous le recevons d'une ma-
nière corporelle & par la bouche du corps.
Nûus avons veu.de mêmeque S, Cyrille d'AiexâpdfieFCJet5e
efi mxngé corporellement dans l'EuchariJUe. 399
ce qu'il appel acLf^o^a.yi7v >^ aTfia. po:pt7f , c'eft à dire littérale- Ch. V.
ment , manger de la chair & boire du fang. Et cependant en
combien de manières enfeiMet-il la manducation corporelle
dans ce même ouvrage & dans le même chapitre, où il rejette
la Sarcophagie ? Ne dit-il pas fur ce même chapitre de S. Jean p.354
^ue le corps de J.C. vivifie ceux quiy participent ^ &quilen bannit
lu mort reçu dans des corps fujets à la mort ?
N'enieigne-t il pas C[\xq parce que la chair du Sauveur a eficren-
due vivifiante par j^on union au J^crhe qui efi la vie par cljence ,
nour aurons la vie ennous ^lorfque nous la manderons 'i tàh olôtUs
Ne déclare t il pas en comparant l'union intime que nous- inToann.i-*^
avons avec la chair de J. C. par la manducation avec le ilmple-
attouchement de cette même chair, ^«^ fi des corps morts font
vivifiez^ par le fcul attoucbeynent de fia fainte chair^ nous devons •
efiperer de plus y and s avantages de l'eulogie vivifiante en la qoù^
tant elle-même , (^ quelle c onmiuniqitera Jon propre bien^ ccfi à dire-
J^ immortalité a ceux qui y participeront ?
Ne li'^ons-nous pas o^t comme l'eau que l'on- approche du, feu
perd prefque fia propre nature ^ pajfe en la ver tu du feu qui efi le in J»a«iî. ^
plus fiort -^ de même quoyque nous fioyons corruptibles par la nature '*^"
de nofire corps , nous ne laififerons pas par le mélange de là chair
de y. G. d'efire dèpoiiillez^ de nofire- infirmité (^ revefius de fies
promefi^és ,cefi à dire de la vie -^ parce qu'il efi oit necefi aire oue
non fieulementl'ame fiiifi renouvellée aune nouvelle vie parle S. Efi^
prit j mais auljîque ce corps grejjîcr ^ terrefire fiufi fianciifié ^ ré-
tabli dans l'incorruptibiliîèp^vr la participation d'une chofie terrefire.
^ conforme à fa-nature ?
N'alFure t il pas encore au même lieu, que Jefus-Chrifi
eftant enncus comme. vie par fia fiaintc chair, renvcrfie l'empire du
crael tyran 1
N'y voit-on ^^^s ,C[ViQquoy que la tnort qui par la prévarication
du premier homme s' efit emparée du genre humain ^ nous pouffe fins -^^^ ^^j ^,-
xelàche vers une corruption inévitable , néanmoins puifique J. C. p. 563.
efi en nous par fu propre chair j il e(l. indubitable que nou^s reffufci.
terons , parce qu'il n'efi pas croyable, ou philofi qu'il efi impofiible
que la vie ne vivifiic pas ceux en qui elle efi. ?
Ne dit- il pas que comme on met une étincelle de feu dans un ibiJcm.
monceau de paille ^ pour la conferver^ de même nofire Seigneur J. C,
cacJu la vie en nous par fia chair ^ ^ il y fait entrer comme ms
D D d lii .
400' /Li-^.Vl. ^e lecorpsâê Jefm-Qoriji
Jcmence' d'immortalité , qui dejirutt toute', noji e corruption t
wijoann.3^4- Ne dit-il pas pour expliquer de quelle manière s'accoinplic
cette parole, ce lu y qui man<Te'ma chaire boitmonfan<^d,cnu;ii.
re en moy ^ moy en luy : que comme joignant »u morceau
'de cire h un antre ^ on peut dire que l'un eft dam l'autre', a.inS
celuy qui reçoit lor chair du Sauveur (j?- qui boit fon précieux fan<i^
eft un avec luy , parce qu'il eft mêlé ^ confondu avec luy par
cette participation ?
â«d. p.5^;. Ne dit il pas enfin que Chrifi eftant en nous appaife la ïoy
de nos mem'arcs , excite la pieté vers Dieu , mortifie les pa.IJions'i
11 efl: donc certain qu'il n'y a point de contradidion à dire
d'une part que l'on mange, que l'on reçoit la chair de I. C. 6c
que l'on hoit Ton fang , que (o\\ corps entre dans noftre bou-
che & dans nos entrailles ;& à nier de l'autre que l'on mange
la chair de i. C. &: que l'on boive Ton Tang, Ces expreffions
.qui paroiiîent contraires ne le font point en effet, parce qu'el-
les ont des fens differens." Les premières marquent la firaple
réception réelle du corps & du fang de I. C. dans noflre bou-
che & dans noflre corps, & ainfi elles font employées par
tous les Pères quand ils n'ont eu que ce fens en veue. Les fé-
condes excluant du corps 6c du fang de J. C. ce que l'on appel-
le proprement i^ozVt? ôcw-z^gfr, c'efl à dire ces adions anima-
les qu'on exerce furies alimens, en lesdivifant,en \t^ goû-
tant , en les digérant. Et c'étoit-là le fens auquel les Caphar-
naïces les entendoient. Ainfi les Pères ont deu tantoft fe fer-
vir de ces termes , & tantoft les rejetter, félon qu'ils ont eftç
frappez'de l'utie'ou de l'autre de ces idées.
C'eft ainfi que TertuUien déclare en un endroit de fon li-
vre de la, Refurreftion, que la chair fe nourrit du corps ^ du
©e -efur a - '''''''2 '^^ ^- ^- '^/^''^ f ^^ lame s'engraiffe de Dieu: Caro corporel
Mif. c. s. fan'îiiine Chrifti vefcitur ^ ut anima de Deo fapnetur-^ &L C[nQ
dans le mêmeîWrè en parlant des Capharnaïtes , & prenant
'• le mot de inanger feloh l'idée qu'ils en avoient , il dit, ^»'//;
c, 57, s' v.ia2 inoient que 7. C leur donncroit vcritahlcment fa chair a,
jiuni'ier. JSTam quia durum ^ intolerabilem exiftimaverunt fer-
fhonerh ù'jus -,' qu if vcrè carnem fuam illis edendam determinaffet,
Aubercin conclut de-là que'J. C. félon TertuUien , ne devait
Aub. p. 358- donc pas d-niner véritablement fi chair a manquer. Et il a raifon
de le conclure; mais il a tort de croire que cette propofition
' fôîc""co.ni:radicloire dans le fens , avec celle cv:/. C. nom domiff
efi nmngé corparellement dans rEucharifiie. 401
verit^iblemcnt Ja chair k yyiatiqer. Elles font tontes deux verita- Ch. VI-
bics ôc toutes deux authorifees par les Pcres.Tertullien avance
Ja première, comme nous venons de voir, quoy qu'il ne laifîe
pas de dire avec tous les Pères, qite la chair fe nourrjt du corps
de 1. C. Ft il auroit dit de même fans d'fficultë qu'elle le mange
véritablement , & que I. C. nous donne véritablement /on
corps à manger. Car Gelafe Cyfique n'en fait point de faire dire
au Concile deNicée, que nous recevons vcritahlement le précieux
corps é^ le précieux fang de L C. ro ao'ra ca/j.a. yjji BUfAx
etxrijas A c/xC a vovrti. Et faint Auguftin qui parle en un endroit,
que nous verrons tout àl'heure , de la même manière que Ter-
tullien, n'en fait pas non plus dédire, que I. C. nous a donné
véritablement ion corps à manger: Vere qui nobis dedtt man,
dacare corpus fuum.
L'illufîond'Aubertin confifte donc en ce qu'il ne veut pas
camprendre qu'on peut dire lans contradiction, &: que I. C.ne
nous donne pas fon corps à manger, c'eft à dire qu'il ne nous
le donne pas à brifer, à couper, àgoufter, à di gérer comme les
Capharnaïtes fe l'imaginoient, &; qu'il nous donne verit^ble-
ftient fon corps à manger, parce que nousle recevons réelle-
ment dans nos corps.
Mais, dit Aubertin, diroit on qu'un liomme qui mangeroit
de la chair qui auroit la forme de poilTonne mange pas delà
chair ? Ne dit-on pas que l'on mange des pilules, que des bro-
chets mangent d'autres brochets, quoy qu'ils les avalent tous
entiers i Pourquoy donc ces Pères diroient-ils que l'on ne
mange point la chair de I. C. s'il eftoit vray qu'elle entrafl
réellement dans nos corps ?
Aubertin eft tout plein de ces comparaifons baïïès. Mais il eiî
étrange que s'y eftant fi fouvent appliqué il n'en ait jamais re-
connu le défaut. Car il efi: bien vray que l'on peut dire qu'un
brochet mange un autre brochet , & qu'on ne fçauroit dire qu'il
ne le mange pas. Et larai(on en eft qu'il le touche, qu'il le
goufte, qu'il le digère. Mais quand une chofe n'agit point du
tout furies fens,& que de toutes les actions en quoy confifte
le manger, il ne s'y rencontre que celle d'entrer par l'organe
Je l'aliment & de defcendre dans l'eftomach ; Il eft bien plus
ordinaire de dire qu'on ne la mange pas, que de dire qu'on la
mange.
Horail.
CVK,
DeEccle. f.
Tlieol.comr,
Marcel. An-
cyi, l.s. c, li,
401 Liv. VI. ^c h corps de lefus.QhriJi
Ainfi, comme nous avons déjà remarqué , pcrfonne ne dit
qu'on mange de l'air.
On ne dit, pas n'en déplaife à Aubercin, qu'on mange des
pilules. Les Miniftres eux - mêmes ne difenc point qu'ils
mangent le S. F fprit quoyqu'il foir prefent dans les alimens qu'ils
prennent. Les Théologiens nient que l'on mange l'ame de
J. C. quoyqu'ils croyent qu'on la reçoit avec Ion corps. Les
Philofophes de l'échoie ne difent pas qu'on mange les former ^i
fubftantielles, quoy qu'ils fe les figurent comme deseftres ma-
tériels, qui font joints à tous les corps, 6i par confequentaux
alimens. Defortequ'en s'atiachantàla fignification littérale du
mot de mander, il efl: plus difficile en quelque forte d'expliquer
les paflTages où les Pères nous difent que l'on mange le corps de
J. C. que ceux oii ils nous difent qu'on ne les mange pas j par-
ce qu'en effet on n'exerce fur le corps de J. C. prefque aucu-
ne des actions qui font comprifes dans l'idée que nous avons
de ce mot.
Qi.n s'étonnera donc après cela qu'Origene nous difg
par rapport à ce fens des Capharnaïtes qu'il y a dans ces paro-
les, Si vous ne mangei^la chair .du FJls de rMomnie ^ ne heu.
vez^fon fang^une lettre qui\tuë ! car pourquoy ne le diroit-il
pas, puifquele fens des Capharnaïtes efb un fens littéral à&s
mots de manger &c de hire , & que ce fèns çll véritablement
une lettre qui tuë?
Qtii s'étonnera qu'Eufebe de Cefarée faile dire à J. C. JV>
penfe::^pds que -je pétrie de la chair que je porte, comme s'il la fal-
lait manger^ & ne vous imaglnez^pas q ne je vous ordonne de boi-
re un fang corporel (^ vifible Qiie -conclut tout cela finon que
l'on ne mange pas la chair de J. C. 6c que l'on ne boit pas foa
fang de la manière &: félon le ieus le plus.commun de ces ter-
mes ?
Il faut feulement remarquer qu'Eufebe tf explique en ce lieu
•le fixiéme chapitre de S. Jean ny de la manducation Sacramen-
tale, ny de la manducation fpirituellede la chair de L G mais
delà parole de Dieu ; ce qui eftun fens très, rare dans les Peresi
& qu'aifienfuppofant que cette chair dont parloitJ.C. eftoit
fa parole & non fon corps, il avoit encore plus d'occafion de
-faire dire à J. C. qu'il ne falloit pas manger fa chair. Mais cela
ne conclut nullement que le mêmeEufebe n'aitcruque ^onre-
f e,vo;c réellement la cliair de J.C. en recevant l'Euchariftie,
.quoyque
eji mange corporellement dans l'Eucharifiie. 4*3
quoique d'une manière qui n'eft pas fenfible , puifqu'il crovoit
que les fynnboles Euchariftiques n'efloienc point des figures
vuides,comme ceux de l'ancienne Loy,mais qu'ils contenoient
la vérité même , aur V à.KYi')inv itéOÎxj'^rA.
C H APITRE VII.
Éclaircijfement du faffwie de faint Auyiftin tiré du
58. Pfeautne.
ON pourroit fans autre façonajoûteraux pafTages que nous
venons de rapporter celuyde faint Auguftin, dans Ton
Commentaire fur le Pfeaume 98. où pour montrer que ce fut
à tort que quelques-uns des Difciples fe fcandaliferent de ce
que J. C. leur avoit ordonné de manger fa chair ^ parce qu'ils
durent qu'il la devo!t couper par morceaKX, il fait dire à J. C. En-
tendeT^irituellement ce que je vttis ay dit. Ce ne fera pat a corp
que vous voyez^ que vous mangerez^^ ni le ptng qui fera verfc par
ceux qui me crucifieront que vous boirex^ J'ay voulu par la. vous
marquer un Sacrement. Ce Sacrement vous vivifiera^ ponrvà que
vous l' entendiez fpiri tue Uement. Car quoiqu'il fe doive célébrer k
la vite des hommes , il' faut pourtant concevoir qu'il s'y paffe qucL
que chofe d'invifïble. Car en effet ce paiîàge ne concienr aucune
difficulté particulière i & il efl vifibleque faint Auguftin pre-
nant le terme de mangerdans le fèns ordinaire ,& félon l'idée
que les Difciples en avoient, a dû faire nier à J. C. que (on
corps dût eftre mangé.
Mais parce que ce lieu de S. Auguflin efl un des principaux
appuis desMiniftres, fc qu'on ne voit autre choie dans leuis
écrits, il ne fera pas inutile de remarquer qu'il y a dans ce Ser-
mon fur ce Pfeaume 98. une contradiction apparente félon les
termes , qu'il faut que les Miniftres accordent par lefensaufù-
bien que nous.
Car faint Auguftin y dit d'une part que J. C. nous a donné
à manger la chair qu'il a apportée dans ce monde. Et quia in e<i
ipfa carne hic ambuluvit , O" ipfint carnemnobis rrutndncandam ad
falutem dédit , nemo autem illamcamem manducat , nifî prius ado-
raverit.
Etil fait dire de l'autre à J. C. que IVn ne mangeroit pas la
EEe
404 L I V. V I. j^<? le corps de Je/tts-Chrifl
chair que l'on voyoic en luy i non hoc corpm quodvtdetis manâtt.
caturi ejiis.
On demeure d'accord de parc & d'autre que c'eft de la vraye
chair de J. C. donc S. Auguftin dit en un endroic quil nous l'a
donnée a man'zer , & dans un autre , que nous ne !amangerons pat i
Ôc chacun Uiv fait cette juftice de croire que la contrariété qui
paroill dans ces palFages n'eft que dans les ternies , 6c nulle-
ment dans le fens,
C'eft donc un devoir commun aux Catholiques^ auxCaU
viniftes d'allier cesexpreflionsqui feniblentcontraires. Et com-
me ils entendent dans le même fensles mots àz chair dej. C.
Se de corps de J. C. il faut necellairement que les uns & les au-
tres ayenc recours à la diftincftion è^s divers fens du mot de
manger.
AufTi eft- ce ce que font les Calviniftes. Car en donnant deux
fens au mot de manger., un métaphorique & l'autre propre , ils
fuppofent que quand S. Auguftin dit qtiej. C. nous a donné fa.
chair à manger., il parle d'une manducation métaphorique , &
que quand il fait dire à J. C. vous ne mangerezpoint la chair^e"
vous voye'z^., il parle de la manducation propre & corporelle.
Les Catholiques n'employent que le même moyen pour ac-
corder ces exprelTions. Car ils diftinguentde même deux fens *•
du mot de manger ; l'un commun 5c ordinaire qui enferme de
brifer l'aliment avec les dents en diverfes parties j de le goû-
ter ^ de le digérer J l'autre plus extraordinaire qui n'enferme
que le feul paflage d'un corps par la bouche dans l'eftomach.
Ils difent que félon le premier fens faint Auguftin a eu raifon de
faire dire à J. C. pour faire lever le fcandale de fes Difciples :
Vous ne mangerei^paf la chair que vous voyez^.^ c'eft- à- dire vous
ne la briferer point , vous ne la goufterez point , vous ne la di^
gérerez point ^ &: que dans le fécond fens qui eft extraordinai-
re de foy, mais ordinaire dans l'application de ce terme à
l'Euchariftie , il a pii dire que J, C. nous a donné à manger la,
chair même qu'il a eue dans le monde ; ipfam carnemmanducan.
dwn ad falutem dédit.
Les Calviniftes n'ont donc rienà dire contre ctitç. voye d'ac-
corder la contrariété de ce.'i pairages,pui(que c'eft la même que j
celle qu'ils fuivent. Il s'agit feulement de comparer ces deux
manières; & dans cette comparaifon on trouvera que l'explica- •
Uon que les Calviniftes donnent au terme de manger dans ces
efi ma,ngi corporellement dans lEuchartfiie . 405
deux différentes expreluons de S. Auguftin ne ibauroit (iibli- Ch. VII.
fter, &; qu'il n'y a rien au contraire de plus naturel que celle des
Catholiques.
On a déjà fait voir qu'ils s'abufent vifiblement en expliquant
ces paroles j Etquia m ipfa carne hic ambulavit ^ ^tpjam carncm
manducandam ad falutem (^f<!^/>, d'une manducation métaphori-
que ôi fpirituelle. Car cette manducation dont S Auguftin par-
le doit eftre neceflliirement précédée de l'adoration , nemo an.
tem illam camem manducat , nijî prius adoravertt. Or il eft ridi-
cule de mettre un ordre fixe & réglé entre la manducation
fpirituelle de la chair de J. C. ôc l'adoration de cette même
chair , comme nous l'avons fait voir.
Mais il n'en eft pas de môme de l'explication des Catîvoii*
ques. Elle n'a rien que de conforme au bon fens &: aux paroles
de S. Auguftin.
Car premièrement on ne fçauroit prendre que pour une
manducation réelle & corporellecelledontfaint Auguftin dir
quelle efi toujours précédée d'une adoration, & d'une adoration
renducàun objet prefent devant lequel on fe profterne :/i?'V^.;7c/
terrain quanilibet cum te inclinas atque projhmis. Et c'eft de cetE€
Bianiere que les Miniftres mêmes entendent ces paroles.
En fécond lieu , il eft très-naturel en faifant parler J C à des
Difciple qui viennent d'eftre reprefentez comme concevant
une manducation groffiere & ordinaire d'une chair coupée par
morceaux , carnahter intelligentes ^ putantes quod DornivM
pr^tcifurus effet parti culas quafdam decorporefao, ^ daturtisiOis :
il eft tout natureljdis-je, de (uppofer que faine Auguftin a pris
le mot de manger dans le même fens auquel ils le prenoient >
&(^ue ce qu'il a voulu nier , c'eft cette idée faufle quieftoltlc
fujetde leurfcairdale.
La fuite même favorifé manireftenrentce fens^ pourvu qu'on
Fentende félon la doctrine de l'Egnfe du temps de S. Auguftin.
[Car après avoir dit, non hoc corpus quodvidetis manducaturi ef-
nis , nec bibituri tllum fanguinem quern 'ufuri funt qui me crticipgent-^
[il ajoute, pour marquer quel eft l'objet corporel qui feroir pro.
jprement mange de cette manière commune, que ces Difciples
[avoient dans Véiprïv.Sacramentumaliquod vobis commendavi quod
Mritualiter intelleHum Divificabit vos : ^ Ji neceffe eft illud vifi-
fiilitercelcbrari^oportetiamen invifîbiliter intelligi. C'eft à dire
[en un mot que cette manducation groffiere & commune
E E c i j
•f4-96 Liv. VI. ^ele corps de jfefùs-Qjrifl
qui ne s'exerceroic pas furie corps de J. C. avoit pour objet le
Sacrement qui fert de voile à ce divin corps où la foy nous le
découvre.
Ainfî tout ce paiTage de S. Auguftin dont les Miniftres ont
tant fait de bruit , n'a point en effet d'autre fens que celuy qui
eft contenu dans la paraphrafe que j'en vas faire,où je develo-
p,eray fimplement ce que S. Auguftin dit avec plus de breveté ,
fans ajouter rien à fa penfce^ Ne vous fcandalifex point de ce
que je vous dis qu'il faut manger ma chair &: boire mon fangj
vous ne mangerez point de la manière que vous vousl'imagi.
nez ce corps que vous voyez j vous ne le briferez point, vous ne
le toucherez point, vous ne legoufterez point, vous ne le di-
gérerez point. C'eft d'un Sacrement que je parle,quand je vous
ordonne de manger ma chair. Ce fera ce Sacrement qui fera
touché , goiîté , brifé , & qui fera ainfî mangé à voftre fèns; Il
i^ra vifible , afin que vous y exerciez ces adionsvifibles: mais
il vous vivifiera par l'intelligence fpirituelle de la foy qui vous
découvrira que mon corps y fera invifiblemenr.
C'eft ainfi que les fîdclles inflruits dans la dodlrine de la pre-
ience réelle , ont dû prendre les paroles de S. Auguflin, Ils
cftoient accoutumez à ne pas concevoir l'Euchariftie comme
un Sacrement vuide, mais comme un Sacrement qui contenoic
le corps de J. C. Ainfi ils ajoiitent fans peine au terme de Sa-
crement ce que les Catholiques y ajoutent encore , quand on
leur parle du Sacrement de l'Autel. Ils fçavoient au^'îi ce qu'il
falloit entendre invifiblement dans ce Sacrement j & ainfi ils
ne s'arrefloicnt point au feul voile , mais ils y joignoient tou-
-tiCs les idées que les inftrudions communes de l'Eglife leur
donnoient de ce Myflere ^ 6c par confequent rien ne leur de-
voit paroiftre difficile , ôc ce n'efl qu'en fe tranfportant en ua
autre état que celuy où efloiencces fidelles , que l'on y peiyc
trouver de l'obfcurité.
f
eft mungé corporeUement dans tEuchmflie. jÇty
Ch. VITI.
CHAPITRE VIIL
explication du f affale de S. Au(^ttflin , tiré du troifiime Livre
de la DoBrine Chrejiienne , cliap. i6,
ON peut dire que lepafTage de S. Auguftin du troifiéme
Livre delà Doctrine Chrell:ienne,chap.r 6. eft le plus cé-
lèbre de cous ceux dont les Sacramentaires le font fervis con-
tre la dodrine de l'Eglife. Car il ne paroifl: pas <que les Beren-
gariens ayent connu , m celuy de Terrullien du livre quatriè-
me contre Marcionj ni ceux que les Miniftres tirent des dialo-
gues de Tlieodoret, ni ceux de Gelafe , de S. Ephrem & de
S, Chryfoftome. Celuy de Facundus n'eft connu que depuis
quelques années que cet Auteur a eftë donné au public. Mais
pour le paffage de S. Auguftin dont nous parlons , il n'a jamais
elle inconnu à aucun de ceux qui ont combattu ce Myftere. Ils
en ont tous fait le fondement de leur doctrine , ôc s'en font fer-
•vis ordmairement pour l'infmuer dans les efprits.
On voit mêm.e que c'eft: ce pafTage qui avoit fait naiftre à
Trudegard des douces contre la foy de la prefence réelle où ii
âvoit efté élevé, des doutes qui le portèrent à en demander
TéclairciiTement à Pafcafe.
Il eft donc jufte de l'examiner avec foin 5c de bonne foy ,
fans rien dilîimuler des difficultez qu'il peut avoir. On évitera
même les folucions qui pourroient avoir quelque apparence
de lubtilité , quoiqu'elles puifTent eftre • èits dans le fond j
& l'on ne prétend fe fervir que de celles que le paflage four-
nit, & qui fontfondées fiir des chofes qu'Aubercin mêmere-
connoift.
Les difficultz de ce paflage font de deux fortes. Les unes
font fondées fur une règle que S. Auguftin eftablic pour l'in-
telligence de l'Ecriture : \ç.s autres fur l'application qu'il en
fait.
La règle ou le principe de S. Auguftin dont les Miniftres
tirent avantage , eft que fi une exprcfflon qui porte un comman-
dement , femble prefcrire une aftion honteufe ^ criminelle , ou
empêcher quelque chofe d'utile , ou défendre qu'on ne fajfie duj.^.^°^'
lien aux hommes ^, il faut la prendre pour figurée. Si pr^ceptiva isl' ' '^'**
EEeiij
j^.oi Liv. VI. ^e le corps de Je/ks-Chrifi
locutio ,flagittum autfacimis videtur jubere , aututiUtatem ac he^
neficentiam vitare , fiquraui efi.
Les Miniftres prétendent avoir droit de conclure de cette
maxime , que les expreffions où J. C. nous exhorte à manger
fa chair hc à boire Ton fang , eftant de ce nombre, & portant
à quelque chofe qui paroift horrible, il les faut prendre pour
figurées.
Mais on peut dire avec vérité qu'à ne confiderer que ce
ièul principe , il n'y eut jamais d'objedion plus foible que
celle-là.
Car ce principe fê pouvant prendre , ou généralement , cm
avec diver/ès rcftnctions , il fe trouve qu'eftant pris générale-
ment, c'efl: la plus faufle & la plus dang^ereufe maxime qu'on
puifle avancer ^ & qu'eftant joint aux reftridions que les Mi-
nières mêmes y jugent necefîaires, il ne prouve rien du tout.
Si on le regarde dans fa généralité^ qu'y a t'il de plus dan-
gereux & de plus faux ? Car n'eft-ce pas par. là queSocin pré-
tend prouver qu'il faut entendre en un Tens métaphorique tou-
tes lesexpreflions de l'Ecriture, qui portent que J.C. a offert
fa mort pour nous racheter de nos péchez, parce qu'il luy pa-
roift indigne de Dieu de vouloir la mort d'un innocent pour
fauver des coupables.
N'eflr-ce pas fur ce principe qne les Pelagiens fé fondoienr
pour détourner à des fcns métaphoriques tout ce que l'Ecriture
nousenfeigne du péché originel , parce qu'ils ne comprenoienr
pas que fans injaftice Dieu puft reputcr des cnfans coupables-
pour un crime , où leur volonté n'avoir point de part.
Cette prétendue maxime n'efl-elle pas même démentie par un
grand nombre d'exemples de l'Ecriture, qui montrent que les
Saints fe font crus obligez d'obéïrà Dieu dans des chofes qui
paroilfoient criminelles félon les principes ordinaires de la jufti*
cèdes hommes. Je n'en rapporte point icy d'exemples, parce
qu'ils font communs ,& que le Cardinal du Perron l'a déjà fait
d'une manière fi forte, qu'Aubcrtin a été obligé de fe rendre lur
ce point, & de reconnoiflre que ce feroic faire tort à S. Auguf
tin que de luy attribuer cette règle prife dans toute l'étendue
Aub,p.«7x, des termes aufquels elle eft conçue. Il avoue expreflement que
l'intention de ce Père n'a pas efté de l'étendre à tous les lieux de
l'Ecriture , dans le [quels il femble que -Dieu coynmande ou confcille
quelque aHion déréglée. Carily en .^^. dit- il , qui font tellement atta-
ejip mxnge corporelkment dans tÊucharlfile. ^(.ogi
chez^du fens Litteralpar toutes les cireonjîances, qu'oyme les fcauroit Ch. VIII,
f rendre en un autre fens. Enfin il avoue que ce principe n'a lieu
jqu'à l'égard des expreffions qui ne font pas déterminées au fens
littéral, & dans lelquelles il n'eft pas neceiraire d'avoir recours
à l'autorité de cekiy qui fait le commandement.
:" Mais en reduifant cette règle à des termes raifonnablespar
le moyen de ces reftriclions , il ie la rend entièrement inutile
^ détruit toutes les confequences que les Miniftres en peu-
vent cirer. Car puifque ce principe n'eît pas gênerai , 6c qu'il re-
çoit des exceptions ; puifque par l'aveu même d'Aubertin , il
ce regarde que les pafl'agesqui ne lonr pas déterminez au fens
littéral par les circonftances , quel droit ont les Miniftres de
l'appliquer à ces paroles : Si votes ne mangez^la chair du Fils de
r H-onmie , ^^ ne beuve'^fonfang , votis n aurezJJoint la vie en votis^
expliquées au fens des Catholiques? Comment prouveront-ils
qu'elles ne fignifient point fi clairement une manducation
réelle qu'il foit contre la raifon de les entendre autrement ?
Comment prouveront-ils qu'il ne foit pas neceflaire d'avoir re-
cours dans ce commandement à l'autorité de celuy qui lefait ,
puifqu'il paroiftau contraire que les Pères nes'appuyent que
lurcela, & qu'ils nous ont déclaré que ce qu'on dit de manger
la chair de J. C. feroit impie & infenfé , fi ce n'eftoit de J. C.
même qu'on l'apprend ? De naturali cnim in nobis Chrifli veri-
tate qua dicimtis^nifiabipfo dtfcimns^ftultè ^ impie dicimus. Ipfe -j-ri„it *
enim ait , care mea verè efi efca , ^J^tnguis mcusverè efi potus , Chryfoft.
puisqu'ils nous déclarent, qu'il t'y a dans ces paroles ni parabole h°^"-4<i- 1™
ni ènyne, (jj- qud faut abfolument mander la chair de J. C. puif- B.if. Reg. J.
que S Eafile allègue même la créance que l'on doit à ces parc- ^.i.
les , pour montrer qu'il faut croire avec certitude , que toutes ^ „
rcp'-nne. . j^^J'^'^
les paroles de Dieu font véritables (^ pojjibles , quoique la nature y
Mais quelle apparence de crime ou d'aclion honteufe , peut- ^;, ; ^i^„f
on trouver dans ce commandement pris au fens des Catholi- fxa,v«To«.
ques pour le comprendre (ous cette règle? On peut bien dire
qu'il choque en apparence la raiion &:la nature: mais qui peut
dia^queliionnefteté y foit blelfée, cec\a on appelle ^!gitium ,
ni qu'il y ait rien qui nuife au prochain , ce que l'on entend par
le mot àefacinus , félon que faint Auguftin explique ces ter- ^^rift'^i
mes ? Quod autem agit indomita cupidita-s ad cormmpendum ani-
mum (^ corpus fuum , flagitium vocatur 3 quod autem a^it utalte-
ri noccat , facinus.
c, le.
i|.io laiv. y \. ^s le corps de Je fus- Qjrifi - i
On ne f(çauroic donc le fervir de certe maxime pour exclure Te
fens des Catholiques, puifque n'ayant nen de honteux ou de
criminel,mcme félon l'apparence, il ne peur cflre compris dans-
le principe de S. Augufïm. Ainfi il faut que les Calviniiles fe re-
duiient uniquement à la feule application queS. Auguftin fait de
ce principe à ces paroles : Si vous ne mangez^ la chair du Fils de
l'I-Iomme^(^ ne beuvcz^fonfani^^vous ri aurez^foint ht vie en vousfii
à la conclufion qu'il en tire, qui t^ que cette expre (/ion eft figurée.
C'eften effet la feule difficulté raifonnable qu'on peut propo-
fer fur ce fujeti ^ pour l'éclaircir, jerapporteray premièrement
les propres termes de S. K\x2^\i{\.'in :Si l'expreffion de l'Ecriture
femble. commander quelque ait ton honteufe ^ criminelle ^ou inter-
dire quelque chofe d'utile, ou défendre défaire du bien au prochain^
elle eft fqurée. Par exemple cette parole de J. C. Si Vous «f maU'
çe\la chair du Fils de l'Homme, ^- ne bcuvez^fon fan<i^^ vojisn'au-
rez^point la vie en votis , femble commander une aiiion honteufe ^
criminelle. C'efi donc une fi'iur'' qui ordonne de participer à la paf-
fon de 7 C. (3^ À confcrvcr dans la mémoire le fouvenir doux 0"
utile que fa chair a efiè crucifiée pour nous.
C'eft ce que contient ce fameux palîage dont les Miniftres
^concluent que l'on ne mange donc la chair de J. C. qu'en figu-
re , 6c que la manducation commandée par ce paffagene con-
filTie que dans la participation aux fouffrances de J. C. Mais il
eft aifé défaire voir la témérité de cette confequence par quel-
ques remarques.
Il efi: certain premièrement qu'on ne f^auroit rien conclure"
precifément de ce que S. Auguftin explique ce pafTage de la
manducation fpirituelle. Car on ne fcjauroit nier qu'il n'aiceftc:
expliqué de la même forte par plufieurs Auteurs très perfua-
dezde la prefence réelle 6c delarranfTubftaniiation.
S. Bernard entr'autres , dont la créance n'eft pas doureufe
fur- cette matière, y donne ce fens dans le Sermon troifiéme fur
le Pfeaume qui habitat. Ces gens , dit il , ayant oiiy ces paroles de-
J. C. Si vous ne mangez^ la chair du Fils de l'FIom?ne , <jr ne beu-
veZi /on fan^ .^ ôcc. trouvèrent ce difcours dur ^ fe retirèrent. Or
qu'efi.ce-^ que manger fa chair ^ boire fon fang^ finon communi-
quer à fes pa.ffions , ^imiter la vie qu'il a menée fur la terre) Il efl
vifiblc que S. Bernard explique là ce paflage de la même ma-
nière que S. Auguftin dans le lieu dont il s'agir , 6c qu'il l'ex-
glique même de cette force pour montrer que le fcandale des
M*
efim ange corporellement dans Vêuchari^ie. 4T1
laifs elloic mal fondé. Cependant qui concluroit de là que S. Q^^ VIII
Bernard ne croyoic pas la tranirubftantion,tireroic une con-
fequence tres-faufle hi. tres-temeraire par l'aveu même des
Miniftres.
Il c(l encore certain que l'on ne fcauroit rien conclure du
fens que faint Au^uftin exclut formellement &. expreirement.
Car il e(l bien vray qu'il exclut en cet endroit un certain (ens
littéral. Mais quel cft ce fens littéral formellement exclus? Eft-
ce le fens des Catholiques? Les Calviniffces voudroient bien le
pouvoir dire 5 mais les termes de S. Auguftin ne le foufFrcnt
pasi parce qu'ils marquent trop cxpreflement par deux carade-
res quel eft ce fens qu'il defigne. Le premier de commander ce
qu'il appelle jîaytitim ^ c'eft à dire comme il l'explique luy-
mefme , une aciion honteufe par laquelle on fc fouille foy-mhnej
le fécond de commander ce qu'il z^^^cW^facinus^ c'eft à dire un
crime contre le prochain , quod nocet alteri.
Que les Calviniftes nous difent de bonne foy, fi ces marques .;û.
conviennent à la manducation du corps de I. C. telle que les
Catholiques l'enfeignent.Peut on croire raifonnablement que
ce foit une adion honteufe, bL qui nous fouille? Peut on croire
qu'elle nuifeà I. C? Etn'eft-il pas clair au contraire que ces
marques déterminent l'c/prit à la feule manducrtion que fefi-
guroient lesCapharnaites, c'ellà dire à la manducation d'une
chair fanglante, coupée par morceaux, gouAée& digérée? Car
n'eft ce pas celle là que les hommes ont jugée honteufe &
brutale? N'efc cepasla feule que l'on puiiïe concevoir comme
outragcufe à I. C. puifque ceferoit détruire l'intcgritc de fon
corp.>»? Ce n'eft donc que la manducation conçue par les Car-
phanaïtes que S. Auguftin rejette exprelTemeni. Nous verrons
enfuite, fi l'on en peut tirer par confequence qu'il ait auffi re-
jette celle que foûtiennent les Catholiques : mais il eft déjà
clair qu'il ne le fait pas formellement.
3. Il eft certain encore que quand S. Auguftin en rejettant le
fens littéral , palTe tout d'un coup au fens métaphorique qui
confifcc à entendre ce paftiige de la participation auxfouft'ran-
cesde I. C. &à la mémoire de fa mort , on n'en doit pas con-
clure qu'il propofecefens métaphorique comme l'unique fens
des paroles de I. C ny mefme comme le plus ordinaire.
Car il faut que lesMiniftres reconnoifl^ent qu'il entend or-
dinairement ces paroles de la manducation Sacramencale:que
FFf
4ii Liv.VI. .^e le corps de Jefus-ChriH
c'eft ainil qu'il l'explique dans le livre contre l'adverfaire de la
Loy &: des Prophètes ch. lo.
Dans la queftion 57. fur le Levitique.
Dans le livre premier du mérite éc de la remilTion des pé-
chez.
Dans le Traité 11. &: 26. fur S. lean.
Dans le Sermon ir. & 46. des paroles du Seigneur.
Dans e premier livre contre Crefconius P. 25.
Dans le Sermon des paroles de l^Evangile , rapporté par
Bede fur la première Epiftre aux Corinthiens.
Dans les Sermons fur les Pfeaumes 33. & 98.
Il faut qu'ils reeonnoiiTent de plus que quand S. Auguftin
exprime en tant d'endroits ce fens delà manducacion Sacra-
mentale , ce n'eft point comme une fîmple interprétation al-
légorique 6c incertaine qui n'eft pas propre à fonder un dog-
me-, mais qu'il le regarde comme le vray fens des paroles de
I, C.&commeun fondement folide, fur lequel on peur éta-
blir contre les hérétiques là neccffité de participer à ce Sacre-
ment pour avoir la vie.
Ainfi quand les Minifrres demandent , pourquoy S. Auguftia
n'a pas^en corrigeant cette idée de la manducanon Carphanaïte
qu'il rejette comme criminelle & honteufe , fubftitué celle de
la manducation Catholique, s'il a cru que l'on reçuft réellement
le corps de I. C. on leur peut faire à peu près la même que-
ftion, & les obligera nous dire, pourquoy S. Auguftin en ex-
cluant ce fens criminel de la manducation d'une chair fanglan-
te, ne propofe pas en ce lieu l'explication qu'il donne par tour
ailleurs à ce même pafthge , qui eft de l'entendre de la mandu-
cation Sacramentale ? Pourquoy,parexemple, nefait ilpas en
ce lieu icy, ce qu'il fait dans le Sermon fur le 98.Pfeaume, où
ayant exclus la manducation des Carphanaïtes par ces paroles:
Vous ne mangerez^fas le corps que -vous voyez^i Non hoc corpus
quodvidctis manducaturi cftis , il fubftituë au lieu de ce fènS5
non la manducation fpiritueîle comme il fait icv, mais la man-
ducation Sacramentale : ^^rrrfWfw^»»/, dit-il, vobis cornmendavi,
c'eft à dire que ces paroles s'entendent de la manducation
d'un Sacrement?
Les Miniftres feroient peut- eftre aflèz embaraflèz à répondre
à cette queftion , félon leurs principes. Mais on va voir qu'i
nous eft cres aifé de répondre à celle qui nous font , c'eft â di
efl ma,ngê corporcUement diins TEucharifiie. 4I5
rc de rendre raifon pourquoy Saint Auguftinen rejettant l'i- Ch. VllI.
dée de la manducationcarphanaïte, nefubfticuë pas celle des
Catholiques, & que l'èclaircifTement de cette queftion difTipe
entièrement toute la difficulté de ce pafTage.
Il ne faut pour cela que confidercr l'occafion qui luy fait rap-
porter ces paroles de J.C. Carfondefleinn'eft nullement de les
traiter à fond , ny de rapporter tous les fens dont elles font ca-
pables, ny de choifir entre ces fens le plus probable & le, plus
naturel. Il ne les allègue que pour fervir d'exemple de la règle
qu'il propofe, que ^«^W «w? expreijion femble commander quel-
que chofe de honteux é" de criminel , il la faut conjïderer comme
figurée^ & en expliquer les termes en un fens métaphori-
que.
Or afin qu'un exemple répondît à cette règle , il falloit qu'il
euft deux conditions. La première qu'il femblât commander
une adion honteufc& criminelle. La féconde qu'en rejettant
ce fens littéral , on pût paflerà une vérité reprefentce par ces
termes figurez.
Comme on ne trouve pas facilement des exemples d'une ef- '
pece fi particulière, & qu'en écrivant on employé d'ordinaire
ceux qui fe prefentent les premiers , pourveu qu'ils puiflent fer-
vir au deflein qu'on a d'éclaircir le fujet pour lequel on les alle-
■guCj S. Auguftin a cru que pour confirmer la règle qu'il propo-
fe, il pouvoit fe fervir de cette parole de J. C. Si vous ncman-
ver^ la chair du Fils de l'Momme C^* ne hcuvrz^ fon fafJg , vous
tCaurez^foint la vie-, parce qu'en effet ces termes fignifiant dans
iefens ordinaire ce qui fe pafifè à l'égard des alimens, comme
<ie les brifer , les goûter , les faire palier dans l'efromach
pour les digérer & pour s'en nourrir , il y trouvoit la première
des conditions neceffaires pour l'éclairciffement de fa règle,
c'eftà dire que les termes femblafient ordonner une action hon-
teufe êc criminelle.
Mais cela ne fuffifoit pas pour fondefTein. Il y falloit auflî
trouver la féconde condition, &: qu'en rejettant ce fens litté-
ral qui porte à une aclion honteufe 6ccrimincllej on deût re-
garder cette exprciïion comme figurée ^ c'cft à dire comme
marquant par l'image de cette acflion une vérité toute pure &
toute fainte.
Car uneexpreiïion n'eft appelle figurée que quand eftanc
faufle félonie fens htteral, elle marque néanmoins une vérité ,
FFf li
4J4 Liv. VI. ^e le corps de Jefus-Chrift
donc cette lettre efc l'image. Ainfi le feus littéral doit fubfi-
fter dans le fens que l'on y donne , non comme vérité , mais
comme image de la vérité. J. C. n'étoit pas effedivement un
lion , mais il eft figuré par un lion dans cette expreflîon : le lion
de la tribu de Juda a vaincu. Et ce terme de lion, qui n'eft pas
vray à la lettre, ne lailTe pas de reprefenter par cette lettre
fauiïe la force véritable de Je^us Christ.
Il eft facile de découvrirpar làpourquoy S. Auguftinn'apas
fait rtiention en cet endroit de la réception réelle 5c Sacramentel-
le du corps de J. C. Car il eft vifible qu'il ne le pouvoit faire rai-
sonnablement. Il propofoit en ce lieu cette expreflîon de J. C.
Si vous ne many:zj,a chair du Fils de l'homme ^ ne beuvez^ (on
y^«g,commeun exemple des expreffions qui femblent porter
par le fens littéral à une adion honreufe. Et il avoit raifon de le
faire, puis qu'en effet le fens le pkis ordinaire des termes de man-
ger êc de^É7z>^,eftceluy desCapharnaïtes. Maisilfalloitdeplus
que ce fêns littéral eftantexclus on regardaft l'exprefllon coai.
me figurée , c'eft à dire que pour en trouver le fens on palTaft
de la lettre confiderée comme figure , à une vérité fisiuree.
Ilfe trcuvoit donc engagea marquer quelle eftoit la vérité
figurée par le fens littéral , c'eft à dire par les mots de mungerbL
de boire pris au fens des Capharnaïtes. Or cela l'engagoit necef-
fairemcntàne point parler de la manducation Sacramentale ny
de la réception réelle du corps de J. C 6c à parler uniquement
de la manducation fpirituelle.
La raifon eft que la réception réelle du corps de J. C. non-
plusquela manducation Sacr3menta!e,n'eft point du tout la vé-
rité figurée parla manducation Capharnaïte. On peut bien dire
qu'elles font fignifiéesfccomprifcs dans les paroles de J. C. fé-
lon un autre fens littéral moins propre félon les termes. Mais el-
les ne font nullement reprefentées par les idées qu'impriment
dans l'efprit la manducation queconcevoient les Capharnaïtes,;
dont S. Auguftin avoit befoin en ce lieu- là.
Ce n'eft que dans la manducation fpirituelle qu'on trouve les
adions figurées par cette manducation littérale. C'eft - Là
qu'on fepare fpiritueilement en plufieurs parties l'objet que
J'^on mange fpiritueilement j qu'on legouteavec plaifir j qu'on
Je ferre dans la mémoire. C'eft là enfin qu'on en nourrit fon
ame comme le corps fe nourrit par les alimens. Rien de tout ce-
la ne fe rencencrc ny dans la manducation du Sacrement ny dans
la réception du corps de J. C.
cfi mangé corporellement dcins lEuchaviflie. 4I5
Qiii s'étonnera donc que S. Augi'iftineftanc obligé de produi- Ch. VlII-
re un exemple de fa règle, où l'on vift qu'en abandonnancla let-
tre comme contenant une action hontcufe Si criminelle, on
paffaft au fens figuré par cette lettre , & ayant pour cela allégué
ces paroles : Si vous ne mangez^ Lt chair du Fils de l'homme ^ ne
henvez^ [on fanq^ , dont le fêns littéral ne peut fubfifter 5 qui s'é-
tonnera, di je, qu'il p afle à la vérité figurée par cette lettre qui
ne fçauroit cflire , comme j'ay dit , que la leule manducation
fpirituelle.''
Tout ce que l'onpourroit demander, c'efl:,pourquoy ce Pè-
re prend le l'ens Capliarnaïte pour le fens littéral de ce palTagc.
Mais pourquoyne le prendroitil pas en cette manière, puifque
c'eft en eiFet le fens le plus littéral &le plus ordinaire des ter-
mes aufquels il eft conceu/ D'ailleurs il y eftoit déterminé par
la règle à laquelle il appliquoit cet exemples Se ces paroles ne
luyauroientefté d'aucun ufage, s'il avoitconfideré la manduca-
tion Sacramentale comme en eftant le fens littéral. Il a donc
recours à un autre fens littéral que les termes expriment effecti-
vement, parce qu'il y trouve cette condition neceflaire pour
l'éclaircifTement de fa règle, décommander en apparence une
chofe honteufe. Mais après avoir praduit ce paflage ence fens êc
avoir confideré cette lettre comme une figure qui fe rapporte à
une vérité, il ne pouvoir plus parler de la manducation Sacra-
mentale,mais de la feule manducation fpirituelle, parce qu'il n'y-
a quecelle-cy qui réponde comme vérité figurée à cette mandu-
cationCapharnaïte qu'il confideré comme la lettre.
Que refte t il à dire aux Miniftres après cet éclaircifTement?
Diront- ils qu'il paroifi: parce pafiage que S. Auguftin prend la
fens de la manducation Capliarnaïte pour la lettre des paroles
de J.C? On leur répond qu'il a eu droit de le faire, parce que c'eft
le plus ordinaire fens des termes de manger Se de i>oire. Diront-
ils qu'il s'enfuit de là que S. Auguftin ne reconnoift d'autre fens
dans ces paroles que celuy de la manducation fpirituelle ? Mais
les Miniftres reconnoifiTent-ils pas eux mêmes que cette confe-
quence eft fau{re,&; qu'au contraire il explique ce paflage dans
cet endroit d'une manière qui luy eft extraordinaire /
Diront ils qu'il reconnoift au moins que cette cxprefiîon eft fi-
gurée entant qu'elle femble porter à une aétion honteufe & cri-
minelle , c'eft à dire qu'elle eft figurée en la prenant dans lefens
des Capharnaices, qui eft le fens qui porte à cette adion honteufe
FFfiij
xi6 Liv. VI. ^e le corps de Jcfus-Chrifl
6c criminelle. Mais s'enluit-il de là qu'il là reconnoifle auffi fî_
curée en la prenant en un aucre iens qui n'a rien de honteux ny
de criminel ?
En effet n'avoûent-ils pas eux-mêmes que S. Auguflrin expli-
que fouvent ce lieu de la manducation Sacramenrale? Etce fens
néanmoins atout enfemble ces deux qualicez, d'eftre différent
de celuy que S. Auguftin apporte en ce heu icy, & de n'être
point la vérité figurée par ces paroles prifcs au fens des
Capharnaïtes.
Diront-ils que S. Auguftin ne marque point dans ce palTage
d'autre manducation de la chair de J.C. que la rpiriruel le? ]e ré-
ponds qvi'il n'^n pouvoitmarqucr un autre ^ïicç. lieu-là, par la rai-
ion que nous avons dite , fçavoir qu'il n'y a que la manducation
fpirituelle qui réponde comme vérité figurée à la manducation
Capharnaïte. Mais comme par l'aveu même des Miniftres , il
ne s'enfuit pas qu'il n'ait reconnu une manducation Sacramen-
tale, quoy qu'il n'en parle point en cet endroit, il ne s'enfuit pas
auffi qu'il n'ait point reconnu de réception réelle delà chair de
]. C. puifqu'elle eft compnfe dans la manducation Sacramen-
tale , comme nous l'avons tant de fois prouvé.
Ainfi pour juger fainement & équitablemcnt de cepafîage,
on en peut dire qu'il n'a rien du tout de fâcheux pour les Catho-
liques que la feule apparence, mais qu'e'Hnt confideré avec ton.
tes ccscirconrtances, on n'enfcauroit rien conclure de raifon-
nable contre eux, &: qu'il laiiTe la queflion toute entière à. déci-
der par les autres pafîàges de S. Auguftin.
Car il eft cerrain, comme j'ay dit, qu'outre le ïf^x^s des Ca-
pharnaïtes que ce Pcrc rejette en ce lieu ; 5c cchiy de la mandu-
cation fpirituelle qui répond à ce fens des Capharnaïtes comme
vérité figurée, il reconnoiftdans tous fcs ouvrages un autre fens
de ces mêmes paroles qui eft que J. C. nous y ordonne de man-
ger le Sacrement de rEuchariftie& de manger fa chair dans le
Sacrement. Ce fens n'eft certainement pointexclus pafcepaf-
iàge , & il n'eft plus queftion que de fçavoir ce qu'enferme ce
même fens. Or on n a qu'à voir les pafîàges où S. Auguftin ex-
plique la manducation Sacramenrale pour rcconnoiftre claire-
ment qu'elle comprend une réception réelk du corps de J. C.
comme nous l'avons déjà faiï voir.
efi mangé corporellement dans fEucharifiie. ^\g^
CHAPITRE IX.
Que toutes les exfrcffîons où les Percs difent tantofl que les me-
chans manquent le corps de I. C. (^ tantofl qu^ils ne le man-
qent pas , font des fuites naturelles de la prefence réelle.
IL ne refte plus que de montrer que les Pères ont parlé de la
manducacjon du corps de J. C. à l'égard des méchans com-
me la do(flrine de la prefence réelle les en a dii faire parler. Et
e'eft ce qui paroiftra clairement en ramaflant toutes leurs ex-
preflîons.
Car qu'eft-ce que cette doftrine nous enfeigne à l'égard
des impies? Qu'ils reçoivent J. C. fur leur lèvres, & dans une
ame foiiillée 5 qu'ils l'outragent par leurs mains & par leur bou-
che, qu'il va une manière de recevoir la chair même de J. C,
qui leur eft commune avec les bons : que Judas reçut le corps
qu'il avoit vendu, que c'eft le corps de J. C. auffi bien pour les
méchans que pour les juftes.
Or les Miniftres n'ignorent pas que toutes ces expreilîons
fe trou voient dans les Pères , 6c qu'on ne ks y trouve très-
iouvent.
Ils n'ignorent pas, par exemple, que S. Chryfoftome ne pref- inEpift. ad
fe les impies par ces paroles j Comment pourrsz^vous paroiftre de. Eph- Hom.j
vantle tribunal de I. C. vous qui avez^ofc toucher fon corps avec
des lèvres (^ des mains iyyipures Z
Ils n'ignorent pas qu'il leur reproche en un autre endroit de
recevoir J. C. dans une ame fouillée. Macth.
Ils fçaventque S. Auguftinparlant^:/^' ce corps é" de ce fanq^qui cont. Crcf,
font nofire unique fucrifice , ^ dont le Seigneur affure que Jî quel- 1. i.c.i;,
quun ne mange pas fa chair (^ ne boit pas fon fang , il n aura pas
la vie , ajoute qu'ils font pernicieux à ceux qui C7i ufent mal.
Ils n'ignorent pas l'endroit où ilalTure que c'eft toujours le
corps de J. C. a l'égard de ceux me [me s dont l'Apoflre dit que ce-
luy qui le mange indignement mange fa condamnation.
Ils n'ignorent pas ce que dit S. Bafile que le crime de ceux -qz bapt.i. î-,
qui ayant l'ame fouillée., touchent le corps de J. C. efi d'autant plus q- î-
y^and que celuy de ceux qui touchaient les Belers é* les Tau-
Taux que l'on immoloit fous l'ancienne loy , que J.C.efi fias grand
qtte le temple des Juifs.
4i8 Iav.YI. ^le le corps de Je/ùs-Ckifi.
Les Miniftres ne nieront pas fans douce que les méchans ne
foiencauflî capables de recevoir le vray corps de I. C. que de
le facrifier. Or ce même Père nous allure daus le chapitre fui-
vant qu'ils le facrifienCj puifqucpour rcprefènter le crime qu'ils
commettent en le faifanc indignement, il dit que le crime d'jin
Baf. .le bapt. homme foiiiUc d'ordures qui ofc ficnficr le corps du Seigneur qui
1. i.'l-i. s'efi donné luy-Tnhne en qualité d'oblation (^ de fucrifice à Dieu
en odeur de fuaviié ^ l'emporte d'autant fur celuy qu'on commettott
en ocrant indignement les anciens facrifice s , que le corps du Fils
\i-^\(:y{jï.de Dieu pafie en dignité les Béliers ^^ les Taureaux.
Ce ncfi pas^^]o\\x.t-t ï\ , que je veuille comparer ces chofes Car
il y en a une dont l'excellence ne foujfre point de comparuifon ,
ct.<3vyx.^iToS y) » u7repo^>j.
Mais quel efl: ce corps du Seigneur facrifîë par les méchans
félon ûint BafilerN'eft ce pas ce corps qui n'a point de fro.
portion , (jr qui ne fouffre point de comparai [on avec les bejles
immolées dans l'ancienne Loy? C'eft donc le véritable corps de
i. C. &. ce corps eft facrifîë par le? méchans. Et c'eft ce même
corps véritable de J. C. dont S. Bafile dit encore dans le chapitre
fuivant, qu'il eft touché pat les méchans , comme il arrivoic
quelque fois que les vidimes anciennes l'eftoicnt par des perfon-
nes impures.
Il feroit inutile de ramafer icy tout ce qu'on peut trouver
dans les Pères pour prouver en particulier, que les méchans
reçoivent véritablement le corps de J. C. Car les Miniftres ne
defavoùant pas cette confequence , que fi le corps dej C. eft
réellement prefcnt dans l'Euchariftie, il eft auflî réellement
reçu par les méchans^il faut regarder ce point de la doctrine
de l'Eglife comme appuyé fur autant de preuves, qu'il y en a
qui font voir la vérité de cette prcfence , 5cil n'y a plus qu'à
examiner ft les Perés ont toujours parlé conformément à cette
doilrrine, & s'ils n'ont rien dit qui lemble la contraHer.
Pour en juger il ne faut que voir à quelles expreffions elle
porte à l'égard des méchans, outre celles que nous venons de
citer.
Il eft vray qu'ils reçoivent le corps 8c le fang de J. C. com-
me les bons '■> mais i! s'en faut bien qu'ils ne le reçoivent en tou-
Jes les manières qu'il eft reçu par les bons.
Les juftes en le recevant en reçoivent une force^ une vi-
gueur , 2c u-ne naurriture fpirituelle.
Le«
ej} mangé corporelîement ditns fEucharifiie. 41 a
Les méchans ne font au contraire en le recevant que feren- Ch. IX.
dreplus criminels , &: par confequent plus toibles.
Les juftes en recevant le corps de J. C.s'uniffent àluy par la.
charité. Les méchans eftant vuides de charité ne s'y r<^auroienc
unir en cette manière.
Les juftes en le recevant font unis à tous les fîdelles , parce
que le corps S^l'eTprit de J. C. en font le lien ^êc ils font ainfi in-
corporez dans lafocieté des Saints^ qui eft le corps de J. C.
Les méchans au contraire n'étant point membres vivans de ce
corps & de cette fainte locieté , ne font que s'en feparer davan-
tage, &: Cl J. C. eft en eux, ce n'eft pas pour les unir à fon corps.
Tout cela convient aux juftes , & ne convient point aux mé-
chans, & tout cela s'appelle manger dans un fens métaphori-
que &:fpirituel. Car tirer une force 6c une nourriture fpintuellc
du corps de J. C c'eft le manger.
Recevoir le corps de J.C. jufqu'à la participation de fonef-
prit , c'eft encore le manger en ce fcns.
S'unir au corps de J. C. par amour , c'eftie manger. S'incor-
porer dans le corps myftique de ]. C. parlemoyenderEucha-
riftie , c'eft le manger , & c'eft même manger au même fens ce
corps myftique dont il eft le chef, &: qui le comprend ; ^par
confequent les jufles mangent le corps de J. C. en plufieurs ma-
nières dont les méchans ne le mangent pas. Et lorfqu'on ref-
tramt le terme de manger à ces manières, on doit dire que les
juftes le mangent, & que les méchans ne le mangent pas.
C'eft ce quifdicque iîiint Augultin après avoirjoint les jufles
aux méchans dans la manière commune de recevoir le corps de
J. C. attribue enfuite aux feuls juftes une certaine manière de
le recevoir , qui ne convient point aux'méchans. Dirons-nous , Scrm •.. <îi-
dit-il , que ceux qui mangent cette chair (y- boivent cefang avec un ^''^'^' ^*^"''-
cœur hypocrite , ou qui deviennent enfuite apoflats , demeurent en
J- C. d" 7- c. demeure en eux ? mais cejlquily a une certaine ma-
nière de manier cette chair ^ de boire ce fav.g , dont il efi vray de
dire queceluy qui mange cette chaire boit ce fang demeure en J. C.
^J.C. en luy. il n'eft donc par vray que tous ceux qui mangent la
chair de J. C. é" boivent fon ftng, demeurent en luy ^ luy en eux :.
JEt cela n eft vray que de ceux qui le font d'une certaine manière
quil avait en vite.
Or comme cette certaine manière ne convient qu'aux bons
en qui J. C. demeure , ôcnon aux méchans en qui j. C. ne de-
GGg;
410 Liv. VI. ^e le corps de Jefus-Chrifl
meure pas, il n'y a nulle concradidion à dire que les médians
mangent le corps dej C. Si qu'ils ne le mangent pas, Carilcft
vray qu'ils le mangent de cette manière communeauK bons&
aux méchans 5 & il efl encore vray qu'ils ne le mangent pas de
cette manière particulière aux bons dont les médians Tonc
exclus.
Qiiand il feradonc qucftion de ces manières particulières
aux bons , on dira toujours que les méchans ne le mangent'
point. * :
Et comme ce font ces manières particulières aux bons qui
rendent la réception du corps de J. C. vrayment utile , il efti
naturel.d'exhorterlesfîdelles à ne le pas contenter de la récep-
tion & de la manducation commune, mais de cendre à la man-
ducacionquieft propre aux juftes, & qui ne convient po;ntauX'
méchans , comme eftant la fin & là vérité figurée par la man-
ducation corporelle. Car nous ne recevons J. C. dans nos corps
qu'afin de le recevoir dans nos âmes , &; de tirer de luy une
force & une vigueur fpirituelle.
C'eft ce qui fait que faintAuguftin après avoir enfeigné dans
un excellent Sermon, que nofire divin Rédempteur nous a parlé
dans le (ïxicme chapitre defaint Jean du prix de nofire rançon ,
Serm. i.^e ^^ ^a r^^ r^^„ aprés Dous avoir aiFuré que ce corps cfl nollre
z'i.inde , &• ce fang noftre breuvage 3 après nous avoi^r dit que Lesji-
delles rcconnoiffent dans ces paroles le Sacrement de l' Eucharifiie ,
(jr- que les Catéchumènes n'y entendent rien .-Sacramentu ujïde-
lium agnofcunt fidèles y audientes autem quid aliud quant audiunt :
ce-qui marque qu'il neprctendoit pas qu'elles hgnifiafiTent une
fîmole manducation fpirituel le du corps de J. C. puifque les Ca-
cechumenescn font aulh capables que les fidelles , & qu'il au-
roitefté ridicule de fuppofcr qu'aucun d'eux n'avoir allez d'ef.
prit pour pénétrer une métaphore comme celle-là qui ne dé-
pend-oi-r d'aucune connoilTance qu'ils n'euflent pas^ après avoir
' dit encore que j.C. pour appiiTer le fcandale de les Difciples,
qui croyoicnt qu'il dut couper fa chair en morceaux , leur par-
la de Ton Alccnfion, afin qu'ils vilfent, non qu'eftant dans le
Ciel il ne pourroit eflre mangé fur la terre, mais qut mvntantau
Ciel tout entier , ilnc feroit point confumé par ceux qui le mangea
roient .• Certe qui micgcr afcendere potuit , confioni non potuit:
aprés tout cela , dis- je,comme l'on doit rapporter toutes les in-
flru.dioni dogmatiques à l'édification de la pieté, il finit ce di/1
eft mange coYpoTellement duns rEucha,riflie. ^n
cours par ces belles paroles : Que ceux qui mangcvt ce corrss le Ch. î X.
mangcru l que ceux qui boivent ce f'in'i^ , le boivent i qu ils e?i ayent
une faim Qr vne foi f ardente ; qu''ils manz^cnt la vie , qu'ils boivent
la vie. Manger de cette sorte, c'est estre nourri -^mais
ton fe nourrit cnfunc que ce dont on fe nourrit ne diminue ■point.
"Boire en cette manière ,n cft autre chofe que vivre. Manifr^dcnc la
\vie , ^ beuvezja vie , vous aurcz^la vie , (y^ l'* vien'e laijjcra pas
'i^e demeurer entière.
J'ay traduit que ceux qui maniant ce corps le ■ma7izcnt .^ mandu-
cent qui manducant-.^ parce qu'il eft vifible que le nom 2;ouverné
parce vtïhzmanocr.^ qui n'eftpas là exprimé, fe doit prendre de
la période précédente, oi^i les mots de corps & de fang dej. C.
ie rencontrent. Erqo^de corpore ^ fdnguine fuo dédit nobis fa.
lubrcm refcciionem , ^ tam maffia brevitate folvit de fia mtcgri-
'tate quafiionem.
Ainfi voilà deux manières de manger le corps de J. C. qui
font exprimées par ces paroles : Manducenterzp qui 'manducant^
Tune commune aux bons& aux méchans , l'autre particulière'
aux bons. Saint Auguftin dënnit enfuite quelle eft cette ma-
nière propre aux bons, à laquelle il exhorte tous les fîdelles ,.
& il déclare que c'eft celle , où par le mot de manquer on entend
eftre nourri: Illudmanducare rcfci eji.
On ne doit donc pas s'étonner qu'après avoir ainfi défini
cette forte de manducation, il la rende particulière aux bons.
Car il ed tres-vray qu'il n'y a que les bons qui foicnt nourris
du corps de J. C. Et jufqu'ici il n'y a rien dans ce pallage qui
ne foit contraire aux Calviniftes. Mais voicy ce qu'ils croyenc
décifif pour eux. C'eft que faint Auguftin ayant dit enfuite
que cette nounirure confifte à tirer fa vie du corps deJ. C. il
aioûre ces paroles , pour marquer quand cela arrive :Z<? r*?/^/
d^ le fanz^ de j. C. dit il , feront alors la vie de chacun. Si l'on
inange ^ fi l'on boit fpiritucllement dans la vérité mhne ce que
l on prend en Sacrement , (ou dans le Sacrement ) ., vifïblement. Car
nous avons oiii dire au Seigneur : c'eft l'efprit qui vivifie , la chair
ne prof te de rien.
M. Claude qui eft un homme de conclufions pluftoft que de
preuves, a crû qu'il luy ruftifoit de dire fur ce paflTage , que
l'on y voit que les deux manières de manger que S. Angufïin
établit , l'une en Sacrement vifiblement, l'autre dans la veri-
GGgij
411 Lîv. VI. c^^ le corps de Jejus.[hrifl
té même fpirituellemenc, font les mêmes que celles que les
Cal viniftes admettent, & qui font incompatibles avec la rea-
lité que Romeenfeigne. Et qui voudroit imiter fon procédé^
on n'auroit qu'à dire fimplement le contraire de ce qu'il avan--
ce ; mais parce qu'on ne termine rien en agiiïant de la forte ,
il vaut mieux examiner les raifons qu'Aubertin en apporte au
lieu de luy..
Ce Miniftre pour prouver que ces paroles combattent la do-
â:rine des Catholiques, propofe d'abord deuxargumens auffi
Attb.p.714. rares en abfurdicez qu'on enpuifl'e voir. Telle , dit-il , qu'eft
.la nourriture dont S. Auguftin parle, telle eft la manduca-
tion. Or S. Auguftin parle d'une nourriture fpirituelle. Donc
il parle delà manducationde Tamc ,& non dexelle du.corps.
Mais à quoy penfoit-il en propofant cet argument, & contre
qui difputoit-il ? Qui doute que S. Auguftin ne parle en cet
endroit d'une raanducation Ipirituelle qui ne convient qu'aux
j iftes feulement?
Mais la queftion efl: s'il n'y en a point aufll une autre , & fi S.
Auguftin ne la marque pas clairement par ces paroles , que ceux
qui m.tïi'icyit le corps de /. C le manquent ^ ce qui veut dire que
ceux qui le mangent cqrporellement le mangent auffi fpiri-
tuellement.
La queftio^i efl: s'il ne la marque point parce lieu de l'Evan.
gile qu'il cite : c'efi l'efprit qui vivifie , la chair ne profite de rien^
Car l'appliquant à ceux qui communient,, & qui n'en reçoi-
vent point de fruit, il fuppofe vifiblement qu'ils reçoivent la
chair de J. C. quoiqu'ils ne reçoivent pas fon efprit.; puifque
s'ils ne la recevoient pas, on n'auroitpas fujet de dire d'eux
-,<jue la chair ne leur fert de rien.
/lub. ibidem. Le deuxième argument efl: de même force. Manger^.âit-i\^,
félon S. Auguftin , cefife nourrir. Or les mèchans ne font point
nourris. Donc ils ne mangent paf. Eh quoy ! ce Miniftre igno-
roit-il encore que les Catlioliçjues reconnoifltntqu'il y a plu-
fîeurs fens félon lefquels les méchans ne mangent point le
corps de J. C. que c'en efl: un entr'autres , quand on définie
Je mot de manger-par celuy d*efl:.re nourri ?Mai$ il fe trompe
grolîïerement,s'il s'imagine que ce foit l'unique fens de ce mot,
,6c que S. Auguftin le prenne toujours de la f)rte. Par exem-
ple dans le commencement du pafl!age : Manducent ergo qui
pianducMt ^ qui traduiroit que ceux qui fe nourrifTent (è nour-
ejî mxngé corponllemcnt dans l' Eucharifîie. 41J
riflenc, accribueroit à S. AngulVin un fcns ridicule ; la repe- Ch. IX.
îitionde ce terme faifanc voir qu'il eft pris neccflairemenc en
deux fens differeas , &: que l'on peut manger en une maniè-
re fans manger en l'autre. Ainfi comme il efl: tresvray que
S. Auguftin marque dans ce palîage un fens du mot de man-
ger qui ne convient point aux médians , il efl: très- vray aulTî
qu'il en marque un qui leur convient. Et il n'y a qu'à exami-
ner ce qu'enferme celuy qui efl: commun &; aux uns 6c aux
autres.
Ces deux argumens efl:oient donc indignes d'eflre propo- Aub.p.^w.
fez par un homme de fens. Et il iê trouvera encore par l'exa-
anen du troifieme que ce n'eft qu'un pur fophifme, quoiqu'il ait
plus de couleur. Il efl: fondé fur ce que S. Auguftin oppofe ,
dit Aubercin , manger U chair in Sacramento ,àce qu'ilap-
pelle , la manger in ipsa veritate. Par confcquent ^ dit il ,
lu manger in Sacramento ncjt pas la manger réellement ^ mais
feulement en figne. Il veut fortifier ce fens par quelques pafla-
ges ou il paroifl: que S. Auguftin prend ce mot, in Sacramento >
appliqué aux Sacremens de l'ancienne loy Amplement pour
enfgne , avec exclufion de la vérité. Mais je dis que tout cela
jî'eft qu'un pur fophifme par plufleursraifons,
La première, parce qu'il eft certain que le mot de Sacrement
e{ï de telle nature , qu'il eft tantofl: pris pour un pur fgne, Sc
tontoft pour un figne joint à la realité, félonies opinions donc
l'efpric eft prévenu ^ de forte que ce n'eft point du tout par
le fens précis de ce terme qu'il faut jeiger de ccluy d'un Au-
teur qui s'en fert , mais par la connoidance de (a doctrine fur
Je fujec dont il parle. Ainfi parce qu'il eft certain que S. Ber-
iiardcroyoitla prefence réelle, £c tenoit pour hérétiques ceux
.qui la nioient , quand il dit dans le fcrmon qu'il a fait fur fainc
Jvlartin , que la vraye fubflancc de J. C. nous efl anjji fre fente , d^
.qu'il eft indubitable que c' eft dans le Sacrement , haud dubium quin
in Sacramento , il eft certain qu'il entend , non qu'elle eft pre-
fente en figne , mais qu'elie eft réellement contenue dans le
Sacrement.
De même parce qu'on ne doute point que Geofroyde Ven- Gocrredar
dofmenefuftaulh dans cette dodrine , quand il dit, en em- L'ërt''dè''crr.
pruntant les termes de S. k\i2,vS!im ^que pcrfonne ne craigne de porc & lan-
dire que cette chair eft devenue la chair propre ^' naturelle de S"'"'^ Doa«-
"}. C. qu'on le croye en le difant , d^ qu'on l'apprenne en le croyant
G G g lij
4^4 ^'V- ^^' '^^ ^^ ^^^P^ ^^ Jefus-Chrifl
non feulement dans le Sacretnent , in Sacramcnto , ce que ■plufteun
iiupics font av.,IJî , ynais jufquW Li participation de l'Efprit : 1 es Cal-
viniftes ne nieront pas qu'il ne fuppleaffc au fens précis de ce
terme in Sacramento , & qu'il n'entendift un Sacrement qui con-
tenoit réellement )e corps <je J. C.
Ainiî quand l'Auteur du Commentaire furies Epiftres de S.
Paul , attribué à S. Anlelme, employé ce même pafîiige de'S.
Augullin dont il s'agit, & qu'il dit , c'c/l ce qui arnver-a ^fi l'on
nuDi'ic (^ (î l'on boit dans la vcritc jpiritiiellejnent ce que l'on reçoit
vifïblcment en Sûrement^ il eft encore indubitable que par ce-
terme in Sacranicmo , cet Auteur entend un Sacrement qui
contient le corps de J. C. Car il enfêigne un peu après , que le
pain que l'on divife a plu fleurs eft le vray corps du Seigneur, P anis
quem nniltis dividiiniis eft verum corprts 'Domini.
dansfonCom- Ainfî' quand le même Auteur empruntant les paroles de S.
nvtnrine lur , , ^, . , i- i i i ■ „ ' i /- i i:. a i
S, Miitdi. )erome , dit qu au heu de la chair 6c du lang de 1 Agneau il a
fubriitué le Sacrement de fon corps & de fon fang,on ne fçau-
roit douter qu'il n'entende un Sacrement qui contient réelle-
ment le corps de J. C.
\ Et ce qui eft remarquable ^ c'eft que les mêmes Auteurs
qui entendent quelquefois parle mot de Sacrement \\n ligne,
joint à la vérité , quand la matière dont ils parlent les y porte ,
n entendent d'autrefois qu'un pur figne, quand elle ne \qs y.
porte pas.
Ainii Robert PuUus , comme nous avons remarqué ailleurs,,
qui fupplée plufieurs foi au mot de Sacrement, quand il en-
, rend l'Euchariftie par ce terme -, c'eft-à-dire qui conçoit par ce
mot non un pur figne-, mais un Sacrement qui renferme le
corpsdej. C. entend par ce même mot un pur figne , quand il
l'apphque aux anciennes figures du corps de J. C. que Dieu
paît. s.c. r. avoit établies dans l'ancienne Loy. Jly a donc eu ^ dit-il , des
Sacremens du corps C^ du fang du Seignetir qui ont précédé parmi
l'ancien peuple , (^ ils ont eu , pour ceux qui croy oient la même uti-
lité que nos Sacremens ^ non que la figure puiffc avoir la force de la
chofe même , mais parce qu'il a plu a Dieu ^ qui peut tout , de leur
donner alors par la figure , ce qud luy plaift de notis donner far la
vérité.
Tous les Catholiques en font de même ,& prennent ce ter-
me au même fens, quand ilsparlent de ce qui regarde lan-
cienne loy. Mais cela ne conclut nullement , que quand ils-
ejimungêxorporclkmcnt dam t Etichartflic . 415
rappliquenc à l'Eucliariftie , ils l'eutendem auffi d'un figne ex- Ch. XL
cluiif de la vérité.
Ain(î il faudroit avoir prouvé que faint Auguftin ne croyoit
pas la prefence réelle, avant que de pouvoir rien conclure de
ce terme ,piiirqu'il eft certain que s'il l'a crue, il s'en eft fervi ,
en y liipplcanr ce que tous ici Catholiques y fuppléent 5 & le
fuppo(er fans le prouver, c'eft juftcmentle Tophifine qui s'ap-
pelle dans l'Ecole pétition de principe.
Mais , dit Aubertin , il oppo(e in Sacramcnto, à, in ipfci veritate.
Etpar.confequentcomme inipfa vcritateÇ\2^\\\'àt réellement,/»
Sacrumento exclut la realité.
On peut faire trois réponfes à cette objection qui font voir
toutes trois combien il eftinjufte de faire tant valoir une objec-
tion fî vaine.
La première , eft que faint Auguftin n'oppolê pas feulement
en cet endroit ces mots in Sacramento à ceux de in ipfa veritate ,
mais qu'il oppofe toute rexprefllonyî</«^/T/'« Sacramento2.\'3.\i.
treexprelîîon ^manducare fpirituulitcr in ipfi -veritate. Il entend
par la première recevoir corporellemenc J C. dans le Sacre-
ment. 11 entend par la dernière s'en nourrir félon l'efpritdans
la vérité, c'eft-à-dire dans la vérité figurée parla manducation
corporelle. Recevoir J. C. dans le Sacrement, ce n'eft pas ab-
folument parlant s'en nourrir dans la vérité, parce que cette
réception n'eft elle-même que lafigurede la nourriture fpiri-
tuelle. Mais le recevoir fpirituellemenr , c'eft le recevoir dans
la vérité même, parce que c'eft ce qui eft figuré par la récep-
tion corporelle.
Le fécond fens , eft que quoi<]ue ces mots in Sacramcnto fîgni-
fîent davs un Sacrement contenant^. C. ils ne lailfent pas d'eftre
oppofèz à ceux de ipfn veritax , qui fignifient la vérité du corps
&du fang de ]. C. toute pure £c lans figure ni voile, parce
que , comme dit Pafchafe , ce cjui eft cache dans l' Euchariftie f:.i^,f''Doauiii
ri eft point fiquré , mais la. vérité pare : Totom veritas gS nu lia- c. ^.
tenus adumhratioquodintrinfecus percipitur. La manducation ex-
térieure le termine au Sacrement qui contient J. C. Ai;ifi par
cette manducation on reçoit bien J.C. maisj. C. voilé fous des
énigmes & des ombres dontil eft enveloppé, comme parle faint
Denis. La manducation fpirituellc au contraire ne fe termine
pointau Sacrement^ elleva chercher J.C. en luy-même fousle
voile, elle fè nourrit de luy- même fans figure 6c fans Sacrer
4i6 Liv. VI. ^e le corps de ye/ks-. (^hrtjf
ment inipfa vcritate , parce qu'elle a pour objet unique ce qui
cft caché dans l'Euchariftie qui eft purement vérité , &. nulle-
ment figuie. J. C. n'eft voilé dans l'Euchariftie qu'aux Tensiilne
l'eft point à la foy.
S. Auguftin a donc raifon de dire que le corps ôc le fang de
J. C. feront noftre vie , li nous mangeons ficbeuvons fpirituel-
Jement dans la vérité même ce que nous recevons vifibLemenc
dans le Sacrement j c'eft-à dire fi nous ne nous contentons pas.
de le recevoir extérieurement dansle Sacrement , mais que
nous percions par l'eTprit juiqu'à la vérité qu'il cache, & que-
nous nous nourririons de cette vérité toute pure.
V.ts méchans le reçoivent dans le Sacrement, mais ils n'ont
point de foy qui perce le voile. Ils ne trouvent point J. C. ils ne
s'attachent point à luy. Ils ne s'en nourriffent point. Et fi les.
bons le reçoivent comme les méchans fous le voile du Sacre-
ment , ils n'en demeurent pas là néanmoins , ils ne s'arreftent
pointau voile, ils découvrent J .C même, ils fenourriflcntde.
luy même dans la vérité. On reçoit corporcllement le Sacre-
, ment contenant la vérité : mais on n'eft nourri fpintuelkmenc:
que de la vérité même.
C'eft dans. ce même fens quePachymere Commentateur de
îacRym;. m faint Denis , dans le même lieu où il dit que les fymboles font
c. 3 . de Ecclel. ' , /- , o, ^ \ ■ ,-^ i^ i- >
jjjeg. changcz^au corps & au fang de J. C. ne laille pas de dire qu ait
lieu que plufieurs s'arreftent aux fèuls fymboles , ne pouvant
s'c/evcr plus haut ,, le Pontife s' èleve ju [qu'aux prototypes , c'efta-
dire au précieux corps & au précieux, fang de J. C. croyant que les
fymboles propofez^ ont eflé changez^ en ces prototypes. Car cette
contemplation que Pachymere décrit , par laquelle le Pontife
s^'cleve jufqu'aux .prototypes , c'eft l'adion de la foy qui dé-
couvre la vérité même. Mais bien loin que.cetce foy exclue , fé-
lon Pachymere , la créance delà prefence réelle & de latranf- j
rubftantiation,que c'eft de là même qu'elle naift , •7tiq-ix)m ért t* j
^ croyant, dit il, que les donspropofez ontefté changezau corps
ôc au fang de J. C. par le Saint El'prit qui opère toutes cho»
fes.
Quelle difficulté y a-t'il donc dans ce paftàge, en le pre-
nant auquel on voudra de ces deux fens ? Et qui eft-ce qui nous
empêche de l'y prendre ? N'eft-ce pas undifcoursraifonnable,
que de dire que le corps & le fang de J. C. ne font la vie de ceux
, ' . ' q«îi(
ep mangé corporellement dan f V Emhar'tjîic . 417
qui les retçoivent que lorfqu'ils ne Ce concencenr pas de les rece- Ch. X h
voir fimplement dans le Sacrement , mais qu'ils fe nonrriiîenc
de la vertu de ce corps &c de ce fang que la toy leur découvre ,
& qu'ils en tirent la nourriture fpiriruellequiefb la vérité figu-
rée par la réception du Sacrement ? Etcediicours railonnai-)le
lâns doute, & qui ne blefle en rien la doctrme des Catholiques,
ne peut-il pas eftre exprimé par les termes de faint Auguftin :
Tune vita tmicuiquc ent corpus Q- fmguis Chrijii , fi quod in Sa-
crumento vifiLili er j'^mitur , in ij>pi veritate Jpir.tualitirmjnduce'
tur, fpiritualiter bibatur.
Mais le troifiéme fens doit élire d'autant moins fufpec't aux
Calvinillies qu'il eft pris en quelque lorte d'eux-mêmes , & de
la comparaifon qu'Aubertin ^ M. Claude font d'un paflage
tiré de la Cité de Dieu avec celuy dont il s'agit.
Voicy quel eft ce palTage. Ces faroles de j. C. dit faint Au- BeCiv. Def
guftin , Ccluy qui nuiny: ma chair (^ boit ynon funz^ demeure en ^' ^' '•"•-^
fiioy ^moy en luy , noies font voir ce que c'efi que de manger la
chair de J. C. non en Sacrement feulement , Sacramento tenus ^
mais en effet ^ sed reipsa ou rêvera, comme il eftdic en utî
autre endroit du même chapitre.
On accorde donc aux Calviniftes, félon ce troifiéme fens ,
que c'eft la mêmechofede recevoir en Sacronent , in Sacrai
mento ^commt il eftdit dans le paflagedu Sermon dont il s'a-
git , que de recevoir- Sacramento tenus ^in folo Sacramcnto , com-
me S. Auguftm parle dans ce chapitre de la Cité de Dieu.
On convient encore que c'eft la même chofe de dire rece-
voir in ipfa vcritate , comme il parle en un endroit de ces paf-
iages , que de dire recevoir & manger r^i^^";-^?, reipfa^ comme il
parle dans les autres. Mais je dis qu'il faut apprendre de S. Au-
guftin même ce que c'eft félon luy que de recevoir ?r/^y2f.
On ne içauroit propofer une condition plus jufte. Cepen-
dant pourvu qu'on i'obferve, il ne reftera pas une ombre de
diiiiculté dans ces pallages.
Il faut feulement fe fouvenir que félon fâint Auguftin le
principal rapport de l'Euchariftie comme Sacrement , eft au
corps myftique de J. C. c'eft- à dire à la focieté de tous les fi-
delles , Se que dans la dcclrine de ce Père , c'eft ce rapport du
pain & du vin au corps myftique,quiafait que J. C. lésa choi-
lls pour la matière de fon Sacrement.
Il faut encore fçavoir que l'effet principal de l'Euchariftie ,
HHh
4?.8 Liv. VI. ^e le corps de fefùs-Qjtifi
c'eft de nous incorporer au corps myfbique de j. C. c'ed ce qui
fait que faine Aut^uflin s'écrie dans le z6. Traité fur S. Jean :
0 S^icroticnt de pieté j O Jîgne d'unité ! O lien de charité , on ccluy
qui de (ire de vivre trouve ce qui le fuit vivre ! Ou^il s'en approche ^
au il croyc , qu'il fait incorporé , afin qu'il foit vivifié.
L'effet de l'Eucharifbie efl donc de nous incorporer à J. C. Et
elle le fait en deux manières, premièrement parla communi-
cation de l'efprit dej. C. car c'cft eftre du même corps, que
d'cftre animé & de vivre par le même efprit.
Secondement , par le corps même de j. C. qui lie tous les
juftes qui le reçoivent , & qui en fait un même corps. C'eft ce
que les Pères nousenfeignentexpreffement. ^yf« , ditS.Cyril-
I T n p ^^ •> 1^'^ ^'^"■^ fulfions réduits en unité , d" ^l'vec Dieu même g^ entre
j^g. nous , quoique feparez^ d'ame (jr de corps par la difttnBion qui fe
conçoit entre noiis , le Fils unique de Dieu a trouve un moyen qui
efl une invention de fifagcffe (^ un confcilde fon Père. Car unif-
fint dans la Communion myftique tous les fidellcs par un feul corps
■qui ejî le fien propre , /'/ en fait un même corps é' <^'vec luy , f-;- en-
trcux. AtiJJi qui pourrait les divifer , ^ rompre l'union naturelle
qu'ont entr eux , ceux qui font licz^avec J. C. en unité par ce corps
unique! Si nous participons donc tous à un 7nèmv pain , nous ne
fui fans touj qu'un corps ., parce que J. C. ne peut eflre divifé. C'efi
pour cela que l' E<îlife e/l afpellée le corps de J. -C. ^ q^e nous en
foynmes nommc'X^ les membres ^ félon S. Paul. Car nous fotnmes tous
unis A /. C. par fon faint corps , recevant dans nos propres corps ce
corps unique ^ indivifible j ce qui fait que nos membres luy appar.
tienyient plufqv'k nous.
Et ai; liv-re douzième expliquant cet endroit de l'Evangile,
où U efl: dit que les foldats diviferent les habits de J. C. en
quatre parties , mais qu'ils ne diviferent point fa tunique , il
f. i3r^. à^xtqus les quatre parties de ce monde ont obtenu par fort .^ ^ qu'el-
les poffedent fins divifion le faint vcftement du l^crbe , c'efl.k-
dire fon corps , parce que le Fils unique , quoique difiribué k tout
les fi'^elles particuliers , Q- fanBifiant l'ame ^ le corps de chacun
d'eux par SK propre chair, efi néanmoins entier S" fans divi-
fion en tous .^parce qu'il efi un par tout , & que comme dit S. Paulj
il ne peut ejire divifé.
Il dit la même chofe dans le livre quatrième contre Nefto^
rius, 6c il en conclut que c'efl: par l'indivifibilité de ce corps que
les édelles font réunis en un même corps. Le corps de I.C.qui
I Epift.ad
Cor.
eji mxngê corporeUement dans rEucharifiie. 419
e^ en nous , (^ qui n'eji en aucune forte divifé , nous réduit j dit- il , C H . XL
à l'unité.
Enfin c't^L ce qui efl encore clairement enfeigné par faine Hom x^.m
Chryfoftome. Quefl-ce que le fuin, dit- il J c'eft le corps de y. C.
^ que deviennent ceux qui le frcnnent ? Le corps de J, O. non
flufieurs corps , mais un feul corps. Car comme le pain ejî compofê
de plujieurs grains tellement unis cnfemblc ^que les grains ne pa-
roiffent plus du tout } (y- que quoiqu'ils fuljili'ent encore , tcute la
diftinciion néanmoins en eft tachée : Ainji nous femmes unis tj-
entre nous gS avec J. C. Car ii ous n'èftes pas nourris , vous d'un
corps ^ ér celuy-lu d'un autre -^ 7naiî vous eft es nouviis d'u7i mhrîè
corps.
L'incorporation au corps myftique de J; C. eft donc le pro^
pre effet de l'Euchariftie ; mais ce n'eft c]u'en ce que l'Euchari-
ftieeft le corps même de J. C. Ce corps eftant reçu dans les
fidelles , les lie enfemble , & par fa propre unité , & par celle de
fon efprit. Il peut bien eftre prefent dans les m.échans , m.ais il
n'y eft jamais prefent comme lien d'unité , comme fe les affo.
ciant , parce qu'il ne lie à foy que ceux à qui il communique Ion
efprit. Ainfi ce grand efFec d'ellre incorporé au corps de |. C.
par l'union réelle avec fon corps naturel , qui nous communi-
que fon efprit , ayant eflé confidcré par faint AuguAin comme
l'effet principal de l'Euchariflie, il a cru le devoir exprimer par
les termes de w./»;2;irr/f corps dej. c. rcellemeni. Ceux qui le man-
gent enforte qu'ils foient incorporez le mangent, félon ce'iSaint,
reipfk., revera.Ceny. qui le mangent fans cette incorporation ,
ne le mangent o^ç.Sacra7nento tenus ^ ou folo Sacramento yC'cik.
à-dire qu'ils reçoivent le Sacrement de l'incorporation fans re-
cevoir l'incorporation 5 qu'ils reçoivent J. C. dans un Sacre-
ment qui fignifîe l'aiTociation à fon corps , mais qu'ils ne font
point afTociez à fon corps. Ainfi ces mots in S.icramento fignific
lont dans ce fens un fîgne exclufîf , non du corps naturel de,
J. C. m.iis de l'incorporation au corps myflique ,' qui eft félon
S. Auguflin la chofe fîgnifiée par le Sacrement.
Cela paroift clairement par plufieurs autres lieux des ouvra-
ges de ce même Père. Car c'eft dans ce fens qu'il dit au même .
chapitre : Celuj qui eft dans l'unité de ce corps , c'eft-è-dire dans la
focieté des inembres de J. C. duquel corps les fidelles reçoivent le.
Sacrement en communiant l c'eft de celuy-la qu'on doit dire qu'il
mange véritablement le corps de J. C. qu'il boit fon fang. C'cîl-à,.-
HViiiij
450 L I V. VI. ^c le c-yyps de Jefiis-Chrifi
dire que les autres ne mangent pas ce corps , & ne boivent 'pas i
celang vcricablemenc. *
Q'qÙ. dans ce fens qu'il afllire encore qu'on ne doit pas dire
que ceux-là mandent le corps de J. C. <pn ne font pa^ dans le corps
de Je fus- Chriji.
C'eft dans ce fens qu'il dit de tous les médians ^quil ne faut
pas dire qu'ils mangent le corps dej. C. parce qu'ils ne doivent pas
eftre comptex^au nombre de fes membres.
Enfin c'eftdans ce fens qu'il dit ce qu'en rapporte Aubertin,
dit-il par ces ^zvoXas-.Celuy quimany: ma. chair (y- boit mon finir
demeure en moy & moy en luy ^J-C. fait voir ce que c'efi que tnanoer
fon corps ^ boire fon fang , non quant au Sacrement , mais dans la
vérité j non Sacramcnto tenus , fed rcipfa. Car manger le corps 6c
boire le iang de I. C. en cette manière , c'efi: demeurer en J. C.
afin qu'il demeure en nous.
Et parce que c'efl: par cette demeure de J. C. en nous & de
nous en luy qu'il nous rend ks membres , il conclut de là que
ceux cjui ne font pas les membres de J, C. ne demeurent pomt
qn luy. Nonitaquc mancntin Chnfoqui non funt membra ejus.
Il paroift donc clairement que quand S. Auguftin dit que les
médians ne mangent point le corps de J. C. revera^\\ veut dire
qu'ils ne demeurent point en luy, qu'ils rve luy (ont point m-
çorporcz • 5c que quand il dit des mêmes médians qu'ils le re-
çoivent 5jfrir?«i'«/'«' tenus, infolo Sacramento ^\\ ne veut dire
autre choie, fînon qu'ils ne reçoivent que le Sacrement de l'in-
corporation fans recevoir l'incorporation. Et c'efl encore ce
qu'il exprime dans'le 16. Traité fi-ir S. Jean, quand il dit : le Sa.
er- ment de cette chofe , c'efl- à- dire , de t unité du corps d^ du fang
de y. .C. ef préparé fur la table du Setyieur,& il en c fi pris par quel-
ques-uns pour la vie , t^ par les -autres pour leur propre perte yCn ccr^
tains lieu.x tous les jours , ^ en d'autres dans certains intervalles de
jours. Mais la chofe de ce Sacrement cft toujours catife de vie , ^
jamais de mort a ccluy qui y participe.
Et plus bas expliquant ces paroles : M^a chair cfi vrayment
•viande , (jr- mon fang cft vrayment breuvage. Zcs hommes , dit- il ,
ayant pour but dans le manger O" h boire de n'avoir plus de faim ni
de foif , ils ne peuvent attendre véritablement cet effet que de cette
viande ^ de ce breuvage qui rend immortels (^ incorruptibles ccu.v
qui les prennent. Et cette viande ^ ce breuvage\ font lafocieté
des Saints où il y aura ifne paix entière ^ ^ une unité pleine ^par-
faite.
ejî ffiAngé corporellement dans [Eucharifiie. 431
Mais pour bien entendre cette doctrine de S. Augiiftin , il ne Ck. X I.
faut pas prendre l'explication qu'il donne ici à ces paroles : Caro
mca verè cfl cihus , comme entièrement allegorie]iie , fie comme
n'ayant rien de commun avec la participation au corps naturel
de J. C. par TEuchariftie. Car encore qu'il en parle obfcurc-
ment, parce que la prelence des noms initiez, comme il le mar-
que dans ce fermon même , l'obligeoit à une grande retenue à
l'-cgard decemyftere,il eft clair néanmoins en joignant les prin-
cipes de fa dodrine avec celle des autres Peres^que quand il par-
le de la focieté des Saints, comme d'une viande & d'un breuva-
ge, il entend la participation ou l'incorporation à cette focieté,
^ qu'il veut que la réception de l'Euchariflie foitle moyen de
cette incorporation. Or elle ne l'cfb', félon les Pères , que parce
que nous y recevons le corps même de J. C. qui nous unit à fon
corps myflique, & par fon corps naturel bc par fon efprit.
Ainfi les Miniftresfe trompent dans l'intelligence de ces pa-
roles de S. Auguftin , &:à l'égard desbons &ài'ëgard des mé-
dians : Ils fetrompentà l'égard des bons, en s'imaginant que
ces }pa.r oies ^manger le corps dcj. C. véritablement ,fprituelle.
7}ient ^ dans la vérité ,(\uq ce Père rend particulières pour les
jufles , n'enferment point , félon luy , la prelence réelle & cor-
porelle du corps de J. C. dans ces juftes. Car encore que ces
paroles fignifient precifémenc , félon le lens de S. Auguflin ,
l'incorporation au corps myflique , & la participation à î'efpric
de J. C. qui nous rend membres de ce corps ^ elles enferment
néanmoins la prefence réelle par une confequence neccffaire ,
parce que le moyen ordinaire de cette communicarion du
S. Efpnt & de cette incorporation , cfl , félon les Pères , la
prefence réelle du corps de j. C. dans les noflres.
\ Ils fe trompent à l'égard des médians, en s'imaginant que S,
Auguflin les exclut de toute participation à la chair &; au fang
deJ.C. parce qu'il dit qu'ils ne mangent le corps dej. C.quVw
Zaerartiento ^owSacra^nento tenues .Q-3iX^ il eft vifîbleque par ces mots
inSacramento^on Sacramento tenus ^ il ne les exclut que de l'mcor-
poration à J. C. & de la réception de fon efprit , qui nous fait
membres de fon corps, puifquec'efb cette incorporation qu'il
entend par les mots de manger le corps de J. C. in veritate^ re.
vera , reipfa i mais quand il s'agit de la feule participation réel-
le de la chair de J. C. il joint les méchans aux jufles. Et c'efl ce
qu'ilmarque clairement parla conclufîon qu'il tire de tout ce
HHhiij
431 I^iv. VI. ^etè corps dé Jejus-Qjrifl'
dilcours en ces termes : Que tout cclanous jcrve^ mes chers frères ,
afin que nous ne mawiions pas la chair de J. C. é^ fan fang feule,
ment dans le Sacrement^ tantum in Sacramento : ff qui efi:
commun a/pltifcurs mechans ; mais que nous many.ons fa chair (^
bcuvions fonfangjufquù la participation de l' Efprit^ afin que nous
demeurions dans le corps de J. Q. comme f s membres ^ ^ que notes
foyons animez^par fon Efprit^.
Ce partage écLiircic admirablement toute la doclrine de S;
AiigLiftin à l'égard des juftes & àas mechans , Se le rend parfak
temenc conforme aux autres Pères.
Cequeles.jufîesont pardefliis les mechans, félon luy, ce n'eft',
pas de manger la chair de J.C. mais de la manger ufquc adparti-
cipationem Spiritiis. Et par confequent les mechans , félon luy,
mangent la chair & boivent le fang , quoique fans participera
fon Efprit. Autrement les juftes leroient doublement diftin-
guez d'eux , en ce qu'ils participent à fon Efprit , fie en ce qu'ils,
participent à fa chair i au lieu que S. Auguftin ne reconnoift
qu'une feule diftiniftion , qui eil qu'ils participent à i'efprit de.
J. C. & que les mechans ne le font point.
La manducation des juftes, félon S. Augufl:in,enferme la par-
ticipation à i'Efprit de J. C. & cette participation à la chaire:
à Tefpric de J, C. nous fait membres de fon corps myflique.
Ainfi comme elle efl: infiniment différente de celle qui convienÊ-.
aux mechans , on ne doit pas s'étonner s'il dit , qu'ils ne man-
gent que dans le Sacrement, parce qu'ils ne reçoivent point
cette incorporation, quoiqu'ils reçoivent le Sacrement qui en.
eil: le figne.
Voilà quelle efl la dodrine de S. Auguflin fur lefujet de la-
manducation du corps 6c du fang de J. C. Et les Miniflres n'y
trouvent tant de ténèbres , que parce qu'ils ne veulent pas , .
comme l'équicé le demande , joindre enfembîe tous ces prin-
cipes , ôcconfiderer cette manducation par rapport à laraifon,
à la doftrine de ce Père £c à celle de. tous ceux de fonfiecle,
dont on ne doit point le feparer.
On pourroit produire encore quantité d'autres pafTagcsde ce ■
S. Docteur ^ mais comme ils ne difent viffL>lement que la même
chofe que ceux que nous venons d'ëclaircir, &c qu'ils ne contien-
jijenc aucune difficulté particuliere,ilferoit inutile de s'y arrêter^.
'éjî mangé corporelle ment dans TEuchxrifiie. 43^
CHAPITRE XII.
^2»'// ejl naturel que Ion dife ^ fuivant la doflrine de la prefcnce
réelle , que J. C. cfi prefent fur la tirre ^ abfcnt
de la terre.
LA confequence la plus immédiate de la doctrine de la
Tranflubftantiation , c'efl: que J. C. efl: prefenc fur la terre
& parmi nous: mais comme cette dovftrine n'exclut pas toute
forte d'abfence , elle ne doit pas exclure non plus toutes les ex-
prelfions qui marqueroient qu'il en cfi: abfent. Quelque
prefent qu'il y foit , nos fens ne Tapperçoivent pas , 6c ils
font au même état à fon égard, que s'il n'y eftoit point du
tout.
Il efl: vray que nousne^ifonspas pour cela que Dieu foit ab-
fent de nous , fi ce n'eft par métaphore ^ mais c'eil: d'un cofl-é
qu'il efl: prefent par tout , &i de l'autre que nous fçavons que
fon eft;re tout fpirituel ne nous a jamais efté ni ne nous fçm-
roit eftre prefent d'une prefenc e fenfible. Mais quand il s'agit
d'un corps, nous en parlons autrement, parce que nousconnoif-
fons une autre prefcnce des corps. L'idée que nous en avons
enferme une prcfence qui fait imprefîlon fur les fens , & qui
s'apperçnit par les lens. Nous fçavons d'ailleurs que le corps de
J. C. a efté autrefois prefent en cette manière fur la rerre- Nous
jçavons qu'il l'eft maintenant auffi dans le Ciel. Ainfî nous nous
Tentons privez d'iin bien dont les hommes ne lont pas inca.
pables, & dont ils ont en effet joui. Et cette privation s'ap-
pelle naturellement abfence , puifque c'efl la privation d'une
efpece de preience , -& de l'efpece la plus connue, & la feule
dont nous ayons naturellement ridée. '
On voit déjà qu'il s'enfuit de là que les Pères ont dû dire , &
que J. C. nous efl prefent , & qu'il eft abfent de nous , & que
dans la doctrine de la prefencc réelle cesrernies s'allient natu-
rellement, quelque contraires qu'ils paroiiient. Mais il efl bon
d'en donner d'abord des exemples dans les Auteurs mêTnes,qui
ayant vécu depuis la naiflancede l'herefiedesSacramentares,
ontefté plus appliquez à éviter tous les termes dont ils rirc-ient
avantage , Si n'ont employé que ceux qui expriment fï precifç-
454 Liv. VI. ^e le corps de Jefus-(^hrifi
ment les idées naturelles , qu'il eftoic prefque impofTible de
s'en abftenir entièrement.
Celles qui reprefententJ.C. comme abfent de nous font ab-
folument de ce genre. Comme nous ne le regardons prefenr
que dans le Ciel de cette prefence corporelle dont nous avons
une idée dill;incte,nous fommcs portez à nous fervir d'expref-
fions qui ne le reprefentent que dans le Ciel , èc comme abfenc
de toutç la terre.
Et l'on va voir des preuves de cette inclination dans les Au-
teurs les plus attachez à la doctrine de l'Eglife Catholique teI-~
le que nous la concevons.
On ne r(^auroit douter que S. Bernard ne foit de ce nombre
après les preuves qu'il en a données. Cependant il marque
enplufieurs endroits que J. C. eftabfent de nous ^ & que nous
fommes privez de fa prefence corporelle.
De Afccnf. Il dit qu'il eftoit Utile aux Apoftres que la prefence corporel-
lerni. i. jg (^^g j_ Q j^^j. p^,(^ fouftraitc : Expcdlehat ut prafentiam eis fub~
firahcret corporaletn.
Il dit quele S. Efprit n'a pu defcendrefur les Apoflres tant
que J. C. a efté fur la terre j Chrifto commorante in terrts Spiri-
tus Sancius vcnire nonpotitit. Il n'y eft donc plus, diroient les
Miniflres. Il eftvray qu'il n'y eft plus de la manière que faine
Bernard l'entendoit.
Il parle encore plus exprefTément de cette abfence dans le
Scnn.deAdv, premier Sermon fur l'Advcnt. Caraprésavoir dit que \q. Ver-
be Cjl defcendu du haut du Ciel jufqu aux pkts baffes parties de la
terre , il â]o{ne , ne faut-il donc pax nous attacher à la terre ? il le
faudrait fans doute , s'ily eftoit demeuré. Car où pourrions-nous eftre
bien fans luy ., ^ avec luy , où pourrions nous eftre mal j Et c'efl
de 1.1 qu'il conclut avec l'Apoftre , qu'il faut s'élever au Ciel
parce que ]. C. y eft.
Ainfî, félon S.Bernard , il eft vrayen un certain fens que
J. C. n'eft point demeuré fur la terre , non pcrftitit in terra , ôc
nous ne pouvons eftre bien , parce qu'il n'y eft pas.
Mais que ne diroient point les Miniftres de cette divifîon
qu'il fait des avenemens dej. C. Comme il eft venu, dit il ,«»i?
fois dans une chair vifible au milieu delà terre pour opérer le falutjl
vient aujji tous les purs en efprit ^ d'une manière inviftble pour
fauver chacun de nous : SicuT ad operandam falutem in média
terrée venit femcl in carne vijibilis , ita. quotidie ad falvandof
animas
efi mange corporellement dans ÏEuchariflie. j^.^^
animas (iri'iîdcntyn in fpiritu vaut invifibilis. N'ya- t'il donc pas , Ch, XII.
diroienc-ils , une troificme manière de venir , (çavoir avec une
chair inviilble i&.d'où vient que iainc Bernard n'en fait point
mention? Mais laréponfe eft bien ailée. C'cft que quand on
parle naturellement comme luy , on n'eft point allervi aux rè-
gles du langage des Miniftres. On ne fe croit point obligé de
faire en tous lieux des divifions exades ,& de définir les ter-
mes comme les Géomètres j &: l'on le contente de marquer les
efpeces les plus communes , &;qui fe prefentent les premières
à. l'efprit , foit que l'on parle , ou qu'on écrive.
Ce n'eft pas le langage dufeul laint Bernard. Tous ceux qui
ont eu occalîon de parler du même fujet , font tombez dans
les mêmes exprelTions par le penchant de la nature. Vuifque Serm.<!fAf-
nous fommes privez^de la prcfence eorporelle de J. C, dit Yves de i^^"'*"'^^'
Chartres , cffcrcons- nous avec toute l'ardeur de ncjlre caur de par~
•venir a l'éternelle. )
Hugues de faint Viéloroppolê la feule prefence fpirituelle à
celle que J. C. nous a fouftraite par fon Afcenlion, comme s'il
ne reconnoiflbit que deux forces de prefences.
J. C. dit-il,^ï converfé avec les hommes félon fa -pr-efence corps,
relie , afin de les élever a la prefence fpirituelh , (^ ayam achevé
Can œuvre ^.il s' efi retiré félon la prefence corporelle .^ mais il efi
demeuré félon la prefence fpirituelle : fecundùm fpiritualem re-
manfit.
Pourquoy ne parle- t'il point de« la prefence Sacramenrale , v^yvjpAer,.
s'il la croyoir , devroient dire les Miniftres ? Cependant il eli J^l'^n'' 'Jt '^''^
fans doute qu'il la croyoic , comme il eft fans doute qu'il n'en
parle pas en ce lieu- là, quoiqu'il la dût avoir d'autant plus pre-
lente à l'efprit qu'il en avoit parlé dans tout le refte de ce dit
cours. Mais c'eft qu'il n'y a rien de moins naturel que cette
exactitude plufque géométrique-, àlaquelle les Miniftres vou-
droienc que tous les Auteurs le fulTenr airujettis.
Ce langage des Anciens aeftéluivi par les nouveaux , parce
qu'il eft prelque impoflible de ne le pas fuivre. Puifcjue la fv-u.-
veraine félicité ^ dit Grenade, confifte dans la prefence dit Sei-
<zneur , (^ /jue cette prefence nous efi ofiée dans cet exil , quels efforts
ne devons-notis point faire pour y- parvenir?
Et ils le fuivent même dans les livres de Controverfes , où
l'on eft en quelque forte plus fur fes gardes ; tant il s'allie na-
Éurellenrienc.avec ce que la foy nous fait. croire des myfteres;.
Uï.
43^ Liv.Vl. J^e le corps de Jefus.Qmfi
Feu M. l'Abbé de Bourzei, dont la capacité ne doit pas eftre
inconnue aux MinKtres qui l'ont fouvent éprouvée &: de vive
voix & par écrit ,, parle de cette lorte dans r.n difcours ou'il
adrelFc à Monfieur le Prince Palatin. J. C. dit il , ravijfamfon
propre corps aux yeux des Apofircs , pour les confoler de fèloigne-
mcni de celuy qu'ils alloient perdre _, voulut leur en laiffcrun autre ,
mais qui fujl vifible d^ matériel ^ comme celuy qu'il avoit pris de la
Vterqe Mère , ^ quil devait Joujiraire k leur vue , en lefaifani
monter au Ciel.
Ne feroit-ce donc pas la prétention dumonde la moins rai-
sonnable , que de vouloir que la doclrine de la prefence réelle
air dû empêcher les Pcres d'ufcr du même langage, 8c de dire
que J C. eft abfentde la terre, que nous fommes privez de fa
prelcnce , & qu'il s'eft retiré du monde félon Ion humanité ,en
y demeurant (elon la divinité ?
Neluffit-il pas qu'ils nous aycnt également enfeigné l'une
&; l'autre de ces veritez , & que J. C. s'eft retiré de la terre , 6c
que nous l'avons encore iur la terre ? Et le fens commun n'al-
lie-t'il pas de luy-méme ces deux veritez ,puifqu'il nous fait
voir d'une part que J. C. ne nous eft plus prefent d'une ma-
nière vifible ,&:de l'autre que c'eft aflez qu'il ne fort plus pre-
fent de cette forte , pour dire en un certain fens qu'il eft ab-
fent ?
Ne fuffit il pasqucles Pères qui parlent de cette abfence de
J. C. foient ceux mêmes qui enfeignent le plus pofitivemenc
la prelence réelle, &: fouvent dans les lieux mêmes ou ils la
marquent ?
c.uli?c. 14. Ilefi abfent maintenant félon la chair , dit S. Cyrille de Jerufà-
lUuai. lem , e^ cependant il eft reçu fur la main droite comme fur un trbne ^
f . niyft. iltuuche nos yeux , il ejl dijlribuc dans nos membres .
iiiEvnng. -Les Apioflrcs 3 dit S. Chryfoftome, ncftoient point dans laf-
Ib Ed Vl* fliciiun pendant que J. C ejloit avec eux , mais après qu'il s'en fut
Cor.'hom. i<.. a/lé. Il z douc quitté les Apoftres, il s'en eft al!é;,& cependant
'i'^''i^''^!i'' ft-'lon ce même Père, jjous avons devant nous fur la terre ce qu'il
Ei>li7hoin,,}. y ^'de plus précieux dans le Cief fcavoir le corps même du Roy. Ce
Hoiu.iiiEi'. corps qui eflaffiilk haut avec le Père Eternel eft touché des mains
1 Hcbr.
Hoinirde '^ ^°^^- ^^ ''fi ^''"* t^^'^ ^'^ temps entre, les mains. Celuy qui efi ajjii
^cro-pli. a la droite de fm Père eft icy. il y eft véritablement prefent ,
S. Cyrille d'Alc>:andrie enfeigné û formellement i'.une&
efi ma,ngê corporeîlement dans î Euchar'ifiïe , ^yj
l'antre venté de la prefcnce êc de rabfence de J. C. que ici Ch. XII.'
Minillres mêmes fe lont partagez lur (on efprit Car comme
Aubertin qui eil incapable d'eilre perfuadé par l'évidence , ne
laiife pas d'abuler contre les Catholiques despafi^gesde ce Pè-
re . qui marquent l'abfence de J. C. il s'eft trouvé au C(n-.traire
d'autres Calvinifles^ qui n'approuvant pas la conduite de Tains
Cyrille contre Neftorius , ont prétendu le décrier parmy
ceux de leur fccle , comme enfeisinant clairement la prelence
'Il
réelle.
Ce font les extremitez contraires où les hérétiques ont accou:-
tumé de fejetter en prenant pour contrad:cl:oire ce qui ne l'ef}:
pas. L'Egliié Catholique Ibit un procédé tout opporcjâc qu-ind
elle a des marques certaines qu'rl fautprendre fans métapho-
re ce que les Pères enici2;ntnt , elle n'abandonne pas des veri-
rez claires fur des apparences de c.oncradiclion qui f-ont fifaci.
les à démêler. Elle reçoit donc avec foumiflion ce que S. Cy-
rille enfeigne en tant de lieux , que J. C. efi en nor/s Lins nos en-
trailles , far [on corps , par fa chair , far fu -propre chair, qu'il entre ,
qu'il s'infinuc ^ fe mêle dans nés membres ; qu'il nous cormv.uniqiie
la vie par [on corps ^ quil e[î indnhitahle que non^ rcffufcitcrons ^
parce qu'il efî en notis , ^ qu'il nous joint enfemble corporcllc7nent
^ fpiritnellcîncnt f ar jon efprit ^ par fon corps ,^xvA\q z\yx.xç.s
expreflions aufîî fortes qui ne fe peuvent prendre pour méta-
phoriques fins renvcrfcrtout le langage humain , & par confe-
quent toute la foy. Et elle n'a garde d'abandonner des veritcz
ï\ claires, fur le vain prétexte qu'il fe trouve en d'autres en-
droits du même S. Cyrille , que J. C. eft abfent de nous , qu'il
n'eft plus avec nous par fa chair, &: qu'il y eftparfon efpnt. Ce
qui fe trouve aulTi dans plufieurs lieux de S. Auguflin.
Car qu'eft-ce que toxisces pafTages difent que ce que nous
avons vu dans ceux des Auteurs pofterieurs au fiecle de Be.
renger que nous avons citez, comme dans le palfage dep-îugues^
de S. Viftor, qui nous atllire , quej. C. s'efi retiré félon la pre-
fence corporelle ^ mais qu'il efi demeure félon la fpiritucHc : Se-
€UN DU M pK-efentiam corporahm rèce.ffît ^fedfccundùm fpiritualem
remanfit.
11 eil: donc ridicule de chercher des preuvescontre la prefen-
ce réelle dans des pafîages de cette nature.Que fi l'on demande
maintenant' comment des Auteurs perfuadez de cette créance
ont pi'iparlcr delà forte.il eft facile,comme nous avons dit,d'en
ïli ij
1. -j in Evang.
l-c,i.
458 Liv. VI.. ^e le coyps de Je/us -Chrifi
chercher la raifon dans la manière donc refpric humain con-
çoïc ordinairement leschofes. Car il faut par necelîîcc que les
idées qu'il fe forme fur l'dcac naturel des choies luy loienc
beaucoup plus prefentes que celles qu'il fe forme fur ce que
Dieu fait par fa toute-puillance contre fes règles de la nature ,
parce que les premières font fans ceiTe renouvcllées par tous
les objets ^ au lieu qu'il fout une application particulière de
l'efprit aux veritez de la foy pour former les autres.
Or l'idée naturelle que nous avons de la prefen ce d'un corps
n'eftant formé que fur l'impreiîîon que nosfens reçoivent des
corps que nous appelions prefens^c eftfans doute celle d'une
prefence fenlible , 8c l'on eft naturellement porté àconfiderer
:omme abfens les corps qui ne font pas preîens en cette. ma-
nière.
Nous avons donc une pente naturelle à regarder le corps de
J. C. comme abfent de la terre , & à le confiderer dans le Ciel
où il eft prefent de cette manière de prefence que nous connoif.
fons. Et pour cette prefence qu'il a dans le Sacrement, comme
nous n'en fomraes frappez que lorfque nous l'y confiderons
exprelTement:, nous ne iommes portez à en parler que lorfque
nous parlons expreffement de ce myftere.
Hors de là les idées ordinaires reviennent 5 &: comme nous en
avons deux à l'égard de ]. C. l'une pour fon humanité , qui eft
celle d'une prefence feiifîble, l'autre pour fa divinité, félon la-
quelle nous concevons qu'il eft par tout , il n'eft nullement
étrange qu'il n'y ait que ces deux idées communes qui fe pre-
fentent à l'efprit ,&queron dife ainfi quej. C.s'eft retiré de
ce. monde félon fon humanité, parce qu'il a cefle d'y eïlrc vilî-
blement ^ & qu'il y eft demeuré félon fa divinité.
Ce n'eft pas que cette divifion foit exacte , puifqu'outre les
deux manières de prefences , il y en a une troifiéme qui eft la
prefence.invifible des corps. Mais commec'eft uneprefencemi-
raculeufe, extraordinaire, incomprehenfible, furnaturelle, elle
n'entre pas dans les divifions où Tonne confiderequelesefpe-
fcs naturelles &; ordinaires. Elle ne fe prefente pas même alors
à l'efprit, fi ce n'eft rarement, comme elle s'cft prefentée à
S Ainbroife , quand il a écrit: JV/ Caiflieni Pihnc n'ont pof cala
puilfancc de nous ravir I. C. (y- nous ne pouvons jeûner , comme fi on
nous avait ofiènoflre Epoux ^farce que nous avons I.C. (j;- que nous
nous nourrijfons cie fpncorps d^ defonfang.
efi mangé corporellement dans rEuchariflte. 439
Les Miniftrespropofent d'ordinaire contre cette dodrine un Ch. XII
paflage de S Chryfoftome , où ils prétendent que ce Saint ex-
horte les fidellesà chercher J. C. dans le Ciel au moment mê-
me de la communion.
M. Claude fait des merveilles fur ce paflage j & comme je m. ciauJc t.
me fuis quelque part obligé d'en parler, je prendray cette occa- |^^P-i'"^" ^•'^'
fi-on de dégager ma promelîe. Voici le palFage dont il s'agit.
C'efi à cette union ynutticUe que cette terrible O" redoutable viEii-
me nous invite. Elle nous commande de nous approcher d'elle avec
tin cfprit de paix ^ ^^ qtiainfi cflant faits des aigles , nous nous éle-
vions jufqu au Cielméme. Car là oie [craie corps mort , la feront auljî
les aigles. Jl appelle fon corps un corps mort ., parce que s'ilne fujî
mort ., nous ne nous ferions jamais relevez^ Jl nous appelle aujfî des
aigles ^ parce que ccluy qui s' approtkc de ce corps doit sftre tout ce-
lefîe , ^ ne plus tenir à la terre j qu'il ne doit pas fe traifner ni ram-
per icy bas , 7nais fe porter en haut d'un vol continue f regarder le
Soleil de juflice , î^ avoir l'œil de l' entendement clairvoyant. Car
cette table efi la table des aigles ^ non des corneilles.
AubertinSc M. Claude concluent de là quepuifque S. Chry-
foftomeveut qu'on élevé fon efprit au Ciel pour y chercher
J. C. il ne croyoit donc pas qu'il fuft: fur la terre, n'y ayant
point d'apparence de l'aller chercher fi loin , s'il eftoit fi prés-
Alais que ces raifonnemens Font bien voir que ces gens ne
conçoivent les chofes de la Religion que d'une manière bafle 6c
charnelle, & qu'ils n'ont nulle part à cet efprit dont les Saints
ont efté animer j & qui les a. fait parler de cette manière !
Pour faire fentir leur égarement, il n'y a q«'à demander (î
quand J. C. nous commandoit de dire à Dieu dans la prière
cju'il n(^us a prelcrite; Noflre Pcrcqui cfles dans les Cicux^xX nous
vouloit faire croire qu'il n'eftoit pas prefent au milieu de nous?
Ç\ le Prophète qui diioit à Dieu : fay élevé mon ame vers vous ^
Seigneur^ qui habitez^dans les C/Va.'c, étoit perfuadé que Dieu n'é-
toitaae dans le Ciel , & fi ceferoit bien rai(onner que de dire
lur cette prière de David , à l'imitation d'Aubertin : Qui d ne.
ceffc foret c terra in coclum voLirc,fi pcrpropriamfubflantiam Deum.
hubcremus in terra pra:fentcm ?
C'eft par ces faufies & honteufes fubtilitez qu'Epifcopius Se
les Remontrants qui les ont tirées de l'école des Calviniftes ,
ont depuis attaqué la plupart des myfteres que leurs maiflres
avoient épargnez, Scentr'autresla prefencede Dieu dans tous
•es lieux du monde. Ili lij
440 Liv. VI. ^e le corps de fefus-Chrifi
Mais pour les Catholiques, ils n'ont aucune peine à refifter
aux uns & aux autres, & à foûtenir également contre les Re-
montrans, que ces paflagesqui portent à regarder Dieu comme
prelenc dans le Ciel d'une manière particulière, ne doivent
point empêcher qu'on ne le croye prefent par tout ^ & contre
les Calviniftes , que c'cR une choie tres-fainte & tres-confor-
me à la doclrine Catholique d'adorer en même temps J. C.
comme prelent dans le Ciel & fur la terre , &au même temps
que l'on reçoit Ton corps icy bas, d'élever fon efprit à ce même
corps refidant à la droite de Dieu. Chaque vue a fes utilitez.
Si celle cy nous remplit plus de l'admiration defa bonté & de
Ton humilité : l'autre nousinfpire plus de rerpect, en nous met-
tant plus vivement fa majefté devant les yeux. Si l'une nous in-
ftruit davantage de ce quenous luy devons , pour avoir bien
voîilu demeurer parmi nous 5 l'autre nous détache davantage
de la terre , en faifant que nous nous reprefentons à nous-mê-
mes comme éloigne? & bannis de noflre patrie & du bonheur
où nous afpirons. Si l'une nous porte plus à l'amour, l'autre
excite plus noftre efperance. Et comme tous ces mouvemens
doivent eftre joints dans l'ame fidelle, l'Eglife en joint auffi les
motifs en portant fesenfansà confiderer J. C. de cette double
manière. Et c'eft ce que l'Eglife Grecque fait exprefîémcnt par
cette prière de fa liturgie -. T^oas qui eftcs aljts dans le Ciel avec
voflrc Pcre , ^ qui cfies icy invijîblemcnt avec nous ^ daignez^par
•uofire mainpuiffante nous faire partici-pans de vofire corps tres-pur
(jr de vo[ire précieux fan^ ,. ^par nous tout le peuple.
Voilà cequ'on diroit avecraifon à Aubertin &à M. Claude^
quand il feroit vray que S. Chryfoflome nousauroit voulu por-
ter à aller chercher J. C. au Ciel dans l'afte même deiia com-
munion. Mais ils font fî malheureux en preuves, que quoiqu'ils
n'en puiîènt rien conclure , il fe trouve de plus que S. Chryfo-
ftome ne dit rien moins que ce qu'ils luy font dire. Car il eft
clair qu'il n'entend point parler d'un certain afte de devotiori
qui fe doive pratiquer àlacommunion, mais d'une difpofirion
permanente où doivent eftre les fidelles qui s'en approchent,&
qui efl fortifiée par la communion même, il faut , dit il ^que ce-
liiy qui s'approche de ce corps , foit élevé , qu'il ne tienne point À
la terre , quil ne fe traifne point ^ ne rampe point icy bof ,.
mais quil vols inccffamrncnt en haut , à,m •nlxi'ta.i J^iytti'
eji mangé corporellemmt dans tEuchmfl'ie. 44I
Ceft donc une difpoficion perpétuelle qu'il exprime , êc non Ch. XII.
une action pafîagere. Et c'efl encore ce qu'il marque bien net-
tement, lorfqu'il àït^que cette redoutable hostie nous com-
mande de nous approcher d'elle- même avec une chanté h iiLmte , qui
nous rendant des aiqles nousfaffe voler dans le Ciel. Car cette cha-
rité eftant une dilpofîtion permanente,el!e a toujours pour efFcc
de nous rendre aigles, & de nous élever vers le Ciel. Et S. Chry-
foftome ne prétend pas que cela fe faiïe plûtod dans l'acte de
la Communion qu'en un autre temps. Mais cettecharité qui
nous rend aigles félon luy , qui nous fait voler vers le Ciel , qui
nous aflemble autour du corps de J. C- nous fait trouver ce
ciel & ce corps dans l'Euchariftie.
Et c'eft pourquoy il marque exprefTement que ces aigles s'af-
femblent à cette table : Ce n'efipas , dit-il , la table des corneilles^
2w.?;;j-(^^/^/g/w,& qu'ils s'y approchent du corps dej. C. Celuy,
dit-il , qui s'approche de ce corps , c'eft- à- dire du corps de J. C.
dans l'EuchaFiftie, doit ejlre élevé (^ ne point tenir à la terre ^mais
voler inceffamment en haut. Il n'entend donc pas le ciel à la let-
tre , puifque cette terre qu'il y oppofe n'eft pas la terre où nous
fommes, àlaquelleil eftimpoflible que nous ne tenions point,
mais les pallions terreftres dont il veut que nousfoyons déga-
gez. Cependant c'eft fur cette oppofition du ciel à la terre
qu'Aubertin prétend que S. Chryfoftomea voulu parler du ciel
véritable : T^fiatur fe pcr cœlum locum fuhlimem intcHigere terra:
çppojtium , &; qu'il prend fujet de quereller Bellarmin qui fou-
tient le contraire 5 an lieu que c'eft juftement cette oppofition
à une terre métaphorique qui fait voir que ce ciel n'eft qu'un
ciel métaphorique.
CHAPITRE XIII.
Que la confideration de l' Eucharijlie comme mémorial de laPadîon
de J. C. n'efi point contraire a la prefçnce réelle.
ILn'yauroitriendeplusaifé que de fuivre dans l'examen de
ce point la même méthode qu'on a fuivie dans les autres,
c'eft à dire de faire voir d'abord par l'exemple des Ecrivams
Catholiques qui ont écrit contre Berenger, que cette vue de
i'efprit qui regarde l'Euchanftie comme mémorial de J. C.
44Î. Liv. VI. ^e le corps de Jefus-Qjrifi
crucifie n'a rien de contraire à la fov de la preience. Mais parce
que M. Claude demeure d'accord de ce langage , &: qu'il cite
luy même dans Ton livre contre le Père Nouée un endroit de
Pierre Lombard, où l'Euchariftie eft appelléeun lacrifice&;a«<f
obi at ion , parce que ce II ht mcmoire du facrifice de la croix : que
toutes les prières de l'Églife retentiflent de ce terme àcmemoi-
re, que l'on y appelle par tout l'Euchariftie mémorial de la mort,
de J. C. Omemoriale mortis Domini ! que l'on y chù.x\tt y que I. C.
nous commandé de célébrer ce myfiere en msmoire de fa mort , je
crois pouvoir fLippofer ce langage comme autonfc par toute
l'Eglife depuis Berenger i &:il ne refteplusqu'à demander aux
Miniitres pourquoy il leur plaift que ces deux vues de l'efprit y
dont l'une regarde l'Euchariftie comme mémoire de J. C. 6c
l'autre regarde J. C. comme prefent, qui fe font fi bien accor-
dées depuis 600. ans dans l'eiprit de tous les Catholiques, ont
dû fe combattre neceffiirement dans celuy des Pères.
Je n'ay qu'à leur demander par quelle raifon ib veulent bien
qu'on fe puifî'e fouvenir de Dieu comme David : Memor fvi
JDei é^ dcleciatus fum : &, fe fervir même de toutes les images
que l'on veut pour s'en renouveller fa mémoire , quoiqu'il
loit aduellement prefent dans toutes ces images & par tout 5 Se
qu'il ne foit pas permis néanmoins de fe fouvenir de J. C. pre-
fent d'une manière invifible dans l'Eucharillie ^ & de fe fervir
de l'extérieur de l'Eucliariftie pour renouveller ce fauve.-
Dir ?
je n'ay qu^à leur dire, comme on a dcja fait,qu'il n'y a rien de
plus vifiblement contre le fens commun que ce principe ima-
ginaire que la mémoire fuppofe l'abfence. Car la mémoire
n'eft oppofée qu'à l'oubli , & nous pouvons nous fouvenir de
routes îeschofesque nous pouvons oublier. Or nous pouvons
oublier une infinité de chofes prtfentes, parce qu'elles ne frap-
pent pas nos fens. Nous n'oublions que tropfouvent Dieu en
qui nous fon>mes , &en qui,nous vivons. Nous nous oublions
nous mêmes. Nous oublions que nous fommes- environnez de
Démons qui vont& viennent autour de nous, cherchant l'oc-
cafion.de nous perdre. Nous oublions que les Anges font avec '
nous pour'nous fecourir. Nous oublions nosbiens& nos maux,
& les biens èc les maux de ceux avec qui nous vivons, quoique
tout cela foit prefent. Et comme nous pouvons oublier les cho-
ies, nous pouvons auiîinous en iouvenir ^ nous en avons la
mémoire
ejî mmgé corporeîlement dans rSucharifiie. 445
TOCmoire. Et c'eftune chicannerie ridicule à Aubertin de vou- Ch. XIII.
Joir qu'on ne puilfe appliquer ce mot de mémoire à ces forces
de chofes fans le prendre en une (Ignification impropre.Car c'eft
tellemenc fa fignificacion naturelle qu'il n'eft pas polliblede
^'exprimer plus proprement. Ainfi quand quelques Auteurs
■ont dit que la mémoire néregarde pas les choies prefentes, il*
ont entendu une prefence fenfible & non une prefence réelle.
Tout ce qu'ils ont voulu dire c'elt qu'on ne fe lert pas du mot
■de mémoire ou de fouvenir pour marquer l'application de l'ef^
prit aux chofes qui frappent les fensque l'on ne fçauroit en ef-
fet oublier.
Je n'ay encore qu'à faire remarquer qu'il n'eft vray qu'u-
ne chofe ne peut pas eftre le mémorial de foy-même que lorf-
qu'elle eft découverte^ mais que lorfqu'elle eft voilée ôc cachée,
bien loin qu'elle ne puiflTe eftre un mémorial d'elle-même , il eft
impoflible qu'elle ne le foit pas à l'égard de ceux qui fçavent
qu'elle eft cachée fous ce voile. Et cela eft fi vray que comme la
veuë de l'hoftie faitreflbuvenir les Catholiques que J. C. eft
prefent j elle fait auflî reflouvenir les Calviniftes, qui ne le
croyent pas prefent , que les Catholiques le croyent. Tant il eft
vray que le voile excite naturellement la mémoire de tout ce
que l'on croit qu'il couvre.
Je n'ay qu'à leur répondre que quand on veut reprefenter
des gens en un certain eftat , ce n'eft que le défaut de leur
propre prefence, qui oblige de retournera d'autres fortes de
fîgnes.
Enfin il n'y a qu'à propofer cinq ou fix pafi^gesoù les Pères
en reconnoiflant clairement là prefence réelle ne laiftent pas
de regarder l'Euchariftie comme mémorial de lapaffion. En
voicy quelques-uns de ce genre.
S. Chryioftome dans l'homélie 17. fur l'Epiftre aux Hé-
breux parle en ces termes , félon que M. Claude les traduit luy-
mêmedans (on livre contre le Père Noiiet. Q^oy donc \ cfi-ce
qtce nous n'offrons paf tons les jour s} "Nous offrons^ il efi vray, mais
nous faifons la. commémoration de fa, mort y ^ cette ablation efi
une ^^ non plufieurs . Cotnmtnt efi-e/Ie une ^ non plufieurs ? par-
ce qu'elle a efi ê offerte une fors, CcUe-la a. eflé tranf^ortée dans le
Saint des Saints ^ ^ cecy en efi une figure , ^^ la même. Car nous
offrons toiijours le même I. C. non maintenant un autre, mais to«-
jours le même. Et pour cette raifon <'efi un même facnfice. Efi- ce
KKk
444 ^^v. V I ^e le corps de Jefus-Chrifi
qu'il y a plujicurs Chrifis , farce qu'il efi ojjert en plufieurs lieux}
2^ on -.mais c'eft puTtoutun même J. C.quteji entier icy, (^ là. un
feul corps. En la, mefme forte donc queflant offert en pluffeun lieux^
c'efl un fcul corps ^ non pluficurs : .Ainfi c'cfi un mefme (acrifice.
l^ojlrc Jouverain Sacrificateur efi celuy qui a offert le facrifice par
lequel nous fomtnes punficz^^ (jK nous offrons maintenant le mefme
qui fut offert alors .^ ^ qui ne peut eftre eonfumé. Cecy fe fait en
commemonition de ce qui fe fît alors : Faites cecy, dit- il , en com-
mémoration de moy. Ce îiefi pas un autre facrifice comme ceux de
l'ancien Sactificateur. N'eus fiifons toujours les mefme s ou pour
mieux dire nous en faifons la cortmiemoration.
Les refilexioniqui oncefté faites fur ce paflàgedans le fécond
2. Perp.i.i.c. Xome de cet ouvrage prouvent manifeftement que S. Chryfo-
'■- ?• '■>-' ftome y fuppoie la preîence réelle & détruit toutes \qs chicane-
ries des Calviniftes. Cependant il y eft dit plufieurs fois que
nous hiilons/^ commémoration de lamortde I.C. q^mqcqc'^ fe fait
en commémoration de cette mort : Tant les Pères ont peu penfé à
la contrariété prétendue que les Mmiftres veulent mettre entre
eftre inftituë pour eftre le mémorial de la mort de J. C.& con.
tenir néanmoins réellement J. C.
Il y a une difficulté de Critique fur la première partie de ce
patfage dans laquelle M. Claude abandonne avec raifon Au-
bertm. Car au lieu de ces termes: Nous offrons .^il efi vray • mais
nous fuifons co?nmemoration de fa mort ^ Aubertin prétend qu'on
devoit traduire : Offerimus : irno tncmoriam facimtis mortis ejrcs.
C'eft à dire félon ion fens^ nous offrons, ou piùtoftnous ifai-
Ibns commémoration de fa mort. Mais la critique d'Aubertin
eft tout à fait fauiîe. Car la partie uleetAXà^dontS. Chryfofto-
me fe fert n'eft pasdeftruélive dece qui eft étably, comme la
particule /wo, qui fubftituc une nouvelle idée à la place de celle
qu'elle bannit. Ainfi c'eft corrompre le iens de S. Chryfoftome
que de traduire ce qu'il exprime par «AÀrt, par le terme imo^ou
potiusautem, comme il fait en un autre endroit.
On voit encore clairement l'union de la qualité de mémo-
rial avec la prefence réelle dans ces pafTages de S. Cyrille fur S.
1104 Jean .• Zes paroles de l'Eglife efiant formées f. C. furvient, ^ nous
paroi/} invifiblement comme Dieu j (^ vifblement par [on corpsr
0- il nous permet de toucher fa ficrée chair. Aiyift ufint de la grâce
que Dieu nous fait , nous approchons de luy pour participer k
l'euloye myftique ^ recevant J. Q. dans nos mains ., croyant ferme-
efi ma,ngé coYporellement dans t EuchArijîte . 445-
^ent qu il il véritablement njfufcitè fon corps. Car que la conimu- Ch.XIIL
nion à l'eulogie myjîique fait la confcMon de la refurreclion de
J. C. il paraifira facilement parles chofes quil a dites ^ lorfqtiil
fit parluy-mefme le type de ce myjlere.
Cette prefence invifiblcde J.C comme Dieu que l'on ne
içauroic faire paiFer pour métaphorique , ne permet pas non
plus que l'on prenne pour figure cette prefence du corps de J. C.
«lont il efb parlé dans ce lieu. C'eft donc auffi ce J. C. prelenc
par Ton corps qui eft reçu dans les mains. Cependant (elon S.
Cyrille^ cette réception efl une confljion de fa refurreclion , c'eft à
dire que c'en eft un mémorial.
Il y a une infinité d'autres lieux, où les Pères en même temps
qu'ils établilîent le plus fortement la prefence réelle, nelaifienc
pas de reconnoiftre dans l'Eucbariftie cette qualité de me-
xiiorial.
Nous annon(^ons ., dit le Concile tenu à Alexandrie contre
Neftorius , Umort qu'a fouffert félon la chair J. C. Fils unique
de Dieu (^ fa refurreclion d'entre les morts g?- fon Afcenfon dans
le ciel^ en célébrant dans les Ez^lifes le fa cri fie e non fanqjant. Voi-
la la qualité de mémorial bien marquée^ mais la prefence réelle
ne le fera pas moins par la fuite du paflagc. Amfinous approchons
de l'Ettlogiemyfiiqiie,^nous fommes fanHtfîc\ parla participation
de la fainte chair ^ du précieux fan^ de I. C. Sauveur de tous. Car
nous ne la prenons pas comme une chair commune, à Dieu ne plaife.^
ny comme la chair d'un homme fanctifié., ^ joint au T^erhc par une
union de di<înité ou d'habitation divine..^ mais comme cftant véritable-
tuent vivifiante t^ la propre chair du Verbe.
Les Hébreux ^ dit S. Auguftin , cclebroicnt par les viclimes
^u^ils offraient à Dieu en diverfes manières félon qu'il efioit con- Cont. Fauft,
venable^^là Prophétie de la victime future que I.C. a offerte fur la ^' ^' '*•
Croix'} (j;- les Chreffiens célèbrent la mémoire de ce (acrifice accom-
fli par l'ohlation fainte ^ par la participation au corps (^ aufang
de J. C.
Ainfi félon ce Pcre, c'eft par l'ohlation même du corps de
J. C. qu'on célèbre cette mémoire, bien loin que la célébra-
tion de cette mémoire [oit incompatible avec la prefence de ce
corps.
Si les Pères n'avoient jamais parlé que de cette forte de la
qualité de mémorial qu'ils donnent à l'Eucbariftie, les Mini-
tftrjcs n'auroient-ils pas honte de s'en fervir contre la prefence
KKkij
440 I-iv. Vï. ^e le corps de fejus.['hrifi'
réelle ? mais en font ils plusexcufables foui ombre que les Pè-
res parlent quelquefois différemment? Car encore qu'ils parlent
de l'Euchariftie en quelques endroits comme d'un facrificede
mémoire fans marquer expreflèment la realité , ne fuffit il pas
qu'ils la marquent en d'autres , pour conclura qu'ils l'ont tou-
jours crue ?Ne fuffit-il par qu'ils unifTent quelquefois ces deux
qualitez, de contenir réellement J. C. & d'eftre un mémorial
de fa pafîîion, pour conclure qu'elles l'eftoient toujours dans
leur eiprit, quoyqu'ilsayent efté portez par desveuës différen-
tes à exprimer quelquefois. Tune fans l'autre ?
Car enfin il eft tres-vray que ce que les Pères ont dit piu-
lîeurs fois, ils l'ont toujours penfé. Mais il n'eft pas vray qu'ils
ayencdeu exprimer en tous lieux ^ tout ce qui eftoit dans
leurs efprits. Car pourquoy quand Aubertin conclut en un en-
droit que Tertulienen difantquej. Ç. aconfacréle vin en
mémoire de fon {■xv\<^^quoà in fanyiinis fui memoriam confecravity
n'a peu remarquer par cette exprelTion que J. C. ait changé le
vin en la fubftance de fon fang , il tire une conclufion qui eft
vraye en un fens, mais inutile, &: qui eu tres-lauiîè en un
autre.
Il efl vray que cette expreflîon ne fîgnifie point du tout litté-
ralement que J. C. ait changé le vin en la fubftance de fon
fang : mais elJe n'exclut pas auffi ce changement
Or comme il y a des expreflîons qui contiennent la fubftan-
ce de la foy,^^ d'autres qui fans l'exclure renferment d'autres
circonftances des. My fteres j celle cy eft de ce dernier genre.
Elle ne marque par elle-même frnon que I. C fit le vin par la
confecration le mémorial de ion fang. Mais comme cette cir-
conftance eiloit jointe dans l'efprit des fidelles avec la fubftan-
ee du myftere ,elleen excitoit l'idée entière : de même que
quand on die aux Catholiques que \. C. fit du pain le Sacrement
de fon corps, ils entendent qu'il en fit un Sacrement qui con-
tient fon corps.
Il n'y a donc rien qui foit plus contre le bon fens que de vou-
loir juger de toute la doctrine des Auteurs, & déroute la foy
de l'Eglife de leur fiecle par cts expreflions imparfaites quL
n'en font connoiftre qu'une partie. Et la juftelTe de l'efprit &L
la bonne foy veulent qu'on juge des expreffions par celles oit
les Pères fe font expliquez plus amplement, &oùiIs ont réu-
ni dans leurs difcours cesdiverfes parties de leur dodrinequi
«ftoienc unies dans leur efprit.
eji mangé corporellcment dans ÎEnchuriflie. 447
Que s'il u'elloic pas contraire à la créance que le corps de J . C. Ch. XIII,
eft prefent réellemenc dans l'Euchariftie, de donnera ce Sa-
crement la qualité de mémorial ^ il ne faut pas croire que celle
de gage,/>/^«a;,y loit plus oppolëe, puifque ceux qui ont ap-
pliqué ce terme à TEuchariftie^ n'entendent par là qu'un pre-
fent donné pour nous conferver le fouvenir de TafFedion qu'a
pour nous celuy qui l'a donné. C'efl: ce qui paroift par le pafla-
ge qu'Aubertm & M. Claude citent fur ce fujet. U eft tiré d'un
commentaire qui fe trouve entre les Oeuvres de S. Jerofme,
mais qui eft le Pelage ou de quelque Pelagien,
Cet Auteur fuppofant lefens littéral des paroles de l'inftitu-
tion de l'Euchariftie comme n'ayant pas befoin de commentai-
te, s'attache à éclaircir la fin pour laquelle J. C.a inftitué ce
myftere, qui eft marquée par ces paroles ; Faites cecy en mé-
moire de moy. J. C. dit ilj efiant prefi de fouffrirnous a Luffc ce
dernier mémorial de luy-mème. il a fait en cela comme un homme
ifui devant faire un long voyage laifjc un gage a fon amy , qui luy
puiffe renouveller le fouvenir de (es bienfaits ^ de fon affecHon.
Qite fî cet amy a four luy réciproquement un amour fine ère ^ il ns
fcauroit voir ce gage fans verfer dxs larmes ^ fans efire touchi
d'un extr'em.e regret.
Ce paftage eft fi éloigne de cîioquer les idées qu'aTEglifê •
Catholique du myftere de l'Euchariftie, qu'on le voit cite par
des Auteurs qui ont écrit depuis Berenger^ qui n'ont par cru-
pouvoir donner une inftruction plus tendre & plus importante
que celle qu'il contient. Gérard deZutphenqui vivoit au qua-
torzième fiecle, &: dont on voit un traité intitulé delà Répara-
tion des forces de l'amej imprimé dans la Bibliothèque des Pè-
tes, le cite deux fois dans ce petit ouvrage, feavoir au premier ^'biior. patr,
livre chap. 27. & au fécond chap. 3. Mais comme les Miniftres °'"' ^" "*'
ne laifiTènt pas d'inlîfter fur cette qualité de gage , il ne fera
pas inutile d'inférer icy la réponfe que M. le Cardinal de Perron
y a faite dans l'examen du pafiage tiré de ce commentaire donc
nous avons parlé, & de juftifier cette réponfe contre leschicane-
ries d'Aubertin. Ce Hierofme Apocriphe, dit ce Cardinal, écrit ^^
que no^re Seigneur s' eft comporte comme ceux qui ayant à faire un
voyage en pais lointain.^ laijjent quelques gages à leurs amis^ afin
qu^en le voyant ils fe fouviennent de Icu r amitié Q" ^^ l^^^'^ bienfaits.
Etdelàqueremporteralefieur duPlefiis?N'appellons-nouspas/
cous les jours les corps Se les reliques des Martyrs , gnges & oft^.. "
kkkiij
448 î-rv. VI. ^e le corps de Jeftis.QonH
»t go , tant de leur afllftance&interceffionence fiecle, quedelear
15 refurredion &: prefence future en l'autre' A la Mémoire du Mar.
A "• de S " ty>\à\z S. AugLiftin , parlant des Reliques de S. Eftienne , que
Stcph. " )■) tranfportoit l'Evefque Projettus . affluait une grande concurrence
«om, 7. „ (^occurrence de multitude. La une femme aveugle pria quelle fufi
,,,■>■> mcnéea l' Evefque qui portait les gages sacrez. Et S. Ambroife.
vid. * ' »» il nous faut prier les Martyrs^ dcfquels nous femblons nous vendi-
ti quer un certain patronage par le gage de leurs corps. Et ne proteftons^
11 nous pas tous les jours que la prefence invifible du corps du Sei-
»» gncur fous lesefpecesdu Sacrement, nouseftungage&un ofta-
»■, ge tant de faproteârion invifible en ce monde, que de la joùif-
«I fance de la prefence invifible en Tautre , lorfque nous luy ferons
i> faits femblables, pourceque nous le verrons comme ilefl: , à
n fcavoir avec la fplendeur de fa gloire fur laquelle les Anges s'é-
>, jouifTent de jecter les yeux ?
„ Et de fait quel autre allez digne gage nous pouvoit-il laiflèr
„ de luy- me ne en fa propre efpece 6c figure, que luy, même fous
,, une autre efpece & figure ? veu que tout gage, pour eftre vray
•)■, gage, doit avoir quelque proportion de prix & de valeur avec
„ la chofe dont il eft gage. Suivant ce que dit le vray S. Jerofme fur
fîier , i" 11 ces mots de S. Paul : Z'efprit qui efl le gage de nofire héritage^
*P- ^^' ,, comme de l'arrhe., s'cflimequcl fera l'achapt &c. ainji de la variété
^ ' ,5 del'arrhe, fè juge la grandeur de l'héritage futur ; ^ qu'il n'y a
,1 nul/e proportion de prix entre la créature^ gr le Créateur.
î» pf. 81. " S- Auguftin ne dit-il pas , l'Epoux donne pour arrhe à fin Epoufe
^1 fin fang (jS fon Efprit, dont il nous a cependant enrichi en ce pelé.
», rinage : mais il nons garde encore fe s richeffes cachées. Carpuifqu'il
„ nous a donné un tel gage , que doit'efire ce qu'il nous garde? Et S.
„ Chryfoftomc ne crie -t-il pas parlant de propos délibéré de l'Eu-
S» Joau, ^^ chanftie: Celuy qui s'exhibe ainfi à nous en cette vie .^ combien
id"" t '^" •,» plits encore en la future? Et ailleurs: ^ partant ne perdons point
t. ad pop." „ courage, ne nous défilons point .^ ^n'appréhendons point la difficuL
Antiock- ^^ ^^' ^^^ {gj^p^^ Car celuy qui n'apoint refufè d'èpandre fon fang ne re-
„ fufera rien pour nofire filu/t? Et Gandentius Evefque de Brefl^
„ leur contemporain, ne prononce-t- il pas en termes encore plus
,j exprex : Cétuy-cyefi levray prefent héréditaire du nouveau Tefla-
Gïwd. tr. ,> ment.,lequel en la nuit où il fut livré pour ejire crucifié, il nous laiffa
''y^^^'^^o^'^- ^t comme un gage de fa prefence "> Y^t^Ç^n (\\iQ nous ne penfions pa»
,, que ce gage foitautre fubftance que fon propre corps, ne crie-
,, cil ^3.s: Le mime Seigneur ^ Créateur des natures ^ qui produit'
eB 7na,ngé corporellement dans t Euchiirifiie, 449
de la terre le pain : du pain derechcfyource qu'il le peut é" l<^ p'o- Cm. XIII
mis, fait fun propre corps i é" ItfJ qtii de l'eau a fait le vin , du vin „
fait audi fon fang.
Mais l'Auteur du fieur du Pleffis, répliquera t on , compare **
noftre Seigneur à un amy s'en allant à un païs lointain qui laiC *'
ie un gage à Ton amy. Or le gage qu'un amy s'en allant à un "
paie lomtain laifFeà Ton amy , n'eft pas Ton propre corps. Et a " Aug. i
quelle fimilitude ^ dit S. Auguftin, a jamais efié déférée en dif " P^- ^°^
futant une fi qrande ccnvcnance ^ quelle Je puijfe accomr/îoder en "
tout ^ par tout à la chofe à laquelle elle efi appliquée , &■ quand ''
eji-ce , ajoute t il , qu'il fe peut tirerrien de (cmhlable de la créa- '
ture au Créateur ? L'Auteur du fieur du Pleffis compare l'Eucha- "
riftie avec les autres gages en la condition qu'ils ont de pouvoir "
exciter la fouvenance de l'amitié & des bien-faits de ceux qui "
les laiiïènt ; mais non pas en la condition qu'ils ont de ne pou "
voir pas eftre les dons & les donateurs tout enfemblej les gages "
&les confignateurs des gages tout enfemble : Non plus que '*■
quand noftre Seigneur compare Ton Père avec un père de fa- ''^
mille qui envoya Ton fils à la vigne , il ne le compare pas en ce '*
que le Perc de famille en envoyant fon fils , ne le retint pas ef- "
ientiellementavecluy ,ny en ce que le père de famille &. le fils "
defamille ne font pas une même fubftance en nombre ; mais en "
ce que comme le fils de famille meritoitd'eftre traité des Fer- '*
miers avec plus derefped; que les ferviteurs -, ainfi les juifs de- "
voient porter plus de révérence au Fils de Dieu qu'à fes Pro- "
phetes. "
Ainfi il compare l'Euchariftie a^ec les gages humains en la '* •
condition qu'ils ont d'exciter la mémoire de leurs donateurs; "
mais il ne la compare pas avec eux en la condition qu'ils ont"
denepouvoir paseftreles dons& les donateurs tout enfemble. ''^
Il la compare avec eux en ce qu'ils ont de perfedion & depuif- '^
fancei mais non pas en ce qu'ils ont d'imperfeclion ou d'impuil- ''
fance.Car ce que les gages humains ne font pas les dons &: les do- ''
Dateurs tout enfemble vient de l'imbécillité des hommes, qui ''
ne peuvent pas en emportant leurs corps avec eux, les lailTer en ''
même tempsà leurs femmes, enfans & amis.-chofe qu'ils feroient "■
volontiers s'ils le pouvoicnc^ afin de leur configner des gages''
plus réels de leur afFedion : Là où notre Seigneur eftantmeu de ''
pareille volonté, n'efb pas retenu dépareille infirmité. Melie,*'-
dit S. Chryfoftome, /<î///I/ fonmanteauitfonDifciplej^ le J^ils"^^
45» Liv. VI. ^e le corps de Jefus-Qhrifl
de Dieu montant du ciel nous aLiiffé fa chair. Mais Helie le laiffa
en s'en dépouillante Là où Chrifi nous l'alaijjee^ d^ eft monté l'ayant
avec luy. Et pour ce comme l'Auteur du fieur du PlefTis confère
ce Sacrement avec les autres gages en cette convenance qu'ils
font propres pour ramentevoir l'amitié 6c les bienfaits de ceux
qui les laiflent: aufll ledifcerne-c-il d'eux encctte différence^ qu'il
eft le gage &: le corps du confignateur du gage tout enfcmble,
c'eft-à- dire en fomme comme il ouvre &; délie la bouche au
fieur du Pleflîs lorfqu'il écrit -, Noftre Seigneur a fait comme un
homme qui entre prenantun long voyage.^ ^^iff^ quelque gage à fin amy
afin qu'il fe puiffe reffouvenir de [on amitié ^ de fes bienfait si
ainfi la luy ferme-t-il toft après lorfqu'il ajoute: A cett£ caufe
nous fommes admonefiez^ par les Preftres , quand nous le prenons^
que c'eflle corps & fang de J.C. afin que nous ne foyons point in-
grats a fes bénéfices.
Les défaites par oh. Aubertin prétend éluder cette répoofè fî
folide font tout à fait rares & dignes de luy. Il dit d'abord qu'il
n'y a pas de rapport entre l'Euchariftie & les exemples allé-
guez parle Cardinal du Perron 5 parce que dans ceux-cy il
y a différence entre le gage &: la chofe même^ que les corps des
Martyrs ne font pas leurs âmes, qu'ils ne font pas les perfon-
nes donrils font les gages 5 que le fang de J. C. eft différent
de la gloire dont il eft le gage , félon S. Auguftin ScS. Chryfo-
ftome.
Mais comment ce Miniftre n'a-t-il pas veu combien tout cela
eftoit vain & inutile? Car premièrement cette prétendue dif-
tindion réelle qu'il exige entre 1 e gage & la chofe même n'a
aucun fondement dans la raifon. Il fuffit qu'il y ait une diftin-
élion d'eftat. Si j'avois promis à quelqu'un un diamant mis en
œuvre J pourquoy ne luy pourrois je pas donner pour gage de
ma promeffe le même diamant que j'aurois deffein de luy don-
ner en cff>.'t lorfqu'il feroitenchâffé ?
2. Il eft- facile de trouver tou'-e la diftindion qu'il de-
mande entre le corps de J. C. & la chofe dont il eft gage. Car
cette chofe n'eft pas proprement le corps de J. C. c'eft fon
amour; c'eft fa protedion, c'eft la 2;loirc qu'il nous a promifè.
Le corps de J. C. nous eft un gage de tout cela. Il y a donc au-
tant de diftindion entre le corps de J. C. confideré comme ga-
ge dans l'Euchariftie, & la chofe dont il eft gage , qu'entre les
corps
eji mxngé corporelîement dans lEucha.rifiie. 451
corps des Martyrs , conflderez comme gages , &:la protection Ch. XIIL
des Martyrs, entre lefangde J. C.&leS. Efpric , ou la gloire
des entans de Dieu
Ce que ce Miniftre ajoute qu'un homme qui s'en va en voya-
ge ne Te laifTe pas luy-même en gage i & quainfî J. C. n'a pu
laiflèr Ton corps fur la terre en s'en allant au Ciel, eft d'auill
mauvais fens qu'une chicanerie le peut eftre.
Car il ne s'agit nullement de fçavoir fi un homme peut felaif
fer en gage en s'en allant. Il eft queftion fi cela répugne à la
qualité de gage. Si les hommes ne le font pas, c'efl: leur im-
pui/Tance qui les en empêche. Mais s'ils le pouvoient faire , ôc
qu'il leur fïit poffible de fe multiplier, Se qu'ils puffent fe laiiîer
d'une manière au même temps qu'on les perdroit en une autre,
ce feroit le gage le plus naturel qu'ils pulfent donner de leur
afFecldon. Et en effet il eft alfez ordinaire aux Rois de retenir
des gens à leur Cour pour s'alTurer de leur fidélité. Ainfi la pre-
iênce de leur propre perfonne eft en même temps le gaf!;e
d'eux-mêmes comme fidelles. Il eft vray qu'ils ne foiK pas prc-
fens& abfenstout eniemble ^ mais perfonne n'a dit auili qu'on
puft imiter ce qu'il y a de miraculeux & de furnaturel dans ce
myftere. Et je ne crois pas que les Miniftres prétendent qu'il
n'y ait rien dans les myfteres de la Religion , dont on ne puifTe
donner des exemples dans la nature.
Aubertin a recours enfuite à quantité de petits argumens qui
ne font que des fophifmes tout purs.
Ce que J. C. laifîa comme un gage , dit il, félon cet Auteur,
n'eft autre chofe que le pain, qu'il avoit béni & rompu. Or ce
pain n'eft pas le corps de J. C. Donc &c. Je réponds en un mot
que ce que J. C. laifîa comme un g ge efl le pain confacré , &
que le pain confacré eft le corps de J. C.
Ce que J. C.laiffa , dit- il encore, eft un fujet vifible, puifqu'il
dit que ce gage eft tel, que l'ami en le voyant eft touché de re-
gret. Or le corps de J. C. n'eft pas vifihle,&c. Je réponds que le
corpisdeJ.C.eft vifible dans rEuchariftie|r.ar le voile qui le mar-
que comme le corps d'un homme eft vifible par fes habits.
Le gage, dit-il , dont parle cet Auteur ,eft lailTépour fervir
de mémorial de l'ami abfent. Donc ce ne peut eftre le corps
de J. C. qui ne fçauroit eftre abfent & prefent. Je réponds
^ue le corps de J. C. peut eftre abfent & prefent félon divers
LLL
452> liv. V I. ^iû le corps de ^efus^(^'hrifi y ^c.
égards. Il eftpreient félon fa fubftance , mais il eft abfenc fé-
lon ce qu'il eft dans l'eftat de fa gloire.
Les bienfaits donc ce gage nous taie reflouvenir, qui font
tous les myftercs de fa vie , ne ionc pas prefens-. La gloire que
nous attendons n'eft pas prefence. Il nous- fait donc reflTouve-
nir de quantité de chofes qui ne font pas prcfentcs. On voit
quelle eft la nature des répliques d'Aubercin.
JP'in du Jixième Livre..
LIVRE SEPTIE'xMf.
CHAPITRE PREMIER.
•
^e M. Claude ']U<ie fort mal de U force ^ de la foiblcffe des
arpiiïiens ncgatifs. Deux exemples importunts de fon feu
de d'.fcernement fur ce point.
\ î'erprir des hommes comprenoit les preuves des
i'crirez dans toute leur étendue , il n'y auroir
point de lieu aux conreftations &aux difputes ,.
comme on voit qu'il n'y en a point dans lesveri-
cez de Mathématique, parce que les principes en
iont il iimpies & en lî petit nombre, qu'on ne les comprend
point à demi. Mais comme les faits humains & les choies mo-
rales font d'un autre genre, & que fouvenc la certitude qu'on
en peutayoir, ne dépend point de certains principes clairs, que
l'on pénètre tout d'un coup , mais d'un amas de circonftances
■qu'il faut joindre enfembie pour former la conviclion, il arrive
de là que ceux qui ne conçoivent qu'une partie de ces circon-
fl-ances, ou par défaut de lumière en eux, ou par lesdiverfes
préoccupations qui naiilèntde leurs pafilons, font capables de
rejetter les plus fortes , &de s'attacher aux plus foibles.
Ces deux effets font même comme infeparabîes , &ilsfe fui-
vent prefque toujours l'un l'autre ^aufli naifient- ils de la même
caufe. Car c'eftle manque de lumières qui fait d'une part qu'en
ne voyant pas ce qui rend fauifes de certaines raifons , l'on s'en
remplit Se l'on s'en entefte ; de l'autre , qu'on entre fi peu dans
les- preuves les plus lumineufes de certaines veritez , que ce-
qu'on en voit , n'efl; pas ca.pable de perfuader l'efprit.
LLlij
454 Liv. VII. Exumen des argumens negtttifs ,
Je ne precends encore rien conclure de ce dilcours gênerai.
Je fçay que chacun de ceux qui difputents'en fervent d'ordi-
naire réciproquement pour prévenir l'eipric à^s lecleurscon-
tre leurs adveriaires M lis comme il efl: injufte de vouloir tirer
avantage de ces reproches qu'on (e fait de part & d'autre avant
que d'en avoirétabli la vérité, ileft tres-jufte au contrairedc
la faire remarquer , après l'avoir bien prouvée. Ainfi M. Clau-
de ne peut le bleirer que nousufions de ce droit envers luy,&:
que nous luy appliquions ce difcours par quelque réflexion par-
ticulière.
Les argumens négatifs font proprement du genre de ceux où
ces illufions peuventavoir lieu, 1; y en a de bons, de mauvais ,
de probables & d'improbables. Ils reçoivent divers degrez de
clarté 5 &:on les peut comprendre parfaitement ou imparfaite-
ment félon l'étendue de l'efprit &: la difp,ofition du tœur. Le
j-eproche que je fais à M. Claude iur ce fujct,c'cft qu'il y com-
met prefquetoutes les fautes qu'on y peut commettre : Mais je
ne l'en accufe pas fans preuves L'on en a déjà vu un grand
nombre dans le corps de cette difpute , Se nous en allons voir
de nouvelles dans ce Livre icy.
Tantoft. il avance fur le fujet de ces argumens des principes
chimériques, & qui n'ont de fondement que dans (on imagina-
tion.Car où at'il trouvé, par exemple,cctte plailante maxime,
qu'une propofition affirmative ne fe peut prouver par desargu-
Répoiifc p. mens negatits ? La thefe , dit-il , de M. Amauld cjlant affirmati-
^' ' vc , fcavoir que les Grecs croycnt la tranffubftantiation , il fi.vut qu'ai
Xètablifje claire?ncnt par des preuves affirmatives : (j;^ c'efi de ces
■preuves seules que dépend la dcctjïon de laqucfiion. Et quoy ! ne
fçauroit-on prouver cette thefe affirmative, queU ville de Ro-
me a fubftjiè toute l'année mil fi x cens foixante douz^ , par cette
raifon négative , que depuis ce temps- là perfonne n'arapporré
qu'elle aitefté ou abîmée ou détruite? N'avons-nouspasune
entière certitude de la vie des Papes & des Rois pendant un
certain temps , par cela feul que leur mort n'a eRé mile dans
aucune Gazette?
Tantoll il fait des déclamations en l'air contre de<;argumeHS
du genre dont nous parlons,commeceux par lefquelson mon-
tre que certains faits ne font pas arrivez , parce qu'on n'en a
point oiiy parler, & qu'il eftimpoffible qu'ils fuflént demeurez
cachez. Il les réduit à delimplesvray-feniblanceSjàdespreu-
■^
ti des difficultcz^ tirées des fens. ^jy
T-esdouteufcs , fans conlidercr , comme l'on luy a. fait voir , Ch. I.
qu'une infinité de chofes qu'on croit fçavoir avec le plus de cer-
titude , ne font appuyées que fur des preuves de cette nature.
Tantoft il trouve mauvais que les mêmes perfonnesqui onc
rejette l'argument négatif tire du filencedes Payens fur l'Eu-
chanftie , & de celuy des Pères fur les difficulrez naturelles de
ce myftere , fe fervent de l'argument négatif tiré de ce que ni
les Grecs ni les Latins n'ont jamais marqué qu'il y eût aucune
différence entre les deux Eglifes fur le dogme de l'Euchaiiflie,
&ilen prend fujet de railler avec fon agrément ordinaire. Com-
ment s'efi- il fait ,à\t-\\ ^ que l'argument négatif ^ quincfioit dans 5-rcponfcp.
mes mains qu'une foihle vray-femhlance , fait devenu dans celle de
M. Arnauld une -puiffante dcmonfiratiom Cela veut dtre^ dit il plus
bas , que ces Mefjieurs confèrent aux argumens , quand ils leur font
l'honneur d£ s'en fervir^ un cara&ere de bonté qu'ils ne fcauroient
avoir d'eux-mêmes ^ que les mêmes argumens deviennent mAUvais
quand on les employé contreux.
Maispourquoy M. Claude a- t'ilbcfoin qu'on luy apprenne ce
que nul homme de fens ne devroit ignorer j& qu'on luy difc
que les argumens négatifs ne tirent pas leur force de ce qu'ils
font négatifs, puifqu'il y en a de toutes fortes, de forts, de foi-
bles , de folides , de vains, de certains , de probables , d'évi-
demment faux: mais que ce qui en fait la forcé,c'efl: qu'ils fuient
fondez fur un tel amas de circonftances, que la raifon demeure
perfuadéequela chofe ne fçauroit eflre autrement , êc que le
liazard ne peut avoir joint tant d'cvenemens.
Il eft donc tres-permis de rejetter un argument négatif, &
d'en employer un autre, félon qu'ils font plus ou moins con-
cluants, comme il eft permis de rejetterune faufle raifon, & de
fe fervir d'une bonne. •
Mais il n'y a rien de plus extraordinaire que les jugemens que
M. Claude porte des argumens négatifs , quand il vient à com-
parer enfemble ceux dont on s'efi: fcrvi , & ceux qu'il employé.
Car on peut dire avec vérité qu'ils ne peuvent eftre ni plus
déraifonnabies ni plus bizarres.
Si vous demandez à M. Claude ce qu'on doit croire de l'argu-
ment tiré du fîlence tant des Latins que des Grecs pendant l'eC
pace de fîx cens ans, fur le différend que les Miniflres vou-
droient faire croire qui eftoit alors entr'eux touchant la prefen.
ceréellej il vous dira nettement que le contraire de cet argu-
L L I iij
4^6 L I V. VI L Êxcimm des ctrgU7Tîens négatifs
3. rfp. p. 397. nient , cfi non feulement trcs-pojjible , nuis aujji trcs vray-femhla^
Lie , & qfis Is raifonnement de M. Arnauld ne conclut , ni dans le-
genre du ncceff.iire , ni dans celuy du probable,.
C'eft à dire , pour développer un peu ce qu'enferme cetta-
g^nerlic ^' ^^^cirion de M. Claude , qu'il (t^tres-pnfjwlc bctres-vrjyfembla.
tK.7. 5' ^A' que pendant l'eTpace de fix cens ans, il y ait eu une certaine
•)' timiditérépand-uë parmy tous les Grecs &. les autres focietez
•>■> de l'Orient qui les ait empêchez de s'élever contre les Latins,.
55 & de les traiter d'idolâtres fur la doctrine de la prefence réelle,,
■jj & que pendant tout ce même temps il y ait eu dans l'Occi-
r> dent je ne Tçay quel efprit de politique qui ait empêché tous les^
5) Latins de rien reprocher flir le même point aux Grecs ôc au»;
>î autres Chrétiens Orientaux.
■)■> CUril efl: très poffible & tres-vray.fembLible que , ni la charité ,.
31 ni le zèle, ni l'inclination naturelle qu'on a à dire la vérité, ni
51 la haine, ni l'intereft:, n'ait jamais porte aucun ni des Latins ni,;
5> des Grecs à fe démentir.
j.- Qu'il cd: trcs-poMole & îres-^ray-femhlahk que les Latins
55 ayent craint de ble.'Ter les Grecs par ce reproche , lors même
55 qu'ils les faiToient mourir pour d'autres points dedodrine 5 ôc
55 que les Grecs ayent craint d'offenfcr les Latins fur ce même
» pointjors même qu'ils mouroient pour leur Religion , ou qu'é-
55'fanc en feureté ,,& hors la puiffance des Latins, ilss'abandon*^
55 noient à toute la violence de leur haine.
•)>• Çm\\ eft 'trcs-po,fJible dc très vn/y fembLrble que les motifs 6C'
5) lés reîforts qui ont retenules Latins dans cette politique fuflenc
,» tellement cachez qu'on foit encore à en découvrir les moin-
}> dres vefliges, fi étendus que perfonne n'en ait eflé excepté , ni
„ les Papes , ni les Cardinaux , ni les Evêqucs , ni les Preftrcs, ni
,5 les Religieux , ni les Soldats , ni les Voyageurs curieux -, & en
,.•, même temps Ci efficaces , que de tantde millions d'hommes ,
,3 jamais un (eul n'ait trahi ce fecrec.
,5 Qii'ilefi: ires-po_fJible & tres-vray-femblable , qu'on ait laifle
,? agir toutes les autres paffions contre leî Grecs , qu'on air cxer-
i, cécontr'eux les dernières rigueurs, qu'on les aitaccufexde tou-
„ tes fortes d'erreurs, qu'on leur en ait même reproché qui iem-
,3. bloient porrer naturellement à les accufer d'erreur fur la prefer»
„ ce réelle , C\ on l'eufl: pu faire avec vérité. Si que tous generale-
„ ment de concert ayent juftement arrefté leur plume & leur
„, langue fur le point, où il auroiLefté naturel depaiTer à cere-
- fS àes àijficiilte%,nrces dci fens , 457
îprocke , 5c. cela durant l'efpace de fix cens ans, non dans un ' Cn. ï.
îeul lieu , dans une feule ville , dans une feule province , mais "
dans la plus grande partie du monde. *'
Voilà ce que M. Claude^;/'/>f//f tres-fojjîhlc & trcs-vray-fem-
iLéle ,&c {apposer le contraire, c'eft félon luy ne coEnclure,
ne dans le genre du neceffair'e , m dans celtiy du probable.
Mais quand il vicnc à rapporter des exemples d\irgumens
négatifs , qu'il prétend zïirQ infiniment plus fohdes que ceiuy. lu :
il enpropofe de iî étranges, que je fuis contraint de luy dire
qu'il ne ménage pas. affex fâ propre réputation, & qu'il abulê
un peu trop de la patience de fes Lecl:eurs.
Le delîein que je me fuispropole dans ce troinémc Tome
■cftant d'examiner ce que les Miniftrcs tirent des Auteurs des
£x premiers fiecles , je traiteray daas la fuite avec foin de deux
de ces argumens qu'on appelle negatii:s, donc l'un cft tiré du
Élence des Payens lurle dogme de la prefence réelle &: de la
TranlFubrtanciation , £< l'autre du filence des Pères fur les fui-
tes pliilolophiques de ce Myftere. Mais avant que d'entrer
danscedifcours, il ne fera pas mauvaisd'en produiredeux au-
tres qui feront juger de la juftelle de fon efpnt dans la compa-
laifon qu'il tait de ces fortes d'argumens.
Pour faire voir^à\x.-A, que l'arytruent de AT: Arnauld ne conclut^ C. ;. réponC
ni dans le genre du necelfaire , ni dans celuy du probaUs , Q- que le ^'" ''"
contraire en cfi très pojjiblc ^ tres-z)ray. Icmblable , je pmduts pre-
mièrement l'exemple de tEglife Romaine même qui ne condamne pat
plufieurs créances qu'elle voit en des focietez^ particulières , cS rn'e-
mc en des focictez^ entières , ou en des corps qui luy font fournis , ^
qui pourtant ne les reçoit , ni ne les approuve. Elle garde le filence à
leur égard , mais -elle ne prétend p^u qu'on argumente de Jon flence
aulfi bru fquement que 2s/[.Arnanld fait de celuy des Grecs. Il rap-
porteenluite î'exempie del'infail!ihilité du Pape fur laquelle il
prétend que l'Eglife Romaine carde le filence 5 & de là il cor-
dut que s'il dit que les Grecs , cn ne difputant que fur quelques ar-
ticles , rC ont pas prétendu approuver par leur filence le refis de la.
Religion des Latins , ^ moins en particulier la doHrine de la cor»
verjion (îibflantielle , ii ne dira, rien qu'on ne doive trouver raifionna-
ble par l'exemple de l'E'^life Romaine.
On n'auroit jamais fait qui voudroic marquer tous les défauts
de cette comparaiion.
I. Ceprécendu iilcnce de l'Eglife Romaine fur l'infaillibilité
45^ Liv. VII. Sxnmen des argumens negiittfs ^
du P.ipe n'ell; un filenccque pour M. Claude , Se ce feroic au
plus pour tout autre une mutuelle tolérance. Car on içait que
les défenfeurs de l'infaillibilité ne font point fi muets qu'ils ne
marquent fore diftincteraent ceux qui loûtiennent l'opinioa
contraire , & que parmy ceux qui combattent cette dodrine ,
aucun ne fait difficulté d'en nommer les défenfeurs. Il n'y a.
<ionc point de ûlence réel entre ces divers partis^mais il' y aune
tolérance mutuelle qui les empêche de le traiter d'heretiques,.
parce que ce différend n'a pas efté formellement & expreflè-
ment décidé par l'Eglife univerfelle en corps. Qify a-t'il en
cela d'étrange fie de Surprenant ?
Mais quandon tire un argument négatif du filence des Grecs
& des' Latins fur le prétendu différend où M. Claude veut que-
ces deux Eglifes ayent vécu pendant fix cens ans , on parle
d'un filence réel & efFeétif 5 & on veut dire , non que les La-
tins onttoleré les Grecs & \çs Grecs les Latins i mais que les
Latins n'ont jamais marqué qu'il y eût de l'erreur parmy les
Grecs fur le fujet de la prefence réelle, & que de même il ne
paroift point que les Grecs ayent jamais crû que les Latins euf-
fent un autre fentiment qu'eux à cet égard. Quelle comparai-
fon y a-c'il donc entre ces deux filences , dont l'un efl fi réel , 6c
l'autre (\ imaginaire ?
2. Si le différend d'opinion qui efl entre les Théologiens de
i'Eglife Romaine fur l'infaillibilité n'a pas efté porté jufqu'à
s'entr'accuferd'herefie, chacun néanmoins a donné à ladodri-
ne qu'il corabattoit les noms qu'il a cru luy convenir.
Ilfaudroit donc que M. Claude prouvaft que les Latins & les
Grecs ont fait de même. Mais c'efl: ce qu'il ne fçauroit mon-
trer , fie qu'il avoue luy même eftre très- faux. Cependant c'eft
fur cette circonftancequ'efl: principalement fondé l'argument
négatif qu'on tire du filence des Grecs fie desLafin';. On ne dit
pas r Les Grecs ont toléré les Latins iur le point de la prefence
réelle. Donc ils la croyoient auffi bien qu'eux. Mais on dit :
Les Grecs durant Tefpace de 600. ans , n'ont jamais accufé les
Latins d'avoir une docT;rine fauffe fur l'Euchariftie. Donc ils
efloient les uns fie les autres dans le même fentiment.
Il eft tres-jufte fie très- naturel que des Théologiens particu-
liers qui font divifez de fentiment fur quelque point , fie (oumis
néanmoins de part fie d'autre au jugement de I'Eglife univer-
felle, évitent de fe donner les noms odieux d'heretiques, C'efl
à'
^ des difficukez tirées des fèns. 459
âmioy la charité les oblige. Et ainfi la tolérance dont lesTlico- Ch.
lo2;iens de l'Eglife Romaine ufententr'eux à l'égard de l'infail-
libilité n'a rien d'extraordinaire , & on aiiroit bien fujet de
s'étonner s'ils en uloient autrement. Mais il eft ablulument
contre la nature fie contre le fens commun que les Latins, qui
traittoient partout ailleurs d'herefie la dodrine contraire àla
prefence réelle, & qui condamnoient ceux qui la tenoienr,
aux plus grands fuppliceSj ayent évité durant fix cens ans de
reprocher aucune erreur aux Grecs lur ce myfterc , s'ils les en
avoient crus infec1:ez, lors même qu'ils en eftoient les maiftres,
S: qu'ils les traittoient avec la dernière rigueur pour d'autres fu-
jets moins importans.
Les Grecs de leur cofté n'auroient guère cfté plus difpofez à
tolérer les Latins , s'ils avoient eu quelque différend avec eux
furce fujet- puis qu'ils n'auroient pd s'empêcher de regarder
leur dogme comme uneherefie , qu'il yen auroiteu fans doute
parmy eux , auffl bien que parmi les Calviniftes, qui l'au-
roient pris pour une idolâtrie, 6c qu'au moins ils l'auroientcon-
fideré comme une erreur fchifmatique, qui les divifoit duref-
te des Chreftiens.
Ce (croit une étrange tolérance que celle- là, & fur tout pour
des peuples cjxii ne vouloient pas tolérer dans les Latins des cé-
rémonies indifférentes.
Cependant il falloit que M. Claude fîfl voir tout cela dans fa
comparaiion de l'infaillibilité. Mais il n'a pas accoutume de
poufîer les chofes fi loin. Il luy fuffit de pouvoir appliquer le
rnême mot des deux coflez , pour en tirer une comparaifon &
un argument. On fé tait dans l'Eglife Romaine fur l'infaillibi-
lité : On s'efl teu parmy les Grecs (ur ce différend prétendu avec
les Latins. Qiie ce loit la même cfpece du filcnce ou non : Que
les circonflanccsen foient les mêmes , ou'totalemcnt contrai-
res , il n'importe; c'eft le même ncm, il n'en faut pas davan-
tage pour M. Claude.
Le fécond exemple qui fait bien voir encore rinjufiiice de
M.Claude dans fescomparaifons, c'cfll'hiftoired'un Docleur
■nommé Jean de Paris, à qui il arriva d'avancer une opinion té-
méraire lur l'Euchariftie, Se qui n'ayant pas efté condamné par
la faculté de Théologie de Paris fut feulement déféré à Rome,
où eflant allé pour fe juftifier,il mourut avant que fonafFui-
re fuft inflruite ; ce qui fît que l'on n'y prononça rien.
MM m
r
460 L IV. VII. Examen des Argumens negutifs ^
Comme il eft certain que les Grecs n'ont jamais fait aucun bruic
de cet événement, ôc qu'ils ne témoignent pas en avoir rien
fçu, M. Claude en prend fujet de faire cetadmirable dilemme:
En vérité y. dit il ^ 7^ ^^^ Grecs rient rien fck de cette hijioire^ ^
que ny les Pèlerins ^ ni les Ambcijjciâenrs^ ni les <^ens de guerre ,
rép p. 414- ^^ ^^^ Croife-^ ni les Tnquifiteurs ^ ni les Grecs d'Italie^ ni les
Latins de Confiantinople ne leur en aycnt rien appris^ ils peuvent
avoir ignoré bien d'autres chofes [ c'eft à dire qu'ils peuvent avoir
ignoré le lenrimentde l'Eglife Latine lur la prelcnce réelle ÔC
la tranirubrtantiation;) ô- ji M. Arnauld dit qu'ils l'ont feu ^ il
ne doit pas trouver mauvais qu'ils i' en fuient fait une raifon de
Jîlence& de retenue.
C'eft àquoy fe réduit ce fameux exemple que Je choifls a
deflein, parce qu'on fçait que les Calviniites en ont fait plus
de bruit que tous les autres. Mais avant que d'en faire voi
l'énorme dirproporcion^ il efl: neccllaire de remarquer que M.
Claude pour ajufler fa comparaifon^ s'aide de certains moyens,,
dont une fincerité un peu délicate auroit delà peine à s'accom-
moder.
Le premier eft de nous avoir transformé l'écrit particu-
lier où ceTheoloigen explique fonfentiment, en un jugemenc
delà Faculté de Théologie, ce qui ne vaut pas la peine d'en
parler^Sc d'avoir pour cela ou fabriqué ou pris \q ne fcjay pas
oh, un fauxtitrC;, en le faifant même imprimer à la marge en-
ces termes, TituUis eft : ludicium faeultatis Thcologue. Or ja-
mais cette écrit ne porta ce titre, & les copies manufcrites qu'on
en a à Paris, n'en ont point d'autres queceîuy cy. Detcr?mna,
tio fratris Joannis de P ariftis P/.-cdicatoris , de modo exiftendi
corpus Chrifti in Sacramento aliaris alio quarn fit ille qucm te^
7ict Eccle fia.
M. Claude ne s'eft pas porté gratuitement à inventer ou à
authorifer cette faufleté. Il a crcu par là en colorer une autre en-
core plus in excufable, qui eft de faire palîèr pour un décret
de la Faculté, uneclaufe ajoiitéeà la fin de cet écrit, qui porte
ces termes: In pr^fcntia Magifironon in Thcologia diLium eft
utrum que modum ponendi corpus Chrifti cfjc in altari , tenet pro
opinione probabili .^^ approbat utrumque per ( il y a quelque mot
de manque ) ^ per difia Sanclorum ., dicit tanicn quod nullus eft
dctcrminatus per Eccle ftam , ^ ideo nulluni cadere fub fi de 5 ^ fi
aliter dixijfet i minus bcne dixijfet , é" i^i aliter dicunt minus
t£ des difficîiltez tirées des fens. ^ 461
bene iicunt, ^ qui determinato a(]creret , alterutrum cadere jiih Ch. I.
fide , incurreret Scntentidm Cunonis anathematis.
M.Claude prétend à la faveur de ce faux titre , lugcment
deU Faculté^ attribuer toute cetteclaufe à la Faculté deTheo-
logie de Paris, comme il paroift par la traduction qu'il en fait
en ces termes: En prefcncc^ dit.il,</« Muiftres en TheologiCy il a eftè
dit quelle tient l'un 1^ l'autre moyen de 7nettre le corps de Jefus-
Chrijl à l'autel, fcavoir celuy de la converfon de la [ubfiance du
pain dj- ce-luy de l'ajfomption de cette fubflance parle Verbe , pour
une opinion probable. Elle dit toutefois qu'aucun de ces deux
moyens n'a efié déterminé' Et fi elle eiiji dit autrement , elle euji
moins bien dit.
C'eft toujours fclon M. Cliude, la Faculté qui tient, qui dit^
qui euft moins bien dit. Cependant ce fens eft très faux &; même
tres-ndicule. Car cetteclaufe ajoutée à la fin de l'écrit de Jean
de Pans, ou par luy. même ou par quelqu'autre, marque non ce
que dit la Faculté fur l'opinion de Jean de Paris, mais ce que
dit lean de Paris Ity.mêmej ou quelque autre, pour juftifier Ion
opinion devant la Faculté. Ft ainfi il faut traduire non comme
a fait M. Claude : En prefence des Maiftres en Theoloye , il a
efié dit qu'elle tient l'un ^ l'autre-.^ mais: En prefence des Do-
Heurs en Théologie , ila eftè dit que Jean de Paris tient l'un ^
l'autre moytn pour probable. '^x. ainfi tout ce que M. Claude at-
tribue à la Faculté, fe doit uniquement attribuera lean de Pa-
ris, C'efl: luy qui tient, c'eft luy qui dit., c'eft luy qui euft moins
bien dit ,^ non pas la Faculté.
Le necefîité de ce fens eft évidente par fes paroles mêmes: Fc
il eft aflèz difficile à concevoir que M. Claude ait pu s'y mé-
prendre de bonne foy.
Car quel décret delà Faculté a jamais efté conçu en ces ter-
mes : En prefence des Docleurs en Theolozie il a efié dit que la
Faculté tient ? Eft-ce que la Faculté par le en prefence de la Fa-
culté.*'
Secondement, le mot de tenet doit avoir un Nominatif Or
il eft alfez naturel qu'un Auteur qui écritfe lous. entende luy-
même-, mais c'eft fans aucun fondement que M. Claude y a
fous-entendu le mot de Faculté qui n'y eft point exprimé.
Ces autres termes : Bicit tamen quod railhis efi- deterniinatns
modus per cclefiam. Et fi aliter dixifiet minus bene dixiffet ,
marquent encore que c'eft un Théologien particulier qui parle
MMm ij
4^1 Liv. VII. Examen des Argumens négatifs ^
& non pas la Faculté. Car depuis qu'il y ades Facukezau mon-
de, jamais aucune nes'eft (ervie d\in tel langage. Ce fontdes
corps qui parlent avec authorité&; avec confiance, & non pas
avec ces tours qui ne conviennent qu'aux particuliers. Jamais ny
Dodeursny Juges fe font ils avilez de mettre dans leurs deci-
fions , que s'ils avoientjugé autrement ils n'auroient rien fail
qui vaille ?
Qiie M. Claude effiice donc s'il luy plaifl: de Ton livre toutes
les reflexions qu'il fait fur ce prétendu jugement de la Faculté
qui ne fut jamais ,& qu'il ne luy attribue plus d'avoir qualifié
deprobablei'opinionde Jean de Paris. C'eftàquoy la Faculté
n'a jamais penfé. Tout ce qu'il y ade vray^c'eflqu'ellenelecon*.
damna pas fur le champ: ce qui peut eftre arrivé par cent rai-
fons différentes dont onnefçauroit rien conclure , & «jue cette
affaire ayant efté portée à Rome, elle y fut alfoupie par la mort
de ce Théologien ; ce qui conclut encore nioins^corame nous le
dirons plus bas.
Le troifiéme moyen dont M. Claude fe fert pour trouver
quelque rapport dans fa comparaifon , n'eft guère plus fincere.
Car félon qu'il reprefente l'opinion de Jean de Paris , il en don-
ne cette idée, que ce Théologien nioit , & la prefence réelle,
êcla tranfubftantiation, & qu'il n'admettoit point ainfi que le
corps de J.C. fuft réellement dans le Sacrement. C'eft l'impref-
fion qu'on reçoit de cette Affomption du pain par la prefence d%
/^i?r^f, qu'i-lluy imputej M.Claude s'étant toujours fervi de
ces termes en divers lieux de fes ouvrages , fans y enfermer au^
cune prefence réelle. Mais ceux qui auront leu l'écrit de Jean de
Paris reconnoiitront tout d'un coup que cette idée eU tres-fau£
fe. Car tant s'en faut que ceTheologien niaftla prefence réelle,
qu'il ne s'eftoit porté à ces nouvelles imaginations que pour la.
foutenir plus facilement.
C'eftcequi paroift clairement dans tout l'écrit &; par les ter-
mes mêmes qui le commencent. Je pretens dit ce Docfteur,
dcffendre la vrayc ^ réelle exiflence de corps de J. C. dans le Sa-
crement de l'Autel. Etafin qu'on ne s'imagine pas qu'il n'admift
dans leSacrement que lecorpsdu painuniàceluy de J. C.dans
le cieljil déclare nettement qu'il y a félon luy deux corporeïtés
dans le S3.crQ\x\cr\t .,fcavoir celle du pain éT' celle de l'humanité .,
c'efià dire l' humanité ^ la paneïtè : mais qu'il n'y admet qu'un
eor£s,, ^arce qiCun cor£s n'ejl fas la cor^orcité: mais ceji ce qui
(^ des difficultés tirées des fens. 463
a la corporel té. H diten un autre lieu j qu avant la confecration la Ch. I.
fubjiance du pain efioit feule , mais qu'après la confecration elle
n'e/i pas feule, parce que le corps de J. C. y e/t caché.
Il répète les mêmes chofes en diveri autres endroits de (cm
écrit j ce qui ofte tout lieu de douter qu'il n'admill la prefeii-
ce réelle.
Il ne faut pas s'imaginer auffi qu'il combattît direclemcnt
la tranfubftantiation : Il enrecevoit& le terme Scies principa-
les expreïTions. Son opinion le reduifoit donc à une fubtilité de
metaphyfique, par laquelle il confèrvoitlepain dans le Sacre-
ment ^ en luy donnant le nom d'accident. Cette fubtilité efloic
de dire que le pain & le vin eftoient unis à laperfonne du Ver-
be , non immédiatement^ mais mediatement par le corps de
J. C. qu'ainfî & la corporeïté du vin & celle de J. C. (e trou-
voient enfemble dans le Sacrement , mais qu'il n'y avoi t néan-
moins qu'uncorps, parce que le mot de corps appartient à laper-
fonne, & qu'il n'y avoit point d'autre perfonne que celle de
Jesus-Christ.
Par le même moyen il d'ifoit que le pain ne fubfiftoi t plus,
parcequ'il eftoit uni hypoftatiquementà la corporeïté duVerbe,
gc qu'il perdoit ainlî (a propre fubiiftance. De forte que comme
il fauvoit a peu prés routes les expreffions de l'Eglife, il oûoit aux
iîmplesla connoiflancede ce différend.
On ne doit donc pas trouver étrange que cette opinion ne
choquant en rien la réalité , & admettant les termes dans \e(-
quels la tranfubftantiation s'exprime dans l'Eglife, elle n'y sit
pas fait beaucoup de bruit, qu'on n'en ait pas d'abord pouffé
l'Auteur, qu'on l'ait laiffé aller à Rome, pour juftifietles fen-
timens; que le commun du monde ait regardé cette queftion
comme un différend particulier, auquel il n'avoit point d'inte-
reft, & dont il n'eftoic point obligé de s'informer, 6c que ceux
même qui en ont pénétré le fond en-ayent ménagé l'Auteur, qui
fe mettoità couvert descenfurespar îesproteftation.s réitérées
qu'il faifoit par tout d'une foumilBon entière pour 1 Eglife uni-
verselle & pour le Pape qui en eft le chef L'Eglife a toujours
craint,6c avec grande raifon,les condamnations qui font de l'é-
clat, parce qu'elles n'ont pour l'ordinaire point d'autre effet que
d'engager les Auteurs à deffendre avec opiniâtreté les erreurs
.■qu'ils ont légèrement avancées. Ainfi elle aime beaucoup
mieux q;u'elles s'étouffent 6c s'anneantiffent d'elles mêmes, 5c
M M m ii]
464 Li V. VIT. Examen des nArgmiens negcitifs ,
elle tente d'ordinaire ces voyes de douceur,, &. ccb inénage-
rnens de prudence, avant que d'en venir à des remèdes plus
forts, qu'elie n'employé jamais qu'avec regret Se par une efpece
de neceflité,
C'eft une partie des remarques qu'on peut faire fur la ma lie-
re dont M. Claude rapporte cette hiftoire. Mais fi la bonne Foy
fe peut fentir bleflee dans ce rapport, la raifon fs peut bien plain-
dre à ion tour de l'ufage qu'il en fait. Car il en conclut que files
Grecs ont pu ignorer l'afFaire de Jean de Paris, ils ont donc bien
pu ignorer la créance de TEglife latine fur l'Eucharidiie.
C'eft à dire que fi les Grecs ont pu ignorer la créance d'm
particulier qui écrivoit dans un païs étranger Se dans une langue
qu ieu reftoit inconnue: ils ont bien pîi ignorer auifi la créance
décent millions de Chrétiens avec qui ils avoient un commer-
ce continuel.
Que s'ils ont pu. ignorer une affaire peu célèbre dont on n'a
parlé que pendant quelques mois 5c en un lieu particulier ,6i
qui s'eft étouffe en fuite ; ils ont pu ignorer fix cent ans durant
un difïerend toujours fubfiftant, toujours prefent, & qui de-
, voit attirer leurs attentions par mille raifons.
Que s'ils ont pu ignorer une erreur obfcurc embaraffée de
termes rcliolaftiques,6(: difficile à démeflersjils ont pu ignorer
auiïî des dogmes très clairement marquez , & dont il eftoit fa-
cile de comprendre le fond pour peu qu'on s'y appliquafl.
Q')e s'ils ont pu ignorer une chofe, dont perlonne n'avoic
intereft de les informer, ils ont pu ignorer aulîî une dodrine
que l'on avoir toute forte d'interefl; de leur faire encendre,qu'on
expofoit en quelque manière à leurs yeux, & qu'on auroit tâ-
ché par toutes fortes de moyens, de leur infpirer &: de leur faire
approuver , fi l'on eufl cru qu'ils ne l'euffent pas tenue.
Que s'ils ont pu diOimulcr une erreur qui ne formoit aucun dif-
férend entr'eux Scies Latins, puifqu'ilsia condamnoientdeparc
&: d'autrCj ils ontpù diffimuler auifi une autre doclrine fur la-
quelle ils auroient efté en differendavec toute l'Eglife latine.
La difproportion de ces chofes que M. Claude compare efl ^\
énorme , que je ne fqaurois croire qu'il n'en ait prefentemenc
quelque honte, & que tout homme de bon fens qui examinera
iYin & l'autre fans prévention,ne juge tout d'un coup qu'il étoic
prefque moralement imnoffible que les Grecs fuffent informez
de la doctrine de Jean de Paris j £c qu'il efl plus que moralement
Sf des difpmlte\ tirées desfens. ^é^
impofïïb'e qu'ils n'aycnc e(le très exactement inftruits de celles Ch. Î.
des L^riis fur l'Euchariftie: De forte que quand jj auroic eu
deiïein de choilîr les exemples les plus éloignez &les plus con-
traires en toutes choies, il n'auroit pas plus heureufemenc ren-
contré. Cependant comme il le croit en pcfTeffion de faire
tout palfer à la taveur de la confiance qu'il témoigne, il propofe
cette hidoire d'un air fi fier que je ne m'éconne pas que ceux
qui n'en jugent que par là en foienc éblouis.
Il me feroir aufil aifé de faire voir le peu de juftefie de l'cf-
prit de M. Claude dans tous les autres argumens négatifs,
qu'il allègue dans ce même chapitre ^ car ils ont tous les
mêmes défauts. Mais comme ce n'en eft pas icy le lieu, je ms
contenteray d'examiner avec foin ceux qu'il rire du filcncedes
Payens & des Pères fur les difficultez de l'Euchariilie, qu'il
prétend eftre infiniment plus forts contre les rnatholiques ^ que
ceux qu'on a tirez du filenccdes Grecs, ne font contre 'es pré-
tendus Keformez; 6i j'efpere que le fuccésdecet examen fera
de perfuader à tout le monde, qu'y ayant de bons & de mau-
vais argumens négatifs, M. Claude eft fi peu heureux Aies dif
cerner, qu'il prend les plus foibles conjectures de ce genre- là,
pour des demonftrations convainquantes, & des demonflra-
tions convainquantes pour de légères conjectures; & en un
mot que pour en juger félon le bon fens , il n'y a qu'à en juger
tout au contraire de luy.
CHAPITREII.
Que 'M.Cla.udc fuppofe témérairement que les Payens ayent con-
nu la docirïne des Chrejiiens furl' Euchanfiie.
M. Clnude compare dans fa troifiéme Répon/ê l'argu-
ment du filence des payens avec celuy qu'on a tiré du
filence des Grecs & des Latins, &; cela de cet air d'authorité
qui luy eft propre.
Il fêmble, dit-il, que ces Me/fienrs confultcnt fur toutes 'M. rcp. p
ehofes leurs interefts. Lorfque les Auteurs les favorifent, les " ''**'
Auteurs font dignes des louanges publiques -, lorfqu'ils ne les "
favorifent pas , ils ne font dignes que de mépris, &: les argu- ''
mens deviennent forts ou foibles^ bons ou mauvais félon qu'ils "
466 Liv . VII. Examen des aArgumem négatifs^
leur, fervenc ou qu'ils leur nuifent. Il eft certain que fi l'on
compare la preuve de M. Arnauld&la mienne 1 une avec l'au-
tre, à l'cgard de la forme elles font égales. Nous fuppofons des
principes femblables, oc nous en rirons des coniequences lem-
blables. Mais fi on les compare à l'égard de la matière , l'avan-
tage eil tout entier de mon cofté : car toutes les circonftances
donnent du poids à mon argument, au lieu qu'elles affoibliC
fent le ficn. Les Payens eftoient fçavans. Ils avoient en maia
toute l'authorité. Ils n'avoient rien à ménageravec les Chré-
tiens. Ils sc^avojent fort bien les doctrines du Chris-
tianisme. Il s'agitroic de la ruine entière de leu-rs Autels. Et ils
eftoient interellez pour la confervation de leur ancienne Reli-
gion, de décrier ces nouveautez qui s'introduifoient dans le
monde. On ne peut prelque rien dire de femblable à l'égard
des Grecs.
Il ne fait néanmoins dans cet endroit que recueillir le fruit
de Tes vidoires. C'eft dans fa féconde réponfe qu'il prétend
les avoir remportées, & c'eft- là en effet qu'il traitte avec
étendue cet argument du filence des Payens, & qu'il en fait la
plus pompeufe de fes preuves contre la prefence réelle & la
tranlîiibflantiation. Il y employé deux chapitres entiers , &
il le relevé tellement par toutes ces figures, ces exagérations,
ces railleries , cesinfultes dont il a un fonds inépuifablej que
ceux qui ne font pas accoutumez à tout ce grand bruit pour-
rpient en eftre furpris. Mais comme on s'aguerrit à la fin , 6c
que nous avons aftez veu depuis noflre difpute à quoy d'ordi-
naire tout cela fe réduit, nous ne laifferons pas de luy foûtenir
que tout ce qu'il ditfur cette matière n'eft qu'un amas d'illu-
fîons , & un vain appareil de fauflè éloquence, auffi bien que
de faux raifonnemcns: ôc pour ne pas imiter fon procédé, 6c
ne pas m'amufer à perdre comme luy du temps 6v des paroles,
je viendray au fond & aux raifons decifives.
Tous ces argumens tirez du filence des Payens dépendent
■de la vérité de cette propofition,que les Payens eftoient com-
munément informez de la dodrinedes Chreftiens furl'Eucha-
riftie. Car fuppofé qu'ils ne le fufient pas, quel fujet y auroit-
il de s'étonner, qu'ils n'euflènt point parlé d'un myflere qui
leurefloit inconnu.' M. Claude a tellement veu que cette fup-
pofition efloit effentielleà fon argument , qu'il ne manque ja-
mais delà pofer comme un principe ferme qui luy fert de fon-
dement
t^ des diffcuhe\ tirées des/cns, 467
dément. Z(?^ Puycns, dicil en un lieu, cfloicnt [cavdns.lls (ca- Ch. I ï.
•votent trcs-hUn la àocirine du Chrifiinmfme.^z ailleurs : Za î'*P-P-;*^'
coutume de cacher l' Eucharif te aux Jnf,dcl!cs ^n'cfi nuEemcm de i. ,;«. p. 144..
la pratique des trois pcmiers JiecUs , comme M. de l' Auhcfpint
Evèquc d'Orléans l'a reconnu , d^ coryirne il faroift évidemment
■par Le Dialogue de Jîijîin contre Triphon luif ^ Q^ par la féconde
yîpolope de ce mèine Auteur. An.IJi ne trouve-t'on point dans les
vrais ouvrages de ces premiers Atiteurs aucune de ces réticences ^
de ces forinules qui font familières aux Ecrivains du quatrième ^
du cinquième (tccle.
Il applique dans la fuice ce principe gênerai aux PhiloTophes
qui ont écrit contre la Religion Chreftienne. Les Phtlofophes,
dit- il , recherchaient curieufement dans nos doclrincs tctct ce qui
peut choquer la raifon. D'otî il s'enfuit que Jt les Chrcfiiens euffent
crû la tranjfubji ant iation , ils n'eujfent p^^s manqué de la leur re-
procher.
Je foùiiens ^ dit-il encore , qu'il nefi pas concevable que Cclfe
qui a fait une perquifition fi exacle de tout ce qu'il a cm pouvoir
efire reproché aux Chrefiiens , ait oublié une doctrine qui luy ou-
vroitun (î beau chemin. C'eft à dire qu'il n'a pas ignoré ce qu'ils
crovoientde ce myfi:crej& qu'il n'y a rien trouvé qui puftluy
fournir un fujct de reproche. S'il fetrouvoit donc que tout cela
fût témérairement avancé, Se que non feulement M. Claude
n'euft aucune raifon de (uppofer que le commun des Payens
fuftinftruir de ce myftere j mais que le contraire même fufl
certain, que deviendroient tant défigures &:de pbifanrcries ?
Ne devroient-elles pas paflèr pour des difcours de Sophi»-
fte , indignes d'edre employez dans une difpute de Reli-
gion?
C'eft néanmoins ce que je foûuens d'abord contre M. Clau-
de. Et pour luy marquer nettement en quoy je me renferme, je
prétends que quoiqu'on ne puiilè peut-eftre pas dire afTuré-
ment qu'aucun des Payens n'ait fçû ce que les Chreftiens
croyoiencde l'Euchariftie , ou par les efclaves ,ou par lesdefcr-
reurs, ou par l'Apologie de S. Juftin qui en a parlé plus tlaire,-
ment que les autres , parce qu'il s'eft cru obligé de ne rien difîî-
muler en parlant à desEmpereurs; il eft pourtant certain que la
plupart des Payens n'en ont rien fcHi, &que les Chreftiensont
toujours eûim foin particulier de leur cacher ce myftere ,aunî-
bien dans les premiers fiecles que dans les autres.
NNn
4éS L I V. V 1 1. Examen des argumens négatifs ^
Cette propofîtion ainfi reftrainte luffit entièrement pour
empêcher qu'on ne s'ctonne du filence des Payens. Car ny
avant que deux ou trois Payens dont les objidions conrre la
Religion Chrétienne ioient palîces à la pofterité , s'il eft
vray , comme je le prétends, que de ce nombre infini des Gen-
ti'.s , il n'y en ait eu que très- peu qui ayant eftc informez en
particulier de la créance des Chrétiens (ur ce myftere , quelle
difficulté y a-t'il à croire que ces deux au trois, comme Celfus,
Porphyre , Cecilius ayentefté plûtoft de ce grand nombre de
Payens qui l'ont ignorée , que de ce petit nombre, dont on
pourroit dire, &, encore avec incertitude & fans preuve pofiti-
v.e , qu'ils l'ont connue ?
Voilà la queilion ouverte & marquée diftincT:ement. M.
Claude foûtient que les Payens fçavoient communément la
dodriae des Chrétiens fur i'Euchanftie , & qu'ainiî il fcroïc
étrange que ceux dont nous avons les écrits n'en eulTent point
parlé. Je luy foùciens que les Payens ignoroient communé-
ment la docirine des Chrétiens (ur l'Euchariftie , & qu'il eft
- très- vray l'cmblableque tousceux dont il nous refte des obje.
clions contre les Chrétiens l'ont ignorée 5 & qu'ainfi il y au-
roit beaucoup plus de fujet de^'etonner qu'ils en euflcntpar- ,
lé, que de ce qu'ils n'en ont rien dit. Il ne s'agit plusicy de
difcourir en l'air. Il s'agit de produire des preuves dece qu'on
avance ; & c'eft ce que je prétends faire.
Les Miniftres demeurent d'accord qu'au quatrième fîécle
la pratique de l'Eglife eftoit de cacher les Sacrcmens aux
Payens 5 & principalement celuyde l'Euchariflie, & ils ne dé-'
{avoueront pas fans doute que cette pratique ne fût générale ,
& qu'elle ne s'obfervaft alors dans toutes lesEglifês du monde.
Car S. Cyrille de jerufalem fait voir que c'eftoit la coutume de
fon Eglife . lorlqu'il écrit -. Nous ne parlons fas clairement des
myp.eres devant les Catcchiimenes j mais nous femmes contraints
d'ufer fouv.ent d'exprcffinns oh [cure s ^ afin qu'elles puiffent efire en-
tendues des jî de lies qui font infiruits ^ é^que ceux qui ne le font pas
n'en foient pas blcjfcx^
Apud Ath.nn. Le Synodc d'Alexandrie rend témoignage pour l'Egypte ,
lojfqu'il déclare qu'il ne faut pas découvrir les myfteresà ceux
qai ne font pas bapciiez , & qu'il reproche aux Arriens de les
avoir publiez devant les Catéchumènes, Se ce qui eft encore
pisj devant des Payens.
C.itech..(;
illmn.
apol. 1
^ des dijffimîteT^ tirées des fens. 469
S. Epipliane le fait pour Tlfle de Chypre en reprodiant aux Ch. I Y
Marcionites qu'ils avoicnt la harûielFe de célébrer les Mvfteres H<cxcf.4i.
devant les Catéchumènes.
S. Bafile parlant même du Baptême & de la Confirmation-,
fur quoy on eftoit bien moins exad qu'à l'égard de l'Euchari-
ftie , dit qu'il n'efloit pas permis à ceux qui n'cftoient pas baptt.
fez de les voir admimftrer. Ce qui montre que c'eftoit la prati-
que de l'Eglife de Cefarée en Cappadoce dont il eftoit Evê-
que.
Il n'y a rien de plus fréquent dans les écrits de S. Chryfofta-
meque les réticences fur le fujet de l'Euchariftie,& quelque-
fois même à l'égard des autres Sacremens , à caufe de la pre-
fence des Catéchumènes, ce qui montre clairement qucccrtc
coutume s'obfervoit à Conftantinople & dans le Dioccle du
Pont.
Tlieodoret qui l'a marquée dans ks Dialogues, fait voir qu'el-
le s'obfervoit dans le Parriarcha td'Antioche , & dans les Erlt-
fesd'Afie les plus éloignées , comme l'eftoit celle de Cvr.
Il ne faut point d'autre témoin pour l'Afrique que S Au,
guftin , dans les écrits duquel on voir continuellement ces di^
cours (ufpendus & obfcurcis à defTein fur le liiict deTEuciia-
rin:ie,&:qui marque fans ceOe que c'eft la prefence des Caté-
chumènes qui l'obligeoir d'en uferainfi.
Enfin S. Ambroile rait voir que c'edoit auffî la coutume de
l'Italie, lorfau'il dit au premier chapitre da livrL' qu'il a fait pour
les nouveaux baptifez, que s'il cuft parlé des myftcres &: des
Sacremensavant le baptême, fçauroit efté , non les en inftrui-
re j mais les découvrir par une efpeee de trahiion : Prodidijje
fottujcjuum edidiffe exiflimarenmr.
Il eft encore certain que ce confentement de toutes les^Fgli'ês
au quatrième fîecle n'a pour caufe aucune ordonnance de
Conciles qui les ait unies dans cette pratique , qu'il ne paroift
point qu'aucune l'ait empruntée d'une autre ; mais qu'elle fe
trouve uniformément établie par tout,faDS qu'on en puifîe mar-
quer lecommencement en aucun lieu.
Ainfi il n'y eut jamais de pratique à laquelle on eufl; plus Az
droit d'appliquer cette règle de S. Auguftin, que les chofes
qui fe trouvent obfervees uniformément par toute l'Eglife, 6c
que l'on ne fçait point iivoirefté inftituécs par des Conciles j
doivent eftre rapportées à la tradition des Apoftres,
NNni]
47® Lîv. VII. Exxmen des argumens négatifs ^
Qtie (î réquicé veut , (elon ce Père ,que l'on juge ainfi de
toutes les pratiques univerfelles de l'Eglife, dont on ne voit
point le commencement , la raifon &: le bon fens nous y obli-
gent encore plus à l'égard de celle-cy.
Car fi l'on n'euft ulc d'aucune referve à l'égard de l'Ei-icha-
riftie dans le troifiéme fiecle,&:que les Payens eufient efté
communément inftruitsdece que l'Eglife croyoitde cemyfte-
re, comme M.Claude fe l'imagine? quel fruit auroit-elle pu
efpcrer de cette retenue 8c de ce filence qu'elle a depuis fî
exadement pratiqué ? Eft-cç qu'elle auroit crû effacer par là
toutes les idées que lesPayensen auroient eues? S'amafet'on
à cacher les chofes publiques? Et les Chrétiens, par exemple ,
ont ils jamais diffîmulé aux Payens qu'ils adorojent J. C. ôc
qu'ils rcjettoient ia pluralité des Dieux ?
Ainfi la retenue bc le filence univerlel des fidelles du quatrié.
me fiecle fur l'Euchariftie, prouve non feulement que ce myfte.
re n'eftoitpas connu aux Payens de leur temps , mais qu'il ne
l'eftoitpas non plus à ceux des trois fiecles precedens.
Car on. ne s'adreint point à des pratiques gênantes comme
jcelle-là fans aucun fruit 5 jamais l'Eglife n'auroit commencé à
cacher ce myftere aux Payens 3 fi elle avoir eu lieu de croire
qu'ils le connuffent, 6c qu'ils en fuffent informez. Elle a donc
cru qu'ils ne fçavoient pas ce qu'elle prenoit tant de foin de
leur celer; c'eft-à- dire c^ue ion filence n'a pas efté une vaine for-
malité , êc qu'elle a crû confcrver'parlàdans le fecret lesmy-
ileres qu'elle vouloir cacher aux infîdelles.
Aufii les Pères de ce temps là rapportent-ils formellement
cette referve à la tradition des Apoilres jbien loin de la regar-
der comme une pratique nouvelle qui n'eût commencé que
dans le quatrième fiecle.
C'cil ainfi que S. Bafilcen parle exprefîèment dans fon livre
du S. Eipric. Car après y avoir mis au nombre des traditions
r)on écrites les prières qui fe font à la conlecracion de l'Eucha-
riftie j &. qui fe diloient avant 5c après les paroles de S. Paul ou
de l'Evangile , il rapporte cette conduire aux Apoftres , & en
rend une raifon générale, qui marque que ce filence que l'Eglife
gardoit à l'égard de (es myftcrcs, eftoit conforme à leurefprit.
Les Apofires é" l^s SS. Pères ^ dit- il , qui ont prefcrit certaines ce -
refnonies au commencement de l' E'^life , ont crû que ^^ir conferver
la majejié des myjîeres j // les falioit tenir dans le filence ^ dans
f-..
^) des difficitltez. tirées des Jens. 471
le fecret. Cur ce qui devient public , (jr- qui paffe jufquaux oreil-
les du menu peuple , n'eft fa^ un myfiere. C'cji la raifon pour la-
quelle Dieu nous a laijjé plu (leurs dogmes fans les faire écrire , de-
peur que le monde cjiant trop accoujtumc à cesveritcz^^ on ne vint à,
les méprijer.
Mais il n'eft pas befoin de raifonnemens pour montrer que
cette coutume de cacher les myfberesauxPayens n'a point com-
mencé dans le quatrième liecle ; puifque nous en avons àes
marques certaines dans des Auteurs qui l'ont précédé. Car c'eft
lur cela qu'eft fondé ce que le Payen Cecilius dit dans Minu-
tius Félix : Que tobfcurite où ton tenoit cette Rcliy on prouvait la
vérité d'une partie des crimes qu'on luy imputoit. Pourquoy ^ dit- il ,
ont ils tant befoin de cacher (^ de dérober leur culte ajix yeux des
hommes , puifquon ne craint point d'expo fer a la lumière ce qui efi
honneflei Qu'eft-ce que ce culte , iînon les myfteres de^ Chrc-
tiens , entre lelquels l'Euchariftie tient le premier rang ?
C'eft par cette même raifon que Tertullien juflitîe les Chré-
tiens des crimes qu'on leur imputoit de commettre dans la cé-
lébration de leurs myfteres. Car après avoir montré que ceux
qui les y avoientfouvent furpris, n'en avoient jamais rien dé-
couvert , il ajoute : Qui font donc ceux qui ont fait connoifire ait
monde ees prétendus trimes 1 Sereient- ce ceux même que l'on en ac-
cu fe .<■ Mais comment cela pourrait- il eftre , puifque c'eft la loy com-
mune de tous les myfteres que de les tenir fecret s / S'ils nefe fontd.o~nc
pas découverts eux-mimes , il faut que ce foient des étrangers. Mais
■comment des étrangers en auroient-ils eu la connaifunce , puifque
l'on é la iqi'ie les profanes de la vite des mvfieres les plus fa:nis ^^
que l'on fait choix de ceux que l'on en rend fpeFiatcurs ?
Si les myfteres des Chrétiens euirent efté connus de la pkl-
part des Payens , & s'ils évident efté informez de ce qui le paf-
foit parmi eux dans la célébration de l'Eucharifticqu'y auroit-
il eu de moins iolide que cette réponfe de Tertullien :- Quel
droitauroit-il eu de demander comment les étrangers auraient p»
fçavoir ces chofes ? v'N DE extraneis notifia} Et comment auroit-
il pu fuppoferjComme un principe conftant & capable de perfua-
der les Payens , que l'on éloigne les profanes de la vue des
myfteres, êc que l'on fait choix des témoins &; des fpedateurs ?
Cum etiarn pia; initiationes arceant profanas c'^ arbitris careant. ^ ,
ï#-ii • ^ in '' J- J Terrul apq.
Alaisies calomnies mêmes que les Payens repandoientdetou- loa, c.?.
tes parts contre les Chrétiens j en les accufant de tuer un en-
NNn lij
Tenu!, ai
8ȕor. 1. 1. c. j,
47i Liv. VII. Examen des argumens négatifs,
fantdans leursaflt'mblccs,& deccmmeitre des ] m pu rctLZ abo-
minables, & la manière dont les Pcres s'en font défendus fou r-
nilîènt encore une preuve convaincante du fecret où les Chré-
tiens tenoient leurs myrteres.
Car ces accufarions même font voir qu'ils en eftoient très-
mal informez : & comme elles eftoient générales , elles font
voir que cette ignorance eftoit générale. Il paroift d'ailleurs
qu'encore qu'il infl naturel pour repoufler ces calomnies de
fiureun récit decequiie pafToit dans la célébration des myfte-
res , & que cette voyefufi: fans doute la plus propre de toutes!
perfuadcr,aucundes Apologiftesde la Religion Chrétienne ne
l'a prife, excepté feulement S. Jun;in,par la raifon que j'ay
marquée. Mais on ne voit rien de femblable, ni dans Minutius
Félix, ni dans Atenagore, ni dans Tertullien. Et il eft remar-
quable que ce dernier Auteur décrit bien dans fon Apologett-
que lesfeftinsque les Chrétiens appelloient Agapes, qu'il dé-
crit les prières qu'ils faifoient dans leurs aflcmblccs, le foin
qu'ils avoient de s'y infiruire par la ledure des Ecritures, la
manière dont on y recueilloit les aumônes , & dont on corri-
geoit les fautes ; mais qu'il ne dit pas un mot des faints Myfle-
res dans ce récit , quoique la célébration des myfteres fuft la
principale partie du cuite chrétien, & qu'on ne doive point
douter que ce f^javant Auteur ne l'ait regardée auffi bien que
S. Epiphane , comme le principal moyen du falut des Chré-
tiens : Pï^cipua Chrifiianonim faUfs.
Il fait encore voiren un autre endroitde fêsonvrages que les
Clirétiens de ce temps, là fe croyoient obligez de cacher leurs
myfteres aux Payens , puifqu'il s'en fert pour détourner les
femmes de fe marier à des infidelles. Par là , dit-il , on tombe
d./ns cette fciute que les Payens 'viennent à connoifire nosmyjleres.
Hoc efl igitur delicium qttod gentiles nojîra noverunt , qtiod fub
eonfcicyitia inp'ftoruiyi fumns. Et'appliquant cnfuice cette raifon
générale à l'Euchariftie que les femmes Chrétiennes prenoient
fouvent dans leurs maifons pendant ces temps de perfccution ,
il reprefente comme un grand malque les infidelles en puflenc
avoir connoiOance. Voftre mary , dit il , m fcaura-t'il pas ce qui
V071S qovfiez^ en facret avxnt toutes les autres -viandes 5 & s'il ap-
perçoit que c'ejl du pain , ne s'imaginera- t'il pas que c'efi celuy dont
m parle tant ?
C'eft un des grands inconveniens que Tertullien trouve
^ des diff^mlteT^tirées des fens. 475
dans ces mariages j ce «.[ui marque rimpreffion commune où Ch. IL
eiftoienc cous les ChrécieHs de ce temps-là, qu'il falloit tenir
leurs myfteres cachez aux Payens,
Mais on ne fcauroit rien defirer de plus formel & de plus pré-
cis (ur ce fujer, que la plainte môme qu'en fait CeKus dans Ori-
gene , où il appelle pour ce fujet ladoclrine des Chrctiens ,
S^o-yf^A ï^pv^ior ,unedoc1rine clandeftme , & que la rëponfeque
luy fait Ori2:ene qui reftraint ce fecrec aux feuls myfteres : Par o.-ig contr.
f r , dit- il, ^a^' Celfus af)pclle fouvent nojhe doïinne une docirine '■•"'•
cLtndeJline , il luy faut répondrcfur ce fujct ^ ce qui n'efi p':i'y difficile^
pnfque le monde coymoifi même prefentement mieux la docirine des
Chrétiens que celle des Philofophes. Car qui eft-cc qui ignore main-
tenant quej. C. efi ne d'une vierge , quil a eflè crue j fié ? Qui efl.ce
qui n'a p^is cuy parler de fa Refurrcchon qui efi crue de tant de
monde , ^ du jugement dernier où les mèchans doivent efire punts
^ les bons recompenfez^'i Ce que nous croyons de fi RefUrreBion cfl
de même public , quoiqu'il fcrve de fujet de ri fée aux Infidetles.
Isf'efi- il donc pas ridicule à Celfus d'appelier après cela nofire doc-
trine c lande [fine } Jl efi vray qu'il y a certains points parmy nous
^ue l'on ne communique pas % tout le monde imajs cela efi fi peu
particulier aux Chrétiens , qu'il s'obfervoit parmy les Philofophes
aujji-bien que parmy nous , puifqu ils avoient aufiî deux fortes de
doctrines > l'une qui pouvait -efire cormnuniquée à (^eux de dehors j
Vautre qui n'efioit que pour leurs difciples particuliers. Tous les
myfieres des Grecs é- des Barbares font aufji tenus fccrct s, fans que
perfonne y trouve k redire. C'^fi <^onc en vain que Celfus entre-
prend de décrier le fecret que les Chrétiens gardent , ne fcachant pas
même en quoy il confifie.
Il paroift clairement par ce lieu d'Origene , que non feule-
ment de Ion temps il v avoic des dogmes & des myileres que
l'on tenoit cachez aux Payens, mais qu'il acruquecela-fe pra-
tiquoit du temps même de Celfus, c'eft-à- dire des le premier
fîecle, ou au commencement du fécond.
Il paroift que Celfus ne croyoit pas fçavoirtoutela docirine
des Chrctiens , £c qu'il en eftoit bien éloigné, qu'il ne fçavoic
paî même félon Origene en quoy confftoic ce qu'on luy ca-
choic. Et comme il eft certain d'ailleurs que Ton n'a rien caché
avec tant de foin que TEuchariftie , on ne doit point douter
qu'elle ne ruft de ces chofes cachées dont CcHus n'eftoitpas
informé j 5c qu'il ignoroit abfolumenc.
^"74 Liv. VII. Excimen des AYgumens mgatifs ,
Ces raifons font plus que (uffifantes pour faire conclure à
tout le monde , que M. Claude a fuppofé très témérairement
que la doftrine des Chrétiens fur l'Euchariftie fuft connue
aux Payens-, que c'eft fans fondement qu'il reftraint au qua-
trième fiecle cette referve fur les myftcresj & qu'il eft conftant
au contraire qu'elle a toujours efté pratiquée , hormis en cer-
taines occafions rares, où les Pères s'en font difpenfez, comme
S. Juftin a fait dans fon Apologie. Âinfi le foin que les Chré-
tiens ont toujours eu de cacher leurs myfteres aux Payens ,
ellant certain , on ne doit pas douter qu'il n'ait eu fon effet à
l'éo-ard delà plupart des Payens ,&: même des plus curieux &C
des plus paflîonnez; De forte , comme j'ay déjà dit , que ce
grrand argument tiré de leur filence fe renferme en un mot, 8c
par la réponfe du monde la plus vray femblable , en difant que-
ce peu d'Auteurs Payens' dont les objections nous reftent ,.
eftoient compris dans ce grand nombre , à l'égard de qui la re-
ferve des Chrétiens n'avoif pas efté inutile.
M. Claude remarquera, s'il luy plaifï, que cette réponfe ne
fuppofe point qu'aucun Payen n'ait efté informé de ce que les
Chrétiens croyoient fur l'Euchariftie , quoiqu'il euft de la pei-
ne à le montrer d'aucun par des preuves pofitives. On ne fup-
pofe point non plus qu'aucun Payen n'ait rien dit fur ce fujec
contre les Chrétiens.
Je veux bien luy accorder Tun & l'autre, pourvu qu'il borne
&, cette connoifTance & ces reproches à un petit nombre de
Payens, & qu'il me permette de luy dire que cène fontpasceux
dont les reproches foient venus jufqu'à nous»
En effet combien v a.t'il de gens qui peuvent connoiflre le
fond d'une doctrine, dans lefquels cette connoifTance meurt?
Tout le monde n'eft pas d'humeur à faire du bruit , ni à pu-
blier fes penfées. On ne s'applique pas à tous ceux qui le fonr.
Et dans la multitude des chofes qu'on avoit en ce temps à re-
procher aux Chrétiens , on s'arreftoit principalement à celles
qui eftoient dans la bouche de la multitude qui ignoroit ce
myftere.
D'ailleurs , quand quelque Payen en auroit fait un fujet de
reproches , il ne faut pas s'imaginer que les Chrétiens fe fuf^
fent crus obligez d'y appliquer le monde en y répondant ex-
prefTemcnt. Leur conduite fait voir qu'ils auroient pluftofl-
pris le parti de les diffimuler. & de les laifîcr étouffer fans
bruit
^ des difficulté^, tirées des fens. \-j^
bruit j que de s'engager, ne s'y arreflantj à publier des chofes Ch. II.
qu'ils croyoienc devoir cacher.
On a déjà veudes preuves de cette conduite dans la ma-
nière dont les Pères ont répondu aux reproches des Payens ,
que dans leurs aflemblées ils couvroient un enfant de farine Se
le mangeoient aprcs l'aveir percé de plufieurs coups. Car au-
cun des Pères, excepté S. Jufl:in,n'en a pris fujet d'expliquer la
dodrinede l'Euchariftie, quoyqu'il n'y euftriendc plus propre
iêlon les Miniftres pour repoufjer cette calomnie. On envoie
un autre tres-confiderabîe dans les livres que Saint Cyrille
d'Alexandrie a faits contre Julien. Car cet Apoflat ayant
parlé par rencontre du baptême ài^s Chreftiens , & s'eftanc
mocqué de ce que ne purifiant pas le corps de la Icpre ny des
autres maladies, on pretendoit qu'il purifiaft l'ame de fes cri-
mes j Saint Cyrille au lieu de s'étendre fur ce fujet à fon ordi-
naire, fe contente de répondre que ces myjhres fintji profonds d^
fi relevez^qu' ils ne peuvent efirc compris par ceux qui n^ ont pas
lafoy , ^ qui font dans les ténèbres de l'erreur: Que cefi de ces ^ ^yrii i
veritez^^ quifaye a dit: Si vous ne croyez^ vous ne comprendrez^ comr. lui. p.
rien : Que lafoy efl la four ce de l' intelligence , qu'ai'nfi de peur ^^^'
Cvu'en DECOUVRANT LES M^SlïKts aux noniniticz^^ihï'offcnfafi
y. C. qui défend de donner les chofes fiintes aux chiens ., ^ de jet-
ter des perles devant les pourceaux, il n'entreprendra fa^ de tr ai t-
terde ce qu'ils renferment le plus profond.
Et après en avoir dit quelque peu de chofes, il ajoute, qu'il
en diroit bien d'autres^ s'ils ne craignait point d'eftre entendu des
non initie?:, ,'ti /j-vi t«4 tSc clu.iïi tuv i'S't^iiv «t'xoa i Parce , dit-il ,
qu'on fe mocque oTdinaire7nent de ce que l'on ne comprend pas , (J^
que les ignoruns ne connoiffant pas m'eriic lafoibleffe dejcur efptit^
mèprifent ce qu'ils devraient le plus admirer.
il y a bien de l'apparence que fi quelqu'un parmi les Payens
euft découvert quelque chofe delà créance des Chreftiens fur
l'Euchariflie, & qu'il l'eufl voulu tourner en ridicule, les Chré-
tiens auroient fuivi cette conduite de faint Cyrille, &: qu'au
lieu d'expliquer à fond, ils fe feroient contentez de certaines
réponfes générales qui auroient éludé leur curiofité , êc leur
auroient caché ce qu'ils n'en connoiiToient pas encore.
C'eft ainfi qu'en ufa une fainte Martyre, comme il efl rap-
porté dans un paflage de faint Irenée qui fe trouve dans les œu-
vres d'Ooeumeniusj 6c dont les Minières abufent tres-mal à
oo#
■^yé Liv. VII, Examen des Argamens négatifs ,
propos. Ce paflage porte que les Fayens ayant pris des Efclavei
des Chreftiens qui n'efioient encore que Catéchumènes^ ^ les for-
çant de leur apprendre quelque chofe de fecret touchant les Chré-
tiens i Ces efclaves qui rt avaient point Vautre 7noyen de les fa~
tis faire ^ qu'en leur difant qu'ils avaient ouy dire a leurs mai(hes que
lit divine Communion ejlait le corps d^ le fang de J. C. g^ qui s'i~
mazinoient que c'efioit effectivement de la chaire du fang^ le di-
rent en effet ainfi a ceux qui les preffoicnt : c^-^ fur cela ces Payens
ferfuadez^ que les Chreftiens .pratiquaient en effet ce qui leur ef~
toit impute par ces Efclaves ^^ répandirent ce bruit parmy l'es autres
Payens 3 ^ tachèrent par les tourmens de le faire avouer a San-
Uus ^ a Blandine. Mais Blandine leur répondit avec une liberté
pleine de faqeffe -^ Comment ceux qui s'abjlienncnt par pieté des
viandes qu il leur ferait permis de manger., feraient- ils capables
de faire ces chofes que vous nous impute^}
Voila le myftere de l'Euchariftie découvert en partie par les
Payens j & le voila caché à ces mêmes Payens par la prudence
de cetteMartyre.il eft indubitable, 6c que ces Efclaves, 6c
que ces Payens avoient dans l'erprit que parmi les Chreftiens
on mant^oit effectivement de la chair humaine comme on
man^e les autres viandes : c'elT: à direqu'ils eurent Tidéeque
ies Capharnaïtes en conçurent quand J. C. leur parla déman-
ger fa chair. Cette idée eftoit tresfaulTe 5 c'eft: à dire qu'il ef^
toit faux que l'on diviTaft la chair de J. C. qu'on la mangeafl
de la manière que les Payens fe l'eftoient imaginez. Etc'efb
pourquoy faint Irenée a raifon de reprefenter cette idée com-
me faulFe en l'attribuant à ces Efclaves & à ces Payens.
Or l'idée que les Payens avoient eftant faufle, les Chrétiens
qui vouloient d'une part fe juftiiîer,& de l'autre cacher leurs
myfteres à ces profanes , n'avoient qu'à la nier fimplement.
Et c'efl: ce que fît auffi fainte Blandine. Elle defavoiia cette
action brutale &: barbare qu'on imputoit aux Chrétiens,
mais elle ne découvrit pas ce qui fervoit de fondement aa
rapport de ces Efclaves.
Il faut que les Miniftres reconnoiflènt eux-mêmes cette
referve dans laréponfe de fainte Blandine. Car elle ne dit rien
de ce qu'un Calvinifte quiauroit voulu fejuflifier d'un repro-
che femblable & ne rien cacher, n'auroit pas manqué de ré-
pondre. Elle ne dit point que ces Efclaves s'eftoient trompez
faute d'entendre une expreffion ordinaire parmi les Chrétiens,
^ des difficulté^, tirées des fcns. 477
qui efl: que mangeant dans leurs myfteres un morceau de pain Ch. III.
& beuvant un peu de vin j ils donnoient à ce pain & à ce vin les
noms de corps & de fang de J. C. parce que ce font les fi-
gures de ce corps &: de ce Tang. Elle ne dit point que l'on ne
mange que fpiricuellement la chair & le fang de J. C. &: que
cette manducation n'efl: autre chofe que de concevoir qu'il
eft mort pour nous.
Ainfî ce pafTage n'efl propre qu'à établir tout ce que nous
avons entrepris démontrer dans ce chapitre contre M. Clau-
de. Car il paroift premièrement que ces Payens dont parle S.
Irenëe, eftoient très mal informez du myflere de l'Eucharif-
tie, puifqu'ils n'en fçavoientrien avant le rapport de ces Efcla-
veSj & que fur ce rapport même ils en conçurent une idée
fi fau{Ie,que les Martyrs n'eurent qu'à la nier fimplement.
2. Il paroift en fécond lieu qu'il eftoit même rare que les
Payens en fçûflent jufques là, puifqu'on ne voit ny dans les
autres acies des Martyrs, ny ailleurs, ny que desEfclavesayenc
jamais fait un pareil rapport, ny qu'on ait voulu faire avouer
aux Chrétiens qu'ils mangeoient le corps & beuvoientlefang
dej. C.D'oùon a lieu de conclure que les autre-* Payens ef-
toient dans une ignorance de ce myftere , pareille à celle des
Juges de faince Blandine, avant que ces Elclaves leur euflent
tait ce faux rapport ^ c'eft à dire qu'ils n'en fçavoient rien du
tout.
3. On y voit en troifiéme lieu que les Chrétiens avoient foin
de tenir leurs myfteres trcs.cachsz aux payens : puis qu'au
lieu de fe juftifier de la calomnie de ces Efclaves par un éclair-,
ciiTement entier de ce qui fe palfoit dans leurs myfleres , & de
ce qui donnoit lieu à cette imagination: fainte Blandine fe con-
tenta de la nier, & de montrer qu'elle eftoiccontre toute ap-
parence, fans rien dire davantage p ^oaa'j.î
4. On peut enfin conclure, que fi des Chrétiens prèflèz &l
forcez de répondre par la rigueur des tourmens à une accufa-
tion fondée vi-fiblement fur l'Euchariftie, ont gardé cette rete-.
nue. les autres qui n'eftoienc pas dans la même necefiîté,.orrc
•dû s'y croire beaucoup plus obligez, ôcqu'ainfi les Apologiftes:
de la Rekgion Chrèrienne, qui ont cboifi entre les. objediôns
des Pavens çeHes qu'il eftpitle plusneceâkircidie diétrmre, orrtreui
t^vtes-fortes de raifons de diffimuier celles qui auroienr regardé
ce myftere,qn.and même il yen auroit eu^puifqoejd'iine parcelles
OOoij
4yS Liv. VII. Examen des Argumens négatifs^
n'auroienc efté faites que rarement &par peudepayens, &que
de l'autre ils n'auroient pu y répondre comme il faut, fans don,
ner auxpayens plus de connoiffance de ce myftere , que leur Re-
ligion ne leur permettoit. Ainfi il n'y a aucun lieu de s'étonner
de ce qu'on n'en trouve rien dans leurs écrits^. Car outre qu'il
eftfort incertain, (î jamais cette objedion a efté faite à d'au-
tres qu'à ces Saints Martyrs de Lion ; il eft vifible de plus , que
quand elle auroit elle faite, lés règles de la prudence chreftien-
ne obligeoientde l'éluder par le filence.
Ainfi il n'y a rien de plus mal concerté que ces deux pro-
pofitions fur lefquelles^ de l'aveu môme de M. Claude, toute
la preuve qu'il tire du filence des Payens efl: établie; l'une,
que fi les anciens Chreftiens ont cru la tranffubftantiation
Romaine, il n'eft pas imaginable que les Payens ne leur en
ayent reproché les inconveniens 5 l'autre, que fi les Payens
avoient formé contre les Chrétiens toutes les plaintes que la
raifon 5c les fens peuvent former contre la tranfiubftantiation,
il feroit impoffible que nous n'en trouvaffions quelque trace
dans leurs écrits.
Caril efttres-imaginableau contraire que la plufpart des
Payens n'ayent point parlé de ce qu'ils n'ont jamais fçeu.
Il efi; tres-imaginable que ce peu de Payens, dont nous avons
les écrits, ou dont il eft fait mention dans les Pères, fufïent de ce
grand nombre à qui le myftere de l'Euchariftie a eftéabfolu-
ment inconnu.
Il eft tres-imaginable que quand quelques Payens en eufiênt
appris quelque chofe, & qu'ils en auroient même parlé , ces
reproches ayent efté éludez par la prudence & la fidehtédes
Chrétiens à cacher leurs myfteres aux profanes.
Il eft très imaginable que les Apologiftes de la Religion Chré-
tienne, qui nous parlent des objedions ordinaires des Payens,.
n'ayent rien fçeu de celle-là qui eftoit rare & extraordinaire.
Et il eft enfin tres-imaginable que, quand ils l'auroient fçeuë,
ils £e foient crus obligez de ladifiimulerfans y répondre autre-
ment qu'en defavouant en gênerai ces banquets de chair hii-
maine dont ils eftoient communément accufcz.
Que M. Claude conçoive donc une fois s'il peut ce que
tout autre que luy auroit peine à ne pas concevoir tout
d'un coup , & qu'il juge là-defTus de l'cftat qu'on doit faire
de fon argument.
g/ des diffculte-z^ tirées des fens. 47^
CHAPITRE m.
Examen particulier de ce que M. Claude avance
touchant les livres de Celfus,
L'Avantage que les Miniftres veulent tirer du filence des
Payens eft tellement décrait par le chapitre précèdent,
que je m'en tiendrois là , fi je n'avois àfaire à M. Claude. Mais
comme il n'efl: pas homme à fe rendre fi aifément, j'ay peur
qu'il ne ramené encore fur les rangs , ce farouche ^ infolenten-
nemy de la Religion Chreftienne ,(c'z^ ainfi qu'il appelle Cel.
fiis)3qu'ilne nous fa fie un long dénombrement des points
que ce payen en a attaquez j qu'il ne nous veuille obliger de trou-
ver dans Minutius FeliXj dans Athenagore, dans Arnobe, des ré-
ponfes aux objections que les Payens auroient deu faire, à ce
qu'il prétend, contre la doctrine de la prefence réelle , &; en-
fin qu'il ne nous vienne encore fatiguer de fes déclarations en-
nuyeufes touchant Julien l'Apoftat , aufquelles il s'eft déjà
plaint, qu'on n'avoit point répondu.
Epargnons luy donc cette peine par une difcufîion particuliè-
re de chacun de ces Auteurs. ComnTe Celfus eft celuy qui a le
plus attaqué de pointsparticuliers de la Religion Chreftienne,
ôc fur lequel aufîî M. Claude infifle davantage, commençons
par luy, & voyons fi M. Claude a eu raifon de décider Ç\ magi-
ftralement quiln'efipas concevable que Celfus , qui a fait une fer-
quifîtion fi exacte de tout ce qu'il a cru pouvoir efire reproché aux
Chrefliens , ait oublié une do&rine qui luy ouvroit un fi beau
champ, ^ dont ils fe pouvoit promettre bien plus d'avantage que de
celles qu'il attaque avec tant de fureur.
Si je voulois me contenter de faire voir à M. Claude que fa
pafiîon t'emporte , & luy fait avancer comme indubitable une
chofe très- incertaine, je n'aurois qu'à luy dire qu'outre le livre
de Celfus qu'Origene a refuté, & dont il rapporte les objeclions,
il eft probable que ce Philofophe en avoir fait encore deux au-
tres contre les Chreftiens dont il ne refte rien du tout. Car
c'eft Origene même qui le marque en ces termes: Platon n'a
nullement cru que les Poètes comme Homère ^ Hefiode eujfcnt eflé-
infpirex^de Dieu, Mais l'Epicurien Celfus [fi néanmoins l'Auteur
OOoiij
t. rfp. p. 4.
4S0 Liv. VIL Examen des Argumens négatifs ,
que je réfute cft ce Cclfus Epicurien qui a compofc deux autres U.
vres contre les Chreflicns) comme s^il efioït meilleur juge que Pla.
ton, déclare que ces Poètes eut eflé infpirez^de Dieu.
Il eft clair par ce partage que l'Epicurien Celfus , qu'Origene
a cru probablement eftre le même que celuy qu'il réfute, a fait
deux autres livres contre les Chreftiens. Et comme il eft fort
concevable qu'un Auteur qui fait plufieurs livres contre les mê-
mes adverfaires, dife des chofes dans les uns qu'il ne dit pas
dans les autres^ à moins qu'il ne veuille faire trois livres qui
n'en foient qu'un 3 il e^ concevable aulli que Celfus ait parlé de
l'Euchariftie dans ces livres que nous n'avons plus, quoy qu'il
n'en ait point parlé dans ceux que nous avons. Ain fi quand ce
feroit une neceflîtc que ce Phiîofophe euft fîiit quelques obje-
(ftions aux Chreftiensfur l'Euchariftie, M. Claude auroit tou-
jours tort de foutenir fî hardiment, qu'il n'efi pas concevable
qu'il n'en eufi point parlé dans ceux quOrizene a refutez^^ puif.
qu'il auroit pu fatisfaire dans les autres à cette prétendue ne-
ceffité.
Mais je prétends pafter plus avant , & montrer qu'il eft fin
concevable que Celfus n'ait point parlé de l'Euchariftie, quoy-
que l'Eglife en cruftce qu'elle en croit maintenant; parce qu'il
eft fort probable qu'il n'a jamais rien f^'eu des myfteres des
Chrétiens, & qu'il a efté très mal informe de leur véritable
doctrine.
Toute la fcience de cePayen que M. Claude nous veut per-
fuader avoir fait une ' perquijîtion fi exafie de tout ce qui pouvoit
efire reproche aux Chrcfiiens , fe reduifoic prefque à l'égard du
nouveau Teftament^ à quelques partages de l'Evangile de S.
Matthieu. Il ne cite dans tout fon ouvrage qu'un feul de S.
Paul, &; Origene le luy reproche à la fin du livre cinquième.
Il ne paroift pas qu'il ait leu les autres Evangeliftes , £c il n'en
tire aucune des objecT:ions qu'il en auroitpiitirer.il fait même
mention en un endroit de la généalogie de J. C. rapportée par
S. Matthieu, & il fe contente d'en dire par une froide raillerie,
que la femme de ce charpentier a ignoré qu'elle euft un tel
Prince pour tige de fa race ; mais il ne dit pas un mot de la
contrariété apparente qu'il y a entre S. Matthieu & S. Luc,
Surquoy Origene a fort bien remarque qu'il nef^avoit pas mê-
^rieen. i.z. "^^ '^^ difficultez êclcs doutcs raj.fonnables, qu'on peut former
conu-. Ceifiim ^nr Ics Ecritures.
(^ des diffctikcz^ tirées des fens. 481
Pour les dogmes il eft: vifible par tout ce qu'il en dit qu'il Ch. IIT.
ne fçavoit que ce qui eftoic connu de tout le monde j & qu'il
ignoroit abfolurnent ceux que les Chrétiens cachoient aux non
initiez. Cela paroift non feulement par le reproche qu'il fait:
aux Chrétiens, de tenir leur doctrine cachée, ce qu'Origene
avoiie à l'égard des myfteres : mais aufli par toutes fes objec-
tions contre le Chriftianifme. Car il n'en forme aucune fur les
myfteres, non pas même fur le Baptême ny fur aucun des points
de la Difcipline Chreftienne qu'on tenoit cachez. Mais il fe
plaint en gênerai que les Chreftiens tenoient des affèmblées fe-
crettes contre les deffenfes des Loix , fans rien dire du tout de
ce qui fe faifoit dans ces allemblées , parce qu'il n'en fçavoit
rien.
Il eftoit même fi peu inftruit des dogmes les plus communs,
& dont il luy eftoit le plus aifé de s'informer, qu'il eft éton-
nant que M. Claude l'ait voulu faire palTer pour un homme
phis inftruit que ne font beaucoup de Chrétiens, & qu'il aie
ofé écrire qti'à peine y a-t-il rien qui fuijje cfire relevé avec
quelque apparence contre nojlre fainte Religion , que ce Philo- ^' ^^' ?• ^^^'
fophe Epicurien riait relevé avec siutant de fubtilité que de ma.
lice.
Il s'imaginoit que Dieu n'eftoit point par tout, & que c'ef-
toit même la créance des Chrétiens 5 de là il concluoit, que ft
Dieu eftoit defcendu en terre, il avoir donc quitté le ciel.
Il fuppofoit que félon les Chreftiens Dieu eftoit figuré co- q^- j ,
loré, & capable de mouvemens. Il ne paroift point par tout ce cont. ccif,
qu'on voit de luy qu'il ait connu la doctrine de la Trinité, ny
ce que les Chrétiens enfeignoient de l'unité du Père & du Fils &
du S.Efprit.Il ne forme aucune objeclion fur ce point, & il ne
nomme pas même le S. Efprit comme une perfonne diftincTie ;
mais il prend l'Efprit de Dieu ra-veoV* ^^ pour le Verbe qui
s'eft incarné : C'eftpourquoy il fait dire aux Chrétiens, que
Dieu eftant difficile à connoiftre a envoyé fon S. Efprit dans ^onf cd£
un corps femblable au noftre, Tmi;^* /J^ioi' lin^àiKm e/s o«.aa jî/*?''
Il connoifloit auffi peu l'Incarnation que la Trinité. Car il
s'imaginoit que J. C. n'eftoit autre chofe félon les Chrétiens .
que l'efprit de Dieu revêtu du corps humain, c'eft à dire qu'il
ignoroit l'union de l'humanité avec la divinité, & qu'il n'avoir
garde ainfi de former aucune des difficukez qui naiflènc de ce
myftere incomprehenfible.
Gii^,
4^1 Liv. V 1 1. Exumen des Argumens négatifs ,
Mais rien ne fait mieux voir le peu de foin qu'il avoir eu
de s'inftruire delà Religion Chrétienne, que la confufion ,
& le mélange qu'il fait de toutes les fentes , en attribuant aux
Chrétiens en gênerai, les rêveries particulières de tous les hé-
rétiques de Ton temps.
C'eft ainfi qu'il leur attribue d'enfeigner que les fontaines
chaudes eftoient venues des larmes de certains Anges jce qui
eftoit une folie des Valentiniens.
i_ y°"^" * ' Il leur impute ailleurs les erreurs des Ophites, comme de re-
connoiftre fept principaux démons , &d'appeller le Créateur
<lu monde , un Dieu deteflable & digne d'exécration pour
avoir maudit le ferpent quia donné aux hommes la fcience
du bien &: du mal : Ce qui eftoit une des folies de ces impies,
qui bien loin d'eftre Chrétiens, comme le marque Origene,
ne recevoient pcrfonne dans leur compagnie qui n'euft maudit
Jefus- Chrift.
Et c'eft ce qui donne lieu à Origene de luy reprocher que-
la dodrine de ceux qui font dans la vrayc Eglife , 7^ "^
rr.s i-tL-tiX-ftsm, luy eftoit inconnue.
Auffi confond c il tellement toutes chofes qu'il parle même
de certaines fedes de Chreftiens, qu'Origene ne connoiffoit
{Joint àce qu'il dit 5 comme de certains Marcelliensquijtiroienc
eur nom d'une Marceline, de jene fçay quels Herporiens
qui venoient deSalomc, & d'autres qui venoient de Marianne.
Qui croira qu'un efprit fî confus , fi rempli de fauiîès idées,
de fables, &: de rêveries, ait eu grand foin de s'informer des
vrais fentimens de l'Eglife fur ces myfteres les plus cachez? Qui
croira qu'il ait pénétré ce qu'elle a toujours eu foin de cacher
à ceux même qu'elle recevoit au nombre de fes enfans 5 puis
- qu'il ne fçavoit pas même ce qu'elle ne cachoit à perfonne,
éc ce qu'elle defiroit que tout le monde connuft ?
Qiii ne voit au contraire, que tout ce qu'il en a creu fçavoir,
fe reduifoità quelques fables , qu'il avoit ramaflees fans difcer-
nement des difcours de ceux qui ne connoiftbient point les
Chrétiens; &; à quelque leAure fuperfîcielle de l'Evangile de
S. Matthieu & du livre delà Gcnefe?
Que fi l'on veut encore une preuve particulière pour mon
crer qu'il n'eft pas croyable que Celfus connût en aucune forte
le myftere de l'Euchariftie , en voicy une très vrayfemblable,
c'çft que eePayen a entrepris de prouver en divers lieux que
les
& des di^fficahez. tirées des fens. 4R3
îes Chrctiens avoient emprunté ou des Philofophes, oudedi- Ch.îîî.
verfes iecles barbares une partie de leurs dogmes 6c de leurs
pratiques, comme par exemple ^ que c'cftoit de Platon qu'é-
toit tirée cette parole de J. C. quU eft plus facile qu'un chameau
paffe parle trou d'une eguille que non pas qu'un homme riche entre
dans le Royaume de Dieu. Que la coutume de n'avoir point de
temples , d'autels , de ftatuës , eftoit pnfe des Numides , des
ScytBes & des Perles. Cependant quoiqu'il rapporte fur cela
entr'autres exemples que les Chrétiens empruntoient une cer-
taine doctrine des Prellres de Mitra , on ne voit point qu'il par-
le nulle part du rapport que S. judin marque entre la célébra-
tion de î'Euchariftie 6c les facrifîces de Mitra, ou Ton fe fer-
voit auiïî de pain ôc de vin. Cet exemple auroit fans doute efté
plus propre qtierous ceux que Cellus aiie2;i]e. Les mvfteres de
Mitra ne luy eftoient pas inconnus , puifqu'il en rapporte les
chofes les plus difficiles 6c les plus obfcures. D'où vient donc
qu'il ne s'en fert point, fi ce n'eft qu'apparemment il ignoroic
non les myfteres de Mitra, mais ceux àss Chrétiens? Il n'y a
point d'autre voye pour prouver les négatives de cette nature-,
puifqu'on ne fçauroit nous obliger de trouver dans ce qui refte
de ce Payen un aveu formel qu'il ignoraft la doctrine des
Chrétiens fur le mvftere de l'Euchariftie , 6c que même cet
aveu yeft marqué de la manière qu'il le peuteflrepar les repro-
ches qu'il fait aux Chrétiens decacher leur docl:rine,cequi ne
fe peut entendre que des myfteres , comme dit Orrgene.
Mais il fuffit , pour obliger M. Claude à fe rendre , qu'il n'aie
aucune preuve queCelfus fuftinftruit de cette do<ftTine, ni au-
cune raiion pour le fepareren cela du commun des Pavens , à
qui elle eftoit inconnue ? quand même il n'y auroit pas des con- '
jeftures tres-raifonnablesqui font voir en particulier qu'il l'a
ignorée. Il n'en faut pas davantage pour avoir droit de foùte-
niràM. Glaudef«'/7 f/? tres-coneevahle (\ut Celfus n'ait point
reproché aux Chrétiens leur doctrine fur l'Euchariftie J puif-
qu'enfin on ne fait pointde reproches pour àts chofes dont on
n'a feulement pas d'idée.
PPp
484 L IV. VIL Examen des Argumens négatifs^
CHAPITRE IV.
Qt^il n'y a aucun fujet de s'étonner que les JÎpoloyJles de la
Religion Chrétienne , nayent Joint Jarlé de
l'Eucharijlie.
Prii's Celfns M. Claude nous oppofe les écrits de Juliem
l Apoilac , & ceux des Apologiilesdela Religion Chré-
tienne. Mais comme il renverfe en cela le vcntable ordre ,.
nous commencerons à luy répondre par ces derniers.
Il en fait le dénombrement en ces termes : Nom avons , dit-
il , la difpîtte de Jujlin Martyr contre Tryphon , où il efi fouvent
parlé du pain de l'Eue harijite. Que veut dire qu'il ne fc trouve rien
de ce que nous cherchons , non plus que dans fes Apologies , ni dans
celle de TertuUien , 7ii dans celle d Athenaqore , ni dnns Mmutitu
Félix , ni dans Arnobe , ni dans LaHance , ni généralement dans
toute cette partie de l' Antiquité qui noui reflc , ^ qui n'efi pas Jt
peu de chofe que l' Antcur nous veut faire croire. Et je l'ejiime trop
fcavant pour ne l'avoir pas vii'é à fond ^ ^ trop judicieux pour ne
l'eflimer pas autant qu'elle le mérite.
Mais s'il n'eft pas permis de douter que M. Claude ne foit
trop ((gavant, pour n'avoir pas vu à fond cette partie de l'Anti-
quité Ecclefiaflique, il faut qu'il nous permette q"ue nous dou-
tions malgré nous, s'il a une autre qualité d'efprit infiniment
plus eftimable que la fcience,quieft lafincerite.
Car eft-ce agir lincerement que de vouloir tirer avantage de
certaines petites raifons , lorfque l'on fçait bien qu'elles font
vaines & frivolfis ? Or M. Claude peut-il ignorer qu'à l'égard
de la plupart de ces Auteurs, dont il entafle ainfi les noms, ce.
ne foit même une chofe ridicule de demander, pourquoy ils
n'ont point parlé del'Euchariftie ?
Y a.t'il,par exemple , delà fincerité à demander pourquoy
il n'en efl: point parlé dans le Dialogue de Minutius Félix, pui<l
que l'on n'y trouve pas même le nom de J. C. 6c que l'unique
but de cet Auteur eft de répondre aux raifons des Pa.yens
pour la pluralité des Dieux , & de repouflèr les calomnies ordi-
naires qn'il"; puWioienc contre les Chrétiens, & qui marquoicnc
une extrême ignorance de leur ReligionjComme de dire qu'ils
C$f des dijpculte\ tirées desjens, 485
âdoroiencune tefte d'afnei ôc que quand ils rccevoienc quel- Ch.1V.
qu'un à la iociecé de leurs m\ itères, ;ls couvroient un enfant
,de iarine , leperçoiencdecoups, fie ayant bu de ion (ang,en
eoupoienr le corps en divers morceaux , comme la victime
qui les unifloit ^ qu'ils commettoient des impuretez horribles
dans leui s teftins nocturnes, qu'ils adoroienc les croix .& ren-
doient des honneursdivinsà un homme puni du dernier fup-
plice.
Comme le difcoursde Ceci!ius ne contient que cela , Octa-
vius qui y repond ie renferme prefquedans les mêmes bornes.
Il atcaque la pluralité des Dieux, il prouve qu'if n'y en peut
avoir qu'un : 11 donne une haute idée de fa Maj^ilé infinie ; il
fait voir que les Philofophes s'accordent en ce point avec les
Chrétiens ^ il reprefente l'oric^ine de l'idolâtrie j il en décou-
vre les abfurdirtz: Il montre quelle part les démons y avoicnt:
11 réfute les infâmes calomnies dont on chargcoit les Chré-
tiens: Il relevé l'innocence de leur vie, leur chaftcté dans les
mariages, l'amour qu'ils fe portoient les'uns aux autres : Il les
juftifie de ce qu'ils n'avoient point d'autels à la mode àçs
Payens : Il fait voir qu'il n'y a rien d'abfurdedans ce qu'ils en-
leignoient de l'embrafement gênerai du monde &de la Re-
furredion: Il rejette toii'iours lut les Payens les crimes dont
ils accufoient les Chrétiens : Il fait voir que leur pauvreté leur
efl: glorieufe, & que c'cft un effet de la bonté de Dieu envers
eux .-Enfin il ne fait^, pour le dire ainfi, que défendre les dehors
de la Religion Chrétienne ;& ileft fi éloigné de vouloir entrer
dans les dogmes ^ comme la Trinité , l'Incarnation , 2c ce qui
regarde en particulier J. C & les Sacremens^ qu'ayant à répon-
dre à ce que Ceciliusavoit reproché aux Chrétiens qu'ils ado-
roient un homme puni de mort , il fe contente de dire, qu'071 fe
tromfoit , en s'imaq^inant^ eu qu'un criminel ait fii yneriter d'eflte
ejîimè JDieu parmy les Chrétiens , ou qu'un homme forme de ter-
re l'ait pu obtenir i ce qui étoit une réponfe ambiguë & fufpen-
duë, bc qui donnoit lieu de douter à ceux quin'auroient pas été
d'ailleurs informez de fesfentimens , s'il croyoit que J. C. fuft
Dieu , ou s'il ne le croyoit qu'homme. Quelle apparence donc
qu'affectant de n'entrer dans le détail d'aucun de nosmyfteres,
& ne parlant même point de J. C. en particulier ^ il ailaft fans
fujet é<: fans prétexte parler de l'Euchariftie ? Rien fans doute
n'auroit eflé plus mal à propos. Et M, Claude ne pouvoir ails-
PPpij
4^6 Liv. VIL 6xa,men des m'gumens negut'ifs.^
guer d'Auteur donc le filence fur l'Euchariftie kilt moins pro-
pre à faire voir qu'on n'en croyoic pas en. ce temps- là te qu'on
en croit dans l'Egliie Catholique.
Gn en peut dire aucanc d'Achenagore. Jamais cet ancien
Auteur ne s'eft propofë dans l'Apologie qu'il a faite pour les
Chrétiens, ni de prouver tous leurs dogmes , ni de repoulTer
toutes les accufations des Payens. Il ie réduit à trois qu'il mar-
C|ue diftinclement. Onnotis charge , dit il , de trois crimes execra^
hhes , d' impiété , de manger de la chair humaine , de commettre des
incefles abominables. Voilà le defïèin de Ton Apologie. Il ne die
rien en particulier d'aucun dogme, fi ce n'eft de la Trinité qu'il
marque fort firaplement , &, (ans prévenir aucune des obje-
»3:ionsqui en peuvent naiftre. II ne parle ni de la naiflànce de
J. C. ni de fa vie , ni de fa mort , ni de (a refarreclion , ni d'au-
cun de fes myfleres. Il employé tout fon Traité à faire voir les
abfurditezde laTheologie des Payens par leurs Philofophes
&: par leurs Poëtes, &à repouffer les calomnies dont ils noir-
cifloient les Chrétiens ^ en repreftntant la pureté de leurs
mœurs, & combien leur doctrine efloit oppofée aux crimes
qu'on leur impucoic.
Eft-ce que M. Claude voudroit que ne parlant pas même de
J. C. il euft parlé de l'Euchariftie, que l'on ne fc^auroit entendre
fans eftreinftruit de ce qui regarde la perfonne de J. C.
Mais il s'en(uit au moins , dira.t'il ,que les Payens ne rcpro-
rhoicnt rien aux Chrétiens fur le fujet de l'Euchariftie J'aydéja
montré qu'il n'y auroit rien là d'étrange, puifqu'ils ignoroienc..
abfolument ce myftere. Mais M. Claude le conclut fort mal
du lîlence d'Atbenagore. Car s'enfuit-il qu'ils n'ayent point
fliit de reproches aux Chrétiens fur la naiftanc^, fur la vie& fur
la mort de j. C. de ce qu'Athenagore n'en parle point? Qui ne
fçaicou'il eft permisàun Auteurdechoifirentreun grand nom-
bre d'objeclions celles qu'il crcic les plus importantes ,& que
c'eft proprement ce qu'Athenagore a fait dans fon Traité ?
La linceritë permettoit encore moins à M. Claude de mettre
Arnobe au rang -r^.e ceux dont il prctendquele filence fur l'Eu-
chariftie luy fournit une preuve que les anciens Chrétiens ne
croyoicntpasla prefence réelle ni la tranlfubftantiation.
Car il n'ignore pis fans doute que lorfque cet Auteur a com-
pofé fes fept livres contre les Payens , il n'eftoit ni Ecclefiafti-
que , ni même Chrétien , mais fimple Catéchumène , ou peut
"& des âifficultci. tirées des fins. 4^7 ^
aflre moins que Cacechumene , puifqu'il ne fie ce livre qu'atin Ch. IV.
de mériter d'eftre reçu dans l'Eglife , ce qu'il ne pouvoir obte-
nir de l'Evèque de Sicceen Atnque, qui ne crtivoir pas qu'il
voulût fincerement embraiTer la Religion Chrétienne.
Cette feule qualité de Catéchumène fuffiroit pour montrer
qu'il eft ridicule de s'étonner qu'il n'ait point parlé de TEucha-
riftie , puifqu'on voit par tous les Pères que l'ignorance de ce
myftere , eftoic jointe à cet eftac.
Detnaniez^^ài^\X. S. Auguftin , à un Catéchumène , s'ïhnange la ^"5- f--"- '«
ciitir du Fils de l'homme , (^ s'il boit fon fing. il ne fant ce que
votis luy voulez^dire. Les Catéchumènes , dit il encore , «f /tvz- itij.
•vent point ce que reçoivent les Chrefiiens. Nesciunt Catechume.
ni qui d accipiant Chrifiiani. C'efi , dit- il , une chofe 'voilée aux
Catéchumènes , que la manière dont rn man'ie la chair du Seigneur.
Quelle raifon a donc M. Claude de tirer Arnobe du rang des
autres Catéchumènes, ^ de luy donner une connoiflance qu'il-s
n'avoient pas communément, Ainii la feule qualité de la per-
fonne d'Arnobe , anéantit l'objeclion de M. Claude jMais s'il
kiy avoit plu de juger par les livres mêmes de cet Auteur de
la connoilTance qu'il avoit de la doctrine de i'Eglife, il auroit eu
lionte fans doute de l'en alléguer pour témoin , &. beaucoup
plus de conclure que l'Eglife ne croyoic pas de fon temps les
articles dont il ne fait pas mention.
Que feroit M. Claude , fi par fa propre règle on l'obligeoic
è.Q prendre pour doctrine de l'Eglife tout ce qu'Arnobe propofe
comme la doctrine des Chrétiens, & retrancher de la foy cous
les points dont il n'apas parlé ?
Il faudroit qu'il concluft d"al:>ord que les Chrétiens du temps
d'Arnobe croyoientl'ame mortelle de fa nature, qu'elle n'é-
toit rendue immortelle que par une grâce particulière qucDieu
ne faifoit qu'aux iufl:es,6c que lésâmes des méchans après avoir
efté long-temps brûlées par le feu, en feroient enfin entière-
ment coniumées.
C'eft-à dire qu'il faudroit qu'il attribuai aux Chrétiens des
premiers fiecles l'opinion prelentedes Sociniens ,qui n'ont fait
querenouveiler en ce temps-icy ce qu'Arnobe avoit enieigné
avant eux en plufieurs endroits de fon (êcond livre, dont je
B''en rapporteray que quel ques- uns.
Que diray-je , dit il j de voflre Platon^ Ne parle^t'il pas dans
fon dialogue de l' immortalité de l'urne ^ du fleuve d' Acher^n , d»
P P p iij
^88 L I V . V ï I. Examen des zArgumens négatifs ,
iityx , du Cocyte ^ du. Purflegeton , dans lef quels il dit ^qtie les
ames font roulées , plongées S^ hmlées ? En quoy ce Philo fophe ,
quoyque d'ailleurs tres-judicicux ^ très, intelligent , ne prend pas
carde qu'il s'engage en un ernbaras inexplicable , en voulant d'une
■pari que le s ames [oient immortelles ^perpétuelles ^ incorporelles j
g)" prétendant de l'autre qu'elles ne laiffent pas d'ejlrc punies , ^
qu elles reffentent de la douleur. Or qui ne voit qu'un ejlre itnmortel
^ (impie ejî incapable de douleur , ^ que ce qui en peut recevoir
n'éji p-ts immortel ?
Aorcsavoirainfi réfuté Platon parce principe ridicule & hé-
rétique, que ce qui eft capable de douleur ne peut eftre iminor-
Ecl iil propofe enfuite ce qu'il prétend que J. C. nous ait appris
fur ce fujec
Cependant^ dit-il , Maton ne s'efi pas beaucoup éloigné de la vé-
rité en ce point. Car quoyque fa douceur naturelle luy ait perfuads
au il y aurait de l' inhumanité k condamner les ames à. lamort yC'eJi
pourtant avec raifon qu'il a cric qu elles eftoient jettées en des fleu-
ves bridants ^ horribles par les flammes qu'ils roulent avec la boue.
Car il eft vray qu'on les y jette , d^ qu'estant réduites AU'
NEANT j elles periffent abfolument. Jefus-Chrift nous ayant appris
qu'elles font d'une condition moyenne , ^ que pouvant périr fi elles
Vcnor^ nt Dieu , elles peuvent aujjî eftre délivrées de l'aneantiffe-
went , fi elles font touchées de fcs menaces.,^ qu'elles fe portent
à recourir à fa mi fcri corde.
Laraifon.^ dit-il encore, nous fait voir que les ames ne font ni
incorporelles ni immortelles , ^ q%e leur vie finit comme ailes des-
autres animaux.
C'eft ce qui fait conclure à cet Auteur qu'il y a fort peu de dif-
férence entre l'homme &: les autres animaux. Vultis ., dit.il j.
turnore depojïto .^ cogitationibus tacitis pervidere animantia nos ejfe-
aut confrdilia cajterk , aut nonplurima differitate diftantia.
C'eftcequiluy fait douter Çï lésâmes des méchans nepaf-
fent point dans les corps des beftes. .S'// eft vrav , dn-i\, comme'
onl'cnfeigne dans les myftcres , que les ames des méchans entrent
après leur mort dans les corps de divers animaux.
Il faut en fécond lieu que M. Claude attribue auflî aux an-
ciens Chrétiens cette opinion impie que le même Arnobe at-
tribue à J. C. que les ames n'ont pas eflé créées de Dieu , èc
qu'elles ont un autre Père. Apprenez, dit-il enfin ^ de J. C. qui
sftoit pUmement inftruit de ces chofes y d^ qui les a découvertes ai^
^dcs dijficultez tirées des fcm. 4^9
monde , que les âmes ne font -point filles du yand Roy : que ce nc;i Ch. IV.
■point Itty qui les a eny:ndrces , mais qu'elles ont un autre Pcre
beaucoup inférieur en puijfancc ^ en dignité à ce fouverain Em-
pereur.
Ec quand il fe demande enruiceàluy même , quel cft donc
celuy qui les a produites , fi Dieu n'en eft pas le Pere^ il fe coii.
tente de répondre qu'il n'en fçait rien^Sc qu'il n'eftpasobligé
de le fçavoir3 ce qu'il prouve par un railonnemenc touc-à-faic
rare.
De même , dit il , qu'encore que l^on fâche bien que les mouches ,
les arraignées , les efcatgots , les papillons ne font pas des ouvrages
de Dieu Tout-puiffant , on ne peut pas pour cela non s obliger à dire
^ui eft donc l'Auteur de tous ces infectes : On ne doit pas trotiver
mauvais que nous ignorions aufjï d'oii viennent les âmes , quoyque
mus fâchions que Dieu n'en eft pas le Père.
Il eft clair non iêulement que cet Auteur ne fçavoit rien de
la doctrine àts Chrétiens, mais qu'il n'avoit pas même leu le
commencement de la Genefe, quoique ce livre nefuft pas in-
connu à plufieurs Payens. Car autrement auroit il pu ignorer
<jue Dieu eft le Créateur des hommes^ ni attribuer à J. C. cette
horrible doctrine, qui ofteà Dieuie plusexcellent de Tes ou-
vrages?
Ce qui marque encore plus l'excès de Ton ignorance , c'eft
qu'il paroift par les raifons dontil fe fert pour établir cette rê-
verie, qu'il n a rien fçû de la chute de l'homme , ni du dérègle-
ment de lanature humaine par le péché. Car ion unique argu-
ment, pour montrer que Dieu n'cftpas Auteur des âmes, c'eft
dit-il , qu'elles font trop coiitrefaites pour avoirune fiilluftre
origine, ^quelles font aljez^voir par leurs défiuts qu elle s ne font
que d'une famille très, médiocre : Sca:vitate innv.iyierabili vitioram
ipfos fe indicare y non cffe patricii gcneris , fed ex mediocrtbus fa.
tntliis procréa tos.
Or il eft clair que les défauts de l'homme ne prouvent point
qu'il n'ait pas Dieu pour Auteur , qu'en fuppofant qu'il Toit for-
ti tel qu'il eft des mains de fon Auteur.
Il n'eft pas même trop certain fi Arnoben'a point crû que
fous le Dieu fouverain il y avoir plufieurs Dieux inférieurs i car
il en parle en quantité d'endroits fort dooteufement.
Cum enim^ dit-il , Dij omnes , (^ qu'cunque funt veri vel qui
ejfe rumore atque opinione dicuntur , immortahs ac perpetui volun.
taie ejus fint.
490 Liv. VIL Examen des argumens négatifs ^
Nos contra^ diL-il , fi modo Dij cetti Junt^ habcncqiie hujusnO'
minis authontatem^ potentiam , diyiitatcm^ aut iriy^nita effe cenfe-
mus , hoc enim relizioftimeft credere , aut fihahent nativitdtis exor-
dium , Dei fummi eft fcire qiiihns eos rationihus feccrit.
Il eft vray qu'il prouve dans la fuite que Jupiter, Efculape, &
cette DeelTe que les Romains appelloient la Mère des Dieux ,
n'eftoient pas de véritables divinitez. Mais il ne s'enfuit pas de
là qu'il n'ait cru poflîble qu'il y euft des Dieux fubalternes ,
quoique ceux- là félon luy n'en fuflent pas.
Que Ç\ nous voulions faire le dénombrement des dogmes de
la Religion Chrétienne dont Arnobe ne parle point ^ & par un
raifonnement pareil àceluy de M. Claudel'obligeràles' xtlure
des articles de Foy,à peine en refternit-ii qu'il ne fùfl contraint
de rejetter. Car excepté la nailîance, les fouiFrances 6c la mort
de J. C. que cet Auteur défend fort imparfaitement, il ne parlt
prelque d'aucun aurre dogme. Il n'explique diflindemcnt au,
cun de nos myfteres , & il fait parniftre par tout qu'il eftoit
auffi peu inftruit de la Religion Chrétienne, qu'il eftoit fça:-
vant dans celle des Payens, dont il reprefente les ablurdicez-
d'une manière très- vive &. tres-ingenieufe.
Voilà l'Auteur dont M. Claude nous propofe le filence com-
me la règle de noftre foy, & par l'autorité duquel il prétend
prouver que les anciens Chrétiens ne croyoient pas de l'Eucha-
riftie ce que nous en croyons, parce qu'il ne paroift rien de cette
doctrine dans ks écrits. Il veut même qu'il l'ait dû avoir con-
tinuellement en vûë pour ne rien reprocher aux Payens, qu'on
puft tourner contre la dodrine de l'Eglife;
Que s'il eftoit permis d'employer des preuves femblables à
celles de M. Claude, il feroit facile de conclure des écrits d'Ar-
nobeque l'ancienne Eglife ne croyoit pas qu'il y euft du vin
dans nos myfteres j car autrement , diroit on, il nauroitpas^
o{é foûtenir aux Payens quon n'honore -point Jjtcu a-uec du vin.
JsFos monfirum , dit- il, ac prodigium judicamus ex roribus exiguis
■vint Deum fihi ducere fatis fanBè atqus honorificè fupplica-
tum. Qu'efi-ce que le vin a de commun avec Dieu , dit il en un
autre endroit ? QuiD Deo cum vino eft ? Mais je laiftè debon
cœur ces fortes d'ârgumens à M. Claude. La bonne foy ne
s'en accommode pas, ce me femble;& pour peu qu'on life avec
foin les Apologiftes de la Religion Chrétienne , & fur tout Ar-
aobe , on doit reconnoiftre qu'ils n'ont pas fait difficulté d'ob-
jeder
g^ des diffimkez. tirées des Jens. 491
^e£ter diverfes chofes aux Payens qu'on pouvoir tourner avec Ch, IV.
quelque vray-femblance contre la Religion Chrctj'cnne, ou
contre la Religion Judaïque , que les Ciirétiens eftoient ob li-
gcz de defFendre , comme inftituée par le Dieu qu'ils ado-
i-oient & comme le fondement de la leur.
Quand Origene prouve^ par exemple , que les erprits qui ef-
toient attachez aux ftatuësêftoicnt des démons , parce qu'ils
fe plaifoient à l'odeur des facnficesj a t il craint que les
Payens luy reparcilîent, qu'on offroit de pareils lacrifices au
Dieu des juifs ^ &: qu'il eft dit fouvent dans l'Ecriture j que
l'odeur luy en eftoit agréable ?
Quand Arnobe demande aux Payens à quoy fervoicnt les
temples qu'ils édifîoient à leurs Dieux, &: quelle utilité ils leur
apportoient j les Payens ne pouvoient-ils luy demander de me- * ^'
me, de quelle utilité eftoit au Dieu des Juifs ce Temple ma-
gnifique qui luy avort efté bâty par Salomon , & qui fut depuis
rebâty par Zorobabel & enfuite par Herode?
-Quand il leur demande quel gam revenoit à ces mêmes j
Dieux, des facrifices qu'on leur offroit , ne pouvoient-ils pas
âufîî demander ce que gagnoit le Dieu des Juifs aux facri-
fices qu'il avoit ordonne qu'on luy fift?
Qiiand il traittc de cruels les meurtres des animaux qu'on ijjii,
tuoit pour les oiTnr en facrifices , que ne pouvoient ils point
kiy répliquer furies facrifices que Salomon offrit à la Dédi-
cace du Temple , & fur ceux que l'on offroit continuellement
dans le Tabernacle ou dans 4e Temple durant le temps de la
religion Judaïque ?
■Quand il combat encore CQ$ facrifices , fur ce que les Dieax
n'cftant point capables de colère n'ont point befoin d'eftre ap-
paifez; ne leur donnoic-il pas lieu d'en dire autant^ 5c des fa-
crifices que Dieu avoit ordonné qu'on luy fift pour le fléchir,
& de celuy où J. C. s'eft offert luy-m-ême fur la Croix, & qui
avoit pour fin d'appaifer Dieu irrité contre les hommes?
Quand il demande aux Payens, s'il eft raifonnablc que Dieu
change de difpoiîcion envers les hommes, parce qu'ils luy im- ' "
molent àts pourceaux: Qic.c cdufae/i ut Ji ego porcum occidcro^
Deus mutet affeciurrf. Quand il fait parles les beftes pour fe plain-
dre qu'il eft injufte de les faire mourir pour le crime de l'hom-
me.-qui ne voit qu'on pouvoïc faire lesmêracs demandes &le*
491 Lîv. VII. Ex Amen des Argumens négatifs ^
mêmes proropopées pour les beftes q^Li'on imraolok dans l'aiv
cienne Loy ?
Quand il allègue contre les Dieux que les Payens atta-
choienc aux fimulacres , qu'y ayant pluiîeurs de ces fimula-
crc's , il taudroif qu'il y cuit plufieurs Dieux du même nom, ou
que l'eflre de ces Dieux, ftiil multiplié , & qu'il en prétend
montrer l'impoilibilité par ces principes de Philofophie. Qu.e
funt prius Jin'iulariaquc natu-rà^ multa jieri non fojftint ^mplicatis
fîi.-e integriLite fervatà. Et un peuaprds: Si iiutem tenus é^ idem
in omnibus ejfe perhihctur , penc om.-iis ratio atque imcyritas ve-
riLitis Ji hoc fuerit fumptum , pojfe uvum in omnibus uno tempore
pcrmancr^. N'efl- il pas clnir que ces mefmes principes pou-
voient eitre alléguez contre la doctrine des Chreiliens qui:
croyent que Dieu efl tout entieren chaque lieu ; &: n'eft ce
pas en effet l'ufage qu'en font les difciples d'Epifcopius &les-
Sociniens? Cependant Arnobe reconnoifl: ailleurs' cette doc-
Arnobe. 1. f, ^"'""^ T^^'^ femble combattre. Hoc efi , dit-il , proprium Deo~
rum compUre anmia vi fu-.i ^ non partialiter ufpiam ^fed ubique
effe totos.
C'efl donc une pure vifion d'attribuer à ces Apologiftes.
une application continuelle à éviter tout ce qu'on pourroic
tourner contre eux. M. Claude qui le prétend , confulte plus
en cela l'intereft de fa caufe que la vérité & la bonne foy. Ec
afin qu'il ne m'impofe pas d'en juger aulfi par intereft , je luy
vay faire voir qu'il y a plus de douze cens ans que fàint Jerofme^
qui n'avoit pas nos différends en veuc , en a jugé tout au-
trement que luy. lly a bien de la diff'crence , dit ce ^QTC ^ entre
les écrits Pcleptiques^ ^ où l'on a un advcrfaire en îefie^^ceux
où l'on trait te fimplement des donnes. Dans les premiers , la difpute
Hicron, apol, 0'-^ vapic^^ fans ordre ^ (^ en repondant à fonadver faire on pro.
adp.miai.ich pofe tantofl unc chofe (jf- tantofl une autre. (Xn argumente co7nme
pro iibl. aJv. ^^^ peut: On dit Une cbofe , ^ l'on en fait entcndn une autre. On'
montre du pain-., comme dit le proverbe .^ (^ l'on cache une pierre.
Origcne.^ Methodius.^Eufebe (^ Apollinaire ont écrit au long cen-
tre Celfus ^ contre Porphyre. Examinez^ la qualité des argumens
^ des preuves qu'ils employent pour détruire les difcours formez^
p.ir l'efprit du diable , (^ vous verrez^ que fuuvent on les pourroit
éluder. Considéra te quibus argumentis (jS qua?n luhricis pro-
blematibus diaboli Jpiritu contexta fubvertant. ils font quel-
quefois contraints , ajoute t-il , de dire , non ce qu'ils pen^
Çgf des difficulté^ tirées des fens, 493
Cent ^ mais ce qui cfi ncccjfaire à leur eau fe. Interdum coguntur C H. 1 V.
loqai ,van quoi Jentiunt^ fci quodnccejjc cfi. Je ne dis nen, ajoû-
te-C-il encore, la'^/ Auteurs -Latins., coynme TertulUcn , Cyprien^
Minutîus y Vichrinus , Ldciance (j^ Hilairc , de feur qu'il ne
femble que j" aye filufiqji entrepris d'acctifcrles autres que de me dé-
fendre ynoy même.
Je ne prétends pas icy décider ,fi la maxime de fainr Jcrof-
rne pour les écrits polémiques eft bonne ou mauvaife. Mais la
bonne foy oblige de reconnoiftre qu'elle a efté tres-fouvent
fuivie par plufieurs de ceux qui ont écrit en cette manière,
& que c'eft avec raifon qu'il l'a appliquée en particulier aux
Apologifles de la Religion CIrreftienne.
Il' ne reftcroir plus que d'exprimer \zs raifonsdu filence de
Tertullien& de LaJlance fur l'Euchariftie ; mais nous avons
déjà fait voir que TertuI lien a expreflcment évité d'en parler,
& qu'il paroirt manifcftement qu'il aeuen veuë de cacher ce
myftere aux infidellcs. Et quant à Laclance, il ne faut d'une
parc que faire reflexion fur les matières dont ._il traite pour
reconnoidre qu'il n'y en a aucune qui l'obligeall neceiîaire-
ment à parler de l'Euchariftie, &: confiderer de l'autre qu'il
vivoic en un temps où il ne le pouvoit faire fans crime, puis
qu'un des reproches que le Concile d'Alexandrie fait aux
Arriens , c''eft d'avoir parlé de l'Euchariftie devant des Infi-
delles. Ils ont l'auduce ^ dit ce Concile, de farler des myfieres .^^^ AtKaiw
devant des Catéchumènes, ^ce qui eft encore pis devant dc-s Paycns, apol. 1.
quoyque l' Ecriture nous ordonne de cacher le myftere du Roy, ^
que le Seigneur défende de donner les chofes fiintes aux chiens ,
^ de' jet ter les perles devant les pourceaux,
J.'ay {êparé à dciTèin S. Juftin des autres Apnlogiftes de la
Religion Chreftienne, parce qu'an n'en peut pas dire comme
de ceux-là, qu'il n'ait point parlé de l'Euchariftie L'obliga^
non où il a cru cftre en rendant compte denoftre Religion à des
Empereurs fort fages, de les en informer à fond, l'a porté à fe
difpenfer de cette rcferve que l'Eghfe gardoit pour les autres
Payens, & qui eftoit plùtoft établie par une coutume générale,
que par une ordonnance eyprefle. On demeure donc d'accord
que ce delTèin d'exprimer nettement la foy de l'Eilife fur ce
point , paroiflant autant dans S. juftin que celuy de la cacher
dans les autres , on doit avoir beaucoup d'égard au rémojo-na-
ge qu'il en rend. Mais aufliilne pouvoit eftre plus formel
V 4H -^ïV. VIT. Examen des ^rgumens négatifs y
pour la foy del'Eglife Catholique. Nous ne recevons pas , dit-il,
ces chofcs , c^efi à dire ce pain (^ ceaftn confacrez^comme un pain
commun^ ni comme an breuvay: comymm: mais de la Jnéme forte que
J. C. nojlre Sauveur qui a cfic fait chair par le J^crbe de Dieu y s'cji
rcvefiu de chair ^defanT^-pour nofire filut. Ainji nous avons ap-
pris que cette viande c'> ce breuva/^e , qui par le changement qu' ils
reçoivent dans nos corps nourri [fent nofire chair (^ nofire Jang , ,
for,j: la chair ijr- le f-ing de ce même J . C. incarne. Car les Apofires .
dans les écrits quils nous ont lai(fcz^ , que l''on nomme, Evangiles ,
nous ont appris que J. C. leur avait co mmandè de faire cequilavoit
fait^ (j> qu'ay^mt, pris du- pain^- ayant rendu grâces , \\-èi\X.\Fai.
tes cecy en mémoire de moy : Cecy efi mon corps , ^ que de même
z. pcrpet. \.ay-ant pris le calice., ildic ; Cecy efi mon fang,
5.C.8. p. J04. On a fait voir ailleurs, que ces paroles (ontdecifivespour la ,
doclrine de l'Eglife Romaine , & qu'il eftcontre le fenscom-
mun, qu'un Auteur ait parlé de cette forte à des Empereurs .
payensqui ne Içavoientceque c'eftoit que Locutions S acramen-
talfis , pour leur faire feulement comprendre, qiie lé pain &le .
vin eftoFent les figures du corps ôc du iang de J C. On a refuté .
aa même lieu les vaines rcponfes de M. Claude. C'eft pour-
qu-oy quand il nous die dans l'endroit que nous examinons pre-
I fentement, qu'il ne trouve rien dans ce lieu de S. Juftin de ce.?
qu'il cherche, il fuffit de luy répKjndre , que c'efl: ou qu'il ne.
cherche pas ce qu'il y devroit chercher, ou qu'il cherche ce.
qu'il n'y doit pas trouver. S'il y cherchoit la foy fimple de la.
prefence réelle & de la.rranlTubftantiation , il l'y trouveroif:
très-nettement exprimée, comme on leluy a fait voir dans les
]i:;ux où l'on a traitté de ce paiTage plus à fond.
ÎViais-s'il y cherche l'éclairciflement desdifficultezPhilofophi-,
ques de l'Èuchariftie , c'efl: fa faute de les y chercher. Car il ne
fakiit que^ faireun peu de reflexion, non feulement fur l'efpric.
de^Percs en gênerai , mais auffi fur le génie particulier de S. Ju-,
flin, pour eftre convaincu qu'on ne s'y devoitpas attendre.
Ce faint Martyr parle de tous les Myfl:eres avec une extrême^
fimplicitc. Il fe contente de les propofer fans s'arrefter à en
éclaircirles difficulrez -, ou s'il y entre quelquefois un peu, il n'y
ré.pond que par de certaines raifons communes & propres feu,
Icment pour ceux qui n'en avoient qu'une connoiffancegroffie-
re & fuperficielle comme lesPayens. C'eft ainfi que l'on voie,
qu'il explique ladodrinede la Trinité d'une, manière très fim--
1^' des difficultcz, tirées des /en s. 49J
plê , en ayant feulement à.\t ^ que nous rêverons ^^ adorons levé- Ch. IV.
ritable Dieu, P ère de toute jufiice ^de toute chajleté^ de toute ver-
tu , ^incapable de tout péché , c^ fou Fils qui efi venu vers nous
^ qui nous a, appris ces chofesauJH bien-qi^ aux Anyss , ^ l'efprit-
qui a parlé par les Prophètes.
Er parce que les Pavens avoient accoutumé de demanàer
comment il eftoit poffible qu-e Dieu euft un Fiis, il repond en
un mot que Jupireren avoit bien plufieurs félon eux : ce qui elV'
plutoft éviter de parler de cette difficulté que l'éclaircir, puil.
qu'il n'efl: pas étrange que Jupiter qui n'eftoic point regardé
comme un purefprit par les Payens, euft desenfans, &; qu'on
ne comprend pas avec la même facilité, ni qu'un efpric puiile en-
gendrer un efprit , ni que cet efprit engendré n'ait cju'une mê-
me nature avec l'efprit qui l'engendre.
S'il y euft eu quelques objedions populaires fur l'Euchariftie,
S'. Juftin y euftpeut-eftre fatisfait par des réponfes de cette na-
ture] mais comme il n'y en avoit point, parce que ce myftere
eftoit inconnu au commun des Payens, il nes'eft pas cru obligé
de lesprévenir, &: il ne l'auroit mômepirfans fe départir de la
conduite générale des Pères qui onttoujoursévité de faire envi-
fager les difficultez qui n'eftoient pas encore formées.
Il ne tenoit donc qu'à M. Claude de trouver dans la féconde
Apologie de S. Juftin , la doctrine de l'Eglife Catholique fur
l'Éuchariftie, exprimée de la manière que le bon fensfait juger'
qu'elle devoir l'eftre. Et pour les dialogues contre Tryphon, il
ne faut encore qu'un peu de fens pour voir qu'il y dit tout cC
qu'il en devoir dire.
Son deftèin dansce dialogue eft de prouver à Tryphon Juif,
quej C. eft le MelFie , 8c il employé pour cela, outre les pafla-
ges des Prophètes qui s'entendent de J. C. le rapport de diver-
fesfigures à ce que ]. C. a eftabli.Unedes figures dontil fe fêrr,
eft celle de i oblation de farineprefcrir e par la Loy,& il pré-
tend qu'elle eftoitinftiruée pour fignifîerl Euchariftic. L'Analo-
gie de la vérité figurée l<. de la figure l'obligeoit donc neceftaire-
nien de parler de pain, puifque c'eft par le pain dont l'Euchariftie
eft faite qu'elle a rapport à cette ancienne oblation de farine.
M'aisil n'eftoicpointqueftion d'expliquer en cet endroit ce que
l'Eglife croyoit decepain. ïlnefaioirpasexpoferce myftereà
des oreilles profanes fans neceffité, & rien n'vobligeoit , puif.
qu'il-s'agiffoic feulement de montrer, qu'une figure légale avoir
496 Liv • VII. Bxa.}mn des <iÀrgiimem négatifs,
cflé accomplie par J.C. Il Cecofitente donc de dire ce qui-eftoit
ncced'aire à fon detrçin, que tohlatian de farine pour ceux qui
cftoient pmficz^ de la. Icpre , cjioit la figure du pain Eucharijlie qus
y. C nojhe Seitncur nop.s a commande de faire en mémoire de
la Pa.ffîon qu'il a foufferte four purifier les efpnts des homn:i>s. de
tout pcchc. ^^
Cela fiiffifoit à la preuve de S.. Juftin,^ ce n'ei\oitnulle- *
ment le lieu d'encrer dans une explication exaAe de cequ'il
croyoic de ce painde l'Euchariftie. Mais comme on doit fuppo-
fer que qLioyqu'un Auteur judicieux ne dite pas tout en tout,
lieu , il aneanmoins partout les marnes penf-ces & lamême foyj
on ne fqauroit douter que fi l'on- euft demandé à S. Juftince
que c'eftoic que ce pain fie ce vin de l'Euchariftie qu'on ofFroit
en mémoire de la Paflionj il n'eufl: répondu comme il fait dans
fa féconde Apologie,. ^«£' ce n'eftoit pas tin aliment , ni un brcu.-
vaqe commun^ m-ais le corps & le fangdej.<2. connue l'£vanplt<
nous l'apprend.
Ain fi ce paiTage du dialogue contre Tryphon n'eft propre
qu'à faire voir que les Pères, qui par quelqueraifon particulière
n'appellent l'Euchariftie que du nom de pain, ne laiftbient pais
de croire en même temps , que ce pain eft le corps de J . C. &que
c'eft tres.mal raifanner que de conclure qu'un Auteur qui n'ex-
prime en un endroit qu'une partie d'un myftere , ne croyoic pas
ce qu'il en fupprime.C'eftà quoy fe réduit l'examen particulier à
quoy M. Claude nous a oWigez touchant les Apologiftes de la
Religion Chreftienne & le filence qu'ils gardentà l'égard de
TEuchariftie qui ne luy eft pas comme l'on voit fort avantageux.
CHAPITRE V.
Q^e le (ilencc de Julien l' Apoflat fur l' Eficharijlie ne donne
point lieu à M. Claude de conclure que l Eglifc du temps de cet
Empereur rien avoit pas la même créance que l'Eglife Romaine
en a tnuintenant.
Claude ne tire pas feulement une preuve négative de
.ce qu'il n'eft point parlé de l'Euchariftie dans ce qui
nous refte des écrits de Julien l'Apoftar, pour en conclure que
ks anciens Chreftiens ne croyaient pas la p.refence réelle Se la
(^ des difficnltex. tirées des fe fis. 497
ttanfTubftantiatron j il en tire une aufii de ce qu'on n'y a pas Ch. V.
expreflement répondu, 6c qu'on n'a fait dans le premier traître
cju'opporer des conhderations générales aux arguinens tirez du
filence des Phyens, 5c il en prend fujecd'infulcer à l'Auteur de
ce Traitcé à fa manière ordinaire. L'Auteur div il , ^^ bien con-
nu la force de cet exemple ^ fuis que m'en c liant fcrvi â.ms mon
jfibrezé ^ tl l'a fort adroitement cou-vert du voile de [on fiîênice.
jl a cru que la yneiUcure rèponfe efloit de ri en dire mot 5 ce qm /5Ï
une ayeable manière de réfuter les Ariumens ^ fort ai fée ^f ni f
qu'il ne faut que fe taire pour triompher.
Or comme cette plaifantcrie n'cft: fondée fur rien , fi M.
Claude devine mal pourquoy on n'npas parlé de cet Auteur, oir
n'a qu'à luy dire en un mot qu'il fe trompe, ôi luy moritrer en
répondant à cette objection que c'eft plutoft par mépris qu_e
parimpuiffànce qu'on ne s'y cftcit pas arrefté.
J'avoue d'abord qu'il eft un peu plus fort en un point fur le
fujet de Julien l'Apoftac qu'il ne l'eft à l'égard des autres
Payens. Caraulieu qu'on a toutes fortes de raifons depreten-
dre que la dodrine de l'Eucliariftie elloit inconnue à ce petit
nombre d'intidelles , dont nous avons ou les écrits ou les obje-
âions contre ladoArinede.rEglifè, on n'en peut pas dire tout k
fait autant de J.ilien; puis qu'ayant efté Ledeur dans l'Eglifc, 5C
ayant participé aux myfleres , il a pu fçavoir ce qu'on en
croyoit.
Mais M. Claude eft infiniment plusfoiblepar une autre rau
Ion, c'eft qu'il n'y a rien de plus incertain que ce qui fert de fon-
dement à fon argument;
Il fuppofe que Julien n'a point parlé de i'Euchariftieen
écrivant contre les Chrétiens. On luy demande quelle preu-
ve il en a ? Car s'il n'en a point, c'eft une temerice ridicule,
que de fonder des argumens fur un fait dont on n'eft point
alTuré. C'eft, dira t-il , qu'il n'en eft point parlé dans ce
que Saint Cyrille rapporte du livre de cet Empereur. Je ne
penfe pas que M. Claude ait d'autres raifons à nous allé-
guer que celle-1-à. Cependant il me pardonnera, fi je tuy dis
_ qu'il n'en içauroit apporter une plus mauvaife, ny qui fafié
mieux voir qu'il n'a pas examiné cette mattiere fort à fond.
Cac cette preuve eft défedueufe en deux maniei-es qui la ren-
dent même ridicule. -' -v . . -. '
La première eft qu'elle fuppofe que nous ayons roue rêuytâ-
ge de julien contre les Chrcriens, ou au moins que nous en
498 Lïv.Yll. Examen des Argumens négatifs^
Ayons la partie où il avoit deu vray-lemblablemenr parler de
l'Eucharidie. Mais M;Clau<je n'a pas pris garde à la faulTetë
de cette fuppofîrion j & que faint CyrilJe remarque des fa pré-
face que cet Apo flat avoir hiit trois livres contre les Chrétiens ,
ç^ yjiavicLHi' yruTiLiicLS.
Or de ces livres il n'y en aqu'im qui ait efté rapporté &■ ré-
futé par faint Cyrille ^ ce qui paroift fi clairement qu'il n'eft pas
-poffible d'en douter.
Cit. contra Premièrement quoyq.ue S. Cyrille ait marqué expreflèmerïc
^ri?" '" ^"^ Julien a fait trois livres , il ne rapporte néanmoins tout
pbid.i.'i.p' 3: ce qu'il en infère dans Ton ouvrage que comme d'un fèul
livre. Or un Auteur qui réfute trois livres l'un après l'autre, ne
■manque guère de remarquer qu'après avoir refuté le premier,
il pafle au fécond , &: c'eft ce qu'on ne voit point dans cet ou-
vrage de faint Cyrille.
-. De plus lorfque faint Cyrille marque en particulier lecara-
dere du premier livre de Julien , il dit qu'il eftoit cornpofé de
penfées conFufês entalTées fans aucun ordre, & qu'il y repetort
îouvcnt lesmefmes çho(es au commencement, au milieu & à la
fin; ce qui l'avoit obligé à ralTembler en un même lieu ce qui
regardoir la même matière, & à digérer tout ce livre en un au-
tre ordre. Mais il ne dit rien de femblable des deux autres li-
vres. Ce qui fait voir que n'y trouvant pas le même defordre.,
il avoit delîein de les rapporter & de les réfuter de fuite.
Orileftclairquetoutcequis'eftconfervé de l'écrit de Julien
dans l'ouvrage Je faint Cyrille, porte ce premier caradere. S.
Cyrille ne le rapporte nullement de fuite. Il réunit en un
même lieu ce que Julien avoit dit en divers lieux. Il retranche,
il abrège comme il veut l'écrit de ctt Apofbati & enfin il
pratique exaftement par tout, ce qu'il avoit dit qu'il feroit à
l'égard de ccpremier livre, & ce qu'il nepromettoit point de
faire à l'égard des autres. Ainfî ilefl plus que probable qu'il
n'a refuté que le premier. Mais ce qui rend ces preuves entiè-
rement: decifîves, c'efl que Julien témoigne luy.même en
quelq-ues endroits , devoir traitter des chofes dans la fuite
de fon ouvrage, &;en particulier dans fon fécond livre, qui ne
iê trouvent ppintdans celuy que S. Cyrille infère dans le fien.
Cyr. contra. H dit en un endroit en parlant d'une circouffcance qu'il avoit
jrihiu. 1. 7.-y^ppQj.j^g jg j^ y^g jç j Q qu'il traitceroit cela dans la fuite ,
quand
(^- des difficukez. tirées des fens. 499 ^
quand il exaniineroic en particulier les faux prodiges & les Ch. V.
faufletez des Evangiles. Iraj (J^.k TrepJ T>?y t^ îw.yfyixi'av re-
pxTUpy.'ttS ti a)Ltuù}fict.s i%na.(f à.pÇ,ûf^tJa.. Or on ne voie point
qu'il entre dans cet examen particulier dans tout ce que faint
Cyrille rapporte de fon ouvrage.
11 ajoute ailleurs en parlant de la contrariété apparente des
Généalogies de J. C. rapportées par S. Matthieu &;parjS. Luc, " '"
que devant faire voir dans fon fécond livre qu'il y avoit là une
véritable contradidion , il difreroit d'en parler , aVa! ttê^Î' fier
Tovry fiiWo'Tii ce Ta S^iVTÎfJù cvJy^aLfJ.l^Av' To ai\yijii cc^oQâs '
i^iroi('Jv Ù7Ci(riJiui')ii.. Or il eft certain que cela ne fe trouve
point encore dans le livre que faint Cyrille a confervé , 6c
parconfequent que ce n'eftque le premier de ceux de Julien,
&quc nous n'avons point le fécond , où il combattoit en par-
ticulier l'Evangile , en commençant apparemment par ce qui
eft dit de la généalogie de J. C.
C'eft ce qui montre encore que non feulement nous n'avons
pas tout l'ouvrage de Julien , mais que nous n'avons pas en
particulier l'endroit où fon fujet le pouvoit porter à parler de
î'Euchariftie. Car comme la dodrine de l'Eglife fur ce myfle-
rc eft prife de l'Evangile, fî Julien en euft voulu tirer quel-
que objeétion, il l'auroit fait fans doute, lorfqu'il auroit expref-
Jcment attaqué l'Evangile , &: il auroit mis cette dodrine au
nombre des chofes qu'il appelle /es faux prodiges ^ les trom-
peries des Evangiles ^ TjpaToo'd^î 19 (TXêo«ôw.5 C'eftoit-là le
lieu naturel d'en traitter , & ce que le vray ordre demandoit.
Qiie M. Claude nous reprefente donc ce livre, avant que
d'alTurer comme il fait que Julien n'a rien reproché aux Chré-
tiens fur le fujet de I'Euchariftie. Autrement chacun voit qu'il
eft ridicule de conclure que Julien n'en a rien dit, parce qu'il
n'en a point parlé dans fon premier livre , où félon toutes les
règles du bon fens , il n'en devoit point parler , puis qu'aucune
6e$ matières qu'il y traitte , ne l'y portoit, ôc qu'il avoit ail-
leurs une occafion naturelle d'en parler.
C'eft le premier défaut de la preuve de M. Claude, qui eft fî
grofîîere 6c fî fenfible, qu'apparemment il abandonnera luy-
même fon argument quand il y aura fait reflexion.
Le fécond ne l'eft pas moins. C'eft que non feulement il eft in-
certain fi Julien n'a point parlé de I'Euchariftie dans les deux li-
vres de fon ouvrage que nous n'avons point, mais qu'il eft
RRr
^oo L IV. VII. Examen des Argumens négatifs ,
même incertain s'il n'enavoit point parlé dans celuy qui nous
aefté confervé par faint Cyrille. Car M. Claude fe trompe,
s'il s'ima2;ine que nous l'ayons tout entier. S. Cyrille témoi-
gne luy-même en pkifieurs endroits , & particulièrement au
commencement de Ton fécond livre, qu'il a pris la liberté de
letranchcr diverfes cbofes de celuy de julien, qu'il n'a pas mê-
me (liivi Ton ordre, qu'il relinit en un même lieu les ohjeclions
qui regardoient la même matière. Et enfin il ne faut que voir
cet écrit de Juhen pour reconnoiftrc qu il n'y a fouvent aucu-
ne fuite , & que ce ne font que àt^ objedions feparées , auf-
qiiclics faint Cvrille repond.
Ainfî faint Cyrille s'eflant donné îa liberté de retrancher ce
qu'il luy a plû.du livre de Julien , on a droit de conclure'
qu'il eft incertain s'il n'en a point retranché quelque chofe qui
rc-gardaft l'Euchariftic dés qu'on peut faire voir qu'il a eu quel-
que raifon de le faire. Or il eft certain qu'il en avoit eu une
tres-preflarte , & qui doit faire juger , que quand Julien en
auroit parlé/aint Cyrille auroit évité de le réfuter. Car il pa.
roift parce livre même, qu'ayant defTein que fon ouvrage peuft
cftre leu par les Payens , il évite d'y traitter des myfteres que
la Religion Chrétienne obligeoit de leurcacher. C'eftce qu'il
témoigne expreiTément à l'égard du Baptême, comme nous
l'avons déjà rapporté ailleurs. De petir^ à^xtW^qu en publiant nos
myficres devant les non initiez^ je n'offenfe J. C. qui défend de don-
ner les chofes faintes aux chiens ^ (^ de jctter les perles aux pour-
ceaux ; je ne diray rien de ce qU^il y a de plus profond dans ce
myftere. Et plus bas il ajoute : /<' dirais plu(îcurs autres chofes de
ce 7nyfiere , fï je ne craiyiois d'eflre entendu des non initiez^
Et il ne ferviroit rien de répliquer que fiint Cyrille s'abftienc
bien de répondre au long à l'objeftion de Julien fur le Bap-
tême,mais qu'il ne la retranche pas. Car cç.xt(t objeclion cftantr
que les Chrétiens croyoient parla fe purifier de leurs péchez ,
elle ne contenoit rien que les Payens ne fçuiîènt diftinéhement.
îvlais fi Julien avoit attaqué en particulier la doéfrine de l'Eu-
charifi:ie,il en auroit bien dit 3es chofes, qu'il falioit cacher aux^
Payens. Et par conlequent S. Cyrille qui auroit eu delTein de
les cacher,& qui ne s'eftoit point obligé à rapporter tout l'écrit
de Julien-, auroit pu & dû les retrancher , félon l'efprit qu'il
fait ■paroiftre dans cetiuivrace. Aind comme il eft incertain fî
Julien n'a point parlé de l'Euchariftic , il eft; certain que toutes
& des dij^cuhez. tirées des fens. foi
îes Conjectures qu on fonde fur fonfilence font vaincs &reme- Ch. V.
raires,& que quand l'arçiumcnc que M. Claude en tire feroic
auffi preflanc, qu'il s'efforce de le reprefcnter , il ne faudroic
que ces deux remarques pour le détruire.
Mais j'ajoûteray de plus qu'il s'en faut bien qu'il ne foit tel
<ju'il le voudroit faire croire, &; qu'en prenant pour vray tout
£6 quiy fert defondement, ilnepourroit tenir lieu que d'une
conjefture alTez légère.
Ceux qui fçavent le veritab e u(age de ces fortes d'argumens
négatifs, n'infiftent jamais beaucoup fur le iilence d'un feul
Auteur , parce qu'ils n'ignorent pas combien il efi: ordinaire
aux Ecrivains les plus judicieux d'omettre des chofes qui pa-
roilîént importantes pour la matière qu'ils traitent.
Par exemple faint Auguflin examinant dans l'a lettre à Hono-
rat,en quel cas un Evêque peut ou ne peut pas fe fouftraire à la
perfecution par la fuite,& ayant établi pour règle, qu'illepeut,
quand c'eftluyqui eft particulièrement en butte aux periècu-
tcurs, Scquel'Eghfene manque pas d'ailleurs d'alFiftance , &
c]p'il ne le peut pas quand la perfecution eftant générale l'Fgli-
fe manqueroicdePafteurs s'il feretiroit,il ne pouvoit apporter
id'exemple plus naturel pour établir cette do<flrine que celuy de
faint Cyprien qui crut fe pouvoir retirer par ce motifs par ce
principe durant la perfecution deDecius, parce quelesPayens
avoientune animofité particulière contre luy , & qu'il reftoic
afièz de Prêtres pour affifter les fidelles.
Rien fans doute ne pouvoir faire plus d'imprcffion fur l'ef
prit d'un Evêque d'Afrique comme Honorât ^ que l'exemple
du plus célèbre & du plus grand Evêque d'AlVique h Se il n'y
en avoit point qui fe dût plutôt prefenter à l'efprit de faine
Auguftin que celuy de faint Cyprien qu'il honoroit fi particu-
lièrement. Cependant ilnes'eft pasfouvenu de s'en fervir,&
il a recours feulement à l'exemple de faint Athanafe.
Voicy un autre oubly decemême genre, 6v qui efi: encore
plus étonnant. Le même S. Auguftin traite une infinité de fois
dans fes livres contre IcsDonatiftes de l'effet du Baptême con-
féré par les Schifmatiques ou les Hérétiques, & dans tous ces
lieux il établit toujours cette doctrine qu'ils peuvent bien don-
ner le Sacrement & le caradere du Baptême , parce que c'eft
J. C. qui baptife ; mais qu'ils ne donnent point le S. Êfprit &C
laremiffiundcs péchez, qui nefe reçoit que dans l'Eg'ife. La
RRr^ij
50Z Liy. VII. Eicumen des Argumens négatifs ^
généralité de ces termes donnant lieu de conclure que les en-
fans meniez baptifez par les hérétiques ne reçoivent pas la re-
miflion des péchez, fembloit demander que S. Auguftin s'ex-
pliquât, & qu'il efltraignît expreffement cette dodrinc aux
adultes, qui le faifant volontairement Baptifer par des here-
tiques,ne peuvent recevoir du baptême que le ftul caradere.
On ne voit point néanmoins qu'il ait eu foin d'exclure cette
confequence. Il propofe toujours généralement cette maxi-
me, qu'hors de l'Eglifc on ne reçoit point la remiflîon des pé-
chez, en fuppofant qu'on ne l'appliquera qu'aux adultes, mais
ne le marquant jamais.
Eftce que S. Auguftin a cm qu'en effet les enfans des héréti-
ques ne reçoivent point par le Baptême la remilîion du pcchc
originel ? Nullement, & jamais perfonne ne luy a imputé ce
fèntimcnt. Pourquoy donc ne fait il point cettee^^ception qtri
femblefi neceifaire.^ C'eft qu'un auteur ne dit pas toujours tout
ce qu'il femble qu'il devoir dire. Il n'en faut point chercher
d'autre raifon. La feule connoiflànce de l'efprit humain, qui
n'étant pas infini, s'applique fouvent de telle forte à un feui ol?-
jet qu'il perd de veuë tous les autres, fuffit pour diffiperl'éton-
nement de ces forces d'oublis , quand on ne les trouve qu'en
peu de perfonnes.
C'eft donc en vain que M. Claude étale avec tant de pompe
les avantages que Julien pouvoit tirer de la docT:rine de la pre-
fcnce réelle & de latranflubftantiation , fî c'eût été celle des
Chrétiens de fon temps. Il eft vray qu'il le pouvoit : mais il ne
s'enfuit nullement de là , que ce foit une necelTicé qu'il l'ait
fait.
L'Euchariflie n'étoit ni le feul , ni le principal motif de fon
averfion contre les Chrétiens. Il étoit attaché par une paffion
aveugle à la Philofophie& à laTheologiedesPayens.il ne pou-
voit fouffrir que l'on préférât aux Dieux honorez parles Sages
du paganifme, & par ces hommes célèbres dans l'hiftoireGrec-
quc & Romaine, dont fon imagination étoit pleine,Ia dodrine
d'un homme né ftijet des Empereurs Romains , Si crucifie par
les Romains.
Il haïfloit donc tout le corps de la ReIi2;ion Chrétienne, &
particulièrement la divinité de J. C. C'eft dans cette difpofîu
cion qu'il fe mit à écrire contre les Chtétiens pendant le fcjouT
fi des difficulteT^ùrées des fens. 505
qu'il fie à Antioche en allant faire la guerre aux Perfes. On Ch. V.
peut juger qncl temps il pouvoir donner à ce travail , étant
chargé de toutes les affaires de l'Empire, des préparatifs d'une
grande guerre, de mille dépefches dont il ne (e dechargeoic
iur perfonne,& de la compofition d'autres ouvrages, dont il
en reftc encore quelques- uns :, comme ce qu'il écrivit contre,
ceux d'Anriocheà caufe des railleries qu'ils firent de luy , ic
qu'il intitula Mifopoqon.
•Tout ce qu'il put donc fairedans un tel accablement, 'ce fut
de répandre confufément dans ces livres le venin dont il étoic
plein contre les Chrétiens. Or qui ne fçait quedans ces fortes
d'écrits tumultuaires, le hazard a fouvent plus de part que la
raifon aux choix des chofeSj& qu'il efl comme inévitable qu'on
n'en oublie plufieurs qui pourroientyentrer?On efl emporté par
le fil de fon difcours j une penfée en attire une autre, & roue
ce qui ne trouve pas fa place dans cet enchaînement fortuit,
cnefl exclus par cette feule raifon. AufTi voit-on que Julien ne
poufTe prefque aucune des dilîîcultez tant foit peu confidera-
bles. Etcequieft de plus étrange, c'efl que lors même que U
fuite femble l'y conduire, fon emportement l'en détourne in-,
continent , 6c le fait paflér à d'autres matières , comme s'il ne
voyoit pas les difficultez.
-Son deffein , par exemple, étoit de décrier le Dieu deMoife
honoré par les Chrétiens , ou du moins de décrier les Ecritu-
res fâintes qui fervent de fondement à la Religion Chrétienne.-
Il fe moque pour cela de ce que Dieu dit dans lesNombres, que
Phinées , en tuant un Ifraëlite qui abufoit d'une femmeMadia-
nite , avoit détourné fa colère de deflus les enfans d'ifracl , &:
empêché qu'il ne les confumat j &: il en prend fujet d'accufer
le Dieu de Moïte d'une colère inhumaine. Mais combien l'e,
xemple du péché originel, pour lequel tous les hommes ont
été condamnez à la mort temporelle , & une fi grande partie à
la mort éternelle, auroit-ilété plus vif 6c plus preflant, que ce-
luy-fà ? Et quelles déclamations ne pouvoit point faire Julien
contre cette doftrine ? Cependant il n'en parle feulement
pas, & il s'arrefle à cet exemple de Phinées qui a infiniment
moins de force.
Il efl vray , comme M. Claude le remarque , qu'il entre un
peu dans la doctrine de la Trinité , & qu'il en tire quelques lé-
gères objedions contre les Chrétiens ; mais cette remarque n'a
RRr iij
j04 Liv. Vil. Examen des tArgumem négatifs,
de force que contre M. Claude. Car il eft trcs- aiie qu'un Au-
teur s'ctant engagé dans un difcours n'y taffe pas entrer une
autre matière quoy qu'importante, lorsqu'elle n'y ell pas na-
turellement liée. Et ainlî il n'y a aucun fujet de s'étonner que
Julien n'ait point parlé de l'Euchariftie dans ce qui nousrefte
de Ton ouvrage , puifque la fuite de fon difcours ne l'y portcic
pas, & que s'il en eût parié , c'eût été en quelque forte une
chofe hors d'oeuvre , qui eût mrerrompu la fuite de tout l'é-
crit. Mais il efl: étonnant qu'un homme d'elprit ne faflfe pas
valoir les raifons que le fujet dont il traitte luy fournit. C'eft
pourtant ce qui eft arrivé à Julien fur le fujet de la Trinité Se
de l'Incarnation. Il eft vray qu'il marque la dodlrine de l'E-
^life fur ces points ^ mais il femble qu'il n'ait pasapperceu les
difEcultez qu'elle renferme , & qui font tout auffi naturelles 6c
tout auffi aifées à trouver que celles que la tranfTiibflantion pro-
duit. Il fe contente de reprocher aux Chrétiens qu'ils ado.
rent trois Dieux , &: il ne dit pas un feul mot de l'unité d'une
nature en trois Perfonnes , qui eft ce qui choque le plus ceux
qui fou mettent les myfteres à la raifon.
Qiie M. Claude apprenne donc à faire un autre ufage&un
a"utre jugement des argumens négatifs. Le filence d'un feul
Auteur eft toujours peu confiderable. Celuy d'un Auteur que
fon fujet n'oblige pas necelTairement à parler d'une certaine
matière, l'eft encore moins. Celuy d'un Auteur occupé & qui
écrit au haz^lrd tout ce que faphantaifie luy prerente,kns avoir
le temps de digérer fes penfées , ne mérite en aucune forte
qu'on y ait égard. Tout cela fe rencontre dans le filence de
Julien a l'égard de rÊuchariftie. Et ce qui eft encore plus,
c'eft que cefilencemême eft incertain , puifque nous n'avons
plus les livres où il auroit eu lieu d'en parler , & que celuy qui
nous reften'eft pas entier. De forte que c'eft une divination
téméraire, pour ne pas dire ridicule, que d'avancer qu'il n'en
a point parlé. C'eft à quoy fe réduit cet argument terrible ,
auquel M. Claude s'eft imaginé qu'on ne pouvoit répondre
que par le fîlencc.
^ des dijficuhez. tirées des fetis, 505
CHAPITRE VI.
Que t" Objection tirée du Jtlcnce des Payens , regarde auffi bien
les Culvinifles que les Catholiques , (^ qu'ils n'y fcuuroient
fatisfaire que far les 'inèmes folutions que les Catholiques y
apportent.
CO M ME il a de l'aveuglemenc ou de îa mauvnife foy
à fe (ervir de preuves qui Ioi'>;nt auffi fortes d un côté
que de l'autre , la première reflexion que doit faire un Au-
teur judicieux ôcfîncere , c'efb depenferàévitercec inconvé-
nient.
S'il avoir plu à M. Claude d'obferver cette règle du bon fcns,
il fe feroit épargné bien des difcours inutiles (ur le filence des
Payens j puifqu'il auroit d'abord reconnu que cette objcdion,
quelle qu'elle foit^n'efl: poinrarrachéeprecifémcnt à la docTiri'-
ne Catholique ^ & que s'il y a lieu de s'étonner de ce filence, la
chofe.efl: égale dans l'une & dans l'autre opinion. De forte que
les Câlviniil:esnc font pas moins obligez que nous d'en cher-
cher des raifons, &que.pouren alléguer même de vray.fem-
blables, il faut qu'ils ayent recours aux réponfes dont nous
nous fommes fervis contre eux. M. Claude en conviendra
fans doute s'il daigne confiderer qu'on ne fçauroit s'imaginer
ces Payens, donc il fait tant valoir le filence , qu'en trois lortes
de difpofitions.
La première eft d'une entière ignorance du myfleredel'Eu-
chariftie.
La féconde d'une connoiffance imparfaite formée fur les
paroles ordinaires dont on (éfervoit pour l'exprimer.
La troifiémeed d'uneconnoiflance diftinde de la doclrine
des Chrétiens fur cet article.
LefilencedespremierSjC'eft à-dire,deceux.qui auroientété
dans une entière ignorance des myfteres des Chrétiens, & qui
n'en auroient pasoûy parler, ne feroit pas fort étonnant , &
il le feroit beaucoup plus fans doute qu'ils en euffent parlé fans
en rien fçavoir.Tout ce qu'ils pouvoienr faire en cet état, c'é-
toit de fe plamdre, comme Celfus& Cecilius, que les Chré-
tiens cachoient leurs myfteres. Mais cette ignorance les mec-
joô Liv. VII. Examen des Argumens négatifs ,
tant dans une impuiflance entière d'attaquer l'Euchanftie par
aucune objedion particulière, il n'eft pas aifé de voir comment
ils l'auroient pu.
M. Claude voit déjà bien , qu'à l'égard de ccux-cy les Ca-
tholiques ne font pas plus embarafTez que les Calviniftes à ren-
dre rai fon de leur filence. Et comme on ne fcjauroit montrer
d'aucun Payen en particulier, qu'il ne fut pas de ce nombre ,
il ne faut compter pour rien le filence d'aucun Payen en par-
ticulier.
Mais on veut bien luy accorder qu'il y en avoit apparemment
quelques-uns , à qui les expreffions dont les Chrétiens fe fer-
voient fur le fujct de l'Euchariftie, n'étoient pas entièrement
inconnues , quoyqu'ils n'entendiifent pas leur fens. Lepafîa-
ge de faint Irenée conlervé par Oecumenius en eft une preu-
ve , &: l'on a lieu de croire que ces Juges d€ fainte Blandine
n'ont pas, été les feuis d'entre les Payens , quiayent appris, ou
par le rapport des efclaves & des faux Chrétiens, ou par quan-
tité d'autres voyes , que les Chrétiens difoient qu'ils man-
geoient la chair , & beuvoient le fang de J. C. dans leurs
affemblées.
Mais quelle efl l'idée que ces paroles formoient dans l'ef-
prit de ceux qui n'en entendoient pas le fens'Ce mêmepafTage
de faint Irenée nous le marque. Ils croyoient, dit-il , que les
Chrétiens mangeoientefFedivement de la chair, c'eft-à- dire,
qu'ils la mangeoient à la manière ordinaire. C'efl donc aufll
l'idée que ces paroles ont deu former dans l'efprit de ces au-
tres Payens, qui n'entendoient pas comme nous le fuppofons
le fens de ces paroles. Cependant on ne trouve point qu'au-
cun en ait fliit de reproches aux Chrétiens , ny qu'on s'en foie
fervi pour décrier leur Religion. Les Apologiftes du Chriflia-
riifme ne fe font point crus obligez d'y répondre , ny de jufti-
iier les Chrétiens fur ce fujet. Et excepté le féul pafiage de
faint Irenée , il ne s'en trouve aucun veflige dans tous les au-
tres Pères.
Je veux bien avouer à Mr. Claude qu'il y a quelque fujet de
s'étonner de ce filence. Mais qu'il avoue auffi qu'il n'y en pas
moins pour luy que pour nous. Car les Payens dont nous par-
lons concevoient une prefence réelle & une manducation réel-
le du corps de J. C. C'étoit-là, dit Aubertin , ce qui les cho-
cjuoit. D'où vient donc qu'on ne voit point qu'ils ayent fait
érl- ;c
&f des difficuîtcz, tirées des fens. 507
éclater leur fcandale, ni qu'on ait efté obligé d'y remédier: Ch. VI. \
qu'ils n'en ont tiré aucun avantage contre lesCIiretiens,&que
les Chrétiens n'ont pas efté obligez de s'en défendre ? Il faut
que M. Claude en trouve la raifon auffi bien que nous. Et fi l'on
dit qu'il eft croyable que les Payens ont fouvent objecté cela
aux Chrétiens, & que les Chrétiens y ont fouvent répondu ;
il eft donc poffible que des objections ayent efté faites, & qu'on
y ait fouvent répondu , fans que ni les objections ni les répon-
fèyfoient venues jufqu'à nous. Et M. Claude voit bien que
comme cette objeétion regarde auffi-bien les Calviniftes que
nous 3 cette réponfe auffi n'eftpas moins bonne pour nous que
pour eux.
Maisjepalîe plus avant, & je foûtiens qnes'il eft vray même
que les Payens ayent fouvent fait ce reproche aux Chrétiens ,
le filence des Apologiftes de la Religion Chrétienne fur ce
point eft beaucoup plus étonnant dans l'hypothefe des Calvi-
niftes que dans la noftre.
Car en fuppofant que l'ancienne Eglife ait crû de ce myfte-
re ce que nous en crovons , ceux qui la défendoient eftoient
aflèz empêchez à y répondre , puilqu'il ne leur eftoit pas per-
mis de découvrir le fond de leur doftrineaux Payens, Cen'é-
toit pasjjle moyen de les fatisfeire. Us ne pouvoient donc re-
pouflèr cette objcclion qu'en l'éludant en quelque forte-, & en-
difant qu'il eftoit faux que les Chrétiens mangeaftènt de la-
chair humaine dans leurs affemblées , de la manière que ces
Payens fe l'imaginoient. Or comme cette manière de réponfe
ne fatisfait pas pleinement, & qu'il eft toujours iùfpeél d'éluder
une objection ,. la prudence les a pu porter à prendre le party
de n'en point parler.
Ainfi le filence de ces- Auteurs peut eftre fondé félon nôtre
hypothefe fur une raifon de prudence. Mais quelle couleur v
peut-on donner, en fuppofant qu'ils fuffent dans le fentiment
des Calviniftes ? Evite t'on de répondre à des objedions qu'on
peut Cl facilement détruire ? Et ne s'y feroiton pas pîûtoft
attaché pour convaincre les Payens de calomnie, fans qu'il leur
reftaft le moindre prétexte de rephqtie, & pourmontreràceux
qui auroient encore eu quelque bonne foy, combien on abu-
fôit indignement de leur crédulité & de leur averfîon contre
les Chrétiens?
Ce n'eft donc pas à nos adverfairesquece filence des Apo-
SSf .
5o8 Liv. VII. Bxa,mendes Argumens négatifs ^
logiftes de la Religion.Chretienne fournir un argunicuc CeO:
nous qui nous en pouvons (ervir conrr'eux , puitqu'ils ne fqau-
roienc alléguer une raifon apparente , pourquoy ces Apolo-
giflés n'ont point exprelîement répondu à ces fortes d'obje-
clions, s'ils lepouvoient faire avec tant d'avantage pour l'E-
glifeôc tancdeconfufion pour lesPayens Orc'eft l'état où ils
auroientefté , s'ils avoieiit crû que l'Euchariftie n'eit appellée
le corps 6c le iang de J. C. que parce que le pain eft le figne de
fon corps 6c le vin le iîgne de fon fang. Car qui eftle Payen fî
ftupide à qui on n'eull: pu faire comprendre fans peine une
chofe fi facile ?
Il faut donc que M. Claude abandonne malgré luy ces deux
genres dePayens, 6c qu'il fe reduife à dire qu'au moins ceux
qui eftoient informez diftinclemcnt de la dodrine des Chré-
tiens fur cet article , n'auroient pas manqué de s'en fetvircon-
tr'eux ,(î l'Eglifeeût cru alors la prefence réelle 6c la tranflub-
flantiation , 6c qu'en ce cas il eft incroyable qu'ils n'en euffent
point parlé, mais qu'il n'y a rien de lurprenant en fuppofant
que l'Eglife ancienne ait efté fur ce point dans la créance des
Calviniftes .
C'efttoutce que M: Claude peut répondre , êc nous n'avons
plus qu'à luy en faire voir l'inutilité ,6c que l'opinion des Cal-
viniftes devoir fournir à peu prés aux Payens autant de fujec
de reproches que celle des Catholiques. Il faut même que les
Miniflres l'avouent s'ils veulent demeurer dans leurs principes :
car quand on les preife par les partages des Pères qui repre-
fentent la doftrine de l'Euchariftie comme difficile à croire , &c
comme oppofée à la raifon ^ au fens humain , ils prétendent
que tout cela convient aullibien à leur doâ-rine qu'à celle des
Catholiques. Quand on dit, par exemple, à Aubertin que félon
S. Hilaire ce qu'on dit de manger la chair ^ de hoine le funz de
A*l3,.p.4i4. y. C. faroifiroit infenfé é- impie , s'il n'efloit appuyé de l'afitorité
de l Ecriture , il répond froidement que cela s'entend de la
manducation fpirituelle , 6c qu'elle doit paroiflre abfurde 6c
infenfécaux efprics charnels, auffi bien que la régénération par
le Baptême.
Calvin répète plufieurs fois que la manière dont J. C. nous
nourrit de fa chair dans l'Euchariftie eft incomprehenfible. Ec
M. Claude t. M. Claude ne craint pas de dire , quilya dam le Sacrement fans
rcp.^ p. 137. -prefence réelle ^ fans converjton defubjlance ^ des merveilles S" des
incomj'rehenjîèiliUKi
3,. rep.p. 115,
^des dïjfimlteT tirées desfcns. Ç09
îl ne niera pas Tans douce que ces Payens ne fufTênt des gens Ch. VI.
charnels , ôc à qui , félon Aubeitin , la manducation fpiricuelle
,de la chair de J. C. devoit paroiftre pleine de folie &:d'abrurdi.
té. Il ne niera pas auiîi que n'ayant point de foy , ils nefudent
peudilpoi'ez à croire lur le témoignage de l'Ecriture ou de TE^
glife ces merveilles incomprehenfibles de l'Euchanftie , & tres-
portez à les rejecter & à les combattre.
D'oà vient donc que nous ne voyons rien de tout cela dans
les écrits des Payens ? Pourquoy n'y paroift-il rien de tout' ce
quela dodrinede l'EuLhariliie , félon l'idée même des Minif-
tres , devoit exciter dans leur efprit ? Pourquoy ne traitent ils
pas de folie &: d'abfurditéceque l'Eglifeenfeignoit de la man-
ducation du corps de J. C ? Pourquoy ne fe font ils peint éle-
vez contre ces incom.prehenfibilitez , que les Minières trou-
vent dans leur doctrine auffi bien que dans la noftre ?
Que M. Claude cherche donc à fon tour des raifons au fîlence
des Payens, ou qu'il avoue quetouccequedifent les Miniflres-
& luy-même des incomprehenfibilitez de l'Euchariftie dans
leur dodrine^ne font que des défaites artiiîcieufes pour éluder
les palîîigesdes Pères qui marquent la créance de l'Eglife de
leur temps par un caraÂere qui ne convient point du tout a
celle des Calviniftes.
Mais quand il prendrait ce dernier parry , &que fans avoir
égard à ce que difent les autres Minifl:res,il s'arrefteroit à la do-
ftrine de fon Eglife telle qu'elle efl en effet , ce filence des
Payens ne l'enibarafleroit de rien moins , &; il faudra toujours
qu'il avoue que c'efl: une difficulté commune, & tout auffi force
contre luy que contre nous.
Car quelque foin que les prétendus Reformez ayent eu de
retrancher de ce myftere tout ce qui pouvoit choquer la rai-
Ion , il a fallu malgré eux qu'ils y laiïïafTent deux chofes qu'ils
n'ont pûchanger jl'uneeft l'efficacequ'ils attrihuentauSacre- j,^ o.màe.
ment , ou qu'ils avouent que \ei Pères y ont attribuée; l'autre contre i^- p.
efl: la manière d'exprimer ce myfliere qu'ils reconnoiflcnreux- ^'"^«tp- 's^»
mêmes tres-écrantre & très extraordinaire. Carcomme le re-
marque S. Chryfoftome, jamais perfonne avant J. C n'avoit
parlé de manger fa chair &: de boire fon fang.
L'un & l'autre dévorent extrêmement choquer les Payens.
Car Ç\ Julien fait tant de railleries du Baptême, & s'il fc moc-
que de ce que n'ayant jamais guéri ni une lèpre , ni la moindre
SSfy.
jio L I V. VII. Examen des argumens négatifs ^
e evnrc . les Chrétiens précendoient néanmoins qu'il purifioit
lésâmes des rapines , des adultères. S: de tous les auties cri-
mes : que ne pou voit-il point dire , fur ce qu'ils appelloicntua
morceau de painSc un peu de vin , le remède d'immortalité , l'an-
tidote delà mort, la vie ^ le bien , Scde ce qu'ils luy attribuoienc
la remifïïon des p,^chez , la communication du S. Efprit , &:la
refurreclion à venir ? Cette dodrine eftoit-elle plus favorable
à l'égard des Payens que celle du Baptême <" & devoit elle eflre
moins en butte à leurs objeâiions &; à leurs railleries ?
Non feulement laraifon ne permet pas de le dire, mais elle
oblige même d'avouer que les termes dont fe fervoient \ti
Chrétiens, en appellant la participation a l'Euchari(l:ie,mangejr
la chair de J. C. quoique ce nefull, fclon les Minières, qu'un
morceau de pain figure de J.C. en cnfeignant que cepaineftoic
change r.u corps de J. C. & en ufimt d'une infinité de compa-
raifons étranges, que ces termes, dis je, auroicntefté tres-ça-
pabL's d'attirer les railleries des Payens par le peu depropor-
tion qu'ils avoiànt avec ce qu'ils auroient fîgnifie.
Car c'cfl- fe tromper que de crtM'rc que les objedions des
Payens fuiTent fondées fur la leulc difficulté des myfteres , en
forte qu'ils s'y obUinaiPent d'autant plus , qu'ils clloient plus
mal.aiîcz à comprendre On voit au contraire que ceux qu'ils
ont le moins attaquez, font les myfteres de la Trinité & de
Hncarnation. Tout ce qui ell couvert de la toute-puillance de
Dieu, eften quelque forte moins expofé aux objeÂionsi parce
qu'on n'efl point choqué de voir attribuera Dieu des choies
qu'on ne fçauroit concevoir. Et cette raifon auroit pu porter
les Payens à ne fe pas élever avec tant de force contre le my-
flerede l'Euchariftie , quand même ils l'auroient connu j ou-
tre que ce qu'ils croyoient delà prcfence de leurs Dieux en di-
verles llatucs , pouvoit fervir à le leur rendre moins incroya-
ble. Mais leur pente a toujours eflé d'?traquer la B^eligion
Chrétienne &r ce qui la pouvoit faire puroillre vile, balîe &;
ridicule. Tout ce qui frappoit l'efprit de ces idées, eftoit tres-
conforme à leur inclination. Et c'cil pourquoy leurs reproches
ordinaires contre les Chrétiens, eftoientprisdela naillance ,
delà vie Se de la mort de Jesus-Christ.
Il efl: donc certain qu'ils n'auroient pas laifîe pafler le langage
dont les Calviniftes expriment ce qu'ils croyent de rEucha,ri-
ftie .^puifque rien ne leur auroit eftéphis aifé que détourner les
I
tS des diffciilnx.tmes des fens, 511
Chrétiens en ridicules fur ces expreffionSjSc fur les effets qu'ils Crf. V I.
attnbuoientà ce pain & à ce vin.
Enfin , puifqu'entre les raifons qui auroient dû porter les infi-
delles à attaquer les Chrétiens fur la prefence réelle &i la tranf-
fubflantiation , M. Claude allègue que cette doctrine leur au-
roit fervi à repoufler plufieurs des objedions qu'on faifl it contre
la Religion Payenne , il doit conclure par les mêmes principes
qu'ils auroient dû tirer le même avantage de la docîrine des
Calviniftes fur i'Euchariftie , 6c s'en fervir pour la même fin.
Car il ed certain queCelfus& les autres ennemis de la Reli-
gion Chrétienne, ne croyoient point que leursûatucs fufTenc
des Dieux , & qu'ils déclarent qu'elles n'eftoient que des ima-
ges des Dieux. Et CQs. images même n'avoient fouvent aucun
rapport avec ces prétendus Dieux, puifque l'image de la Mère
des Dieux n'cftoit qu'une pierre ronde. Or félon M. Claude
ces Chrétiens en croyoient autant de l'Euchariftie. Ils la pre-
noient pour une image du corps ào. J. C. où J.C. habitoitpar fa
divinité & par fon eîprit. Pourquoi cesPayens ne s'en fervoient-
ils donc pas pour repoufîér les objections des Chrétiens , &; qu«
pouvoient-ilsoppoferde plusfpecieux à toutes les railleries que
les Chrétiens faifoient de leurs idoles ?
N'avon^nous pas droit lur cela de faire parler ces Payens,au(li
bien que M. Claude, & de luydemanderde même ce qu'il y au-
roit à répondre à un de ces Philofophesqui diroit à des Chré-
tiens qui feroient dans la créance des Miniflres : Vous prenez
fujet de l'honneur que nous rendons à nos idoles , de nous re
procher que nous honorons & adorons ce que nos mains ont ' ^
fait , ce que nos paroles ont confacré , ce qui ne (e meut , ni ne «.^
parle, ni n'agit, & ce qui ne montre fa divinité par aucun effet ^
furprenant, quoique vous iijachiez que nous n'adcrons pas le
bois&lapierre,&que nôtre adoration fe rapporte uniquement *^'
au Dieu dont le bois &; la pierre font les 'mages. Mais comment ''
avez-vouslahardiefledenousfaireun crime de ce que vous pra-
tiquez vous-mêmes dans vos myfteres ? Car n'avez vous pas*"
aulfi une image de votre Dieu qui ell: faite non d'oroud'ar- "
gent,ou de pierre, ou de bois , mais de pain &de vin ? Ces "
matières en font-elles moins images pour eflre plus viles ? Ne ''
font elles pas les ouvrages de vos mains?Ne font ce pas vos bou- "
ches qui les confacrent ? Ne font- elles pas mortes ii. fins mou. '''^
vement? Cependant ne les honorez-vous pas comme nous ho-"
SSf lij
c
jiz Liv. VII. Examn des argumem négatifs,
,j norons nos fîmulachres ? Ne.les traitez-vous pas avec refpe<fl ,
„ comme nous traitons les nôtres ? Et enfin n'adorez- voas pas
„ vôtre Dieu agifliint fur vous par ces matières , & refidant en
j, elles par Ton efprit iEt que failons-aous davantage à l'égard de
j, nos idoles?
„ Que voulez-vousdireaufÏÏde nous reprocher que nos Dieux
„ font expofez aux injures du temps , au feu , à la vieillefTe ,à la
y, pourriture ; qu'ils peuvent eftre enveloppez dans le pillage des-
„ ennemis j que nous avons beioin de clefs &; de verroux pour
,, empêcher qu'on ne nous les vole. Tout cela n'tft vray qu'àl'é-
y, gard de nos ilmulacrcs ; ôc nos lîmulacres ne font pas nos
„ Dieux, mûisles images de nosDieux. Le bois & la pierre fonc
j, expofez à ces accidens, mais non pas la divinité qui en elle-
„ même eftimpaffible&inviolable. Etfiellene communique pas
,, fcs qualitezà fes images, ce n'efl: pas par impuifîance, mais par
^ volonté. Qiie trouvez- vous là qu'on ne puifl'e dire avec autant
j, de raifon de l'image de vôtre Dieu faite de pain & de vin?N'eft-
„ elle pas fujette à ces mêmes accidens, quoique vous l'appelliez
j, vôtre Dieu , &: qu'elle foit l'indrument par lequel vous dites
„ qu'il fe communique à vous ? N'eftes vous donc pasinjuftesde
jj nous faire des reproches dont vous ne fçauriez vous-mêmes
vous défendre ?
*' Il eft clair que ce difcours n'auroitpas eu moins de vray- fem-
blancedansla bouche des Philofophes qui auroient combattu
une focieté de Calviniftes, que ceux que M. Claude leur fair
faire contre nous. Qu'il fonge donc à fon tour comment il ren-
dra raifon du filence des Payens fur la dodrine des Calviniftes,,
lu y qui nous demande avec tant de fierté, pourquoy ils n'ont
point parlé de celle des Catholiques. Qii'il nous dife pourquoy
ils ont parlé du Baptême & point du tout del'Euchariftie , s'il
eft vray que ces deux myfteres leur fuflent également connus ?•
Qu'il nous démêle , s'il peut , pourquoy ils n'ont point relevé
les abfurdirez apparentes du langage dont, (elon luy , TEglife fe-
fervoit à l'égard de ce Sacrement? Et pourquoy ils n'en ont pas
tiré des réponfes aux railleries que les Chrétiens faiioient de
leurs idoles & du culte qu'ils leur rendoient ? Qu'il médite fur
cela plus attentivement qu'il n'a fait. Et on afliirepar avance
qu'il ne fçauroit trouver de réponfes raifonnables, fans donner .
en même temps aux Catholiques dequoy prouver que le filence-
d-es Payens ne conclut rien, ni contre la prcfence réelle, ni con^
Ere la tranlTubftiantiation,.
ti des ciifficiilteT^ tirées des fens. ^15
C H AP ITRE VII.
Que l'arpiment négatif tiré du Jîlcncc des Feres fur les difficultex^
de l' Eucbarijiie , a efiè abfolumcnt détruit dans le
cours de cette contcfiution.
M. Claude ayant propofé l'argument du filence des Pères
fur les difficultez &; les merveilles de l'Euchariflie dés
fa première réponfe ,on y fatisfit d'une manière qui le devoit
contenter. Et en effet nous ferons voir icy que tout ce qu'il y R^.fut. i parc.
a répliqué ne confifte qu'en de faulTcs fuppolîcions , qui ont p.i48.&iuiv.
elbé détruites dans le cours de cet ouvrage.
On a depuis fortifié cette réponfe par un chapitre exprés
dans le premier tome de la Perpétuité , où Ton montre par
l'exemple de toutes les Societex d'Orient , que la créance de la
prefence réelle & delà tranfTubftantiationell très compatible
avec un fîlence entier fur toutes ces difHculcez. M. Claude y a Perp.tomei.
encore répondu à fa mode dans fa troificme réponfe. Et c'eft ' '°" ^'
ce que nous allons examiner icy , parce que cet examen fulKc
pour décider cette qucftion.
On avoit montré dans ce chapitre, que ce font deux veritez^
de fait également certaines ^ (^ que les Grecs c^ toutes les autres
Societcz^ d'Orient croyent la prefence réelle éî' l'-t tranffubjhin-
tiation i & que ion ne parle point néanmoins dans ces So-
cietez des difKcultez de ce myflere. Et (ùr cela on preffe M"
Claude par ces paroles Ces deux ventcz^notu font voir d'a-
bord la faujfeté de la confequence de M. Claude ^qui s' imagine que
la doctrine de la prefence réelle oblige neceffairement h parler de
ces fuites Philofophiques î mais en même temps elles montrent in-
vinciblement la l'criîè d'une confequence toute contraire , qui efi
que la dctlrine de la tranffubjlantiation peut fort bien s'accorder
avec un flence entier fur toutes les difficultés^ que la nature
humaine trouve dans le myflere de l' Euchariftie , (i" qu'il efi très-
po,flîble que cette doctrine f oit crue univerfellcment ^diftin'clement ^
fans oppofition ^ fans contradiction par de grandes fecietez^pen-
dans l'cfpace de plufieuts fiecles 5 que l'an écrive ^ que l'on par-
le tres-fonvent de l' Euchariftie _, C^ de la vérité du myftere ,que
Ion établi If e la tranffubftantiation tres-cUirement ^ tres-precifé-
5Î4 Liv. VII. En amen des Argimicns négatifs ^
ment , fans faire des reflexions exprejjes furjoutes ces dij/itultexjia-
turc [le s qui fcmblent nuijire de cette doctrine.
„ Non feulemenc cetce expérience fenfible prouve la compati-
„ bilicé de ce filcnce avec cetce doûrine, niais elle prouve de
j, p'ius qu'il n'y a rien en cela que de cres- naturel , & que c'effc
,j mal coiiRoiftre l'efpricdes hommes, que de s'imaginer que la
„ doclrine de la prefence réelle & de la rranflubflantiacion porte
„ d'elle-même à s'embarallèr de toutes les difficultez,quela Phi-
„ lofophie humaine découvre dans ce myftere. C'eft une illufion
,:, qui vient de ce que l'on prend pour une dirpofition naturelle
„ éz. pour un effet commun une dirpolîrion d'efprit extraordi-
„ naire , & qui vient d'une paffion qui change les idçes ordinai-
,, res , & k pente naturelle de refprir.
,, Les Miniftres Calviniftes qui ont pris pour principal objet de
„ leur averfîon , & pour le plus grand prétexte de leur fchifme ,
,j la dodrine de l'Eglife Catholique fur l'Eucharidie , qui ont
jj pour but de la faire pjroiftreinfupporrable à ceux qu'ils veulent
,, retenir dans leur pariy, ou qu'ils tachent d'y attirer , fe font
,, fortement appliquez aux difficultez Philofophiques de ce Sa-
j, cremenr. Ils rempliflént leurs livres de raifonnemens pour les
„ augmenter. Ils en font undesfujetsles plus ordinaires de leurs
,, dilcours ; & comme ils en ont la.tefte pleine', ils tâchent aulïï
„ d''en remplir celle des autres.
,j M.iis pour les détromper de ces faufTesconjcdureSjil nefaut.
„ que les avertir qu'ils fe règlent fur de fort mauvais modèles, 6i
^j qlie des gens que leur pafîîon & leur préoccupation ont fait
„ forrir de leur naturel , ne font pas propres pour faire coniioî-
,, tre la pente & l'inclinatiou naturelle des efprits.
Enfuire on applique l'exemple fenfîble de toutes ces grandes^
Fgli fes d'Orient à celles des fîx premiers fiecles en cette ma-
nière;
,., Or ce que l'expérience nous fait voir de nos yeux dans ces
^ Eglifes Orientales , nous donne lieu de juger de ce qui a dûar-
„ river dans l'Eglife des fîx premiers fîecles , en fuppofant, com-
j, me nous avons droit de le faire , que la dotTirine de la prefence
„ réelle £i de la trantlubllantiation y ait eflé univerftllemenc
„ établie en la même manière qu'elle l'efl dans tout l'Orient ,
„ c'efl: à.dire fans combat& fans conteftation. Et comme nous
^, voyons que la créance de ces dogmes cft jointe avec un entier
j,. filence fur ces difficultez Philofophiques , on doit juget qu'il
en
^ des dijjiciilte'z. tirées des fèns. p^
en a deu eftre de même de l'ancienne Eglife , ôcque les Pères Ch. VIII
qui ont cftë excrememenc retenus à ne parler de ces chofes' "
<]ue par nece-lîicé , n'ont point deu en entretenir les peuples ny "
en parler dans leurs écries. S'ils l'avoient fait, ilsfe icroienten
quelque forte éloignez, & de la nature qui n'y porte point , &:
de l'efprit de la foy qui en éloigne.
M. Claude entreprenant de réfuter cette preuve dans fa.
txoifiéme réponfe, abrège la queftion fans y pcnfer. 11 de-
meure d'accord de ce filence de toutes lesEglifes d'Orient fur
les difficultez de l'Eue hariftie , &; il en prétend même tirer
avantage.
Il ne combat point la confequence que l'on en tire, qui eft
que les Peies des lix premiers ilecles ont pu tenir ces mêmes
dogmes, & garder le même filence à l'égard de ces diffi-
cultez,
II s'attache uniquement au principe, fçavoir que toutes ces
Societez croyent la prefence réelle 6c la tranlîubftantiation. Il
prétend que ce fait eft conteftc, qu'il n'eft pas permis de le fup-
pofer , qu'il en prouve la négative, & qu'il la défend mille fois
plus folidement que l'on n'en aprouve l'affirmative;' êcqu'ain-
fi il le faut lailTerà part , & répondre à fon argument.
Oeft donc à quoy la queftion eft maintenant réduite. Si ce
fait eft conftant , M. Claude voit bien qu'il faut renoncer à fon
argument, Se qu'on a droit d'enconclure que c'eft une pure il-
lufion. S il n'eft pas conftant, on luy avoue auffi que ion ar-
gument fubfifte , & qu'il y faut chercher d'autres répon'es.
Mais en vérité la queftion en eftantre duite à ce point, on peut
dire qu'il n'y a plus de queftion , & que jamais il n'y en a deu
avoir. Car il ne faut pas que M. Claude s'imagine que l'opiniâ-
treté inflexible d'un particulier à nier des chofes conft.mtes, en
puilTe ébranler la certitude & la notoriété. Il a beau dire qu'il
n'eft ras certain que les Grecs croyent la prefence réelle &: la
tranffubftantiation iil ne fait par là que fc décrier luymême
fans diminuer en rien l'évidence du fait qu'il cortefte. Le pu-
blic nous fait juftice à l'un & à l'autre fur ce point. Et quoy que
lacrainte de.fe faire des affaires parmy ceux de leur party em-
pêche les Calviniftes intelligens de fé déclarer fur ce point,
on a pourtant des preuvesqu'ils condamnent M. Claude dans
leurs entretiens particuliers -, & je fuis mov mêr/.e témoin
qu'une perfonne des plus considérables de leur fecle à qui
TTt
p6 Liv. VII. Examen des Argumens négatifs ,,
j'cftois entièrement inconnu , eftant prelîé en ma prefence par
un homme d'erpricSc de qualicé d avouer fincerement ceqa'il
penfoit de ce point de fait, ne put s'empêcher de dire qu'il y
avoic la même différence entre les preuves de M. Claude^fic
celles que l'on avoir produites dans le premier Tome de la Per-
pétuité, ôc dans la répoiife générale ^ ^«'^«^r^ un Almanac ^
une douz^aine de bons eontrafts.
Je ne Hçay nicme fi M. Claude perfiftera encore à nier ce
fait, après avoir ku ce que je produiray à la fin de ce Volume.
W y verra tout ce qu'il a avance touchant les Eglifes d'Orienc
condamné formellement par les decifians autentiques de ces
même Eglifes. Noftre diiputene leur efl: point inconnue. On
les en a informées. Etc'eft fur noftreconteftation même qu'ils
nous déclarent ce qu'ils croyenr, & qu'ils condamnent M. Clau-
de. C'eft l'avantage qu'on a quand on difpute du fentiment
des Eglife vivantes. Monfieur Claude fe joue de celuy.
des morts, parce qu'on ne fçauroit les refTufciter pour le dé-
mentir .• Mais il n'en eft pas de même quand il s'agit de Socie-
tez qui lubfifbent encore. Il ne faut point de miracles pour leur
faire déclarer leurs fentimens. Un peu de foin fuffit. Et l'on
verra l'ÈfFet de ceux qu'on a. pris pour cela qui ne font que
fort médiocres.
Quoy qu'il en foiî, je veux attendre à fçavoir de !uy-mê-
me qu'il demeure dans fon premier fentiment , la charité
ne permettant pas,ce me femb'e, deluy attribuer avant cela un
enteftement fi déraifonhable. Mais quand il feporteroit jufques
à cet excès, il ne fera qu'attirer la compalîion de ceux qui-
comme nous n'ont point de venin contre luy , fans afFoiblir
en rien la /olidité de cette réponfe. On fera feulement o-
bligé de le mettre à part, comme une perfonne fur qui l'évi-
dence ne peut rien , & de s'adreder aux autres de fon party
qui ne font pas dans les mêmes, difpofitions.
Si cet argument tiré du filence des Pères furies difficultezde
l'Euchariftiefait donc encore quelque impreflion fur eux, il
n'y a qu'à les prier d'ouvrir les yeux, & de voir un fiience tout
pareil joint à la créance de la prefence réelle & de la tranlTub-
ftantiation dans toutes cesSocietez, de lafoy defqiielles ils ne
peuvent douter, & qu'ils ne fçauroient foupçonner avecla
moindre apparence d'en avoir changé depuis fix cens ans. Il
faut que les conjedures fe taifent quand on peut s'aiïurer des.
Çjf des difjîmlter^ tirées des fens. 5T7
•chofes par un moyen de cette nature. Etiln'efl: plus queftion Ch. VII.
<le conclure , comme M. Claude auroit voulu faireen fuppo-
fanc l'incertitude de ce fait , que puHque les Societczd'Oricrc
ne parlent point de ces difficultez, elles ne croycnt donc pas la
prelence réelle & la tranlTubftantiation. Mais il Faut conclure
direclement, que puiique ces Socictez croyent très certaine-
ment ces deux points, gc qu'elles ne parlent point de ces diffi-
cultez , ce filcnce cft tres-compatible avec cette créance , &
<]u'ainri l'argument qu'ont tiré du lilence les Pères, &: dont o\\
prétend conclure qu'ils n'eftoient pas danslefentiment de l'E-
glife Romaine n'eft nullement confiderahle.
Iln'efl: pas plus ditKcile de convaincre M. Claude de la foli-
<lité de ce qu'on a répondu à c<i.xx.Q même objection dans la ré-
futation de (on premier écrit.
On'luy a dit qu'on ne doit poinrtrouver fî érranc;e que les Pè-
res n'ayent pas mar que en particulier les difficultez Philofo-
phiques de l'EuchariiVie , puifqu'il ne paroift point qu'ils le
loientplusmiis en peine de marquer celles qui naifîènr du péché
originel , de la Trinité , 6c de l'Incarnation, avant que ces
myfteres euflent elle attaquez par les hérétiques, Se qu'il y
a même plafieurs de ces difficultez qu'ils n'ont point dévelo-
pées dans la plus grande chaleur des difputes qui fe font éle-
vées fur ces articles.
M. Claude n'a rien à repartir fur les difficultez du péché ori- m. Claude t.
ginei,finon quec'eftun mvftere Spéculatif. Mais c'efl: une très. '^P* P' "°'
vaine défaite, puifque d'une part l'exorciTme que l'on prati-
quoit fur les enfans pour les tirer de la domination du diable,
en eftoitune confeffion publique , &: expofoit en quelque forte
aux fens ce que l'Eglife en croyoit^&que de l'autre les repro-
ches que Julien fait fur ce fujet à S. Auguftin, qu'il avoir pour
luy lesarrifansSc les gens de boutique ,font voir que cette doc-
trine eftoir populaire, & connue des moindres fideiles.
I! chicane encore d'une manière plusdéraifonnable fur les
difficultez du myftere delaTrinité. Premièrement ^à\x.-\\^ aqv.el. M. cia-adc i.
■propos l'Auteur met.il encore le myfiere de la Trinité en panileL '^'•'P P '34.
ïe av-ec celtiy de l' Euchariftie , ^ quelle proportion y a-t-tl de l'un
(^ de l'autre } Mais il n'y a que M. Claude qui croye avoir droit
de demander à fon adverfaire , pourquoy il propofe un exem^
pie decifif Car celuy de la Trinité l'eft en cette occafion , & il
efl aifé de le faire voir en le reduifant à cet argument en forme.
TTC i]
jiS Liv. VU. Examen des Argument négatifs ^
Si le filence couchant lesdifficiilcez de la Trinité a pu compatir
pour les Pères avec la foy de la Trinité -, le filence Car lesditfir
cultez de la prefeiice réelle & de la tranlFubltantiacion a pil
compatir pour Ic^ mcme Pères avec la foy de la prefence ré-
elle delà cranfllibftannacion. Or on ne fçauroit nier lepremier..
Donc &:c.C'efl: à M. Claude à repondre à cet ar^jnmenc, avant
que de faire de ces iortes d'interrogations figurées qui luy
tiennent lieu de raifons folides.
LaTrinité ^ pour fuit- il, eft établie très- clairement ^ très fortement
dans l'Ecriture-, la tranjjubfiantiation y eft combattue. Celle Ik efi-
erifeiqnée formellement (^-^ diftinci ornent far les SS. Pères i ^ ils
n'ont pas feulement fait w.ention de celle, cy.
On voit que M. Claude fe fait des raifons detoutce qu'il croit
eftre avantageux à fi caufe, fans avoir aucun égard au fenscom-
niLin. il n'y a donc qu'a luy répondre fimplement, que la Tri-
nité eil clairement établie dans l'Ecriture &. dans les Pères
pour les efprits ncn préoccupez, & qu'on a fait v^iir la même
chofe de la tranfîiibflantiation. Maiscen'eft pasdequoy il s'a-
git icy. La queftivjn eft de fçavoir fi l'on peut conclure du fi-
lence des Pères (ur les difficulcez de la prefence réelle , qu'ils
n'ont point reconnu cette prefence. Et je (oùriens que cette con-
clufion eft faufre,puifque le filence des mêmes Pères fur lesdif-
ficultez de la Trinité ne prouve point qu'ils n'ayant pas cru
la Trinité.
Celle là , ajoute M. Claude , a des difficultés qui ne paroiffent
qu aux yeux trop perçants de la curiojitè : ^ l' autre en a qui ne fa
fcauroient cacher aux yeux des plus endormis. Les d/fficultez^de cel-
le-là ne (ont pas tout à fait ejîranges à la rat fou : mais celles de l'au-
tre renvcrfent toutes [es maximes ^ choquent ce qu'elle a déplus
inviolable. Qifont-elles donc de commun /
Si Monfieur Claude n'avoit luy- même les yeux endor-
mis , il faloit au moins qu'il fuft bien aveuglé par fa paflîo n ,
paur ne pas voir la faufleté de tout ce qu'il entaffe là fi
hardiment. Car ce n'eft que par un enteftement pareil
au Ç\i\-\ ., qu'on peut dire que les difficultez du myftere de la
■Trinité ne paroifîenc qu'aux yeux trop perçants de la curio*
fité , & qu'elles ne font pas tout à fait étranges à la raifon..
Et quiconque n'aura pas refolu comme luy , de trouver à quel-
que prix que ce foit des différences entre les difficultez du my-
ftere de la Trinité & celle de l'Euchariftie, reconnoiflra fans
peine q^u 'elles, font grandes de part &: d'autre, & qu'il n'y a de
fi^ des difficultez. tirées des Jens. 519
différence q^e félon que les diverfes paffions dont on eft polîè- Ch. VII.
dé , (ont qu'on s'applique à l'un ou à l'autre de ces myileres.
Les Calviniiles s'appliquent uniquement aux difficultczde la
tranilubftantiarion.Les Sociniens s'appliquent principa'emcnt à
celles delaTnnité: & ils en trouvent les uns & les autres
qu'ils croyent infurmontables. Les Catholiques ne s'appliquent
ni aux unes ni aux autres ^ mais jugeant fainement de toures^ils
les regardent comme grandes, parce qu'elles le (ont en tffct-^ &
ne lailîènt pas d'embralTer fans répugnance les rayilcres donc
elles nailîènr, parce qu'ils font accoutumez à foùmettre leur
raifon aux lumières de la foy.
Il ne faut pa'; auffi que M. Claude croye nous donner le chan-
ge lorfqu'il dit en gênerai, que les Pères ont connu les difHcuI-
tîzdelaTrinitë, & qu'ils ont tà<:hé de les éclaircir. Un'eilpas
qaeftion s'ils les ont connues ni s'ils ont dit généralement que la
Trinité eft incomprehenfible. Cela n'eft pas contraire à ce fi-
lencelurlesdifficulvez de la Trinité dont il s'agit, & ces ex pref-
^o-\s générales font elles- mêmes un véritable filence, puifqu'et
les ne forment que des idées confufes 6c ne prefentencrien de
diftincl à Tefprit.
Ils ont marqué en cette même manière les difficultez de la
prefence réelle & de latranlTubftantiation.ris ont exhorté dens
les pas fonder curie» femcnt , de les confioner far l'ardeur de la foy
Ô" du S. Efprit. Ils ont dit que la manière du changement cftoit
inconcevable'') que ce qu'on ^x\. croix, ferait une folie ^ (i l'Ecriture
ne l'enfeignoit h qu'il n'y faloit pas chercher l'ordre de la nature.
Ce n'efl: donc pas là dequoy il s'agit ^ mais de Tçavoir s'ils ont
particularifé les difficultez (ùr laTriniréde la manière que nous
les concevons 6c qu'elles iont propofées par les Sociniens. C'efl
ee qui ne peut eftre avancé que par des gens qui aiment mieux
entretenir ceux de leur party par de vaines déclamations, c|ue
de leur dire flnceremenc les chofc5 comme elles font.
TTt iij
Tnii. 1. ?.
■ jio Liv. VII. Exa,men des Argumens négatifs ^
CHAPITRE VIII.
Que la maxime des Pères eft de s\tttacher à. la foy fans écouter
les raifonncmens humains. Qu^ils ont appliqué cette yyiaxime à
l' Eucharifiie ., ^j^ qu'elle a deu les porter a nenreprejenter les
difficulté z^que d'une manière tonfufe ^ (générale.
l;
'Exemple de ce que les Pères ont pratiqué à l'égard des
'points capitaux delà Religion Chreftienne qu'ils ont trai-
tez, comme l'avoue M. Claude , avec une fohnété ^ une rete-
nue admirable ., en s'attachant à la règle de la foy &:à l'Ecriture
fans s'amufer à prévenir les difficultez que l'efprit humain pou,
voit former, nous porte naturellement à conclure qu'ils en ont
deu ufer de même à l'égard de l'Euchariftie -, &qu'airi{I on ne
fe doit pas attendre de trouver dans leurs écrits des éclairciflè-
mens furies difficultez de ce myftere. Mais fi l'on s'efForce d'en-
trer dans leur efprit &. dans les principes qui leur ont fervy de
règle , on fera encore plus perfuadé qu'ils n'ont point deu ex-
pofer ces difficultez aux yeux des hommes , qu'ils n'ont deu ni
s'y arrefter eux-mêmes ni apprendre aux autres à s^y arrefteri ôc
enfin qu'il y a un parfait accord fur ce point encre leurs maximes
générales & leur conduicte particulière.
Si vous demandez à S. Hilaire quel eftat il fait de la raifon
humaine, quand il s'agit des myfteres de Dieu , il vous dira
Hilar. Je que le S penféesdes hommes font incapables de comprendre les œuvres
Tcin, 1. 1. ^^ Dieu , parce qu elles ne conçoivent rien de ce qui eft au deffus de
l'intc/lizcnce ou du pouvoir des hommes .- qu'ainf ce n'eft pas par les
fcns qu'il faut juger de la puijfance de Dieu , mais par l'étendue in-
finie de la foy , que cette foy rejette d^ méprife les queftions inuti-
les ^ capticufes de la Philo fophie ; ^ qu'elle ne fe laiffe point
embarrajfcr parles raifon s trompeufes des hommes.
Il vovisàlra. .,quiî ne faut pas prétendre régler les effets de la
Hilar. de puiffavcede Dieu par les opinions des hommes : Que l'ouvrage ne
doit pas juger de fon Jtuteur. Qu^ il faut fe revcftir d'une efpece de
folie pour arriver d la fageffe : Que cette figeffe conffte a. ne point
donner de bornes a ht vertu C^ à la puiffancc de Dicu^àne pas pré-
tendre rcjfcrrer le Matfire de la nature dans les bornes de la nature ^
^ des difficulteT^tirées des fens. jii
é" à e/îre feifuadé que ta créance qu'on a de Dieu, efi toujours Ch.VIII.
faufje ^ trompcufe , s'il n'en efi luy- même l'Auteur 6^ le té-
moin.
Voila quel eftoic refpric de ce grand Saint. C'eft fur ces prin-
cipes qu'il établilîoic fa foy & fa pieté. Il vouloit qu'on écou-
tai! Dieauniquement, &: qu'on n'écoutafi: plus eniuice Icsrai-
fon'iemens ôi les opinions des hommes , ny les difficultcz qui
pourroienc naiftre de la raifori & des fens.
On devroit donc juger par la feule eonnoiOance de fon ef-
prit qu'il a appliqué ces principes à l'Euchanftie , quand même
on n'en verroic rien par fes écrits, & qu'ainfi il n'a deu avoir
aucun égard aux difficultez que la raifon , êc les fens y peuvent
trouver. Mais il paroiftde plus qu'il l'a fait, £cque rcconnoif-
iânt que ce myftere choque noûre raifon , A nous a appris à la ij_ ]_ ^
méprif'er pour fuivre uniquement ce que Dieu nous en a ré-
vélé par fa parole, Attachons nous , dit-il, a ce qui efi écrit, f
nous voulons accomplir les devoirs d! une jov parfaite. Car il y a de
la folie ^ de l'impiété à dire ce que nous difons de la venté ni-
turelle de J. C. en nous, à moins que luy même ne nous l'ait appris.
C efi luy qui nous dit: Ma chair efi vraycment viande , (> monf^ng
vrayement breuvage : Ccliiy qui manqe ma chair ^ boit mon fan^
demeure en moy g/- moy en luy. il ne laifie aucun lieu de douter
de la vérité de fa chair &- de (on fang , puifque la déclara-
tion du Seiyieur çj^ nofire foy concourent à dire que c'efi vraye-
men de la chair (^ vrayement du fang. Et ces chofes efiant prifes
^ avalées font que nous fommes en J. C &*que J. C. efi en nous.
Que cette conduite eft fage 6c judicieufe : qu'elle eft digne
de la pieté des Pères "qu'elle eft conforme à lafoiblefTe de nos
efprits ! Elle les afTujettit parfaitement à la foy. Elle reprime
le foulevementde la raifon dans fa naifTance mefme ,5i au lieu
de s'arren:erà déveloper desdifïîcultez qui ébranlent toujours
l'efprit , elle les étouffe tout d'un coup par le poids de l'au-
torité divine , avant même qu'elles foient formées. Qti'il vaut
bien mieux empêcher ainfî l'efprit de fe laifer aller à fes vains
raifonnemens, que d'avoir à le ramener après qu'il s'y efi
abandonné/
Qui s'étonnera donc que ce Père ait fuivi cette règle ? Et qui
ne jugera que les autres en ont dû faire autant, puifq' ''!s ont
efté animez par le mefme efprit j 6c que la raifon mefme les y
a portez /
ja.1 L IV. VII. Examen des /îrgumens négatifs j
AufTi c'eft ce qui éclate partout dans leurs écrits. Etil n'y
a ritnqu'ilsinfpirent plus univerlellement que ce mépris des
raifonncmens humains dan.^ les chofes de la foy , que l'éloi-
gnement de toute curiohté ,ôcque l'attache inviolable à l'au-
thorité divine.
// e/r bon^ dit faint Ambroife , que la foy précède la raifort^
'Ambr. de de peur quil ne femhle que nous exigions de Dieu qu'il > nous ren-
Abrah. patr. ^g rai fan des chofes , comme nous l'exigeons des hommes. Car
'' qu'y-,a-t il de plus indigne que de croire les hommes dans les té-
moignages qu'ils rcyident les uns des autres , Q^ de ne croire pas
Dieu , dans ceux qu'il rend de luy même .<" ,
le ne demande point de raifon d J. Cditil pilleurs-C^y
s'il me fa Ho it des raifons peur me convaincre j je renonceras a
la foy .
C'efi potirq-uoy , dit- il encore , vn ne parle point d'argumens
quand il eft queflion de la foy. Au fer hinc argumenta ithi fides
quccritur , ^ que la Dialeflique fe taife doins les Ecoles. Et au
niême lieu.- Mettez^^ dit-il, A/ main furvoftre bouche. lin' e^ point
permis de fonder les divins myjhres : Manum ori admove : Scru-
tari non licet fuperna myfieria. Il cjl permis dx fc avoir que le Fils
a l'ftè engendre i mais non -pas de fcavoir commenta
11 eft: vray que faint Ambroife applique là ces principes à
d'autres myft:eres qu'à l'Euchariftie. Mais ils nous font toû.
jours voir quelle eftoit la difpofition de fon efprit , Se quelles
maximes il infpiroit aux peuples dort il avoit la conduite. Ec
ces maximes ne laiiroient pas de faire leur effet à l'égard de
l'Euchariftie, comme elles le faifoient à l'égard de l'Incarna-
tion 5c du péché originel aufquels il ne les applique pas non
plus. Mais il fe trouve de plus qu'il en ufe expreflement à
l'égard de rEucharift;ie, puifqu'il déclare qu'il ne faut point
demander l'ojdre de la nature dans le corps de J. C. & qu'on
doit croire ce que la foy enfeigne malgré l'oppofition des (ens
qui nous fait prendre TEuchariftiie pour du pain &du vin, au
lieu que la foy nous ajfurc que ce n'efi point ce que la, nature a,
forme , mais ce que la benediclion a confacré.
S Ephrem Diacre d'Edefîè a fait un trairré entier pour dé-
tourner les hommes de fonder l'abifme de la nature divine &; de
Ja génération du Verbe. Quentrepreaez^vous , dit-il dans ce
Tvxnté, homme audacieux '' La naijfance du pils unique de Dieu
cjl une mer immenfc (jr infinie. N'efi. ce donc pas un excès de
folie
^ des àijficultcz^ tirées des fens. 515
felic ^ detenicritè a vous qui rCcjtcs qu'un^-eu de poujjicre lice en~ Ch, VIIT.
fanhle , d^ pre fumer que vous ponrrcz^fbnder cet abime \
De même que la paille , dit-il encore ^ [croit incontinent con fu-
mée ^ fi elle voulait éprouver Li force du feu : Ainfi l'jjomme qui
prétend pénétrer la nature de Di eu ^c fi confumé (jr- confondu p^r cet-
te recherche qui efiun feu dévorant pour luy.
Mais il ne faut pas s'imaginer qu'il ne prefcrive cette rete-
nue qu'à l'égard de la génération du Verbe. Il l'exige exprelTé.
ment à l'égard du mylîere de l'Euchariftie. Participez^, dit- il ,
dans ce traitté même , au corps immaculé , S" aufiing du Seigneur '
avec une foy très -pleine , ^ ne doutez^point que vous ne mangicx^
l'agneau même tout entier. Car les myjlercs de Chrifi font un
feu immortel. Gardez^ vous de les fonder avec témérité , de peur
qu'en y participant vous n'en foyez^confumé.
Et la raifon qu'il en rend , eft que ce que J^ C. a fait pour
nous dans ce Sacrement ejî au-dcffus de toute admiration , de tout
efprit ., (^ de toutes paroles. C'ejl pourquoy , dit- il , je noferois en-
trer plus avant dans cefujet.^ ny vous entretenir plus lonq - temps
de ces myfteres. Et qUand je l'entre prendrai s , bien loin de les pou-
voir pénétrer , ce ne ferait que faire paroifire ma, témérité ^ mon
imprudence. Car ces faints vénérables ^ terribles myfteres jur-
fafent toutes les forces de mon efprit. J'aime donc mieux m'adref.
fer au Père éternel , ^ luy rendre grâces de ce que par fon Fils uni-
que C^ bien-aimé , d a eu pitié demoy , quelque indiine pécheur
que je fuffe j parce que je croyais en luy avec un cœur Jimple , (^
quefay toujours eu de l'éloignetnent (j;- de l' horreur pour ces curio-
fite-z^ prefomptucufcs.
Ainiî ce faint Diacre bien loin d'entretenir les peuples de
ces difficultcz du myft^c de l'Euchariftie , n'ofoit s'en entre-
tenir luy-même ^ & il établidoit en même temps leur foy fur
un principe qui anéantit tout d'un coup toutes les ditficultez,
& lesempêclie même de naiftre.
Mais il n'y a point de Saints qui ayent plus travaillé à im-
primer aux fidelles cette foùmiffionreligieufe pour lesveritez
deUfoy&cet éloignement de toute curiofité à l'égard de
nos mvfteres, que les deux Pcres de l'Eglife Grecque qui fem-
blenr choifis de Dieu pour eftre les principaux témoins de la
foy de l'Euchariftie. Je veux dire faint CbryToftome &: faint
Cyrille d'Alexandrie.
YVu
JI4 Liv. VIL Ex Amen des Argumens nega,tip ^
Le premier renferme la dilpodrion à-l'égard des myfteres de
f 'hom.^''"^" ^^ ^°y '^""^ ^^^ paroles admirables : Je rei^ois , dit il , avec fou.
de Séraphin, mijjion , ccque L' Ecriture dit , S^J^ ne m'informe point de ce quelle
taifi. Je comprends ce quelle découvre fans me mettre en pei^
ne de chercher ce qu'elle cache ipuifqu'elle ne le cache que pour m' é^
loigner de le chercher. S'iy^oixxi roi ùfïttdp'a. 4 •Tt.oXvTÇ^y/xo a ta
(;iafyyt/^jJa.,xciTaL''oci) Toi "^hnyicLKv^^Jé/rai ^' Ttifii^ya.^opi.dLi rà.<rtiyx,ÉZ<*-
Au^^ii*, J^(at Tyro y) auyx^iya.Av(pJc(.i.
Aulfine répond-il jamais d'une autre manière auxobjecftions
que les hcretiqnes tiroienc de la raifon , qu'en les méprilant,
qu'en diicinc qu'il ne les faut pas écouter, qu'en les traittanc
même des blaiphêroes.
ihToaii h. 3, Si quelqu'undemande ^ à'\t-'\\^comment il fe peut faire que le Fils
de Dieu ne foit pas moindre que fon Père qui l'a eni^endré : je ré-
ponds que ces fortes de que fiions naifjent des penfées humaines , que
ceux qui les forment en feront encore de plus ridicules ^ qu'il ne
faut pas même les écouter.
In Joan.. h.r^ J^ous demandez^^ dit il en un autre lieu , comment il fe peut
faire que cela fe trouve dans le Fils ? Qnoy ! il s'agit de Dieu ^ .
vous demandexcomment il fe peut faire ? Ne tremhlci^vous point
de l'excès de votre témérité / Si quelqu'un vous demandait , com-
ment il fe peut faire que nos corps i^ nos âmes poffedent la vie im.
mortelle i ne vous mocqueriez^ vous pas d'une telle queflion ,paice
que ce n'eji pas a l' intelligence humaine à juger de ces chofes j 7nais
qu'il les faut croire par la foy fans vouloir pénétrer, ce qui n'a he-
foin d'autres preuves que de la feule authorité de celuy qui le
fropofe ] Vous avex^ oiiy , dit il y dans le même ouvrage , qu'il y
avait une véritable lumière : Pourquoy prétendez^- vous donc ju-
ger de cette vie éternelle par la lumière de^ voftre raifon ? Pour-
quoy vous efforcez^ -vous de fonder des chofes qni n'ont point de
fond / Pourquoy tachez.^ vous de comprendre des chofes incompre-
herifihles ? Pourquoy voulez^-vous pénétrer ce qui efl impénétrable ?
Epuifez^vous en réflexions , d^ faites tous vos efforts pour décou-
vrir la produit ion des rayons d.u Soleil ? Vous n'y réiifirez^jamais
^ vous avouerez fins peine votre impuifance. Pourquoy donc
efle'.i'ov.s f prefomptucux S" fi hardis dans des chofes qui paf-
fcnt infiniîuent celle la ? Qtioy ! le Fils du tonnerre a qui Dieu
avoit donné une trompette f^iritu'elle pour annoncer fes m.jfleres „
fe tient k ce qu'il avoit appris de l' Efprit , fans vouloir aller au-
dsla i^ vous qui n'avex^ien de cette ^race ^ ^ qui ne vous ap*
^ des difficuke'x^tirées des Jens. jij
puyat^uejur de iHiferabies raifonnemens ^ vous tàchez^dc ptijfer ces Ch. VÎII.
.homes !
Ne prétendons point , dit-il encore , juz^er des chofes (divines par Hom. 15. i»
la raifon^ ny les affujctttr aux loix i^aux necc_IJiicz^de la nature. J""^"'
Recevons les avec joumi.ljîon, &• que l' Ecriture règle no ^ire créance.
'■Car ceux qui les veulent pénétrer avec curiojité , bien loin d'avancer
en connoiffunce , ne font que s'attirer de grands chktimens .
Il n'y arien de pire , ditil dans une autre homélie , qued'affu- Hom. 14.
jettir les chofes fpirituelles aux raifons humaines. C'ejî ce qui rendu
JSficodeme incapable de concevoir rien de grand j ^ l'on ne nous
donne le nom de fide lies qu afin qu'en ynèprifmt la baffe jfe des pen-
fèes humaines , nous nous élevions a la hauteur de lafoy.
C'efl: ce qui a porté ce même Père à donner de fi grandes ^^^^ ^^^
louanges à la foy , & qui luy en fait reprefenter la neccffi-
té en ces termes : il n'y a rien , mes chers frères., où nous n'ayons
iefoin de la foy. C'efi elle qui eft la mère de tous les biens , g/^ le
vray remède qui procure le falut. Sans elle pcrfonne ne f^auroit
/irriver a la connoiffance des chofes hautes : ^ ceux qui en [ont
dépourveus , reffcmblent à des gens qui ayant entrepris de pajfer
la mer fans navire , ne fontpas plutoji éloigficz^durivagc^que leurs
mains é^ leurs pieds fe laffent , ^ qu'ils font engloutis par les flots .
C'eft ainfi que ceux qui ne Lonnoijfant pas la venté parla foy , ^
prétendant la trouver par leurs raifonnemens , n'ont a. efpercr qu'un
irifte naufrage.
II ne veut donc pas , quand il s'agit des œuvres de Dieu, qu'on ibid,
en demande aucune raifon 3 & il dit que la meilleure folution'^^'^- *f;
qu'on puiffe apporter à ces difficulté^., c'efi qu' tin' eft pas au pou- ^^us Ap.
voir des hommes de les comprendre , £>-- que lafoy demande notre Hoai 17. ia
oheiffance , é' non notre curiofitè. f /• ^'^ ^°"*'
Il compare ceux qui veulent comprendre les chofes de la foy ed. adcor.
par la raifon , à ceux qui veulent prendre un fer rouge avec la Hom i.m
Wam. Hom. 1. in i.
Il dit que c'efi nnblaf^hème de vouloir juger des chofes divines Ep.adTina.
parla raifon , parce que le raifonnement humain n'a rien de commun
avec les myftefes de Dieu.
Il veut que ce foit le crime pour lequel Hymenéc& Phile-
tus furent livrez à Satan par iaint Paul , qui dit d'eux r^aw/r^-
didi Sat.zn.v ut difcant non blafphetnare.
Et dans un autre lieu il afFure que toutes les herefies font ve.
liuës , de ce qu'on a voulu Juger des myfieres par la raifon.
V V u ij
526 Liv. VÎI. Examen des oArgumens négatifs ,
Voilà les principes généraux de faine Chry(oftt)me, fur
quoy on doit remarquer qu'il eft bien vray que ce Père & lea
aunresjes ont plus fouvent appliquez au Myftcre de la Trini-
té qu'aux autres pomts de la toy , parce que ce myftere eftoit
combattu de leur temps i mais qu'il ne paroirt pas qu'on en aie
nié de même avant la naiflance de l'Arianifme.
Que , quand ils ont propofé les objedions des hérétiques j
ils les ont peu approfondies, parce que ce principe les ren-
verluit quelles qu'elles fullenc.
Qu'ils comparent (ouvent de grandes difficultez avec de
beaucoup moindres, comme la Trinité avec lapoffibilité de
la refurrcdion ; la naifTance du Verbe avec la produdion des
rayons du Soleil. Ce qui oAe tout lieu de s'étonner que les Pè-
res pour prouver le changement qui arrive dans l'Euchariftiej
allèguent quelquefois des exemples de changemens qui ne
font pas fî eftrange-ç.
On feroîten droit de conclure tout d'un coup de cette dif-
pofirion de S. Chryioftome, qu il n'a pu être fort touché des
difficultez de TEucharilliie, ni fort porté à les déveloper de-
vant des peuples qui efloient afTez préparez à les méprifer par
ces maximes i mais on a fait voir de plus qu'il exhorte les
fîdclles à n'écouter ni leur raifon ni leur fens fur ce myftere.
Croyons ^ dit il , Dieu en toutes chofes , e^" «^ ^^ contredifons point ^
quoyque ce qu il nous dit fcynhle contraire a nos pcnfées d^ à nos yeux.
Que l^authorité de fa parole foit plus forte furnous que nos yeux (^
nos penfées- Pratiquons cela à l'égard des myfleres. Ne regardons
pas feulement les chofes propofèes , mais attachons-nous à fa pa-
role. Car fa parole ne nous peut tromper j au lieu que nos fens s'a^
bufent facilement. Sa parole eft infaillible .^Q' nos fens fe trompent
fouvent : Puifque c'efl donc fa parole qui nous dit : Cccy eft mon
corps j foyons en perfuadez^j croyons, le , (^voyons le avec les yeux
de la foy. Car J. C. ne nous a rien donné de fcnfible j mais il ne
nous a donné fous des chofes fenfîble s , que des chofes qui ne s'apper-
(^oivcnt point parles fens.
},om. 4^. in II dit en un autre endroit, que ce que Dieu nous a dit., quand.
Joan. jl Yiaus a commandé de manquer fa chair dans l' Euchariftie , n'e/l
point affujetti à la neceffitéde la nature ,(^eft au deffus des loix des
chofes d'icy bas.
Ces pafTages comprennent efFedivement toutes les difficultez
"que lesMiniftresccalenc.Maisils les comprennent en la manie-
(^ des dijfimlteT^ tirées des fens. 517
re qu'il efl: inutile del^Faire envifager au peuple, c'cft-à dire, Ch. VUI.
d'une manière générale ii confufe ,c]ui ne fait peint d'imprcî-
/îon fur l'iiTiigination ,&:qui iaiffe l'efprit dans un parfait affu-
jettinèmentà la foy.Ils les comprennent en la manière que ces
mêmes principes généraux de foumiffion a la foy appliquez aux
difficultez de la Trinité, comprennent celles dont les Soci-
niens remplilîent leurs livres.
Cette conduite de S. Chryfoflome a été fuivie par S. Cvril-
le d'Alexandrie, dont lespaflages pour la prefence réelle font
tellem.ent au deflus de toute chicannerie,qu'il y a des JVî iniftres
qui ont trouvé plus court de l'abandonner , & de faire de cette
doctrine une des erreurs dont ils l'accufent.
La maxime capitale fur laquelle il établit fa foy , &: dont il fe
fert pour réfuter les objections desheretiques & des payens,c'en:
que toute curiofité doit cefîer à l'égard deschofes de la foy ]i°," 1. lo.p.
To 'Tti'tit «Sr^S'iKTo" '^ \aT!f^fy.'ftyyiT(if uvcn ^c>t. Ec c'eft 3«o.
par cette même maxime qu'il fe defFait d'une objeclioii
tres^difficile des Apollinariftes fur l'Incarnation. Que répon-
drons-nous à cela, dit \\^ Jînon qu'il n'efi pas jufie d'abandonner la DereAiM»
tradition ancienne de la foy , qui cflvenu'é des Apbtres iufquànous^ P- 'î-
ySfr des fubtilitez^de cette forte , ni de fotimcttre à une vaine curiofi-
té desjtiyfieres quifurpaffentla capacité de nos efprits. Qjfil ne faut
faf même les mettre en quefiion , ni fuivrc l'exemple de quelques
^ens^ qui fans fc foncier de leur propre péril, ont la hardieffe de déci-
der hardiment des dogmes de la foy , d"" de les approuver ou de les
rejetter comme bon leur fernble. N'cfiil pas plus raifonnable de re-
ferver à Dieu la connoiffunce de fes œuvres ^d^ de n'avoir pas l'im-
piété de reprendre les chofes qu'il a jugé devoir faire ?
Aufîi n'avoit-il point d'autre voye pour (e délivrer des dou-
tes fur les myfteres, que de s'en rapportera Dieu. Quandnous
Il entendons pa^ , dit- il , comment les œuvres de Dieu font pofiblcs ,
nous ne laijfons pax de dire a Dieu en renonçant a tout doute j Je
fcay que vous pouvezjout ^ C> qu'il n'y a rien qui vous foit im-
pojfible.
C'eft ce qu'il veut qu'on pratique à l'égard de l'Euchariflic. in jcan. p.
Et c'efV par cette raifon qu'il condamne ces Juifs qui eurent la i?^.
hardieffe de demander comment J C. leur pourroit donner fa
chair à manger : Ils eurent ^ dit- il , la hardieffe de demander ert-
core : COMMENT / comme s'ils n'euffent pas fceu que cette parole
itoit unblafph'eme. Carcejr le prcrpre de Dieu de pouvoir faire
VVuiij
52,8 Liv. Vil. Examen des cÀrgumem négatifs ^
fans peine tout ce qu'il T^eut. Mdis étant c'kà^rnels &■ animaux^ com-
me parle S. Paul , ili ne comprirent pa/Ws œuvres de l' Efprit de
Dieu. Ce niyjhreji plcinde fagcjje leur parut une folie. Ainfi pour
proiiter de la cheute des autres , nous devons en participant auÂ
7nyjhres y apporter uncfoy exempte de toute curiojitc , (^ nous bie»
carder de demander comment 'ipuifque cefi une quefiion dejuif^
(j;- qui mérite les derniers (upplices. Que Li tcmcritè de ces Juifs
nous rende donc plus prudens pournofire propre bien. Evitons .^à l'é-
q^ard de ce que Dieu fait , de dcmaridcr comment il le peut faire.
Reconnoifjons qu'il fcait bien lemoyen dt exécuter ce qu'il veut. Car
quel fujet y a-til de s'étonner que ce luy qui furpajfe fî fort notre fa~
1,^ ([<''&' notre force , fiffe des œuvres mcrveillcufes , qui. foient au.
deffus de la portée de nos efprits /
Eft-ce qu'une difcuiîîon particulière de chaque difficulté au-
roit plus fortifié les fidèles que ces principes généraux, &: l'ap-
plication que S. Cyrille en fait àrEuchariilie/ Pourquoy donc
les auroit il marquées plus diftinclemenc ? 6c pcurquoy auroit-
il appris aux fidelles à s'y arrêter ?
Cette conduite efb (î conforme à l'inftinâ; du Chriftianifme
& aux lumières du fens commun , qu'on ne doit pas s'étonner
qu'elle ait été fuivie prelque par tous ceux des Pères qui ont
parlé en gênerai de ces difficultez.
S. Gaudenceles marque &; les étouffe de la même manière,
c'efl: dire , en n'en donnant qu'une idée confufe. 6'///ry/>,dit-
il j quelqu? doute dans l'cfprit de quelqu'un , qui ne fit pas di.ffipé
far ces paroles.^ qu'il le con fume par l'ardeur de lafoy. On voit qu'il
n'exprime point en détail ces difficuItez^Sc qu'il ne les détruit
qu'en nous obligeant de les mépriler.
Hefychius en fait de même dans Ton fécond livre fur le Le-
vitique. Quandnous n'avons pas , à\t W , a jfe\de force pour many:r
le facrifice ^ le con fumer tout entier ; c' efi k dire quand la foiblejfe
de notre e(J>rit nous empêche de comprendre que les chofcsquilvoit.^
font le corps du Sei'zyicur , lequel les .Anges défirent de contempler ., il
ne fautfe lai fer aller à ces doutes 5 mais il les faut jetter dans le feit
du S. Ejprit , afin que ce feu confume é" digère ce que notre foibleffe
nous rend incapables de digérer » Mats de quelle manière les pourra-
t-ilconfumer ? Si mus penfons que ces chofes qui nous par oijfient
impojjibles , font poffîhles à la vertu du S. Efprit.
C'efl tout ce qu'il auroit pu dire quand ces difHcultez auroient
été exprimées plus en détail. Cette raifon fufîit feule pour les
^ des dijf imitez, tirées des /ens. 519
Ji{î)per,& aucune ne luffic (ans celle là.Et ainfi c'eft avecgrande C"- ^'^*
raifon que ces Pères n'ont pas voulu aller plus avant, & qu'inf-
pirant aux peuples autant qu ils pouvoicnt le mépris à la rai-
ion humaine, 6c l'attache inébranlable de la foy, ils n'ont pas
crû qu'il hit utile de s'enfoncer davantage dans l'examen de
ce que les mvfteres ont d'incomprehendble, de peur qu'ayant
donné trop de liberté a l'elprit humain, il ne leur tût plus potli-
ble de le retenir dans les bornes de la foy.
CHAPITRE IX.
Que les Pères ont quelquefois marqué les véritables difficv.ltex^ de
L' Eu char 1 fil e i^mais qu'ils rC ont JAmais parlé des f retendues wer-
veiUes que les Cdlviniftes y trouvent. ,
M
Claude ne prétend pas tout à fair que les Pères
i. rép.p. i}7,
n'ayenc jamais parlé des merveilles de l'Euchariftie, '
& ce n'eft pas en cela que confifle precifément nôtre diffe
rend. Il demeure d'accord en gênerai qu'ils y remarquent des
difficultei Se des merveilles. //)'^«,dic il, dans le Sacrement
fans prefence réelle S^ fans converjion de fubfiance des mcrveiL
les (^ des incomprclyenfibilitez^.^ c'efl a. dire des chofes au dcjjus de
tordre de la nature qui dépendent de la fuiffance fouveniinc de
Dieu, ^ fur le [que lie s il ne faut pas confulter les fcns , ny fui^
vre les penfées ordinaires de la raifon , mais croire à. la parole de
Dieu. Les Pères les ont exaltées , ^ nous les exaltons avec eux.
2/rais ce ne font pas les merveilles delà tranjfubfiantiation. C'eft
fiir ce fondement qu'il accufe l'Auteur de la Perpétuité, de
donner le change félon fon adreffe , & celle de ceux de fon party , qui
lorfquon leur demande une chofe , en proàuifent une autre , Q' fub-
fiituent ce qui nefi pas en qnefiion a la place de ce qui y cft.^ i^ quils
ne pouvcnt -montrer.
Puifque l'on convient donc de part & d'autre que les Pères
exaltent., comme dit M. Claude , quelques merveilles de
l'Euchariftie, & qu'ils y remarquent quelques difficultez, il
c'eft plus queftion que de voir (\ ce font les difficultez & les
merveilles reconnues par les Calviniftes,ou fi ce font celles
qui naiftent de l'opinion des Catholiques.
C'eft la queftion i mais avant que M. Claude ait droit de j|a=
530 Liv. VII. Examen des Argumens négatifs y
décider en fa faveur , il a des ciiofes à faire qu'il nous per-
mettra de luy marquer.
Il prétend que ce font les merveilles Calviniftes que les Pè-
res ont ^x^///^m. Il faut donc voir quelles elles font. Or quelles
font ces merveilles Calviniftes?
C'eft félon luy que la chair de J. C. abfente communique fà
vertu au pain. Car c'eft-là l'opinion qu'il attribue auxPercs.
C'eft, comme parle Calvin, que J. C. abfent & feparé de nous,
nous nourrit delà fubftancemême de fa chair. Il doit donc
nous faire voir que c'eft là ce que les Pères ont reprefenté
comme incomprehenfible, comme contraire à la raifon Seaux
fens. Mais comment le feroient ils, paifque jufqu'icy aucun
Miniftre n'a feulement ofé le tenter ? Ils nous diient bien en
gênerai que ce font là les difficultezqueles Pcres remarquent
dans l'Euchariftie. Mais de produire aucun pallage qui le prou-
ve, ils ne l'entreprennent feulement pas.
M. Claude eft donc réduit à appliquer fans fondement ôc
fans raifon ce que les Pères ont dit en gênerai des diiïîcultez ,
& des merveilles de l'Euchariftie à celles qu'il y trouve félon
fon opinion. Mais pourquov les Catholiques n'appliqueront-
ils pas auffi ces difcours généraux des Pères aux difficultez qui
nailTent de la prefence réelle Scde .la tranlfubftantiation .<" Ec
s'il nous demande pourquoy les Pères n'ont point particulari-
fé celles-cy , nous le prierons à nôtre tour de nous apprendre
pourquoy ils n'ont point particularifé les fiennes.
Le voila donc au moins dans le même embarrasoù il croie
nous avoir mis. Mais il eft aifé de montrer que le (ien eft beau-
coup plus grand. Car quand les Pères parlent de ces difficul-
tez , s'ils n'expriment pas en particulier les fiitesPhilofophi-
ques de la prefence réelle, ils expriment au moins la fubftance
du myfterc d'où ces difficulté! nailfent. .Spr^/^r:;^, dit S.Cyrille
Citccli. 4. de Jerulalem , que le pain apparent ri eft pas du pain j quoyque le
qoùt fente que c'eft dupain.
\ s dcTrin. J l ne faut point douter ^ dit faint Hilaire, de la vérité de la
myft, chair Qr du fan?^ de yf. C. puifque les paroles du Seiqneur ô^ nôtre
foy nous ajjurcnt que c'eft vrayement de la chair (^ vrayemcnt du.
P.articipci. au corps immaculé d^ au fanq^ du Scipicur^ dit faint
DenatuLiDci ppi^ij-^fy, ^-j,,^^ ji„g f^y parfaite, é- dans l'affurancc que vous
cunosc non t ' _-'-''' / 7 ; r
fcrut. mange7y_^ layicau même tout entier. Car les myfteres ae J. C. font
un feu
t^ des difficulté'^ tirées des fens. 519
un feu immortel. Gardez^ votis de les fonder avec témérité. Ch. IX.
le vois une aife chofe . dit S. Ambroifs^ , comment m'affurez- ■^'"''- demi-
votis que fc reçois Le corps de j. C.
Quand nojhe efprit , die Hefychius , manque de vigueur pour j ^ mLevit
comprendre que les chofes qu'il voit font le corps du Seigneur , ^c.
Il eft clair que toutes ces expreffions marquent littéralement
Ja prefence réelle, Se qu'ainfi elles nous portent , quoique con-
fnfément , aux difficultez qu'elles produifent. Mais elles ne
nous portent, ni parieur fignification fimple , ni par aucune li-
gnification métaphorique qu'on y puifîè raifonnablement don-
ner , à concevoir une vertu feparëe imprimée au pain par la
chair de J. C. ni que le corps de J. C. du haut du Ciel nous
nourrilTe de la fubftance. Et ainfi ces prétendues merveilles que les
Pères ont exaltées , félon M.Claude , ne fe trouvent ni diflin-
éVemenc marquées par les Pères ^ ni même confufémenr.
Quand il ieroit vray que ces partages pourroient cflre rap-
portez à la vertu feparée, l'argument que M. Claude a tiré de
ce que les Pères ne parlent point des difficultez de la prefence
réelle n'en feroit pas moins renverfé. Car afin que cet argu-
ment ait quelque force, il faut qu'il foit certain quecespalfa-
ges ne s'entendent point de là prefence réelle. Or ce n'eft pas
le montrer^que de dire firnplement qu'ils peuvent s'entendre erï
un autre fens, fi l'on ne montre de plus qu'ils s'entendent ne-
cefiTairement en un antre fens. Cependant c'eft ce que M. Clau-»
de ne fe met jamais en devoir de prouver. Il croit que c'eft allez
dédire fur tous les palîages qu'on luy allègue, qu'il ypeutdon-»-
ner un autre fens ; & il s'en tient quitte pour cela.
Mais il s'enfuit de làmanifcftcmeat que la preuvequ'il veutr
tirer du filence. des Pères, fur ces diffi;i|jÉ||z eft un pur io^
phifme.
Car cet argument fîippofe qu'il eft .certain que les Pères ne
parlentpoint des difficultez de la prefence réelle;^ M, Claude
dans {ç^s réponfes fe. contente de foûtenir qu'il n'eft pas certain
qu'ils en parlent J ce qui eft bien différent. La première proposi-
tion peut donner lieu à un argument qui a quelque couleur.
Mais la féconde dans laquelle M. Claude fe retranche , ne luy
fournit aucune objection qui mérite à peine ce nom.
Dequoy fert donc à M. Claude, quand on luy allègue ce paf-
fage de faint Grégoire de NyfTe : Jlfaut confiderer comment tlcjî ^f^^- Catecî»
ppflibUqtis cet unique. corps qui eft fans ccffe divifc à. tant de mil. '^''
XXx
530 L IV. VIL Examendes Argumens négatifs ^
tiers de fidetes par toute la terre ^ (oit tout entier e}i chacun d'eu>e
par la partie qu^ils en reçoivent , O" demeure neanruoms entier en
Çvy A qiioy , liiy (ert , dis je , de prétendre que ce palfagepeuc
fignifier (eulemenc que le corps de J. C. demeurant entier en
foi même^fa vertu efl: communiquée à tous les fidelles qui par-
ticipent à la famte Table par la partie du Sacrement que cha-
cun d'eux reçoit , chacun le prenant en la plénitude de Ton mé-
rite ? Et de là. 7iatfi cette merveille , dit il , qui furprend d'abordla.
rai fan qu'il eji divifé k tant de perfonnes , (^ que pourtant chacune
d'elles le pojfede tout entier.
Je n'examine pas encore ce fens i mais je foûtiens que M'
Claude ne difant pas un feul mot pour montrer que c'eft le
véritable fens , il ne peut tout au plus le propofer que comme
probable. Or ne le propofer que de cette forte, c'eft ne riea
faire du tout. Car quand il nous viendra dire enfuite que les
Pères ne parlent point des diliîcultcz de l'Euchariftie, on n'au-
ra qu'à luy demander de quel droit il parle ainfi,puifque tout
ce qui s'enfuit de fes réponfes , c'eft qu'il n'eft pas certain que
les Pères parlent de ces diflicultez3&: qu'il n'a pas même en-
trepris de prouver qu'il foit certain qu'ils n'en parlent point,
quoique ce foit le fondement de fon obje£lion. J'ay bien voulu
marquer en paffant ce défaut de M. Claude, parce qu'il eft
très- ordinaire dans fes écrits , & dans ceux des autres Mi-
niftres.
Mais je n'en veux pas demeurer là. Et puifque l'occafion
s'en prefente , ileft bon de faire reflexion fur cette étrange ma-
nière d'expliquer ce paifage de S. Grégoire de NyfTe, qui eft:
très propre à nous faire connoiftre comment les Miniftresfe
jouent des Peresi|fcfcy^a^ conjiderer , dit celui-ci , comment il efl
pcffible que cet uwqUê corps (oit divifé a tant de milliers d'homines ,
^ qu'il foit néanmoins tout entier en chacun d'eux. Cela veut
dire , dit M. Claude , que chacun reçoit toute la plénitude du
mérite de J. C.&: que le corps dej. C. demeure néanmoins en-
tier en foy.
Voilà toute la merveille que (Iiint Grégoire remarque dans
l'Euchariftie , félon M. Claude. Plaifante merveille qui ne
fçanroit furprendre quedes infenfez. Car peut-il tomber dans
la penfée de ceux qui ne le font pas , que de ce que chacun re-
ijoitla plénitude du mérite de j.C. le corps de J. C. doive erre
divifé ? N'eft-ce pas au contraire une conlequence neceflai-
(^ des diffctiltCT^ùries des fens. 531
re de ce qu'on ne rea.ic que cette plénitude dn merire de J. C. Ch. IX.
que fon corps demeure donc entier ? Où eft donc la queftion ?
où eft la m.;rveille ? S. Grégoire reprefente cette divifion du
corpi de J. C. comme contraire en apparence à l'intégrité de
fon corps. Et M. Claude entend ce pafTàge d'une fimple parti-
cipation au mente de ]. C. de laquelle s'enfuit Tmiegrité de
ce corps , &; qu'on ne fçsuroit regarder fans folie comme con-
traire n. cette integnre.
Que fi l'on prend la peine de joindre à cette queftion ainfî
expliquée , les réponfes de S. Grégoire, on verra que M. Clau-
de porte l'extravagance qu'il attribue aux Pères au delà de
toutes bornes.
S. Grégoire de NyflCjfelon M. Claude, demande comment
il eftpollible que tant de milliers d'hommes participans à la
plénitude du mérite de J. C. par rEucharifiie., le corps de j. C.
ne lailfe pas de demeurer entier. Et la répor.fe àçce Père, eft
que cela ^}:nvQ^p.irce que l.imème vertu qui faifoitd.ms le eorps
de J. C que le pain qu'il manzecit c(}oit changé en la nature de fon
corps ,fait la même chofe dans l'Eucharifiie.
Il y auroit tant d'extrayagance dans cette rcponfe, fi la quef-
tion eftoit teilequeM Claudf le voudroitperfuaderjque l'on ne
f(jauroit l'attribuer à S. Grégoire de Nyfle,fans vouloir qu'il
n'euft pas de fens commun^ Cependant M. Claude nous débite
cela froidement comme la chofe du monde la plus claire 6c la
plus plauilble 5 &;il déci-ieen un mot que la merveille que S.
Grégoire deNyffetouchejC'eft que la participation au mérite
de J. C. ne caufe aucune divifîonà fon corps-, comme fi ce fens
efloit fi clair qu'il n'euft pas befoin de preuves.
Mais comme cette manière de répondre n'eft propre qu'à
des gens qui ne fe foucient ni de la vérité ni même du juge-
ment des perfonnes fages , elle ne fçauroit donner d'atreinte à
l'évidence de cette preuve ; & nous avons toujours droit de
conclure, que comme lareferve que les Anciensont cru devoir
garder religieufement en traitant de l'Eucharifiie devant les
Payens n'a point empêché S. Juflin d'en parler clairement
danslafeconde Apologie adrefr:;e à Marc Aurele & à fon frè-
re ; de même aufïî , quoique l'efprit gênerai des Pères ait cflc
de ne propofer que d'une manière confufe les difficulrez ^es
myfleres qui n'efloient pas combattus , S. Grégoire de Nyfîê
néanmoins n'a paslaiffe de propofer diflinclement par ce paf^
X X X ij
^32- Liv. VII. S xnmen des ^Argumens négatifs ^
iage la principale difficulté de l'Euchariftie, De lorte qu'il
n'eft point vray abfolument, comme les Calviniftesle préten-
dent, que ces difficultezn'ayenc jamais efté marquées par au-
cun des Pères.
Cette même difficulté n'a pas feulement eftépropofée paT
S. Grégoire; elle l'a encore eîté par d'autresPeres , non com-
me une difficulté, mais comme une fuite neceflaire dumyftere.
£. perp.i. 5. C'efl: ce que nous avons fait voir dans un chapitre exprés du
C.5, p- f4i- fécond tome de cet ouvrage , où nous avons montré que les
Pères ontêxpreflcment enleigné qu'on divife les lignes fansdi-
vifer le corps de J. C. & que chaque fidelle le re(^oit tout en-
tier, quelque partie de ces fignes qu'il reçoive.
On y cite entr'autresces paroles des Liturgies de S.Jacques,
de S. Baille & de S. Chryfoftome, L'Agneau de Dieu & le
Fils du Père cfi divifè fans divtfion ^ il-efi coupe en parties fans
feparation de fes parties ; /'/ ejl toujours m.in'gè (j;- Tamais confumè.
Et nous ajouterons ici , pour m irquer la foy de l'Eglife d'Oc-
cident, ces paroles d'une préface qui fe lifoit, dit Guitmond,
prefque dans toute l'Eglife Latine. Cette hofiie qui vozi^ eji of-
ferte par pluficurs , cfi faite le corps unique de J. C. parl'infu-
Jîon du S, Efprit. Chaque fidelle reçoit noflre Seigneur J. C. Il efi
tout entier en toutes les portions de l'Hcftte. lin efi point diminué
four efirc communiqué à plufeurs , mais il fe trouve tout entier en
tous. SiNGULr accipiunt Chriflum Doînimim ^ ^infinyilisportio-
nihus tôt us efi , nec perfingulos minuitur ., fed integrum Je prabet in
finyilis.
S. Chryfoftome remarque de même expreflement l'unité
Homil. i7-m du corpsde J. c. en plufieurs lieux. Y a t'il plu(teurs Chrifis.,
Epift. ad dit- il , parce qu'il efi offert en plufieurs lieux} Nullement , car il
r^y a qu'un J. C. qui efi tout entier icy., ^ tout entier. Ik .^^ un me-
wc corps.
Il remarque qu'il efi; dans le ciel & fur la terre. O miracle^
dit- il ! O bonté de Tiieu / Celuy qui efi là haut avec fin Pcre ..^ nous
l'afuons tous entre nos mains.
Ne fonc-ce pas là des merveilles de TEuchariftie ? Et n'ont-
elles pas efté exprelfement propofées &; marquées par ces
Pères ?
Ainfi pour réduire en abrégé ce que nous avons lieu de con-
clure de l'examen de cet argument des Minières, il eft clair
que le fîlencedes Pères fur les difficultés de l'Euchariftie , ne
& des difficulté^, tirées des fens. j ^^
:j)eut avoir de force que contre les Calviniftes , puifqu'ils ne
içauroienc faire voir que les Pères ayenc parlé ni en gênerai ni
en particulier , ni diftinclement , ni confufëment des préten-
dues merveilles qui naiflent de leur dodrine ou de celle qu'ils
attribuent aux Pères. Et il efl: clair au contraire qu'il n'y a rien
plus vain que l'argument que M. Claude prétend tirer du fiien-
ce des mêmes Pères lur les difficultezde la prefence réelle &:
de la tranlîubftantiation.
1. Parce quil n'eft pas vray abfolument qu'ils n'en ayent
parlé,
2. Parce que leur efpritêc leurs miximes les ont dû porter à
n'en parler pour l'ordinaire que confufément.
3. Parce que les paflages où ils marquent en. gênerai lesdiffi-
cultcz de l'Euchariftie ne le peuvent entendre raifonnable-
ment que de la prefence réelle 5 & ainfis'ils ne marquent pas
diftinctement toutes les difîicultez particulières, ils marquent
au moins le principe qui les contient & qui y conduit.
CHAPITRE X.
Rèponfe a ce que dit M. Claude , que les Pères ont eflabli des
principes de Philofophie contraires au x ynerveillcs que les
Catholiques rcconnoijfent dans l'Eucharifie.
M. Claude , pour fortifier fi preuve tirée du filence àss
Pères fur les difficultez de l'Euchanilie, ajoute qu'ils
ont propofé des ynaximes contraires aux miracles qui s'y trouvent
félon nozi-s , & cela d'abord paroifl avoir plus d'apparence.
Il ne faut néanmoins que faire un peu de reflexion fur la
rature de l'eiprit humain &: (ur la manière dont il agit ordi-
nairement pour reconnoiftre l'inutilité de cette remarque ^ êc
que comme le profond refpect qu'ils avoient pour les myfteres
les a dû porter à ce filence , ce filence auffi les a portez natu-
rellement à parler des chofes de la nature lans aucun égard à
cesdifficultez^ni auxmyfteres qui lesproduifent.
Car en parlant peu de ces diftîcultez, 6i;ne les regardant
jamais que confufément, ils y ont peu penfé, &en y penfant
peu ,ils les ont eu peu prefentes à l'efprit. Il y en a même
quelques unes aufquelles ils ont pu ne faire aucune reflexion ,
X Xx iij
534 Liv.VIÎ. Examen des a^rgumens négatifs ,
parce , comme nous avons remarque ailleurs , qu'us n'ont pas
conçu les myfterespar des idées philofophiques , mais par les
idées communes 6c populaires. Ils onc crû qu'après la confe-
cration le pain eftoit véritablement changé au corps de J. C.
qu'ainfi ce que l'on recevoit n'efloitpas du pain, quoiqu'il
parLifl pain , mais le corps même de J. C. Mais il n'efl: pas
necefTiire qu'ils ayent porté leur curiofité jufqu'à vouloir con-
noiftre quelle cftoic la nature de ces apparences de pain , que
la foy leur apprenoit n'eftre pas du pain. Il (uffit qu'ils ayenc
cru en gênerai que J. C. leur donnoitfon corps fous la forme
du pain fans qu'il tuft du pain, & que ce qui paroifloit pain
n'eftoit pas du pain , eftant changé réellement au corps dé
Jésus- Christ.
li n'cft pas même necelîlure pour la créance de ce myftere
qa'ils fe (oient formez dogmacqiiemcnt ces maximes fpecula-
tives, que Dieu peut faire qu'un même corps foit en divers
lieux ,& que les jjarties d'un corps fe pénètrent. Carquoiqu'en
expliquant philofophiquement ce myftere la raifon ne voye
pas comment on en peut feparer ces luites,lafoy néanmoins ne
les regarde pas neceflairement. Elle s'attache uniquementà la
revelnc(on divine. Elle croit fans hcfiter que le corps de J. C.
eft réellement prerent_,& que le pain & le vin ne hibfiftent plus ,
parce qn'ils font devenus ce corps & ce fang 5 mais elle ne va
pas plus loin,&: elle laifle à Dieu à exécuter par les voyes qui
ne font connues que de luy ce qu'il luy a plu de nous révéler
fans fe mettre en peine fî ces voyes s'accordent , ou ne s'ac-
cordent pas avec les principes de noftre rai/on , èc fans décider
fi c'eft que ces principes ne foient pas abfolument vrais , ou Ci
c'eft que Dieu a des moyens inronnus aux hommes pour opé-
rer ces myfteres fans choquer nos principes.
En un mot la foy range les myftcres dans un ordre à part,
qu'elle tire de la jurifdiciion des raifonnemens humains &des
vues humaines , au nombre defquelles elle mec ces difficultez.
Comme les Pères en eftoienr donc peu occupez, & qu'ils
ne les regardoient que fort confufément , il efbfrcsnaturet
qu'ils n'y ayent eii aucun égard dans les raifonnemens qu'ils
ont fait lur la nature des corps 5 & qu'alors ils ayent parlé
felon les feules lumières de la raifon , &i fclon le cours ordi-
naire des chofes du monde. Car pourquoy voudroit-on qu'il?
n'eufïént jamais parlé des chofes naturelles en Philofophes fans
6f des difficulté^ tirées de s fins. 5 5 y
faire en même temps leurs protellations qu'ils ne prétendoienc Ch. X.
pas que ce qu'ils auroient dit tuft vray dans un autre ordre que
ce!uy de la nature? C'eftbien malconnoiftrc i'erpricdes hom-
mes que de les vouloir airujetcir à cette exactitude , &: c'efl:
avoir tait bien peu dereHexion fur la manière dont ils parlent.
Car dans les chofes mêmes qu'ils ont Je plus fouvent dans
refprit^ ne leur eft-il pas ordinaire d'avancer des propofitions
qui paroiirent générales dans les termes, & qui reçoivent néan-
moins diverles exceptions en d'autres matières ? Il leur fuffic
qu'elles foient vrayes ordinairement , & qu'elles le foient en
particulier dans lesfiijetsaufquelsils les appliquent : mais ils ne
ïe croyent point obligez d'examiner fur chaque maxime, s'il
n'y auroit point quelque rencontre extraordinaire où elle ne
ieroit pas véritable.
Combien ont ils eu plus de liberté d'agir dé la forte à l'é-
gard des propofitions univerfellement vrayes dans tout l'ordre
de la nature, &: qui ne pouvoient recevoir d'exceptions que
dans un autre ordre qui eft naturellement excepté de tous les
difcours des hommes, &: qu'ils ne prétendent jamais affujettir
à leurs raifonnemens Se à leurs maximes.
AufTi n'eft-ce point à l'égard du feul myftere del'Euchari-
ftie qu'ils en ontainfî ufé. C'eft à l'égard de tous ceux qui font
au defTus de noftre raifon. Combien trouve-t'on,par exemple,
dans les Pères de propofitions générales à l'égard des péchez ,
qu'ils auroient exprimées d'une autre forte , s'ils avoient eu
€n vilë le péché originel ?
Quand , par exemple , faint Juflin & plufieurs antres Pères
ont établi cette maxime , que le péché ne confïfte que tLms une ^^°^- '•*^-'
eleclion libre , (j^- que fans cette èlcciion l'honnne ne fcuuroit ejlre
coupable , n'auroient ils pas pris quelque précaution pour cm-
pcxher qu'on ne puflabuler de ce principe, fi le péché origi-
nel leur fuft venu dans l'efprit? Et de même quand S. Augu-
ftin dit , que le pechè eft tellement un mal volontaire , qu'il ncef.
roit pas pechè , s'il neftoit volontaire j s'il avoir penfé à l'avanta-
ge que les Pelagiens en prirent depuis, auroiril manqué Je
limit r cette propofition aux péchez acluels &: propres , &
d'en excepter le péché originel , comme il .^'efl crû obligé de
faire en répondant à Julien ? Hoc reBè dicitur, diril ^propter au't. cont.
fopritm cujujque peccatum y non propter peccati oriynulis cou- Juiian. !. 7.
tayurn. ^' '•
J35 LiV. VII. Examen des Argwmens nega,tifs.
Il auroit au moins marqué que la volonté neceffaire pour le:
péché n'eft pas toujours la volonté propre ; & qu'il fuffit à l'é-
gard du péché originel , qu'il ait efté commis par une volonté
libre , quoique ceux qui le contractent ne foient pas libres de.
ne le point contracter , comme il l'explique en divers autres,
lieux de Tes ouvrages.
Mais quoique S. Auguftin ait remédié par ces explications a:
l'abus que les Pelagiens faifoient de cette maxime, il eft vifL
ble néanmoins qu'il euft évité d'y donner lieu , s'il euft eit.
le péché originel en vue dans les endroits où il l'avance. Ce.
font des propofitions générales qii'on forme fur la vue des.
actions des hommes qui ne font péchez qu'eftant volontaires,,
& fur l'équité qui y paroUL Et l'on ne prend pas garde alors,
qu'elles reçoivent une fort grande exception j&: qu'il y a une
très grande différence de les appliquer aux enfans ou aux
adultes.
Combien forme t'on de même d'argumens fur des princi-
pes qui fe trouvent faux dans le myftere de la Trinité ?La pld-
part desjugemens que nous portons de l'unité ou delà diÎHn-
dion numérique des objets de nos penfees ne font-ils pas ap-
puyez fur ces maximes .• Qu^ funt eadem tmi tertio ^funt sadem
inter fe. Qu,euni tertio non funt eadem., non funt eadem inter fe. Ce-
pendant les Minières voudroient ils prétendre que ceux qui.
fe fervent de ces axiomes fans diftindion, ou qui les fuppofenc.
dans leurs raifonneraens^ ne croyent pas le myftere delaTji-r-
nité ?
Ne voit- on pas aufli que ces maximes générales fur k nature-
dés corps n'empêchent pas ceux qui les établirent le plus pre-
cifément , de reconnoiftre en d'autres lieux que Dieu en peut,
dï-rpenf-^r 5 &: que ce qui paroift: impolïïble félon ces maximes,
ne l'eft; point à la Toute- puiilance ?
Saint Auguftinj parexemple,eft un de ceiixqui foûtiennent:
le plus formellement qu'il n'efl pas poflîble qu'un corps pénétré,
un autre corps. Et cependant il reconnoift en un grand nom-
bre de lieux que par la puiffance infinie de Dieu, des corps ont
paffé au travers d'autres corps, fans avoir jamais recours à ces
iobti-litez Philofophiques par lefquelles le^ Miniftres tâchent
d'expliquer ces fortes de miracles. C'efl: pourquoy ayant rap-
porté dans le livre de la Cité de Dieu un miracle qui ie fit dans,
l'Oratoire de faint Eftienne, ou l'on vit un anneau fortir d'un.
cordon
(^ des difïciihez. tirées des fe fis. ^37
cordon de cheveux dans lequel ileftoic palîë , fans aucune rup- C h. X.
ture de ce cordon , il Te contente d'ajouter que ce miracle pa-
roiftra incroyable à ceux qui ne croyenc pas que J. C. foitné
fansfaire tort à la virginité de. fa mère, 6c qu'il foit entré dans
le lieuoùelloient res'dilciples , lansque les portes en fuITenc
ouvertes. Mais il ne s'amufe pas à chercher des voyes Philofo,
phiques pour expliquer ces miracles , & ilparoift qu'il n'en
avoit point d'autre idée que celle que les paroles impriment
naturellement, qui eft que le corps de J. C. paila au travers de
ces portes qui eftuient fermées ^ & que ctz anneau eftoit forti
de ce cordon de cheveux fans le rompre 5 ce qui enferme l'idée
naturelle de la pénétration.
Il eftfî vray que l'on peut avancer ces fortes depropofitions
générales , fans croire qu'elles mettent des bornes à la Toute-
puiiTance de Dieu , qu'Aubertin en cite luy-même de deux
Auteurs qu'il appelle fes adverfaires. Car l'un qui eflGuitmonc
dit auiïî fortement qu'il fepeut qu'on ne fcauroit concevoir qii un
corps fenêtre un autre corps. Ouomodo enim in folido corporc panis ,
alterum corpus latere po.ffit , videri non potuit. Cependant on ne
fçanroit raifonnablement douter que cet Evêque n'ait crû la
pénétration poifibiepar lapuilfance deDieu,puifqu'il veut que
toutes ces propofitions , par lefquelles on dit que quelque cho-
fe ne fe peut faire , enferment toujours cette e>'ception,y^ J)/V«
ne le veut ^ & que de ne l'y pas ajouter, ce foit mettre en doute
la Toute-puiflance de Dieu : Si prêter exceptionem ajjcrunt id
naturam non pojfe pati , etiatn fî Deus velit ;^ ?ion ery) credunt
quia omnia quacumque voluit Dominus fecit.
L'autre qui eft un Auteur qu'Aubertin appelle Francifcus
Georgius , nie formellement qu'un corps puifle en mcmeteinps
eftreen plufieurs lieux. Cependant il c'eft un Catholique, com-
me Aubertin le fuppofe , il eft bien certain qu'en parlant ainfi ,
il n'a eu égard qu'aux vues communes de laraifon , qui expri-
me les chofes félon qu'elle les conçoit, fans prétendre par là
borner la puiifance de Dieu , ni foùtenir qu'il ne puifie faire ce
qui nous paroift impoffible.
Auffi voit-on que les Auteurs qui ont marqué la vérité de la
prefence réelle & de la tranlTubftantiation de la maniere.la plus
claire £<: la plus indubitable, & qui font même abandonnez fur
ces dogmes par les Miniftres un peu finceres, ne laillent pas ~
Y Y y
J38 L IV. VII. Examen des Argumens négatifs,
d'avancer ces principes de Philoibphie donc lesMmiftresabu-
fent.
On ne pourroit raifonnablement douter du fentiment de
S.Jean de Damas fur la prefence réelle , quand il ne l'auroit
déclaré que par ce paffage qu'on en a déjà cité- Zes Anges ,
dic-il, ne font f as rendus -participans de la nature divine ^ mais
feulement de fon opération ^ de fes grâces 3 mais les hommes en font
rendus participans , lorfqu^ils rei^oivent le faint corps de J. C. &
qu'ils boivent fon précieux fang. Car ce corps efi uni hypoflatique-
ment a la Divinité > (^ il y a deux natures dans le corps de J. C.
que nous recevons , qui font unies hypoflatiqucment (^ infeparable-
ment^ ér nous fommcs rendus participans de ces deux natures , dît
corps corporcllement , (^ de la divinité fpiritue tiennent j ou pliitofl
de l'une tc^- de l'autre fc Ion l'ame S^ félon le corps : non pas que nous
y foyons unis hypofiatiquement , car nous fubftftons en nous-mêmes
avant que d'y eftre unis ^ mais par le mélange qui fe fait du corps de
J. C. aux nojîres.
Auffi M. Claude n'a pas mêmeofc eirayerd'obfcurcir la clar-
té de ces paroles, quoiqu'on fçache ce qu'il fçait faire , quand
il ne s'agit que d'éluder les palîages. Cependant Aubertin ne
laifTe pas de rapporter plufieurs lieux de cet Auteur, où il éta-
blit de ces fortes de principes philofophiques, commequ'il ef
de la nature des corps ^non feulement d' eftre cnfcnncz^dcins un lieu ^
mais aujji d'avoir une furface bornée , ce qu'il appelle circonfcri-
ption.
On en peut dire autant de Nicephore Patriarche de Con-
ftantinople. Car ayant vécu après le /econd Concile de Nicée,
oùlefens de figure, que les Calviniftes donnent à ces paroles.
Ceci efi mon corps ^ïwx. rejette 3 & l'ayant luy-même condamné,
en le prenant pour une figure exclufive de la realité , il ne peut
eftre foupçonné avec la moindre apparence de n'avoir pas crû
la prefence réelle. Et quand il le feroic, il fuffit,pour diiîîper
ce foupçon, d'en alléguer icy unpaflage qu'on en a cité ailleurs.
Car il y enfeigne formellement que laraifon par laquelle on ne
peut pas dire que l'Euchariftie foit l'image du corps de J. C.
c'efl: que fi cela eftoit , il y auroit diftindlion de nombre entre
l'Euchariftie & le corps de J. C. ce qui n'eft pas, c'eft-à dire
qu'il veut que l'Euchariftie & le corps naturel de J. C. foient le
même corps en nombre.
Comment, dit-il, cet îconoclafte peut-il accorder que ce foit
Çîf des difficulté 't;^ tirées des/ens. 539
tout enfcmble ^ l'image de J. C. & le corps de J, C? Carce"CH.X.
qui efl- image d'une chofe , n'en fçauroit eftre le corps ^ ôc au " DeChe-
contraire ce qui efl le corps ne fçauroic eftre l'image. Car tou- " ^^ ' '' ^*
te image eft autre que la chofe dont elle eft image. Ileft vray"
que l'Ecriture appelle le Fils l'image du Père. Mais s'il n'en eft ''
pas diftingué par fa nature , il l'eft au moins par fon hypoftafe "
&par fa perfonne. Si donc le faint corps que nous recevons "
dans la communion eft l'image de J. C. on dit par là qu'il eft "
diftingué du corps de J. C. Que fi l'on dit que cen'eftpas une"
autre chofè que J. C. mais que c'eft une partie de fon corps , "^
nous diviferons donc ce corps en deux ^ôc il faudra dire que"
J. C. a une infinité de corps. *'
Aubertin néanmoins rapporte aufiî despafi!ages de cet Au-
teur, qui contiennent de ces fortes de principes, comme par
exemple» que les Anges ne fcauroient efirc ,ni opérer en plujieurs
lieux , e> que cela n'appartient qu'à Dieu ftul. Que l'homme efi toit^
jours da?is le temps , toujours en un feu l lieu ^ f^ dans un efpacc
ho rné.
On voit donc évidemment que quand ces Auteurs décri-
vent les proprietez de la nature corporelle , ils ne prétendent
marquer que celles qui luy conviennent par fon eftre propre,
&non celles où elle peut eftre élevée parla Toute-puifi!ance de
Dieu,6c quien effet font plûtoft des fuites de la nature de Dieu,
que de celle des corps. Ils expriment ce que nous connoiftbns de
la matière , ôc ce qu'elle pofl"ede par les principes de (on eftre.
Mais ils n'ont pas defttin par là de mettre des bornes à la pui(-
fance de Dieu , ni de définir precifément ce qu'elle peut opé-
rer par fes créatures. Et enfin on voit par une expérience fenfi-
ble que ces principes de Phyfique peuvent fubfifterdans un
même efprit avec la créance de la prefence réelle & de la tranl-
fubftantiation,foit que ces Auteurs les ayentexprefi^émentref-
traints à l'ordre de la nature , foit qu'ils n'ayent pas fait une re-
flexion expreffe fur la contrariété de ces principes avec ce qu'ils
croyoient de l'Euchariftie , foit que pour allier enfemble &: ces
principes bc cette créance , ils fe foient formez une manière de
nuage ,par laquelle on allie fouvent deschofes qui paroiffent
contraires , en fuppofant que Dieu f(^ait bien faire fubfifter la
vérité de (qs myfteres avec ces principes naturels , s'ils font ve-
litables, quoique nous n'envoyions pas l'accord & l'union.
Y Y y ij
540 Liv. VII. Ex Mien des Argumens négatifs^
CHAPITRE XI.
Que la Dochine de l'Eglife fur l'Eucharifiie n'cfi potJit contraire
au ièmoiqriay: des Jens , ni à ce que les Pères en ont dit.
N pourroic rapporter aux difficulcez naturelles & aux
principes de Phylîque que ces Pères ont établis fans fon-
ger s'ils s'accordoient avec leurdoclrine fur l'Euchariftie, tous
ies argumens tirez ou du rapurt des fcns en gênerai ou des paf-
fages des Pères qui les autoiifenti car ce n'ell: proprement que
la même chofe. Mais parce que M. Claudcles étale avec tant
de pompe & d'étendue dans fon livre contre le PereNouet ,
qu'il paroift qu'il n'y en a point où il ait eu plus de complai-
fanccj je veux bien tâcher de luy faire voir en particulier
qu'il n'en a pas defujet.
La principale fource de Tes égaremens fur ce point , c'efl:
que par une Philofophie Rethoricienne , il fait des fens de
certains eftres intelligens qui jugent, qui connoifîènt , qui
font capables de vérité 2i de faulfeté, d'/^w^^^^^^f &dem»z^,
M. Claude qui ont leurs droits & leur jurifdiclion. ils portent ^ félon luy ,
contre le Père ^^^ jugem'ens formels. Ils parlent de la fub/lance é^ des accidens. ils
1 1. M. Z4. 1 y.* 077t dcs chargcs d^ des emplois ér ««^ vocation . Dieu ^ dit il ^ leur
5S. Jt6.&iC6, afoîimts toutes les œuvres 7natericlles : il les a fait comme les por-
tes de l'ame , Ces guettes (^^ fes mefagcrs > C/- // a imprimé un cara-
itère fi fort d'évidence S^ de certitude dans leurs rapports , quil ne
nom cft pas po,irible de noti-s en défendre.
D'où il conclut que les fens témoignant que J. C.n'efl: pas
dans l'Euchariftie , H. ne faifant rien en cela qui ne foit entiè-
rement conforme a leur vocation , il les en faut croire.
Je ne m'arrefteray pas icy à cenfurer la Rethorique de M".
Claude : il parlera comme il luy plaira ;, & je luy pardonnerojs
même aifément fafauife philofophie, s'il n'en tiroit point de fî
fauiïès conclufions contre la Foy. C'cft la feule chofe qui m'o.
blige à la réfuter j &: à m'engager plusavant que moninclina-
tionae m'y porteroit dans cesdifcuffionsdePliyfique.
Pour éclaircir donc cette matière, il faut par necelfité expli-
(]ucr de quelle forte fefont les opérations des fens,&: ce qu'il y a
de certain ou d'incertain dans les jugemens que l'on en porte.
^) des diffimltex, tirées des fens. 541
Les actions des fens qu'on appelle fenfanons ne compren- Ch. XI.
nencqiie des mouvemens corporels joints à de certaines per-
ceptions confufes.
Les mouvemens corporels appartiennent aux organes ^ôc fe
font dans les organes , dont le cerveau eftle principal. Lesper- ■
ceptions appartiennent à Tame , &: font ainfi des impreiîions
qui fe font dans lame, 6c des idées qu'elle conçoit.
Maisquoique ces perceptions ou impreflions fe fafTent dans
l'arae , elles n'enferment néanmoins par elles- mêmes aucun ju-
gement. Ce font de fîmples idées & de fimples images qu'elle
le forme des chofes extérieures qu'elle expofe à laraifon pour
en juger.
Enfin il faut remarquer que l'efprit joint fouvent à ces idées ,
qui répondent proprement aux mouvemens corporels, d'autres
idées, ôc qu'il s'en fait une idée qui va plus loin que celle des
fens.^
On voit de loin un corps qui fe remue. On s'en forme l'image
d'un homme. On voit un homme qui approche. On en conçoit
l'idée particulière d'un homme qu'on connoift. Cependant
l'idée d'un homme n'efloit pas enfermée dans celle de ce corps
mobile, ni celle de cet ami, dans celle d'un homme. C'eft l'ef-
prit qui les ajoute à l'idée qui répond precifement aux mouve-
mens excitez dans les organes des fens.
Mais tandis que l'ame demeure dans les fimples idées , foie
qu'elle ne fe forme que celles qui répondent aux mouvemens
excitez dans les fens, fo-it qu'elle y en 'ajoute d'autres , toutes
ces idées ne font point capables de faulfeté. Etc'eft pourquoy
il n'y en avoit point dans les vifions desProphetes , quoique
les objets qui leur eftoient montrez, leur fuflent fouvent re-
prefentez on comme des corps effectifs , ou comme des corps
vivans & animez , 6c qu'il n'y euft rien de tout cela.
Que M. Claude ne s'imagine pas que cette philofophie foit
ncRivelle. Je ne luy dis rien icy qu'il ne puifle lire dans S. Au-
guftin en termes formels.
C'eft luy qui apprend à diftinguer le mouvement corporel
qui fe fait dans les organes , de la perception qui fe fait dans
l'ame. In animn fiunt vifiones- corporulium rerum quiC fentiuntnr De Genef, ad
fer corpus ; ce qu'il explique plus au long dans le fixiéme Livre Htcj. ii.c.i4-
de laMufique , où il enfeigne que les corps n'agilîent quelur
les corps : Corforalia. qu.ccunq^ue huic corj^ori in<irunnt aut ob-
Y Y y iij
542- Liv. VII. Examen des aArgumens négatifs,
jiciuntur ,non in anima ^fedtn ipfo corpore aliquid faciunt , & que
Jes actions des fens ne iont que des attendons de l'ame aux
mouvemens qui fe paifent dans le corps. Et c'eft ce qui a mê-
me efté reconnu par les Philofophes Payens , dont Ciceron
avoit pris ce qu'il dit dans la première des Queftions Tufcula-
nes. Nos enim ne nunc quidcmoculis cemimus ea qu.-cvide.
7nus. Neque enim cfi uUus fenfus in corpore ^fed ut non folùmPhy.
jîci doccnt , verum etiam medici qui ifta aperta ^ ptttefalla vide-
runt ^vi.v quidcm [tint ad oculos a fede animi perforata. Itaque
fape aut cogitatione , aut aliqua vi morbi impediti aperiis àtque
intcyris oculis ^ aurihus nec videmus , ncc audimus , ut facile intel-
ligi po,ffït anirmim ^ videre Q- audire , non cas partes qua quafi
feneftne funt animi..
S. Auguftin reconnoift: auiïî que l'on ajoute fouvent beau-
coup à la fimpleidée qui eft formée par les objets. C'eft pour-
quoy j encore que tous ceux qui voyent de loin un corps qui
Te remue , &: qui a la figure d'un animal , fe forment l'idée d'un
animal vivant , Se qu'on ne demeure jamais dans la feule idée
de la figure &: du mouvement de ce corps , il prétend néan-
moins que cette idée n'eft point prife des fens , parce , dit- il ,
que même dans les animaux , on ne voit point l'ame par les fens
du corps. Et c'eft de là qu'il conclut qu'on ne peut pas afteu-
rer que la colombe qui parut à S. Jean, lorfqu'il baptifa J. C.
fuftune colombe vivante , quoiqu'il foit difficile que S. Jean
l'ait conçue d'une autre manière.
Mais de quelque forte que foit cette idée , pourvu qu'elle
demeure dans les termes de fimpleidée , on ne peut pas dire,
félon les principes de faint Auguftin , qu'elle foit faufTe^ parce
que la faulTeté ne confifte que dans le jugement qu'on en
porte.
DeCivit. Dei Car c'eft fur ce principe qu'il décide que , quoique lapercep-
i. 16. c. 17. tion des chofes fcnfibles appartienne aux fens , le jugement ne
leur en appartient pas. Si les yeux , dit- il ailleurs , & tous les
autres fens ne rapportent rien à l'cfprit que félon l'impreffîon qu'ils
ont rci^ué ^ je ne vois pas que nous ayons droit de leur en deman-
der davantage. Si quelqu'un croit qu'une rame fe rompt dans l'eau.,
ce n'eft pas que fe s yeux luy fajfent un faux rapport , mais c'ejî luy
qui fait un faux jugement 3 car l'œil n'a pas du voir autrement félon
fa nature. L'œil voit comme il doit voir , mais l'efprit rie juge pas
comme il doit juger.
De veraRc
lig. C.55.
^ des diffcultei. tirées desjens. ■ Ç43
11 faut donc d'abord que M. Claude retranche cous ces Ch. XF.
grands difcours qu'il fait fur le témoignage des fens, &: toutes
cesexprefTions qu'il répète à chaque page que les fens feroienc
trompez dans lEuchariftie , qu'ils rendent témoignage que
J. C. n'y efl; pas , & que ce qu'ils voyent eft du pain Se du vir.
Car il iuffit de luy dire en un mot que les fens ne jugent dt
rienj & que ne jugeant de rien , ils ne font capables ni de vé-
rité ni de faufleté.
Je ne prétends pas néanmoins que la difficulté foit entière-
ment refoluë par là. Car quoique les fens ne forment , com-
me j'ay dit, aucun jugement, &: que les fenfations ne foientque
de iimples perceptions attachées à des mouvemens corporels ,
il eft pourtant vray que comme les mouvemens corporels qui
fe font dans les organes font joints par l'ordre de Dieu avec
certaines perceptions qui font des imprelîions de l'ame ; de
même l'ame jomt d'ordinaireà ces perceptions des jugemens ,
par lefquelselle conçoit que l'objet extérieur qui lescaufè,eft
tel que l'image qui le reprefente. Ainfi lorfque les yeux font
frappez par un corps rond , figuré & coloré , l'organe eftant
remué, & l'ame fe formant l'idée de ce corps par la perception
des fens, elle forme enfuite ce jugement qu'il y a hors d'elle un
corps rond qui caufe l'impreffion qu'elle a reçiàë.
Or ces jugemens font non feulement capables de vérité 6c
de fauHeté j mais il faut de plus qu'ils foient capables de certi-
tude. Et il eft vrav que fans cela ni la Religion ni la vie hu-
maine ne peuvent iubfifter, & que c'eftavec raifon que les Pè-
res ont reproché aux Académiciens qu'ils ruinoient l'une & Tert.deani-
l'autre , en voulant que les jugemens fondez fur les fens fufîent ""^^i*^-'^*
incertains.
Mais M. Claude reconnoift luy-même qu'afin que ces juge-
mens foient certains , ils doivent eftre accompagnez de diver-
fes conditions. Il en avoue quelques-unes, 6c il ne faut pour
démêler toutes ces chicaneries qu'établir la neceilité de quel-
ques autres qu'il n'avoue pas.
Il eft vray, comme j'ay dit , que par un ordre établi -de
Dieu dans la nature de l'homme , 6c qui n'a d'autre fonde-
ment que la volonté du Créateur, il y a certaines perceptions
attachées à certains mouvemens corporels j enforte que toutes
les fois que le corps eft remué d'une certaine manière, l'ame
""onçoit certaines idées, ^ que l'ame eft portée à fuivre ces
J44 Liv . VII. Examen des aArgumens négatifs^
idées dansfes jugemens , pourvu qu'il n'y ait rien qui l'en em-
pêche.
Mais afin que l'on fe puiiîe aflurer dans ces jugemens , ou
qu'on aie droit de les former ^ les conditions marquées parles
Philofophes &; par M. Claude, & qui regardent les organes,
le milieu 6c la diflance de l'objet ne fuffifent pas , êc il faut de
plus;
1. Que nous fçachions que les perceptions fur lefquelles nous
les formons , foient des idées qui naiiïent des fens , & non des
idées d'imagination qui demeurent dans l'efprit , lors même
que les objets font abfens.
2. Que le mouvement corporel ait efté produit par un objet
exteneur à la manière ordinaire , ôC non par quelque efprit
étranger.
3. Que nous demeurions precifément dans l'idée qui naift
des fens , &: que nous n'y ajoutions rien davantage , fi nous n'a-
vons certiinde que ce que nous ajoutons y eft joint.
La première condition eft neceflaire , parce qu'il eft certain
quel'ame eftant capable de fe former de deux fortes d'idées ,
les unes qui font jointes à des mouvemens corporels, par lef-
quelsl'ame conçoit les cliofes prefeates ^ &: les autres qui ne
fuppofent point ces mouvemens , par lefquels l'ame conçoit
aufîi bien les chofesabfentes & qui n'ont jamais efté , que cel-
les qui font prefentes & efK^dives: ces deux fortes d'idées fe
confondent quelquefois tellement , bi. les dernières deviennent
fi vives , qu'il n'eft pas poffible de les difcerner des perceptions
des fens.
M. Claude le reconnoift à l'égard desPhrenetiques, & faint
Auguftin à l'égard àes Prophètes, & de ceux que Dieu a favo-
rifez de vifions. Il y a , dit ce Père , des vifions qui paroiffent
à l'efprit comme Jî elles faroijjoient aux fens du corps. Et cela hr-
Epilt. loi. y^^g ^ ^^^ feulement aux perfonnes endormies bu phrcnetiques ,
mais quelquefois auffî à ceux qui veillent (jr qui ont l'efprit fain.
il y en a qui ne font point caufees par l'illufton des démons qui
notes trompent ., mais par une révélation fpirituelle qui fe fait par
des formes incorporelles fî femblables a des corps , qtion ne les en
peut difinguer , f Dieu ne nou^ éclaire par une lumière plu-s vive ,
(^ que l'on 'n'en juy: far l'intelligence j ce qui arrive rarement
pendant les vifions mêmes , mais ordinairement quand elles font
Jaffées.
Il
■t£ des diffîculuT^tïrées des fms. ^4^
11 die !a même chofe dans le livre douzième fur la Genele. Ch. XI.
Et ce que l'Ecriture die de S. Pierre , que lors qu'il Fut délivré
par l'Ange, il croyoit que ce fufbune vifion, en cft une preu-
ve manif-efte , puifqu'il efl: clair qu'il ne difting.ioïc pas la
realité de fa délivrance, des viiîons qui nefe paircntquc dans
l'efprir.
La féconde condition n'eft pas moins neceflaire. Car iî cfl:
certain que fi le mouvement extérieur qui eft ordinairement
imprimé par certains corps,efl:oit produit dans nos crgancs par
quelqu'autre caufe, comme par une maladie , par un démon ,
par un Ange ou delà part de Dieu même, nous aurions les mê-
mes perceptions, que Çx cesohjetseftoient prefcns,c'efl:-à dire,
que (î un démon produiloit dans nos yeux le même mouve-
ment qu'y produit une montagne, nous verrions une monta-
gne fans qu'il y en euft devant nos yeux.
Ainfi parce que les nerfs du bras de ceux qui ont une main
coupéCj peuvent eftrc remuez de même qu'ils l'efloient lors
qu'ayant encore leur main, les imprefiions qu'elle recevoit àts
corps fe cômuniquoienr par ces nerfs jufqu'au cerveau, il arrive
tres-fouvent que ces perfonnes fentent les mêmes douleurs, que
iorfqu'ilsavoient la main qui leur manque, i^ qu'ils croycnt les
fentir dans cette main j-Que il l'on avoit coupe la main à quel-
qu'un dans une aliénation d'efprit, & qu'on luy euft -depuis tel-
lement envelopc le bras, qu'il ne fe fuft'poiivt apperçu de ce
retranchement ny par la veuc ny par le toucher, ce (croit alors
qu'il ne douteroit point du tour^ qu'il ne fentît de la douleur
dans la main.
Enfin la troifiéme eondition,qui eft de n'ajouter rien à l'idée
formée par les fens, ou de n'y ajouter que ce qui eft neceilai-
rement lié avec la chofe que nous concevons, eft: encore viiî-
blement neccftaire , puifque fi nous y ajoutions des chofes qui
n'en foient pas infeparablesou naturellement ou fjrnaturclle-
ment, nous pourrions nous tromper en les y ajoutant.
S'il fe pouvoit que nous ne fuffions jamais ailurez que ces
conditions fercnconcrentdans les jugemens que nousformoos
fur'lcs idées des fens , ils feroient tous téméraires &: incertains.
Mais comme la vie humaine •&; même la Religion ne fçau-'
roient fubfifter fans certitude, &; que nous fommes aftîrez par
lafoy que Dieu veut que l'un 6c l'autre fubfiftent, nous en de-
vons conclure qu"'il a donné des moyens aux hommes pour
ZZz
J46 Liv- VH. Examen des Argumens négatifs ^
s'alTurer que ces conditions eflentielles s'y rencontrent efFedî-
vement.
Ainfi quoyqne les vifions d'imagination ne fe diftinguent
pas toujours des perceptions réelles qui naiiïent des objets
extérieurs, & que nous ne puilfions peut-eftre marquer aucun
fîgne certain pour les difcerner, nous pouvons cependant juger
avec certitude, que la providence de Dieu ne fçauroit permet-
tre que faifant long temps reflexion fur des idées , & n'ayanc
aucun fujet de les prendre pour desvillons , cène foient néan-
moins que des phantômes qui n'ayent point de realité hors de
noftre imagination.
Il en eft de même de la féconde condition. Il n'efl: pas na-
turellement impoffible ny aux démons ny aux Anges de pro-
duire dans nos organes les mêmes mouvemens t]ue les objet»
extérieurs y produifent. Et en ce cas ces mouvemens feroient
fuivis des mêmes rcnrations,&; nous fentiriôsdes chofes comme
prefentes qui ne le feroient nullement. Cependant la même
lumière qui nous découvre que la providence de Dieu nous ap-
pelle au (alut par la véritable Religion, 6c qu'elle nous com-
mande de conlerver la focieté civile , nous afl^re auffi que
Dieu ne fçauroit permettre , au moins ordinairement, ny aux
Anges ny aux démons, de difpofer ainfi de nos fens. Car nous
obligeant de juger dçs chofes fenfibles, & fa vérité ne permet-
tant pas qu'il nous engage necedairement dans l'erreur, il faut
par confequent qu'il nous ait donné le moyen d'en connoiftre
la vérité. Ce qui ne pourroit eftre s'il elloit ordinaire que les
Anges ou les démons imprimaiTent dans nos corps des mou-
vemens qui nous fiflent voir comme prefens, des objets qui ne
le feroient pas.
Enfin comme il y a de la témérité d'ajouter aux idées que
nous recevons par les fens les idées que Dieu en peut feparer^
quoyqu'elles y foient jointes naturellement , lorfque nous ne
fommespas afTurez que Dieu n'agit point furnaturellementjir
n'y a point auflî de témérité quand nous a^ons fujet d'avoir
cette afliirance. Or nous l'avons prefque toujours. Car Dieu
n'agit furnaturellement que pour des fins importantes, & il
n'a point accoutumé de le faire fans en donner des marques
ou avant ou après ces effets miraculeux. De forte que lorfque
nous ne voyons point ces marques, & que rien ne nous don-'
ne lieu de îbupçonner un miracle, nous pouvons ajouter aux
(^ des dif^ciilteT^ tirées des fens. 547
i<îées des fens toutes celles que la nature y joint,quoy que Dieu Ch. XL
les en puille leparer quand il luy plaift.
C'eft par cette raifon que quoyque l'idée que les hommes
avec qui nous vivons ix)rment dans nos fens , ne nous rcpre-
fente precifëment que des matières mobiles & colorées, nous
jugeons néanmoins fans témérité que ce font des hommes et-
fcétifs&non des Anges ou des'demons reveftus de corps fem.
blables à ceux des hommes à l'extérieur.
Voila les vrais principes de la certitude des jugemens que
nous formons fur les imprefTions des (ens,qui n'eft fondée,com-
meil eft vifible, ny fur une force naturelle qui mette nos fens
à couvert des illufions, nv fur des marques certaines que nous
ayons pour les reconnciftre, mais lur la feule providence de
Dieu qui ne fçauroit permettre que nous en (oyons toujours en
doute dans l'obligation qu'il nous impofe de juger des chofes
fenfibles , & d'en juger véritablement.
Et par là il eft clair que lorfque la vérité de Dieu n'y eft
point intercirée,c'tft à-dire, lorfqu'il ne s'enfuir point que nous
ferions neceftairement contraints de faire de faux jugemens,
il y a de la témérité à dire que Dieu ne peut pas permettre de
certaines chofes.
Aind quoyque les vifions reprefentent fouvent des objets
-qui n'ont point d'eftre hors de l'imagination, & que ces vi-
fions ne fe diftinguent pas toujours des perceptions des fens.
Dieu peut néanmoins non feulement les permettre , mais les
procurera les imprimer dans l'efprit, parce que rien ne force
ccluy à qui il les envoyé de les juger véritables dans le temps
quil les a, &. que Dieu enfjiteou luy donne des figues pour
les diftinguer deceque l'on connoift par les fens, ou l'obli-
ge de n'en pas juger, &:c'eftce qu'il fit à l'égard de S Paul.
Car il ne luy fit pas connoiftre Çx c'eftoit en corps ou ename
qu'il avoir efté ravi au troifieme Ciel , mais il l'empêcha de
juger de ce qu'il ne fçavoit pas.
Il permet aulTi quelquefois aux démons de caufcr des illu-
fions aux fens de ceux qu'ils poiledent. Mais s'il leur laiile quel-
que ufage de leur raifon , il leur laifle auifi le moyen de ne
pas fuivrecesimprelfions. Se de n'y pasafleoir de jugemens.
Que Ç\ Dieu peut permettre toutes ces chofes, lor/qu'il ne
donne que des fignes tres-obfcurs pour empêcher qu'on n'en
foit trompé, qui peut douter qu'il ne les puifi!è permettre quand
ZZz ij
54? Liv. VII. Examen des Argumens négatifs ,
il en donne de il clairs 6c de fi exprcs,que l'on n'y puifle eftre
abiifc que par une intidelitc volontaire.
Or il n'y a point de ligne fi clair &: h propre pournous em-
pêcher d'ertre furpris ou par les impreiîions des fens ou par
l'imagination, qu'une déclaration formelle de Dieu qui nous
alVure de la venté des chofes. Car comme nous avons déjà
dit, les fimples perceptions des fens, & même toutes celles
" de l'imagination eftant incapables d'erreur, & n'y ayant que
le feul jugement qui en foit fufceptible , quel moyen plus
propre pour l'en prererver,que de luy marquer precifemenc
ce qu'il doit juger >
Rien n'approche de ce que dit M. Claude furce fujec.
contKie'i'" ^^t" "T^^^gré Ics cmbarras de fa faufTé philofophie, il ne laifTe
Nouct. p. 66. pas de reconnoiftre la venté i mais il l'oblurcit à l'inftant par
une chicanerie làns raifon.Il veut que dans toutes les apparitions
des ^nges dontl' Ecriture fait mention^ il y ait toujours eu quelque
caractère fcnjihle .^ qui marquait, dit- il , quelque chofe de furnatu.
rcl^ (jj- qui arreftoit lu conclu fion des fcns , avcrtîfiant la raifon
^ l'obligeant de fe tourner de l'autre cofiè pour faire un jugement
droit. Ainfi ^à\x. il , les fcns n'efioient point trompez. , parce qu'il
y avait dans l'objet même de quoy les defibufer. Que fî l'on deman>-
de quels cfiaient ces caractères fenjtb le s ? Je réponds , dit il , que
l'hijioire même les remarque , comme la clarté qui accompagna les
Anges qui apparurent aux bergers à la naifjancc de J. C. d^ les
ve/hmcns refplcndiffans comme ceux que portaient les Anges qtiigar-
dotent le Sépulcre de J. C. é" d'autres femblables qui cmpef choient
les fcns de rapporter que c'eftoicnt de véritables hommes.
M. Claude auroit bien de la peine à découvrir ces caraderes
fenfibies dans toutes les apparitions des Anges raportées par
l'Ecriture. Mais quoy qu'il en foit, il reconnoifb par là, que
poLirveu que l'efprit foit averti de ne pas juger, Dreu peuE
permettre qiie ksfens foient frapez d'une manière qui pourroit
l'engager dans l'erreur fans cet avertiflement. Or il n'y en a
point lans doute de plus formel, qu'une déclaration poficive de
Dieu qui nousinftruit delà qualité des objets 5 & ce figne eft
tout autrement clair que toutes ces lumières & coures ces au-
tres circonftancesque M.Claude jugefuffifantes pour obliger
ceux à qui les Anges apparoifToient de fufpcnJre leur juge-
ment, & de ne les pas prendre pour des hommes.
C'eft pourquoy lorfque M. Claude, pour empelcher qu'on ne
(^ des difficHltex. tirées des fens. ^^()
tire cette coniequence,exige quecescaraderes foîent fenfibles Ch XI.
& expofez aux fens, il eft clair que c'eft une réponfe de caprice
&dephantairie. Car il ne s'agit pas d'empefclier les fens d'eftre
trompez, puilqu'ils en font incapables, & que s'ils en eftoienc
capables , ces caraderes fenfibles dont parle M. Claude, ne les
en empeicheroienr pas. Mais il s'agit de preferver l'efprit d'er-
reur dans (es jugemens. Or un avertilîcment précis de Dieu e(l
infiniment plus propre à produire cet effet que toutes ces cir.
confiances aufquelles M. Claude attribue cette force, & qu'il
juge fuffifanres pour obliger l'efprit dcfufpendrefon ju2;eini2nr.
Ges principes de fens commun que itous venons d'ef^ablir ,
font voir tout d'un coup, que tout ce qu'on allègue pour la cer^
titudedu témoignage des fens contre la doctrine Catholique
eft entièrement vain. Car Dieu ne doit rien davantage aux
hommes à l'égard de toutes les chofes dont ils jugent, que de
ne les pas mettre dans la ncceflîté d'en porter de faux jugemens.
Or la déclaration pofîtive qu'il a nous faire, que ce qui nous
paroift pain , eft fon corps , &c ce qui paroift vin , eft fon f.ang,
eft plus que fufîifante pour nous exempter de cette necelîirc, éc
pour nous faire juger au contraire que cen'eftni du pain ni du
vin, mais le corps ôc le iang de J. C. Car comme il n'efl pas
vray en gênerai que tout ce qui pa^-oift homme aux fens, foie
effectivement homme, il n'efl pas vray non plus que tout ce qui
paroît pain foir pain 5 & que tout ce qui paroift vin,roit vin.Ccs
propofltions générales font téméraires àmoins que d'y ajouter
diverfes conditions. Il en faucpremierement exclure les défauts
des organes & le trouble de l'imagination. Il en fautexclureles
illufîbnsdu diable.U en faut enfin exclure les miracles de Dieu.
Et quiconque acquicfce à cette propoiîrion générale : Ce qui
furoifi pain, cfipain^ fans eftre aileuré de tout cela, y acquiefce
témérairement. On peut à la vérité eftre afTuré qu'il n'y a point
d'illuflô du diabIc.Mais comment le pourroit-on eftre qu^il n'y
a point de miracle de la part de Dieu, ni d'opération furnatui
rellej puil'que l'Evangile nous affure qu'il a dit du pain quec'é-
toit fon corps, £c que toute l'Eglife lui demande par fes prières
une opération furnaturelle pour changer le pain en fon corps ?
Mais Dieu , dit M. Claude, ne peut eftre Auteur des illu-
/îons, de la fauffeté,& de l'erreur. Eft-ce do^nc qu'il ne com--'
prendra jamais qu'il n'y a aucune erreur dans les fens, qui repre-
fentent fimptemenc à l'efprit l'image du pain Se du vin, & une
Z Zz iij
^^o Liv. VII. Examen des Argumens négatifs^
ima^^e quiaronunliciiparlcs rapports qu'elle contient, & qu'il
n'y en a peint auflidans l'elprit^qui eftant éclairé par la foy, ju-
ge que ces objets qui paroiilenc du pain &: du vin^ne ibnt ni du
pain ni du vin , mais le corps & le fang de J. C.
Pour ajouter neanmoiiàs quelque éclaircillement à cette ma-
tière , Si faire voir plus nettement que les iens ne font point
trompez dans l'Euchariftie, il hiut remarquer qu'il n'y arien
dansce myftere dece qu'on appelle proprement vifion,c'e{l-à
dire que ce n'eft point une pure imagination où le rapport des
Iens n'ait point de part. Car nos fens y agiiîent effectivement.
Ils conçoivent l'idée d'un objet extérieur, & prelentent cette
idée à l'efprit ; ce qui ne s'appelle pas vifion.
Il n'y a point auflî de ce qu'on appelle illufion des fens. Car
on dit que les fens fouffrcnt illuiîon, quand ce ne lont pas les
objets extérieurs qui caulent l'impreffion qu'ils reiTentent, mais
quec'eft quelque elprit qui imprimant par luy-même certains
mouvemens fur les organes fait (encir comme preient ce qui ne
i'eftpas.
Orc'efl: ce qui n'arrive point dans l'Euchariftie. Ce n'eft
point un efprit qui imprime dans nos organes les mouvemens
qui nous en font former l'idée, C'eft l'c>bjct même extérieur
réellement preient à nos fens. Et lorfque l'efprit s'arrête
precifément aux imprefîîons qu'il en reçoit, il n'en porte au-
cun jugement qui ne foit entièrement véritable.
Il juge premièrement que les organes font remuez, & que
ce qui fe pafle en luy n'ell pas une pure imagination : 6c ce
jugement eft vray. . i-b
il juge qu'ils font remuez par un objet extérieur réellement
prefent, & qu'ainfi ce n'eft point une illufion :£c ce jugement
eil: encore vray.
Il juge que cetpbjet extérieur eft à une certaine diftance*
enfermé dans une certaine figure, &; qu'il eft en un ctîrtain lieii';
&: il n'y a rien en cela que de Véritable ,
Il juge que cet objet fait fur ces fens telles & telles impref-*
fions : £c il eft- vray cju'il les fait.
II. juge encore fi ro.n veut! /qu'il y a un corps à une certaine
diflance : &: cela eft encore vray. Car le corps de J, C.eft preci-
(pment daniS tout ce qui écoit occupé par la lubftance du vin.
Etainfiil n'y a aucune partie de cet efpace que l'on puifTe dire
vuide de corps, puilque le corps de j. C. y eft, quoiqu'il y foie
i^ des di^aihez. tirées des fens. 551
d'une manière rcirnaturelle i>: incomprehenhble. AinH quand Ch. XÏ-
l'elpric conçoit un corps dans cet efpace, pourveu qu'il ne dé-
termine point la manière , il ne fe trompe point en cela.
Mais il veut poufler plus loin ces jn2;cmens, & conclure que
cet objet eft de vray pain&de vray vin, & qu'il occupe cet
e/pace à la manière des autres corps ^ ces ju^emens ne feroient
pas fondez lur le (Impie rapport de (ens, ny fur les idées qui
naiiîenc precifément de l'objet, mais fur les additions que l'ef-
prit Fait aux idées des lens. Les iens rapportent qu'il y a dans
cet efpaceun obier lemblabîe à du pain 6<. à du vin L'ei'prit
ajoute que c'eft du pain Sc'du vm. Les ièns rapportent que cet
objet occupe un e(pace étendu , mais ils ne rapportent poinc
comment il l'occupa. C'eft l'eTprir qui fait cette addition.
Il eft vray que l'on peut finvre non feulement ces idées des
fens, mais fufîî ces additions de l'efprit, lorfqu'on auncalili-
rance raifonnable-qu'il n'y a point d'opération furnaturclle de
Dieu. Mais qu:i.nd nous femmes alîurez du contraire, parla dé-
claration de Dieu même& de Ion Eglifc, c'eft fe tromper vo-
lontairement &; inexcufablement que delesfuivre& d'en for-
mer des jugemens. C'eft conclure témérairement &: fans raifon,
que tout ce qui parcuft pain & vin eft en effet pain Se vin. C'eft
impofer une lov à Dieu qu'il ne s'eft point impofée. Enfin ce
n'eft pas juftifier les fens qui ne font point inceriftez dans ce
qu'enfeigne l'Eglife ^ mais c'eft vouloir juftifier en effet ms
imaginations 5: nos mauvais raifonneinens contre l'autorité
de la parole de Dieu.
Cetéiairciifem.entrenverfenon feulement toutes les décla-
rations que M. Claude fait de fon chef en faveur des fens,
mais auffitoutce qu'il allègue de l'Ecriture &: des Pères pour
montrer leur certitude. Car encore qu'il ioit vray que ces paf-
fages fe doivent entendre ôc de l'impreiîion precife qui eft
toujours exempte d'erreur, parce qu'elle n'en eft pas capable,
&mcme des jugemens que refprit forme en fuivant les im-
prefîionsdes fens, c'eft à- dire que félon les Pères il eft cerram
que quand on voit un corps par les yeux , on n raifon déjuger
qu'il y a un véritable corps hors de nous tel qu'il nous paroifl: i
il eft pourtant vifible qu'ils on tfuppofé que ce jugement dema-
doit deux conditions pour eftrecsrtain, l'une qu'on foit afiuré
qu'il n'y ait point d'illufion de la part du Diable ; l'autre qu'il
n'y ait point d'opération furnaturelle de Dieu. Car il eft con-
5^2. Liv. Yll. Examen des A^rgifmms négatifs ,
liant qu'ils n'ont pas prétendu que le Diable ne puifle caufer
DcGen.ad des illufions dans nosîens, puisqu'ils en parlent tres-fouvent
'"' • '*' dans leurs ouvrages , comme quand S. Auguftin dit, que lorfque
le Diable nous trompe par des phantômes, l'illufion qu'il fait
à nos yeux ne nous nuit point fî nous ne tombons dans aucune
erreur touchant la foy.
On ne doit pas non plus leur imputer d'avoir -douté que
Dieu ne puilTe, en nous en avertifiant, imprimer dans nos or-
ganes certains mouvemens qui y excitent des idées des cho-
ies abfentes, qui nous paroiflènt prefentcs, comme il en impri-
me dans l'imagination par l'aveu de tous les Peres^puifqu'il n'y
a pas plus de difficulté à l'un qu'à l'autre , .& qu'il n'y auroit
pas plus de faufleté dans ces idées des léns qui ne tromperoienc
point l'efprit, que dans des idées de l'imagination. Mais au
moins il eft certain qu'ils n'ont point cru impoiîible que Dieu
prefentaft aux fens certains objets que l'efprit ne puft s'empê-
cher de prendre pour autres qu'ils ne feroient qu'en fuppofant
un miracle.
Ainfi ceux à qui les Anges apparoifTcient ne fe pouvoient
empelcher de les prendre pour des hommes qu'en fuppofanc
un miracle.
Ainfi S.Jean ne fe pouvoir empêcher de prendre la colombe
qui parut (ur J. C. pour une colombe véritable , qu'en Tuppo-
iant un miracle.
Ainfi ceux qui voyoient la Vierge & qui fçavoient qu'elle
avoir un fils 5c un mari , ne fe pouvoient deffendre de juger
qu'elle eftcit devenue mère comme les aucres femmes, qu'en
fuppofant un miracle.
Ainfi ceux qui voyoient J. C. ne fe pouvoient defFendre de
juger qu'il avoit un père lur la terre , qu'en fuppofant un mi-
racle.
Et par confequent les Pères ont cru qu'afin que les jugemens
qu'on forme fur les objets des fens, fullent abfolument cer-
tains danscesadditions quelaraifon fait aux idées des fens, il
failoit fuppofer qu'il n'y eût point de miracle.
Cette certitude des fens ainfi limitée, & qui fuppofeTexclu-
fion d'illufion & de miracle, (uffit pour confirmer tout ce que
ks Pères ont prouvé par les témoignages des fens.
Elle prouve la vérité du corps de J.C. &;de fa Refurreclion.
Car on avok droit^dc l'aveu même des heretiques,d'en exclure
toute
&f des difficulté^, tirées des/èns. 5J5
toute illufîon diabolique, & il n'eftoic pas moins certain qu'il Ch.XI.
en falloit encore exclure l'opération lurnaturelle de Dieu, par
ce principe gênerai , que Dieu ne peut nous donner des idées
qui inclinent nos efprits à des jugemens qui feroient faux, qu'en
nous donnant des avertiflemens fuffifàns pour arrefter cette
impreffion. Or il eft bien certain que non feulement J. C. n'a-
voit donné aucun figne, qu'il n'eufl: pas un corps ,ou qu'il ne
fuft pas refluicité , mais qu'il avoit fait tout ce qu'il falloir
pour perfuader l'un & l'autre.
Les Pères ayant donc droit de faire cette double fuppofition,
ont conclu diredement que les jugemens formez du rapport
des fens par ceux qui ont vu J. C.& dans fa vie mortelle , ôc
après fa Refurredion , ne pouvoient eftrefaux. Et leur argu-
ment eftoit abfolument concluant.
Ils ont eu raifon dédire, comme fait S. Irenée , que y. C.fe- iren.adv.
roit un feducieur. (i Ces fouffrances n avaient eltè véritables. h<cr. 1.5.0.10.
Ti A .?•-' J . J ■■' r, ^ > n ■ 1 Tert.contr.
lis ont eu railon de prouver , que y. C. n e[toit^as un phan- Marc.i. 4. c.s.
tojme , pttifqu' il foufroit un attouchement violent.
Ils ont eu raifon de dire, que fi J. C avoit trompé par fa fub^ Li 1 - c 8
fi^ance extérieure , il ne mériterait pas d'efire cru dans ce qu'il nous
a dit de l'intérieure.
Ils ont eu raifon de conclure, que file corps de J. C. n'eftoit la.decarne
le corps d'un homme qu'en apparence, on auroitfujet dédire chnftic, 1.
qu'il n'eflaufli Dieu qu'en apparence.
Ils ont raifon de dire que ce n'eftoient point des pieds ima- Epiph.i. i.
ginaires que ceux que la femme pechereffè arrofa de fes lar- adver.hxr. i
mes.
Ils ont raifon d'employer pour prouver la vérité de la chair Hiiar.inPf.
deJ.C. ce que J. C. dît luy même zÇqs Apôtres .- Touchez^^ ^37-
voycT^ Un cfprit tHa ni chair ni os , comme vous voyez^ que
Ils ont eu raifon d'accufer les Manichéens de faire J. C. Aug.i. 14.
menteur , endifant que fes fouffrances , fa mort fie fes cicatri- '^°""' ^^^^'
ces avoient elte imaginaires, &: de leur reprocher que la vie Eti.ij.c.i.
de J. C. avoit efté une efpece de mag'e. Tout cela efl: tres-vray & ^•
& tres-folide. Car n'y ayant aucun avertiflement de la part de
Dieu , qui dût empêcher de juger fur le rapport des fens à l'é-
gard de J. C. êc de fes actions , c'eftoit fuivre l'ordre de la Pro-
vidence que de juger qu'il avoit un corps tel que les fens le re-
prefentoient. Et par confequent fi ce jugement eût efté faux ,
AAaa
^j4 Liv. VII. Examendes Argumens négatifs ^
cccce faalîecë feroic retombée fur J. C. même. Mais que peut-
on conclure de là contre ce que TEglife Catholique enfeigne de
l'Euchariftie ? Non feulement elle ne dit point que les fens y
foient proprement trompez, mais il s'enfuit même de fa doc-
t rine que l'ef prit ne s'y trompe point , en fuivant le rapport des
fens , pourvu qu'il s'arrefte precifémentà ce qu'ils rapportent,
qui eft que nous avons devant nos yeux un objet extérieur ren-
fermé dans un certain efpace avec tels & tels accidens , & qui
fait telles Se telles imprefîîons furies fens.
Toutes les erreurs dans lelquelles on peut tomber fur ce fu.
jet,- regardent les additions qu'on fait à l'idée precife des fens,
& l'on eft prémuni contre ces erreurs par le plus claire le plus
précis de tous les fignes , qui eft une déclaration formelle de
Dieu. Qiiel prétexte y auroit. il donc, d'accufer Dieu de trom-
perie & de menfonge ? Trompoitil les Prophètes à qui il én-
voyoit des vidons, ou les Patriarches qu'il inftruifoit de tant
de chofes par des apparitions d'Anges , quoiqu'il fuft beau-
coup moins facile aux Prophètes de diftinguer ce quîleurpa-
roillbit en vifion, des objets réels , Seaux Patriarches de dif-
cerner les Anges des hommes effeiftifs^ qu'il ne l'eft aux fidel-
les de diftinguer le corps de J. C. du pain commun ? Car s'ils
ne le difcernent pas par les fens ,ils ledifcernent par la lumiè-
re de la foy , c'eft-à dire par ce qu'on peut avoir de plus cer-
tain en cette vie.
C'eft donc en vain qu'on allègue ces pafîîîges des Pères
pour la certitude des fens, puifqu'ileft clair qu'ils la fondent
tous fur la vérité de Dieu , èc que par confequent tout ce qui
n'eft point contraire à la vérité de Dieu, c'cft àdiredontil ne
s'enfuit point que Dieu feroit trompeur , n'eft point contraire
à la certitude des fens.
Ainfi il n'y avoit nulle neceiîité que les Pères exceptaflènt
l'Euchariftie de leur docftrine touchant les fens, puifqu'elle n'y
eft pas contraire ,& qu'elle n'en afFoiblit en rien la certitude.
Et c'eft inutilement que M. Claude ajoufte qu'ils ont eftabli la
vérité du témoignage des fens, même en ce qui regarde l'Eu-
'chariftie:,& qu'il rapporte fur ce fujet ce paflagedeTertuUien,
qu'il abrège en cette manière. // n'e/ pof permis aux Chrétiens
Tcrt, de .Trii- dg rcvoquer en doute le témoignage des fens , de peur qu'on ne dife
inac.17. ^^g J c.a goujiéune autre pivstir que celle dx vin^u'ilaconfa.
cré en mémoire de fonfung.
^ des diffiCHlte'z^ tirées des fens. 555
Car premièrement il n'efl pas clair par ce pafTage, (î cette Ch. XL
faveur du vin que J. C. a gouftée^fe rapporte à la faveur du vin
confacré , &: l'on la peut fort bien rapportera celle du vray
vin que J. C. but dans la Cène légale , & dont il confacra en-
fuite un calice. Comme on peut fort bien dire que Judas but
du vin quej. C. confacra , pourfignifier fimplement qu'il but
au fouper où J. C. confacra l'Eucharifiie , quoiqu'il en foie
forti, félon quelques Pères, avant la confccration.
Secondement, en s'arreflant même au fens de M. Claude, 5c
fuppofant que Tertullien a voulu dire que J C. avoit gouftc la
faveur du vin confacrc; jil n'y a rien cians cette expreiïi'on d'où
il puifle tirer le moindre avantage. Car il faut remarquer que
Tertullien établit deux cliofes dans tous fes ouvrages à l'égard,
de J. C.la vérité "de fa nature corporelle qui eftoit niée parles
hérétiques de fon temps, 5c la vérité des opérations de cette na-
ture, qui eftoit niée par les mêmes hérétiques. Il veut donc
que non feulement il ait eu un vray corps , mais auflî qu'il aie
efFedivement mangé , qu'il ait effectivement foufFert j en un
mot qu'il ait relîènti les mêmes imprelîions en tous fes fens ,
que celles que nousreflfentons. C'eft ce qui luy fait dire , quil
n'eji pas permis de révoquer en doute le tèmoiyiay: des fens , de
peur qu'on n'en prenne fujet de faire pJ-ffer les actions de J. C.
pour des iUufons , ^ que l'on ne dife qu'il a fenti une autre odeur
que les autres , du parfum qu'il reçut pour l' appareil de fa fepulturc ,
^ qu'il a y)u(lè une autre faveur que les autres dans le vin qu'il
confacra en mémoire de fon fang. Car c'efl: ainfi que fe doivent
traduire ces paroles Latines: JV(?/î'r/£'(^/rrf/ar .... quodalium
poftea unyienti fenferit fpiritum , quod in fepulturam fuam accepta^
vit , alium poflea vini faporem , quod in fanyiinis fui mcmoriayn
confecravit 3 & non pas comme fait M. Claude , de peur qu'on ne
dife que J. C. a y)ufié une autre faveur que celle du vin quil a con-
facré en mémoire de fon ftn^. Mais de quelque maoiere que l'on
traduife ce paflage , il eft clair qu'il ne s'y agit ni de la vérité de
ce parfum , ni de celle du vin , mais de la vérité de l'impref-
flon qu'en re(^ûrent les fens de Jesus-Christ. Tertullien veut
avecraifon que Jesus-Christ ait fenti la véritable odeur de
ce parfum ,Sc qu'il en ait reflenti la même impreffion que les
autres. Il veut auffi qu'il ait goufté la vraye faveur du vin con-
facré , Scelle même que les Apoftresgoufterent , 5c qu'il n'y
ait rien eu de particulier dans les opérations de fes fens. Or que
AAaa ij
J56 L I V. V 1 1. Examen des Argumens négatifs ^
faiccek contre la doArinedel'Eglife? Eft-ce que les Catholi-
ques difenc que le vin confacré n'a point de faveur, & qu'il ne
fait point d'imprefTion fur les fens?
Tout ce que TertuUien prétend donc eftablir en ce lieu, c'eft
que J. C. a goûté la faveur naturelle de ce vin , qu'il a fenti ce
qu'un autre auroit fenti ,&qu'ainfi il n'avoit pas d'autres fens
que les autres hommes. Ce n'eft: que de cela qu'il s'agit, & point
du tout, fi ce vin conficrédont J. C goûta la faveur, eftoitou
n'eftoit pas du vin véritable ; 6c s'il n'y eftoit point arrivé de
changement. Si l'on eût fait cette dernière queftion à Tertul-
lien, qui doute qu'il n'eût dit , comme S. Ambroife a dit de-
Deiisquîmy- puis, que Ce ncjîoit point ce que la nature avait forme ^ mais ee que
iler.init.c.9. labcnediBion avoit confacré^ ou ce que dit l'Auteur du Livre des
\ i^ (:\ ' Sacremens , qu avant la confccration c efioit un calice plein devin
Catcch. 4. ^ d'eau, mais qu'après que les paroles de J. C. ont operè^ le fanfi^ qui
"^J' • a racheté le peuple fe trouve dans le calice j ou ce que dit S. Cyrille
de Jerufalem, que ce n'efi point du vin , quoique Icgoujî le rapportct
mais le fang de J. C.
Les Pères encore une fois ont donc pu confirmer la certitude
à^s fens , fans donner aucune atteinte à la doctrine de l'Eu-
chariftie. Mais parce néanmoins qu'on ne didingue pas toujours
fi exactement ce qui leur appartient en effet, 6c que l'on com-
prend quelquefois dans ce qu'on appelle le témoignage des
fens, non feulement l'idée precifequi répond auxmouvemens
corporels, mais auffi celles quel'efprit yajoufte, & le jugement
qu'il en porte,c'eft une fuite de la dodrine de la prefen ce réelle,
qu'il y aie des Pères qui ayent eu foin de nous avertir de ne
croire pas nos fens fur le fujet de l'Euchariftie. Et c'eft auffi ce
que S. Cyrille de Jerufalem , S. Ambroife , S. Epiphane 6c
S.Chryfoftome font exprefTement.
M. Claude qui ne l'ignore pas , a cru qu'il s'en pouvoît fàu-
ver par une folution fubtile. Il y a , dit-il, deux rapports é^ deux
M. Claudel, témoiqnages des fens fur les myferes ^ l'un affirmatif ^ l* autre ne-
rép. p. 13^. gatif. Par le premier , ils nous ajfurentque le Baptême efi de l'eau ,
^ que l'Eucharifiie efi du pain ^ du vin -^^ par le fécond , ils
nous difent que ce n'cfi que de l'eau , que ce n'cfi que du pain ^ du
vin , ou pour me fervirdes termes des Pères , que c'efi de l'eauvui-
de , que cefl de fîmple pain é^ de fîmple vin , du pain ^ du vin
commun. Le premier de ces témoignages eft vray , // ne choque point
lafoy , ^ fumais les SS, Pères n'ont dit qtiille fa/Iufi révoquer en
&f des di^mîtez. tirées des Jens. ^^7
doute. Mais f les yeux veulent aller plu s avant ^^ dire que ce n'efi Ch. X I.
que du -pain , que c'eft de fimple pain , du pain ordinaire', alors il faut
que lafoy les corrige , ^ quelle fe fortifie de la. parole deJ.C. contre
la déception de leur témoignage. Et cefi ce que veulent dire S. Am-
brai fe , S. Cyrille de Jerufaletn ^ S. Chryfoftome.
Mais fi la philofophie de M. Claude s'ajufte allez bien aux in-
terefts de fa caufe,elle s'ajufte cres-mal aux paflages dont il s'a-
git. Car il n'y a qu'à \qs confiderer avec quelque foinj pour faire
évanouir cette fauflè fubtilité.
Les Pères ^ dit M. Claude , ne rejettent que le tétnoignage néga-
tif des fens ^ qui eft que l'Euchariftie n'eft que du pain &: du vin
commun. Et pourquoy le rejettent-ils ? C'eft , dit il , que l'Eu-
chariftie outre ce pain & ce vin commun , enferme encore une
certaine vertu feparèe.
Ainfi l'expreflîon naturelle par laquelle ils dévoient rejetter
ce prétendu témoignage négatif des fens, eft celle-ci ; Ne croyez^
pas que t Eucharifiie foit du pain d^ du vin commun. Car outre le
pain ^ le vin , elle contient encore une certaine vertu feparée du
corps de J. C.
D'où vient donc que jamais aucun d'eux ne s'eft avifé de s'ex-
primer de la forte ? Pourquoy la nature ne les a-t'elle jamais
conduits à ces expreffions fi naturelles ? Ils les trouvent fi bien v
à l'égard du Baptême j 6c ils nous difent fi nettement , qu'il ne
faut pas feulement croire ce que l'on y voit : Jdeo anie pra:diEtum efi Ambr.dehs
ut non hoe folum crederes quodvidebas , dit S. Ambroife. C'eft à '
dire qu'il faut croire ce que Ton voit & quelque chofe déplus.
Ils nous marquent fi precifément ce qu'il faut croire de plus, Ambr.ibid.
fçavoir que ces eaux nous nettoyent de nos péchez^:, que ces eaux pro-
duifent la régénération d^ le renouvellement qui efi une chofe fpiri. pu r j,
ifaf//^. Mais cependant ils ne nous difent jamais à l'égard du Ea- Sj.inMatth
ptême , qu'il ne faut pas croire que c'eft de l'eau j au lieu que
S. Cyrille de Jerufalem ditexpreflèment à l'égard de l'Eucha-
riftieque ce n'eft pas du pain.
Ils nous difent encore moins à l'égard du Baptême , que ce
n'eft pas de l'eau , mais le fang de J. C. & c'eft ce que S. Cyrille
ajoufte exprefièment : Tenez^ pour certain que le pain que voies
voyezjîefipas du pain, quoyque le goufi le jugejgfmais le corps de
Jeftis.Chrift.
On arefuté ailleurs la chicanerie des Miniftres , qui préten-
dent quequand S. Cyrille dit que le pain n'eft pas du pain, il
AAaa iij
cc8 Liv. VII. EXiimen des Argumins négatifs ^
entend fimplemencque cen'eftpas du pain commun jôciln'cfl
pas neceffaire d'en parler icy.
Mais ce qui fait encore mieux voir que les Pères n'ont point
fimplement voulu rejetter ce prétendu témoignage négatif des
fens j. ni dire fîmplement qu'outre le pain ôc le vm quelesfens
nous découvrent dans ce myftere , il falloit croire de plus que
ce pain & ce vin avoientune vertu fpirituellei c'eft qu'ils repre-
fentent ce que la foy nous oblige de croire fur l'Euchariftie,
comme eftant renfible&vifible par fa nature, &tel qu'il s'en
enfui ve que nous ne devrions pas voir du pain. C'eft à- dire
qu'ils enfeignent que la foy de ce m.yftere eft contraire au té-
moignage pofitif des fens. Et de même ils reprefentent ce que
les fens nous rapportent pofitivement comme contraire à la
vue naturelle &i fenfible que nous en devrions avoir.
La foy eft félon S Ambroife, que notu recevons le corps de J. C.
Si nous en croyons les Théologiens Catholiques, celafignifie
que nous recevons fon vray corps. Si nous en croyons les Mi-
niftres , cela veut dire par une manière de parler bizarre , que
nous recevons la vertu de ce corps. Les uns ou les autres fe trom-
pent. Mais les objections que ce Père propofe font allez voir de
quel cofté eft l'erreur,
Voiis me direz^peut-ejlre , ajoufte S. Ambroife , je vois autre
chofe , comment me dites-vous que je renvois le corps de J. C. c'eft à
dire que ceux de la part de qui il fe propofe cette objedion ,
concluant de ce qu'on leur difoic qu'ils recevoient le corps de
T. C.qu'ils le dévoient voir, àc qu'ils ne dévoient pas voir une au-
tre chofe, ils doutoient, parce qu'ils voyoient autre chofe j6c s'ils
n'euflent point vu cette autre chofe , ils n'euftent point douté.
Ainfi ils concluoient de la dodlrine del'Eglife qu'on ne dévoie
pas voir du pain^ôi ils concluoient de ce que l'on voyoit du pain,
qu'on ne recevoit donc pas le corps deJ.C. Tout cela s'accorde
parfaitement avec la doctrine Catholique. Car de ce que nous
recevons le corps de J. C. il s'enfuit félon la nature que nous
devrions voir le corps de J. C. & non pas du pain 5 ôcdece que
nous voyons du pain , il s'enfuit félon la nature que nous ne re-
cevons point le corps de J. C. Mais comment ajufter cela à l'hy-
pothefe des Calviniftes? S'enfuit-il de ce que nous recevons une
vertu feparée imprimée au pain , que nous la devrions voir , &
que nous ne devions pas voir du pain.'' Ne s'enfuit- il pas aucon-
I
^ des dïjficiike%_ tirées des fem. 559
traire que nous devons voir ce pain , & ne point voir cette ver- Ch. XI.
tu, puifqu'une vertu ne Te voit point ?
Ce que lafoy nous oblige donc de croire fur l'Euchariflie ,
cen'efl pas , félon S. Ambroife, que nous recevons une vertu,
mais que nous recevons le corps de J. C. Et félon le même
S. Ambroife, cette foy exclut non l'apparence du pain, mais
la realité du pain. Ce ncfi point , dit- il ,ce cjîu lu nature a formé ^
7nais ce que la bencdi'ciion a confier é , c'elVà-dire , c'eft le corps
deJ.C.&: non pas du pain. Ainfilafoy , félon luy, exclut ce té-
moignage pofitif des fens, dont il eft icy queftion.
L'Auteur du Livre des Sacremens reprefente encore plus
clairement cette contrariété naturelle qui efl: entre la foy de ce
my(lere&: le témoignage pofitif desfens.
Car qu'eft ce que la to y nous enfeigne félon luy ? Qjie cefi.
la vraye chair de J.C. ^ue nous recevons ^ ^ fonvray fang qui eji
nofire hrcuva'^e.
Mais que s'enfuit-il naturellement de cette foy félon cet Au-
teur? Il s'enfuit que nous devrions voir la vérité du fang, &:
que nous ne devrions point voir de vin. Et c'eft pourquoy il
exprime le doute qui s'élève contre cette foy en ces termes :
Voîis me dircx^fcut-eflre -.comment ejl.ce fa vraye chair , fui fque
je ne vois qu'une reffemblance du fang , S^ non la vérité du ftng ?
C'eft à dire qu'il s'enfuit félon la nature , de ce que c'eft la
vriye chair de J. C. qu'on la devroit voir, ôc qu'on ne devroit
pas voir la reffemblance du fang ,c'cft-à dire du vin. Et ainfi
cet Auteurreconnoît encore une contrariété fenfible entre ce
qu'il faut croire, & le témoignage pofitif des fens. Et comme il
établit ce dogme, ^ae c'eft la vraye chair de J. C. il nous apprend
par confequent à rejetter ce témoignage pofitif, qui dit que
c'eft du vin , comme nous l'avons fait voir ailleurs plus ample-
ment dans l'examen de ce palTage.
Nous avons droit d'appuyer encore ce que nous venons de
dire par toutes les preuves que nous avons jufqu'icy produites,
6c qui font voir que les Pères ont crû que lepain confacré étoit
réellement Si. véritablement le corps même de J. C. de qu'il
eftoit réellement changé en ce divin corps.
Car tout cela prouve que quand ils ont dit que le pain que nous
voyons n'eftoit pas du pain , ils entendoient que ce n'eftoit pas
du pain efFeclivement j c'eft-à-dire qu'ils ont rejette ce que •
^6o Liv. VII. E:famen des Argumens négatifs^
M. Claude appelle le témoignage pofitif des fens. Et M. Clau-
de au contraire n'a aucun droit de fefervir de fa prétendue fo-
lution , avant que d'avoir détruittoutes ces preuves ^Ôc établi
le fens chimérique qu'il donne à ces paflages , en prenant les
mots de corps de J. C. pour une vertu feparée 3 & comme on
eftafîuré qu'il ne le fera jamais, nous aurions fort bien pu nous
difpenfer de répondre à cette vaine fubtilité de témoignage
pofitif 6c négatif, qu'il n'aura jamais lieu de propofet raifon.
nablement.
On auroit pu étendre beaucoup davantage ces objedions &
ces réponfes , mais on n'a pas crû qu'il fuft ni neceflaire ni utile
de le faire , puifqu'il eft difficile que rien puifTe fuffire à ceux à
qui les éclaircifièmens qu'on a tâché de donner dans tout cet
ouvrage ne fuffiront pas ^ainfi l'on croiteftreen droit, en re-
gardant cette difpute comme terminée, d'en reprefenter main-
tenant l'origine & le progrés, & de réduire la queftion au point
où l'on l'a mife d'abord, dont les Minières ont tâché vaine-
ment de s'écarter. Ce fera le fujet du Livre fuivant.
Fin du feptième Livre.
LIVRE
f(^
LIVRE HUITIEME
CHAPITRE PREMIER.
Orizine iy- p'op'ès de ce dijfcrcïtd avec M. Claude. Son oplnih-
frété à ruer que les Socic'tcz^ d'Orient croycnt la prejcnce réelle.
Cond'iration des Miniflres à nier ce même fait. Utilité du
dejjein de les convaincre pleinement.
O N s I E u R Claude ayant fujec d'eftre fatif^
fait de la déférence que nous luy avons ren-
due, en entrant fur les in (lances qu'il nous en
a faites dans la difcuffion de. ce que l'Ecriture,
& les Pères nous enlèignent de i'Euchariftie
où il prctendoic avoir de grands avantages:
il eft juOe qu'il nous permette de nousdélaflerun peu dans ce
dernier Livre, en le rappellantau premier eftat de la queftion,
£c en luy reprefentant les divers détours, aufquels il a eu recours
pour embaraflér cette matière.
Il fe fouvienc fans doute de l'origine de noftre difpute, 6c
dudedeindu traitté qui l'a fait naiftre, dont je renouvelle-
ray la mémoire aux autres en peu de paroles.
Comme il y a quantité de gens qui n'ont pas moyen de
donner à l'étude des controverfes autant de temps qu'il en
faudroit pour examiner toute la tradition; qu'il y en a d'au-
tres qui n'en font pas capables 5 &: que d'autres enfin après
avoir entrepris cet examen n'y trouvent pas toujours afîèz
de lumière pour fe déterminer dans le choix de tant de diffé-
rentes opinions qui partagent ceux qui portent le nom de
Chreftiens , on crue qu'il eftoic utile de propoferàcesdiver-
BBbb
562. Liv. Fil I. Preuves authent. de l' union detEg. d'Or^
(es fortes de pcrfonnes une voye plus courte pour les aider
à prendre parti.
Cette voye confiftoit à leur montrer d'une part toutes les
Eglifes Chreftiennes unies au temps de Berenger & depuis Be-
renger,dans la confefîion de la prefence rëelie^ôcde lautreà
leur faire tirer de là cette confequence, qu eftant impolTible que
cette créance fe foit établie de nouveau dans toutes ces E2;lires
fans qu'il y ait paru aucune trace de cette innovation , on doit
croire que c'eft la dotflrine perpétuelle de l'Eglife.
Tout cela eftoit compris dans un fort petit Traître, Se ce fut
en le réfutant que M. Claude commenta defe fignaier dans le
monde èc dans fon parti.
Sa première réponfe contenoit toutes les ouvertures, & toutes
les adrelTes qu'il a depuis pouffees plus loin. II tafcha première-
ment d'éluder cette preuve par une voye d'exception en s'effor-
^ant de détourner les efprits de cette nouvelle méthode & en
leur prefentant un amas de difficultex tirées des Pères des fix
premiers fiecles, pour leur perfuader que le changement qu'on
pretendoit eftre impoffible , eftoit effeclivement arrivé. Mais
comme il jugea bien que le monde ne fe payeroit pas tout
à fait de cette defFaite, il répondit direc1:ement à l'argument
du premier traitté de la Perpétuité, en niant le fait , c'eft à
dire cette union de toutes les Eglifes dans la dodrine de la
prefence réelle , S>c en avançant un fait entièrement oppofé
qu'il exprima en ces termes deciCifs.
M. Claude i, le foutieïis , dit-il , ^ue la tîanl[uhfiantiation (i^ l'adoration au
Rép. p. 19. Sacrement font deux chofes inconnues à toute la terre à, la referve
de l'E'^life Romaine. Car ny la Grecs , ny les Arméniens , ny
les RuIJtens , ny les Jacobites , ny les Ethiopiens , ny en gênerai
aucun Chreflien, hormis ceux qui fe foumcttent au Pape^ ne croyent
. rien de ces deux articles.
Or comme lemot de tran(Tubfl:antiation comprend tant la
dodrinede la prefence réelle que celle du changement du
pain, il pretendoit foutenir par \l , que ces Chreftiens Orien-
taux ne croyoientny l'un ny l'autre de ces deux points , &
qu'ils n'eftoient d'accord avec l'Eglife Romaine ny dans le
dogme de là prefence réelle^ ny dans celuy de la tranfllibftan-
tiation.
Après avoir ainfî rejette ce fait qu'on avoit pris pour fon.
dément , dans la crainte qu'il eut qu'on ne l'en crufl: pas, il at-
I
auec l'Eglifè Romaine fur rEuchmfiie. jéj
taqua la confequence qu'on en avoit cirée, & il tafcha d'expli Ch. T.
quer par quelle voye ces dogmes auroient pu fe glifler dans
l'Egliie Latine, depuis le neuvième fiecle jufqu'au commen-
cement de l'onzième 5 mais il ne dit pas un feul mot de tout
l'Orient. Il s'arrefta uniquement à nier que ces Societez crullent
la prefence réelle, tant il eftoit convaincu qu'il eftoit ridicule
de prétendre que le Livre de Pafchafe etiffc perverti toutes
lesÈglifes Orientales qui n'en oûirent jamais parler.
On fuivit à peu prés dans la réfutation qu'on fit de cette ré-
ponfe de M. Claude la voyc qu'il avoit marquée. On tafcha
de luy faire voir l'injudice de ce détour artificieux, par lequel
il avoit voulu empefcher qu'on s'appliquaftà confiderer la for-
ce de cette preuve tirée de l'impoifibilité du changement
univerfel de créance fur un article fi important.
On détruifit les voyes par lefquelles il avoit tafcKé de mon-
trer que la créance de la prefence réelle s'eftoit introduite
infenfiblement dans l'Eglifè Latine durant le dixième fiecle,
ôcl'on confirma ce confentement des Eglifes d'Orient avec l'E-
glifè Romaine, par quelques preuves convaincantes, en té-
moignant eftre étonné que M. Claude euftofé nier un fait fi
confiant.
Mais cet étonnement venoit de ce qu'on ne connoifToit pas
encore fon efpritSc fon génie, & que l'on s'imaginoit que pour
l'obliger à fe rendre, il fuffifoitque les chofesfufiènt vrayes&
bien prouvées. On a efté bien contraint depuis de changer de
fentiment ; Et il eut grand foin de nous détromper fur ce point
dés fa féconde réponfe. Car bien loin d'y demeurer d'accord de
bonne foy de ce fait, qui nefepouvoic raifonnablement con-
tefter j il continua de le nier avec plus de hauteur & de fierté
qu'il n'avoit encore fait. Il s'efforça même de tourner l'Auteur
de la Perpétuité en ridicule fur ce fujet .• il prétendit répondre à
toutes fes preuves .- il en propofa pour fon fentiment qu'il appelle
convaincances 5 & il les conclut en ces termes , qui font voir
combien il croyoit avoir bien xtvS^v. Que l' Auteurne prétende donc
plus mettre de fon party les communions fe parée s du Pape. Car-qaoy ^^ ' *" , *
qu'on les put (fe accuferd' eftre tombées dans une ignorance ajjez^rof-
Jteredes myfteres du Chrifiianifme^^ d'avoir corrompu leur première
foy par beaucoup d'altérations ^ fi cf. ce qu'on ne fçauroit leur im-
puter la tranffuhfantiation {Cous laquelle M. Claude comprend
la prefence xcqWq) fans leur faire tort.
BB bb ij
564 L I V. V H I. Preuves authen. de t union des Eg. d'Or.
On avoite qu'on fut touché de quelque force d'indignation
en voyant une opiniaftrecé Ci déraifonnable i de forte que pour
elfayer fi l'on pourroit faire céder un Miniftre à l'évidence de la
vérité, on ralîèmbla dans le premier tome de la Perpétuité un
fi grand amas de preuves claires ëc precifes fur ce points qu'on
craignit avec raifon qu'il n'y en cuft trop , ôc que les ledeurs
n'en fuficnt chargez. En effet ce fut l'impreflion que ce livre fît
fur toutes les pedonnes équitables: & fi l'on n'euft eu foin de di-
verfifîer ces preuves par quelques évenemens hiftoriqnes qu'on
y a mêliez, à peine en euft-on pu fouftrir la multitude.
Ce fut dans cette occafion que M.Claude voulut montrer juf-
qu'où il f<^avoit porterfa hardiefieànierles chofes claires , &:
l'arc qu'il prétend avoir-de les obfcurcir. Car s'eftant engagé de
répondre à cet ouvrage pour fatisfaire ceux defon partie il ne
voulue rien abandonner de ce qu'il avoic avancé. Il foucint de
nouveau plus hautement que jamais que les Grecs ne croyent ni
la prefence réelle ni latranfiubftantiation. Il s'infcriviten faux
contre les Conciles qui avoient condamné Cyrille Lucar , con-
tre le livre d'Agapius, & contre celuy de Gabriel de Phila-
delphe. Il prétendit faire paiïèr pour faux Grecs, & pour pen-
fionnaires de la Cour de Rome ceux qu'il ne pouvoit éluder
autrement, & il tafcha de mettre defon parti les Grecs qui a-
voient vefcu avant ces derniers temps , en leur imputant une
opinion chimerique,qui excluoitSc la prefence réelle & la tranf-
fubflantiation, & qui n'eftoic différente de celle des Calviniftes
que par quelques termes. Il en fit de même àj'égard des Armé-
niens, deCopches, des Jacobites^ des NellorienSj 8cdes Ethio-
piens. Et tout cela avec tant de hauteur, de confiance, d'in-
iultes, que cela palîé tout ce que l'on en peut dire.
Quand il promet dans fa préface ce qu'il doit traitter dans
fon livre. On verra , dit-il, dans mon ouvrage, i.k fkuss'ETE^ de
cette fuppojition^ que Li vcritahle Eglife Grecque ^ les autres So.
ciclezJDricntcilcs croyent la tranffubfia'ûtiation , & qu elles adorent
le Sacrement, comme fait l' Eglifc Romaine. On y verra le contraire
y^ CLAIREMENT eflabli <^ les preuves de M. Arnauldjî SOLIUE-
MENT deflruites^ qu^ on s'étonnera^ je rrCaffure^quHl ait irai tté cette
matière avec tant d'êhlouijfement j ^ néanmoins avec tant de con-
fiance ^ tant de hatiteur.
Et en recueillant à la fin de fôn ouvrage le fruit de ces preten-
dues victoires. Si M. Arnauld, dit-il j a quelque chagrin de fe
avec l'BgliJe Romaine fhr l'Si'ichxrtfiie. j^j
•voir déchu de cette qrande cfpc)\tnce qu'il avait conccuc touchant les Ch. Î.
Grecs , les Arméniens^ é" les autres Eq^ltfes Orientales , cela mè^
me luy fera connoi^rc qn'ihie faut pas juger des chofcs fur lespre-
mieres apparences. Et plus bas ! Quant aux véritables Grecs , nous
fommes ajfurcz^ de deux chofcs , l'une qu'ils ne tiennent point la.
tranffuhfiantiation des Latins 5 ce que je croy avoir prouvé demo'H-
ST B< AT IV EMI.'NT} l'autre que ce font eux fculs qu'il faut appeller /a
véritable Eglife Grecque, quand même le parti contraire deviendrait
le plus fort.
Si l'on veut fçavoir ce que c'efl que ces prétendues demon-
ftrations, on n'a qu'à lire la Réponfe générale, ou l'excellent li-
vre du Père Paris Chanoine régulier , intitulé: La créance de
ï glife Grecque touchant la tranjfubfiantiation défendue contre la
réponfe du Minifire Claude. On y verra que ce ne font que de
miferables chicaneries indignes d'eftre propofées par un hom-
me fincere &: judicieux , &: que jamais perfonne n'entreprit au
contraire de combattre une venté iî claire, par àts raifons fî
peu vray-femblables.
Mais il me fuffit de faire remarquer que jufque icy M. Clau-
de a perfiftc à nier ce fait : que tout ce qu'on luy a peu repre-
fenterneluy apoint fait changer de refojution, & ne l'a point
porté à reconnoiftre qu'il s'eftoit mal engagé : Que bien loin
qu'on ait trouvé mauvais dans Ton partiiqu'il ait pris cette voye
de le deffendre, il en a receu au contraire des recompenfes
confîderables & il s'y eft acquis par là un grand rang Se une
haute réputation : & enfin que quelque fentiment que les Mini-
ftres ayent dans le cœur des prétentions de M. Claude, il ne s'en
eft point encore trouvé d'aflez fin ceres pour avouer qu'il s'é-
toit opiniaflré mal à propos àfoutenir des faits évidemment
faux.
Il paroift donc que ce deflein defoûtenir que les Societez
d'Orient ne croyent point la prefence réelle ni la tranfTubftan-
tiation , n'eft pas un enteftement particulier de M. Claude,
mais quec'eft uneconfpiration générale de tout le party. Quel,
que partagez qu^ils foient de fentimens parmi eux furcepoint
de fait, cette divifion n'éclate point au dehors. La crainte em-
pefche les uns de fe déclarer :£c nous verrons que l'impreifion
qu'elle fait fur les efpritsefl fi forte, qu'elleagitjufques fur ceux
qui font à Conftantinople, & qu'elle les empefche de rendre
publiquement témoignage à la vérité dont ils avouent qu'ils
BBB b hj
^66 Liv. VIII. Vrewves authen. de r union des ig. d'Or,
ionc convaincus. La plufparc des autres croyenc fans examen
ce qu'ils voyenc foutenu avec fierté dans le livre d'un de leurs
principaux Minières. Enfin ils s'uniflenc cous , quoyque par
divers motifs , dans cette prétention.
Comme nous avons ainfi moyen déporter encore plus loin
l'évidence de ce fait, êc de le mettre en un tel jour qu'on ne
p ourra plus le nier fans une folie toute vifible j il efl: important
de ne pas négliger cet avantage , ô^de faire voir aux fimples
Calvinifbes par cet exemple combien ils ont peu defujec defe
fier aux aflurances que leurs Miniftres leur donnent, que l'Ecri-
ture & les Pères favorifent leurs opinions, &: combien ils en onç
de croire au contraire que s'ils font aflez hardis pour les trom-
' per dans deschofesfi notoirement fauifes qu'ils en font con-
vaincus par des millions de témoins vivans, ils les trompent fans
doute avec bien moins de referve lorfqu'il s'agit des écrits des
morts, quine font plus en eftat delesdémentirj&qu'ainfi pe-
chantcomme ils font dans le principe de toute inftrudion , qui
eft U fincerité& la bonne foy , ils ne méritent plus d'eftre
écoutez fur des matières de Relidonoùron a tancd'intereft
de n être pas trompe.
Nous allons donc reprendre en peu de paroles l'argument
capital fur lequelroule tant le premier traittéque le premier
volume de la Perpétuité, afin d'avoir lieu d'y ajouter ces nou-
velles preuves. Il fe réduit, comme nous avons dit ailleurs, à ce
R.gener.c. i. fyllogifme conditionel. Si toutes les Communions feparées de
l'Eglife Romaine qui font répandues par toute la terre , fe font
trouvées unies au temps de Berenger avec l'Eglife Romaine
dans la créance de la prefence réelle , il efl; contre toute appa-
rence de raifon de s'imaginer qu'elles puiflent efl:re venues à
cet efl:at, par une innovation & un changement univerfel de
"" créance fur ce myfl:ere , qui fe foit introduit depuis Pafcafe
jufques à Berenger, comme les Miniflrres le prétendent. Or
toutes les communions fchifmâtiques d'Orient fe font trouvées
avec l'Eglife Romaine, du temps de Berenger, dans la créance
de la prefence réelle. Donc il efl: impoflible qu'elles en ayent
changé, c'efl: à dire qu'il eft neceflaire que la dodrine de la pre-
fence réelle ait efté perpétuelle dans toutes ces focietez.
Tout cetargument, comme on l'a remarqué au même lieu,
fe réduit à un fait que l'ony fuppofe,&;à une confequence que
Ton en tire. Le fait eft, que toutes les communions fchifmati-
d'vec ÏEglife Romaine furtêuchmfiie. 567
que d'Orient eftoient d'accord avec l'Eglife R omainCj dans la q^ j
doftrine de la prefence réelle, au temps de Bercnger.
La confèquenceeft qu'il eftimpoffible qu'elles foienc venues
à cet eftat par innovation.
Ainfi tout confifte à prouver ce fait & cette confequence.
On l'a déjà fait pleinement dans le premier tome de la Perpé-
tuité j& dans la réponfe générale: Et on le va faire icy encore
plus plemement, s'il fe peutjfans qu'il Toit même befoin de rnifon-
nemenr, parce que les preuves en confiftçront en des acles qui
le décident d'une manière qui ne fouffre point de réplique.
Je fçay que ce qu'on eft obligé de prouver eft, que toutes ces
communions Orientales efloient d'accord avec l'Eglife Romai- -
ne, au temps de Berenger fur la dodrine de la prelènce réelle.
Mais comme on a fait voir dans la réponfe generale,qu'on ne
fçauroit dire fans renoncer au fens commun^ qu'elles ayenc
changé de créance depuis Berenger jufques à ce temps icy, il eft
vifible, qu'en prouvant que toutes ces Societez croyent prefen-
rement la prefence réelle 6c la tranlTubftantiation, on prouvç
qu'elles la croyoient auffi du temps de Berenger. Nous com-
mencerons donc cette preuve par l'établifTementduconfente-
ment prefent de l'Eglife Romaine avec toutes ces Societez dans
le dogme de la prefence réelle, & dans plusieurs autres points.
Car quoy qu'il n'y ait que celuy de la prefence réelle qui foie
efîèntiel à l'argument du livre de la Perpétuité , on ne lailTera
pas de voir la tranffubftantiation, l'adoration, le facrifice, & di-
vers autres arti«;les prouvez avec la même évidence par les at-
tefl:ations,&aLT-es que nous allons produire, fur lefquelsnous ne
ferons aifcune reflexion, parce qu'ils font fi clairs 8c fi précis
qu'on ne fçauroit rien ajouter à leur évidence ny à leur force.
568 Liv. VII J. Vrcwves amhent. de l'union des Eg. d'Or.
CHAPITRE II.
Uwon de l'E'zlifc Grecque avec l' Eq^Ufe Romaine fur VEuchurifiie
frouvèe par l'attention He ,fcpt A'rchcvcfqKes d'Orient,
ON a déjà prouvé dans le premierTomede la Perpétui-
té l'union prefence de l'Eglile Grecque du Patnarchax
de Conilantinople.
Par le livre d'Agapius Religieux du mont Athos dont on
peut voir l'Extrait au livre \i. p. 43.
Par l'Ecrit d'un Seigneur Moldave infcré tout entier , p.
50. &c.
Par un Synode entier tenu en l'Ille de Chypre, l'an 1668.
rapporté p. 73.
On y a ajouté dans la réponfe générale, p. izS.
L'extrait d'un Catechifme de l'Eglife de Conftantinople,
imprimé à Venilé en 1635. & autorifé parle Théologien de
cette Eglife Patriarchalc.
L'Extrait de la célèbre ConfeOion Orthodoxe , fignée àçs
quatre Patriarches , 6i de plufieurs autres Evefques d'Orient.
p. 138.
Une confeffion de foy exigée par Methodius , Patriarche
de Conftantinople. De Hilarion Cicada Théologien de la
grande EglifC:, tirée des Regiftres de cette Eglife ^ p. 149. &;
plus au long, p. i6i. &c.
L'atteftationde huit Religieux du mont Athos p. 150. & 175.
L'Atteftation du Patriarche Methodius. p. 151. 6rc.
Le témoignage d'un Preftre de Candie nommé Michel
Chortacius , tiré d'un livre imprimé à Venife, l'an 1641,
rapporté p. i<;i3.
L'éclairciflement exigé du même Hilarion fur le Synode de
Chypre, qui confirme encore la dodrinede l'Eglife Grecque
fur l'Euchariftie ^p. 206.
Mais comme M. Claude ne s'eft pas encore rendu à ces té-
moignages 3 nous luy en allons fournir de nouveaux, dont le
premier fera celuy de fepc Archevefque^ Grecs ^ contenu
(dans l'Atceftation fuivante.
ATTEST.
a^i'ec ÏEglife Komnine fur ÏEuchuriftie. 569
'ATTESTATION B E SEPT
^Archevêques d'Orient.
C~^ Eux. là cherchent inutilement la vérité, qui ne cher-
^ chent pas fes ruiiTeaux par les fources Evangeliques , &
s'efforçant de l'établir feulement par leurs propres raifonne-
mens , & par une vaine Philofophie s'éloignent avec jufle
raifon du but qu'ils fe font propofez , & s'engagent dans des
précipices, tâchant en même temps d'y attirer leurs frères avec
eux. C'eft le propre des Calvinirtes qoi font en France, qui
enflez de vanité 6^ de hardieffe , calomnient impudem-
ment noftre tglife Orientale , & luy impofent hardiment les
plus noires impoftures, publiant par tout qu'elle s'accorde avec
leurs opinions, & confent à leurs phantaifics , quoique néan-
moins leur opinion abfurdeSc extraordinaire touchant le Saine
Sacrement de l'Euchariftie & quelques autres points, aiteflé
bafouée &: rejettée par des Conciles particuliers alTcmhlez à
Conftantinople,comme illégitime 5c inconnue à l'Eglife Orien.
talc. C'eG: pourquoy le tres.illuftre & très-excellent AmbalTa-
deur du Sereniffime ScTres-Chrétien Roy de France, Meiîire
Charles François Olier, Marquis deNointel , nous ayant de-
mandé un jugement véritable bi fincere des articles à nous
propofez : Nous fouffignez avons crn devoir eflTectuer une de-
mandé fi pieufe 6c Çi légitime fur les fentimens de l'Eglife
d'Orient.
Premièrement fjrle Saint Sacrement del'Eucharifliejnous
difons que le corps vivant de J. C. qui a elle crucifié , qui eft
monté aux Cieux , & qui eft alfis à la droite du Père , eft véri-
tablement prefent dans l'Euchariftie , mais invifiblement.
2. Que le pain & le vin , après l'invocation du Preftre , &
après la confecration , font changez de leur propre fubftance,
au vray corps & fang de J. C. & que quoique Icsaccidens qui
demeurent paroiflent fous les apparences du pain&: du vin, ils
ne lont néanmoins ni pain ni vin.
3. Que l'Euchariflie eft un facrifice pour les vivans & les
morts , établi par J. C bi. que les Apoftres nous ont laiifé par
tradition.
4. Que le corps de J. C. dans l'Euchariflie eft: mangé tout
entier impaffiblement par ceux qui le reçoivent, dignes ouin-
CCcc
Ch. 1 1.
jyo Liv. VI 1 1. Preuves authen. de F union des ig. d'Or.
dignes j l2s dignes le rec^oivenc pour leur faluc , 5cle.s indignes à
leur condamnation 5 6c qu'il eft immolé fansefFafion delang,
Se adoré juftemenc comme Dieu.
5. Qj-ie l'Eglife ordonne desjeunes&: l'abflinencede quelques
viandes.
6. Que les Chrétiens rendent à la Vierge une vénération
d'Hyperdulie , §c aux Saints qui font dans le Ciel un honneur
particulier, fans dmiinuer l'adoration qu'on doit à J. C.
7. Qu'il faut honorer relativement les images des Saints, &
non pas les adorer du culte de latrie.
%. Qu'il faut honorer bi. refpecler les Saints , comme ayant
fpufferc pour J. C.
9. Que les Evêques par un ordre établi de Dieu font au
defTus des Preftres , qui reçoivent la grâce divine par leur mi-
niflere.
10. Que rEpifcopateftrecefTaire dans l'Eglifede J. C,
11. Qiie l'Eglife Catholique, baftie lur le fondement des
Prophètes Se des Apoftres , J. C. en eftant la pierre angulaire ,
fera toujours vifible & infaillible.
II. Que le Baptême eO: neceflaire à tous les enfans des fidè-
les poureftre fauvez.
13. Que les vœux des Preftres & des Moines, & les prières
qu'ils font font agréables à Dieu.
14. Que les Livres deTobie , Judith , la Sagefle ,rEcclefîa-
ftique, Baruch,les Machabées ,font partie delà Sainte Ecri-
ture , bi ne font pçint rejettez comme ceux des Payens.
ij. Qiie lEglile Orientale reconnoîc aulîî lept Sacremens,
-comme elle l'a appris par tradition.
Nous, Enfans de l'Eglife Orientale , croyons toutes ces cho-
fes de cœur fans aucune difficulté, 6c les confelFons de bou-
che, ayant recjii de toute antiquité des Pères Scdesfaints Con-
ciles , la tradition qui nous fait ainfi croire , & ceux qui ont fur
ces points d'autres fentimcnsfont dans une erreur pernicieufe
& préjudiciable. Outre cela ils parlent impudemment dans U
fureur qui les apte contre noftre confeflîon orthodoxe & con-
tre l'Eglife d'Orient ,& murmurent contfelle avec la der-
nière infolence, voulant montrer qu'elle eft tombée dans \c$
fcntimens de perfonnes obfcures, £c qu'elle a abandonné les
coutumes 6c règles deies Pères, que les traces de ces mêmes
Pères ont autorifées, ôcles Synodes ont confirmées j comme
a<vec PEgUfe Romaine fur VEuchurïflïe. 571 '
celuy de Conflantinople fous le Patriarche Cyrille de Beroce, Ch II.
&:un autre peu après ^Parthenius furnommé le Vieil eflant Pa- Témoignage
triar'.he , qui condamnèrent des articles infâmes fous le nom ach^v^nlT
de Cvr''le T.nrar ^ 'e'^ reietterent comme des prodiges ôc dfs Conciles
faufletez qui s'accordoient avec les rêveries des Calviniftes. Et «""f<^°""e
1 ,' \ I 1 r I /-> n 1 1 CjriiltLucar,
la retutaiion o«.^ ces Chapitres Janscherde Cyrille, dans la- rcjcttezpar
quelle fes fauflltez eltoient renverfées, a efte mile dans les ^^-C'-u^e
Archives de la grande Eglife. C'eft pourquoy nous avons figne, '^°"^"^* ^
certifions tous les articles ci-defTus mentionnez à tous ceux qui
croyent Se pro^^siTent la véritable Religion.
DoNNi'àPera 1671. 18. Juillet. Signez,
Barthélémy d'Heraclee'. Metrophane deCyzique.
Jer£mie de Calcédoine. Antoine d'Athènes.
Methodius qv. Pisidie, Joachim de Rhodes.
Neophiti de Nicomedie.
EXTRAIT Jj'VlSfE LETTRE DE M. T)E NO INTEL ^
yimbajfadeur de fa Miijcj'lé Très Chrétienne à la Forte
de Confiantineple ce i^. Septembre 1671.
LA crainte où je fuis que votre zele ne nous fift foufTrir
avec impatience de recevoir de mes lettres fanseftre ac-
compagnées de quelques preuves du fait qui cft en queftion ,
m'oblige à vous en envoyer une fort authentique, puifqu'elle
eft ïïgnée de fept Métropolites. C'efl une atteftation de leur
foy fur l'Euchariftie , l'invocation des Saints ôc quelques autres
points importans. Quatre de ces Meflieurs. là eftoient rerirez
chez moy,pour fe garantir de la perlècution de Parthenius. Les
trois autres efloient ou dans le Palais d'Angleterre, ou chez
leurs amis ^ & quoique feparez de demeure , ils ont concouru
enfemhledans la même volonté, d'atcefterune vérité Çi publi-
que ,& qu'ils avoient déjà certifiée avec Parthenius j même en „.
la profeffion de Cicada. Ils ont lu les articles à loifir, &les mécdansU
ayant trouvez conformes à la doctrine deTEglife d'Orient, ils répouie gene-
ont commis le foin d'en drefler l'atreftation à un Papas qui a "^"^^
efté long temps en Angleterre &: en Hollande , t< qui ne parle
point en Calvinifte , ainfique vous le jugerez par lale«^urede
cet acte.
Ces Evêques m'ont remercié de la peine que je prenoisde
CCcc \\
cyi Liv. VI H. Preuves authen. de f union des Eg. d'Or.
vouloir afTurer la foy de leur Eglife contre les calomnies dont
on s'efForc^oic de la noircir , & m'ont afTuré qu'ils auroient bien
de la joye de fijner la même chofe dans un Synode.
CHAPITRE III.
Union de l' Eglife Grecque avec l' Eglife Romaine fur l' Eucharijîie ^
prouvée par les Atteflations des Eglifes de l'Archipclage.
oAtte^Ation de l Eglife de tljle Siphanto.
Confcflion de la 'Ooclrine de l' Eglife fainte de Siphanto touchant
le Sacrement de l Euchariflie.
AYant eftc informez d'un très-mauvais bruit que quelques-
uns des fuperbesHeretiques de nos jours font courir,pour
calomnier malicieufement nôtre fainte Eglife Catholique des
Grecs, nous attribuant fans fujet quelques-unes de leurs here-
fies, quoique la fainte Eglife Catholique de J. C. ait de tout
temps efté exempte de toute mauvaife doclrine&herefie ,afin
d'avoir un prétexte deperfifter dans leurs folles opinions, prin-
cipalement fur le fujet des faints Sacremens du corps & du fang
de J. C Et quelques perfonnes demandant à fçavoir exademenc
nôtre véritable fentiment fur le divin myftere de l'Euchariftie ,
afin de connoiftre clairement fi ces Hérétiques trouvent dans
des Catholiques comme nous un prétexte légitime à leurs mau-
vais fentimens , ou enfin fic'eft tout au contraire , nous avons
crû qu'il falloir par cette confeflion repoufier leurs vaines pa-
roles & nous juftifier de leurs injuftes foup<;ons.
Nous confefions donc publiquement, & publions clairement
contre cette folle perfuafion noftre fentiment, quieftceluy des
Grecs fur ces chofes; & noftre opinion que nous avons reçue de
j. C. Car il a dit lui-même , Cecy ejl mon corps , & Cccy efl mon
fang , fur lefquelles eftant/ortement établis , nous confeffons
comme nous le penfons , & difons d'une voix de tonnerre.
Premièrement , que le corps même de J. C. que la Vierge a
ccmçû fins corruption qui a fon ame 6c fon efprit, crucifié, réf.
fufcitc , élevé aux Cieux , &: afllsà la droite du Père , eft cer-
tainement &: verirablement prefent dans l'Euchariftie , bien
qu'il foit invifîble félon fa forme fubftnnrielle , 6c que c'eft le
Verbe même ,Dieu 6c Homme j qui eft dans le faine Pain,
•' arvec ÎEglifi Romaine fur ÏEucharïflit. 575
.. 2. Qu'il entre dans la bouche de tous ceux qui le reçoivent Ch. IIi,
des dignes , & de ceux qui ne le font pas , pour le falut des di-
gnes , & pour la condamnation des indignes.
5. Que le pain & le vin font changez & transélementez j de
forte que leurs fubftances & leur nature s'écoule & fe détruit
entièrement, & que les fubftances du pain & du vin ne demeu-
rent plus après la confecration, mais le corps même 6c le fang
de J. C. prêtent en la figure & gouft du pain.
4. Que l'Euchariftie eftun véritable facrifice que l'Eglife fon-
dée fur les loix établies par J. C. offre par tradition des Apô-
tres pour lesvivans &les morts.
f. Que le faint pain devant la confecration efl: honoré d'un
culte relatif comme antitype du corps de |. C. mais qu'après la
confecration il le faut adorer d'un culte de latrie , car alors il
eft J. C. tout entier,
6. Qu'il faut que les Chrétiens invoquent la fainte Vierge 5:
les Saints qui font dans le Ciel à leur fecours, &: que par là J. C.
nôtre médiateur n'efl: ofFenfé en aucune manière, mais qu'il en
eft plus honoré.
7. Qu'il faut honorer les Saints & leurs Reliques.
8. Que nous Orthodoxes devons honorei: leurs images d'un
culte relatif
9. Qu'il y a fepc Sacremens de l'Eglife ,f<;avoir le Baptême ,
le S. Chrefme , la Communion, la Pénitence , l'Ondion des
malades , l'Ordre facré , & le Mariage.
10. QLie les Evêques font au delfusdes Preftres , Si qu'ils ont
feuls le droit de les ordonner.
11. Que le gouvernement d'un Evêque Orthodoxe & ver-
tueux eflneceifaire à l'Eglife.
n. Que l'Eglife Catholique ne peut jamais manquer contre
la fainte doclrine.
13. Queles Livres de Tobie, Judith , laSagefTe, l'Ecclefiafli-
que , Baruch , & àts Macabées , , quoiqu'apochry phcs chez les
Hébreux, font néanmoins partie de la fainte Ecriture.
Atlianafe Archevêque de Siphanto, ^
Parthenius Choretis Prédicateur de l'Evangile.
Nicolas Canditijs Preftre £c Oeconome de Siphanto.
Le Preftre Mancganaris Sacriftainde Siphanto.
George Preftre Ruiïîen Protopapas de Siphanto^
CCcc iij
X75 Liv. VI M. Freuojes nuthen. detuniond^s Eg. d'Or,
Antoine , Jeroulbeneris , Protofincelle de Siphanto.
Le Diacre Ermartis Protonocaire de Siphanto.
ATTESTATION B^ r EGLISE D'ANDROS^
L'Atteftation de l'Eglife d'Andros contetiarit a'&ïofuriTén'r'
les mêmes termes , on ne l'a point inlerée. Elle eft; fignée
par Jacques Archevêque d'Andros.
Denis ancien Archevêque de Milo.
Jean Prcftre Econome d'Andros.
Stamafius PreftreSacriftain d'Andros.
ATT eSTATION DE L'EGLISE
de Siphanto fur Agapiîi^.
N nous a demandé à l'Eglife de Siphanto, touchant la.
vie du Moine Agapius de Crète, qui a compofé en langue
vulgaire un Livre intitulé , le Salut des Pécheurs , fi c'eftoit un
homme qui eull: quelque vertu ;& nous témoignons félon la
réputation qu'il a parmy la plupart des Grecs , que c'eftoit un
homme vertueux &• vénérable, & qui a fait honneur à l'Eftac
Monaftique. C'eft pourquoy nous avons donné cecy pour faire
eonnoiftre la vérité. 1671.
ATTE ST ATI ON B E L' E G L I S ^
de l'ijle d'-^naxia.
NOus foufïïgnez Preftres Se Clercs de l'Ifle d'Anaxia „
ayant appris par des perfonnes dignes de foy, que quel-
ques Calviniftes de France nous impoloient injcftement de
i'ouftenir nous & noftre (ainre Eglife Catholique d'Orient les
opinions qu'ils ont touchant l'Euchariftie & quelques autres
points particuliers , pour leur fermer la bouche , & que noftre
foy paroifîè à toute la terre, nous faifons ce prefent écrit ,
afin qu'il eu ioit un témoignage.
Premièrement donc nous confeiïons que dans la fainte Eu-
charift.e eft contenu, & fe trouve fubftantiellemcnt & réelle-
ment nôtre Seigneur J. C. avec fon corps, fon fang, fon ame
& fa divinité, & que par laconfecration la iubftancedu painôc
du vin eft changée au corps & au fang de J. C. lequel chane-
amev tEglife Romaine fkr l'Euchxridte. çyj
menteft appelle par les Théologiens tranlîubllantiation : de Ch.III.
force qu'il ne refte plus rien du pain &: du vin que les feules ef-
peces ou les apparences du pain & du vin, & que la fiinte Com-
munion donne beaucoup de grâces à ceux qui la reçoivent
avec un coeur pur &: net , comme au contraire il y a une grande
punition pour ceux qui la reçoivent avec une conicience cri-
minellCjôc que la ïaince Euchariftie doit élire adorée d'un culte
de latrie.
2. Nous confèfTons que lafainteEglife a pouvoir d'ordonner
le jeune Se l'ahftinence de quelques viandes.
. .3. Que nous avons befoin du fêcours des Saints , &:que nous
les pouvons invoquer avec toute lorte dejuftice, fans commet-
tre aucune injuftice contre J. C. nôtre médiateur.
.4. Que nous honorons juftement leurs faintes Reliques.
. 5. X^e c'eften cela que confifte le culte relatif
,, j6.Que les Sacreraensde l'Eglife font fept^fçavoir le Baptê-
me, la Confirmation, la Communion, la Pénitence, l'Ondion
des malades , l'Ordination & le Mariage.
7. Que les Evêques font au defllis des Preflres, & fêuls les
peuvent ordonner.
8. Que le gouvernement de l'Evêque eft neceffaire dans l'E-
glife.
9. Que la fainte Eglife demeurera jufqu'à la fin du monde
inébranlable & vifible.
10. Que cette même Eglife eft infaillible.
11. Enfin que les Livres deTobie, de Judih , de la Sagefle ,
del'Ecclefiaftique, de Baruch & des Machabées font partie
de la fainte Ecriture.
Nous confelTons toutes ces chofes^êc pour confirmation de
la vérité , nous faifons ce prelent écrit , 6c le fienons de nnftre
popre main, A Anaxiale 11. Juillet , l'an du Seigneur 1671.
Tzan Preflre ,.Ecotwn>e d'Anaxia.
Séraphin Religieux & Cor- Evêque.
Damafcene Religieux & Vicaire de l'Archevêque.
Sophronius Religieux & Confefleur.
Maciire Reiisiieux.
Le Papas George fjLiXicropyoi.
Le Papas Nicolas Econome de Drimalia.
Le Papas Nicolas Sacrillain du même lieu.
Papas Nicolas Melifurgus,
p6 LïV.YlU. Preuves autben.de Tunion des Eg.d'Or,
Le Preftre Marc Raropulus.
Callinicus Religieux.
Jacques Preftre x.êf/2êAAa«.
ATTESTATJOl^ DES EGLISES BES ISZES
de Cephalonie , Zante é^ Itaque.
Payfius par la mifericorde de Dieu Archevêque de Cepha-
lonie , Zante 5c Itaque.
ESTANT venu à nôtre connoiflance que quelques héréti-
ques de France calomnient nôtre Eghfe d'Orient, com-
me eftant participante dé leurs here(îes, non feulement fur le
fujet du faint & vénérable corps du Seigneur dans l'Euchari-
ftie, mais auffi fur d'autres points^nous avons crû eftre obli-
gez à repoulTer cette calomnie qu'ils avancent contre nôtre
Eglife , 6c de faire paroiftre , déclarer & témoigner clairement
que nôtre Eglife d'Orient a toujours cru 6c croit par la grâce
de Nôtre Seigneur J. C.
Premièrement, que le corps de nôtre Seigneur J. C. crucifié
pour nous , qui a efté élevé au Ciel ,6c eft affis à la droite du
Pere,eft réellement 6c invifiblement prefent dans le faint pain,
quand il eft confàcré par les Preftres.
2. Que le pain 6cle vin après la confecration du Preftre, font
changez de leur propre fubftance en la véritable ^ propre fub-
ftance de J. C.
3. Qiie l'Euchariftie eft un facrifice établi par J. C. pour les
vivans 6c les morts , 6c qui nous a efté donné par la tradition
des Apoftres.
4. Que le corps de J. C. eft abfolument mangé dans l'Eucha-
riftie impaifiblement par celuy qui le reçoit, qu'il eft offert
d'une manière non fanglante, 6c qu'on l'adore comme Dieu
par une adoration de Latrie.
J. Que l'Eglife peut ordonner des jeunes , 6c défendre de
certaines viandes.
6. Que ceux qui prient la Vierge Marie 6c les Saints qui font
dans le Ciel , rendent à J. C. l'honneur qui luy eft dû.
7. Qii'il eft jufte d'honorer 6c de loiier les Saints.
8. Qu'il eft à propos d'honorer les images par rapport j c'eft-
à-dire par un culte relatif
9. Que les Evêques par l'ordre établi de Dieu font au deflus
des Preftres , donc ils re<^oivenc la grâce facerdocale.
10.
i
dnjec TEgîifè "Romaine ftir tEuchariflie. 577
j^io. Que la dignité Epifcopale eft necefTaire dans l'Fgliie de Ch. IIÎ.
Jesus-Chmst.
I r. Que l'Eglife Catholique a eflé pendant tous les fiecles vi-
£ble fi infaillible.
II. Qu'il y a fept facremens de TEglife.
13. Que les Livres de Tobie , Judith , la SagcHe , l'Ecclefîa-
ftique , Baruch & les Machabees, font partie de TEcriture
Sainte , 6i lonc reconnus pour tels.
Nous avons fait cette déclaration , afin que notre foy pa-
roille afluréeSi ferme dans les chofes où oneft en peine il nous
croyons mal & autrement que cela,& pour en faire un aCt&
qui puiiTe fervir d'Original , nousavons voulu l'accompagner
de nos foufcriptions & déclarations de nos fentimens.
PaysiuS Archevêque de Cephalonie , Zante ^ Itaque i^fouf.
cris ^ confens a. ce qui a efté écrit ci-deffie^s,
T I M o T H fc'£ , Ty pâlie Protopapof de Cephalonie.
Clément Prcftre Proto.Syncelle de la grande E^life.
Gerasme Coulompis Prefire (jr Econamè de Cephalonie.
EsTlENNE Preftre ^ SAcelLirius de Cephalonie.
Jeak Lycoudis Preflre ChartophyUxde Cephalonie.
Nicolas Mycalitzes PreftreSicvophylax de Cephal&nie.
Theophane Religieux Prcjire de Petinz^.
Timothe'e Samicus Reliz^icux ^ Abbé du Sepulchre,
SiMEON Genatha Religieux , Abbé du Monajîere dit iiffor.
Metrophane ComjTopulus j Abbé du Mona^ere dit ^x^-
Parthenius OloubarduS PrcjIre Abbé du Monajîere du.
Prophète Elie.
Caliopius LitadaS Rstiy eux Abbé du Monafiere deS, André.
Daniel Dania Religieux Abbé du Monaftere de S. Jcafi-
Baptijie.
Chrysanthe Zt R^ u s Religieux Abbé du Mono/} ère de tcuy
les Saints.
Metrophane Religieux dit Li'&.iardopulus , Abbé du Mona.
fiere de Omalle.
Chariton Religieux Abbé du Monaftere de la Source de Vie.
S1MEON Grouspas Religieux Abbé de S. Nicolas.
Metrophane Religieux é- Abbé du M. de la Sainte Vierge.
loANNIOlUi Religieux Abbé du Mont de l'Apoflre S. André.
DDdd
57^ Liv. VI î I. Preuves authen. de V union des Eg. d'Or.
D I o M E D E Rclipcux dit Netaxai^ Abbè du Mont de S. Michel.
Constantin Balsamon Grand Vicaire de l' Archevêque 62
Proropnpas de Zance , j'afllire ainfi 5c déclare que non feule-
inentlEglife Orientale & Oecumeniquede J. C. croit ain fi ,
& rejette ces herefies , mais enco're qu'elle anathematife tous
ceux qui ont ces fentimens , ôc-ks rejette de (à communion ,
comme des membres pourris.
HiACiNTE Matz^rgtis Preflre ^ Econome de Zante.
George Prc/Ire SacelLtnns de Zante. .
EiJSTATHiuS Pre/he ^ Scevophylax de Zante.
Hector Pas us Preftre (^Canophylax de Zante.
Constantin Eleaza-r Preflre &■ Sacellion de Zante.
Jean Calchias Preflre ^ Protecdicus de Zante.
Anastase Athanasakis Preflre Protonotaire de Zante.
Pierre Aboures Preflre Lo^o thêta de Zante.
Basile Catramis Preflre Ganticius de Zante. T
Stammatius Roucanes ^reftre Jeroînnemon de Zante.
Mathieu Roucanes Religieux du Monaflere de Saint-Jean-
Bapùfle dans le Château de Zante.
Cette Attcftation eft écrite partie en Grec vulgaire,
partie en Grec littéral.
ATTESTATION DE L'EGLISE DE L'ISLE
de Mycone.
A LA GLOIRE DE DIEU LE PERE.
NOus fouiïîgnez Evêques & PreHres, ayant appris par
des témoignages certains & mamfeftes qu'il y a quel-
ques Hérétiques dans le Paysdela France, qui avec une har-
diellè extraordinaire , & fans crainte de Dieu nous im.pofenc
quelques erreurs contraires à la Foy que nous profclFons.^ &
principalement fur le Sacrement de la Sainte Euc.':^'-iîli^- , ^r
quelques autres points particuliers : Nous avons refolu &: dé-
cerminé, félon ies règles qui s'obfervent dans nôtre Eglife, de
nous oppoier à une fi grande inlolcnce , 6c de la reprimer , en
montrant la faulT;ré de leur calomnie par uneexpofition fin-
cere & véritable de nôtre Foy fur ce Sacrement , & furplu-
ficnirs autres points dont nous fommes informiez.
C'eft pourquoy nous croyons 6c certifions c]i;e le propre corps
ai'ecrEgli/è Komaîne /uriBucharifîie, ^79
de J. C. vivant quia eftë crucifié ^ qui eft monte aux deux ,;2c Ch. III.
qui eftalFi^àla droite du Pere,eft prefenc dans la fainte Eu-
charilbe , bien qu'il loitinvifible ,& qu'il ne paroifle point.
Qu'il entre dans la bouche de ceux qui la reçoivent bons &:
mauvais, pour le faluc des bons &: la condamnation des roé-
chans.
Que le pain & le vin font véritablement changez, &: perdent
leur propre iubllance ; de forte qu'après la Conlecration la
fubftance cki pain 6c du vin ne demeure plus, maisle cor^sôC
Je fang de J. C. efi: preient fous la forme du pain i>: du vin.
Qi-ie la lamte Euchanftie eft un véritable Sacri^fice , que
jîorre Eglife fondée fur les loix établies par J. C. &L avec la
Ks;a."!tion des Apoftres , offre pour les vivans & pour les
^orts.
Que le corps de J. C. prefenten la fainte Euchariftie doit
eûreadoré d'une adoration de Latrie.
Que l'Eglile peut ordonner aux Chrétiens de sVoilenir de
certaines viandes.
Que les Chrétiens ontbefuin d'invoquer à leur fccoiirs la
-fainte Vierge &: les Saii ts qui lont dans le Ciel ,& que cette in-
vocation nebleflèpoint J C. nôtre Médiateur.
Qii'il faut honorer les Images parun culte de fervitude relatif.
Qu'il y a fept Sacremens de l'Eglife.
Qiie les Evêques félon l'ordre établi de Dieu font au deffus
des Preftres , & qu'eux feuls peuvent les ordonner.
Que l'Eglife Catholique fubfiftera toujours, fine deviendra
point invifibie.
Que l'Eglife ne fe peut tromper.
Que les Livres de Tobie, de Judith .de la Sageffe, de l'Ec-
clefiallique, de Baruch £c des Machabées lont partie de la
Sainte Ecriture.
Que nous devons honorer les Saints & leurs Reliques.
Marc Prcfire Econome de M icône , Grand T^icairc de l'Eve.
que.
Le Papas Laprianm Sdccllamts.
DemetriuS SrevophyLix.
Georges Cartophylax.
Joseph Religieux.
Le PApas Philoièe premier Chantre.
D D d d i)
580 Liv. VWLVrewves tiuthen. de Tuntondes Bg.d^Or.
Le Papas Isaye.
Le Papas Pantelei.
Le Papas Baptiste.
Le Papas Gerasj.m J^idus. Je certifie ce qui eft ci- deflus.
ATTEST AT I O N B^ L'EGLISE
de l'Jjle de Milo.
AYanc entendu parler d'un très- mauvais bruit qu^oo fait
courir contre nous qui femmes de l'Eglife Grecque, &
Habitansdel'lflede Milo, à fcavoir qu^il yaquelques perfon-
nesenfansdes Calvmifl:es,quife croyent à la vérité fortfages,
&qui néanmoins ne font pas dans les véritables fentimens , qui
difent que nous autres Grecs Orthodoxes avons des fentimens
femblables à leurs mauvailês opinions, nous avons crû qu'il
eftoit à propos de reprimer leur Folie ; parce que nousau-
tres Orientaux & Catholiques ne foufFrirons jamais d'eftre fe-
parcz de la Foy qui nous a eftë donnée par Jesus-Christ , &
des Dogmes des Ap^oflres &: de nosPeres.
Seigneur J. C. que cela n'arrive pas. C'efl: pourquoy pour con-
damner leurs méchantes herefies, pour repoufler leurs calom-
nies, &diiri,per le mauvais bruit qu'ils ont fait courir, nous
avons donné ces Articles, pour fcrvir de témoignage de la pieté
de nôtre foy , & pour fervir d'inftrudion à ceux qui voudront
embrafler la Foy-Orthodoxe.
Premièrement, nousconfefTonscontr'eux , félon la tradition
très- manifefte de J. C. du Vaiflèau d'Election, de tout le Chœur
des ApoftreSjIe confentement gênerai des Saints Pères & des
Conflirucions orthodoxes , que ce faint pain de l'Euchariflie
<3ue nous qui fommes Preftres consacrons tous les jours, eft le
propre corps àz] C. crucifié , refiîifcité , élevé au Ciel,&:afiîs
à la d-roite JuPerc , &: ce qui eftconfacré dan*" '^^ calice, noa'-
croyons que c'efl: le précieux fang du Sauveur répandu pour
nous.
Secondement, nous difons à haute voix , que dans ce terri-
ble Sacrifice de l'Euchariftie J. C. eft: tout entier, c'efl:-à-dire
le Fils qui efl: la parole deDieuincarnéeavecfaûinteame &:
fon efprit.
Troifiémement , que depuis ces paroles , cccy efl le corps ^
le fin^i ces myfteres re<^oiverii une puiiiance qui les difpo-
avec r EgU/e Komaine fur r Euchariflie , j8i
fè à la confecration i & dans la deuxième prière il ne refte Ch. III.
plus nila fubftance du pain ni celle du vin, mais les feules efpeces
& accidens du pain & du vin i & le pain cfl: tranflubftanciéêc
eft confacré au corps de J. C. vivant Ranimé, comme nous
avons dit ci- deffus. De même le vin eft tranflubftancié & de-
vient le véritable fans de Dieu d'une manière admirable.
4. Que nous adorons ces Mvfteresde l'Euchariftiea'une ado-
ration de Latrie. Car queile autre adoration leur pourroic-oa
rendre , puifquej. C. eft en eux tout entier?
j. Que l'Euchariftie eft un véritable Sacrifice , que nous qui
avons l'honneur d'eftre Preftres , offrons pour les vivans Zc
pour les morts.
6. Qye ces Myfteres apportent un grand avantage à ceux qui
.les reçoivent avec une amepure, & qu'ils font le contraire à
ceux qui s'en approchent autrement.
7. Que l'Eglife peut dans les temps & jours neceflaires fans
aucun fojet de fcandale, ordonner des jeunes aux fidèles, lorf-
qu'ilya quelque neceffitéou quelque utilité dans JesieuTnes,
comme dans les temps de fecherefle, de guerres, de maladies
contagieufes & d'autres chofesfemblables, ce qui ne va point
à la deftruclion des traditions Ecclefiaftiques.
8. Que nous invoquons le fecoursdes Saints , & que nous
honorons leurs Reliques comme faintes , & que nous les pre-
nons pour nos IntercelTèurs fans bleifer la fov Orthodoxe -, ni
l'honneur de J. C. Dieu & homme notre médiateur auprès de
Dieu.
9. Nous confeiTons qu'il y a fept Sacremens de l'Eglife , à
fcavoir le Baptême , le S. Chrcfme , la Communion , la Péni-
tence , le Sacerdoce , l'Onclion des malades, &: le Mariage
honorable , Ttyn^s ya.fJi.es.
10. Outre cela J. C. avant promis à l'Eglife Catholique
d'eftreavecelle jufqu'ala fin des fiecles , nous croyons qu'elle
•demeure infaillible dans la Foy,&: qu'elle demeurera julqu'a !a
fin, êc après la confommation des fiecles. Pour une Eghfeparti-
ticuliere il peut arriver qu'elle fe trompe en quelque opinion-.
11. Nous confclTons encore que lesLivres deTobie,de lu-
dirh, de la Sageife, de Baruch, de l'Ecclefiaftique &: des Mâcha-
bées font parties delà fainte Ecriture.
II. Qi-ie les Evêques (euls ont autorité fur les Preftres
paç lefquels , quand il s'en trouve de vertueux & d'ortho-
D D d d ii j
jfi Liv. VMI. Treu^ves tvuthen. de l'unianJ-es ig.d'Or.
î î .hD doxes , l'Eglife elt .ucilemeot gouvernée , & comme il eft ne-
ceiTaire. lr.n!nnt£.
GiRASiME humble Archevêque de Milo , je certifie cecy.
Matthieu Prejhe Econome de Mtlo , certifie comme deflus.
Guillaume Prejhe CLorevèque de Milo.
Q^oKCi. Prefire Scevophiilax.
M I C H A E L Prejlre Chanophylax.
Georges Prejhe (^- Sacnjhiin.
Jean Prcftre Promoteur de Milo.
^■HhW hS Religieux ^ Abbé.
N 1 C E P II O R E Rcliyeux é^ Abbé.
N I c o ij E M E Religieux 5-^ Abbé.
D A M A S C t N f Religieux.
Germain Religieux,
NtGPHii E Relipiux ér- Archimandrite.
ATT ESTAT 10 N T) E rBGZISE
de l'Jjle de Chio.
S'Eftant élevé une aflTez grande difpute fur la Foy des
Clirétiens qu'on doit eftimer laine Se Orthodoxe, & plu-
fieurs allurant que l'Eglile d'Oricnr avoir quelques opinions
m^iuvaifes, & contraires aux véritables i'cntimens , &: qu'elle
etoit dans les mêmes opinions qu'eux, ceci a efté écrit de Chio
pour la réfutation de ce menfonge &. la confirmation de la vé-
rité, ou on trouvera ce que TEglife d'Orient tient pour Ortho-
doxe , 5c. comme établi par l'Ecriture & par les faints Pères.
L'an 1571.au mois d'Odobre, Indiclion première.
Premièrement, nous croyons que la rranlfubftantiation du
pain & du vin au corps 6c au fang de J. C. fe fait par le Preftre
avec les poiroles de nôtre Seigneur.
•j l- Que la chair & le lang entrent dans les Communians.
-f 3- Qu'après la confecration le corps & le fang demeurent
dans la fainteEuchariftie. • i
4. Que la lainre Euchariftieeft offerte parles Preftrespour les
vivans & pour les morts.
5. Qu'on luy doit une adoration de Latrie.
6. Que l'Eglife ordonne les jeûnes comme elle veut.
7. Elle dit que ]. C. eft le feul médiateur pour le péché
originel Se les perlonnels , & qu'après fa Rciurredion tous
avec rBgii/e KomcLwe jfur tEuchmfllc. 583
les Saints 1-e fane pour les chofes donc noas avons befoin. Ch. 1 1 1.4
8. Que Dieu eft adoré d'une manière différence de celle donc
on honore les Saints & leurs Reliques, Dieu par un culte de.
Latrie, la Saince Vierge d'Hyperdulie , Scies Saints de D
<). Elle rend un lianneur relatif aux Images.
10. L'Eglife a fept Sacremens , le Baptême, le Chrefme, la
fainte Euchariftie , la Pénitence , l'Onclion des malades , le Sa-
cerdoce , & le Mariage.
11. Que les Preftres font ordonnez par les Evêques, par qui
l'Esilife doic eftre neceflairement gouvernée.
12. Le gouvernement des bons Evcqueseftfortutile.
13. Que TEglilène fe trompe jamais. , ^ Jf
14 Qu'il y a deux Eglifes , la vifible &: l'invifîble j celle d'icy
bas eft vifible , celle d'en haut invifible.
15. Que les Livres de Tobie , Judith , de la SageHe, deSyrac,
de Baruch ,des Machabëes , ionc partie de l'Ecriture, &fonc
lus comme tels.
L'Archevesque^^ C^/>.
\Gn ACE Econome de Chio.
AktoinE Prcftre. Le Prcflre Parthcnins , Treforicrde Chio.
Constantin Prejire , Sacrifiain de Çhio.
NiCOLifs Frcftre , Ecclcjiarque de Chio.
AflMEZiNUS Prcfire .^ Jeromnemon de Chio.
Jean Preftre .^ Secrétaire de Chio. v'Tto^Mjiu.xTÔypApas.
"Nicolas Prej2re , Prédicateur de l'Ez\.'?:^i/e.
Clément Religieux de la Com/niDiautê des SS. Cojme (^ T)a.
mien.
Parthenius Religieux des fa in t s Apoflres.
Manuel Sakes Protonotaire de chio. ] ay fiçrné en fcy de
cecy. ' ^--^'^^ . ^ ' " ^
George Prefirc .^ Carlophylax de Chio.
MiCHAEL Prcfire , premier Défenfcur , ou Promoteur , ■z^piTj'îo-
Nicolas preftre , Rhetor de Chio.
Michel Officiai de Chio.
VnoTiTjs Pi Cjlre Logothc ta. '•> f . '
G A: R.FL Religieux , Docleur é^ MaiJIre dé la Communauté de
fiim f/'i.ctor.
84 Li V . y II I. Trewves nuthen. de t union des ig. d'On
CHAPITRE IV.
"Union de l'EqJ.ifc Grecque avec l'E^life Romaine fur lEuehd-
rifiie , prouvée far le tèmoiyqa'ie de plujteurs Jlbbez, , Religieux
^ Papas Grecs , contenue dans quelques Relations de Mon-
fieur de N oint cl Ambaj] ideur de Sa Majcpè à la Porte , ^par
la Lettre de J^onjicur Panaioti y premier Interprète du Grand
Seigneur.
COmme il n'^y a point de moyen plus propre pour s'aflu.
rer qu'une doclrine eft généralement re(^ûë dans une
Eglife,quede ne s'en infoimer pas feulement de ceux qui y
tiennent les premiers rangs, mais auffi du commun des Eccle-
fiaftiques , des Religieux , &: même dt;s Laïques qui la compo-
fent , je ne feray pas difficulté de rapporter rci divers Extraits
des Relations que Monfieur de Nointel AmbafTadeur du Roy
à la Porte a envoyées à fes amis à Paris , qui en contiennent
des témoignages qui perfuaderont toujours , non feulement
tous ceux qui connoiffent particulièrement la parfaite fînceri"-
té decePuy qui les a écrites j'mais aufîî toutes lesperlonnesfen-
{ç.t% qui ne s'imagineront jamais qu'un homme d'honneur qui
fert de Miniflre à un grand Roy dans un employ confiderable,
voulufl hazarder fa réputation , en publiant des faulïètez dont
tant de gens auroient inrerefl de le convaincre, & tant de
moyens de le faire.
RELATION De MOM'SIEUR DE NOINTEL
-^mbaffadeur de Sa Majefic Très- chrétienne à la Porte , conte-
nant Le récit d'un entretien avec l'Abbé du Monafi^re de Mau-
Tomate.
LE premier jour de Septembre j'allay me promener à
Mauromale, qui veut dire en. Grec vulgaire, Pierre Noire^
c'eftpourquoy les Turcs l'appellent Karatach , qui Hgnifiela
mêmechofe. C'eft une Abbaye de GrecS) fituée en Europe ,
au delà des féconds Châteaux. Elle eft à micofte , & dans un
enfoncement auquel on arrive par un chemin large, où le char-
roy
a.'vecïEgUfe'KomùnefurÏEuchû.riflle. _f87 '
roy peut pafler , 6c donc l'accès n'efl point difficile , parce Ch. IV
qu'on monte en coiirnanc.
Les Religieux foie au nombre de quarante cinq qui vi-
vent fous Ja Règle de faint Antoine , & lous la conduire
d'un Abbé. Us gardent une perpétuelle abftinence de chair,
& l'obfervent plus rigoureufeles Lundis, Mercredys^ ^ \'cn-
dredys. LeurEglife eft petite &: ornée comme les autres du
pays, de quantité de tableaux ôc de lampes allumées qui font
d'argent éc aflez belles.
Je paflaydans le S.i^cfa Sanfhmm accompû^né de l'Abbé.
Je luyfîs demander où efloit l'Euchariftie. Il me montra une
boëte d'argent ou de fzr blanc, pofée iùr le coin d'un petit au-
tel, qui efV celuy où l'on confacre. II paroiObit qu'il y avoit
du papier ou de la toile, parce qu'on le voyoit déborder. Je
"m'informay de fa croyance fur cemivftere. Il me dit que c'ef«
toit le véritable corps de J. C que l'on confacroit le Jeudy
Saint pour fervir de Viatique aux Religieux malades, auxquels
celuy qui adminiRroit ce Sacrement, le portoitfur fa tefte.
On l'interrogea s'il ne crovoit pas que c'eftoit du pain. Il
'repondit que c'en eftoit avant la Confecration , mais qu'après
la prononciation des paroles & de rOraifôn^ le pain & le vin
efloient changez au corps & au fang de J. C. On luy fit la de-
mande, pourquov donc on voyoit du pain? Il répliqua qu'il en
paroifloit, mais qu'il n'y en avoit point. Se qu'il en relloit feu-
lement les apparences : que J. C, avoit déclaré que le pain de-
venoit fon véritable corps: Moc cft cnim corpus meum^tcXQ sm
fon véritable fang : Mie cjl calix fany-'inismei • &: que tous les
Apoftres qu'il me nommaTunaprés l'autre, avoient enfeigné
cette vérité.
Il y avoit une lampe devant l'autel où eftoit ce précieux
depoft, ce qui m'obligea de luy faire reproche de nç l'avoir
point allumée comme les autres qui pendoien^t devant des ta-
bleaux, ce qui fut caufe auffi qu'on l'âliumaen même temps,
toute la matière eftant prefte , & ne reftant plus que le feu à
y mettre! L'Abbé avoua que c'eftoit le moindre honneur que
l'on devoit à l'Euchariftie, que c'eftoit une faute d'y manquer,
& que nous devions l'adorer. Il me rapporta de grandes hi-
ftoires de pludeurs miracles arrivez pour confirmer la prefence
réelle de |. C. au S. Sacrement,^ il les recitoit avec une très-
grande affeclion 2i volubilité de langue, témoignant bien de
EE e e
j88 Liv VllI. Preuves authent. de l\wion de ISg. d'Or.
la joye qu'il eufl plu à la providence de Dieu de confondre
alors le doute & l'incrédulité de quclques-uos qui approchoient
de ce divin myftere en manquant à la foy qu'ils luy dévoient.
3c luy parlay des Sacremensdc l'Eglifc. 11 me fit dire qu'il y
en avoit fept. On luy parla auffide l'invocation des Saints.
II répondit que les prières qui leur eftoient addreflTées fi fré-
quemment par les Grecs en faifoienc foy , & qu'on adoroic
leurs Images d'un culte relatif
Je le priay de me faire voir les Livres de l'Abbaye. La réponfè
fut qu'il n'y en avoit point d'anciens, parce que leur maifon
n'eftoit r'établie que depuis cinquante ans, que ceux qu'ils
avoient, fervoicnt .à l'Office,;! l'exception de quelques-uns de
dévotion qui efloicnt modernes, entre Icfquels il me nomma
le Livre intitulé, A'/x^^toAuv aar-Afict compofe par Agapius
Religieux du montAthos. Je ni'informay dequoy il traittoit.
lime dit qu'il parloit des fept Sacrcmens , Se particulièrement
de l'Euchariftie, Se de la préparation à la fainte Communion.
Luy ayant reprefcnué qu'un Miniftre Calvinifle foûtenoic
qu'Agapius n'avoit point efté , & qu'en tout cas l'ouvrage
qu'on luy attribuoit eftoit celuy d'un impofteur qui s'eftoit fervi
de fon nom j il m'alTura qu'il avoit connu ce bon Religieux ,
qu'il elloic Auteur de ce Livre, lequel il avoit rempli de tou-
tes les veritez, qui y font contenues, dont il eftoit inftruitpar
une longue leAure de plufieurs bonsmanufcrits. Enfin il me
protefta qu'il m'avoit répondu la vérité. Luy ayant demandé
s'il voudroit bien la certifier par une déclaration authentique,
ilme témoigna qu'il en auroit de la joye. Ainfi ilprit les articles,
me promettant de drefTcr une profellîondefoy fur ces points,
ôc de me l'apporter.
Cet Abbé me parut de bon fens: & il parloit afièz jufte fur
toutes les chofes qui tombèrent dans la converfation. Il me dit
que du temps des Empereurs Grecs, il y avoit depuis Topana,
qui ell à l'entrée du port, jufqu'àfa maifon 365. Monafieres,
& qu'il n'avoit point de connoilfance de l'antiquité du fien , à
caufe de la perte des titres caufée par les guerres Se les in-
cendies.
Après le repas je montay au haut de la montagne du cofté
du Pont-Euîcim. C'eft un grand terrain fur lequel on rencon-
tre un Moulin Se une Ferme appartenante aux Religieux. L'on
"y découvre la Mer noire Se l'entrée du Bofphore,6c l'on voit
d^vec rEgllfe Romaine fur l'Eucharifiie. jS9
fort aifémcnc le Canal , quoy qu'il ait une demie lieuë. Il Ch IV.
ferc de bornes au territoire des Religieux qui s'étend depuis
ctt endroit en retournant juiqu'au premier Château d'Europe.
Le Grand Seigneur d'aprefent s'y promenant il y a fept ans,
après avoir bû de l'eau d'un puits qu'il trouva fort bonne^ &
qui l'eft efFedivement, s'informa de la vie de ces Religieux, ic
lors qu'ilfçuc qu'ils la gagnoient par le travail de leurs mains, il
leur fit donner cinquante fequins^ &: ajouta à fa libéralité tout
Je terrain dont je viens de parler, quia pour le moins une lieuë
de long Scune demie de large, mais qui cft fi ingrat, ne pro-
duifant de foy que de médians bois d'épine, que dans les meil-
leurs endroits il ne rend que ce que l'on y feme , & rien
davantage.
Ces Religieux ne font point tourmentez par les Turcs, auC
quels on a defFendu d'y aller, principalement durant la neu-
vaine de l'AlTomption , parce qu'ils avoient accoutumé de s'y
enyvrer, d'yf^ure du defordre, & d'exiger de l'argent de tous
ceux que la dévotion y attire. Ce qui n'empefche pas que ceux
du Château d'Aficnc faiTcntpalTer à bord les Barques de ceux
qui y vont pour en tirer des Afpres. Le Boftangi Bachi qui
a la fnperioritc furies codes des environs de Conftanrinople,
& par confequcnt fur celles du Canal , eft celuy qui profite le
plus du concours qui fe fait en ce Monaftere. Cav les Religieux
pour n'en eftre point inquiétez fous diiïerens prétextes, comme
d'yvrognerie, de fedition fc autre? ,qui ne manquent jamais à
l'avarice des Turcs , font obligez de luy donner tous les ans
une certaine penfion. C'eft ainfi qu'il devient leur Protedeur
par fon intereft.
ATTESTATIOIT BV SV PERIEV R ET D E S
Relipcux du Moriiiflcre de Mauromale.
LA fainte EgHfe Catholique & Apcflrolique d'Orient,
fondée fur l'Hiftoire Evangelique , Se les Ordonnances
des Apoftres, immole par ia divine Liturgie lesmyfleres purs
& falutaires, & accomplit le myftere non fanglant en mémoire
de noftre Seigneur Jhsus-CHRiST. Son fentiment ell: que ce
culte divin s'accomplit avec du pain & du vm , comme le Sei-
gneur même l'a ordonné, difant à fcs faints Difciples &: Apof-
tres , lorfqu'il fit le banquet myfterieux: Prenez & mangez,
EE ee ij
59o Liv . Vlll. Preii'ves autbefir. de lunicm des Eg. d'Or.
Ce cy efi mon corps^Qw prenant du pain ; & lorlqu'il prit le Cali-
ce 3 beuvez en tous, Cecy efi mon fang.
Le Preftredonc de même manière, difant les mêmes paroles
dans la fainte Liturgie, prie que le pain 6c le vin propolez de-
viennent le corps Scie Tang de J. C. &les benilTanc par l'invo-
cation du S. Efprit duquel dépend la Confecration, l'un & l'au-
tre fe changentau corps parfait 6c au fang parfait. C'efl ce que
penfe ,confe{re & croit la fainte Eglife d'Orient, fans avoir au,
cun doute ou aucune dii^culté& fans en rechercher la manière.
Car la manière feule eft l'invocation du S. Efprit qui a tiré tou-
tes chofes du néant. Et la refolution de toutes les difficultez
que chacun peut avoir, eft lafoyqui eft un confentement af-
iuré qu'on donne aux chofes qu'on entend, avec une entière
perfuafion de la vérité , comme l'appelle le célèbre Baille.
Car celuy qui croit, neconfidere pas feulement les chofes fen-
fibles qui (ont devant luy, mais les fpirituelles. Et comme nous
croyons que la régénération 6c le renouvellement fe fait dans
le Baptême par de l'eau fenfible 5 de même nous fommes per-
fuadez que dans le S. Sacrement, le pain & le vin ayant efté
propofez oc fandiHez, fontfaits le corps & le fang de J. C. Ec
les faints Pères ont déclaré que ce facrifice fe failoit avec du
pain levé, parfait 6c fans aucun défaut, 6c du vin, comme Dieu
incarné eftoit parfait félon fa divinité 6c fon humanité. Carie
pain marque la propre chair du Fils de Dieu, ôc le vin fon fang,
comme lafagefîèScla vérité même l'a témoigné de luy-même
en plufieursdifcours devant la Cène myflerieufe. Jcfuis , à\t-
\\, le patn qui eft- dcfcendu du ciel , (^ donne la vie au monde. Ec
en un autre endroit: y? quelqu'un manque de ce pain, il vivra
éternellement. Et encore: Si vous ne m^tni^ez^la chair du Fils de
l'Momme^ C^ ne beuvez^ fon fano^^vous 7^ aurez, point la vie en vous.
Et quand il mangea avec fes faints Difciples , il leur rompit du
pain 6c non des azymes, comme déclarent les Evangeliftes ,
difant.-Jtsus prenant du pain, le rompit 6c le leur donna, 6c die-
Prcnez^f^ jnangez^., Cecy efi mon corps. Et Jacques frère du Sei-
gneur ^ premier Evêque de Jerufalem ordonné par J. C. le
grand Prêtre, ^ qui nous a le premier montré cette fainte Li-
turgiCj l'a célébré avec du pain levé. Et parlant de J. C. il dit:
Prenant du pain en fes mains faintes, pures, fans aucune tache
6c immortelles Et après luy les divins 6c faints Docteurs, pré-
dicateurs 6c deffenfeurs de la vérité, le divin Bafilc 6cS. Chry-
a'vec lEgîi/è'^mAine fur rêuchiirijîie. 591*
foRomc &: les autres , tant de l'Eglife Orientale que de l'Occi-
dentale, jusqu'au Pape Alexandre premier,ont célébré avec du
Pain levé. Et depuis luy l'Eglife Romaine a commencé à fe fer-
vir d'azymes en la célébration des myfteresi au lieu que celle
d'Orient n'a jamais quitté le pain levé. Car les Juifs oblervoienc
les azimes, comme la circoncifion Scies autres cérémonies de
l'ancienne loy.Et nous n'en obfervons aucune chofe étant choi-
fîs pour le nouveau Teftament. Il ne faut donc point obierver
les azymesj car les ombres de la loy font arrivées à la vérité,
comme enfeigne le divin Chryfoftome , difant : là, c'efl: à dire
dans l'ancienne loy, efloit la lettte , 6c icy l'efprit. Là eftoic
l'Agneau,' 5c icy J. C. Là efboient des azymes, éc icy du pain.
Et comme les Apoftres fe font fervisde pain levé , de mefme
l'Eglife Orientale fur leurs confefîîons, 6cne s'eloignanten rien
de la veriré oC de la vraye foy , s'en ferf 6c enfeigne qu'il s'en
fsut fèrvir.
LafainteEglife Orientale eftaufîl ornée avec raifon des fain-
tes images de noftre Seigneur J. C. & de la Vierge Mère de
Dieu 6c de tous les Samts. Efil eft ordonné de les honorer
non pas d'un culte de Latrie , mais relatif. Car les images
ne font pas Dieu ni la Vierge ni les Saints: mais ce font des
protctypesôc des arclietypesdu Créateur déroutes chofes, de
la Même Vierg-e £c mère, & des Saints i êc les honorant nous
en recevons de grands bienfaits. Car voyant dans une image
la croix de J. C- nous nous fouvenons de fa fainte paifion, de fa
divine charité, 6c de la grande mifericorde qu'il a eue pour nous.
Saint Luc eft le premier qui en acnfci gné l'ufage. Et les faints
Pères ont ordonné qu'on leur rendre l'honneur qui leur eft
deu,ayan t jugé leur vénération jufte 6craifonnable. C'eftpour-
quoy quelques-uns ayant tafché par infidélité 6c par tyrannie
cic les oftcr de la fainte Eglife j néanmoins les dangereux Icono-
maqiics ayant efté condamnez par le jugement divin dufëp-
tiéme Concile, elles furent reftablies avec l'honneur 6c la pié-
té qui efloient neceflaires , 6c il fut ordonné qu'elles ieroienc
honorées.
Un- certain Agapius natif de l'Kle de Crète , qui apafîe fa
vie dans l'eflat Religieux , d'une manière fort pieufe, a fait Atteftation
plufieurs livres, 6c entr'autrcs un qui s'intitule: le falut des pe- ''"r agapius.
cheurs^ ^ les a fait imprimer pour l'utilité publique. Tous ceux
qui -les lifent y peuvent reconnoiftre plufieurs chofes
EE ee iij
5';i Liv. VIII. Preuves auth. de T union des fEfr. d'Or.
fur cette matière. Et luy les ayant ramairées de pliifieurs Do-
cteurs tant anciens que nouveaux, les a compote?, félon la com-
mociité du temps. Et comme véritable ôbtcrvateur des paro-
les de l'Evangile, il a beaucoup multiplié le talent, & ayant
cftë iaint pendant toute fa vie, &: continue jufqucs à la fin
dans de femblables actions, il s'eflrcpofé au Seigneur.
■ Ce preferit efcrir pour témoignage certain &: confefïïon
alTurée du faint Sacrement, de la vénération qui efl: dciie
aux Images , &z de la vie religieufe 2c monaftique du même
Agapius , efl: rendu par nous foud^gnez à tous les Chrefliiens,
6c principalement au tres-noble &; très. excellent Seigneur
Charles François Olier Marquis de Nointel, très- digne
Ambatfadeur du très puilfant Roy de France, qui nous a de-
mandé fur ces Articles la vérité de la foy de l'Eglife d'Orient.
Dans Nofl:re Monafl:ere de JMauromoIe le 14. Octobre l'an
de J. C. 1671.
EA'TRAIT B'Vl^E AVTRE RELATION,
contenant le rccit d'un ctitretien avec un Papous.
LE onzième Teptcmbre j'allay dans l'Eglife êiQS Grecs de
BaKtchekhu. Je la trouvay dans une telle propreté , &:
toutes chofes dans un li bon ordre que j'en fus furpris. Elle
efl: petite, bien carrelée, & ornée d'un plafond de menuiferie.
Il y a deux rangs de grandes chaifes aux deux coftez & des
jaloulles derrière pour les femmes. A la face du funHa fane
torum, l'on voit trois ou quatre tableaux de la Vierge, de noftre
Seigneur & de quelques. Saints, dont les mains font en relief
d'argent ou de cuivre doré auffi bien que les ornemens qui
font fur la refl:e. Il y a un crucifix de bois au deflTus de la
porte du milieu. C'efl: celle où le prefl:re vient montrer le
fàint Sacrement ,& ce fut par une autre que j'entray dans cet
endroit, nonobfl:ant que le Papas m'eufl; die que les ieculiers"
n'y entroient pas. Il y vint avec moy.
Il y a deux petits Autels dans des enfoncemens ; fur l'un
efl:oit le calice , fa patène & le voile , & fur l'autre je n'y
remarquay qu'une boëte qui me p?rut d'argent avec un pa-
pier qui d'ébordoit. le luy demandé ce qu'il y avoit dedans.
]I répondit que c'efl:oit i'Eucharifl:iè qui contenoit le vray
corps &: fang de I. C. le m'informay de luy fi l'on ne pou-
a.'-v:c V Eglife '%oméne fur r Etichariflie . i,^-!^
'voir pas dire que c'eftoic du pain. Il m'afflira qu aprcs la con- C h. IV.
fecration, la fubftance du pain & celle du vin efl. lient en-
tièrement changées au corps 6c au fang de J. C. J'infiftay
pourluy taire connoiitre que ce pendant nous voyons du pain
& du vin . Il répliqua qu'à !a vérité il paroiffoir à nos yeux,
mais qu'il n'y en avoit point.
Je luy témoignay quelque curiofité devoir la boëte ouver-
te;, mais je me contentay de fbn refus que je pris en bonne
part , le loiiant d'en ufer de la forte , fc prenant occafion de
luy dire que je m'eftonnois de ne voir pas une lampe devant
]e faint Sacrement^ y en ayant devant fes images. Sa réplique
fufi: qu'elle eftoic caflee.
Je luy dis qu'en France les Catholiques adoroient l'Eucha-
riftie , qu'on fe tenoit dans le lieu où l'on la gardoit avec un
grand refped. 11 reconnut que c'eftoit un devoir indifpenfable
non feulement aux François, mais aux Grecs. Je l'interrogeay
fur le Viatique, lime dit qu'on leportoitaux mourans, que
c'eftoit pour eux feulement qu'on le confcrvoit dans une boëte
que j'avois veiie j qu'il la prenoit fur latefte , qu'on l'accom-
pagnoit avec un cierge allumé, & que le malade eftant con-
fefle , 6c ayant recité Ion Credo , recevoit la communion du
corps de J. C. avec adoration .
n me montra, en fortant du fanchi fanciorum ,unQ. bouteil-
le, me di&nt qu'il y confervoit la fainte Huile; 6c m'in for-
mant de l'ufigeauquel elle eftoit deftinée, il m'apprit qu'on
l'appliquoit à ceux qui eftoient à l'extrémité.
Je luy fis encore plufieurs demandes, 6c entr'autres, files
paroiffiens communioient fouvent ,s'il les inft:rui(oit de leurs
devoirs principaux, s'il les confefToit, 6c s'il difoit la Mefle
tous les jours. Il me répondit precifement qu'ordinairement
les Grecsfe contentoientde la communion Pafchale, qu'il
inft'ruifoit ceux qui eftoient fous luy le mieux qu'il pouvoir,
que des Caloyers les venoient confefler , 6: qu'il celebroit la
Liturgie les Feftes 6c les Dimanches, s'y préparant auparavanc
par le jeufne.
Je luy demanday quelle opinion il avoit de ceux qui ne
croyoient point la preience réelle 6c la'converfion du pain 6c du
vin au corps 6c au fang de J. C. Il n'heflta pas à me dire,
qu'ils n'étoient point Chreftiens y 6c m'eftant enquis de luy,
fi le fieur Cyrille premier Drogmande Venife qui demeuré
^<)j^Liv.yUl, PreU'Ves atahcnt:. de l union des E^. d'Or.
dans fa paroi(re,&: qui eft du rire Romain , aHiftoic à la Li-.,
tLirgie, &: s'il n'eftoic pas receu dans (on Eglife , il me die
qu'il y venoic fouvenc poùralufter à la Mefle,& qu'il y écoic
le bien venu.
le fis enfin tomber la converfation fur le revenu de fa Cure^
flir celuyde la nomination, & fur le Diocefedans lequel il ci-,
toit. Il m'en expliqua les parciculancez, en me difant que les'
chariccz de Tes paroilTicns^aufquels il pn; coic de l'eau benice tous
les mois dans leurs mai(onSj le nourrifloient, qu'il n'y avcjc
point de dixme , & que rousleurs hienj- confiiloient en bois
^ en quelque beftail , qu'il pouvoir avoir environ une centai-
ne de communians diftribuez en quarante mailons > que le
Patriarche de Conflrantinopleefloit patron de fa Cure, qu'il luy
en avoir confie l'adminiftrationpour un an, moyennant deux
mille afpres qui font cinquante livres. Mais luy ayant reprc-
fcntc que c'eliolt un péché , il en convint, le rejcttant furies
Turcs comme eftant lacaufe inévitable du deiordre. Il ajou-
ra qu'il efloit du Diocefe de Dcreon,&: quefonEvêque fai-
foit la vifite dcu); ou trois fois l'année.
Je m'informay du lieu de fa naillance. I! me dit qu'il eftoic
de la Morée allez proche de Lutrin, jercqarday les livres im-
primez à Venife, que je trou vay bien conditionnez &: fort en-
tiers fans eftre déchirez en aucune manière , ny à la couvertu-
re ny aux fciiillets, ti je m'en fis lire les titres qui eftoicnt :
farucliticon, Anihologium^ Eucholoyum , Triodinm en douze vo-
lumes, y en ayant un pour chaque mois de Vz.x\\~\èQ ^Pcntecofta-
rium horoloyum , qui font tous en grec littéral. Il n'y avoic
que la vie des Saints de Maximus qui fuften grec vulgaire.
Le Papas me montra que dans l'Euchologeelloient toutes
les Liturgies &: les prières necefTaires pour l'adminiftration des
Sacremens..Il médit même par cœur celle qui conçernoit l'Eu-
chariftie. Je luy témoignay que j'en eftois fort édifié, Siluy de-
mandant s'il avoir étudié, Se ^\ on l'avoit examiné pour le faire
Prêtre , fa rcponfe fut qu'il avoit réduit fes études aux chofes
les plus neceflaires 6c les plus ifïiportantes , & que c'eftoit fur
(telle là qu'on exaRiinoic îorfqu'on admettoit à la preftrife.
Enfin l'ayant loiiéfur la propreté de fon Eglife, je me reti-
ray. Il m'accompagna, &: lorfque nous fûmes auprès du Ce-
metiere, je luy témoignayde l'étonnement decç qu'à chaque
Sepulchre des Grecs on avoic planté une pierre droite fuivant
l'ufage
a,<vec l'Eglifè Romaine fur VEucharifiie. 595
l'ufage des Turcs ,luy remontrant qu'il falloit y mettre des Ch. IV.
croix. Mais ne pouvant répondre fur ce point, il fe lauva fur la
coutume qu'il avoit trouvée ainfi établie.
EXTRAIT D'VNE AVTRE RELATION CONTENANT
le récit d'un entretien avec un Papas de Calcédoine.
ME trouvant il y a quelque temps dans l'Eglifè de Calcé-
doine , où l'on prétend que le Concile a efté tenu , je
demanday à un Religieux qui me montroit ce qu'il y avoit de
plus remarquable , où eftoit le S. Sacrement j il me montra un
fac de toile pendu à un clou , dans lequel il y avoit une bocte ,
où eftoit enfermé ce précieux dépoft de noftre falut , & pour
fatisfaire ma curiofité, il l'ouvrit & me fit voir les efpeces éc les
apparences extérieures du pain. On lui demanda quelle eftoit
fa croyance fur ce qu'il voyoit. Il me répondit que ce n'eftoit
point du pain , mais le corps véritable de J. C. que l'on confer-
voit pour les malades, aufquels on en donnoit une particule j
qu'on confacroit le pain tous les Jeudis Saints pour cet ufage ,
& que les efpeces fe confervoient d'une année à l'autre.
Je lui fis demander pour quelle raifon il ne tenoit pas le
corps de J. C. d'une maniera , & dans un lieu plus propre &
plus convenable à fa Majefté. Il me fie réponfe que c'eftoit la
coutume, que l'Eglifè eftoit pauvre, &que dans celles où il y
avoit quelques revenus , l'on en ufoit autrement.
On ne fera pas difficulté de joindre au témoignage de ces
Papas celui d'un Laïque qui eft Monfieur Panaiotti i parce que
c'eft un des plus confiderables de toute l'Eglifè Grecque, ^ des
mieux inftruits de fes léntimens,& qu'elle contient des faits
importans, contre lefquels M. Claude a ofé s'infcrire en faux.
LETTRE DE MONSIEUR PANAIOTTI
à Monfieur l'AmbalIadeur.
B^rCELT' DOMINE MIMI COr"y
ACccptis Litteris ExcELLENTii£ Vestr^ , fuatn ergs
Eccleftam T)ei pietaiem , necnon ■nrnvua.T'xyi avpLTfoloLS , de-
(îdiriiim ^ fiudium , haud parum fumadmiratm , ctim in tantis
FFff
596 Liv. VIII . Vrcwues authcn. de l'union des Eg. d'Or,
re<z,iis non parvi momcnti neqotiis , apudbanc ampkffimam aulam
{jualibet horaverfetur ^ nihdominus zclo vcritatis ^pietatisamore
fretam hicreticorum Gcillia contra Orientalcm Ecclefiam bUfphe-
pnia-f quibus l^dere putant yxii a.d'TtfiKw s^ à.ixvtJL'^va. 't'v vv!J.(pyiy ,non
potnijje fiiffcrre , ^ gladio vcritatis illis refecandis fiudcre. Mirum
fine eji , t^ir ExccllcntiJJimc , cur nonpudeat Calviniante harefcos
Conciles con- fcHatores ^pofi tôt Ecclejî^ Oricntalis contra eos facias démon/ira-
ire Cyrille rc- tiones , poji tôt acius Synodales typis evulyttos , pofi Cyrilliance
vrri's'par m" confcjjîonls damnationcm , fo^ Meletïi Siny. Docioris Ecclejî.x:
Païuiotti. Oricntalis prolixam cjufdem refutationem , pofi denique fcpe me-
morat/c Ecclejia fidci fua confeffioncm omnium fere Antijiitumjîio-
rum unanimi confenfu ^ confirmatione nuperrime publicatam ,
Cyrille Lucar IMPUDENTER. ET PERTIN AGITER hmc Ecclefîam lit
chaire du Pa- confortiu>n pcrnitiofarum hicrefum juarum advocare ! ji enim Gr^e.
triaichat à corum Ecclcfi.c fidci confcfTioncm [cire cupiunt , qtiare cani folum.
foupcons }nodo à Cyrilli quater ob fufpicionem hicrefeos fede Patriarchali à.
4hercr>e. Gr.ccis exptilfi ^fofi occifi , ac ultimo publico anaîhemati traditi ,
tonfe.fjîone petunt ? Si quarunt qtiid de veru (^ fubflantiali Jepi-
Chrifii Servatoris in divino Euchariflia. myflcrio pnsfentia Gneci
trcdant , infpiciant faulifper libros officionim faccrdotalium quoi
«PoAoyjct, vacant , O' perlegant onitiones quas quilibet Sacerdos
éinte & pofi Saeramcntorum aljumptione^n tenetur ahfolvere. Si de
intercedione Sanchrum qiiid fcntiant infirui cupiunt , leclitent
duodecim Libros rp^ i^''ii^o\Q'y'aiv )(^ fUu r^r^xKnc r;x.y]i 5, ex qui-
bus 'clarè patet eos nihil 7na<iis quàm Sanciorum interceffzonem
efflaptarc. Sique de Sacramentorum numéro hicjttant , contemplcn-
L'igMfaaee ^^^ ^ihros Ritualcs j Ei»;)^o Ao'y'* intitulatos. Intelligent enim Gr^~
n'cftdonc (OS cum fanfio Areopagita Doclore fuofeptcm numéro Sacramenta
point fi îrran- profitcri. Si denique de ima^inibus ^ jeiuniis fanius fapere /?«,
de que ks ^, - r^: ' r ■ t l ■ -r^ .•■ • /r-
Miniibcsle ^''/^^ 5 To T^idS^m perlcytnt , qui Libn omnes Venetits imprejjt-^
publient. Icvi pretio co'émi pojjunt. Nulla, Ecclcjia Oricntalis fine bis Zibris y
nec nllus Sacerdos efi qui eos ignore t ^ bis Gr^ci Graca j Eulgari ,
Servi , Moldavi , Valacbi , Ruteni cum Mofcis lingua Sclavo-
n ca iituntur , Arabes Arabica , ^ utuno verho concludam , cun~
fli Orientales Chrifiiani in Ecclefiis fuis eos pr.t manibus habent ,
Us perficiunt orationcs fuas , & iifdem loquuntur Deo (^ Sanïtis.
Ex quibus omnibus exprefjè ^ claré liquet vera ip forum opinio^ in-
mixa fancliC Scriptur^ ^ Canonibus Apoftolorum ^ Conciliorum
tam Oecumenicorum quam Toptcorum. MiCC fcnitcnturCalvinifia^ ,
^ invjenieni veram Onentdts Bccle^a conjej'Jionem y (^ non k
aivec l'Bglfe Komaine fur ÏEuchur'iflïe. . ^9-7
Cyrillo oh perverfa fiia do'iynata feâc expulfo , occifo é^d/imnaio. ^^- I ^•
7<fec fin^antfbi mlferrimi Ecclejiam Gr^cam chimericayn e([e , ^ de^M nrùd
non altbi quant in ip forum cerebns exifiere 5 more modernorum He. qui fe fimuc
hneorum , qui (tbi reqnumà, nullo vifumnec auditum in quu mundi ""'^ Egi'i'i-Je
1 r r n- ^ vrais Grecs
playtfitumfitconfiituunt. <ju. ,Veft nui.
Ut autem veritas in poflerum (^ cum gloria piorum ^ docirina^^p^'^'^ rcfutée
Confpicuorum virorum Gallorum , qui Librum illum eyrey.um , de ^^^^j ^"^
quo annuit Bxcellentia veflra , ediderunt , ^ harefeos Calviniflica
Jingularem effe pernicietn tefiimoniis confirm.trunt ^ cl.iriîis eluceat , cvflCnifius
mitto nunc ExccUenti/e vefine MieremiiV Putnanhie C. P. ad Cur ProfL-ileut de
Jîum , ^ alios Gennania Calvtnifias anno l'^-jG. fcriptum refpon. " '"^^*
fum ad aliquot articulas Calvini harefeos , paria litterarum 2Ve-. Cet Original
^larii atrio-rchiC Hierofolymitani nuper ad Fayfutn Alexandri- ,neiK danf la
num fcripta , necnon r^ ■w^ajirvx^t fidci confeffionis Orienta/is BvjUotïicquc
EcclejFie Antifiitum fubfcnptionibus confirmatiim : quod ut hxre- ^"^ '^°''^'
ticis ad declarandamveritatcm (^ (^oriamperpetuam Jucc Maje- . .
flatis ChriftianiJJîm.'C fcpius monftretur , roqo acceptetur , ac in déclare cu'il
BibliothecA Reya confervetur , cui ego illud humillime ^f^/r(?. =1 l'Original
Credo dorni mcv Conflantinopoli a'jroypct^of acluum (ynodalium jg par°ju''s
fenioris Parthcnii contra confejjionem CyriUi , Meletii Sirizi contre Cyrille
Orientalis Eccleji.v Docioris prolixam a^Dipp/ff'/ contra eandem ^ucarque M.
Cyrillianam confeffionem , ^ Gennadii fatriarch^ C p. de tranf- de i'aux.
fubftantiatione panis Q- vini in Eucharifiia orationcfu elegantif.
fimam ac docli^f/îmam me habere i h^c omnia . curabo quam pri-
muyn fubmitti , ut omni diligcntia pio ^ fanBo x^lo injerviam ac
permuneam^
EXCELLINTI^ VeSTR^,
Adje^liflîmus 8c ad fervicium paratiffimus ,
PanaiottaNicusius.
AdrianopoU 20. Decemhris iG-ji.
Excellenti^mo Domino T)oynino fuo Marchioni de T^ointel ^
facra Majeltatis Chrijtiani.fftm.i: Legato ad Portam Otto-
jnanam , ^ Domino mihi eolendi.f/ïmo.
FFffij
C9S L I V. VIII. Prewves amhen. de r union des Eg. d'Or.
NO S Carolus Francifcus OUer de Nointel , Re'^is Chriftia^
ni.IJiwi aâ Imperatorn Turcarum Portam Leyitus , omni-
bm. quorum intererit notumjït , Tios cujufcunque dubii ac nebula-
ruru , quihus Heterodoxi Culviniani conati funt in Gallia Gra-
coïjon fidem. imflicare , difcuticndarum conjîlio , totius rei vcrita-
tcm non foliini à Patrianhis , Metropolitis , Q-multis aliis- Eccle-
fiafiki Ordinis , verum etiam a Laïcis dihgemer inquijivifie : Inter
hos clams efl Panaiotta Turcarum Imperatoris Jnterpres , cximiis
do-tibtis injîyfiis ^ qui qnarus (^ pcritijjimus docirina Ecclcjîa Orien-
talis , ilUus etiam fe patronum gerit tn propuqnandis articulis , qui
illdm 4b Occidentali disjungnnt, llle ad î^os Epifiolamfc'ripfit ,
cujus par omnino (jr ad minimum apiccm ex altéra pArte ley:n-
dum patet. Muic ne quis fidcm adhihere reçu [et , hanc dcclaratio-
nemfecimus ^cui^ fubfcripfmus ^ nccnonJîgtHi nofirorum injîgnium
contrappjitionç coynmuniri curavimus. Datum Fera anno réparât^ ■
f^lutis. millejïmo, fexcentefimo Jeptuazejimo feCimdo , quinto idni
Januarii.
Olier de Nointel.
CHAPITRE V.
"Union pre fente de l'Eglife Grecque avec l'Eglife Romaine prouvée
par divers autres tèmoiyiayis d'Abbe'z^ , Religieux ^ Papas
contenus dans la, Relation de M. l' Ambajfadcur.
ON a crû devoir rapporter ici cette Relation toute en-
tière , quoiqu'elle contienne plufieurs defcriptions qui
ne regardent pas precifément la matière dont il s'agit , parce
qu'elle fait voir d'une manière tres-fimple & très-naturelle
avec combien de bonne foy oc d'exactitude Monfieur l'Am-
badàdeur s'efl: informé du point du fait qui fait le fujet de nô-
tre conteftacion.
i'vec FEgli/e Komaine fur lEuchmflie. 599
RELATION DV J^OrAGE DE M. DE HO INTEL ,
Ambaffadeur du Roy à la Porte , aux ijles des Princes.
LE dix-huitiéme je partis de bon matin de Topana dans
un Caïque , accompagné de deux autres , pour m'en aller
aux Ifles , que l'on nomme communément des Princes. Je
pailay à la pointe du Sérail , & vis-à-vis de celuydu fanal éloi-
gné de Conftantinople de fix milles , que nous fifmes en une
heure de temps. Il nous en fallut autant pour arrivera la pre-
mière des Ifles nommées Proca en Grec vulgaire , en Turc Ke-
na!i, quieft une drogue dont ces Infidèles rougifTent les doigts
de leurs femmes , de leurs enfans & des efclaves , ce qui les a
portez à en donner le nom à cette Ule , parce que la terre en
paroift rouge. Elle eft petite, & ne confifte qu'en une feule mon-
tagne qui a une pente ou vallée à l'oppofite deTAfie^qui fe ter-
mine en une petite plaine où nous abordâmes. La terre y eft
fort feiche &:pierreufe, peu cultivée & découverte. Les arbres
qui s'y trouvent en petite quantité j ne faifant pas beaucoup
d'ombre, Scie refte du terrain n'eftant rempli quedebroulîail-
les , de petks chefnes verts 3 de lavande fauvage, &: d'herbes
fortes. Je ne m'étonne pas qu'il ne s'y trouvepoint de villages,
& je ferois furpris qu'il y en ait eu autrefois, comme il paroift
par les mazures qui s'y voyent, &les reftes de quelques citer-
nes , & par un puits dont l'eau eft fort bonne , s'il n'y avoit lieu
de croire que les Turcs eftant caufe qu'on arrache jufqu'aux
racines des arbres, & qu'on renverfe les maifons , font des fo-
litudes des endroits qui eftoient les plus cultivez C'eftce qui
e ft arrivé à cette I fie , ou il n^y a plus qu'un féul Monaftere de
Caloyers fîtué fur le haut.
L'Egltfe qui eft très petite a efté confacrée fous le titre de ia
fainte Vierge. Elle eft baftieà la manière des autres.
J'y enrray avec l'Abbé l je m'informay de fa croyance fur
l'EuchariftieJl me répondit qu'elle contenoit le corps vérita-
ble de J. C. Il me montra un fac attaché à la muraille, où il me
ditqu'eftoit le corps dej. C. enfermé dansune boëte_que l'on
confacroit le Jeudy Saint , & que l'on confervoit pour les ma-
lades. Je me promenay dans la maifon qui n'a rien de confide-
ble , & je m'arreftay pour difner fur une éminence auprès de la
porte, oùil y a uncabmet que les Turcs nomment Kiofgue.
FFffiij
Ch. V.
6oo Li V. VI I L Treuojes authen. de V union des Eg. d'Or.
Je m'informay de la chafle qu'il y avoit dans l'Ille ; unCa-
loyer qui ni'entretenoit ,me répondit qu'autrefois elleeftoic
pleine de lapins qui mangeoient cous leurs grains , & que pour
s'en garantir ils y avoienc mis des renards qui leur en failoient
raifon^ & qu'on y voyoïc quelques ramiers ou pigeons fauva-
ges^quife repofenc ordinairement fur des rochers, mais qu'on
auroit de la peine d'en approcher 5 luy ayant dit adieu, il me
reconduifit jufqu'à la mer.
Nous continuâmes nôtre chemin, Se en une heure nous ar-
rivâmes à la plus grande des llles nommée Prinkipo par les
Grecs , &c par les Turcs Kefeul Ada , figniliant Ifle Rouge. Elle
eft fituée dans le Golfe de Sinit ou de Nicomedier, qui peut
avoir quatre-vingt mil de long , ôi n'eft feparée de l'Âfie que
parun trajet d'une lieuë Vrunqoife. C'eftfur cette cofte de la
terre ferme,qui eft pleine de montagnes,où font fituez fur quel-
ques penchans , & même fur le bord de la mer , quelques Vil-
lages. Il y en a un d'eux entr'autres que l'on nomme Boujoux ,
& KoutechouK , Malrepe , qui veulent dire le grand & le petit
de la montagne du trefor. Nous débarquâmes à l'endroit de
rifle qui eft à peu prés vis-à-vis, dans le feul Village qui y refte.
Il eft aflèz grand , confiftant en cinquante-fept maiîbns , qui
font fîtuëes le long de la marine pour la plus grande partie ,
les autres eftant derrière , où elles s'étendent dans une vallée
aflez agréable, mais qui eft petite. C'eft dans ce lieu, où Busbe-
quius marque qu'il a demeuré trois mois à caufe de la pefte ,
que je refolus de fejourner quelques jours, pour avoir leloifir
de confiderer tant cette Ifle que celles des environs.
Le 19. jemontaydu grand matin en Kaique, afin d'abréger
le chemin qu'il m'auroit falu faire par terre pour aller à une
Abbaye ou maifon de Caloycrs , qui eft fituée fur le haut d'u-
ne montagne à un bout de l'Ifle de PrinKipo. Le chemin en fut
alTez pénible, la montagne qu'il nous faluc monter eftant la
plus haute de toute l'Ifle. Elle eft couverte de brouflailles,
fougères, &c herbes fortes, 6c aflèz pierreufe, & l'on n'eft pas
bien recompenféde fa peine , quand l'on voit l'Abbaye, la
court eftant cres-petice ,les chambres des Caloyers mal bâties,
& l'Eglife âflez mal entretenue. On n'y voit clair qu'à grande
peine. Elle eft conftruite de la même manière que les autres ,
&: paroift fort vieille- Il y a plufieurs tableaux de J. C. de la
Vierge & des Saints, Se entr'autres de faine Georges fon Pa-
avec rEgîife Romaîne Jltr ÏEuch,mflie. 601
cron.L'ayancconfideree exaclement.j'en fortis pourm'allerre- Ch.I V.
poferfurun Kioche, qui eftant firué un peu plus haut , fait
voir une belle dëvouverce. Cefut-làque l'Abbé qui revenoit
du village me vint trouver. Il eftoit allez mal vêtu, ayant une
robbe en mauvais eftat , un bonnet lié avec un turban noir j
mais il eftoir habillé magniliquement encomparaifon des au-
tres Caloyers. Nous confiderâmesla beauté de rafpécT:, & l'ex-
trémité de l'iHe toute couverte de grands rochers. Je m'infor-
may du revenu de l'Abbaye êc de Tes charges ^ il me dit que
l'on y recueilloit du vin de deux clos de vignes , qui avoienc
coutume de rendre deux cens mitres de vin , mais qui avoient
efté réduites cette année à quarante 5 &; qu'il payoit 80. afpres
àraifon de dix afpres par chacun millier de Touches : que de
huit gerbes de bled il en donnoit une , & que ce tribut appar-
tenoit à la mofquée de Sultan Sclim. Je luy demanday de quel
Ordre ileftoit 5 il me répondit qu'il fuivoit la règle de S. Ba-
zile ; Scluy demandant enquoy elle confiftoit , il ne fçut me
dire autre chofc , finon qu'il alloit la nuit à l'Eglife , qu'il gar-
doit la chafteté , 6c qu'il faifoit abftinence de viande. Je fis
tomber la converfation fur le ménage , m'informanc quelles
façons il donnoit à la vigne, Se il me marqua qu'il n'y en a voit
que deux, qui confiftoientàla labourer au mois de May , &:la
tailler en celui de Mars , &: à la fumer de dix en dix ans • &
qu'à l'égard du bled , on ne labouroit la terre qu'une fois après
les premières pluyes vers le mois d'Odobre ou de Novembre ;
& qu'on femoit en même temps pour recueillir en Juillet. Il
me dit encore que ce labour fe faifoit avec mains d'hommes ,
& qu'il ne femoit pas feulement du bled , mais de l'avoine 6c de
l'orge.
Après avoir ainfi fatisfait ma curiofiré , je luy fis d'autres
queftions plus ferieufes , pour içavoir s'il difoit la MelTe tous
les jours. Sa réponfe fut qu'ordinairement il n'y manquoicpasj
qu'hors les fe(l:es il celebroit pour les morts, &: que le jour qu'il
me parloir il n'avoir pu célébrer. M'eftant enquis de ce qu'il
croyoït del'Euchariftie, il fe munit d'une précaution, qui fut
de s'informer fi i'eftois Papifte. Mais luy ayant efté répliqué
qu'il n'imoortoit pas qu'il le fçùf , &: que j'eiiois l'Ambafia-
deur de France , il dit qu'il croyoit la realité de J. C. au S. Sa-
crement, de telle manière qu'après la confecration & l'orai-
lon , il ne reftoic plus que \q.s apparences extérieures du
6oi Liv. VIII. "Preuves authen. de ï union des Eg. d'Or.
pain àc du vin. On luy reprefenta de ma parc qu'il auroic parlé
autrement , (î l'AmbafTadeur d'Angleterre l'avoit interrogé.
Mais il infifta au contraire , difant qu'il avoic demeuré long-
temps à Belgrade , où il defervoit l'Eglile, Se qu'ayant eu en
ce lieu de grandes conférences avec leMiniftre du Comte de
Vinceflay , il ne luy avoit jamais tenu un autre langage, je luy
fis demander où il gardoit le Viatique, ne l'ayant point ap-
perçû dans le Suncta Samtorum. Sa réponfe fut qu'il lemetcoit
en terre j Se qu'il me le montreroit en fortant.
Ayant fatisfait félon la vérité à toutes les autres queftions,
comme de l'invocation des Saints &: du nombre des Sacre-
mens , il m'accompagna dans l'Eglife , où il me montra l'Eu-
chariftie dans du papier fort blanc, qui eftoit enfermé dans une
boëte qu'il ne tira point de terre , mais du côté droit de l'Au-
tel, devant lequel il y avoit une lampe non allumée. Je regar-
day Tes Livres qui étoient en bon ordre , qui concernent l'Offi-
ce des Liturgies , & les autres prières accoutumées dans l'Eglife
d'Orient. Et comme il fçutque je fouhaitois de voir quelques
manufcrits , il m'en apporta un contenant divers traitez pour
la viemonaftique, qu'il confentit que j'emportafle pour le faire
examiner, me prometrant de m'en apporter d'autres, lorf-
qu'il viendroit reprendre celuy là.
Je luy donnay encore une attaque fur le fujerde l'Euchari-
flie, pour fçavoir s'il n'avoit point déguifé fes fentimens 5 6c
afin d'en eftre mieux convaincu , comme je vis qu'il les pouC
foit plus fortement qu'auparavant, je luy demanday s'il m'en
voudroit donner une atteftation en bonne forme. Il y confen-
tit, me promettant d'y ajouter l'invocation des Saints, & les
fepc Sacremens , & de m'apporter le lendemain le modèle qu'il
en drefièroit , difant qu'il le feroit fort bien , & qu'il en eftoit
plus capable que tous les autres de fa Religion &mêm.e que le
Patriarche , ce qui m'obligea de (ourire ^ en voyant cette pre-
fomption. Luy ayant demandé s'il voyoit foiivenc l'Arabafla-
deur d'Angleterre pendant qu'il eftoit à Belgrade, je pris fu-
jet de fa réponfe, qui fut qu'il conferoit fouvent avec fon Mi-
niftre, de luy dire qu'alTèurément il luy auroit donné quel-
ques atteftations. Il le nia d'abord; mais comme il vit que je
le preflbis , luy témoignant que j'en eftois bien informé , il
convint qu'il avoit accordé aux inftances de ce Miniftre une
explication de la manière dont les Orientaux invoquent la
Vierge
iLwe<: VEgl'ifi %omAtne fur l'Euchmftie. 603
Vierge , les. Anges 6c les S<iinc>-, mais qu'il n'y avoir rcn mis ^^* ^•
contre la vérité, & qu'il n'y avoit touche aucun point con-
cernant le faint Sacrement. Ce fut par là que finir r.oftrc ccn-
verfatîon. Il me reconduifit dans la court, où il me pria inuti-
lement de manger du fromage de Chèvre , du vin à demy fait
& tout bourbeux , 6c du pain cuit à demy avec tout Ton Ton.
Mes GianiflairesSc kaidgisen firent bonne chère, &: lorfqu'ils
eurent achevé je me mis en chemin pour aller dans une au-
tre Abbaye.
Il falut defcendre la montagne, mais non pas tout à fait^ &:
en remonter une autre bien moins rude , au haut de laquelle
nous trouvafmes unemailon 6c une Eglile de tTaioyersqni vi-
vent fous la règle de faint Sabas, Les abords en font agréables,
y avant quantité d'Oliviers aux environs, 6c les dedans font
fort bien bailis, ôc allez Ipacieux pour le païs. LTglife eft gran.
de, propre 6c des mieux peintes 6c dorées qi.e j'aye veiies. li y
a un tableau reprefentant untemple foutenu d'un cofté par S.
Pierre èc de l'autre par S. Paul chacun d'une main, dans le-
quel on voit la Vierge tenant J.C. fur loncftomach. Il yen a
d'autres qui reprefenrent ]. C. laiainte Vierge, ]arransfi2;u-
ration dont l'Egiife a prjsle nom , ayant efte conlacrée en
l'honneur de cemyflerc. J'entray dans \z faniia fanctorum^ovi
dans le milieu vers un enfoncement, ef!:oiti 'Autel. Il y avoic
dciTus un tapis fort propre Le livre des Evangiles y efloit po,
fe , ?^ couvert d'un voile brodé d'un autre beaucoup plus
grand. Le faint Sacrement enferme dans unebocte qui eftoic
ferrée dans un fac d'efirofe de foye à fleurs d'or,Dendcit à un
clou dans l'enfoncement, 6c vers le milieu. Et comrae un Re-
ligieux me l'eut montre au doigt, 6c fans ouvrir le lac , je luy
demanday ce qu'il en croyoit. Il me répondit fans hcfïterque
c'eftoit le véritable corps 6c fang de J. C. Et Luy ayant fait la
queftion s'il y avoit du pain , il répliqua qu'il n'en reftoit que
Je gouft bL les apparences, 6c que J. C. y eftoit tout entier.
Je m'informay s'il voudroit nous donner une arteftarion de
cette vérité, comme avoient fait plufieurs autres, 6c même des
Abbe7; maisil me répondit qu'il ne le pouvoit pas, tant àcaufe
de l'abfencedefon Supérieur, qui eftoic vers la Mémoire, que
parceque les déclarations de foy regardoient les Patriarches 6c
les Evefques, non pas de (impies Relis;icux, is. que même" elles
dévoient eftre Synodales poureftre plus authentiques. Ne le
GGgg
604L1V. VI IL Prewves authént. de r union des Eg. d'Or.
prellant pas davancige^ je luy demanday pourquoy il n\ avoir
point de lampe devant le S. Sacrement. Il répondit qu'un des
coftez de la corde queje voyois eftoit rompu, ce qui eftoit
vra y^maisla raifon ne valoit rien, puifqu'onavoit loin de bien
entretenir celles qui pendoient devantles Images des Saints,
Le 20. j'allay me promener à l'ifle nommée par les Grecs
Calchit â caulé qu'ils prétendent qu'il y a une mine d'airam.
Les Turcs la nomment heihcli ^ parce qu'il y a deux monta-
gnes qui fe joignent par des vallées qui aboutirent à un ter-
rain élevé entre deux, en forte que cette figure leur paroift
celle d'une befaced'pù ils tirent l'origine du nom qu'ils onc
donné à cette LHe , dont le feul village eft fitué furie bord de
la Mer dans un endroit uni qui a un peu d'étendue. L'ayan-c
traverfé je pafTay fur la droite, & après avoit monté des mon-
tagnes i'arrivay à une Abbaye dont l'Eglife efb dédiée à la
fainte Trmité , 6c dont les Religieux fuivent la règle de faint
Sabas. Il y en eut deux qui me vinrent recevoir à îa porte avec
à^s cierges allumez, & qui me conduifirent en chantant dans
J Egiiie, où ils allumèrent les lampes. Se me montrèrent ce
qu'il y avoit de plus curieux ,& entre autres chofesdes Epita-
phes écrites fur le plancher, dont toutelinfcription neconfîftoit
qu'à demander des prières, fans marquer le nom du defFunt.
L'on me fit aufîî remarquer le portrait de ]eremie Pa-
triarche de Conftantinople qui efl: auprès de la porte^ mais ma
curiofîté allant plus loin j'entray dans le S^uiHa Saniiorum ^
devant lequel pendoitune lampe non allumée, oii demandant
de quelle manière eftoit gardée l'Euchariflie , un Religieux
prit dans l'ent-'oncement derrière l'autel un Ciboire de laton
fait comme les noftres, à l'exception que je n'ay point veu de
croix au defîus. Il tira une petite vis, &: l'ayant ouverte, &
auflî la boëte deiois qui eftoit dedans, il me fît voir lesefpeces
du pam tenues fort proprement. Je luy demanday quelle eftoic
ix croyance fur ce qu'il me montroit, & fi c'eftoit du pain
que je voyois. Il répondit que c'eftoit le véritable corps &
iang de J. C. fous les apparences du pain, dont la fubflance
avoit efté changée en celle de J. C. par la confecration.
Me contentant de luy faire cette feule queftion fur fa
foy, je m'informay oi\ efloit l'Abbé, fi l'Abbaye avoit quel-
ques revenus, de quelles charges elle eftoit tenue. Il me dit que
fon Supérieur eftoit à Conftantinople ^ que luy & les Re-
ligieux au nombre de vingt- cinq vivoient de ce qu'ils retiroient
d'vec ÏEglife Romaine fur V Euchariflie . 605
d'un peu de terres à bled ôc à vignes qu'ils culrivoienc j que Ch . V.
(îins tes aumofnes ils ne pourroienc pas fobfiftcr, & qu'ils
p-ayoienc par an à la Molquecde Sultan Mehcmet cinq cens
afpres pour toutes chofes en confe.]nence d'un abonnement
porté par un Catacherif. je le priay de me Faire voir les manuf-
erits , mais n'ayant pas le temps de les faire tous examiner,
j'en emportay «juelqucs-uns, à condition qu'il les viendroit re-
prendre à Fera, 6c qu'il m'en rapporteroit d'autres, principa-
lement s'il en trouvoit qui euiîent cfté compofez par des Pa-
triarches, & Abbez des derniers temps, lans exclure néan-
moins ceux des anciens.
Je ne goûtay point de fa collation qui ne confîftoit qu'en
Melons d'eau , en dattes, & en pam bis , aimant mieux m'ar-
refter quelque temps à la porte de l'Abbaye d'où l'on dé-
couvre le codé de la Mer oppofé à celuy par lequel j'eftois
aborde. J'y vis une petite lile déferre qui eft p Ictte, &cùil
n'y a point d'arbres. Les Grecs la nomment Pifa.
Par delà il y en a une plus grande qui conlîfte en un; mon-
tagne fort haute, dans le pied de laquelle eft un enfonce-
ment fur le bord delà Mer, oùefl: fitué le vifjgc. Les Grecs
luy donnent le nom d'Antigonia, ou de Pyregos , les Turcs
celuy de Bourgas. Elle cmpelche que l'on ne voye les deux
autres Ilîes abandonnées qui font peu confi derables , dont
la première en venant de Conilantinople s'appelle Oxia,
en Grec, & en Turc Sivadct , iJÎe pointue. Elle cft un peu
montueufe, ce qui fait que-l'autre qui eft unie s'appelle Platu
en Turc, Touchanadaft ^ Ifle des Lièvres. Je ksav confiderccs
du Monaftere de iaint Georges qui eft à la pointe de l'iile
de Prinkipo.
Me contentant de voir ces quatre Iflesde loin fans me don-
ner la peine d'v defcendre, jecontinuav mon chemin, & avant
defcendu !a montagne, je montay l'autre, qui forire la f gure
d'un des pendants de la befice; c'eft fur lehaut dr.ns un bois
de Pins, & de Cyprès qu'efb fituéc l'Abbave de nofrre D.ime
L'Abbé n'y eftoit point eftant allé s-Andrinople pour obtenir,
un commandement pour rebaftir fi maifon qui avoit cftc bnj.
lée depuis peu par de: Bnuftangis, Iclqucls s'cftant enyvro2, le
feu avoit prisa une paillalfe &; avoit conlumé tout le bâ-
timent qui eftoft fort grand, & entouroit toure le; cour,
n eftant refté que deux ou trois chambres, & rFî:;!ife qu'il n'a
GGggij
6o6 Liv. VIII. Preu^ies Authent. de t union des Eg. dOr.
poinc endommagée, Elleeft petite 6<: ne confillequ en un doime
qui efloit autrefois la Sacnftie.L'on m'y montra le S. Sacrement
donc la boëce eftoit dans un (ac de- toile pendu à un clou dans
renfoncement derrière l'Autel. Le Religieux qui voulut bien
me montrer l'Euchariftie, m'aiïi-ira fur la demande que je luy
en fis faire, qu'il croyoit quec'eltoit le corps de J. C. caché fous
Jesefpece5& les apparences du pain. Je m'informay deluy quel-
le eftoit fa règle. Il répondit qu'il fuivoit celle deTheodofe Ab-
bc d^Jis la PalcitmCj Se luy ayant fait plufîeurs autres deman-
des, il y fatisfit en difant qu'il ne payoitque 200. afprcsà la
Mofquée de Sultan Mehemet, en vertu d'un Catachinf , 6c
que le revenu de l'Abbaye confiftoic principalement en vignes
& en bleds. Et j'ay fçeu d'ailleurs qu'il efloit confiderablc pour
le païs ; qu'il fe faifoic dans cette maifon un grand abord aux
Fefles de la Vierge, &: particulièrement à celle du mois de
Septembre i & qu'ainfi il y avoir un grand inrereft de la faire
rcb.uir : qu'on efperoit en obtenir la permiffion par le moyen
de Panajotri, & la facilité de la conftrudiun parlescharitez.
L'on m'a encore appris que les Turcs n'y entroient pas autre-
fois comme ils vouioient, & que même on les repoufroit non
feulement .T coups de pierres, mais aufîî des pierriers. Elle efk
fermée de bonnes murailles, &; l'entrée en eft comme fortifiée.
La plus grande perte à mon avis que le feu y aitcaufée , efl
celle des manufcrits dont il y en a eu une grande quan-
tité de perdus, les Religieux m'ayant aifeuré qu'il y en avoic
une chambre pleine. Ayant fait examiner quelques uns de ceux
qui reftentj j'en emportay quelques Volumes que l'on me don-
na i condition de les venir reprendre à Fera-, mais je ftipulay
qu'on m'en rapporteroit d'autres. Il y a quelques infcriptions.
Grecques en difFcrents endroits. Ce qui prouve que cette Ab-
baye eftoitconfiderable du cempsde la domination des Chref-
ti'.^ns.
L'on voit à la porte, mais dehors dans la campagne unetennbe
cie pierre avec une épitafe qui fait foy que Edoiiard Barton Am.
bailadeur de la Reine Elifi^beth d'Angleterre à la Porte Ortho-
mane, &; qui eft comme je le crois le premier de cette nation, y
eft enterré. L'infcripcion eft conçue ences termes, ■E<^/z^r^oi?./r-
ton llltillnljimo Serenifji^n^v Anglorum Repris Orutori.^ viro pr/e-
Jhinti.ljmo^ qui poft reditum à. bello Hungarico quo ctim inviHo Tur~
car. Impcratorc profcHus fuerat^ diem ohijt pieLrtis crq^o^^^ctatis tin..
'jp.fil.veroMD^YCVII.JLl^IIIJ^allanuar. Mais ce qui eft
A^ec ÏEgîïfc %oma,ine fur ÏEuchciriflie. éoy
de plus remarquable, ell que cet Anibaliadeur n'a pas efté mis Ch. V.
en r^rre SaincCj le cimetierre de la maifon eftant d'un autrecoté.
Ainfi il y a lieu de croire qu'on n'a pas voulu l'y mettre à cauf'e
de fa religion. L'on dit qu'il eft more de la pefte s'eftant refus^ié
dans cette Ifle pour l'éviter à Conftantinople où elle i'ailoic
de grands degafls.
Je vifitay encore une troifiéme Abbaye qui eft: du cofté du
villao;e iurune cminence. Elle eft dedice à faint Georçres. L'E-
glife en eft plus large que les autres, fort éclairée &.biv'n peinte.
Le Saniia Sanciorum eft aufli plus fpacieux. Le faine Sacre-
ment y eft coniervé dans une bocte qu'un Religieux prit avec
rei'pecl à cofté de l'Autel, fe couvrant les mains d'un voile Mais
comme il l'eut ouvert, il ne trouva rien dedans, & il me dit qu'il
falloit qu'on l'euft confumé pour les malades. Et comme je de-
manday oià il prendroit le Viatique s'ii en avoit btfoin , il me
dit qu'il auroic recours aux autres Abbayes, j'interrogeay le Re-
ligieux fur la réalité du corps de j.C. en l'Euchariftie, cc lur le
pain & le vin. Et en ayant receu réponfe que j. C. y eftoit prc-
Tent réellement, & qu'il ne reftoit que les apparences du pain 6c
du vin, je remarquay que dans un trou en face de l'Aurel efti.ic
lecaliceavec le voile qui y eftoit liéj&; qu'il pendoit une lampe
vis à- vis fans eftre allumée. Je me promenay dans la maifon
qui eft propre, mais pauvre. Je m'inforraay de la règle que l'on
y oblervoit, que l'on me dit eftre celle de S. Bafile ; 6c avant
demandé à voir les manufcrits, l'on s'excufa fur ce que l'Abbé
qui eftoit abfent les avoit ferrez en cas qu'il y en euft. Ainfi je
m'en retournay par un aftcz beau chemin le long delà mer, qui
n'eftoit point cultivé, n'eftant rempli que de brieres.
Le II. lAbbé de S. George de l'Ille de Prinkipo m'a apporté
fon atteftation. C'eft le feul des Religieux dont je viens de par-
ler qui m'en ait voulu donner. Car les autres, aufli bien que ceux
de la Tranifiguration, s'en font excufez ou fur l'abfence de leur
Abbé, ou lur ce qu'il leur falloir une permiiîion du Patriarche.
Mais comme ils m'avoient fufïifammenc témoigne leur
croyance, je n'ay pas jugé à propos de les prefter.
Ne voulant pas feulement eftre informé de la foy du Cler-
gé régulier , mais encore du ieculier, j'ay vifiré les Egliies Po-
rochiales du village de Prinkipo. J'ay trouvé dan^ l'une oui
eft dédiée à Saint Dimitre, Se qui eft aftèz propre, un bon
homme qui en a le foin en qualité de Papas. Il alluma en
GGggiij
6o8 Liv. VIIÎ. Preuves amhent.de t union des E<^. d'Or
même temps qu'il me vie quelques lampes, 6c me tonduii'îc
dans le Sancluaire où il me montra fur la requifition que je luy
en fis, deux lacs de toile qui pendoient au codé gauche à un
clou dans un enfoncement derrière l'Autel^ £c dans lefquels
écoient des boctesquircnfermoient le corps de Jésus- Christ.
Je Juy demanday pourquoy ilyenavoit deux. U me ditque
l'une eftoit pour l'Abbaye de b. George, parce que l'Abbé n'y
eftant pas le Jeudy Saint dernier on avoit confacré pour fa mai-
fon. El- comme je luy eus reprefentë que l'on m'y avoit montré
une bocte, ôcmême les efpeces, il m'afîura qu'il falloit que ce
fuft de l'année précédente. Je luy demanday file Viatique ne
pouvoir cftre adminiftré que de la confecration de Jeudy Saint,
& m'ayant alîeuré qu'il le falloit , je luy fis l'objeiftion, de quel-
le manière on en ufoit quand elle eftoit confommée par les ma-
lades. Aquoy il repondit que fi le malade qui en avoit befoin
pouvoit fe rendre à l'Eglife, qu'on le communioit de l'Euchari-
ftie qui s'y conficroit à la Liturgie, & qui cftoitpourle Preftre
& pour luy , Se Idrfqu'on ne pouvoir l'y faire venir, qu'on luy
en portoit une particule. Je l'interrogeay fur la réalité de J.C. au
S. Sacrement, &: fur le pain. Saréponfe futque la confecration
rendoit le corps de J. C prc-fent fous les apparences du pain
& du vin. Et comme je luy eus reproché qu'il n'alumoit pas fa
lampe qui eftoit devant , il me dit que pendant le Sacrifice on
avoit foin de la tenir allumée, jem'enquisdeluy du nombre des
Sacrei'nens,&: après m'avoir répondu qu'il n'étoit pas aflez ha-
bile, je luy parlay du Bapcelme; ce qui l'obligea de me dire que
c'étoit un Sacrement , &. enfuite il me nomma les fix autres,
Se répondit à mes autres queftions; qu'il inftruifoit fon peuple
le mieux qu'il pouvoir^ mais qu'il aimoit mieux aller au caba-
ret que de venir à l'Eglife 5 qu'il y avoit trois perfonnes dans la
Trinité, quinefciifoient qu'un Dieu ^ qu'il ne prenoit pour Tad-
miniftration des Sacremens que ce qu'on vouloir luv ûv)nner-,
que c'eftoitun grand péché de contraindre ceux qui lés reçoi-
vent à donner plus que leur volonté? qa'il rendoit par an defa
Cure à l'Archevefque de Calcédoine douze piaftres, quoyqu'il
n'en euft touché cette année que dix. Mais qu'il ne prenoit pas
garde à cela, fe contentant de vivre doucement^ qu'il n'y av-^ic
que dix-fept maifons qui eftoientfous fa direction, 6c qu'il ap-
prenoit àlireauxenfanspour lefquels onluy donnoicpour cha-
cun ,un alpre par femaine.
anjec ÏEglife Romaine furVîuchcLriflïe. 609
J'allav à l'autre paroifie qui cil: plus coniiderable, ^Çiz.vsx. q-^ y^
coinpolée de quarante maifons. L'Eglife eft auffi plus grande,
& n'i-'ft pas moins propre. Il y a comme dans l'autre un endroit
leparc pour les Femmes qui ont veuc dans l'Eglile par des ja-
loufies. Je trouvay le Caloyer qui la defTert à ia porte du vcili-
bule, qui appienoir à lirfàde petits enfansdans des livres
imprimez, où eft le ?:tcr S'" le Credo. Je luy fis plufieurs quef.;
tions, 6: je trouvay Tes réponTes conformes à celles de l'autre
touchant la prefence réelle, Sv les apparences du pain &: du vin,
& la raifonpour laquelle la lampe pendante anprés du Saint
facrementn'eftoitpas allumée, 'ôc encore touchant l'inftruc-.
rion qu'il donnoit à Tes Piroiiïîcns. Jl m'apprit que Ton Eg'iie -
eftoit dédiée à l'Airomption delà Vierge. Il memontra avec
beaucoup derelpecl lesefpecesapparentesdu pain quieftoicnt
à gauche dans une boëce enfermée dans un /ac, me rap{>ortant
l'hiftoire d'une perfonne laquelle doutant de laToute-puiilance
de Dieu eu ce myllere, avoir ede fortifiée par le miracle d'une
préfënce vifible; fie luy demandant ce qu'il penfoit de ceux
qui ne croyoient pas cette vérité, il m'afleura qu'ils eftoient ex-
communiez, èc qu'il ne les enterroit pas enterre famte Je
m'informay de quelle manière il portoit le Viatique. Il me dit
que c'eftoit avec beaucoup de refped, fie qu'on l'a^compagnoit
avec des cierges allumez, n'y ayant point de Turcs qui puflenc
troubler cette cérémonie comme à Conftantinople. Il ajouta
qu'en casquel'Euchariftie confacréele Jeudy Saint manquaft,
on pouvoit faire une nouvelle confecration, dont l'on mcttoit
les efpeces dans la boëte, 6c enfin il m'avotia que c'eftoit mal
fait de donner par an trente Piaftres de fa Cure, mais que la
tyrannie des Turcs fur les Patriarches, fie les Métropolites en
eftoit la caufe : qu'elle ne dcvoit point fervir de prétexte aux
Curez pour vendre les Sacremens, àc qu'il recevoit de fon
peuple ce qu'il vouloir luy donner. Etcomireil m'eut expliqué
nettement les fepc Sactemens en les diftinguant par leurs
noms, je me retiray.
Le même jour je partis une heure &demieaprés midy. Je
traverfay la mer pour gagner les bords d'Afie, Si. dansl'efpace
d'uiie hei're j'arrivav à cette cofteeflcignée de l'Iflede Prin-
kipo de trois mille. )e continuay mon chemin prefque terre à
terre ,& avec un vent favorable. Je fis neuf mil en ept quarts
d'heure. Je vis deux villages fur le cofté, donc l'un fe nomme en "
6io Ltv, VIII. Prewves authen. de l'uniondesig. d'Or.
Turc K.artal,&: l'aucre Peeudix Et j'aborday l'abbaye de laint
Dimirre de Toiifla pour y fèjoiirner quelques jours. Elle eft
ficucecn Afiefur le bord de la mer en un endrcic uni, environné
de petites collines, de petits bois , de vignes & de terres labou-
rables , ce qui rend Ion aliiecte fort avanrageufe pour la chaire.
La mailonert aflcz propre. Elleconfille en une court quarrëe
prelque entourée de baftimens,& où l'Eglifê qui eft peiate
&, dirpoféceà peu prés comme les autres, eft fermée.
L'autel qui eft dans le Sanduaire,efi: orné en haut d'un petitba-
luftre qui poiefur la table, &: qui la ferme de tous coftez, à l'ex-
ception de celuy où fe met l'Officiant. Au milieu eft une croix
remplie de très-petites figures taillées en bolTe dans l'épailTeur
du bois. Il y a une bocte auprès qui eft fur l'autel, & qui n'ef-
tant pas fort propre ne laiflc pas de contenir le corps de noftre
Seigneur Jésus Christ. On me la montra avec révérence
après avoir allumé quelques cierges. Et comme jedemanday
pourquoy la lampe qui eiloit devant ne brufloit pas toujours,
on fit réponfe que la pauvreté en eftoitla caufe. Eftant forti de
i'Egiife (e me mis fur un banc qui eft à la porte, l'Abbé & quel-
q\ics Religieux eftant auprès de moy. Je m'informay de leur
nombre, que l'on me die cftre de vingt- cinq , de la manière de
faire l'Abbc, & l'on me répondit que c'eftoit la voye d'élec-
tion, en prenant néanmoins la confirmation du Mettropo-
liîc Archevêque de Calcédoine, auquel on fait quelque petit
prefenr. Ils ajoutèrent fur l'inftruction que je defirois d'en avoir
qu'un Abbé élu &; confirmé, l'eftoit pour fa vie, à moins que
les Religieux s'en plaignant ne folicitaiîent fa depofition:
Qu'ils vivent de leur revenu confiiiant en bled, & en vignes
&, encore de charitcz : Qu'i's ne payoient point de Caratche,
mais feulement i'aulîour qui eft la huitième gerbe de bled, ca
d'autres grains, &dixafpres pour chaque millier de f^i.chesj
êc que la receptes'en failoit par un Soubach^. oemeurant au
village voifin, qui eftoit mis par le Mutevelly d'une Mofquée
de Bourfe. L'on me dit encore qu'à cent pas de l'Abbaye il y
avoit un petit baftiment quiaccompagnoit une Eglife dédiée
à l'AlFomption, où les Religieux de Touftli en étant les Sei-
gneurs , alloient officier quand ils en étoient requis pour fa-
tisfaire à la dévotion des particuliers.
Efcanc content de ces éclairciftemens fur le temporel, je fouhait-
tay d'en avoir d'autre sfur le fpirituel,aufquels & l'Abbéôc les
Religieux
Uvec ÏEgliJe Romaine fur rEuchmflie. 6ir
Religieux prirent parc, répondanc chacun félon la connoifîàn- Ch. "VT.
ce qu'ils avoiencdemes demandes. La réalité dej. C en l'Eu-
chariftie , la converfion du pain &: du vin en fon corps & en Ton
fang, en telle manière qu'il ne refte que les accidents du pain Se
du vin/urent les principales. L'Abbc m'aiTeura qu'il croyoit l'un
& l'autre comm e eftant la foy de toute l'Eglife d'Orient. Il me
ref>eta deux ou trois Fois, qu'après la coniecration il nereftoic
plus rien dupain &: du vin que les apparences & les accidents,
confirmant ces veritez par des hiltoires arrivées à ceux qui en
avoient douté. Et luy ayant dit que les Calviniftes de France
foûrenoient que les Orientaux ne crovoient point la prefcnce
réelle ni le changement des fuhftances, il n'hefita pas à dire
<5ue c'eftoient des calomniateurs. Un autre ferra les épaules &: fe
mita rke, témoignant par ià là fermeté. Un troifiéme me die
que ceux qui ne croyoient pcMnt la realité 6c la converfion des
fubftanceseftoient des excommuniez, & qu'ainfiils nefailoient
point partie de l'Eglife , & tous les autres quand on parloit du
S. Sacrement difoient C/j///?<?/, témoignant par cette feule pa-
role que l'Euchariftie confient I. C.
L'invocation des Saints fut encore le fujetde noftre entretien.
L'Abbé me dit qu'ils étoient nos Ambalfadeurs auprès de Dieu,
que la Vierge eftoit puifiancé auprès de luy, & que nous réf.
fentions fouvent des effets de leur protecTiion. le luy fis aufïî
connoiftre que les Calviniftes qui nereconnoillènt que deux
Sacremens , le Baptême & la Cène, pretendoient que les Grecs
«ftoient dans la même opinion. Il ne<-omprit pas bien ce que
je voulois dire, parce que ce mot de Cène en matière de Sacre-
ment luy eftoit nouveau ; mais un autre prenant la parole
répliqua qu'il y a\ioitfept Sacremens qu'il nomma-en commen,
çant par le Baptême, fans oublier l'Euchariftie.
Ce5 points de doârine furent lesfeuls fur lefquelsje lesinter-
rogeav, fans dilcontinuer néanmoins de les entretenir d'une
matière pieufe. Car ayart envie de m'informerde leur con-
duite à l'égard de l'Office divin, & de la difcipline Monafti--
que , j'appris qu'il' n'y avoir que deux Preftres entre eux,
Icavoir l'Abbé qu'ils nommoient Izpumcnos, c'eft à dire le Su-
périeur j 6c un autre: Qu'ils fuivoient la règle de faint Ba-'^
file : Qu'ils ne mangeoient jamais de viande : Qu'ils ef-
toient obligez à la chafteté .• Qu'ils faifoient quatre Carefmcs
d'obligation, de Pafques, des Apoftres, de TAflomption, 6c
HHhh
éJt Liv. y III. Prewves authent. de V union des Eg.d'O'*'^
de Noël, n'ayanc permiffion cje manger du poiiron que pen-
dant ceux de l'Avent 2c des Apollresi Qu'il y avort crois au-
tres Carêmes de devonon , qui iont de laine Dimitre, de la
Croix, &: de lainc George; Qu'après avoir tfté éprouvez dans
une niaifon , ils prennent une atceftation du Supérieur, 6c
s'en vont trouver l'Evefque, lequel eftanc informe de leurdeH.
fein, les exaorte à quitter le monde, retjoic les vœux dechafte-
té,, d'obeïiTànfe, Vautres, ôc leur donne une croix^ Qiie l'on
élevé dan6 les maifons des jeunes garçons qui fervent à la
Melfe, & à l'Office, Siquieftant en âge peuvent fonger à en-
trer dans la vie religieufe; Qu'ils Te lèvent deux heures devant
le jour pour aller dans l'Eglile chanter les louanges de Dieu
pendant une heures Qiic l'on dit la Melfetous les jours; Que
tousiesfoirs un peu avant le coucher du Soleil on fe rafïèmble
dans l'Eglifè pour vacquer à la prière.
Voila ce que j'ay pu, tirer de ces Religieux. Car ils font fi peu
inftruits de leur eflar, qu'ils n'enfijavent point parler jufte, fe
contentant de connoiftre leurs principaux devoirs. Mais ce qui
eft: admirable, c'efl: qu'ils n'hefitent point fur l'Eue hariftie tou-
chant la prefence réelle. Scie changement du pain& du vin,
6c furîesmyfteres plusimportans, fi vous en feparez ce qui
efl de la Schoîaftique ^car il y eria peu qui en ayent quelque
légère connoifiance. La tyrannie des Turcs leur pourroit fervir
d excufe , comme aufTi les ruines de leurs maifons. Celle donc
nous parlons, qui eftoit de trois cens Religieux avant la prife de
Conflancinople, n'a été rétablie que depuis trente ans. Ce qui
s'eft fait en y joignant les Caloyers d'une Abbaye de faine Geor-
ges qui en eftoit voifine, &quiefl:maintenantabandonnée. Oiï
y a bâti un Réfectoire depuis peu, qui eft aflez propre, où il y a
une table feparée pour le Métropolite. Mais comme ces Reli-
gieux foufFrent fouvent de mauvais traitremens de la parc des
Turcs, Ion peut faire pafter pour une chofe extraordinaire les.
reftes derObrervancequel'on y voit. Ils font tributaires des
Mofquées du Mahometifme,ôcils font foûmisfort fouvent à
àcs avanies.
A deux heures de l'Abbaye de faint Dimicre il y a un village
ou bourgade en pleine terre, nommé en grec Aretftu?n , & en
Turc Dargé^ où il n'y a que trente maifons de Turcs. Le refte
quiconfifteen deux cens, eft habité de Grecs qui y vivenc
en liberté de confcience fous la diredion de quatre Papas qui y
avec rBçlife Romaine fur T EucharlJ^ie. 615
<3ererveRt quafcEglifes, quifontdenofbre Dame la Catholi-
que, de Saint Nicolas , de Sainte Chrifalcine, & de Saint Ni-
ceras. La féconde eft la plus conilderable, Ion étendue efcant
de foixante maifons, luivanc !e rapport que m'en a fait le Curé,
qui en a l'adminiftration. C'eftun Caloysr, lequel eftantvcnu
dans l'Abhaye, je ne négligeai pas l'occafion de lui faire plu-
fïeusqueftions. Il répondit à celles qui concernoient TEucha-
riftie, que c'eftoit un facritice non fanglant, inflituë en comme-
moratiorde la Palficn de Nuftre Seigneur Iesus-Christ, que
le même corps de I.C. qui avoit efté crucifié y eftoit offert,
& que les fubftances du pain & du vin fe changeoient par la
Conf?cration au corps del. C. Luy ayant reprefentë que l'on
voyoit du pain &; du vin, 6c que le goût le faifcut croire -, il
me dit que les apparences extérieures demeurent fars leur
fubflance.
le lui demandai pourquoi donc l'on ne rendoit pas plus de
refpecl dans les Églifes au Samt Sacrement^ d'où venoit que
l'on ne tenoit pas une lampç allumée devant, & qu'il n'eftoit
pas ferré dans une boëte ou calice plus propre j 6c j'ajoutai
que cettemaniere d'agir fervoit de prétexte aux Calviriftes
pourfoutenir que les Grecs eftoient de leur opinion. Sa réponfe
fut qu'ils eftoient des calomniateurs^ qu'afllirément on ne pou-
voit trop témoigner de refpeclau S. Sacrement, mais que fou-
vent ia pauvreté emnefchoit la bonne volonté ; qu'il y avoit
.même des fimples qu'on ne pouvoit defabufer de rendre des
cultes fi extraordinaires à des images qu'ils négligent leurs
principaux devoirs ; 6c qu'enfin la tyrannie des Turcs appor-
toit un grand trouble à toutes chofes.
le m'informai des inflrudions qu'il donnoit à fcs Paroiffiens,
de 1 i r Çommnnion,5>: de la minière d'adminiftrer le Viatique,
'& jetiouvai ( Cicç qu'il m'endir eft véritable) qu'il ne tenoit pas
à luy que (es Ouailles ncfiîlL'nr leur devoir, qu'autant qu'il le
pouvait il lesenfeignoit, principalement les Dimanches ^ qu'ils
commu?'ioient ordinairement quatre fois l'année, à Pafques, à
Noël , à la Penrecofte, & aux Apoftres; que la Communion de
Pafques ctoit d'obligation à peine d'excommunication, 6c que
le Viatique confacré le leudi Saint fe porrcit publiquement aiix
malades avec une cérémonie refpcclueofe. le lui fis l'ohjedion
des Turcs; mais il répliqua qu'ils n'apportoient point de trou-
ble à leur miniftere , qu'ils eftoient en périr non l-je qu'ils
H H h h ij
6i4Liv.VîIT. Prewvas authen. de t union des Eg. d'Or,
avoiencunepetireMofquéedaos le Bourg ,& qu'il y enav jic
une dehors coûte bâtie.
Il me dit encore pour fatisfaire a. ma curiofité qu'ils dépen.
dolent du Métropolite de Calcedoine,auquel il rendoit quaran-
te piaftresi qu'il y avoit vingt quatre autres paroilîesdans fa dé-
pendance, 6c llx Monafteresj que ce Prélat faifoit ia vifite deux
fois l'année; qu'il examinoit la manière dont les Eglifesétoienc
tenues, & les Sacremens adrainiftrez5& qu'il inftruifoit le peu-
ple , qui lui donnoit par tête douze afpres à chaque vifite ,
donc il y en avoit la moitié pour le Patriarche. Il me procéda
qu'il ne prcnoitpour les fondions curiales que la volonté de
iès Paroifîiens, lefquels ne luy payantaucune dixme, donnoienc
ce quileurplaiioit à Pafques & dans les autres temps qu'ils
recouroient aux Sacrtmens , ou de dévotion.
J'ay viliré le Monaftere de l'AfTomption où il y a dix Re-
ligieux, entre lefquels efl: un Abbé & unfeul preftre Us fui-
vent la même règle, & lamcme diicipline que ceux de faine
Dimitre. Leur mailbn eft fur le haut d'une éminence fort ai-
fée à monter, d'où la mer paroilTanr l'entourer, on s'imagine
eftre dans une Ifle i mais elle tient à la terre ferme par un
grand chemin large de dix ou douze toifes, & fort long. Il
eft un peu en dos d'afne , & paroift un pont, parce que d'un
cofté eft la mer. Se de l'autre eft un lac ou eftang d'eau falée.
Elle a encore une autre communication avec la terre ferme,
rnais qui eft artificitlle par le moyen des chauffées & digues,
qui fervant aupaftage d'une Ifle à une autre,conduifenc juC
qu'à terre, & fervent à feparer l'eftang dont nous avons parle
de l'autre cofté de la mer. Il y a des temps où l'on rompt cer-
tains endroits des digues, afin que la mer donne du Poiflon
à ce refervoir, lequel eft toujours fort pacifique à caufe de fa
ficiiation dans unenfoncemenc,dont les bords eftantaftèz bien
cultivez & plantez, rendent la promenade fort agréable.
Il faut maintenant retournera l'Abbaye. L'Eglife eft placée
comme eelle de Saint Dimitre. Elle eft peinte à peu prés de
la même manière, excepté que le fanduaire eft un peu plus
large auffi bien que la nef, Se qu'il y a de gros coffres le long
de la muraille, où font enfermez les ornemens. Celuy des
Religieux qui me montroit toutes chofes, me dit que la boëte
dans laquelle on garde le Viatique y eftoit aufli ferrée d nsun
ciboire j, Si luy demandant la raifon quiobligeoit de la tenir
Anjec tEgUfe 'T{oma.ine/ur ÎEuchanflie. 615
ibus la clef, il répliqua que c'eftoit pour une plus grande {eu-
leré. le pris occafîon de cet entretien de luy demander ce
qu'il croyoit de l'Euchanltie. Ayant réplique que c'eftoit le
véritable corps, 6c le véritable fang de I. C. &: qu'il n'vavoit
point de pain , il ne voulut pas me rien dire davantage. Et cop.t-
me il vit que je continuois de l'interroger, il me montra la mu-
raille qui eftderriere l'Autel.
C'eft un enfoncement coupé en dt^mie voûte, dans lequel i! va
trois rangs de figures peintes. Dans le premier tout en haut
eft la Vierge ayant les bras étendus, & tenant 1. C. hir {on
eftomach. t,)ans le fécond l'on voit au milieu un autel avec
un dais foûtenu de quatre pilaftres, aux deux bouts I. C. fur"
les pieds pofez fur l'autel , tenant d'un cofté l'Euchariftie &
de l'autre le calice. H y a à droite & à gauche fix Apôtres,
qui font les douze, qui viennent l'un après l'autre dans une
pofture fort dévote recevoir ce gage de l'amour divin. Saine
Pierre d'un coflë re çoit le laint Sacrement dans fa main , & de
l'autre faint lean boit au Calice, Se tous ceux qui le fuivent
font fi bien peints , que par leurs geil:es ils témoignent a0ez
la créance delà realité,n'y ayant que ludas lequel eft reprefenté
le dos tourné à fon Maiftre, & tenant un doigt dans fa bouche,
le Peintre avant voulu reprefenter qu'iJ trahilToit celuy-là mê-
me qu'il alloit loger dans (on cœur.
Quoyque ces peintures reprefentent bien la vérité du Mvftere
qui eft fuffifammenc prouvé parla lampe qui pend au milieu
du dais,& par un livreouvertpofé fur l'autel où (ont écrites
ces paroles : Prcne\ & manzezj. ce cy eft mon corps c^c. les figures
du troifîéme rang font encore plus expreiTives. Un autel qui eft
peint, & dans le milieu le calice d'où l'on voit fortir I. C. en
chair , en figure d'un enfant, avant à fa droite le livre des Evan-
giles, où les paroles facrées qui opèrent cette merveille font
écrites , & à fa gauche le pain dont la fubftance eft convertie
en celle de I. C. mè!ïie^& au de(rus le voile du calice. Quatre
Docteurs font reprefenter dans les coftez de la voûte, deux
dans chacun reveftus de leurs habits pontificaux Les deux pre-
miers montrent d'une main la reprefentation du Myftere in-
efFable,3c tiennent de l'autre, auffi bien que ceux qui font après,
des rouleaux où on lit des fenrences Spirituelles.
Ce qui m'a furpris,c'eft que l'on m'a aduré qu'il n'vavoic
point d'Egli/e Grecque, qui fe fut un peu confervée, où il n'y
HH hh lij
éi6 Liv VJIL Preuves authent. de f union des €g. d'Or.
eût dans l'enfoncement une double reprelentation du Myfte-
re der£uchariftie,figuréeàpeu près comme je l'ay expliquée,
&: cependant je n'y avois point tait de reflexion jufqu'alors
Ayant oblervc ce qu'd y avoit de remarquable dans cette Ab-*
bïyCj je palTay dans une autre vis à vis, qui cfl: la feule maifon
que l'on voye dans une petite Ifle, où elleeftfituée. Son patron
ell laint André. Deux Caloyers feulsy demeurent depnis trois
ans, afin de nela pas abandonner ab(olumenf,comme elle l'a cté
durant les quatre années prefentcs, depuis que Ton eut la cruau-
té d'afLlîiner deux Relideux , les autres eftan'>ab(ens,&oue
le Soull>achi defaint Dim.tre pouffé d'une avare barbarie con-
traignit les deux Abbayes voifînes de luy payer quatre cens
piaftres/autedereprefenter les meurtriers, comme s'ils vcuiTént
manqué, s'il avoit efté en leur puilîance. C'eftoit auifi pour
leur faire payer le fangdes morts, fuivant l'ufage des Turcs qui
en exigent le paiement des voifin*. L'un des deux Caloyers qui
eft un bon homme me mena dans l'Eglife où il n'y a aucune
peinture qu'au devant du Sanduaire^ le dedans n'ayant nul or-
nement. Il me dit que ceux du Monaflcre voilln, qui dépen-
doit autrefois de leur maifon, venoient leur dire la MefTe, &
luy demandant fî c'efloit bsFefl;es& Dimanches, il mefitcon-
noiflie que c'eftoit quelquefois tous les huit iours,'& que
leur pauvreté les empefchoit de la faire dire plus fouvent.
je l'interrogeay de fa fov fur l'Euchariflie , & fur le nombre
des Sacremens. Sa réponfe fut que J. C. eftcit prefent réel-
lement dans ce myftere, fous les apparences du pain & du vin,
qu'il y avoit fept Sacremens, &: que tous ceux qui croyent au-
trement efloient des heretiquesj que c'eftoit la croyance de
Ion Eghfe, mais qu'il faloit du pain levé pour la confecration.
Il m'expliqua tous ces points affirmativement, & fans hefiter.
Il me parla anfîî de l'antiquité de fa maifon , me montrant le
reftedes voûtes & des murai! les du temps des Empereurs Grecs,
Et comme je me promenoisdans la cour , il me montra un coin
où eftoit autrefois une chambre bâtie par un Refîdant d'Hol-
lande, qui venoit y pafîer quelque temps. l! me dit encore que
pw'ndant le règne de Sultan Murât, i! y avoit des Religieufes
ou Caloyeres, dont l'appartement eftoit feparé^ &: qui enten-
diîiert la iMcfîe d'un Caloyer deftiné pour elles.
Filant informé de toutes ces particularités, je retournay à
l'Abbaye de l'AfTomption, &: de là à la maifon.
(tn;ec l'Egl'tfè Komùne fiirTEucha.riflie. 617
Je ne fus pas li toit de retour que j'allay dans l'Eçlifë de l'Ab- Ch V.
baye , où l'on achevoic la prière du loir avec beaucoup de
dévotion, Si tofl: qu'elle fut finie j'entray dans le SanduAire ,
pour y remarquer la pciijture qui eft dansla demiecouppeà la
Face de l'Autel. L'on y voit J. C. communiant les Apoftres de la
même manière que nous avons remarqué, à l'exccpt'on que
S. Pier'-e paroift recevoir la Communion dans fa bou..he. Au-
delTus eft un Autel où elt dépeint le calice, un livre d'Evangiles
6c l'haftieJ & l'on voit aux deux collez les figures au naturel,
fçav&ir adroite de faint Blaife, de faint Silveftre Pape de
Rome, ayant une triple couronne fur la tefte, de faint Nico-
las, &: de faint Chryloftome, & à la gauche de faint Bafile , S.
Grégoire , S. Spindion, & S. Cvi-ille , le premier deces der.
îiiers ayant ces paroles écrites dans ui\ rouleau qu'il tient, O
Dieu , no^re Dicu^ qui avez^envoyé nojhe pain celé fie , qui eft la
nourriture de tout le monde.
L'on voit à peu prés la même reprefentation dans trois des
Eglifes Grecques, & Paroillîales du village de Foulta, où j'ay
efté exprés, tant pour examiner ces parricularitez, que pour
faire interroger le Papa. La différence qu'il y a ,c'eft:que la fi,
gure de J. C. en quelques-unes n'eft pas doublr, & qu'eflant
au milieu de l'autel , il étend les deux mains en forme de Croix
pour marquer davantage fa paffionj& que de Tune il commu-
nie S. Pierre, & de l'autre il fait boire famt Jean dans le Calice,
J'ayobfervé qu'au troifiéme rang il y a un autel fur lequel nô-
tre Seigneur Jesus-Christ eft couché en figure d'enfant fur
la reprefentation de l'hoftie , eftant couvert julqu'auprés du
menton d'un voile , qui eft celuy du Calice, où il y aune croix
delTjs, 8c ayant auprès de luy d'un celle le Calice avec une
cuilliere dedans, & de l'autre le Livre des Evangiles. Deux fi-
gures d'Anges au naturel à droite & à gauche y marquent
le culte de latrie qu'ils luv rendent. Ils ont le corps courbé, la
tefte un peu baillée, les yeux prefque fermez, & tiennent un
grand bâton au baut duquel eft une tefte de Seraphim figurée
dans un rond. L'on voit en fuite faint Nicolas, fie faint Chrylb-"
ftome à la droite, & à la gauche faint Bn.fi!e,& faint Athanalê
tenant chacun un rouleau de papier où lont écrites quelques
louanges de Dieu,
Les Eglifes dont les peintures appliquées derrière l'Autel fè
trouvent femblables à celles que je viens d'expliquer, lont de-
6i8Liv.VIH. Preuves auth. de t union des Eg. d'Or,
diees à l'Annonciation , à faine Dimicre,&; à faine Tiicodore.
Cette dernière comme U plus grande ç\k defervie par deux
Papas, qui ont fous leur diredion cinquante-cinq maifons, &
familles. Dans la première il n'y en a que trente, 6c dans la fé-
conde vingt-cinq. Il y en a une quacricme dedice àlaint Mi-
chel, ou il n'y a des peintures qu'au devant du Sanctuaire, n'y
en ayant point au dedansà caufe qu'elleeftiort pauvre, quoy
qu'elle ait trente familles. Le Papas de celle-cy rend au Mé-
tropolite de Calced^Mne trente cinq Piailres. Le Caloyer de
l'Annonciation en donne vingt. Le Papas de laine Dimitre au-
tant, & celuy de S. Théodore cinquante.
Jetrouvay les Papas de ces paroilTes bien inftruit? , tc en-
tre autres le Caloyer de l'Annonciation, lequel ayant plus de
vivacité êc de promptitude à répondre, me dit que l'on gar-
doit le Viatique dans le Sanctuaire, qui eftun lieu à part& fe-
paré du commerce, & que c'eftpit le fujet pour lequel les fe-
culiers n'y venoient point prier, qu'il eftoit feulemcnr dcftiné
pour l'ufage des malades, & que hors le temps de la célébration
on n'y tenoit point de lampe allumée, que J. C. eftant la lu-
mière même n'avoitpas befoin de cet honneur extérieur. Mais
ces raifons ne me fatisfaifant pas , parce que nousnc devons ja-
naais manquer,autantque nous le pouvons, de faire paroiftreau
de hors ce que nous profefTons dans le cœur; il me répliqua que
c'eftoit l'ufage. Je lui dis, &à tous lesautres^quele peu de ref-
ped qu'ils portoientau S. Sacrement parla manière dont ils
li tenoient dans des boëtes,enfermé dans un fac^efloit caufe qix
les Calvmiftes accufoient les Grecs de ne pas croire la pre-
fènce réelle, 8cla converfion du pain & du vin au corps &au
fano- dej. C. Ils s'écrièrent en difant que c'étoit une accufation
téméraire, & que l'Eglife d'Orient avoir toujours cru, & croyoic
encore le corps dej. C. pre fent réellement dans l'Euchariftie
fous les appafences du pain 6cdu vin. Je leurfis plufieursquef-
tions fur ce divin Myftere , & je trouvay leurs rcpofc s uni-
formes, aufquelles ils ajoutèrent que ceux qui croyoïent autre-
ment étoient des excommuniez. Quantité de païfans qui nous
environnoient, apportoient beaucoup d'attention à nôtre en-
tretien. Et lorfque je dis à leurs Papas qu'on les accufoit de ne
pas croire la prefence réelle, &; le changement du pain & du
vin, ils remuèrent la tête, ôc quelques-uns dirent que c'étoic
une faulîèté.
je
doiec ÏEglïfe Komx'tne JurVEucharïflïc. 619
Je m'informai des Papas s'ils avoient foin d'inftruire leurs Ch. V.
Paroiffiens les Dimanches &; les principales Feftes , de ce qu'ils
leur enfeignoienc touchant la Sainte Trinité , les fept Sacre-
mens , & autres chofes neceflaires au falut. Ils m'aiîurercnt
qu'ils s'acquicfoienc à ce t égard de leur devoir autant bien qu'il
leur eftoit polfible , 6c que la tyrannie Tous laquelle ils vivoienc
le leur permettoit ^ qu'ils leur enfeignoient que la Trinité con-
/îftoit en trois perfonneS;, Dieu le Père ,Dieu le Fils, Dieu le
Saint Efprit : Qii'il y avoit fept Sacremens, & qu'il falloit in-
voquer les Saints , & particulièrement la fainte Vierge. Ils me
dirent âuffi que leurs Paroilîiens communioient d'obligation à
Pâques, &: par dévotion aux autres Feftes j qu'il y avoit des
gens qui apprenoient à leurs enfansà lire , & en même temps
leur croyance. Et comme je voulus en interroger un de cinq à
jfix ans , le Papas me dit qu il ne fçavoit encore rien, |e lui de-
mandai s'il ne communioit pas ^ & m'ayant répondu qu'oiii, je
lui fis reproche de l'admettre à ce Sacrement fans lui donner
aucune conno'iTance de ce qu'il faifoit. Sa réplique fut qu'étant
dans l'eftat d'innocence , il n'eftoit pas necefTaire de lui donner
desinftruclions dont il n'eftoit pas capable. Ce qui m'obligea
de lui dire que cela eftoit bon à l'égard àts en Fans de deux ou
trois ans que l'on corîimunioit aufTi dans l'Eglife Grecque^ mais
non pas pour ceux qui eftoient déjà capables de comprendre
quelque chofe, & qui eftoient bien proches de fortir de leftac
d'innocence.
Je m'enquis errcore d^e favifTte que leur Métropolite Faifoit
dans leurs EgliFes & Paroifles , & je trouvay leurs réponfes
conformes à celles que l'on m'avoit faites ailleurs. Enfin
m'ayant déclaré qu'ils ne prenoient rien de leurs Paroifl
fiens que leur volonté, je les quittai, 6cm'en retournant je paC
fai dans une petite Eglife dédiée à S. Jean, défervie par des Ca-
loyers, mais qui eftoient abFens. Un valet de la maifon me
l'ouvrit en l'abfence de ces Religieux. Je trouvai que la de-
mie voûte derrière l'Autel répondoit fufiifamm.ent auxquefl
rions que j'avois envie de leur Faire. La réalité y eftant peinte ,
puifquel'on y voit J C. en chair&figure humaine fur la repre-
fentation de l'hoftie 5 la converfion du vin en Ton fang touc
de même par le moyen du calice qui eft tout contre ^ l'adora-
tion y eftaufiienfeignéeparles Anges & les Saints qui fonraa-
prèsreprefentez dans un culte de latrie 5 ce qui Fait bien con-
liii
éio Liv. VIII. n^reufves authen. de r union des Eg. d'Or.
noiftre de quelle manière les Grecs encendcntrinfhcution de
la Cène figurée au deiïus.
J'obfervai toutes ces particnlaritez le vingt deuxie'me, & le
vingt-troifiéme ellint retourne de la vifite des Papas , je
rencontrai dans TAbbaye deux Religieux Grecs du Mont de
Sinaïj qui faifcient leur qucfte. Nous parlâmes de p.ufieurs
points qui concernoient le temporel ; & cftunt tombé fur le
fpintuel ,ils me dirent que l'on diioit quatre McfTes tous les
jours fur le mont Sinaï contre la coutume de l'Eglile Grecque
qui veut que l'on n'en célèbre qu'une chaque jour ;& que le
nombre des bienfaiteurs qui faifoient leurs aumônes , afin
qu'on priaft pour eux , & qu'on les nommaft au faint Sacrifice ,
edoitcaufe qu'on s'cloignoit de la règle générale: Qu'à la vé-
rité il n'y avoitf qu'une Mede publique , les trois autres eftant
particulières , &:que la tyrannie des Turcs eftoit encore le fu-
jet pour lequel on n'y prenoit pas garde de fi prés,àcaure de
la necefTitéoù ils les reduiloient de fe procurer leur fubfiftance.
Je leur demandai d'où vient qu'ils appellent la MeflTele faint
Sacrifice , & ce que Ton Archevêque , & tous ks Religieux _, 6c
lui même en croyoient. Il me dit quec'eftoit le Sacrifice non
fanglant du corps & du fang de J. C. inftitué par lui même ,
qui Te faifoit en mémoire de fa Paflion. Et fi.ir lesobjedionsque
je lui fis du pain &: du vin qui paroiflent vifiblement , 6c d'une
prefence de vertu j il répliqua qu'après la Confecration&l'O-
raifon du S. Efprit , leslubftjncesdupain& du vin eftoienttel-
lemenc changées au corps Seau fâng de J. C. qu'il ne reçoit
plus du pain &: du vin que les apparences extérieures & les ac-
cidens, que les Grecs nommoientcrtj^(^«/2«/.oTo!,. Jeluireprefen-
tai que les Calvinifles de France Vautres ioûtenoient quel'E-
giife Grecque ne tenoic pas la prefence réelle de J. C. en l'Eu-
chariftie , ni le changement des fubftancesdupain & du vin.
S'eftant mis à rire comme d'un fait avancé témérairement , il
répliqua que ces hereriques reflembloient à ceux qui faifoient
naufrage , lefquels ie fervoient de tout ce qu'ils rencontroienc
pour tâcher de fe f3uver,mais que malgré leur imagination ,
la croyance de l'Eglife Orientale fubfifteroit, &; que par fa gr^-
ce elle fubfifteroit toujours. Il me p r!a aiifii du nombre des
Sacremens , ou'il m'aflura eftre de fept , me proteftant que ces
vericez eftoient capitales , & qu'elles eftoient crues par fon
Archevêque & tous (as Religieux, comme faifant une par-
A^ec ÏEglife 'Roma.ine fur rEuchurifiie. éii
tie eflentielle de la Fov OxiencaiC. Voilà l'intormation que
j'ai prife de ce bon Religieux.
Le Samedi vingrquarrieme je retournai tout droit à Con-
ftantinople, d'où je n'ciluis éloigne que de trente milles ou dix
Jieucs de France, & j'arrivai à dix lieures, citant parti à qua-
tre heures du matin.
CHAPITRE VI.
Union de fEglife Grecque avec l'Eglife Romaine fur l'^ncharifiie
prouvée far une Atteftation authentique du patriarche de
Confiantinople ^fî'inée des trois autres Patriarches qui Tant efiè
* avant lui , du Patriarche d'Alexandrie (^ de trente cinq Ms~
tropolites.
Election du p.rtriarche Tiionyfîus a prefent feant. Zi fie des Patriar-
ches depuis Cyrille Lucar. Lettre de Aionfieur de l^ointel
au Roy fur L' Attcp ation de Dionyfus.
ON doit d'autant plus eftimer l'Attcftation authentique
du Patriarche de Confiantinople que nous produirons
ici, que quand il l'auroit refufée, il n y auroit pas fujetdes'en
étonner. Les Grecs ne manquent pas de raifons pour ne pas
accorder ces fortes d'Acles. II v en a qui s'imaginent qu'on
leur fait tort de demander des atTurances de kur fov D'autres
craignent que l'on ne s'en f.'rve pour avancer les prétentions
de la Cour de Rome. D'autres peuvent appréhender de Te
brouiller avec les Princes Proteftans, en les condamnant for-
mellement. D'autres n'aimenr pas à fa;re plaifîraux Latins par
la feule averfion qu'ils ont pour eux. Enfin ils peuvent pren-
dre beaucoup d'autres prétextes pi^v.r s'en exempter.
Cependant le Patriarche nouvellement inftallé dans cette
haute dignité eftant prié parMonfieur l'AmbafTadeur de don-
ner cette atteftation, n'a eu recours à aucur.e de ces excufes. ôc
ayant crii au contraire qu'il devoir fignaler Ton zèle pour la
vérité de lafoyen luinccordant l'acle qu'il lui demandoit , il
l'a fait de la manière du monde la plus foiemnelleS: la plusau-
tkenti<^ue > comme oa le verra par la Lettre que Moniieur
ï 1 1 i i]
6iz Liv. Vî 1 1. Prewves authen. de tunion des €g. d'Or.
l'Ambaffadeur en a écrite au Roy, qui fera rapporté ci deflous.
Cependant afin que l'on fçache quel eft ce Patriarche , &
pourquoi cetAcTieefi: figné dequatre Patriarches de Conftan-
tinople cous vivans , ce qui paroill extraordinaires on remar-
<^uera ici que la tyrannie des Turcs jointe à l'ambition & à
l'avarice de quelques Grecs eft caufe de cedefordre. Carie
Sultan s'cftant mis en polFelBon de nommer au Patriarchat ,
quoiqu'il permette au Clergé d'examiner &: d'élire celui qu'il
nomme, & exigeant enfuite de celui qui eft élu une grande
fomme d'argent ; pour avoir droit d'exiger fouvent cette fom-
me,il prend des prétextes de les dépo(reder,& de conférer le
Patriarchat à quelqu'autre qui lui donne encore de l'argent.
Ainfi cette grande Charge eft fouvent expofée à l'ambition Se
à l'avarice des Evêques des autres Sièges.
Ces révolutions ont efté fort fréquentes depuis quelques an-
nées, comme on le peut voir par la Lifte que nous donnerons
ici des Patriarches de Conftantinople depuis Cyrille Lucar.
CATALOGUE DES PATRIARCHES
de Confiantinofle depuis Cyrille Lucar.
Cyrille Lucar. 1610. Paysius \(>^\.
Gregoir-E Damasie 1(313. Parthenudi iéj6'. kranglé.
Athanase Batelare 1634. Gabriel 1657.
Cyrille Lucar 1634. Parthenius 1657.
Cyrille de Bere'e 165J. Clément 1662-
Parthenius leVieux 1639. DiONYStus pour une féconde ,
Parthe"nius leJeune 1644. foisi(>C6.
JOANNICIUS 1646. MeTHODIUS 1667.
Parth nius le Jeune Kjjo. Parthenius pour la troijlème
pour une fconde fois. fois.
JoANNicuS \G')\. pour une fe. Dion-^ISWJS Evcque de Lariffe,
condcfois. 16 ji.
Parthenius qui gouvernoit cette Eglife avant Dionyfius a efté
chadé du Patriarchat d'une manière allez canonique, ayant
efté convaincu d'exaclions immenfes fur les Eglifes, tant par
lesMetropolites,que par les principauxGrecs qui ont demandé
fa dcpolîïion : Et pour la manière dont Dionyfius a efté élu,
on la verra dans l'Extrait d'une Lettre de M. l'Ambairadeur
que nous inférerons ici.
itfvec ÏE?life Komaîne fur tEucharifiie. 615
^ Ch.VI.
EXTRAIT D'VNE LETTRE DE M. VAMBASSADEVR
de Confiantinofle ce lé. Novembre 1671.
LE Vifir eftanc refolu de chaiïèr Parthenius après une
preuve fi pofîtive de fes démérites , fie venir devant lui
Jes Evêques , pour fçavoir d'eux s'ils ne fouhaitoient pas qu'il
leur rendift Methodius. Mais l'ayant prié de leur accorder «'eftun Dio-
Dionyfuis , ce Miniftre les fit avertir que ne voulant pas leur nyfiusq^'i'f;
d- T-> ■ f 1 , /i • ■ A \ \ 1 I • voit dtia elte
ernier Patriarche , il n eftoit pasiulte de leur donner celui avant panhc-
qu'ils defiroient ; mais qu'il valoir mieux prendre un milieu , en mus.
élevant à la dignité Patriarchale Dionyfius à prefent Arche-
vêque de Lari(fe , auquel Methodius avoit donné fa demiflion. ^fj^T'""^
Il n'en a pas fallu davantage pour fa défignation , qui a efté
rendue publique par le Coftan qu'il a reçu du grand Vifir.
C'eft ainfi que fansparoiftre dans le commencement! il a re-
cueilli le fruit du travail des autres qu'il s'eft appliqué par la
voye ordinaire. Il eft digne de ce rang , & il pourra s'y mainte-
nir par fon crédit qui eftconfiderable dans le Sérail & auprès
duVifirqui s'eft expliqué de fon deiïein , de ne plus écouter les
propofitions de changerles Patriarches. Par confequentl'éta-
blilfcment de celui-ci caufera à l'Eglife le bien de lui ofter
Parthenius, & lui produira celui de la délivrer de ces chan-
gemens {î frequens qui ne font qu'augmenter fa mifere 6c fon
afflidioru
DENIS PAR LA MISERICORDE DE BI^V ,
Archevêque de Confiantimpie la nouvelle Rome ,
é^ Patriarche Oecuménique.
C"^ E n'eft pas une chofe indigne de la conduite Evangeli-
_j que> mais au contraire c'en eft une qui lui eft tres-con-
forme , d'ouvrir toujours la porte de la doctrine à celuy qui
frappe, & d'avoir des réponfes favorables prêtes à rendre à ce-
lui qui témoigne avoir quelque paffion de les écouter. Il faut
que ceux qui l'ont comme nous reçue du Ciel , la confervent
toujours avec grand foin ,' puifque nous avons efté difpofez
par l'ordonnance Apoftolique à nous tenir toujours j-refts à
en rendre raifon à tous ceux qui nous la demandent , à caufe
de l'efperance que nous avons , le faifant avf^c douceur , &
II ii iij
6Z4 Liv.VîII. Trewves authen. de T union des €g. d^Or,
dans une bonne confcience, comme il nous a efté ordonné ^
quoique de nous mêmesnous ne foyonspas capables de rien di-
re,ni même de rienpenfer^ mais tournant nôtre vue vers celui
qui a trouvé toutes les voies de la rcience,& qui les a données 2
Jacob Ton ferviteur & à Ifracl ion bien aimé , & tirant la ma-
tière de nodreréponfè , desialutaires inftruclions qui or,t efté
révélées par luy,parron Fils & (on Verbe dans lequel font
tous les trefors de fagefîe ti. de fcience , & par l'Efprit confo-
lateur , à ceux qui font dans les véritables fentimens , dans lef-
quels la pieré eft renfermée comme dans fa demeure ordinaire;
ayant appris à éviter avec grand foin toute paroleou peniée
éloignée de la dodrine de J C.
C'eft pourquoi quelques perfonnes curieufes ayant efté pouC
fées je ne fçay comment à s'enquérir de quelques chofes qui
nous regardent , & nous ayant fait quelques queftidns fur àts
matières Eccledaftiques , defirant de fc^avoir de nous com-
bien noftre Eglife d'Orient Catholique & Apoftolique re-
connoiftde Sacremens^ quels font nos fentimens furie divin
Sacrement de l'Eucliariftie touchanrle Baptême, s'il eftnecef.
faire aux enfans , avec quelques autres queftions fur la même
matière j touchant la dignité Epilcopale , fi elle eft neceflaire
à l'Eglife j & fi l'Evêque par un ordre divin eft au defTus des
Preftres : fi les hommes éc femmes qui embraftènt le célibat
font une chofe contraire aux Ecritures-, & fi l'Eglife Catho-
lique de J. C. fera toujours vifible & infaillible fur la véné-
ration des Saints , & le culte relatif des Images 5 fur les jeû-
nes ordonnez & Tabftinence de quelques viandes ; fur quel-
ques Livres de l'Ancien Teftament dont l'autorité eft en con-
teftation, Tobie, Judith , laSagefte , TEcclefiaftique, Baruch
& les Machabées , Çi nous regardons ces Livres comme partie
de l'Ecriture , ou Ç\ nous les rejettons comme fuppofez par les
Payens : Nous n'avons pas cru pouvoir palTer fous filence leurs
queftions, de crainte d'eftreentr'autres chofes accufez de né-
gligence, mais nous les avons jugez dignes d'un-e prompte
& courte réponfe que nous faifons dans la pure venté , autant
que le temps plein de plufieurs contre-temps nous l'a permis ,
pour éviter le reproche qu'on nous pourroit faire de noftre
filence.
Pour les Sacremens , nous fommes de tout temps en
poftcflîon -de fept^ laines & vénérables. Je répons à la quef-
ifvec ÏEgîife Komxine Jhr ÏEuchuriflie . 62.J
tion. Depuis le temps que le faint Evangile nous .1 eflé piê. Ch. VI.
ché, ils font tous véritables & neceflaires pour le faluc des
iideles.
Le premier d'entr'eux efl: le faint Baptême , dans lequel efl:
pardonné le péché origmel , aulîî-bien que les péchez acT:uels ,
dans ceux qui s'en trouvent coupables, de par lequel eftant ré-
générez , nous fommes de nouveau mis dans la voye de la vie
éternelle.
Le fécond efl: celui du f-xint Chrefme, dans lequel nous re-
cevons une force fpirituelle pour pouvoir prêcher avec afleu-
rance ce que nous croyons dans le cœur.
Le troiiîémeeft celui de la fainte Communion, dans lequel
«efliant nourris rpiriruellemenr, nous fommes conrerveZjôccroiC
fonsdansla vie fpirituelle.
Le quatrième eft celui de la Pénitence , par lequel efl;ant
délivré des péchez acl:uels, l'homme efl: rétabli dans ks biens
que te péché lui avoit fait perdre.
Le cinquième eft: celuy du Mariage , qu'il paroift clairement
que l'Apôtre a appelle Sacrement.
Le fixiéme efl: celui du faint Sacerdoce établi par J. C. qui
rend parricipans delà grâce divine j & qui donne l'accomplif.
fement aux autres Sacrcmens.
Le feptiémeeft l'Ondion , que nous appelions iv')^i\xiov, qui
a deux effets , l'un de fervir à !a guérifon de l'ame , ^ l'autre
à celle du corps.
Nous croyons & nous confeflîins fans aucun doute fur le
terrible Sacr.^mentdc l'Eucharifliie , que le Corps vivant de
nôtre Seigneur J. C. efl: invifiblement prefenr , par une pi e.'cr,
ce réelle dans le Sacrement. Car lorfque le Prêtre célébrant
dit après les paroles du Seigneur ^ fa/ tes ce pain le véritable
corps de voftre Chrifi , ^ ce qui efi dans ce calice le véritable
fanq_ de voflre Chrfi , les chany:ant par vofire Saint Efprit i alors
par i'operaton ciel'Elprit très Saint, d'une manière furnaturel'e
& ineffable le pain eft changé réellement, véritablement 6c
proprement au propre corps de Jesus-Christ , & le vin en
fon fang vivant j éc nous croyons que c'eft Je.sus-Christ
même tout entier , qui ofFrc &: qui eft offert , qui eft reçu 6c
diftrîbué à tous, & qui eft mangé tout entier d'une manière im-
paflible. Ceux qui le re<^civent dignem.ent font vivifiez eftanc
unis à J. C. même . & ceux qui le font indignement font con-
damnez ,&: fe précipitent eux-mêmes dans une pertelnévita-
6i6 Liv. Vï M. Vrewves authen. de l union des Eg. d^Or.
ble. Ce Sacrement efl: cligne d'une verirable adoration , parce
qu'on y adore avec le même honneur qui efl dû à Dieu le corps
divinif é du Sauveur J. C. & il efl: offert en facrifice pour tous les
Chrétiens orthodoxes vivans 6ctrépaflcz.
Nous croyons du Baptême qu'il efl tres-necefîaire à tous les
enfâns abfolumenr, ôc que c'eft par ce moyen qu'ils reçoivent le
iceaudeferviteurs de J. C. & que renonçant à Satan par la bou-
che de leur Parrain, qui eft comme leur répondant , ils font
unis à J. C. poureflre purifiez de la tache originelle, ôcenfuite
prefêrvez des filets de l'ennemi. Car un trefor qui n'efl point
îcenéefl facilcmentenlevé par les voleurs, 6i on furprend fans
aucun danger une brebis qui n'eft point marquée, dit le grand
Biflle. C'cft par là qu'ils fë font rendus capables delà beatitu-
cle;car celui qui n'efl pas régénéré d'en haut ne peut pas jouir du
Royaume du Ciel. Et quoiqu'ils ne foicnt pas encore parvenus
à l'habitude de la foy , néanmoins ils en font capables par la
grâce de Dieu , & par la fbyde l'Eglife & de leurs parens.
Sur les queflionsqui nous ontefte propofées touchant le Ba-
tême , nous difons que le péché originel efl parfaitement
efface dans lefaint Baptême i de forte que s'il arrivoit enfuite
à quelqu'un de mourir en infidélité, on nepourroit pas dire
qu'il n^auroif pas obtenu la remifTion du péché originel , quand
il a eflé baptifé. Nous confefîc:)ns que celui qui a eflé une fois
juflifié , &fait enfant de Dieu, peut après la juflification dé-
cheoir de la grâce par infidelité^ou quelque autre péché mor-
tel , devenir efclave de Saran & enfant du diable i car l'aAion .
du péché nous éloigne du Seigneur , & fait que nous apparte-
nons au diable , comme dit l'Apoflre. C'efl pourquoy, quoi-
qu'un homme ait eflé une fois juflifié , il ne fçait pas néan-
moins s'il perfeverera jufqu'à la fin dans la juflice j & par
cette même raifon il ne fçait pas quelle fin aura fon éledion
qu'il a reçue par la juftifîcation , puifqu'il peut la perdre ,
comme il a eflé dit , & ne pas obtenir la part des Elus,
C'efl pourquoy le bien heureux Pierre nous recommande de
rendre noflre éledion certaine par de bonnes oeuvres. Princi-
palement 5 dit-il , mes frères , ayez^ fcin de rendre vofire vocation
S- vofire éleHion certaine'-, &c il ajoute enfuite ; Car faifant cela,
voiisne tomherez^jamais : Et le divin Paul pour nous rendre plus
foigneux , ditj c'efi pourquoy. celuy qui croit élire debout -prenne
garde de tomber^
Par
awec TEgUfe 'T{oma.me fur ÎEtichariflie. ^ly
P?rces mêmes paroles on trouve la refolution d'une autre Ch. VÏ.
de leurs queftions , qui eft qu'un homme-ayant efl.é première»
ment juftifië, s'il s'abandonne enluite à la débauche, aux adul-
tères,. aux homicides, & à d'autres fortes de crimes , s'il ne
revintà luymême parla pénitence, decheoit entièrement de
l'adoption &: de la grâce qu'il avoit reçue, & fe met en eflac
de ne pouvoir acquérir la vie éternelle j parce oue la mort eft
\z payement du péché.
Sur la neceffité de l'Epifcopat dans l'Eglife ; nous difons que
le grand Preftre même, qui a pénétré les Cieux, a établi des
Pafteurs & des Docteurs dans l'Eglife , comme dit l'Apoftre,
pour la perfection des Saints, ôc l'édification du corps Eccle-
fîaftique ; c'eft pourquoy autant que le baftiment du corps de
l'Eglife eft necelTaire, l'Epifcopat l'eft auffi , puifque par fon
moyen ce bafliment s'accomplit: & Iesus- Christ n'eft Preftre
jufqu'à la fin des fiecles félon l'ordre de Melchifedech, que
par lesPreftres qui font-crablis par fon ordre, parle moyen
defquels il agit continuellement dans les chofes facrées, ôc
eft confacré jufqu'à la fin des fiecles.
Les Prcftres ne peuvent eftre faits & confacrez par aucun
autre que par l'Evêque, comme ditisint Denis, û. perfonne
ne peut eftre Preftre, qui ne foit appelle à ce miniftere par les
confecrations hiérarchiques. C'eft pour cela queT'ite^'Timo-
thée furent neceftairement ordonne?, Evêques par les Apoftres,
afin qu'ils étabiiifent parles villes des Diacres, des Preftres ôc
autres Miniftres deschoies laintes, (e!on d'aucp-s diftétecs de-
grez pour un entier acccmpUlfement du lâinc Ordre qui doic
eftre dans l'Eglife de I'. C.
De-là on décide une autre quertion,qui eft que l'Evêque
par un ordre divin eft au delfus des Preftres qui reçoivent la
grâce divine par fon miniftere,&: qne c'eft un Ordre qui luy eft
naturellement fournis Carie morndrecftantbeni par ce qui eft
plus excellent, luy eft fournis en route manière.
Nous ne difons pas que les hommes & les femmes qui ne
veulent point fê marier, & aiment mieux vivre dans la virgi-
nité,faftènt quelque choie qui ioit contraire aux laintes Ecritu-
res; au contraire ils recevront de Dieu des couronnes p'us
glorieufes, comme ayant choifi le meilleur chemin de li.-
lut, puifque fi celuy qui fe marie fait bien; ceiuy qui ne fe
marie point, fait encore mieux, comme dit l'Apcftrei par-
KKkk
éi8 Liv. VTJI. Preuves a.uthent.de funion des Eg. dOn
ce que cekiy qui n'eft point marié n'a foin que des chofts qui
regardent le Seigneu-r pour trouver moyen de plaire au Sei-
gneur, au lieu que celuy qui eft marié a fî^in des chofes du
monde pour tafcher de plaire à la femme. C'eft pourquoy il eflr
bien meilleur de n'avoir (oin que des chofes du Seigneur que
ésk mettre en peine de celles de ce monde, ôc cette adion mé-
ritera auilî une plus grande recompenfe.
Sur l'Egli'e Catholique & Orthodoxe de J. C Nous difons
qu'elle eft infaillible comme eftant conduite par Ton facré chef
J. C. qui efl: la vente même, oC enfeignée par l'Eiprit de vérité.
Ilefl u-npolfible après cela qu'elle fe trompe. C'eft pourquoy
l'Apoftre l'aappcllée la colonne ^ le fovdement de la venté. Elle
fera toujours vilîble, par^e qu'il ne manquera jamais d'y avoir
des Orthodoxes, jufqa'à la fin des fiecles. Puifque tous ne dor-
miront pas, & que néanmoins tous enfemble feront changez^
ce que l'Apoflres a dit parlant des fidèles ; il eft évident que
juf ]u cà la fin du monde l'Eglife de J C. ne cédera point d'efire
vifibieen plufieurs parties.
Nous honorons les Saints qui ont combattu pour J. C. & nous
les prenons pour nos médiateurs envers Dieu , comme eftanc
fes amis , bi. ayant un grand accès auprès de luy , demandant
par eux le fecoursde Dieu , ce qui fe tire de plufieurs endroits
de l'Ecriture Sainte :& nous pratiquonsccîa comme uneadtion
de pieté qui nous ferra obtenir l'alîîftance qui nous eft necef-
faire. Et ce que difenc quelques per(onnes , que rendre hon-
neur à lafainte Mère de Dieu à caufe de fa dignité, comme
eftant plus excellente que les PuiiTances fpirituelles, Se hono-
rer les Saints, c'"ft diminuer l'honneur de J. C. nous penfons
quec'eft un raifonnement ridicule; car la manière de vénéra-
tion eft fort différente, & ne diminue en aucune manière l'ado-
ration & le culte fouverain de Latrie qu'on rend à' J. C.
Nous croyons auflî que les-prieres des Preftres & des hom-
mes vertueux & leurs oraifons font fort agréables a Dieu i nous
\ts recherchons toujours avec dévotion i ce que nous appre-
nons dans plufieurs endroits de. l'Ecriture Sainte. Et nous en-
tendons Paul même deftiné dés le ventre de fa mcre à la prédi-
cation de l'Evangile de Dieu , qui dit aux Romains : Secourcz-
moy par les pneres que vous ferez pourmoy envers Dieu. Il
dit la même chofe écrivant aux Ephefiens & aux Hébreux.
Outre cela nous confervons avec 2:rand foin la coutume très-
pieufe èc très-utile de la vénération des faintes Images , corn-
âwec r EgUfè %oma.ine' fur r Eucharîjîfe . éi^
me eftanc en ufagedésle temps des Apoltres .félon l'hiftoire C h. VI.
Eccieliaftique. Et comme nous ne rendons pas aux îmaç^es un
honneur de Lacrie, mais relatif ^ n'arreftanc pas noftre penfée
à la matière ou aux couleurs , nous nous en fervons pour
nouslouvenir des originaux à qui nous en rapportons tout
1 honneur.
Sur les jeufnes, nous confeifons que l'Eglifepeut ordonner
des jeufnes &; ahftinences de quelques viandes , comme on
fçait qu'il s'eli toujours obfervé parmy nous , & que tous les
Chreliicns font purifiez par les jeûnes établis.- Qiie pour lors,
non ieulement nous nous abftenonsde manger^, mais auflide
différentes fortesde nourriture, depoiflons, de fromage 6c au-
tres femblables ^ ce quia eûé fort bien ordonné pour la mor-
tification des paffions charnelles, pour une dif polition à la priè-
re , &: une humiliation très- utile.
Pour les Livres de l'Ecriture nous en trouvons divers Cata-
logues dans les Canons Apoftoliques, &des faines Conciles de
LaodicéeSc de Carchage , en exceptant les Conftitutions de
Clément, que le i. Canon du 6. Concile rejette, parce qu'elles
ont efté corrompues par les hérétiques, comme chacun le peut
voir & apprendre des Livres qui font mis au nombre de
ceux que l'Eglife reçoit. Et tous les Livres de l'ancien Tefla-
n'.ent, qui ne font pas compris dans le dénoi-nbremont des
Saintes Ecritures, né font pas pour cela entièrement rejettez
comme Pavens& profanes , mais on les appelle bons 6c ver-
tueux, 6c ne doivent pas eftre entièrement négligez. Nous
répondons ces chofes pour le prefenr comme en abrégea ceux
qui nous ontinterrogez. Elles déclarent noftre pieté avec une
(Implicite pacifique , 6c ferviront de preuve certaine 6c con-
vaincante des (cntimens orthodoxes que nous avons, de for-
te qu'on né peur plus douter de tout ce que nous avançons,
qui ne peut aulh eftre contefté par ceux qui nous veulent im-
poser des fentim.ens éloignez de noftre créance. Ecrit dans la
maifon Patriarchale de Conftantinople l'an 1672. au mois de
Janvier indiclion 10.
Denis par la mifericorde de Dieu Archcx'kque de Covftantiiio»
pic , la nouvelle Rome C^ Patriarche OecuyncràqTie.
Paisius cy. devant "patriarche de Conftantinople.
DiNis cy- devant Patriarche de Conftantinople.
KKkK ij
6jo Liv. VIII. Freuwes authent. de ïunion clés Eg. d'Or.
METHODius cy. devant Patriarche de Conft antinomie.
Paisius d'Alexandrie.
Barthélémy d'Heraclée.
Metrophane de Cyzique^
Methodius de Nicée.
Jeremie de Calcédoine.
Grégoire de Cefarée en Cappadoce:
Néophyte de Ni comédie.
Gabriel de philopolis.
Anthime^é" Paros.
Cyrille de Serre,
Joachim de Rhodes.
Theodoret de Lacedemons..
Macaire de T>ryfte.
Meleiius^i? Sophie.
A NT H I ME d'Athènes..
Jacques de Larijfa.
Daniel d'Euripe.
Calliste de Corinthe.
B ARTHELîMY de Naupaïle ^ d"C
Daniel de l' -ancienne Partras, ^
Eugène de Chrïflianopolis.
ZoZYME de Mcletine.
Cornélius de Corcyre.
Metrophane de Barri.-
D A ni EL d'-dnchiale.
Géras iME d'Amasêe.
Mêle CE de Theffalonique.
Joachim de Berèe.
]ean de Trebiz^nde.
Theophane de Mefmbie, '.;
Laurent de Proilave.
Daniel de Vidonie. }
Laurent de Monembajîe.
G^'i.GOïK'E. de Didymotyqtie^
Daniel de Me die.
Gedeon d'Aynos.
David deCalaune , &Menocorb.
Cetécricacfté compofé, & écrit de la marn de moy le grand
Rhéteur de la grande Eglifc-ôc ainfia efté couché fans y rien
changer dans le faine Livre de la grande Eglife de J. C.
Afvec FEglife Romaine fur tEuchariJîie. 631
LETTRE DE MONSJEVRDE'NOJNTEL AV ROY.
Ce n'eft pas feulement de ceux qui vivent Jans la foy ca-
tholique du Rite Romain que voftre Majefté eft reconnue pour
le Fils aifné de l'Eglife, & pour fon proteéleur. Car fi éten-
due que puifTe eftre l'Eglife Romaine en plufieurs parties du
monde, Vôtre protection Sire, va encore plus loin. Les
.Chreftiens Orientaux y recourent de tous coftez comme à un
afyle afïèuré : & l'on peut dire que Votre Majeftéefl le centre
oià ils Te réuniiTent en quelque façon au chef duquel ils font
feparez ou par une necelîité malheureufe, ou par un refte
d'opiniaftreté.
Les ordres, SIRE , que j'ay reçus de Vôtre Majefté de pré-
venir ces Chreftiens affligez dans leurs befoins, font exécutez
avec toute la ponctualité qui m'eft polTiblei ôc parce qu'ils ne
s'étendent pas feulement fur le temporel, mais encore furie
fpirituel, j'ay cru que je ne devois pas borner le zcle auin puif
fant que fecourable de Vôtre Majefté, à donner refuge à des
Patriarches ôc des Archevefques dans le Palais de France à
Conftantinople, mais qu'il fâlloit encore les avertir de la pré-
tention d'un Miniftre Calvinifte fujet de Vôtre Majefté, lequel
foutient dans divers traittez, que les Grecs, Arméniens & au-
tres communions Orientales feparées de l'Eglife d'Occident
ne eroyent point la prefence réelle de N. S. J. C. dans l'Eu-
chariftie, ni le changement réel & fubftantiel du pain & du
vin en fon corps 6c en fon fang , & qui s'opiniàtre fur ce prin-
cipe à foûtenir que les Orientaux n'adorent point du cuire de
Latrie Jesus-Christ prefcnt réellement dans le faint Sacre-
ment.
J'ay cru, SIRE, ce point de fait fi important que je n'ay
rien oublié pour Téclaircir, & je puis afiTurer Vôtre Majefté,
en luy gardant toute la fidélité que je luy dois, que les Grecs
& les Arméniens eroyent la prefence réelle de J C. au faint
Sacrement, & la converfionfubftantieîle du pain & du vin en
fon corps &: en fon fang, &: qu'ils adorent J. C prefent réel-
lement & invifiblement daiTs l'Euchariftie. Jay affiftéà' leurs
cérémonies 2c à leurs Liturgies, ou cette vérité paroift dans
KKkk iij
6}t Liv. VIII. Vrewves nuthen. de r union des Eg. d'Or.
un cclac invincible, &: les Patriarches, Archevelques &; Evef-
qiies, iesPreltres, les Gentils hommes Se les particuliers, 8c
même les Papas éc le peuples à la compagne me l'ont certifié
avec exécration contre ceux qui leur miputoient une autre
croyance, les traitrant de calomniateurs & d'hérétiques.
Il n'y a même pas un du cierge qui ofaft faire paroiftre un
fentiment contraire quand il l'auroit. Et lorfque j'ay deman.
dé des atteftations aux Patriarches Grecs, ils m'ont dit que
les anciens Pères de leurs Eglifes, les conférences par lettre
du Patriarche Hieremie avec des Luthériens d'Allemagne , les
Synodes tenus contre une prétendue profeffion defoy de Cy-
rille Lucar, la confeffion Orthodoxe de l'Eglife d'Orient, le
livre d'Agapius êc plufieurs autres traittez faits du temps de
Cyrille Lucar, étoient autant de preuves inconteftables de
cette vérité , &; que l'imagination contraire d'un particulier
deftituéede tout fondement, nelesengageoit pasd'aiTembler
un Synode , pour ledefabufer. Us n'ont pas lailïede me four-
nir plufieursjpieces de confequence, & entr'autres une profef-
fion de foy fur les points dont ils différent des Latins, don-
^„ Cl- ■ née par un de leurs Docleurs, & enreg-iftrée dans le livre de
niée dans la la grande Egluede Conltantmople, dont j'ay fait certiher la
répoiifegcue- copie par le Patriarche &: plufieurs prélats & Officiers. J'ay
Certf à°di*rc mêmc obtenu des atteftations du Patriarche gênerai des Arme-
du Patriarche niens 5i de celuy de Conftantinople. J'en ay eu àes princi-
Armenicii de p^j^^ villes de l'Archipel. T'yav ajouté le témoiçrnage de la
pie. Voyez pkifpartdes Ambafladeurs & reprefentans , qui font en cette
Rep. gen p. Porte. Celuy d'Angleteire & fon Miniftre m'ont avoiié ex-
i9f. preflement que les Grecs croyoïent la prefence réelle & le
changement des fubftances , mais qu'il ne pouvoit à prefenc.
le témoigner par écrit. Le Refidene des Etats m'a confefTé
quec'étoit luy-mêmequi avoir apporté de Hollande la con-
feîllon Orthodoxe, où elle avoir efté imprimée Les perfon-
nes les plus confiderables du Païs après ces Meilleurs, n'ont
pas hellté de fervir de témoins.
Et enfin le Patriarche Dionifius avec trois autres qui l'ont
précédé dans la même dignité 6i celuy d'Alexandrie 6c ti en-
te fix Métropolites fe font aifemblez ,£c ont déterminé un
acle Synodal qui eft dans l'Eglife de la grande Eglife, où le
point de l'Euchariftie 6c plufieurs autres étant expliquez, il;;
font voir clairement quelle eft leur foy.
aaiec tPglfe Romaine fur T Eucharlflie . 635
Le Patriarche m'en a envoyé un Original en bonne forme Ch> VI.
par trois Métropolites & fon Référendaire avec prières tres-
inflrantes &forc iuûmifesde le faire pafler ettre les mains de
votre iV'aiefté, la priant très humblement de vouloir qu'il
foitmisen dcpofl: dans fa Bibliothèque, ou en tel autreendroic
qu'il luy plaira d'ordonner, afin que les calomniateurs qui les
pcrfecutent en leur imputant de ne pas croire la prefcnce rcel-
îe, 6c le changement des fubfrances & le devoir de l'adora-
tion à |. C. prefent réellement dans l'Euchariftie , y lifenc
Jeur condamnation.
Ceux qui m'ont porté ces paroles ayant eu grand entretien
avec moy , je prends encore îa liberté d'en faire tenir une
relation à votre Maiefte.
Elle trouvera encore avec ces pièces uneatteftation du Pa-
triarche Grec d'Anpioche Se une de celuy des Cophres, quiefc
celuy desAbyiîins.Etelle jugera mieux que perfonne qu'on ne
peut fans une opiniâtreté inexcufable s'eievcr contre un iî
grand nombre cl'authorrcés, Icfquelles eftant cl'cllcs-mêmcs
très fortes deviendront invincibles , lorlqu'elles fetrouveront
fous la proteclion de Vôtre Majefté, &: qu'elle s'en fervira
pour la gloire de l'Eglife. Vous en êtes, SIRE, le Fils aifné.
Ainfîfi deffenfe regardant particulièrement vôtre Majefté
me fervira dexcufe Ç\ j'interromps fes grandes occopations,
& de moyen pour luy prouver le zèle ô: le profond reipecl
avec lequel je fuis»
SIRE ,
DE V.MAJESTE^
Le très humble ^ très obeïflrint &
tres-fidelle ferviteur 5c lujec
Oliir. de Nointel.
A fera lès Confiant inouïe le
'juillet 16/ z.
634 ^ï V. VI I î. Pnwves autheut, de t union des Eg.d 'On
CHAPITRE VII.
Union de l'Eglife Grecque avec l'Eglife Romaine fur l' Euchari-
ftie prouvée far l'attcjiation des Eglifes de Min^rclie , de
Géorgie ^ de la coicbide.
N
Ous avons remarqué dans le premier Tome de la Per-
pétuité, en faiiant le dénombrement des Provinces foû-
mifes au Patriarchac de Conftantmople; que la Mingrelie en
faifoit partiej & que les Géorgiens qui avoient un Patriarche
particulier & indépendant, luivoient néanmoins la doctrine &
1.1, c, i.q.i. la difcipline de l'Églile Grecque. Ileftoit difficile de le prou-
ver autrement que par le témoignage des Hiftoriens qui en
parlent de la forte. Et le peu de commerce que l'on a dans ces
pays Cl écartez oftoit coût lieu d'en eiperer des atreftations par-
ticulières. Néanmoins les foins de Monfieur l'Ambafîàdeur
de Conftantinople ont iurmoncé cet obftacle, £c on en a re-
çu depuis peu deux écrites en caraderes Géorgiens 6c en
langue Géorgienne ^ l'une de l'Archevêque de Mingrelie
qui s'appelle Catholique j l'autre d'un Evêquede ces quar-
tiers là. Comme elles ne contenoient l'une & l'autre que la
même chofe ,1e tradiKleur lésa jointes dans la traduction. Si
M. Claude faifoit difficulté d'y ajouter foy fur ce que c'eft un
Millionnaire Italien , il peut avoir recours à l'original , &
chercher quelqu'un qui entende , &: qui life la langue Géor-
gienne.
ATTESTATION des Eglifes de Mingrelie,
Colchide j Géorgie.
EXPLICATION I>ES ErESQVES DV LEVANT DE LA
Colchide, Géorgie, MiH'^cUe ^ GoriejJ'e,^';;- autres nations Orien-
tales qui vivent dans la Religion Chrefliennc , contenant lesfcn-
timcns de ces nations fur Ls S'écrément de l' Eucharijiie ^
d'autres Articles de Foy.
ÎLs tiennent premièrement que du Temps de Moyfe on im-
moloit feulement des bœufs & des brebis , &: qu'on n'offroit
à Dieu que des facrificesoidesholocauft.es de beftesj mais que
depuis
a<vec ÏEglife Komaine fur l'Euchmliie. é^K
depuis llncarndtion & l'avenemenc de J. C. on n'offre plus le Ch. VII.
iang des boucs & des veaux , maislefangde J. C. fous l'efpece
du ^ain & du vin , & que tous les i'ours à la Mefîe les Preftres
facriri jni dans le Sacrement de l'Euchariflie le corps de Nôtre
Seigneur J. C.
Que ceiui-là eft infidèle , anarheme, & indigne du nom
de Chrérisn , qui ne croit pas que dans le Sacrement de
l'Euchanftie la fubflance du pain & du vin ne dcmeiirent
plus^ àcaufe des paroles pronontéjs par le Preftre j qu'il faut
croire qu'après la Confecration du Preftre la fubftancc du pain
& du vin eft tranffubftanciée au vray corps & au fang de J C.
né de la Vierge Marie, qui afouffert, a efté cracitié, & eft
refrufcité'.
Que ce Sacrement a efté infdtué par J. C. en la Cène du
Seigneur dans la grande Semaine ,eftantà table avec fes Dif-
ciples.
Que J. C. a dit & qu'il eft de foy que quiconque mange ce
pain vivra éternellement-, & au contraire que quiconque ne
mange pas cette chair mourra j Scn'eft pas digne de J. C.
Ils déclarent déplus que non feulement les Preftres Se les
Prélats, mais tous les Primats tant réguliers que feculiers de
la Région Orientale desNations de la Géorgie , Mingrel e,Ô£
autre*, qui font Chrétiens de vie & de moeurs , croyenc fince.
remenc & fermement tout ce que doivent croire tcus b ins &
parfaits Chrétiens fur le Sacrement de l'Eucbariftie , f(javoii?
que la fubftance du pain eft détruite après la confecrntion du
Preftre , ic qu'elle eft rranlÏÏibftanciée au vray corps &aufang
de ].C. & que les Preftres l'offrent lui même pour les vivans
& pour les morts, célébrant tous les jours des Meftès en faveur
des défunts. Ils ont aulîl une grande vénération pour ce corps
& ce fang ; &: dans la célébration de la Meffe ils l'adorent Se
révèrent avec une grande dévotion.
Ils rendent grand honneur aux Reliques des Saints , 5c ont
foin de les placer avec beaucoup de refpecl aux lieux honora-
bles de leurs Eglifes.
Dans leurs arîlicLions & dans If^urs maux ils invoquent fans
cefte lefecours de la bien heurcufe Vierge Marie , de S. Pierre
te S. Paul , & de tous les Apoftres , de S. Michel Archange, &:
particulièrement de S. George leur Patron.
Dans leursmaladiesils ont beaucoup de confiance aux Saints
LLll
-ôj^ Liv. Y'f II. Trouves authûK. de r union des €g. d'Or.
qu'ils invoquenc,.f^raffiftancederqLieIsils oncinimediatemem:
•recours en leur offrant des prefens,comme des cierges & autres
rhofes. Ils leur brûlent de l'encens , & leurfoot des vœux &
^iespromelîes pour en obtenir leur guérifon.
Outfe l'adoration & la vénération qu'ils ont pour les Saints,
ils obfervent dans l'année des jeunes à leur honneur. Car ils
jeûnent à l'honneur des Apoilres iliint Pierre & Taint Paul , -Se
en celui delà bien heureul'e Vierge Marie quinze jours avant
la fefte de fo\i Allompcion.
Ils oLttous les ans quatre Jeûnes , le grand qui ert: le Carê-
me, celui de faine Pierre &: laint Paul, celui de l'AiTomption
de la feinte Vierge, & le dernier au temps de TAvent de
Nôtre Seigneur J.C Celui-ci eft de quarante jours, ôiilss'ac-
quittent de tous avec beaucoup de rigueur.
Ils obfervent ces quatre jeûnes, parcequ'ils les reconnoif-
fent établis par les quatre Patriarches de Conllantinople,
d'Ancioche, d'Alexandrie 6: de Jcrufalem^Sc tout ce qui vient
d'eux ils le (uivent ponduellement.
Donné d Mingrelie darss la Région de la Colchide en
Orient l'an 1671. au mois de Décembre.
Ce qui eft dit, ci deiTus fait voir ce que contienn'?nt véri-
tablement & confiammenc les atteflations écrites en caraâ:e-
res Géorgiens .quiontefté très fidellement traduites, &;jufte-
ment e\'pliquécs par moy Jofeph-Maiie Zampio, Clerc Ré-
gulier Miffionnaire, &L je jure que cela eft la vérité.
Voici ce que M. de Nointel a fait écrire au bas des attefta-
rions Géorgiennes. Au bas de la première.
Ous CharlesFrançoisOlier de Nointel jConfeiller du
Royen fes Confeils, en fa Cour de Parlement de Paris,
Si Amballadeur pour fa Majefté Très- Chrétienne à la Porte
Otchcmane, certifions à tous qu'il appartiendra que le Père
Zampio Theatin refidant en Mingrelie , nous a envoyé l'ac-
teftation qui eft de l'autre part , nous affuranr que pour fatis-
taire à nos requiiitions , le chef des Evêques de cette Provin-
ce , furnommé le Catholique, l'ayant compofée&: écrite en ca-
r,aderes Géorgiens , l'avoit auiïî authentiquée de fon para-
phe reprefenté par une main tenant une Croix , dans lequel
aevec r EglifeKomAine Jur l' Euchariflie: dyj
ît trouve écrit , Hilarion , qui eft Ton nom. C'eftceque nous Ch. Vil.
confirmons par nôtre fignature , le Iceau de nos armes &: le
contre feing de nôtre premier Secrétaire.
Donné à notre Palais (ur le canal de la Mer Noire le
Septembre 1673.
OLIER DE NOINTEL , AmbafTadeur
pour Sa Majefté Très Chrétienne
à la Porte Otthomane,
Par mondic Seigneur , L E PICARD.
Et au bas de la féconde,
NOus Charles François Olier de Nointel , Confeilîer
du Roy en fes Confeils en fa Cour de Parlement de
Paris , Se Amballadeurpour fa Majefté Très- Chrétienne à la
Porte Otthomane , certifions à tous qu'il appartiendra que le
PereZampioTheatin refidant enMingrelie ^ nous a envoyé
l'atteftation quieftde l'autre part, nous aifurant que po'irfatis-
faire à nos requifi^tions , l'un des Evcques de cette Pnvince
l'ayant compofée décrite en caracleresG-eorgienSjl'a-voitaAJtii
authentiquée die Ton paraphe. C'eft ce que nous confirmons
par nôtre fignature , le fceau de no^ armes , ôc le contre- feing
de nôtre premier Secrétaire. ~ ■
Donné à nôtre Palais fur le canaîdc la Mer Noire le.
Sedtembre 1673^
OLIER DE NOINTEL, Ambafladeur
pour fa Majeflé Très Chrétienne
a la Porte Otthomane.
Barmondi: Seigneur LE PIGAR.D.
J.LHij
éjS Liv. Vf 1 1. Prcuvûs authen. de l'union des Eg, d'Or.
CHAPITRE VIII.
Union de l'Eglife Grecque avec l'EqJ.ife Romaine fur l'Euchariflie ,
prouvée par les Attejiations du Vicaire Apojioliqtie , des Re-
fidens de plu(ïcurs EJîats , &■ de la Communauté des Pcrotes.
Zetire de Monfieur de Nointel Ambajfadeur de Sa Mnjejtc
Très. Chrétienne.
COmme il n'eft nullement croyable que desperfonnesqui
font dans de grands emplois publics, veuillent renoncer
à leur honneur &à leur coniuence , pour atteftcr publique-
ment unefaufleté dont il feroit aifé de les convaincre, Mon-
fieur de Nointel a jugé avecraifon que le témoignage des Re-
ficiens de divers Eftats bL autres perfonnes confiderables qui
font à Conftantinople , quoique Catholiques ,feroitde grand
poids à i'egard de tous les gens de bon fensi puifque leur qua-
lité les mettant à couvert du foupc^on de poavcir manquer de
lîncerite dans une affaire de cette nature ^ 8c eftant parfaite-
ment informez du fait dont il s'agit parle fejour qu'i's font à
Conftantinople i ils ont tout ce que l'on peut juftement de-
mander en des témoins. C'eft pourquoy il n'a pas négligé de
tirer d'eux des atteftacions authentiques que nous miererons
dans ce Chapitre.
ATTESTATION DE MONSIEUR RIDOLPHI,
Vicaire Apoftolique Rcfident à Conltantinople.
1~2 Andréas Ridolphi Deidono é^ Apofiolica; Sedis Gratia EpijZ
copus Calimina; , Vicarius Apofiolictis , ^ Suffra^aneus
Patnarchalts Conftantinopoli,
Annofa confuetudine a nobis cum Gracis habita , mainave cura
^ folertia quid eorum Ecclcjia credat perquijïtione conjiderata ,
fnceram m.irtyriam univcrjîs é" finfitilis praftanius i^fam ea om.
nia credcre quit ab aliquibus heterodoxiis livido ore in controver,
Sam revocantur.
Primo vivum corpus vindicis noftra falutis in cruce fuffixum ,
quodquepofi analypjm ad c^lum fedet ad dexteram Patns , moda
a,fV6c tEglifc Komninefur fEucJuriJiie, 639
invijîhili , verè é- realiter ejfe frJ(cns in Euchanjiia , ^Jfïrmare. Ch. VlII.
iiccundo ^ pancm <^ vinurti ,peruBa à Leiturgo confecratume ^
tranfmutan a propria fub[tantiain vcrum fubfluntumi Chnjli , itn
ut folàm accidentta ^ fpecies extcriores panis ^ vini remancant
edocere.
Tertio , Eucharifiiam cfje holocatiflum , càm pro omnibus viven-
iihus , tàm pro dcfunilus ordinatum ab authore S ucramentoruni ,
nobifquc ab Apgflolis traditum , tencre.
Qu^irto , in Euchuriftia corpus Chrifli integrum manducari , irti'
falJibiUter fumi ^ offcrri , (^ latria adoratione venerari , afiruere.
Quinto , Ecclejtam haberc facultatem indiccndi jejunia d^ ub~
ftincntiam k cibts ^ credcre.
Sexto , chrifli feUatores Deiparxm Virginem exorantes > fan-
Bofve qui ifl cclo exiftunt frecibtis ferientes abfque minimu Re~
demptoris ojfenfa id pr^rflare , contendere.
Septimo , fanîlos honore illis débita profequcndos ac eelebrandos^
eorumve exitviaf , lipfana. é" reliquias in veneratione habenda-s ,
frojjteri.
Ottavo , Divorum imagines relative revcrendas eJfe , fcntire.
2^ono , Epifcopos divina ordinatione , c^cteri Sucerdotibitj infe-
rior^s hicrarchia pracellere , hofque ah ipjis Antiflibiis Jolùm ordi-
nari , prxdicare.
Decimo , Epifcopatum in Ecclefia Chrifli efle necejflurium , pro
aris (^- focts defcndere.
Undccimo , Eccleflam Catholicam idque ad ultimam faculi cori-
fiagrationem jempcrvifïbilemfore (f^ infallibilcm , ajjeverare.
Duodecimo , feptem e/Je Sacramenta .
Decimo tertio ^ ultimo. Libros Tobi^c , Judith , Sapicntia; ,
Eccleflafles , Baruch , Machah.torum , cfJe partes facra: pagina: ,
toto annuere capite.
In quorum fidem manu propria fubflripflmus , ^^ flgillnm nof.
trum appofuimus. Datum Galata apud fanciufn FrAncifciimnoflr^e
refidcntia: ^ K'ilendis Augtifii anno Domi7ii mille flmo flexc ente flm»
fepttiagcflmo primo.
ANDREAS RJDOLPHJ Epifcopus Calamina:.
LLII iij
640 Liv.VIII. Vreu'vesauthetit. de t union des Bg.diOr.
ATTESTATION DE MONSIEUR CASIMIR
Reildenc de Pologne à la Porte.
OS Francifcus Cafmnrus de V^ifocha Rifochi Eques San^
cii,ffimi Se-ppdchn Microfolymitanus ^ F Incerna. Socachovicn-
Jis , Secretariîi-s Aidicus , ^ Ableyitus Sacra Rey.^ Majcjiatif
Puloniamm ^ Reipublica ad Port um Otthomanam.
Cum fer expert entiam ^ ^ colloquia fapiui habita cum Prima-
tibus (^ Frxlatis Eceleji.e Graciée , aliifque , tam in Polonia , in.
cujiis pcrmuliis ditionibus fovetur ac frotcq^itu.r ri tus Gracus, quant
etiani in his partibus , ubi jam a longo tempvre commoramur \fide
dignis heminibus ccrti/Jima notitia fciamus quid Graci de .Reli-
(fionc Chriftiana un a cum Latinis*teneant quidve non tcneantifa^
cinms plenam & indubitatam fidcm quikufcunque quorum interefi
Chi'ifiianis- ^ aut Cat ho lui s Romanis , Calvinianis^ aut Luthiranis.^
Ecclejîam Gracam qu^: fequuntur fupra Eucharifiiam ^ alia ca^
pita mù cum Romana firmiicr credere 5 Ncmpe ,
Primo , Vivurn corpus Jefu Chrifli crucifixi qui in cœlum a [ten-
dit,, quiquead dexteram Patris fedet , realiter in Euchanfiia rn-
'vijîbiliter adejje.
Secundo ^panem (^ vinum confecratoriis a, Sacerâote verhis ort
froliitis, expropria fua fubfiantia inverayn (^propriamjefu Chrijii
pibfiantiam 3 ita ejje commutata , ut nihil tvmpliHs rcmaneat prêter
accidentia g^ fpecies exteriores fanis ^ vtni.
Tertio. , Eucharijiiam ejfe holocaujltim pro vivis ^ mortuis à
Chrifio inftitutum , & per traditionem ah ^pojiolis tranf/niffum.
Quarto ,, Jefu Chrifli carpus totum in Euchariflia tTnpalJibili^
ter fumi ab eo qui illud recipit ^.facrificio incruento afferri , atqne
fupra omnia ut Deurn adorari.
Quinto ,,Ecclefiam hubcre authoritatsm ftatuendi jejunia ,- ci-
hojque quofdam prohihcndi.
Sexto y Chrijiianos qui fuis precihus , Deipara T^irginis , San-
B or unique qut heat-is fcdes tncolunt ^ au xilium implorant , dehitUM
Jefu Chrifîo Servatori honorem nihil imminuere.
Septimo , SanHos honorari ^ celebrari dcbere.
Octavo , honorem relativum eorum imaginibus aut relïquiis
dcheri.
2<fono , Epifcopos fuperiores effe Sàcerdotibus qui ab ipfis Epij.
sopis folum caruHerein faccrdotalem reci£iunt.
d'vec tEgîifè Romaine fur TEuchuriflie. 641
Decimo , Epifcopatum in Chrifii Ecclefia ejje necejfarium- Ch. VIII.
Unâecimo , Eccle fiant Cathoikam ejfie ^ fem^erque futuram vif.
■bilem ^ infulli'oiUm.
^ Duodecimo ^ ejJe fcptem SacrAmentA,
Denique Libres Tobnc , Judith , S ipientiit , Ecclcfiafttci , Ba.
ruch C^ Mitchabaorum , cjfe partes Scriptura Sacra.
In fidem quorum huic teftimonio fubfcnbere voluimus , g/- ap-
foni curavimus nofirum fipllum ^ contra fignum nofiri primi Se-
cretarii.
Datum Conflantinopoli die feptimx Scptembris , ano Domini
mille fimo fexccntcfimo fcptuay^fimo primo.
IRA2\^CISCVS CASIMIRVS Vifochi Ablegatus.
Ex mandata pncfati illufiri^mi Domini ,'
.1 RANCI se US DE V^RT -Secretarius.
ATTESTAT lOJT DE MO^ S lEVR QJJ IRINO
■ Refident de la Republique de V-cnife a Lt Porte.
"^.TOi Giacomo Quirino Cavaîiero per ia SerenifTimo Re-
X^ poblica di Venetia Cailo alla Porta Orchomana , Eiîen-
do di noftro ordineil Dragomano Grillo andato da Dionyfio
prelenremenre-PatriarcadiConftantinopoIi, da Methodiouno
de (uoi predecefîori,-c damoltialrri Mctropoliti-Grxci, perin-
formari s'habbino alcuna oppofirionealli fequenti rrcdecl atti-
coli , ciriporto che cflî fenza alcuna difficulcà ë francamente
rirpofero, de confermono è tengono pcr indubitati, è di fide
i medefimi a-rricoli; in de noi afficuraci di qucfta verita , fac-
ciaino ampla è indubiraca fide a qnafivoglia Chriftinno , tanto
Cattoiico Romano, che di qualiîiia Tetra o Religione , come
laChiefa Grxca crede.
i.-Che il corpo vivo di Giefu Chrifto crocififTo^ che fali al
cielo. è che fede alla deftra del Padre j è ver-^mente prefente
neir Euchariftiainvifibile.
2. Che il pane & il vino doppo la Confecrationej fonocom-
mutaci dalla propria (oftanza loro^nella vera è propria foftan-
za di Giefu ChriftoJ di modo che reftono flilanriente gli acci-
denti , & le fpecie efteriori del pane è del vino.
3. Che rEuchariflia è elocauilo per i vivi 6c per i mord or-
642- Liv. V\\\. Treuwes amhent.de Vunion des Eg. d'Or.
dinacoda Giefu Chrifto, è datoci per traditione dalli Apo»
ftoH. ^
4. Che il corpo di Giefu Chrifto nell' Euchariftia rutto fi man-
giaimpaffibilmente dichilo riceve, s'offeriice fenza uccidere,
è coma Dio fommamente s'adora.
5'. Che la chiefa ha authoricad'ordinare digiuni , è proibire
alciini cihi.
6. C!îe li Chriftiani i quali pregano la Vergine Maria e i Sandi
non diminiiifcono l'honore dovuto à Giefu Chrifto.
7. Che fi devi honorare i Sandli è celebrare la lor Fefta.
8. Chei Vefcovi per ordinatione divina non folo fopraftan-
no agliaîtri lacerdoti , ma foli conferifcono loro il carattere
facerdutale.
10. Che l'Epifcopato fia neceflario nella chiefa di Chrifto.
11. Che la chiefa Cattolica è & Tara fempre vifibile ôc infail-
Jibile.
1 2. Che i Sacramenti fono fette.
15. Chegli hbri diTobbia, Guidit , Sapientia,EccIefiaftico.
Bariich è Maccabei fono parce délia facraScrittura,
In fede di che habbiamo fottofcricco la prefente di noftra
propria mano , c muniia con il noftro figillo. Data in Pera dï
Conftantinopoli il 5. Gennaro 1671.
Zociis fgiÏÏi.
GTACOMO QVIRINI Can. Bailo.
BERNARBO NJCOZAZI Secretariô,
ATTESTATION Be M. FEJtCHI RESIDENT
de la Republique de Gènes à lu Porte.
NOi Sinibaido Fiefchi Refidenre per la Sereni/ïïma Re-
publica di Genova afprefl'o la Porta Ottomana , per
l'experienza che habbiamo di motd anni in quefte parti , è per
la pratica è converfatione dà noi ha vuta con piimati delta
Chiefa Greca , Patriarchi, Metropoliti , & al tri j facciamo
piena& indubitara fcdedinanzi à qualfivoglia Chnftiano, o
Catolico Romano ,6 Calvinifta, o Luterano, qualmente la
Chiefa Greca crede.
1. Che il corpo vivo di Giefu Chrifto crocififTo , che fali a'I
cielo
avec ÏEglife %oma,ine fur VEud]mfîie. 645
cielojèche iedeailadeltradel Padre, è realmente preience Ch.VIII.
•nell'Euchâriftia, invifibile.
2. Che il pane & il vino, fratta d'al facerdoce la confecracione,
fono commucati dalla propria loftanza loro, in vera è propria
fbftanza di Gielu Chrifto , di modo che rellano lolamence li
accidenti, le fpecieefteriori del pane è del vino,
3. Che l'Eue bariftia è holocaufto pcr i vivi , è per i morri »
ordinato dà Giefu Chrifto , c daccci per rraditione dà gli Apo-
ftoii.
4. Che ilcorpodi Giefu Chriflo, nell' Euchariftia turto fî
afume impaffibilmente , da chi lo riceve ^ s'ofFerifce Tenza uccL
dere, c corne Dio fommamente s'adora.
-5. Che la chie(a hà authoricà d'ordinare djgiuni, è prohi-
bera alcuni cibi.
6. Che gli Chriftiani che pregano la Vergine Dcipara , ègli
fanti quali fono nel cielo, non diminuifcono l'honore dovuto à
Giefu Chrifto.
"7. Che fi deve honorare gliSanti, ë celebrare.
8. Che relativamente dobbiamo riverire l'i'.i-iagini de fanti.
•9. Che gli Vefcovi per ordinatione divina fopraftanno à gli
altri Sacerdoti,è dà loro Ç\ fanno degni deila gratia.
10. Che l'Epifcopaco fia neceiTariG nellachiefa di Chrifto.
ii.Chelachicfa Catholicafarà fempre vifibile, è mfaillibile.
II. Che fono fette Sacramenri.
13. Che gli librideTobia, Giiidir, S-pientia, Ecclefiaftico,
Baruch ë de Maccabei (bno parce délia Scrunra.
In fede di che habbiamo locto fcritto, ë farro apponer il
noftro figillo ë concrafegno del noftro primo Secrerario. Data
in Galatadi Conflantinopoli nel palazzo délia noftra folitâ
habitatione li 13. Agofto 1671.
LOCUS flplli FiNIBALDO FlESCHI.
D'ordine del Prefato Illurtrillnno.
Michel' Ang,° del Noftro Sec»^
MMmra
I
644 Lïv. ^^^^- 'Pt'CU'ves authent. de T union des Eg.d'On
ATTESTATION DES AMBASSADEVRS DE LA
République de Rciyife à. lu Porte,
'Oi MarinoBernarJocirCaboga,S{,Giorgirecunclo Bnc-
hia AmbafciatorialL^Porca Otthomanaperriil'iftri-n-
maôcEccellenrifîîma Republicadi RagLi(î,havendopicn.i noti-
fia per pratica, &in[ormationed'a molti predeceflori n ftri, è
per un comertio continuocon li fubdici dcU' Imperio Otcho-
mano è con li principali délie fette Chriftiane,che fî Profelîa-
no.,èparticolamente délia greca dicharamoàtutti quanti che
falfamentele vien imputato d'cfTer invilupata in molti pundi
ne leherefidi Calvino, èper rintuzar queftacalumnia faccia-
mo indubitata fede che quefta chiefa crcde corne noiCatiio-
lici.
1. Che il medefimo corpo vivo di Giefu Chrifto crocefiflo
chefalia'! (.ielo, èche fiedealla deftra del Padre, è veramenpe
prefenteneli' Euchariftia invifibile.
2. Che il pane & il vino, fatta la confecrarione, fono vera-
mcnremutraci dalla propria roft-anzaloFo,alla foftanza del cor-
po- c fangue di Giefii Chrifto, di maniera che non reftano
piu che lefpecie c le apparenze d'el pane è d'el vino.
3. Che il corpo dr Giefu Chrifto neli' Euchariftia ft man-
gia tiito impaffibilmente dà chi lo riceve, fià bono 6 fiacacti-
vo, è che come Dio fommamente s'adora.
4. Che TEuchariftia cun vero facnficio ordeneto da Giefu
Ch.rifto^ è dacoci per traditione dagir Ap-iftoli.
Che la chiefa ha autorita di ordinare deJli diguini, è prcibi-
re ccrd cibi.
^ Che la y^rgine èli Santi che fono n'el cielo debbaao
eller invochati, è ch'invochandogli non fi fminuifce l'onor
dovuto à Giefu Chrifto.
7 C he dobb'amo honorer li Sanri cle loro reliquie.
8, Che relativamente dobbiamo honorar le loro ima^ini.
9. Che iono fette Sacramenti délia Chiefa.
10. Che gli Vefcovi per inftitutione divina fopraftanoalli
Sacerdori^ eche da loro fi fanno degni délia gratia.
11. Che l'Epifcoparo è neceflario neila chiefa.
12. Che la chiefa fara fempre vifibile & infalibile.
13,. Che li libri ^- diTobia, Guidith, Sapienza, del'Eccle-
avH TEgli/é Ronjaine/ùrrEucharifiie, 64^
^aftico, Baruch& Maccabei fono parce délia Scrirura facra.
In fide di che noi auchenticliiamo ôcattefliamo quefta verâ
dichiaratione c'ol noftro proprio piigno, è iafigilamo c'ol no-
ftro proprio figillo.
Data in Andronopoli li.14. Octobre 1^71.
Locui (Izilli.
MARI NO bï BERNARDO. Cabota è Giory di fecundo
Brucchia Ambafciatori.
ATTESTATION DE LA COMMVNAVTE
des Perotes.
NOi che cotnponiamo laCommunita di Pera efTêndo în-
formati qualmente certi eretici vogiiano mecter indu-
bio la fede délia chiefagrecaintorno alla reale prefenza di Gie-
fu Chrifto n'el fantiiîïmo Sacramento delT Euchariftia, Ja
tranfubftantione del pane è del vino n'el fuo Tangue, l'adoratio-
nechegii è dovuca, l'invocatione de' Santi, egli fecte Sacra-
menti, habbiamo ftimacoche farebbi ncceflario per fodis far'
al richiederc dell' Illuftriirimo & Ecceilentiiîimo Signore
Carlo FrancefcoOlier Marchefe di Nointel Iiribaftiadore di
fiia Maefta Chriftianiffima alla Porca Otcomana, di dicliiarar
€ palefar quel chi'intorno a quefta materia è di noftro co-
nekimento.
Péril che fepza ingerirci diparIaredaTheologi,i-nà percC
plicare Tolamence quel che fappiamo diqucili articolidi ^sdc
che fono délia dottrina famigliare, atceftiamo c cerrificgiamo
à tutti quanti che toccara mhrifliiani , o vero Cattolici Roma-
ri, Calviniani, o Lutherani, corne i Greci,re ben Tepanui dalla
ChieTa Romana, nulla dimeno credono fermamence com'eira
gli infrà fpecifîcati articoli.
I Che ^Eiefu Chrifto è realmente fe beninvifibilmente pre-
fente ne'l fantiiîïmo Sacramento dell' Euchariftia.
1. Ch'il pane e'I vino, doppo la confecratione fono cam-
biatti dalla propria loro foftanza^ nella veraepropria fobftan-
2a de'l corpo è fangue di Giefu Chrifto, di modo che reftano
folamentegl'accidenci, è Icfpecieefterioride'l panée de'l vino.
^. Che indifpenfabilmente fiamo obligaci d'adorare Giefu
Chrifto in quefto facrofanto myfterio.
M M mm ij
646 Liv VIJI. Prcwves authent. de ïimion desê'g. d'Or.
4 Che l'invocatione de' Sandi è legiuma.
In lomma che nellachiefa iono i.tce Sacramenri.
Ecco tjuanro Tappiamo certiffimamence intornoalla confor,
mica dcila tede Greca colla Romana toccante gli fnpra fcritti
£rtico!i, il pcr labito continue, ë là prattica ordinaria che
habbiamoconglidf tri Greci feparati délia chiefadi Rona, co-
rne per gli cnlloqui da noi fpelTè voire havuti colîi Primati, e
Prelaci dellaehiefa {opr.i accennaca Sonoancor' alcune délie
noftre mogli, le quali encndo rimafe nel rico greco adorano
' Giefu '^hnllo nel rantifTiino Sacramento dell' Euchariflia,
è non f'.nno difficoiti nelTunadi fendre la MelFa celebrata fe-
conJ'il nco Romano.
Noiparimence incontradonci in villa fenza fcmpulo veru-
• Mo affifli.'mo aile Liturgie Grcce, & adoriamo nelle loro
ChieTe Chrnlo rea! mente iotto le fpecie de'l pane è del vi-
no. Facciamo fede di piu chel.!habbrarao vifto portar dalli Pa-
pa/îî loro à noflri amici Greciammolati per viarico, è ricever
Jodaloro con fomma veneratione e riverenza, che giornal-
mentefi ved.>no li Greci invocar la Vergine madré di Dio, e
gli Sanri , (c'ie leggendogli loro catechifmi fi ritrova la lo-
ro doctrina conforme à tutte quefle verità fopra aciennate. le
quali' Greci infegnano tutte, com'anche chefonoferte Sacra-
mencij di modo ch'eiïfendotefti-oculari fe ben amici fiamo di
quelliche fono'accufati di contraria opinione, crediamo nulla-
dimeno ch'il noftro teftimoniofara irreprchcnfible,, poiheh à
per fondamentejàverkài dalle quali fuprafcritre ragione fpin-
ti e molfi non facciamo diiîîcolcào fcrupolo veruno, di dar^e
forrofcrivere quefta prcfence diehiaratione farta in Pera di
Confcantinopoli al fecondo di-N.ovembre 1671;
G E o R G I O Dr A P E Br 1 1 s P^riore dclla commun! ta di perra a fer-
mo qu.iyito di fopra.
D^o MIN ICO Per-one Sottopriore délia. Commtinita afferme qitan.
to di fopra.
Francesco Testa Confeglier afferma quanta di fopra.
Antonio Perone Confeqjier affcnno^ o"t.
Antonio Grillo afferma quanto di' fopra-.
NlGOROSO DI NfGRi Confeglier:^ ^c.
f o . A B R A M . Fontana P afferma.
Thomaso Navone Confeglier.^ é-c.
A^ec ÏEgûfe Romaine fur tEHchurifiie. 647
Antokio di Negri l'affermo.
Francisco Dane ConfcgUer^ é-c..
LoRENZO SvMMAl'^iffermo.
Thomaso Glrachi Confeglier^é-c.
Pasqua Navone afferma ut fupra.
GiasEPPE d'Andréa Confe^Uer^ é^c.
Gro BAVTXsrAToKSLrrx afermoat fupra.
Francecho di Negri Confrgiier ^ é^c.
Jo. Christophoro Tarsia afferma di fopra,
Bernardo Baroni Confeqlier ., (^c>
PiETRO CuPlR afferma di fopra.
EXTRAIT D'VNE LETTRE D\E MONSIEUR
V-Ambaffadeur ce jj. Novembre 16 7 x.
L'Opiniâtreté dans laquelle le Miniftre Claude s'efl: enga-
gé mai à propos, me fai Tant appréhender qu'il nevcuille
pas fe rendre à toutes ces preuves, je n'en néglige aucune de
celles que je croy capables de le convaincre. Ainfi comme la
difpute roule fur un fait, & qu'on a coutume d'éclaircir ces
fortes de conteftations par desmformationsdont les témoins
font d'autant pins croyables que leur intégrité &:leur qualité
les élevé davantage & les met au delTus de tout foupçonjj'ay-
cru que les depofitions de xVIefiieurs les Reprefentans qui font
icy ou à la Porte, méritent une croyance entière. Vous verrez:
ce qu'en dit M. l'/nrernoncede Pologne. LeRefîdentdcGenes-
de la maifon deFiefcy, cft le fécond témoin. Il eft confidera-
ble par luv-mème& par fanailTance, pouvant compter dans
fa famille,des Papes, des Cardmaux, & des Evêques en grand,
nombre. Les Ambafladeursde Ragufe donc la Republique eft
tributaire de fa Hautefle ,. pourroient feuls retrancher toute
difficulté par la raifon du grand commerce qu'ils ont dans cet
Empire. Vous lirez, avec plaiiîr la manière dont ils s'en expli-
quent, en attendant que je vous falFe tenir une atteftation du
nouvel AmbafTadeur de Venife, le defFunt ayant cfté prévenu
delà mort lorfqu'il m'en vouloit donner une. J'en attends -âufiî-de
la part de M. le Refidenr d'Allemagne. Et- fi M. lAmbaf-
fadeur d'Angleterre, qui eft convenu de la vérité de lacroyance
des Grecs comme je vous l'ay mandé, me tient la parole
qu il m'a donnée , vous recevrez la déclaration qu'il m'en don-
nera.. MMmiiiiij
648 Liv.Vill. Prewves auth. de t union des Eg. d'Or.
Voila ce ni2 fembie des pièces bien anthenriques. Malien
voicy encore (i'aufes qui font bien precifes. Il y aicy un Vi-
caire Patriarche latin nomme Monfieur Ridolpln qui y fait fa
refidence depuis quelques années. C'eft un homme éclairé, qui
s'efl inilmit à fond de la doctrme des Grecs pour écrire con-
tre eux , & qui a déclaré nettement ce qu'il fçait des articles
qu'on luy a donnez de ma part. J'ay joint à toutes ces preuves
une information de dix neuf témoins qui fontfujets du grand
Seigneur. Us descendent d'anciennes familles, &: font nom-
mez les Pcroties comme eilant les principaux de Galata &,de
Pera. Leurs anceftres ont obtenu une capitulation particulière
pour eux du Sultan qui prit Conftantinople. Enfin la confi-
nuelle habitude qu'ils ont dans le païs , leurs alliances avec
les Grecs feparez de l'Eglife Romaine, &la qualitéd'un d'en-
tr'eux du premier Drogman d'Angleterre, rendent leur témoi-
gnage irréprochable.
CHAPITRE IX.
Union deVEglife Grecque avec l'Lqlife Ronidne furl^Ettcharifiie^
■prouvée parle peu de difficulté que les Grecs font de communiquer
avec les Catholiques Romains, en même temps quils excluent
abfolument les Calvinifics.
CEtte uniformité de fentimens fur l'EucharifHe & fur la
plufpart des autres points, fait une telle impreflion fur
l'efprit oc des Catholiques Romains & des Grecs , qu'elle ef-
face quelquefois la mémoire des différends qui font entre ces
Eglifes , 6Î les porte à recevoir les Sacremens les ups des au-
tres: comme on le pourra voir parles extraits des lettres de
M. l'Ambafladeur de fa Majefté j que nous produirons dans
ce chapitre.
EXTRAIT D'VNE RELATION DE MONSIEVR
l' Ambaffadeur fur le Sieur Tarfîa
c'eft qu'il a Y E témoignage du Sieur Tarfia mérite 4'eftre diftingué
S"o«£pÎ -L des autres .a.vec lefquels il a figné, puifqu'ila joint à Tes
a,fvec ÎEglife T^omnine fur T Euchanflie . 649
bonnes qualicezia la patience dans les toutmens dont il a eltc Ch. IX.
bourrelé juiqu'àu moment de rendre Tame. On l'a attaché fur rottescomme
une croix de fer j on luy a retourné les pieds par derrière juf- j^j]-^ ^ "^^ '^^'
qu'A la telte ^ on luy a fait boire d'une certaine eau. Toutes
ces cruautez exercées à trois diverfcstoisSc durant long temps
eftoient pour l'obliger de découvrir la perfonne qui cftoiticy
de la part des Vénitiens, s'il avoir de l'argent, &qoi eftoienc
lesefpions qui leur donnoient les avis. lî a ioufFert toutes ces
tortures fans rien déclarer. Et l'on peut juger de leur violen-
ce, puifqu'ayant eftc exercées en l'année 1646. il en fouffre en-
core à prefent. Non i'eulemenr fa confiance , fon âge avan-
cé, & fa probité le rendent digne de foy, mais encore fa pro-
pre expérience de quelques-uns des articles en qucftion. C'eft:
pourquoy il m'en a donné une at'ceftation particulière j qui
prouve que les Grecs adminiftrenc le Viatique aux mourans
après qu'ils fe font confeflèzj qu'ils prient Dieu pour le repos
de leurs âmes, qu'ils les enterrent en terre Sainte, 5c qu'ils ne
font pas de difficulté de rendre les Latins participansdc tous
eus avantages.
Vous y verrez aufî? le femiment qu'en ont les Prêtres La-
tins mêmes. Le Chapelain de Ragufe n'ayant pas voulu de
nouveau adminiflrer le Saint Sacrement au malade qui eftoit
'le fils de Tarlïa. Vous verrez qu'il eft enterré dans l'Eglife
Grecque de Saint Dimitred'Andrinople-,& vous apprendrez
par une relation que je vous envoyé d'un voyage que j'ay fait
dans quelques ParoifTes Se Monafteres des Grecs en k(\i Se
dans les Iflesdcs Princes, que dans l'une de celles là Edouard
Barton Ambaffadeur d'Ançrleterre eft enterré, mais qu'il eft
hors de l'Eglife 6c de l'enclos de l'Abbaye proche la porte, 5c
que le Cimetière eft d'un autre cofté.
uiTl ESTATION DV SIEVR TJRSIASVRLA
mort do fon fils communia par les Grecs & enterré dans leur
Eglife.
10 infrafcritro nrteflo comeil quondam Sig. Leon'ardoTar-
fla mentreperinterpere fi trovara in Andrinopoli appreffo
V. EcceIl''-^°. Ballarino Canceiliore grande délia Sereniiîima
Republica de Venetia , è ftnro ferito dalia peflé , ch'in
quel tempo faceva gran ftrage mqucUa Ciîcà, Se che doppo
6^o L I V. V H I. Preuves attthen. de l'union des Eg. d'Or.
freccegiorni havendorefo l'anima Tua aDio,il (uo corpoè ella-
to con pompa accompagnaco dalle orti delii Rapprefentanci,
& datiitn gli Greci principal! d'Andrinopoli infinoallachie-
laGreca difan Dimitri, dcntro la qiiale è ftaro lotterraco vi-
cino raltaremaggiore,c frattedalli ReligiofiGrechireflèquie
le folice fiinerali preghiere per l'anima del defonto, coll'ap-
pendere al di fopro délia fuafepolcuraunalampadad'argento
la eiualefempre è accefa per la commemoracione dell' anima
fua, è col poncrefoprail fuo tumulo una gran piecra con lec-
tere latine è Greche in honore délia iua vircù, nafcica è con-
ditioni.
Jo infrafcricto atteftoancoche pernonliaver rEccellencifl
fimoBellarino, Capellano, il iopracennatoSig. LeonardoTar-
"lîaeflendoficonfeiïaco àun PapafloGrecoricevetedalui l'aiïb.
lutione, &il facro Viatico porcacogli dal lopradetto Papafîô^
il c]uale fubito che fà enrrato nélla cafa fecela Sacramentale
fontione Doppo vi è andato all'ammalacoil Capellanodelli
Sereniffimi Ragafei, è non eflendo arrivatoà tempo, & incen-
daco effer data fatta la fontione da mano del Papas Greco, gli
diede rulrimaaflblutione; dichiarando pero il detto Sig. Leo-
«ardo Tarfia in fcritti al detto Eccellentiffimo Cancelliere
grande che avan t'Iddio è il mondo confeffava morire vero ca-
toHco & Apoftoliquo Romano, raccommandando alla fua pro-
fettione il Vecchio Padre c la fua cariiïima madré. Conftanti-
nopoli à di iz. Novembre 1671.
lo. Chr.istophor.0 Tarsia Padre del fopradetto de
fonto afFermo ut fupra.
EXTRAIT D'VNE LETTRE DE MONSIEVR
l' ArnbaJJadcur de Confiunninoplc furU mon de Tctera'chef des
Coz^iques.
E vous diray par une efpece de préliminaire & pour diver-
llfier, que le grand Seigneur ayant accordé fon eilendart à
quelques-uns des Cozaques au préjudice des Capitulations de
la Pologne, DorozenKo qui le recrut fe voyant chef des rebelles
ne fongea qu'à fe confervefidans ce porte. Ainfi craignant que
Tétera qui luy avoit quitté la place , pour fe retirer dans un
Monaffcere en Moldavie ne Teufl: fait par foibleirej&: pour mieux
chercher
a^ec VEglïfe Komiine jur tEucha.vifiie. 6 çt
chercher les moyens de fe rétablir, il le fie prendre, £c l'en- Cii. ÎX-
voya au Grand Vifir , en raccufant de trahir les intercfts de là
Hauteire, pour ccablir l'autorité de fà Majcfté Polonoile. Le
Vifir ayant entretenu ce nouveau captif en fut fort fatisfait :
Il lui donna un logement où il paroiffoit libre avec lesdomefli.
ques j &; l'on croit qu'il le conlervoit pour le (ubfliruer à Do-
ro2enko en cas de beloin. Mais (es deflèins ont efte renverrez
par fa mort. Comme il vit qu'elle approchoit , il fut combattu
du defir de rendre publique fa profeihon de Catholique Ro-
main , en defavouant la profelhon Grecque qn'il avoit f it pa-
roiftrc à l'extérieur julqu'alors. Mais la crainte que revenant en
ianté cette adion ne nuifiil: à (si fortune , l'obligea de confer-
ver fa qualité de difciple caché de la véritable E'j,lifei c'eft
pourquoy il crut qu'il devoit prendre un milieu, qui même a
efté approuvé par des Catholiques Romains , Evoques & Re-
hgieux, &: par les principaux Grecs de l'Egiile. Ce fut de !e
confefTer à un Francifcain ,& profefler tous les points de la
croyance Apoftolique 6c Romaine, de déclarer qu'il y vouloit
mourir, & qu'il renonçoità tous fentirnens de rébellion con-
tre fon Roy ^ ce qu'il déclara non feulement à fonConfeifeiir,
mais encore au Refidentde Pologne. Mais comme il vouloir
recevoir le Viatique , il l'envoya demander à l'Eglife Grec-
que , & mourut dans fa communion.
L'on auroit pu fort bien le communier en noftre manière ,
quoiqu'en l'un & en l'autre ce foit le même corps de J. C. Et
fansdouteil eftoit bien temps au moins au moment de la more
de quitter tout déguifémcnt.Et il n'y pouvoit plus avoir de pré-
texte pour le continuer. La vérité en cette occafion ne dévoie
point eftre mife en balance avec des avantages temporels^
d'^autant plus que Tétera avoit fait une donation de cent mil
écus aux Jeiuires de Varfovie ,&: qu'apparemment il luireftoit
peudechofe aménager.
Vous connoiftrez néanmoins par cette hiftoire que les Grecs
tiennent la tranfrubfi:antiation&: la realité du corps de J. C.
puifqu'un particulier qui confefle dans le cœur la croyance Ca-
tholique Romaine ne fidt pas difficulté au moment de fa more
de recevoir cet augufle Sacrement confacréparunGrecSchif-
matique,&fepare de nôtre Eglife, quifqu'il l'areçrdu confen-
tement des Religieux Romains , 6c qu'il lui a efté apporté
N N n n
6)2, Liv. VIII. Trewvesautheft.de PuniondesEg.d'Or.
avec un refped &c une adoration qui n'appartiennent qu'à
Dieu
EJiTTRAlT D'VNE AVTRE ^ELATI0 2T.
LEs Grecs ne font pas difliculté d'afîifter à nos Meilès,
quoiqu'ils n'ayent point d'empreffement pour y venir. Ils
envoyent même leurs enfans & leurs femmes à confefl'e à nos
Religieux , & pour en eftre inftruits. Mais les Catholiques
trouvant leurs Liturgies trop longues, n'y vont point , {î ce n'eft
par curiofité. Vous îçaurez néanmoins qu'à Smirneles Latins
avoient coutume d'aller un certain jour en proceffion dans
TE^life des Grecs, ce qui fe faifoit publiquement avec la croix,
les cierges & les Preftres j mais comme il arriva du defordre ,
on a cette certe cérémonie -, ce qui n'empêche pas les Grecs de
venir dans nôtre Eglife. La nuit du Vendredy Saint ils y vien-
nent en proceffion , & y font leurs prières.
CHAPITRE X.
Union de l'EgUJ'e Grecque avec l'Eglife Romaine fur l' Euchariflie
fïouvèe par une Lettre de Nc[iuritis Patriarche de Jerufalcm
au Patriarche d^ Alexandrie , ^ par le témoignage du même Pa-
triarche d'Alexandrie touchant les Mofcovites.
LA Lettreque nous allons produire efl: toute d'un autre
genre que les actes que l'on a inférez jufqu'ici dans ce
Livre , Se elle mérite une reflexion particulière. Elle n'cfl: pas
d'un Grec ami des Latins j mais d'un homme qui paroift tres-
envenimé contr'eux. Il efi: fi peu porté à la compla.'ftnce pour
eux, que l'on voit que fans fujet il traite avec les derniers ou-
trages celui qui avoir demandé une profeffion de la Foy des
Grecs. Et cependant avec toutes ces préventions il ne laide
pas de marquer auffi fortement qu'on le fçauroir faire , le con-
fentement des deux Eglifes fur la tranfTubftantiation Se la
prefence réelle.
(Ltec ÎEglifè T^omaine fur t€ucharijiie. é^^
Ch.X.
COPIE DE LA LETTRE DV BIEN-HEVREV^Y
Patriarche de '^erufalem Neîiariîis au hien.henreux
Seiqricur Payfus Patriarche d'Alexandrie.
NOus avons reçu par deux fois des Lettres de vôtre béa-
titude, dont les unes étoient pour nous recommander de
certaines perfonnes arrivées ici pour la vénération des faints
Jieux , les autres fur difFerens lujets contcnoient entr'autres Ce Capuciu
chofes quelques articles touchant le Frère Lazare de la Con- ^■';°'f '•'^'"^n-
gregation des Capucins, dont le premier efl: qu'il demande ment cette
une confeilîon de foy par écrit de vôtre (ainte main pour té prorcffiondc
moigner les fcntimens qu'a l'Eglife Orientale fur les laints & mcmoiies en-
iacrczmyfteres : Le (econd qu'il doit par cette confefîion con- voycv.en
vaincre un Luthérien demeurancen France ,& qui tourmente ^sn^'^.j^e.
ies Papiftes , prétendant que l'Eglife d'Orient n'cfl: point d'ac- m.nt Je cette
eord avec les Latins fur le fujet des Sacremens : Le troifiéme contiftanon.
<^ue ce Luthérien a entre les mains une confefiïon de foy origi
nale,à ce qu'il dit, de Cyrille autrefois Patriarche de Conftan- aemrnrent
tinople. Et il fembie que cette confeflïon foitces articles Cal p" 'l'accord
viniftes qui ont trouble toute l'Eglife, & qui font attribuez au- f^l_ nnrnir de
dit Cyrille , qui pour lors étoit Patriarche Oecuménique : cesartkici.
Le quatrième, que,comme il dit, les autres Patriarches ont
pour ce fujet envoyé chacun en France leur confeflîon de foy.
Commençant donc par le dernier, nous finirons par le pre-
mier, allans ^ rebours avec ceux qui ne fçavent pas marcher
droit.
Nous répondons donc à ce dernier avec aflcurance, n'ayant
pas plus d'envie de nous délivrer des deffeins malicieux 8c de la ^^ Patmrche
{•^•i ,T 11 II- cftoit-il un
langue impudente de ce Lazare, que de le convaincre pubh- desGrecsLati-
quement de menfonge fur ce fujet, afin que vôtre béatitude nHezieW.
puilfeconnoiflre clairement les fbphifmes frauduleux aveclcf- ^^^"^ *■"
quels les Latins qui viennent à nous tâchent de nous furprcn-
dre. Qu'il dife ce bon homme de Lazare qui font ces Patriar-
ches ? en quel temps , en quel lieu & en quelle manière ils ont
fait ce qu'il dit? Si c'ert celui de Confkanrinople , ou d'Antio-
ehe,oude)crufalem, en quel temps & en quelle Ville? S'ils fe
font aflemblez tous trois avec leurs Synodes, ou là chacun en
particulier a écrit &envové cette confeffion ? Qu'il en montre
les originaux ou au moins les copies 5 mais il ne peut en aucune
NNnn ij
654 Liv. VI M. Pieuses authen. de fimiondes Eg. d'Or,
manière rien montrer de ces cliufes. Seulement il veut faire
palier pour véritables des cho(es qui n'ont jamais efté^& qui ne
font pas même venues dans la penfée des Patriarches ^ & ne
pouvant iiîontrer la vérité par des preuves de fait , il tâche
de nous tromper par des paroles. Non , divine ôcfacréetefte j
non , vos confrères les Patriarches qui font dans les mêmes
fentimens que vous^ n'onc point donné aux Latins des coa-
fellîons de foy par écrit. Le menteur qui avance cette fauf-
fcté en dût il crever. Car fî cela eftoit arrivé dans le temps
de nôtre PatriarchatjCommenc l'auriunsncms piiignorer^puifl
qu'il me femble que nous faifons quelque figure dansl'Eglife
d'Ofienc? Si cela eft arrivé devant notre Patriarchat,nousn'a.
Il fait aiiu- vons jamais entendu parler de cette aclion, ou pluflofl: de cette
fiMiaumor! fic^linn : car c'eft véritablement une ficT^ion Se un jeu plein de
^^l^'H"^;^^""' diffimulation & d'hypocrilîeque tout ce qu'a dit Lazare.
auflî iiiiepiere Vous vousêces donc fort prudemment délivré de ces four-
dc'TJieatre, [5^5 ^ ç^-^ écrivant cette confelfion fi orthodoxe 6c fi bien con-
çue , en Ja leur montrant;,maisneleur donnant point, pour les
affliger davantage en rendant leurs fourberies inutiles.
Et quant à ce qu''ondit que ce Luthérien pour pafi^er du qua-
trième article au troificme , fe fertde laconfeiîion de Cyrille ,
cela ne nous a pomt tc;uchez , ni ne noustouchera jamais.
Premièrement, parce queplufieurs lont en peine , fi elle efl:
véritablement de Cyrille, ou fi c'eft l'ouvrage de quelque here-
dquequi ait voulu autoriler fo-n herefie du nom de Cyrille.
Secondement , quand mcme Cyrille auroit eftédans cette
opinion , conformément à laquelle il auroit donné une telle
confeffio-n, il ne s'enfuit pasquetoutei'Eglife d*Orientait fui-
vi (es fentimens. Puifque quand même d'autres Papes & Pa^
triarches ont eflé hérétiques , ils n'ont pas attiré à leurs here-
fîes toutes les Eglifes qui leur eftoiencioûmifes, au contraire
ils les ont rejettees & condamnées fynodiquement.
Troificmement , fi quelqu'un a affez d'imprudence pour
dire que Cyrille a compofé cette confeffion au nom de toute
l'Eg!i(e d'Orient, &que pour cela on demande Ci toute l'Eglife
d'Orient s'efl: laiflee aller»au fentimentde Cyrille ;c'efi;une
chofe qui paroift fort inutile après plufieurs apologies mani-
feftes que les Orientaux ont publiées en divers temps depuis la
mort de Cyrille , parlant 6c écrivant pour réfuter la confef-
fion de Cyrille, Se donner des preuves de la foy Orthodo-
nwec ï BgU/e Komaine fur ÏEuchcinflie. 655
se que nous profellons , & de nôtre fentiment fur les faints fepc Ch. X.
Sacremensde l'Eglife.
La première pièce eft le Tome Synodique fait en Moldavie Conf.nionde
fous le Duc |ean Bafile Boibunda, Parchenius le Vieil eilanc janinéc- Aiïo.
Patriarche de Conftantinople. Car les deux vénérables Pa- dioucmente»
triarches Nicephofed'Aiexandrie& Theopbanede Jerufalem ^°''^**i^-
eftant allez en Moldavie,on parla, de cectcconfcffion attribuée
à Cyrille , &des articles qu'elle contenoit , & tous les ayant
déclarez heretivnues , &; entièrement differens du véritable
ièntiment de l'Ei^life d'Orient , ledit Duc Bafile avant un zèle
ardent pour l'Eglife Orientale, demanda qu'ils fuliencrejec-
tezfynodiquement, &: qu'on prononçât anathême contre ceux
qui el^oient dans ces lentimcns, ce qui tv.t fait i car alors le
Patriarche de Conftantinople Parthenius envoya deux dépu-
tez , dont l'un eftoit Porphyre Evêque de Nicëe , qui n'igno-
roit pas les belles Lettres, &: Mclece Syrigue Théologien &
Prédicateur de l'Evangile , pour, approuver le Livre que les
Rufles avoienc compofe de là foy Orthodoxe , eux mêmes
l'ayant demandé j-ce fut pour lors que fut fait ce Tome Syno-
dique. Ces deux Patriarches dont nous avons parlé, lesDc-pu-
tez du Patriarche de Conftantinople, & piufieurs autres per-
fonnes confiderables s'eftant affeniblez. Et ayant elle porté à
Conftantinople ,il y fut confirmé partout lelacrc Synode des n oiri" <'«
Archevêques &: des Clercs, & enfuite imprimé par le foin 2^ J »'"preinon da
la libéralité du Duc Baille, 6c envoyé dans ttairel'Egli.e d'O Pnhemu?,
rient, &: tous les Orientaux le reçurent avec rcfpeâ:, comme quifcficen
edant délivrez par Ion moyen d'un mauvais foupçon. rlrd/^d ^^'
Mais aulîl depuis la publication d.e ce Tonve nous a vons plu- Duc.
iâeurs autres perlonnes qui ont écrie en particulier (ur les Sa-
cremens , & pour dire en un mot , qui onr cumbartu genereu-
(enient ces articles hérétiques.
Le premier efl; George Ciîrefius homme très ortlioi^o::e, at-
taquant Screuverlanî (es Hérétiques comme un capitaine fore
courageux, qui dans plulîeurs endroits de Tes ouvrages infè-
re par manière d'iacident des difcours fur les Sacremens, fe-
Um le fentimtnt de l'tglife Orientale. Et oijtre cela il en a
donné en particulier un ouvrage complet intitulé des Sacrç-^'fftl's"^^"^
mens. De touslefquels le Religieux Grégoire Proto- Syncelle i"(.^ar.sb "^
de la grande Eglife & fon vcrirabîe diiciple a compofé un pe- Rcponfegenc-
tic Traité particulier des Sacremens, ramaiTanc de la bouche- -*^^-
NNnn iij
6^6 Li V. VI 1 1. Prswves authent, de T union des Eg.d'Or.
de Ton maîrre comme d'une fource^ Tes fentimens qu'il a fait
imprimer à Venile, & qu'il a ramaffés dans on petit Livre com-
mode pour celui qui le voudra lire ^ qui eft; à la vérité fort
court , mais clair & aifé à comprendre , parce qu'il eft écrit en
langue vulgaire. Ces deux Docteurs n'avoient , comme je pen-
fe , aucun autre deifcin que de montrer que l'Eglife Orientale
n'a pas des fentimens femblables à ces articles hérétiques, mais
qu'elleloûtient fortement la foy orthodoxe fur lesSacremens,
qu'elle a reçue des Pères de toute antiquité.
Outre ceux là, celui dont nous avons parlé un peu aupa-
ravant, & qui eft mort fort heureuiement, MeleceSyrigus a
compoié un grand ouvrage contre les mêmes articles , & pour
dire la' vérité , plus étendu & plus clair que les autres , les réfu-
tant 6c renverlant mot à mot 8c félon les expreflions & félon le
fens, 6c les dérruifant comme unetoile d'araignée. Il expofe
aufli nôtre pieté 6c nos fentimens orthodoxes fur lesfaints Sa»
cremens. Il confirme ce qu'il dit par des demonftrations tres-
cxacles , qu'il appuyé par quantité de témoignages des an-
ciens Doâeurs de l'Egliie, 6c refout en même temps plufieurs
contradictions difficiles quifémblent fe trouver dans les paro-
les de ces faints DocfVeurs. Cet ouvrage ayant eftécompofé fî
exatftement par Melice, fut premièrement recherché par des
Jefuires qui eftoient pour lors à Galata , qui l'ayant jugé or-
thodoxe , promirent de le faire imprimer à leurs dépens , (î
l'Aureurdu Livre, diient ils, vouioit en cfFIicer quelques pa-
roles qui déplaifent aux Latins. Car celui ci reeonnoifTant
feulement fepr Conciles généraux par un nombre déterminé ,
ceux-ci vouloient qu'il dit fans déterminer aucun nombre
précis ,^les faines Conciles généraux , afin qu'il paruftrecon-
noiftre ceux qu'ils ont afïèmble? en leurparriculicr , 6c qu'ils-
oncinrirulé Conciles généraux. Mais ce Prédicateur des véri-
tables fènrimens de l'Esilife d'Orient, & ennemi de tous les He-
rerrqoes, n'y voulut c onfcnrir en aucune manière, eftimant
qu'il valoir mieux ne donner pas la moindre occafTonde ca-
lomniera ceux qui font prefts à en i-nventer , que de faire im-
primer fon propre ouvrage. Cari! ne parloit ni n'écrivoit pas
comme plufîeursfont^arfenviedeparoiftre , mais par le foin
qu'il avoir de la veriré. Mais quoique le Livre fojt demeuré
jufqu'à prefent fans eftre imprimé, il s'en trouve néanmoins
plufieurs exemplaires particuliers.
atv€c ÎEgî'tfe domaine /urrEuchariJfîe. é^y
Voilà ce que nous avons à dire touchant les articles, ioit Ch. X.
qu'ils foient de Cyrille , {bit qu'ils n'en foicntpas , qu'ils ionc
faux, &: qu'ils ont efté non feulement rejetrez lynodiqucment
comme difFerens de nôtre véritable fêntimenc , mais auffi que
plufieurs des nôtres, comme nous avons déjà dit , ayant écrit
particulièrement pour les réfuter , ont découvert à tout le
monde les véritables fencimens de i'Eglife Orientale fur les Sa-
cremens.
Touchant le fécond article,que Lazare fçache là-defllis, que
fi les Caiviniftes &: Luthériens difputent avec les Latins lur les
Sacreaiens,ils ont tort de demander nôtre témoignage. Qii'ils
foient auparavant d'accord avec nous fur tous les dogmes de
la foy , & qu'ils fe réunilTent , pour lors ils trouveront en
nous non feulement des témoins, mais des perfonnes de nie.
me opinion , &; qui combattent la même caufe. Mais il efl:
manifeftc que les Calviniftes & les Luthériens ne lont point
d'accord avec nous en plufieurs chofes , non plus qu'en la ma-
tière des Sacremens, par ce qu'ils difent eux mêmes. Car ils
reconnoilîènt quelques Sacremens , mais non pas comme
nous, & ne mettent pas même les autres au nombre des Sa-
cremens. Les Latins afliirentque nous (omines d'accord avec
eux, quoique nous ne trouvions pas en toutes chofes cette
conformité qu'ils prétendent. Car dans les uns ils différent
en la matière & la manière dont le Preftre demande l'avene-
mcnt delagraceà haute voix, & en d'autres feulement dans
cette forme d'invoquer la grâce fanc^tifïante.
Si donc les Latins & les Luthériens fe combattent les uns les
autres, qu'ils combattentjcarl'herefle des Luthériens & Cal vi-
nifies cfi forrie de i'Eglife Latine , & il n'efl pas temps de dn e
à quelle occafîon. Mais nous dirons feulement que les Latins
ont plus de raifon que nous d'entreprendre cette guerre con-
tr'eux , 6c de rappeller ceux qui ont efté autrefois de 1. ur
Egliie, j'entends de l'Egiife de Rome. Qu'ils nous laifïèntdonc
conlerveren repos les bons fentimens que nous avons, car à-
chaqiie jour fufHt fon mal.
Le premier article eft celuy de tous qui nous a femblé le
moins fiipportable i c'eft pourquoy nous l'avons laiffe le der- "
nier,depeur de manquer de force dans la fuite, cflant nctablé
t!e fa pcfanteur. Car qui eft ce Moine Lazare pour demander
û impudemment à voftre béatitude , vous qui eiks Pape &c .
6^î Li V . VI 1 1. Ftewv'és nuthen. de f union des fg. d'Or.
Patriarche d'Alexandrie, & comme j'ay montre, avec trom-
perie & dillimulation une conFeffion de Foy , ce que le Pape de
iiparoiftpar R-^^'^nc n'a abtenu quelorlqu'ii l'a demandé dans une prellante
ià<]ue!cs necelîiré. : .
Grecs n'ni- ^^^ ^^^^ j^ Dieu , divine & facrée tefle , ne vous laifTèz pas^
m-tit pas a ,. .... V I 1 I 1 J
donner des pcriuader par celui-ci m par aucun autre lemblable, quand
attcftatiQns. jij VOUS dcmandcroient par écric l'Oraifon Dominicale. Car
ils ne viennent pas avec fincerité , mais avec diffimulation ,
afin que s'attachant à quelque petit mot tel quecefoit, car ils
font grands obfervateurs des mots, ils médifent de ce qui. nous"
regard e.
Qiie fî véritablement ils défirent apprendre dans quels fen-
timens nôtre Eglife fainte & orthodoxe efl: fur les iept iaints
SacremenSj confeillez-leur de lire nos anciens Docteurs qui
ont traité des Sacremens dans leurs ouvrages, dont le pre-
mier efl: Denis TAreopagite , dont les ouvrages paiTent pour
eflircs femblables aux écrits Apoftoliques , & avec lui Ton in-
terprète le grand Maxime, & après lui Sinieon deTheifaloni-
que. Je laifte les autres faints Pères qui ont écrit quelque chofe
touchant les Sacremens en differens endroits de leurs ouvra-
ges, que l'EgJifed'Orient fijivant tous, & ayant toùjiTursla vue
arreftée fur eux , comme fur une règle fort droite , elle ne s'efl:
jamais écartée du droit chemin.
Loiianaede A l'cxTemple de ceux là cet homme admirable Gabriel de
hî"t '^'^^' Pi^'i'^delphe a compofé un petit Traité des Sacremens en lan-
gue vulgaire , afin qu'il fuft intelligibleaux perfonnesles plus,
iimples. Tous ceux-là ne font ils pas des témoins irréprocha-
bles,, & des Prédicateurs qui font retentir par tout l'opinioiv
que nous avons fur les Sacremens?
Que Cl Lazare vous prefle encore , difant ,cela efl: vray ,, 6c
je ne puis pas y contredire ; mais ce petit ouvrage oe Cyrille j,
' comme nous avons dit ci-delTus, a fait concevoir un grand
foupçon à tous les Occidentaux, que vous autres Orientaux ne
vous fufliez laifléz aller à l'opinion de Cyrille, car il afTure
que cette confeflion eft l'opinion de l'Eglife Orientale ; fi dis-
je , cet importun de Lazare avance ces»cho(es, commandez-
lai de lire exadement les Livres dont nousavons parlé, leTo-
Ce Tome fait me fait en Moldavie , le Livre de Grégoire Proto-Syncelle
^ftks-node' ^ '^ refutatiou de la confeffion de Cyrille faite , comme nous
«k Piitkauus. avons ditj par MeleceSyrigusi Car ils fervent d'apologie fuffi^
fante
llïl-
avec TEglife Romutne fiir C Eucharifiie . 6^9
Tante & très -accomplie à toute l'Eglife d'Orient contre ceux Ch. X.
•tjui nous veulent calomnier. courre cyrit
Que Cl voftre modeftie luy en veut donner une entière cer- jec1u'& ilr
trtude, faites-iuy voir le livre imprimé qui eft intitulé Confcf primé.
fion Orthodoxe de- l'Eglife Catholique & Apofioliquc d'Orient.
Car il déclare toute la foy Orthodoxe de l'Eglife d'Orient, & ^"i^xe"
noftre fentiment fur les faints Sacremens y eft expliqué nette,
ment. Chacun peut apprendre par le commencement de cette
lettre à quelle occafion ce livre a efté fait & autorifé par toute
l'Eglife d'Orient, & s'il eft orthodoxe en remercier particu-
lièrement le tres-fage & très- pieux & orthodoxe Seigneur Pa-
najoti premier Interprète des Empereurs d'Orient &: d'Occi-
<lent. Car ce livre ayant efté imprimé par fes foins & diligen-
ces, a efté diftribué gratuitement à tous ceux qui en ont vou-
lu, par l'ordre de ax. homme pieux. Comme je ne fçavoispas
fî vous en aviez chez vous, je vous en envoyé deux exemplai-
resj dont l'un eft relié & l'autre ne l'eftpas, afin qu'il en de-
meure un chez vous, & que vous donniez l'autre au bon Laza-
re, & qu'il ait par ce moyen une confeflîon de foy de nous
autres Orientaux.
Pardonnez-moy divineôc fâcrée tefte, fi j'ay parlé Ç\ long-
temps,car on ne devroit pas faire autrement que de convain-
cre fort au long la tromperie & finefle de cet homme, je vous
prie donc de ne me pas juger indigne d'une réponfe à ce que
je vous ay mandé au mois de Mars 1671.
Nectarius cy-devant Patriarche d;; Jerufalem.
EXTRAIT D'VNE LETTRE DE MONS lEVR
J'Ambaffadeur de Cor.ftantinople du \6 . Mars i6/i.
onten^nt la Confirmation de la Lettre cy-deffus imprimée , ^-
un témoignage authentique du PutrÎArchc d'Alexandrie fur Li foy
des Mofcovites.
I^AïbiusParri.irche d'Alexandrie auquel eftoitadrefte i'ori-
. ginal de la Lettre de Nectarius, a reconnu la copie que je
vous ay envo^'ée,pour luy eftre entièrement conforme, à l'ex-
ception de quelques fautes d'écriture, & il a promis de luy-
même, lorfqu'il feroit àAlexandriCj d'en donner l'original à
00 00
(>6o Liv. VHl. Preuves Authen. de f union des Eg. dOr'
M. le Conliil de France, pour me le faire tenir. Il s'eft au iïi en-
gagé fur ma prière de feuilleter Tes mémoires, lorfqu'il (croit
chez luy pour en tirer une relation exacte de tout ce qui s'eft
paflé à ion voyage de Mofcovie^où il aififta à la condamna-
tion du Patriarvihe de cet Eftat. On luy a demandé cepen-
dant quelle eftoit la croyance des MofcovitesTur le mvflrere de
l'Euchariftie. A quoy il a répondu qae leur Eglife faifoit par-
tie de la Grecque, qu'ils croyoient la prefence réelle & la
tranllubftantiation, éc que le S. Sacrement porté pour viati-
queaux malades, eftant rencontré dans les rues, l'on mettoic
la tefte contre terre en figne d'adoration de latrie, &:il nous
a remis pour une inftruclion plus circenftantiée de ce point 6c
de plufieurs autres , au récit qu'il m'en envoyera.
CHAPITRE XL
"Union de l'Eglife Grccqve avec l'Eglife Romaine , prouvée par
la dccijton de quelques points^ envoyée de ConJI antinomie en
Mofcovie.
L'AcTie que nous produirons dans ce chapitre eft encore
d'un autre genre que les autres^ car il n'a pas eflé fait en
veuë de noftre conteftarion, ni dans la penfée qu'il puft eftre
vcu par les Catholiques Romains. C'efi une decifion de plir
fieurs difficultez Theologiquesquele Patriarche de Conftan-
tin pie a envoyée à l'Eglife des Rudes, comme on l'apprendra
de l'Extrait d'une Lettre de Monfieur l'Ambafladeur que nous
mettrons icy.
EXTRyîIT D'VNE LETTRE DE MON SIEV R
l' Amhaffudcur de Conjt antinomie ce 12. Otiobre j6 /o^
JE ne fçay fî vous avez efté inftruit de l'éclairciflèment que
i'ay eu avec un Officier de l'Eglife Patriarchale très habile
homme qui me paroift bon Théologien, qui fçait zrfi^ bien les
langues Grecque, Latine, Italienne & Turque, & qui eft fort
éclairé dans les fcncimens de l'Eglife Orientale, dans la con-
noiflànce du gouvernement Turc , & encore plus dans
la médecine qui eft fa profelîîon. lia de la vivacité & du fond
avec VEgîifè Romaine fur l'Euchtriflie. 66i
pour s'expliqijeren beaucoup de fciences ; il fait paroiftre fes Ch. XI.
ferrtmensavec une très grande facilicé & neccecëd'expreirion,
&: ce cju'il en dit efl: toujours tres.folide^ (1 J'on en excepte
le trop grand attachement à quelques uns de fes fentiinens,
qui divifent l'Eglife Grecque d'avec nous. C'efl: ce qui luy a
attiré Ja mauvaife volonté de la plufpart des Latins. I! ?. aullî
des ennemis parmi les Grecs, &: (î les premiers l'nccufenc d'ê-
tre un Shifmatique zélé, les autres ne font pas difficulté de l'ac-
cufer de Calvinifme.
J'en croyois quelque chofe fur l'imprefTion que l'on m'en avoit
donnée. J'ay voulu depuis m'en éc aircir avec luyJ & prenant
le biais de luy demander Ton fentunent iur l'Euchanllie, j'ay
vedqu'ily répand(tit en Catholique Romain, à l'exception de
la qualité du pain levé & de l'oraifon. Il m'a répondu de mê-
me fur tous les autres points principaux propres aux Calviniftesj
& après avoir feu de moy fincerement & de bonne foy que
l'on me l'avoit dépeint pour un autre qu'il ne paroilloit alors,
m'ayant eilé indiqué pour eftre un fêdateur de Calvin , il s'en
défendit par une proteftation fort exprelF^, que c'eftoir une
calomnie dont il eftoit redevable à fes ennemis , bi. il en ac-
cufa le Dodeur Cigala, & Ton frère le médecin.
Il m'afleura qu'il n'y avoit eu qu'un nommé Coridale qîi'on
ait foupçonné légitimement de Calvinifme, & me pria trcsin-
ftamment d'effacer l'opinion qu'on avoir voulu m'inlinucr,
me proteftant qu'on ne luy pouvoir pas foire ime plas grande
injure. Il me promit aulfi pour fon entière juftification de me
donner la copie d'un écrit fynodal, quil avoit drcifépar or-
dre de Methodius, & que ce Patriarche envoya en Riifiie for-
tifié de fi fignature, &: de celle de Neclnr& de Dozirhce fon
neveu 5c fucceifeur au Patriarchat de Jerufalem. Il con-
tient des réponfes iur plufieurs points , entre lefquels celuv de
l'Euchariftie eft bien expliqué, ainli que je l'ay veu parla ver-
fion Latine qu'il m'en a donnée , &que je vous envove au.<Ti
bien que l'original grec. Il ne croit pas qu'il y en ait rien dans
le livre de la grande Eglife, parce qu'en ce temps- là on ne
voulcic pas qu'il y demeurât aucun? preuve d'un commerce
avec les Rudes. Enfin c'eft une pièce de confequence paCiée
entre des Grecs du même rire ; car ceux de Rufïie qui fon di-
vifez de l'Eglife Romaine vmilant eftre éclaircis de plufieurs
articles quiformoient des difputes entre eux, fc ceux qui font
O O oo ij
66l Liv. VIII. Preuves authen. de l'union des Eg. d'Or,
unis au rire latin que l'on nomme même en Grec , uniani^, ils
eurent recours à leur Patriarche de Conftantinop,le qui leur
répondit en la manière que vous verrez..
EXTRAIT DE QUELQUES DECISIONS DE
l'Eglise de Conftancinople, envoyëee aux Rufles.
QVARTJ QJJ^SITI S 0 LUT 10.
Varto qiu-critur : tttrum accent unam ^ ejtifdcm honoris ado-
^ ratione?n exhibera Chrifio , ut Deo Qj-ut homini. Et hic etiam
cur.Oji fcrtituiores (jr niiilitioji deceptorcs andcnter Patrihus adver-
fantes ,. dividunt ac difcerpunt in Chrijîo nalmras , ^fi conjuncia
Rnt inconfus è , indicibilibui (^ Dco foli notis vinculis unionis , d^
fubjificntes in unitate fcrfona, ac difcindentes altcrani ab altéra ,
altcrcantur de adaratione , qualifnam, alteri fejunciitn fumpt/c de-
beatur'y (^ divine quidcm latriam. offerunt , humun^ vero hyper-
duliam. Sed nos talcm novationsm in [ufpeHo habentes , ac teriti,
iina adoratione Chrifium colirnus. Per unionem cnim in perfona Fi-
lij divin^c (^ hnmana natur^e (^ qn.-e maxime diffîta: funt^ pro-
prie ta te s non minus quamnominainv.icemcommunicantur,ut Theo-
Loy dicunt, ratione mutuationis. Undc homo Deus dicitur ^ ^ Deus
kûmo , nedum di camus difcerni rnodum adorationis.
QJJJNTI QJJ JÎ.SIT I SOLVTIO.
Quinto qa^ritîir : utrum anim^ SanHonim po(^ emigrationem
ex bac vita , vidcant Deum ad faciem , ^ ejus beatitate fruan-
iîtr , feccatorum veto fiatim abeant in iyiem sternum ? An omnes
expecicnt commimem re (iirreHionem ^ ut ill^e quidem una cum cor-
poribus coronentitr , hiC vero damnentur ? Patrum itaque traditio.
jii parentes^ confitemur^ non abfque corporibus animas accipere
■promiffîonem , ut divtna tc/hitur do&rina^ ne fine corpore prccmium
fumant , quod una cum corpore meruertint^ fed tamen gaudent îifque
ad refurrefhonem corporis , in locis lucidis , plenis gaudio S" <-'on.
folatione ^ expefiantes illud dichm, Venite benedidi Patris mei
&:c. Si vero no[}ra Ecclefia his canit ut fim fruentibus in rcino
c.clotum , hoc ex more ftcit ?o'éta futuris utens ut prafentibus:
fimilïter anima pcccatorum haucPquaquam fiatim rapitmtut in
krriein atcrnum. Quid enim in illo patercntur ciim immateriales finfi
a,^ec ÏEgtife Komaine fur l'Eucharifiis. 66 j
fed in timoré ^ dolore in tnfemo crucianttcr , terrihilia verùa ti~
mentes : Abitei me maledidi &c.
OCTAVI QV^SITI SOZVTIO.
Perfîcitttr Euchar'ifti^ myfleritim fer aBionem Spiritus fancii
invocati k Sacerdoie orante t^dicente : Dimitts. Spintum luum
fuper nos g?- fiiper propojîta iftadona ^(^fac fanem quideniifium
honorabik corpus Chrifti tui^ quod vero in hoe calice eft honora-
bilem fanqtiinem Chrifti tui ^ mutans Spiîitu fanUo Uto. Per lixc
enim verba mucatur panis in perfeclum verè corpus Chrifti ,
tsL vinum inperfeâ;Lim verè fanguinem Chrifti, ut nuda relin-
quatur (pecies panis, 6c nudafpecies vini fine ip(oruni fubftan-
tia 5 Chrifto tanquam inflitutore dicente : Hoc eft corpus-meum,
d^, Hic eft fanguis meus. Sacerdos vero ut adminiflrator per
rnodum fupplicis invocet Sancium Spiritum , ad tramformationcm-
propoJîtoruM donorum , fideni Domini verbis qUiC ad vcrburn ad
bunc finem récitât.
SOZVTJO DECIMl.
T^andem qu-crcbatur: ntrum p^irticula a, Sacerdote Deo antè
imrnaculatum facnficinm o 'yldta , mutcntur in corpus Chrifti / Qui.
dam igitur rccentiorum prêter Ecclcfta confuciudinem facnficant
f articulas^ qUiC ad honorem fanciorum , & 'inemoriam fidclium of-
feruntur. Nos vero acquiefcentes traditioni amatorum Chrifti Pa-
trum y yteque intcntionem habemus confccrandi bas particulas tn
Jacra liturgia.^ neque ck hi'i fidelibus communicantibus prabemus-
fed tantum nt pancm fanciificatum honoramaSy ô" tanquam parti-
eulas fanciificationcm à eorpore chrifti per approximationern mu-
tuatas , (^ ordmum c^clefiiumvicem gèrent es colimus , nequaquam.
tamen ut corpus Domini adoramus.
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00
"J
6é4 Liv. VII L Vtewves authen. de V union des Eg. d'Or.
CHAPITRE XII. .
"Union de l'Eglife Grecque avec l' Eglife Romaine fur PEuchariJiie
prouvée par la réponfe d'un Grec à M. Claude.
TOut ce qu'il femble qu'on puifîe defirer de plus fur le
fujec de ces acceftacions des Grecs, eft qu'ils eufîènc ré-
pondu de la même force à des queftions, qui leur auroienc ,,
efté faites pardes Calvinin:es. Et peuteftre que nous aurions |
bien dequoy facisfaire le monde en cette matière ^\ M. Clau-
<le vouloic bien nous faire part déroutes les nouvelles quiiuy
font venues d'Orient. Mais comme on ne le voit pas difpofé
à avoir cette complaifanc.e pour nous, il trouvera bon que l'on
tâche à y fuppléer en inférant icy la lettre qui luy a efté
écrite par un Grec qu'il avoir confalté par luy ou par {ç.s
amis, dont on a eu copie par un canal qui ne luy peut être
{ufpecl. Elle fait voir au moins qu'on ne luy peut pas repro-
cher avec juftice de ne s'eftre pas mis en peine d'obtenir des
atteflrations des Grecs , & que ce n'eft pas fa faute s'il n'en a
point à produire. Je ne penfe pas qu'il foit befoin de l'avertir
qu'il ayroit tort de vouloir tirer avantage de ce que toutes les
citations de ce Grec ne font pas exaAes , puifqu'il fçait bien
qu'il ne s'agit pas icy de l'érudition ou de i'exacT;irude des
Grecs , mais de leur foy.
JLIVSTRISSIMO AC TR^STANTISSÏMO FIRO DOMINO
'joanni Claudio Reformata: Parijienjis Ecclefia Pafiori. Marcus
T>onus Crctenfs falutem S" dileciionis affecium.
U M ad me delati fuiiïent articuli quidam defcriptî
ut fertur exlatere dominationis tua: Ilinftriflimx, in qui-
bus quarritur , quid Sancla Mater noftra Oriencalis Ecclefia
fentiat de Tranfubftantiatione panis & vini in Sacramento
Euchariftix , opetc-e pretium duxi , ejus fêntentiam pacefacere
& quibus niticur fundamencis defcribere, ut qui eadem profi-
tenrur credere qux ipfa Sarnfla Ecclefîaj ad illius unitatem
âdvolent & concordiam.
Nocum fit icaque tibi , prXilantiffime vir , quod totus
atec l'Eglife Romaine fur t Eucluriflie. 665
Oriens conrentiencem habens &Occidentem credidir femper Ch XII.
& crédit à primis EccleficX incunabulis ,/-;;«f?w (y-vimimvnè
^ Phyfïcè tranfuhflantiari in corpus ^ fanguincni^ Chrijii depojiia-
frima fubfiantia , & hanc tranfTiibfl: antiacionem tenet articulos
îidei necefTarios, ade6 ut ncmini liceat eam igoorare, auc m
dubium revocare, aut penitus rejicere. Hanc antem fldcm ha-
huit à Chnfto, & poil fuccedionem ab Apoftolis & à Patribus
primitiva: Ecclefix, qui columna: fu erunt&: fundamencum Or-
thodoxix gra:canic£e. Et quod hoc faceatur paret ex fac1:o.
Qiiemcumque enim dehoc Sacramento interrogaveris , fta- '
tim tibi affirmabit hanc ^ir^Jtccjiv , in que edoceri potes à car-
dinibus &c Sacerdotibus fanclx noftrcX Ecclefix , qui neminem
permittunt participcm fieri fanctiiTmii corporis & prctiofifliroi
îànguinis, nifi prius hanc edat confeflîonem qu a: prolata
primo pro fimplicibus à Sacerdoce, profereur quoqj.ie de ver-
bo ad verbumab iisqufad myfticam cœnam accédant, utunuf-
quifque nofcat non folum , fed faceatur apertè myfterium.
'Tttfi'vcû v-iiçii ^ CjUî^oya (verba iunt Chryfoftomi) tn av (1 dhr
^âi ideft, tu qui es in calice, &: obfervet tua quam maxima
virtus, illud (tlK^-')m ) quod non iam rYpum, fed vericatem fî-
gnificat 0 mis tS ^l'A xeù ^mroi, % i\Jcà* tU iw 7.Q<jy.ty (t.\x.a.f-
TtiK^S aaaa.1 àf nrcTùTOS tlfj.1 iyco e'fi -Wi^i'ju) ôri rouro Wvto 'éÇî rô /° V"J"^^ ^
à-^çAvrev ca'j.A ^ T8ro id eft quod elt m calice a'/r» 641 lité que tous
To Ti'fjLtot a.îu aou & cHii crédit ipfum corpus elle, ^ipTum !« Grecs font
ianguinem,noi> crédit cerce parrem elle & vinum. Lx qurbus ^^^^^^^
clarè confiât fandam noftram Ecclefiam hanc rranlTubftantia-
tionem firmicer creder;. Si enim qui eft in calice, eft vere &
non typice Filius Dei Se quod in eodem, ipfum corpus & fan-
guis, profeiflo non eft pan>s nec vinuna,.quia hoc qÛqz abfurdum
omnium maximum.
Quod vero fie femper crediderit probatur inexplicabili con-
jectura, qiiia h.TC fides non fuit denovo introduc'^a in Ecclefia Argument de
J >ei. Omnes enim novitates , qua: fandam turbarunt Eccle- i^ pcrptiuité
fiam, habueruncproprios aurores ,utnosdocent hoftoria\ At/"^"^!^''^ ^""^
hujus fidei nuUus è Neotericisfuit autor. Ergo hanc novit ab
antiquitare. Qiiod û q^uem habetis hujus vos autorem , often-
dite& in priftinam Orthodoxiam redibimus. Nec fas eft calum-
niari qiiemquam Parriarcharum noftrorum, vel P^omanornm
Poutificum , cùnî- calis calumnia: nulla confturepofficpit ba-
66 6 Liv, VII J. Vreti'vcs cLuîhcnt, de V union des Eçr.d'O
tio. Excanc cnim intégra monumenra anciquita ris j excanc hiflo-
riarum annales , in quibustalequid neclegimusunquam nec
vidimus.
Nec nobis obijcias Conci lium Tridenrium , in quo nec in-
terfuimus, quod criminaminiî, juc definitrit haine fivrhfo^tian
Le Concile Quod cnim crcdimus non habemus ab aliis, fed è concrai cùm
jien dTfinide ^^^ Oriente ortum habuerit fidesSi veriras, 6c propagata fueric
nouveau fur ab Oriente per univerfumterrarum orbem. Nec tamen mihi
ce poiac, fuadeo defînitum fuifTe ,uc novum dogma inillo Concilio , fed.
renovatum potius ut vêtus quemadmodum multaalia i cujus&:
evidens conftat probatio j Romana enim Ecclefia nunquam à
noftra difcrepavit inhoc arriculo. Erg© fie ipfa quoqueabini-
jamais les cio crcdidic. Cum itaque fie fe res habeat ut talisfidei nuUus
deuK Eghies Neotcricorum fit autor, aurvosut neoterifinum antiquitacem
n ont eu dif- j ...... ^
ferend fur la damoatis , CU]US vix cxtat iHitium.
trjnifubftan- Ut autem innotcfcat tibi vcritatis hujus origo, fcias quod
dation. ^^^ g^ nova ifta contcntio , fed ortum habuit ipfius Chriûi
cemporibus qui de illa quid efîèt conftituit. Cum enim Sal-
vator nofter dixifi^et Judxis ; ^afiis quem ego dabo uobis^ caro
7nea efl , dictum illi interpretati pro vera & phyfica carne ( in
quo non aberrarunt ) 6c impoffibile hoc exiftimantes, ut vos
modo injuriam non parvam inferentes divinse Omnipotentiar,
quomodo , dixerunt inter fe , foteft ific dare nobis fuam carnem
ai manducandum ? Chriftus autem eor«m increpans increduli-
tatem , 6c oftendens divinitatisfiixomnipotentiam : Nifi man-
dacaveritis ( fubdidit ) carnem finj hominis & bïberitis e'pis fan-
guincm ,non habebitis vitatn in vobis. Ac fi diceret : Vos non
creditis me pofiTe dire vobis ad manducandvm veram meamôc
phyficam carnem. Ego autem dico vobis , non folum pofii-
biie hoc apud me , fed 6c necefilirium vobisad fakitem. Ideo
prjjcipiout eam carnem manducetis, quam vos afi!eritis impof.
fibile.Ne quis putet nunc Chriftumprarcepifi'e Judaris, ut car.
nem fuam comederent myfticè. Prxcepitenim utillam man»
dacarent , quam ipfi afi!erebant non polfe eum dare ad mandu-
candum.Et ciim de vera'Sc phyfica ha:fitarent,eam ipfe prjece.
pit utmanducarent. AHcer pra;ceptum Chrifti noncon(onarec
eorumhiefitationi. Jufllt itaque Chnftus, ideos facere , quod
opinabantur inapofllbile , quod 6c necefiarium ait. Cùm enim
•caro Chrifli fit vivificatrix 5'(6c vita. Hinc fit, ut qui veram
carnem non comedit , non habeat vitara.
Un de
avec ÎEglife %omaine fur ÎEuchuriflie. 667
Unde & os aureum fanclx noftra: Ecclefia:, in hujustexcus C h. XII.
explicacione hom. 47. cum id fieri pofle negarenc , non folum
non impoffibile , fed & neceflarium aflèric. Ac quid oltendit
non impoffibile ? Id fane dixeric unufquifque , quod ipli aflè-
rebanc impoffibile i nempe dare illis iuam veram carncm ad
iTianducandum,non myfticam , de illa enim non lixlitabanc
Judcxi. Hanc ergo eos manducare cumexiftimarenc dégénère
impoffibilium, oftendic ille poflîbile.
Ex prardiclisitaque ficargumenratur fancla noftraEccIefia.
Iftam carnem prxcepic Chriftus ut mandueaicnt |udan, de
qua ipfi h^ûcabanc ,fed bxfirabant de vera & phylica. Ergo
illam pnTcepit uE manducarenc. Item: lllud Chriftiis dixic
poffibile quod Jud;Ei impoffibile , fed Phyficam kuim carnein
dicebant impoffibile eos manducare. Ergo lilam dixit ChnÛLVs
eos manducare poffibile.
Chriftus ipfe in fua cœna myflica fanclis fuis prarcepir Apo-
flolis ,dicens, XcL^tri (pcc/im^To'o^ ,non o-mficL /u.y, fed cum ar.
ticulo demonftrativo tô oaux p.ov , quod ipfum corpu., non jsisi
corporis typum fignificat. Et en hujus^êTkff-Wêaj author j non
quis Patriarcharum noftrorum , nec alius purus hcmo, fed
Chriftusipfe homo Dominicus & Deificus , qui cum fpopon-
ditFec nobifcum elfe ufque ad confummacionem feculi , hoc
quoqueinftituitSacramentuiTijUt in illoadimplererurpromiC
fum&fponfîo.
Hanc edoélus à magiftro doctrinam Jacobus Apoftolus^
crac m Licurgia , ut pams converratur in GorpuSj&: vinumm
fanguinem. F^c ^ fnquic 3 huncpanem corpus fanHumChrtJii tui ^
^ hune calicem pretiofum fanptinem Chrifii tm. At quomodo
poceft fieri corpus, nifi craniTubllrâncietur in illud ? nifi dicatis
panem ejufdemeiredivinitatis cum Verbo, quod caro Fadum
eft fine muratione , quod ipfa damnaret impiecas. Ideoduo
illa nunquam Occidentia Ecclelut noftra: lumina Balilius H.
Chryfeftomus , ut non objiceres duas eiîe in Sacramenro na.
turas , panis nempe &: corporis , planius exponentes mencem
Apoftoli , addiderunt & ip(i in fuis Liturgiis lUtTa^aAa, tùù-«
'KHjjua.TKjarjTaÀyiai.hç fi diceFent,nemo h^rfuec in Sacramcnco
Euchariftix panem eife & corpus ^ ut in Verbi Incarnatione
divinicas 6c humaniras. Ibi enim fadlum eil; fine ulla miita-
tione : hic cum mutatione unius natura' in aliam.
Nec dkas }lUm mutationem eileftatus, quia mnratio flatas
PPpp
668 Liv.VIII. P'/ewoes authent. de f union des Eg. d Or.
non tfanfmucac unum in alcerum. Omnis enim mutacio , ait
Philofophusj. Phyficorumcap.il. t. y.eft ex quodamin quid-
dam, id eft in quiddam quod non fie idem cum quodam^quod
patec ex fubrequentibus. Aliud enim pnus fignificat , (ait ibi
idsai Philofophas) aliud pofterius. Ergo aliud panis,aliad cor-
pus , 2c fi aliud ôc aliud, quomodo idem?
At quis unquam dixic quod mutât ftatum tranfmutari in
aliud? Nam & qui creatur Imperator mutât quidcm ftatum ,
uc & qui deponitur,4ion propt.erea dicitur tranfmutari in aliud.
Unde fi paiis tranfmuraturin corpus, non mutât quidem fta-
tum , fedipTam fubftanciam.
Et fi quarras qua: fie ifta tranfiiiutatio ? Dico non efîè jam
de non fubjeclo in rubjedum , cum non fit generatio , ( divifio
eO: Pliilofophi j nec defubjeéloin nonfubjectum, cum non fie
corrupcio. Reliquum ergo eft ut fit de fubjeclo in fubjedum,
ideft de uno in aliud ^ &: fie dicimus qnoddefinens panis elle
pams, tranfmutacur in corpus. Talis enim eft natura hujus mu-
cationis, id eft ut definat res efi!e quod erat , & incipiac effè
quod non erat , vel quod amictat proprium efie , & in alterius
tranfear. Aliter pofterius non fignificarec aliud à priori, 6c
ficut frigidum tranfmutaturn incalidum Scnigrum in album ,
definunc elle mgrum 6c frigidum j fie & panis cum tranfmu-
tatur in corpus.
Nec officit quod nec Evangelifta: , nec Apoftoîi , nec Patres
ufi fuerint verbo jtc6TVo-/So9a/ , nec \oct [xtiSiolacitàS. Ha:c enim
non Fuerunt in ufu apud Autores Grarcos , ut nec apud Latinos
plulîeurs mots tranfjubfiantiari vel tranjjubftantiatio . Ideo perxquipoUentes vo-
cquivaiens au ^ eumdem fignificantes efFeclum explicaverunt clarc fuana
mot de tram- . * ■ • ■ \ ir i - i
(ubitannation fenccnciam Antiquitascnim ^ro vcxbotranjliibjiantiatto uceba-
paniii les j.^, j- ycrbis facio , verto , tranfmuto , c'tpi-i yiyfoiJ.oj ^ÊTctjSstMw fxiltt-
Lidrts*^ ^^ -TToiS, &aliis fimilibus,quod probacurex veteri&novoTefta-
m^^nro : Legimus enim in Genefi cap. 19 . refpicicns uxorejus»
poft fe , verla eft in ftatuam falis , iyhtro ç'îÎam aAoî. Et in Exo-
do cap. 7. Toile virgam tuam , ôc projice cam coram Plm-
raone ,&vertaturincolubrum , )(j:f V5*in J^pstxûîv Tulicque Aaron
coram Pharaone virgam, qua: verla eft in colubrum,5(5y èyêVn-o
S^^xv-dv. Et in Evangelio Joanniscap. 3. ut autem guftavic Af-
chirriclinusaqnam vinuin faclam , û'J^a? ol-'oi yiyuyit^^ov. Et in '
î irurgia prxdidorum Sandorum , iJiira.!ls.\à/ ra Ttnv'/j.a.Ti' aou
1C4 àyîa. Q£3e omnia fi intègre explicavens , non aliter fane
ajvec ÏBglfe "R.omAine /lir l'Eîich.mfiie. 66<)
evolves ^quam unum iubiedum rranirubftannaciim efTe in al- Ch. XII.
rerMin. Quod lï per dcre<rtum huius neoterica; vccis, non cre-
dis pani.s rrannuollantiaiionem in corpus, ergo nec fupradi{f^as
de quibus nunquam hxfiravirEcclefîa. Er lîcut in iis, cùm non
atcendacur vocula , fed clîecl:us& operatio , creditur tranffnb-
ilannario , (k &. in SacramentoEuchariiliTcactendendustfTec-
tns, & prxdicanda unius fubftantix in aliam tranTmiiratio j
eùm per rranfmucari.inem intellexerir femper rranlTùblian-
tiacionem Ecclefia, ut paret ex ejas fide&: conreffione. Unde
qui ju.êTxgo/^})!' admicrit , 6c f.uToL'm'm-iv fecundùm inierpreca-
tionemEcclefi;r j à q-iarremini licec deflecler? , tranlTubdan-
riacionem negare n.m p oreric. Darecur enim caufa in afta
operandi fine etïèclu , quod implicat.Hibjs iraquc liane tranl-
fubftantiarionem à Clirifto, à primo aucore. llabes eandem
& ab Apoftolis , ut probauim eft. Videamus jam quid de hac
erediderinc eorum (uccefTores & Patres primirivxEcclefi^ jà;
quibus vos non puto decidere.
Qiii Eplieiî convenerunt Pâtre? vircure quidem fapientirer
& fanclimonia prx^clarilîimi, &, hujus dogmaris interprètes
prxftantilOiTii jha:c habent de hac matenain Epifboîaad Ncf-
torium, ex quibus clare patet quxnam fuerit eoruinfentenna.
J^eceffario iytiir O^ hoc adjicimus. A'nminciantcs eni-in , Jîcut fe-
ciindùm carnem mortem uniq^cniti Filii De: , id efi Jefu Chrifti ,
^ rcfurrecTÏonem ejtts , (^ in cœlis afcenfîoncm pnnter cvnfiten~
tes , incmeyUitni celebramus in Ecdefiafticis facri^ciis verit.itcm ,.
êc hic non dicunt ipfi typum , ut vos crediris , fed verita-
tem. Er quantum diftar tvpus à veritate , tanrum ab eadenv
veftra opinio J quod diclum (it pace veftra , Fratres carilîimi.
Sic eciam ad 'mv/ricar benediciioncs accedimus , (y' fanchficamur
farticipcs fancri corporif , ^ pretio(i funy.inis Chrtfii omr.irzm
nojirum Redemptaris effecii , non ut csm-mnnem carnem fcrci- '
fientes , quod abfit , nec Ut viri fanciïjîcati , ^ nt Verho conjsnFii'
fecundtmi diqnitatis itnit.rte/H-^ aut ficut divinam pojjtdentis h:ts.
hitationem , fed ut vivificatriccm , (y- ipfius Vcrbi propriam f.ic.
tam. Confiderentur intègre , qua:fo , hit voccs , nam omnes di-
luant difficuitares. Vita enim n.tturaliter ut Deusexiftens ^ quia^
fropTiiC curni unit us efi ^ .vivifiattricem eam ejfc profeffus efi , ^
idcn quamvis dicat nobis : Nif manduca'veritis carnem Filii
Mominis , ^ biberitis ejus fangtanem , no7i tatnen cam ut homi-
nis unius ex mhis exifiinuire dcbcmus : quotnodo enim juxta
P-Ppp ij .
éyo Liv. VIII. Vreu^es authem. de t union des Eg. d'Or.
juiim naturani vivificairix efje euro honunis foteji l fed verè pro~
priant ejus faïiam , qui propter nos films hominis ^ (^ efi Q;- vo^
catur. Quid liis clarius ? quid lucidias ? Manducamus , in-
quiunr toc Patres fandliffimi , veram Chrifti carnem ; & fi ve-
ram, ergo non myfticam , neque panem : vera enim caro ve-
ram fubftantiam carnis fignificac. Et quomodo verum panem
comedens poterie veram carnem comedere,nifi unum cranf-
fubftantietur in alterum '
Chryfoftomus homilia 45 in Joannem. Motjobjtgnificabat
de fervts , qui fuum amorem pra fe ferentes itccbant , quts darei
nohis ut fuis carnibus impleremur / Quod ^ Chnfius fecit , ut ma~
jori nos charitate ajîringerct , ©^ ut fuum in nos oftenderet dejide-
rium y non fe tantum videri permittens defiderantibus , fcd ^ téiny.
.^ mxnducari ^ ^ dentés carni fu^ i^fip -, dl" dejtderio fuo omne^
impleri. InfiguHturne dentés myftic^ carni, an vera: ôc phy-
fica: ? Et in eadem in diâo Chrifti : Punis quem ego dabo vo-
his caro me a ejl : cum enim ïn petendo cibo infiarent , ^ patri~
bus fuis datum memorarent , ^ manna tanquam magnam quid-
dam Uudarent^ omnia illa fiytram ^ umbramfuifje^ rerum ant^
"vcYitatem prafentem ofiendit. Vides quod ifte panis non eft fi-
gura corporis Chrifti , fed ejufdem corporis ventas. In homi-
Jia quoque 85. in Matth. O quomodo dicunt , vellem formam
^ fpeciem ejus , vcllcm vcflimenta ipfa , vellem calceam-enta vi~
dere. Ipfum iymr vides , ipfuyn tandis , ipfum comedis. Kefiimen-
'ta ejus dcfdera^ vidcrc , ipfe vcro feipfum tibi tradit \ non ut vL-
deas fohïm , verùtn ciiam ut tanyts d^ in te habeas. Ac fi dice-
ret , qua: magis probant corpus Chrifti ; Veftimentane , an
ipfum videre , tangere &; comedere , & fi tu vides , tangis êc
comedis ; quid veftimenta qua:ris ? Vifus autem corporis , tac-
rus &: comeftio , nonne corpus ipfum ceftantur,6: veritatem
ejus aflirmant.?
NyfTenus quoque horc &: ille in eadem hypothefi in fer-
mone de Catechumenis cap. 37. Relie quidem xredimus verbo
T)ei fanciificiitum panem in Corpus Chrifti tranfmutari [ //era,-
TTroiVcSiz* J verbo Grxcanico. Ex quoinfero quod fi panis ille
tranfmutatur in corpus ,defimt eiîe panis. Non poteft enira
id;m raanens , tranfinutari in aliud , ut ex didis probavi-
mus.
Damarcenusquoquein4 Libro de Eucharifiia . Corpus verè
divinitati unitum , quod ex SanHa Virgine corpus , non quod
ipifum AJfumptunft corpus de cAo dcfcendat , fcd quod ipfe pa.
a^ec ÏEglife Romaine fur t Euchartflie . 6yt
nïs ^ vinum vertuntur in corpus d^ fanzuincm Dei. Et ne quis Ch, XII.
confugiac ad inrerpretationesad placirum , & rypum verfio.
nem illam exiftimec, clarius explicac fuum fènfum inferiùs.
17 on efi typus :, aie , panis ^ vinum corpons (^ fan'iumis Chrijli.
ylbfit 5 feâ ipfum Doyyiini corpus dcificum , ciim ipfe Dominus dixe-
jit , hoc efi , non typus corporis , fed corpus , é- non typus fanyiinis ,
fed fanffiis.
Quod fi in qua allegatis Epiftola, qua; non eft apud nosaf-
'feric , a'TiT-uTfct, TV x.v6ic(.x.«' ffâ/xoLTos , isteiligendus eft antc Tandi-
ficationem panis. Sic enim ipfe in eodem interpretaturaîfTi'rtJTrct,.
Si quidam autem y ctirlri^n. corporis d^ fanytis D«mini , panent
■C^ vinum , ut divus dixit Bafilius , ncn pofl fancHficationcm
dixerunt ^ fed ante fanBificationem ohlationis. L'x quo evidens
patec hujus fandi Dodorisfententia j nempe panem &; vinum
non eflert'r/rt^Tro. , ut vos modo aflTeritis , fed ipium verum cor-
pus & fanguinem. Et ut modum non qiixras hujus tranfTub-
ilantiationis : fufficiat , inquit , tibi audire . quod per Spiricum
Sandum.
Sandus quoque Ambrofius , Lucifer "&; ipfe in primitiva Ec-
clefia de Sacramentis ait , anteverha Chrifii , calix vino (^-^
aqua efi plefius , ubi vcrba Chnfii opérât a fucrunt , f inguis ejfi.
citur qui plebem redemit. Antc ■heneditfioncm verboium aiia fpe- -
des nominMur : pofl confccrationem corpus Chrtfti vête fignifica-
tur. Et in oratione ante Millàm dicenda :Z)o;«/«rZ)«/j, »/^/f<r/-
ro tua inveritate fujnitur , uhi fanpiis tuus inveritate bibitiir (^c.
Et in primo de viduis. Antequum confccrctur panis <:ft ^ubi vero
verba Chrifii accefferunt, corpus Chrifti efi. 'Ex. feipfum clariusex-
plicans , ne illud ( efle ) quis interpre-caretur pro typo , ait in
MatthîEum : Chrifius ajfiumpto pane qtti confortât corhominis ^ ve~
ritatem corporis Juirepr^fentavit. Eu itaque veritas quir typum
omnem evercit.
Ex his teftu-nohiis ut reliqua pneteream brevitacisgratiâ,cùm
fînt innumera, manifefta patet fandorum Patrum fententia ,
quod fciHcet verum fit corpus nontypicum feu myfticum jUC
aiîeritis, in quononparum mihi aflfert admirationis veftrappi,"
nio. Nam vel polîlbile credicis liocapud Deum, vel impoflî-
bile. Si primum rcurrantum contendicis, & vosipfosfejungi-
tis àSanclaEcclefia? Sifecundum , cur potentiorem pnvdica-
tis naturam ipfo autore naturx ? Natura enim ipfa tranfub-
ftantiat panem infubftantiam comedentis , ut probat magiftra
P P p p iij
-éyi Liv/ VIII. Freuves authent. de l'union des Eg. d'Or,
rerumexpcrienda. Ac quid horum putstis majusomniacrea-
re ex nihilo , an panem in corpus convertere ? Et fi quod ma-
jusdivinitati conceditis, cur quod minus negatis ? Audi fuper
' hoc ipfunr Ambrolîum in 4. de Sacramcntis •• Si tuntum valuit
ferma EltiC ut ignemde c^clo deponcret ^nonvalcb:t fermoChrifiiut
fpccics clementorum muteturi ( Pondéra quod non mutatur fta-
t-us clemencorum: fed fpecies) de totius muriii operihus ,leq^i-
fti , quia ip{e dixit & fucia funt , ipfe manduvit ^ creata funt,.
Scrmo igitur Chrtfii qui potuit ex nihilo facere quod non erat ^ non
pote fi ea qua funt mutare in illud quod non funt , & ne ftatus
miicacionem uc fophifta induceres , fubdir , nonenim minus.efl
novas rébus djre formas , quum mutare naturas. Si Deus ergo
mutât non ll:atum natur.x , fed ipfam naturam in aliam ,
quomodo natura cranfmutata eadem remanebit & m fua prima
fubftanria ? Ac hoc captu perdifiîcile dicis; Mihi vero dilîî-
ciHus vidccur rranfmutare naruram & confervare eamdem in
tranimutatione. Hocenim apertè répugnât & imphcat. Nam
fi Verbum tranfmutaretur in carnem , noneflec ampHus- Ver-
bum,quiatranrmutatio importât converfionem prioris fubflan-
ticC. Sed ilpropter difficulratem non credis, ergo necTrinira-
cis-,.necîncarnacionis. myiVeria, ut longe difficiliora intelledlui.
noltrOj&propter hoc magis credendum, non inquirendum .-
F ides enifn non hubct meritum ^ ubi humana ratio prabct expcri-
menttun ;& fides nuftra non comprobatur /yllogirmis &; ratidni-
bus, fed fe ipfa, &;Dei miraculis. Unde quod non capis quod'
non vides , animofa firmat fides. Ecati cnimqai non viderunt
^9- crcdiderunt. Portenrofum videcur myrterium , quiadivinita•-
tds eO; non humaniraiis, & obiTftic fenfiii , quia rupernarurale
eft. Harc enim divinorum natura , ut- non cadant.dibfenfu ôc
inrellec^u noftro.
Ut jamad veftros veniamus articuîos- Scias Fcclefiam Gra:-
camcredci-e, quod aiferis credere Romanos Pontincios in i.
z. £c 3. ar-ticuio.Hajicenim fidemut&omne bonum habuerunr
à nobis , pr.xcerquod iUis imputas, nempediabolum polTeSnn-
svftoirpasou- ctidmio corpori iliudere , atquc abuti ad malencasarîC5& 'ce-
biiédekur Icra patranda : hoc enim apud nosnon eft inrer arriculos fidei-
^""/f-'r^'^'^V- neceiîarios, qui &;pio potius filentio quoque talia commend.ire
îionsr fuevimus, quam-jurgiofis dialogis. Rodi vero à muribus illud
Deificum corpus vei manducan abimpiis&à canibus, hoc nul-
lara afFert divinicaci injuriam. Si enim Deus ubique efl iaten-
a^ec l'EgîiJe "Romnine /ur ÏEUçhiinflk. ^73
dum, efTe quoqae in ventribus animalium , fed lîcut fol per Ch. XII.
impuricaces tranfiens, &: in iis permanens non inquinatu-r , ne- Qi'^ft'ons n-
*■ \\ ■ r r \- /-^ o ■ r\ r diculcs qui ne
que polluicur, 11c neciolis Creator, & omnium Opirex. font bonnes
Quarcum quoque crédit Sanda Eccîefia. Nequeinquiritom- qu"a épouvan-
nipotendam Dei ,cuiomniatribuit, quonam modofervetac- ^^'^ '^^ ^' ^"^'
cidentia fine fubjeclo , aflerens hoc mirabiie divinitatis efle, cui
& mirabiliora poflibiha funt. Et qui non totuin tribuit fenfui fa-
cili negotio , elevabitur ad cognitionem Scfîdem fupernatura-
lium. Legimus enim in libris Sapientix c. 16. quod qui manna
comedebant , omnes attingebant fapores prout quifque volue-
rit. Audi Scripturam liane veritateai docentem:/'r^fa/(^w/^«-
gelorum efca nutrivifti populum ttium^ (jj- faratum. fancm de calo
frafiitifti illis fne labore , omne deleciamentum in fc habentcm j
(^ omnis faporis fuavitaton. Subjîantiam cntm tvam (^dulcedtnem
tuam quam in filios hahebas o^endebas ., ^ dcferviens unmfcujuf-
que voluntati , ad quod qui fque volebat convertebaUir. Quod lî de
converfione faporis in fâporem interpretatus fueris,non aber-
raveris à veritate , & eft fapor carnis in manna & aliornm co-
meftibilium fine re (aporara. Qui ergo hoc mirabiie perperratus
eft, ut qui manna comederentpanis experirentur deleclairien-
tum^carnis raporem,&;cujurcumqneakerius fijbfl:antia.%ut quif.
que voluerit, fine fijbftantia rci fapidx , car non valebit efficere
uccomedens corpus {uum,panis attingat faporem, licet abfic
panis fubftancia? Atquiipfam quoque concemplatur naturam,
non fi.ipernatura!e hoc fadum conipiciec. Si enim quanritarem
•rofarum in Thalamo tuo pofi.ieris, deinde illas extraxcns, vel
confiampferis-fenfijs tameniine re odorataperji.:cuniJum ilkina
odorem percipiet h quod & in thure patet & thymiamare & cx-
terisolidis. Quid mirum ergo fi panis odor in corpnreconferva-
tur fine ejus fubftancia? Hxc lane videtur porccntofa dcclri.
na , cura plus tribuat naturx quam DeOj& creatura: quara
Creatori. Ideo irt irapia à noftra fancta damnatur Ecclefia.
■Qiiintum parirer crédit. Et quoad fextum ,adorar corpus in
Euchanftia , adoraciooe latrix ; deificum enim eft.
Quod habesin feptimo ,non eft in ufu apud nos circumferre
corpus fancliirurium per plateas & vicos , magna feqnente po-
pulorum caterva. Non damnaturramen quodpietate fit in ho-
n.oremf\; gloriam Dei.
Quod quarrisin oclavOjqui crédit panem converti rcalirer in
unum corpus Chnfti, crédit quoque Deumipftim eiîèfiabftan-
Voilà fa ns
674 Liv. Vu I. Vrewves authen. de ï union des Sg. d'Or,
tialitcr creacoremcxli & terra: ,&.doceclubfi:antiam illam pa-
nis fanftifîcari , quam fidèles lumunt orecorporeo jcfle eani-
dem illam particulam macerix , quam fand.x Trinitatis fecun-
da perfonaVerbum Patris aflumpfit in veritatem perfopiE per
unioneni hypoftaticam-
doute iia'i^ux Qiioad nonum abhorrcc Ecclcfia noftra ab iiïa dodrina ,
Grfc félon quaiTi docciit Rcformati , nempe illud idem quod fecundum
Mail'iemlifft ^u^m nacuram panis eft^ myfticë & fecundum grariam fandi-
qu'ii n'en trou- ficacionis , elfe corpus. Crédit enim corpus elle non myflicè ,
ve point de ç^^ ygj.^ 5^ phvficè , adco Ut Dcr tranrmutationemlfubftantias
vriis,&que ■ ,~r \ r .^ r n j n ■ ■
fon Eiriifc panis elle delniat. Tranjmu-tationcm cmm p'o tranjjubjtantiattone
Grecque corn- aCCipimUS.
verkaWes" ^ ^^ fanclilîimo Patriarcîia Cyrilîo concive meo & conter-
Grecs eft une raneo, cum Orthodoxus natus fit ex Orthodoxis parentibus ,
chimerequi nunquam quod fcribis audivi de eius fententia. At nec illum
ne fut jamais ' .»,-. c^ n o -ks i-
que dans fa numcrac landa Eccielia rater Sandlosôc Martyres , licet virtu-
tefte. te , docirina & probitace morum poUueric. Sin autem ille ali-
d"cyHnc"Lu- ^^r quam patres fui crediderit ,damnatur profedo ejusdoélri-
carpcucon- na&fides tanquam ha^retica. Vale ad multosannos 5 utdepre-
nus des Grecs. ^^^ iUuflriffimc Domine , & Spirirus veritaris qui ex Pâtre
oerfiM.ciau- procedit ^ dirigat in viam lalutis , corpulque Domini noltri
de aura eftc Tçfy chriftl cuftodiat animam tuam in vitam xternam,
fort fatisfait de -.
cette réponle. -«inicn.
Ex Arce Zacyntlii die ir. Maii 1(372.
CHAPITRE XIII.
Union de l''Eq:Iife Grecque avec l^'zlife Romaine -prouvée far
l'aveu de ceux de la Religion F retendue Reformée ,
qui font a Confiantinople.
COmme la conteftation que nous avons eue en France
avec les Miniftres fur le fujet de la créance à^s Grecs , a
efté rendue célèbre à Conftaritinople par les attefiarions qu'on
y a demandées, &. qu'elle a fervi d'entretien aux Catholiques
& aux Proteftans qui y font : on fera peut eftrc bien aife de
fçavoir de quelle manière ceux qui font dans les (cntimens de
Monlieur Claude à l'égard des dogmes, parlent à Conftanti-
nople
Awsc TEglife KomAÎne fur ÏEucharifiie. 675
nople de fa prétention touchant la créance de l'Eglife Grec- Ch. XII.
que , ôc c'eft ce qu'on verra par l'extrait de deux Lettres de
M. l'Ambafladeur que nous inférerons icy.
^EXTRAIT D'VNE LETTRE DE MONS lEVR
l'Ambajjudeur ce 9. Février 16/2.
JE croy que vous ne ferez pas fâché d'apprendre quelques
traits de la bonne foy des Miriftres Calvinilles qui font icyj
vous en avezveu un échantillon par ce qui fe pafla entre nioy
& le Miniftre d'Angleterre à l'Eghfe Patriarchale.
J'en ay appelle depuis àMonfieur l'Ambafladeur d'Angleterre.
J'avois difné avec luy , & ne voyant point (on Miniflre , je
luy dis en riant que je croyois qu'il me fuyoit.Il merepliqua qu'il
avoit eflé malade à l'extrémité , & que feulement de ce jour,
il commençoit àeftrc hors de danger.Nousentrafmesen con-
verfation fur le fait des Grecs.
11 me protefta qu'il eftoit fi fort perfuadé que les Grecs
croyoient la prefence réelle & la tranflubftantiation , qu'il ne
feroit pas difficulté de m'en donner une artefl;acion , ians la
crainte qu'il auroir qu'en le faifant on ne le fit pafier en An-
gleterre pour Catholique, c; qui luy nuiroit extrêmement. Luy
ayant repondu que je ivn^ii bien fâché de luy nuire, & que
je me contentcrois quant à prefenc de la déclaration qu'il me
faifoit , il me promit de luy même d'écrire à Meilleurs de l'A-
cadémie de Londres la croyance des Grecs de la prefence ré-
elle & de la tranfiibn:antation. M. l'AmbafTcid ur d'Angleterre
s'eftoit déjà expliqué des raifons qui l'empêchoient de me
donner rattefi:ation qu'il m'avoit promife , Se il l'avoit fait
en des termes plus forts en marquant, ainfi que je penfe vou^
l'avoir mandé, que s'il la donnoir, ce feroit le moyen de luv
faire perdre fonemplov ,5c qu'eflant de retour la difgrace qu'il
encoureroit auprès de Ion Archevêque luy porteroic un très-
grand préjudice. C'eft ce qui m'a efté rapporté par une perfonnc
tierce qui s'eft entremife pour foulager M. l'Ambafiadcur
d'Angleterre de la peine où il fe trouvoit de ne pouvoir exé-
cuter fa parole, & qui defiroit pourtant avec paillon que je
n'eulTe pas lieu de me plaindre de luy.
J'ay cru que ces aveus de coiifiderations politiques &d'ia-
terefts humains, pour ne pas déclarer nne vérité après s'yeftre
676 Li V. Vf 1 1. Preuves authcn. de l'union des Eg. d'Or.
engagé, valoienc bien une arceftation formelle. C'eft pourquoy
i'ay voulu vous en inftruire , &: vous avercir auffi que les ex-
cufes de Monfieur l'AmbafTadeur font des inventions de {on
Miniftre. En voicy encore d'autres qui font de luy ou de celuy
d'Hollande, dont j'ay veu des effets en la perlonne du fieur
Peftalorri chef des Marchands Allemans,quire(Ideà Conftan-
tinople depuis trois ans. Il efl Calvinifbe, homme de con-
fiderarion, tant par luy-même que par les grandes correrpon-
dances qu'il a partout le mjnde. Il a delà probité & de l'in-
telligence. Et âinfî tant par toutes ces raifons , que parce
qu'il a efté en France, où il croyoit avoir entendu le prefche
du Miniftre Claude, fuivant qu'il me l'a dit, j'ay cru que je
pouvois m'informer de luy de la croyance des Grecs fur les
points en queftion. Je luy ay déclaré la raifon qui m'obligeoit
à cette recherche. Je luy ay même montré les aiteftations que
j'avois déjà, & je I'ay prié de me donner une déclaration de
ce qu'il en fçavoit, ou de ce qu'il en fçauroit après s'eneftre
informé. Il me promit de le faire , me difmt que pour un plus
grand éclairciflement , il iroit voir le Patriarche des Grecs,
& il ajouta que j'avois déjà dequoy confondre le Miniftre
Claude , & qu'il ne comprenoit pas pourquoy il s'eftoit enga-
gé dans cette conteftacion. Il me pria enfuite de luy donner
un mémoire des articles j & comme il l'eut leu avec plus de
reflexion, il me reprefenta qu'ils eftoient tous contre l'a croyan-
ce de fa Religion. Je luy remontray qu'il ne s'agiiTo-it pas de
leur veriré , mais bien de fçavoir files Grecs les croyent. Cet-
te réponfe l'ayant fatisfait , il fe retira,
11 a demeuré huit jours fins qie j'ave entendu dîT-sn^^u -
velles, & enfin il m'a fait prier inftammenî de l'exciirer , s'il
ne pouvoir fatisfaire â nia jufte d;mande. Il eft convenu que
s'eftant informé d'un Métropolite grec homme habile, delà
vérité de tous les articles en qucftion , ill'a voit afieuré que les
Grecs croyoient comme les Romains, fçavoir la prefence réel-
le, la tranlTubftantiation,. l'invocation des Saints, les fept Sa-
cremens & les autres; mais qu'il ne pouvoir en donner aucune
atteftation , le perri où il s'expofoit en foumilîant des armes-
aux ennemis de fa propre croyance eft int trop grand. Il dit
qu'allant par exemple à Paris, le Miniftre de Charenron &:
Claude luy même,s'il fe trouvoit dans la fondion, luy refufe-
roit la participation à la Cène , fous prétexte pu'il auroitattefté
a^'ec ÏEglife Komaine fur l'Eucharifiie. 677
un fait qui luy feroic contraire. Il a die de plus qu'il n'en tau- Ch. XIII.
droit pas davantage pour luy caufer un grand fcandale ,& luy
procurer même l'inimitié de Tes parens, 6c qu'il ne feroit pas
raifonnable qu'il s'engageaft dans ces extremirez. On luy are-
prefenté qu'on ne luy demandoit pas l'acteftation des points
en queftion, comme d'une chofe qu'il fçût de fcience certaine,
mais comme l'aysnt apprife d'un Métropolite , & même du
Patriarche s'il vouloit s'en informer de luy. Il a répliqué que
l'un ne luy feroit pas moins périlleux que l'autre, 5: que quoy
qu'il fçùt bien là vérité, il ne pouvoit néanmoins la déclarer
par écrit, 8c qu'il y auroitmêmedeTentreprifeà luy dele faire>
puifqu'il ne tient icy aucun rang deperfonne publique, & qu'il
fë trouveroitle feul de la Religion qui l'auroit fait, les An-
glois, & les Hollandois demeurans dans le filence. Onainfifté,
en luy reprefentant que le devoir de fa confcience ne s'ac-
cordoit pas avec la conduite qu'il tenoit en cette rencontre,
mais on n'a pu le fléchir.
Je laiflè le champ libre à toutes vos reflexions fur la manière
d'agir de ces Meffieurs les Miniftre^ qui employent une efpece
d'excommunication pour fermer I^ bouche à ceux qui veulent
déclarer la vérité. Il n'y a point de doute qu'ils ne foienr les
auteurs de ces craintes 6c de ces corjfiderations politiques, puit
que ceux qui s'en fervent n'y fongoientpas dans le commence-
ment, & qu'ils ne s'en font fervis qu'après coup.
EJTTRAJT B'V.ITE AUTRE LETTRE.
VOus fçaurez que le Miniftre de xMonfieur l'Ambafîadeur
d'Angleterre m'eftant venu voir^ je luy av montré l'at-
teft:ation (ynodale 6c plufieurs autres Je luy ay fait lire Xz^
paroles qui concernent l'Eucharifliiei Se il eft convenu pofiti-
vementdela croyance que les Grecs ont delà prefencc réelle
& de la tranlTubftantiation. Il s'étonne même de l'opiniâtreté
à difputer ce fait delà part du Miniftre Claudei&: il prétend
qu'il n'y a aucun Mémoire venu d'Angleterre quiJuy ait pu
donner lieu de le faire avec quelque fondement.
Vofla comment parlent ces Mcflîeurs à Condantinople j &
comme l'on ne croira pas aifement que Monfieur Claude &
Jes Miniftres de France n'en foient avertis, puifque s'adreC
Tant comme il fait à des Grecs de Crète, ils n'auront pas ne-
QQ^qqij
678 Liv. VIII. Treunjes authenr. de T union des Eg. d'Or. ^
gligé d'écrire à Conftancinuple même, & à des gens qui Ton,
liez d'intercft entre eux -, il faut ou- que ces Minières qu^
font à Conftantinople trompent M. Claude, ce qui paroift. peu
vrayfemblable, ou que M. Claude ne les croye pas bc ne veuil-
le pas fe détromper, ou quequelque détrompé qu'il foit, l'en-
gagement où il eft le porte à foutenir jufques au bouc con-
tre fa confcience , ce qu'il a témérairement avancè._
CHAPITRE XIV.
Union de l'EgUfe Grecque avec ^Eglife- Latine prouvée far te
qui eft arrivé au fu] et du terme de tranfTubftantiation , inféré
dans la confejjion Orthodoxe. De quelle forte cette ConfeJ/ion a
eftè imprimée en Hollande aux dépens des Ejiats.
LA Cbnfeflîon Orthodoxe de l'Eglife d'Orient eft une
pièce fi authentique &: fi decifive dans le différend que
nous avons avec Monfiéur Claude, que j'ay cru qu'on feroit
bien aile de fçavoir pourquoy elle fe trouve imprimée en Hol-
lande, d'autant plus que le récit de ce qui eft arrivé fur le fujçc
de cette Confeffion donnera lieu d'éclaircir un endroit du li-
vre de Monfiéur Claude^ où il rapporte une Lettred'un nommé
Bafire^qui afiêure que le mot de tranflubftantiation inféré
dans un Catechifme Grec a efté cenfuré par les Grecs. Les
Lettres de Monfiéur l'Ambafiadeur que j'infereray icy éclairr
ciront parfaitement ces deux points,
EXTRAIT D'VNE LETTRE DE MONSIEUR
de Nointel Ambajfadeur de fa Majefté très- Chreftienne à la Pone.
LE quinzième de Février un de mes amis m'a rapporté,
qu'ayant difné avec Monfiéur le Refident d'Hollande, &
la converfation eftant tombée fur la Religion des Grecs, on
avoit parlé du livre intitulé, Confe,IJton Orthodoxe de l'Eglife
Catholique ^ Apoftolique d'Orient., comme eftant juftifïicatif
de fa croyance de la prefence réelle &: de la tranflubftan-
tiation.
Mpnficur le Refident découvrit l'origine de l'impreffion
anjsc TEgîi/è l{omiiine /îir ÎEuchxriflie, 679
de ce livre. Car il luy dit queMonfieur Panaiotci avant en- Ch.XIV.
voyé l'exemplaire en Hollande pour y eftrc imprimé à Tes
frais, Meffieurs les Eftats n'avoienc pas voulu qu'on prift de
fon argent, & que pour gagner Tes bonnes grâces, ils l'avoienc
fait imprimer à leurs propres dépens avec un très, grand foin,
& qu'ils en avoient confié plu fleurs cailfes à leur Refîdcnt,
pour en faire prefent à Monfîeur Panajotti.
Voila la manière donrce Seigneur Hollandois s'eft expliqué,
& je croy qu'il auroit donné un de ces livres à celuy qui luy
parloit , s'il ne luy avoit pas répondu qu'il en avoir un.
C'eft un« cbofe admirable^ non pas que ce livre ait eftc im-
primé en Hollande, puifque tout s'y imprime indifférem-
ment par le defir du gain, mais que l'impreflion s'en foit faite
par l'authorité publique j gratuitement 6c avec tant d'exacli-
tude. Il eft vray que le defir d'acquérir l'amitié de Monfieuf
Panaiotti y a contribué. Mais l'on peut croire aufli que comme
fans une confideration auffi forte que celle-là , Meffieurs
]ès Effcats n'auroient jamais confenti à fournir des armes con-
tre eux-mêmes. Dieu a permis qu'il y fulTent comme for»
cez par des veucs temporelles, afin que le remède fufl rendu
public par ceux mcme qui avoient contribué au mal. Le Refî.
dent de Hollande nommé Cornélius Aga avoit corrompu Cy-
rille Lucar. Il en avoit tiré une profelTion de foy Calvinîfle,
fous le nom de l'Eglife d'Orient. Il avoit donné à ceux de
fa fecle un moyen d'éloigner d'eux le reproche de fingularité
dont ils fontaccufez; & comme il ne fepouvoit vanter tourau
plus que d'avoir un Patriarche j & quelques Evêques partici-
pans à fon hcrefie , il commeitoit unefaufFeté, &: faillie une
injure à l'Eglife d'Orient en luy imputant l'opinion d'un Pa-
triarche, & de quelques particuliers. Cette manière d'agir eftoit
d' autant plus injufte, qu'il fçavoit bien que fon argent avoic
fiit parler ces Mefîîeurs comme il avrit voulu. Ainfi il eftoit
raifoanable que la réparation en fuft authentique. Deux Sy-
nodestenusà Conftantinople , l'un par Cyrille deBerée, Se
l'autre par Parthenius le vieil, onrrejetté avec anathcme cet-
te profefîion de fov mercenaire : mais comme fî des ades de
cette importance n'eulfent pas fufK, il a fallu que lacondam-
rwtion de ces principaux articles Calviniftes ait efté réduite en
forme de Careckifme.
4.
Q^Qjiq "'j
68 o Liv. VII, Prewves auth. de ï union des Eg. d'Or.
Car c'eft pour ce fujec qu'en l'année 1641. fur la recjuificion
de l'Eglife de Ruffie , le livre intitulé Confejfîon Orthodoxe de
t'Eglife Catholique é^ Apojlolique et Orient ^ a efté approuvé de
tous les Patriarches, On y voit la prcfence réelle, la tranflub-
ftantiation , l'invocation des Saints , les (ept Sacrements, 6:1e
culte des Images établis nettement.Et parce qu'il fembloit inu-
tile, s'il n'efloit imprimé, on afongé au moyen de le mettre
entre les mains de tout le monde par l'impreffion.
Il n'y a point d'imprimerie Grecque à Conftantinople. Cel-
les quife pourroient trouver en Valachie, ouen Moldavie ne
font pas afîèz correAes. Il y auroit eu du danger àfe pourvoir
en Mofcovie. Ceux de l'Eglife Latine n'auroient peut-eftre pas
voulu confentir d'imprimer un livre qui ne contient pas des fen-
timens Catholiques touchant la Proceffion du S. EfpritjôC
quelques autres points. Ainlî il ne reftoit plus que les Prote-
ftans .- & je ne douce point que Dieu n'ait permis la rencontre
de toutes ces difficulcez, afln qu'on fe trouvaftdanslaneceffité
de fe fervir des Hollandois, 6c qu'ils reparaflent ainfî en quel-
que forte l'injure qu'ils ont faite à l'Eglife d'Orient. Et comme
leur Refidenty avoit donné lieu, qu'il l'a voit tramée, & qu'il y
avoit employé fon induftrie & fon argent, on ne peut pas defi-
rer une réparation plusexprefTe qu'un defaveu de fes calomnies
par fes Supérieurs, qui font imprimer à leurs dépens un livre
qui découvre la faudetéqu'avoit avancée leur Refident,ll avoit
corrompu le Patriarche & quelques particuliers par argent, &
fes Maitrcs font forcez par une conduite admirable de Dieu
de fe fervir de leur argent pour rendre public le contraire d'une
profeffion de foy toute vénale.
Il pretendoit cacher une vérité de fait par des veuës toutes
humaines, voulant authorifer à quelque prix que ce fuft, une
chofe qui favorifoit fa Religion: Se d'autres veuës humaines
contraignent Met. les Eftats de delavouer leur Miniftre. Enfin
c'cfl leur Refident même qui découvre ce myftere fans en eflre
autrement follicité,& qui deluy même eft entré dans ce détail
pour fatisfaire à une curiofité générale de fonamy.
Toutes ces reflexions font altez fortes; mais il faut revenir à
l'entretien de M. le Refident, dans lequel on n'a pas oublié de
parler aufiî des Arméniens. Après qu'il eut demandé ce qu'il en
eftoit, &: qu'on luy eufl: repondu qu'à l'égard des Cérémonies ,
elles approchent fort desnoftresj que pour la croyance , ils
ai'ec ÏBgl'ife Romaine fur ÏEuchariflie. égi
avoient de grandes herefies, mais qu'ils te noient la prefence
réelle & la crunlfubftantiation , il s'ëronna de ce dernier point
Redemanda s'il cftoitbien véritable. On luy en certifia la venté,
& ce fut ce qui finit la converlacion.
Le 4. de Mars, j'ay ordonné à Fontaine d'aller chez M. le
Refirent d'Hollande, le remercier de ce qu'il m'avoit envoyé
fon Secrétaire avant (on voyage de Smyrne, Si kiy offrir fcs fer-
vices à la Porte où je le depèchois. li l'a prié de mapart^ qu'il
me voulût bien faire le plaifir de me donner un des Livres qui
eftoienr intitulez, Confd/ion Orthodoxe de l'Egltfe Catholique (jr-
uipojiolique d'Orient^ &c de me dire comment l'impreffion s'en
eftoic faite, & par quelle raifon il fe trouvoit laifi de quelques-
uns de ces exemplaires. M. le Refidentayant témoigné m'cfire
tres-fenfiblement obligé de ma civilité, a afieuré Fontaine que
luy& tout ce qui fe trou voit dans fa maifÎDn eftoit à mon'ervice,
&illuy adonné deuxdes livres que je deiîrois,en luy difant que
c'étoient les feuls qui luy reftoient, & que pour leur impreifion
Des brolles, quieftoreut icy Secrétaire de Mef les Etats en
l'année n'y ayant point alors de Refident, fut recherché
par le fieur Panajotti pour faire imprimer en Hollande un ma-
nufcriî de Catechifme qu'il luy donna écrit à la main,re décla-
rant d'en vouloir faire les frais: Que ce Secrétaire en ayant in-
formé Mef. les Etats, ils le firent imprimer à leurs dépens, qu'il
leur en coûta 4000. francs pour en remplir des cailTes où il
y avoir plufieurs exemplaires,
M. le Refidentajoûta qu'ayant efté nommé en ce temps là
pour venir à Conftantinople y refider pour Mef les Etats, il luy
fut ordonré par eux , de le charger de ces caifles & d'en fai.
re prefent au fieur Panajotti .■ Qu'il y avoit même une douzai-
ne & demie d'exemplaires reliez à la Hollandoife dont il luy en
prefenta douze, Se que pour les fix autres, il n'en avoit plus que
les deux qu'il venoit de me donner.
EXTRAIT D'VNT: LETTRE DE M, VAMBASSADEVlt
dn Coïïfiantinople ce 2^. Septembre 16 7Z.
J'AY parlé nu Patriarche Methodius de la lettre de l'Anglois
nommé Bazire, je luy ay demandé fi le mot detranlfubftan.
tiation inféré dans le Catechifme qu'il m'avoit envoyé parl'Ar-
chcvefque d'Andrinople imprimé à Venife en 1635, fie compolé
par Grégoire Jeromonaqueavoic efté cenfuré.
68i Liv VIIJ. Preuves authaat. de tun'wn des €g. d'Or.
Il a répondu qu'il n'avoic poinc de connoiirance qu'on eût ja-
mais public aucune cenfure contre cette parole en quelque lieu
quelle fe crouvaft.Mais qu'ilfe fouvenoit fort bien d'une hidoire
arrivée fur ce iujec couchant le même terme qui eft dans la
confeffion Orthodoxe de 1 Egiife d'Orientj voicy comme il l'a
racontée.
LorfqueParthenius tenant le Siège de Conflantinople vou-
lut approuver la Con'-effion Orthodoxe de l'Eglite d'Orient, il
alTembla Tes Métropolites & les Officiers de l'EgliTe pour ré-
gler les prétentions de Corydale qui foutenoit qu'il en falloit
retrancher le terme de/ierfe'ffiaff/iOnluy enjoignit de dire Tes rai
/bns; & comme il eftoi: grand Philofophe bc qu'il pofledoiraf-
fez bien les Langues Latine & Grecque, il s'expliqua avec tou-
te l'adrerte 6c la fubtilicé qu'il put. Il remontra que non feu-
lement cette parole ne fe trouvoit point ni dans les Pères Grecs
rii dans les Conciles Ecumeniques, mais qu'elle eftoit contre-
faite fur celle de tranfliibftantiation forgée parles Latins, bc
que fî les Grecs la recevoient , ils donneroient lieu à leurs ad-
verfairesde fe glorifier qu'ils les fuivroienc dans une chofe qui
eftoit de leur invention.
Cette manière de parler n'étonna point Syrigue. Il efloic
grand Théologien & intereflé àdeffendre la vérité du livre qu'il
avoir rédigé^ 6c ce qui l'y portoit davantage, c'eft qu'il paroif-
foit dans l'intention de Corydale qui n'en vouloit pas feulement
aux paroles, mais qu'il avoir pour but de détruire le Sacremenc
même. C'ell: pourquoy fouhaittanc qu'il s'en declaraft, il luy de-
manda l'explication du mot Mctoufiofis.
N'olant biaifcr, il fut obligé de dire qu'il marquoit le chan-
gement d'une fubftance à u ne autre. Maisiln'cut pas fi toft
achevé de prononcer ce difcours quetoute l'afTemblée luy re-
partit d'un commun confentement que l'Eglife ne prenoit pas
tant gardeaux motsqu'à leur {îgnification,& qu'ainfi le terme
de tranflubftantiation marquant pleinement le changement de
la fubftance du pain 8cdu vin en lafubftance du corps Se du
fang de Jesus- Christ, n'eftoit pas plus des Latins que des
Grecs , puifque de l'aveu même de Corydale il defignoit fî
bien la croyance de l'Eglife d'Orient. Ce fut ainfi que Syrigue
fut déclaré le vainqueur & qu'il luy fut permisse à ceux qui le
vcudroientde fe fervir de cette parole.
Methodius m'a affeuré de la vérité de cette hifloire comme
ayant
a.'vec l Eglifè '^ma.ine fur tiucharifiie, 685
ayant efté rcmoin de toures ces parcicularitéz , parce qu'il afli- Ch. XIV.
fka à rafTeinblée où elles (q font paflces en l'année 1641. î1
eftoic en ce temps là Supérieur des Preftres d'une Egli(e de
Galata j & comme il s'eft louvenu de ceux qui s'y trouvèrent ,
il m'a dit que les Métropolites eftoient Pacome de Calcedoi.
ne , Parthenius d'Andnnoplc , Daniel de Serres , Grégoire
de Lariife , Anthyme de Cyzique , Cyri'le de Nicomci^ie ,
Joannicius d'Heraclée, Macarius deTornoue, & que les Offi-
ciers de la grande Eglile eftoient Lafcaris grand Logothetej
Philippe de Chypre Protonotaire , George Ecclefiarque, Ni-
colas Petit Logochete.
Vous voyez bien que celuy qui eftoit l'auteur de cette onpo-
jfitionapprochoitfort du Calvinifme, mais vous en Icrez con-
vaincu , quand vous fçaurez une hiftoire dont l'on m'a afluré
]â vérité, & qu'il ne fera pasmal.aife de juftificr, comme vous
le verrez par les circonftances qui fuivent.
Les Patriarches de Conftantinople eftant obligez de venir
tous les ans un Dimanche de Carême officier en l'Eglife de
Chrifopii dédiée à la Vierge , & iîruéeà Galata ; & Parthe-
nius le Vieil fatisfailant acette vieille coutume , ibarriva que
Corydale fie une raillerie fort téméraire lur J'Eucharjftie. Ce
fut en parlant à un Religieux qu'il rencontra, cherchant de
certains poiiTons nommez des Seiches , qui feuls font permis
aux Grecs pendant le Carême. Comme il le vitaiTez cnpeine,
parce qu'il n'en trouvoic point, il lui reprocha qu'il fehxtiguoit
inutilement J & que s'il vouloit prendre un vieux Toulicr qiù
eflroit auprès de lui & le bénir, iJ fe changeroiten Seiches ,
auffi bien que le pain & le vin après la confecration eftoiene
changez au corps & au fang de j. C.
Le Religieux ne répondit rien , mais eftant retourné au Pa.
lais Parriarchalavec plufïeurs autres que le Patriarche y avoit
menez pour les traiter, il demanda à Mcthodiusà prcfent dé-
pofé du Siège, fi la bcncciclion pouvoir Kiire d'un fouher un
poilTon , comme la confecrarion failoit du pain & du vin le
corps & le fang de J. C. mais la réponfe eftant que c'eftoit une
impieté de parler de la force, & une grande hardie/îè de faire
une telle raillerie ei prefencc du Patriarche ; le Religieux
qui l'a voie fait exprès, ann d'eftre entendu, dit q^ue Corydale
eftoic l'auteur de cette profanation.
RRrr
éS4 Liv. VIII. Preuves authent. de t union desEg. d'Or.
Il reullic dans Ion deflein : car le Patriarche eftanc inftruic
de la chofe s'informa le lendemain de quelques Métropolites
& Ofliciers qu'il aflembla, de ce qu'ils penioient d'un hom.me
qui auroit tenu un dikours de cette nature. Leur fentimentfuc
qu'il ne pouvoit eftre moins queCalvinide Ainfi l'on lit venir
Corydale qui eftoit alors dans la maifon Patriarchale , on l'in-
terrogea s'il avoit dit CCS paroles dont le Religieux l'accufoit,
& parce qu'il le nia en prefence de fon accufateur , & qu'il n'y
avoit point de témoignage fuffifantpour une entière convic-
tion , on l'obligea feulement de faire un écrit fur ce fujet , par
lequel il declaroit que fi on pouvoit le convaincre davoir
avancé une telle profanation , il vouloir fe condamner lui-mê-
me à fe retirer de Conftantinople. C'eft une condamnation
qu'il n'a pas feulement prononcée , mais qu'il a exécutée depuis
par fa retraite dans la Morée, voyant bien qu'il n'y avoit que
trop de preuves qu'il adheroit au Calvinifme.
L'ade de cette déclaration eflc inféré dans la çrrahde Eo;life ,
&)e feray mes diligences pour l'avoir , afin que la preuve foit
authentique, & que vous voyiez au jufte les termes qu'on a exi-
gez de Corydale3 mais quand je ne pourrois pas l'avoir , il me
lemble qu'eltant appuyé fur le récit d'un homme prefent qui a
efté Patriarche , ôc qui m'a fait cette hiftoire par occafion , la
vérité eft fuffifàmment établie.
,. Vous connoifïrez encore mieux l'efprit de Corydale, quand
vous fcaurez qu'il a étudié à Padouë en Philofophie fous le pre-
mier Rcgentde l'Univerlité de cette v'\\\e.r\omn\é llCremonino
qui efi: mort, comme je crois , & dont les écrits qui attaquoient
l'immortalité de l'ame , ont efté cenfurez par la facrée Congré-
gation. Il ne faut donc pas s'étonner qu'un difciple inft^ruit
dans cette Ecole , fe foie feparé de fon Eglife , qu'il fe foit atta-
ché à des opinions nouvelles, plutôt par intrigue que par aucu-
ne croyance qu'il en eût- Car s'il a eilé capable de croire fon
ame mortelle, il y a grande apparence qu'il n'avoit point d'au-
tre Religion que fon inrereft. Quoiqu'il enfuir^on laccufe d'a-
voir travaillé conjointement avec le Miniftre Léger à la profcf
fion du Calvinifme, qui a paru fous le nom de Cyrille Lucar.
Cette hiftoire éclaircit un endroit de M. Claude , oià il rap-
porte la lettre d'un Anglois nommé Bafire, qui contient ces
anjec l'Bghfe Romaine fur tEucharifiie. 685
termes : 7^ fç^y q^un certain Moine du nombre de ces faux Gréa ^f •^'^"''* '• 1
avoit fuit glifft'r le terme de tranjjubjiantiation dans fa Calcchcfe
que j'ay vke a Confiantinople ^ a.nljifut il -pour cela me7ne cenfurè
■pur les mêmes Grecs.
On avoir cru d'abord que le Catechifme, dont ce Bafîrevou-
loic parler elloic celui de Grégoire, qui contient en effet le ter-
me de tranffubftantiation.
Mais comme il ne paroift point qu'on ait jamais fait aucune
oppofition à ce CatechiTme^ il y atouteJorte d'apparence que
ce difcours regarde la Confeffion Orthodoxe, dont M. Clau-
de attribue la compofition à Meletius Syrigus , qui eftoit en
effet député de l'Eglife de Conftantinople au Synode qui fe
tint en Moldavie en 1643.
Et par- là on peut apprendre quelle créance on doit avoir pour
les mémoires des Calviniftes i car cette prétendue cenlure
n'eft autre chofe que roppofition téméraire d'unfeul Calvini-
fle caché, qui fut lolemnellement condamnée parlesEvêqiies
Grecs. Ainfi ces véritables Grecs fe reduifetit à un feul homme
complice de Cyrille Lucar, difciple d'un Athée, & qui defa-
vouë néanmoins le Calvinifme par une déclaration exprelfe.
CHAPITRE XV.
Seconde imprefjîon au Livre de la Confedion Orthodoxe. Approba.
tion nouvelle du Patriarche de Conjlantinople. Oriqjnal de cette
ConfeIJion envoyé au Roy en Grec ^ en Latin. Article de l'Eu-
charifiie en Latin.
o
N en eftoit juftementà l'impreflion de cesAcftes &: Ac-
teftations de l'Eglife Grecque, lorfque le Secrétaire de
MonfieurrAmbad'adeureftant arrivé de Conllantinopleà Pa-
ris, pour apporter à Sa Majeflé la Ranhcation dei Trairez
conclus avec la Porte, a apporté en même temps les Oric;inaux
de plufieurs atteftations authentiques que les Patriarches d'O-
rientavoient prié M. l'AmbafTadeurde faire prefenter au Roy
pour la juftification de leur loy contre les calomnies des Mi-
niftres Calvmîiles. Il y avoir parmi ces atteftations un ManuC
crit magnifiquement relié , dont le lîeur Panajotti faifoit pre-
Tent à Sa Majeflé , pour eflre confervé dans fa Bibliothèque ,
R R r r ij
686 Liv. VI 1 1. Vrewv€s amhen. de Funion d^s fg. d'Or.
S.-C fervirà jamais de témoignage de laFoy de l'Eglife d'Orient.
Cemanufcriteft l'un des Originaux delà Coni^eflion Ortho-
doxe, lleft figné parle Patriarche de Conftantinople, par plu-
fîeurs Evêques & divers Officiers de l'Eglife de Conftantino-
ple. Mais au lieu que les Exemplaires imprimez ne font que
Grecs, ce manufcrit eft Grec-Lacin, le Latin n'étant pas moins
Original que le Grec.
On y a mis à la tefte une nouvelle Approbation de Diony-
fîuSj qui marque que le Sieur Panaiotti en a fait faire une fécon-
de Edition à la prière de ce Patriarche, & que ce Seigneur en a
diftribué de même gratuitement les Exemplaires dans tout
l'Orient. Voici cette atteftation.
jDEKJS PARLA MISERICORDE DE DIeV
Archevêque de Confiantinople la nouvelle Rome ^
^ Patriarche Oecuménique.
CEux qui s'appliquent continuellement , & qui font leur
étude jonrnaliere des faints Livres, en retirent aiîèuré-
ment un fruit de faluttrés-confîderable. Car elle eft comme un
chemin où on ne fe peut tromper, qui conduit d'une manière
furnaturelle ceux qui courent droit à la Gloire éternelle ,6c qui
leur donneuneheureufefin,puilque iélon l'Ecriture celui-là eft
heureux qui s'occupe nuit & jour dans la loy du Seigneur.
C'eft pourquoi confiderant que la ledure de cette docftrine
Orthodoxe peut eftre fort utile, quiayanteftécompoféeil y a.
qvielques années par des Docteurs Orthodoxes, approuvée^re-
cûc &: confirmée par les vénérables Patriarches qui nous ont
précédé, & imprimée quelque temps après par les fouis , le rra.
• vail & aux dépens du très- fage& très Orthodoxe Seigneur Pa-
najotti Premier Drogman des Empereurs d'Orient & d'Occi-
dent, Tiôtre très cher fils fpirituel plein de pieté & d'un zèle
4ivin, avecune fagefle extraordinaire, on en a diftribué gratui-
tement de Exemplaires de tous collez aux Chrétiens pour l'u-
tiUtc commune ; & que tous les Exemplaires ayant eftéem-,
ployezà cette diftnburion qui en aefté faite, piufieurs perfon-
ncsqui demandent tous les jours avecempreôeraent une pièce,
.fi utile n'en peuvent avoir , nous avpns crû qu'il eftoit de nôtre
devoir de foigner à cela , &; de follicirer ce même Seigneur de
fuppléer à ce défaut par fa bonté ordinairej&t d'y remédier par
unjec ÎEgllfe Romaine fur fEuchariflie. 6Sj
une féconde impreffion , lui reprefentant qu'il s'acquerroic par
là une réputation , non feulement égale à celle qu'il a déjà par
toute la terre ,&qui n'eft ignorée deperfonne , mais une meil-
leure & qui la furpaiîe de beaucoup , quieft celle par laquelle
les belles actionsdeviennentimmortelles. Et comme il a un zè-
le ardent & une paffion tres-grande du bien public, i! n'a pas né-
gligé noftre confeil , mais au contraire il l'a aufli-toft exécuté
avec l'aide de Dieu , Se par une féconde impreiîîon , a donné
de nouveau aux fidèles un nombre confîderable de livres^ ren-
dant ainfi un fervice important à celui qui en eftoit l'auteur ,
en ne laiflant pas obfcurcir fon ouvrage. Car le Sieur Meletius
Syrigus Docleur de la grande Eglife a travaillé avec beaucoup
de fom,par ordre du Patriarche & du Synode, à revoir &: à met-
tre en ordre ce prefent livre. C'efl: pourquoi, Chrétiens Or-
thodoxes, recevant ce livre de la Dodrine Orthodoxe favora-
blement comme pieux & utile aux ames^ rendez en grâces k ce
commun Bienfaci:eur,& confervezlefansen négliger jamais k
leclrure faluraire ,car on trouve la vie éternelle dans la médita-
tion des Saintes Ecritures, laquelle je fouhaire que nous ac-
quérions tous enjEsus- Christ Notre Seigneur, à qui /oit gloi-
re dans tous les fiecles. Ainfi foie il. L'an 1672. au nîois de
Juillet , ïndicl:ion5.
Sein du Patriarche,
Denis de Constantinople.
Mais comme cet Original efl en Grec 8c en Latin , J'ai cru
que s'il eftoit inutile de rapporter le texte Grec , qui efbnt en
langue vulgaire feroit entendu de peu de perfonnes, il ne le
feroit pas de rapporter ici en Latin ce qui y eft dit de l'Eu-
chariftie , qui a déjà efté cité en François dans la rcponfe ge,
nerale.
QJJ^STIO C. V. I.
Quodnam Jît tcnium Afyfierium ?
Rcfponfuiti.
Efl Euchdrifli.a flve corpus ^ fdH'Ziiis Chrifii T)or,iiyn fuhfpecie
fanis Q- vini , & realts pr^cfeniia. Hoc Sucramentuyn excellit aliis
(^ mugis conducit faliiti avima nofty^ ^ in hoc enim Sacramento
omnis gratia O' bonis Chrijîifidclibusfnanifeflaturijj- pr.vfentaiur.
RRrr iij
Ch. XIV.
688 Liv.VIII. Preuves authent.de tuniondes Eg, d'Or.
D^NS LA QV eSTION SVIVANTE.
Animaâvertendum efl ut Sacerdos haheat talent intentionem ,
quoi ip fa vera (ubfiuntia panis ^ fubjlantia. vint tranffubfiantien-
tur in verum corpus ^ funqutnem Chrifii , per operationem Spiri-
tiis Siincii , cujus invocationem facit tu7n temporis ut perficiat My-
fierium hoc ornndo (^ dicendo^ mitte Spintmn Sancium in noi ^ in
hac prxpofita dona^ ^fac hune fanem pretiojum corpus Chrifii tui i
quod autcm efl in hoc calice pretiofum fanqtiinem Chrifii tui , tranf-
7nutans per Spiritum tuum SanHum. Statim enim ad ha:c verbafit
îrav.ffubfiantiatio , ^ tranfiubfiantiantur panis in verum corpus
chrifii ^ vinum in verum faniuinem Chrifii , remanentibus folùm
fpeciebiis vifibilibtcs , ^ hoc fit fecundum divinam difpofitionem
propterduo. Primo , nevideamus corpus Chrifii , fedcredamus illuà
ejfc propter verba prolata à Chrifio Domino^ Hoc efl: corpus meum,
O' Hic efl; fanguis tncws^plufijuam fenjîbus nofirts. St quidemfro
hoc protnifit nobis beatitudinerrt dicens , beati qui non vident ^ cre-
dunt. Secundo , quia natara humana abhorretufum viva carnis, ^
quoniam débet homo uniri Chrifio Domino per communionem car-
nis chrifii Domini ^ fanyiinis Chrifii Domini. Ne igitur abhor-
reret , confiituit Dominm dare carnem fuam (^ fanyuncm fuumin
efum ^T potum fub fpecicbiis panis ^ vini. De quo Divi Damafce^-
ntis ^ Gregorius 1>7 ajfentts fufius difputant.
DE EJ^HIBENDO MONO RE QVJ DEEETVR
huic Myfierio tanquam ipfiChrifio.
Quemadmndunt SanEîus Petrus de illo ore omnium Apofiolorum
dixit : Tu es Chrifius Filius Dei vivcntis , ita ô" nos dicifnus cultu
Zatri^e, Credo Domino , ^ confiteor quodtu es Chriftas Filius Dei
vivi. Efi etiam id Myfierium Sacrificium pro vivts ^ defuniiis iis
qniin fpe refurreBionis mortui funt , quod Sacrificium ad extremum
jtidicium non ccffabit.
Il y a à la fin du Manufcric un ade Je legalifation de M.^
l'Ambafladeur, qui reijd témoignage de la vérité de ce que j'^ay
rapporté. En voici les termes.
N
a^vec ÏEgliJe Romaine /ûr tEUchiinfiie. 6S9
Ous CharlesFrançoisOlier de Noincel, Confeillerdu Ca. XIV.
_ . Roy en Tes Confeils , en fa Cour de Parlement de Paris ,
& Ambalîadeur pour Sa Majefté Très. Chrétienne à la Porte
Otthomane j certifions & atteflons que le prefent Manufcrit
Latin &: Grec, intitulé la Confelhon Orthodoxe de l'EoJile
d'Orient j nous a efté mis entre les mains par le Sieur Pana-
jotti premier Interprète de la Porte, qui nous ayant afiuré qu'il
ferviroit puiflammentàétablir la vérité duLivredu mêmetitre
'imprimé par lés foins, puifqu'il en eft l'un àts originaux , &;
que les fîgnatures originales des Patriarches s'y trouvent,nous
a priez par le zèle de venger fon Eglife des outrages qu'on iuy
fait , de faire enforte que Sa Majefté ait la bonté de l'agréer
pour la confufîon de ceux qui en voudroient douter. Et comme
il s'eft fait un point de confcience & d'honneur,à l'imitation àas
Patriarches & Prélats de fon Eglife, de mettre le fait contellé
dans toute l'évidence poffible, il nous envoya l'année paiTce
une approbation de ce même Livre par le Patriarche Denis
tenant alors le Siège de Conflantinople, que nous avons mife
à la tefte de ce Manufcrit. Toutes ces veritez eftantconftantes,
nous nefaifons pas difficulté , afin que perfonne n'en doute,
de les confirmer par noftre fignatiire& fceau de nos armes, 6c
lecontre-feing de notre premier Secrétaire.
Donné à nôtre Palais fur le Canal de la Mer Noire l'onzié"
me Septembre 1673.
OlierdeNointel. -
AmbafTadeur pour Sa Maiefté à la Porte Otthomanc.
Parmondit Seigneur,
Le Picard.
wm
m^"^
690 Li V. VI H. Frewves authen. de l* union des Eg. d'Or,
CHAPITRE XV.
Union de, l'Eglife Grecque avec l'Eqlife Romaine fur rEucha-
rifiie éprouvée par l'Acie Synodal fait far le Patriarche de Je-
rufalcm , ^ toute [on EZ^life contre les calomnies des Calvi-
nifies.
Quelque considérables que foient les Aâ:es qui ont eflc
produits jufqu'ici, on peut dire que celui dont nous al-
Ions rapporter l'Extrait a quelque chofe qui mérite d'eflre par-
ticulièrement confideré. C'efl: un Patriarche qui y parle avec
grand nombre d'autres Evêques,qui entreprend lui même la
défenfe de l'Eglife Orientale , &qui ne le fait pas feulement
entendant témoignage de fafoy, & en condamnant les Cal-
viniftes, mais auflî en éclairciflant les principaux faits , dont
ils ont prétendu abufer, & principalement ce qui regarde Cy>
rille Lucar. On y voit le peu de fondement de l'avantage que
les Calviniftes ont voulu prendre des articles qu'ils avoient
tirez de lui ^ la diffimulation perpétuelle de Cyrille 5 combien
l'Eglife Orientale a toujours efté éloignée de participer à fes
erreurs, & enfin la vérité des deux Synodes tenus contre lui,
que M Claude a traitez de fuppofez par une témérité dont il y
a peu d'exemples.
Tout cela efl: contenu dans un Livre manufcrit adreflé à Sa
Majefté même par le Patriarche dejerufalem^ poureftre mis
en fa Bibliothèque , où ceux qui le voudront voir le peuvent
faire..
EXTRAIT
tt^ec ÏEglîfe l{omaine fur lEuchmftie. égr
EXTRAIT LV TRAIT TE' SYNODAL COMPOSE' PAR
le Patriarche de Jerufilem, ^ far [on Synode^ intitulé^
Bouclier de la Foy Orthodoxe.
Ou Apologie contre les hérétiques Calvini/îes qui accufent /'£-
^life d Orient d'avoir des fentimens femblables aux leurs fur
Dieu ^ les chofes divines.
Compofèe far le Synode de Jerufalem^ fous le Patriarche 'Djfithèe.
Le Froloyie ne contient autre chofe que l'entrée du. difcours : vers
la fin il y a cecy,
NOuseftancdonc aflemblez parla grâce deDieu pour la
Dedicacedela Ste Eglifede Bethlcem , lieu de la naifl
fance , félon la chair , de J. C. noftre Sauveur & noftre Dieu,
que le Seigneur a permis qu'on rebâcift dans ces temps mife-
râbles de perfccution : & qu'il fût donné, embelli de nouveau,
aux véritables enfans de l'Eglile Catholique par toute la terre,
s'eftant trouvé avec nous plufîeurs PreflreSj Religieux , &
autres Chrefliens venus en dévotion des extremitez de la terre,
nous avons cru que nous devions dire en abrégé noftre fen-
timenc fur les chofes donc on accufe l'Eglife Apoflolique ,
noftre mère nourrice,afin de rendre manifefte à tout le monde
la foy que noftre Seigneur a lailTée par tradition ^ que les
Apoftresont prefchée, que les faints Pères ont gardée^Sc que
rimpofture des adverfairesfoit reconnue d'une manière con-
vaincante.
Il faut donc f(^avoir que ces hérétiques ne fçachant point
les opinions de l'Eglife Orientale fur Dieu & les chofe divines,
l'accufenc exprés, pour tromper par là les plus ilmples Car
s'eftant déjà feparez des Occidentaux, & ayant enfuite re-
noncé à toute l'Eglife , ils font évidemment convaincus d'ef.
tre hérétiques, & même les principaux chefs des heretiquesi
ayant non feulement introduit des dogmes nouveaux &: ridi-
cules, fi on peut néanmoins appeller dogmes, de pures fa-
bles^ mais n'ayant aucune communion avec l'Eglife .....
L'Eglife d'Orient n'a point d'autre fentiment, & d'autre
<JD<f^rine que la parole de Dieu, crue de la manière qu'il faut, bc
expliquée par les Saints Pères d'une manière pieufe,& lestra-
S S lï
Ch. X V,
6<)iLiv.Vlîl. Prewves authm. de l'union des Eg^d'OK
ditions que les Apoftres ont lailTees de bouche,&; que les Pères
ont gardées jufqu'à nous. Au lieu que les hérétiques, s'arref-
tant, comme il leur eft ordinaire, à leur propre rentimentfonc
fourds , èi. ne reviennent point au bon chemin. Mais de peur
que le temps ne nous manque. Ci nous rapportions les paflages
de l'Ecriture & des anciens Pères fur ce fujet,nous nous con-
tenterons de ra{.-porter là deflus ce qui s'eft pafle parmi nous.
Cinquante ans après Luther, Martin Crufius, & quelques
autres fçavans Luthériens de Tubinge en Allemagne , envoyè-
rent des articles de leur herefie à celuy qui gouvernoit pour lors
l'Eglife de Conftantinople, afin de voir, comme ils difoient ,
«.'il eftoient dans les mêmes fentimens que l'Eglife d'Orient.
Ce célèbre Prélat leur écrivit trois fois ayant compofé des
difcours contre eux, ou plikoftdes traitiez dogmatiques, où il
refutoit routesleurs herefies d'une manière orthodoxe Si theo-
Iogique,&: leur enfeignoit toutes les opinions qui fe font depuis
tout temps confervées dans l'Eglife d'Orient, à quoy néan-
moins ils n'eurent aucun égard ayant renoncé à la pieté. Le
Livre eft imprimé en Grec ôc en Latin à Vvittemberg l'an
J584.
Devant ce Patriarche "^eremie, Jean Nathanaël PreltreSc
Econome de Conftantinople dans fon expofîtion delà Litur-
gie, &: après luy Gabriel Severe Archevefque des Grecs de Ve-
nize dans fon petit traitté desfept Sacremens de l'Eglife, ons
rapporté fort clairement les fentimens de l'Eglilé d'O-
rient.
Et non feulement ceux-là , mais encore plufieurs autres ont
écrit de ce mcnie iujet depuis peu de temps, comme nous le
rapporterons quand il en fera temps.
Il y a fix ou fept ans que Ton a imprimé un livre intitulé, Co«-
fc,IJîon Orthodoxe de l'Eglife Oriennale , compofé par Pierre
Mctropolitain de IQaibe^ de mis en ordre & éclairci( y ayant
quelques endroits qui avoient befoin d'éclairciflement) par
Melece Syrigus Protofyncelle, &. Dodeurde la grande Eglife
de Confbantinople, par l'ordre du Concile tenu à '^afium. Tou-
te l'Eglife d'Orient la reçut alors & la reçoit abfolument, &
le très b.")n, tres.illuftre & tres-fage Seigneurie Seigneur Pa-
najotti, Drogman Bacchi du grand Seigneur , extrêmement
zélé pour la pieté, l'a fait imprimer conformément à l'Original
fans y rien ajouter ou diminuer.
»
mec ÏEgVîfi Romaine fur VEuchariflie. 693
Puifque nos adverfaires Tçavenc donc coures ces cliofes, & que Ch. X V.
îaplurparcde ces livres font imprimez chezeuxj venant après
à nous accufer, il efl: clair , que ce n'eft pas qu'ils ignorent
nôtre foy, mais quec'eft par une grande impudence qu'ils
tâchent, pour furprendre les plus iîmples, de nous attribuer
des chofes qui ne nous conviennent point.
Mais on leur peut bien dire, ce qui eft vray, que la vérité
cft fimple, au lieu quelemenfonge eft tout au contraire.
C'eft pourquoy ces gens fe doutant bien que le menfono-e
qu'ils avoient fait à plaifir eftoit appuyé fur un fondement
pourry,ils ont recours à une autre entreprife très- pernicieufe
Se auflî mal fondée. Car, afin de n'cftre point convaincus par
tout ce qu'il y a de Chreftiens en Europe, & pour n'eftre
point condamnez comme des impofteurs publics par ceux
d'Orient, ils oppofent Cyrille Lucar natif de Crète, Pa-
triarche de Conftantinopleil y a quarante ans, comme ayant
donné une efpece de Confefîion en 18. chapitres, &: quatre
interrogations, au nom de l'Eglife d'Orient, qui montre que
cette Eglifê eft dans les mêmes fentimens qu'eux. Mais cette
invention eft aulTi facile à détruire, &: eft auffi impofîible que
les autres, quoy que ce foie la plus grande dont ils fe foient avi-
fez. Car on montrera avec l'aide de Dieuj
Premièrement que jamais l'Eglife d'Orient n'a connu Cyril-
le pour tel que nos adverfaires difent qu'il eftoit, & n'a jamais
connu ces chapitres comme fon ouvrage.
Secondement, que fuppofé même qu'ils fufîènt de luvj il
lésa donnez tout à fait en cachette, fans qu'aucun des Orien-
taux, 6c bien moins de l'Eglife Catholique, en euft connoif.
fance.
Troifiémement que la confelîîon de Cyrille n'eft point la
confefîion de l'Eglife d'Orient.
Quatrièmement , qu'il eft impoffible que les Orientaux
ayent eu connoiflance de cette confefllon, ou que le (cachant
il eft abfolument impoffible qu'ils fuilenc Chreftiens.
Cinquièmement, que les Orientaux ont toujours eu tant
d'horreur de ces chapitres , qu'on a fouventveu Cyrille pro-
teftercontrej& enfeigner le contraire dans l'Eglife^èc que feu-
lement à caufe qu'il n'avoit pas écrit contre ces chapitres, il
avoir eftc frappé d'excommunication & d'anathême dans deux
Conciles fort nombreux.
SS ffii
694 Liv. VH I. Preuves authen. de l'union des Eg, d'Or.
CHAPITRE PREMIER.
TOut homme qui voudra agir de bonne foy reconnoiflra
obfolumencque jamais Cyrille n'a efté connu dans l'E-
glife d'Orient comme cftant dans les fentimens desCalvini-
ftes. Car ayant efté patriarciie d'Alexandrie après Melece,&
élu enfuite par le Clergé de Conftantinople, où il fe trouvoit
alors, il fur transféré à ce Siège, fans avoir enfeigné dans au-
cun Cond'e, ni dans l'Eglife, ny dans la maifon d'aucun Or-
thodoxe , en un mot ny en public ny en particulier, ce que les
adverfaires luy attribuent. S'ils difent que Cyrille ait dit quel-
que chofe de cette nature à quelqu'un en particulier, ou à plu-
fîeurs,ils ne fçavent ce qu'ils difent. Il falloit, s'ils vouloient
porter témoignage, ne le pas faire d'eux-mêmes; parce qu'aine-
fï nous les convainquons qu'ils le calomnient, 8c que n'ayant
point connu Cyrille, ils ne font point dignes de foy^ mais fe
îervir du témoignage de ceux qui ont connu Cyrille, dont il y
en a encore dix mille en vie. Ceux qui ne 1 ont jamais veuaflu-
rent qu'il eftoitdans leur herefie, & ceux qui l'ont fervi pen-
dant 1 cfpace de plufieurs années, & qui ont veu tout ce qu'il
faifoif, déclarent qu'il n'eftoit point tel.
r. On ne voit point aucun écrit de fa main, qui ne foit fuf-
ped, &C qui foit conforme à ce que témoignent ces a-dverfai-
1. Nonfeulement nous avons plufieurs témoins qui confef
fent que Cyrilk profeiToit publiquement les fentimens de pic-
té^& qui ne luy ont jamais entendu rien dire d'heretiquej mais
encore nous avons un 2;rand livre écrit de la main de Cvrille,
dans lequel on voit les homélies qu'il a prechéesàConftanti-
nople les Dimanches & jours de Feftes^ &: qui contiennent des
chofes tour à fait contraires à ces chapitres luppofez, dont nous
rapporterons quelque chofe pour donner une certaine afluran»-
ce de ce que nous difons,
// y a en cet endroit quelques paffages tiret^ de ces homélies
de Cyrille^ contraires à ce qui eji contenu dans chacun des Articles
de la confc,ffîon de Cyrille Lucar. Koicy ceux qui re^irdent l'Eu-
s harifiie.
Contre le dix-feptieme chapitre, de l'hoinelie fur le vaifleau
agité au milieu des flots.
î
avecTEglife Konmine fur ÏEuchmfiie. 69 j
Quand vous recevez la Cemmurion que voyez- vous Z Cm. XV.
Du pain êc du vin i Ne diftinguez-vous pas ? Vous voyez un
phantôme , fi vous n'en regardez pas davantage. Mais fi vous
ouvrez vos yeux intérieurs . ôc que vous voyez le Seigneur ,
vous reconnoiflez là la chair du Seigneur. Vous voyez aujour-
d'huy comme les Dilciples. Ils virent comme unph antôme,ik;
ils virent auffi en vérité. Quand ils virent comme un phantô-
me, ils furent troublez; quand ils virent en vérité, ils reconnu-
rent , êc ils furent confolez & furent délivrez de la tempefte,
le navire fut fauve, & eux avec le navire.
Dans l'homélie fur l'Evangile des cinq Pains: Le Seigneur
rompit du pain trois fois i la première dans la Cène myftique
en faint Luc 22,. où il nous ordonna de recevoir la puifiance
infinie de la Divinité dans la tranfiubftantiation du pain,
CHAPITRE IL
LE chapitre fécond prouve que fi Cyrille e(l fappofè cjîre fau-
teur de ces chapitre s ^ il les a faits en cachette y fins que pe r-
fonne des Orientaux en eufi connoifjance.
Le premier chapitre eft clair, par ce que nous avons dit. On
prouve celuycy par quelques autres chofes ineonteftnbles.
Car s'il les avoit faits publiquement, il s'en feroit enfuivi ne-
cefl^iirement trois choies, entre autres?
Premièrement, qu'ils euflent efté fignezpar lesPrelats îv au-
tres Ecclefiaftiques qui demeuroient avec luy,qui demeurent
toujours avec le Patriarchc,êc qui font tout avec luy (l'ancienne
Rome les appelle Cardinaux. ) Mais les accufateurs ne le peu-
vent montrer en aucune manière. Car aucun des Prélats &: Ec-
clefiaftiques ne connoiflent, ny n'ont figné cts chapitres, &: n'en
ont mêmejamais entendu parler à Cyrille.
Secondement, ils euficnt efté tranfcrits dans le livre de la
grande Eglife,& cette copie euft efté fignée par les mêmes qui
avoient figné l'Original. Car tout écrit concernant la fcy, ou
quelque autre affaire Ecclefiaftique, qui eft fait par le Patriar-
che & pafi^e pour un ade fynodique & drelTé par délibération
fynodalc,eft infère comme tel dans ce livre. Mais les chapitres
SS ff iij
<j96 Liv. VIII. Prennes authent. detumon des Bg.d'Or.
qu'on die eftre de Cyrille ne font point tels, puifque non feule-
ment on ne les a point inférez dans ce livre, mais encore par^e
qn'il n'y a que fort peu d'Evêques & d'Ecclefîaftiques qui jufl
ques icyen ayenteuconnoiflànce, tant s'en faut que le peuple
an ait au cune.
Troifiémement, il faudroit qu'ils euflènt efté tranfcrits dans
le livre par quelqu'un des Ecclefiaftiques. Mai au contraire
aucun des Ecclefiaftiques ne les a tranfcrits dans aucun livre de
la grande Eglifc ni aucun autre; comme au contraire on voit les
ades Synodiques &; les autres concernant la foy, principale»
ment les adles du Seigneur Jeremie contre les Luthériens,
qui font couchez dans le grand livre avec le nom de l'EccIe-
iîaftique qui lésa écrits,qui eft Théodore Zygomale le grand
Retheur. La vérité de ce que nous difons paroiftra de là claire
comme le Soleil. Car fi Jeremie écrivant en particulier aux
Luthériens, &nonSynodalement, mais lui feul, afin de rendre
ce qu'il écrivoit digne de foy, &; hors de coure reprehenfion,
crut en devoir mettre une copie dans ce livre & les faire figner
enfuite par le grand Retheur3 comment Cyrille faifant une
confellîon 6c parlant au nom de l'Eglife d'Orient, n'a t il pas
eu foin de les faire tranfcrire dans ce livre, ni de les faire figner
par aucun des Prélats ou Ecclefiaftiques, ni par aucun autres
Cela fait voir qu'elle a efté faite en cachette.
CHAPITRE TROISIE'ME.
L eft auffi évident que cette confeffion de Cyrille ne peut
eftre la confeffion de l'Eglife d'Orient, & que perfonne ne
le peut dire fans eftre fol, & tâcher de contredire les chofes
les plus évidentes. Car 'à ce Cyrille eftoit, comme on dit , aC
furément & véritablement hérétique, qu'il ait compofé cef-
dits Chapitres, & qu'il ait enfeigné à^s chofes en public, &
qu'il en ait cru d'autres dans fon cœur, il a écrit & cru contre
fa confcience& non pas contre l'Eglife d'Orient qui eft proté-
gée par le Saint Efprit.Quelesadverfairesne tirent donc point
avantage d'un trompeur 6c d'un vray athée, puifqu'on peut
ainfi appeller un homme qui fe joue de Dieu, ayant dans le
cœur d'autres fentimens que ceux qu'il confefioit de bouche,
fe jouant dans des chofes où il n'y a point de jeu. Que s'il a
écrit de la part de l'Eglife d'Orient, qu'eft- ce que cela nouj
{
a'VecÎEgU/è Romaine fur VEuchmdie. 697
regarde.^ Qu'il rougiiîè le menteur, auffibien que tous ceux Ch. a V,
€jui s'arreftent à ce menfonge évident comme à une vérité. *
CHAPITRE QUATRIE'ME.
ON peut voir clairement de tout ce qui a efté déjà dit, que
TEglife d'Orient eft au delfus de toutes les calomnies que
ces adverfaires ont in\ entées contre elle , & qu'elle n'a jamais
fait ou cru ces chapitres de Cyrille, & la dotftrine impie qui y
eft contenue. Car elle eft fort éloignée de n'cftre pas fortemenc
appuyée fur la foy des Apoftres &: des Prophètes, &: d'eftre agi-
tée parles vents, comme des nues fans eauj puifqu'elle a pour
maiftrc Se pour guide le S. Efprit,
Nous difons qu'il eft impoffible que l'Eglife d'Orient ait cruce
qui eft compris dans les Chapitres de Cyrille, bc que ft elle l'a-
voitcru,il feroit impoffible qu'elle eût de paix avec Jesus-
Christ. Il paroift clairement que le premier eft vray. Car il
falloir que lesOrientaux, s'ils eftoient tombez dans cette extré-
mité que leur impotent leurs adverfaires^ témoignaftent leur
foy non pas par de fimples paroles, mais par des effets. Et pre-
mièrement il falloit qu'il donnallènt une confeffion par écrit
avec toutes les qualitez qui font marquées dans le troifiéme cha-
pitre. Secondement qu'ils renverfaiîent tous les degrez du Sa-
cerdoce, èi. principalement la différence de l'Epifcopat avec les
autres degrezj de forte que les Evefques ne fuiîent point diftin-
guez des preftres, comme la confellion de Cyrille pleine de fo-
lie le fait obfcurement entendre. Mais cela n'eft point arrivé
aux Orientaux^ ni cela ne leur arrivera point avec la grâce de
Dieu nôtre Sauveur , puifque jufqu'à prefent les dtgrcz du
Sacerdoce font diftinguez réellement parmy eux. Donc les
Orientaux n'ont point ajouté foy à la folie de Cyrille.
Il falloir anlîl qu'ils n'euifent point fept Sacremens, & qu'ils
oftalTent des EsiHfes 8c Oratoires le*; S^" Imagesi qu'ils ne fîf-
iènt point le figne de la croix vénérable, qu'ils n'honorallenc
point les Reliques des SaintSj qu'ilsne leur fiftent point des
Fêtes 5 qu'ils neleur chantalfent point d'hymnesi qu'ils s'ab-
ftinfent des mémoires & bonnes œuvres pour les morts, & de
faire l'Office des faints Myfteres comme veulent les adverfaires
mêmes.
Mais jamais les Orientaux n'ont rien fait defemblable. Car
6<)% Liv. VIÏI. Preuves authen. de l'union des Eg. d'Or.
îion Seulement ils confeflenc lîmplement qu'il y a lept Sacre-
mens, mais ils font tousses jours landifiez par leur moyens &
non fcrulement il n'y a point d'Oratoires, mais il n'y a pas même
de maifon particulière de Chreftiens où il n^y aitdeiainte>Lna-
ges Se des lignes de la croix vivitîance^qu'ils ont toujours con-
tre les démons comme une arme à laquelle ils ne peuvent re-
fifter. Ils honorent tellement les faintes Reliques,que dans tou-
tes les maladies, ils s'en fervent comme de médecin, 6c les ho-
norent comme des Serviteurs de Dieu, comme témoignent les
livres du Paracliticon^ Triodion ^ Martyrologes ^ qu'on chante
tous les jours chez eux. ils ont de fi bons fentimens (ur les mé-
moires, que toûjours,& principalement chaque Samedy& jours
de feftesjils offrent à Dieu le Sacrifice non fangiant pour rou-
tes les âmes des Chreftiens vivans &: morts , appaifant Dieu
par des aumônes & des offrandes. En un mot les Orientaux
iont fi peu attachez à la foy de ces chapitres, qu'ils y (ont com-
me on a dit diretflement oppofeZj ne s'éloignant en rien, non
pas même dans les moindres chofes, des traditions des Apôtres
&des Pères. Il eft donc impcfFible que les Orientaux ayenç
connu laconfelfion de Cyrille.
Il faut enfuite venir à l'autre partie qui cfl , que Ç\ par hazard
il faut accorder que les Orientaux ayeut jamais cru ce que les
ennemis veulent ,il eft impoffible qu'ils foient Chreftiens. Car
il y a trois chofes principales qui conviennent necefîairement à
celuy qifii croit; la foy du cœur exempte de doute pour la jufi:!-
ce, la confefTion de la bouche pour le falur, & le fruit de Fa foy
& de la confertîon,qui font les œuvres de la vie Chreflicnne
agréables à Dieu.
Les Orientaux donc, croyans comme prétend la confefîion
de Cyrille, ne l'ont pas cru par leurs paroles, ayant jufqu'à pre-
fent confeffé tout le contraire de ces Chapitres.
Ils n'ont pasaufli de rciîemblanceavec lesCalviniftes paries
çeuvres,commeon a dit cy-deflus.C'eft donc du cœurfeul qu'ils
font d'accord avec les hérétiques, qu'ils ont compofc la foy de
ces chapitres. Car nous voulons bien faire ces fuppofitionsqui
paroilîênt peu ferieufes pour réfuter en cette manière les im-
pertinences des Calviniftes. Si cela efl: vray, il efl: impoflible
qu'ils foient Chreftiens, puifque celuy qui croit une chofe dans
le cœur, & qui en confefle une autre de la bouche & parfes œu-
vres, tel qu'on fuppofe qu'a efté Cyrille, eft digne tres-affuré-
menc
I
a.'vec ÎEglife %omànefurTEucha.rijtie. 699
ment non feulement de la participation avec Jesus-Christ, C h. XV.
mais auffi du nom de Chrétien. Car ainfi Judas quicroyojt,&:
qui paroiircit un Difciple en public , & qui dans le fond eftoic
un trailtre , a efte précipité dans le feu éternel.
Que fi pour quelqui's empêchemens les Orientaux n'ont
pu communiquer de bouche, ni même par les œuvres aux Cal-
viniftes , au moins r>e dévoient ils pasj ayant le cœur de leur
côté , s'emporter contr'eux d'une manière impitayable ; mais
ils le font d'une telle manière, que le premier Dimanche après
l'onzième d'Odobre, Scie Dimanchedu Carêmequ'ils appel-
lent ôp^oJ'u^/its , ils prononcent anathême contre les Ii onoma-
ques , 6c ceux qui difent que le pain & le vin de l'Euchariftie
ne font pas réellement & véritablement changez après la con-
fecration au véritable corps &: fang de J. C. mais par image,
iîmilitude , figure , ou métaphore.
Il y a en cet endroit des Anathèmes tirez^ de ce qui fe dit dans
les Dimanches marquez^ci-âefjiis.
A ceux qui difen t que le Sacrifice qui eft offert toas les jours
par ceux qui ont reçu de J. C. la puiflance de célébrer les
Éiints Myfteres, n'eft pas offert à la Sainte Trinité , comme
eftant en cela contraires aux Saints Pères.
ânathe'me trois fois.
'A ceux qui écoutent la voix du Sauveur difânt de la célébrai
rion des divins Myfteres qu'il a laiflce par tradition: i^^/ze^rd'/^
en memaire de moy ^ mais qui ne prennent pas bien ce mot de
mémoire , & qui concluent delà que ce facrifice eft différent de
celui que le Sauveur célébra lui même au commencement, 6c
qui le rapportent à celui-là d'une manière figurée êcimaginaire^..
comme rendant vain le Sacrement de la divine & terrible Li-
turgie , par lequel nous recevons le gage delà vie future: faint
JeanChrvfoflofne,ce divin Pere,expliquan: iibien l'immurabj-
lité de ce Sacrifice , &difantdans plufieurs de fes explications
fiir faint Paul que c'eft un feul 6c un même.
An A THE* ME TROIS FOIS.
Il efi dit enfuitc , que fi quelque chofe eilt empêché l'E'-
glifed'Orienc de témoigner extérieurement ce qu'elle avoit
TTic
700 Liv. yill.PreuvesAurhen.de l'union des Eg. d'Or.
dans la cœur , ce ne pouvoir eftre que la crainte. MaJs qu'il y
avoii beaucoup de Pays , comme ribcrie , la C(dcl)ide'& Min^
grelie , la Molcovie , Rulîîe , Pologne , Sec. où il y avoic un
grand nombre de Chrétiens enfans de l'Eglifè d'Orienr , com-
me aufll à Vcnife & dans l'Archipel, dans l'Afie, dans la Perfe,
qui n'eftoicnt point fujets du Grand Stigneur,&: qui cependant
avoicnt la même croyance. Que s'il eftoit permis u'eftre Chré-
tiens de cœur feulement , & qu'on pût profelTer de bouche
une autre Religion, ils pourroient faire femblant de profefTer
celle des Empereurs à qui ils font fournis, mais qu'au contraire
ils foufFrent, & ont toujours foufFert de grandes perfecutions ,
& la mort même pour la défenfe de leur foy. Enfuite il conclut.
Puis donc qu'il n'y a rien qui empêche les Orientaux de
croire &: de confeiTer ce qu'ils veulent, il eft impoffible qu'ils
ayent jamais cru d'autres chofes dans leur cœur , que ce qu'ils
ont témoigné & confefle débouche. Ils croyent feulement 6c
confefTent ce qui eft cru de toute antiquité par l'Eglife Catho-
lique , pour laquelle ils fouffrent la mort avec joye , & ainfi
font fort au deffus des calomnies de leurs adverfaires.
CHAPITRE V.
On feulement il cftimpoffible que les Orientaux ayent
jamais efté dans les mêmes fentimens que les Calvini^
ftes de quelque manière que ce foitj mais encore outre ce qu'ils
font tous les ans en rejettant les Iconomaques, & ceux qui
nient les faints Myfteres , n'ayant de foy que dans leurs paro-
les , ils ont encore par deux fois efté animez du zèle de Dieu
Tout puifTant dans les Synodes tenus contre Cyrille. CarCy-
Dcciaration j[\\ç^ ayant vêcu fix ans après l'impreffion de ces chapitres , &:
dcCynlle La- j t ' r .-i . rv ■ i> o »i
cAr contre CCS ^v^nt déclare avec lerment qu il n en eitoit pas i auteur,&qu il
chapitres. ne tCHoit point la foy qui y eftoir enfèignée, enfeignant même
publiquement dans l'Eglife des chofes contraires à ces chapi-
tres : néanmoins feulement à caufe qu'il n'écrivit point con-
tre,donnant pour raifon de fa conduite ce qui eftoit aflez vray,
mais qui eftoit indigne delà bonne opinion qu'un bon Paf-
teur doit donner de foy, que ces chapitres n'avoient rien
qui puft faire croire qu'ils fuffenc faits par luy , ou qu'ils
fuiîènt Ja confefficn de l'Eglife d'Orient . & que les Pè-
res avoient défendu d'attaquer des choies de cette nature »
a<vec tEglife Romame fur tEmha.riflie. 701
^uandil n'y avoir peine de prcflante necefficë, on ne refatisfit Ch XV.
point de tout cela. Ce n'eft pas qu'il nedift peut-eftre bien ,
mais il euft encore bien fait de Te fouvenir qu^une petite étin-
celle allume un grand feu.... Enfin Cyrille déclara qu'il n'a-
voit aucune connoilfancc de ces chapitres. Cependant les
Orientaux animez de cezele, parce qu'il ne voulut pas écrire
contr'eux , le condderant comine un trairtre , prononcèrent
deux fois anathéme contrelui&: ces chapitres dans deux Con-
ciles très- nombreux , parce que les chofesqui paroidèiit cftre
picufes dans ces chapitres eftoient dites exprès pour corrom-
pre adroitement la foydes fimples , comme les rochers ca-
chez fous l'eau renverfent les vaiffeaux.
Que les adverfaircsdonc ne fe glorifient point de CyriHc, '
car il ne fut point tué injustement , comme ils prennent plai.
fir de dire , ni pour le nom de j. C. maisePantpofTedé d'une
ambition demefurée , que S, Bafile a z.-^^tWé.Ç.lamaladie de Lu-
cifer ^ s'eftant intrus par trois fois contre toutes fortes de loix LiaifondeC^-
dans le Siège de Conftantinople outre la première qui pailoit [.''''^^/^'•|:
pour eflre légitime après mille expulfions^ vexations des Ec- d'Huiiande.
clefiaftiques , infatiable deschofesexterieuFes, & fe fervant de
l'Ambafladeur de Hollande en fes de{ïèins,ce qui lerendicen Ce font les ,^7-
coreplus f.ifpeA ài'Eglie, il foufFric enfin cette mort honteufe. airie pre- *
Et étant vray qu'il cft devenu autour d'une impieté_,commeaf tend cftre %-
furent les adverfaires^nousnele reconnoiflons pas comme un ^°''^^'
fàint, mais comme un miferable qui n'a aucune part avec J. C.
Nous inferons ici les Actes de ces Synode.s tirez du Livre
que nous en avons, pouraflarance de ce qui a efte dit , & que
nous fommes en toutes chofes dans les mêmes fentimens. Le Jermer
___.,/. , . > V // . Concile coiT-
(jcs Conciles font en cet endroit comme dans AlL^tiiis. j^e Cynlle fuc
Ce font là les chofes qui ont eflé faites contre Cyrille fc""«" -^o'-
par deux Conciles ^ qui montrent rrex-clairement la pieté de ^j^^g^g^^^j^"^*
i'Eglife d'Orient. Le dernier fut tenu à lajium en Moldavie de i-imprcnio.i
fous le Duc Bafile Boibunda,& le Patriarche de Confbantino- mé..,edeMoi-
pie Parthenius je Vieil, homir.e vénérable, & qnis'eftoit occu- main des Prer.
pé depuis faieuneffedansles chofes divines , qui ayant envoyé Cenvftquciâ
une Lettre Synodale à ce Concile , l'aflemblee crut qu'il fufîî- ^'^H poTthê-
foit de foufcrire &: de confirmer la Lettre Synodale qui leur niusqui yfuc
avoir efté envoyée de Cnnftantinonle, &qu'ainrî onexccutoit ^PP'°"'^'^' -
pleinement ce dont il citoit queition. Et u ce v^oncile ayant
combattu les Calviniftes ôcplufieurs autres chofes, n'a pas
TTtc ij
70L Liv. Vl-n. Vrewves authen. dt ï union des £g, d'Or. '
néanmoins prononcé anathéme contre Cyrille , non plus que
celui de Conftantinople par fa lettre Synodale , ce n'a pas
efté pour faire grâce à Cyrille, les Saints Pères qui lescom-
poloieiu n'cftanr pas des hommes qui euffent égard aux per-
fonnes,niqui fullcnt capables d'honorer les hommesplusque
Dieu ■• mais parce que Cyrille n'avoit jamais pafle pour Cal-
vinifte dans l'Eglile d'Orient , ni pour avoir d'autre fentiment
que cette même Egkfe. Us ne crurent donc pas qu'il fut à pro-
pos de prononcer anathéme contre un homme qu'ils ne fça-
voient pas clairement mériter c cttecondamnation , quoique
cependant ils l'ayent prononcée indifféremment contre l'au-
teur des chapitres, lequel aulïïnous f:)ûmettonsà d éternelles
maledîdions , & que nous reconnoifîons eilre éloigné du
. Royaume du Ciel.
Le premier Synode a efté fait fous Cyrille de Berée Patriar-
che de Conftantinople, en prefence de plufieurs perfonnes
confiderables & vertueufes, & il a anarhcmatifé Cyrille par
fon propre nom , non pas qu'il le reconnut, ou l'eût jamais re-
connu pour hérétique , mais parte qu'il Içavoit qu'ayant vécu
fîxans après l'imprefîîon de cts chapitres, & qu'ayant f(^û les
troubles qui eftoient arrivez en Pologne & en Ruffie aux fidè-
les de ces Pays- là, plufieurs difant que l'Eglifè d'Orient eftoic
Calvinifte, après que le Patriarche de Conftantinople avoit
fait une telle confeffion , il n'avoit pas voulu écrire contre ces
chapitres , quoiqu'il fût prié & preflTé de le faire , comme nous
avons dit dans le chapitre cinquième. C'eft pourquoi fe défiant
qu'il n'eftoit pas exempt detromperie touchant la foy Ortho-
doxe, & voyant qu'il ne prenait pas le foin qu'il dcvoitde fon
troupeau , il prononça nommément anathéme contre luy.
Nous n'acculons pas ce Concile qui a porté une fentence iî
jufte. contre lui .- au contraire nousl'cftimons heureux d'avoir
en fon temps Ci bien combattu pour la foy , puifqu'il a eu un
affez grand fujet dans fon long filence de le punir de cette
manière, Se pourchaftier ainfîle coupable, bc pour retenir les
autres.
Et fi nous ne prononçons pas anathéme contre lui, cependant
nous le pleurons, comme ayant par fon Hlence excité une Iî
grande guerre des ennemis de l'Eglife contr'elle. Que ii vérita-
blement il a efté hérétique &: dans les fcntimens des Calvini.
(les, & qu'il nefe fbi^ pas converti, car Dieu reçoit tous ceux
l
iL'vec ÎEglife Romame fur rEucharifite. 70J
qui feconverciflenc à lui quels qu'ils foienc , mais qu'il foit de- Ch. XV.
meure dans des fentimens hérétiques , nous le foûmertons avec
ceux de fon parti fans aucune difficulté à un anathéme 6c ex-
communication éternelle.
CHAPITRE VI.
C^E que nous avons dit fuffira pour apprendre aux perfo»-
^ nés qui font dans les bons fentimens , & qui aiment la vé-
rité, dans quels fentimens efl; l'Eglife d'Orient, qu'elle n'a ja-
mais efté d'aecord avec les Calviniftes dans les chofes qu'ils
ont innovées , ni avec aucuns autres , & qu'elle ne connoift
point pour tel celui qu'ils veulent faire pafîer pour un de leur
fecte. Mais enfin pour diffiper & détruire entièrement toutes'
Jes penfées qui ontefté inventéescontre la gloire de Dieu , 6c
pour rejetter entièrement les blafphêmes contenus dans ces
fameux chapitres, nous avons crû devoir faire des interroga-
tions ic des chapitres égaux en nombre à ceux de Cyrille , dans
iefquels il a, comme on fuppofe, affilé fa langue contre Dieu, 6c
qui leur foient directement oppofez ; de forte qu'on puiile les
appeller une réfutation & correction defdits chapitres de Cy-
rille , dont nous garderons l'ordre dans ceux que nous ferons ,
afin que chacun des fidèles les pui^Te comparer & conférer en-
femble, & reconnoillre facilement la pieté de l'Eglife d'Orient,
& l'impcfture des hérétiques , à quoy nous pourrons, quand, il
fera befoin , y ajouter ou diminuer d'autres ciiofesqui contri-
buent à la connoifîance exade de la quefliou.
lE-nfuite il y a dans le Mdnufcrit des Articles ^ynvdaux oppofez,
à ceux de Cyrille , dont voici la lettre qui eji
À la tefie.
DOfithée par la grâce de Dieu, Patriarche de Jerufaleni:, i
tous ceux qui nous interrogent, 6c ont envie de fçavoir
quelle efl: la foy gc laReligion desGrecs,ou de l'Eglife d'Orient,
& quelle efl: fa créance rmichant la foy Orthodoxe, au nom de
tous les Chrétiens qui font fourni à nôtre Siège Apofl:oli-
que , & de tous les Orthodoxes qui viennent en dévotion à
cette fainte &: grande ville de Jerufalem, avec Iefquels l'Eglife
Catholique efl: d'accord en ce quiconcerne la Foy , à qui il pré-
TTtc iij
^04 Liv. Vil î. Tfemi'es attthen. de Tunion des Eg.d!Or,
lente cette confedion abrégée pour fervir de témoignage de-
vant Dieu 2c devant les hommes^
Dans l' Article ou Définition xv.
LEs Sacremens font compofëz de naturel & de Tumaturel j.
& ne font poinï des fignes fimples des promelîes de J. C.
car autrement ils ne- diifercroient pas de la Circoncifion. Ce
qui feroit un extrême aneanriJièment de nos Myfteres. Nous
confeiTons qu'ils opèrent necelTairement la grâce comme in-
(îrumens effedi^s dans les initiez. Nous rejettons comme une
cliofe éloignée de la fîmplicité du Chriftianifme , que la fim-
piicité des Sacremens demande l'ufage d'une chofe terreftre.
Car celâefl: oppofé au Sacrement de l'Euchariftie, qui ayanc
efté établi par le Verbe fubflftant, &: eftant Tanditié par l'in-
vdçationd.uS.Eiprit, efl: accompli par Texiftence de ce qui eft.
fjgnifîé , r^avoirdu corps & du fang de J. C.&c Ton accomplif-
femenc précède neccflàircment l'ufàge qu'on en fait. Car fi de-
vant il n'eft pas parfaic, celui qui en ufe mal n'a donc pas man-
ge &'bûf6iVjugement jpuifqu'il n'a reçu que du pain & da'
vin. Cepe'ndanc celui qui y participe indignement boit & man-
ge fon jugement. Donc le Sacrement de l'Euchariftie ne reçoit
pasfonaccompliflémenE da.ns l'ulage, mais devant
N:
Article x v i î...
Ous crayons le très, fâint Sacrement de l'a fainte Euclia»-
riftie, que nous avons mis !e quatrième dans l'ordre des^
Sacremens, & que c'cft: le même que le Seigneur a donné lar
nuit qu'il fe donna lui même pour la vie du monde. Car
ayant pris du pain , & l'ayant béni , il le donna à Tes (aints i jifZ
ciples &: Apofcres , difant ; Prenez, , mjrty:%, j Cbcy eft moficorpSy,
ficayant pri^s le calice & rendu grâces , il leur dit : Bcuvez^en
toui > Cecy eft mon fang , qui eft ver fè pour 'vous , pour la remiffioTl'
des péchez^
0-: Tv-aïKa; Noiis croyons quc quand ott Ic cclcbre , noftre Seigneur
tCil ÙAsis- J. C. y eft prefent , non par reprefentation ou par image , ni
xfs, par une grate furabondante, commedans les autrcsSacremens,
ni par une fimple prefence, comme quelques Pères ont dit du
Bapïême,nipar une conjonction 3 en forte que la divinité du
I
avec ÏEgliJe Romaine Jùr tEuch'iriflte. yo^
Verbe foie unie au pain propofé del'Euchariiliehypofta.tique- Ch. XV.
ment j comme penfent les Luthériens avec une grande igno-
rance & une grande mifere, mais véritablement &: réellement :
<ie forte qu'après la confecrarion du pain 6c du vin , le pain eft A'«T'»/3«w.e-
chanffë , tranffuhlîuncié , transformé éc converti au véritable & "' /''J'"'
même corps de J. C. qui eft né en Bethléemdela Viergt, qui T«^4,s7,ja,
a efté baptifé dans le Jourdain , qui a fouffert , qui aefte en- (..irapiuii^i-
terré , qui eft reflufcite , qui a efté élevé au Ciel , & eft affisà ((ù<xi.
la droite de Dieu le Père, ^ qui doit venir fur les nuées du ^!,r^°a'^^ -
Ciel , 6c le vm eft change 5c tranjjubftancie au même & veri- ^jT^ffr»"^/*
table fang du Seigneur , qui a efté répandu pour la vie du mon- eft encore re-
de , luy eftant attaché à la croix. ^"'■''
De plus, nous croyons qu'après la confecrationdu pain &
du vm , la fubftance du pain Se du vin ne demeure plus , mais
le corps même 6c le fang de J. C, dans l'apparence 6c la figure
du pain 6c du vin ,c'eft-à-dire fous les accidens du pain 6c du i, ^^ ^^j-
vin, a (rail ait
De plus, que le corps même 5c le fang immaculé du Sei- raS ^mu,
gneur eft donné 6c entre dans la bouche 6c l'eftomach de ceux
qui le reçoivent , pieux ou impies , avec cette différence qu'il
donne aux dignes 6c pieux la remiffion des péchez 6c la vie
éternelle , 6c aux impies S<. indignes la condamnation à une
peine éternelle.
Que le corps 6c le fang de J. C. font coupez 6-: divifêz par
les mains 6c par les dents ,à la vérité par accident, c'cftà-di-
re félon les accidens du pain 6c du vin , félon lefquels oncon-
fefte qu'ils font vifibles ^ maniables , mais que par eux mêmes
ils demeurent fans eftre feparez ni divifez en aucune manière.
C'eft de là que l'Eglife Catholique dit : // c fi partagé (j;~ m:s en
pièces^ hy qui eft partage d^ qui n'eft point divifc , liiy qui eft man-
ge par tout , fi^ qui ttcji point ccnfommé , mais qui Jan'cii fie tous
ceux qui le reçoivent dignement.
Nous croyons auffi que dans les plus petites particules du
pain 6c du vin changez ,il ya ,non une partie du corps 6c du
fang de Chrift, ( ce qui feroit un blafphéme ^ un AiheiTme, )
maii le Seigneur tout entier félon fa fubftance , avecfcname
& fa divinité ,Dieu parfait ^ homme parfait. D'oi^i vient que
la célébration du myftere fe faifant en plufieurs endroits en
une même heure , il ne fe fait pas plufieurs Chrifts , ni plu-
fieurs corps de Chrift , mais qu'un feui 6c même Chnft , eft
7c6 Liv. VIII. Treunjes duthent. de ï union des Eg. d'Or.
véritablement & réellement prefenc, & qu'il n'y a qu'un corps
bi un fang de J. C. dans toutes les Eglifes particulières h & cela,
non pas parce que le corps du Seigneur quieft dans le Ciel à<^i~
cend lur les autels , mais parce que le pain qui eftofFert dans
toutes les Eglifes, eftant changé bc tranjfubfianaè après la con-
fecration jCft fait , & eft un feul &même corps que celui qui
cft dans les Cieux. Car le corps de J. C. eft un dans plufieurs
lieux jSc non plufieurs 5 &; c'eft pour cela que ce Sacrement
eft &; s'appelle principalement miraculeux ,& compreheniî-
ble par la feule foy , non point par les fubtilitez de la iagefle
humaine , dont nôtre pieufe Religion , qui nous eft donnée
de Dieu , rejette la vaine &folle inutilité dans les chofes di-
vines.
Nous croyons de p'us qu'il faut honorer le corps & îe fang
de J. C. dans îe Sa*"r,ment de l'EucharilHe d'une manière
extraordinaire, & l'adorer d'une adoration de Latrie;car l'ado-
ration de la Sainte Trinité & du corps &fang de J. C. eft la
même.
De plus,qu'il y a un facrificc véritable^ propitiatoire qu^bn
offre pour toutes les perfonnespieulcs vivantes ou mortes , &
pour l'utilité de tous , comme il eft porté expreflement dans
les prières de ce Sacrement, qui ont eftc données à l'Eglife
parles Apoftres , félon l'ordre qu'ils en avoient rec^û du Sei-
gneur.
Que devant l'ufage, incontinent après la confecrarion, &
après l'ufage J ce qui feconfervedans les ciboires pour la com-
munion des personnes qui font preftes à mourir ,eft le vray
corps de |. C. ne diff'erant en rien de lui ; de forte que devant
l'u fa ge après 1 a confec ration , dans &; après Tufage, il eft tout-
à fait le véritable corps du Seigneur.
Deplus^par ce.motdcTranfÎLibftanriation , nous ne croyons
pas que la manière par laquelle le pain & le vin font chan-
gez au corps & au fang du Seigneur , foir rendue claire &: évi-
dence 3 car c'eft une chofe incomprehenfiblei&quin'eftpoffi-
ble qu'^à Dieu fèul , & qui convainc d'ignorance & d'impieré
ceux qui croyent la comprendre 5 mais que le pain & le vin
après laconfecration , non par type , non par maniered'ima-
ge, non par une grâce furabondanre , non par la communion,
ni par laprefencede la divinité feule du Fils unique de Dieu,
font changez au corps 5c au fang du Seigneur i ni que quel-
que
avec T€giî/e Romaine fur Fincharifiie. 707
qiie accident du pain &: du vin foie changé en quelque acci- Ch. XV.
dent du corps & du lang de J. C. par quelque converiîon ou
changement; mais veriablement, réellement 6c fubftantiel-
lement le pain eft faitlevray corps de J. C. &, le vm Ton mê-
me fang, comme nous avons dit cy-deflus.
Enfin que le Sacrement de la fainte Euchariflie ne peut
eftre fait que paj: un Preftre pieux , qui a recju l'ordination
d'un Evêque canoniquement ordonné, de la manière que l'en-
ièigne l'Eglife d'Orient. C'eft-là en abrégé le fentiment de
i'fcglife Catholique fur ce Sacrement, & fa véritable confef-
fion , & fa tradition trcs-ancienne , que nous ne voulons point
eftre tronquée en aucune manière par les impies, rejettanc
fort loin les innovations, 6c vaines opinions des heretiquesi
mais nous voulons que la tradition qui eft établie foit confer-
vée dans Ton entier. Car l'Eglife Catholique de J. C. renonce
& dit anathéme à tous ceux qui ne l'obfervent pas.
C'eft une chofe tres-ridiculede conclure de ce que quelques
Preftres Orientaux ont le faint Pain dans des boëces de bois
hors du Chœur, & du lieu où eft le faint Autel, pendu à quel-
que co'lomne, bc qu'ils ne confefTent pas le réel & véritable
changement du pain au corps de J. C. Nous ne defavoûons
pas que quelques pauvres Preftres ont le corps de J. C. dans des
boëtes de bois ; car J. C. n'eft pas honoré par des pierres &
par des marbres, mais il demande de nous un efprit faint &
un cœur pur. C'eft ce que dit faint Vsiui^T^ousavonsun Thrcfor^
dit il, dàins des vafes de terre. Mais dans les lieux où nos Egli-
izs font plus riches,coinmeen Jerufalem parmy nous, le corps
de J.C. eft honoré dans le Sanduaire avec des lumières, &il
brûle toujours devant une lampe à fept branches.
Au refte je trouve afTez étonnant que les hérétiques ayent
remarqué que le corps du Seigneur eft en quelques Eglifes at.
taché à la muraille hors du Sanduéjire, parce que peut-eftre
les murailles du Sanduaire eftoient tombées de yieillefle , & Raifon reri-
que delà ils en concluent des chofes qui ne peuvent eftre, & wbiedes
qu'ils n'ayentpas veu fous la voûte du Sanc1:uaire J. C. repre- lailfo" a"
fente en forme d'enfant fur la patène , afin de voir, que com- Grecs donc
me les Orientaux ne reprefentent fur la patène , ni la fi- ',' ^^ p^'''^
gure , ni la grâce, ni quelque autre choie , mais ). C me- Luion de m,
me j ainfî ils croient que le pain de l'Euchariftie n'eft rien fait ^^ Noincd.
VV V V
7o8 Liv.VIl. Frewves auth, de îunion des Eg. d'Or.
autre chofè que le propre corps de J. C. iubflanciellement: ôc
ainfî leur conclufîon feroic véritable.
Ze Patriarche cite en fui te divers livres où il dit que l'on feut
voir la Foy de l'Eghfe d'Orient , comme la Confelfion Orthodoxe,
Gabriel Archevêque de Philadelphie , GreQ:pire Protofyncelle en
fon traitté des Myfieres. Theophane Patriarche de Jerufalem dans
fon Epifire dogmatique.
Et il finit par cette confiderationtres-judicieufe.
Ces chofesfont confirmées parun argument que les Héré-
tiques nousfourniirenc. Car les Neftoriens, &les Arméniens^
les CophteSj& les Syriens,les Ethiopiens, qui demeurent fous
la ligne équinoc1:iale,& au-delà même vers la tropique du Ca-
pricorne , qui font feparez depuis plufieurs fiecles de l'Eglife
Catholique, & qui ont chacun uneherefie particulière, com-
me on le peut apprendre des Ades des Conciles, font néan-
moins d'accord avec nous fur la fin & le nombre des Sacre-
mens j & fur tout ce que nous avons dit jufques icy, &en onC
les mêmes fentimens que TEglife Catholique, comme nous
le voyons de nos yeux, oc comme nos fens 2c noftre raifon
nous l'apprennent dans cette fainte Ville de Jerufalem oh il y
a des gens de tous les lieux du monde qui y habitent, ou qui y
viennent en pèlerinage, tant fçavansque (impies.
Que ces vains difcoureursSc ces novateurs hérétiques fetai-
fent donc, & qu'ils ne s'efforcent plus de tirer artificieufe-
inenc, (oit de l'Ecriture, foit des Pères, quelques petits pafîa-
ges, pour établir le menfonge, comme ont fait de tout temps^
tous les Hérétiques 2c les Apoftats qui ontefté jufques icy.
Dosithe'e par la mifericorde de Dieu Patriarche delà fain-
te Jerufalem ^ de lu. Palejîine ^je déclare (^S eonfcjje que c'efi la
foy de l' Eglife d' Orient.
Dorothe'e de Petra,
P A II T H E N I u s Métropolitain de la fainte Kfax^reth.
JosAPHAT Métropolitain de Ptolemaïàe é" de Sidon.
Neopphyte Métropolitain de la fainte Bethléem.
Antoine Archevêque de Lydda.
Christophe Archevêque de Naples ^ orpoe/^/io'; de Scbafe,
Daniel qrand Archimandrite du S. Sepulchre.
Cyrille Prefire ^ ^rand Protofyncelle de Jerufalem _, ^ Prieuf
du Monajlere du faim Sepulchre de Trebiz^ndc,
Anjec ÎEglife Komn'me fur tV-uchariflie. jo^
Melece indigne Pnfire é- archimandrite, Nonce dv fdnt SepuL Ch. XV.
cbre auprès du Roy des Ilcriens , ^ Princes de Colchide avec
le Synode de la haute Iberic.
JostPH Preftre O- Prieur du Monajîcre des Iberiens de Jeru.
fale?n.
Grégoire Prieur de la fainte Bethléem.
A-BEK-Hius Religieux & Fricur du vénérable é- Royal Monafiere
de C Archange.
Daniel V rieur de la fainte Laure de faim S a bas.
Denis Religieux d^ Frieur de faim Elie.
Arsenius Religieux Prieur de faim George en Pez^la.
Néophyte Prieur de fainie Tecle.
Germain Religieux e fiant ordinairement au faim Scpulchre.
Callinicus Religieux.^ <^ Confcjfeur des Rcligieufes.
h'LK.^K^ grand Archidiacre de Jerufalem avec les autres Dia~
cres.
Mac A I RE Religieux ^ Prieur de faim Jean Baptifie.
Habacuc Scevophylax du faim Sepulchre.
Daniel Religieux ^ Sy ne elle de Jerufalem.
Timothl'e Religieux de Rufjïe la grande, Confcffe que c'efi-la,
nojhe poy ^ celle de l'Eglife à! Orient.
Ze grand Econome PapaMichel, croit ^ confeffe que c'efi. là nb~
tre créance ^ notre foy que commande ^ ordonne l'EglifApo-
ftolique ^ Orthodoxe.
Le grand Scevolax Papa Isaac.
Ze grand Sacellarius Papa M i c H A E L
MoYSE Preftre de la grande chapelle.
Se ROUE Preftre Protopapas.
Helib Vreftre Econome de Zydde.
Soliman Preftre Econome.
Habie Protopapas de Lydde ., avec tous les Preftre du même lieu.
Mac AI RE Religieux^ Exarque de l' Anhevèchè dejoppè.
Le chetif Curé George Econome de Cefirée en Paleftinc.
SiMEON Curé de faint Elie aU Mont-Carmel.
Grégoire Protofyncelle de Moldavie., [Moldoblaquie je confeffe)
que ceft. là, noftre foy é" de l'^glife d'Orient.
SiKXVHiîA Diacre de Milet déclare la même chofe.
GtNNADius Prefire Sy ne elle de Jerufalem,
Ze Curé Mo^fe Econome de Naples.
VVvvi]
yio Liv. VIII. Prewves authent. de tunion des Eg. d'O^'
Philemon Religieux é" Vicaire du Métropolitain (^^ ^o/r^-
Mac AI RE Reliyeux de Crète ^ prédicateur du S. Evangile ^ «
tous ceux de Macédoine^ Achaie é- -^fie qui font dévots au fairt^
Sepulchre.
Jésus P.'f/?r^ Econome de la fainte Bethléem.
S ERGius Preflre é^i{f*îcxoç t5 efyiV ff'aniActîy
Jeremie preftre Econome de Pez^le.
Le Curé Campimpis Econome de Petra.
P ASC H AL Prcfirei(pnixitMiS du S. Mont de Tabor^ Adminiflra..
teiir du village du même endroit ^ du village de Naim é' autres
d'alentour. *■.
Le Exarque de Hythopolis.
SiMEON Religieux Exarque ou adminijirateur de Gabaon ^
Ramla
A G A p I 11 s Econome de Gaz^ ^ les Vrefires qui font avec moy,
Antoine Logotheta de Rcmlie ^ économe.
Galaction Religieux éi" Scevophylax.
Grégoire Prefire ^ Econome de Ptolemaïde.
Gabriel Religieux Protofyncelle ^ Pontopfaltesde Jerufalem.
l'ay Jïgné cette Apologie contre tes hérétiques que nous avons
eompofèe d'un commun confentement pour l'Eglife Catholi-
que.
Justin Diacre S- Domcfîique de Jerûfalem.
Joseph Diacre. Jacob Diacre.
Athanase Diacre. Joachim Grand Ecclejiarquë.
JoACHiM Religieux Commiffaire.
|ean grand Logotheta de la fainte RefurreUion.
Pierre fils de chanil protonotaire.
Nacer Primiceirus. AntoINE Lampadanus.
Cyrille Ahbè.
Le prefent écrit comme il eft couché cy-defTus avec les fignat-
tures, & tout ce qui s'eft fait, a efté mis dans le livre de noftre
Thrôue ApoRolique , pour fervir de mémoire éternelle &
d'aucori'"é le lo. Mars 1671.
Dosithe'e Patriarche de Jerufulcm le déclare ^ ^ le Jîgne de
ma propre main.
Nectarius cy- devant patriarche dejerufilem déclare .^^ coli-
feffe que tclU efi nofire foy (^ ceUe de l'Eglife d'O rient.
(Lwec ÎEglife '^tna.ine fur tEuchArifiie. yn
Ne CT A RI us Reltpeux é" Mypomncmato.Graphus de la. Re.
furreilion de No/ire Seigneur^ ay Jîgné déclarant lu même chofe
que le faint Concile.
CHAPITRE XVI.
Union des Eglifes d'Orient avec l'Eglife Romaine fur l'Eucha*
rijlie ^ autres points, prouvée parunAcie ou Traitté du Pa.
triarche des Maronites d'Antioche. Signé de plujieurs Metro-
folites é" Prejhes de [on fatriarchat.
ON n*a rien à ajouter pour faire connoiftre les Maroni-
tes à ce qu'on en a dit dans le premier volume de la Per-
pétuité. La profelîion qu'ils font d'eftre fournis au Siège de Ro-
me, ne laifîè pas lieu de douter de leurs fentimens fur l'Eucha-
riftie. Néanmoins comme M. Claude a voulu chicaner fur quel-
ques extraits qu'on avoit faits de leurs livres, & que d'ailleurs
ils ne rendent pas feulement témoignage pour eux-mêmes ,
mais auffi pour toutes les Eglifes de l'Orient , dans lequel ils
font répanduSj nous n'avons pas cru devoir négliger d'inférer
icy unade dreiïe par les Maronites d'Antioche, à la follicita-
tion d'un Jefuite.
Le préambule contient divers faits hiftoriques très peu ex.icT:5j
mais ce n'efl pas dequoy il s'agit, ci. l'on fçait aïïez que l 'Orient
eftrempli de livres où les hiftoires font fort altérées. Mais il
y a bien delà différence entre les hiftoires dont les particuliers
nefont point obligez d'eftre informez, & la foy desmyfteres
qui fubfiftent dans la connoiftance de tout un peuple.
ACTE OV TRAITTE' DES MARONITES D'ANTIOCHE.
Au nom du F ère , du Fils & de l'Efprit de S^mtctè ^ un
feul Dieu.
V
Terre le chef des Difciples dans fa première Lettre qu'il ad-
dreflèaux élus, difperfez en tous les pays, leur ordonne
d'eftre toujours difpofez^ k rendre réponfe à celuy qui les interro-
.q£ra de la parole touchant l'efperance qu'ils ont. Les gens du
monde gardent même cet ordre , à combien plus forte raifon,
nous que Dieu par la ra ce de fa libéralité a eftabhs Pafteursde
y V vv ii]
y il Liv. VI H. Prewves authent. de tuniondes Eg.lor,
fes ouailles , fommes nous obligez d'ellre prorapcs à rendre
réponfe à celuy qui nous incerroge, à conduire celviy qui de-
mande noftre diredion , afin que noftre condamnarion ne foit
pas avec ce ferviceur qui enfouie dans la terre le talent de Ton
maiftre, ôc qui mérita d'eftre exilé dans les ténèbres exté-
rieures.
Ceft que dans le pays d'Occident le Diable a élevé plu-
fieurs troupes infidelles & dévoyées du bon chemin , cher-
chant leur propre gloire, 6c l'impiété, qui par leur infpira-
tion dépravée ont voulu renverfer les tondemens du Siège
Romain que le Seigneur a placé de fes mains fur Pierre, qui
eft la pierre ferme de la fby, & qui Iny a promis que les portes
d'enfer ne prévaudront point contre luy dans la fuite conti-
nuelle des teinps. Et parce qu'ils n'ont point de foutien pour
s'appuyer deffiis, ils ont calomnié l'Eglife d'Orient, difanc
qu'elle eftoit de leur opinion 6c qu'elle. s'accordoit à l'impu-
reté de leurs fentimens Or Dieu a mis le zèle de fa foy dans
le cœur de la Seigneurie de l'illuftre & élevé de Nointel
AmbafTadeur du grand Roy de France la gloire des Chré-
tiens , afin qu'il s'informa!!: de cette chofe,ôcila envoyé le
Révérend Père Michel Jefuite pour fçavoir de nous ce que
nous penfons 6c ce que nous croyons fermement, des points
principaux dont on a douté 6c difputé.
Pour le comprendre , que le. fage Leéleur fçache que noftre
Nation des Maronites, bien qu'elle foit éloignée du peuple
de Rome d'un éloignement extrême au regard de fon langa-
ge, 6c de l'étendue des pays, n'a jamais cefTé par la grâ-
ce du vray Dieu, dont la louange eft haute, d'en efbre proche
dans les quartiers d'Orient. Elle s'eft tenue attachée à Rome,
& elle s'eft foutenuë par elle d'un foutien parfait à la loy
Chreftienne, comme il eft manifefte par les lettres des Pon-
tifes du Siège Romain 6c par leurs Bul'es glorieufes, qu'ils
ont enyoyé^s à ceux qui nous ont précédé dans le haut Siè-
ge'd'Antiothe. Ec pour ne nous pas étendre à expliquer
cela, nous ferons mention icy d'un feul témoignage tiré d'une
lettre envoyée par le Pape Paul cinquième parlant aux Ma-
ronites en cette manière:
Beny foit le Seigneur qui par fa grande mi fertforde , lorfque
le, déluge de quantité d'eaux , c'ejî k dire , de divers fthifmei^
anjec VEgUfe Komaine fur rRuchurifiie, . 715
hère fie s ^ méchancetcz^ a inondé le fays d'Orient, (y^ lorfqu'il Ch. XVL
tient encore prefque tout le monde abifmè , rHa -point permis qu'il
approcha^ de vous , mais qui a daigné vous conferver tant de
fie de s dans la vérité de lafoy Catholique ^ par un don tout par-
ticulier de fa clémence. C'efl pourquoy vofirefoy efi annoncée dans
tout le monde, é^ elle e(l louée dans l'Eglife Romaine qui efl la
JM'ere ^ la Maiflreffe de toutes les E'ilifes.
Lorfqiie le fcelerac Severus prie pofleffion du Siège
d'Antioclie &: reduific par fa malice le cœur d'Anaftafe Em-
pereur àQ% Grecs, Se qu'ils fe mirent cous deux à perfecucer
l'Eglife de Dieu & à femer la zizanie des hérétiques dans les;
quartiers d'Orient, les difciples de S. Maronleur refifterent
& s'oppoferent à leur docT;rine corrcmpuë, comme il paroifl:
par les lettres qu'ils écrivirent au Pape de Rome S, Hormif-
das, & les requeftes qu'ils prefenterent au cinquième Con-
cile aiTembléàConftartinople,puirqu'ils yconfeiTent que ce-
Juy qui tient le Siège de Rome efl: le Chef de toute la terre
habitable , le Dodeur de l'Eglife, le Médecin des Ames,ôc
Je Pafleur des Ouailles Chreftiennes.
" L'année depuis l'Incarnation du Seigneur 691. Callinicus
Patriarche de Conftantinople s'égara de la droiture de la foy.
L'Empereur des Grecs Juflinien Rhinotmet commanda qu'on
afTemblafl: un Concile , Se on dit que ce fut à Conftantinoplc
dans le Palais fous le dôme, pour changer ce qu'avoient or-
donné le SS. Pères qui eftoient venus au fixiéme Concile.
En ce temps-là le Patriarche Jean qui eftoit du Monaftere
de S. Maron, eftoit en pofTeffion de la Prclatnre du Siège d'An- -
tioche. Ils firent un Concile dans î'Eglife de S. Jean de La-
tran , Se ils frappèrent d'excommunication lefauxSvnode &
celuy quile fuivoit. Le Patriarche Jean retourna en Syrie
fous l'écendart du Pape/& i! y apportai le manipule, la mître.
Se l'anneau félon qu'en ufe l'Eglife Romaine.
Or Jufl:inien l'Empereur des Grecs voyant que le Concile
qu'il avoit ailemblé avoit efl:é rejette Se n'avoit point eflé re-
ceu , il envoya fes foldats fous la conduite du gênerai Zacha, '
rie pour luy amener le Pape enchaifné. Dieu ne luy donna
pas la force de le faire.
Cependant il commanda qu'on fift tourner fon armée du
coftéde la Syrie contre le Patriarche Jean, Se les Généraux
de l'armée eftoient Marrie Se Marcian hommes cruels, Se fans
7I4I-IV' VHI. Prewves authent. de Vunïon des €g. d'Or.
picié. Ils ruinèrent le Monafbere de faine Maron qu: eftoit bafti
fur la rivière dite Rebelle, 6c qui renfermoit près de 800. Re-
ligieux. Ils feduifirenc le monde &:ils mirent à mortplufieurs
perfonnes dont le nombre n'a point de bornes , &c quand ils
furent arrivez avec leur armée au bas de la montagne du Ly-
ban au deflusde la ville de Tripoly de Syrie, les Princes de
la ville de Hidet fondirent fur eux avec l'ëpëe , & depuis ce
temps-là fut la divifion des deux nations des MelkitesSc des
Maronites dans le pays de Syrie.
Ceux quifuivirent Juftinien & fon Synode dépravé fe nom-
mèrent Melkites ou Melkic, quieft un nom dérivé de ce-
luy de Roy. Et ceux qui fuivirent le Patriarche Jean & les
loix de Rome, s'appellcrent Maronites, d'un nom pris du
Monaftere de S. Maron où le Patriarche Jean s'eftoit fait
Religieux. Et après la mort de ce Père fufmentionné, fuc-
ceda au Siège d'Antioche le frère de fa fœur, le Patriarche
Cyrus, lequel receut auffi (a confirmation de Rome , juf-
que là même qu'au temps d'Innocent III. un des Papes de
Rome, entrai Rome le Patriarche Jeremie, & fe trouva au
Concile qui fe célébra à Rome, fie il fut confirmé Patriar-
che de la nation^ des Maronitesj puis il retourna au mont
Liban avec de glorieufcs lettres èc quantité de faveurs ôc de
grâces , & ainfi tous ceux qui luy ont fuccedé jufqu'à nos
joursj comme nous fommes prefts avec la grâce de Dieu de
faire voir ces chofes par une explication fort longue, Et nous
n'avons abrégé cette déclaration quieft hors de ce qu'on fou-
haite, qu'afin qu'un chacun fçache que la nation des M^ro^
nites n'a jamais ceflc en tout temps depuis l'ancien tempî^
d'cftre unie sveclEglife de Rome comme les membres avec
le chef, iSc foumis au SuccefTeur de Pierre Se au Vicaire du
Mefîîe, comme fes enfans. Et en confequence necefl^ire dç
cette déclaration,
PREMIEREMENT
Nous croyons j &: nous profeflons d'une profeffîon ferme
^ue dans l'Office de la Sainte Méfie fe trouve affeurément
éc véritablement le corps du Sauveur Meffie, &c qu'il y eft
vivant 6c vivifiant, fie parfait, fans qu'il luy manque rien
de tout ce qui appartient aux deux natures la divine fie l'hu-
mainÇj & que celuy qu'a annonce l'Ange Gabriel à Naza-
reth
û/vec VBglife Romaine fur ÏEu-chiiriflie. 71;
ret qui eft né à Bethléem de Notre-Dame la pure , & qui a elle Ch. XVI.
crucifié en Jerufalem fur le mont de Calvaire , & qui cftaflis
dans le Ciel à la droite de la Grandeur , celui là même , &:
non un autre , eft offert fur les faines Autels par les mains des
Preftres ôc à^'s Pontifes , comme nous croyons que l'a fait le
Seigneur en prefence de {&% Di fciples, 5^ qu'il leur a commande
de le faire juft]u'au temps de fa venue.
SECONDEMENT.
Nous croyons & nous profefïons qu'après la Consécra-
tion des myftcres par la vertu de la parole ôc de l'clpric ,■ le
pain & le vin font changez dç leur eftac au corps du Seigneur
& en fon fang vivifiant par un changement véritable i^ iub.
ftantiel y de forte que les deux natures du pain 6c du vin font
détruites en leur cjire , & qu'au lieu d'ellt;s 'Xiiw^ le trouve le
corps du Sauveur & fon fang à la manière des efprits , & que
les accidens du pain & du vin , &: les rcflembkinccs viiîblcs loe
perdent point leur eftre^ mais qu'ils font rranfporrez de l'un
& de l'autre au corps du Meilîe & à fon fang^ comme il cftévi-
dent & manifcfte des Meffes des fiincs Apoftres & des Per«s
élus les colomnesde tTgUiè. Et s'il pUift à Dieu dans peu àç.
temps nous ferons voir aux curieux delà icienee les copies de
toutes les Méfies qui fe trouvent dans nôtre Pavs d'Orient ,
avec un long Commemaire qui comprendra tout ce qui con-
cerne l'Office de la faii>te Meflè.
T R O I S I E' M E M E N T-
Nous crovons & nous profeiTors que le pain Ju Seigneur^
que nous offrons tons- les^ jours (iir les Autels vénérables, &
que nous diftribuonsaux oiiaillcs railonnables, eftâfîiirtirenc
un facrifice raifonnablc & vivant &- làinr , mai: noa fanglant &
fans paillon & douleui , &; qu'il eft offert pour les Fideies v'-
vans & Erëpalfez ,.pourefFaccr leurs offènfes, ^i Icui-faifc avoir
le pardon de leurs péchez ^ lelon la parole du Seigneur à fcy
purs Difciples, que fon corps eft donné 5i fon (ang répandu ,
pour eux £c pour le pardon des péchez.
XXxx.
■-/
•ji6 Liv. Vif I. Pmufves authen.de Cunion des €g.£OK
QJJ A T RI F M E M E NT.
Nous croyons & noas profeflbns que tous les Fidèles, lorf-
qu'ils communient, reçoivent véritablement le corps du Sei-
gneur &: fon fang précieux ,& que celui qui reçoit les deux
Myfteres enfemble , ne reçoit rien de plus que celui qui re-
çoit une des deux efpeces ou une de Xtwïs particules, parce
que nous profefTons que le corps du Seigneur fe trouve vivant
& dans Ton entier fur la patène , & dans le calice , & dans cha-
que partie des deux, efpeces. Celui qui le reçoit avec dévotion
.& avec pureté d'intention , il lereçoit pourfon falut & pour la,
vie éternelle 5 & celui qui le méprife , & qui le reçoit fans
épreuve, il le reçoit à fa condamnation , &pourfupplice des
feux , comme il eft marque dans \qs Evangiles .& les Epiftres du
.bien-.heureux Paul.
C I N Ç^U I F ME M E N T.
Nous croyons & profeflTons que la fainte Hoftie etl toute
adorable & vénérable , non feulement comme les croix &
les Images dignes de refpecl , mais comme l'unique Fils de
Dieu , puifque nous confeHons que dans elle eft toute la divi-
nifé, & que la perfonnedu Seigneur Sauveur s'y trouve non
en figure & reprefentation , mais en vérité & en perfection fé-
lon (a véritable parole, Je fuis le pain de la vie ^ ôc ailleurs .
Ory cfl mon corps.
SIXIEMEMENT.
Nous croyons & nous profeflbns que le Sacrement du S.
Baptême eft abfolument neceflaire pour le falut , bien que
l'homme foit né de perfonnes faintes, parce que comme le
meurier bien qu'il foit enté , ne produit que des meures fauva-
ges ^ de même bien que Thomme foit faint , il ne mer point
d'enfansau monde qui ne foient enfans de colère. Et pour cela
le Seigneur a dit : En vérité en vérité jeté dis : Celui qui n'ejl
point né de l'eau (^ de l'efprit de fainteté ^ ne peut entrer dans le
Royaume de Dieu.
(Lwec ÏEglifi 'Romaine fur t Eucharifiie, 717
S E P T I E' M E M E N T. ^"' ^^^'
NousconfeflTonsquele Sacrement de la Confeffioneftabfo-
lument neceflaire pour le pardon des pecKez , félon la parole
du Seigneur ; Celui à qui vous fardonnerez^fes péchez^ ^ ih Imfe.
' ront pardonnez^: c'eft pourquoy quiconque tombe en péché par-
- fait , c'eft-à dire mortel , il ne trouve point de pardon , s'il ne
s'en confefle au Preftre, fî ce n'eft qu'il n'y ait point de Prê-
tres. Alors que l'homme le repente du péché dontils'eft rendu
coupable , & qu'il propofe de fe confeffer , quand Dieu le
Très- haut lui en donnera le pouvoir , & qu'il ne deferpere
point de la mifericordedeDieu & du pardon.
HUITIE'MEMENT.
Nous croyons & nous confefTons que l'Intendant de nôtre
falut a honoré Ton Eglife du Sacrement du Sacerdoce ^ oc qu'il
' eft divifé en trois ordres , le Diaconat , la Prêtrife & la Prela- 1<" Orientaux
ture,à la refiemblance des trois Ordres des Anges qui font dans "ousTIccord
le Ciel. Et dans ces trois Ordres , comme il eft écrit dans les deiadivifioa
faints Livres , l'un eft plus élevé en honneur que l'antre , &: il h'frirl'hw^ *
faut que le degré inférieur foit obeïflànt à celui qui lui eft fu- des Anges.
perieur , le Diacre au Preftre , & le Preftre à l'Evcque , & l'E-
vêque au Patriarche , d'une foumiflîon telle qu'eft celle des
membres au chef dans le corps, afin: que le corps de l'Eglife fe
conferve, & que le fchifme en foit banni. Et comme il n'eft pas
poffible qu'un troupeau foit bien gouverné fans Pafteur , il en
eft de même des OiiaJlles du Meflie , s'il n'y a point de chef en
l'Eglife. Et pour cette raifon nous profeiîons que le degré des
Evêqueseft neceiïaire dans l'Eglife pour fon gouvernement,
& pour l'ordination des Preftres , Se la Preftrife pour la con-
fecrationdu corps du Seigneur & fa diftribution, & les Dia-
cres pour le fervice.
N E U V I E' M E M E N T.
1 ./-,';!
Nous croyons & nous profeiTbns que l'Epoufe du Melïïe
éft une fur la terre , c'eft à- dire la fâinte Eglife Catholique ^
Apoftolique, qu'il aacquifeau prix de fon fang; &il lui a don-
né les clefs pour lier celui qui lui obéît au bonheur de la
XXxx ij
7i8 Liv.VIII. Freunjes authent.de Tunion des Eg. d'Or.
Communion des Saints, 6c celui qui luiefl rebelle eft comme
un Payen & un Publicain. Etcetcê Eglife n'a jamais ceiréd'c.
tre manifefte & vifible dans tous les iiecles Se dans tous les
temps, comme une ville placée fur la cime de la montagne ,
qui ne peut eftre cacliée , afin que les hommes y viennent de
tous lesxroins du monde J & par lapuilî^incequiluia eûëdon-
nce d'enhaut, elle a ordonné les Conciles &. les Canons, & elle
a. déclaré avec aflûrance les laints Livres qui doivent eftre con-
fervez , & aux loix defqucls il faut fe tenir J & du nombre de ces
Livres reçus font les Livres deTobie, de Judith, delà Sagefle,
de l'Ecciefuilique , de Barucfa.
D I X I E' M E M E N T.
^ Nous aflurons que î'Eglife a ordonné avec bonne raifon
les abftinences Se le jeûne du Carême aux Fidèles fes enfans
pour brider la concupifcence & l'empêcher de faire mal , pour
diriger les Fidèles dans l'acquifition des vertus. Et la preuve
de cela eft la parole du Seigneur : Quand l'Epoux fera enlevé ^
alors ils jeûneront.
ONZIEMEMENT,
Nous difons que le recours qu'on a aux intercefïïons de celle
a qui il appartient d'intercéder^ qui eft la minière du bien &: de»
bénédictions , qui eft nôtre Dame à nous tous , qui eft la Mère
du Salut, eft du nombre des chofes convenables , parce que
ç'eft par elle que vient toute la grâce de la vie , & qu'il eft im- '
poffible que fon bienaimé Fils confonde fon vifage, lorfqu'elle
'offre pour nous fes demandes, &; nous fupplions les Saints de
'Dieu ôvi fes Anges de lumière qu'ils lui prefentent nos prières ,
2c qu'ils intercèdent pour nous devant leur Seigneur , parce
qu'ils font nos médiateurs entre lui êc nous , comme I'Eglife en
fait mention dans l'Office des Martyrs, difant que Dieu a
exaucé les prières des Pères, Abraham, Ifaac, Jacob &;Jofeph.
En cette manière 'es enfans du jufte Abraham, bien que mis
dans leurs fepulchres , ont pu détourner la mort du peuple.
Et à canfe de David Jerufilem a efté fauvée de l'armée des
Egyptiens aux juurs d'Ezechias. Lesos du glorieux Jofcph ont
efté un rempart aux enfans de Jacob , lorfqu'ils fortirent de la
terre d'Egypte.
n'vec'lEgUje Romaine /nr t€uchxriflie. 719
DOUZIE'MEMENT.
Nous difons que c'eft une bonne chofê d'honorer 5c ado-
rer la Croix du Seigneur , 8c les Images des Saints vénérables,
parce que la Croix reprerente la qualité du Sauveur^SclesIma-
^es fe rapportent à celui qui ell reprefenté par elles. C'efl pour
•cela que nous les honorons comme nous honorons le Livre du
iainc Evangile , &nous baifons les reliques des os des Saints ,
&nous vifirons les Eglifes bâties à Dieu en leur nom, pour
avoir le bonheur de leurs bénédictions & des miracles qui pro-
cèdent d'eux. Et les Pères anciens ont ordonné que les Images
des Saints fufTent dans les Eglifes, comme leurs âmes font
dans le Ciel, & que le figne de la Croix fuft fur les Autels, &
les baluftres , & furies habits du Sacerdoce, & fur les tombes
des Martyrs 3 & fur les portes des Egiifes , & que les Prélats à
leurs MelFesôc Proceffionsôc autres chofes eufîènr toujours la
Croix enleur main droite, parce que c'eft par elle que le Fils
de Dieu a dompté le Diable ,& qu'il nous a délivrez de la
damnation, 6c il en a fait la clef du Paradis éternel.
TREIZIE'MEMENT.
Nous difons que l'Etat Religieux eft un chemin pour arri-
ver à la vie éternelle , l'homme méprifant le monde, &: ce qu'il
y a dans le monde , & s'ofFrantà Dieu en vidime volontaire.
C'efl: pourquoy cette manière de vivre efl: vertueufe , êc fcs rè-
gles font droites , & fes vœux font bons , & on eft obligé de les
maintenir Se de les garder. Nos purs Pères Se nos bons Saints
ont tenu cette voye par l'inipiration de l'efprit de fainreté.
Celui quilacombat.j combat leur nxafliere de vivre , êc celui
qui la r^iéprife , mcprife la vertu ^ la perfedion : Le Seigneur
ayant dit , St tu vetix,ejtre Jfarfait , va ^^ vends ce que tu as , é-
donne -le aux pauvres 3 ô" tu auras un trefor dans le Ckl ^ ^ viens
^ fuis moy,
., Q^UAT ORZIE'MEMENT.
■ Nous difons que les prières 5c la manière d'adminiftrer les
(acrez Myftcres ont efté ddcmenc compofez. Elles fe dilênc
XXxx iij
Ch. XVI.
yio Liv. VIIÎ. Freumi authent. de t union desTg. d'Or,
en langue Syriaque , en Grec & en Latin, & en d'autres lan-
gues, bien qu'elles ne foient pas entendues du peuple , parce
que nos anciens Pères ont compofé en ces langues, les priè-
res , les Meflès , &: le rite de l'Eglife , & que ceux qui leur onc
fuccedé ,ont marché fur leurs traces jufqu'à nos jours. Quoi-
que le peuple n'entende pas la fignificaiion des paroles, il lui
fuffit que ion intention (oit conforme à l'intention de l'Eglife.
Et à propos de cela il cft écrit dans les hiftoires des Religieux ,
de ce Religieux qui vint à l'Abbé Paftcur , Se fe plaignit à lui
qu'il ne fentoit aucun gouft ni plaifir à, prier , parce qu'il n'en-
tendoit pas le fens des paroles , le vieillard lui répondit : Mon
fils, ne fois point parefleuxà continuer de prier inceflammcnt,
parce que , comme l'enchanteur endort le ferpent, bien qu'il
n'entende pas les paroles du fortilege , de même tu confon-
dras le Démon , & tu le dompteras par la prière , bien que tu
ij'entende pas la fignification.
Q^U I N. Z I E' M E M E N T;
Nous croyons & nous profeflons que Dieu àquiefl là puif-
ikncefic la gloire àcaufe de l'abondance de l'amour qu'il porte
au genre humain, defire le falut d'un chacun des hommes, &
que par lès mérites de fon Fils bieiî aimé qui a livré fa vie pour
BOUS tous, il donneàunchacundenous la grâce qu'il fçaitnous-^
fuffire pour garder fcs Commandemens, & fauvernos âmes..
Et celui quife damne, fon péché eft fur lui, parce que de fa prol
pre volonté il a rejette la grâce deDieu,& a fuivi la cupidité de
Ion corps Et celui qui fê fauve, il faut qu'avec la droiture de fa
foy,il ait encore l'amour déDiieu &: la bonté des œuvres,efl:ant.
certain chez nous que la foyfans les œuvres eft une foy morte.
Enfin pour ne pas étendre davantage cette déclaration, nous
Qc nôtre peuple des Maronites , recevons fans déguifcrhent &:
de bonne foy ce que re<^oit l'Eglife de Rome la grandcj Se tout:
ce qu'elle rejette nous le rejettons , parce qu'elle poflede le-
premier Siège, & que c'éft-là qu'efl: mort Pierre le Chef d&s
Apoftres, que le Seigneur lui-même a établi la pierre vivede
la foy , & pour lequel il a prié que la foy ne manquât point ,.
afin qu'il confirmât Ces frères , qui font les Patriarches Sx. les
Prélats difperfez dans les quatre coins du monde.
Or poux ce qui eft de toutes les autres Nations Chrétien--
^wec ÏEglife Romaine /ur fEuchayifiie. jn
•nés qui font dans les climats d'Orient, il eft vray qu'elles font Ch. XVL
oppoieesen quelque chofeà nous&àl'Eglife de Dieu la Ca-
'tholique & rApofl-olique. Mais pour ce qui regarde les quinze
articles dont nous avons fait mention ci-delTus, ils les croyent
fermement , 2c d'autres Myfteres encore que nous paiTons fous
(îlence , 6c ils croyent cela parfaitement fans doute & fans
fraude -, & nous prions TUnité Divine dont la louange eft éle-
vée , qu'il conduife les cœurs de tous les liommes à la charité
- & à l'union , afin que tous foient unfeul troupeau fous un feul
Pafteur: &; Dieu eft témoin de ce que nous difons. Et voici
nôtre Cgnature -& le fceau de ce haut Siège fur lequel nous
fommes affis , qui témoigne pour nous , écrit dans le Monaf-
tere de Cannobin , le béni de Dieu le i z. jour de Juin , le béni
<ieDiew l'année 1684. des années d'Alexandre le Grec, qui i"e
rapporte à l'année 1673. depuis l'Incarnation du Seigneur , &
qu'à Dieu foit la gloire éternellement.
Suit le fceau 4u Siège Patriarchal , dans lequel eft gravée
l'image de la fainte Vierge tenant fon Divin Fils. Elle eft com-
tne fur une nuée , ■& on voit trois Croix autour de fa teftc , tc
autour ces paroles fontécritcsen Syriaque^ l'humble-ôcrabjec
Pierre Patriarche d'Antioche. Et fous ce fceau eft la fignaturc
de la main de Monfeigneur le Patriarche en ces termes ;
Eftienne- Pierre l'humble & l'abjet Patriarche d'Antioche.
Signatures des Evêqaes & des Prêtres , Religieux y
& de quelques Séculiers.
■Georges t humble d^ l'abjet Métropolite d'Acoura , fils de
Habnoux.
Joseph P humble ^ l' objet Métropolite de CebaeL
Jean l'humble ^ abjet Métropolite de Sydon.
Le Cure de PlERRE^^f/i de Mas.iouf, Religieux de S. Antoine.
Ze Curé ^f Geo kg ES ,fils de Jacques , Religieux de S. Antoine.
Moy le Curé Elie ,fils d!Aonyta de Caz^i , Religieux de S. An-
toine.
Moy le Prefire Stmeon ^fils de Jean de Heden y Religieux de
S. Antoine.
Moy le Prefire Abduccas , au. village de BeK^faya , Religieux
de S. Antoine.
Moy le Prefire Gabriel de Belorza , Religieux de S. An-
toine.
711 Li V. VI I ï. Trewves authen, de fumon des Eg. d^Or,
Jlfoy le Prefire Georges , Religieux de Saint Antoine.
Moy le Cure Moyse , qui dejfert le Village d'Afchkout.
Moy le Curé Harfouch du villaqe diBohel., qui dejfert l'E-
^life de S. Doumat.
Suie le feing des Jeux principaux Séculiers qui
font Gouverneurs du Pays de Xerroan
fousle Prince Hamed,.
Dit le Serviteur qui abefoin de "Dieu le très -h ont é" glorieux.
Moy Nader Abonnonsel , JîU de JTiafen d'Agelton dans
le JCerroan , Chevalier Romain , ^ Conful des Francs dans
la Ville de Barut , que nous Lt Nation des Maronites confef-
fons ^ profcffons tout ce qui efi expliqué dans ce cahier .^d^ qui efi
la parole de notre Seigneur le Patriarche Ejlienne , ^ des Sei-
gneurs Archevêques df Prêtres touchant certaines chofes delapoy
Catholique.
Moy le Serviteur qui a h e foin de Dieu le très, haut Fi ad ,/7f
fl'f Nador KaSEN ,7> confejj'e é- 1^ frofejje ce qui efi expliqué
dans ce cahier des chofes de la. Foy Catholique félon la parole des
Seigneurs fu [mentionne ■î^
CHAPITRE XVII.
Union de l'Eglife Grecque avec l'Eglife Romaine Jur l'Eucha-
nfiie dî' autres points , prouvée par deux condamnations des
Erreurs des Calvinifies faites par deux Patriarches dAn-
tioche..
LE Siège d'AntiocRe qui eftoir autrefois le rroinéme cîes
Patriarches ,& qui fut enfuire le quatrième depuis que
les Patriarches de Conftantinople fe furent élevez au fécond
rang par la faveur des Empereurs , fubfifte encore à prefenr, &:
fait partie de l'EgHfe Grecque , efïantunr de Communion avec
les Patriarches cje Conftantinople , d'Alexandrie & Jerufalem,
&c'èfl: l'autorité de ces quatre Pattiarchcs qui en règle pre-
fentement la foy & ladifcipline. Ainfi après avoir vu. par les
Atteftaeions précédentes, les fentimens du Patriarche de Cotj-
ûajitmople
avec lEglife Romaine fur l' Eucharijile, yij
ftantlnople dans l'Ade Synodal que nous en avons produit Chap.
de celui d'Alexandrie dans une Relation de M. rÂmbalîa. XVII,
deur , rapportée ci-deiïus , chap 10.6c dans les fignaturesde
l'atteftation de Conftantinopie , & de celui de Jerufalem dans
laLettre de Ne(flarius,& l'Acle Synodal de Dofithëe : nous fe-
rons voir ici que le Patriarche d'Antioche n'a pas d'autres fen.
timens qu'eux fur l'Euchariftie , &: fur les autres points pour
lefquels \&s Calviniftes fe font feparez de l'Eglife Romaine.
C'eft ce qui paroiftra clairement par deux condamnations
authentiques de leurs erreurs , qui ont efté faites par deux Pa-
triarches confecutifs , Macaire & Néophyte à l'occafîoa
delà difpute prefente. La traduâiion en a efté envoyée d'O-
rient , & elle eft apparemment du P. Jefuite qui les a obte-
nues. Les Originaux font Arabes, & font dans la Bibliothè-
que du Roy.
C07TBAMNu4TION DES C ALV J N I ST E^S.
far Monfciy/ieur l'ilh'flrifftTne (^ Rsverendi.ljîme Dom Ma- ^
C^ire Patriarche d'Antioche de la Uation des Grées.
Au nom dn Père , du Fils e^ de l'E/prit de Sainteté , un féal
Dieu , ^'^ c'cj^ à lui que nous demandons ajjijiance.
Voici les nouvelles des Hérétiques qui ont paru depuis peu ^
qui fe trouvent à prefent dans le Pays de la Gaule, c'eft à dire
de la France &: d'autres Provinces de I Europe , & qui fejfio'n-
ment Calviniftes. Ils nient toutes les traditions de l/Eglifê
d'Orient: Ils ont change &: annullé tout ce queles divins A pô^
très &les faints Pères qui ié font trouvez dans les fepc Conci-
les Oecuméniques ont ordonne : Usent rejette les coutumes
de l'Eglife Orientale , & ils ont aboli treize articles de fa bon-
ne croyance. ^ ,
Voici ce qu'a compofé le tres-faint & très heureux Père le
Seigneur Patriarche Dom Macaire Patriarche de la Ville de
Dieu Antioche la grande , 6>: c't ft pour les réfuter & pour dé-
truire leurs difcours téméraires,
CHAPITRE L
ILs difent touchant les purs Myfteresqu*Sl|)rès que le Prêtre
les a offjrrs à l'Autel , & qu'il a prononcé îur eux les paroles
fubftantiellesjls font la figure du corps de J. C. & de fon fang ^
mais qu'ils ne font pas en vérité fon corps & fon fanç.
Ytyy
7X4 L^v. VIII. Preuves authent. déTunion des Eg. d'Or.
RE'P ON SE.
S Cachez que chacun des quatre bienheureux Evangeliftes
a rapporté par rinfpiracion du S. Efprit dans fon Evan-
gile quelques uns des miracles de J. C. Se une partie de Tes
îàintes Ordonnances: mais pour ce qui regarde ces facrez My-
fteres , ils en ont tous parlé clairement. Us ont dit que le mê-
me Seigneur Mciîie dans ce même fouper prit du pain dans
fes faintes mains , qu'il le bénit, le rompit , êc le donna à Tes
Difciplesles faints Apoflres, leur disant , Prcnez^^mangez. ,ceci
efi. mon corps , lequel ejl rompu pour lu remi.ljton des péchez, : En-
fuice il prit le calice , i5<:il le mêla d'eau, il le bénit, & le pre-
fênta à fesDifciples ^ leur difant ,^faT'f^^» , Ceci eft mon fan(^
du nouveau Tejlament répandu pour votis , ^ pour plufïeurs pour
le pardon de 'vos pcchez^._ Puis il leur fît ce commandement ;
Quand vous vous affeynblerez^^ faites ceci en mémoire de moy. Ce
fera le pardon de vos péchez. Et il dit encore dans l'Evangile
de Jean : Celui qui mange mon corps ^ boit monfang a la vie
éternelle , ^ je le rejfuf-iteray au dernier jour ^ parce que mon corps
efi un vray manger , ^ mon fang une vraye boiffon. Celui qui
manie mon corps ^ boit monfing demeure en moy ^ je demeure en
lui. Et il leur dit ces paroles, parlant du pain Ôt du vin qu'il
leur a prefenté , aflurantque c'eft véritablement Ton propre
corps Se fon propre Tang, Comment donc fera ce la figure
de fon corps ? Ceux qui diîent cela ont menti , & ils ont donné,
le démenti à l'Evangile de Nôtre Seigneur J. C. & leur men-
fongeeft une doctrine du diable ,&:celaeft clair comme lefo-
leiL
CHAPITRE II.
Ls difent que le pain & le vin , quand le facrifîce s'accom-
plit, ne font point changez &: tranfportez de leur propre
fubftance en un autre eftat.
^ RE'P ON S E.
■ *
S Cachez que Nôtre Seigneur J. C. n'a pas coupé la chair
de fon corps , & qu'il n'en a pas faitfortir du fangpour le
donnera (qs Difciples, lorfqu'il leur a dit: Frenez^^ manzez^.
A'vec ÏEglife Komcùne fur V BîichAriflie , yij
Cccy eflmon corps : tî^ beuve^-, Cecy efi ynon fung : Mais , comme Chap.
nous l'avons rapporté , il leur prefencaen veritcdupam &du XVII.
vin,& il leur die : Cecy efi mon corps : Cccy efl mon fu/ig. Que
foienc donc confondus ceux qui parlant de ces Myfleres diienc '
que ce font la figure de Ton corps &c de Ton Tang. Ce difcours
efl tout à fait éloigne des traditions del'Eglife Orientale Ca-
tholique , parce que le pain 6c le vin par l'oblation du Preft.re,
& parla confecrarion qu'il en fait , & parles paroles fuhflan-
tielles qu'il profère fur l'un fie fur l'autre, en dilant : Cecy efl
won corps: ^ Cecy cjl mon fnig^ (ov\t changez, & tranfportez
deleur propre fubfi:ance,c'eft à dire de la fubftance du pain fie
du ym , fie palTent en la vraye bi propre fubftance de Notre
Seigneur J. C. 6c a|.rcs il ne refte plus du pain fie du vin oue
leurs apparences , comme nous l'a appris le Grand entre les
Saints Jean Bouche d'Or dans les Oraifons de fa MeiTcadref-
fëes à Nôtre Seigneur J. C. en cette manière : Vous efles pre-
fent parmi nous d'une fac^oninvifible,. rendez nous dignes de
recevoir comme de votre puifTinte fie glorieufe main votre
corps tres-pur fie vôtre très- précieux fang. Oui je crois que
c'eft-là vôtre corps très pur fie vôtre très- précieux fang. Il dit
de plus que la grâce fie la puiflance appartient à Dieu., qi;'elle
émane de ces paroles qu'il a proférées , Cecy cji mon corps : que
ces paroles depuis ce temps là jufqu'à la fin du monde font
opérantes: que ce font elles qui changent l'offrande piifée fur
les Autels desEglifes de tout le monde , parce que le Meffieeft
là prefent lui même en ce moment-là , bi. que c'eft lui qui ho-
nore la fainte Table , qui donne raccompliffement au faine Sa-
crifice.
CHAPITRE III.
GUtre cela ces Prévaricateurs ont die queîes vivansSeqne
les morts ne reçoivent aucun profit des Méfies que l'on
dit pour eux.
R E' P O N S E.
APprensque les grands fie les faints Pères nous ont com-
mandé défaire commémoration des vivansfie des morts
dans toutes les prières, ^ dans toutes les Meifescous les fame-
dis pour le repos des trépalîèz , fie ils ont établi un certain nom-
bre de famedis de l'année qui font connus , & toutes les
YYyyij
72,6 Liv. VFîI. Preuves authen. de Funion des Eg. dOr.
prières fon^ pour le repos de t©us les mores. C'efl: ce qu'a pref-
cric Denis le Juge & le Prefidcnt desScjavans. Et ce que nous
difons efl: aulîî confirme par Bafile le Grand & Grégoire le
Théologien, & Jean Bouche d'Or,& le grand Athanafe, 6c
d'autres Dodeurs de îa fainte Eglife : &: ils nous ont ordonné de
garder & de pratiquer cette bonne coutume. Celui qui lob-
ierve eft Sedareux de ces Saints i & celui qui la nie ôc qui la re-
jette eft du nombre des Hérétiques rebelles , parce que ces
Mefles font des Sacrifices purs & faints établis de Nôtre Sei-
gneur J. C. Se iesvivans &: les morts en reçoivent du profit ,
leur faifant mifericorde, & leur pardonnant leurs péchez,
quand ils font offerts pour eux félon la tradition que nous en
avons des faints Apoflres & des divins Pères que nous avons
citez ci-delfus. Et c'efl: de ces Sacrifices dont le Dieu Tres>
haut a prédit par la bourbe du Prophète Malachie , en difant :
Depuis l'orient du Soleil jufqu'à fon couchant mon nom eft
grand dans toutes les Nations , on facrifie en tous lieux , & on
offre à mon nom une oblation pure, parce que mon nom eft
grand dans toutes \^s Nations.
CHAPITRE IV.
D Avantage c^% Hérétiques ont dit que celui qui reçoit les
faints Myfteres, ne les reçoit pas véritablement & par-
faitement.
REPONSE-
S Cachez que nous avons par tradition que le Preftre qui
reçoit tout ce qu'il a confacrc à la Méfie ce jour- là , & que
le Séculier qui reçoit une particule des Myfteres, reçoivent
tous deux entièrement & parfaitement le corps du Meffie &
fonfang, &; non feulement une partie» & ceux qui le reçoi-
vent en bon eftat & en eftant dignes.^ en reçoivent le par-
don de leurs péchez ^ mais ceux qui le reçoivent en mauvais
eftat, Sceneftantindignes, en reçoivent leur jugement &une
peine éternelle. Et cette hoftie n'eft pas la figure du corps du
Meffie & de fon fang. Dieu garde d'une telle créance. Mais
c'eft le corps du Meffie même 8c fon fang précieux répandu ■■■
pour nous fur la Croix. Et celui qui en reçoit une petite ou une
grande partie reçoit tout le Mefiîe entièrement comme ce-
A^vic fEglip T{omaine fur ÏEuchuriflle. 717
lui qui confidere fon vifage dans Ton miroir y voit Ton corps Cha? .
& fon image dans fa perfeclion -, & ainfi lorfqu'ii rompe le mi XVIL
roir,5c le réduit en petites pièces, il voit en chacune de ces
pièces fon image parfaite en fon entier. De mêmic ceux qui re-
çoivent les faints Myfteres les reçoivent entièrement ^ parce
que dans l'Euchanftie le corps du Melfie fe mange entière-
ment , & dans toute fa perfedion par ceux qui communient ,
fôit dignement, loit indignement, fans qu'il endure aucune
douleur. C'eft pour cela que le Preftredit devant qu'il prenne
les Myfteres , 6c qu'il s'en communie : Nous partageons & nous
divifons l'Agneau de Dieu, &: nous en mangeons toûjourSj&. il
n'ellpoint diminué.
c
CHAPITRE V.
Es Hérétiques encore rejettent tous les jeunes que Die»
nous a prefcrits,
R E' P O N S E.
S Cachez qui que ce foit que le premier commandement que
Dieu a fait à nôtre Père Adam , eft cette fienne parole ,
mange de cela & ne mange pas de celajd'où paroift l'ordonnan-
ce du jeûne. De plus lorîqu'il donna un précepte au jufte
Noéau fortir de l'Arche, & qu'il lui dit qu'on mangeaft delà
chair comme on mangeoit les légumes &: les herbes , mais
qu'on ne mangeaft point de la chair avec fon fang, on voit en-
core clairement de là l'ordonnance du jeûne. D'ailleurs le
Prophète Moyfea jeûné deux fois quarante jours, &: pour cela
il reçut les deux Tables de Pierre. Voila encore une preuve
manifefte du Précepte du jeûne. Et après eux Nôtre Seigneur
J. C. fut baptifc, & eftant forti du Baptême il monta à la
Montagne, il jeûna quarante jours , & il nous a appris que
toute perfonne baptifée doit jeûner quarante jours chaque
année. De même les faints Apoftres après fon Afcenfioa
dans les Cieux firent une facrée alTemblée dans Jerufalem ,
& ils établirent plufieurs Canons qui font connus. Et en-
tr'autres ils ordonnent aux Chrétiens de jeûner deux jours
de chaque femaine , fçavoir le Mercredy fie le Vendredy ,
& de jeûner encore le grand jeûne de chaque année , comme
Y Y y y iij
yzî Liv. VH I. Prewves authen. de l'union des êg.d'Or.
a jeûné nôtre Seigneur J. C. Et de plus ils lui prefcrivirent de
jeûner un autre jeûne. Et la raifon de ce fécond jeûne eft que
les Pharifiens ayant interrogé Nôtre Seigneur,&: lui ayant die
pourquoy les Difciples de Jean & ceux des Pharifiens jeûnent-
ils beaucoup , 6c vos Difciples ne jeûnent ils pas ? il leur répon-
dit : Il n'eft pas à propos que les enfans des noces jeûnent pen-
dant que l'Epoux eft avec eux j mais quand l'Epoux leur fera
enlevé, alors ils jeûneront. Et de cette manière les SS. Pères
ont fait plufieurs Canons dans les faints Conciles par lefquels
ils nous ordonnent les facrez jeûnes , & ils nous commandent
de nous abftenir de manger de certaines viandes. De cette forte
les enfans de l'Eglife Orthodoxe ont rec^û par tradition de fie-
cle en fieclcj qu'ils doivent obferver cela jufqu'à la fin du
monde. Ceux qui le rejettent, &: qui contreviennent aux tra-
ditions de la fainte Eglife , feront comme des Payens Se des
Publicains, félon ce qu'a dit Nôtre Seigneur J. C. que celui
qui n'écoute point la fainte Eglife foit comme unPayen & un
Publicain.
CHAPITRE vr.
D Avantage ces Hérétiques difent qu'il ne faut point ho-
norer les Saints , parce qu'ils ne profitent point du toutà
aucun de ceux qui les honorent , qui ont recours à eux, & qui
Jes invoquent.
R E' P O N S E.
APprens qui que tu foiSj& dis- moi files Saints ne doivent
pas eftre honorez ; pourquoi Dieu le Très haut les a t'il
honorez dans l'ancien &dans le nouveau Tefcam.'nt ? Et pour-
quoi a t'il fait par eux défi grands prodiges & ce grand nombre
de miracles,& les at'ilprotegez 5<: confervez plusque les autres?
Car il a confervédans l'Arche de Noé&lfes enfans & leurs fem-
mes à caufede leur vertu , & il fit périr en ce temp^lâ tour ce
qu'il y avoir d'hommes dans toute la terre habitable. De plus il
a fauve Loth & fes deux filles de l'incendie, & il fit alors périr
tout le monde qui eftoit dans Sodome &: Gomorre. Il a rendu
célèbre la mémoire d' Abraham, d'ifaac 5c de Jacob, en difant :
Je fuis le Dieu d' Abraham,d'Ifaac 8c de Jacob, & il a fortifié les
Prophètes Moy fe &; Jofué fils deNum 6c Elie le zélé ôc d'autres.
avec VEgliJe Romaine fur F Euch<irifiie . 729
Il leura donné les vidoircs contre les Nations étrangères, & il Cka?,
a fait par leurs mains ces grands miracles^ & parlant de David , XVII.
il a dit .-Je protegeray la Ville de Jeru/âlem pour l'amour de
Il moi même & pour l'amour de David mon ferviteur. N'efl: il
pas vray que Dieu a ainfi honoré d'une manière particulière les
Prophe:es& les Saints? Comment donc n'efl: il pasneceflaire
de les honorer ? Il faut que nous les honorions,car cefontles
amis de J. C. & les héritiers de Ton Royaume. Nous élevons
des temples de Dieu en leurs noms, nous leur prefentons dçi
vœux, nous multiplions les prières que nous leur adreflbns,
principalement à Nôtre Dame la Vierge Marie Mère de Dieu
qui eft l'efperance de ceux qui n'ont plus d'efperance. Car le
Seigneur nous a commandé d'eftre faints par fa haute parole.-
Soyez faints, dit il , parce que je fuisfaint5 car en faifantcela,
nous accompliifons l'obligation que nous avons de /ervir le
Melîie , & cela eft un accroiflement d'honneur que nous lui
rendons. Tous les Livres rendent témoignage à cette vérité.
Car d.ins ces Livres on demande aux Saints qu'ils intercèdent
pour les vivans & pour les morts. Parce que les Chrétiens of-
frent leurs prières à la Mère de Dieu & à tous les Saints , ils ne
diminuent pomt le culte 8c le fervice qu'ils doivent au Meiïie ,
l'honneur & la gloriiication qu'on rend aux Saints eftantchofe
d'oblieation.
D
CHAPITRE VIL
E plus ces Hérétiques déclarent la guerre aux faintes
Images , 6c ils les appellent des idoles.
R F P O N S E.
Apprend qu'anciennement Moyfe ayant vu que les en-
fans d'Ifmaël avoicnt adoré de fouines, des poifTIms, des
oifeaux, des bêtes brutes, le Soleil 6c la Lune^ Dieu leur dé-
fendit d'adorer aucune reprelentation , de crainte qu'ils ne
tombaflènt dans l'idolâtrie. Mais Nôtre Seigneur J. C. qui efl:
le Soleil de Juft:ice,lorfqu'il commenc^a à paroiftre dans le mon-
dc,£c que le Roy d'EdelTe Abagarus lui envoya le Peintre Ana-
nias pour lui rapporter fon image , 6: que ce Peintre ne put la
tirer, le Seigneur Mcflie l'appella . ôc ayant demandé de l'eau
dont il lava fon très- pur vifage, il lui demanda la toile laquelle
7îô Liv. VII î. Preuves amhen. de Vunion des Eg. d'Or.
Abagarus Rov d'EdeiIeavoit envoyée avec lui. Il enefTuyafon
vil'age 5 Se auffi tofl: l'image de la facrce face y parut avec des
couleurs vives 6c bien teintes qui y furent imprimées. Il la lui
donna & il l'envoya à fon maiftre. Et cette image fit enfuite
paroiftre des miracles fans mefure & fans nombre. Elle fut en-
fin portée à Conftantinople, & de-là à Rome. Davantage après
l'Afcenfion du Sauveur Melîie dans le Ciel, Luc l'E va nge lifte fît
J'imace de Nôtre-Seiçrneur T. Cil fit encore les images des deux
Apôtres Pierre &: Pauli&il peignit trois images de Notre-Da-
me la Mère de Dieu. Quand il les eut achevées^il alla trouver
la Mère de Dieu , car elle eftoit encore en vie, & il lui raconta
ce qu'il avoit fait. Il la pria de venir avec lui, &: les ayant vues,
elle fourir, puis elle les bénir, & elle prononc^a ces paroles fur
elles, que la grâce qui cfl (ortie de moy, & qui eftoit dans moy
foit fur elles & dins elles Ces trois images ont opéré de grands
miracles, & elles en opèrent encore aujourd'hui. De même en-
core lorfque Pierre ôc Jean bâtirent une Eglile à la Vierge dans
la Ville Je Lyde, les Juifs & les Payens la voulurent enlever
aux Chiêtiens. Ayant porté cette afFaire devant le Juge delà
Ville, il commanda que l'Eglife fut fcellce, 8c qu'elle demeurât
fermée pendant tro;.^ Tonrs,après quoy il entrâ-dedans, & aufîî-
tol â l'improvifte l'image de la D-emc,qm eft Nôtre- Dame,vinc
à paroiftre fur un pilier. Il ordonna à 1 inftant que cette Eglife
reftât aux Chrétiens. Et cette image produifit une infinité de
miracles. Ainfi cette image que les Juifs firent faire à la Tybe-
riade,Iorfqu'ils corrompirent par prefens un Peintre Chrétien
& qu'il leur peignit félon leur demande l'image du Meffie en
Croix, & qu'ils la reçurent de lui, lui ayant donné des prefens ,
6: qu'ilsla mirent dans un lieu fecret près de leurSynagogue im-
pure , ils commencèrent à s'en mocquer , & un d'eux fauta def-
fusj& planta dedans fon couteau. Au même inftant fa main def^
fecha , £v il fortit quantité de fang de l'image, & ce farg fit un
grand nombredeguerifons.il y eut desaveugles dont les yeux
s'ouvrirent , des fourds qui oiiirent, des muets qui parlèrent ,
des boiteux qui forent redrefre2,& toutes fortes de maladies &L
dedouleursquifurent gueriesXa main même de celuiqui l'avoic
frappe re(^ut la f^nté. Pareillement S. Athanafe le Grand ra«
conte que «Jans h Ville de Berithe de Syrie , un Juif fe logea
dans une noaifon de Chrétiens , que lui & les Juifs fes compa-
gnons s'apperçûrent d'une image de Nôtre Seigneur le Mef^
fie
Afvec rêgUfe Komnine fur r Eucharijîie. 751
/îe quieftoic en cette maifon.Ils s'en mocquerent, & le Juific Chap.
levant la frappa d'un couteau. Il en fortit fur l'heure une XVII.
grande abondance de fang-, la main de ce Juif devint feclie • il
Ja frotta incontinent de ce fang , & elle fut guérie. Ce fin"-
guérit aufl] plufieurs perfonnes incommodées & malades. En
outre l'imnge de la Vierge Marie, lors qu'on l'apporta de je-
rufalem dans le Monaftere Said naïa,qui fe nomme de fon nom
comment trouvât- on qu'elle eftoit devenue corps (& chair)?
Et une liqueur en découloic continuellement, & en décou-
le encore à prefent , & elle a fait de grands miracles. Qiiantitë
d'autres chofes ont paru par le moyen des faintes Imacres à
Conftantinople &; ailleurs. Et il s'efl: fait des miracles dont on
ne peut trouver le nombre. Où eft doncceluy qui ofe dire
qu'il ne faut pas adorer les Images &; les honorer, puis qu'il
eft évident de ce que nous avons rapporté cy-deflus, que nous
fbinmes obligez d'honorer toutes les faintes Images.^Car l'hon-
neur qu'on rend à l'image va à fon prototype félon ce que die
S. Bafile le Grand. Et les faints Pères du feptiéme Concile
Oecuménique ont excommunié tous ceux qui n adorent pas les
Images, 6c ceux qui difent que les Chreftiens en font des Dieux.
c
CHAPITRE VIII.
Es hérétiques difent qu'il n'eft pas neceiïaire qu'il y ait
dans l'Eglife une Hiérarchie.
RE'PONSE.
SCachezquel'Eglifeeftappelléeun Ciel terreflre, oii com-
me dans le Ciel il y a neuf Ordres d'Anges qui fervent
Dieu dans 'es lieux hauts & qui le louent , il y a de même dans
la fainte Eglifedu Meffie, qui eft fur la terre, des Ordres Ec-
clefiaftiques qui fervent Dieu , & qui communiquent aux
fidelles la glorieufe grâce du Sacerdoce. Car vcila comme
parle le Patriarche avec les Evêques qui l'afTiftcnt lors
qu'il prie fur luy. 0 Seigneur^ donnez^a voflre fervitcur que
•voila icy la force de la grâce de vojhe Saint Efprit j Fortifiez^
le comrne vous avez^fortifié les faints Apoflres^ (^ comme vous ave-z^
oint les Prophètes (^ les Rois , ^ comme vous avez^fanciific les
Pontifes-^ fanBifiez^le ^ rendez- le irreprehenfble ^ fans defmt
dans la dignité du Sacerdoce j ^ ornez^ le de toute pureté , ' C^
ZZ zz
732. Lîv. VIII. Vreu^es authent. deVunion des Eg.d'Or.
faites qu'il (oit le conducteur des aveu'ilcs & la lumière de ceux
qui font dans les ténèbres , gS l'infiruticur des iz/iorans , ^ le
maifire des enfans ^ l'afirc du monde. Il paroift de-là qu'il efl:
neceiraire qu'il y ait dans l'Eglife un ordre de dignité dans
le Sacerdoce. Et le grand S. Bafile dit dans fa MelTe: Souvenez
vous, Seigneur, desPreftres lesferviteurs du MeiFiCj 2c de tous
les Ordres du Sacerdoce.
CHAPITRE IX.
Es hérétiques ont encore dit quM n'efl: pas neceflàire
qu'il y ait d'Evêquesen l'Eglife.
RE'PONSE.
k P prend que le degré desEvêques eft neceflaire, & qu'il'
doit élire dans l'Eglife Orthodoxepour la conduite des
eroyans; parce que l'Evêque veut dire furveillant &: Pafteur
d'un troupeau, & toutes fortes d'animaux ont leur Pafteur.
Comment donc les Chreftiens qui font des ouailles raifonna-
bles feront ils fans pafteur, c'efl à dire fans Evêque? Le Pro-
phète David appelle Dieu Pafteur, lors qu'il dit: O Pafteur
d'Ifracl , écoutez: le Seigneur Meffie parlant de foy 3 Je
fuis, dit-il, le bon Pafteur, Scje connois mon troupeau, &mon
troupeau me connoifl:: Et le Seigneur a dit qu'au jour du j'ige-
ment_, il fepareroit les Juftes des pécheurs, comme le bon Paf-
teur fepareles agneaux ces boucs, & c'efl luy- même qui avanc
fapaiTion confacra l'Apoftre Jacques fils de Jofeph & le fit pre-
mier Evêque de Jeruf-ilem, & c'eft luy qui après fa fainte Re.
furredion interrogea Pierre par trois fois, & qui luy dit, M'ai-
mes- ta Pierre? & il luy repondit, Oiiy, Seigneur. Le Seigneur
luy dit, Pais mes béliers, pais mes brebis, pais mes agneaux. Que
il le Seigneur &: le Seigneur à qui eft la gloire, s'eH: appelle luy-
même P^'ideur , bc a commandé à fes Àpoltres de paiftre fon
peuple, il (uit delà qu'il eft necefifaire que dans route l'Eglife il
y ait un Evêque, c'efl: à-dire un Pafteur pour les agneaux du
Mefiîe. Et l'Apôtre Paul dit; Soyez vigilans& fur vous-mêmes
&: fur le troupeau, fur lequel Dieu vous a établi Evêque. En
effet le degré d'Evêque doitcflre de neceffité dans les Eglifes
du J\leiîie.
.mjst ÎBglifi T{omaine fur tEuchariflie. 733
Chap.
CHAPITRE X. XVir
CEs hérétiques ont auflî dit que l'Eglifedu Meffîeavoit
péché 6c manqué, pour avoir ordonné certaines cho-
fes , & établi des Canons qu'il ne faut pas garder.
RE'PONSE.
SCachezquerEglifeCathohquedu Meffiene pèche jamais
en aucune manière. Elle eft vifible Se perpétuelle fur la
terre, & elle efl: mcapable d'erreur. Elle eft le fondement & la
colomne de la vérité , 6c le Meffie eft avec elle jufqu'à la con-
fommation du mcnde. L'Efprit Paraclet eft en elle, 6c il de-
meure avec elle éternellement. C'eft luy qui a infpiré les di-
vins Apôtres 6c les faints Pères , 6c qui a parlé par leurs lan-
gues, afin qu'ils établiffent des loix 6c des canons, des précep-
tes 6c des ordonnances, & ils n'ont point péché en cela , mais
ils ont touché le but, 6c toutes leurs paroles ont efté (elon la
loy, ^ le bon chemin. S. Bafile le Grand dit dans la MefTe en
addreftànt fa parole au Seigneur; Nous zous demandons en-
core^ 0 Seigneur , que vous -vous fouveniex^ de voflre fainie Egli-
fe Catholique , Apofioltque qui eft depuis les extremitez^ de la
terre jufquk fes autres extremitez^ que vous avez^acquifes-parle
fang précieux de voftre Chrift. Faites-la fubfîfler en paix^ & af.
fermijjcz^ cette fainte maifon jufquk la fin du ^ecle.
c
CHAPITRE X.
Es gens là cntaufll dit qu'il n'eftoit pas vray qu'il y euft
fept Sacremcns dans l'Eglife.
RE'PONSE.
Pprend que les Prophètes premièrement^, & après eux
^ _^ les Apôtres en ont parlé , 6c ils ont fait mention de fept
Efprits de Dieu. Qiielques-uns les ont appeliez dons, d'autres
les ont nommez colomnes , d'autres leur ont donné le nom de
grâces, 6c en vérité ce font fept dons. Le premier c'eft le Bap-
tême jle 2. le divin Chrefmei le 3. les faints Myfteres;le4.
ZZ z z i i
' 7H L^v. VI 1 1. Treunjes nuthent. de l'union des Eg. d'Or,
la Confeffion ; le 5. la fainte Huile pour les malades ,1e 6.
la Couronne du Mariage j 6c le 7. le Sacerdoce. Celuy qui
croit à ces facrez dons, il les poflede , & ils defcendent fur
luy , 6c celuy qui les rejette n'y a point de part.
CHAPITRE XIL
Eplus ces hérétiques ne croyentpas, 6c n'admettent pas-
tous les faints Livres.
RE'PONSE.
S Cachez que les faints livres font le fondement de noftre
foy,& que c'efl: d'eux dont parle le Seigneur dans le pur
Evangile où il nous dit : Recherchez dans les Ecritures -, car
elles rendent témoignage de moy. Et il dit encore : Moyfe a
écrie pour moy. Et outre cela il dit , comme il eft rapporté
dans le S. Evangile , Kaie n'at - il pas bien dit de vous.? De plus
leSeigneur cite dans l'Evangile des témoignages delà Prophé-
tie de David &: d'autres. Et pour cela noftre Seigneur a confir-
mé ces fainrs livres qui eftoient devant la venue du Seigneur
Meffie , en ayant rapporté des témoignages, 6c les ayant con-
firmez Davidadicencore que Dieu a parlé dans Tes Saints. Que
ces defobeïirans opiniaftres (cachent que nous recevons tous
les facrez 6c divins Livres , dont il eft fait mention dans les
Conciles de l'Eglife Orthodoxe, ^ dans tous^les autres livres
des faints Pères. Et du nombre de ces livres font l'Apocalyp-
fe, l'Epiflre de Jacques frère du Seigneur, Tobie, Judith ,1e
livre de la Sageife de Salomon,le livredeTEcclefiaftique, 6r
\cs Macabées. Nous les recevons tous., ôc nous les lifoas dans
l'Eglife pure, fainte, 6c orthodo^^e..
CHAPITRE XIIL
CEs hérétiques nous reprefentent auffi avec honte la fer-
meté avec laquelle nous nousattachons aux traditions de
l'Eglife iaince j, orthodoxe jdonc nous avons fait mention.
', a<vec tEglife Koma,me fur rEchurifiie. 735
RE'PONSE.
S Cachez que ces chapitres mentionnez font venus jufques à
nous par la tradition des divins Apoftres &; des famts Pè-
res, & connoifîant que ce font les bonnes &vrayes croyances,
nous les profelfons d'une profeflion parfaite bi entière du fond
du cœur & d'une langue véritable) 6c nous prions le Créateur
qui veut que tout le monde fe fauve, 6c qu'il arrive à la con-
noiflance de la vérité. Nous le prions qu'il confirme tous les
fidelles dans cette vraye & droite foy, &: qu'il amené à fa
croyance ceux qui n'y croyent, parce qu'on n'eftlauvé qu'en
la recevant, & qu'on eft damné en la rejettanc. Que tous ceux-
là foienc confondus qui calomnient noftre pure 6c fainte Eglife,
& qui luyimpofent d'embrafler de mauvaifes croyances, 6c que
leurs langues deviennent m.uettes. Ayant confirmé la vérité,
nous l'avons foufcrite de noftre main, 6: nous l'avons fcellée
de nôtre cachet dans la ville bien gardée de Dieu la ville de
Damas.
Mo^ le -pauvre Mac Ai RE Patriarche d'Antioche la ville de
Dieu , le 20. jour dumois d'Oclobre de l'année Chreftienne 1671-
répondante à l'année jzSoo. de noflre Père Aàam,^ a l'année
J0S2. de l'Hepre , ^ nous demandons à Dieu qu'il nous ajjîfte^
qu'il fait glorifié à jamais.
Suit le Seing que le Seigneur Patriarche a écrit & cacheté de
fa propre main, en cette manière.
Gloire a Dieu a jamais.
Ma CAIRE par la mifericordc de Dieu Tres-haut Patriarchs
âAntioche O^ de tout t Orient.
Dans le cachet eft l'image de Pierre afîîs dans fon Siège Pon-
tifical, hc fon nom en lettres Grecques, Se l'écriture d'alentour
eft Grecque d'un cofté, 6c Arabe de l'autre, 6c elle eft conçue
en ces termes ,. Macaire par la grâce de Dieu Patriarche
<i'Antioche.
JEnfuite font divers Seings en cette forme.
Cette' croyance expliqués par la langue de Isfojlre Seigneur
ZZzz iij
730 Liv. VII i ^nwves authent. de l" union des € g. d'Or,
le patriarche efi ncjîrc croyance de nous autres Grecs , C?" j'en
rends témoignage moy.tndizne (J!^ l'aiijei G K.i.GOi ke nommé l^r-
chevefque de Befra (^ du pays de Hoaran.
Cette croyance expliquée par la bouche de noftre Patriarche , efi
la croyance que nous avons nous autres Grccs.']e le témoiqne moy le
pauvre Ctiré ]iK^'fils de Taschat, qui fuis tm de ceux qui fer- ■
vent aujourd'huy dans l'Egltfe de Damas ^ de Syrie.
£t moy au^z ^oszvH de Saudah.
Cette croyance cft ma croyance le pauvre Curé Abd-Pla7,im Helar.
Et c'efi auljî la mienne moy le Curé Michel Akem.
"Je croy ^ je profejfe de cœur (^ débouche cette croyance moy l'in-
digne & l'abjet entre les Prefires le Curé Jean qu^on nomme
Ebneldib.
le croy ^ profejfe cette croyance moy le Curé Michel le Gra-
veur., ^moy aufji le Preflre Mo^sv..,^ moy auj/i le Preftre Joseph.
A la fin efi: lafoufcription du plus confiderable des feculiers
Grecs qui foient à Damas. C'eft le Seigneur Michel Gon-
doles Maiftre de l'arcilleriedu Chafleaude Babylonne. Elle
efl: de fa main 5 & comme il ferait 6c écrit un peu Italien , il
l'a voulu écrire en cette langue. Au bas efl Ton cachet dans
lequel Ton nom &, fa qualité font écrits en Turc.
Ce font les veritex^ faintes (jr- indubitables de l'Ecriture divine,
qui efi l'ancienne ^ la nouvelle., que ce dont il efi fait mention en
ce livre .^ (^ nous tenons fermement celte croyance dont nous conve-
nons univcrfcllcment avec les Romains. C'cji nofire témoignage
donné à U ville bien gardée de Sidon de la propre main de moy K E-
RARAMA Evefque V'icairedu Seigneur, Père Macharius Patriar.
che d'Antioche , l'année du Mcjjie 16/1. dans le cinquième pur
au mois de Décembre.
C'ejl icy nofire foy ^ nofire croyance.^ la benediclion fait fur eux
ceux qui la, croy ent fermement , S" qui font alliez^ dans cette foy.
C'efi fur quoy font fondezje frère le Curé Jean le frère le Curé
Michel , é/" /^ /rrr^ le Curé Paul, le cinquième Décembre.-
C'efi dans la mèm.e ville (^ dans la même année.
Et moy encore l'abjet Jer-Emie, je confeffe avec nofire
S'='igneur le Patriarche que tous les Grecs conviennent en ce-
avec la fainte Eglife de Rome qui l'a pris de l'Ecriture
divine à l'imitation des Apoftres, & je Ta y attelle à Sidon
l'an du Meiîie 1671. le 5. Décembre
Le plus vil 6c l'abjet parmy les principaux des Prefires
A^ec l'êgUJe ^{omatrtefiir tSuchari^ie. 737
Jeremie ferviteur delà Chaire de T'r, Sidon &c leursdëpen- Chap.
dances. Il nous eft parvenu un livre plein de foy compofé par XVII.
n6tr<ïSeigneurPacriarched'AnciocheKt;pAta.x;ocpio; pour la con-
verfion des Hérétiques, donc les paroles font fauftes &; defec-
tueiireSjainfi qu'il l'a attefté parla fignacure defamainfanclifiëe
Scfceliée de Ton noble fceau. Nous l'avons mis avec noftre bé-
nédiction entre les mains de Monfieurde Bonnecorée Conful
de France refidentàla Ville de Sydon quialemêmedefirque
nous. Et quant à la croyance qui eft expoféeparnoftre Sei-
gneur le Patriarche fur le fujet de lafainte Euchariflrie & des
autres mvftéres de l'Eglife Chreftienne, je l'avoiie, le croy 6c
le confeffe de coeur & débouche moy le pauvre abjet parmi
les Preftres, le Curé Jean de Chehirban Tachât , Serviteur de
l'Eglife de Damas defireux.
^infi le croit é- leconfeffe moy le Curé M i cwel^Is de KTachab.
Et -moy le Curé AbdELAZIN Elma Keneba//j-^^ Halab.
AVTRE CONDAMNATION DE PLVSIEVRS AVTRE3
erreurs des Calvinifies portée far ledit Seiytcur Patriarche
d'Antioche de la nation des Grecs.
Au nom du Fen^ é" du Fils, é- de l'EJprit defainteté unfeulBieu.
CHAPITRE PREMIER.
Après avoirappofc noftre cachet ,& fignë de noftremain
l'explication que nous avons faite cy-deiTus des chapitres
fufmentionnez^Nous avons oiiy dire que les prévaricateurs
dont nous avons parlé ont ajouré à leur blafphême (uf-
ditj & qu'ils ont aboli l'ufage du figne de la croix, & qu'ils
ne le font point fur leur front. Ne fçavenc-ils pas que c'efi:
une coutume prife du temps même de-Noflre Sei^neuf J. C.
Carlorfqu'il rompit le pain il forma defTus le lïo-ne delà
croix , comme nous le tenons par la tradition que nous en
avons receûe de S. Bafile le Grand , bi. des autres Saints. Les
Apoftres duMeffieont fait le même fùivant les traces de leur
maiftre, &: S. Ignace le reveitu de Dieu Patriarche de la Vil-
le d'Antioche, a ordonné de cette manière aux fidelles d'en
ufer ainfi, &: c'eft par luy que cette chofe s'eft épanduë,& ren.
duc célèbre par toute la terre habitée. Enfin ce fîgne a paru
parmy les cclacantes étoiles du ciel par trois foisàl'Empe-
758 Liv. VI I ï. Preuves authcnt. de r union des Sg. dOr.
reur Conflancin le Grand. Et il y avoic à l'cntourune écriture
Grecque qui eftoit conçue en ces termes: Conftantin tu vain-
cras les ennemis p^r ce figne. La première fois ce figne luy
parue dans le païs de la Gaule 5 la féconde foib fur la rive da
fleuve Thanofis, & la troifîëme fois lorfqu'il eftoit à Bizan-
ce. De cette forte on voit l'obligation qu'ont tous les Chré-
tiens de faire le figne de la croix fur le front & fur leur corps
pour en eftre fandifiezj & pour chalfer loin d'eux les démons,
CHAPITRE SECOND.
Touchant l'eftat Religieux, fes voeux, & fes obligations.
Ces prévaricateurs ont dit que c'ëtoic une invention de
Satan.
R E' P O N S E
S Cachez qu'auparavant la venue du Meffie Noftre Sei-
gneur J. C. le Prophète Elle , & faint Jean Baptifte ont
mené cette fainte vie ,& que lorfque Noftre Seigneur J. C.
vint a paroiftre, il voulut confirmer cette bonne coutume,^
il die que celuyqui veut me fuivre renonce à foymême, qu'il
porte fa croix, & cju'il me fuive. Or pour l'amour de cette
parole l'on a veu dans le monde un nombre infini de grands
hommes qui ont embrafTé Paufterité, & habité les Deferts,
& les Anges les fervoienr, & ils ont fait de grands miracles.
Si cela eftoit une invention de Satan, comme ces gens là di-
fent, elle n'auroit pas été recherchée par aucun des Saints
tels qu'ont efté Antoine, Macaire, Sabas & Symeon le Stilite,
& plufieurs autres qu'on ne peut nombrer qui ont fuivi leur?
traces
CHAP.
c
Anjec tEglife Koma-ine JuYÎEuchiinflie. 759
Chap,
CHAPITRE III. XVII.
I Es Prévaricateurs ont dit auflî qu'aucun des grands Pa.
triarches & Prélats n'avoient la puiiïance de donner à
qui que ce fût des Fidèles des indulgences pour Tes péchez , 6c
qui hilTènt utiles aux vivans & aux morts qui ont pechéj &: qui
font obligez à des pénitences.
R E' P O N S E.
S Cachez que Nôtre Seigneur à qui foit gloire a dit à {ts
Apoftres en plufieurs endroits : Tout ce que vous lierez^fur
la terre fera lié dans le Ciel , (^ tout ce que vous delierez^fur la.
terre fera délié dans le Ciel. Et cnfuite après fâ fainte Refurrec.
tion il fouffla fur le vifage de fes Difciples , £til leur dit : Re~
cevte^le S. Efprit. Les personnes à qui vous remettrezjcurs pechcx^^
ils leur feront remis , (jr ceux à qui vous les retiendrc:^^ ils leur fe.
ront retenus. Qiie fi on dit que Nôtre Seigneur J, C le Mcfîie
a donné cette puiiïance à fes Apoftres feulement , & que les
Apoftres du Meliie font fortis du monde , &que les gens da
temps où nous fommes n'ont pas le pouvoir de faire comme les
Apoftres^ nous répondons que fi la parole du Mefîîe eftoit
adreffee feulement aux Apoftres , il s'enfuivroit que la fov du
Meffie & fa fainte Eglife ne font plus depuis que les Apoftres
font trépaflèz. Mais leur ayant dit : Voilà, que je fuis avccvoiis
tous les jours jufqu'à la confommation du ftecle j il cA afTeuré que
le Meffieeftavec les Prélats leurs fucceflèurs jufqu'à la fin du
monde. Et faint Paul l'Apoftre après avoir livré a Sataa celui
qui avoit pris pour femme la femme de fon père, lui pardonna
enfuite , & lui donna indulgence. Ainfi plufieurs àz% Patriar- .
ches & des Prélats ont donné ab(olution , & indulgence à plu-
fifurs des pécheurs coupables , afin qu'ils en reçulîent abon-
dance de bénédictions , & que ce leur fut un payement auprès
de Dieu pour ce qu'ils lui doivent à caufe des peines penicen-
tielies aufquelles ils font obligez.
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740 Liv. VI I î. Preuves authent. de tunion des Eg. d'Or.
•CHAPITRE IV.
CEs Prévaricateurs ont cic de plus que Dieu a impofc aux
hommes des Commandemens qu'il ne Jeur tiV pas poffi-
ble d'accomplir, & qu'il ne les aide pas de ù grâce èc de ion
afliftance fuffifante.
R E' P O N S E.
PArce que les Conrimandemens de Nôtre Seigneur fonc
aifez & légers , il nous a dit : Venez^ à nioy vous qui efies fa-
tiguez^^ ^ qui avezjle pefants fardeaux , (^ je voui mettray en re-
pos. 11 paroît de- là queNôtre Seigneur n'impofe pas àfes fervi-
teurs de pefancs fardeaux , mais des choies bonnes bc légères ^
êcil nous a donné fa grâce Se la pcilTance, c'eft à-dire le libre
arbicre fur nour..mêmes pour fuir le mal Refaire le bien. Et ce-
lui qui tombe en pechéy tombe par la malice de fa volonté , 6c
il eft rebelle au S. Efpritquil'appelleàobéïr àDieu ,2càiâuver
fon ame.
CHAPITRE V.
c
Es Prévaricateurs ont dit que le Meffie n'eftoit pas mort
pour tous les hommes 5. mais pour quelques-uns lèule- 1
. narce Qu'il n'a oas voiiiu le falut de tous. *
"âîient , parce qu'il n'a pas voulu le falut de cous.
R E' P O N S E.
S Cachez que ce difcours efl: contraire à la Foy Chrétienne,
parce que l'Apoftre S. Paul dit que tous les hommes eftanc
pécheurs, le Meffie efl: mort pour tous , afin de les fauver. Com-
ment donc n'eft-il mort que pour quelques uns? Et outre tous
les hommes eftanE fous la maledidion originelle qui eftoit fur
Adam ôc fur fa race, &: aucun des Saints ni des Prophètes n'é-
tant capable de les fauver,Ie Mefîie apparut en perfonne,& il les
a fauvez par fes fouffratices, & par fa mort , & par fa Refurrec-
tion, &: il les a tous fauvez. Et pour ce qui regarde cette paro-
le des Heretiques,qu'il ne veut pas le (alut de tous, comment
eft ce donc qu'il a dit , lui dont le nom eft très- haut j je ne fuis
pas venu pour appeller les juftes, mais les pécheurs à pénitence?
Afvec tBgîi/è "Romaine /ur ÎEuchurifiie. 741
Ec il a die encore que le Ciel &la terre fe rejouironc pour un Chap.
pécheur qui fait pénitence plus que pour quatre-vingt-dix-neuf XVII.
juftes qui n'ont pas befoin depenitence.Ecil nousaapportéplu-
/ieurs paraboles à ce fujec , & celle de celui qui avoit cent bre-
bis dont une s'égara, l'ayant trouvée, il en eut une extrême
joye. Ecil a dit que Ton Père fe réjouit pour le retour d'un pé-
cheur à la pénitence , & il nous a apporté la parabole de l'en-
fant qui prit fa part. Le feul mot Aralafchather Hgnifie tout
cela II «xprime mieux que celoi de Prodigue qui eut averfîon
de fa maifon paternelle, qui la quitta , & s'en alla dans un Pays
éloigné 5 &• d'autres exemples. Et S. Paul a dit, que Dieu foit
béni, lequel veut que tous fe fauvent, ôc qu'ils arrivent à la
connoiflance de la vérité. Il y a quantité de témoignages pour
cela dans les faints Livres. Ceux que nous avons produits nous
fuffifentv
c
CHAPITRE Vî.
Es Prévaricateurs ont dit que les pèlerinages aux lieux
fàints eftoient chofcs vaines & fans fruit.
R E' P O N S E.
Comment donc Dieu commanda t'il 'à Moyfe d'ordotr-
ner aux Enf ans d'Ifraël des vifîces à }erufalenrtrois fois^
l'année à la Fête de Pafques,à la Fête de la Penref-oOcySc à cel-
le desTabernacles,qu'ilsadorafl?nt en ce lieu là,&: qu'ils y pre,
fentaflent des facrifices & des ofîi'andc*? Si les pèlerinages ionc
chofes vaines, comment Dieu commandoit-il celui-là ? Si ce
font chofes vaines , pourquoi les Apoftresdu Meffie parcou-
rant la terre, & prêchant la Foy Chrétienne, retournoient- Ip-o,, nomme
ils à Jerufalem pour y adorer > Ce fut !à qu'ils firent un (aint ia FefteHcia
Concile , & qu'ils établirent de faints Canons. Et comment eH- ^^t"'^^^ "
I I A T 1 n Aritje, parce
ce que S.Luc l'Evangelilte raconte dans tes Adesdes Apoftrcs, qu<;c'eftfe
<jueS Paul l'Apoftrefe preffoitfort pour pouvoir faire la fefte commence-
ir>-\T/-i - ment do la
du Principe a Jeruialem ? ^ Lq,. Mofnïqne
Il y a plufieurs preuves femblables, &; la pIûparB des grands iciuc-icn:c.
Saints font allez en ces faints lieux , 8c ils y ont adoré , & ils y j^," ^'j^-^'™'
ont reçu, heureuienient lagracedu S.Efprit,àcaufe delà pet- conjcamc.
AAaaa ij
e
013 r-
c
74i Liv. VIII. Preuves authent. de l'union des Eg. d'Or.
ne qu'ils avoient prife , êc de Ja foy qu'ils avoient. Il s'enfuit
que ceux qui adorent dans les fajnts Lieux en retirent un grand
profit.
CHAPITRE VII.
C Es Prévaricateurs difent encore qu'il efl: permis aux Re-
ligieux & aux Evêquci de ie marier, Se qu'en le failànc
ils ne pèchent point.
R £■ P O N S E.
S Cachez que tous ces Evcques & ces Religieux, auparavant
que de vêtir l'habit Angélique, fe font obligez par vœu'
de leur plein gré , & fans contrainte , & fans violence , & ont
dévoilé leurs corps pour eftre les Temples de Dieu. De plus les
Apoftres du Meiîîe , & tous les faints Pères ont ordonné aux
Evêques& aux Religieux de ne fe point marier , 6cde garder la
continence & la chafleté. C'eft pour cela que mille & mille
perfonnes vertueufes & mortifiées ont tenu le facré chemin ,
(Se ils ont beaucoup plu à Dieu en cela.
CHAPITRE VIII.
EN outre ces Hérétiques ont dit qu'il n'eftoit pas permis
d'ufer dans les Eglifes de langues étrangères qui ne font
point entendues par le peuple du Pays pour les prières que l'on
fait.
R E' P O N S E.
S Cachez que les faints Apoftres ont parle de toutes fortes de
langues dans tout le monde , & que les Docteurs de l'Eglife' ^
s'énonçoienten plufieurs langues, & ils nous ont laiilé ordre de
nous fervirdes plus nobles. L'oiiye du peuple ert: fanftifiéeen
prononc^ant ces faintes paroles, &: les entendant dire. Elles font
que les Anges qui les entendent fe rendent prefens, Si. leur
vertu oblige les démons de fuir. C'eft pour cela que nous prions
dans nosÈglifes & dans nos maifons en Grec Se en Syriaque.
Il y a des lieux près de Damas ou les Grecs prient en langue
Syriaque dans leurs Eglifes.
Tout ce que nous avons expliqué dans ces chapitres fait par-
I
awec ÏEglife Romaine /urr€ucha,njîie. 745
cie de nôtre Foy & de notre profeffion Orthodoxe. Et nous Chap.
avons confirmé la vérité par la foufcription de notre main , & XVII.
par notre cachet dans la Ville de Damas gardée de Dieu. Le
quinzième du mois de Novembre de l'année Chrétienne i6;^i.
répondante à celle d'Adam nôtre Pure 7i?>o.
Gloire a Dieu a jamais.
'M.KCKiK'È.parla mifericorde de Dieu très haut Patriarche d'An,
tioche (^ de tout V Orient. Le Cachet Patriarchal cft pofe au mime
lieu. Enfui te font diverfes foufcriptions en cette yyitintcrc.
C'e/i ainfi que je crois moy l'indigne ^ l'abjet Grégoire ^r~
chevelue de Bofra ,C^ du Pays de Houran.
Je crois (y- je profcffe cette créance de cœur (^ de bctiche ,mo\ le
pauvre d^ l' indigne d'entre les Preflres le Curé Jean connu fous le
nom de T ASCHAT, qui fuis un de ceux qui fervent aujourd' hui dans
l'Eglife de Damas de Syrie.
Et moy aufftle Cure Abdelazez .^fumonirnè fils de Helal.
CcJiauJJî ce que je confejfe ?noy le Curé Michel _/f/j du Gra.
veut.
HOVVELLE CONDAMNATION DES CALVINISTES
par l'Eglife Grecque du Patriarche d'Antioche.
Au nom du Père , ^ du Fils ^^ du S. Efprit.
CEci cfl: une explication abrégée faite fur des demandes
qu'on a propofées, &des réponfes qu'on a rendues, pour
' établir &; confirmer la vérité des iept Sacremens de l'Eglife
Catholique j &:des autres chofes qui font écrites en ce Livre.
C'eftce qu'a éclairci 5c démontré le Pcre desPcres , letres-
faint élevé parmi les hommes en voix & en fcience , le Sei-
gneur Neophytos Patriarche delà Ville de Dieu la grande, 2c
de l'Orient.
I L A D IT.
S'eft venu prefènterànous le Père Michel Religieux Jefuire
Preftre Théologien. C'cft le grand Se le trcs-haut Ambafîa-
deur de Nointel , qui eft Ambaifadeur du Roy de France , la
gloire des Rois Chrétiens ^ qui nous l'a envoyé , pour s'infor-
mer d'eux de certaines chofes de la Foy , afin de faire voir que
les Eglifes du Meffie en ont le même fentiment, & font d'ac-
cord en cela. Que foit donc confondu quiconque les a calom-
niées , & que retourne dans 'le droit chemin celui qui s'en eft
égaré fans connoiflance , ou par obftination.
A A ai a iij
744^^'^' ^^^■'' JP^^^'^^^ authenL de î union des ig. d'Or.
hA PREMIERE DEMANDE A ESTE' TOVCHANT
le nombre des Sacremcns de l'E'ilife.
R F P a N S E.
NOus difbns que Dieu a donné à la /âinte Egîife fepE
Sacremens. Le premier eft le Baptême , félon la parole
du Seigneur Sauveur, qui a dit .• Que celui qui n'efi point né de
l'eau & de l'efprit ne peut entrer au Royaume de Dieu. Le fécond
eft le Chrême , & l'Apoftre nous le donne à connoiftre. Que
Dieu efl celui qui nous confirme avec vous dans lu JEoy du MeJ]îe y
far lequel nous avons efié oints S" fit^H^^^, Ô' q«i nous a donné
l'arrhe de l'e [prit dans nos cœurs. Le troifiémc eft l'hoftiefainte^
puifque Nôtre Seigneur qui eft tout mifericorde, a dit : Si vous
ne mange z^le corps du Fils de l'homme, ^ne bcuvez^fon fa?ig., vous
n'aurez., point la vie en vous. Le quatrième eft la confeffion des
péchez qu'on fart au Preftre , comme nous le fçavons de la pa-
role du Mtfiie , qui a dit à fes Difciples ; Celui à qui vous re^
mettrez^ fes péchez^, ils lui feront remis , ^ celui à. qui vous les re^
tiendrez^ , ils lui feront retenus. Le cinquième eft la prière de
l'huile fainte pour les malades , comme Jacques l'Apoftre frère
du Seigneur le témoigne par fa parole : Si quelqu^un de vous efi
malade , qu'il appelle les Prefires de l'EqJife pour prier fur lui , ^
qu'ils l'oignent d'huile au nom de Notre Seigneur J. C. ô" l^
prière faite avec foy fauvera le malade , (jj' le Seigneur le relè-
vera , ^ s'il a commis péché , il lui fera pardonné. Le fixiéme eft
l'Ordre pour laconfecration des Myfteres Divins , &: le par-
don des péchez , félon ce que dit le Meffie aux Difciples t
Faites cecy en mcrnoire de moy , 6c encore -.Ccluyà qui vous re-
mettre\fes péchez^, ils luy feront remis , & ce qui fuit. Le feptiéme
c'eft le Mariage , duquel l'Apoftre Paul a dit : Ce Sacnmenteft
grand , S^ ce que je Jîgnifie par cette mienne parole j c'eft le Meflîe
&l'Eglife.
SECONDE DEMANDE.
Touchant l'Hoftie fainte, Qu'eft ce ? Eft ce la figure du
Corps du Meffie j ou bien eft- ce fbn corps pur en fa pro-
pre eflènce i
anjec tBghfe Romaine fur ÏEuchxnfiie. 74;
Chap.
R E' P O N S^E. XVII.
LE Seigneur Meflîequieftcout-puiiTant, ayant pris du pain
dans les faintes mains , l'ayant béni , &: rompu , Se don-
né à Tes Difciples , en difanc : Prenez^mangezj. Cecy efi mon Corps^
qui efi rompu pour le pardon de vos péchez^ Puis ayant pris le Ca-
lice, ôc l'ayant béni, & donné aux Difciples, en difant : ^^»-
vez^tous de cecy : Cecy efi mon fauq^ du nouveau TefiameJit , rèpun-
dttpour vous é^ pour plufieurs pour le pardon des péchez^ Il eft vray
que le pain & le vin changèrent d'eftat, & furent tranfportez
de leur propre fubftance en la fubftancedu corps & dufangdc
Nôtre Seigneur J. C. & ce qu'il Ht lui , il a donné puillance
aux Preftres de le faire par fa haute parole: Faites cecy en mé-
moire de moy. Pour nous nous profeflons d'une foy ferme , que
le pain & le vin qui font mis fur la faince Table font tranfpor-
cez &: changez de leur propre fubftance du pain & du vin, & ils
font tranfporrez en la propre & véritable fubftance de Notre
Seigneur J. C. par la parole fubftantielle que l'on dit fur eux ,
f(^avoir : Cecy efirnon Corps , 6c Cecy efi mon fang : & après cela il
ne refte rien du pain & du vin que les apparences, comme l'a.
expliqué félon la vérité le vénérable Père Macaire nôtre pre-
deceftèur dans le Siège. Et comme le Meiïie eftoit véritable-
ment dans les flancs de la Vierge après qu'elle l'eut conçu du
Saint Efprit 3 de même il eft véritablement dans la poitrine de
ceux qui le reçoivent, &1I eft le faluc de ceux qui le reçoivent
dignement, & le jugement deceuxqnile reçoivent fans en '
cftre dignes. C'eftpour cela que levafe d'élection lepredeftiré
Paul a publié par ces paroles i que chaque perfonne s'examine
premièrement, & qu'il fe mette en bon eftat, qu'il mange en^
fuite de ce pain , & qu'il boive de cette coupe ; celui qui en
mange Se en boit fans en eftre digne , il mange & boit fon ju-
gement , ne connoilTant pas le corps du Seigneur de la con-
noillance dont il doit eftre connu.
DEMANDE TROISIE'ME.
CElui qui reçoit une partie de la fainte Hoftie , foit que ce
foit de l'efpece du pain , foit que ce foit de l'efpece du vin,
communie- t'il parfaitement ?
74^ Liv. VI 1 1. Vreu^ues authent. de t union des Eg. d^Or.
R E' P O N S E.
S Cachez que quand le Preftre rompt l'efpecc du pain , il
ne rompt pas le corps du Meffie par morceaux,parce que le
Meffie eft prefent tout entier fous chaque partie , Toit qu'elle
foit petite, foie qu'elle foit grande^ Scie malade que nous com-
munions fous l'efpece du pain qui a efté trempée dans le facré
fans; le jour du grand Jeudi, il reçoit le corps & le fang de Nô-
tre Seigneur entièrement, bien qu'il ne boive point du Calice j
& ainfi à la Mefle qu'on nomme la Mefîe des Myfteres déjà
confacrez , & qui fe dit en Carême pendant le grand jeûne, le
Prêtre communie parfaitement fous l'efpece du pain, bien qu'il
ne reçoive pas le fang lous l'efpece du vin , puifque le Meffie n'a
rien de manque , & qu'il eft en fon entier fous chacune des eC-
peces , 6c fous chaque partie de l'une ôc de l'autre.
DEMANDE QUATRIE'ME.
Touchant la fainte Mefle, eft ce un Sacrifice véritable,
qu'il foit permis d'offrir à Dieu pour les vivans & pour les
morts ?
R E' P O N S E
NOus croyons que la MefTèeftun vray facrificenon fan-
glant, d'autant plus parfait , que les facrifices qu'on of-
froit dans la Loy de Moyfe , que l'Agneau de Dieu qui ofte les
pechex du monde , eft plus parfait que les agneaux qui n'ont
point d'ame raifonnable, & que le Preftre éternel félon l'ordre
de Melchifedec eft plus parfait que celui qui eft vêtu d'infirmi-
té ^ 5c capable de pécher, parce que le Meffie dans la divine
Meffeeft celui qui eft offert 6c qui offre , qui reçoit 6c qui don-
ne, comme dit le grand parmi les Saints Jean Bouche d'Or. Or
nous offrons ce facrifice raifonnable non fanglant au Dieu très-
haut pour le pardon des péchez qu'ont commis les Fidèles vi-
vans 6c trépaffèz , comme nous ont appris les faints Apoftres
inftruits par le Meffie à qui foit gloire.
DEMANDE
E
a.^ec tEgli/è Tlomaîne fur tSucharifiie. 747
Cha?.
DEMANDÉ CINQJJIE'ME. XVII.
Sr-ii permis d'adorer même de la plus grande adoration
la fainte Hoftie ?
R E' P O N S E.
Estant perfuadez que cette Hoftie par la vertu de la parole
effentielle que le Mefîle prononce par la langue du Prêtre,
efl: le MefTie lui-même , le (uprême degré de l'adoration lui
eft dû. Car il eft dit , Tu adorerai le Scio^neur ton Dieu. Et com-
me lorfqu'il entra dans le monde , le Père Celefte dit que tous
les Anges l'adorèrent, comme nous le tenons par la tradition
de l'Apoftre en ion Epiftre aux Hébreux , ainll nos laints Pè-
res nous ont rapporté que les Anges fe lont trouvez prefensà
la Meffe ; 6c il eft hors de doute que lorfque Nôtre Seigneur
entre (ous les apparences du pain Se du vin par le change-
ment de leur fubflance dans la fienne, ils l'adorent de la plus
grande adoration.
T
DEMANDE SIXIE'ME.
Ouchant le Sacerdoce : s'y trouve t'il des degrez difFe-
rens dont les uns foient élevez au delîus des autres ?
R E' P O N S E.
S Cachez que le Livre faint fait mention des Apoftres&des
Difciples , des Evêques, àcs Prêtres & des Diacres. Les
Pj-êtres font devez au defllis des Diacres , & les Evêqiies au
defllis des Prêtres, & le plus grand des Evêques , c'ell l'Arche-
vêque, Et pour ce qui eft du Patriarche, il a puiflance fur eux
tous dans (on Pays , comme nous l'avons appris des faints Con-
ciles i& celui qui efl établi en autorité félon la voye delaLoy
& des Canons , doit eftre obcï de cous ceux qui font fous fa ju-
rifdidion ^ & comme dans le Royaume celefte de Dieu on
voit des Ordres des Anges plus hauts & plus bas les uns que les
autres, ain(î dans fon Royaume terreftre ,fçavoirfa fainte
Eglife,il a établi des ordres \qs uns plus hauts que les autres
pour la bonté du gouvernement & i'utihté des Fidèles.
BBbbb
748 Liv. VH I. Vrewves duthen. de ï union des Sg, d'Or.
DEMANDE SEPT lE' ME.
Touchant la Vierge Mère de Dieu & cous les Saints : efl:-
il permis de les invoquer, ôc d'avoir recours à leurs in-
terceffions ?
R E' P O N S E.
LE Dodeur de l'Univers ,& la langue du S. Efprit Paul
l'Apoftre ayant demandé les intercellions des Fidèles de
fon temps, lorfqu'ils eftoient vivans dans le lieu du banniflè-
ment , &; le lieu des dctauts 6c du péché , à combien plus forte
raifon devons nous demander cela des Saints qui font allez au
Seigneur , qui font logez dans les pays celeftes , & qui font en la.
prefencede Dieu puifTant Se glorieux avec uneextrême con-
fiance , qui n'ell point vaine ni fans fruir ? ^t il faut principale-
ment avoir recours à celle qui fait les affaires importâmes,
Nôtre Dame, la Dame Marie Mère de Dieu , dont la puif-
fance aui.-rcs de Dieu ,& l'amour pt'ur les hommes funtinefFa-
bles. Di;u dont le nom eft béni eft honoré en cela , comme il
fut honoré du Centenier , lorfqu'il lui envoya les principaux
des Juifs pour lui demander de venir, &; de fauver fon fervi-
teur. Et le Meflle ditcn l'admirant -.^e vous dis que je n\iy point
trouve parmi les Ifraélites une foy commue celle-là. Et comme il fut
encore honoré de la femme Cananéenne , quand elle crioit
derrière les Apoftres , 6c qu'ils intercédèrent pour elle ,leMe(^
fie lui dit : Femme ta foy eft grande , aycs fe que tu dejîre.
DEMANDE HUITI'EMF.
Touchant les faintes Imnges : Efl: il défendu de leshono.
rcr d'une adoration qui retourne à celui qui y eft peint ?
R E' P O N S E.
Ous ne prenons pas les Images pour dei Dieux , mais
nous les honorons pour glorifier feulement leur proco-
rype delà manière qu'on honore le fceau du Prince ,& l'image
de ion nom ,& qu'on Téleve fur la tefte : fie Dieu a fait plufieurs
miracles pour confirmer cette dévotion qui lui eft agréable à
lui très haut , & à qui foit louange 5 du nombre defquels eft
ce qu'on raconte de S. Jean Damafcene furnommé le Cou,
a^vec lEglife Romaine fur t Eucharijiie . j^^
lart d'cr , leDet^^nfeurdes fliintes Images, lorfqu'onlLiicou- Chap.
p.i 1.3 mam , &que la Vierge Marie nôtre Dame la lui remit, XVII.
co'isme il la prioit devant fon Image: 6i de ce nombre eft en-
c<Tc ce que rapporte ce Saint du Roy de la Ville d'EdeflcAba-
gare , Icirrqu'ii envoya un Peintre pour lui peindre le portrait
de Notre Seigneur, que le Peintre ne pouvoir pas le tirer à
caufe de la fplendeur éclatante de fon viiage. LcMeffiepritun
mouchoir, &: le mit fur fa face vivifiante. Son image s'imprima
furie mouchoir, &; il l'envoya de ce coté là à Ab^gare. Ily a
d'autres hiftoires fans nombre , &L fuffit pour cette demande ce
qui a efté déterminé dans le feptiéme Concile.
DEMANDE NEUVIE'ME.
Touchant la Croix : Faut il l'adorer, &: en fcairele figne
fur fon front ?
REPONSE.
QUe vous fuffife ce qu'a écrit l'honneur de notre Ville de
Damas, S. Jean dont nous avons fait mention ci- devant
touchant la Croix, dans fon Livre connu fous le nom de Traité
des chofes de Dieu , où il dit que le Meffie s'efl: veritablem.ent
offert pour nous fur ce vénérable bois en honorable facrifice ,
& qu'il a confacréceboispar l'attouchement de fon tres-faint
corps bc de fon fang,& il efljufte de l'adorer. Nous n'hono-
ronspas la matière, à Dieu ne plaife, mais nous honorons ce
quireprefente la pafllondu Mcffie, & de cette manière nous
adorons toutes les chofes qui font préparées & rapportées à
Dieu , & nous lui déferons honneur. Il faut aufli que tous les
Chrétiens fafTent le figne de la Croix fur levifage ,& qu'ils
s'en arment pour combattre le Diable, & rejetter fes trompe-
ries , & nous avons reçu cette illuftre coutume par tradition
des faints Apoftresj & fi vous vous informez des miracles qui
fe font faits par le figne de la Croix , ils font fans nombre. Paul
Apoftre a dit , Pour moy que je n'aye point de gloire que dans
la Croix de Nôtre Seigneur J. C.
DEMANDE DIXIE'ME.
Touchant la vinte des lieux fanélifiez par les vertiges
du Meffie , ôc de ks Saints :Eft ce une vaine dévotion ,
ou non j
BBbbb ij
750 Liv. VIII. Preuves authent. de t union des Eg. d'Or.
R E' P O N S E. '
Dieu commande aux enfans d'Ifraël dans l'Ancien Tefta-
mcnt de vifiter la fainte maiion rrois (ms tous les ans,
pour y célébrer la mémoire de les bientiits , ôc pour honorer
le lieu qu'il avoir choifi.Cefl: à cet exemple que nous vifitons
les lieux fancliHez par les vertiges du Meffie & de Tes Saints ,
pour les honorer,& leur témoigner notre amour. Nous y joiiifl
Tons du bonheur d'une grâce plus abondante ,& tous les faints
Pères ont approuvé cette œuvre, & s'y font appliquez.
DEMANDE ONZIE'ME.
Touchant l'eftat Religieux & Monaftique : Eft-ce une
des chofe;. louables & agréables à Dieu, & tous ceux qui
s'y font liez font-ils obligez d'en garder les vœux 5c les condi-
tions?
R E" P O N S E.
S Cachez que c'eft Dieu qui a établi dans la fainte Eghfe
l'eftat Religieux j &; qu'il en a fait un chemin qui conduit
à laperfeclion Chrétienne , félon la parole du Mefîie à qui foie
gloire: Si tu veux efire parfait , va ^ vends tout ce que tuas , dr-
donne, le aux pauvres , afin que tu ayc un trefor dans le Ciel , ^
viens , fuis moy. Et il a dit encore ; Quiconque aura quitté en
mon nom , maifon , ou frère , ou faur^ ou pcre , ou mère , ou fem-
7ne j ou fis , ou champs , il recevra le centuple , f^ il aura la vit
éternelle pour héritage. Et l'Apoflre a <dit ; Je defire que vous
foyez^fans^ foin ^parce que celui qui n'a point de femme prend foin
de ce qui regarde fon Seigneur ^ de quelle tnaniere il luy plaira.
J^ ai s celui qui a une femme prend foin des affaires du monde , com-
ment il plaira a fa fcmm^ pour l'amour du Seigneur. Et celui qui
a rcfolu en fon jugement de garder fa virginité , <^ que la necef.
fîîè ne porte pas au contraire , qu'y a-t'il de meilleur que ce qu'il
faif>. Avez-vous remarqué l'excellence de l'eftat Religieux ?
C'eft pour cela que la plupart des faints Pères bL à^s Doc-
teurs de l'Eglife y font encrez ; &: dans nôtre Eglife on ne choi-
fit aucun Evcque qu'il nefoit Religieux : 6c pour ce qui appar-
'lient aux vœux , Si aux conditions qu'on y fait , on efl obli-
awec TBglîfe Romaine fur ÎEuchmflte. y^x
gé de les garder , félon la parole de David le Prophète : P^'oncz^^ Chap.
(^ payc\_au Seigneur votre Dieu , & le Seigneur Meiïîe encore XV IL
dit , que celui qui mec la main à la charrue , 6c regarde derrière
foy , ne mérite pas le Pvoyaume de Dieu.
DEMANDE DOUZIEME.
TOucliant les jeunes & les abftinences quel^'Eglife a com-
mandez : sll efl permis de ne les pas garder ?
R E' P O N S E.
NOus difons que Dieu a fait les jeûnes un inftrument di-
vin , pour rectifier les vertus , & pour prefcrver des ma-
ladies fpirituelles. L'Eglife les a ordonnez , &: a obligé de les
obferver.- Scie Seigneur MeiTieaditque celui qui n'écoute pas
l'Eglife foit comme un payen & un publicain. Celui qui défo-
beït en ce Commandement , eft celui que reprend aigrement
Paul l'Apoflre par fa parole : Je dis maintenant , ^ je pleure
fur ces gensJa qui font les ennemis de la Croix du Mcffîe , dont la.
fin efi la déflation j ces gens-là qui ont leurs ventres pour dieux ^(^
dont la gloir c ejî leur confufion. .. ^
DEMANDE TREIZIEME.
Touchant les prières pour les morts. Sont elles vaines 5^
fans fruit , &: ne leur en revient-il ni pardon de leurs pé-
chez 5 ni repos de leurs âmes ?
RE'P O N S E.
Dîeu ne rejette pas les prières de fon EgHfe bien aimce î
ma-is il l'exauce en ce qu'elle demande ielon la parole du
'isXt^xz-.Demandex^^ ^ onvous donnera. Qiiand donc l'Eglife le
prie par la langue des Prêtres, 6c des autres Fidèles pour le
pardon des péchez de fss ferviteurs orthodoxes tr.épairez , &C
pour le repos de leurs âmes avec lésâmes des Saints^ dans un
lieu lumineux , oùil n'y a poiiît de triftefîè ni dé foupir, où il
les vifite de la lumière de fon vifage, comment ne lesexauce-
roit-il pns ? Certainement les morts tirent un grand profit des
Meffe^ 5 des aumônes £c des prières. Et nos pères les revêtus de
BBbbb ij
751 Liv. VI l-Î.Pyeufves authcn. de t union de s E^. d'Or.
Dieu nous onr appris cela 3 &i. la chofe aeftémanifefteepar ce
qui eft rapporté dans le Synaxarion Triodicon le premier Di-
manche de Carême touchant l'Empereur Théophile , qui
après avoir perfecuté les Fidèles à Toccafion des faintes Ima-
ges, mourut fidèle & repentant. L'Impératrice Théodore de-
manda au Patriarche & au peuple de prier pour le pardon des
péchez de Ton mari. Ils le firent ,& elle vit pendant Ton fom-
meil Théophile qui éftoitdansun grand tourment ^ & elleen-
tendit le Meffie qui lui difoit , Maintenant 6 femme à caufe de
ta fay èc de tes prières , & de tes larmes ardentes , & à caufe des
prières des Evêques èc des Preftres , je pardonne à Théophile
ton mari.
DEMANDE' OU ATORZIE'ME.
Touchant rhomme. va- t'il un libre arbitre , Scpeut-il faire
le péché , ou ne le pas faire ? Et Dieu l'aflifte t'il toujours
d'une grâce qui foitfuffifante ,afin qu'il fepreferve de pécher.
R E' P O N S E.
Dieu ed reprefenté dans l'Evangile femblable à un hom-
me Roy qui envoyé fes ferviteurs pour appeller à la noce
ceux qui efioient conviez , & ils ne voulurent pas y venir , & le
Meffie pleura fur Jerufalem ,en difant : O Jerufalem , o Jerli-
falem , ô toy qui mets à mort les Prophètes ^ & qui lapide ceux
qu'on t'envoye , combien de fois ayje voulu faire revenir tes
enfans,& les affembler comme la poulie aflemble les pouffins
fous fesaifles, &: vous n'avez pas voulu? Donc celui qui veut le
bien a puilFance de le faire , & celui qui le quitte & tombe en
peché,reiette la grâce qui fe trouve en lui , ôc il repouflcdelui
le Saint Efpric qui l'aide. Et cela fevoit encore par ce que dit
S Eflienne le premier des Martyrs , en reprenant lés Juifs .•
O du rs de tefie , ^ incirconcis de cœur , vous reffiez^au S. Efprit à
tous momens.
L
DEMANDE QJQ I N Z I E' M E.
A Foy feule fuffic- elle pour juftifier une perfonne de Tes
péchez?
a.'vec ÏEgli/è Romaine fur ÎEuchiriflle. 753
Chap.
R E' P O N S E. XVII.
JAcques le frere du Seigneur a déjà répondu que Ufoy qui
efl fans œuvres efl une foy -morte e/iant feule. Regarde '::^nbtre
l'erc Abraham , n'a t' il pas cfiè jufitfié far les œuvres ? Et Paul
l'Apoftre eft conforme à cela par faparoie-Quandj'aurois , dit-
il toute la foy jufques-Iàque je pûfTetranfporter les monta-
gnes, & que jefuflefans charité, je ne ferois rien. Tout l'Evan-
gile rend témoignage de cela.
DEMANDE SEIZIE'ME.
Touchant Dieu dont la juftice eft glorieufe. Nous donne-
t'H des Commandemens qu'il foit impoflîble de garder ,
même à quelques juftes, biej qu'ils failènt tous leurs efforts
pour les obferver ?
R E' P O N S E.
ADieuneplaife que nous profefîlons que Nôtre Seigneur,
qui eft abondant en mifericorde , nous foit tyran de cet-
te manière , parce qu'il nous a dit que fon joug eft doux , & fa
charge légère : 2c c'eft lui qui fortifie continuellement notre
faiblelTe.
DEMANDE DIX- SE PTIE'ME.
Touchant le Meflie dont la bonté eft parfaite en to.ute
manière. Veut-il le falut d'un chacun, fie eft-il mort pour
tous les hommes ?
R E' P O N S E.
C'Eft une chofe vraye que le Meffie l'amateur des hom-
mes , veut que tous fe i'auvent , ôc viennent à la connoif-
fance de la vérité : o- il cjl mort four un chacun^ afin que U
vie des vivans ne foit pas pour eux-mêmes , mais en celui qui
tft mort four eux , comme dit l'Apoftre Paul en fa féconde
Epiftre à ceux de Corinthe ^ 5c: le Melîie eft le bon Pafteur ,
qui quitte les quatre- vingt dix neuf, fe va à celui qui s'eft
égaré.
754 Liv. VIII. Prewves authent. de Vunîon des Eg. d'Or.
DEMANDE D IX-HUITIE'ME.
Touchant l'Eglifc Univcrfelle Se Apoftolique :£(!:- elle fer-
me , & toujours vifible fur la terre ,&n'eft-ilpas poffible
qu'elle fe trompe, & qu'elle trompe en ce qu'elle nous enfei-
gne des chofes de la,foy , 6C ce qu'elle nous ordonne des cho-
fes de Dieu >
R E' P O N S E.
Our ce qui regarde la vifibilitéde l'Eglifc Aportolique,.
nous difons qu'elle a toujours paru depuis le temps du
Meffie, & qu'elle demeurera conftamment vifible jufqu'à la
fin du monde , parce qu'elle eft comme une ville placée fur Te
harut d'une montagne qui ne peut pas eftre cachée. Etpource
qai eft d'eftre trompée Se de tromper,c'efl: urïe chofe qui lui eft
impolUble , puifqu'elle eft gouvernée par le S. Efprit, félon la
parole du Meffie dans le li^u où il dit : Je frieray mon Pcre , d" il
'VOUS donnerai un autre Confolateur pour demeurer avec vous éter-
nellement, l' Efprit de vérité que le monde ne peut recevoir^ parce
qt^il ne le voit pas. Et vous vous le connoifire'Z^ , parce qu'il de-
meurera avec vous , & fera confiamment dans vous. Et il a dit :
Le S. Efprit ConfoLtteur que mon Père envoyera en?non nam vous
enfeiyiera toutes chofes.
DEMANDE D IX- NElTVIÊ'MË,
Touchant l'Eglife : les Prélats qui y font ont ils puiflànce
de diftribuer aux Fidèles les dons du Meffie ,fçavoiFles
pardons , par le moyen defquels les obligations que leur impo-
fent les Canons leur font remifes, 6c la peine auffi qu'ils ont mé-
ritée par leurs péchez.
REPONSE.
'Cachez que Dieu a établi les Prélats pour gouverner /on
' EgHfe , & qu'il leur a dit: Tout ce que vous lierex^fur la ter-
re fera lié dans le Ciel , (^ tout ce que vous de lierez^ fur U terre
fera délié dans le Ciel. Ils ont donc puiflànce de Dieu d'impo.
1er des loix pénales aux petheurs , ôc ils les en délivrent en-
d^ec Ttglïfe %oma,îne fur ÏEmhmflie. y^^
fuite avec raifon , en leur donnant pardon , &: ce pardon n'eft Chat.
autre chofe que leprixdufang du Nôtre Seigneur J. C. Les XV IL
Prélats le diflribuent , & celui qui le reçoit eil délivré de Tes
péchez ,6c Dieu ne lui en fera plus ibuffrir la peine.
DEMANDE VINGTIE'ME.
LEs Livres qu'on nomme Tobie , Judith , la Sageiïe de Sa-
lomon , rÈcclefîaftique , Baruch & les Machabées .^ ne
fonç-ils pas du nombre des Livres facrez ?
? R E' P O N S E.
NOus recevons tous les Livres Divins qu'ont reçu les SS.
Pères £.<. les Conciles; &de ce nombre font ceux donc
on a fait mention dans la demande j àc nous croyons que la pa-
role de ces Livres eft la parole de Dieu , qu'il n'eft pas permis
de contredire mcm? dans une feule lettre.
Tout ce que nous avons expliqué dans toutes ces réponfes
d'une manière abrégée eft: delà foy de TEglife Orthodoxe , &
nous le croyons & le profelfons fermement -, & celui qui la re-
jette eft du nombre des Refraclaires haïs de Dieu , & fon fort
eft celui d'Arius &: des autres Hérétiques. Q^e Dieu éclaire
les efpnts aveugles , & qu'il amolifte les cœurs endurcis & re-
belles. Pour nous nous rendons des louanges ôc des actions de
grâces à Dieu pour la grâce qu'il nous a faite de nous donner la
droiture des fentimens & la vérité de la Foy, Et tout ce que
nous avons explique dans ce Livre , nous l'avons confefîé , ôc
confirmé de récriture de nôtre main , & deTapplication de
nôtre fceau ^ à Damas la confervéede Dieu le troifiéme jour
du mois de May le jour de Samedi de l'année Chrétienne
1673. qui fe rapporte à l'année 7181. depuis Adam , ficl'année
1084. de l'Hegire.
Suit le fceau où eft gravé S. Pierre avec fes clefs , ficfon
Siège , & à l'entour eft écrit en Grec oc en Arabe
le nom du Patriarche.
Au deftbus de la fignature en Grec en cette manière^
CCccc
75é Liv. VI I î. Preu'ves authent. de ïunïon des Eg. d'Or.
NEOPHTiE/'rf/" la mifericorde de Dieu, Patriarche de Li VilU
de Dieu , Antioehe , ^ de tout l'Orient.
Suivent enfuite les fignatures des Archevêques _, Curez, Prê-
tres, Diacres ,& des principaux Laies Seculit-rs.
Grégoire A>xhevèque de Bafjera ^ de Houran. Antoine
\Archevcque de B^lbc k . R O m A i N An hcveque de Zehda.
Z'abjet en:re les Prejires le Curé ^ea'H Jih de DiB. Zt- Cure Mi-
chel Graveur. Le ?ncpri fable cnt e les Pn'Jires le Cure Aboila-
ziN Heal. Z'humble Curé Mi ChiiiL BtGAY. Ze Curé )t-AN
Taschal ^unde ceux qui dejjervent l'Eii^hCt: de Damas de Syrie,
L'humble Curé Michel. L'humble Càré El c^ un de ceux qui def.
fervent l' E<^ife de D-imas. Vhumble Pe/ire Moyse le Dcvideur,
L'humble Prêche Nicolas Sasi. L'humble Prcfire MesuaD
Sansal- V humble Prefire Geokg hS. L'humble entre les Prêtres
le Curé So'LiMAN Racca. Le c^vr^ J accrues. Le pauvre Curé
MAUSOnR Le Diacre Siuï-Oti fils du Jils de t Archevêque. Ls
Diacre Michel TaschAl. Le Diacre Michel Athaya.
L'humble entre les Diacres Jean. Le Diacre Michel Saidah.
Le Diacre Barkat.
Et nous les Chrétiens demeurans a Damas de Syrie la Ville gar-
dée de Dieu j nous croyons ^ nous -profefjons ce que croyent nos Sei-
qïieurs les patriarches ô- Prefires , ^ cela eji expliqué dans ce
Li vre Michel CondolEO avec le cachet de fes armoiries , s'ejl
trouvé prefent à cela. Nicolas le Médecin. Georges Semou-
Rou. NicoiAs 0s du Curé El A FR A ngi. Eli AS yf/i «'^Geor-
ges K tLATH. ¥ Ao ALLAH j/?ls de MoYSEdâ Tripoli. Georges
J^ls f/^-SELiiMEI.ScUTHF' jfls de GeoRGES. jEAN_/f/.f de DaBD
ElmefrehHjLEuthf a ll ARA A Vj Constant in, Michel
Médecin .,}e Ali Afedecin., JosEVHjÇls de M ADOLxjMyGhOKGES
BaRREIc, V AXJL fils du Curé VeDL ALLAH.
Suit mon témoignage en Larin. Eqo infra fcriptus ^c.
Puis celui que m'a donne l'Archevxque de Stïde en cette ma-
nière. Au yiom du Père , (^ du Fils , ^ du S. Efpnt. Amen.
Isfous efl venu c^ cahier , ^ ce que témoigne des chofes de no-
tre foy le tres-faint (^ bien heureux Père y le Père ^f Seii^neur Pa-
triarche le vénérable Seigneur Neophitos avec fon illuftre fiqna-
ture , ^ fon glorieux fceau : ^ cela eji U foy ^ la profeffion
de tous les Grecs. Et fn'jy le pauvre entre les Prélats Jerçmje
Archevêque de Tyr Q- de Si don , f affirme que cette pro^edion
fi fainte ^ gloricufe , cfi notre frofc_l]ïon ^ notre créance.
awec TEghfe Romaine fhr tEuchariflie. 757 ^'^ '
^crit k Scidc le quinzième de May l'année 7181. jufqu'à notre Chap,
fcre Adam, falut à lui. Et ceci cfl ma Jîgnature , mon témoignage XVII.
^ monfccau , e^ que [aient bénis tous ceux qui ont cette foy.
Suivent les noms des Preftres.
"^e refids avjjî témoignage moy humble Curé Jean Difciple de
t Archevêque a Sidon, Et moy le Cuté Paul. £t moy le freflre
AIansouk.
Le fceau de l'Archevêque efi une Croix ^ ^ l écriture d'alentour ,
l'humble entre les Prejires , Jeremie Archevêque de Tyr & de
Sidon.
Les deux Car^r^jEAN d^ Paul fu [nommez^ font aUez^cn Chan-
cellerie rendre témoignage de la, vérité de ces attefiations de la part
de Monfeigneur l' Archevêque Jeremie. Vaîie en efi décrit ^
fçellé du grand fceau de fa Majefié Très -Chrétienne.
En fuite efi ant allé à Barut autrefois Beryte .^ l' Archevêque du
lieu m^ a auljî donné le témoignage fuivar.t.
Au nom du Père , ^ du Fils , é-du S. Efprit^ un feul Dieu.
Premièrement , ]e fujet de tracer ces lignes eft que nous
avons vu ce que nôtre Père bc Patriarche le Seigneur Neo-
phitos a attefle des chofes de la Foy dans ce Livre, & nous
avons reconnu la vérité de fon fens par foniliuftre fignature ,
Ôcfon glorieux fceau. Et je dis moy humble entre les Prélats,
Philippes Archevêque de Barut la gardée de Dieu, que cette
foy efl: nôtre foy à nous autres Grecs , & celui qui la contre,
dit , contredit l'Evangile & les Conciles , & les faints Pères, &
celui qui contredira ce qui efl écrit en ce Livre n'a point de
part avec les Fidèles. C'eft- là nôtre foy & nôtre témoignage,
écrit à Barut l'année 7i8r,
Témoigne aufft-ccLt le Curé Saba , ô" ^"y auffî le Curé Geor-
ges.
Au milieu du fceau de l'Archevêque ces paroles font écrites
en Ara Se.
Philippes Archevêque de Barut , 6c elles font en Grec à
l'entour.
CCccc ij
';^^$ Liv. VII î. Preuves authen. de l'union des Eg.d'Or.
CHAPITRE XVIII.
Union des E'zjifcs d'Orient avec l' Eglife Romaine fur l'Eucharifiie
^ autres f oints , prouvée par la condamnation des Qutvinifies
far L' E'ijije des Syriens de Dama^.
CE Patriarche ne s'ert: pas contenté d'une condairnatioii
des Calviniftes. Il en a fait deux , l'une plus ample , l'au-
tre plus courte ; mais comme elles ne contiennent que la mê-
me chofe dans le fait, nous nous contenterons d'inférer celle
qui eft plus courte , & d'avertir que l'original de la plus longue
eft dans la Bibliothèque du Roy.
CONDAMNATION DES CALVIN ISTES
par l'Eglife des Syriens de Damas.
Au nom du Père , ^ du Fils , ^y de l'Efprit de Sainteté , un
feul Dieu.
Que les impies , ^ que toutes les Nations qui s'oublient de Dieu
retournent en enfer. C'efi ce que dit le Prophète David.
Avant- Propos.
G Loire foit à Dieu qui fait tout par le choix de fa liberté ,
qui par fa faveur &: fa grâce a donné l'eftre au monde,3c
qui a mis Adam pour Roy, pour Prophète & pour Preftre , le
douant du franc arbitre, aHn qu'il marchât dans la voyedel *o-
béïflance , lorfqu'il manqua à fon devoir , qu'il fe rebella , &
qu'il ofa goufter du fruit défendu , fon Seigneur le bannit, ôC
il marcha avec peine dans le pays de la triilefTe & des miferes.
Après y avoir bû ce qu'il y a de plus {ale&; de plus amer , pour
avoir quitté les lieux de délices où il efl:oit,& après que plu-
fîeurs années fe furent écoulées pour le temps de fa pénitence,
alors Dieu qui n'a que des inclinations de mifericorde en eut pi-
tié. Après lui avoir envoyé des Prophètes, quand il vie que le
rebelle ne retournoit point, &: que le remède n'avoit point
d'effet ,& que le malade vouloit un pleigequi vint s'employer
à fa guénion pour une manière de médecine excellente &
glorieufe, le Très-haut envoya fa Parole fubftantielle par la
coopération de fon Efprit, à la pure^ la dévote &: l'humble Ma-
a,wec ÎEgltfe Romaine fur VEucharifiie. 7^9
rie. Le renom de la laincerë de là s'eft répandu jufqu'auxçx- Chai».
tremicez du monde. Et ce Verbe fe revêcic d'un corps doiié XVIII.
d'une ame raifonnable s'y unifTantiScil y eut alors une caution
pour notre falut. Il relfuicita le more , 6c rendit la vie à celui
. dont on faifoit les obfeques ^ & il fît revivre le Lazare , le reti-
rant du Imceul où il eftoit coufu. Il fut béni de toutes les créa-
tures déraifonnables, desinfenfibles, &de celles qui ont de la
voix. Ilhic admiré avec étonnement de toutes les perfonnes
d'efpnt , intelligentes £c éclairées. Ce fut lui qui s'afîèmbla
dans le Cénacle avec fes Difciples ,& qui leur lava les pieds
pour aller devant eux ,& leur donner l'exemple de marcher
dans la voye de la foùmiffion & de l'obcillance. Le Tres-haut
voyant que le falut ne pouvoit eftre que par une conduite infi-
niment excellente, il a établi la robe du Baptêmej& prefenté
une table & une boiflon qui eft toujours prefte , bi dont on ne
peuts'excufer. O qu'heureux eftceluiqi.:i la defire, 6c quis'em-
prefl'e d'en approcher ,ne s'écartant point des grandes chofes
qui font dans l'Eglife, ou celui qui y vient avec dévotion , &
qui s'attache à la pureté de (qs principes &; des effets qui en
naiflenti Le Seigneur a établi tout cela pour nous foulagerdes
pefants fardeaux des facrifices Mofaïques , qui rendoient té-
moignage à la vérité des Myfteres fpirituels que nous offrons,
qui nous délivrent des facrifices des animaux , dzs pigeons, des
béliers, des paiTereaux & des tourterelles.
' Le glorieux Evangile , dont l'autorité efl; fuprême , rapporte
qu'après que le Sc-igneur fe fut afiis avec la compagnie des
jufles dévouez à Dieu , il prit du pain , le bénit &le rompit ,
& le donna à (qs Difciples, & il leur dit : Mangez^-. Cccyeftmon
corps : qu'enfuite il prit le calice , & qu'il leur dit : Prcnez^?^
heuvez^-en tous : Cecy efimonfan^ du nouveau TcJ},iment , ^ vous
ftrei^ ainjt , quand vous vous affemblert'z^ en mémoire de moy. De
même Paul l'Apoftre le Bàtifieur de l'Eglife , le Preftre&i le
Publicateurdela Loy ,a tranicritces illuftres paroles, & il les
a prêchées à tout le monde , à l'adverfaire opiniaftre , 6c à
J'ami docile j 6c il a dit de plus que celui qui a fait (on manger
du corps de Notre Seigneur ,&: qui a fait fa boifion de Ion
fang fans en eflre digne , en a fait fon jugement 6c fa condam-
nation , parce qu'il n'a pas connu le corps de Nôtre Seigneur
4'une connoiffance jufte 6c véritable.
CCccc iij
yéo Liv. VHI, Treufves duthen. de l'union des Eg. d'Or.
Or maintenant , 6 incrédule, qui faispafler pour figure ce
qui eft la caufede ton falut^ il eft: à propos que tu fçache que
ces paroles , Ceci efi , ne fonffrent rien de ce qui fignifie figure,
mais qu'elles établifTenr la vérité de ce qui eft affirmé dansl'et
prit de toute perfohne f(çavante & intelligente.
Pour ce qui eft de nous autres Syriens d'Orient & d'Occidenr,
nous croyons & nous femmes perfuadez , & nous aflurons con-
ftamment , que les paroles fubftantielles , que le Seigneur de
la gloire profera la nuit de fa pafTion , endifant: Ceci eft mon
Corps ^ cftant prononcées par un Preftre véritable fur les My-
fteres , ils font changez de leur bafleire en un état fou^eraine-
ment c;levé,&i'ls pafTent de la reflemblance 6cde la figure à la
veriré , 6^ qu'ils deviennent un Theriaque infiniment efficace ,
hL le falut même de ceux qui font liez des chaînes du péché.
En fécond lieu , pour ôtcr tout doute & toute faufte imagina-
tion, nous ajoutons que comme Dieu au commencement du
monde fit une divine ordonnance qu'il profera en cette haute
manière : Croljjez^^multipltei^^ d^ rcnip liffe^z^la terre 5 & comme
ces paroles fubfiftent,& s'accomplilTent encore aujourd'hui
dans la propagation de l'efpece : Ainfi cette parole vivantes^
fubftantielle, eft celle qui opère dans le myftere de ce Sacrifice
par un commandement fuprême connu de celui qui connoift la
puiilance du Seigneur, qui tire l'eftre du néant ; & cette puif-
fanteforce émane de fa faintc bouche. Allons donc nous pre-
fenter à ces myfteres avec ardeur , la tefte bailTce , & avec une
profonde adoration.
Troifiéraemmt, nous croyons que cette grande grâce & cette
communjg mif^ricorde eft pour les vivans & pour les morts , &
qu'elle délivre du defefpoir ceux qui (ont dans l'un ôidansTaii-
treeftat, comme nous l'ont allure nos Pères les A poftres, les
maiftres de la direction & des lumières qui diflîpent i'obicurité.
Attachons nous y fermement, c'cft toute l'efperance.
Quatrièmement, celui qui reçoit dans la communion cette
Hoftic toute fainte , mange dans fa bouche le Corps de Nô-
tre Seigneur &: de nôtre Dieu , & il ne le mange pas en figure.
De plus il eft facrifié véritablement pour nous fur l'autel ;& c'eft
un facrificeplus noble que tous les facrifices. Nous l'adorons ,
mais d'une adoration fincere , fouveraine &: très afTurée.
JCinquiémement , nous jeûnons les facrez jeûnes deTEgli/ê,
qui nous ont efté donnez de Dieu. Et il n'y a pas moyen que ce-
'fii^ec ÎEgîifè Romaine fur î Euchcivifiie. .761
lui qui eft accoutumé à nier, nie cela, que nos foins ne font pas Chap.
pour Jes plaifirs du ventre Scdcs chofes honteufes , comm.e il XVIII.
eft écrit dans l'Epiftre de PauH'Apoftre en ces termes : C^^y^»»^
des qcns qui ont leurventre -pour Dieu , ^ qui mettent leur zloire en
ce qui efl leur confujion & leur honte.
Sixièmement, celui qui arecours à la Vierge Marie Mère de
Dieu, & qui fe met fous la protedion des Saints, & fe repciê
fur leur providence , de les prie , 6c fe fortifie des lieux qui leur
font confacrez , obtient fon affaire, & jouit de ce qu'il deman-
de. De plus, nous lommas obligez de garder les Images des
Saints, les honorant d'un honneur qui retourne à celui qu'elles
reprefentent. Et comment celui qui révère la robe du Roy ôc
fon fceau , ne revere-t'il pas l'image des Rois du Ciel , qui font
enfansde Dieu, & frères de J. C
Septièmement , le degré des Evêques eft un degré illuftre Se
une dignité relevée , parce qu'ils font le Pafteurs des âmes rai-
fonnables qui les font paiftre dans les prez des vrayes fciences;
&les Preftres font obligrz de leur obéïr, fie ils leur font fou-
rnis , comme ils ont eu le Patr'arche pour Supérieur.
Huitièmement, il y afept Sacremcns de l'Eglife, &:ces fepc
Sacremens font le Baptême , la Confirmation par le Chrême,
l'Euchariftic, laConfefîion despejhez pour en avoir le pardon,
l'Huile des malades , le Sacerdoce & le Mariage. *
Neuvièmement, l'Eglife Chrétienne Catholique ne défaut
point jufqu'à la fin desfîecles & des temps , comme leMeffie le
lui a promis: J^oilk que je fuis itvecvous jufqu'à la dejîruclion du
monde. Et elle eft une ville placée fur le haut d'une montagne,
parce que c'eft d'elle d'où vient le faiut. Or cette Eglife du
Meflîe reçoit Je Livre de 1 Ecriture Sainte , comme eftant forti
de la bouche de Dieu. Il eft divilé en plufieurs parties, du
nombre defqaels font les Livres nommez Tobie, Judith , la
SagefTe de Salomon, Cohelet, c'eftà-direrEcdefiafte, le Pro-
phète Baruch , & les Machabées.
CONCLUSION. ■:
JE dis en fuite moy l'indiqne ^ l'abjut entre les chefs des Prhres
Grégoire nommé l'Eveque^ e a n /<• Syrien de D.'.masyque c'ej}.
làmaprofe^on^mafiy , ma volonté ., mm élévation dr- ma con-
fiance. Jette la vii'é fur cela avec un œil dejujHce ^ non de contra.
76i Liv. VI 1 1. Preuves a,uthent. de tunîon des ig. d'Or.
diBion. Dèfais-toy de la paffion de la haine. 2Ve parle point tant.
Quitte le babil ^ l^ erreur. Koilk la conclufion de mes paroles, après
avoir faluè les âmes faintes qui abhorrent ^ qui fuyent le mal. Et
louan'^e à Dieu au commencement ^ a la fin. Ainjt foit.il.
Suie le cachet qui porte ces paroles écrites au milieu -J'ai mis
ma confiance en Dieu j & à l'entour , Grégoire Evéque nommé
Jean 5 &; aux coins^ la croix dompte , la Croix uainc.
Au defTous du cachet font les fignaruresde tout ce qu'il y a
dePreftres Syriens à Damas. Et prcmicrement celle que l'E-
vêque a voulu écrire de fa propre main en caraderes Syria-
ques, qui font ceux dont les Syriens fe fervent mcme pour le
langage Arabe. Elle efi: conçië en ces termes :
Je dis moy l'indigne ^ l'abjet entre les chefs des Prefires, le »o»?-
»2i? Grégoire é^ l'Eve que Jean le Syrien de Damas .^que ce qui
efi tracé ^ écrit ici efi mafoy ^ ma ferme croyance. JeprofeJJe cela
dans lefecret du cœur ^ en public , ^ avec cela )e rencontrerai ^ je
foutiendrai la face de mon Juge a qui appartient d'eftre éternelle-
ment loué. Ainfi foit-il.
Et moy le Serviteur de Dieu GtOKCE/ indigne ^ l'abjet entre les-
Prefires , nommé Curé , je frofejfe cette foy que notre Père G R E G O i-
RZ nommé l'Evèqne Jean ^ expliquée dans ce pre fient cahier.
Et ynoy l'indigne f^ l'abjet entre les Prefires Jean nommé Cure ,
je Crois é" j^ p^ofefife cette foy , ^ ceft celle que profeffient générale" -
ment tous les Syriens.
Et moy le ferviteur de Dieu l'indigne ^ l'abjet entre les Prefires
nommé le Curé Jean Kessan^^V crois d^ je profcffie cette vrayefoy ,
^ c'efi cette foy que tous les Syriens prof ejfient.
Et mof encore Moy SE.^ l'indigne (^ l'abjet entre les Prefires, nom-
mé Curé de la Nation des Syriens qui demeurent dans la Ville de
Damas , c'efi ce que je profeffie , ^ ce que je crois j ^ notre Seigneur
Je fus Chrifi en fait mention dans l'Evangile , é" encore Paul l'A-
fbtre & tous les Pères.
Et moy le ferviteur de Dieu , l'indigne (^ l'abjet entre les Prefires.,
nommé le Pre [ire Amr-allah ,;> crois Ô" je profeffie cette foy^ ^»
e'efi celle qu'ont tous les Syriens.
CHAPITRE
tinuec ÎEglife Romaine fur T Eucharifiie. 76 j
CHAPITRE XIX.
Vnion des ^glifes d'Orient avec l'Exil fe Romaine fur l'Hucharifiie ,
prouvée par deux attefiations authentiques du
Patriarche des Cophtes.
ON n'a point encore produit d'attefliations en forme de fa
Foydes Cophtes, quoique les preuves d'un autre genre,
que Ton en a alléguées dans le premier Tome de la Perpétuité,
ne permettent pas d'en douter. Mais la durée de cette contef-
tation ayant donné moyen à Monfieur l'Ambafladeur de Sa
Majefté à la Porte d'en obtenir deux, que le Patriarche a en-
voyées au Roy avec toutes les formes qu'il y a pu obfcrver ,
pour les rendre plus authentiques , on fera bien aife d'en voir
ici la tradudion.
Il eft bon feulement de fe fouvenir que la jurifdiclion d"e ce
Patriarche s'ctendant dans l'Ethiopie , il rend témoignage ,
non feulement de la foy des Chrétiens d'Egypte , mais auili de
■ous ceux qui font dans le Royaume d'Ethiopie.
ATTESTATION DV PAT RI. ARC HE DES COPHTES.
Au nom de Dieu clément ^ miferlcordieux,
LA paix de nôtre Seigneur J. C. & la grâce de fon Éfprit
faint & vivant,.qui eft defcenduë fur lesfaints Difciples,
& les fiints Apoftres dans la faite de la fainte Sion i la pre-
cieufe ellence de cette paix divine ,& cette même bénédic-
tion , dem.eurent à jamais fur les faints frères Orthodoxes , &
fur les Princes Chrétiens illuftres, que Dieu beniffe tous des
bénédictions celeftes. Nous vous faifons fçavoir après avoir
réitéré les benediélions fur vous , & vous avoir adreffé un fa-
lut fpirituel , que nous avons oui dire , &; que nous avons efté
informez, que l'ennemi parle parmi vous de différentes for-
tes de manières & d'opinions à nôtre fujet , difant que nous
ne fuivons pas lesCommandemens dej. C. qui doivent eftre
gardez , m les Canons Apoftoliques, ni la foy Orthodoxe.
Cela n'eft arrivé parmi vous qu'afin d'y femer une grande
diminution de foy &: de charité. Et comme l'ennemi ne ceûe
point de faire tenir de femblables difcours, pour vous délivrer
DDddd
764 Liv. VIII. Preuves authent. de t union des Eg. d'Or.
de ce doute , nous vous avons écrit cette lettre , moy le pauvre
Matthieu ferviteur de J. C. par la grâce incomprehenfible ,
quoique rres-indigne Patriarche de la grande Ville d'Alexan-
drie ,&: du Pays des Cophtes en Egypte, Ethiopie & Nubie ,
Afrique 6i Nicée , qui ay écrit ceci à la charité de quiconque
s'inftruira dans cette écriture bénite delà foy Orthodoxe des
Cophtes. Et comme j'ay appris _, moy miferable , que vous
cherchez la grâce de Dieu Très-haut , afin que nous foyons
vous Se nous une même chofe par l'amour dé la jafticeSc de
la dodrine rpirituelle , qui efl: conforme à Ja foy Qrthodoxe ,
par le Verbe Incarné, &: pour ofter entièrement toute forte de
divifion , nous commencerons premièrement au nom du Père,
du Fils J&: du S. Efprit, un feul Dieu , qui fo;t glorifié jufqu'à
la fin des fiecles. Amen.
Nous croyons véritablement un feul Dieu, Dieu le PereTout-
puilTant , Créateur du Ciel & de la terre , de ce qui eft vifible.
Nous croyons auffi un feul Seigneur J. C. Fils unique de Dieu
engendré du Père devant tous les ficcies , lumière de lumière j
vray Dieu d'un vray Dieu , engendré & non créé ,confubil:an-
tiel à fon Pcre , qui pour nous hommes, & pour nôtre fàluc
efb defcendu du Ciel,&:a pris un corps du S. Efprit, Scde la
Vierge Marie , a efté fait homme , &: a efté crucifié pour nous
fous Ponce Pilate, a foufFert,aen:éenfeveli , eft relFufcité le
troifiéme jour, eft monté aux Cieux , &efl: affis en haut à la
droite du Père, & qui viendra encore dans fa gloire juger les
vivans 6c les morts , dont le Royaume n'aura point de fin.
iisnecroyent, Nous croyons au S. Efprit, le Seigneur vivifiant, qui pro-
difc-nt ils, j,çjg jy Père, & nous l'adorons & le2;lorifions avec le Père &
ou une iiatu- ,, ,, it>i t r ■
re, & iis.id- le Fils, qui a parie par les Prophètes. Nous croyons une lainte
mettent ncan- EgUfe Univcrlclle & Apoftolique, Nous confeffons un feul
eorps"en\ C. Baptême pour la remiffion de nos péchez. Nous attendons la
reiurredion des Morts , la Communion des Saints , & la vie
éternelle.
Nous recevons cette foy Orthodoxe &fainte, que les trois
cens dix. huit Pères afTemblez dans la Ville de Nicée ontcom-
pofée. Nous croyons auffi &: nous confeifons que nôtre Sei-
gneur J. C.Dien incarné n'a qu'une nature & qu'une volonté,
&que l'humanité n'a pas efté leparéede la divinité une heure
ou un clin d'œil. Gloire lui foit à jamais.
Nous confeffons &: nous croyons fon faint corps,, qu'il nous
a.njec ÏEglifè Romaine fur tiuchAnflie. yéj
a fait lenouveau Teftament le faine jour de Pafques, lorfqu'il Chap.
dit à Tes Difciples : Prenez^ , Ceci eft mon corps ^ ^ ceci efimonfanz XIX.
du nouveau Tejlament ^ far lequel vos peche'z^vous feront remis. Ec
Ja fainte oblation efl J. C. même, qui doit eflre glorifié avec ^'^'""^ *^
fa divinité & Ton humanité. Spari»"
Nous croyons que la fainte Vierge Marie Mère de Dieu in- Cophtcs.
tercede pour le faluc de nos âmes.
Nous confelTons le Sacerdoce, qu'il a donné à fon Vicaire le
Prince des Apoftres faint Pierre, en difant: Ce que vous lierez^
fur la terre fera lié dans les deux , & ^^ f *^ '^o^^ délierez^fur la
terre fera délié dans les deux.
Nous recevons aufli les fepc faints Sacremens del'Fglife Or-
thodoxe, qui font le Baptême, le Chrême faint & l'On(fl:ion
facrée, la Confeflion faite au Prcftre, comme dit S. Jacques en
fon Epiftre : Confcffcz^vous l'un à tautre. Car il n'y a point de
remiffion de péchez par la pénitence parfaite , par la main du
Preflre fans confeffion. Le yrand Sacrement a^\\ t'î!iVo\A^i\on
vivifiante, dont nôtre Seigneur J.C. a dit lui même -.Je fuis le
pain vivifiant qui cj} défendu du Ciel. Celui qui en raano-era
vivra éternellement , il demeurera dans moy,& je demeure-
rai dans lui Nous CROYONS ^ nous confcffons que ce pain vi.
vif.int efl 7. C. même avec fa divinité ô- fon humanité tout en- P'^'""'^,^
JembLe.W eit le lalutde toute créature ,& de quiconque le con-
férera & fes faints Sacremens. Le refte desfept faints Sacre-
mens font l'Ordre du Sacerdoce dont nous avons déjà parlé
le Mariage Canonique 5c l'Huile des malades , qui eft l'huile
delà lampe, lly a douze dcgrez d'Ordre reçus dans la fair.re
Eglife, qui font les Exorcif^'es, les Moines, les Séculiers, les
Chantres , les Lecteurs , les Soudiacres , les Diacres , les Prê-
tres , les Archiprêtres, les Evêques , les Archevêques 6c les
Patriarches.
Nous confefTons que quand nous mourons , 6c que nous
avons quelques péchez, nous fommes tranfportez dans le Pur-
gatoire, dont nous fommes délivrez par les prières 6c Mefîès
devant 6c après la mort, ^ les prières particulières pour les
morts qui ont efté de tout temps enufage.
Nous honorons encoieles faintes Images qui font marquées
avec du faint Chrême, àcaulede ceux dont elles portent le
nom, afin qu'ils intercèdent pour nous.
DDddd ij
j66 L IV. VIII. Trewves duthent. de F union des Eg.d'Or.
Voilà un petit abrégé de l'expofition de nôtre foy, que nous
avons déclarée pour quiconque le lira , ôc recevra ce qui y eft
contenu avec une charité fpirituelle, Se obéira aux Commun,
démens Evangeliques èc Apoftoliques, comme aufll aux Ecri-
turesTaintesôc divines, qui font reçues dansTEglife Orthodo-
xe. Et je prieray celui qui poflede un tre(or de mifericorde qu'il
éclaire vos efprirs ,&c qu'il vous conduife à tous les biens fpi-
rituels qu'il lui plaira,&: que vous foyez enfans de TEglife fainte,
dont la mémoire eft répandue jufqu'aux extremitez de la terre
par les benedidions de la fainte Vierge Marie, des Anges, Ar-
changes, de tous les Martyrs &: Saints qiu fe fon^ rendus agréa-
bles à Dieu par les bonnes œuvres , depuis ce temps jufqu'iiux
ilecles des fiecles. Le i8. du moisdeHatur.
ATTESTATION DV MESME PATRIARCHE
fur l'EuchariJiie en particulier.
'AV NOM LE DIEV CLEMENT ET AffSERICORDlEVX,
j , Zouange à Dieu à tout jamais . Ze falut vient du Seigneur.
bleMat- y ^ p^j^ ^g nôtre Seigneur J. C. & lagracede fonEfprit
"^^^' 1. J vivant Sifaint, quieftdefcenduc fur ki pursDifciplesSC
faints Apollres dans la chambre haute de la fainte Sion ,
l'etrence precieufe de cette paix , & cette même benedidion
defcendentSc demeurent à tout jamais fur les Chrétiens nos
frères bons & illuftres. Beniffez-les tous , Seigneur , des bene-
didions celeftes. Ainfî foit il. Nousleur faifons fçavoir après
avoir reïteréfureuxles benedidions, 6c leur avoir envoyé un
falut fpirituel , que nous avons appris que l'ennemi parloit de
nous parmi vous fur le fujet de la foy 3 Nous avons déjà en- '
voyé un écrit fur ce fujet, & nous vous écrivons encore cette •
lettre. Moy le pauvre Matthieu fervitciirde J.C. parla grâce
de Dieu incomprehenfibie , quoique je ne mérite pasce nom ,*
Patriarche de la grande Ville d'Alexandrie, des Provinces d'E-
gypte, d'Ethiopie, de Nubie, d'Afrique & de Nicée , j'écris ce- >
ci à toutes les perfonnes remplies de charité qui verront cet
écrit 6c le liront. Nous avens fçû que les Hérétiques de Fran-'
ce attaquent opiniaftrement & particulièrement le grand Sa-''/»
crcment du corps de J. C. qui eft la fainte Euchariflie , & en
nient la vérité , difant que J. C. ne s'y trouve point réellement,
aivec ÏEgîlfe 'R.omxine furîîmhunftïe. 767
mais feulement en figure. Ils difènc aufllde nous que nous ne Chap.
croyons que ce Sacrement , c'eft à- dire , que nous ne croyons XIX.
pas le changement de la iubftance du pain ôc du vin àlafub-
flance du corps & du fang de J. C. ni la prefence véritable dans
l'Eucliariftie iur le S. Autel après la confecration. Ils difent en-
core que la fainte Euchariflie n'eft pas le véritable corps de
J. C. dans le pain qui efl: appelle corps de J. C. à caufe de la
vertu du S. Efprit qui s'y trouve. Et ils difent que l'Euchariftie
qui eft appellëe le corps de J. C. n'eft pas fon corps même qui
efl: dans le Ciel , & ils difent que J. C. efl feulement dans le Ciel
rccUcment, non fur la terre, &; que ce que nous voyons n'efl: pas
le véritable corps de J. C. mais feulement du pain. Ils difent
auffi de nous que nous n'adorons point le corps de J. C dans
l'Eucharifliic d'un culte qui foit particulièrement propre à Dieu.
Ils difent auflî que les pécheurs qui reçoivent l'Euchariftie ne
reçoivent point le corps de J. C Nous demandons à Dieu pour
eux pardon de ces chofes que nous avons entendues , & nous
leur confeillons de ne tenir point fur nous des difcours fi im-
portuns, qui ne font que menfonges &: fottifcs, où il n'y a point
de vérité , &: qu'ils ne regardent point un petit fétu dans nos
yeux , ayant une grofTe poutre dans les leurs.
C'eft pourquoi , afin d'ôter toute forte de doute , qu'on
pourroit avoir dans le cœur, nous leur déclarons à prefent nô-
tre créance , & nous leur difons devant tous les hommes , que
\t^ Cophtes Jacobites reçoivent & croyent fermement cette
f-Li I jT/->^ -n. ' M, Claude diJ
oy véritable, que le corps de J. C. même qui eit monte aux ^^^j,! f.^^^^^
Cieux , qui eft affis en haut à la droite du Père , que ce même queics jaco-
corps rcellem.ent en perfonneS: en fa propre fubftance,cft dans '^"" "^ .
la (ainte Euchariftie, où il eft invifible àcaufe de la prefence que^ Caic^
de fon proprecorpsfur le faint Autel. Nous l'adorons d'un cul- «ncorps.^
te qui eft particulièrement propre à Dieu; nous croyons dans
ce point particulier tout ce que croyent les Latins avec lef-
quels nousfommes d'accord fur cela, quoique divifez en d'au-
tres chofes. Et ces Hérétiques nous impofent une calomnie ,
quand ils difent qu'après la Confecration nous ne l'adorons
point ,6c nous ne nous profternons point devant lui.
Nous croyons & nous difons que les méchansauiFi. bien que
les bons reçoivent le corps de J. C. dans leur bouche , les pre-
miers à leur perte ,& les autres pour leur falut.
Nous difons ôcnous crovons que le pain &Je vin fcntchan-
D D d d d iij
yéS Liv. VIII. Preuves authent. de l'union des Eg. d'Or.
gez vericablemenren lafubftancedu corps de J. C.dc^tn la fub-
Itance de fon Ikng prea -ux ^ de forte qu'apiés la confecration
la fuhftance du pain & Li fubftance du vin ne demeurent plus.
Que ce faint Sacrement fe donne aux malades, afin qu'ils meu-
rent dans la grâce de Dieu , & qu'ils ayenc un trefor dans le
Royauriie de^ Cieux.
Nuus difons qu'il n'eft point incomprehenfible, & qu'il n'y
a point d'mconvenientàdire, queplufieurs corps qui n'en font
qu'un foif en plufieurs lieux en une même heure. Car celui qui
a Fait le ciel & la terre d'une feule parole peut faire ces miracles.
Il fait fon corps par fa parole,endifant paria bouche du Prêtre^
Ccciefimon cvrps. Il donna foncorpsàfesDifciplcs enEmmaùs,
& il écoit en d'autres lieux : Et comme la divinité ëtoit renfer-
mée dans le ventre de la Vierge Marie -, ainfi il efl: fous les acci-
dens du pam 6c du vin , la chofc eftanc égale , parce qu'il étoic
neceiTaire que Dieu éprouvât ainfi nôtre foy , & afin que nous
n'eneuflîons point d'averfioni& que quand J.C. nous eût com-
mandé de manger fon corps , cela ne nous fift point de peine.
Nous croyons & nous tenons pour afleuré que c'eft là la foy.
tirée des paroles dej. C. Nôtre Seigneur, qui eft venue à nous
jufqu'à prefent par la tradition de nos Peres,les faints Apoftres
&; les SS. Pères, Scelle que nous garderons jufqu'à la mort;
Nous excommunions tous ceux qui (ont dans des fentimens
contraires à la foy Apoftolique, c'eft à dire à cette foy donc
nous avons parlé ci-deilus touchant la fainre Euchariftie , &
tqui nient le changement delà fubftance du pain en la fubftan-
cede J. C. Nous allarons celaà tous ceux qui liront, ou im-
pugneront ctx. écrit.
Ceux quidifent que nous ne recevons pas le changement de
la fubftance du pain &du vinen la ^ubdance du corps &du fang
précieux de Nôtre Seigneur J- C.difentdes chofes inutiles ,&
s'opiniâtrent contre la vérité en ce qui concerne ce fiint Sacre-
ment, parce que nous tenons en cela la même chofe que les La-
tins. Nous le déclarons, nous le faifons fçavoir , nous le fcellons,
afin qu'il vienne à vôtre connoi'Jance , 6l que vous le receviez
dans la charité Chrétienne , c'eft.là mon deifein. Et le pauvre
miferable prie celui qui a un trefor de mifericorde d'éclaircir
vosefprits,& de vous conduire à tous les biens celeftes qui lui
font agréables, & que vous foyez enfans del'Eglife Orthodoxe,
dont la mémoire eft répandue par toute la terre par les benedi-
d^ec fEgli/e Komnine fur lEucharifiie. 769
clions de la fainte Vierge Marie, des Anges & des Archanges,
de cous les Martyrs &: Saints qui ont eflrë agréables à Dieu par
leurs bonnes œuvres à prefenc , de tout temps Se jufqu'aux fie»
clés des/îecles. Amen. Amen. Anaen.
Fait le 5. du mois de Mefein l'an âcs SS. Martyrs.
Au basefl: le cachet du Patriarche en Cophte ,oùil y a
quelques mots qui veulent dire Jefu-s.
Chrifi Fils de Dieu.
CHAPITRE XX.
Union des Eglifes d'Orient avec l^'ijife Romaine fur l'Eucharifiie
^ autres points , prouvée par divcrfes atteftations des
Patriarches , Evèques é^ Prcflres Arméniens.
N a tellement juftifié iafoydes Arméniens fur l'Eucha-
riftie dans le premier Tome de cet ouvrage qu'il femble-
roic fuperflu d'y rien ajouter, principalement avec les attefta-
tions authentiques du Patriarche d'Ermeafus &: de l'Archevê-
que Arménien de Confl:antinople,que l'on a ajoutez dansla re-
ponfe générale à l'atteftationdes Arméniens d'AlepSc de deux
Evêques Arméniens , dont l'un étoit en Hollande, l'autre à
Rome , qui avoienc efté produits dés le premier volume.
Néanmoins comme la Nation, 5c par confequent l'Eglife Ar-
ménienne eft fort étendue ,& qu'ils (efonr établis par le moven
du commerce dans les principalesvilles d'Orient,on croit qu'on
fera bien aife de trouver ici des atteftations des autres Eglifes
Arméniennes, comme celle du Patriarche de CiSj qui eft celui
qui partage toutes les Eglifes des Arméniens avec celui d'Er-
meazin. Celle des Arméniens d'Ifpahan,& celle des Arméniens
du Caire : après quoy il M. Claude contefte encore lur ce fait ,
il nous dira, s'il lui plaift,par quels moyens on peut donc établir
la vérité des faits de cette nature. On a joint à ces atteftations
des extraits des lettres de M. de Nointel , dont l'une contient
les cérémonies qu'il a vu pratiquera la Melîe des Arméniens ,
& entr'autres l'adoration de TEuchariftie. Les autres autori-
fenc les atteftations du Patriarche Arménien de Cis , 6c celle
77© Li V. VI H. Treuaies authmt. de T union des Eg. etOr,
de l'Evêquedes Arméniens dlfpahan. On alaifle les artefta-
tions du Patriache de Cis & des Arméniens d'Ifpahan en Latin,
parce que ces traductions ont efté faites en Orient, & vérifiées
iur les lieux, & peuvent ainfi pafTer pour Originaux. L'on a
néanmoins auffi ces aéles en langue Armenienne,dans laquelle
ils ont efté envoyez à Sa Majeftë.
EXTRAIT D'VNE LETTRE DE MONSIEVR DE NOJNTEL ,
■Ambajfudeur dit Roy k la Porte.
IL ni'eft venu une belle atceftation d'Alep avec fa tradudion
en Latin. Je vous envoyé celle-ci , me refervant l'original
pour le faire tenir, lorfque j'en auray un Duplicata. Ellem'aété
accordée par le Patriarch'e des Arméniens , refidant à Cis en
Cilicie , lequel l'ayant fait figner de plusieurs Prélats & Eccle-
fiaftiquesdans une forme fort authentique , l'a fait paflèr par
AIep,où rArchcvcque^: le Clergé l'ont approuvée,&c'eft de
ce dernier lieu qu'elle m'eft venue. Vous y trouverez quelques
noms qui font peut eftre les mêmes que ceux de l'atteftation
Arménienne imprimée dans vôtre Livre de la Perpétuité au
nom de David, qui s'intitule Patriarche des Arméniens,-
Ce David eftoit en ce temps là Patriarche de Cis, &bien uni
avec le grand Patriarche Jacob ; mais la cabale d'Eleazar Pa-
triarche , ou pour mieux dire Archevêque des Arméniens de
Jerufalem l'ayant emporté, Cruciador qui edoit de fon parti
fit chafler David , & obtint le Patriarchat en fa place.
Il me femble que maintenant la croyance Arménienne furies
points en difpute , eft établie d'une manière fans réplique. Car
je me perfuade que la conformité d'une déclaration de foy
donnée par des gens auffi éloignez que Iefonclfpahan,Cis,Alep
&, Jerufalem eft au deiTuscle toute coilulion, Se qu'il eftimpoffi-
ble d'en foupçonner avee raifon, quand l'on confidereque lâ
divifion des Patriarches qui fêchaflent les uns les autres, n'em-
pêche pas leur union dans les fentimens del'Euchariflie ^&
autres points qui nous font conteftez.
ATTESTATION BV PATRIARCHE De C75'.
Ekvus Jesu-Christi CruciadorPatriarcha &: Primas exi-
gurcpartis Armeniorumquimoranturin Cilicia &Pala:fl:i-
na,dextra; divi Gregorii,eiufdemque throni minifter, oui ne-
cefTarium valde fuie hxc fcribere. Siquidemaudivimusàmukis
fide
aivec tEgltfè Romaine JurtEuchciriftie. 771
fidedignisSc eciaminfignibus, elîeqLiofdamharrecicosin Gai- Chap.
lia Lucheranos Se Calviniftas nuncupatos , Armenis Orien- XX.
talibusfallo imponentes, alTerendo ubiquequod ipfis fîntcon-
formes Religione,&fide,quodabfitomnino; quin potius faxic
Deus, utnacio noftratantum diftetà talibus icfimilibuserro-
ribus Calviniftarum & Lutheranorum quantum cxluni à terris.
Eorum autem propofitiones func ejufmodi.
I. Dicunt corpus Chrifti non efle realiter in facra Euchariftia,
fed paoem tanrummodo & vinum, figuras & figna corporis 6c
fanguinisJefu-Chrifli, qua: vim ÔC vircutem eorum recipienti-
bus communicant.
z. Afleruntgloriofum & immortale corpus Domini fedens
ad dexteram Patris , nullomodo efTe prc-çfens in Euchariftia,
nec ctiam introitre in os accipientium facram hoftictm, (ed tan-
tummodo panem & vinum uniri penetrativè ac perfonaliter
divinitati virtute confecrationis, & ita fieri novum corpus
Chrifti, quod primo uniri dicitur, fiquidem ab eadem divi-
nitate fervatur acque fuppofitatur non fecus ac primum.
3. Dicunt rubftannam panis & vini non converti in cor-
pus &: fanguinem Chrifti, fed panem & vinum manere poft
confecratioiiem.
4. MifTam non efle verum Tacrificium propitiationis, nec de-
bere ofFerri pro vivis & defun<flis.
y. Incongruum efle adorare Chriftum in facra Euchariftia,
imo nec poflfe adorari fine idololatria.
6. Non concedi omnibus & quibuflibet baptizatis univer-
faliter loquendo remiflîonem culpx originalis , fed pra:defti-
natis folummodo,ita ut fiquisadultus baptizatus moriaturin
infidelitate, nuUam prorfus gratiam recepifl^e in baptirnio
fuo,
7. BaptiHifium non efle necefl~arium filiis fideHum,ira ut Ci
moriantur fine ipfo poflînc falvari, undefuperfluum eft adeo
folicitumefle ut baptizentur antequam moriantur.
5. Jiiftitiam femel receptam non poflle amitti , fiquidem
talis adoptione fadus eft filius Dei, nec poteft unquam filius'
efle diabolij nec excidere à gratia adoptionis.
9. Si quis juftuscadataliquandoidololatriam,aut homicidium
vel fornicationem , aut fodomiam , in furtum ceu eriam
blafphemiam, non polTe nihilominus primam juftitiam fuam
amittere.
EE eee
I
77i L I V . V H L Freu'ves authen. de tmion des Eg. d'Or.
lo. Vota perpétua caftitatis & aliaemifla à Religiofis, ini-
qua efi[e,contraria Tacris Scripturis,nec non inventa à diabolo.
II. Ecclefiam Dei non pofle fineinjuftitia &tyrannideprae.
cipere jejunia, &ceriis quibufdamcibis interdicere fidelibus.
II. Chriftianosnon poiTe , nec debere patrocinium Deiparx^
Virginis aut Sancflorum qui in cîclis funt, ullo modo implorare
nec eos deprecari, aiioquin damnum inferre Chriflo mediatori
noftro.
13. Incongruum effe ac ridiculum Sandos & eorum rcli-
quias venerari.
14. Chriftianos non poffe etiam honorem exhibere eorum
imaginibus cultu relativo.
15. Non elfe feptem EcclefiiE Sacramenta, fed duo tantùm.
î6. Sacerdotes ex inftitiito divino pares efTe & squales Epif-
copis , & pofTe alios Prefbyteros confecrare.
17. Ecclefiam non indigeie regimine Epifcoporum , imo
/atius efle quod multirudo Sacerdotum ab aliis competenti
numéro conftitutorum regant eam quam Epifcopi.
18. Univerfalem Ecclefiam pofle excidere , feu in exitum ire,
invifibilemquefierialiquando,eandemquenoneflèin'fallibilem.
19. Juftos nullisunquam pœnis corporalibiTs affici in tem-
pore propter deliifta fua.
20. Libros Tobix, Judith, Sapientia:, Ecclefiaftici , id efl:
Sirac, Baruc,6cMachaba:orum,non eflfe libros facrn; ScriptutcX.
Nos igitur fupra fcriprus Cruciador Patriarcha, unà cum
noftris Ecclefiaftiris, Epifcopis, DocfVoribus, & prefbyteris ,
mox ut audivimus bas fupra allatas propofitiones mendaciis
refcrtas, horrendas, ac totalitcr penitufque contrarias Ecclefias
Catholicae & Apoftolicae ejufdemque fed:atoribus,uri patet fîn-
gulisj pro viribus conati (umusè medio tollereejufmodi erro_
res ac fpurcitias hucufque auribus noftris inaudiras ; imo ab/îc
ut talium harrefium folacogitatioin mentem noftram rn^idac,
quin potiusab ipfis totoaminoabhorremus, tanquam àmorti-
fero veneno, & adeo deteftamur eas ut nequidem de ipfis
aliquid audire velimus.
Tandem Ecclefia noftra firmirerac fideliter obfervat do-
«flrinam à Domino Jefu Chrifto acceptam , ipfique traditam
ab Apoftolis qui erunt pleni Spiritu fan<flo,imopluries exami-
nata, inventa eft omnino conformishucufquefacrisConciiiis,
anjectEgli/è Romaing fur lEuchAnfiie. 775
fiqiiidem fides noftra eft abfolutè & evicJenterconirariafupra Cha?.
allâcis hxreucorum vigintipropoficionibus. In hoc quod non XX.
tancum modo admittat feptem Sacramenta, verum etiam cece-
rosarticulos pr.xdicTiis oppoficos, prxfertim confccrationem
panisin corpus Chrifti. £c licet profîreamur unam in Chrifto
naturam,non inde fequitur liumanicatem deftrui, &: Chnftum
non habcrecorpus, QUIA NON DfciMusuNAM esse Christc
nacuram deperditione unius, vel commixtioneucriufquei fed En quel fens
perineffabilem unionem proficemur inconfuTani unicatem na- '" Z^™^""-'*
turarum Chriltij imo etiam nrmirercenemus ac credimushu quii nya
manitacem Chrifti nullomodo deftrui, eamque habere corpus, qu'une nature
&quod idem corpus pro nobis crucifixum &; fedens ad dex-
teram Patris^ Ç\t prefens realicer, licecinvifibiliter in Euchari-
ftia fub folis fpeciebus panis & vini;, quia panis & vinuni ira
xronvertuncurin verum corpus & fanguinem ChriftijUtutriufqj
fubftantix non remaneatamplius, niftfola accident'ia. Quam-
ob remadoramus Chriftum in fancliflimo Sacramento. Haro
•eft Ecclefia: noftfc^ orthodoxa doclrina quam accipimus^ quam-
que toco corde & pro viribuscolimus, cuiufque fpegaudemus
ac femper gloriamur, & medianre ipfa fperamus, uc cum Chri-
fto fimul rapiamur in aéra, cui gloria œcerna, laus & honor
in fecula. Amen.
Has refponfionesftriclimac paucis verbis fcriptas ea civita-
te Sirenfi,qux eft fedes noftra^ mifîmus profupradiclisChrif-
tianis qui funt in Gallia.
In quarum fidem ego Crtjciador. Pacriarcha manu pro-
pria fubfcripft eas ac figillo munivianno Armenorum lui. 6c
a partu Virginis 1671.
Eqo Pau LU s DoBor ^ Archiepifcopus Armenorum Vicarius
gênera lis periSuJîris D- Patriarcha. in civitate Sifenji^ afientioT
veritati ^ teflimonio data.
Ezp JoANNES Docior ^ Archiepifcopus civitatis Kcnnanic^
adh^reo fanciis Patribus , (j;- condcmno (upradichi h^reticos.
Ego GaE.GOR.ius Archiepifcopus Mcrdinicondemno ^ àna-
thcmati^o cum fan&is Patribus [npradicios hcvreticos.
Ego AzARlA Bocior é" Archiepifcopus Alcpenfis accepidh il-
lujfri.ljïmo patriarcha hafce Itttcras tcfiimoniales è civitate Sifen.
Jî j congregavi Sacerdotesac Minijiros Ecclefa , ^ uni cmnipfs
EE eee ij
774 L^v. VIII. Prewves authent. detunîon des Eg.d*Or.
confirmavimus fanam doîirinam contra hos hareticos anno Arms-
norum ii2t. 'juin 25.
By) DomBaptista Sacerdos (^ Archipreshyter Ecclefia Kir-
pnis Deipara ajj'entior veritati ^ condemno do^rinam horuM
hareticorum,
E70 Do M. fervus T>ei adharens favBis Patrikus refpuo pravas
opiniones ifiorum hareticorum.
Ego'DoM.-hm.O'DA'rus Jimiliter anathematixo doBrinam ho-
rum Schifmaticorum.
Ego DoM-GREGORius»W(i cum fauïHs Patrihus damno fer-
verfa ijiorum hareticorum doynata.
Ego DoM Theoûorus unàcumCatholicis rejicio doclrinam
hoTum hiereticorum.
Ego DoM M-iCRKii. anathematixs f«pra allatam haretice^
rum doBrinam.
NOs Carolus Francifcus Olier de Nointel Régi Chriftia-
niffimo ab intimis fecretis & in Parlamenci Paridenfis-
Curiâà ConcilHs, nen non ejufdem ad OtEhoraanum Impe-
rarorem Legatus ; teftamur ac notum facimus Ecclefix: Si-
fenfrs qua: eft in Caramania, Patriareham Armenum nonnul-
]is ha:retica quçdam dogmata fibi calumniosè imputantibus
Calvinianis occurrendigratia, propri^ fimul ôc ArmenorunTï
omnium fidei declarationem mififfe, cujus apud nos fervato
prutotypogenuinam affîrmamuseilèrupra fcripcam interpreta-
tionem qnie dido prototypo junda Alepo perlaca eft 5 cujus
rei certioris faciend;^ fidei caufa, hacce noftra fubfcripcione,
chirografb,acnoftrorum infigniumfîgillo munivimus, quibus-
te ejus qui nobis primus eft à fecretis fubcriptionem contraponi
curavimus. Dacum Perxad Conftantinopolim 3. Noh. Odo-
bris an. rep. fal.hu. 1671.
Olier De Nointel.
Par. mondit Seigneur.
Le Picard Secrbtaire>
A^ec liglifè Romaine far rSuchariJite. 77 j
Chap.
'ATTESTATION DES ARMENIENS DV CAIRE. ^ X.
v^» nom du Pere^ du Fils ô" du Saint EJ^rit qui efi un feul
Dieu. Amen.
JE croy de tout mon cœur en un feul Dieu Créateur, au
Fils de Dieu engendré du Père, &au S.Efprit procédant du
même Perei Je croy c]ue le Verbe de Dieu eft Eternel fans
commencement & fans fin, comme le Père eft éternel. Je croy
au faint Elprit immortel procédant du Père, & qui eft adoré
a\ ec le Père Se le Fils. Je croy en la fainte Trinité qui n'eft
qu'un feul Dieu dans une même fagefle , &c'eft lui qui a créé
toutes les chofes vifîbles & invifîblcs. Je croy en la fainte Eglifê,
en la Remiflîon des péchez, en la Communion des Saints. Je
croy l'unité dans la Trinité. Je croy en J. C. Fils de Dieu
engendré defon Père de toute éternité, qui defcendantdu
Ciel a pris un corps dans le ventre de la bien-heureufe Vierge
oiiiis'eft fait homme, &: eft demeuré uni à la divinitépen-
dant neuf mois entiers. Ainfî il eft vray Dieu & vray
homme, compcfé d'ame , d'efprit & de corpsj il n'a en luy
qu'une feule nature. Ce même Fils de Dieu qui eft éternel
& immuable , s'eft fait homme fans corruption & fans impu-
reté. Comme Dieu eft immortel , de même l'humanité de
J. C. eft immortelle. Noftre Seigneur J. C. eft aujourd'huy
comme il eft hier, & il demeurera fans fin-.
Je croy que noftre Seigneur J C a converfé /lirla terr^,
& qu'après trente ans il a efté baptifé, que le Père prononça
cette parole 5 c'eft-là mon Fils bien aimé, & qu'on vit dcC
cendre fur luy le S. Efprit en forme de Colombe. Je croy que
noftre même Seigneur confondit le diable lors qu'il en fut ten-
té, que préchant aux hommes le Royaume de Dieu pour les
fauver, il fouffriten fon corps beaucoup de peines £cla faim 6s
lafoifj Qu'il porta volontairement toutes les^xiffrances^ Qull
voulut eftre crucifié & mourir en fon corps , Se qu'il fut enfe- .
vely j Que la divinité n'abandonna point fon corps dans le
tombeau non plus que fon ame quand elle descendit aux En-
fers où il parla aux âmes des Pères, brifa leur fers , & déli-
vra ces âmes de la captivité. Le troifiémejour il reftufcita,^:
apparut à fesDifciples. Je confefle que noftre Seigneur J. C.
eft montéaux Cicux avec le même corps qu'il a reçu de k
EE eee iij
77é Liv. VIII. Vvewvcs authem. de Vunion des Eg. d'Or.
Sainte Vierge, qu'il y eft aflis à la droite de fon Père, que de
là il reviendra en ce même corps, Se qu'avec une grande Ma-
jeftéil jugera les morts &: les vivansj&ccux qui auront biea
vécu iront en la vie éternelle , 6c les autres en enfer.
Cette foy eft necefTaireà tous les hommes, ôcaux juftesmê-
mesj &il faut qu'ils enfaflent profeiïion en tous temps &de
tout leur cœur comme de la bouche.C'eft cette foy qu'ont en-
feignéeles Apôtres,promettant le falut à ceux qui l'obferverorc
exadlement. C'eft cette même foy que protelfe l'illuminé S.
Grégoire. Je reconnois auiîî qu'il y a fept Sacremens, le Bap-
tême, la Confirmation, l'Euchariftie, la Pénitence, l'Ordre,
le Mariage & l'extrême Ondion. Nous adorons la fainte Croix
&nous rendons la même adoration aux Images de la bien heu-
rtw^z Vierge Marie Mère de Dieu. Nous honorons les Images
de tous les Saints, & nous célébrons leurs feflcs par de tres-de-
votes commémorations Je croy que la bien- heureufe Vierge
ed: Mère de Dieu. Je croy en la chair Seau fangdej. C. ôcque
ce pain &: ce vin que nous voyons eft changé au corps Se au
fang de J. C. aulîl toft que le Preftre a prononcé les paroles de
la confecration, &: qu'ils font propitiatoires pour les morts.
Donné au temps de noftre
Carefme de S. Nicolas l'an
1671.
Moy je Gaspar Preftre & Supérieur
de 1 Eglife des Arméniens au Caire
d'Egypte déclare Se confefle que cet
écrit eft de noftre véritable foy.
RELATION DE MONSIEUR DE NOINTEL.
LE fécond Juillet trois Marchands Arméniens m'ayant fait
leurs civilitez, l'un deux venu par la Caravane m'a ren.
du une lettre du Père Rapliaël du Mius écrite d'Ifpahan le 14/.
Décembre 1671. Il m'informe que l'atteftation que je defirois
ayant efté accordée, la difficulté qu'on a eue n'a point efté
fondée fur ce que les Arméniens ne crufTent point les mcme«
chofesque nous fur l'Euchariftie Se les autres points dans lef-
quels ils conviennent, mais fur l'apprehcnfion de leur clergé.
li
Afvec ÏEglife %omaine fur lEuchAriftie. 777
que le noflre ne fe veuille rendre maiftre de leur Egiife j que
néanmoins la confiderarion du Kelontcr des Julfalius nommé
Agapiri aiifli généreux que civil & honnefte, &: qui foûcienc
fes bonnes qualirez par Tes grandes richeflès au defTiis de tous
ceux de fa nation dont il eft le chef par Ton rang auflî bien que
par fon mérite, l'a emporté: Ce Seigneur,quieft fort Catholi-
que,s'efl: fervi de tous les moyens les plus convenables pour ob-
tenir cette déclaration delà vérité à laquelle on s'eft déterminé
par le refped que l'on a pour le Roy, pari cgard qu'ils ont eu à
mes lettres^principalement parcelles du grandPatriarche join-
tes à la copie de l'atteftation que luy êc les Arméniens de Tur-
quie m'ont accordées &: qu'enfin l'mimitié des Arméniens con-
tre les Loutrans,qui elt le nom qu'ils donnent à tous les héréti-
ques d'Occident, a levé tous les obftacles quife prefentoient y
ceux-là eftant bien aifesd'avoir occafion de convaincre l'impof.
ture de ceux cy, d'imputer à l'Eglife Arménienne leurs fen-
timens.
Ce bon Père me témoigne que pour le faire avec plus d'éclaf^
l'Archevefque & r£vêqueVertabjets,le PreAreKelonderôi au-
tres des plus confiderables ont voulu écrire cette atteftation fur
velin orné, peint 6c doré en leur manière, afin qu'elle fufl; digne
d'eftre prcfentée à noflre Monarque, 6c que celuy qui l'a rradui -
te en Latin fuivant la phrareArmenienne,6c oui a travaillé audî
à l'obtenir,re nommePetrus EbediK qui a étudié à Rome, qui
eftfçavant, fort 7elé, 6c que Kelonder a retiré chez luy.
Il me parle enfuice de l'aufterité des jeûnes de cette Egiife
pendant lefquels ceux qui en font, ne fenourriiTent, plus de la
moitié de l'année que d'herbages, y cftant tellement attachez
qu'ils taxent ceux qui manquent à les obferver, de n'eftrc pas
Chreftiens.il m'obfervc auiîl non feulement la longueur de
leurs MefTes, pfalmodies, confeffionsSc communions, mais en-
core la célébrité qu'ils y apportent par Icsiichefes de leurs
ornemens d'Eglife, où ils n'épargnent rien, failant ainfi écla-
ter 6c revivre dans un païs Ci éloigné, ce qui fert à exciter
dans le Chriftianifme la dévotion 6c le refpecl; d'où il pafle
àcctte reflexion que nos Occidentaux qui crovent 6c pra-
tiquent les Cérémonies de l'Eglife par grimace 00 les Miniftres
de la Reiieion prétendue reformée qui les trait- ent de fraif-
che datte Romaine 6c comme inventées pour tenir le peuple
dans fon devoir , n'ont qu'à pafTer dans le Levant poureftre
dfabafe z de cette nouveauté imaginaire.
778 Liv. VH I. Preuves authen. de t union des Eg. d'Or.
Ce bon Pere qui depuis vingt- cinq années eft dans la Perfe,
avertit ces novateurs qu'ils trouveront dans ce voyage les Egli-
fes Grecques Se Arméniennes qui font les principa.'eSj celles
des Cophtes, Maronites & autres, en poiTeffion des Icpt S^cre-
raens, de quantité d'Eglifes richement ornées d'habits Sacer-
dotaux, d'un Clergé compofé de Patriarches,d'Archevêques,
Evêques, R.eligieux,& Predicateursqui font élevez à ces rangs
fubordonnez les uns aux autres, par la voyed'é'eclion,&c]ui ob-
fervent régulièrement avec les feculiers les Feftes annuelles,jeû-
nes 6c MelFeSjtoutes ces chofes ayant paflTé dépuis l'antiquité
jufqa'à eux, ôc s'y eftantconfervécs inviolablement malgré la
dowiiination Mahometane, laquelle par fa tyrannie ayant pu
réduire ces peuples dans une grande ignorance, qui commence
néanmoins à celî'er, n'a pas efté capable toutefois de les faire
départir du principal & de leurs cérémonies anciennes, donc
il y a des preuves irreprocli:^-bles dans les médailles antiques,
qui ne font plus frappées au coin deRome depuis tant d'années.
Et il conclut que de cette union de fentimens des Chreftiens
Orientaux dans des points fieffentiels, quoyque d'ailleurs les
Arméniens & les autres ne s'accordent pas avec nous ny en-
tr'euXjil faut croire que nous & eux les avons pris dans la même
fource que l'on doit nommer indubitablement la tradition
Apoftolique, puifque tant d'herefies n'ont pu la détruire ny
nous en priver, & qu'au contraire parleur feparation elles ont
attefté que noftre Eglife eft celle dont le laint Evangile diç
qu'elle eft fondée fur le rocher inébranlable.
ATTESTATION BES ARMENIENS D'ISPAHAN.
POTENTISSIMO CHRISTI CORONATO LVDOriGO
Régi Gentis viHricis Francorum. ' -^
Natio Armena SCR.1BIT.
Eleberrimus eft definitioneatque ordine regni, five Re-
_ gum, heroïcx cogitanonis jufti confilii atque fecreti ,
cledio circajudicîum, vider robuftusinPalçftra belli,tremor
adverfusveritatirebel!es,fundamentum &:dîfpofitio Chriftia-
nac cultura: Dei,in luce natus & primogenitus Ecclefix Ca-
tholicxqux eft mater beatitudinis, exftirpe antiquorum Rex
U. forris virtuofe, bonum germolium &: planta benediélionis
ornacus gloriis , H. viclor excellens , iupra tuam fortif-
fîmam
Anjec ÎEglife Koma.ine Jur VEucharifiie, -j-ji^
fimamprogeniem , fupremuSj altum thronum regni habens , Cm. XX.
omnibus prjeledus in circumfcribendofamauniverrum , fpes
& refugium omnium Chriftianorum , cum divina piecace c^e-
fareas Se abfolutus Rex amator Dei & Chnftianorum.
Sâlutem exhibemus juxta traditionem Chrifli amore fpiri-
tuali cum Dei benedidione tuo regno Deum amatori , Nos ^y" ^ ^^"^1^
'humiles Archiepifcopi , David, Ifaacus, Se Stephanus Se Ka- cercmoniedcs
lanter Ae;a Piri, SeDodores ,&:cum Maçinanbus ,Se unanimo Arméniens,
, ^ n • ' • /r j J ■ V comme fi c't-
populo noitro continuas orationes eftundendo , petmiusama- toicpourmeE-
eno Reee Chrifto , uc cum fuo alto Se omnipotente brachio "c le nom du
r ri r ■•••11 Ro\,quiuy
conlervet ialvum , cum perpétua perleverantia mvincibile re eft pas nean-
gnumtuum juxta didum Apofloli ad ThelTalonicenfes i. cap. moins, cequi
2. ôc juxta benediârionem Jacob ,Gen. 49. cap. ôc non deficiant "J^sT^f^ni-V
tibi proies germinanda; in purpuris ufquead advcntum xterni lef^ed.
Régis, Se tr.ndem cum tuis fplendidis Magnatibus Satrnpis , Se
quàm plurimo exercitu , quo abundas gloriis Se honoribus , in
eifdemgaude Se jugiter fruere , ad laudem Se gioriam Redern-
ptorisJefu-Chnfti totiufque orbis Chriftianr.
Notum fit Magnirudiniveftrarquod aliqui fegrcgati'Se fcifîî
& maledicentes( fcilicet Novatores ) pofuerunt falfam nobis
impofturam fingendo nos cfie communicantes eorum mali-
tix. Idcirco Celfitudo veftra jufTerat cultori boni Domino
Carolo Olier Marchioni de Nointel ,ut fciatur veritas,Se ma-
pifeftctur tua: Magnitudini. Ipfe quc'efivic ab univerfali Pâtre
Jacobo Patriarcha Generis Armeiiici, d qub verè fcivit nori ita
e{îè , ut dicunt , Se eriam Icripfit ad anriquum Se prudentiffi-
mum niiffionarium Patrem Raphaclem Capudnum in Perfide;
fcitugratia modum fentiendi nofcrum dehac re. Etillecontu-
lit hoc ne2:brium cum noftro gloriofo Domino Kalanter Aga
Piri , qui eft Princeps Armenorum Perfidis, mediante Domino
noftro Petro BadiK fortirer in litteris Larinis perito. Oftendit
nobis fi:ripta fcilicet Pariarcba; Se Domini Legati, Se nobis fas
fuit fcribere ad Sublimitatem veftramnoftramacceptationem,
quia omnino longinqua eft fcientiaSe ienfatio noftra à talibus
imperfeclis Seerroneis opinionibus, quar diftant àtraditioni-
bus illuminatoris fandi Gregorii Se aliorum fandorum Pa-
trum noftrorumj Se taies dubitationes nunquam fueruntapud
nos , neque in mentem noft;ram afcenderunc, Se erant argu-
HienEa eorum ha:c.
FFfff
ySo Liv. VI M. Prewves authcn. de tuniondes Eg. d'Of.
I. Contra fandlidimum Sacramencum Euchaiilb.'E cjuinquc
capicibus. In primo dicant ChnftumDominum non eiîë reali-
ter in illo Sacramento ,
i. Gloriofum corpus Chrifti fedens in dcxtera Paris , non ell
illic , & non ingredicur in os iapientium.
3. Quod fubltantia panis 2c vini non tranfmutatur in corpus
Chrifti.
4. Qiiod Mifla non efl: facrificium remilîîonis peccacorum,,
ideoquenon eft celebrandum pro vivis & defundis.
5. Quod peccatum eil colère in illa Chriftum Dominum. Ac
nos contrariam partem eorum tcnemus -, abfque dubio fundati
in verboDomini, in craditionibusfandorumPatrumJ &quam-
vis non pofTuiTius a:quariin dando refponrionem cuilibet illo-
rum veftrx fublimiflima; fapienria: , atcamen cum noftro hu-
mili fciencia habita ex traditionibus fanAorum Patrum , quod
idem corpus Domini crucifixum 5c afcenfum in ca;ium , &: fe-
dens ad dexteram Patris efl: realiter in illo Sacramento, tamen
invifibiliter , fub fpeciebus panis & vini , & ita eorum fubftan-
tia tranfmutatur in corpus Chrifti Domini.
Deinde quamvis credimus unam naturam Verbi Incarnati
juxta Cyrillum Alexandrinum , non tamen confufam juxca
Euthychum hîcreticum. Sed ex pcrfcdla Deirate , & perfeéla
humanirate, &:exuna perfona unum Dominum Jefum Chri-
ftum unitum cognofcimus inconfusè j èc unde credimus & dif-
cimus Chriftum habere corpus & naturam humanam , quod
largitur pretiosè omnibus digne accipientibus, & habcmus fîr-
mum fundamentum in verbo Domini Matth. cap. i6. Moc efi
corpus mcum ^ fanquis métis ,êi non fignum j & in Joan. cap. G .
Panis quem ey) dabo corpus meum eft , Q- qui manducat ex illovi^
vet in sternum , ^ ey) fum panis vit/e. Undc indubicatè ado-
ramus Chriftum in illo Sacramento ,&il}cqui tafia non cré-
dit, fit ipfi idololatria , nobis vero fidelibus eft iàlutaris atque?^
optimus cultus. Pariter credimus efle veram propitiationem
pro vivis Scdefundis.
6. Dicunt baptifma non efle neceflàrium filiis fidelium , &
quoduniverfaliter non fitremiffio peccatorum pcr iliud omni-
bus , fcd folum eledis ; quorum contrarium dicit Dominus :
Qui non baptix^tus fuerit ex aqua (^ Spiritu ^c, EtApoftoI. ad
Rom. cap. 6.
7. Gracia femel habita non poteftamittijcujus contrarium di-
A^vec TEglife Romaine fur tEuchariJîie, y Si
cit idem Apoftolus ad Cor. i. cap. lo. ^/ exiftimat feftare^ vi- Ch. XX.
deaf ne cadat.
8. Quod perpétua caflimonia efl peccatum , contra faclum
Domini probancis per fuum exemplum , ôc dicentis Matth. 9.
funt EuriHchiqui feipfûs cajiraverunt fropter rcgnum calornm.
Cf. Quod Ecclefia Dei injuftè jubet jejunium , contra faclum
Domini jejunantis per 40. dies &:no(fles, &in principio Deus
interdixit comedere de arbore ilJa- Igitur eft bona traditiodc
jejunio.
10. Quod interceffîo San(5torum efl peccatum , contra illud
Pauli ad Cor. cap. 5. Ohfecramus fro Chrifio rcnonciliamini ^^
Danielis 3. Neque aufera^ mifericordiam tuam ànobis propter di.
leHum tuum jlbraham ^ Jfaac fervum tuum.
ii.QuodSacramenta non funt reptem,contra illud proverbium
cap. lo.Sapientia ^difitavit Jîhi domnm, excudit columna-s fcptem.
11. Quod Ordo Epiicopi & Sacerdotis eft xqualis,& quod
affiftentiaEpifcopi non eO: neceflaria eeclefiisj contra ea quac
habentur in Acl. Apolt. cap. 8. &i. ad Cor. cap. \x. Et quofdam
■pofuit Detis in Ecclefia fuos Apoflolos ^c. Et prxcipua circa Sa-
cramenta & ordinem Eccleiiafticum clarè& diffusé traclac
ianctus Dionyfius in lib. %.
13. Quod univerfalis Ecclefia potefterrare coorra illud Marth.
r6. Tues Fetrtis , ^ fuperhanc petram^c. ^adverfus eam non
pr^cvalebum porta inferi 5 &: Lucx 22. ^y> rogavi pro te , Petre
ut fides taa non deficiat.
Et tandem dicunt Librum Sapientix , Sirach , & Tobix ,&
Baruchj&Machabxorum non eiTe partes Scriptura: rancla:,fic
item dicunt reliquias Sanclorum non eiîê colendas , neque eo-
rum imagines, & quod fidèles non polFunr pati poft mortem
pœnam temporalem j cujus contrarium habetur in Libro Ma-
chabxorum ,ubi jubeturorarepro defunclisfidelibus, fed prce-
cipuè liabemus contra fupradicîaex traditionibusantiquorum
SS. PP. & Coneiliorum , Se confervamus & hunoramus ea qu*
illiparvipendunt.
Taies funt intentiones, Potentifiîme Rex ,' Epifcop^orum Se
Doclorum Ecclefia: Arménie noftr^ ,quibus breviter oflendi-
mus veracitati veftr^ quod non fumus taies, ut diffamarunc
nos receptorestalia enormia, fed prxcipuè militamus contra
illa fequendo orthodoxam viam antiquorum Sanclorum Pa-
trum & Apoftolorum Chrifti Domini , cujus benedidio fit
F F ff fij
ySi Liv. VI 1 1. Preuves authent. de ï union des î g. â' Or.
iuper ce , tiuimque regnum Se fuper dilediffimum liberum
tuum, coronaque dignifîîm'.im, 6c Chrifto forrificatum Del-
THiNUM , teque ipfe Dominus confervec feniper juxta cuam
filiacionera legitimam 6i fîdelem, cum Macre tuafanda Ro-
mana Ecclefia.
Scripcafiiithxc juxta computûfionem Latinorumannoi^yr.
menfis Decembris lo. &; Armenorum luo. in Conventunof^
tro, quod eft in Regia Civirace Spaham ; êc in veritatem hu-
jus Epiftolx , nos infra fcripti acteflamur cum noftris propriis
figillis&manibus.
£go 'D k.v\T> Archiepifcçpus Civitatis ^eya Sfaham ^ accepta ea
qua verè fcrifta funt in hac Eprfiola , ^^ illis utimur ^ credU
mus.
1. -EgolsAAC Archiepifcopus (^ StiperiorCon-vevti funili ibate^
tedii , t^ fuccejfor univerfalis PatriarcbiC noflra Gentis fi-miUter
atteftor S" accepta , illifque utimur.
3.'Eg<?STEPHANUs Epifcopus^ Superior Convenu Dei Genitrifis
idem accepta.
4. Ego M I c H A E L DoHor idem accepta."
5. Ey) Jo A N N ES DoHor idem accepta.
6. Ego JoANNES DaHor filius Buniut idem accepta.
7. Ego Parochus Ecclejîx fincii Burtholomai qu^ efi BaflicA
in Julpha.
8. Ego Jo ANNES Gimala idem accepta.
9. Ego Zacharias Diglicrat idem accepta.
lo- E-ro Manuel Dizi'imatum idem accepta.
\ \i Ego Deodatus m igifieriomus Domini Kalanter , ^ vi-
cem gerens ejufdem idem accepta.
1 2 . Ego A G A M A L di Thobii Idem accepta.
l'if.Ega Agajar di Cumal idem accepta.
Ega Aga F tri Kalanter Julfa qu/v efi in Civitate Regia fervus
Chrifio Domini , tu^eque Magnitudinis creda ^ accepta ea qua
fcripferunt Archiepifcopi nofiri , cum meis ynagnati'ous idem fen-
timus , unde henignitas vcfira non cenfeat ita ejfc , ut diffama-
runt.
Ey) PETR.US Viî.'Dl.'K. Ecclejîa: Armcnx DoBar idem accepta.
'Bga Sergius Is aaci quondam Dochris Difcipulus , teftor hanc "
,e[fe veram Ecclefi^e Armena profcfiionem , quemadmodum fupra
Armenis çaraUeribu^,
A'vec ÏEglife Romaine fur ïEuchxrifle. 785
Ha:c incerpreiacio Ladna ad nos miira eft unà cum exem- Ch. X}C.
plari Armenoab Archiepifcopis , Epifcopis, &. CleroSc Prin-
cipe Gencis Armenx qua: verfatur in Perfia, uc fimul facr^
Majeftaci veftra: ofFerrecur.
Oliir de Nointel.
Sacra Majefiatis Vejîra; ad Portant Otthomanam Zcgàtas,
RELATION DE MONSÏEVR DE NOINTEL.
LE feiziéme Janvier 1671. les Arméniens faifancIaFefte de
Noël, de la Circoncifion , des Rois & du Baptême de
nôtre Seigneur, j'eus la curiofité d'aller à leurEglife de Ga-
laca pour y obférver leurs cérémonies. J'y affiliai à la Mefîe
qui fut célébrée par un Abbé ou Supérieur d'un Monaftere en
Afie. Il avoir en refte un bonnet rond doré , fur le corps une
manière de chappe,& autour du cou un efpece de collier com-
pofede plaques d'argent doré ,reprerentanc les Apoftres , qui
écoit haut de cinq doigts. Cinq ou fîx Diacres fe tiennent au-
tour de lui ayant des bonnets à peu prés de même façon 6c des
furplis de grofTe toile blanche qui alloient jufqu'aux talons, &:
dont les manches joignent à leurs bras. Ils étoient bigarrez de
croix & de bordures de foyesde diverfes couleurs , & ils por-
tent fur leur épaule gauche une étoile qui pendoit par derrière
jufqu'à terre, je les obfervai après que l'on eut tiré le rideau
qui eft de velours , & fur lequel eft figurée une grande croix.
Je vis auffi que l'Autel eftoit orné de trois grandes croix pofées
fur des gradins & de fix chandeliers avec des cierges allumez,
difpofez comme les nôtres i il y avoir un ornement au devant
de c air doré ou d'autre matière femblable, &au dellus du der-
nier gradin un tableau delà Vierge.
La première cérémonie que je diftinguai fut la proceffion
du Livre de l'Evangile , & la féconde fut celle du pain &: du
vin avant la confecration qui fe font en grande cérémonie , &:
av;ec un grand culte de la part des affiftani, qui fe mettent pour
la plus grande partie à genoux , & témoignent leur refpecî par
de grands fignes de croix. Lorfque l'Officiant eut re(jû ie cali-
ce qui eft fort haut, & fur lequel étoit la patène avec le pain
fans levain couverte d'un grand voile de tafecas orné de faces de
Chérubins, il le pofa refpcclueufement fur l'Autel , &c quel,
FF iïï lij V
7S4 Liv. VII I. Preuves a.uthen. de l'umondes Eg. d'Or,
ques momens après il doubla le voile en le relevant , & tira
l'hoftie fur le bord de la patène.
Quand le temps de la confccration fut venu, il releva une
féconde fois le voile ayant tiré la patène à lui. Il avança la tê-
te , & la baiifant furriioftie qui eftoir deflus ,il profera les pa-
roles, Il prit enfuite le calice ,& s'eftantbaiiTé de même , il
confacra le vin par les mots Sacramentaux,& lorfqu'il eutache-
Eiev.nion pra- y^ ^ jj jevatout douccmcnt au deflus de fa telle le précieux
Anuemenlr corps,&: l'ayant pofé fur l'Autel, il fit l'élévation du calice. Le
peuple qui s'eftoit misa genoux dés le commencement de la
confecration , témoignoitun grand refpe<5l. Et dans le temps
Adoration, qu'elle s'operoit , 6c lorfqu'il vit le corps & le fang de Nôtre
Seigneur , on l'entendoit proférer des prières ferventes , & l'on
le voyoit faire des fignes & des ades d'adoration.
Je remarquai que l'Officiant ayant pris l'hoftie la baigna dans
le fang, fans néanmoins la quitter, &; qu'après l'y avoir tenue
quelque temps , il la tint fur le calice , enforte qu'on la pou-
voit voir. Ses deux mains eftoient employées à ce miniftere ,•
pendant lequel il paroilToit faire des prières avec beaucoup de'
dévotion. C'eftoit apparemment la préparation à la Commu-
nion dont je ne fus pas témoin, parce qu'on tira le rideau. Lorf-
qu'il fut ouvert, le Preftre lui mcmefe tournant du cofté du
peuple lui montra le calice couvert du voile où eftoient les'
efpeces. Tout le monde fe profternant & priant, il donna la-
benediclion , & retourna à l'Autel, àc en un moment après ,
lorfque la Mefle fut finie, il defc'endit accompagné dedeux
Diacres , & ayant dans fes mains un Livre d'Evangile , il le fît
baifer à un Prêtre ou Evêque qui eftoit en bas , & à tout le peu-
ple qui concouroit à cette dévotion avec grand zèle ,&jettoit"
quelques afpres dans un baffm.
Lorfqu'il fut remonté, un de fes affiftans s'eftant revêtu d'une'
ehappeavançafur leborddu Sanduaire ,& un autre tenant le
calice , il communia quatre ou cinq jeunes gardons de dix ou
douze ans , ce qui fe fit peu refpedueufement & avec afifez
de confufîon -, & c'eft ce qui obligea , comme je crois , le Prêtre
de donner la benediâion & de fe retirer , fans vouloir commui-
nicr les autres enfans que l'on prefenroit.
L'on tira alors le rideau , & lorfque les Preftres eurent mis
leurs chappes,ils defcendirent. Celui qui avoir célébré tenoic
une manière de foucoupe de bois couverte d'un voile fin , fur
avec TEglife l^omaine fur ÎEuchmJlie. ySj
lequel il y avoir une pecice figure de colombe d'argent, £cau- Ch. XX.
tour des pains pareils à ceux que les Arméniens confacrenc ; il
méfie compliment en m'en donnant un. 11 en donna unauffi à
un Père Capucin: Et comme il voulait lui baifer la main , le
Religieux s'en défendit en lui baifant la fienne. Ce pain efboic
de palte bife fans levain. Sa figure ronde & bordée feulement
d'un codé reprefentoit dans une feule face, l'autre eftant toute
unie , le calice duque) on voyoit fortir le corps de Nôtre Sei-
gneur J. C. Il ya aufîl des caractères Arméniens à droite 6c à
gauche. 11 eftoit un peu plus grand que nos écus de France , &:
l'eftoit quafi le double moins que l'hoftic de la Méfie du Sa-
medi de Pâques, qui eftoit aufii bien plus blanche. Pour ce qui
eft de la grandeur ils l'augmentent quand il y a plufieurs com-
/munians , parce que la communion fe fait d'une feule hoftie.
L'on me dit la raifon pour laquelle il avoit communié fi peu
de monde, c'eft que le jour précèdent on s'eftoit acquitte de ce
devoir à la Mefi"e de l'aprës-difnée que l'on célèbre à cette
heure- là au lieu de minuit.
Lorfque j'eus fait remercier celui qui m'avoit faitprefent de
ce petit pain , je le fuivjs & fon Clergé. Nous fortîmes del E-
glile, & lorfque nous fômcs entrez dans un endroit fermé de
baluftresàjour , l'on ferma la porte en empêchant que le peu-
ple n'y entraft. C'eft pourquoi il fe cenoit dehors avec des pots
à la main. Cependant les Preftres ayant entouré une grande
cuve pleine d'eau , l'on chanta plufieurs oraifons ou prophé-
ties. L'on chantoit aufll des motets qui eftoient entremêlez
d'une mufique de deux plats de métail que l'on frappoit l'un
contre l'autre, &du fon d'un timbre que l'on tenoit frappant
deflus avec un fer , ce qui faifoit une mélodie qui n'eftoit point
defagreable. Le principal Miniftre tenant une croix en faifoit
de temps en temps des fignes fur l'eau en la croifant & la divi-
fant parlehaut de la croix & parle pied 5 & comme le defiein ,
après la bénédiction réitérée de l'eau , eftoit de reprefenrer
le Baptême de Nôtre Seigneur, le même Officiant ayant po-
' fé la croix au fond du vafe & au milieu , enforte qu'on ne la
voyoit plus , on approcha de lui la petite figure de la Colom-
be dontj'ay parlé, 2clorfqu'on eutôté une petite vis qui em-
pêchait de fortir la liqueur qui eftoit dedans , il pria l'Evê-
que qui eftoit auprès de lui de faire l'afpcrfion. Ils fe firent
l'un 6c l'autre de grandes cérémonies ^ fe renvoyant recipro-
786 Li V. VU I. Preuves authen. de t union des ig. d'Or.
quemenc cec honneur. Enfin il demeura à celui qui l'avoit of-
ferc. Il prie îa colombe d'argent, 6c en ayant répandu de l'huile
dans l'eau en forme de croix, un des Aflîftansla mêla ,5ccefut
ce qui finir la cérémonie. Ceux de dehors qui avoient des amis
au dedans , eurent des premiers de l'eau bénite , pour moy je
me retiray avec le Clergé par une porte dérobée fichors de la
foule.
J'ay réduit cette Relation le plus en atwegé qu'il m'a eftc pof-
fible pour éviter la répétition de ce qui pourroitfe rencontrer
de pareil dar^s la cérémonie que font les Arméniens la veille
de Pâques j c'eflrce qui m'a fait oublier une particularité dont
je feray maintenant la remarque. Avant que le Preftre com-
mençât la célébration, il s'avança fur le bord de l'endroit éle-
vé où efi: pofc l'Autel j 6c tenant un papi.'r en fa main , il lettt
les noms de tous ceux qui avoient donné pour participer aux
prières du faint Sacrifice , il remontra les befoins de l'Eglife ,
& fit une exhortation à ceux qui n'ctoicnt point écries avec des
reproches de leur avarice j & au temps de la confecration il re-
prit la lifte pour faire commémoration des noms de ceux qui y
étoient couchez.
CHAPITRE XXI.
Qu^on ne fc^auroit dire fans extra'Oagan'ce , que la doflrine de la
frefence réelle ait pu s^ introduire dans les Societez^d' Orient
depuii Bereny^r jufqu'a ce temps ici.
Confefjîon de Foy de SotherictM Patriarche d'Antioche.
A Foy prefente de l'Eglife d'Orient fur l'Euchariftie étant
auffi certaine quele peut eftre aucun fait humain d€ cette
nature , il ne refteroit plus à M. Claude que de dire que cette
créance s'y eft introduite depuis Berenger j 6c c'eft auffi ce
qu'il a tâché d'infinuer dans le fécond Livre de fa troifiéme
réponfe.
Maison a auffi tellement détruit cette mauvaifé défaite par
voyezrép. kréponfe générale, êc on y a fi bien fait voir que cette préten-
tion renfermoit un amas d'abfurditez 6C d'extravagances^qu'on
r'a pas fujetde craindre qu'il puilîè refter quelquedoutefurce
point à des efprits tant Jfoit peu fenfez.
. Il
Ky>ec tEgUfe Romaine fur ÏEuchmflie. -j%-j
Ily a rnêmecence différence entre le faic de la créance pre- Ch XXI.
fente àzs Societez Orientales, que nous avons établie par
rette foule de preuves qui font produites dans cet ouvrage,
& la conlequence que l'on en tire, qui eft que ces Societez ef- ■
coienc doncdanslamêmefoy au temps de Berenger, qu'il faut
au moins examiner les preuves qui fervent à l'établiffement
du fait, ce qui a befoin de quelque application. Mais la con-
fequence n'a point du tout beloin d'exan:>en. La moindre lu-
mière du fens commun la découvre tout d'un coup Se com-
prend clairement qu'il eft impoffible que les Latins ayant efté
mêlez dans tout l'Orient depuis l'onzième fiecle avec ces So.
cietez feparées de l'Eglife Romaine, eflant occupez de la pre-
fence réelle plus que d'aucun autre article, puniffant en Occi-
dent ceux qui en doutoient avec toute forte de rigueurs, ôc
examinant avec foin tous les points de la créance de ces So-
cietez qui ne s'accordoient pas avec la leur, ne fe foicnt point
point apperi^us fix censans durant que ces Societez euflcnt une
autre foy qu'eux touchant cet article, ouques'en eftant ap-
perçus ils ay entera le devoir diirimuler,&: que de même ces
Societez Orientales ayenc pu demeurer fîx cens ans durant
ou fans remarquer dans les Latins cette différence de créance
dans un article fl important, ou fans le leur reprocher en tant
d'écrits qu'ils ont fait contr'eux.
De ces deux partis qui font également ridicules, Monfieur
Claude s'efl réduit au fécond dans fa troificme Réponfe,en foiî-
tcnant que cela efl arrivé par la Politique des Latins d'une
part 5c par la timidité des Orientaux de l'autre. Etc'eft ce que
l'on a refuté dans la réponfe générale en reprefentant feule-
ment Tabfurdité de cette hypothefeenla manière que nous Je
rapporterons icy.
Monfieur Claude fuppofe dans les Grecs 5c dans toutes les au '•'^
tresSocietez d'Orient, c'efl: à-dire dans un nombre infini"
d'hommes , une timidité de (îx cens ans, qui les ait tous em ''
pêchezdes'élever contre les Latins Se de les traitter d'idolâtres *'
fur la dodrine de la prefence réelle. 11 ferme la bouche à tous "
les Latins fur le même fujet par une politique de fîx cens ans. «'
Ni la chanté, ni le zclc, nila vanité, ni l'inclination naturelle "
qu'on a à dire la vérité, ni la haine, ni l'interefl, ne porte jamais "
aucun ni àç^, Latins ni desGrecsà fe démentir. Les Latins crai *'
gnent de bleffer les Grecs par ce reproche, lors même qu'ils les "
GGggg
788 Liv. VIÏI. Treuves authen. de ï union des Bg. d'Or.
„ Font mourir, & les Grecs craignent d'ofFenfer les Latins fur ce
„ point, lors même qu'ils meurent pour leur Religion, ou qu'ef-
„ tant en feuretc ils s'abandonnent à la plus grande violence de
., leur haine.
„ Ce qui eft encore plus admirable, eft que les m¥s par
„ lefqueîs on unit les Latins dans cette referve politique, font fi
„ cachez que l'on n'en n'a pu encore rien découvrir 5 fi étendus
„ qu'ils font pratiquez par les Papes, par les Carditvaux, parles
„ Evêques, par les Preltres, par les Religieux, par les foldats, par
j, les voyageurs curieux J &. fi efficaces qu'ils n'ont encore permis
j, à perfonne de manquer à ce fecret. Ils laiflTent agir toutes les
j, autres paffians contre les Grecs: ils permettent qu'on exerce
,, contre eux les dernières rigueurs Çc qu'on leur fafî'e toutes for-
,, tes de reproche 5 ils fouffrent qu'on en failè, qui femblenC
„ conduire naturellement par la fuite du difcoursàlesaccufer de
„ ne pas croire la prefence réelle, fi on l'avoit pu faire avec ve-
„ rité^ mais ils arrêtent juftement la plume 6c la langue quand
„ elle feroit fur le point de paiferà celuylà, ôcceJa durant Tef-
„ pace de fix cens ans, non dans un feul lieu ,dans une feule
j, ville, dans une feule province, mais dans la plus grande
„ partie du monde.
„ Voila ce que Monfieur Claude tâche de perfuader a ceux de
„ la feAe, & qu'il prétend avoir rendu vrai femblable.Sanscet-
,, te double hypothefe d'une timidité de fix cens ans, qui do-
,j mine tous les Chreftiens d'Orient, & qui étouflFe toutes leurs
„ autres pafllons, & celle d'une autre politique aufîi longue par-
„ my les Latins, pratiquée par eux avec une fidélité inviolable,
„ 6c qui étouffe de même en eux tous les fenrimens de la nature J
„ i.l faudra qu'il avoue luy-même que les Grecs & les vSocietez
j, croyent la prefence léelle. C'eflà quoy fe reduifent toutes Ces
„ réponfcs. C'eft cette rare invention qui fait le fujet de la fatif-
,, fadion extraordinaire qu'il témoigne de fon ouvrage. C'eft
„ par là qu'il prétend avoir renverfé l'argument de laPerpetuité.
„ IN-Iais s'il eft homme à fe repaiftre de fes vifions, j'efpere qu.il
„ y en aura peu qui foient en cela de fon humeur èc qui ne
„ me permettent de conclure contre luy.
„ 1. Que l'union de ces faits que nous avons alléguez prouve
„ avec une entière certitude, que les Grecs &les autres Socie-
,, tez d'Orient aufquelles on les peut appliquer, croyent la pre-
„ fence réelle, comme l'union de ces mêmes faits prouve que les
CalviniHes croyent la Trinité & l'Incarnation.
tifvec î'Eglïfe Komainefar V Euchariflie. •789
1. Que cette confeqiience s'étend plus loin , oc qu'elle fait Ch.XXI.
voir non feulement que les Grecs S: les autres Chrcftiens d'O- "
rient font prcfentement perfuadez de cette docT:rine mais '^
qu'ils Tont toujours efté depuis Berenger.- &: qu'ainfi elle ren- '^
ferme entièrement le fait que l'on prouve dans le I. Tome de la "
Perpétuité, &: qu'elle ruine en particulier tout le fécond livre "
de la réponfe de M. Claude auquel il a donné pour titre "
Nullité delà confequence. Etc'eft ce qu'il efl: très, facile & très. "
important de faire voir. "
Il s'efforce dans ce livre de prouver que la docflrine de la"
Tranffubftantiarion a pu s'introduire parmy les Grecs &: les aa- ''
très focietez Schifmatiques, par le mélange de l'Eglife Latine "
avec elle5 par les Miffionnaires que les Papes y ont envoyez^ "
& par le pouvoir que les Latins ont eu fur ces Chreftiens "
d'Orient. Mais en accordant à M. Claude tous les faits qu'il "
rapporte, il n'y a qu'à luy dire en un mot qu'ils prouvent ju- '"
ftement tout le contraire de ce qu'il prétend, & que l'on ne le "
peut même mieux prouver que par ces faits. "
Ce qui le trompe toujours efl: qu'au lieu que les cliofes hu- "
maines font attachées à une infinité de circonfl:âncees,& que "
c'eft le plus fouvent ce qui les rend poffibles ou impoffibles, "
faciles ou difficiles, il les détache de toutes les circonftances "
aufquelles elles font liées, pour en faire des qucftionsmetaphy- "
fîques qu'il confidere d'une manière abflraite Se fpeculative, "
comme s'il s'agifToit d'un monde fcparé de celuy-cy , dont '*
nous ne fcjuffions aucunes nouvelles. "
Il examine en l'air cette quellion, s'il efl; impoffible que la "
Tranfrubfl:antiation( fous laquelle il veut bien que l'on com. **
prenne la prefence réelle, quoyqu'il ne l'ofe pas dire)fe foit "
introduite depuis Bcrenger dans les focietez d'Orient,&: il croit "
qu'il luy fuffit detrouverde certaines caufes vagues qui ayent *'^
une proportion éloignée & metaphyfiqueavec cet effet, C'efl: "
pour cela qu'il nous conte deshiftoires qui font auffi inutiles "
pour luy qu'elles font utiles en les tournant contre luv.. Mais "
pour le defabufer, il n'y a qu'à l'obliger de confîderer les chofes "
celles qu'elles font, & de les revêtir de toutes les circonftances "
qui y font effedivement attachées. "
Il efl: donc certain premièrement que les Latins n'ont point "
réduit entièrement ces focietez à s'unir avec l'Eglife latine; "
que s'ils en ont converti quelques particuliers, ils n'en ont "
GGgggij^
f 790 Liv. Vin. n?réuues Authent. de ï union de s B g. d'Qr
j, point converti le corps, qu'ils ne les ont pu porter ny à quitter
,, leurs anciennes opinions^ni à changer leur ancienne difcipli-
„ ne, & qu'elles y demeurent la plus parc auffi attachées que
„ jamais.
„ Que M. Claude enferme donc d'abord cette circonftan-
,j ce dans la queftion qu'il traitce, & qu'il examine , non s'il eft
„ pofTible en gênerai que les Millionnaires Latins ayent per-
„ fuadé tous ces peuples de la doctrine de la prefence réellcj
, mais s'il el1: croyable que ces Miflîonnaires n'ayant pu faire re-
, cevoir dans aucune de ces focietez, ny les dogmes de l'Eglifé
, Romaine, ny les points de difciplin^ furlefquels ils font div^-
, fez d'elle; & n'ayant pu adoucir leur efprit envers cette EgU-
„ fe, & les empefcher de la traitter d'heretique, ayent générale -
„ ment reùffi à faire recevoir par toutes ces focietez une dodri-
,> ne auffi étrange que celle de la prefence réelle le devroicpa-
■yy roiflre à ceux qui auroient eflé nourris dans une autre foy.
5, Il faut de plus ajoutera cette queftion fa double hypothe-
„ fe d'une timidité générale parmy les Chreftiens Orientaux, 6C
,y 4'uns politique générale parmy le Latins pendant tout le
„ temps qu'il deftine à ce changement. Car comme dans lepro-
„ grés de cette introdudion on ne pourroit faire voir que les
j, Grecs &: les autres Orientaux non convertis, fe foient élevez
j, contre les Latins fur ce point, en ayant pris fujet d'en faire des
„ reproches à ceux qui n'avoient pas encore embraffé leur foy,
„ M. Claude efl: obligé de nous montrer que cette introdudion
„ eft pofTible avec ces deux circonrtances,c'en:-à-dire qu'il doit
„ faire voir qu'il eft pofîible que tous les Orientaux non conver-
„ ris, voyant répandre parmy eux une dodrine nouvelle, ayent
,, étouffé par la crainte des Latins toucceque la jaloufie natu-
j, rcll.e êc les principes de leurReligioil pouvoient fournir de rai-
j, fons contre une dodrine fî étrange, &: qu'ils Payent tous laif-
„ fé introduire fans aucune refiftance dans tout le monde.
„ Il faut qu'il montre auffi qu'il efl: poffible que tous ces Miffion-
„ naires qui fe trouvoienr parmy ces peuples , & qui connoif-
„ foient qu'ils eftoient infeétez de Terreur de Berenger, qui re-
„ gardoient tous cette erreur comme une herefie damnable, qui
„ les ir.flrui foient fur ce point avec foin, qui voyoient leur do-
„ élrine reçue par quelques- uns 5c rejettée par d'autres, ayent pu
„ tous garder fans aucune raifon apparente un filence fi religieux
„ fur ce point , qu'aucun n'ait accufé ces nations de I erreur de
aun ÏEgliJe %omaine fur t Euchariflic . 791
Berengerj qu'aucun ne l'aie inférée dans le catalogue de leurs Ch.XXL
Jierc{iesjqu'aut.un n'en ait averti les Papes; que nul d'eux n'ait
rajt aucun ecnc pour les convertiriqu aucun n aie ule de rigueur
envers ceux qui refufoienc de recevoir la Doclrine de la pré-
sence réelle, quel«|ue pouvoir qu'il eneaftj qu'aucun nefêfoit '
vantédans aucun livre du fuccés de fespredications en ce pointi
qu'aucun n'ait témoigné d'admirer cette alliance étonnante
à une docilité fi extraordinaire à recevoir cette dodrine , 6c
d'une opiniaftreté fî inflexible à rejetter tous les autres dogmes
qu'on tafchoit de leur infpirer, & qu'enfin ils ayent tous conf- '
pire à nous dérober la connoiflance d'un fi grand événe-
ment.
Voila ce que M. Claude devoit entreprendre de faire croire
poflîble, s'il euffc voulu détruire cette confequence, qu'il com-
bat dans le titre de ce fécond livre, 5c qu'il établit par tout le
livre même. Mais comme il n'a pas feulement ofé le tenter, il
n'y a pour renverfer tout ce livre qu'à luy montrer ce qu'il
avoir à prouver, 6t à faire remarquer que le mélange de ces '
Millionnaires & ce pouvoir des Latins fur les Grecs ïi. les au-
tres Chrétiens d'Orient, prouve très mal qu'ils ayent pu leur
faire recevoir la dodrine de la prefence réelle avec ces cir-
•onftancesj mais qu'il prouve parfaitement qu'il efl: impoffible
d'une part qu'ils n'euflènt pas découvert cette erreur dans les
Grecs 6c les autres Chreftiens d'Orient fi elle y euft: efi:é,6c qu'il ^
efl encore moins pofiible de l'autre qu'ils ne la leur euffent pas
reprochée, &nc fe fufîènt pas appliquez à la déraciner s'ils l'y
euflènt découverte 1 D'où il s'enfuit que ne l'ayant jamais
fait, par l'aveu même de M.Claude, il faut qu'ils en fufîènt en-
tièrement exempts. C'effcla iéuleconclufionraifonnable qu'on
puifTe tirer des faits alléguez par M. Claude dans Ton fécond
livre, & ce feroit perdre le temps que de le réfuter d'une au-
tre manière.
Il ne faut point de preuve pour établir une chofe que la rai-
fon penettre avec tant d'évidenceJ il faudroitau contraire plus
que des demonfirations pour rendre probable le changement
de créance dans ce fociertz depuis Berenger. Cependant on
a fait voir, & dans la réponfe générale, &: dans le livre de la ,'j'u%frVi'a!
créance des Grecs, que la prétention de M. Claude n'efloit pas ns chanome
appuyée de la moindre preuve, ôc qu'au contraire il y en avoit rcguiici.
tant ôc de fi demonftratives de l'union de ces focietezavec
G G g g g iij
791 Liv. VI n. Preufves authent. de t union des €g. d'Or,
l'Eglife Romaine dans la dodrine de îa prefence réelle ôcde
la cranlTubftanciation , qu'elles fuffiroient pour periuader les
chofesles plus incroyables. On les peut voir ramaflees dans
les deux livresque j'ay marqués, ê^l'on y en ajoutera enco-
re quelques autres ici qui font tres-confiderabics, Se qui mon-
trent pofitivement que ces dogmes ont toujours efté crus
par toutes CCS focierez.
La première fera tirée d'un Synode tenu fous l'Empereur
Manuel, dans lequel un Diacre nommé Soterichus élu au Pa-
triarchat d'Antioche, fut obligé de (e juihtîerrir l'Eiichariftie.
Cesades fe trouvent dans la Bibliothèque de B>dlei à Ox-
ford num. lOf. Des perfonnes curieufes de Paris en ont obtenu
copie de M. Bernard qui en eft Bibliothécaire , & qui eftanc
très habile dans toutes fortes de fciences, anffi bien que dans
les langues Orientales, eft très porté de plus à communiquer
tout ce qui dépend de luy aux perfonnes de lettres qui s'ad-
drelTent à luy. Comme il n'y a proprement que l'Apologie de
Soterii hus qui (crve à la preuve dont il s'agit, on s'efl: conten-
té de la rapporter icy.
On a joint à cette Confeflîon de foy deux autres Extraits
de deux pièces , l'une plus ancienne & l'autre plus récente.
La plus ancienne eft un traitté Arabe d'Elie Patriarche de
Jerufalem , qui eft dans la Bibliothèque du Roy, fur les prin-
cipaux myfteres de la Foy, dont on a tiré ce qui y eft dit de
l'Euchariftie.
Et la plus récente eft une lettre de Melece Patriarche d'A-
lexandrie, qui a efté envoyée de Conftantinople. Ce Melece
n'eft pas pourtant le Patriarche d'aprefent, car il s'appelle Paï-
fîus, èi. c'eft luy dont on a eu la lettre de Nectarius, qui eft rap-
portée cy devant.
APOLOGIE DE SOTERICHVS PANTEVGEKVS
au Patriarche (^ au Concile fur les chofes touchant leffuelles
on l'a accufé d'avoir de mauvais- fentimens.
TRes faint Seigneur , divin & facré Concile. Quelques
Archevêques m'ont il n'y a pas long temps mis entre les
mais un paquet, oùeftoit contenu undifcours qu'ils avoient
condamné, comme avançant des chofes différentes & éloi-
gnées de la dodrine de l'Eglife, me demandant avec d\£-
atec rSgiî/e Komaine fur tSucharifiie. y^j
émulation, fi ce difcours eftoic de moy. D'abord je pouvois Ch.XXI.
ne point répondre leur opporant rauthontë qui a efté donnée
d'enhauc au Throfiie Pacriarclial3 mais obeilfanc à la parole du
Sauveur (qui ordonne d'honorer tout le monde , 6c de ne pas
fcandaliier Tes frères, i'ay cru qu'il falloit me foûmettre à la
puiflance Scme juftifier d'une manière fimple& fans l'ornemenc
qui m'eft ordinaire, & je vous prie d'écouter mon Apologie.
Je me fouviens d'avoir fait il y a quelques jours un difcours,
pcufl'é à celaplus par un de mes amis que par ma propre inclina-
tion. Ce dilcoursn'avoit aucun ornement fophiftique. Le feul
deflèin pour lequel il eftoit faic,efl:oit pour réfuter une opinion
nouvelle & extraordinaire, &: qui avoit quelque chofe du Nef-
torianifme, qui s'eftoic glilTèe depuis peu. Perfonne ne me peut
reprocher d'avoir écrit la réfutation de cette nouvelle opinion.
Carj'aurois honte dene pas employer toutes chofes,& même
ma propre vie, pour les fentimens pieux que j'ay reçus de mes
anceftresj & que j'ay gardez en mon particulier jufqu'à prefent
fans aucune tache: croyant 2c confeffant immuablement la
foy qui eft établie & prêchée dans l'Eglife Catholique &
Apoftolique, recevant lesfeptfaints Conciles Oecuméniques,
prononçant anathême contre Arius &; fes fecT:ateurs, contre
leur abominable adoration d'une créature, 6c toutes leurs au-
tres fottifes, de même contre le fol Macedonius, qui eftanc
poiledé d'une fureur prefque femblable à celle d'Arius, n'a pas
eu de honte de mettre le S Efprit au nombre des créatures,
& ainfi de rendre à une créature une même adoration, &: avec
eux contre Neflorius l'impie, qui divifoit la perfonne unique de
). C.noftre Sauveur en deux hypoftafes, qui avoit rêvé que le
Fils unique de Dieu n'eftoit qu'un pur homme, & qui nioit que
la fainte Vierge fuft Mère de Dieu. Déplus contre EutycheSc
Diofcore & leur folle imagination que la chair du Seigneur
ne nous eAoit pas confubftantielle, 6c qu'après Tunion elle
a/oitefté changée en une autre nature, fan >^ que l'autre confer-
vaft les propnetez. Pareillement contre Didymus, Evacrrlus ôc
leurs feclateurs, contre tous ceux que le cinquième Concile a
condamneZjCeuxqui fuivent Honorius,Sergius 6: Macaire,qui
n'attribuent qu'une feule volonté 6c une feule opération par
une grande méchanceté à J C. noftre unique Dieu 6c Sau-
veur, qui efl de deux 6c en deux nature^: ceux qui eftanc
ennemis de J. C. 6c fentant la puanteur des Manichéens,
794 Liv.VIII. Prewves authenr. de l'union des Eg.^Or.
avoient horreur de peindre le très faine corps de J. C. qui n^u*
eft confubftantiel.
Je dis donc anathêmeà tousceux que je viens de nommer,
&: à toutes leurs fotifes, êc à ceux qui dilcnt que ce qui aeltc pris
.,% ^ , dans l'Incarnation, eftrerviteur,& qui l'adorenc d'une manière
^ lervile aulli bien que tous les autres elprits employez au mi-
niltere. Et comme) apprens que quelques peiionnes me ca-
"■f* "<"■- lomnient d'une manière très irapudentccommedifanr que les
^*' falutairesSc divins Myfteres font des figuresj il falloit premiè-
rement que ceux qui me font ce reproche, eufïent trouvé
dans le difcours que j'ay fait dequoy les perfuader d'une cho.
fe, dont je n'ay pas même eu la moindre penfée. Caroùa t'on
trouvé cela écrit danscedifcours?Et comme le pourrois-je di-
«tuTt/rù re fans me contredire moy- même ? Mais pour en donner ui\e
«*. plus grande certitude )E MAUDiKAY delà plus grandi
malcdiHion ceux qui ne penfent ou ne dijent pas que les vénérables S*
faints dons que nous offrons font changez^ furnaturelicment par le
faint Efprit au corps é^fan'i^ vivifiant &-fi lut aire de J. C. & que
ceux qui les reçoivent ont par eux union avec J. C. &C je pro-
nonce anathême contre eux.
Lifancenfuite le difcours qui m'a eftémis entre les mains,
j'ay trouvé qu'on en avoit mis quelque chofe par écrit, & qu'on
en âvoit omis quelque chofe. Ce qui me fait demander que
l'examen des chofes qui y font contenues, & de cette nourelle
opinion, qui eft tout le fujet de mon difcours, fe falfe & fc
termine en la prefence del'Empereur. jediray même quelque
chofe de plus hardy, qui eft qu'on fafle une aflcmblce dans
l'Eglife de la fainte Vierge , compofée de quelques membres
du Senat,& d'autant de vous autres qu'il s'y en voudra trouver,
&. qu'on examine enfcmble ce qui concerne ce difcours.
EXTRAIT DV TRAITTE' D'EL/E, ErESQVE
de J erufaletn , dans lequel il explique en abrégé les principaux
Myfteres de la Religion Chreftienne. C eft unmanufirit Arabe
de la Bibliothèque du Roy.
LE faint Evangile dit que ]. C. a pris du pain dans les
mains pures &: fainres, le bénit, le rompit & le donnai
iti Difciplc* ^§C leur dit : Cecyeft mon corps qui eft mis en pièces
pour
àfVec TEgli/è Romaine fur îîuchArïflie. -79^
foiir la vie du monde & la remiffion des fichez^ Et il mêla du vin Chap.
& de l'eau dans le calice , il rendit grâces delfus , hc die enfuite : XXI.
Ceci eft mon fang du nouveau Teftaynent qui eft répandu four plu.
Jteurs ^ & pour la remi.ljton dès pech^K ; prenez^en tous , mangezjde
ce pain , éi- beuvez^de ce calice : F^dtes ainji lorfque vcus ferez^
ajjemblez^pour faire mémoire de moy. C'eft la perfedion de la pu-
reté êc la fortification de la Foy de ceux qui les reçoivent , &
le falut de leurs âmes.
Ces chofes fontlandifiées par la communication de la puif.
fance du S. Efprit, 6c SONT change'es de leur, première
NATURE, & le pain eft fait fon corps faint 6c fonfang précieux,
qui fervent à la remiffion des péchez , la purification , la fain-
teté, l'illumination & la grande efperance de la refurreclion . ^
des morts , Se l'héritage de la vie éternelle & du Royaume du
Ciel &du plaifir véritable. Et nous cous qui participons à ces
Sacremens, nous allons au devant de nôtre Seigneur J- C. Nous
le portons fur nos mains , nous le baifons : 6c dans la Commu-
nion nous fommes unis à lui par un mélange de fon corps avec
les nôtres , 6c la mixtion de fon fang avec le nôtre. Car il die :
Celui qui manize de 7non cerps ^ boit de mon fang , // efi uni avec
moy , (^ moy avec Iwy.
EXTRAIT DE LA LETTRE DE MELECE
Patriarche d' Alexandrie.
DAns les paroles par lefquelles les faints Myfteres nous
ont efté donnez, , il n'y a aucune figure , car elles font
prifes dans leur propre fcns, & fe doivent entendre de la même
manière fans aucune divifion. Car le Pam de vie a pris du pain
êcdu vin, fçachant bien qu'il eftoic lui même d'une manière
plus excellente le pain de vie , mais n'ignorant pas auffi que le
Mfftere ne fe dérruiioit pas, mais s'accompliiïbir p'ûtoften'?''* '^'' ô
prenant auffidu vin , afin que comme le pain rend prefente la à'T"^ 1^*
chair j de même le vin rendiffc le fang prefent. L'un ce corps fl-a.,'x,a
qui a eflé brifé pour la remiffion des péchez , £c j'^autre ce fang 1 f^ Ksf] 0
qui eft répandu pour nous 6cplufieurs autres , èc la remiffion or^w 'xa.px
des péchez. W"*' to
Ces paroles ne reçoivent point de fens figuré. Car il n'y a aTiza.
lien d'indecenc , qui nous puifle obliger, comme dit S. Au-
guftin, d'avoir recours aux expreffions figurées. Car le corps
HHhhli
79^ Liv. VIII. Prewves duthent. de t union des Eg. d'Or.
nefê change pas en pain, mais le pain en corps, & ceschofes
ne foufFrent poinc de divifion , car le Sauveur qui efl: la fagellè
du Père lésa données toutes cnfemble. C'efl lui dont nous
écoutons la voix , &; que nous fuivons , mais nous ne iuivons
point un étranger , parce que nous ne connoifTons point la voix
des étrangers. Et c'eft par cette raifon que nous ajourons l'oy 3.
■ ce que le Sauveur a fait d'une manière !i illuftre, & qu'il aen-
feigné fi clairement. Car nous recevons fimplement les chofes
que Dieu nous a données, & qu'il a diies fans aucune obicu-
rité y & lorfqu'il nous parle par figures , nous confiderons ces
figures, &C les chofes dont elles font les figures.
C'eft pourquoi lorfque le Verbe s'appelle lui-même la pierre
angulaire , la porte & le chemin , par une Théologie fymboli-
que, nous trouvons, lorfque nous les confiderons, qu'il efl tou-
tes ces chofes par la refi!emblance qu'il a avec elles , & que ces
chofes le fignifient.
Il ya des figures qui ne font pas fimplcs. Se qui ne fignifienc
pas feulement la grâce, mais qui ont en elles-mêmes la grâce
qu'elles fignifient , comme l'eau dans le Baptême. Car elle ne
fignifie pas feulement, mais aufii elle opère lapunfication qu'elle
fignifie par l'avènement du S. Efprir, & par la parole divine qui
a la force d'agir. Il en eft de même du faint Chrême.
Nous trouvons auilî , comme difent quelques perfonnes ,
des figures reprefentées par d'autres figures, comme les cho-
fes mêmes, &: qui font elles nicmesfiguresd'autres,c'eft à dire
qui font les chofes des figures Se les figures des chofes. Caries ef-
peces qui fontconfervccs dans le Sacrement, font des figures ,
Scie corps & le fang font des choies ;& on dit encore qu'ils font
les figures du corps myfiiique de j. C. qui efl l'Eglife. C'eft
pourquoi -il faut que ceux qui parlent des chofes divines , re-
çoivent les paroles de J. C. dans leur fens naturel i &; ne les
confondent pas enfemble. »
Lors donc que le Sauveur dit : Je fuis le pain de vie , il s'eft
fignifie par le pain d'une manière figurée , comme eflant l'au-
teur de la viCj que nous entretenons avec du pain , non pas •
comme eftanc lui même changé en pain.
Et lorfqu'il dit du pain &: du vin dans le Sacrement de la
Communion ; Cecy efl mon corps , & Cecy efl 7nonfanq^, il a fi-
gnifie fa chair & fon fang par ces figures.: de forte néanmoins
fju'elles font réciproquement la chair 5i le fîmg. Car le
I
(Lfvec t'Eglifè 'Romaine fur tEucharifiic. -j^-j
pain eft la chair ,& le vin le Tang. Ecils y fontveritabicmenc
changez j les efpeces demeurant pour fervir de figures, & les
fubftances eftanc changées dans les fubftances fignifiées.
CHAPITRE XXII.
Union des SocietexJDrientales avec ï't'ilife Romaine fur t Eucha-
riflie , -prouvée far l'Extrait d'un Manu frit Arabe
de la. Bibliothèque du Roy.
E pallage que nous produirons ici ne prouve pas feule-
ment que les Jacobites ont toujours crû la prefence réel-
le depuis Berengerjufqu'à prefent j mais comme ceux qui ont
rapporté l'hiftoire qu'il contient font plus anciens que Beren-
ger, ils font voir que c'eftoic la foy du dixième lîecle^ ce qui
eft encore plus.
Ce paflage eft tiré d'un Manufcrit ancien delà Bibliothè-
que du Roy, & il ne contient pas feulement une confefîion'
claire ficprecife de la tranfTubftantiation ,maisla confirme de
plus par un miracle. Or quoique les Miniftres fe mbcqucnc
d'ordinaire de ces fortes d'hiftoires , ils ne fçauroient nier néan-
moins qu'elles ne contiennent une preuve certaine de la foy de
ceux qui les rapportent , & de TEglife où l'on les a crus.
EjirTRAir D'VT^ MANUSCRIT ARABE
de la Bibliothèque du Roy , contenant les -vies des Patriarches
d' Alexandrie ^dans la vie de Philo te e 63. Patriarche ^ q tu fut
élu fur la fn de l' Empire de Muaz^ en Egypte , qui mourut l'an
57y. deJ.C. coynme dit l'hijîoire de ce Livre y ou c)2>\. félon un
autre Auteur.
VAfah fils de Reja raconte dans fa vie qu'il a écrite lui-
même que Severe Evêque d'Afchmonin lui a conté .
qu'il y avoit dans Bagdad un Prince de famille Royale nohi-
mé Elhafchami , & qu'il nefongcoit en aucune manière aux-^
affaires de rErat,ni aux beaux habits, ni à la mag-nificence.mais
tout Ion plaifir ctoit de monter tous les jours à cheval , 6c de
s'en aller accompagné des foidacs de ia fuite dans les Eglif^s
yinirn -fttj'b : HHhhh ij
79^ Li V, Vr I î. Trewves authent. de F union des Eg. d'Or.
des Chrêciens pendant le temps de la Licurgie. Il y entroit à
cheval , & commandoit qu'on prift Thoitie dans la place mê-
me du San(ftuaire. Il la failoic rompre Se fouler aux pieds & ré-
pandre le calice. Quand il avoir fait cela dars une EgUie , il al- .
loit enfuite dans une autre , où il en faifoit autant Cela in-
commoda fi fort la Ville de Bjgdad , que lesEgli'es com-
mencèrent à n'avoir plus de Liturgie, & la plupart des Prêtres
ne la vouloient point célébrer , pour la crainte qu'ils a voient
de cette profanation. Maislefecoursde Dieu vint lorlqu'on n'y
penfoit point. Car ce: homme eftant un jour entré dans l'Egli-
le félon fa coutume , Dieu lui ouvrit les yeuXj & il apperçuc
fur la patène de l'hoftic un enfa^c beau & très bien fait ^ dans
le temps de ladivifion del'hoftie: il vit que le Preftrel'immo-
loit , &. recevoit f)n (ang dans le calice. Se divifoit fa chair
par morceaux fur la patène. Elhafchami fut fi étonné décela,
qu'il demeura prefque immobile. Apres cela le Prêtre eftanc
forti, donna au peuple de la chair ,& le Diacre du fang dans le
calice , comme il vit , ce qui le lurpritexrremement 5 6cil dit
àfe.s foldats: Ne voyez vous pas ce Célébrant, c'èft-àdire ce
Preftre? Ils lui dirent oiii , nous le voyons. Il leur dit: Souffri-
rons nous que cet homme prenne un enfant, l'immole &divife
fa chair à cette aflemblée , Se qu'il les fafle boire de fon fang ?
Ils lui dirent , Dieu vous maintienne , Seigneur , mais nous ne
voyons que du pain &: du vin -, ce qui augmenta la crainte & fon
admiration.- le peuple n'eftant pas moins furprisde le voir fl
hors de lui- même , &; de ce qu'il ne faifoit point de l'hoftie ce
qu'il avoit accoutumé.
Le Prêtre ayant achevé l'Office, 5c le peuple eftant forti, il
appelIacePreftre ,&Iui demanda ce qu'il avoit vu. Il lui dit ,
Je vous aiTure devant Dieu que ce n'écoit que du pain Se du vm.
Ayant donc ainfi reconnuqueceMylleren'avoit pat^i qu'à lui
feul , il dit au Preftre : Je veux que vous me fafllez connoî-
trele Myftere de cette Euchari(lie& fon inftitut'on. Il luiap-'
prit comment le Preftre Jefus Chriftpritdu pain &; du vin ,1e
partagea entre fes Difciples , Si leur die : Prenez^^ manq^i^C
Ceci efi mon corps ,■ Si. enÇhito:-. Bfuvc^: Ceci efi mon ftn% ., bcu-'-
vez^en tous four Lt remiMon de vos pechaz^ Et ks lJ>i{ciples ^
dit il , nous ont appris une prière que nousdifons furie pain&:.*-
fur le vin , quand nous les mettons furTAuteL, Se le pain eft
changé & eft fait chair, Se le vin eft fait fang d'une manière
Awec tBgltfe RontAÎne Jur fEucbarifiie. 799
fecrete, comme Dieu vous l'a fait voir aujourd'hui. Cepen-
dant en apparence c'ell du pain & du vin , parce qu'il n'y a per-
fonne au monde qui puiife prendre un morceau de viande, ni
boire du fang qui vient d'eftre répandu.
Cet homme le fît enfuite Chrétien , ScfoufFrit le martyre.
Celui qui a écrit l'hiftoire des Patriarches d'Alexandrie efl:
Severe Evêque d'Afchmonin. Elle a efté contmuée par un
nommé Michel Diacre: & c'eft dans cette continuation d'hi-
ftoire que (e trouve ce miracle, &tout ce que j'en ai rapporté
eft traduit de là. Vazahou Vadah, fils de Reja eft un Jacohite
fameux qui a écrit fa propre vie -, &c c'eft dans cet ouvrage qu'il
dit avoir entendu dire à Severe Evêque d'Afchmonin , ce mi-
racle arrivé à Bagdad. Michel Diacre d'Alexandrie l'a tiré de
cette vie de Vazah fils de Reja écrite par lui même. Ainfi
cette hiftoire a trois témoins, i. Severe Evêque d'Afchmonin,
qui l'a dit à Vazah. z, Vazah qui l'a mis dans fa propre vie
écrite par lui-même. 3. Michel Diacre continuateur de l'hi-
ftoire des Patriarches d'Alexandrie , d'où on l'a tirée.
CHAPITRE XXIII.
VNION DES EGLlSlSB'ORlElsfT AVEC L'EGLISE
Romaine fur l'Eucharifiie , prouvée par les Liturgies des
Nefioriens , Eutichtens d^ Maronites.
ON a rapporté dans la réponfe générale une atteftation
authentique de la foy des Ncftoriens fur l'Euchariftie,
qui confirme tout ce que nous en avons dit dans le premier to-
me de cet Ouvrage, & condamne formellement tout ce que
M. Claude a voulu impofer aux Chrétiens d'Orient. Je n'y
ajouterai ici que des extraits de leurs Liturgies , afin de laire
voir que cette profefiion de foy ne contient que la doclrine
commune de leurs Eglifes, don: leurs Liturgies leur renouvel-
lent tous les jours la memeirc, &dont jIs fontainfi tous les
jours profeïïion publique , en célébrant les facrez Myfberes.
HHhhh iij
800 Liv. VllI. Preuves authent. de l'union des Eg.d'Or.
BJ^TRAIT DES MISSELS ^T LIVRES- DE
prières des Ncfioriens ^ Euty chiens , Maronites , dont tly aun
exemplaire dans la Bibliothèque de Monjieur Hardy Confeiller
au Chajielet.
V E la grâce de votre S. Efprit , Seigneur , vienne' fur noîts
f3> fur cette ablation , é" qu'elle demeure ^ qu' elle repofc fur
ce p.ùiié' ftirce calice. Qu^clle les bemljejes fanEéifie^ (jr les [celle
au nom au Père , du lils , ^ du S- Efprit , 5c que ce pain par la
puiffance de -votre Nom, ce pain , dis je .^foit le Corps faint de No-
tre Seigneur je (us Chrifi , & ce Calice le Sang précieux de Notre
Seigneur Je fus Chriji j ^ que ccluy qui mangera de ce pain (^ boira,
de ce calice avec une vraye foy , ils luy foient a, l'e-xpiation de fes
cffcnfes , ^ à la remiljton de fes pecbe^
Dans la Meffe qu'ils accribuent à Nefîorius .^ comme enefFet
Echellcnfis dans les Notes lurle Catalogue d'HebedJelu, en
parl-e.
Seigneur., que la grâce de votre S. Efprit vienne , demeure , &[:
repofe fur cette oblation que nous offrons devant vous -.Qu'elle la
fan'chjie , &• falfe ce pair, d?" ce vin le Corps é^ le Sang de Nôtre
Seigneur Jefus-Chrifi , les changeant ^ les fan&ifiant vous-même
far l'a.ffifhince de votreS, Efprit.
Dans le Livre des Offices delà femaine des mêmes Nefto-
riens , dans une des Oraifonsil y a mot pour mot.
Dans le moment que U Frcjire monte au Santiuaire ,les armées
et efprits bien- heureux fe tiennent audcffus de luy , & regardent le
Frcftre .^ui rompt à- divife le corps de ChriJ} pour la remifjion dts^
fcchez^
Dans lin autre endroit du même Livre.
Tons nous autres Fidèles allons ^ confejfons avec une joye fpiri.
tue'ic fans aucun doute ..que nous voyons fur le faint .Autel l'Agneau
de Dieu , qui ef tous les jours facrifiè facramentalement .^quoiquil
foitvirvant à l'Eternité , ô" q^i ejl difiribué a, tout le monde , ^
n'efl point confumé ni diminué.
Dans un autre endroit.
Moname fouhaite avec pj,ffion vos tabernacles .^ o l'EglifeJîdele .^
où nous voyons dans le Sacrement l'-^gneau vivant de Dieu , qui ejt
fofè fur votre -Autel.
a^vet tEgUfe Romaine Jïtr lEucharifiie. 8ot
Dans une autre Oraifon. C ta p.
Vous tous qui approchez^pour jouir des délices de ces glorieux (^ XâIIL
divins Myjîeres , confcjjons d" adorons enfcmblc le Seiq^neur de tou-
tes chojes , gr recevons avec pieté & fiy l<^ corps du Fils , le Chnj}^
qui a ejîè immolé pour nôtre vie ,(^ qui a expié nos crimes ^ gS qui
a reconcilié fin Père avec nous par l'efufionde fin Sang. Et voici
qu'il efi apporté fur l'ylutel dt la droite du Père , qui l'a envoyé. Et
quoiqu'il fiit Un , ^ incapable d! aucune divifion , cependant il
efi tous les jours fiacrifié dans l'Eglife , fans qu'il fouffre pour nos
crimes. Vc7iez^, approchons avec rcfpefl du fiacrifice de ce Corps ,
qui fianHifie toutes chofes , Q- crions -luy tous enfemble .^ ^ di fions
luy , Gloria tibi.
Une autre.
Ifiaye bai fia du fieu dans des charbons , ^ ne brida point fes Ut
vres , mais [on iniquité fiut expiée. Les mortels rei^oivent du fieu
au milieu du pain , qui conficrve leurs corps , ^ leurs pechez^fiont
.hridiz^
Il faut remarquer fur cette Oraifon , i. qu'elle fe trouve
dans cous les MiCTels des Neftoriens & des autres Orientaux
■que j'ai vus. On en a vu quatre de ceux- là , &: fept ou huit des
autres,tant Eutychiens que Melchites. Elle fe trouve auffi dans
la MeflTe de Malabar altérée par Alexis de Menezes Archevê-
que de Goa , donc la traduction eft au bout de fon voyage }
l'Original efl: imprimé in folio en Portugais à Lisbonne j& de
là dans la Bibliothèque des Pères.
i. Que le feu veut dire la divinité unie à ce charbon , c'efl-
à dire à l'humanité de J. C. comme on le peut prouver parplu-
lleurs de leurs paflages. Et c'eft pour cela qu'ils appellent la
Vierge l'Enccnfoir d'or , qui a porté le charbon vivant J. C.
Nôtre Seigneur. On peut voir ce qui a efté dit fur ce fujet dans
la réponfe générale fur S. Jean de Damas.
Dans le Miffèl Maronite , p. m. dansla Méfie de S. Denys,
après la prière pour les morts , ils ajoutent.
Et les regardant , Seigneur., avec pitié , pardonnez^ leur Ictirs pe-
chex^, d" remettexj,eurs défauts , à. caufe du Corps & du ^ang de
votre Fils unique , qui efi caché ^ enterré & cnjevcli daiit leurs
membres.
Pag. 115. dans la même. Chrifi pain véritable qui efi défendu
du Ciel ^ ^ qui nous aefié une viande qui ne périt point .^gardezjîos
Mme's (^ nos corps de la géhenne qui ne s'éteint point.
Dans le Bréviaire ou Livre d'Oraifons de la Semaine, & des
Soz Liv. VHI. Vreunjes authen. de ï union des Eg. d'Or.
Eutychiens Syriens ,qLUcfl; dans la Bibliothèque de Monfieur
Hardy.
Donnez^Fils de Dieu un bon repos ^ une heurcufe mémoire aux
morts qui ont mangé votre corps , ^ qui ont bu votre fang avec
En un autre endroit.
Notre Sauveur a donne un gage de la vie nouvelle aux Fidèles 3
pour paffer de la mort a la vie par le moyen du Corps ô- du Sang ,.
qui fait le bonheur des morts qui l'ont mange , d" ^«^ ej} celui qui
les rejfufcite.
Dans l'Office de Pâques.
J^ous foyez. heureux , vous qui eftes morts dans ce jour de la Re-
furreclion 5 Carie corps vivant que vous avez^mangè , é- ^e fan^
propitiatoire que vous avez^ bit vous fera tenir debout au cojlè
droit.
r ATTESTATION SVIVANTE AyaNT ESTE'
ézarèe au temps quon imprimoit l'endroit où elle devait efire infé-
rée ,on a cru la devoir ajouter ici.
Attefiation du Supérieur du 2<^onafiere de S. Georges.
LE très illuftre &: très excellent Seigneur Charles Fran',
(jois Olier, Marquis de Nointel , Ambaffadeur du tres-
puilTantRoy de France , ayant dcfire d'eltre informé exacle-
ment de la foy de l'Eglife Orientale touchant les terribles &
immaculez myfteres d-e nôtre Seigneur J. C. & les autres Sa-
creirens de nôtre Fglife. Voici ce que nous avons écrit tou-
chant le facré corps U (acre lang de J. C.
Nous croyons & nous confcffons qu'après la confecration &:
la prière du Preftre le pain & le vin font véritablement & prcr-
pren1entchange2.au corps & au fang de J. C. nous pronon-
çons ces paroles luivantcs : Je crois , Seigneur ^ é^ je confeffeque
vous eftes véritablement le Chrift Je Fils de Dieu vivatit , qui eftes
venu dans le monde pour fauver les pécheurs , dont je fuis lepre?mer.
Je crois encore véritablement que e'eft- là. votre Curpsmkme tres-ptir,
^ que ccft-là votre facré fang. Je vous prie donc d'avoir pitié de
Tnoy , ^ de me pardonner mes péchez^ tant volontaires qu'involon-
taires , fait en paroles ^folt en œuvres^
Ee
»
a'vcc tEgUfe Romaine fur rEucharifiie. 803
Et quand le Prellre après avoir porté les faines dans le San- Chap.
fl:uaire,èc avoir prononcé les paroles, du Seigneur, ajoute, XXIIL
J<.utii dece fMïi le ficré corps de vofire Chnfi , Amcn^ & ce
que dans le calice le facré fang de vojîre Chrijl^ Amcn^'û dit de
l'un &. de l'autre ces paroles-cy, les changeant par vo/Irc faini:
Bjprtt , Amen-^ marquant clairement par là qu'ils font changez
& convertis véritablement au corps même & au fang même de
J. C. n'y ayant que les efpeces & apparences du Pain êc du vin
qui demeurent. C'eft pourquoy nous ne les appelions plus fim-
plement du pain & du vin : mais nous confefTons qu'ils font le
corps même & le fang même de J. C. qui a efté verfé pour
nous pour la remifTion des péchez & la vie éternelle, êctous
ceux qui faifantprofeffîon de cette foy participent dignement
& avec pureté à ces myfleres , ont part avec tous les Saints au
Royaume du Ciel,
Nous avons beaucoup de refped pour les Saints, pour les
Anges, pour la fainte Vierge , & nous les employons pour
Ambafladeurs&intercefTeurs auprès dej. C. pour nos péchez,
& pour ceux de tout le monde, afin que par leurs faintes priè-
res nous foyons délivrez à^% fupplices éternels: & nous avons
un refped encore plus grand pour la S^^ Vierge comme ayant
plus de pouvoir que tous les Saints auprès de fon Fils &:de fon
Dieu pour obtenir le pardon de nos péchez, & de ceux de tout
le peuple qui porte le nom de Chreftien. Nous honorons de
même les Anges, & nous les invoquons afin qu'ils délivrent
nos âmes des malins efprits ,& qu'ils les afîîftcnt lorfqu'elles
fe feparent du corps.
Nous croyons de plus que dans la fainte Eglife il y a fept
SacremenSj le Baptême, le faint Crefme,la Communion,
l'Huile de prières, le Sacerdoce & le premier Mariage. C'eft
pourquoy nous Supérieur & autres Pères du Monaftere de
faint George de l'Iflede Principo, nous avons donné ce té-
moignage de noftre foy, qui eft celle de l'Eglife Orientale,
audit Seigneur & à tous les autres Chreftiens,& nous y avons
foufcntle 10. Odobre mil fix cens foixante & onze.
Ji/[oy Supérieur fay fou fcrit.
Moy Damascene Eccnome j ay fou fer it.
NicoDEME fayfoufcrit.
II iii
8C4L1V.VIÎI. Preu.<ves auth de t union des Eg.d'Or,
CHAPITRE XXIV.
Conclusion.
A Prés avoir juftifîé par une infinité de preuves dans le
premier volume de cet ouvrage que depuis le fiecle de
Berenger jufqu'à celuy cy, l'Eglife Romaine ôc les Sorieccz
Orientales ont eu la même foy fur les dogmes de la prefence
réelle 6c de la traniTubrtantiation : après toutes celles donc
on a fortifié ce fait dans la réponfe générale, & cette foule
de témoignages authentiques qu'on y vient d'ajouter: il n'efl:
pas croyable qu'il fe trouve déformais perfonne qui le puiffe
contefter de bonne foy, & fi quelqu'un n'en paroilToit pas en-
core perfuadé, on auroit tout fujet de croire, ou que la préoccu-
pation l'auroitempefché de faire attention à ces preuves , ou
qu'il en parleroit pliitofl: félon (es pallions ôc fes interefts
que félon fes véritables fentimens.
Ce feroit même en vainque M Claude pretendroit fejufti-
fier de l'a voir nié fur ce qu'il n'eftoit pas obligé de deviner tou-
tes les preuves qu'on a depuis produites, car il y en avoit allez
dans les premiers ouvrages pour l'obliger àfe rendre s'il n'eufl:
point eu envie de montrer au monde ce qu'il fçavoit faire pour
obfcurcirune vérité certaine. Et il ne pouvoit au moins s'en-
gager à nier ce fait,ny en parleravec la confiance qu'il a témoi-
gnée, fans avoir pris les loins necelTaires pour s'en informer,
dont le premier eftoit deconfulrer les Patriarches &: les Evef-
ques des Eglifes d'Orient^ ce qui auroit fuffi pour le conduire
à la même convickion.
Que l'on ne dife plus auffi que cette voye que nous avions
voulu faire palier pour courte & abrégée efl: tellement longue
qu'il a déjà fallu plufieurs volumes pourenéclaircirles difH-
cultez. On fçait qu'une des veucs deM. Claude en s'opiniâ-
trantànier ce fait, àefté d'embarafler par làcertedifpute. H 9,
cru que s'il nepouvoitempefcher que l'on n'emportaft ce point,
il en rendroitau moins par ces chicaneries la difcufhon diffi-
cile : 2c qu'ainfi fi l'argument efloit invincible on n'en tireroic
Afvec FEglife Komnine fur rRuchariJiie. gof
du fruit de long- temps. Mais il a mal pris fesmefuresen cela
comme dansjes antres cho(csj&: fi la neceffité où il nous a mis
d'accumuler tant de preuves pour établir une vérité confiante
a allongé la dilputepour quelque temps, ces mêmes preuves
l'abrègent déformais pour tous ceux qui voudront s'inllruire
de ce différend, puifqu'elles forment pour l'avenir une.cerfi-
tude 6i une notoriété fi reconnue de ce fait qu'il ne fera pas
moins certain que ce qui fe pafle parmi nous, & qu'on n'aura
plus befoin de le prouver.
Ainfi l'effet de cette longue difpute fera de pouvoir dire
maintenant fans dilpute, comme a dit autrefois Lanfranc, que
du temps de Berenger tûus ceux qui avaient quelque connoijfancc
de la langue latine é" des livres latins^ les Grecs, les Arméniens,
^ généralement ious les Chrcjliens, croyaient de l'EuchariJIie ce
quen croit l'Eglife Romaine, dcqu'ils ont toujours continué de-
puis de faire profeffion de la même foy, c'eflà dire en un mot
que ce fait capital, qui fert de fondement à l'argument de la
Perpétuité, eft parfaitement établi, qu'on le peut fuppoferfans
preuves, & qu'on nefçauroit fe tromper^pourveu qu'on n'en
cire que les confequences qui s'en tirent necelîàirement.
Peut-eflre fe trouvera-t il des Minières qui croiront nous
pouvoir arrefler fur ces confequences, & qui eftant forcez de
reconnoiftre queM. Claudes'eflma! engagé, & qu'il n'a point
dû nier ce qu'il a nié, prétend roient s'en pouvoir tirer d'une au-
tre manière que luy, en difant que c'eft'a faute d'un particulier
dont on ne peut rien imputer à tout le corps: qu'après tout il
ne s'enfuit pas de là que la dodrine de la prefence ait efté per-
pétuelle dans l'Eglife, qu'il eft bien vray qu'elle efloit univer-
fellement répandue dans tout l'Orient aufîi bien que dans lOc-
cident au fiecle de Berenger, comme on l'a fort bien montré,&
que M. Claude a eu tort de le nier, mais que cette docflrine a pu
s'introduire dans toutes les focietez Orientales par innova-
tion depuis le fiecle de Pafchafe, & que c'efl par là que M.
Claude fe devoit deffendre.
C'efl-Ià tout ce qu'ils peuvent répendre .- mais cette réponfe
en nous abandornant M. Claude, ne juftifie néanmoins ny
leur procédé ny leurcaufe. Car à l'égard de leur procédé,
ont ils dû fouffrir que dans une caufc commune, celuy qui
's'efloit chargé de leur deffenfe , l'établifl fur une fauffeté
1 1 iii ii
8o6 Liv. Vlll. Preuves amhent. deVumon des Eg.d'Ot
notoire, & qu'il conteftat quatre ou cinq ans fur un fait donc la
bonne foy & la fincencé le devoir faire convenir dés le premier
jour?Nedevoient-ils pas defavotier publiquement cette con-
duite ,, & ne point permettre que dans le delTein de deffendre
ce qu'ils prennent pour venté^ onbleflall: la vérité , en impo-
faut à toLit rOnent de croire ce qu'il ne croit pas ? N'eftoienc-
ils pas'obligczde rendre témoignage à la vérité dans ce point^
puifque ceux qui l'honorent véritablement l'honorent en tout
6c ne la regardent jamais comme ennemie?
Cependant qui eft: le Miniftrequi ait defavoué M. Claude
depuis tant de temps que cette dilpuce a duré, 8c qu'en peut-on
conclure finon qu'on n'a. nul égard à la vérité dans leur parti,
& que ceux qui y régnent par la créance &: par Tauthorité ne
fe (oucient pas par quel moyen ils y tiennent les peuples at-
tachez; que lei fauflecez leur font auffi bonnes que les veritez
quand elles produifencceceffetJ 6c que pourveu qu'un Auteur
fadedu bruit ,& qu'il foitcapable d'araufer le monde par le
ion de fe.s paroles, les plus intelligens d'entre les CalvmifteS'
font bien aifes de le laifler faire, & regardent toujours com-
me un avantage rimprefllon qu'ils font par là fur le commun-
de leur parti.
En un mot quand ils prétendront pafîèr à l'avenir pour des-
gens qui n'ont point d'autre interelî que celuy de la vérité,.
&: qui fuivent en tout les mouvemens de leur confcience, on
n'aura qu'à leur dire qu'au veu & au fçu de tous les Miniftres
de France, M.-Claude a foîitenu pendant le cours d'une difpute
de plufieurs années, fKÉ' U tranJfubjLintiation S'' l'adoration du
Sacrcûjcni fam des chofes inconnuvsj. toute la terre à la re férue de
l'Eglifc Romaine, (jp- que ny les, Grecs y ny les Arméniens^ ny les
Rufjlcns , iiy les Jacobites^ uy les Ethiopiens- , ny en ^encrai au-
cun Chrefiicn^ hormis ceux qui fe foumetîent au P^pe, ve croyent
rien de ces deux articles^ & que bien loin que perfonne parmy
eux s'y foie oppofé^c'efi: en publiant 6c en loûrenant cette inlî-
gne fauiîeté qu'il a efté élevé auxprejïiiej:s degrez d'honneur
de leur prétendue Eglife. . ., .,
Mais s'ils i^e fçauroient fe mettre \ couvert eux-mêmes
des juftes reproches que l'on leur peut faire de leur peu de
fincerité , il leur eil encore moins poffible d'éluder les
confequences qu'on en tire necelîaireraenc contre leur do-
cirine.
a,fvec tEgliJe ^o^nxine fur ï îiucharïfiie . 807
Car il ne fau: pas s'imnginer'que M. Claude fe foie engagéXXI V.
/ans de grandes S: importances raifons à foi^tcnir comme il a
-fait qu'il n'y avoir que l'Eglife Romaine où ces deux articles
fulTcnc crus. Ileft trop habile pour s'eftre porté gratuitement
à une telle extrémité ,& ce qui l'y a forcé malgré luy en cet-
te occafion n'eft pas difficile à deviner.
Il avoit entrepris de répondre au traitté de la perpétuité, ce
qui l'obligeoit de montrer la poffibiliré du changement que
\qs Miniftres prétendent eftre arrivé dans l'Eglife par le moyen
de Pafcafe depuis /e neuvième fiecle jufqu'à l'onzième. S'il
euft donc avoué qu'au fiecle de Berenger les focietez d'O-
rient faifoient profeflîon des dogmes de la prefence réelle
& de la tranfTubftantiarion^ il eût fallu dire par neceflîté que
fans que le livre de Pafcafe euft: efté veudans l'Orient, fa doc-
trine néanmoins s'y eft:oit répandue , 6c qu'en moins décent
cinquante ans elle s'yeftoic glilTée dans tous les efprirs , qu'ils
l'avoient tous retjuë comme l'ancienne foy en oubliant celle ,
dans laquelle ils avoient été élevés jufques alors^ queperfonne
ne s'y eftoitoppofé, que perfonne n'avoir même remarqué ce
changement, &: qu'il avoit efté embraftTé univerfellement 6c
fans contradidion partoutescesfedes divifées depuis plufiei'.rs
fiecles de l'Eglife Romaine,, 6c qui avoient pour fufpeci; tout
ce qui venoic d'elle.
Cela a paru tres-juftemenc ridicule à M. Claude , & quelque
hardy qu'il foit d'ailleurs^ il a bien veu qu'il ne reuifiroit pas
s'ilentreprenoicde faire goùr;r au monde une celle abfurdiié.
II a craint avec raifon que s'il reduifoit le différend à ce point,
il fuft trop tôt terminé, 6c que le fens commun ne fe declaraft
tout d'un coup contre luy.
Il a donc jugé qu'il valloit encore mieux contefter le fait, 6c
nier abf-)!ument que les focietez d'Orient crrfTent la prefence
•réelle 5 que par là au moins la difpute ne feroit pas fi roft finie,
que peut cfîre on ne s'attacheroit pas à prouver ce fait avec
tant àt foin, ^ qu'il pourroit demeurer enfevely fous cet amas
de nuages qu'il tafcheroic d'y répandre.
Il y a lieu de croire quec'efl par ces veuës que M. Claude
s'eft porté à prendre ce parci. Si elles ne font pas d'un homme
fincere, elles font au moins d'un homme habile 6c intelligenr,
.6c ce feroit aux Miniftres qui le voudroienc condamner à nous
1 1 iii iij
8o8 Liv. Vî î I. Preuves authent. de tunion des êg. d'Or,
dire auparavant ce qu'ils auroic pu fc'.ire de mieux. Qu'ils le
tencenc s'ils en ortc envie, &: qu'ils fçichcnt qu'ils yreiiiïironc
encore plus mal. Car au moins a c- il trouvé un grand champ à
faire paroiflre ronefpritjêc <à étaler Tes figures &: Tes hypo-
thefes. 11 a trouvé le moyen defufpendre les efprits, bi de les
éblouir pour quelque temps.
Mais il n'en feroit pas ainfi de ceux qui auroient pris un autre
chemin, &: abandonné les focietez d'Orient. On les auroit
condamnez fur la feule propofition de ce qu'ils auroient voulu
foutenir. Car qui voudroit écouter un homme qui diroit fe-
rieufement, î'avouë qu'au commencement de l'onzième fiecle
toutes lesEglifesdu monde croyoient la prefente réelle; mais
je prétends que c'eft le livre de Pafcafe q'-i fans avoir efté con-
nu dans l'Orient y a tait tous cesdefordrei &'. tous cesrenver-
femens, que c'eft ce livre qui a fait recevoir fans contradidion,
fans bruit, fans diCpute la créance de la prefence réelle par les
Neftoriens, les Arméniens, les Ethiopiens, les Copthes, les
Grecs , Se enfin par tous les Chreftiens du monde, & cela fans
que perfonne (e foit apperçu qu'il cnangeoit de fentimens.
Qu'on ne blafme donc M. Claude que d'eftre Calvinifte ,
& d'avoir voulu défendre fon parti à quelque prix que ce (nty
6c qu'on ne dife de luy que ce que S. Auguftint dit de Faufte.
2^ala caufa vana te loqui coept^ fed maldm caufam habere nemo
te eoegit : mais qu'on reconnoifTe en même temps que c'efl: un
étrange parti que celuy du Calvinifme, puifqu'on ne le peut
deffendre qu'en s'engageantà foutenir des faudetcz notoires
& palpables, & à nier des faits qui ont toute la certitude que
des faits peuvent avoir & par la raifoo &c par les fens .- c'eft
à dire qu'on ne le fc^auroit deffendre fans le détruire en même
temps; puifque rien de ce qui dépend neceifaireraent d'une
faufleté ne f^auroir eftre véritable.
Ainfi les livres de M. Claude par un effet bien contraire à
fon intention peuvent eftre juftement appeliez la deftrudion
du Calvinifme, puifque faifant voir qu'on ne le peut deffendre
avec quelque forte d'apparence qu'en fourenant que lesEgli-
fes d'Orient ne font pas d'accord avec l'Eglife Romaine fur la
prefence réelle, ils font voir auffi qu'il eftimpofîible de le dé-
fendre raifonnablement, puifque ce fait eft abfolumenc infou-
tenable.
f'^ afvec ÏBglïJe Romaine fur rEucharîflie, 8o9
C'eft la conclufion qui fetire naturellement de toute cette
difputeôcoii le fens commun conduit tout d'un coup ceux qui
i'ëcouteront tant foit peu.
Que s'il fe trouve encore des gens qui ne concluent pas ainfi
d'eux mêmes, ou qui rejettent cette confequence, on les peut
regarder comme ayant plus beloin de prières que d'éclair-
ciiTemens & de raifons. Qiiand on en eft venu dans les écrits
jufques à contenter pleinement toutes les perfonnesde bonne
foy , on peut s'arrefter là, puifquelamauvairefoy & l'opiniâ-
treté n'ont point de bornes. Je croy pouvoir dire qu'on y efl:
arrivé dans les matières qui font le fujetde ces trois volumes,
& principalement dans l'argument capital de tout cet ouvrage.
Ainfî on me permettra bien fans doute de le regarder défor-
mais comme achevé, S^ comme n'ayant plus befoin d'eftre
foutenu par de nouvelles réponfes contre les attaques des Mi-
niftres. C'efl: la règle que S. Auguftin donne expreflèment à
Marcel lin à qui il dédie les livres de lu Cite de Dicu^ en luy
marquant qu'il n'yauroit pas dejuftice à luy demander des
réponfes toutes les fois qu'on verroit {ts écrits combattus par
des perfonnes opiniâtres & déraifonnables. Quamobrem nccte-
ipfum^ mi fit MancUine, nccalios quibuihic nofierlaboî in Chrifli
charitate utiliter ac liberaliter fervit , taies fcriptorum meorum
velim judices qui relponjîonem femper dejiderent cum his qu^e
leyintur atidierint aliquid contmdici. Qiie s'il y a jamais eu lieu
de pratiquer cette règle, on peut bien dire que c'eft en cette
occafion, & qu'on a pliitoft fujet de craindre d'avoir ennuyé
le monde par un trop grand nombre de preuves, que d'avoir
laiiïë lieu à perfonne d'en defîrer davantage. Mais quoy
qu'il en foit, il nouseft au moins permis en finiffant cet ou-
vrage d'emprunter les paroles par où ce S. Dodeur finit celuy
de la Cité de Dieu, & de dire comme luy^que l'on croit avoir
fatisfait avec l'affiftance de Dieu par çt% trois vi^lumes de
la Perpétuité de I2 Foy de l'F.gUfe Catholique fur l'Eucha-
riftie, à l'engacrement où l'on eftoit entré. Que l'on
conjure ceux qui y trouveront de l'excès ou du défaut
de le pardonner aux Auteurs qui y ont travaillé félon la
mefure de leur lumière qui ne s'eft pas étendue plus loin ;
Et ceux qui en feront contens de ne leur en rien attribuer ,
mais de fe joindre à eux pour en rendre grâces à Dieu. Vi-
8io Liv. VIÎI. ^reunues authent. de t union des B g. d'Or.
deor mihi debitum ingentis hujus operis adjuvante Domino red^
didijfe^ quibus parmn vel qv.ibus mmium efi mihi ignofcant ^
quibus auiemfatis efi non mihi, fed Dommo mecum gratias con-
gratulantes agant.
FÏN.
TABLE
l
ADDITION.
On a parlé en divers endroits de lit Réfutation que Jlùîetitis Syrinus le
pt:is cdcbre Théologien des Grecs avoit faite des an' clés de Cyrille hucar:
mais on nen a rien mftrc parmy les autres pièces , parce qu'on ne l'a receu'e
de Conflantinople qn après que cette impreffion a efté entièrement achevée.
On a cru neamtioins qiiil ejloit bon d'en ajouter icy quelque chofe , ny
ayant point d'écrit ou l'on puijfe mieux voir le fentiment des Grecs , ce
livre ejiant généralement eflimé , comme on l'a pu voir dans la lettre de
Neclarius Patriarche de feritfakm , qui y renvoyé pour apprendre la fby
de l'E^.ife Grecque : & par cille du ftcur Panajotti , qui le met au nombre
de ceux qui tant le pins nettement expliqué.
EXTRAIT DU LIVRE DE MELETIUS SYRIGUS,
contre Cyrille Lucar.
Du nom de Tranjuhftantiation.
NOus demeurons d'accord que ce mot de Tranflubftan-
tiation ne fe trouve point dans les anciens Théolo-
giens. Carne s'eftant point élevé aucune herefîe particulière
fur ce Tujet, fî ce n'eftoit de ceux qui nioient la véritable pre-
fencedu Verbe en la chair, les faints Pères ne fe font point
mis en peine de chercher de nouveaux mots. Mais nous ne
difputons pas des mots, & nous ne faifons pas tant confîfter
la force de la pieté dans les paroles, que dans les chofes. Si
donc nous trouvons dans les Théologiens ce qui eft fignifié
par le mot de Tranflubftantiation, qui peut empêcher de le
fervir de ce mot, ou de quelque autre qui ait la même for-
ce.'' Car nous ne trouvons point dans l'Ecriture, que le Père
foit appelle fans principe, incapable d'eftre engendré 5 nous
n'y apprenons point en termes exprès, que le Fils foit confub-
ftantiel au Père , ny que le S. Efprit (oit Dieu. Mais il eft con-
forme à la pieté, & même tres-neceflaire, à caufe des here-
flesqui s'élèvent, de tirer ces mots de plufieurs autres cho-
fes qui les établirent, pour donner une connoiftànce plus
claire des véritables fentimens, & renverfer les fentimehs
contraires.
Car enfin quel defavàntage peut-îl arriver aux fîdelles,
d'enfeigner un même fens pieux par de différentes manières
de parler? Pour moy je ne le vois pas. Et les paflages que nous
avons rapportez font voir que les Théologiens en(eignent
'KkKKk
unanimement ;, que le pain fandifîé eft proprement changé en
la fubftance de la chair du Seigneur^ ce qui eft la tranflub-
ftanciacion. Car S. Juftin die , quil a pu faire fon corps du ^ain,
de la même manière qu il a pii s'incarner. Et faint Cyprien dit,
que le pain que J. C. donna à fes difciples e/lant changé non pas
en apparence , mais en nature, eft fait chair par la toute.puijfance
du J^erbe,
Et Cyrille de Jerufalem à'\t,queJ.C. ayant changé de l'eau en
•vin en Cuna de Galilée ,il mérite qu'on le croye quand il change
le 'Vin en fang.
Et en un aurre endroit. Le pain ,^\x^'^^ qui paroijl rùeft pas du
pain, quoyqu'il paroijfe tel quand on le goitte,^ mais le corps de Jé-
sus CnaiST , S^ ce qui paroift du vin^ n' eft pas du vin quoyque
les fens femhlcnt le perfuader ., mais le fang de J. C.
Saint Ambroife dit auffi, Ce pain devant les paroles facramen-
t elle s eft du pain '■> (^ après (lue la confecration a cfté faite ^ de pain
il devient la chair de J. C.
Grégoire de NyiTefe fertdeces termes, TVsus croyons que le
pain confacré par la parole de Dieu eft changé au corps de J. C.
S. Jean Chryfoftome dans l'Homélie 83. (ur faint Mathieu
dit, 2Vous tenons icy le rangdes Miniftres ^ mais ceftluy qui les
fanHifie ^ qui les change.
S. Jean Damafcene dit, Le pain de propofttion, le vinQ^ l'eau
par l'invocation S'- l-i prcftcnce du S. Efprit ^font changez^furna.
turcllcînent au corps (y- au faivg de J. C.
Theophylacle de Bulgarie , Jefus qui aime les homncs , con-
ferve l apparence du para ^ du vin , (^ les change en la puiffance
de fon corps & de fon fmgy
Or ce que les anciens Uoâ:eurs de l'Êglife ont entendu par
devenir, eftre fait, eflre changé, & trarfclementé , ou s'jl y
a quelque autre manière d'exprimer cela , les Théologiens
d'aprelent entendent la même chofe par le mot de Tranf-
fubftantiation. Comme ceux làdilenc que le pain eft propre-
ment & véritablement changé au corps de J.C. de même ceux-
cy entendent, fans aucune différence, la même chofe par
le mot de Tranflubflantiation, ayant trouvé ce mot nouveau,
à caufe de la nouveauté de l'herefie. Car un certain Beren-
ger &: Tes difciples, publiant que véritablement le pain rece-
voir quelque grâce du corps de J. C. que Dieu luy commu-
niquoitpar accident, mais qu'il n'eiloit pas fubflantiellemeni
changé au corps de J. C. au contraire qu'il demeuroit fans
eftre changé, tel qu'il eftoit avant la conlecration, les Théo-
logiens qui eftoient dans le véritable feanment, pour ren-
vericr la tolie , dirent que le pain eftoic cranflubftantié au
corps de J. C. afin de montrer que quelque accident du pain
n'efloit pas changé en quelque accident du corps de J. C par
quelque changement, mais que le pain eftoic fait fubftan-
tiellement le corps de j. C. Et de même qu'auparavant The-
refie Arrienne, on ne ie fervoit du mot de confubftantiel,
ny en écrivant, ny en parlant, & qu'après qu'il eut eu l'im-
pudence de feparer le Fils de la fubftance du Père , ce moc
fut publié par les Pères du premier Concile, qui confeGe-
rent que le Fils eftoic confubftantiel, de la même fiibflauce,
&uny fubftantiellement au Pere^ pour renverfer cc.-> divisions
de la Divinité. De même en tous temps, ceux c^\: ont gou-
verné l'Eglife comme il faut, ont efté obligez d'invent» de
nouveaux m.ots , à l'occafion de quelques nouvelles herefies5
ce qui femble eftre arrivé dans ce Sacrement. Car devant le
7. Concile prefque tous en ont parlé fimplement, mais après
]'an 700. de J. C. ces ennemis des faintes Images s'eftant aC
fembiez à Conftantinople, ce qu'ils appellerent fort mal à
propos le 7. Concile, ils déclarèrent impudemment qu'il n'y
avoit qu'une feule image de J. C qui eftoit le pain de l'Eu-
chariftie. Depuis ce temps là les Pères qui vinrent enfuite ,
commencerez ta déclarer dans leurs écrits, que lepaincon-
facré n'eftoir point la figure du corps de J. C. mais la vérité,
comme on peut voir dans le 7. Concile, Saint Jean Damaf-
cene, & les autres qui l'ont fuivy. Et l'herefie de Berenger
qui ne vouloir pas que le corps & le lang de J. C. fulfent fub-
liantiellement prefens dans les divins myfterés, eftant venue
jufques dans' nos Provinces, on inventa le mot de pLu^ctuati
TranfTubflantiation, qui fe/on le fens,ne diffère en aucune
manière du changement ,converfion , & tranfehmentation,
dont les anciens Pères fe font fervis, comme nous avons dit.
Si donc il y a quelque perfonne,qui craignant de s'éloigner
de la pieté, ne veuille pas toucher aux expreffions des an-
ciens, ny les chan2;er en d'autres, qui neanmois conf-rvent
entièrement le même fens, quoyqu'il fade une chofe ridi-
cule, néanmoins pourvu qu'il reçoive ces paroles félon la
penfée des Pères qui s'en font fervis, oousne dirons rien de
contraire à cela, mais nous le recevons au contraire comme
eftanc dans les mêmes kncimens que nous , louans fa pièce,
& ayant quelque condefcendance pour fa fmiplicité. Mais je
ne crois pas auffi qu'il doive s'éloigner de ceux qui expriment
le même fens par desexpreffions qui paroitrenc plus expref-
fes & plus éloignées de la duplicité des hérétiques , ou qui
expliquent plus clairement la penfée des Pères. Car c'eft élire
animé d'un efprit de contention, que de dilputer des mots,
quand on demeure d'accord de la lubftance de la chofe.
Que s'il nie la Tranfiubllanciation à caufe de la force de
ce mot, à fçavoir , parce qu'il ne croit pas que !e pain & le
vin foient changez au corps èc au fangde J. C. alors nous le
rejettons comme n'eftant pas d'accord avec noftreEgliie, &
comme eftant éloigné de noftre foy, & avançant des chofes
abfurdes de fa propre invention. Car nous avons receu de nos
divins Pères une autre doctrine, qui eft que nous communi-
quons au corps de noftre Sauveur d'une manière fenfible, le
voyant de nos yeux, le recevant dans nos mains, le portant
à noftre bouche êc le mangeant i ôcqu'ainfi nous fommes faits
cuïïacùi^o d'un même corps avec J.C. eftant nourris myftique-
menc de fa chair ôcdefes os. Car participant corporellement
aupain fenfible, changé fubftantiellement en fon corps parla
divinité toute-puilTante du Verbe , nous en approchonsd'une
manière fenfible, comme du pain & du vin , &: d'une manière
fpiritue'le &; myftique, à caule qu'on ne voit pas un corps hu-
main qui ait de la chair ôcdesos ; qu'il ne fortifie pas les cœurs
de ceux qui le reçoivent corporellement, félon la manière des
autres viandes corporelles, mais fpirituellement par fa Divi-
nité, qui comme on a dit y eft contenue.
TABLE
TABLE DES MATIERES
CONTENUES DANS LES TROIS V O LUMES
de la Perpecuicéj & dans la Rëponfe générale.
JLepremier nombre marque le Tome , le fécond Livre , le
troijiéme le Chapitre , le dernier la. fa y:.
R. G. marque la Rèponfe /générale.
On a marque les pages du premier Volume félon la troijîéme
Edition , parce que les chiffres ne continuaient pas
dans les deux premières.
A
B D 1 1 s n Patriarche des
Neftoriens reiini au Pape,
. 1. f. c. le. p. 389.
■ihrcgement des paxoles con-
formes a l'inclination des
ment traittés par Daillé i. 1. i, c. 11. p. 91
^hjjfuis Témoignages de trois ^bj'-
fr.s fur l'Euchariftie , i.l.j. c. 15. p, 40*
jéccidem eflentivls, 1, f.c.S. p. lyS
^dions contraires à des atîtions cxte-
hommes, foûtenu contre les Sophifmes rieures de refpeCi peuvent marcjucr un
de M. Claude r. g. 1. z. c. if. p. îifi. que plus grand refpe^l: , i. 1. j. c. 4. p. ;îé
l'on s'en eft toujours fcrvi dans les ma- filions de refprit connues jufqu'a u«
ticres de Religion, $%(,. que félon M. certain point, combien ildlaiféde s'y
Claude tous !es Auteurs Ecclefiaftiqucs embroUiller 2. 1. 1. c. i. p. 148
le n;roient feroient fervis de paroles abré-
gées d'une niamere contraire au (ens
commun , p. 51',.
^bfence réelle peut eftre conçue lans nier
formellement la prefence^i. 1.6. c. i.p.4 1 ?
J. C. abfent & prefent de nous lêlon
fon corps en divers fens,).l. C. c. ii.p, 545
que ce langage cft commun auT: nou-
veaux Auteurs & aux Pères, p. 414 &:c.
.^da-m Supérieur des Religieux de Ca-
riée cnvové au Pape par le Patriarche des
Neftonens, i. 1. f.c. 10. p. 550
Son écrit pour allier la foy de fa nation
avec celle de l'Eglilè Romaine, /^.•^. p.î^l
Argumens négatifs & pofitifs pour la
rranifubflantiation tirez de la conduite Se
des écrits de ce Légat, ibid. p. ^^j 393,
^//f/.;/<^e Impératrice, (es mœurs oc-
^bflinencc des viandes commandée cupcnt prcfque tout le dixième lieele.
dés le quatrième & le cinquième fiecle
félon les MiniftreSj i. 1. i.c. i i p. 91
n'a pu eflre obfetvée félon eux par qui
que ce loit fans apofla/îe , ihid, p. 95
Ceux qui l'ont commandée outrageufe-
adore l'Eucharilbe en mourant , fa vie
écrite par faim Odilon, 1. 1. 9. c. rf.p. C184
^debnan marque que de Ion temps
tous les Allemans elloientdans la dotiri-
ne de la prelence réelle , 1. 1. 9. p. -nf*
KKkkk
Su
TABLE DES MATIERES.
adoration véritable en quoy confite.
Deux fortes d'adoration, i. 1. 7. c. 9,
p. 54f-
adoration de l'Euchariftie prouvée
avant l'Epoche chimérique de M. Clau-
de, 1. 10. c. 9, par les Pères ihid,
^doration^ prouvée parmy les Grecs ,
& à l'égard des Mofcovites , 1. 1. 10. c. j,
p. 779- & des Arméniens i. 1. 10. c. 9>
p. 779.
adoration enfermée dans la prelènce
réelle , mauvais railonnement de Mon-
/îeur Claude fur ce fujer, i. 1. 10. c. 9-,
P 7S7-
adoration fouveraine non attachée à
aucun fli^ne , itid.
^d.orariott le fait plus tard dans FEpili-
fe Grecque que d.ins la Latine, raifon de
cette difcipline, T. l.io c. 9. p. 778.
^Vitfius Moine du Mont Athos a fait
divers ouvrages qui font dans la Biblio-
thcque de fainte Geneviève , cite luy-
mefme fon livre du falut des pécheurs
r. g. 1. I. c II, p 778. Approbation de ce
livre pat les Supérieurs du mont Athos,
ibid p. 779. par l'Eglife de Siphanto, j,,
1.8. O.^
Son témoignage pour la prefence
réelle & la tranlfubflant, i. 1. 4, c. «.p»
nr-
Réfute les objeiflions ordinaires des
Calviniftes , i.Lii p. 49.
Extrait de fon livre, i. 1. ii. p. 45.
Alexandre Gaguin fur les Mbicovites,
». l.f.c. r p. 541.
Alexis Commene zélé contre les héré-
tiques a» raport de fa fille , I. 1, 1. c. II,
p. i7(;.
alliance ne peut eftre ellablie en ter-
mes métaphoriques obfcurs, 1. 1. 1. c. 17.
p. 140.
^kemati-ue fâcheufe pour les M'ini-
ilres, ou faint Bernard eft un fourbe^ ou
ils font hérétiques , i. 1. u. c. i. p.79(î.
^malarius parle fur l'Euchariftie le lan-
gage des fens, 1. 1. 8. c. +. p. f 69. & ce-
luy de la foy, p. f7i. J75. item c. 7. p.
io(,.
^mttlarlus peut eftre jnftement accufc
de Stercoranifm?, i . 1. 8. c. u. p. 8 5 3.
^mbajjadeitr d'Angleterre mal infor-
mé de la créance des Mofcovites r. g. \.
". c. t4. p. ll«.
^/wii/r«//(?' des termes caufe ordinaire
des disputes, d'où vient qu'il y a tant de
îfrmes , j. 1. 6. c. i. p- 346.
^mhigttiti des niots de manger âc
boirej thtd, ;4.7.
^;«f».fens de cette parole dans la recep--
tion de l'Euchanllie 1. 1. i. c. 6. p, 44^
& fuiv.
Avanônincf figure > fa nature, peut
avoir lieu dans le célèbre paffage de Ter-
jullien contre Marc , ;. 1. 1. c. 5. p. S6..
^tajfa/e Sinaïre , temps où il a vefcuv
a crû le corps de J. C. corruptible dans
l'Euchariftie. p. 480.
^ndroni^ue fils de Michel renouvelle
le (chilme , prive fon père des honneurs-
funèbres deus aux Empereurs, 1. 1. 3. c. 4»
p. 115.
Excez de la paffion des fchifmatiques
conrre les Latins & ceux qui les avoient
fuivis, nulle mention de la tranf./W. izfi
^ngelonus Benediftin fur l'Euchari-
ftie j 1. 1. 8. s. 4. p, 571.
^nne Comnine montre dans (on his--
ftoire qu'il n'y avoir aucun différend en--
tre les Grecs & les Latins fur la prefence
réelle & la tranfubft. 1. 1. r. c. lo.p.ifitf.
anonyme du P.Ctlot a velcu dans l'on-
zième fiecle, 1.1. li.p. ly
^rstitjjie. terme d'^nt/tyfe a un double
fens. peut eftre affirmé & nié fans-
coutradicîlion , 1. 1. 7. c. z, p. 474
^fologiflei de la R^'ligion chrétienne,,
leur procédé félon S. Jcrôme,3, \. 7, c. 4,
P,49i
^^f offres n'ont point fait de queftions.
fur le fens de ces paroles : Cecy efl morf
Corps , & ils les ont prifes pour claires,,
1. 1. I c. 17. p. 141
^fojîres fîmples & dociles,refpe(îlueuT,
incapables de prendre des paroles'en des
fens éloignez, /^/^. & i. I.4. c. «. p. 37)
^rcudius àz naturel aigre, fait des re-
proches injuftes aux Grecs fur l'adora-
tion , 1. 1. 10. p. 777
^rgumens négatifs de divcrlês fortes,,
5.1. ?. CI. p. 4.f4.
La nature de ces argumcns mal connue
par M. Claude. Ses mauvaifes maximes-
fur ce fujer, p. 45-f
^rgumens tirez du filence d'un fëul'
auteur en un feui point foible. 5. 1. 7.C. f;.
p.-,(oi ,.
arméniens fchifmatiques , lieu de la
tefidence de leur Patriarche, i. 1. 2. c.j.
Leur difcipline touchant le jeûne ihii.
temps de leur fchifme, p. 114.
T runes ^rmtn -ens ca t l.oliqucs. ■ efî ien—
ce dekur Patriarche, I..'. i.c.j.p n. 3
TABLE DES
^rjnettieHS , Cérémonies qu'ils prati-
quent à la Mcflc. 1. 1. II. p. Si
arméniens accufez injuftement de ne
point croire la prcfencc réelle par divers
Auteurs, mais injurt:emcnt,i.I,j. c. y. p.iXi
Source de cette accufation , erreurs qui
leur (ont imputées devant Benoifl: XII.
dont celle-là fait partie , p. jSj.
Cette erreur détruite par leur liturgie,
p. 3 S+. dcfavoiiée par le Roy d'Arménie,
p.58f
accufation renouvellée devant Clé-
ment 6. détruite par la déclaration
CïprciTe du Patriarclied'où elle peut eftre
«ce, p. 585
CIcment V I. envoyé un formulaire
.âi:x Arméniens, R. g. 1. 1. c.17. p. 171
Plainte de ce Pape contr'eux , 171
Jugement fmcere de l'information de
Benoift XII, & de toute cette affaire,
R.g. I.i.c. 17.P.171
Erpreffions des Arméniens rejettées
înjiiftement par les Théologiens de Ro-
me, r. g. 1. 1. c. 17. p. 175.176
Que cette accnfation détruit la poli-
tique que M. Claude impute aux Latins.
R.g. 1. 1. c. 1 f . p. lié
, La créance des arméniens fur l'unité
d'une nature, R. g.l. i.c. 1 y. p. ij9
^rmeruem n'ont point cru que le corps
-de J. C. fût détruit , i. 1. 5, c. (t. p. 361
Preuves qu'ils ont cru laprefence réelle
•jusqu'au 1 4. (îecle. 1. 1. f . c. tf. p.5é5
Commerce des arméniens avec l'Egli-
fe Latine 1. 1. 5. c. S. p. 366
arméniens difoicnt que le corps de J.
C dans l'Euchariftieeftoit le corps de la
Divinité , 1. 1. 5. c. <>. p. 5f 9
arméniens s'unilfent avec le Pape au
Concile de Florence d'une manière qui
fait voir qu'ils croyent la pretence réelle,
I 1. f. c. -7. p. 371
Objedlions fur la créance des ^rme-
Biens de ce dernier tempSj i.l.ç. C.8.P.378
^rgîimens à quatre termes fur le mot de
tec-^ fait-; par tous les Miniftres , i.l. 1.
C.5. p. 176
^rgume/js qu'on auroit pu tourner con-
tre les clirefliens , 471
^rnobe Catéchumène , & par confe-
quent ignorant dans les niyfteres , 3 . 1. 7-
c. 4.P.4S7
S;s crrîurs, ibid, &c.
articles de foy ne peuvent eftre établis
en termes métaphoriques quand la meta-
plore feroit obfcure. Faux exemples allé-
guez par les Miniftres, i.l. i. c, 17. p. 113
MATIERES. gr5
^Jfomfrtcn du pain par le Verbe impu-
tée par Blondel à S. Jean de Damas fur
des raifons frivoles, i.l. 7. c.ro. p. f f i.& pat
M. Claude à Jean de Paris,}.!. 7,c. i
^thenugore n'i point eu intention de
traitter les dogmes. Points dans lefquels
ils'eft renfermé, 3.I. 7.C. 4. p. 48*
yl-vantages de la caufe de î'Eglife fur
celle des Calviniftes avant l'examen d»
fond , 1. l.j. c. I, p. n6
^ubertin fon livre n'eft point le premier
fujet de cette contcftation , i . 1, i. c. i , p
13. &c.
Pourquoy ileft difficile d'y répondre,
I.I.7.C. p, 499
jiMhertin. retranche onze lignes d'ua
palfage après avoir fait profeflion de le
rapporter tout entier, i,l. 6. c, 8.p.(^4j
Prétend éluder tous les palfages des
catholiques par d'autres expreflîons
aulquelles il les compare , produit lii
vingt palTager pour éluder ceux qui
marquent le changement du pain au corps
de J.C. 1. 1. (1, c. 5. p. <!04
Prouve vainement que les mots de
changement &c. ne (îgnificnt pas tou-
jours un changement fubftanciel. Inuti-
lité de ces paifages , 1 1. é. c. 4. p. Sio
Raifonnement d'Aubertin où il n'y z
pas de fèns commun , 5, 1. j. c. 4, p.
Réfutation de fa principale objeftio»
fur Thcodoret à l'égard de la prefence
réelle, 3. 1. f.c. 4. p. i(;4
Sophifmes d'Aubertin fur le même (ît-
jet, 3.1.?. C.4. p. 16g & c. 3. p. 170
Reconnoift que le fens de la tranfliii».
au pu venir dans l'efprit , p. i6y
Sa mauvaife foy fur Thcodoret, 3.!,
r.c. 14?
Solutions d'Aubertin fondées fur des
fens impertinens qu'il lui pUift de donner
aux termes, 3. 1. É.c. i.p. 3 v6 &c. f.p.
879. &?8'.. 3«6
^uflerite utile , i. 1. i. c. j. p. ro?
auteur de l'hiftoiredel'Euchariftie a
pour caradere l'inaplication.Deux exem-
pl«s remarquables , 1, 1. 6. c. u. p. 6j-f
auteur de la réponfe à l'Office du laint
Sacrement. Sa confiance , i.I. i.c. j.p.f/
auteurs font le portrait de leur efpriï
en faifantceluy des chofes dont ils écri-
vent, 1.1.7, f.p-4!^8
^«/exri peuvent u(êr des mefnies ter-
mes en des fens fort difterens. Comment
on les diftingue , j.;l 3. c i. p. 14 6 &'c.
auteurs c^xowt parlé de l'Euchariftie^
KKkkk ij
Si4 TABLE DES MATIERES.
comme Theodoret, éclaircis par les me
mes lolucions , 3. 1, 5. c. 10, p. 3 14
E
Byiftefme a dû produire de jurandes
métaphores , & avoir pluficurs ex-
prellions communes avec l'Euchariftie,
1.1.6.0. if.p. 717
Pourquoy les effets du Bttftefme ne
niartiuent point la prefence réelle, &L]ue
les effets attribués à rEuch.itiftic la mar-
quent, i.l. 6. c. if.p. 718
EiFet du Batcme inteliigthle ^ mifs
différent de celuy de l'Euchariftie, 1. 1.6.
c. If. p. 7^0
B'iptc/me^ie^Wzz & veriré à l'égard «les
Sacremensde l'ancienne Loy fanstrani-
fijb!Kint. 1. 1. 6. c. If. p. 750-
fondement de diverfes métaphores
touchant le B.iptêmCj 7^1
Djfftrence des exprt (Tions des Pères à
l'égard du Baptême & de l'Euchariftie ,
ï.l. 6. c. if. p. 711. & fuiv.
M. Baron Coniul d'Altp confirme par
fà fignatute la vérité des atteft.itions des
Grecs d'Antioche ^ des .Syriens, des Ar-
méniens d'i\lep j I. 1. II. p. 56. 81. SI,
Btiftle Archevefquc de ThelFilor.ique,
fa moicration , protclte que les deux
Eglifes lont unies dans la foy, 1. 1. i. c. 10,
p. I6>^.
Bede parle le langage des fcns & ce-
luy delà foy , 1. 1. 8. c.4. p. po. sTi-
Berenger n'avoit tiré fon (cntiment
d'aucun auteur de fonllecle, i,i. 9. c. i.
p. 6y6
Son opinion regardée comme nouvelle
& inoiiie , ibid. n'a pas eu grand nombre
de partifans, /^/^. 6f7
Sereng.irïensr\i (ê font jamais prévalus
du confentenient d'aucune EgIi(e,difoient
que l'Eglife eftoit perie, r. 1. 1. c.7. p. 171
Combien ce filence eft convaincant ,
p.i4i
Bertram n'a point combattu direde-
mcnt ladoûrine de Pafcafe. Qiie fon li-
vre eft fait contre d'autres adverfaires j
preuves claires pour ce point,:. 1. 8. c. ir.
p. 638
Diff.-rences de ces adverfaires combat-
tus par Bertram , & de Pafcafe , p. 640.
641
Que le livre de Bertram doit eftrede
nulle canfideration pour la decifion des
differens entre les Catholiques & les Cal-
viniftcs», n'a commencé de paroiftrc fous
fon nom qu'à la fin deronziriïie fïêcle,
qu'il eft pollible qu'il n'ait point efté pu-
blié durant fa vie, i. 1. u, p. 1?. f^oyexj
Jean Scot
Véritable difficulté du livre de Ber-
tram non entendue par M. Claude, i.T.
Il, p. 51.33. 54. 55. ,(•■ 57
Bejfirion au Concile de plorence. éta--
blit la tranilubftanti.uion écrivant con-
tre Marc d'Ephefe, fait voir clairement
que l'Eglife Grecque eftoit d'accord avee
la Latine fur le doi/me de la tranlfub.!, 1,
4.C. i. p, 176
Bizarrerie des Miniftres qui font pen-
fer tous les hommes en un certain temps
d'une certaine façon , & d'une autre en
un autre, 1. 1. 6. c. ii.p. 9J
Blondit, fon fonge fur l'introduélion
prerendue des Evtlques, i . 1. 1 c. 8.p.74
Avoue que la prééminence des Evef-
ques eftoit reconnue par tout à la fin da.
Iccondfîecle, i. ). c. S. p. is
Bogomiles hrretiques nioient l'Euchari-
ftie, I. l.i.c.ii.p. 776
Bre-uetè authorile certaines expreffions
i. 1.7. c. 5. p. Soi
Bucer Dominicain apoftat auteur de
l'eftat politique de l'opinion Zuinglien-
ne , taxé de timidité par les Calriniftes,
l.l. I.c. 4. p. 41, Cache la différence des
Calviniftcs & Luthériens dans la confef^
fion de Strasbourg , ilud. Prétend qu'il
n'y avoit point de différend entre eux fur
ce point, 41. Defavolic parles Luther
riens, donne lieu de croire qu'il admet.,
toit la prefence réelle , p. 41.. tnperfuade
Luther à Coburge, p. 43
Artiffce de Buccrpcu approuvé à Bafle,
47. Miniftres Ziiinglicnsfc laiffent ga-
gner . leurs équivoques, jo. Voyez Coiv-
cordede Vvittemberg. Luther.
CAbasilas fleurit fous Cantacuzené
ennemy des Latins. Ses paûages pour
laprefenceréelle & la ttanffubftant.i. I.5.
c. 8. p. 145. fa dodriiie particulière fur iè
facrifice.
Erreur de M. Claude fur cet Auteur,
p. 149. livre de Cabafïla de la vie de J.C.
Beaux paffages, p. ifi
Erreur de Grammaire reprochée in-
iuftement par M. Claude fut cet auteur,
R.G. 1. i.p. 487
Caietan a cru que l'on pouvoic enten-
dre ces paroles .- (ecy ejl mon corfi en ua-
TABLE DES
iéns de figure, & pouRjucy i. 1, 2. c. }
Calomnie dç M. Claude contre Arcu-
dius, en luy imputant d'avoir nié que ics
Grecs adorent, i.l. 10. c. 9. p. 776
Calomnie , que l'on air enfermé l'im-
poffibilité du changement de créance
dans les feuls myller>.'s populaires, 1. 1. i
c. 7.p. 6S
Calomnie de Mon/leur Claude qui at-
tribue au Pape Alexandre 7. d'avoir fait
Une herefîe de l'opinion de faint Bernard
fur la Conception de la Vierge, i. 1. 9.
c. 9. p. 7 08
Calomnie de Monfieur Claude contre
l'auteur de la Perpauitc , qu'il n'ccrivoit
que par politique de l'EuchanlIie, 1.I.17.
c. 9.p. Sif.
Autre calomnie , d'imputer au mefme
auteur du chagrin contre les myfteres, r.
1. I. 10. p, 8l8. l^ojeiL M Claude.
Calomnie contre l'auteur de la Perpé-
tuité fur l'infaillibilité de l'Eglife, R, G.
1. l'.t. 7. P.Î95
Camatei-e Patriarche de Conflantino-
ple j n'eft blalmé que de foibleife par Ni-
ceras Choniate , & c'efl une vifion d'Au-
Kettin qu'il ait cru les myîlcrcs corrupti-
bles. I 1 i.c. 14. p. 194
Caraéleres divers du fens catholique &
du fens calvinifte fur ces paroles , cecj efl
mon corps., 1. I.3. c.i. p. 141
Ceifauhon. 1« fentimens (urles CalviniC-
tesj principalement lur du Moulin, i.l-i.
c.î.p.48.49
Catechijme de Conftantinoplc en grec
vulgaire où la tranll'ubftant. cft expri'-
mée en termes formels. R. G. 1. i. c, 9,
p. 118, Autheritéde ce livre, p. 1 jt
Catholiques peuvent tomber en certai-
nes erreurs , non en d'autres , en demeu-
rant catholiques , 1.1. 6, c.i. p. 481
Catholiques comment doivent cftre
dilpofez a l'égard dei Caviniftes, i. 1,+.
p. 846
Catholiques obligez à la retenue en
écrivant contre les hérétiques^ i. 1, 1. c.i
p,790
Crf/W/^«« ont droit de fuppofer que
les paflàges des Pcres qui peuvent rece-
voir leur fens l'ont en effet en vertu du
confentement prouvé de toutes les Eglifes
dans leur doctrine depuis mille ans , r,
1,10. c. y. p. 748
C*rW/5'«f i n'enfeignent point que c«s
paroles, cecjejf mon corps 11e /igiiitient
iienj'.î.,l. 1. c. 3. p. 175.
MATIERES. 8,5
Cal-un, .ivoue que tous les Pères fe font
trompez lur la prière pour les morts,!. l.i.
c. j.p. ïi
Cahi/ti/me ou dodrine des Sacramen-
taircs traitté d'hcrtfie au commtncc-
mentde l'ouziéme (îécle , 1. 1. 9. c.i,
p. * !i
Qu'il y avoit lors peu de perfonnes
qui erraiiént fur rEuLhanlbe , & qu'ils
efloient regardez comme des Novateurs
en ce tcnips-là , ihid. p. éf4
Cal-jinijlcs n'ont pu lo'uer Cvrille Lu-
car fans trahir leur confcieiice , i. 1. 4.
e. n. p. ;u
Cal-uinifies appellent toutes les autres
fedes du nom de leur feâe ^ & ne veu-
lent pas fouffrir qu'on les nomme Calvi-
nifles, 1. 1. lo.c. i. p. 803
Calviniftes anciens ont reconnu que le
fens cpe les Catholiques donnent a ces
paroles cecy efl mon cerfs , ePLoit clair.
Divers degré de phantailie par où ils ont
paffé, 1.1. 1, o, i.p. I4(;
Cahiniftes interrogez juridiquement
par Luther à la conférence de Vvitani-
berg,i. l.i.c. +.p. 49
Se trompent en îout dans l'explicnion
de ces paroles , cecj efl mon corps , 1, 1.
i.c.i.p.i64. Ils renferment l'examen
des controverfcs dans la. feuk écriture ,
t.\. i.c. r.p.18'
Rejettent les Pères & les ConcilesaTcc
infolence , p. 19
CJualité des premiers Miniftres CaU
vinillcs, p. 10, & 11
Témérité de cette voye reconnue par
Melanûon, i. 1. i. c. 1. p. 1;. 14
Seîle des Calviniftes fondée fur un
jugement injufte & précipité. Qu'ils ont
attiré les peuples à eux par des faulfes
promelTcs de la venté comme les Mani-
chéens, 1.1. 1. p. i«
Cahinifles ne fçauroient efperer de
falut qu'en luppofant que faint Ambroife
& faint Auguftin & pluiieurs autres Saints
ont efté des fourbes, i.l, i.c.'i6. p, 85
y, alternative.
Les Calviniftes ont befoin' d'une évi-
dence perfonnelle à l'égard de tous les
points de foy pour lefquels ils condam-
nent l'Eglife Romaine, i.l. ic. e.p 6}
Perlonne ne fc fait Calvinifte par rai-
fon, 1. 1. I. C.3. p. ?4-
Cafuimfles ont alTcz e'j de grandeur
humaine, &• n'ont eu aucune ombre de
gtandeur divine, i, 1. 1 1. c. t. p. S i.
Cahiniftes fcparent les veiitez aulic'l
KKkkk lij
tld
TABLE DES MATIERES.
de k-s unir, 1. 1. 5. c. y.p. 301
Cal-uinilles qui prouvent (împlement
qu'un palfjge (n peut prendre en leur fens
ne prouvent fien, 1. 1. 10. c. f.p. 74^
Leur hardieire à nier les chofes tbires,
utilité qu'on en peut tirer , i, 1. 4. c. 4.
p. t8i.
Pour eftre Calvmiftes , il faut avoir
l'eCprit faux & rcmuanr, i . l.S. c.é. p. J 9<;
Catvtnifies rai'bnnables ne peuvent
dcfaprouver le procédé qu'on a renu
contre eux, i.l. 6.c.II■p.S4■'•
Crf/■D/»'/?e■f ont anathemrvtilé avec
grand foin l'erreur qu'ils appellent »«a!rf
y^»rf tenue par les Sociniens, & ils font
néanmoins dans l'impuillince de les ré-
futer fur ce point , 1. 1. i.c. 8. p. 67- (îî?
/'S'-
il cft douteux fi les Calviniftes ne font
poinr cng'gez dans l'hereiîc des fignes
nuds II fouvent an:itheniatizée par eux ,
3.. 1. I. c. 10. p. ,81.
Enfeignent que les Sacremcns n'opè-
rent que dans les élus , 1. 1. i. c, io_
■p. S5
Q_^ic le Baptême ne produir quelque-
fois foneffer que dans la vieilkire. Ikij.
Cahiinijies ne fç.iuroient prouver par
l'Ecriture l'efficace jointe à l'Eucliariftie,
en l'expliquant dans un Icns figuré, 7) Ç^
fut-v. Item. c. 9. p. 78. Çj fun.
Cal-vinijies ne peuvent s'empefcUer de
dourer du fens de figure , que par un en-
te ftcmencdéraifonnable, i./o-^/ip. 4
Deux clefs des Calviniftes pour lé dé-
mefler des paflages des Pères, i.l i.c. 9.
p. I t.
Caufes Phyfiques agilTent par la pofition
de leur fubftance. Efficace PhyCquc de
l'Eucliariftie.i. 1.5.^. î. P-4!;9
Cjcufe Phylîque doit une fois avoir efté
unie, mais iln'eflpas neceifaire qu'elle le
foit toûiours , 1.1. r.c. 4.p. Î15
On peut eftre caufc de foy-même à
l'égard d'un certain eftac, %. 1. c c, 7.
p. "53.3.
Célibat des Prsffres injuftemcnt atta-
qué par Monfitur Claude, gardé par les
Doaatiftes, 1. 1. 9 c, 7. p. 701
Celfus. qu'il n'eft point certain que
iK>us avons tous fes livres contre les
Clirefticns, }.\.6. c. 5. p. 479
Combien il eftoit ignorant dans les
dogmes des Chreftiens, iliid. p. .^.So 481
Qi^i'il cft très- probable qu'il n'i point
connu l'Euchariftie, p. 48^.
Ceci eft mon corps.^ pris en divers fens
par les Sacramentaires fuivit des raifon-
ncmcs metapliyliques , i. 1. 10. p. 71I
Double ffry dans cette propofîtion. Ce-
cj ejl mon corpi ., t. 1. 1. C. 1. p. 1(7,
Kîtrai fignifie aufil bien eftre mis ,
eftre prefent ^qu'eftre gilant. i.l. 7.0,4.
p. 810.
Ccnjeurs de Rome n'ont point eu dç
parc a rimprefTioa du texte Ethyopien
du cd.nowuninjerjtiiis .^x.^z,- 1. t. c, J5. p,
Objeiftions de M. Claude fondées fur
des alterarions de ce texte dans la ver-
fion , 148. 149.
Cerul.iriHs. fon différend avec le Pape
Léon 9. prouve que les 1 , Eglifcs eftoient
d'accord fur la rraulfubftant. i,l.i.c. 5.
p. 113. G? /«'•".
CeruLinus excommunié par les Légats
du Pape , les veut faire alfommer. Ecrit
à Pierre Patriarche d'Antiocbe. Ses accu-
fations contre les Latins, nulle fur la pre-
fciKC réelle, &c. i. l.i. c. f, p. 119
M. Claude confond deux Lettres de
Cerulanusenune T. g. 1. 1, c. 10. p. 43S
Ch.iiràc j. C. vivifie immédiatement
fdon les Pères i. l.J.c.é. p. 515,
Ci.iOT/fr raille avec infolence les Catho-
liques fur les divers fens qu'ils donnent 4
cette propofition , ceci eft mon corps 1, 1,
i.c.i. p. 7fi
Impudence du même Clianiier ^ 1. l.i.
c. lé.p.ir?
Chungemens infenfibles alléguez pat
M. Claude nullement femblables à celuy
qu'ils prétendent eftre arrivé fur l'Eucha»
rifti^, I. 1.9. CIO. p. 7if
Ch.tnxement arrivé dans fa pratique de
la communion fous les deux elpeces,qu'il
n'eft point univcrfel, 1. 1. 9. C 'O. p. 7i<»
Ch.tngement du pain levé en azime,que
ce changement n'eft ny certain ny uiii-
yerfcl, 1. 1. 9. c. 10 p. 7i(;
Changement dan^i l'éledion des Evef-
qucs , que ce changement n'a point cfté
infenfible, i 1. 9.C. 10, p, 717
changement dans les cérémonies du
Baptême , qu'ils ne font point unifor-
mes , tbid.
Ci.«»»f/«^»/ fur les images , qu'il n'efl
point univerfcl , qu'il n'elt point cftrange
que l'opinion des Evefqucs du Concile de
•Francfort n'ait point eu de lieu dans l'E-
g!ife , I. 1. 9. c. 10. p 7i«.
Autres clitFerenccs de çe« exemples de
changement, P' 71?
TABLE DES
Oubli gênerai , tbid.
changement infeniible , impoffible
fur l'Epifcop.it^ I. 1. I. c. 8. p. 71.
Changemens infcnfible impofTible fur
la pricrcpouries iiioKs , 1. 1. 1. c.9.p. 8î.
CArf»fi,wf«/-inrcnrible, impoflîble iur
l'invocation des Saints, i.l. i.c, lo. p, 90
Surl'abftinence des viandes, i.l.i.cii
p. 9f.
Degré de certitude de l'impo.Tibilité de
ce prétendu changement Tur l'Euchar. i.
1, J- c. II. p. 711.
Changement reconnu par les Pères a
deux cjujlitcz , d'eftre réel , d'ellre une
fiiite de ces paroles , cecj ej} mon corps.
Ce qui exclut le fcns de figure & de
vertu, z.l. 6.C. 4. p. 619.
Termes de ch,wgement lignifient ran-
tofl un changement fubftanciel , tantoft:
un changement accidentel ^ & les hom-
mes ont des règles pour le difterner^a.l.
6. c. f. p. éi8.
Termes de changeaient clairement dé-
terminez pour la (uitedes pafFages , à fi-
gnifier un changement Tubitantiel, 1. l.é;
e. 6. p. 634 z£ f'"^.
Autres qualitez de changement qui
jjrouvenc que c'eft im changement de
lubftance ,2.1.6.c,. r.p. (Sii. ǣ fui'u
Changement marqué par les Pcies ne
peut eftre changement de vertu, r. 1. é.
c, (.. p. (.u. Ç^/i,i-v.
Changement marqué par les Liturgies
& les petes, i.l. 6. c. 3SS. Les Pères le
fervent toujours de ces ternies iiuis expli-
cation, p. 601,
Aubertin reconnoît que ces termes por-
tent a la prelènce réelle, 1 1. 6.c. z.p.
<oi
changement de fens dans plufieurs ex-
prefTions, impoifible, 1. 1. ro. c, i.p,^j4
On ne dk point qu'une choie cft f/i.î»-
/ff en une autre pour marquer qu'elle en
cil rendue figne. 2.1. C.-c. j.p. (.\6.
changement reconnu p.ir les l'cres, n'a
point pouf terme l'éiablillement d'une fi-
gure,!. î.é. c. 4. p. (îlé.
changement réel ne fe conclut point du
fens de figure, i.l. <i.c. j p. <i:f
Deux fortes de changement marquez
par M, Claule. r, g.l. i.c. 8. p. m.
Chapitre /îxiéme de (aint Je.in donne
naturellement l'iiléc d'une maniucation
réelle du corps de J. C LifFerence des
exprelïïons du commenccm nt& de la fin
de ce chapitre reconnue par les Dilciples
de J. C. & parles Juifs, r.l.fi.c.ifi.p. 678
MATIERES. 817
Que c'eft la crainte des Hullîtcsquia
poité quelques Catholiques a l'entcndr*
de la manuucarion Ipiiituellé , ibid. p.
(■79.
Qu'il cft moralement impolTible qu«
ceux qui ont le fens de figure dans VeÇ-
prit l'fjpliquent de l'Euchar. & que ceux
qui oat la réalité ne l'eu eipjiquentpa"*,
tbid.p. 681.
Auteurs qui l'ont expliqué de l'Eucha^
riftie , p. 6S } •
Les Pères ont allié ce chapitre avec les
paroles de l'inllitution , 6S3.
Qu'ils l'ont entendu d'une manduca-
tion réc-llcdela chair de J. C. «84,
l^ Charb<in . c\\ie vit Kaic fignifie dans
Saint Jean de Dan,as le corps de J. C,
uni à la divinité, 1. 1. 7. c 4. p. 49 f.
Prouvé invinciblement par un pa(l.:ge
de la ttoifiéare orailbii fur les Images ,
p. +9«^.
• Chanté qne l'on doit avoir pour prc-
ferver les fidellcs des hcrcfics, 1. 1. ir c,.
11. p. ï)^
S. Chryfoflome explique avec un grand
foin toutes les métaphores de l'Evaneile
de faint Jean fans jamais expliquer en un-
fèns métaphorique ce qui y regarde l'Eu-
haiiftie, 1. 1. 3. c. 7. p. 187. ^ /u/-u.
Déclare mén-ie qu'il faut ablblumcnr
manger la cLiir de J. C. fans énigine, &
fans parabole, p. 153.
Chjtnus. Ses erreurs fur les Grecs, i, 1.
1. c. 4. p. jiS.
Cmlité des M-iniftres,. ils traitent de
Saints ceux qu'ils croyentapollars & nu-
niftres des démons.
Clarté ne coniifte pas feulement dans
les termes, mais auflî dans les détermina-
tions qui en font connoiftrc le fens, z.
1. 1. C. I. lé.p. 150.
M, Claude. Son génie : n'eft jamais fi-
éloquent quequ.ind il parle de ce ou il ne
peut fçavoir , prJif. p. T
Nouveau genre d'humilité & de dou-
ceur de M.Claude, qai coniille en trois
chofes J t. à s'attribuer des vertus qu'on
ne voit pointji.àfe plaindre de bagatelles,
3, à charger d'injures atroces fcs adver-
laires, r. g..I. i. c. i. p. 3 i 6. Çy ftn'u.
Aigreur & violence de M. Clau k, lors
qu'il cnacul'e les .'urres,r.g I.i.c.iS.p.ff o
Sou caracîlcre ell la confiance, il trouve
tout ce qu'il veut dans les Percs par fVs
explications chimériques. Exemple (ut
un paUàge tle faint Jean de Danx.'is, l'I. i..
c«rp- Î7.
8i«
TABLE DES MATIERES.
Son éloquence emportée, i.l. ii.p.51
Propres aux eftats popuiaires , i. 1. f.
c. 4. p. 5?i
Tranl'port de la Rhétorique, i. 1. 8.
ce p. f.;t.
Fait un nouveau Di<Sionnairej 1.1.7.
c. i.p.4(f)-
Difpofe des éyenemens félon Ces vewè's,
itiii.
Décide cavalièrement les queftions du
Concile de Florence, i. 1. 4.c. 1. p. 163
Place mal les exclamations, i. 1. 7.
C. 7- p. 3^1
•Change les figures enraifons, 1. 1. i,
C. I. p. 79Î-
Sçait toujours des nouvelles desfiecles
padcz quiontelté inconnues à tous ceux
qui Y ont vefcu , 1. 1. 6. c. 7. p. 4fi
Domine fut l'efprit des hommes , il les
fait penfer comme il veut, i. 1. 6. c. 7,
A eu intention de faire pitié , & pour
cela raporK les reproches qu'on lui fait
dans une faufl'e application , r. g. 1. 2.
c. u.p. 47f
Fertile en peur-efire , & en faulfes hy-
potef-s , 1. 1. 1. c, f
-En fvftemes, i.l. i.c. 8. p. I45-
Caraderes extraordinaires ne coudent
rien à M. Claude, r. g. 1. i.g.iz, p. i'??
N'arcfte pas long-temps l'efprit à fes
fuppolîtions déraifonnablcs , i . 1. 7. c. f
p. fOi
Doncque M.Claude s'attribue de péné-
trer dans les intentions de fes adverfaires,
1, 1. II. p.r7
Prend pour accordé tout ce qu'on n'e-
xamine pas fur le champ, liid, p. 17
Tout eft poffible , tout cft impolTIblCj
quand il plaift à M. Claude, i. 1. ir.,
p. 19.
S.x milignité contre les Religieux, t.
1. 9. c. .9.p. 69»
Abufe des maximes communes faute
de les entendre. Sophifmc qu'il taie fur
les moyens généraux des preuves, i.l.i,
c. 4. p. 4i
Maxime de M. Claude dans l'examen
des auteurs , i. l.i. c. i^. p. 188
La dureté de fes -oreilles n'empefché
pas la force des raifons qu'on luy oppo-
lé , I. I. C.c. li. p. 470.
Abus qu'il fait des -règles de la Logi-
que, \. 6,c. i. [■>. ^-ir-.Ç^ /hiv.
Ne prend jamais garde que c'cfc à luy
à prouver, i.l. i(i.c. <;,.p. 7
M. Claude coutredicAubertin fur le fa
jet desGtecs, 1. 1. 1. c. 4. p.Ii-i
Porte fes prétentions plus loin qu'au-
cun autre Minillre , it/d
Argument impertinent fur la vertu de
M- Claude, fcmblable a celuy qu'il attri-
bue à Nicolas de Mcthotie,i.l.i.c.5. p.i8<C
■Q£'il admet politivement tout ce que
l'on a voulu dire touchant la connoiflan-
ee dillinftede laprefence réelle, i. 1, 6,
C>4. p. 4îî
Supercherie de M. Claude qui décrit
l'eftat de l'onzième tiéclc pour faire con-
noiftre l'eftat du mélange prétendu dans
le dixième, 1. 1. 5. c. 440
Sa cronologie eftrange, par laquelle il
fait mourir le jeune Eftienne après le fé-
cond Concile de ttficée, quoy qu'il fuft
mort vingt ans auparavant , i. 1. /. c. .8.
p. ^38
Autte faute du mefnie M" Claude fur
ccttehiftoire , 1,1. 7. c. S. p. 149
Son emportement injufte contre ce
Concile, s'40
Fauffeté qu'il commet dans le lecit qu'il
en fait, p.f4t
Abus qu'il fait de l'authoriré de Bellar-
niin &:de Syrmond 1. 1. S.c. 10. p. éjo
Sa faulfe chronologie fur deux ouvra-
ges de Pafcafe 1. 1. 8. c. 10. p. 616
Le contredit fur les moyens par lefquels
il a cru que la prefence réelle fc loir éta-
blie, I. 1. 9. c. 6. p. 67e. & (Î77
Infulte fansxaifon fur ce qu'on a com-
mencé par la méthode de prcfcriptionj
1. pref, z. 8
Il fuit la méthode des Sociniens en vou-
lant rendre les pafl.iges de l'Ecriture équi-
voques, &les déterminant par Les fens,
1.1. !..c. 1. p. 171. &C.S. p. 177
Ses nouvelles lumières fut les rapports
des S.icremens anciens à l'Eucliariftie re-
futées,!. 1. ^.c. 9. & 10. principale illufioa
fur ce fujet réfutée, lA. 6.C.9. p. 660
M. Claude doit exhorter à lirele livre
de la Perpétuité félon fes principes.i.1.7
c. 7. p. 840.
Avoiie par fon filenceqae fî toutes les
focietez d'Orient croyoieiH la prefence
réelle au temps de Berengcr, le change-
ment eft impolTihle , r. g. 1. 1, c. r. p. 10
Répond (ans conteftcr ni lama jeure ni
la mineure d'un argument dcci(îf./^/i^.
Veut nier da pcrfencc réelle & ne veut
pa< qu'on la proijve,r. g, p. 60
Vcutf.iire croire qu'il n'a point parlé de
la feule cho{è dont il étoit obligé de parle;
r.g.l.;.c.5. p.jS.
■Pourquoy
TABLE DES
Pcurquoy il s'eft porté à cette illuiîon
p- 4+.
Prétend ^ansraifon qui n'a point parlé
delà prefcnce réelle dans fcs deux pre-
mières réponfes, conviction de cette faul-
fcté par un grand nombre de preuves r. g,
1. i.c. 4. p. !4.
Accufe injnftement l'auteur de la Per-
pétuité de mauvjile foy fur ce point p. fg
Afaufedes paroles de l'auteur du premier
Traitté peur faire croire qu'il a parle de la
Tranflubd. r. g. 1, i. c. +. p. 48
Prétend injuftemcnt qu'il n'a jamais nié
que les Grecs & les Latins qui ont efté dé-
puis l'oaziéme flccle ne connullent pas ks
l'entimens les uns des autres. Conviction
de cette faufleté r. g. 1. 1. c. ç. p. 66.
Traittciiient injurieux qu'il fait à l'au-
teur de h perpétuité fur cette prétention p.
ii.avoue maintenantle contraire p.é7.(iS
Injufte reproche fur l'omiffîon de quel-
ques miffionsj:. g. 1. 1. c. 6, p. 8^
Abfurdité extrême de la fuppofition
qu'il fait d'une politique & d'une timidité
de 600. ans, r.g. l.i. c.7. p. 697
Juge fans raport aux circonflances des
cliofcs qui font attachées à mille circon-
ftances r. g. 1. i. c. 7. p. loi
Se yante de n'eftre pas d'humeur à pren-
dre parti fur les premiers objets , & prend
neâmoins parti fur des choies qu'il avoue
qu'il ne fçait pas r.g. 1. i.c.io. p. 161
Avance témérairement que les Grecs ne
fc fervent du mot de Tranfubftantiatiô ni
ordinairement ni cxtraordinairement.i^t
Son erreur grofllcre qne ce n'eft pas à
J. C. que l'on offre fon corps & fon fang,
r, g- 1. 1. c.if. p. iji
DifFerens jugemens qu'il a porté du
traité de la perpétuité félon fcs divetfes
paffionSjr. g. l.i. c.;.p. 3 fi
Ouverture qu'il donne à la confulîon des
Religions & à toutes les herefies r. g, 1. 1.
c. 5. p. 577 .
Prétend fans raifon qu'on ne puifle nen
conclure de certain par les preuves de
raironnement,r. g. l.i. c.6.p.58t.&7^/'j.
Voye ridicule propofce par M. Claude
pour s'aflurer du fentirrtent de l'ancienne
Eglifer. g, 1 z.c.S.p. 414
Son éblouiircment fur le fujet de Nico-
las de MethonCj r. g. l.i.c. 11. p. 454
Se plaint injuftemcnt fur le fujet de For-
befius, r. g. 1.1. c. li. p. 470. l'accufe fans
rnifon detrahifon& de vilaine falfifica-
tiorr, p. 47e
Reproche fans raifon une f a«te de Gram-
MATIERES. Sig
maire à l'auteur de la perpétuité , r. g.
1. i.c. 13. p. 481
Qu'il a iujct de fe défier de luy-mcmc
en matière de Grammaire, traduit le mot
iS'Iuliif qui fignifie particulier par ce-,
lui d'idiot EvTidilJ.i.\of quifignifie»?//
dedans jinditiim, par cchiy d'appliqué,r.g.
I.i.c. 13. p. 4S)-
Sourticnt p:r de vains paralogifmes
qu'il a pu appellcr les huit premiers
Siècles les beaux jours de l'Eglife , r. o-. •
l.i. c. I?. d.4S8
Détours dont il ufê pour pallier une
faute de Chronologie^r.g. I.i.c.i5.p.4^i
Ses caradfcrcs qui paroiflent dans les
reproches qu'il fait fur un palFage de Jean
21. Erreur groffiere, fur laquelle il fonde
ce reproche j r. g, 1. 1. c. 14 p. fio
DeHx CUudes ridiculement inventez
par Balée, 1. 1. 11, p. 19
Clément 4. envoyé une profeffion de
foy aux Grecs contenant la tranlfub. en
termes formels, 1. 1. c. i. p. ziy
XO/,&)jT* csmmunicatio corforis Chri-
y?/., expliqué par Zuingle non de la par-
ticipation , mais de la fbcicté qui eflle
corps de J . C. z. 1. 1. c. 8. p. 74
Commerce des deux Eglifès dans l'on-
zième fiéclc, I. 1. 1. c. 8, p. 147
Commerce fpirituel entre l'Eglifê Grec-
que , & la Latine dans le douzième fic-
elé I. 1. i.c. 10. p. 169
Comparaijofis extravagantes des Sacrc-
mens de l'ancienne loy avec ceux de la
nouvelle faites par M. Claude,!. 1. 6, c. 9
p. 661.
Comfaraifans inégales ordinaires dans
l'explication desmy(Veres,3.1 j-, £.7.p.i9i
Comfaraifons n'exigent pas un parfaic
rapport, 1. 1. 7.C. 4. p.49+
Corr.fitmifons des changemens infenC-
bles avec celuy de l'Eucharifliejque celuy-
cy eflleplus impolfiblede tous i.l.i.c.ii.97
Co>:ciles tenus contre les Berengarien^
1. l.i. c, S. p. 14e
Que CCS Conciles n'ont pu eftre incon-
nus aux Grecs, ihid.
Concile de Florence. Grecs forment le
dcllein de s'y reunir avec les Latins. 167;
Exaflitude des Latins pour éclaircir les
queftions dans ce Concile, r, 1. 4. c. 1.
p.iéS
Argumens negatifs,& pofitifs tirez dece
Concile pour le confentement des Egli.'es,
p. 1É9. 172.
Suites du Concile de Florence prouvent
l'union des deux Eglifes dnns le dogme
LLIU
gio ■"* TABLE D
de la rranfTub. Argumens négatifs rirez
de ces fuites, 1.1.4. c. 5. p. 174
Concorde^ Vvittemberg lource des cx-
prclTions Luthériennes emplojces par les
Calviniftv-s , i.l.i. c,f. p. jt
Calvin imitant la diffimulation de Bu-
cerj éclaircit cesexprcffions fans les chan-
ger, i.l.i. c. J. p. fi
Effet naturel de ces exprefîîons fur qua-
tre villes d'Allemagne, çi
Concorde de Vvittemberg prouve qtte
les Calviniftes& les Luthériens eftoient
des gens fans confcience, p. 51. Rompue
par Luther, i.l. i c. 6. p. 60
Conférence ^ouï unn l'Eglife Grecque
à la L.itiue tenue a Barry , on n'y parle
point de l'Euchar. 1. 1. 1. c. 8. p. 187
Confeffion de foy pour les Sarazins au
douzième Sieclej claire pour la ttanilub.
Import mec de ces fortes d'écrits , i. 1, 1.
e. 15. p. 100 101. .
Confejfion d'Ausbourg clairement con-
traire aux Calvinifl:c;s. Chicanerie indi-
gne de ceux qui l'expliquent en un fens
iguré, 1. l.i. c.j.p. î»;
€o-/ifefion orthoiloxe de l'Eglile Orien^
lale , de qu lie forte elle fut drciréc, r. g.
1, 1. c. 5>.p. I5t
Son authontc , 136. Sadecifion fur la-
ftanlfublTiant. 158. v. v 1.8. c. 14. & if
Cottnoijf.tnce confufe de la pref. r. cft un'
niot en l'air, & au cas qu'il fignific quel-
que chofej on ne peut y réduire le 10,
fiecle j 1. 1. 9. c. 4. p. i 5
Connoijfunce claire n'a efté fuppofée
par l'auteur de la perpétuité qu'à légard
de laprel'ence réelle, i.\.6. c. i.p. 41 f
Connoijfance dilHndle de la prefeiice
réelle de trois fortes : quel degré eft ne-
ceifaire pour la preuve de la Perpétuité,
r. 1. 6. Cl. p. 416
Que fouventil n'y a point de différen-
ce entre ne connoiftrepas qu'une choîe
ibit, & connoiftre qu'elle n'eft pas. 411.
Fauflfc fubtilitéde M.Claude fur ce fu-
jct, 1. 1. <f. c. 1. p. 4ii. 41^.
Termes de confejfer Ç^ ajfurer peuvent
eftre joints à des termes métaphoriques,
&: non à des termes proprement figura-
tifs, 1.1. 4. c.y.p. 3;i
CDiifentement- des (ocictez fchifmati-
ques avec l'Eglife Romaine marque de
l'Egiife&efferde la providence , i. 1,2.
p.iof
Canfentement des focietez d'Orient
avec l'Eglife Romaine fur l'Euchar. n'cfl:
^goiiuunc chofe incertaine , & qui puilic
ES MATIERES.
être difputée,& l'erreur qu'on commet en
le niant n'efl pas humaine, 1. 1. i.c.t,
p. 'Of
Canfentement de tous les peuples dans
la doftrine de la prefence réelle, fait voit
que c'cft l'impreifion naturelle de ces pa-
roles : Hoc efi corfus meutn , 1. 1, 10. C. I.
p. 727. & z. 1. i.c.ii.p.jo. 91
Canfentement de l'Eglife depuis mil'
ans dans la doftrine de la prefence réelle
& de la tranfTubftant. explique les ex-
prefTions des Pères, i. 1. 10. c. z. p. 75*
Détruit les clefs de figure & de vertu,
P-735 . j
Cenfenteynent de toutes les Eelifes de-
puis mil ans dans la doûrine de la pre-
fence réelle prouve que plufieurs eiprct-
iîons que les Miniftres oppofent à cette
doftrine n'y font point contraires^ 1. 1, lO'
c.4.p.-4i.
Cat:feqnences du fcns catholique Ce
trouvent dans les Pères. Confequence»
du fens calviniffe ne s'y trouvent point ,
i.l-î. c. S. &9
Deux confequences , l'une qui prouve
le fait, l'autre qui nailldufaUj r. g.l. !,■
p. 16
Que M. Claude ne nie que la confc-
quence qui prouve le fait,& non la con-
le.]uencc qui naift du fait, tbid.
Confequence du témoignage des GtecS^
d'aprefent à ceux dn.'tcmpsde Bcrengcr,
r. g. 1. 1, c,<). p. ijf. '«w, 15». Pi joj. (î^
fufv,
ConfeefUence neceffairc des faits avouez
pir M. Claude à la perpétuité de la foy
des focietez d'Otienr dans la prefence
réelle depuis Berenger , r, g, 1. i. c. 7.
p. 106.
ConffirJtfion des Pères à parler contre'
le fens commun félon les MiniftreSj 1..
1. «.p. él7
Contenir pris ridiculement pour décla-
rer par Aubertin, z, l.é.c, i«. p. é7î
Controverfe ■çîs.\xxzvX\ttc décifîve delà'
générale,!. 1. i.c. 11. p. 56
Confanttnofle prile par les Latins.
Leur cruauté. Haine des Grecs contre eux
marquée parNicetas , Baudouin élu Env
pcrcur,Grecs rciinis an P.ipe. Nul vertige
d'erreur de Berenger, reconnu parmi eux.
Force de cet atgument, i. l.j.c. i.p. 104
Cofhies &i Ethiopiens n'ont que la mê-
me créance. Pattiarche des Ethiopiens
nômé Abuna confirmé par le Patriarche
d'Alexandrie. Preuves négatives de leur
confentcment avec l'Eglife Romaine fut
TABLE DES
t'Euchar.i.l.f . c. 15. p. 402. Leur rclinion,
Corfs de J. C.veu & touché en quel
fcns , i.l.S.c. i+. p. 7 f 7.711.715.
Corfs de J. C. ne peut iignifieï l'cffi-
cace félon Beze , i. 1. 6. c. 6. p. 617
CoTfs de J. C. reconnu indivifible dans
l'Fuchariftie par tous les Pères, 1. 1, f.
sC.?.p,j43,
Curfi dj J. C.divifé fans divifiondans
l'Euchaiifti.- fclon tous les Pères, i.l. 7.
c. 5. p.4i,8.e:y«'T-
Corruption de la moraie des Calvi-
niftes , I. 1. 9.C.9. p.700,
Queflioii de la corruptibilité des my-
fteres rapportée par Zonarc &Nicecas.
Chon, prouve que les Grecs croient la
prefence réelle & la tranffubft. i. 1. 1.
c, 14. p. 191. Ç^fui-M.
Aubertin contredit mal à propos par
M. Claude fiir ce point, p. 155
Sophifmes de M. Claude fur la quef-
tion de la corruptibilité des mjftcres, ré-
futez,!. 1. 1. c, 14. p. 19e
Cour de Rome fort rabailTéc au dixic-
xre fiecle, i. 1. 9. c. 6. p. 678
Ottflume de donner l'Euchariftieaux
enfans , rejcttce par M. Claude comme
ane erreur au mime temps qu'il l'attri-
bue à l'ancienne Eglife , i. 1. 9. c, 10,
p. 710
«oufiume générale de cacher l'Eucha-
liftie aux payens , ;.1,7, c. 1. p. 4*S
Doit efbrc eftimée de tradition , ibid,
K'a point commencé au quatrième fic/-
(rie , p. 470
Marquée par plufîeurs auteurs du fé-
cond, 471. 471. &c.
Crexnce confufe à l'égard de l'Eucha-
riflie admile par M. Claude durant mille
ans. Supercheries dont il uic pour le jufti-
iîer de ce reproche. Retranche 4. lignes
d'un de fes paffages , 1. 1. fi. c. 5. p. 42-7
Croifjtde refoluc au Concile de Cler-
jnontjl'an i09f. Concours des peuples de
"l'Occident. Progrez de Godefroy , mé-
lange des deux Egliics pendant ces temps,
1. 1.1. CIO. p. 161, (^ ftiiv.
Cruautés réciproques des Grecs & des
Latins ,1.1.5 c. i, p. 107. ic>3
Crujtus Luthérien, fes qualitez bien infor-
mé des fentimens des Grecs. Reconnoift
qu'ils croyent la tranffubfl:.i.l.i.c.4. p. 116
Ses negotiations avec le Patriar-
che de Conftantinople , 1. 1. 4. c. 4.
Cjrille Lucar «u Lacaris difciple de Me-
MATIERES. Rii
Ictius. Sçavoit diverfcs langues , 1. 1. .\,
c. «.p.199
Lié d'amitié avec de Domini^. Franc
Calvinifte. p. 500. Dillimule fes fenti-
mens , i^id. Eli fait Patriarche d'Aleran-
tfarie, jci,
EmpoifonncTimothée Patriarche de
Conftantinople lelon Allât, ibid. Eft élu
Patriarche de Conft. tiid.
Public fes erreurs fans éclat , &fans y
contraindre perfonne , p. 501. Grecs s'é-
lèvent contre luy. Ses diverfes depofitioiis
& rétabliiremens, ihid.
Déclaration de Cyrille comte ceux qu'ii
appelle Papiftes, p. 505.
Gppofîcion qu'on luy a faite durant fa
vie & après fa mort , i. 1. 4. c. 6. Se 7. p,
310. g? /u/%1.
Cjrille ne fuivoit point les opinions de
l'Eglifc GrecquCj ittd. p. 509
Cjrille de JBeréc anatheniatife Cyrille
Lucar dans un Concile, i.l. 4.C.7. p. ;n.
Parthenius Patriarche condamne Cyril-
le Lucar , 1. 1. 4 c. 7. p. 514. v. 3. 1, c, if
D Aille' prétend qu'on ne peut déci-
der le différend fur l'Eucbarifte par
les pères, & que cea.'c qui ne trouvent pas
leurs paiTiges difficiles font bonne mine
à mauvais jeu, 1. 1. r. c. 5 . p. ^S
Didlé avoiie que l'invocation des SS.
eftoit eftablie au quatrième fieclc, 1. 1. 1.
c, 10. p. 84
La tiaitte d'aveugle, de fuperftitioR
p.88
Datllé avo'iie que la prière pour les
morts eftoit eftablie dans le fécond fiecle,
1. l.i. c. 9. p. 87
Civilité extraordinaire de Daillé envers
faint Ambroife, 1. 1. i.c. 10. p. 84
Vaille n'a pas fçu que les Catholiques
de France ne font pas obligez de jeunet
l'A vent, 1. 1. 7. c. 7. p. V 37
DAmafcene de Theflalonique, r. g. 1. 1.
c.i7f
Damien Goez. Son écrit , preuves ti-
rées de cet écrit pour la foy des Ethia-
piensfur l'Euchar. l.l. f.c. ij. p. 404.
D'innaruerus Luthérien impute la tranC*
fubft.auK Grecs comme une erreur, i.l.i.
c.4.p.i7.avoiiequeles Mofcovitescroienc
latranlTubft. 1. 1. f.c.i.p.î4*
Dangereux de vouloir nier un miracle
& une œuvre de Dieu, parce qu'on n'en
xoit peint la fin. Turcs Socinienspavens
LLlll ij
îiz T A B L E D E
détruits pat la ifligioii chreftienne , i
1,1, «. 4. p. 191
D^fe pris par Aubertin pour déclarer)
1. 1. ^.c. 10. p. (îyfi
Dialogue des deux natures. Sommaire
de ia dodririe de ce livre , & des erreurs
qu'il contient j i, 1. ii. p 3
Qiie Jean Scot en cA l'auteur, p. 4
Ditie ne doit pas aux liommcs l'éclair-
cilFement de toutes les diffieultez des my-
ftcres , 3.1. T. c. i.p. 4 ,
Différence entre le lens métaphorique &
lefensfiguratif.i. 1. 4, c.iJ.p.394.. &p.4ii
Différence des propofitions vraiment fi-
gurât ives^Sc des littérales,!. I.3. c.4.p.iéî
Différends perfonnels ne doivent eftre
mêlez avec ce qui regarde la caufe de l'E-
glife félon S. Àugullin, 1. 1 11. ci. p. 789
Dijjic»ltez, des Myfteres ne font dar,ge-
reules à coiilîJercr que pour les Calvinif-
tes , & non pour les Catholiques. Riifon
de cette diftetence fondée fur les difFercns
principes des uns & des autres, i.l. 11 c. 10.
p. 8 ;4
liiffculfez, des myfteres peuvent eftre
des marques de leur vérité en un certain
fens, & non généralement. Reproche in-
jufte de M. Claude fur ce fujet, i. 1. 11
c. 10. p. 836
Difficulté reconnue parles Pères dans la
chofe figuif éepar ces paroles,cirf;y efl mon
corps, 1. 1.4 c. i.p.jzy. Ç^ fecj. Sens de fi-
gure n'a aucune difficulté dans la chofe
mefme, iL-id. -ç, ^i^
Difficrt/tcz.'^m nailfent de ladodrinedes
Calvinilles lelon M. Claude , 3. 1. 7 c. 9.
p.fiS
Qiji'il ne fçauroit les faire voir dans les
Percs , iiid.
DiffimlteK. qui naiifent de la doilrine
catholique, exprimées quelquefois par les
pères, 3.I. 7.0,9. p. J19
Difyojition necelfaire pour communier
dignement, i.l. ii.p. 44.'Vices plus op-
pofcz à la réception de l'Euchariftie , 43
Pureté neceifaire pour recevoir l'Eu-
chariltie , ihid.
Impudence des Preftres déréglez qui
s'approchent de ce myftere, 46.
Qjj'il eft honorable de fc retirer des
foniiîions du facernoce par révérence en-
vers ce myftere. ibid,
De'uotion neceifaire pour communier.
Confideration pour exciter la dévotion &
l'amour, 47. Nece/Tité du defir & delà
faim de ce pain. ibid.
Difiinltitn neccflaire entre les images &
S MATIERES.
originaux n'empefche point l'union &
l'indentité, 5. 1. j. c. z.p. ij i
Reconnoilfance d'Aubertin fur ce point,
p. ifi
Une chofe peut eftre image d'elle-mê-
me c n un autre eftat , ibtd. & p, 1 y j
Dnerfitè d'opinion n'eft pas toujours
ridicule , 1. 1. z, c. 2. p. lyi
Do/lrine de la prefence réelle infepa-
rable de l'adoration intérieure, Faulfe dif-
tinéiion des Miniftres fui l'adoration ,
1,1. 10. c, j), p. 783
Dogmes renfermez dans l'opinion des
Calviniftes fur l'Euchar. aucune ne fe
trouve dans le fermon de faint Aguftin id
infantes, ;. 1. 2. c, 8. p. ni
Doiife feul oblige les Calviniftes de lê
rendre catholiques, 1. 1. 1. c. fi. p. fii
Doute fur l'Euchariftie marqué par les
anciens, fes qualitez félon les catholi \\Ki,
& félon lesproteftans, 1. 1. i.c. 13. p. 187
El prcllions oppofées au doute fur l'Eu-
chariftie, comme que c'eft le vraycorp»,
ufitées dans tous les lieux de l'Eglife, i.l.
8. c. 5. p. ySi. gfyâ/i'.
Expliquées ridiculement par les Calvi-
niftes, p. 585
Témérité crimin^elle de ceux qui hazar-
dent leuf falut fur cette explication, ibid^^
Réfutation t'u fens de vertu qu'ils y
appli.iuent , p. f i>7.
Ufage des mots de -vraj & àt-verité, de
■venruhlement dans les cxpreffions figu-
rées pour exclure ce doute j 1. 1, 8. c. c
p.ySS.
Doute que M. Claude atttibucà 3, de (es
ordres inconnu aux Pères. Deux (brt<s
de doutes fur la chofe mefme, ?■ furl'ex-
prÉ-flioUj f. 1. é.c,9.p, 46}.
Se diftinguent par la manière de ks
refoudre , 4S4.
Qiie les Pères n'ont point connu de
doute fur l'Euchar. fondé fur l'ignorance
du fens des paroles, ihid.
Diiference du doute connu par M.-
Claude , & de ccluy que les Pères ont
connu , p. 466
Doute furl'Euch.irrftie prévenu par les
auteurs des 8. & 5. fiecles, 1. 1. 8, c. 4.
p. 574. y7tf.
Doutes fur l'Euchariftie marquez par les
Pères determirjent leur foy , 2, 1, 4. C 1.
p. m
Ce ne font point des doutes d'expref-
fions ny de figurc,/^/:^.& ;3f.ny des douces
d'efficace, c. 3. p. 358. (^Jui-v.
Dtute d'efficace nettement exprimé
TABLE DES
par les Pères à l'égard des autres Sacre-
mens ^ 1. 1. 4. c. 5. p. 1 40
Ne peut eftrc fondé fur ce qu'on ne voit
point J. C. comme ctluy que les Percs
marquent a l'égard de l'Euchariftie , 3 41
Doute marqué par les Pères regarde la
realité j 1, 1, 4. c. -5. p. 34U n'elt nyun
doute de vertu ny de figure félon M.
Chude, p. Hf
Doute mai que par les Pères n'cft point
fondéfur rigaoraacedufens des ternies^
1.1, 4.'-". 5. p. 54^.
Doute fondé fur l'incompatibilité des
t:rmes,ftiifij corfs^ inconnu aux Percs,i.
1, 4.C.4. p.3f3^
' Doxte marque par Nicolas de Metho-
ne. Fauflis lumières de M.Claude fur ce
fujet, 2'. 1. 4. c.f.p. 56Î. &r.g. 1. 1. c. II.
p. 451, Et fur celuy de Theophilaclc, 565
Doutes qui nmjfent de Vob\c't extérieur
expliquez par faint Auguftin dans 1; fer-
mon iid infantes par les rapports de la
matière Euchariftique, 3. 1. 1. c. 9. p. 130
/n'i'au/f fe prend en trois fens qui ne
favorifent point les Calvinilles , i.l. 1,
C, j.p. 1)7. &1.I. f. C.15.P. 574
S. Dunflan , haine des Miniflres contre
ce Saint. Generollté avec laquelle il reprit
le Roy Edgar , blafmée par M. Claude
d'une manière peu Iionnefte , i, 1. 9. c. 9.
p. 703-
Calomnie de M, Claude contre ce
Saint, p. 707
ED G A R Roy d'Angleterre. Combien
fes déreglemens ont duré. Repris par
S. Dunftan, i.l. 9. c. 9. p. 705. 704.
Combien il fied inal 2\ix Minillres de
rrouver à redire à fa pénitence, ibid.
Efficace de l'Euchariftie ne fuit point
du fens de figure, eft un fens à part.z.
1.4. c. 3. p. 358
Efficace de l'Euchariftie reconnue par
les Pcres, exclut le fens de figure, s'enfuit
du fens des Pcres , p. 478
Efficace de l'Euchariftie , 1. 1. f . c. i,
p. 481. {^/«'•"■'.
f Efficace rcconntrè' pat les Pères, 4S1,
Se tire de la prefence réelle , fi>id. & c. z.
P.4S7. &491
Efficace de la chair de J. C. n'elt que
méritoire félon les Miniftrcs, %, 1. j. c.i.
P.4S7
Efficace phyûquc de l'Euchariftie félon
MATIERES. 8î3
faint Cyrille par l'aveu d'Aubertin , 1,
l.).C.2.p. 4Î9
Efficace chimérique attribuée par 1«
Miniftres aux Sicremens de la loy nou-
velle au dcflus de cenx de rancienne,qui
ne dépend que d'un tour d'imagination
i. 1. 6. c.io. p. 670
Elfric & l'Auteur des Sermons An-
glois luivent les expreflions de Bertram.
Peuvent eftre expliquez en un bon fens.i,
1. u. p. 40
Miracles rapportez par cet auteur , p.4t
Confequence de ces miracles ^ ikid.
Homélies atuibuées à S.Eloj fur l'Eu-
chanllie , 1. 1. 8.c.4.p. 5-77
Encristites réfutez par Clément d'Ale-
xandrie, 3.1.4. c. j. p. 250
Eitèe Evefque de Paris réfute les Grecs
au neuvième fieclefans parler de la pre-
fence réelle, 1. 1. B.c. r.p. jjy
Enigmes en quel fens pris par les Pères,
1.1. 3. c. 7. p. 194.
Epiphane Diacre , ce qu'il dit de l'Eu-
chariftie dans le lecond Concile de Ni-
cée, 1. 1. 7.C. j. p. joo.
Euthymeme du Cardinal du Perron pri#
pour un lyliogilme par Aubertin& trait-
té ridijulement de monftrueux 3. 1. x,
c. y.p. 88
Ernuphe Evefque dans l'Angleterre
contre les fuites philofophiques, 1. 1. i®.
c.8.p.775
Erreurs ne font pas toujours reprochées
aux auteurs par les anciens. Prouvé par
divers exemples , 1. 1. ii- p. iS
Epïfcopat non attaché à lige dans le
premier fiecle , i.^. i. c. S.p. 7S .
Ecriture félon quelques Pères en quel
fens corps de J.C. 1. 1. 4. c. 9. p. 408. 409
S. Efprtt habite en nous par fa fubftan-
cemcme, & non pas par fa feule opéra-
tion, z.l. J-C.4. p. J08
Fjfrit gênerai des Pères à l'égard des
difficulté! des myfteres, 3. 1. 7.G. S.p. jie
Appliqué par eux à l'Eiichar. thid.
Ejfence du myftere diftinguéedes con-
fequences, i. 1. 6. c. i . p. 417
£/? n'cft jamais pris pour ejlre en effica-
ce , 1. 1. J.C. I. p. 479
Que cette exprefllon efi appelle ǣ efl
exclut le fens de figure &non le fens de
methaphoî- , 1. 1. 4. c. 14. p.7i
Ejlre en figure & eftre en efficace font
deux fens differens, ibid. 480
£/ ne fig.iifie jamais c'eft-à-dire ^ i.l. <;.
c. I. i.p.î70. pourquoy l'on dit qu'il y a un
^explicatif, ibid.
LLlll iij
8z4 TABLE DES
Eitchariflie compofée de deux parties
qui produifent ttois regards diffcrcns &
trois genres d'expreflioiis , 1. 1. 8. c. %,
T.xcite un trouble félon S. Chryfofto-
me. Ce qui ne convient point à la doc-
trine des Miniftrcs , 1. 1. 4. c. 6. p. 571
Euchariflie , moyen ordinaire de la
vivification des âmes & des corps , 1, 1. f,,
c. 4, p. yro, eft neceiiaire pour cet effet ,
cncjuel fcns , yii
Euchttr. ne (croit point prcforablc aux
Sacremens de l'ancienne Loy comme
corps de J, C. fî elle n'elloit elle-même
que figure,!. I. C.c. 9. p. 664
Euhar. ridiculement préférée aux
veftemens de J. C. fi elle n'cft que figure,
1. 1. 6. c. 13. p. 706. 8c de mefme au fc-
pulchre, p. 708
Eftchar. comparée avec le facrifice de
Jvielchifcdec, 3. 1. 4. c. 4, p. iii
E-uefyues dans toutes les locietez fciiif-
matiques, t.l. i.c.y.p. 73.
E-vefyuesopl\ reforment les Monaftcres
au 10. ficelé avec grande feveritc , i, 1. 9,
C.9. p. 693
Eiiidcnce égale de part & d'autre doit
fulpendre les efprits , 1, 1. i. c. 6. p.
E-uidence eftant au moins neceffkire
pour condamner l'Eglife Catholique ,
x^uiconque doute ne la peut condamner,
1.1. r.c. 6. p. 61
E-vidence de ces paroles , Cecj eji mtn
orfs, reconnue pat les Proteftans &par
Luther, i.l. lo.c.é. p. 754
E-vide>ice fondée furia mémoire, eft
foible & n'exempte pas de doute. Que
les Calyiniftes ne peuvent prétendre
avo;r d'autre évidence que celle-là, 1. 1. 11.
e. 1 1 . p . S5 5
Ev/deme qui naift de l'application
ptefentc aux preuves plus vive & plus
convainquante que celle delà mémoire.
Celle des Catholiques efl: de ce genre à
•«ufe de l'article de l'Egli/b, i.l. u. c, u.
p.'n-
Eulegie eft la chair mîme de J.C.
■lèlon S.Cyrilk j 1. 1. f c. 7 . p. fi7
zutichiens leurs difFcrens fcntimens &
leur* diverfesexpreffions 3.1. f. c.7.p.iSt
En quel fcns ils difoient que la nature
humaine eftoit abforbée , ikid. p. 283,
Theodoretne taifonne bien qu'en fuppo-
fant qu'il conrenoit avec les Eutichicns
de la traiifiubfl:. 3. 1. f . c. 7. p. iS4.
tHtichiens n'ont janaais prétendu que
MATIERES.
J. C. n'cuft plus de corps , & qu'il fuft
purement incorporel. Pallagcs pour 5c
contre, 3.I. j c. n. p. 513. Réfutation
des objcdions de M Clau4c fur ce point.
5.1, f.c. u, p. 354. &c. & r. g.l. 1. c. i;.
p. 239. &lél
EHtjchiens réfutez par l'Euchai^ftie.
Suppolition téméraire de M. Claude fur
ce point. 5. 1. î. c. rz. p. 359
Eutychius ■vindicAtus compofé par
EKcUenfis, 1. témoignages conCdera-
bles de la foy des Copthes tirez de ce
Livre, r. g. 1. 1. c. 13. p. 215
YMthjmtus Zigabenus fournit des preu-
ves négatives & polirives. Beaux paffa-
ges tirez de fbn Commentaire fur Saint
Mathieu. Reflexions liir ces palTages, i.l,
Z.c. 11. p. 179. (^ fuiv,
ïXitToeit des fix premiers ficelés ne peut
cftre niellé avec la méthode de prefcrip-
tion , i.l. II. c. Il, p. S49
s.xfrelJtons évivoqucs fe doivent dé-
terminer par le coiifent»mcnt confiant
de tous les fidclles , i . 1, 7. c. r. p. 471
txpre0o>is abregéts & leur ufage dans
la matière de l'Euchariftie , i.l.7,c, 7,
p. 555
txfrejftons qui naiffent de la ntture
même du myftere , autres que celles qui
naiffent des diljuxs , 1. 1. 8. c, 1. p. f j^,
Ç^ fuit],
\xfrejfions oppofées au doute qui naift
fur l'Euchariftie , quelles elles doivent
eflte, 1. 1. 8, Cl. p.6 t9
ixfrelfions abrégées, i, 1, S,c, i, p. ftfa
zxprejjîons dont les Miniftres abufenr,
employées par des Auteurs certainement
Catholiques, r. 1. to.c. 4. p. 741, On n'en
doit pas régler le fens par le langage qui
s'eft introduit depuis quelques temps,
tbid.
Exfrejfions qui marquent la prefence
réelle , font toutes ordinaires, & feroient
toutes extraordinaires eftantprifes en un
fens métaphorique , 1. 1, 7. c. 5. p. 798
ixi'relfions figuratives,alleguées par les
Miniftres, prouvent tout le contraire de
ce qu'ils prétendent, x. l.i, c. 15. p. 101,
I. Exemple. Je fuis une vigne.: Je fuis
une porte, 105
î. Les fept Vaches grafle* font 7. an-
nées. il>;d. lOf
^.Tu es caput aureum, p. 106.
4. Semenefiiicrbum Dei. lorf.
txemfUs tirez des expreffiont ficra-
mentales , prouvent tout le contraire de
es que prétendent les Miniilrcs , iq%
TABLE DES MATIERES.
». La Circoncilion eft l'alliance, p. i Jo
1 . £y? enimfhaje, id efl tranfitus Domi-
ni. II ;
3. it intmlnt Rex glor'iA. , p, iitf
4. La pierreeftoitChrift, 117
5 . Ce Calice eft le Nouveau Tcftament
p. 118
Confequence de tous ces exemples,
p. 119^
ixfrejfions literales , ont quantité de
fuites réelles , non les métaphoriques ,
i.l.J.c.^.p.^oj
ixfrejftons Euchariftiques différente»
de celles qui marquent les autres fignes
d'inftitution ou les pauvres, i. 1. 6, c, 16.
p. 41 &c.
B*^rf^9w touchant les pauvres, 1. 1, tf
c. té. p. 741
Les différences de celles qu'on employé
fijrl'Euchariftie, ibid, p. 74J
Expressions Eucharistiquis
reunies, z. 1.7.c. i.p. 7fi. &c.
Euch, corps & fang de J. C. x. 1. 7. c. r.
p. 7fi
Pères n'ont repris perfonne de croire
qu'elle fuft le corps de J. C. ibid. 7^1
Ils ont confideré ces paroles comme
claires , félon l'exprcffion, comme diffi-
eiles quant à la chofe lîgniHée , ttid.
Ils ont exigé la conferfion, 7f ;.
Cette foy produit naturellement des
doutes, ibid,
Expreflîons naturelles de ce ddute. 7J4
Naift de la différence du rapport des
fcns & de celuy de la foy. 75'4
Huit moyens de combattre ce doute,
pratiquez par lesPcres, qui prouvent la
réalité. p.7f4.7fî.
Noms de l'Euch. naiffant de la realite.
Pain changé fuite de l'Euchariftie.
p.7f8
Changement marqué comme réel. 758
Corps de J. C. pris pour le corps na-
turel. 7f9
Changement, fuite de cette parole,
Cecj efl mon corps 7 j 9
Comparaifons approchantes de la
trinfubft. emp'oyéi.'spnr les Pères. 760
On s'eft adreffé à Dieu pour l'opcrer.
On a dû s'exprimer par les termes de
faire le pain le corps de J. C thid
Corps de J. C. propofé gifant. 75^1
Il eft fur l'autel. -'61.
Sanftifîe l'autel & lesvafes. 7<;t
Le corps de J. C, eft fui 1» leric. 671
11 eft entre les mains des hommes.
7«i
II eft touché, j6i
Nos mains reçoivent le Roy. 7^;
On doit éviter qu'il ne tombe , & re-
garder cela coinine un grand malheur.
7«3
Il eft prefent. 764,
Celuy qui eft à la droite du Père eft
entre nos mains. 71S4
Nous en approchons, nous 7 partici-
pons , nous le recevons , nous le pre-
nons. 7^4,
Nous le mangeons abfolument & fanf
énigme. 7^ f
Nous le mangeons d'une manière qui
ne peut convenir à la divinité, ysy
Le corps de J. Centre dans nous par-
vôyed'r. liment, ji^
On boit le fang de J.C, fans aucua
doute j(-6
J.C. nous donne véritablement foif
corps à manger &{bn fang à boire. ■j6é
On difpenfede l'autel la viûime fain-
te. ibid.
JC. nous dreffe une table de fon corps
& de fon fang. ihid.
Loy nouvelle différente de l'ancienne ,
parce qu'on commande d'y boire du'
fang. 767
3 . C. a bû luy- même fon fàng. ibid.
J. C. s'eft porté luy-mêmc en fes
mains, ibid,
J-. C. n'eft pas dans ce myftere fous f*
propre forme, ibid.
On prend J. C. par la bouche, y 6%
Les méchans le reçoivent, ibid.
Adoration eiterieuie commune aux
bons & aux méchans. 770
Les méchans outragent direiSement'
le corps de J. C ttid.
Il entre dans nous, s'introduit dans
nous. 771
Eft méfié avec nous. ibid.
Comparaifons naturelles pour erprimcf
ce mélange d'un levain, d'une cire, 773.
J. C, eft dans nous par fa propre
chair. 775.
Nous luy fommes unis corporelle-
ment. ibid.
Il eft dans nos entrailles, ibid.
Nous prenons le même pain dont noBS
vivrons éternellemenc. itid.
Nous portons J. C. en nos corps, ibid,
J . C. eflant en nous y produit de grands
ffcts.774
jCeux qui f« fèpaxent de l'Eue IwuiiUc
8i6 TABLE DES
font feparcz de la vie. 774
Corps de J. C. indivifibk. jy.f
Unit Icschreftiens. 77(S'
Nous n'avons qu'un pain & un calice,
tiid. J. C. cli effet, 777.
Picftres foinient le corps de J. G. tiiJ,
Nos myftercs font terribles, /iid.
11 f,-.ut s'approcher comme du corps du
Roy en portured'adorntion.777.& 778
Il hîut en le recevant reconnoiftre Ion
indignité, 778
Le corps de J. C. dans l'Euchar. attire
les Anges, qui y font prefens, 779
On les y voit. ttid.
Prefencedc J. C. fur l'autel , favOraKIe
pour obtenir des grâces pour les vivans
& les morts. 780
Honorable aux M-irtyrs d'eftre nom-
mez enprefence du corps de J. C. 7S i
Seize comparaifons de l'Euchariftie
avec diverfes cliofcs , dans le(l]uelles les
Pères ont dit ce qu'il falloit dire félon
la doiitrinc de la prcfencc réelle. 781
Il eft jufte félon cette do^rine, d'ex-
pliquer de l'Euchariftie le 6. chap. de
S. Jean. 78e. de parler à l'Eucharirtic
comme vivante, riid.
Il efl jurte d'exhorter à la recevoir
comme le corps de J. C. d'en parler com-
me du corps de J. C. &c. lèid,
Confequences naturelles de cet amas
de partages qui donnent l'idée de lapre-
fcncc réelle, qu'il prouve comme un chi-
fre dechifré.j,, I.7. c. t. p. 750. &c.
FAIT fuppofé dans la perpétuité, que
coûtes les communions fchifmatiques
le font trouvées dans l'onzième /îecle ,
perfuadées de li dodrine de la prcfence
réelle, non contcfté par M, Claude, r. g,
l.i. c. I. p.iL.& C.2. p, 88
Faiu enfermez dans l'aveu prcfent fait
par M. Claude , que les Grecs & les La-
tins ont connu mutuellement leur do-
ctrine, r.g. 1. 1. C.6. p.So.c. S. p. 107 Se
fuiv.
faits a-youez par M. Claude j r. g, i. i ,
e. f. p. 69 .
F»>ts humains, de quelle forte de certi-
ie peuvent eftre connus, 3. 1, 7. c. i.
p.4S5
lalfficatian de deux endroits du Livre
de la perpétuité par M. Claude , 1. 1. il
c. 10. p. 819
- ^'vin autre palFagede la PerpetHitc^t.g
MATIERES.
l.t.c. !<;. p.f57
FiilJJf cation d'un partage de Jeremie
deConllantinoplepar M. Claude, prou^
vée,r. g.l.i. c. Il, p.463 ^
Faljijication d'un partage de S.Chry-
foftorne, injullement reprochée à l'au-
teur de la Perpétuité, 1. 1, 7.C. 4. p. S19
Fierté, caradere d'." u'jcrtin & de M.
Claude^ 1. 1. 1. C. z.p. 104.
Figure nue attribuée aux Calviniftes par
Parthenius & pourquoy^ 1. 1.4. c. 7.p, 31^
Figure} fe dilccrnent par le fens com-
mun des exprertîons fimples,& fe meflenc
fans confu lion ,1.1.7. c. 3.P.490
Figure niée formellement de l'Euchar,
par divers auteurs , 1. 1. 7. c. f . p. fot
Sens de figure notoirement obfcur , 2,
1. I. c. 17. p. 154
Que J. C, ne l'auroit pu propofer Çins
exphc.ition , 13*
Oçie les Evangeliftes l'auroient expli-
qué, ibid. Exemples de ces explications j
757
Fitux exemples alléguez par les Mi-
niftres, des métaphores non expliquées j
tbid.
Sens de figure tres-difFercnt àa fimplcs
métaphores , z. I. 4. c. 8. p. 39?
Figure, image J vérité pour la Loy,
l'Eglife & le ciel, i. 1. 6, c. 10, p. 67^
Mots de ^«rf & de fignes. Suites de
laprefence réelle, 3. 1. i.c. j.p.14
Mots de figures &c, employez par des
Pères qui marquent en même temps
qu'ils croyent le corps de J. C, joint à. Iz
figure , 5. l.r. c. 4. p. 51
Figure Se lacrement du corps de J. C.
exprellions indéterminées, 3.I. z.c. i. p.
<Î9. Comment il les faut déterminer, p. 70
Ftaviut Luthérien, prouve que la con-
fertion de Cyrille ne contient point la
foy de l'Eglife Greque. 1. 1. 1. c. 4. p. 117
fléchir les genoux , c'eft adorer, quand
cette cérémonie cft jointe à une rcvcren-
ce intérieure, i. 1. 7. c.9.p. Si9
Florus fur l'Euchar, 1. 1, 8. c. 4. p, jyj
& Sl\
PartTage de cet auteur dont M, Claude
abufc. 1. 1. S. c. 7.p. J9J'
Pourquoy il ne demande le chatige-
mcnn du pain au corps de J. C, que pour
les fidellcs, ttid. p. 5-90
Ftndement des métaphores doit eftrC
connu. Application de ce principe contre
la yerftt feparée, z. 1. tf. c, i.p. J9+
Forank
TABLE DES
/■«>•»?? œconomique de M. Claude fans
âuthoiité & fans preuves , r. g. 1. 1, c. 8.
p. iii
torbefitis auteur de tinfiruBion hiflo-
rjqiie , dit qu'il n'eft pas fcur d'imiter les
Pères fur la prière pour les morts , i . 1. 1,
c. 9. p. Si
Ferbejlus auteur des confidcrations ba-
cifîqi/es , dit que les Grecs tiennent la
tranfiubltantiarionj 1. 1. i.c, 4. p. 117
Aigrement & injuftement repris par
M. CJaude. i.l. 4.C. 4. p. 186
Foj. Bçnne foy neccfl'aire à tous les
r^ifonnemciis. i, I.7.C. f.p.4?^
G^i/vf/Archeveique de î'hiladelphie
pour la tranliubftantiation & l'ado-
ratiùn , I. 1. 10. c. 8. p. 776
Gujanttes Eutychienscrovoient lapre-
fence réelle, i. 1. j.c. S p. 340
Cennadtus Scholatius fur la tranfTub-
ftatiation , 1. 1. 4. c. 5. p. 17Î
Gergan allégué par M.Claude à contre-
fens, r. g. l.i. c. 14. p. zij
Gerlacl^ Luthérien , entremetteur des
Luthériens envers le Patriarche de Con-
ftantinople , 1. 1. 4. c. 4. p. 183
Marque dans une Lettre que les Ar-
meniins croyent la cranflubftantiation ,
*.l.f. c. 7,p. 579.
Germain Patriarche de Conftantino-
ple au 7. fîecle. Il n'eft pas certain que la
Théorie des myftcres foit de luy. R.aifons
de ce doute, i, 1. 7. c. 3. p. 484
Témoignage de cet auteur fur l'Euchi-
xiftie,p. 48f
Grâce, peut eftre prile pour la grâce
eflentielle, 5. 1. j.c.4.p, i6f
Grandeurs de deux (orte de mefmeque
la baflelfe. Les Apoftres grands d« la
grandeur divine ; petits par le défaut de
grandeur humaine. i.l.4.c.(;.p.}7î.
Grecs attachez à l'ancienne difcipline,
leur aufleritc , leur 4. carefme, i.l.i.
C. ?. p, IC9
Grecs anachez à 1 invocation des Saints
félon ChytrcuSj 1. 1. i.c.;.p. iio
Grecs en Italie tolérez dans leurs coû-
tâmes, 1, 1. i, c. f. p. 1 14
Grecs modérez & emportez, i. 1. 1.
<. lo.p 169
Criff/ quiont mKquéau 11. fiéclc leur
différend avec l'Eglife Romaine , n'ont
point parlé de \n prc/cnce réelle ni de la
MATIERES. 23y
tranffubftantiation, i.l.z,.c.ii.p.i7i& 174
Grecs attachez a leur religion , ne peu •
■vent eftre foupçonnez d'avoir dilTimulé
par complaifance l'erreur des Latins fur
l'Euchariftie , 1. 1. ;. c. i, p. icc
Grecs Ipciîlatcurs de l'adoration de
l'Euchariftie, ne s'en font pouit fcanda-
lifez, i.l. 5.C. i.p. 169.
Reunis a l'Eglife Romaine fans inftiu-
dion furl'Euch. 1. 1. 5.C. i. p.io;)
Adorent l'Euchariftie a Florence , i. 1.
4. p. 171
Ecrits des Grecs & des Latins du i;.
ficelé, 1. 1, 5. c. 4. p. 116.
Eftat de l'Eglife Greque au 1 4. ficde ^
i.l.;. c. 7.p.i54. Nui différend lur la
■ tranifubftan iation , liid.
Grecs ont peu parlé des fuites phi lofo-
phiques de l'Euch. quelques exemples
quien reftent , 1. 1. 10. c. 8. p. 770
Gr-ecs félon M. Claude , retiennent le
fens littéral de ces paroles : Cecj efl mon
corps, r. g. 1. I. c. 8. p. iic. Vont aux
Eglifcs des Catholiques quand ils n'ea
• nt point, r.g. l.l. c. 11. p. 210. reçoi-
vent les Catholiques à la communion,;.
1. 8.C. 9.p. «48
Grégoire VU. n'a point connu d'autres
différences entre les Grecs & les Latins ,
que la procelfiôdu S.Efprit,i.l.î.c.8 p.147
Grégoire IX. traitte avec les Grecs pour
la réconciliation des Eglifes. Leur décla-
re par occafion la doélrine delà tranf-
fubftantiation. Nulle oppofition de la
part des Grecs dans ce traitté. Diffcrcns
réduits à 1. Il n'eft point parlé de la
tranflubftantiation , i. 1. 3 . c. f . p. 211
Greotius avoué que les Grecs croyent la
tranflubftantiation , i. 1 z, c. 4. p. ii5
H
Hilton Hiflorien, Prince d'Armé-
nie,fe fait Religieux de Pténiontréj
1. l.f. c. 6. p. ^6<)
Hamond proteftant Anglois , réfute
Blondcl fur rEpifcop.it par rimpollibilité
du changement , 1. 1. i. c. S. p. 76.
Herbert a augmenté le récit de fou
voyage en la i. édition , ce qui a efté
caufe d'une mépnfe. Erreur dp ce Voya-
geur fur les Arméniens. 1. 1. y. c. 8. p. 580
Hil.trion Religieux Grec , enleigne la
prefence réelle & la tranfubftantiation ,
, I.I.4.C. î.p.199
HiLtrion Cicada de l'Ifle de Chypre,
fa profellîon de foy. r. g. 1. c. li. p. 101
M M m m m
8z8
TABLE DES
Son Ecrit pour l'échirciircment du Sy-
noui; de Chypre. p,i07
']-lincmar condamne ceux qui donnoient
atteinte en lecret à la doftrine de la pre-
fence ici.-lle. i.l.8.c.4.p.s^é9
Il parle de l'Eucliar. comme eftant du
pain, 1. 1, 8.C. 4. p. 569
Autres Auteurs qui ont fait le même ,
ibid.
Hijforiefis du lO fiecle , ne font aucu-
ne mention d'erreur contre l'Euchariftie,
ï.l.9.c.<^.p. (Î85. nidezelepaniculier a
en fourenir la foy, ibid.
Hoc. CCS paroles ; Hoc tft corpus meum ,
propofées fans explication comme objet
de la foy par dix Auteurs , z. 1. 5. c. <).
p. 3ii.&:c.
Q^'il s'enfuit de là qu'elles ont eftc en-
tendues littéralement parles Petes, p-3tf
Hocfucite in me.tm commemorationem ;
que ces paroles ne (ont point explicatives,
i. 1. I. c. ly.p. iio. Nul Père ne les a pri-
fcs pour explicatives, ibtd. ni les premiers
Calvinift.'s. Omifes par S. Mathieu &
S, MarCj ib'd.
Hommes capables de toutes fortes d'ab-
furdicez. Qii'il ne faut pas les nier lors
qu'elles font attirftées , 1. 1. 1, c. 6. p. i ■ 7
Horreurs naturelles naiflTent d'imagi-
nation. 11 faut peu de choies pour les didî-
per, 1.1.4. c. 6. p. J7f
Ho//» /«/»» approuve des aillions toutes
contraires , 1. 1. 1. c. f. p. f i
Hu^o Eteiianus, écrit contre les Grecs^
ne leur fait aucun reproche fur l'Eutha-
rilHe , i.I.i.c.ii. p.173
i/«/«éf7-/^ impute Ibuvent aux Grecs des
confequences non avouées, i. I. i.c.tf.
p. 154
Dif^Tcns qu'il a eu avec Cerularius &
NicetaSj 1. 1. 1. c. f.& 6. prouvent l'u-
nion des Eglifes fur l'Euchariftie- , p. ij7
Traduction d'un partage de Humbert
juftifiée , r. g. 1. 1. c. 10. p. 4i-i
Hujfites cnvoyent en Orient pour s'in-
former s'il n'y avoi: point de Chrcftiens
à qui ils fe puifeut joindre. Les Luthé-
riens en font de même. 1. 1. 1. c. 7. p. 141
Hjferbitte dans un pa(raj;e de Tertullien
félon le Cardinal du Perron. Autres
exemples de la même figure j j, l.i. c. 3
P.78'
I
J^cohites. Leurs Eglifes, leur Patriar-
che, I. 1. i.cvp.n?
Preuves ncc;uivcs& pofitivesdc la foy
des jacofaitjsfur la prcfence réelle &: la
MATIERES.
tranlfubft, i,l. f. c, 11, p. 399. MilfionS
qui leur ont efté envoyées , tbid. p. 356.
C'onfe/fion de foy qui ne park point de
rEuchafiftie,/^/»^. 597 Témoignages po-
fïtifsds leur créance par leurs Livres, 398.
'Extrait d'un Livre Jacobite. 3. 1. 8. p 767
Iconocl.iflei alfemblez à Conftantino-
ple. Leurs fentimens fur la realité , 1.1.7.
c.7.p-fi9
Jean Bafile Boibonda Defpote de Mol-
davie,r.g.l.i.c.i,p. H4
Jeun Cantacuzene , d'Empereur Reli-
gieux de S. Bafile. Sa conférence avec
Paul Patriarche latin. Ses erreurs , 1. 1. 5^
c- 7. p. 13 y
S.Jean de Damas rejette par les Mî-
niftres. Beaux palfiges de cec Auteur fur
l'Euchar. mal éludez par Aubertin, 1. 1. 7,
C.4. p. 494. ^ /«/-u. Traduftion jufti-
fiée, r. g. 1.»., p. 411.
Jean le Fevre marque que les Mofco-
vites croyent la tranlliibftantiation^i.l ;.
Cl. p. 544
Jean Patriarche d' Antioche reftabli pat
les Latins, i. 1. 1. c. 10. p. 165
Jean Phurne Prieur de Montagne , fon
témoignage pour la prefence réelle, 1 . Li
c. II. p. 171
Jean Plufiadene pour la tranflubft.i.l. 4,.
c. 4. p. 177
fean de Paris. Son hiftoire alléguée
mal à propos. Divcrfcs fnlfifications que
M. Claude a faites dans ce qu'il rapporte
de fon écrit , 3. I.7.C.I. p. 45?- n'a
jamais nié la prefence réelle j 461. Son
erreur confiftoit dans unefubcilité deme-
taphyfiquc, 461. Pourquoy il ne fut pas
condamné à Paris & a Rome, ihtd. Com-
bien il cft ridicule de prétendre que fi les
Grecs ont pu ignorer l'Hiftoire de Jean
de Paris , ils ont bien pu ignorer la créan-
ce des Latins. 4(^4.
^ean Scot n'a jamais cfté Abbé d'Ete-
lige Difierentde Jean Saxon, i. l.ii.p.io
Jean Scot n'a point cfté difciple de
Bede , prouvé par l'âge de- tous les deux
Qu'il n'eft point compagnon d'Akuin,
m fondateur de l'Univerfité de Paris,/W.
Hiftoire de fon martyre peu alfuré, il.
qu'il n'a point efté mis au rang des Mar-
tyrs parles Papes , if.
Jean Scot auteur des Dialogues des
natures, 1. 1. 11. p. 5. & du Livre attribué à
li'-rtram. Preuvesde ce fentinient, i. l.u.
p. S. 9. lo, &c.
Tout ce qui e(V dit dans les anciens du
Livre de Scot fe trouve dans le Livre d c
TABLE DES
èertram, remarques particulières , 9,
10. II.
Conformité du génie de Bertram & de
Jean Scot. Auteurs qui ont parlé de Ber-
tram , If.
Jcitn Vcccus grand deffenfcur des
Grecs contre les Latins, t. l.vcj, p. 119.
Se convertit dans la prifon, ibid. Eftfait
patriarche de Conftmtinople , p. 111,
Approuve la tranflub.dans fes Lettres Sy-
nodales. Eft cluiré du Patriarchat par
Andronic, 1.1.3. '^- 4- P- 1^ f- Relégué au
Chafteau de S. George. Y meurt , ibid,
p. iî6. Fait fon Ttitamcnt, & déclare
qu'il meurt pour la procelîîon duS.Elprit
parle Fils^ ibid, & r, g.l. i.c. 11. p. 19$
Jeremie Patriarche de Conftjntinople.
Sa ncgotiation avec ies Luthériens. Sa
rcponfe au 10. article de leur confcilîon,
,1.1. 4. c. 4. p i8f
Explicition d'un partage de cette ré-
-ponfe, p. z8f. Divers pallages pour la
prefence réelle & latranilubUantiation ,
p, 190. 191. 193.
Confeflion de Jcremic traittée de Cal-
vinifle par Aubertin & par M. Claude,
1.1. t.c. 4. p. m. Traduiîlion juftifiécj
r. g. p. 478.
j^eitnes avant la réception de l'Eucha-
rifte, r. 1. it. p. 48
/. C. a. eu des delFeins de mifericorde
& de juftice en prononçant ces paroles ,
Cfy efl mon corfs , (ans autre éclair-
ciiTement, Que ce font les Calviniftes qui
éprouvent des effets de fa juftice , 1. 1. 1.
c. 17.. p. 145
/,'C. a participé à l'Euchariftie fclon
S. Chryfoftome, i.l. 4.C, «.p. S7r-
S. Ignace. Auteurs qui ont cité fes
Lettres, i.l. i. c.8.p.74.
Ignorance monftrueufe fuppofée par M.
Claude à l'égard de l'Euchariftie dans
l'Eglife Gr-cque & Latine , i.l.i. c. f.
p. \i(i.
^»orrf»f<; mutuelle des fentimens des
uns & des autres entre les Grecs & les La-
tins , eft toujours le dernier remède de
M. Claule, r. g.l. I.c. f.p.yz.
Image. Que cette propofîtion 5 l'image
tîefl pas la chofe dont elle efi l'image , ne
iî:;niffe pas qu'elle n'en contient pas la
verru, 1.1. 7. c. f. p. j-05. Réfutation des
e;:é'^les alléguez par M. Claude pour fou-
tenir ce fens chimérique, i.l.7.c.7.p. fi9
Termes à'image rejette par Charle-
magne furie fujec de l'Euchariftie, i.L^ "^
c. 4. p. r7
MATIERES. 819
Ce que c'eft que d'ofFrir en image fc-
lon S. Ambroife, i.l. (î.c. 10. p. 674.
Impofibiluc du changement doit déter-
miner tous ceux qui ne font pas Capables
d'exammer ces matières par voyc de dif-
culTion, 1. 1. i.c. f . p. 5j
Imfojfdilitè du changement fur l'Eu-
chanllie, prouvée en abrégé dans tous les
fîecles j I. 1. 10. c. 16. p. -•'Ï6
Preuve tirée de '\!imfo(fth:li.tè du chan-
gement doit déterminer les Calviniftes
qui doutent de la folidité des preuves de
fait,i.l.i.c.f. p. 4f, & qu'il y en aplu-
fieurs entr'eux de ce genre , ibid.
Impojfthle que la vérité du myfterc de
l'Euchar. ne (oit connue que d'une focietc
d'heretiques. Cela fuppolc toute erreur
dont on convainc les Calviniftes, les con-
vainc au/îî d'erreur fur l'Euchar. i. 1. 7
c. -i.p. 840. confequence de cette preuve,
p. 844-
Imfrefjtans fcmblables s'expliquent fou-
vent tres-difFeremment, ; 1. i.c. 1. p. 75
Imprudence (îgnalée de M. Claude dans
ce qu'il ofe avancer que l'on a refufé pri-
vilège au I. Volume de la Perpétuité ,
dans un temps où il fçavoit que le livre
avoit efté leu & approuvé parplufieurs
Evefques, l.l. 11. p. 841.
Impudence des hommes a des bornes ,
& n'eftpascapablede toutjT. g. 1. 1. c. 17.
p. 181
Pourquov les hommes ne £e portent
pas à certains excez d'impudence, i.l. S.
C.9. p. f-ii.
Incompatibilité apparente n'empefche
pas de concevoir l'union des termes lors
qu'on s'appuye fur li révélation de Dieu,
I. 1. é.c. I. p. 418
Incomprehenjibilité d'opinion, & incom-
preheniibilité d'exprefilons que le dogme
de la prefence réelle eft incomprchenfïble
en la première manière, & que les ei-
prellions des Calviniftes le lont en la
1. ce qui eft un renverfement de ce que
les Pères nous ont dit de l'Euchar. 1.1.8.
c.6.p. f9?
Incorporation avec le corps de J. C,
comment doit cftre conçue (clon Calvin,
plufîeurs fortes d'incorporation z. l.i c.9.
p. 78. Celle qui eft un effet de l'Eucha.
riftic, confifte félon M. Cluide en de
nouveaux 'ayons de lumière & une abon-
d.- ntc mefure de fi paix , ibid. p. 7 j
Indiefls. Chreftiens Indiens, forme de
leur confecration , i 1. 5. c. 10. p. 394
M M m m m i j
S30 TABLE DES MATIERES.
Autres preuves àe leur foy tirets de pellcr le pain confactc divinité > i
leurLitur'^ie, v;î
1. f
I/idmJiLilite de l'original dans les fi-
gures n'a jamais eflé rcmarijute , i.l. j.
c. 9. p. f+o.
tnfuilUbiiité de l'Eglifc confiilerL-e
comme un privilège & comme une grâ-
ce , cft un principe à prouver , & elle s'é-
tend à tous les myftcres , i. 1. r, c. 7.
p. 69
Inftillibil'tté du peuple. Chimère de
M. Claude. Qiie l'auteur de la Perpétui-
té ne luy attribue rien que ce que tout le
monde luy attribue, 1. 1. 1. c.7. p. 6r. 69
Intelligible en quel fens employé par
H-ficKius, qu'il fignifîe la vérité oppofée
à la figure j 1. 1. 4. c. 7. p. 37^. & jSo.
&c.
Le changement qui fe fait dans l'Eu-
chariftie fe fut intelligiblement félon
Pafcife, 1. 1. 8.C. 4.p. 575
Itnoc.'.tioit des Samts comment con-
damnée par les miniftres, 1. 1, i. c. 10.
p. S3. 84
I»-uocittion des Saints enfcignée au 4.
5: y. Siccle par cous les Percs , i. 1, r. c.
rc. p. %6
Les Pères ont cru dans tous les Siècles
qu'elle avoir eflé pratiquée dans les prc-
cedcnSj i.l.i.c. 10, p.87
Imocation du S.Efprit pour changer le
pain , & faire qu'il fbiî le corps de J. C.
contenue dans toutes les Lirurgies,& dans
les Pères, 1. 1. 6. c. j. p. fS/. Les fîdclles
ont conclu que ces paroles , Cecy efi mon
corps ne fe pouvoient accomplir fans cetîe
invocation f9o
Paroles de l'invocation odicufcs auv
C ilviniftes , 1. 1, 6.C. 5. p. $9
Jours.
Beaux Tours de l'Eglife. Leur defcri-
ptioa félon M. Claude, r. I.7- c. t. p.
4,(,6, Se terminent au huitième iîeck',
tbui.
Jours obfcirrs & leur defcription , i 1.
7. c. 1. p. 497. Quels cftoient ces b. aux
jours félon les auttes Mniiftres , ibid.
p. 498. £^/«™.
P.iralogifincs de M. Claude poijr foû-
tenir fes beaux jours ^ r. g. 1. 1. c, 13,
P.4S8
Ironie méchante Kguré\, fort familière
à M. Claude i.1. 11. c. 10. p. 845. Mau-
■yjiisufage qu'il en f.iit , p. 844.
Ijaac Evc'fi-jue d'Arménie, fbn témoi-
gnage pour la prcfc-nce réelle, i.i. i. c.
ji. p. 174, Accufe les Armenièiis d'ap-
c. 6 p. 55^
S. ijuiore de Seville parle fur l'Ea-
charilliCj le langage des fens, 1. 1. 8.c. 4.
p. fK9. Celuy de la foy , p. ^70.^71.
Julien l'apoftat. Q^c nous n'avons que
le tiers de (on ouvrage contre les Chré-
tiens , 5. 1. 7. C. y. p. 499. & que nous n'a-
vons pas mefme le premier entier & de
fuite, p. foo.
Ciue faint Cyrille n'auroit point rap-
porté ce qu'il auroit dit de l'Euchariftic ,
fbid. Temps où Julien a écrit contre les
chrcfticns , s 05
S .Jujlin martyr. Sa retenue' à parler de
tous les myftercs, approfondit peu les
objeftioiis , parle de l'Huchariftie com-
me il a du, 3.1. 7. c. 4. p. 498,
LAnfRanc, fbn pai's. Temps auquel
il a compofé fon livre du Corps du
Seigneur : enfêrgne que toutes les Eglifes
du monde croyent la prefence réelle, &c.
1. 1. 1. c. 7. p. 140..
Double langage des fens & de hraifon
ou de la foy. Exemple de se double lan-
gage , 1. 1. 7. c. 7. p.Jii. ZSf"'-".
Liingage des fens lur l'Euchariflie dans
les Auteurs Latins du 8. & duj.fiecle, i,
1. 8.C. 4. p. ^(îc). ^ fui-u,
DefFenfc de ce qu'on a dit du langage
des fens dans le premier tome, 5. 1. 4. c.
i.-p-i9f
Ufase du lan"-a2e des fens dans les
Auteurs déclarez pour la Iran (Tubd. 3. 1. H
c. 3. P-i>4
Latins. La durée de leur Empire en
Orient, 1.I.3 c. i.p.107
Lutins maffacrez à Co.iflantinoplè
fous le jeune Alexis , leur multitude à
Conftanrinople, i. l.i. c. lo.p- 168
/«^rV/ai combat les Mofcovites fur ce
qu'ils croyent la rranlfubfl:. par une rai-
fon pitoyable, r. 1. s.c. 2 p. 34?
Léon Roy d'Arménie defavouë les er-
reurs imputées aux Arméniens, r.g. l.i,
c. 17. p. 171.
Ltgaridtus Archevefque de Gaza flir
la créance des Mofcovites & auttes
Grecs touchant l'EucharilHc, i.l. y. c. }.
P-3fi , . ,.,
Circonflance du témoignage qu il a
renc'u de la créance des Mofcovites , &
■des autres Grecs fur l'Euchir. 1. 1. y. c.
■^4ip.3ji. Son écrit i.l.u.p.;9.Adora-
TABLE DES
on cflablie pir cet écrie, p.io. c.j. p. 779
Traité irijuftemen: par M. Claude, r.
g. 1. I. c. :i.p. 101
Lihental Rîfilcntrfe Suecic , à Lettre
au Metropolit.iin de Gaze pour s'infor-
mer de hiy de la créance des Grecs , i.
1. ii.p. j8
Liturpc Latine appellée ordre Romain,
1.I.8.C.5.P f^iî
Liturgie d'IIlyricus , i. 1, 8. c. ?. p. CCi,
PaiHiges de ces Liturgies ^ ihtâ. p. ^ f 4
Ç£ fuiv. Suffirent pour convaincre les hé-
rétiques, liid. p.f67
Liturgie Ethiopienne |appellée Cinon
nai-uerfalis ^ Jcc. t. 1. f. c. 13. p. /\o6
M. Claude avance témérairement
cju'on n'a pas l'original Erhyopicn, r.g.
1. i.c.rf. P.14J
Occafion pour laquelle elle fut impri-
mée, ibid.
Verllon latine imprimée à Rome , p.
146. Altérée en quelques endroits , mais
nullement dans l'original , liid. 14 6
Tous les partages alléguez de ces Litur-
gies pour la tranirubft. (ont dans le texte
original, r. g. 1. 1. c. if. p. i.fy
Et de même dans les Liturgies Cop-
thes , traduite! par Viélor Sciala, zjf
Elles contiennent une confcirion clai-
re des deux natures & de la prefence
réelle, ibid. p. ijé, g° (ui-v.
Liturgie d'Alexandrie rapportée par
EKcUentis admirable pour la prefence
réelle j i. 1. f. c. f. p. ^y8
Li-ures Ecclefiaftiquts des Grecs pour
latranflubft. i. 1. 4 c, 16. p. 32:1
Luther approuve la ligue de Scamal-
cade contre l'Empereur, quoy qu'il eue
cnfèignc le conrraire , 1. 1. i c. 4. p. 44.
Empreifement de Bûcher après la mort
de Zuingle pour s'unir aux Luthériens ,
p. 4f
Démarches des Calviniftcs d'Allema-
gne, 4tf. Leurs déguifemens , ibid. Ga-
gnent Melandlon , 47. Concorde con-
clue à Vvittcmbergj en accordant tout à
Luther, 4S.
Articles qu'ils ne condamnèrent pas
formellement, ibid. Le mot ore rctra'i-
ché par Bûcher , quoy que le fens en de-
meure, ibtd.
Luthériens diffimulent hontcufement
leurs opinions aux Grecs, i, 1. 4. c. 4.
p.z82.&iS?.
Luthérien accufé fans fondement de
rhertfie d: Bcrengcr , , 1. 1. 9. c. i. p- 6jo
MATIERES.
M
S3'
Machine; de M. Claude pour produi •
rc le changement infenfible, i. !, 9.
c. 2. p. lél
M.uhines de retranchement, t. 1.9. c.i,
p. «61. & c. 3. p. (S«y. Inutilité de ces ma-
chines, tG.
Machines de preparatiaa, i. 1.9. c. i.
p. ('61,. & 4. p 6(^9
Machines d'adouciflement , j. 1. 9. c. 1.
p. 6é!. Se c f. p. «74
Machines d'oijbli , 1 . 1. 9. c. 1, p, f 64
&c. 8. p. 691.
Déclamation de M.Claude peu railon-
nable fur ce fujct , tbid. 693
Malignité de M. Claude dans une com-
paraifon honteufe qu'il fait de fes aver-
faires , 1. 1. 11. c 11. p. S48
Mandiication du corps de J. C. eft cor-
porelle félon les Pcies, 1. 1. 5.C. î. p. 514.
Ne peut convenir à la Divinité , p. yij-
Munducation du corps de J.C. a dû
eftre affirmée & niée par les Pères , 5.I. 6.
c. 6. p. 39e
Manducation corporelle cflablie par
les palfiges des Pères, 5. 1.6. c.i. p 3fi
Manières particulières à M. Claude.
Première manière. Sufpenfioude juge-
ment. Combien il en ufe mal à propcs à
l'égard de Gabriel de Philadelphie, quife
fert vingt fois du terme de tranllueftan-
tiation , r. g. 1. 1. c. 10. p. iêo
11 feconrente que ces réponfes durent
un an ou deux , ihid. Dccidc par avance
les chefes fur lefquelies il dit qu''l ful-
pcnd (on jugement , & les décide mal,
r.g.l.T. c. : C.p, 161
C'eftune de fes manières de direpo/î-
tivcment le contraire de ce qu'il fçait, r.
g, 1. 1. c lo.p. ifi4
Seconde tnanitic de M. Claude de
s'inicrire en faux contre les Auteurs, qu'il
ne peut éluder autrement. Ufagedecec-
te manière contre Agipius, r. g. 1. i. c.
II. p, 170. Et contre les Conciles tenus
contre Cyrille Lucar , i8i. Réfutation
des raifons de M. Claude contre ces Con-
ciles, p. 194. Ses railons pitoyables con-.
trccet AUteur,p. 17!. ^yw/T/.
Troifiéme manière de M. Claude de
traitter de faux Grecs ceux qui parlent
contre luy , r. g. 1. i . c. 11. p, lîf
Ufage qu'il fait de cetre manière, 19^
S'imagine qu'on peut tirer toutes for-
tes de confeaucn.-cs de toutes fortes de
M M m m m ii]
83t TABLE DES
reproches , 197
Qn.itncme muniere de M. Claude, de
dire des injures à ceux qui rapportent
des partages qui l'incommodent. Ulagc
qu'il en tait contre AUatius, r. g. 1. 1, c. 3
p. 113, contre EKcUenfis, p. 114
M^mne changée au corps de J. C. en
quel Cens, 1. 1. 11. p. 41
Af^»«f/ Calccas Dominicain Grec en-
feigne la tranff.ibftantiation. N'accule
point les Grecs de la nier , i. 1. 5. c. 9.
p. i95
Mm-c d'Ephefe contredit par Jofeph
Êvelque de Mcthone fur ce qu'il dit qu'on
refufoit l'argent aux Evelques G recSji.l.
4.C.I. p. 107
Déclare que le principal fujet du diiFe-
rend entre les deux Eglifes cft l'addition
Fiiioque^iciid,
M.trc d'Ephefe, Son opiniaftretc , fi
haine contrôles Latins j meurt dans le
fchifme j enfeigne la tranllubll. l, 1. 4.
C. j.p.i/f. i7«.
Murcionites difoient que J. C. avoir
adopté le pain pour en faire fon corps ,
5. 1. z. c. 5.p.7f
Mirgunnius Evefque de Cythere grand
ennemi des Latins, ne leur reproche
point la doûrine de la tranirubftantia-
tion. L'approuve, 1. 1. 4.CA. p. 19S.199
Muronttes^ leur reunion avec l'Eglife
Romaine, i. l.t.c, 5. p. m
M.ironites foûmis au Pape. Aucun ne
les a acculez d'avoir une opinion diffé-
rente des Catholiques fur l'Euchar. Leur
reiinion, i.l.f. c, u. p. 598. Preuves po-
fitives de leur foy , ihid. 40
Manques différentes du fens catholi-
que & du fèns calvinifte en ce qui regar-
de noftre vivifîcationparlachairdc J. C.
1.1. ç.c. 6.p.5ii.
Que toutes celles du (èns catholique fe
trouvent dans les Pères, & que celles du
fens calvinifte ne s'y trouvent point,
p.U4.
Méch.tns mangent & ne mangent pas
le corps de J. C. félon divers fins , 3. 1. 6
c. 9 p. 417
MèUn/e monftiujux au dixième fie-
clededeuxdoftrinesfcloa les Miniftres,
I. !■ 9.e. 7. p.fSS
Monfk'ur Claude s'en démêle par
dtsantithefes, P.1ÎS9.
M-'lunçes des exoreffions Luthériennes
& Calviniftcs , nrincipalemenr après la
concorde de Vvjttemberg. DifFc-rente
conduite des Suilfes & de Calvin , mots
MATIERES.
de fubllaïuicllement , corporellement
condamnez parles Suilies, fo.ucnui p.ir
Calvin, 1. 1. i.c. f.p. si •i'ojc^.co/icorde
de V-vittemherg. Luther. Cai'um, Bu-
cer,
McUnge continuel des meraphores &
des exprelfions fimples dans les dilcours
des hommes : comment on les difeerne
fur le fiijet de la prelence réelle , i.\. 6
c, 14. p. 710. 711.
Mekhites ou Syriens ; preuves négati-
ves & pofitives qu'ils croyent la tranlTub,
i.l. f. c j.p. 5f7
Aîelerius Patri.uche d'Alexandrie en-
nemi du Pape n'a rien écrit contre la
cranlfubft. i. 1. 4. c. y. p. 1^8
Meietius pour la tranlfubltant. 3. 1, 8,
p. 79f.
Mémoire ne fuppofe point l'abfence, &
n'cft oopofée qu'à l'oubly. On peur ou-
blier les choies prefcntes J 1. 1. i, c. if,
tAcmoriul. Qualité de Mémorial qui
convient à l'Euchar, n'eft'point contraire
à la prelence réelle , 3. 1, 6, c. i? p. 44t
Mefine. Combien cette exprelïïoH ,
l'Euch-ririie efl le corfs mefme de J C,
ellcomnnine dans les Pères, x.l, 4. c. ii,
p. 4-7- ($ ft"-^.
Qjje les Minillires ne produifent aucun
exemple où le mot de mejme foit pris
dans un lens de figure, p. 454.
En quel fens S.Chryfoftome dirqucles
fidellcs font le corps mefme de J C. p.
431. & que les pauvres font J. C. 440,
On ne dit jamais des (îgnes qu'ils font
les chof.s mefiTies, 441
Metuphores, vraie nature des meta-
piiores, qu'elles font concevoir deux cho-
fes , ce font des comparaafons fecrettcs,
l.^.f. c. II. p. 4'^9
Met.ifihoresnz fe peuvent renverfer, t.
1. I.C. 16. p. 131
Met.tfhores rnifonnibles , ne juflifîent
point les métaphores dérailonnables , t.
1.1. c. 5. p. 111
Quarre conditions neceffairespourin-
fifèer fur la venté des propolîtions meta.
f boriques & pour dire qu'il les faut croi-
re , 1.1. 5.C.9.P.377
Les mots ne fe prenncnr point en un
f-is métaphorique, à moins qu'il n'y aie
quelque chnfe qui y détermine l'efprit^
I. 1 4. c. 13. p. 4f^
Rapport ciu terme métaphorique à la
chofe fîgnifiée , doit eltre connu^ ibid,
4Î +
TABLE DES
Fondement de métaphores doit cflre
nofoitre, 1. 1. 6. c. 5. p. 62.1
Métaphores qui nailliiitde ces paroles:
Cecj efl mon corps. Source ordinaire des
fophifmes d'Aubertin , 1. 1. 6, c. 14. p.
Métaphores (ê peuvent diftinguer des
eiprellîons simples , 1. 1. 6, c. 14. p. yif.
Peuvent prouver des veriteZ littérales
comme la pre(ènce réelle, 716, 711. Ori-
gine des métaphores furie fujet de l'Eu-
charillie, 717
Métaphores (ur un mefme fujet ne font
pas liées, 1.1.7. c. 1. p. 79^3
Exprcffions Eiichariftitjues liéoç , 791
Métaphores fondées fur un rapport tcn-
Cble ne font jamais obfcures , z. 1. 7. c.
3. p- 800
Métaphores dont on n'ufe point pour
s'eiprimer fimplcment , ou pour s'ex-
primer fortement, 1. 7. c. p. Soi
Métaphores qui ne prefentent plus deux
in^ges ceflent d'eftre mctaphotcs,!. 1. 7.
c. 5. p. 805
Eïpreffions fimples plus ordinaires que
les métaphores en 4. cas , 1. 1,7.0.5. p.
804
Métaphores ne font jamais continuées,
en quel fens cette règle eft vraie , 1. 1. 7.
c. 4. p. 837- S13.819
Quand on peut prouver des métapho-
res,!. 1.7. c. f. p. 814
Faufleté infigne de M. Claude que
les métaphores ne foient employéi-s par
les Pères que dans les grandes occafions,
1.1.7. c. 6. p S33
FauflTes règles de M. Claude fur les
métaphores , 1. 1. 7. c 6. p. ; 55
Dénombrement des métaphores con-
rinuées félon les Miniftres fur le fujet de
l'Eucharirtie, 1. 1. 7. c. 4. p. Su.
Ce n'eft oas le terme métaphorique ,
mais les chofes fignifiées qui fervent d'i-
Biagcs, 5.1. i.c. f.p. 84
Métaphores fondées fut le defir d'abré-
ger. 5. 1.4. c. I. p. lOI
11 eft contre la nature d'expliquer par
tout les métaphores , 3. 1. 4. c. 4. p.ii+
Metaph^fitjue éblouit l'efprit dani les
chofes qu'on entendok clairement aupa-
ravant, i.l. 10. c. i.p. 7i8
Méthode qu'on a fuiviedansle premier
tome , & fcs raifons , prsfat. p. 7. qu'il
a fallu commencer par la queftion du
changement, ibid. p. 7.& 8.
Méthode de prefcription fur l'Eucha-
liftie j ne laiilc pas d'eftre courte quoy
MATIERES. 833
qu'elle ait efté fouftenuc par un gros li-
vre, pnf. p. 1 7
N'cft point nouvelle , & a efté em-
ployée par Tertullien , Bakazard Lidius ,
Bellarmin,;'r.f/. p. 18,19. Qu'il eft permis
de traitter une queftion lans en traitter
une autre , mais il n'eft pas toujours
permis de conclure abfolument d'une
queftion fans examiner l'autrCji. 1. 1. c. 1.
P.M.
Méthode de difcuflîon.Ses avantages i:
dcfavantageSj 1.1. i.c.j.p.ji
Méthode de prefcription necellaire à
l'Egiifc j; marque de l'Eglife , 1. 1. 1. c. 5.
P- 5 3- . .
Les Calviniftes n'en ont aucune, ihid.
Méthode de prefcription doit eftre fe-
parée de celle de difcuffion, i.l.i.c.î.p.jf'
Deux manières de regarder les mé-
thodes en i<iy & par rapport aux luires ,
1, prxf. p. 1. '
Ciu'il n'y a point de methoie certaine
par rapport aux autres , 1. /"•«/". p. i
Méthode peut eftte utile quoy qu'elle
ne le foit pas à tous . x.pmf. p. 3
Méthode de dilcuffion n'eft nrcefliire
que par rapport a ctnains efprits préve-
nus, x.prdf. p. 6.
Methodius Patriarche de Conftanti-
nople. Confellion exigée par luy de l'un
de les Officiers Se fes cuconftances , r. g.
1, i.c.p,i48
Sa confellion propre, p. lyr
Metropb.tne élu Patriarche de Con-
ftantinople après l'union , foûlevemenc
contre luy , fa depolîtion , 1. 1. 4. c. 3.
p.iSo
Metrophane Patriarche d'Alexandrie.
Extrait de fon livre , i.l. 11. p.7i
Michel Paleologue recouvre Conftan-
tinople , traître de l'union : à quoy fe
reduifoient les differens, i.l. 3. c. i.p.
Le Patriarche Jofeph y lelifte, tbid.
c. 3. p.iiS
Veccus refifte à l'Empereur , fe con-
vainquit de la fincerité de la foy des Lar-
cins fur la procefllon du S. Eprit, nj
Lettre de Michel au Concile de Lion,
où la tranlfubft. eft contenue, 111
Lfgatjdu Concile des Grecs pour la
mcfme profcflîon, p. m. Eledion de
Veccus, ibid. p. iii. Ses Lettres au Pape
contenant la tranlfubft. ibid. Excommun,
de Michel par Nicobs i. 1, 3. c, j. p.
113.
Violences de Michel Paleologue , ne
§54
TABLE DES MATIERES.
prouvent point qu'il n'ait point figné lîn-
ceremfat la. tranHubll. r. g. 1, i. c. 8,
p. lit.
Michel Cortacius Grec de Candie. Son
témoignage fur la traniïliblt. r. g. 1, i.
c. lo. p. iSs. &c. II. p. lyç
Mimftres de J, C. ne doivent pas bif-
fer voloniairemcnt les Chrcfticns dans
les ténèbres, 1. 1. 4.c.4.p. 5fi
Minijh-es font acception de pcrfonnes
à l'égard des Saints en ne tr.iitant pas
les P^'tcs avant le (îxiéme Siècle d'idoli-
trcs , i.l. I. c. 10. p. 8o.
Mépris que les Miniftres font des Pè-
res, prouvé 1. 1. n. c. 10. p. 851
Miniflyes méprifent & traittent les rai-
fons des Catholiques pour le fens de rea-
lité avec un mépris étrange, Aubcrtin
Charnier, 1.1. i.c.itf.p.117
Minutias Félix ne parle point de J. C.
dans fon Dialogue, & ainli on ne doit
point rien conclure de ce qu'il ne parle
point de rEucharidie. Points traitiez par
cet Auceur, 5. 1. 7. c. 4. p. 485
Mii-mUs de S. B'.'rnard contre les Hen-
riciens atteliez par un auteur contempo-
rain , par faint Bernard mefmc, 1. 1. 1.
c, II. p. 793
Mauvaife defFaite d'Aubertin pour élu-
der ces miracles, ibid. p. 794.
11 prétend infirmer ces miracles , parce
qu'ils n'ont pas arrefté les progrés de cet-
te fedle, que cette raifon deflruit tous les
miracles de J. C. & des ApoflreSji, 1. 11,
c. ï. p. 795.
Mijfions en Orient prouvent qu'il cft
impoillble que la doiflrine de la prefence
i'y foit in'^roduite par innovation , r. g,
1. 1. 7.C. 504.
Motda-ve Voyez Nicolas Sfadanus,
Prière pour les morts dans le Canon
de la Merte, i. l.i.c. 9.p. 8r
Mofctniites quand convertis à la foy ,
i.l.fc.i. p 357
Nul Auteur ne les accufe de nier la pre-
fence réelle. Ce filence efl; decifif, ibid.
P- 55^ .
Ambafl'adcurs Mofcovites à Pans , ré-
cit de ce qu'ils ont dit chez M. de Sens.
Leur témoignage fur l'Euchariflie j 1. 1.
Il p. 7f.
A/;</?frw entièrement feparez de l'ordre
de la nature n'ont point eflé alTujettis par
les Pères aux règles de la Philofophie, i
1. 7.C 4.p.493
Les mylteres égalent tous les cfpritSj i.
Î.8.c.6.p.y74
My/fcres révélez de Dieu fans cclair-
cili'ement des difficultez , 1. 1. 1. c. 6. 114,
Ccluy de l'Euchanftie revclé eu cette
manière, ibid, plus clairement & expref-
femcnt que les autres , i.l. i, c.6. p. tii
N
NAtioe /ignifie fouvent l'amas des
accidens , 3. 1. f . c. 6. p. 178
Autres fens des mots de nûtuie & de
lubftance, qui ouvrent un nouveau fens
du pallage de Théodore: , 3. 1. j c. 9,
p. 30'*. .
Diverles fignifîcations de ce terme &
fa véritable (ignifi:.ition dans Th'oào-
ret,?.l.f.c.8 p. 191. RertraiutparTheo-
dotet, ibid.307.
Termes de nature efl fouventptis pour
l'eflat & la qualité par l'aveu d'Auber-
tin , 1.1. é.c. f p éOf
Neftoriens. Leurs Eglifes, Patriarches,-
&C. I. 1. l. c. 5, p, (fl
Ils croyent la prefence ré-elle , 1. 1, f.
C. 10. p. 3lï7
Millions vers les Neftoriens, p. 588,
On n'a exigé d'eux aucune retraéla-
tion lut l'Euchar. 589. Leur réunion avec
l'Eglife Romaine , ibid.
Niceus Pedorat Religieux de Studc
écrit pour Cerularius contre les Latins ,
ne forme aucune accufation contre eux
fur la prefence réelle ny fur la tranlTub-
ftantiation. Enfeigne l'un & l'autre dog-
me aulfi bienqu'Humberr , i, 1. 1. c. 6. p.
131. & feq. Anathematizefcsécrits, p.i;7
Nicetas Chon. marque le facrilegc com-
mis par les Latins fur l'Euchar. Note hé-
rétique de Volphius fur cet endroit dans
l'impredîon du Louvre, 1. 1. 1. c. 1 3. p.198
Nicetas fait voir par le commerce des
Grecs & de« Latins , qu'ils eftoient unis
de créance fur l'Euchanftie , 1. 1. 1, c. 10.
p. U7
Nicolas premier repris injuftementpat
M. Claude, r. g. 1. 1. c. i. p. itf
Nicolas Evefquede Methone fous Ma-
nuel, grand ennemi des Latins, écrit con-
tre un doute fur l'Euchar. dont les minif-
tres ne fçauroient fe former d'idées rai-
fonn.^bles, 1. 1. 1. c. 15. p. iSî
Palfage de cet Auteur pour la prelênce ,
& la trand'jbftantiation , p. 1S4 Ç^ fun.
En quel fens Nicolas de Methone dit
que le pain eft joint à la divinité , i, 1,
1. c. 15. p. 1S9
M. Nom tel. M, dcNointel Ambafladeur
da
TABLE DES
du Roy à la Porte Ottomane. Relation
de Ton entretien avec le Patriarche , r. g.
1. r.c. 14. p. 119
Extrait d'une de fes Lettres Cur l'attc-
•ftation de lept Métropolites d'Orient , 5.
J. S.c.i. p. (71
Relation de Ton entretien avec l'Abbé
du monaftere de Mauromale, 3 . 1. 8. c.4.
p. fS6. d'un entretien avec le Papas de
Baktchekhu, p. f 91. avec un Papas de
Calcédoine , 59;. de fon voyage aux Ifles
des PrineeSj 8. c. f . p. Î99
Lettres de M. de Nointel fiir l'cleiftlon
de Dionyfius, c. 6. p. 615.
Lettre du mefmeau Roy fur l'atteftation
du Patriarche de Conftantinopic, p. 651
Extrait d'une lettre du melme fur les
atteftatiorts des Refidens j p. 647.
■Extrait d'une autre fur le fieur Tarfîa ,
648. D'une autre fur la mort de Tétera
chef des Cofaques, p. 650. D'une autre
fur la Lettre de Neftarius, p. 6V- D'une
autre contenant l'hiftoire des decifions
envoyées enMofcovie./i/(^-
Extrait d'une Lettre du nie&ne fur les
eonfideratioiis politiques qui empefchent
les Calviniftesqui (ont à Conftantinople
de rendre témoignage à la vérité, p. 675
D'une autre furie mefmc fujet, p. (79
Extrait d'une autre fur l'imprellionde
,ia conteflion orthodoxe , p. 6 80.
Extrait d'une autre contenant l'hiftoi-
re de Corydale, p. 6ii
Relation de M. de Nointel fur les at-
teftations des Arméniens, p. 776
Relation du mefmc fur la Liturgie des
Arméniens, p. 78 4
NicûUs Spada.rius Moldave. Son Ki-
ftoire, 1. 1. 4.C.9. p. 311. Son écrit tou-
chant la créance des Grecs, 1. 1. n. p. fo.
Témoignage que la prefence réelle & la
tranflubft. font crues de tous les Grecs
«lu monde, p. ji. & qu'ils conviennent
avec l'Eglife Roroame fur les fept Sacre-
Diens , fur l'invocation des Saints, &:c. f?.
Nouiieaux baprifez avoient efté inU
truits de l'EucharLftic le Samedy Saint,
avant que de la recevoir , 5, 1. 1. c. 9, p.
Ii4-
Nouneaux baptifez maj inftruits dans
la dodrine des Calviniftes par faint Au-
guftin, expliquépax M. Claude, j. 1, i. c,
S.p.ioi
o
i'^et extérieur diftinguc du corps
de J. C. par des auteurs qui croient
MATIERES. i'^^.
la trandubft. j.l i.c. 8.p. ^<?
ObUtiou détruite par les Miniftres p.-r
une iuite de leurs pimcipcs, le fens de fi-
gure ne portant point a oblation, 1. 1. 6.
c. li.p. f 89
ObUtion du corps de J.C. reconnue par
les Pères, 1. 1. (..<:. u. p. Ê30. Ç^ /un.
Suite de la prefence réelle, ihid. 699
Occaftons où l'explication de ces paro-
les, Cecj efl mon corfs AMto'n ^Çtk neceflai-
re s'il les eufl: fallu entendre dans un fens
de figure, & où les Pères ne les expliquent
jamais, 1. 1. 5.C. 8. p. joi
En parlant aux payens , /^/^. 304.
En parlant aux nouveaux baptilez, 5 p. 5
En parlant aux Catéchumènes, p. 507
Oderbonus Luthérien fait voir que les
Mofcovites adorent l'Euchariftie , i.l, j
c.i-p.344
S.Odilon Abbé de Cluni.Son témoigna-
ge pour l'adoratiô del'Euch.i.l. 9.c. p. 684
S. Odon premier Abbé de Cluny. Son
jugement fur les écrits de Pafcafe , 1. 1. 8.
p. éiy.&1.9.c. C, p. fSf
S. Odon Arcbcvefque de Cantorbie,
convertit des gens qui doutoient de la
realité , p. éSo,
OecoUmfa.de devient Sacramentaire en
renonçant aux Pères, & n'a pu le devenir
en s'y attachant, i. 1. i. c. j. p. 47
EÂranglé parle diable félon Luther,
1.1. I c.4. p. 4J
Offinius Roy d'Arménie envoyé des
AmbalTadeurs au Pape Jean li. qui re-
connoiflent la tranlîubft. i. I.f. c.6. p 37»
Clear'tus confirme par une lettre ce qu'il
a écrit touchant la créance des Mofco-
vites fur la tranlfubft, i.l. 5. c. 5. p. 347
& ii.p. ftf
Témoignage que les Arméniens
croyent latranifuhft. i.l. f.c.7.p. 574
Déclare que les Luthériens adorent J.C.
prefentdans la Cène , mais qu'ils ne l'a-
dorent pas hors de l'ufage , 1. 1. ii. p. jy.
Ordres chimériques placez par M. Clau-
de dans les huit premiers fiecles touchant
la connoilfance de l'fuchariftie , i, \.6,
c, 5.p. 4?9
Premier ordre des ignorans coritenx-
platifs refuté , 1. 1. 6. c. 6. p. 441
Vifion de M. Claude fur les notions
d'ufage, 443.
Alliance de llupidité & de lumières
dans cet ordre, 44f
1. Ordre des ignorans pareflTeux refuté ,
I. 1. 6. c. 7. p. 4fO. ^ fnn.
Ordres de M. Claude composés de gens
NNnnn.
83<î ' TABLE DES MATIERES.
extraordinaires j p. j^.^ i
5. Ordre de M. Cnudc conipofé de
catholit-)ucs. c. 8. p. 4,-3
4. Ordre de M. CLiude compofé de
ealviniftes devenus tels après une lon-
gue recherche : C]ue cet ordre avoit l'i-
dée delà prefcnce réelle , i,l. 6. c, s,p.
j. Ordre de M. Claude compofé de
calvuiiftes lans reflexion, 1. 1. 6. c. ii.p.
468
6. Ordre de gens qui félon M. Claude
n'entendoient pas le fens de ces paroles ,
Cecyefi mon corps ^ inconnus aux Peres^i.
1,6. c. 10. p. 46}
0)v/>-f chronologique peu ntile , t. 1. 3
c, I. p. ^58
0''^>'t-de fuivre pas à pas fon adverfai-
re. Ses avantages &: fes inconveniens.
1. /■«/. p. y.S; 6.
Origine &progrezde cette dilpute , 5.
r, S.c.i.p. yéi
Hardielfe avec laquelle W.CIaudc a nié
que les focietez d'Orient cruifent la pre-
fcnce réelle , fé-î.
Confpiration des M-iniflres fur ce point.
Utilité de les confondre, p. jj^
P^chymere , diverfes omifiîons & er-
reurs de cet auteur, dans le cecit
qu'il fait de l'uilion de Michel Paleolo-
gue avec l'Eglife Romaine. 1. 1. j. c. j.
p. 118. &c.
Palefiine. Eftat des Es^lifes de Palefti-
ne après la prife de Jcrufaleni par Godc-
froy, r. 1. i.c. 10. p. I'^ 4. qu'il y a eu fous
les Saralnis des Evefques en Paleftine
contre la prétention de M. Claude, r. 1.
3.C. 6. p. 131
Ptifes du quatorzième fiecle n'onr
point foupçonné les Grecs d'erreur fur
la prefcnce réelle ny fur la tranlfubftan-
tiation , 1. 1.'5. c, 7. p. 140
Paradoxe de M. Claude fut les propo-
lîtioiis dont les termes font incompati-
bles, r, g. 1. 1. c. 17. p. f 49
Abfurditez qu'il enralle fur ce iiijet ^
■j-tfp/faKl fignifie rendre prefcnt^
dans unpaflagede Zonare , 1. 1. 5. c, fi.
p. lïo
P.iroles de Dieu toujours conformes
au langage humain , i. 1. i. c i<;. p. iS
Particifam, En quel fens les Pères difeat
qu'il eft impolfible d'efttc p^rticip.rm
de ioy-mefme, 1. 1. 4. c. 7. p. j8f
Pafcafe Abbé de Corbie n'a pas tou-
jours efté l'objet de la haine des Calvi-
niftes 1. 1. S. c. 8. p. 607. Protellans qui'
l'ont mis de leur parti, (>o8
Pourquoy il a elté choifi par Aubertin'
pour le faire auteur de la dodrine de la
prefcnce réelle , 609. Admirable focieté
des Palcafites félon les defcripcions de
M.Claude, ibid.
Qualitez extraordinaires que M.Claa-
de attribue a Pafcafe, 010. Hiftoire que
M. Claude en fait, ibid. Temps auquel il
compofa fon livre, p. éif. Pourquoy il
foùleva quelques cfprits , fin. Perfonne
ne l'acoatredit durant fa vie, p. 6iî. fit}
Qli'iln'a expofé dans fon livre que la
doctrine commune de fon temps, 1. 1. 8.
C.9. p.fii4
Abfurdité de l'hypothefe de Mordïeur-
Claude« p. 615. &c. Que Pafcafe a tou-
jours cru que l'Eglife crtoit de fon fenti--
ment , p. 6i8. Supercherie de M. Claude
pour éluder cet argument, p. 610
Réfutation des preuves par Icfquelle»'
M'. Claude prctend montrer que Pafcafe
efloit inventeur de fa dodrine , J.l, 8, c*,
10. p. (îi*
Adverfaires prétendus de Pafcafr^
Difputcs qui s'élevèrent après fa mort,
I. I. S.c. a. p. fijo. Faits certains fut ce
fuj«- ihid.
Vifion de M. Claude touchant Pafca-
fe , i.l. S. c. 15. p. «47.
Pafcafç parle de l'Euchariflie comme
cftant du pain & du vin , fuivant lelan-
g.igedes fens, i. 1.8. c. 4. p. i6y
Pafcaftes & Bertramiftcs & leurs
qualitez fclon M. Claude, i.l. j.c. ■<)>. p.
47;.&p. 687. </ffOT c. (5. p. 677. '
Pa/tjae figure d'une figure. En quet
fens ? 1. 1. (î.c.io.p. 675
Pajfuies plus étendus où la matière eft ■
fraittée à deflein, préférables aux paf-
fages écartez ou elle eft traittée en pafr
fant, z.l. î. c. f. p. i?9
/'.«//•//ïri-Wde'Conftantinople.Sagtan-
deur dans l'onzième fieclc , 1. 1. z. p,
Pntriarchat de Jerufalem quarid éta-
bli, l.I. i. c,*'j.p. m.
Patriarche de Conftantinople ne veut
point baifer les pieds au Pape en arri-
vant à Ferrare , i , 1. 4. c. i. p. ifio
Autres Patriarches en Orient outieles
«quatre. 1.1,1. c, J. p.iu
TABLE DES
^- Deux Patriarches des Cophces coii-
foûdu'i p.ir divers auteurs mal à propos,
& diltiiigucz par AUatius, i. 1. i. c, j
p. III
AmbafTade du Patriarche des Cophtes
au Pape rraittée de luppefce par divers
auteurs , bien deJtcadue par AUatius ^ i,
1.2,. C.'i.p.IIl
Pau/ Jovc fur les Mofcovites, 1. 1. 5.
p. 559
Pauluiert^ hérétiques dctruifoient la
prerciice réelle & la tranllubll. parmi les
Grecs réfutez par Euthymius. c. 11. r. 1. 2,
p, x8i. Réflexions fur le choix des palfa-
gcs qu'il fait pourcela, P..1S5.& 1. 7.C.9.
■P.tyeKs fuppofcr. par M. Claude inf-
•truitsde la doanue de l'Eglife fur l'Eu-
char, ;.l. 7.C. i.p. ^66. FaulTeté de cette
• fuppofuion , 468. On ne fuppofe point
qu'aucun payen n'ait fçu ce que les chré-
tiens croyoient de l'Euchar. p. 470. Les
Chrétiens n'auroient pas relevé les repro-
ches que les payens leur auroient fait fur
c&fujet,p,47y
. Péché que commettent ceux qui com-
munient indignement, i.l. ii.p.<ri.é5,
Pourquoy J. C. a voulu que fon corps
fuft couvert des accidens du pain, 68
Pères ont eu les mefmes penfées des
myfteres, quoyqu'ils s'en expriment di-
.verfement j .5. \.z, c.i. p./i. & 99.
Percs fe font fervis du langage des fens
avec toutes les précautions qui le déter-
minent au fens catholic]uej 5.I, 4. c. 3.
p. 114
Pétition de principe ordinaire aux mi-
riiRres:tous les argumens tirez du mot de
figure font de pures pétitions de princi-
pe^ ?. 1. z. c. 1. p. 65
Peufles à deuxqualitez, docilité & dé-
faut d'intelligence , 1.1. 8. c. 6.p..f9f
Phibfofhie rheroricienne de M . Claude
qui anime les fens, & les fait raifonner,
3.1. 7. c. II. p. 640
Pierre Pacri3rçhe d'Ant'oche répond à
Cerulariusi.l. 1. c. 5. p. iy%. envoyé fa
j confedîon au Pape, n'accufc point les La.
tins d'erreur fur rEuchariftie,i.l. i.,c..$.
p. 1-9
Pierre Strozza Secrétaire du Pape Paul
V. Son livre de Dogmatihus Chald^orum ,
I. \. f.C.TO.p. \90
Pierre Eve(que de Seb.-.fte frère de faint
Bjfilc. Palfage qui luy eft attribué^ 1. 1, 5.
c. f.p. Îf8
Pierre de Sicile. Ses partages fur l'Eu-
char. 1. 1. 7. t. 9«p. f++.
MATIERES. 837
Li pierre efcit Chrifl expliquée par la
plufpartdes commentateurs, z.l. 3.C. 4.
p. if<5
M. Piquet cy-dcvant Conful d'Alcp
pour les François,!, l.f.c. 14. p. 407. Son
témoignage fur la créance des Eglifcs
d'Orient. il>id. Son zelc pour la Religion
catholique j tbid.
Attcftarion du mefme M. Piquet fur la
qualité des témoins qui ont (igné les at-
teftations de la créance des Syriens & au-
tres, i.l.Ji.p.85
Plaintes injuftes de M. Claude fur la
manière dont on traitce les Calviniiles ,
1. 1. iii.c.i. p. 791
plaintes touchant Bertram,i. 1. 11. c.<>.
p.814
Plaintes de M. Claude fur les mauvais
raifonnemens qu'on luy reproche^ il fait
luy- mefme des reproches faux , & lans
fondement, 1. 1. 11. c. 3. p. 80s
Plainte iur une accufaiion de contra-
diiflion touchant Bertram loiiépar Trite-
mCj i.l. w.c. 5. p. Soé. Sur une faute im-
putée à Blondel, i.l. 11.C.4. p. 80S.
Aigreur de M. Claude, /i/<i?. Sur ce qu'il
prétend qu'on attribue à Blondel ce qu'il
n'a point dit, i. 1. u. c, f. p. S 10.
plainte injufte que fait M. Claude
qu'cii attaque les C^ilviniftes dans toutes
fortes d'cctits, 1. c. 11. p. 84^
Points qui regardent la difcuïïîon trait-
tez dans le premier volume, i . frs.f. p. 10
n. 11.13. 14. if.&j- 1. i.c. I. p.f .6.
Points de la troifiémc réponfe de M.
Claude refutés dans le fécond tome,
1. frjif. 10. ǣ finii.
Politique des Iiommes bornée ne peut
pas fervir de principe pour expliquer tout,
1.1.4. Cl. p. 1S4
■ M.de Pr/nfone Ambaffadeur en Suéde
Sa lettre fur l'i'crit du Métropolitain de
Gaza & les affaires de Mofcovic , i . 1. f.
C.8 p. 349 _. .
Pojfe-vm furies Mofcovites , i.l. j.c.i
Pratiques contraires peuvent eltrc éga-
lement convenables, 1.1. 10. c. 7. p. 761.
Exemples, ibid.
Prefence réelle porte à concevoirdcux
chofts dans l'Euchar.;. 1. i. c, 1. p. S.
Propofitionsqui CB naiifent , 9. Qne
faint Irenéca rudirefeloncettedodirine
que l'EuchanlUe cil compofée de deux
chofes,3.1.i.c. 3.l-'-ii.
Prefence de J. C d-nsl Elichar. con-
le cndiverfes nnniercs, les unes iccl-
NNnnn ij "
çue
§38
TABLE DES
les, les autres métaphoriques ^i.I. 6. c. 8.
p. 460
Pr.fince réelle produit naturellement
& ncceUaircmcnt pluficurs métaphores,
a. 1. 6.C. 14. p. 717
Q^ie le premier traité ne parle que cle
la prefence réelle. Supercherie de M.
Chude fur ce point, r. g. 1. i.c. j.p. 34.
^ fui-u. item. c. 4. p. 47
Que ce n'cH point par préoccupation
(que les Catholiques trouvent la prefence
réelle dans ces paroles , Cecj eji mtn
cer^s ^ 1.1. 1. c. î.p. 168
Preu-\jes de l'immortalité de l'ame & de
la béatitude éternelle cachée dans le li-
vre de l'ancien Tcftamcnt,que M. Clau-
de a tort de trouver à redire à ces exprcf-
fioas, 1. 1. II. c, ro. p. %-■,%
Preuijes de la venté d'un myftere ,
doivent detetminer l'eTprit fans la réfu-
tation de l'erreur oppofce , 1. 1. 7. c. 7,
P.8'?.
Pr/ere pour les morts dans le facrifîce
ic la mcfle. Preuves de la réalité j 1. 1. é.
8. i.p.î7i
Pnnafe de la morale de M. Claude,!,.
1. u.c. II. p. Î4f
Prêb.ihilite d'un fens prouvée donne
lieu quelquefois d'en conclure 11 cerri-
tnde , 5. 1.1. c. 1. p. <4
Prffeffion de foy de Clément 4. ptopo-
fée à divers peuples ; i, 1. ;.c. 7. p.i3i.
Sh^néc par l'Empereur , tbid.
ProjofttiBns fau/Fcs ont un fcns,r, g. l.i.
«. i7.p. ffo
Le mot de Profre jamais employé dans
l«s propoiîtions figuratives , 5, 1. i.c. 1,
p- 11
Termes de propres corjis , frofrcmint
cerfs de J, C. ordinaires dans les Percs,
1. 1. 4. c. 10. p. ^10
Qii'ils ne fe peuvent prendre en un fens
de fi2;urc , 411
Qiie ce terme de frofre exclut le féns
iSguratif, p. 4ii. 413. Ç$ fuiu,
Pretefïtws qui ont fiiûtenu que les
Grecs ne croyent point la tranflubflan-
tiation , i. 1. î. c. 4 p. 119
Puijfance des Papes en Orient as 13,
isckj I. 1. 3,c,i.p. lie
MATIERES
CL
^~\ Veftions que l'on peut faire aus
V^Calviniftes femblables à celles
quiii font fur cette propofition .- Cecj eft
tji mon corp-s. 1, L i. c. I. p. ijo
Qusd-vuhdeus Evefque . Demande
qu'il fait à faine Augultin de luy faire
en abrégé le dénombrement des here-
fies , & de l'inftruirc de ce que l'E^life en-
feigne contr'eux, ne peut eflre Site par
les Calviniftcs , i.l.i. c.}.p. jy.
R
R^bam Arckevefque de Mayence ,
en quel temps il a éciit fa lettre a
Egilon , t.l. c.ï. p. 611
Accuf é témérairement de Stercoranif-
mepar Thomas Valdcnfis, 5.1.;.c.8.p.i87
r^'a jamais diredement attaqué Paf- *
café, I. I.c. ti.p. 6;f
Quel fens pcat avoir ce que l'on cite de
fou penitentiel & de cette lettre, p. ^37
Railleries de M. Clau<le fur l'infaillibi-
liré populaire, i.l. i.c. 7, p. 67. Ç^fun.
Railleries de M. Claude faulles & mali-
gnes, I. 1. ri.c.7. p, 87. &r. g. 1. 1. c,i.
p. ?+!•
Kairttildus ; que ce qu'on en dit dans Ift
Perpétuité n'cft- point contraire à «e
q-.i'on en lit dans certains écrits , r. g.l.i,
c. 5. p. jç?. ^ fufv. Qy'on ne peut foap-
çonncr cet auteur d'infidélité dans l»s
faits , x6»
Raifort de l'inftitution du myftcre de
l'Euchaiiftie & de la prefence réelle, t.
1.1. c. 4. p. 194
R.iijonnement, Principe de W'. Claude,
qu'il n'cft pas permis d'oppofcr les preu-
ves de raifonnemcnt aux preuves de faits,
commodes à mette en antithefe , mais
tres-faiix, T. 1. 1. c. i. p. 17
Preuves de faits fondées fur des preu-
ves de raifoiincmentj liid z%
Preuves de raifonnemcnt quiprouvenc
là vérité des mir.acles de Moyfe,;W. p. 19
Preuves de raifonnementjqui montrent
la vérité du témoignage des Apoftres fur
la Rtfutreiflion de J. C.iiid. p. 30.
Nulle règle générale dans la compa-
raifoii des faits aux raifonnen^ens ^ 1. 1. j.
c, 4.. p. 3f4
Raijonnement non contefté prouve
mieux qu'un fait contefté, r. g.l.i.c.i.p.if
Ruifonnemens abfurdes impofez aux
TABLE DES
î-eres par les Miniftres par leur Icns de
figure, 1. 1. é.c. 13.P. 699 iJ5'/«/-u.
Ritpfort de la matière Euch.infticjuc
avec la vérité intérieure, fuppofé par les
Grecs & par les Latins, comme fonde-
ment de leur argument, z.l. 5.C.É. p. 187
Rapport de la matière de l'Eucliariftie
adueftre conûdcré par les Pères, 3. 1. 3,
c. i.p. 1)8
Qiic ces confldcrations s'allient avec
lafoy de la prcfence réelle, ibid. p.i;? &-c.
Auteurs déclarez pour la tranirubft.
qui en ont parlé de la même forte que
les Pères , 14®. &c.
Que ces rapports font cftablis par les
Percs dans le pain & dans le vin ; mais
qu'il n'eft pas necelfaire pour cela que le
pain & levinfubfiflent,/W. p.145, 144,
Rarramne réfute les Grecs au neuviè-
me lîecle, 1.1.8. CI. p. îf}
Riitramne Religieux de Corbie. Sa ré-
putation, 1. 1, 1 1. p. f.
Ulferius eft le premier qui luy a attri-
bué le livre de Bertram Raifoiis de cette
•pinion refutées , p. 6. &:?
Recejfus Fianco-Furdienjls contient
une profeiTion exprelfc de la prcfence
réelle, & néanmoins eft fîgnée par les
Princes Calviniftc s , 1. 1. 1. c. y. p. y f
Réformateurs prétendus veulent refor
mer les erreurs de tous les fiedes félon
Daillé, 1. 1. II. c.z. p. 7^9.
Combien leurs quiilitez perfonnelles ré-
pondent peu a cette vocation, il/iA. 800,
Refroidijft-ment A\i zèle pour la convcr-
fion des Calviniftes, i.praf. p. z.Sc ^
Regards difFerens de l'Euchariftie , &
propoficions qui en nailTent, 5. l.i.c. i.
p. fiv. Contrariété apparente de ces pro-
portions, p. (.7
Règles qui fouffrent des exceptions ne
lailfent pas A: fervir de preuves , quand il
eft clair que le cas donc il s'agit ne tombe
point fous l'exception, i. I.7. c. 5 p. ~9f
Règle pour difccrner ce qui eft injurieux
^ ce qui nel'eft pas, r. g. 1. i. c. i.p. .lé
Relations produites par M. Claude té-
moignent que les Grecs croyent la pre-
fence réelle j r. g. c. 6.p. 99
Religie»»Aw mont Athos , i.l.i.c.5.
p. 108. Noviti-r dp l'Orient, tbid. Leur
témoignage fur l'Euchariftie , r. g. 1. 1,
fi. 9 p. MO
> Religion n'a pas fait le langage des
Wommes , 5,1.4.c i.p. loi
KcmjUKxdiiw parle clairement pour
MATIERES. 839
la prcfence réelle, i. 1. t. c. 7. p. 599
Reprtjextare. Terme équivoque de (by
fignific rendre prejent dans Ict pafliges
de faint Jerofme & de Tertullien, allé-
guez par les miniftres , 1. 1. }. c. j. p. 168
&c.
Reproche de politique ,1,1. 11. c, il,
p. 84t
Reprocher doivent eftrc véritables,
certains^necelfaircs, i.l, u.c. i.p. 791.
ReJurreHion ne peut eftre raifonnable-
mcnt prouvée par l'Euchariftie, fi elle
n'eft qu'une figure, 1. 1. 4, c. 13. p. 704
ReJurreHion prouvée par l'Euchariftie
fuppofé la prcfence réelle & non autre-
ment , 3. 1. i. c. 1. p. 10.
Rhetoricjne véritable, i.l. 11. p. 814.
Ridicule de fe vanter qu'on n'ait point
répondu à de certains livres, 1. 1. i.p. 814
Rojy Se l'on image ne lont pas deux Rois
félon les Pères non plus que l'Euchari-
ftie, & le corps de J. C. en quel fens cela
eft vrjy 5. 1. 3.C. 4. p- i(î i.
Cette maxime ordinairement appliquée
à la Trinité, ibid. p. i«4
S^cranus Ciianoine de Cracovie fur
les Mofcovites , i. 1. c. f. i. p. 341
Objeûion fur ce qu'il dit que les Mof-
covites ne vénèrent point le pain confà-
cré , refoluc, i. 1. 5.C. i.p. !45.
S.icrement n'eiclut point la realité, i,
1.8. c.3.p.fé8
Saciemens ne peuvent eftre eftablis en
paroles figurées qi and il y auroit de l'obf-
curiré. faux exemples alléguez par les
miniftres , 1. 1. i. c. 17. p. 738. &c.
Sacremens Judaïques ne (ont pas figu-
res de l'Euchariftie félon Aubertin , i.l. 6,
c. 8 p. i\i
Ces rapports marquez par tous les Pe-
rcs , p. (^43 ^ fuiii. Confequences de
ces rapports, p.<;5i
Sacrement pris pour un pur figne , U.
pour un figne joint à la vérité par les
mêmes auteurs, 5. 1. (î. c. 11. p. 414
Samonas n'eO' "oint un phantofme.
Raifonfrivol d'AÏJcrtin, il y avoir du
temps que l'on le fait vivre des Evêqucs
dans la Paleftnie , 1. 1. 3,c. <;. p.130
Son témoignage pourlatranllubftan-
tiation, 131
SardiHs avoliè' que les Grecs croyent
ktxanflub. i.l. i.c. 4p. né
N N n n n iij
84® TABLE DES
Scaliger avotte que les Percs o iitcru
que le pain devient corps de J. C, 1. 1, i.
Cf. p. 47 .
Sia~jitijs ne le (çauroicnt faiiver pax
une autre voye que les /impies j i.l. l.
c, 6. p. 60
Scriijme avec l'Eglife catholique n'eft
janiais permis, d'où l'on conclu: qu'elle
ne peut enfcigner d'erreur, i. l.i. c.S.p 61
Sens ne fout pis contraires à la prefeu-
ce réelle, 3. 1. 7. c n. p. 540
Sens ; en quoy confident leurs adlions,
idées ajoutées a leur rapport, 3. 1. 7, c. 11.
P' ^''■5
Inc.ipables de faufT-'té , $4.1, félon
S. Auguftin ne jugent de rien, f 4;. Joints
par l'ordre de Dieu à certaines percep-
tions, i'ûid. Conditions nece(l.iires pour
juger félonies fens , y44. Principe de la
ccn-itude des fens , f4(;. f47. Qu'il n'y a
dans l'Eucliarillie ny vifion ny illufion
iiy erreur des fens ,«549. &c.
Di.u peut prefenter au fens des objets
que l'efprit ne peut s'em^jêcher de pren-
dre pou^ autres qu'ils ne font qu'en fup-
pofantun miracle, }. 1. 7. c. 11. p. ffî..
Que les Pères n'ont rien dit des fens de
contraire à ces principes , ibid.p, ff;. &e.
Témoignage nîgatif & pofirif des fens.
;^6. Diliinftion chimérique refutée, ff7
Sens. Aveu des Proteflans que le fens
de la tranlTubft. eft littéral, i. 1. 6, c. 7,
p. 4f7,&i. 1. z.c.i. 147.
Sens des Catholiques fur cette propo-
fition , Cecj cfl mon corps , z. I, z. c. 1.
Que CCS fens font parties d'un même
fens complet , p. ij- 4. Explication de ce
fens pnr les principes de la Logique,
p. If 4. CS"/^?' Qii'^1'' nenailfent que du
dlferent regard d'une même chofe , p.
16$ Ç^fiq.
Sus de figure révélé dans l'Ecriture
felcn l"s Calviniftes de la manière du
monde la plus extraordinaire , il n'en eft
jamais parlée i. l.i. c. 7.p l'.i.
Sens de ces paroles : Cecj e/f mon corps ,
regardé comme clair par les Percs , 1.
I. 5.C.5. p. i4f
Ils ne fe font jamais mis en peine de
l'expliquer , quoy qu'ils ayent eu foin
d'expliquer toutes les métaphores diffi-
ciles de l'Ecriture , p, 147. item p. i f 1.
Sens e.ïtraorJin lires ceifent de nous
choquer par l'accouftumance, i.l, i.c.
II. p. S8
Vray fens doit convenir avec toutes les
exprelilons des auteurs, 5. 1. f. c. 3. p. ifi
MATIERES.
Sens de figure , fans exemple dâ.ns
rétab'ùllement des lignes, 2, l.i. c.i. & f.
p.iij.
Sentiment ou imprc-ffion fimple règle
la plus feure pour trouver le fens de ces
paroles : Cecj ejl mon corps , r. 1. 10. c. i.
p. 719
Quec'eftce ffntimentqui a uni tous
les Clireftiensdu monde dans la même
foy, & qu'on ne s'eft defiini qu'en s'en fe-
parant , ibid, p. 750.
Que J. C. a conformé fes paroles à ce'
fentiment & à cette iniprelTion preveue,
p. 730, Que les fentimens de tous les
peuples depuis m ;lle ans jrauvent celuy
des fixprcmicrs (iécles , p. 731.
Sentimens diftingaent les exprelTions
qu'Aubextin pro^ çfe comme (cmblables,
ibid.
Se partition c^'un m"me objet en di-
veIfe^ idées ignoréï par •\ui>ertin. Sour-
ce de diversfophifmes, 5.1. 5. Cf. p.iéf
Siede-p.&L 8. félonies Miniftres, 1.I.7,
c. i.p. 468
Siècle 10. defFendu contre les repro-
ches de M. .Claude , 1. 1. 9. p. 696. Qu'il
ne faut pas juger des fiecles par certai-
nes accufations générales , ibid. p. 697.
.Qiie lesconverfions faites au 10. (îecle
prouvent qu'on y croyoit la prefence
réelle, i.l. 9.c9.p. 710
Sigebert , faute dans fon texte en ce
qu'il dit que le livre de Bertram de la
PredelHnation eftoit dédié à Charlc le
-Chauve, 1. 1. ii. p. if
Sigifmond Baron d'Herbeftain fur les
Mofcovitcs , 1. 1. f . c. I. p. 540
Signes, Qu'on n'en peut pas affirmer les
chofes fignifiées en toutes occalions ny
en toutes circonftances. 1. 1. 1. Règles qui
font voir quand on le peut, p. 94. Que
l'on ne l'auroit pu faire raifonnablement
dans l'occafion où J. C. a prononcé ces
paroles : Cecj eji mon corps ^ p. 98. Autre
chofe de parler des lignes dans leur éta-
bliflemcnt , & d'en parler lotfqu'ils font
déjà eftablis& connus pour fignes, 99
Signes conjoints, figncs leparez , oti
ne conclut de la qualité de ligne ny Ia
prefence, ny r.ibfencc des chofes figni-
fiées , 5,1. i.c. 6. p. 9^
Signe comme figne ne demande que la
fuhfiftancc extérieure des apparences ,
& non de la fubftance intérieure, 1. 1,/,
c. 7.p.fi8. & 5. 1. 3.C. I. p. 144.
S'gnijicrtion du mot de Cecy, i, I. 1,
c-M'-iff. i5<». Ap^irouvée par Zuingic,
p.iCi.
TABLE DES
Signifcaiion des propofitions operati-
■vres , & en quoy elles font différentes
des autres, 1. 1, 2,c. f. p. iCj .
SiUnce fur les fuites Philofopliiqucs
compatible avec la dodlrine de la pre-
fence réelle & de la tranifubft, prou-
vé par le confentement des Eglifes
Schifmatiques avec l'Ei^lile Romaine
fut l'Euchar. c. 7. p. 7é9.qu'cllescro)-ent
le péché originel, i, 1. 10. c. 8. p. 5(^9.
& ne parlent point des fuites philofophi-
qucs ,ibid.
Silence des Grecs fur les difficukez de
l'Eucharifbie détruit l'argument qu'on
peut tirer du filence des Pères fur ces
difficukez , ^.1. 7.C. y.p. nî
Silence des Pères gênerai pour toutes
les difficukez des mylleres , 5. 1. 7. c.7.
{>.f«7
Silence des Payens fur l'Euchariftie,
Difficulté commune aux Calvinilles, &
aux Catholiques , j. 1 7. c. 6, p. fo;
Simfles qui croyent l'Euchariftie fur la
foy de tous les Chreftiens du monde
ufenc bien de leurraifon , & par ccnife-
quent ne fe peuvent tromper dans cejur-
gement, i, 1, i.c. 6. p. 6f
■ Sntaleius Socinien dit que la doûrine
delà prefenCe réelle a eftc inventée par
l'Eglife, dans laquelle S. Chryfoftome
prefidoit , 1. 1. 1. c. y. p. fo
Socin avoiie que fi l'on s'arrefte aux
Pères, tous les adverfaires de l'Eglife
Romaine ont petdu leur caufe , 1. 1. i.
c. V. p. Ji
Sociniens n'admettent que de purs
fignes dans l'Euchariftie , c'eft-à-dire
nulle efficace, r. l.i. c.S. p.^i&c. Suivent
les principes des CalviniJles- plus exacte-
ment qu'eux, 6\
Différence réelle entre les Sorinicns
& tes Calvmiftes, «f
Sofhifn-.e de conclure de l'expreiïîon ,
à lapenfée, ?. l.i.c. J.p.17
Sophtfme d'Aubettin fur la diftinclion
des images des originaux , 5, 1. 5. c. 5.
p. if7
Sprituellement , les hommes reçoivent
le corps de J. C. fpirituellement & my-
ftiauement félon Pafcafe , i. 1. 8. c.4,
p.î74
gfirituellemenr & myftiquement , i.
1. 5. C.7.p.9«
Stercor.tni[me reproché à Nicetas par
Hunrt'jert i.l.z.c.é. p.iu. Sophifinc de
Claude fur ce fujet , $bid.
£41
MATIERES.
Qu^'il n'eft point vray que les Grecs
ayent cfté Stercoraniftes. ibid.
Siibfldnce pris pour l'amas des acci-
dens, 5.!. 5.C. s. p. 178
SaLtilité des Minifttes n'a pour effet
que d'obfcurcir le fens commun , ?• de
les emp^-fcher d'entendre ce qui cft en-
tendu de tous les autres, i. 1, 10. c, 3.
p. 7 + 0
Siifet & attribut font toujours les mê-
mes dans toutes les propofitions affirma-
tives , 3.1. ?• c. f. p. t(i7
Suites necellaires & non necefTaires du
dogme de la ptefence réelle fe diftin-
gucnt par le confentement de tous ks
peuples eftabli danslei.l. 10. c. 7. p. 761
Suites nonneceffaircs de l'Euchariftie
qui donnent lieu à M. Claude de cirer de
faulfes confequences, 1. 1. 10. c. 7. p. 761,
5«/?efyi'//^/o« introduite depuis le 6, fie-
cle félon Hofpinien, i. l.i. c. 10. p. 86
Saffojitions contraires à l'imprcllîon
publique ridiculeSji. 1. i. c. r. p. iz.&c ij
SHpfofltions faullès de M. Claude fur
l'onzième fiecle , 1. 1. 9. c. 1. p. 6f9
Symboles peuvent eftre pris pour l'ob-
jet prefent , & font le corps de J. C. 3,
1. ). c.vp. 159
Sjmeon Evefque de Jerufakm du
temps des Apoftres, i. 1. i.c. 8. p. 78
Stmeon le jeune , paffage de cet auteur
pour la. prefence réelle , i. 1. 1. c. ir,
F- H7 . , .
Sjmeon Archevefque de Theflaloni^-
que n'a pu ignorer la doctrine des La-
tins , fes livres des Sacremens & contre
les herefies , i. 1. 4. c. i. p. lyS. Paffa-
ges pour la prefence réelle £c la tranf-
fubft. p. x<8.
Sa doArine fur les particules , 1 <;i
Symeon Sulacha Patriarche des Ncfto-
riensuniau Pape , i. 1 î-c. 10. p. ^89
Synode à Conftancinople fous Manuel
pour la relinion des Eglifcs , on n'y
parle point de l'Euchaiiftie, i. 1. 1. c. it
p. 17)"
Sjnode de la Rochelle où l'on condam-
ne ceux qui rejettoient le terme de fub-
ftance , 1. 1. 1. c. J. p. f9i- Plaintes des
Suiffes contre ce Synode , ibid. Modeué
par celuy de Nifme, p. $•).
Syyiode de Sandomir en Pologne où
les Liith-riem, Vvaudois & Calviniftes
de Pologne conviennent d'une forcnule
captieufe , ii 1. 1. c. 6. p. «o
^À
84t TABLE DES
SyrieH) avoient kur propre Evoque
du temps que k-s Latins domuioient dans
la. Paleftine. Mauvaife raifoa de Mon-
fîcur Claude contre ce fait , r. g. 1. t.
c, y. p. 70
Syfiéme ic M. Claude touchant l'cftat
de l'Eglifedans l'onziéiTie lieck' , & dans
les fuivans , tonde fur une tripk igno-
rance qu'il doit attribuer aux diverks
focietcz qui eftoient alors dans le mon-
de , 1. 1-1. c. 8. p. I4J
Syflcme àe l'opinion de M. Claude fur
la créance diftuide & confufe, i, J. 6,
c,;. p. 4S7.&feq.
Ttmo'fgnitge des hommes doit paiïcr
quelquefois pour ' indubitable , ôc
quand, 1. 1. 9. c. i. p. fijf
Conditions fuffifantes pour rendre des
témoins croyables ,r.g. 1. I. c.ii. p, 197.
Temps inexplicable pour les Minif-
tres, i.l. 9. CI. p. é4>
Termes qui ont un double fens , 1. 1. 7.
C. t. p. 47f.ibid.
Termes abrégez auxquels on fùpplée ,
& qui donnent une idée plus étendue
que leur fignifîcation precife^ 3. 1. i. c. j
p. if. Peuvent elhe réduits à Iciu signi-
fication literale , ibid. p. 17
Que l'efprit ne demeurant point dans
la fignifîcation grammaticale de ces
termes j ils peuvent eftre employez en
toutes forces d'occafîons j 5,1. :, c. ;. p,
50. fi
Thebutis premier corrupteur de la foy
de l'Eglife , parce qu'on ne l'avoir pas
voulu faire Evefquc, i. 1. i. c. S.p.yS
Théodore Abucara Evêque des Ca-
riens, 1.1.7. c.9. p. 541. Paifage de cet
auteur fur l'Euchariftic, p. 543
Theidore de Mopfuefte qui combat le
péché originel , approuvé par Photius,
I.l. II. p. 45
Que cette erreur ne luy a. point eflé
reprochée au f . fîecle , 1. 1. ii. p. 18
Theodoret, Difpute fur Theodorct nul-
lement decifive , 5. 1, 5, c. i.p. 144.
Theodoret établit la prefence réelle
clairement , ;. 1, j. c. ^. p. if 1
Tbeo^hiUde a fleuri dans l'onzième
jecle, fait Archevêque d'Acride , n'ac-
cufe point les Latins d'erreur fur l'Ea-
chariftie^i.l.i. c.y. p. 149.
Ses pùfiages pour U prefence réelle &
MATIERES.
naQlI'ubft. p. ifo. Aveu de Saum
& la contradidion , ibid. Fauifcs (blu-
tions des Mimltres refutées , p. jyi ^
M-
Doute propofé par Th;ophilaéle n'eu;
jamais venu dans l'efprit d'aucun Calvi-
nifte , ibid. p. 16S
S. Thomas écrit contre les Grecs par
l'ordre d'Urbin 4. Sa rcponfe au chan-
tre d'Antioche marque que les Sarra-
zins reprochoi.'nt aux Chrefticns la
créance de la prefence réellcj 1,1,3. c, ;,
p. iiS
Tout colleftif différent d'un tout con-
notatif : ce qpi demefle un fophifme
d'Aubertln, 5. 1, i.c. i.p. 16
Tradition. Règle de faint Auguflin
poux les traditi<>ns apofloliqucs , i. 1. 1
c.9. p. S;
Ttaitté d'accord entre les Grecs & les
Latins , où il n'eft point parlé de la.
tranffub. i.l. 3. c.7. p. 137
Tranjfubflantiation fignée par les Grecs,
r. g. 1. I. c. 8. p. 114. Mot de change-
ment déterminé au changement lub-
ftantiel par tous ces a£tcs , p. 117
Tranjfiibfi. Sc changement , termes
équivalens parmi les Grecs j r. g. 1, i.
c.,9. p. 144
Tranjfubjtantiat'ion exprimée par cer-
tains auteurs par une élévation à un pins
haut eftat, 5. 1. f. c. u p. 17?
Triode office de Carefmc parnji les
Grecsjes Calviniftes y font anarhemati-
zez, I.l. 4.C. ro.p. 515
Tritheme parle de Bertram fans l'a-
voir leu , 1. 1. II. p. 16
Tyfe du corps de la Vjerge pris pour
l'Euchariflie confacré par Aubertin &
par Blondel, i,1.7,c,3.p. 487
Vyilenttn fe fait hérétique pour n'a^
voir pas efté Evêque, i. l.t, c,8.p.79
Valfridus Strabo pajle le langage des
fens fur l'Euchariflie. t.l, S, c, 4. p. J6y,
Celuy de la foy , f 74
Veccus. Voyez Jean Veccus,
yerice^ de foy ne font pas toutes éta-
blies fur les mêmes preuves^ 1. 1. 6. c, r
p-4if
Vérité prifc pour clarté par S. Am-
broife, 1. 1.6. c.ii.p.<^9'5
Comment la realité le conclut de ce
que rEuchjri,ftic çft appell.éc vérité à
l'égard
TABLE DE
l'égard des anciens Sacremens, i. 1. 6
c. to. p. éyi
Procédé des Miniftres dans l'étibiif-
•feineat de leur -ver/u (eparée , i.l.;.c,4.
p. fSo.
yertu fcparce tirée de Marcellus Pho-
tin & Sophronius, & employée par eux
à détruire la divinité du Verbe, i. 1. f .
c. I4.p.^S4
Vert» feparée cirée mal à propos d'un
palTage de faint Cyrille rapporté par
Viilor d'Antiojlie. Examen de ce paf-
fàge, i.l.j.c. lo. p. 584
Pfeuves fubfidiaires de la vertu fepa-
j-ée,i.l.f.c.ii.p. JJ7
rl-'ertu du corps de J. C. danc Theo-
philavSc cV-ft le corps de J. C. pldn de
vertu. Réfutation des chicaneries de
M, Claude fur ce point, 1. 1. j. c. 13.
p. f74
Sens de vertu ne peut raifonnable-
ment eftrc enfermé dans ces paroles:
Cecy efl moncorfs ^ 1. 1.6. c.4. p. 68
Vies des Saints du 10. liecle, 1. 1 9.C. tf
p. 679. Il n'y eft parlé d'aucune dilpute
îiir l'Euchar, ibid.
Vnion des preuves pour le confente-
ment des deux Eglifcs eft d'une force in-
vincible, i.l. 1 c. II. p. 178'
Vnion de la divinité au pain comme
caufe efficace , marquée par Nicolas de
Methone, 1. 1. 4, c. $. p. ;6o.
Vnion d'objets différents en une mé-
nie idée, ?.1.3.ç.é. p. 17J
Vfuge de cette union dans les auteurs
déclarez pour la tranrtubft. 171. &c.
Sophilmes des Miniftres qui naiflenc
de l'ignorance de ce principe, 3. l.j. c. 7.
p. 176
Nourriture & autres accidens attri-
buez à l'Euchar. confequence de cette
, union de divers obj ;ts en une même idée,
3.1. 5- c. 8. p. 187. &c.
Auteurs qui ont dit que l'Euchariftie
eftoit exempte de la condition des vian-
des communes J 5. l. }. c. 8. p. 191
Vnitez^ inégales fe diftinguent par fcs
diverfes expreffions , 1. 1. 8. c. 7. p, «01
Vnité de viftime reconnue par faint
Chryfoftome dans l'Euchar. preuve de
la realité , 1. 1. 6. c. 11. p. 691
Vra-1. Qjie le terme de vray dans ces
propoiîtions , Cfejl le niray corps de J. C.
&c. exclut la figure & marque la realité
2. 1. 4. c. 8. p. 587 & ch. 9. p. 411. Ç^
fui-v.
Combien ce langage eûoit commun
S AUTEURS. ^45
dans l'ancien.ie Eglife , p. 3S8. ^ fun.
Chicaneries de M. Claude llir le ter-
me de vray , 1. 1. 4. c, 8, p. jsi.Faulics
coniparaifons, ibid.
yere employé par oppofition au dou-
te , 1. 1. 4.c.8.p. ?94
Sens chimérique du mot de vray corps
de J, C. allègue par M. Claude , i. 1. 4,
c. 9. p. 411. ^ Jui-v.
VrAj marque une affirmation foite
oppofée au doute, 1. 1. 4. c. 15. p. 41 g
Ufage ridicule du mot de vray, 1. 1.4.
c. 13. p. 457
Grands efforts de M. Claude pour élu-
der la preuve tirée des mots de vraj corps
z.l. 4.C. 9. p. 400. Généralité de cette ex-
prclTïon, ibid. Qu'elle a efté prife en un
mêmelêns, 401. Que -vere Ç£ -verHf ne
peuvêt /îgnifierla vérité de la vertu, p. 404
Sens particulier du mot de "vertus dans
quelques palTages, 407
Volonté humaine a dej effets réglez 8c
déréglez, i. l.io. c. 17. p. 761
Vjlatus Evéque Arme nien. Son at-
teftation fur l'Euchariftie , r.l. 11. p.^S
Réponfe du même Evéque fur diverfes
queftionSj ibid.
Extrait de la Liturgie Arménien ncdon-
né par cet Evêque 79.
Réponfe du même Evêque fur diver-
fes queftions touchant l'eftat prefeut de
l'Eglife d'Arménie , 1. 1, îi. p. So.
Z
Z^nchius figne la concorde de Vvi-
temberg avec une équivoque hon-
teufe, 1. 1,1. Cf. p.f4.
Zumgle avoué que S. Auguftin a cru la
prefence réelle , 1. 1. i. c ;. p. 47
N'apprend le (êns de figure que long-
temps après avoir rejette la doârine de
la prefence réelle , i.l.i.c.i.p.î^. Cona-
ment il a trouvé les adrefles pour le dé-
fendre , ibid. Premier eftat auquel il pro-
pofa fon opinion qu'on peut appeller eftat
de fincerité. thid. Il ne reconnoift d'abord
dans le Sacrement que la figure, p. ?o.
& ;i.nie que ce%-p2.To\es,Hoc ejfl corpts ç£c.
contiennent une promelTe de grâce, p.? i ,
Ne parle point de l'efficace jointe a« figne
p. 33-
Que Zuingle n'a admis que de purs fî-
gncs dans le Sacrement, 1. 1. r.c.j.p. ?o.
il n'a pas reconnu plus d'efficace dans
l'Euchariftie que dans tous les autres fi-
gnes arbitraires ou naturels de J.C.p, 78
Oecolampades en fait de même, p. 59
fin de U Table des Matières,
O O 000
TABLE
DES PASSAGES DES AUTEURS,
SUR LESÇ^UELS ON FAIT QUELQ^UES
reflexlom particulières dans les crois tomes de la
Perpétuité , fc dans la réponfe générale-
De^MAN'Us Epift. nd Bgreng,
^malàrius Ipirilcgiiidm.yl p^tyi
cte officiis Ecclcfîaft. 1 î.'cîf . ....-.^.i.^ -.
^mhrofists deiisquim/fteriis iiii- '' "i-il.jjVCi 8.. p. J07. & p. p 3
liaiitur , c; -y- m -:• .• ;:■ -'Ji .j'i
r. 1.9. c. I. p. (. f}, & 70f'
I 1. 8.C.4.P. f7i
".c. 7.p.6oS.
1.1.8.
Defacrameiitis,
1. (S.c. I
+.C.+
iilPfal,-3 8
^mhroftafler in prima Epiftoland Cojint.c. ir
^naftafius Synaira , traft .a'hx-^of c. 15
C. 15
Orat. de facra Synaxi,
u4n(ehnus de 5. Valeriaiij qusft. c, 4.
^ugnltiuKs contr.x Adiinanmm-,.tf;'ii'
Êpiftol.adBonifac. -' '•;''
1. 3. dedoûrin. Chirifti /c, is '
de fcrm. Doinini in mont'e. • •
de Civitate Dei, 1. ii.'c. if* '
de hïref.ad Quolvultdeum, •"'
cont. Fauft. 1. u.c. 10.
&1. lo.c.iS ••'
contra adverf. leg. Si proph. ■!.%.■ c.. 5»
d.- pfcca torum meritis;- î.'=>! . ç. ^o
courra Crcfcon. 1.1. c.2f! ' ''- "'■'■'•■
^Kj;iin, p(al. j
iaiD^il. 55.
inpr^l.îg
in pfal. 7j(
in pfal. pS
tra^. 15. in Joann,
1.4. c.v.p.Hi. ^P-^ff?- ^ ^•'^••
c. ? p. f07. & c.S.p. 644
;. 1.;. c. 7.p.i85
z.l.4.c.3.p,!4i.c.8.p.î90.
&1 f.c.ii. p,5t9.&3'-<'-'^-'*"''
p. 171. i.i.6.c.ii.p.6^y
i. 1. 5. C.4. p.ij7 ' . .j
1. 1. -".c. i. p. 471.
iitd. p. 480.
ti>td, p. 48J
1.1. 3 C.S.p. 1^5
3'l.i.c.i.p.H.&1.2-.c-^ P-9f'
3. 1. i.c. é. p. 99
- 3. 1.6. c. 8. p. 407
5.1 é'. C. f.p-i^î-
3. 1.-6.C. 9. p. 417
1. 1. i.c. 3.p.î4
3;1.6-.c.j.p. 3»7
3.1.«.c.n.p. 44y.
j.ll^.'c. 5'.'p-^76
3. 1. 6.Ç. f.'p. 78:?
3.1'.6.c.f-p. v;3
'3.1.1.0.4. p. 46
^■ia\i,.dans Lir'-ff.
i.U.c.g.p.C+S&î-l-^-'^-f-P'^'
1. 1. 6. c. 10. p. 6715
3.1. S.c.f. p. ?84.&P-'^°'
p, 3 . </«»».> la P:-efac^'
24J
TA,&.LEÏ!)ES AUTEURS.
Traa. 26. in Jpaii. , i . 1. tf . c. 5. p. 4}«
traa. injoan. ; , ^.■>,. dans Ufref.
Scrm.i devetbo Apoiloli,. 3.1- U.c. <>. p. 410
St-rm. gj. de diverlis. 3, 1_ i_ (.. 9. p. u6
c , ■ f 5.1-i.c.8.p,ii5.&c.^.p.ii4.
Scnn.admEint. &/^/^.p.i35
^uthor Commentarii in pf. incer opéra Hieron, in i. 1, 4. c. 9. p. 407
pl'al. 1+7
,u<uthor. Homil. de cruce inter opéra Chrjfoft. i. 1, j., c. 3. p, 500
^«r,i. Comm. in epift. PauL incer opéra Anfelmi , 3* l' 4', c. 1". p. lu
inl.io.&ii, Epift.i.'ad Cor.
"' . B
BAS tl:us deBaptiCl. i.quxft.i.&j 3. 1. S. c. 9. p. 418.
BedumU^^.tc.\.^ 1.1.5. c. 4.p. léS
Bejfarmn de Sacram. Euchari/lis. I 1. 7 c 6 P, f 14
Bernardus^ ferm. 5. in pfal. Oui habitat. 3.'l.'l.c.i 'p.25.& î.l.«.c.8 p 410
Bertramus de corp. & fang. Domini. ,, i,g_ c.iz. p.539. ,5 ^/-v.
& U. p, 5t. ǧJui-v,
5/o»</e/ Eclaircitr. fur rCuch. c. itf. I.I.7.C. io.p,j'49 •
C
AsAsiLAsin EipoC Litureis, ,
C.24 i.l.}.c.8.p.i4J
c. 17
c 19
c, 50
c. îi
c. j9
in Jean. hom. 41
hom. 4y.
liom. 46
ibid,
ibid. p. 145
»*/(/. p. 147. 248. & R.G.Î.z^
C.52 C. 5,p.4So
I. 1. J.c. 8.p. 140
de vira Chrifti 14 1. 1. j.c. 8.p. 251.5?',
Cîfarius dialogo j 5. inter. r, 1. 9. i-1.5. c. 9- p. 31^.
Caietan in 5. p. S. Thom.quxft. 75. art. i 2. l.t.c.j.p. i«9
C-.ÏW», gêner, ^thiop. i.I. f.c.i j. p. 40tf
R.G.I. i.c.ij-.p.i45
C<»ro/«j Mag. de imag. 1. 4. c. 14 i.l.S. c.4.p. J77
epifl. ad Alcuin. ■'*"^-
Crfj^^Wifrin liturgia Armenorum, J. 1. 5.c. s.p. 379
Chryfoftomus. Hom. 2. ad pop. Antioch. *. L *• '^^ '5' P- 71}
in pfal. no. 3.1,4. c. j. p. 216
defacerd.l. 3. i.l.é. c. i3-p.7iî
Hom. de Cruce. 2. 1. 6. c. 13. p. 70S,
hom.deEuchar. 3. 1. 4. c.?. p. 216
hom. 51. in Math. ' "• •^- '^^ ''■ P'^^ , » „ ,,0
hom. 8,. m Math. ^- M- '^•-- P-'^°- ^ ^/: P-^ °'
&1. 4. <:.2. p. 33J &c. 4. p.
319. &c. é.p. 371. 1. <!.c- 13.
p. 708. & 5.1. 4- c. 3. p. 2lé.
& G. 4. p. 220
1, 1, 6, c. II. p. 694
2. 1, 5 • c. 7. p. 292. &c. & 1. 6
\. ' r c. 13- p. 709
4. 1. 6.C. 12. p. 694
„ , , 1. I C.4.p.2é4.&1.4.C.ll.
in Afta hom. il. '• '•'"^ . r o n c a6 & U
j" Ep'^- -'^^°"-^^' rii'p.?o9;i;,.T.Ko:p.4'<^
■■*''"• ^^ iil. 6. c. 12. p. 691. & 3.1.6
cm. 17. in Epift.adHeb. 3. 1. 5. c. lo.p. îU
pift. ad Ca:f. O O O Ô O ij
84<î
TABLE DES AUTEURS.
hom. 17, in ep. adHeb.
epift. ad Cxfar.
Chriftitin. Diutinarin Marh. c.itf
Clemens AlcvXand. pedag.,1. i.c. x
Comment, in cpift. Paul, inter oper. Hicron,
incpilt- ad Cor. c. to
Concilimn Conllantinopol. in Conc, Nicxn.t, ait, S
Concdium Nicxnum , adl.tf
Concil. Florent, fefl". zj
Confejfis Auguft. an. 1^51
Confi'JftonAc iay de l'Egl. Orient,
ConflitHnones Apoft. ). ;, c. 5. 1. «. C, 13. & x^. & 1. 8.
Cil. & n
l.Cortnfh, 10. v. 17
10. V. 16.
• 10. V. 4
Cyprianus epift. «5. ad Catcilium»
epift. 76
de orat. Domini.
Cy'illus Hicrof. Catech. 4. myAi,
Cjrillui Cath. 4s nij;ft^
GatecH. f
Cjrillus Alex, de adoïrat. 1. 7. p. ijr
1.1.
in Joann. p. 314^
1. 4. in J"oan. p. 3^5
p. 3«o. & 365. 36J;
p. 861
1. Il, p. 104
1, 4,adverf. Neft. c. f. p.iir
apolo^. adycrf. Orienr,
1. 7. contr. Jul,
homil. de cœna myftic*
iiïcatena in Mith. Tolofx.
5. 1. 6.C. to, p. 459^
2. 1. 6. C. 11. p. 6jl &
î. l.é.c. 13.P.44J
5.1. î. c,io.p.3iî
1.1. S.c,4.p. f79
».l. J.c. 4. p, 166, & 5. 1. 4»
c. f.p.îi^
). I, (f. c. ri. p. 4+7
1. 1. 7. C.7. p. fil. fi 6. 517. 518^
r. 1.7-. c. f. p.yoa.&c.S. p.yjy-
I. 1. 4. c. 1. p. 171
1. 1. i.c. f. p. 5f
R. g. l.i. c. 9. p. 13 (, 13 j. & J».
1. S. c. If. p. 687
}. !.. 1. c. 4. p. 4i
r. 1. I. c. 8. p. 71
i, 1. t. c. 8. p. 75. Sa
1.1.1. c. 14. p. 117
i. 1, j. c. i.p. 48}» & J.l'-f
CI. p. 141
t.I. 3. c. 4. p. I6tf
t.l. tf. C. II. p. 684
x,r. 10. c. 5% p 751
t. 1. 3.C. S. p. 507. &c. 9-.pt
jii.&l. 4. c. I. p 377. &î^.
r. 4.C. i.p. 5^6. & p. U5. &
}.l. i. e. 4. p. u. 53.& 3 '■4'.
c. 5. p. 114. & 5. 1.6- c. X.
p. J<Ji
f. 1. i.c. 4. p. 3r
i» 1. f C.7. p, jisr
i.I. f. c. i.p. 494
a, 1. r. c. i. P- 49 f
i. 1. Î-. c. 7. p. fi9
*. 1. f.c. r. p. 49*. &c.
t I. r. c. 8. p.î34
3. l.r. C.4. p. 57. & î-1- ^'
c. ii.p. 444
ï, 1. f. c. 3. p. fi.& »•• 1-ï»
e. i. p. 49+
1. I.5.C. r.p.îi7
3. 1.7. c, 1. p. 47î'&î- ^•7«
Cf. p. 499
s. 1. f, c, 1. p. 494 .
z.l.y.cio. p. 5JI
DA II i e' dans fon lirre du vray cmploy des Pe-
resp. Iî8. 131. 1 îf.ljif.i99
advcrf. latinor.de reliq. ciiltu, 1. 4. c. 13
Eionif. Alexand. epift. Canon,
dcEcckf, Hier.G.5&4
1.1. i.c. f. p, îi. n
I. 1. r, c. 10. P-S7
1.1. 6. c. 15. p. 707
3. l.I.C.4'P,4i.& J.l i.C. l.p.f ^
TABLE DES AUTEURS, 847
ELiAS Cretertf. in r. orat. Greg, Nanz, i. 1. f. c. lo.p. ff4
£fiph. in a.ncot, 1. 1. f. c. 9. p. 511
m comp. fi-iei i,l. f.c. ii.p, ySi
in comp. ferm. ie fîde Eccle. 5. ], 6. c, 3. p. 571
t.}h>em i'j'n.. de natara Dei curiofe non fciutanda , j. 1. 1. c. 4. p, 44. & 5. 1 «,
c.j.p. 3^4.
Ephrem Antiocn. apud Photium cod, 3.1,5.0. lo. p, jié. & jij
Zthertus & beat, lib; adverf, Elipand. i,l, 4. c. 9. p. 405, & 1. 1. «•
Eufeb, de demonft, Evun^. 1. 1, c, lO c- 8, p. 643. & c. 10. p. 67U
idem 1. 8, j,l. i,c,4.p.4j
de Eeclef, Theol. contra Marccll, an. 1. f-, j. 1, <. c.«.p. 40*
c. II
apudEhimafccn. 3.paral.c.4y, z.l.tf.c. i.p.fSS
£)»/^OT/«/ in Matth. c. 6-4 ^1 ,_ ^ jj^ „ j^.
& I. 1. t. c. li. p. 179, a
in panop tit. de Paulician, p.iSi
i.l, 1. c. it, p. i8t
FA eu NOUS lib. 9. p. +04 ^.l.t.c. 7. p. 101. &c.
florus inexpl. milH ,_ 1_ «_ c_ ^_ p, y7j_ & c. 7;
. ^ p.f97
rMertEpM.j f. 1. 8. c. 7. p. éotf
fulgentius de baptif. iEchiopif, c. ir. j_ i_ 4, j. ,_ p_ ^jg_ ^ ^ y y^
C.5. p.joo. &;03
G
Abriei. Archiep; Philadelphia; , j.l. 3.C. ^. p. 171. & r. g. 1. 1.
C.ro. p. I6ré
Gaudentiuî Brixian. tiaft, i. in Exod, j.l. 3. c. 4. p. 1^4. & i.l.4.
e. I. p 317. & 3. 1. I. c. +.
p. 5S.&Î. 1. 4.C. 4. p. »i»
1.1, 10. c. y. p. 7ÎI
}.l. 1.C.4 p. 45
CeUr. Cyzicèn. »• }■ ^- <=■ "^^ P- +*
in diatvp. Gelaf. J.l. f. c. 10. p. 3if
traft. de 1. nuur. cont, Neft. & Eutych. ?• ^ +• <^- *• P-^*?'
de duabus natur. *
Ctmma anima: , 1, i. c. ioj>
t.l. -.c. I4.p, iio
c. (î
Cen. 17. V. ro
i. ^. 1. 1. c. 14. p. 1^4
c. 41. V. i<î l.i.7-c.3.p.48fef/'"'^
Cer^anus
Cermurus Patriarch. Confiant. ' }.l. ?. c. é. p. I7î
in theor. myftcr
Cotfrid Vin foc. trîcîl. de corp. & fang. tom. i; J. 1. 1. c. r- P- 49
BiSliot Patr. p. f+4 '•|"''*^'^''''^°É7i
Creeorius Nazianz. orat. il. i.l.é. c 10. p. 67Î
"* T 1 1 c « P. iî9 oc '■ ^•^'
orat". 4'' , x..p.i-'9.&^.lf-<:.t.P.-4»I
CresoriMt Nyff. orat. Catech.c,}?. ^'•';-Z ^^-r^"^ ...
S48 TABLE DES AUTEUES.
Guillelmus Malinesb. iii OJone , i. ^. 9. c. (,. p. €8
in Vuiklmo . 1. 1- }. 1. 1 9. c i. p. 6,6
H'
H
E 1 G A L D II s in Epitome vita: Robeiti Reg,
Henric. Boxoinius , 1. i. p. <0
chsu-s . 1, r in Leviticiira.
Patriarcha Conft,
I, c. lo. p. %6
yiierem
R.-'lp
Hieron. Epift. ad Hedib
in Jerem. c. îi
in 41. Ezech.
in Matdi.16
HiUrtus de Ttin. 1. 8
I. i.&>
Hildebert Csnom. in carn.
Htncmxtc de pridcft. c. J
Hoff. p. 1. f. m &iii
f. 144.
f. 3'o
//0«/»^. fec. 16. p. f O
inappend.diflertationis, S.p.fî5 .^
«««.ie.r^.' cont. Grxc. calum. Bibliot Part. Pat.I.
t. 4. p. 10 1
contra Nicct.
I. h 9.c.i.p.iîr7
I. l.i.c. 4.p.iio
A. 1. 4. c. z. p. 35f. & i. ,1,
4.C.7 P ^78 . i
i.l. 4. c. 4.p.iS5 ■•.
thiil p, ii/O V
.3. 1. 4.C. é. p.i}6
î. 1. t. c. 4. p, 46
3.1. I.C.4. p. 44
a. 1.3. c. 4. p. i^^
1. 1. 4. c. I. p. JiS, & c. 8,
p, 589. &3.I. *■ c. 1. p. 3^1»
3J. 7. c. 8. p fio
5, 1. 5. c. 6. p i7i
1.1.8. c. 11. p. «43
1.1. i.c.9. p. 78
1,1. I. c. s
1. 1. I. C.9. p. 79
I. 1. 4. c. 4. p.iSi
i.l. 4. C.6. p. 3°°
î.l. 3. c.â. p. 182, & 3- '• î
c. I. p. 140. &C.;;. i.c.io.
p.43y
I. l.i.c.6. p. 131
IGnatius Epift. ad Smirn.
/crfw.ii.aux Arni.
7»^»»« Datnafceuus de fide orthodox. 1. 4- <:• 1+
idem orat. 3. de imagin.
Joannes de Parifiis ,
Jaannes RusbrocW in fpcculo
l,en<)iifs 1.4. adverf. hxr. c. 3 4
1. f. Cl.
apud Oecum.
Jfidor. in Exod. C ï%
DeEcclefiaft.offic.cxv.
lufitntii apolog. 1
1.1,
10. c. f. p. 748. 749.
.1.1. c. 14. p.joo
7. C.4. p. 491
p. 49é.& r. g. 1.1. c. 9.
II
7. c. I. p. 460. &c.
3. c. 8.p. i8«
6.C. 13. P.704.&Î
c. 1. p. 10. & 1. 3. c- T
7«
4.c.i.p. 337
7. Cl. p. 47^
î.l.8.c.4.P-f70
i.l.io.c.^. p. 7fo &i.lî.
c, 8. p. 504. Sec. & 1. !• 6»
c. 13- p 703
r. g.
I.l.
3.1.
2..1.
1.1,
p.i
1.1.
î.l.
LAnfrancus decorpore&fanguineDomini,c.iz
La-^ate,-us Hiftor, Sacrament. p. 5
irfî:,<f/«j apud Forb, p. 4oS
Léo IX. Epift. I. tom. 3. E^j^om.
LttHrghi BAÛlii.
Pont. C. 5>
I. 1. 1. c. 7- p. 140
i.l.i.c.y.p.46
i.l.f.c.4.P-3fr
T.l.i.c. f.p. 114
*.1.4.<:.ii.p.4>5.
TABLE DES
Luci ■> o
AUTEURS. S49
i.l.I.C.I4. p. 118. &tjg
I.I.7.C 9. p.y45
VL
MAcARius hom. tj.
Manus Euhefîn,
Matth. 15. V î8
2A. V. iC
Maximus in Eccleflall^
Hierar, c. 3.
M.jj.t II ;.ici ,
N
3. 1. I. c. 4, p. 4«
1.1.4. c, 3. p. tyj
ï. 1. I. c. 15. p. 107
1. 1. I. c. 9. p. 76
j. l.i. c. i.p. f7
l.l. 8. c. 3. p. jtff
NiCEPHOR.Patriarcha Conft.in AntirreticoapuJ
Allacium de perpétua con(enl' p. 1121.
idem de Chcrub. c. 6
Nicetai Cbor. in Alfxio ann. g. 1 5.
NtceLis Methon. deiisqui dubi:ant & Biblior,
vec. Patr. 1. 1. Gnecol.
O
OEcoLAMPADras Epift. apol, ad Philipp,
Melaricl. apuJ Ho p. p. z.p, 71
S. Od$to in vita AdeUidis
Origenes hom. 4. ia Levit.
in Matth. c ij
concr. Celf. 1. 1.
P
PAcHYMïRES in c.;.de Eccl. Hier.
Pafc.tJ. Ratber. de corp. & faiig. Domini ,
in Mjth. c. i6.
Epift. o.d f rudeg.
V'itit'~.:us Ration. 1. ^.pîrt. i. c. 7
Pctrus Chryfolog.
Vetrus Damian. traifï. de Domin. vobircum
Petrus Siculus Bibl. Patr. Colon fjcculo 9.
Photius Eftfiol. ad Ntcol.i-fud ^liat.
erercit. adveri, Chreigt p.J é + j
Pfal 14
R
RA'BAnus in Math. i6
Rainatdtts ann. 1^7 7, m '-,6
n. <9-
ann. n:8.n.8
Rtïiigius Aliidî'or. inEïPofit.M' T^e,
in c. 10. 10. 1. Eu- 1. aa Corint.
S
SAcRANus de Relig. RiilTorum errore, 10
: ■■.'i,i,'.! Ev>.-ry.'e de Gaze,
S.iiéicen. Mr.hunji-Xa, p . 89
Sct'li^/A.na ^ P- "^
S<:■uerus■'Y^czX.t■^.■^. Aiitucrpiï
:! :. G. joan.
Sfi ro.n. z. p. ^74
.5. î^a demorib. Chai, p- 117
ï.l. 7.C. 5.p. foi & fii&fio
tkidem
l.l.i. c. 14. p. 191
i.l.i.c.i?.p.iS3.&:i.l.)4.c.f
p.56t. &r. g.l. i.c. !i.p,45i
p.jfi
1. 1. 9 c, (î.p. 6^4.
^1. 6. C. 6. p. 401
3, 1. 3. C. 8. p. 188
3.1.7. c. i.p. 47J
}, l.i.c. é.p. 94
1. 1. 8.C 8.p.6iî. & 6'.€. (l'i.
rttd.p. 615. i^ /'"'''.
C. 9. p. <5i8.& c. lO. p. 614
1.1.7. C. 8.p. n9
1.1. 6.C. ij. p. 707
3. I.c. I. p. 11
1.1.7. C.9- P- Î44. Î4r
1. 1. 10. c. 4. p-741
1. 1. I. c. 14. p. ii«
l.l. 3.C.4.P. ^f6
R. g. 1. iS.p. ÏI9
1. 1. ?. c. 3. p. m
1. 1. r.c. <f. p. 570
I. 1. ».C.4 p. '74
1, 1. 8 c. 7. p. 6.00
1.1 5. c. i.p. Hî-
1.1.3- <-■ 7- p- -5^
I. 1. 1. c. 15. p 100.
1. 1. 1. c. s. p. 4''
1.1. 5.C. É. P- fi7
I. 1. 9. c. 1. p. ^Ji
ï.\, 5. c. 10. p. 393
Sjo TABLE DES AUTEURS.
exercic. comr. Cfueigron. p. 4i(; -r . .^. )<»
lib de Sacr.ai. apud Arcud. 1. j. c. ir.p. ^77 ,W. p. rs:
P
SjrofuLus
I. 1. 4. c. 7. p. i(Ç9
X rW/,^„«. apoiog. c. 7 3. 1, 7 c. z.p 47
de pra.'(cnpt. adverf. Jia:rec. c. iS i. 1. 2. g. i p 10/
de amni. c. 17 ' ^'
de refurreftione carn. c. 8 5. 1. <?. c. 6. p. 408
• '• =^'*^"'- Marcion. c. i* i.l. 5. c. f.p.fyô &c.
J- '• ''• '» ;.l-i. c.i.p.jg
^•'^•'^- *° &5.1.i.c.z. p. 71 & c.
p. 76 &C.4. p. Si & c.
p. 86, 8S
Theodoreftfs Epift. ad Corint. c. 11. i. l.J.c. 4. p.ifS
'J'ai. I 5- 1. r. c. 1, p. Z47 & c. 3.
dialog. z p.iy5
, , &3.I.1. C.4. p. 4f & ^l
Theodorus Abucara Epifcopus Cariar, opus 11 c. 7. p. lS4. 1. 1. 7. c. 9 p. j
Theodorus apud AUatium in exercita:, adverf, 1. 1. 7. c; j. p. 488, & 551'
Clireigt. p. 416
Theodorus apud Clément, Alex. 2. 1. f.c. tt. p.ytfj
Theodorus Antiochenus apud Buline, 3, 1. 5. c. 4. p. ifii.
TheofhiUlius in Math. c. lé 1. 1. 1. cy. p. 145. Ç^ fui-v^
in Joan. c. lî
in Marc. c. 14 r, 1. i. c. 9. p. if?
inMattli. C.14 - 2. 1. 4. c, f . p j-îi
in Marc. - a. 1. C- c, ij. p. 574
Thetfhjlus Antioch. comm. in Matth. li 1. 1. 3. c. 4. p. ifif
Theorian. Légat, ad Armen. 1. 1. f. c.é. p. jtff
S.Thomas in opufcujo cui titulus eft, déclarât i, 1,3, c.y, p.jiS
quorumdam dubiorum contra Grxcos Armenos
& Saracen. 1
Trkdus ou l'office de Carême parmi les Grecs. i. I. 4. c. 10. p. 31e
TttrcogrMta^ p. 414 1. 1. 4, c. 4. p. i8j
V
IcTOR, Antiochenus comm, in Marc. 14 i. 1.3. c. 4. p. 160
Z
ZOnaras ou Glycas apud All.in excrcicat, ad- i, 1. i. c. 14. p. 19*
vcrf. Chreigt. p, 544
Epift. ;i. Calcera.
«. tom. fanfti Cyrilli^ fiveGlicas^ 2. 1. 3.£. 6. p. 17?
apud Allât. Exercit. adverf.
Chreigt. p. 544
Zuingims de vera Relig. p. m 2- 1. i. c. 2. p. ;•>
Refp. ad Struth. f. 31Î
Expof. fidei fol. /H *. 1- ï- c 5- P- H
TABLE
TA BLE
DES ATTESTATIONS ET ACTES DES EGLISES
d'Orient , produits dans les trois Volumes de cet Ouvrage,
& dans la Rëponfe générale , pour juftifier l'union de cci
Eglifes avec l'Eglife Romaine, dans la créance de lapre-
fence réelle & de'Ia TranfTubftantiation , &; autres pumis
conteftez entre les Catholiques èc les Calviniftes,
POUR L'EGLISE GRECQ^UE.
D'^ns le premier Tome de la Perpétuité.
ES c R I T d'un Seigneur Moldave fur la créance des Grecs, intitulé , Enchiri^
dton^fne flelUOrientalts , &c. l.tt.-j). jo
ProfefTion de foy des Grecs du Patriarchat d'Antioche fur l'Euchariftie^&c. 1. ii p. ff
Lettre de M. Olearius fiu la créance des Mofcovices & Arméniens. 1. 12.. p.) <î
Ecrit du Métropolitain de Gaze fur la créance des Grecs &des Mofcovites, 1. 11. p. f?
Extraitd'un Synode tenu en l'Ifle de Chypre , lééX l.lip.75
Atteftation d'un Prefl:re& Chanoine de Moufcou, & de trois autres Mofcovites de la
fuite de l'Ambaifadeur , touchant la foy de leur nation. ' 1. ii.p. 77
'Dans la Rëponfe générale.
ConfefTion de foy exigée par Methodius du Dodeur Cicada , 1. 1 . c, 9. p- i4^. & loi
Atteftation de huit Supérieurs & Religieux du mont Athos. I.1.C.9, p. ifo
Atteftation de Methodius Patriarche de Conftantinople , 1. 1. c. 9. p. ifi
Atteftation des Supérieurs du mont Athos fur Agapius , 1. 1. c. n- ?• '7?
Dans le troijtéme Tome de la Perpétuité.
Atteftation de fepc Archevefques d'Orient. '■ 8- c. 1. r. î*^»
Atteftation de l'Eglife de l'IAe de Siphanto , 1. 8. c. z . p.y/i
Atteftation de l'Eglife de l'Ifle d'Andros, l.S.c.3. pr «
Atteftation de l'Eglife de Siphanto fur Agapius, 1 8c.5.p. f,6
Atteftation de l'Eglife de l'Ifle d'Anaxia, ''• »• C- ?• P- f76
Atteftation des Eglifcs des lOes de Cephalome.Zante, & Icaquf:, 1. 8. c, 5.p. r^S
Atteftation de l'iflc de Mico,ne, '• " c.vp-'^^
Atteftation de l'Eglife de ritle de Milo, l.S.c.J.p- »-
Atteftation de l'Eglife de Chio , 1.8. c. 3. p. f H
Atteftation d'un Supérieur & des Religieux du Monaftererde Mauromale, c. 4. f!^f
Lettre de Monfieur Panaiotti , 1- ^•<^- +• P/^f
Atteftuion du Patriarche de Conftantinople, & des Métropolitains de fon Pam, r-
chat, 1.8c,«.p6 5
Atteftation des Eglifcs de Mingrelie, Colchide, & Géorgie, 1. 8. c. 7. p. «3+
Attcft.;ition i^u Vi-aire Aporto'liqueRcfidentàConftantinpplc, 1.8. c. 8. p. K-,8
Atteftation de M. CafimirRcfidcnt de Pologne, c.8,p.é+o
AtteftotionaeM.QiiiiinoRefidentde la Republique deVenife, c. g. n. 641
Atteftiation de M. Fiefchi Refident de Gène , c.S.p. 611
Ppppp
Atteftations des Ambafladeurs-de la Republique de Ragufe , c, S. p. ^4+
Actcftation de la Comunauté des Perottes , p. é+j
Arcellatioii du (îi.urTai(Ia fur la mort di; (on fils, commencée par les Grecs. c, 9. p. 649
Lettre de Nedlarius Patriarche de Jerufalcm à Payfius Patriarche d'Alexandrie ,
c. 10. p. <;j5
Extrait de quelques decifîons de l'Eglife de Conftantinoplc, envoyées aux Ruffes ,
c. II. p. 6(L
RéponfL' de Marc Doinis de l'Ifle de Candie à M. Claude, c.ii.p.6é4
Approbation de la féconde confe/Tion orthodoxe par Denis Patriarche de Conftan-
tinoplc, c. i4.p. 6S6
Extrair d'un traité Synodal compofc par Pofîthée Patriarche de Jcrufalem , & pat
l'on Synode à la dédicace d'une Eglife de Betlehem , c. 15. p. ^91
Condamnation des Calviniftes parMacaire Patriarche d'Antioche de la nation des
Grecs, c. 17. p. iij
Autre condamnation de plufieurs autres erreurs des Calviniftes par le même Patriar-
che, p. 7J7
Nouvelle condamnation des Calviniftes par l'Eglife Grecque du Patriarchat d'An-
tioche fous le Patriarche Néophyte , c. 17. p. 743
Apologie de Soterichus Panteugenus au Patriarche & au Concile, furies chofcs tou-
chant lc(quclles on l'a accufé, c,ri. p. y^i
Extrair du traité d'Elic Evefquc de Jerufalem fur les myfteres , tiré dun manufcrit A-
rabe de la biblioteque du Roy , c. ir. p. 794
Extrait d'une lettre de Melece Patriarche d'Alexandrie envoyée de Conftantinoplc ,
F- 79f
Atteftation du Supérieur du Monaftere de S. George , c. tj, p. Soi
ïitrait du traité de Meletius Syrigus contre Cyrille Lucar, dans l'addition.
POUR LES MARONITES.
*l.P.7i
Dans le Tome troijîème.
E ou traité des Maronites d'Antioche fur la foy de leurs Eglifes, 1, J.c, 16.
P-
POUR L'EGLISE ARMENIENNE.
Dans le premier Tome.
ATTESTATION d'un Patriarche Armenicnquieft prefcntcmcnt àRome , touchant
la créance des Arméniens furl'Euchariftie. 1. ii. p. 78
Atteftation d'Ufcanus Evefque de S. Serge en la grande Arménie, donnée à Amftcr-
<l3m, 1. II. p. 78
Attclbtion du Patriarche &: de plufieurs Preftres & Evefques Arméniens refidens à
jAlep, lu, p. 81
Hans la Rèponfe générale.
Atteftation du Patriarche Dermeazim fur la créance des Arméniens , 1. r. f . 1 8. p. 187
Atteftation des Archevefques Arméniens de Conftantinople , d'Amafce & d'Andrino-
Ple, p. 19J
Dans le troijî'eme Volume.
Atteftation du Patriarche de Cis , 1. 8. c, lo. p. 770
Atteftatisn des Arméniens du Caire, , p. 77r
Atteftation «les Arméniens d'Ifpahan , p, 77Î
8|3
POUR LES SYRIENS.
Dans le premier Tome.
f A Ttestation du Patriarche des Syriens touchant 1» foy de leurs Eglifès
A fur l'Euchariftie. l.ii.p.»*
Dans le troifème Tome.
Condamnation des calviniftes par l'Eglife des Syriens de Damas , c. iSp- 7î8
Extrait d'un manufcrit Arabe de la bibliothèque du Roy , qui fait voir la créance d«S
Jacobites fur l'Euchariftie au dixième fiécle. 8ij. p. 7*7
POUR LES NESTORIENS.
Dans la Réponfe générale.
A
Dans le troijtème V'olume^
Extrait des MiiTelsSc livres de prières des Neftoriens. 1. S.c.rf.p. 8«o. &s
POUR L'EGLISE DES COPHTES.
Dans le troijîème Volume.
r/k Ttes TATioN du Patriarche des Cophtes. 1, S.c. i^.p. 7*?
^\. Autre atteftation du même fur l'Euchariftie en particulier, P- 5*^
Ttestation du Patriarche des Neftoriens de la ville de DiarbeKcr, i . c^ i J.
p. i?*
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