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Full text of "La Perpétuité de la foy de l'Eglise catholique touchant l'Eucharistie, déffendue contre les livres du Sieur Claude, ministre de Charenton"

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Universityof  Ottawa 


Iittp://www.archive.org/details/laperptuitde03arna 


PERPETUITE' 

DELA  FOY 

DE  LEGLISE 

CATHOLIQUE 

TOUCHANT 

LEUCHARISTIE^ 

DE' FENDUE 
Contre  les  Libres  du.  Sieur  Claude  ,  Minifire  de  Charenton. 
TOME    TROISIEME. 

Contenant  laRtponfe  auxPafTages  difficiles  des  Pères  objedez  par  lesMiniftres, 

E  T 

La  Confirmation  de  l'Union  des  Eglifes  Orientales  avec  l'Eglife  Roma.'ne  fur 
la  Prcfence  réelle  ,  la  TranlTabftantiation  ,  &  autres  points ,  par  les  Attefta- 
tions  authentiques  de  tous  les  Patriarches ,  &  de  la  plupart  de  s  E  vêques  de 
CCS  Eglifes,  &  par  un  grand  nombre  d'autres  preuves. 


A    P  A  RI  S^ 

Chez  H I L  A  I  R  E  Foucault,  raë  faine  Jacques  ,  dans  la 
vieillePofte  ,  au  fond  de  la  Cour. 

M.   DCC.   XlII. 
AVEC  PRIVILEGE    ET  A  P  P  KO  B  ATI  ON, 


z^aSô  /s 


I/-3 


=T^^±3:rr^^-T.T       VH  -   ï\l-^^I-f^  in -FPr 


PREFACE- 


%'ÀSK^^i  ^^^^  ^°"^  les  hommes  ne  font  pas  également 
7i.^  ':"®1^^  éclair £z  en  toutes  chofes  ,   &  qu'ils  ne  regaf- 
^    ^' ■  '  '  s  mêmes  objets  par  Ici  mêmes 


Il    C    ^pencpas  cous 

'iMi^;^,p^^'lfa':es,  il  eft  vifibie  qu'on  ne  fçauroïc  les  concen- 
^U-'^'-'^^  j  tvf  cous  en  quoy  que  ce  C<At ,  puifqu'il  faut  en 
agiiïànc  le  réduire  à  une  certaine  mani-ere ,  &  qu'il  efl  comme 
ïmpoffible  que  cette  manière  s'accommode  à  tant  d'inclina- 
tions différentes. 

C'eft  lafource  ordinaire  des  plaintes  que  chacun  fait  contre 
les  Auteursflui  ne  fuivenc  pas  la  voye  qu'il  auroit  voulu  pren- 
dre ,  ce  qu'il  j  ige  la  meilleure  par  rapport  à  fa  difpolition 
particulière  5  &:  je  ne  doute  point  que  plufieurs  perlonnes 
ft'ayent  attaque  par  là  les  deux  Tomes  de  la  Perpétuité  qu'on 
a  déjà  publiez ,  &:  n'ayent  trouvé  à  redire  A  l'ordre  &  à  la  mé- 
thode qu'on  y  a  (uivie.  Mais  on  a  répondu  à  ces  plaintes  par 
cette raifon  d'équité,  qu'eftant  impoilîble  de  contenter  tout 
le  monde,  on  ne  peut  faire  autre  chofe  dans  les  Livres  ,  que 
de  choifîr  l'ordre  le  plus  naturel  en  foy ,  £c  le  plus  conforme  à 
la  difpofition  la  plus  commune  5  ce  qu'on  prétend  avoir 
fait. 

On  eft  bien  aife  néanmoins,  en  produifancletroiiîéme  Vo. 
lume  de  cet  Ouvrage,  de  pouvoir  encore  fe  défendre  fur  ce 
point  d'une  manière  dont  on  croit  que  plus  de  gens  feront  fa- 
tisfaits. 

Car  encore  que  les  plaintes  qu'on  a  pu  faire  contre  la  me- 
thode  des  deux  premiers  ne  foienc  pas  tout-à-fait  juftes  par 
la  raifon  qwe  je  viens  de  dire ,  elles  font  pourtant  fondées  fur 
une  imperfeclion  de  cette  méthode  ,  inévitable  à  la  venté  , 

âij 


P    R    E    î    A    C    E. 

îTiais  réelle ,  qui  eft  qu'elle  n'efl:  pas  conforme  au  goût  &  à  l'in- 
clination de  routes  fortes  d'efprits. 

Il  y  en  avoit  qui  auroient  voulu  qu'on  eût  Commencé  par 
les  preuves  qui  font  contenues  dans  le  fécond  Volume  ,c'eft:- 
à  dire  qu'après  avoir  établi  la  vérité  de  la  dodrine  de  l'Eglife 
par  l'examen  des  paflages  de  l'Ecriture  ,  on  paflàt  enfuite  à 
celui  de  la  créance  des  Pères  des  fix  premiers  fiecles,  pour  finir 
par  la  difcufTion  delà  Foyde  toutes  IciEglifesdu  monde  de- 
puis lefîxiéme  fiecle. 

D'autres  n'eftant  retenus  dans  le  parti  des  Calviniftcs  que 
par  certains  paiïâges  difficiles,  auroienc  voulu  qu'on  fut  en- 
tré d'abord  dans  la  difcufllon  de  ces  paflages  ,  qui  les  ont  tel- 
lement frappez,  qu'ils  font  incapables  d'écouter  toutes  les  au- 
tres raifons  qu'on  leur  peut  alléguer  j  tant  que  celles-là fubfi- 
ftentdans  leurefprit. 

On  n'a  pas  crû  néanmoins  devoir  fuivre  ni  l'un  ni  l'autre  de 
ces  deux  ordres  par  les  raifons  qu'on  a  marquées  dans  les  Vo- 
lumes precedens  5  &  on  a  jugé  qu'il  eftoit  tout  autrement  na- 
turel de  commencer  par  ce  qu'il  y  a  de  plus  clair  &  de  plus  in- 
conteftable ,  qui  eft  la  dodrine  de  toutes  les  Societez  Chré- 
tiennes depuis  mille  ans ,  pour  pafler  enfuite  à  ce  qui  eftoit  plus 
combattu ,  qui  eft  celle  de  l'Eglife  des  fix  premiers  fiecles. 

Mais  quoique  cette  dernière  méthode  ait  aflurément  quel- 
que avantage  fur  ces  deux  autres  qu'on  auroit  pu  fuivre,  on 
avoue  qu'elle  ne  les  furpafle  pas  en  tout ,  puifqu'elle  n'eft  pas 
proportionnée  aux  pcrfonnes  dont  nous  avons  parlé  ,  qui  fè  fe- 
roient  mieux  accommodez  des  autres  5  &ainfi  après  l'avoir 
gardée  par  neceffité  dans  le  cours  de  cet  ouvrage  ,  on  eft  bien 
âife  prefentement  qu'il  eft  achevé,  d'en  pouvoir  laiflèr  le 
choix  aux  Ledeurs,  qui  n'auront  qu'à  difpofèr  ces  trois  To- 
mes, félon  la  méthode  qui  fera  la  plus  à  leur  goût. 

S'ils  aiment  cet  ordre  de  nature  &  de  raifon  qui  conduit  l'ef- 
prit  des  chofes  claires  à  celles  qui  le  font  moins ,  ils  n'ont  qu'à 
(ûivre  celui  auquel  on  a  pubUé  ces  Volumes ,  fans  y  rien  chan- 
ger. 

S'ils  font  attachez  à  l'ordre  Chronologique  ,  &  qu'iîs  ne 
trouvent  pas  bon  qu'on  ait  commencé  l'Examen  de  la  tradi- 
tion de  l'Eglife  fur  l'Euchanftiepar  les  derniers  temps  ^ilsont 
moyen  de  contenter  leur  inclina»  ion ,  en  faifant  du  fécond  Vo- 
lume le  premier ,  du  trojfiéme  le  iecond ,  &  en  finiiTanc  ainfi 
par  le  premier. 


Préface. 

Enfin  ceuxiqui  ont  fouffèrtavec  peine  qu'on  aie  différé  juf- 
Gu'àcecroifiéme  Volume,  réclaircifîemencde  certaines  diffi- 
culté! &  de  certains  pafTages  qui  les  arreftent ,  ont  moyen 
maintenant  de  fatisfaire  leur  impatience,  en  fefaifanc  un  nou- 
vel ordre  ,  qui  feroit  de  prendre  ce  dernier  Volume  pour  le 
premier,  5c  de  donner  aux  deux  autres  tel  rang  &  tel  ordre 
qu'il  leur  plaira. 

Je  fçai  bien  que  ces  autres  ordres  n'edantpas  celui  auquel 
on  s'eft  attaché  ,  ne  feront  pas  fi  juftes  ni  fi  luivisquele  pre- 
mier, &  que  l'on  n'y  trouvera  pas  toutes  chofès  traitées  dans 
leurplace  naturelle.  Je  fuisperfuadé  néanmoins  que  cela  ne 
va  pas  bien  loin ,  &  qu'ils  pourront  fort  bien  fuivre  dans  la  le- 
â:ure  de  cet  Ouvrage  l'ordre  qui  fera  le  plus  conforme  à  leur 
inclination ,  d'autant  plus  que  les  citations  qui  font  à  la  marge, 
&  la  Table  qui  réunit  tous  les  trois  Volumes  en  un  corps  ,  les 
avertit  de  ce  qui  pourroit  eflre  traité  dans  un  autre  Volume 
que  celui  qu'ils  auront  entre  les  mains. 

Il  feroit  àfouhaiter  que  cet  Ouvrage  fût  auiïî  en  e'tatd'a. 
gréera  tout  le  monde ,  à  l'égard  des  chofes  de  de  la  manière 
dont  elles  font  traitées ,  qu'en  ce  qui  regarde  la  méthode. 
Mais  c'eft  ce  que  je  fuis  bien  éloigné  de  prétendre.  Jerecon- 
nois  au  contraire  qu'à  l'égard  de  l'un  &de  l'autre  il  ne  répon- 
dra nullement  à  l'idée  que  les  perfonnes  éclairées  auront  de  ce 
qu'on  pouvoit  faire  ,  5c  qu'ils  y  pourront  remarquer  avec  jufl 
ticeun  grand  nombre  de  défauts.  Mais  afin  qu'ils  en  puifTent 
mieux  juger  ,  j'expoferai  fîmplement  ici  les  vues  qui  m'onc 
porté  à  le  mettre  dans  l'état  où  il  efl ,  &  à  le  renfermer  dans 
les  bornes  que  je  m'y  fuis  prefcrites. 

Il  m'a  paru  que  c'étoient  des  défauts  prefque  également  à 
éviter  de  traiter  les  matières  avec  trop  de  brièveté ,  ou  de  les 
étendre  trop  >  defe  contenter  de  propoferles  principes  géné- 
raux, pour  refoudre  les  objedions ,  ou  de  defcendre  dans  un 
détail  qui  fatigue  inutilement  lesLeûeurSjd'obmettrelesdif- 
fîcultez  importantes  ôc  efTentielIes ,  ou  de  n'en  négliger  aucu- 
ne pour  petite  &  légère  qu'elle  foit  -,  &  qu'ainfi  il  falloit  pren- 
dre un  milieu  qui  pût  fatisfaire  les  perfonnes  de  bonne  foy,& 
qui  ne  rebutât  pas  le  commun  du  monde  par  une  longueur  en- 
nuyeufe. 

Il  efl  certain ,  comme  dit  S.  Auguflin ,  que  ceux  qui  font  in-  *'  ^'^.c*"'^- 
flruits  de  la  vérité,  n'auroient  pas  befomde  beaucoup  de  dif- *'c.i.'  ' 


3» 


3} 

5) 
51 


P  R  E  î  A  G  E. 
cours  pour  faire  voir  la  taufTecé  de  quelque  erreur  que  ce  foif;, 
fi  l'efpric  de  ceux  à  qui  lU  ont  affaire  ne  refiftoic  point  à  la  lu- 
mière de  la  venté  ,  &  s'ils  écoutoient  avec  dotilirc  la  dodri- 
ne  falutaire  .jufqu'à  ce  qu'il:  fuiïènc  guérie  par  le  fecours  de  la 
grâce, qu'ils  attir^roient par  leur  toy  &:  leur  pieté. 

Mais  il  efl:  vray  auiFi  ,  comme  dit  ce  même  Père  ,  que  la' 
plupart  de  ceux  qui  font  dans  l'erreur,  ne  font  pas  dans  une  dif- 
pofition  Cl  heureufe.  ïls  fuivent  aveuglement  leurs  paffion^  &c 
leurs  prejucrez  ,  après  même  qu'on  leur  en  a  fait  voir  la  fau^ 
fêté.  Leur  aveuglement  les  empêche  de  voir  des  chofes  tres- 
claires  ,&  leur  opiniaftreté  fait  qu'ils  nefe  rendent  pas  à  cel- 
les mêmes  qu'ils  ne  fi^auroient  s'empêcher  de  voir  :  &  c'tfl:  ce 
qui  oblige, dit  il,  de  s'étendre (ur  des  chofes  qui  font  d'elles- 
mêmes  claires ,  afin  de  ne  les  expofer  pas  feulement  aux  yeux 
de  ceux  qui  les  voudroient  regarder ,  mais  de  les  faire  en  quel- 
que forte  toucher  à  ceux  mêmes  qui  ne  les  veulent  pas  voir. 
J^it  ncce.fjïtas  copiofms  ducndi  plcrumque  res  dards ,  veht  eas  non 
fpeciantihus  intuendas  ,fedquodammodo  tangendas falpantibus^ô^ 
conniventibus  offerumin . 

Il  y  en  a  même  qui  n.'eftanc  pas  en  une  fi  mauvaifedifpofi- 
tion  ,  méritent  encore  mieux  cette  déférence.  Car  comnieil 
y  a  des  difficultez  dans  tous  les  myfteres,  il  ne  faut  pa.  rout- 
à  fait  s'étonner  que  certains  efprits  en  foient  embarafïez  5  &  la 
charité  ne  permettant  pas  qu'on  néglige  le  falut  de  perfonne, 
il  faut  par  neceffité  s 'appliquer  à  refoudre  ces  difficulté/.,  puifl 
qu'il  y  a  peu  de  gens  qui  en  trouvent  l'éclaircifiTement  dans  les 
folutions  générales. 

Or  pour  le  faire  comme  il  faut ,  &  ne  donner  pas  lieu  à  des 
répliques  ,  qui  portent  encore  la  difpute  à  une  plus  grande' 
longueur  ,  il  faut  traiter  les  chofes  exadement  ,  &  avec  une 
étendue  raifonnable  ,  autrement  on  ne  termine  rien.  Un  écrie 
n'efl:  que  la  femence  d'un  autre,  &  on  laifle  à  ceux  qui  font 
dans  l'erreur  un  prétexte  apparent  de  fe  flatter,  qu'ils  ontrai- 
fon  de  demeurer  dans  leurs  fèntimens  ,puifqu*onne  leséclair- 
cit  point  fur  ce  qui  les  y  arrefle. 

C'eft  ce  qui  a  obligé  d'expliquer  en  détail  ces  fameux  pafl, 
iages  deTertullien,  de  S.  Auguflin  ,  deFacundus,  de  Theo- 
doret,  de  Theodotus  d'Antioche,deGelafe,  de  S.  Ephr.m  , 
&  de  quelques  autres  Auteurs ,  dont  les  Miniflre-s  rempliirent 
tous  leurs  Livres  6c  cous  leurs  difcours ,  6c  donc  ils  foncier eni  - 


Préface. 

part  du  Calvinifmc ,  6c  le  fondement  de  toutes  leurs  folu- 
tions. 

Ces  pafîàges  fe  trouveront  traitez  dans  ce  Volume  ici  avec 
tout  le  foin  &  toute  la  netteté  qu'on  a  pu  ,  mais  fur  tout  avec 
lîne  entière  finceritë.  Il  ne  s'y  verra  point  qu'on  ait  tâché 
d'ebloiiir  le  monde  ,  en  feignant  de  méprifer  ce  qu'on  auroic 
eu  peine  à  éclaircir.  On  n'a  ni  diffimule  ,  ni  obfcurci  les  diffi- 
cultez  &:  les  réponfes  ordinaires  des  Miniftres ,  &  on  leur  a 
donné  de  bonne  foy  toute  la  force  qu'elles  ont  dans  leurs 
écrits. 

Ileft  vray  que  l'ordre  dans  lequel  elles  font  propofées ,  Se 
les  principes  de  vérité  qui  les  précèdent  èc  les  environnent,  en 
font  difparoiftre  la  plupart.  Mais  il  n'eftpas  moins  permis  de 
détruireune  objedionpar  avance, qu'après  l'avoir  propofeei 
&ce  n'eft  pas  ce  qu'on  appelle  éluderune  difficulté  par  adrelîe 
&  de  mauvaife  foy  j  c'eft  au  contraire  la  dilîiper  par  la  lumière 
de  la  vérité. 

Ce  font-là  les  raifons  qui  m'ont  porté  à  m'étendre  ,  comme 
j'ay  fait ,  fur  certains  pafTdges  célèbres  :  mais  j'en  ay  eu  d'au- 
tres qui  ne  font  pas  moins  confiderables,  pour  me  renfermer 
dans  certaines  bornes  ,  &  ne  pas  piuifler  cet  examen  jufqu'à 
un  dérail  ennuyeux  de  petits  paflages  &C  de  légères  difficultez , 
qui  font  fuffifamment  éclaircies  par  la  folution  des  autres. 

Il  n'y  a  que  trop  de  gens  qui  fe  plaignent  déjà  de  la  longueur 
de  ces  Volumes  ,  &  qui  en  font  rebutez.  Il  n'y  en  a  que  trop 
qui  fe  perdent  dans  ces  difcuflions  embarafrées,&  qui  n'ont  ni 
alfez  de  temps,  ni  aflez  de  capacité  pour  fuivre  le  fil  de  cette 
difpuce.  Queferoit-ce  donc  fl  on  les  avoitvculu  conduire  pr 
un  chemin  infini ,  en  les  accablant  de  la  réfutation  d'un  ta-  de 
vaines  chicaneries  ,  qui  ne  font  point  pour  l'ordinaire  ce  qui 
attache  les  gens  au  Calvinifme  ? 

Comme  la  vraye  Religion  n'efl  que  pour  les  perfbnnes  de 
bonne  foy  ,  ce  n'eft  proprement  qu'à  ceux  là  qu'il  faut  fonger, 
en  tâchant  d'éclaircir  ce  qui  les  peut  retenir  dans  l'erreur  :  mais 
c'eft  fe  charger  d'un  travail  également  ujfini  6c  inutile,  que 
de  prétendre  repouflèr  ou  prévenir  tous  les  reproches ,  6c  tou- 
tes les  objeclions  de  ces  fortes  de  gens ,  qui  tont  gloire  de  ne 
fe  rendre  jamais  à  la  vérité  ,  &  qui  n'ont  pas  pour  but  de  la 
trouver,  mais  de  la  combattre. 

C'eft  pour  cette  ralfon  que  S,  Auguftin  déclare  que  ceux 


Dei  ly.  c. 


P   R   E    FACE. 

"  qui  défendent  la  vérité ,  ne  doivent  point  fe  croire  obligez  de 
"  répondre  à  tout  ce  qu'on  peut  oppofer  à  leurs  écrits.  Carquel- 
"  les  bornes,  dit-il,anroientles  difputes  ,6c quand  pourroit. on 
"  ceiîèr  d'écrire  ,  s'il  falloit toujours  répondre  aux  adverfaires 
>'  de  la  vérité  jufqu'à  ce  qu'ils  ne  répondirent  plus  ?  Ne  Tenait  on 
"  pas  qu'il  y  en  a ,  qui  par  défaut  d'intelligence  j  ou  par  une  aver- 
»'  fion  opiniaftre  qui  les  empêche  de  fe  rendre  aux  chofes  mê- 
^'  mes  dont  ils  font  convaincus ,  ne  demeurent  jamais  fans  ré- 
"  ponfe,  &  ne  fe  laflent  jamais  de  produire  de  vaines  objections? 
r'"  Qiie  fi  on  les  vouloit  réfuter  autant  de  fois  qu'il  leur  plairoic 
5'  d'attaquer  la  vérité  par  ces  fortes  de  difcours,  où  fans  avoir 
5'  égard  au  bon  fens ,  ils  n'ont  pour  but  que  de  contredire  ce 
,'  qu'on  a  dit  ,ce  feroit  fe  charger  d'un  travail  le  plus  grand  ,  le 
j' plus  pénible  &:  le  plus  infrudueux  qu'il  foit  pofliblede  s'ima- 
>'  giner. 
Decivit,  ^,  Il  eft  aifé  ,  dît  encore  ce  même  Père,  à  ceux  qui  ne  veulent 
j,  pas  fe  taire  ,  de  produire  des  écrits  pour  faire  croire  qu'ils  onr 
,5  répondu.  Ne  fçait-on  pas  que  le  menfonge  ne  tarit  point.  Mais 
,j  s'il  fçait  faire,  quand  il  veut,  plus  de  bruit  que  la  vérité  ,  il 
„  ne  faut  pas  croire  pour  cela  qu'il  ait  autant  de  force  que  la  ve- 
„  rite.  Facile  efi  cuiquam  videri  refpondijje.j  qui  tacere  noluent  ^ 
aut  quid  efi  loquacius  vanitate  ,  qu^  non  ideo  potefi  quod  v«- 
ritar ,  quia  Jî  voluerit  etiam  ^lus  -potefi  clamare  ^  quam  Veri- 
tas ? 

Un  homme  de  fens  nefe  doit  donc  jamais  promettre  que  fès 
écrits  puiflent  étouffer  toutes  lesréponfes.  Ce  feroit  mal  con- 
noiftreceque  peuvent  l'engagement  6c  la  paffion.  Mais  l'on  a 
droit  d'exiger  de  tous  ceux  qui  écrivent,  6c  principalement 
en  des  matières  importantes  pour  le  iàlut ,,  qu'il  n'y  ait  rien 
que  de  fincerefcde  folidc  dans  leurs  preuves:  qu'ils  nepropo- 
pofent  jamais  comme  certain  ce  qu'ils  fçavent  leureftre  nié 
avec  quelque  apparence  par  ceux  qu'ils  combattent:  qu'ils  ne 
prétendent  pas  payer  le  monde  de  déclamations,  au  lieu  de 
railons,  ni  cacher  leur  foibleflè  fous  une  abondance  de  paro- 
les  inutiles ,  qu'ils  ne  fuppolént  pas  groffierement  ce  qui  efl: 
en  queftion  ^  &  enfin  qu'ils  accompagnent  ce  qu'ils  difent  de 
preuves  afîèz  fortes,  pour  en  perfuader  les  perfonnes  raifonna- 
bles,  6c  pour  faire  croire  au  moins  qu'ils  en  font  eux-mêmes 
perfuadez. 

C'eft-là  ce  qui  diftingue  les  gensfînceres  &  de  bonne  foy 

de 


Préface. 

•  de  ceux  qui  ne  le  font  pas.  Je  f^ai  que  chacun  en  particulier  s'at- 
tribue ces  qualiteZj  &  les  ote  à  Ton  adverfaire ,  mais  il  n'en 
faut  croire  perfonne  fur  Ton  propre  témoignage.  C'eft  à  ceux 
qui  lifent  ces  Ouvrages  à  en  juger  ,  &  c'eft  par  là  qu'ils  en  doi- 
■   vent  commencer  l'examen  pour  en  juger  équitablement. 
i    Car  en  vérité  quand  on  n'aime  qu'à  déclamer ,  on  en  devroit 
chercher  d'autres  fujets  que  ces  queftions  ,  où  il  ne  s'agit  de 
rien  moins  que  du  fâlut  éternel  5  &  il  n'eft  pas  rupportable 
qu^on  en  veuille  faire  un  jeu  Si.  un  exercice  d'efprit ,  &  qu'on 
.   ait  pour  but  en  les  traitant ,  non  pas  d'éclaircir  la  vérité ,  maiç 
de  Tobfcurcir ,  pour  faire  paroiftre  de  la  fubtilité  ^  &  de  l'élo- 
quence, 
•^  Ainfî  comme  il  n'y  a  rien  déplus  jufte  que  de  juger  les  Ou- 

vrages où  l'on  reconnoiftroit  cet  efprit,  indignes  d'eftre  lus, 
je  confens  de  bon  coeur  qu'on  ufe  de  ces  règles  dans  l'examen 
de  ce  Volume  ici  ,aullî  bien  que  des  precedens ,  &:fansm'ar- 
•rêter  à  prévenir  les  Lecteurs  en  ma  faveur^  je  les  renvoyé  à  l'ou- 
vrage même,&  c'eft  par  là  que  je  confens  qu'ils  me  juftifienc 
ou  me  condamnent. 

Ils  y  trouveront ,  comme  j'ay  dit ,  les  principales  difficultez 
que  les  Miniftres  forment  fur  cette  matière  ,  Se  les  principaux 
•paflàges  traitez  dans  une  jufte  étendue  ,  mais  ils  ne  trouve- 
ront pas  ces  paflàges  difpofez  dans  un  ordre  chronologique  j 
*  cet  ordre  ne  donnant  par  lui  même  aucune  lumière,  éc  obli- 

geant à  des  répétitions  inutiles  ,  parce  qu'il  arrive  fouvent 
que  les  paflàges  d'un  Père  du  2.  ou  du  3.  fiecle  ne  contiennent 
que  la  même  difficulté  que  celle  d'un  Auteur  d'uniîecle  plus 
reculé. 

11  fuffit,  pour  avoir  droit  de  les  propofer  fans  diftinclionde 
fîecles,  que  les  Miniftres  demeurent  d'accord  qu'ils  ont  tous 
eu  le  mêmefencimenr  fur  l'Euchariftie,  &  qu'il  n'y  en  a  point, 
excepté  Zuingle,qui  place  Ci  haut  ce  prétendu  changem'ent, 
qu'ils  prétendent  eftre  arrivé  dans  la  doclrine  de  rEglifefurce 
Myflere. 

On  peut  donc  avec  raifon  les  confiderer  tous  comme  un 
même  Auteur,  &  réduire  enfuire  leur  doclrine  à  certains  chefsi 
ce  qui  abrège  &  éclaircic  la  difpute ,  &  qui  a  efté  même  prati- 
qué par  plufieurs  des  Miniftres  qui  ont  traité  cette  matière, 
&  entr'autres  par  le  Sieur  Blondel,  qui  tient  avec  raifon  un  des 
premiers  rangs  parmi  eux. 

c 


Préface. 

Il  arrivera  fouvent  que  j'employeray  en  preuve  ce  que  les 
Miniilrcs  propolent  comme  des  objections  confîderabies,  par- 
ce qu'il  y  a  ées  chofes  qui  peuvent  paroillre  difficiles  ,  elîanc 
conllderées  fcparément,  iic  iiorsde  leur  place, Se  qui  ne  laillcnt 
pas  de  conrribaer  fouvenc  à  faire  paroiftre  )a  vericë  avec  plus 
d'éclat ,  lorfqu'elles  font  regardées  dans  un  certain  jour  ,  ôc 
jointes  aux  principes  dont  elles  dépendent. 

Au  rede  quoiqu'on  n'ait  point  fait  profelTionde  fuivre  Mon- 
(leur  Claude  pas  à  pas  ,  Si.  que  l'on  (e  foit  cru  obligé  de  né- 
gliger une  infinité  de  petites  objections  qu'on  auroit  pu.  rele- 
ver: tout  ce  qu'il  y  a  néanmoins  de  plus  confiderable  dans  Tes 
trois  rcponfes  eft  tellement  renverfé  dans  les  trois  Volufnes 
de  cet  Ouvrage ,  que  ceux  qui  prendront  la  peine  de  les  com- 
parer ,  n'auront  gueres  d'égard  aux  plaintes  qu'il  pourroic 
faire ,  qu'il  y  a  beaucoup  de  chofes  à  quoy  on  n'a  pas  ré- 
pondu. 

Je  les  avertirai  feulement ,  que  quoique  les  principes  de  fâ 
troifiéme  réponfe  foient  détruits  danslefecond  Volume,  com- 
me on  a  eu  foin  de  le  remarquer  ,  &  que  tout  le  huitième  Li- 
vre de  celui-ci  combatte  diredement  ce  qu'il  a  prétendu  y 
établir  touchant  lesSocietçzd'Orient,  néanmoins  pour  avoir 
une  réfutation  exacHie  des  preuves  qu'il  employé  fur  le  fujet 
des  Grecs  ,  6c  des  autres  Chrétiens  Orientaux  ,  il  faut  joindre 
à  ces  trois  Volumes  ,  outre  la  Réponfe  q^cnende  ,  l'excelleni: 
Traité  du  R.  P.  Paris  Chanoine  Régulier,  &;  Profefleur  en 
Théologie  de  laMaifon  de  Sainte  Geneviève  ,  quiabien  vou-^ 
lu  fe  charger  decettepaitiedelâ|refutation  de  M.Claude,  & 
qui  s'en  efl:  acquitté  avec  toute  la  folidiîé ,  la  netteté  &  la,  fîn- 
cerité  que  l'on  pouvoir  fouhaiter. 

C'cft  ce  qui  donne  encore  plus  de  lieu  de  regarder  cette  dii^ 
pute  comme  terminée  jcequel'on  pourroit  ajouter  aux  preu- 
ves dont  on  s'eft  fervi  ,  paroiiTant  peu  neceflaire ,  &  ce  qui 
pourroit  yeflreoppoféaprés  les  écUircilîèmensquel'ona  don- 
nez, ne  pouvant  plus  eflre  que  de  fauffes  vues  que  l'opiniaftreté 
ne  ceiîe  jamais  de  produire  j&:  que  S.  Augu/lin  nous  apprend  à  , 
mépril^r. 

II  y  a  divers  partages ,  6:  principalement  de  S.  Auguftin,  dont  . 
je  n'ai  pas  crû  devoir  grolTir  ce  Volume,  parce  qu'ils  ne  con- 
tiennent aucune  difficulté,  qui  ne  foit  fuffifamment  éclaircie 
par  ceux  qu'on  y  a  traiccz,&;  qu'il  ii:i'a  femblé  qu'il  yaloit  mieux 


P   R    E   I    A    C    E. 

y  difcucer  dans  une  jufte  étendue  les  paflages  que  j'y  rapporee, 
ique  d'y  entaller  confulemenc,  à  l'imitation  de  M.  Claude,  une 
foule  de  citations  inutiles. 

11  y  enaauffi  que  j'ai  crû  devoir  obmettre,  parce  qu'ils  ont 
efté  fi  nettement  expliquez  par  d'autres  Auteurs  ,  &  fur  tout 
par  M.  le  Cardinal  du  Perron,  qu'il  auroit  efté  inutile  d'y  vou- 
loir rien  ajouter. 

Tout  ce  que  l'on  pouvoit  faire  ,  c'eftoit  de  reprocher  à  M. 
Claude  d'avoir  ofé  les  alléguer  fans  répondre  aux  raifons  de  ce 
Cardinal. Mais  comme  ces  reproches  euflcnt  efté  trop  frequens; 
parce  que  c'eft  fa  coutume  de  ne  fe  pas  fatiguer  à  examiner  les 
réponfes  des  Catholiques  ,  &:  de  propofer  despaftages  très- 
communs ,  &cent  fois  détruits,  comme  fi  jamais  on  n'enavoit 
parlé  ,  j'aime  mieux  y  fuppléer  par  cet  avertifiTement  gênerai  ^ 
&  par  deux  ou  trois  exemples  particuliers  que  je  crois  en  de- 
voir rapporter  ici. 

Les  anciens  Miniftres  avoienr  extrêmement  fait  valoir  un 
certain  paftage  de  S.  Auguftin  ,  tiré  du  Traité  59.  fur  S.  Jean  , 
011  ce  Père  dit,  en  comparant  les  Apôtres  à  Judas ,  qu'au  lieu 
^ue  les  Apofires  mangèrent  un  fain  qui  cfioit  le  \Sciyieur  ^  Juda-f 
mangea  le  pain  du  Seigneur  contre  le  Seigneur  :  que  les  uns  ret^ùrent 
la  Vie ,  l'autre  le  fupplice  ,  parce  que  ccluy  qui  tnange  indignetntnt , 
mange  fon  jugement  félon  l'yipojhe. 

Mais  M.  le  Cardinal  du  Perrcma  fi  bien  fait  voir  que  S.  Au- 
guftin n'entend  point  l'Euchariftie  par  ce  pain  du  Seigneur  , 
qu'il  dit  en  cet  endroit  que  Judas  mangea  ,  mais  un  morceau 
de  pain  trempé  ,  après  lequel  le  Diable  s'empara  de  lui,  &  que 
S.  Auguftin  diftingue  expreflément de  l'Euchariftie  dans  le  6%. 
Sermon  fur  le  même  Evangile  ,  qu'Aubertin  cftant  convaincu 
par  les  preuves  de  ce  Cardinal,  n'a  pas  ofé  employer  ce  paflàge 
contre  les  Catholiques,  Se s'eft  même  cru  obligé  dcreconnoî- 
tre  que  c'eft  le  morceau  trempé  donné  à  Judas ,  &  non  l'Eu- 
chanftie,  qui  eft  marquée  ence  lieu  de  S.  Auguftin  par  les  mots  ^'■^'  ^'  ^^*' 
à.Q  panem  jDomini, 

Mais  M.  Claude  qui  n'y  regarde  pas  de  fi  prés  ne  s'cft  pas 
embarafle  déroutes  ces  dilcuflions^  &  il  produit  hardmicnc 
cepaflage  de  faint  Auguftin,  pour  prouver  que  l'Euchariftie 
y  eft  appel lée  Pain^  'Se  qu'elle  y  eft  diftinguée  du  vray  Corps 
de  J.  C.  Et  ce  qui  eft  de  plus  rare  ,  c'eft  que  pour  mieux  faire 
<iire  à  faine  Auguftin  ce  qu'il  prétend  ,  il  y  ajoute  une  li- 

€ij 


P   R   É    f    Â   C   É. 

*hèétitiéré  de  fa  façon.  Les  Pcres  ^  dit- il ,  Comparéfit  le  fâîn 
après  la  conjecraîion  avec  le  corps  du  Seigneur  ,  o""  >ls  dtfent  que 
l'unejt  le  pain  du  Seigneur  ^ue  lesmkham  mangent  3  ^  l'autre  le 
■pain  qui  efl  le  Seigneur  même ,  que  les  mèchuiiS  ne  peuvent  man- 
ger ^  ^  que  les  Fidèle^  reçoivent.  Le  paflàge  de  S.  Aiisriftin  qu'il 
M.  Claude  cicc  à  la  marge  ,  porte  fimplement  :  ////  manduc.ibant  panem 
R.eip.p.;4.  Dominum  .,  lUe panem  Domtni  contra,  Do^ninum  ^  iUi  vitam^iUe 
fœnam  3  qui  enim  tnanducat  indigné  ,  ait  Apojiolus  ,  judicium  fil>i 
manducat  (j^  hibit  :  de  force  que  ces  paroles  ici ,  qud  les  mèchans 
ne  peuvent  manger.,  (^  que  les  Fidèles  ret^oivent,  font  de  M.  Clau- 
de, &  non  de  S.  Auguftin.  11  appellera  cela  comme  il  luiplal- 
i-a  ,  mais  il  aura  peine  à  faire  approuver  ce  procédé  par  lés 
perfonnes  finceres. 

Tous  ceux  qui  ont  traité  la  matière  de  l'EuchariftiCjtant  Ca- 
tholiques, que  Protellans,  citent  auffi  ordinairement  deuK 
palTIiges  deS.  Augudin  ,  cirez  des  deux  Sermons  qu'il  a  faits 
fur  le  Pfeaume  33. 11  dit  dans  le  premier  abfolument  que  J.  C. 
s'eftoit  porté  dans  fcs  mains,  lorfque  donnant /o«  Corps  même 
à  [es  Bifciples ,  il  dit ,  Cecy  eft  fnon  Corps  :  Et  dans  le  fécond  il 
dit  qu'il  fe  porroiten  quelque  façon  dans  fes  mains  :  Quodam- 
modo  ferehatvr  in  manibus  fuis. 

Le  Cardinal  du  Perron  prouve  par  des  raifons  très  folides  , 
que  le  fécond  ne  détruit  point  le  premier  :  que  le  fens  littéral 
de  ces  paroles,  que  J.  C.  efioit porté  dans  fes  mains .^  efl:  établi 
par  diverfes  circonfl:ances  du  premier  pafTage  ,  &  entr'autres 
par  la  remarque  que  S.  Augufl:in  fait, qu'il  eft  impoflible  de  con- 
cevoir que  ce  qui  eft  exprimé  par  ces  termes  s'accompiiiTe  dans 
un  homme ,  quoiqu'il  prétend'e  que  ces  paroles  fe  font  vérifiées 
félon  la  lettre  dans  J.  C.  Hocvero  fratres  quomodo  fieri  pojjît  in 
Qiiomoio  in-  domine  quis  intelUqat.  A  quoi  Aubertin  n'a  pu  répondre  autre 

tcUiçatur  111  ,       ^       ^^  1/1  •  I      nv        1  ■  „ 

ipfo  Davidfe-  ciioie  ,  liHon  que  C  clt  une  exagération  de  Prédicateur,  Con- 

cuiidum  litre-  cionatorum  ^  dcclamatorum  more  difficultatem  quantum  potcjl  an. 

"mûrii"'''  g^^:  c'eft  à-direque  c'eftunepenfée  fansfolidité  ,  par  laquelle 

chriftô autcni  S.  Auguftin  relevé  fans  raifon  une  difficulté  chimérique,  qui 

'"^r'vT^'      n'eftoit  fondée  que  fur  un  fens  auquel  on  ne  doit  point  prendre 

"'      '        ces  paroles.  On  jugera  s'il  n'eft  point  plus  vrai,  femblable  que 

ce  Miniftre  impofe  à  S.  Auguftin  un  faux  fens ,  que  nonpas  que 

ce  Saint  ait  parlé  d'une  manière  fauffe  &  ridicule. 

Ce  Cardinal  prouve  encore  qne  ces  termes  qui  fc  trouvent 
dans  le  fécond  paftàge,  que  J.  C.  fc  portait  en  quelque  forte  eit 


Préface. 

fef  mains ,qttodammo do ,  ne  nient  pas  la  vérité  littérale  &  réelle 
de  la  première  expreffion  :  de  même  qu'en  difant  avec  faint 
Auguftin,  que  Dieu  s'eftuniàla  nature  hum^mc  quod.immodo y 
que  l'ame  ell  immortelle  en  quelque  manière ,  fecnndumquem- 
dam  modunf-,  Et  avec  Théophile  d'Antioche  ,  que  la  matière  a 
efté  créée  de  Dieu  en  quelque  manière  ,  materiam  a  Dca  cjfe 
quodammodo  facljfn  ;  on  ne  prétend  pas  dire  que  ces  propoll- 
tions  ne  foient  vrayes  qu'en  un  fens  métaphorique  ,  mais  on 
veut  feulement  en  attacher  le  fens  littéral  à  une  certaine  ma- 
nière particulière  :  ce  que  S  ^luguftin  a  eu  grande  raiion  de 
faire  ,  en  exprimant  cette  pcnfée ,  que  J.  C.  s'efi  porté luy -même ^ 
puifqu'encore  qu'il  l'ait  fait  réellement ,  c'a  efté  néanmoins 
d'une  manière  toute  différente  de  celle  dont  on  porte  les  au- 
tres corps. 

En  effet  on  ne  dit  gueres  que  l'on  porte  les  âmes,  quand 
on  porte  des  hommes  vivans,  quoique  ces  hommes  ne  foienc 
pas  fans  ame.  Et  ainli  le  corps  de  J.  C.  ne  faifant  pas  plus  d'im- 
preflion  fur  nos  fens  qu'une  ame  fpiritucUe,  &  n'eftant  porté 
en  effet ,  que  parce  qu'il  eft  réellement  dans  le  Sacrement  qui 
eft  porté ,  on  ne  doit  pas  trouver  étrange  que  S.  Auguftin  dé- 
termine le  fens  vague  &  gênerai  de  ce  terme  de  porter ,  qui 
pourroit  donner  l'idée  d'un  corps  porté  de  la  manière  ordi- 
naire à  cette  manière  particulière,  qui  ne  convient  qu'au  corps 
de  J.  C.  &  qui  eft  une  fuite  de  l'état  incomprehenfible  oià  il  eft: 
dans  ce  Sacrement. 

Tout  cela  eft  entièrement  conforme  au  bon  fens,  &:aeftc 
fouvent  allégué  par  les  Ecrivains  Catholiques  ;  mais  il  ne  plaift 
pas  à  M.  Claude  d'y  avoir  égard.  Il  écrit  comme  fi  c'eftoitpar 
lui  que  cette  controverfe  commençât  à  eftre  traitée  j  êi:  fans 
comparerces  deux  paffàgesenfemble,  fans  dire  un  mot  de  ces 
remarques  &  de  ces  reflexions  fi  naturelles ,  fi  juftes  6c  Ç\  com- 
munes, il  croit  en  eftre  quitte  pour  citer  feulement  le  fécond 
paffage  avec  une  petite  interrogrition.  J.  C.  dit- il.  fe portait  en 
quelque  forte  , quand  il  di fait:  Cecy  efimon  Corps  ^  que  veulent  dire 
ces  correclions  (^  ces  adouci ffcmens  ? 

Voici  encore  un  exemple  confiderable  de  ce  procédé  fi  or- 
dinaire à  M.Claude.  LesMiniftresontlongremps  fait  valoir 
dans  leurs  écrits  &  dans  leurs  difcours  ces  paroles  de  faint  Au- 
guftin, tirées  du  25.  Sermon  fur  S.  ^ean.  Pou^quoy  prrp.irez^ 
vous  les  dents  é^  le  ventre  .«'  croyez^^  é^  vous  aurcx^manq^è  ,  pour 


Préface. 
en  conclure  que  l'on  ne  mangeoic  le  corps  de  J.  C.  que  par  1 

foy. 

Ce  pafTage  leur  fcroit  inutile,  quand  il  s'entendroit  du  Corps 
de  J.  C.  &  qu'il  s'y  agiroic  de  rÉuchariftie^  parce  que  l'on  au- 
roic  fujet  de  dire  à  des  gens  qui  la  rfgarderoienc  comme  une 
nourriture  corporelle,  que  ce  n'eftpas  en  cette  manière  qu'il 
la  faut  conlîderer  :  qu'elle  n'eft  pas  deftinée  à  nourrir  le  corps 
mais  à  nourrir  l'amei  &  que  c'eft  pour  cette  raifon  qu'on  en 
prend  fi  peu  :  Moiicum  quiâ  accipirmis  ,  ^  in  corde  fapnamur. 
Et  il  n'y  auroit  nul  inconvénient  pour  reprimer  ces  penfëes 
charnelles ,  de  fe  fervir  des  termes  de  Taint  Augultin  -.IJtquid 
paras  dentem  d"  ventrcm  /  crede  ^  manducafii ,  comme  l'Auteur 
du  Livre  (i^  Cœna  Domini ,  reconnu  pour  TranlTubUantiateu-r 
par  Aubertin,&  par  les  nouveaux  Miniflres,  ne  cramtpasde 
dire  :  N'on  dentés  ad  ynordcndum  acuimus  ,  fcd  fide  fincera  panem 
fanchm  frangimus  d?-  partimur:  par  où  cet  Auteur  ne  veutpa^ 
dire  que  l'on  ne  reçoive  point  le  corps  de  J.  C.  dans  la  bou- 
che ,  ni  qu'on  ne  le  ret^oit  que  par  la  foy,  mais  feulement 
qu'on  ne  fonge  point ,  en  prenant  le  corps  jEsus-CHRiST,à  fa- 
tiifaire  legoûcdu  corps, &;  qu'on  n'eft  attentifqu'à  le  goûter  par 
Ja  foy. 

C'eft  cequ'onleur  diroit  avec  juftice,  quand  ce  paffages'en^ 
tendroit  de  TEuchariftie.  Mais  il  eft  fi  certain  qu'en  ne  l'en  doit 
pasentendrcj  &que  S.  Auguftin  n'adrefl'e  point  ce  difcoursaux 
Chrétiens  ,  mais  auxjuihqui  fuivoient  J.  C.pt>ur  en  recevoir' 
une  nourriture  corporelle,  q"u'Aubercin  ne  Ta  ofé  alléguer  con- 
tre la  manducation  réelle.  M.  Claude  néanmoins  qui  ne  né- 
glige rien,  parce  qu'il  a  befoin  de  tout,  &  qui  ne  fe  pique  pas 
d'exacfticude  ,  n'a  pas  cru  devoir  obmettre  ce  paCage ,  &  le 
cite  exprefi^ement  dans  la  page  58.  de  fon  Livre. 

Ce  procédé  ,  comme  j'ai  dit,  eft  fi  ordinaire  à  M.  Claude, 
igu'il  faudroit  à  tous  momens  lui  faire  de  ces  fortes  de  repro- 
ches :  mais  comme  cela  nous  auroit  mené  trop  loin,  &  nous  au- 
roit obligé  pour  le  réfuter  de  grofiir  ce  Volume  d'une  partie 
de  ce  qu'on  peut  aufiî  bien  lire  dans  les  Livres  du  Cardinal 
du  Perron  ,  on  a  mieux  aimé  épargner  Eout  enfemble  M. 
Claude  &:  les  Lecteurs ,  d'autant  plus  que  l'on  n'a  pas  eu  defiein 
dciendre  inutiles  lesautres  Auteurs  qui  ont  travaillé  fur  cette 
matière,  &:  que  l'on  a  crû  fe  devoir  borner  à  éclaircir  à  fond 
leii  principaux  paftages,  dont  la  foiution enferme  celle  de  tous 
icsauLre.s  moins  cûnûderables. 


Préface. 

Tout  "ce  que  j'aiMic  jufqu'ici  a  principalement  lieu  pour  les 
iepc  premiers  Livres  de  ce  Volume,  qui  appartiennent  pro- 
prement au  deflein  particulier  qu'on  y  a  eu,  de  repondre  aux 
difficultez  des  Minnîres.  Le  huitième  eiï  tout  d'un  autre  genre, 
puifqu'il  n'efb  prefque'compofé  que  d'ades  d'atteftations&i  de 
preuves  nouvelles  de  la  créance  des  Societez  Orientales.  Mais 
il  C2  Livre  efl  en  quelque  forte  hors  d'œuvre  à  i'cgard  de  ce 
Volume  ici ,  il  nel'eftpas  à  l'égard  de  tout  l'ouvrage,  Se  l'on 
peut  dire  au  contraire  que  c'en  eft  une  conclufion  très  jufte  Si 
très  naturelle. 

Car  il  faut  fe  reflouvenir  que  lorfque  l'un  propofa  dans  le 
premier  Traité  qui  a  donné  lieu  à  cette  contcftation  ,  l'argu- 
ment qui  prouvoit  la  perpétuité  de  la  dodrine  de  la  prefence 
réelle  par  i'impoflibilité  du  changement  de  la  créance  deT'E- 
glife  fur  ce  point ,  &  qui  établifloit  cette  impoffibilité  fur  ce 
fait  conftant,que  toutes  les  Societez  Chrétiennes  eftoient  dans 
la  doiflrine  de  la  prefence  réelle  au  fiecle  de  Berenger  ,  M. 
Clau^e&les  autres  Minières  ne  crûrent  pasavoir  de  meilleur 
moyen  pour  éluder  la  force  de  cette  preuve,  &:  pour  empêcher 
l'impreiîîon  qu'elle  pouvoit  faire  fur  les  efprits,  que  de  la  faire 
paffcr  pour  un  détour  &  pour  une  voye  indirecte  ,  &  d'y  oppo- 
ferles  preuves  par  lefquelles  Aubertin  prétend  avoir  fait  voir 
que  les  Pères  des  fix  premiers  fiecles  font  contraires  à  cette 
doctrine  ,  qui  leur  donnoit ,  difoient  ils  ,  droit  de  conclure 
que  ce  changement  qu'on  reprefentoit  comme  impoflible 
eftoit  effeclivement  arrivé. M. Claude  n'a  point  fait  de  Livre  où 
il  ne  fe  foit  fervi  de  cette  voye  artiiicicufe,  &  où  il  n'ait  fait 
même  de  longs  difcours  pour  la  juftifier  :  &il  faut  avouer  que 
<^uelque  injufte  qu'elle  foit,  elle  n'a  pas  laiiïe  de  produire  fur 
quelques  efprits  l'effet  qu'il  en  prctendoit. 

Il  y  a  des  gens  qui  jugent  des  argumens  fur  l'étiquette,  pour 
ufer  de  ce  mot ,  &  fur  la  forme,  5c  qui  prennent  pour  également 
forts  tous  ceux  qui  concluent  directement,  fans  confiderer  fi 
les  principes  que  les  argumens  fuppofent  font  également  véri- 
tables. On  dit  aux  Miniftres  que  toutes  les  Societez  Chrétien- 
nes s'eftant  trouvées  dans  la  dodrine  de  la  prefence  réelle 
dans  l'onzième  fieclc,il  eft  impoffible  qu'elles  y  foient  venues 
par  changem'int  ,&  qu'il  fautainil  que  cette  dodrine  ait  toû. 
jours  efté  dans  l'Eglife  ,5c  M.  Claude  réplique  que  les  Pères 
n'ayant  jarpais  crû  la  prefence  réelle  durant  les  fix  premiers 


P  R  E    T  A    C    E. 

fiecles,  il  faut  bien  que  cette  doiflrine  fe  doit  introduite  par 
changement ,  puifqu'ellen'a  pas  toujours  efté  crue. 

L'un  fans  doute  conclut  auffi  bien  que  l'autre  :  mais  il  y  a 
cette  différence  ,  que  le  premier  eft  fondé,  tant  fur  un  fait  cer- 
tain ,  qui  eft  l'union  de  toutes  les  Societcz  Chrétiennes  dans 
la  doctrine  de  la  Prefence  réelle  depuis  Berenger  jufqu'àpre- 
fent ,  que  fur  le  fens  commun  ,  qui  conçoit  avec  tant  dévi- 
dence  ,  qu'il  s'enfuit  de  laque  cette  doctrine  nes'efl  point  éta- 
blie par  innovation  ,  que  M.  Claude  lui-même  n'a  ofé  nier 
cette  confequence. 

L'autre  au  contraire  n'eft  fondé  que  fur  la  témérité  d'un 
homme,  qui  veut  faire  paffer  pour  clair  ôc  pour  certain  tout 
ce  qui  lui  pLiift ,  n'y  ayant  rien  au  contraire  de  plus  mal  prou- 
vé, ni  de  plus  faux  que  cette  contrariété  prétendue  des  Pères 
avec  l'Eglife  [Romaine  fur  la  Prefence  réelle. 

Mais  comme  ceux  que  M.  Claude  a  par  là  abufez,  ignorent 
ou  veulent  ignorer  cette  différence,  il eftoit  necefl'aire  de  les 
en  convaincre  i  ce  qui  obligeoit  par  neceffité  de  leur  montrer 
l'inévidence  de  ces  preuves  On  a  mcmepafle  plus  avant  J  car 
on  a  pofitivement  montré  que  les  Pères  eftoient  clairement 
pour  nous ,  5c  que  la  Dodrine  de  l'Egliie  Catholique  paroilToit 
avec  éclat  dans  les  fix  premiers  fiecles,  auflî  bien  que  dans  les 
derniers. 

Et  c'efl  ce  qui  nous  donne  lieu  maintenant  de  reprendre 
avec  plus  de  force  le  premier  argument  ^  l'imprefîlon  n'en  pou- 
vant plus  eflre  afToiblie  par  cette  chicanerie  des  Minières. 

Que  fi  cet  argument  n'eft  plusabfolument  necefTaire  à  ceux 
qui  leroient  demeurez  entièrement  perfuade/.  du  fennmentde 
l'ancienne  Eglife  ,  il  î'eft  à  l'égard  de  ceux  a  qui  il  feroit  encore 
reflé  quelque  doute  dans  l'efprit ,  comme  nous  avons  dit  ail- 
leLirsi  &il  eft  toujours  utile,  pour  faire  paroiftre  la  vérité  dans 
un  plus  grand  jour  par  cette  union  de  preuves  &  de  lumières. 

On  l'auroitpû  faire  ,  en  faifant  fîmplement  rciTuuvenir  les 
Leifleurs  de  l'origine  de  cette  difpute ,  &  en  leur  remettant  de- 
vant les  yeux  quelques-unes  des  preuves  dont  on  a  appuyé  le 
fait  qui  fort  de  fondement  à  l'argument  de  la  Perpétuité ,  qui 
eft  cette  union  de  toutes  les  Societez  Orientales  dans  la  foy  de 
la  Prefence  réelle.  Mais  il  eft  bien  plus  avantageux  à  la  véri- 
té, &  il  doit  eftre  beaucoup  plus  agréable  auxLedeurs,  qu'on 
l'ait  fait  par  des  preuves  toutes  nouvelles  j  &  qui  n'avoienc 

point 


Préface. 

point:  encore  efté  prodmces  dans  aucun  ouvrage. 

Il  eu.  difficile  que  le  monde  en  attende  de  pius  fortes  que 
celle  qu'un  a  déjà  alléguées^  tant  dans  le  premier  Volume 
que  dans  la  rcponreg'inerale. Cependant  je  croy  leur  pouvoir 
dire,  que  celles  que  l'on  verra  dans  ce  dernier  livre,  lent  en- 
core plus  confiderables.  Ce  ne  lerontplus  des  preuves,  ce  fe- 
ront des  airefls,  des  jugemens donnez  avec  connoiflance  de 
caule,  &.  des  condamnations  formelles  de  M.  Claude. 

JLa  conreftation  qui  s'eft  élevée  en  France  fur  le  fujet  de  la 
créance  des  Orientaux  ,  leur  a  efté  expofée  de  cofte  &  d'au- 
tres. On  l'a  fait  par  des  Mémoires  que  l'on  leur  a  envoyé,  &  il 
y  a  aulli  des  Miniftres  qui  ne  s'y  font  pas  épargnez.  Les  Eglifes 
d'Orient  en  ont  jugé,  &  ce  font  ces  jugemens  c|ue  nous  repre. 
fenterons  icy.  On  en  verra  prefque  de  tous  les  endroits  de  l'O- 
rient: de  Conft;antinople,derA{ic  mineure,  de  l'Archipel,  de 
Jerufalem,  d'Alexandrie,  de  Damas ,  de  Syde,  deMingrelie, 
d'Arménie,  de  Perfe.  On  y  verra  tous  les  Patriarches,  &  pref- 
que tous  les  Evefques  de  l'Afie,  On  y  verra  des  gens ,  qui  re- 
fufant  leur  attcftation  à  ceux  qui  la  leur  ont  demandée,  con- 
damnent néanmoins  le  Calvinifme  avec  toute  la  force  qu'on 
fçauroit  defirer. 

On  a  joint  à  ces  adies  quelques  lettres  &  quelques  relations 
de  M.deNointel  Ambaffadeur  defaMajeftéTres  Chreftienne 
à  Conftantinople,  tant  parce  qu'elles  fervent  à  les  authorifér, 
&  à  en  éclaircir  quelques  particularitez,  que  parce  qu'on  a  efté 
bien  aife  de  faire  connoiftre  à  tout  le  monde  avec  combien  de 
zele&  d'exadlitude  il  a  exécuté  l'ordre  qu'il  avoir  receu  de  Sa 
Majefté,  d'avoir  un  foin  particulier  de  tout  ce  qui  regarderoic 
la  religion  dans  l'employ    qu'Elle  luy  a  confié. 

Je  ne  croy  pas  que  M  Claude  ofê  attaquer  la  foy  de  ces 
aÂes  fur  ce  prétexte,  qu'ils  ont  cfté  procurez  par  l'Am- 
baffadeur  de  Sa  Majefté.  Il  a  fans  doute  non  feulement  trop  de 
refpecT:  pour  Elle,mais  aufTi  trop  de  ,bon  fens  pour  fe  fe,rvir  d'ur 
ne  fî  mauvaife  raifon,  &  pour  vouloir  faire  croire  que  le  Mi- 
niftre  du  Roy  du  monde  le  plus  ennemi  des  impoftures2cdes 
fourberies, ait  eu  recours  à  de  mauvais  moyens  dans  une 
matière  auffi  importante  que  cède- cy  ,  &  où  il  luy  auroit  efté 
auffi  difficile,  de  les  cacher,  eftanr  environné  de  Miniftres  Se 
de  Princes  Proteftans,  qui  auroient.pû  découvrir^,  §c  rendre 


Préface. 

publiques  les  voyes  par  lefquelles  il  auroic  obtenu  ces  attefla- 
tions,  5c  qui  en  pourroienc  même  tirer  de  contraires,  fi  elles 
ne  conrenoient  pas  les  véritables  fentimens  de  ceux  qui  les 
ont  données. 

Mais  quoy  qn'i,  n'y  air  rien  de  moins  raifonnable  que  ce 
foup(^on,  &,  qu'il  y  euft  même  de  la  folie  à  croire  qu'un  feul 
Ambafladeur  air  pu  obliger  tous  les  Evelques  d'Orient  à  tra- 
hir leurfoy,  au  même  temps  qu'il  paroift  que  les  Ambafiadeurs 
de  plufieurs  autres  EAats  n'ont  pu  rien  obtenir  d'eux  qui  favo- 
rïfàÙc  le  Calvinifme  ,  nous  produirons  encore  dans  ce  mê- 
me livre  des  ades ,  qui  font  abfolument  à  couvert  de  ce  repro- 
che fi  ptii  /enfé  Car  il  y  en  a  d'anciens  qui  font  voir  ce  qu'on 
croiûirdans  l'Orient  au  dixième  &  au  douzième  fiecle.  Il  y  a 
dci  extraits  de  àiverfes  liturgies  chaldaïques  &  fyriaques,6c  des 
paflage^  tirez  de  divers  manufcrif;  anciens  de  la  Bibliothèque 
du  Roy, qui  prouvent  la  foydeces  peuples.  1!  y  a  destémoigna- 
ges recens  de  lafoy  des  Grecs, donnez  fans  follicitation  ,  & 
envoyez  par  des  Patriarches  pour  Tinftrudion  des  Eglifes  de 
leur  communion. 

Ce  feroit  tout-à  fait  manquer  à  la  reconnoifTance  &  à  la 
juftice,  que  de  ne  rendre  pas  un  témoignage  public  de  l'obli- 
gation qu'on  a  à  celuy  qui  a  rendu  la  plu(part  de  ces  a(ftes  u- 
tilcs  à  l'Eglifepar  la  traduction  qu'il  en  a  faite, &  qui  a  pris 
la  peine  d'extraire  luy.  même  des  livres  Orientaux  tous  ces 
pafTages  qui  en  font  rapportez  dans  cet  Ouvrage.  Il  fuffit  de 
dire  que  c'eft  M.  l'Abbé  Renaudot.  Sa  modeftic  ne  permet 
pas  qu'on  en  dife  davantage  :  mais  la  diverfité  de  ces  ades 
6:  des  livres  dont  ces  extraits  ont efté  tirez,  qui  font  écrits  les 
uns  en  Grec  vulgaire,  les  autres  en  Arab'*,  les  autres  en 
Syriaque,  les  autres  en  Cbphte,  les  autres  en  Ethiopien,  font 
connoiftre  l'intelligence  extraordinaire  qu'il  a  de  toutes  ces 
langues  II  fera  toujours  preft  de  repeindre  à  tout  le  mondi'  de 
la  fidélité  de  (escradudions  :  &  '^'il  y  iena  qui  veulenr  conful- 
terles  originaux,  on  les  tlrouver^i  ou  dans  la  Bibliothèque  du 
Roy,  où  l'on  garde  les  plus  ronfidcrables  de  ces  atteft?!tions, 
qui  ont  efté  envoyées  à  fa  Majefté  même  par  les  Patriar- 
ches qui  les  ont  faites,  ou  dans  celle  des  Religieux  de  faine 
Germain  des  Prez,  où  l'on  a  mis  celles  que  l'on  avoir  receuës 
par  dfverfes  voyes ,  &  quelques  unes  même  de  celles  qui  ont 


Préface. 

eflé  envoyées  par  Monfieur  i'Ambalîadeuf, 

Il  me  rell:ereulemencde  luppher  ceux  qui  liront  ce  Volume 
de  ne  paflerpas  fi  légèrement  lur  tous  ces  ades,  &c  de  faire  re- 
flexion fur  i  évidence  de  ce  que  l'on  établit  par  ces  pièces  au- 
tentiques-  fur  la  hardieflè  avec  laquel  M.  Claude  a  nié  ce  fait 
dans  trois  livres  difFerens  faits  endiverfes  années  ^  fur  la  fier- 
té extraordinaire  avec  laquelle  il  en  parle  encore  dans  fa  troi- 
fîéme  réponfe,  qui  eft  prefque  uniquement  employée  à  le 
combattre.  Se  fur  toutes  les  confequences  qui  naifTent  de  la 
convidion  pleine  &  entière  de  ce  Miniftres,  qui  feront  re- 
prefentées  en  abrégé  à  la  fin  du  huitième  livre.  ; 


i«) 


-  '  •  'approbation  de  Monfeigneur  l' Archcvefque  de  Sens. 

^'J  Ous  ne  pouvons  mieux  exprimer  le  jugement  que  nous 
^    talions  de  ce  troifiéme  volume  de  la  Perpétuité,  ny  en 
donner  une  idée  qui  réponde  mieux  à  celle  que  nous  en  avons, 
qu'en  déclarant  qu'il  ne  cède  en  rien  aux  deux  autres  qui  ont 
paru  avec  tant  d'ecJat  &  dont  l'Egiife  Catholique  a  déjà  tiré 
défi  grands  avantages  pour  la  défenfe  delà  foy  contre  les  Hé- 
rétiques de  ces  derniers  (lecles.  Nous  eftimons  donc  qu'il  doit 
eftre  receu  de  tous  les  fidelles  avec  la  même  reconnoilîànce 
po'.ir  Ton  Auteur  ;&  que  toute  rEglifej  dont  il  a  achevé  de  ju- 
ftifier  les  fentimens  d'une  manière  fi  claire  &.  Ci  convaincante, 
doit  renouveller  Tes  vœux  &  Tes  prières,  afin  qu'il  plaileàDieu 
de  détraire  dans  le  cœur  &  dans  l'efpritdefes  enfans  rebelles 
qui  demeurent  feparez  de  Ton  fein  les   obftacles  qui  peuvent 
les  empefcher  de  fe  rendre  à  de  fi  viveslumieres,  Scà  deséclair- 
cifi!èmens  fifolides  desdifKcultezqui  leur  pouvoient  encore  re- 
fter  fur  le  myn:ere  de  l'Euchariftie.  Donné  à  Sens  le  13.  Jan- 
vier. 1674. 

Louis   Henry    de    Gondkin,    Arch.  de  Sens. 


;•^J••^j•■9•-!{^4••^^4"■9••4'•■$•4•4■■0■•4^•H'■■'?■■'î'■■^'■■'!'"■^■'î'■"fr■v^ 


li 

^Approbation  de  Monfeigncur  H  Eve  [que  de  Condom  ,  Précepteur  de 
ivLo7ijeiyneur  le  Dauphin. 

ib  T  'Ay  lii  avec  artenrion  le  livre  qui  a  pour  titre  ,  la,  Perpétuité 
'  J  de  la  foy  de  l'E^^Ufe  C'ithohque,  touchant  l' EnchcirijTie ^défen- 
due contre  les  livres  du  Sieur  Claude  Afinijirc  ac  Charcnton  ^to- 
me troijième.  L'Auteur  après  avoir  établi  la  Doclnne  Catholi- 
que par  la  tradition  conftantc  de  tous  les  fiecles  dans  les  deux 
^\  Volumes  precedens,  répond  dans  celuy-cy  aux  objevl:ions  que 
les  ennemis  de  l'Eglile tirent  du  témoignage  des  SS.  PP.  lia 
fallu  oppofer  une  extrême  exaditude  aux  fubtilitez  des  Hé- 
rétiques, &  une  Dodrine  profonde  autant  que  folide  à  leur 
érudition  affectée.  C'eft  ce  qu'a  fait  cet  Auteur^  &  on  trouvera 
iês  réponfes  claires,  pourveu  qu'on  ne  ioit  pas  du  nombre  de 
ceux  qui  veulent  entendre  les  chofes  fans  fe  donner  la  peine  de 
les  confiderer  de  prés,  &  de  les  pénétrer  dans  taute  leur  luite. 
Donné  à  Verfailles  le  zo  Février    1674. 

J.  Bénigne  A.  E.  de  Ccndom. 


^KJyJLEGE     DV    T^OT. 

LOulS    PAR  LA  GRACS    DE    DiEU  RoY  DE   FRANCE    ET  DE   NAVARRE  :  A    IIOS  amés 
Ji  leaux  Car.fi:iUers ,  L-s  Jcas  ttiiaiis  nos  Co>irs  Uc  l'-irlcment ,  M  litres  des  Re- 
queftes  ordinaires  de  noti>  Hôtel,  grand  Confeil ,  I-'révôt  de  P.iris,  Bailhfs,  Senccliaux, 
leurs  Lieutenins  Civils,  &  autres  r.os  Jiiîlu-ifts  qu'il  apparriendra,  S'alut.  Cath£Rins 
Mangeant  Veuve  du  fieur Guillaume  Oesprez  noltre  Impnm.ur  &  Libr.iure  ordi- 
naire a  l'arisj  Nous  ayant  fait  remontrer,  qu'il  lui  avoit  été  mis  entre  les  mains  un  Livre 
qui  a  pour  titre  S.tncit  Projperi  yjquit.tni  opéra  j  cjuét  exfant  omnia  ad  manufctiftos  co^ 
dices  ^   edittones  antiquiores  emendtita ,  ^c,  lequel  elle  deûreroit  fare  imprimer  ,  pour 
enrichir  davantage  la  Republique  des  Lettres;  mais  parce  qu'elle  ne  peut  donner  cette 
nouvelle  édition  plus  parfaite  &  plus  complette  que  celles  qui  ont  ci-devant  paru ,  (ans 
s'en<»ager  à  une  très-grande  dépenle  ,  Nous,    voulant   favorilér  le  zèle  de  la  Veuve 
Desprez  ,  lui  donner  aulli  bien  qu'a  fesenfans ,  les  moyens  de  mettre    cet    Ouvrage 
dans  fa  dernière  perfeétion  ,  encourager  les  Imprimeurs  à  entreprendre  des  éditions 
des  Livres  utiles  à  l'avancement  des  Sciences  &  belles  Lettres  qui  ont  toujours  été  flo- 
rilfantes  dans  notre   Royaume,  foutenir  en  même  temps  l'Imprimerie,  qui  a  été 
cultivée  par  nos  Sujets  avec  tant  de  réputation  &  de  lucccs,  &  recompenfer  ceux  qui 
fe  diftinguent  dans  cette  profedion  parles  éditions   des  bons  Livres,  Nous  luy  avons 
permis  &  accordé  ,  permettons  &  accordons  par  ces  Préfentes,  d'imprimer  ou  faire 
imprimer  ledit  Livre  inl'nuM  jSanélt  Profperi  ^tjuituni  Ofera,  qut  ext.int  omniA  ad 
manufiriftos  codices  Ç^  editiones   antiquiorei  emendata,  ^c.  &  de  reimprimer  ou  de 
faire    réimprimer  les   Li-ures  Çmyi\\%:  La  Religieufe  farfaite  ^  tmfayfaife,  Hi^orUÇ^ 
concordiu  E-u.tngeiicit,  Perpétuité  de  ta  foj  contre  le  Minifire  Claude.  Préjugés  légitimes 
eontre  les  Cal-uinifles.  Di-uers  ouur^ges  de  pieté  tirés  des  Jaints  Pères.  Inflruélions  de  Tttu~ 
l:re,  La  folitudc  Chrétienne. Coi^duite  Canonique  pour  lareception  des  Filles  dans  les  Mo- 
najleres,  Dijfertations  fur  Chemine  de -vin  Ç^  Jurla  li-vre  de  pain  de  s  anciens  Moines,  Con- 
(îderations  Jiir  l^s  Dimanches  Ç£  Fêtes.  Lettre  de  Nôtre-Seigneur  J  C-  à  l'amede-vote  par 
Lanf'pegius,  La  -vie  de faintjean  Chryjoflome.  De  la  bonté  Ç£  de  la  mifericorde  de  Dieu, 
Ç^  de  notre  mifere  ,  tr.iduit de  l' EffagnoldeJ^an  Palafox.  Hijloire  Ç^ concorde  des  quatre 
E-vangeliliss ,  Trattté  de  l' équilibre  des  liqueurs  ,  ^  de  la  pefanteur   de  l'air,  par  Mon- 
(îeur  P.ijch.tl.  Nouvcauxélemens   de  Géométrie.  De  l'iifagedes  Sacremens  de  Pénitence 
Ç£  d' Eucharijlie,  Oeu-ores   Poflhumes  de  Monjlear  Rohault,  Mémoire  de  Pontis.  Renou-vel- 
le  ment  des  ^ceux  du  Batêmc  ^  des  Vœux  de  Religion.  Tr.t  té  du  culte  des  Saints,  par  Mon- 
peur  tEiiéque  de  Cafiorie.  L' Abrégé  de  i'Hifloire  Ecckji.ijli^ue,  par  Monfieur  Le    Bref. 
Saint  u4uguj}in  du  Don  de  la  perje-uerance  ^  de  la  prêdeflination  des  Saints.  Les  Con- 
férences de  Cajften,  L'Imitation  de  J.  C.  pardu  Beuil.  Soliloques,  Manuel,  Méditations 
de  faint  Augnflin ,  aiiec  /on  Efp'it.  De  la  Pieté  des  Chrefliens  en-vers  les  Morts.  Penfées 
de  Monfieur  Pafcal,  La  Logique,  ou  l'art  de  pe» fer,  Inflru/f ion  fur  la  Pénitence  Ç^  l' Eu- 
ch.trijhe ,  Ep'itres  Ç^  E-jangites  p.tr  h  fleur  de  Bonneval.  abrégé  de  l'inftrufiion  fur  la 
Vénitence  gf  l'Euchanftte,  Examen  des  ét.its  Ç^  conditions,  par  le  fleur  de  Saint  Germain, 
Confiderations  fur  laiKOrt.  Traité  de  Phyfique.  par  Monfieur  Rohault.  Morale  Chrétienne 
fur  le  V cLtet ,  par   \îr  Fleuriot,  Inflruftions  de  Cafpen    Sainte- Rcu-oe  de    Confrmatione 
^  Extyema-IJnflione.   Hifoire  des  Vari.itions,  par  Monfieur  de  Meaux   Les  Avertif' 
jemens  aux  Pnteflans,  par  le  même  Auteur.  L'Expofltion  de  la  Foi,  du  même,  Owvraues 
de  Piete,de  Monfieur  H.tmon.  Epigrammatum  Deleflus,  Po^me furie  Sacrement  de  l'Eu- 
charjffie.  Règles  de  S.  Augufiin ,  p.tr  Hugues  de  faint  Vu'ior,  M.tniere  de   remplir  les 
de-uoirs  de  la -vie  Chrétienne,  Cérémonies  de  l'Egli/e.  Règles  du  Mariage,  Litanies  ttrées 
de    l'Ecriture  Sainte  Poème  de  S,  Profpert  En  telle  marge  ,  forme,  caraftere;  en  tant 
de  volumes  ,  &  autant  de  fois  que  bon  luy  feniblera ,  pendant  le  temps  de  quinze 
aun  Jï^s  confecutives ,  à  compter  du  jour  de  la  datte  des  Prcfentes,  &    fans  tirer  à 
conft()ucnce  ;  à  condition  néanmoins  que  l'imprellion  dudit  Livre   Sàneii   Profperi 
Aqui^wi  Opéra,  ^c.  fera  achevée  dans  le  temps  de  deux  ans  à  compter  pareillement 


Icflits  deux  an<:  de  la  d.itre  des  Prcfentcs,  Fuirons  défcnfe  à  tons  Impiimcuts,  Libraires 
&  autres,  d  imprimer  ,  foire  imprimer,  vendre  &  débiter  lefciits  Livres  ,  fous  quel- 
Que  prétexte  que  ce  (oit,  même  d'impreflion  étrangère   &  autrement,  fans  le  ton- 
leutemeiit  de  l'Expofaiitc  ou  de  tes  ayms  cauTc,  fur  peine  de  coiitifcation  des  Exem- 
plaires contrefaits,  de  trois  mille  livres  d'amende  contre  chacun  des  contrevenans, 
applicable  un  tiers  à  nous  ,  un  tiers  à  l'Hôtel-Dieu  de  Paris,  l'autre  a  ladite  expo- 
ÉiiKC  ;  &  de  tous  dépens ,  dommages  &  interefts  ;  à  la  charge  que  ces  prclentcs  feront 
enrcgiftrces  tout  au  long  fur  le  Rtgiftre  de  la  Communauté  des  Imprimeurs  &  Li- 
braires de  Pans5&:  ce  dans  trois  mois  de  la  datte  d'icelles  :  que  i'impreflion  defdits 
Livres  fera  faire  dans  notre  Royaume  &  non  ailleurs  ;  &  ce  en  bon  papier  &  en  beaux 
caraifteres ,  conformément  aux  reglcmens  de  la  Librairie  ,  &  qu'avant  de  les  expoler 
en  vente  j  il  en  fera  mis  deux    Exemplaires   dans  notre  Bibliothèque  publique,  un 
dans  celle  de  notre  Château  du  Louvre  ,  &un  dans  celle  de  notre  très-cher  Se  féal 
Chevalier  ChanccUier  de  France  le  Jîcur  Phelipeaux  Comte  de  Pont-chartrainj  Com- 
mandeur de  nos  Ordres  ;  le  tout  à  peine  de  nullité   des  préfentes  ;  du  contenu  def- 
quelles  Vous  mandons  &  enjoignons  de  faire  jouir  l'Expofante,  oufesayans  caufe, 
pleinement    &   pûifiblement  ,  fans    fouffrir  qu'il  luy  foit  fait  aucun  trouble  ou  em- 
pêchement. Voulons  que    la  copie  des  Prélêntes  qui  fera  imprimée  au  commence- 
ment on  à  la  fin  defdits  Livres,  foit  tenue  pour  duement  Cgnifiée^  ai  qu'aux  copies 
coilacionnées  par  l'un  de  nos  amés  &  féaux    Conleillers  Secrétaires  j  foi  foit  ajoutée 
comme  a  l'Original.  Commandons  au  premier  notre  Huiiïier  ou  Sergent  de   faire 
pour  l'exécution  d'icclies  tous  adles    requis  &  necelfaires,  fans  demander  autre  per- 
miflion ,  nonobftant  Clameur   de   Haro ,   Chartre    Normande  ,  &  autres    Lettres 
à  ce    contraires  :    C  a  R  tel    eft   notre  plaifir.  D  onné  à  Vetfailles    le    quatorzième 
jour  de  Décembre,  l'an  de  grâce  mil  (èpt  cens  neuf,  &  de  notre  règne  le  foixante 
&  feptiéme.  Si^nè  Par  le  Roy  en  fon  Confeil.   Lauthier. 

Regijlré  fur  le  Regiflre  de  la  Communauté  numéro  l,  des  Libraires  Ç^  Imprimeurs  de 
Vans ^  fag.  f  17.  Ç^  ^\%.  numéro  959  conformément  aux  Replemens,  Ç£  nottamment 
k  L'^rrèt  du  Confeil  du  ij.  ^oufl  1703   ^  Pans  le  z].  Décembre  mil  je ft  cens  neuf. 

De    Launay,  Syndic. 

Et  ladite  Veuve  Desprez  a  cédé  &  tranfporté  fon  droit  du  prefentPrivilege  à 
Guillaume  Desprez,  Imprimeur  &  Libraire  ordinaire  du  Roy,  fon  fils  ;  &  à  Jean- 
Baptiste  Desessartz  aurti  Libraire  à  Paris,  pour  en  jouir  fuivani  &  conformément 
au  traité  fait  entr'eux. 


Kt  le/dits  Sieurs  DeffreK.  ^  Defejfarts  on  cédé  leur  droit  du  frefenf  Privilège  aux 
Sieurs  Foucault,  Da-vid  l'aine  ,Clot,i^ier  ,  Nion  l'a'iné,  Cojfelin  Ç£  Da'oi-i  fis  Libraires 
à  Pans ,  tant  pour  la  Perpétuité^  de  la  Foj ,  m  40.  }  iiol,  la  Perpétuité  mil.  la 
Morale  Chrefi lenne  m  40,  ^«e  les  Mémoires  de  Pontis  in  ii.  1.  ■vol.  feulement  poure» 
jouir fui-vant  l'accord  fait  emr-eux  Ç^  fendant  tout  U  temps  dttdit  Privilège,  iMt  * 
Vnris  (t  deuxième  Maj  171J. 


TABLE  DEîS  CHAPITP.hS, 

CONTENUS   DANS    CE    TROISIEME  TOME 

de   la    Perpecuicé. 


LIVRE    PREMIER. 

Des  noms  tire:!,  de  la  partie  extérieure  de  l'Eucharifiie. 

CnAp./^  U'on  n'a  pas  du  craiccerplûtofl:  quelques  paiïâges 
I.  \^  des  Pères  que  les  Calvinifles  allèguent  lanscef- 
fe,  &  quw-  ce  qu'on  a  établi  jufqaes  ity  fait  voir  qu'ils  n'en 
fçauroient  tirer  avantage.  pag.  i 

Chap.  II.  Que  la  Dodrine  Catholique  porte  necefîairement  à 
fe  former  l'idée  de  deux  chofesdifFctentes  dans  l'Euchari- 
fiie. Que  le  palEige  de  S  Irenée ,  qui  marque  ces  deux  cho- 
fes ,  prouve  clairement  la  Prefence  réelle.  p.  8 

Chap.  IIÏ.  Que  c'eft  une  fuite  naturelle  de  la  manière  donc 

les  Catholiques  conçoivent  l'Eucharillie  ,  d'y  confiderer  un 

figne  &  une  figure,  &;  de  l'exprimer  par  des  mots  qui  ne  fî- 

gnifîent  précilément  que  figne  &  figure,  quoyqu'ils  repre- 

fentent  à  l'efprit  toute  l'efience  de  l'Euchariftie.         p.  14 

Chap.  IV.  Qu'il  paroifl:  par  les  Pères  mêmes  que  par  les  ter- 
mes As  Jj^me,  d'imaqe  ^  de  type,  de  facrement ,  de  myjîere,  ils 
ont  entendu  des  images,  des  types  &c.  joints  aux  chofès, 
&  contenant  les  chofes  mêmes.  Reflexion  fur  1^  4,  cathe- 
chefe  de  S.  Cyrille  de  Jerufalçm.  p.  38 

Cka>.  V.  Que  la  preuve  que  M.  Claude  tire  des  occafions 
où  les  Pères fe  font  fervis  des  mots  d' antitypes  é-  d'image^eO: 
entièrement  vaine.  Sophifmes  d'Aubertin,  qui  font  éclaircis 
par  la  même  remarque.     _^ p.  44 

LIVRE 


l 


Table  des  Chapitres» 


LIVRE   SECOND. 

BxpîicAtion  particulière  de  quelques  pacages  y 
où  l'Euchariftie  eft  appelléc  Image  , 
.     .  Figure  j  Myii ère  y  i^c. 

CHAP.y'^UE  M.  Claude  place  en  quelques  lieux 
I.   V^le  mot  à^  figure  ^  où  l'EucharilHe  n'eft 

-  point  appeile'e  figure  :  ou  fi  elle  eft  appelle'e  de  ce 
nom ,  c'eft  par  des  raifons  particulières  ,  qui  ne 
font  rien  à  cette  dilpute.  Explication  du  paftage 

,     de  Tertulliea  du  troifie'me  livre  contre  Marion 

Chap.  II.  Que  les  Calviniftes  ne  fçauroient  rien  con- 
clure raifonnablement  du  célèbre  pafTage  de  Ter- 
tuilien ,  tiré  du  40.  Chapitre  de  ion  4.  livre  con- 
tre Marcion.  p.   62.. 

Chap.  lil.  Explication  du  fèns  que  le  Cardinal  du 
Perron,  &;  d'autres  Théologiens  cathohques , ont 
donne'  à  ce  palTage  de  Terrullien.  p  76. 

Chap.  IV.  Autre  lens  naturel ,  que  Ton  peut  donner 
au  palTage  de  Tertullien,  qui  ruine  \q^  avantages 
que  les  Miniftres  en  rirent.  p.   yo. 

Chap.  V.  Refiitation  des  railonsd' A uber tin, contre 
le  lens  auquel  le  Cardinal  du  Perron  prend  le 
paflage  de TertuUien*  p  g», 

111  O  *- 


Table  des  Chapitres.' 

Chap.  VI.  Examen  de  3.  pafTages.  Le  i.  de  Pachy- 
more-,  le  z.  de  faint  Auguftin  contre  Adimante^ 
&  le  3.  dumêmefaint  Auguftin  dans  ia  lettre  à 
Boniface.  On  fait  voir  que  ,les  Minières  en  abu- 
fent  demême  que  du  paflage  de  TertuUien.  p.  91. 

Chap.  VIL  Explication  du  pafTage  de  Facundus,, 
pag.  loi. 

Chap.  VIIL  Que  l'on  ne  fçauroit  plus  mal  inftrui- 
re  les  peuples  de  la  dodrine  Calviniile ,  que  par 
le  Sermon  de  faint  Auguftin  aux  nouveaux  bap- 
tizez ,  quoy  que  M.  Claude  le  propofe  pour  mo- 
dèle d'une  mftrudlion  Calvinifte.  p.    110. 

Chap.  IX.  Explication  (incere  &  véritable  du  Ser- 
mon de  faint  Auguilin  ad  infantes^  p^  ii^y 


LIVRE 


Table  des  Chapitres. 


LIVRE    T  R  O  I  S  1  E'  M  E. 

Rè^onfe  aux  obje citons  tirées  des  rampons  de  la  matière  de  l'Eacha- 
r'ijiie ,  d"  des  différentes  manières  de  eoncevjir  ce  Myftere. 

Chap.  f^\  UE  les  rapports  de  la  matière  du  Sacrement  au 
I.  V^  corps  myftique  dej.  C.  n'empêclioient  pas  que  les 
Fidèles  ne  compriflènt  facilemenr^qu'il  n'y  avoic  que  \t  corps 
eiîentiel  de  J.  C.  qui  fût  réellement  contenu  dan^  le  Sacre- 
ment. Abus  que  M.  Claude  fait  de  divers  pafTages  àzs  Pè- 
res, qui  marquent  ces  rapports.  pag.  136 

Chap.  II.  Examen  de  la  Philofophie  des  Minières  fur  la  diftin- 
Aion  des  Images  ôc  de  leurs  originaux.  p.  iji 

Chap.  III.  Sophifmes  d'Aubertin  contre  les  maximes  établies 
dans  le  Chapitre  précèdent.  p  157 

Chap.  IV.  Explication  d'un  palTage  difficile  de  Theodote 
d'Antioche.  p.  161. 

Chap.V.  Que  la  nature  nous  porte  à  concevoir  &:  à  exprimer 
le  Myftere  de  l'Euchariftie  félon  les  manieras  ordinaires 
dont  les  hommes  conçoivent  &:  expriment  les  autres  objets. 
Première  manière  defeparation  d'un  même  objet  en  diver- 
fès idées.  Sophifmes  greffiers  d'Aubertin,nez  de  l'ignorance 
de  cette  manière  ordinaire  de  concevoir  les  objets,  p.  165. 

Chap.  VI.  Seconde  manière  dont  les  hommes  conçoivent  les 
objets ,  qui  eft  de  raffembler  en  une  même  idée  ceux  en  qui 
ils  ne  remarquent  aucune  différence  fenfible.  Ufage  qui  a 
efté  fait  de  cette  manière  de  concevoir  à  Tégard  de  l'Eucha- 
riftie par  {t%  Auteurs  les  plus  attachez  à  la  TranlTubrran- 
tiation.  p.  171,  . 

Chap.  VII.  Exemples  de  divers  fophifmesdesMiniftres,  fon- 
dez fur  l'ignorance  de  cette  manière  de  concevoir  la  doctri- 
ne de  la  Tranftùbftantiaîion.  p.  \-6 

Chap.  VIII.  Conf?quence  importante  de  cette  manière  de 
concevoir  le  pain  &:  le  corps  de  J.  C.  comme  un  feul  fujet , 
pour  entendre  le  véritable  fens  d'un  paftàge  d'Origene  ,qui 
afTujetcit  1  Euchariftieà  lacondition  des  viandes  communes. 

p.  185 
o 


Table  des  Chapitres. 


LIVRE    Q^U  A 1  K  1  l'  M  L. 

Que    les  noms  de  pain  é'  de  vin  donnez,  a  l'EucbariJIie  font  une 
fuite  de  la  Tranffubfiantiation. 

Ch AP,  /^  ^  E  c'efl:  une  faire  naturelle  de  la  dcclrine  de  la 
I.  V^  prefencer  eilo,  quel'Euchariftiefoitfouvencap,. 
pellëe  u^..  noms  de  pai  i  ^  ie  vin  ,dc  -iucres  termes  fynony- 
mes.  Défenfe  de  ce  qu'on  aditdans  le  premierTomede  la 
Perpétuité  touchant  le  id  i^igedesfèns.  p.  191 

Chap.  II.  Ufage  perpétuel  cie  ce  langage  dans  les  Auteurs  les 
plus  perfuadez  de  la  prefenre  réelle,  &  de  la  tran(rubftantia- 
tion  depuis  Berenger  ju'q  'i  prefenr.  Règles  pour  juger 
feurement  en  quel  {^^i.^  le^  Pères  s'en  lont  fervis.  p.  zoy 

Chap.  III.  Que  les  Pères  fe  font  icrvis  de  ce  langage  des  ièns 
avec  toutes  les  circonftances  quile  déterminent  au  fens  Ca- 
tholique. Première  circonftanr' .  Réponfeàceque  les  Mi- 
niftresobjedentj  que  les  Perei  di  cnt  que  TEuchariftien'efl: 
pas  un  pain  commun.  p.  214 

Chap.  IV.  Autres  circonftancesqui  déterminent  les  mots  de 

■pain  &  de  vin  à  ne  fignifier  qu'un  pain  ôcun  vin  apparent. 

Compiraifon  del'Euchanftie  avec  le  Sacrifice  deMelchife- 

dech.  p.  219 

Chap.  V.  Abusqu'Aubertin&M.  Claude funt  d'un pafTage  de 
Clément  d'Alexandrie  ^  Scd'un  autre  d'Origene.         p.  zzg 

Chap.  VI.  Examen  d'un  pailage  de  S.  Jérôme  tire  de  la  lettre 
à  Hedibie.  P-33^ 

LIVRE     CINQ^UIE'ME. 

Explication  despaffuges  de  Theodoret ,  4Jr  des  autres  Auteurs  qui 

ont  parle  coynme  lui. 

Chap.  T^  Euxinjufticesdes  Minières  fur  le  fujetde  Théo. 
I.      \^     doret.  p.  241 

Chap.  II.  On  rapporte  au  long  les  deux  paflages  de  Theodo- 
ret .  tirex  de  Ton  premier  &  de  Ton  fécond  dialogue,  p.  24(j 

Chap.  îU.  Que  ces  paffages  deTheodoret bien  entendus  éca- 
bliiTes-ît  clairement  la  prefence  réelle.  p.  2«2 

Chap.  ly.  Refiitation  de  la  principale  objeclion  d'Aubertin,  6c 


Table  des  Chapitres, 
de  M.  Claude  contre  le  fens  que  nous  avons  donné  à  ce  pafl 
fage  de  Theodoret.  p.  264 

Chap.  V.  Autres  fophifmesd'Aubertin  dans  ce  qu'il  a  écrit  fur 
Theodoret.  p.  270 

Ghap.  VI.  Examen  des  mêmes paflàges  de  Theodoret  par  rap- 
port à  la  TranflTubftantiation.  p.  27-7 
Chap.  VIÎ.  Explication  fincere  du  paflage  de  Theodoret,  tiré 
,     de  fon  fécond  dialogue,  par  laquelle  on  fait  voir  qu'il  ne 
blefle  en  rienladodrinede  laTranflubftantiation.       p.  281 
Chap.  VIII.  Delà  fîgnification véritable  des  mots  de  çv^n  Se 
d'y'ff/ct ,  6c  de «<«/ar^  dans  Theodoret ,  £c  dans  d'autres  Au- 
teurs. P-  ^92 
Chap.  IX.  Autre  folution  du  même  paflage  de  Theodoret , 
fondée  fur  le  fens  auquel  les  mots  de  nature  &  A'oujïe  font 
pris  par  les  Auteurs  Ecclefiafliques ,  &  par  Theodoret  mô- 
me. P-309 
Chap.  X.  Qu'après   ces   éclairciflemens  il   ne  refte  plus  de 
difficulté  dans  les  paflàges  de  trois  Auteurs  qui  ont  parlé  de 
l'Euchariftie  comme  Theodoret.  p.  314 
Chap.  XI.  Que  les  Eutychiens  n'ont  point  nié  abfoîument  que 
J.  C.  eût  un  corps ,  &  qu'ils  n'ont  point  prétendu  qu'il  fût  en- 
tièrement immatériel.                                                       P- 325 
Chap.  XII.  Réfutation  de  quelques  autres  obje<flions  que  M. 
Claude  tire  de  l'herefie  des  Eutychiens ,  &  de  la  manière 
dont  elle  a  efl;é  combattue  par  les  faints  Pères.  p.  334 


LIVRE     SIXIE'M-E. 

Que  l'on  reçoit  J.  C.  corporellement  dans  l' Eucharifiie. 

Chap.  T^Ivers  fens  du  mot  de  manger.  Expreflîonsdiffe- 


Dlve 
re 


I.  A^  rentes  qui  en  doivent  naiftre  à  l'égard  de  l'Eu- 
chariftie,  fuivant  la  dodrine  de  la  prefence réelle  ,  &;  delà 
Tranflubftantiation.  p.  346 

Chap.  II  Que  tout  le  fécond  tome  de  cet  ouvrage  contient 
une  preuve  de  la  vérité  de  la  manducation  corporelle.  Exa- 
men des  vaines  folutions,  par  iefquelles  les  Miniftres  pré- 
tendent éluder  quelques  pafl^ages.  p.  350 

(5  ij 


Table  des  Chapitres, 

Chap.  III.  Saint Ephrcm  Diacred'EdelIe,  &  Saint  Epiphane. 
p.  364 

Chap.  IV.  S.  Ambroife,  ou  l'Auteur  du  Livre  des  Sacremens. 
p.  371 

Chap.  V.  Pacages  de  faint  Auguftin ,  qui  prouvent  clairemenc 
la  man.iucâciun  corporelle  du  corps  de  J.  C.  p.  376 

Chap.  VI.  Que  les  Pères  en  (uivai.rla  doclunede  la  prtlence 
réelle,  ont  dû  dire  que  l'on  mange  ,  6c que  Tonne  mange 
pas  J  C.  P  ^^^^ 

Chap.  VIL  Eclaircifîèmencdu  paiîage  de  S.  Auguftin,  tirëdu 
98  Pfeaume.  p.  403 

Chap.  VIIÏ.  Explication  du  paflage  de  S.  AuguHin,  tiré  du  3. 
Livre  delà Dodrine  Chrêcienne , chap.  16.  p-407 

Chap  IX,  Que  toutes  les  expreffions  où  les  Pères  difent ,  tan- 
toll  que  les  méchans  mangent  le  corps  de  J.  C.  &.  tantofl: 
qu'ils  ne  le  mangent  pas ,  font  des  fuites  naturelles  de  la 
prefence  réelle.  ,  P-4i7- 

Chap.  X.  Qj^i'il  efl:  naturel  que  l'on  dife  ,  fuivant  la  doctrine 
de  la  prefence  réelle  ,  que  J.  C.eft  prefent  fur  la  terre  ,  6c 
abfent  de  la  terre.  p.  433 

Chap.  XI  Qiie  la  confideration  de  TEuchariftie^  comme  mé- 
morial de  la  Paffion  dej.  C.  n'efl:  point  contraire  à  la  pre- 
fence réelle.  p.  441 


LIVRE     SEPTIE'ME. 

Examen  des  argumens  négatifs ,  (^  des  difficultexjirèes 

des  fins. 

Chap.  f^  UE  M.  Claude  juge  fort  mal  de  îa  force  &  de  la 
L  v.^  foiblefle  des  argumens  negarifs.  Deux  exemples 
importans  de  fon  peu  de  difcernement  fur  ce  point,    p.  455 

Chap.  IL  Que  M.  Claude  fuppofè  témérairement  que  les 
Payens  ayent  connu  la  doclrine  des  Chrétiens  fur  l'Eucha- 
riftie.  P-46î- 

Chap.  III.  Examen  particulier  de  ce  que  M.  Claude  avance 
touchant  les  Livres  de  Celfus.  p.  479 

Chap.  IV.  Qji'il  n'y  a  aucun  fujet  de  s'étonner  que  les  Apolo- 


Table  des  Chapitres, 
gifles  de  la  Religion  Clirêcienne  n'ayenc  point  parlé  de  l'Eu- 
chariftie.  p.  484. 

Chap.V.  Que  le  filence  de  Julien  l'Apodac  fur  l'Euchariflie 
ne  donne  point  lieu  à  M.  Claude  de  conclure  que  l'Eglife  du 
temps  de  cet  Empereur  n'en  avoit  pas  la  même  cieanceque 
TEglife  Romaine  en  a  maintenant.  p- 49*^ 

Ch  AP.  VI.  Que  l'objedion  tirée  du  filence  des  Payens  regarde 

.  auffi.bien  les  Calvinilles  que  les  Catholiques  ,  &c  qu'ils  n'y 
fçauroient  fatisFaire  que  parles  mêmes  folutions  que  les  Ca. 
tholiques  y  apportent.  p.  505 

Chap.  VII.  Que  l'argument  négatif  tiré  du  filence  des  Pères 
fur  les  difficulcez  de  l'Eucharillie ,  a  efté  abfolument  détruit 

•   dans  le  cours  de  cette  conteftation.  p.  513 

Chap.  VIII. Qye  la  maxime  des  Pères  eft  de  s'attachera  la  foy, 
fans  écouter  les  raifonnemens  humains.  Qu'ils  ont  appliqué 
cette  maxime  à  l'Eucharifiie  ,  &  qu'elle  a  dû  les  portera 
n'en  reprefenter  les  difiîcultez  que  d'une  manière  confufe  de 
générale.  p.  yio 

Chap.  IX.  Queles  Pères  ont  quelquefois  marqué  les  vérita- 
bles difficultez  de  l'Euchariftie  ,  mais  qu'ils  n'ont  jamais 
parlé  des  prétendues  merveilles  que  les  Calvinifies  y  trou- 
vent, p.  J29 

Chap.  X.  Réponfe  à  ce  que  dit  M.  Claude  ,  que  les  Pères 
ont  établi  des  principes  de  Philofophie  contraires  aux  mer- 
veilles que  les  Catholiques  reconnoifi^ent  dans  l'Euchari- 
ftie.  p.  533 

Chap.  XI.  Que  la  doctrine  de  l'Eglife  fur  l'Euchariftie  n'eft 
point  contraire  au  témoignage  des  fens  ^  ni  à  ce  que  les  Pe. . 
les  en  ont  dit.  p.  540 


LIVRE    HUITIE'ME. 

preuves  authentiques  de  l'union  des  Eglifes  d'Orient  avec  l'EgliJè 
Romaine  fur  l'Eucharifiie. 

Chap.  /^  Riginc  &  progrés  de  ce  différend  avecM.  Claude. 

I.       V^Son  opiniaftreté  à  nier  que  les  Societez  d'Orient 

croyent  la  prefence    réelle.  Confpiration  àts  Miniftres  i 

oïï) 


Table  c^es  Chapitres, 
nier  ce  même  fait.  Utilité  du  defTein  de  les  convaincre  plei- 
nement, p.  561 

CHAP.II.Unionde  l'Eglife  Grecque  avec  l'Eglife  Romamefur 
l'Euchariftie  prouvée  par  l'atteftation  de  fept  Archevêques 
d'Orient.  p.  568 

Chap.  III.  Union  de  l'Eglife  Grecque  avec  l'Eglife  Romaine 
fur  l'Euchariftie  prouvée  parles  atteftations  des  Egiifes  de 
l'Archipelage.  p.  572 

Chap.  IV.  Union  de  l'Eglife  Grecque  avec  l'Eglife  Romaine 
fnr  l'Euchariftie  prouvée  par  les  témoignages  de  plufieurs 
Abbez ,  Religieux  &;  Papas  Grecs ,  contenus  dans  quelques 
Relations  de  Monfieur  de  Nointel ,  Ambaflàdeur  de  Sa  Ma. 
jefté  à  la  Porte ,  &  par  la  lettre  de  Monfieur  Panajotti  pre- 
mier Interprète  du  Grand  Seigneur.  p. 586 

Chap.  V.  Union  prefente  de  l'Eglife  Grecque  avec  l'Eglife 
Romaine  prouvée  par  divers  autres  témoignages  d'Abbez, 
Religieux  oc  Papas  Grecs,  contenus  dans  une  Relation  de 
M  l'AmbafTadeur.  P- 59^ 

Chap.  VI.  Union  de  l'Eglife  Grecque  avec  l'Eglife  Romaine 
fur  l'Euchariftie  prouvée  par  une  atteftation  authentique  du 
Patriarche  de  Conftantinople  fignée  de  crois  autres  Patriar- 
ches qui  l'ont  efté  avant  lui,  du  Patriarche  d'Alexandrie  , 
£c  de  trente-cinq  Métropolites.  p.  6zi 

Chap.  VII.  Union  del'Eglife  Grecque  avec  l'Eglife  Romaine 
fur  l'Euchariftie  prouvée  par  l'atteftation  des  Egiifes  de  Min- 
grelie  ,  de  Géorgie  6^  de  la  Colchide.  p.  634 

Chap.VIîI  Union  de  l'Eglife  Grecque  avec  l'Eclife  Romai- 

ne  fur  l'Euchariftie  prouvée  par  les  atteftations  du  Vicaire 

Apoftolique  ,  des  Refidens  de  plufieurs  Etats,  6i  delacom- 

.munautédes  Pérores.  Lettre  de  Monfieur  de  Nointel  Am- 

'  bafi^ideur  de  Sa  Majefté  Très.  Chrétienne.  p  638 

Chap.  IX.  Union  de  l'Eglife  Grecque  avec  l'Eglife  Romaine 
fur  l'Euchariftie  prouvée  par  le  peu  de  difficulté  que  les 
Grecs  font  de  communiquer  avec  les  Catholiques  Ro- 
mains en  même  temps  qu'ils  excluent  abfolumenc  les  Cal- 
viniftes.  p.  648 

Chap.X.  Union  del'Eglife  Grecque  avec  l'Eglife  Romaine 
fur  l'Euchariftie  prouvée  par  une  lettre  de  Nedarius  Pa- 
triarche de  jerulalem  au  Patriarche  d'Alexandrie  ,  &  par 


Table  des  Chapitres, 
le  témoignage  du  même  Patriarche  d'Alexandrie,  touchant 
les  Mofcovitcs.  p.  652 

Chap.  XI.  Union  de  l'Eglife  Grecque  avecTEglife  Romaine 

prouvée  par   la  décifion  de  quelques  points  ,  envoyée  de 

Conftannnople  en  Mofcovie.  p.  660 

Chap.  XII.  Union  de  l'Eglife  Grecque  avec  l'Eglife  Romaine 
fur  l'Euchariftie  ,  prouvée  par  la  réponfe  d'un  Grec  à  M. 
Claude.  p.  664 

Chap.  XIII.  Union  de  l'Eglife  Grecque  avec  l'Eglife  Ro- 
maine ,  prouvée  par  l'aveu  de  ceux  de  la  Religion  Préten- 
due Reformée  qui  font  à  Conftantinople.  p.  674 

Chap.  XIV.  Union  de  l'Eglife  Grecque  avec  l'Eglife  Latine  , 
prouvée  par  ce  qui  eft  arrivé  au  fujet  du  terme  de  Tranflub- 
ftantiation  inféré  dans  la  confeiîion  orthodoxe.  De  quelle 
forte  cette  confefTion  a  eflé  imprimée  en  Hollande  aux  dé- 
pens des  Eftats.  p.  680 

Chap.  XV,  Seconde  impreffion  du  Livre  de  la  confeffion 
orthodoxe.  Approbation  nouvelle  du  Patriarche  de  Con. 
ftantinople.  Original  de  cette  confeffion  envoyé  au  Roy 
en  Grec  6c  en  Latin.  Article  de  i'Ecuhanftie  en  Latin. 

p.  685 

Chap.  XV.  Ce  Chapitie  par  une  faute  d'impreffîon'n!  cft  encore  que 
le  quinzième  ,  quoique  ce  fait  le  feiz^éme  ,  la  même  faute  conti^ 
nue  dans  les  fuivans.  L'union  de  l'Eglife  Grecque  avec  l'E- 
glife Romaine  fur  l'Euchariftie  ,  prouvée  par  l'Acte  Syno- 
dal fait  par  le  Patriarche  dejerufalem&  toute  fon  Eglife 
contre  les  calomnies  des  Calviniftes.  p.  690 

Chap.  XVI. Union  de  l'Ecrlife  d'Orient  avec  l'Eçrlife  Romai- 
ne  fur  l'Euchariftie  8c  autres  points,  prouvée  par  un  Acle  ou 
Traité  du  Patriarche  des  Maronites  d'Antioche,  fignéde 
pluiîeurs  Métropolites  ScPreflres  de  fonPatriarchat.  p.  711 

Chap.  XVII.  Union  de  l'Eglife  Grecqueavec  l'Eglife  Romai- 
ne fur  l'Euchariftie  &  autres  points,  prouvée  par  deux  con- 
damnations des  erreurs  des  Calviniftes  faites  par  deux  Pa- 
triarches d'Antioche.  p.  71% 

Chap.  XVIII.  Union  des  Eclifes  d'Orient  avec  l'Ecrlife  Ro- 
maine  fur  l'Euchariftie  &  autres  points,  prouvée  par  la  con- 
damnation des  Calviniftes  par  l'Eglife  des  Syriens  de  Da- 
mas, p.  758 


Table  des  Chapitrés. 

Chap.  XIX.  Union  des  Eglifes  d'Onencavec  l'Eglife  Romai- 
ne fur  l'Euchanftie  prouvée  par  deux  atteftations  anthenci- 
ques  du  Patriarche  des  Coplires.  p.  -763 

Chap.  XX.  Union  des  Eglifes  d'Orient  avec  l'Eglife  Romai- 
ne fur  rEuchariftie  &;  autres  points ,  prouvée  par  diverfes 
atteftations  des  Patriarches  ,  Evêques  de  Prêtres  Armé- 
niens, p.  769 

Chap.  XXI.  Qu'on  ne  fçauroit  dire  fans  extravagance  que  la 
dodrine  de  la  prefence réelle  ait  pu  s'introduire  dans  les  So- 
cietez  d'Orient  depuis  Berenger  jufqu'à  ce  temps  ici.  Con- 
feffion  de  foy  de  Sotherius Patriarche  d'Antioche ,  &  autres 
pièces  p.  786 

Chap.  XXII-  Union  des  Societez  Orientales  avec  l'Eglife  Ro- 
maine fur  l'Euchariftie  ,  prouvée  par  l'extrait  d'un  Manuf- 
crit  Arabe  de  la  Bibliothèque  du  Roy.  p.  797. 

Chap.  XXIII.  Union  des  Eglifes  d'Orient  avec  l'Eglife  Ro- 
maine fur  l'Euchariftie,  prouvée  par  les  Liturgies  des  Nefto- 
riens ,  Eucichiens  &  Maronites,  P- 799 

Chap.  XXIV.  Conclufîon.  p.  804 


J^in  de  la  Table  des  Chapitres, 


LA  PERPETUITE' 


LIVRE   PREMIER. 

DES    MOTS    DE    FIGURE,  TYPE    E  Xi 
autres  noms  tirez  de  la  partie  extérieure 
de  l'Euchariltie  > 

■  f  i 

Qiion  n'a  pas  du  traiter plùtoj}  quelques  paffages  des  Pcrcs  que~ 
les  Calvinifies  allèguent  fans  ccjje  :  O- 1^^^  ce  qu'on  a  étably 
jufques  icy  ,  fait  voir  qu'ils  n'en  f^auroient  tirer  avantage.- 

E  ne  douce  point  que  la  promefTe  qu'on  a  ^  -er 
faite  d'expliquer  dans  ce  Volume  icy  les 
principaux  palTsges  des  Pères  que  les  MiniT 
cres  ont  accoutumé  d'alléguer  contre  la  Foy 
de  l'Eglife  ,  ne  l'ait  fait  attendre  à  plufieurs 
de  ce  parti  avec  plus  d'impatience  que  le- 
précèdent.  Car  outre  qu'il  eft  naturel  à  ceux  qui  font  pré- 
venus de  ne  conter  pour  rien  tout  ce  qui  ne  répond  pas  pré- 
cifément  aux  raifons  dont  ils  ont  efté  frappez,  quoy  que' 
bien  fouvenc  ce  ne  foient  pas  les  meilleures  ;  il  arrive  encore- 
que  CCS  fortes  de  conteftations  étant  rarement  épurées  de  roue 
intereft  humain,  on  efi  bien  aife  que  la  difpute  fe  porte  (ur 
des  matières  oùron  croit  avoir  plus  d'avantage  que  fur  les  au- 
tres. 

Je  n'ay  pas  ignoré  en  entreprenant  d'écrire  fur  ce  fujer^ 

A 


X  L I  V.  I.  Dûs  mots  défigure ,  type  (B^  autres 

Ch.  I.  quelle  eftoic  en  cela  l'inclination  des  Minifbres.  Mais  je  n'ay 
pas  cril  qu'il  fiid  jufte  de  la  contencerplutoft, parce  qu'elle  m'a 
para  contraire  au  véritable  ordre  ,  qui  eft  la  lumière  des  did 
putes. 

Car  cet  ordre  demande  qu'on  établiiTe  premièrement  les 
principes  dont  on  a  befoin  pour  éclaircir  les  difficultez  ,  afin 
qu'on  ne  foit  pas  obligé,  ou  de  fuppofer  des  chofes  non  prou- 
vées ,  ou  de  répéter  fouvent  les  mêmes  chofes  ,  faute  de  les 
avoir  traitées  une  bonne  fois  dans  leur  place  naturelle. 

C'eft  ce  qui  nous  a  obligé  de  ruiner  d'abord,  commç  nous 
avons  fait  dans  le  fécond  Volume  ,  ces  folutions  chimériques 
àe  figure  &  de  vertu ,  de  corps  fimboliquc ,  Aq  figure  efficace  ,  qui 
font  les  fondemens  de  la  doctrine  des  Calviniftes ,  Se  qui  font 
fuppofées  dans  tous  leurs  argumens.  Caria  réfutation  de  ces 
notions  imaginaires  obligeant  de  prendre  les  termes  dont  les 
Pères  fe  fervent  à  l'égard  de  ce  Myrtere ,  dans  le  fens  naturel  ôc 
littéral ,  elle  ruïne  par  avance  tous  les  raifonnemcns  par  lef- 
quels  les  Calviniftes  les  voudroient  détourner  à  un  autre  fens^ 
Il  faut  confiderer  de  plus ,  qu'après  s'eftre  inflruit  de  la  do. 
t^rine  d'un  fiecle  par  l'examen  6c  la  comparaifon  de  tous  le  s 
partages  des  Auteurs  de  ce  temps- là  ,  on  a  droit  d'expliquer  les 
pallagcs  particuliers  de  chaque  Auteur,par  la  connoillance  gé- 
nérale de  la  dodrine  de  fon  fiecle.  Car  l'expérience  fait  voir 
auffi  bien  que  la  raifon  ,  que  lorfque  des  perfonnes  parlent  ou 
écrivent  fur  des  matières  communes ,  &  qu'ils  fuppofent  eflre 
entendues  de  tous  ceux  à  qui  ils  parlent ,  ils  n'ont  pas  le  même 
foin  d'exprimer  exadement  toutes  choies ,  que  s'ils  parloienc 
à  des  gens  qui  n'euiîent  aucune  connoillance  de  ce  qu'ils 
traitent.  Et  ainfî  pour  les  bien  entendre,  il  faut  premièrement 
eftre  inftruitde  ces  notions  comanunes  qu'ils  fuppofent.  C'eft 
même  une  condition  infeparabledu  langage  humain,  de  n'ex- 
primer pas  toutes  les  idées  qu'il  imprime  dans  l'efprit ,  parce 
qu'v  ayant  bien  plus  de  chofes  que  de  mots,  il  faut  par  necefîîté 
laifler  plufieurs  chofes  à  fupplcer.  Il  y  en  a  que  l'on  ne  marque 
Pfrp.  1. 1.  7.  que  par  une  de  leurs  parties, lors  même  qu'on  les  veut  faire  con- 
C.7.P.  55+-  &  cevoir  toutes  entières, parce  qu'on  fuppofe  que  chaque  idée  ex- 
gen.i.r.c.if.  citc  dans  i  clprit  toutes  celles  qui  y  lontordmairementjomtes.. 
C'eft  ce  qu'on  a  prouvé  dans  le  premier  Volume ,  &;tlans  la  ré- 
ponfe  générale,  d'uncmanierequeM.Claudeapparemment' 
n'entreprendra  plus  de  tourner  en  ridicule,  après  avoir  v\l  le 


tire\de  h  partie  extérieure  de  TEuchariJUe.      3 
mauvais  fuccés  tles  railleries  qu'il  a  faites  lur  ce  lujet  dans  fa  Ch.I. 
troifiëme  réponfe. 

Ainfi  ce  que  doit  faire  d'abord  une  perfonne  qui  clierche 
ferieufemenc  à  s'éclaircir  du  véritable  fentiment  des  Pères  fur 
quelque  matière,  cen'eft  pas  de  s'attachera  un  petit  nombre 
de  leurs  palîages,parce  qu'il  fe  pourra  faire  que  le  fens  en  dépen- 
dra de  tout  lé  corps  de  la  doclrine  des  Pères  de  ce  temps-là. 
Mais  il  faut  qu'il  s'applique  d  abord  à  confiderer  en  gros  tous 
les  lieux  où  ils  ont  traité  de  cette  matierejqu'il  s'attache  à  s'af- 
furer  en  les  comparant  enfemble  de  leur  véritable  fentiment;& 
qu'il  fe  ferve  enfuite  de  cette  lumière, pour  éclaircir  les  difficui- 
tez  qui  peuvent  refter  dans  quelques  endroits  qui  ne  paroiflent 
pas  d'abord  conformes  à  l'idée  que  l'on  aura  pnfe  fur  tous  les 
autres. 

C'eft  proprement  la  méthode  que  nous  avons  fuivie  dans  tour 
cet  ouvrage.  Car  nous  y  avons  prouvé  d'abord  par  une  foule  de 
palTages  &  de  raifons  qui  produifent  une  entière  certitude^que 
les  Pères  des  fix  premiers  fiecles  ont  pris  ces  paroles  de  l'inftitu- 
tionde  rEuchariftie,C^9'f/»zraC<?r/'/,dans  le  fens  littéral  6:  na- 
turel des  termes  :  Que  les  fens  détournez  deTf^z/y^^v  de  ^'f^'/^■|r, 
ne  leur  font  jamais  venus  dansl'efprit  -.  Qii'ilsont  reconnu  un 
véritable  changement  de  la  fubftance  du  pain  en  celle  du 
CorpsdejESus-CHRisT,& enfin  qu'ils  ont  crû  la  préfcnce réel- 
le 6cla  tranfÎLibftantiation  comme  l'Eglife  Romaine  les  croit. 
Nous  avons  en  même  tems  refuté  toutes  les  vaines  fubtilitez 
qu'Aubertin  employé  pour  éluder  la  force  &  la  clarté  de  ces 
preuves.  Et  ainll  le  fentiment  des  Pères  demeurant  confiant , 
nousfommesen  droit  de  nous  en  fervir  pour  l'éclairciffemcnt 
de  quelques  pafîages  qui  refient  encore  à  traiter ,  ôc  que  nous 
avons  refervez  pour  ce  troifiéme  Volume. 

Mais  le  principal  avantage  de  cet  ordre, c'eft  qu'en  préparant 
àl'examen  de  cespafïages  parl'établifTement  des  principes  dont 
ils  dépendent,il  fait  en  même  temps  que  cet  examen  n'efl  plus 
necefraire,&que  ceux  qui  veulent  uiivre  la  raifon  s'en  peuvent 
fort  bien  pafTer.Et  c'efl  en  cela  que  j'ay  dit  qu'il  étoit  plus  avan- 
tageux aux  Calvinifhes ,  que  celuy  qu'ils  auroient  voidu  qu'on 
fiiivît. 

Car  leur  véritable  intereft  dans  ces  difputes ,  n'eft  pas  de 
contenter  leurcuriofité,  ni  de  s'inftruire  du  fens  précis  d'un 
petit  nombre  de  pafTages.  C'efl:  de  fcavoir  à  quov  ils  s'en  doi- 

Ai] 


4       Liv.  I.  Des  mots  défigure ^  types  ^Autres 

Ch,I.  "V^"^  tenir,  &;à  quel  parti  ils  fe  doivent  ranger  dans  ce  grand 
dilfcrend  qu'ils  ont  avec  l'Eglife  Romaine.  Or  pouveu  qu'ils 
veuillent  confiderer  de  bonne  fo y  toutes  les  preuves  delà 
dodirine  Catholique, que  nous  avons  ramafTées  dans  les  deux 
premiers  Volumes^ils  y  trouveront  beaucoup  plus  de  lumière 
qu'il  n'en  faut  pour  fe  déterminer  dans  ce  choix  ,  en  laiflant 
même  (ubfifter  les  difficukez  qui  leur  peuvent  refter  fur  quel- 
ques points. 

Dieu  ayant  voulu  faire  grâce  aux  hommes,  &  les  appeller 
au  falut ,  en  les  obligeant  pour  s'en  rendre  dignes  de  fuivre  la 
Religion  veritable,leur  doit,pour  ainfi  dire,par  la  même  mife- 
ricorde  ,  que  les  preuves  de  cette  Religion  eftantconfiderées 
toutes  enfemble ,  foient  beaucoup  plus  fortes  que  celles  dont 
les  fedes  hérétiques  peuvent  appuyer  leurs  erreurs.  Mais  il  ne 
leur  doit  point  que  l'avantage  de  la  vraye  Religion  fur  les  fauf- 
ks  paroi{Ie  à  tout  le  monde  dans  toutes  les  preuves  particu- 
lières ;  nique  fa  lumière  foit  fi  vive  qu'elle  diiîîpeabfolumcnt 
tous  les  nuages  de  l'erreur.  Les  hommes  n'ont  donc  pas  droit 
d'en  demander  davantage,ni  de  chercher  une  plus  grande  af- 
furancedans  le  choix  d'une  Religion.  Et  comme  nous  avons 
dit  à  la  fin  du  Volume  précèdent ,  lors  qu'ils  font  parvenus 
jufqu'à  ce  point  que  de  voir  beaucoup  plus  de  preuves  de  vérité 
d'un  côté  que  d'un  autre  ,  la  raifon  les  oblige  de  fe  détermi- 
ner fans  attendre  l'entier  éclaircifiement  de  toutes  leurs  diffi- 
cul  tez.  Autrement  il  n'y  auroir  perfonne  qui  ne  fuft  prévenu 
de  la  mort  avant  que  d'avoir  pu  faire  ce  choix. 

S'il  efb  donc  vray,  comme  on  le  prétend,  êc  comme  l'é. 
quité  &  le  bon  fens  les  doivent  obliger  d'en  convenir,  que  les 
preuves  de  la  dodrine  Catholique  qu'on  leur  a  propofées 
dans  les  deux  premiers  Volumes  de  cet  Ouvrage  l'emportent 
de  beaucoup  fur  les  difîîcultez  qui  refient  à  éclaicir  ,  ils  fe- 
roient  injufl:cs  envers  eux-mêmes ,  fi  ces  difîîcultez  leur  fer- 
voient  de  prétexte  pour  demeurer  encore  dans  une  parti  que 
leur  confcience  condamneroit  efFedivement ,  puifqu'elle  en 
jugeroit  les  raifons  moins  fortes  que  celles  des  Catholiques. 

Ainfi  quand  j'en  demcurerois  là,  &que'je|leur  declarerois 
que  je  ne  veux  point  entrer  du  tout  dans  l'examen  de  ces  paf- 
fages  ;  que  je  les  laifle  pour  tels  qu'ils  font  j  que  je  ne  me  croy 

f)oint  obligé  de  les  éclaircir  5  cela  ne  devroit  rien  changer  » 
a  réfolution  qu'ils  doivent  prendre  ,  puifqu'ils  feroicnt  toii- 
Jours  obligez  de  faire  k  comparaifon  ^^i  preuves  que  nout 


tîreT^de  la.  pa.nte  extérieure  de  tEucharifiie.  j 
avons  proporëes,  avec  ces  difficulrez,  Scdefe  déterminer  par  Ch.  lu 
ce  qui  leur  paroîcroic  plus  évident  &  plus  folide.  Or  on  n'a 
pas  lieu  d'appréhender,  que  pourveu  qu'ils  agiffenc  de  bon- 
ne foy  dans  cette  comparaifon,  ils  hefitenc  tant  Toit  peu  fur 
le  choix  qu'ils  doivent  faire. 

Car  feront-ils  aflez  hardis  pour  prétendre  que  Dieu  après 
leur  avoir  fourni  tant  de  preuves  éclatantes  &  fenfibles  de  ce 
qu'il  les  oblige  de  croiredel'Eucharifl;ie,a  du  de  plus  tellement 
régler  les  paroles  des  Saints  Pères ,  qu'il  ne  leur  en  ait  laifle 
échapper  aucune  qui  pût  faire  de  la  peine  fur  cette  matière  ; 
&  qu'encore  qu'il  n'y  ait  prefque  point  de  Myftere  fur  lequel 
il  ne  fe  trouve  des  paflages  difficiles ,  il  a  dû  excepter  celuy- 
cy  de  cette  loy  générale,  quoy  qu'il  ait  voulu  expreflemenc 
qu'il  fervît  à  exercer  nôtre  foy ,  &à  humilier  nôtre  efprit  ? 

Ce  n'efl:  donc  que  par  une  condefcendance  charitable  que 
nousfommes  refolus  de  les  fuivre  dans  leur  voye,  &  non  par 
une  neceiïîté  abfoluë.  Et  l'on  va  voir  de  plus  que  ce  qui  reftoit  à 
faire,eft  beaucoup  moins  confîderable  qu'ils  ne  fe  l'imaginent. 

Car  de  cet  amas  de  difficultez,  que  M.  Claude  étale  avec 
tant  d'éclat  dés  l'entrée  de  fa  féconde  Réponfe,  il  y  en  a 
déjà  plufieurs  qui  font  entièrement   diffipées  dans  les  Volu- 
mes precedens  :  comme  par  exemple  ce  qu'il  avance  du  fi-      ^-  ciaada 
lence  de  l'Ecriture  fur  la  prefence  réelle,&  fur  la  tranflubftan-  y^Jç^'ie"  l'-* 
tiation,&tout  ce  qu'il  dit  dans  fon  Livre  contre  le  P.  Noiiet,  vre  i.&i.diî 
pour  prouver  que  les  paroles  dont  Jesus-Chuist  s'eft  fervi  ^-Volume. 
pour  établir  ce  Myftere ,  ne  peuvent  recevoir  le  fens  que  les 
Catholiques  y  donnent.  Car  tout  cela  eft  refuté  amplement 
dans  deux  Livres  entiers  du  fécond  Volume. 

Tout  ce  qu'il  allègue  des  Pères  pour  montrer  qu'ils  ont     m.  clause 
donné  à  l'Euchariftie  les  noms  àç  pain  &  àtvin ,  eft  fuffifam-  ^-  R<p-  p-  f'. 
ment  éclairci  dans  un  endroit  exprés  du  premier  Volume,où  '^'/y'^p Vii.' 
l'on  a  montré  que  les  Pères  n'ont  point  dû  parler  un  autre  lan- 
gage que  celuy-là,  êc  l'on  le  fera  voir  encore  plus  amplement 
dans  celuy-cy.  ^o 

Il  ne feroit prefque  pas  befoin  d'autre  éclairciflement  furies  1.7.0,7. p."  * 
m&tsâ'imai^e^àQtype  &  àe  fizure ,c\ue.  quelques  Pères  ont  don-  îh-  «£  C^^y. 
nez  à  l'Euchariftie,  que  de  celuy  qui  eft  contenu  en  divers  lieux  ^^'cfi  P"'  * 
du  premier  Volume,  où  l'on  a  fait  voir ,  que  ces  expreffions 
croient  fupléées  dans  l'ufage  par  la  connoiflance  que  les  fidel- 
ÏQs  avoienc  delà  dodrine  de  TEglife  j  6c  que  ne  fignifiant  l'Eu- 

A  iij 


é        .  L I  V.  I.  -D^j-  mots  défigure ,  type  ^  autres 
Ch.T.         chariftie  que  par  une  de  Tes  parties ,  elles  imprimoienc l'idée 

entière  de  tout  ce  qu'elle  contient. 
rcrf.  tom.  I.      Tout  ce  qu'il  avance  dans  (a  fixiéme  difficulté  ,  &  dans  plu- 
a  la  fin  de  la  /^^yj-^  autres  Heux  ,  Sc  Qu'Aubcrtin  avant  luy  a  fi  fouvent  re- 

1.  diliert    liir  r  •  i       n  1  J        r         i      i       r-       i 

k  Livre  Je  battu ,  Içavcir  que  les  Pères  en  parlant  des  Symboles  Eucha- 
Bcrtram.  rifliques ,  ne  les  écabliflent  point  dans  des  accidens  fans  rujet, 
mais  qu'ils  difent  formellement  que  c'cfi:  le  pain  &  le  vin  qui 
font  fignes,  images ,  &  figures,  eftfuffilamment  renverfépar 
la  remarque  que  l'on  a  faite ,  que  les  Pères  ont  conçu  &:  ex- 
primé les  Symboles  par  des  idées  populaires,  &  non  par  des 
idées  philolophiques  5  &:qu'ainfi  ils  les  ont  dû  appeller  pain 
&;  vin,  &les  concevoir  comme  pain  &vin,  mais  changé  & 
tran(rubft:antiéauCorps&;  au  SangdeJssus-CHRisT, comme 
ilsenfeignenten  une  infinité  de  lieux  ,  que  nous  avons  rappor- 
tez dans  le  fécond  Volume. 

On  a  refuté  auffienpaflant  en  quelque  endroit  l'argument 
qu'ils  tirent  de  ce  que  l'Euchariftie  eftappellée  gage,  mémo- 
rial ;  de  ce  qu'elle  eft  oppofée  par  laint  Ambroile  à  la  vérité 
qui  eft  dans  le  ciel  ^  c'eft. à-dire,  comme  onl'a  montré-j  à  la 
manifeftation  de  la  vérité  qu'elle  contient. 
,  On  peut  trouver  dans  le  chapitre  2..  du  8.  Livre  du  pre- 

c.  If.  p.  u+.  niicr  Volume  ,  des  principes  fuffifans  pour  répondre  à  tous 
&i.tf.c.io.  les  paflages  des  Pères,  dans  lefqtiels regardant  le  Sacrement 
^"  '*''^*  feparément,  ils  n'en  ont  affirmé  le  Corps  de  Jésus  Christ 

qu'indirectement,  &  avec  quelque  modification  ,  commeils 
eltoient  obligez  de  lefaire,  s'ils  vouloient  parler  comme  les 
autres  hommes. 

On  a  découvert  cxpreflementl'illufion  où  M.  Claude  eft 
tombé  en  divers  lieux  ,  &;  principalement  dans  la  page  69.  & 
80  de  fa  2.  Rcponie  ,  en  prenant  les  raifons  myfterieufes  que 
les  Pères  apportent  du  choix  que  Jesus-Christ  a  fait  de  la 
matière  du  pain  &  du  vin ,  pour  des  explications  du  fens ,  fé- 
lon lequel  ils  leur  donnent  le  nom  de  Cor^s  &de  San'^  de 
Jesus-Christ. 

Les  paflages  fur  lefquels  M.  Claude  établit  avec  Aubertin 
fa  grande  folution  de  la  venu  feparée  ,  ont  efté  traittez  aflèz 
amplement  dans  un  Livre  entier  du  2.  Volume  ,  pour  ne 
pas  craindre  que  M.  Claude  fe  plaigne  qu'on  ait  négligé  d'y 
répondre. 

Toutes  ces  difficultez  philofophiques ,  dont  il  prétend  que 


■tirei,  de  h  partie  extérieure  de  rEuchxrifiie.     ^ 
les   Pères  auroienc  du  entretenir  conrmiiellement  leurs  le-  Ch.  î, 
cleurs  &: leurs  auditeurs,  &  félon  krquellcs  il  s'imagine  qu'ils 
dévoient  régler  tous  leurs  dilcours,  ont  efté  Tuffifammentre- 
jettées,&:  parce  que  l'on  a  dit  dans  le  7.  Livre  du  premier  Vo- 
lume fur  le  fujec  de  Saint  Jean  de  Damas,  &  par  la  preuve  fen-  p         ,  ^ 
fible  que  l'on  a  tirée  dans  le  10.  déroutes  les  nations  d'Orient ,  c.4.p.  4!)3- 
qui  croyant  les  mêmes  chofes  que  nous ,  ne  parlent  prelque  '^-  ^'  P-  7^'* 
point  de  ces  difficultez,  &;  de  ces  fuites  philofophiques. 

Cette  reveuë  que  M.  Claude  fait  dans  fa  14.  remarque  flir 
tous  les  commentateurs  de  ces  paroles  ;  Cecy  e(i  mon  corps  , 
&  ce  catalogue  de  16.  Auteurs  qu'il  prétend  les  avoir  expli- 
quées dans  un  fens  de  figure ,  a  efté  tellement  renverfé  dans  le 
3.  Liv.  du  2. Volume,  qu'il  y  a  apparence  qu'à  l'avenir  il  fera 
plus  refervé  à  nous  produire  des  catalogues  de  cette  forte. 

Enfin  il  y  a  peu  de  ces  difficultez  que  les  Miniftres  ont  tant 
fait  valoir,  aufquelleson  n'aitdéja  donné  quelque  atteinte,& 
que  l'on  n'ait  prelque  fuffifamment  éclaircies  pour  les  perfon- 
nes  intelligentes. 

On  a  dejfîein  néanmoins  d'y  répondre  dans  ce  Volume  icy 
d'une  manière  encore  plusexprefle  ,  Se  plus  proportionnée  à 
toutes  fortes  d'efprits,  &  dctraitrer  même  en  particulier  ces 
fameux  partages  qui  font  fi  fouvent  répétez  par  les  Miniftres. 
Mais  i'ofe  dire  par  avance  qu'il  y  aura  plufieurs  de  ces  diffi- 
cultez qu'on  aura  peine  iappercevoir^  &que  le  monde  trait- 
tera  avec  raifon  de  vaines  &  de  frivoles ,  &;  que  l'on  s'éton. 
nera  fur  tout  que  les  Miniftres  en  puilTent  faire  tant  de  bruit, 
&  qu'ils  ofent  les  oppofer  à  cette  foule  de  preuves  invincibles, 
fur  lefquelles  la  dodrine  Catholique  eft  appuyée. 

On  prétend  faire  voir  fur  la  plufpart ,  qu'elles  ne  naifTent 
que  d'une  ignorance  allez  grolîîere  de  la  manière  dont  l'efprit 
conçoit  les  chofes ,  bc  les  exprime  après  les  avoir  conçuesj& 
qu'ainfi  il  eft  arrivé  par  un  jufte  jugement  de  Dieu,  que  ces 
gens  qui  ont  eu  allez  de  prefomption  pour  donner  des  bornes 
à  fa  toute- puiflance  ,  &:  qui  fe  font  crus  capables  de  fonder 
les  abyfmes  de  fa  fagefle ,  &:  de  juger  des  moyens  qu'il  devoit 
choifir  pour  fauver  les  hommes ,  n'ont  pas  eu  aflez  de  lumière 
pour  comprendre  ce  qui  fe  pafle  dans  leur  propre  efprit,  & 
dans  celuy  de  tous  les  autres  ^  &  s'en  font  formé  des  idées  fî 
bizarres  par  une  vainc  metaphyfique,  qu'elles  les  ont  empê- 
chez d'entendre  ce  que  les  enfans  entendent  fans  peine. Voilà 


s         Liv.  I.  Des  mots  de  figure  ,  type  (^  autres 
Ch  II.       quel  eft  le  deflcin  de  cet  Ouvrage.    On  verra  dans  la  fuite, 
fi  on  l'a  bien  exécuté. 


CHAPITRE     II. 

Que  la  doBrine  Catholique  porte  neceffairement  a  fe  former  l'idès 
de  deux  chofes  différentes  dans  l' Euchariftie.  Que  le  paffay:  de 
faint  Irenée  qui  marque  ces  deux  chofes  ,  prouve  clairement 
la  prefence  réelle. 

ON  ne  f(^auroit  fans  doute  prendre  une  méthode  plus 
naturelle  ,  pour  découvrir  lî  des  expreffions  que  l'orï 
trouve  dans  les  Pères ,  font  conformes ,  ou  contraires  à  la  do- 
drine  delà  prefence  réelle  ,  &;  delà  tranifubdantiation  ,  & 
peuvent  eftre  raifonnablement  employées ,  ou  à  l'établir^  ou 
à  la  détruire  ,  que  de  confidercr  premièrement  quelles  idées 
cette  doctrine  imprime  dans  l'efprit ,  &  quelles  expreffions 
ont  dû  eftre  produites  par  ces  idées  ;  &  de  palTèr  enfuite  à 
l'expérience  ,  c'eft-à-dire  ,  de  confulter  de  quelle  forte  cette 
doclrine  a  efté  conçue ,  &  exprimée  par  ceux  qui  en  ont  efté 
perfuadez.  Car  s'il  fê  trouve  que  laraifon  Scl'ufage  s'accor- 
dent à  autorifer  quelque  expreffion  ,  bc  à  l'employer  pour 
exprimer  cette  dodrine,  il  fcroit  vifiblement  contre  le  bon 
fêns,  de  conclure  fur  une  expreffion  de  cette  nature ,  que  les- 
Pères  qui  s'en  font  fervisonteuune  dodrine  différente. 

C'eft  la  méthode  que  nous  avons  defléin  de  fuivre  dans 
l'examen  de  la  plufpart  des  paffages  conteftez.  Et  pour  com- 
mencer à  en  faire  Teflay  ,  je  dis  qu'on  ne  fçauroit  s'appliquer 
à  comprendre  ce  que  l'Eglife  Catholique  enfeigne  du  Myfte- 
re  de  l'Euchariftie,  que  l'on  n'y  confidere  deux  chofes  diffé- 
rentes ,  qui  donnent  lieu  d'en  former  deux  idées  diftmcles  6c 
fcparées.  Car  on  ne  fçauroit  n'y  pas  concevoir  le  Corps  de 
Jésus  Christ  ,  qui  en  fait  la  partie  principale.  Et  comme  il 
eft  clair  que  le  Corps  de  J.  C  n'a  pas  cette  étendue,  &  cette 
forme  qui  font  l'objet  de  nos  fens  ,  il  eft  impoffible  que  nous_ 
ne  regardions  cette  apparence  de  pain  que  nous  appercevons, 
comme  quelque  chofe,  &  que  nous  ne  la  concevions  par  une 
idéefeparée  de  celle  qui  nous  reprefente  le  Corps  même  de 
Jesus-Chkist, 


tire\de  h  punie  extérieure  de  PEuchariflie  9 
Je  n'examine  pas  prefentement  quelle  eftli  nature  de  cétre  Ch.  IL  ' 
apparence  •>  Ci  ce  font  des  accidens  qui  fubfiftenr  par  miracle  , 
comme  des  fubftances,  ou  fi  ce  n'eft  qu'une  fimple  apparen- 
ce de  pain.  C'efl:  une  autre  queftion  qui  fe  doit  traiter  fepa- 
rément  pour  ne'  pas  embarafler  les  chofes.  Il  me  fuffit  pre-î 
fentement  que  ces  idées  foient  difl:ini5l:es,'ôc  que  comme  je 
puis  me  former  Tidée  du  Corps  de  J.  C.  fans  me  former  l'i- 
dée de  cet  objet  fenfible,  je  puifie  aulTi  concevoir  cet  objec 
fenfible  fans  concevoir  diftindement  le  Corps  de  J.  C. 

Cette  diverfité  d'idées  doit  produire  par  neceflltc  une  di- 
verfité  de  mots  qui  y  répondent ,  dont  les  uns  fignifientcét 
objet  fenfible ,  &  les  autres  le  Corps  de  J.  C.  Ainfi  les  mots 
de  Corps  de  J.  C.  de  Sang  de  J.  C.  de  chair  de  J.  C.  font  deftinez 
à  fignifier  expreifément  le  Corps  &:  le  Sang  même  de  J.  C.  fans 
marquer  precifément  cet  objet  fenfible  :  &:  les  mots  de  pain  6c 
de  vin  ,  de  Symbole ,  de  Sacrement ,  àtjtgne ,  àa  figure ,  à'efpece , 
à.'hofiîe,  à'ohlation  ^ÀQ  don  ^  représentent  diredement  l'objet 
fenfible,  fans  marquer  dire<3:ement  le  Corps  de  J.  C. 

Je  n'ay  pas  befoin  de  prouver  que  c'eft  le  langage  ordinaire  fttruspi^t*». 
des  Théologiens  les  plus  perfuadez  de  la  prefence  réelle,  &  '"xl*."  ^^' 
qu'il  n'y  en  a  aucun  qui  ne  s'en  ferve.  M.  Claude  eft  trop  ha-  //«/»  de  s. 
bile  pour  contefter  unechofê  fi  confiante.  Il  me  fuffit  de  re-  ^'^"''  '"J}'- 
marquer  que  c'e(\:  le  fondement  de  cette  dodrine  fi  commune  MÙ^i'fl.  ' fent. 
dans  tous  ceux  qui  ont  écrit  depuis  Berenger,  fçavoir  que  l'on  ^-4  -^'Z.  8• 
peut  confiderer  trois  chofes  dans  ce  Sacrements  l'une  qui  ^*'"''"-^''^"^ 
n'eft  que  Sacrement  fans  être  la  chofe  du  Sacrement,  &:  c'elt 

{)roprement  ce  que  I'otî  appelle  l'objet  fenfible ,  qui  efl:  tel- 
ement  figne  qu'il  n'eft  point  fignifié;  l'autre  qui  eft;  Sacre- 
ment &  chofe  fignifiéc  5  &  c'eft  le  Corps' de  J.  C.  fignifié  par 
les  efpeces  fenfibles ,  &  fignifiant  le  Corps  Myftique  :  La  troi- 
sième ,  qui  efl  chofe  fignifiée  fans  eftre  Sacrement,  c'efl  à 
dire  ,  fans  en  fignifier  uneautre  :  &  c'eft  la  focieté  des  juftes 
&  des  membres  vivansde  J.  C.  Mais  cette  dernière  n'eftanc 
que  fignifiée  &  iion  contenue  dans  l'Euchariftie  j  il  ne  refte 
quedeux  partie  qu'elle  contient  effedivement,  fçavoir  celle 
qui  n'eft  que  Sacrement,  c'eft  à  dire,  l'objet  fenfible  5  l'autre 
<juieft  la  chofe  fignifiée  dans  le  Sacrement',-&îc'eft  le  corps 
natureideJ.C.  qui  nous  donne  de  plus  par  la  diOcrfîtcde  fes 
membres ,  &  par  le  voile  dont  il  eft  couvert,  l'idéede  céciau-  .,3.^;  i^^j^t 
tre  Corps  qui  lu  y  a  efté  fi  cher,  qu'il  a  donné  'pour  lé  fauver-, 
Ja  vie  de  Ion  propre  Corps.  '  ...B,      .... 


i 


lo        Liv.  I.  T>es  mots  de  figure^  type  f^)  autres 
Ch.  II.  ^^  v\y^  rien  encore  en  tout  cela  que  de  très- confta"t,&  les 

Minières  ne  nieront  pas  fansrdoure  que  l'on  ne  trouve  dans 
tous  les  Pères  cette  même  diverfitc  d'idées  &  de  termes  ^  6c 
qu'il  ne  s'y  en  voye  beaucoup  qui  fignifient  literalement  le 
Corps  de  J.  C.  fa  Chair  ôc  fon  Sang  j  &  d'autres  qui  marquent 
l'objet fenfible,  qu'ils  appellent  pain,  vin, image,  antitype, 
fymbole.  Car  c'eft  du  Sacrement  même  de  l'Euchariftie  que 
Saint  Auguftin  dit  dans  un  Sermon  qu'il  a  fait  aux  nouveaux 
baptifez ,  rapporte  par  Saint  Fulgence  &  par  divers  Auteurs» 
Que  ces  chofes  font  appellées  Sacrement  parce  que  l'on  y  voit  une 
chofe  ,  é'que  l'on  y  en  conc^oit  une  autre .  Ifta  fratres  ^  ideodicun- 
tur  Sacramenta  ,  quia  aliuâ  videtur ,  aliud  intetltgitur. 

Nous  verrons  en  un  autre  lieu  ce  que  Saint  Auguftin  en- 
tend par  cette  chofe  conclue  -,  mais  je  n'allègue  présentement 
ce  paflage  que  pour  montrer  que  Saint  Auguftin  a  confideré 
dans  l'Euchariftie  un  objet  vifîble  différent  de  la  cho-fe  que  l'on 
n'y  voit  pas ,  &  qu'on  y  doit  concevoir  -,  &  pour  conclure  que 
ce  langage  eft  tres-conforme  à  celuy  de  tous  les  Théologiens 
de  rEglileCatholique,qui  ont  emprunté  ces  paroles  de  Saine 
Auguftin ,  &qui  n'en  ont  point  trouvé  de  plus  propres  pour 
exprimer  leur  fentiment. 

Mais  celuy  de  tous  les  Pères  qui  a  le  plus  expreflêment  mar- 
qué que  l'on  doit  confîderer  deux  chofês  dans  l'Euchariftie, 
eft  Saint  Ircnée ,  dont  l'autorité  eft  d'autant  plus  confiderable 
qu'il  eft  un  des  plasproches  du  temps  des  Apôtres ,  n'y  ayant 
entre  luy  &  Saint  Jean  que  Saint  Polycarpe  dont  il  eftoit  Dit 
ciple.  Car  c'eft  luy  qui  nous  dit  en  termes  formels ,  que 
l  Eucharifiie  efi  compofèe  de  deux  chofes ,  l'une  terrefire  ^l'autre 
celefie.  Mais  comme  ce  paflage  eft  un  grand  fujet  de  contefta- 
M.  Claude  tion ,  &  que  M.  Claude  s'en  fert  avec  tant  de  confiance ,  qu'il 
».  Rcp.pji.  ne  craint  pas  de  dire,  qu'il  efl  fi  dhnonfiratif^oyxtiono^vciion^ 
qu'il  ne  peut  recevoir  aucune  réponfe  folide'À\&^  bon  de  le  rappor- 
ter icy  tout  entier  ,  &  d'examiner  ce  fêns  que  les  Miniftres  y 
donnent,pour  juger  (î  M.  Claude  a  eu  raifon  d'en  parler  d'une 
manière  fi  decifive. 

Ce  Père  après  avoir  expofé  l*herefic  des  Valentiniens,  qui 

ëifotent  que  J.  C.  n'étoit  pas  Fils  du  Créateur  du  Monde,mais 

d'un  autre  Dieu  ,lcs  réfute  par  ces  paroles. 

AdTcrf  Hatr,       Comment pourront-ils  croire  que  le  pain  fur  lequel  on  aura  rendu 

•  4-  C.  34«      grâces ,  /ait  le  Ûorps  de  leur  Seiq^nrnr^  ^  que  ce  fait  le  Calice  de  fon 

San^  {  que  l'on  offre)  i'ili  ne  -  ccmoifcnt  pas  qu'il  foit  F  ils  dm 


tirez,  de  lu  p.irtie  extérieure  de  tEuchxriflie,         n 

Créateur  du  monde  ;  c'eft  à  dire ,  le  p^erbe  de  celuy  qui  fait  porter  des  Ch.  1 1, 
fruits  aux  arires  y  qui  fuit  couler  les  fontaines ,  ^  qui  fait  que  la. 
terre  pouffe  premièrement  l'herùe ,  enfui  te  l'épi  ,  ^  puis  le  froment 
dans  l'épi'i  Et  comment  d'autre  part  peuvent-ils  dire  que  la  chair 
/loive  eftre  réduite  k  la  corruption, é'  ri  avoir  point  de  part  à  L-  vie  y 
€lle  qui  eft  nourrie  du  Corps  ^  du  San^  du  Seizntur  ?  Il  faut  donc  ou 
qu'ils  abandonnent  leur  erreur^  ou  qu'ils  ce  fjent  d'offrir  le  Myfiere 
dont  j'ay  parlé.  Mais  pour  nous  nofire  doUrine  efi  entièrement  con^- 
forme  a  l Euchariftie ,  ^  l'Eucharifie  confirme  nofire  doUrine. 
Car  nous  offrons  à  Dieu  des  chojcs  qui  font  à.  luy^  publiant  par  ce 
Myfiere  d'une  manière  convenable  ,  funité  de  la  chair  ^  de 
l'ef'^rit.  Car  comme  après  que  nous  avem  invoqué  Dieu  fur  le  pain 
qui  efi  une  fnb fiance  qui  suient  de  la  terre ,  il  ceffe  d'efire  un  pain 
commun ,  &  devient  Eucharifiie  qui  efi  compofée  de  deux  chofes , 
Pune  celefie  ^  P autre  terre fire  >  ainfi  nos  corps  en  recevant  l' Eu- 
charifiie ceffcnt  d'efire  corruptibles  ,  puis  qu'ils  reçoivent  l'efpe- 
rance  de  la  refurreiiion.  , 

Aubertin  fe  démêle  de  ce  paflâge  en  y  employant  tout  à  la  •*  •?•  '^ 
fois  Tes  deux  clefs  de  vertu  &  de  figure.  Ainfi  quand  S.  Irenéc 
<lit ,  Comment  pourront  ils  croire  que  le  pain  fur  lequel  on  a  rendu 
grâces  ,foit  leCorps  duSeigneur'i  il  veut  que  cela  fignifie ,  Com- 
ment pourront  ils  croire ,  que  le  pain  foit  la  figure  du  Corps 
de  leur  Seigneur,  ou,  fon  Corps  Sacramentalî 

Quand  ce  Père  ajoute .-  Comment  peuvent-ils  dire  qne  la  chair 
doive  tomber  dans  la  corruption  ,  ^  n'avoir  point  de  part  à  la. 
•vie  y  elle  qui  efi  nourrie  du  Corps  ^  du  Sangdu  Seigneur}  il  veuc 
que  cela  fignifie  que  nôtre  chair  eft  nourrie  de  la  figure  du  - 
Corps  §»:  du  Sang  du  Seigneur. 

Et  quand  il  eft  dit  enfin ,  que  l' Eucharifiie  eft  compofée  de  deux  p.  jor. 
chojes .  l'une  terrefire fi' autre  celefie ,  il  veut  que  cela  puiflè  (Igni- 
fier  qu'elle  eft  compofée  de  pain  &  du  Corps  de  J.  C.  abfenr, 
comme  l'explique  Pierre  Martyr,  &  plufieurs  autres  Mini- 
ftres  ;  ou  plutôt  félon  une  autre  opinion  qu'il  juge  plus  pro- 
bable ,  qu'elle  eft  compofée  de  pain  qui  eft  la  chofecerreftre,  P-  J^» 
&  de./rf  vertu  feparée  du  Corps  de  J.  C.  jointe  au  pain,  qu'il 
veut  que  Saint  Irenéc  ait  defignce  par  le  mot  gênerai  de 
chofe  celefte. 

Mais  comme  cette  explication  n'eft  fondée  que  fur  cet 
fuppofîti  VIS  .q^i2  le  mot  de  Corps  de  J.  C.  fignifie  dans  les 
'^sx^i.lufiyirede  ce  Corfs^  &  qu'il  y  a  dans  i'Euchahftic  unf 


t«?Cli  .8[,t" 


Il       L I V.  T.  ^Ves  mots  de  figure ,  type ,  ^  autres 
Ch.  il      certaine  vertu  feparée  du  Corps  de  J.  C.  nous  l'avons  déjà 
ruinée  en  réfutant  ces  deux  chimères. 

Et  quand,  même  nous  n'aurions  fur  cela  d'autres  lumières 
que  celle  que  nous  trouvons  dans  ce  paflage,  &  dans  quel- 
,que  autre  de  ce  Père ,  il  y  en  a  plus  qu'il  n'en  faut  pour  faire 
;voir  rabfurdité  de  ce  fens ,  àc  de  tout  ce  qu'Aubertin  allègue 
pour  le  foutenir. 

-  Il  prétend  que  le  mot  de  Cori)S  de  J.  C  en  cet  endroit  figni- 
iie  un  corps  typique ,  un  Corps  Sacramentel ,  c'eft  à  dire  ,  une  fi- 
gure du  Corps  de  J.  C.  Mais  S.  Irenée  expliquant  luy  même 
en  un  autre  endroitde  quelle  manière  lepamEuchariftiqueeft 
le  Corps  de  J.  C.  il  nous  afllire  que  c'eft  fon  propre  Corps. 
J  t  e  1  jESVS-CHRISTy  à\t-'\\yaj'fure  pojîtivement  que  le  pain  ^  qui  efi 

une  cnature  ^efi  fon  propre  Corps. 

Je  f<^ay  bien  qu'Aubertin  pour  éluder  ce  paflage,  rapporte 
quantité  d'exemples  où  le  mot  ^ç. propre ^  ÏS^ka  ,  cft  jointàdes 
termes  métaphoriques ,  comme  lors  que  Clément  d'Alexaru 
drie  dit,  que  /.  C.  a  eu  l'Eglife  pour  fa  propre  Epoufe  j  t<.  Saint 
Grégoire  de  Nyfle ,  qu'il  a  formé  notre  corps  de  fa  propre  main. 
Mais  nous  avons  déjà  découvert  l'illufion  &  le  fophifme  de 
cette  réponfe,  qui  confifte  en  ce  qu'il  confond  mal  à  propos 
les  proportions  métaphoriques  avec  les  propofîtions  figurati- 
ves. Car  il  eft  bien  vray  que  le  terme  de  propre  peut  eftre 
joint  à  des  mots  vrayement  métaphoriques  ^  c'eft  à  dire,  où 
l'attribut  fe  prend  pour  quelque  qualité  de  la  chofe  figuréej 
qu'ainfi  l'on  a  bien  pu  dire  que  Dieu  a  formé  le  corps  de 
l'homme  de  fa  propre  main-,  c'eft  à  dire,  par  fa  propre  puit 
fance:  mais  il  eft  certain  auffi  qu'Aubertin  n'a  pu  alléguer 
d'exemple  où  ce  terme  foit  employé  dans  des  propofitions 
figuratives 5  c'eft  à  dire,  dans  celles  où  le  Signe  eft  appelle 
du  nom  de  la  chofe  fignifiée  ^  &  que  l'on  ne  trouve-  nulle 
part  que  la  pierre  du  defert ,  le  Sacrifice  de  Mekhifedech  , 
l'Agneau  Pafcal,  ayent  efté  appeliez  le  propre  Corps  de  J.  C. 
«■^^  pour  marquer  qu'ils  le  fignifioient.  Ainfi  cet  ufage  qu'il  veut 
que  Saint  Irenée  ait  fait  du  mot  de  propre  en  cet  endroit,  eft 
également  contraire  au  bon  fcns,  &  à  Tufage  de  tous  les 
autres  hommes  j  6c  c'eftlà  un  des  caraderes  des  folutions 
•d'Aubertin, 

■  hes  mots  de  confe.fer^d'a  furer pofîtivement  J^itC«,3Aiac7a7o  dot 
iê  ferc  Saint  Ir  ence  en  difant ,  que  J.  C.  a  confejfè  que  le  Calice 


tirc^de  îa  partie  extérieure  de  T Eucha,riflie .      rj 

qui  eft  une  créature ,  eft  [on  propre  Sang  ;  &  qu'il  a  ajjuré  pofitive-    Cjj.  1 1. 
Tnent  que  le  pain,  qui  eft  une  créature^  eft  fan  propre  Corps  ,  font 
voir  encore  manifertement  que  le  mot  de  Corps  de  y.  C.  ne 
peut  eftre  pris  pour  une  fimplc  figure  de  ce  corps.  Car  com- 
me l'on  l'a  déjà  remarqué,  ces  termes  donnent  l'idée  d'une 
chofe  difficile  à  croire,  que  Ton  veut  perfuader,  en  l'aflèu- 
rant  fortement  j  au  lieu  que  l'efprit  ne  conçoit  rien  que  de 
très-facile  à  comprendre ,  quand  il  n'a  qu'à  fe  reprelénter 
qu'un  être  corporel  eft  devenu  la  figure  d'une  autre  chofe  : 
Comme  l'efprit  ne  fe  force  point  pour  le  croire  ,  il  ne  fait 
point  auifi  d'effort  pour  le  perfuader  aux  autres  ;  &  par  con- 
lequent  pour  n'imprimer  que  cette  idée  ,  ce  Saint  n'auroit  ja- 
mais eu  recours  à  ces  termes  :  Que  J,  C.  a  confeflTé  que  le  Ca- 
lice eftoitlafiyire  de  [on  propre  Sang  :  Qu'il  a  pontivement  alTu- 
ré  ^«1?  le  pain  efttit  la  figure  de  fon.  propre  Corps.  Il  faut  n'avoir 
gueres  de  jufteflè  d'elprit  pour  n'eftre  par  choqué  d'une  ex- 
preflîon  fi  bizarre. 

Le  Cardinal  du  Perron  remarque  judicieufement  fur  ce 
paflage  que  Saint  Irenée  dit  que  J.  C.  a  ajfuré  que  le  pain  eft  oit 
fon  Corps ,  de  même  qu'il  dit  trois  lignes  après  ,  qu'ilaaffuré 
qu'il  eftoit  homme.  Ce  qui  marque  qu'il  propofe  ces  deux  ve- 
ritez  ,  comme  eftant  également  At^  objets  de  foy  ,  Se  comme 
les  voulant  faire  également  recevoir  par  l'autorité  de  J.  C, 
fc  qu'ainfî  il  n'y  a  point  d'apparence  de  vouloir  faire  de  la 
première  une  propoficion  figurative,  puis  que  ce  feroit  don- 
ner lieu  d'en  faire  autant  de  la  féconde,  êc  de  faire  palier 
l'Humanité  de  J.  C.  pour  une  Humanité  phantaftique,  com- 
me faifoient  les  Marcioniftes. 

Et  la  réplique  qu'Aubertin  fait  fur  ce  fujeteft  entièrement 
vaine.  C'eft,  dit-il,  qiCon  eftoit fuffifamment  averti  par  la  dife- 
rence  qu'il  y  a  entre  un  pain  é"  le  Corps  de  J.  C.  d'entendre  la  pre- 
mière en  un  fens figuré.  Car  c'eft  au  contraire,  cette  différence 
qui  formant  une  difficulté  confîderable,  donne  lieu  à  cette 
exprefllon  de  Saint  Irenée  que  J.  C.  a  affuré  qui  fait  naître 
l'idée  d'une  chofe  difficile  à  croire.  De  forte  que  non  feule- 
ment cette  difficulté  n'empêche  pas  de  prendre  cette  pro-- 
pofitionen  ce  fens,  mais  c'eft  au  contraire  ce  qui  y  oblige. 
Auffi  cette  différence  entre  le  pain  &  le  Corps  de  J.  C.  eft 
Ç\  peu  une  raifon  de  ne  pas  entendre  en  ce  lieu  le  vray  Corps 
<ie  J.  C.  par  le  mot  de  corps.,  que  c'eft  ce  qui  y  oblige.  C'eft 

h  iij 


Ch.  II. 


Aub,  p.  }U. 


Coar.  Adim. 


I4        L I V.  I.  Des  mots  âe  figure^  type  ^  ti  autres 
l'obftacle  que  la  foy  a  à  furmonter,  &  qu'elle  fùrmonce,  félon 
S.  Epiphane ,  dans  cous  ceux  qui  font  fauvez  j  puisque  ceux  en 
qui  elle  ne  lefurmonte  pas,  font  exclus  du  faluc. 

Je  ne  m'arrêteray  pas  non  plus  â  réfuter  icy  quelques 
exemples  >  dans  Icfquels  Aubercin  prétend  que  les  Auteurs 
ont  joint  ces  termes  de  confejfer  &  d'ajfurer  à  des  termes  mé- 
taphoriques. Car  on  a  fait  voir  ailleurs ,  qu'il  confond  tou- 
jours les  cxprefiîons  figuratives  avec  les  métaphoriques  ,  5c 
que  la  même  raifon  qui  fait  que  ces  termes  peuvent  avoir 
lieu  dans  les  expre^ons  métaphoriques ,  qui  eft  que  la  chofc 
exprimée  par  métaphore,  peut  eftre  grande  ÔC  difficile  à  croire, 
fait  qu'ils  ne  peuvent  avoir  lieu  dans  les  propofîtions  figurati- 
ves, parce  qu'il  n'eft  jamais  difficile  à  croire  qu'un  être  corpo- 
rel foit  deftinc  à  eftre  le  figne  de  quelque  chofe  excellente  -, 
que  l'efprit  n'y  a  aucune  répugnance,  &  qu'ainfi  il  eft  ridicule 
de  faire  effort  pour  la  furmonter  par  une  affirmation  qui  mar- 
que que  l'on  craint  de  n'eftre  pas  crû. 

J'ajoûteray  feulement  qu'Aubertin ,  outre  ces  exemplei 

d'expreflîons  métaphoriques  qu'il  compare  mal  à  propos  avec 

celle  de  S  Irenée^en  allègue  encore  une  de  S.  Auguftin,  qui 

paroiffant  plus  vraifemblable  que  les  autres ,  eft  en  effet  la 

,  moins  jufîe  de  toutes.  C'eft ,  dit-il ,  que  S.  Auguftin  fe  ferc 

,  de  cette  même  expreffion  dans  le  livre  contre  Adimantc. 

,  Le  Seigneur^  die  il ,  n'a  f as  fait  difficulté  de  dire ,  cecy  eft  mon 

,  Corps ,  en  donnant  le  fiyfie  de  fon  Corps.  Or  que  veulent  dire 

,  ces  paroles,  n'a  pas  fait  difficulté  ^  finon  a  confirmera  affurè 

,  pofitivementl 

Nous  traitterons  ailleurs  exprjeflemcnt  de  ce  pafïâge,  & 
nous  ferons  voir  qu'il  ne  fîgnifie  autre  chofe,  fînon  que  Je- 
sus-Christ,  donnant  à  {t%  difciples  un  Sacrement  de  fon 
Corps,  dans  lequel  le  Corps  eftoic  réellement  contenu,  n'a 
pas  fait  difficulté  de  donner  le  nom  de  Corps  à  ce  Sacrement, 
qui  le  fignifioitôc  lecantenoit  j  comme  l'Ecriture  ne  fait  pas 
difficulté  de  donner  le  nom  d'ame  au  fang  qui  U  contient  & 
la  fîgnifie.  Mais  il  fuffit  prcfcntemcnt  de  découvrir  l^abus  qu'- 
Aubertin en  fait  en  ce  lieu  icy,  Darce  qu'il  eft  afièz  fubtil. 

il  confîfte  en  ce  qu'il  n'a  pas  remarqué  qu'il  y  a  de  deur 
fortes  de  difficulté!  j  l'une  qui  ne  regarde  que  l'expreffion  , 
l'autre  qui  regarde  les  chofes  mêmes.  Car  quelquefois  les 
choies  Mac  ea  cllet'Cnêmei  difficiles  à€roiFei& quelque- 


tirez,  de  la  punie  extérieure  de  tEuchmJîie.  i^ 
fois  les  choies  eftant  d'elles-mêmes  communes  &  faciles  à  C".  IL 
concevoir,  i'expreflîon  qui  les  reprefence  ne  laiflé  pas  d'ê- 
tre extraordinaire  i  de  force  que  ces  mors  qui  affirment  plus 
fortement  que  d'autres ,  font  quelquefois  deftinez  pour  faire 
croire  la  chofe  même  qui  eft  regardée  comme  difficile,  & 
quelquefois  pour  autorifer  l'expreffion  qui  a  quelque  cho(e 
d'extraordinaire. 

S.  Irenée  fe  ferc  de  ces  mots  de  confejfer  Si.  ^ajfurer pojîtive- 
ment  I^ta.Qt^a.tei(Talo  en  la  première  manière.  Car  quand  il  dit, 
qneJ.C.aaJfurépoJttivement^uelepaineJioitfon  Corps ^  c'eft 
la  chofe  même  qu'il  veut  faire  croire  ,  &  non  l'expreflioa 
^u'il  veut  autorifer. 

Mais  S.  Auguftmne  s'en  fert  qu'en  la  2.  manière,  c'eft  à 
dire  ,  pour  montrer  que  c'eftoit  une  expreffion  autorifée  par 
l'Ecriture  de  donner  aux  fîgnes  le  nom  des  chofes  fignifiëes. 
Car  c'eft  pour  prouver  cela  qu'il  allègue  cette  expreffion  : 
Cecy  efi  mon  Corps  :  &  il  veut  dire  feulement  que  J.  C.  n'a  pas 
fait  difficulté  de  ie  fervir  d'une  expreffion  ,  où  le  nom  de  la 
chofe  fignifiée  eft  donné  au  figne  qui  la  fîgnifîe  6c  la  contient. 

Ainfî  il  n'^y  a  nul  rapport  entre  le  paflage  de  S.  Auguftiti 
&  celuy  de  S.  Irenée.  Il  s'agit  dans  celuy  de  S.  Auguftin 
d'une  difficulté  d'expreffion  ,  qui  eft  oftée  par  le  mot,  non 
duhitavit:  il  s'agir  dans  celuy  de  S.  Irenée  d'unedifficultéde 
chofè,  qui  eft  oftée  par  le  mot  de  confejfer  Se  de  ha.Qtfliiuaa.l9 
il  a  ajfuré  pofitivement  .^  qui  nous  porte  à  croire  malgré  la  re- 
fiftance  de  nôtre  efprit.  Voilà  comment  on  trompe  le  monde 
par  ces  fauflcs  refïèmblances  d'expreffions ,  qui  font  les  plus 
grandes  fources  de  fôphifmes  6c  d'illufion  qu'il  foie  poffible 
de  s'imaginer. 

Que  M.  Claude  cependant  ne  fè  promette  pas  grand'cho- 
k.  de  l'aveu  que  je  luy  fais  que  S,  Auguftin  a  reconnu  en  cec 
endroit ,  que  le  nom  de  la  chofè  fignifiée  eftoit  donné  au  fi- 

Î;ne  dans  cette  propoficion ,  Cecyeft  mon  Corps  -.  il  verra  dans 
a  fuite ,  que  ce  Père  l'a  dit,  Ôcl'a  pu  dire  fans  s'éloigner  en 
effet  du  fens  de  tous  les  autres ,  &  fans  donner  aucune  attein- 
te à  la  dodrine  de  la  prefênce  réelle. 

Aubertin  fait  donc  un  tres-mauvais  ufage  delà  clef  de  P*  '"'* 
figure  en  expliquant  les  mots  de  Corps  &  de  Sang  de  J.  C.  de 
la  figure  de  ce  Corps  &  de  ce  Sang.  Mais  la  manière  dono 
il  veut  que  l'on  entende  ces  autres  paroles  de  S.  Irenée , 


î^        Liv.  î.  T>^s  mots  de  figure ,  type  ^  &  autres 

Ck.  1 1.  Que  l'Euchanflie  efl  compofée  de  deux  chofes ,  l'une  teneflre  ^ 
l'autre  celefte^  eft  encoreplus  contraire  au  bon  fens&  à  la  raifon. 
Il  veut  pren:îierement  foùtenir  contre  Bellarmin  rexplication 
<]ue  Pierre  Martyr  y  avoit  donnée ,  qui  efl:  que  cette  chofe  ce- 
Iefl:e  marquoit  le  Corps  de  J.  C.  abfènt ,  &  que  S.  Irenée  avoit 
voulu  dire  qu'il  fixlloir  confiderer  deux  chofes  dans  l'Eucha- 
riflie,  le  fignc,c'efl:à  dire  le  pain  ,  &  lacliofe  fignifiée,c'eft:à 
dire  le  Corps  de  J.  C.  qui  efl;  dans  le  Ciel.  Etcomme  ce  Car- 
dinal fe  fert  fur  cela  de  cette  maxime  tirée  du  bon  fens ,  que 
l'on  n'a  jamais  dit  qu'une  chofe  efl:  compofée  d'une  autre  cho- 
fe  qui  efl:  hors  d'elle i  Aubertin  s'élève  fièrement  contre  luy , 

Aub.p.joj.  ^  jg  jj-aite  de  ridicule.  Ily  a^  dit-il, //«x  de  hardieffe  que  de 
vérité  en  ce  que  ce  Cardinal  avance ,  que  l'on  ne  peut  dire  qu'une 
chofe  eft  compofée  de  parties  qui  ne  font  pas  pre fentes  toutes  enfem. 
hle.  Car  Clément  Alexandrin  ne  dit-il  pas  que  toute  l'Eglife,  auffî 
bien  qu'un  homme ^eft  compofée  de plufîeurs  membres  1  dr-  S.  Chry- 
foftome  ne  dit-il  pas  aujjî  en  parlant  des  Corinthiens  :  Z'£glife  qui 
eft  parmi  vous  eft  une  partie  de  l' Eglife  qui  eft  par  tout ,  &  ^» 
Corps  qui  comprend  toutes  les  Eglifes. 

Que  cet  exemple  fait  bien  voir  combien  il  efl:  dangereux 
d'oppofer  à  l'autorité  de  l'Eglifc  des  fubtilitez  de  Logique , 
puis  que  ceux  qui  s'en  piquent  le  plus ,  &  qui  ont  tant  de  con- 
fiance en  leurs  raifonnemens  qu'ils  en  font  le  fondement  de 
ieur  foy  &:  de  leur  falut,  ne  laiflènt  pas  de  s'éblouir  d'une 
manière  fi  groffiere  :  Car  qui  a-t-il  de  plus  groflïer  que  cette 
erreur  d'Aubertin  qui  n'a  pas  fceu  diftingucr  ce  que  l'on  ap- 
pelle  un  Tout  colleftif  de  ce  que  l'on  nomme  dans  la  Logi- 
que un  terme  ou  un  Tout  connotatif  ? 

Un  Tout  colledif  efl:  un  amas  de  plufieurs  chofes  confide- 
rées  diredemenc  &  renfermées  dans  un  même  mot ,  à  caufe  de 
quelque  rapport  qu'elles  ont  enfemble  ,  comme  une  armée, 
un  peuple,  un  Parlement  ,une  Eglife.  Mais  un  terme  ou  un 
Tout  connotatif  au  contraire  n'eft  qu'une  chofe  unique  en  elle- 
même,  mais  dans  laquelle  on  conçoit  quelque  rapport  à  quel- 
qu'autre  chofe  qui  n'cft:  fignifiée  qu'indiredement.  Tels  font 
les  mots  Acfigne ,  de  Sacrement ,  de  tableau.  Car  outre  l'être 
*  «lu  figne,  j'y  connois  encore  un  rapport  aune  autrechofe  mar- 

quée par  CCS  fignes  ,  mais  marquée  obliquement. 
Il  n'eft  nullement  étrange  que  le  premier  genre  de  Tout^m& 
«ftrc  compofé  de  parties  feparées  Se  abfentcs  les  unes  des  au- 
tre» 


tire-z^de partie  extérieure  de  tEuchanfiie.  ly 

très ,  puis  que  ce  Tout  n'a  point  d'unité  réelle ,  &  que  ce  font  Ch.  1 1. 
en  effet  piufieurschofès  exprimées  directement  par  un  même 
mot.  Or  il  n'elT:  pas  étrange  que  pluiîeurs  chofes  foient  com- 
pofées  de  ces  mêmes  plufîeurs  chofes  qui  font  renfermées  fous 
un  même  terme. 

Mais  il  n'en  efb  pas  de  même  de  la  féconde  efpece  de  Tout. 
Car  comme  l'efprit  n'y  conçoit  direcTiement  qu'une  chofe , 
quoy  que  cette  chofe  fe  rapporte  indirectement  à  une  autre, on 
ne  dit  jamais  quelle  eft.compofée  de  ces  deux  chofes.  Amfi 
perfonnen'a  jamais  dit  qu'un  tableau  d'Alexandre  fût  compo- 
fé  des  chofes  prelentes,  qui  font  la  toile  &.  les  couleurs ,  &: 
d'une  chofe  abfenrc  qui  eft  Alexandre 5  ny  qu'un  olivier  fuft 
compofé  d'arbre  ik"  de  paix.  Perfonne  n'a  jamais  dit  aufîî  qu'un 
père  fuft  compofé  de  luy  &  de  fon  fils.  EtlesMiniftres  mêmes 
ne  difent  pas  que  l'Euchariftie  foit  compofée  de  pain  5c  du 
peuple  ,  quoy  que  le  pain  figure  le  peuple  félon  les  Pères. 

Apre";  ces  éciaircifTcmens,  la  furprife  d'Aubertin  eft  toute  vi- 
fîble:  Car  quand  Bellarmin  foûtient  qu'on- ne  dit  pas  qu'un 
Tout  loitcompofc  de  parties abfentes  6c  feparées,  il  parle  non 
du  Tout  coUedif ,  c'eft  à  dire ,  de  plufîeurs  chofes  renfermées 
fous  un  même  mot ,  mais  d'un  tout  connoratif  ou  relatif.:  Gr 
l'Euchariflie  felonla  prétention  des  Miniftresmêmesn'eft  pas 
un  Tout  collectif  comme  une  armée,  un  peuple,  &c  un  Parle- 
ment; C'eft  un  Sacrement,  c'eft  à  dire,  une  certaine  chofe 
unique ,  à  laquelle  on  ne  peut  donner  d'autres  parties  que  cel- 
les qu'elle  enferme  réellement.  Ainft  prétendre  comme  fait 
Pierre  Martyr  &;  Aubertin ,  que  quand  S.  Irenée  a  dit  que 
l'Euchariftie  eftoit  compofée  de  deux  chofes ,  l'une  rerrcftre, 
&  l'autre  celefte,  il  a  voulu  dire  qu'elle  eftoit  compofée  de 
pain  &  du  Corps  de  J.  C.  abfent,  c'etl  le  faire  parler  d'une 
manière  aufh  extravagante  que  fi  l!6n.difûit ,  Le  cheval  de 
bronze  eft  compofé  de  metail  6c  d'un  Roy  de  France ,  ou  que 
l'agneau  pafcal  eftoit  compofé  d'animal  k  de  pafTage. 

Il  n'y  a  donc  pas  moyen  de  foûrenir  ce  premier  fens  que  les 
Miniftresont  donné  zxxmoXi  à^  chofe  cele/h  .^nÏQ  prenant  pour 
le  Corps  de  ].  C.  abfent.  Et  c'eft  neut-eftre  dans  cette  vue 
«^u'Aubertinnousen  fubftituëunat  tresqui  ift,  dit-il,  que  l'on 
peut  entendre  par  cette  chofe  celefte  une  certaine  vertu  fepa- 
rée  duCorps  de  J.  C.  qui  eft  jointe  au  pain  Euchariftique  félon 
S.  Irenée  Ôc  les  autres  Pères. 

C 


i8        Liv.  I.  Des  mots  de  figure  ^  type  (^  autres 
Ch.  II.       Mais  avanc  que  d'avoir  droit  d'appliquer  un  mot  gênerai, 

comme  celuy  de  chofc  cclcjle  ,  a  cette  idée  particulière  de  vertu, 
feparêe^  il  faudroit  qu'il  euft  bien  prouvé  cette  vertu  (eparée,  ôc 
qu'il  euft  fait  fait  voir  que  c'eftoit  une  chofe  fi  notoire ,  qu'on 
pouvoit  ruppofer  ,  que  tous  les  fid.  les  laconnoiifoient  dilbnc- 
tement.  Or  tant  s'en  faut  qu  il  l'ait  prouvé,  que  nous  avons 
montré  au  contraire  que  c'eft  la  plus  improbable  de  toutes  les 
chimères ,  &  que  tous  les  partages  dont  il  prétend  la  tirer ,  ou 
ne  prouvent  rien  du  tout,  ou  prouvent  le  contraire  de  ce  qu'il 
Vovezi.  V.  1.  prétend.  Ainiî  comme  il  ne  fonde  en  ce  lieu  cette  prctenduë 
f,c,  IO.&  II,  vertu  que  fur  ces  mêmes  partages ,  il  n'y  a  qu'à  renvoyer  à  l'en- 
droit du  fécond  volume  oÎmwus  les  avons  réfutez. 

2.  Il  faut  n'avoir  point  de  difcernement  pour  ne  pas  recon- 
noître  que  les  mots  rcs  temna  S>c  rcs cclefiis ,  qui  (ont  gcnerau?c, 
font  relatifs  aux  mots  particuliers  qui  les  précèdent.  Or  com- 
me le  mot  res  terrena  fe  rapporte  manifcflement  au  pain  ,  il 
faut  que  le  mot  de  res celcjtis  fe  rapporte  au  Corps  de  J.  C. 

Je  içay  bien  que  le  Cardmal  du  Perron  entend  par  le  mot  de 
tes  cclefiis ^  l'efprit  de  J.  C.  mais  c'efl:  en  entendant  par  celry 
de  ras  terrena  le  Corps  de  J.  C.  &.en  rapportant  amfi  ces  deux 
termes  généraux  à  deux  autres  termes  particuliers^  dont  S.  Ire- 
nee  ic  ert  auparavant,  qui  iont  ceux  de  chair bi  d'c/prit ,^cit 
lefquels  il  entend  encore  la  chair  &  l'cfprit  de  J.  C. 

Je  diray  de  plus  en  partant  que  l'explication  de  ce  Cardinal 
eil  très  mal  refutée  par  Aubertin  ,  qui  le  contente  de  dire  qu'il 
s'enluivroit  que  S.  Irenée  n'auroit  point  reconnu  dertgne  dans 
rEucharifl:ie  ,  puifqu'il  ne  compofoit  l'F.uchariftiie  que  du 
Corps  de  de  l'elprit  de  J.  C.  Car  ce  Minirt:re  devoir  fçavoir 
que  l'on  defigne  &  que  l'on  définit  fouvent  leschofes  par  le  rs 
feules  parties  principales  &  fubftantielles ,  (ans  exprimer  c.  . 
les  qui  ne  (ont  qu'accidentelles  ^  quoy  que  l'on  n'ait  pas  def. 
fein  de  les  nier. 

Parext^mple,  ErtienneEvêqued'Autunnepretendoit  point. 
du  tout  nier  qu'il  n'y  eull:  un  figne  externe  dans  l'Euchariftie 
Tr.  de  Sacr.  lors  qu'il  dit  qu//  n'y  a  qu'unefeuie  chofe  dans  le  Sacrement  ^  À. 
^'^^-  fi^avoir  J.  C.  Dieu  dr-  homme. 

Et  S.  Anfelme  avoitauffi  peu  cette  intention  lors  qu'il  dit; 

&  s  %  D^'  -^^^'y  ^^^  Prefent  fur  la  table  de  l'autel  que  le  Corps  du  Seigneur^ 

°  ^       dans  lequel  la  vraye  fub (lance  du  pain  a  efiè  véritablement  changée. 

Ce  nefut  jamais  auffile  delTein  de  Geoffroy  de  Vendôme,  qui 


'    tirez^de  lit pa.rtie  extérieure  de  rEuclmr'ifiie.         I9 

dit ,  Qjie  ce  que  l'on  prend  fur  l'autel  après  la  confccration  ,  n'efi  Ch  .  î  T. 

rien  autre  chofe ,  ^  ne  contient  rien  autre  chefe  ,  que  ce  que  la  ve-  '^^-  ^'^  Corp. 

>  ,    ,  I       ^         n  ^  &  Sang.  D. 

rite  déclare  par  ces  paroles  :  Cccy  ejt  mon  Corps. 

MaislaifTincà  parc  l'opinion  de  ce  fçavantCardinal, qui  quoy 
qu'in^enieufe,  n'eft  pas  fuivie  par  le  commun  des  Théologiens, 
parce  que  concevant  félon  la  doctrine  de  l'Fgliledcux  chofes 
dansl'Euchariftie,  l'une  terreftre,  quieft  l'objet  fenfible  ;  l'au- 
tre celcfte,  qui  eft  le  Corps  de  J.  C.  ils  ne  croyenc  pas  avoir 
befoin  de  chercher  un  autre  fens  dans  les  paroles  de  S.  Irenée, 
qui  exprime  iî  narureliement  ces  deux  idées  ;  je  dis  qu'il  efl: 
clair  que  le  fens  d'Auberc:n  ne  peut  aucunement  fubfifter, 
puifqu'il  fait  tomber  S.  Irenée  dans  cette  abfurdité  d'exprimer 
une  certaine  vertu  inconnue  par  un  mot  gênerai  fans  la 
deligner  par  aucun  terme  particulier  ni  dansce  qui  précède  ni 
dans  ce  qui  fuit  ;  de  forte  que  ce  feroit  proprement  une  énigme 
dont  l'explication  auroit  efté  refervée  au  fieur  Aubcrtin. 

On  pourroit  encore  avec  juftice  demandera  Aubertin  &  aux  ;. 

autres  Minières ,  des  exemples  où  il  foit  dit ,  lorfque  des  cho- 
fes ont  une  certaine  force  &  une  certaine  vertu ,  qu'elles  font 
compofées  d'une  chofe  t(?rrefl:re  6c  d'une  chofe  celcfle  ou  fpi- 
rituelle-  Car  ils  allèguent  bien  des  Pères  qui  difénc  que  l'eau 
du  baptême  reçoit  une  vertu  par  la  confecration  ,  qu'il  y  a  de- 
dans une  vertu  cachée:  mais  il  n'eft  dit  nulle  part  que  l'eau  du 
baptême  foit  compofée  d'eau  &  de  vertu;&  encore  moins  qu', 
elle  foit  compofée  d'une  chofe  rerreflrc  &:  d'une  chofe  celefte; 
ce  qui  donne  l'idée  de  deux  chofes  feparées,£c  dont  l'une  n'efl 
pas  accident  de  l'autre. 

Ainfi  l'ufage,  la  raifon^  &  l'autorité  des  Pères  dccruifant 
également  ces  fens  chimériques  d'Aubertin,il  doit  demeurer 
pour  confiant  que  S. Irenée  enfeigne  danscepaflagela  prefen- 
ce  réelle  du  Corps  de  J.  C.  dans  l'Eue hariftie. 

Il  l'enfcigne  endifant  que  l'Euchariftie  efl  compofée  de  deux 
chofes,  l'une  terr-^ftre  6c  l'autre  celefte,  puis  que  cette  chofe 
celefte  ne  peur  cflre  que  le  Corps  de  J.  C.  &  qu'il  ne  fçau- 
roit  faire  partie  «le  l'Euchariftie  s'ii  n'y  eft  prefent. 

Il  l'enfeigne  en  marquant  qu'il  faut  croire  que  le  pain  confa- 
cré  efl  le  Corps  de  J.  C.  ce  qui  ne.  fe  peut  entendre  que  de 
ion  propre  Corps  .  comme  nous  l'avons  prouvé. 

Et  il  l'enfeigne  cni^ore  en  tirant  de  la  participation  à  l'Eucha- 

riflie  une  picr\ice  la  refurreclion  des  corps  j  &  de  leur  in- 
corruptibilité après  la  refurrcction.  C  ij 


lo         Liv.  I.  Des  mots  de  figure  ^  type  &  autres 
Ch.  1 1.  Car  cette  penfée  de  S.  Irenée  ci\  tres-r..i(onnable  en  fuppo» 

Tant  qu'il  ait  crû  que  l'Eucharillie  contenoit  réellement  le 
Corps  &c  le  Sang  de  J.  C.  &  tres-dëraifonnable  en  fuppofanc 
qu'il  ne  l'ait  pas  crû.  Et  en  effet  comme  nous  avons  dit  ailleurs, 
per.  1. 1.6.C.  iln'eft  pas  étrange  que  l'autheurde  la  vie  communique  la  vie, 
•'i-P-7"5.       que  le  Corps  incorruptible  dej.  C.  communique  l'incorrupti- 
bilité: &:  le  Myffcere  étonnant  de  l'unioii  de  ce  Corps  divia 
avec  nos  corps  mortels  donnant  l'idée  de  quelque  fin  très  gran- 
de &  de  quelque  effet  extraordinaire,  nous  avons  grand  fujec 
de  croire  que  c'eft  par  là  que  nous  acquerrons  l'immortalité 
qui  nous  eft  promife.  C'eft  pourquoy  comme  il  y  a  quelque 
Gliofe  de  fort  plauiîbl-e  dans  cette  preuve,  on  ne  doit  pas  s'c- 
^^'^'^iJ' l'^  tonner,  nique  S.  Irenée  l'ait  répétée  plufieurs  fois  dans  cec 
£.  i5.fp,  704'  Ouvrage  ,ni  qu'il  ne  foit  pas  le  feul  qui  l'ait  employée ,  &  que 
d'autres ,  comme  S.  Grégoire  de  Nyfle ,  S.  Chryfoftome  &  S. 
Cyrille  d'Alexandrie  l'ayent  empruntée  de  luy  ^ comme  nous 
l'avons  fait  voir.     ' 

.  Mais  il  l'on  fuppofoït  que  S.  Irenée  &ces  autres  Pères  onc 
efté  dans  le  fentiment  des  Miniltres,  il  n'y  auroit  rien  d'égal  à 
l'abfurdité  de  leur  raifonnement.  Nous  fommes  nourris, leur 
fait  dire  Aubertin,  de  la  figure  de  J.  C.  Donc  les  Valentinien  s 
ont  tort  defoûtenirque  notre  chair  nereifufciterapoint.Donc 
il  eft  affuré  que  nous  reffu (citerons.  Quelle  confequence,  quelle 
liaifon  y  a-t-il  de  cette  figure  à  la  refurredion  ?  Pourquoy  ces 
Pères  n'auroient-ils  pas  dit  de  même:Nous  fommes  oints  de  la 
figure  du  S.Efprit  :  Donc  nous  relTîilcitcrons  !  Pourquoy  n'au- 
roient-ils pas  dit:  Les  Juifs  ontprrsdanslama-nnela  figure  de 
J.  C.  donc  ils  reffufciteronr?  Pourquoy  de  toutes  les  figures  de 
J.  C.  &  du  S.  Efprit  dont  l'Ecriture  eft  pleine,  n'auroient-ils 
conclu  la  refurrecfion  que  de  celle-là?Pourquoy  autoienr.ilsfup- 
pofé  que  cette  confequencequ'ils  rirent  de  la  réception  de l'Eu- 
chariftie  à  la  refurredion, eft  Ci  claire  qu'ils  ne  fe  mettent  jamais 
en  peine  de  la  prouver?  C'eft  ,  dit  Auberrin  ,  que  ielon  les  Pè- 
res, l'Euchariiiieeft  le  gage  de  la  refurrecl;on.  Mais  fi  c'eftoit  là 
leur  principe  &;  le  fondement  de  leur  argument-,  en  vérité  il  au- 
roit efté  neceflaire  de  le  marquer  au  moins  quelquefois,  &:  de 
ijeftippoTerpas  toujours  qu'il  eftoitaifé  à  deviner.  Cependant 
Is  ne  l'ont  fait  dans  aucunsdes  lieux  où  ils  conclucnr  que  nous 
JrefiTufciteronsdeceque  nous  participons  à  la  chair  de  |.  C  Eft- 
-çequece  principe  que  l'Euchariftie  eft:  le  gage  de  larefurrec* 


tire'^  de  lapartie  extérieure  de  l' Eucharifi'te .  m 
tion ,  eft  une  de  ces  preniieres  verkez  que  l'on  fuppofe  eftre  Ch.  I L 
connues  de  tout  le  monde  j  &  qui  n'ont  pas  befoin  d'eftre  ex- 
primées ?  Mais  de  plus ,  comment  S,  Irenée  euft-il  pu  raifonna- 
blement  fuppofer  que  les  Valentiniens  qui  nioient  la  refurrec- 
tion,  demeureroient  d'accord  que  l'Euchariftie  en  fuft  le  gage? 
Si  cette  abfurdité  efl  incroyable  dans  un  homme  tant  foit  peu 
fenfé, combien  reft-elle  plus  dans  un  aufli  grand  homme  que 
S.  Irenée?  que  fera-ce  donc  de  l'attribuera  tant  de  Pères  tout 
à  la  fois?  Et  comment  les  Miniftres  n'ont-ils  point  de  honte 
de  vouloir  quêtant  de  grands  Se  de  faintsDodeursayent  pref- 
que  toujours  penlë  &  fe  loicnt  toujours  exprimez  d'une  maniè- 


re extravagante  > 


On  examinera  dans  un  autre  endroit  l'objeclion  que  les  Mi- 
niftres tirent  de  ce  que-S.  Irenee  dit  que  nous  fommes  nourris 
du  Corps  de  J.  C.  mais  je  répondray  dés  icy  à  une  autre  ob- 
jection que  M.  Claude  propofe  avec  une  extfême  confiance, 
&  qu'il  appelle  demonftrative.  Etquoyqu'elle  foit  un  peu  hors 
de  l'ordre  que  je  me  fuis  propofé  ,  je  veux  bien  m'en  écarter 
pour  luy  témoigner  la  déférence  que  j'ay  pour  luy. 

Cette  prétendue  démonftration  eft  que  faint Irenée  veut  non  M-  Claude  s»« 
feulement  quele  pain  recevant  la  confecration  figure  vos  corps  re.  ^'^P'P*^  ' 
cevant  l' incorruption  5  mais  il  veut ,  dit-  il ,  qutl.  les  figure  formel, 
lement par  lafubfifi-ance  de  fon  être  fous  la  qualité  de  Sacrement  ^ 
que  l^ invocation  ^  la  confecration  luy  donnent. 

Ainfi  bien  loin  que  le  Myftere  en  détruife  la  fubftance  ,  qu'au 
contraire  il  faut  par  la  rai  fon  du  Myftere  qu'elle  ne  foit  pas 
détruite ,  pour  reprefencer  la  chair  qui  n'eft  pas  détruite  par 
la  grâce  de  l'efprit. 

Ce  raifonnement  peut  eftre  éclairci  en  le  reduifant  en  forme. 
Car  ce]queM.  Claude  veut  dire  que  eft  S.  Irenée  ne  fçauroic 
prouver  par  l'exemple  du  pain  Euchariftique  que  la  chair  ne 
fera  pas  détruite  qu'en  fuppofant  que  ce  Pain  n'eft  pas  détruit. 
•Or  il  le  prouve  par  cet  exemple.  Donc  il  fuppoie  que  le  pain 
demeure. 

Mais  en  le  reduifant  à  ui"ie  forme  plus  claire.,  on  en  décou- 
vre en  même  te;Tipstres-clairement  lafoiblcile.  Car  on  voit 
-que  M.  Claude  attribue  à  S.  Irenée  une  intention  qu'il  n'eue 
jamais.  Il  eft  certain  que  l'erreur  que  S.  Irenee  réfute  dans 
l'endroit  dont  il  s'agit,  eft  qu'une  chair  corruptible  (oit  inca- 
pable de  recevoir  la  vie  éternelle  ôc  l'immorraJifé. 

Cii> 


zz         Liv.  I.  Des  mots  de  figure  ^  type  (dp-  autres 

Cm.  II.  •'  Il  pi'ecend  au  contraire  leur  faire  voir  que  la  chair  n'eil  pas 
incapable  de  devenir  incorruptible,,  &  il  allègue  pour  cela, 
non  comme  une  preuve ,  mais  comme  un  exemple  ôi  une 
comparaifon,  le  Pain  Euchariftique^  qui  eftant  une  matière 
tcrreftre  devient  le  Corps  de  J.  C.  Or  qui  ne  voit  que  plus 
le  changement  qui  arrivera  à  ce  pain  fera  grand  ,  plus  il  fera 
capable  de  reprefentcr  l'eftat  d'incorruption  où  nos  corps 
arriveront  après  la  re'urredlion  ?  Et  qui  ne  voit  au  contraire 
qu'il  n'y  a  aucun  rapport  du  changement  de  l'état  de  pain 
commun  à  l'état  de  figure  admis  par  les  Miniftres  avec  le 
changement  qui  arrivera  à  nôtre  chair  après  la  refurredlion, 
puifque  le  pain  dans  cet  eilat  de  figure  demeure  toujours  cor- 
ruptible? 

Un  changement  fubflantiel  peut  bien  fervir  d'image  d'un 
changement  très  grand ,  &  très- réel ,  quoy  qu'accidentel ,  tel 
que  celuy  qui  arrivera  à  nos  corps  ;  mais  un  changement  fi- 
guratif ne  le  peut  eflre,  parce  qu'il  ne  confifte  qu'en  ima- 
gination ,  &:  qu'il  n'efl  pas  dans  larhofe  même. 

Et  il  ne  fert  de  rien  de  dire  que  félon  le  fens  que  nous  at-. 
tribuons  à  faint  Irenée  ,  le  pain  ne  fubfifle  pas  dans  le  chan- 
gement ,  &  qu'ainfi  il  ne  reprefentera  pas  bien  la  chair  qui  fub- 
fifle en  devenant  incorruptible.  Car  où  efl-ceque  M.  Claude 
a  trouvé  ce  principe,  que  toutes  les  comparaifons  deuflent 
'  eflre  parfaitement  juftes  ?  &  comment  ne  s'efl.il  pasfouvenu 

qu'Aubertin  fe  fert  d'un  principe  contraire  pour  fe  démêler 
des  pafTàges  qu'on  luy  objedle,  &:  qu'il  prouve  par  divers  exem- 
ples des  Pères,  qu'il  n'eft  pas  neccffaire  queles  chofcs  com- 
.  parées  potîedent  en  la  même  manière  la  qualité  dans  laquelle 
on  les  comparé?  Il  fuffit  doue  qu'il  y  ait  de  la  reflèmblance 
dans  les  deux  membres  de  la  comparaifon.  Or  il  y  en  a  cer- 
tainement icy,  puifque  dans  l'un  &:dans  l'autre,  une  matière 
corruptible  efl  changée  en  une  chofe  incorruptible. 

Mais  pour  ôter  à  M.  Claude  tout  prétexte  de  chicaner  fur 
ce  point,  je  luy  vay  faire  voir  cette  comparaifon  avec  les 

Aubert.p. i;5,  mêmes  défauts  dans  des  Auteurs  qu'Aubertin  même  avoiic 
eflre  dans  la  doctrine  des  Catholiques. 

Le  premier  efl  Pierre  de  Damien  qui  parle  de  cette  forte 
après  Rcmy  d'Auxerre,  fans  le  citer,  dans  le  traité  qu'il  z 
fait  fur  ces  paroles,  Dominus  vohifcttm\  Comme  ce  pain  (^  ce 
Sang  ont^  dic-il ,  ejiè  changez^eritablemcnt  au  Corps  du  Seigneur^ 


nrez.de  U partie  extérieure  de  V Eucharifiie.        a.^ 

de  même  tous  ceux  qui  le  reçoivent  dans  l'Eqlife  deviennent  indu-  Ch.  IL 
bitabhment  un  même  corps  avec  Y  C. 

On  peur  remarquer  dans  cette  comparaifon  tout  ce  que  les 
Miniftrcs  remarquent  dans  celle  de  S.  Irenée.  Car  comme  S. 
Irenée  compare  le  changement  du  pain  au  Corps  de  J.  C. 
avec  le  changement  du  corps  des  juftes  en  un  état  immortel  5 
de  même  Pierre  de  Damien  compare  le  même  changement 
du  pain ,  avec  l'union  des  fidelles  au  Corps  de  J.  C.  Or  com- 
me ceferoittrés-mal  conclure  que  de  dire:  Ce  dernier  chan- 
gement qui  arrive  aux  fidelles  par  l'incorporation  au  Corps 
Myftiquede  J.  C.n'eft  qu'un  changement  accidentel,  Si  n  em- 
pêche pas  qu'ils  ne  fubfiftent  dans  leur  propre  être  :donc  félon 
Pierre  de  Damien  le  changement  du  pain  au  corps  de  J.  C- 
n'efl:  qu'un  changement  accidentel,  6c  n'empêche  pas  que  le 
pain  ne  fubfifte  dans  fon  propre  être  ;  de  même  c'efl  tres-mal 
raifonner  à  M.  Claude  de  vouloir  que  le  pam  lubfifte  dans  fon 
être  propre  félon  S.  Irenée,  parce  que  ce  Saint  employé  le 
changement  qui  arrive  pour  fervir  d'miageàun  changement 
quin'cfl  pas  fubflantiel. 

Le  fécond  eft  S.  Bernard  qui  compare  l'entrée  du  Sacrement 
dans  nos  corps,  avec  la  manière  dont  J.C.  entre  dans  nos  âmes 
par  l'exemple  de  fa  vie.  Comme  l'on  voit  ^  dit-il  au  fermon  3. 
fur  le  V  (t3i\xxwQ  Qui  habitat  ^qtie  cette  forme  de  pain  entre  en  nous^ 
de  même  J.  C.  entre  en  nous  far  l'exemple  de  fa  vie  qu'il  a  menée 
fur  la  terre ,  pour  habiter  dans  nos  cœurs  par  le  moyen  de  fa  foi.  M. 
Claude  conclura-t-il  de  là  que,  félon  S.  Bernard  ,  la  forme 
du  pain  n'entre  pas  réellement  &  fenfiblement  dans  nos  corps , 
quifque  J.  C.  n'entre  en  nous  par  la  foy  que  d'une  manière 
métaphorique  &c  fpirituelle?  Qu'il  apprenne  donc  de  ces  exem- 
ples à  eftrc  plusrefervé  dans  l'ufage  de  ces  termes  ^  de  preuves 
demonftratives ,  a  laquelle  on  ne  fauroit  rien  répondre  de  folide  , 
puifqu'ilefl  vifîble  que  fa  prétendue  demonftration  ne  mcri- 
toit  pas  feulement  d'eftre  mife  au  rang  des  plus  légères  objec- 
tions. 


Ch.  III. 


14        Liv.  I.  Des  mots  de  figure  :,  type  ^  Autres 


CHAPITRE     III. 

Que  c'efi  une  fuite  naturelle  de  la  manière  dont  les  Catholiques 
conçoivent  l' Eucharifiie  ^  dy  confiderer  un  fiyîe  <^  une  fiyiire  ^ 
^  de  l'exprimer  far  des  mots  qui  nejignifientprecifémentqucji^ 
gne  O"  figure  ^  quoy  qu'ils  repre [entent  à  l'ejprit  toute  l'ejfence  de 
L' Eucharistie. 

COmme  ce  Corps  de  Jesus-Christ  ne  fe  fait  point  voir 
dans  l'Euchariftie  fous  fa  forme  naturelle ,  &  qu'il  y  a  un 
objet  fenfible,  c'eftàdire,  une  apparence  de  pain  qui  fait  im- 
preffion  fur  nos  fens ,  nous  ne  recevons  pas  feulement  l'efpece 
&  Timpreffion  de  cet  objet,  mais  il  nous  conduit  de  plus  par 
les  inftrudions  que  la  Religion  nous  en  donne,  à  la  connoiC 
fance  de  quelques  autres  objets  qui  ne  frappent  pas  nos  fens. 
Il  nous  marque  &  nous  fignifîele  Corps  de  Jesus-Christ  j 
puifque  la  foy  nous  affure  qu'il  efl  caché  fous  ce  voile  myfte- 
rieux ,  &  que  nôtre  raifon  aidée  de  cette  foy  découvre  du  rap- 
port entre  la  force  que  le  pain,  dont  cet  objet  imprime  l'image, 
a  de  nourrir  &  fortifier  le  corps,  &  la  vertu  fpiricuelle  que  le 
Corps  de  Jesus-Christ  a  de  fortifier  &  de  nourrir  fpirituel- 
lement  nos  âmes ,  ôc  même  de  détruire  dans  nos  corps  la  cor- 
ruption  Se  la  mortalité. 

Il  nous  marque  &  nous  reprefente  encore  plus  vivement  l''u- 
nion  des  membres  vivans  del'Eglifeentr'eux&iavecJ.  C.  qui 
les  fait  un  même  corps,  comme  le  pain  efl:  compofé  de  plu- 
ficurs  grains. 

Or  comme  ce  que  l'on  appelle  un  figne  n'eft  autre  chofe  qu'un 
objet,  qui  imprimantdans  les  fens  une  certaine  efpecc,en  fait 
concevoir  une  autre  à  l'efprit ,  il  eft  impoffible  que  cet  objet 
prefent  &:  fenfible,qui  frappe  nos  fens  de  l'image  d'un  pain  ma- 
tériel ,  &  qui  fait  concevoir  à  nôtre  efprit  le  Corps  de  J.  C. 
naturel  &  myftique,  ne  foit  pas  un  figne  ;  &  les  objets  qu'il  fait 
concevoir  eflant  facrez ,  il  eft  impoflible  que  ce  ne  foit  pas  un 
figne  d'une  cbo(ê  facrée  :  ce  que  les  Latins  ont  appelle  Sacre- 
ment  ^  &  les  Grecs  Myflere. 

Or  s'il  eft  figne ,  il  peut  eftre  appelle  fipie  ;  s'il  efl:  figure  Se 
type ,  il  peut  eftre  appellé/g»/^  c^  type  j  s'il  eft  image ,  il  peut 

eftre 


tirez.de  h  partie  eaterieure  de  F Eucharijîie ,        zj 
eftre  appelle  image.  S'il  eft  Sacrement  êc  Symbole,  il  peut  eflre  Ch.  1 1 1. 
s.p^e\\é  Sacrement  &C  Smèo/e .,  puifquel'on  peut  donner  aux  cho- 
fes  des  noms  qui  expriment  ce  qu'elles  font  efFedivement,quoy 
qu'ils  n'expriment  pas  tout  ce  qu'elles  font. 

Ainfî  non  leulcment  les  mots  de  /%w,  àtfiyirc  ,  d'ima'ie  ^  de 
type ,  ai  antitype ,  de  Sacrement ^  de  Myftere ,  de  ^vmhcle ,  n'ont 
aucune  contrariété  avçc  ce  que  les  Catholiques  croycnt  de  l'Eu- 
chariftie ,  mais  encore  leur  créance  les  y  conduit  d'elle-même, 
elle  les  exige ,  &  ne  fe  peut  exprmier  parfaitement  fans  l'ufage 
de  ces  termes. 

Mais  comme  dans  refprit  des  Catholiques  cet  objet  fenfible 
qui  (ert  de  fondement  à  tous  ces  mots ,  eft  joint  avec  le  Corps 
mêmede  Jésus  Christ  ,  auquel  il  fert  de  voile,  Se  qu'il  cache 
à  nos  yeux,  il  arrive  auiïi  par  neceffité  que  l'idée  de  ce  figne  & 
diiCorpsdeJ.  C.  fe  joignent  enfemble  dans  nôtre  efpritj  c'efl: 
à  dire ,  que  l'on  regarde  le  Corps  de  J.  C.  comme  contenu  fous 
ce  figne.  Et  c'eft  encore  une  fuite  de  l'union  de  ces  deux  idées, 
que  l'une  excite  l'autre,  &  que  comme  on  connoît  cet  effet , 
&  qu'on  le  fcnt  en  foy,  on  le  fuppofe dans  les  autres, &  lors 
on  (econcenre  fouventd'en  exprimer  une,  quoy  que  l'on  ait 
deiïbin  de  faire  concevoir  toutes  les  deux. 

Car  la  neceffirc  de  fe  fervir  de  mots  pour  exprimer  fes  pen- 
fées  eftant  un  défaut  à  l'homme,  elle  l'incommode  effective- 
ment ;i!  votj droit  s'en  paffer  s'il  le  pouvoit.  Ainfi  lorfque  par 
un  feul  m<itil  peut  exciter  deux  idées,  il  fe  difpenfe  de  le  faire 
par  deux  expreffions  feoarées. 

Ce  font  ces  termes  qu'on  a  appelle  dans  le  premier  Tome  de    "^°y"  P'""?» 
la  Perpétuité  des  termes  abrcie-::^^  c'eft  àdire,  qui  ne  fignifiant  p'^j'/^.  r-I' 
pnr  eux-  -nêmes  qu'une  certaine  chofe  ,  ne  laiffent  pas  d'impri-  gen.i,  i.c.i'j. 
.mer  une  iiée  plus  étendue.  Et  s'il  eft  clair  par  la  raifon  que  les 
mots  de  S  icrement  ^  àz  Symbole  ,àe  Mvfiere ,  &  les  autres  fem- 
bia'bles  appliquera  l'Euchariftie  doivent  eftre  de  ce  nombre, 
il  eft  encore-  plus  (rnfih'e  par  l'expérience  déroutes  les  nations 
du  mon  leq  l'ils  en  f^nt  effectivement. 

Qui  e'I-te  d'entre  les  Catholiques  qui  entendant  nommer 
/(?  S  tint  S  cr  entent ,  le  Sacrement  de  l'Autel ,  les  ficre^Symboles  ^  la. 
faivtr  H'.'fie  ,  borne  fa  ponfée  precifément  à  un  certain  objet 
fenfible? Qui  d'entr'eux  ne  conçoit  le  Corps  de  J.  C.  réelle- 
ment prefentdans  ce  Sacrement,  dansce  Symbole, dans  cette 
Hafbe  ?  Qui  d'entre  les  Grecs  entendant  parler  de  participer 


j^  X  i  V .  I.  Pes  mots  défigure ,  type  (^  Autres 
Ch.  III,  aux  myfteres ,  ne  fe  forme  incQncinçnt  l'idée  au  moins  confiifc 
4e  tout  ce  qui  efl:  contenu  dans  ces  myfteres  félon  le  fenti- 
ment  de  fon  Églifè  ?  Ce  n'eft  pas  que  fi  l'on  demande  aux  Ca- 
tholiques ce  quefignifîe  le  mot  de  Sacrement  ,ilspui(îènt  répon- 
dre autre  chofe  que  ce  que  S.  Auguftin  répond  ^  que  c'cfl  le  ^\- 
gne  d'une  chofe  facrée.  D'où  il  s'enfuit  que  Sacrement wi^Çx^px- 
lie  precifément  &  grammaticalement  qu'un  figne  facré  :  mais 
ç'eft  que  l'efprit  ne  demeure  pas  aux  feules  idées  exprimées, 
&  qu'il  paflê  à  toutes  celles  qui  y  font  jointes,  principalement 
lorfqu'il  s'apperçoit  que  l'intention  de  celuy  qui  parie,  eft  de 
\q.s  f.;ire  concevoir. 

Je  ne  croy  pas  que  les  Minières  nous  veuillent  engager  à 
la  preuve  d'une  vérité  fi  certaine  j  &  quand  ils  le  voudroicnt,  il 
feroit  bien  aifé  de  les  fatisfoire.  Car  fi  ce  n'efl:  afil^z  de  l'ex- 
périence de  tous  \qs  Catholiques  qui  font  prefentcment  au 
monde ,  on  leur  peut  produire  une  infinité  de  paflàges  tirez 
des  Auteurs  qui  ont  écrit  depuis  Bercnger  ,  où  ces  termes 
font  employezd'unemaniere  quifaitvoir  qu'ils  ont  plus  voulu 
fignifier  par  ces  termes  que  ne  porte  leur  fignificationliterale 
Et  cela  n'a  pas  lieu  dans  le  feul  Myftere  de  l'Euchariftie,  mais 
aufiî  dans  tous  les  autres ,  comme  on  l'a  prouvé  dans  la  rcponfe 
générale. 

Mais  Ç\  c'efl:  la  nature  même  qui  a  introduit  ces  exprefiîons 
parmi  les  Catholiques ,  pourquoy  n'auront-elles  pas  eu  lieu  par- 
my  les  Pères ,  en  luppofant  qu'ils  ayent  con(jû  le  myftere  en 
la  même  forte  que  les  Catholiques  le  conçoivent, en  ce  qui  re- 
garde la  prefence  réelle  &:  la  tranflubftantiation  ? 

La  raifon  ne  fouffre  pas  fans  doute  qu'on  fafie  une  difFe'rence 
ij  bizarre  entre  desperfonnesque  l'on  fuppole  dans  un  même 
ièntiment.  Et  tant  s'en  faut  qu'il  y  ait  moins  d'apparence  que  les 
Pères  s'en  foient  fervis,  qu'il  efl:  en  quelque  forte  plus  éton- 
nant de  voir  cet  ufâge  établi  parmy  les  Catholiques  d'aprer 
fent ,  que  de  le  trouver  dans  les  Pères. 

Car  depuis  qu'il  s'efi:  élevé  des  gens  aflez  téméraires  pouf 
vouloir  changer  la  foy  de  l'Eglife  fur  ce  Myflrere  ,  en  reduifant 
l'efi^nce  de  ce  Sacrement  à  n'eftre  qu'un  fimple  figne ,  le  mau- 
vais ufage  qu'ils  ont  fait  de  ces  mots  a  fans  doute  obligé  l'E-- 
glife  d'y  efl:re  plus  circonfpede ,  &  de  s'exprimer  plus  precifcr 
ment  8c  plus  exadement. 

Ncanmoins  toute  cette  précaution  s'eft  réduite  à  ufçr  moiM 


?.  ;i<. 


tire'z^  de  la,  punie  extérieure  de  fEuchariJîie.     zj  . 
ordinairement  de  quel-ques-uns  de  ces  termes ,  comme  de  ceux   Ch.  1 1  î. 
àtfiyire  ^  ai  image ,  àt  fignt  j  ôc  l'Eglife  en  même  temps  n'a  pas 
lailTéd'en  retenir  plufîeurs  autres  qui  ont  le  même  fens,  com- 
me ceux  A^  Sacrement  ^  de  Sacrement  de  l'Autel ,  à'ef^ece  ,àc 
facrez^Myferes  ^  de  Svmhole  ^  àHloJlie. 

Et  il  eft  arrivé  delà,  comme  on  l'a  déjà  remarqué  ,  que  ce 
qui  manque  à  ces  termes  moins  ordinaires  n'eflant  pas  /uppléé 
par  l'intelligence  commune ,  ils  font  demeurez  dans  leur  figni- 
fication  littérale  &.  imparfaite,  &  font  icy  devenus  fufpecls  ;  au 
lieu  que  Tufage  fuppléant  aux  autres,  ils  impriment  dans  Tef- 
prit  des  Catholiques  une  idée  auffi  pleine  que  fî  rien  ne  man- 
quoit  à  l'exprelfion.  Mais  la  même  raifon  fait  voir  au  contraire 
que  ce  Myftere  n'ayant  pas  efté  attaqué  du  temps  des  Pères , 
ils  ont  pu  eftre  plus  libres  dans  l'ufage  de  ces  termes  ,&  qu'ils 
ont  dû  eftre  plus  accoutumez  à  y  fuppléer,  bc  à  concevoir  ou- 
tre l'idée  qui  fait  la  fignification  precile  de  ces  mots  ,  celles 
aufquelles  elles  eftoient  jointes  par  la  doctrine  de. l'Eglife. 

Il  y  a  une  imperfedion  naturelle  &  neceifaire  dans  nos  ex- 
preffions  &  dans  nos  penfees.  Ce  défaut  des  langues  fait  que  nos 
expreflîons  n'égalent  pas  l'étendue  de  nos  penfées  :  &  celuy  de 
nôtre  efprit  fait  que  nos  penfées  n'égalent  pas  l'étendue  dts  ob- 
jets. Nous  nous  reprefentons  quelquefois  le  même  objet,  quel- 
que fimple  qu'il  foit,  par  diverfes  penfées ,  &  nous  nous  en  for- 
mons diverles  idées.  Et  fouvenc  la  même  penfée  eft  l'objet  de 

lufieurs  exprelfions,  qui  ne  la  marquant  que  par  une  partie, 

a  font  néanmoins  concevoir  toute  entière. 

C'eft  donc  un  fophifme  vifîble  que  de  conclure  généralement 
de  l'expreffion  à  la  penfée ,  &  d'une  penfée  feparée  ,  au  dogme 
entier;  parce  que  l'expreffion  peut  ne  reprefenter  pas  toute  la 
penfée  qu'elle  a  pour  objet ,  &  que  fouvent  la  penfée  n'égale 
pas  l'étendue  du  dogme. 

Aind  la  raifon  veut  que  l'on  fupplée  à  certaines  expreflîons 
par  les  autres  expreffions  qui  nous  font  voir  la  penfée  toute  en- 
tière i  &à  l'imperfedion  de  certaines  penfées  par  l'amas  de 
toutes  les  penfées  qui  compofent  le  dogme  total.  Il  faut  fouvenc 
joindre  plufieurs  expreffions  pour  trouver  la  penfée  totale  qui' 
répond  à  une  certaine  expreffion  :  &  il  faut  de  même  joindre 
fouvent  plufieurs  penfées  pour  concevoir  le  dogme  total ,  donc 
chaque  penfée  ne  contient  qu'une  partie. 

Cette  confideration  fuffit  pour  prouver  que  la  voye  que  les 

Dij 


l 


ii  L I V.  I.  Des  mots  défigure ,  type  ^  autres 
Ch  III.  Miniflresfuivent  en  ce  point,  en  prerendancdetcrminer  par  le 
moyen  de  ces  termes  AQfiziire  ,  à'imaae  .  de  Sacrement ,  de  type^ 
à' antitype  ,  quel  cO:  le  fentiment  des  Pères  fur  l'Euchariftic,  cft 
une  voye  d'illufion  &;  de  tromperie.  Car  comme  on  peut  fup. 
pléer  à  ces  termes, oun'y  fuppléer  pas,  ôcqu'ainfi ils  peuvent 
imprimer  ou  l'idée  d'un  fimple  fîgne,d'un  fimple  Sacrement, 
ou  l'idée  d'un  figne,  joint  à  la  choie  fignifiée,  l'idée  de  l'objcc 
fenfible  joint  au  Corps  de  J.  C.  réellement  prefent,  il  n'y  a 
point  d'autre  moyen  de  s'en  écUircir ,  que  de  s'afTurer  par  ail- 
leurs de  la  doiflrine  des  Pères. 

Et  comme  il  efl:  certain  que  fi  l'on  avoir  prouvé  qu'ils  n'ont 
point  crû  la  prefence  réelle,  on  auroit  droit  de  conclure  qu'ils 
ont  pris  cts  termes  dans  leur  fignification  littérale  fans  y  rien 
fuppléer:de  même  fi  l'on  prouve  qu'ils  ont  efté  perfuadez  de 
cette  doétrine,  on  prouve  par  une  confequence  neceflaire  qu'ils 
ont  fupléé  ce  qui  manquoit  à  tous  ces  termes  ;  que  la  nature  les 
y  a  portez ,  &  qu'ils  ont  agv  tres-raifonnablement  en  concevant- 
par  ces  termes  l'idée  entière  de  ccMyflere,  telle  que  leur  foy 
les  obligeoit  de  le  concevoir. 

Quiconque  prouve  que  les  Catholiques  croyeht  la  prefence 
réelle  dej.  C.  furies  Autels,  prouve  que  par  le  mot  àt  Sacre, 
ment  de  l'Autel  i\s  entendent  un  Sacrement  qui  contient  réeî- 
ment  J.  C.  il  n'eft  pas  befwin  d'en  alléguer  d'autres  preuves: 
ce  n'eft  point  par  ces  mots  qu'il  faut  juger  de  leur  foy  -,  c'eft 
par  leur  foy  qu'il  faut  juger  du  fens  de  ces  mots:6cIaconnoif- 
fance  de  leur  foy  joj^nteà  celle  de  la  manière  dont  les  hom- 
mes parlent,  donne  droit  de  conclure  qu'il  doit  y  avoir  dans 
leur  langage  des  exprefïïons  de  cette  forte,  qui  ne  marquant 
le  Myftere  que  par  une  partie  ,  le  fout  concevoir  toute  entier, 
&  que  celle  là  eft  de  ce  nombre. 

Or  ce  qu'il  n'eft  pas  neceflaire  de  prouvera  l'égard  des  Ca- 
tholiques d'aujourd'huy  ,nous  l'avons  prouvé  à  l'égard  des  Pè- 
res morts,  en  faifant  voir  dans  la  plus  grande  partie  du  fécond 
Volume  qu'ils  (mt  crcu  la  prefence  réelle.  Cette  preuve  déter- 
mine donc  par  neceffitc  les  termes  dont  il  s'agit ,  quand  on  les 
trouve  dans  leurs  Ecrits;  &  puifqu'ils  ont  eu  la  même  créance 
quel'Eglife  Romaine,  il  faut  par  necefîîté  qu'ils  les  ayentpris 
au  même  fens  qu'elle  les  prend, Il  n'eft  pas  befoin  d'autre  raifbn 
pour  le  prouver-,  il  iulfitde  fuppofèr  qu'ils  eftoient hommes  & 
qu'ils  parloient  comme  des  hommes  ont  coutume  de  parler. 


M.  Claud. 
1-  p.p.  <•• 


tire\de  h  partie  e^cteneure  de  rEucha.rifiie.      29 
A  quoy  donc  apenléM.  Claudijqiiand  il  a  misau  rangdeles  Ch.  III. 
principales  preuves  contre  la  prefence  réelle  la  remarque  qu'il 
fait  que  les  Pères  nous  difenc,  que  ce  font  desy/g«rj-,des  Sym- 
holci ,  des  images ,  des  types ,  des  figures ,  des  mémoriaux  ,  des  re~ 
pcfentations  ^  des  rejcmblances ,  des  gages  ^  de  énigmes,  des  ex- 
prc/Jions ^  àt^voiles matériels ^  des  apparences ^^  ^ts  -portraits  du 
Corps  6c  du  Sang  de  J.  C  ?   Et  pourquoy  a  t  il  chargé  inucile- 
menc  les  marges  de  fon  livre  de  la  citation  des  endroits  où  cz% 
termes  fe  rencontrent  ?  Ne  devoic-il  pas  avoir  vûdeluy-même 
qu'il  efl  contre  la  fincerité  &le  bon  fens  d'employer  en  preu- 
ves ,  des  termes  dont  le  fens  dépend  de  la  décifion  de  la  quefl 
rions,  bL  qui  fuivent,pour  ainiî  dire,  le  parti  viélorieux  ?  S'il 
avoir  prouvé  que  les  Pcres n'ont  pas  crû  la  prefence  réelle, il 
auroirdroit  de  prendre  ces  termes  dans  le  fens  des  Calviniftesj 
maiseftant  bien  éloigné  de  l'avoir  fait,&  eftant  au  contraire 
dans  l'impuiffance  de    répondre  à  la  foule  des  preuves  par 
lefquclles  on  a  juftifié  lafoy  des  faints  Pères  fur  ce  point,  il 
efl:  vilîble  que  ces  termes  doivent  eftreconfiderez  comme  com- 
muns,  ôc  qu'il  n'en  fçauroit  tirer  aucun  avantage. 
Je  l'avertis  de  plus,  qu'outre  l'infuffifance  &  llllufion  de  cette 
preuve  ,  il  y  a  encore  une  efpece  defauffeté  &,  d'injuftice  dans 
la  manière  dont  il  traduit  quelques-uns  de  ces  mots.  Carcom- 
meil  y  en  aquel'herefie  des  Sacramentairesarendu  odieux  & 
aufquels  les  Catholiques  ne  font  plus  accoutumez  de  fuppléer  , 
quoyqu'ils  fuppléent  à  d'autres  demême  fens;  c'cft  une  efpece 
d'infidélité  de  rendre  un  mot  qui  n'eflioit  point  odieux  du  tems 
des  Pères  ,&qui  excitoit  l'idée  entière  de  tout  ce  qui  efl:  con- 
tenu dans  ce  Mvfteres,  par  un  mot  qui  n'ayant  que  le  même 
fens,  félon  le  fon,  n'efl:plusle  même  félon  le  fens,  parce  qu'- 
efl:ant  devenu  odieux ,  il  n'imprime  plus  qu'une  partie  de  l'idée 
qu'il  imprimoic  autrefois. 


D  ii) 


Ch.I\^. 


50       L I V.  î.  D^s  mors  défigure ,  types  ^  autres 


CHAPITRE    IV. 

Qu^il  paroit  par  les  Pères  mêmes  que  par  les  termes  de  figure, 
(af'image,  de  type  ,  de  Sacrement,  de  Myftere  ,  ils  ont  entendu 
des  images ,  des  types ^  ^c.  joints  aux  chofes ,  C^  contenant  les  cho- 
fes  mêmes. 

Réflexion  fur  la  ^.  Catechefe  de  5.  Cyrille  de  Jerufalem. 

J'En  pourrois  demeurer  là,  6c  obliger  M.  Claude,  s'il  vou- 
lolc  fuivre  la  raifon ,  de  retrancher  de  fon  livre  tous  les  paf- 
i'a2,es  qu'ilacrii  luy  eftre  avantageux,  parce  qu'ils  contenoient 
cts  fortes  de  termes.  Mais  je  veux  pafTer  plus  avant,  &  luy 
rnontrer  pofîtivement,  que  non  feulement  ces  termes  n'ex- 
cluent point  dans  les  Pères  la  prefence  réelle  &;  efFedive  du 
Corps  de  J.  C.  dans  les  fymboles ,  mais  que  même  ils  la  ren- 
ferment comme  les  mots  de  Sacrement  &  d'hofiie  dans  la  bou- 
che des  Catholiques. 

Pour  s'en  éclaircir  de  bonne  foy  il  faut  agir  de  la  même 
forte  que  fi  l'on  vouloit  découvrir ,  fi  un  homme  qui  diroic 
qu'il  a  participé  plufieurs  fois  au  faint  Sacrement  fêroit  Cal- 
vinille  ou  Catholique.  Car  s'il  efi:  Calvinifte  il  ne',  doit  rien 
dire  ni  devant  ni  après  qui  enferme  la  dodrine  de  la  prefen- 
ce réelle.  Celuy  qui  ne  la  croit  point  ne  l'explique  point  :  il 
ne  dit  rien  dont  on  la  conclue  neceflTairement  :  il  dit  toujours 
quelque  chofe  qui  fait  voir  qu'il  ne  prend  ce  mot  que  pour  un 
figne.  Mais  un  Catholique  qui  prendroit  ce  mot  de  s-tcrement 
pour  un  figne  qui  renferme  &;  qui  contient  le  Corps  de  J.  C. 
âgiroit  tout  autrement.  II  découvriroit  fa  créance  en  plufieurs 
manières ,  ce  qu'il  auroit  appelle  une  fois  Sacrement,  il  l'ap. 
pelleroit  une  autre  fois  Corps  de  J.  C.  Sang  de  J.  C.  &  il  don- 
neroit  diverses  marques  qu'il  entendroit  parler  du  Corps  véri- 
table de  J.  C 

•■    Pour  luivre  cette  voye,  qui  eft  fans  doute  très  naturelle, 
imaginons-nous  que  S.  Cyrille  de  Jerufalem  efl:  cet  homme 
de  la  créance  duquel  nous  fommes  en  peine,  &  qu'il  nous  « 
donné  lieu  d'en  douter  par  un  mot  dont  il  fe  fert  dans  fa  cin- 
«juieme  Catechefe ,  oià  il  parle  de  cette  forte  :  On  ne  vaut 


tini^de  h  punie  extérieure  de  l'Euchuriftie.         yt 

commande  p  04-  ^  dit-il,  de  goûter  du  pain  é"  du  vin^  mais   l'an-    Qa.  IV. 
titype  du  Corps  df  du  san^dej.  C.  Voilà  ce  mot  qui  caufe  le 
doute,  &C  qui  eft  la  même  chofe  que  celuy  de  t/pe,  d'image  , 
de  fiyire  ^  àtfiyieî  ainfî  en  l'expliquant  il  expliquera  tous  les 
autres. 

Tous  cts,  mots  font  capables  de  deux  fens ,  comme  nous  avon$ 
dit.  Ils  peuvent  fignifier  un  pur  iîgne,  une  limple  figure,  une 
image exclufîvc  de  la  vérité.  On  y  peut  aufîl  fuppléer  par  la 
doctrine  de  l'Eglife ,  &  en  ce  cas  ils  imprimeroient  non  par  leur 
Cgnification  littérale ,  mais  par  i'ufage  particulier ,  qui  naift  de 
la  doctrine  receiie  dans  l'Eglise  où  Ton  s'en  fert,  l'idée  d'un 
Myftere  qui  contient  ^renferme  réellement  le  Corps  même  de 
J.  C.  Il  eft  queftion  de  fçavoir  en  quel  fens  ce  Père  s'en  eft  fer- 
vi.  Mais  il  décide  bien  toft  cette  queftion^parce  qu'il  ajoute  im- 
médiatement après.  Lors  t^ue  voné  en  approcherez^^  dit-il ,  n'ayet^ 
pas  les  mains  étendues ,  ni  les  doigts  écartez^^mais  appuyant  de  vè- 
tre  main  gauche  la  main  droite ,  comme  celle  qui  doit  recevoir  le  Roy , 
recevez^  le  corps  de  J.  C.  en  difant  ^  Amen. 

Cet  antitype  contient  donc  le  Roy ,  félon  S.  Cyrille.  Il  con- 
tient le  Corps  de  J.  C.  &  il  en  faut  faire  une  folemnelle  profef- 
fion  en  difant  que  cela  eft  vray.  Cen'efl  pas  là  le  langage  d'un 
Calvinifte,  ni  d'un  homme  qui  prendroit  cet  antitype  pour  un 
pur  figne  5c  une  fimple  figure.  Jamais  Calvinifte  n'appela  le  Sa- 
crement ,  fon  R  oy ,  jamais  il  ne  fit  profeffion  de  croire  que  c'eft 
le  vray  Corps  de  J.  C. 

Mais  les  auditeurs  de  S.  Cyrille  n'auroient  pas  eu  befoin  de 
cet  cclairciiîèment  pour  comprendre  que  cet  antitype  n'eftoic 
pasune  pure  image  :  ils  enauroient  eftë  pleinement inftruits , 
&  éclaircis  auparavant,  êc  ils  n'auroient  pas  même  cfte  (ufcep- 
tibles  d'un  doute  fi  peu  raifonnable.  Ce  Père  leuravoit  fait  le 
jour  d'auparavant, qui  eftoit  lejeudy  delafemainede  Pafques, 
une  inftrudion  pleine  de  l'Euchariftie  ,  qu'il  leuravoit  promifc  Citechef.  »> 
avant  Pafques:  Et  c'eft  de  cette  inftruclion  qu'il  faut  apprendre  ii^"«i* 
ce  qu  il  croyoit  de  ce  Mvfterej  &  ce  qu'il  vouioit  que  les  Néo- 
phytes en  cruftènr  -,  c'eft  là  aulTi  que  s'il  euft  efté  dans  les  fenti- 
mens  des  Calviniftes,  il  leur  euft  expliqué  les  principes  de 
cette  doftrine,  que  le  nain  hi  le  vin  ont  efté  faits  par  l'infticu- 
tion  de  J  C  la  figure  de  fon  Corps  &  de  fon  Sarg;  Qu'il  faut 
en  mangeant  ce  pain  fongerà  la  mort  de  |.  C  &  que  c'eft 
parlameditacion  de  cette  more  que  l'on  mange  fpiricuellemeoc 


34  Lî  V.  i.  T>es  mots  de  fgure ^  type  ^  fS  Autres 
Ch.  I V.  J-  C.  Voilà  ce  qu'il  leur  auroit  dû  dire ,  i'il  avoir  efté  perfuadc 
de  certe  dotflnne,  &:  s'il  avoir  pris  le  mot  à'antitype  ou  àtfipire^ 
dans  la  Catechefe  fuivante,  pour  une  figure  fimple  &:exclufi- 
ve  de  la  realirë  du  Corps  ^  mais  il  leur  parle  bien  un  autre  lan- 
gage. Participons ,  dit  il ,  ^zvec  une  pleine  foy  au  Corps  ^  au  Sang 
de  /.  C.  Cardans  le  lyp-c  du  ^uin  le  Corps  vous  eft  donné ^  ^  le  Sang 
dans  le  type  du  vin '■>  afin  quevnts  fiiffic^participans  de  [on  Corps 
(^  de  jon  San^^  (^  que  votis  neufjîcz^quun  même  corps  (^  un  mê- 
me Sançr^  avec  luy  C'e/i  amft  que  7ious  devenons  porte  -  Chrifl ,  fon 
Corps  ^  (on  Sano:^  e/iant  difirihuez^dans  nos  membres. 
Qviel  eft  ce  Corps  de  )  C.  qui  nous  eft  donné  dans  le  type  du 
pain,  félon  S.  Cyrille?  eft-ce  un  Corps  en  figure  &  en  image?M. 
Claude  auroit  honte  ians  doute  d'attribuer  à  ce  Père  une  telle 
abfurdité.  Car  qui  auroit  il  de  plus  ridicule  que  de  dire  que  la  fi- 
gure du  Corps  nous  eft  donnée  dans  la  figure  du  Corps  ?  C'eft 
donc  le  Corps  véritable  Mais  peut-eftre  ne  nous  eft-il  donné 
querpirituellement  !  C'eft  cequeS.Cyrilleexclut  pcfitivement 
en  marquant  que  ce  Corps  bc  ce  Sang  qui  nous  font  donnez 
dans  la  figure  du  pain  fe  diftribuent  dans  nos  membres. 

pou  voit-il  exprimer  plus  clairement  que  cette  figure  &;  ce  type 
qu'il  reconnok,  contient  réellement  le  Corps  mêmede  J.  C  ? 
Il  faudroit  rapporter  la  Catechefe  entière  fi  l'on  vouloir  mar- 
quer tous  les  lieux  qui  prouvent  que  le  Corps  de  J.  C  que  nous 
recevons  en  nous  félon  S.  Cyrille,  âc  auquel  il  applique  ces  pas 
ro'es,  Cecy  efi  mon  Corps ,  n'eft  point  un  Corps  en  figure.  Puif» 
que  J.  C.  dit  il ,  noiuaffure  de  ce  pain  que  c  eft  fon  Corps  ,  qui  ofera 
en  douter}  Puifquil  confirme ,  (^  qu'il  dit ,  Ccfl  mon  Sang,  qui  en 
doutera  ^  (jr  qui  dira  que  ce  n'efl  pas  fon  Sang  ? 

Saint  Cyrille  combat  un  doute,  &  il  veut  empêcher  les  Neo- 
phites  d'y  tomber. Et  nous  avons  fait  voir  qu'on  ne  fcjauroit  fup- 
pofer  avec  la  moindre  apparence  que  cefuft  un  doute  de  figure  , 
c'eft  à  Atq.^  Ci  !e  pain  eft  la  figure  du  Corps  de  J.CSi  pourrc- 
connoîrre  clairement  l'abfurdité  de  ce  fens ,  il  n'y  a  qu'à  (ubfti- 
tuer  les  explications  des  Calviniftes  aux  termes  de  S.  Cyrille. 
Carvoicy  ce  que  les  Calviniftes  luy  feroient  dire  (elonce  fens  : 
Puifque  J.  C.  nous  a  dit  du  pain,  c'eft  mon  Corps,  qui  ofera 
douter  que  ce  n'en  foit  la  figure  rPuifqu'il  a  dit ,  c'eft  mon  Sang, 
qui  en  dortera  ,  8c  qui  fouriendra  que  ce  n'eft  pas  la  figure  dé 
fon  Sang?  M.  Claude  peut-il  dire  de  bonne  foy  qu'il  y  ait  du 
fcns  commun  dans  ce  dikours ,  &  que  S.  Cyrille  ait  pii  fuppo- 

fcr 


35 


tirôi  de  U  pxn'ie  extérieure  de  ÎEîichariflie. 
fer  que  les  .ludicetirs  fullenc  capables  de  tomber  dans  un  douce  Ch.  I  V. 
fj  extravagant. 

Qii'on  (ubdituë  de  même  les  explications  Calviniftes  à  ce 
que  ce  Père  ajoute  dans  la  fuite  de  cette  Catechele,  Se  l'on  en 
fera  un  difcours  plus  propre  à  un  infenfé  qu'à  un  Père  de  l'Eglife. 
'  J  ESV  S-C  HRI ST  ,^\z\\,  eftant  à  Cana  de  Galilée,  a, 
autrefois  changé  l'eau  en  vin  qui  approche  affc:^  du  Sa-n<^  ,  ^  il  ne 
méritera  pas  d'être  cru  ^  lors  quilchaijge  le  vin  en  fon  Sang?  C'cft 
à  dire  ,  félon  les  CalvinifteSjil  a  autrefois  change  l'eau  en  vin^  &: 
il  ne  méritera  pas  d'être  cru  lors  qu'il  change  le  vin  dans  la  figu- 
re de  fon  Sang.  Ce  difcours  eft  il  iupportable  ?  Et  les  Minières 
nedevroient-ils  pas  rougir  de  rendre  les  Pères  les  plus  ridicu- 
les hommes  du  monde  par  des  explications  fi  déraifonnables  ? 

Mais  que  dira- 1- on  de  ce  quife  trouve  à  la  fin  de  cette  Cate- 
chefe  ,  fi  Ton  y  applique  les  idées  Calvinifles  ?  Scachez^^  dit  S. 
Cyrille  ,  (^  tencT^pour  très -certain ,  que  ce  pain  qui  vous  paroifl  ^ 
n'efi  pas  du  pain ,  quoy  que  le  go  lit  juge  que  c'efi  du  pain  ,  mais  le 
Corps  de  J.  C.  (^  que  ce  vin  que  vous  voyesji'eji  pas  du  vin  ,  quoy 
que  le  goiit  le  dtcie  ,  mais  le  Sang  de  Chri/î.  A-t-on  jamais  dit 
d'un  portrait  du  Roy:  Sçâchez  que  ce  que  vous  voyez,  n'eft 
pas,  du  bois ,  ni  de  la  toile ,  mais  que  c'eft  le  Roy  •  ou  de  l'a- 
gneau Pafcal  :  Sçachez  que  ce  n'eft:  pas  là  un  agneau,  quoy  que 
vos  yeux  vous  le  rapportent,  mais  un  pafTage?  Qui  pourroin 
croire  que  les  Pères  ayenc  parlé  d'une  manière  donc  aucun 
homme  fenlé  ne  voudroit  parlera 

Il  n'y  a  donc  pas  le  moindre  doute  que  S.  Cyrille  n'ait  pris 
le  mot  à'antaype  pour  une  figure  qui  contient  réellement  le 
Corps  de  J.  C.  qu'il  n'ait  crû  que  le  Corps  de  J.  C.  nouseftoit 
donné  réellement  dans  ce  type  ou  antitype,  comme  il  le  dit 
luy-même  Et  comme  il  ne  prenoit  pas  ce  terme  en  un  autre 
fens  que  tous  les  autres  Chreftiens  de  fon  temps ,  il  doit  pafiler 
pour  confiant,  qu'ils  entendoient  tous  parle  vc\oz à' antitype  la 
mêmechofe  que  l'on  entend  prefentement  dans  l'Eglife  Ro- 
maine par  le  mot  de  S.  Sacrement ^  &  qu'ils  croyoient  tous  com- 
me luy,  que  dans  l'antitype  du  pain,  k  Corps  de  J.  C.  nous 
eftoit  réellement  donné. 

Si  l'on  veut  içavoir  de  même  ce  que  fignifioïc  dans  les  écrits 
des  Pères  le  terme  de  Sacrement  du  Corps  deJ.C  &;  s'ils  s'en 
iervoient  pour  marquer  un  fimple  figne  facré ,  ou  pour  expri- 
mer un  figne  qui  contient  fon  véritable  Corps,  on  n'a  qu'à 
confulter  S-  Ambroife.  E 


j4        Liv.  I.  Des  mots  de  figure  ^  type  ^  mtres 
Ch.  V I.         Il  employé  cette  expreffion  dans  le  traité  qu  il  a  fait  pour 
les  nouveaux  baptifez.  CVy/,  à\t-\\ ,  vraymcnt  le  Sacrement  de  fit 
De  Init.  c.  9.   (hair.  V  £  R.  E  ergo  carnis  illius  Sacramcntum  eji. 

Mais  n'eft  ce  qu'un  Sacrement  fimple  &  vuidc?  Ne  con- 
tient-il point  le  Corps  de  J.  C?  Demandons-le  au  même  S. 
De  Init.  c.  10.  Ambroife.  J.C.efidans  ce  Sacrement  parce  que  fin  Corps  y  eji:  In 
illo  Sacramento  Chrijius  ejf ,  quia  Corpus  efi  Chrifli. 

Je  n'ay  pas  befbin  de  repeter  icy  tout  ce  que  l'on  a  dit 
dans  le  z.  Volume,  pour  montrer  que  S.  Ambroife  enfeigne  clai- 
rement dans  tout  ce  chapitre  la  prefence réelle  &  la  tranflub- 
Voyei  perp.     ftantiation  :  il  me  fuffit  d'y  renvoyer  les  ledeurs ,  &  de  leur  mar- 
x.i.é.c.5.p.i.  querquel'ona  prouvé  invinciblement  que  le  changement  du 
*97.&.iuiv.     p^-|^  au  Corps  de  J.  C.  queS.  Ambroifeétablit  là  par  l'exemple 
des  plus  grands  miracles  de  Dieu  ,eft:  un  changement  très- réel 
&:  tres-effedif ,  &  non  un  changement  métaphorique  6c  imagi. 
naire  :  que  ce  changement  n'a  pour  terme ,  ni  que  le  pain  foit  fi- 
gure du  Corps  de  J.C.  ce  qui  ne  demande  point  de  changement 
réel  J  ni  qu'il  foit  rempli  d'efficace,  ce  qui  ne  peut  eftreni  prou- 
vé par  les    raifonsque  S.  Ambroife  allègue  pour  juflifîer  le 
changement  dont  il  parle,  ni  exprimé  par  les  paroles  donc  il  le 
fer  t. 

Car  la  raifon  qu'il  apporte  pour  prouver  que  le  pain  eft:  chan- 
gé, c'eft  que  J.C.  a  dit,  Cr^/f/)  mon  Cor//,  &  que  les  paroles  de 
J.  C.  font  efficaces.  Or  jamais  homme  railonnable  ne  conclura 
de  ces  paroles  que  J.  C.  ait  voulu  donner  quelque  efficace  au 
pain. 

Et  les  expreffions  qu'il  employé  font  que  l'Euchariflie  eft  la 
chair  de  J.  C.  le  Corps  du  Créateur  ^  &;  qu'elle  l'cft  par  oppofi- 
tion  à  la  manne  qui  n'en  eftoit  que  l'ombre  &  la  ligure  :  Qiie 
nous  recevons  le  Corps  de  J.  C  quoyque  nous  voyions  aurre 
chofe.  Que  cen'eft  pas  ce  que  la  nature  a  formé ,  mars  ce  que 
la  benediétiona  confacré,  c'eft  à  dire,  le  Corps  de  J.  C.  Que 
ce  Corps  que  l'on  forme  eft  le  Corps  né  de  la  Vierge.  Qu'il  ne 
faut  pas  prétendre  que  l'ordre  de  la  nature  foit  gardé  dans  le 
Corps  de  J.  C.  puifque  J.  C.  eft  né  d'une  Vierge  contre  l'ordre 
de  la  nature.  Que  puifque  l'on  donne  au  pain  après  la  confecra- 
tion ,  le  nom  de  Corps  de  J.  C.  &:  que  l'on  avoiie  que  cela  eft 
vray ,  il  le  faut  donc  croire  ,  ôc  en  eftre  entièrement  perfuadé. 
Or  jamais  perfonnene  s'eft  fervi&i  ne  fe  fervira  de  ces  expreC 
fions  pour  marquer  qu'un  eftre  corporel  a  eftc  faitleiîgne  du 
Corps  de  J.  C.  &  qu'il  t  receu  quelque  vertu. 


tiret,  de  h  piirtie  extérieure  de  fEucharifiie.         35 

Mais  il  n'eft  pas  neceflairc,  comme  j'ai  dit,  de  prouver  icy  C  h.  IV". 
cela  en  particulier,  p^iifqu'on  l'a  prouvé  fî  amplement  en  Ton 
lieu.  Il  luffit  donc  de  conclure  que  bien  loin  que  le  terme  de 
Sacrement  dans  S.  Ambroife  exclue  la  prefencedu  Corps  de 
J.C.  il  eft  clair  au  contraire  qu'il  la  renferme. 

Il  fuffit  pareillement  de  dire  que  le  mot  de  type  fe  trouve 
dans  S.  Cyrille  d'Alexandrie  pour  juger  de  ce  qu'il  fignifie ,  & 
de  ce  qu'on  y  fuppleoitpar  la  créance  commune  de  l'Eglife 
de  Ion  temps.  Car  c'efl  ce  même  S.  Cyrille  qm  nous  dit  en  tant  Comm.  i« 
de  manières ,  que  nous  recevons  en  nous  J.C.  afin  que  nous  lom.p.  1104, 
recevions  une  nouvelle  vie  par  fa.  fainte  Chair  Se  Ton  faint  Sang. 

C'eft  luy  qui  nous  d\tc/ue  l'EuIogievivi^ante ,  qui  comprend  Deador.i.ii- 
ce  type  dont  il  efl:  queftion ,  e/  la  Chair  de  J.  C.  Il  nous  fait  la  ^'  *''' 
grâce  ^  dit- il,  de  nous  faire  participans  de  L'Eulogie  vivifiant*^ 
c'ejl  a  dire  ,  de  fa  fainte  Chair. 

C'eft  luy  qui  nous  dit  que  J.C.  ne  nous  vivifie  pas  feulement  Dui.de  Incir. 
comme  Dieu  par  la  feule  participation  du  faint  Ejprit ,  mais  en     '  '    ' 
frefentant  auljî  à  notre  table  la  chair  qu'il  a  prife  .^  afin  que  nous 
la  m.tny.oni  félon  ce  qu'il  efi  écrit ,  6"/'  vous  ne  manqezjla  Chair  du 
Fils  de  l^  Homme  y  ^  ne  bcuvez^fon  Sang  ,  vous  riaurex^pas  la, 
vie  en  vous. 

C'eft  luy  qui  nous  die  que  J.  C.  nous  donne  fon  Corps  comme  Hoai.inMyft. 
du  pain,  (^  fon  Sang  comme  du  vin.  Ce  qui  ne  fe  peut  enten-  Cen. 
dre  d'un  pur  type  ,  perfonne  n'ayant  jamais  dit  en  envoyant 
fon  portrait  à  fon  ami,  qu'il  luy  envoyé  fon  Corps  comme  de 
la  toile,  on  ne  peut  dire  auffi  raifbnnablemenc  qu'on  donne  fon  » 

Corps  comme  du  pain ,  s'il  y  avoit  du  pain  &  point  de  Corps  : 
car  ce  feroit  donner  le  pain  comme  eftant  le  Corps ,  &  non  le 
Corps  comme  eftant  du  pain. 

C'eft  luy  qui  nous  dit  que  nous  mangeons  J.  C.  non  que  nous  ^-  4.a'i^f"^ 
tonfommions  la  Divinité ,  ce  qui  ne  fe  peut  penfer  fans  impiété  , 
mais  nous  mangeons  la  propre  chair  du  Verbe  rendue  vivifiante , 
farce  qu'elle  luy  efl  unie  J  C'eft  à  dire  ,  que  nous  mangeons  la 
Chair  J.  C.  d'une  manière  que  l'on  ne  peut  attribuer  fans  im- 

λietë  à  la  Divinité ,  parce  qu'elle  eft  incorporelle,  comme  il 
e  dit  en  un  autre  lieu. 

C'eft  de  luy  que.Severe  avoit  tiré  cette  même  doiflrine.  l^ous  Ei  caten*.  U 
fie  manque  on  s  pas  le  Verbe  en  fa  propre  nature  de  Verbe:  car  le  moyen  ^o»"-  Antue- 
que  cette  action  fe  put  exercer  fur  un  être  incorporel ,  incapable  d'è-  is^o, 
tre  pris ,  (^  que  les  yeux  ni  les  dents  ne  peuvent  atteindre  :  mais 

Eij 


36         Liv.  I.  Des  mors  de  figure  ,  type  (^  autres 

C  H.  IV.  ejlantunik  la  chair  d'une  union  trcs-ctroiic  ,  quoy  que  la  chair  foit 
demeurée  ce  quelle  e fiait  ^  é-  n'ait  pas  cfié  cl»any;e  en  la  nature  du 
Verbe ,  nom  many:ons  le  Verbe  en  mangeant  la  Chair  vivifiante 
du  Verbe.  Cependant  fi  nous  ne  mangeons  que  la  fimple  figure 
de  cette  chair  ,  il  feroit  tout  auffi  aiié  d«  manger  le  Verbi  mê- 
me dans  fa  figure  que  de  manger  fa  chair  en  cette  manière. 
Contra  Neft.  C'cft  ce  même  S.  Cyrille  qui  nous  enfeigne  que  le  Verbe  ne 
■  ■*■  demeure  pas  feulement  en  nous  d'une  manière  divine  par  le  S.  £/- 

frit^  mais  au(Ji  d'une  manière  humaine  far  fa  fa  inte  Chair  ^  fat 
fon  précieux  Sang. 

C'cft  luy  qui  parlant  de  l'Eulogie  Myftique,  c'cft  à  dire  du 
S.  Sacrement ,  dit ,  que  J.  C.  s' introduit  par  fia  Chair  en  ceu.x  qui  le 
manient. 

In  loan.  P.  <^,   n  i  .  \-  i     /•  /- 

}i4.  ^  eit  Juy  qui  nous  dit,  que  le  faint  Corps  de  J,  C.  vivifie  ceu:i 

en  qui  il  cfi ,  efiant  m'elè  dans  nos  corps- 

Ibid.  jifj.  C'eft  luy  qui  nous  dit,  que  parce  que  J.  C.  efir  en  nous  par  fit  pro- 

pre chair.^  ilefit  afjuré  que  nous  rcfiuficiterons ,  efiant  impo.ijîble  ^  in^ 
croiable  que  la  vie  ne  communique  pas  la  vie  à  ceux  en  qui  elle  efi. 

l.io.p.  861.  C'eft  luy  qui  nous  dit,  que  l'Eulogie  Myfiique  nous  efi  donnée 
afin  que  J.  C.  habite  en  nous  corporellement  par  la  participation  dj^ 
la  communion  de  fia  fiainte  chair. 

"^^^'  C'eft  luy  qui  nous  dit,  qu'une  nature  corruptible  comme  la  notre 

ne  peut  efire  autrement  vivifiée  qu  efiant  corporellement  unie  an 
Corps  de  celuy  qui  efi  la  vie  par  fia  nature. 

!'■  990.  C'eft  luy  enfin  qui  nous  dit ,  que  J.  C,  s'efi  fervi  de  l'Eulogie 

four  bénir  ceux  qui  croyent  en  luy ,  far  fion  Corps  unique.  Que  nous 
fiommes  réduits  en  unité  avec  J.  C.  far  cet  unique  Corps  3  (^  que 
■nous  luy  fiommes  unis  en  recevant  dans  le  notre  ,  ce  Corfs  unique 
^  indivifible. 

Tous  ces  paflàges  5c  plufieurs  autres  du  même  Père  ont  efté 
rapportez  ailleurs,  5c  l'on  a  ruiné  toutes  les  défaites  dont  les 
Calviniftes  fe  fervent  pour  les  éluder  i  de  forte  que  nous  avons 
droit  de  les  produire  comme  abfolumentconvainquans  ôcde- 
cififs.  Et  comme  ils  font  voir  manifeftemenr  que  félon  ce  Père 
par  l'Eulogie  ou  l'Euchariftie  nous  recevons  réellement  la  pro- 
pre Chair  de  J.  C.  ils  font  voir  en  même  temps  qu'il  ne  l'appelle 

►  point  type  pourexckire  la  realité  de  cette  Chair ,  &  qu'il  n'en- 

tend autre  chofe  par  ce  mot,  que  ce  que  les  Catholiques  enten- 
dent par  celuy  de  Sacrement,  qui  leur  reprefente  tout  cequela 
;,  fuy  les  oblige  de  croire  de  ce  Myftere ,  c'eft  à  dire,  que  c'eft  un 


tirec^de  U partie  ester'nwe  de  l'Euchafifiie        37 
voile  exteneur  qui  couvre  à  nos  yeux  le  Corps  de  J/G/pr^fenc  Gh.  IV.  ^ 
réeliementSc  fubftanciellement  fur  nos  Autels  &  dans  ncV^  corps. 

Mais  il  n'eft  beloin  même  que  du  palfage  où  S.  Cvn'le  em- 
ployé le  mot  de  type  pour  découvrir  comme  il  l'enrend  C'eft- 
dans  le  dernier  livre  de  Ton  Commentaire  fur  S.  Jean,  où  fai-.  i_  n.p.  no*. 
fant  comparairon  de  l'apparition  de  J.  C.  à  Tes  Difcrples- ,'  lors 
qu'il  fe  trouva  au  milieu  d'eux  ,  les  portes  fermées,  avec  le^at 
femblées  qui  retiennent  le  Dimanche  dans  l'Eg'ifedonton  fer- 
moit  aufli  les  portes  lorfque  l'on  celebroir  l.-s  Myfteres  ,  ].Q. 
dit  \\^y  furvicnt  auM  Ô"  y  apparoi/f  invifihlement  comme  Dieu} 
^  vijiblcment  dans  fan  Corps -,  (^  il  nous  donne  aufjï  à  toucher  fie 
faintc  Chair ,  ©>  nous  nous  en  approchons  par  une  faveur  fiti^uliere 
de  Dieu  en  recevant  par  l' Eulop'e  jnyftique  J.  C.  en  nos  mains  j  afin 
que  conformément  a  ce  qui  nous  eft  enfeiyiè  par  ce  myflere ,  nout 
croiïons  qu'il  a  reffufcité  fon  temple ,  (  ceji  à  dire  ,  fon  humanité  ) 
Car  ce  que  noire  Seigneur  dit  lors  qu'il  fit  parluy-mhne  le  type  de 
fon  Myfiere  ^  montre  clairement  que  la  communion  de  l'Eidoyi 
myjliquc  eflune  confejjîon  de  la  refarrecHon  'de  'J.  C. 

Qu'eft-ce  donc  que  ce  type  du  Myflere  que  J.  C.  fît  par  luy- 
même  ?  C'eft  l'Eulogie  myflique  ,  c'eft  le  Sacrement  myfle- 
rieux.  Etqu'efb-ce  que  contient  ce  type?  Il  contient  J^C.  c'eft 
pourquoy  en  le  recevant  dans  nos  mains ,  nous  y  recevons  J.  C. 
en  le  voyant  nous  voyons  fon  Corps,  &  J.  C.nous  y  apparoift 
vifîblementdans  fon  Corps:  il  s'y  donne  à  toucher  comme  aux 
Apôtres.  Et  tout  cela  confideré  félon  le  bon  fens ,  &:  joint  avec 
tous  ces  autres  lieux  de  S.  Cyrille,  fait  voir  plus  clair  que  !é 
jour  que  le  mot  de  type  &  de  figure  ne  fignifie  point  dans  ce 
lieu  une  pure  figure ,  mais  un  fïgne  &  un  Sacrement  qui  con- 
tient réellement  la  Chair  même  de  J.  C. 

Quoy  que  les  mots  de  figure  &  d'image  n'ayant  point  d'au- 
tre fens  que  celuy  de' type,  d'antirype&  de  Sacrement ■•foiêrit 
fiiffifamment  expliquez  par  réclaircifîement  de  ces  autres  ter- 
mes-,  fi  l'on  veut  fçavoir  néanmoins  en  quel  fens  les  Pères  les 
ont  appliquez  à  l'Euchariflie,  6^  s'ils  on  prétendu  parla  en  ex- 
clure fon  véritable  Corps,  on  n'a  qu'à  confu'ter  S.  Gaudencc 
Evêque  de  BrefTe  qui  employé  ces  termes  de  figure  &  d'image 

dans  fon  fécond  traité  fur  l'Exode,  &  qui  y  joint  encore  plu- 
iîeurs  autres  dont  les  Ca'viniftesabufentde  même  que  de  ceux- 
là.  Car  il  dit  que  le  vin  Euchariflique  efl:  offert  en  figure  de- la 
J?affîon  :  il  appelle  exprelTément  l'Euchariflie/w^gj  de  la  pajfion^ 

E  iij 


38  Liv.  I.  T)es  mots  de  figure ,  type  ^  6"  autres 
Cil.  IV.  en  difânc  que  nous  Tommes  fandifiez  per  imaginent propriè  Paf- 
fionis.  Il  dit  qu'elle  eft  le  legs  héréditaire  du  Nouveau  Tejlamenty 
que  J.  C.  nous  a  laijfé  la  nuit  qu'il  a  efiè  livré  four  eftre  crucifié  , 
afin  qu'il  nous  fervift  de  gage  de  fa  prefence,  Tanqua?n  pignus 
fuaprafentia:  dereliquit.  Il  l'appelle  les  Myfieres  de  la  vie  éter- 
nelle ,  a:terna:  vit^e  myfieria  :  les  Myfleres  de  la  PaJJton  de  J.  C. 
le  Sacrement  du  Corps  du  Seigneur. 

Jamais  perfonne,  non  pas  même  un  Miniftre,  n'employa  tant 
de  ces  forces  de  termes  dans  un  fi  petit  difcours ,  &  jamais  per- 
fonne ne  fit  mieux  voir  aufli  combien  il  eftoit  éloigné  de  préten- 
dre exclure  par  ces  termes  la  prefcnce  réelle  du  Corps  de  J.  C. 
dans  cette  image  &  dans  cette  figure  de  la  Paffion  ,  dans  ce 
Myftere ,  dans  ce  Sacrement ,  dans  ce  gage ,  dans  ce  legs  tefta- 
mentaire.  Car  c'eft  ce  même  faint  Gaudence  qui  dans  ce  mê- 
me difcours  en  oppofant  l'eftat  de  grâce  à  celuy  de  la  loy, 
comme  un  eftat  qui  contient  la  vérité  ,  à  celuy  qui  ne  conte- 
noit  que  des  figures  ,  s'exprime  de  cette  forte.  En  cet  ejîat 
de  vérité  dans  lequel  nous  fommes  ,  un  feul  efi  mort  pour  tous^ 
Et  le  même  J.  C.  nous  nourrit  efiant  immolé  dans  chaque  Egli- 
fe  particulière  au  myficre  du  pain  ^  du  vin.  il  nous  vivifie 
efiant  cru  :  /'/  fantifie  efiant  confacré  ,  ceux  qui  le  confacrent.  C'efi- 
la  la  chair  de  l'agneau ,  c'efi  fon  Sang  :  car  c'efi  le  pain  defcendu 
du  Ciel  qui  dit  :  Le  pain  que  je  donneray  eft  ma  Chair  pour  la 
vie  du  ficelé-  Cefi  avec  rai  fan  qu'il  a  voulu  que  parl'efpece  de 
lîrencl  raifon  "vin  fon  Sangfufi  repre fente:  car  difant  comme  il  fait  dans  l'E^ 
du  choix  de  vangile ^  Je  fuis  la  vraye  vigne,  //  nous  fait  affez^voir  que  tout 
Sicremenc  "  ^^  '^"^  ^^^  ^'"^  "ïï^''^  i^»/«J  l'Eglife  en  figure  de  fa  Paffion  efi  fon 

Sang Luy  donc  qui  efi  Créateur  (^  Seigneur  de  toute  la  natu- 

re^  Q^qui  de  la  terre  produit  le  pain  ,  fait  en  fuite  du  pain  fon  propre 
Corps ,  parce  quil  le  peut  é^  l'a  promis.  Et  comme  de  l'eau,  il  fait  du 
vin  (  dans  l'ordre  de  la  nature  )  il  fait  auffî  du  vin,  fon  Sang. 
Nous  avons  fait  voir  que  ce  changement  qui  fc  fait  félon  S. 
Gaudence,  du  pain  au  Corps  de  J.C.  paruneadion  réelle  ôc. 
par  un  effet  de  la  toute- puiflànce  de  Dieu ,  ne  peut  fans  extra- 
vagance eftre  rapportée  à  l'inftitution  d'un  fîgne,  eftantvifible 
que  ce  n'eft  pas  un  difcours  raifonnable  que  de  dire  que  celuy 
qui  eftant  le  Créateur  de  la  nature  produit  le  pain  de  la  terre, 
fait  en  fuite  du  pain  la  figure  de  fon  Corps ,  &  qu'il  le  fait 
parce  qu'il  le  peut  ,  &  qu'il  l'a  promis  :  n'y  ayant  aucun 
xapporc  encre  cette  adion  cres-rcclle  de  faire  que  la  terre 


ttrez.de  la, punie  exterîture  de  tEHcharifiie.       39 
produife du  pain,  ôc cette inftitution  du  pain  pour figne& pour  Ch.  IV. 
figure  du  Corps  qui  ne  marque  aucune  puiflance.  Outre  que 
le  mot  de  propre  Corps  détermine  clairement  tout  cepaffàgcau 
Corps  véritable  de  J.  C.  comme  nous  l'avons  encore  montré.  P^rpï^  I.  .♦< 
Et  s'il  en  pouYoit  refter  quelque  doute,  ce  qui  luit  dans  la  même  ^'  '"* 
Homélie  eft  capable  d'en  convaincre  les  plus  opiniâtres,  pour- 
veu  qu'ils  ne  veuillent  pas  renoncer  vifiblemenc  au  fens  com- 
mun. 

Ne  prenei^fas ,  dit- il,  ce  Sacrement  pour  une  chofe  commune  (^  TraA.  ».  ;» 
terre ftre  :  Mais  croyez^quil  a  efté  fait  par  le  feu  du  faint  Efprit  ce   ^^^^' 
qu'on  vous  dit  qu'il  cf.  Car  ce  que  vous  recevez^eft  le  Corps  de  ce 
Pain  celé  fie  ,  c'eft  le  Sang  de  cette  vigne  facrêe.  Car  lors  quilpre^ 
fente  à  [es  T)ifciples  le  pain  ^  le  vin  confacrè ,  il  leur  dit ,  Cecy  eji 
mon  Corps ,  Cccy  efl  mon  Sang.  Croyons ,  je  vous  prie  ,  celuy  que 

nous  avons  crii.  La  vérité  eft  incapable  de  menfonge Croyons 

tout  ce  qui  nous  a  efrè  enfeigné ,  (^  de  la  manière  qu'il  nous  a  eftè 
enfeignè  .^  en  nous  gardant  bien  de  rompre  cet  os  tres-folide  ,  Cecy 
efl:  mon  Corps ,  Cecy  eft  mon  Sang.  Que  s'il  refte  encore  quel- 
ques doutes  à  quelqu'un  qui  n'aycnt  pas  efté  levez^par  cette  expli- 
cation ,  qu'il  les  confume  par  l'ardeur  de  la  foy. 

Il  n'y  arien  dans  cepaflage  que  de  decilîl:*  pour  la  foy  de  la 
prefcnce  réelle.  S.  Gaudence  infifte  fur  la  vérité  de  ces  paro-   Vavez  pçrp, 
les ,  Cccy  eft  tnon  Corps ,  &  il  fait  voir  par  là  qu'il  les  faut  pren-  -•  ^-  i-  e.  s. 
dre  à  la  lettre  comme  nous  l'avons  prouve. 

Il  reprefente  le  fens  de  ces  paroles  comme  difficile ,  êc  il  s'en- 
fuit de  là  qu'elles  ne  fe  prennent  ni  en  un  fens  de  figure  ,  ni  en 
un  fens  d'efficace  ,  comme  nous  l'avons  encore  prouvé.  Ainfi   Pcrp.  1. 1.  z^ 
il  détermine  clairement  tous  ces  mots  de  (ïgure  &  à' image ,  c.  i. 
dont  il  fe  fert,&il  fait  voir  qu'ils  font  très  compatibles  avec 
Ja  créance  de  la  prefence  réelle  &:  de  la  tranffiibftantiation. 

Ce  n'efl:  pas  que  ces  mors  enferment  d'eux-mêmes  cette 
doctrine  ,  ni  qu'ils  la  fignifient  littéralement  &  grammatica- 
lement j  &:  c'eft  ce  que  je  fupplie  M.  Claude  de  bien  remarquer. 
Car  il  eft  très- vrav  que  figure  comme  figure,  image  comme 
image,  n'enferment  point  la  vérité  j  de  forte  que  l'on  n'a  ja- 
mais droit  de  conclure ,  c'eft  la  figure  ,  donc  elle  contient  la 
vérité.  Tant  s'en  faut  que  cette  conclufion  foit  jufte  ,  que  lors  ' 
que  l'on  ne  fçait  rien  d'une  chofe,  finon  qu'elle  eft  figure  d'u- 
ne autre,  on  adroit  de  conclure  qu'elle  ne  la  renferme  pas. 
C'eft  ainll  que  l'on  a  conclu  que  tout  ce  qui  eftoit  dans  l'ancien 


40        Liv.  I.  "P^i"  mots,  de  figure ,  type ,  t^  autres 

Çh/IV.')  Teftament  eftanc  fiirure,  n'edoicoas  la  vérité  même.  Mais  ce 

raifonnement  eltoic  fondé  fur  ce  qu'il  ne  paroifToit  par  aucune 

autre  preuve  qu'il  continfl:  la  vérité  ;  &;  le  titre  de  figure  ne  la 

,,  renfermant  pas,  on  avoit  droit  de  prendre  ce^  figures  pour  des 

.  figures  ext  lufives.  Ainfi  c'efl.  très- bien  conclure  que  de  dire  j 

C'eH:  la  ftatuë  du  Pape ,  donc  ce  n'eft  pas  le  Pape  même. 

Mais  comme  ces  termes  n'enferment  nullement  par  eux- 
mêmes  la  prefence  réelle  de  la  cholè  figurée,  ils  ne  l'excluënc 
auffi  nullement.  De  forre  que  fi  l'on  f(,ait  par  d'autres  preu- 
ves que  ceux  qui  s'en  fervent  la  croyent,  on  a  droit  de  con- 
clure qu'ils  renferment. 

On  peut  taire  les  mêmes  reflexions  fur  les  autres  termes  dont 
le  Minières  abufent.  S'il  cfl  queftion  par  exemple  du  mot  de 
Symbole  ^  on  peut  voir  en  quel  fens  il  eft  donné  à  l'Euchariftie 
par  S.  Chryf  >n;(une ,  &:  juger  par  là  de  fa  fignification.  Il  s  en 
fertdans  l'Homélie  83.  fur  S.  Mathieu,c'eftà  dire  ,  dans  un  des 
lieux  de  toute  l'antiquité  où  la  prefence  réelle  eft  le  plus  forte- 
ment établie.  Il  reconnoît  que  les  chofes  qui  fe  pafTcnt  dans 
Je  Sacrifice  font  les  Symboles  de  Ja  mort  de  J.  C.  Si  J.  C. 
dit  il  ,  n'ejî  point  ynort  ?  dcquoy  nos  Myftcrcs  font-ils  Symboles 
T/yV'S  ffu'/iÇoAtt  Tct  reAa'/u.em;  Mais  c'efl  le  même  S.  Chryfoftome 
qui  avoit  dit  auparavant  à  fon  peuple: 

Croyons  Dieu  en  tontes  chofes  ^  (^ne  le  contrcdifons  point  ^  encore 
que  ce  qu'il  nous  dit  femble  contraire  à  nos  penfèes  (^  à  nos  yeux. 
Bt  que  l' autorité  de  [a  parole  fait  plus  forte  fur  nous  que  nos  yeux 
^.  nas penfèes.  Pratiquons  cela  dans  nos  Myfieres  :  ne  regardons  pas 
feulement  les  chofes  offertes ,  fiiais  attachons-nous  a  fa  pttrole  :  car 
fa  parole  ne  nous  peut  tromper  ^au  lieu  qtci  nos  fcns  s' abufent  facile- 
ment. Puis  donc  que  fa  parole  nous  dit  .^  Cecy  efi:  mun  Corps, 
foyons-en  perfuades.^.^  croyons -le ,  voyons  le  avec  les  yeux  de  la  foy. 
.  C'çfl  le  même  qui  leur  avoir  dit  :  Combien  y  en  a-t  il  qui  di'fcnt^ 
fe  yoiid,rQis  bien  voir  fyi  vifgc,  fa  foiTne  .^  fes.  habits. r^Vous  le 
Vûyg%^luy-mè-ms  ,  vous  le  touchez^,  vous  le  mangez^  ■     •   . 

C'cll  le  même  qui  leur  avoit  dit  :  J.C.  ne  s' e fi  pas  contenté 
de.  fc  faire  homme ,  d'eflre  foiietté ,  d'cjîre  crueifiè  pour  nous  ;  mais 
il  Ce  mêle  luy  même  en  nous ,  ^  //  nous  rend  fon  propre  Curps ,  non 
feulement  par  la  foy ,  mais  en  effet  ^  rèelie rient. 

Enfin  c'eftice  même  S.  Chryfoflome  q,ui  donne  dans  tousfês 
ouvrages  tant  de  preuves  éclatantes  de  la  foy  fur  la  prefence 
réelle,  que  l'on  peut  dire  avec  vérité  qu'il  n'y  a  point  d'Au. 

teur 


tirei,  de  lu  punie  extérieure  de  tEucharifiie.  41 
teur  Catholique  des  derniers  temps  où  elle  foie  plus  fortement  Ch,  IV. 
exprimée ,  bc  par  un  C\  grand  nombre  de  palTages ,  nous  avons 
d'autant  plus  dedroitde  le  dire  , qu'une  grande  partie  de  ces 
palTages  a  eflé  alléguée  dans  le  fécond  VolumCjôcmile  à  couvert 
àts  vaines  diftinctions  des  Miniflres. 

Ain  fi  il  faudroit  eftre  bien  déraifonnable  pour  ne  pas  avouer 
_que  le  mot  de  Symbole  ne  peut  fignifîer  dans  les  Ouvrages  d'un 
Auteur  qui  s'explique  fi  clairement  fur  la  prefenceréellej  qu'un 
Symbole  joint  à  la  chofe  fignifiée. 

hQs  Pères  que  nous  venons  d'alléguer  ne  fuffifent  que  trop 
pour  nous  alTurer  du  fens  de  ces  termes.  Car  eftant  pa'ï  leur  na- 
ture fufceptibles  de  ces  différentes  déterminations  que  nous 
avons  marquées,  &:  ayant  eftc  déterminez  à  fignifier  non  de  pu- 
res figures  &:  de  purs  fignes,  mais  des  figures  éc  des  fignes  de  J. 
C.  prefent ,  par  l'ufage  de  tous  les  Auteurs  qui  ont  écrit  depuis 
mille  ans,  on  ne  fçaur'oit  prétendre  que  les  Pères  les  ayent  pris 
en  un  autre  fens  à  moins  que  d'en  avoir  des  preuves  demonflra- 
tives.Il  eft  fi  naturel  qu'un  même  terme  fignifie  toujours  la  mê- 
me idée  :  Il  efb  fi  difficile  que  des  mots  changent  de  fens  par  tou- 
te la  terre  :  Il  efl  fi  peu  probable  que  ceux  qui  ont  eflé  les  difci- 
ples  des  Pères  fe  foient  tous  trompez  dans  l'intelligence  de  leurs 
termes ,  qu'il  n'en  faut  pas  davantage  pour  former  une  demonf- 
tration  morale  que  cela  n'eft  point  arrivé.  Que  doit  -  on  donc 
dire  en  voyant  de  plus  que  les  principaux  d'entre  les  Pères  les 
ont  pris  certainement  dans  le  même  fens?  Et  qui  aura-il  de  cer- 
tain au  monde  fi  cela  ne  l'efl  ? 

Quand  aucun  des  autres  Pères  ne  fe  feroit  expliqué  fur  cqs  ter- 
mes ,  un  homme  tant  foit  peu  raifonnable  n'en  feroit  pas  le 
moins  du  monde  ébranlé.  Cependant  il  efb  arrivé  par  un  effet 
de  la  Providence  qu'ils  font  connoître  afïez  clairement  leur 
fêns  dans  la  plufpart  des  lieux  oii  ils  en  ufent. 

Si  S.  Denis  appelle  ce  qu'il  y  a  d'extérieur  dans  l'Eucharifliie     De  Eccief 
des  ifnages  (jS  des  Symboles  ^  il  dit  (\\.\Q  par  ces  vcneniblcs  Symboles  Hier.  c.  4.  c. 
7.  C.  efi  fimifiè  é"  participe  Aq.  même  que  Vidor  d'Ancioche  dit  v 
que  par  le  Symbole  du  pain  nous  jotnmes  faits  tous  participatif  du  1.  l.j.  c,  4. p. 
Corps  dej.  C.  i^  de  fon  Sangpar le  Symbole  du  vin.  Or  nous  avons  ^^°- 
fait  voir  que  ces  termes  s'entendent  d'une  participation  réelle, 
qui  fuppofe  une  véritable  prefence. 

Si  cet  Auteur  reconnoît  dans  i'Euchariflie  des  voiles  énisima- 
tiques,il  reconnoît  auffi  qu'ils  couvrent  une  chofe  divine,  à  qui 

F 


J.8.C.U. 


"ult       "L I V.  h  T>^s  mots  de  figure ,  type ,  g^  autres 
Ch.  IV.    il  adrefle  ces  paroles  qui  ne  conviennent  qu'à  J.  C.  0  fainté' 
divin  Sacrifice  :   ofiez^  ces  voiles  d' énigmes  (jr  de  fj/mboles  qui  vous 
environnent ,  (jr-  vom  niontrexj:laircmcnt  à  nous  en  éclairant  les  yeux 
de  nofire  cjf  rit  par  une  lumicre  vive  &  éclatante. 
Si  l'Auteur  des  Conftitutions  Apolloiiques  ufe  quelquefois 
1.  5 .  c.  -,.  1  <    des  termes  de  Myfiere ,  à' antitype  du  précieux  Corps  de  /.  C.  d'Eu- 
c.  1^.  jbid.  c.  charifiie  antitype ,  àQ  fymbole  ^  il  fait  voir  clairement  ce  qu'il  en- 
tend par  ces  termes  lors  qu'il  rapporte  cette  prière  célèbre  de  la 
Litur2;ie:  Envoyez^ôtre  faint  Efprit  fur  ce  facrifice ,  afin  qu'il  fa  f~ 
fie  ce  pain  le  Corps  de  votre  Chrifi.^  (jr-  ce  calice  le  Sang  de  votre  Chrifi, 
perp.  1.  1.  <r.  Car  on  a  montré  ailleurs  que  cette  prière  contient  une  preu- 
*^'  '•  vë  convainquante  de  la  preîence  réelle&:  de  la  tranfTubftantia- 

tion  5  &:  qu'on  ne  fçauroit  dire  avec  la  moindre  apparence  que 
l'on  y  demande  à  Dieu  ,  ni  qu'il  rende  le  pain'figure  de  J.  C,  ce 
qui  n'a  point  befoin  de  l'opération  du  S.  Efprit  i  ni  qu'il  le  rem^ 
plifTe  d'efficace,  ce  qui  ne  s'exprima  jamais  en  ces  termes  ^  auf- 
quels  néanmoins  toutes  les  nations  du  monde  fe  font  portées 
d'un  commun  corifentement. 

Et  lorfque  prefcrivant  la  manière  dont  il  faut  s'approcher  de 
rEuchariftiCjil  dit  que  chaque  ordre  prenne  chacun  a  part  le  Corps 
du  Seigneur  ^  le  précieux  Sang.^  en  s'en  approchant  avec  crainte  S* 
révérence ,  comme  du  Corps  du  Roy.  Car  c'eft  en  vain  qu'Aubertin 
prétend  éluder  ce  paflàge  par  fon  explication  chimérique  de 
Corps  typique  &:  de  Corps  fymbolique  ;  puis  qu'outre  que  cet- 
te diftindtion  eft  entièrement  vaine ,  &  qu'elle  a  déjà  efté  dé- 
truite par  une  infinité  de  preuves  dans  le  fécond  Volume  j  il efl: 
vifible  de  plus  qu'elle  efl:  mal  appliquée  à  ce  lieu- là.  Car  on  ne 
dirajamais  d'une  image  dej.  C.  qu'il  s'en  faut  approcher  com- 
me du  Corps  de  J.  C  6c  fi  l'on  le  difoit ,  chacun  entendroit  par 
là  que  l'on  voudroit  faire  rendre  à  cette  image  le  même  refped 
qu'on  rend  à  J.  C.  même.  Ce  qui  ne  fe  pourroit  dire  fans  im- 
pieté de  l'Euchariftie,  d  elle  ne  contenoit  réellement  J.  C. 

Enfin  il  marque  clairement  ce  qu'il  entend  foit  en  ce  qu'il  ufe 
fou  vent  des  mots  de  Corps  de  J.  C.  en  difanz  que  nous  participons 
au  Corps  de  J.  C.  que  nous  le  prenons  5  de  même  que  les  Catholi- 
ques après  s'eflre  fcrvis  des  mots  de  Sacrement .^d'efiece  Se  de 
rymbole ,  employent  fouvent  auffi  ceux  de  Corps  ôc  de  Sang  de  J. 
C.  par  la  pente  qui  vient  de  leur  dodlrinc,  qui  les  porte  à  me- 
Conflit  1  S.  ^^^  ^^^  fortes  d'expreffions  j  foit  en  ce  qu'il  dit  que  ceuxquicom- 
e,  13.  munioient confirmaient parY Amen  ces  mots  de  Corps  de  J.  C.  que 


tire'zjie  la,  partie  extérieure  de  ÏEuchafiJiie,  4.3 

lePrellre  leurdifoit  en  Jeurprefentanc  la  communion. Car  .cette  Ch.  IV. 
confeflîon  jointe  à  ce  que  le  Preftre  difoic  en  donnant  l'Eucha- 
riftie^tormoit  cette  propofition  entière  ;  c'eji  le  vmy  Corps  de  J- 
C.  Et  cette  propolition  contient  un  aveu  folemnci  de  la  doc- 
trine delà  prerenceréelle,eflant  deftinée pour étoufFerôc pour 
delâvoûer  non  ces  doutes  chimériques  ^fl'Euchariftie  cfifigtire, 
ou  fi  elle  a  quelque  vertu  5  mais  le  doute  naturel  que  la  difficulté     y^''^'"  P^''?- 
du  Myftcre  produit  d'elle-même  ^  à  fçavoir  que  le  panifoitef-  s.  &  "y.  "    ^ 
ficacement  changé  au  Corps  même  de  J.  C 

\^&s  autres  Pères  quife  fervent  de  ces  termes  en  font  de  mê- 
me. Eufebe  appelle  à  la  vérité  r£ucharift:ie/^W(?;H^//^?/du  Corps  '^  i-  ^e  prcp- 
êc  du  Sang  dujSeigneuT  :  mais  il  témoigne  au  même  endroit  que  "''^"S-  '^-  '^ 
c'efb  un  mémorial  qui  contient  la  vérité  même,  au  lieu  que  les 
anciens  Sacremens  ne  contenoicnt  que  des  images  toutes  pures, 

Il  \'a.ppeUe/ymi>ole  (jj-  image  du  propre  Corps  de  J.  C.  auffi  bien  Demonft. 
que  Procope  de  Gaze ,  c'eft  à  dire  ,  Sacrement  du  propre  Corps  p^"^"»-  ^-  *• 
de  J.  C.  Mais  l'un  6c  l'autre  témoigne  au  même  heu ,  que  c'eft  iii°Gtnèf. 
dans  i'Euchariftie  que  s'accomplit  cette  prophétie  célèbre  de 
David  J  I^ous  navez^pûint  voulu  de  facrifice  (j;-  d' ablation ,   mais 
vous  m'avez^  formé  un  Corps.    C'eft  à  dire  que  l'on  offre    dans 
l'Euchariitie  l'unique  Corps  de  J.  C.  au  lieu  de  tous  les  facri- 
fîces  de  l'ancienne  Loy.  Et  Eufebe  enfeigne  de  plus  qu'on  l'of- 
fre en  facrifice  propitiatoire,  en  difant  exprelîement  dans  la 
vie  de  Conftantin.qu'à  la  dédicace  de  l'Eslife  de  Terufalem  une  ^    , 

■      J       r:    ^  n.    •      ^  ■  ^      J       -rT-  DevitaConr. 

partie  des  hveques  eltoient  occcupez  a  rendre  Dieu  propice  par  tan.i.4.c,4f. 
des  facrifices  non  fanglans. 

Gelafede  Cyzique  fe  fert  du  motde/y;HW(fj',mais  il  témoi- 
gne en  même  temps  que  ces  fymboles  font  le  Corps  véritable  i"  diatyp. 
de  J.  C.  //  ne  faut  pas  ^  dit-il,  dans  cette  table  divine  eftre  baffement 
attentifs  au  pain  Q-  au  calice  qui  font  propofez^.  mais  en  élevant  no- 
tre efprit  il  faut  contemplerpar  la  foy  l' Agneau  de  Dieu  qui  o(ic  les 
péchez^.,  gifantjur  cette  table  ,  ^  immolé  fans  efufion  de  fing  :  e^- 
prcnantvcritablcment  fon  précieux  Corps  ^  fon  Sang  ,  il  faut  croire 
que  ce  font  les  fymboles  de  la  refurreclion.  Eft-  ce  le  Corps  dj^J.  C. 
dans  le  Ciel  qui  eft  le  fymbole  de  la  refurreclion  ?  Ce  feroit  une 
penféefî ridicule,  que  M  Claude n'oferoit  ledirCj  outre  que  ce 
Corps  de  J.  C.  dans  le  Ciel  n'eft  pas  pris,  &:  que  le  mot  de 
A«t;HjSctigV ,  dont  cet  Auteur  fe  fert,  ne  s'applique  pas  à  un  ob- 
jet de  i'efprit.  Eft-ce  une  figure  de  J.  C.  Mais  le  mot  de  vere 

F  ij 


44         ^^v.  I.  Des  mots  de  figure  ^  type  ^  autres 
Ch.  I V.    qui  y  eft  joint  j  exclut  le  fens  de  figure,  puis  qu'il  n'eft  employé 
que  pour  prévenir  un  doute,  Se  que  jamais  perfonnene  douta 
vojez  perp.  que  le  pam  pût  eftre  la  figure  de  J.  C. 

1.  .4.C.4.C.  .      Je  lie  croy  pas  eftre  obligé  de  refutericy  le  fens  qu'Aubertin 
donne  au  mot  de  verè  ^  dans  le  paffage  de  Gelafe,  en  préten- 
dant que  cet  Auteur  l'a  pris  pour  dévotement  ^  fincerement.  Car 
commeil  n'a  pûauthoriferce  prétendu  fens  par  aucun  paifage, 
où  le  mot  de  vcrè  foit  employé  en  ce  fens ,  &  qu'il  eft  contraire 
à  l'ufage  &  à  l'impre/îion  commune ,  il  ne  peut  que  fervir  d'e- 
xemple de  la  hardieflè  de  ceMiniftre  à  fe  joiier  des  paflàges  des 
Pcres  qui  détruifent  fon  erreur. 
Tradi-  de  na-      L'Euchariftie  eft  une  figure  félon  S.  Ephrem ,  qui  dit  que  J.  C. 
turâ  Dci  non  bénit  Ic  pain  en  figure  de  fon  Corps  ^  le  Calice  en  figure  de  fon  Sang. 
cunosc  fcrut.   y[^\^  qu'eft-cc  qu'enferme  cette  figure,  félon  ce  même  Saint?  Il 
le  déclare  dans  la  fuite  de  ce  traité  par  ces  ^zroïei: participez^ 
au  Corps  immaculé  (3^  au  Sang  du  Seigneur  avec  une  foy  très. pleine^ 
vous  tenant  affurè  que  vous  mangez^  l' Agrieau  même  tout  entier. 
1  I  4  c.  Cette  foy  très,  pleine  qu'il  exige  pour  bannir  le  doute  qui  peut 
1. 63.       '■    s'élever  fur  ce  Myftere:  cette  remarque  qu'il  fait  que  le  Corps 
pcrp.  1.1,7.  c.  de  J.  C.  cft  entier  dans  l'Euchariftie ,  excluent  manifeftement 
i^"c!^9'Vï4^.  '^  àQ  figure  de  de  vertu  ^  qui  ne  produifant point  ces  fortes 

de  doutes ,  ne  portent  jamais  les  Pères  à  fe  fervir  de  ces  termes 
pour  les  prévenir. 

C'efl  le  Myftere  du  Corps  &  du  Sang,  félon  S.  Jérôme.  Le 
Kz  "h'"  ^^'  ^^igncur^  dit-il,  fit  la  Pafque  du  Genre  humain  dans  le  Cénacle^ 
^  dans  un  large  ^  (pacicux  Cénacle  ,  furiflé  de  toute  fouUleure  , 
orné  ^  préparé  pour  le  banquet  fpirituel ,  où  il  donna  àfcs  Difciples 
le  Myficre  de  fon  Corps  (j^  de  fon  Sang  ,  &  nous  laiffa  la  fefte  éter- 
nelle de  l' Agneau  immaculé.  Maisfi  quelqu'un  pouvoit  douter  fur 
ces  paroles  de  la  foy  de  ce  Père  ,  il  ne  faudroit  que  le  renvoyer 
à  fa  lettre  à  Hebidie,  où  il  pouffe  plus  loin  cette  reflexion  fur 
le  Cénacle.  Ecoutons^  dit- il,  avec  docilité  ce  qui  efl  dit  ^  que  le 
pain  que  le  Seigneur  rompit  ^  qu'il  donna  à.  fcs  Difciples ,  ej}  le 
Corps  de  notre  Sauveur.^  luy -même  leur  ayant  dit .,  Cecy  eft  mon 

Coi^s Si  donc  le  pain  qui  eft  défendu  du  Ciel  eft  le  Corps 

du  Seigneur ,  ^  le  vin  qu'il  donne  à  fes  Difciples  eft  (on  Sang ,  le 
Sang  du  nouveau  Tcftament  verfépour  pluficurs ,  méprifons  les  fa- 
bles Judaïques ,  ^  montons  avec  le  Seiqrieur  dans  ce  grand  Cénacle 
préparé  é^  nettoyé  pour  recevoir Àans  ce  lieu  élevé  le  Calice  du  nou- 
veau Tcftament. 


tirez,  de  h  punie  extérieure  de  tEucharifiie,     45 

Theodorec  appelle  le  pain  &  le  vin  après  la  confecration  les  Ch.  IV. 
fymboles  myftiques.  Mais  en  recevant  ces  fymboles  on  reçoit  Diaiog.». 
le  Corps  6c  le  Sang  de  Chrift ,  félon  cet  Auteur.  Crois- tu ,  dit 
l'Eranifte,  recevoir  le  Corps  é"  Is  Sang  de  Chrift  i  Ouy  ,jele  croy  , 
répond  l'Orthodoxe.  On  croit ,  dit  il  encore  ,  que  ces  fymboles 
font  ce  quils  ont  cfté  faits ,  (  c'eft  à  dire  Corps  de  J.  Q.  )&  on  les 
croit  ^  les  adore  comme  eftans  ce  qu'ils  font  crûs. 

L'Euchariflie  eft  un  Sacrement  Talutaire ,  félon  le  même  Au-  .^,     ,    , , 

ri  T     r        ■    •       1  o     |j         I  Theoo.oret.  In 

teur.  Mais  ce  Sacrement  lalutaireelt  1  ongmal  ce  1  archétype  Epiii.  ad  co- 
des figures  de  l'ancien  Teftament  &  le  Corps  J.  C.  L'^pbtrc ,  nnûi. 
dit-il ,  les  fait  reffouvenir  de  cette  trés-fainte  nuit.,  dans  laquelle  le 
Seigneur  mit  fin  à  la  Pafque  typique ,  ^  montra  l'original  de  cette 
figure  :  //  ouvrit  la  porte  du  Sacrementt  falutaire ,  ^  donna  fon pré- 
cieux Corps  &  fon  précieux  Sang ,  non  feulement  aux  onx^  Afotrcs^ 
mais  aujjî  à  celuy  qui  le  trahijfoit. 

C'eft  le  Sacrement  du  Corps  de  J.  C  félon  S.  Ifidore,  qui  en-  iaExod.c.15. 
feigne  que  ce  que  Moife  dit  qu'il  eft  oit  défendu  aux  étrangers 
de  manger  l' Agneau  Pafcal ,  éî'  qn-'il  dcvoit  cfire  mangé  dans  une 
même  mai  fon  ^  ^  qu'on  ne  devoit  point  porter  de  fa  chair  de- 
hors ^  s'entend  proprement  du  s-tcrernent  du  Corps  de  J.  C,  Mais  la 
fuite  fait  bien  voir  ce  qu'il  renferme  fous  ces  mots  de  Sacrement 
du  Corps  de  J.  C.  il  nozis  eft  commandé ,  dit-  il ,  de  manger  ce  orps 
^  ce  Sang  dans  une  même  maifon ,  c'eft  à  dire ,  dans  la  même  JEgli- 
fe.,  C^  denc  le  point  porter  dehors ,  c'eft  a  dire ,  parmi  les  Hérétiques 
qui  fe  font  retirez^de  l'unité  de  l'Eglife  Catholique.  Il  efb  bien  vi- 
fible  que  par  les  mots  de  sacrement  du  Corps  du  Seigneur .,  il 
n'entend  pas  un  fîmpleSacrement  &  une  fimple  figure  du  Corps, 
puis  qu'il  ajoute  que  ce  Corps  eft  mangé  dans  l'Eglife,  &  qu'il 
prend  fans  doute  le  mot  de  Corps  au  même  fens  lors  qu'il  dit 
qu'il  eft  mangé ,  que  dans  ccittex\<rcÇ[\oï\  .^Sacrement  du  corps  du 
Seigneur.  Or  quand  on  parle  du  Sacrement  du  Corps  du  Seigneur.^ 
le  mot  de  Corps  eft  pris  proprement ,  &  par  confequent  ce  me- 
me  mot  répété  une  ligne  après  doit  aufTi  eftre  pris  pour  le  vé- 
ritable Corps  du  Seigneur,  6c  non  pour  une  figure  de  ce  Corps. 

Quod  ait  de  agni  illius  efu  :  Omni  s  alienigena  non  manducahit  ex  eo. 

In  unk  domo  comedetis ,  nec  efferetis  de  carnibus  ejus  foras  :  Hoc 

de  corporis  Chrift i  Sacramento ,  cujus  agntis  ille  figuram   obtinuit, 
fropriè  tenetur fcriptum.  Cujus  Corpus  d^  Sanguis  in  una  domo  j   id 

cfiin  una  Le  de  fia  vefci  praciptur ,  nec  efferri  foras  in  plebibus  fci- 

lie  et  Hareticorum. 

F  iij 


46       L IV.  I.  Des  mors  défigure ,  types  ^  Autres 

Ch.  I  V.  Qiii  s'éconnera  après  cela  que  quelques  Pères  fe  loient  fervis 
en  quelques  endroits  de  cç.s  mêmes  termes  fans  les  expliquer  ? 
Les  Catholiques  prennenc-ils  la  peine  de  s'expliquer  toutes  les 
fois  qu'ils  appellent  l'Eucharillie'/ri/;;/-  Sacrement,  ow  fymbole  , 
ou  efpcce ,  ou  hofiie  ?  N'eft-ce  pas  au  contraire  un  effet  necefîài- 
re  que  l'ufage  rende  ces  fortes  d'explications  inutiles ,  parce 
qu'il  imprime  deluy-mcme  dans  l'elprit  les  mêmes  idées  que 
l'on  imprimeroit  par  une  explication  cnnuyeufe? 

c-  5^.  QS'^  M-  Claude  ne  nous  dife  donc  plus  que  S.  Jérôme  dans 

Ton  Commentaire  fur  Jeremie  ,  dit  que  ceBle  vin  dont  on  ace om. 

In  piai.  5,  -plitlc  de  type  fon  Sjng.  Qi.ie  S.  Auguftin  2v  Bede  après  1  uy  difent 
que  J.  C.  tèmoigncî  une  fatience  admirable  quand  il  admit  Judas- 
au  banquet  où  il  donna  à  fes  Difciples  la  figure  de  fon  Corps  ^  de 

nir.côiur.      f"^  Sang.  Qii'il  ne  nous  dife  pIus  qu'Euftathe  ,  S.  Bafile  &   S. 

Ncrt,  &  Eu-  Grégoire  de  Nazianze  fe  fervent  du  mot  à'antitype.  Que  Ge- 
lafe  dit  que  l'on  célèbre  dans  le  Myflcre  la  reffemblance  du  Corps  de 

Macar  Hom   ?•  ^-  Qh'^^  "^  faflepoint  Valoir  ce que  dit  S.  Macaire,  f«V/  rCef- 

17.  toit  point  encore  venu  dans  l'efprit  des  Patriarches  qu'on  deufi  offrir 

dans  l'Eglife  le  pain  ^le  vin  antitype  de  la  chair  ii^-  du  Sav.g  de  I. 
C.  &C  qu'il  reconnoiffe  que  ces  fortes  d'objections  font  entière- 
ment vaines  &  inutiles.  Car  pourquoynefeleroient-ils  pasfer. 
vis  de  ces  termes  ?  La  nature  du  Myftere  de  i'Euchariftie,  tel- 
le que  les  Catholiques  la  conçoivent ,  les  y  portoit.  L'ufâge  les 
autorifoit.  Ces  termes  n'eftoienr  point  devenus  odieux  par  au- 
cune herefie  qui  en  euftabufé.  La  foy  de  l'Eglife  fur  ce  Myf- 
tere  efloit  marquée  par  une  infinité  d'expreffions  qui  determi- 
noient  le  fens  de  celles-là.  Iljeftoit  donc  impofTible  qu'ils  ne 
s'en  fêrvîfTent,  &:  l'on  doit  plutoft  admirer  comment  ils  s'en 
font  fervis  fi  rarement, qu'il  y  a  peu  de  ces  pafi[ages  qui  ne  foienc 
joints  à  quelque  explication  qui  fait  clairement  voir  leur  fenti- 
ment.  Il  faudroit  avoir  cette  équité  dans  les  difputes  de  ne 
remplir  pas  les  livres  de  ces  vains  argumens ,  qui  marquent  un 
delfein  d'éblouir  les  fimples  par  ces  amas  trompeurs  de  paflà- 
ges ,  où  il  n'y  a  ni  folidité  ni  apparence  dans  le  fond.  Mais  fur 
coutil  faudroit  éviter  certaines  fuppofitions  captieufes  ou  en- 
tièrement faufies,  comme  celles  que  fait  M.  Claudeen  avan- 
çant généralement,  que  quoy  qu  il  ne  foit  pas  tout  a.  fait  hors  d' ap.. 
farenceque  des  ç^ens  qui  croycntla  tranffubfiantiation  ufent  quelque- 
fois de  termes  de  fî<znc ,  d'image  C^-  de  figure  ^  c'efi  néanmoins  rare- 
ment lors  que  la  di  [pute  les  y  contraint  .^(j;'  que  la  fuite  du  raifonne. 


tirû'^de  la  partie  extérieure  de  t Euclmifiîc ,  47 
ment  les  y  conduit-  Car  il  eft  bien  vra^r  qu'il  y  a  quelques  -  uns  Ch,  I  V» 
de  ces  tv'rmes  qui  lonc  devenus  odieux  par  Je  mauvais  ufage 
que  les  Sacramentaircs  en  ont  fait:  :  mais  il  eft:  certain  que  le 
fens  de  ces  termes  en  (oy  eft  fi  neceifaire  à  l'explication  du  Aly- 
ft:ere,  qu'au  même  temps  qu'on  en  évite  quelques-uns,  parla 
railbn  que  nous  venons  de  marquer ,  on  en  conlerve  d'autres 
qui  ont  le  même  fens. 

Que  l'on  demande  à  tous  les  Théologiens  ce  que  fignifie  le 
mot  de  Sacrement,  ils  répondront  tous  avec  S.  Auguftm  qu'il  ne 
fîgnifîe  rien  autre  chofe  qu'un  figne  facré  ,  &  fouvent  même  ils 
prennent  ce  terme  dans  cette  lignification  precifeôc  gramma- 
ticale qui  n'enferme  rien  que  d'eftre  figne  d'une  choie  facrée. 
C'eftainfi  que  le  Cardhial  Pullus  parlant  des  figures  ancien- 
nés  de  l'Euchariftie  qui  avoientefté  dans  la  loy  écrite,  \qs  ap-  c."i" 
pelle  les  s^cremcns  du  Cors  (^  du  Sang  du  Seiqv.eur.  Les  Sacrcmcns  , 
dit  il ,  du  Corps  (^  du  Sani^  du  Seigneur  ont  précédé  dans  l'ancien 
peuple ,  ^  ont  fait  le  même  effet  que  les  nôtres ,  dans  ceux  qui  croyent^ 
non  que  la  figure  ait  la  force  de  la  chofe  même  5  mais  parce  que  Dieu  y 
qui  peut  tout  ^  a  voulu  donner  par  l'ombre  ^  ce  qu'il  nous  donne  pre- 
fentement  par  la  ueritè. 

Cependant  quand  ce  même  terme  eft  appliqué  à  l'Euchariftie, 
aucun  Catholique  ne  fait  difficulté  de  s'en  fervir,  &  n'a  befoin 
d'y  eftre  conduit  par  la  difpute  &  par  la  fuite  du  raifonnementj 
parce  que  l'on  y  joint  auffitoft:  l'idée  entière  duMyftere. 

L'Eglife  ne  difpute  ni  ne  raifonne  quand  elle  chante  à  l'hon- 
neur de  ce  Myflere ,  Tantum  ergo  facramentum  veneremur  ccrnui. 

Hugues  de  S.  Vidor  ne  difputoit  point    lors  qu'il  dit ,  que  le  De    fyçchiï- 
Preflre  après  des  figne  s  de  croix  élevé  avec  l'une  (j;-  l'autre  main  le  '^"'^  Mi'I-j^  ob- 
Sacrement  du  Corps  ^  du  Sang  dej.  C.  (j^^  le  ?net  en  fui  te  fu   l'Au- 
tel pour  fignifer  l'élévation  du  Corps  de  J.  C.  fur  la  Croix. 

Saint  Edmond  Archevêque  de  Cantorbie  ne  difputoit  point  Tom.  bi- 
lors  qu'il  appelle  tellement  l'Euchariftie  unSacrement  dans  une  biior. 
inftrudion  envoyée  aux  Moines  de  Pontigny ,  qu'il  ne  la  décrit 
du  tout  que  parfes  efFetSjfans  faire  mention  de  ce  qu'elle  enfer- 
me, parce  qu'il  fuppofoit  que  ces  Religieux  le  fçavoienc.  afîèz. 
Ze  quatrième  Sacrement  ^  dit-il,  f/?/f  Sacrement  de  L'Autel  qui 
confirme  ^  fortifie  le  pénitent ,  l'aide  à  éviter  le  péché ,  le  réconcilie, 
le  foûtient.  Car  dans  la  dernière  Cène  que  J.  C.  fit  avec  fes  Dif- 
ciples  bien-aimex^,  il  établi}  ce  Sacrement  en  mémoire  de  fia  Pafi- 
fion. 


48         Liv.  I.  Des  mots  de  figure ,  type  ^  &  autres 
Ch.  I V.      Qi^e  ne  diroic  point  M.  Claude,s'il  avoir  trouvé  ce  paflàge  dans 
quelque  ancien  Auteur,  &  combien  feroit-il  valoir  que   dans 
un  difcours  qui  a  pour  but  d'inftruire  des  Religieux  de  ce  Myf- 
tere ,  on  ne  leur  en  apprenne  autre  chofe ,  fmon  que  c'eft  un 
Sacrement,  c'eft  à  dire  un  figne  facrc  quiefl:  établi  en  mémoire 
de  la  Paffion ,  Se  qu'il  a  plufieurs  effets  fpirituels?  Mais  les  hom- 
mes ne  parlent  point  du  tout  félon  Tes  fantaifies.  Ils  ne  s'atta- 
chent point  fervilement  à  la  fignifîcation  grammaticale  des 
mots.  Ils  y  joignent  les  idées  qu'ils  tirent  de  la  dodrine  de  TE- 
glife  de  leur  temps  •  Se  comme  ils  fuppofent  que  tous  les  autres 
en  font  de  même  ,  i]s(edifpenfent  de  la  peine  de  les  exprimer. 
C'efb  ainfi  que  S.  Anfelme  ne  s'en  eft  pas  mis  en  peine  ,  lors 
Math.  c.  20.  «l^iil  nous  dit  que  J.  C  ayant  rait  la  lolemnite  de  la  Pafque  an- 
cienne, paffa  à  la  nouvelle,  qu'il  voulut  que  fon  Eglife  célébrât 
en  mémoire  delà  rédemption  qu'il  leur  avoit  procurée,&:  qu'- 
au lieu  de  la  chair  &  du  fang  de  l'agneau  ,il  inftituale  Sacrc- 
„., ,.  ment  de  fon  Corps  &c  de  fon  San^. 

p.  nsij.  il  n  y  a  pomt  non  plus  d  ancien  Théologien  qui  rafle  difnculte 

de  fe  iervir  du  mot  à'obUta  &  devant  &  après  la  confecration , 
de  dire  qu'on  la  rompt,  qu'on  la  recjoit,  qu'elle  fîgnifie  J.  C.  Sc 
cela  fans  s'expliquer  davantage,  fi  ce  n'eft  par  rencontre- 
ObUta^  dit  l'Auteur  d'un  livre  intitulé,  GEMMA  ANIMjE^ 
non  intégra  fumitur ,  fed  in  tria  dividitur:  nnum  in  caliccm  mitti~ 
tur ,  aliud  ci  faccrdotc  confumitur^  tertium  in pixidem  nioriîur  ad  via~ 
ticum  reponitur,  quia  Corpus  Domini  efi  priforme.  Pars  in  calicem 
mijfa ,  cfl  Corpus  Domini  jamaffumptum  in  iloria  j  pars  comefla ,eji 
Corpus  Chrifii ,  id  efi  Ecdcfia.  Qu'eft  ce  que  cette  oblation  qui 
fe  divife  &:que  l'on  compare  avec  le  Corps  de  J.  C.  oc  avec  l'E- 
glife, comme  fîgnifïant  l'un  &:  l'autre?  C'efl  le  Sacrement ex- 
f.  ,j,  terieur  qui  cache  le  Corps  de  J.  C.  Cet  Auteur  le  croyoittres- 

réellement  prefent ,  comme  il  paroît  par  ces  paroles ,  De  même 
que  par  la  parole  du  Seigneurie  monde  a  efiè  créé  de  rien  ^ainjî  par 
la  même  parole  du  Seigneur^  ces  efpeces  de  chofe  s  font  changées  véri- 
tablement au  Corps  gS  au  Sang  du  Seigneur.  Mais  c'efl  cette  créan- 
ce même  qu'il  avoit  &:  qu'il  fçavoit  que  tous  les  autres  avoient 
qui  l'empêche  de  s'expliquer  plus  preciiément. 
In  ExpoCt  On  ufe  avec  la  même  liberté  du  mot  d'/^i?//^.   On  appelle 

MiiKe.  hoftiece  que  l'on  offre  même  avant  la  confecration.  Lhofiie  ^ 

dit  S.  Bonaventure  ,  efi  mife proche  du  Calice  ,  parce  que  J.  C.  efi 
immolé  pour  l' Eglife, 

CHAP. 


tirc^de  h  partie  extérieure  de  ÏEuchciriflie,         49 


Cii. 


CHAPITRE     V. 

Qu!  la  -preuve  que  JVf.  CUude  tirée  des  occajîons  où  les  Pcres 
Ce  font  fervis  des  mots  d' antitype  d^  d'image ,  e/^  entièrement 
vaine.  Sophifmes  d'Auhertin  qui  font  éclairas  par  la  même 
remarque. 

CE  que  nous  avons  dit  clans  les  Chapitres  precedens ,  de  la 
manière  dont  l'efprit  fupplée  à  l'imperfcclion  de  certains 
termes ,  en  ne  demeurant  pas  dans  l'idée  precife  qu'ils  excitent, 
mais  en  y  joignant  toutes  celles  que  la  foy  a  de  coutume  d'y 
joindre ,  fait  voir  combien  il  y  a  peu  de  foliditë  dans  la  cinquiè- 
me des  preuves  que  M.  Claude  propofe  contre  la  doctrine  de 
l'Egiife  j  quoy  qu'il  la  pouffe  avec  fa  véhémence  ordinaire  ,  &: 
qu'il  en  paroilfe  fort  Satisfait. 

„  J'ajoûteray ,  dit- il ,  pour  une  cinquième  preuve  ,  qu'il  y  a 
j,  certaines  occafions  fortes  oii  il  n'efl  pas  concevable,  que  fi  les 
„  SS.  Pères  euffent  eu  la  croyance  de  la  Tranifubftantiation,  ils 
„  n'euiTent  die  réalité  .^  au  lieu  de  dire  figure  ^fignc  :  ôc  nean- 
„  moins  ils  onx.  à'xx. figure ^ figne ^-sm  lieu  de  dire/'^<;^//Vf. En  voicy 
„  quelques  exemples  L'Auteur  des  Conftitutions  Apoftoli- 
„  ques  nous  donne  un  formulaire  d'aclion  de  grâces  pour  la 
j,  communion  où  il  nous  fait  dire  :  O  notre  Père ,  nous  te  rendons 
,,  grâces  pour  le  Sangprecieux  de  J.  C.  quia  eflé  répandu  pour  nous j 
„  Ô"  po^-r  [on  précieux  Corps  dont  nous  célébrons  ces  figures  ,  luy- 
,,  même  nous  ayant  comm.nidè  d'annoncer  fa  mort.  En  bonne  foy 
„  eftoit-ce  le  lieu  de  à\rQ  figure  ^  s'il  euft  crû.  realité 'i  Qui  ne 
,jfçait  que  dans  l'ardeur  de  la  dévotion,  l'ame  d'un  commu- 
„  niant  qui  croit  la  réalité  ^  n'a  garde  de  quitter  fon  principal 
„  objet,  la  perfonne  même  &;  la  fubftance  de  fon  Sauveur 
„  pour  s'amufer  à  des  figures  ?  Saint  Grégoire  de  Nazianze 

,  raconte  la  euérifon  miraculeufe  de  Gor2:onie  fa  fœur,  6cla 

»  ■    •  I 
„  rapporte  au  S.  Sacrement  en  ces  termes:  T^erfant .,  dit  il ,  un 

,„  torrent  de  pleurs ,  kl' exemple  de  celle  qui  arrofa  defes  larmes  les 

^..^  pieds  de'}.  C.  elle  déclara  qu'elle  ne  bougeroit  de  la  qu'elle  n'eufi 

,,  obtenu  la  fanté.  Ses  pleurs  jurent  le  parfum  qu'ellcyrépandit  fur 

,j  tout  fon  Corps.  Bile  les  mêla  avec  les  antitypes ,  ou  les  figures  du 

g,  Corps  ^  du  Sang  de  J.  C.  autant  que  fa  main  en  avoitpù  refer- 

G 


jo        Liv.  I.  'Des  mots  défigure ,  tjj?c  (§/-  autres 

Ch,  I  V.  j,  ver.  Et  incontinent .,  b  miracle  !  elle  fc  feniit yierie  &  fe  retirât. 
„  Si  S.Gregoirecroyoit  qu'il  y  avoir  deux  chofesau  Sacrement, 
j,  la  figure  &  la  realicé,  n'cffcoic-ce  pas  la  dernière  de  toutes  les 
,,  impertinences  de  rapporter  ce  miracle  à  la  figure  ^  fans  rien 
5,  dire  de  la  realité  ?  Je  fuis  perfuadc  que  l'auteur  n'en  uferoit 
„  pas  de  la  forte.  Il  n'auroit  garde  d'appeller  dans  cette  oc- 
„  cafion  le  S.  Sacrement  /f-^ar^.  Il  ne  manqueroit  pas  de  rap- 
,,  porter  ce  miracle  au  Corps  même,  &  d'en  tirer  une  preuve 
„  de  fa  prefence. 

„  Cependant  vous  voyez  de  quelle  manière  faint  Grégoire 
„  en  ufe.  Je  trouve  dans  les  œuvres  de  ce  même  Père  une 
j,  Oraifon  fort  éloquente  &  qui  facistait  bien  à  la  neccf- 
,j  fitc  de  fon  fujet.  Car  il  s'agifToit  de  fauver  la  ville  de  Na. 
„  zianze  que  le  Préfet  de  l'Empereur  menaçoit  de  (accagemenc 
^,  &:  de  ruine.  Ce  bon  Prélat  qui  en  eftoit  Evêque  Coadjuteur 
j,  de  Grégoire  fon  père,  follicitele  Prefetàufcrde  mifcricorde 
„  avec  une  véhémence  incomparable.  Il  le  prie.  Il  le  conjure.. 
„  Il  lui  met  devant  les  yeux  tout  ce  qu'il  y  a  de  touchant  dans 
„  la  Religion  :  &  entre  autres  chofes ,  il  luy  parle  du  S.  Sacre- 
„  ment.  'Je  mets ,  dit.il,  devant  ijos  yeux  cette  table  où  nous  com- 
,,  munions  enfcmhle ,  (y-  les  figures  de  mon  fa  lut ,  que  je  confacie  de 
j,  cette  même  bouche ,  dont  je  vous  offre  ma  requeftc.  Ce  Sacrement , 
„  dis-je  ^  qui  nous  élevé  au  Ciel.  Sans  mentir  Ci  le  Sacrement  eft 
„  le  Corps  même  de  J.  C.  en  fubflance  ,  on  ne  vit  jamais  une 
„  expreffion  ni  plus  lâche  ni  plus  froide,  ni  qui  reponde  moins 
jj  au  zèle  &  au  deflein  de  Grégoire.  QLielle  apparence  y  a-t-il 
„  qu'il  euft  parlé  de  la  forte,  fi  dcflors  on  euft  crû  ce  que  l'Eglife 
„  Romaine  croit  aujourd'huy  ?  Mais  pliitofb  n'eût  il  pas  dit  .- 
,,  Je  mets  devant  vos  yeux  cette  table  où  nous  communions 
„  enfemble,  6cle  Corps  même  de  mon  Sauveur  que  je  fais  de 
,,  cette  même  bouche  dont  je  vous  prie  ?  Mais  au  lieu  de  cela , 
„  il  ne  luy  parle  que  àc s  figures  de  fon  falut. 

Aubertin  propofe  le  même  argument  &  avec  la  même  for- 
ce en  divers  endroits,  6c  entr'autres  fur  ce  même  pafiagc  de 
"iaint  Clément.  Le  Cardinal  du  Perron  ,  dit-il,  ne  f  rend  pas  garde 
quil  rend  par  là  ridicule  le  di (cours  de  cet  Auteur  5  je  dis  quil 
le  rend  ridicule.  Car  fi  fa  penfce  avoit  efiè  que  J.  C.  eufi  donné  à 
fies  Difciples  fon  Corps  d^  fion  Sang  couverts  des  accidens  du  pain 
^  du  vin,  il  n\turoit  jamais  dit  qu'il  leur  donna  les  antitypes  d^ 
les  fiymboles  di  fion  Qor^s  é'  de  fion  Sang:  Car  ne  fie  rendroit-on 


tirez.de partie  extérieure  de  tEnchurifiie.  ^i 

pas  ridicule  ji  pour  (îyiifier  qu'un  époux  a  donne  fon  corps  à  ion 
éponfe ,  on  difoit  qu'il  luy  a  donné  fon  habit ,  fipire  de  fon  corps  \ 
Ou  (i  pour  marquer  qu'un  Roy  auroit  donné  à  quelqu'un  une 
bourfe  de  centpifioles ,  on  difoit  qu'il  luy  a  donné  une  bourfe  jjzure  de 
cent  pifioles  ? 

Mais  toutes  cq^  déclamations  s'cvanouiflent  d'elles-mêmes 
quand  on  a  compris  le  prmcipe  que  nous  avons  étably.  Elles 
auroient  quelque  lieu  fi  l'eTprit  demeuroit  dans  la  fignification 
grammaticale  des  mots  de  Sacrement^  de  figure  ^  à' antitype  , 
d'image:  mais  il  n'y  demeure  pas.  La  foy  qui  unit  dans  refpric 
des  fidelles  cette  idée  de  figure  avec  celle  de  |.  C.  réellement 
prefcntj  ne  leur  permet  pas  de  les  feparer.  Car  lorfquecesex- 
preffions  excitent  l'idée  qu'elles  marquent  prccifcmcnt ,  toutes 
les  autres  qui  y  font  jointes  fe  prefentent  en  même  temps  à  l'ef- 
prit.  On  conçoit  donc  par  le  mot  de  S.Sacrement,non  un  fimple 
Jîgne  ,  mais  tout  ce  qu'enfisrme  le  Myfiere  de  l'Eucliarifi:ie  j 
c'eilr  à  dire  le  Corps  de  ].  C.  couvert  d'un  voile  qui  le  cache. 

Ainfi  comme  l'effet  des  expreO'ions  fc  doit  juger  non  par  la 
fignification  precife  des  termes,  mais  par  l'nnprelfion  qu'elles 
font  fiir  l'efprit;  il  n'cftpas  eftrangeque  des  Auteurs  Catholi- 
ques le  iervent  mdifferemmenc  de  celles  qui  font  par  elles-mê- 
mes dëfeclueufes,  &c  de  celles  qui  ne  le  font  pas ,  lors  que  les 
unes  &  les  autres  propofent  à  l'efprit  le  même  objet ,  qu'elles  y 
font  la  même  imprellîon ,  6c  qu'elles  font  par  confequent  égale- 
ment capables  de  toucher  le  cœur. 

C'eft  ce  que  M.  Claude  n'auroit  pas  manqué  de  reconnoître 
s'il  luy  eut  plu  de  faire  reflexion  fur  le  langage  dont  l'Eglife  Ro- 
nnain^;  feferc  dans  les  occafions  où  elle  a  plus  d'intention  d'ex- 
citer la  dévotion  Scia  révérence  defesenfans  pour  ceMvilrere. 
Car  il  auroit  veu  qu'elle  employé  fort  fouvent  ces  mêmes  ter- 
mes qui  n'en  fignifient  d'eux-mêmes  qu'unepartie,  Se  qu'elle 
les  croit  auifi  propres  que  les  autres  pour  nous  porter  à  l'amour 
&  à  l'adoration  de  |.  C.  comme  prefent  dans  l'Eucharifiie. 

Cela  paroifl;  par  l'ofiîce  qu'elle  a  compolé  à  l'honneur  de  ce 
Myftere.  Car  dansl'Oraifon  qu'elle  répète  à  toutes  les  heures 
de  cet  Office ,  elle  n'appelle  l'Euchanftie  que  des  noms  de  Sa- 
crement merveilleux  &  de  Myftere  du  Corps  (^  du  Sang  du  Sei- 


Ch.  I  V. 


ineur. 


Elle  témoigne  une  révérence  particulière  à  ces  vers  d'une 
Hymne  qu'elle  chante  en  cet  Office,  Tantitmergo  Sacramentum 

G  ij 


ji  Liv.  I.  Des  mots  de  figure ,  type  ^  autres 
Cil.  V.  vcncrcmur  cernui ^  &  les  choific  d'ordinaire  quand  on  ne  la  rc- 
cire  pas  coûte  entière. Cependant  fi  l'on  s'arrefte  à  la  lettré,  l'Eu- 
chariftie  n'y  eft  appellée  que  du  nom  de  gnind  Sacrement ,  c'cd 
à  dire  de  grand  figne.  Elle  va  même  plus  loin:  car  parmy  les 
Antiennes,  qui  font  des  Verfets  qu'elle  choilît  pour  s'y  appli- 
quer en  particulier,  on  en  trouve plufieurs  où  l'Euchariftieen: 
marquée  par  les  mots  de  bled  ,  de  froment  &  de  vin.  AfruHu 
frunicnti  (y-  vini  multiplie ati  fidèles  ^  in  pace  Chrifti  requicfcmit. 
Ze pain  de  J.  C.  eft  délicieux,  dit- elle  dans  un  autre ,  C^  il  comble- 
ra les  Roy  s  de  délices. 

Les  fiiints  Prcftres ,  dit-  elle  encore  ,  offrent  de  l'encens  é"  des 
pains  au  Sciç^icur. 

Il  les  a  nourris  de  la  fleur  du  froment  ^  &  les  a  rafiafiez^âu  miel 
de  la  pierre. 

Si  les  déclamations  de  M.  Claude  eftoient  fuftes,  elles  au- 
roient  autant  de  lieu  contre  ces  endroits  de  l'Office  de  l'Eglife, 
que  contre  les  Pères  qu'il  accufe.  Et  il  en  pourroit  conclure  de 
même  qu'il  n'eft  point  croyable  qu'elle  les  prenne  au  (ens  de  la 
prefence  réelle.  Mais  comme  il  eft  certain  néanmoins  qu'elle 
les  y  prend  ,  il  doit  apprendre  de  là  qu'il  ne  juge  pas  bien  de  la 
lignification  de  ces  termes  ,&  que  pour  en  trouver  le  véritable 
lèns,  il  faut  joindre  à  leurfignification  grammaticale  &  litté- 
rale, celle  qu'ils  tirent  de  la  créance  àz  ceux  qui  s'en  fervent. 
De  forte  que  pour  prouver  que  les  Pcres  ne  les  ont  pas  pri's  aa 
même  fens  c)ue  les  Catholiques ^  il  taudroit  qu'il  eull  prouvé 
qu'ils  n'on  pas  eu  la  même  créance  qu'eux. 
On  doit  conclure  du  même  principe,  quec'efb  très  mal  juger 
de  la  fignification  des  termes  dans  une  matière  particulière  que 
de  s'arrefter  à  la  fignification  générale  que  ces  termes  peuvent 
avoir  dans  les  autres  matières  5  parce  que  les  opinions  que  l'ef- 
prita  furunfujet  particulier,  peuvent  changer  Se  déterminer 
cette  fignification  générale- 

Ainfi  il  efb  certain  que  quand  les  Théologiens  latins  fe  fer- 
vent des  mots  de  confacrer  &  deconfecration  dans  toute  autre 
matière  que  celle  de  l'Euchariftie ,  &  quand  les  Grecs  fe  fer- 
vent de  ceuxd'ct'>jaT«ii'  &  d'c(.'y;A(7;Uo4  ils  n'entendentque  la  de- 
ftination  d'une  choie  au  ferviceSc  au  culte  de  Dieu,  qui  les  tire 
de  l'ufage  commun  &  profane.  Mais  quand  ils  appliquent  ces 
termes  à  l'Eue  hariftiejils  entendent  le  changement  réel  du  pain 
au  Corps  de  J.  C. 


tircT^  de  U punie  extérieure  de  V Euchiriflie .        55 

G'eft  donc  un  pur  fophifme  d'argumenter  de  la  fignification  Ch.  V. 
generaie  de  ces  rerJTies,à  la  fignificadon  fpecifîque  &  particuliè- 
re qu'ils-  font  dans  la  matière  de  l'Eùchariftie:  c'efl  néanmoins 
un  lophiimeoù  Aubercin  tombe  fortfouvent.  On  prouve^  dit-il 
en  un  endroit,  invinciblement  que  le  pain  n'a  pas  changé  de 
nature -parle  mot  mime  de  fanciification  dont  fe  fertS.Auyiftin.  Car 
fantifier  quelque  chofe  ,  nejîgnijîe  jamais  .changer  fa  fubjlance ,  ny 
l'anéantir. 

Ce  qu'il  prétend  faire  voir  par  pludeurspaflages  où  ce  mot  efl: 
employé  par  les  Pères  en  d'autres  matières  fans  qu'ils  y  conçoi- 
vent aucun  changement.  Il  prétend  conclure  de  là  qu'il  ne  il. 
gnifîe  donc  pas  un  changement  de  iubftance  dans  la  matière  de 
i'Euchariftie.  Mais  cette  conclufion  eft  fauffe  &:  fophiftique. 
Car  fi  S.  Auguftin  a  cru  autre  chofe  du  Sacrement  de  l'Eucha- 
riflie»  que  des  autres  Sacremens ,  il  a  fans  doute  pris  ce  mot  en 
un  autre  fens  en  parlant  de  ce  Sacrement  qu'en  parlant  des 
autres  :  comme  tous,  les  Catholiques  le  prennent  en  un  autre 
fens  quand  ils  l'appliquentà  l'Euchariftie  que  quand  ils  s'en  fer- 
vent en  d'autres  matières.  Tout  dépend  donc  de  s'affurer  dir 
ientiment  de  S.  Auguftin.  C'efI:  fa  docfïrine  qui  doit  régler  la 
fignification  de  ces  teraies.  Ec  fi  M.  Claude  en  veut  tirer  avan- 
tage, il  faut  qu'il  ait  prouvé  auparavant  que  S.  Auguftin  ne 
croyoit  pas  la  prefence  réelle.  Autrementil  ne  fera  propremenc 
que  fuppofer  ce  qui  eft  en  queftion. 

On  peut  voir  encore  une  illufion  toute  femblable  dans  la  page 
699.  du  livre  d'Aubertin,  ou  de  ce  que  S.  Auguftin  appelle 
Vï.\xc\\'xx\Çi\t ^Sacramentummenfa: fua^comvcizW  appelle  le  Bap- 
tême Sacra'rnentum  lavacri  .^  il  forme  cet  argument  fophiftique: 
S.  Auquftin  prend  le  mot  de  Sacrement  lors  qu'il  parle  de  l'Eucha- 
riflie.  comme  il  le  prend  lorfqu  il  parle  du  Baptême.  Or  quan  d  il  par- 
le du  Baptême,  il  entend  parcetermeunfigne,  c'eft  à  dire  l'eau 
fîgnedu  Sangde  J.C.  donc  parle  Sacrement  de  la  table,  il  en- 
tend le  pain  &  le  vin  Sacremens  du  Corps  &  du  Sang  de  J.  C. 

Pour  y  répondre  nettement ^  il  n'y  a  qu'à  luy  dire,  que  Ç\  S. 
Auguftin  a  eu  une  autre  idée  de  l'Euchariftie  que  du  Bap- 
tême, il  a  pris  le  mot  de  Sacrement  appliqué  à  l'Euchariftie 
d'une  autre  manière,  qu'en  l'appliquant  au  Baptême,  n'y  ayant 
rien  de  fi  commun  que  de  déterminer  ainfi  la  fignification  gé- 
nérale des  termes  parla  matière  à  laquelle  on  les  applique. 
Son  raifonnemenc  ne  conclut  donc  qu'en  fuppofant  que  faine 

G  lij 


ChV  y. 


l'eft 


54  Liv.  I.  Des  mots  de  figure ,  type  (^  autres 
Auguftin  n'a  pas  eu  la  doctrine  Catholique  dansl'efprit,  c'ed 
à  dire  qu'Aubercin  ne  conclut  qu'il  a  raifon  ,  que  pourveu  qu'il 
ait  auparavant  prouvé  qu'il  l'ait.  Voila  dequoy  il  a  remply 
ce  grand  Livre  ,  donc  les  Miniftres  font  tant  de  bruit. 


F  in. du  premier  Livre. 


f'bs'. 


55 


LIVRE   SECOND    ■; 

EXPLICATION     PARTICULIERE 
de  quelques  paflages ,   où  l'EuchariiIie  eft 
appellée  Image  ,  Figure,  Myftere,  :^'c.  ., 


CHAPITRE    PREMIEPv. 

Que  iVf.  Clitude  place  en  quelque  s  lieux  le  mot  de  Figure ,  oùl[£i(-   Ch.    I. 

.  .charr/iie  n'e/t  foint  appellée  figure ,  ou  fi  clic  efi  appellée  de  rh 
norn ,  c'cfi  par  des  rai  fions  particulières..^  qui  ne  font  rien  îi  cetîs 
difpute.  '  :  ■         '       '  '. 

Explication  du  paJJage  de  Tertullien  du  troifième  livre 
contre  Marcion. 

U  O  Y  que  tous  ces  paflàges  où  ies  Pères  fe  fen- 
vent  des  mots  àe figure  &  de  (îgne ,  foient  fort  inu- 
tiles à  M.  Claude,  cormrre  nous  venons  de  voir, 
il  eft  bon  de  remarquerneanmoins  qu'outre l'il- 
lufion  générale  de  cette  preuve,  il  enj^ùfcavec 
.une  certaine  adrcfle  qu'on  pourroit  nommer  au- 
trement, &;  qui  donne  lieu  de  juger  qu'il  fe  fert  de  toutes 
fortes  de  moyens  pour  venir  à  bout  de  ce  qu'il  prétend. 

Ilauroit  mieux  fait,  par  exemple,  de  ne  pas  alléguer  cepafTa- 
•ge  de  Tertullien  ipfium  fum  Corpus  reprecfievtat.j  -ni  celuyde  S.  Lihr.i.  contra 
Jérôme  ipfequoque  veritatem  fui  torporis  repr^rfentavit.  Le  (tv\i  ^^^'^*^-  '•'■*• 
de  cespalFages  eft  trop  contefté  pour  pouvoir  eftre  déterminé 
à  l'avantage  de  la  caufe  des  Calviniftes  par  la  feule  authorité  voyez  perp.z. 
de  M.  Claude.  Et  nous  avons  fait  voir  de  plus  qu'on  ne  le  peut  i.s-cj.p-iSo. 


^6    '     L I  V.  II.  D{'s  mots  défigure ,  type  (B/-  autres 
Cii.   r.      ■  t-'cure'faifonnablement,  ^  que  ces  pad'ages  prouvent  au  con- 
traire que  J.  C.  rend  fon  Corps  prefent  dans  TELichariftic  , 
félon  l'ufage  le  plus  ordinaire  du  mot  de  reprxfcntarc  ^  auquel 
toutes  les  circonftances  de  ces  deux  pafTages  appliquent  l'et 
prit. 
Le  paflcige  tiré  des  Ol^ces  de  i^unt  Ambroife  devoit  aulîî 
Pcrp.  î.  1.  <r.  eftre  omis.  Car  nous  avons  fait  voir  ailleurs  que  quand  ce  Pc- 
c.  10.  p.   74.  ^^  ^.^^  queJ.C.  c(i-  offert  en  image  ,  cela  ne  veut  pas  dire  qu'il 
eft  offert  dans  l'image  de  fon  Corps,  mais  en  image  de  la  clarté 
avec  laquelle  il  s'offre  luy-mêmc  à  Ton  Père  ,  &:  s'offrira  dans 
toute  l'éternité  j  S.  Ambroife  ayant  diftingué  trois  eftats  avec 
quelques  anciens  Auteurs-,  l'un  qu'il  appelle  à.'ombre  qu'il  at- 
tribue à  l'état  de  la  ioy ,  &  qui  n'avoit  que  des  figures  toutes 
pures  5  l'autre  qu'il  nomme  ài'imay: ^  qui  eftoit  méfié  de  figure 
&:  de  vérité  ;  l'autre  qu'il  appellede  ^'mJ'f',  c'eft  àdire  de  véri- 
té fans  figure.  C'efl:  en  ce  fens  qu'il  dit  que  J.  C.  efl:  offert  en 
image,  c'efl  à  dire  qu'il  n'y  eft  pas  offert  à  découvert  comme 
dans  le  Ciel. 
..;  Laplufpart  des  paflages  que  M.  Claude  rapporte  de  S.  Denis 

font  aufîî  très  mal  alléguez  ,  comme  il  eft  facile  de  le  luy  faire 
voir  en  les  parcourant. 
Le  premier  eft  celuycy  :  u^Si^yu  -rà.  ^tloTaxa.^  ^  vTt'  o-^"  âyi  tÀ 
Dionjf.  de  J^vviAtV  //et  tV  '«fî^ï  ■zcfozti/iSj'av  avfiCÔAov,  il  confacre  Us  f^icrcz,_ mj- 
Jiercs  ^  les  révérant  par  fes  louanges ,  il  les  expofe  à  la  viie  du  peu- 
ple par  le  moyen  des  Symboles  facrez^  qui  font  propofez^  Car  il  eft 
clair  que  dans  ce  paifage  les  myfteres  divins  qui  font  exprimez 
commede  terme  de  l'adion  du  Prêtre,  [epyyerrct  'j-hùtclta  font 
quelque  chofe  d'invifible  qui  n'eft  rendu  vilîble  que  par  les 
Symboles.  Ce  qui  eft  très-propre  pour  donner  l'idée  du  Corps 
de  J.  C.  rendu  prefent  par  le  Prêtre,  &  rendu  vifible  par  les 
Symboles.  _,j 

Le  1.  dont  M.  Claude  ne  cite  que  deux  paroles,  Jua  tru%|SoA(t, 
eft  celuy  où  cet  Auteur  dit  que  plufieurs  ne  s'arreftent  qu'aux 
divins  Symboles.  Et  ce  paffage  marque  feulement  qu'il  ne  faut 
pas  s'y  arrefter,  &  qu'il  faut  pénétrer  les  myfteres  qui  y  font 
x.uno3 .  r.ir,  '  cachez,  &  qui  (ont  produits  par  l'adion  du  Sacrifice.  Qu'il  faut 
•^'  -^  •'"•  aller  jufques  aux  prototypes ,  c'eft  à  dire  au  Corps  S"  ^«  Sang  de 
J.  C.  comme  le  dit  Pachymerej  en  croyant,  dit  ce  Commenta- 
teur de  S.  Denis ,  que  les  chofcs  propofées  ont  eflè  changées  au 
Corps  é^  au  Sang  de  J.  C. 

Pour 


eft  appellée  type  j  image  ^figure.  ^7 

Pourle3.quieftcequeS.DenisappellelalainteCenequeNô-  Ch.  I. 
cre  Seigneur  célébra,  <z,p;)(^/(n-'ftCoAoi' ,  il  ne  faut  que  le  renvoyer  m.  chud.  i, 
au  même  Pachymere  interprète  de  S.  Denis  qui  explique  ce  ^^^'  ^'  ''' 
terme  par  celuy  de  ap^ix.o/Fa'j^oi' ,  c'eft  à  dire,  l'origine  écla  four- 
ce  de  cette  fainte  communication  des  fidelles ,  qui  eft  marquée 
dans  l'Euchariftie.  Ainfi  cela  ne  fait  rien  du  tout  pour  prouver 
quel'Euchariflien'eftle  Corpsde  J.  C.  qu'en  figure. 
M.  Claude  fe  trompe  encore  plus  vifiblement  dans  le  4.  qui 
efl:  que  l'ablution  du  Pontife  fe  fait  devant  les  facrez^  Symboles. 
Car  il  prend  en  cet  endroit  les  Symboles  non  confacrez ,  dont 
parle  cet  Auteur ,  pour  les  Symboles  confacrez  i  5c  pour  fe  dé- 
tromper il  n'a  qu'à  lire  3.  pages  après  le  lieu  où  il  eft  parlé  de 
cette  ablution  j  car  il  y  trouvera  la  confecration  de  ces  Sym- 
boles. 

Il  eft  vray  que  ce  qu'il  cite  après  cet  Auteur,  que  le  Ponti-  « 
fe  reprefente  d'une  manière  fenfible  par  la  découverte  &  la  di-  u 
vifion  des  Symboles ,  J.  C.  noftre  vie  fpirituelle,  s'entend  des  «« 
Symboles  confacrez.  Mais  le  fens  n'a  aucun  rapport  à  ce  que 
M.  Claude  prétend.  Car  cet  Auteur  veut  dire  feulement  que  le 
Prêtre  en  découvrant  les  dons ,  &  les  divifant  en  plusieurs  par- 
ties, reprefente  la  manifeflation  du  Verbe,  qui  eft  forti  en  quel- 
que forte  de  l'unité  facrée  du  fein  de  fon  Père,  pour  s'engager 
parmi  la  multiplicité  des  créatures.  Il  s'agit  donc  non  de  l'ef. 
(ènc€  de  ces  Symboles ,  mais  de  ce  que  fignifie  l'aclion  du  Prê- 
tre qui  les  découvre  &  qui  les  divife. 

Le  pafTage  de  S.  Maxime  Commentateur  de  cet  Ouvrage , 
que  M.  Claude  allègue  enfuite  ,  n'cft  pas  plus  à  propos.  Cet 
Auteur  expliquant  le  mot  d'image  dont  S.  Denis  s'eftoit  fervi , 
dit  qu'il  appelle  du  mot  d'image  des  chofes  véritables  ^  ce  qui  fe 
pajfe  dans  la  Liturgie  :  par  où  il  entend  généralement  toutes 
les  cérémonies  qui  fe  pratiquoient  dans  le  Sacrifice ,  &  non  pas 
feulement  le  pain  êclevin,  comn>e  M.  Claude  le  fuppofe.  Il 
-eft  donc  vray  que  cet  Auteur  reconnoift  qu'il  y  a  dans  cette 
action  fainte  divers  Symboles  &  diverfes  images  ^  mais  il  ne 
prétend  nullement  dire  par  là  qu'il  n'y  ait  rien  de  prefent  de 
ce  qui  eft  reprefente  par  ces  Symboles  &  par  ces  images.  C'eft 
à  quoy  fè  réduit  tout  ce  qu'il  enfeigne  en  divers  lieux  fur  cet- 
ce  matière. 

M.  Claude  infère  auffi  entre  les  paflages  où  il  prétend  que 
les  Pères  ont  donné  à  l'Euchariftie  le  nom  de  figure,  un  lieu  de 

H 


fi  Liv.  II.  Expl.  des  Tajfages  ou  i'Eucharifiie 
Tertullien  ciré  du  t  roi  fié  me  livre  contre  Marcion^  qui  mérite 
d'aLicanc  mieux  d'eftre  examiné,  que  quoy  qu'il  n'ignore  pas 
que  M.  le  Cardinal  du  Perron,  ôcplufieurs  autres  Auteurs  Ca- 
tholiques y  donnent  un  fens  tout  différent,  qui  détruit  cette 
prétention  ,  il  ne  lailTe  pas  de  le  produire  quatre  fois,  en  le  dé- 
terminant toujours  au  fens  qu'il  croit  Uiy  eftre  avantageux,  fans 
prendre  la  peine  de  réfuter  l'explication  de  ces  Auteurs  j  com- 
me ne  méritant  pas  de  l'eftre. 

Mais  comme  je  ne  fuis  pas  en  cela  de  fon  fentimcnt ,  &  que  ce- 
procédé  de  fe  donner  gain  de  caufe  par  fon  propre  fufFrage ,  ne 
me  femble  pas  oacz  équitable  ,  je  nelaifleray  pas  de  remettre 
en  queftion  ce  qu'il  fuppofe  fi  hardiment ,  ôc  de  luy  foûtenir 
que  le  fens  auquel  il  prend  ce  paflage  eft:  beaucoup  moins  pro* 
bable  que  celuy  auquel  il  eft:  pris  parle  Cardinal  du  Perron. 
Je  rapporteray  donc  d'abord  le  paflage  en  latin,  parce  que  le 
différend  con  /ifle  dans  la  manière  dont  il  doit  eflre  traduit. 

Hoc  liyium  ^  Mieremias  tibi  infinuat ,  duiuris  fradicans  "Ju- 
dais  :  Venite^  mittamus  liffiunv  in  panem  ejus  3  U tique  in  Corpus. 
Sic  enim  Deus  in  Evangelio  quoque  veftro  revelavit ,  fanem  Cor~ 
■pus  fuHm  appellans  h  ut  ^  hinc  j  am  eum  intelligas  Corporis  fuijjpt- 
ram  pani  dedijje  .^  cujus  retrb  Corpus  in  pane  Propheta  fipirauit  ^ 
ipfo  'Domino  hoc  Sacramentum  pofiea  interpretattiro . 

On  convient  de  part  &  d'autre  que  le  but  de  Tertullien  en 
cet  endroiceft  derefuter  les  Marcionites  qui  pretendoient  que 
le  Dieu  de  l'ancien  Teflamenc  eft:oit  contraire  au  Dieu  Père  de 
J.  C.  Auteur  du  nouveau,  &  que  c'eft  ce  que  Tertullien  y 
combat ,  en  faifant  voir  un  parfait  accord  entre  les  deux  Tefta- 
mens,  &  que  J.  C.  avoic  fouvent  accompli  &  éclairci  les  figu- 
res qui  fe  rencontroient  dans  l'ancien ,  ce  qu'il  ne  pouvoit  faire 
fans  l'approuver.  Un  des  pafTages  qu'il  employé  pour  prouver 
cet  accompliffement  ôccetéclaircifTement  des  figures  de  l'an- 
cien Teflament  par  J.  C.  efl  celuy  de  Jeremie ,  Mïttamus  li~ 
qnum  in  panem  ejus^  en  prétendant  que  ce  paflage  s'entend  des 
juifs ,  qui  ont  attaché  au  bois  le  pain  de  J.  C.  c'efl  à  dire  fon 
Corps.  Et  comme  cette  explication  dcmandoit  que  l'on  fïfl 
voir  que  par  le  mot  de /'^r/>2  Jeremie  avoir  pu  entendre  le  Corps 
de  J.  C.  il  fe  fert  des  paroles  de  l'inflitution  de  l'Euchariftie 
pour  le  prouver. 

Cedénouemensde  l'argument  de  Tertullien  efl  commun  à 
tous  les  deux  fens.  Ainfî  en  le  fuppofant ,  il  n'y  a  pour  enten- 


efi  cippellée  type ,  ima,ge ,  fgure ,  ^c.  ^9 

dre  en  quoy  le  difFerend  confifte,  qu'à  rapporter  la  manière  Ch.    î. 
dont  M.  Claude  traduit  ce  pafllige,  en  y  oppofant  enfuite  cel- 
le dont  on  croit  qu'il  le  faut  traduire. 

Voicy  celle  de  M.  Claude. />/>»,  dit-il,  a  appelle  le  pain  fon  u.cuuie i 
Corps  ^  afin  que  vous  reconnoijjzez^que  ccluy  dont  le  Prophète  avait  ^'^P- P-  '*• 
anciennement  figuré  le  Corps  par  le  pain  ,  a  maintenant  denné  au 
pain  la  figure  de  fon  Corps. 

Etvoicy  celle  dont  je  prétends  qu'il  le  faut  traduire.  C'efi  ce 
que  Dieu  a  révélé  dans  voflre  Evangile  même  en  appe liant  le  pain 
fon  Corps  ,  afin  de  faire  conyioifire  par  là.que  celuy  dont  le  Prophe- 
te  avoitrepre fente  le  Corps  par  le  pai'd  longtemps  avant  qu'il  ac- 
complit cette  figure ,  avait  voulu  dés  ce  temps,  là  même  que  le  pain 
fervifl  à  figurer  &  à  fignifier  fon  corps. 

Ileft  vifible  que  comme  de  la  première  manière  de  traduire 
ce  pafîâge,  il  s'enfuivroit  que  TertuUien  y  auroit  appelle  le 
pain  Euchariftique  figure  du  Corps  de  J.  C.  ce  qui  ne  feroic 
néanmoins  de  nulle  importance  5  il  s'enfuit  de  la  féconde  qu'il 
ne  l'a  point  fait,  puifquc  cen'efipas  au  pain  de  l'Euchariftie 
que  TertuUien  entend  que  J.  C.  a  donné  la  figure  de  fcfn  Corps, 
mais  au  pain  dont  parle  le  Prophète  Jeremie,  c'eft:  à  dire  au 
pain  en  gênerai  :  &  que  le  mot  de  figure  ne  fe  rapporte  pas  au 
temps  de  J.  C.  mais  au  temps  de  ce  Prophète. 

Si  l'on  confidere  la  feule  lettre  de  ce  paflage,  il  faut  recon- 
noiflre  de  bonne  foy  qu'il  peut  foufFrir  l'un  &  l'autre  fens.  Car 
c'eft  une  objedion  tout  à  fait  frivole  que  celle  que  fait  Auber- 
tin  contre  le  fens  du  Cardinal  du  Perron,  qu'il  y  auroit  une 
tautologie ,  c'eft  à  dire ,  une  répétition  ridicule  de  penfces  à  fai- 
re dire  d'une  part  à  TertuUien  que  J.  C.  a  donné  au  pain  la  fi- 
gure de  fon  Corps  dés  le  temps  de  Jeremie ,  ut  hinc  jam  eum 
intelligas  Corpons  fui  figuram  pani  dedijfe  .^  &  d'ajouter  enfuite 
que  le  Prophète  avoit  figuré  fon  Corps  par  le  pain ,  cufiis 
rétro  corpus  in  pane  Propheta  figuravit'-,  &  que  TertuUien  au, 
roit  cCtéftupide  s'il  avoit  parlé  de  la  forte,  Certè  fiupidus  omni- 
nh  fuijfet  >  fi  fie  effet  locutus. 

Mais  cette  ftupidité  n'eft  que  de  la  part  d'Aubertin  qui  n'a 
pu  comprendre  que  ce  font  deux  penfées  toutes  différentes,  de 
dire  que  J.  C.  avoit  voulu  dés  le  temps  de  Jeremie  que  le  pain 
fignifiaft  fon  Corps ,  SiC  de  dire  que  Jeremie  avoit  effective- 
ment figuré  ce  Corps  par  le  pain.  L'une  marque  que  J.  C.  avoit 
réglé  &  ordonné  ce  qui  s'eftoit  fait  dans  l'ancien  Teftamenc  j 

Hij 


6 o  L  I V .  1 1.  Explication  despaptges,  ou  rEuchurifiie 
l'autre  que  !e  Prophète  avoit  execut-j  la  vvDloncé  de  J.  C.  La 
premicre  reprefente  J.  C.  comme  mAiftre;  ôi  la  féconde  Jc- 
remie  comme  miniftre.  Et  cert::;  rabordinacion  de  jeremie  à 
J.C.  marque  bien  mieux  l'accord  de  J.  C.  avec  l'ancien  Te- 
ftament,  que  le  limple  rapport  d'une  parole  de  J.  C.  avec  la 
pnrole  d'un  Prophète. 

Cette  raifon  ne  prouve  pas  feulement  que  le  fens  du  Cardi- 
nal du  Perron  n'efh  pas  détruit  par  l'objection  d'Aubertin^  mais 
elle  prouve  de  plus  que  c'eft  le  véritable  fens  du  paflage  dont  il 
s'agit;  parce  qu'il  paroift  clairement  par  TertuUien  même  qu'il 
n'a  pas  feulement  voulu  prouver  que  l'expreflîon  de  J.  C. 
ëclaircifToit  celle  du  Prophète,  mais  qu'il  a  voulu  de  plus  mar- 
quer que  Jeremie  avoit  parlé  par  l'ordre  de  J.  C.  &  que  c'eft 
J.  C.  qui  avoit  voulu  qu'il  fefervift  du  mot  de  pain  pour  fîgni- 
lier  fon  Corps. 

Cela  paroifl.  manifeftement  par  un  autre  lieu  de  Tertullien ,. 
où  il  rapporte  le  même  paflage  dans  le  même  deflein ,  &c  pour 
en  tirer  la  même  conclulîon.  C'efl;  dans  le  livre  fuivant,  où  il 
parle  ainlî. 
Mais  pourquoy   efi.ce  que  ce  fut  du  pain  que  J.  C.  appella  fon 
1.  *..  conr.       Corps ,  ^non  pas  une  citrouille^  Certes  ,.  il  faloit  que  Marcion  en 
Marc.  c.  40,    g^fj}  ^jjg  ^^  [jg^  ^g  ^gjj-g  ^  ^^  rC avoir  pu.  comprendre  que  la  raifon  de 
choix  dej.  C,  gj}  ^  que  le  pain  eftoit  une  ancienne  fgure  du  Corps 
de  J.  C.  qui  dit  par  la  bouche  de  Jeremie  :  ils  ont  conceu  de  mauvais 
de  (feins  contre  moy ,  difant:  Allons ,  mettons  le  Bois    en   son 
PAIN,  c'ef  adiré,  attachons  la  croix  h  fon  Corps.  Et  c'  e fi  pourquoy 
J.  C.  qui  s'efi  plu  à  éclaircir  les  anciennes  Prophéties ,   nous  a  dé- 
claré affezjnanifefiement  ce  qu'il  avoit  voulu  que  le  pain  (iiiriifiafi 
d^s  ce  temps -là  (  c'eft  à  dire  dés  le  temps  de  Jeremie  j  en  appel- 
lantlepainfon  Corps  àiins  l'inftitution  de  fon  Myftere. 

Le  rapport  ft  précis  de  ces  deux  paflages ,  &  des  claufes  qu'ils 
contiennent,  ne  permet  pas  de  leur  donner  un  fens  diffèrent. 
Dans  l'un  &  dans  l'autre  c'eft  J.  C.  qui  révèle  &  qui  déclare 
par  ces  paroles  :  Hoc  efi  Corpus  meum,  le  fens  de  l'ancienne  Pro- 
phétie de  Jeremie.  Sic  enim  Deus  in  Evangelio  quoqne  vefiro 
revelavit ,  panem  Corpus  fuum  appellans,  dit  Tertullien  dans  le 
premier.  Satis  declaravit  Corpus  fuum  vocans  panem ,  dit- il 
dans  le  fécond.  Nous  devons  donc  croire  que  c'eft  la  même 
ehofe  qu  il  révèle ,  &:  qu'il  déclare  dans  l'un  &:  dans  l'autre.  Or 
tju'eft-ce  qu'il  déclare  dans  ce  fécond  paflfage  félon  Tertullien? 


efl  AppelUe  type ,  imcige  ^figure ,  î^c.  éx 

Il  déclare  qu'il  avoir  voulu  que  dés  le  temps  de  Jeremie  le  pain  Ch.  I. 
(igniliaft  fon  Corps.  ^/(.■^  tune  •voluerit  (iyiificafj'c  pancm  fatis 
dcci.ravit.  On  doit  donc  croire  que  Tercullien  aura  fait  révé- 
ler la  même  chofe  à  J.  C.  dans  l'autre  paffage  ,  pourvu  que 
les  paroles  iepuiflent  fouffnr.  Or  non  feulement  elles  le  fouf- 
frent,  mais  elles  l'expriment  clairement.  Ut  ^  hinc  jam  eum 
intelliyts  Corporis  fui  figurant  pani  dediJTe.  A  F  i  N  ^  dit-il ,  que 
l'on  entende  par  là  ^  que  dès  ce  temps-là. ,  Jam,  c'eftàdirej  dés  le 
temps  de  Jeremie  ,  /'/  avoit  voulu  que  le  pain  fuft  filtre ,  su  fi. 
gnifiafi  fon  Corps. 

La  féconde  objeclion  qu'Aubertin  fait  contre  ce  fens  ne 
vient  encore  que  d'un  défaut  d'mtelligence.  Elle  eft  fondée 
fur  le  mot  de  rétro',  dont  TertuUien  fe  fert  dans  la  dernière 
elaufCj  en  difant:  cujus  rétro  corpus  in  pane  Prophetafiyiravit. 
Or  ce  mot ,  dit  Aubertin ,  fignifie  /^»g^  antè  ,  dans  l'ufage  de 
TertuUien.  On  avoue  que  c'eft  en  effet  le  fens  du  mot  de  ré- 
tro. Mais  afin  de  luy  conferver  ce  fens  &:  cet  ufage,  il  n'y  a 
qu'à  concevoir  que  Tercullien  compare  enfemble  deux  temps  3 
l'un  ,  celuy  du  Prophète  Jeremie  j  l'autre,  celuy  de  J.  C.  & 
que  c'efl:  à  l'égard  du  temps  de  l'avènement  de  J.  C.  qu'il  dit , 
quéle  Prophète  avoit  fi^guré  par  le  pain  le  Corps  de  J.  C.  retro.^ 
c'eft  à  dire,  long-temps  avant  cet  avènement. 
.  La  conformité  de  ces  deux  paflages  jointe  à  l'évidence  qu'il  y 
d  que  TertuUien  a  cru  important  de  marquer  non  feulement 
que  J.  C.  avoit  voulu  expliquer  une  figure  ancienne  -,  mais  qu'il 
eftoit  l'auteur  de  cette  ancienne  figure ,  &  que  c'eftoit  par  fon 
ordre  &  par  fa  volonté  que  Jeremie  avoit  parlé  de  la  forte,  don- 
ne un  tel  avantage  au  fens  du  Cardinal  du  Perron  fur  celuy  des 
Miniftrcs ,  qu'un  homme  judicieux  ne  fcjauroit  prendre  ce  paf- 
fage  dans  un  autre  fens.  Car  quoy  que  je  ne  le  propofe  que 
comme  plus  probable,  &  que  j'avoue  qu'il  n'y  a  pas  une  certi- 
tude entière  ,  que  c'ait  efté  la  penfée  de  TertuUien  j  néanmoins 
il  n'eft  pas  feulement  plus  probable,  mais  il  eft  abfolument  cer- 
tain que  de  deux  fens  il  faut  préférer  le  plus  vray-femblable  3 
&  par  confequent  que  c'eft  une  injuftice  vifible  d'employer 
quatre  fois  ce  pafTage  dans  le  fens  qui  a  le  moins  d'apparence, 
comme  fi  ce  fens  eftoit  abfolument  certain  &inconteftablc. 

Mais  fi  l'éclaircifiement  de  ce  paffage  eft  utile  pour  faire  con- 
noiftrc  le  peu  d'équité  de  M.  Claude ,  il  n'eft  pas  fort  necefiliire 
pour  la  caufe  que  je  foutiens  •,  puifque  quand  Tertullienauroic 

H  iij. 


6i,  Li V.  1 1.  Explication despajfages ,  où  fEuchariJ^ie 
dit  que  J.  C.  cninftituant  l'Euchariftie  avoic  donné  au  pain  la 
figure  de  Ton  Corps,  cela  ne  voudroicdire  autre  chofe,  finon 
qu'il  auroit  fait  du  pain  le  Sacrement  de  Ton  Corps,  &  que 
l'on  devroit  toujours  fuppofer  que  ce  terme  eftoit  expliqué 
par  la  doélrine  commune  de  TEglife  de  fon  fiecle ,  comme  ce-, 
lu  y  de  Sacrement  l'eft  prefentement. 


CHAPITRE     II. 

Que  les  Caîvini/Ies  ne  f^auroient  rien  conclure  raifonnablement  du 

célèbre  pajfage  de  TertulUen  tire  dît  ^o.  Chapitre  de  fon 

^.  livre  contre  Marcion. 

QUoYQUE  M.  Claude  ne  rapporte  pas  au  lieu  où  il  entaC 
fe  lespaflages  des  Pères  qui  ont  appelle  l'Euchariftie  fi- 
gure du  Corps  de  J.  C.  ce  célèbre  paiTage  du  40.  Chapitre  du 
livre  4.  contre  Marcion,  dont  les  autres  Miniftres  font  leur 
principal  appuy  ;  néanmoins  parce  qu'il  le  rapporte  en  d'autres 
endroits,  &  qu'il  a  beaucoup  de  conformité  avec  celuy  que 
nous  venons  d'éclaircir,  j'ay  crii  qu'il  eftoit  plus  naturel  de  les 
joindre  enfemble. 

Je  le  confidereray  en  trois  manières.  Premièrement  félonie 
fens  auquel  il  eft  pris  par  les  Miniftres  ,  en  leur  faifant  voir 
que  les  conséquences  qu'ils  en  tirent  font  entièrement  vaines. 
Secondement  félon  le  fens  auquel  il  eft  expliqué  par  le  Cardi- 
nal du  Perron ,  &  par  divers  autres  Auteurs  Catholiques,  où  je 
montreray  que  s'il  n'eft  pas  abfolument  certain  que  ce  foit  le 
fens  de  Tertullien ,  il  eft  certain  néanmoins  que  toutes  les  rai- 
fons  dont  Aubertin  fe  fert  pour  le  combattre ,  font  non  feule- 
ment frivoles,  mais  ridicules,  &  qu'ainfi  il  eft  entièrement 
contre  la  raifon  de  faire  tant  valoir  un  pafiage  qui  re(joit  très- 
probablement  un  fens  par  où  toutes  les  confequences  des  Mi- 
niftres font  anéanties.  Et  je  montreray  en  troificme  lieu  , 
qu'on  peut  encore  entendre  ce  paflage  dans  un  fens  un  peu 
différent  de  celuy  du  Cardinal  du  Perron,  &:  qui  ne  renverfc 
pas  moins  les  avantages  que  les  Miniftres  en  veulent  tirer. 
Mais  avant  que  d'entrer  dans  cet  examen  je  propoferay  d'a- 
bord quelques  eonfiderations  générales ,  dont  on  verra  l'ufa- 
ge  dan*  la  fuite. 


efl  appellée  type ,  image ,  pgure ,  t^c.  65 

PREMIERE    CONSIDERATION. 

Comme  l'équité  6c  la  raifon  doivent  régler  toutes  les  dif- 
putes  qui  tendent  à  réclairciflement  de  la  vérité  ,  il  faut  fur 
tout  éviter  les  preuves  dont  on  ne  fçauroit  rien  conclure  qu'en 
/uppofant  la  queftion  même.  C'eft  ce  qu'on  appelle  des  péti- 
tions de  principe.  Et  quoy  qu'il  n'y  ait  rien  de  plus  décrié  fous 
ce  nom,  il  eft  néanmoins  très-facile  d'y  tomber  fans  s'en ap- 
percevoir.  Car,  fi  l'on  y  prend  garde,  toutes  celles  que  les 
Miniftres  tirent  des  mots  de  figure  &:  de  fîgne  pour  en  con- 
clure que  les  Pères  n'ont  pas  cru  la  prefence  réelle,  font  ab- 
folument  de  ce  genre.  Et  quoy  qu'en  s'en  fcrvant  ils  ne  s'i- 
maginent pas  fuppofer  la  queftion,  il  elt  bien  aifé  de  les  en 
convaincre.  Car  toutes  les  fois  qu'un  terme  efl:  tel  qu'il  peur 
efFedivement  recevoir  deux  fensdifFerens,  &  imprimer  deux 
différentes  idées,  dont  l'une  établit,  &;  l'autre  détruit  ce  que 
l'on  prétend  prouver  par  ce  même  terme,  il  efl:  vifible  que 
c'eft  tomber  dans  ce  défaut,  que  d'en  tirer  une  confequence 
précife  pour  fon  fentiment,  en  fuppofant  gratuitement  qu'il 
fignifie  ce  qui  nous  efl:  avantageux. 

Or  nous  avons  fait  voir  que  les  termes  de  figure ,  de  fizne , 
âe  Sacrement ^  peuvent  efFecT:ivement  efl:repris  en  divers  fens, 
&  imprimer  diverfes idées,  félon  qu'on  s'arrête  à  leur  fens 
grammatical ,  ou  que  Ton  y  en  ajoute  d'autres  tirées  de  la  do- 
drinedont  on  fait  profeffion ,  &  qui  eft  reconnue  dans  l'E- 
glife  où  l'on  eft:  :  Qu'ils  peuvent  donner  l'idée  d'une  figure  & 
d'un  Sacrement  qui  contient  la  chofe  même ,  ou  d'une  fimple 
figure  qui  ne  la  contiendroit  pas.  Et  l'expérience  faifanr  voir 
de  plus  qu'ils  font  prefentementprisau  premier  fens  partons 
les  Chreftiens  du  monde  ,  il  n'y  a  rien  de  plus  ridicule  que 
de  prétendre  fans  preuve  que  les  Pères  les  ont  pris  dans  le  fé- 
cond i  c'eft  à  dire,  qu'ils  n'ont  entendu  par  ces  termes  qu'u- 
ne figure  toute  pure. 

Cen'eft  pas  ainfî  que  nous  nous  fommes  pris  à  montrer  que 
ces  expreflions  fe  doivent  entendre  en  un  fens  Catholique, 
nous  n'avons  point  fait  de  fuppofition  en  l'air,  ti.  nous  avons 
fimplement  ufé  du  droit  que  la  raifon  nous  donne  d'apuyer 
des  confequences  fur  des  principes  déjà  établis. 

Car  s'il  eft  vray  que  ces  termes  peuvent  eftre  difFeremmenc 


Ch.   I  I. 


64    Liv.  II.  Explication  despajfages^  ou  l Eucharijîie 
entendus,  félonies  divers  fentimcns  que  l'on  peut  avoir,  qui- 
conque a  prouvé ,  comme  nous  avons  fait ,  que  les  Pères  ont 
crû  la  prefence  réelle  ,  &;  que  cette  do(5lrine  a  fait  partie  de 
leur  foy,  a  droit  de  conclure  qu'Us  ont  donc  fuppléé  à  l'im- 
perfedion  de  ces  termes,  8c  qu'ils  les  ont  pris  dans  le  même 
îèns  que  les  Catholiques  les  prennent  prefentement 
Il  y  a  des  rencontres  où  il  fuffit  de  prouver  qu'il  eft  poflî- 
'     blede  donner  un  fens  à  des  expreflîons  pour  conclure  qu'el- 
les l'ont  efFedivement  ;  &  celle  cy  en  eft  une.  Parce  qu'après 
avoir  montré  que  dcsperfonnes  ont  eu  conftamment  une  cer- 
taine dodlrine,  il  eft  jufte  de  donner  à  toutes  leurs  expreffions 
qui  font  capables  de  divers  fenSj  celuy  qui  s'accorde  à  cette 
doclrine  confiante,  &c  d'exclure  celuy  qui  y  eft  contraire. 

Tout  confifie  donc  à  bien  s'afTurer  du  fond  de  la  dodrine 
qui  doit  déterminer  les  expreffions  douteufes.  Mais  de  pré- 
tendre par  les  expreffions  ambiguës  déterminer  la  dodrine 
confiante,  c'eft  choquer  les  plus  claires  lumières  de  la  raifon.  . 

SECONDE    CONSIDERATION. 

Nous  ferons  voir  dans  la  fuite  que  ce  qui  efl  arrivé  aux  Cai- 
viniftes  dans  l'ufage  qu'ils  ont  fait  en  gênerai  de  ces  mots  de 
type  &  àa  figure  ,  leur  arrive  en  particulier  à  l'égard  de  deux 
paflàges  des  Pères ,  oià  ils  foutiennent  que  ces  paroles  :  Cecy 
eft  mon  Corps  ^  font  expliquées  par  ces  termes  :  Cecy  eft  la  fi~ 
ytre  de  mon  Corps. 

Plufîeurs  Auteurs  leur  conteftent  tous  ces  deux  pafîages,  & 
je  montreray  que  la  prétention  des  Miniftres  eft  injufle  au 
moins  à  l'égard  de  l'un  des  deux,  qui  eft  cekiy  deTertullien. 
Mais  pour  n'entrer  pas  prefentement  dans  cette  queftion  de' 
fait ,  je  veux  bien  fuppofer  icy  que  ces  paroles  Cccy  eft  mon 
Corps  j  ont  efté  expliquées  par  Tertullien  de  la  manière  qu'ils 
difent,  &;jene  m'arrêteray  qu'à  faire  voir  leur  illufion  dans 
Ja  coniéquence  qu'ils  en  tirent. 

Pour  la  mieux  comprendre  il  faut  confiderer  que  la  dodrine 
de  la  prefence  réelle  ne  porte  pas  fîmplement  à  confiderer  deux 
objets  &  deux  chofes  dans  l'Euchariftie  ;  l'une  extérieure , 
l'autre  intérieure  ^  l'une  terreftre ,  l'autre  celefte^  l'une  vifî- 
ble,  l'autre  invifible  :  Qu'elle  ne  porte  pas  feulement  auffi  à 
confiderer  la  partie  fenfîble  comme/gar^j  type  i  antitype  ,fi- 


efl  cippelUe  type ,  ima.ge ,  figure ,  t£c.  6 j 

yie^  image ,  Sacrement  de  la  partie  invifible  &  intérieure  j  mais  C  h,  I  !. 
qu'il  arrive  de  plus  par  necefllté  que  ces  deux  cliofes  jointes 
enfemble  devenant  l'objet  de  nôtre  efprit,  donnent  lieu  à  di- 
verfes  propofitions,  félon  les  diverfes  faces  par  lefquelles  il  les 
regarde. 

Car,  comme  nous  avons  dit  ailleurs,  refprit  s'attache  quel- 
quefois direclement  au  Corps  de  J.  C  confideré  comme  fub- 
flance  prefente,  quelquefois  il  regarde  directement  l'objet  fen- 
fible ,  qui  eft  ce  qui  s'appelle  voile  &  Sacrement  j  5c  quelque- 
fois il  regarde  direclement  &:  le  voile  &:  le  Corps  de  J.  C.  de 
mcme  que  l'homme  étant  compofee  d'ame  6c  de  corps,  l'ef- 
pric  le  peut  regarder  ou  comme  un  efprit  qui  gouverne  un 
corps ,  ou  comme  un  corps  régi  &  animé  par  un  efprit,  ou 
comme  un  efprit  &:  un  corps  qui  forment  un  même  tout. 

On  a  déjà  amplement  expliqué  ailleurs  la  contrariété  appa- 
rence qui  fe  doit  trouver  neceflairement  entre  les  propofitions 
qui  nailîènt  de  ces  difFerens  regards.  Je  n'en  repeteray  icy  que 
ce  qui  efl  necelîàire  pour  l'intelligence  des  paflages  dont  il 
s'agit. 

C'eft  qu'étant  poflîblc  ,  comme  nous  venons  de  dire,  d'at- 
tacher (x  penfée  ou  à  ce  qu'il  y  a  de  principal  6c  d'intérieur 
dans  l'objet  prefent ,  ou  à  ce  qu'il  y  a  de  viiîble,  d'extérieur 
&defjnlîb!e,  confideré  feparément,  il  en  naiftra  neceflaire- 
ment, félon  la'doclrine  delaprefence  réelle,  des  propofitions 
qui  paroiftront  contraires  en  apparence,  6c  qui  le  ne  feront 
point  en  effut. 

Car  fi  j'attache  ma  penfée  à  ce  qu'il  y  a  de  principal  &  de 
caché  dans  cqz  objet,  &  que  l'on  me  demande  ce  que  c'eft?  je 
dois  dire  que  c'eft  le  Corps  de  J.  C.  que  c'eft  la  victime  qui 
a  effacé  les  péchez  des  hommes  ^  que  c'eft  le  propre  corps ,  le 
vray  corps  ,  la  vraye  chair,  la  chair  même  de  J.  C.  C'eft  le 
langage  naturel  que  cette  vue  doit  produire. 

Mais  a  ma  penfée  fe  porte  diredememt  à  l'objet  extérieur  ^ 
c'eft  à  dire  au  voile  6c  aux  fymboles  qui  nous  cachent  le  Corps 
de  J.  C.  quoy  que  cette  même  penfée  regarde  en  même  tems 
le  Corps  de  ].  C.  comm.e  prelenr,  èc  qu'elle  enferme  tres- 
exprcllemcnt  la  doctrine  delà  prefence  réelle,  elle  produit 
neanm  -lins  des  propofitions  toutes  contraires  dans  les  termes. 
Car  C\  l'on  me  demande  alors  ce  que  -c'eft  que  cet  objet  de  ma 
penfée, Se  ce  voile  qui  frappe  mes  fens ,  je  dois  dire  que  ce 


^(,      Liv.  II.  Explication  des  pajfagss  ou  tEuchxrijîic 
n'cft  pas  le  Corps  de  J.  C.  mais  que  c'eft  fa  figure,  Ton  type  , 
Ton  Sa:remenr, 

Comme  ce  regard  eftune  fuite  de  la  doctrine  de  la  prefence 
réelle ,  6c  de  la  nature  de  l'efprit ,  &  que  ces  fortes  de  propo- 
fitions  font  des  fuites  naturelles  de  ce  regard,  on  ne  manque 
pas  de  les  trouver  très  fouvent  dans  ceux  qui  croyent^ôc  qui  dé- 
fendent cette  doclrine. 

On  y  trouve  tresfouvent  que  cet  objet  extérieur  eft  diffé- 
rent du  Corps  de  J.  C. 
G-mmi  ani-      On  appelle  Myftere  ^  dit  l'Auteur  d'un  livre  intitulé.  Gemma 
'"   '^'-      *       A  N I M  ^ ,  quand  on  voit  une  choj^e ,  ^  que  l'on  en  coni^oit  une  autre. 
On  voit  l'apparence  de  pain  ^  du  vin  j  on  croit  le  Corps  ^le  Saîig 
de  J.  C. 
f    ulo  L'efpece  vijîble  qui  arrefie  nofire  veu'è ^  dit  Hugues  de  S.  Vic- 

tor ,  efi  une  autre  chofe  que  la  vérité  du  Corps  C/"^  du  Sang  de  J.  C' 
que  nous  croyons  fans  la  voir. 
Traa.de  Sa-  L'efpece  dupain  d^"  di^  "^in  •  dit  Eftienne  Evêque  d'Autun  ,  ej? 
cram.  ait  ans.  feulement  Sacrement ,  c'efi  à  dire  ,  Jigne  vifihlc  d'une  chofe  invifhle 
dr-  ficrée.  L'Auteur  du  fermon  de  l'excellence  de  l'Eucharif- 
tie  &  de  la  dignité  des  Preftres ,  qui  eft  entre  les  Oeuvres  de 
S.  Bernard,  fe  fert  des  mêmes  termes,  Autre  chofe  eft  ,  dit  il , 
l'efpece  vifihlc ,  qui  'eft  apperi^uë  par  lavué.  Autre  chofe  eft  la  vé- 
rité du  Corps  que  l'on  croit  cftrc  invifiblcment fous  cette  efpece  vi- 
fihk. 

Et  non  feulementon  diftingue  ces  deux  cliofes  l'une  de  l'au- 
tre ,  mais  on  nie  le  Corps  de  J.  C.  du  Sacrement  &  du  voile  , 
c'eft  à  dire  que  l'on  nie  que  le  Sacrement  foit  le  Corps  de  J.  C. 
T   A  d  Cette  reffetnb lance  du  pain^  dit  S.  Anfelme,^»/'  fe pre fente k 

Corp."&  nos  yeux  fur  l  Autef  eftant  confiderèe  en  elle-même  ,n' eft  pas  le 

Sang,  Dom.   c<?r/'.f  du  Seigneur. 

Et  en  un  autre  endroit  du  même  Traité  :  Vefpece  vifihle  du 
fain ,  dit- il ,  eftant  regardée  en  elle  même  C^  fe  parement ,  n  eft  pas 
la  chair  d"  le  Corps  dej.  C.  d"  ^l^^  n'en  porte  le  nom  que  par  une 
manière  de  parler  commune  dans  l'Ecriture ,  félon  laquelle  on  don- 
ne aux  Sacremcns  les  noms  des  chofes  qu'ils  fignifient. 

C'eft  ce  qui  eft  auflî  compris  dans  cette  doétrine  fi  commu- 
ne parmi  les  Théologiens  tant  anciens  que  nouveaux,  que  i'ef- 
pece  (enfible  eft  Sacrement,  fans  eftre  la  chofe  du  Sacrement ,  Sa- 
CR.AMENTUM  é^  non  res  Sacramcnti  i  car  cette  chofe  du  Sacre- 
ment eftant  le  Corps  de  J.  C.  dire  que  l'objet  fenfible  n'eft  pas 


efl  appellée  type ,  image  ^  figttye  ^  t3c.  67 

la  chofe  du  Sacrement  ,c'ell  dire  qu'il  n'eft  pas  le  Corps  de  J,C.  Cii.  1 1. 

Enfin  Thomas  Valdenfis  témoigne  que  XY^iclef  ayant  pro-  p.  «s. 
pofc  à  Londres  par  des  affiches  publiques  cette  queftion  :  Sca- 
voir  jî  cctt£  chofe  ronde  (>  blanche  ,  qui  cfi  vue  entre  les  mains  du 
Preftrc  ,  eft  le  vmy  Corps  de  J.  C.  les  Dodeurs  Catholiques  de 
cette  ville-là  répondirent  que  non  5  5^  il  approuve  luy-même 
cette  rcponfe  ,  qui  ne  fignifîe  autre  chofe,  finon  que  le  voile 
qui  couvre  le  Corps  de  J.  C.  prefent ,  eflant  conlideré  Tcparë- 
ment,n'eri:  pas  le  Corps  de  J.  C. 

C'efl  cette  même  vue  qui  produit  toutes  ces  exprefîîons  or- 
dinaires, de  S-tcrement  du  Corps  de  J.  C.  de  ?n)'J}ere ,  de  fymholes  du 
Corps  de  J.  C.  &  qui  fait  dire  5  Que  l'on  divife  le  Sacrement  î 
Que  l'on  èlcve  le  Sacrement  ^  Que  l'on  rompt  le  Sacrement  3  Que  l'on 
diftribué  le  Sacrement  du  Corps  de  J.  C.  Car  toutes  ces  expref- 
ilons  mettent  quelque  différence  entre  le  Sacrement  &  le  Corps 
de  J.  C. 

On  parlera  ainfi  tant  que  l'on  croira  la  doctrine  de  la  pre- 
fence  réelle,  parce  que  ces  expreffions  naiiTent  des  idées  na- 
turelles que  cette  doctrine  imprime.  Et  c'efl:  n'avoir  aucun  dif- 
cernement,  ny  aucune  équité  que  de  prétendre  s'en  fervir 
pour  la  détruire. 

III.  CONSIDERATION. 

Quoyque  les  propofitions  qui  naiflent  de  ces  differens  re- 
gards n'ayent  aucune  contrariété  dans  le  fond ,  elles  peuvent 
avoir  néanmoins  une  contrariété  apparente  dans  les  termes , 
comme  nous  l'avons  déjà  dit.  Et  cela  arrive  de  ce  que  l'objet 
de  la  penfée  efliant  tantofl:  l'efpece  extérieure  ou  le  voile,  tan- 
toft  le  Corps  de  J.  C.  ou  la  fubfliance  prefentc  confufément 
conceuë,  ces  deux  objets  conviennent  en  certaines  idées  con- 
fufes  qui  fervent  de  fujet  à  ces  propofitions.  Car  le  Corps  de 
J.  C.  conçu  fous  l'idée  de  fubfl:ance  prefcnte,  efl:  un  objet  pre- 
fent ,  une  chofe  prefente  j  de  le  voile  extérieur  eft  auffi  un  ob- 
jet prefent,  &  une  chofe  prefente.  Ainfi  l'un  &  l'autre  peut^ 
eftre  exprimé  par  le  mot  de  Cecy ,  qui  fignifie  proprementr; 
une  chofe  prefente.  Et  l'efprit  peut  rapporter  ce  terme,  ou 
au  voile  fenfible  ,  ou  au  Corps  de  J.  C. 

En  le  rapportant  au  voile  il  doit  dire  :  Cecy  eft  le  Sacre- 
ment du  Corps  de  J.  C.  en  le  rapportant  au  Corps  de  J.  C.  il 


68  Liv.  II.  Explicmondes p.tjfiges ^ou  l'Euchirifi  i 
doit  dire  :  Cecy  eft:  le  Corps  de  J.  C. 

En  le  rapportant  au  voile  il  doit  dire  :  Cecy  n'ert:  le  Corps 
de  J.  C  qu'improprement.  En  le  rapportant  au  Corps  de  J.  C. 
confufément  conçu  il  doit  dire.-  Cecy  eft  proprement  le  Corps 
de  J.  C. 

En  le  rapportant  au  voile  il  doit  dire  :  Cecy  eft  la  figure  de 
J.  C.  &  le  contient,  Enle  rapportant  à  la  fubftance  prefente,  il 
doit  dire  :  Cecy  n'eft  pas  la  figure,mais  le  Corps  même  de  J.  C. 
Et  non  feulement  il  peut  fe  fervir  de  toutes  ces  expredîons 
fans  rapport  aux  paroles  de  l'inftitution  de  l'Euchariftie,  mais 
il  les  peut  aufîî  faire  fervir  d'explication  à  ces  paroles  :  Cecy 
ejl  mon  Corps.  Et  toutes  ces  propofitions  eftant  àt%  fuites  de 
ces  difi'crentes  vues,  n'ont  toutefois  qu'un  même  objet ,  fcja- 
voir  le  Corps  de  J.  C.  réellement prefent  fous  les  Symboles  du 
pain  &:  du  vin. 

IV.     CONSIDERATION- 

On  ne  peut  croire  raifonnablement  qu'il  y  ait  eu  entre  les 
Pères  aucune  différence  réelle  de  dogme  fur  le  fond  du  My- 
ftere  de  l'Euchariftie  j  ce  Myftere  eftant  trop  important  pour 
pouvoir  fuppofer  cette  divifion.  Et  comme  les  Catholiques  8c 
les  Proreftans  conviennent  réciproquement  de  cette  fuppofî- 
tion  commune ,  que  les  Pères  font  d'accord  fur  ce  point ,  cri 
la  peut  prendre  pour  un  principe  conftant; 

Mais  cette  union  de  fentimens  dans  le  dogme  n'exclut  pas 
toute  diverfîté  dans  les  manières  de  concevoir  S:  d'exprimer 
les  mêmes  chofes.  Et  il  eft  au  contraire  très .  croyable  que 
Dieu  ayant  lailfé  agir  l'efprit  des  Pères  d'une  manière  natu- 
relle, ils  auront  conceu  par  des  biais  difFerens  les  chofes  qui 
pouvoient  eftre  regardées  par  diverfes  faces. 

Ainfi  comme  nous  avons  montré  que  quoyque  l'on  croye  le 
Corps  de  J.  C.  réellement  prefent  dans  l'Euchariftie,  on  la  peut 
néanmoins  confiderer  en  deux  manières  i  &  que  l'efprit  peut 
s'attacher  tantoft  directement  au  fimple  voile,  Se  tantoft  à  ce 
qui  eft  contenu  fous  ce  voile  ^  il  eft  fans  anparence  qu'il  ne  pa- 
roifîe  aucune  trace  de  cette  diverfîté  d'idées  dans  les  Ouvra- 
ges des  Pères. 

Ils  nous  difent  en  cent  manières  différentes  que  l'Euchariftie 
eft  le  Corps  de  J.  C.  que  ce  que  J.  C.  donna  à  fes  difciples  eftoit 


eft  appellée  type ,  image ,  figure ,  g/V.  é 9 

Ton  vray  Corps ,  ion  propre  Corps ,  fa  chair  même  i  &  qu'il  n'en  Ch.  IL 
falloic  pas  douter.  C'eflTeftcc  6c  la  fuite  de  l'une  de  ces  viies, 
qui  attache  l'efprit  diredemenc  au  Corps  de  J.  C.  conçu  fous 
l'idée  de  fubftance  prefente.  Seroit-il  doncpoffible  que  l'autre 
manière  de  concevoir  ce  Myftere,  qui  eft  de  regarder  le  voile 
direcl:ement>&;le  Corps  de  J.  C.  comme  contenu  fous  ce  voi- 
le, laquelle  renferme  également  laprefence  réelle  dans  l'idée, 
quoyqu'elle  la  renferme  moins  clairement  dans  l'expreffion  , 
ne  fe  trouvaft  jamais  dans  leurs  Ecrits  ?  Ce  feroit  une  efpece 
de  miracle, que  l'on  ne  doit  pas  efperer  du  cours  ordinaire  de 
la  providence  divine ,  qui  laifle  parler  les  hommes  en  hommes. 
On  s'y  doit  donc  attendre ,  &  ne  pas  s'étonner  quand  on  trou- 
vera de  ces  fortes  de  propoftions. 

La  raifon  faifant  donc  voir  qu'il  efl  tres-poffible  qu'entre  ' 
ceux  qui  croyent  également  la  prefence  réelle  ,  les  uns  expri- 
ment l'idée  qu'ils  tirent  de  ces  paroles  :  Cccy  e^mon  Corp  ,pa.r 
celles  c  y  ,  Cccy  efi  mon  propre  Corps ,  mon  Corps  véritable  3  £c  les 
autres  par  celles-cy  -,  Cecy  eft  la  figure  de  mon  Corps,  ou  le 
Sacrement  de  mon  Corps  j  il  s'enfuit  que  cette  dernière  ex- 
preiîlon  eft  du  nombre  de  celles  que  l'on  doit  regarder  com- 
me indéterminées,  &:  fur  lefquelles  on  ne  doit  fonder  aucun 
jugement  fixe  du  fentiment  de  celuy  quis'en  feroit  fervi.  Car 
comme  l'efprit  y  peut  fuppléer  ou  n'y  pas  fuppléer,  &  comme 
elle  peut  fignifier ,  Cecy  eft  le  figne  de  mon  Corps  prefent,  ou 
Cecy  eft  le  figne  de  mon  Corps  abfent,  ce  n'eft  point  par  la^ 
feule  exprelfion  qu'il  faut  juger  de  l'idée  totale  qui  y  répond, 
mais  par  toute  la  dodrine  de  l'Auteur,  6c  de  ceux  avec  qui 
l'on  fuppofe  qu'il  convient  de  fentiaient. 

Car  s'il  fe  trouvoit  qu'en  prenant  en  un  certain  fèns  les  ter- 
mes du  Père  dont  ils'agiroic  ,il  fuft  parfaitement  d'accord  avec 
luy  même,6c  avec  tous  les  autres  5  6c  qu'en  les  prenant  autre- 
ment, il  fût  contraire  ou  à  luy  même  ,  ou  aux  autres ,  il  eft  in- 
dubitable que  la  raifon  veut  en  ce  cas  qu'on  prenne  pour  véri- 
table le  fens  qui  réunit  tous  les  Pères  dans  un  même  fentimenr, 
6c  qu'on  rejette  comme  faux  celuy  qui  les  divife  ôc  les  oppofe 
les  uns  aux  autres. 

De  forte  que  comme  cQt  examen  eft  déjà  fait ,  ^  que  nous- 
avons  montré  par  un  amas  de  preuves ,  aufquelles  on  ne  peut 
raifonnablement  refifter,  que  les  Pères  des  6.  premiers  fiecle* 
ont  efté  perfuadez  de  la  doctrine  de  la  prefence  réelle  6c  de 

liij 


yo  Liv.  II.  ExpUciition  des  pajfagcs  ^  où  rEuchurifîie 
]a  Tranflubftantiacion  ,  la  raifon  veut  qu'on  prenne  dans  un 
fens  conforme  à  cette  doctrine  toutes  ces  forces  d'expreffions, 
au  cas  qu'on  les  trouve  dans  les  Pères,  &  que  l'on  n'y  voye 
rien  d'ailleurs  qui  les  détermme  necelHiirement  à  un  autre 
fens  5  puifque  par  ce  moyen  on  conferve  cette  union  de  fenti- 
mens,  qui  efl:  le  caraélere  de  la  vérité,  qui  ne  peut  cflre  con- 
traire à  elle-mcme. 

Il  n'y  a  rien  que  de  tres-jufte  dans  cette  préparation.  Il  eft 
jufte  de  prendre  pour  ambiguës  toutes  les  expreffionsaufqueL 
\qs  on  peut  jomdre  l'une  ôc  l'autre  doctrine  de  la  prefence  £c 
de  l'âbfence  réelle. 

Il  eft  jufte  de  mettre  de  ce  nombre  toutes  lesexpreffions  où 
l'Euchariftie  efl.  appellée /f^art" ,  Sacrement ,  Jîgne  du  Corps  de 
J.  C.  parce  que  les  fignes  pouvant  eftre  également  de  chofes 
prefentes  ou  abfentes,  on  ne  voit  pas  par  l'expreffion  même  de 
quelle  forte  de  figne  l'on  parle. 

Il  eft  jufte  de  regarder  ccrte  propofition:  Cecy  efl  la  fiqure  de 
7non  Corps ,  comme  ambiguë,  puifque  nous  avons  tait  voir  que 
la  ductrine  de  la  prefence  réelle  la  peut  produire. 

Il  eft  jufte  de  déterminer  ces  expreflions  ambiguës  &  indéter- 
minées par  la  dodrine  conftante  &  déterminée  de  l'Eglife  du 
temps  où  ont  vefcu  les  Auteurs  qui  s'en  font  fervis. 

Ainfi  ayant  prouvé  que  la  prefence  réelle  a  efté  la  dodrine 
conftante  de  l'ancienne  Eglife  ,  il  s'enfuit  que  toutes  ces  expref- 
fions  doivent  eftre  fuppléées  &  déterminées  par  cette  do<ftrinc, 
&:  que  fi  quelque  Père  a  dit  ians  s'expliquer  davantage,  que 
par  ces  paroles  :  Cecy  cflmon  Corps ,  il  faut  entendre ,  que  c  eft  le 
Sacrement  du  Corps  deJ.C.  cela  veut  dire  que  c'eft  le  Sacrement 
du  Corps  de  |,  C.  prefent  j  que  c'eft  le  figne  de  ce  Corps ,  com- 
me le  Sang  eît  le  figne  de  l'ame,  comme  l'ablution  extérieure 
du  baptême-,  l'eft  de  l'ablution  intérieure  du  cœur ,  &. comme 
la  Colombe  &  les  langues  de  feu  l'eftoient  du  S.  Efprir, 

Que  les  Miniftres  oppofent  prefentement  leur  paflage  d  c 
TertuUien  à  des  gens  qui  auront  dans  l'efprit  ces  principes  du 
bons  fens.  Quel  avantage  en  tireront-ils?Ils  diront  que  Tertul. 
lien  explique  ces  paroles:  Cecy  eft  mon  csrps  ^  parcelles-cyjf'^T? 
a  dire  la  figure  de  mon  Corps  ,$^'\\è\q  montreront  par  ce  paflàge 
du  quatrième  livre  contre  Marcion  chap.  40.  Jefus-Chrifi  ayant 
pris  le  pain  ,  ^  l'ayant  diftrihué  à  fes  Dtfciples  le  fit  fon  Corps  , 
en  di fiant:  Cecy  eftmon  CorJ^s ,  c'eft  à  dire  ,  la  figure  de  mon  Corp. 


cfi appelée  type ,ir,uge, figure,  î£c.  yr 

Mais  quand  ce  feroic-lale  véritable  lèns  deTeitiiIlien,n'efi;  il  Ch.  1 1. 
pas  facile  de  leur  répondre  ,  que  le  iens  des  Calviniftes  ne 
confiftepas  dans  ces  mots  précis ,  puifque  les  Catholiques  s'en 
peuvent  fervir  comme  eux,  t?>:  qu'ils  diront  (ans  peine  ,  quej. 
C.  fie  le  pain  fon  Corps  ,  c'eft  à  |dire  le  Sacrement  de  fon 
Corps  ?  Ce  qui  nous  rend  differens  eft  le  fensque  les  Cal  vini- 
fies donnent  aux{  mots  âefigtire  èi.  de  6'^rrf;?/f«/j  par  lefqueis 
ils  entendent  le  figne  d'une  chofe  a'ofente.  Qu'on  ajoute  à  ces 
termes ,  l'idée  de  la  prefence  du  Corps  de  J.  C.  Se  que  l'ondi- 
fe  que  J.  C.  fit  le  pain  le  Sacrement  de  fon  Corps  prefent  ,*cç 
n'eft  plus  le  fens  des  Calviniftes.  Or  qui  a  dit  aux  Miniftres  que 
cette  idée  n'a  pas  efté  jointe  au  terme  de  figure  dansl  efprit 
de  TertuUien  ?  Et  comment  le  peut  on  fçavoir  qu'en  conful- 
tant  la  docT:rine  de  l'Eglife  de  (on  temps,  Se  de  tous  les  fix 
premiers  fiecles ,  qui  eft  la  même? 

C'efl:  l'unique  moyen  de  le  fcavoir,  &  Tans  cet  examen  on 
ne  fçauroit  juger  du  fens  de  l'expre/fion  de  TertuUien  j  mais 
avec  cet  examen  on  juge  qu'il  a  certainement  eu  cette  idée, 
comme  l'on  juge  qu'un  Catholique  qui  fe  fert  du  mot  de  Sa- 
crement ,  &:  qui  dit  qu'il  a  receu  le  S.  Sacrement ,  ajoure  à 
l'idée  2;rammacicale&  littérale  de  ce  terme ,  toutes  celles  que 
ion  Egliie  y  ajoute. 

Si  TertuIIien  avoit  dit  que  J.  C.  fit  le  pain  fon  Corps,  c'eft 
à  dire  la  figure  de  fon  Corps,  mais  que  ce  Corps  nous  ell: 
donné  certainement  dans  cette  figure,  que  nous  ne  devons 
point  douter  que  nous  recevons  le  Corps  même  de  J.  C.  qu'il 
entre  dans  noflre  bouche,  Se  dans  nos  entrailles,  &C  qu'il  eft 
en  nous  par  fa  chair,  &c  par  fa  propre  chair  5  qui  des  Mini- 
ftres feroit  aflez  hardi  pour  tirer  encore  avantage  de  ces  pa- 
role ?  Or  que  nous  importe  qu'il  l'ait  dit,  puifque  nous  fom- 
mes  a(rurez  qu'il  l'a  penfé,  &  qu'il  a  eu  toutes  ces  notions  &c 
toutes  ces  idées  dans  re(prit  ? 

Il  a  penfé  comme  S.  Cyrille  de  Jerufalem,  que  dans  le  type  Cacech.  4. 
du  pain  le  Corps  nous  efi  donne ,  ^  le  Sanv^  dans  le  type  du  vin ,  (^^  Myftagog. 
que  ce  Corps  cS  ce  Sang  font  receus  dans  nos  membres. 

Il  a  penfé  avec  S.  Cyrille  d'Alexandrie,  qu  il  entre  en  nous  par 
ja  propre  chair,  qu  iL  e/t  efi  nous ,  qu  il  eft  mêle  dans  nous.  ,  j 

Il  a  penfé  avec  S.  Grégoire  de  Ny(Iè^»^7-  C.  s' introduit  par  in  joan.  p. 
fa  chair  dans  ceux  qui  le  croyent  .^  afin  que  l'homme  devienne  in-  o^'^r^'^h* 
corruptible  par  fon  union  avec  ce  Corps  immortel.  Je  dis  qu'il  l'a  c,  57. 


yi  Liv.  II.  E^cplicittion  des  pa (figes  eu  tEuchmflie 
penfé  ,  puifqu'il  a  eu  les  mêmes  fentimens  que  ces  Pères ,  com- 
me les  Miniftres  mêmes  le  ruppofent;  Se  s'il  les  a  eus,  il  a  peu  (è 
fervir  de  toutes  ces  expreflions  fans  contredire  fes  fèntimcns. 
Mais  fans  avoir  recours  aux^pafîages  des  autres  Pères, 
^quoy  que  l'union  de  leurs  fencimens  fur  le  point  de  TEucha. 
riftie  nous  donne  droit  de  regarder  tous  leurs  Ouvrages  com- 
me un  livre  qui  auroiteflécompofépar  un  même  Auteur^' que 
Ton  joigne  feulement  à  ce  paflage  ce  que  Tertullien  dit  en  di- 
vers autres  lieux,  &  que  l'on  fuppofe  qu'il  y  ait  ajouté,  que 
par  le  moyen  de  cette  figure  ou  Sacrement  du  Corps  de  J.  C. 
de  Refur.       notre  chair  mange  la  Chair  ^  le  Sang  de  J.  C,  Et  que  notre  efprit 
earn.  c.  ».      y^  nourrit  de  Dieu ,  qu'ainfi  ceux  qui  étant  indignes  de  toucher 
ce  Corps  ne  lailfent  pas  de  le  manier  tous  les  jours ,  font  pires 
it   Idolol  c   ^^^  ^^^  3*^^fi  f*'  n'ont  mis  les  mains  fur  J.  C.  qu  une  feule  fois  ^  au 
7.  lieu  que  ceux  là  outragent  tous  les  jours  fon  Corps  ;  que  ce  Corps  efi 

crû  f^-^  reconnu  eftre  dans  le  pain.  Corpus  cjus  in  pane  cenfetur  j 
de  Orat.  c.  5.  q^ç  nousen  faifons  profeflîon  en  difant  ;  Amen  fur  le  Saint  ^  c'eft 
à  dire  en  reconnoiillxnt  quec'efl:  le  vray  Corps  à^y  C.  qu'on 
ajoute  ,  dis-je,  tout  cela  ,  &:  l'on  n'aura  plus  aucun  prétexte 
d'en  abufer.  Car  encore  que  les  Miniftres  prétendent  éluder 
tous  ces  partages  par  leurs  clefs  de  figure  èc  de  vertu  ,  nous 
avons  néanmoins  tellement  détruit  ces  vaines  folutions  ,  que 
tous  ces  partages  fubfirtient  dans  leur  fens  littéral ,  &l  font  voir 
clairement  le  fentiment  de  Tertullien. 

Toutes  ces  idées  donc  ayant  erté  jointes  dans  fon  efprit,  il 
n'y  a  qu'à  les  ajouter  au  mot  de  figure  dans  fon  exprertîon,& 
l'on  verra  clairement  qu'il  n'a  pii  entendre  une  figure  dej,  C. 
abfent,mais  un  Sacrement  quile  contenoit  comme  prefenr, 
&  par  lequel  nôtre  corps  le  recevoir,  félon  la  profeflion  pu- 
blique qu'on  en  faifoit  en  difant  :  Amen. 

C'ert;  ainfi  qu'agiront  tous  ceux  qui  ne  chercheront  pas  à 
fortifier  leurs  préoccupations  par  des  mots  écartez  qu'ils  ra- 
mart!ent  où  ils  peuvent,  mais  qui  voudront  juger  de  bonne  foy 
du  fens  des  Auteurs  par  tout  ce  qui  fertà  le  faire  entendre. 

Afin  neanmois  que  les  Miniflires  ne  fe  plaignent  pas  que 
l'on  dirtimule  leurs  raifons,  je  veux  bien  leur  en  fournir  une 
qui  efl:la  feule  qui  ait  quelque  forte  d'apparence,  2^  qu'Auber- 
tin  infinuë  en  quelques  endroits. 

Ils  peuvent  donc  alléguer  que  quand  il  fefoit  vray  que  le 
mot  à^fi'^K  n'cxcluroit  pas  la  vérité  de  lachofcfignifiée,  & 

que 


efl  appellce  type  ,  inuige ,  figure ,  (^c.  73 

«jue  cette  vérité  y  pult  eftre  jointe  i  il  eft  certain  nean-  Ch.  I  î. 
moins  qu'il  ne  l'enferme  pas  par  liiy-mêmej  &  que  c'eft 
une  faufîè  confequence  que  de  dire  .•  C'efl:  la  figure  d'une 
telle  chofè  j  donc  elle  la  contient  réellement.  Qui  ne  f^ait 
donc  rien  d'une  chofe ,  fînon  qu'elle  eft  la  figure  d'une  autre, 
ne  peut  conclure  de  là  qu'elle  la  contient  réellement.  Or  les 
Pères  qui  ont  expliqué  ces  paroles  :  Cecy  efi  tnon  corps ,  par 
celles-cy  :  Cecy  efi  la  figure  de  mon  Corps  ^  n'ont  rien  confia  de 
l'Euchariftie,  finon  qu'elle  eftoic  la  figure  du  Corps  de  J.  C. 
puifque  ces  paroles  de  J.  C.  contiennent  tout  ce  qu'il  en  faut 
croire.  Donc  ils  n'ont  pu  conclure  qu'elle  fuft  réellement  le 
Corps  de  J.  C.  donc  ils  ne  l'ont  pas  conclu. 
Mais  ce  raifonnement  qui  a  quelque  chofe  de  fpecieux ,  n'a 
en  effet  rien  de  folide.  La  foy  de  ce  Myftere  ne  s'apprend 
point  du  tout  félon  l'ordre  qui  y  eft  marqué.  On  en  reçoit 
les  premières  inftrudions  par  leminiflere  de  rEglife5  c'eft  fon 
autorité  qui  y  attache  d'abord.  Et  l'on  la  trouve  enfuite 
confirmée  par  la  parole  de  Dieu.  Ainfî  les  Pères  ont  re- 
ceu  d'abord  de  l'Eglife  les  dogmes  de  la  prefence  réelle  ôc  de 
la  Tranlfubftantiation  -,  car  ils  ont  paffé  pour  l'ordinaire  par 
les  mêmes  degrez  que  les  autres.  Ils  ont  crû  ce  que  l'on  y 
croyoit  de  leur  temps,  &:  enfuite  par  leur  étude  ils  ont  ap- 
pris les  preuves  que  l'Ecriture  en  fournit. 

Il  eft  vray  que  la  principale  eft  tirée  de  ces  paroles  :  Cecy 
efi  mon  Corps.  Car  nous  avons  prouvé  qu'elles  forment  net- 
tement l'idée  de  la  prefence  réelle,  &:  qu'elles  y  avoient por- 
té naturellement  toutes  les  nations  du  monde.  Mais  il  faut 
bien  diftinguer  l'impreiTion  qui  fait  comprendre  la  vérité 
en  elle-même,  des  diverfes  manières  de  développer  cette 
impreffion. 

Car  il  arrive  fouvent  que  l'impreflîon  étant  la  même,  les 
hommes  ne  laiffent  pas  de  fe  partager  quand  ils  viennent  à 
l'expliquer.  Il  n'y  arien  ,  par  exemple,  qu'ils  entendent  mieux 
que  le  mot  de  temps ,  quand  on  en  parle  fans  le  définir  ,  com- 
me quand  on  dit  que  deux  perfonnesont  eftéde  même  temps, 
ou  que  l'une  a  vécu  plus  long-temps  que  l'autre,  6c  néan- 
moins ils  fe  brouillent  auffi-côc  qu'ils  veulent  développer 
l'idée  uniforme  qu'ils  en  ont,  par  des  définitions  plus  étendues. 

Ils  n'eft  donc  pis  étrange  que  quoy  que  ces  paroles  ;  Cecy 
efi  mon  Corps ,  ayent  formé  dans  l'efpric  de  tous  les  Pères  la 

K. 


74  Liv.  1 1.  Explication  des  pajfagûs^  ou  F Euchariflie 
même  impreffion  &  la  même  idée,  &.  qu'elles  leur  ayenc  fait 
concevoir  le  Corps  de  J.  C.  couvert  fous  les  apparences  du 
pain  ^  il  leur  foie  néanmoins  arrivé  ,  lorfqu'ils  font  venus  à 
vouloir  développer  cette  idée,  ce  qui  arrive  à  tous  les  hom. 
mes ,  qui  efl  de  regarder  de  divers  biais  &  par  diverles  faces 
les  objets  compofez  de  diverfes  parties. 

Aiiifi  il  eft  arrivé  que  quelques-uns  ont  dit  que  le  pain 
confacré  était  le  Corps  de  J.  C.m'eme^  en  attachant ,  comme 
j'ay  die,  leur  penfée  à  ce  qu'il  y  a  de  principal  &;  d'inté- 
rieur dans  l'objet  prefent.  Les  autres  en  très-petit  nombre, 
comme  nous  le  verrons  en  fon  litu,  l'attachant  à  l'objet  fen- 
fîble,  ont  dit  que  c'étoit  le  Sacrement  ou  le  figne  du  Corps 
de  J.  C.  en  concevant  en  même  temps  que  le  Corps  y 
étoit  joint.  Les  uns  ont  rendu  ces  ^o.vo\qs -.Cecy  efi  mon  G orps^ 
par  la  première  expreffion  ^  les  autres  par  la  féconde  :  mais 
les  uns  &  les  autres  n'ont  exprimé  que  la  même  vérité  ,  la 
même  doftrine  ,  le  même  fens,  &  la  même  impreffion. 

Il  ne  faut  donc  pas  dire  qu'on  ne  fçauroit  tirer  la  dodrine 
de  la  prefence  réelle  de  ces  paroles  :  Cecy  efl  mon  Corps  ,  expli- 
quées par  celles-cy  :  Cecy  efl  la  figure  de  mon  Corps.  Car  on 
l'en  tire  fort  bien,  en  ne  prenant  pas  ces  termes  félon  leur  Ct- 
gnifîcation  grammaticale  ,  mais  félon  leur  fignificationTheo- 
logique  j  c'eft  àdire  avec  toutes  les  idées  que  l'ufage  de  l'E- 
glife  y  joignoit  :  comme  on  ne  fçauroit  conclure  à  la  vérité 
,  qu'un  homme  ait  crû  recevoir  le  Corps  de  J.  C.  de  ce  qu'il 
dit  qu'il  en  areceu  le  Sacrement,  mais  on  le  conclut  fort  bien 
quand  on  fçait  qu'il  prend  ce  terme  comme  ilfe  prend  com- 
munément dans  l'Eglife  Catholique, 
Enfin  pour  ne  rien  oublier,  on  demandera  peut- eftre  pour- 
quoy  Tertullien  auroit  ajouté  cette  explication,  c'eft  à  dire 
la  figure  de  mon  Corps .,  puifque  fûppofé  que  l'on  cruft  de  fon 
temps  la  prefence  réelle  ,  cette  expreffion  que  l'Euchariftie 
eft  le  Corps  de  J.  C.  étoit  du  moins  auffi  intelligible  que  ce 
qu'il  ajoute  pour  l'éclaircir  qu'elle  eft  la  figure  de  ce  Corps. 
Mais  la  folution  de  cette  difficulté  eft  clairement  contenue 
dans  le  pafTàge  même  de  Tertullien,  qui  marque,  comme  le 
AmIs.  }z8.  dit  Aubertin,  quec'eftoit  une  des  erreurs  desMarcionites.de 
prétendre  que  J.  C.  n'ayant  point  de  Corps  véritable,  il  avoit 
adopté  le  pain  pour  en  faire  fon  Corps  5  de  forte  que  félon  la 
penîce  de  Marcion  il  y  avoit  bien  dans  l'Euchariftie  un  ve- 


efl  appellée  type ,  imuge  ^  figure  ^  ^c.  75 

ritableCorp  de  J.  C.  quieftoitlepain,  mais  il  n'y  avoit  point  Ch.  III. 
de  Sacrement  de  ce  Corps ,  parce  que  ce  pain  n'eftoit  point 
la  figure  du  Corps ,  mais  le  Corps  même ,  non  par  nature,  mais 
par  adoption.  Il  femble,  dit  Aubertin,  que  Marcion  ait  nié 
qu'il  y  euft  dans  l'Eucliariftie  une  figure  du  Corps  de  J.  C.  &: 
qu'il  ait  crû  que  le  Seigneur  avoit  pris  le  pain ,  non  comme  la 
figure  de  Ton  Corps,  mais  au  lieu  de  Ton  propre  Corps ,  &  com- 
me un  Corps  emprunté,  parce  qu'il  n'en  avoit  point  de  vérita- 
ble. Car  c'eft  ce  qui  eft  marqué  par  ces  paroles  de  Tertul- 
lien.  Que  fi  l'on  dit  que  du  painj.  C.  s'eft  fait  un  Corps  ^  par- 
ce qu'il  n'en  avoit  point  de  véritable,  c'eftoit  donc  aufli  du 
pain  qu'il  devoit  livrer  pour  eftre  crucifié  pour  nous. 

Tertullien  a  donceûintereftde  diftinguer  la  créance  del'E- 
glife  de  celle  de  cet  hérétique  ,  &  de  ne  dire  pas  feulement  que 
J.  C.  avoit  fait  du  pain  fon  Corps,  ce  qui  eftoit  une  expreffion 
commune  aux  Catholiques  &  aux  Marcionites ,  mais  de  mar- 
quer clairement  que  ç'avoit  efté  en  rendant  le  pain  Sacrement 
de  ce  Corps  5  ce  que  les  Marcionites  ne  pouvoient  dire  félon 
leurs  principes.  Mais  enfe  fervant  de  ces  termes,  qui  feparenc 
le  fens  des  Catholiques  de  celuy  des  Marcionites ,  il  y  enfer- 
me tout  ce  que  les  Catholiques  y  enfermoientj  &  fi  l'cxpreffion 
efl:oit  imparfaite,  l'idée  qu'elle  imprimoit  ne  l'eftoit  point,  par- 
ce qu'il  y  ajoûtoit  tout  ce  qui  y  eftoit  joint  par  la  connoifiance 
que  tous  les  fidelles  avoient  de  la  dodrine  de  TEglife. 

C'eft  ce  que  l'on  peut  dire  fiir  ce  paftâge  de  Tertullien  en 
s'arreftant  au  fens  que  les  Miniftres  y  donnent ,  &  que  les  paro- 
les prefentent  d'abord.  Et  comme  cet  éclairciiTement  ne  laifiTe 
aucun  doute  raifonnable  ,  il  ne  feroitpas  neceflaire  d'exami- 
ner l'autre  fens  que  plufieurs  Théologiens  Catholiques  ytrou- 
ven  ,  fi  la  prcfomption  &la  fierté  avec  laquelle  les  Miniftres 
ont  fait  valoir  ce  paflage  dans  tous  leurs  Ecrits  ne  meritoit 
d'eftre  reprimée. 


Kij 


j(t     Li  V .  n.  Bxplkiîion  des  pajpiges ,  oti  tEucha.n[iie 


CHAPITRE     III. 

Explication  du  fcns  que  le   Cardinal  du  Perron  ,  (^  d'autres 
Théologiens  Catholiques  ont  donné  a  ce  pajjage 
de  Tcrtullien. 

O  M  M  E  le  Sens  que  le  Cardinal  du  Perron  8c  plufîeurs 
autres  donnenc  à  ce  pafTage  deTertullieneft  tiré  de  tou- 
te la  fuite  de  Ton  difcours,  il  eft  neceflairepour  le  faire  enten-- 
dre  de  rapporter  cepalTageplusaulong;  &  jepourroisoire  que 
c'efl:  une  efpece  d'infidélité  à  M.  Claude  de  ne  l'avoir  jamais 
cité  qu'en  abrégé,  puifqu'il  ne  peut  ignorer  que  ces  Auteurs 
croycnt  cette  fuite  necelîaire  pour  en  déterminer  le  fens. 

Le  voicy  dans  une  jufte  étendue.  De  tant  de  fcjles  des  Juifs  , 
dit-il ,  7-  C.  choifit  celle  de  Fafque ,  parce  qua  c'efi  dans  la  vue  de- 
ce  Sacrement  que  Moyfe  avoit  dit  :  Ccfi  la  Pafque  du  Seigneur. 
C'efi  four  cette  raifon  qu'il  fit  paroijire  un  defirjï  ardent  de  la  cé- 
lébrer. J'ay  .^  dit- il ,  ardemment  de(irè  de  manger  cette  Pafqne  avec 
vous  avant  que  de  fouffrir.  Efi-ce-là  détruire  la  loy  que  de  fouhaiter 
avec  tant  d' ardeur d' ob ferver  la  P a fque  ?  Dira- 1.  on  que  c'efi  qu'il 
aimoit  la  chair  d'agneau ,  dont  les  Juifs  mangeoient  en  ce  temps- 
la?  Et  n'efi-il  pas  vifible  que  la  véritable  raifon  de  ce  d.efir  efi 
qu'il  eftoit  luy-mcme  cet  agneau  qui  dcvoit  efire  conduit  pour  cftre 
immolé  fans  jetter  un  cri  non  plus  qu'une  brebis  entre  les  mains  de 
ceux  qui  la  tondent ,  voulant  accomplir  ainfi  cette  figure  (  légale  ) 
de  fon  Sang  falutaire.J.  C.  pouvait  efire  trahi  par  un  cft  ranger: 
mais  il  eu  fi  fallu  effacer  ce  verfiet  du  Pfieaume  :  Q^Xw^  qui  mange 
avec  moy  lèvera  le  pied  contre  nioy.  Il  pouvoit  efrc  livré  aux 
Juifs  fans  que  ctluy  qui  le  trahiffoit  en  tirafl  de-  recompenfe.  Car 
quel  h  e  foin  les  Juifs  avoicntils  du  7ninifiere  de  ce  traifire  pour  fie 
fiai fir  d'un  homme  qui  fe  preficntoit  de  luy-mcme  au  peuple'',  il  pouvoit 
rftre  fai fi  ouvertement  fans  qu'il  fu fi  befoin  que  quelqu'un  le  li- 
vrafi  par  adrefie.  Mais  cela  eufi  cfié  bon  pour  un  autre  Chrifi ,  ^ 
non  pour  celuy  qui  avoit  defiein  d'accomplir  les  prophéties ,  dans 
Ufiquellcs  il  cft  dit  .^  qu'ils  avoient  vendu  le  jufte.  Jeremie  même 
avoit  marqué  la  fiomme  prccife  pour  laquelle  il  fut  livré  ■>  &  l'ufa- 
gs  qu'on  en  fit.,  lorfque  Judas  qui  s'efioit  repenti  de  fion  crime ., 
ay.ant  renoncé  au  profit  de  fion  traité  ,  cet  argent  fut  employé  * 


ejî  appellée  type  ^  image  ^figure ^  ^c.  77 

V achat  du  champ  £  un  potier  ^  comme  lEvanyle  de  S.  Matthieu  le  Ch.   lîî- 
rapporte.  Ils  ont  pris ,  duce  Prophète ,  les  trente  pièces  d'argent , 
qui  eftoient  le  prix  de  celuy  qui  a  efté  mis  à  prix  ,  ^  ils  les  ont 
employez  à  acheter  le  champ  d'un  potier.  7-  C  ayant  donc  té- 
moiriié  qu'il  avait  ardemment  defirè  de  manqet  la  Pafque  com- 
me (ïcnne  (  car  il  efloit  indiqrie  d'un  Dieu  de  defrcr  quelque  cha- 
fe  quine  luy  appartint  pas )  Il  prit  LE  PAiN  ,  et  le  distri- 
buant A  SES  Disciples  ,  il  le  fit  son  Corps  en  disant  j 
Cecy  est  mon  corps  ,  c'est  a  dire  ,  LA  figure  de  mon 
Corps.  Or  il  n' aurait  pas  cftè  fiyire  du  Corps  de  J.  C.  fi  ce 
Corps  n'eufl  pas  été  véritable.  Car  un   chofe   vuide  de   réalité , 
co7nme  un  phantbme\^  ne fcauroit pas eflre reprefcntéc parnnc fiyire. 
Que  Jî  l'on  dit  que  du  pain  ^J.  C.  fe  forma  un  Corps  ,  parce  qu'il 
n'en  avoit  point  de  véritable  ,  c'cfl  donc  au/Ji  du  pain  qu'il  de- 
vait livrer  pour  nous.  C'aurait  cflé  un  chofe  ajjez^  conforme  à  la 
folie  de  Jifarcion  qu'un  pain  eufi  efté  crucifié  pour  nous.    Mais- 
pourquoy  appella-t-il  le  pain  fon  Corps  ^  ^  non  pas  une  citrouille , 
que  Marcion  avoit  fans  doute  au  lieu  de  tejie ,  pui [qu'il  n'a  pà 
comprendre  que  le  pain  cftait  une  ancienne  fipirc  du  Corps  de  J.  C. 
qui  avoit  dit  par  Jercmie  :  Ils  ont  confpiré  contre  moy ,  <^  ont 
dit  :  Venex^,  mettons  le  bois  en  fon  pain  ,  c'efi  a  dire\  ta  croix  en 
fon  Corps.  Ain  fi  J.  C.  éclairciffant  les  figures  anciennes  a  affe:::^ 
déclaré  ce  qu'il  ajwit  voulu  que  le  pain  ftznifiaji  dés  ce  temps   de 
Teremie,  en  appellant  depuis  le  pain  fon   Corps. 

Voila  le  pafluige  cjui  fert  de  fujet  à  tant  de  conreftations. 
Nous  avons  déjà  vu  qu'il  eft  inutile  aux  Calviniftes ,  en  leur 
accordant  même  que  Tertnllien  ait  expliqué  le  mot  de  Corps 
par  ceux  de  fiyire  ou  de  Sacrement  du-  Corps.  Mais  plufieurs 
Auteurs  ,  6c  fur  tout  le  Cardinal  du  Perron,  ont  prétendu 
prouver  de  pins  que  l'on  peut  raifonnablement  y  donner  un 
autre  fens  ,  éc  qu'il  peut  fîgnifier  que  \.  C  prit  le  pain ,  c'cfi  a 
dire  Ut  fiiqure  de  fon  Corps  ,  (fi  le  fit  fon  Corps ,  6c:  cela  en  rappor, 
tant  ces  paroles ,  Hoc  c  fi  figura^  non  au  mot  de  Corps  qui  eil:' 
l'attribut  de  lapropofitionj  mais  au  motdeC^ry,  qui  en  eft  le-  . 
fujet.  Ce  qui  le  fait  par  une  efpece  de  figure  que  Ton  appelle 
Jiypcrbate  .^  allez  commune  dans  les  Auteurs. 

La  raifon  qui  fembie  aurorifer  ce  fens,  eft  qu'il  paroift  par' 
toute  la  fuite  du  paifage  que  le  but  de  Tertullien  eft  de  mon- 
trer que  J.  C.  n'eft  point  contraire  à  la  loy  ,  puifqu'iî  en  a  ac- 
compli les  figures.  Ce  qu'il  prouve,  ôcpar  la  Pafque  accom- 

K  iij 


\ 


7?     Liv.  II.  ExplicAtiondespalfiges ^oà  ÏEucha,riflie 
plie  par  J.  C.&: parla  qualité  de  celuy  qui  lerrahic,  qui  dcvoit 
eftre  un  de  fesdomeftiques,  fuivant  les  Prophéties  j  ôc  par  le 
prix  pour  lequel  il  fut  livré,  prédit  par  un  Prophète. 

Cette  preuve  continue  fans  interruption  jufqu'à  ces  paroles, 
Profiijus  itaquc  fe  concupifccntià  concupijse  edere  Pafcha^  JesuS- 
Christ  ayant  donc  thnoi'ine  qu  il  avait  ardemment  defirè  de 
many:r  la  Pafque  ^  qui  ne  marquent  en  aucune  forte  qu'il 
palTe  à  une  autre  matière,  &  qui  donnent  clairement  l'idée 
de  la  continuation  du  même  raifonnemcnt. 

Il  faut  donc  que  ce  qui  fuit  immédiatement,  fc^'avoir  ^«-^ 
y.  C.  fit  le  pain  [on  Corps  ^  contienne  une  preuve  femblable  à 
celles  qui  précèdent.  C'eft  à  dire,  qu'il  faut  que  Tertullien 
prouve  que  J.  C.  a  accompli  les  prophéties  &  les  figures ,  en  fai- 
fant  le  pain  Ton  Corps.  Or  il  ne  le  fcjauroit  prouver  qu'en  fuppo- 
fant  que  dans  l'ancienne  loy ,  le  pain  eftoit  une  figure  du  Corps 
4e  J.  C.  Et  comme  cette  propofitioneffc  celle  fur  laquelle  tout 
le  raifonnemcnt  eft  fondé,  &  qu'elle  ne  peut  eftre  fuppofée  j  il 
faut  encore  que  Tertullien  l'ait  exprimée.  Et  c'efl  ce  qu'on  ne 
fçauf oit  trouver  qu'en  rapportant  ces  mots ,  Hoc  id  cfi figura 
corporis ^  au fujet delà propofition, c'eftàdireau mot C^fy, &  en 
traduifant  route  cette  claufe.  Acceptmnpanem  (^  difirihutum  dif- 
cipulis ,  Corpus  fuum. ,  illum  fecit ,  IPoc  efi  Corpus  meum ,  dicendo , 
idefl  figura  Corporis  mei ,  en  cette  manière  :  '/.  C.  prit  le  pain  é"  le 
difiribuantàfes  difciples  il  le  fit  fonCorps  en  difant ,  Cecy  (  c'efi 
À  dire,  La  figur-e  DE  mon  Corps)  est  mon  Corps. 
En  un  mot  le  raifonnement  de  Tertullien  demande  necef- 
fairement  ces  propofitions  :  J.  C.  a  fait  le  pain  fon  Corps.  Le  pain 
eftoit  une  figure  légale  du  Corps  de  J.  C.  Donc  il  a  accompli  les  fi- 
gures. Aucune  des  deux  premières  propofitions  ne  peut  eftre 
oubliée ,  n'eflant  pas  aflèz  claires  pour  eftre  fuppofées.  On 
trouve  la  première  dans  ces  paroles  :  J.  C.  fit  le  pain  fonCorps. 
Il  faut  donc  que  celle-cy  :  Hoc  cft  figura  Corporis  met  ^  contien- 
ne la  féconde  ,  qui  eft  que  le  pain  efioit  la  figure  légale  du  Corps 
de  7.  C.  puifqu'on  ne  le  fçauroit  trouver  jailleurs. 

Rien  ne  s'oppofe  à  ce  fens  que  l'hyperbate  qu'il  faut  admettre, 
qui  eft  une  figure  un  peu  extraordinaire ,  mais  elle  ne  l'eft  point 
fi  fore  qu'on  ne  foit  obligé  de  l'admettre  en  plufieurs  rencon- 
tres. On  en  produit  ordinairement  cesexemples  de  Tertullien 
Cont.  Prax.    même  :  Qhrifius  mortuus  ef ,  id  ejl  uniius^  où  le  mot  unHus  fè  rap- 
«^- 19.  porte  à  Chrifius  5  ôc  cet  autre  du  même  Auteur  j  Aperiam  in  pa^ 


efl  appellée  type ,  mage ,  figure ,  g/V.  79 

raholam  aurcm  mearn^  id  ei'i^jîmilitudiiiem.,  où  le  iuoc  à<t  Jîmilttu-  Ch.  I  Î  I. 
dinem  efl  l'cixplicacion  de  paraholam ,  Ôc  non  dV/^/r^-w.  Er  cet  au-  ^'^•"-  •'^■^- '^• 
tre  de  S.  Chryfoitome  ;,  Super  hanc  fctram  adificjho  Eccicjîam    •''■•'^'''' 
menm  ,  idefl^fidem  ^  confe/^onem,  où  les  deux  mots  de  fidon  (j,-' 
confedisnon  font  l'explication  de  celuy  àt  fetram^  £c  non  d'£c- 
clejicim. 

Mais  en  voicy  encore  un  plus  précis  &  reconnu  par  Au- 
bertin  même ,  dans  la  propre  efpece  du  pafTage  de  Tertul- 
lien  ,  c'efl  à  dire  ou  un  mot  ajouté  après  ces  paroles  5  Cccy  efl 
mon  S.rng^  eft  pris  pour  l'explication  dn  Tujet,  &  non  pas 
de  l'attribut.  Il  eft  tiré  de  Clément  d'Alexandrie,  lequel  ayant 
cité  ces  paroles ,  rVro  jX^  iaxt  ro  eiip.a..  ^ecy  efl  mon  Sjti'Z^  : 
ajoute  tt/^cît  TY\i  dfi'TCÎXy ,  le  Sang  de  la  vigne.  Or  Aubeitin 
prétend  que  ces  trois  derniers  mots,  £uix  tjTî  cLfj-T^iAy ,  fe 
rapportent  au  fujet  de  la  propofition ,  &  qu'il  faut  tradui. 
re  toute  claufc  en  cette  manière  -.  O9/,  c'efl  a  dire ,  le  Sang  de 
la  Vigne ^  eft  mon  Sang.  Car  c'eft  ainfi  qu'il  le  traduit  luy 
même. 

Le  rapport  parfait  de  cts  deux  pafTages  ofle  certainement 
tout  droit  aux  Calviniftes  de  fe  récrier  contre  l'hyperbate 
attribué  à  Tertullien.  Et  comme  le  fens  du  Cardinal  efl  d'ail- 
leurs tres-conforme  à  toute  la  fuite  ,  pour  peu  qu'ils  euflènt 
d'équité  &  de  bonne  foy,  ils  reconnoiflroient  que  s'il  n'efl: 
pas  certain  que  Tertullien  ait  eu  ce  fenSj  il  eft  encore  moins 
certain  qu'il  ait  eu.  celuy  auquel  ils  l'expliquent  ;  &  qu'ainfî 
la  raifon  veut  qu'on  mette  ce  paftage  à  l'écart ,  comme  n'é- 
tant propre  qu'à  éblouir  les  yeux  des  fîmples. 


CHAPITRE    IV. 

Troifihne  fens  naturel  que  l'on  peut  donner  au  pajfage  de  Tertullien 
qui  ruine  les  avantages  que  les  Miniftres  en  tirent. 

MAis  afin  de  montrer  encore  mieux   combien  les  Cal  - 
viniftes  ont  peu  de  raifon  de  faire  tant  de  bruit  de  ce 
paflâge,  je  propoferay  encore  une  autre  manière  de  l'expli- 
quer ,  qui  eft  pour  le  mpins  auffi  probable  que  la  leur. 
Chacun  f(^ak  qu'il  arrive  quelquefois  non  feulement  à  ceux 
qui  parlent ,  mais  auflî  à  ceux  qui  écrivent ,   de  commeo- 


s o  Li V .  1 1.  Explication  despcijjligcs ,  oit  ï Euchmflie 
cer  une  période,  6c  de  l'inrerrompre  enfuice  par  une  penfée 
incidente  ,  qui  efl  une  efpece  de  parenchefe.  Que^fi  cette  pa» 
renthefe  devient  trop  longue  lorfqu'il  efl;  queflion  d'achever 
la  propolltion  commencée  ,  il  arrive  quelquefois  ou  par  négli- 
gence ou  par  quelque  veuë ,  qu'on  le  fait  par  un  autre  tour  qui 
ne  s'accorde  qu'avec  les  premières  paroles.  Ainfî  elles  de- 
meurent fufpenducs  Scdefliituces  de  leur  fuite  naturelle. 
C'eft  ce  que  les  Grammairiens  appellent ,  tt>'ax,«'A»}-oi',  ou  difl 
cours  fans  fuite.  Et  il  y  en  a  des  exemples  dans  Ciceron  même. 
En  voicy  entr'autre^untres-propre  pour  éclaircirceluy  que  je 
feray  remarquer  dans  TertuUien.  Il  efl; tiré  du  fécond  livre  des 
Tufculanes ,  où  Ciceron  parle  de  la  forte  :  Btcnimfi  orationes 
quas  non  multiiuiinii  judicio  probari  volebamus  ,  fopularis 
efi  enhn  illa  facultas  ,  &  ejfeïius  éloquent i,i:  tfl  audicntium 
approbatio.  Seâ  Jl  rcpcriebantur  nonnulli  qui  7ïihil  laudarent , 
nifi  quod  fe  imitari  poffe  confidercnt.  On  peut  remarquer  dans 
ce  paiïàge  trois  claufes  qui  forment  cette  figure.  La  premiè- 
re confifte  dans  ces  paroles  qui  demeurent  fufpenducs.-  Ete- 
nimjî  orationes  qu.ts  nos  multitudinis  judicio  probari  volebamus. 
La  féconde  dans  la  parenthcfe  qui  interrompt  la  fuite  : 
Popularis  efi  eniyn  illa  facultas  ,  (^  effccius  eloqucntia  efi  aiidien- 
tium  appfcbatio.  La  troifiéme  conflfte  dans  la  reprife  qui  fuit 
Ja  parenthefe,  &  qui  continue  la  première  claufe,  mais  par  un 
autre  tour ,  qui  ne  fe  peut  joindre  avec  cette  première  dans  une 
conflrudion  régulière  5  Scd  fi  reperiebantur  nonnulli  qui  nihil 
laudarent ,  nifi  quod  fc  imitari  pojfic  confidcrent. 
Que  fi  l'on  trouve  de  ces  fortes  de  figures ,  ou  plûtofl:  de  négli- 
gences de  flile  dans  Ciceron  qui  écrivoit  fi  exactement  j  il  n'y  a 
pas  lieu  de  s'eftonner  qu'on  en  voye  dans  TertuUien  qui  efl  un 
Ecrivain  impétueux ,  Û.  qui  fuivant  la  chaleur  de  fon  efprit ,  ne 
s^afllujettit  pas  Ç\  precifément  aux  règles  de  la  conftrudion. 

Aulfi  ne  faut-il  pas  en  aller  chercher  bien  loin  des  exemples 
dans  cet  Auteur.  Car  qui  ne  voit  que  dans  cette  période  :  Poiir- 
quoy  donc  appcllc-t-tlle  pain  fon  Ccrps  ^  (^  non  pas  une  citrouille 
que  Murcion  avait  au  lieu  de  te  fie ,  n'entendant  pas  que  c'cfioit  une 
ancienne  fi'^ure  du  Corps  de'j.C.  CuB.  autem  panent  Corpus  fuum 
appellat ,  £?>  nonpotius  peponcm ,  quem  M  arc  ion  cordisloco  habuit^ 
non  intclligcns  vétéran  fuifje  ijlam  fiyiram  Corporis  chrifiij(\\n 
ne  voie,  dis-je^  que  ces  paroles  ^  P^urquoy  appelle-t-il  le  pain 
fon  Corps,  Cu».  autem  panem  Corpus  fuum  appcllat ^  demeu- 
rent 


efi  appellée  type ,  image ,  figure  ,(^c.  8 1 

renc  fufpenduës,  6c  n'onc  point  de  luice  direclc,  mais  que  s'c-  Ch.  VI. 
tant  détourné  pour  faire  une  raillerie  de  Marcion  en  difant 
qu'il  avoir  une  cirroiiille  au  lieu  de  teftc ,  il  attache  à  la  fin  de 
cette  raillerie  la  réponfe  qu'il  devoir  faire  dirticlement  à  la  que- 
flion  propofée,  6c  il  l'y  attache  par  un  tour  qui  ne  (e  lie  pas 
bien  avec  cette  queilion.  Car  ce  n'ell:  pas  un  difcours  raifon- 
nable  que  de  dire  :  Cur  autem pancm  corpus  ftium  appelLit  ^  Q-non 
fotius  peponem  ,  no7i  inteUigcns  vetercm  fuiffc  tfiam  figuram  Corpo, 
ris  Chrifin. 

Il  eft  certain  de  plus  que  dans  le  pafTage  même  dont  il  s'agit 
il  faut  admettre  un  difcours  interrompu.  Car  il  eft  vifible  que 
ces  ^a.To\es:J.C.  ayant  donc  témoigné  qu  il  avait  ardemment  fou - 
haité  de  manger  lapafque  comme jienne^  frit  le  pain  ^  ^  le  diji  ri  huant 
à  [es  difciples  il  en  fit  [on  Corps  en  difant;,  Cecy  cfi  mon  Corps  ,  appar- 
tiennent à  la  principale  preuve  que  Tertultien  traite  en  ce  lieu- 
là  ,  qui  eft  de  montrer  que  j.  C.  a  accompli  les  Prophéties.  Ec 
il  eft  certain  de  plus  qu'elles  ne  contiennent  que  le  commen- 
cement de  cette  preuve ,  &;  que  TcrtuUien  ne  la  reprend  &  ne 
l'achevé  qu'après  une  parcnthefede  fix  lignes,  par  cette  que- 
ftion  :  Pourquoy  appelle- 1  illepainfon  corps, Q;- non  pas  une  citrouil- 
le^ que  Marcion  avoit  au  lieu  de  tejle  :  n^  entendant  pas  que  c"  eft  oit  une 
ancienne  figure  du  Corps  de  J.  C.  De  forte  que  tout  ce  que  Tertul- 
lien  dit  incidemment  contre  l'erreur  des  Marcionites,  qui  n'ad- 
mettoienten  J.  C.  qu'une  chair  phantaftique,  eft  une  interru- 
ption de  cette  première  preuve,  qui  demeure  imparfaite Sc/uf- 
penduc  par  cette  longue  parenthefè. 

Et  l'on  peut  encore  remarquer  furcefujct,  que  lors  que  Ter- 
tuUien  reprend  cette  première  preuve  qu'il  avoit  commencée, 
ce  n'eft  point  en  la  continuant  par  une  fuite  qui  y  puft  eftre 
jointe  directement ,  mais  en  y  ajoutant  ce  qui  y  manquoitpar 
un  autre  tour  5  &  c'cft-là  proprement  ce  qu'on  appelle  interru- 
ption ou  oLya.y.câAyJov. 

Le  bon  fens  donc  obligeant  d*a<lmettre  un  difcours  fufpcndu 
en  cet  endroit,  il  n'y  aucun  inconvénient  de  l'admettre  de  la 
manière  que  je  vay  dire. 

Ilfaut  fuppofer,ce  qui  eft  très  -  certain  ,  que  Tertullien  veut 
montrer  que  J.  C.  a  accompli  les  figures  de  l'ancienne  loy  en 
faifant  le  pain  fon  Corps ,  &  que  c'eft  dans  cette  vue  qu'il  dit , 
7.  C.  ayant  donc  témoigné  quil  avoit  ardemment fouhaité  de  manger 
UP  afque  (ojwne  fiennc  ^  prit  le  pain  ^  le  difinbuant  à.  fie  s  dificiples^  il 

L 


Sx  Li V.  1 1 .  Explication  despa,Jfiiges ,  ou  t EuchuriHie 
en  fit  [on  Corps  en  difant  ^  Cecy  efimonCorps.  Or  pour  rendre  ce 
raifonnement  concluant  Tercullien  dévoie  montrer  que  dans 
l'ancienne  loy  le  pain  que  J.  C.  fit  Ton  Corps  eftoit  la  figure  de 
fon  Corps.  C'eft:  auflî  ce  que  l'on  peut  croire  avec  raifon  qu'il 
avoit  deilein  d'exprimer  immédiatement  après  par  ces  paroles 
ou  autres  femblaoles  :  C'cfi  à  dire  la  figure  de  mon  Corps  mar- 
quée dans  l'ancienne  loy  ,  efl  maintenant  mon  Corps. 

On  a  raifon  de  fiippofer  que  Tertullien  avoit  toute  cette  fi.iite 
dans  l'efprit,  puifqu'on  la  trouve  effedivement  fix  lignes 
après  :  mais  ayant  commencé  à  propofer  les  premiers  mots  de 
cette  preuve,  qui  font,  ^'efl  a.  dire  la  figure  de  mon  Cotps ,  Id  efi 
figura  Corporis  met  ^  au  lieu  d'achever  comme  il  avoit  defi!ein 
de  faire,  &  de  dire  tout  d'une  fuite ,  Ceft  à  dire  la  figure  de  mon 
Corps  qui  a  cfié  marquée  par  le  Prophète  Jeremie,  e^  mon  Corps'j 
le  mot  ât figure  luy  ayant  ouvert  un  moyen  de  réfuter  en  paf- 
fant  l'erreur  des  Marcionices  contre  la  chair  de  J.C.  il  fe  détour- 
ne de  la  fuite  de  fon  raifonnement  par  une  longue  parenchefe  , 
pour  entrer  dans  cette  preuve  incidente  ,  6c  enfuite  il  achevé 
ce  qu'il  avoit  commencé  j  mais  il  l'achevé  comme  l'on  fait  en 
cesoccafions  en  reprenant  ce  qu'il  avoit  commencé  par  un  au- 
tre tour  indépendant  du  commencement  ,  l'interruption 
ayant  elle  trop  longue  pour  prétendre  joindre  le  commence- 
ment de  la  propofition ,  Se  la  reprife  dans  une  même  conftru- 
élion  ,  &:  pour  fuppofer  qu'on  s'en  fouvint. 

Ainfi  félon  ce  fens,  ces  paroles,  Pourquoy  appelle-t-il  le  pain 
fon  Corps  ,  é^  non  pas  une  citrouille  que  Marcion  avoit  au  lieu  de 
icfie  ,  n'entendant  pas  que  c' eftoit  une  ancienne  figure  du  Corps  de 
J.  C.  qui  fe  trouvant  immédiatement  après  la  réfutation  inci- 
dente de  l'herefie  desMarcionites  contre  la  Chair  de  J.  C.  ne 
font  qu'une  reprifè  qui  achevé  une  propofition  qu'il  avoit 
commencée,  &  qui  forment  avec  cette  première  propofi- 
tion un  raifonnement  entier  qui  ne  fuppofe  rien  que  de 
clair. 

La  première  propofition  qui  efl  que  y.  C.fitle  pain  fon^-orps^ 
efl:  contenue  dans  la  première  claufe. 

La  féconde,  que  le  pain  eftoit  une  figure  légale  v  orps  de  J.  C. 
'commence  dés  cette  première  claufe,  &  efl  reprife  &  achevée 
dans  la  dernière. 

'   Et  entre  cesdeuxclaufesil  y  aune  longue  parenthefe  ,  dans 
laqiielleTertuUien réfute  en  pafl!ant l'erreur  desMarcionites, 


f/?  appelles  type  ^  imuge ,  figure  ^  ^c.  S5 

qui  enreignoient  que  J.  C.  n'avoir  point  un  vxay  Corps.  Ch.  IV. 

Ce  fens  convient  avec  ceiuy  de  M.  du  Perron  en  ce  que 
l'on  entend  par  ces  mots,  Cefi  à  dire  la  figure  de  mon  Corps  ^ 
que  le  pain  qui  eftoit  figure  légale  du  Corps  de  J.  C.  a  eftë  fait 
fon  Corps.  Mais  il  en  eft  différent  en  ce  que  M.  du  Perron 
prétend  que  ces  mots  ,  c'cfi  à  dire  la  figure  de  mon  Corps  ,  font 
partie  de  la  période  précédente,  au  lieu  que  l'on  en  fait,  félon 
cette  explication,  le  commencement  d'une  nouvelle  période, 
qui  efbant  interrompue  par  une  longue  parenthefe,  ne  s'achè- 
ve que  fîx  lignes  après.  Et  ce  qui  femble  l'autorifer  davantage, 
c'eft  que  la  reprifefe  trouve  juftement  au  bout  de  la  parenthe- 
fe ,  ce  qui  eft  le  caradere  de  cette  figure  que  l'on  appelle  «,'1  b)c«- 

Voila  donc  deux  fens  difFerens  de  celuy  des  Miniflres,  auf- 
quels  on  peut  entendre  ce  paflage  de  TertuUien ,  6c  qui  font 
plus  probables  que  le  leur ,  comme  on  va  voir  par  la  réfutation 
des  objedions  d'Aubertin,  Car  quoyqu'il  fe  vante  d'avoir  re- 
futé Tes  adverfaires  par  de  forts  argumens  ramalfez  de  toutes 
parts  ,  "validis  rationibus  undequaque  conquifitis  ,  je  prétends 
faire  voir  qu'il  avoit  plus  de  fierté  que  de  force ,  &  plus  de  fauf- 
fè  fubtilité  que  de  véritable  lumière. 

CHAPITRE   V. 

Réfutation  des  raifons  d'Aubertin  Contre  le  fens  auquel  le  Cardinal 
du  Perron  prend  le  paffage  de  TertuUien. 

PREMIERE   OBJECTION   D'AUBERTIN. 

A  Ubertin  tire  fa  première  preuve  contre  le  fëns  du  Car- 
X5v,  dinal  du  Perron  du  pafTage  de  TertuUien  que  nous  avons 
expliqué  avant  celuv-cy.  Hocliyium^  dit  cet  Auteur,  e^///(r- 

remiai  ttbi  infînuat  diHuris  pr.-vdicans  Judais ,  Venite^  mittamus 
lignum  in  panem  ejus\  u tique  in  Corpus.  Sic  enim  Deus  in  Evan- 
felio  quoque  veftro  rcvelavit ,  pane?n  Corpus  fuum  appellans ,  ut 
hinc  jam  eum  intelliqas  ,  Corporis  fui  fiyiram  pani  dedijfe ,  cujus 
retrb  Corpus  in  pane  Propheta  figuruvit ,  tpfo  Domino  hoc  Sacra^ 
mentum  poflek  interpretaturo. 
On  a  déjà  fait  voir  qu  Aubertin  n'a  point  entendu  ce  paflàge. 


§4  Liv.  1 1.  Explic'.ttion  des pa.Jfa.ges ,  ou  V Euchari/iie 
èi.  que  le  (ens  de  TertuUien  eft  que  J,  C.  avoir  voulu  que  dés 
le  temps  de  Jeremie  le  pain  fuft  figure  de  fon  Corps  ^  ce  quiau- 
torife  encore  le  fens  du  Cardinal  du  Perron  qui  eft  fondé  fur 
cette  remarque  de  TertuUien.  Mais  l'ufage  qtf  Aubertin  en 
fait  en  cet  endroit  icy  cft  tout  à  fait  rare. 
'jMh.  p.  351.  Il  f  dut  remarquer ,  dit  il,  que  dans  ce  lieu  de  'jeremie  ce  n'efi 
pas  le  pain  qui  cft  figure  du  Corps  de  J.  C.  en  parlant  exaïiement  ^ 
fui  [que  Jeremie  n  avait  pas  un  pain  entre  les  mains ,  mais  que 
c'eft  le  motdeV  K\w  qui  cft  félon  TertuUien  fîqtire  du  Corps  de  J. 
C.  CarTertulken  dit  que  le  mot  de  P  Ain  cft  mis  pour  celuy  de  Co  R.P  y. 
dans  ce pajfaqe:  Mettons  le  bois  dans  fon  pain  ,  c'cft  a  dire  dans 
fon  Corps  par  une  métaphore  cachée  dans  le  ?not  de  pain.  Si  donc  lorf- 
qu'il fait  dire  cnfuiie  à  7\fo[ire  Sei'gncuj  :  Cecy  eft  mon  Corps,. 
c'efi  à  dire ,  la  figure  de  mon  Corps  ,  il  rapportait  les  mots  de 
FIGURE  DE  MON  CoRPS  ail  mot  de  CtCY  ,  ^  qu  il  l'entende  de 
te  pain  dont  il  efl  parle  dans  'jeremie  ,  le  fens  de  ce  difcours  feroit 
neccijaircmcnt  :  Cecy  ,  c'eft  a  dire  le  ynot  de  Pain  ,  lequel  fous  la 
loy  eft  ou  la  fiyire  de  mon  Corps  ,  eft  mon  Corps  -,  ce  qui  eft  le  comble 
de  l'abfurdité  :  carefl-ce  le  mot  de  Pain  qui  a  efté  fait  le  Corps  de: 
J.  C.  dfins  l' Evanyle  ^' 

REPONSE. 

Il  eft  difficile  de  s'imaginer  une  plus  fauffe  fubtilité  que  cel- 
le qui  fait  le  fondement  de  cette  objection  d'Aubertin.  Il  eft 
vray  que  Jeremie  n'avoit  pas  du  pain  devant  les  yeux  quand 
il  fait  dire  aux  Juifs:  Mettons  le  bois  en  fon  pain -^  mais  il  eft. 
très- faux  que  ce  foit  le  mot  de  pain  qui  foit  la  figure  du  Corps 
de  J.  C.  c'eft  la  choie  fignifiéeparce  mot,  c'eft  à  dire,  du  pain. 
Ce.  Mmiftre,  quelque  habille  qu'il  fuft,  n'a  pu  comprendre  en 
cette  rencontre  qu'il  falloit  confiderer  deux  chofes  dans  les 
mots,  le  fon  &:  la  chofe  fignifiée.  Selon  le  fon  il  n'y  a  nul  rap- 
port du  mot  de  panis  au  mot  de  Corpus  -,  &  ainfi  ce  mot  confi- 
deré  comme  mot ,  n'a  pu  eftre  figne  du  Corps  de  J.  C.  Tout 
le  rapport  eft  entre  les  chofes  fignifiées.  Et  c'eft  ce  rapport  du 
pain  au  Corps  de  J.  C.  qui  fait  que  le  mot  de/»///»  peut  eftre  mis 
par  métaphore  pour  celuy  àt  Corps -.^  de  même  qu'afin  que  le 
mot  de  lion  puifle  eftre  mis  pour  un  vaillant  homme  ,  il  faut 
que  l'animal ,  que  ce  mot  fignifîe  ,  foit  l'image  de  la  va- 
leur. 


J 


eji  appellée  type ,  image ,  figure  ^  (^c.  85 

En  un  mot  la  métaphore  confifte  non  à  fe  lervirdes  mots  &  Ch.  V- 
des  fenspour  repreienter  les  choies  que  Ton  veut  faire  enten- 
dre j  mais  à  prelenter  à  l'elpric  par  le  moyen  des  fens^  les  ima- 
ges de  certaines  chofes  pour  en  faire  concevoir  d'autres.  Le 
mot  ne  fert  qu'à  peindre  l'image  de  la  chofe  dans  rcfprit. 
Mais  c'eft  la  chofe  même  peinte  dans  l'efprit  qui  en  reprelcn- 
te  une  autre.  De  forte  qu'il  n'y  a  point  d'autre  différence  en- 
tre une  métaphore  &  un  tableau  dont  on  fe  ferviroit  pour  re- 
prefenter  quelque  chofe  ,  finon  que  le  tableau  eft  extérieur 
&  expofé  aux  yeux  du  corps,  au  lieu  que  la  métaphore  eft 
un  tableau  intérieur  qui  ne  s'apperçoit  que  par  l'efprit. 

On  ne  fçauroit  donc  plus  mal  raifonner  qu'Aubertin  fait 
en  cet  endroit ,  en  prétendant  que  ce  n'eft  pas  le  pain  même , 
mais  le  mot  de  pain  qui  eft  figure  du  Corps  de  j.  C.  dans  Je- 
remie.  Car  puifque  félon  Tertullien  ce  Prophète  s'eft  fervi  de 
ee  mot  de /'.-//«  pour  fignifier  le  Corps  de  J.  C.  il  a  donc  peint 
le  Corps  de  J.  C.  dans  l'elprit  de  fes  lecteurs  fous  l'image  du 
paini  éc  par  confequent  c'eft  le  pain  conçeu  par  l'efprit  qu'il 
a  fait  fervir  de  figure  au  Corps  de  J.  C. 

Ce  que  ce  Miniftre  ajoute  que  félon  ce  fens  Tertullien  aura 
voulu  expliquer  de  cette  forte  ces  paroles  de  J.  C.  Cecy  efl 
mon  Corps ,  c'ejî  à.  dire  ^  le  mot  de  fain  qui  fous  la  Loy  eftoit  fi'iiirc 
de  mon  Corps ,  eft  mon  Corps-^  eft  une  continuation  de  la  même 
abfurdité  &  de  cette  fauffe  fuppofition  que  ce  foit  le  mot  de 
fain  qui  foit  figure  de  J.  C.  &  non  pas  la  chofe  fignifiée  par  ce 
mot.  Et  comme  cette  fuppofition  eft  ridicule,  laconfequence 
Teft  aufïï.  Ainfi  le  fens^de  cettep  ropofition  deTertullien  eft  que, 
Cecy,  c'eft  à  dire  ce  pain,  lequel  avoir  fervi  à  Jeremie  à  fi- 
gurer mon  Corps,  eft  mon  Corps.  Et  ce  fens  eft  tres-raifonna- 
ble  ,  ôc  n'eft  nullement  embarairé. 

IL    OBJECTION. 

La  deuxième  objedion  eft  tirée  du  lieu  même  dont  il  s'a- 
git. Car  ^  dit-il,  Tertullien  y  dit  que  J.  C.  ayant  pris  le  pain  le 
fit  [on  Corps ,  en  difant  :  Cecy  efl  mon  Corps ,  c'eft  h  dire  ,  la  fi. 
yire  de  mon  Corps.  Or  à  quoy  fe  peut  rapporter  le  pronom  ,  Cecy , 
finon  au  pain  que  J.  C.  avoitpris ,  puifqu'tl  fuppofe  manifcfctncnt 
un  terme  précèdent  auquel  il  foit  relatif  Or  dans  tout  ce  livre 
de  Tertullien  il.n'avvit  encore  eflè  fait  aucune  mention  de  ce  pain 

L  iij 


86    hiv.  II.  Explication  des  pa.Jfa.ges  ^  oui"  Euchariftie     ' 

dont  parle  Jeremie-^  ^  il  avait  au  contraire  marqué  tres-diflinBe. 
ment  le  fain  que  J.  C.  avait  fris  d^  qu'il  diftrihua  â  fes  Apôtres  ■ 
(^parcanfequent  c'efi  de  ce  pain  Eucharifiique  qu'il  dit  que  c'efioit 
la  figure  de  fon  Corps. 

R  E'  P  O  N  S  E. 

Ce  n'efl:  encore  icy  qu'une  fubtilité  fophiflique,  qui  ne  vient 
que  de  défaut  d'intelligence.  Il  efl:  certain  que  ie  pronom  ,■  Cecy 
£e  rapporte  au  pain  qui  efboit  prefent  devant  J.  C.  mais  cela 
n'empefche  pas  que  ce  pain  eftant  du  pain,  c'eft  à  dire  pofle- 
dant  les  qualitez  qui  conviennent  au  pain  en  gênerai,  Tertul- 
lien  n'en  ait  pu  dire  qu'il  efioit figure  dès  le  temps  dejeremie. 
Aubertin  ne  fçauroit  nier  qu'il  ne  le  dife  dans  la  fuite  du  paC 
/âge  en  ces  termes,  intelligens  veterem  hanc  figuram  Corporis 
Chrifii:  car  cela  s'entend  aufli  de  ce  pain  que  J.  C.  tenoic 
dans  fes  mains.  Ce  n'efl:  pas  que  ce  pain  que  J.  C.  tenoit ,  eufl: 
efl:ë  individuellement  du  temps  de  Jeremie ,  mais  c'eft  que  le 
pain  en  gênerai  ayant  efté  employé  par  ce  Prophète  pour  fî- 
gnifier  le  Corps  de  J.  C.  on  peut  dire  enfuitede  chaque  pain 
particulier  qu'il  a  fervi  de  figure  du  CorpsdeJ.  C.  dësle  temps 
de  Jeremie,  comme  l'on  peut  dire  d'un  Lion  particulier  qu'il 
cfl:  l'image  de  la  valeur,  parce  que  le  Lion  en  gênerai  en  efl: 
l'image. 

Il  efl  encore  vray  queTertullien  n'avoir  point  jufqucs-là  par- 
lé dans  ce  livre  contre  Marcion  ,  de  ce  pafîàge  de  jeremie  où 
le  pain  eft  employé  comme  figure  du  Corps  de  J.  C.  mais 
c'eft:  qu'il  avoir  delTein  d'en  parler  immédiatement  après  ces 
paroles,  Moc  eft  figura  Corporis  mei  ^  quoyqu'ayant  interrom- 
pu fon  difcours  par  uneparenthefe,  il  ne  l'ait  fait  que  fix  li- 
gnes après. 

III.    OBJECTION  D' AUBERTIN. 

La  troifiéme  objedion  fe  peut  réduire  à  ce  raifonnement. 
TertuUien  témoigne  un  peu  après  ce  pafîlige  même  ,  &  dans 
le  livre  (uivant  qu'il  avoit  refuté  l'erreur  des  Marcionires  tou- 
chant la  chair  de  J.  Cpar  le  Sacrement  du  pain  ^  aufli  bien 
que  parceluy  du  C.'.Iice  ;  ce  qui  ne  fe  peut  entendre  que  du 
pafîagedonc  il  s'agit.  Or  il  n'auroit  point  refuté  l'erreur  des 


efi  dppellée  type ,  imdge ,  figure  ,  t^c.  îj 

Marcionites  parle  Sacrement  du  pain  dans  ce  paiïage  ,  à  moins 
que  d'entendre  ces  paroles ,  id  efi  figura  Corporis  mei ,  dans  ce 
fens ,  que  le  pain  a  été  fait  par  J.  C.  la  figure  de  fon  Corps , 
puifque  la  preuve  de  Tertullien  eft  fondée  fur  cette  maxime  , 
qu'une  figure  fuppofe  que  la  chofe  reprefentée  eft  réelle.  Donc 
c'eft  en  cette  manière  qu'il  faut  entendre  ce  paflage. 

REPONSE. 

Il  y  a  trois  chofes  vraies  dans  cette  objection ,  mais  la  con- 
fequenceeneftfauire.  Il  eft  vray  que  Tertullien  prouve  la  réa- 
lité de  la  chair  de  J.  C.  contre  les  Marcionites /'^r/é-  Sacrement 
du  pain.  Il  eft  vray  encore  que  fa  preuve  eft  fondée  fur  ce  prin- 
cipe ,  qu'une  figure  fuppofe  la  vérité  de  la  chofe  figurée.  Enfin  il  eft 
encore  vray  qu'afinque  le  pain  du  Sacrement  prouve  la  vérité 
delà  chair  de  J.  C.en  vertu  de  ce  principe,  il  faut  que  l'on 
prouve  qu'il  eft  figure  de  cette  chair. 
Tout  cela  eft  vray.  Mais  il  n'eft  pas  neceflaire  pour  rendre  cet- 
te raifon  concluante  que  l'on  mette  en  fait  que  le  pain  eft  une 
figure  Evangelique  de  cette  chair.  Il  fuffit  que  l'on  prétende 
qu'il  en  eft  une  figure  légale  ^  une  figure  prophétique,  &  qu'il 
aferviau  Prophète  Jeremie  pour  figurer  la  chair  de  J.  C.  Car 
ce  principe  deTeituUien,  que  la  figure  fuppofe  la  vérité  delà 
chofe  figurée,  eft  auflî  vray  d'un  genre  de  figure  que  d'un  autre. 
Et  il  n'eftoit  point  neceffaire  à  Tertullien,  qui  eftoit  porté  par 
la  fuite  de  fon  raifonnement  à  faire  remarquer  que  le  pain  dont 
J.  C.  s'eftoit  fervi,  eftoit  une  figure  de  fon  Corps  employée  par 
Jeremie,  de  remarquer  de  plus  qu'il  en  eftoit  figure  dans  le 
temps  même  de  la  loy  de  grâce  ^  puifque  l'argument  qu'il  tire 
contre  les  Marcionites  de  cette  qualité  de  figure  eft  tout  auffi 
bon  pris  d'une  figure  ancienne  que  d'une  figure  nouvelle  C'eft 
pourquoy  c'eft  tres-mal  raifonner  à  Aubertin  d'alléguer  que 
quelques  Auteurs  fe  font  fervis  de  même  de  la  qualité  de  figu- 
re que  le  pain  a  par  l'inftitution  de  J.  C.  pour  prouver  la  véri- 
té de  fa  chair ,  afin  d'en  conclure  que  Tertullien  a  confideré 
dans  ce  paiïage  le  pain  comme  figure  Evangelique  du  Corps  de 
J.  C.  Ces  Auteurs  qui  fe  font  fervis  de  cet  argument  n'avoient 
point  été  portez  par  la  fuite  de  leur  difcours  à  confiderer  le  pain 
comme  figure  légale  du  Corps  de  J.  C.  Etainfi  ayant  eu  fim- 
plement  befoin  de  faire  remarquer  dans  le  pain  du  Sacrement 


88        Liv.  1 1.  Expl.  des  Paffages  où  l' Euchuriflle 

la  qualité  de  figure,  ils  l'ont  fait  de  la  manière  la  plus  com- 
mune. Mais  comme  le  delTein  de  TerCuUien  eftoit  de  montrer 
que  J.  C.  avoit  accompli  les  Prophéties  ,  &  que  la  raifon  qu'il 
avoiteuc  dechoilîr  le  pampouren  faire  (on  Corps,  c'ert  que 
Je  pain  avoit  efté  dans  l'ancienne  loy,  figure  de  Ion  Corps-, 
ce  delTein  ,  dis-je,  l'ayant  obligé  de  coniîderer  le  pain  comme 
figure  légale  du  Corps  de  J.  C.  il  n'avoit  plus  beioin  de  mon- 
trer que  le  pain  eftoit  encore  en  une  autre  manière  la  figure  de 
ce  même  Corps  j  puifque  de  quelque  manière  qu'il  le  fuft , 
l'argument  qu'il  en  tiroit  pour  prouver  la  réalité  de  la  chair 
de  J.C.  n'eftoit  pas  moins  concluant.  De  forte  que  tant  s'en 
faut  que  cette  railon  prouve  ce  que  prétend  Aubertin  ,  qu'elle 
prouve  tout  le  contraire  ,  puifqu'il  eftoit  eflentiel  au  deffem  de 
Tertullien  de  confidcrer  le  pain  comme  figure  légale  du  Corps 
de  J.  C.  &.  que  cela  (uppofc  il  auroit  efté  ridicule  à  luy  d'avoir 
recours  à  l'autre  manière  dont  le  pain  eft  figure,  puifque  la 
première  eftoit  tout  aufli  forte  que  la  féconde  pour  en  con- 
clure ce  qu'il  pretendoit. 

IV.     OBJECTION. 

^^^  Je  rapporteray  comme  une  quatrième  objecflion  le  repro- 

che qu'Aubertin  fait  au  Cardinal  du  Perron  d'avoir  fait  deux 
aryimens  monflrucux  6c  plus  dignes  d'un  homme  endormi  que 
d'un  homme  éveillé,  &  qui  ufe  de  ^z.  raifon.  Le  fondement 
qu'il  en  prend,  eft  que  ce  Cardinal  avoit  réduit  le  raifonne- 
ment  que  Tertullien  fait  dans  ce  paflagc  cà  ces  deux  argumens  : 
Jcfiis-Chri/la  fait  le  pain  fon  Corps. Or  le  pain  ejîoit  la  fipire  leyile 
de  ce  Corps,  jl  a  donc  accompli  les  figures  légales.  Ou  hten  ,  dit-il, 
en  renverfant  l'argument ,  J.  C.  devait  accomplir  les  fiyircs  léga- 
les. Or  le  pain  eftoit  la  figure  légale  du  Corps  de  J.C.  Il  ^  donc  fait 
ce  qti'il  devoit  en  fai fiant  le  pain  foji  Corps. 

Sur  cela  Aubertin  fe  récrie,  qu'il  ne  fiait  fi  le  Cardinal  du 
'Perron  a  cent  cela  par  jeu  ou  ferieufimcnt ,  s'il  eftoit  éveillé  ou  en. 
dormi ,  mais  que  ces  deu\  argumens  font  des  monftrcs  tres-mon- 
firueux  dans  le  genre  d' argumens  .^  neftant  dans  aucune  figure  ni 
dans  aucun  mode  :  monstra  funt  monftrofi./Jima  in  génère  aryi- 
mentormn ,  figura  ^  modo  carentia. 


REP^ 


êfi  Appellée  tjfe ,  imagi ,  figure ,  &c.  S9 

RE'PONSE. 

Je  fuis  fiché  d'eftrc  obligé  d'ofter  à  Aubertin  la  gloire  d'a- 
Yoirefté  ^rand  Logicien ,  que  je  luy  laifTerois  bien  volontiers. 
Mais  en  vérité  rinfolenceaveclaquelle  il  traite  un  homme  auflî 
célèbre  que  le  Cardinal  du  Perron,  force  en  quelque  forte  de 
luy  montrer  qu'il  n'étoic  pas  difficile  d'en  fçavoir  plus  que 
Itiy  dans  cette  fcience,  quelque  habile  qu'il  s'y  cruft,  bien  qu'il 
en  ait  pris  fujet  d'infulter  à  un  homme  que  fa  dignité  &  fon 
mérite  luy  dévoient  faire  refpeder  quand  même  il  auroit  eu 
quelque  tort.  Car  la  chaleur  de  la  difpute  5c  la  différence  des 
Religions  n'ont  jamais  dû  faire  oublier  à  Aubertin  &  à  (es 
femblables  qu'ils  écrivoientdans  un  Royaume  Catholique, oii 
toutes  fortes  de  loix  les  obligeoient  à  une  retenue  toute  autre 
que  celle  qu'ils  gardent  dans  leurs  Ecrits.  Mais  quoyqu'il  en 
foit,  il  eft  facile  de  faire  retomber  ce  reproche  fur  celuy- mê- 
me qui  l'a  fait ,  en  montrant  qu'il  n'y  a  rien  de  monftrueux  dans 
les  argumens  du  Cardinal  du  Perron  ,  mais  qu'il  y  a  quel- 
que chofe  de  fort  extraordinaire  dans  l'aveuglement  de  ce- 
luy qui  a  eu  la  hardiefle  de  luy  faire  des  reproches  fi  bas  5c 
fi  mal  fondez. 

Car  c'eft  une  chofe  afiêz  étonnante  qu'à  l'âge  où  eftoit  Au- 
bertin il  ne  fçuft  pas  encore  diftinguer  une  Enthymeme  d'un 
Syllogifme  \  éc  qu'il  fe  foit  récrié  que  des  argumens  eftoienc 
monfirueux  ,  parce  qu'il  luy  a  plu  de  chercher  ridiculement 
dans  deux  entymeme*  très  bons  &:  très,  fôlides ,  les  conditions 
&  les  règles  des  Syllogifmes  catégoriques. 

Il  n'eft  donc  befoin  pour  faire  connoiftre  fonillufion  que  de 
prouver  fimplement  que  les  argumens  qu'il  a  pris  pour  des 
Syllogifmes  ne  font  que  des  Entymemes,  &  que  ce  qui  l'a  trom- 
pé eft  que  la  première  propofition  n'en  eftant  pas  fimple ,  mais 
compofée  de  deux  propofitions ,  il  a  crû  que  ce  devoit  eftre 
une  majeure  &  une  mineure,  au  lieuqueccn'eftoient  que  des 
parties  d'une  même  propofition. 

Or  cette  preuve  eft  bien  aifée.  Car  n'y  ayant  point  d'autre 
différence  entre  un  enty  même  &  un  Syllogifme,  finon  que  dans 
l'enrymemeil  y  a  une  propofition  omife ,  &  qu'elles  font  tou- 
tes experimées  dans  un  Syllogifme,  il  s'enfuit  que  tout  argu- 
ment qui  par  l'adition  d'une  propofition  devient  Syllogif. 

M 


Ch.  V. 


90    Liv.  IL  Explication  despa.Jfa,ges^  ou  rEuchar'ifiie 
me  parfait,  eft  un  enthymeme  lorfque  cette  propofition  n'cfl 
pas  exprimée. 

Qlic  ceux  qui  s'intereflênt  à  la  réputation  d'Aubertin  pren- 
nent donc  la  peine  d'ajouter  cette  majeure  au  premier  argu- 
ment du  Cardinal  du  Perron  :  Quiconque  fait  fon  Corps  ,  d'une 
fiyirc  ley.de  de  ce  Corps  ^  accomplit  les  figures  légales  ^  &  il  verra 
s'il  ne  fera  pas  en  forme  eftanc  exprimé  &dirporé  en  cette  ma- 
nière 5 

Quiconque  fait  fon  Corps ,  de  ce  qui  en  efloit  dans  la  loy  une  figu- 
re ,  accomplit  les  figures  légales. 

Or  fi  J.  C.afaitfion  corps  du  pain:  é^  fi  le  pain  en  cftoit  une  figure 
légale. 

Donc  J.  C.  a  accompli  les  figures  légales. 

M.  Claude  eft:  fans  doute  trop  habile  pour  ne  pas  recon- 
noiftre  tout  d'un  coup  que  cet  argument  eft  tres-bon  &:  tres- 
concluant,  qu'il  eft  de  la  première  figure  du  premier  monde  ,^ 
parce  que  la  féconde  proportion  eftant  non  particulière  mais 
iîngulierej  eft  équivalente  à  une  univerfelle ,  &;  que  bien  loin 
d'eftre  monjhueux^  il  n'y  a  rien  au  contraire  de  plus  ordinaire 
dans  les  Auteurs  que  ces  fortes  d'argumens. 

Il  n'y  a  qu'à  en  faire  autant  du  fécond  argument  en  y  ajou- 
tant de  même  une  majeure  en  cette  manière. 

Celuy  qui  devant  accomplir  les  figures  de  la  loy  ,  fait  fon  corps  de 
ce  qui  en  efioit  une  figure  légale  ^  fut  juftement  ce  qu'il  avait  deffein 
de  faire. 

Or  J.  C.  devait  accomplir  les  figures  de  la  loy ,  (jr-  le  pain  dont 
il  fit  fon  corps  en  efioit  une  figure  légale. 

Donc  en  le  changeant  en  fon  corps  il  a  accompli  ce  qu'il  devoit 
faire. 

Qu'eft-ce  qu'il  y  a  de  monfirueux  dans  ces  argumens  ?  Ce- 
pendant ils  ne  font  difFerens  de  ceux  du  Cardmal  du  Perron 
qu'en  ce  que  l'on  ajoute  à  chacun  une  majeure  que  ce  Cardi- 
nal n'a  omife  que  parce  qu'elle  eftoit  trop  claire.  Donc  avant 
cette  addition  ce  n'eftoient  que  à.ts  enthymemes,  qu'Auber- 
tin  par  une  erreur  que  je  neveux  pas  nommer  du  nom  qu'elle 
mérite,  a  pris  pour  des  w^»/?r^/ ,  en  les  prenant  pour  des  Syllo- 
gifmes.  Voila  ce  que  c'eft  que  de  faire  vanité  de  ces  connoif- 
fances  puériles.  Car  une  faute  de  ce  genre  ne  feroit  rien  à  un 
homme  que  le  hazard  feul  y  auroitfait  tomber,  mais  elle  n'eft: 
pas  pardonnable  à  un  Miniftre,  qui  ayant  gris  fujet  d'une  chi- 


cfl  appellée  type  ^  image  ^  figure ,  t^c.  91 

canerie  de  Logique  d'infulcer  outrageufement  à  un  Cardinal,  Ch.  V. 
fe  trompe  Iny.  même  tres-groffierement,    èc   fait  voir  qu'il 
ignore  les  principes  les  plus  communs  d'une  fcience  dont  il  fe 
pique. 

C'eft  à  quoy  fe  reduifent  ces  terribles  argumens  recherchez 
de  toutes  parts,  Vjlidis  r.itionibus  uniequaque  conqutfitis ^  par 
lefquels  Auherrin  devoit  faire  voir  la  fauflèté  du  fens  que  le 
Cardinal  du  Perron  donne  à  ce  paiîage  de  Tertullien  que  nous 
avons  examine.  Et  comme  il  a  paru  que  ce  n'eftoient  que  de 
purs  Sophilmes,  il  doit  maintenant  paiîer  pour  confiant  que  ce 
fèns  eft  très-probable,  &  que  s'il  n'eft  pas  abfolument  certain 
que  ce  foit  celuy  de  Tertullien ,  il  eft  au  moins  certain  que  les 
Miniftres  fonttres-injuftes  d'avoir  tant  fait  de  bruit  par  toute 
l'Europe  fur  un  paflage  de  cette  nature  ^  c'eft  à  dire  qui  peut 
eftre  expliqué  tres.probablementen  deux  manières  quileur  font 
entièrement  contraires ,  &;  qui  ne  leur  fêroit  pas  même  favo- 
rable eftantexpliq  lé  félon  leur  fens,  parce  que  ce  fens  eft  en- 
core ambigu,  &  ne  peut  eftre  déterminé  que  par  la  docTirine 
de  l'Eglife  de  ces  fiecles  là ,  que  nous  avons  montré  eftre  tres- 
conftamment  celle  de  la  prelênce  réelle  6c  de  la  tranftubftan- 
tiation. 


CHAPITRE    VI. 

Examen  de  trois  Paffaz^es-^  le  premier  de  Pachymcre  :  le  fécond  de  S. 
Auqufiin  contre  Adimante:  le  troifiéme  du  même  S.  Augufiin 
dans  fa  Lettre  a,  Boniface.  On  fait  voir  que  les  Miniftres  en  abu- 
fent  de  même  que  du  paffage  de  Tertullien. 

RI  E  N  n'eft  plus  capable  de  nous  affurer  que  des  Auteurs 
ont  efté  effectivement  dans  un  fentiment ,  que  lors  qu'on 
voit  qu'ils  difent  precifément  ce  qu'ils  ont  dd  dire ,  fuppofé 
qu'ils  ayent  efté  dans  ce  fentiment,  &.  qu'ils  ne  difent  jamais 
ce  qu'ils  n'ont  pas  du  dire ,  &  ce  qu'ils  n'auroientpas  manqué 
de  dire,  s'ils  en  avoienteu  un  autre.  Qu'ils  difent  fouvent  ce 
qu'ils  ont  dii  dire  fouvent-,  rarement  ce  qu'ils  ont  dû  dire  ra- 
rement, &  que  toutes  ces  expreffions  font  accompagnées  des 
circonftances  naturelles ,  que.  la  raifon  6c  la  nature  y  dévoient 
joindre. 

M  ij 


^t       Li  V.  W!  Explication  des pA^ages ,  oà  ÎEuehxriJïis 

Nous  avons  déjà  vérifié  la  pluiparc  de  ces  remarques  dr.ns 
les  expreflions  des  Pères  qui  contiennenc  la  doctrine  de  la  pre- 
fcnce  réelle.  Car  nous  avons  montré  qu'ils  fe  fîmt  juftement 
exprimez  comme  ils  le  dévoient  pour  nous  perfuader  qu'ils 
avoient  efté  dans  cette  dodrine,  en  nous  difant  fi  fou  vent  que 
ce  que  nous  recevons  à  la  Communion  eftoit  le  vray  Corps  ^  U 
propre  Corps ,  le  Corps  même  de  J.  C.  qu'il  efioit  en  nous  par  luy- 
mème ,  par  [on  propre  Corps ,  par  fa  propre  Chair  i  &:  que  toutes  ces 
expreffions,&  mille  autres  femblables  qui  fe  trouvent  dans  leurs 
Ecrits,  font  toutes  accompagnées  de  fuites  naturelles  qu'elles 
dévoient  avoir  félon  la  doétrine  de  la  prefence  réelle; 

On  a  fait  voir  qu'ils  le  font  exprimez  de  cette  manière  dans 
les  occafions  où  ils  le  dévoient  faire  naturellement  ;  comme 
en  inftruifant  de  nouveaux  baptilêz  de  ee  qu'ils  dévoient  croi- 
re de  l'Euchariftie  :  en  parlant  à  des  perfonnes  qui  n'euflent  pu 
entendre  la  bizarrerie  de  leur  langage ,  s'ils  n'eufifent  pas  vou- 
lu eftre  entendus  à  la  lettre  .-En  commentant  l'Ecriture  Sain- 
te :  En  combattant  les  doutes  qu'ils  ont  cru  pouvoir  naiftre  de 
cette  dodlrine  :  En  traittant  dogmatiquement  de  l'Euchariftiej 
&  qu'ils  n'ont  jamais  parlé  fi  clairement  quelorfques'arreflans 
long  tenn-ps  fur  ce  fujet,  ils  ont  eu  moyen  de  nous  inftruire  plus 
à  fond  de  leur  fentiment. 

Nous  avons  fait  voir  qu'ils  n'ont  jamais  dît  ce  que  Fa  do- 
drine  de  la  prefence  réelle  les  devoit  abfolument  empêcher 
de  dire  :  Qu'ils  n'ont  jamais  repris  perfonne  de  croire  que  J. 
C.  fuft  prcfent  :  Qu'ils  n'ont  jamais  craint  ny  que  les  paroles 
de  l'Ecriture,  ny  que  les  leurs  mêmes  fufifentprifes  parleurs 
auditeurs  en  un  fens  trop  littept^  trop  g-roffier  :  Que  la  pré- 
caution qu'ils  ont  eue  pour  empêcher  qu'on  ne  prift  à  la  lettre 
mille  métaphores  de  l'Ecriture  qui  n'ont  jamais  trompé  perfon- 
ne ,  n'a  jamais  efté  obfervée  par  eux  à  l'égard  des  expreflions 
qui  marquent  fi  precifément  la  prefence  réelle:  Qu'ils  n'ont 
jamais  dit  que  le  Corps  de  J.  C  ne  fi.ift  pas  contenu  dans  les 
Myfteres  du  pain  &  du  vin  ,&  que  ce  Corps  ne  fuft  pas  recea 
dans  les  noftres  .•  Qii'ils  n'ont  jamais  exprimé  ces  prétendus 
doutes  Calviniftes,  fi  le  pain  peut  eftre  rendu  figure  du  Corps 
de  J.  C.  Si  le  Corps  de  J.  C  eftant  dans  le  Ciel  peut  impri- 
mer fa  vertu  au  pain  qui  eft  fur  la  terre.  Tout  cela  ne  fe  trou- 
ve point  dans  les  Pères,  parce  que  c'eflrla  dodrine  de  l'abfên- 
ce  réelle  qui  devoit  produire  ces  difcours ,  5c  que  cette  do,^ 


cjî  a.ppellée  type  ^  imige  ^  figun,  ft)c.  93 

Arine  a  toujours  efté  tres-ëioigné  de  leivr  pcnfee.  Ch.  VI. 

Il  ne  refte  plus  que  de  faire  voir  icy  qu'ils  ont  dit  de  même 
rarement  <  ce  qu'ils  dévoient  dire  rarement,  &  qu'ils  l'ont  dit 
de  la  manière  qu'ils  le  dévoient ,  &  avec  les'circonftances  qui 
s'y  dévoient  rencontrer. 

Car  il  y  a  certaines  expreffions  ambiguës  que  la  dodrinc 
de  la  prefencc  réelle  peut  produire ,  Se  qui  peuvent  ainfi  (e  ren- 
contrer dans  les  Pères  ;  mais  qui  n'y  peuvent  néanmoins  être 
que  rarement ,  parce  qu'elles  nous  font  regarder  ce  Myftere 
d'une  manière  moins  naturelle  &  moins  conforme  aux  idées 
communes  que  lafoy  &  la  pieté  en  donnent. 

L'idée  qui  porte  à  prendre  dans  cette  propofîtion  ^Cecy  cfi 
mon  Corps ,  le  mot  de  Cecy  pour  le  voile  extérieur ,  le  figne  6c 
le  Sacrement,  eft  proprement  de  ce  genre.  Car  l'Euchariftie 
comprenant  j  comme  nous  avons  déjà  dit ,  &  le  Corps  de  J.  C.  . 
&  le  voile  extérieur  qui  le  cache  à  noftre  vu<;,  l'un  &  l'autre 
peut  eftre  exprimé  &  entendu  par  le  mot  de  Cecy  ;  puifquc  , 
comme  nous  avons  déjà  dit,  le  Corps  de  J.  C.&le  voile  exté- 
rieur conviennent  dans  cette  idée  confufe  de  chofe  prefentc 
qui  s'exprime  par  ce  mot.  Mais  il  eft  vray  qu'on  a  beaucoup 
plus  de  pente  a  expliquer  le  mot  de  Cecy  de  la  fubftance  pre- 
fènte  ,  &  de  ce  qu'il  y  a  de  principal  dans  l'objet  prefent ,  que 
d'une  apparence  qui  n'y  eft  que  pour  luy  fervir  de  voile.  Mais 
quoy  que  l'autre  idée  foit  moins  naturelle,  elle  a  pourtant 
auffi  fa  vray  femblance,  parce  que  le  mot  de  Hoc  a  quelque 
rapport  à  ce  qui  frappe  les  fens.  Et  c'eft  pourquoy  Jacques  de 
Vitri  remarque  exprefîement  qu'il  y  en  avoit  parmi  les  Scola- 
ftiques  qui  les  expliquoient  en  ce  fens.  Quibufdafn  vidctur quod 
forma  panis  iemonfiretur  ut  Jit  fenfus ,  Hoc  ,  idefi  fub  hoc ,  ejl  Cor-  c] r^^'°^^j^t' 
fui  meum. 

Il  ctoit  difficile,  pour  ne  pas  dire  moralement  impoffiblc  , 
que  tous  les  efprits  du  monde  confpiraflent  tellement  à  pren- 
dre le  mot  de  Cecy  dans  un  de'ccs  fens,  que  l'autre  fuft  généra- 
lement abandonné.  Cela  ne  fe  rencontre  prcfque  jamais  dans 
les  idées  mêmes  les  plus  bizarres  &  les  moins  raifonnables ,  6c 
ç'auroitefté  mal  connoiftre  l'efprit  des  hommes  que  de  s'y  at- 
tendre en  un  fujet  comme  celuy-cy.  Mais  il  eft  vray  pourtant 
que  l'on  n'auroit  pas  dû  efperer ,  ce  qui  eft  effedivement  arri- 
vé 5  c'eft  que  tous  les  Auteurs  Ecclefiaftiques_,  à  l'exception  de 
Mois  dont  nous  traiterons  l'un  après  l'autre ,  priilènt  generale- 

M  iij 


94  Liv.  II.  Explication  des pajfages  ^  oit  l'Sucharifiie 
mène  ces  p?.roles  dans  le  premier  de  ces  deux  fens  ^  c'efl;  à  dire 
qu'ils  entcndiiîènc  par  ces  termes  -,  Cecy  efi  mon  Corps ,  que  l'ob- 
jet prefent  efl;  efFedivement  le  Corps  de  J.  Q  fans  faire  pafTer 
l'efprit  par  cette 'idée  de  figne  &  de  figure.  Car  il  n'y  en  a  que 
trois  qui  s'y  fuient  arreflez  ,  qui  iont  S.  Auguftin,  Facundus, 
&  Pachymere ,  commentateur  de  S.  Denis ,  dont  nous  exami- 
nerons lespafTages  feparément,  en  avoiiant  d'abord  à  Tégard 
de  tousles  trois  qu'ils  ont  entendu  par  le  mot  de  Cecy ,  la  figure 
ou  le  Sacrement  du  Corps. 

Qiiandles  Miniftres  auroient  plufieurs  paffages  de  cette  for- 
te, leurcaufe  n'en  feroit  pas  mieux  appuyée,  puifque, comme 
nous  avons  montré,  la  doctrine  de  la  prefence  réelle  pouvant 
produire  cette  exprefîion ,  il  la  faudra  déterminer  par  la  docT:ri- 
ne  confiante  de  ces  fiecles-là,  qui  neleureft  pas  f^ivorable. 
Mais  n'ayant  que  ces  palîages  à  oppofer  «à  ceux  de  tant  de  Pères , 
c^ui  concluent  de  ces  paroles  i  Cecy  e^  mon  Corps  ^  que  le  pain 
conlacré  eft  le  Corps  même  de  ]C.  dont  nous  avons  montré 
que  les  paroles  ne  fe  pou  voient  détournera  un  fens  de  figure  j 
il  feroit  non  feulement  déraifonnable,  mais  ridicule  de  préten- 
dre qu'il  y  euft  quelque  égalité. 

Nous  commencerons  par  Pachymere,  parce  quelafoy  de  cet 
Auteur  ne  pouvant  eftre  douteufè,  pui(qu'il  eftoitdu  temps  où 
l'on  fignoit  en  Grèce  la  Tranflubftantiation, il  en eft d'autant 
plus  propre  à  faire  voir  qu'on  peut  expliquer  cette  propofition, 
Cecy  efl  mon  Corps  ^  comme  nous  verrons  que  S.  Auguftin  bc 
Facundus  l'ont  expliquée,  fans  rien  dire  de  contraire  à  la  do- 
ctrine de  la  prefence  réelle,  ôcen  fuppofant  que  les  fignes  font 
réellement  joints  avec  le  Corps  de  J.  C. 

Il  ne  faut  pour  eneftreperfuadé  queconfiderer  lepaflage  de 
cetAuteur.  C'efb  dans  fiParaphrafe  lur  S.  Denis,  où  après  avoir 
rapporté  ces  paroles  de  S.[Denis,'iepfe'p8?  rà  ^êiTccrct,  ^  ùw'  (^jv 
âyi  Tct,  J,u,vn/4<''*  5  il  ajoute  5  C!L<^\)^i(ai  cei  VpiT'oC  ê('<ji'  tol'  toiolutcc 
cTuVCoActjOTi  ^êTct  Toc^ÉiTfvOK  Actba»  «.'pTOF  ^  Ttt  e|»^j  C'eft  à  ditC  :  jLe 
Prejhe  confacre  les  divins  Myftercs  ^  (^  il  montre  ce  qu'il  a  célébré 
par  fes  loiian'ies ,  déclarant  que  ce  font  les  Cymbales  de  J.  C.  parce 
qu'ayant  pris  du  pain  après  la  cène  il  dit  :  Cecy  eft  mon  Corps. 
Ainfi  félon  Pachymere,  ces  paroles  de  J.  C.  Cecy  eft  mon  corps 
aufquelles  il  fait  vifiblement  allufion ,  ne  font  qu'une  déclara- 
tion que  le  pain  &  le  vin  font  les  fymboles  de  ].  C.  N*eft-ce  pas 
Uj  diront  les  Miniftres,  noftre  fens  d-efigure  ?  ÎM'eft-ce  pas  à  di- 


efl  dppellée  type ,  whige ,  fignre ,  ^c.  9; 

re  que  ces  paroles:  Ceiy  efi  mon  corps  ,  fignificnt,  c'efl:  le  Tym-  Ctj.  Y. JE 
bole  S^  le  type  de  mon  Corps,  puifque  Pachymere  aiïurc  que     / <^P, 
Je  Preftre  déclare  par  ces  paroles,  non  que  le  pain  confacré       '^Él 
efl  le  corps  de  J.  C  mais  que  le  pain  &  le  vin  font  les  fymboles         J 
de  J.C'i  En  effet  la  confequence  cft  bien  tirée  jufques  là.  Maiy 
pour  faire  voir  que  quand  cet  Auteur  dit  que  le  pain  5c  le  vin 
font  les  fymboles  du  corps  de  J.  C.  ^  que  c'efl  ce  qui  efl:  mar- 
qué par  ces  paroles  :  Cccy  efi  mon  corps ,  cecy  cfi  mon  Saw^^  il 
n'entend  pas  des  fymboles  feparez  du  corps  de  J.  C.  mais  des 
fymboles  qui  font  le  corps  même  de  J.  C.  il  ne  faut  que  con- 
fiderer  ce  qu'il  dit  un  peu  plus  bas. 

Au  lieu  ,  dit- il ,  que  plujîeurs  ne  s'arrefient  qu'aux  divins  fymbo- 
les ,  ne  pouvant  conjïderer  rien  de  plus  haut  j  l'Hiérarque  porte  la 
veu'é  de  fon  efprit  jufques  aux  Prototypes  de  ces  fymboles ,  qui  font 
le  (orps  même  &  le  fang  vicme  du  Seigneur,  croyant  que  les  chofes 
propopes ,  c'efl  a  dire  le  pain  ^  le  vin ,  ont  efté  changées  en  ce  corps 
ér-  en  ce  fing  par  l' Efprit  fiint  ^  tout-puiffant.    Ainfî  cette  ex- 
preflîon  que  le  Prêtre  déclare  par  les  paroles  de  l'Evangile  que  le 
pain   dj'  le  vin  font  les  fymboles  de  J.  C.  eft  compatible  avec  la 
créance  que  ces  fymboles  font  changez  par  le  S.  Efprit  au  corps 
&  au  fang  de  J.  C.  &  ces  fymboles  du  corps  &  du  fangde  |.  C. 
font  en  même  temps  fon  corps  &  fon  fang ,  ou  contiennent  fon 
corps  S:  fon  fang.  Car  l'une  &  l'autre  exprefTion  ne  fîgnifîe  que 
la  même  chofe ,  quoyque  par  différentes  manières  de  la  con- 
cevoir. Si  par  le  mot  de  fymbole  on  entend  la  fubftance  pre- 
fente  reprefentant  par  fon  voile  extérieur  le  corps  de  J.  C. 
alors  les  fymboles  font  J.  C.  même  ;  fî  l'on  entend  le  feul  voi- 
le ,  les  fymboles  contiennent  le  corps  de  J.  C.  &;  font  fymbo- 
les du  corps  de  J.  C.  prefent. 

Ce  pafTage  peut  fervir  d'éclaircifîèment  à  celuy  de  S.  Augu- 
flm  qui  efl  tiré  du  livre  qu'il  a  fait  contre  Adimante,  &  dans 
lequel  on  doit  remarquer  d'abord  qu'il  eft  muni  des  circon- 
ftances  qui  font  prefque  toiijours  jointes  aux  exprefTions  extra- 
ordinaires. 

S.  Augnflin  n'a  eu  defTein  dans  cet  cndroit-lA  d'inflruire 
perfonne  de  ce  qu'il  falloit  croire  de  l'Euchariflie.  Ainfi  on  ne 
doit  point  s'étonner  qu'il  n'en  dife  preciféjnent  que  ce  qui  étoic 
neceffaire  à  fon  fujer. 

De  plus  la  matière  qu'il  traitoit  le  portoit  à  chercher  des 
exemples  où  le  fîgne  extérieur  full  nommé  du  nom  de  I4  chofe 


çé     Li V.  II.  Explication despajfdges^  où  ÏEuchmflie 
fîgnifiée.  Et  l'on  fçait  combien  ces  fortes  de  vues  font  capables 
d'engager  les  Auteurs  à  des  expreflîons  &:  à  des  raifonnemens 
moins  ordinaires. 

Voicy  l'occafion  qui  a  porté  S.  Auguftin  à  celle  cy  Le  Ma- 
nichéen Adimante  pour  montrer  que  le  Dieu  de  l'ancien  Tc- 
ftament  étoit  contraire  à  ccluy  dunoveau  ,  avoir  al  légué  que 
le  Dieu  de  l'ancien  Teftament  avoit  deffendu  de  manger  du 
fang,  par  cette  raifon  que  le  fang  eft  l'ame  de  la  chair  J  ce  qui 
fuppofoit  qu'on  pouvoir  nuire  à  l'ame,  au  lieu  que  J.  C.  avoic 
déclaré  dans  l'Evangile  qu'on  ne  pouvoir  nuire  à  l'ame. 
Comme  cette  objeclion  n'étoit  fondée  que  fur  ce  que  le  fang 
cfl:  appelle  ame  dans  le  DeuteronomC;  S.  Auguftin  y  répond 
d'abord  qu'il  ne  s'agit  dans  le  pafliige  du  Deuteronome  que  de 
l'ame  des  beftes ,  au  lieu  que  J.  C.  parle  de  l'ame  de  l'homme. 
Mais  pour  achever  de  defarmer  le  Manichéen,  il  répond  en 
fécond  lieu  que  le  fang  eft  appelle  ame,  purce  qu'il  en  eft  le 
fisine.  Et  comme  il  avoit  befoin  d'exemples  où  le  fii:;nefuft  ap- 
pelle du  nom  de  lachofe  fîgnifiée,  il  allègue  &  celuy  de  l'Eu- 
chariftie,  où  le  Sacrement,  félon  luy,  eft  appelle  Corps  de  J.C. 
&  celuy  de  la  pierre  du  defert  qui  eft  appellée  Chnft  par  l'A- 
potre.  Le  Seigneur,  dit-il ,  n'a  point  fait  difficulté  de  dire  :  Ceey  efi 
mon  Corps ,  lorfqu^il  donna  le  figne  ou  le  Sacrement  de  fin  corps 
Non  eni!n  Deus  duhitavit  du  ère  :  Hoc  èfi  corpus  mcum^  cùmjt- 
qrium  d.trct  f^r/mj /a/.  Et  plus  bas.  Le  Sang  efi  l'ame ,  comme  la 
pierre  étoit  Chrifi.  Sic  efi  Sanyiis  anima ,  quomodo  petra  erat 
Chrifius. 

Les  Miniftres  qui  prétendent  avoir  droit  d'expliquer  tout  à 
leur  avantage,  au  lieu  de  conclure  feulement  que  S.  Auguftin 
a  cru  que  le  Sacrement  eftoit  figne  du  Corps  de  J.  C.  prefent, 
comme  le  fang  eft  figne  de  l'ame  prefente,  en  concluent  qu'il 
eft  figne  de  J.  C.  abfent ,  comme  la  pierre  du  defert  eftoit  fî- 
gnede  J.  C.  abfent:  mais  ils  le  concluent  contre  la  raifon ^ôc 
par  un  caprice  fans  fondement. 

Car  ces  deux  exemples  de  S.  Auguftin ,  du  Sang  qui  eft  ap- 
pelle ame ,  de  la  pierre  appellecChrift,  prouvent  qu'il  y  a  de 
deux  fortes  de  fignes. 

Il  y  a  des  fignes  conjoints  iiux  chofes  ,  comme  le  vifage  fi- 
gne de  l'eTprit,  eft  conjoint  à  cet  efprit.  Les  fignes  des  ma- 
ladies ^  aux  maladies ,  6c  le  fang  à  l'ame  des  beftes,  félon  l'o- 
pinion de  S.  Auguftin. 


ifi  appellée  type  ^  image  ^  fgare^  ^c.  97 

.    ïl  y  en  a  defeparez  des  chofes  ;  comme  la  pierre  du  défère,  Ch.  VL 
qui  étoïc  feparée  de  J.  C.  félon  fon  humanité  ,  quoy  qu'elle 
JuY  fuft  jointe  félon  fa  divinité,  qui  eft  éternelle  &  qui  rem- 
plie toutes  choies. 

Ces  fignes  conjoints  &  ces  lignes  feparez  conviennent  dans 
cette  qualité  commune  que  l'on  donne  quelquefois  aux  fignes 
le  nom  de  la  chofe  fignifiée.  On  dit  que  le  iang  cil  l'ame  i  on 
dit  que  la  pierre  eftoïc  Chrifl.  On  ne  peut  donc  conclure  pre- 
cifément  de  ces  expreiTions  ni  que  la  choie  eft  prefente  m 
qu'elle  eft  ab fente. 

Si  on  conclut  de  cequ'il  eft  dit,  que  le  fang  eft  l'ame  ,  que 
l'ame  eft  abfente  ,  c'eft  mal  conclure. 

Si  on  conclut  de  ce  qu'il  eft  dit  ,  que  la  pierre  éroit  Chriftj 
que  J.  C.  étoit  prefent  ou  joint  à  cette  pierre  ,  ce  fera  encore 
mal  conclure. 

Saint  Auguftin  dit  que  dans'ces  paroles  ^  Cecy  pft  mon  Corps , 
la  chofe  fignitiée  eft  affirmée  du  figne  ,  &  il  n'ajoute  rien  da- 
vantage. Que  s'enfuit-il  de  là  ?  Qi-ie  le  corps  de  |.  C.  y  eft 
prefent  ?  Non.  Qii'il  en  eftabfent  ?  Non.  Ni  l'un  ni  l'autre  ne 
s'enfuit  precifément  de  ces  paroles  ^  &  le  paflàge  ne  prouve 
rien  direirtement,ni  pour  les  Catholiques  ni  pour  les  Calvini- 
ftes.  C'eft  un  paifage  indéterminé,  dont  il  faut  chercher  le  fens 
dans  le  grand  livre  de  la  Tradition  de  ce  fiecle-là,  &  dans  les 
autres  ouvrages  de  S.  Auguftin.  Car  comme  ce  Père  en  di- 
fant  que  le  Sang  eft  l'ame,  parce  qu'il  en  eft  le  figne,  a  joint 
dans  Ion  efprit  à  cette  expreflîon, l'idée  que  ce  fang  eftoituni 
à  l'ame ,  fuivant  le  fentiment  qu'il  avoit  de  l'ame  des  beftes 
quoy  que  cette  union  de  l'ame  avec  le  fang  ne  foit  point  mar. 
quée  dans  cette  expreffion  -,  Le  fling  efi  jîyie  de  lame  h  de  mê- 
me en  concevant  que  le  Sacrement  eftoit  appelle  Je  corps  de 
J.  C.  comme  fon  iîgne  ,  il  a  pu  joindre  à  ces  idées  celle  de 
l'union  de  ce  Sacrement  au  corps  de  J.  C.  en  la  tirant  de  la 
doclrine  conftante  de  l'Eglifede  fon  temps.  Il  l'a  fait  fans  dou- 
te s'il  a  efté  perfuadé  de  cette  docT:rine.  Or  il  l'a  efté,  &  on  n'en 
fçauroit  douter  après  les  preuves  que  nous  avons  produites  du 
fentiment  des  Pères  des  Ç\-%  premiers  fiecles. 

Mais  au  moins,  dira- t-on, il  s'enfuit  que j félon  S. Auguftin, 
onnefçauroit  prouver  la  prefence  réelle  par  ces  paroles  j  Cecy 
efl  mon  Cozps^  puifqu'il  les  explique  en  ce  fens  5  Cecy  efi  lafiyi- 
rede  mon  corps -^  èc  que  fi  ce  fens  ne  l'exclut  pas,  au  moins  il  ne 

N 


9?  Liv.ll.  BxpUcdtion  des po-lfages  y  où  VSuchariflie 
Ctî.  IV.  l'enferme  pas.  Je  pourrois  répondre  que  quand  S.  Aiignflin 
n'auroic  pas  vu  toutes  les  confequences  de  cette  explication 
qu'il  propofe  une  fois  en  paifant ,  on  ne  s'en  devroit  pas  éton- 
ner. L'efprit  des  hommes,  quelque  grand  qu'il  foit ,  n'eft  pas 
capable  d'une  prévoyance  fi  étendue .-  Se  vouloir  impofer  cette 
loy  à  ceux  qui  écrivent,  en  concluant  qu'ils  ont  admis  toutes 
les  confequences  qui  femblent  naiftre  de  ce  qu'ils  avancent, 
c'eft  mal  connoiflre  la  portée  de  l'eTprit  humain.  Saint  Au- 
guftin  a  eu  befoin  d'un  exemple  pour  autorifer  une  maxime 
qu'il  avancoit.  L'Euchariftie  s'eft  prefentée  :  Il  s'y  cft  arrefté 
autant  de  temps  qu'il  faut  pour  écrire  une  ligne  :  il  s'en  eft  fer- 
vi.  Donc  il  a  prévu  cette  confequence  ,  qu'il  rendoit  par  Là  ces 
paroles ,  Cecy  efl  mon  corps  ,  inutiles  à  la  preuve  de  la  pre- 
ience  réelle.  Efk-ce-là  juger  équitablementde  la  manière  dons 
les  hommesparlent  ?  Peut-eftre  que  s'il  eût  prévu  cette conle- 
quence,  il  auroit  cherché  un  autre  exemple.  Tant  y  a  qu'il 
n'y  a  tait  aucune  reflexion  ,  ôc  qu'on  n'a  pas  droit  de  fuppo.^er 
qu'il  l'ait  préveuc. 

Mais  je  dis  de  plus  que  cette  confequence  eft  faufTe,  6c  que 
fouvcntlors  même  que  l'on  nomme  le  fignedu  nom  de  la  cho- 
fe,  on  peut  conclure  que  cette  chc-fe  eft  prefente,  non  par  la 
nature  de  rexpre(îîon,mais  par  les  circonftanccs  qui  l'accom- 
pagnent, qui  donnent  l'idée  de  cette  prefence  Car  fi  j'entends 
un  médecin  dire  d'un  malade  5  cette  rougeur  qui  paroît  fur 
fonvifageen:  la  fièvre  ,  c|uoyqu'il  donne  au  figne  le  nom  de  la 
chofe  ,  ne  me  donnera- 1- il  pas  lieu  de  concevoir  cette  fièvre 
comme  prefente?  Or  comme  nous  avons  montré  amplement 
ailleurs,  les  circonftances  particulières  dans  lefquelles  J.  C. 
prononça  ces  paroles  :  Cccy  cfl  mon  corps  ,  porroient  de  même 
les  Apôtres  à  concevoir  qu'il  leur  donnoit  cïFecTiivement  fon 
Corps ,  &:  ils  n'ont  pu  s'en  former  une  autre  idée.  Ainfi  en- 
core que  S.  Auguflin  ait  dit  en  cet  endroit  ,  que  J.  C.  avoic 
donné  le  nom  de  fon  Corps  au  figne ,  il  ne  s'enfuit  pas  que  fclon 
luv, cette  cxpreiïîon  ne  marque  pas  par  les  circonftances  avec 
lefquelles  elle  a  efté  prononcée ,  la  prefence  du  Corps  de  J.  C, 
dans  ce  figne.  Car  l'on  peut  bien  dire  d'un  figne  connu  êc  éta- 
bly  ,  Cccy  efluïie  telle  chofe  ,  encore  que  cette  chofe  foit  abfen- 
te.  Mais  l'on  ne  peut  dire  raifonnablement,  d'un  figne  incon- 
nu &  que  l'on  établit  fur  l'heure  mefme  ^  Cecy  efi  une  telle  cho- 
fe ^  à  moins  que  cette  chofe  ne  foie  efR^diveuient  prefente  Se 
jointe  au  figne. 


cfi  appellée  type  ,  bn-ige  ,  fguy-e  ^  (^-c.  99 

Il  faut  le  fouvenirfLir  ce  iujccde  ce  que  nous  avons  déjà  dit,  Ch.  V  î. 
■qu'il  eft  contre  toute  apparence  que  S.  Auguftin  ait  eu  une  au- 
tre impredîon  que  les  autres  Pères ,  de  la  vérité  fignifiée  par 
ces  paroles  :  Cccy  cfimon  corps  ;  mais  qu'il  eft  tres-polFible  qu'il 
ait  développé  cette  imprefllonparun  autre  tour  &  par  une  ex- 
preiîion  diftcrente  des  leurs,  en  concevant  néanmoins  la  mê- 
me chofe  ;  &;  qu'il  eft  encore  très  poffible  que  cette  exprefllon 
ne  rcprefente  pas  par  la  force  des  paroles  tout  ce  qu'il  conce- 
voit.  De  forte  qu'il  en  faut  toujours  revenir  à  examiner  la 
doctrine  de  ce  Père  &:  de  tous  les  autres  des  fîx  premiers  (îecles , 
puilque  c'eft  par  là  feulement  qu'on  peut  fçavoir  ce  qu'il  a  ,  ou 
n'a  pas  fupplcé  à  cette  expreffion. 

Ainfi  la  queftion  fe  réduit  toujours  à  fçavoir,  fi  S.  Auguftin 
a  cru  que  l'on  prenoit  la  vraye  Chair  de  J.  C.  dans  l'Euchari- 
flie  par  la  bouche  du  corps.  Car  s'il  l'a  cru,  il  eft  indubitable 
que  quand  il  a  dit^*^7-  C.  avait  donne  le  Sacrement  de  [on  corps 
à  fesdifciplcs,  il  a  entendu  parler  d'un  figne  &  d'un  Sacrement 
joint  à  la  chofe.  Or  c'eft  une  queftion  déjà  décidée  ,  &  qu'il 
eltbien  aifé  de  décider  par  S.  Auguftin  même,  comme  nous 
le  ferons  voir  en  traittant  des  cxpreffîons  de  ce  Père  fur  la 
manducation  de  la  chair  de  J.  C. 

On  produit  encore  un  paflage  de  S.  Auguftin  tiré  de  fa  lettre 
à  Boniface,  qu'il  eft  bon  de  joindre  à  celuy  contre  Adimante 
que  nous  venons  d'expliquer,  parce  qu'il  n'a  befoin  que  du 
même  éclaircilîémcnt.  Voicy  tout  ce  qu'il  a  dit  en  ce  lieu. 
Ze  Sacrement  du  corps  de  J.  C.  eft  le  corps  de  J.  C.  en  quelque  ma- 
ni  ère  i  comme  le  S.tcremcnt  de  Li  foy  eft  la  foy.  SicuT  ery)  fecundùm 
quendam  modum^  Sucramentum  corporis  Chrifti ,  eft  corpus  chrifti ,  ' 
Sacramcntum  SanguinisChrifti  eft^fanyiis  chrifti  eft^itu  S-icramen^ 
tum  fidei  fides  eft. 

On  peut  remarquer  fur  ce  paffage  ,  comme  fur  l'autre  ,  que 
S.  Auguftin  ne  traite  point  encore  expreftement  dans  ce  lieu  de 
l'Euchariftie  ,  &:  qu'il  n'a  aucun  deltein  de  marquer  precifé- 
ment  ce  qu'il  en  faut  croire.  Qu'il  eft  attiré  à  confiderer  dans 
l'Euchariftie  la  qualité  de  figne  &  de  Sacrement,  parce  qu'il 
avoir  befoin  d'expliquer  en  quel  fens  on  peut  dire  que  les  en- 
fans  croyent,  quoy  qu'ils  n'ayentpns  de  foy  acluelle  3  fie  qu'il 
vouloit  prouver  que  l'on  pouvoit  dire  que  lesenfansont  lafoy, 
parce  qu'ils  ont  le  Sacrement  de.  la  foy.  Il  falloit  pour  cela 
iîiontrer  que  l'on  donne  aux  fignes  les  noms  des  chofes  figni- 

N  ij 


Tiaft.  de 


loo  Liv.  II.  Explîcdtîou des pAJpigcs ^oû  T EucToariflie 
fîcfes  j&  c'cftceciui  le  porte  à  alléguer  l'exemple  de  l'Eiicl-iâ- 
riftie,  dans  laquelle  on  donne  fonvent  au  Sacremtjit  extérieur 
Je  nom  de  corps  de  J.C.  comme  quand  on  dit,  ^ae  l'on  divi/ê- 
le  corps  de  I.  C.  que  nojire  langue  efi  roupie  du  Sang  de  I.  C.  que 
nous  qoîi fions  le  corps  de  I  C. 
Il  cft  donc  vray  que  S.  Auguflin  dit  dans  ce  pa(îàge  que  le 
corp.  &  ftng.  Sacrement  eft  appelle  le  Corps  de  J.  C.  parcequ'il  en  eft  le 
Domini»  figne ,  ôî.  qu'il  eft  le  Corps  de  J.  C.  en  quelque  maniere,comme 
S.  Anfelme  dit  que  I^cfpecc  du  pain  efiant  regardée  en  elle-même  , 
Ô"  feparément^  ncfl pas  la  chair  (^  le  corps  de  J.C.  ô'  qu'on  ne  l'ap. 
pelle  ainjt  que  par  une  manière  de  parler  commune  dans  l'Ecriture , 
félon  laquelle  on  donne  aux  Sacremens  les  noms  des  chofes  qu'ils  fi. 
gnifient'iEx.  comme  tous  les  Théologiens  enfeignent  que  l'efpece 
vifible  eft  Sacrement  fans  cftre  la  chofe  du  Sacrement  id'où  il 
s'enfuit  qu'elle  n'en  peut  recevoir  le  nom  qu'en  quelque  manière 
&  comme  Ton  fîgne.  Tout  cela  n'eft  que  l'cfFet  de  ce  regard 
que  la  nature  de  TEuchariftie  produit,  par  lequel  on  n'attache 
fa  penfce  qu'au  feu!  fîgne  extérieur  3  auquel  cas  fî  on  vient 
à  le  comparer  avec  le  Corps  de  J.C.  on  ne  le  peut  regarder 
que  comme  Ton  fîgne. 

Je  ne  fçay  files  Miniftres  voudront  infifter  fur  ce  que  Saint 
Auguftin  compare  la  manière  dont  le  Sacrement  eft  appelle 
Corps  de  J.  C.  avec  celle  dont  le  Sacrement  du  Baptême  eft 
appelle  foy  ,  pour  en  conclure  que  comme  faint  Auguftin  n'a 
pas  crû  que  le  Sacrement  de  la  foy  fuft  joint  dans  les  enfans 
avec  une  véritable  foy,  il  n'a  pas  cru  aufli  que  le  Corps  de  J.C. 
fût  joint  au  Sacrement.  Mais  je  fçay  bien  que  cctteobjediorr 
eft  tre  vaine,  &;  très  peu  digne  d'eftre  propofée.  Car  lorfque 
S.  Auguftin  veut  juftifier  que  les  fignes  reçoivent  le  nom  des 
chofes  fignifiées,  il  rapporte  indifféremment  des  exemples  de 
fignes  joints  aux  chofes ,  &:  de  fignes  feparez  ^  parce  qu'il  n'y 
regarde  que  cette  unique  qualité,  de  recevoir  le  nom  des  cho- 
fes fignifiées  dans  laquelle  ils  conviennent. 

Ainfi  ayant  defTèin  de  montrer  dans  le  livre  contre  Adi- 
mante,  comme  on  l'a  déjà  remarqué,  que  l'on  pouvoir  donner 
au  fang  le  nom  d'ame  ,  parce  qu'il  en  eftoirle  figne,  il  rappor- 
te l'exemple  de  la  pierre  qui  cft  appellée  Chrift  ^yfr  efi  fanguis 
anima  quomodo  pctra  erat  Chrifius  ^  fans  confiderer  cette  diffé- 
rence, que  le  fmg  eft  figne  d'une  chofe  prefente,  ôc  que  la  pier- 
le  L'eftok d'une  chofe  ab fente. 


cji  appellée  type ,  image ,  figure ,  f£c.  jor 

C'efl:  donc  en  cette  manicre,  mais  dans  un  fens  contraire  ,  C  H.  VI. 
qu'ayant  à  montrer  que  le  Sacrenlent  de  la  foy  peut  eftre  ap- 
pelle' foy,  il  apporte  l'exemple'du  Sacremct  du  Corps  de  J. 
C.  qui  eft  apellë  Corps  de  J.  C.  Tans  avoir  égard  à  cette  dif- 
férence dont  il  n'eftoit  pas  queftion,  que  le  Sacrement  du 
Baptême  efl:  le  Sacrement  de  la  foy  actuelle  abfente  ,  &  que 
]e  Sacrement  du  Corps  de  J.  C.  eft  le  Sacrement  du  Corps  de 
J.  C.  prefent. 

Si  on  prerendoit  avoir  droit  de  fuppofer  que  les  comparai- 
fons  des  Pères  font  parfaitement  fcmbl  blés,  &  qu'il  leur  en 
faut  imputer  les  conièquences,  il  n'y  a  point  d'herefie  qu'on 
ne  leurpuft  attribuer.  Et  pour  nem'éloigner  pas  de  cet  exem- 
ple de  la  foy ,  je  dis  qu'on  s'en  pourra  fervir  pour  conclure  que 
S.  Auguftin  a  nié  le  péché  origmel ,  6c  l'a  réduit  à  une  pure  im- 
putation ,  fi  l'on  veut  infiller  fur  une  comparaifon  qu'il  en  fait 
aveclafoy  dans  un  de  les  livres  contre  les  Pelagiens ,  où  il  parle 
en  ces  termes  de  l'un  &;  de  l'autre.  T)e  même  que  l'efpnt  de  juftice  p„  ^^^^ 
nfidant  en  ceux  par  qui  les  enfans  renaiffent ,  fait  pajfer  en  eux  m.  i,  j.c.  r. 
la  foy  qu'ils,  ne  fewvent  encore  avoir  -par  leur  propre  uolonté  j  de 
même  la  chair  de  péché  de  ceux  par  qui  ils  naijfent ,  fait  pt^fTcr  tn 
eux  le  crime  qu'ils  n'ont  pii  contraFier  par  des  actions  qu'ils  aycni 
faites  dans  leur  vie.  Car  on  pourroit  conclure  félon  cette  bel- 
le manière  de  raifonner  ,  que  comme  la  foy  acluelle  dont  S. 
Auguftin  parle,  n'efl  point  réelle  ,  mais  en  quelque  forte  im- 
putative dans  les  enfans 5  de  même  le  péché  originel  n'efl: 
qu'une  pure  imputation  de  celuy  d'Adam. 

Mais  toutes  ces  fortes  d'argLimens  fuppofent,  que  qui  com- 
pare deux  chofes  enfemble  ,  les  compare  en  tour.  Et  c'efl:  lai 
plusfauflè  de  toutes  les  maximes,  &  la  plus  contraire  à  la  na- 
ture de  l'efprit  humain,  qui  aimant  naturellement  lescompa- 
raifons ,  6c  n'en  trouvant  prefque  point  de  parfaitement  juftes, 
efl  obligé  par  necefllté  de  fe  fervir  des  plus  approchantes ,  en 
ne  s'appliquant  qu'à  ce  qu'elles  ont  de  femblable,  fans  avoir 
égard  aux  différences. 


Nii| 


loi  Liv.  lî.  Eicplication  des pa (piges  où  lEucha.riJiie 


L 


CHAPITRE    VII. 

Explication  du  faffaqe  de  Facunins, 

E  célèbre  paffige  de  Facundiis  ne  contient  pas  une  diffi- 
culté différente  de  celle  deceuxdeS.  Aiiguftin  que  nous 
venons  d'examiner.  Et  ainfi  il  n'y  a  qu'à  y  appliquer  ce  que 
nous  en  avons  dit. 

Il  eft  certain  que  i'efpritpeut  s'attacher  au  Sacrement  fepa- 
'rément  du  Corps  de  J.  C.  quoyque  l'onconfidcre  l'un  ScTau, 
tre  comme  joints  enfemble.  Et  il  cfl:  certain  que  dans  cette 
comparailon  on  doit  dire  en  parlant  exactement  que  le  Sacre- 
ment n'efi  pas  proprement  le  corps  de  J.  C.  mais  quil  le  contient. 
Tous  les  Auteurs  Catholiques  parlent  de  la  forte,  quand  ils 
parlent  du  Sacrement  feul  &  feparé  du  Corps  de  J.  C.  par  la 
penfce,  comme  nous  l'avons  fait  voir. 

Facundus  ne  dit  rien  davantage  ,  &  il  n'y  a  qu'à  fe  mettre 

cela  dans  l'cTprit  pour  n'y  trouver  plus  de  difficulté. 

Cet  Auteur  avoit  entrepris  de  juftiiier  une  expreffion   de 

lacund.  1   9.  ^i^el^"es  ancicns  qui  avoient  dit,  que  J.  C.  a  reccu  l'adoption 

p,  40*.  des  enfans  -,  d'où  il  lémble  qu'on  pouvoit  conclure  qu'ils  n'a- 

voient  donc  confideré  J.  C.  que  comme  fiis  adoptif. 

lia  recours  pour  cela  à  la  même  folution  que  S.  Auguftin, 
dont  il  avoit  beaucoup  lu  les  Ouvrages,  a  employée  dans  fa 
lettre  à  l'Evêque  Boniface ,  qui  cfl  que  l'on  peut  dire  qu'on 
recjoit  une  ciiofc  quand  on  reçoit  le  Sacrement,  parce  qu'on 
donne  au  Sacrement  le  nom  delà chofe^Sc  qu'ainfiJ.C.  ayant 
receu  le  Sacrement  d'adoption  dans  fa  Circoncifîon  &  dans 
fon  Baptême,  on  pouvoit  dire  qu'il  avoit  receu  l'adoprion. 
Sacramcntum  adoptionis  fufcipere  dic^natus  efl  Chrijius  ^  quando 
tircuncifus  eft  ,  O"  quando  baptifatus  efi  j  O'  potejl  Sacramcntum 
sdoptioyus  adoptio  nominari. 

Toute  la  difficulté  de  cette  preuve  confifioit  à  montrer  que 
les  Sacremens  prenoient  le  nom  de  la  chofe  flgnifiée,  les  exem- 
ples en  eftant  afTez  rares.  Il  a  donc  recours  pour  cela  àl'Eucha. 
riflie  en  comparant  les  efpcces  viflbles  avec  le  Corps  de  J.  C. 
qu'elles  fignifient  &  qu'elles  cachent ,  &;  il  en  parle  de  cette 
forte  :  Le  Si*(rerriehtde  l'adoption  peut  ejhe  appelle  adoption ,  corn- 


efi  appellée  type ,  image ,  figure ,  ^c.  105 

Hte   le  S'icrcment  du  corps  érdufiin'^dc'j.C.quiejt  daHslcpain(^  Ch.   VII. 

if  calice  confacrc,efi  appelle  fon  corps  &  fon  fang.  2^on  que  ce  pain 

^  ceculue  [c'eH  à  dire  l'objet  ienfible  )  foicnt  proprement  corps  é" 

fanz  ,  mats  parce  qu'ils  contiennent  le  myfiere  de  ce  corps  é"  de  ce 

fang.  C'eft  à  dire  ,  que  cet  objet  extérieur  qui  s'appelle  pain  8c 

vin  dao^  le  langage  commun  ,  n'efl:  pas  proprement  le  corps  de 

J.  C.  &  qu'il  n'en  efl:  que  la  figure  &  le  Sacrement ,  quoyqu'on 

ne  Uiire  pa>  de  l'appeller  Corps  de  J.  C.  comme  quand  on  dit 

que  l'on  rotnpt ,  que  l'on  divife ,  que  l'on  unit  le  corps  de  J.  C.  au 

yT/ffg,  quoyque  ces  actions  ne  s'exercent  que  furies  fymboles. 

C'eft  dans  ce  même  iens  que  Facundus  prenant  toujours  le 
Sacrement  pour  le  ieul  ob|ct  exteneur,  ajoute  ^«ir  J.  C. avait 
appelle  le  pain  &  li-'  calice  qu'il  avoit  béni  ,fon  corps  é"  [on  fang. 
Et  que  comme  l'on  dit  fort  bien  que  les  fidelles  qui  re(^oivcnt  le  Ca- 
çrement  du  corps  (^  du  fang^  reçoivent  le  corps  deJ.C.de  même 
l'on  a  pu  dire  que  J.  C.  ayant  receu  le  Sacrement  de  l'adoption  ,  a 
r-eceu  l'adoption.  1  . 

Mais  les  fidelles  ne  re<joivent.ils  point  le  Corps  de  ,  J.  Ç^  en 
une  autre  manière  qu'en  recevant  fon  Sacrement  ?  Ne  le  re- 
coivent-ils  pas  luy- même  ?  Ouy,  ils  le  re<^ôivent,  &  Facundus 
ne  le  nie  pas.  Mais  comme  l'aclionde  recevoir  fe  termine 
pjus  proprement  au  Sacrement,  qu'au  Corps  de  J.  Ç,  parce 
que  le  Sacrement  agit  fur  les  (ens ,  au  lieu  que  le  Corps  de  J.  C. 
n'y  agit  point,  Facundus  a  crû  devoir  fuivre  ce  langage  en  cet 
endroit,  parce  qu'il  luy  eftoit utile  de  parler  ainfi  pour  juftifier 
cette  exprciîîon  ,  que  J.  C.  a  receu  l'adoption  des  cnfans ,  8c  il  ne 
rapporte  le  morde  recevoir  qu'à  la  réception  du  figne.  En  une 
autre  occafioniln'auroit  pas  fait  difficulté  de  dire  que  nous  re- 
cevons proprement  le  corps  de  J.  C.  8cque  nous,  prenons  I^ 
propre  chair  de  J.  C.  comme  tant  d'autres  Pères  l'ont  dit,  & 
comme  on  peutdire  qu'il  l'a  dit  en  leurperfonne,  parce  qu'il 
n'auroit  pas  eu  le  même  engagement  de  prouver  qu'on  pouvoiç 
direavec  raifin  que  l'cm  reçoit  une  chofe  quand Qn  en  ref^oiç 
le  Sacrement.  Ce  n'efl  que  la  neeeffîtédecettepr-euye:,qui  l'a 
déterminé  à  cette  penfée  ,  &  à  ces  expreffions.     ■jo-jux.':  ' 

En  un  mot  tout  le  Myfiere  de  ce  paflage  confiftes  en  ce  que 
l'efprit  pouvant  regarder 'la  réception  de  l'EuchariRie  par 
deuxveuës  différentes  qui  font  toutes  deux  vrayes  ^  Facundu^ 
s'attâche-à  l'une ,  &  laifTe  l'autre,  parce  qu'il  n'y  en  àvoic 
qu'une  qui  fift  à  fon  fujet.  •;  l'^wwçN 


Î04  Liv.  IL  ExpUcitùon  des p^iffiiges ,  oùtEuchariflie 

Car  I.  on  peut  raporcer  la  réception  ,  ou  l'adion  de  recevoir, 
à  l'objet  immédiat  qui  eft  lefacremenc  ^  Sccetteveuedei'efprie 
fe  peut  exprimer  par  ces  paroles,  r<fcevoir/^ir(pr/'^</(?  y.  C  parce 
que  les  Sacremens  reçoivent  fouvent  les  noms  des  chofes  dont 
ils  font  Sacrement  ;  &:  qu'ainfi  le  Sacrement  du  Corps  dej.  C. 
efb  le  Corps  de  J.  C.  en  quelque  fens. 

1.  On  peutraporrer  cette  même  réception  à  l'objet  médiat  qui 
efl:  le  Corps  de  J.  C.  caché  fous  le  figne:  &  c'efl:  de  cette  forte 
que  les  autres  Pères  en  parlent. 

Ainlî  il  eft  vray  que  ces  paroles  ont  deux  fensj  &  ces  deux 
fens  font  tous  deux  vrais  dans  le  fentiment  des  Catholiques , 
qui  peuvent  dire  ainfi  que  nous  recevons  le  Corps  de  J.  C.  en 
l'une  &  l'autre  manière.  Mais  Facundus  n'ayant  bcfoin  que  de 
la  première  manière ,  il  s'y  arrefte  en  cet  endroit ,  en  difant  que 
nous  recevons  le  Corps  de  J.  C.  parce  que  nous  en  recevons  le 
Sacrement.  Ce  qui  eft  très- véritable.  Et  pour  l'autre^qui  eft  cel- 
le en  laquelle  les  Pères  prennent  ce  terme ,  il  n'en  parle  point, 
&  ne  l'exclut  point  aulTi.Et  ce  feroit  une  confequence  tres-fauflè 
que  de  conclure  qu'il  l'ait  niée. 

Que  (î  ce  procédé  paroift  étrange ,  êc  que  l'on  ait  peine  à  croi- 
re qu'un  homme  tel  que  Facundus  ait  pu  être  tellement  poflèdé 
dudefir  de  prouver  ce  qu'il  avoir  avancé,  qu'il  n'ait  pas  fait  dif- 
ficulté d'employer  en  argument  une  expreffion  qu'il  prend  en 
un  fens  extraordinaire  &  éloigné  de  l'ufage  des  autres  Percs,  en 
omettant  le  fens  ordinaire  de  cette  même  exprefïïon  ^  comme 
s'il  l'avoit  ignoré  ;  il  eft  facile  de  faire  cefîèr  cet  étonnement  par 
l'exemple  du  monde  le  plus  naturel,  le  plus  fenfibieSc  le  moins 
recherché ,  puifqu'il  fe  trouve  dans  Facundus  même  immédia- 
tement après  les  paroles  que  nous  avons  rapportées- 
Car  il  faut  remarquer  que  cet  Auteur  ayant  entrepris  de  mon- 
trer qu'on  pouvoir  dire  que  J.  C.  avait  re^ii  l'adoption ,  farce  qu'il 
en  avoitrecù  le  Sacrement  ^  ne  fe  fert  pas  feulement  de  l'exemple 
de  l'EuchariAie  ,  mais  il  en  apporte  encore  un  autre,  dont  on 
devroit  bien  eftre  plus  choqué  que  de  celuy-là,  &  où  il  s'éloi, 
gne  beaucoup  plus  du  fens  ordinaire  des  termes,  pour  les  aju- 
fter  à  fon  deiTein.  Voicy  comme  il  parle. 

S'il  n'efi  pas  vray  de  dire  que  J.  C  ayant  reçu  le  Sacrement  de 
l'adoption  desenfans ,  a  receu  l'adoption  ,  on  ne  pourra,  pas  dire  de 
nous-mêmes  que  nous  ayons  re^ù  l'adoption  des  enfans  ,  ou  que  nous 
fommes  rachetez^  ^  fauvez^,  fuifque  l'Apofire  a  dit  :  Nous  au- 
tres 


eji  dppellée  type ,  im.igc ,  figure ,  &c.  ïcj 

très  au (Tî  qui  polledons  les  prémices  de  l'cfprir,  nous /ou-  C'A.  V\X. 
pirons&nousgemiironsen  nous  mêmes,  attendant  l'adoption 
divme,  laredemption  denos  corps. Carnousavonscftë  fauvez 
parefperanceJ  &  cen'efl:  plus  efperance  quand  envoie  ce  que 
l'on  efpere.  De  même  donc  que  quoy  que  nous  Mtendions  encore 
i^ adoption ,  la  rédemption  ^  (jr  le  falut  ^  néanmoins  parce  que  nous 
recevons  le  Sacrement  de  l'adoption  ,  de  la  rédemption,  ^  du  falut^ 
nous  fammes avec  raifon  appellez^cnfans  de  Dieu  ^  rachetez^(jr  ftu- 
vez^-^  de  même  J.  C.  ayant  reçu  le  Sacrement  de  l'adoption ,  non 
pour  fou  utilité^  mais  pour  celle  des  autres  félon  l'Apofire,  a  pâ 
jiijlement  eftre  dit  par  les  anciens  Pères  avoir  reçu  l'adoption  des 
enfans. 

Qui  ne  s'imagineroic  d'abord  à  entendre  parler  Facundus 
de  cette  forte,  qu'il  n'auroit  point  reconnu  que  nous  fuffions  au- 
trement enfans  de  Dieuj  adoptez,  &  rachetez,  que  parce  que 
nous  avons  receu  le  Sacrement  d'une  adoption  &  d'une  rédemp- 
tion future?  qu'ainfî  nous  ne  pofïèdons  pas  réellement  la  qualité 
d'enfans  adoptifs ,  comme  J.  C.  n'eftoit  point  réellement  en- 
fant adoptif  ?  Ne  dit- il  ^ù.s  dâirsment  que  nous  fommes  appeliez:^ 
enfans  de  Dieu  (^-^  rachetez^^  parce  que  nous  avons  reçu  le  Sacrement 
de  l'adoption  (^  de  la  rédemption  que  nous  cfperons  /  Il  ne  fe  con- 
tente pas  d'exprimer  cela  affirmativement ,  mais  il  l'exprime 
même  négativement  5  &  ii  s'avance  jufques  à  foutenir,  que  f  l'on 
ne  peut  dire  de  J.  C.  qu'il  a  reçu  l'adoption  des  enfans ,  il  ne  le  faut 
pas  dire  de  nous  même  s-  A  L  i  o  qu  i  n  neque  de  nobis  dicendum  efi^  quo- 
niamadoptionem  fufcepimus  fliorum.  N'efl:  ce  pas  dire  que  nous 
n'avons  pas  plus  receu  l'adoption  que  J  C.  ?  Cependant  attri- 
buer ce  fens  à  Facundus,  c'efl  luy  faire  nier  une  vérité  claire- 
ment décidée  par  l'Ecriture,  6c  qu'il  eft  impofTible  qu'il  ait  igno- 
rée. Car  il  eft  trcs-conftant  par  tout  le  nouveau  Teftament, 
que  nous  ne  lommes  pas  feulement  enfans  de  Dieu  &  adoptez 
parla  réception  dufignedela  confommation  de  cette  adop- 
tion, mais  que  nous  le  fommes  par  l'infufion  prefente  de  l'Efprit 
de  Dieu  ,  qui  nous  rend  enfans  de  Dieu  &  membres  de  J.  C.  Il 
eft  très  conftant  que  nous  fommes  juftifiez  5c  rachetez  félon 
Tame  dés  ce  inonde  même,  par  la  réception  réelle  delà  grâce 
juftifi-inre,  &  de  la  charité  que  le  S.  Efprit  répand  dans  nos 
cœurs  Et  i!  eftimpoffible  qu'un  homme  équitable  foupçonne 
feuleii  ent  Fa'  undus  d'avoir  ignoré  desveritez  llcommunes. 
Car  «uroit-il  Ignoré  ce  que  dit  faine  Paul  aux  Galates ,  que 

O 


io6  L I V .  1 1.  ExpUccition  despajfdges,  où  VEucharifiie 

€il.A,^.u<'.  1-  lorfque  les  temps  ont  cftè  accomplis ,  Dieu  a  envoyé  fon  Fils  formé 
d'une  femme  ^  ajfujetti  à  la  loy ,  pour  racheter  ceux  qui  e fiaient  feus 
la  loy ,  jîn  que  nous  receujjîons  l'adoption  des  enfans  ?  Et  parce  que 
vous  efies  enfans  ^  "Dieu  a  envoyé  en  vos  cœurs  l'efprit  de  fon  Fils  , 
qui  crie ,  Mon  Père ,  Mon  Père.  Chacun  de  vous  n'efi  donc  plus  fer- 
vitcur ,  mais  Enfant.  Que  s'il  eft  enfant ,  il  efl  donc  aulfi  héritier 
de  Dieu  par  J.  C. 

Auroic-il  ignoré  ce  que  dit  le  même  Apoflre  dans  l'Epiftre 
Uey.  it.  -v.  S'  ^"^  Hébreux,  Que  Dieu  nous  parle  comme  ùfes  enfans  ,  (^  qu'il 
s'ofre  à  nous  comme  à  fes  enfans  ? 

Auroic-il  ignoré  ce  que  die  S.  Jean  :  Confiderex^quel  amour  le 
Père  nous  à  témoigné^  de  vouloir  que  nous  foyons  appeliez^  (^  que 
eus  soyons  en  effet  enfans  de  Dieu? 

Mes  bien  aimez^ ,  nous  fommes  dé] a  enfans  de  Dieu  j  mais  ce  que 
nous  ferons  un  ■jour  ne  paroi  fi  pas  encore  ? 

Enfin  auroic-il  ignoré  ce  que  faine  Paul  dit  dans  ce  chapitre 
UiRom.c.  8,  même  qu'il  cite:  Que  tous  ceux  qui  font  pouffe  x^  par  l'efpritde 
Dieu,  funtenfaris  de  Dieu^  &c  ce  qu'il  ajoute  :  ^ous  n'avez^point 
receu  l'efprit  de  fervitude  pour  vivre  encore  dans  la  crainte ,  mais 
vous  avet^  receu  l'efprit  d'adoption  des  enfans ,  par  lequel  nous 
crions  y  Mon  Père  ,  mon  Père.  Car  l' Efprit  de  Dieu  rend  luy.mcme 
tétnoignage  à  nofire  efprit ,  que  nous  fommes  enfans  de  Dieu.  Que 
ft  nous  fomyne s  enfans ,  nous  fommes  aujjz  héritiers. 

C'eft  ce  qui  ne  viendra  jamais  dans  lapenfée  d'un  homme 
fenfé.  Pourquoy  donc  ne  rapporte  t-il  dans  cet  endroit  la  qua- 
lité de  fils  adoptif  qu'à  la  réception  du  Sacrement  de  l'adop- 
tion future  &;  parfaite  que  nous  recevrons  dans  le  Ciel  ?  C'eft 
qu'il  n'y  avoir  que  ce/eul  fenj  qui  ferviftà  fon  fujet,  &  qui  puft 
eftre  employé  à  juftifier  que  l'on  pouvoir  dir^  de  J.  C.  qu'il 
avoir  receu  l'adoption  des  enfans. 

Ainfi  Facundus  fuit  la  même  méthode  en  l'un  &  en  l'autre 
de  ces  exemples.  On  peut  dire  en  deuxfens  que  nous  fommes 
enfans  adoptifs  de  Dieu-,  l'un  commun  &  ordinaire,  qdi  efl  que 
nous  le  fommes  par  l'efprit  de  Dieu  que  nous  recevons  par  la 
charité  de  Dieu  répandue  dans  nos  cœurs ,  par  la  juftice  de 
la  foy  qui  nous  efl:  donnée  actuellement  dés  cette  vie  :  l'autre 
très- extraordinaire  ,  tres-peu  commun,  ôc  dont  peut  eftre  il 
n'y  a  que  Facundus  qui  fe  foit  jamais  fervi ,  qui  eft;  que  nous 
fommes  enfans  de  Dieu  par  la  réception  du  Sacrement ,  ou  du 
Jg,ne  de  l'adoption  parfaite  que  nous  attendons  dans  le  Ciel. 


cfi  appellce  type  ^  image  ^figure  ^  (^c.  107 

Cependant  parce  que  ce  dernier  fens  failolc  à  Ton  flijec ,  6c  qu'il  Ch.  V I. 
a  cru  en  pouvoir  tirer  un  argument  qui  prouvoit  ce  qu'il  pre- 
tendoit ,  il  l'allègue^,  il  s'en  fert,  U.  femble  méconnoître  l'autre. 
De  même  y  ayant  deux  fens  félon  lefquels  on  peut  dire  que 
nous  recevons  le  Corps  de  J.  C.  l'un  qu'il  entre  en  effet  dans 
notre  bouche  j  qu'il  eft  receu  dans  nos  entrailles  par  fa  pro- 
pre chair ^  l'autre  que  nçus  recevons  un  objet  extérieur,  qui 
en  eft  la  figure  &  le  Sacrement ,  6c  à  qui  on  en  donne  le  nom  j 
quoyque  le  premier  fens  Toit  le  plus  autorifé ,  le  plus  commun, 
ôcpeut-eflre  le  feul  auquel  ces  paroles  font  entendues  par  les 
autres  Pères,  Facundus  néanmoins  s'attache  au  fécond,  parce 
qu'il  eftoit  le  Ibul  qui  fervift  à  fa  preuve  :  Mais  comme  ce  fe- 
roit  eftreinjufte  &  ridicule  que  de  conclure  du  choix  que  Fa- 
cundus a  fait  de  ce  fécond  fens  de  l'adoption  è^t^  enfans^  qu'il 
n'a  donc  point  reconnu  que  nous  fuffions  réellement  enfans 
adoptifs  dés  cette  vie,  ny  que  nous  y  receuiîîons  le  S.  Efprit, 
la  charité  &Ia)ufticej  en  quoyconfifte  cette  adoption  5  de  mê- 
me c'eft  une  injuftce  manifefle  que  de  prétendre,  que  parce 
qu'il  ne  s'eft  fervi  que  d'un  des  fens  de  ces  mots ,  Recevoir  le 
corps  de  J.  C.  il  ait  voulu  nier  l'autre. Quand  ill'auroitmêmenié, 
&  qu'il  auroit  dit  nettement  &c  négativement ,  ^ue  nous  ne  re- 
cevons le  corps  dej.  C.  que  parce  que  nous  recevons  ce  Sacrement  ^ 
il  ne  faudroit  pas  conclure  fî  vifle  qu'il  fuft  contraire  aux  autres 
Pères  ny  à  la  doctrine  catholique.  Ces  fortes  de  termes  qui  mar- 
quent des  actions  corporelles,  peuvent  eflre  pris  quelquefois 
avec  une  certaine  rigueur  qui  donne  lieu  de  les  nier  quand  on 
les  rapporte  au  Corps  de  J.  C. 

Tous  les  Pères  difènt  que  nous  touchons  ce  corps  j  6c  néan- 
moins les  Scholaftiques  foiitiennent  fans  eftre  contraires  aux 
Pères  que  nous  ne  le  touchons  pas,  &  que  nous  n'en  touchons 
que  le  Sacrement.  * 

Tous  les  Pères  difcnt  que  nous  mangeons  le  Corps  de  J.  C. 
&  ils  font  voir  clairement  qu'ils  entendent  que  le  Corps  de 
J.  C,  entre  réellement  en  nousj  &:  néanmoins  comme  nous 
•verrons  en  fon  lieu,  quelques-uns  de  ces  mêmes  Pères  nient 
que  nous  mangions  le  Corps  de  J.  C.  parce  que  nous  n'exer- 
çons pas  à  l'égard  de  ce  Corps,  les  adions  corporelles  dans  lef^ 
quelles  ils  font  confifter  la  manducation,  comme  de  divifêr^ 
de  goûter  6c  de  digérer  l'aliment.  On  pourroit  doncdirede 
même  que  Facundus  a  conçu  par  ce  mot  à'accipere  ^  recevoir, 

Oij 


Iren.  l.  y.  c.  î, 

1. 1.  Ep,  109, 


Exod, 


1.  4.  cont. 

Neftor.p.  113, 

di.il.  j.  iiiterr. 
169. 


voyez   perp. 
*•  1.  4.  c,  8. 


L6. 


c.  r. 


i o 8  L I V .  1 1 .  ExpUciition  despcijfages ,  07/  ÎEuchxriJlïe 
cette  adion  corporelle  que  l'on  fait  en  recevant  le  corps  de  J.C. 
&  que  comme  cette  adion ,  qui  eft  un  efpece  de  contact  corpo- 
rel ,  fe  termine  proprement  au  Sacrement ,  il  a  crû  que  c'eftoic 
proprement  le  Sacrement  qui  eftoitreceu,  &;que  le  Corps  de 
J.  C.  n'eftoit  receu  qu'improprement  &:  par  le  Sacrement;  com- 
me félonies  ScholaftiqueSj  il  n'eft  touché  qu'improprement  j 
&de  même  que  quoyque  l'on  dife  proprement  qu'on  rec^oitle 
corps  d'un  homme  entre  fes  bras,  on  ne  dit  point  que  l'on  y  re- 
çoit fon  ame,  encore  que  fon  ame  nefoitpas  feparée  de  fon 
corps. 

C'cfl:  donc  une  folie  toute  pure  que  d'employer  une  confe- 
quence  fî  faulTe  pour  renverfer  cent  déclarations  formelles  d«s 
Pères  j  dont  on  peut  dire  cç.Qfit6^\x.^3iC\i.x\à\is:Non}uvciny:nio~ 
.  fum  leHorem^  fcd  potius  IcHorem  nonfafiidiofum  nquirunt.  A  por- 
ta res  ac  manifefia  interpretatione  ttUà  non  indiqet.  Tantum  efi  ut 
•uidercjam  vclint  qui  claufis  oculis  vcritati  rcjifimit. 

Qi-ioy  !  parce  qu'un  Auteur  pofTedë  d'une  vue  particulière  Si 
cherchant  des  preuves  de  toutes  parts  pour  juftitier  une  expref- 
fîon  ,  aura  employé  des  termes  en  un  fensun  peu  extraordinai^ 
re  ,  if  ne  /era  plus  vray  que  le  Seigneur^  comme  dit  S.  Irence  , 
ait  déclaré  que  le  Calice  qui  cjî  une  créature ,  efi  fon  propre  fanz. 

Il  ne  fera  plus  vray  ,  que  le  S.  Bfprit ^  comme  dit  S.  Ifidoré, 
fajje  le  pain  de  V  Eucharifiic  le  propre  corps  dont  f.C.  s" efi.  rcvéttc 
dam  fon  incarnation. 

n  ne  fera  plus  vray ,  que  le  Créateur  des  natures ,  comme  dit  S: 
Gaudence ,  falje  du  pain  fon  propre  corps ,  parce  qu'il  le  peut  (^ 
qu'il  l'a  promis. 

Il  ne  fera  plus  vray ,  que  J.  C.  comme  dit  S.  Cyrille  ,  s'infînuè 
dans  nos  corps  par  fa  propre  chair. 

Il  ne  fera  plus  vray,  que  quoyque  ce  que  l'on  offre  ne  foitni  fem. 
blablc  ni  égaf  c'efi  néanmoins  le  corps  divin  proprement ,  comme 
dit  l'Auteur  des  Dialogues  attribuez  à  Carfaritis. 

Il  ne  fera  plus  vray ,  que  ce  que  nous  recevons  dans  f  Eucharifiie 
foit  le  vray  corps  d^  le  vray  fang  de  J.  C.  que  ce  (oit  fon  fon  corps 
dans  la  vérité.,  quoy  que  toutes  les  Eglifesdu  monde  fafîencuna 
profcffion  publique  de  le  croire. 

Il  ne  fera  plus  vray,  quece  foit  favraye  chair  que  Jiousrecevom.^ 
Ô-fon  vray  fing  qui  efi  nofire  breuvage .,  comme  dit  l'Auteur  du 
livre  des  Sacremens. 
Il  ne  fera  plus  vray ,  que  le  saint- Efprit  faffe  du  pain  Je  corpi  me- 


efi  appellée  type  ,  inuige ,  figure  ,  (d^c.  109 

me  de  J.  C.  comme  Procle  raifure  dans  ion  craicé  fur  la  Litur-  Ch.  VII. 

aie.  Chryfoll, 

Il  ne  fera  plus  vray ,  f«i?  nous  voyons  dans  l'Euchariflie ,  corn-  ep"V.ad  cor. 
me  dit  S.  Chry  foftome  ,  ce  même  corps  que  les  Mages  ont  adoré.     Dans  k  chaî- 

II  ne  fera  plus  vro-y  .que  nous  ne  pouvons .  comme  dit  Severe,  "e^^rS.  jeaa 
many:r  Le  Verbe  en  Luy-vie7ne  .^  parce  qu  un  a  point  de  corps.,  maisque  Anvers. 
nous  le  ijianzcons  en  mangeant  la  chair  que  le  Vcrhc  rend  vivifiante. 

Il  ne  fera  plus  vray,  que  J.  C.  comme  dit  S.  Cyrille  ^éenifie  i"  Joaa.  P. 
tous  les  fidèles  par  un  feui  corps ,  qui  eft  le  fien  propre .,  (^  que  mus  '^^" 
prenions  ce  corps  unique  (^  iniivijible  en  710 s  propres  corps. 

Une  fera  plus  vray  ,^«r«oajr^^i'i/'/o/;j,  comme  dit  S.  Auguftin,  '•-•  <^°"". 
avec  un  ceeur  &   une  bouche  fidèle  ,  le  Médiateur  de  Dieu  (^  des  ^  Pro'pk'^l  9 
hommes  J.  C.  homme.,  qui  nous  donne  fion  corps  à  manç^er^  fon  fang 
a  boire ,  quoy  qu'il  femble  plus  horrible  de  manger  la  chair  d'un  honu 
me  que  de  la  tuer.,  (>  boire  le  fang  d'un  honmie  que  de  le  verfer. 

Il  ne  fera  plus  vray  de  dire  avec  S.  Cyrille,  qu^un  être  corrup-  injoana 
tible ,  comme  le  noftre ,  ne  peut  eftre  autrement  vivifié ,  quefiantuni  861. 
corporellemcnt  au  corps  de  celuy  qui  efi  la  vie  par  effcnce. 

Il  ne  faudra  plus  faire  cette  profelîîon  de  foy  que  fait  S.  Gre-  Orat.catech' 
goire  de  Nide  j  Je  croy  que  le  pain  fanclifié  parle  Verbe  eft  changé  '^'  ^7- 
au  corps  de  Dieu  Verbe  :  ni  dire  avec  l'Aurcirr  des  Homélies  attri- 
buées à  Eufebe  d'Emele^  Que  le  Sacrificateur  invifible  convertit  ^ 
par  fa  parole  plçmt  d' une puijfance fecrete  les  créatures  vifiiblcs  en  la  Pa°"c^  ^'  '' 
fub fiance  de  fon  corps  d^  de  fon  fang. 

Il  faudra,  (î  Ton  en  croit  les  Miniftres,  faire  céder  tous  ce.spaf- 
fagesj  &  tant  d'autres  que  nous  avons  rapportez  dans  le  deuxiè- 
me volume, au feul  paiHige  deFacundus. 

Mais  s'il  eft  permis  de  fuivre  cette  méthode  dans  l'examen  des 
Pères,  quelle  vérité  de  foy  ne  pourra  demeurer  inviolable,  puis 
qu'il  n'y  en  a  point  qui  ne  foit  combattue  par  quelque  oarfage 
difficile  ?  C'eftpourquoy  Facundus,  dont  les  Miniftres  fcroienc 
bien  de  fuivre  l'efprk  dans  l'explication  des  Père  ,  n'attribue 
ce  procédé  qu'auxHeretiques  6c  il  fait  voir  que  les  Catholiques 
en  ont  toujours  luivi  un  qui  eft  directement  oppofé.  Cermne  ïl  Facundus  9 
TÛ appartient.,  dit-il ,  qu'à  des  Hérétiques pofiedex.fi e  l'efprit  de  calom- 
nie de  vouloir  d/ tourner  de  leurfens  véritable  des pafiage s  clairs^ 
manifeftes  par  des  pafjages  obfcurs  ^ambigus.,  la  pieté  ^  la  prudence 
Catholique  doivent  porter  au  contraire  li  éclaircir  les  fafiagcs  ohfcurs 
far  la  lumière  de  ceux  qui  font  évidcns.  Q  u  t  m  A  D  M  o  D  u  M  calum- 
niamitcm  Jrîareticorum  efi  ex  dubiis  df  obficurcis  qua  certa  Q-  niani- 

O  iij 


110  Li V .  I  î.  Expllc.ition  despajfiges ,  ou  f  Euchurijîie 
fttïit  mdlè  interpretari ,  ita  folitumpriidenti^  ac  'ucritatis  Cutholtca, 
€x  indubitatis  atquc  cvidentibus  ambigua  ^  latentia  decLirare. 

C'efl:  luy-même  qui  nous  apprend  cette  belle  règle,  <\wq  félon 
que  des  Auteurs  traittciit  des  matières  différentes ,  ils  ont  auljt  des 
viies  différentes  dans  leurs  paroles.  Pro  divcijiiate  caufarumdiver- 
fa  femper  efl  diccntis  intcntio  3  par  où  il  nous  montre  à  ne  pas  in- 
iïfter  fur  le  fens  qu'il  donne  à  une  exprefîion  dans  la  vile  particu- 
lière de  la  faire  fèrvir  de  preuve  àunechofe  qu'il  avoir  avancée. 
Enfin  c'cft  ce  même  Facundus  qui  nous  apprend  par  fon  exem- 
ple à  pratiquer  envers  luy  ce  qu'il  a  pratiqué  envers  les  autres 
Percs,  6c  qui  condamne  par  avance  la  témérité  de  ceux  qui  fe 
fervent  prefentement  de  ion  nom  pour  combattre  la  dod:nne 
de  l'Eglife.  Cefl ^  dit-il  ,f«  ces diverfesmanicres qu^unlcctcur pieux 
^  intelligent  doit  entendre  les  paroles  des  anciens  Pères  Q"  If  s  met- 
tre à  couvert  des  calomnies  des  Hérétiques.  Mais  lorfque  des  igno- 
rans  prejomptueux  ^  qui  condamnent  tout  ce  quils  n' entendent  pas  j 
fe  mettent  à  les  lire  ,  il  efl  comme  inévitable  que  ces  fortes  de  gens  y 
trouvent  des  fujets  de  fe  troubler ,  (^  de  troubler  les  autres  j  parce 
que  n'ayant  pas  affczjic  lumière  pour  les  entendre  ,  ils  ont;  affez^  de 
prèfomption  pour  ne  pas  vouloir  que  d'autres  leur  en  donnent  l'in- 
telligence. 

CHAPITRE    VIII. 

Que  l'on  ne  fi^auroit  plus  mal  inflruire  les  peuples  de  la  doctrine 
Calvinifle  que  par  le  fermon  de  S.  AtigtijUn  aux  nouveaux  bap. 
tifc'z^^  quoy  que  Monfteur  Claude  le propofc pourmodelle  d'une  in- 
flruîtion  Calvinifle.   ' 

OUtre  les  quatre  paflages  que  je  viens  d'examiner ,  oii  les 
Calvinifles  prétendent  montrer  que  i'Euchariftie  n'eft 
que  la  figure  du  corps  de  J.  C.  6c  qu'elle  ne  le  contient  pas  réel- 
lement ,  ils  en  ont  encore  un  qu'ils  ne  font  pas  moins  valoir  que 
ceux  que  j'ay  rapportez.  C'eft  un  fermon  de  S.  Auguftin ,  qui 
nous  a  efté  confervépar  S.Fulgence,  6c  que  divers  autres  Au- 
teurs ont  enfuite  inféré  dans  leurs  ouvrages.  Aubertin  l'a  crû  G 
avantageux  à  fa  dodrine ,  que  c'eft  par  là  qu'il  commence  l'exa- 
men de  S.  Auguftin.  Et  M.  Claude  qui  vouloit  trouver  dans 
l'antiquité  un  prédicateur  de  fa  dodrine  pour  l'oppofer  à  celuy 
que  l'Auteur  de  la  Perpétuité  avoit  introduit  donnant  aux  Braf- 
iiliens  ou  aux   Chinois  les  premières  mftrudions  de  ce  qu'il 


efi  appellée  type  ^  inmge  ^figure  ^  Mc^  iri 

faut  croire  de  l'Euchariltie ,  par  les  termes  mêmes  dont  S.  Ch.VIII. 
Cyrille  de  Jerufalem  s'eftoit  iervi  pour  en  inftruire  les  Chré- 
tiens de  fon  tempSj a  crû  qu'il  ne  pouvoit  rien  trouver  déplus 
propre  que  ce  iermon  à  propofer  pour  modèle  d'une  inftru- 
dion  Calyinille',  ny  qui  luy  donnaft  plus,  d'occailon  d'inful- 
ter  à  cet  Auteur. 

Que  fi  Ton  s'en  veut  rapportera  ce  qu'il  en  dit ,  on  ne  doit 
point  douter  qu'il  ne  luy  foit  extrêmement  favorable.  Car 
après  en  avoir  cité  la  moitié ,  le  tranfport  le  prend ,  &  s'inrer-  m.  chude.p. 
rompant  luy-même  :  Peut-on  douter ^  s'écrie-t-il ,  que  des  Ca-  lyz. 
thoUques  Romains  ne  frijjent  le  prédicateur  qui  e?nprmitcra  les  ter- 
mes de  S.  Awiufiin  pour  un  Calvinifte  tres-z^le  qui  voudrait 
inflruire  ces  infidelles  dans  la  foy  de  l'Eglife  reformée}  Mais  parce 
que  les  mouvemens  des  autres  ne  font  pas  toujours  Ci  vifs  5c  fî 
violens  que  ceux  de  M.  Claude,  &que  fouventil  paroit  tres- 
afTuré  fur  des  chofès  que  les  autres  trouvent  tres-douteufes, 
nous  ne  lailTerons  pas  de  mettre  d'abord  en  queftion  fi  ce  dif- 
cours  de  S.  Auguftin  efi:  fi  propre  à  instruire  des  infidelles  de  la 
créance  des  Calvinifires,  6c  fi  M.  Claude  a  eu  raifon  d'en  con- 
clure fans  preuve,  6c  comme  par  uneefpece  d'enthoufiafme, 
que  tous  les  Jîmples  Catholiques  frendroient  un  prédicateur  qni  fe  fcr- 
viïoit  de  ces  termes  pour  tin  Calvinifte  obftiné ,  ou  pour  le  plus  i/npcr- 
tinent  de  tous  les  hommes. 

Et  corne  cette  manière  de  décider  des  queflions  importantes 
par  des  exclamations  en  l'air,  &  des  conclufions  fans  preij- 
ves ,  me  femble  un  peu  trop  abrégée,  je  tafcheray  d'en  fui- 
vre  une  toute  oppofée ,  en  reduifant  la  quellion  à  des  princi- 
pes particuliers  Se  précis. 

On  peut  avoir  deux  idées  de  ce  Sermon  de  S.  Augufiin. 
Car  on  le  peut  prendre  ou  pour  un  difcours  dogmatique,  dans 
lequel  faint  Auguftin  ait  prétendu  inftruire  ces  nouveaux  bap- 
tifez  de  ce  qu'ils  dévoient  croire  de  rEuchariftie,  ou  pour  un 
difcours  moral,  dans  lequel  j  fuppofant  qu'ils  eftoient  inftruirs 
de  la  fubftance  de  la  foy  ,  6c  des  dogmes  renfermez  dans  ce 
myftere,  il  tafche  feulement  d'édifier  leur  pictéen  lesinftrui- 
fanc  des  rapports  myfterieux  qui  iê  trouvent  dans  la  matière 

de  ce  Sacrement.  ■  £|  i^nib  .0  J  ob  «mo'J  «jî  insTisî 

On  auroit  tort  de  demander  à  ceux  qui  foutiénnent  qu'on  le 

doit  regarder  en  la  féconde  manière ,  qu'ils  y  montrafiént  les 

dogmes  delà  prefence réelle  6c  de  la tranfubftantiation claire- 


m  Liv.  1 1.  ExpUùition  des  pciffages ,  ou  ï Euchmflie 
ment  exprimez  ^  puisqu'ils  precendenc  au  contraire  que  ce  n'eft 
point  uh  diicours  dogmatique^  6c  que  fuppofant  ces  nouveaux 
baptifez  pleinement  inftruits  dans  la  foy  de  ce  Myftere,  il  n'efl: 
deftiné  qu'à  leur  découvrir  lesrailons  divines  qiie  Dieu  a  eues 
dans  le  choix  des  matières  du  pain  &  du  vin  pour  en  faire  Ton 
Corps  &  Ton  Sang.  Et  comme  c'efl:  en  cette  feccnde  manière 
que  nous  foûtiendrons  dans  le  chapitre  fuivant  qu'il  le  faut  con- 
fiderer  j  M.  Claude  n'a  pas  lieu  de  nous  demander  que  nous  y 
faffions  voir  la  prefènce  réelle  &:  latranfubftantiation ,  puifque 
nous  luy  déclarons  d'abord  qu'il  n'efl  pas  fait  pour  cela. 

Mais  M.  Claude  n'eft  pas  de  même  condition  que  nous  fur 
ce  point,  non  plus  que  tous  les  autres  Miniftres.  Il  foûtient 
quefaint  Auguftin  y  a  voulu  inftruire  ces  nouveaux  fidelles  de 
ce  qu'il  faut  croire  de  ce  Myftere:  Qiie  c'eft  un  difcoiirs  dog- 
matique propre  à  établir  ceux  qui  l'écoutoient  dans  la  foy  des 
Calviniftes.  Il  eftdonc  oblige  de  nous  y  faire  lire  leurs  dogmes. 
Et  puifqu'il  fait  de  (aint  Auguftin  un  catechifte  de  fa  fede,  il 
doit  montrer  qu'il  ait  fatisfait  au  devoir  d'un  Catechifte  ,  & 
qu'il  aitenièigné  à  fes  auditeurs  d'une  manière  claire  6c  preci- 
fe  les  principaux  points  qui  compolent  cette  foy ,  6c  fans  lef- 
quels ,  félon  eux-mêmes,  on  ne  peut  participer  dignement  à 
ce  Myftere. 

C'eft  par  là  qu'il  doit  vérifier  cette  étrange  alternative  , 
que  ce  Catechifte  qui  parleroit  le  langage  de  S.  Auguftin  de- 
-vroit  eftre  pris  ou  pour  un  Culvinifte  obfimé  ou  four  le  f  lus  imper- 
tinent des  hommes. 

Or  ces  dogmes  eftentiels  à  la  créance  Cal  vinifte  fe  peuvent 
réduire  à  quatre.  Le  premier  eft,  que  le  pain  6c  le  vin  ont  efté 
établis  par  J.  C.  fignes,  figures  S:  Sacremens  de  fon  Corps 
naturel. 
Le  fécond  ,  que  cesefpeces  le  figurent  comme  mort. 
Le  troifiéme ,  Qii'il  s'eft  engagé  de  remplir  ce  pain  &  ce  vin 
d'une  efficace  furnaturel le,  c'eft  à  dire,  de  communiquer  de 
nouveaux  rayons  de  lumière,  ^-une  augmentation  de  graxre 
ceux  qui  y  participent. 

Le  quatrième ,  Qii'il  nous  eft  commandé  de  manger  fpirituel- 
lement  le  Corps  de  J.C.  dans  la  participation  de  ce  Sacrement^ 
&  que  cette  manducation  fpirituelleéonfifte  dans  la  médication 
de  la  mort  de  J.  C.  comme  la  chw^q  àc  notre  îz\nt:  La  manduca- 
tisn  fpirittttlle ,  dit  Aubertin ,  <?/?  un  aïie  fpecial  de  foy  qui  a  pour 

objet 


çy?  appellée  type ,  image ,  figure ,  ^c.  113 

ebjet  la  chair  de  j.  C.  comme  ayant  joujjcrt  ^   ^-^  comme  eftatit  Ch.VIII. 
mort,  dr-  qui  la  regarde  coynme  le  foiaien  de  ïiojlrc  vie. 

Si  famt  Auçruftin  aenfcio-né  clairement  aux  nouveaux  fîdel- 
les  ces  quatre  dogmes  qui  compofent  la  créance  Calvinifle, 
c'eft  avec  raifon  que  M.  Claude  propofe  Ton  alternative,  qu'à 
faut  le  prendre  ou  pour  un  Calvinijle  objlinè ,  ou  pour  le  pins  im- 
pertinent hoynme  qui  ait  jamais  cfiè.  Mais  s'il  fe  trou  voit  qu'il  ne 
leureût  enfeigné aucun  de  ces  points,  &:  qu'il  n'y  eût  pas  mê- 
me penfé  j  la  raifon  nous  donne  droit  de  faire  une  alternative 
toute  contraire,  &.  de  conclure  que  faint  Augufkmn'eflroit  pas 
Cahinifie  ,  on  qu'il  e/ioit  le  plus  impertinent  des  hommes.  Car 
il  n'y  a  pas  de  plus  grande  impertinence  que  d'avoir  pour  bue 
d'enfeigner  les  articles  dans  lefquels  confifte  la  foy  d'un  My- 
ftere  j  êc  ^e  n'en  dire  pas  un  feul  mot.  C'eft  donc  à  quoy  il  faut 
s'appliquer  en  lifant  les  paroles  de  ce  Sermon  que  je  rapporte- 
ray  félon  la  traduction  qu'en  fait  M.  Claude  pour  éviter  les  con- 
teftations,  après  y  avoir  néanmoins  remis  la  tefte,  qu'il  en  a 
oftée,  parce  qu'elle  eft  de  quelque  importance  pour  l'intelli- 
gence du  fcns, 

yous  avez^dèja  vu ,  dit  ce  faint  Doéleur  ,  la  nuit  précédente  les 
chofes  que  vous  voyez^prefentement  -^  mais  on  ne  vous  a  pas  en- 
tore  dit  ce  'Quelles  efloicnt ,  ce  quelles  Jignifîoient  y  &  combien  celles 
dont  elles  font  Sacremens  .^  font  grandes  ^  excellentes.  Ce  que  vous 
voyez^  donc  efi  du  pain ,  (^  c'ejl  aujjt  ce  que  vos  yeux  vous  dé- 
clarent. Mais  l'infimciion  que  voflre  foy  demande  .^  ejl  que  le 
pain  eft  le  corps  de  J.  C.  ^  que  le  calice ,  ou  ce  qui  efi  dans  le 
talice  efl  fon  fang.  Cecy  efi  dit  en  peu  de  mots  j  g?-  peut- efi re  que 
■ce  peufujfiroit  ù  la  foy .  Mais  la  foy  demande  d'ejlre  inftruite.  Car 
le  Prophète  dit  :  Si  vous  ne  croyez^pas ,  vous  nentendrez^point. 
yotts  me  pouvez^  donc  dire:  Fui fque  vous  nous  avez^  commandé  de 
croire ,  expliquez^  nous  ce  que  c'efi  ,  afin  que  nous  entendions.  Car 
cette  penfèe  peut  naifire  d.tns  l'efprit  de  quelqu'un.  Nous  ft^a- 
vons  de  qui  J.  C.  a  pris  fa  chair,  f  avoir  de  la  Vierge  Marie. 
J^ous  fcavons  qu'il  fut  alaitté  en  fon  enfance  ;  qu'il  fut  nourri  , 
qu'il  devint  grand  5  qu'il  parvint  a  l'âge  de  l'adolefcence  :  qu'il 
fouffrit  les  perfe  eut  ions  des  Juifs  j  qu'il  fut  pendu  au  bois  5  qu'il 
y  fut  mis  à.  mort  5  qu'il  reffufcita  le  troifième  jour  j  qu'il  monta  au 
Ciel  lorfqu'il  luy  plut  d'y  monter  .^  qu'il  éleva  là  fon  corps  ,  d'où  il 
viendra  pour  fcger  les  vivans  (^  les  morts  3  d^  qu'il  cfl  mainte- 

P 


114    Li  V.  II.  Explicuion des pajfiges ,  oti  f  Euchanfiie 

nant  iijjis  a  la  dcxtredu  Ferc.  Comment  dont  le  pain  eji-il  fon  corps 
^^  le  calice  fon  fang  / 

Mes  frères ,  ces  cbofcs  font  appelle  es  Sacremens  ^parce  qi^  autre 
cJjofe  eji  ce  que  nous  voyons ,  autre  chofe  efi  ce  que  nous  concevons. 
Ce  que  l'on  voit ,  a  une  efpece  corporelle  ,  ce  que  l'on  conçoit ,  a  un 
fruit  fpiritnel. 
M.Claude  fait  icy  une  petite  interruption,  comme  pourlaif- 
fer  un  peu  évaporer  par  quelques  exclamations  iafatisfadion 
que  ces  paroles  luy  donnent.  Mais  comme  il  y  a  fouvent  autant 
d'adrelîe  que  de  chaleur  dans  fa  rhétorique,  il  n'efi:  pas  mauvais 
d'avertir  le  monde  qu'il  prétend  auia  couvrir  parla  un  défaut 
elfentiei  de  l'explication    qu'il  donne  à  ce  pafTage  de  laine 
Auguflin,  en  faifant  confiderer  cette  première  partie  comme 
feparce  de  la  féconde  qu'il  rapporte  enfuite  5  au  lieu  que  non 
feulement  elle  n'en  efl:  pas  détachée  dans  faintAuguftui ,  mais 
qu'elle  y  eft  expreflèment  attachée  par  une  particule  qui  con- 
tinue le  dif.ours ,  &;  qui  empêche  qu'on  ne  prenne  les  mêmes 
mots  qui  fe  trouvent  dans  la  première  &  dans  la  féconde  par- 
tie en  deux  divers  fens ,  comme  on  verra  que  le  tait  M.  Claude. 
Et  c'eftpourquoy,  afin  qu'on  s'apperceût  moins  de  l'union  de 
ces  deux  parties ,  il  a  trouvé  bon  de  retrancher  dans  fa  tradu- 
éli  jn  la  particule^i'??^  qui  les  lie.  Et  au  lieu  que  S.  Auguftin  dit:  Si 
vous  voulez^  donc  fcavoir  ce  que  cejî  que  le  corps  de  J.C.\\  luy  fait 
dire  (implement  fans  cette  particule  de  liaifbn:  V^oulez^vous  fa^a- 
voir  ce  que  ccjlque  le  corps  de  JC.  ècoutez^l'  Apofire  S.  Paul  qui 
dit  aux  fidelles  3  Vous  ejlcs  le  corps  de  J.  C.  dr-  fcs  membres.  Ko f- 
ire  myjlere  e(l  mis  fur  cette  table ,  ^  vous  y  prenez^  le  myjlere  du 
Sci'ipcur.    (  Il  faut  traduire  i   Et  vous  avez^  pris  voflre  myfiere  , 
Mystertum  vcftrum  acccpij'hs .,  comme  il  y  a  dans  le  latin  que 
]V1.  Claude  met  à  la  marge.  )  Vous  dites  Amen  k  ce  que  vous  efies., 
^  vous  y  foufcrivez^par  voflre  réponfe.  On  vous  dit  donc  :  Le  corps 
du  Seigneur.^  ^  vous  répondez^  Amen.  Soyez^  membre  du  corps  de 
J.  C.  afin  que  voflre  Amen  fuit  véritable .  Mais  pourquoy  tout  cela 
au  pain  î  N'apportons  icy  rien  du  nofhc,  mais  écoutons  encore  le  même 
Apofîre  parlant  de  ce  Sacrement.  Nous  qui  fommes ,  dit  il ,  plu. 
fleurs ,  nous  ne  fommes  qu'un  feul  pain  ^  un  feul  corps.  Entendez^ 
cecy ,  je  vous  prie ,  C^  vous  en  rêjoUifez^  Car  ce  n'efi  icy  qu  unité , 
pieté ,  vérité  ,  charité  j  un  feul  pain  ^  un  feul  corps  ,  quoyque  nous 
foyons  plufieurs.  Remarquez^  que  le  pain  ri  efl  pas  fait  d'un  feul 
grain ,  mais  de  plufieurs.  Quand  on  vous  a  exorcifez^.,  v.ous  avez^ 


eji  appellée  type ,  image ,  figure ,  ^c.  n  j 

faj[c fous  la  meule:  quand  ijous  avcz^c/iè  hapttfez^^  vous  avci^ejié  Ch.  VIII. 
arroufcz^d'eau  :  ^  quand  vous  avc\receu  le  feu  du  S.  Efpru ,  on 
peut  dire  que  vous  avcz^efic  cuits  comme  un  pain.  S'jyez^donc  ce  que 
vous  voycz^^  (^  recevcz^ce  que  vous  efies.  Voila  ce  que  l' u4p'otrc  a 
dit  du  pain  ^  Par  où  il  nous  montre  ajfez^ce  que  nous  devons  enten- 
dre à  l'égard  du  calice.  Car  comme  pour  faire  cette  efpece  viftble  du 
pain  plufieurs  grains  font  réduits  en  un  corps  ,  pour  reprcfenter  ce 
que  l' Ecriture  dit  des  fideles:^  ils,  rC avaient  qu'une  avie  (^  qu'un  cœur 
en  Dieu  j  il  en  efl  de  même  du  vin.  Remarquez^  comment  il  eft  un> 
rlufieurs  grains  pendaient  au  raifin  ,  mats  leur  liqueur  a  cflé  con- 
fondue en  un  corps .  Ce/}  ainfi  que  7-  C'.  nous  a  voulu  reprcfenter  (^ 
nous  faire  fien  s ,  confier  ant  fur  cette  table  le  myfere  de  notre  paix  ©• 
de  notre  unité.  Celuy  qui  reçoit  le  myficre  de  l'unité ,  ^y  ne  conferve 
pa.f  le  lien  de  la  paix ,  ne  reçoit  pas  un  myftere  pour  fon  bien ,  man 
un  témoign:xge  contre  luy-yn'cme. 

Ceux  qui  auront  efté  attentifs  en  lifant  tout  ce  Sermon  , 
pour  voir  fi  faint  Auguftin  y  enfeigneroit  les  quatre  dogmes 
fondamentaux  delà  dodrine  Calvmiftefur  l'Euchariftie  ,  re- 
connoiftront  d'abord  qu'il  ne  s'y  en  trouve  aucun  formelle- 
ment exprimé.  Il  n'eft  dit  nulle  part  en  termes  exprès,  que  le 
pain  de  i'Euchariftie  foir  figure  du  corps  naturel  de  J.  C.  Car 
pour  ces  mots;  Vous  prcnez.^le  myficre  du  Seigneur.,  que  l'on  y 
lit  dans  la  verfion  de  M.  Claude,  par  où  il  pourroit  peut-eftre 
entendre  que  Ton  y  prend  la  figure  du  Seigneur ,  c'eft  M.  Clau- 
de qui  les  y  a  mis  j  comme  j'en  ay  averti  ^  puifqu'il  y  a  dans  S. 
Auguftin,  Vo7(s  avcT^receuvotre  myficre  .^  Mysterium  vefirum 
accepifiis. 

Il  n'y  eft:  point  dit  aufil  que  le  pain  &  le  vin  reprefentent  J. 
C.  comme  immolé  &  comme  mort. 

Il  n'y  eft  dit  nulle  part,  que  J.  C.  fefoit  obligé  dedonnerde 
nouveaux  rayons  de  lumière ,  o  une  ciuirnentation  de  grâce  à  ceux 
qui  y  participeront,  ny  qu'il  ait  inondé  ce  pain  d'une  efficace 
ipirituelle  dérivée meritoirement  de  fa  chair  divine. 

Il  n'y  eft  dit  nulle  part,  que  la  manducation  fpirituelle  de  la 
chair  de  J.  C.  nous  loir  commandée,  ny  que  cette  manduca- 
tion confifte  à  méditer  que  la  mort  de  J.  C.eft  la  caufe  unique 
de  notre  ûluc.  Quelle  efpece  de  Catechifte  eft- ce  donc  là,  fî 
l'on  en  croit  M.  Claude  ?  Il  parle  à  de  nouveaux  baptifez,  à 
des  gens  qu'il  fuppofe  n'eftre  pasinftruits  de  la  foy  ,  II  leur  fait 
un  SeriT.on  tout  exprés  pour  les  en  niftruin  j  Se  cependant  ii 

Pij 


116  Liv.  1 1.  Expliciition  des pnJpLges  où  t Eucha,nfl'ie 
n'exprime  en  aucun  lieu  formellement  aucun  des  points  elFen- 
tiels  de  la  doctrine  qu'illeur  veut  apprendre.  C'eftàdire,  qu'en 
prenant  faint  Auguftin  pour  un  Catechifte  Calvinifte,  il  fau- 
droit  dire  qu'il  auroit  fait  comme  un  homme  qui  voulant ap. 
prendre  à  des  enfins  le  Myftere  de  la  Trinité,  ne  leur  parle, 
roit  ny  de  l'unité  de  Dieu  ,  ny  des  trois  Perfonnes.  Comme  un 
homme  qui  voudroit  inftruire  de  la  paflîon  de  J.  C.  des  gens 
qu'il  fuppoferoit  n'en  avoir  jamais  rien  appris,  &  qui  ne  leur 
parleroit  ny  des  tourmens  qu'il  y  a  foufFerts,  ny  de  fa  croix,, 
ny  de  fa  mort. 

En  vérité  M.  Claude  nous  permettra  de  luy  dire  que  fbn 
alternative  eft très. mal  concertée,  puirqu'elleeft  compolée  de 
membres  infeparables,  6cque  bien  loin  qu'il  faille  prendre  ce 
Catechifle  ou  four  un  Calvinijh  obftinê  ,  ou  four  le  plus  imperti- 
nent des  hommes ,  S.  Auguftin  auroit  efté  au  contraire  le  plus 
impertinent  des  hommes,  s'il  avoitcfté  Calvinifle.  Mais  com- 
me cette  épithete  ne  f(jauroit  jamais  s'allier  avec  l'idée  que  tous 
le  monde  a  de  l'éminence  de  l'cfprit  de  ce  grand  Saint ,  il  fauc 
par  neceiïïté  que  M.  Claude  celle  de  luy  donner  la  qualité  de 
Calvinifle  que  l'on  n'en  pourroit  leparer. 

M.  Claude  prétendra  peut- eftre  que  fi  ces  dogmes  ne  font  pas 
en  termes  formels  &  exprés  danscefermon  ,  ilsy  font  au  moins 
par  des  confequences  neceflaires.  Mais  quand  cela  feroit,  faine 
Auguftin  n'en  fêroit  pas  moins  tombé  dans  cette  impertinence 
fîgnalée.  Car  que  pourroit- on  s'imaginer  de  moins  judicieux. 
que  d'entreprendre  un  difcours  dans  l'intention  d'enfeigner  à 
des  perfonnes  ignorantes  les  dogmes  renfermez  dans  un  my- 
ftere ,  dont  la  connoiiîance  eftoit  neceftaireà  leur  falut,  &:  de 
ne  leur  exprimer  formellement  aucun  de  ces  dogmes ,  mais  de 
les  leur  laifler  à  deviner  ,  £c  de  vouloir  qu'ils  les  tirent  de  fon 
difcours  par   des  confequcnces  éloignées  ?  Ce  procédé  cft  il 
digne  d  un  homme  fage  &  judicieux?  Y  a-t-il  quelque  Mini- 
ftreaffez  ennemy  du  bon  fens  pour  l'imiter?  M.  Claude  voa. 
droitil  luy  même  le  fuivre  ?  Comment  ofe-t-il  donc  faire  par- 
ler faint  Auguftin  d'une  manière  dont  aucun  Calvinifte  ne 
voudroit  parler,  êc  nous  propofer  enfuite  cet  exemple,  qu'il 
ne  voudroit  pas  fuivre ,  comme  le  modèle  du  difcours  d'un 
Calvinifle  obftinè. 

Mais  encore  quelles  font  ces  confequcnces?  font-elles  claires? 
ibttt- elles  faciles?  lonc-elles  fcnftbles ?  Examinons  ce  que  M. 


cfl  appelle e  type  ,  image ,  figure ,  t^c.  117 

Claude  nous  dit  lljr  cepuinc,  ou  pliicoftcequ  Aubertin  nous  Ch.VIII. 
die  pour  luy. 

Ce  Miniftre  ruppofe  que  ces  nouveaux  baptifez  n'entendoient  Aiîb,  p.  es 
pas  le  (cns  de  ces  paroles  iZ^/^z/^^/ /^ror/'j- «^^^/.C.  c'cft  à  dire 
que  ne  concevant  pas  qu'il  ne  l'eftoic  qu'en  figure,  ils  propo- 
ient  une  objection  fondée  fur  les  différences  du  pain  6c  du  corps 
J.  C.  en  cette  manière.  Comment:  le  pain  peut  ilefirecorpsde  J.  C. 
O"  le  calice  [on  fmg^  puifque  le  corps  deJ.C.efl  ne  d'une  Vierze^ 
qu'il  a  efié  nourri  de  lait ^  qu'il  aefiê  mis  à  'mort ,  qu'il  eft  rc(Jufciîé\y 
ce  que  l'on  ne  fçauroit  dire  du  pain  6cdu  calice  ? 

z  II  TuppoTe  que  la  réponfe  de  S.  Auguftin  à  cette  queftion 
propofce,  eft  uniquement  contenue  dan^  ces  paroles:  Ifta^  fra- 
tres,  ideo  dicumur Sacrumcnta  ,  quia  in  eisaliud  vidctur ,  aliud  in- 
telliptu'r-^ quod  vidctur^  fpccicm  hjbet corporalcm-^quod  intciligitury 
frucium  habit J^iritualcm.  Ce  qu'il  glofe  en  cette  manière  :  .S".  Au~ 
gujîin  veut  dire  ,  dit- il ,  que  le  pain  (jr-  le  vin  font  appellcz^^  font 
après  la  confecration  le  corps  (^  le  fanq^  de  /.  C.  parce  qu'ils  en  [ont 
Sacyemcns  -.que  l'on  ne  leur  donne  pas  ce  nom  comme  ejiant  propre- 
ment ce  corps  ^  ce  fang ,  mais  parce  qu'ils  les  fignificnt.  Car  c'cfi  ce 
qui  arrive  communément  dans  tontes  les  chofes  qui  font  appellèes  ^ 
qui  font  Sacrcmens  ,  que/les  reçoivent  les  noms  des  chofes  figni-- 
fiêes.  Si  les  Sacrcmens ,  dit  ce  Saint  dans  un  autre  lieu ,  n  avaient 
point  de  rapport  aux  chofes  dont  ils  font  Sctcremens  ,  ce  ne  fcroient 
pas  des  Sacrcmens  ^  é^  c'eft  a  caufe  de  ce  rapport  ^  qu'on  leur  donne 
fouvent  les  noms  des  chofes  mêmes. 

Que  veulent  dire  ces  paroles  :  On  voit  une  chofe  ^  on  en  conçoit 
une  autre  ,  dit  encore  ce  Miniftre,  fînonque  ce  qui  fe  pre  fente  aux 
yeux  n' eft  pas  ce  que  l'  c_f]>rit  y  conçoit  ?  Car  le  pain  (j;'  le  vin  font  une 
chofe ,  (^  ils  en  f^nifent  une  autre ,  f  avoir  le  corps  (^  le  fin'g  de 
Jefus-Chrifl. 

Il  veut  donc  que  ces  nouveaux  baptifez  compriftènc  par  ces 
paroles  de  S.  Auguftin  ^  cjue  dans  le  S  icrement  onvoit  unecbofe^ 
(ii-l'on  en  conçoit  une  autre ,  qui  ne  diient  pas  un  feul  mot  du  corps 
naturel  J  &  qui  ne  contiennent  point  ce  principe,  que  les  Sa- 
cremens  reçoivent  le  nom  des  chofes  ftirnifiées  1  II  veut,  dis-  ie 
qu  ils  ent^^ndiffent,  que  le  pain  prenoit  le  nom  du  corps  na- 
turel,  parce  qu'il  en  eftoit  la  figure.  Et  il  fait  confiftcr  dans 
ces  paroles  tout  l'cclairciftcment  que  S.  Auguftin  donne  à  la 
queftion  propofée. 

Aubertin  fuppofe  en  troifiéme  lieu  que  le  mot  de  corps  de 

Piij 


ii8     Li V.  1 1.  Explication despnjfages ,  ou  tEucharifiie 
J.  C.   s'entendant  du  corps  naturel  j  jufqucs  à  ces   paroles: 

Ouod  vidctur ^  fpccicmhahet  curpyralcm ,  quod intclliytur  ,frucium 
h.tbet  fpiritualem ,  ce  terme  change  tout  d'un  coup  de  fens  ,  6c 
s'entend  du  corps  myftique  dans  celles  qui  iuivent  immédia- 
tement. Corpus  cry}  ChrijH  fi  vis  intcUi'^erc  ^  Apofiolorum  audi 
dicentem  fidcùibiis  :  J^oi  cftis  corpus  Chrifti- 

Mais  tout  cet  amas  de  fuppoficions  n'efl:  qu'un  amas  de  fauf- 
fetez,  de  temeritez,  6c  d'iliufions.  Il  ne  trouve  ce  dogme  fon- 
damental du  Calvinifme  ,  que  le  pain  eft  figure  du  corps  natu- 
rel que  dans  ces  paroles  -.Qes  chofcs^  mes  frères^  font  afpcllccs  Sa- 
crement ,  parce  qu'autre  chofe  efi  ce  que  nous  y  voyons  ,  autre  chofe 
ce  que  nous  concevons  ,  &  ne  l'y  trouve  qu'en  fuppofant  que  par 
cette  chofis  conceue  ^  S.  Auguftin  a  voulu  marquer  le  cçrps  na- 
turel de  J.  C. 

Mais  il  n'y  a  qu'à  rapporter  les  paroles  mêmes  de  S.  Auguftiii 
pour  montrer  que  l'on  ne  Tçauroit  faire  une  fuppofition  plus  ab- 
furde.  Voicy  toute  la  fuite.  Mes  frères ,  ces  chofes  font  appellces 
Sacremens ,  parce  qu'antre  chofe  ejl  ce  que  nous  voyons ,  autre  chofe 
ce  que  nous  concevons.  Ce  que  l'on  voit  ^  a  une  cfpece  corporelle  ^  ce 
que  Ion  conçoit ,  a  un  fruit fpirituel.  Voulezjvous  donc  fcavoir  ce  que 
c'eji  que  le  corps  de  J.  C.  ou,  comme  il  y  a  mot  à  mot ,  fi  vous 
voulez^donc  concevoir  le  corps  de  J.  C.  ècoutezj  Apotrc  S.  Paul  qui 
dit  aux  fidèles:  Vom  efi  es  le  corps  de  f  .C  &  fis  membres. 

Qiii  ne  voit  plus  clair  que  le  jour  par  cette  fuite ,  que  ces  mots 
de  S.  Auguftin:  Ces  chofes  font  appcUècs  ^uremcns  ^  parce  qu'au- 
tre chofie  (f  ce  que  nous  voyons ,  &  autre  chofe  ce  que  nous  conce- 
vons.,  ne  contiennent  qu'un  principe  gênerai  Se  indéterminé  , 
qui  fait  le  commencement  de  fa  folution  ^  &:  que  quand  il  vient 
à  déterminer  qucUeefl:  cette  chofe  qu'il  faut  entendre,  il  mar- 
que  cxpreiFement  que  c'eft  le  corps  myftique  de  J  C  d'où  il 
eft  clair  qu'il  ne  s'agit  en  aucune  forte  dans  ce  qui  précède  , 
du  rapport  du  Sacrement  au  corps  naturel. 

C'eft  ce  qui  paroift  encore  manifeftement  par  le  terme  d'r;>^<», 
donc ,  corpus  ergo  Cbnjlifi  vis  intclli'iere  Car  ce  terme  fait  voir 
qu'il  n'avance  rien  de  nouveau,  mais  que  ce  qu'il  ajoute  eftoit 
déjà  contenu  dans  ce  quiavoitefté  dit,commeuneconclufion 
particulière,  dans  une  thefe  générale.  Il  avance  généralement 
qtie  dans  les  Sacremens  on  voit  une  chofie  ,  d^  l'on  en  conçoit  une  au. 
trc  :  &;il  applique  à  l'Euchanft-ie  cette  maxime  générale  ,  en 
marquant  que  cette  chofie  conceuë  eft  le  corps  myftique  de  J.  C. 


efi  appelée  type  ^  image,  figure  ^  t^c.  119 

de  forte  que  le  rapport  du  Sacrement  au  corps  naturel  n'efl  Ch.  VIII. 
marqué  en  .meure  (orte  non  plus  dans  le  commencement  qu'en 
cet  endroit.  Le  mot  même  à'nitclligere  qui  ell  dans  cette  der- 
nière claule  ,  fait  voir  qu'elle  fe  rapporte  à  ce  qui  précède.  Car 
S.Auguftm  dés  le  commencement  du  Sermon  promet  de  don- 
ner à  fes  auditeurs  cet  éclaircillement  des  veritez  de  la  foy  qui 
s'exprime  par  ce  terme,  (uivant  ce  palîjge  :  Si  vous  ne croycz^^ 
vous  n'entendrcz^pas. 

Enfin  pour  faire  comprendre  combien  le  fens  qu'Aubertin 
attribue  à  S.  Auguftin  eft  ridicule ,  en  voulant  qu'il  ait  palle 
du  corps  naturel  au  corps  myftique  dans  deux  claufes  conie- 
cutives  ;  où,  bien  loin  qu'il  y  paroifle  aucune  marque  de  paf- 
fagedune  idée  à  une  autre,  toutes  chofes  au  contraire  contri- 
buent à  appliquer  Tefprit  à  la  même  idée,  il  n'y  a  qu'à  repre:- 
fenter  tout  cet  endroit  avec  cette  glofe.  Car  voicy  de  quelle 
forte  il  veut  que  S.  Auguftin  ait  parlé.  Mes  frères  ,  ces  chofe^j 
font  appcUées  Sacremens ,  parce  qu'autre  chofe  e fi  ce  que  nous  voyons, 
fçavoir  le  pain  ,  d^  autre  chofe  ce  que  nous  concevons  ,  Içavoir  le 
corps  de  j.C.  ceque  l'on  voit^  qui  eft  le  pain,  a  une  efpece  corporel- 
le 3  ce  que  l'on  coiK^oit^  fçavoir  le  corps  naturel  de  J.  Ç.  a  unfruif 
fpirituel.  Si  vous  voulez^  donc  entendre  le  Corps  myllique  de  7-  GT. 
écoutez^  l'Aphtre  qui  dit  aux  fidèles  :  Vous  efles  vous-mêmes  le 
corps  myftique  de  "ffus-Chrifl. 

Il  faut  eftre  fans  iincerité  ou  fins  lumière  pour  ne  pas  recon- 
noiftre  qu'il  n'y  a  pas  de  fèns  commun  dans  ce  difcours,  &:  que 
le  feul  moyen  de  faire  parler  S.  Auguftin  raifonnablement  efl: 
d'ofter  cette  glofe  ridicule  de  corps  «^z/^sr^/,  &  de  réduire  ces 
deux  claufes  ci  un  même  fens,  en  prenant  la  première  pour  une 
maxime  générale ,  que  dans  les  Sacremens  on  voit  une  chofe,  d^  l'on 
en  conçoit  une  autre  >  Se  la  deuxième  pour  l'application  de  cette 
maxime  qui  marque  que  cette  chofe  que  l'on  conçoit  dans.i^E^r 
chariftie  eft  le  corps  myftique  de  J.  C.  -  ',  ;? 

Mais  en  oftant  cette  idée  du  corps  naturel àz  J.  C  qu'Auber- 
tin fait  entrer  ridiculement  dans  ce  pafTage,  on  voit  en  même 
temps  qu'il  n'en  eft  pas  dit  un  mot  dans  tout  le  Sermon^  de  for- 
te que,  félon  les  Miniftres,  S.  Auguftin  voulant  inftniire  de 
nouveaux  baptifez  de  la  doctrine  de  l'Euchariftie ,  n'a  pas  fon- 
géà  leur  en  dire  la  chofe  capitale ,  qui  eft  la  fource  &  le  fon- 
dement de  toutes  les  autres. 
M.  Claude  dira  peut-eûre  que  cette  preuve  qui  montre  qu'on. 


12.0  Liv.  II.  Explication  des  pa^liges  ^  oîi  T Euchari^'ie 
ne  doit  point  defunir  ces  deux  cLuies ,  tv  que  la  première  ne 
peut  s'entendre  du  corps  naturel ,  non  plus  que  la  féconde, 
tombe  autant  fur  le  Cardinal  du  Perron  que  fur  Aubcrtin ,  par- 
ce que  ce  Cardinal  prétend  auffi  que  la  première  ,  qui  eft,  ces 
chofes  font  appellèes  Sacremcns ,  farce  que  l'on  y  voit  une  chofe  ,  (^ 
que  l'omn  conçoit  une  autre  ^  s'entend  du  corps  naturel  de  J.  C. 
&  qu'il  rapporte  la  féconde  au  corps  myilique. 

Mais  il  y  a  une  extrême  difîl-rence  entre  la  manière  dont  le 
Cardinal  du  Perron  explique  ces  deux  claufes ,  &  celle  dont 
elles  font  expliquées  par  Aubertin.  Ce  Cardinal  atres-bien  vu 
qu'en  l'cflat  où  nous  avons  ce  fermon,  il  efboit  impofîîble  de 
ne  rapporter  pas  ces  deux  claufes  confècutivesau  même  fujet. 
C'eft:  pourquoy  pour  avoir  droit  de  les  entendre  difFeremment, 
il  a  prétendu  qu'il  manquoit  quelque  chofe  en  cet  endroit,  & 
<]ue  ces  paroles  5  Corpus  ergo  ChrijH  fi  vis  int<:Uiy:re  ^  n'avoient 
aucun  rapport  à  ce  qui  les  précède. 
Je  n'examine  point  icy  fi  cette  prétention  eft  foIide,mais  au 
moins  elle  ne  choque  point  le  fens  commun.  Il  n'y  a  que  cel- 
le d'Aubertin  qui  le  choque  ,  en  voulant  d'une  part ,  que  ce  fer- 
mon  (oit  entier,  5c de  l'autre,  qu'il  (oie  parlé  dans  la  première 
partie  du  corps  naturel ,  &  dans  la  féconde  du  corps  myftique, 
fans  qu'il  paroilîe  aucune  trace  dé  ce  changement  d'idée. 

Ce  n'efl  pas  là  la  feule  abfurdité  du  fens  qu'Aubertin  don- 
ne à  ce  paOage.  ïl  fuppofe  de  plus  que  ces  Néophytes,  au  doute 
defquels  faint  Auguflin  veut  remédier ,  eftoient  choquez  de  ce 
qu'on  appelloit  \Qpain,  le  corps  de  J.  C.a  caufe  de  la  diucrfité 
de  ces  deux  objets  5  &  il  veut  que  la  folution  que  ce  Père  leur 
donne  foit,  que  le  pain  eft  le  Sacrement  de  ce  Corps,  &:  que  les 
Sacremens  prennent  les  noms  des  chofes  (ïgnifîées.  En  effet  il 
exprime  nettement  ce  principe  dans  la  réponfe  qu'il  fait  au  nom 
de  faint  Auguftin  ,  &;  (ans  doute  faint  Auguftin  l'auroit  expri- 
mé aufîï  bien  que  luy,  s'il  av^it  voulu  remédier  à  cette  forte 
de  doute.  Car  ce  principe  n'efl  point  (î  clair  qu'on  doive  le  laif- 
fer  à  deviner  à  des  Néophytes.  Cependant  on  le  voit  dans  Au- 
bertin expliquant  S.  Auguftin  ,  mais  on  ne  le  voit  point  dans 
faint  Auguftin  parlant  à  ces  Néophytes.  Il  dit  bien  que  dans 
les  Sacremens  on  voit  une  chofe  ,  é^  l'on  en  con(^oit  une  autre  j 
mais  il  ne  dit  point  que  l'on  donne  au  Sacrement  le  nom  de 
la  chofe  entendue  \  èc  la  liaifon  de  ces  deux  maximes  n'efl:  pas 
afiez  claire  pour  prétendre  que  l'une  emporte  l'autre.  On  voit 

-de 


efi  dppelUe  type ,  image  ^figure ,  i^c.  m 

de  l'Caudans  le  13aptême  ,  &  on  y  conçoit  le  Saint  Efprit.  Une   Ch.  VIII. 
s'enfuit  pas  néanmoins  que  l'on  puillè  dire  que  l'eau  eft  le  S. 
Fjpnt.  Cela  dépend  d'un  autre  principe. 

Cette  raifon  fait  voir  que  les  Miniftres  n'entendent  ny  le 
doute  propofé  par  faint  Auguftin,  ny  la  folutiondece  douce  j 
&que  le  doute  qu'il  marque  ne  peut  eftre  fondé,  comme  ils  le. 
prétendent,  fur  l'ignorance  du  lens  de  ces  termes.  Le  pain 
eft  le  corps  de  '}.C.  Nous  verrons  dans  le  chapitre  fuivant  en 
quoy  il  confifte.  Il  me  fuffît  d'avoir  prouvé  que  les  MiniOres, 
ne  l'entendent  pas. 

Mais  comment  M.  Claude  ne  s'eft  il  point  élevé  luy-mêmc: 
contre  la  manière  dont  Aubertin  explique  ce  doute  ?  car  elle 

•ompt  toutes  fes  mefures ,  &  mec  tous  fes  principes  &  toutes 

es  fuppofitions  en  defordre.  i .  Si  co.^  gens  ignoroient  encore  le 
fens  de  Hg;ure  ,  comment  les  avoic-on  fait  communier  la  nuic 
précédente  ,  puifque  c'eft  par  là  qu'il  falloit  commencer  aies 
inftruire  ?  2.  Avec  quelles  penfées  avoient-ils  communié,  &: 
quelles  autres  idées  pouvoient-ils  avoir  eues  c|ue  celle  de  la 
prefencc  réelle  ? 

Si  faint  Auguftin  a  craint,  comme  le  fuppofe  Aubertin  ,  que 
ces  gens  n'entendîiîént  pas  le  fens  de  figure  ^  il  a  donc  jugé 
<jue  ce  ièns  n'eftoic  pas  fi  clair,  qu'il  n'cuft  befoin  d'explica- 
tion. Et  fi  cela  eftj  d'où  vient  qu'il  l'explique  icy  fi  obfcure- 
tflent?  D'où  vient  qu'il. ne  l'explique  ntdlepart  ailleurs  ?  D'où 
vient  qu'aucun  des  autres  Pères  ne  l'a  éclairci.''  Eft-ce  que  les 
Ghreftiens  d'Afrique  avoient  l'efpric  autrement  fait  que  les  au- 
tres? Et  comment  S.  Auguftin  ,  en  les  fuppofant  fî  groffiers.qu'ils 
r/entendoient  pas  ce  qui  ne  doit  jamais  avoir  efté  regardé  com- 
me obfcur  félon  M.  Claude  ,  les  fuppofet-il  en  même  temps 
afïèz  fubtils  pour  entendre  à  demi  mot ,  que  le  pain  eft  la  figu- 
re du  corps  naturel  de  J.  C.  quoyqu'il  ne  leur  parle  que  du 
corps  myftique  '■>  Se  que  les  fignes  s'appellent  du  nom  des  cho- 
ies ,  quoyqu'il  ne  prenne  pas  la  peine  de  leur  marquer  ce 
principe  ? 

•Il  eft  donc  vifible  que  toute  cette  explication  d'Aubertin 
eft  une  pure  vifion.  Qu'il  n'entend  ni  le  doute  que  faint  Au- 
guftin a  craint,  ni  la  réponfe  qu'il  y  a  faite.  Et  fur  tout  il  eft 
clair  que  ce  dogme  capital  du  Calvinifme,  que  le  pain  eft  la 
figure  du  corps  naturel  de  J.  C.  n'eft  contenu  en  aucun  endroit 
de  ce  Sermon. 


■iit        Liv.  1 1.  Expl.  des  Viiffciges  oîi  tEuchuriflte 

Pour  les  trois  autres  dogmes,  je  ne  (çay  fi  M.Claude  voudra 
feulement  tenter  de  les  tirer  par  confequences.  Mais  il  eft  bien 
certain  au  moins  qu'il  ne  le  fc^auroit  faire  à  l'égard  de  ces  deux, 
que  le  pain&:  le  vin  rcprefentent  le  corps  &  lelangde  J.  C.  en 
eftat  de  mort  ,  &  que  la  manducation  fpirituelle  qui  nous  efl 
commandée  ,  efl  un  aiie  de  foy  par  lequel  on  regarde  la  mort  de 
J.  C.  comme  la  fource  de  notre  vie.  Car  il  n'eft  pas  plus  parlé  de 
ces  deux  dogmes  dans  ce  Sermon  que  de  la  création  du  mon- 
de ,  ou  de  la  prife  de  Jerufalem. 

Ce  feroit  auflî  vainement  qu'il  pretendroit  tirer  fon  effica- 
ce, ôc  [es  nouveaux  rayons  de  lumière  .^  de  ce  que  faint  Augutlin 
ditj  que  ce  que  l'on  entend  dans  l'Euchariftiea  un  fruit  Ipirituel  j 
puifqu'il  eft  clair  qu'il  ne  parle  que  d'un  fruit  d'édification  qui 
naift  de  la  confideration  d'une  vérité  édifiante.  Se  qu'il  feroic 
ridicule  d'établir  fur  cela  une  promelTe  d'une  efficace  particu- 
lière à  TEuchariftie.  Toutes  les  veritez  de  Dieu  ont  des  fruits 
Spirituels  J  &  l'on  peut  dire  de  même  que  h  Ton  confidere  ce 
que  les  créatures  corporelles  nous  fignifient ,  nous  y  trouverons 
un  fruit  fpirituel  .^  fans  que  perfonne  s'imagine  fur  cela  c]ue  ces 
créatures  foient  des  Sacremens.  Ainfi  l'efficace  fecramencale 
&  particulière  de  l'Euchariftie  n'eft  marquée  en  aucune  forte 
dans  ce  pafîagej  &  par  confequcnt  on  n'y  trouve  aucun  des 
dogmes  qui  compofent  la  créance  Calvinifte. 

Que  M.  Claude  ju^e  luy  même  ce  que  l'on  devroit  dire 
d'un  tel  Catechifte  :  &  fî  eftant  très  certain  qu'il  feroit  le 
flus  impertinent  des  hommes  ,  pour  u fer  de  fes  termes  ,  j'/7  efloit 
Calvinifte  ,  on  n'a  plus  droit  d'en  conclure  que  fxint  Augu- 
ftin  J  à  qui  cette  épithete  ne  peut  convenir  ,  ne  l'eft  donc 
pas,  &  que  les  Miniftres  luy  font  outrage  lorfqu'ils  le  veulent 
rendre  partifan  de  leurs  erreurs,  &  qu'ils  prétendent  les  au- 
torifer  par  ce  Sermon  ,  qu'ils  n'entendent  pas. 


(fi  appe liée  type  y  image  j  figure  j(^c.  lij 

_____________   ^"*  ^  ^' 

CHAPITRE    IX. 

Explication  Jîncere  ^  véritable  du  Sermon  de  S.  Augufiin 

ad  Infantes. 

QUand  je  ne  m'engagcrois  pas  plus  avant  dans  l'expli- 
cation de  ce  Sermon,  ïes  Mir  iftres  n'auroient  aucun  droit 
d'tn  prendreavantage.il  fuffir  qu'il  loir  clair  que  faint  Augu- 
ftin  ne  leureft  pas  favorable  ,&  qu'il-n'enfeignc  aucun  de  leurs 
dogmes  pour  les  obliger,  s'ils  ont  quelque  refte  d'équité,  de 
mettre  ce  Sermon  à  part ,  &  de  chercher  à  s'éclaircir  du  fenti- 
ment  de  ce  Père  par  des  pafHiges  plus  clairs. 

Afin  néanmoins  de  ne  rien  oublier  de  ce  que  je  puis  pour  leur 
fatisfaclion,  je  veux  bien  ne  me  pas  contenter  de  ce  qu'ils  ont 
droit  de  pretenJre,&:  m'accommoder  même  à  ce  qu'ils  peuvent 
de/îrer,  en  expliquant  en  particulier  ce  qu'il  y  a  de  plus  dif- 
ficile dans  ce  Sermon. 

Pour  en  trouver  le  véritable  fens  il  faut  d'abord  établir  ce 
qu'il  y  a  de  certain  ,  afin  de  s'en  fervir  comme  de  principe  pour 
l'etlaircidèmL'nt  du  refte. 

Or  il  eft  certain  ,  i.  Qu'il  n'y  a  point  d'apparence  de  prendre 
ce  Sermon  pour  un  difcours  dogmatique,  où  faint  Auguftin  aie 
deflein  d'mftruire  ces  nouveaux  baptifez  de  ce  qu'ils  avoientà 
croire  fur  l'Euchariftie.  Car  il  paroift  clairement  par  ce  Ser- 
mon même,  &  par  un  aurretout  femblab'e  qu'il  fit  aux  nou- 
veaux baptifez  à  un  jour  pareil  &  fur  le  même  fujet,  que  ces 
nouveaux  b.iptifez  avoient  déjà  participé  aux  myfteres.  Vous  Aug.  fern». 
avexjre(^ii  vo/rre  myjlere  ^  dit  S.  Auguftin  dans  le  Sermon  dont  ^^'  ^  '^"  ' 
il  s'agit  M\lierium  veftrum  accepijhs.  Vous  avez^déja  efiè  faits 
pariictpam  du  Sacrement  de  la  table  du  Seigneur^  leur  dit  il  dans 
l'autre. 

Or  s'ils  avoient  déjà  participé  aux  faints  Myfteres,  il  eft  cer- 
tain qu'on  leur  avoit  déjà  dit  ce  qu'il  en  falloit  croire ,  eftant 
incroiable  qu'après  leur  avoir  caché  ces  myfteres  avec  tant  de 
foin  lorfqu'ils  n'eftoient  que  Catéchumènes  ,  on  ne  les  en  in- 
ftruifit  pas  au  moins  lorfqu'ils  eftoient  fur  Je  point  d'y  partici- 
per, pour  lespreferverde  faireunfacrilegeen  communiant,  5c 
les  empêcher  de  tomber  dans  cette  ignorance  criminelle  mar-     , 


114   Liv.  I  î.  ExpUcmon  despdjf^gcs  , ou  l" Euchariftie 
quée  par  HefychiuS)  dont  on  le  rend  coupable  en  mangeant  le 
corps  de  J.  C,  fansconnoiftre  fa  vertu  &.  fa  dignité^  c'efl  à 
dire,  dit  cet  Auteur  ,  fins  favoirqiiil  cfi  le  corp  de  Jefus-Chrifi 
en  vérité.  ^ 

Ce  n'eftpas  feulement  la  raifon  qui  nous  convainc  que  les  Pè- 
res ne  pouvoient  fe  difpenfer  d'un  devoir  fi  preflant  &  fi  ne- 
cefTaire ,  mais  c'eft  la  difcipline  de  l'Eglife  marquée  par  S.  Cy- 
rille de  Jerufalem  dans  fes  Catechefes.  Car  il  témoigne  dans 
Ja  i§.  qu'avant  que  de  conférer  aux  nouveaux  baptifez  chacun 
des  Sacremens  qu'ils  recevoient  le  Samedy  Saint ,  on  leurfai- 
fbit  une  inftruction  fur  ce  que  la  foy  les  obligeoit  d'en  croire, 
Se  fur  les  difpofitions  .avec  lefqueîles  ils  les  dévoient  recevoir. 
Xa  veille  du  grand  jour  de  Pafque ,  dit  ce  Père ,  ^  de  voflre  régé- 
nération, nous  vous  enfeignerons  ce  qui  fera  convenable ,  avec  quel- 
le révérence  ^  avec  quel  ordre  il  faut  entrer  dans  le  lieu  où  vous 
ferez^  baptifez^ ,  quelles  font  les  raifons  de  toutes  les  faintes  céré- 
monies que  l'on  y  -pratique ,  avec  quelle  dévotion  il  faut  au  fortir 
du  Baptême  s'approcher  de  l'Autel  de  Dieu  d^  participer  aux  my- 
fteres  fpirituels  ^  celefies  que  l'on  y  offre  ,  afin  que  voflre  ame  étant 
illuminée  par  nos  injiruHions  ^  nos  di [cours  ,  chacun  de  vous  con^ 
tioiffe  la  grandeur  des  prcfcns  que  Dieu  liiy  fait. 

Il  eft  donc  confiant  par  cette  difcipline  que  ces  nouveaux  bap- 
tifez aufquels  S.  Auguftin  parle ,  avoient  déjà  reçu  une  inftru- 
âion  dogmatique  fur  l'Euchariftie,  qui  leur  faifoit  connoifire  Lt 
grandeur  du  prefent  que  Dieu  leur  y  faifoit.  Cependant  il  témoi- 
gne dans  tous  ces  deux  fermons ,  c'^eftàdiredans  ce  fermon',<?f^ 
/«/^ï^/^fj, rapporté  par  S-Fulgence^  &dans  lefermon  S^.dedi- 
verfis .,  qu'il  pretendoit  leur  dire  ce  qui  ne  leur  avoit  point  enco- 
re efté  dit.  p^ous  avez^.,  dit-il  dans  le  premier,  déjà  vu  la  nuit 
dernière  fur  l' Autef  les  chofes  que  vous  voyez^prefentement  :  mais 
on  ne  vous  a  pas  encore  dit  ce  qu  elles  étaient,  ce  qu  elles  fgnifoicnty 
'^  combien  les  chofes  dont  elles  font  Sacremens  font  grandes  d^  itn- 
portantes.  Vous  voyez^.,  dit  il  dans  le  fermon  de  diverfis ,  le  Sa- 
crement de  la  table  du  Seigneur ,  ^  vous  y  avez^  déjà  participé  la 
tiuit dernière.  Mais  vous  devez^fçavoir  ce  que  vous  avez^re^ù,  ce 
que  vous  recevez^ ,  ^  ce  que  vous  y  devcz^  recevoir  tous  les  jours. 

Il  eft  donc  évident  que  ces  nouveaux  baptifez  ayant  déjà  efté 
inftruits  des  dogmes  eflèntiels,  ce  n'eftoit  pas  de  ces  mêmes 
dogmes  que  S.  Auguftin  les  vouloic  inftruire ,  puifqu'il  ne  pour- 
roit  dire  à  l'égard  de  ces  dogmes ,  qu'ils  ne  les  avoient  point  oUis, 
Nondum  audiftis.  .  ^ 


^  efl  a,ppellée  type /image '^figare  ^^c,  "  uj 
Siippofons  donc,  conjme  nous  avons  tout  droit  de  le  faire  ,  Cn.  IX. 
qu'avant  cette  inftruclion  que  S.  Auguftin  leur  donne  le  jour 
dePafque,  on  leur  en  avoir  fait  une  autre  leSamedy  Saint,  ou  un 
peu  auparavant,  fur  la  fubftance  même  du  Myftere.  Suppofons 
que  l'on  leuravoit  dit  ce  que  S.  Cyrille  de  Jerufalem  dit  aux 
nouveaux  baptifez  : /'«//^art'^y^  J.C.  même  qui  nous  ajjure  ^  nous 
dit  du  fain  ^  Cecy  eft  mon  corps  ,.  qui  déformais  en  ofera  douter  /  Et 
fuifque  c'cfl  luy-m'eme  qui  nous  confirme  ^  nous  dit  que  c'efi  fou  fan^^ 
qui  ofera  cn  douter  (y-  dire  que  ce  n'efi  pas  fon  fang  ?  uéutrefois  en 
Cana  de  Galilée  il  changea  l'eau  en  vin  qui  approche  du  fang ,  (^  ' 
on  ne  le  jugera  pas  digne  d'efre  crû  lorfqu' il  change  le  vin  en  fon^ 

P^^  ■ 
Qu'on  leur  avoir  dit  ce  que  le  même  Père  dit  encore:  Recevons 

donc  ces  chofes  avec  une  entière  certitude  comme  le'  corps  ^  le  fang^ 

de  J.  C.  car  dans  le  type  du  pain  le  corps  vous  eft  donn'è  ,  ^  le  fang^ 

dans  le  type  du  vin. 

Qii'on  les  avoit  avertis^  comme  il  en  avertit  ceux  de  fon  Eglife, 
que  le  pain  qu'ils  voy  oient  n'efiojt  pas  du  pain ,  quoyque  le  gouf  rap- 
portât que  c'eftoit  du  pain ,  mais  le  corps  de  J.  C.  g?-  que  le  vin  qui 
eft  oit  expofè  à  leurs  yeux  n'cfoit  pas  du  vin  ,  quoyqu'il  paruft  tel 
au  gouft,  mais  le  fang  de  J.  C. 

Qii'on  leur  avoit  dit  ce  que  dit  S.  Gaudence  des  Chreftiens 
qui  eftoient  dans  la  même  difpofition  que  ceux  à  qui  S.  Auguftin 
parloir  .-  Qu^e  le  Créateur  des  7iatures  qui  de  la  terre  crée  le  pain , 
fait  enfuite  du  pain  fon  propre,  corps ,  parce  qu'il  le  peut  ^  l'a 
promis. 

Qii'on  leur  avoit  prouvé  la  venté  de  ce  Myftere ,  &  combaru 
les  doutes  qui  pouvoient  s'élever  dans  leurefprit  par  les  mê- 
mes raifons  dont  S.  Ambroife  fefertpour  affermir  les  nouveaux 
fidelles  dans  la  créance  qu'ils  en  doivent  avoir.  Qu'on  leur 
avoit  rapporté  les  miracles  de  latoute-puiftance  de  Dieu  pour 
leur  rendre  croyable  ce  changement  du  pain  au  corps  de  J.  C, 
Qu'on  les  avoit  excitez  à  faire  profeffion  de  la  vérité  de  cette 
foy  en  répondant  Amen  ,  c'eft  àdirc,  en  vérité,  au  Preftre  qui 
leur  doijnoit  le  corps  de  J.  C.  en  les  afturant  que  ce  l'eftoir. 

Voilà  la  difpofition  où  eftoient  ces  nouveaux  baptifez  à  qui  S. 
Auguftin  parle.  Etainfi  ne  nous  étonnons  plus  qu'il  nefe  met- 
te pas  en  peine  de  les  établir  dans  cette  foy  ^  qu'il  ne  leur  en  dé- 
velope  pas  les  dogmes,  &  qu'il  prenne  pour  fujet  de  fon  dif. 
cours  l'explication  des  rapports  myfterieux  de  la  matière  du 

Q^iij 


iz6    Liv.  1 1.  Explication  despajfages ,  ou  î Euchariftie 
Sacrement  au  corps  myftique  de  J.  C. 

Le  deuxième  principe  que  l'on  doit  avoir  dans  l'erprit  en  ex. 
pliquant  ce  fermon ,  c'efl:  que  l'explication  que  Ton  y  donnera, 
pour  être  folide  &  véritable,  ne  doit  point  feparer  ces  deux  clau- 
fes  confecutives,  dont  la  première  eft  :  Ifta  ^fratres ,  idco  duun^ 
tur  Sacramenta ,  quia  aliud  vidctur ,  aliud  intelliytur.  Quod  vide^ 
tur  fpeciem  habet  corporalem  ■>  quod  intelliptur  fruHum  habet  Ipiri- 
tualem.  Et  la  féconde;  Corpus ergo  Chrifii fivis intelligere ^  Apo. 
fiolum  audi  dicentemfideltbus  :  Vos  efiis  corpus  Chrifti. 

Car  l'opinion  du  Cardinal  du  Perron,  qui  veut  qu'il  y  ait  quel- 
que interruption  entre  deux, eftant  peu  probable,  puilque  S.FuI- 
gence  qui  rapporte  ce  fermon  de  S.  Auguftm  ,  témoigne  qu'il 
le  rapporte  tout  entier:  &  celle  d'Aubercin,  qui  rcconnoiffanc 
que  ces  deux  claufes  fe  fui  vent  immédiatement ,  entend  néan- 
moins la  première  du  corps  naturel ,  &  la  deuxième  du  corps 
myftique  eftant  ridicu  le ,  comme  nous  l'avons  prouvé  ;  il  s'en- 
fuit que  la  véritable  interprétation  doit  avoir  pour  caradere 
de  réunir  ces  deux  claufes  dans  un  même  fens. 

Enfin  le  troifiéme  principe  efl: ,  qu'eftant  vifible  que  le  fermon 
83.  de  diverfis  n'eft  différent  du  fermon  ad  infantes  que  par 
quelques  termes,  &  que  S.  Auguftin  s'y  efl  propofé  de  donnera 
ces  nouveaux  baprifez  les  mefmesinftruélionsî  il  faut  que  le  fens 
qui  conviendra  à  l'un,  convienne  à  l'autre,  &  faire  en  forte 
que  ces  deux  difcours  s'entr'éclaircifTent  mutuellement 

Nous  commencerons  donc  par  le  fermon  83.  de  diverjis  ,  dont 
le  fens  réglera  celuy  du  fermon  rapporté  par  S.  Fulgence.  Voi- 
cy  de  quelle  manière  S.  Auguflin  y  parle. 

Je  me  fouviens  de  lapromeffe  que  je  vous  ay  faite  Je  me  fuis  en- 
gagé de  vous  faire  un  difcours ,  à  vous  qui  avez^eflê  baptifez^^  pour 
vous  expliquer  le  Sacrement  de  la  table  du  Seigneur ,  lequel  vous 
voyez^  prcfente7nent ,  (jS  dont  vous  avez^  efîè  parti cipans  lu  nuit 
piffée. 

Le  fujet  de  ce  difcours  efl  d'expliquer  non  les  dogmes  renfer- 
mez dans  ce  Myllere,  comme  l'cfR^t  de  la  confecration,  le  chan- 
gement du  pain  au  corps  de  J.  C.  S  Auguflin  fuppofe  ks  bapti- 
fez  inftruits  déroutes  ceschofes  :  mais  c'eH:  d'expliquer  menfa 
Dominicc  S  icruracnta  ^  c'cfl  à  dire  quelles  font  les  chofes  fïgni- 
fîées  par  le  pain  &:  le  vin  dont  nn  fe  fert  dans  ce  mvficre.  C'cft 
de  faire  voir  poarquoy  la  matière  de  ce  myflere  cft  le  pain  &  le 
vin.  Curinpanc  ^  commue  il  dit  dans  le  même  fermon.  C'eft  de 


efi  appellée  type ,  image ,  figure  ,  ^c.  ti-j 

montrer  que  ce  pain  èc  ce  vin  fignifienc  le  corps  myilique  ,  Ch.  IX. 
comme  il  le  dit  dans  la  fuite. 

P^ous  devczi,  ajoute  S.  Auguftin  ,  [(^avoircc  que  vous  avezjre- 
çk  ,  (^  ce  que  vous  rccevez^^  (y-  ce  que  vous  devez^  recevoir  chaque 
jour ,  c'eft  à  dire  ,  vous  devez  fc^avoir  les  myfteres  renfermez 
dans  ces  chofes  que  vous  devez  recevoir  chaque  jour.  Voilà  ce 
qu'il  veut  expliquer.  L'explication  fuit  immédiatement  après 
en  ces  termes  : 

Ce  pain  que  vous  voyez^fur  l'autel  efiant  confacrê  par  la  parole  de 
Dieu ,  efi  le  corps  de  J.  C.  Ce  calice^  ouplutoft  ce  qui  efi  contenu  dans 
ce  calice ,  efi  lefang  de  J.  C.  il  nous  a  voulu  confier  g^  donner  dam  ces 
chofes  le  corps  ^  le  fang  qifil  a  verfè  pour  la  rcnuijion  des  péchez^, 
pourveu  que  vous  le  reccviez^bien  ^  car  l' Apôtre  nous  dit  :  Quoyque 
nous  [oyons  plu  (leurs  ^  nous  ne  fo-mmes  qu^  un  feul  pain  ^  un  feuicorps . 
S.  Auguftin  répète  icy  quelque  chofe  de  dogmatique,  en  difant 
que  le  pain  efi  le  corps  de  J.C.   é^  Is  calice  fin  fiing  ;  ce  qui  eft 
Tabregé  des  inftrutflions  qui  avoient  efté  données  à  ces  nou- 
veaux baptifez  :  mais  il  le  répète  non  pour  s'y  arrcfter,  mais 
pour  paflTer  à  l'inftruction  principale,  qui  fait  le  fujet  particulier 
de  fon  fermon  ,  qui  eft  de  fçavoir  pourquoy  Dieu  nous  donne 
ce  corps  ôccefang  fous  la  forme  de  pain  &  de  vin  ^  &  cette  in- 
ftru(ftion  principale  qu'il  propofe  enfuire  par  ces  paroles.-  J.C. 
nous  a  voulu  confier  fion  corps  d^  fon  fang  par  ces  chofics ,  c'eft  à  dire , 
par  le  pain  &  le  vin  ,  ôc  fous  la  forme  du  pain  &  du  vin.  Et  pour- 
quoy ?  C'^j  dit-il,  ce  que  l'Apbtre  explique  par  ces  paroles:  Quoy 
que  nous  foyons  plufieurs ,  nous  ne  fornmes  qu'un  corps  &  qu'un 
pain.  C'eft  à  dire  en  un  mot  que  la  raifon  du  choix  que  J.  C.  a 
fait  des  matières  du  pain  &  du  vin  pour  en  faire  Ion  corps  6c 
fon  fang,  eft  principalement  le  rapport  que  ces  matières  ont 
avec  le  corps myftique de  J.C.  Le  Sacrement  defigne  princi- 
palement l'uniré  des  fidèles  ,  dit  Thomas  Valdenfis.   C'eft  ce 
rapport  avec  le  corps  myftique  qui  fait  que  J.  C  nous  donne 
fon  cor^js  naturel  &  le  iang  qu'il  a  verfé  pour  nous  fous  ces  ef- 
peces  fenllbles.  Le  rapport  naturel  du  pain  comme  pain  ,  &  du 
vin  comme  vin  regarde  diredement  le  corps  niyftique.  C'eft 
le  corps  myftique  qui  eft  reprefenté  par  cette  diverfiré  de  grains 
de  bled  qui  compofent  un  même  pain,  bi.  de  grains  de  raifin  qui 
.  compofent  un  même  vin.  Mais  c'eft  à  caufe  à^cç  rapport  que 
J.  C.  qui  vouloit  fe  fervir  de  fon  propre  corps  nature!  pour  unir 
tous  les  fidelles ,  a  voulu  nous  le  donner  fous  les  efpeces  du  pain 
&  du  vin. 


li?'  Li V.  II.  Explication despiiffiges ,  où  l' EuchuriHie 

Voilà  ce  que  faine  Auguftin  appelle  expliqtier  les  s^icrcmeni' 
delà  table  du  Seigneur^  &  ce  qu'il  prétend  que  l'Apôrre  a  fait. 
Ce  n'efb  pas  en(eigner  ce  que  le  pain  eft  fait  parla  confecra- 
tion.  C'efl:  faire  entendre  ce  que  le  pain.Sd  le  vin  fignifîent  ,  ÔC 
pourquoy  T.  C.  s'en  eft  lervi  dans  (on  mvftvjre. 

£t  c'eft  ce  que  ce  S.  DoAeur  dëvelope  encore  avec  plus  de  clar- 
té dans  la  fuite.  Jefus-Chrifi^  dit-il ,  nous  recommande  par  ce  pain 
d  aimer  l'unité.  Ce  pain  ejl-il  coiv.fiofe  dttn  fetil  qrain^.  Ny  en  avait- 
il  pas  plufïeurs  dans  le  froment  dont  il  eft  formé  ?  Mais  avant  qu'ils 
entrafjent  dans  la  cojnfojïtion  du  pain ,  Us  ejioient  feparei^  C'efl- 
far  l'eau  qu'ils  ont  efté  réiinis  après  avoir  efté  broyez^  Car  fi  l'on 
ne  broyé  le  froment ,  &  que  ton  n'en  fiffe  de  la  pafte  avec  de  l'eau  , 
on  ne  le  peut  reduitr  k  cette  forme  qu'on  appelle  pain,  il  en  eft  de 
m'eme  de  vous.  T'^ous  avez^  comme  palfé  fous  la  meule  par  l'humilia, 
tion  des  jeufnes  (jr-  du  Sacrement  de  l'ekorcifme.  Enfui  te  vous  avez^ 
ejîé  arrofez^  de  l'eau  du  baptême  afn  d'avoir  la  forme  de  pain, 
Mais  'ne  ce  n'èft  point  encore  du  pain  quand  il  n'a  point  encore 
fa[fé  par  le  feu.  Que  fgnifie  donc  ce  feu  ?  C'eft  le  Chrefme.  Car  cette 
huile  de  notre  feu  eft  ù  Sacrement  du  S.  Efprit. 

Il  n'y  a  qu'à  conlîderer  toute  cette  fuite  pour  reconnoître 
que  le  fermon  ^td  Infantes  ,  rapporté  par  faint  Fulgence  ne 
contient  queles  mêmes  inftruclions. 

S.  Auguftin  le  commence  en  diiant  aux  nouveaux  baptifez 
qu'ils  avoient  déjà  vu  la  nuit  précédente  ce  qui  eftoit  lurrAutel, 
c'eft  à  dire  le  pain  &;  le  vin ,  mais  qu'on  ne  leur  avoir  pas  dit  : 
Quid  effit  ,quid  fibi  vellet,quafn  ynayniC  ret  ficrayncntum  contine- 
ret\  Ce-  que  c'était  que  ces  efpeces.^  ce  qu'elles  fî'inifioicnt  .^  é^  combien 
■l'a  chofc  dont  cites  eftoient  Sacremcns .fftoit  yrunde  &  excellente.  Voi- 
là  donc  le  dèifein  de  S.  Auguftin  bien  marqué. Il  veut  apprendre 
à  ces  nouveaux  baptifez,  ce  que  ces  efpeces  eftoient  ^  non  dans  la 
nature,  car  il  eftoit  impodible  qu'ils  ne  le  fcùflent,  mais  dans 
la  religion  j  c'eftà  dire  qu'il  leur  veut  apprendre  ce  qu'elles  lî- 
gnifîoient,  &  de  quelle  chofe  elles  eftoient  Sacrement.  Il  les 
veut  faire  connoître  en  qualité  des  fignes  en  marquant  &:  la 
chofe  fignifiée ,  &laraifc5n  du  rapport  à  cette  chofe  fignifiée.- 
c'eft  à  dire  en  un  mot  qu'il  leur  veut  apprendre  ,  Sacramenta  cœ, 
nd  Bominic^e ,  comme  il  parle  dans  l'autre  fermon. 

Et  comme  ce  Sacrement  àq  la  Cbne  du  Seigneur  confiftej  . 
comme  ndus  avons  vu,  dans  le  rapport  du  paiiî  au  corps  my- 
ftiqtie  qu'il  reprefente  par  la  multitude  de  ces  grains  unis  tjui 

ont 


?/?  appellce  type ,  ima.ge ^  figure ^  (^c.  119 

ont  fervi  de  motif  à  J.  C.  pour  nous  donner  Ton  corps  &  Ton  Ch.   IX. 
fang  dans  ces  efpeces,  noiLS  ne  devons  pas  acrendre  que  faine 
Auguftin  nous  y  donne  une  autre  inftradion  que  celie-là.  Elle 
eH  feulement  un  peu  différemment  propofée.  ^ 

Ce  que -vous  voyci^^  leur  dic-il  ^  fur  l' Autel  ^ccfl  du  pain  ,  ^^c'e/i 
anjji  ce  que  vos  yeux  vous  déclarent:  mais  l'injfyuclion  que  votre 
foy  demande  cft  que  le  pain  efl  le  corps  de  Je  fus  Chiifi. 

Cette  rcponfe  de  S.  Auguftin  ne  contient  pas  encorel  eclair- 
cilîement  qu'il  avoit  promis  à  ces  nouveaux  baptifez.  Ce  n'eft 
pas  encore  ce  qu'ils  n'avoient  jamais  entendu  dire ,  &;  ce  qu'ils 
ighoroient.  C'cft  la  répétition  d'une  vérité  déjà  connue ,  mais 
connue  imparfaitement,  dont  Saint  Auguftin  leur  veut  don- 
ner uneconnoiftance  plus  entière  &  plus  pleine. 

Il  faut-  donc  fuppofer  que  ces  nouveaux  baptifez  ayant  déjà 
participé  à  l'Euchariftie  f^avoient  que  le  pain  ejîoit  le  corps  de 
J.  C.  &C  qu'ils  le  f(^avoient  félon  les  idées  que  la  dodrine  de  la 
prefence  réelle  peut  donner  de  ces  termes  ^  c'eft  à  dire  ,  qu'ils 
confideroient  cet  objet  extérieur  appelle/»;?/»,  comme  un  figne 
facré  ou  un  Sacrement  qui  contenoit  réellement  le  corps  de 
J.  C.  &  qui  y  eftoit  joint  comme  le  fang  l'cft  à  l'ame.  Voila 
l'impreffion  que  CCS  paroles  de  S.  Auguftin  formoient  dans  leur 
efprit  y  &  c'eft  ce  qu'ils  concevoient  par  ces  paroles  j  Pan/s 
cjl  Corpus  Chrifti. 

Comme  cette  dodrine  ainfi  conçue  enferme  deux  vericez; 
l'une  de  la  prefence  du  corps  de  J.  C.  dans  ce  figne  j  l'autre  que 
cet  objet  extérieur  appelle  pain  ,  eft  Sacrement  ou  figne  facré 
du  corps  de  J.  Celle  pouvoir  auffi  eftre  combattue  dans  l'ef- 
prit  des  auditeurs  de  faint  Auguftin  par  deux  fortes  de  diffi- 
cultez. 

Les  unes ,  qui  font  les  plus  confiderables,  regardoient  le  fond 
même  du  myftere^  c'eft  à  dire  le  changement  du  pain  au  corps 
de  J.  C.  &  ce  font  celles  que  S.  Ambroife  ,  que  l'Auteur  du  li- 
vre des  SacremenSj  que  S.  Cyrille  de  Jerufalem,  que  S.  Epi- 
phane ,  &  plufieurs  autres  Pères  combattent. 

Ce  font  cesdifficultez  que  les  Pères  étouffent  par  la  ferme-  < 
té  immobile  de  la  parole  deDieu^  &:  parles  autres  exemples 
de  fa  toute-puiffance.  Ce  font  celles  que  S.  Ambroife  en  par- 
ticulier condamne  par  l'exemple  de  l'Incarnation ,  en  difant  j 
que  ce  corps  que  les  Prejlres  forment  cfi  le  corps  né  de  la  Vicrqe. 
Et  hoc  quod  conficimus  corpus  ex  Virqfne  eft  :  Qifil  ne  faut  pas 

R 


rjo    L  I V .  1 1.  EspUcittion  despxjjages,  oà  l EucJurifiie 

cl.ccher  l'ordre  de  la  nature  dans  le  corps  de'}.  C.  puïfque  J.  C.  cjf 
luy-rn'eme  ne  d'une  Vicri^^e  contre  l ordre  de  la  nature.  Quid  hk 
quarts  natures  ordincm  in  Chrifii  corpore ,  cùm  prêter  naturam  fit 
ipfe  Dominus  "je fus  partus  ex  Virynd 

Mais  comme  ces  fortes  de  difficulcez  nailTent  de  ce  qu'il 
y  a  de  principal  dans  ce  Myftere,  c'eft  à  dire  de  la  prefence 
réelle  du  corps  de  J.  C.  dans  les  fymboles ,  on  les  détruifoic  en 
propofant  cette  dodrine  ôc  en  l'appuyant  &  la  fortifiant  de  rai- 
Ions.  C'eft  pourquoy  comme  ce  fcrmon  de  S.  Auguftin  n'eft  pas 
deftiné  pour  donner  à  ces  nouveaux  baptifez  cette  forte  d'in- 
ftruclion ,  ce  ne  font  pas  auffilà  les  doutes  contre  lefquels  il  a 
deft'ein  de  les  fortifier.  Il  les  fuppofe  déjà  détruits  dans  leur  ef- 
prit  par  les  inflrudions  précédentes. 

Les  autres  difficultez  naiflTent  de  la  deuxième  vérité,  qui  eft 
que  robjetexterieurappellé/'<^/«,  eft  le  Sacrement  du  corps  de 
].  C.  &ce  font  celles  que  S.  Auguftin  a  dû  combattre  dans  ce 
lermon  ,  parce  qu'ayant  eu  defîèin  d'y  expliquer  Sacramenta 
Cœna  Dominiez  .^  les  sacrernens  de  la  table ,  comme  il  parle  dans 
le  fermon  85.  dedivcrjîs  j  cequejîgnifioient  le  pain  &  le  vin  y  corn, 
bien  ils  eftoient  Sacrement  d'une  grande  chofe  ^  Quid  fibi  vcllei , 
quant  maqiïarei  Sacramemtm  continerct .,   comme  il  dit  dans  ce- 
luy-  cyjil  eftoit  obligé  d'éclaircir  les  difficultez  qui  fe  trouvoient 
en  particulier  dans  cette  matière  qu'il  traitoit  en  particulier. 
Or  il  nefepeut  gueres  élever  qu'une  difficulté  fur  ce  point, 
fçavùirqu'afin  qu'une  chofe  foit  Sacrement  d'une  autre,  il  fauc 
qu'il  y  ait  quelque  reflemblance  &  quelque  rapport  naturel  en- 
tre ces  deux  cliofes.  Car  files  Sacremens ,  dit  le  même  faint  Au- 
guftin  ,  n'avoient  aucun  rapport  avec  les  chofies  fipiifiées  ,  ils  n'en 
Aug.  ad  Bo-  ficroient  point  du  tout  Sacremens.   Si  eni^n  Sacramenta  quandam  fi~ 
* ^  '    ^'     '      militudinein  earum  rcrum  quarum  funt  Sacrajnenta ^iion  habereni., 
omnino  Sacramenta  non  ejjent.  Il  faut  donc  felpn  ce  principe  du 
fens  commun,  que  S.  Auguftin  avoit  fort  dans  l'efprit,  qu'afin 
que  robjct  extérieur  appelle /^/w  foit  Sacrement  du  corps  de 
J.C  il  ait  quelque  rapport  avec  le  corps  de  J.  C,  Cependant 
ce  rapport  eftoit  aflez  difficile  à  découvrir,  parce  qu'il  n'eft  pas 
aifé  de  comprendre  quel  rapport  ont  des  matières  mortes  &  in- 
fenfibles  avec  le  corps  Se  le  fang  de  J.  C.  ni  avec  aucune  aâùon 
de  fa  vie. 

C'eft  donc  là  le  doute  que  S.  Auguftin  a  deftein  d'éclaircir 
dans  ce  fermon  }  c'eft  le  doute  qu'il  veut  exprimer  j  &  toute  la 


efi  dppellée  type ,  lynAge ,  figure ,  t^c.  131 

difficulcë  confifte  en  ce  que  les  termes  dont  il  fe  fert  pour  l'ex-  C  h.  IX. 
primer ,  &  les  raifons  fur  lefquelles  il  fe  tonde  ,  font  en  quelque 
forte  équivoques,  6c  peuvent  marquer  par  elles  m.êmes  ou  un 
doute  de  réalité ,  ou  un  doute  de  Sacrement.  Car  le  fondement 
de  ce  doute ,  comme  Aubertin  en  convient ,  efî:  la  diverfîté  qui 
paroiil  entre  le  pain  d'une  part,  &:  le  corps  de  J.  C.  &  toutes 
its  aclions  de  l'autre.  Or  cette  raifon  combat  &!a  réalité,  par- 
ce qu'il  eft  difficile  de  croire  que  cet  objet  fi  différent  de  J.  C. 
contienne  J.  C.  même  ^  &:  la  qualité  du  Sacrement,  parceque 
l'efprit  ne  voyant  de  luy-mcmcaucun  rapport  entre  un  pam  &: 
J.  C.  confideré  dans  toutes  Tes  actions  ,  il  ne  voit  pas  auflî  tout 
d'un  coup  par  quelles  raifons  J.  C'a  plùtoft  choifi  le  pain  qu'u- 
ne autre  matière  pour  en  faire  le  Sacrement  de  fon  corps. 

Comme  la  raifon  du  doute  eft  équivoque  ^  l'expreffion  du  dou- 
te Peft  au(îî.  Car  une  perfonne  que  la  diverfité  du  pain  6c  du 
corps  deJ.C.  feroit  douter  delà  prefence  réelle,  pourroit  fort 
i»ien  exprimer  fon  doute  par  ces  paroles:  Comment  le  pain  ejl-il 
le  corps  de  J.  C?  Quomodo  cfi  partis  corpîis  cjus^ 

Et  de  même  une  perfjnne  qui  auroit  peine  à  comprendre 
pourquoy  J.  C.  nous  donne  fon  corps  fous  la  forme  de  pain  , 
Cur  in  pane ,  parce  qu'il  ne  luy  paroiftroit  aucun  rapport  entre 
un  pain  &  le  corps  de  J.  C  quoy  qu'il  y  en  doive  avoir  entre 
le  Sacrement  d'une  chofe  6c  la  chofe  fignifiée  j  cette  perfon- 
nCj  dis-je ,  pourroit  exprimer  ce  doute  par  ces  paroles ,  Quorno. 
dopanisefi  corpus  ejus'i  pour  fignifier  feulement:  Comment  le 
pain  peut-il  efire  Sacremeyit  de  ce  corps ,  puifque  je  n'y  voy  aucu- 
ne reffemblance  ? 

Mais  ces  doutes  équivoques  dans  l'exprelTion ,  6c  équivoques 
dans  le  fondement  du  doute ,  peuvent  eftre  diftinguez  par  d'au- 
tres circonftances  ^  6c  c'eft  faute  de  les  avoir  obfervées  que 
les  Miniftres  fe  font  égarez  furcepaffage,  en  s'imaginant  que 
le  doute  qu'il  contient  eftoit  propofé  contre  la  prefence  réel- 
le, au  lieu  qu'il  n'eft  propofé  que  contre  la  qualité  deSacrement. 

Et  c'eft  pourquoy  comme  ils  fè  font  formé  une  faulTè  idée  du 
doute,  il  fe  trouve  auffi  que  la  réponfe  de  S.  Auguftin  eft  im- 
pertinente félon  leur  fens,  puifque  pour  répondre  à  cette  que- 
ftion  •  Comment  le  pain  eft- il  le  corps  de  J.  C?  il  fe  feroit  conten- 
té de  dire  que  le  pain  fignifie  le  corps  myftique,cequi  eft  ri- 
dicule. Corpus  ergo  Chri/h  fi  vis  zntelligere  ,  Apoftoliim  audi  di- 
centem  fidclibus  :  Vos  eftis  corpus  Chrifii. 

Rij 


iJi    Liv.  1 1.  Explkiinon  des  p^Jfiges ^  où  t Euchariflie 

Mais  en  fe  formant  une  autre  idée  de  ce  doute  ,on  ne  trou- 
ve rien  que  de  raifonnable  dans  la  rcponfe  de  S.  Auguftin  ,  &  on 
reconnoiftra  qu'il  y  a  un  parfait  accord  entre  la  queftion,  la  re- 
folution,  l'objeclion  ,  larëponfe  ,  &  toute  la  fuite. 

La  quellion  traitée  eft  :  Quid  Jibi  vellet  -punis  é^  calix ,  Q;-  quam 
mazrj.c  rci  Sucramcntum  continerct^.  Larefolution  eft,  que  le  pain 
eft  le  Sacrement  du  corps  de  J.  C.  contenu  réellement  fous  les 
efpeces  -.  panis  c/i  corpus  Chrifii.  Mais  ces  paroles  donnent  lieu  à 
un  doute  &  à  une  objection  confiderable. 

L'objeclion  ou  le  cloute  eft  contenu  dans  ces  paroles  de  la 
traduftion  de  M.  Q\l\xàc:Vous me pouvez^donc  dire:  Puifque  vous 
nous  comryiandez^  de  croire ,  expliquez^  nous  ce  que  c'cfi ,  afin  que 
nom  entendions.  Car  cette  pcnfèe  peut,  naître  dans  l'efprit  de  quel- 
qu'un: Nous  f^avons  de  qui  Notre  Seiyieur  a  pris  fa  chair,  fcavoir 
de  la  Vierqe  Marie:  Nous  fi^avons  qu  il  fut  alaité  en  fon  enfance -^ 
Ou'' d  fut  nourri  5  Quil  fc  fit  grand  ^  Qu'il  parvint  u  l'âge  de  l'a~ 
dolefcence  j  Qu'il  fotiffrit  les  perfecutions  des  Juifs  3  Qjffl  fut  pen- 
du au  bois  3  Qîfil  y  fut  mis  ix  mort  '■>  Qu^il  rcffufcita  le  troifième 
jour  J  Qtfil  monta  au  Ciel  lorfqu'il  luy  plut  d'y  monter  \  Qjfil  éle- 
va la  [on  corps ,  d'où  il  doit  venir  pour  juger  les  vivans  é^  les  morts  5, 
(^  qu'il  efi  maintenant  a.ljïs  k  la  dcxtre  du  Père.  Comment  donc  le 
pain  eft -il  fou  corps ,  é"  le  calice  fon  fang  ?  c'eft  à  dire,  s'il  y  a  donc 
fi  peu  de  rapport  de  toutes  ces  circonftances  de  la  vie  de  J.  C. 
avec  ce  pain  éc  ce  vin ,  comment  peuvent- ils  eftre  les  Sacremens 
du  corps  de  j.  C.  puifque  cette  qualité  enferme  quelque  reflem- 
blance  &  quelque  rapport ,  &  que  nous  ne  voyons  qu'une  entiè- 
re diverfité  entre  ces  objets  ? 

Voilà  l'objection  &.  le  doute  auquel  S.  Auguftin  entreprend  de 
répondre.  Et  il  le  fait  d'une  manière  auffi  jufte  &  auffi  précife 
quand  on  l'entend  de  cette  forte ,  qu'il  l'auroir  fait  d'une  ma- 
nière extravagante ,  fi  l'on  prend  &:  le  doute  oc  la  réponfe  félon 
la  penfée  des  Miniftres. 

Car  pour  montrer  à  fes  auditeurs  que  c'eftoit  leur  fliute  de 
ce  qu'ils  ne  trouvoient  pas  de  rapport  entre  le  pain  &:  le  corps 
de  J.C.  qu'avoir  i!  autre  chofe  à  faire  que  de  leur  découvrir  un 
rapport  efteétif  entre  le  pain  &:  ce  corps  >  Mais  pour  cela  il  ne  fa- 
loitpasconfiderer  ce  corps  feparémentde  celuydes  fidelles  au- 
quel il  eft  joint  J  c'eftàdire,  qu'il  faloitconfidercr  le  corps  de 
J.  C.  tout  entier  comme  lachofe  fignifiéeparle  Sacrement,  & 
finie  regardant  de  la  forte,  envoie  tout  d'un  coup  qu'il  y  a 


eft  appslléc  type  ,  hn âge  ^  figure  ,  (^c.  133 

beaucoup  de  rapport  entre  le  pain  compoTé  de  plufieurs  grains,  Ch.    I  X. 
&  le  corps  de  J.  C.  n'en  failant  qu'un  avec  celuy  des  fidelles , 
ce  qui  s'appelle  Ion  corps  myftique.  C'eft:  l'abrégé  de  la  rcponfe 
de  S.  Augurtin  qu'il  exprime  de  cette  forte. 

Mes  frères,  ces  cho je  s  font  af^cllcts  Sucremens ,  parce  qu'autre 
chofe  eft  ce  que  nous  voyons  ,  d^  autre  chofe  ce  que  nous  concevons. 
Ce  que  l'on  voit  a  une  efpece  corporelle  3  ce  que  l'on  conçoit  a  un 
fruit  fpirituel.  Sivous  voulez^donc  concevoir  le  corps  de  JC.  (.fî- 
gnifie  par  le  Sacrement,  &  auquel  les  efpeces  ont  rapport  )  écou- 
tez^ l' Apôtre  S.  Paul  :  Vous  efies  le  corps  de  "J.  C.  (^  fes  membres. 
Voflre  myftere  eft  mis  fur  cette  table  :  Vous  avezjeceu  vofire  myfte- 
re.  Vous  dites   Amen  ace  que  vous  efies ,  ^-^  vous  y  foufcrivcz^par  ouare  cr^o  m 
vofire  rcponfe.  On  vous  dit  donc  :  Le  corps  de  1.  C.  ô'  vous  rè-  T""^  ' 
pondez^:  Amen.  Soycz^  mcynbre  du  corps  de  J.  C.  afin  que  vofirs  traduit  :  w.<is 
AwE'H  foit  véritable.  Fourquoy  donc  ce    ynyfiere    s'accomplit-il  f<"*>-^,"'>jtc:<r 
dans  le  pain  ?  N'apportons  icy  rien  du  nofire ,  mais  écoutons  encore  ''^''  ^"  ^^^^'' 
le  même  Apbtre  parlant  de  ce  ftcrement.  Nous  qui  fommes  ,  dit-  mal  traiimt  : 
il ,  plufieurs .  nous  fommes  un  feul  corps.  Entendez,  cecy  .  je  vous  "'^^  "^^^  "^°^ 

J  '   '■    ..,r        À  in-  >  ■    ^  ,  .     marquent 

en  pne  ,  &  vous  en  rejoujjez^  Car  ce  n  efi  tcy  qu  unité ,  fiete ,  veri-  y,,g  rouvellc 
^é,  charité  3  Unfeulpain^  un  feul  corps .,  quoyque  nous  foyons plu-  qucftion,  au 
fieurs.  Remarquez^  que  le  pain  nefi  pas  fait  d'un  feul  grain ,  mais  ^^^^^Vf^'" 
de  plufieurs .  Qiuindon  vous  a  exorcifez^.,   vous  avez^pajfè  fous  la  ftin  mamua 
meule:  Quand  vous  avez^été  baptifezjvous avez^ctê  arrofcz^d'eau^  qii-  ce  n'cft 
(^  quand  vous  avez^recit  le  feu  de  S.  Efprit ,  on  peut  dire  que  vous  ^^^^^^  ^g^[" 
ofvez^  été  cuits  comme  un  pain.    Soycz^  donc  ce  que  vous  voycz^ ,  qucftion pro- 
^  recevez^  ce  que  vous  elles.  Voilà  ce  que  l' Apbtre  a  dit  du  pain,  V°^'^^->  0^"-, 
par  ou  H  nous  montre  ajjez^ce  cpue  nous  devons  entendre  aleyird  ^i„.f„s  chnfin 
du  Calice,  Car  comme  pour  faire  cette  efpece  vifible  du  pain  ,  plu- 
fieurs grains   font  réduits  en  un  corps  ,  pour  reprefenter  ce  que  dit 
l'Ecriture  :  ils  n'avaient  qu'une  ame  C^  qu^un  cœur  en  Dieu  5  il  en 
efi  de  mime  du  vin.  Remarquez^  comment  il  efi  un.  P lufieurs  grains 
pendaient  au  raifin  ,  mais  leur  liqueur  a  été  confondue  en  un 
corps. 

Qui-a-t-il  de  plus  jufte  que  cette  re'ponfe?  Car  n'eft-ce  pas 
comme  fi  S.  Auguftin  avoir  dit  à  ces  nouveaux  baptiiez ,  qui  ne 
concevoient  pas  comment  le  pain  pouvoit  eftre  Sacrement  da 
Corps  de  J.C.  ne  trouvanfaucun  rapport  entre  ces  deux  objets  : 
Vous  ne  comprenez  pas  commenc  le  parn  eft  Sacrement  du 
Corps  de  J.C.  parce  que  vous  n'y  voyez  rien  qui  ait  du  rapport 
cy  avec  ce  corps  de  J.  C.  ny  avec  aucune  des  actions  de  fa  vie. 

Riij. 


134  L^^-  ^^'  Explicj.tion  des pxfpiges ,  ou l' Euçhxriflie 
Je  vay  vous  aider  à  le  comprendre.  Ces  choies  font  appcl- 
lées  Sacremens,  p;irce  que  l'on  y  voie  une  chofe,  &  l'on  y  en 
conçoit  une  autre.  On  y  voit  le  pain  ,  on  conçoit  le  corps  de 
J.  C.  Mais  ce  corps  de  ].  C.  qu'il  faut  entendre  comme  la  cho. 
le  fignifîée  par  le  Sacrement*  n'cft  pas  le  feul  corps  naturel.  C'eft 
le  Corps  de  J.  C.  tout  entier,  c'eft  à  dire  le  chef  &  les  mem- 
bres, qui  s'appelle  le  corps  myftique.  Ecoutez  ce  que  dit  l'Apô- 
tre :  Vous  efies  le  corps  dcJ.C.  Or  ce  rapport  que  vous  ne  trou, 
vez  pas  entre  le  pain  &  le  corps  de  J.  C.  confideré  feul ,  vous  le 
trouverez  entre  le  pain  bL  le  même  corps  de  |.  C.  joint  à  (qs 
membres  ,  c'eft  à  dire  entre  le  pain  &  le  corps  myftique.  Si  vous 
me  demandez  donc  pourquoy  J  C.  nous  donne  fon  corps 
dans  le  ^zm  ,quarc in  pane  ^  ccn'e.'lpas  moy,  c'eft  l'Apôtre  qui 
vous  en  découvre  la  raifon  par  ces  paroles  :  Un  feul  pain  c?-  un 
feul  corps.  Remarquez  que  le  pain  n'eft  pas  fait  d'un  feul  grain, 
mais  deplufieurs.  Remarquez  que  le  vin  ne  fe  fliit  que  de  plu- 
sieurs grains.  Voila  le  rapport  que  vous  cherchiez.  Voila  la 
raifon  du  choix  de  cette  matière.  Voila  po^irquoy  J.  C.  nous 
donne  fon  Corps  (s'/wj /é'/'^?/».  Voila  comment  le  pain  eft  Sa- 
crement du  corps  dej.  C. 

Cette  explication  n'eft  pas  feulement  probable,  mais  elle  eft: 
certaine  parplufieurs  circonftances,  i.  Parce  quel  autre  doute 
que  l'on  attribue  à  ces  nouveaux  fidelles,  qui  eftdene  fcavoir 
pas  le  fens  de  ces  paroles  ^  Le p.iin  efi  le  corps  de  7.  C  eft  contre 
toute  apparence ,  puifqu'ayant  déjà  communié  ils  avoient  déjà 
reçu  cette  inftrudion. 

2.  Les  deux  claufes  de  la  réponfe  de  S.  Auguftin ,  dont  la  pre^ 
miere  eft  -,  Ces  chofes  font  appellces  Sacremens  ,  parce  qnon  voit 
une  ^hofe  ^ l'on  en  conroit  une  autre  3  &.  la  féconde  ,  Si  vous  vou- 
Icz^  donc  concevoir  le  corps  de  J.  C.  écoutez,  l'Arb'.re  qui  dit  aux 
fidcUes  '■>  Vous  êtes  le  corps  de  J.  C.  qu'Aubertm  fepare  contre  tou- 
te~ib?te  d'apparence  ,  font  réunies  par  cette  explication ,  £c 
font  partie  de  la  même  folution. 

3.  Il  eft  clair  que  ces  paroles:  si  vous  voulez^  donc  entendre  le 
corps  deJ.  C.  font  partie  de  la  f)Iution  de  la  difîiculté  propo- 
fée.  Cependant  l'explication  d'Aubertin  les  en  fepare  abfolu- 
ment,  &  celle  qu'on  a  apportée  les  y  rend  cftentielles. 

4.  Il  eft  encore  vifible  que  la  qneftion  propofée  par  ces  pa- 
roles :  Quomodoefi panis  corpus  Chrilli^  eft  la  même  que  celle 
qui  eft  exprimée  plus  bas  par  ces  mots,  quare  crzp  in  pane  ^  U 


eji  dppcllée  type  ,  image  ,  figure  ^  (^c,  13^- 

particule  cry) ,  marquant  que  ce!le-cy  n  cfl  qu'une  repeckion  Ch.  I  X. 
d'une  quefrion  déjà  propofée.  Or  il  n'y  en  a  point  d'autre 
que  celle-là.  Il  ne  s'agit  donc  plus  que  de  fçavoir  le  fens  de  cette 
queftioni  Ouare  in  pane  ?  Mais  ce  fens  eft  clair  par  lafolution  que 
S.  Auguftiny  donne,  qui  eft  que  le  pain  cftant  fait  de  placeurs 
grains  reprcfence  l'unité  desfidelles:  Ce  qui  t'ait  voir  que  le  fens 
de  laqueflion  propolée  eftoit  :  Maispourquoy  le'corpsdej.  C. 
nous  eft-il  donné  dans  le  pain  ?  Done  c'eft  aulTi  le  fens  de  cette 
même  queftion  exprimée  par  ces  autres  paroles:  Ouomodo  eji 
fanis  corpus  Chrifti  ? 

Enfin  le  rapport  de  cette  queftion  avec  celle  qui  eft  propo- 
fée  6c  refoluëdans  le  fermon  83.  de  diverfs ^  fait  voir  claire- 
ment que  S.  Auguftin  n'a  prétendu  autre  chofe  que  de  faire 
connoîtreàces  nouveauxChrctiensles  raifons  myfterieufesdu 
choix  de  la  matière  du  pain  &:  du  vin ,  qui  font  que  cesefpeces 
reprefentent  l'unité  de  tous  les  fidelles  avec  J.  C.  Car  cette  rai- 
ion  eftoitfi  fortement  gravée  dansl'efprit  de  ce  Père ,  qu'il  ne 
perd  point  d'occafion  de  la  marquer,  6c  qu'on  ne  voit  point 
qu'il  en  rende  d'autre ,  lorfque  la  matière  le  porte  à  en  alléguer. 
On  en  voit  encore  un  exemple  dans  le  traité  16.  fur  S.Jean. 
Notre  Sciyficur  J.  C.  dit  -  il  ,  flous  a  laijjé  fou  corps  &  fon  fing  Epift.  6.  &  7. 
en  des  chofcs  qui  de  plujteurs  font  rc dattes  en  un  ;  car  le  pain  qui  e-i 
un  ,  efl  formé  de  pluficurs  orains  de  froment  ^  (^  le  vin  de  plufieurs 
yrains  de  raifin. 

Auiïî  avoit  il  empninté  cette  raifon  de  S.  Cyprien  ,  &  peut- 
être  encore  de  S.  Gaudence ,  qui  s'en  fert  de  même  dans  fon  fé- 
cond traité  fur  l'Exode.  De  forte  que  n'y  ayant  point  de  rap- 
port plusautorifé  queceluy-là,  ny  qui  fût  plus  édifiant ,  puif- 
qu'il  tend  à  faire  connoitre  l'importance  de  l'union  des  fidelles, 
qui  eft  une  des  finsdeTEuchariftie,  il  n'eft  pas  étrange  que  S. 
Auguftin  ait  fait  un  fermon  exprés  aux  nouveaux  baptifez  pour 
les  en  inftruire  j  ny  que  S.  Fulgenee,quin'y  confideroitquecet 
unique  vérité  de  l'unité  du  corps  de  J.  C.  iignifiée  par  l'Eucha- 
f  iftie,  ait  appelle  ce  fermon ,  Admodum  luculentum  Q-  aptum  ^cdi- 
ficationi  fidelium.  Car  il  mérite  en  effet  cet  éloge,  en  l'expli- 
quant comme  nous  avons  fait ,  &  en  leprenantnoncommeun 
difcours  dogmatique,  maiscomme  dit  S.  Fulgence,  pour  un  dif- 
cours  moral  ,  propre  à  édifier  les  fidelles  :  au  lieu  qu'il  necon- 
rienc  qu'un  amas  de  penfées  &  d'exprelTions  déraifonnables 
fi  l'on  y  cherche ,  comme  fait  M.  Claude ,  une  inftruclion  Cal- 
tinifte.  Fin  du  fécond  Livre. 


IJÔ 


LIVRE   TROISIE'ME- 

REPONSE   AUX   OBJECTIONS    TIRE'ES 

des  rapports  de  la  matière  de  l'Euchariftie,  &des 
aifterentes  manières  de  concevoir  ce  Myftere. 


CHAPITRE    PREMIER. 

Q^e  les  rapports  de  la  matière  du  Sacrement  au  corps  myftiqut 
de  J.  C.  n'smpèchoient  pas  que  les  fidclles  7ie  co/nprijfcnt  facile- 
ment  qu'il  n'y  avait  que  le  corps  ejfenttel  de  J.  C.  qui  fufi  réelle- 
ment contenu  dans  le  Sacrement.  Abus  que  M.  Claude  fait  de 
divers  paffazes  des  Pères  qui  marquent  ces  rapports. 

Ous  avons  fouvent  remarqué  que  la  cau(e  or- 
dinaire de  Tcgaremenc  des  Miniftres  dans  l'in- 
telligence des  pafTages  des  anciens  Pères ,  c'efl 
qu'ils  n'ont  jamais  tait  allez  de  réflexion  furies 
diverfes   manières  dont  les  hommes  penfenx 
&  expriment  leurs  penfées. 
Comme  leur  préoccupation  les  attache  fortement  à  regarder 
la  dodrine  des, Catholiques  d'un  certain  biais^&  à  la  renfer, 
mer  fous  certaines  exprellîons ,  ils  s'imaginent  qu'on  ne  peut 
i'avoir  dans  l'efprit  fans  la  regarder  de  la  même  forte,  &  fans 
repeter  à  tout  moment  ces  expreffions  fous  lefquelles  ils  la 
conçoivent. 

Mais  pour  les  détromper  de  cette  imagination,  il  ne  faut  que 
les  rappeller  à  eux-mêmes,  &  leur  faire  confiderer  ce  qui  fe  paf. 
fe  dans  leur  propre  cfprit,  Se  ils  reconnoîcronc  d'abord  que  lors 

qu'ik 


des  rapports  des  matières  de  T Eucha.rijiie.  137 
qu'ils  font  une  fois  perfuadez  d'une  vérité,  &:  qu'ils  la  fuppo-  Ch.  I. 
fenc  connue  de  ceux  à  qui  ils  parlent ,  ils  fe  mettent  peu  en  pei- 
ne de  l'exprimer  diftinciement  ,  &  que  fans  entrer  dans  le  fond, 
ils  s'arreftent  fouvent  à  en  expliquer  certaines  circonftances 
extérieures  félon  que  le  fujet  les  y  porte.  C'ell:  un  effet  necef- 
fàire  de  la  crainte  que  nous  avons  naturellement  de  I aller  l'ef- 
prit  en  ne  luy  prefentant  rien  de  nouveau ,  &  plus  encore  de 
la  foibleffe  de  nôtre  veuë ,  qui  ne  nous  permettant  pas  d'envi- 
Tagerun  objet  tout  entier,  &  de  comprendre  d'un  leul  regard 
tout  ce  qu'il  contient,  nous  oblige  de  le  feparer  en  diverfes  idées 
<5ui  ne  fe  conçoivent  &  ne  s'expriment  que  fcparément. 

En  appliquant  ces  principes  du  fens  commun  à  la  dodrine  de 
la  prefence  réelle^  il  eft  aifé  d'en  conclure  qu'il  ne  faut  pas 
s'attendre  que  ceux  même  qui  en  auront  efté  les  plus  perfuadez 
l'ayant  deu  mettre  continuellement  devant  les  yeux  de  leurs 
auditeurs  ou  de  leurs  leCleurs.  Quelque  important  que  fufl:  ce 
myflere  ,  il  eftoit  trop  connu  pour  en  uferde  la  forte.  Etainfi 
ilsenont  deu  parler  comme  l'on  parle  des  chofes  connues  j  c'eft 
à  dire,  que  comme  ils  l'ont  deu  exprimer  diftinctement,  lorf- 
qu'il  en  a  efté  queftion  ,  ils  ont  eu  auffi  une  entière  liberté  de 
ne  parler  fouvent  que  des  circonftances  qui  l'accompagnent 
fins  en  expliquer  le  fond. 

-  Or  une  circonftanceinfeparable  de  cette  dodrine,  c'eft  que 
J.  C.  eft  prefent  dans  ce  myftere  couvert  de  voiles  myfte- 
'-rieux.  Car  l'état  de  foy  qui  eftceluy  de  cette  vie  ,  ne  permet- 
tant pas  qu'il  s'y  montre  à  découvert ,  ne  fouffre  pas  auffi  qu'il 
s'ycaclie  tellement  que  rien  de  ce  que  nos  fens  y  apperçoivent 
ne  puifle  fcrvir  à  aider  &;  à  édifier  notre  foy. 

J.  C.  a  choifi  le  pain  6c  le  vin  pour  en  faire  la  matière  de  fon 
Sacrement.  Nos  fens  font  toujours  frappez  de  l'idée  &  de  l'ima- 
ge fubfîftante  du  pain  &:  du  vin.  Eft-ce  fans  raifon  qu'il  a  fait 
choix  de  ces  matières  terreftres  &;  de  ces  voiles  fenfibles  pour 
-un  ufage  fî  noble  &  fi  divin?  Et  peut-on  croire  que  n'ayant 
rien  fait  dans  l'œconomie  de  notre  falut  où  il  n'ait  gardé  des 
proportions  admirables  des  chofes  fenfibles  aux  fpirituellesSc 
intelligibles ,  il  les  ait  entièrement  negligéesdansje  plus  émi- 
nenr  de  ces  myfteres,  &  qui  eft  la  fin  6c  la  confommaticn  de 
tous  les  autres? 

L'analogie  delà  foy,  5c  les  plus  communes  lumières  de  la  pie- 
té ne  nous  permettant  pas  d'avoir  cette  penfée,  nous  portent 

S 


îi^S  Liv.  III.  Kêponje  aux  ohJeStions  tirées 

par  confequent  à  chercher  ces  rapports ,  &  à  nous  perfuâder 
après  en  avoir  trouvé  de  raifonnablesôc  dejuftes,  que  ce  font 
ceux  que  Dieu  a  pu  avoir  en  veuë.  Et  comme  ces  rapports  fer- 
vent d'une  part  à  fixer  la  matière  de  ce  Sacrement  &  à  empef- 
cher  qu'on  n'en  puifle  fubftituer  une  autre  eftant  fondez  fur  la 
qualité  de  cette  matière  ^  &  qu'ils  tendent  de  l'autre  direde- 
ment  à  l'édification  des  fidelles  ^  il  efl;  clair  que  foit  qu'il  ait 
eftéqueftion  de  la  matière  de  l'Euchariftie,  foit  qu'on  ait  eu 
en  vue  l'édification  des  peuples ,  il  n'y  a  rien  deu  avoir  de  plus 
ordinaire  que  l'explication  de  ces  myfterieufes  analogies. 

Mais  doit-on  croire  qu'en  les  expliquant  &  en  déduifantles 
raifons  du  choix  que  Dieu  a  fait  de  ces  matières  &de  ces  voi- 
les ,  on  ait  toujours  deu  y  joindre  une  explication  diftinde  de  la 
dodrine  de  la  prefence  réelle,  enforte  qu'il  y  ait  lieu  de  con- 
clure que  ceux  qui  ne  l'auroient  pas  ajoutée  ne  l'auroient  pas 
crue  ?" 

C'efl  ce  qu'il  faut  que  tous  les  Miniftres  ayent  fuppofc  ,  & 
particulièrement  M.  Claude  qui  ramaffeavec  foin  lespaflàges 
des  Percs  qui  expliquent  ces  rapports  pour  en  faire  la  fixiéme 
preuve  contre  la  prefence  réelle.  Ils  defcendent  ^  dit-il ,  jufques 
1.  tcp^p  64  ^  une  particulière  explication  des  rapports  ou  des  conformitez^qui 
font  entre  le  pain  (^  le  corps  de  J.  C.  é^  qui  fervent  de  fondement 
à  la  fgnijîcation.  Car  ils  difent  que  comme  le  pain  efl  fait  de  plu- 
'  fieurs  yains ,  il  en  efl  de  même  du  corps  de  J.  C.  d^  quefnfang  efl 
comme  un  vin  exprimé  au  preffoir  de  la  croix  qui  efl  reçu  dans  le 
cœur  des  fidcIlcs  comme  dans  des  vaiffcaux  ffatieux  :  Que  comme 
le  pain  ^  le  vin  fortifient ,  nourri ffnt  (jr  réjoii(fent  noftre  corps  -y 
de  même  J.  C.  augmente  le  bien  qui  efl  en  nous  (jr  nous  réjoiiit 
d'une  véritable  joie  :  Que  comme  dans  l'aHion  du  Sacrement ,  ce 
pain  efl  couvert  ^  puis  découvert  j  un  ^  puis  divifé  ,  diflribué  ^ 
mangé  i  de  même  J.  C.  a  efté  caché  dans  le  feinde  [on  Père,  ^puis 
manifeflé  au  monde  un  en  foy.mème  ,  ^  fait  divifible  par  l'afjom- 
ption  de  noftre  nature ,  (^  enfin  communiqué  aux  hommes  pour  eftre 
leur  vie  fpirituelle. 

Ce  difcours  n'efl:  qu'an  tiflu  que  M.  Claude  fait  à  fa  mode 
des  palTages  de  Bede  ,  de  Gaudence ,  de  Valfridus ,  de  S.  Cy- 
prien  ,  de  Théophile d'Anrioche,  de  S.  IfidoredeScville,  de 
Raban&deChriftianDrutmar:  &il  prétend  conclure  de  tout 
cela  que  ces  Pères  ayant  reconnu  ces  rapports  dans  l'Euchari- 
ftie ,  n'y  ont  rien  reconnu  au  delà ,  &  qu'ils  ne  l'ont  regardée 


cp. 


des  rapports  de  U  mAtiere  de  l'Buchmfiie.      139 
que  comme  un  figure  des  objets  qu'elle  reprefente,  fans  qu'el-  Ch.   I. 
le  contienne  en  aucune  forte  le  véritable  corps  de  J.  C. 

Mais  cette  confequence  a  fi  peu  de  fondement ,  qu'après  ce 
que  nous  venons  d'établir  ,  il  ne  feroic  prefque  pas  necelTaire 
de  le  réfuter  plus  amplement ,  fi  ce  que  nous  avons  à  en  dire 
ne  fervoic  à  donner  encore  plus  de  jour  pour  entendre  le  lan- 
gage des  anciens  Pcres. 

Car  que  pretend-il  par  cet  amas  de  pafiàges?  Eft-ce  qu'il 
veut  que  quiconque  marque  un  rappport  de  la  matière  que  J.  C. 
a  choifie  pour  en  faire  fon  Sacrement,  ne  reconnoifle  dans 
ce  Myftere  qu'un  fimple  rapport  ?  Mais  qui  luy  a  donné  droit 
de  fuppofer  une  maxime  fi  déraifonnable?Cesrapp©rtsne  font- 
ils  pas  aufii  des  fuites  necefiaires  de  la  dodrine  de  la  prefence 
réelle  ?  Et  faut  il  que  J.  C.  foit  abfent ,  pour  faire  que  le  pain 
&  le  vin  foienc  des  matières  propres  à  reprefenter  l'union  de 
plufieurs  corps,  parla  multiplicité  des  grains  qui  les  compo- 
fent?  Quoy  ;  s'il  fe  rencontre  efRrd:ivement  que  J.  C  nous 
donne  fa  propre  chair  fous  le  type  &  la  figure  du  pain  ôcdu  vin, 
ne  fera-t-il  plus  permis  de  dire  qu'il  a  choifi  ces  matières  plutolt 
que  d'autres  pour  montrer  par  cet  aflemblage  de  plufieurs 
grains ,  qu'il  ne  fait  qu'un  corps  arec  tous  les  fidelies  dont  il  efc 
Je  chef  5  ou  que  fon  corps  &  fon  fang  font  dans  nos  âmes  les  mê- 
-mes  effets  que  le  pain  &;  le  vin  font  dans  nos  corps  ?  Cela  feroit 
ridicule  à  penfer.  Et  par  confequent  les  Catholiques  ayant  eu 
droit  de  faire  ces  queftions  ôdde  demander  .-  Pourquoy  J.  C, 
a  choifi  ces  matières  terreftres  pltitoftque  d'autres  pour  en  fai- 
re fon  corps?  pourquoy  il  l'aplûtoft  couvert  de  ces  voiles  que 
d'autres,  dont  il  fepouvoitfervir?  les  Pères  ont  dcu  leur  répon- 
dre comme  ils  ont  fait  6c  s'exprimer  comme  ils  fe  font  exprimez. 

Si  M.  Claude  en  doute  ,  oc  s'il  prétend  abufer  de  ce  que  les 
Pères  parlent  toujours  du  pain  &  du  vin  comme  s'ils  fubfi- 
ftoient  dans  ce  myftere ,  parce  qu'ils  fubfiltent  en  effet  à  l'égard 
dçs  fens,  &  qu'il  n'eft  pas  queftion  d'expliquer  en  tous  lieux  le 
changement  intérieur  qui  s'opère  par  la  puififancede  Dieu  ^  il 
ne  faur  que  luy  montrer  les  mêmes  queflions  refoluës  de  la 
même  forte  dans  des  Auteurs  qui  ne  font  a0urément  pas  de 
fon  parti. 

Qu'il  confulte  donc  les  écrits  que  les  Théologiens  Latins  les 
plus  déclarez  pour  la  tranfTubftantiation  ont  fait  contre  \Qi 
Grecs ,  ou  ceux  que  les  Grecs  ont  fait  contre  les  Latins ,  il  y 

Sij 


I40  Liv.  III.  Képonfe  aux  ohjeEiions  tirées 

verra  non  feulement  que  tous  ces  rapports  y  lent  expliquez 
dans  les  termes  mêmes  dciPeres,  mais  qu'ils  fervent  même  de 
principe  &  de  fondement  à  toute  cette  difpute  ;  les  uns  &  les 
autres  convenant  dans  ce  principe  commun,  qu'il  doit  y  avoir 
un  rapport  &  une  analogie  myfberieufe  entre  les  fymboles  & 
la  verifé  de  ce  myftere. 

C'eft  fur  ce  fondement  que  Humbert ,  le  grand  adverfaire  de 

Berenger,fuppofant  la  neceffitë  de  ce  rapport,  veut  qu'on  exa. 

Iii  op.  coiitt.  xïï\nQ  laquelle  des  deux  Eglifcs  repre fente  la   vérité  ^  la  froprie- 

Grc-Ec.  calum.  ^^  ^^^  corps  du  Seigficur  par  un  rapport  plus  exact  ^  plus  précis  -^ 

4.  p.  107,    "   ^  que  pourfuivant  dans  la  fuite  l'explication  de  ces  rapports^ 

il  fe  fert  de  tous  les  termes  qui  les  marquent,  comme  ceux  de 

Ji'intficare^ajjîînilare ,  imitari  ^  annuntiare ,  fans  prétendre  parla 

exclure  la  vérité  de  laprefence  réelle  du  corps  de  J.  C.  Et  il 

fait  Çi  peu  difficulté  d'appeller  l'Euchariftie  du  nom  de  pain 

dans  cette  difpute ,  qu'il  dit  clairement  o^ç.c'eftoitdufain  azy- 

7ne  que  le  Seigneur  Je  fus  diflribua  aux  premiers  fondateurs  de  fon 

Jr.glife  en  mémoire  de  fa  Paf/Ion  3  Azymum  panem  fuiffe  quem  ipfs 

Dominus  in  cœna  primis    Ecclefa  fua  fundatoribus  difiribuit^ 

in  7nemoriam  fu^  Pa.dionis. 

Que  nie  diroit  point  M.  Claude  s'il  avoit  trouvé  un  paflage  de 
cette  forte  dans  quelque  Ancien  auteur,  &  avec  quelle  har- 
dieffeenconcluroit-il,  qu'il  faloit  bien,  félon  cet  auteur,  que  le 
pain  demeuraft,  puifque  c'eftoit  du  pain  que  J.  C.  a  diftnbué? 
Cependant  cette  confequenceneferoit  pas  plus  véritable  à  l'é- 
gard de  cet  ancien  qu'à  l'égard  de  Humbert ,  dont  le  nom  feul 
la  détruit,  &peut  faireconnoiftreà  M.  Claude  quelles  font  les 
expreffions  qui  peuvent  fubfifter  avec  la  plus  forte  perfuafion 
■delà  prefence réelle &:  de  laTranlfubftantiation.  Humbert diz 
que  c'éroit  du  pain  azyme  que  J.  C.  diftribua  à  ces  difciples,  c'efl: 
à  dire  que  J.  C.  prit  du  pain  azyme  pour  en  faire  le  Sacrement 
de  fon  corps  qu'il  diftribua.  Il  eft  vray  qu'après  l'avoir  pris  il  le 
changea  3  mais  il  n'eftoit  point  queftion  d'expliquer  là  ce  chan- 
gement, 6^  ainfi  il  n'en  parle  point.  C'eft  ce  qu'on  a  déjà  montré 
ailleurs  ,&  que  Ton  montrera  encore  plus  amplement  dans  la 
fuite. 
L'Auteur  du  traité  contre  les  Grecs  qui  eft  dans  la  Bibliothè- 
que des  Pères,  &  qui  a  été  fait  par  quelque  Dominicain  mil- 
fîonaire,  parle  ainfi  de  ces  rapports. 
2^'y  ayant  rien,  de  fupierflu  dans  notre  Sacrement  à  l'égard  même 


des  rapports  de  la.  matière  de  ÎEucharïflie.      14I 

des  (îonifications ,  on  n'y  trouve  que  trois  chofes ,  la  farine  ,  l'eau  (>■*  Ch.  I. 
le  feu  qui  fcrt  a  joindre  l'eau  ^  la  farine.  Za  farine  Jignifie  la  chair 
de  Je  fus-  Chrift  ;  l'eau  fi'iriifîc  [on  ayne  3  é-  le  feu  ,  la  divinité  qui  a 
pis  l'un  &  l'autre  en  unité  de  perfonne.  Donc  ,  diroic  un  homme 
qui  raifonneroic  à  la  mode  d'Aubertin  ,  la  farine  &:  l'eau  lubfi- 
ftenc  dans  le  Sacrement.  Donc ,  félon  cet  Auteur  ,  le  corps  de 
J..C  nes'y  trouve  pas,  puifqu'il  ne  s'y  trouve,  lelon  luy,  que  de 
la  farine,  de  l'eau  &  du  feu  pour  fignifier  le  corps ,  l'ame  &  la 
divinité  de  J.  C  Mais  ceux  qui  parlent  naturellement,  comme 
cet  Auteur  a  fait,  neprévoyent  point  ces  fortes  de  chicaneries. 
Ils  difent  qu'il  fe  trouve  de  la  farine  &  de  l'eau  6c  du  feu  dans 
le  Sacrement  ;  parce  qae  pour  le  faire  ,  il  eft  befoin  de  pain  qui 
eftfait  d'eau  &  de  farine  par  le  moyen  du  feu.  Ils  difent  qu'il 
ne  s'y  trouve  que  cela  ,  t'eft  à  dire  comme  matière  de  Sacre- 
ment, quoyque  cette  matière  eftant  changée  par  l'opération 
du  S.  Efprit ,  rien  de  tout  cela  ne  s'y  trouve  en  effet ,  mais  feu- 
lement le  corps  de  J.  C, 

Que  fi  M.  Claude  veut  qu'on  luy  montre  dans  des  Auteurs 
qu'il  met  luy- même  au  nombre  des  tranffuhftantiatcurs  les  mê- 
mes rapports  marquez  par  les  Pères  ,  il  n'a  qu'à  confulter  tous 
ceux  qui  ont  écrit  fur  la  Liturgie  ,  ou  qui  ont  expliqué  les  ligni- 
fications myfterieufes  de  ce  Sacrement. 

Il  faut ,  dit  Robert  PuUus,  un  amas  de  plujîeurs  grains  pour  ce 
Sacrement.,  parce  qu'il  eft  prépare  pour  divers  fidelle  s  ,  é-  que  com-   ^^"^^^  «•  <:•  ^•. 
me  plufeur s  grains  font  unynèmcpain ,  de  même  les  divers  fidelle  s  a 
qui  cette  nourriture  eft  deu'é  ,  ne  font  qu'une  Eglife. 

Rien  n  eft  plus  propre  .^  dit  S.  Bonaventure,  pour  fiqnifier  l'unité  in  Brtviio- 
tant  du  corps  naturel  de  J.  C  que  de  fon  corps  myftique  ,  que  du  pain   l"'-"  '^-  9. 
fait  de  grains  de  bled  très -purs ,  ^  du  vin  forme  de  grains  de  rai  (in. 

S.  Thomas  ramafTe  auffi  dans  fa  Somme  tous  ces  divers  rap- 
ports marquez  parles  Pères.  Enfin  il  n'y  a  prefque  point  d'Au- 
teur qui  ait  écrit  fur  ce  fujet,  qui  ne  parle  de  ces  analogies  de 
la  matière  Euchariftique  au  corps  de  J.  C.  &  à  l'Eglife  dans 
les  lieux  mêmes  où  ils  foutiennent  le  plus  fortement  la  vérité 
de  ce  myftere. 

Qiii  s'étonnera  donc  de  trouver  le  même  langage  dans  les 
Pères ,  puifqu'ils  n'ont  pas  efté  moins  appliquez  à  découvrir 
ces  rapports,  ou  plûtoft,  qui  ne  s'étonnera  de  voir  que  les 
Miniftres  ayent  prétendu  tirer  avantage  de  ces  exprelTions  qui 
s'accordent  fi  parfaitement  avec  la  dodrine  àes  Catholiques 

S  iij 


i4i  Liv .  III.  Képonfe  aux  objectons  tirées 
Cependant  il  n'y  a  rien  de  d  commun  dans  leurs  Ecries  ^  &  il 
ne  faut  que  lire  l'examen  qu'Aubercin  fait  dupalfagede  Saine 
Cyprien  à  Ca;cilius  qu'il  divifèen  dix  argumeus,  pour  admi- 
rer comment  les  Miniftres  font  valoir  les  moindres  chicane- 
ries. Je  ne  m'arrefteray  pas  à  difcuter  cette  foule  de  petits  ar- 
gumens  qui  ne  méritent  pas  d'être  propofez. 

Comme  ce  qu'il  allègue  que  (aint  Cypnen  dit,  que  le  calice 
efi  offert  en  commémoration  de  j.C.  Ce  qui  u'eft  que  le  langage 
commun  de  tous  les  Catholiques  du  monde. 

Qu'il  conclut  dje  ce  que  J.  C.  dit  :  Je  fuis  lavrayevign^ ,  que 
ce  H  efi  pas  L'eau  mais  le  vm  qui  efi  le  fang  de  J.  C.  c'eft  à  dire  , 
ce  n'eft  pas  de  l'eau  mais  du  vin  que  J.  C.  a  dit ,  que  c'eftoit  fon 
fang. 

Qu'il  dit,  que  c^  efi  par  le  vin  que  le  fang  de  J.  C.  efifignijîé  dr 
montre  j  c'eft  à  dire  ,  que  le  rapport  qui  doit  être  entre  la  ma- 
tière du  Sacrement  &:la  vérité  ,  (e  trouve  non  entre  l'eau  Se  le 
corps  de  J.  C.  mais  entre  le  vin  &ce  même  corps. 
Qu'il  dit ,  que  notre  facrifice  apoit  été  auf^figuré  par  Melchifedec^ 
d^  que  J.  C.  avait  offert  la  même  chofe  que  Melchifedec ,  c'efi  à  dire^ 
le  pain  é-  le  vin.  Ce  qui  ne  fignifie  autre  chofe  fînon  que  ].  C. 
a  employé  dans  fon  facrifice  la  même  chofe  que  Melchifedec , 
fçavoir  la  pain  &  le  vin ,  quoy  qu'il  en  ait  fait  un  ufage  différent 
en  le  changeant  en  fon  corps ,  comme  nous  le  montrerons  ail- 
leurs. Ainlî  le  facrifice  de  J.C.  eftle  même  queceluy  de  Mel- 
chifedec à  l'égard  de  l'être  original  de  la  matière  &  dans  l'ap- 
parence qui  en  fubiîfte  ;  &il  ne  laifTe  pas  d'en  être  différent 
comme  la  vérité  le  doit  être  de  la  figure.  J.C.  dit  S.  Jerofme  , 
p^tffe  au  vray  Sacrement  de  la  Pafquc,  afin  que  ce  que  Melchifedec 
Prêtre  du  Très-  Haut  avait  fait  cnoffrant  le  pain  d^  le  vin  enpréfi- 
ytration  de  luy ,  il  le  fit  aujjî  en  nous  donnant  la  vérité  de  fon  corps 
^  de  fon  fang  :  Ut  quo  modo  in  prafiguratione  cjus  Melchifedec 
fiimmi  D^i  Sacerdos  panem  g^  vinum  offcrens  fccerat ,  ipfe  quo~ 
que  veritatem  fui  corporis  éf'  fatiguinis  reprafentaret.  Ce  qui  eft 
la  même  chofe  que  ce  que  faint  Cyprien  exprime  en  moins  de 
paroles,  mais  qui  ont  le  même  fens:  Obtulit  hoc  idem  quod  Mel- 
chifedec, id  eflpancm  &  vinum ,  fuum  filicet  corpus  d^  fanguinem. 

Je  m'arrefterav  donc  feulement  à  quelques  raifonnemens  qui 
ne  font  pas  plus  folides  que  les  autres  ^  mais  qu'Aubertin  répète 
fi  fou  vent  qu'il  les  faut  au  moins  réfuter  une  fois  pour  toutes. 

Le  premier  efl;  que  tous  les  Pères ,  &  entre  autres  faint  Cy- 


des  rapports  de  h  matière  de  FEucharifiie.  143 
prien  ,  établiOent  coiijours  le  figne  du  corps  dcj.  C.  tant  natu-  Ch.  Î. 
rel  que  miftique ,  dans  le  pain  &  dans  le  vin,  &  jamais  dans  les 
accidens  du  pain  &  du  vin.  Il  n'y  a  que  de  vray  pain  &  de  vray 
vain  qui  foient  compofez  de  plufieurs  grains.  Il  n'y  a  que  du 
pain  6c  du  vin  efflxlifs  qui  puiflent  nourrir  &  fortifier  le  corps 
de  l'homme.  Et  tous  ces  autres  rapports  marquez  par  les  Pè- 
res ne  retrouvent  vrais  que  dans  de  vray  pain  &  de  vrai  vin,Sc 
nullement  dans  de  fimples  accidens  du  pain  &  du  vin.  Cepen. 
dant  félon  ladodrine  des  Catholiques  le  pain  Scie  vin  ne  iub- 
ilftent  plus.  Ce  qui  tient  lieudefignene  fubfil^e  donc  plusauf- 
fi.  Et  par  confequent  cette  dodrine  détruifant  tous  ces  rap- 
ports ,  ne  peut  eftre  celle  des  Pères. 

Il  fuffit  de  répondre  en  un  mot  à  cette  chicanerie  ,  qu'il  eft 
vray  que  les  rapports,  marquez  par  les  Pères,  font  entre  le 
pain  Ôc  le  vin  &  le  corps  &;  le  fang  de  J.  C  &  non  entre  les  acci- 
dens du  pain  bc  du  vin  &:  ce  corps  &  ce  fang  :  Mais  qu'il  n'eft 
nullement  neceflaireny  pour  établir,  ny  pour  faire  fubfifter 
ces  rapports ,  que  le  pain  &:  le  vin  fubfiftent  fans  changement 
intérieur.  Il  fuffit  pour  l'établir  que  J.  C.  ait  choifi  le  pain  & 
le  vin  pour  eftre  la  matière  de  fon  Sacrement.  Car  la  raifon  de 
ce  choix  eft,  félon  les  Pères ,  l'analogie  que  le  pain  &  le  vin  ont 
avec  le  corps  naturel  &  le  corps  myftique  de  J.  C.  Ce  choix 
fuffiroit  même  pour  le  faire  fubfifter  quand  i!  n'en  refteroit  de 
traces  que  dans  la  mémoire  des  hommes.  Il  fuffit  donc,  d'au- 
tant plus  que  le  pain  ôc  le  vin  fubfiftent  fenfiblemenr.  Car  tant 
que  ces  apparences  demeurent  &  frappent  les  fens,  l'eipritefl 
toujours  frappé  de  l'idée  du  pain  Se  du  vin  ,  &  il  eft  conduit 
par  là  à  comprendre  que  comme  le  pain  Scie  vin  fortifient  ie 
corps ,  de  même  le  corps  &,  le  fang  de  J.  C.  font  la  force  bc  la 
joiedel'ame,  &:  que  comme  ces  deux  eftres  matériels  font 
formez  de  l'union  de  divcrfes  parties,  de  même  le  corps  my- 
ftique de  J.  C.  eft  compofé  de  tous  les  fidelles  unis  enfemble. 

Il  faut  que  ceux  qui  font  ces  fortes  d'objedions  n'ayent  ja- 
mais  bien  compris  ce  que  c'eft  qu'un  fîgne  ,  &  qu'ils  n'ayent  pas 
même  fait  reflexion  fur  la  définition  qu'on  en  donne  dans  les 
Ecoles,  &  dont  faint  Auîruftin  fe  fert  dansfcs  livres  de  la  Do- 
ctrine  Chreftienne.  Le  figne,  dit-on,  eft  une  chofe  qui  outre 
l'idée  qu'elle  imprime  dans  les  fens  porte  l'efpric  à'tn  conce- 
voir une  autre.  Carilsauroient  conclu  de  Là  fans  peine,  quêtant 
que  l'idée  imprimée  dans  les  fensfubfîfte,  il  eft  impoffible  que 


Ï44  ^iv.  III.  Uéponfe  clî4.x  ohjeEtions  tirées 
Je  fîgne  ne  fuMfle  auiïî  j  &  qu'ainfi  le  pain  &:  le  vin  demeu- 
rant félon  l'apparence ,  &;  la  mêmcimpreffion  (e  faifant  fur  les 
fensjle  figne  fubfifte  tout  entier,  puifeiu'il  ne  confifte  qu'à 
exciter  par  cette  impreffion  qu  il  fait  furies  fens ,  l'idée  des  ob- 
jets fîgnifiez. 

Que  le  pain  fubfifte  ou  ne  fubfifte  pas  intérieurement,  les 
yeux  en  voient-ils  moins  du  pain  ?  L'efprit  le  conçoit  il  moins, 
&  luy  efl-il  plus  difficile  de  comprendre  le  rapport  que  ce  pain, 
a  avec  le  corps  desfidellcs  ?  Qiii  ne  voit  donc  que  la  iubfiftan- 
ce  intérieure  du  figne  ne  fert  du  tout  de  rien  pour  produire 
cet  effet  dans  l'efprit? 

L'arc- en-ciel,  par  exemple,  n'eflrant  marqué  dans  les  nues 
que  par  la  diverdré  des  couleurs  que  les  reHexicns  du  Soleil  y 
forment,  on  peut  dire  que  Dieu  a  rendu  ces  couleurs  lignes  de 
la  promefle  qu'il  a  faite  à  Noéde  ne  détruire  plus  le  genre  hu- 
main par  un  déluge  femblable  à  celuy  qui  arriva  de  fon  temps. 
Qui  ne  fèriroit  cependant  d'un  Philofophe,  qui  pour  réfuter 
l'opinion  de  ceux  qui  n'admettent  point  de  couleurs  réelles 
dans  les  objets  ,  allegueroit  que  cette  opinion  détruit  la  realité 
du  figne  que  Dieu  a  établi  dans  le  Ciel?  Car  que  les  couleurs 
foient  réelles  ou  non  réelles,  ne  iuffit  il  pas  que  nos  yeux 
foient  frappez  de  la  veuë  de  cette  figure  dans  les  nues ,  pour  fe 
fbuvenir  delà  promeiïe  de  Dieu  ?  Il  en  eft  de  même  du  ligne 
qu'il  a  mis  dans  l'EucIiariftie  ,  qui  confifte  à  nous  donner  l'idée 
de  la  nourriture  &;  de  la  force  fpiritueîle  que  nous  recevons 
par  le  corps  Se  le  fang  de  J.  C.  &  de  l'union  des  membres  qui 
font  fon  corps  myftique.  Sa  fubfiftancc  &;  l'aneantiiTemenc  de 
la  matière  du  pain  5c  du  vin  n'y  fait  rien  du  tout;  &  pourveu 
que  nos  fens  foyent  également  frappez  des  impreffions  du  pain 
te  du  vin  ,  nôtre  efprit  fera  également  porté  à  concevoir  ces 
divins  objets  que  le  pain  &:  le  vin  luy  reprefentent.  Quoy  que 
ce  foient  les  proprietez  d'une  vraie  colombe  qui  ayent  du  rap- 
port aux  attributs  du  S.  Efprit,  &  qui  reprefentent  fa  douceur 
&  fi  bonté  ^  les  Pères  croient  néanmoins  que  celle  fous  laquel- 
le le  S.  Efpit  fe  fit  voir  au  Baptême  de  J.  C.  n'eftoit  point 
,une  colombe  véritable  &  vivante.  Mais  en  eftoit-elle  moins 
propre  pour  reprefenter  le  S.  Efprit?  Nullement,  parce  qu'elle 
n'enformoit  pas  moins  dans  l'efprit  l'idée  d'une  vraie  colom- 
be &  de  les  proprietez  ,  &  ne  conduifoit  pas  moins  à  concevoir 
par  là  le  S.  Efprit,  Et  il  n.;  fert  de  rien  d'alléguer ,  comme  fait 

Aubertin 


des  rapports  de  la,  m.itiere  de  rEucljAr'iPàe.         145- 
Aubertin,  que  cerne  colombe  étoit  toujours  une  vraie  fubftan-  Ch.  I. 
cC;  car  elle  ne  reprefentoic  pas  le  S.  Efprit  comme  fubftance, 
mais  comme    colombe.  Or  elle  n'écoic  pas  plus  réellement  co- 
lombe, que  les  accidens  font  pain. 

Mais,  dit  M.  Claude,  que  peut  on  répondre  à  cecy,que  les  j,  RéDonfe 
faint  Pères  veulent  que  le  vin  &  l'eau  meflez  fïgnifient  l'union  p.  «l* 
de  J.  C.  &:  de  fon  peuple  par  la  fuhjlance  (jS  la  foliditè  de  leur 
union ,  qui  emporte  neceffaircment  la  fubfîjrance  de  leur  efire  ?  Sur 
quoy  il  cite  S.  Cyprien  qui  dit,  que  ce  mcla?ige  de  l'eau  ck-  du 
vin  au  calice  eft  telle  que  ces  chofes  ne  peuvent  plus  efire  feparées  i 
d'où  il  s'enfuit  que  rien  ne  pourra  feparer  l'Eglife  de  la  communion 
^^  JesuS-Christ. 

On  y  peut  répondre  que  c'eft  un  fopIiifÎTie  pitoyable,  6c  que 
M.  Claude  fe  mocque  de  nous  de  le  propofer  de  cet  air.  Quand 
S.  Cyprien  dit  que  l'eau  ne  fe  peut  feparer  du  vin ,  il  ne  veut 
dire  autre  chofc  finon  qu'on  ne  l'en  voit  jamais  feparée  j  c'eft 
à  dire  que  l'on  n'apperçoitjamaisunefeparationfènfible  entre 
l'eau  &  le  vm  :  ce  qui  fuffit  pour  nous  donner  l'idée  de  l'union 
indivifible  de  J.  C.  6c  de  l'Eglife.  Que  l'eau  &:  le  vin  fubfiftenc 
ou  ne  fubfiftent  pas,  quant  à  leur  fubftance,  cela  n'y  fait  rien 
du  tout.  Il  fuffit  qu'on  ne  lesvoye  jamais  feparez.  L'efprit  ne 
forme  l'idée  de  cette  union  fpirituelle  que  fur  cette  union  fen- 
fîble  qui  lubfifte,  &:  qu'il  voir,  &:  non  fur  l'union  aciuelle  des 
fubftances  qu'il  ne  f(^auroit  voir. 

Le  fecod  raifonnement  que  nous  réfuterons  icy  n'eft  pas  plus 
folide.  C'eft  ccluy  qu'Aubertin  forme  fur  ces  paroles  de  Saine 
Cyprien  5  Que  le  peuple  efi  conçu  par  l'eau  ,  (jS  que  le  vin  dcjiqne 
le  fang  de  J.  C.  Et  fur  ce  qu'il  ajoute  enfuite  ,  (\ut  fi  quelqu'un 
ti offre  que  du  vm ,  le  fang  de  J.  C.  commence  a  efire  feparé  de 
nous ,  ^  s'il  n'offre  que  de  l'eau ,  le  peuple  commence  à  efire  feparé 
de  J.  C,  Mais  quand  on  me  Ile  l'un  avec  l'autre ,  (^  que  par  ce  mé. 
lange  on  en  fait  un  même  corps  ,  cefi  alors  qu'on  fait  un  Sacrement 
fpirituel.  De  là  Aubertin  prend  fujet  de  conclure  que  S.  Cy- 
rille parlant  de  ].  C.  &.du  peuple  de  la  même  forte,  &  difanc 
d'une  part  que  par  l'eau  le  peuple  eft  conçu,  &  de  l'autre  que 
le  (ang  de  j.  C.  eft  marqué  par  le  vin  ,  il  fait  voir  évidem, 
ment  qu'il  n'entend  pas  que  le  propre  fang  de  J.  C.  foit  con- 
tenu plus  réellement  dans  le  calice  que  le  peuple ,  &  qu'il  veut 
amplement  que  l'un  6c  l'autre  y  foie  contenu  reprelentati. 
vement. 

T       .    •     ■ 


146  Liv.  III.  Kcponfe  aux  ohjccîlom  tirées 

Mais  c'eft  encore  icy  un  exemple  de  l'égarement  des  Minf- 
ftres  dans  l'examen  des  Auteurs.  Il  ert:  vray  que  le  paflage  de 
S'  Cyprien  ne  marque  pas  plus  que  le  fang  de  J.  G.  foit  réel- 
lement dans  le  calice  que  le  peuple-,  Scfi  nous  voyions  ce  paf_ 
fâge  détaché  de  toute  fuite  fans  fçavoir  de  quel  auteur  il  eft, 
on  ne  pourroit  juger  de  Ion  Sentiment.  Mais  nous  n'avons- 
rien  d'ailleurs,  qui  nous  puifle  déterminer  à  l'égard  de  S.  Cy- 
prien. Et  Aubcrtin  a  t-il  cfté  en  droit  de  juger  par  là  de  ce  qu'il 
croyoit  de  l'Euchariflie  5 

Cette  erreur,  comme  je  l'ay  déjà  dit,  ne  peur  venir  que  de 
cette  maxime  particulière  aux  Mjniftres,,qu'unAuteureft: obli- 
gé de  dire  en  chaque  lieu  tout  ce  qu'il  croit  d'un  fujet:  ce  qui 
eil  faux,  impoffible  oc  contraire  à  la  nature  des  hommes,  comme 
nous  l'avons  tant  prouvé.  Le  corps  de  J.  C.  a  cela  de  commun 
avec  le  corps  des  fidelles  félon  la  doctrine  Catholique,  qu'il 
eftlignifié  parla  matière  de  l'Euchariftie.  Mais  il  a  cela  de  par- 
ticuher,  &  qui  ne  convient  qu'à  luy  feul  &  non  au  peuple  , 
qu'il  effc  réellement  contenu  dans  ce  myftere.  S.  Cyprien  ex- 
prime en  cet  endroit  la  première  de  ces  vcritcz.  Donc,  dit  Au- 
bertin  ,  il  ne  croit  pas  la  féconde.  C'eft  une  confequence  ridi- 
cule ,  &  le  bon  fens  fait  voir  d'abord  que  ce  n'cft  pas  par  là 
qu'on  doit  juger  du  fentimcnt  de  ce  Père  ,  &:  que  pours'en 
aillirer  il  faut  raffemblcr  toute  fa  doctrine,  &  toute  celle  des 
Auteurs  des  premiers  (îecles ,  aufquelsil  eft  certain  qu'il  aefté 
conforme  en  ce  point. 

Si  l'on  trouve  qu'ilsayent  mus  5i  partout  parlé  delà  même 
forte  dej.  C.&  du  peuple  à  l'égard  de  l'Euchririftie,  il  faudra 
conclure  qu'ils  ont  crû  que  J.  C.  n'y  eftoit  prefent  qu'en  figni- 
fication  non  plus  que  le  peuple.  Mais  fi  unilTant  le  peuple  avec 
J.  C.  dans  cette  qualité  d'eftre  figniiîé  par  l'Euchariftie ,  ils  l'en 
ieparent  par  plufleurs  expreflîons  qui  marquent  que  l'Euchari- 
ftie contient  le  corps  de  J.  C.  tour  autrement  qu'elle  ne  con- 
tient le  peuple,  il  faudra  conclure  que  S.  Cyprienn'explique 
en  cet  endroit  qu'une  partie  de  fa  doctrine  j  &  qu'il  a  re- 
connu dans  ce  myftere  non  feulement  cette  prefencede  figu- 
re &  de  fignification  commune  à  J.C.  &  au  peuple,  mais  enco- 
re une  prefence  réelle  qui  convient  à  J.  C.  6c  non  au  peuple. 
Voilà  l'examen  qu'il  faut  entreprendre  pour  décider  cette 
quelHon  raifonnablement.  Et  commme  nous  l'avons  pleine- 
îpenc  exécuté  dans  le  fécond  tome  de  la  Perpetuitéj  nous  ayoïis 


de^s  rapports  de  h  matière  de  tEuchuYÎflie.         14J 
flroit  de  tirer  icy  cette  conclu fîon,  &  de  renvoyer  le  Ledeur  Ch.   II. 
en  chercher  la  preuve  dans  ce  Volume. 

Il  luffit  de  remarquer  icy  à  l'égard  de  S.  Cypricn,  que  quoy 
qu'il  ait  parlé  en  cet  endroit  de  la  même  forte  de  J.  C.  &:  du 
peuple, il  en  a  parlé  fort  difK-'remment  ailleurs.  Il  n'a  jamais 
«<iit,parexemple,que  ceux  qui  vouloicnt  communier  contre  l'or- 
dre de  \'^<^\'ît  pechoient  cont7-c  le  peuple  chrcticnpar leurs  mains  eS 
far  leur  bouche  •  mais  il  dit  d'eux  par  rapport  à  J.C  qu'ils  ccra-  ^^'^^-  ^•'"'^1?^^ 
mettent  un  plus  grand  crime  contre  le  Seigneur  par  leurs  mains  Qj- 
farlaur  bouche  que  lors  m'cme  qu  ils  l'ont  renie. 

Il  reproche  bien  à  ceux  qui  communioient  indignement  <7<v 7// 
recevaient  le  corps  du  Seigneur  dans  des  mains  pollues ,  eS  qu'ils  Lcu- 
voient  fon  fang  avec  une  bouche  foiiillèe  :  mais  il  n'a  jamais  dit 
qu'ils  reçûfîènt  li  peuple  dans  leur  main,  ny  dans  leur  bouche. 
Il  dit  que  nous  touchons  le  corps  de  J.  C.  en  communiant ,  mais 
on  ne  trouvera  point  quil  en  ait  autant  dit  à  l'égard  du  peuple. 
Que  fi  l'on  ajoute  encore  cette  foule  d'autres  expreffions,  donc 
Jes  Pères,  qui  ont  précédé  ou  fuivi  S.  Cyprien ,  fe  font  fcrvis 
en  comparant  l'Euchariftie  avec  le  corps  de  J.  C.  ôcdont  ils  ne 
fe  font  jamais  fervis  en  la  comparant  avec  le  peuple ,  Se  que  l'on 
confidere  que  cesexpreflîons  n'avoient  pas  juftement  fini  à  S. 
Cyprien  pour  recommencer  incontinent  après  luy,  on  verra 
que  les  fidèles  dévoient  eftre  tellement  accoutumez  à  diftin- 
guer  la  manière  dont  le  corps  de  J.  C.  eft  dans  l'Euchariftie  , 
de  celle  dont  on  peut  dire  qne  le  peuple  y  eft  i  que  S.  Cyprien 
a  eu  une  entière  liberté  de  marquer  ce  qu'il  y  avoit  de  com- 
mun entre  J.  C.  &:  les  fidèles ,  fans,en  marquer  les  différences. 
Car  toutes  les  fois  qu'une  différence  eft  bien  eftablie  par  les 
exprefllons  communes,  Se  que  l'on  n'a  point  lieu  de  foupçon- 
tier  qu'il  y  ait  perlonne  qui  l'ignore,  onledifpenledu  foin  delà 
marquer  ,  &  la  penfée  même  n'en  vient  pas. 

Auifi  ne  trouvera  t  on  pas  un  auteur  grec  ni  latin  qui  n'ait 
ufé  de  cette  liberté  aulfi  bien  que  S.  Cyprien ,  Se  qui  n'ait  fou- 
vent  confondu  dans  rexpre!non,^des  manières  d'eftre  tres-dif- 
ferentes  ^  parce  qu'ils  fuppof.Ment  avec  raifon  que  les  lecteurs 
fuppléeroient  fans  peine  à  ce  oui  manquoità  ces  paroles,&qu'ils 
prendroient  quelques  unes  de  ces  expreffions  dans  un  fens  de 
j-éaliré  ,  &  les  autres  dans  un  fens  de  figure. 

C'eft  ainfi  que  Germain  Archevêque  de  Conftantinopîe  , 
Auteur  de  la  Théorie  des  myfteres,  qui  apparemment  a  écrit 


I48  Liv.  III.  Képonfè  aux  ohjeFiions  tirées 

au  treizième  iîecle,  comme  M.  Claude  luy-mêmc  l'a  reconnu, 
&  donc  la  foy  fur  ce  Myftere  ne  peut  cOre  par  confequent  dou- 
teufe,  ne  laifle  pas  en  comparant  les  particules  que  les  Grecs 
offrent  à  l'honneur  des  Saints  avec  celles  qu'ils  offrent  en  mé- 
moire de  |.  C.  de  les  unir  tellement  par  l'expreffion  ,  que  com- 
me il  dit  en  parlant  de  la  grande  portion  quelle  cfi  le  Seigneur 
O"  Is  Roy  1  c'eft  à  dire  J.  C.  il  dit  clés  autres  qu'elles  font  Icsmem- 
Gernianus  in  hres  de  JefuS-Chrifi  Ta,  S^t  ctAAct  Ti/J-iX  S'tJùÇj^  ix'iKy,  ^pifoC.  Etcom- 

ftc^doruiir^'  """^  ^^  ^^^  ^^^  '^""^  P^**  l'apport  à  l'effet  de  la  conlecration  , 
que  JC.  y  efl  veu,  £c  qu'il  fouffred'y  eflre  touché,  il  ditpareil- 
lement  en  parlant  des  dons  non  confacrez  qui  font  portez  avec 
grand  refped:  parmy  les  Grecs  à  l'Autel  où  l'on  les  doit  con- 
ïacrer,  que  le  p-and  Roy  J.  C.  s'avance  vers  le  jacrifice  ynyÇtiquey 
^  qu'il  efi  -porté  far  des  mains  mortelles. 

Que  comme  il  dit  encore  que  dans  le  divin  pain  efi  montrée 
Ô'  figurée  la  divine  él"  vivifiante  Pafiion  de  celuy  qui  a  efié  im- 
molé pour  la  vie  de  tout  le  monde  •  il  dit  de  même  que  la  triple 
immerfion  qui  fe  fait  dans  le  Baptême  figni fie  les  trois  jours  de  fa 
fepulture:  Ce  qu'il  porte  encore  plus  loin  dans  la  fuite  en  expli- 
quant les  fignifîcations  myftiques  des  habits  Sacerdotaux  & 
de  toutes  les  cérémonies  de  la  Liturgie  par  les  mêmes  termes 
qu'il  employé  pour  marquer  les  rapports  du  pain  confacré  y 
au  corps  de  J.  C. 

C'eft  la  liberté  qu'on  prend  naturellement  quand  on  a  rai- 
fon  de  fuppofer  qu'une  docîlrine  eft  connue  de  ceux  à  qui  l'on 
parle.  Germain  fc^avoic  bien  que  fes  lec1;eurs  ne  luy  impute- 
roient  jamais  de  croire  que  les  petites  portions  fufîent  auflî 
réellement  les  membres  de  J.  C.  c'efl  à  dire  les  fidèles^  que  la 
grande  efi  véritablement  fon  corps. 

Il  fçavoit  bien  qu'ils  diflingueroient  fans  peine  la  manière 
donc  on  peut  dire  que  J.  C.  eft  touché  dans  les  dons  avant  ôc 
après  la  confecration  i  &  qu'ils  ne  croiroient  pas  non  plus  que 
J.  C.  ne  fût  que  figuré  dans  les  dons  comme  la  fepulture  de 
J.  C.  n'efl  que  figurée  dans  Je  Baptême. 

Comme  ces  doutes  ne  fe  formoient  pas  dans  fon  efprit ,  il 
ne  craignoit  pas  aufîî  qu'ils  s'elevaffent  dans  l'efprit  des  au- 
tres J  &  bien  loin  qu'il  crût  bleffer,  en  parlant  ainfî,  la  do- 
drine  de  la  prefence  réelle  ,  c'eft  la  ferme  perfuafîon  de 
cette  dodrine  qui  luy  donnoic  la  liberté  de  parler  de  cette 
iôrte. 


des  rapports  de  h  matière  de  l'Eucharifiie.  I49 
Hugues  de  S.  Vktor  ,  dans  le  traité  qu'il  a  fait  fous  le  titre  Ch.  I. 
de  miroir  de  l'Eglifc^  parle  de  la  même  force  que  S.  Cyprien  , 
&  avec  auifi  peu  de  précaution.  Ze  Frefire ,  dit.il  ,  offre  les  dons 
four  le  Sacrifice ,  [(Ravoir  le  pain  é^  le  vin ,  mais  on  ajoiae  l'eau  a» 
vin.  Et  fi  vous  vous  en  ètonnet^  fiachca^  quec'efi  un  grand  Sacre- 
ment. Car  l'eau  méfiée  au  vinfi.<iure  l'homme  méfié  a  J.  C.par  le  fang 
de  J.  C.  Celtiy  qui  fepare  l'eau  du  vin  rompt  l'union  de  J.  C.  d^  de 
l'Eglife.  Ou  voit  que,  félon  cet  Auteur,  comme  l'eau  figure 
l'Egliie,  le  vin  figure  J.  C.  6c  qu'il  ne  fait  point  en  ce  lieu  là 
de  différence  entre  l'un  êc  l'autre,  mais  qu'il  fuppofoic  que  les 
lecteurs  la  feroient. 

On  pourroit  rapporter  une  infinité  d'exemples  de  cette  forte. 
Car  il  n'y  a  point  d'Auteur  Catholique  qui  ne  tombe  natu- 
rellement dans  ces  expreflions ,  Se  qui  ne  mefle  indifférem- 
ment à  celles  qui  marque  la  prelence  réelle  d'autres  expref- 
fions  qui  marquent  une  autre  iorte  de  prefence  fans  en  mar- 
quer la  différence. 

Je  lifois ,  par  exemple  ,  il  y  a  quelques  jours  un  traité  édi- 
fiant fait  par  une  perfonne  qui  n'a  fongé  en  le  faifant  qu'à  ex- 
primer les  mouvemens  de  fa  pieté ,  où  l'on  lit  ces  paroles  tres- 
faintes  à  la  vérité  ,  mais  fur  quoy  les  Miniftres  ne  manqueroienc 
pas  de  chicaner  s'ils  le  trouvoient  dans  quelqu'un  des  anciens 
Pères.  J  C.  eft  dans  l'Eucharifiie  pour  eftre  l'exercice  de  nô- 
tre fov  J  &;  il  eft  dans  nos  frères  non  feulement  pour  y  eftre  de 
même  l'exercice  de  noftre  foy,  mais  auffi  pour  y  eftre  l'exer- 
cice de  noftre  charité  &  de  noftre  patience.  Nous  n'avons  rien 
à  fouffrir  de  J.  C  dans  l'Euchariftie^  &  il  ne  fait  que  nous  y 
confoler,  ce  qui  nous  rend  peut-eftre  fi  ardens  à  l'y  chercher, 
au  lieu  que  nous  avons  quelque  chofe  à  fouffrir  de  luy  dans  nos 
frères ,  &  qu'il  a  fouvent  befoin  que  nous  l'y  confolions  ^  ce  qui 
ne  vient  néanmoins  que  du  dcfir  qu'il  a  de  nous  confoler  nous- 
mêmes  avec  plus  de  tendreflè.  Il  nous  nourrit  &  nous  fortifie 
dans  l'Euchariftie  ^  au  lieu  qu'il  veut  que  nous  contribuions  à 
Je  nourrir  &  le  fortifier  luy-même  dans  fes  membres ,  pour  le 
moins  par  nos  prières ,  par  le  témoignage  de  noftre  bienveil- 
lance, 6c  par  toute  forte  de  bons  exemples. 

CoAime  il  fe  cache  dans  l'Euchariftie,  afin  que  nous  n'ayons 
pas  horreur  de  manger  fa  chair  ;  il  fe  cache  de  même  fons  la 
foiblefTêde  fes  membres ,  afin  que  nous  ayons  plus  de  zélé  pour 
l'afïîfter.  Il  nous  eft  avantageux  qu'on  ne  puiffe  s'appercevoir 

T  iij 


Cl 


ce 

Ce 
Ci 

ce 
il 
ce 
ce 

(S- 


c 


ijo  L IV,  III.  Képonfè  auK  objections  tirées 

de  (a  pr-efence  d-ms  fon  Augufte  Sacrement  que  par  la  foy.,  & 
il  nous  cft  utile,  quand  nous  le  regardons  dans  les  membres, 
que  ce  ne  km  point  par  le  muxftere  des  (ens,  qui  nousébloui- 
xoient  par  l'ecl  t  de  la  magnificence,  &  qui  nous  priveroienc 
,,  de  la  plus  grande  partie  du  fruit  que  nous  en  recevons. 

On  voie  clairement  que  c'eft  la  nature  qui  a  porté  l'Auteur 
de  ce  traitté  aulFi  bicnquc  tous  les  autres ,  à  ces  -fortes  de  com- 
piraifons  &:  d'expreffions.  Car  comme  il  y  ^  an  plaifîr  à  con- 
lîdcrcr  lesrefTemblances  des  cho/cs,  parce  que  toute  forte  de 
juftifle  plaift  à  l'efprit  ^  c'crt  auffi  un  àss  plus  grands  ornemens 
de  l'éloquence  que  de  les  taire  remarquer  aux  autres.  Mais 
comme  elles  ne  font  jamais  parfa-itcment  jufles,  on  fe  porte 
naturellement  à  cet  artifice  de  fupprimer  ces  différences ,  &: 
d'unir  dans  l'cxprcffion  les  chofes  dont  on  nous  veut  faire  con- 
naître le  rappart ,  en  Uiifant  à  l'efprit  à  concevoir  ohfcurémenc 
les  diffcrenccs  qui  oderoienî  tout  l'agrément  lî  onlesmarquoic 
fiexpreflement  &  (î  clairement. 

C'efl:  donc  une  règle  très  fauffeê*:  tres-trompcufe  ,  que  de  s'i- 
maginer qu'un  Auteur  ait  eu  les  mêmes  fentimensde  deux  cho- 
ies,  parce  qu'il  les  a  confondues  dans  quelques  expreffions. 
Pour  avoir  lieu  de  tirer  cette  conclufion,  il  faudroit  qu'il  les 
euft:  unies  en  toutes, Scqu'il  n'euft  rienditde  l'une  qu'il  n'euft 
auffi  dit  de  l'autre.  Mais  quand  il  fe  trouve  que  s'eftant  (ervi 
de  quelques  exprclTions  communes  à  l'égard  de  ces  deux  fii- 
jets,  il  vient  à  les  feparer  par  une  infinité  d'expreffions  parti- 
culières qui  déterminent  cette  expreffion  générale, &: ne  fe  di- 
fcnt  jamais  que  de  l'un  de  ces  deux  (ujets,  il  faut  conclure  au 
contraire  que  l'exprefTion  commune  ne  fe  difoic  pas  de  l'un  & 
de  l'autre  au  niême  fens.  C'eftainfi ,  par  exemple  ,  que  quoy 
que  Germain  Patriarche  de  Conftanrinople  déclare  que  j.  C. 
cfl:  touché  par  des  mains  matérielles  avant  &  après  la  confe- 
crition  ;  il  cil  vifible  néanmoins  qu'il  a  entendu  qu'on  le  trni- 
choit  réellement  apréslaconfecration,&  qu'on  ne  letouchoic 
pas  auparavant,  parce  qu'il  dit  un  grand  nombre  de  choies 
de  l'hoftie  cok facrée ,  qu'il  ne  dit  poinp  ^  que  perfonne  n'a  ja- 
mais dres  de  l'hoftie  non  confacrce. 

On  ne  dit  point,  par  exemple,  de  l'hoftie  non  corifacrée 
qu'elle  foit  changée  au  corps  de  J.  C.  On  n'exhorte  point  les 
Chrétiens  à  n'en  point  douter.  On  ne  dit  point  que  J.  C.  ait 
dojiné  aux  Preftres  la  force  d.ç  rendre  l'iiollie  corps  de  J.  C. 
comme  Q€C  Auteur  dit  tout  cela  à  l'égard  de  l'hoftie  confacrée. 


des  nippons  de  la,  matière  de  t€uch:trifiie,  \^i 
Voilà  la  règle  qu'il  faut  fuivre  &  fur  ces  palfages  de  S.  Cy-  Ch.  II. 
prien,  &  fur  tous  les  autres  iemhlables,&  non  pas  palier  fa  vie 
à  chercher  un  à  un  dans  hs  Pères  quelques  endroits  écarter 
où  ilsayent  parlé  deTEuchariftie  dans  les  mêmes  termes  donc 
ils  fe  fervent  à  l'égard  de  divcrles  chofes  dans  lelquelles  ils  ne 
reconnoiirent  point  de  prcfencc  réelle,  ou  qui  ne  n'.arquent 
qu'iiDC  fimple  reprefentation.  L'importance  cil'  de  découvrir 
s'ils  ne  dilent  pointdeceMyftere,  de  certaines  chofes  que  l'on 
ne  fçauroic  dire  de  ce  quin'eft  qu'image  &  figure.  Et  comme 
nous  avons  fait  voir  dans  le  fécond  Tome  de  rct  ouvrage  ,. 
que  cela  leur  arrive  fouvent ,  c'en  eft  alfez  pour  montrer ,  que 
toutes  le  expreffions  communes  &  équivoques ,  telles  que  font 
celles  de  S.  Cyprien,  fe  doivent  prendre  au  fens  de  la  dodrine 
Catholique  j  &  que  c'eft  ce  que  le  bon  fens  preft  rit  à  tous  ceux 
qui  ne  veulent  pas  s'aveugler  eux  mêmes. 


CHAPITRE    IL 

Examen  de  lu  Philo fophic  des  MiniJIres  fur  lu  dijlinclion  des  ma, 
gcs  ,  ô-  de  leurs  eri^inaux^ 

SI  l'on  examine  la  diflinclion  qui  fe  doit  rencontrer  entre 
l'image  ôcTorigma!  par  le  feul  fens  commun  ÎS:  fans  rap- 
port à  l'autorité ,  il  n'y  a  point  de  gens  de  bonne  foy  qui  ne 
conviennent  aifément  de  ce  cju'on  en  doit  croire. 

Car  il  eft  certain  d'une  part  qu'il  faut  qu'il  y  en  ait.^puifque 
cette  diftinciionell  une  efpcce  d'oppofition  relative,  qui  don- 
ne lieu  de  conclure  que  l'image  n'eft  pas  l'original ,  au  moins 
en  tant  qu'elle  eft  image. 

Mais  il  eft  certain  aufli  que  cette  diflinclion  n'empêche  pas 
que  l_a  chofe  reprefenrce  ne  puille  eflre  jointe  à  l'image  qui  là 
reprefente  i  comme  l'Arche  ligure  de  l'Eglile  eftoit  jointe  à 
Noé  &à  les  enfans  qui  eftoient  la  véritable  Eglife  de  ce  temps- 
là,  frgurée  par  l'arche  ,  comme  nos  temples  matériels  font  joints 
à  l'allèmblée  des  fidèles  dont  ils  ne  font  que  les  images  ^  com- 
me le  S.  Elprit  eftoit  joint  à  la  colombe  &  aux  langues  de  feu 
qui  le  figuroient;  comme  l'ablution  extérieure  qui  fe  fait  dans 
Te  Baptême  eft  jointe  à  l'intérieure  qu'elle  figure  j  comme  la 
manducation  corporelle  du  figne  eft  jointe  félon  les  Calvinù 


lyi  Liv.  III.  Képonfe  aux  objections  tirées 

ftes ,  à  la  fpiricuelle  qu'elle  fignifie. 

L'évidence  de' cette  vérité  efl:  telle,  qu'Aubertin  même  n'a 
pu  la  defa vouer  entièrement.  Car  après  avoir  rapporté  un  ex- 
cellent paflage  du  Cardinal  du  Perron  qui  diftingue  deux  for- 
tes d'images,  dont  les  unes  font  deftinées  à  fuppléer  l'abfence 
à.Qs  chofes,  &:  les  autres  à  fuppléer  au  défaut  de  l'apparence, 
&  allègue  pour  exemples  de  ce  dernier  genre  d'image  ,1e  buif- 
fon  ardent  que  vit  Moyfe,  les  figures  d'hommes  fous  lefquel- 
les  les  Anges  apparoifToient ,  le  ferpent  dont  le  diable  emprun- 
ta la  forme  pour  tenter  Eve,  il  en  demeure  d'accord.  Je  con- 
Aiiber.  794.  viens  ,  dit-il ,  qtie  d'cfire  (î'inc  ^  fiqtirc ,  rC  exclut  pas  far  la  force 
de  ces  termes  mêmes  ^  la  frefencc  de  la  chofe  Jipiifice. 

M.  Claude  fait  le  même  aveu  en  quelque  endroit  de  ks  li- 
vres 5  car  il  a  bien  veu  qu'il  n'y  avoitpas  moyen  de  s'en  defFen- 
dre. 

Mais  il  auroit  bien  fait,  &:  Aubertin  auflî ,  de  porter  cet  aveu 
un  peu  plus  loin,  bc  de  reconnoiftre  qu'il eft  tres.pofîible  non 
feulement  qu'une  chofe  foit  jomte  à  fon  image ,  mais  audî  qu'u- 
ne chofe  dans  un  certain  eftat  foit  fi2:ure  d'elle-même  dans  un 
autre  eftat.  Car  M.  Claude ,  par  exemple ,  eftant  dans  fa  cham- 
bre avec  (es  amis ,  ne  peut-il  par  fe  reprefenter  luy-même  prê- 
chant à  Charenton  &  imiter  fon  gefteSc  fa  pofture?  Et  n'y  au- 
roit il  pas  de  la  chicanerie  à  nier  qu'il  ne  fût  alors  une  figure 
de  luy  même  ? 

Ne  femocqueroit  il  pas  luymêmed'un  homme  qui  fefervant 
de  ce  principe  fi  ordinaire  aux  Miniftres  ,  que  lien  ne  peut  efire 
figure  de  foy-mcme ^  luy  feroit  l'application  par  cet  argument , 
Rien  ne  peut  cftre  figure  d)^  image  de  foy-m'emc.  Or  cet  homme  efl 
la  figure  de  M.  Claude ,  puifquil  le  repre fente  prêchant.  Donc  ce 
n' eft  pas  M.  Claude-^  ou  d'un  autre  qui  tireroit  une  conclufion 
toute  différente  du  même  principe  par  cet  autre  raifonnement: 

Rien  ne  peut  cftre  figure  de  foy-mètne. 

Or  cet  homme  eft  M.  Claude. 

Donc  il  ne  repre  fente  pas  M.  Claude. 
Ne  fe  contenteroit-il  pas  de  leur  dire  qu'il  fçait  bien  qu'il  eft 
M.  Claude,  6c  qu'il  ferait  bien  encore  qu'il  fe  reprefente  luy- 
même? 

C'eft  en  vain  qu'Aubertin  prétend  éluder  cet  exemple  & 
cent  autres  femblables  qu'on  peut  apporter ,  en  difant  qu'u- 
ne adion  peut  bien  eftre   image  d'une  aélion  ,  mais  qu'un 

homme 


des  rapports  de  la,  matière  de  l'EucharijUe,  jjj 

îiomme  ne  le  Içauroic  cdre  de  foy-même.  C'eft  n'entendre  pas  C  h.  IL 
noême  ce  que  l'on  die  que  de  repondre  de  la  forte.  Car  on  ne 
fçauroic  reprelenrer  une  aciion  qu'on  ne  reprefence  en  même 
temps  celuy  qui  la  fait,  puifqu  une  aciion  ell:  un  mode  que  l'ori 
nefçauruit  concevoir  fans  l'attacher  à  un  Tu  jet.  Il  efi:  donc  cer- 
tain que  lorfque  l'on  reprefente  le  geft  &  l'air  de  quelqu'un  , 
on  lereprelente  luy-même,  ce  qui  s'appelle  en  effet  le  con- 
trefaire. Et  qu'ainfi  M.  Claude  reprefentant  les  acT:ions  publi- 
ques qu'il  fait  à  Charenton,  fe  reprefente  luy-même,  2c  efl 
très-proprement  image  de  luy-même. 

Il  eft  clair  par  là  qu'il  n'efï  pas  neced^iire  qu'il  y  ait  entre 
l'image  &  lachofe  reprefentce  une  dillinclion  tL^le  que  celle 
qui  fe  trouve  entredes  êtres  feparez  j  mais  qu'il  fuftit  en  quel- 
que rencontre  qu'il  y  ait  une  difl:incT:ion  de  mode  6c  de  maniè- 
re î  comme  M.  Claude  n'eft  diftingué  dans  fa  chambre  de  luy- 
même  préchant  à  Charenton  ,  que  parce  qu'il  eft  d'une  autre 
manière  dans  fa  chambre  qu'à  Charenton. 

Il  n'y  a  encore  rien  en  tout  cela  qui  reçoive  la  moindre  dif- 
ficulté raifonnable ,  non  plus  que  dans  la  remarque  qu'il  eft  ne- 
celfaire  d'y  ajouter,  &  qui  donne  lieu  de  découvrir  quantité 
de  fophifmes  d'Aubertin. 

C'eft  que  quand  il  arrive  que  le  fig:^ne  &  la  chofe  (Ignifiée  font 
joi-ns  enfèmble,  l'efpnt  les  peur  concevoir  en  deux  manières 
différentes.  Car  il  peut  concevoir  le  figne  feparémcnr  de  la 
chofe  (îgnifiée  ,  ou  bien  il  peut  réunir  l'un  &  l'autre  en  une  mê- 
me idée,  en  faifant  de  la  chofe  fîgnifîée  l'idée  principale,  & 
du  figne  l'idée  accelToire.  Ainfi  parce  qu'un  vertement  eft  joint 
à  un  homme  ,  on  peut  concevoir  Se  le  veftement  &  l'homme 
par  deux  notions  diftincTies ,  ou  l'homme  &  le  veftement  réiinis 
dans  une  même  idée,  en  concevant  ijn  homme  veftuj  ou  une 
chofe  vcftuc. 

Or  quand  il  arrive  ainfi  que  deux  idées  font  confiderées  com- 
me un  tout  avec  cette  fubordinationj  que  l'une  eft  regardée 
comuiefubftance&  l'autre  comme  accident^  la  nature  du  lan- 
gage humain  eft  d'attribuer  .1  lapartie  principale  de  ce  tour,  ce 
qui  ne  convient  au  tout  que  par  la  partie  accciloire.  Ainfi  l'on 
dit  qu'un  homme  eft  bien  mouillé  quoy  qu'il  n'y  ait  que  ies 
habits  qui  le  foient,  &:  l'on  ne  Ir^iftèroit  pas  de  dire  qu'on  voit 
un  (oldat,  encore  qu'il  Fuft  entièrement  caché  fous  fes  armes. 
Les  conclullonsqui  fe  tirent  de  ces  principes  à  l'égard  del'Eu- 

V 


JJ4  Liv.  m.   "Réponfe  aux  ohjeBions  tirées 

ch.iriftie  ne  font  pas  difficiics  à  découvrir.  Car  il  s'cnlliit  à  la  vé- 
rité ,  que  ce  qui  y  tient  precifément  lieu  d'image ,  ceft  à  dire  le 
voile  extérieur,  eft  diflingué  du  corps  de  J.  C.  qu'il  figure  & 
qu'il  rcprefente  :  &.  c'eft  ce  que  perlonne  ne  nie  j  puifque  nous 
avons  fait  voir  qu'on  peut  même  dire ,  que  ce  qui  eft  image 
n'cffcpas  lecorps  de  J.  C.  Mais  cela  n'empêche  nullement  que 
le  corps  de  J.  C.  ne  puifle  eftre  caché  fous  ce  voile  comme  le  S. 
Efprit  l'étoit  fous  la  figure  de  la  colombe,  &  la  nature  de  Dieu 
fous  la  forme  de  ce  buifiTon  ardent  qui  parut  à  Moyfe  dans  le 
defert.  Cela  n'empêche  pas  non  plus  qu'on  ne  puifle  regarder 
J.  C.  dans  cet  eRat  comme  figure  de  luy-même  dans  un  autre 
eftat.  Enfin  cela  n'empêche  pas  que  par  l'efprit  on  ne  puiflè 
faire  un  tout  du  corps  de  j.  C.  ôc  du  voile  qui  le  couvre ,  &:  que 
par  une  faite  naturelle  de  cette  idée  on  n'actribvtë  au  corps  de 
J.  C.  ce  quineluy  convient  que  par  ce  voile,  comme  d'eftre 
vifible  &;d'efl:re  lymbole  de  Ion  corps  naturel. 

Toutes  ces  confcquences  font  fi  juftes,  qu'il  efl:  étrange  que 
des  gensd'efpritayent  pu  entreprendre  de  les  combattre.  Ce- 
pendant il  n\  a  gueres  d'endroits  où  les  Miniftres  faflent  de 
plus  grands  efforts  ^  &;  oii  par  confeqnent  ils  tombent  en  un 
plus  grand  nombre  d'égaremens.  Le  livre  d'Aubertin  en  eft 
M.  cbuie  j.^yj.  reuipii^  2^  M.  Claude  n'a  pas  manqué  de  le  fuivre  en  ce 
'*  ''^*  point  aulTi  bien  que  dans  les  autres. 

C'eft  pour  comt>atfre  ces  principes  de  fens  commun  qu'Au- 
bertin  par  exemple,  nous  fait  en  plufieurs  endroits  des  liftes  en- 
nuyeufes  de  paiTages  des  Pères,  qui  marquent  qu'il  y  a  de  la  dif- 
férence entre  l'image  &:  la  chofe  reprefèntée,  que  l'image  n'é- 
gale pas  la  vérité,  qu'elle  n'eft  pas  la  chofe  même  qu'elle  rcpre- 
fente j  comme  s'il  s'enfuivoit  de  là  que  les  Pères  euflent  voulu 
nier  que  la  chofe  reprefèntée  peut  eftre  jointe  à  celle  qui  lare- 
prefente,&  qu'un  homme  peut  imiter  dans  un  certain  eftat  ce 
ce  qu'il  fait  dans  un  autre,  &  fe  reprefenter  ainfi  luy-  même  , 
qui  font  deux  chofes  fi  claires  par  elles-mêmes,  qu'Aubertina 
efté  contraint  de  reconnoiftre  la  première,  &  qu'il  ne  combat 
la  féconde  que  par  une  diftindion  chimérique,  en  foûtenant 
qu'on  reprcfente  uneaclion  fans  reprefenter  celuy  qui  la  fait. 
La  raifon  veut  donc  qu'on  reduife  les  expreffions  des  Pères 
touchant  la  diftindion  des  images  &  de  leurs  originaux,  aux 
bornes  que  le  fens  commun  y  met,  puifqu'apparemment  ils 
n'en  n'ont  pas  manqué. 


des  rapports  de  la,  matière  de  tEuchar'iflte        1^5 

Ainfi  quand  Tercullien  nous  dic  que  hmage  rieyde  pas  la  Ch.  II. 
venté ,  eS  qu'autre  chofe  ejl  d'cfire  Li  vcritè  même  ,  Q-  autre  chcfe 
d'ejtre  conforme  u  la  vérité  ,  il  veuc  dire  fîaiplement  que  l'image 
comme  image  n'eft  pas  l'original.  Car  ce  (eroic  une  hère  fie  que 
.  de  prétendre  qu'une  image  ne  puilTe  égaler  la  chofe  donc  elle 
«ft  image,  puiique  le  Verbe  eft  l'image  de  Ton  Pcre,Sc  égal 
à  fon  Père. 

Ainfi  quand  S.  Athsnafe  dit,  que  ce  qui  efi femblable  à  qucL 
que  chofe  ncfl  pas  la  chofe  même  a  laquelle  il  eft  femblable  ,  il 
veut  dire  qu'il  ne  l'eft  pas  entant  que  femblable  ,&  par  la  cho- 
fe qui  le  rend  femblable,  quoy  qu'il  le  puifle  eftre  ablolumenr. 
Et  c'eft  ce  qui  fe  prouve  par  l'exemple  même  qu'apporte  faint 
Athanafe.  Car  il  eft  vray  d'une  psrt,  comme  il  le  dit,  que 
l'homme  eftant  image  de  Dieu  n'eft  pas  Dieu  ,  c'efl  à  dire  qu'il 
ne  Teft  pas  par  l'ameSc  l'intelligence  qui  l'en  rend  image  .-mais 
il  feroit  faux  abfolument  de  dire  que  l'homme  ne  puilTe  eftre 
Dieu ,  puifque  J.  C.  ell:  Dieu  &:  homme  tout  enfèmble ,  ôc  qu*- 
ainfi  il  eft  vray  de  dire  que  l'homnie  eft  Dieu. 
Amfiil  eft  vray,  comme  ledit  S.  Ambroile,  o^trienriefl ima- 
fe  de  foy-m'eme ^  mais  il  faut  entendre  cela  des  chofes  confTde- 
rées  abfolument  &  fans  rapport  à  des  eftats  difftrens.  Et  c'cft 
pourquoy  comme  ce  n'eft  pas  par  rapport  à  un  certain  eftar, 
que  l'on  dic  du  Verbe  qu'il  eft  image  du  Père ,  S.  Ambnnle  en 
conclut  fort  bien  qu'il  en  eft  diftingué.  Mais  cela  n'empe.  he 
pas  qu'une  chofe  confidecéeenuneftat  ne  puifle  eftre  la  figure 
d'elle-même  dans  un  autre  eftat.  Ainfi  les  Pères  remarquent 
que  lorfque  J.  C.  dans  la  croix  convertie  un  des  Larrons,  & 
rejetta  l'autre,  il  eftoic  une  image  de  luy. même,  lorfqu'il  fera 
dans  fon  dernier  jugement  le  difcernement  des  Elus,  8c  des  re- 
pr.^uvez-  Jam  fî'inijjcabat  quod  faclurus  ef}  de  vivis  ^  mortuis  ^  Aug.  traft.  ^ 
alias  pofiturus  ad  dexteram  ^  alios  ad  finifiram.  Cari!  ne  faifoic 
pasconnoiftre  cette  feparation  terrible,  par  ^ts  paroles  qui  la 
prédîiîènt,  mais  par  une  aciion  réelle  qui  la  reprelèntoic.  Ec  les 
Anges  mêmes  avercirent  les  Apoftres^que  J.  C.  moncant  aux 
Cieux  eftoit  l'image  de  luy  même  defcendant  des  Cieux  pour 
juger  les  hommes.  Hi-c  Je  fus  qui  ajfumptus  eflà  v  obis  in  ccclum^ 
fie  veniet  quemadmodum  vidjfiis  èum  euntem  in  cœlum. 

Ainfi  il  eft  vray  en  un  fens  que  l'tmaqe  a  des  figures  ^  non 
pas  des  chofes  ,  comme Theodorer  dit,  c'eft  à  dire  que  la  qua- 
lité d'image  n'enferme  point  du  tout  d'eftre  la  chofe  même ,  ÔC 

Vij 


1^6  Liv.  III.  Képonfi  aux  ohjeEtion  tirées 
que  l'on  ne  peut  conclure  de  ce  qu'une  chofeeft  image,  qu'elle 
enferme  la  vérité  de  ce  qu'elle  rcprefente.-  de  forte  que  lorfque 
nous  ne  fçavons  rien  d'une  chofe  (înon  qu'elle  eft  image  d'une 
autre ,  nous  avons  droit  d'en  conclure  qu'elle  n'en  contient  pas 
la  vérité. 

C'eft  ainfî  qu'il  efl  vray  que  l'image  ne  peut  eftre  la  chofe 
même,  comme  les  Grecs  orthodoxesie  (oûtenoient contre  les 
Iconoclades ;  mais  celafe  doit  entendre  de  ce  qui  n'a  point 
d'antre  qualité  que  celle  d'miage ,  comme  l'Euchariftie  n'en 
auroit  point  d'autre  fi  ces  paroles  :  Cecy  eft  mo7i  corps  ,  ne  fîgni- 
fioict  rien  antre  chofe  ni  par  les  termes  ni  parles  crreonftan- 
ces,  finonqu-^c'ert  Tmiagedu  corps  de  |.  C.  Etc'cft  pourquoy 
ils  avoienr  raifon  de  conclure, que  fi  l'Eucharifte  eftoit  l'una- 
ge  ,  elle  n'efioit  pas.  le  corps  même,c'eft  à  dire  que  fi  elle  n'c- 
toit  qu'une  figure  &  une  fimple  image,  elle  ne  pouvoit  eftre 
le  corps  même  de  J.  C. 

Comme  le  fens  commun  ne  permet  donc  pas^  qu'on  poufiTe 
ces  maximes  des  Pères  dans  les  autres  fujetsiulques  à  des  con-- 
fequences  qui  feroient  vifiblcmentou  abfurdes  ou  hérétiques, 
perfonne  ne  doit  trouver  étrange  que  le  même  lèns  commun 
les  fafle  auffi  modérer  à  l'égard  de  l'Euchariftie  j  &.  qu'encore 
que  l'on  avoue  que  ce  qui  eft  precifément  image  dans  l'Eu- 
chariftie n'égale  pas  J  C.  n'eft  par  J.  C.  eft  différent  de  J  C. 
on  ne  laifle  pas  de  foutenir  que  J.  C.  eft  joint  &  uni  à  cette 
image  i  &  qu'eftant  confi'ieré  comme  y  eftant  joint,  de  même 
qu'un  homme  qui  feroit  enfermé  dans  fa  ftatuë  feroit  j(»int  à 
û  ftatuc,  il  peut  eftre  appelle  image  de  luy  même  dans  1  eftat 
de  fa  mort  &  de  fa  refiirreftion  ,  &  il  peut  même  eftre  concea 
d'une  connoifiànce  confufe  fous  l'idée  de  fymbole,  de  Sacre- 
ment &  d'image  :,  quoy  qu'il  ne  foit  rien  de  tout  cela  que  par 
le  voile  qui  le  couvre. 

Ainfi  il  fera  vray  de  dire  de  cet  objet,  &  qu'il  eft  le  corps  de 
J.  C.  &  qu'il  en  eft  image  toutenfemble,  avec  cette  différence 
néanmoins  que  l'un  de  ces  attributs  luy  convient  efiènrielle- 
ment,&  1  autre  feulement  par  accident,  en  tant  qu'il  eft  re- 
gardé comme  failant  un  tout  avec  ces  voiles  myfteneux  dont 
il  tir^  la  qu^lire  d'image. 


des  rapports  des  matières  de  tEucharifiie,         jjj 


Ch.  m. 


CHAPITRE    III. 

Sophifmcs  i'Aubcrtin  contre  les  maximes  établies  dans  le  Cha. 

pitre  précèdent. 

COmxME  il  efb  impofilble  de  combattre  des  maximes  tirées 
de  la  lumière  du  Icni  com.mun  ,  fans  tomber  dans  desab^ 
furditez  qui  choquent  le  fens  commun  ,  on  ne  doit  pass'cti-n- 
ner  de  celles  qu'on  remarquera  dans  le  raifonncmentd*  Auber- 
tin  que  nous  allons  rapporter.  On  doit  s'y  attendre  ,  &;  ailii- 
rcment  on  n'y  fora  pas  trompe  5  car  il  efi:  difficile  d'en  trou- 
yer  de  plus  groffieres  dans  quelque  Auteur  que  ce  fojt. 

Il  ne  Faut  que  l'entendre  ddcounr  fur  ce  iujct  dans  la  page 
274.  pour  s'allurer  de  ce  que  je  dis.  Car  après  y  avoir  propo- 
fe  cet  amas  de  palTages  lur  la  diilinclion  qui  fe  doit  rencontrer 
entre  l'image  6ci'original,  dont  nous  venons  de  voir  l'inutiiité, 
il  forme  un  nouvel  argument  lur  la  nature  des  images  en  cet- 
te forte. 

En  fécond  lieu,  dit-il,  l'image  doit  expofer  aux  yeux  la  chofe 
dont  elle  ejl  image.  Mais  comment  le  corps  de  J,  C.  invifible  i^ 
caché  fous  les  acetdcns  du  pain ,  pourra- 1  il  démontrer  fon  corps  ^'/- 
fible  étendu  dans  la  croix  î  Qui  a  jamais  oiii  parler  d'une  irrut'i:e 
invifible  d'une  chofe  vijîhle  ]  Et  comment,  dit  S.  Grégoire  de  Niffe, 
une  chofe  invifible  pourra-t-elle  r^ous  conduire  à  la  connoiffancc  de 
ce  qui  efi  vifiblcl 

Qui  ne  feroit  renté-de  rire  en  voyant  un  Miniftre  qui  veu) 
faire  lefubtil,propofer  fericufementunfophifme  11  puérile?  Cai 
qui  nefç  it  qu'une  chofe  invifible  devenant  vifible  par  quelque 
chofe  d'extérieur  auquel  elle  eft  jointe,  peut  eftre  figne  d'une 
autre  chofe  ou  vifible  ou  invifible.  Les  Penfees  font  invifible? 
par  leur  nature,  mais  eflant  revefluës  de  mots,  elles  devien- 
nent les  fignes  de  la  qualité  de  ni  flre  elprir  &:  de  nos  moeurs. 

Un  difcours  écrit  ou  imprimé,  c'efl:  à  dire  des  penfées  revê- 
tues de  caractères,  fint  des  fignes  de  ce  même  difcours  pro- 
noncé, &  donnent  heu  fjuvent  de  fe  figurer  l'adion  de  celuy 
qui  l'a  fait. 

Les  Anges  par  lefque's  Dieu  manireftoir  aux  hommes  fesvo- 
lontez  dans  l'ancien  Teftament  eftoienc  invifibles  parleur  na- 

V  iij 


ij8  Liv.IIf.   "Réponje  dux  objections  tirées 

turc ,  mais  par  le  moyen  des  corps  qu'ils  empruntoient  ils  de- 

venoienc  les  images  Je  Dieu  le  Pcre  ôc  de  JesusCh-^ist. 

Quelle  difficulté  y  a  t-il  donc  à  concevoir  que  le  corps  de 
J.  C.  eftanc  invifible  dans  l'Eucharifte ,  mais  y  eflant  couvert 
d'un  vuile  lenfible,  foit  une  figure  ou  de  luy.  même  dans  un 
autre  eilat ,  ou  de  Ton  corps  myftique?  Et  comment  Aubertiii 
a-t-il  pu  s'imaginer  qu'il  y  euft  de  l'incompatibilité  ? 

Ce  qu'il  y  a  de  plus  étonnant  efl:  qu'il  n'a  pas  tout  à  fait  igno- 
ré la  réponfe  qu'on  pouvoit  faire  à  cet  étrange  argument,  6c 
qu'après  le  l'eftre  propoféc  il  la  r.jstre  par  un  autre  raifonne- 
ment  encore  plus  ridicule. 

Il  ne  ferviroit  de  rien  de  répondre  ^  dit-il ,  que  Chrijî  pour  fe  re- 
frcfcnter  comme  étendu  dans  la  croix  fe  fcrt  des  efpcccs  du  pain  ^ 
du  vin  fous  lefquelles  il  ejî  caché ,  (^  quejiam  conjtdcré  avec  ces  ef- 
fèces  il  peut  fe  reprefenterk  nous. 

Et  pourquoy  cela  ne  ferviroit-il  de  rien  ?  La  raifon  qu'il  en 
donne  eft  admirable.  C'r//,  dit-il,  f«'<?w  ne  fcauroit  dire  que  par 
taillerie  que  J.  C. prenne  pour  fe  manifefter  des  ejpcces  qui  le  cachent. 
Ce  feroit  dire  quil  a  pris  les  ténèbres  pour  éclairer  ^  comme  dit  Ter.. 
tttllien ,  en  parlant  d'une  phantaife  femhlable  de  certains  Héréti- 
ques. Orpcrfonne  ,  dit  le  môme  Auteur,  pour  faire  voirie  vifay; 
d'un  homme  ne  luy  met  un  cafque  ou  un  mafque. 

Cet  argument  paroift  fans  réplique  à  Aubertin.  Mais  il  pour- 
roit  bien  paroiftre  fans  railon  à  tout  le  refte  des  hommes.  Car 
pour  me  fervirde  l'exemple  que  j'ay  déjaallegué;  Eft-ce  qu'on 
ne  peut  dire  que  par  raillerie  que  les  Anges  pour  figurer  Dieu 
qui  efl:  invifible  ,  fe  cachoient  fous  des  formes  vifibles  ? 

Ne  fçauroit  on  dire  que  par  raillerie ,  que  Dieu  fe  rendoic 
vifible  fous  la  nature  humaine  de  }.  C.  qui  le  cachoit  ?  S  Paul 
n'a  t-il  dit  que  par  raillerie,  que  Dieu  s'eft  manifefté  dans  la 
chair,  Dcus  manifcfiatusefi  in  carne}  Y  auroit  il  delà  raillerie 
à  dire  d'un  homme  caché  dans  fa  (latuc ,  qu'il  fefait  voir  par 
ie  voile  même  qui  le  cache?  Y  a-t  il  de  la  raillerie  à  dire  d'ua 
cafque  qui  cache  le  vifage  d'un  homme,  qu'il  le  découvre  fou- 
vent  en  qualité  de  figne  ?  Et  tous  les  habits  qui  font  propres  à 
certaines  perfonnes ,  ne  font  ils  pas  ce  double  effet  de  les  dçj 
couvrir  &  de  les  cacher  ? 

Que  nous  veut  donc  dire  Aubertin  avec  cette  plaifante  ma- 
xime? Et  comment  n'a~t  il  point  veu  que  le  delîein  qu'a  eu  J,  C. 
en  infticuant  l'Enchariftie  demandoic  au  contraire  qu'il  yfuft 


des  rapports  de  la  matière  de  l'EuchariBie.         159 
&  caché  6c  découvert  tout  enlemble?  Cii.  lH» 

Il  y  devoit  eftre  caché  aux  fens,  puifque  c'efl:  un  myftere  de 
foy  ,  &  que  la  foy  n'a  point  de  parc  à  ce  qui  s'apperçoit  par  les 
fens    Mais  comme  la  foy  a  befoin  d'eftre  excitée  ,il  falluitaul- 
fiqu'ilyfuft  découvert  à  noftre  efprit  par  quelque  image.  Qu'y 
a  t-il  donc  de  plus  convenable  à  ce  delTein  que  de  s'eftre  caché 
aux  fens  ions  des  voiles,  &  de  s'eftre  découvert  à  nos  efprits  par 
le  moyen  de  ces  mêmes  voiles  ?.  Ce  ne  fera  donc  pasj  dit  il ,  le 
corps  de  J.  C.  quieft  invifible,  mais  lesacciJensdu  pain  Se  du 
▼in,  qui  auront  la  qualité  de  figne,  puifqu'il  n'y  a  que  les  ac- 
cidens  qui  foient  vifibles.  Il  efl  vray  qu'on  les  peut  appeller  lî- 
2;nes,  &  qu'ils  font  tellement  fgncs  qu'ils  font  réelkmeut  di- 
ftin<5ts  de  ce  qu'ils  fignifient.  Et  ainfi  Aubertin  n'a  qu'appliquer 
à  la  lettre  à  ces  accidens  toutes  fes  maximes  de  la  diflinction 
qui  doit  eftre  entre  les  figures  &  leurs  objets. 

Mais  bien  loin  de  conclure  de-là,  que  la  qualité  d'image  & 
de  figure  ne  peut  donc  convenir  au  corps  de  J.  C.  caché  fous 
ces  figures,  il  en  devoit  conclure  tout  le  contraire.  Car  dés  là 
que  J.  C.  efl:  joint  à  ces  fignes,&  qu'il  leureft  intimement  pre- 
fent,  il  devient  capable  de  recevoir  les  noms  qui  ne  convien- 
nent proprement  qu'au  voile  3  comme  dés  lors  qu'un  homme 
eft  veftu  ,  il  devient  capable  de  recevoir  des  attributs  &  des 
noms  qui  ne  luy  conviennent  que  par  fes  hahits  ou  fes  orne- 
mens.  On  dira  par  exemple  qu'un  homme  efl  brillant  de  pier- 
reriesjquoyqu'il  n'y  ait  proprement  que  les  pierreries  qui  bril- 
lent. Et  cela  a  encore  plus  de  lieu  quand  le  fujetn'efl;  conçu 
que  confufément  fous  l'idée  de  chofe  prefcnte  &  de  fubflan- 
ce  prefente. 

C'efl  ce  qui  fait  voir  que  non  feulement  les  mots  è^antityfe^ 
de  fymbole ,  &de  Sacrement ,  peuvent  eflre  pris  pour  le  voile  ex- 
térieur,  qui  efl  le  fens  dans  lequel  Eutychius  Patriarche  de 
Conllantinople  dit ,  que  le  corfi  de  J.  C.  cjî  mis  dans  les  anty-    ^'"'  *"^ 
tives  ÀiTvTo'^oii  îvTt}i[j.iHi'  5  mais  qu'il  efl  auffi  tres-naturel  de 
les  prendre  peur  l'objet  prefent,  pour  la  fubflance  prefente  con- 
^    fiderée  comme  image.  Et  félon  ce  fens  les  fymboles  ne  contien- 
nent pas  ].  C.  mais  font  J.  C.  même.  C'efl  ce  qu'il  eft  impor- 
tant de  remarquer  pour  démêler  divers  fophifmes  qu'Auber- 
tin  fonde  fur  cette  équivoque  ,  &  dont  nous  donnerons  plus 
bas  des  exemples. 

Il  n'y  a  rien  en  cela  à  quoy  le  fens  commun  ne  nous  coû^ 


j6o  Liv.  III.  Képonfè  aux  obiccîicins  tirées 

duife  de  liiv-môme. Cependant  Auberun  croit  avoir  trouvé  une 
raifon  admirable  pour  montrer  qu'on  ne  {ïjauroit  dire  fans  fè 
rendre  ridicule,  cjue  le  corps  de  |.  C.  cil:  figne  p.ir  les  apparen- 
ces qui  le  couvrent.  Si  cet  y4titcur,à\K-\\ /ur un  piijfc'ie  attribué  au 
Pape  MiLtire  prétend  que  le  corps  ejt  (î'iveparles  accidens ,  il  don- 
nera U:z  de  le  traitter  de  ridicule  ,  ridenJum sepropinabit.  Car 
c'cfi    de  même  que  fi  quelqu'un  dif oit  qu'un  homme  cfi  fiq^ure    de 
luy  -même  a  caufc  des  habits  dent  ilcji  rcyejiu.  Mais  c'cfl:  Au- 
bertin  luy  même  qui  fe  rend  ridicule  par  le  peu  de  difcerne- 
ment  qu'il  témoigne  dans  cette  comparailon.  Car  afin  qu'une 
chofe  puillè  eftre  appellée  figure  par  ia  partie  extérieure ,  il  faut 
qu'elle  foit  entièrement  cachée.  C'cd  par  le  défaut  de  cette 
condition  qu'on  ne  dit  pas  qu'un  homme  Foit  figure  de  foyinê- 
nie  à  caufe  de  fes  habits,  parce  que  Tes  habits  ne  le  couvrent 
point  enrierement,  6c  que  l'cTprit  ayant  moyen  de  s'appliquer 
à  la  chofe  même,  n'a  cjue  faire  de  tirer  fon  idée  de  fes  vêce- 
mens.  Mais  fi  une  chofe  étoit  entièrement  cachée,  comme  fî 
un  homme  étoit  renfermé  dans  une  ftatuë  ,  &  qu'il  la  fit  mou- 
voir, on  appclleroic  tantoft  cet  objet  du  nom  d'image   6c  tan- 
tofl:  du  nom  de  la  chofe  même  qui  y  feroit  cachée.  Ainfi  le  S. 
Efpric  defcendant  fur  J.  C.  fous  l'imagede  Colombe, cfl:  ran- 
rôi  appelle  Colombe,  &  tantôt  S.  Efprit.  Ainfi   Gabriel  par- 
lant à  Daniel  fous  la  figure  d'un  homme,  c(l  tantôt  appelle 
du  mot  de  w>,  &  tantôt  de  celuy  de  Gabriel. 

Ce  qui  a  caufé  cet  obfcurcifiemcnt  d'efprit  à  Auberrin,  cft 
q'il  n'a  pas  compris  de  quelle  manière  le  corps  de  J.  Cclt  ap- 
pelle image  de  luy- même  prefent  dans  l'Euchariftie.  Ce  n'cll 
pas  le  corps  de  J.  C.  dirtinclement  conçu  comme  corps  de 
J.  C.  6c  fans  rapport  au  voile,  C'cft  le  corps  de  J.  C.  conçu 
comme  objet  prefent,  comme  fubftance  présente.  Etc'eftde 
cet  objet  prefent  conçu  par  rapport  à  fa  partie  extérieure,  qu'on 
afErme  qu'il  eft  image,  comme  on  affirme  du  S.  Efprit  cou- 
vert de  l'unage  de  Colombe  6c conçu  non  diftinclement  com- 
me S.  F.fprt, niais confuiément  comme  objetprefent,  quec'vfl: 
l'image  du  S.  Efprit.  ^ 

Je  penfe  qu'il  y  a  peu  de  perfonnes  qui  ne  demeurent  d'ac- 
cord qu'on  ne  peut  gueres  raifonncr  moins  folidement  qu''Au- 
bertin  fait  en  tous  ces  endroits.  Cependanttout  cela  luy  paroifl: 
fi  jufte,  que  c'eft  d'ordinaire  fur  quoy  il  fe  jette  quand  il  rencon- 
tre dans  les  Pères  les  mots  de  type^    à'ùntitype  ^  àtfymhole-. 

Comme 


des  rapports  de  la,  matière  de  ÏEuchariflie.  léi 
Comme  par  exemple,  ayant  rapporté  le  paflage  des  Dialogues  Ch.I  II. 
de  S.  Juftin  avecTriphon  ,  où  ce  Père  dit,  que  J.  C.  nazis  a  com- 
mande de  faire  le  pain  de  l'EuchariJiie  en  mémoire  de  fan  Incar- 
nation, pour  montrer  qu'on  ne  fçauroit  entendre  par  ce  pain  le 
corps  de  j.  C.  il  ne  manque  pasd'allegaer  qu'une  chofe  qu'on 
ne  voit  point  ne  peut  eftre  le  monument  de  ce  qu'on  voit^  &de 
rapporter  encore  fon  palîagede  S.  Grégoire  de  Nyffe,  quidir, 
que  ce  qui  ejt  invijible  ne  nous  peut  conduire  a  la  connotfjancc  de 
ce  qui  eflinvifihle.  Aquoy  Auhertin  ajoute  encore  une  autre  fo- 
phifme  auffi  grodîer  que  celuy  dont  nous  parlons ,  &:  qui  n'efl: 
appuyé  que  kir  le  même  fondemC'ir.  Le  corps  de  J.  C.  dit-il, 
eilant  glorieux  ne  fçauroit  eftre  le  mémorial  de  ce  même  corps 
en  eftat  de  foufFrance^  car  il  doit  y  avoir  quelque  reflemblan- 
ce  entre  le  mémorial  &  fon  objet.  Or  il  n'y  en  a  point  entre 
un  corps  glorieux  &:  invifible ,  6c  un  corps  vifible  ôc  enfan- 
glanté. 

Je  dis  que  ce  n'eft  encore  que  le  même  rophifme  dont  nous 
parlons;  Car  il  eft  vray  qu'il  faut  qu'il  y  ait  quelque  reflèm- 
blance  entre  le  figne  6c  la  chofe  figniliée^  mais  il  n'eft  pas  ne- 
cefTaire  que  ce  qu'on  appelle  figne  contienne  en  foy-même 
cette  reffemblance  ;  il  fuffit  qu'elle  luy  convienne  par  quel- 
que autre  chofe  à  laquelle  il  foit  joint.  Or  quoy  qu'il  n'y  ait 
point  de  reflemblance  entre  le  corps  glorieux  &  invifible  de 
J.  C.  6c  un  corps  vifible  ^  fanglant  :  il  -y  en  a  néanmoins  entre 
un  corps  glorieux  couvertdefignes  vifibles  quireprefenrent  la 
mort, 6c  ce  même  corps  confideré  dans  l'eftat  de  fa  paiïîon  6C 
de  fa  mort.  Ainfi  l'un  peut  eftre  le  figne  de  l'autre. 

Il  fe  fert  encore  du  même  argument  fur  un  paflage  d'Ori-  j,_  ,^j_ 
gène  ,  fur  un  autre  d'Euftate  Patriarche  d'Antioche,  fur  un   p.  3«9. 
de  S.  Ephren,  6c  fur  deux  deTheodorec,  6c  toujours  avec  la  ^"g^'^'g^,,, 
même  confiance,  que  fi  c'eftoit  une  demonftration  à  laquelle 
tout  le  monde  fe  deuft  rendre.  Tant  il  fe  connoilloic  peu  en 
bonnes  6c  en  mauvaifes  râifons. 

Quelle  meilleure  marque  en  peut  on  encore  avoir  que  de 
luy  voir  avancer  ferieufement  comme  une  raifon  decifive  cet 
autre  argument.  Ze  Jiq/ie  efi  inférieur  à.  l'objet  fiyiific.  Donc  fi  p^o-.  ^j?. 
le  corps  (glorieux  de  J  C.  efloit  dans  l'Eucharifiie  figne  de  lùy- 
mème  ,  il  ferait  inférieur  à  ce  mhne  corps  inanimé  ,  ifumo/é-  (^ 
mort  3  ô"  par  confcquent  il  rien  efi  pas  figne.  Mais  comment  n'a- 
r-il  pas  veu  qu'à  prendre  fon  axiome  à  la  lettre  ,  on  en  conclu- 

X 


162,  Liv.  1 1 1.  Répon/e  aux  ohjeEtions  tirées 

roit  une  herefie ,  qui  cft  que  le  Fils  de  Dieu  eft  inférieur  à  fou 
Père,  puifqu'il  eneft  image  -,  que  l'eau  &  le  fang  qui  fortirent 
du  coftc  de  J.  C.  eftoient  inférieurs  aux  Sacremens,  puifqu'ils 
en  eftoient  les  figures  félon  les  Peresi  qu'un  homme  dans  un 
certain  eftat  feroïc  mferieur  à  luy-même  dans  un  autre  eftat, 
pirilque  la  raifon  nous  dicle  qu'il  fe  peut  reprefenter  luy- 
même. 

Il  faut  donc  par  neceflité  modérer  cet  axiome,  ou  en  l'en- 
tendant des  lignes  tout  purs,  qui  n'ont  point  d'autre  avantage 
que  d'eftre  fignes^  ou  en  ne  prenant  pas  le  mot  d'inférieur  pour 
une  infériorité  réelle,  mais  pour  un  certain  ordre  que  l'eiprit 
met  entre  les  chofes,  qui  ne  détruit  point  l'égalité.  Et  en  ce  cas 
rien  n'empêchera  de  dire  que  J.  C.  dans  l'Euchariftie  eft  en 
quelque  forte  inférieur  à  luy,même  confideré  dans  d'autres 
eftats  ;  puifqu'en  effet  il  y  a  plus  couvert  fa  grandeur ,  &  qu'il 
s'y  eft ,  pour  le  dire  ainfi ,  plus  anéanti,  que  dans  tous  les  autres 
myfteres. 


CHAPITRE     IV. 

Explication  d'un  fa[faqe  difficile  de  Theodote 
d'Antioche. 

AUbertin  &M.  Claude  rapportent  chacun  deux  fois 
un  palFage  d'un  ancien  auteur  appelle  Théodore  d'An, 
tioche,  qui  mérite  qu'on  y  falle  une  réflexion  particulière.- par- 
ce que  non  feulement  il  appelle  l'Eucharifiie  antitype  ^  c'eft  à 
dire  image  •  mais  qu'il  le  fait  même  d'une  manière  qui  pourroit 
paroiilre  furprenante,  fi  l'on  le  feparoit  àç.s,  cclairciiTemens 
que  l'on  y  peur  apporter  par  la  doÂrine  des  Pcres. 
-  G^  paiîàge  qui  nous  aefté  donné  par  Bulinger  porte expref- 
fémenc  ,  que  comme  le  Roy  Q-  [on  ima^e  ve  font  f<.is  deux  Rois  j  de 
même  le  corps  pcrfonnclde  J.  C.  qui  ef}  dans  le  Ciel ^  (^  le  pain  aui 
en  eft  l'i?nagc ,  (^-^  qui  eft  béni  dans  les  Eglifes  pAT  les  Prcjlres  (j^ 
diftrihuè  aux  fid^elles  ne  {ontpof  deux,  corps. 

Auberrin  ne  manque  pas  de  conclure  nettement  de  ce  paf. 
fage,  que  comme  l'image  d'un  R  oy  &  un  Roy  font  difiinguez 
de  lubfiance ,  &  que  l'image  n'cfi:  pas  proprement  le  Roy;aiiiîi 
le  pain  de  l'Euchariftie  n'eft  pas  proprement  le  corps  de  J.C, 


■  des  Y  Apport  s  de  Li  mAtiere  delEuchuriflie.  165 
&  en.  eft.  fubftanciellepaenc  diftingué. ,  Ec  M.  Claude  le  cire  C  h.  IV. 
.jijfÇxiime  un  de  cqs.  paiîàges  clairs  pour  l'apinion  des  Calvinides 
qui  pouvoiencdifllper  les  dçucçs  qu.e  les  lieux  où  les  Pères  ap- 
pellent l'Euchanftie  corps  £c  fangde  J.  C.  auroienc  pu  faire 
naiflre  dans  les  efprics. 

Mais  quoy  qu'il  y  aie  de  la  couleur  dans  le  raifonnemcnt  et  Au. 
bertm^  comme  je  l'ay  déjà  reconnu,  &;que  l'apparence  de  ce 
pafîàge  femble  favorifer  l'ulage  que  M.  Claude  en  a  voulu  fai- 
re ;  je  ne  laiflèray  pas  de  dire  qu'ils  ne  l'ont  pu  alléguer  qu'a- 
vec beaucoup  de  mauvaife  foy,  &;  qu'étant  entendu  dans  fon 
véritable  fens,il  n'efl:  propre  qu'à  établir  la  doclrine  catholique. 
■    La  raifon  en  eft  qu'Aubertin  n'ignore  pas  que  ce  principe, 
^«1?  le  Roy  Q-  l'image  du  Roy  ne  font  pt^f  deux  Rois  ,  maii  un  Jeul 
Gî' unique  Roy  ^  a  eftë  employé  par  les  Pères  fur  d'autres  fu- 
jets  que  celui  de  l'Euchariftie ,  6Î  que  le  principal  ufage  qu'ils 
en  ont  fait,  eft  qu'ils  l'ont  appliqué  à  la  Trinité  pour  mon- 
trer que  le  Père  &  le  Fils  ne  font  pas  deux  Dieux,  mais  un 
même  &  unique  Dieu.  Car  les  Pères  eftant  en  peine  de  prou- 
ver contre  les  Sabelliens  &  les  Arriens  l'unité  de  la  nature  di- 
vine dans  la  diftinclion  des  Perfonnes,  &:  que  quoique  le  Fils 
de  pieu  fqit  par  fa  notion  perfonnelle  l'image  5c  le  caraûerc 
de  la  fubftance  de  fon  Père,  il  n'a  néanmoins  que  la  même 
eflènce  6c  la  même  nature  5  comme  ils  ne  trouvoient  point 
dans  les  créatures  de  comparaifon  qui  peuft  proprement  expri- 
mer cette  unité,  ils  ont  efté  obligez  de  fc  fervir  de  ce  principe 
&  de  cette  comparaifon,  que  le  Roy  5c  l'image  du  Roy  ne  font 
pas  deux  Rois ,  pour  en.  conclure  que  l,e  Père  i)i  le  Fils  ne  font 
pas  deux  Dieux. 

C'eft  l'ufage  qu'en  fait  S.  Atbanafe  dans  fa  quatrième  orai- 
fon  contre  les  Arriens,  6c  dans  celle  qu'il  a  faite  contre  les  Sa^ 
belliens-,  S.  Bafile  dans  (aç^  livre  du  S.  Efprit  chapitre  18.  & 
dans  fon  Homélie  contre  les  .Sabelliens  page  524.  S;  Cyrille 
d'Alexandrie  dans  ion  threfor  afF.ii.  £c  Nicephore  Patriarche 
de  Conftanrinople  dans  fon  livre  des  Images. 
,  Et  il  eft  remarquable  que  tous  ces  endroits  font  rapportez 
par  Aubertin  dans  la  même  page ,  où  il  cite  celui  de  Theodo- 
rei  mais  qu'il  le  donne  bien  de  garde  d'avertir  les  ledeursque 
tous  ces  Pères  parloient  de  la  divinité  du  Père  &  du  Fils,  & 
ne  fe  fervoient  de  ceri-e  comparaifon  que  pour  prouver  que  ce 
nt  font  pas  deux  Dieux. 

Xij 


164  L I  V.  1 1 1.  Reponfè  aux  ohjeBions  tirées 

Cependant  il  eft  bien  clair  que  dans  cette  comparaifon  des 
Pères,  ce  feroit  une  herefieque  de  tirer  une  confequeneè  pa-- 
reille  à  celle  d'Auberrin.  LePcrcSi  le  Fils  ont  entr'eux  la  mê- 
me unité  qu'tm  Roy  6c  fon  image.  Or  l'image  n'eft  pas  pro- 
prement Roy,  6c  diffère  fubllantiellement  du  Roy.  Donc  le 
Fils  diffère  fubrtantiellement  du  Père  ,  ôcn'eft  pas  proprement 
Dieu. 

Et  il  eft  clair  au  contraire  que  les  Pères  employent  cette 
comparaifon  pour  établir  l'unité  individuelle  ,  numérique, 
réelle  &  fubflrantielle  de  la  nature  divine  dans  le  Père  &  dans 
le  Fils  j  &:  qu'ils  ne  confiderent  point  l'image  d'un  Roy  &  ce 
même  Roy  dans  leur  fnbflance  &  dans  leur  eflre  propre  ,  en 
quoy  ils  font  alfeurémentdifferens,  mais  dans  la  notion  de  Roy 
que  ces  deux  idées  de  Roy  &i  d'image  ne  multiplient  point  dans 
nos  efprits.  La  comparaifon  donc  ne  confifte  point  félonies 
Pères,  ni  dans  la  fubflance  &  l'eftre  de  l'image  &:du  Roy  ,  ni 
dans  la  manière  de  participer  à  la  Royauté  -,  mais  dans  l'unité 
de  l'idée  de  Roy,  que  l'image  ne  multiplie  pas:  c'eft  à  dire 
qu'elle  ne  fait  point  qu'on  fe  reprefente  deux  Rois.  Et  cette 
■comparaifon  toute  imparfaite  qu'elle  e{l:,eft  employée  par  les 
Pères  pour  nous  faire  entendre  la  plus  grande,  la  plus  réelle, 
la  plus  individuelle,  la  plus  fubftantielle,  la  plus  parfaite  de 
toutes  les  unitez ,  qui  eft  celle  de  la  nature  divine  dans  le  Père 
&  dans  le  Fils. 

,  Cette  feule  remarque diflipe  entièrement  toute  la  difficulté 
apparente  de  ce  paffige.  Car  quel  fujet  y  a-t-il  de  s'étonner 
<}ue  TKeodote  voyant  cette  comparaifon  appliquée  par  les  Pè- 
res qui  l'avoient  précédé  ,  à  exprimer  l'unité  individuelle  du 
Père  &  du  Fils  dont  l'un  eft  appelle  image  de  l'autre,  l'ait  auiTi 
appliquée  pour  exprimer  l'unité  individuelle  du  corps  de  J.  C. 
i5c,du  pain  Euchariftique,  qui  eft  aiddi  appelle  l'image  de  ce 
corps  ?  E't  la  confequence  qu'en  tire  Aubertin^  que  le  pain  con- 
facrë  n'eft' donc  pas  proprement  le  corpsdeJ.C.  comme  l'i- 
mage d'un  Roy  n'eft  pas  proprement  le  Roy,eftaufîî  faufïè 
que  fî  l'on  concluoitde  ctitç.  comparaifon  dans  l'ufage  qu'en 
ont  fait  les  Pères ,  que  le  Fils  de  Dieu  n'eft  donc  pas  propre- 
ment'&:  fubftanîiellement  Dieu ,  comme  l'image  du  Roy  n'eft 
pas  fubftantiellement  le  Roy,     f  1  '2''^  :■  ;;.;■:■:/: 

J'ay  dit  qu'il  y  avoit  de  la  mauvaife  foy  à  Aubertin  5  parce 
qu'étant  impoifible  qu'il  ait  ignoré  l'ufage  que  les  Pères  fout 


desmpports  de  Li  matière  de  fEuchariftie.  16$ 
de  cette  comparairon,puifqu'il  cite  les  lieux  où  ils  l'appliquent  Ch  V. 
au  Père  6c  au  Fils^  la  fînceritci  vouloit  qu'il  n'en  recrancliaft 
pas  l'application  comme  il  Fait.  Il  adonc  voulu  nous  empêcher 
de  voir  cette  application  ,  &  nous  porter  à  concevoir  par  la 
différence  fubftantielle  qui  efl  entre  l'image  du  Roy  &  le  Roy, 
une  différence  fubftantielle  entre  l'Euchariftie  &  le  corps  de 
J.  C.  au  Heu  que  l'application  qu'il  a  retranchée  détruit  nette- 
ment ôc  precilément  cette  confequcnce. 

M.  Claude  n'eltpas  plus  fincere  ^  puifqu'il  a  vu  cespaflages 
dans  Aubertin,  6c  qu'il  en  citeluy-même  quelques-uns,  pag. 
355.  Et  parconfequent  la  bonne  f'oy  l'obligeoit  de  ne  pas  rap- 
porter ce  pailage  qui  fous  une  apparence  facheufe  efl  néan- 
moins dans  le  fond  très- favorable  aux  Catholiques.  Car  com- 
me dans  l'application  ordinaire  que  les  Pères  font  de  ce  prin- 
cipe, ^«1?  le  Roy^fon  im^igc  ne  font  pas  deax  Rois  ^  ils  en  con- 
cluent que  le  Père  &  le  Fils  ne  font  pas  deux  Dieux  ,  &:  qu'il  y 
a  une  unité  individuelle  entre  le  Père  &  le  Fils  ;  de  même  dans 
cette  autre  application  de  ce  même  principe  à  l'Euchariflie 
faite  par  Theodote  à  l'imitation  des, Pères ,  où  le  painEucha- 
riftiqueêc  le  corps  de  J.  C.  contiennent  la  place  du  Père  6c  du 
Fils,  ôcfont  comparez  à  la  même  ehofe,  on  en  doit  conclure 
que  cet  auteur  amis  la  même  unité  entre  le  corps  de  J.  C.  &: 
l'Euchariflie ,  que  les  Pères  mettent  entre  le  Père  &  le  Fils, 
c'efl  à  dire  qu'il  y  a  mis  une  unité  tres-parfaite. 


CHAPITRE    V. 

Qice  la  nature  noiis  forte  à  concevoir  ^  à  exprimer  le  myfiere  de 
l' Etccharifiie  félon  les  manières  ordifj aires  dont  les  hojnmes  Con- 
çoivent S^  expriment  les  autres  objets.  Première  manière  :  Sé- 
paration d'un  même  objet  en  divtrfes  idées.  .  Sophifmcs  yo_IJicrs 
d' Aubertin  nez^de  l'iyiorance  de  cette  manière  ordinaire  de  con- 
cevoir les  objets. 

QU  £  LQJJ  E  difproportion  que  les  myfleres  de  noflre  reli- 
gion aycnt  avec  l'efprit  humain, dés  lors  néanmoins  qu'ils 
en  deviennent  l'objet,  il  faut  qu'il  s'y  forme  quelque  efpecede 
proportion  avec  fon  intelligence  :  c'eft  à  dire  qu'il  faut  que  les 

X  îij 


i(>6  Li  V.  1 1 1.  Képonfe  aux  objections  thées 

hommes  s'en  faflenc  des  idées  conformes  à  celles  qu'ils  onc 
des  objets  communs. 

C'eft  ainfi  qu'ils  fepnrent  les  cliofes  fimples  en  divers  attri- 
buts j  qu'ils  renferment  lous  des  idées  finies,  des  objets  im- 
menfes  &;  infinis  j  &  qu'ils  conçoivent  par  des  idées  corporel* 
Jes  des  objets  purement  fpirituel.v.  Souvent  même  ils  fontobli,. 
gez  de  reconnoiftre&  de  corriger  l'imperfeélion  de  leurs  idées, 
lorfqu'ils  viennent  aies  conllderer  plus  exactement.  Et  c'eft  ce 
qui  leur  arrive  fur  tout  à  l'égard  du  myCcere  de  la  Trinité,  Se 
de  celuy  de  l'Incarnation.  Car  foie  que  l'on  conçoive  l'unité 
de  la  nature  divine  dans  les  trois  Perfonncs,  foitque  l'on  con- 
çoive la  diflincflion  de  ces  Perionnes  dans  la  même  nature ,  foit 
qu'on  fe  forme  une  idée  de  la  diflincftion  des  natures  dans  J.  C. 
foit  qu'on  s'en  forme  de  l'unité  de  fa  perfonnc  ,  on  ne  réduit 
gueres  toutes  ces  idées  à  une  exacTie  vérité  qu'en  retranchant 
ce  qu'on  y  met  du  lien  ,  &:  en  defavouant  ce  qu'on  en  peut  re- 
trancher. 

Si  nous  ne  concevons  donc  rien  que  nous  ne  rabaiflions ,  aju- 
ftions,  &  proportionnioas  à  la  portée  de  noflre  efprit  ;  il  n'eft 
pas  étrange  que  quoyque  le  myftere  de  l'Euchanflie  foit  fort 
éloigné  des  idées  communes,  néanmoins  lorfqu'il  devient  l'ob- 
jet de  l'imagination,  de  l'intelligence,  &  des  paroles  des  hom- 
mes ,  il  foit  conçu  6c  exprimé  par  les  manières  ordinaires  que 
l'efprit  a  de  concevoir  &  d'exprimer  les  autres  chofes. 

Il  y  en  a  plufieurs  qui  doivent  eftre  particulièrement  confî- 
derées  fur  ce  fujet.  Et  l'on  verra  dans  la  fuite  que  le  Miniflre 
Aubertin  bc  plufieurs  autres  ne  fê  font  engagez  en  divers  fo- 
phifmes  peu  dignes  de  gens  habiles ,  que  faute  d'y  avoir  fait 
afièz  de  réflexion. 

La  première  eft  Ç\  générale  qu'elle  s'étend  prefque  à  toutes 
fortes  de  jugemens  &:  de  raifonnemens.  C'efl:  que  quand  on 
conçoit' un  objet  quoyque  prefent  aux  yeux,  on  ne  le  conçoit 
pas  toujours  par  tous  ces  attributs  particuliers  qui  le  diftin- 
guent  des  autres  •  mais  l'on  s'en  forme  fîiuvent  des  idées  con- 
fufes,  comme  font  celles  qui  ne  le  font  connolflre  que  fous  la 
qualité  d'eftre  prefent, d'objet  prefent,  de  fubflance  prefente, 
&  qui  n'excluent  par  elles-mêmes  aucun  des  attributs  parti- 
culiers que  l'on  y  peut  joindre. 

C'eft  de  là  qu'il  arrive  que  le  même  objet  cftant  prefent  à 
diverfes  perfonnes,  elles  s'en  forment  une  certaine  idée  con- 


des  di'Verfes  manières  de  concc-voir  ce  Myflere.  167 
fufe  qui  peut  compatir  avec  des  attributs  particuliers  incompa-  Ch.  V. 
tibles  entr'eux.  Si  plufîeurs  perfonnes  voyent  de  loin  un  corps 
en  mouvement,  ib  s'en  formeront  tons  une  idée  de  fubllance 
qui  le  meut, de  corps  qui  fe  meut:Mais  lesunsyjoindronci'idce 
particulière  d'un  homme,  en  dilant  :  C'cjr~là  un  homme  -^  les  au- 
tres celles  d'un  cheval,  en  difant:  C efi  un  cheval  iÏQs  autres  cel- 
le d'un  arbre  agité  par  le  vent ,  Rediront:  C'cfi  un  arbre.  L'idée 
coniuielera  la  mêmeentous,6>:  recevra  dans  leur  ef prit  tous  ces 
difFerens  attributs  qui  (ont  néanmoins  incompatibles.  Car  un 
mcmi  eftre  ne  i<^aaroit  eftre  homme ,  cheval,  &c  arbre  tout  à 
la  fois. 

C'eft  encore  de  cette  diverfité  d'idées  par  lefquelles  nous 
nous  pouvons  reprefentcr  un  même  objets  qu'il  arrive  que  nous 
en  pouvons  faire  diverlés  propofitions  dans  lefquelles  nous 
n'en  affirmons  efFeclivement  que  fon  propre  eftre, fans  que  pour 
cela  la  proportion  foit  ridicule.  Et  l'on  peut  dire  même  que 
toutes  les  propofitions  affirmatives  font  de  ce  genre ,  £c  parti, 
culierement  les  eflentieliesj  c'eû  à  dire,  celles  donc  rattribut 
eft  un  terme  eirentiel. 

Car  la  nature  de  toute  propofîtion  affirmative ,  eft  de  mar- 
quer que  le  fujet  eft  la  môme  chofe  que  l'attribut.  Or,  une 
chofe  n'eft  une  qu'avec  elle-même  j  éc  elle  eft  diftincT:e  de 
toute  autre  chofe. 

Tant  s'en  faut  donc  que  ce  foit  un  défaut  dans  «ne  propofî- 
tion qu'une  chofe  foit  affirmée  d'elle-même,  que  c'eft  une  con- 
dition générale  de  toute  forte  de  propofition  affirmative.  Et 
l'on  peut  dire  que  quiconque  ignore  ce  prmcipe  ,  ignore  le 
fondement  de  tout  le  langage  humain  &  de  toute  la  Logique. 

Mais  il  eft  vray  que  comme  il  eft  neceiTaire  qu'une  choie  fi-ic 
affirinéed'ellemêmedans  toute  propofition  affirmativei il  eft 
necelîaireaullîpouren  eftre  affirmée  raifonnablement,  qu'elle 
foie  conçue  par  difF.;rentes  idées  5  ôc  que  c'eft  cette  diverfité 
d'idées  que  nous  nous  formons  d'une  même  chofe ,  qui  empê- 
che que  les  propofitions  ne  ioii;ntdu  genre  de  celles  que  l'on 
appelle  identiques  &  vaines ,  c'eft  à  dire  où  Ton  affirme  une 
chofe  d'elle- mè»ne  fans  aucun  changement  d'idées. 

Pour  appliquerces  principes  à  l'Fuchariftie,  il  s'enfuit  que  le 
pain  eftant  change  au  corps  de  J.  C.  &:  le  corps  de  j.  C.  eftant 
ainfî  prefenc  à  nos  fens  fous  ces  voiles  fenfîbles,  l'efprir  des 
hommes  ne  le  conçoit  pas  néanmoins  toujours  par  ces  attri- 
buts diftincls  ôc  particuliers ,  de  corps  de  J.  C.  de  fang  de  J.  C.  de 


i6S  Liv.  ni.  "Réponfe  aux  objectons  tirées 

chair  de  J.  C.  mais  qu'il  le  peur  auffi  concevoir  fous  des  idées 
plus  confufes  ,  d'objet  prcfent ,  de  fubflance  fre fente ,  de  chofc  qui 
frappe  nos  fcns  ^  qui  efl  en  un  tel  lieu  ^  &c  même  fous  l'idée  de 
fymbole,  comme  nous  l'avons  déjà  dit. 

Il  n'y  a  rien  en  cela  que  de  necefTaire,  6c  qui  ne  foie  une  fuite 
de  la  manière  dont  les  hommes  conçoivent  les  objets.  Car  il 
faudroit  qu'ils  changealîentde  nature,  £c  qu'ils  liiflent  des  Aa- 
ges  ou  plus  que  des  Anges  pour  n'avoir  que  des  idées  diftincles 
du  corps  de  J.  C.  en  cet  état,  &  pour  pénétrer  par  une  feule  viîë 
tout  ce  qu'il  eft^ians  avoir  befoin  de  le  concevoir  par  différen- 
ces idées  qui  s'éclaircilTent  les  unes  les  autres.  Or,  le  concevant 
par  différentes  idées, il  faut  bien  qu'ils  expriment  l'union  de  ces 
idées  dans  le  même  objet,  en  les  affirmant  les  unes  des  autres. 

Il  efl  clair  par  là  qu'en  concevant  le  corps  de  J.  C.  comme 
objet  prefent,  c'eftune  propofition  fort  raifonnable  que  de  di- 
re ;  Cecy  efl  le  corps  de  f.  C  Cecy  efi  la  chair  de  J.  C.  Et  quand  on 
conçoit  de  même  cet  objet  prefent,  comme  marquant  &  figu- 
rant quelque  chofe,  &  qu'on  exprime  cette  qualité  par  le  mot 
de  fymbole,  de  Sacrement,  ou  de  myftcre,  on  peut  dire  véri- 
tablement :  Ce  fymbole  cjî  le  corps  de  j.  C.  ou  :  Ce  myftcre  efi  le 
corps  de  /.  C.  ou  :  Ce  Sacrement  efi  le  corps  de  Jefus-Chrifi. 

Il  s'eft  néanmoins  trouvé  des  gens,  qui,  bien  loin  d'entrer 
naturellement  dans  le  fens  de  ces  propofitions  fi  faciles,  fi 
communes  &  fi  conformes  à  toutes  les  res-les  du  lançrao-e  des 

o  ce? 

hommes,  ont  prétendu  y  trouver  des  abfurditez,  &;  détruire 
par  là  la  dodrine  des  Catholiques.  Cet  égarement  feroit  in- 
croyable, fi  je  n'en  allois  faire  voir  des  exemples  dans  un  des 
hommes  du  monde  qui  s'efi:  le  plus  piqué  des  fubtilitez  de  Lo- 
gique. Je  n'en  choifiray  que  trois  ou  quatre  entre  plufieurs 
qu'il  a  eu  foin  de  nous  fournir. 

I.  EXEMPLE  TIRE'  D'AUBERTIN. 

Il  examine  dans  la  pag.  187.  de  fon  Livre  ces  paroles  de 
S.  Ignace  Martyr.  Ces  Meretiques  ri  admettent  pas  les  Eucha- 
rifiies  (^  les  ablations  :  parce  qu'ils  ne  confe[fent  pas  que  l'Eucha- 
riflie  [oit  la  chair  de  noflre  Sauveur  J.  C.  qui  a  fouffert  pour  nos 
pechez^^  ^  que  le  P ère  a  rcjjufcitè  par  fa  bonté.  Et  après  s'eftre 
bien  travaillé  pour  les  tourner  à  fon  fens,  il  prétend  lever  tou- 
tes les  difficultez  par  un  argument  clair  &  decifif  Mais  pour- 
quoy  ^  dit-il ,  mamufay  je  à  perdre  le  temps  dans  une  chofe  claire> 

Cu  R 


des  dherfis  marneras  de  concevoir  ce  Myjîerc.  lé  9 
Cor  tempus  ter.o  in  re  perspicua  ?  Je  nay  qu'à  rétorquer  Ch.  %. 
contre  mes  adverfuires  les  paroles  ctlyiacc.  Cir  quand  il  donne  lieu 
de  conclure  que  l'a  créance  des  Orthodoxes  eftoic  que  l'Euchariftie 
eft  la  chair  de  J.  C.  il  entend  par  l' Eucbari/Iie  ou  le  corps  même 
dej.  C.  ouïes  accidens  du  pain  ,  ou  du  pain  proprement  dit.  Or  il 
n'entend  point  le  corps  de  J.  C.  Car  c'cfl  une  propojition  vaine  ©« 
ridicule  que  de  dire  :  Le  corps  de  J.  C.  efl  le  corps  de  J.  C.  Ce  ne 
■jont  pas  aujji  les  accidens  :  car  des  accidens  ne  peuvent  ejlrc  appel. 
lexjhairde  J.C.que  fiigurèment  l  Q- de  plus  noii-s  foutcnons  qu'au- 
cun des  anciens  n'a  entendu  parle  motd'  Euchariftie  des  accidens  fam 
fubfiance.  C'ejl  donc  du  pain  proprement. 

■C'eftainfi  queceMinirtrreraifonne.  Et  ce  raifonnemenr,  com- 
me l'on  voie,  n'eft  fondé  que  fur  l'ignorance  de  ces  deux  ma- 
nières de  concevoir  les  chofes,  l'une  confufe  ,  l'autre  diftincle. 
Car  s'il  les  euft  comprifes ,  il  n'eufi:  trouvé  aucune  difficulté 
à  concevoir  ,  que  le  mot  d'Euchariftie  lignifiant  le  corps  de 
J.  C.  confufémenc  ,  on  en  ait  dit  qu'elle  eft  le  corps  de  J.  C. 
Et  bien  loin  de  traiter  cette  proportion  de  ridicule  &  vaine  , 
J>arce  qu"'on  y  affirme  une  chofe  d'ellf-mcfme,  il  auroit  reconnu 
que  ce  qu'il  y  blafine  ,  fe  doit  trouver  par  necefficé  dans  toutes 
les  propofitions  affirmatives. 

SECOND    EXEMPLE. 

Aubertin  avoitce  bizarre  principe  fi  fortement  imprimé  dans 
l'elprit ,  qu'il  s'en  (ert  en  je  ne  fçay  combien  d'autres  occafions, 
cpmme  dans  l'examen  qu'il  fait  de  ces  paroles  de  S  Cyrille  de 
Jeru  falem  :  Puifque  J.  C.  affirme  ijr-  dit  du  pain ,  que  ccfi  [on  corps  ^ 
qui  en  ofera  douter?  Surquoy  il  forme  encore  ce  rare  raiionne- 
ment. 

Je  demande  au  x  adverfaires  s'ils  prétendront  que  J.  C-  ait  af- 
firmé [on  corps  de  la  fi'iure  extérieure  du  pain  ,  c'efi  à  dire  des 
accidens  du  pain  confacré ,  ou  de  la  fubjlance  mefme  du  pain  ce- 
le  fié  J  c'efi  a.  dire  de  fon  propre  corps.  S'ils  difent  le  premier .,  ce  , 
[croit  une  fauffetè  à.  S.  Cyrille  de  nous  dire  :  Puifque  le  Seiyieur 
nous  affeure  du  pain  que  c'efi  fon  corps .,  qui  en  a  fera  douter  /  Car 
non  feulement  il  eft  douteux  ,  mais  il  efi  abfolument  faux  que  des 
accidens  foient  le  corps  même  du  Seigneur.  S'ils  s'arrefient  au  fé- 
cond ,  /■/  nojis  auroit  dit  que  le  Seigneur  auroit  affirmé  fon  corps 
defijn  cer£s  ,  ^  qu'il  auroit  dit  en  e^et  par  une  tantologie  im^er- 

Y 


ijo  Liv.  Wl.'RéponJe  aux  ohj estions  tirées 

tinente  :  Ce  mien  corps  cfi  mon  corps.  Et  ce  feroit  ainfienvain  qu'il 
exhorterait  a.  n'en  point  douter  ^  puifquc  ferfonnc  ne  fcauroit  douter 
que  le  corps  de  J.  C.  ne  foitle  corps  dej.  C.  C'efl:  à  dire  que  félon 
Aubertin  on  ne  fçauroic  affirmer  le  corps  deJ.  C.  du  corps  de 
J.  C.  fans  impertinence  5  au  lieu  que  félon  tous  les  autres 
hommes  du  monde  on  ne  fçauroir  fans  impertinence  affirmer 
du  corps  de  J.  C.  autre  choie  que  le  corps  de  J.  C. 

TROISIE'ME    EXEMPLE. 

Mais  il  triomphe  particulicreraencfur  ce  même  principe  chi- 
mérique dans  l'examen  de  ce  lieu  de  Theodoret:  Ze  Seigneu'r 
ayant  pris  lefymbole ,  dit  :  Cecy  rft  mon  corps.  Je  demande ,  dit-il  ^ 
à  du  Perron  ce  quil  prétend  que  Theodoret  a  voulu  Jiqnifier  par  le 
mot  de  fymbole.  Puis  ayant  fait  fon  argument  ordinaire ,  qu'il. 
ne  peut  avoir  entendu  par  cemotry  les  accidensdu  pain  qui 
ne  font  pas  le  corps  de  J.C.  ny  le  corps  de  J.  C  parce  .^  dit- il, 
que  perfonne  fans  efire  fou  ne  dira  quej.  C.  ait  honoré  fon  corps  du 
nom  de  fon  corps ,  comme  le  dit  Theodoret,  il  infulre  à  ce  fçà- 
vant  Cardinal  en  s'écriant  3  Où/e  tournera  du  Perron  ?  Quofe  vtr- 
iei  Perromus} 

On  voit  qu'il  y  va  de  bonne  foy  ,  &  qu'il  n'avoit  aucune  dé- 
fiance de  fon  argument.  Et  c'eftce  qui  donne  lieu  d'admirer  , 
ou  pliitoft  de  plaindre  la  petitefîè  de  l'efprit  humain ,  en  voyant 
un  homme  comme  Aubertin  ébloui  par  un  fi  ridicule  fophifme. 
Car  pourquoy  ne  comprenoit-il  pas  que  l'objet  prefen't  qui  eft 
pain  avant  la  confecration,  6c  corps  cfe  J.  C.  après  la  confecra-  ■ 
tion ,  peucefh'econ(^u  fous  cette  qualftë  commune  d'objet  pre- 
fent  >  que  Ton  y  peut  encore  joindre  la  qualité  de  fymbole  j  & 
qu'eftant  conçu  par  cette  double  idée  générale,  on  peut  y  ajou- 
ter 1  idée  du  corps  de  J.  C.  &  dire  :  Ce  fymbole  eft  le  corps  de 
J.  C.  Mais  quoy  qu'on  affirme  dans  ces  fortes  de  propofitions 
une  chofe  d'elle-même,  ce  n'eft  comme  il  a  efté  dit  qu'en  la. 
concevant  par  des  idées  diflPèrentes.   Par  celle  du  fujet ,  on  la 
regarde  comme  objet prefenr,  &  comme  figure.   Parcelle  de 
l'attribut  de  corps  de  J.  C.  on  conçoit  ce  même  objet  prefenr 
fousl'idéediftinftedecorps  de  J.C.  &  l'on  joint  ces  deux  idées 
par  une  affirmation  régulière  félon  là  loy  générale  de  toutes  les* 
propofitions  affirmatives. 
Je  n'ay  rapporté  ces  trois  endroits  que  pour  montrer  le  cas 


dti  di<v^rfes  mAnïent  de  eonanjoir  ce  Myfiere.  i-ri 
;qa.e  l'on  doit  Faire  de  la  confiance  dont  Aubercin  propofè  fes 
iirgumens.  Car  d'ailleurs  cectte  illufion  eft  fi  groflicre  qu'il  fuf- 
droic  del'avoirune  fois  démêlée  pourempêcher  queperfonne 
îie  s'y  puft  tromper. 


CHAPITRE   IV. 

Seconde  manicre  dont  les  hommes  conçoivent  les  objets ,  ^ui  efi ,  de 
, ,   rajj'embler  en  une  ■)nème  idée  ceux  en  qui  Us  ne  remarquent  aucu- 
ne différence  fenjible.   Vfu'i^e  qui  a  eft è  fait  de  cette  manière  de 
■■{oncevoir ,  à  l^ égard  de  l' Euchariftie  far  les  Auteurs  les  plus 
attachez^à.  la  Trunfiubftantiation. 

LA  (êconde  manière  que  les  hommes  ont  de  concevoir, 
qu'il  eft  important  d'expliquer  icy  ,  6c  dont  l'ignorance 
a  encore  engagé  Aubertin  ,  &  engage  tous  les  jours  les  Mini- 
tftres  en  une  infinité  de  fophifmesj  comme  nous  le  ferons  voir^ 
«ft  plus  fine  &  plus  fubtile.  C'eftque  lorfque  deux  ou  plufieurs 
fujets  fe  fuccedent  dans  le  même  lieu  fans  qu'il  y  paroifle  de  dif- 
férence ^quoy  que  les  hommes  les  diftinguent  quand  ils  les  con- 
iiderent  exaÂement ,  ils  ne  les  diftinguent  point  néanmoins 
dans  leurs  difcours  ordinaires,  ils  en  parlent  fouvent  comme 
<i""une  même  chofe,5^  les  réunifient  fous  une  même  idée  qui  n'en 
fait  point  voir  la  différence, &  qui  n'exprime  que  ce  qu'ils  ont 
de  fommun.  C'efl  ainfi  qu'encore  que  nous  changions  d'air 
prefquc  à  tout  moment,  nous  regardons  néanmoins  l'air  qui 
nous  environne  comme  cftant  toiijours  le  même  air,  &  nous 
difons  que  de  froid  il  efl  devenu  chaud ,  comme  fi  c'eftoit  le 
même  j  au  lieu  que  fouvent  cet  air  que  nous  (entons  froid  n'eft 
pas  le  même  que  nous  avions  trouvé  chaud. 

Cette  eau,  difons  nous  aulFi  en  parlant  d'une  rivière,  eftoic 
trouble  il  y  a  deux  jours ,  &  la  voilà  claire  comme  du  criftal. 
Cependant  combien  s'en  faut- il  que  ce  nefoitla  même  eau?/« 
idem  flumen  bis  non  defcendimus  ,  dit  Seneque  j  manet  idem  flu. 
minis  nomen  ,  aqua  tranfmiffa  eft. 

Nous  confiderons  les  corps  des  animaux  8c  nous  en  parlons 
comme  eflant  toûiourslesmcmes,quoy  que  nous  ne  foyonspas 
aiïurez  qu'an  bout  de  quelques  années  il  refte  aucune  partie  de 
la  matière  qui  les  compofoit.  Et  le  langage  ordinaire  nousper- 

Yij 


lyi  Liv.  II/.  Képonje  auxobjeSîions  tirées 

mec  de  dire  :  Le  corps  de  cet  animal  eftoic  compofé  il  y  a  dix 
ans  de  certaines  parties  de  matière,  &  mainrenarit  il  eftcom^ 
pofé  de  parties  toutes  différentes.  Il  femble  qu'il  y  ait  de  la 
contradidion  dans  ce  difcours.  Car  (i  les  parties  font  toutes 
diferentes,  ce  n'eftdonc  pas  le  même  corps.  11  eft  vray  ;  mais 
on  en  parle  pourtant  comme  d'un  même  corps.  Et  ce  qui  rend 
CCS  propofitions  véritables ,  c'efl  que  ce  même  terme  efl  pris 
pour  des  fujets  differens  dans  cette  différente  application. 
■''  Il  eft  vifible  par  cette  règle  que  le  corps  de  J.C.  fuccedantao 
pain  dans  le  même  efpace ,  &  n'en  eftant  diftingué  par  aucun 
accident  fcnfible  ,lorfqu'il  vientàeftre  conçu-par  une  idée  con- 
fufe,  d'objet  prefent,  de  lubftanceprefente,  cette  idée  ne  le  difl 
tingue  nullement  d'un  pain  matériel ,  comme  l'idée  confufè 
qu'on  a  d'eau  prefente  en  voyant  une  rivière  n'a  rien  qui  di- 
ftingué les  eaux  différentes  qui  paiîcnt  &  fe  fuccedent  conti- 
nuellement. Et  il  arrive  de  là  que  les  hommes  concevant  ainfi 
deux  chofes  différentes  par  la  même  idée^en  forment  un  certaifi 
fujet  confus  à  qui  ils  attribuent  les  qualitez  différentes  de  ces 
deux  fujets.  De  forte  que  de  même  qu'on  parle  de  cette  eau 
claire ,  comme  fi  c^ftoit  la  même  eau  qu'on  a  veuë  trouble  ;  on 
parle  auflî  &  on  raifonne  du  pain  &:  du  corps  de  J.  C.  comme 
il  c'eftoitun  même  fujet  qui  fuft  tantoftpain  ôctantoft  corps  de 
Jésus  Christ. 

C'cft  ce  qui  paroîtra  clairement  parles  exemples  que  nous 
allons  rapporter  tirez  des  Auteurs  les  pluj  déclarez  pour  la 
tranlïïibftant'ation. 

Gabriel  de  Philadelphie, dont  l'opinion  apparemmenrne  fera 
plusmife  en  doute  par  M.  Claude  après  rimprcflion  qui  en  a 
cfté  faite  depuis  peu,où  le  mot  même  de  tranffubftantiation  eft 
employé  16.  ou  17.  fois ,  parle  de  cette  forte  dans  ce  Traitté. 
Le  pain  que  l'on  fîcrifîe  poffede&;  reçoit  trois  dignitez. 

Il  pofîède  la  première  par  la  nature. 

Il  reçoit  la  féconde  par  participation. 

Et  il  eft  revêtu  de  la  troifiéme  parla  tranffubftantiation. 

Ne  femble  t  il  pas  que  ce  foit  le  même  pain  qui  reçoit  la 

qualité  de  corps  de  J.  C.  par  la  tranflubftantiation&qui  avoit 

eu  les  deux  autres  auparavantAuffi  ?M.  Claude  que  les  fubtilitez 

de  l'Ecole  Cal  vinifte  ont  rendu  incapable  d'entendre  le  langage 

om*re*^ie^"p^  de  la  nature,  fe  récrie  fur  cela  d'une  étrange  forte,  si  cette  me- 

Nouet  p.  ;<j.  toufiofe  ,  dic-il  s  eft  la^  tranjfubftantiation Romaine ,  cet  homme  a- 


des  diwerfes  ma.  nier  es  de  concevoir  ce  Myfiere.        \  -j  ? 

p;rdule  fens  de  dire  ,  que  le  pain  rci^oitune  troijième  dignité  ,   lors  Ch.    V  I. 

qu  de/}  détruit^  &  détniitde  telle  forte  que  ce  n'cjl  pltis  le  même 

fujet  qui  cfioit  auparavant.    Jl  cfi  évident ,  dit  il  encore  ,  que. 

quand  G  abnel  du  que  le  pain  fioffcdc  trois  dignitez^^  il  veut  dire  que 

ceft  un  mime  Jram  ^  un  même  fujet [uns  ces  trois  diytircz^  diff'e- 

rentes.        • 

Mais  que  M.Claude  ne  fe  mertc  point  fi  fort  en  colère  con- 
tre cet  Archevêque.  Il  va  voir  qu'il  n'a  parlé  que  le  laro-arredes 
Théologiens  Latins,  &  qu'il  a  confideré  auflî  bien  qu'eux  le 
pain  Sçle  corps  de  J.  C.  comme  un  mêmefujet ,  non  en  effet, 
mais  en  idée  ;  puifque  les  /ens  n'y  dëce  uvrant  point  de  dirtinc- 
tion  donnent  occafion  à  l'efprit  d'en  former  cette  idée  con- 
fufe  à  qui  l'on  attribue  ce  qui  convient  bi.  au  pain  &  au  corps  de 
Jésus  Chr  i  st. 

Car  n'efl  ce  pas  en  fuivant  cette  idée  qiie  Geoffroy  de  Ven- 
dofme  dit ,  que  le  pain  (jr-  le  vin  avant  la  confccration  n'ont  rien     [Twirtc  «5- 
que  teur  propre  nature  de  pain  ^  de  vin  '■>  mats  qu  après  la  confe.  "T"  (^J'"- 


gaine. 


crationils  ne  retiennent  pltis  la  nature  de  pain  (f^  de  vin.   Quel  Tom.  ir.  Bi- 
efl:  ce  fujecqui  ne  rerient  plus  la  nature  du  pain  &  du  vin  après  '^''°'-  p*'- 
la  conTecration  ?  N'eft  ce  pas  le  pain  &  le  vin  même  ?  AinH  ce  ^'  ^'''^' 
pain  &  ce  vin  font  confiderez  comme  un  même  fujet ,  qui  a  !a 
nature  de  pain  &  dé  vin  avant  la  confecration ,  &  qui  ne  l'a. 
pas  après  la  confecration.    Or  ce  fujet  qui  a  la  nature  de  pain 
eft  le  pain.  Ce  fujet  qui  n'a  plus  la  nature  du  pain  cfl  le  corps 
de  J.  C.  Ce  font  donc  deux  (ujetsbien  differens  j  mais  qui  efl 
tant  conçus  fous  la  même  idée  ne  font  qu'un  même  fujet  con- 
fus. 

Qiie  veut  dire  de  même  Hildebert  dans  ces  vers      oii  il 
parle  du  pain  &  du  vin  offerts  par  Melchifedec. 
U truque  fuh  typico  rituformàque  futuri 
Melchifedec  Domino  ficrificaffe  fcrunt. 
U  traque  difcipuUs  canantihti-s  ipfc  Rcdemptor 

Tradidit  in  corpus  utraque  verfa  fuum. 
La  rranffubflanriarion  eft  clairement  établie  dans  ces  Vers. Ce- 
pendant qui  voudroit  chicaner  à  la  manière  de  M.  Claude ,  on 
s'écrieroit  comme  luirCommentpeut  il  direque  J.  C.  a  donné  à 
its  Difciples  les  deux  mêmes  chofes  que  Melchifedec  avoic 
offertes,  puifque  ce  n'efloit  plus  du  pain  &  du  vin  ,  mais  fon 
corps  &  fon  fang,  in  corpus  utraque  verfa  fuum  ?  C'efl  qu'il 
confideroic  c€t  objet  comme  un  même  fujet  à  qui  ces  qualitcz 

Y  iij 


174         Li  V .  III.  Képonfe  aux  objections  tirées. 

ci'eltre  pain  &;  vin,  &;  d'cftre  corps  de  |.  C.  convenoienc  ea 

divers  temps. 

C'efb  encore  de  cette  unitc  d'idée  qtic  naiflent  lesexpreffions 
qui  reprefencent  la  rran(ra'ofi.anciati()n  comme  l'acquificion 
d'une  nouvelle  dignité  &  d'une  nouvelle  force  au  fujet  que  I  on 
coni^oit.  On  en  peut  voir  un  exemple  dans  ces  vers  du  même 
Hildebert. 

Ncfcit  homo ,  Lttct  &  fuperas  qtio  provehdt  cfiui 

GrMia  vcrborum  myjhriumquc  crucis. 

His  verhis  utrumque  novas  iicquircre  vires 

Ma'forefquc  fiiis  fcripta  pobata  doc  en  t. 
'  Comment  fe  peut  il  faire, dira  M.  Claude,  qu'unechofeac- 
quierre  des  forces  lorfqu'elle  efl:  détruite?  Elle  n'en  acquière 
point  en  effet,  mais  on  ne  lailîè  pas  de  parler  ain  fi  ^  parce  qu'on 
ne  fait  point  d'attention  à  cette  dcftrudion  ,  &  que  l'on  regarde 
le  pain  &  le  corps  de  J.  C.  comme  un  même  lujet.  Ainfi  parc$ 
que  cet  objet  prefent  eft  tantoft  pain  ,&  tantoft  corps  de  J.  Q, 
on  en  die  &  l'on  en  peut  dire  qu'il  acquiert  une  dignité  qu'il 
n'avoit  pas.  Car  M.  Claude  ne  dira  pas  fans  doute  que  cet  Au- 
teur ne  croyoit  point  la  tranlfubdantiation  ,  &:  s'il  le  prétend, 
il  n'a  qu'à  lire  les  vers  qui  fuivent  ceux  que  fay  citez. 
Suh  crticc ,  fub  verbo  natura  novatur^  Q-  aram 

Pjïiis  honorificat  carne ,  cr~uore  Cciltx. 
Et  CCS  autres  danslefquels  il  peut  encore  remarquer  la confii- 
fion  de  ces  deux  fujets  en  une  même  idée. 

Fit  cibus  hic  ex  pane  caro  Dcus  clemcnto^ 
Mvflerio  (tmplcx ,  utiliiate  triplex. 
Car  ne  (érable  t-il  pas  qu'il  parle  d'un  même  fujet  qui  foit  pain 
en  un  temps  Se  chair  dans  un  autre,  mais  qui  fubfifte  dans 
tous  les  deux  temps? 

Et  que  M.  Claude  ne  s'imagine  pas  que  cet  Auteur  n'ait  ainfi 
parié  que  parce  qu'on  appelle  licence  Poétique.  Ceux  qui 
écrivent  en  profe  &:  d'une  manière  tres-fimple  en  font  tout 
autant. 

Odon  Evefque  de  Cambray  dans  fon  Traité  de  l'Expcfi- 
tion  de  la  Meffe  dit,  quon  ne  doit  point  toucher  la  faints  Sacri- 
fices avant  qu'ils  ayent  rei^ii  une  force  fpirituellc  y  (^  qu'ils  ayent 
cftè  changez^  au  corps  &  au  fang  dcj.  C.  NECijaE  enim  contingi 
debent  priufquam  fump forint  virn  fpiritualcm  &  converfa  fue~ 
vint  in  Chrijii  corpus  (^  fanyiincm.  Que  M.  Claude  nous  diie 


des  dinjcrfes  manières  de  CGnce<voîrce  My^ere        ly^  ' 
après  cela  que  la  réception  d'une  force  fpirituelle  exclue  là  Cvi.  VI. 
ïranfTubftantiation. 

Ce  même  Auteur  dit  encore  quclefujct  qui  cfboitpain  aupa- 
ravant efl:  fait  chair  par  la  benedidion  j  qu'il  cft  après  cela  chair 
&  non  plus  pain  5  Qui  prnis  cnn  -pavis  hcncdiHicnc  facius  efl  caro. 
Mais  en  parlant  delà  forte,  il  fait  toiiiouriconfidcrerun  mê, 
me  fujetfous  cesdifFerenseftatsde  pain  &:  de  corps. 

Un  ancien  Auteur  qu'on  voit  dans  la  Bibliothèque  à<is  Pe-  Tom.  n.p- 
res,  dit  en  expliquant  le  facrifice  de  la  Mcflèj  qt^c  la  première  "■''• 
sraifon  qui    fe  dit  fur  le  futur  corps  de  J.   C.  i  appelle    Secrctic. 
Ainfi  il  appelle  pain  le  corps  de  J.  C.  furur.  Ce  qui  ri 'a  enco- 
re de  fondement  que  dans  cette  unité  d'idée  dont  nous  par- 
lons. 

C'eft  encore  fuivanr  cette  même  manrere  de  rciinir  le 
pain  &  le  corps  de  ).  C.  dans  une  même  idée  ,  que  l'Auteur  du 
Sermon  de  la  dignité  &  del'excellencedes  Preftte  ^qui  fe  voiE 
parmy  les  Oeuvres  de  faint  Bernard, parle  en  ces  termes  :  L'ho. 
jlie  que  vous  "voyezji'cjl  plus  a  prefent  du  pain.  H  o  s T  J  A  qua7n  vi- 
dfi  jamnon  eft  paim.  Elle  l'a  donc  efté  autrefois  félon  luy  > 
Et  ainfr  il  attribue  au  même  fujet  conçu  comme  l'hoftie  d'a^ 
voir  efté  pain  &  de  ne  Tertre  plus. 

Robert  Pullusen  fait  de  même  dans  ces  y^:ixo\t%:  La  (ubjl an- 
ce  du  pain  ^  du  vin  ceffe  d'efire  ce  quelle  ejloit ,  0?-  elle  cjr  faite 
ce  quelle  n'efioit  -pas  auparavant. 

Et  Innocent  III.  dans  celles-cy  :  Ce  qui  efloit  pain  quand  J.  C.  ' 
le  prit ,  eflûit  [on  corps  quand  il  le  donna. 

Le  même  Innocent  III.  accorde  cette  propofîtion  :  id qttod'^ 
fuit  panis  ,   efl  corpus  Chrijli. 

Il  eftvidble  que  toutes  ces  expreffions  font  fondées  furTuni- 
té  de  cerre  idée  à  laquelle  on  attribue  tous  ces  differens  cftats>._ 
qtioyqu'ils  ne  conviennent  en  effet  qu'à  des  fujets  diflfcrens^ 
Et  elles  font  fi  naturelles  que  les  Minifl::'es  s'en  fervent  eux- 
mêmes  quand  ils  veulent  expliquer  l'opinion  des  Catholiques ,. 
comme  on  le  peut  voir  par  l'exemple  de  Zuingle  qui  exprime 
ce  que  nous  croyons  par  ces  paroles  :  Ejl  corpus  fubito  quodpa. 
riis  erat ,  où  il  efl:  clair  qu'il  attribue  au  même  fujÈt  d'^eflr-e  le 
corps  de  J.  C,  &  d'avoir  cfté  pain.  '';  :^"'-  '"  ^  '  ''^""y  \  ^'';  i"^/ 


lyô  Liv.  III.  Rcponfe  aux  objeSiions  tirées 


CHAPITRE   VII. 

Exemple  de  divers  Sophifmcs  des  Minifires  fondez^  fur  l'iqnorance 
de  cette  niiinicïe  de  concevoir  la  docinne  de  la  trunjjubfian- 

tiation. 


J 


E  tireray  de  M.  Claude  même  le  premier  de  ces  exemples, 
&,  l'on  y  pourra  voir  non  feulement  que  le  langage  donc  il 
s'agit  icy  eft  très-commun,   mais  aulll  que  l'ufage  en  eft  lî  na- 
turel qu'on  y  tombe  même  en  le  reietcanr.  Il  examine  dans  (oa 
Livre  contre  le  Père  Noiiet  ce  paliage  de  S.  Irenée  dont  nous 
M. ciauJc     avons  parlé  dans  le  chapitre  i.  du  premier  Livre  :  Le painqui 

contre  le  P.  ,,     ,      ',  ).  ■  i      -,^  'ni 

Noiiftp.  J40  ^P  "-^  '"'■  ^^^^^  rccevcint  l  invocation  de  Dieu  n  ejt  plus  un  pain 
commun,  mais  l' Eucharifiie  compofêe  de  deux  xhofes  ,  l'une  terre - 
flre  ,  l'autre  celejle.  Ainfi nos corj)s  recevante Euchanfiie  ne  font 
plus  corruptibles  ,  mais  ils  ont  l'efperance  de  la  Refurretfion.  Et  il 
l'explique  à  fa  fantaifîe  en  entendant  par  cette  chofe  terreftre 
le  pain  matériel ,  &  par  la  chofe  celefte  la  confecration.  De 
(onc  que  S.  Irenée  ,  félon  luy,  aura  dit  dans  ce  paûTage  ,  que 
t  Eucharifti'e  efl  compofêe  de  pain  matériel  (^  de  confecration  ;  ce  qui 
ell  une  idée  &:  un  langage  afTez  bizarre.  Mais  ce  n'cltpasàquoy 
je  prétends  m'arrêcer.  Comme  j'ay  traitté  ce  pafTage  ailleurs,  je 
ne  le  propofeicy  que  pour  avoir  lujet  de  rapporter  ce  que  M. 
Claude  dit  en  réfutant  le  Père  Nouer.  Voicy  comme  il  s'y 
prendi  Que  la  préoccupation  efi  aveugle  !  Pour  peu  que  l'on  conji- 
dere  ce  pafjaq^e ,  //  ruine  de  toutes  parts  l'opinion  Romaine.  Etpour-i\ 
tant  le  Père  Noiiet  en  veut  faire  [on  bouclier.  On  efl  trop  accou- 
tumé à  l'air  de  M.  Claude  pour  s'étonner  de  ces  exclamations 
&de  cespropoficions  fi  declGvesiJiû  fieres.  Il  n'y. a  doni;  qu'à 
continuer  de  récouter.  •  .,;jj    .  ■-![•>■' 

Le  pain  qui  -efi,  de  la  terre  re(^oitl'' invocation  de  'Dieu.  Deja  cei~. 
te  fti^on  de  parler  donne  l'idée  d'un  chanq^ement  qui  fe fait  par  U 
réception  de  la  grâce  dans  un  fujet.,  (jr-  non  par  aucune  dejlruïlion 
de^  fuhfiancc.  Ce  .pafTage  ne  don.D.e  cette  idée  qu'à  ceux  qui  s'çti 
fornient  à  leur  fantaifîe  j  mais  ceux  qui  ne  vont  pas  fivifte  que 
M.  Claude,  attendent  qu'ils  ayént  appris  quel  efl  l'effet  de  cette 
invocation  fur  le  pain.  Et  quand  ils  ont  appris  de  S.  Irenée 
même  que  cet  effet  eft  de  faire  du  pain  le  corps  de  J.  C.  ils  fe  for- 
ment 


des  diverfès  manières  de  concevoir  ce  Myflere.      177 
mentavec  raifon  l'idée  d'un  changement  fubftanciel ,  en  con-  Ch.  VH' 
cevanc  que  ce  n'eft  plus  du  pain  ,  mais  le  corps  de  J.  C. 

//  riefi pas  un  pam  commun,  pourfuit  M.  Claude.  live  ccjje 
donc  pa^f  abfolument  d' cjîre  pain ,  mais  feulement  du  pain  ordinaire. 
Ce  qu'il perdift  non  la  fuh/Ltnce ,  mais  la  qualité  de  pain  ordinaire. 
Nous  avons  déjà  fait  voir,  ic  nous  ferons  voir  encore  combien 
cette  confequence  eft  vaine.  Et  ainfi  je  ne  m'y  arrefterây  pas 
prefentement. 

C'eft  après  cela  qne  M.  Claude  propofe  fon  fophifme  que 
voicy.  Il  eft  tonde  fur  ces  paroles  de  S.  Irenée  :  Ce  n'eft  plus 
un  pain  lommun^  mais  l'Euch. m/lie.  Le  mhne  fujet ^  dit  il  ,  qui 
ejèoit  pain  commun  ^fi  Eucharifiie.  Il  n'a  donc  pas  eflé  détruit. 
Je  dis  que  c'efb  là  proprement  le  fophifme  dont  nous  parlons.    . 
Il  conclut  que  le  pain  n'eil  pas  détruit,  parce  que  S.  Irenée 
parle  de  J'Euchariflie  &  du  pain  comme  d'un  même  fujet.    Et 
moy  je  luy  réponds  qu'il  ne  s'enfuit  nullement  que  le  pain  ne 
foit  pas  détruit,  de  ce  que  S.  Irenée  en  parle  comme  du  même 
fiijetque  l'Euchariftie  confacrée.  Et  pour  faire  voira  M.  Clau- 
de combien  ce  langage  eft  naturel ,  je  le  prieray  feulement  de 
remarquer  qu'il  s'en  lertluy-mêmecinq  ou  fîx  lignes  plus  bas, 
&  qu'il  s'en  lert  lors  même  qu'il  nous  veut  apprendre  à  l'éviter. 
Qu'il  fafîè  ,  s'il  luyplaift,  reflexion  fur  ces  termes  que  l'on  lit 
dans  la  même  page  dont  nous  avons  rapporté  les  autres  paro- 
les que  nous  avons  citées.  L'explication  du  Père  Noiiet ,  dit- il, 
établit  deux  fujets  où  S.  Irenée  n'en  établit  qu'un.  Il  cufî  fullu  dire, 
félon  le  fens  du  Père  Noiiet  bi.  des  Catholiques  .-  Le  pain  qui 
efi  de  la  terre  eflant  détruit  par  l'invocation  n'cf}  plus ,  il  cf}  fait 
un  nouveau  fujet  qui  s'appelle  Eucharifiie. 

Le  deflein  de  M.  Claude  eft  de  marquer  par  ces  termes  de 
quelle  forte  S.  Irenée  auroitdû  parler  pour  parler  en  Catholi- 
que. Il  veut  marquer  par  fon  expreffion  deux  fujets  5  '\\  veut 
marquer  que  le  pain  n'eft  plus,  ^  il  exprime  l'un  ôc  /'autre 
formellement.  Cependant ,  en  même  temps  qu'il  marque  la 
deftruclion  du  pain  &  la  duplicité  des  fujets,  il  ne  laiftepasde 
faire  6c  du  pain  &de  l'Euchariftieun  même  fujet  par  cette  ex- 
preffion  5  //  cfi  fait  un  nouveau  fuiet  qui  s'appelle  Eucharifiie  . 
Car  cet  //  fîgnifie{le  pain.  Et  ainfi  c'eft  du  pain  qu'il  affirme 
qu'il  eft  fait  Euchanftie.  Or"  cette  exprefiion  enferme  que  le 
pain  eft  Euchariftie,  puifqu'il  eft  fait  Euchariftie.  Car  il  n'eft 

Z 


lyS  Liv.  III.  Keponfe  <tux  ohjeEliom  tirées 

fait  Eucliariftie  qu'afîn  qu'il  le  ibic.  Ils  Ibnt,  dit  Theodoret ,  ce 

qu'ils  ont  efté  faits. 

Voila  donc  dans  l'expreffion  de  M.  Claude  un  même  fujet 
qui  cft  pain  &  Eucliariftie.  lia  beau  dire  que  c'eft  un  autre  fujet. 
C'en  efl:  un  dans  la  vérité^  mais  non  dans  l'efprit  &  dans  l'idée, 
&  dans  la  manière  de  le  concevoir.  En  même  temps  que  l'ef- 
prit affirme  pofitivement  que  ce  font  deux  fujets,  il  ne  Joifle 
pas  de  reiiniren  un,  6c  d'attribuer  à  ce  fujet,  conçu  comme  un, 
les  qualitez  de  l'un  &:  de  l'autre.  Et  c'eft  le  même  fujet  en  idée, 
qui  eft  appelle  pain  6c  Euchariftie ,  &  par  Saint  Irenée  &  par 
M.  Claude. 

Mais  comme  M.  Claude  qui  parloir  en  cet  endroit  en  Ca- 
tholique ne  l.iifloit  pas  de  comprendre  que  c'en  eftoient  deux 
réellement  :  ainfi  quoy  que  S.  Irenée  ait  parlé  du  pain  &  de 
l'Euchariftie  comme  d'un  même  fujet,  il  concevoir  neanmoms 
que  c'en  eftoient  deux ,  puifqu'il  concevoir  que  le  pain  eftoit 
changé  au  corps  de  J.  C. 

II.    EXEMPLE. 

Noftre  efprit  fe  porte  fi  naturellement  à  cette  manière  de 
concevoir  1  Euchariftie ,  &;  d'exprimer  ce  qu'il  en  conçoit  en 
reiiniftant  deux  fujets  réellement  difFerens  dans  une  "même 
idée, que  la  plufparc  des  exprefîlonsqui  marqucut  la  tranflub- 
ftantiation  ne  laiftênt  pas  d'enfermer  cette  unité  de  fujet. 
perp.i.  1.  C'eft  par  là  que  nous  avons  démêlé  dans  le  fécond  Tome  de 
cet  Ouvrage  cet  argument  célèbre  fi  fouvent  répété  par  Auber- 
tin  &:  parles  autres  Miniftres  ,que  le  mot  de  c^ryfignifiant  du 
pain  dans  cette  propofitioni  C(7c^  efi  mon  corps  ^  il  faut  qu'elle 
fait  métaphorique  ,  puifque  le  pain  ne  peut  pas  eftre  propre- 
ment .corps  de  J.  C.  Car  \\  l'on  y  prend  garde  la  réponfe  qu'on 
y  trouvera  dans  le  lieu  où  nous  avons  éclaircy  à  fond  cette  ma- 
.dere  ,  eft  fondée  fur  cette  manière  naturelle  aux  hommes  de 
reiinir  deux  fujets  differens  en  une  même  idée.  On  leur  a  dit 
que  quoy  que  le  mQtde.f^'fj/figriifiaft  du  pain-,  lorfque  J.  C  fe 
prononça,  il  le  fignifioit  néanmoins  fous  l'idée  générale  d'ob- 
jet prefenc,  &:  quii  s'enfuit  de 'là  que  cette  même  idée  qui  re- 
prefentoit  le  pain  comme  objet  orefent,  n'eftant  point  diftin- 
guée  de  celle  du  corps  de  J.  C.  conçu  auflî  comme  objet  pre- 
fent,refpric  les  pouvoit  reiinir  en  une^  pour  former  cette  pro- 


1 

C-3.P-  177 


des  dinjcrjes  manières  de  concetoir  ce  Mjfltre.    179 

pofition  -.Cecy  qui  eft pain  en  ce  moment ,  c/l  le  corps  de  J,  C.  dans  Ch.  VII. 
celuy-cy.  Où  l'on  voir  qu'il  va  deux  fujc.rs  diftinds  qui  vç.  fonc 
confiderez  que  comme  un  ,  à  caiife  dé  l'unité  de  leur  idée  ^  & 
qu'ainfi  retranchant  de  cette  propofition  les  termes  qui  n'y 
font  pasnecelTaires  ,  &  qui  fe  (uppléent  aifémentjOri  en  forme 
celle  dont  J.  C.  s'eft  efFcciivement  fervi  ,  fçavoir  :  Cccy  efl  mon 
corps.  Ec  par  là  il  paroift  clairement  que  tous  ces  argumens 
par  où  les  Miniftres  prétendent  prouver  que  ces  paroles  de 
J.  C.  ne  peuvent  eftre  prifes  dans  le  fens  de  la  tranflubftantia- 
tion ,  ne  font  fondez  que  fur  ce  qu'ils  n'ont  pas  afîez  conçu  cet- 
te matière  fî  ordinaire  &:n  naturelle  à  l'efprit  humain  de  réu- 
nir dans  une  même  idée  deux  fujets  réellement  diflTerents  , 
lorfqu'ilsfe  fuccedent  immédiatement,  &  de  ne  les  confiderer 
enfuite  que  comme  un  même  fujet,  en  luy  attribuant  ce  qui 
convient  à  ces  deux  fujets  difFerens ,  comme  fi  ce  n'cftoient  que 
divers  eftats  d'un  même  fujet. 

Aubertin  employé  une  infinité  de  fophifmesqui  ne  naiflenc, 
comme  celuy-là,que  de  l'ignorance  de  ce  même  principe ,  tan- 
toft  à  deflèin  d'éluder  les  partages  où  les  Pères  expliquent  le 
plus  nettement  la  dodrine  de  la  prefence  réelle  &  de  latrans- 
fubftantiationj  &  tantoft  pour  combattre  ces  dogmes  par  de 
certains  partages  qui  ne  concluent  proprement  rien.  Il  ne  fera 
pas  inutile  d'en  rapporter  icy  quelques-uns. 

III.     EXEMPLE. 

S.  Epiphane  ,pour  montrer  qu'il  y  a  è^ts  cRofes  qu'il  faut  croi- 
re ,  quoiqu'on  ne  les  comprenne  pas  ,  propofe  en  ces  termes 
l'exemple  de  l'Euchariftie.  l<fous  voyons ^  dit-il  .^que  le  Seigneur 
frit  de  certaines  chofes  entre  fes  mains  ,  comme  on  le  lit  dans  l'E~ 
vangile ,  qu'il  fe  leva  de  table ,  ^  prit  ces  chofes  3  (^  qu'ayant 
rendu  yaces  ,  il  dit  :  Cecy  eft  une  certaine  chofe  ,  (  il  parle  ainrt 
à  caufe  des  non  initiez.  )  Cependant  notes  voyons  que  cette  chofe 
nefi  ni  égale  ni  femhlahle  k  l'image  de  la  chair  qu'il  a  prife  ,  non 
plus  qu'à  la  divinité  qui  ne  fe  peut  voir ,  ni  aux  Une  amen  s  ,  ni  aux 
caraîteres  des  mer^bres  :  car  cette  chofe  efl  ronde-^^  quant  à  fa  vertu 
elle  n'a  point  de  fentiment.  Et  néanmoins  par  un  effet  de  fa  grâce 
il  a  bien  voulu  déclarer  que  cecy  eft  oit  une  certaine  chofe ,  Q-  il  n'y 
a  perfonne  qui  n'ajoute  foy  a  fes  paroles  3  (^  ccluy  qui  ne  le  croit 
pas  comme  il  dit  y  eft:  déchii  d^  la  grâce  (^  du  filut. 


i8o  Liv.  "Réponjs  aux  ohjeciions  tirées 

Il  n'y  a  rien  de  plus  clair  6c  de  plus  précis  que  ce  paflàge 

pour  la  dodrine  catholique.  Ce  Père  propofe  cette  vérité ,  que 

cette  chofe  ronde  &  inammce  eft  le  corps  de  J.  C.  comme 

j       un  objet  de  foy  j  &  li  porte  l'efprit  par  là  à  prendre  ces  paroles 

«.*  9.  P-'  3'^'    ^  '"^  lettre ,  comme  nous  l'avons  prouvé  ailleurs. 

Il  dit  exprellemcnt  qu'il  faut  croire  cette  vérité  ,  quoiqu'il 
n'y  ait  nulle  reffcmblance  entre  cet  objet  rond  Se  inanimé,  & 
le  corps  de  J.  C.  &  par  Là  il  fait  voir  que  ce  qu'il  propofe  à 
croire  choque  également  en  apparence  &  la  raifon  &  les  fens  : 
d'où  il  s'enfuit  qu'il  ne  pouvoit  entendre  ces  paroles  en  un 
fcns  de  figure  ,  qui  ne  choque  ni  l'un  ni  l'autre  ,  puifquc  les 
types  2c  les  lymboles,  comme  Aubertin  même  le  remarque, 
ne  demandent  point  de  rapport  fenCble  avec  leurs  originaux. 
Aubertin  qui  a  fenti  la  force  de  cette  raifon,  dont  le  Cardinal 
du  Perron  s'cftoit  fervi ,  s'eflaiifli  efforcé  d'y  répondre  5  &  fa 
réponfe  fe  réduit  à  dire  que  quoique  le  fens  de  ces  paroles ,  Ce- 
cy  cjl  mon  corps  ^  n'ait  aucune  contrariété  apparente  avec  les  fens 
ni  avec  la  raifon  ,  quand  on  l'entend  ,  il  y  peut  néanmoins  fem- 
bler  contraire ,  quand  on  ne  l'entend  pas  ^  mais  cette  défaite  ne 
fait  que  mettre  dans  un  plus  grand  jour  le  raifonnement  de  ce 
Cardinal.  Car  il  n'y  a  qu'à  confiderer  de  bonne  foy  tout  cet  en- 
droit de  S.  Epiphane,6c  ce  qui  luy  a  donné  iîijec  de  faire  ce  dif- 
cours,pourcfl:re  perfuadé  qu'il  ne  parle  pas  d'une  contrariété  5c 
d'une  répugnance  quinaiflè  du  deffaut  d'entendre  l'expreffioii; 
de  J.  C.  mais  d'une  répugnance  qui  fe  rencontre  entre  le  fens 
connu  de  cette  expredion  ,  &  ce  cjiie  les  fens  &  la  raifon  nous 
dictentipaifque  fonintentioneftoit  vihblement  de  prouver  non 
qu'il  fallut  croire  une  chofe  que  l'on  n'entendoit  po!nt,mais  une 
chofe  qu'on  entendoit,  6:  qui  fembloit  contraire  à  la  raifon. 

C'eflcequi  paroill:  parle  fu jet  fur  lequel  il  allègue  l'exemple 
de  l'Eucharidie.  Car  il  prétend  qu'il  faut  croire  que  l'iiomme 
eft  image  de  Dieu,  comme  il  faut  croireque  le  painconfacré 
cfl:  le  corps  de  J.  C.  Or  dans  ce  premier  exemple  il  s'agifToit 
d'une  difficulté  prife  de  la  chofe  même,  &  non  de  l'expreiifionôc 
d'une  difHculté  qu'il  ne  prétendoit  point  qu'on  puû  lever  par 
réclairciffement  du  fens  de  ces  termes, puifqu'il  foûtenoit  qu'on 
ne  pouvoir  aiîigner  en  quoy  confîftoit  l'image  de  Dieu  ni  dans 
le  corps  ni  dans  l'ame,  6c  que  cependant  il  lefalloit  croire. 

Ainfi  fuppofé  qu'il  n'ait  reconnu  dans  l'Euchariftic  qu'une 
difficulté  qui  vint  du  défaut  de  l'intelligence  des  termes ,  quel 


des  dî'verfes  manières  de  conccaioir  ce  Myfiere.  i8i 
exemple  luy  auroit  efté  moinsproprequeceluy  là,  s  il  n'yavofc  Ch.  VII. 
qu'à  luy  repondre  qu'il  falloir  croire  e»  effet  que  l'Eucharirtie 
ertoïc  le  corps  de  J  C.  mais  que  cela  n'eftoir  nullement  difficile 
à  croire  ,  n'y  ayant  qu'à  expliquer  lefens  de  ces  paroles,  Cf 9- <y? 
moncorps,  &à  les  prendre  en  un  fens  défigure  5  &.  qu'il  nefija- 
voit  ce  qu'il  difbic ,  de  vouloir  prouver  une  vérité  dont  la  diffi-. 
culte  iubfifle toute  entière  après  l'explication  des  termes,  par 
l'exemple  d'un  palîâge^dont  les  termes  étant  une  fois  expliquez, 
ne  contiennentplus  rien  quipuilîe  f;iire  la  moindre  difficulté. 
On  voit  par  là  combien  Aubertin  fe  défend  ma!  de  la.  preuve 
que  ce  lieu  de  S.  Epiphane  fournie  aux  Catholiques.  Mais  ce 
qu'il  y  a  de  rare,  eft:  que  par  le  moyen  de  fon  argument  ordi- 
naire, qui  trouve  fon  ufage  par  tout ,  il  prétend  en  faire  une 
preuve  contr'eux.  Car,  dit- il,  il  entend  par  cette  chofe  ronde  ce 
quej.  C.  avoir  pris  entre  fes  mains,  comme  la  fuite  de  fon  dis- 
cours le  fait  voir.  Or  J.C-avoit  pris  de  vray  pain.  Donc  ,  dit- il, 
cette  chofe  ronde  eft  de  vray  pain.  Et  de  là  conci uant  à  fon  ordi- 
naire, qu'il  faut  que  S.  Epiphane  entende  que  l'Euchariftie  n'efl: 
donc  le  corps  de  J.  C.  qu'en  figure ,  il  triomphe  félon  fa  coutu- 
me; il  reproche  au  Cardinal  du  Perron  de  l'avoir  diiîîmule,  par- 
ce qu'il  n'y  pouvoir  répondre  :  Perroyiius argumentwm  iijjimuiat^ 
lion  videns  Qpinor  quomodo  illtid  folveret  ;  il  acculé  le  Cardinal 
Bellarmin  d'audace  ,  d' imprudence  C^"  d\ibfurditè  ,  parce  qu'il 
avoit  répondu  que  lorique  S.  Epiphane  dit  que  cette  clicfc  mide 
eft  le  corps  dej.  C.  i!  ne  faut  pas  entendre  du  pain  véritable,  iT;.jis 
du  pam  apparent.  Cependant  toute  cette  fubtilitépar  laquelle 
Aubertin  croit  avoir  éludé  l'impreffion  de  la  vérité, n'eft  fondée 
que  fur  l'ignorance  du  principe  que  nous  avons  établi.  Et  pour 
la  diffiper  ,  il  n'y  a  qu'à  luy  répondre  en  un  mot ,  que  ce  que  S. 
Epiphane  appelle  une  chofe  ronde  &infenjible ^  c'eft  TEuchariftie 
conque  par  fes  accidens  extérieurs:  Qu'il  dit  deux  chofes  de  cet- 
te Euchariilie  J'une  que  c'ell  ce  que  J.  C.  a  pris,  c'eft  à-dire  du 
pain  5  l^aurre,  qu'elle  eft  lecorp^  de  J.C.  &  qu'il  le  faut  croire. 
Ainfi  il  attribue  au  même  fujet  d'avoir  efté  pris  par  |.  C.  fie  d'ê- 
tre le  corps  de  ].  C.  quoique  ces  deux  chofes  conviennent 
réellementà  deux  fujers  différents.  Nais  c'eftque  ces  deux  .Su- 
jets quoique  diffcrens  f)nt  réunis  dans  l'cfprit  fous  une  même 
idée  qui  fait  qu'on  en  parle  ,  comme  fi  l'on  n'en  connoiffoitpas 
Ja  diverfité.  Qiiand  on  dit  que  cette  chofe  ronde  fut  prife  par 
J.C.  ce  mot  marque  du  pain  véritable  confufement  conçûu 

Z  iij 


ijl  Liv.  III.  Réponfe  aux  objectons  tirées 

Quand  on  dit  quec'eft  le  corps,  de  J.  C.  il  marque  l'objet prc- 
fenc  qui  efl:  réellement  le  corps  de  J.  C.  Ce  font  donc  deux  fu- 
jets.  Mais  parce  que  ce>  deux  fujetsfe  fuccedant  l'un  à  l'autre 
font  conclus  par  la  même  idée  ^  l'elprit  ne  les  diftingue  pas  ,  6c 
les  exprime  par  un  même  terme. 

Voilà  tout  le  Myftere.  EtainfîS.  Epipbanen'adit  en  ce  lieu- 
là,  quoiqu'en  d'autres  termes ,  que  ce  que  dit  Odon  Evêque  de 
Cambray  par  ceuxcy ,  qui  frius  erat  panis ,  benediciione  fatius 
eft  caro.  Car  comme  cet  Evêque  attribue  au  même  fujet  d'eflre 
la  chair  de  J.  C.  6c  d'avoir  efté  pain  auparavant ,  ce  qui  ne  con- 
vient réellement  qu'à  deux  flijers  differens»  aufli  S.Epiphane 
attribue  à  cette  chofc  ronde  d'eftre ,  &;  le  corps  de  J.  C.  £c  ce 
que  J.  C.  avoit  pris  ,  c'eft-à-dire  du  pain. 

Ces  chofes  paroilfent  difficiles ,  lorfqu'on  les  veut  expli- 
quer en  particulier  &:  par  àiÇ.s  reflexions  expreiTes  ^  6c  cela  ar- 
rive ,  comme  on  l'a  remarqué  ailleurs .  prefque  dans  toutes  les 
adions  de  l'efprit.  Mais  quand  on  fuit  de  bonne  foy  les  im- 
preffîons  que  les  termes  forment ,  on  entre  fans  aucune  peine 
dans  le  fensdeces  termes,  6c  l'on  conçoit  feulement  qu'en  un 
certain  moment  il  n'y  a  que  du  pain  devant  nos  yeux  ,  6c  que 
dans  l'autre  le  corps  de  J.  C.  y  eftprefent,  fans  qu'il  refte  rien 
dupain. 

IV     EXEMPLE., 

Si  l'on  examine  de  même  lesargumens  qn'Aubertin  tire  de 
divers  partages  de  S.  Auguflin  ,  dont  il  fait  fafîxicme  oufeptié- 
me  preuve  ,  pour  montrer  qu'il  y  a  de  vrav  pain  dans  l'Eucha- 
riftie  ,  on  trouvera  que  ce  ne  font  que  des  fophifmes  de  ce 
même  genre, 

Saint  Aupiflin^  dit-il  en  un  endroit,  ;>^r/^  du  pain  qui  ejl  mis 
fur  la  table  du  Seigneur ,  qui  efl  béni ,  qui  eft  confacrè ,  qui  eft  çon- 
fumé  ,  comme  d'un  même  fujet.  Nous  entendons  ,  dit  ce  Père  ,  par 
le  mot  de  prières  ce  qu'on  dit  avant  que  ce  qui  efl  mis  (ur  l'autel  fait 
béni  :  Nous  entendons  parle  mot  d'oraifon  ce  qui  fe  dit  quand  il 
efl  béni  ^  conficrè^^.quon  le  rompt  pour  le  diflrihuer.  Or  c'cft  de 
vray  pain ,  conclut  Aubertin ,  quand  il  eft  mis  fur  la  table;  c'eft 
donc  de  vray  pain  quand  il  eftdiftribué. 

Il  fuffir  de  répondre  à  cette  petite  fubtilité ,  qu'il  eft  vray  que 
S.Auguftin  dit  toutes  ces  chofes  d'un  même  fujet  5  de  même 


des  cifuerfes  minières  de  concevoir  ce  Myflere.  zt^ 
que  tous  les  Auteurs  Catholiques,  en  attribuant  à  l'EucKariftie  Ch.  VII. 
d'avoir efté pain  en  ce  temps,  &:  de  ne  l'eflre  plus  dans  un  au- 
tre, en  parlent  comme  H'un  même  fujet.  Mais  comme  il  ne  s'en- 
f^ur  nas  que  tous  ces  Auceurs  n'ayert  point  effectivement  crû  la 
tranirubiiantiacion,  puis  qu'au  contraire  ils  l'ont  même  expri- 
mée par  ces  termes  où  cette  unité  de  fujet  fe  rencontre ,  il  eft 
ridicule  de  conclure  de  là  que  S.  Augufnn  ne  l'ait  pas  crue. 

V.     E  X  E  M  P  L  E. 

On  trouve  les  paroles  qui  fuivent  en  diverfes  éditions  du  li- 
vre des  Sacremens  attribué  à  S.  Ambroife:  Si  ery)  tantavis  ejl 
in  fermonc  Domini  ut  incipercnt  effe  qua  non  eriint  ■>  quanta  magis 
operatorius efi  ^  utjîntqu^c  erant  (^  in aliud commutentim  Lanfranc 
témoigne  qu'il  y  avoit  des  éditions  qui  portoient  fimplement, 
ut  qu^  erant  in  alitid  commutentur.  Mais  comme  les  Miniftres 
prétendent  avoir  droit  de  choifir  toujours  entre  les  diverles 
manières  de  lire  des  paflages,  celles  où  ils  trouvent  plus  leur 
compte,iIs  s'arreftent  à  la  première.  Et  Aubertin  prétend  en  ti-' 
rer  une  grande  preuve  que  le  pain  demeure,  parceque  cet  Au- 
teur di  t  ^wf  ff  qui  cjîoit  efi,  dy  qu'il  cft  change  :  Ut  S  i  n  t  qu.v  erant 
(^  in  aliud  commutentur.  Cependant  ce  n'eft  encore  qu'une  faufle 
fubtilité  qui  fe  démêle  par  le  même  principe  de  la  réunion  de 
divers  lujets  en  une  même  idée. 

Car,  fuivant  cette  manière  de  concevoir  les  chofes,  il  n'y  a 
rien  de  plus  naturel  que  de  parler  comme  cet  Auteur  a  fait.  On 
confidere  &  le  pain  &  le  corps  de  J.  C.  conçu  confufémenc 
comme  un  même  fujet  &  un  même  eftrequi  paffe  d'un  eftat  à 
un  autre.  Dn  ne  regarde  donc  pas  ce  fujet  comme  anéanti  5  on 
le  regarde  comme  fubfiftant  daris  cesdifferens  eftats.  Et  ainfi 
Tondit  qu'il  eft  &  qu'il  efl:  changé.  On  dit  qu'il  eft,  parce  que 
nous  le  concevons  toujours  comme  s'il  eftoit  ;  de  même  que 
nous  concevons  toujours  l'air  qui  nous  environne  comme  s'il 
eftoit  le  même. 

On  dit  qu'?7  efi  change,  parce  que,  comme  dit  ctx.  Auteur,  du 
fainfe  fait  le  corps  de  J.C  DE  PAN£  fiTCARO  CnKisri.Ce  n'était 
pof  ,  dit- il  encore,  le  corps  de  ^.  C.  avant  la  confecration  ,  niAis 
après  la  confecration  je  voîisdis  que  c'efi  le  corps  deJ.C  Nonerat 
corpus  Chrifii  ante  confecrationem^  fed  pofi  confecrationem  dico  tibi 
quodjam  corpus  Chrifii  efi.  C'eft  la  manière  dont  l'efprit  conçoit 


184  Lîv.  ni.  Kcponfè  aux  ohjcUions  tirées 

ces  rortM  de  chofes.  Quand  on  liiy  demande  expreirément  (î 
le  pain  eft  encore  pain  ,  il  die  que  non  -,  parce  que  c'efi:  le  corps 
de  J.  C.  Mais  quand  on  luv  demande  s'il  efl:  5  comme  il  ne  le 
conçoit  pas  anéanti ,  mais  change  ,  il  répond  qu'il  eft,  vC  (]u'il 
eft  change  :  Scil  eft  même  en  ce  qu'il  cft  change.  Car ,  lèlon 
■noftre  manière  de  concevoir,  c'cft  un  racme  lujet  que  l'on  con- 
çoic  dans  des  eftats  difFerens. 

VI.     EXEMPLE. 

Le  Cardinal  du  Perron  tire  une  preuve  confiderable  pour  la, 
prefcnce  réelk  de  ce  que  Theodoret  ayant  fait  dire  à  l'Era- 
nite,  c'eft-à-dire  à  l'Eutychien,  qu'après  la  confccration  le 
Jymheie  myftique  change  fon premier  nom,  qu'il  ne  l' appelle  plus  pain 
comync  auparavant  ^  mais  corps  de  J.  C.  l'Orthodoxe  répond  qu'// 
ne  l'appelle  pas  feulement^  corps  mais  pain  de  vie,  (jr-  que  ccji  ainfi 
que  le  Seigneur  même  l'a  nommé.  Car,  comme  il  eft  certain  que 
Theodoret  fait  allufton,  dans  ce  pailàgc,  àceque  J.C.  dit  dans 
S.  Jean ,  qu'/7  cfi  le  pain  de  vie ,  &  que  le  pain  qu'il  donne  efi  fa, 
chair  pour  la  vie  du  monde  '■>  ce  Cardinal  conclut  de  là ,  que,  (t- 
lon  Theodoret,  l'Euchanilie  eft  cette  chair  que  J.  C.  a  die 
.qu'il  donner^  pour  la  vie  du  monde  ,  puifque  cet  endroit  de 
S.Jean  qui  ne  fe  pcutentetidreque  delà  verita.bk^hairdej.  C. 
s'entend  ,  félon  Theodoret,  de  l'Euchariftie. 

La  preuve  eft  forte  &  concluante.  Cependant  Aubertin 
croit  la  tourner  contre  les  Catholiques  par  un  raifônnement 
iemblable  à  ceux  que  nous  avons  rapportez.  Ce  fymhole  myfli. 
que ,  dit-ilj  dont  parle  Theodoret  ^  efi  un  de  ceux  qu'il  dit  avoir  efiè 
honorez^  du  nom  de  fon  corps:  c'efi. à-dire  qu'il  entend  par  ce  fym- 
hole, un  pain  vifihle.  Cela  ne  fe  peut  nier.  Ccjl  donc ,  pourfuit  ce 
Miniftre ,  ff  pain  vifible  qu'il  dit  avoir  efi  ê  appelle  pain  de  vie  par 
le  Seigneur,  Or  un  pain  vifiblc ^  dit- il ,  n  efl  pus  le  propre  corps  du 
Seigneur  .^  mais  il  efl  vray  pain.  Donc  Theodoret  ne  l'appelle  corps 
de  7.  C  que  par  métaphore. 

Ainfi  ce  Miniftre  conclut  de  ce  que  Theodoret  entend  en 
un  lieu  par  le  mot  de  fymbole  un  pain  véritable,  qu'il  ne  peut 
plus  entendre  en  un  autre  lecorps  dej.  C.  par  ce  même  terme: 
Et  c'eft  juftement  fon  fophifme ordinaire.  L'iiluftonconfifteen 
ce  que  ce  Miniftre  n'a  pas  comprisque  c'ctoienr  deux  fujets  réii- 
vi\s  fous  un  même  nom, 

II 


dus  dinjerfes  manières  de  concevoir  ce  Myfiere.  lî^ 
Il  n'y  a  donc  qu'à  luy  répondre  qu'il  eft  vray  que  le  pain  de-  Ch.  VIII. 
(liné  àla  confècration  c[ï  appelle  fymi?o/e  par  Theodorec  ,  6c 
que  dans  cet  eftac  le  mot  ds  Sj?ni?o/e  fignifie  un  pain  ver  table, 
Qiie  ce  piin  ayant  efté  change  par  la  confècration,  &cfl:anc 
ce  qu'il  a  efté  fait  -,  le  mot  de  fymhole  dans  ce  fécond  eftat  figni- 
fie  le  corps  de  J.  C.  &:  le  pain  de  vie  :  Mais  que  fignifiant  &  le 
pain  matériel  &  le  pain  de  vie,  confuféiTient  5c  par  la  même 
idée,  Theodoret  ne  fait  de  l'un  &  de  l'autre  qu'un  feul  fujec 
conçu  fous  l'idée  de  fymbole,  auquel  il  donne  ces  noms  difFe- 
rens  de  pain  matériel  par  rapporta  un  certain  eftat,&  de  corps 
dej.  C.  par  rapport  à  un  autre.  Nous  avons  montré  que  cette 
manière  de  concevoir  l'Euchariftieeftoit  fi  naturelle,  &  même 
fi  ordinaireà  tous  les  Auteurs  les  plus  perfuadez  de  la  prefence 
réelle  qu'il  n'eft  pas  necefTaire  de  nous  arrefter  davantage  à 
l'éclâircir. 


CHAPITRE   VIII. 

Confequcnce  importante  de  cette  manière  de  concevoir  le  pain  (^  le 
corps  de  J.  C  comme  un  feul  fujet ,  pour  entendre  le  véritable 
fens  d'un  paJfaged'Origene  qui  ajjujettit  l'EuchariJiie  à  la  condi- 
tion de  viandes  communes. 

COmme  nous  avons  montré  dans  les  Chapitres  precedens, 
que  l'efprit  humain  eft  naturellement  porté  à  concevoir 
le  pain  non  confacré  &  confacré  comme  un  feul  fujet-,  Se  à  at- 
tribuer à  ce  fujet  des  qualitezqui  ne  conviennent  qu'à  l'un  ou 
à  l'autre  ;  on  a  lieu  de  juger  que  cette  manière  de  concevoir  les 
objets  a  dû  s'étendre  encore  plus  loin,  &  que  comme  nous  di- 
fonsque  le  pam  ordinaire  nourrit,  quoyquece  ne  foit  point  en 
demeurant  pain  qu'il  nourrifle  ,  quelqu'un  aura  pu  dire  en  fui- 
vant  ces  idées  fi  ordinaires  que  l'Euchariftie  nourrit.  Car  de 
quelque  manière  que  fe  fafle  cette  nourriture,  6c  que  ce  foie 
fi  l'on  veut  quelque  autre  matière  qui  fuccede  au  corps  de  J.  C. 
il  eft  certain  néanmoins  que  tout  cela  fe  pafi[e  d'une  manière 
abfolument  cachée,  6c  que  comme  le  corps  de  J.  C.  prend  la 
place  du  pain,  fans  que  les  fens  le  découvrent,  de  même  ce  qui 
nouriit  proprement  prend  la  place  du  corps  de  J.  C.  fans  que 
nous  ayons  de  voye  pour  l'en  juger. 

i^-  A  a 


1^6  Liv.  III.  Képonfè  nux  oBjecîions  tirées 

Il  cft  donc  naturel  aufli  d'attribuer  encore  ce  dernier  effet  au' 
même  fu  jet ,  &:  de  regarder  ce  lujet  rantoll:  comme  pain ,  tan- 
toll;  comme  corps  de  J.  C.  ôi  tantoft  comme  aliment.  Et  il  y 
auroit  plus  lieu  de  s'econner  que  perfonne  n'eufb  luivi  cette 
manière  de  concevoir  &  d'exprimer  l'Euchanftie ,  que  d'en 
trouver  quelques^ins  qui  Tayent  fuivie. 

Quelquefois  les  Auteurs  en  marquant  clairement  la  prefence 
réelle,  ne  laiiTent  pas  de  dire  que  la  chair  de  J.  C.  nourrit  nos 
corps. Comme  on  le  peut  voir  dans  le  palTage  d'Apollinaire  rap. 

Inc.  (..  joan.   porté  dans  une  chaîne  fur  S.Jean  imprimée  à  Anversl'an  1630. 

^-^î'  on  ne  f(^auroit  jouir  du  Verbe  de. Dieu  pour  l'éternelle  vie  que 

par  fa  chair mais  maintenant  on  nous  a  donné  une  chair 

vivifiante  qui  nourrit  les  corps  qui  luy  font  femblables; 

Cet  Auteur  parle  clairement  en  cet  endroit  de  TEuchariftie. 
Il  en  parle  comme  de  la  chair  de  J.  C.  unie  au  Verbe.  Il  dit 
qu'elle  nous  efl:  donnée,  6c  qu'elle  nourrit  nos  corps  qui  luy 
font  femblables. 

Jean  Kulbroc  dans  le  Traité  qu'il  a  fait  fous  le  titre  àe  Mi- 
roir du.  fulut  éternel,  exprime  la  foyde  l'Egliié  fur  l'Euchariflie 
d'une  manière  fî  claire  qu'on  ne  fçauroit  douter  que  cène  fois 
la  fienne.  J.  C  dit  il ,  s'efi  donné  luy. même  tout  entier  (^  fans  di- 
vifion,  c'cfi- à-dire  [on  corps  Ions  l'cfpcce  dit  pain ,  ^fon  fangfous 
tcfpcce  du  vin^  ^  foy-wèmetout  entier  fins  divijïon  fous  l'une  .^ 
fous  l'autre. 

Il  y  a  encore  plufieurs  autres  pa'dligesauffi  précis  &auffi'for- 
mels  que  celuy-lc.  Cependant  il  ne  craint  point  dédire  en  un 
endroit,  que  tous  les  Apojhes  ont  rci^ii  J.  C.  dans  la  Cène ,  ce  véri- 
table Sacrement  comme  une  viandequi  nourrit  le  corps-^  d^  que  dans 
le  Sacrement ,  ils  ont  recà  par  la  foy ,  par  l'amour,  ^  par  le  defir,. 
Ie>  <^orps  du  seigneur  comîne  leur  aliment  éternel.  Apostoli  in 
cœna  cum  Chrifio  omnes  'uenerahile  hoc  perceperunt  Sarcramenium^. 
tanquamefcam  corpus  nutricantem  j  (jr  in  ipjo  Sacramento Jinyilt 
corpus  'Dominicum ,  ut  sternum  cibum  fuum  per  fidcm ,  amorem  ^ 
dcjiderium  acceperunt. 

Ainllj  félon  cet  Auteur,  le  Sacrement  de  l'Euchariflie  efl  une 
viande  qui  nourrit  leeorpsj  parce  qu'en  effet  le  corps  efl  nour- 
ri en  la  prenant.  Et  cela  fait  voir  que  Thomas  Valdenfis  s'efb 
fcandalifé  (ans  fujet  d'une  femblable  exprefTion  d'Honorius 
d'Autun^  qui  ditdans  un  Traité  intitulé,  Gemma  anima,  que  le 
Sacrement  quiefb  pris  par  labeuche  paiïe  en  aliment  :  Sacra* 
mentum  quod  ore^erci^iturjinalimcntumcorporisredt^itur.  Car  il 


des  ài'veYfes  mcLvùcres  de  concenjolrce  Myfl^re,  \%-j 
dévoie  confiderer  que  cet  Auteur  reconnoiflant  dans  ceTrai-  Ch,  VlU. 
té  même  la  cranfrubllannation  en  ces  termes  formels  5  8c  dé- 
clarant que  comme  le  monde  awit  cfié  fait  de  nen  ,  de  même  far 
les  paroles  du  Setyieur  ces  efpeces  de  matières  font  chanq^ccs  veru 
tàblement  au  corps  du  Sciznctir ,  il  ne  Vouloit  dire  autre  chofe, 
quand  il  s'exprime  en  ces  termes,  qae  le  Sacrement  devient  ali- 
ment  du  corps^  linon  qu'en  prenant  le  Sacrement  on  eftoit  nour- 
ri, &  qu'il  avoit  pu  parler  de  la  iorte  en  re^^ardant  ce  Sacre. 
ment&:  ce  qui  nourrie  comm.e  un  mône  fujct;  parce  qu'en  ef- 
fet les  fens  n'y  appcrçoivent  pas  ces  fortes  de  différences  qui 
obligent  de  regarder  les  chofes  comme  des  eftres  &  des  (ujeis 
^ifFerens- 

C'eft  pourquoy  comme  les  pafTages  qu'on  cite  dêRaban  Ar- 
chevêque de  Mavence  ,  ne  contiennent  que  la  même  exprefi 
fîon,  &:  qu'il  eft  vifible  qu'elle  peuteftre  employée  par  des  Au- 
teurs qui  crovent  la  tranfTubftantiation  ,  c'eft  encore  témérai- 
rement que  ce  f(çavant  Archevêque  eft  accufe  tant  par  on  cer- 
tain Auteur  anonyme  de  peu  de  poids,  publié  par  le  Père  Ce- 
lot, que  par  Thomas  Valdenfis.&enfuite  parAubcrtin&  par  M. 
Olaude, d'avoir  cru  que  l'Euchariftie  nourrir  proprement  com- 
me les  autres  viandes  communes.  Il  faut  d'autres  fondemens 
<jue  des  palTages  de  cette  forte  pour  faire  croire  que  des  Au- 
teurs célèbres  ayent  eu  des  fentimensqui  ne  s'accordent  pas 
-avec  ceux  des  autres  Pères,  &  le  bon  fens  veut  qu'on  vrcduife 
leurs  paroles  pourvu  qu'elles  le  puiffent  foiiffrir.  Or  certame- 
Tnent  elles  le  peuvent,  comme  nous  Tavons  fairvoir. 

Mais  pourquoy  cette  équité  n'auroit  elle  pas  auiîî  lieu  à  l'é- 
gard de  quelques  palli^ges  desAnciens,que  les  Miniftres  produi. 
fent  pour  montrer  que  l'Euchariftie  nourrit  j  comme  celuv  de 
S.  Juftin&celuy  deS.  Irenée?  Car  quand  celuy  de  S.  Juftin  de- 
vroit  eftre  traJuitde  la  manière  dont  lesMiniftres  letraduifent 
.pour  y  trouver  que  notre  chair  efi  nourrie  de  l' Euchciriftie  par  le  vovez  r.  Per. 
changeme7it  -^  au  lieu  que  nous  avons  montré  qu'il  eft  pour  le  i.'^-'^'^' 
moins  auiTi  probible  que  S. Juftin  ait  dit  cela;  non  de  l'Eucha- 
riftie, mais  de  l'aliment  en  gênerai:  Quand  ce  que  dit  S.  Irenée 
que  notre  chair  eft  nourrie  du  corps  &du  lang  de  J.  C.  fe  de- 
vroit' entendre  d'une  nourriture  palTagere  pareille  à  celle  qu'on 
recoitdes  âIimensordinaires,&  non  d'une  autre  qu'on  peutap- 
peller  gne  nourriture  permanente,  par  laquelle  le  corps  des  ju- 
ftss  reçoit  de  l'union  avec  celuyde  J.  C.  les  feniences  de  l'in- 

Aa    ij 


188  Liv.  III.  Képonje  aux  ohjeEiions  tirées 

corrnptibilicc  &  de  l'immortalité  glorieufe.-Toutceqne  les  Mf- 
niftres  devroient  conclure  de  ces  paflages,  c'eft  que  les  Pères 
ont  attribué  l'efFet  de  nourrir  à  l'Euchariftie  ,  comme  tant  de 
Catholiques  kiy  attribuent  les  effets  qui  ne  conviennent  qu'au 
pain  noncon'acre:  &;ce  parce  que  l'efprit  fe  forme  &du  pain 
nonconfacré  &  du  pain  confacré,  &de  ce  quiluccedeà  l'un  &à 
l'autre  un  certain  lu  jet  confus,  auquel  il  attribue  ce  qui  con- 
vient réellement  à  divers  fujets.  Il  n'y  a  rien  en  cela,  comme 
nous  avons  fouvent  dit,  que  de  fort  naturel ,  &:  de  fort  confor- 
me aux  idées  que  l'efprit  fe  forme  de  ce  myftere.  On  prend 
l'Euchariflie  &  on  eft  nourri.  On  dit  fur  cela  que  1  Euchariftie 
nourrit,  de  même  que  parce  qu'elle  paroift  pain  ,  ôc  qu'elle  efk 
faite  de  pain,  on  l'appelle  pain,  &;  on  dit  qu'elle  a  eftc  pain. 

Il  n'eft  pas  toujours  queftion  de  parler  félon  la  rigueur  Schoj. 
lan:ique5-&  fouvent  on  n'en  parle  que  mieux  &:  plus  naturelle- 
ment.. L'efprit  fçait  réduire  ces  exprefllons  à  la  vérité  ,  &  n'y 
entend  que  ce  qu'il  y  faut  entendre.C'efl:  la  chicannerie  qui  em- 
brouille,&:  qui  fait  naiftre  des  difficultez  que  ces  exprcflionsne 
produifent  point  quand  on  fuit  fîmpicmentrimpreflion  qu'elles 
font.  Les  Miniftres  voudroient  que  les  Pères  eufTent  cfté  Pro- 
phètes dans  tous  leurs  difyours;  qu'ils  euffent  toujours  elté  en 
garde  contre  Aç.s  erreurs  qui  n'étoient  point  encore  nées;  qu'ils 
eufTent  tout  exprimé  r  qu'ils  n'euffent  rien  laifTé  à  fuppléer  à 
l'intelligence  de  leurs  Auditeurs.  C'eft  vouloir  qu'ils  n'eufTent 
pas  parlé  en  hommes  j  &  c'eft  exiger  d'eux  fur  le  fujetde  l'Eu- 
chariftie,  ce  qu'ils  n'ont  pratiqué  en  aucune  autre  matière. 

Enfin  on  doit  mettre  encore  air  nombre  des  pafîàges  qui  font 
éclaircis  par  cette  remarque  cet  endroit  d'Origenefur  S.  Mat- 
thieu que  lesMiniftres  ont  rendu  Ç\cQ.\tthvQiIIIc  clbus  qui  fanBifi- 
catur  fer  verhum  Dei  ^  orationem juxta  id  qtiod  hubet  materiale-^ 
in  ventrem  abité^in  fecejjum  qicitur.  Car  c'eft  encore  la  réunion 
de  ces  trois  fujets  réellement  differens  en  un  même  fujet  con- 
fus, quia  donné  lieu  à  cette  cxprefîlon. 

Quand  il  dit,  ille  cibushA  le  regarde  dans  lé  premier  eftat  où. 
ee  n'eft  encore  que  du  pain. 

Qi-iand  il  dit ,  qui funHificatur fer  vcrhum  Dei  ^  orationem ,  ïï 
îe  regarde  dans  le  fécond. 

Et  quand  il  ajoute^,  Juxta  id  quod  habet  materiale:,  in  ventrem 
«ibit  ^  in  fecejfum  ejicitur,  il  le  regarde  dans  le  troifîéme. 

C'eft  toujours  dans  ces  trois  états  le  même  aliment  enidée^. 


des  dwerfcs  muni  ère  s  de  conceojotr  ce  Myfiere.       189 
L'efpric  les  connoic  tous  lous  le  nom  de  Cibus  ^  comme  un  Ch.  VIIK 
homme  dans  une  eau  courance  coniîdere  toutes  ces  différentes 
furfaces  d'eau  qui  s'appliquent  à  ion  corps,  fous  l'idée  géné- 
rale d'eau. 

Mais  la  foy  nous  apprend  que  dans  le  fécond  érar ,  ce  n'eft 
plus  le  même  aliment,  &  qu'il  eft  changé  au  corps  de  J.  C.  Il 
eft  vray.  Et  fi  on  l'avoir  demandé  à  Origene,  il  en  auroit  parlé 
comme  les  autres  Pères. 

Il  auroit  dit  comme  S.  Cyrille  cîe  Jerufaiem,  qac  ce  neft  plrâ 
du  fainquoyque  le  goufi  le  juge  tel ,  mais  le  corps  de  /.  C. 

Il  auroit  dit  comme  S.  Ambroife,  que  cericfl plus  ce  que  lana- 
ture  a  formé  _,  mais  ce  que  la  bénédiction  a  confacrè. 

Il  auroit  dit  comme  Theodoret  ,  qu'ail  eft  conçu  é^  crû  eftre  1^9- 
corps  de  J.  C.  d^  qu'il  eft  adoré  comme  eftant  ce  qu'il  a  eft é  fait. 

Il  fe  feroit  oppofé  au  doute  que  le  rapport  des  iens  fonrr 
contre  ce  myftere^  de  la  mcme  forte  que  les  autres  Perefs 
l'ont  fait. 

Il  nous  auroit  dit  avec  S.  Epiphane,  que  quoy  quil  n'y  ait 
aucun  rapport  de  cette  cbofe  ronde  (^inanimée  avec  le  corps 
de  J.  C.  //  fuut  croire  néanmoins  que  ce  l'eft  ,  parce  qucjejus- 
Chrift  l'a  dit.  , 

Il  auroit  apporté  tous  les  exemples  que  S.  Ambrcife  allè- 
gue pour  faire  voir  qu'il  faut  croire  cette  merveille,  comme 
l'on  croit  la  création  du  monde  &  l'incarnation  -,  Se  il  nous  au- 
roit exhorté  comme  S.  G ^udcnce  à  consumer  les  doutes  qui  nous 
tn  pourraient  refier ,  par  le  feu  du  Saint  Efprit  (^  l'ardeur  de 
la  foy.. 

Mais  il  h'étoit  point  queftion  de  tout  cela,  il  parloir  de  TEiT- 
chariftie  par  occafion  ,  &  il  vouloit  feulement  montrer  qu'elle 
n'étoit  pas  du  nombre  de  tes  caules  Phvfiques  qui  produifenx 
leur  effet  neceffairement,  &.  qui  agiffent  indcpendemment  des 
difpofitions  volontaires  des  fujccs ,  aufquels  on  les  applique. 
Car  fi  cela  e/loit ,  dit- il  ,  elle  fancti-fîeroit  atifjî  ceu.-<  qui  la  re- 
cevroient  indignement. 

Pour  le  m>intrer  donc  encore  plus  particulièrement  il  la  re- 
garde comme  un  eftre  matériel ,  ce  qu'elle  eft  en  effet  dans  ie 
premier  eftat ,  c'efl:  à-dire  avant  la  confecration ,  &  dans  le 
troifiéme  ,  lorfque  le  corps  s'en  nourrit  i  &  après  avoir  con- 
clu qu'elle  ne  fanctifie  point  comme  matière  ,  il  dit  qire 
fclon  ce  q^u'elle  eil   par  la  confecration  ,  juxta  precationem 

Aa  ii.i 


If  o         Li V .  1 1 1.  Keponfe  aux  ohJeStionf  tirées 
qî(,c  illi  acccjjît^  elle  n'eft  utile  qu'à  proportion  de  k  foy.  D'où 
il  s'enfuit  qu'elle  ne  Lindiiie  donc  pas  de  la  rnème  manière 
que  les  caufes  PhyGques  produilent  leur  effet. 

Il  eft  vray  qu'il  n'explique  pas  en  ce  lieu  quel  eft  l'effet  de 
cette  confecration  qu'il  appelle  prière.  Mais  il  le  faut  tirer  de 
la  dodrine  de  l'Eglife  de  Ion  otfnnps  &  de  la  fienne  propre, 
parce  qu'on  doit  luppoferque  ceux  pour  quril  écrivoit  l'enten- 
doient  de  cette  forte.  Qu'on  fuppole  donc  qu'à  ces  paroles ,  fé- 
lon la  prière  qui  cji  jointe ,  Origene  ait  ajouté  ces  autres  paroles 
pnfes  de  la  doctrine  commune  .de  l'Eglife  5  far  laquelle  le  -pain 
(jj-  le  vin  font  chuniicz^  au  corps  mhnc  (>  au  fan^  mcync  de  J.  C. 
ou  quelqu'autrechote  femblable,  &  il  n'y  aura  plus  de  difficul- 
£.é  ,  ny  pour  la  prefence  -fceile  qui  y  fera  établie,,  ny  pour  la 
Tranlfubllantiationqui  y  fera  reconnue. 

Mais,  dira  t- on,  cette  addition  n'eft  pas  dans  Origene.  11  eft: 
vray.  Mais  il  ne  l'exclue  pasauffi.  Elle  eftfavorifée  par  d'au- 
tres paflages  d'Origene  ,  comme  par  ce  qu'il  dit  contre  Celle, 
^uc  le  pain  par  les  prières  s' e fi  fait  un  certain  corps  faint ,  c'cft-à- 
dire  le  corps  de  J.C.  &  par  ce  qu'il  dit  ailleurs  -,  quand  vous  re- 
cevci^lc  pain  ^  le  breuvay:  de  vie,  oî^  que  vous  manqezj.e  corps  (^ 
heuvez^le  fanq^  du  Seiyîcur ,  a^ors  le  Seigneur  entre  dans  vofire  Mai- 
fon.  Jrîumilicz^vms  donc  À  l'imitation  du  Centenicr  ,  ^ditetluy. 
Seigneur ,  je  ne  fuis  pa-y  digne  que  vous  entriez^  dans  ma  maifon. 
Car  s'il  ejl  re(^ù  indignement ,  //  y  entre  pour  la  condamantion 
de  ccluy  qui  le  reçoit.  Enfin  elle  eft  conforme  à  la  doétrinc 
commune  des  autres  Pères.  On  doit  donc  croire  qu'elle  a 
efté  auffi  dans  l'efprir  d'Origene  ,  quoy  qu^elle  n^en  foit  pa« 
lortie  en  cette  occafîon. 

Mais  il  faut  de  plus  confiderer  fur  ce  fujet  qu'il  peut  bien  ar- 
-river  que  des  Auteurs  quoy  que  perfuadez  de  laTranifubflan- 
tiation,  regardant  néanmoins  l'Euchariftie  comme  un  même 
fujet  &  comme  un  même  être  dans  tous  ces  divers  états^  difcnt 
que  ce  qu'il  y  a  de  terreftre ,  eft  fujet  aux  accident  des  viandes 
communes  ;  au  lieu  qu'il  eft  fans  nulle  apparence  qtie  des  gens 
qui  auroient  efté  dans  les  fentimens  des  Miniftres  ayent  pu  s'a- 
vifer  de  vouloir  exempter  l'Euchariftie  de  cette  condition 
.commune  des  autres   viandes. 

Cependant  il  eft  certain  qu'ourre  ceux  d'entre  les  Pères  qui 

appellent  l'Euchanûie  viande  incorruptible,  du  nomble  def- 

jquels  eft  Origene  luy-raéme, nous  trouvons  formellement  dans 


des  dinjcrjci  muméres  de  concevoir  ce  Mjijiere.      191 
trois  Auteurs  célèbres  qu'elle  n'efl:  point  fujette  à  cet  accident.  Ch.  VÎII. 

Le  premier  cft  S.  Cyrille  de  jerufalem,qui  nous  dit  nette- 
ment dans  fa  cinquième  Catliechefe,  que  cq  pain  que  nous  de- 
mandons dans  l'oraifon  Dominicale  N  O  N  o?  fcceifui  obnoxium. 
0  ap"^'  ^To4  o  y.oivoi^yv^  'é^i-  '(rh'ytyloi ,  à^rci  .Ts  arc;  o'  siyioi  'blhydoi 

'(t^J?,  «,'yY/   T'a   VMJ     'SiCl-Li  TYii  ■]>>J')0)i  ^CLTXjmO/iê/-Oi'  '^bTûf  0.  dfTOt    C6^i 

il'  itouA^çtF  %i»pi?.s^  £i'f  ettp/J^pfi^^oi   iy^Qcc^iTa.1  o-W  t]s  TiO.'jxitj'^u'ûii- 
■  Car  il  eft  ridicule  d'entendre  ce  paiîàge  du  S.  ETpHt  on  du 
Verbe,  dont  on  voit  aflez  qu'on  ne  Tçauroit  dire  lans  ab(ur- 
dité  qu'ils  font  diftnbuez  dans  toute  la  fubftancede  l'homme 
pour  l'utilité  de  l'ame  &c  du  corps.  Outre  que  le  mot,  à'proc 
\tos  o  a-yf^f ,  dont  fê  fert  S.  Cyrille,  fe  rapporte  vifiblement  à  ' 
l'Euchariftie ,  que  l'on  appelle  de  ce  nom. 
Le  fécond  efi  de  S.  Chryroftomequi  nous  dit  en  parlant  de 

l'Euchariftie  'vya p  d>  Aci'TtcLi  (içJctiS   ils  cl<ptS^fcl7X  ywc'^,  cictayi  ^<"n.  <îe  Fn-- 

'      r.  '  char,  in  En- 

f^.^  T^rovoj..  ^    ^^;   '^'^ 

Le  troiûcme  eft  S.  Jean  de  Damas, qui  fe  fert  encore  des  mê- 
mes termes  dans  Ton  quatrième  livre  de  la  foy  orthodoxe  e.  14. 
Comment  une  penfëe  fi  bizarre  auroit  elle  pu  venir  dans  i'tC- 
prit  de  ces  Pères ,  s'ils  n'avoient  regardé  l'Euchariftie  que  com- 
me la  figure  du  corps  &  du  Sang  de  J.  C.  Er  comment  l'ayanc 
une  fois  admifeauroient-ils  pu  la  bornera  l'Euchariftie^  au  lieu 
de  l'étendre  à  tous  les  autres  Sacremens ,  puifqu'il  y  avoit  au- 
tant de  raiion  d'un  cofté  que  de  l'autre? 

Les  Miniftres  démêleront  cela  quand  il  leur  plaira.  Mais 
cependant  je  remarqueray  qu'Auberrin  expliquant  ces  paroles 
à  fa  manière,  a  efté  obligé  d'imputer  à  S.  Chryfoftome  une 
opinion  qu'il  prétend  luy  eftre  particulière,  ^ff^i'y^/;z£'/'?vf^/^ 
fuer.'t  ejus  ofinio ,  &  qu'il  ne  fe  fçauroit  exempter  d'en  dire  au- 
tant de  S.  Cyrille  &  de  S.  |ean  de  Damas. 

Ainfî  il  eft  obligé  d'admettre  un  partage  d'opinions  entre 
les  Pères  fur  ce  que  devient  l'Euchariftie,  quoy  que  cepartage 
n'ait  jamais  efté  remarqué  de  qui  que  ce  foit. 

Mais  en  expliquant  Origene  comme  nous  avons  fait,  tous 
les  Pères  font  d'accord  dans  lefond,  quelque  différence  qui  pa- 
roifi^  dans  leur  langage.  On  n'eft  point  obligé  de  les  oppofer 
les  uns  aux  autres,  ny  d'attribuer  à  aucun  d'eux  des  fentimens 
particuliers.  Ils  font  tous  d'accord:  ôcc'eft  la  plus  certaine  mar- 
que qu'on  puiile  avoir  de  la  vérité. 

Ein  du  troijïéme  Zi-ure, 


LIVRE   QUATRIE'ME. 


CHAPITRE    PREMIER. 

Que  c'efi  une  fuite  naturelle  de  la  docirine  de  la  frcfence  réelle^ 
que  l' Evchariftie  fçit  fouvent  appcllée  des  noms  de  pain  & 
de  vin  (^  autres  termes  fynonymes.  Dcffenfe  de  ce  qu'on  a 
dit  dans  le  premier  Tome  de  la  Perpétuité  touchant  le  lan~ 
gaqe  des  [eus. 

Ly  a  dans  tous  les  mvflercs ,  &  principalement 
dans  celuy  de  l'Euchariflie,  de  certaines  difficuU 
cezqvii  eftant  deftinëes  deDiCu  pour  exercernô- 
tre  Foy,  ne  feront  jamais  Ç\  parfaitement  ëclair- 
^  cies,  qu'on  n'ait  encore  befoin  de  faire  effort  fur 
nôtre  raifon  pour  la  foiimettre  à  l'autorité  de 
pieu  &  de  fon  Eglife.  Quand  les  Hérétiques  nous  combattent 
par  les  objedions  qu'ils  tirent  de  ces  obfcuritez  que  l'on  ne 
peut  entièrement  diiliper  5  nous  femme  s  obligez  de  les  fouffrir 
avec  patience,  &  de  leur  répondre  avec  humilité,  en  taf^hant 
de  les  faire  entrer  dans  la  voye  de  la  Foy,  qui  enibralfe  toutes 
les  veritez  que  Dieu  propofe  par  fon  Eglife,  quelque  incom- 
prehenfibles  qu'elles  foient  à  nosefprits. 
Mais  il  y  en  a  d'autres  qui  ne  font  pas  de  ce  genre,  &  qu'un 

fieu  de  bonne  foy  retrancheroit  de  la  difpute,  pour  donner 
ieu  cie  pajOTer  à  celles  qui  mentent  d'eftre  examinées  ferieu- 
/ément. 

Celles  que  les  Miniftres  tirent  des  lieux  des  Pères  où  i'Eu- 
çjiariftie  eft  appel lée/^/w  ôéx//«,  Scdonr  M.  Claude  forme  fa 
première  preuve  dans  fa  féconde  Réponfçj  a'eft  que  de  cette 

féconde 


ou  r Euchurifiie  cjî  appelléc  pain  ts  l'in.  i^y 

féconde  efpece  j  car  l'Euchariftie  ne  paroilîant  en  rien  differen-  C  H.  I, 
îe  du  pain  i$c  du  vin ,  la  nature  &  le  lens  commun  ont  du  porter- 
ies fidellesà  luy  en  donner  le  nom  ,  lorfqu'il  n'a  elle  qucftion 
que  de  la  deiîgner ,  &  non  de  faire  connoiftre  Ion  ellcnce  mce- 
rieure.  Ainfi  comme  c'eftoit  bien  alTez  qu'il  euH  propole  cette, 
objection  dans  cet  endroit  de  ion  Livre ,  il  y  avoir  lieu  d'efperer 
qu'après  l'ëclaircillement  qu'on  y  a  donné  dans  le  premier 
Tome  de  la  Perpétuité,  endiflinguant  le  langage  des  fens > 
deceluyde  la  vérité  &  de  la  foy  ,  il  ne  nous  y  arreftcroit  pas- 
davantage,  &  nous  donneroit  lieu  de  venir  plutoft  aux  princi- 
fraies  difficultez. 

Mais  fa  troifiéme  Réponfe,  où  il  a  prétendu  réfuter  le  pre- 
mier Volume  de*la  Perpétuité,  a  bien  fait  voir  qu'il  ne  faut  plus. 
fe  promettre  de  tirer  de  luy  aucun  aveu  j  &  qu'il  ell:  relolu  à: 
quelque  prix  que  ce  foit  de  foùtenir  tour  ce  qu'il  a  avance ,  io'it. 
à- l'égard  des  faits,  loit  à  l'égard  desraifonnemens.  II  croit  qu'il, 
y  va  de  Ion  honneur  de  ne  fe  dédire  de  rien.  D'autres  pour».- 
rx)ient croire  le  contraire.  Mais  quoiqu'il  en  foir,  il  nous  a  mis. 
par  là  dans  la  neceffité  de  reprendra  icy  quelque  choie  de  ce: 
qui  a  efté  dit  dans  ce  premier  Tome  de  la  Perpétuité  ,  &  d'exa- 
miner ce  qu'il  y  répond  pour  mettre  encore  cette  matière  dans» 
un  plus  grand  jour  ,  s'il  elloit  poffible  qiul  y  reftaft  quelque 
obkurité; 

Le  principe  dont  on  s'efl  fervi  dans  ce  Livre,  c'éftque  lorf-  vnp  i  .om' 
^2  le  jugement  de  la  raif)n  ou  de  la  foy  font  contraires  aux.P»  «s*, 
iuéesqui  naillent  des  lens  ou  de  la  cupidité  ,  il  fe  forme  par 
neceffité  deux  forte«s  de  langages  qui  fubfiftent  enfemble  3  l'un- 
qui  repond  aux  idées  des  lens&  de  la  concupifcence  J  lautre. 
qui  repond  à  la  raifon  &  à  la  foy-:  &  que  le  moyen-que  ies-- 
hommes  ont  trouvé  pour  les  accorder  ,.n'eft  pas  d'abolir  Tuiiv 
par  l'autre,  mais  de  marquer  ôidéOgner  les  chofes  par  dester^ 
n'.es  conformes  aux  idées  des  fcns  ou  de  la  concupifcence,  &: 
d'y  joindre  enluire  les  idées  de  la  foy  ou  de  la  railon ,  pour  [qs^ 
corriger. 

On  avoir  ajouré  que  ce  double  langage  a  êiçs  racines  natu- 
relles dans  l'elprit  des  hommes  -,  parce  qu'ils  ne  font  jamais  li; 
parfaitement  pénétrez  des  idéesdela  venté  qu'ils  puiilent  ou- 
blier celles  qu'ils  ont  reçues  par  les  /ens  ou  parla  cupidité  ;  &. 
qu'jinfitout  ce  qu'ils  peuvent  faire,c'eft  de  les  corriger,  ôc  non. 
de  les  anéantir  éc  de  les  détruire. 

B  b. 


If 9 4  Liv.  IV.  Képon/è  atix pcijpiges 

On  s'eftoic  fervi  de  divers  exemples  cirez  du  laneaee  des 
hommes  pour  auconfer  cette  maxime. 

On  avoit  remarqué  c]ue  parce  que  la  Lune  paroifl  plus  gran- 
deànos  fens  que  les  étoiles,  l'Ecriture  rap,ielle  <^r.ind  /aw_ 
«.i/>f,quoiqu'elle  foie  en  effet  beaucoup  moindre  que  les  étoiles. 

On  avoit  fait  obferver  qu'en  appellanr  biens  lesrichefles  8c 
lesplaifirs,  &  appellant;"»  /«x  les  douleurs  8c  la  pauvreté  ,  elle 
avoit  (uivi  le  langage  commun  des  hommes,ô:nonceluy  qu'on 
pourroic  former  (ur  les  règles  de  la  vérité. 

On  s'eftoit  auffi  fervi  d'exemples  tirez  du  langage  des  Phi- 
iofophes  Carceficns.rCopernic!cns  ^l  Thomiftes,  qui  ne  fuivent 
point  dans  leurs  difcours  i>rdinaires  les  opinions  qu'ils  ont  tou- 
chant la  vérité  des  chofës ,  &;  qui  le  contentent  d'expliquer 
leurs  fentimens  ,  quand  il  en  eft  quefbion  ,  en  parlant  dans  le 
refte  comme  le  commun  du  monde. 

Et  l'on  avoit  conclu  de  tout  cela  que  le  pain  &  le  vin  eflant 
la  matière  de  l'Euchariftie  ,  &  fubfiftant  à  nos  fèns  après  la 
confecration  ,  il  eftoit  naturel ,  quand  on  ne  vouloir  que  la  dé- 
fîgner,  de  luy  donner  le  nom  de  pain  &c  de  vin, en  fe  conten- 
tant d'inftruire  les  fidèles  en  certaines  occaflons  de  ce  qu'il  faut 
croire  de  ce  pain  &  de  ce  vin. 

M.  Claude  ayant  donc  entrepris  de  contredire  ce  difcours  à 
quelque  prix  que  ce  fuft  ,  s'y  prend  en  cette  manière.  //  me 
,  rep.  p.  Î05.  Çemble ,  dit-  il ,  que  cette  folution  porte  tous  les  caraHeres  de  la  con- 
trainte ,  (^  qu'on  y  voit  les  remarques  d'un  efprit  qui  s'cfl  extraordi- 
nairemcnt  échauffe  four  fe  délivrer  d'un  mauvais  endroit  ,  oit 
il  fe  fcnt  emharaffè  ,  C^  dont  naturellement  il  ne  pouvoit  for- 
tir. 

Comme  il  ne  cite  encore  icy  que  fes  propres  pen fées ,  on 
veut  bien  déférer  au  témoignage  qu'il  en  rend  5  c'efl  à- dire 
qu'on  veut  croire  que  c'eft  ce  qui  luy  a  paru.  Mais  il  trouvera 
"bon  que  je  luy  réponde  qu'il  a  quelquefois  d'affez  étranges 
penfées-,  &  c'eft  ce  que  l'on  va  montrer  par  l'examen  des  rai- 
fons qu'il  allègue. 

Il  demande  quel  rapport  il  y  a  des  idées  de  la  concupifcence  ^ 
de  la  r^lipon  ,  &  des  fentimens  Jinguliers  des  Thomfies  é'  des  Co. 
ferniciens  ,  ofuec  le  difcours  de  ces  bons  Evèques  Grecs  qui  vivaient 
au  huitième  Jîccle  ,é^  qui  affeurément  navoient  pa-f  toute  cette  Phi- 
lofophie  dans  la  tefle. 

On  luy  répond  que  quand  on  n'auroit  pas  marqué  le  rapport 


ou  ÏEucharïflie  ejl  appeUée  pain  (^  tin.       195" 
de  ct%  expreflions ,  il  eft  allez  vilîble  pour  ne  pas  donner  lien  à  ^^-  ^v 
cette  demande;  mais  qu'on  l'a  déplus  fi  clairement  marqué, 
qu'on  a  peine  à  croire  qu'il  ne  l'ait  pas  compris  ,&  qu'il  faille  le 
]uy  repeter. 

Je  Juy  dis  donc  encore  une  fois  que  ces  EvêquesGrecs, quoique 
très-  perfuadez  avec  toute  l'Eglife  de  leur  temps,  que  le  pain  Se 
Je  vin  efloient  changez  au  pr<^)pre  corps  de  |.  C.  parlaconfe- 
cration,  ont  pu  néanmoins  fuivant  le  langage  des  fens  marquer 
l'Eucharillie  par  \Qsmots  de  pain  ^  de  vin^  de  fith/lance  de  pain  ^ 
de  vin  ;  parce  qu'il  n'eftoir  point  qucftion  au  lieu  cùils  en  ont 
parlé,  d'expliquer  foneirence  iaterieure  ,  mais  feulement  de  la 
défigner:  Comme  nous  voyons  tous  les  jours  des  gens  perfua- 
dez des  veritez  delà  religion,  ou  d'opinions  particulières  en 
Philofophie  ,  fe  fervir  pour  défigner  certaines  chofes  du  lan- 
gage formé  fur  le  rapport  des  fens ,  ou  fur  les  idées  que  la  cupi- 
dité en  donne,  fans  prétendre  par  là  defavoiier  les  fentimens 
que  la  vérité  leur  en  fait  avoir.  Voilà  en  quoyconfif{:e  ce  rap- 
port. Et  comme  rien  ne  peut  eflre  plus  naturel  ni  plus  jufle ,  il 
eft  mal  aiféquc  la  figure  de  M.  Claude  le  foit. 

Mais  la  raïf  )n  qu'il  infinuc  icy  mérite  qu'on  y  fafîè  quelqu» 
réflexion.  Car  il  eft  vifible  qu'elle  luy  a  bien  plu,  quoique  dans 
la  vérité  ce  ne  foit  tout  au  plus  qu'une  fort  méchante  plai'^ 
f;)ntcrie,,  ou  une  grande  marque  de  faufTeté  d'efprit,  s'il  a  parle 
ièrieufement.  Ajjcurèyncnt ,  dit-il ,  ces  Evcques  Grecs  7iavo;ent 
pof  toute  cette  Philofophie  dans  la  tefie.  Mais  il  n'eft  nullement 
necefîliire  queces  Èveques  ayenteu  ctiiQ  Philofophie chms  la 
C^-fte ,  ni  que  leurs  expreffions  ayenr  eftë  formées  fur  le  mod,;  !e 
de  celles  de  ces  Philofophes  pour  v  eftre  femblables.  Il  fufnc 
que  les  unes  &  les  autres  foient  fondées  fur  l'inftinâ:  naturel  à 
tous  les  hommes  ,  de  défigner  les  chofes  félon  ce  qu\"lles  pa- 
roifTent  5  £c  il  n'eftoit  point  hefoin  pour  cela  que  ces  Eveques 
euffent  cette  Philo fvphie  dans  la  tejre  5  comme  il  n'efl  point  ne- 
cefTaife  que  M.  Claude  fçache  l'Arabe  &  le  Perfàn  pour  em- 
ployer dans  fondifcours  quantité  de  métaphores  &  de  figures 
qui  kiy  font  communes  avec  les  Arabes  êc  les  Perfes.  La  natu- 
re unit  tous  les  hommes  dans  certaines  manières  de  concevoir 
ljschofes,&de  les  exprimer  après  les  avoir  conçues.  Et  il  n'y  a 
rien  de  plus  contraire  au  bon  fens,  que  de  vouloir  qu'il  ne  puifîè 
y  avoir  du  rapport  encre  les  expreffions  de  diverfes  penonnes ., , 
à  moins  qu'elles  n'ayent  eu  toutes  le  même  maîtj-e ,  ou  qu'elles 

Bh  ij 


îïf6  \,\v.\Y.'R.éponfe  aux -pnjf tiges 

fe  foient  formées  lur  un  même  modelé. 

Qui  pourra  s" nnayner ,^owï{\.\\t  M.Claude  ,que  leurs  expref- 
Jîons  qui  font JÎMpUi  t^  dehonnefoy  ,  ay  ant  c fié  formées  (ur  le  ynodek 
de  ces  doubles  langjya  ,  c'efi-à  dire  fur  une  obfcrvationqueperjunne 
:ne  s'cfioit  encore  avtfé  de  fuird  Tant  ces  doubles  langa^sfont  èloi- 
<Uiez^  de  la  vue  &  de  l'uf^r'^^c  ordinaire  du  ynrr/ide. 

C'cft  encore  une  continuation  delà  mêmeiliufion  ,  par  la- 
quelle il  piailla  M.  Claude  de  luppoferen  l'air  ,c[u'aiin  que  les 
exprjffions  de  ces  Evêques  euiient  du  rapport  avec  celles  de 
ces  Pliiloiophes  ,  il  falloit  queles  unes  eufïcnc  eftë formées  fîj-r 
Jes  autres  ^  au  lieu  c]u'il  liiffit  que  les  unes  &;  les  autres  ayenc 
efté  formées  lur  la  nature  même,  qui  ift^int  la  même  dans  tous 
les  temps,  porte  &  portera  toujours  tousiesliomnies  à  s'expri, 
iTicr  de  la  forte. 

Mais  il  enchérit  de  plus  icy  fur  cette  illufion  par  une  antre 
encore  moins  pardonnable,  en  attribuant  à  l'Auteur  de  la  Per- 
pétuité de  vouloir  que  ces  Evêques  Grecs  fe  foient  réglez  dans 
,ce  qu'ils  ont  dit  de  l'Eucharillie  fur  cette  obfervation  du  dou- 
ble langage  de  la  raifon  &  des  fens  ^  en  quoyil  téinoigneou 
■peu  d'intelligence  ,ou  peu  de  fincerité. 

Car  cette  obfervation  ,  au/Ti-bien  que  la  plupart  de  celles 
.que  l'on  fait  furie  langage  des  liommes  ,  n'eft  qu'une  refle- 
xion fur  la  manière  de  s'exprimer  que  la  nature  leur  infpire  à 
touségalcment:  comme  la  plupart  des  préceptes  de  l'éloquen- 
ce ne  lont  ,  félon  faintAuguftin, que  des  reflexions  que  l'on 
a  faites  fur  les  difcours  des  perfonnes  éloquentes  Auffi  com- 
me ce  Père  a  raifon  de  dire  que  ces  préceptes  fe  trouvent  pra- 
tiquez par  ceux  qui  font  éloquens,  quoiqu'ils  n'y  pcnfent  pas 
en  les  pratiquant  :  Implent  quippe  illa  quiafunt  éloquente^  ,  non 
adhibeyit  ut  fint  éloquentes  h  ce  double  langage  de  même  a  efté 
foivi  généralement  par  tous  ceux  qui  ont  parle  depuis  qu'on 
parle  dans  le  monde  ,(ans  qu'ils  en  ayentfciit  l'obfervation,ni 
même  qu'ils  l'ayent  connue,  &  il  apalTé  des  uns  aux  autres 
avec  Ips  langues  mêmes. 

C'eft  ce  que  le  bon  fens  auroit  fuggeré  à  M.  Claude  ,s'il  avoic 
pris  la  peine  de  l'écouterjquand  même  il  auroit  pu  dire  avec  vé- 
rité que  cette  obfervation  eft  nouvelle.  Mais  elle  l'efi:  fi  peu^qu'il 
n'y  a  point  de  livre  de  controverfe  où  l'on  ne  l'employé  ,  n'y 
en  avant  p  int  où  l'on  ne  réponde  aux  Calviriftes  ,  lorf.;U'ils 
objeclentquc  l'Euchariftie  eft  appellee  pain,  que  l'un  nomme 


oà  l'EucIurifiie  efi  appellée pa,'n  f£  nj'm.         197 
■Tonvent  les  choies  félon  les  apparences  extérieures.  Etillapeuc  Ch.  I. 
voie  ençr'aucres  dans  Thomas  Valdenfis  6c  dans  Bellarmin. 
•CeU  la  coiaume  de  l  Ecriture  ,  dit  ce  Cardinal  ,  de  nommer  les  cho-  X''-/^'P-  *'• 

r-      ,  ,  ,    „  rr  /^  .1  Bellarni.  con* 

jcs  félon  qn  elles  p.iroilfent  extérieurement.  Ce  qu  u  répète  encore  deEuch.  c.  4. 
ailleurs.  Ain (i  quand  on  examine  les  réponfes  de  M.  Claude  ,  1,5.  crj. 
on  trouve  qu'elles  ne  font  fondées  que  fur  de  faux  faits  &;  de 
faux  principes ,  &  qu'il  avance  les  uns  auffi  hardiment  que  les 
autres.  Cependant  comme  s'il  ne  reftoit  pas  un  mot  à  dire  à  fon 
adverfaire,  il  luy  infulte  ,  &;  s'en  joue  d'une  manière  raillcufe, 
fans  fonger  que  rien  ne  fîed  fi  mal  que  la  faulTe  raillerie. 

jlLt  vérité ,  dit-il  ,7V  «1?  mattendops  p^x  que  les  idées  de  lacon- 
■cupifcence  ,  ni  les  corps  ynorts  des  Thoynifies ,  ni  les  impre.ffîons ,  ni  les 
auto7nates  des  Cartejiens  ,  ni  le  fijiéme  de  Copernic  ,  fe  vinffent  mè~ 
1er  dans  noflre  difpute.  Mais  pourquoy  nes'y  attendoit  il  pas  ? 
Quis  te  coëgit  filfu7n  putare?  Car  s'agilfant  de  montrer  que  quel- 
<]ue  opinion  que  l'on  ait  touchant  la  venté  intérieure  des  cho- 
fes  j  on  en  parle  (ouvent  iélon  les  apparences  extérieures,  étoit- 
il  fi  mal  ailé  de  prévoir  qu'on  pourroit  fe  fervir  contre  luy  de 
l'exemple  de  tesPhilofophes  quifuivent  les  apparences  exté- 
rieures dans  leur  langage  ,  quoiqu'ils  ne  les  fuivent  pas  dans 
leurs  fentimens,  &  qui  ayant  des  opinions  peu  populaires,par, 
Jent  néanmoins  comme  le  peuple  ? 

Ce  qu'il  ajoufteenfuiten'eftpasde  meilleur  (çn^.  Que 3e  appa- 
rence ^à\t-û  ^y a-t'ilque  des  Evêques ajfemblez^en  Concile  ,dontles 
paroles  doivent  rcglcr  la  foy  du  peuple ,  ^  qui  d'ailleurs  dévoient 
farler  fuy:ment ,  ayant  des  adverfairef  fur  les  bras  comme  ils  en 
avotent.,  eurent  abandonné  le  Jiyle  de  la  reliyon  ,  jînotis  en  croy  ons 
M.  Arn.iud,  pour  fuivre  celuy  des  fens  que  la  rehpon  condcrmiie  ? 

Quand  il  eft  de  l'intereft  de  M.  Claude  de  n'entendre  pas  les 
chofes,  on  diroit  que  c'eft  l'homme  du  monde  qui  a  le  moins  de 
pénétration.  Il  trouve  des  difficulté?,  par  tout  5  &  on  eft  obligé 
de  luy  expliquer  jufqu'aux  principes  les  plus  communs  du  lan- 
gage des  hommes.  Qii'i!  apprenne  donc,  puiiqu'il  veut  faire 
croire  qu'il  ne  le  (çait  pas ,  que  comme  il  n'y  a  point  de  fauffeté 
dans  les  métaphores  &  dans  les  tropes ,  quoiqu'il  y  en  paroifie  , 
pnrceque  l'eirrit  le  porte  ,  non  au  fens  qui  eft  marque  parla 
figniHcation  pretifedes  mors ,  maisàceluv  que  l'on  a  voulu  fî- 
gnifier  :  il  n'y  a  point  de  faufteté  non  plus  à  parler  des  chofes 
lelon  l'apparence,  lorfque  ceux  à  qui  l'on  a  atfaire  fçavent  bien 
que  c'eft  lelon  l'apparence  qu  oh  en  parle. 

Bb  iij 


198  Liv.  IV.  'Réponfè  aux  pa.Jfige5 

M.  Claude  dira- il^par  exemple, qu'il  y  a  delà  fauïïèté  d.ins 
l'EcricLire  ,  par'.equ'elleappellcle  ferpenc d'airain  ,a«y2'r/'^«f  i 
les  Anges  qui  paroilToienc  lous  la  forme  d'hommes,  flW/)o»2wej3 
Jes  bœuts  d'airain  ,  des  bœut<  5  &  des  fio;ures  de  «rrenadcs  ,  des 
grenades?  Et  n'eftil  pas  clair  au  contraire  qu'il  n'y  en  a  point, 
parce  que  cesexpreffions  ne  forment  qu'un  iens  véritable  dans 
J'eTpric  'qui  conçoit  aifément  qu'elle  n'entend  pas  parler  en  ces 
endroits-là  ni  du  véritable  ferpent,  ni  d'hommes ,  ni  de  bœufs, 
ni  de  grenades  véritables,  mais  d'un  ferpent  apparent  ,  &;. 
d'hommes ,  de  bœufs ,  de  grenades  apparentes. 

L'on  fie  peut  pas  dire  avec  plus  de  vraifemblance  qu'il  yatu 
roit  eu  de  la  fauffeté  dans  le  langage  de  ces  Evêques  afTemblcz 
à  Conftantinople,  qui  pour  dëfignercequi  eft  image  dans  l'Eu- 
chariflie,  la  nomment  fuhftûnce  de  pain^  s'ils  ne  l'avoient  crue  cf- 
fediveinenr  d'.i  pain  Caril  n'y  en  a  point  fans  doute,  fî  ce  difl 
cours  efloit  rres-inte!iigibie.  Or  comme  ce  qui  rend  ces  difcours 
intelligibles  6c clairs,  eft  la  créance diftinde  &  générale  deU 
dodrine  de  la  prefence  réelle  &  de  laTranfubftantiation-,  il  fau- 
droirque  M.  Claude  nous  euft  prouvé  auparavant  que  l'on  ne 
croyoitpas  ces  deux  articles  au  tems  oticeConcde  fut  tenu  jc'eft 
à  direqu'afîn  qu'il  y  aie  quelque  étincelle  de  bon  fens  dans  fon. 
difcours,  il  tant  juftement  qu'il  luppofece  qui  efl  en  queftion. 
Ces  circonftancesqueM  Claude  prend  la  peine  de  remarquer,, 
que  ces  Feresdevoicntregleylafoydespcwdcs^  qu'ils  eflotent  nfjcm. 
hlez^en  Concile , qu'ils  avaient  des  ^dverfaires  entefie  ,  ne  font  pas, 
feulement  vaines ,  parce  ^ue  ce  difcours  eftoit  fortintelligible, 
&c  que  n'ayant  point  d'obfcurité,  &  ne  pouvant  ainfi  fcandalifer 
gerfonne,il  n'avoitpar  confequentbefoin  d'aucune  précautionj, , 
mais  elles  marquent  de  plus  beaucoup  de  mauvaife  foy. 

Premièrement,  parce  que  M.  Claude  ne  peut  ignorer  que  le». 
Miniftresfes  confrères  ont  fait  de  grands  traitez,  pour  montrer 
que  lesexpreffions-metaphoriques  ont  lieu  dans  toute  forte  de 
difcours,  dans  les  articles  de  foy  ,  dans  les  loix,  dans  les  tefta- 
mensjd'oùil  pouvoitconclure  facilement  qu'elles  peuvent  bien 
avoir  lieu  dans  les  difcours  d'un  Concile. 

Secondement ,  parce  qu'il  n'eft  point  vray  que  lorfque  ces 
Evêques  affembiez  à  Con{1;antinople  ,ont  appelle  l'Euchariflie 
fnbftancede  pain ,  ils  ayent  eu  en  vue  de  régler  la  foy  des  peu- 
pies  :  c'eftune  fuppofition  entièrement  faufîe  :  car  il  faut  extré- 
jx.e^nsnt  diftingusr  dans  les  Conciles  les  matières  conteftées  c\m 


ok  r Eucharijlie  efi  appellce  pain  ^  fvïn.  199 
font  le  principal  objet  de  leor  dëcifion  ,  &  celles  qui  ne  le  font  Ch.  I. 
pas;&dont  ils  traitent  leu'ement  en  paflant.  Ils  parlent  à  la  vé- 
rité des  premières  avec  plus  de  rigueur  &:d'exa6litudej  mais  ils 
parlent  des  autres  avec  plus  de  liberté,&  feulement  pour  fe  faire 
entendre.  Or  ce  que  les  Evêques  difent  de  l'Euchariftie  n'cft 
que  de  ce  fécond  genre  :  car  ils  n'en  parlentque  paroccafion, 
ii  pour  montrer  que  J.  C.  n'avoir  point  autorifé  d'autre  image 
<jue  celle  qui  eft  dans  l'Euchariftie.  De  forte  que  comme  ce 
font  lesfuhftances  du  pain  &;  du  vin  qui  y  tiennent  lieu  d'miages 
félon  les  Pères  ,  quoiqu'elles  ne  fubfiftent  que  félon  l'apparen- 
ce ,  il  n'eft  pas  étrange  que  c  es  Evêques  en  parlant  de  ce  qui  eft 
image  dans  l'Euchariftie  ,  nous  ayent  parlé  de  ces  iubftances 
que  Dieu  a  choifies  pour  figurer  fon  corps  5:  fon  fang. 

Ainlnl  n'eft  pointvray  encore,  comme  l'ajoiite  M.  Claude, 
'<que  ces  Evêques  ayent  appelle  l'Euchariftie  lubftance  de  pain 
fans  neceffité.  La  neceffité  y  eftoitau  contraire  toute  évidence, 
puifqu'il  s'agiftoit  de  marquer  ce  qui  y  tient  lieu  d'image.  Or 
ce  font  les  fubHances  du  pain  &  du  vin  félon  les  Pères,  qui  con- 
tiennent ces  rapports,  quoiqu'elles  ne  fubfiftent  dans  iTucha- 
riftie  que  félon  l'apparence  extérieures  comme  c'eftune  vraye 
colombe  qui  a  rapport  avec  le  S.  Eforit  ,  quc)ique  la  colombe 
qui  le  figuroit  dans  le  baptême  de  J.  C.  n'euft  que  l'apparence 
d'une  vraye  colombe,  &  non  la  realité. 

Après  que  M.  Claude  a  combattu  le  principe  en  la  manière 
que  nous  avons  vu,  il  attaque  les  exemples  dont  on  s'eft^ic 
fervi  pour  l'appuyer ,  &  il  prononce  d'abord  qu'ils  font  dé- 
fectueux. Mais  parce  qu'il  y  en  avoir  quelques-uns  qu'il  ne 
pouvoit  éluder  par  fes  défaites ,  il  a  pris  le  party  de  n'en  point 
parler.  C'eft  ainft  qu'il  s'eft  démêlé  de  ce  qu'on  avoit  cité 
d'Horace  :  micat  interomnes  Juliumjtdtis  ,  velut  inter  ignés 
luna  minores  ^  &  de  ce  que  l'on  avoit  rapporté  que  l'Ecriture 
appelle  la  lune  Jaminare  majr/s ,  en  la  comparant  aux  étoiles: 
ce  qui  n'cft  vray  qu'en  fuppofant  qu'elle  a  parlé  félonie  rap- 
port des  fens.  Ainfi  quand  il  auroit  raifon  dans  les  répon- 
les  qu'il  fait  aux  autres  exemples  ,  le  principe  dont  il  s'agit 
ne  laifTeroit  pas  d'eftre  fuffiflimment  autorifé  par  ceux  auf- 
quels  il  n'a  pu  répondre, &  par  plufieurs  autres  femblables  qu'on 
peut  rapportera  de  l'Ecriture  &  du  langage  des  hommes. 

Car  c'eft  ,  comme  nous  avons  dit,  en  fuivant  l'apparence  ex- 
térieure que  l'Ecriture  donne  le  nom  d'hommes  aux  Anges  qui 


loo  LtV.  IV.  "Réponfe  aux  pa.jfa.geT 

paroifTentfous  la  forme  humaine.  Ec  c'eftcn  luivantcette  mê- 
me apparence,  que  Virgile  die  que  les  terres  &:  les  Villes  s'éloi- 
gnent de  ceux  qui  navigant ,  terra;que  urbefque  rccedunt  J  &  que. 
les  étoiles  palîencd'un.iieuenun  a.nitQ^JieUafacemducens  multa. 
cum  luce  cucurnt. 

Mais  il  fe  trouve  de  plus  qu'il  n'oppofe  que  de  vaines  chica- 
neries aux  exemples  qu'il  contefte.  Le  plus  grand  nombre  dc- 
ceuxqu'ona  rapportez  eftoit  pris  des  Philofophes.  Etvoicy  ce. 
qu  il  y  répond.  Il  ne  faut  pas  trouver  étrange,  fi  les  Philofophes 
i' accommodent  aux  lan^aqes  des  autres  hommes  ,  quoiqu'il  fait  con~ 
traire  à  leur  hypothefe.  Car  ils  n'en  font  pas  les  maifiris.  La  ne- 
cejjitè  de  s'entendre  les  uns  les  autres  dans  le  commerce  ,  la  crainte 
de  pajfer  pour  extravagans ,  s'ils  affccloient  7nn  nouveau  fiyle  ,  les. 
oblige  de  parler  comme  le  monde  parle  ,  pui [qu'ils  ne  peuvent  pas 
faire  que  le  monde  de  [apprenne  fon  langage  ,  ^  qu'il  s'accoutume, 
à  parler  félon  leurs  o^iinio^s.  Cela  fait  voir  que  leurs  opinions  ne\ 
rey^oient pas  lorfque  le  lanq^ay:  humain  s' e fi ,eftabli ^Q- qu  encore au^ 
jourd'huy  elles  ne  font  point  populaires.  Mais  cela  ne  montre  pas  qu'il, 
eu  eufi  efié  de  même  dans  la  Rcli(gion  Chrcftienne  u  l'égard  de  l'Eu- 
chari/iie.  Le  langage  de  l' Eglife  n'a  pas  efié  trouvé  tout  fait,  il  a~ 
efié  formé  fur  les  fentimcns  qu'  on  a  commencé  d' en  avoir  dés  qu'on  (t.. 
commencé  d'en  parler. 

A  entendre  parler  M' Claudé,irreml->!e  que  ce  n'éft  que  par  po- 
litique que  lesCopernicienSj  les  Carcheiîens  &  lesThomiftes^ 
s'abftiennent  d'introduire  leur  langage  dans  la  vie  commun^, & 
que  s'ils  o(oient,ils  ne  s'accommoderoieat  jamais  au  langage  po- 
pulaire. Mais  d'où  vient  doncqu'ils  s'y  accommode nr,non  ieulc- 
ment  en  traitant  avec  le  commun  du  monde  ,  mais  aufli  avec 
ceux  qui  ne  feroientpas  incapables  d'entendre  cet  autre  langa- 
ge Philofophiqus  ?  D'où  vient  qu'ils  ne  font  point  difficulté  de; 
îefervir  de  ces  termes  populaires ,  lors  même  qu'ils  inftruifent 
Jeurs  diiciples  ?  D'où  vient  qu'ils  s'en  ferventen  parlant  avec- 
eux-mêmes,  &:qu'un  Cartefien  formant  un  difcours  dans  fon^ 
efprit,  y  employera  aufllbien  tous  ces  termes  qui  femblenr  con- 
traires à  Tes  rentimens,que  dans  les  entreriens  qu'il  auroir  avec 
le  commun  du  monde?Si  M.  Claude  en  doute,  qu'il  prenne  la. 
peine  de  confulter  ceux  qui  font  profeffion'  de  cette  Philoro- 
phicj&il  trouvera  qu'aucun  n'a  fongc  à  cette  politique  qu'iL 
leur  attribue  ■>  &,  que  l'impreflion  des  fens  &:  de  la  coutume  eft;'. 
£forteiur  eux,  qu'ils  felervent  du  langage  qui  y  eft  conforme 

£in$. 


ok  (T Euchmflie  efl  appelée  pain  (^<vin,  loi 

fans  reflexion  &:  par  le  feul  inftind  de  la  nature.  Ch.    I. 

»  Mais  c'cfi ,  cHc  M.  Claude,  qu'ils  thc  font  p.zs  Auteurs  de  ccLtn- 
%^i%f ,  &  qu^ils  Tonc  trouvé  tout  fait.  Il  fe  trompe.  Quand  ils 
en  ieroient  Auteurs,  ils  n'en  auroient  pas  fait  un  autre  que  ce- 
iuy  qu''ils  ont  trouvé  tout  formé,  parceque  c'cftceluy  où  la 
nature  même  nous  porte.  Car  il  n'y  a  rien  de  plus  naturel 
<que  d'éviter  les  longs  circuits  de  paroles ,  &.  de  tendre  ai.tant 
■qu'on  peut  à  la  breveté.  C'ert:  ce  qui  fait  qu'on  ne  s'amufe 
point  à  appeller  totijours  les  tableaux  &  les  ftatuës  des  noms 
<^ui  marquent  que  ce  ne  font  que  des  tableaux  &  des  flarucs, 
&  qu'on  leur  donne  le  nom  de  leurs  originaux  mêmes. On  ap- 
pelle du  nom  de  Celar  &  d'Alexandre  les  ftatuës  de  Ceiar  ôc 
îl'Alexandre,  &  ainfi  des  autres. 

C'eft-là  l'unique  fondement  de  toutes  les  métaphores  qui 
comprennent  une  grande  partie  des  expreffions  des  hommes. 
Car  la  métaphore  n'eft  autre  chofe  qu'une  comparaifon  abre- 
gée.  Quand  on  apelle un  hojnme lion,  tygre,  renard  ,  on  veut 
dire  qu'il  efl:  femblable  à  un  lion ,  à  un  tygre  5i  à  un  rena  rd  Et 
<ette  reiîèmblance  luffit  pour  luy  donner  les  nomsm.êmesde 
ces  animaux  aufquels  on  veut  dire  qu'il  rcfF.mhlc, 

Mais  (î  une  reflemblance  fi  éloignée  dans  laquelle  &  le  fens 
&  la  raifon  trouvent  tant  de  différences,  fuffit  néanmoins  pour 
attribuer  le  nom  même  d^une  chofe  à  ce  qui  y  a  quelque  rap- 
port: 6c  11  c'eft  Là  le  fondement  de  tant  d'exi^reflions  authori- 
lées  par  l'ufage  de.  toutes  les  langues  î  combien  une  reiîèm- 
blance parfaite,  qui  ne  fe  diflringue  point  du  tout  par  le  Icns, 
cftelle  plus  capable  de  produire  le  même  effet? 

Il  eft  donc  clair  que  ce  qui  paroift  pain  6c  ce  qui  ne  fediflin- 
gue  point  du  pain  par  les  fens,  doit  s'appeller  pain  dans  le  lan- 
gage des  hommes,  parce  que c'eft: un  tour  trop  long  6c  trop  in- 
commode de  le  nommer  toujours,  une  chofe  qui  puroijî  pain  ^ 
qui  a  cjlé  pain  ^  conferve  les  apparences  du  pain.  On  ne  parle  de 
cette  manière  que  dans  les  Ecoles,  ou  dans  des  difcours  faits 
expréspour  expliquer  la  nature  de  ces  apparences.  Mais  quand 
il  ne  s'agit  pas  de  cela,  on  revient  à  la  nature  6c  au  langage 
commun, 

Ainfî  quand  M.  Claude  entreprend  de  combatte  cette  ma- 
xime, que  les  chofes  fe  nomment  fouvent  félon  l'aprarence  & 
félon  qu'elles  paroiflènt  au  fens,  il  attaque  en  effet  le  princi- 
pe le  plus  commun  j  le  plus  certain  &  le  plus  univerfel  du  lan- 

Ce 


lOi  Liv.  IV.  Kéfonfè  aux  pa,jfa.ges 

gage  de  tous  les  peuples,  qui  efl;  celuy  qui  fercde  fondement  à 
toutes  les  métaphores ,  n'y  ayant  point  de  différence  entre  les 
exprefîions  dont  il  s'agit ,  que  nous  avons  appellces  le  langage 
des  rens,6c  les  métaphores  ordinaires,  finon  qu'elles  ont  un 
fondement  plus  réel  j  &  qu'ainfi  l'on  y  eft  encore  plus  porté 
qu'aux  autres. 

Si  M.  Claude  trouve  encore  quelque  difficulté  dans  ce  que  je 
luy  dis,  qn'il  fe  fcrve  de  f'es  propres  lumières  pour  l'ëlaircir  ,. 
&  qu'il  rapporte  à  la  Religion^  ce  qu'il  dit  de  ces  nouvelles 
Philofophios  Ellen'apas  faïc  le  langagedeshommcs,  non  plus 
que  la  Philofophie,  elle  l'a  trouvé  tout  formé.  Elle  a  trouvé 
l'imagination  des  hommes  portée  à  joindre  le  nom  dQ  pain  Se  * 
de  vin  à  tout  ce  qui  paroift  pain  Se  vin.  Elle  n'a  donc  pas  entre- 
pris de  changer  cette  mclination  qui  eftoit  trop  naturelle,  èc 
trop  profondement  gravée  dans  l'efprit.  Elle  a  eu  foiii  feule- 
ment d'empêcher  que  ce  langage  ne  trompait  perfonne,  ocelle 
y  a  réiiiïi  en  apprenant  aux  fidelles  que  ce  qu'on  appelle  pain 
n'eft  pas  du  pain  j  mais  le  corpsdeJ.C.  qu'il  eft  changé  &tranC 
élementé  en  ce  divin  Corps.  Par  ce  moyen,  ce  langage  cefle 
d'cflre  contraire  à, la  Religion,  parce  qu'il  cefîè  d'imprimer 
de  faufTes  idées  ^  tous  ceux  qui  font  perfuadez,  de  ces  veritez: 
comprenant  enfuite  fans  peine,  qu'on  ne  conferveau  paincon- 
facré  le-  nom  âe pain ,  que  pour  le  deiigner,  ôc  pour  marquer 
qu'il  en  confei^e  les  apparences. 

C'efl  ainfî  que  l'Ecriture  en  a  ufé  à  l'égard  du  nom  de  Dieu: 
que  l'idolatrie  des  Payens  avoit  donné  à  tant  de  viles  créatu- 
res. Elle  nous,  avertit  fouvent  que  ces  chofes  que  les  Payens 
appel loient  Dieu  ne  font  pas  Dieu.  Quelle  nation ,  dit  Jeremie, 
a  jamais  changé  (es  Dieux}  Cependant  ce  ne  font  pas  des  DicuK, 
Si  MUTAviT  gens  Deosfuos ^  ^  certè  ipfi non  fiint  Dit:  L'homme^ 
dit-  il  encore ,  efl  il  capable  de  fe  faire  des  Dieux  ?  Cç  ne  font  donc 
point  des  Dieux.  'H\3^Qi2J\'0  faciet  fihi  homo  Deos  :  ^  ipfi  non  funt' 
%ii  6  ^19  ^''-  (^orinoi [funt  donc .,  dit  ^OlYMC  ^  par  toutes  ces  chofes  que  cène  font 
point  des  Dieux ,  n'en  ayez^aucunc  crainte.  Scient  es  itaqueex  his 
quia  non  funt  DU  ^  ne  timeatis  eos.  Mais  après  leur  avoir  ainfi^ 
ofté  l'être  de  Dieu,  elle  s'accommode  enfiiire  au  langage  des- 
peuples pour  les  defîgner,  quoyqu'elle  ne  prétende  pas  qu'orv 
les  doive  jamais  regarder  comme  de  vrais  Dieux. 

C'eft  en  fufvant  ce  langage  qu'elle  fe  ferr^fouvent  des  ter- 
mes de  Dieux  eflrangers  &  de  Dieux  des  nations.  Cepea"« 


Jerem.  i,  n. 


oît  tUMchmîiîe  efl  appeîîce  pa,în  (^  fvin.  zoj 

ézTit  ce  n'eftoient  point  ces  mots  qui  oftoient  d'eux  -  mêmes  Ch.    I. 
la  divinité  à  ces  faux  Dieux  dans  î'efprit  des  Juifs  ,  mais  la 
connoiiTance  qu'ils  avoient  ,>•  que  les  Dieux  des  nations  n'ef- 
toient  pas  des  Dieux,  mais  des  démons.  Quoniam  Dij ^entium 
damonia. 

Quand  les  habirans  de  Sephamain  brufloient  leurs  enfans  à 
Adramelec  6c  Anamelcc  Dieux  de  Sepharuain  ,  ils  les  rccon- 
noifloient  par  cette  idolâtrie  fîicrilege  pour  Dieux  véritables  ; 
&  c'eft  ce  que  ce  mot  fignifioit  en  leur  bouche.  Quand  Rapfa- 
cez  pour  infulter  aux  Juifs  leur  difoit  j  Oàcfl  le  Dieu  d' Amuth 
^  d'Arphad ,  ^  le  Dieu  de  Sepharuain  ,  ont- ils  délivré  Samarie! 
il  parloit  d'eux  comme  de  petits  Dieux  qui  n'eftoient  pas  ca- 
pables de  refifterà  la  puiflance  des  AfTyriens.  Mais  quand  les 
Prophètes  en  parloient,  ils  n'entendoient  par  ces  mots  que  des 
idoles  à  qui  l'erreur  5c  l'aveuglement  des  peuples  avoit  attri- 
bué le  nom  de  Dieux. 

Les'mots  de  Deus  ôc  de  D//,  eftofent  les  mêmes  dans  la 
bouche  de  ces  idolâtres  &  de  ces  Prophètes  ^  mais  leurs  diver- 
fes  créances  en  changeoient  la  fig,nification  dans  leur  efprit.  Et 
afin  qu'ils  changeaflfent  de  fens  dans  celuy  d'une  même  perlon- 
nc  ,  il  falloit  lentement  qu'elle  changeaft  d'opinion.  C'eit  pro- 
prement ce  que  la  Religion  Chreftienne  a  fait  à  l'égard  du  pain 
&  du  vin  qu'elle  employé  dans  Ton  facrifice.  Les  fens  &  la  rai- 
fon  ont  joint  à  ces  mots  l'idée  d'un  véritable  pain  &:  d'un  vé- 
ritable vin  ,  quand  on  les  regarde  dans  leur  eftat  naturel.  La 
confecration  en  change  la  nature ,  mais  elle  n'en  change  point 
les  apparences. 

La  Religion  inftruit  donc  les  fidelles  de  cette  vérité  ;  &c  cet- 
te inftruclion  fuffit  pour  flure  que  les  mots  de  pain  Se  de  vin  ,  qui 
avant  la  confecration  imprimoient  l'idée  d'un  pain  commun  Se 
d'un  vin  commun ,  n'impriment  endiite  que  celle  d'un  pain  ap- 
parentée d'un  vin  apparent  qui  contiennent  réellement  le  corps 
dej.  C.  Il  n'eft  point  neceffaire  pour  cela  d'abolir  les  mots  que 
l'ufage  a  reçus,  ny  de  faire  cette  violence  à  l'imagination.  Il 
fuffit  d'éclairer  I'efprit  par  la  connoiiîànce  de  la  vérité. 

C'eft  encore  vainement  que  M.  Claude  chicane  fur  les  exem- 
ples que  nous  av(.n>  tirez  du  mot  de  l>/em  appliqué  par  l'Ecri- 
ture aux  ricliefles  &  aux  plaifirs,  &  fur  ceux  de  /^avavs ,  &  de 
fages  èc  de  frudens  appliquez  à  la  fcience  &  à  l'habileté  des  gens 
du  monde.   Car  il  faut  qu'il  avoue  que  quand  lesperfonnes 

Ce  ij 


204  Liv.  IV.  T^ponfi  aux  pcLJfdges- 

charnelles  donnent  aux  nchelles  le  nom  de  biens,  ils  ne  de- 
meurent point  d.ns  cette  idée, que  ce  font  des  biens  en  eux-mê- 
mes &  par  leur  narur.r,q-uoy  qu'ils  deviennent  de  grands  maux- 
à  ceux  qui  en  ulcnt  mil. 

Ils  les  re2:ardent  comme  des  cbofes  qui  rendent  heureux  ceux 
qui  les  polîcdcnt  de  quelque  manière  qu'ils  en  uft-nt.  Et  com- 
me ceux  qui  ont  ce  fentiment  compofcnt  prelque  le  monde  en- 
tier ,8c  par  confcquent  font  maiOrres  du  la-- gage, ils  n'attachent 
point  fnnplement  à  ce  mot  de  ^/i«  appliqué  aux  richelîes  & 
aux  autres  avantages  du  monde,  certe  idéefpirituelle  qui  peut 
fubfiller  avec  la  penfée  que  ces  preten-dus  biens  font  réellement 
de  très- grands  maux  à  ceux  qui  les  poflèdent  ;  ils  y  attachent 
une  idée  groffiere  d'un  bonheur  réel  Se  folidej  qui  fait  regar- 
der comme  heureux  tous  ceux  qui  les  ont. 

Les  Payens  auffi  en  donnant  à  certaines  perfonnes  des  noms 
de  fages,de  prudens,de  fi^avans,  ne  bornoient  point  ce  qu'ils 
enfermoient  fous  ces  mots  à  certaines  connoilîlince.siiumai- 
nes ,  baffes  &  inutiles,  qui  peuvent  compatir  avec  une  fouve- 
rain  efolie,  une  fouveraine  miprudence,  6c  une  fouveraine  igno- 
rance dans  les  chofes  capitales  8c  edentielles.  Aind  ce  que 
l'Ecriture  entend  par  ces  mots  effc  fort  différent  de  ce  qu'on  y 
entend  en  fuivant  la  cupidité,  8c  les  ténèbres  de  l'efprit  humain. 
Cependant  elle  ne  lailîepas  de  les  apphquer  aux  mêmes  objets. 
Elle  fe  contente  donc  que  nous  changions  8c  que  nous  refor- 
mions nos  idées ,  fans  vouloir  que  nous  changions  ces  termes. 
Et  c'efl:  tout  ce  qu'on  a  voulu  prouver. 

Mais  ce  n'efl  pas  là,  dira  M.  Claude,  emprunter  le  langa. 
ge  de  la  concupifcence.  C'eft.  fubftiruer  un  nouveau  fens  aux 
mots  dont  la  concupiscence  abufe.  C'eft  en  retrancher  les  fauf- 
fes  idées  8<:  laifler  les  véritables.  Les  richelîès  font  des  biens,  non 
en  la  manière  que  le  conçoivent  les  perfonnes  charnelles ,  mais 
en  la  manière  qu'on  le  doit  concevoir  félon  la  Religion.  L'E- 
criture bannit  le  premier  de  ces  fens  ;  elle  laifle  le  fécond.  El- 
le ne  fe  fcrt  donc  point  du  langage  de  la  concupifcence  j  mais 
du  iîen  qui  efV  véritable. 

C'efl  le  fens  de  la  réplique  de  M.  Claude ,  qui  fait  voir  qu'il 
n'^entend  point  de  quelle  manière  l'Ecriture  corrige  ces  faufTes 
idées.  Pour  luy  aider  donc  à  le  concevoir  ^  je  luy  demande  ,  (î 
iorfque  S.  Paul  dit  qu'/7^  -plu  a  Dieude  fauvcr  ceux  qui  croyent^ 
far  la  folie  de  la  ■prédication  y^\  lorfqu'il  dit^a^  la  folie  de. Dieu 


oé  tEuchariJiie  eji appelTce  pain  ^  vin.  105 

(  c'efl:  la  ci-adLidion  de  Genève  )  cfiplusfa'ie  que  les  hommes  '■>  ii  Cn.  I- 
lors  qu'il  dit ,  qite  ccltiy  qui  veut  cjlre  fige  entre  von^r^  devienne  fou 
four  efire  fige ,  il  entend  parler  d'une  véritable  folie  ;■  C'efl:  ce 
que  M.  Claude  ne  dira  pas,  &  il  avouera  fans  peine  que  S  Paul 
n'entend  parler  que  d'une  folie  apparente ,  ik:  de  ce  qui  pal-e 
pour  folie  au  jugement  des  Payens. 

Il  en  eftdemême  desmotsde/r.'gf/T^&deyT/g^rj.  Quand  il  les 
attribue  aux  Payens,  il  n'entend  de  même  q'une  lageile  appa- 
rente, une  (agelîc  félon  l'opinion  du  monde.  Et  c'cft  pourquoy 
comme  d  foutient  que  ce  qu'il  appelle  du  nom  de  iolic  en  Dieu, 
eft  plus  fage  que  les  hommes,  il  (oûtienc  auffi  que  Dieu  a  con- 
vaincu cette  fagelTe  du  monde  d'cftre  une  véritable  folie. 

La  raifonen  eft  que  les  mots  à^  folie  &  de  ftgelfe  fignitient 
d'eux-mêmes  une  véritable  folie  &  une  véritable  fagcllc.  Mais 
quand  l'Ecriture  les  applique  à  des  fujets  où  l'efprit- ne  voit  pas 
qu'ils  conviennent- félon  cette  idée,  il  conçoit  par  là  qu'elle  ne 
les  prend  que  pour  en  marquer  l'apparence,  ou  plutoft  ce  qai 
paroift  tel  au  jugement  de  ceux  dont  elle  parle  Et  c'cft  ce  que 
nous  avons  appelle ,  fe  fervir  du  langage  de  la  concupifcence 
en  le  corrigeant. 

Il  en  eft  de  même  des  mots  de  biens  que  l'Ecriture  applique 
aux  commoditczde  la  vie,  5c  aux  plaifirsdes  gens  du  monde. 
Le  S  Efprir  a  bien  fçû  qu'il  eft  naturel  aux  hommes  de  conce". 
voir  par  ces- termes  des  biens  qui  rendent  réellement  heureux 
ceux  qui  les  pofledent,  &;  qui  ne  s'en  tiennent  point  à  cette  idée 
raifonnée  de  M.  Claude.  Notre  imagination  n'eft  pas  alfez  fle- 
xible pour  (e  défaire  ainfi  tout  d'un  coup  des  idées  qu'elle  a 
accoutumé  de  joindre  aux  mots.  Ainfi  la  manière  donc  on  ré- 
duit à  la  vérité  ces  fortes  d'expreffions,  c'eft  de  concevoir  que 
les  richclTes  ne  font  des  biens  félon  ce  fens  commun  &  ordinai- 
re qu'au  jugement  corrompu  des  hommes  charnels,  &  de  nier 
qu'elles  en  méritent  lenom.  Cequi  donne  lieu  à  Salvien  pour 
fîgnifier  que  lesenfans  héritent  plûcoft  des  vices  de  leurs  pères  Ad  Eccie^ 
que  de  leurs  biens,  de  s'exprimer  en  ces  termes:  Antequam  Cathoi.  k 
habeant  illa  qu.t  falso  dicmitur  bona^  arite  habent  iliaque  vcrè  di~ 
cuntur  mala.  Il  ne  ditpoint  que  les  richeilès  font  devrais  biens 
à  un  certain  égard.  \\À\t  qu  elles  ne  font  point  des  biens  &  qu'on 
les  appelle  fliulVement  des  biens  ^  parce  qu'elles  ne  renfermene 
point  ce  que  l'on  entend  par  le  mot  de  bien. 

Saint  Auguftindic  dansle  même  fens,  pour  expliquer  le  nom 

C  c  iif 


1,11.  c.  27. 


zo6  Liv.  T  V.   "Rcponfe  auii  p^^Jf^gcs 

DeCiv  Dei.  (\q  m,mjntona  iniqiiitatts<^\Q.  l'Etrirure  donne  aux  ricliefles,  que 
\ti  richefles  même  bien  acquifci  ne  fonc  pas  vrayes ,  èc  i-]u'elies 
ne  fonr  prifcs  pour  riclieïïês  que  par  !e  dérèglement  des  hom- 
mes. Etiamfi  bcnc  non  tamcnvcns  ,  fed  qViM  iniquitas  putut.ejps 
divitia.r. 

Mais  fur  tout  il  cfl  impoffible  de  prendre  autrement  le  mot 
de  bien  dans  le  paOage  de  S.  Luc  que  l'on  a  cité  ,  où  Abraham 
dit  au  mauvais  riche  :  Mon  fils  fouvenez^vous  que  vous  avez^  re- 
cil  vos  biens  en  votre  vie  ,  (^  que  le  Lazare  y  a  reçu  des  mauxj  (^ 
maintenant  il eficon foie  dj"  vous  ejhsdans  les  tourmens^  car  ce  n'eft 
pas  avoir  mérité  d'eftre  puny  après  cette  vie  que  d'y  avoir  pcf. 
ledédes  richefîes&des  plaifirs,  en  les  regardant  d'une  manière 
chreftienne  &;  fpirituclle  pour  des  bénédictions  de  Dieu  donc 
on  peut  faire  un  ufage  légitime,  puifque  le  mauvais  riche  euft 
pu  répondre  à  Abraham  qu'il  avoitreçu  luymêine  dans  fa  vie 
ces  mêmes  biens.  Mais  c'eft  une  raifon  fuffiiante  pour  eftre 
tourmenté  juflement  dans  l'autre  moncle  que  d'avoir  joiii  dans 
fa  vie  des  richefles  &  des  plaifirs,  en  les  regardant  comme  Ton 
bonheur,  fa  félicité, &  Ton  repos.  Etamfi  il  fautneceflàirement 
que  le  mot  de  bona  Toit  pris  en  ce  lieu  félon  l'idée  qu'en  avoic 
le  mauvais  riche,  &;non  félon  cette  autre  idie  de  M.  Claude 
particulière  aux  Chreftiens. 

Mais  quoy  qu'il  en  foit,  il  efl:  fort  inutile  à  M.  Claude  de  s'ar- 
refter  à  chicaner  (ur  quelques  exemples,  y  en  ayant  une  infini- 
té d'autres  aufquels  il  ne  fçauroit  rien  répondre,  qui  autorifent 
fuffifamment  ce  qu'on  appelle  le  lan^a^e  des  fcns  -^  c'eft  à  dire 
toutes  les  expreffionsoù  l'on  appelle  les  chofes  du  nom  de  cel- 
les à  qui  elles  reiïcmblent,  foit  imparfaitement,  comme  dans 
'les  métaphores  ordinaires, fait  parfaitement  comme  dans  celles 
.où  la  chofe  dont  on  parle  a  tellement  l'apparence  d'une  autre 
que  les  fens  ne  l'en  fçauroient  difcerner  Or  comme  la  méta- 
phore ne  fçauroit  eftre  plus  naturelle  ny  plus  necefi^iire  qu'elle 
j'eft  en  ce  dernier  genre,  il  n'y  en  a  point  par  confequent  de 
plus  conforme  aux  règles  du  langage  humain  cc  à  la  manière 
dont  Pefprit  des  hommes  conçoit  les  chofes,  que  d'appeller 
l'Euchariftie  coiifacrée  du  nom  de  pain  &  de  vin ,  de  (ubftanccde 
■pain  ^  de  vin,  de  bled^  de  fromentfiLc.  puifque  non  feulement  elle 
a  efté  faite  de  ces  matières  terreftres,  maisqu'elleen  conferve 
F«ême  tellement  les  apparences,  que  les  fens  ne  l'en  fçauroient 
diftinguer.  De  force  que  l'on  peut  dire  avec  vérité  quç  ce  fe- 


ou  t Ettcharijîie  efla,ppe liée  pain  ^  'v'm.         toy 
roit  mettre  les  hommes  dans  une  gêne  infiipportable,  ou  plu-  Ch.  I* 
toft  leur  rcnverler  abfolument  l'eipric,  que  de  leur  interdire  en 
ce  cas  ces  lortes  d'exprellions. 


CHAPITRE    II. 

Ijfage  pcrpettiel  de  ce  langage  dans  les  Autctirs  les  plus  perfuadei^ 
de  la  ptcfence  réelle  ^  de  la  TravjJ'ubfiantiaPion^  depuis  Bcrcyi- 
gerjufjues  À  prefent.  Règles  pour  juger  feuremait  c?i  quel  f(?h  les 
lucres  s'en  font  fervis. 

APre's  ce  que  je  viens  de  dire^  je  ne  croy  pas  qu'on  foie 
furpris  de  trouver  ce  langage  pratiqué  &  authorifé  par 
tous  ceux  qui  auront  efté  les  plus  grands  défenfeurs  de  la  pre- 
fence  réelle,  &  de  la  tranfTubftantiation ,  ny  qu'on  ait  grand 
égard  aux  deffaites  des  Miniftres  quiprétendenr  qu'ils  nel'onc 
lait  que  par  politique  ^  ou  pour  tourner  à  leurs  fens  fcs  cxpref- 
fîonsdes  Pères  qui  s'en  font  fervis.  Il  n'eft  pas  beioin  de  poli- 
tique pour  (uivre  l'infl:incl& la  pente  delà  nature^  &  de  plus  il 
eft  ridicule  de  joindre  dans  un  deffein  de  politique  toutes  le 
nations  du  monde  pendant  plufieurs  fiecles,  comme  il  faudroit 
que  les  Miniftres  filfent  ,  puifqu'ils  ne  fçauroicnt  defavoiier 
que  tous  les  Auteurs  de  l'Eglife  Latine  ne  fe  foient  fervis  de  ces- 
cxpreffions,  auffi  bien  depuis  Berenger,  que  devant  Berenger, 
&  qu'elles  ne  foient  de  même  communes  à  toutes  les  autres  na- 
tions, dans  le  temps  même  où  l'onajuftifîé  leur  confentemenr 
avec  l'Eglite  Romaine  fur  ces  dogmes,  d'une  manière  qui  ne 
foufFre  point  de  repartie. 

Si  M.  Claude  en  demande  des  preuves,on  s'offre  à  luy  en  pro- 
duire tant  qu'il  en  voudra  Mais  pour  ne  charger  pas  inutile- 
ment les  Lecteurs,  j'en  propoferay  feulement  icy  quelques  uneS' 
qui  ne  font  que  trop  fuffiianres. 

Le  Cardinal  Humberr,  par  exemple^  pouvoit-il  mieux  témoi- 
gner combien  il  avoit  peu  d'apprehenfïon  que  ce  langage  ne 
nuifift:  à  la  vérité  de  la  dodrine  de  la  prefence  réelle  6c  de  la 
tranffubftantiation,  qu'en  parlant  aux  Grecs  en  ces  termes  icy. 

l>^ous  ferc2^à\l-\\  ^  obligez^de  confejfer  avec  nous  ^  cjue  ce  fut  du 
fain  azyme  cjue  N  offre  Seigneur  Je  fus  -  Chrifl  difiribua  dans  la 
CèneauJ.  premiers  F ondateurs  de  l'Eglife.  Eftoit-ce  donc  du  pain<* 


zo8  Liv.  IV.  Hcponfe  aux  pnjfages 

çiue  J.  C-  diflribua  félon  le  lentimcnt  d'Humhert&cIe  tous  les 
Catholiques  ?  N  on  fans  douce  :  Ce  n'écoic  qu'un  pain  apparenti 
mais  cela  futlit  pour  l'appellcr  pain. 

"La  foy  de  l'Auteur  du  Microlige  ne  peut  eftre  douteufe  ,■& 
par  la  confideration  du  temps  où. il  vivoic,  qui  c(l:oit  celuy  de 
Grégoire  VII.  condamnaceur  de  Berenger,  &  par  les  témoi- 
gnages qu'il-cn  rend  dans  Ton  Ouvrage, où  i!.rappt)rte  en  ces  ter- 
mes la,  créance  de  l'Eglile  de  Ion  temps:  N'eus  ne  doutons  point 
qfie  l* ablation  ou  le  pai^  ne  foit  changé  au  vray  corps  de  J.  C.  ô"  l^  vin 
au  fang  du  Seigneur.  Oblatam  (ïve pancm ^  inverum  Chrifti cor- 
pus, (îcut  ér  vinurn  in  fanguincm  Doniini,  converti  non  dubitamus. 

C'eft  ainfi  qu'il  parle  quand  il  s'agit  d'expliquer  la  Foy. 
Mais  quand  il  n'a  point  cette  vûë ,  il  revieiit  au  langage  des 
fens  comme  plus  propre  à  fe  faire  entendre.  Il  traite  dans  le 
chapitre  14.  des  lignes  de  Croix  qui  fe  font  fur  les  fymboles 
avant  la.  confecracion  j  ôc  pour  les  marquer  diftinctement,  il 
dit  :  Q^e  l'on  fait  le  figne  de  la  Croix  fur  f  ablation.  Oblatio  fi- 
gnanda.efi'i  que  l'on  en  fait  une  fur  le  pain  S"  »w^  autre  fur  le  ca- 
lice. Q17AP.TA.  crjix  fuper  panem  ^  (^^  quinta  fuper  calicem  fepa- 
ratim  imponitur. 

Après  a.voir  parlé  dans  le  quinzième  de  la  confecration  6c 

des  cérémonies  qui  fe  pratiquent  enfuite,  il  ne  change  point 

de  la-ngage  ;  mais  il  dit  premièrement  que  le  Preftre  prend  le 

/-;//«  entre fes mains,  &;  qu'il  le  bénit  avant  que  de  le  remettre 

fur  i'^^Aitel  :  où  il  efl:  clair  que  félon  les  termes ,  c'eft  le  pain 

qu'il  dit  que  le  Preftre  remet  fur  l'Autel.  Cependant.ee  n'eft 

plus  alors  du  pain,  félon  la  créance  de  cet  Auteur  Car  comme 

v»>  dit  Eftienne  Evoque  d'Autun  ,"  c'eft  la  même  chofe  félon  l'ap- 

»»  parence  que  l'on  élevé  &;  que  l'onremer,  maisil  y  a  bien  de  la 

"  différence  .entre  ce  qui  paroift,  &  ce  qui  eft  caché  au  dedans. 

>s  On  élevé  de  l'autel  ui>  pain  co.mmun  5  ôc  on  y  remet  la  chair 

immortelle  de  J.  C. 

Ij  continue  de  parler  de  la  même  forte  dans  la  fuite.  On  fait., 
dit  iJ  ,  la  quatrième  croix  fur  le  pain  d^  l^t  cinquième  fur  le  calice 
fcparcmeni. 

Il  fe  fert  indifféremment  dans  les  chapitres  17.  &  18.  de  ces 
expreOions. 

Que  le  corps  de  J.  C.  eft  rompu  :  yîfîn ,  dit-il ,  de  nous  rendre 
favorable  celuy  dont  nous  voyons  ^  notfS  croyons  que  le  corps  efi 
rompu  dans  ce  myfierg. 

Que 


oà  t Euchurijiie  eB  appcîlée  pain  (^  <vm.         109 
Que  l'on  fait  des  portions  du  corps  du  Seigneur.  Le  Preftre,  Ch.  1 1. 
<âic-il ,  rompt  en  deux  la  pins  grande  partie  de  l'hofiie  ^  pour  faire 
trois  portions  du  corps  du  Seigneur. 

Que  l'hoflie  eft  rompue.  Le  Pre/re  ^âit-il,  remet  l'hofiie  fut 
l'autel  pour  l'y  rompre. 

Que  le  pain  cfi  rompu  ^  qu'il  eft  mis  dans  le  calice.  C'eft  pour- 
quoy  le  Chapitre  1 8 .  porte  pour  titre  :  De  la  fraciion  du  pain  eS 
de  la  Communion.  Et  il  corn  mence  par  ces  mots ,  Après  que  l'on  a 
mis  le  pain  dans  le  calice. 

Ainfî  dans  l'efprit  de  cet  Auteur,  pain  ,  hoftie,  corps  de  J.  C. 
fîgnifient  la  même  chore&  le  même  objet,  quoy  que  fous  dif- 
férentes idées.  Cet  objet  prefent  eft  appellera;/'.?  de  J.  C.  parce 
qu'il  l'eft  véritablement.  Il  eft  appelle  hofie,  parce  que  c'eft  îa 
viclime  du  facrifice.  Il  eft  Appelle  pain ,  parce  qu'il  eft  pain  à 
nos  fens.  Ilfaudroit  fe  forcer  pou»  ufer  d'un  autre  langage.  Et  fî 
Dieu  faifoit  la  grâce  à  M.  Claude  de  le  rendre  Catholique,  il 
verroit  qu'il  ne  pourroit  pasfe  paiferde  s'exprimer  de  la  forte, 
à  moins  qu'il  ne  fift  une  attention  continuelle  pour  s'en  em- 
pêcher. 

Il  n'y  a  pas  plus  de  fu  jet  de  douter  de  la  créance  de  l'Auteur 
du  Traitté  intitulé:  Gemma  animée,  attribué  à  Honoré  d'Au- 
tun.  Il  ne  faut  pour  s'en  aiîvirer  que  fçavoir  qu'il  a  écrit  après 
Berenger,  &  voir  ce  qu'il  dit  dans  le  Chapitre  105.  du  premier 
livre,  où  il  parle  ainfi  fur  les  paroles  de  la  confecration  :  Comme 
par  les  paroles  du  Seigneur  le  inonde  a  efiè  créé  de  rien  :  ainfi  par 
ces  paroles  d.u  Seigneur  ^  ces  matières  font  changées  veritablerncnt  ait 
corps  du  Seigneur.  Et  dans  le  Chapitre  7.  On  appelle ,  dit  il ,  my- 
fiere  quand  on  voit  une  chofe.^  ^  que\l'on  en  conçoit  une  autre.  On 
•voit  les  efpeces  du  pain  ^  du  vin:  on  y  croit  le  corps  (jr-  le  fang  de 
J.  C. 

Mais  comme  il  parle  quand  il  faut  le  langage  de  la  foy,iI  par- 
le aufli  celuy  des  fens  quand  il  le  faut.*  comme  quand  il  dit  de  1. 1.  c.  s;. 
l'Euchariie  confacrée  >.  Le  painquiefl  mis  dans  le  vin  fignijîe  que 
l'ame  de  J.  C.  eft  retournée  dans  [on  corps. 

r  C'eft  en  fuivant  le  même  inftinclde  la  nature  qui  porte  à  ces 
exprenîons,que  Hugues  de  S.  Viclordit,  que  le  Prêtre  divife  le  in fpecui» cf , 
faint  Pain  en  trois  parties:  Panem  SacrofanHum partitur. 

Que  S  Anfelme  au  traité  de  fermento  Q-  azymo  ,  dit ,  que  l'on 
facrifie  ^  le  pain  ax^yync  é^  le  pain  levé  :  Et  que  l'Auteur  du 
Commentaire  fur  S.  Paul  qui  luy  eft  attribué,  appelle  plufieurs 
fois  l'Euchariftiedumotde/'rf;»,  Dd 


iio  Liv.  IV.  Képonfe  aux pajfages 

In  CIO. &  II.       Mais  il  fe  ferc  de  ce  même  terme  d'une  manière  fort  remar- 
•^'  ■  ''  quable  dans  ce  pafîage  icy  :  Zcs  jujhs  ont  7nangé  dans  la  manne  la 

même  viande  du,  corps  de  f.  C.  que  nous  man'icons  dans  le  famv 
E  A  N  D  E  M  efcam  corporis  Chrifit  quam  nos  in  pane  manducamus ^., 
îpj!  manducavcrtintinmanna.  Carquoyque  le  mot  de  manne  Ci. 
gniiieune  manne  véritable,  le  mot  de  pain  ne  fignifîe  néan- 
moins qu'un  pain  apparent.  Et  quoyque  le  mot  de  corps  de}.  C^ 
mangé  par  les  Anciens  dans  la  manne  ne  fignific  le  corps  de 
J.  C.que  comme  objet  de  lafoyde  même  terme,  dans  le  fécond 
membre,  figmfie  ce  même  corps  comme  réellement  prefenc 
fous  les  apparences  du  pain.  Et  tout  cela  eftoit  expliqué  fans- 
peine  par  la  connoiilance  de  la  vérité  du  myftcre ,  que  cet  Au- 
teur  fuppofe  dans  Tes  Lecteurs. 

Comme  ces  expreflions  naiiîênr  de  la  manière  naturelle, 
dont  nous  concevons  le  myftere  &  de  l'inclination  commune 
à  tous  les  hommes  de  defigncr  les  chofes,  parce  qu'elles  pa- 
roUTent,  elles  fe  trouvent  auffidan-J  l'ufage  commun  de  toutes^ 
les  nations,  fans  qu'elles  falîènt  nulle  part  aucune  peine  à  ceux 
qui  font  le  plus  perfuadcz  de  la  tranflubflantiation. 

Ces  Grecs  que  M,  Claude  appelle  lacinifez  ,  parce  qu'il  ne" 
fcauroit  nier  qu'ils  ne  fadcnt  une  profefTîon  publique  de  cette 
doctrine,  ne  font  aucune  difKculté  de  s'en  fervir.  Et  il  y  a  en- 
tr'autres  plufîeurs  exemples  dans  ce  que  Ton  a  rapporté  d'Aga- 
pius.  Quand  volts  èpni  feriez^,  dit-il  cnunendroit^  tout  ce  que  l' art 
des  hommes  peitt  inventer^  vous  nauynentcriez^en  rien  la  grandeur 
Q^  le  prix  infini  de  ce  pain.  Ce  pain\  dit- il  en-  un  autre  ,  efi  le  my. 
fi  ère  de  l'union  S"  de  la  charité.,  S'^  c'cfipar  fin  moyen  que  les  fi  de  lie  s 
fiont  rendus  participans  d'une  même  nourriture .  Et  en  un  autre  lieu,, 
Ce  pain  ,  dit-il ,  efi  la  nourriture  des  Saints  ,  la  médecine  des  ma- 
lades ,  la  vie  des  vivans  ,  la  refiurrctiton  des  morts.  C'efi  ce  pain  qui 
appaifi  la  révolte  delà  chair.,  (^  qui  fortifie  nofire  ame  parla  pieté  y 
qui  nous  purifie  de  nos  péchez^  qui  augmente  les  vertus.. 

Ligardius  Archevêque  de  Gaza  contre  qui  M.  Claude  a  té- 
moigné tant  de  malignité,  parce  qu'il  a  rendu  un  témoignage 
ii  formel  de  la  créance  des  Grecs  qu'il  n'a  pu-  l'éluder  d'une 
autre  forte  5  ne  laiflè  pas  de  dire ,  que  le  corps  de  J.  C.  efi  dans  le 
pain  (^  dans  le  vin  comme  dans  un  Sacrement  5  In  pane  ^  in  vino 
tanquam  inSacramento  ■.,  Sc  qu'il  faut  adorer  Dieu  dans  le  pain 
de  l'Euchariftie;  adorandus  Deus  in  pane  Eucharifii,-e. 

Grégoire  Prêtre  ôc  Religieux  Protorincelle  de  l'Eglife  de 


oïl  tEucha,rifiie  efl  appUéepain  ^  (vin.  2.11 

Conftantinople,  dans  le  Caceciiifme  qu'il  a  dreiré  pour  Tin-  Ch,  II. 
ftrudion  des  Grecs,approuvé  par  le  Théologien  de  cette  Eglife, 
^Sc  qui  n'a  jamais  eftc  combattu  de  perfonnCj  comme  il  paroiftra 
par  les  relations  imprimées  à  la  lin  de  ce  volume^  ne  fefert  pas 
îeulement  de  ce  langage,  en  diiant  c^uq  d.ms  le  pain  changé  fc 
trouvent  trois  chofcs  ^  Zc  pain  qui  tfi  lu  chair  du  Sauveur  (^c.  mais 
il  en  fait  une  remarque  cxpreire ,  &C  en  rend  la  raifon.  C'cfi  pcur- 
quoy  ^  dit  -  il ,  même  après  le  changement  le  corps  de  I.  C.  s'appelle 
pain,  k  caufe  des  accidcns  du  pain  qui  paroi jjcnt  dans  ce  corps. 

Les  Grecs  un  peu  plus  anciens,  mais  qui  ne  lont  pas  moins 
formels  pour  la  préfence  réelle  &  la  tranirubftantiation  que  les 
nouveaux,  fe  font  fcrvis  des  mêmes  termes  aum  bien  qu'eux. 
Simeon  Archevêque  deThclîalonique  dans  un  traire  qu'il  a  fait 
du  temple  &  de  la  Mclle,  imprimé  en  partie  en  latin  dans  la  bi- 
blioteque  des  Pères, 6c  depuis  entier  en  Grec  dans  PEuchologue  coat.  p.  n-. 
du  PereGoar,  après  avoir  dit  dés  le  commencement,  que  I.  C. 
eftant  Dieu  tout-pmjjant ,  change  le  pain  &  le  vin  en  [on  corps  ^  en  P-  -'-7. 
fonfang.  Et  qu'après  lu  eonfecration  l' Eve  (que  voit  devant  luy  I.  C. 
vivant  qui  efl  le  pain  véritable  3  ne  lailfe  pas  de  parler  de  l'Eu- 
•chariftie  comme  fi  elle  eftoitdu  pain.  Le  Pre/hr ,  dit-il,  efiant 
preji  de  lever  le  vain,  dr  de  le  divifer  en  parties,  il  faut  qu'il  foit 
revêtu  de  tous  les  ornemens  facrez^d^  fa  dignité.  S'en  efiant  donc  re. 
vètu,S'^  ayant  élevé  le  pain  ^c.  L'élévation  du  pain,  dit-  il  encore, 
marque  l'élévation  de  J.  C.  fur  la  croix  5  (^  enfui  te  il  divife  le  pain 
tn  quatre  parti-es  O"  l^s  difpofe  en  forme  de  croix.  Et  dans  la  page 
fuivante.  L' Evèque  ,  dit-il ,  divifanl  le  pain  en  plufeurs  parties 
imite  le  facnficede  J.  C  Et  un  peu  après  :  ilcommu7Uque  le  premier 
^u pain  (^participe  au  terrible  calice. 

C'eft  en  fui vant  cet  inftincl  de  la  nature  qui  nous  porte  à  ces 
cxpreflions  que  ny  les  Grecs  ni  les  anciens  Auteurs  latins,  quoy 
<]u'ils  ayentvêcu  depuis  Berenger  ,  n'ont  tait  aucune  difficulté 
d'admettre  cette  propofitiom  Le  pain  cft  le  corps  de  I.  C.  parce 
c^u'ils  ont  crû  que  le  mot  à^  pain  x\c  fignitioit  autre  chofe  que 
l'objet  vifible  qui  paroiftdu  pain.  C'efi  une propofïtion  véritable, 
-dit  Thomas  Waldenfis,  de  dire  que  le  pain  eft  le  corps  de  L.  C.       p-75. 

Le  pain  que  nous  divifons  a  plufieurs,  dit  l'Auteur  du  commen-  ^'^  ^°''"  ^'^°' 
tzi^e  0Xiv\h\xék^.  kn(^\m<t  ,ei  fie  vry  corps  du  Seiqneur.  ,  ,    ^ 

Le  pain,  dit  Simeon  de  Theiîalomque  ,  efi  le  corps  même  de  nuiVa, 
lefusChrifi. 

Le  S.  pain,  dit  Grégoire  Procofincelle  de  Conûantinople,  efi  ^'^  Catech, 
Ja  chair  de  I.  C,  X)  d  ij 


2Î1  Liv.  IV.  Képonfe  aux  pajfages 

Metroplun  ze  païu  facrtfiè ,  dit  Metrophane,  eft  véritablement  le  corps 

\°^l;^'-'-^"  deJ.C. 

Ze  pain  é^  le  vin  propofez^fur  1^ Autel ,  dit  Jeremie  Patriarche 
ia  1.  Kefpon.  de  Conftantinople ,  ne  font  pas  des  types  du  corps  ^  du  fang  de 

cap.  de  Sacr.     j  ^  ^^^-^  ^^  ^^^^^  ^^^^^^^  ^^  j   q   ^^^•^^_ 

Enfin  c'eft  en  fuivant  la  même  pente  que  Pafchafe ,  comme 
on  l'a  remarqué  ailleurs,  dit  que  ce  myfîere  fe  célèbre  dans  lepainr 

Pafc.  de  cerp.    MySTERIUM  HOC  IN  PANE  CELEBRATUR;  qu'il  cjî  Célébré  danS 

e  lo!!^  °'"'  l-^  mbnc  fuhftance  :  &  qu'aprcs  avoir  dit  que  Melchifedech  offrait 
du  pain  d^  du  vin ,  il  dit,  que  nofire  véritable  Roy  de  paix  ^  nofire 
vray  P ontife  a  offert  LES  MEMES  choses.  Et  c'eft  en  fuivanc 
Hincm.  opuf.  auffi  Cette  inclination  naturelle  que Hincraar  àït^que I.C.nous 
*.  ad  Carol.  a  donne  le  nouveau  teflament  dans  le  pain  (^  le  vin  mêlé  d'eau,  SC 
'■'"*  que  Walfridus  Strabo  qui  nous  airure  que  le  pain  efi  véritable- 

ment le  corps  de  I.  C.  nous  dit  auiîi ,  que  I.  C.  donna  à  [es  difciplef 
le  Sacrement  de  fon  corps  (^dc  fonfangdans  la  fub fiance  du  pain  ^ 
du  vin ,  &  enfin  c'eft  en  ce  fens  qu'Amalarius  déclare ,  que  le- 
JPreJîre  immole  le  pain  O'  le  vin. 

Il  faudroit  eftre  bien  déraifonnable  après  avoir  conçu  par  la 
raifon ,  combien  la  nature  nous  porte  à  ces  exprefiions  que  nous 
avons  appellëes  le  langage  des  fens ,  &  avoir  vu  l'effet  de  cet 
inilinifl  dans  tous  les  Auteurs  qui  ont  eu  la  doctrine  de  la  rranf- 
fubftantiation  6i  de  la  prefence  réelle  le  plus  imprimée  dans 
i'efprit,  pour  prétendre  encore  en  abufer,  quand  on  les  trouve 
dans  les  Pères,  5c  pour  les  faire  fervir  de  preuves  qu'ils  n'ont  pas 
efté  perfuadez  de  ces  dogmes. 

Mais  le  bon  fens  nous  mené  plus  loin,  &: après  nous  avoir 
convaincusque  d'appeller  l'Euchariftie  àt%  noms  de  pain  &  de 
vin ,  defubfiance  de  pain  (^  de  vin,  &:  autres  termes  Tynonymes, 
eft  un  langage  commun  à  ceux  qui  croyent  la  tranfilibftantia- 
tion  &:  à  ceux  qui  ne  la  croyent  pas,  il  nous  apprend  à  difcerner 
dans  l'ufage,  quelle  eft  la  créance  de  ceux  qui  s'en  fervent. 

Carquoyquece  langage  doive  eftre  commun  anxuns  &  aux 
autres,  il  doit  néanmoins  eftre  joint  à  des  circonftances  diflTe- 
rentes  dans  les  uns  &  dans  les  autres. 

I.  Si  les  Pères  ont  cnî  que  l'Euchariftie  eftoit  réellement  du 

pain  &  du  vin,  ils  n'ont  jamais  dû  fe  mettre  en  peine  d'éclaircir 

ces  expreflîons,  où  ils  l'appellent /-^/^  &:w'«,  ny  s'efforcer  de 

nous  empêcher  de  croire  que  c'eft  du  pain  ôc  du  vin. 

2,    lis  n'ont  point  dû  nous  rien  dire  en  appellant  l'Eucha- 


où  r Eucharifiie  efl  appellée  puin  ^  qj'in.  ziz 

riftie  faïn  èc  vin ,  qui  nous  dût  faire  juger  qu'elle  n'eft  pas  du 
pain  6c  du  vin. 

3.  Non  feulement  ils  ne  l'ont  pas  dû  faire  dans  le  lieu  même 
où  ils  employoïent  ces  termes,  mais  ils  ne  l'ont  dû  faire  en  au- 
cun  lieu. 

4.  Ils  ont  dû  lever  la  difficulté  des  termes  qui  nous  pou- 
voient  faire  juger  que  ce  n'étoit  pas  du  pain  &  du  vin. 

Mais  on  doit  croire  au  contraire  qu'ils  n'ont  appelle  l'Ea- 
chariftie  pain  &:  vm  ,  que  pour  deiîgner  feulement  ce  qu'elle 
paroifl,  s'ils  nous  ont  avertis  quelquefois  que  ce  n'eft  pas  aa 
pain  £c  du  vin.  i 

Sienappellant  l'Euchariftie/'^/K&w;/,  ils  nous  ont  dit  plu- 
iîeurs  choies  qui  donnent  lieu  de  conclure  que  ce  n'eft  pas  du 
pain  &  du  vin. 

Si  ne  l'ayant  pas  fait  en  ces  lieux-  là  mêmes  ils  l'ont  fait  en 
d'autres. 

S'ils  n'ont  jamais  formé  de  difficulté  fur  les  expreffions  qui 
marquoient  que  n'eft  pas  du  pain  &:  du  vin,  ni  déclare  qu'ils  ne 
les  entendoient  pas  littéralement. 

C'eftparces  difïerenres  circonflances  qu'on  peut  diflinguer 
le  fens  auquel  les  Pères  fe  lont  fervis  de  ces  termes.  C'ellpar  là 
qu'ils  peuvent  devenir  àts  preuves  de  leurs  ientimens.  Us  ne 
prouvent  rien  par  eux  mêmes  5  puifque  quelque  créance  qu'il 
ayent  eue  dans  l'efprit,  il  efl;  certain  qu'ils  ont  du  s'en  fervir 
fouvent  ;  mais  ils  prouvent  avec  ces  circonfliances ,  &  ils  font 
voir  de  quel  cofté.  les  Pères  font.  Nous  ne  ferions  pas  obligez  de 
montrer  icy  qu^ils  s'en  font  fervis  avec  les  circonftances  qui  les 
déterminent  au  fens  catholique,  puifque  nous  l'avons  déjà  fait 
dans  le  fécond  tome  de  laPerpetuité,où  nous  avons  montré  que 
les  Pères  ont  reconnu  un  changement  réel  &c  fubftantiel  dans 
l'Euchariftie,  &;  qu'ils  ont  enfeigné  dans-  un  fens  propre,  fimple 
&  naturel,  fans  figure  6c  fans  métaphore,  qu'elle  efl:oit  le  corps 
même  de  J.  C.  Car  ces  preuves  faifant  voir  que  les  Pères  ont  die 
quantité  de  chofes  contraires  à  la  créance  que  l'Euchariftie  foiî 
effectivement  du  pain  êc  du  vin ,  fuffilent  pour  déterminer  ces 
termes  à  n'en  fignifier  que  l'apparence.  Il  ne  fera  pas  néanmoins 
inutile  de  faire  voir  en  particulier  qu'ils  s'en  font  fervis  avec 
toutes  les  circonfcances  qui  peuvent  marquer  qu'ils  ne  croïoiene 
pas  que  l'Euchariftie  fuft  réellement  du  pain,éc  qu'ils  n'ont  obu 
fervé  aucune  des  chofes  qui  auroient  pu  faire  croire  le  contraire, 

Dd   iij 


114  1-Iv.  IV.  Képonfs  aux  pajfcges 


CHAPITRE    ï  1 1. 

Q^e  les  Pcrts  fc  funt  fcrvis  de  ce  lanq^<^ige  des  fcns  az'ec  toutes  les 
circoiifiances  qui  le  déterminent  au  fcns  Catholique .  Première  cir- 
xonjlance.  ^Rcponfe  a  ce  que  les  Miniftres  objetient  que  les  Perei 
difcnt  que  l' Eucharijlie  ricji  pay  un  pain  commun., 

LA  principale  êi  la  plus  decifive  des  circondances  que  nous 
venons  de  marquer,  efi:  que  lesPeres  qui  appellent  l'Eu- 
chariftie  pain^  nous  ayenc  averris  quelquefois  que  ce  que  nous 
voyons  n'eft  pas  du  pain  ,  &;  qu'il  ne  s'en  faut  pas  rapporter  au 
gouft,  ni  aux  autres  iens. 

S'ils  avoient  crii  que  ce  fik  du  pain,  cela  ne 'Te  devroit  Ja- 
mais trouver  dans  leurs  écrits,  mais  il  ne  senfuivroic  pas  qu'ils 
î'eufienL  cru  quand  ils  ne  l'auroientpis  fait,  y  ayant  beaucoup 
d'autres  manières  d'exprimer  cette  même  vérité.  Il  fuffiroic 
bien  pour  nous  faire  entendre  que  l'Euchariftie  n'eft  plus  du 
pain  qu'ils  nous  ayent  déclaré  polîîtivement  qu'elle  eft  le  corps 
dej.  C.  &:que  le  pain  eft  changé  en  celaint  corps  ^  mais  il  n'y 
aura  pas  lieu  de  douter  de  leurs  fentimens  fur  ce  point,  fi  l'on 
y  trouve  une  decifion  fi  précife.  Et  c'eft  néanmoins  ce  que  l'on 
y  voit  en  plufieurs  endroits. 
-Catech.  j.  S.  Cyrille  dc  Jerufalem  cft  du  nombre  de  ceux  qui  appellent 

Mj'it.  l'Euchariûie ///M.    Car  quand  il  dit  que  le  pain  de  1  Eucha- 

riftie  eft  le  corps  de  J.  C.  ildefigne  l'Euchariftie  par  le  mot  de 
/'.'?/'«,  &  il  fe  fert  encore  de  ce  même  mot  plus  exprelTément, 
Cjtech.      ^,  lorfqu'il  dit  que  ce  pain  ne  defcend  point  dans  le  ventre,  qu'il 
■■''  '^'  "  „  ne  va  point  au  lieu  des  excremens ,  mais  qu'il  ell:  diflnbué  ea 
'  ,„  tout  rhomme  pour  l'utilité  de  i'ame  &  du  corps. 

Voyons  donc  s'il  s'enfuit  que  cet  Auteur  croyeque  TEucha- 
,€atec!i.4.  riflie  eft  du  pain,  parce  qu'il  l'appelle  ^^m.  Il  faut  croire^  dit- 
il,  fermement  que  le  pain  que  l'on  voit  n'eft  pas  du  pain ,  quoy  que  U 
^ottji  le  juge  tel ,  mais  le  corps  de  J.C.  &  que  le  vin  que  l'on  voie 
n'eft  pa-s  du  vin  ,  quoy  que  le  gouft  le  iule ,  mais  le  fang  de  Je- 
jus  Chrift. 

Voilà  la  difficulté  formée  &  réfoluë  en  la  manière  qu'elle  le 
.•devroit  eflre  par  un  homme  perfuadé  deiaprefence  réelle  &  de 
h.  tranllubllantiation.  Voilà  ce  qu'on  ne  devroit  point  trouver 


ou  ï Euchxriflie  efl  appellée  pain  ^  fvtn.  2.Î5 

dans  les  Pères  s'ils  n'avoienteftë  perfuadez  de  ces  dogmes,  &:  Ch.  III4 
qui  dtinnenc  heu  de  conclure  qu'il  ne  s'enfuie  pas  de  ce  que  fé- 
lon le  rapport  des  {tx\s  ils  appellent  l'Euchariftie/'^ww ,  qu'ils  ne 
creuflènc  en  même  temps  qu'elle  n'eft  pas  du  pain  félon  l'in- 
ftruction  de  la  foy. 

C'efl:  encore  une  déclaration  exprene,qne  ce  que  nous  voyons 
dans  l'Euchanftie  n'eft  pas  du  pain  ,  que  ce  que  S.  Ambroi- 
fe  dit  dans  le  livre  qu'il  a  fait  pour  les  nouveaux  baptifez  :  Vous' 
vie  dircz^peut-efire  5  /^  vcy  autre  chofe  l  comment  me  dites-vous  que 
j.e  recoy  le  corpsdej.  C?  //  faut  donc  que  je  vous  prouve  cette  venté. 
De  combien  d'exemples  nous  pouvons-nous  fervir pour  l'établir?  Je 
veux  donc  faire  voir  que  ce  n'e/i  point  ce  que  la  iiaturc  a  formé,  mais 
ee  que  la  benediHion  a  confacré. 

Car  il  eft  clair  que  dans  ce  pafîàge  le  fens  de  cette  objecliom- 
"je  voy  autre  chofe  h  comment  me  dites-  vous  que  je  re(^oy  le  corps  de 
y.  c  ?  eft.  Je  voy  du  pain;  comment  me  dites-vous  que  je  re- 
eoy  le  corps  de  j-.  C  ?  &  qu'ainfi  l'objeclion  fuppofe  que  ce  fonc 
deux  choies  incompatibles,  que  l'on  voye  du  pain,c'eft  à  dire 
que  l'objet  que  l'on  voit  foit  du  pain ,  ù.  qu'ilfoit  le  corps  de 

Si  S.  An^broife  avoit  cfté  Calvinifte ,  il  auroir  avoué  la 
première  paitie  de  l'objrtiion .,  £c  auroit  nié  la  féconde.  C'eft  à- 
dire  qu'il  auroit  dit  :  Il  eft  vray  que  vous  voyez  du  pain  ,  que 
vous  recevez  du  pain  ;  mais  il  n'eft  pas  vray  aufîî  que  vous  re- 
ceviez le  corps  de  J.  C.  vous  recevez  feulement  fâ  figure  &  fb* 
vertu. 

S'il  avoit  efté  Luthérien,  il  auroit  avoiié  l'une  &  l'autre  j  & 
û  auroit  dit  :  Il  eft  vray  que  vous  voyez  du  pain  :  mais  vous  re- 
cevez auffi  le  corps  de  J.C.  Mais  s'il  a  efté  Catholique,  il  a  du 
nier  que  ce  que  l'on  voit  fuft  du  pain  j  &  a  dà  ioutenir,  que 
cet  objet  eftoit  le  corps  de  ].  C.  Et  c'eft  proprement  ce  qu'il  a 
fait,  &  ce  qui  eft  enfermé  dans  ces  paroles  :  Je  veux  ,  dit  il , 
faire  voir  que  ce  n'cfi  point  ce  que  la  nature  a  formée  mais  ce  que  la 
bénédiction  a  confacré ,  <c^  que  la  force  de  la  bénédiction  ejl  plus 
grande  que  celle  de  la  nature. 

Car  le  fens  de  ces  paroles  eft ,  que  ce  n'eft  point  du  pain  que 
la  nature  a  formé,  mais  le  corps  de  J.  C.  que  la  bénédiction  a 
confacré. 

On  peut  trouver  une  femblable  déclaration  ,  dans  cepafîage 
d£  l'âuteur  du  livre  des  Sacremens  :  Avant  la  confecration  c'e^- 


ii6  Liv.  IV.  Répofîfè  aux  pa.[fiiges 

du  pain  ;  après  quon  a  prononce  les  paroles  de  7.  C'.  lefi  le  corps  de 
J.  C.  Car  c'eft  la  même  cho(e  que  s'il  difoit  :  Avant  la  confe- 
cration  c'eftdu  pain  ^  mais  ce  n'en  efl:  plus  après  la  confecra- 
rion.  Et  quand  il  dit  de  m-cme:  Avant  qu'on  pronocc  les  paroles 
de  J.  C.  £ejl  un  calice  plein  d'eau  d^  de  vin ,  mais  quand  les  pa. 
rôles  de  J.  C.  ont  fait  leur  effet ,  le  fa7ig  qui  a  racheté  le  peuple  e^ 
■produit  dans  le  calice.  Ceft  comme  s'il  difoit  J  avant  la  confe- 
cration  le  calice  eft  plein  de  vin,  mais  après  la  confecration  il 
ne  contient  plus  devin. 

Car  il  efl  clair  qu'il  reprcfente  dans  ces  lieux  eflre  pain  ^ 
eflre  corps  de  J.  C.  cftre  vin  &  cfrc  fang  de  J.  C.  comme  deux  pro- 
poficions  incompatibles ,  dont  l'une  exclut  l'autre.  Si  c'eft  du 
pain  avant  la  coui'ecration  ,  ce  n'eft  donc  pas  le  corps  J.  C. 
Si  c'efl:  le  corps  de  C.  J.  C.  après  la  confecration ,  ce  n'efl  donc 
pas  du  pain. 

Je  n'ay  pas  befoin  de  m'arrêrer  icy  à  réfuter  les  vaines  chi- 
caneries,  par  lefquelles  les  Miniftres  tournent  ces  paflàgesà 
leurs  (ens  chimcriqaes  de  tîgure&  de  vertu,  parce  qu'on  l'a  fait 
pleinement  dans  le  fécond  Tome.  Et  ainfi  nous  avons  droit 
d'en  tirer  maintenant  les  conclufions  qu'ils  nous  fournilîènc 
d'eux  mêmesqui  font  que  ceque  les  Pères  appellent  quelque- 
fois pajn  dans  l'Euchariftie  n'eft  pas  néanmoins  du  pain  que  la 
nature  a  formé,  mais  le  corps  de  J.  C.que  la  confecration  a 
produit. 

Saint  Cliryfoftome  auflî  bien  que  les  autres  Pères  appellent 

1  Euchariftie  du  mot  de  pain  &  devin.,  comme  quand  il  àitqae 

Inpfalm.jio,  Melchifcdech  a  au^ offert  du  pain  (f;- du  vin^  c'eft- à- dire  qu'il  en  a 

offert  comme  J.  C.  Si  quand  il  appelle  vin  &  fruit  de  vi^ne  ce 

Hom.  S;,  in   quc  J-  C.  donna  à  fes  difciplesdans  la  dernière  Cène.  Maisde- 

Matth.  mandez  luy  exprelTément  s'il  faut  croire  que  l'Euchariftie  foit 

du  pain  &  du  vin?  &il  répondra  en  termes  précis  :  Ne  regarde!^ 

Hom.  de  Eu-  p^rf  cela  commc  du  pain.    Ne  croyez^pa^  que  ce  foit  du  vin.  Car  ces 

chofes  ne  vont  pas  au  lieu  des  excremens  comme  les  antres  viandes. 

Je  fçay  bien  que  le  Miniftre  Aubertin  s'infcrit  en  faux  con- 
tre cette  trjlduclioD  :  Neregardcz^pas  cela  comme  du  pain,  dC  qu'il 
prouve  que  cette  exprefîion  (mIS"  oV/  ctp Vo/  t^\  7J^»j"  ,  ne  quod 
■panis  efi  afficias  5  peut  fignifier  5  Ne  faites  pas  reflexion  que  c'efl 
du  pain ,  èc  r;ue  fxint  CKryfoftome  s'en  fert  quelquefois  ,  non 
pour  nier  ce  qui  eft  cffedivement ,  mais  pour  empêcher  que 
Ton  n'y  fafle  réflexion.  Comme  quand  ce  même  Saint  dit  en  un 

endroic 


ciiar.  in.Eu- 
cxa. 


ou  tEucharifiie  efi  appcllce  pain  ^  njin,         217 

endroit,  ix-^l  ^^(iç^X^  0  XÇoi'oî  '«"^is  ,  c'eft-d-dire;  Ne  regar-  Ch.  III. 
dezpas  que  le  temps  efl:  court,  il  ne  veut  pas  dire  que  le  temps 
ne  foit  pas  court  3  il  veut  feulement  qu'on  n'y  failè  point  re- 
flexion. 

Mais  ce  Miniflre  auroit  dû  voir  qu'il  ne  prouve  qu'une  partie 
de  ce  qu'il  devroit  prouver ,&;  que  ce  qu'il  ne  prouve  point, 
détruit  ce  qu'il  prouve. 

Car  il  faut  remarquer  que  Saint  Chryfoflomene  dit  pas  feu- 
lement ,  nequodfanis  fit  afpicia-s  ^  mais  qu'il  dit  de  plus ,  nequod 
vinumfit  arbitreris.  OrAubertin  fait  bien  voir  que  la  première 
partie  de  ce  paiTage  peut  fignifier  ,  ne  faites  pas  réflexion  que 
c efi  du  paini  mais  il  ne  prouve  point, &  ne  fçauroit  prouver 
que  ces  paroles  ,  yin^  oti  uvoi  'éii  vo/tiVn/ ,  puiiîènt  fignifier  autre 
chofe  ,  finon  ,  ne  croyez  pas  que  ce  foit  du  vin  5  nequodvinum 
fit  arbitreris.  Il  ne  produit  aucun  exemple  où  ces  paroles  foienc 
prifes  en  un  autre  fens.  KO;UiTo ,  fignifie  croire  ,  penfer,  juger, 
&  non  faire  reflexion.  Si  donc  la  première  partie  efi  équivo- 
que ,  la  féconde  détermine.  Et  comme  elle  lignifie  clairement 
qu'il  ne  faut  pas  croire  que  ce  qui  efi:  dans  le  calice  foit  du  vin, 
elle  oblige  d'entendre  la  première  dans  ce  lens  ici ,  ne  regardez^ 
■pa^s  ceci  comme  du  pain. 

La  réponle  ordinaire  qu'Aubertin  fait  à  tous  ces  pafl!ages  j 
où  les  Pères  nient  abfolument  que  l'Euchariflie  foit  du  pain, efl: 
qu'ils  entendent  par  là  qu'elle  n'efl  pas  du  pain  commun.  Sur 
quoy  il  a  accoutumé  de  cirer  quelques  paiTages  de  faint  Juflin ,  - 
defaint  Irenée&de  faint  Cyrille  de  Jerufalem  ,  qui  difentque 
l'Euchariflrie  n'efl:  pas  du  pain  commun.  Ze  pain  ^^  le  vin  de  ^^^r^^'  *' 
l'Euchariflie  ^  ait  faint  Cyrille,  devant  la  flacrée  invacation  de 
l'adorable  Trinité  efloient  de  fimple  pain  ^  de  fimple  vinî  mais 
après  cette  invocation  c'efl  le  corps  de  J.C  ^  le  vin  efl  le  fang  de 
J.C  Et  ailleurs  ,  comme  le  pain  de  l'Euchariflie  après  l'invoca. 
tion  du  S.  Efprit  rH efl  plus  du  pain  commun ,  mais  le  corps  de  J.  C.  de 
même  le  faint  *•  hrefme  après  l'invocation  n'efl  plus  une  huile  fimple 
^  commune  ^mais  le  don  du  S-  Efprit.  D'où  il  conclut  que  puif.. 
que  les  Pères  nous  aflTurent  que  ce  n'efl:  pas  du  pain  commun 
6c  du  vin  commun ,  ils  entendent  donc  que  c'efl:  du  pain  6c^ 
du  vin. 

Il  appuyé  cette  confequencede  quelques  paflages  des  Pè- 
res, qui  parlant  de  l'eau  du  Baptême,  diient,  qu'ilnefaut  pa^ 
la  regarder  comme  de  l'eau  commune:  D'où  tant  s'en  faut ,  dit- 

Ee 


Car.  j.  Mj-ili 


ilS  Lîv.  ly,  Rcponfèaux  pitlpiges 

il ,  qu'on  puifle  conclure  qu'elle  n'eft  pas  de  l'eau  qu'il  en  faut 
conclure  au  contraire  que  c'eftj'de  l'eau. 
Mais  avec  tout  cela  cette  réponfe  n'eft  dans  le  fond  qu'un  fo- 
phifme,  comme  il  eft  aile  de  le  faire  voir.  Car  cette  exprel'- 
iîon  5  Ce  rCeJl  pas  du  pain  co7nmun  ^  cftant  compofée  de  deux 
idées,  elle  peut  eftre  aulfi  confiderée  comme  contraire  à  deux 
propoficions  ,  dont  l'une  eft  ;  Ce/I  du  paiti  5  l'autre  :  Ce  pain  eji 
commun.  En  un  mot ,  elle  peut  nier  ou  la  nature  du  pain ,  ou  la 
qualité  de  pain  commun. 

Par  exemple  quand  Ligaridius  Archevêque  de  Gaza  dit  de 
l'Euchariftie^i^fff  ce  rUcJlpafun^ain  commun  co7nmc  ccltty  qu'on  man- 
iée, ny  un  vin  commun  comme  ccluj' qu'on  boit ,  il  entend  que  ce  n'eft 
point  du  tout  du  pain.  Et  au  contraire  quand  les  Percs  nous 
difent  que  l'eau  du  Baptême  n'eft  pas  de  l'eau  commune, ils 
entendent  que  c'eft  de  l'eau.  On  ne  fçauroit  donc  juger  pre- 
cifément  par  l'expreflion  mcine,  laquelle  de  ces  deux  propo- 
rtions on  prétend  nier.  Mais  on  le  juge  par  la  fuite,  &  par 
l'adverfativc  que  l'on  y  ajoute.  Car  fi  elle  ne  détruit  que  la 
qualité,  on  juge  qu'il  n'y  a  que  la  qualité  niée.  Et  fi  elle  dé- 
truit la  fubftance  même^on  juge  que  la  fobftance  même  eft  niée. 
Ainfi,  parce  que  la  raifon  pour  laquelle  les  Pères  nient  que 
l'eau  du  Baptême,  ou  l'huile  de  la  Confirmation,  foient  de 
l'eau  ou  de  l'huile  communes,  &  qu'ils  ont  une  eiîîcace  fùrna- 
Curelle,on  a  raifon  de  conclure  que  c'eft  ncanmoinsde  l'eau  & 
de  l'huile  en  fubftance  5  parce  que  l'efficace  n'exclut  que  la  qua- 
lité d'eau  commune,  6c  d'huile  commune,  &  non  la  fubftan- 
ce même. 

Mais  il  n'en  eft  pas  ainfi  à  l'égard  de  l'Euchariftie.  Qiiand  les 
Pères  n®us  difent  ,que  ce  n'cjl pas-  du  pain  commun  ,  (^  de  Jîmple 
vin ,  cela  peut  eftre  équivoque.  Mais  quand  ils  ajoutent  comme 
ils  font,  mais  le  corps  de  J.  C.  l'équivoque  eft  levée.  Car  cette 
addition  détruit  non  la  fimple  qualité  de  pain  commun  &  d'eau 
commune ,  mais  auiïi  l'eftre  même  de  pain  &  de  vin.  Et  c'eft 
pourquoy,au  lieu  que  les  Pères  qui  nous  difent  que  l'eau  du  Bap- 
tême n'eft  pas  de  l'eau  commune ,  ne  nous  difent  jamais  que 
ce  n'eft  pas  de  l'eau,  les  Pères  mêmes  qui  nous  difent  que  ce 
n'eft  pas  du  pain  commun  &  de  fimple  vin ,  nous  difent  abfo- 
lument  Scfans  addition  que  ce  n'eft  pas  du  pain  ny  du  vin. 


où  ÏEuchuriflie  efi  appellée  pain  ^  ^oîn.        i\() 


Ch.  IV. 


C  H  AP  ITRE     I  V. 

Autrei  circonfiances  qui  déterminent  les  mots  de  pain  ^  de  vin 

à  ne  Jîyiificr  qu'un  pain  d^  un  vin  apparent.  Comparai fon 

de  l'Eucharifiie  avec  le  Sacrifice  de  Melchifedech. 

CEt  T  E  première  circonftance  qui  détermine  le  fens  des 
mots  de  pain  &  de  vin ,  quand  les  Pères  les  appliquent  à 
l'Eucharifl:ie,nous  donnant  déjà  lieu  de  conclure  abfolumenc 
qu'ils  ne  les  ont  pu  entendre  que  dans  le  Tens  Catholique ,  elle 
fera  encore  infiniment  fortifiée  par  les  autres  que  nous  avons 
remarquées. 

La  féconde  de  celles  que  nous  devons  confîderer,  eft  fi  les 
Pères  enappellant  l'Euchariftic/'i^/;?  ôcx'/'w,  ne  nous  ont  point 
dit  plufieurschofes  qui  foient  incompatibles  avec  les  idées  d'un 
pain  réel  2c  d'un  vin  effedif.  Ils  ne  l'ont  pomt  dû  faire,  s'ils  les 
ont  entendus  au  fens  des  Calviniftes  ^  Scils  l'ont  dû  faire  ,  s'ils 
les  ont  pris  au  fens  des  Catholiques.  Or  nous  ne  femmes  pas 
obligez  de  prouver  ici  qu'ils  l'ont  fait,  puifque  tout  ce  que  nous 
avons  dit  du  fentiment  des  Pères  dans  le  fécond  volume  ,  en 
contient  la  preuve.  Car  quand  nous  avons  montré  que  félon  les 
Pères  ,  le  pain  confacré  étoit  le  corps  même ,  le  corps  propre  , 
Je  corps  véritable  de  J.  C.  &que  nous  avons  refuté  les  fens  de 
figure  &de  vertu  aufquels  les  Miniftres  veulent  détourner 
leurs  paroles,  nous  avons  fait  voir  que  félon  les  Pères  l'Eucha- 
riftie  n'eft  pas  du  pain  6c  du  vin ,  puifqu'eftre  du  pain  &;  du  vin 
enfubftance,  &:  eflre  le  corps  même  de  J.C.  font  des  chofes 
incompatibles,  &  félon  la  vérité,  £c  félon  le  fentiment  des  Cal- 
viniftes ,  &  félon  celuy  des  Pères. 

Nous  montrerons  donc  feulement  ici  que  les  Pères  en 
ont  ufé  de  la  forte  dans  les  lieux  mêmes  ou  ils  appelloienc 
l'Euchariftie  du  nom  de  pain  &  de  vin  :  ce  qui  fuffit  pour  faire 
voir  qu'il  n'étoit  pas  difficile  aux  Fidelles  de  prendre  ces  ter- 
mes dans  un  fens  conforme  à  la  doélrine  des  Catholi- 
ques. 

S.  Juftin  par  exemple  eft  un  de  ceux  qui  appellent  le  plus  pre. 
cifément  l'Euchariftie  confacrée  des  noms  àepain  &  de  vin  jnon. 
feulement  dans  fon  dialogue  contre  Triphon ,  mais  auffi  dans 

E  e  i j 


110  Liv.  IV.  Képoufè  aux p.ijfdges 

ce  lieu  célèbre  de  fa  féconde  Apologie,oùilexplique  la  créance 
des  Chrétiens  fur  ce  Myflere.  Car  il  y  die  exprclTèmenc,  ^?/^ 
ceux  que  l'on  appelle  Diacres  parmi  eux ,  donnent  ù  chacun  de  ceux 
qui  font  prefens  quand  on  célèbre  ,  du  pain  (^  du  vin  eonfacrez^  Mais 
Ç\  vous  demandez  au  même  S.  Juftin  ce  qu'il  faut  croire  de  ce 
pain  &dece  vin  confacrez,  il  vous  dira  un  peu  après,  que  de  la 
même  manière  que  J.  C.  noftre  Sauveur  qui  a  c (le  fait  chair  par  le 
Verbe  de  Dieu  ,  s'ej}  revêtu  de  chair  O-  de  fan^  pournojlre  falut  ■> 
ainfi  nous  avons  appris  que  cette  viande  &  ee  breuvage,  qui  parle 
changement  quils  reçoivent  en  nojlre  corps  nourriffcntnojîie  chair  ^ 
ont  la  chair  CT  le  fmg  de  ce  ynumc  Je  fus  incarne.  . 

Saint  Gaudence  appelle  rEuchariftie,  comme  le  remarque 
Awhtxùnjes  myfteres  du  pain  0  du  vin.  Maisil  dit.dans  le  mênie 
Traité,  quej.  C.  nous  fait  connoiftrc  que  le  vin  que  l'on  offre  en  fi- 
gure delà  paljîoneft  fon  fang.  Il  die  que  le  Créateur  &  le  Seigneur 
de  toutes  chofes  qui  produit  le  pain  de  la  terre  .,fait  du  pain  fonpro. 
fre  corps  .^parce  qu'il  le  peut  ^^  l' a  pro^nis .  Il  dit  qu'il  ne  faut  point 
douter  que  ce  ne  foitle  corps  de  7.  C.  parce  que  la  vérité  cfi  incapable 
de  menfonge  ,  ^  qu'il  faut  confu?ner  par  l'ardeur  de  la  foy  les  doutes 
qui  pourraient  re/rer  fur  ce  point. 

S.  Chryfoftome,  pour  réfuter  Tlierefie  desAquariens  ,  nous 
afliireque  lorlque  Jesus-Chi<.ist  donna  les  myfteres  à  fcs  Apô- 
tres ,  il  leur  donna  du  vin.  Mais  pour  s'aifurer  qu'il  n'entend  au- 
tre choie  par  là,  finon  qu'il  fe  fcrvit  de  vin  fie  non  d'eau  dans  les 
myfteres ,  &:  qu'il  ne  prétend  nullement  expliquer  en  cet  en- 
droit ce  que  J.  C.  fit  de  ce  vin  ,  il  ne  faut  que  faire  réflexion  que 
ce  lieu  efl:  pris  de  l'Homélie  83.  fur  S.  Mathieu, c'eft  à-dire  d'un 
difcours  où  la  doélrine  de  la  prclence  réelle  fie  de  la  tranfub- 
ftantiation  eft  très  clairement  filtres  fortement  exprimée,  fie 
qui  contient  toutes  les  propontions  fuivantes  -,  Que  ce quelafoy 
nous  en  feigne  de  ce  Myjlerefr,ihle  contraire  a  la  raifon  (y-  au  fens. 

Que  ce  qu'elle  mus  en  feigne ,  efl  que  c'cjl  le  corps  de  J.  C.  Ô' 
qu'il  le  faut  croire. 

Que  nous  avons  dans  ce  J\/fyfcre  plus  que  les  vetemens  de  J.  C. 
•puifquc  nous  l'y  touchons  Q;-  nous  l'y  mangeons  luy.  même. 

Que  J.  C,  s'y  donne  luy-  ?nènic. 

Que  nou^ y  fommes  mclez^avec  J.  C. 

Que  J.  C.  eji  l'unique  Tafîcîir  qui  nourriffe  fes  brebis  de  fespro' 
fres  metnbres. 

Qtftl  nous  y  nourrit  de  [on  propre  fang  ,  Ç;-  qu'il  n'y  fait  paf 


où  t LuchurijUe  efl  appellce  pain  (^  a;in.       azi 

comme  les  tncrcs  qui  donnent  leurs  cnfins  à  nourrir  à  d'autres.        Ch.  IV. 

Tout  cela  efl  die ,  répété ,  inculqué  dans  cette  homélie  d'une 
manière  (i  vive  ai.  Ci  forte  ,  qu'on  ne  fçauroit  comprendre  com- 
ment Aubertin  ,  qui  ayant  rapporté  ce  palfage  de  cette  même 
Homélie,  oùS.  Chryfoftome  ,  pour  réfuter  les  Aquariens ,  dit 
que  j.  C.  donna  du  vin  à  fcs  difciples  dans  ce  My  ftere ,  c'efl-à-  di- 
re qu'il  y  employa  du  vin  6c  non  de  l'eau ,  a  pu  s'écrier  comme 
il  fait ,  qu'il  attefte  la  confeience  de  fcs  adver [aires ,  s'il  n'cfl  fa^s     . 
vray  que  ce  feullteu  ,  où  S .Chryfojlomc  parle  hiftoriquemcnt  ^  do^.. 
matiquement ,  doit  prévaloir  à  tous  les  autres  où  il  fe  fcrtd'cx- 
•prc.fjions  hyperboliques.  Car  quand  on  détacheroit  ce  pallage  de 
tout  le  refte  de  l'Homélie ,  on  n'y  verroit  que  le  langage  de 
ceux  qui  voulant  marquer  la  matière  originelle  de  l'Eucha- 
riftie  ,  la  défigneroient  par  le  mot  de  vin.  Mais  fi  on  le  regarde 
avec  toute  la  fuite  de  cette  Homélie  ;  bien  loin  de  pouvoir  te- 
nir lieu  d'une  objedion  tant  foit  peu  difficile ,  il  fournit  au  con- 
traire une    preuve  convaincante  que  ces  fortes  d'exprefîîons 
n'ont  rien  d'oppofcà  la  doctrine  delatranfrubftantiation. 

Car  il  faut  remarquer  que  tous  les  termes  qui  marquent  fi  for- 
tement la  prefence  réelle  dans  cette  Homélie  ,  Scdans  tous  les 
autres  écrits  de  S.  Chryfoftome,  établifient  en  même  temps 
qu'il  n'y  a  point  de  pain  dans  l'Euchariliie  ;  parce  que  ce  Saint 
ries  propoiètous  comme  dcsconfequences  du  fens  de  ces  paro- 
les ,  ceci  eft  mon  corps  entendu  fans  figure  &  fans  métaphore,  qui 
ne  peuvent ,  fclon  les  Mmiftres ,  marquer  la  prefence  réelle 
qu'en  marquant  la  rranffubftantiationj  6:  qu'il  enfeigne  même 
formelJement,  que  le  pain  cjlfait  le  corps  de  j.  C.  par  changement. 
De  forte  que  c'eft  en  vain  qu'Aubertin  prétend  que  les  expi-ei- 
fions  de  ce  Saint  nefavorifent  que  les  Confubfiantiateurs,puif. 
qu'elles  ne  rendent  point  à  nous  faire  croire  que  le  corps  de 
J.  C.  eft  avec  le  pam  ;  mais  que  le  pain  eft  fait  le  corps  de  J.  C. 
&  eft  changé  &  transformé  en  ce  corps. 

Il  n'y  a  rien  aufîi  de  plus  commun  dans  les  Pères, que  de  com- 
parer le  facrificede  J.  C.  avec  celuy  de  Melchifedech,&  de  di- 
re qu'il  a  offert  du  pain  &  du  vin  comme  luy.  Et  c'eft  en  vain 
qu'Aubertin  fait  une  grande  lifte  de  ces  palTages^  puifqu'ils 
nedifent  en  cela  que  ce  que  Pafcafeadit  en  ces  termes;  Parce  Aubeit.j 
que  Melchifedecb  avait  offert  du  pain  (^  du  vin ,  //  a  eftc  ne  ce  ([aire 
que  le  vrav  Rov  de  paix  ,  C?-  noflre  Pontife  félon  l'ordre  de  Melchi» 
fcdeeh ,  offrit  les  mêmes  chofcs. 

E  e  iij 


lit  Liv.IV,  Réponje  aux piijfages- 

Et  c'eflr  ce  qu'HiIdeberc  a  exprimé  en  ces  vers  ici  : 
■    Utraque  fub  typico  ritu  formkqtie  fnturi , 
■Melchifedech  Domino  facrificajjc  ferunt. 

Utraque  difcipulis  cœ}if.mtibus  ipfe  Redemptor 
Tradidit,  in  corpus  utraque  verfa  fuum. 

Mais  Ç\  les  Pères  difent  que  J.C.  ofFroit  du  pain  &  du  vin 
comme  Melchifêdech  avoic  fait^ils  ne  nous  laiflenc  pas  à  deviner 
ce  qu'ils  entendent  par  ces  termesi&  ils  marquent  bien  claire- 
ment que  ce  pain  &  ce  vin  font  fon  corps  &  fon  Tang. 

C'eft  ainfii  que  S.  Cyprien  s'explique  dans  la  lettre  à  Corci- 
lius.  7-  C".  dit- il  ^a  offert  la  même  choje  que  Melchifêdech  ,f^avoir 
du  pain  ^  du  vin  ,  c^efi  à  dire  fon  corps  ^  fon  fang. 

Saint  Jérôme  fur  laGenefê.  Farces  paroles ,  diz-iX  ^  tu  es  Prê- 
tre félon  l'ordre  de  Mclchifcdech ,  noflre  tninifierc  efi  fiqnifîè  ,  parce 
qu'on  n'immole  plus  des  victimes  de  hefies  privées  de  rai  fon ,  comme 
fàifoit  Aaron  ,  mais  qu'on  offre  le  pain  ^  le  vin  ,  ccfî  à  dire  le  corps 
(jr-  lefingde  J.  C. 

Primafe  nous  dit  de  même  que  /.  C.  eflfait  Prêtre ,  non  tempo. 
tel,  mats  éternel  ^  (^  qu'il  n'offre  plus  des  victimes  pareilles  a  celles 
que  l'on  offroit  fous  la  loy  ,  mats  qu'il  offre  du  pain  ^  du  vin  comme 
Melchifêdech ,  cefi  a  dire  fa  chair  ^  fon  fang. 

Que  fi  l'on  veut  (çavoir  encore  plus  diftinâement  ce  qu'ils 
croyoientde  ce  qu'ils  appellent /^z/;;  Se  vin  ,  &  qu'ils  difent  que 
J.  C.  offroit  félon  l'ordre  de  Melchifêdech;  il  ne  faut  que  le  de- 
mander à  S.  Auguftin  ,  qui  après  nous  avoir  dit  que  le  Verbe  de 
Dieu  nom  a  préparé  une  table  avec  dupain'^ij;'  du  vin  félon  l'ordre 
de  Melchifêdech ,  explique  enfuite  ce  que  c'eft  que  ce  pain  bc  ce 
vin  ,  en  difant ,  que  le  Médiateur  du  nouveau  Teflament  nous pre^ 
fente  unfacrifîce  félon  l'ordre  de  Melchifêdech  ^  qui  conftjie  en  fon 
corps  (^  en  fon  fang  ;  que  ce  facrifice  a  fuccedé  à  tous  les  autres  facri- 
fices  de  l'ancien  Teflament  qui  efl oient  les  figures  du  facrifice  futur  : 
Et  c' efi  pourquoy ,  dit-il  ,  nous  reconnoiffons  que  c' efl  par  prophétie 
que  ce  même  Médiateur  dit  dans  le  ^^.  Pfeaume  :  Vous  rîavez^pas 
voulu  de  facrifice  ^  d'oblation  ,  ynais  vous  -iriavcx^ormé  un  corps  y 
fuifquau  Itcu  de  tous  ces  facrifices  ^  de  toutes  ces  eblations ,  c'efi 
fon  corps  qu'on  offre  (j;'  qu'on  difiribue  a  ceux  qui  y  veulent  parti' 
Ciper. 

Ce  Saint  s'explique  de  même  cîans  le  cinquième  chapitre  du 
même  livre.  //  rnarque  ,  dit-il  >  très -élégamment  far  ces  termes  , 
mander  le  ^ain ,  le  ^enre  même  dufairijics  dont  le  Prêtre  même 


oîi  l'Euch.iriftie  cfl  dppe  liée  pain  ^  fin.         izj        ^1 

llJUS  a  dit  :  Le  pain  que  je  donneray  efi  ma  chair  pour  lavie  du  mon-  C  H.  IV. 
de.  C'eji-là  le  fucrifice ^  non  félon  i.' ordre  d'Aaron,  mais  félon  celtty 
de  Melchifedech.  Saint  Chryfoftome  enfcigne  aufîi  exprefle- 
ment  que  l'Euchariftie  efl:  la  vérité  du  pain  &:  du  vin  offert  par 
Melchifedech.  Or  elle  ne  le  fcroit  pas  11  elle  n'efloit,  non  plus 
cjue'le  facrifice  de  Melchifedech,  que  du  pain  &  du  vin  figure 
du  corps  Se  du_rang  de  J,  C. 

C'efl  en  vain  qu'Aubertin  tache  d'éluder  ces  fortes  de  pafla- 
ges,  en  difant  qu'il  ne  s'enfuit  pas  que  l'Euchariftie  ne  foit  pas 
du  pain  &  du  vin ,  pour  avoir  eftë  figurée  par  le  pain  &  le  vin 
de  Melchifedech,  puifqu'il  ne  s'enfuit  pas  que  le  Baptême  ne  fe 
fafîè  avec  de  l'eau  pour  avoir  efté  figuré  par  diverfes  eaux 
dont  l'Ecriture  parle. 

S'il  eufl  raifonné  plus  juftement  il  auroitveu  que  ce  qu'on  ne 
conclut  pas  à  l'égard  du  Baptême,  fe  doit  conclure  à  l'cgard 
de  l'F.uchariflie.  Car  il  efl  vray  qu'il  ne  s'enfuit  pas  que  le  Bap- 
tême ne  fe  faffe  pas  avec  de  l'eau  pour  avoir  efté  figuré  par 
diverfes  eaux^mais  il  s'enfuit  qu'il  furpaflè  de  beaucoup  toutes 
ces  eaux  qui  l'on  figuré.  Or  fans  cefîer  de  fe  faire  avec  de 
.l'eau  ,  il  les  peut  furpafTerpar  l'efficace  particulière  que  l'Ea-i- 
ture  luy  attribue. 

Il  s'enfuit  donc  aufîî  precifément  de  ce  que  l'Euchariftie  eft 
la  vérité  du  facrifice  de  Melchifedech  qu'elle  furpafTe  de  beau- 
coup ce  facrifice.  On  ne  porte  pas  plus  loin  la  confequence  im-  ' 
médiate  que  l'ontirede  cette  qualité  d'eftre  la  vérité  de  cette 
figure.  Mais  cette  première  confequence  en  produit  neceffai- 
rement  une  autre,  qui  eft,  qu'elle  eft  donc  le  corps  de  J.  C. 
réellement.  Car  en  quoy  fans  cela  furpaflèroit-t-elle  le  facri- 
fice de  Melchifedech?  Seroit-ce  en  efficace?  Mais  il  n'eft  fait 
mention  nulle  part  de  cette  efficace.  Toute  fon  excellence  eft 
renfermée  dansces  paroles  :  cecy  eft  mon  corps.  En  les  prenant 
en  un  fens  de  figure,  elle  n'en  aura  aucun  avantage  fur  le  facri- 
fice de  Melchife  Jech,  car  le  facrifice  eftoit  aufTi  figure  du  corps 
Se  du  fang  de  J  C.  Il  les  faut  donc  prendre  dans  le  fens  littéral. 
Ainfi  l'excellé -ice  du  baptême  au  defTus  de  cts  figures  confî- 
ftant  dans  fon  efficace  marquée  par  l'Ecriture,  fubfifte  fans 
tranfTibftann.-'rion  :  &  celle  de  l'Euchariftie  au  contraire  ne 
pouvant  fu'^'lftcr  fans  prendre  à  la  lettre  ces  paroles:  cecy  eft 
mon  corp- ^  l'enferme  necefTairement. 

Mais  il  n'cft  pas  befoin  de  raifonner  pour  fçavoir  en  quel 


2,z4  Liv.  IV.  Képonje  aux  p.tjfigcs 

fens  TEuchariftie  eil:  appellée  par  faine  Chryloftome  vérité  du 

facrifîce  de  Melchifedech. 

On  ne  dira  pas  fans  doute  qu'elle  le  foit  autrement  qu'elle  l'eft 
de  tous  les  facrifices  de  l'ancienne  Loy.  Or  elle  ne  rcft  félon  ce 
Saint  que  comme  corps  &  fang  de  J.  C.  <S/  la  figure  de  ce  fang  , 
dit-il  en  parlant  de  l'Euchariftie  ,  a  eutat/t  de  forceda/is  le'icm- 

Homu"'4f      ^^^  ^'^^  J"^fi  '  ^^^^^^  /^^'^^    ^'^  f^'^^'^'  ^^  ^'^   venié  même    de  ce 
fang? 

lo  pfalm.  110.  Et  c'efl:  pourquoy  ce  Saint^qui  dit  en  un  endroit  que  J.  C.  efl: 
Preftre  félon  l'ordre  de  Melchiredech,parce  que  Melchifedech 
a  offert  à  Abraham  du  pain  &  du  vin,  comme  J.  C.  nous  dit  en 
d'autreSj  qu'on  offre  Je  fus-  chriftmème  au  lieu  des  vitiimes  de  l'an- 
cienne Loy  J  Se  ipftinijujjit  offcrri. 
Hom.  14.  In  S.  Jérôme  renferme  6c  explique  en  même  temps  la  penféede 
t^',:"l*^  S.  Chryfoflome  dans  ces  paroles  dont  on  a  établi  le  véritable 
lens  ailleurs.  Comme  Melchifedech  avait  offert  du  pain  &  du  vin 
en  figure  de  J.  C,  J,  C.  a  aufjî  emfloyè  les  mêmes  chofe  s  fourrions 
donner  ht  vérité  de  fon  corps  (^  de  fon  fang. 

Enfin  on  ne  peut  pas  marquer  plus  clairement  en  quel  fens 
on  dit  ,  que  J.  C.  a  offert  du  pain  d^  du  vin ,  comme  Melchife- 
dech,qu'il  eft  expliqué  dans  le  Commentaire  fur  les  Pfeaumes 
qui  fe  trouvent  parmi  les  Oeuvres  de  S.  Jérôme.  Comme  MeL 
chifedech  Roy  de  Salem  ^  dit  cet  Auteur,  a  offert  du  pain  d^  du 
vin  ,  de  même  votis  offrirez^vofire  corps  &voflre  fangqui  eft  le  vray 
pain  d"  lo  vray  vin.  C'eft  ce  Preftre  félon  l'ordre  de  Melchifedech 
qui  noîts  a  donne  les  myftcres  que  nous  en  avons  :  ou  dans  le  Trai- 
re que  S.  Ambroife  a  fait  pour  les  nouveaux  baptifez  ,  dans  le- 
quel après  nous  avoir  dit  que  ce  Sacrement  a  efté  offert  par 
Melchifedech  qui  a  béni  AhrdihdiTiwNon  igiturhumani  fed  di~ 
vini  d"  muneris  facramentum  quod  accepijli ,  ah  eo  prolatum  qui 
henedixit  fîdci  F atrem  Abraham  :  Ce  qui  eft  lamêmechofeque 
s'il  avoit  dit  que  ce  Sacrement  efl  du  pain  &  du  vin  comme 
celuy  de  Melchifedech  -,  il  ajoute  un  peu  après  que  ce  pain  eft 
le  corps  de  J.  C-  que  c'efl  la  chair  de  J.  C.  le  corps  de  la  vie  d^  du 
Maître  des  Cicux  ,  le  corps  de  l'Auteur  de  la  manne  i  que  c  n'eft 
pas  ce  que  la  nature  a  formé  ,  mais  ce  que  la  bénédiction  a  confacré, 
(^  que  cette  benediclion  eft  plus  forte  qtie  la  nature  ,  puifqu'ells 
chany:  même  la  nature. 

Tout  ce  que  les  Miniflres  peuvent  dire ,  eft  que  les  Pères  ne 
s'expliquent  pas  toujours  fl  clairement,  6c  que  comparant  le  ^z» 

cnfîce 


où  V Euchansîie  efl  appellée  pain  ^  ^în.  iiy 
crifice  de  J.C.  avec  celuy  de  Melchifedecli,  ils  ne  font  quel-  Ch.  IV. 
quefois  mention  que  du  pain  6c  du  vin^  comme  quand  S.  Au- 
guftin  dit  que  l'on  offre  par  tout  fous  le  Sacerdoce  de  J.  C.  ce  que 
Melchifedech  a  off'ert:  ce  qu'il  répète  en  plufîeurs  endroits  de 
fes  ouvrages. 

Mais  il  n'y  auroit  rien  de  moins  fenfé  que  cette  repartie.  Car 
il  auroit  ofté  ridicule  aux  Pères  de  ne  fe  fervir  jamais  de  cette 
expreffion  ,  flmsl'accompngner  d'une  explication  formelle.  On 
ne  fe  fert  de  ces  terme  que  parce  qu'on  (uppofe  qu'on  les  en- 
tendi  &  en  luppofant  qu'on  les  entend,  on  ne  fe  croit  plus  obli- 
gé de  les  expliquer. 

Ce  langage  eft  un  efpece  de  métaphore  &  de  métapho- 
re très-naturelle  j  comme  nous  l'avons  fait  voir.  Or  il  eft  en 
quelque  forte  contre  la  nature,  d'expliquer  les  métaphores.  Ce 
feroit  en  perdre  toute  la  grâce  ,  &.  les  rendre  foibles  &  languif- 
fantes.  Tout  ce  qu'on  peut  donc  prétendre,  eft,  que  comme 
on  revient  fouvent  du  langage  figuré  au  langage  naturel  ;  les 
Pères  après  avoir  appelle  l'Euchariftie  des  mots  ào.  pain  êcde 
vin  nous  ayent  dit  des  chofes  qui  fiflentvoir  qu'Us  croyoienc 
que  c'étoit  le  corps  de  J.  C.  Orc'eftce  que  nous  avons  montré 
qu'ils  ont  fait  fouvent.  Et  cela  fuffit  pour  en  conclure  qu'ils 
l'ont  toujours  penfé.  Au  lieu  qu'afin  d'arrefter  nos  cfpnts  dans 
l'idée  d'un  pain  &d'un  vin  matériel ,  tcrreftre,  &  (ubfiftant,  il 
faudroit  qu'ils  ne  nous  enflent  jamais  portez  à  regarder  ce  pain 
&  ce  vin  comme  le  corps  &  lefang  de  J.  Cil  faudroit  qu'ils  ne 
nous  euflent  jamais  dit,  qu'ils  font  changez,  convertis,  tranfele- 
mentez  au  corps  de  J.  C.  enfin  il  faudroit  qu'on  euft  effacé  de 
leurs  livres  tous  les  partages  que  nous  avons  raircmblezdans  le 
1.  Tome  de  la  Perpétuité,  qui  peuvent  tous  fervir  d'eclaircif- 
fement  au  fens  auquel  les  Pères  ont  appelle  l'Huche rifl:ie/<«^«  & 
-y/w^puifqu'ils  c  rnciennent  bc  qu'ils  marquent  ce  qu'ils  croyoient 
de  ce  pain  &;  de  ce  vin  ,  6c  du  changement  qui  y  arrive.  C'eft 
même  en  quelque  forte  par  des  vues  différentes  que  l'on  ap- 
pelle l'Euchariftie /^/Vz  6c  ^'/«,  en  la  comparant  avec  le  facrifice 
de  Melchifedech ,  6c  que  l'on  marque  qu'elle  efl  le  corps  de 
J.  C.  6c  ces  vues  ne  fe  rencontrent  pas  toujours  enfemble.  Car 
quelquefois  on  veut  fimplement  marquer  le  rapport  de  la  fi- 
gure à  la  vérité,  6c  quelquefois  on  veut  marquer  l'excellence 
de  la  vérité  au  deffus  de  la  figure.  La  première  de  ces  vues  porte 
feulement  à  dirCjque  commeMelchifedech  offroit  du  pam  6cdu   -. 

Ff 


C.  14. 


zz6  L 1 V.  I V.  Képonje  aux  pajfages 

•vin  j  de  même  J.C,  a  offert  auffi  du  pain  èv  du  vin.  Ccft  la  fé- 
conde vue  qui  porte  à  remarquer  que  le  pain  &  le  vin  quej.  C, 
offrit  écoient  changez  en  ion  corps  &  en  fon  Tan  g.  Ainfi  comme 
le  bon  fens  peut  tairs  juger  que  l'efprit  doit  fouver  t  demeurer 
dans  la  première  de  ces  vues,  il  doit  aufli  faire  conclure  que 
les  Pères  ont  deu  (ouvent  exprimer  les  rapports  du  facrifice  de 
Melchiledeclî  avec  celuy  de  J.  C.  fans  en  marquer  les  diffé- 
rences. 

On  peut  encore  remarquer  que  quand  unedodrine  ell:  éta- 
blie dans  l'Eglife  &  connue  de  tous  les  fidelles,  il  n'eft  pas  be- 
foin  de  l'exprimer  toute  entière  par  des  mots  capables  de  la  fai- 
re entendre  à  ceux  qui  n'en  auroient  pointentendu  parler. Il  fuf- 
fït  d'exciter  par  quelque  mot  qui  y  ait  rapport, toi.tes  les  idées 
que  les  fidelles  en  ont.  Or  c'efl  ce  que  les  Pères  ont  encore  fair 
fouvent. 

Aa.  p.>i.  Au'ocrtin  croit  eflre  fort  fubtil  en  concluant,  de  ce  que  Ter- 

tullien  dit ,  que  f.  C.  n'a  point  rejette  le  pain  p,,r  lequel  il  rend  fon 

Cont.  Marc,  (-g^p^  prefcnt^  que  le  pain  y  demeure  donc  Mais  il  devoit  pen- 
fer  que  les  fidelles  entendant,  que  le  pain  rend  le  corph  de  j  C, 
preienr,concevoient  incontinent  qu'il  ne'le  rendoir  prefentque 
parce  c^u'il .  ftoitfait  le  corps  de  J^  C.  &  qu'il  ell:oit  changé  en 
ce  corps  félon  rexpreiîion  déroutes  les  Liturgies. 

S.  Ignace  appelle  l'Ecichariflie  un  pnin  unique  qui  efi  le  remède 
à'e  l immortalité,  l'antidote  qui  nous  em^'cfche  de  monrir-^  mais  il 
marque  allez  par  là^  que  ce  pain  eft  le  corps  de  J  C.  puilqu'il  ne 
leroit  point  un  remède  &  un  antidote  contre  la  mortalité  s'il 
n'étoit  le  corps  de  J.  C.  &  que  toutes  cesqualitez  que  Saint 
Ignace  luy  attribue,  n'auroicnt  aucun  fondement  dans  l'Ecri- 
ture, fî  l'on  expliquoit  ces  paroles  :  Cecy  eft  mon  corps  ,  dans  le 
fens  de  figure,  qui  ne  les  produit  en  aucune  forte. 

Le  feul  titre  de  pain  unique  montre  que  l'on  ne  peut  entendre 
ce  pafTage  que  du  corps  de  J.  C.  Car  pourquoy  les  pains  de  la 
communion  qui  font  differens  en  nombre  feroient- ils  appeliez 
un  pain  unique^  Et  c'eft  en  vain  qu'Aubertin  réplique  au  Car- 
dinal du  Perron  qui  avoir  fait  cette  obfervation^que  S.  Ignace 
a  bien  pu  appeller  les  pains  de  l'Euchariftie,  un  pain  unique, 
comme  on  dit  qu'il  n'y  a  qu'un  baptême.  La  comparaifon  eft 
faufle.  On  ne  dit  point  qu'il  y  a  une  eau  unique  dans  le  Baptê- 
me,une  huile  unique  dans  la  Confirmation.  On  n'a  point  dit  des 
Juifs  qu'ils  mangeoient  un  même  agneau;  mais  on  dit  que  nous 
avons  un  feul  BaptêmCj  parce  qu'on  prend  ce  mot  non  pour  la 


oà  tEuchxriflie  efl  appUéepain  ^  <vin.  zxy 

matière  qu'on  employé  qui  eft  différence,  mais  pour  le  lave-  Ch.  IV. 
ment  intérieur,  qui  eft  un  dans  fa  fin  6c  dans  Ton  principe  mé- 
ritoire. 

Origene  nous  dit  contre  Celfe  ,  que  nous  mavy;oni  dans  l'E' 
^life  les  pains  qui  font  fervts  aux  fidèles  -^  mais  il  ajoure,  c^t  ces 
fains  font  faits  par  les  -prières  un  corps  faint ,  &  fanclifiant  ceux 
qui  le  reçoivent  avec  pieté ^  coiJi-a.yivà/^Qi  d^^  ilui   lù-iyi  à.ytô.Tt , 
■&  il  eftoit  ailé  aux  fidèles  d'entendre  par  ces  paroles  que  c'é- 
toit  le  corps  de  J.  C.  puifque  c'cftoit  ce  que  l'on  demaiidoit 
à  Dieu  par  ces  prières  dont  parle  Origene  ,  &  dont  il  leur  re- 
nouvelle la  mémoire ,  ce  qui  leur  y  remettoit  toutes  les  expref- 
fions  àss  Liturgies  qui  marquent  fi  bien  la  prelen^e  réelle,  que 
les  Minières  n'ont  point  trouvé  d'autre  fecret  d'en  empêcher  ^"^-  '^°"^-  '• 
l'imprelfion  que  de  les  abolir  autant  qu'ils  ont  pu  ,  comme  nous  AuU^iéi. 
l'avons  remarqué  ailleurs. 

Mais,  dit  Auberrin,  le  moyen  qu'Origene  ait  pu  dire  en  ce 
lieu  ,  que  le  pain  eft  fait  par  la  prière  le  corps  (ubll:antiel  de  J. 
C.  puifqu'au  même  temps  c]u'il  ccrivoit  ces  lettres  contre  Cel- 
/è,il  écrivoit  aufii  fes  livres  fur  S.  Matthieu,  où  il  dit  que  le 
pain  eft  fait  typique? 

La  refolution  de  cette  difficulté  eft  fort  aifée. 
C'eft  premièrement,  qu'Origene  ne  dit  point  ce  qu'il  fuppo- 
fe  qu'il  a  dit.  Il  appelle  bien  dans  fes  livres  iur  S.  Matthieu 
l'Euchariftie,  corps  typique,  comme  tous  les  Pères  l'ont  appelle  ï?  TAôrei 
antitype ^  fans  faire  aucun  préjudice  à  la  réalité,  comme  nous  A^^''  '^i  tv 
l'avons  montré:  mais  il  ne  dit  point  que  le  pain  c  fi:  fait  un  corps  tu-tt^oJ  x) 
/y/'/'^wf  comme  Auberrin  le  luy  fait  dire.Orilya  quelquediffe-  ^duCoA^xoc) 
rence  entre  ces  deux  expreflions.  Mais  quand  il  fe  fcroit  fervi  ca'f^xToi. 
de  la  dernière,  cela  fignifieroit  feulement  qu'il  auroit  eflé  fait 
Sacrement  du  corps  de  J.  C.  èc  il  refteroit  a  voir  fi  Origene  fe- 
roit  demeuré  dans  la  fignificationlirtcrale  du  mot  deSacremenr, 
ou  s'il  n'y  auroit  point  fuppleé.  Or  nous  avons  montré  qu'on 
doit  croire  qu'il  l'a  fait. 

On  ne  doit  pas  mettre  entre  les  pafi^ages  qui  ne  déterminent 
la  fignification  des  mots  de  pain  &  de  vin  que  par  des  épithetcs 
qui  fillent  reifouvenir  les  fidelles  de  la  créance  de  l'Eglife,  ce- 
luy  de  l'auteur  de  la  difpure  contre  Arriusqui  fe  trouve  parmy 
les  Oeuvres  de  S.  Athanafe  J  car  il  ne  fe  contente  pas  de  dire 
de  J.  C.  qu'il  nous  a  pre fente  une  table ,  ce^  a  dire  le  faint  Au- 
tel, ^  qu'il  y  a  mis  le  pain  celefte  incorruptible  qui  donne  la  vie  « 

Ffij 


2i8  L  I V.  IV.  Réponje  aux  pajfagsr 

tous  ceux  qui  y  participent-,  ce  qui  feroic  du  genre  dont  nous  par- 
lons i  mais  il  ajoute  expreflement  que  ce  pain  cft  fon  faim  é^  très- 
Jacrè  corps  :  ce  qui  eft  précis.  Ni  celuy  de  Julius  Firmicus^  qui 
nous  exhorte  à  chercher  le  pain  de'Jefus  Chriji  ^  le  calice  deJ.C.  afin 
que  mèprifant  les  chofes  terrcfires  ^  frugiles  ■,  la  (uh fiance  de  l'hom- 
me [oit  nourrie  par  cet  aliment  immortel.  Car  il  ne  fe  contente 
pas  âuffi  de  nous  faire  connoiftre  ce  que  c'eit  que  ce  pain.,  par 
ces  mots  aliment  immortel ^  qui  ne  iuy  conviennent  que  par  ce 
que  c'eil:  le  corps  de  Jésus  Christ.  Mais  il  ajoute  exprefTe- 
menc  dans  la  fuite  ^a^"  ce  pain  efi  celuy  dont  il  ejl  dit  ,f  vous  ne 
mangez^la  chair  du.  Fils  de  l'homme ,  &  ne  beuvez^  fon  frng ,  vous 
n'aurez^point  la  vie. 

Tous  ces  paflages  &  plufieurs  autres  qu'on  pourroit  alléguer 
fout  voir  fi  clairement  en  quel  fens  les  Pères  ont  appelle  l'Eu- 
chari(lie/'.z/?2&x'/«,  qu'il  eft  inutile  de  s'arrefteren  particulier 
à  quelques  uns,  où  ils  n'ont  point  ajouté  ces  éclairciflemens. 
Car  il  ne  faut  pour  en  reconnoître  le  vray  ièns,  que  fefouve- 
nir  de  ce  principe ,  que  ce  que  les  Pères  ont  exprimé  en  divers 
lieux  de  leurs  ouvrages  comme  leur  foy  &  celie  de  l'Eglife,  ils 
l'ont  toujours  eu  dansl'efprit  lors  même  qu'ils  ne  l'ont  pas  ex- 
primé; Qii'ainfi  il  eft  permis  de  l'entendre  par  leurs  expreC 
fions  ;  ôd  par  confequent  qu'on  doit  fuppofer  que  quand  ils 
nous  parlent  de  pain  &  de  vin, ils  entendent  ces  mots  d'un  pain 
changé  &  converti  au  corps  de  J.  C.  d'un  pam  qui  n'eft  plus 
ce  que  la  nature  a  formé  ,  mais  ce  que  la  bénédiction  a  confa- 
cré  ,  &  enfin  d'un  pain  qui  n'eft  plus  pain  ,  quoy  que  les'yeux  &; 
le  gouft  le  jugent  tel ,  mais  le  corps  de  Jesus-Christ. 


CHAPITRE    V. 

Ahus  qu^Auhertiné-M.  Claude  font  d'un  faffage  de  Clément  d'A- 
lexandrie ,  ^  d'un  autre  d'Oriqene. 

ON  a  fujet  de  craindre  que  les  perfonnes  judicieufes  ne 
trouvent  qu'on  s'eft  troparrefté  à  la  réfutation  des  confe- 
quences  que  les  Miniftres  tirent  des  pafi!ages  où  les  Pères  don- 
nent à  l'Euchariftie  les  noms  de  pain  &  de  vin  ,  &  qu'ils  ne  ju- 
gent qu'une  objedion  Ç\  foible  ne  meritoitpas  d'eftre  repoufTée 
avec  tancde  foin.Neanmoins  comme  ily  a  des  gens  qui  s'imagi. 


t 


on  tEuchurifiie  eBappellée  pain  ^  <vîn.  12.9 

nent  toujours  que  c'eft  par  finefTe  «qu'on  ne  rapporte  pas  certains  Ch.  V. 
pallagestout  au  long  ,  ôc  qu'on  n'y  répond  qu'en  gros  ^  Je  veux 
bien  leur  fa  ire  voir  que  l'on  ne  fe  difpenle  de  lefaire,  que  pour 
éviter  la  longueur  extrême  de  cette  méthode,  &  que  fans  cet 
inconvénient  qui  rendroit  les  ouvrages  inutiles  au  commun  du 
monde,  on  y  auroit  encore  plus  d'avantage  qu'en  aucune  autre. 
C'eft:  ce  qui  paroiftra  clairement  par  l'examen  que  nous  al- 
lons faire  d'un  palfage  de  Clément  d'Alexandrie  que  les  Mini- 
ftres  allèguent  d'ordmaire  comme  un  des  plus  forts  &  des  plus 
précis  qu'ils  ayent  fur  cette  matière. 

Monfieur  Claude  le  cite  trois  fois  pour  fa  part  dans  lechapi- 
rre  quatrième  delà  deuxième  réponfe.  Levoicydans  toute  ion 
étendue.  De  quelle  fone  croyex^vous  qu'a  bcu  le  Seiqiiicur  qui  i'cjl 
fait  homme poumojhe  falut  ?  Croyez^vou^  que  ce  fufi  avec  les  mê- 
mes emportemens  que  nous  ?  N'efioit-  ce  pas  au  contraire  avec  une 
modération  extraordinaire  ^  une  extrême  bonne/} e té  !  Car  vous  de- 
vez^fcavoirquil  a  ufe  de  vin  aufft  bien  que  nous  ,  puis  qu'il  efloit 
homme  comme  nous^^  ce  fut  du  vin  qu'il  bénit  lorfqail  dit  :  Prenez^, 
beuvez^:  Cecy  eji  mon  fan'Z, ,  ce  qu'il  dtfoit  du  fang  de  la  vigne  ,  cet- 
te liqueur' de  joye  qui fiyiifie  le  Verbe  répandu  fur plufîeurs pour  la 
rem' f ion  des  péchez^  Or  que  nous  foyons  obligez^de  garder  la  fobrie- 
té  dans  l'ufige  du  vin^cela paroifl  cLtirement  parles  inflruU ions  que 
Jefus-  Chrift  donnait  dans  les  fefiins.  Car  il  ne  les  euft  pu  donner  i' il 
euji  pris  du  vin  avec  excès. 

il  a  fait  voir  aujji  que  c  efloit  du  vin  que  ce  qu'il  bénit ,  en  di- 
fant  a  [es  difciples  ,  Je  ne  boiray  plus  du  fruit  de  cette  vigne  ju  fqu  à 
ce  que  j'en  boive  avec  vous  au  royautne  de  mon  Père.  Et  pour  mon- 
trer auffî  que  J.  C  bruvoit  du  vin  ,  //  ne  faut  que  confiderer  ce  qu'il 
dit  de  luy-mcme  en  reprochant  aux  'juifs  leur  dureté  :  le  Fils  de  l'hom- 
me ,  leur  dit-  il ,  efi  venu ,  (i^  ils  difent  :  C'cft  un  homme  qui  aime  a 
manger ,  c'efl  un  beuvcur  de  vin ,  un  ami  de  s  publicains .  C'efi  ce  que 
nous  établifons  contre  les  Encratites. 

Monfieur  le  Cardinal  du  Perron  avoit  répondu  très- judicicu- 
fementà  ce  palTage,  que  le  but  de  Clément  d'Alexandrie  n'é- 
toit  aucunement  de  juftifier  en  ce  lieu-là  que  ce  qui  étoit  dans  le 
calice  après  la  confecration  étoit  du  vin,  mais  que  c'étoit  du 
vin  avant  la  confecration, &:  non  de  l'eau  pure. 

Car,  dit- il  j  ildifputoit  contre  les  Encratites  qui  abhorroient  l'u- 
fage  du  vin  comme  impur  <^  poilu  en  toutes  chofes  5  ^pour  les  refu^ 
ter  .^  il  agi jf oit  par  deux  argumens  :  l'un  quenofire  Seigneur  avoit  bien 

F  f  iij 


ijjo  Liv.  I V.  Képonfe  aux  pajfciges 

luy-mème  du  vin  ;  ^  cela  il  le  vérifie  7wn  par  l' Eucharijîic, mais  par 
les  reproches  de  ceux  qui  l'appc liaient  hcuveur  de  vin:  l'autre  qu'il 
avait  béni  ^  confacré  du  vin  j  (^  cela  il  le  prouve  par  l' Eucharifiic 
O"  allègue  les  paroles  que  cite  le  fleur  du  PlcJJis ,  pour  montrer  que 
c'ejloit  du  vin  ,  ^  non  de  l'eau  pure  ijuil  bentt. 

Auberrin  entreprend  de  refucer  cette  rcponfe ,  &  il  le  fait  par 
quantité  de  fuppolîcions  ou  faulTes,  ou  incertaines,  ou  vaines  , 
comme  nous  Talions  montrer. 

Il  nie  premièrement  que  le  deflein  de  Clément  fufi:  de  réfu- 
ter les  Encrantes,  parce,  dit-ii ,  qu'il  n'en  eft  point  parlé  dans 
tout  le  refte  du  livre.  Mais  il  [v\^t.  qu'il  en  (oit  parlé  dans  ce 
pafTage  où  il  eft  parlé  de  boire  du  vin.  Or  Clément  ditexpreC 
lement  qu'il  établit  ces  maxime  contre  les  Encratites.  Il  les  y  veut 
donc  réfuter.  Il  eft  vray  qu'il  ne  les  réfute  qu'incidemment. 
Ji'îais  ce  n'eft  aufli  qu'incidemment  qu'il  établit  que  J.  C.  a  beu 
du  vin.  Sans  cette  veiieil  Tauroit  lUppofé  fans  preuve,  puifque 
ce  n'cftoit  pas  une  chofe  conteftee  entre  les  Catholiques. 

X.    Il  dit  que  le  but  dired  de  Clemert  eft  d'exhortpr  àla  fo, 
bricté.  Je  fçay  bien  quil  y  exhorteen  effet.  Mais  cela  n'empê- 
che pas  qu'il  n'ait  eu  auffi  en  veuë  de  réfuter  en  paûTant  les  En- 
cratites  ,  &  que  ce  ne  foit  dans  cette  veiie  qu'il  s'arrefte  à  prou- 
ver que  J.  C.  a  beu  du  vin  :  Scc'eft  chicaner  que, de  n'en  pas  de- 
meurer d'accord,  puifque  cet  Auteur  le  dit  en  termes  formels. 
Voilà  les  premiers  efforts  d'Aubertin.  Il  entreprend  enfuite  de 
combatre  ce  que  le  Cardinal  avoir  avancé,  que  Clcment  ne  prou- 
ve point  par  l' Euchariflie  que  I.  C.  ait  beu  du  vm,  mats  feulement 
parles  in  fuite  s  de   ceux  qui  l'appelloient  beuveur  devin.  Mais  il 
«'y  reuiTic  pas  mieux.  Clément ,à\t'\\ .,  avait  k  prouver  deux  cho. 
fes  i  l'une  que  I.  C  uvoit  beu  du  vin  '■>  l' autre  qu'il  en  fallait  ufer  mo- 
dérément. Or  il  prouve  le  premier  par  l' Euchariflie.  Si^achez.^^  dit- 
il  ,  qu'il  a  tifédc  vin  cum-nc  nous ,  parce  qu'il  étoit  homme ,  (^  que  ce 
fut  du  vin  qu'il  bénit.  Or  Clément  n'aurait- il  pas  efté  un  fiupide  de 
pouver  par  l' Euchar'ftie  que  1.  C.  avait  beu  du  vin  ,  s'il  n'eiit  cru 
que  I.  C.  y  avait  beu  du  vi'''  proprement  ditt 

Cet  argument  d'Aubertin  efî  encore  une  pure  ilîufion  ^  &  il 
p/elf  fondé  que  fur  un  faux  fens  qu'il  donne  à  ces  paroles  de  Clé- 
ment :  fcache'z^  ^V^'^J  ^-  ^'-  ^^"'  ^"  '^'"  ■>  ^"  ^^^  rapportant  à  l'Eu- 
c-iiariftie  ^  au  lieu  qu'elles  s'entendent  de  toute  la  vie  dej.  C. 
dans  laquelle  Clément  nous  alTure  qu'il  a  beu  du  vin.  Et  quant 
à  ces  pa.roles  :  Et  ce  fut  du  vin  qu'il  henit ,  c'eft  un  nouvel  argu- 


ou  ÎUuchdYÏflie  eji  appellée  pain  es*  'vin.         231 
ment  que  Clément  propcfe^  qui  n'eft  point  du  tout  la  preuve  Ch.  V. 
que  J.  C.  ait  beu  du  vin. 

Pour  entendre  cela,  il  faut  fuppoferque  Clément  en  cet  en- 
droit a  deflein  de  réfuter  en  palfant  l'herefie  des  Encracites, 
comme  il  le  dit  luy-même  en  termes  formels.  Or  ces  Héréti- 
ques nioient  le  fait  6c  le  droit.  Je  veux  dire  qu'ils  diloient  que 
T.  C.  n'avoit  point  beu  de  vin  ,  &  qu'il  n'en  avoit  point  dà 
boire ,  parce  que  c'ëtoit  un  eftre  impur  &  poilu.  Clément 
foûtient  donc  le  contraire  de  ces  deux  erreurs,  par  deux  clau- 
fes  différentes.  Il  dit  que  J.  C  avoit  beu  du  vin  par  ces  paroles: 

chez^quil  a  heu  attjji  au  vin^  farce  qu  il  ejioit  ho7nme  comme  nous. 
Et  il  combat  le  principe  qui  eftoit  l'impUrecë  du  vin,/'^ra'  que 
ce  fut  du  vin  que  J.  C.  henit.  Or  iln'auroit  pas  choifiun  eftre  im- 
pur pour  le  bénir.  Ainfî  par  la  prem.iere  raifon  il  détruit  la 
pratique  des  Encratites  parcelle  de  J.  C.  &  par  la  féconde  il 
détruit  le  principe  des  Encratites  par  la  benediclion  que  J.  C. 
fit  du  vin.  Mais  ce  tuntdeux  raiions  toutes  différentes^  &  Au- 
bertin  les  confond,  ridiculement.  Quand  Clément  dit  que  J.  C- 
a  beu  du  vin,  il  entend  qu'il  en  a  beu  dans  le  cours  de  fa  vie. 
Quand  il  dit,  qu'il  en  bénit  dans  l'Euchariftie,  il  prouve  qu'il 
n'etoit  pas  impur. 

La  fuite  du  palfage  fait  voir  manifeftement  la  vérité  du  fens 
que  nous  y  donnons,  &  que  ce  font  deux  claufes  feparées  ;  l'une 
que  J.  C.  a  beu  du  vin,  l'autre  qu'il  a  béni  du  vin  :  que  l'une  fe 
rapporte  à  toute  la  fuite  de  la  vie  de  J.  C.  ôc  l'autre  s'entend  de 
l'Euchariftie.  Car  après  avoir  propofé  ces  deux  claufes,  il  les 
reprend  toutes  deux  dans  la  fuite,  quoyque  dans  un  ordre  ren- 
verfé  5c  les  prouve  chacune  à  part,  en  les  prenant  dans  le  fens 
que  nous  avons  marqué.  Il  prouve  premièrement  la  dernière, 
qui  eftque  c'étoit  du  vin  que  J.C.  avoit  béni,  par  ces  paroles 
qu'il  ditdans  la  dernière  Cène,  Jcne  hoiray  plus  du  fruit  de  cette 
vizne  jufqua  ce  que  f  en  boive  avec  vous  dans  le  Royaume  de  mon 
Père.  Et  il  prouve  la  première,  qui  cft  qu'il  beuvoitdu  vin  or- 
dinairement,par  le  reproche  que  les  Juifs  luy  fa.iCoient  d'efre  un 
beuveur  devin ^  en  propofantféparémentces  deux  points  &  les 
preuves  dont  il  les  appuyé. 

Ainfi  le  rapport  qu'aubertin  fait  de  qq.%  paroles:  Scaehcz^que 
J.  C.beuvoit  du  vin  z  l'Euchariftie  eft  une  pure  vifion  ;  auHl 
bien  cpe  tout  ce  qu'il  y  ajoute,  o^x^  Clément  a  voulu  prouver  que 


z^r  Liv  .IV.  Képonfe  aux  piijfiges 

nous  pouvons  boire  du  vin  ^  farce  que  J.  C.  en  avait  beu  dans  l^Eu- 
charifitc  :  Qu'il  faUoit  donc  que  ce  fuft  du  vin  cfj'eciif  qu'il  y  beut^ 
fuifqu' autrement  on  ne  pourrait  conclure  delà  que  nvus  en  fui,IJions 
boire.  Car  Clément  n'employé,  comme  nous  avons  dit,  la  be- 
nedidiondu  vin  que  J.  C.  liten  confacrant  l'Euchariftie,  que 
pour  montrer  qu'il  n'abhorroit  pas  le  vin  ,  puilqu'il  le  benif- 
ioit  :  &:  ce  raifonnement  n'a  point  du  tout  beloin  que  J.  C.  aie 
bu  du  vin  dans  l'Euchariftie. 

Le  rroifiérae  avantage  qu'Aubertin  prétend  tirer  de  ce  paf- 
fage,  efl;  fondé  fur  ce  que  Clément  alTure ,  que  ce  fut  du  favg  de 
la  vigne,  c'eft-à-dire  du  vin  dont  J.  C.  dit.  Cccy  e/lmon  fang.  D'où 
Aubertin  conclue  à  fon  ordinaire  qu'il  n'a  pu  prendre  ces  pa- 
roles: Cecyefl  mon  corps  .^  en  un  fensde  tranflubftantiation.  Mais 
nous  avons  refuté  d'une  telle  forte  ce  fophilme  ,  qui  n'effc  qu'un 
argument  à  quatre  termes,  dans  le  fécond  Tome  delà  Perpé- 
tuité, que  je  ne  fçays'il  prendra  encore  envie  à  quelque  Mi- 
niftre  de  s'en  fervir. 

Celuy  qu'il  prétend  tirer  de  ce  que  Clément  dit ,  que  le  vin 
figure  le  Verbe  .,  par  allégorie  ,  efl:  encore  détruit  dans  un  autre 
lieu  du  même  Ouvrage  où  l'on  montre  que  c'efl:  un  fophilme 
vifible  de  prendre  pour  une  explication  de  cette  propofition  : 
Cccj  cfi  mon  corps  .^  &  que  les  Pères  difent  des  raifons  du  choix 
que  |.  C.  a  fait  du  pain  &,  du  vin  pour  en  faire  la  matière  de  l'Eu- 
chariftiej  parce  qu'il  y  a  une  extrême  différence  entre  mar- 
quer les  rapports  myftiques  du  pain  &:  du  vin,  &  de  l'eau,  ou  au 
Verbe,  ou  au  peuple  &  à  l'Eglife,  ou  au  fang  de  J.  C.  ôc  expli- 
quer littéralement  cette  propofition-.  Cccy  ejtmon  corps. 

Le  cinquième  efl:  ,  dit  il,  que  Clément  prouve  que  c'était  de 
vray  vin  ,  quoyque  confacré.,queJ.C.  avait  beudans  la  célébration  de 
L'  Euchari(lie.^lorfqu  il  dit  que  le  Seigneur  l'a  fait  voir  encore  en  di- 
fant:  Je  ne  boiray  plus  du  fruit  de  cette  vigne. Car  ces  paroles, ait  il, 
ne  montrent  pas  que  J.C.ait  bit  du  vin  dans  lEucbar  ifiiejî  l'on  n'en- 
tend du  vray  vin  par  ce  fruit  de  vigne. 

Mais  c'eft  encore  une  fauiTeté  d'Aubertin  que  cet  argument 
qu'il  fait  faire  à  Clément  Alexandrin.  Car  comme  l'a  remar- 
que le  Cardinal  du  Perron  ,  il  ne  veut  prouver  en  aucune  forte 
que  J.  C.  ait  bu  du  vin  dans  l'Eucharifliie  ,  mais  que  c'étoit  du 
vin  qu'il  bénir  ,  comme  le  portent  expreifcment  les  paroles 
Grecques ,  en  S^i  oîvoe  to  eiiAoyîioS'É''  aTtiS^n^i  Ttdxi.  Il  ne  dit  pas 
<juej.  C. fait  voir,  que  c'étoin  du  vin  qu'il  avok  bû,  comme 

Aubertin 


euïEuchàriflie  eji  appellée  pain  't£  <vin.  133 

A'ubertinlLiy  faic  dirc.Maisiliiit  quej.  G.  a  fait  voir  que  c'eftoïc  Ch.  IV. 
du  vin  qu'il  avoïc  béni. 

Qiie  fi  M.  Claude  réplique  que  l'on  ne  Tçaurcit  faire  voir 
que  J.  C.  a  béni  du  vin  par  ces  paroles  :  Je  ne  boiray point  du  fruit 
de  cette  vi'ine  ^  que  l'on  ne  faflè  voir  en  même  temps  que  J.  C. 
en  avoit  bû  ;  puifque  fi  ce  pailâge  prouve  par  le  mot  de  fiuit 
de  vigne  que  c'eftoit  du  vin  que  J.  C.  avoit  béni,  il  prouve  aufiî 
par  ceux  de  nonhibum^  qui  fuppofent  que  J.  C.  avoit  fait  ce 
qu'il  dit  qu'il  ne  fera  plus  que  dans  le  Royaume  de  fon  Père  , 
qu'il  en  avoit  bu  effectivement  :  on  luy  répondra  que  cet  ar- 
gument propofé  en  cette  manière  feroit  un  peu  plus  fubtil  que 
ceux  d'Aubertin  ,  qui  ne  font  que  des  falfincations  vifiblesou 
du  texte  ou  du  fens  de  Clément  d'Alexandrie  :  mais  qu'après 
tout  ce  ne  feroit  qu'une  faulfe  fubtilité.  Car  ce  paflage,  je  ne 
hoiray  point  du  fruit  de  cette  viiine  ,  prouve  fort  bien  que  c'eftoit 
du  vin  que  J.  C.  avoit  béni ,  fans  prouver  que  ce  fufi:  du  vin 
qu'il  avoit  bû. 

La  raifon  en  efl: ,  que  fi  ces  mots  de  pain  &  de  vin ,  de  froment, 
&  de  fruit  de  vigne  ,  ne  fignifient  pas  dans  l'efprit  des  Catholi- 
ques de  vray  pain  &  de  vray  vin  ,  lorfqu'on  les  applique  à  l'Eu- 
chariftie  confacrée^  ce  n'eft  pas  que  de  leur  nature  ils  n'excitent 
dans  l'efprit  les  idées  d'un  vray  pain  Se  d'un  vray  vin  ,  mais 
c'eft  que  la  créance  qu'ils  ont ,  qu'il  fe  fait  dans  ce  Myftere  un 
changement  du  pain  au  corps  Se  du  vin  au  fang  de  J.  C.  les  por- 
te naturellement  à  bannir  ces  idées  pour  fubfîituer  celle  d'un 
pain  apparent  ou  d'un  vin  apparent. 

La  caufe  de  ce  changement  d'idée  n'eft  donc  pas  dans  les 
mots  mêmes.  Elle  efl  dans  l'efprit  de  celuy  qui  les  prononce  ou 
qui  les  entend. 

Ainfi  J.  C.  ayant  formé  l'idée  de  la  prefence  réelle  Se  de  la 
tranffubflantiation  dans  l'efprit  de  fes  Apôtres  par  les  termes 
dont  ilfe  ferviten  inflituant  ce  Sacrement:  leurefprit  conçut 
fans  peine  qu'il  n'appelloit  fruit  delà  vigne ,  c'efl-  à.dire  vin^  ce 
qui  leur  avoit  dit  eftre  fon  corps,  que  parce  qu'il  en  avoit  l'ap- 
parence. 

Mais  fi  l'on  fe  fert  de  ce  même  pafTage  pour  faire  roir  la  na- 
ture de  la  matière  que  J.  C.  avoit  bénie  ,  Se  dont  il  avoit  fait- 
l'Euchariflie,  l'efprit  en  conclut ,  non  que  c'efloit  du  vin  appa- 
rent, mais  que  c'efloit  de  vray  vin  ,  parce  qu'alors  l'impreffiorr-; 
naturelle  du  mot  de  vin  n'eft  plus  empêchée  par  aucune  créan-i 


,A^j 


i34  Liv.  IV.  Képonfe  aux  pâjfages  ' 

ce  contraire.  Audi  n'yat'il  poinc  de  Catholique  qui  ne  crue 
bien raifonner, s'il  difoit  en  montrant  une  hoftieconfacrée:  Il 
paroift  bien  par  ce  pain  que  l'Euchariftie  fe  fait  dans  l'Eglife  Ro- 
maine,avec  du  pain  Taiib  levain ,  &  non  avec  du  pain  levé.  Ce- 
pendant par  le  mot  de  puin  ilentendroit  la  première  fois  un 
pain  qui  neferoitplus  pain  ,  mais  le  corps  de  J.  C.  puifqu'ilap- 
pelleroit  de  ce  nom  l'hoftie  confacrëe ,  £c  il  entendroit  de  vray 
pain,  lorfqu'il  le  prononceroit  la  féconde  &:larroifiémefois, 
puifqu'il  defigneroit  la  matière  de  l'EucharilHe  avant  la  confe- 
cration.  Tout  celafe  palIe  dans  l'efprir ,  fans  prefque  qu'il  s'en 
apperçoive  ,  5c  fans  qu'il  y  trouve  le  moindre  embaras.  Et  il  y  a 
bien  moins  de  difficulté  à  paflerainfi  d'une  notion  à  une  autre 
fans  fe  confondre,  cp'il  n'y  en  a  à  le  démêler ,  ôc  à  Le  faire  com- 
prendre. 

Il  efl:  donc  clair  quel'unique  but  de  Clément  d'Alexandrie 
efl  de  prouver  que  ce  fut  du  vin  que  J.  C.  benic,"^  non  de  l'eauj 
Oii'il  ne  prouve  ni  directement  ni  indirectement  qu'il  ait  bu  de 
vray  vin  dans  l'Euchariftie  ,  &  que  ces  argumens  fi  foiides  6c  en 
Çi  grand  nombre,qu'Aubertin  reproche  au  Cardinal  du  Perron 
<le  n'avoir  pas  vus,  ou  d'avoir  diniraulez  ,  ne  font  que  des  fo- 
phifmes  de  ce  Miniftre. 

Ce  n'eft:  pas  qu'il  eut  fujet  de  tirer  un  grand  avantage  de  ce 
paiTage  ,  <]uand  Clément  d'Alexandrie  y  auroit  dit  formelle- 
ment que  J.  C.  but  du  vin  dans  la  célébration  de  l'Euchariftie. 
La  bonne  roy  voudroit  toujours  qu'on  examinât  par  la  dodrine 
des  premiers  fiecle^,  ce  qu'il  auroit  entendu  parce  vin.  Et  ainfî 
comme  L'on  trouveroit  quel'on  y  croyoitque  ce  vin  eftoit  chan- 
gé au  fang  de  J.  C.  on  en  concluroit  que  c'eftoit  en  ce  fens  que 
cet  Auteur  l'auroit  pris  j  car  cette  créance  n'empêche  nulle- 
ment que  l'on  nefejerve  de  ces  termes.  On  dit  que  l'on  boit 
du  vin  dans  l'Eucliaxiftie  ^parce  que  l'on  y  prend  une  chofe  qui 
•ne  fediftingue  pas  fenfiblement  du  vin,  &;  qui  en  a  les  effets. 
Qiiand  il  eft  queftion  de  marquer  precifémentce  qu'elle  eft, 
CD  en  parle  félon  la  foy.  Mais  quand  il  n'en  eft  pas  queftion, 
.on  par-lele  langage  où  la  nature  nous  porte. 

Aubertinenpropofe  iuy-même  deux  exemples  qui  îuy  aa- 

jroient  pu  apprendre  de  quelle  forte  on  parle  ,  quand  on  parle 

.îiaturellement,  fi  la  préoccupation  ne  l'avoit  point  porté  à  en 

^  &bufer. 

P'9++.1j     II  rapporte  que  l'Auteur  delà  viedeS.  Genoulphequ'il  place 

à  l'encrée  de  l'onzième  fiecle ,  c'eft-à-  dire  en  un  temps  où  l'oja 


oà  t Euchariflie  cB  appelle e  pain  (^t'în.  i^ç 
brûloit  ceux  qui  necroyoient  pas  la  tranfTubltannation  ,  &:  où  Ch.  V. 
.  Berenger  âÀ^oiz^que  l' E'^Jife  efiojt  pcrie  ,  pace  que  tout  le  mon- 
de la  croyoir,  n'a  pas  laifTé  d'écrire  que  ce  Saint  a  pajfé  le  refleàe 
fa  vie  devais  fan  ordination  fans  boire  de  vin  ,  excepté  ce  qu'il  en 
prenait  en  célébrant  le  divin  Sacrement.  Et  dans  la  page  958.  il 
cite  les  paroles  d'une  Chronique  écrite  à  lafinde  l'onzicmciie- 
cle,c'eft:-à- dire  après  Berenger,  par  lerquelks  l'Auteur  dit  qu'il 
a  vu  dans  un  certain  Monaftere  un  Moine  nommé  Littenus 
d'une  abftinence  fî  admirable ,  que  par  l'efpace  de  dix  ans,  //  ne 
but  ni  vin  ni  eau ,  excepte  ce  qu'il  en  prenait  dans  [''Eitcharifiie. 

Eft-ce  que  ces  Auteurs  qui  écrivoient  en  un  temps  où  la 
tranflubftantiation  eftoit  reconnue  par  toute  l'Eglile,  ne  la 
croyoiept  pas  eux-mêmes  ?  C'eft  une  confequence  qu'Auber- 
tinfeul eftoit  capable  detirer,  mais  qui  ne  viendra  jamais  dans 
l'efprit  d'une  perfonne  judicieufe. 

Fuis  donc  qu'il  eftvifible  que  la  nature  porte  à  ce  langage, 
aufîî-bicn  ceux  qui  font  perfuadez  de  cette  doctrine ,  que  ceux 
qui  ne  le  feroient  pas,&  qu'on  n'a  point  fait  difficulté  de  s'en  fer- 
vir  dans  les  temps  mêmes  où  l'erreur  contraire  eftoic  punie  des 
plus  rigoureuxiupplices, quel  fujet  y  auroit-ilde  s'étonner  quand 
Clément  d'Alexandrie  auroitufé  de  ce  la^ngage  ?  Et  quel  lieu  y 
a  t'il  d'abufer,  comraefait  M.  Claude^d'un  paiTage  d'Oxigene 
qui  s'en  fert  effcdivemenr ,  en  difant  que  /.  C.ne  beutpaintdè  Ong-Hom.^, 
vin  dans  la  célébration  de  l'Eucharifiie  ,  farce  qu'il  approchait  de 
l'autel!  Car  n'eft-  ce  pas  boire  du  vin  félon  le  langage  àzs  honi- 
mes  que  de  boire  l'Euchariftie ,  quoique  l'Euchariftie  ne  foic 
pas  duvin  ^comme  c'eftofFnrdu  pain  que  d'offrir  l'EuchariAie 
félon  ce  même  langage,  quoique  l'Euchariftie  ne  foit  pas  du 
pain  ?  Et  comme  tant  de  Pères  nous  aifurent  que  J.  C.  en  of- 
frant l'Euchariftie  a  accompli  le  iâcrifice  de  Melchifedech ,  2^ 
celuy  des  pains  de  propofition  qui  la  Hguroientjj  quoiqu'ils  nous 
difenten  même  temps  quece  qu'il  ofFroit  eftoit  fon  corps  même 
qui  a  fuccedé  à  tous  ces  facrificesj  il  n'eft  aufîî  nullement  étran- 
ge qu'Origene  aie  crii  par  unepenfée  qui  luyeft  particulière  , 
que  J.  C.  en  s'abftenant  de  participera  l'Euchariftie , lorfqu'iL 
eftoit  fur  le  point  de  fe  facrifier  luy-même,  ait  obfervé  la  dé- 
fenfequi  eftoit  faite  aux  Preftres  de  l'ancienne  loy  de  boire  du 
•vin,  lorfqu'ils  dévoient 5'approcherds l'autel, quoiqu'il  ait  re- 
connu en  même  temps  avec  toute  l'Eglife  de  fon  temps  que  le 
YÏndonc ,  ielon  luy  ,  J.  C.  ne  voulut  pas  boire  par  cette  raifon 


ijé  Liv.  IV.  Hépon/è  aux  pdjfagcs 

Honi.  f.accîi-  rnyfterieufe  ,  eftoic  fonvray  fang.  Et  c'ellauffi  ce  qu'il  nous  en- 
yerC  Evang.  fgjgj-nj  par  c£s  }^aro\QS  czlçhr^s:  Quand  voî/s prencz^le faint  ali- 
ment (jj'  cette  viande  incorruptible  l  quand  vous  jomjfez^  de  ce  pain 
^  de  ce  breuvage  de  vie  ,  vous  mangezje  corps  <^  vous  beuvez^  le 
fang  du  Seiyievr.  Mumiliez^  vous  donc  vous-  mêmes  ,  ^  imitant  le 
Ccntenicr ,  ditcs-luy  :  Scigfieur ,  je  ne  fuis  pas  digne  que  vous  entriex^ 
ans  ma  mai  [on.  Car  lorfquil  eji  rccjc  indignement,  ^il  y  entre  pour 
^  Londamnation. 


J 


CHAPITRE   VI. 

Examen  du  p^jf^-tge  de  Saint  Jérôme  tire  de  fa   lettre 

à  Hedibie. 

E  ne  fçay  fi  je  dois  nommer  le  dernier  paflàge  que  nous 
_   examinerons  ici  5*  une  objection  ou  un  éclaircillemenr.  Si 
l'on  en  croie  Aubertin  ,  c'eflun  nœudGordten  pour  les  Catho- 
P'  ^^'*'  liques  ,  Nodus  hic  Gordio  firiHtor  :  mais  je  prétends  au  contrai- 

re que  c'cftun  fophifme  puérile,  qui  ne  peut  fervir  qu'àéclair- 
cir  tout  ce  que  nous  avons  dit  fur  cette  matière.  LeLedeur  en 
jugera. 

Une  Dame  nommée  Hedibie  qui  demeuroit  aux  extrémitez 
des  Gaules  avoit  envoyé  un  homme  exprés  en  Jerufalempour 
confulter  S.  Jérôme  touchant  quelques  queftions,  tant  fur  la- 
vie  d'une  veuve  Chrétienne  ,quefurrEcriture.. 

La  féconde  de  ces  queftions  regardoit  ces  paroles  de  J.  C-  Je 
vous  dis  que  je  ne  boiray  plus  de  ce  fruit  de  vigne ,  jufqu'au  jour 
que  j'en  boiray  de  nouveau  avec  vous  dans  le  Roy^tume  de  mon 
Père.  S.  Jérôme  ayant  deflein  d'éclaircir  ce  paiTage  com- 
mence fa  réponfe  par  cette  remarque,  dont  Aubertin  tire fon 
nœud  Gordien  :  Quelques-uns  ,  dit-il ,  ont  bâti  fur  ce  paffage  la  fa- 
ble de  mille  années.^  pendant  lefquclles  ils  prétendent  que  J.  C.  re. 
gnera  corporellement  fur  la  terre  ,  ^  quil  boira  du  vin  qu  il  n'au- 
ra point  hù  depuis  ce  temps -Ll  ,  jufqu'u  la  confommation  des  fie. 
des. 

C'eft  fur  cela  qu'Aubertin  forme  cet  argument.  Les  défen- 
deurs de  cette  opinion  croyoient  quej.  C.  boiroit  durant  mille, 
ans  du  même  vin  dont  il  avoit  bu  dans  TEuchariftie.  Or  le  vin 
qu'ils  croyoient  qu'il  boiroit  durant  ces  mille  ans,eftoic  de  vray 


ou  t Eucha,riflie  ejî  appellée  pain  Csf  ^in.  i^y 

?vin.  Donc  ils  croyoienc  que  J.  C.  avoic  bu  de  vray  vin  dans 
li'Euchariftie.  Cependant  ,  ajoûte-t'il  ,  plufîeurs  des  anciens 
■Peres ,  comme  Papias ,  S.  Juftin ,  S.  Irence ,  Tercullien  ,  Apolli- 
naire, Laclance,  Vidorin  ,  Severe  ont  efté  du  même  fenti. 
■ment  qu'eux.  Donc  tous  ces  Peres  ont  crû  que  j.  C.  avoit  bii 
»<ie  vray  vin  dansTEucharittiflie. 

Il  enchérit  farce  premier  raironnement  parce  fécond.  5".  e- 
rhme  ,  dit- il  ,  efloit  d'accord  avec  tous  ces  F  ères  touchant  la  nature 
du  vin  que  J.  C.  avait  hà  dans  l' Euchariftie ,  ^  ne  di{f croit  d'eux 
que  dans  la  confequence  qu'ils  en  tiraient.  Or  ces  Peres  croyaient 
que  J.  C.  avait  bit  de  vray  vin  dans  l' Eucharijiic .  Donc  S.  J  crame  le 
^croyait  aujji. 

Pour  faire  voir  l'abfurdité  de  ce  prétendu  »ffaG<?r^/V«j  il  ne 
faut  que  propofer  un  argument  fembiable  où  la  fauflètë  foit  tou- 
te vifible.  Suppofonspour  cela  qu'un  homme  partant  pour  aller 
à  la  Cour,  montre  à  fes amis  le  portrait  du  Roy  ,  en  difant  qu'il 
efpere  avoirl'honneur  dans  deux  mois  de  faluer  ce  grand  Prince. 
Je  demande  fi  l'on  ne  fe  mocqueroit  pas  d'un  homme  qui  fur  ce 
difcours  formeroit  ce  raifonnement. 

Cet  homme  dit  qu'il  faluëra  dans  peu  de  temps  le  même  Roy 
qu'il  a  montré  à  fes  amis.  Or  le  Roy  qu'il  prétend  faluer  dans 
peu  de  temps  eft  un  Roy  vivant,  réel  ScefFeclif,  &:  non  pas  une 
peinture.  Donc  ce  Roy  qu'il  a  montré  à  les  amis,  efl  un  Roy 
vivant ,  &  non  pas  une  peinture.  Cet  argument  efl:  fi  ridicule  , 
que  perfonne  ne  voudroit  prendre  la  peine  de  démêler  la  petite 
fubtilité  fur  laquelle  il  efl  fondé.  Cependant  il  eft  tout  auffi 
bon  que  celuyqu'Aubertinpropofe  comme  un  nœu  gordien. 

L'illufion  confifte  en  ce  que  le  mot  de  Roy  eft  équivoque. 
Car  dans  la  première  propofition  l'efpritde  ceux  qui  l'enten- 
dent, eft  déterminé  aie  prendre  pour  un  Roy  en  peinture,  par- 
ce qu'on  l'applique  à  un  portrait  que  l'on  montre  ,  &  il  fe  prend 
pour  un  Roy  véritable  quand  on  en  parle  lans  l'appliquer  à 
aucun  fujet  qui  change  la  fignification  naturelle. 

Or  cette  mêmeillufion  fe  rencontre  dans  l'argument  d'Au- 
bertin.  Car  l'efprit  de  ces  Peres  dont  il  s'agit ,  eftoit  déterminé 
de  même  par  la  créance  qu'ils  avoient  que  le  vin  efloit  changé 
au  corps  de  J.C.  à  prendre  le  mot  àQ  fruit  de  vigne -çonx  un  vin 
apparent,  quand  on  l*appliquoit  à  l'Euchariftie  ,  &  à  le  pren- 
dre dans  fa  fignification  ordinaire ,  quand  on  en  faifoit  un  ufà- 
ge  qui  ne  les  obligeoit  pas  d'en  changer  le  fens. 

Ggiij 


Ch.VI. 


2 3?  Liv.  I  V.  Képon/e  atix  paJpLges 

M.  Claude  repondra  peuc-ellre  qu'on  luppole  la  queftion,  qui- 
eft  qu'il  y  eûc'une  créance  diftincle  delà  tranflubftantiation- 
dans  l'elprit  des  Pères   qui  les  portât  à  prendre  ces  mots  de 
fruit  de  vigne  en  deux  fens  difFerens. 
Je  répons  que  je  ne  fuppole  que  ce  que  j'a.y  droit  de  fuppofer, 
6c  que  ce  que  j'ay  prouvé  d'une  manière  invincible.  Mais  fi  l'on' 
ne  veut  pas  avoir  égard  a  ce  que  Ton  a  prouvé  ^ je  dis  qu'il  efl: 
toujours  vifible  par  cette  réponle  ,  que  fuppofé  que  les  Pères 
ayent  eâ  la  rraniTubûantiationdans  refpritj  ils  ont  pu  très- na- 
turellement fe  fervir  de  ce  langage  fiins  y  faire  aucun  préjudice. 
Et  parconfequentil  nefçauroitrien  conclure parcet  argument, 
qu'en  fuppofant  qu'ils  n.e  l'y  ayenc  paseuë  ,  c'eft-à  direenfup- 
pofanr  la  queftion.  jde  force  qu'il  fe  trouve  que  ce  nœud  Gordien 
eft  une  pure  pétition  de  principe  qui  ne  peut  rien  prouver  qu'en' 
fuppofant  que  les  Pères  n'ay  enc  pas  crû  latranflubftantiation. 
Aubertinefl  d'autant  plus  inexculable  dans  l'abus  qu'il  fait  de 
ce  paflage,qu'il  avoit  dans  fon  opinion  même  l'exemple  de  ce' 
même  mot  pris  en  deux  fens  differens.  Car  il  rapporte  lui  mê- 
me le  fentiment  de  plufieurs  Pères ,  qui  enk'ignent ^  ^ue  quavd 
J.  C.  diit  qu'il  ne  boirait  fins  du  fruit  de  la  vigne  ,iufquà  ce  qu'il  en 
bût  de  nouveau  dans  le  Royaume  de  fon  Père  avec  [es  Apôtres  ,  iP 
n'entendoit point  par. ce  vinnouveau ^hn  vin  matériel  &;  {ênfi- 
ble  ,mais  un  vin  métaphorique,  c'eft-à- dire  ce  torrent  de  dé- 
lices donc  les  Saints  feront  enyvrez  dans  le  Paradis.   S'il  eft 
donc  poffible  félon  luy  que  ces  mêmes  mois  àe  fruit  de  vigne 
foient  pris  dans  la  première  partie  pour  un  vin  réd',  &  dans 
la  féconde  pour  un  vin  métaphorique  ,  pourquoy  ne  fera-t'i! 
pas  poffible  qu'ils  ayent  efté  pris  par  ces  Pères  en  deux  fens  dif- 
ferens ,  c'eft-à  dire  dans  la  première  partie  pour  un  vin  appa- 
rent ,  &  dans  la  féconde  pour  un  vin  véritable  ? 

Mais  ce  qui  achevé  de  convaincre  fa  mauvaifefoy  oufonpeu 
d'intelligence  ,  eft  de  s'eftre  fervi  de  l'auroricé  de  S.  Jérôme 
pour- appuyer  ce  fophifme,  &  de  nous  avoir  donné  pour  princi- 
pe,que  ce  Père  avoit  le  même  fentiment  à  l'égard  de  l'Euchari- 
ftie  que  les  Pères  qui  ont  efté  dans  l'opinion  desMil  lenaires.Car 
au  lieu  qu'il  forme  de  là  ce  raifonnemenc,  S.  Jérôme  a  eu  le 
même  fentiment  de  l'Euchariftie  que  ces  Pères  qui  onc  été  dans... 
la  doclrinedes  Millénaires.  Or  ces  Pères  ontcrù  qu'il  y  avoit 
de  vray  vin  dans  l'Euchariftie.  Donc  S.  Jérôme  l'a  crû  auffi  :  il 
nous  donne  fujetde  faire  un  raifonnemenc  tout  contraire,  mais 


1 


oà  tEuchariflic  efi  appeUée  pain  ^  (vtn.  2,39 

plus  concluant  que  le  fîen,en  nous  fervant  de  ce  même  principe.  Ch.  V I. 

S.  Jérôme  a  eflé  du  même  fentiment  à  l'cgard  de  l'Eucha- 
ri/lie  que  les  Pères  qui  ont  cfté  dans  celuy  des  Millénaires.  Or 
S.  Jérôme  a  cru  que  le  vin  de  l'Euchariftie  efloit  le  fang  même 
de  J.  C.  donc  ces  Percs  l'ont  auffi  crû. 

Ce  raifonnement  efl  auffi  bon  que  celuy  d'Aubertin  quant 
à  lâformejmaisil  y  a  cecre  différence  quant  à  la  mariere^qu'au 
lieu  que  ce  qu'Aubercin  dit  de  ces  Pères  qui  ontelté  dans  l'opi- 
nion d'un  règne  temporeldej.  C  pendant  mille  années,  qu'ils 
ont  crû  qu'il  y  avoit  de  vrayvin  dans  l'Euchanftie,  n'eft;  fondé 
9  que  fur  un  fophifmc  qui  fuppofe  la  queftion, comme  nous  l'a- 
vons montré  j  la  propofition  que  j'ay  avancée  ,  qui  ell:  que  S.  Jé- 
rôme a  crû  que  le  vin  de  l'Euchariftie  eftoit  le  fang  même  de 
J.C.  eft  fondée  fur  les  paroles  mêmesdeS.  Jérôme.  Car  après 
avoir  rapporté  l'ufage  que  ces  Auteurs  faifoientde  ce  paffage, 
je  ne  boiray  plus  (^c.  il  ajoute  ce  qui  fuit  pour  exprimer  fon  fen- 
timent  6c  celuy  de  l'Eglife.  Mats  poumons  ,  dit  il  ^apprenons  que 
le  pain  que  nojire  Seigneur  rompit ,  &  quil  donna  àfes  difciplcs.^  efi 
le  corps  de  noftre  Sauveur ,  puifqu'il  dit  luy-m'eme  à  fcs  difciplcs  : 
Prenez  ,  mangez  ,  cecy  est  mon  Corps  ,  é"  que  c'efi  de 
même  de  ce  calice  dont  il  efl  dit,  Bcuvez^en  tous,  cecy  eftmon  Sang 
du  nouveau  Tcfiament  qui  fera  ver fé  pour  pluficurs .  C'efi  ce  calice 
dont  nous  lifons  dans  le  Prophète  :  jeprendray  le  calice  du  falut  ^  ^ 
Ailleurs  3  que  vofire  calice  qui  enyvre  de  délices  efi  excellent  \  Si  donc 
le  pain  qui  efi  def:cndu  du  Ciel  efi  le  corps  du  Seigneur  ,   ô'  fi  le  vin 
qu'il  donna  àfes  difciples  efi  le  fang  du  nouveau  Tcfiament^  quia 
cfiè  verfè pour plufieurs en  la  remifiiondes  péchez^,  rejettons  les  fa- 
bles judaïques ,  ^  montons  avec  le  Sc-igneur  dans  le  grand  céna- 
cle du  nouveau  Tefiament  ^  four  nous  enyvrer  en  célébrant  la  Paf 
que  avec  luy  d'un  vin  de  fohrietè.  Carie  Roy  anime  de  Dieu  n'cfi  ny 
viande  ni  breuvage  ^-  mais  pifiice  ^joye  ^  paix  dans  le  S.  Efprit. 
Et  ce  n' efi  pas  Moyfe  qui  notts  adonne  le  pain  véritable  ,  mais  le 
Seigneur  J.  C.  qui  affifie  luy.  mèrae  à  fon  fcfiin  ,  ^  qui  efi  le  fefiin 
.rn'eme  ,  qui  mange  (jS  efi  mangé.  C'efi  luy  dont  nous  buvons  le  fang  I 
(^  fans  luy  nous  ne  le  fcaurions  boire.  C'efi  du  fruit  de  cette  véritable 
vigne  de  Sorec ,  c^efl.  a  dire  élue ,  que  nous  foulons  tous  les  jours  dans 
nos  facrifices  un  vin  nouveau  ,  pour  le  boire  dans   le  Royaume  de 
fon  Père ,  non  dans  la  vieillcfe  de  la  lettre  ,  mais  dans  la  nouveauté 
de  l'efprit. 

Je  ne  f*jay  ce  qu'on  pourroit  defirer  de  plus  formel  2c  de  plu* 


z^o  Liv.  I V.  Répon/e  aux  paJfagcT 

précis  que  ces  paroles  de  S.  Jérôme  ,  pour  nous  aflurer  de  ce 
qu'il  croyoic  de  ce  vin ,  donî  J.  C.  die  qu'il  ne  boiroic  que  dans  . 
le  royaume  de  fon  Père.    • 

Il  ne  fe  contente  pas  de  dire  que  ce  pain  efl:  le  corps  de  J.  C. 
ôiquece  vinenfonfang.  Ilditquecepaineft  defcendu  du  Ciel, 
ce  quieftrépithete  propre  de  Jesus-Christ  même ,  &  qui  ne 
fe  peut  appliquer  au  pain,  fuppofé  qu'il  demeurât  pain.  Il  die 
que  ce  vin  eft  le  fruit  de  la  vigne  de  Sorec,c'efl:-à-  dire  J.  C.  En- 
fin il  dit  que  J.  C.  eft  lui-même  le  feftin  qu'il  nous  tâit,ipfe 
conviva  é'  convivium  ,  c'eft-à-  dire  qu'il  ne  rjous  y  prefente  que 
fon  corps ,  6c  qu'il  le  reçoit  par  nous. 

Voilà  l'Auteur  qu'Aubertin  a  choifi  pour  l'interprète  de  l'o- 
pinion des  Millénaires-,  il  n'y  a  donc  qu'à  luy  accorder  fon  prin- 
cipe ,  qui  eft  que  S.  Jérôme  avoit  lemême.'fentimenc  qu'eux 
touchant  la  nature  de  l'Euchariftie.  Mais  il  nous  permettra  d'en 
conclure,  que  puifque  S  Jérôme  marque  fi  clairement  que  ce 
pain  &  ce  vin  font  le  véritable  corps  êc  le  véritable  fang  de  J.  C. 
la  raifon  veut  qu'on  croye  le  même  des  Pères  qui  ont  efté  dans  .  j 
rppinion  des  Millénaires» , 

Fin  du  quatrième  Livrer.' 


LIVRE 


LIVRE   CINQUIEME- 


CHAPITRE    PREMIER. 

Ikux  injujtices  des  M.nijîres  fur  le  fujet 
de  XhoAjtet. 


H  Oas  allons  mciintcnant  entrer  dans  ces  faniea- 
fes  Objections  que  les  Miiiiftres  tirent  de 
Theodoret,  Se  de  tj-ois  autres  Auteurs  qui  ont 
parlé  comme  iuv,  6v  nous  taicherdn's  de  leur 
rendre  fur  ce  fujet  toute  la  lu/lice  oui  leui;  cVi 
de 


ue. 


I 


Car  nous  fommes  perfuadez  que  la  fincerité  chrétienne ,.& 
l'amour  qu'on  doit  avoir  pour  la  vericéj  ne  permettent  jamais 
qu'on  fe  difpenfe  de  parler  des  cliofes  félon  ce  qu'cfles  iontic'cil 
à  dire  de  traiter  les  chofes  claires  de  claires ,  les  obf.uresd'ob- 
fcures ,  les  raifons  fcxrtes  de  fortes ,  6c  les  fùibles  de  fojblés ,  eh 
jdonnant  à  chacune  le  rangqu'clles  méritent. 

C'eft  donc  pour  s'acquitter  de  ce  devoir  qu'on  reconnoifl:  de 
-bonne  foy  que  les  objections  dont  il  s'agit  prefentement  méri- 
tent qu'on  s'applique  à  les  cclaircir,  &  qu'il  n'eu  pas 'étirâ^ge 
que  des  gens  prévenus  contre  la  TranlTubCtantiation,  s'imagi- 
nent que  ces  paiTages  y  font  clairement  contraires. 

Si  lesMiniftres  pouvoient  s'aflujettir  à  cette  règle,  notre dif- 
pute  fepaiferoit  dans  un  examen  tranquille  de  ces  difficultez, 
&  l'on  tâcheroit  d'y  apporter  tout  l'éciairciflemént  paîîiblë, 
fans  y  mêler  aucune  plainte,  ny  aucun  reproche  contr'eux.   '  ' 

On  les  prieroit  feulement  de  confiderer  que  ces  <liiïîcultez 
^quelles  qu'elles  foientj  ne  font  pas  plus  grandes  que  cellej 


142,    Liv.  V.  Explication  des  pa(figes  de  Theodoret 

qu'on  trouve  dansTercuIlicn  &:dans  quelques  Pères  anciens 
fur  la  Trinité,  &  fur  plufieurs  autres  mylteres,  &:  qu'ëc.-nt  de 
l'ordre  de  Dieu  qu'il  yen  ait  ainfi  fur  tous  les  points  de  la  foy,. 
celuy  de  l'Euchariftie  ne  doit  pas  dire  exempt  de  cette  loycre- 
ncrale,.  puifque  Dieu  a  eu  un  deiïein  particulier  de  s'en  (ervir 
gour  Kumdicr  la  raifon  de  l'homme  ,  &  la  faire  plier  fous  (où: 
d'ororirë  foàverain?.  '      '     ••' 

Mais  comme  ces  Mefîienrs  n'ont  jamais  penfé  à  fe  tenir  dans 
les  juftes  bornes  de  la  difputC;  qu'ils  triomphent  toujours  avec 
hauteur ,  &:  fouvenc  même  avec  infulte  j  que  leur  coutume  eft 
de  faire  p  a  (fer  les  obfcuritez  pour  dp  clartez,  les  conjedures 
pour  des  demonftrations  convaincantes  5  ils  s'emportent  tel- 
lement fur  le  fujer  de  Theodorer,  ils  pouffent  leurs  raifonne- 
niens  fî  fort  au  delà  de  ce  que  les  pafîages  leur  donnent  lieu 
d'en  conclure,  que  quoy  qu'il  y  ait  del'obfcurité  dansces  paf- 
fages,  on  ne  laiffe  pas  d'eftre  en  droit  de  fe  plaindre  de  Tufage 
qu'ils  en  font,  comme  d'une  injuftice  manifefte. 

C'cft  ceqwe  '^Q.  prétends  faire  voir  nettement  dans  la  fuite, 
.  où  j'efpere  montrâr  premièrement  que  Theodoret  établit  clai- 
rement la  préfence  réelle, 5:  en  fécond  lieu  qu'il  ne  dit  rien  de 
contraire  à  la  tranfliibftantiation,  &  que  les  Miniftres  abufent 
'dé  Tes  paroles,  contre  fon  véritable  fens. 
.  Mais  avantque  d'entrer  dans  cette  difcuiïîon  ,  jeremarque- 
"ray  d'abord  deux  injuflices  confiderables  que  les  Miniftres- 
jGom mettent  fur  le  fujet  de  cet  Auteur. 

La  première  efl:  particulière  à  Aubertin  qui  abufe  en  un  en- 
droit avec  beaucoup  de  mauvaife  foy  de  ce  que  quelques  Ca- 
'tholiques  ontdit  de  Theodoret,  car  ce  Minidren'ignoroit  pas 
que  fi  quelques  uns  de  ceux  qui  ont  écrit  pour  l'Eglifè,  onr 
avoiié  que  Theodoret  eftoit  favorable  au  fentiment  de  ceux  de" 
"fafefte,  ils  ont  tous  borné  cet  aveu  au  feul  point  de  la  tranf- 
fubftantiation  ;  &  qu'aucun  ne  l'a  étendu  à  la  préfence  réelle,. 
Il  rapporte  luy-même  leurs  paffages  p.  771.  &  il  n'y  en  a  au- 
cun qui  ne  foit  reftraint  à  la  tranflubftantiation  en  termes  for- 
mels. Cependant  il  a  la  hardieffeen  un  autre  endroit  de  rendre' 
Ij'aveu  de  ces  A,uteurs  gênerai ,  &  de  s'en  fervir  à  l'égard  dès- 
pacages,  me  inésmii  ne  regardent  que  ia  préfence  réelle.  Car 
pour  montrer  que  ces  paroles  de  Jlilius  Firmicus;  7<roas  hcuvons 
le  faille  immortel  de  J.C.  le  fang  de  J.  C.  eft  joint  au  noftre ,  ne  s'en- 
tendent pas  du  vray  fang  de  J.  C.  mais  d'un  fang  myftique6c 


^  de  trois  Auteurs  qui  ont  parlé  comme  Itiy.  145 
•métaphorique,  ce  qui  ne  regarde  que  la  queAionde  la  prefence  Ch.  I. 
réelle,  il  allègue  que  Tlieodorec  l'appelle  des  mêmes  noms,en- 
.core,  dit-il,  que  les  Auteurs  Catholiques  avouent  qu'il  a  eu  de 
mauvais  ientimens  de  l'Euchariftie:  Voicy  fes  propres  termes. 
//  ne  s'i  nfuit  pas  ,  dit  il  ,  que  cet  Auteur  ait  parlé  en  cet  endroit  du 
propre  Jung  de  I.  C  Car  Théodore t  qui  par  taveu  même  des  Au- 
teurs de  la  Préface  de  fes  Dialogues  dans  l'édition  de  Rome ,  d'Ala-  P-  -i  *  ^* 
K»/,  de  Grégoire  de  f^alence  gS  autres  ,  fait  voir  dans  fes  écrits  qu'il 
a  eu  de  mauvais  fcntimens  fur  l' Eucharifie  ,  c'efi  -  a-  dire  qu'il 
a  eu  les  mêmes  que  les  Reformez^,  ne  laiffe  pa^s  de  l'appcUer  banquet 
immortel  ^  viande  immortelle. 

Il  s'agit  proprement  de  la  prefence  réelle  en  cet  endroit, 
&  il  n'allègue  Theodoret  qu'en  luppolant  qu'il  ne  l'a  pas  crue, 
&  que  ces  Auteurs  l'ont  reconnu.  Cependant  il  fixait  très  bien 
qu'ils  n'ont  jamais  eu  la  moindre  penfée  d'attribuer  cette  er- 
reur à  Theodoret ,  &  que  pour  le  convaincre  de  faulTeté  il  n'y 
a  qu'à  lire  les  endroits  de  leurs  livres  où  il  nous  renvoyé.  Mais 
/î  cette  mauvaife  foy  eft  particulière  à  Aubcrtin  ,  l'autre  inju- 
ftice  qui  confifte  à  abufer  de  l'autorité  de  Theodoret  ell  com- 
mune à  tous  les  Miniftres.  Il  femble,  de  la  manière  qu'ils  en 
parlent  tous,  que  toute  la  queftion  qui  eft  entre  l'Eglife  &  eux, 
Te  doive  décider  par  cet  Auteur  :  Qiie  toutes  les  preuves  que  les 
Catholiques  apportent  pour  la  tranlTubftantiation,  ne  doivent 
«ftre  comptez  pour  rien,  fi  Theodoret  y  eft  contraire  -,  bc 
qu'enfin  en  abandonnant  l'examen  de  tout  le  refte  de  la  tradi- 
tion,il  n'y  ait  pour  trouver  la  vérité  qu'à  examiner  lefentiment 
decetAuteur.  Maisquelleombre  de  juftice  &de  raifon  y  a- 
t-il  dans  ce  procédé?  L'Eglile  fait-elle  dépendre  fa  dodri- 
ne  d'un  feul  Auteur-,  ou  même  d'un  petit  nombre  d'Auteurs? 
Ne  puife  t-elle  pas  fes  fentimens  dans  le  corps  entier  de  la 
tradition  i  6c  la  raifon  fortifiée  par  l'expérience  ne  nous  fait- 
elle  pas  voir,  qu'il  eft  très  poffible  que  quelques  Pères  ayenc 
efté  moins  exacfls  dans  ce  qu'ils  ont  écrit  fur  de  certains 
points  de  foy,  avant  qu'ils  eufient  efte  parfaitement  éclaircis? 
Pourquoy  donc  ne  feroit-il  pas  permis  dédire  fur  ce  fujet  ce 
que  S.  Jerofme  dit  fur  ces  erreurs  que  Rufin  pretendoit  qu'on 
euft  ajoutées  aux  écrits  d'Origene  :  Qu'il  eft  po.fjïble  que  les 
pères  aycnt  crii  avec  (lynplicité  ces  chofes ,  ou  qu'ils  ayent  eu  un 
autre  fens  que  cchiy  qui  paroi fl  dans  leurs  écrits ,  ou  que  ces  écrits 
ayent  efié  corrompus  peu  k  peu  par  l'ignorance  des  Copi/les  j  eu 

Hh  ij 


"144     L I  V.  V.  Explication  despajfages  de  Theodoret 

qu'enfin  avant  la  naijfance  des  hère  fie  s  ils  ayent  parlé  avec  moins 
de  précaution. 

Ec  cela  a  particulièrement  lieu  dans  les  points  qui  font  de  \a. 
nature  de  celuy  de  la  Tranffubftantiation.  Car  comme  nous 
avons  remarqué  ailleurs,  le  principal  objet  de  noftre  foy  étant 
J.  C.  même  refidant  fur  nos  autels ,  l'efpri-t  eil:  moins  porté  à 
Faire  une  reflexion  expreffe  ;  C\  le  pain  y  demeure  ou  s'il  n'y  de- 
meure pas.  Et  quoy  que  toutes  les  expreflionsde  l'Eglile  por- 
tent à  croire  qu'il  n'y  eft  plus,  néanmoins  avant  que  la  chofê 
eulleftémifeenqueftion,  il  n'étoitpasimpofîîble  qu'un  Auteur 
ie  formafi:  fur  cela  quelque  opinion  particulière  ,  6:  qu'il  l'ex- 
primaft  enfuite  dans  fes  écrits. 

Mais ,  dit  Aubertin  ,  quelle  apparence,  ou  que  Theodoret  " 
ait  ignoré  le  fentiment  de  l'Eglile  de  Ton  temps  fur  l'Euchari- 
llie,ou  que  le  fentiment  de  l'Eglife  fuft  douteux  &.  incertain  fur 
ce  point?  ■ 

je  pourrofs  renvoyer  à  M.  Claude  l'cclairciflement  de  cetce  ' 
demande  d'Aubertm  ,  puis  qu'il  a  prétendu  prouver  depuis  par 
ces  fubtilitez,  qu'il  eftoit  très,  pofilble  non  feulement  qu'un  Au- 
teur, mais  que  preixquetoute  l'EgHfe  eurt:  demeuré  pendant  più- 
ficursfiecles  fans  fçavoir  expreilcment  fî  J.  C.  écoit  ou  n'étoic 
pas  réellement  prefent  dans  l'Euchariflie.  Mais  pour  en  juger 
lainement  il  faut  rejcttcr  le  fentiment  de  l'un  &.  de  l'autre 
comme  vifiblement  exceffif. 

Car  il  n'eft  pas  poffible  à  la  vérité  que  dans  un  myftere  capi- 
tal comme  celuy  de  la  prcfence  réelle  de  J.  C.  dans  l'Euchari- 
ilie,  qui  a  du  eflre  le  principal  objet  d'un  culte  pratiqué  par  ' 
tous  lesfîdelles,  &  dont  la  créance-ou  l'ignorance  ont  du  ■ 
chan2;er  toute  la  difpofition  intérieure  de  Tefprit  de  chaque  ■ 
Chrefticn  ,  S:  même  leurs  avions  extérieures  ^  il  n'eft  pas  pof^ 
fible,  dis-je, que  toute  l'Eglife,  ou  même  un  grand  nombrede  • 
gens  habiles,  foient  demeurez  dans  cette  créance  confufe,où  ■ 
M.  Claude  met  l'Egliïe  pendant  pluficurs  fiecles.  Mais  il  eft 
rres-polîible  que  dans  un  autre  myftere  moins  capital ,  qui  n'a 
pas  dû  par  neceffité  cftre  exprcflement  confideré  par  chaque 
fidelle,  dont  la  connoiiîance  ou  l'ignorance  ne  change  rien 
dans  la  difpofition  intérieure  ny  extérieure  de  perfonne  ,  un 
Evêque  fçavant  &  tel  qu'étoit  Theodoret  fe  foit  formé  des 
penfées  différentes  de  celles  du  commun  de  l'Eglife,  qu'il  les 
ait  exprimées  dans  un. livre,  &  qu'on  les  y  aie  laiÀees  tres-loiïg- 


f#  de  trois  Auteurs  qui  ont  parlé  comme  luy.  i^^ 
remps  fans  y  Faire  aucune  retiexion.  11  ne  faut  pas  eftrefort  in-  Ch.  Ï, 
fbruit  des  fentimens  des  anciens  Pères  pour  pouvoir  douter 
que  ceia  ne  foie  pollîblc  dans  des  matières  qui  trapent  bien  au- 
trement l'efpritque  la  Traniïlibftantiation,  6c  dont  il  fembl'e 
par  confequent  que  la  connoiilancedevoit  eftre  plus  diftincle. 

Origene  témoigne  plufîeurs  fois  dans  (on  Livre  des  Principes 
qu'il  n'a  point  eu  deflein  dé  s'éloigner  de  la  créance  commune 
de  rEglire,&  qu'il  ne  fe  donne  la  liberté  de  propofer  fes  penfées 
que  fur  les  choies  qu'il  ne  croyoit  pas  établies  par  un  conferl- 
tement  univeriel.  On  a  même  eflé  long- temps  fans  l'attaquer 
fur  plufîeurs  de  fes  erreurs,  au  moins  avec  cette  force,  avec  la- 
quelle il  a  cfté  depuis  combattUj&  il  a  reçu  des  grands  hommes 
de  l'EgHfe  pendant  plus  d'un  fiecle  plus  de  marques  d'i.ltim'e 
que  d'improbation.  Eft-ce  qu'il  faudra  conclure  de  là  qu'il  n'a 
point  avancé  d'erreurs,  ou  que  l'Eglifede  fonremps  étoir  dans 
l'erreur  aufîî  bien  que  luy?  Combien  y  a-c-il  de  même  d'autres 
opinions  particulières  dans  les  anciens  Auteurs  contre  lefquels 
il  ne  paroiftpas  que  perionneferoitélevé,ny  durant  leur  vie  ny 
après  leur  morr?  Et  qui  doit  en  eftre  plus  perfuadé  que  les  Re- 
ligionnaires  ,  eux  quionc  tanrde  foin'denous  faire  des  catalo- 
gues des  erreurs  de? Pères  &;  qui  mettent  entre  ces  prétendues 
erreurs  prefque  tous  les  points  que  leur  nouvelle  Eglife  a  rè- 
jettez,  quoy  qu'ils  avouent  fur  la  plupart  que  jainaris  on  n'en'a 
faitde  reprochesàceuxqui  lesontenfeignez? 

Qti'ils  nous  difent  donc  par  quelle  fantaifie  il  leurplaifr  de 
fuppoferqueTheodorct,&:  deuxou  trois  autres  Auteurs  n'ont 
pu  avoir  fur  laTranirabftantiationdes  fentimens  difïerens  de 
celuy  de  l'Eglife  ^  &c  de  quel  droit  ils  nous  veulent  en  même 
temps  perfuader  que  tous  les  dogmes  qu'ils  combattent  dans 
l'Eglife  Romaine,ont  elle  d'abord  propofëz  par  quelques  Pères 
contre  le  fentiment  commun  des  autres  fîdelles,  fa,ns  qu'ikfaf- 
fent  voir  que  ces  Pères  ayent  été  condamnez  pour  ces  dog- 
mes, ou  feulement  attaquez.  Eft  ce  qu'ils  n'auront  jamais  d'au- 
tre règle  dans  leurs  fentimens  que  leur  intereft,  leur^caprices, 
ou  leurs  paffions? 

Il  fufîîroit  donc  de  leur  dire  qu'on  eft  beaucoup  moins  obligé 
de  s'en  rapporter  à  Theodoret  fur  la  matière  de  la  Tranllub- 
ftantiation. qu'ils  ne  lefont,  dereconnoiftre  S.  Grégoire  de  Na- 
zianze,  S.  Grégoire  de  N y  fTe,  &S.  Bafile  pour  juges,  fur  la  ma- 
tière du  culte  des  Saints  Se  de  leurs" reliques  5  S.  Aiiguflin  fur  ' 

Hh  il]. 


Z4Ô  Liv. V.  ExpUccitiondes pnjfkges deTheodoret 
l'ecacdes  entans  des  fidellesqui  meurt  ne  fans  Baptême,  ^  S, 
Grégoire  le  Grand  fur  le  Purgatoire.  Car  au  lieuqu'ih  s'cloi- 
gnenc  de  la  dodrine  de  ces  grands  Sainti,iàns  avoir  de  preuves 
que  les  autres  Pcras  de  leur  ^emps  ayent  enfeignë  le  contraire; 
nous  n'abandonnerions  Theodorei  &  ces  deux  ou  trois  Auteurs 
s'il  étùit  vray  .qu'il  y  eût^iuelque^hofe  à  redire  à  leur  dodrine, 
flir  ce  point,  que  pour  nous  attacher  à  l'autorité  des  autres  Pa- 
res qui  compofentîe  corps  de  la  tradition,  ôc  qui  font  ainfî  les 
témoins  légitimes  de  la  doélrinc  de  rLglife. 

li  efl  donc  vifi'ble  que  la  difpute  touchant  le  fentiment  de 
Theodqret,  n'eft  ny  capitale  ny  dccifive,  ôc  que  ce  n'eft  point 
ce  qui  doit  détermmer  un  homme  lage  à  prendre  party  dans  ce 
différend:  que  c'cft  une  injuftice  aux  Minières  d'en  faire  tant 
de  bruit,  &  que  quand  même  les  fentimensde  cet  Auteur  au- 
roient  été  tels  qu'il  leur  plaît  de  fe  les  imaginer,  cela  nelesju- 
ilifîeroit  point  d'herelie  non  feulement  fur  la  prcfence  réelle, 
mais  même  (ur  laTranfrubflantiation,parce  q^uel'Eglife a  d'au- 
tres régies  pour  en  juger. 

C'eft  ce  que  la  feule  viië  de  la  vérité  m'a  obligé  de  déclarer 
.avant  que  d'entrer  dans  l'examen  particulier  des  fentimens  de 
cet  Auteur.  Que  fi  M.  Claude  pnr  le  droit  qu'il  fe  donne  fou- 
vent  de  pénétrer  les  penfées  &  les  intentions  des  gens,  prétend 
prendre  ce  difcours  pour  une  marque  que  l'on  fe  défie  de  pou- 
voir répondre  aux  argumensqueTheodoret  fournit  aux  Cal- 
viniftes  ^  je  le  prie  feulement  de  furfeoif  un  peu  fes  conjedure.s 
jufqu'à  ce  qu'il  ait  vii  ce  que  j'ay  à  luy  dire  fur  ce  fujet,  &  peut- 
eftre  qu'il  changera  de  fentiment. 


CHAPITREII. 

On  rapporte  tout  au  lon'i^  les  deux  Palfagcs  de  Theodoret 
tirez^  de  fon  premier  ^  de  fon  fécond  Dialogue. 

LE  s  Padages  dont  il  s'agit  font  tirez  des  Dialogues  que 
Theodoret  a  faits  contre  les  Eutychiens  où  il  introduit  un 
Catholique,  qu'il  appelle  orthodoxe,  difputant  avec  un  Euty- 
chien,à  qui  il  donne  le  nom  d'Eranifte,  c'eftà.  dire  mendiant, 
parce  que  Tes  opinions  ne  font  qu'un  ramas  de  diverfes  hereiîes. 
Dans  le  premier  de  ces  dialogues  qui  a  pour  titre  l' immeuble  j 
.&  où  il  prétend  prouver  contre  l'Eutychjen ,  que  le  Verbe  n?? 


&de  trois  Auteurs  qui  ont  parlé  comme  luy.  147 
s'étoir  point  fait  chair  en  Te  changeant  en  chair,  parce  qu'il  tfl  Ch.  \ 
immuable  ,  mais  en  fe  revêtant  d'une  chair ,  &:  en  prenant  une 
chair ,  il  allègue  divers  paiîages  de  l'Ecriture  pour  montrer 
que  cette  chair  à  laquelle  le  Verbe  s'eft  uni,  eft  toujours  de- 
meurée diftinfte  du  Veibe,  &  qu'elle  ne  luy  tenoit  lieu  que  de 
voile  £c  de  vêtement. 

Il  apporte  pour  prouver  qu'elle  luy  tenoit  lieu  de  voile,  le 
pafîage  de  l'Epiftre  de  S.  Paul  aux  Hébreux,  où  il  dit  que  J.  C, 
nous  a  tracé  une  voyc  nouvelle  par  fon  voile ^  c'eft  -  à  -  dire  par  fa 
chair  3  oùilcfl:  clair  que  la  chair  de  J.  C.  eftappellêe  voile. 

Et  pour  prouver  qu'elle  tenoit  lieu  de  vêtement,  il  allègue 
ee  pafTage  tiré  de  la  Genefe,  où.  Jacob  en  parlant  du  Meflie,dic 
qu'il  lavera  fa  robe  dans  le  vin  ,  é"  fin  manteau  dans  le  fiing 
(de  la  vigr.e ,  prétendant  que  par  cette  robe  &  ce  manteau,  ii 
faut  entendre  le  corps  de  J.  C. 

L'Eranifte  ayant  répliqué  que  cela  s'entend  non  du  corps  de 
J.  C.  mais  de  Tes  vétemens,  même  à  la  lettre,  il  le  réfute  de  la 
manière  qui  fuit.  ^^ 

L'Orthod.  Puifque  vous  dites  que  par  cette  robe  &:  ce  man  ^^ 
feau,  ii  faut  entendre  les  vétemens  mêmes;  montrez  donc  où  ^^ 
il  eft  dit  que  J.C.  a  lavé  fes  vétemens  dans  le  fang  de  la  grape  ^, 
de  raifin. 

L'Er.  Montrez- nous  auffi  de  votre  coté  qu'il  foit  dit  qu'il  ait 
lavé  fon  corps. 

L'Orthod.  Répondez-moy  s'il  vous  plaifl  en  paroles  myfti-  ^^ 
ques  &  obfcures.  Car  il  y  a  peut-eftre  icy  des  gens  qui  ne  font  ^^ 
pas  initiez  aux  myfteres.  ^^ 

L'Er.  Je  vous  entendray  bi.  je  vous  répondray  dans  cette  ^^ 
veuë.  ^  ,, 

L'Orthod.  Vous  fçaveî  que  \.  C.  s'eft  donné  le  r\ov!\<it vigne.  ^^ 

L'Er.   Oùy,  je  f<çay  qu'il  a  dit  ^je  fins  la  vraye  vigne. 

L'Orthod.  Mais  comment  nomme-t-on  le  fruit  de  la  vigne  ^^ 


quan 


d  il  eft  foulé  ? 


41 


L'Er.  On  le  nomme  du  vin,  ^^ 

L'Orthod.  Quand  les  fol dats  ouvrirent  lecofté  du  Sauveur  ^^ 

avec  uiie  lance,  qu'eft- ce  que  les  Evan gélifies  nous  difent  qu'il  ^^ 

en  coula  ?  \^ 

L'Er.  du  fang  &:  de  l'eau.  ^^ 

L'Orthod.  Vous  pouvez  comprendre  par  là  que  c'efl  le  ^^ 

Sang  du  Sauveur  qui  eft  appelle  jang  de  la  vigne.  Car  fi  le 


v 


148  Liv.  V.  Explication  des piijf'gjs  de  Thsodoret 
Seigneur  s'appelle  vigne  ^  ôc  11  le  truie -ie  la  vigne  s'appelle  vin; 
&;  i\  du  cote  du  Seigneur  il  coula  des  Fontaines  de  iang  kir  Le 
refte  de  ion  corps  j  c'efb  avec  beaucoup  de  raifon  qtie  le  Pro- 
phète a  prédit  qu'il  laveroit  Tes  vétam:;ns  dans  le  vin  ,  8c  Ton 
manteau  da-nslefang  delagtape.  Car  com:ne  le  fruit  myfti- 
que  de  la  vigne  s'appelle  après  la  confecration  fang  du  Sei- 
gneur 5  de  niêai-^  le  Prophète  a  appelle  fang  de  raifin  ,  le  fang 
de  la  véritable  vigne. 

L'Er.  Vous  avez  prouvé  clairement  ce  que  vous  voûtez  cjuoy 
'qu'en  paroles  myftiques. 

L'Orthod.  Quoy  que  ce  que  j'ay  dit  jufques  icy  fuifife  pour 
prouver  ce  que  j'ay  prétendu,  je  ne  lailferay  pas  d'ajouter  en- 
core une  autre  demonftration  pour  confirmer  davantage  cette 
rerité.  ^ 

L'Er.  Je  vous  en  feray  fort  obligé,  c'efl  encore  un  avantage 
que  je  tireray  de  yotre  entretien. 

L'Orthod.  Vous  fçavez  que  J.  C.  a  appelle  fon  propre 
corps  du  nom  de   pain  ? 
Je  le  r<^ay. 

L'Orthod.  Et  qu'ailleurs  il  donne  à  fà  chair  le  nom  de 
froment  ? 

L'Er.  Je  le  fçay  aufli.  Car  il  efl:  dit  dans  l'Evangile:  L'heure 
ef}  venue  que  le  F~ils  de  l'homme  doit  efire  glorifie,  ^^  Jï  le  grain  de 
froment  tombant  en  terre  ^  n'y  meurt ^  tl  demeure  Jlerilei  mais  s'il 
meurt,  il  devient  capable  de  porter  beaucoup  de  fruit. 

L'Orthod.  Mais  dans  l'inftitutiondes  myfteres  ilappella  le 
pain  fon  corps,  bL  le  vin  fon  fang. 
L'Er.  J'en  conviens. 

L^Orthod.  Cependant,  félon  la  nature,  le  corps  s'appelle 
corps  &   le  fing  fang. 
L'Er.  Oiiy  fans  doute. 

L"Orthod.  Mais  notre  Sauveur  a  changé  les  noms.  Il  a  don- 
né au  corps, le  nom  de  fymbole,6c  au  fymbole  le  nom  du  corps, 
&  s'érant  donné  à  luy-mêmelc  nom  de  vigne,  il  a  donné  au 
fymbole  celuy  de  fang. 

L'Ojt.  Ceque.vous  dites.eft.tres-vray,  mais  jevoudrois  bien 
f^avoir  quelle  eflla  caufe  de  ce  changement  des  noms. 

L'Orthod.  La  raifon  en  cft  claire  à  ceux  qui  font  initiez  aux 
myfteres;  c'eft  que  J.  C.  vouloitque  ceux  qui  participent  aux 
divins  myfteres  ne  cojifideraflent  pas  la  nature  des  cliofes  qui 

s'y 


^  dé  trois  Auteurs  qui  ont  parlé  comm^  îuy:      249 

s'y  voyenc ,  mais  que  par  ce  changement  de  noms  ils  crûfîenc  "  Ch.  il. 

je  changement  qui  fe  fait  par  lagrace.  Car  J.  C.  qui  appelle  "^ 

fon  corps  Xïiit\ixt\  froment  àcpain,  &qui  s'eft  luy-même  nom-  " 

mé  wg»fj  ,  a  honoré- les  fymboles  vifibles  du  nom  de  Ibn  " 

corps  &  de  fon  fang,  non  en  changeant  la  nature ,  mais  en  " 

ajoutant  la  grâce  à  la  nature.  " 

L'Er.  Quoique  vous  ayez  exprimé  des  chofes  myftiques  par  " 

des  expreflions  myftiques ,  vous  n'avez  pas  lailTé  d'expliquer  " 

tres-clairement  des  chofesqui  ne  font  pas  connues  de  tout  le  '' 

monde.  "■ 

L'Ofth.  Puis  donc  qu'il  eft  confiant  que  c'efl:  le  corps  du  Sei-  ''' 

gneurquieft  appelle  robhe^&c  manteau  par  \e  Patriarche ,  &que  "' 

nous  avens  com.mencé  à  parler  des  divins  myfteres  3  dires-moy  " 

en  vérité  ,  dequoy  vous  croyez  que  la  viande  faince  foit  fym-  " 

bole  &  Sacrement)  Eft-ce  de  la  divinité  de  notre  Seigneur  '^ 

J.  C.  ou  de  fon  corps  &  de  fon  fang  ?  « 

L'Er.  II  n'y  a  pas  lieude  dçuterquecene  foie  des  ehofesmê-  '' 

mes  dont  elle  reçoit  le  nom.  «f 

L'Orth.  Voulez-vous  dire  du  t:orps&  du.fang  ?  " 

L'Er.  Ouy  fans  doute.  " 

L'Orth.  Vous  parlez  comme  un  homme  qui  aimez  îa  V(?ri-  "■ 

té.  Car  J.  C.  ayant  pris  le  fymbole ,  ne  dît  pas.  Ceci  eft  ma  di-  '' 

vinité  5  il  dit ,  Ceey  eftmon  corps.  Il  dît,  le  fam  que  je  donncray  cfi  f' 

ma  chair ,  que  je  dorrmray  four  la  vie  du  monde.  <•' 

L'Er.  Ce  que  vous  dires  eft  tres-vray  ,puifque  ce  font  les  ora-  « 

clés  mêmes  de  l'Ecriture.  " 

L'Orch.  Mais  fi  ces  oracles  font  vrais^  il  faut  donc  que  J.  C.  «•' 

ait  un  corps  ?  .' 

L'Er.  Eft  ce  que  je  dis  qu'il  eftoit  incorporel  ?  ce 

L'Orth.  Vous  confcftèz  donc  qu'il  avoit  un  corps?  ce 

L'Er.  Je  vous  dis  que  le.  Verbe  s'eft  faJtchair  3  carc'eftceque  c<- 

l'Ecriture  m'apprend.  cc 

Voilà  mot  à  mot  le  pafÏÏige  du  premier  Dialogue  de  Theo- 
doret:  Celuy  que  l'on  cite  du  fécond  regarde  plus  la  rranlfub- 
ftantiation  que  la  prefence  réelle.  Mais  comme  il  a  beaucoup 
de  rapport  avec  celuv-ci ,  bc  qu'ils  s'entreclairciilent  mutuel- 
Jemenr ,  je  les  rapporteray  tout  de  fuite.  Theodoret  y  prétend 
de  même  convaincre  l'Eutx^chien  que  le  corps  de  J.C.  n'eftpas 
changé  en  la  divinité  i  Se  il  employé  pour  cela  un  argumenc 
tiré  de  l'Euchanftie. 

îi 


zjo     Li  V.  V.  Explication  des pajfdges  de  Theodoret 

L'Ort.  Dices-moy,  je  vous  prie  j  les  iymboles  myftiquesqui 
font  ofFercs  à  Dieu  par  les  Preftres ,  de  quelle  chofe  font-Us 
fymboles  ? 

L'Er.  Du  corps  &  du  farsg  du  Seigneur. 

L'Orth.  Eftce  de  fon  vray  corps  ou  non  ? 

L'Er.  De  fon  vray  corps. 

L'Orth.  Fore  bien.  Car  il  faut  que  toute  image  ait  fbtî 
original  ,  comme  les  Peintres  ne  font  qu'imiter  la  natu- 
re, &  qu'ils  tirent  des  chofes  vifibles  tout  ce  qu'ils  reprefen- 
rent 

L'Er.  Il  efbvray. 

L'Orth.  Si  donc  les  divins  myfteres  font  les  Anticypes  d'un 
vray  corps ,  il  faut  que  le  coqjs  du  Seigneur  foit encore  corps, 
&  qu'il  ne  foit  pas  changé  en  la  nature  de  la  Divinité  ,  mais 
qu'il  foit  feulement  rempli  d'une  gloire  divine. 

L'Er.  Je  fuis  ravi  que  vous  ayez  ouvert  les  difcours  des  divins 
myfteres.  Car  je  prétends  vous  montrer  par- là  que  le  corps  du 
Seigneur  eft  changé  en  une  autre  nature.  Répondez  donc  à  la 
queftion  que  je  vous  vais  faire, 

L'Orth.  Dites. 

L'Er.  Comment  appeliez- vous ,  avant  l'invocation  faccr- 
dotale,  le  don  que  l'on  offre  ? 

L'Orth.  Il  ne  faut  pas  le  dire  ouvertement ,  parce  qu'il  fe 
peut  faire  que  nous  foyons  écoutez  par  des  personnes  qui  pc 
font  pas  initiées. 

L'Er.  Répondez  donc  en  termes  couverts,  fi  vous  voulez. 

L'Orth.  Nous  l'appelions  un  aliment  fait  de  certains  grains. 

L'Er.  Et  comment  nomme- t'on  l'autre  fymbole  ? 

L'Orth.  On  luy  donne  un  nom  commun  qui  marque  une 
forte  de  breuvage. 

L'Er.  Et  après  la  confecration  comment  appellezvous  ces 
fymboles? 

L'Orth.  Le  corps  &  lefangdej.  C. 

L'Er.  Et  vous  croyez  participer  au  corps  6c  aufangde  J.  C? 

L'Orth.  Ouy  je  le  crois. 

L'Er.  Donc  comme  les  fymboles  du  corps  6i;  du  fang  du  Sei- 
gneur font  autres  avant  l'invocation  facerdotale  ,  qu'après  5  àc 
que  par  la  confecration  ils  font  chaVigez  &.  (ont  faits  autres  ^  de 
même  le  corps  du  Seigneur  après  fon  afcenfiona  efté  changé 
en  une  eiîênce  divine. 


ce 
<c 
ce 
<c 
ce 
et 
ce 
ce 


gy?  de  trois  Auteurs  qui  ont  parlé  comme  îuy.  zji 
L'Orth.  Vous  vous  enveloppez  dans  les  filets  que  vous  avez  "  Ch.  IL 
vous  mêmes  tilTus.  Car  les  lymboles  myftiques  ne  quittent  " 
point  leur  propre  nature  ,  ils  demeurent  en  leur  première  effen-  " 
ce  ,  &  dans  leur  ficrureScdans  leur  forme.  Ils  font  vifibles  &  " 
palpables  comme  auparavant. Mais  on  conçoit  par  l'efprit  qu'ils  " 
font  ce  qu'ils  ont  eflé  faits  :  on  croit  qu'ils  le  font ,  &  on  les  '*■ 
adore  comme  eftant  ce  qa'on  les  croit.  Comparez  maintenant 
cette  image  avec  fon  original  ,  &  vous  verrez  le  rapport  qu'il  y 
a  de  l'un  à  l'autre.  Car  il  faut  que  la  figure  refTemble  à  la  véri- 
té. Le  corps  donc  dej,  C.  garde  fa  première  forme,  (a  première 
figure .  fa  première  cir  confcription ,  ôc  pour  le  dire  en  un  mot , 
il  a  l'efTence  d'un  corps.  Mais  après  la  refurrcclion  il  a  eftc  fait 
immortel  &  incorruptible,  il  s'eft  afîis  à  la  droite  de  Dieu  ,  &: 
toute  créature  l'adore  , parce  qu'il  eft  appelle  le  corps  du  maî- 
tre de  la  nature.  "^ 

L'Er.  Cependant  le  fymbolemyftique  cliange  fon  premier  '^ 
nom.  Car  on  ne  l'appelle  pluscomme  ob  faifoit  auparavant  ;  '' 
mais  on  le  nomme  le  corps  de  J.  C.  D'où  il  s'enfuit  que  la  vé- 
rité qui  répond  au  figne ,  doit  eftre  appellce  Dieu  £c  non  plus 
corps. 

L'Orth.  Vous  vous  trompez  5  car  on  ne  l'appelle  pas  feule- 
ment corps  ,  mais  ^.Vx^xpam  de  'uie.  C'cfl:  le  Seigneur  mcrfie  qui  "^ 
l'a  ainfi  appelle.  Et  quant  au  corps  même  ,  nous  l'appelions  un  '* 
corps  divin  ,  un  corps  vivifiant ,  le  corps  du  Seigneur  ;  voulant  '^ 
dire  par-là  que  ce  n'eft  pas  le  corps  d'un  homme  ordinaire,  '' 
mais  le  corps  de  J.  C.  qui  cfl  Dieu  6c  homme.  ^^ 

Ces  deux  pafTages  fournifient  le  fujet  d'une  difpute  longue 
&  embarraffee.  LesMiniftres  font  de  grands  traitez  pour  éta- 
blir les  confequences  qu'ils  en  tirent,  &  s'emportent  contre 
ceux  qu'ils  réfutent  avec  une  violence  qui  ne  leur  fiéroit  pas 
trop  bien  ,  quand  ils  auroient  raifon.  Aubertin  appelle  en  un 
endroit  M  de  la  Milletiere  le  plus  ..mâotcictix  &  le pliis  ipiomnt  P'7S4> 
de  tous  les  hommes.  Il  dit  qu'il  n'y  a  rien  de  plus  étonnant  qtie 
fon  avev.'^lement  ^   fon  impudence.   Stupendam  hominis  cacita. 
tem  é^  impudentiam  :  Il  dit  d'un  Jefuite  nommé  Audebert ,  que 
c'eft  un  prodige  de  hardiefl'e  &  de  folie  ,  audaci^c  ne  dixeriman  P-7*X' 
infaniiC  prodiyum.W  dit  que  les  raifonnemens  du  Cardinal  du 
Perron  ne  font  que  des  illufons  d'un  efprit  fophifiique  ^  fans 
foltdité.  P-  774. 

M.  Claude  luy-même  qui  veut  que  les  autres  ayent  de  £ 

li  ij 


Ci 

ce 
ce 
ce 


t 

M.  Claude 


i^i      Li V.  V.  E.^pUciition  âespdjfiges  de  Theodoret 
grands  égards  pour  luy,6c  qui  s'ofFenle  des  termes  dont  on  s'efl: 
toujours  fervi  dans  les  difpuces  pour  n-jarquer  les  défauts  de  rai- 
^  fonnement,  ne  fait  pas  difficulté  de  dire  d'un  homme  aufll  ce- 

oontie  le  p.     lebre  que  le  Cardinal  du  Perron  ,  ■que  c'<:fi  un. c [prit qui  ne  i'eji 
Nauct  p.  48^.  propofé  que  de  fmirber [on  advcr faire  ,  ^  de  luy  faire  illujion. 

Mais  la  violence  &;  remporteme-nt  de  ces  Minières  ne  m'em- 
pêchera pas  de  leur  foûtenir  qu'ils  le  trompent  dans  toutes  les 
confequences  qu'ils  tirent  de  ces  pafla2;es ,  (oit  contre  la  pre- 
le-ncc  réelle  ,  foit  contre  latranfTubftantiation.  Et  pour  le  faire 
avec  plus  d'ordre  Se  de  netteté  ,Jetraireray  feparémcnt  de  ce 
qui  regarde  chacun  de  ces  dogn^es  ^  en  examinant  d'abord  ces 
paflagespar  rapport  àlaprcfenceréellej  5c  eniuite  par  rapport 
à  la  tranflubftantiation. 


CHAPITRE     III. 

-^hie  ces  paffages  de  Thead.orct  bien  eyitendus  êtabliffent 
cUirerncnt  la  prefence  réelle. 

CE  qui  fait  qu'on  s'égare  dans  l'intelligence  des  paflàges 
des  Auteurs,  c'eft  qu'on  les  examine  fans  principes  ,  fans 
-xcgie  &:  fins  équité  ,  Se  que  l'on  s'attache  à  un  mot  oc  à  une 
-claufe  (eparée,  fans  les  confiderer  par  rapport^à  tout  le  corps 
de  ladodrine  de  l'Auteur  &  de  celle  de  fon  fiecle. 

La  rai  (on  veut  que  l'on  ùÇ^'o.  tout  le  contraire.  Car  comme  il 
n'eil:  nullement  vraifemblable  qu'un  Auteur  ait  efté  tantoft 
d'an  fentimsnc  fur  une  matière  importante  ,  &  tantoft  d'un 
autre  i  le  fcns  véritable  de  chaque  palfage  en  particulier  doit 
ellire  tel  qu'il  s'accorde  avec  toutes  les  autres  expreffions  du 
..niême  Auneur.  Et  de  même  parce  qu'il  n'eft  pas  auflî  fort  pro- 
bable qu'un  fçavant  homme,  tel  qu'eftoit  Theodoret,  eût  fur  îç 
fond  du  Myftere  de  l'Euchariftie  des  fentimens  differens  de 
ceux  delEg  lie  defon  temps  ,  principalement  à  l'égard  de  la 
.prelen.erécUe  5  il  faut  encore  que  le  kn^  de  chaque  lieu  foie 
conforme  à  la  do^flrine  du  fiecle  où  il  a  vccu. 

Ainfî  la  principale  marque  d'un  fens  véritable  eft  qu'il  s'ac- 
corde avec  toutes  les  autres  exprefllons,  ou  du  même  Auteur, 
oi^  de  cCiUX  que  l'on  fuppoie  avoir  elle  du  nicmelenciment  que 


^)  de  trois  Auteurs  qui  ont  parlé  comme  luy,  155 
l-jy.  Et  une  grande  marque  de  la  Faufletc  d'un  fens.c'efl:  qu'il  ne  Ch.  IÏI. 
convienne  qu'à  un  lieu  parcioilier ,  6c  qu'il  foie  contraire  à  rous 
\ç.s  autres  ou  du  même  Auteur^ou  de  ceux  du  même  remps.  De 
forte  que  lorfque  de  deux  fen%  l'un  convient  à  tous  les  paflages 
généralement ,  l'autre  ne  fêpeut  appliquer  qu'à  un  lieu  parti- 
culier ;  il  eft  indubitable  que  le  fens  gênerai  ôc  commun  doit 
eflre  infiniment  prei'erc  au  feni  particulier. 

Il  faut  encore  conluierer.  comme  on  l'a  remarqué  fouve'hc 
ailleurs,  que  l'jdée  qui  répond  aux  mots  dont  on  cherche  le 
fens ,  ne  fè  doit  pas  prendre  precilément  de*la  figniiication  lit- 
térale de  chaque  terme  ,  parce  qu'il  y  en  a  beaucoup  aufquels 
l'eiprit  joint  d'autres  notions,  &  qui  ne  marquant  d'eux- mêmes 
l'objet  que  l'on  veut  faire  concevoir  que  par  une  de  (es  parties, 
nous  lereprefentent  néanmoins  tout  entierpar  l'habitude  que 
l'efprit  a  de  joindre  certaines  idées. 

L'Ecriture  par  exemple  en  nous  difant  que  le  Verbe  s'eftfaic 
chair,  n'a  pas  defîéin  feulement  de  nous  faire  entendre  qu'il  a 
pris  une  chair  fans  ame^  mais  elle  veut  dire  qu'il  a  pris  un  corps 
&:uneame.  Or  nous  avons  montré  que  les  mots  d'/»?./g(7,  A\in- 
titype  ,  à^  figure  ,  de  jymbole ,  de  Sacremev.s  ,  àc  myfierè  eftoienc 
de  ce  genre  ,  6c  ceiuy  de  changement  en  eft  aulTÎ  ;  parce  qu'il  eft 
déterminé  (ur  le  fujetde  l'Eucha-iftie,  à  un  changement  fub- 
flantiel  ,  comme  nous  l'avons  fut  voir. 

Si  les  Miniftres  avoient  fuivi  ces  règles ,  ils  n'auroient  pas 
tant  fait  de  bruit  des  objeclions  qu'ils  tirent  d-e  Theodaret  con- 
tr-ela  pfefence  réelle. 

La  plus  apparente  eft  fondée  fur  ce  que  cet  Auteur  dit  dans 
fon  premier  dialogue  ,  que  comme  le  fniit  myfiique  de  lavigne 
s'appelle  après  la  confecration  fang  du  Seigneur ,  de  même  le  Prophè- 
te a  appelle  fanq^du  raifîv ,  le  fens  de  la  verit.ible  vigne. 

Les  Miniftres  concluent  de  là,  que  comme  le  fàng  de  J.  C. 
n'eft  appelle  par  Jacob  y^/«g  du  raifin  que  par  métaphore  ; 
demême^  félon  Theodorer,  lefruitde  la  vigne  n'eft  appelle 
fang  de  J.  C.  que  par  métaphore  ,  que  l'une  de  ces  cxprelîions 
n'ell  pas  plus  propre  que  l'autre ,  puifque  Theodoret  les  com- 
pareenfemble  ^  eftant  ridicule^  difent-ils,  s'il  eût  cru  que  le 
vinconfacré  fut  réellement  le  iang  de  J.  C.  qu'il  eût  compa- 
ré l'expreffion  qui  l'affirme  avec  cette  autre  expr  ifîion  dejacol-, 
où  le  fang  de  J.  C.  eftappellé  vin  6c  fmg  du  raifm  ^ce  qui  n'eit 
qae  métaphorique  3  6c  qu'il  eût  dit  encore ,  comme  il  fait  dans .. 

li  iij 


ZJ4      Liv.  V.  Explication  despa.ffciges  deTheodoret 

Ja  lliice  ,  que  J.  C-  a  changé  les  noms  i  quil  a  donne  aux  fymboles 
le  nom  de  [on  corps  ^  de  [on  fawz^  ,c^  à  fon  corps  ^^  à  fon  fang  le  nom 
des  fymboles.  Car  il  y  a  bien  changement  de  nom  ,à  donner  au 
corps  &  au  fang  de  J  C.  le  nam  de  pain  &  de  vin  ,  puilqu'ils  ne 
font  pas  réellement  pain  &  vin.  Mais  quel  changement  y  a  t'it 
à  appeller  \qs  fymboles,  le  corps  &  lefang  de  J.  C.  s'ils  font  réel- 
lement ce  corps  bc  ce  fang  ? 

On  leur  répond  queTheodorer  compare  ces  expreffions  dans- 
ce  qu'elles  ont  de  femblable^mais  qu'il  n'en  a  pas  pour  cela  igno- 
ré les  différences.  Là  reiP^mblance  coniîfte  en  ce  que  comme 
J.  C.  s'eft  appelle  luy  même  vigne  &;  froment  ;  &  que  le  Pro- 
phète appelle  fon  fang  du  nom  de  fang  du  raifini  J.  C.  a  de  mê- 
me donné  le  nom  de  fon  corps  &.  de  fon  fang  à  ce  qui  étoit  pain 
£c  vin  par  fa  nature  ^  ainfi  comme  le  nom  de  froment  fie  de  vi- 
gne &  de  vin  ne  convient  point  par  nature  à  J  C.  de  même  il 
eft  vray  de  dire  qtie  le  pain  &  le  vin  qu'il  a  appeliez  fon  corps  6c 
Ion  fang,  n'eftoient  pas  par  leur  nature  fon  corps  6c  fon  fang. 

Mais  la  différence  confifte  en  ce  que  J.  C.  en  s'appellant  vi- 
gnen'z  point  efté  réellement  changé  en  vigne,  en  s'appellant 
pain^  ne  s'eft  point  rendu  pain.  Ecainfr  il  n'a  point  fait  que  les 
noms  de  pain  &  de  vigne  luy  convinffenr  réellement  5  au  lieu 
qu'en  donnant  au  pain  le  nom  de  f,')n  corps  ^  il  1  a  réellement 
changé  en  fon  corps  -,  &  en  donnant  au  vin  le  nom  de  ion  fang, 
i!  l'a  réellement  changé  en  fon  fang.  Et  il  a  fait  ainfi  que  les 
noms  de  corps  &  de  /C.;/g  convindcnt  réellement  à  ce  qu'il  a  ap- 
pelle fon  corps  êc  fon  fang  :  de  forte  que  ces  dernières  expref- 
iions  font  fondées  fur  un  changement  réel,&  non  pas  les  auti"esv 
Il  n'y  a  rien  de  moins  imaginaire  que  la  reffemblancc  &  la 
différence  de  ces  expreffions^  &  l'on  peut  dire  même  en  quel- 
que forte  que  l'on  conçoit  l'une  &  l'autre  par  différentes  par- 
ties de  l'ame.  Car  on  conçoit  la  reffemblance  en  fuivantl'im- 
preflion  qui  répond  au  fens.  C'eft-à  dire  que  l'on  conçoit  que 
comme  J.  C.  s'appelle  vigne  ,  quoique  Ic^  fens  mettent  une  dif- 
férence réelle  entre  luy  &  une  vigne  5  de  même  il  appelle  le 
vin  fon  fang,  quoique  les  fens  nous  reprefentent  ces  deuxcho- 
fes  comme  deux  eflres  différents.  Et  c'eft  en  quoy  confifte  la 
reffemblance  de  ces  exprefUons. 

Mais  c'eft  par  la  raifon  éclairée  des  lumières  delà  foy  que  l'on 
en  conçoit  la  différence  ,  parce  que. la  foy  ne  nous  apprenant 
point  que  J.  C.  foie  changé  en  vigne,  elle  nous  fait  alTez  com- 


(^  de  trois  Auteurs  qui  ont  parlé  comme  hy.  255 
prendre  qu'il  ne  s'appelle  wg/^r  que  par  meraphore^au  lieu  c]i;e  C  H.  ÎII. 
nous  enfeignant  que  le  vin  eft  réellemenr  changé  au  fangde 
J.  C.  elTe  nous  fait  concevoir  que  ce  que  l'imagination  nousre- 
prefenre  comme  deux  eflrres ,  n'efb  qu'un  même  élire  ,  qui  gar- 
de les  apparences  de  vin,  &  qui  eft  réellement  le  fang  Ac  ].  C. 

La  queftion  doit  donc  confifter  uniquement  à  fçavoir  fi  Theo- 
dorecquia  marqué  dans  le  paiîage  allégué  la  refTemblance  qui 
fe  trouve  entre  ces  expreffions,  a  reconnu  ou  ignoré  les  diffé- 
rences que  les  CathoHques  y  mettent.  Les  Catholiques  font  en 
droit  de  iuppofer  qu'il  les  a  reconnues, puifque  tous  les  Pères  les 
ont  reconnucs;&  que  fçachant  tous  quej.  C.  s'eft  appelle  vigne, 
ils  n'ont  jamais  dit  que  J.C.  feFùt  changé  en  vigne.  Us  n'ont  ja- 
mais exhorté  perfonne  à  croire  que  J.  C.  fi.it  une  vigne. Us  n'ont 
jamais  dit  qu'il  n'en  falloic  point  douter,  malgré  la  répugnance 
de  notre  raifon^  de  nos  fcns.  Us  n'ont  jamais  dit  que  depuis 
qu'il  s'eftoic  appelle  vio;ne,il  n'eftoit  plus  celuy  qui  eftoit  né 
d'une  Vierge^mais  qu'il  eftoit  ce  qu'il  s'eftoit  fait  en  fe  donnant 
ce  nom.  Us  n'ont  point  entrepris  de  prouver  la  polFibilité  du 
chansiemenr  de  T.  C.  en  viîrneiils  n'en  ont  allégué  aucun  exem- 
pie  j  au  lieu  qu'ils  n'ont  rien  oublié  de  tout  cela  à  l'égard  de 
i'Euchariftie  :  qu'ils  nous  ont  avertis  expreftement  que  le  pain 
eftoit  changé  au  corps  de  J.  C.  &  le  vin  en  Ton  fang^Sc  qu'ils  ont 
marqué  en  une  mfiniré  de  manières  qu'ils  entendoient  par  ce 
chançemenc  un  chançrement  réel  &.  fubftantiel. 

U  n'-y  adôncqu'à  demander  aux  Miniftres  s'ils  veulent  join- 
dre Theodoret  aux  autres  Pères,  ou  l'en  feparerj  s'ils  l'en  fepa- 
rent,quelle  fera  l'autorité  &  le  poids  d'un  Auteur  oppofé  à  tous 
Jes  Pères  ?  s'ils  l'y  veulent  joindre,  qu'ils  nous  permettent  donc 
d'attribuer  à  Theodoret  lespenfées  des  awtres  Peres,6cderup- 
pofer  qu'encore  qu'il  n'ait  pas  precifément  marqué  dans  cet 
endroit  les  différences  qu'ils  ont  reconnues  entre  ces  expref- 
fioTîs,  il  n'a  pas  laiffédeles  reconnoiftreauffi-bien  qu'eux. 

Qu'ils  ajoutent  donc  à  ce  paftiige  ce  que  l'on  doit  croire  que 
Theodoret  a  certainement  penfé  ,  êcils  ven-ont  fi  leur  difficul- 
té pourra  fubfifter. 

Mais  il  n'cft  pas  bef^)in  d'autres  interprètes  pour  faire  con- 
noiftre  la  peniée  &  le  véritable  fens  deTheodoret ,  que  Theo- 
doret même.  Et  pour  en  convaincre  tout  le  monde,  je  demande 
Ç\.  l'on  pourruit  dire  raifonnablement  que  ce  pafTageeiit  une 
difficulté  confiderabIe,Si  qu'il  fut  contraire  à  laprefencercel- 


.P^*"  1^6     Liv.  V.  Explication  des pa^^ges de  Theodoret 

le  ,  Cl  Theodorec  s'y  eftoit  exprimé  de  cette  forte.  J.  C.  a  fair 
un  changement  de  noms.  Il  s'cfi:  donné  à  lui  même  le  nom  des 
lymbules  de  (on  corps  &  de  Ton  Tang^  en  s'appeliant  pain  ,  fro~ 
ment  &c  vigne.  Si.  il  a  donné  ^ux  fymboles  les  noms  de  fon 
corps  &  de  fon  iang.  Mais  il  y  a  cette  différence  qu'en  s'appela 
lant  v/g?2e  ,  il  n*a  point  voulu  nous  faire  croire  qu'il  fût  en 
effet  une  vigne  ,  ni  qu'il  fût  changé  en  vigne  ,  ni  queceluy  qui 
le  reçoit  ,  reçût  une  vigne:  Il  n'a  point  voulu  eftre  adoré  com- 
me eftant  devenu  vigne  i  au  lieu  quenoi>feulement  ilaappellé 
lepam  fon  corps  de  le  vin  fon  fing,  mais  qu'il  veut  encore  que 
nous  croiyons  que  le  pain  eflie  corps  dej.  C.  par  changement» 
&  que  par  ce  changement  le  pain  cil:  fait  le  corps  de  J.  C. 
De  forte  que  nous  fommes  obligez  de  le  croire  corps  de  J.  G. 
de  le  concevoir  comme  corps  deJ  G.  de  l'ad<»rer  comme  corps 
deJ.  C.  de  le  recevoir  comme  corps  de  J.  G.  Qu'ainflnonfeu. 
lement  ce  changement  effedif  eft  la  caufede  ce  que  nous  ap- 
pelions le  pain  corps  de  J.  G.  mais  aufli  de  ce  que  J.  G.s'efl; 
donné  les  noms  de  vigne  &  de  froment,  &c  de  ce  que  Jacob  ap, 
pelle  fon  fang  du  norn  de  vin  i  ces  CKprelTions  eftant  toutes  fon- 
dées fur  ce  qu'il  devoit  changer  le  pain  &  le'  vin  en  fon  corps  8û 
en  fon  fang. 

Je  demande  encore  une  fois  aux  Miniftresfi  ce  paflàge  ain^ 
exprimé, leur  fembleroit  fort  propre  pour  perfuader  que  Theo- 
doretn'a  point  crii  la  prefence  réelle,  6c  qu'il  a  voulu  que  le  vin 
nefùtlelang  de  J.  G.  que  comme  J.  G.eft  une  vigne?  Gepen- 
dant  je  n'y  ay  rien  mis  qui  ne  foit  pris  de  Theodoret  même 
dans  ces  deux.  Dialogues.  Il  eft  vr?.y  qu'il  dit  ^ue  le  vin  myfli- 
qitc  e(l  appelle  fang  de  J.  C.  comme  le-  fang  de  J.  C.  cfl  appelle  vin  ^ 
CS  que  le  seiyieur  a  change  les  noms ,  en  fe  donnant  les  noms  des  fym- 
Loles  ^  dr-  donnant  aux  fymboles  les  noms  de  fon  corps  éi"  d^  fon  fang^ 
Et  cela  prouve  feulement  qu'il  a  reconnu  la  rcffemblance  de. 
CCS  cxprcfiions  ,  ce  qui  n'eft  pas  en  queflion. 

Mais  n'a- il  pas  auffi  reconnu  la  différence  ?  Ne  dit- il  pas  que 
7.  C^  a  changé  les  noms  ,  afin  que  par  ce  changement  de  noms  ils  cruf- 
fent  le  changement  qui  fe  fait  parla  qracel  II  veut  donc  qu'on  re- 
connoiife  un  changement  pour  fondement  de  ces  exprcffions. 
Mais  où  fe  fait  ce  changement?  Eft-ce  dans  J.  C.  afin  qu'on- 
Tappelle  vigne ,  ou  dans  le  pain  &c  le  vin  ,  afin  qu'onles  appelle. 
corps  &  fang  de  J.  G  ? 

^^hQs  Miniftres  mcines  l'entendent  d'un  changement  qui  fe  fait 

dans 


&  des  trois  Auteurs  qui  ont  pxrU •comme  luy.       t^j 
<îans  les  Myfteres;  ScTheodoretle  déclare  expreflemenc.  Car  Ch.  IfC. 
il  parle  de  ceux  qui  participent  aux  myfteresj  il  leur  deffcnddc 
s'arrefter  à  la  nature  dzs  chofes  qui  s'y  voyenc,  &  il  les  oblige 
de  croire  le  changement  qui -s'y  fait. 

Voilà  donc  déjà  une  différence  reconnue  par  Theodoret. 
J.C.  ne  s'eft:  point  appelle  vigne  pour  nous  obliger  à  crore  qu'il 
efl:  changé.  Et  au  contraire  il  appelle  le  pain  Ton  corps  Se  le  vin 
fon  Tang,  pour  nous  obliger  à  croire  un  changement. 

Mais  voyons  quel  eftce  changement,  &:  par  quels  caracte- 
resThecxloret  le  defigne.  C'eft  déjà  félon  luy,  un  changement 
qui  fe  conçoit  parTerpric.  On  conçoit^  dit-il ,  far  l'cjpritque  les 
fymboles  font  ce  qu'ils  ont  efiè  faits  ,  on  croit  qu'ils  le  font ,  ^  on  les 
adore  comme  efiant  ce  qu'on  les  croit. 

Theodoret  reconnoift  expreiîement  tout  cela  du  pain  &du 
▼in ,  que  l'on  appelle  corps  &;  fang  de  J.  C.  &  il  ne  reconnoifl: 
jien  de  tout  cela  à  l'égard  de  J.  G.  qui  s'appelle  vigne  &;  fro-  . 
iTiCnt.  Il  ne  concevoir  point  par  l'efprit  qu'il  euft  elle  fait  vigne 
&  froment.  Il  ne  croyoit  point  par  la  foy  qu'il  eut  été  fait  vigne 
ou  froment.  Et  s'il  l'adoroit  comme  J.  C.  il  ne  l'adoroit  poinc 
comme  ayant  eité  fait  ny  froment  ny  vigne.  On  ne  peut  donc 
pas  dire  qu'il  ne  reconnut  point  de  d  fference  entre  ces  ex- 
preffions  qu'il  compare. 

Mais  ce  n'eft  pas  encore  tout.  Il  s'agit  de  fçavoir  ce  que 
l'on  conçoit  que  l'Éuchariftie  eft  faite  félon  Theodoret,  ce  que 
Ton  croit  qu'elle  eft  faite  &  en  quelle  qualité  on  l'adore  qu-and 
on  T adore  comme  ejiant  ce  que  l'on  croit  qvS elle  a  ejré  faite.  Je  ne 
prétends  pas  icy  faire  fort  fur  le  mot  (^'adorer.  Il  eft  équivo- 
que dans  les  Anciens ,  auffi  bien  que  celuy  de  vénérer.  Et  M. 
Claude  fe  pouvait  épargner  la  peine  de  fubftituer  par  tout  avec 
tant  de  foin  le  mot  de  vénération ,  au  lieu  de  celuy  ^'adoration. 
C'eftpar  l'objet  qu'il  faut  juger  de  la  fignifîcation  de  ce  terme. 
S'il  fe  rapporte  à  la  chair  de  |.  C.  il  fignifîe  une  adoration  fou- 
veraine.  Si  c'eft  à.  un  fimple  figne  ,  ce  n'efl:  qu'une  adoration 
fubalterne,  Se  une  vénération  telle  qu'on  la  peut  rendre  à  des 
créatures. 

Ce  qu'il  faut  donc  premièrement  décider,  c'eft  la  nature  de 
cette  chofèquel'on  affirme  des  fymboles,  èc  dont  Theodoret 
dk^quel'o?:  conçoit  par  l' efprit  que  les  fymboles  font  ce  qu'ils  ont  cfté 
faits  comme  l'on  croit  qu'ils  le  font ,  ^  qu'on  la  adore  ou  rcvere 
comme  efiant  ce  qu'on  les  croit. 

Kk    .  - 


ijS       LiY.y.  E'xplicatio'/zdcspaJfagesdeTheodoref 

Si  on  le  demande  à  M.  Claude^  la  queftion  fera  bien-toft  vui- 
dée,  car  il  s'en  démêle  bien  facilement.  //  ne  faut  fas,  dir  il, 
rêver  longtemps  pour  le  deviner^  c'efi  quon  conçoit  par  l'entende- 
ment qu'ils  font  les  myficres  du  corps  de  J,  C.  qu'on  les  croit  tels  ^ 
qu^on  les  révère  en  cette  qualité.  Mais  il  efl:  à  craindre  aufli  qu'on 
ne  devine  mal ,  quand  on  ne  rêve  pas  affez ,  &  qu'on  propofe 
au  hayard  ces  premières  rêveries.  Se  M.Claude  en  peut  fervir' 
d'exemple  en  cette  rencontre. 

'Car  il  cft  indubitable  que  quand  Tbeodorét  dit,  que  l'on  con- 
çoit  qu'ils  font  ce  qu'ils  ont  cft è  faits  ,  vmro.i  a/Xi^  iy'ivtjo  c'eft  la 
m-cme  choie  que  s'il  avoit  dit.  qu'ils  ont  efté  faits  le  corps  ^Ic 
foig  de  J.  C.  ty~  que  l'on  conçoit  qu'ils  le  font. 

Que  quand  il  dit,  qu'on  croit  qu'ils  le  font  .^  ^  Tf'i  t'ouït  a./,  c'eft 
comm'2  s'il  avoit  dit,  qu'on  croit  qu'ils  font  le  corps  ^  le  fing 
de  I.  C. 

Et  que  quand  il  dit,  qu'on  les  adore  comme  étarit  ce  qu'on  les 
eroit,  c'eft  la  même  choie  que  s'il  étoit  ainfi  exprimé  ;  On  les 
adore  co7nme  étant  le  corps  é^  le  fang  de  J.  C.  &  l'on  croit  qu'ils  le 
font.  En  un  mot,  il  efl:  certain  que  les  termes  à  quoy  les  pro- 
noms relatifs  fe  rapportent  dans  l'expreffion  de  Theodorer, 
font  ceux  de  corps  é^  de  fang  deJ.  C  &  non  pas  ceux  des  myfleres 
du  corps  é-  au  fang  de  J.  C.  donc  M.  Claude  fe  fert  pour  em- 
brouiller ce  palTage. 

Cela  eft  fi  vray  &  fi  confiant  qu'Aubertin  même  recoîanoiflr 
que  les  mots  qu'il  faut  Çm^^Icqt  \ox\z  cqvxx  decorps  éi- de  fangde 
J.  C.  Th  EODO  a  ET, dit  \\.,araifon  de  dire  que  l'on  conçoit  d^  que  l'on 
croit  que  les  fymho'es  myftiques  font  après  la  confecration  ce  qu'ils 
ontctéfaits.^  c'eft  Àdirele  corps  é^le  fangdeJ.C.  TheodoreTUS 
verè  ^quidcm  ait  fymbola  myftica  foft  confecrationem  intelliy.^^ 
credi  i/Ia  qua  faHa  funt ,  nempc  Chrifti  corpus  ^  fanguinem. 

Audi  n'y  avoit-il  pas  moyen  de  defavoiier  que  ce  nefuft  en 
certe  manière  qu'il  falloit  fuppléer  à  cette  propofition,  ôcque 
les  mots  que  les  pronoms  relatifs  rappellent  dansla  mémoire 
ne  fuflcnr  ceux  de  corps  ô-  de  fang  de  J.  C.  Car  il  eft  clair  que 
cette  expreflion  deTheodoret,  qu'on  croit  que  les  fymboles  (ont 
ce  qu'ils  ont  été  faits.,  eft  prife  du  langage  des  Liturgies  &  de  l'in- 
vocation que  le  Prcftre  fait,  dont  il  eft  fait  mention  trois  !iw 
gnes  auparavant.  Or  par  cette  invocation  on  demandoit  ex., 
preflement  à  Dieu  ,  qu'il  fit  le  pain  é^  le  vin  le  corps  (^  le  fang 
de  J.  C.  6c  non  le  înyfitre  du  corps  é"  au  fmg.    Ec  c'eft  ce  <^ue 


Ççf  de  trois  Auteurs  qui  ont  parlé  comme  luy,        2^9 
l'on  a  prouvé  amplement  dans  le  fécond  Tome  de  cet  Ou-  Ch.  III. 

vrage.  1.6.  ci. 

Il  ne  ferviroit  de  rien  de  difputer  de  l'antiquité  des  Liturgies 
que  l'on  y  cite  ;  puifqu'il  paroift  par  les  Coriflitutions  de  Clé- 
ment, parEufebede  Cefarée,  par  S- Cyrille  dejenifalem  ,  par 
faint  Gaudence ,  &  par  faint  Auguilin,  que  c'étoit-Ià  le  langage 
del'Eglife  du  temps  de Theodoret. 

Il  eft  donc  certain  que  Theodoret  ayant  fait  mention  de  la 
prière  ,  par  laquelle  le  Preftre  dcmandoit  à  Dieu  ,  qu'il  fiji  le 
pain  (^le  vin  [on  corps  ^  [on  fing ,  ou  fon  corps  même  fv^  fon  finz 
même ,  comme  porte  la  Liturgie  de  S.  Bafilc;  Rajoutant  en- 
fliite  qu^on  conçoit  ^  qu'on  croit  qu'ils  font  ce  qu'ils  ont  hé  fiiits^ 
portoit  l'efprit  de  tous  ceux  qui  le  lifoient  à  fuppléer  à  cette 
propofition  par  les  paroles  de  la  Liturgie,  &  à  la  prendre  dans 
le  même  fens  que  s'il  eud:  dit  exprelTcment,  que  l'on  conçoit  (jr- 
que  l'on  croit  qu'ils  font  le-  corps  ^  le  fang  de  Je  fus  Clrift  qu'Us  ont 
été  faits. 

Cela  paroift  même  évidemment  par  la  fuite  de  Theodoret 
fans  ce  rapport  à  la  Liturgie.  Car  î'Eranifte  ayant  fait  con- 
feffer  à  l'Orthodoxe  qu'après  la  confecration  lesfymboles  qui 
s'appelloient  pain  ^  vin  auparavant,  s'appellent  corps  c^  fanz, 
de  J.  C  pour  montrer  que  ce  n  étoit  point  d'un  fimplenom  qu'il 
parloit,  mais  d'un  nom  joint  à  l'effet,  il  en  conclut  qu'il  faut 
donc  croire  que  l'on  reçoit  le  corps  ^  le  fani^dej.  C.  &  il  le  fait 
confeiler  à  l'Orthodoxe.  Et  vous  croyez^  luy  dit  il ,  ^?^r  vous 
reccvez^le  corps  é"  le  fang  dej.  C.  Oiiy  Je  le  croy  ^  répond  l'Or- 
thodoxe. 

De  cette  première  confequence  l'Eranifte  en  tire  une  autre, 
qui  eftque  le  pain  eft  donc  changé.  Car  il  n'avoir  fait  avouer 
à'Orthodoxeque  l'on  recevoir  le  corps  de  J.  C.  qu'afin  d'avoir 
droit  de  conclure  comme  il  fait ,  que  les  fymbolc  s  font  autres  avant 
la  confecration^  d^  qu'après  la  confecration  ils  font  changez^ 

Ainfi  il  y  a  félon  Theodoret  un  ordre  de  confequence  entre 
ces  trois  propofitions. 

Ze  pain  eft  appelle  le  corps  de  J.  C. 

L'on  reçoit  le  corps  de  J.  C.  en  recevant  le  pain. 

Le  pain  eft  donc  changé. 

La  première  produit  la  féconde  ,  &:  la  féconde  produit  la 
troifiéme. 

Cependanc  il  eft  clair  que  l'on  ne  fcauroit  conclure  de  ce  que 

Kkij 


i6 o  Li V .  V.  Explication  des  p^Jf^gês  de  Theodoret 
Je  pain  eft  appelle  corps  de  J.  C.  que  Ton  reçoit  le  corps  de  J  C, 
en  recevant  le  pain  ,  fi  l'on  ne  conçoit  qu'il  n'eft  pas  fimple- 
ment  appelle  corps  de  J.  C.  mais  qu'il  l'eft  réellement.  Car  qui 
a  jamais  conclu  de  ce  que  l'Agneau  Palchal  étoit  le  myftereôc 
la  figure  du  paiïage,  que  l'on  recevoitdonc  \Qpaffuge  en  rîien- 
geant  l'Agneau  ? 

De  même  fi  cette  réception  du  corps  de  J.  C.  n'étoitqu'in- 
telleduelie  &:  par  le  moyen  de  la  foy,  il  feroit  impertinent  de 
conclure  de  ce  qu'on  reçoit  (pirituellement  le  corps  de  J.  C.  en 
recevant  le  pain ,  que  le  pain  eft  donc  changé.  Car  quel  Mini- 
ftre  a  jamais  conclu  de  ce  que  l'on  reçoit,  comme  ils  difent, 
J.  C.  en  quelque  forte  en  écoutant  la-parole  desPredicateursj 
que  cette  parole  eft  donc   changée? 

Il  s'enfuit  delà,  que  quand  l'Eranifte  conclut  que  le  pain  eft 
changé ,  il  entend  qu'il  eft  changé  au  corps  de  Jesus-Christ 
félon  le  langage  de  tous  les  Pères,  &  qu'il  faut  fuppléer  à  ces 
paroles  dont  il  fe  fert  /xîxctyê  liuû  'é^'x^w;»'  jUêTctCotAAeTa.i;  les 
lymboles  font  changez  après  l'invocation  ;  &  les  entendre 
comme  s'il  avoitdit,les  fymboles  font  changez  au  corps  de  J.C. 
piiifque,  comme  nous  ayons  remarqué, ces  paroles  ne  (onrqu'u- 
ne  conclufion  de  ce  que  l'Eranifte  avoic  fait  confefTer  à  l'Or- 
thodoxe^  qu'il  croyait  recevoir  le  corps  de  I.  C.  Et  cela  eftant  il  efè 
vifible  que  ce  que  Theodoret  ajoute  enfuite ,  que  l'on  croit  qiae 
les  fymholes  font  ce  qu'ils  ont  efiè  faits ,  ne  fignifie  que  la  même 
choie,  que  ce  qu'il  avoit  exprimé  par  ce  mot  font  change  :}i^ 
Ainfi  comme  il  eft  clair  que  Theodoret  a  voulu  dire  que  les 
fymholes  font  changez  au  corps  de  J.  C.  il  eft  clair  aufli  qu'il  a 
voulu  dire  qu'ils  font  faits  le  corps  de  J.C.  Tout  cela  a  un  rap- 
porta une  liailon  indilfoluble  de  fens  &  d'expreffion. 

Si  l'on  ajoute  à  cela  l'éclaircilTement  qu'on  peut  tirer  de  tous 
Jes-  autres  Pères  pour  déterminer  le  fens  de  ces  mots,  que  le  pain 
eji  changé  an  corps  de  I.  C.  (y-  qu'il  eft  fait  le  corps  de  Je  fus.  Chrift, 
ii  n'y  a  pas  moyen  de  douter  raifonnablement  que  Theodoret 
n'ait  reconnu  auffi  bien  qu'eux  ,  une  réception  réelle  du  corps 
de  C.  J.  &  un  changement  réel  du  pain  en  ce  même  corps. 

Car  nous  avons  fait  voir  dans  tout  le  fixiéme  Livre  du  fé- 
cond Tome  de  cet  ouvrage,  que  ces  termes  ne  fe  pouvoient  en- 
tendre ny  d'un  changement  de  figure,ny  d'un  changement  de 
vertu,  &  que  pour  fignifier  qu'une  chofe  eft  rendue  figure  d'une 
âutre^ou  qu'elle  eft  remplie  de  fa  vertu,  on  n'a  jamais  àiiqueL 


t^de  trois  Aufeurs  qui  parlent  comme  luy.         16^1 

le  e fi  fuite  cette  chofe ,  ou  qu'elle  ejt  changée  en  cette  chofe.  Ch.  IÏL 

Mais  je  n'ay  pasbefoin  prefcntemeni:  de  repérer  ces  preuves. 
Je  prétends  feulement  que  ces  termes,  qui  le  trouvent  dans 
Theodoret ,  que  les  fymboles  font  changez^^  èc  que  l'on  croit  qu'ils 
font  ce  qu  ils  ont  ejiê  f  lits  ^  ont  le  même  lens  que  s'il  avoitdit,  ils 
font  changcT^au  corps  de  I.C.  ils  font  faits  le  corps  de  I.  C.  Et  cela 
me  Tuffit  pour  prouver  ce  que  j'avois  avancé,  que  quoy  que 
Theodores  ait  comparé  ces  deux  propolkions  :  le  fuis  la  vigne. 
Le  v-in  cfl  le  fang  de  I.  C.  &C  qu'il  dilé  que  le  Seigneur  a  change  les 
noms ,  &  qu'il  a  donné  au  fymbole  le  nom  de  fon  corps  ,  ÔC  qu'il  s'ef 
^  donné  a  luy. même  le  nom  du  fymbole  ,  il  ne  les  compare  nean- 
moinsqu'en  ce  qu'elles,  ont  de  iémblable,  6c  qu'il  y  reconnoift 
en  même  temps  de  très- grandes  différences. 

Qu'il  a  regardé  cette  première  propoiition  :  le  fuis  la  vigne 
comme  une  métaphore,  dont  il  ne  s'eniuivoit  ny  que  J.  C.  fuil 
changé  en  vigne,  ny  qu'en  recevant  J.  C.  nous  reçullions  une 
vigne,  ny  que  nousdulFions  concevoir  par  l'entendement  que 
J.  C.  fuft  une  vigne  ,  ny  que  nous  le  duflions  croire  vigne  ,  ny 
que  nous  leduùîons  adorer  comme  une  vigne.  Theodoret  n'a 
jamais  cru  que  rien  de  tout  cela  s'enfulvift  de  cette  propoiition, 
parce  que  perfonne  ne  l'a  crû  ni  ne  le  croira. 

J'ay  pi\)uvé  au  contraire  que  de  cette  propofîtion  :  le  vin  <:fl 
le  fang  de  I .  C.  il  a  eru  qu'il  s  en  fuiw  oit  que  notes  recevions  le  f'.ng 
de  I.  C.  en  recevant  le  vin  confacré  ,  que  le  vin  était  change  au 
fangde  J.  C  qu'il  étoit  fait  le  fang.de  J.C.  que  nous  devions  croire 
qu'il avoit  été, fait  fangde  I.  G.  que  nous  le  devions  adorer  comme 
fang  ae  T.  C.  Tout  cela  luit  manifeflement  du  difcours  de 
Theodor-et  de  quelque  manière  qu'il  l'ait  entendu. 

Voilà  donc  les  différences  de  ces  deux  propofitions  mar. 
quéesSc  rc-connui's  par  Theodoret.  Et  fuppofé  ces  diffcrenccs, 
je  dis  qu'il  ell  ridicule  de  rien  conclure  contre  la  prefence  réelle 
de  la'comparaifon  qu'il  en  fait,  &  que  ces  différences  jointes  à 
la  compara4(ori^  ne  (ont  propres  qu'à  étabhr  cette  doclrine. 

Aufll  comme  a~  Fort  bien  remarqué  le  Cardinal  du  Perron, 
Theodoret  ne  compare  pas  ces  propofitions:  Je  fuis  la  vigne  ; 
levincfi le  fangde  I.  C  comme  deux  propolltions  qui  arentune 
vérité  égale.  Se  dans  lefquelles  l'attribue  convienne  au  fujec 
également. 

Il  les  compare  au  contraire  comme  étant  fubordonnées  l'une 
à. l'autre,  comme  l'une  étant  la  caufe  de  l'autre.  Car  H  veut 

K  k  iij 


îéi        Liv.  V.  ê xpUcmon  des  pajfiges  deTheodoret 
que  J.  C.  fe  foie  appelle  une  viyie  6c  qu'il  aie  appelle  le  via 
fou  fan'z^^  parce  qu'il  dévoie  changer  le  vin  en  Ton  t.mg. 

Ec  c'eft  ce  qui  paroift  n-ianifeftemenc  par  ces  paroles  de- 
Tlieodorec  dans  ion  premier  dialogue.  La  raifon^  die  il  ^deçe 
changement  de  noms  ^  par  lequel  I.  C.  s'appelle  vigne  &  donne 
an  vin  le  nom  de  fon  Tang,  efi  claire  à  ceux  qui  font  initiez^aux 
myftcrcs.  C'efi  qucj.  C.  voulait  que  ceux  qui  participent  aux  divins 
my fi  ère  s  ne  s'arrefiaffcnt  pas  a  la  nature  des  cbofics  qui  s'y  voycnt^ 
mais  que  par  ce  chanzfrnent  de  noms  ^ils  crttffcnt  le  c  banque  ment  qui 
fe  fait  par  la  grâce.  Car  J.  C.  qui  a  appelli'  fon  corps  naturel  ^fro- 
ment &  pain  ,  (j^  qui  s'cfi  luy-  fnème  nommé  vigne ,  honore  les  fymbo- 
les  vifîbles  du  nom  de  fon  corps  f^  de  fonfung  ,  non  en  changeant  la 
nature ,  mais  en  ajoutant  la  grâce  a  la  nature. 

Ainii,  félon  Theodorec,  la  fin  que  J.  C.  a  eue,  non  feulement 
-en  appellanc  le  pain  &  le  vin  fon  corps  &  {owfmg^  mais  aulFi  en 
appellanc  (on  cox^s  froment  èlpam^  fie. en  s'appellanc  luy-  même 
vigne ,  efl:  de  nous  faire  croire  que  le  pain  6c  le  vin  font  chan- 
gez au  corps  6c  au  fang  de  J.  C.  Ce  changement  efl  la  caufe  ôc 
Je  fondement  de  ces  exprelhons.  Mais  comme  ce  fhafigement 
n'efl:  pas  également  fignitîc  par  ces  expreffions  ,  &  que  quand 
J.  C.  a  dit  :  cecy  efi  mon  corps  i  cecy  efi  mon  fang  :  il  l'a  marqué 
direftement  &  clairement ,  au  lieu  qu'il  ne  l'a  marqué  que  mé- 
taphoriquement fie  obfcuremént  en  di(anr  :  je  fuis  la  vigne  .^  il 
5'enfuicque  la  vérité  de  l'une  dépend  de  celle  de  l'autre,  fie  que 
la  première  eft  propre, &  l'autre  métaphorique. 

On  ne  doit  donc  nullement  conclure  de  la  coxripamifon  que 
fait  Theodoret  entre  ces  proportions,  qu'il  les  égale  dans  leur 
vérité,  ou  dans  leur  manière  de  fignifîer,  mais  feulement  qu'il 
les  rapporte  à  la  même  fin ,  qui  efl:  de  montrer  que  par  le  fang 
du  raifîn  dans  lequel  Jacob  dit  que  le  Mclfte  lavera  fon  vejîcment^ 
il  faut  entendre  le  fang  de  J.  C. 

Aubercin  qui  s'cft  propofé  cette  raifon  de  la  part  du  Cardi- 
nal du  Perron  fie  M.  de  la  Milletiere,  s'efforce  de  les  réfuter  par 
un  raifonnement  fi  étrange  qu'on  peut  dire  avec  vérité  qu'il  n'y 
a  pas  la  moindre  étincelle  de  fens  commun  Si  Theodoret, 
dit  il ,  pour  prouver  que  par  le  vin  &c  le  fing  du  rai(ïn  dont  il 
.efi:  parle  dans  la  Prophétie  de  Jacob  ,  il  faut  entendre  le  fang 
de  J.  C.  euft  allégué  que  I.  C.  s'efl:oit  appelle  vigne ^  èc  qu'il 
eu  fl:  montré  en  fui  te  que  y.  C.  s  cftoit  appelle  vigne  ^  parce  que 
dans  rEuchariflie  il  devoit  appellcr  le  vin  fon  lang  j  fon  raifon- 


(d^de  trois  Auteurs  qui  ont  parlé  comme  luy.  163  ' 
ment  auroit  eftë  impercinenc  &  ridicule.  Car  quelle  raifon  &.  Ch.  ÎII. 
quelle  fuite  je  vous  prie  y  a  t-il  entre  ces  propofitions  :  J  .  C, 
icfi  appelle  TJiqne.  Donc  par  le  mot  de  fai.gde  layrappe ,  il  faut 
entendre fonfang  dans  la  prophétie  de  Jacoh.  Le  Seiq^neu  r  devoit 
dans  l'EchariJlie  ,  afpellcr  le  vin  fou  fun<z^.  Donc  c'efi  a  caufe  de 
cela  qu'il  s'efi  appelle  viqrici 

Mais  fi  Aubertin  n'a  pas  veu  cette  fuite,  c'eft  fans  doute 
qu'il  avoic  alors  qyelque  obicurcifiement  d'efprit  qui  l'empë- 
choit  de  voir  une  choie  tres-claire  d'elle-même.  Car  quand  il 
s'agit  d'éclaircir  le  fens  d'une  meraphnre,  il  fuffic  d'apporter  des 
convenances  tres-raifonnables,  £c  que  l'on  n'en  pui fie  pas  ap- 
porter d'autres  plus  naturelles  qui  détournent  Texpreffion  à  un' 
autre  fens.  C'efl  ainfi  qu'on  prouve  &  qu'on  détermine  ordi- 
nairement le  lens  des  mctaphores.  Ec  c'eftce  qu'a  lait  Theo- 
doret. 

Il  s'agifloitde  prouver  que  quand  Jacob  dit  du  Meffie,  qu^il 
laverait  fon  vêtement  dans  le  ftng  du  raijin  ,  il  falloit  entendre 
par  ce  fang  du  raifm  ,  c'efl:  àdire  par  ce  vin  ,  le  fang  de  J.  C. 
dans  lequel  il  devoit  laver  fon  corps  dans  la  pafilon.  Or  n'eft- 
ee  pas  rendre  ce  lens  fort  probable  que  d'alléguer  que  J.  C.  s'effc 
appelle  wgwf?  Car  fi  J.  C  s'appelle  wg/?^,  fon  fang  fe  peut  bien 
appelicr  vm,  é^  fang  du  n/z/f;;,  puifque  le  fangeftau  corps, ce  que 
le  vin  eft  à  la  vigne.  Et  n'efl  ce  pas  rendre  une  raifon  très  forte, 
pourquoy  }.  C.s'eft  appclléx'/g«f,  que  d'alléguer  qu'il  a  appel- 
le; le  vin  fon  fang  ,  &  qu'il  a  changé  le  vin  en  fon  fang  ?  Cette 
vérité  literalé,que  le  vin  efl  changé  au  fang  de  |.  C  qui  eft  ex- 
primée par  ces  paroles^  Cecy  eftmon  A?/?g,  n'efl  elle  pas  capable 
de  fonder  ces  deux  métaphores  :  l'une  donc  |.  C.  .s'eflfervi  en 
s'appellantï^/gw  •  l'autre  que  Jaeob  a  employée  en  marquant 
par  le  mot  de  fang  du  rai  fin ,  le  fang  de  J.C.  Et  le  rapport  de  ces 
deux  exprcilîons  à  celi-c  de  Ja.cob  ,  n'eft-il  pas  très-propre  à  en 
faire  voir  le  fens ,  non  par  une  cDnfeqtience  en  forme,  comme 
Auberfin  prétend  ridiculemenrqu'onle  doit  faire,nuis  pr  une 
convenance  fenfible,  qui  eft  la  manière  naturelle  d'expliqués 
les  métaphores. 


^■64  '   ^IV.   V.-Repon/e  aux  pajfagûs 


CH  AP  ITRE    IV. 

Réfutation  de  la  principale  obje'ciipn  d' Auben'in  ,  Q-  de  M.ClaK- 
de  contre  le  fcnsquc  nous  avons  donné  ùce  pajfaze 

■de  Tljeodorct. 

LA  feule  chofe  qu'on  peut  objecter  raifonnâbleraenr ,  eft 
que  Theodorec  ne  dit  pas  feulejr.enc  que  le  changement 
qui  arrive  dans  l'Euchanftie  fêtait  par  grâce,  mais  qu'il  dit  ex- 
prelTëmenc  que  J.,  C.  ne  f/^^/«;^^ /.//  la  nature ,  ôc  qu'il  ajoute 
ieulemenc  la  'zrace  a  la  nature  ,  y  i^jm     çuaif    p.ivxQoL^^v    ctMa* 

Il  y  a  dans  ce  paflage  une  difficulté  qui  regarde  la  tranfTub- 
ftantiacion\  &  nous  la  traiterons  amplenient  dans  les  chapi- 
tres fuivans  ,  où  nous  ferons  voir  que  Theodoret  dit  dans  un 
fens  très.  Catholique  que  J.  C.  ne  change  point  la  nature  àes 
fymboles.  Mais  parce  que  M.  Claude  abulè  de  ces  paroles,^^^'  le 
changement  fefa/t  par  la  grace^  &iàe  ces  autres  ^«^  J.  C.  ajoute  la 
grâce  a  la  nature ,  pour  en  conclure  qu'il  ne  fe  fait  point  d'autrç 
changement  dans  l'Euchariftic,  que  celuy  de  l'addition  d'une 
certaine  vertu  que  nous  avons  pleinement  détruite  5  &:qu'ainfî 
on  ne  doit  pas  croire  que  le  corps  de  J.  C.  foit  réellement  pré- 
sent, c'ell  ici  lelieudeluy  répondre,  ce  qui  n'eft  pas  difficile. 
Car  pour  la  première  claufe  qui  eft ,  que  le  changement  fe  fait 
par  lagr-ace  ,\\  fuffitde  l'avertir  que  l'argument  que  l'on  tire  de 
ces  paroles  cil:  d  peu  raifonnable  qu'Auberti4i  s'infcrit  en  faux 
contre  le  Cardinal  du  Perron  de  ce  qu'il  avoit  imputé  aux  Mi- 
iiiftrcs  de  s'en  eftre  fervis  :  &  qu  il  ne  defavoiie  pas  que  par  le 
mot  de '2;r.,vT,  on  ne  puillé  fort  bien  eiuendre  la  caufe  de  ce 
changement  J  c'efl:  à  dire  ,  la  puillancç  de  Dieu  &:  fa  bonté 
gratuite. 

Pour  la  feconue  claufc  ,  i!  eft  vray  que  M.  Claude  eft  uni  à 
Aubcrcin,6c  qu'il  l'imite  dans  la  fréquente  répétition  de  ce  paf. 
iage,  &:  dans  la  conclufion  qu'il  en  tireif^avoir  que,fclon  Theo- 
doret, le  changement  qui  arrive  à  l'Euchariitie  confifte  dans 
l'addition  d'une  certaine  vertui  mais  cette  imitation  ne  luy  fait 
pas  d'honneur  ;  car  il  n'apporte  aucune  preuve  du  fens  qu'il 
tienne  à  Theodoret,  6t  il  s'en  remet  à  celle  d'Aubertin. 

Cependant 


^  de  trois  Auteurs  qui  ont  parlé  comme  luy.        16$ 

Cependant  il  n'y  a  rien  de  plus  pitoyable  que  touccequ'Au-  Ch.  IV. 
bertin  die  pour  l'appuyer.  On  en  jugera  par  la  comparaifon 
que  nous  allons  fa4re  de  l'explication  d'Aubcrtin  avec  celle  des 
Catholiques.  Ces  paroles  de  Theodoret ,  que  Dieu  ajoute  la 
grâce  à  la  nature  ,  peuvent  avoir  deux  fens  conformes  à  la  doc- 
trine Catholique  ^  l'un  ,  celuy  que  le  Cardinal  du  Perron  y 
donne ,  qui  eft  que  le  mot  àegnice  eÙ  pris  en  cet  endroit  pour 
la  grâce  elTentielle,  c'eft  à-dire  pour  j.C.  même  qui  eft  fouvent 
marque  parle  mot  degn/rr ,  comme  les  Anciens  le  remarquent 
en  expliquant  cepalfage  ;  Zagmcedc  Dieu  agoti/é  la  mort  ,  6c 
qui  reçoit  particulièrement  ce  nom  dansTEuchariftie  ^qui  eft 
fouvent  appellce  %r.ice  par  les  Pères. 

Ce  Cardinal  juftilîece  fens  par  tant  d'exemples,qu'Aubertiri  Aag.p.^jiji  "3 
a  efté  contraint  d'avouer  que  les  Anciens  ont  quelquefois  pris 
k  mot  degn/fé-en  ce  fens.  Il  prétend  feulement  prouver  qu'il 
ne  peut  convenir  à  ce  lieu  de  Theodoret ,  mais  par  des  raifon- 
nemens  qui  ne  font  que  de  purs  fophifmes,  &  par  quelques 
palTages  mal  entendus  ,  comme  nous  le  ferons  voir. 

Le  fécond  fers  eftencore  plus  naturel  ^  c'eft  que  Theodoret 
par  le  moiàtgrace  n'entend  precifémenc  ni  la  grâce  eOentiel- 
le,  ni  la  vertu  chimérique  de  M.  Claude  i  il  entend  l'effet  fur- 
naturel  produit  par  la  confecration ,  6c  ajouté  à  la  nature  fen- 
/îble  ,  fans  déterminer  en  ce  lieu  quel  il  eft.  Car  c'eft  fe  trom- 
per que  de  prétendre  que  les  Auteurs  fe  doivent  toujours  ex- 
primer par  des  mots  particuliers  êc  précis,  êc  qu'ils  ont  eu  en 
rout  temps  &  en  toutes  occafions  des  idées  diftindes  de  toutes 
chofes.  Ce  n'eft  pas  alîèz  comprendre  comment  les  hommes 
penfent.  Ils  ne  conçoivent  fouvent  les  chofes  que  par  des  idées 
générales  &  confulès,  &:  ils  les  expriment  de  même  j  &  ces 
mots  généraux  doivent  eftre  déterminez- dans  les  matières  de 
foy,  non  par  leur  fignitication  precife  ^mais  fouvent  par  le  fù- 
jetdont  il  s'agit ,  &  toujours  parle  fond' de  la  doctrine  de  TE- 
glife ,  &  de  celuy  qui  s'en  fert. 

Il  eft  donc  tres-vray-femblable  que  Theodoret  en  difant  que 
J.  C.  a  ajoiitè  la  grâce  à  la  nature  ^  n'a  rien  conçu  de  diftincT;  par 
le  mot  de  grâce  ^  mais  feulement  en  gros  un  effet  furnaturel, 
comme  nous  ne  concevons  rien  de  diftincl  en  difant  que  Dieu 
ajoute  à  la  nature  dans  l'Euchariftie  ,  l'effet  gratuit  (j;- fumatu- 
rd  de  fa pmffance.  Mais  qui  luy  eût  demandé  ce  que  c'eftoit  que 
cette  grâce  ,oucetefFet  furnaturel  &  gratuit  que  J.  C.  ajoùteà 

Ll 


2l66      hiwV.  Explictition  despaJfagesdcTheodoret 
la  nature,  iUuroit  répondu  comme  nous  rëpondri.)ns,&  com- 
me il  répond  luy.mcme ailleurs^  quec'eftde  rendre  les  fym- 
boles  corps  &  fang  de  J.  C.  enforte  qu'en  les  recevant,  on  re^d!- 
ve  lé  corps  6c  le  fang  de  J.  C. 

Il  n'y  a  rien  de  plus  naturel  que  cette  explication.  On  y  rend 
par  des  termes  généraux  !e  mot  de  gmcc  quieft  fi  general>qu'il 
s'étend  ,  comme  l'avoue  Aubertin  ,&à  la  grâce clfentielle  ,  & 
aux  grâces  créées, &:  qu'il  comprend  tout  ce  que  Dieu  accorde 
.aux  hommes  par  le  pur  motif  de  fa  bonté.  L'on  yfuppofe  que 
Theodoret  l'auroit  déterminé  comme  l'Eglife  de  Ton  temps  le 
déterminoit ,  &  comme  il  le  détermine  luy-même  ailleurs.  Il 
^     ^  ,  n'y  arien  en  tout  cela  qui  foitfuppofé  en   l'air  ,&  l'on  prend  ' 

'''    *  "  tout  dans  l'Auteur  qu'on  explique,  &:  dans  ceux  qui  ont  eu  le 
même  fentiment  que  luy. 

Mais  pour  l'explication  d'Aubertin  5c  de  M.  Claude,  qui  en- 
tendent par  cette  grâce  ajourée  à  la  nature,  une  certaine  vertu 
phantafi-ique  leparéc,  du  corps  de  J.  C._  &  imprimée  au  pain, 
elle  a  tous  les  défauts  dont  une  explication  eft  capable. 

Cette  vertu  eft  fi  chimerique,qu'au  même  temps  qu'ils  attri-  '^ 
buent  à  Theodoret  de  l'avoir  crue  ,  ils-declarent  qu'ils  ne  la 
Aub.p.yjr.      croyent  pas.  Nous  ne  femmes  pa-s  à  It  vérité^  dît  Aubertin, /^^-/'^r. 
vis  de   Theodoret  fur  ce  fujet  ^  mais  cela  ejî  de  peif  d'importance. 
Peut-  être  auffi  que  d'autres  ne  feront  pas  en  cela  de  l'avis  d'Au- 
bertin ,&  qu'ils  trouveront  afiez  étrange  qu'il  n'ait   pu  ren- 
dre, ni  ce  Père,  ni  les  autres  favorables  aux Calviniftes, qu'en 
,leur  imputant  une  chimère  qu'il  a  efté  obligé  de  rejetter. 
','^  Nous  avons  fait  voir  dans  un  livre  entier  que  cette  vertu  fe- 
f  rrp.  1.  \.u     parée  imprimée  au  pain  qu'ils  veulent  que  les  Pères  ayent  en- 
Min^z*"^'      fcignée, quoiqu'ils  ne  la  croyent  pas  eux-mêmes,  eft  un  pur 
fonge  des  Miniftres,  qui  n'a  aucun  rondement  dans  l'antiquité , 
,&  qui  n'eft  appuyé  par  eux  que  fur  quatre  ou  cinq  paflages  pris 
à  contre  fens. 
Aubertin  aHcgue  icy  celuy  deS.  Cyrille  rapporté  parVidor 
"aAntioche,  êc  celuy  de  l'Epitomede  Theodotiis ,  que  nous 
avons  déjà  rcfurez:  &'il  n'y  ajoute  que  celuy  d'tphrem  d'An- 
'  .tipche,oii  il  eft  à'xtqne  le  corps  de  I.  C  reçu  par  les  fdcllcs  ve  s'èloi- 
'''<ine  pa^  de  fon  cjlencc  fcnfble  ,  (^  demeure  hifeparable  de  la  yace 
\  "tntclli<iible  3  ce  qui  ne  prouve  rien  du  tout ,  narce  que  le  mot  de 
e;race  intelligibleeftencore  un  motgeneral  qui  comprend  tout 
l'effet  furnaturel  opère  par  la  coniecration.  Et  ainfi  c'eft  un 


^  de  trois  Auteurs  qui  ont  parlé  comme  liiy.       2.67 
pafTagc  c  )uc  Icmblable  à  ctluy  deTheodoret ,  &:  qui  n'efl:  pas  Ch.  IV. 
propre  a  l'éclaircir. 

Ccrre  addition  de  la  vertu  feparée  ne  pouvoic  avoiraucun 
dci  effccs  qui  lonc  des  fuites  de  ce  que  Theodoret  entend  par 
cette  gruce  ajoutée  à  la  nature. 

Car  p.ir  cette  addition  reconnue  par  Tbeodoret ,  le  paineft 
fait  le  corps  de  J.  C.  Or  on  n'a  jamais  die, par  exemple, que  psr 
l'addition  d'une  vertu  aux  eaux  du  Baptême ,  cette  eau  ait  efté 
faite  lefang  de  J.  C  ou  que  le  Crème  de  la  Conlîrmation  par 
l'addition  d'une  vertu  ,  ait  efté  faire  S.  Efprit. 

En  vertu  de  cette  addition  (elon  Theodoret ,  on  croit  &  oiî 
révère  les  fymboles ,  comme  eftant  le  corps  de  J.  C.  qu'ils  onc 
efté  faits.  Or  quia  jamais  dit  ny  penfé  que  par  l'addition  d'une 
vertu  aux  eaux  du  Baptême  ou  au  Crème ,  ou<^n  croye  &  on 
révère  &  ces  eaux,  &  ce  Crème  ,  comme  eftant  le  fang  de  J.  C. 
ou  le  S.  Efprit  qu'ils  onc  eftc  farts? 

En  vertu  de  cette  addition  on  croit  en  recevant  les  rvmboles 
recevoir  le  corps  de  }.  C  Or  qui  a  jamais  dit  qu'en  vertu  de 
cette  qualité  imprimée  aux  eaux  du  Baptême, on  crût  recevoir 
le  fang  de  J.  C.  &  d'une  réception  femblable  à  celle  que  l'on 
entend  quand  on  p.irle  de  l'Eue  hariftie,  par  laquelle  on  ait  que- 
J.  C.  ejl  dans  nos  corps  1^  dans  nos  entrailles  par  fon  propre  corps  (^ 
f  ar  fu  propre  chair ,  ^  qu'il  y  eftmèlè  ^quil  y  eft  diliriLuè. 

Outre  les  trois  paflagcs  que  nous  avons  marquez  ,  Aubertin^ 
employé  encore  quelques  raifonnemenspour  prouver /./ xr?/» 
feparée  ajoutée  à  la  nature,  &  pour  réfuter  l'expjication  du  Car- 
dinal du- PerroUi^c  quoiqu'on  les  pût  négliger  comme  depurs 
fophifmes  du  même  genre  que  d'autres  dont  nous  avons  déjà 
découvert  l'illufion,  je  ne  laifferay  pas  de  les  rapporter  ,  pour 
montrer,comme  on  le  verra  encore  mieux  dans  la  fuite  ,  que 
tout  le  Traité  de  ce  Miniftre  fur  Theodoret,  qui  paife  pour  un 
chef-  d'œuvre  parmi  ceux  de  fon  parti,  n'eft  dans  le  fond  qu'ua  ^ 

amas  de  lophifmes ,  qu'une  faufle  Logique  Uiy  a  fournis. 

Theodoret ,  dit- il  ,  déclare  que  les  fymboles  vif.bles  font  hono- 
rez^ des  noms  du  corps  (^  du  fan'^  de  J.  C.  à  caufe  de  l'addition  de 
cette  grâce  dont  je  parle.  Or  cela  ne  fe  peut  dire  félon  le  fenti- 
ment  des  adverfaires  ,  quoique  ce  (oit  qu  ils  entendent  par  ces  fym- 
boles vifihles.  Ctr  s'ils  ente/ident  les  Jimples  accidens  ^  ferait- ce 
pas  une  folie  de  dire  que  des  accidens  font  le  corps  de  I.  C.  à  caufe' 
que  le  corps  de  I.  C.y  e fi  joint  ï  S'ils  entendent  le  pain  é^  les  ac- 

Ll  ij 


468     Liv.  V.  ExpRcAtion  des p/iJJa'T^es  deTheodoret 

cidens  unix  enjemble  j  c'efi  encore  une  fini fc  té  que  le  pain  d^  le  vin 
fuient  le  corps  ^lefang  de  J.  C.  parce  qu'ils  font  unis  au  corps  ^  au 
fanq:^  de  7.  C. 

Je  réponds  quecet  argument  n'efl:  qu'un  pur  rophifme,êc  que 
nous  en  avons  déjà  découvert  la  fource  ,  qui  elt  qu'Aubertm 
ne  s'efl  jamais  voulu  merrre  dans  l'elpric,  que'  l'on  conçoit  fou- 
vent  les  objets  par  des  idées  confules  &:  gênera  les  quife  peuvent 
appliquera  divers  fujets,  &  qu'ainfi  i'clprit  paiîelbuvenc  d'un 
liijec  à  un  autre  fans  s'en  appcrcevoir. 

Les  mots  de  fymboles  vilîhles  ne'fignificnt  precifcment  & 
diftinftemenc  ni  le  pain  ni  le  vin ,  m  les  accidens ,  nile  corps  de 
J.  C. ils  fignifîent  l'objet  prefent  confiderc  comme  virible,&  * 
fîgnifiant  :  cet  objet  eft  du  pain  &  du  vin  avant  la  confecranon, 
après  la  confecration  c'eft  le  corps  de  J.  C.  Mais  quoique  ce 
foient  deux  fujets  en  efFet ,  l'efprit  ne  les  regarde  que  comme 
un  feul  fujet  auquel  il  attribue  diverfes  qualitez  ielon  divers 
jcftats. 

On  dit  donc  de  cet  objet  prefent  qu'il  efl:  honoré  du  nom  de 
corps&  de  fang  de  J.  C.  à  aufe  de  l'addition  de  lagraceà  la 
nature  ,  c'eft  adiré  à  caufe  de  l'effet  furnaturel  que  Dieu  y  a 
opéré  ,  fans  en  changer  la  nature  fenfible  qui  confifte  dans  cet 
amas  de  qualitez  qui  font  qu'on  appelle  deseftres  pain  &  via 
plikoft  que  pierre  &  métail.  Qu'y  a- t'il  en  cela  de  difficile,  & 
qui  ne  foit  à  couvert  des  chicaneries  d'Aubertin  ?  ■■ 

Mais  je  veux  que  par  cette  grâce  on  entende  le  corps  de  J.  C. 
qui  efl:  la  grâce  efTentielle  ;  le  raifonnement  d'Aubertin  n'en 
lera  pas  meilleur.  Cai-  pourquoy  ne  pourra  t'on  pas  dire  alors  , 
■quecet  objet  compofé  du  corps  de  J.  C.  qui  y  tient  lieu  defub- 
ftance  ,  &de  la  nature  fenfible  qui  fefait  paroiftre  à  nos  fens, 
comme  du  pain  &  du  vin,  eft  appelle  corps  de  J.  C.  à  caufe  d'u- 
ne de  fes  parties  ?Qui  empêchera  que  comme  on  dit  que  J.  C. 
eft  Dieu  par  la  divinité ,  qui  eft  jointe  en  luy  à  l'humanité  j  ou 
comme  l'on  peut  dire  d'un  globe  que  c'eft  une  fubftance,  parce 
-que  c'eft  de  la  matière  jointe  à  une  certaine  figure  j  on.ne  puifle 
dire  auffi  de  cet  objet,  quec'eft  lecorpsdej.  C.  parce  que  Dieu 
a  joint  dans  cet  objet  le  corps  de  J.C.  à  une  certaine  nature 
fenfible  ,  c'eft  à-dire  aux  apparences  du  pain  &  du  vin  ?  Qii'y 
a  t'il  en  cela  de  contraire, non  feulement  au  langage  du  com- 
mun des  hommes,  mais  mêmeàceluy  de  laPhilofophiela  plus 
■chicaneufe  Se  la  plus  exadC:,  6c  qui  ne  s'étonnera  que  des  gens 


Gf  de  trots  Auteurs  qui  ont  parlé  comme  luy.       1^59 
«fënt  proporerdepareilsraifonnemens  comme  des  demonftra-   Ch.  IV. 
tions,6c  plus  encore  que  par  de  Ç\  mifèrables  fubtilicez  ils  ac, 
quierenti'eftime  êc  l'admiration  de  tous  ceux  de  leur  parti  ? 
j   Avant  que  de  finir  ce  qui  regarde  ce  partage  où  Tlieodoret 
dit  que  Dieu  ajoute  la  grâce  à  la  nature  ,  il  faut  rendre  julbce  à 
Mo  Claude ,  êd  reconnoiftre  que  toutes  fespenfées  ne  font  pas 
empruntées  d'Aubertin ,  &  qu'il  prend  quelquefois  une  jurte  L- 
bertëd'enhazarderdefon  chef,  qui  non  feulement  font  difFe- 
xentes  de  celles  de  ce  tameux  Miniflre ,  mais  même  qu'il  a  ex- 
preflement  rejcttces. 

Car  un  des  fondemens  de  la  réponfe  que  M.  Claude  a  faite 
au  livre  de  la  Perpétuité  ,  c'efl  que  la  doctrine  delà  prefence 
réelle;,&  de  la  tranfîubftaniiation  ^cfi  unjî q^mnddhohr  d'imagi- 
nation ,  quelle  n'a  pu  venir  que  dans  fcfpru  d'un  Moine  ,  u  l'oynbre 
duConvent  de  Corbie  :  Qu'ainfi  elle  n'a  point  eftéformellemcnc 
rejettée  par  les  Pères,  parce  qu!ils  ne  l'ont  jamais  conçue  i 
qu'ils  n'ont  eu  befoin  d'aucune  précaution  pour  cmpê>.lier 
qu'on  ne  prît  lenrs  paroles  en  un  fens  qui  ne  leur  vcnoit  point 
dans  Tefprit. 

Cependant  Aubertineftfi  éloigné  de  cette  penfée  ,  qu'il  die 
exprcfïèmentque  Theodoret  a  ajouté  ces  paroles  .  que  Dnune 
change  point  la  nature ,  mais  qu'il  a  feulement  joint  la  grâce  à  la  na- 
ture ,  pour  empêcher  que  les  fimplesfidellesneconçûircnt  que 
lepaineftoit  lubftantiellemenr  changé  au  corps  de  J.  C.  &.  il 
avoue  que  cette  penfée  leur  pouvoit  venir  dans  i'efpnt. 

//  a  voulu  ^  dit-û  ,  par  cette  addition  prévenir  (y-  éloigner  par 
avance  une  penfée  qxji  pouvoit  venir,  dans  l'ispiviTi^w  Fi- 
delles  (impies  f^peu  intelligens  ^  en  entendant  parler  du  changment 
du  pain  au  corps  de  Chrifi.  Or  cette  penfée  qui  leur  pouvoit  venir  , 
quand  on  donnoit  devant  eux  au  pain  ^  au  vin  les  noms  de  corps  ^ 
de  fang  de  J.  C.  en  fuite  d'un  changement  qui  avoit  précédé  ,  ejîoit 
que  le  pain  cJloit  fubfiantiellement changé  au  corps  deClrijl. 

Ainfi  Aubertin  fuppofc  nettement  que  les  Fidelles  {impies^: 
peu  intelligenspouvoienteftre  frappez  par  les  paroles  qui  mar- 
quent un  changement  de  l'idée  d'une  prefence  réelle  &  d'une 
tranflubftantiation  véritable  :  Se  M.  Claude  prend  pour  fonde- 
ment de  fa  réponfe  que  cela  ne  pouvoit  eftre.  \ 

Si  l'on  veut  en  fçavoir  la  raifon,c'eft  qu'il  a  paru  utile  à  Auber-  | 
tin  de  fuppofer  l'un  ,&  à  M.  Claude  de  fuppofer  l'autre.  Leur  | 
intereft  les  unie ,  lors  même  qu'ils  paroiflcnc  di vifez.  Ils  ont  eil      •^ 

L 1  iij 


x-jo  Liv.  V.  Explication  des  pajfages  de  Theodoret 
des  vues  contraires  dans  le  même  but  Le  mal  eftque  par  cette 
voyeon  fait  quelquefois  defaulfes  démarches  ^  dont  les  confe- 
qucnces  font  fàchcufès,  parce  qu'on  ne  prévoit  pas  allez  àquoy 
l'on  s'engage  par  ces  maximes  que  Ton  avance  dans  la  vûë  d'un 
intereft  prefent. 

On  a  déjà  fait  voir  les  abfarcJitez  de  la  fuppofîrion  de  M^ 
Claude,  Si  il  n'y  en  a  pas  moins  dans  celle  d'Aubertin,qui  veut 
que  quoique  les  fidcllesne  cruilent  pas  la  prcfence  réelleni  la. 
tranliiibftantiatiori,  ils  s'en  pouvoient  néanmoins  former  l'idée 
fur  les  paroles  qui  marquoient  que  le  pain  eftoit  changé  au 
corps  de  J.  C.  Car  s'il  eft  vrfy  que  ces  paroles  donnent  l'idée  de 
la  rranlTubftantiation,  c'efl  à  dire  félon  luy,  d'une  dodrine 
qu'il  faillit  bien  fe  garder  de  croire  :  d'oi!i  vient  que  jamais 
aucun  Père  n'apenfé  à  prévenir  cette  erreur?  Pourquoy  ont- 
ils  fait  tout  ce  qu'ils  auroient  pu  de  mieux  pour  la  faire  naiftre 
&  pour  l'entretenir  ?  Pourquoy  ont  ils  appliqué  tant  de  fois  les- 
mots  de  changement  à  l'Euchariftie,  fans  jamais  aller  au  de- 
vant de  cette  penfce  ?  Pourquoy  auroit  il  fallu  que  ce  fût 
Theodoret  qui  l'eut  fait  le  premier  &  le  dernier,  bi.  encore 
avec  tant  d'obfcuritéj  que  Ton  diicoursefloit  bien  plus  propre 
à  confirmer  les  fidelles  dans  cette  peniée ,  qu'à  les  en  détour- 
ner, comme  nous  l'avons  fait  voir. 


CHAPITRE    V. 

Autres  fophjfmes  â' Auhcriin  dans  ce  qu'il  a  écrie 
fur  Theodoret. 

E  qu'Aubertin  a  écrit  fîir  le  fujet  de  Theodoret  contient 
un  figrand  araasde  fophifmes  y  qu'il  les  faut  necelfaire- 
ment  partager  en  divers  chapitres ,  encore  n'"entreprens-je  pas 
de  les  rapporter  tous  icy,  tant  parce  qu'il  y  en  a  que  nous  avons 
déjà  exprefTement  refutex,  que  parce  que  M.  le  Cardinal  du 
Perron  a  tellement  éclairci  les  autres ,  que  Ton  ne  pourroit  que 
redire  ce  qu'il  en  a  dit. 

Aubertin  répète  ^  par  exemple ,  trois  ou  quatre  fois  cet  argu- 
ment, qu"eTheodoret  parle  motdeC^O'^  entendu  le  pain  dans 
cette  proportion  :  Cecy  efl  mon  corps  ;  Scqu'ainfi  ,  félon  luy  , 
c'eûdupainquej.  C.  a  dit q[u'il  eftoit  fon cor  s.  D'oùilcon- 


&  de  trois  Auteurs  qui  ont  parlé  comme  luy.        171 
dut  félon  fa  Logique  que  cette  propofition  ^Cccyefi  mon  corps  ^  Ch.V. 
fe  doit  prendre  en  un  lèns  de  ligure.  Cependant  nous  avons 
fait  voir  que  c'eft  un  argument  à  quatre  termes  ,6c  un  Tophif. 
me  indigne  d'un  homme  de  bon  iens. 

C'eft  aulFi  prmcipalement  fur  cet  Auteur  qu'il  étale  cesrai- 
fonnemens  fophiftiquestirezyle  la  diftincliun  qui  doit eftre  en- 
tre l'image  &:  l'original.  Et  il  les  reprend  à  tant  dcdiverfes 
fois ,  qu'il  n'y  a  point  de  Ledeur,  je  crois  mcme  dans  fon  parti, 
qui  n'en  loit  ennuyé.  Mais  comme  nous  les  avons  réfutez  dans 
un  chapitre  exprés  ,  il  n'eft  pas  befoin  d'en  rien  dire  icy. 
!•  Je  me  contenteray  donc  d'en  recueillir  encore  quelques-uns 
qui  méritent  d'eftre  remarquez.  L'on  peut  mettre  ceux  qui 
fuivent  de  ce  nombre. 

A  pfés  avoir  rapporté  l'endroit  du  premier  dialogue  oiiTheo- 
ëoret  dit  ,  que  le  Sauveur  a  changé  les  noms ,  g^  qu'il  a  donné  à  fon 
corps  le  nom  du  fymbolc  ,  (^  au  fymhole  le  nom  de  fon  corps  :  il  fait  ■ 
cette  reflexion,  &  la  propofe  comme  un  axiome.  Il  ejl  très  cer- 
tain ,  dit  il ,  que  le  changement  de  nom  qui  fe  fait  entre  les fiyies,  ^ 
les  chofei  fortifiées ,  ne  marque  pas pliitofl  que  les  fzries  (oient  les 
chofes  fgnifiéeS ,  qu'il  ne  marque  que  les  chofes  fignifiées  foient  les 
fîgnes  i  c'eft  à-dire  pour  developer  &;  appliquer  fa  niaxime, qu'il 
nes'enfuit  pas  pliitoft  de  ce  changement  de  noms ,  que  le  pain 
foit  le  corps  de  J.  C.  qu'il  ne  s'enluit  que  le  corps  de  J.  C.  foit 
du  pain.  Or  il  ne  s'enfuit  pas  que  le  corps  de  J.  C.  foit  du  pain  i 
il  ne  s'enfuit  donc  pas  auiïî  que  le  pain  foit  le  corps  de  J.  C. 

Mais  cet  argument  n'eft  fondé  que  ftir  une  fupprcffion  infî- 
delle  dece  qui  fait  voirie  fens auquel  Theodoret  parle  de  ce 
changement  de  noms.  Car  il  eft  vray  qu'il  ne  s'enfuit  pas  prc- 
cifément  de  ce  que  Theodoret  dit  que  J.  Q..  a  changé  le  s  noms 
entre  le  fymhole  (j;- fon  corps  ^  quelefymboie  foit  réellement  le 
corps  de  J.  C. 

Mais  cela  s'enfuit  de  ce  qu'il  marque  que  le  changement  de 
nom  à  l'égard  du  fymbole  ,  qui  eft  appelle  corps  de  I.  C.  eft  ac- 
compagné d'un  changemeut  opéré  par  lapuiftancede  Dieu  ^ 
par  lequel  le  pain  &  le  vin  (ont  faits  le  corps  &  lefangde  J.  C. 
fc  de  ce  qu'il  ne  marque  point  que  le  changement  de  nom  à  l'é- 
gard du  corps  de  J.  C.  qui  eft  appelle /^/«d^/r^w<7«/ ,  foit  ac- 
compagné d'aucun  changement. 

Non  feulement  ce  changement  s'enfuit  félon  Theodoret  dç% 
cxprclîions  par  lefquelles  J.  C.  nous  aifure  que  le  pain  eft  fon 


lyi  Liv.  V.  Explication  des pajfages de  Theodoret 
corps  Se  le  vin  Ton  fang ,  mais  cela  s'enkiit  même  de  celles  dans 
lefquelles  il  eft  appelle  f/gwi', 6c  Ton  cor^s fromembi pain.  Car 
comme  on  a  déjà  remarque,  quand  Theodorec  compare  ces 
propoficions:  Le  fang  dcj.  C.  eft  du  vin  h  le  vin  ejl  le  fangcCe 
7.  C.  Le  corps  de  J.  C.  ejî  du  pain  j  le  pain  efi  le  corps  de  J.  C.  ce 
n't'fh  pas  comme  ayanc  une  vérité  de  même  genre.  Il  veut  au 
contraire  qu'on  regarde  celle  où  J.  C.  nous  aillire  que  le  paia 
eft  Ton  corps  &  le  vin  Ton  fang,comme  la  fource  de  la  vérité  des 
autres ,  &  ce  qui  a  donné  heu  à  les  dire  :  &  il  prétend  qu'elles 
doivent  toutes  contribuer  à  nous  faire  croire  le  changementpar 
lequel  le  pain  eft  fait  le  corps  dej.  C.  Celles  par  lefquelles  J.  C. 
nous  dit  .,que  le  pain  efi  fon  corps  gS  le  vin  fan  fang  ,  y  contribuent 
diredement,  parce  qu'elles  exprinientdiredement  ce  change- 
ment. Et  celles  par  lefquelles  J.  C.  nous  affure  qu'il  efi  une  vi- 
gne,  que  fa  chair  efi  un  pain  ,  que  fon  corps  efi  un  froment  ^  y  con- 
tribuent indiredementpar  le  rapport  que  ces  termes. ont  avec 
l'inftitution  de  l'Euchariftie. 

C'eft  ce  que  Theodorer enfcigne  nettement,  lorfqu'aprés 
avoir  fait  dire  à  l'Eraniftie  qu'il  voudroit  bien  fçavoir  lacaufedé 
ce  changementde  noms,  il  fait  répondre  parrOrthodoxe,^»^' 
la  caufe  en  efi  claire  à  ceux  qui  font  initiez^auxmyfieres  ,^  que  le 
Seigneur  a  voulu  que  ceux  qui  y  participant  ne  confiacraffentpas  la 
nature  des  chofes  qui  s'y  voyent  ,mais  que  par  le  changement  de 
fjoms  ,  ils  ajoùtajfcntfoy  au  changement  que  la  grâce  opère.  Ce  qu'il 
étend  expreflemcnt  ,tant  aux  propoiitionsoù  f.  C.  nous  dit  que 
k  pain  efi  fon  corps  ^  le  vin  fon  fang,  qu'à  celles  où  il  appelle 
fon  corps  naturel  froment  ^  pain. 

Toutes  ces  expreffions  tendent  ielon  Theodorer  à  établir  les 
Fidelles  dans  la  foy  du  changement  qui  rend  le  pain  &le  vin 
corps  é-  fang  de  J-  C  c'eft  la  fin  unique  de  ce  changement  de 
Bomsi  écil  eft-bien  clair  que  ces  expreiïionsne  tendent  pas  éga- 
lement à  cette  fin,  &  ne  contiennent  pas  cette  vérité  aufli  for- 
mellement l'une  que  l'autre. 

Aubertin  avoit  fifortement  dans  l'efprit  cette  fauflêidcejque 
Theodoret  comparoit  ces  expreffions  comme  eftant  de  même 
genre ,  &  également  figurées,  qu'il  ne  s'en  eft  jamais  pu  défaire^ 
6c  c'eft  ce  qui  l'a  engagé  encore  dans  un  autre  fophilme.  Il  faut 
„  neceftîlitrement, dit-il, queTheodoret  compare  ces  expreffions: 
,,  Le  fangdej.  C.  efi  au  vin:  Le  vin  efi  le  fang  de  J.  C.  comme  de 
„  même  genre  j  6c  comme  eftant  routes  d-eux  figurées.  Autre- 
ment 


t^  de  trois  Auteurs  qui  ont' parlé  comme  îuy.  275- 
mfnt  l'Eranifie  Iuy  auroic  pu  répondre ,  que  l'exemple  de  iTu- 
chariftie  qu'il  allcyuoit  four  êclaircir  lu  frophctic de  ^acob ^  où  il 
ptctendoii  qwe  !e  fangde  J.C.  eftoic appelle  X7'«,  n'avoir  rien 
de  femblable,&  cela  pour  deux  rarfons.  La  première  efl  qu'il  y 
auroit  eu  une  différence  coure  entière  entre  ces  expreHions  , 
puifque  le  vin  de  l'Euchariftie  félon  cette  h)  pothefe  efl:  propre- 
ment vin  5  au  lieu  que  le  fangde  J.  C.  ne  peu reftre  appelle  vin 
que  figurémenr.  Secondement ,  fi  le  vin  de  l'Euchariftie  efl  pro- 
prement fang;  on  ne  doit  point  trouver  étrange  qu'on  l'appelle 
fang  ,  puifque  chaque  chofe  peurefbreappeilcepar  fon  nora. 
Mais  le  fang  de  j.  C  n'eft  poinr  proprement  du  vin.  Ainfl  l'ex- 
prelîîon  n'eft  nullement  fémblable  ,  ôê  cet  exemple  auroir  un 
effet  tout  contraire  au  defTein  de  Theodorer.  Afin  donc  qu'il" 
ait  pu  s'en  fervirjlfaucneceirairement  fuppofer  qu'il  a  regardé 
coures  ces  exprelïïons  comme  également  figurées. 

On  peut  apprendre  parce  difcours  qu'il  y  a  une  certaine fub- 
tilité  qui  n'a  pour  effet  que  d'obfcurcir  les  lumières  naturel- 
les j  &  que  plus  on  a  de  cetre  forte  d'efpric ,  moins  on  a  de 
celuy  qui  fait  juger  deschofes  félon  le  bon  fens. 

Auberrin  n'a  pu  comprendre  queTlieodoreraicpn  employer 
l'expreflion  de  J.  C.  dans  l'inflitution  de  I  Euchariftie  :  Gecy  eft 
mon  corps  :  Cecy  ef}mon  fmg,  pour  écIaircir  le  lieu  de  la  Genefe 
où  Jacob  dit  du  Mciîie  qu'il /avcm  fon  vvtemtnt dans  /«'x'/»,pour 
montrer  que  le  Pr.iphcce  a  voulu  dire  qu'il  laveroïc  fon  corps 
dans  fon  fang,  &  qu'airifr  le  fang  de  J.  C.  eft  défigné  dans  cet- 
te Prophétie  par  le  mot  de  vin  :  Il  n'a  f<ju  comprendre,  dis- j^s, 
que  Theodorer  airpn  fe  fervir  de  la  première  pour  cclaircir  la 
féconde  ,  à  moins  qu'elles  ne  foient  également  figurées.  Ce- 
pendant tant  s'en  faut  qu'il  foie  neceiTaire  que  la  propofition  de 
J;  C.  foitfigurée,afin  d'éclaircir  celle Jde  Jacob,  qu'elle  l'éclair- 
cit  infiniment  mieux,  parce  qu'elle  ne  l'efl  pas.  Car  rien  ns 
nous  fair  mieux  comprendre  le  fens  d'une  métaphore  que 
quand  on  de\'elope  la  vérité  litreralequi  en  efl  le  fondement. 
Il  s'agifToit  de  prouver  que  dans  ces^ paroles  que  Jacob  dit  du 
Meffie  :  //  Livira  fon  vêtement  dans  le  vin  ^  on  devoit  enten- 
dre par  ce  vin  le  f^ng"  de  ce  même  Meflîe.  Or  le  moyen  de  le 
montrer  plus  folidemenr ,  qu'en  faifanc  voir  que  J.  C.  avoit 
dit  du  vin  que  c'eftoit  fon  fang,&  qu'il  ravoitfairréellemcnt 
6c  véritablement  fon  fang  ,  quoiqu'il  confervaft  les  apparen- 
ces du  vin -^  Cette  vérité  littérale  que  le  vin  efl  réellement  1« 

Mna 


Ch.V. 


î. 74  L I V.  V.  Explication  des p^Jfigss  de  Theodoret 
fangdeJ.C.  n'eft;  elle  pas  très  propre  à  nous  perfuader  que  Ja- 
cob a  entendu  fon  fang  par  le  mot  de  w«,  &  peut-on  mieux 
montrer,  par  exemple,  qu'on  a  eu  raifon  d'appeller  un  homme 
tygre  ou  lion  par  métaphore  ,  qu'en  montrant  qu'il  eft  réelle- 
ment ou  cruel  ou  courageux  ,  qui  font  les  fondemens  de  ces 
métaphores? 

Une  fimple  comparaifon  d'exprefîions  également  figurées 
eft:  une  preuve  trestoible  Cari!  ne  s'enfuivruit  nullement  de 
ce  que  J.  C.  auroit  appelle  le  vin  fon  fang  par  une  fimple 
exprclfioD  figurée,  que  le  Prophète  eût  entendu  parle  mot  de 
vin  le  fang  de  ].  C.  Mais  quand  on  dit  qu'il  s'eft:  fervi  du  vin 
pour  en  faire  eiïedivement  fon  fang,&  que  le  fing  nous  efl: 
donné  fous  le  figne  &  le  fymhole  du  vin  ,on  eft  infiniment  plus 
porté  à  croire  que  Jacob  s'eft  fervi  du  mot  devin  pour  fignifier 
ce  fang.  Car  ce  myftere  Q^x  grand,  qu'il  eft  comme  impofîi- 
ble  que  les  Prophètes  ne  l'eulFent  dansl'efprit,  Se  qu'ils  ne 
l'ayent  marqué  par  quelque  figure.  Et  ce  rapport  de  la  figure 
à  la  vérité  perfuade  d'autant  plus,  que  l'expreffion  de  Jacob 
étant  certainement  figurée  &  myfterieufe  ,  il  ne  paroift  point 
d'autre  vérité  ni  d'autre  myilere  auquel  on  la  puiffe  rap- 
porter. 
Aub.  p.  -!%(!.  Aubertin  &  M.  Claude  tirent  encore  une  autre  objecftion  de 
ce  que  Theodoret  dit  ^  I.  C.  a  honore  les  fymboles  vijïbles  da 
nom  de  fon  corps  ^^  de  fon  fang.  Aubertin  l'étend  davantage  ,  & 
marque  plus  précifément  fur  quoy  il  la  îowàt.On  ne fe  f en  jamais^ 
dit-il  ^dc  cette  manière  de  parler  que  dans  les  chofes  qui  rcc^oivent  le 
nom  d'autres  chofes  ^fans  efire  changées  fuhfiantiellement.  C'cfipour- 
quoy  on  ne  dira  jamais  que  la  verge  de  Mo'ife  ait  eflé  honorée  du 
nomde  ferpent ,  ni  l'eau  de  Canadunom  de  vin.,  parce  qu'il fe  fit  un 
changement  fuhftantiel  en  ces  chofes  5  mais  on  dit  fort  bien  que 
l'image  d'un  Roy  efi  honorée  du  nom  de  Roy. 

M.  Claude  la  propofc  d!une  manière  plus  abrégée,  &  avec  un 
certain  dédain  qui  eft  plus  de  fon  air.  Car  après  avoir  rapporté 
le  même  palîàge  ,il  fè  contente  de  dire,^^^  S.Sacrement  eji 
réellement  &  fukftuntiellcment  le  corps  de  I.  C.  que  veulent  dire  ces 
gens  avec  leur  Honoke'  .^  en  nous  lailTant  ainfi  à  deviner  le 
principe  de  fa  confequence  ,  qui  ne  peut  eftre  autre  néanmoins 
queceluy  d'Aubertin. 

Il  eft  vray  que  c'eft  plùtoft  par  prudence  que  parfierté  qu'il 
iSn  ufe  aiafi.  Car  premièrement  les  exemples  d'Aubertin  ne  font 


M.  Claude 
p.  6ë, 


g;7  de  trois  Auteurs  qui  ont  parlé  comme  hif.        Z75 
©ropres  qu'à  faire  rire.   Ce  n'dl  point  ia  feule  métaphore  qui  Ch.  V° 
iait  qu'on  fe  peut  quelquefois  fervir  du  mot  è.'Monorè.  Il  faut  de 
■plus  que  le  nom  foie  honorable.  Ainfi  parce  qu'on  n'a  jamais  re- 
garde le  nom  de  ferpent  comme  un  titre  d'honneur,  on  ne  dira 
■jamais  que  dans  cette  exprellion  ,  fuper  Levi&than  fcrpentem  ^  *'"  ^''•^' 
/^ri*«'///w,  l'Ecriture  honore  ie  Diable  du  nom  du  ferpent, Et  de 
même  parce  qu'encore  que  les  hommes  ayenç  établi  quelque 
preferen::e  entre  l'eau  &:  le  vin  ,  ce  n'efl:  pas  néanmoins  une 
préférence  qui  s'exprime  par  le  mot  d'honneur  ;  on  n'auroit  ja- 
mais dit  de  l'eau  de  Cana,quand  elle  n'auroit  efté  changée  que 
£î^urément  en  vin  ,  que  l'Ecriture  l'honore  du  nom  de  vm. 

Et  pour  le  principe  dont  Aubertin  conclut  que  cette  expreffion 
feroitablurde,  fi  lepain  eftoit  réellement  changé  au  corpsde 
J.  C.  il  eil  aulfi  vifiblement  faux  &  contraire  à  la  raifon.  Car 
comme  nol\re  imagination  ne  nous  repreienre  point  le  pain 
comme  détruit ,  miâis  comme  élevé  à  un  état  plus  excellent , 
on  peut  dire  qu'il  eft  honoré  par  cet  état. 

C'eft  ce  q.u!  a  porté  S.  Fulbert  à  cette  expreffion  :  Za  matière' 
terre ftre  pjjjunt  le  mérite  de  fa  nature  efi  chany:c  au  corps  de  lefus- 
Chrifi. 

Et  à  celle-ci  S.  Hiidebert , 
JsJefcit  homo ,  latet  (j^  fuperos  quo  frovehat  efcaf 
Gratta  vtrborum  mvfieriufnque  crucis. 
Et  ailleurs  encore  parlant  de  l'élévation  que  le  Preftrefait  de 
l'Jioftie. 

Tollit  vtrumcjue  notans  ^  quod  Jît coynmunihîis  efcis 
Altior  ,  S^  quiddam  majus  utrnmque  ^erat . 
Il  dit  même  que  le  psin  honore  l'autel  par  la  chair  de  J.  C. 
Siih  cruce  ,  fui?  verbo  natura  iwvatur ,  ^  aram 
Panis  hovorifcat  carne ,  cruore  calix. 
Et  l'Auteur  du  Sernnon  delà  dignité  dKprcftres  ,qui  fe  trouve 
parmi  les  oeuvres  de  S.  Bernard,  fe  fert  d'une  exprefhon  toute 
iemblab'e  ,  loriqu'il  dit  i:\ixe  c'efk  créateur  du  vin  ,qui  élevé  Ig 
vtna  la.  di^mtédefar.g  de  J.C.  Ckeator  vmi efl quivinumfro. 
vehit  in  fanyjinern. 

On  ne  doit  donc  point  trouver  étrange  que  le  pain  eon^icré  fe 
reprefentant  encore  à  l'imagination  auiîi-bien  qu'aux  fens  fous 
l'idée  du  pain,cm  dife  qu'il  efi  honoré  du  nom  de  corps  de  I.  C. 
Mais  tant  s'en  faut  que  l'on  prétende  par  là  nier  qu'il  le  foie 
réellement  ,  que  c'eft  ce  que  \q&  Pères  ont  voulu  marquer 

M  nv  ij 


i.y6  Li'V.  V.  Expliciition  des pajfa,ges  de  Theodoret 
par  cette  exprefTion.  Car  ayant  un  fouverain  refpect  pour  la  pa- 
role de  Dieu,  ôieftant  perfuadez  quec'eft  la  même  chofe  à 
Dieu  de  dire  ôc  de  faire j  quoniamipfe dixit (^ fatia funt , Scàt 
plus  n'ayant  jamais  eii  la  moindre  penfëe  (^ue  ces  paroles  ^Cccy 
^  wo«Ci?r/'j-,  fe  puflent  expliquer  en  un  fens  de  figure;  ils  ont 
pris  pour  la  même  cliore  de  dire  que  le  pain  cfifait  le  corpi  de 
-î.  C.  &  qu'il  cjl  appelle  corps  de  1.  C  &  ils  n'ont  point  tiré  de 
-cet  te  expreflion  une  conséquence  grammaticale  comme  les  Mi- 
niftres,  mais  une  confequencerëcUe,  en  concluant  que  fi  I.  C. 
iivoit  appelle  le  pain  Ton  corps ,  il  falloit  qu'il  fut  effeclivemeta: 
fon  corps  ;  &  qu'il  fut  changé  en  Ion  corps 

C'efl:  ce  que  S.  Ambroilecn  conclut  exprclTement  dans  fon 
livre  pour  les  nouveaux  bapcifez.  Avant  L  bénédiction  ,  dit-il  , 
qui  fe  fait  par  les  paroles  celefles  ,  on  nomme  -une  autre  efpece ,  après 
2a  confecnition  ,  on  marque  que  c'cfl  le  corps  de  J.C.  Avant  la  confe- 
cration  on  appelle  ce  -qui  efl  dans  le  calice  d'un  autre  nom  i  après  la 
.  confecration  on  l'appelle  fan'^ ,  ^  vous  rèponde%^.  Amen  ,  c'eji-k- 
'  dire  ,  cela  eft  vray.  Que  vofiie  cfprit  foit  perfuadé  de  ce  que  vojlre 
houche  eoîifeffè. 

Theodoret  enfeigne  de  même  que  le  pain  e fi  appelle  corps  de 
J.  C.  non  par  une  fimple  métaphore,  mais  afin  que  parce  chan- 
qerncnt  de  noms  ,  notis  cruffions  le  chan'îement  que  la  ^ace  opère, 
Ainli  comme  ce  changement,  félon  luy,  efi  que  le  pain  efi  fait 
de  corpsdeJ.C.  dtCiSiMi^x  félon  luy  ce  que  nous  fommes  obli- 
gez de  croire  en  vertu  de  cesparoles ,  par  lefquelles  J.  C.  a  ho- 
noré le  pain  du  nom  de  fon  corps. 

De  même  dans  fon  fécond  dialogue  TEranifle  ayant  fait  dire 
à  l'-Orthodoxe  qu'après  la  confecration  on  appelloit  le  pain  , 
corps  de  J.  C.  il  en  conclut  qu'il  faut  donc  croire  que  l'on  reçoit 
Apud  Allât     Je  corps  de  J.  C. 

Nicephore  Patriarche  de  Conftantinople  pour  marquer  que 
l'Eucharillie  n'eft  pas  l'image ,  mais  le  corps  même  de  J.  C.  ie 
contente  de  dire  que  l'on  ne  l'appelle  pas  image, mais  fon  corps 
mên>e.  Nous  n'appelions  point ,  dit  il  ,  ces  deux  i7nages  ^  fiyires 
de  fon  corps ,  quoiqu'ils  foient  faits  fous  des  fymbolcs  ou  des  figures  , 
7nais  le  corps 'ûièmc  de  J.  C.  Et  le  Diacre  Epiphane  dans  le  fécond 
■Concile  de  Nicée,  fe  fert  du  même  langage:  Ni  le  Seigneur.^  ni 
les  Apofres  ,  dit  il ,  «/  /f/  Pères ,  n'ont  point  appelle  image  le  Sa. 
crifice  non  finilant ,  mais  ils  l'ont  appelle  le  corps  même  ^  le  fang 
même.  Et  cela  fufEt  à  ces  Auteurs  pour  conclure  que  le  pain  con- 


aiii 


gj?  de  trots  Auteurs  qui  ont  parlé  comme  luy.      i.-jj 
facréeft  véritablement  le  corps  dcJ.C.  parce  qu'ils  ne  doucoient  Ch.  VT. 
point  que  dire  êc  faire  ne  fufîènt  en  Dieu  la  même  chofe. 

Photius  ne  ie  fert  il  pas  auflî  de  ces  exprefïions , que Itf  ^ain  ApudAUjt. 
■^  changé  au  corps  de  J.  C.  &  que  le  vin  efi  appelle fonfanz,  com-  fus  chrci<fco« 
me  ayant  la  même  force?  0  merveille!  dit-il  dans  une  lettre  au  PMij. 
^ape  Nicolas  Je  pain  commun  ejl  changé  au  corps  de  y.  C.  ^  le  vin 
commun  efi  appelle  fan  fang. 

Et  Jeremie  Patriarche  deConftantinople  ,  dont  on  ad  biea 
juftific  la  foy  à  M.  Claude  qu'apparemment  il  n'en  doutera 
plus  j  ne  fe  contente-t'il  pas  pour  marquer  que  J.  C.  fit  le  pain 
•ion  corps, de  dire  qu'il  le  nomma  fon  corps  >  Après ,  dit-il ,  que 
^.  C.  eût  célébré  laCene  félon  la  loy  de  Moyfe .  il  donna  à  [es  difciples  ^"  '^*'";"  -» 
un  nouveau  jacrifice.  Il  rompit  premièrement  Le  pain ,  O'  Le  nomma 
•fon  corps. 

Si  M.  Claude  entroit  un  peu  plus  qu'il  ne  fait  dans  l'efpric 
<3es  Pères,  &  dans  la  foumiffion  qu'ils  avoient  pour  la  parole  de 
Dieu ,  il  trouveroit  de  luy  même  ce  qu'ils  ont  voulu  marquer, 
quand  ils  ont  dit  que  le  pain  efi  honoré  du  nom  du  corps  de  J.  C.  6c 
il  comprendroit  fans  peine ,  que  comme  Dieu  fait  tout  ce  qu'il 
veut ,  &que  fes  paroles  font  toujours  véritables ,  c'eft  la  même 
chofe  de  dire  ,  qu'il  a  appelle  le  pain  fon  corps ,  que  de  dire  qu'il 
l'a  fait  fon  corps  J  comme  c'eft  la  même  chofe  de  dire  qu'il  a 
commandé  au  Lazare  de  fortir  du  tombeau, &  de  dire  qu'il  lujr 
a  redonné  la  vie. 


CHAPITRE    VI. 

Examen  des  mêmes  pajfages  de  Theodoret  par  rapport 
k  la  TranJJ'uhfiantiation. 

NOUS  venons  de  voir  quels  font  les  argumens  que  les 
Miniftres  tirent  de  Theodoret  contre  laprefence  réelle; 
&  nous  en  pouvons  dire  avec  vérité  qu'ils  ne  peuvent  furpren- 
dreque  des  efprits  précipitez, qui  felaiflent  éblouir  par  les  plus 
légères  apparences,  fans  fe  vouloir  donner  la  peine  de  réunir 
les  divers  endroits  où  un  Auteur  parle  delà  même  matière  , 
pour  en  tirer  fon  véritable  fentiment. 

Il  efl:  vray  qu'il  y  a  quelque  chofe  déplus  fpecieux  dans  les 
objedions  que  cet  Auteur  fournie  contre  la  Tranflubftantia- 

Mmiij 


2.78     LiV.  V.  Explication  des pâfigcs de  Theodoret 

tion  ^  puifqu'il  die  d'une  part^»^  J.  C.  a  honoré  les  fymbotcs  du 
7iom  de  fon  corps  y  non  en  changeant  la  nature  ,  mais  en  ajoutant  la 
y-ace  à  la  nature  ,  d'où  les  Miniftres  concluencque  la  nature  du 
pain  n'eft  donc  point  dvangée  f  &  qa'il  ajoute  de  l''autre  que 
les  fymholes  ?nvfiujiics  ne  quittent  point  leur  propre  nature^  ^  qu'ils 
■demeurent  en  leur  première  ejfence  &  dans  leur  figure  ij'^  dans  leur 
forme. 

On  ne  s'arreftera  pas  icy  à  la  remarque  faite  par  le  Cardinal 
du  Perron  ,  qu'au  lieu  de  traduire ,  comme  les  Miniftres  font , 
que  les  fymbolcs  myjliques  demeurent  en  leur  première  fubftance  ^ 
dam  leur  figure  ^  dans  leur  forme.,  on  pourroic  fort  bien  traduire^ 
que  les  fymboles  myftiques  demeurent  dans  laforme  ^  dans  lafi^^ 
re  de  leur  première  fubftance  :  Non  qu'ils  ayefit  des  raifons  con- 
vaincantes pour  combattre  cette  tradu(fi:icn  j  mais  parce  que 
Theodoret  dit  en  un  iiutre  lieu,  que  Dieu  ne  change  point  lana^ 
ture ,  &  qu'il  dit  QX).  ce\i}'^-C'^  j^  que  les  fj/mbsles  7nyftiques  ne  ^uit- 
tentpoint  leur  propre  nature  ,  ttjs  (pvuzas  orA.iia.s  cht  «^ifetla^ 

On  veut  donc  bien  fuppofer  qu'il  ait  dit  encore  ^a'/A  demea. 
rcnt  dans  leur  propre  fubftance  ou  cftence.  Et  l'on  avertie  feule- 
ment les  Miniftres  que  pour  pratiquer  envers  nous  la  même 
cquiîc  que  l'on  pratique  envers  eux  ,  ils  ne  dévoient  point  fe 
ièrvir  de  ces  palîag^es ,  fans  avertir  le  monde  que  ces  termes  de 
■^latureicàQ  fubftance  ou  ejfence  ontun  ufage  très- commun  dans 
les  Pères,  félon  lequel  il  n'eft  point  contraire  à  la  dodrine  Ca- 
tholique de  dire  que  les  fymboles ,  c'eft-à-  dire  le  pain  &  le  vin  _,> 
retiennent  leur  propre  nature  y(^  demeurent  dans  leur  propre  ejfence. 
Carc'eft  l'ignorance  de  cet  ufage  qui  fait  que  Ton  eft  frappé  de 
CCS  {0XIQ.S  d'expreffions.  Cependant  ce  double  ufage  eft  fi  con- 
ContrelcP.     (^atit,  quclcs  Miniftres  foHt  contraints  d'en  faire  quelquefois 
un  aveu  public,  jeveux  ,  dit  M.  Claude,  tomber  d'accordde  cette 
remarque  (  que  les  mots  de  nature  &L  àe  fubftance  font  équivo- 
ques ,  &  ne  fignifient  pas  toujours  ce  que  l'on  a^^oW^  fubftame 
dans  l'a  Philofophie  de  l'Ecole  ^  )  (^  je   "veux  encore  avouer  ^de 
""'  boti'ie  foy ,  que  Ji  mon  argument  eft  oit  fondé  fur  le  term-e  de  fubjiance.^ 

le  paftage   de  Theodoret  me  ferait  inutile  ,  puifque  ceft  un  terme 
équivoque  qui  peut  fouffrir  deux  interprétations. 
,  Xe  mot  de  ruii'are .,  dit  Anhertin ,  fè  prefid  très- jàuvent  pour  la 

qualité  ^  la  condition.  Et  ainfi  l'on  dit  qu'une  chofe  eji  changée  en 
■iasATVKZ  d'une  autre  .^parce  qu'elle  en  acquiert  les  qualitez^  Ce 
qu'iJ.prouve  par  14.  paflàges  pris  de  divers  Pères.  Et  félon  «e 


^  de  trois  nAuteurs  qui  ont  parlé  comme  luy.     ij^ 
fèns  on  peut  bien  dire  que  le  pain  ne  change  pas  de  nature  ^^t  Ch.  VI, 
la  confecration  ,  puifqu'il  ne  change  pas  de  quaUtez. 

//  efi  vray  ,  dic-il  en  un  autre  lieu ,  que  le  mot  de  nature fe  p-cnd  p-  7*7. 
.^uelqu.efois  pour  les  qualitei^^  facultcz^^  proprietez^dc  la  fuhfiancCy 
icommcil  ejf  clair  par  les  p.ijfaqes  d^Hilaire  (^  de  TertuÙien ,  cite?:^ 
far  le  Cardinal  du  Perron ,  (^par  une  infinité  d'autres  lieux  que  no^is 
avons  allegucz^ailleurs^  K'Liis  locis  quamplurimi s .  Orunfensqui 
fe  prouve  par  une  très-grande  quantité  de  palfages ,  n'eft  pas 
fort  extraordinaire. 

Et  de  peur  qu'on  ne  prétende  que  félon  Aubertin  il  n'en  efl:  pas 
ainfi  du  mot  de  fubftance  ou  de  So-/*,  il  n'y  a  qu'à  voir  ce  que 
dit  Aubercin  fur  le  paffage  attribué  à  Eufebe  Evêquc  d'Emefe. 
ZlC  mot  de  fubfiatice ,  dit  il,  comme  le  Cardinal  du  Perron  l'a  remar- 
que ^  ne  fe  prend  pas-  toujours  à  la  ri<^ueur  pour  une  chofe  fubjifiante-^ 
mais  quelquefois  il  fe prend auffî pour  les  qualité''  gS  conditions  de 
cette  chofe  :  ce  qu'il  prouve  par  hùitpaflàges  formelsjoutreceux 
que  le  Cardinal  du  Perron  avoit  rapportez. 

Il  s'enfuit  de  là  que  comme  ces  Miniftres  ne  prétendent  tour- 
ner ces  pafTages  à  leur  fens ,  que  par  ce  qui  les  précède ,  &:  ce 
<jui  les  fuit  dans Theodoret,touces  les  fois  qu'ils  nous  les  repre- 
fentent  détachez ,  6c  qu'ils  infiftent  feulement  fur  cç$  termes , 
que  le  pain  ne  quitte  point  fa  propre  nature  ,  qu  il  demeure  dans  fa 
■première  fubfiance  ^  que  Dieu  ri  enchante  point  lanature  ,  ils  trom- 
pent le  monde  ,  6c  abufent  delà  pente  que  donne  la  Philofb- 
phie  Scholaftique  à  prendre  aujourd'hui  ces  mots  en  un  certain 
lens  qui  n'eft  pas  néanmoins  le  plus  commun  dans  les  Anciens. 

Ainfî  pour  retrancher  ces  avantages  injuftes,  6c  marquer  pre- 
cifément  le  véritable  état  de  la  queftion  qu'on  doit  former  fur 
ces  paroles  de  Theodorec,  il  eft  clair  qu'il  ne  s'agir  pas  de  fça- 
voir  n  ces  termes  détachez  de  leur  fuite  peuvent  recevoir  le 
fens  des  Catholiques  ,6c  fi  l'on  peut  dire  fansblefler  en  rien  la 
doârine  de  la  tranlÏÏibftantiation,  que  Dieu  ne  cha77^c point  la 
nature  des  fymholes  ^  que  les  fymboles  ne  quittent  point  leur  propre  na- 
ture. Car  cela  eftavoué  6c  reconnu  par  Aubertin, par  M.  Clau- 
dej6c  par  tous  les  Miniftres.  Mais  il  s'agit  de  fçavoir  s'il  y  a 
quelque  chofe  dans  la  fuite  du  difcours  de  Theodoretqui  em- 
pêche de  prendre  ces  termes  dans  un  fens  compatible  avec  la 
dodlrine  de  latranflTubftantiation.  ■'_'_     ^    '!.!■.      1 

Le  feul  établifièment  de  la  queftion  doit  donc  ôSîiger  la  plu- 
part des  Calviniftes  de  fufpendre  leur  jugement  fur  le  fens  de 


fasT.  8.  c.  j. 


a,  S  o  L I V .  V.  Explication  despa.Jfiges  de  Théodore t 
ccpa0age ,  &  d'en  parler  avec  plus  de  retenue  qu'ils  ne  font,, 
puifqu'ils  ne  fcauroient  dire  avec  vérité  qu'ils  foienttousafler 
informez  de  cette  fuite  du  difcours,  d'oii  néanmoins ,  félon 
leurs  Miniftres  mcmes^toute  la  force  de  ce  paffage  dépend.  Er 
s'ils  ont  quelque  amour  pour  la  vérité  ,ilfautqu'ilss'accoxltu- 
nient  à  regarder  ces  paroles  comme  pouvant  certainement  re- 
cevoir un  fens  Catholique  ^Sc  qu'ils  fçachentde  plus  que  de- 
puis même  que  l'herefie  des  Sacramcntairesa  rendu  certains 
termes  fulpeds ,  depuis  même  que  par  l'abus  qu'elle  en  a  fait, 
elle  a  obligé  les  Catholiques  d'efîre  plus  circonfpeéts  dans 
leurs  exprellions  ,  on  trouve  néanmoins  qu'ils  fe  font  encore 
ièrvis  des  mots  de  nature  dans  ce  fens ,  6c  qu'ils  n'ont  pas  craint' 
de  dire  que  Li  nature  du  pain  (jr  du  vin  demeurait  dans  l'Eucha^ 
rifiie.  En  voici  quelques  exemples. 

Il  ell  confiant  parmi  lesft^avans  que  le  Livre  deCœna  Dominiy 
que  l'onattribuoit  autrefois  à  S.  Cyprien,eft  d'un  temps  beau- 
coup pofterieur  ,&  les  Mmiftres  mêmes  ont  crû  qu'il  eftoit  du' 
bien  de  leur  caufede  foûtenir  qu'Arnaud  Abbé  deBonneval, 
contemporain  de  S  Bernard  en  efloit  l'Auteur.  Il  eft  donc 
jufte  de  les  faire  reflou  venir  prefentement  que  lorfque  les  Au- 
teurs Catholiques  leur  alleguoicnc  ces  paroles  de  cet  Auteur: 
Panis  ijie  non  effipe  fcd  natura  miitatus  ,  omnipotentia  Verbi 
façliis  eft  car» y,  ils  répondoient parla bonche  de  Saumaife,  qu'rl 
y  avoit  des  manufcrits  qui  port  oient ,  partis  ijh  ncc  effipe  necna- 
turu  piutatus.  Et  ainfi  en  prenant  droit  fur  cette  manière  de 
lire  qu'ils  ont  voulu  autorifer,&  qui  peut  cftre  véritable  ;  voi- 
là un  Auteur  Catholique  déclaré  pour  Ta  tranflTubllantiation  , 
qui  au  même  temps  qu'il  l'établit ,  ^  ç\\\\\^\x.(\\it  le  pain  efl  fait 
chair  par  la  loute-puijjance  deDieu^wQ  laifl^  pas  de  dire  en  même 
temps  aulTi-  bien  que  Theodoret ,  q^ue  le  pain  ne  change  ni  defor- 
rae  ni  de  nature. 

Le  Cardinal  Pulius dit  expreffement,  que  la  naturedu  painr 
demeure ,  au  même  temps  qu'il  enfeigne  quela  fubfliance  pafl!è, 
tranfit  itaque  fubfiantia  ,  fcd  remanet  forma ,  quamobrem  non  efi 
fcnfuum  delufio  .^fed  vera  Dei  comprehenfio  ,  quod  cum  in  Domini- 
ca  rnenfa fit Jolum caro  ^  fanguis  ,  nihilomintu  vini  N  ATURA/'<rr- 
cipiatur.  Car  puifque  l'on  fént  la  nature dvivin  ,  félon  cet  Au- 
teur ,&  que  les  fens  ne  font  point  trompez ,  il  faut  que  cette 
nature  demeure.  Cependant  félon  luy-meTme  lafubftance  ne 
(demeure  poinc. 
V  Innocent 


(^  de  trois  Auteurs  qui  ont  parlé  comme  luy.        1 8  j 

Innocent  III.  enfeigne  que  non  feulement  les  accidens,  mais  Ch.  VIT, 
auflîles  proprietez  naturelles  demeurent ,  natumles  fropristates  i-ib^;-  mvft. 
marient  ut  pane it m.  Or,  qui  doute  que  les  mots  de  proprietez  ^'"^'^•'• 
naturelles  &  àe  pancité  ne  foient  lynonymes  avec  celuy  de  na- 
ture &c  à'cjfcnce  de  pain? 

Pourquoy  donc  ne  trouveroit-on  pas  le  même  langage  dans 
les  AncienSj  ou  pourquoy  s'en  étonneroit  on  quand  on  l'y  trou- 
ve ?  Qu'on  ne  nous  cite  donc  plus  fi  fouvent  queTheodoret 
àilyque  les  [y  mb  oie  s  ne  quittent  point  leur  propre  nature.  Car  il  eft 
confiant  que  cela  ne  prouve  rien,  êc  ce  font  les  Miniflres  mê- 
mes qui  nous  l'apprenne  it.  Mais  qu'on  examine  de  bonne  foy 
*  ce  qui  peut  déterminer  le  fens  de  ces  mots.  C'eft  ce  que  cous 
allons  faire  dans  les  Chapitres  fuivans. 


CHAPITRE   VII. 

Explication  Jtncere  du  pajfaqe  de  Theodoret  tiré  dr  fon  fécond  Dia- 
logue ,  par  laquelle  on  fait  voir  qu'il  ne  hlcjfe  en  rien.  la. 
àoilrine  de  la  Tranjfubftantiation. 

LEs  Miniflres  ont  mêlé  dans  l'examen  de  ce  pafTàge  de 
Theodoret  tant  de  termes  Metaphyllques,  dont  on  fera 
obligé  dedifcuter  le  fens  avec  une  affez  longue  critique  ;  qu'a- 
vant que  de  nous  y  engager,  je  croy  devoir  l'éclaircir  d'une 
manière  plus  populaire,  6c qui  pourra  fufîîre  néanmoins  à  ceux 
qui  fe  contentent  de  juger  par  le  bon  fens  de  ces  fortes  de  cho- 
k^,  fans  s'engagerdans  ces  recherches  fi  épineufes. 

Tout  le  monde  fçait  que  ce  Dialogue  de  Theodoret  a  pour 
but  de  réfuter  l'herefie  des  Eutychiens,  &  que  ces  hérétiques 
renouvellant  en  cejpoint  l'erreur  d'ApolHnaire,  enfeignoient 
qu'il  n'y  avoir  qu'une  nature  en  J.  C. 

Cette  exprelîion  leurétoit  commune  à  tous,niais  elle  étoit 
fort  différemment  expliquée. 

Les  unsdifoientque  le  Verbe  étoit  naturellement  chair,  & 
que  la  chair  étoit  confubflantielle,  &  ne  faifoic  qu'une  nature 
avec  la  Divinité. 

Les  autres  difoient ,  que  le  Verbe  en  s'incarnanc  s'étoic 
changé  en  chair,  2c  que  c'étoit  en  ce  fens  qu'il  n'y  avoit  en  J.  C. 
qu'une  nature. 


z8r       Liv.  V.  Explication  des pxJfdgesdeTheodoret 

Les  autres  difoienc  qu'il  avoic  pris  une  chair  celefle  ôc  fpiri- 
tuelle  dans  le  ciel ,  avant  que  de  naiflre  de  Marie. 

Les  autres  vouloient  que  s'ctant  uni  à  une  nature  prifede  la 
Vierge,  il  n'en  eût  fait  qu'une  nature  avec  la  Tienne,  &que  la 
nature  divine  eût  ablorbé  l'autre.  C'cft  particulièrement  cette 
manière  d'expliquer  l'hercfie  Eutychienne  que  Theodoret 
comb-^t  dans  Ton  fécond  Dialogue.  Et  comme  elle  pouvoic 
cdrc  encore  différemment  conçue  ,  il  rcprefence  ces  diverfes 
manières,  en  les  attribuant  au  mêmeadverfaire  qu'il  introduit 
&  tju'i!  Fait  parler;  quoy  qu'il  ne  loit  pas  probable  qu'une  même 
pcrfonne  pût  avoir  des  (entimcns  fî  diffcrens. 

Il  {-ait  voir  d'abord  que  ceux  qui  difoient,  quil  n'y  avoit  qu'une 
nature  en  J.  C.  ne  laiiî-jient  pas  de  reconnoiftre,  que  le  Verbe 
T)'cu  avoit  pris  une  chaire  une  ame  raifonnablel  &  que  s'ils  re- 

Theed.p  jy.  f^f^ji^nt;  ,^q  l'appel  1er /^^iww^,  c'eH: qu'ils  diCoient  qu'il  le  falloic 
nommer  par  ce  qui  a  efté  de  plus  excellent  en  luy. 

^-  ^^'  Il  fait  voir  encore  que  L  C.  elloit  vraiment  homme  ,  (elon 

ces  Eutychiens,  êc  qu'ils  cnfeignoient  qu'il  le  falloit  foûtenir 
contre  les  hérétiques  qui  le  nioient. 

f.  7+.  Qii'ils  difoient  que  le  Fils  de  D'eu  s'etant  fait  homme  avoic 

tantoilfait  paroiftre  fa  chair,  &  tantoft  fa  divinité. 

^'l^'  Qu'il  y  avoit  en  L  C.  une  humanité  parfaite. 

f-77..  0^1*^  Je  corps  de  L  C.  n'étoit  pas  un  vray  fpetflre,  comme  les 

Marcionites  &  les  Valcntiniens  l'cnfcignoienr. 

Avec  tout  cela  néanmoins  cet  Euty^hien  ne  laifîe  pas  de 
foûtenir  que  la  nature  humaine  de  L  C.  avoit  été  abforbée  par 
la  divine,  &:  que  les  proprietczde  ces  deux  natures  n'avoienc 
point  fubfiflé  depuis  l'union. 

Il  efi  vray  que  pour  ce  dernier  point  qui  efl:  le  changement 
de  la  nature  humaine  en  nature  divine  avec  l'abolition  despro- 
prieceZj  l'Eutychien  l'ayant  mis  d'abord  immédiatement  après 
l'union,  lerecule  enfin  )nfqu'aprésrAfcenf!<^n.  Etilparoiftmê- 
m?  après  S.  Athanafe  ,  que  c'ctoit  là  le  fentiment  de  quelques 
Apollinarifles,  &  qu'ainfi  on  ne  fçauroit  faire  pafTcr  cet  état  de 
l'herefîe  Eutychienne  décrit  par  Theodoret ,  pour  une  pure 
fiiftion  comme   Aubertin  le  voudroit. 

C'efldonc  ce  dernier  état  de  l'herefie  Eutychienne  qu'il  faut 
particulièrement  confiderer  icy. 

Theod.  f.  77.  Lçs  termes  par  lefquels  il  s'expr'me  font,  que  la  nature  hu- 
maine a  eflé  abforbée  car  la  divine^  comme  une  'goutte  demiel  jettée 
dans  la  mer  j  efi  abforbée  ^arla  mer. 


ft)  de  trois  Auteurs  qui  ont  parlé  comme  luy.       183 

Que  L'humanité  a  perdu  fa  nature  propre,  Ch.  VII. 

Qu^elle  a  cfiè  changée  en  divinité.  p.? 9. 

Que  la  nature  humaine  n'avait  pat  eftè  détruite ,  mais  qu^elle  P-  '''*• 
avait  efté  chanzec  en  cfjencc  divine. 

Ce  qu'ils  entendoienc  par  làjou  au  moins  ce  queTheodorec 
leur  impuce  d'entendre,  c'eft  que  cette  nature  n'étoic  plus  fem- 
blableà  celle  du  refbe  des  hommes,  &  ne  faifoic  plus  partie  du 
genre  humain  CCa.  'i'/j.i  ro'  d^'^fcùTtiiof  ye'yoi. 

Qu'elle  n'avoit  plus  les  mêmes  bornes  de  Ton  étendue,  ifcu 

Qu'elle  n'avoir  plus  aucune  des  marques  6c  des  caraâeresdc 
la  nature  humaine  cxra.  tîcd  (JoV/»  «TmAo?. 

Que  le  corps  de  J.  C.  après  l'Afcenfion  ne  s'appelloit  plus 
corps. 

Voilà  quel  étoit  le  fens  de  cette  expreffionque  la  nature  hu- 
maine ëtoitablorbée.  Et  ce  que  Theodoret  prouve  cft  au  con- 
traire que  même  après  la  Refurreûion  &  l'Afcenfion ,  le  corps  p.  %\. 
dej.  C.  a  une  étendue  bornée ,  qu'il  efi  vijthle,  qu'il  canferveles  ca- 
raBeres  de  la  nature  humaine. 

En  un  mot  les  Eutychiens  vouloient ,  félon  l'idée  que  Theo- 
doret  donne  de  leurs  fentimens ,  que  l'elTence  humaine  fufl: 
tellement  abforbée,  que  le  corps  de  J.  C.  full:  invifible,  impal- 
pable, fans  étendue  bornée,  fans  forme  humaine,  bi.  fans  au- 
cune des  proprietez  de  la  nature  de  l'homme.  Et  l'Eglife  pre- 
rendoit  contre  eux  que  le  corps  de  J.  C.  cftoit  encore  vifible, 
palpable,  cjrconfcrit,  qu'il  avoir  la  forme  &  la  figure  humaine, 
&  qu'il  confervoit  l'effence  d'un  corps  humain. 

C'eft  fur  cette  queftion  que  Theodoret  ayant  tiré  un  argu- 
ment de  l'Euchariftie,  pour  montrer  que  J.  C.  avoir  encore  un 
vray  corps ,  l'Eutychien  en  veut  tirer  un  de  fon  cofté,  ôc  il  le 
fait  en  cette  manière. 

1.  Il  fait  confeftcr  à  l'Orthodoxe,  que  les  fymboles  après 
laconfccration  s'appellent  le  corps  &  le  fangde  J.  C. 

2.  Il  luy  fait  confelTer  qu'il  croyoit  recevoir  le  corps  &  le 
fang  de  J.  C. 

Ècfur  ce  double  aveu  il  forme  cet  argument.  Comme  donc  les 
fymboles  du  corps  (^  du  fan'i^duSei<incur  font  autres  avant  l'invoca- 
tion facerdotale  .^  mais  après  laconfccration  ils  font  changez,,  ^  font 
faits  autres  j  de  même  le  corps  du  Seiyieur  a  efé  changé  en  effence 
divine. 

Nn  ij 


"z?4     Liv.  V.  Expliciitiondes  paJfagesdeTheodoret 

C'eft  là  le  raifonnement  de  l'Eucychien,  &  quoy  qu'il  ne  foit 
introduit  dans  ce  Dialogue  que  pour  eftre  réfuté,  il  faut  pour- 
tant, afin  de  garder  le  caraderede  la  vray-femblance  ,  quefi 
fon  argument  eft  faux  ,  il  ne  foit  pas  tout- à  fait  extravaganr. 
Or  c'eft  ce  queTheodoret  aura  très  mal  obfervc ,  fi  on  l'expli- 
que félon  les  hypothefes  des  Calviniftés.  Car  ils  fuppofent  que 
lesEuthychiens  &;  les  Catholiques  convenoient  que  lesfymbo- 
Ics  n'étoient  changez  que  de  nom,  de  fignification  &  de  vertu, 
bL  qu'ils  ne  recevoient  aucun  changement  fubftantiel.  Et  cela 
étant,  l'argument  que  félon  eux,  Theodoret  auroit  fait  faire  à 
l'Eutychien  fe  réduit  à  celuy-cy  :  Les  fymboles  de  l'Encharifiie 
chan<zent  parla  confccration  de  nam,  de  -figure  (^  de  vertu.  Donc  îe 
corps  de  J.  C.  change  de  fubftance  &  de  nature  &  devient  in- 
vifible  &:  impalpable:  ce  qui  eft  le  comble  de  l'extravagance. 

Il  n'en  eft  pas  de  même  en  fuppofant  que  cat  Eutychien  con- 
venoic  avec  l'Orthodoxe,  que  le  pain  éruit  réellement  changé 
au  corps  deJ.C.  &  qu'il  n'y  avoir  de  difFcrence,  que  dans  l'idée 
de  ce  corpsj  l'Orthodoxe  l'entendant  d'un  vray  corps,  &  l'Eu- 
tychien d'un  corps  divinifé  qui  a  perdu  (ts  proprietez  naturel- 
les Car  alors  fon  argument  ne  fera  pas  fans  vray  (emblance,  & 
il  confiftera  à  propofer  le  changement  qui  arrive  dans  TEucha- 
riftie  comme  une  image  de  ceîuy  qu'il  pretendoit  être  arrivé  au 
corps  de  J.  C.  après  l'Afcenfion  ;  en  quoy  il  n'y  a  rien  qui  cho- 
que lefens  commun.  Car  c'étoit  comparer  un  changement  mer- 
veilleux &:  inconcevable,  avec  un  autre  changement  merveil- 
leux &  inconcevable.  C'étoit  comparer  un  changement  qui  fé- 
lon luy  faifoit  perdre  au  pain  le  nom  de  pain,  avec  un  autre 
changement  par  lequel  il  vouloit  que  le  corps  de  I.C.  perdift  le 
nom  de  corps  humain.  C'étoit  comparer  un  changement  qui 
.  faifoit  que  le  pain  devenoit  le  corps  de  I.  C.  à  un  autre  chan- 
gement par  lequel  le  corps  de  I.  C.  étoit  fait  une  fubftance  di- 
vine. 

Il  y  a  dans  tout  cela  beaucoup  de  rapport  ^  &  on  ne  voit  pas 
même  d'abord  comment  Theodoret  y  pourra  répondre. 

Je  demande  donc  fi ,  dans  cette  hypochefe,  ce  ne  feroit  pas 
répondre  conformément  à  cette  créance,  que  d'accorder  d'une 
parc  à  l'Eutychien  qu'il  eft  vray  que  les  fymboles  font  faits  le 
corps  &  le  fang  de  I.  C.  qu'on  croit  qu'ils  le  font ,  &  qu'on  les 
adore  comme  tels:mais  de  luy  dire  en  même  temps  que  fa  com- 
paraifon  prouve  tout  le  contraire  de  ce  qu  il  pretend;parce  que 
eommç  ces  fymboles  ne  perdent  pointla  figure  du  pain  êc  du  vi% 


^  de  trois  Auteurs  qui  ont  parlé  comme  luy.  2^5 
qu'ils  lonc  palpables/enfibles  comme  auparavant,  &  qu'jls  con-  C  h.  VI  î. 
fervent  toutes  les  proprietez  du  pain  &  du  vin;  il  faut  conclure 
en  fuivant  cette  image, que  le  corps  de  J.  C.  n'a  point  au(îî  per- 
du la  figure  humaine,  la  forme  humaine,  Se  enfin  qu  il  n'a  point 
perdu  les  proprietez  &  les  qualitez  d'un  corps  humain. 

Mais  avant  que  d'ëclaircirde  quelle  manière  il  l'a  fait  :  que 
chacun  prenne  la  peine  de  chercher  en  fov-même  comment  il 
le  devoit  faire  ,  en  fuppofant  qu'il  crufl  le  changement  réci 
du  pain  au  corps  de  J.  C.  comme  on  le  croit  dans  l'Eglife  Ca- 
tholique. Que  Ton  fefouvienne  feulement  qu'il  avoit  affaire  à 
un  homme  qui  vouloit  prouver  par  cet  exemple  tiré  de  l'Eu- 
chariftie,  que  le  corps  de  J.  C.  avoit  efté  tellement  changé  en 
une  nature  divine,  qu'il  n'avoitconfervény  la  figure,  n\  la  for- 
me ,  ny  les  bornes  de  fbn  étendue,  ny  aucune  des  proprietez 
d'un  corps  humain. 

Je  demande,  dis-je,  s'il  y  a  perfonnequi  puft  conclure  de  ce 
difcours,  que  Theodoret  ne  croyoit  pas  laTranifubftantiation, 
&  fi  l'on  peut  dire  que  faréponfe  fbit  extravagante.  Cependant 
la  vérité  efl:  qu'il  n'a  rien  répondu  davantage.  J'ay  mis  feule- 
ment les  motsfl'e  pro^rietez^de  pam  ^  de  vin  au  lieu  de  ceux  de 
nature ,  &  d'efjencc  du  corps.  Mais  je  ne  l'ay  fait  qu'après  l'avea 
formel  des  Miniftres  qui  reconnoiflent  que  les  mots  de  nature 
&  à'ejjence  peuvent  fignifier  les  proprietez  5c  qu'ils  les  fignifient 
tres-fouvent  dans  les  Auteurs  an-ciens.  Je  n'av  donc  ufé  que 
d'un  droit  qu'on  ne  fçauroit  refufer  à  un  interprète  ^  &  il  fe 
trouve  néanmoins  que  la  réponfe  de  Theodoret  eft  jufle, 
qu'elle  combat  direclement  les  prétentions  de  l'Eutychien,  & 
qu'elle  établit  ce  quel'Eglife  foûtenoit  contre  luy  Env^icyles 
propres  termes  qui  ne  peuvent  plus  recevoir  de  diflicultez  rai- 
îbnnables  après  cet  éclairciifement:- 

Voîis  vous  efics  envclopé  dans  les  filets  que  voîis  avez^  vous, 
mêmes  tendus.  Car  les  fymboU s  myfliques  ne  quittent  point  LEUR. 
PROPRE  NATURE  après  Li  caufccration ,  puzs  qu'ils  demeurent 
comme  auparavant  dans  leur  première  ejjence ,  ^  en  leur  première 
figure  ,  ^  en  leur , première  forme,  (^  qu'ils  fiant  vifibles  ^  palpa- 
bles. Mais  on  conçoit  par  l'entendement ,  qu'ils  font  ce  quils  ont  efiè 
faits.  [  C'eft  à-dire  le  corps  &  le  fangde  J.  C.  comme  nous 
avons  prouvé  queTheodoret  ne  pouvoit  entendre  autre  cho- 
ie. ]  On  croit  qu'ils  le  font,  (^  on  les  adore  comme  e fiant  ce  qu'on  les 
croit.  Comparez^donc  maintenant  cette  ima^e  avec  fon  originAl'y  ^ 

N  n  iij 


tî6       Liv.  V.  ExpUciitiondes pajftges deTheodoret 

vous  vcrrez^lc  rapport  qudy  a  de  l'un  u  l  autre.  Car  il  faut  que  la 
fiyire  rejjemblc  a  la  vérité.  Le  corps  donc  de  J.  C .  iTarde  fa  première 
figure ,  fa  première  forme;  ^  fa  première  circonjcnption^  ^pour  le 
dire  en  un  mot  il  a  l'ejfence  d'un  corps. 

Quand  il  feroir  même  vray  que  par  ces  termes  dont  Theodo- 
retu{e  à  l'égard  deslymboles,  il  leur  auroit  donné  trop  de  réa- 
lité, cette  expreffion  fe  trouveroit  corrigée ,  parce  qu'il  dit  en- 
fuite  ,  qu'ils  font  faits  corps  de  "f.  C.  ^1"  qu'on  les  adore  comme  efiant 
ce  qu'on  léserait:^  par  l'union  de  cette  féconde  vérité,  il  auroit 
obligé  de  réduire  la  première  claufe  aune  vérité  exadle. 

Car  c'eft  ce  qui  arrive  d'ordinaire  quand  on  parle  des  chofès 
dont  nous  n'avons  pas  une  idée  bien  nette  dans  l'cfprit.  Il  eft 
difficile,  par  exemple,  en  parlant  de  l'unité  de  la  nature  divine, 
de  n'y  pas  mêler  quelque  idée  qiù  emporteroit  l'unité  même 
des  Perfones  Mais  pour  la  corriger  l'on  en  confeiîè  pofitivement 
la  pluralité.  Il  eft  difficile  de  même  qu'en  concevant  la  pluralité 
des  Perfonnes,  on  n'y  mêle  quelque  idée  qui  emporteroit  divi- 
fion  d'elTence.  Mais  on  la  corrige  en  difant  qu'il  n'y  a  qu'une  ef- 
fence  dans  les  trois  Perfonnes.  S'il  y  avoit  donc  quelque  chofe 
de  trop  fort  dans  ce  que  Theodoret  dit  de  ce  qui  refte  dans 
l'Euchariftie,  cet  excès  fe  trouveroit  corrigé  par  ce  qu'il  ajoute. 
Mais  il  ne  l'a  pas  fait.  Il  s'eft  fervi  de  mots  généraux  qui  par  l'a- 
veu même  des  Miniftres  peuvent  avoir  le  fens  que  les  Catho- 
liques y  donnent,  &:  fe  prendre  pour  l'amas  des  accidens. 

Mais,  difenc  les  Miniftres,  quand  Theodoret  conclut  que  le 
corps  de  J.  C.  conferve,  v'clayffcùiJi.cLTos,  il  veut  dire  qu'il  con- 
ferve  la  fubftance  paroppofition  aux  accidens.  Or  comment 
tireroit-il  cette  conclufion.de  ce  qu'il  avoit  dit  des  fyroboles, 
qu'ils  confervcnt  leur  ou(ie,  &  qu'ils  ne  quittent  point  leur  natu- 
re ,  s'il  n'entcndoit  par  ces  mots  appliquez  à  l'Euchariftie  la 
fubftance  par  oppofition  aux  accidens  ? 

L'on  répond  qu'ils  fe  trompent  prefque  en  toutes  les  manières 
dont  on  fe  peut  tromper  fur  ce  fujet.  Car  premièrement  il  n'eft 
pas  vray  que  le  mot  d'«V/a.  fignifieen  cet  endroit  fubftance  com- 
me nous  le  ferons  voir.  Il  fignifie  l'eil'enceou  les  proprictez  ef- 
fentielles.  Secondement  Theodoret  a  eu  droit  de  tirer  la  confe. 
quence  qu'iU  luy  imputent  d'avoir  tirée,  &  de  conclure  de  l'e- 
xemple de  TEuchariftie,  que  non  feulement  les  proprietez  fen- 
fiblesdu  corps  de  J.C.  fubfiftentaprésfon  Afcenfion,  mais  aufli 
la  fubftance  même  de  fon  humanité.  Car  les  Eutychiens,par  l'a- 


Çj'  de  trois  Auteurs  qui  ont  parlé  comme  luy.  i%j 
veu  même  d'Aubertin  ,ne  mecroient  poinc  de  différence  encre  Ch.  VI. 
ces  proprierez  ,  &  la  lubllance  de  J.  C.  &:  ils  avouoienc  que  fi 
les  propriété'/,  demeoroienc,  la  nature  deraeuroic  aiiiïi.  Et  par 
confequenc  Theodorec ayant  droit  parl'exempledel'Euchari- 
ftie  de  conclure  immédiatement  &.  directement  que  les  proprie- 
tez  du  corps  de  J.  C.  demeuroienr,S:  qu'il  a  voit  encore  après  Ta 
Refurrcclion  la  figure  ôc  l'étendue  humaine^il  a  pu  porter  fa  con- 
ckifion  julqu'à  la  fubftance  en  vertu  de  l'aveu  des  EutychienSj 
&  ne  feparer  pas  ce  qui  n'étoic  pas  feparé  dans  leur  fentiraenc. 

Mais  quand  cette  lolution  ne  feroit  pas  aufll  réelle  qu'elle 
l'eft,  la  vérité  eft  que  le  mot  d'ouV/a.  ne  (igniiîe  en  aucun  de  ces 
deux  endroits  lalubftance  par  oppofitionauxaccidenSjil  fîgni- 
fîe  en  tous  les  qualitez  6c  les  propriccezj  &:  Theodoret  s'en 
ferc  dans  le  même  iens,  &;  dans  le  principe  &;  dans  la  conclu- 
fion.  Le  principe  eiT:  que  lesfvmboies  retiennent  leur  première 
eifence,  c'eft  à-dire  leo>  propnetezdu  pain  &  du  vin.  Et  lacon- 
clufion  eft  que  le  corps  de  J.  C.  coYikrvQl'eJJence  de  corps, c'eft- 
à-direlcs  prc^priecez  d'un  corps.  Et  c'cft  ce  qui  paroifl:  par  Ton 
expreffion  même.  Car  après  avoir  dit,  ^a^/é'^o/ypj^^J  C.  garde  fa 
frémi  ère  forme ,  fu  premi  ère  f pire ,  fa  première  circonfnption  ,  il 
ajoute  pour  rafiembler  en  un  mot  toutes  les  autres  proprietez 
du  corps  humain,  J.^x^x'iPJi  îW^y  -duj  tv  aounToi  à'^ai'xv. 

Par  où  il  fait  voir  qu'il  regardoit  le  mot  d'ou/ie  comme  un 
mot  qui  renfermoit ,  èc  les  propnecez  déjà  exprimées ,  &:  celles 
qui  ne  l'étoienc  pas. 

Ce  n'efl:  pa<;  que  Theodorec  ne  crût  que  le  corps  de  J.  C, 
confei-voit  fa  fubftance  aullî  bien  que  fesproprietez.  Maisquoy 
qu'il  le  crûtjil  ne  l'exprime  pas  en  cet  endroit.  Car  on  n'cxpri- 
rnepas  en  tout  lieu,  tout  ce  que  l'on  croit.  Et  il  luyétoit  même 
inutile  de  le  faire  ,  parce  que  les  Eutychiens  ne  ciftinguoienc 
pas  ces  deux  chofes  à  l'égard  de  J.  C.  Ainfi  comme  c'ctoicpour 
eux  la  même  choie  de  dire,  que  la  nature  humaine  étoit  chan- 
gée en  Divinité,  ou  dédire,  qu'elle  n'étoic  plus  vifîbîe,  palpa- 
ble, 6c  circonfcrite^  c'éroicauiiî  la  même  chofe  de  dire  contre 
eux,  que  le  corps  de  ].  C.  avoic  encore  la  figure  humaine  &L  les 
autres  proprietez  d'un  corps  humain,  ou  de  dire  nu'il  avoir  en- 
core la  fubftance  même  de  la  nature  humaine  par  oppofirion 
aux  accidens.  L'un  étoit  hé  avec  l'antre  dans  l'efprit  des  Eu- 
tychiens. Et  ainfiil  fuffifoit  de  prouver  6c  d'exprimer  l'un^pour 
les  faire  demeurer  d'accord  de  l'autre, 


i88      Liv.  V.  Explication  despAjfAgssdeTheodoret 

Je  ne  puis  m'empêcher  en  finiflant  ce  chapitre  de  prier  les 
pciionnes  cquicabJes  de  faire  reflexion  fur  rinjuftice  des  Mi- 
nières dans  les  raifonnemens  qu'ils  font  lur  ce  palTage  de  Théo- 
dore t. 

A  moins  qu'on  ne  leur  montre  qu'il  s'eTcfervi  de  termes  dans 
la  propriété  grammaticale  ,  qu'il  y  a  une  juflefle  de  Géomètre 
dans  les  conlequences  qu'il  tire  ,  qu'il  ne  va  point  au  delà  de 
ce  qu'il  avoir  droit  de  conclure ,  ?f  pour  tout  dire  en  un  mot 
qu'il  a  parle  comme  il  auroit  fait  s'il  avoit  prévu,  que  ces  écrits 
tomberoient  entre  les  mains  d'Aubertin.  Ils  en  concluent  net- 
tement qu'il  a  condamné  laTranlfubdantiation^  &  ils  veulent 
enfuite  juger  par  ce  fentiment  qu'ils  luy  attribuent  de  celuy  de 
tous  les  Pères. 

Mais  quelle  équité^ou  plûtoft  quelle  ombre  de  fens  commun  y 
a  til  dans  ce  procédé?  Trouvera  t-on  quelque  Auteur  fi  exad, 
qu'il  ne  luy  échappe  jamais  d'exprelTions  ou  de  raifonnemens 
qui  ne  foient  dans  la  dernière  exaélitude,  qui  n'abule  quelque- 
fois de  certains  termes  en  les  prenant  dans  une  fignifîcation 
moins  propre  ?  Et  y  a- 1- il  aucune  matière  ou  ces  défauts  foient 
plus  pardonnables  que  dans  celle  dont  il  s'agit? 

Lafoy  nous  enfeigne  que  le  pain  cft  changé  au  corps  de  J.C. 
Les  fens  nous  montrent  qu'il  refte  quelque  choie  qui  n'efl;  pas 
changé,  &quia  les  qualitez  Scies  proprietez  du  pain  &:  du  vin. 
Jl  falloit  donner  un  nom  à  cequi  refl:e,puifqu'il  en  falloir  quel- 
quefois parler.  Il  n'y  en  avoit  point  encore  de  déterminé  dans 
l'Eglife.  Theodoret  choifit  entre  tous  les  mots  de  fa  langue, 
les  plus  généraux  qu'il  ait  pu  trouver^  il  en  choifit  qui  convien- 
nent auxfubflancesêt  auxaccidensi  il  appelle  cequi  refte,  ef- 
fcnce  cf  nature:  Il  étoitdiflicile  de  mieux  rencontrer.  Et  quand 
il  y  auroit  encore  quelque  impropriété  dans  ces  termes,  il  la 
corrige  foffifamment  par  la  déclaration  ouverte  qu'il  fait ,  que 
les  fymholes  font  faits  le  corps  de  J.  C.  d^  qu'ille  faut  croire. 

Les  Miniftres  exigent  de  plus  qu'on  fafîè  voir  précifément 
que  dans  une  confequence  qu'il  tire,  ouplâtoft  dans  l'applica- 
tion d'une  comparaifon  qu'il  fait,  il  n'y  ait  rien  qui  ne  foitpré- 
cifément  contenu  dans  les  principes  êcdans  l'image  qu'il  avoip 
propofce  ;  mais  Ç\  la  foy  des  Miniftres  dépend  de  là,  combien 
d'erreurs  n'attribueront  -  ils  point  aux  Pères  ?  Car  combien 
.,rrouve  r  on  dans  leurs  écrits  de  comparaifons  inégales  qu'il 
faut  expliquer  favorablement? 

Où 


6f  de  trois  nAuteuTs  qui  ont  purU  comme  luy.       191 

Oùlesmeneroit  cet  étrange  principe  ,  s'ils  vouloient  exiger  Ch.  VII. 
une  entière  juftefie  dans  cette  comparaifon  dont  tant  de  Percs 
fe  font  fervis ,  que  comme  l'image  d'un  Roy ,  &  un  Roy  ne  font 
pas  deux  Rois  ,  ainfi  le  Père  Se  le  Fils  ne  font  pas  deux 
Dieux  ? 

Que  concluroient-ils  fuivant  cette  fau{Ieregle,de  ceque  S.  i>rTnn.  i.». 
Hilaire  compare  l'union  que  les  Fidelles  ont  entr'eux  par  la 
foy  &  par  le  baptême  avec  celle  du  Père  &  du  Fils ,  marquce 
par  ce  paflage  :  Ey)  ^  Pater  unmn  ftmms ,  &  de  ce  qu'il  luy 
donne  même  le  nom  d'union  naturelle  ? 

Qiielle  confequence  tireroient-  ils  de  ce  que  S.  Irenée  compa- 
re la  verge  de  Moyfequi  fut  faite  chair,  lorfqu'elle fut  conver- 
tie en  ferpent  ,  avec  le  Verbe  appelle  par  David  la  verge  du 
Père  qui  a  eftc  fait  chair  par  l'Incarnation? 

Combien  trouve  t'on  d'Auteurs  reconnus  par  les  Minières 
mêmes  pour  avoir  tenu  la  tranlTubftantiation ,  qui  fe  font  fer- 
vis  de  comparaifons  fur  le  fujet  de  l'Euchariftie  qu'il  ne  faut 
pas  prendre  à  la  rigueur  ,  &  dont  les  Miniftres  mêmes  fte  pren- 
nent pas  fujet  de  leur  attribuer  un  autre  fentiment  que  celuydu 
lefte  des  Catholiques  ? 

Diront-ils ,  par  exemple  ,  que  S.  Pierre  de  Damien  ^  qu'Au- 
bertin  appelle  ^owwt' â?f /'^g/z/î"  iî^w^z/»^,  ne  la  croyoit  pas  , 
parce  qu'il  a  écrit,  que  comme  le  pain  S''  le  vin  pajjent  véritable- 
ment au  corps  de  J.  C.  de  même  tous  ceux  qui  le  reçoivent  vérita- 
blement dans  L'E^life  font  faits  indubitablement  le  corps  de  Je. 
fm.Chnftl 

Diront  ils  que  Samonas  qu'ils  ont  rejette  eux-mêmes  com- 
me tranHubftantiateur ,  ne  la  croyoit  pas  j  parce  qu'il  dit  que 
le."-  Fidelles  voyentj.  C.  dans  l" Eucharifiie  outre  le  pain ,  comme  les 
Fidelles  voyent  le  Suint  Efprit  dans  le  Baptême  outre  l'eau  .<* 

Diront-ilsque  S.  Thomas ,  qui  compare  dans  faréponfeaux 
objecT:ions  des  Sarazins  le  changement  du  pain  au  corps  de 
J.  C.  par  la  tranlTubilantiation  avec  le  changement  des  éle- 
mens  en  d'autres  élemens  quant  à  la  forme  ,  ne  concevoit  rien 
davantage  dans  le  premier  que  ce  qui  arrive  dans  ces  change- 
mens  fi  naturels  &  fi  ordinaires? 

Que  l'Auteur' du  Commentaire  fur  S.  Paul  attribué  à  S.  An- 
felme,qui  compare  la  tranfllibftantiation  après  plufieurs  Pères 
avec  le  changement  de  la  viande  en  nos  corps,  par  la  chaleur 

Oo 


igi    Liv.  Y.  Explication  des pajfiges  de  Theodoret. 
dereftomach  ,  croyoitque  ce  n'cftoit  que  la  mêmeefpeccde 
changement  ? 

Pourqiioy  donc  Theodoret  ne  méritera- t'il  pas  qu'on  luy  ren- 
de la  même  juftice ,  quand  même  fes  paroles  ne  pourroient 
avoir  que  le  lens qu'ils  prcrendenc  ?  Efr-ce-là  la  règle  que  leur 
donne  un  Auteur  qui  a  parlé  de  rEuchanftie  dans  les  mêmes 
termes  que  Theodoret ,  qui  eft  Ephrem  d'Anrioche  ,  qui  les 
avertie  un  peu  avant  le  palîage  qu'ils  en  cirent  ;,  qu'il  ne  faut 
pas  exig-er  un  entier  rapport. ni  une  entière  iuftefle  dans  les 
comparailons,  av^i   çtccira,  ra.  e'    <cr^à'uyix%Ti  o(ptiAu  x^ai  t'  t» 

C'eft  ce  qu'ils  devroient  avoir  dans  l'efprit ,  quand  même  il 
y  auroit  quelque  défaut  réel  dans  rexpre(îion.&:  dansleraifon- 
nement  de  Theodoret.  Mais  j'efpere  que  ceux  qui  examine- 
ront fans  paillon  ce  que  nous  en  avons  déjà  dit ,  &  ce  que  nous 
en  dirons  encore  dans  la  fuite  ,  demeureront  perfuadez  que  ces 
défauts  mêmes  ne  s'y  trouvent  pas. 


CHAPITRE   VIII. 

jD^  la  finifiîation  véritable  des  mots  de  (^wa  ^  d'oyalx  ,  ^  de 
natura  dans  Theodoret  gS  dans  d'autres  Auteurs. 

'Est  avec  beaucoup  de  peine  que  je  m'engage  dans  ces 
difculîîo.ns  de  critique  &  de  Philofophie.  Je  fçay  qu'el- 
les ne  font  au  goufl:  que  de  très- peu  de  gens,&.  elles  ne  feroienc 
pas  même  necedaires  à  l'examen  de  ces  pailages ,  fi  l'on  fe  laif- 
îoit  un  peu  plus  conduire  à  la  raifon  &:  au  bon  fens.  Mais  com- 
me les  Miniftres  y  ont  eûrecours  pour  embrouiller  cette  ma- 
tière ,  il  faut  les  y  fuivre  malgré  qu'on  en  ait  pourdifTiper  les 
ténèbres  qu'ils  orrt  tâché  d'y  répandre.  Le  principe  fur  lequel 
ils  fe  fondent ,  &  par  le  moyen  duquel  ils  prétendent  faire  par- 
ler Theodoret  contre  la  dodrine  de  l'Eglife  dans  le  lieu  donc 
il  s'agit ,  cft  que  les  mots  de  (lÙuu,  ,  o^iia. ,  natura  .  ne  font  ia- 

contre  le  P.      ^^^^^  cmployez  par  cet  Auteur  ,  que  pour  iignmer  La  jubjtance 

NoUecp.  47°.  par  oppoJttiùH  aux  accidens. 

M.  Claude  qni  fçait  aflez  bien  ce  qu'il  doit  fuppofer  pour 
donner  de  la  force  à  fes  preuves,  ne  manque  pas  d'établir  ce 

**'*■  fens  pour  fondement.  Je  joutlens  ,  dit-il  ,  q^uii  n'efi  fa<f  foffîble 


(^  de  trois  Auteurs  qui  ont  parlé  comme  luy.        19  j  :> 

^entendre par  les  termcsde  fubjtance  que  Theodoret  employé  ^  autre  Ch.  Vill. 
chofe que  ee  que  les  Philofophes entendent ,  fcavoir lafu'oûance  mê- 
me par  ofpojition  aux  accidens. 

Aubertin  foûtienc  la  même  chofe  ,  &:  il  la  répète  plunenrs 
fois  dans  ce  qu'il  a  écrit  fur  Theodoret.  Mais  s'il  y  a  quelque 
utilité  à  avancer  hardunent  de  ces  fortes  de  propofitions  géné- 
rales, parce  qu'il  yen  a  toujours  qui  s'y  lailTent  éblouir,  &  qui 
s'arrellenr  bonnement  à  ce  qu'on  leur  dit  j  il  ne  lailfepasd'y 
avoir  auffi  quelque  danger  ,  parce  que  d'autres eftant  choquez 
de  cet  air  de  confiance  en  prennent  fujet  d'examiner  fur  les 
Auteurs  mêmes ,  fi  l'on  ne  leur  impoie  point. 

J'ay  donc  voulu  vérifier  fur  Theodoret  même  ce  que  c^s 
Miniflres  avancent,  &  j'ay  trouvé  qu'ils eftoient  entrez  très, 
imparfaitement  dans  l'intelligence  de  ces  termes.  Aubertin  en 
a  un  peu  plus  approché  jlorfqu'il  dit  en  un  endroit ,  que  le  mot 
de  NATURE  fe  prend  pour  un  tout  compofé  de  fuhflancc  ^  d'acci- 
dent^ T OTxj i^i complcxum tam  fulf/}antiale  quam  accidcntale.  Mais 
cela  n'eft  pas  encore  afiez  expliqué,  &  n'efl  pas  univerfelle- 
ment  vray  ,  comme  nous  le  montrerons. 

Pour  examiner  donc  à  fond  le  fensde  cestermes  ,  il  fautob- 
ferver  d'abord  qu'Ariftote  qui  a  fait  un  de  l'es  principaux  foins 
de  diflinguer  le  fensdes  termes,  èc  qui  aeftéiuivi  en  ce  point 
par  la  plupart  de  ceux  qui  font  venus  après  luy  ,  remarque 
expreffément  dans  fa  Metaphyfique  que  le  mot  d'ouV/jt ,  a  deux 
principales  fignificationsi  l'une  par  laquelle  il  fignifie  le  fujec 
Tu'  \jsmLil(j^oi ,  &  c'eften  ce  fens  qu'il  fignifie  ce  que  l'on  en- 
tend ordinairement  en  François  par  le  mot  àç.  fuh fiance  par  op- 
pofition  aux  accidens  ;  l'autre  par  laquelle  il  fignifie  l'efTence 
des  chofes  qu'il  appelle  ,  ro'  «Ter/  oy ,  ou  -vC  x\  v  tutt<  ,  ce  que 
chaque  chofe  efl. 

La  plupart  des  Philofophes  de  l'Ecole  font  la  même  remar- 
que après  luy.  Et  il  eft  encore  certain  que  quand  le  mot  coa/a  , 
fignifie  l'efîence  ,  il  ne  s'entend  pas  feulement  des  fiibllances. 
Et  c'eft  pourquoy  Arill.ore  dit  en  un  endroit  que  l'airain  n'efl 
pas  de  l'efience  d'un  cercle  d'airain  ,  m^l^rrii  t5  icûv-Afe"  eju/aî 
0'  vctAxôs.  Et  ainfi  le  cercle  qui  n'eft  ou'une  figure  ,  a  félon  Arift.i.j,M«- 
Ariftote  ce  qu  on  appeiieaj/xv,  une  eilence.  1.7. &;. 

Le  mot  de  nature  qui  eft  fynonyme  a  celuy  d'ou'a/o,  s'appli- 
que de  même  aux  accidens  auffi- bien  qu'aux  fubftances.  Cice- 
ron ,  pour  marquer  l'eilènce  de  lajuftice  ^  fe  fert  des  mots,  vis  C'*-  pror^". 

Oo  ij 


194       L  i V .  V.  Explication  despxjf.iges  de  Theodoret 

^  natura  jufiiti^  :  bi.  pour  exhorter  les  Juges  à  examiner  refpç- 
ce  8c  l'eiïènce  de  certains  crimes ,  il  leur  dit ,  prfcrutamini  fe- 

Quiatil.  1. 1.     iiitus  ïiaturam  rationemque  criminum. 

cap.  II.  La  qualité  dé  la  voixell  appeIléeparQiiintilien«^/«r<«x;of*f. 

idem  .1.  L'elTènce  des  vertus  Se  des  vices  eft  nommée  par  ce  même  Au- 
teur, «^//-«n;  virtutîim  (^  vninruni.^x.  l'on  trouveroic  une  infi- 
nité d'exemples  de  ce  même  fèns  dans  toutes  fortes  d'Auteurs , 
tant  ecclefiaftiques  que  profanes. 

Or  pourfçavoir  encore  plus  precifcment  cequec'eftque  ce 

qu'on  appelle  nature ,  il  faut  remarquer  que  les  Pères  nous  en- 

feignent  qu'il  y  a  quantité  d'autres  mots  qui  ont  le  même  fens 

que  celuy-Iàj  &  qui  fervent  à  l'éclaircir. 

Ephrem  d'Antioche  expliquant  les  mots  àQ(tmu,^  d'o^îtri* , 

cJd"ijo°''  dit  que  félon  S.  Bafilc&  Procle  Patriarche  de  Conltantinople, 
ils  (îgnifîent  la  même  chofe  que  celuy  de  iU.op?)i,  forma.  Vadmi- 
rable  Bufîle  ,  dit  il  ,  qui  a  éclairé  toute  l' Ezlife ,  enfei<zne  que  les 
mots  de  fJiof^^  &  à'oCaia.  ont  le  même  fens  :  (^  Procle  Archevêque 
de  Conftantmople  dit  lu  même  chofe  de  celuy  de  ç ôatç ,  nature  j  o  jmV 

Theodoret  die  la  melme  chofe  dans  fon  premier  Dialogue  en 
comparant  les  mots  de  nop^i\  &  de  çi/ai'/  ,c'eft  à-dire  ceux  de 
forme  èc  de  nature.  La  forme  de  fervitcur  ^  dit-il,  c'eft  la  nature  de 
fcrvitcur ,  £omme  la  forme  de  Dieu  eft  la  nature  de  Dieu. 

Anaitafe  Sinaïte  y  joint  encore  le  mot  de  yt^oî  Les  mots,  dit- 
il,  de  (ptiirnd'oJff/*,  de/xop(pyi&  de  •yif^s  fontlamefme  chofe  dans 
les  dogmes  Ecclefiaftiques.  Et  expliquant  le  mot  de  (Sfûais ,  il  dit 
que  dans  l'Eglifé  il  fignifie  ce  qui  nous  eft  effentiel  ^  &  il  ajoute 
quepar  le  mot  efTent  iel,  il  n'entend  que  naturel  Ht.  ^  to  'ïv^aio» 
xj  ro*  «/A^oTov  TAVTdt  'é^.  Et  il  tappotte  pout  exemple  dc  CCS 
proprietezeifentielles  la  faculté  que  le  feu  a  de  brûler, 

Pfellus  ramalTc  tout  cela  dans  ce  vers. 

Mais  comme  il  eft  vray  que  les  mots  de  nature  &  d'oyo-Zot, 
fîgnifient  la  mefme  chofe  que  celuy  déforme,  il  eft  vray  auflî 
qu'il  ne  faut  pas  entendre  par  le  mot  de  forme,  ni  la  feule  fi- 
gure extérieure  ,  ni  ce  que  l'on  appelle  dans  les  Ecoles  des  for- 
mes fubftantielles. 

F^rme  ,  ejfence ,  nature.,  font  des  termes  généraux  &  metaphy- 
ftques  qui  comprennent  tous  les  modes ,  déterminations,  artri- 
i>ut5  0u  qualifications  des  eilres,  tant  fpirituels  que  corporels, 


Viiduxc.  I. 


Csf  de  trois  nÀuteurs  qr4t  ont  parlé  comme  luy.  2.^j 
mais  qui  les  comprennencen  deux  manières. Car  comme  les  m  j-  Ch.  VIîI. 
des  fe  peuvent coplîderer^ou  comme  des  fujets  modifiez  6c  qua- 
lifiez, quis'expriment  par  des  termes  que  l'on  appelle  concrets  ^ 
comme  font  ceux  de  curvum^  album  ^jufium ,  ou  comme  des  for- 
mes abftraites,  qui  s'expriment  par  des  termes  que  l'on  nomme 
abfiraits ,  tels  que  font  ceux  de  blancheur^  de  courbure  &  àçjufti. 
ce  :  de  même  les  mots  de  nature  ,  d'ouïe  ,  àc  forme  ^  fe  peuvent 
confiderer,  ou  comme  des  termes  r<7«frf//,  &en  cecas  ils  figni- 
fient  des  chofes  &  des  eftres  comme  modifiez  ôc  qualifiez  par 
les  atributs  qui  leur  conviennent  ;  ou  comme  des  formes  ab- 
ftraites ,  &  alors  ils  fignifient  les  déterminations ,  les  qualifica- 
tions &  les  attributs  qui  conviennent  aux  eftre  . 

Dans  le  premier  fens ,  ils  ne  s'appliquent  qu'au»  fubftances. 
Car  on  peut  bien  dire  que  l'hommeeft  une  nature  intelligente  j 
que  l'ame  eft  une  nature  fpiritucllej  que  les  arbres^lespierres, 
les  métaux  font  des  natures  corporelles  :  mais  on  ne  dit  pomt 
que  les  vices  ou  les  vertus ,  les  blancheurs,  les  couleurs  fuient 
des  natures. 

Mais  dans  le  fécond  jc'eft  à-dire  lorfqu'on  les  regarde  com- 
me marquant  les  qualitez  ,  déterminations  &  proprietez  des 
chofes,on  les  applique  indifféremment  &  aux  fubftances&  aux 
accidens,  &  comme  l'on  dit  la  nature  de  l'cfprit  ,  la  nature 
de  l'homme, des  plantes j  des  animaux  ^  on  dit  aufîi  Unature 
ÀQs  vertus,  des  vices,  descouleurs  &  des  autres  accidens. 

C'eft  en  lesconfiderant  comme  des  termes  concrets,  que  S. 
Juflindit,  que  la  matière  n  eft-  par  elle-même  7ïi  élément , m  effcnce ,  Inrffp.  ad 
nioujie  y  mais  qu  en  recevant  la  quantité  ^  la  qualité  ^  elle  dcviefit  ^"^  '■    ^^^' 
oysjE  ,  ejfence.  C'eft-à  dire  qu'afin  qu'un  eftre  puiiîe  eftre  ap- 
pelle oufie ,  il  faut  qu'il  foit  déterminé  par  certaines  qualitez 
ou  attributs. 

C'eft  dans  ce  fens  que  Ciceron  prend  le  mot  de  nature  dans 
le  premier  livre  des  Tufculanes,  lorfqu'il  djt  :  Ariftotcles  cum 
quatuor  illa  gênera  principiorum  effet  complexns  ,  è  quibus  omnia 
orirentur ,  qutntam  quandam  naturam  cenfet  elfe  ,  è  qua  fit  mens. 
Ca.vnatura  eft  mis  là  pour  un  eftre  &  pour  un  fujet  fubftantiel , 
ayant  certaines  qualitez. 

On  peut  accorder  félon  ce  fens  ce  que  dit  Aubertin  ,  que 
le  terme  de  %Cais  fe  prend  pro  toto  complexo  tàm  fubftantiali 
quàm  accidentait  i  pourvu  que  l'on  ajoute  que  les  accidens 
lonc  compris  dans  cette  définition  ,  comme  les  détermina- 

Oo  iij 


De  anima  c. 
3^' 


Z96    Liv.  V.  Explication  des pâjfages  de  Theodoret^ 
lions  du  fujet ,  &  la  fubftance  comme  le  fujer. 

Et  ainfiquoiqii'en  cefens  il  foit  vray  que  les  mots  de  (ftW 
d'oi>V/x,  fignifîenc  des  ruhftances,ils  ne  les  fignifienr  pas  néan- 
moins comme  fubftances  feulement;  mais,  félon  ce  que  je  viens 
de  dire  de  S.  Juftin ,  comme  des  fubftances  qui  ont  certains  at- 
tributs qui  ne  font  fouvent  que  des  accidens. 

L'autre  ufage  de  ces  mêmes  mots^,  félon  lequel  on  les  regarde 
comme  des  termes  abftraits  qui  marquent  les  attributs ,  quali- 
fications ,  proprietez  des  fujets ,  que  l'on  renferme  d'ordinaire 
fous  le  mot  A'effence-^  eft  encore  plus  ordinaire  ;  ôcil  a  lieu  par- 
ticulièrement quand  on  compare  ces  termes  avec  un  fujet ,  ôc 
qu'on  lesconfidere  dansun  lujec. 

.  Ainfi  qua nd  Tertullien  dit,  almd efl  fubftantia^ aliudeft  naîura 
fubfiantia  :  fubfiantia  eji  lapis ,  ferrum  :  duritia  lafidis  ^  ferri  ,, 
•  naîura  fuhjîanti^ ,  il  confidere  le  fer  &  la  pierre  comme  les  fu- 
jets ,  &  ce  qu'il  appelle  natura  comme  la  qualité  &  la  détermi- 

de  Tnn.l.  10.  nation  de  ces  fujets.  Et  quand  S.  Hilaire  dit ,  que  dans  la  four- 
naife  de  Babilone,  lefeu  &,  les  corps  perdirent  leurnature  ^  il  ne- 
veut  pas  dire  qu'ils  perdirent  leur  matière  ou  leur  fubftance  , 
mais  leur  qualité 

Sape:ir.7.io_  Ainfi  quand  l'Ecriture  fait  dire  au  Sage ,  que  la  fagefle  luy 
avoit  fait  connoiftre,  naturas  animalium ,^  ira-s hejîiarum ^é\\e 
veut  dire  qu'elle  luy  avoit  fait  connoiftre  leurs  proprietez.  Ec 
quand  elle  dit  ailleurs  que  l'eau  sxtinquentis  fu^v  natura  oblivif- 
cebatur  ,  elle  veut  dire  que  l'eau  oublioit  la  propriété  qu'elle  a 
d'éteindre. 

Et  quand  il  eft  dit  dans  les  Livres  d'Efter  que  les  méchans 
abufcnt  de  la  fimplicité  des  Princes  qui  jugent  des  autres  par 
leur  nature ,  ex  fua  natura  citeras  icjHniantes  '■>  ce  mot  de  natura 
eft  mis  pour  les  qualitez  de  l'ame,  auffi-  bien  que  dans  cette  ex» 

4.  Efdras  14.     prcffion  du  quatrième  d'Efdras ,  excute  taminfirmam  naturam. 

4.'Georo-.  De  même  quand  Virgile  dit ,  mine  âge  naturas  apibu-s  quasju- 

pitcrrpfc  addidit ,  le  mot  de  nature  ne  (xgnifie  que  les  proprie- 
tez des  abeilles ,  parce  qu'il  confidere  les  abeilles  comme  le  fu- 
jet de  ces  proprietez. 

Et  quand  il  dic[,  quippe  folo  natura  fubefl  ^  il  prend  le  moc  . 
dénature  pourîa  feule  fécondité  delaterre. 

ic  fin.  1.  f.  Et  quand  Ciceron  dit  que  Theophrafte/Z/'r/'/aw  natura^  per- 

fecuîus  eft  ,  il  veut  dire  qu'il  a  écrit  de  leurs  diverfes  proprietez, 
de  leur  forme  ,  de  leur  figure  6c  de  tous  leurs  accidens. 


^  de  trois  tAutcurs  qui  ont  parlé  comme  Itty.       297 

Et  quand  il  die  QncorQ^fi aliqui  nacti  fumuj  cum  cujus  N  atura   Ch.VIII. 
rnoribiis  ^  vita  conyruarmis  ^  le  mot  de  naturuy  ne  marque  que 
îes  quaîitez  de  Pefprit. 

Et  quand  Horace  dit,  27atnram  expeUa.r  furca ,  tamen  ufque 
recurret  ^  ce  mot  ne  fignifie  que  les  qualitez  naturelles  que  l'on 
regarde  comme  dans  un  fujet  dont  on  les  cliaflè,Scoù  elles 
reviennent. 

On  doitconcluredelà  que  le  mot  dew^t/ar^jnefeprend  pas 
au  même  fens  dans  ces  expreffions  :  L'ayne  e fi  une  nature  fpiri - 
tue  Ile  ^^  on  connoift  la  nature  de  l' urne  -^  ni  dans  celles-ci, /^.f/'/;^»- 
tes  font  des  natures  végétantes  :  Sa/amon  a  écrit  de  la  nature  des 
fiantes.  Cardans  les  premières  de  celles-là  &  de  celles  cy ,  le 
met  de«<r?/»rifefl:  un  terme  concret,  comme  on  dit,  qui  fe  joint 
directement  avec  les  mots  d'ame  &  de  plante  ^  mais  dans  les 
autres,  c'eft  un  iQvmQ al>firait ,  qui  ne  fepeut  lier  directement 
avec  (on  fujet ,  parce  qu'il  n'eftconfîderé  que  comme  une  for- 
me de  ce  fujet.  C'efl:  dans  le  premier  ufage  qu'on  peut  dire 
qu'il  fignifie  fubftancc  3  mais  dans  le  fécond  il  ne  fignifie  que 
proptietez  &  eflence. 

Tant  s'en  faut  que  dans  ce  dernier  ufâge  ,  les  mots  ditnature 
ou  à'oujîe  fignifient  toujours  des  fubflances, qu'ils  ne  fîgnifient 
ordinairement  que  des  accidens  dans  les  anciens  Auteurs.  Car 
il  eftfans  apparence  qu'ils  ayenteftë  dans  ces  principes  de  Phi- 
lofophie  qui  ne  font  devenus  les  plus  communs  dans  les  Ecoles 
que  depuis  trois  ou  quatre  cens  ans ,  fçavoir  que  les  eftres  natu- 
rels foient  compofez  de  deux  eftres  matériels, dont  l'un  eft  ap- 
pelle proprement  matière  &  l'autre  forme.  On  peut  prouver 
au  contraire  par  beaucoup  de  raifons  qu'outre  la  matière  ,  ils 
n'ont  reconnu  dans  les  eftres  matériels,  que  des  accidens.  Et 
nous  avons  vu.  tout  à  l'heure  que  S.  Juftin  enfeignoit  formel- 
lement que  la  matière  recevant  laquantité  &  la  qualité  devient 
fubftance  ,  c'eft-à  dire  qu'elle  devient  ce  que  l'on  appelle  corps 
naturel.  Et  ainfi  les  lubftances  corporelles  félon  ce  Sainte  font 
composées  de  matières  fie  de  qualitez  &  accidens.  Nous  ver- 
rons que  c'eft  auffi  le  fentimcnt  de  Tlieodoret.  Et  c'eft  pour- 
quoyil  parle  du  changement  du  fable  en  verre,  des  pierres  en 
chaux  ,  du  vin  en  vinaigre ,  du  miel  en  eau  falée ,  comme  la  na- 
ture de  ces  eftres  eftant  changée  ,  quoiqu'elles  ne  cefTent  pas 
d'eftre  matière ,  mais  feulement  d'eftre  une  telle  efpece  de  ma- 
tière. Et  par  confequent  cette  nature  qu'ils  quittent  n'eft  pro- 


198    Liv.  V.  Explication  des  pajpiges  de  Theodoret  ■ 
prement  que  l'amas  des  accidens  qui  tait  qu'une  matière  ertap- 
pellëe  fable ,  pierre  ,  vin  ,  miel.  Et  cette  nature  qu'ils  acquiè- 
rent ^  n'ell:  autre  que  l'amas  des  accidens  ,  qui   fait  que  des 
eftres  font  appeliez  ,  verre  chaud,  vinaigre  ,eau  falée. 

Mais  pour  entendre  ce  que  Theodoret  dit  (ur  ce  fujct,il  faut 
faire  encore  quelques  remarques  qui  diffiperont  une  partie  des 
objedions  de  M.  Claude. 

La  première,  eft  que  les  accidens  que  l'on  appelle  la  naturct 
d'uneltre,  font  en  même  temps  &  accidens  SielTence.  Ils  font 
accidens,  parce  qu'ilsfontconfiderezcommemodes,  comme 
qualitez  de  la  matière.  Ils  font  efTence,  parce  qu'on  ne  fçau- 
roit  les  ofter  de  l'eftre  où  ils  font ,  qu'il  ne  devienne  un  eftre 
d'une  autre  elpece. 

La  féconde  eft ,  que  félon  cet  Auteur  ,  quoiqu'il  y  ait  beau- 
coup d'accidens  cfTenticls,  il  y  en  a  qui  ne  le  font  pa*;.  Car  ceux 
qui  peuvent  élire  feparez  du  fujet ,  fans  qu'il  ceffe  d'cftre  un  tel 
cflre,  font  bien  accidens,  mais  ils  ne  font  pas  partie  de  ce  qu'on 
appelle  Vejfenceovi  la  nature  ^  qui  ne  comprend  que  les  détermi- 
nations &  les  qualitez  qui  conviennent  infeparablement  aux 
chofes,&  qui  les  fait  ce  qu'elles  font. 

C'eftpar  cette  règle,  comme  nous  verrons,  queTheodoret 
conclut  quela  maladie  &  la  fanténe  font  pasde  l'eflènce  des 
corps  humains,  parce  que  le  corps  humain  eft  appelle  corps 
humain  ,  quoiqu'il  palTe  de  l'état  de  la  fanté  à  celuy  de  la  ma- 
ladie. 

Latroifiéme  eft  ,  que  les  efpeces^  les  diftindions  des  eftres 
font  ordinairement  marquées  par  les  Auteurs,  non  félon  les  rè- 
gles d'une  PhilofophiefubtileSc  curieufe,  mais  félon  les  noms 
qu'on  leur  donne  &  l'opinion  commune  que  l'on  en  a.  Ainfi 
quand  un  eftre  ne  change  point  de  nom  ,  quelque  changement 
de  qualité  qui  luy  arrive,  ce  changement  n'eft  regardé  que 
comme  un  changement  d'^m^^/^Mj  :  Mais  s'il  changcoit  de  nom, 
iNi  fi  on  le  regardoit  comme  d'une  autre  efpece,  on  regarderoic 
ce  chanciement  comme  un  changement  de  nature. 

Ennnj'ajoûteray  pour  dernière  remarque,  que  quoique  les 
mots  de  nature  &  à'cjfence,  puifTent  eftre  pris  quelquefois  pout 
l'amas  de  tous  les  attributs eflentiels,  ils  ne  fignifient  néan- 
moins quelquefois  qu'une  partie  de  ces  attributs.  Car  tantoft 
ils  nefignifientque  les  attributs  fpecifiques  5  comme  quand  on 
dit  que  du  fable  qui  devient  verre  change  de  nature  ^c'eftà-di- 

re  qu'il 


C<f  de  trois  Auteurs  qui  ont  parlé  comme  Tuy.  '  ^  199 
re  qu'il  perd  ce  qui  lefaifoic  précifemenc  fable.  Tancofl  ils  ne  Ch.VIIT. 
fignitienc  que  les  attributs  individuels,-  comme  quand  on  ap- 
pelle les  inclinations  naturelles  de  chacunyT?  nature.  Tantofl  ils 
font  déterminez  pur  le  fujet  dont  il  s'agit  à  fignifier  une  forte 
d'attributs  plûtofl;  que  d'autres,  comme  dans  ce  que  nous  avons 
rapporté  de  Virgile  5  Quippefolo  nutura  fuhcfi;  où  ce  mot  ne  fi- 
gnifie  que  la  fécondité. 

Il  n'y  a  plus  qu'à  faire  voir  dansTheodoret  les  mêmes  ufa- 
e;es  de  ces  termesj  6c  la  vérité  des  remarques  que  nous  avons 
faites.  j  j  ■  ji-    1. 

Les  Miniftres  avouent  que  le  mot  de  (p-jin?  ou  de  nature  a  le 
même  fens  dans  tout  le  trairté  de  cet  Auteur,  que  celuy  à'oujiei 
&Theodoret  marque  luy-même  que  le  mot  de  ixof/pii  ou  ferme 
a  le  même  fens  que  celuy  de  (^vais.  Ainfil'on  doit  dire  que  ces 
trois  mots  fignifient  la  même  chofe. 

Or,  comme  nous  avons  remarqué  que  ces  termes  pouvoient 
fe  prendre,  ou  comme  termes  concrets,  &  qu'en  cette  manière 
ils  fignifient  des  fujets  déterminez  par  certains  attributs,  for- 
mes, proprietez,  qualitez  &  modes;  ou  comme  termes  ab- 
ftraits  j  Si  qu'en  ce  fens  ils  fe  prenoient  pour  ces  attributs  mê- 
mes, ces  qualitez,  ces  modes,  ces  proprietez  qui  déterminent 
les  fujets,  il  faut  reconnoiftrc  que  c'eftde  la  première  manière 
qu'ils  fe  prennent  le  plus  fouvent  dans  les  Dialogues  de  Theo- 
dorct:  non  que  ce  fens  du  mot  de  nature  foit  plus  ordinaire  que 
l'autre,  mais  parce  que  fon  fujet  l'y  portoit  6c  l'y  engageoit 
neceifairement. 

Il  s'agifloit  de  montrer  que  l'humanité  &  la  divinité  demeu- 
roient  dans  J.  C.  fans  confufion  ny  mélange.  Au  lieu  de  ces 
deux  termes,  il  fe  fert  ordinairement  des  mots  de  nature  hu- 
maine &  de  nature  divine.  Et  en  les  prenant  ainfi,  il  eft  certain 
que  ces  termes  fignifient  la  divinité  &  l'humanité  comme  fujets 
de  leurs  attnlms  &  proprietez,  6c  non  pas  ces  proprietez,  & 
ces  attributs  confiderez  iimplement  comme  des  formes  de  l'hu- 
manité êc  de  la  divinité. 

C'eft  donc  en  ce  fens  qu'il  définit  J.  C.  un  Dieu  revêtu  de  p.  i^, 
la  nature  humaine,  ©^sf  cC^çùi'rrlitfv  'z^zût^ie  %xica. 

Qu'il  dit  que  la  nature  des  hommes  vit  peu  x'réya'p  (ftyViS  «'Ai-  p-  J** 
•yo  GoJ". 

Qu'il  dit  que  la  nature  invifible  a  efté  manifeftée  par  la  chair 
.J^<tx.f('»))*  a}-.{Ara5  eVe^a''})  ^wiS. 

Pp 


30o^   Liv,  V.  ExplmHon  des  pJL(f,ige.s,  de  Theodoyief 
a.  Cefl;  dàr«,(;è  fens  qa'i!  veut  hjire.  confelïèr  à  l'Eranift?-  les 

'  propriecez  de  l'une  &  de  l'autre  nature  ?uject)?  n&ti^s  Toi  lOt^. 

Car  dans  tous  ces  lieux  le  mot  de  natura  ficrnitie  tout  l'eftre- 
de  la  chofe  qui  eft  appcUée  uuturc ^  2c  le  fignifie  commç  f^jg^ 
àt%  propriecez,  ôc  non, "corn me  les  proprietez  mêmes.,    in-ir", 

Il  cftvray,  comme  nous  avons  remarqué,  que  le  mot  de  na. 
iffrr  pris  dans  ce  fens ,  '[\'^\-\\'à<i  fuhjhmce.  Mais  il  ne  fignifie  pas  la 
fubftance  feule,  il  lafignifie  comme- modifiée  &.  déterminée  par 
des  attributs  &:  des  qualitez.  Et  p^arc'eque  la  plupart  des  attri- 
buts qui  compofent  la  nature  fpecifique  des  efîres  matériels,  6c 
qui  Icsdiflmguent  les  uns  des  autre,s,  ne  foptqye  des  accidens 
ou  modes,  il  cfl  clair  que  lorfque  l'on  applique  ce  terme  aux 
corps,  il  renferme  ces  accidens  par  lefquels  ils  font  déterminez 
à  eftre  une  telle  efpece  de  corps,  ,1      ,   ,.  ^^  „  .,  .",(  ..> 

Cçll:  ce  que  Theodorec  enfeigne,  exprefîeme-htdams  ce  Dialo-- 
guemême  :  Car  marquant  la  diiïerç.oce  qui  efl:  entre  la  nature 
de  la  mer,6c  celle  d'une  goutte  de  jniel,rl  die  qu'elles  ne  différent 
qu'en  quantité  &.  en  qualité.  cV  vrîTarvivi  la  2^^^<^î.\<i\  x^  ci\uUyi 
•nraic'riir;  ;  que  l'une  eft  grande  &:  l'autre  petite  3  l'une  douce, 
l'autre  falée:  ?nazs  iju.'  I'u.v.Ç'..d^  l\.UirC' om  une  nature  liquide  ^ 
htnnide  ^coulante.  Ain  G  iil>e  nature  liquide,  humide  &  fa.- 
lée  ,  c'eft  la  mer  félon  Theodorctî  &  une  ncuure  liquide ,  hu- 
ytïide  é^  douce ^  c'efl:  du  miet.  Er  il  elt  viiible  par- là,  comme 
nous  avons  dit ,  que  ce  qu'il  coni^evoir  par  une  nature  maté- 
rielle, c^étoit  une  matière  ^déterminée  par  certaines  qualitez.' 
Et  c'eft  pcsûrq'uoy  il  coneiuc'du  changement  de  cçs.cjrUalitez  un 
changctncnt  de  nature. 

Il  dit  quequand  une  goutte  de  miel  eft  jettée  dans  la  mer, 
fa  nature  eff  ablorbée  par  cellede  la  mer.  Cependant  il  n'y  g; 
que  (es  qualitez  d'abforbées ,  2c  la  matière  en  fubfifte  toute 
entière.    \  -,  :  ; 

,Mais  il  faut  remarquer  qu'il  ne  vouloir  p<as  que  toutchatîm 
géfiient  de  qualité  fuft  changement  de  natLire,  2c  que  pour  dif- 
cêrner  quand  on  doit  dire  que  la  nature  eft  changée  ,  &:  quand 
elle  ne  l'eft  pas,  il  fe  fert  d'une  règle  facile  2v  populaire. 

C'eft  quequand  en  changeant  de  qualité,  la  chofe  change 
aufli  de  nom,  2c  qu'elle  eft  confîdcrée  par  le  commun. du  mon- 
de comme  un  autre  être ,  il  dit  que  c'eft  un  changement  de 
nature. 

Mais  quand  elle  ne  change  point  de  nom,  il  dit  que  ce  n'eft 
pas  un  chaogemenc  de  nature  ^  mais  d'accidens. 


^  de  trois  Auteurs  qui  ont  parlé  comme  luy.         îqi 

-Ainfi ,  félon  Theodorct,  le  changement  de  cette  goutte  de  Ch.  VIIL 
miel  en  eau ,  celuy  du  fable  en  verre,  du  raifin  en  vin, des  pier- 
î-es  en  chaud ,  du  vin^en  vinaigre,  font  des  changemens  de  na- 
ture, parceque  cesctres  changent  de  nom,  6c  font  regardez 
comme  d'es  êtres  ditferens. 

Mais  fi  le  changement  d'accidcns  ne  fait  pas  changer  un  être 
•de  nom ,  &  qu'on  le  regarde  encore  comme  étant  de  m,ême  ef- 
pece,  il  dit  que  ce  n'efl  pas  un  changement  de  7iature.  Et  c'eft 
"pourquoy,  parce  que  le  ferquoyque  ronge  s'appelle  encore  fer, 
«c  eft  regardé  comme  du  fer ,  il  ne  veut  pas  que  fa  nature  foit 
changée.  Et  d'e  même  parce  qu'on  donne  le  nom  de  corps  hu- 
Tnain'à  tin  corps  malade  bi  à  un  corps  fain,  il  n'appelle  la  ma- 
ladie &:  la  fanté  que  des  accidens. 

Ainfi,  félon Theodoret,  il  ne  Faut  pas  dire  que  les  mots  d'^o- 
y?V  8c  de  72^?^«r^  enferment  toutes  fortes  d'accidens.  Il  ne  faut 
pas  dire  auiïî  qu'ils  les  excluent  tous.  Mais  ils  enferment  les  uns 
tn  excluant  les  autres. 

Ils  'excluent  ceux  que  l'on  peur  feparer  du  fujet  fans  luy  faire 
'changer  de  nom  ,  Se  fans  qu'on  les  regarde  comme  un  autre 
être.  Et  c'eft  par-  là  qu'il  conclut  que  la  maladie  &  la  fanté 
font  accidens  5c  ne  font  point  partie  de  Voufie  ou  nature  :  parce 
ïju&'ces  qualitez  arrivent  aucorps&  luy  font  oftées ,  fansqu'il 
change  de  nom  tfu/xC*(y<f  ^  ra  <3à>u.a.Tt  tomto.  \jzna\ùu.Ç,<i\^{  5  5c 
qu'un  homme  ne  laiiFe  pas  de  s'appeller  ho  mme  quoy  qu'il  foit 
malade  ou  fain. 

Mais  quand  ces  qualités  ne  peuvent  pas  eflre  oflée's  au  fujet 
fans  qu'il  charge  de  nom,  Theodor(S,t  ne  les  appelle  plus  alors 
accidens, îTu.aCeCvi-.'sr»  Etpar  confequent  il  ie's  reconnoi'ftcommé 
ifaifaïit  partie  de  la  vature  ^de  Vcujte. 

C'eft  pourquoy  on  ne  trouvera  point  dans  cet  Aureur  que  la 
figure  2c  la  forme  humaine^quela  vifibilifé  6c  l'étendue  loienc 
accidens  du  corps  de   l'homme.'  ■■ 

'On  ne  trouvera  point  que  d'eftre  humide^  liquide,,  faUè\  ce 
Tbierit  des  accidens  de  la  mer.  C'eft  au  contraire  ce  qu'il  ap- 
pelle fa  nature  foV/s. 

lieft  vray  néanmoins  qu'en  prenant  les  mots  dei?u(T/Ç&:  d'ouV* 
pour  des  termes  concrets,  c'eft  à.  dire  pour  un  fujet  modifié  par 
certains  attributs,  ces  accidens  qui  le  modifient  y  font  bien  com, 
pris ,  '6c  font  ce  que  Theodoret  appelle'les  caracle'rês'8c  les  pro- 
ptfetùZj  mais  ilsne  font  pas  tout  c^eqûi  eft  compris  dans  le  moè 

Pp   îj 


302.        I<^ V.  y,  SxpUcùition des  pajfiges  de  Theodoret 
^  àc<^wis,  du  de  oJo-^x,  qui  marque  de  plus  le  fujet  deces  qualiccz 

''  ^- '    ou  attributs,  qui  cH:  la  fubftance.  . 

Mais  fi  l'on  prend  ces  mêmes  mots  de /z^?«rf&;d'^/7^;zr£' com- 
me des  termes  abftraits^ceft  à  dire  comme  des  formes  qui  qua- 
lifient les  fujcts  &qui  ne  les  enferment  pas  i  alors  ces  termes 
ne  marquent  que  les  attributs,  qui  qualifient  &:  déterminent 
chaque  lujet ,  (oit  que  ces  attributs  foicnt  accidentels,  foit 
qu'ils  foienc  fubftanti'ils.  ' 

Et  comme  nous  avons  dit  que  dans  les  eftres  corporels  ces 
attributs  ne  font  d'ordinaire  que  depurs  accidens  &,  des  modes, 
ce  qu'on  appelle  ifu-r/j  &  onai^t  dans  les  eftres  corporels  n'éft' 
d'ordinaire  qu'un  amas  de  fimple^  accidens  à  qui  l'on  donne  ce  * 
nom  de  nature. 

L'ufasie  des  motsde;^.-///<'rf  &  à'oujîc  en  ce  fens  eft  frequenr 
d'ans  l'es  autres  Auteurs^  &  c'eft  ce  qui  a  donné  lieuà  Aubertiii 
de  dire  qu'ils  fè  prennent  fouvent  pour  les  qualitez. des  choies. 
£r  quoy  qu'il  foit  plus  rare  dans  Theodoret,  parce  que  fon 
fujet  l'a  porté  à  regarder  plùtofl  le  mot  de  nature  de  l'autre 
forte  y  &  comme  enfermant  le  (ujet  6c  fes  qualitez,  il  y  en  a 
fHjurtant  plufieurs  exemples:  comme  quand  il  àh.quejî  les  corps 
des  Saints  retiennent  les  caracieres  de  leur  nature\  le  corps  du  Sel. 
qncnr  retient  aujji  fa  propre  ousiE  ou  cjjejicc,'\\  eft  elairquel'ou- 
iîe  eft  la  même  chofe  que  ce  qu'il  appelle  le  caraclere  de  la.  na- 
ture^ S:  que  l'un  &  l'autre  terme  fignifie  l'amas  des  proprietez-' 
"du  corps  fans  que  le  fujet  en  foit. 

C'eft  encore  dans  lem.ême  /ensqu'ildit  que  l'eau  de  la  mer 
&  le  miel  ont  une  nature  fluide ,  liqmde  (^  humide.  Car  confide- 
rapt  l'eau  de  la  merêc  le  miel-commé  fujetsdecette  nature,  il 
ne  conlldere  ce  qu'il  appelle  nature  liquide ,  fluide  ^  humide^  que 
comme  lesqualitex  qui  le  déterminent. 

Il  prend  encore  le  mot  de  nature  dans  le  même  fens,  c'eft  à 
dire  pour  ràmas  des  attributs  ,  quand  il  èi\t  que  l'humanité  n'a 
jroint- perdu  après^  l'union  fu  nature  CiTX  à'^  iluS'  olxilccv  (fûat»  «  à>- 
Tfa'nôryi':  a.'TicJÀiïïi.  Car  l'humanité  étant  conliderce dans  cette 
..  exprelîion  comme  le  iujer  de  cette  nature,  la  nature  qui  y  eft 
marquée  ne  peut  eftre  que  la  forme  ,  c'eft  à  dire  l'amas,  des  at- 
tributs qui  la  qualifient. 

Il  le  prend  au  même  fens,  quand  il  dit  que  le  feu  s'unilTànt' 
avec  le  fer  n'en  change  point  la  nature.  Car  cette  nature  de  fer 
ne  peut  eftre  dans  cette  expreiTion  que  l'amas  des  accidens  qui 
font  le  fer* 


fe*  d^e  trois  Auteurs  qui  ont  pdrU  com?ne  luy,  503 
Enfin  on  peut  dire  qu'il  le  prend  encore  en  ce  lens ,  dans  !a 
conclufion  que  tire  l'Eranifte  de  l'exemple  du  changement  qui 
iêfaitdans  l'Euchariftie,  quieftque  le  corps  du  Seigncurn  cilc 
changé  m  walay  -du,  ')t\^i.  Car  cela  ne  veut  dire  autre  choie^ 
quecequ'Anaftale  Sinaïteexpnmeen  ces  termes,  en  attribuant 
aux  Eutychiensde  dire  que  le  corps  de  J.  C.  avoir  eftc  changé 
dans  les  propnetez^del'abylme  de  la  divinité  lA-iTirci-KnaJ^yù;  rÀ 

Il  s'enfuit  delà,  ainfî  que  nous  l'avons  déjà  remarqué  ,  que 
comme  les  eftres  corporels  ne  font  diftinguez  entre  eux  (i.lon 
Theodoret,que  par  les  qualitez  6i  les  accidens,  leur  elTence  fpe- 
cifique  n'eft  auffi  que  Tamasde  ces  qualitez.  Ce  qui  leur  con- 
vient quand  on  les  regarde  comme  matière,  peut  bien  eftre 
fubftantiel  ;  mais  ce  qui  ne  leur  convient  que  comme  telle  ou 
telle  matière  n'eft  jamais  qu'accidentel.  Il  ne  refte  plus  que 
d'appliquer  ces  principes  aux  pafTage.s  de  Theodorer  qui  re- 
gardent TEuchariftie.  Et  l'on  va  voir  qu'ils  nous  conduifent  na- 
turellement à  en  découvrir  le  fcns  véritable. 

Car  l'Eutychien  ayant  prétendu,  comm.eTheodoret  le  lu)'^ 
impute,  que  le  corps  de  ].  C.  avoir  été  tellement  changé  en  la 
divinité,  qu'il  avoit  perdu  les  caractères  &  les  proprietez  de  fa. 
nature,  qu'il  n'avoit /'//^r/.-;  yfg^r^  humaine  }iy  l'étendue  hornèo 
Ci  un  corps  hum.tin  ^  qu'il  n'était  -plus  .ny  vifthlc  ny  f.ilpublc'-)  hi  s'é- 
rant  fervy  de  l'exemple  de  l'Euchariftie  où  le  pain  eH:  changé 
au  corps  deJ.C.  pour  en  conclure  que  le  corps  de  J.C.  avoit  été 
changé  de  la-  manière  que  je  viens  de  dire  5  Theodoret  a  pu  &: 
du  luy  répliquer ,  qu'il  avoit  tort  de  vouloir  prouver  que  J.  G. 
eft  devenu  invilible,  impalpable,  fans  figure,  fans  étendue  bor- 
née, par  l'exemple  des  fymbolesEuchariftiques,  puis  que  quoyt 
qu'ils  foient  changez  au  corps  de. J.C.  ils  ne  deviennent  néan- 
moins ny  invifîbles  nv  impalpables ,  &  qu^ils  confervcnt  leur  fi- 
gure £c  leurs  autres  propriété/,  ôcqu'ainfienfuivant  cette  im»- 
ge,  il  devoir  plâtoft  conclure,  que  comme  ces  fymboles  ne  per- 
dent point  leurs  proprietez,  &  qu'ils  confervent  leurmême  fi- 
gure 6c  leur  même  forme,  qu'ils  font  vifibles  &  palpables  com* 
meaupara^-ant;  de  même  le  corps  de  J.  C.  conferve  fa  figure, 
fa  forme,  fon  étendue  bornée  ,  &  toutes  les  autres  qualité» 
d'un  corps  humain.  , 

On  ne  fçauroit  nier  que  cette  repartie  ne  foit  jufte  fc  folide. 
Et  cela  étant,  q^ui  peut  raifonnablement  douter  qu'il  n'aie  ea 


104     Li  V.  V.  Explication  des pajfagûs  de  Théodore t 
droit  de  l'exprimer  par  les  termes  dont  il  's'eft  fervy,  &  qiiej'ar 
déjà  piiilïeur!)  fois  rapportez? 

P^ous  vmu  tjics ,  lu  y  dit- il ,  enveloppé  dans  les  filets  que  vom 
avcz^voui  -même  tijjits.  Car  les  fyynboles  myftiques  ne  quittent  point 
leur  propre  nature  après  la  confecration ,  puisqu'ils  demeurent  dans 
leur  première  cffence^  en  leur  proniere  figure  S""  ^/^  leur  première  for- 
me, ils  font  v:fihles  (jS  palpables  tels  qu'ils  e fiaient  auparavant. 
l^Iais  on  conçoit  par  l'entendement  qu'ils  font  ce  qu'ils  ont  efté  faits ^ 
Q-  on  les  croit .^  t^  on  les  adore ^comme  e fiant  ce  qu'on  les  croit. 

Comparcz^d.onc  cette  image  avec  [on  original.^  ^  vous  vertex^le 
rapport  qu'il  y  a  de  l'un  à  l'autre.  Car  il  faut  que  la  figure  rcjfemble 
à  la  venté  Le  corps  donc  de  I.  C.  garde  fa  première  figure ,  fa  pre- 
mière forme ,  fa  première  circonfcnption.  Et  pour  le  dire  en  un  mot, 
l'cfjence  d'un  corps. 

Je  dis  qu'il  a  eu  droit  de  fe  fervir  de  ces  paroles  pour  expri- 
mer ce  que   j'ay    dit. 

Car  fe  fervant  des  motsde«^^«r^&  à'oufie  en  les  comparant 
avec  des  fujets  qui  font  les  fymboles ,  ces  mots  dévoient  eftrc 
pris  comme  termes  abftraits,  qui  fignifient  l'amas  des  proprie- 
tez  qui  forment  l'effènce. 

Ainfî  quand  il  dit  que  les  fymboles  ne  quittent  point  leur 
nature  ?:<.\Qi\r  ou fîe ,  cela  ne  veut  dire  autre  chofe  finon  qu'ils  ne 
quittent  point  cet  amas  d'accidens  &  dequalitez  qui  font  que 
nous  les  appelions  pain  &  vin. 

Or  comme  nous  avons  montré  que  les  eftrcs  corporels  ne 
font  didinguez  que  par  l'amas  des  accidens,  &  que  cet  amas  fait 
leur  nature  félon  Theodoret  5  il  s'enfuit  clairement  que  pour 
marquer  que  les  fymboles  retenoient  tous  les  accidens  du  pain 
5c  du  vin  ,  il  a  pu  dire  qu'ils  en  confervoient  la  nature  J  puis  qu'en 
effet  ces  accidens  font  leur  nature  félon  luy,  &  qu'il  n'en  re- 
connoilToit  point  d'autres  dans  les  cftres  corporels. 

Et  il  s'enfu-ic  encore  que  le  mêmeTheodoret  pour  marquer 
qre  le  corps  de  J.  C.  n'ctoit  point  devenu  impalpable  6c  invilî^ 
ble, qu'il  n'avoit  point  perdu  fa  figure  ni  les  bornes  de  fon  éten- 
due,8c  qu'il  avoit  confervé  généralement  tous  les  accidens  d'un 
corps,  a  pu  dire,  qu'en  un  mot  il  avoit  confervé  l' ou  fie  d'un  corps-.^ 
:ptfis  qu'-en  efl-et  cet  amas  d'accidens  &  de  proprietez  fait  l'ef- 
fènce des  corps  félon  Tbe©doret. 

Il  ne  faut  point  que  M.  Claude  réplique  qu'il  cfl  certain  qu'il 
^iloit  queIl:ion  de  la  fubllanceôcnondes  accidens, puifque lEr 


(d^  dmroïs  Auteurs  qui  ont  parlé  comme  Inj.  305 
ranifte  avoir  conclu  que  le  corps -de  J^  C.  avoir  ç{\.c  change  in  Ch.  VIII. 
jubjlantiam  diviniuitts.  Car  on  a  dcja  remarque  que  ces  mots 
iii  oôcr;=t!' ^É <s.'  fignifienc,  non  en  la  fubftance  divine,  mais ,  com- 
me s'exprime  Anaftafe  Sinaïce,  in  attributa  diviniuitts  ;  &  de 
pins  que  ce  changement  ayant  efté  exph'qué  auparavant  par 
Theodoret,  comme  un  ciiangement  qui  enfêrmoit  celuy  de 
toutes  les  qualité!  des  corps,  ceft  à  cette  unique  circor.flance 
qu'il  s'attache  ,  par  laquelle  il  fait  voir  que  l'Eranifte  fe  fervoic 
mal  à  propos  de  l'Euchàriilie. 

Je  ne  veux  pasdifîîmuler  une  objedion  raifonnable  que  l'on 
pCTJtlaire  fur  ce  fujet^  &:  qui  mérite  d'cftreéclaireie.  On  pour- 
roit  donc  dire  que  les  mozs^Q  n.itnre  &  d'(7?r^f,  eft mt  regardez 
dans  ce  palTàge  jcy,  &  dans  tous  les  autres  où  Theodoret  les  ap- 
plique aux  fymboles,  comme  des  termes  abil:raits.&  comme  des 
formes  dont  ceslymboles  font  lesfuiecs,  puifqu'i!  parle  de  la 
nature  c'^  de  l'oufie  des  Cymbales^  ne  /îgnificnt  autre  chofê  enefFec 
que  l'amas  des  proprietez  &  desquahcez  de  ces  fvmboles:  c'eft 
à  dire  du  pain  &:  du  vin  ;  mais  que  cela  ne  refouc  nullement 
l'objecliôn  ,  parce  que  ces  fortes  de  formes  meraphyh.]ues, 
comme  w^/ar^,  humanité^  elfcnce^  ne  lo-ut  pas  réellement  diflin- 
guées  de  leurs  lujets:  qu'ainfî  comme  l'humanité  ,  quoyqne 
confîderée  comme  une  forme  donrrhomme  efl:  le  lujet,  n'eft 
pas  néanmoins  diflinguéede  l'homme;  de  mcme  quoy  que  les 
mots  de  nature S>iÀ\u fie  dans  l'exprelTion  de  Theodoret,  figni, 
fient  l'edence  ou  l'amas  des proprietez  du  pain  &  du  vin,  néan- 
moins cette  eflence  5c  cet  amas  4e  proprietez  n'eft  pasdiflin- 
gué  du   pain  &  du   vin. 

]'av  appelle  cette  objeclion  raifonnable,  parce  qu'elle  efl: 
fondée  fur  un  principe  véritable,  qui  efl:  que  ces  fortes  de  for- 
mes abftraites  ne  font  pas  toujours  diftinguces  de  leurs  fujets. 
Et  l'on  doit  aufîi  demeurer  d'accord  que  prenant  le  mot  de  na- 
ture as  pain  dans  toute  fon  étendue,  il  comprend  désqualitez 
&  des  modes  qui  font  tellement  cffentiels  au  pain,  que  l'on  ne 
peut  conferver  ces  qualitez  fans  en  confefver  la  fubflance  mê- 
me. Car  comme  il  eft  vray  de  dire  que  le  pain  efl;  eflentielle-, 
ment  matière  ;  il  efl  vray  dédire  aulîî  que  la  nature  du  pain  8c 
l'effence  du  pain  prile  dans  tL.ute  fon  étendue  &;  avec  une  ri- 
gueur philofophique,ou  plutôt  fcholafi:ique,comprend  ce  qu'on 
îippelle  dans  les  Ecoles  lacorporeité  Se  lamatenalitéj  6c  qu'oa 


3o6     Liv.  V.  Expltcxtiondes pnjfiiges  dcTlj^odoret 

ne  peut  fcparerque  par  la  penfee  de  la  fubftance  même  du 

pain. 

Mais  cette  objeclion  qui  feroit  bonne  (1  Thcodoret  avoic 
fait  profeiTion  de  parler  en  Metaphyficien,  eft  nulle, parce  qu'il 
a  parlé  le  langage  commun  du  refte  des  hoijrmes.  Or  il  eft 
certain  que  comme  on  feroir  trop  geTné  fi  l'on  ctoit  obligé  de 
parler  tovijours  avec  ccitç  rigueur  metaphyfiqujS  on  s'eft  mis 
plus  au  large  dans  l'ufage  desexpreiïions ,  &  on  eft  comme 
convenu  de  donner  tantoft  une  plus  grande  &  tantoft  une 
moindre  étendue  à  certains  termes  félon  lebeloin  qu'on  enau- 
roit,  dans  la  penfée  qu'on  connôi{l:roi,t  aiTez  par  les  cir.con- 
flances  en  quel  fens  on  les  prend roit. 

Les  mots  àe  nature  Se  d'oa/f^ font.proprementde  ces  termes 
dont  l'étendue  varie  félon  les  rencontres  &  les  circonftances. 
-Qiiand  ils  font  pris  généralement  ils  comprennent  toutes  les 
qualitez  &:  proprietez  du  fujet  tant  accidentelles  que  fubftan- 
tiellcs:  mais  l'on  reflerre  cette  étendue  par  mille  circonftan- 
ces. Ainfi  ,  comme  nous  avons  remarqué ,  ce  ternie  de  nature 
n'eft  pris  fouvent  que  pour  l'amas  des  qualitez  qui  forment  l'ef- 
pece  &  qui  diftinguent  un  eftre  d'un  autre  fans  y  comprendre  la 
matières  comme  quand  on  dit  que  du  vin  perd  fa  nature  en  de- 
venant vin  aigre  -,  car  il  ne  perd  du  tout  que  certaines  qualitez 
qui  le  diftinguoient  du  vinaigre^  &  il  ne  pert  ny  fà  matière  ny 
rien  de  ce  qui  le  fait  matière. 

Quelquefois  même  le  mot  de  nature  ne  fignifie  qu'une  feule 
qualité  du  fujet  5  comme  quand  Virgile  dit,  quippe  folo  natunt 
fubefl  ^  où  il  ne  fignifie  que  la  fécondité.  F.t  quand  l'Ecriture 
dit  des  .eaux  quelles  oubliaient  leur  nature  éteignante,  extin- 
GuiNTls^natuK'C  obUvifcebantur^  le  mot  de  w<;//ar<?  eft  reft-raint 
à  ne  fignifier  qu'une  feule  qualité.  Et  quand  on  dit  d'un  homme 
qu'il  eft  fçavanc  dans  la  nature  des  plantes ,  des  animaux ,  des 
métaux,  on  ne  veut  nullement  dire  par-là  qu'il  fçait  mieux 
qu'un  autre  que  tous  ces  eftres  font  des  corps  &  des  matières, 
&  qu'ils  ont  la  matérialité  pour  propriété. 

Ainfi  donc,  puifque  les  mots  dénature  &;d'<?»/fi?  peuvent  être 
reftraints  à  ne  fignifier  que  certaines  qualitez  &;  qu'une  partie 
de  l'effènce  ,  comme  tout  le  monde  en  demeure  d'accordj  Se 
que  l'on  a  droit  d'ufer  de  cette ^reftriclion ,  lorfcju'on  peut  fiip- 
pofer  que  ceux  à  qui  l'on  parle  ne  prendront  pas  ces  termes 
(Hans  toute  leur  ctenduc3Je  dis  queTheodoxet  aeu  droit  de  pren- 
dre 


©•  de  trois  Auteurs  qui  ont pxrU  comme  Itiy.  307 
dre  en  cet  endroit  les  mots  de  n^-rture  èc  d'ou/ie  dans  un  lèns  Ch.  Vllî» 
reftraint ,  èc  pour  n'exprimer  que  les  feules  qualitez ,  modes  &c 
accidens  qui  relient  dans  les  iymboles  après  la  confecration  -, 
parce  que  ces  mots  efboient  ruffifamment  reftraintsà  ce  fens 
par  toutes  les  circonftances  de  Ton  difcours. 

Ils  y  eftoient  premièrement  reftraints  par  la  foy  commune  : 
car  nous  avons  droit  de  fuppofer  queTheodoreteftoit  dans  la 
créance  des  Catholiques ,  &  il  s'agit  feulement  ici  de  montrer 
qu'il  n'a  rien  dif  dans  ce  p.fTage  qui  y  foit  contraire.  Erparcon- 
lequent  on  peut  fuppofer  auffi  qu'il  avoit  dans  l'efprit,  &  qu'il 
voyoit  dans  l'efprit  de  celuy  à  qui  il  parloir  ce  que  les  Catl'o- 
liquesy  ont  communément,  &  ce  qui  eft  connu  de  ceux  qui 
fcavent  leur  doiftrine. 

Or  cette  doiflrine  conufte  à  croire  quelepain  eft'changé  su 
corps  de  J.  C.  quoiqu'il  relie  un  objet  dans  lequel  on  apperçoic 
toutes  les  qualitez  du  pain.  Suppofé  donc  qUeTlieodoret  eût 
cela  dans  l'efprit ,  &  qu'il  vît  cette  même  penfce  dans  ccluy 
de  l'Eranifte  à  qui  il  parloit  ,pouvoitil  douter  que  les  mots  de 
nature  ô:  à'oujîe^àont  la  (îgnification  eft  tantoil:  plus  étendue  6c 
cantoft  plus  relTerrée  félon  les  rencontres,  ne  fulTent  reftraints 
dans  l'occafion  prefente  àne  fïgniner  que  cet  amas  d'accidens 
&  de  proprietezqui  reftent  après  là  confecration  ? 

2.  Ils  eftoient  reftraints  en  ce  lieu  par  la  profefîion  exprefle' 
qu'il  fait  de  croire  que  les  fymboks  ont  eftè  faits  le  corps  de  J  C. 
ér  qti'il  le  faut  croire  Car  cette  propofition  n'ayant'  point  d'au- 
tre fens  que  le  littéral  dans  le  langage  commun  du  temps  de 
Theodoret ,  il  s'enfuivoit  clairement  que  le  paiueftant  fait' le 
corps  de  J.  C.  ces  qualitez  &:  ces  accidens  du  pain  qui  rcftoient 
n'eftoient  pas  la  matière  du  pain  commun  ,  comme  on  Ic-leur 
enfeignoit  expreflemenr; 

5.  Ilseftoient  reftraints  par  toute  la  fuite  du  difcours.  Car 
quoique  la  propoiltion  immédiate  de  l'Eutychien  foit  conçue 
en  ces  termes  ,  que  le  coi-fs  de  J.  €.  avoit  ejlè  charivè  en  une  cf- 
fence  divine  5  néanmoins  ces  fermes  expliquez  par  tous  les  dif- 
cours precedens  forment  cette  idée ,  que  le  corps  de  J.  C.  p<ir 
l'union  avec  la  Divinité  ayant  perdu  toutes  les  proprierez  de  fa 
nature  n'éftoit  plus  ni. palpable  ni  vifible,  &  n'avoit  plus  la  fi- 
gure humaine.  C'eftoit-là  ce  que  l'Eutychien  appelloit  eftre 
changé  en  Divinité.  Il  ne  fongeoit  point  du  tout  à  prouver 
difesâement  l'abolition  de  l'eftre  intérieur  Se   fubftantiel  de. 


3o8  Li  V.  V.  explication  des  pi^Jpigos  de  Theodoret 
l'humanité.  Qu'il  l'aie  aboli  par  conie^uente,!!  l'on  veut,  ce 
n'ell:  pas  de  quoy  il  ell  queftion  prelenccmenc:  mais  ce  qu'il 
avoïc  en  vue,  eftoic  de  taire  voir  que  les  propriccez  clloienc 
abolies  j  &:  ue  même  ce  que  Theodoret  avoit  en  vue ,  eftoit  de 
montrer  qu'elles  ne  l'eftoient  pas.  Ainlî  employant  contre  TEu- 
tychien  l'exemple  de  l'Eucharilbe  ,  il  ne  l'employé  qu'en  ce 
qu'il  eft  propre  à  prouver  que  ces  propriétés  des  corps  demeu- 
rent dans  le  corps  de  J.  C. 

Pour  réduire  donc  en  peu  de  mots  ce  que  nous  avons  prouvé 
dans  tout  ce  chapitre^ 

Il  efb  clair  que  les  mors  de  nature  6c  à^oujîe  ne  fe  prennent 
certainement  pour  fubftance  ,  que  lorsqu'on  s'en  fert  pour  ter- 
mes concrets  ,  comme  dans  ces  proportions;  L'ame  efi une  na- 
ture fpirituelle  :  Les  dcmons  ne  font  pas  des  natures  corporelles  -.La. 
nature  hurnaine  efi  unie  à  la  divine  dans  J.  C. 

1.  Qii'outre  cet  ufageil  y  en  a  encore  un  autre  tres-ordinai- 
re,  où  les  termes  de  nature  &  à'oufie  font  pris  comme  termes 
abUraits,  c'eft  a- dire  comme  marquant  des  formes  qui  font 
conllderées  dans  un  fujet. 

3.  Que  dans  ce  dernier  ufage  ils  s'appliquent  &  aux  fubftan- 
ces  &  aux  accidens  ,  &  ne  fignifîent  que  les  proprietei. 

4.  Que  la  plupart  de  ces  proprietez  eftant  des  modes  ou  ac- 
cidens ,  ces  termes  par  confcquent  figmfient  ordinairement 
des  accidens. 

5.  Que  les  termes  de  nature  &  à'oufie  appliquez  à  des  eftres 
matériels  ,  ne  (Ignificnt  ordinairement  que  de  fimples  acci- 
dens, parce  qu'ils  ne  fignifîent  que  leur  nature  Spécifique  qui 
n'ell:  compofee  que  de  fimples  accidens. 

6.  Que  quoiqu'ils  puiflent  lignifier  tous  les  attributs  &  les 
proprietez  des  fujets  dans  lefqucls  on  les  confidere  ,  ils  font 
iouvent  reftraintspar  les  circonftances  à  n'en  fignifier  qu'une 
partie. 

7.  Qiie  ces  termes  font  employez  par  Theodoret ,  quand  il 
les  applique  aux  fymboles  comme  abftraits ,  &  par  confequent 
qu'ils  ne  lignifient  que  les  proprietez. 

8 .  Qu'ils  ne  les  fignifient  pas  même  toutes ,  parce  que  les  cir- 
confiances  dans  lefquelles  il  s'en  fert>  fufîîfent  pour  en  borner 
l'étendue  ,  &  les  réduire  à  ne  fignifier  que  les  feuls  accidens  du 
pain  qui  refrcnt  après  la  confecration. 

C'efl  à  quoy  fe  doit  réduire  la  recherche  de  k  fignificatioa 


^  de  trois  Auteurs  qui  ont  parlé  comme  luy.  505 
de  ces  termes  employez  par  T  heodoret,  fi  on  y  procède  de  bc>i^ 
ne  foy.  Que  s'ils  ne  lailfent  pas  d'avoir  je  nefçayqiu  y  de  cho- 
quant, ce  n'efl  pas  qu'ils  foient  capables  par  eux  mcines  de 
donner  cctta  imprefiion  ,  mais  c'eft  que  l'abus  que  les  Sacra, 
mentaire^en  ont  fait  ,pour  exprimer  leur  erreur,  &:  pour  la  ré- 
pandre dans  l'Eglife,  avant  porté  l'Eglifeà  s'en  éloigner,  &  à 
les  condamner  dans  la  bouche  6c  dans  les  ircrits  de  ces  héréti- 
ques j  on  a  de  la  peine  enluite  à  fe  défaire  de  cette  idée,  ôc  à 
leur  rendre  leur  fignification  naturelle. 

CHAPITRE    IX. 

Autre  folution  dy.  même  paff'a'ie  de  TheoAoret ,  fondée  fur  le  fens 

auquel  les  mots  de  nature  (j-  t^'oufie  font  fris  par  les  Auteurs 

Ecclejiajltques  d^  far  Theodoret  même, 

IL  yadesgens  fi  peu  équitables,  quand  il  s'agit  d'objeélions 
contre  la  foy, que  pour  peu  qu'on  détourne  les  termes  de  leur 
iîgnification  precife  pour  juftifier  quelque  paflage,  ils  prennent 
ce  qu'on  dit  pour  demauvaifes  défflites,&:  croyent  même  qu'on 
s'écarte  de  la  bonne  foy.  Ces  fortes  d'efprits  trouveront  fans 
doute  à  redire  que  l'on  ait  prétendu  que  les  mots  de  nature  8c 
d'oufe  (e  doivent  prendre  dans  une  fignification  plusreftrain- 
te, quand  Theodoret  dit  que  lesfymbules  demeurent  dans  leur 
première  eflence,  &c  qu'ils  ne  quittent  point  leur  nature  ;  que 
dans  d'autres  lieux  où  ils  fignificnt  tous  les  attributs  générale- 
ment tant  fubftantiels  qu'accidentels. 

Or  quoique  cette  diipofition  foit  tres-injufte  ,  puifqu'iî  ne 
fé  trouve  point  d'Auteur  qui  ait  parlé  dans  bis  autres  matières 
avec  cette  juftcfTe  &  cette  ex^ditudequ'ils  voudroient  qu'on  fift 
voir  dans  ces  palîàges  difficiles,  &:  ou'ils  foient  obligez  eux- 
mefmes  de  s'en  relâchera  l'égard  de  plufieurs  paflagcsqui  re- 
gardent d'autres  Myfleresje  veux  bien  neanrrioins  m'y  accom- 
moder, en  leur  raifant  voir  que  dans  le  fens  auquel  non  feule- 
ment Theodoret ,  nsis  Ip  plus  grande  partie  de^  Pères  Grecs 
ont  pris  ces  termes  de<pU(T<5  &  d'oiJa('o!.,c'cfc  à  dire  nature  &efién- 
ce,  il  a  pu  direque  les  iymboies  myfliques  confervoient  leur 
propre  natuie  &  leur  première  elîcnce  ,  fans  reftraindre  la  li- 
gnification de  ces  termes. 

Je  n'aybefoin  pour  cela  que  de  pouflèr  plus  loin  JV>:pIicatio» 


po  Liv.  V.  ExpUcitlon  despajfages  deTheodoret 
de  ces  mots,  que  nous  avons  commencée  dans  le  chapitre  pré- 
cèdent,&:  de  faire  remarquer  que  les  Pères  Grecs  n'ont  pas  pris 
feulement  ces  mets  de  (çmls ,  oùaU ,  f^-opt^vi  pour  termes  fynony- 
iTies,,6\:  ne  nous  ont  pas  feulement  avertis  qu'ils  entendoient  par 
ces  termes  un  eftre  déterminé  &:  qualifié  par  ccrtain^ttributs, 
ou  les  qualifications  &  attributs  des  eftres  5  maisqu*'ils  ontdc 
plus  marqué  que  tous  ces  mots  ne  fignifient  que  la  nature  com- 
mune, &:  non  pas  les  natures  .finguliercs,  &:  que  c'ef}  en  cela 
qu'ils  les  ont  dilHnguez  des  mots  à'Hypofi.tfe  &  àzperfonne. 

Or  quoiqu'cn  appliquant  ces  mots  à  la  Trinité  ou  à  l'Incar- 
nation,  &  en  difânt ,  par  exemple  ,  que  le  Pere&  le  Fils  &  le 
S.  Efpritonr  une  mefme  nature ,  ils  ayent  conçu  efFe£tivemenc 
qu'ils  avoient  une  meîme  nature  finguliere  ;  ce  n'eft  pas  néan- 
moins par  la  feule  force  du  mot  d 'ouV/a,  &  de  (^vcis  ,Aox\x.  ils  re- 
marquent exprefTément  qu'ils  ne  fignifient  que  la  naturje  com- 
mune i  c'eft  par  la  nature  mefme  de  la  Divinité  qui  eft  fingu- 
liere par  elle  mefme.  C'eft  pourquoy  ils  n'ont  paslaifTédc  dire 
que  le  mot  à'oujic  ne  fignifie  que  la  nature  commune.  L'oujîe  ou 
Baf.  cp.  369.    l'cjfeyicc  ,  dit  S.  Bafile  ,  eji  diftinyièe  de  l'hypofiafe  ,  comme  ce  qui 
cjl  commun  cft  difiinyiè  de  ce  qui  efi  fingulier.  Ainfi  chacun  de  nous 
a  [on  ejjcncc  commune ,  (^  ilcjl  tel  fi/-  tel ^arfcs  proprietez^particu" 
■lieres. 
CvriLdiai. I.        Le  mot  d'oujte^àxt  S.  Cyrille  d'Alexandrie,  w^r^»f  quelque 
Jcjnnir»        [Jjqj'^  ^^  comynuïi  i  maisceluy  d'hypofiafefedit des Jin^ulicrs  compris 
fous  ce  mot  commun. 

X-'Aureur  écs  définitions ,  dont  le  traité  fe  trouve  parmi  les 

^  œuvres  de  S.  Athanafe,en  parie  dans  le  mefme  ièns.  L' oujïe ,à\x.- 

11  ^legenre .^  la  natur'Ja forme .^  ne  font  qu'une  même  chofei  ^  an 

contraire  les  mots  de  perfonne^  de  cavaHere  ,  d'hypoftafc,  d'individu^ 

n'ont  que  le  même  fcns.  Une  nature  peut  contenir  en  foy plufeurs  hy - 

po[}afes.  Car  tous  tant  que  nous  fommes  d'hommes  qui  avons  une  ame 

^  un  corps ,  nsus  n'avons  qu'une  même  nature  ,  (^  une  même  oujïe  î 

mais  nous  fommes  plufeurs  hypoflafes.  Et  un  .peu  après ,  la  nature 

eft  donc  univerfcUe  ^  l'hypofiafe  particulière. 

Diai.i.ae  Le  Martyr  Maxime  dit  la  mefme  chofe  en  plufieurs  endroits , 

I  ^l'thin^T."     comme  dans  le  dialogue  premier  de  la  Trinité,  où  il  enfeigne , 

14S.&  iji.       Q^\z\' humanité  qui  eft  en  plufeurs fnptlicrs ,  cft  une  ovsiv.  ,^  que 

,chi tque  homme  en  particulier  eft  une  h  Y  p  o  s  T  a  s  E . 

La  nature  de  chaque  choft; .^  dit  Anaftafe  Sinaïte  ^' cft  quelque 
via  dux  c.  i.      chofe  de  commun ,  O"  l'hypoftafie  eft  ce  qui  eft  particulier. 


df  de  trois  Auteurs  qui  ontpa  rlé  comme  luy.        3  r  r  * 

C'eft  aulTi  la  doctrine  de  S.  Jean  de  Damas,  qui  répète  ces  de-  Ch.  I X. 

finitions  enplufieurs  endroits  ,  de  Théodore  Abucara,d'Eu  i.f.dciidc 

thymius  dans  fa  Panoplie,  de  Theorien  dans  le  récit  de  Ton  Abuc'.'opus  i. 

ambaiïadeaux  Arméniens,  où  il  dit  nettement  a^xxQlcmotd'ouJie  Euthym.parr. 

fe  dit  des  chofcs  univerfellcs  é^  coynmunes^^  non  des -particuliers  d-  '  "^  ^  ^^^  °" 

individus ^ÀQ  Manuel  Calecas ,  de  Michel  Pfellus ,  qui  a  inefme  Sar.do.c.U. 
réduit  cette  do  clrine  en  ces  deux  vers,- 

V.'fi  OV(jl<t,  To'   X^ifot  \J^<rcil!iCiS  itS^OS  ^ 

w'iT'Ê  'XjiJ!S9j'cL<TlS    nfÇO  dCù'Tiov  19  fXiVOlf  i. 

C'eft-à-dire,  ton[ïe  eft  l'efpece  commune  de  l'hypodafe. 
Et  l'hypoftafeefl  une  perfonne  feule  &:  ieparce. 
C'eft:  pourquoy  au  lieu  qu'en  prenant  les  mots  de  nature  Sc 
d'ef/encepour  des  natures  individuelles ,  il  faudroit  dire  que  tii- 
*  vers  hommes  iïnguliers  ont  chacun  leur  nature,  ces  Pères  nous 
difent  au  contraire  qu'ils  n'ont  qu'une  nature  &i  une  humanité  : 
Etmefme  ilspafTent  prefque  jufqu'à  dire  que  ce  n'eft  pas  bien 
parler  que  dédire  que  plulleursfinguJiersfoientpIulieurshom- 
mes.  Nous  ne  difons  pas,  dit  S.  Grégoire  de  Nyife, que  Pierre, 
Paul  &:  Barnabe  foient  trois  eiîences  rpusoùrlxi.  Et  en  un  au-    ',  ^  '^'""""«- 

-  m.  notion, 

tre  endroit  il  dit  ,  que  pour  parler  exa'ciement  ,  il  faudrait  dire 
que  divers  hommes  fnyilicrs  ne  font  qu'un  feul  homme. 

Il  n'eftpaspermis,  dit  S.  Cyrille,  de  dire  des  hommes  qui  ont  Diai.dcTrU 
une  mefme  elfence  ^  que  chacun  a  fon  eifence,  celui  ci  une  &  n::. 
cet  autre  la  Tienne. 

Pierre  &  Paul ,  dit  le  Martyr  Maxime ,  font  deux  perfonnes ,  Maxim.  Mar- 
Tnais  ce  ne  font  pas  deux  humanitez.  tvr,  Jiaiog.i. 

Saint  Tean  de  Damas  Si  Théodore  Abucara  difènt  la  mcihie  ?°T'^/''''l 
choie  en  termes  exprès.  c  8. 

On  ne  peut  pas  dire  que  Theodoret  ait  pris  le  mot  à^oufie  &  Abuc.  opus  2. 
de  nature àzvi'?,  un  autre  fens  que  celuy  de  ces  Pères,  puifqu'il 
remarque  expreflement  que  le  mot dJoufïc fïgni fie  quelque  chofe  de 
commun  ,  félon  les  Pères  ,  &  que  c'efl  en  cela  qiiil  e/i  diflinpié 
de  celuy  d'hypofiafc.  Et  pour  en  apporter  un  exemple  ,  il  dit  que 
le  mot  èihomme  marque  la  nature  ou  Vefence^  5Î  que  ceux  de  ^'^'•'•?'^'' 
Pierre  8c  de  Paul  ne  marquent  pas  des  natures  communes  , 
mais  des  hypodafes.  Ainfi  il  efi:  clair  qu'il  prend  le  mot  de  na- 
iure  pour  la  dernière  elpece  ^fpecies  ultima  ^ii^as^  qui  fe  divifc 
enfuite  en  eftres  individuels. 

Cette  fignification  eftant  reconnue  5c  fuppofce,  il  n'eftpas 
difficile  de  juger  après  cela  en  quel  fens  Theodoret  a  àïi^que  la 


311     Liv.  V.  ExpUcdtion  despajpigesde  Théodore f 

jymboles  myftiques  ne  quittent  point  leur  propre  nature  ,  ^  qu^'ils 
retiennent  leur  première  cffence.  Car  qu'eft-ce  que  la  nature  du 
pain  &clu  vin?  Efl:  ce  l'eftre  individuel  de  chaque  pain  &  de 
chaque  vina  Nullement,  C'eft  la  nature  commune^  c'eft-à-dire 
ce  qui  eft  commun  à  tout  pain  &  à  tout  vin  ,  &  que  les  Peres- 
concevoient  5  comme  étant  le  même  dans  tous  les  individus. 
Si  Di.'ci  changeoit  donc  un  pain  individuel  en  un  autre  pain  , 
&  un  vjn  individuel  en  un  autre  vin  individuel,  il  faudroitdire 
félon  le  langage  des  Grecs^qui  a  efté  fuivi  par  plufieurs  Latins, 
&:  particulièrement  par  ceux  qui  ont  écrit  contre  les  Euty- 
chicnSj  que  ce  pain  tranlÏÏibflantié  n'auroit  point  changé  de  , 
lubiLmce  ni  de  nature  ,&  Theodorec  répondroit  fans  doute 
qu'il  ne  feroir  point  fjrtide  fa  propre  nature,  r^;  oUûcts  QiTts^ 
i'^l^fTcLvcii  çvj-icùs ,&c  qu'il  feroit  demeuré  en  fa  première  elfence, 
fj.i,it  'ch'  Tï\i  Tcparip^s  ovaist  i  parce  qu'encore  que  ce  fiit  un  au- 
tre eftre  individuel ,  néanmoins  ce  feroit  la  même  nature  de 
pain ,  félon  la  Philofophie  de  ces  Pères.  Ainfi  voilà  une  vraye 
&  réelle  tranfTubftantiation  ,qui  n'empêche  pas  qu'on  ne  dife 
que  la  nature  &:l'eflence  demeure. 

Or  ce  qu'il  au'roit  dit  certainement  dans  cet  exemple  de  tranC 
fiibn:antiation,il  l'a  pu  dire  de  celle  qui  (e  fait  dans  l'Euchanftie, 
Gomme  il  eft  facile  de  le  faire  voir.  Il  acruqr>e  le  painétojtrcel- 
lement  changé  &  tranlTubftantié  au  corps  de  J.  C.  &  c'eft  ce 
cju'il  exprime  en  difant,  ^«i'/'o«  conçoit  que  les  fymboUs  font  ce 
qu'ils  ont  cfiè faits ^  ^  qu'on  les  adore  comme  telsi  c'eft-  à-  dire  corn- 
me  corps  de  J.  C.  Ceft  ladoclrine  qu'il  tiroit  de  la  foy  com- 
mune del'Eglirejmais  lesfensluy  apprenoienten  même  temps 
que  ces  fymbolesconfervoient  toutes  les  proprietez  du  pain  & 
du  vin  ,&  que  nous  ne  connoiftansricn  dans  le  pain  6c  dans  le 
vin,  qui  ne  nous  paroifte  dans  ces  (ymboles.  lien  conclut  donc 
qu'ils  ne  quittent  point  leur  propre  nature,^  qu'ils  demeurent  dans 
lev.r  première  elîênce.  Mais  qu'eft  ce  que  cette  propre  nature  . 
&  cette  première  cf[e7ice?  Eft- ce  la  nature  individuelle  du  pain 
Si  du  vin  ?  Non.  Theodoret  même  nous  averric  en  général 
que  ce  n'eft  pas  le  fcns  de  ce  mot,  &  il  nous  avertir  en  parti- 
culier que  le  pain  eft  fait  le  corps  de  J.  C.  ce  qui  emporte  le 
ehangement  de  la  nature  individuelle.  C'eft  donc  la  nature 
fpccitique  &  commune.  Tout  ce  que  l'on  peut  donc  conclure 
dècepaifage  ,  c'eft  que  félon  Theodoret  les  fymbolcs  ne  chan- 
genr  point  leur  nature  commune  jC'eit  à  dire  qu'ils  ont  encore 


à 


^  de  trois  Auteurs  qui  ont  parlé  comme  luy.       315 
îa  nature  de  pain  ôc  de  vin  i  mais  non  pas  qu'ils  ayenc  encore  la  Ch.  I X. 
même  nature  individuelle  de  pain  ôc  de  vin  6c  la  mêmematiere 
qu'ils  avoient  auparavant. 

La  feule  difficulté  qui  pourra  refler ,  c'efl:  de  quelle  forte  l'on 
peut  dire  que  le  corps  de  J.  C.  dans  l'Euchariftie  a  la  nature 
ipecifique  &;  commune  de  pain.  Mais  cette  difficulté  eft  encore 
aifée  à  refoudre.  Car  pourquoy  ne  feroit  il  pas  permis  aux 
hommes  de  dire  d'un  eftre  qui  a  toutes  les  proprietez  du  pain  , 
^u'il  a  l'elTènce  commune  du  pain ,  puifque  nous  ne  connoif- 
ions  cette  effènce  commune  que  par  fes  proprietez,  6c  que  ce 
font  ces  proprietez  que  nous  appelions  fon  elTence  ? 

Il  ne  fera  pas  même  befoin  dans  ce  fens  de  reftraindre  ce 
terme  à'effince  ou  de  nature  aux  feules  proprietez  accidentelles. 
Car  quoique  le  corps  deJ.  C.  contenu  fous  le  voile  du  Sacre- 
ment ,  ne  foie  pas  la  même  matière  individuelle  que  celle  du 
pain  ,  il  eft  pourtant  matière ,  6c  matière  de  même  efpece  que 
celle  du  pain  ,  puifque  J.  C.  eft  confubftantiel  aux  hommes  6c 
aux  autres  eftres  matériels.  En  ioig-nant  donc  cette  matière 
avec  les  autres  qualitez  du  pain  6c  du  vin  qui  paroilTent  dans 
cet  objet,  on  y  trouve  tout  ce  que  les  hommes  enferment  ordi- 
nairement fous  ridée  qu'ils  ont  delà  nature  du  pain  6c  du  vin  , 
6c  ce  n'eft  point  parler  métaphoriquement  que  de  dire  qu'il  en 
a  l'eiTence. 

Il  fuffit  donc  queTheodoret  ait  con<^û  l'Euchariftie  comme 
tous  les  Catholiques  la  conçoivent,  pour  avoir  parlé  comme  il 
a  fait.  Car  il  s'enluit  de  l'opinion  commune  qu'après  la  confe- 
cration  il  refte  un  objet  lur  l'autel  qui  eft  un  corps ,  puifque 
c'eft  le  corps  de  J.  C.  6c  que  l'on  apperçoit  dans  cet  objet  tous 
les  acwidens  6c  toutes  les  proprierez  du  pain  :Et  cela  n'eft  que 
trop  fuffifant  pour  donner  lieu  à  un  Auteur  qui  n'eft  pas  en  gar- 
de contre  les  chicanneriesd'un  Miniflre,  de  dire  que  cet  objet 
eft  du  pain,  qu'il  a  l'eftence  du  pain  ,  6c  qu'il  la  conferve. 

AinlîcepalTage  de  Theodoret  n'a  pas  efteclivement  plus  de 
difficulté  que  celui  d'Hefychius,  qui  dit  de  ce  myftere,  qu'il  efi 
en  même  temps  pain  (j;-  chair ^  mysterium  quod  Jîmul panis  ^  ca- 
ro.  Et  comme  l'on  entend  fort  bien  quHefychius  ne  veut  pas 
dire  que  l'Euchariftie  foit  le  même  pain  individuel  qu'elle  étoic 
auparavant,  mais  feulement  qu'elle  a  les  proprietez  du  pain,  on 
doit  entendreTheodoret  au  même  fens ,  6c  croire  qu'il  n'en  a 
pas  moins  reconnu  en  même  temps  un  changement  delà  na- 


:? 1 4     L I V .  V.  Explication  despa,Jpiges  de  Theodoret 
tare  individuelle  des  fymboles  en  celle  du  corps  de  J.  C.  Aiiffi' 
dit- il  formellement  enfuite  ,  que  l'on  conçoit,    bi  que  l'on 
croit  que  les  lymboles  font  le  corps  de  J.  C. 

Si  l'on  confidere  mefme  le  but  où  Theodoret  tend  par  cette 
comparaifon ,  on  verra  que  ce  fêns  y  (atisfait  entièrement.  Car 
les  Eutychiensne  difoientpas  precifcment  que  J.  C.eût  perdu 
l'eftre  individuel  de  fa  nature.  Ce  n'étoit  pas  là  la  queftion.  Us 
difoient ,  li  l'on  en  croit  Theodoret ,  qu'il  avoit  perdu  les  pro- 
prietez  fpecifiques  &  communes  à  tous  les  hommes,  comme  la 
figure,  la  formej  la  vifibilité  ,  la  palpabilité^  l'étendue  bornée. 
Et  c'eflpourquoy  Theodoret  leur  fait  dire  qu'il  n'a  plusl'efpe- 
ce  humaine  cht  i-)({  '^  cLf^fcùTti-iOi  yîvos  Et  ainfi  il  conclur 
fort  bien  de  ce  que  les  fymboles  confervenc  les  proprietez 
communes  du  pain  &:  du  vin  ,  qu'il  appelle'K///«r^  &  effence^que 
J.  C.  conferve  auffi  les  propricrez  communes  de  la  nature  hu- 
maine &;d'un  corps  humain, qu'il  appelle  l'elTence  d'un  corps. 

Il  eft  vray  qu'il  n'auroitpas  prouvé  parla  la  confervation 
de  l'eftrc  individuel  de  l'humanité  de  j.  C.  mais  ce  n'étoit  pas 
auffi  dequoy  il  étoit  queftion.  Et  comme  ce  n'étoit  pas  pro- 
prement ce  que  les  Eutychiens  nioient  ,  ce  n'éft  pas  auffi  ce- 
qu'il  prouve  dans  ce  lieu  là,  quoique  l'efpric  ne  laifle  pas   de- 
l'y  ajouter.;  comme  nous  rexpliquerons  dans  le  chapitre  fui- 


vant. 


CHAPITRE    X: 

Qu'âpres  ces  èclairci(}\~ryi(ns  il  ne  rejîe  plr/s  de  'difficulté  dans  l'es 

pajfazes  de  trois  auteurs  qui  ont  farlè  de  l' EuchariJîiS' 

comme  Theodoret. 

Ou&avons  déjà  averti  que  la  folution  que  nous  donne- 
rions aux  paiïages  de  Theodoret  feroit  commune  à  ceux 
des  trois  Auteurs  qui  ont  parlé  comme  luy.  Et  l'on  va  voir  en 
effet  que  bien  loinde  contenir  quelque  difficulté  particulière  , 
ils  éclaircifîent  2c  confirment  ce  qui  a  été  dit  touchant  celui 
de  Theodoret. 

Le  premier  eft  tiré  d'une  lettre  que  l'on  prétend  queS.Chry- 
fcftoraea  écrite  à  unMoine  nomméCefariuSjdans  laquelle  pour 

réfuter 


.^  de  trois  Auteurs  qui  ont  pa  rU  comme  îuy.  3 15 
réfuter  l'herefie  d'Apollinaire  qui  écoic  la  même  que  celle  des  Q  h.  X. 
Eurychiensj  il  parle  de  cette  forte  :  J.  C.  eft  Dieu  é-  homme ^  Dieu 
comme  impalJi'oLe,^  ^  homme  comme  ayant  fou jf en.  Ce  n'efi  pourtant 
qu'un  fcul  Fils  é"  ««  /^'*/  Seigneur  :  JJn  (^  le  même  fans  doute ,  qui 
far  l'union  de  fci  notâtes  n'a  qu'une  feule  domination  (^  une  feule 
puijfancc'j  quoy  qu'elles  ne  foicnt puf  confubfianticllai  car  chacune 
d'elles  conferve  fans  mélange  les  caraclcres  qui  la  font  connoi/ire. 
Ce  font  deux  natures  unies  fans  confufîon.  Car  domine  avant  que 
le  pain  fait  confacré ,  ilfe  nomme  pain't  mais  quand  la  grâce  divine 
fa  fanciifié  par  le  minijhrc  du  Preftre  ,  //  efl  libère  du  no7n  de 
pain  ,  éî"  il  devient  digne  d'eflre  appelle  le  corps  du  Seigneur  ,  bien 
^ue  la  nature  du  pain  demeure  en  Iuy  5  ^  que  l'on  ne  dit  pof  qu'il 
y  ait  deux  corps ,  mais  un  feul  corps  du  Fils  de  Dieu  j  de  même  la. 
nature  divine  étant  jointe  au  corps  ,  tous  deux  ne  font  qu'un  feul 
Fils  ^  une  feule  pcrfonnê. 

Comme  c'étoit  l'ordinaire  des  Auteurs  qui  écrivoient  en 
ces  temps- là  fur  lamême^marierejde  fefervir  des  mêmes  com- 
paraifons ,  fans  fe  foucier  qu'elles  fufTent  fi  juftes,  ainfi  qu'on 
Ta  pu  voir  par  celle  d'un  Roy  &  de  fon  image,  qui  ne  font  pas  "  - 
deux  Rois,  qui  a  été  employée  parplufieurs  Pères  pour  mar- 
quer l'unité  de  la  nature  divine  dans  le  Père  &  dans  le  Fils,  on 
trouve  aulîîqu'à  l'imitation  de  S.  Chryfoftome  &  de  Theodo- 
ret,  deux  autres  Auteurs  fe  font  fervis  de  l'exemple  de  l'Eucha- 
jriftie  pour  éclaircir  de  quelle  forte  la  nature  humaine  demeure 
dans  j.  C.  fans  eftre  abforbée  par  la  divine. 

Le  premier  de  ces  Auteurs  eft  le  Pape  Gelafe  dont  les  Mi- 
niftresdeBafleont  fait  imprimer  un  traité,  ou  plutoft  un  frag- 
ment contre  les  herefies  de  Neftorius  &  d'Eutichez  qui  eft 
tres-defedlueux  &  très- plein  de  fautes,  comme  Aubertin  mê- 
me eft  obligé  de  le  reconnoiftre.  C'eft  de  ce  traitté  qu'on  al- 
lègue un  paflage,  où  cet  Auteur  employé  en  cette  manière  l'e- 
xemple l'Euchariftie.  Certes  les  Sacumcns  du  corps  (j;-du  fangde 
J.  C.  que  nottS'  recevons  font  une  chofe  divine ,  ^  ils  nous  rendent^ 
farticipans  de  la  nature  divine ,  i^  néanmoins  la  fubflance  S-  là 
nature  du  pain  &  du  vin  ne  ccffe  point  d'cftre.  Or,  on  célèbre  dans 
l'aïlion  des  myflercs  l'image  ^  la  reffemblancc  du  corps  (^  du  finz 
de  J.  C.  Et  cela  nous  fait  voir  avec  affez^d' évidence  que  ce  que  nous 
croyons ,  célébrons  &  prenons  dans  l'image  de  J.  C.  nous  le  devons 
croire  en  J.  C.  mhne.  Et  que  comme  par  l'opération  du  S.  Efprit  ces 
chofe  s  pajfcnt  en  cette  fubjîance  divine ,  quoy  que  leur  naturs  con~ 

Rr 


3 lé     Liv.  V.  Explication  des  pajfages  de  Theodoret 

Icrve  fes  proprietez^^  elles  nous  marcjuent  au.ffi  que  ce  myftere  princi- 
pal ^  c'eft-à-dire  l'Incarnation^  dont  elles  nous  nnient  pre fente  s 
l'efficace  ^  la  vertu  ,  conjljle  en  ce  que  les  deux  natures  demeu- 
rant proprement ,  il  ri  y  a  quun  Chnjl  qui  ejl  un  parce  qu'il  ejl  en- 
tier d^  véritable . 

Ephrem  Patriarche  d'Antioche  eft  le  dernier  de  ceux  qui  fè 
font  lèrvis  de  cette  comparaifon  -,  &;  il  le  fait  de  cette  forte.  Le 
Fils  du  Toyincrre  en  nous  difant  qu'il  a  annonce'  CE  qn'iL  a 
vu,  dr-  ce  que  fes  mains  ont  touche  du  Verbe  de  vie^  nous  enfeigne 
que  la  même  perfonne  aune  nature  palpable  (y- une  i7npalpable.  Car 
en  difant  qu'il  a  touché  le  Verbe ,  il  ynarquc  que  ce  qui  efl  impal- 
pable a  ejté  touche  3  en  difant  qu'il  l'a  vu,  il  en  feigne  que  ce  qui 
efl  invijïble  a  cfté  vu.  Ain f  il  reconnoift  un  même  J.  C.  dans  une 
double  nature  :  l'une  impalpable.^  l'autre  palpable,  l'uneviflble^  l'au- 
tre invijîble.  C^:r  l'une  (^  l'autre  nature  appartiennent  a.  lamente 
perfonne.  Et  ce  flcroit  avoir  perdu  l'efprit  que  de  dire  que  ce  qui  eft 
■impalpable  (^  invifîble  efl  de  la  même  nature  que  ce  qui  efl  ^  pal- 
pable d/"  viflble.  C'cfl  ainjî que  le  corps  de  J.  C.  qui  efl  reçu  par  les 
baptifez^,  ne  fe  départ  point  de  l'cffence  fenfible ,  ^  n'efl  point  feparé 
de  la  grâce  intelligible.  Et  de  même  quoy  que  le  Baptême  devienne' 
tvut  (pirituel  (^  qu'il  foit  le  même  ,  il  conferve  néanmoins  les  pro- 
priete-z^  de  l'ejfence  fenfible.^  c'cfl -à- dire  de  l'ean^  (^  ne  perd  pof  pour 
cela  ce  qu'il  a  eflè  fait- 

Pour  ne  trouver  plus  de  difficulté  dans  ces  paflâges,  il  ne  faut" 
que  fe  fouvenir  de  l'idée  que  les  Pères  nous  donnent  de  l'he- 
refîe  des  Eutychiens,  &  qu'ils  tiraient  de  leur  dogme  capital,, 
qu'il  n'y  avoit  qu'une  nature  en  J.  C.  c'eil  que  la  nature  humai- 
ne de  J.  C.  avoit  perdu  toutes  les  proprietez  ,  qu'elle  n'étoir 
plus  ny  vifible,  ny  palpable,  ny  circonfcrite  5  qu'elle  ne  confer- 
voit  plus  fon  efpece  tq'  ct!ï^pca7r;i'ov^'eVo/j&:  qu'elle  avoit  été  chani 
gée  en  la  nature  divine.  Ainfi  ce  que  lesPeres  tâchoient  par- 
ticulièrement d'établir,  étoit  que  J.  C.  n'avoit  rien  perdu  de- 
tout  cela,  qu'il  étoit  encore  palpable  &  vidble,  &  qu'il  avoic 
toutes  les  autres qualitez  d'un  corps  humain. 

Ces  trois  Auteurs  ayant  donc  ce  même  defîèin ,  allèguent" 
tous  trois,  à  l'imitation  l'un  de  l'autre,  l'exemple  de  l'Eucha- 
riftie  ,  dans  laquelle  les  fymboles  ne  ceflent  point  d'eftre  pal- 
pables,  vifibles  &  figurez  comme  auparavant,  &  retiennent 
routes  les  autres  qualitez  de  pain  &  de  vin,  pour  en  conclure 
que  le  corps  dej,  C.  retenoic.  auilî  ces  mêmes  qualitez.  Er 


''■^  de  trois  Auteurs  qui  ont  parle  comme  luy.         317 
c'efl:  cette  même  penfée  qu'ils  expriment  cous  trois,  quand  ils  qh.  X. 
difent  que  la  nature  du  pain  &;  du  vin  ne  ccfîc  pas,  &  de- 
meure,puifque  cet  amas  de  qualitez  qui  demeure  dans  l'Eucha- 
jiftie  s'appelle  nature  dans  le  langage  des  Anciens. 

En  un  mot,  leurargumentfereduifoit  à  cet  Entymene-.  Les 
fymboles  ne  deviennent  point  invifibles,  impalpables,  fans  fi- 
gure, fans  circonfcription.  Donc  le  corps  de  J.  C.  n'eft  point 
devenu  invifible,  fans  figure,  fans  circonfcription,  &:  fans  les 
autres  qualitez  d'un  corps  humain. 

On  peut  encore  appliquer  à  ces  mêmes  pafîliges  la  féconde 
folution.  Car  il  ne  faut  pas  s'imaginer,  que  quand  ces  Pères  di- 
fent que  la  nature  ou  la  fubfiance  du  pain  &:  du  vm  demeure, 
ils  entendent  la  nature  individuelle  du  pain  Se  du  vin.  Ils  en- 
tendoient  tous  par  le  mot  de  nature  ce  qui  eft  commun ,  &  non 
ce  qui  efl  particulier,  c'efi  à-dire  l'efpeceôè  la  nature  commune, 
&  non  la  nature  finguliere. 

Ephrem  d'Antioche  en  fait  une  remarque  exprefle  dans  ce 
traitté  même  dont  Photius  a  confervé  l'abrégé.  Après  cela,  dit 
Photius,  il  traitte  de  la  différence  qu  il  faut  mettre  entre  les  mots 
d'ejfence  oCcia.  ^de  genre  yéos  ,  d'cfpcce  ît^oç  ,  drcclu^  d'hypoflafe-^ 
(^  il  la  fait  confifier  en  ce  cjtie  ces  premiers  mots  fignificnt  ce  qui 
eft  commun  ,  au  lieu  que  celuy  cy  marque  l'eflre  fuhfîftant ,  ^  ce 
que  les  Auteurs  -profanes  appellent  les  (in'zuliers,pi.i-xâ.  x-Lùra.  /'/  t^ 
TX  û/^Tofct.i  wy  n'  orIcl'i.Xj  Ta  yîfai  19  t6  ilPos  nrpès  liu^  'Ôstb  ^'clcc  iy\  , 
ù^\cL/ixQù:i  j  aTiTûi  ixiy  Tû  xoi;i'/  cTiiAoi  ,  Ta,  J^e  To  ■a^[c7ai'7toy  xj  0'  Ae - 

-yiTCLt  TO/Ï    i|<i),    JCa^iX.ctç'fi». 

Et  il  ne  faut  pas  s'imaginer  que  ce  langage  foit  particulier 
aux  Grecs.  Les  Latins  qui  ont  été  du  temps  des  Eutvchiens 
ont  parié  comme  eux.  J'ayfait  voir,  dit  le  Diacre  Ruflique 
dans  fa  difpute  contre  les  Acéphales,  que  le  mot  de  nature  fl- 
gnifie  l'ejpece  commune.  Et  ]ean  Maxence  dans  fon  Dialogue. 
Ze  mot  de  nature ^  dit- il  ,  eft  diftinpié  de  celuy  de  perfonne ,  parce 
^ue  celuy  de  perfonne  marque  une  chofe  individuelle^  au  lieu  que  ce- 
luy de  nature  marque  l'efpccc  commune  qui  comprend plujîeurs  ftngu- 
liers. 

Ainfi  quand  Ephrem  d'Antioche  nous  dit,  que  le  corps  de 
J.  C.  ne  quitte  point  la  nature  fenftble:  Quand  S.  Chyfoftome 
dit,  que  la  nature  du  pain  demeure  après  la  confecration:  Quand 
Gelafe  dit  ,  que  l'efence  ou  la  nature  du  pain  (^  de  vin  ne  cejfe 
pas  d'eftrei  ils  n'entendent  point  que  ce  fujet,  c'eft-à-dire  les 

Rr  ij 


5.i8  Liv.  V.  Explication  des  pajpigc s  de  Theodont 
fymboles  confacrez,  confervent  la  nature  individuelle  &  l'être 
iîngulier  de  pain  &;  de  vin.  Ce  n'eft  point  là  le  fens  de  ces  ter- 
mes ,  ny  ce  que  ces  Auteurs  avoient  dans  refprit  Mais  ils  veu- 
lent dire  qu'ils  confervent  la  nature  fpecifique  de  pain  &:  de  vin. 
Ec  ils  auroient  fans  doute  uiëdes  mêmes  exprclfions,  comme 
nous  l'avons  déjà  dit ,  quand  il  auroic  cftë  qucftion  d'un  paia 
tranflabftaïuié  en  un  autre  pain;  car  le  mot  aùaU  cjfcnce  figni. 
£ant  la  nature  commune,  ils  auroient  été  obligez  de  dire  que 
ce  changement  n'empcchoic  pas  que  la  nature  du  pain  ne  de- 
meuraft,  ^cnefaifoitpas  qu'elle  ceflall  d'être. 

Ainfi,  comme  nous  L'avons  déjà  remarqué,  la  difficulté 
n'efl:  pas  d'accorder  ces  paflages  avec  la  tranfllibftantiation.j 
car  il  n'y  a  nulle  contrariété.  Elle  conlille  uniquement  à  Tçavoir 
de  quelle  manière  on  peut  dirjc  que  le  pain  &:  le  vin  confacrez 
confervent  la  nature  fpecifique  de  pain  &:  de  vin. 

Mais  tous  ceux  qui  jugent  équitablement  des  chofes,  s'env 
barrafferont  peu  de  cette  difficulté.  Car  cette  nature  commune 
n'eft  autre  chofe  que  l'idée  commune  que  nous  avons  de  ce  qui 
fê  trouve  dans  toutes  les  natures  fïngulieres..  Et  cette  idée  fè 
forme  fur  l'amas  des  attributs  que  nous  remarquonslesmêmeS' 
dans  chaque  efpece.  Or^deflors  que  le  corpsôc  lefangdej.  C.. 
ont  pris  la  place  du  pain  &  du  vin,  &  qu'ils  font  revêtus  de  leurs 
accidens ,  nous  y  appercevons  tout  ce  que  nous  remarquons 
dans  le  pain  &:  dans  le  vin.  Nous  les  comprenons  donc  par  la 
mêmeidé£,.&  nous  leur  attribuons  par  confequent.  la  mcnve- 
Qature  generiq-ue; 

Des  Metaphyficiens  rigoureux  y  pourroient  encore  trouver 
de  la  différence  ;  mais  ceux  qui  penfent  6c  qui  parlent  naturel- 
lement n'y.  en  trouvent  point,  Qiiand  ils  voyent  quedescorps^ 
ont  toutes  les qualitez  du  pain  6cdu  vin,  ilsdifentqu'ils  ontla 
nature  de  pain  &  devin.  Et  comme  par  le  moyen  de'certe  idée 
confufedont  nous  avons  parlé,  ils  confiderent  lesiymboles  non 
confacrez  Se  confacrez  comme  le  même  fuiet,&  qu'ils  y  voient 
u:)ûjour^  ces  mêmes  proprietez  de  pain  &  de  vin  avant  &  après 
la  confecration,  ils  doivent  dire  qu'ils  en  ont  confcrvê  la  natuie-t 
^quils  ne  l'ont  pas  quittée. 

C'eft  ainfique  ces  Pères  ontparlé.,  &  qu'ils  ont  dû  parler  en 
fuivant  fimplement  le  fens  commun.  Mais  il  ne  faut  pas  conclu- 
re de  ce  qu'ils  ont  reconnu  que  cette  nature  commune  dcmcuEC 
&  n'eft  point  changée,  que. la.nature  individuelle  du  pain^cdu 


^  de  trois  Auteurs  qui  ont  parlé  comme  luy.       ^  9. 
vin  ne  le  foie  point  3  au  contraire,  ils  ont  déclaré  formellement  Ch.X. 
qu'elle  l'étoir. 

C'eftce  que  Gela/e  exprime  quand  ildir,  qnele  pam(^  le  vin 
■paffent  en  cette  divine  fubfiance,  c'efl:  à  dire  au  corps  de  J.C.  reni^ 
pli  de  la  divinité  j  &:  ce  que  S.  Chryioftomc  marque  par  ces  pa- 
roles :  l'on  ne  dit  pas  qu'il  y  ait  deu<  corps  du  Fils  d,c  Dieu  ,  m.tis- 
«« /î-a/j.c'ellàdire  que  le  pain  confacré  &,  le  corps  naturel  de 
J.  C.  ne  font  qu'un  même  &  unique  corps.  Ce  qui  ne  peut  être 
que  parce  que  le  pain  eft  change  au  corps  de  j.  C.  comme  S. 
Chryfofbome  en  feigne  en  tant  d'autres  lieux  &  par  tant  de  diffé- 
rentes expreffions. 

Quand  ils  n'auroienr  pas  marqué  ce  changement  dans  ct% 
palîages  mêmes,  on  auroit  droit  de  leur  attribuer  les  expref^ 
'  fions  6c  les  penfées  de  tous  les  Auteurs  de  leurs  ficelés  pour 
déterminer  leur  fens:  Mais  l'ayant  marqué,  de  quel  droit  les 
peut-  on  feparer  des  aïKres  Pères  pour  une  expreirion  qu'on 
accorde  'ïx  Facilement  avec  le  fenciment  commun  de  l'Eglife  ? 

M.  Claude  prétendra  peuteftre  détruire  le  fens  que  nous 
avons  donné  à  ces  palTàges  par  une  objeclion  qui  a  quelque 
chofe  de  fpecieux.  C'eft  qu'Ephrem  d'Antioche  dit,  que  le  corps 
dej.  C.  ceûàdire  le  Sacrement  de  l'Euchariftie,  ne  quitte  poinC' 
fafubftance  fenfible,  comme  il  dit  enfuite  que  l'eau  du  Bap- 
tême ne  la  quitte  point:  Se  que  de  mêmetous  ces  crois  Auteurs 
difent  que  la  nature  du  pain  demeure  d^ns  l'Euchariftie,  com- 
me ilsdifentque  la  nature  humaine  de  J.C.  demeure  dans  J.  C. 
Cr^quandon  dit  que  le  Baptême  ne  quitte  point  fa Tubftance 
cu.fon  elfence-  fenfible,  on  veut  dire  qu'il  ne  perd  ni  fa  nature 
ou  Ion  ellènce  commune,  ni  fa  nature  individuellcj  5c  de  même 
quand  on  dirquela  nature  humaine  demeure  dans  J.  C.  on 
veut  dire  que  tant  la  nature  commune  que  fi  nature  indivi- 
duelle y  demeurent.  Et  par  confequent,  dira- t-il,  quand  ces  mô- 
mes Pères  difent  quel'elîence  du  pain  &  du  vin"demeure  Se  ne 
ceire  point,  ils  n'entendent  pasceîa  feulemenrde  la  nature  com- 
mune, mais  auifi  de  la  nature  individuelle. 

C'eft  tout  ce  qu'on  peut  dire  de  plus  apparent  en  faveur  du 
ientiment  des  Miniftres  ;  &  néanmoins  il  n'y  a  rien  de  iolide  en 
effet  dans  cet  a^rgument.  Car  pour  y  fatisfaire  précifément,.il 
n'y  a  qu'à  répondre,  que  foirjque  ces  Auteurs  difcntde  l'Eucha- 
riftie  qu'elle  ne  quitte  point  (on  eflence  &:  fa  nature  fenfible,., 
fcit  c^u'ils  le  dilènt  du  Bapcêmej  foit  qu'ils  ledilent  de  J.  C.  ils- 

R  r  iij 


3'i  o  L I V.  V.  Explication  des  pajfages  de  Theodoret 
encendenc  toujours  les  mots  de  çuV;;  ôi  d'ouVia  dont  ils  fe  fervent, 
de  la  nature  commune^  parce  que  ces  termes,  comme  tous  les 
principaux  d'entre  les  Pères  Grecs  nous  en  avertiiïent,  nefi- 
gnificnt  d'eux  mûmes  que  la  nature  commune.  Ainiià  ne  ju- 
ger du  fensd'Ephrem  d'Antiochequepar  laleule  force  de  l'ex- 
pre(îîon,^il  ne  dit  autre  cliofe  du  Baptême,  finon  qu'il  ne  quitte 
point  la  nature  commune  de  l'eau  ,  &  il  ne  dit  point  précifé- 
ment  qu'il  ne  perde  point  la  nature  individuelle. 

Mais  parce  que  nous  n^avons  aucun  lieu  de  croire  que  l'eau 
du  Baptême  perde  fi  nature  individuelle  au  cas  qu'elle  ne  per- 
de point  la  nature  commune,  la  même  cxprelTion  qui  nous  fait 
concevoir  qu'elle  ne  perd  j:\oint  fa  nature  commune,  nousaifu- 
re  auffi  qu'elle  ne  perd  point  fa  nature  individuelle^  mais  ce 
n'cft  pas  par  la  force  même  de  l'cxpreflion  ;  c^eft  pafce  qu'il  n'y 
a  aucune  raifon  de  feparer  dan>  l'eau  du  Baptême  la  nature 
commune  de  la  nature  individuelle.  Car  il  eft  certain,  comme 
nous  avons  dit  ailleurs,  que  toutes  les  idées  qu'excitent  les  ter- 
mes dans  Fefprit,  ne  font  pas  pour  cela  contenues  précifémenc 
dans  ces  termes.  Il  y  en  a  quantité  au  contraire  que  l'efprit 
ajoute  ou  forme  de  luy  même  par  la  liaifon  neceifaire  qu'elles 
ont  avec  ce  que  l'on  exprime  formellem-ent.  Mais  auffi  comme 
ces  idées  ne  naiffent  pas  de  la  force  des  paroles  mêmes,  l'efprit 
ne  les  (upplée  point,  lors  qu'il  ne  voit  plus  cette  liaifon  qui  le 
■portoit  plus  avant  que  l'exprellion. 

Les  Pères  nous  en  fournlifent  un  exemple  remarquable  furie 
fuiet'dece  même  terme  d'ûuo'/«.&:de?[/<ri.f,  Car  il  leur  eft  a(îèz  or- 
dinaire de  prouver  que  le  Fils  de  Dieu  a  la  même  cfTence  &; 
ia  même  nature  que  fon  Père,  parce  que  parmy  les  hommes  les 
enfans  ont  la  même  elfence  &.  la;  même  nature  que  leur  père. 
Or,  il  eft  certain  que  parmy  les  hommes  quand  on  dit  qu'un 
fils  a  la  même  eftence  &  la  même  nature  que  fon  père,  on  en- 
tend feulement  qu'il  a  la  même  nature  &  ia  même  eftence  com- 
mune, &  non  pas  qu'il  a  la  même  nature  individuelle.  Et  par 
confequent  quand  on  en  conclut  que  le  Fils  de  Dieu  a  la  même 
effence  &  ia  même  nature  que  fon  Père,  ces  paroles  ne  figni- 
fient  par  elles  mêmesj  finon  qu'il  a  la  même  nature  commune. 
Mais  parce  qu'on  ne  fçauroit  diftinguer  en  Dieu  une  nature 
commune  &  une  nature  individuelle;  &  qu'il  eft  de  la  nature  de 
Dieu  d'être  parfaitement  une  3  l'efprit  porte  neceftairement  ce 
terme  plus  loin  à  l'égard  de  Dieu  qu'à  l'égard  de  l'homme,  6c 


Ç^  de  trois  Auteurs  qui  ont  pa.rU  comme  luy.        311 
il  ne  conçoit  pas  fcilemenc  une  unité  fpecifiqne  entre  le  Père  Ch.  X. 
&  le  Fils,  mais  auffi  une  unité  parfaite  &  individuelle. 

Il  en  e(l  de  même  dans  la  matière  dont  il  s'agit:  lors  qu'E- 
phrem  d'Ancioche  dit  également:  &  de  l'Euchariftie  &  du  Bap- 
tême, qiiils  ne  ^w  tient  point  leur  ejfence  fcnjîble,  cela  fignine  feu- 
lement par  la  force  des  termes  qu'ils  ne  perdent  pas  leur  efTen-  " 
ce  &  leur  nature  commune.  Et  cela  ne  fignific  nv  à  l'égard  de 
l'Euchariftieny  à  l'égard  du  Baptême  qu'ils  ne  perdent  pas  leur 
nature  individuelle. 

S'il  n'y  avoit  donc  rien  qui  feparafl:  l'Euchariftie  du  B;iptcme 
dans  l'efprit  des  Chrétiens,  on  ne  joindroit  à  cett^ exprciîion 
commune  aucune  idée  qui  les  dilHnguaft. 

Par  exemple,  s'il  étoit  dit  de  l'eau  du  Baptême,  commeil  eft 
dit  du  vin  de  l'EuchariCtie, qu'elle  eft  changée  au  fang  de  J.  C, 
qu'il  le  faut  croire  :  que  c'eft  véritablement  le  fang  de  J.C.  qu'il 
ne  s'en  fautpas  rapporter  au  fens:  que  quoy  qu'elle  paroilTe  de 
l'eau,  c'ell  néanmoins  dans  la  vérité  le  farig  de  J.  C.  Si  qu'on 
ajoûtaft  enfuite  ce  que  dit  S.  Ephrem  ,  que  cette  eau  ne  quitte 
pas  néanmoins  fon  effence  fenfible,  alors  ces  termes  demeure- 
roient  dans  leur  fignificadonprécife'à  l'égard  du  Baptême  auffi- 
bien  que  de  l'Eucharifcie,  &  l'efprit  ne  concevroit  autre  chofe 
fînon  que  ces  fymbolesreriendroient  la  nture  commune  d'eau- 
&  de  vin,  quoy  que  leur  erre  individuel  fufl:  changé  au  (ani^  de 

J-C-  .  .      .  .■ 

Et  au  contraire  fi  jamais  perfonne  n'avoitdicde  ITAichariftie, 

non  plus  que  du  Baptême,  que  le  pain  &  le  vin  y  fulîént'chan. 
gez  au  corps  &  au  fang  de  J.  C.  lorfqu'on  entendroit  dire  de 
l'un&:  de  l'autre  qu'ils  retiennent  leur  nature  fenfible,  on  en- 
tendroit par  la  force  de  ces  termes  qu'ils  retiennent  la  nature 
commune  d'eau,  de  pain  5c  de  vin, &  on  ajoûteroit  auffi  bien  à 
l'égard  de  l'Euchariftiequ'à  l'égard  du  Baptême  qu'ils  retien- 
nent auffi  leur  nature  individuelle,  parce  qu'il  n'v  aurcit  point 
de  raifon  de  ne  le  pas  ajouterj  6cde  leparer  des  idées  que  l'eC 
prit  a  coutume  de  joindre. 

Mais  l'efprit  de  tous  le";  fiJelles  étSL^x  prévenu  par  les  ex- 
preiTions  communes  de  l'Eglile,  de  la  différence  qu'il  y  a  entre 
i'Euchariftie  &  le  Baptême,  &  avant  reçu  cette  impreffion  que 
Je  pain  &  le  vin  font  Ghange7  ^m  corps  de  I.  C.  &  fort  le  corps 
de  J.  C.  après  ce  chançremcnr  :  &que  l'eau  au  contraire  n'elï 
nullement  changée  au  fang  de  J.  C.  c^uand  il  entend  dire  en- 


■312-  Liv.  V.  EspUciition  des  pnjfagt^s  de  Theodoret 
iuire  que  tant  l'EucharifHe  que  le  Baptême  retiennent  leur  eC 
fence  fènfible,  il  entend  bien  cette  expreffion  de  la  même  forte 
à  l'égard  de  l'un  &  de  l'autre  Sacrement,  &  il  conçoit  que  l'on 
veut  dire  qu'ils  conlervent  toujours  la  nature  6c  les  propriétés 
communes  de  leur  nature. Mais  comme  il  croit  d'ailleurs  à  i-ë- 
.gard  de  l'Euchariftie  que  le  pain  &  le  vin  y  font  changez  au 
.corps  de  J.  C.  il  allie  enlemble  ces  veritez  ^  &  ainli  il  conçoit 
un  chano-ement  réel  de  i'eftre  individuel  du  pain  &  du  vin 
qui  n'emmpechepas  neanmoms  que  ce  pain  &;ce  vin  changée 
ne  retiennent  la  nature  commune  j  c'eîl  à  dire  qu'ils  n'ayenc 
routes  les  qualitez  de  pain  bc  de  vin. 

Au  contraire,  rien  ne  l'obligeant  d'admettre  aucun  chan- 
gement à  l'égard  du  Baptême,  il  conçoit  absolument  qu'il  ne 
quitte  ny  fx  nature  commune  ny  fa  nature  individuelle,  c'eft 
à  dire  qu'il  le  conçoit  tel  qu'il  eftoit  auparavant  6c  fanschan- 
gement  réel. 

Cen'eft  pas  que  TEfprit  fe  ferve  de  ces  mots  de  nature  ccmi- 
■xnunc  6c  de  nature  individuelle,  ny  qu'il  appelle  à  /on  fecours 
les  idées  d'accidens  6c  de  fubftance.-Ce  ne  font  que  des  termes 
qu'on  a  trouvez  pour  développer  davantage  .autant  qu'on  a  pti 
ce  qu'ils  font  concevoir  dans  ce  myftere  ,  &  ce  que  l'efprit  en 
conçoit  de  lu.y.même,  bc  fans  toute  cette  Philofophie. 

On  a  toujours  crû  &;  conçu  la  même  chofede  l'Euchariftie 
dans  tous  les  temps  de  l'Eglife.  On  y  a  toujours  crû  que  ce.qu'on 
regardoic  avant  la  confecration  comme  du  pain  ôcdtivin,  & 
qui  l'étoit  en  efïer,eft  réellement  après  la  confecration  le  corps 
6c  le  fangde  j.  C.  On  a  toujours  crû,  &i.  plûtoft  on  a  toujours 
vu,  que  cet  objet  que  l'on  croit  enfermer  le  corps  6c  le  fang  de 
J.  C.  avoit  toutes  les  qualitez  du  pain  6c  du  vin  6c  agidoit  de 
même  fur  nos  fens.  C'a  été  là  lafoy  univerfelleSc  perpétuelle 
de  tous  les  Chrétiens  du  monde  dans  tous  les  fiecles.  Mais 
quand  il  s'cll  agy  d'exprimer  ces  veritez,il  s'y  eft  mêlé  quelque 
diffcrence,  non  de  (entimens,  mais  d'exprefTions.  On  a  exprimé 
dans  l'ancienne Eglife  la  première  de  cesveritez,  en  difantque 
le  pain  confacré  étoit  le  vrjy  corps ,  \c  propre  corps,  le  corps 
même  de  J.  C.  6c  l'on  s'y  eft  fe^vy  de  toutes  les  autres  expref- 
lions  que  nous  avons  reprefentées  dans  le  fécond  Tome  de  cet 
Ouvrage. 

On  a  exprimé  la  féconde  en  appeîlant  le  pain  confacré 
un  pain  changé  ,  un  pain  apparent  j  en  difanc  que,  quoy 

qu'il 


C^  de  trois  ^Auteurs  qui  ont  parlé  comme  luy.  313 
qu'il  paroiffe  pain, c'cft néanmoins  le  corps  2c  lefang  de  J.  C.  Ck.  YA. 
en  difant  que  les  fymboles  font  le  corps  de  J.  C.  qu'ils  ont  efté 
faits,  mais  qu'ils  retiennent  néanmoins  la  naturel  l'ellencede 
pain  &  de  vin.  On  s'eft  fervi  depuis  d'idées  &;  d'expreffions  plus 
Philofophiques ,  principalement  depuis  que  les  Iierefies  qui  ont 
attaqué  ce  myflrere  ont  obligé  de  defcendre  à  des  explications 
plus  particulières.  On  a  dit  que  la  fubftance  étoit  changée  & 
que  les  accidens  demeuroient.  Mais  l'idée  de  foy  qui  répond  à 
tous  ces  difFerens  termes  j  fe  réduit  toujours  à  dire  que  le  corps 
&:  le  fang  de  J.  C.  font  réellement  prefens,  que  le  pain  &:  le 
vin  font  véritablement  changez  en  ce  corps  &ence  Tang  ,  6c 
que  cetobjetj  qui  efl;  intérieurement  le  corps  de  J.  C.  ne  laifle 
pas  de  faire  fur  nos  fens  toutes  les  imprefTions  du  pain  &  du  vin, 
&  d'en  avoir  toutes  les  proprietez.  Ceft-là  ce  qu'on  appelle 
conferver  la  nature  &  reifence  du  pain  5c  du  vin. 


CHAPITRE     XL 

Que  les  Eutychisns  rCont  -point  nié  abfohimcnt  que  J.  C.  cufi  un 

Corps  J  ^   qu'ils  ri  ont  point  prétendu  qu'il  fufi 

entièrement  immatériel. 

J'Ay  fuppofé  jufqu'ici  l'herefie  des  Eutychiens ,  telle  que  les^ 
Miniflresla  reprefentent,  &  qu'on  poarroit  la  concevoir  eri 
fuivant  toutes  les  confequences  que  les  Pères  en  tirent,  5c 
qu'ils  imputent  à  ceux  qui  la  fuivoient.  J'ay  fait  feulement  re- 
marquer que  quelques  fentimens  que  ces  hérétiques  euiient  de 
l'abolition  ou  de  la  fubftance  5c  du  fond  intérieur  delà  nature 
&  du  corps  de  J.  C.  ce  que  les  Pères  entreprennent  particuliè- 
rement de  prouver  contr'eux  ,  c'eft  que  la  nature  Jiumaine  de 
J.  C.  n'avoit  pas  perdu  fes  proprietez,  qu'elle  les  a  confervées 
après  l'Incarnation  ,5c  les  conferve  même  dans  le  Ciel. 

Mais  je  crois  que  pour  donner  encore  plus  de  jour  à  ce  que 
nous  avons  dit ,  5c  pour  éclaircir  même  d'autres  difficultez 
qui  font  propofées  par  M.  Claude  avec  beau-coup  de  pompe  5c 
d'éclat, il  eft  important  d'examiner  fî  les  Miniftres  ont  raifon 
de  foutenir  hardiment ,  comme  ils  font  ,  que  les  Eutychiens 
ayent  abfolument  nié  que  J.  C.  euft  uncorps^  5c qu'ils  ayent 
cru  que  fbn  humanité  étoic  entieremcnc  détruite.  Car  s'il  fe 

Sf 


314    Liv.  V.  Esplicdùon  des  pajfages  de  Theodoret 
trouvoïc  que  cela  fuft  faux ,  il  y  auroit  bien  des  argumens  & 
bien  des  figures  qui  s'en  iroienc  en  fumée  dans  le  Livre  de 
Monfieur  Claude. 

Pour  ne  pas  s'écarter  delà  vérité  dans  cette  recherche,  il  eft 
bon  de  remarquer  que  commelesEutychiensontété  fort  ex- 
travagans  dans  leurs  opinions  ,  leurs  expreffions  ont  été  auflî 
très-  bizarresjde  forte  qu'il  ne  faut  pas  tout  à  fait  juger  de  leurs 
paroles ,  comme  on  juge  de  celles  des  autres  hommes. 

Auiïî  l'unique  moyen  de  pénétrer  autant  qu'on  peut  dans 
les  ténèbres  de  cette  herefie  ,  eft  de  ne  s'arrêter  pas  a  quelques 
expreffions  détachées ,  mais  de  les  joindre  toutes  enfemble,  & 
de  voir  fur  tout  cela  quel  fenciment  il  eft  jufte  de  leur  attri- 
buer. 

C'eft  encore  un  principe  d'équité  dans  l'examen  de  ces  for- 
tes de  faits ,  que  lorfqu'un  fentiment  n'eft  imputé  à  des  héréti- 
ques que  comme  une  con'equence  j  &  que  non  feulement  ils 
défavoiient  cette  confequence ,  mais  qu'ils  enfeignent  pofiti- 
vement  le  contraire  ,  quoiqu'il  foit  jufte  de  fe  fervir  de  cette 
confequence  pour  montrer  la  faufleté  de  leurs  fentimens ,  on 
ne  peut  pas  néanmoins  foûtenir à  la  rigueur  qu'ils  l'ont  tenue, 
ni  en  faire  un  de  leurs  dogmes.  v 

Enfin  on  doit  avoir  dans  l'efpritque  ce  n'eft  pastme  preuve 
tout-à-fait  certaine,  que  des  gens  n'ayent  pas  tenu  deux  opi- 
nions tout  à  la  fois  de  ce  qu'elles  font  effectivement  contrai- 
res. Car  l'entêtement  &  la  petitefTe  de  l'efprir  humain  ne  four- 
nirent que  trop  dévoyés  pour  allier  ces  contradictions ,  &  fur 
tout  dans  les  matières  abftraites ,  &  dont  on  n'a  que  des  idées 
confufes.  Qn  s'en  fait  à  croire  à  foy-mêmcj  on  ne  voit  lescho- 
fes  qu'à  demi  ;  &  quoiqu'elles  paroiflent  contraires  ,  on  croit 
que  c'eft  par  fa  faute  qu'on  n'en  voit  pas  la  liaifon.  Et  jamais 
gens  ne  firent  une  profefljon  plus  ouverte  de  pratiquer  cette 
méthode  que  les  Eutychiens. 

Ces  principes  étant  fuppofez ,  je  rapporceray  d'abord  les  rai- 
fons  qui  femblent  porter  à  croire  qu'ils  ayent  nié  abfolument 
que  J.  C.  euft  un  corps.  Et  je  feray  voir  enfuite  qu'il  y  en  a  infi- 
niment davantage  pour  croire  qu'ils  ont  toujours  reconnu  un 
vray  corps  &  une  vraye  matière  en  J.  C. 

Il  eft  certain  que  tous  les  Eutychiens  difoient  qu'il  n'y 
avoit  qu'une  nature  en  J.  C.  &  qu'ils  difoient  que  cette  nature 
ëtoit  la  divine.  Je  réponds ,  dit  l'Eranifte ,  que  U  nature  divi~ 


t^  dé  trois  Au  teurs  qui  ont  pa.  rlé comme  luy.       5 1  j 
ne  cfi  demeurée  ,  ^  que  l'humanité  efi  abforbce.  Ces  expreflîons  Ch,  XI. 
elloicnt  communes  à  toutes  les  fedes  d'Eutychiens.  Thccd.  .liai. 

Pour  exprimer  cet  engloutifTement  delà  nature  humaine,  ils  '"P"^* 
fe  fervoient  d'ordinaire  de  la  comparaifon  d'une  goutte  de  miel 
jettée  dans  lamer,qui  s'évanouit  fî  toft  qu'elle  y  eft  mêlée.  Et 
fuivant  cette  comparaifon  ils  difoient  que  la  nature  humaine 
avoit  été  changée  en  la  divine ,  en  l'efTence  de  la  Divinité^en 
Divinité.  Ils  concluoient  de  là  que  \ts  proprietex  de  la  nature 
humaine  eftoient  abolies. 

Vous  ne  confeffez^  donc  pas  ^  dit  Theodorer  ,^»^  chacune  des 
natures  ait  confcrvé  fcs  proprietezj  T^on  pas  après  l'union^  répond 
l'Eutychien. 

S'il  ejloit  demeure ,  dit  encore  l'Eutychien  ^quelque  chofc  après 
le  chanqement  de  ce  qui  marque  la  nature  humaine  ,  elle  ri  aurait  pas 
efiè  changée. 

Theodoret  luy  fait  même  dire  expreflement  que  la  nature 
humaine  de  J.  C.  n'avait  plus  les  bornes  de  fan   étendue   ,  iIm 

Il  efl:  certain  encore  que  pour  combattre  leur  herefie ,  il  s'at- 
tache principalement  à  prouver  que  J.C.  avoit  confervéfafor- 
mCjfa  figure  ,  fa  circonfcriprionScles  autres  proprietex  d'un 
corps ,  qu'il  appelle  l'effence  d'un  corps ,  par  où  il  marque  que 
les  Eutychiens  le  nioient. 

On  doitajoûter  que  tout  ce  que  Theodoret  impute  aux  Eu- 
tychiens dans  fes  Dialogues  leur  a  été  imputé  par  d'autres 
Auteurs.  Car  Théodore  Preftre  de  Raite  a  dit  d'eux  à  peu  prés 
\ts  mêmes  chofcs  que  Theodoret,  en  attribuant  aux  Juliamftes 
qui  étoient  une  fedte  d'Eutychiens ,  de  foûtenir  que  depuis  ^^'J  ^j"* 
tunion  les  proprietez^de  la  nature  corruptible  avoient  efié  abolies  5  p.jn;. 
que  l'on  ne  cormoiffoit plus  les  différences  effentielles  de  ces  natures  , 
d^  que  la  divine  qui  efi  oit  la  plus  exceUente  ayant  prévalu  ,  avoit 
transféré  en  un  moment  la  nature  inférieure  aux  proprietez^  de  la 
ftenne. 

Vigile  Evêque  deTapfè  en  Afrique  dans  les  Livres  qu'il  a 
faits  contre  les  Eutychiens,  tire  plufieurs  fois  de  leurdodrine 
cette  mêmeconfequence.<S'//«/  a  plus  .,èi\x..'A  ,  qu'une  nature  en  ]  j^ 
J.  C.  il  faut  qu'ilne  foit  plus  que  Dieu  fans  efîre  homme ,  ou  homme 
fans  efîre  Dieu.  Il  dit  qu'Eutychés  a  ofé  nier  la  nature  humai-  i.t, 
ne  ,en  voulant  conferver  l'unité  delaperfonnede  J.  C. 
Mais  il  n'y  a  gueres  d'Auteurs  donc  on  puiiTe  mieux  appren- 

Ssij 


3  té  Liv.  V.  Explication  des  pacages  de  Thûodoret 
dre  leurs  expreffions  &  leurs  fentimenSj  que  d'Anaftafe  Reli- 
gieux du  mont  de  Sina',  qui  dans  Ton  Livre  intitulé  k  Guide , 
décrit  plufieurs  conférences  qu'il  a  eues  à  Alexandrie  avec 
diverfes  fedes  d'Eutychiens  ,  ôcqui  rapporte  mcme  fouvent 
leurspropres  paroles.  Et  l'on  y  voit  que  non  feulement  Timo- 
thée,un  des  plus  emportez  de  ces  Hérétiques,  f lûtenoit  que/^« 
g- "'^g_  Divinité  efioitla  feulcmiture  de  J.  C.  mais  que  les  Severiens  mê- 

mes qui  vouloient  paroiftre  plus  modérez  fe  fcrvoient  de  la 
mêmeexpreffion.  N  ous  ne  recevons  point ,  ditcet  Auteur  Japa~ 
rôle  impie  de  Timothèe  (^■^  de  Severe ,  qtie  la  Divinité  eft  la  feule 
nature  de  J.  C. 
G.is.  Ils  difoient  auffi,  comme  témoigne  le  même  Auteur  ,   ^;/(7 

le  corps  de  J.  C  par  la  participation  delà  Divinité  avoit  cfié  fuit 
Dieu. 

Que  la  nature  ayant  efié  changée ,  toutes  les  proprietez,  naturelles 
l'avaient  .att.ljï  efié. 

Que  la  nature  divine  ayant  efié  la.  plus  forte  ,   avoit  donné  fa. 
Divinité  a,  la  plus  foible. 
^•'5*  Ils  difoient  ,  que  la  chair  dej.  C.  avoit  efié  changée  en  la  natu- 

re de  la  Divinité. 

Ils  fe  fervoient  aufli  delà  comparaifon  d'une  goutte  de  miel 
jettéedans  la  mer,qui  s'évanouit  &  perd  fa  nature  ,&ilsl'auto- 
rifoientparS.  Grégoire  de  Nyiïe  dont  elle  eft  empruntée. 

Ce  même  Auteur  en  les  réfutant  leur  impute  de  croire  ,  que 
le  facré  corps  de  J.  C  avoit  efié  rendu  tel  que  le  Verbe  divin  .^  en  forte 
qu'il  n' avoit piUS  les  proprietez^de  la  nature  humaine. 

Il  leur  attribue  de  dire  quil  n'avait  plus  aucune  propriété  de  la 
nature  humaine ,  ^  qu'il  efioit  paffè  dans  les  attributs  de  l'immenfe 
Divinité. 

Il  prouve  en  plufieurs  endroits ,  comme  Theodoret ,  que  le 
corps  de  J.  C.  n'eft  niinvifible,  ni  impalpable,  ni  fans  étendue 
bornée. 

Voilà  ce  qui  a  donné  lieu  à  divers  Auteurs  de  croire  que  les 
Eutychiensavoient  entièrement  voulu  détruire  la  nature  hu- 
maine deJ.  C.  5c  qu'ils  prétendoient  qu'il  fût  prefentement  au 
même  état  qu'il  étoit  avant  l'Incarnation.  Mais  quoique  ces 
preuves  foient  fortes ,  fi  on  les  confidere  toutes  feules ,  je  crois 
néanmoins  qu'il  eft  difficile  qu'un  homme  judicieux  &  fincere 
y  ait  beaucoup  d'égard  ,  s'il  prend  la  peine  de  les  comparer 
avec  celles  que  nous  y  allons  oppofer. 


f"     ^  de  trois  Auteurs  qui  ont  parlé  comme  luy.       317 

S' l'on  veut  remonter  jufqu'à  la  fource  de  cette  herede  ,  qui  Ch.  XI. 
eft  celle  d'AppoUinaire  Evoque  de  Laodicce,  tous  les  Pères  qui 
en  ont  écrit  témoignent  qu'il  n^a  jamais  nié  que  J.  C.  n'euft  une 
véritable  chair.  S.  Epiphane  qui  s'en  eft  informé ,  dit-il  ,  avec 
le  plus  de  foin  qu'il  a  nù.Scqui  rapporte  une  lettre  par  laquelle 
S.  Athanafc  a  condamné  cette  berefie,  luv  attribue  ou  à  fesdif. 
ciplesde  loutcnirque  J.  C.  avoir  apporté  une  chair  du  ciel.  Il 
dit  que  d'autres  enfeignoienc  que  le  corps  de  J.  C.  étoit  con- 
fublLintiel  à  la  divinité.  Mais  afin  qu'on  ne  cruft  pas  qu'étant 
confubftantiel  à  la  divinité,  il  ne  fuft  pas  corps,  ces  mcm.es 
Hérétiques,  au  rapport  de  S.  Athanafè,  difoient  que  le  Verbe 
avoit  été  changé  en  chair,  en  os  ,  en  cheveux ,  &.  en  tout  le 
corps  de  J.  C.  que  c'étoit  en  ce  fèns  qu'il  étoit  confubftantiel 
au  Verbe.  Et  par  une  fuite  de  cette  erreur  ilsdiioient  que  ce  qui 
avoit  été  crucifie  fur  la  croix  étoit  non  un  corps  humain,  mais 
cette  iubftance  qui  a  créé  toutes  chofes. 

Les  autres ,  dit  encore  S.  Athanafè,  pafToient  jufqu'A  dire 
que  ce  corps  du  Verbe  étoit  cocternel  au  Verbe ,  &  avoit  tou- 
jours été. 

Ils  encherifloient  fur  cette  extravagance,  en  difant que  cet- 
te chair  ou  effentielle  au  Verbe ^  ou  prifèdans  le  ciel  ,  étoit 
d'une  autre  nature  que  la  notre,  qu'elle  avoit  des  ongles  dif- 
ferens  des  nôtres,  &  de  même  de  toutes  les  autres  parties. 
Et  ils  croyoient  l'honorerheaucoup  en  l'exemptant  de  toutes 
les  necelîitez  communes  de  la  nature.  S.  Grégoire  de  Nazian-  Grec.  Naz. 
ze,  S.  Grégoire  de  NyiFe,  S.  Ambroife,Leonce  ,  S.  Léon  ,  laf&acT'' 
Gennadius,  Facundus,  en  ont  parlé  de  la  même  forte^fic  leur  cieàon. 
imputent  la  même  erreur.  !^/'-  ^\ 

n  *    •  t  «  en  •    •  >      Theoiih. 

Mais  quelque  extravagante  que  tuit  cette  opinion  ,  &  de  Ambr.  1.  de 
quelque  nature  que  fuft  cette  chair  qu'ils  donnoient  au  Verbe ,  i^^cam.  c  6. 
c'ctoit  toujours  une  chair  &un  corps,  ç'eft  àdirequecen'étoic  i^cen/de* 
point  un  cilre  purement  immatériel.  dogm.  Facun. 

Or  c'eft  proprement  là  l'herefie  qui  a  étéemhraftee  par  Eu-  ^•^•P-'t-- 
tyches ,  £«:  par  les  purs  Eutychiens.  Car  S.  Flavian  Archevêque 
de  Conftantinople  qui  a  condamné  cet  herefiarque  ,  dit  de 
luy  ,  qud  fuivoit  en  tout  les  dogmes  de  Valcntin  ^  d'Apollinaire. 
Et  de  même  Theodoret  Preftre  de  Raite  dit  qu'il  enfergnoit 
que  le  corps  de  j.  C.  efioit  defcendu  du  Cul ^  ^  qu'il  efioit  pajfépar 
layieriie  comme  Par  un  canal. 

Anaftâfe  Sinaïte  rapporte  fonherefîe  en  ces  termes  icy.  Eu. 

S  s  ii  j 


3i8      Liv.   Y.  Sxpîicationdespcijfagesde  Theodoret 
C.  ;.  tyche  Supérieur  d'un   Monajhre  de  Conjtantinople  ,  dijoit  que  le 

corps  de  J.  C.  eftoit  defcendu  du  Ciel  ,  ^  qu'il  e fiait  différent  du 
noftre. 

Que  s'il  luy  impute  dans  le  chapitre  fuivant  d'avoir  cru  avec 
les  Valentiniens  6c  les  Marcionifl:es,que  le  corps  de  J.  C. n'é- 
toit que phantaftique  &  apparent,  il  veut  dire  que  félon  luy  , 
il  paroiiîôit  femblable  au  noftre  fans  l'eftre  :  mais  il  ne  veut  pas 
dire  que  ce  ne  fuft  pas  un  vray  corps  celefte. 

C'eft  auffi  l'idée  que  Vigile  Evêque  de  Tapfe  nous  donne  de 
cette  herefie,  lorfqu'il  dit  au  commencement  de  Ton  troifiéme 
Livre ,  que  l'herefie  Euty chienne  s'efi  portée  jufqu'à  cette  impieté 
que  defoutenir,  non  feuleynent  que  le  Verbe  ^  la  chair  ne  font  qu'une 
nature  dans  J.  C.  mais  au/Ji  que  cette  même  chair  n'a  pas  efté  prife 
de  Marie ,  mais  du  Ciel ,  ^  quelle  efipaffèe  par  la  Vierge  ,  comme 
de  l'eàu  qui  pajfc  par  un  canal. 

Il  eft  clair  que  félon  cette  hypothefe  les  Eutychiens  n'étoient 
nullement  embaraifez  d'accorder  le  Myftere  de  l'Euchariftie 
avec  leur  fentiment ,  puifqu'ils  n'avoient  qu'à  dire  ,  &  qu'ils  le 
difoient  en  effet,  que  les  fymbolesétoient  cette  chair  celefte 
&  divine  que  le  Verbe  avoir  prife  dans  le  Ciel.  Mais  il  faut  re- 
marquer que  quoiqu'Eutyches  reconnuft  quej.  C.  avoir  un- 
corps,  foit  qu'il  l'euft  pris  dans  le  Ciel,  foit  qu'il  luy  fuft  coë- 
rernel  comme  fa  nature  divine,  il  foùtenoit  néanmoins  qu'il 
n'avoit  qu'une  nature.  Et  quoique  S.  Achanafe  montre  fort  bien 
dans  fa  lettre  à  Epidete  qu'Apollinaire  ,  dontEutyches  avoic 
emprunté  cç.xx.q.  opinion,  admettoit  efFedivement  deux  natures 
dans  J.  C.  néanmoins  comme  jamais  gens  ne  s'embarafTerenc 
moins  des  contradidions  que  luy  &  ceux  de  fa  fcde  ,  ils  foûtin- 
rent  toujours  opiniâtrement  que  ce  corps  celefte  ôcle  Verbe 
ne  faifoient  qu'une  nature. 

L'Eutychien  introduit  par  Theodoret  propofe  à  peu  prés  ce 
fyftême  dans  le  premier  dialogue  intitulé  l'immuable.  Cari!  y 
ibûtient  que  le  Verbe  n'avoit  pas  pris  la  nature  humaine ,  mais 
qu'il  s'étoit  fait  chair.  Et  quoiqu'il  évite  le  terme  de  mutation , 
il  paroift  néanmoins  qu'il  vouloit  que  l'Incarnation  confîftaft 
dans  le  changement  du  Verbe  en  chair. 

Mais  dansle  deuxième  dialogue  il  prend  un  nouveau  plan, 
&  joue  un  autre  perfonnage.  Car  il  avoue  ,  comme  nous  l'a- 
vons déjà  dit ,  que  le  Verbe  avait  pris  une  ame  gS  un  corps  com- 
me les  nofires  j  &  il  die  que  fi  on  ne  l'appelloit  pas  un  homme  , 


Cs?  de  trois  ^Auteurs  qui  ont  parle  comme  luy,        519 
C(fl  qu'il  le  fallait  nommer  far  fa  flus  noble  partie.  Ch.  X  T. 

Il  dit  que  7.  C  avait  u?ie  humanité  parfaite  ',  qu'il  n'ètoit point 
un  vainfpeclre  ,  comme  les  Valentinicns  (>"^  les  Marcionijles  l'en- 
fcipioient. 

,  Il  ne  faut  même  pas  s'imaginer  qu'il  ne  reconnufl  cette  hu- 
manité parfaite  qu'avant  que  la  nature  fuft  abforbëe,  c'eft-à-di- 
re  avant  la  Refurrection  ou  l'Afcenfion.  Car  il  loûtient  d'abord 
que  c'eft  dans  le  moment  même  de  l'union  que  s'etoit  fait  le 
changement  de  l'humanité  en  la  divinité.  Et  c'eft  néanmoins 
de  cette  humanité  abîmée  ,  qu'il  dit  que  lorlqu'eileaparu  aux 
hommes,  elle  n'étoit  point  un  vain  fpcclre  ^  comme  les  M^arcio.  p.  7f. 
niftes  le  voulaient. 

I  C'eft  de  cette  humanité  abîmée  qu'il  avoue  qu'elle  a  été  cru-  P-74. 
cifiée. 

C'eft  de  cette  humanité  abîmée  qu'il  dit  que  J.  C.  avoitfait  p-?^- 
paroiftre  tantoft  fa  chair  &  tantoft  fa  divinité ,  rdrê  1^  tîco'  ffotp- 
;C90|  ToTê  f<^"  'dut  ^eoTJiTo,  S'uY.vmty  Car  après  avoir  dit  toutes  ces 
chofes  de  la  chair  de  J.  C.  il  dit  qu'elle  avoit  été  changée  au 
moment  de  l'union  dans  l'eflence  de  la  Divinité.  Ftparconfe- 
quentce  changement  n'empêchoit  pas  que  cette  humanité  ne 
fuft  vifible  &  compofée  d'un  corps  &  d'une  ame. 

On  dira  pcut-eftreque  l'Eutychien  reconnoift  enfuite  l'in- 
compatibilité de  ces  opinions  5  &  qu'afin  qu'il  y  euft  quelque 
liaifon  dans  (es  fentimens,il  eft  obligé  de  reculer  ce  change- 
ment de  la  chair  en  divinité  jufqu'aprésrAfcenfion  ,  afin  de 
pouvoir  accorder  qu'on  avoit  pu  voir  le  corps  de  J.  C.  aupara- 
vant, &  qu'il  avoit  été  capable  de  faire  £c  de  foufFrir  par  ce 
corps  tout  ce  qu'en  rapporte  l'Evangile. 

Mais  il  eft  facile  de  voir  que  cet  aveu  queTheodoret  tire  de 
TEutychien ,  n'eft  qu'une  fuite  du  deflèin  qu'il  avoit  d'attribuer 
à  la  même  perfonne  des  opinions  différentes  j  ce  qui  l'enga- 
geoit  à  luy  faire  abandonner  la  première  pour  le  faire  pafTer  à 
une  autre.  Car  il  paroift  que  \qs  autres  Eutychiens  n'abandon- 
noient  nullement  ce  point ,  &  qu'ils  enfèignoient  en  même 
temps  que  le  changement  s'étoit  fait  au  moment  de  l'union  , 

que  la  nature  humaine  avoit  été  abforbée  dés  cet  inftant ,  6c 

que  néanmoins  J.  C.  avoit  un  vray  corps  capable  des  actions 

corporelles. 
C'ctt)it  dés  le  moment  de  l'Incarnation  que  Timothce  &  Se-  c.  15. 

vere  diloient,  au  rapport  d'Anaftafe  Sinaïte  ,  que  la  nature  de 


5p       Li V.  V.  Explication  des p-ijf'^g<^s  de  Thsodoret 
Ibid.  J.  c.  ètoit  la  feule  divinité.  C'ccoic  par  l'Incarnation  même  qu'ils 

difoienc  qu'elle  avoit  été  ablorbée  comme  une  goutte  de  vi- 
naigre jecrëe  dans  la  mer.  C'ëtoit  dans  l'Incarnation  même 
qu'ils  difoient  que  la  nature  divine  avoit  prévalu  ,  &  qu'elle 
■"^'  avoir  déifié  la  nature  inférieure. 

Il  n'y  a  donc  plus  qu'à  examiner  fi  félon  eux  cette  divinité 
qui  faifoit  l'unique  nature  de  J.  C.  &dans  laquelle  l'humanité 
avoit  été  abforbée  ôi  déifiée  ,  n'avoir  point  de  corps.  Or  c'eft 
ce  qui  paroiftra  entièrement  infoûtenable  à  tous  ceux  qui  pren- 
dront la  peine  deconfidererceque  nousen  allons  citer. 
/  Car  Anaftafe  Sinaïte  témoigne  ,  que  tant  les  Sénateurs  de 

Severe^  que  tous  les  autres  Eutychiens  difoient,  que  l'un/que  na- 
ture de  J.  C.  ètoit  compofèe  de  deux  natures  particulicrei ,  dont  cha- 
cune était  imparfaite.  Et  pour  montrer  que  ce  n'étoit  pas  des 
mots  en  l'air  ,  il  rapporte  encore  que  quoique  Severe  refufaft 
de  donner  au  corps  dej.  C.  le  nom  de  nature.,  il  le  traittoic 
néanmoins  de  pafjîble ,  de  matériel ,  de  terreflre ,  de  fu  je  ta  la  faim- 
^ aux  travaux.  Que  quand  ondemandoit  à  ceux  de  fs  fecfte  , 
comment  il  avoit  pleuré,  comment  il  avoit  pu  recevoir  des 
foufflets ,  comment  il  avoit  enduré  tant  de  travaux  j  iL  répon- 
doient  qu'il  avoit  fait  tout  cela  ,  par  ce  qu'il  avoit  r/^  terrcfire.^ 
de  vifîhle  ,  d'humain ,  en  un  mot  par  fon  corps.  A  quoy  Anaftafe 
ajoute ,  qu'accordant  tous  ces  noms  à  Inhumanité  de  J.  C.  ils  luy  re~ 
fufoient  feulement  le  nom  de  nature. 

Que  fi  l'on  demande  comment  ils  pouvoient  allier  ces  expref- 
fions  avec  celles  qui  femblent  nier  ces  mêmes  proprietez  ,  la 
vérité  eft:  qu'ils  s'en  tiroient  afi[èz  mal  -,  mais  que  néanmoins  ifs  ' 
les  allioienc  5  &  qu'une  de  leurs  voyes  pour  cela ,  c'étoit  de  dire 
que  dans  ces  adions  mêmes  qui  paroiffoient  humaines  ,  il  y 
avoit  quelque  chofe  de  divirt 
s,  15'.  C'eft  ce  que  l'on  voit  par  ces  paroles  qu'Anaftafe  rapporte 

d'eux.  Si  J.  C.  n'étoit  point  la  divinité  ,  co-mynent  (a  falive  ren- 
dait elle  la  vue  aux  avctiqles  ^  Comment  fcs  larmes  ont.  elles  pu 
rcjju [citer  le  Zaz^tre  ?  Comment  a-t'il  pu  s' empêcher  de  boire  après 
avoir  dit  a.  la  Samaritaine  qu'il  avoit  foif  ^  Comment  efi.ce  qu'il 
ne  mangea  pax  après  avoir  jeûné  quarante  jours  ?  Nous  ne  lifons 
pas  m'eme  qu'il  ait  dormi  ,  finon  une  fais  dans  le  navire,  il  ne  pa~ 
roifi  pas  non  plus  par  l' Evangile ,  qu'il  ait  hit  a  l'ordinaire  des 
autres  hommes.  Et  tout  cela  prouve  que  la  nature  humaine  de  J.  C. 
était  devenue  divine  î  que /le  n'était  plus  fujette  aux  praprictex^ 

humaines 


'^  de  trois  Auteurs  qui  ont  parlé  comme  luy.         551 
humaine ,  é^par  confcquent  qu'il  n'y  a  en  luy  quune  nature.  Ch.  X  L 

Ils  ne  nioienc  donc  pas  que  J.  C.  n'euft  eu  quelques-unes  de 
ces  fondions  humaines;  mais  ils  difoienc  qu'il  les  avoir  eues 
fans  les  necefîïtez  humaines,  &:  avec  quelques  circonftances 
qui  luy  eftoienc  propres  i  &  cela  leur  fuffifoic  pour  dire  qu'il 
n'avoit  qu'une  nature  i  &  qu'elle  n'avoir  point  les  proprietezde 
la  nôrre. 

Mais  que  pent-on  defirer  de  plus  précis  que  ce  qu'en feignoic 
Severe  au  rapporr  du  même  Aureur ,  que  comme  l'ame  eji  une  ds, 
partie  de  la  nature  de  l'homme  ^  le  corps  l'autrei  de  mefme  dans 
J.  C.  é^  dans  fa  nature  unique ,  la  divinité  fait  une  partie  ,  &  le 
corps  l'autre. 

Que  peut-on  defirer  de  plus  decifif  que  ce  qu'il  aflîire  ail- 
leurs, que  lesMonophyfires  eftanr  prefTez  dédire  à  quelle  na- 
ture de  J.  C.  ils  arrribuoienr  ce  qu'il  y  a  d'infirme  dans  ce 
qu'on  rapporre  de  luy  :  eux  ne  voulanr  pas  appeller  la  chair 
de  J.  C.  du  nom  de  nature,  répondoienr  que  c'étoit  a  l' huma- 
nité-,0,  ce  qii  il  avait  pris  ^  ace  que  l'on  voyait  en  luy^  à  fon  corps,  k  fa 
ehairi  (^  qu'ils  donnaient  ainji  une  infinité  de  noms  à  l'humanité  de 
J.  C.  mais  qu'on  ne  pouvoit  obtenir  d'eux  qu'ils  luy  donnajfent  ccluy 
de  nature. 

Comment  peur-on  expliquer  la  divifion  qui  arriva  entre  les 
Eurychiens ,  que  nous  apprenons  du  même  Aureur  ,  s'ils 
croyoienr  que  J.  C.  n'eufl  poinr  de  corps?  c.  is. 

Severe  f^  Gayen ,  dir-  il ,  ef  oient  autrefois  très-  unis  de  fentimens^  Prcft're°dc 
^  demeuraient  enfemble  dans  la  dix- huitième  rue  d'Alexandrie  j  Raitc,  rappor- 
mais  un  jour  Severe  demanda  aGay  en  s'il  fallait  dire  que  le  corps  de  "'"f'^'"'^."i^- 
y.  C-fnjr  corruptible  ou  incorruptible  3  &  Severe  ayant  dit  qu'il  dit  que  ce 
eftoit  corruptible  avant  fa  refurreEtion,  Gayen  fe  fepara  de  luy, dans  ''"'ï'^rcnd  am- 
la  penfée  que  de  reconnoifre  que  le  corps  de  I.  C  avait  efiè  corrupti.  vere'&^unê» 
ble  y  c'étoit  rcconnaifire  deux  natures.  Evclqu» 

Les  Gayaniftes  croyoienr  que  le  corps  de  J.  C.  avoir  efté  in-    '!^H'^^i"™af. 
corruprible  dés  le  momenr  de  l'Incarnarion.  Ils  difoient  que 
J.  C.  n'avoit  rien  eu  de  ce  qui  nous  eft  narurel ,  comme  le  leur 
reproche  le  même  Aureur. 

Us  croyoienr  que  la  narure  humaine  unie  hypoftatiquemcnt 
au  Verbe  avoir  eflé  changée  dans  les  propricrez  de  la  narure 
divine.  C'eft  la  manière  dont  ils  s'exprimoienr.  Mais  avec  cela 
ils  ne  laifloient  pas  de  reconnoiftre  que  J.  C.  avoit  un  vray 
corps.  Et  pour  marquer  en  quel  fens  ils  difoient  que  cette 

Tt 


331     Liv.  V.  Explication  despnjfigesde  Théodore» 
nature  humaine  avoir  efté  changée'  dans  les  proprictez  de  fa- 
nature  divine  ,  ils  ajoûtoienc,  qu'encore  que  I.  C.  eiift  fleuré  le 
Lw^^ire  ,  fes  larmes  néanmoins  coynme  incorruptibles  &  divines  l'a- 
voient  rejfufcité  :  Que  s'davoit  craché  ^ft  fiUve  avait  rendu  la  vite 

C.  15.  aux  aveu'llcs  :    Que  quoy  qv^il  euft  vcrfé  fon  fmg  ,  ce  fang  avait 

racheté  le  monde  j  ^  que  quoy  qu'il  eiifi  cflé  crucifié ,  il  avait  cou- 
vert le  folcil  de  ténèbres  comme  JDicu^ 

Ce  n'ccoic  donc  pas  en  niant  le  corps  de  J.  C.  qu'ils  le  di- 
foienc  incorruptible^  mais  en  luy  donnant  une  qualité  divine. 
C'ctoit  en  ce  (ens  qu'ils  le  precendoient  d'une  autre  fubftance 

ii'^.  que  la  noflre.  Et  enlin  ,  quoy  que  leurs  expreffions  fuflenc  ex- 

travagantes, &:  que  ceux  qui  les  on?  combattues  ayent  eu  rai- 
fon  d'en  tirer  les  confequences  qu'ils  en  ont  tirées,  il  eft  pour- 
tant vray  que  dans'lefond  les  Eutychiensne  poulToienrpas  leurS' 
fentimens  auffi  loin  que  leurs  expreffions  s'etcndoient;  6c  qu'ils- 
admcttoient  quelquefois  (î  formellement  l'humanité  de  J.  C. 
qu'ils  obligeoient  leurs  adverfaires  mêmes  d'en  convenir. 

C'eft  ce  qu'on  voit  eii  plufieurs  endroits  des  livres  de  Vigile- 
Evefque  en  Afrique. 

Livre +.  cou-       Aumcfmc  temps  ^  d'\t'\\^quc  vous  tafchez^d'ofier  a  I.C.  laJtature^- 

Kc  Eut/chez,  humaine  en  faifant  profcjjion  de  ne  reconnoijlre  en  luy  qu'une  nature ^^ 
il  femble  que  votis  confeffcz^ce  que  vous  niez, ,  puifque  vous  dites 
que  le  Dieu  né  dans  la  chair,  qui  cjî  le  Verbe  de  Dieu:,  a  cflé  fait 
fans  convcrfîon  homme  parfait  ^  en  demeurant  Dieu  h  cjlant  fcmbla- 
hleuDieu  par  fon  efîat  d.e  yrandcur  (j?-  de  puiffanceyé^  à  nous  par  fon 
efiat  d'infirmité. 

Il  rire  la  mêmeconfequence  des  paroles  qu'il  rapporte  d'eux; 
dans  le  même  livre:  Vous  efîcs  contraints,  leur  dit-il,  de  recon- 
'  noiflre  la  vérité  que  nnus  enfeiqrions  par  les  paroles  mefmes  dont 

•vous  vous  fcrvct^  Noflre  nature^  dite  s -vous  ,  fe  glorifie  d'avoir 
efié  élevée  à  cet  honneur ,  lors  qu'elle  voit  que  ce  luy  qui  efl  de  mef- 
me  fubjlance  que  fon  Perc  félon  la  divinité ,  (^  de  mefme  fub- 
jtance-  que  nous  félon  la  chair  qu'il  a  prife  de  la  Vierge,  cfi  ajfîs- 
k  la  droite  de  la  magnificence  de  fon  Père.  Si  vous  avez^fncere- 
mcnt  dans  le  cœur  ce  que  ces  paroles  (ignificnt  ^  on  ne  fcauroit  nier- 
qu'elles  ne  foient  Catholiques.  Et  quand  vous  dites  encore  qus- 
comme  le  Fils  efl  de  'mefme  fubfanccqnc  fon  Père  félon  la  divinité^, 
il  efl  av,(fî  de  mefme  fubflance  que  nous  félon  la  chair  qu'il  a  prife  3- 
je  n'ay  rien  à  vous  dire  fînonquc  vous  reconnoiffez^dcux  natures  en: 
fefus-Chrifl. 


^  de  trois  Auteurs  qui  ont  pArlé  comme  luy.         33  j 

Mais  on  ne  peuc  rien  dire  de  plus  formel  que  ce  qu'il  rap-  Ch.  XL 
porte  dans  le  mcme  livre  comme  avo.ué  par  les  Eucychiens: 
Vous  reconnoijjez^,  leur  dit  il ,  que  le  Verbe  a  c (te  fait  chair  ,  mais 
tn  forte  qu'il  n'a  poititejtè  changé  en  chair  ^  d;- qu'il  a  confervé  les 
fropriûtez^de  fa  nature^  ^  que  la  chair  de  même  n'a  -point  fer  du  les 
proprietczjie  fa  "nature par  1^ union  qu'elle  a  avec  le  Verbe:  ce  qu'il 
prouve  par  un  pafTage  pris  d'un  livre  àç.s  Eucychiens  contre  le 
Concile  de  Calcédoine.  Et  il  conclut  de  là  à  (on  ordinaire^  que 
c'écoic  aller  contre  la  profeiïîon  qu'ils  faifoient  de  ne  croire 
qu'une  nature  en  J.  C.  &  qu'on  ne  pouvoit  pas  mieux  recon- 
noifl-re  Tes  deux  natures ,  gcminas  profccio  intégras  ,  immutatas^ 
inconfufoé-  Verbi  (^  carnis  fatemini  efje  naturas. 

Cependant  ce  même  Auteur ,  à  l'imitation  de  tous  ceux  qui 
ont  écrit  contre  les  Eucychiens,  ne  laifle  pas  de  leur  imputer 
les  confequences  qui  fe  tiroient  naturellement  de  ce  dogme, 
qu'il  n'y  a  qu'une  nature  enj.  C.  Et  on  diroic  même  à  n'en  juger 
que  par  ces  pafTage^  qu'il  a  craque  les  Eutychiensadmettoienc 
ces  confequences,  bc  qu'ils  nioient  pofitivement  l'humanité  de 
J.  C.  mais  il  paroiftpar  beaucoup  d'autres  lieux  qu'il  n'y  a  rien 
de  plus  faux. 

La  raifon  veut  donc  qu'on  diAingue  dans  ce  que  l'on  leur 
impute  ce  qu'ils  avoûoient  en  effet,  de  ce  qu'ils  n'avouoienc 
pas  :  quoy  que  les  Auteurs  qui  en  ont  parlé  n'ayent  pas  toujours 
fait  cedifcernement.  Et  en  gardant  cette  équité,  on  fera  obli- 
gé de  reconnoiftre  qu'on  neA'oit  point  qu'aucun  Eutychien  ait 
enfeigné  pofitivement,  que  J.  C.  fufl:  maintenant  purement 
immatériel:  Qu'il  paroift  au  contraire  qu'ils  ont  toujours  re- 
connu en  J.C.  un  vray  corps,  &:unevraye  matière.  Et  qu'en  di- 
fant  que  la  nature  humaine  avoir  perdu  fes  proprietez  ,  ils  en- 
tendoient  feulement  que  les  propriétés  de  la  nature  humaine 
avoient  en  J.  C.  quelque  chofe  de  divin  qui  les  dillinguoit  de 
celle  des  autres  hommes. 

Il  eft  vray  que  ce  que  The©doret  leur  impute  d'avoir  cru  que 
le  corps  de  |  C.  n'étoit  plus  vifible  ny  palpable  ny  circonfcric 
va  plus  loin  que  cela.  Mais  que  fçait-on  auflî  fiTheodorec  ne 
porte  point  un  peu  trop  loin  fes  confequences,  &  s'il  ne  fait 
point  avouer  à  l'Eranifte  ce  que  les  Eutychiens  n'avoiioient  pas? 
Et  de  plus,  que  tireroic-on  de- là  fînon  que  les  Eutychiens  ont 
pu  avoir  quelques  imaginations  femblables  à  celles  des  Luthé- 
riens Ubiquiftes ,  6c  qu'ils  ont  cru  que  l'humanité  de  J.  C.  étoic 

Tcij 


354  Liv.  V.  Expûcution  des pa.JfiigesdeTheodoret 
par  tout,  Scqu'ainfi  elle  n'étoit  pai  renfermée  en  un  lieu  bor- 
né ,  êc  qu'elle  étojc  impalpable  &  invillble  par  tout  ailleurs  que 
dans  le  Ciel  ^  mais  comme  cette  erreurdes  Luthériens  ne  les  em- 
pêche pas  de  croire  que  J.  C.  a  un  corps ,  elle  n'en  a  pas  non 
plus  empêché  les  Eutychiens. 

Cette  explication  de  l'herefîe  Eutychienne  contribue  véri- 
tablement fort  peu  à  l'éclaircilTement  des  pafTages  de  Theo- 
doret  que  nous  avons  examinez ,  puifqu'il  ne  s'y  agit  pas  tant 
de  ce  qu'ils  ont  crû  que  de  ce  qu'il  leur  a  impute  de  croire. 
Mais  on  va  voir  qu'elle  renverfe  entièrement  d'autres  objec- 
tions que  M.  Claude  propofe,  &  d'un  air  à  étonner  ceux  qui 
ne  font  pas  inftruits  du  fond  de  cette  here/îe. 


M.  Claud,  1, 
lep.  p.  ji. 


CHAPITRE   XH. 

Réfutation  de  quelques  autres  Objections  que  M.  Claude  tire  df 
l'MereJîe  des  Eutychiens  j  (^de  la  manière  dont  elle  a  ejlé 
combattue  far  les  SS.  Pères, 

QUoY-que  M.  Claude  ne  fôit  pas  l'Auteur  d'e  cet  argu- 
ment que  l'on  tire  de  l'Hereiie  des  Eutychiens  contre 
]a  prefence  réelle  ,  il  fe  l'eft  néanmoins  tellement  rendu  pro- 
pre par  le  jour  où  il  l'a  mis,  qu'il  auroit  quelque  fujet  de  fe 
plaindre  û  Ton  ne  le  propofoit  fous  fon  nom,  &  (T  l'on  ne  le 
rcprefento^avec  toute  la  force  qu'il  a  tafché  d'y  donner.  Ainiî 
pour  kiy  faire  toute  la  juflice  qu'il  peutdefirer,  je  rapporteray 
d'abord  fes  propres  paroles. 

M.     CLAUDE.. 

Je  viens  enfin  à  la  difpute  contre  les  Eutychiens,  où  je  pré- 
tends que  les  SS.  Pères  fe  font  fi  formellement  déclarez  qu'ait 
n'y  a  plus  rien  à'  contefter.  Et  voie  y  comment  je  le  montre. 
Ces  Hérétiques  foùtenoient  que  le  corps  de  J.  C.  au  moment 
de  fon  élévation  dans  la  gloire  celelTe,  avoir  été  changé  en 
la  nature  ou  en  la  fabftance  divine.  Les  SS.  Pères  employent 
d'ivers  moyens  pour  combattre  cette  erreur ,  &  entre  autres 
ils  fe  fervent  du  S.  Sacrement.  Or  il  ne  faut  pas  avoir  l'efprit 
fort  pénétrant,  pour  reconnoiftre  que  s'ils  euilent  crû  la  TranC 


m 


&  de  trois  Auteurs  qui  ont  p^rlé  comme  luy.  355 
fubfl-antiation  &;la  prelence  réelle,  lis euifcnt  reproché  auxHe-  C^  Ai*. 
retiques  qu'ils  aneanriflbienc  la  foy  d'un  Ç)  grand  Myftere,  &.  " 
qu'ils  comboient  dans  deux  erreurs  capitales,  l'une  contre  la  " 
nature  humaine  du  Sauveur  confiJerée  par  rapport  à  l'union  " 
hyportatique,  &  l'autre  contre  cette  même  nature  confîderéc  ''^ 
à  l'égard  du  Sacrement.  Car  fi  la  nature  humaine  aeftc  en-  " 
gloutie  par  la  divinité,  6c  le  corps  du  Seigneur  changé  en  la  " 
fubftance  divine ,  il  n'y  a  plus  de  tranlTubftantiation  ny  de  pre-  " 
fence  réelle  au  Sacrement.  Ces  deux  chofes  iè  renverfentmu-*' 
tuellemenc.  La  prefence  réelle  détruit  l'erreur  Eutychiennej  ^ 
&  l'erreur  Eutychienne  combat  la  prefence  réelle.  L'incom-  " 
patibilitéeft  évidente.  Comment  donc  s'eft  il  fait  que  les  Eu-  ** 
tychiens,  5c  les  Orthodoxes  n'ayent  jamais  eu  rien  à  démêler  " 
enfemble  fur  le  fujet  de  l'Euchariftie?  Se  peut-  on  imaginer  " 
que  les  Eutychiens  ayenc  crû  que  le  corps  de  J.  C.  n'eil  plus,  " 
ayant  efté  converty  en  la  (ubftance  divine,  &  que  cependant  " 
ils  ayent  crû  qu'il  eft  tous  les  jours  fubftantiellement  prefenc  "■ 
fur  l'Autel  \  Mais  iuppofons  qu'ils  foienc  tombez  dans  cette  " 
manifefte  contradiction  :  Peut- on  s'imaginer  que  les  SS.  Pères  " 
ne  s'en  foient  pas  eux  mêmes  avifez,  6c  qu'ils  ne  fe  foient  pas  "■ 
fervisde  ce  dernier  article  pour  impugner  le  premier  ,  en  leur '*• 
difant  :  Vous  croyez  avec  nous  que  le  corps  &  le  fang  du  Sau-  " 
veur  font  réellement  &;  fubflanticlfement  prefens  dans  l'Eu-  " 
chariftie,  &c.  Pourquoy  donc  dites-vous  que  ce  corps  &;  ce  «<' 
fang  ne  font  plus  &  qu'ils  ont  cfÊé  changez  en  la  divinité  ?  Ce,  " 
pendant,  ils  ne  l'ont  pas  fait.  Ils  font  demeurez  les  uns  &  les  " 
autres  dans  une  paix  profonde  à  cet  égard.  En  vérité  cette  " 
paix  efb  une  énigme  &  on  myftere  pour  moy,  dont  je  voudrois  « 
bien  avoir  l'intelligence.  Mais  ce  n'eft  pas  tout.  Ce  que  je  vay  « 
dire  eftencore  plusfurprenant.  Les  SS.  Pères  employent  po-  '«- 
lîtivement  le  S.  Sacrement  pour  réfuter  l'erreur  Eutychienne  « 
en  cette  manière.  Il  faut  qu'une  image  ait  fon  original:  caries  " 
peintres  imitent  la  nature  &;  peignent  les  images  àt^  chofes  ff 
qu'on  Toit.  Si  donc  les  divins  myfteres  font  les  figures  d'un  «« 
vray  corps ,  il  s'enfuit  que  le  Seigneur  a  encore  maintenant  un  «« 
corps,  non  changé  en  la  nature  de  la  divinité,  maisremply  de  «^ 
la  gloire  divine.  C'eft  en  propres  termes  le  raifonnement  de  « 
Theodoret  dans  le  fécond  Dialogue  ,  &:  il  répète  la  même  " 
fhofe  &;  le  même  fens  en  deux  autres  lieux.  Que  veut- il  dire  '«- 
d'alléguer  le  S.  Sacrement  comme  une  image  &une  figure  q^LÙ  '* 

Tt  il) 


^''336  Liv.  V.  €splicxtion  des  pnjfages  de  Theodoret 
j,  prouve  la  vérité  du  corps  de  J.  C  fans  le  fouvenir  que  c'eft  le 
j,  corps  même  réellement  ?  Si  dans  cette  difpute  il  n'eult  pas  par- 
„  lé  de  l'Eucharilliie,  à  la  bonne  heure,  je  dirois qu'il  ne  s'en  efl: 
pas  fouvenu.  Mais  l'alléguer,  6c  de  deux  argumensqui  s'en 
peuvent  tirer,  l'un  à  i'ufage  de  Rome  &  l'autre  à  la  façon  de 
jj  Genève,  laifler  celuy  de  Rome  6c  choifir  celuy  de  Genève,  c'eft 
5,  fans  mentir  fcandalifer  tous  les  Catholiques  éc  fe  déclarer  Cal- 
,,  vinifte  trop  ouvertement. 

Je  veux  bien  encore  ajouter  ce  qu'il  dit  en  un  autre  endroit 
de  ce  même  ouvrage. 

N'eft  ce  pas  auiTi  une  chofe  fort  furprenante ,  que  les  Euty- 
chiens  niant  que  J.C,  euft  un  corps  depuis  (a  glorification,  & 
difputant  là.deflus  fortement  contre  les  Catholiques,  les  Ca- 
tholiques ne  fe  foient  point  avifez  de  leur  dire:  Etqu'eft-  ce 
donc  que  vous  adorez  en  commun  avec  nous  quand  vous  ado- 
î'féz  le  Sacrement?  Voulez  vous  que  le  pain  foit  formellement 
c'onverty  en  la  nature  divine,  6cque  ce  foit  l'effence  éternelle 
immédiatement  qui  foit  produite  par  cette  converfion  ,  pour 
eftre  adorée  fous  ces  accidens  ?  Il  faut  avouer  que  fî  le  culte  de 
l'Euchariftie  étoit  en  ce  temps-là  ce  qu'il  eft  aujourd'huy  dans 
*là  communion  Romaine,  la  molefTe  des  Pères  n'eft  nullement 
fupportable,  de  n'avoir  pas  fait  expliquer  les  Hérétiques  fur  un 
article  fi  important. 

Mais  après  avoir  écoute  ces  difcours  de  M.  Claude  5  il  eft 
jufte  auflï  qu'il  écoute  à  fon  tour  la  réponfe  que  nous  avons  à 
y  faire  ,  qui  ne  peuteftre  plusprécife.  Car  il  n'y  a  qu'à  luy  dire 
en  un  mot ,  qu'il  n'y  a  rien  de  vray  dans  tout  ce  qu'il  avance  {î 
hardiment,  ôc  que  ce  n'eft  qu'un  amas  de  fuppoiitions  faufles 
&  téméraires. 

Il  n'eft  pas  même  neceflaire  de  le  prouver,  après  ce  qui  a 
eftcétably  dans  le  chapitre  précèdent.  Car  tout  ce  difcours  a 
pour  unique  fondement,  que  les  Eutychiens  foùtenoient  que 
J.  C.  n'avoit  plus  de  corps,  &  qu'ils  étendoient  leur  dogme, 
d'une  feule  nature  en  J.  C.  jufqu'à  cette  confequence  qu'il 
étoit  purement  immatériel.  Or,  nous  avons  vu  parleurs  pro- 
pres paroles ,  &  par  le  témoignage  des  Auteurs  qui  ont  conféré 
avec  eux  ,  que  ce  principe  eft  faux,  qu'ils  vouloient  que  J.  C. 
fu[i  Dieu  parfait  &  homme  parfait  ^  qu'ils  reconnoiftoient  qu'il 
avoit  un  corps ,  ?^  que  ce  n'étoit  point  un  corps  phantaftique 
comme  les  Marcionites  &  les  Valentiniens  le  pretendoient. 


51 

M' 

»> 

1' 
S' 
»» 
il 

SI 
3> 


&f  de  trois  At^teurs  qui  ont  parlé  comme  luy.  ^^j 
On  ca  fait  voir  aiilîidans  la  répcuife  générale  par  le  témoi-  Ch.  XH. 
gnagede  Nicephore,quefi  quelques  uns  d'cntr'eux  ont  dit  que 
J.  C.  n'avoiceuque  les  apparences  d'un  corps^iis  enrendoient 
d'un  corps  mortel  Sipalfible;  èc  qu'ils  difoient  en  même  temps 
qu'il  avoit  pris  dans  le  Ciel  un  corps  immortel  &  incorruptible. 
Ainfi  tout  ce  que  M.  Claude  baftit  fur  ce  beau  Fondement  tom- 
be par  terre.  Et  il  cft  vifible  au  contraire  que  les  Euty chiens 
n'ont  point  efté  obligez  parla  fuite  de  leur  herefie  à  nier  que  le 
corps  de  J.  C.  fuft  réellenient  prefentdans  l'Euchariftie;  qu'ils 
ontpù  l'y  reconnoiftre  comme  ils  l'ont  reconnu  dans  toutes  les 
actions  de  fa  vie ,  &  que  c'eft  avec  raifon  qu'ils  n'ont  pas  fait  de 
l'Euchariftie  un  point  de  conteftation  entre  eux  èi,  l'Egliie  Ca- 
tholique, 

Que  M.  Claude  ne  demande  donc  plus  fi  l'on  fe  peut  ima- 
y,ner  que  les  Euty  chiens  aycnt  cru  que  le  corps  de  I.  C.  n'ej}  plus, 
ayant  efiè  converty  en  la  fubftance  divine  ,  ^  que  cependant  ils 
ayent  cru  qu'il  cfl  tous  les  jours  ftibflantielleyncnt  prcfcnt  fur  l' Au- 
tel. Ou  qu'il  fe  réponde  à  luy- même  qu'ils  ne  fe  font  point  ima- 
ginez que  le  corps  de  J.  C.  ne  fuft  plus ,  &  que  fa  matière  fuft 
anéanties  Se  qu'après  l'avis  qu'on  luy  en  avoit  donné  dans  la 
première  partie  de  cet  ouvrage,  il  eft  étrange  qu'il  n'ait  pas  eu 
plus  de  foin  de  s'inftruire  du  fond  de  leur  herefie,  &  qu'il  aie 
continué  d'en  parler  avecauffi  peu  delumiere  dans  fa  troifiéme 
rcponfe.- 

La  feule  confequence  qu'ils  ont  dû  tirer  de  leurdodrine,  à 
Pégard  de  l'Euchariftie,  c'eft,  que  la  nature  humaine  qu'ils  ad- 
mettoient  réellement  enJ.C.  ayant  perdu  félon  eux  fes  proprie- 
cez,6c  ne  faifant  plus  qu'une  nature  avec  la  divine}  ilsdevoienc 
dire  auflî  que  le  corps  de  J.  C.  qu'ils  reconnoifl^)ient  dans  l'Eu- 
chariftie étoit  le  corps  de  la  divinité  même.  Auffi  avons  nous 
fait  voir  que  c'étoit  là  leur  fentiment.  Ce  qui  leur  avoit  attiré 
ce  reproche  d'Eutymius, qu'il  s'enfuivroitde  leurdoélrine  que  le 
Sacrement  du  pain  qui  eft  la  chair  de  I.  C.  ri  eft  pas  le  corps  dej.  C. 
mais  le  corps  de  la  Divinité  ;  c'eft-à-dire  que  c'eft  un  corps  qui  Voyez  perp, 
n'eft  plus  une  nature  à  part,  mais  qui  ne  fait-plus  qu'une  même  ^°"^  »'  '•  ^ 
nature  avec  la  divine-  Et  cet  autre  d'Ifaac  Catholique  d'Armé- 
nie qui  les  accufe  de  changer  les  truditions  de  l'Eglife  Catholique^ 
^  de  n'appeller  pas  la  participation  des  myfieres  ou  le  facrifîce  du 
pain  qui  eft  la  chair  de  J.  C  le  corps  de  J.  C.  cormne  J.  C.  mefmg  l'd- 
appelle ,  mais  de  le.  nommer  divinité. 


558      Li  V.  V.  Explication  des  pajfages  de  Theodoret 

Mais  ce  leroic  témoigner  peu  d'intelligence  dans  leur  lan- 
gage que  de  conclure  de- là  queJe  corps  qu'ils  appelloient  di- 
vinité n'étoit  donc  pas  un  corps.  Car  comme  ceux  qui  difoienc 
que  le  Verbe  avoit  été  changé  en  chair,  vouloient  en  même 
temps  que  cette  chair  fufl:  &  Dieu  6c  chair-,  de  même  ceux  qui 
renverfanc  cette  hypothefe  ,  foùtenoient  que  la  chair  de  J.  C. 
avoit  été  convertie  en  Dieu ,  enfeignoient  en  même  temps 
qu'elle  étoit  &  chair  bi  Dieu,  c'eft-àdirè  que  Dieu  &  cette 
chair  ne  faifoient  qu'une  nature  divine. 

Les  Eutychiens  ont  donc  parlé  de  l'Euchariftie,  comme  leurs 
principes  les  y  obi  igeoientjScl'on  peut  dire  qu'il  n'y  a  point  de 
matière  où  ils  les  ayent  iuivis  plusexaclement.  Ils  n'avoient  au- 
cun fujet  d'embrafler  fur  cet  article  un  autre  (entiment  que  ce- 
luy  de  rEglife,c'efl:  à-direque  celuy  de  la  prefence  réelle.  Aufli 
ne  l'ont  ils  point  fait.  Mais  la  bizarrerie  de  leurs  expreffions 
devoit  s'étendre  jufques  à  ce  myfterej  &  comme  ils  croyoienc 
que  le  corps  de  J.  C  y  étoit  réellement  prefent,  ils  dévoient 
l'appeller  des  mêmes  noms  qu'ils  donnoient  au  corps  de  J.  C. 
■confidcré  dans  le  Cieli  &,c'eft  encore  ce  que  l'on  trouve  qu'ils 
ont  fait.  Ainfi  jamais  figures  ny  railleries  ne  furent  plus  mal 
employées,  que  celles  que  M.  Claude  fait  fur  ce  fujet. 

Mais  il  raifonne  un  peu  plus  jufte  à  l'égard  de  la  manière 
dont  i^l  fuppofe  que  les  Pères  dévoient  combattre  les  Euty- 
chiens. Et  l'on  va  voir  qu'il  nefe  trompe  que  dans  le  fait.  Peut- 
4in  s^imapner ,  dit-  il ,  qu.e  les  F  ères  nefe  foientpoi-  Jervk  de  l'article 
■de  l' E-icbariftie  pour  impwincr  l'erreur  des  Eutychiens ,  en  leur  di- 
Jknt  :  J^o'iis  croyez^  avec  nous  que  le  corps  (^  le  f-mz,  du  Sauveur 
font  réellement  (^  fubfiantieUement  frefens  dans  T Euchariflie.  Et 
fourquoy  donc  dites-  vous  que  ce  corps  ç>  ce  fanq^  ne  font  plus ,  ^ 
qu'ils  ont  cfic  changez^en  la  divinité]  En  effet ,  il  y  a  quelque  ap- 
parence que  les  Pères  dévoient  employer  contre  eux  cet  argu- 
ment tiré  de  rEuchariftie,  ou  quelque  autre  femblable.  Caren- 
core  qu'il  nefuft  pas  concluant-,  puifque  lesEutychiens^comme 
nous  l'avons  fait  voir,  donnoient  un  corps  à  J.  C.  &.  dans  l'Eu- 
chariftie  &:  dans  le  Ciel  5  néanmoins  comme  le  procédé  des  Pè- 
res en  combattant  ces  heretiques,a  été  de  leur  imputer  les  fui- 
tes naturelles  &  neceiîaires  de  leur  opinion,&  de  les  accufer  ain- 
fi de  détruire  l'humanité  de  J.  C.  parce  que  leurs  principes  la 
^iétruifoient,  quoy  qu'ils  la  reconnuflfent  en  effet  -,  ils  ont  bien 
pû  en  fuivant  cette  conduite  les  accufer  d'anéantir  le  myftere 

de 


^  de  trois  auteurs  quiontp^â  rlé  comme  luy.        3  3  ^ 
es.  l'Eucharillie  ,  en  iv'admectant  qu'une  nature  en  J.  C.  Ch.  XÎÎ. 

Mais  comme  M.  Claude  a  fort  bien  jii2;e  qu'ils  pouvoient 
Utilement  employer  cec  argument,  fuppofé  qu'ils  icvUTent  la 
prefence  réelle  ,  U  doit  juger  auffi  qu'ils  n'ont  pu  remployer 
I     fans  la  croire. 

'  Il  n'y  a  donc  plus  qu'à  examiner  ce  qu'ils  ontfait  ;  &  d'a- 
bord M,  Claude  qui  difpofedes  hi(l:oires&  des  livres  félon  fcs 
j  befoins  ,  nous  déclare  qu'Us  n'y  ont  pas  penfé ,  qu'ils  font  de- 
lîieurez  les  uns  d^  les  autres  dans  une  faix  profonde  à  cet  é'iard^  û^v-t 
cette  faix  efiune  énigme  pour  luy  ,  dont  il  voudrait  bien  avoir  l'iris 
uHigenee. 

Mais  jamais  chofe  ne  fut  plus  facile  que  de  démêler  cette 
énigme,  ôc  de  faire  entendre  à  M.  Claude  ce  qu'il  n'entend 
pas.  Car  il  n'y  a  qu'à  luy  dire  que  les  Pères  ont  fait  ce  qu'il  leur 
impute  de  n'avoir  pas  fait  ^  qu'ils  onrprefle  lesEutychiens  par 
lemyfterede  l'Euchariftieen  toutes  les  manières  qu'ils  le  pou- 
voient faire ,  &  qu'il  eft  étrange  qu'il  art  oie  avancer  lur  la  foy 
ë'Aubertin  une  taufleté  dont  il  ell:  £  aifé  de  le  ccovaincre. 

Car  n'eft-ce  pas  des  Eutychiens  que  S.  Léon  parle  en  ces 
termes  dans  une  de  fe5  Lettres  :  En  quelles  ténèbres  d'^ignorance  ,  %'*•  *?"• 
en  'quel  engourdiffcment  de  Lâcheté  ces  gens  (ont-  ils  f  longez^  ,-  d^ 
n'avoir  pas  ehcore  af fris  ni  far  l'ouyeni  par  la  leclure  «ne  doEiri- 
ne  rct^ûe  de  tout  le  inonde  d'une  manière  ji  unifortne ,  que  les  langue.! 
mêmes  des  en  fans  annoncent  la  vérité  du  corps  ^  du  fang  de  J.  C, 
en  farticifant  au  Sacrement  de  la  foy  commune  'y  puifque  dans  ha 
diflribution  myjiique  qu'on  nous  fait  de  cet  aliment  fpirituel , on  nous 
le  donne  ,  &  non^s  le  recevons ,  afin  qu'en  recevant  la  vertu  de  ce 
fain  de  vie ,  nous  foyons  changezjjeureufement  en  fa  chair ,  fuifque 
luy  m'crne  a  eftéfait  nefire  chair. 

Ne  font-cepas  les  mêmes  Eutychiens  qu'il  avoit  en  viië  , 
lorfqu'il  dit.  dans  un  de  Tes  Sermons  :  Fuifque  le  Seigneur  nous   • '^/  fjpjiajj 
dit  ffï vous  ne  mangezja  chair  du  Fils  de  l'Homme ,  ^  ne  bcuve-z^  mcnfi^ 
fonfang  ,  vous  n'aurez^  foint  la  vie  en  vous  ,  nous  devons  de  telle 
forte  nous  approéher  de  lafacrée  Table  ^que  nous  ne  témoignions  at^ 
cun  doute  de  la  vérité  du  corps  é^  dufang  du  Seigneur.  Car  l'on  re- 
trait far  la  bouche  ee  que  l'on  croit  par  la  foy  ,  ^  cefi  en  vain  que  . 
ceux.  U  ré  fondent  A  m  E  N  ,  ^«/  combattent  ce .  qu'ils  reçoivent. 

Qui  font  ceux  que  ce  faint  Pape  condamne  en  cet  en- 
droit,  finon  les  Eutychiens  ?  Et  par  où  les  condamne  t'il,finon 
par  la  prefence  réelle,  en  les  accu(ant  de  parler  contre  ce  qu'ils 

Vu 


340    Liv.  V.  ExpUcAtîondespa,Jfa,^esdeTheodoret, 
reçoivent  par  la  bouche,  c'eft-à  dire  contre  le  corps  de  J.  C.  5c 
de  rainer  ainfi  ce  myftere  par  leur  docflrine. 

Si  cela  ne  fulîit  pas  encore  pour  donner  à  M.  Claude  l'intel- 
ligence de  cette  énigme  fi  terrible ,  qu'il  écoute  de  quelle  forte 
AnaftalèSinaïte  fe  lert  de  l'Euchariftie  contre  Timothéeun 
àcs  chefs  des  Eutychiens.i"////)/  a  ,  dit  i! ,  que  la  feule  divinité 
en  J.  C.  co7nmc  la  divinité  ne  peut  cjire  ni  viic  ^ni  touchée ,  ni  fa~ 
crifiée  ^qu  elle  n'  a  point  de  parties ,  quelle  efi  incapable  d'cjlre  man- 
gée ,  il  s'enfuit  elairement  que  Timothée  nie  atift-  bien  que  les 
Juifs  la  communion  des  myfleres  fierez^  du  corps  <ér  du  fang  de  J.  C. 
ET-  qutl  ne  croit  ni  ne  confelfc  que  c'efi  vcntablcment  le  corps  (y  le 
fing  vifble,  créé  ^  terre ftre  dej.  C.qui  cfidifribué  par  celuy  qui 
l'offre  en  prononçant  ces  paroles  :  Le  corps  &  le  fang  de  nofire  Sei- 
gneur S-  Sauveur  J.  C.  Car  foù  tenant,  comme  il  fait  d'une  part  ^  que 
La  divinité  efi  la  feule  nature  de  J.C.  ô-  la  nature  divine  eftant  in- 
capable d'eftre  maniée  ,  rompue  ,  divifée  ,  verfée  ,  vuidée  ,  changée , 
coupée  par  les  dents  j  il  faut  par  neccffîté  que  Timothée  fe  précipite 
dans  l'un  de  <es  deux  abîmes  ,  ou  qu'il  dife  que  la  divinité  eftpaf. 
fible  ^  fujctte  a  changement  ^  ou  qu'il  7iie  le  corps  (^  le  fan'i^  de 
J.  C.  qu'il  offre  ^  qu'il  reçoit  à  la  Table  myftique  ,  ^  qu'il  diftri- 
bue  au  peuple  avec  ces  paroles  :  Le  corps  ^  le  fang  de  nofire  Seiyieur 
J.  C.  car  fuivant  fes principes  ^  ildevoit plufiofi  dire ,  c'efi  la  feule 
divinité  de  nofire  Seiyieur. 

Anaftafe  ne  fait-il  pas  juftement  ici  tout  ce  que  nous^avions 
prévu  que  les  Pères  auroient  fait  contre  les  Eutychicns  -,  fup- 
pofé  qu'ils  ayent  cru  la  prefence  réelle?  Il  fe  fert  de  l'Eucha- 
riftie pour  réfuter  leur  erreur.  Il  les  accufe  delà  détruire  ,de 
nier  le  corps  de  J  C.  mais  il  les  en  accufe  paruneconfequence 
qu'il  rire  de  leur  dodrine  i&il  témoigne  au  contraire  qu'ils  de- 
favouoicnc  cçtzz  confeqnence  ,  puifqu'il  lapropofe  par  une  al- 
ternative, &  qu'il  conclut ,.  ou  qu'ils  admettoient  une  divinité 
palTible,  ou  qu'ils  nioient  le  corps  deJ.  C.  ce  qu'il  n'auroit  pas 
fait ,  (î  c'avoit  efté  formellement  un  de  leurs  dogmes ,  &  qu'ils 
eulfent  nié  la  veriré  du  corps  de  J.  C.  dans  rEuchariftie  par 
quelque  doga->e  formellement  foûtenu. 

Auflî  ce  même  Auteur  rapportant  en  un  autre  lieu  ce  que 
les  hérétiques  cnfeig-noient  dogmatiquement  touchant  cemy- 
ftere ,  il  leur  fait  faire  une  confeiTîon  exprefle  de  la  prefence 
ré. 'Ile.  A  Dieu  ne plaifc ^  fait-il  dire  à  cet  Eutychien  ,  que  notes 
difions  que  la  \jaerée  communion  n'efi  que  la  figure  de  Chrifl  ou  de 


Ê?  de  trois  <îAiiteufs  qui  ont  pxrlé comme  luy.        34T 

(impie  pain.  Mais  nous  y  recevons  ventahlcmtnt  le  corps  mhne  &  Ch.  Xllk 

le  fiiyi'^  même  de  J.  C.  Fils  de  Dieu  inearnê ,  (^  né  de  la  fainte 

Mère  de  Dieu  ^  toujours  Vierge  Mûrie.  C  efieeque  nous  croyons 

Q-  ce  que  nous  confcjfons  ,  félon  ce  que  J.  C.  a  dit  ù  fcs  difciples 

dans  la  Cène  myfiique  ,  en  leur  donnant  le  pain  vivifi.mt  :  Cecy 

eji  mon  corps. 

Rien  ne  fait  mieux  voir  combien  il  eft  important  pour  en- 
tendre les  lentimens  des  Eutychiensde  difiinguer  les  dogmes 
qu'ils  ont  formellement  foutenus  ,  d^^s  confequences  qu'on  en 
a  tirées  ,  que  les  deux  pallages  que  nous  venons  de  rapporter  , 
puifque  dans  le  premier  cet  Auteur  leur  impute  denier  le  corps 
de  J.  C.  dans  TEuchariftie  ,  &:  qu'il  le  leur  fait  confclTer  clai- 
rement dans  l'autre. 

On  peut  encore  juiz;er  par  là  que  'à  cet  argument  efloit  afTèz 
bon  pour  eftrc  propole  par  quelques  Pères  ^il  n'eftoit  pas  alfez 
deciiif'pour  faire  que  tous  s'en  fervilFent,  puifqu'il  n'eftoit  fon- 
de que  fur  une  confequence  que  les  Eutychiens  faifoientpro- 
feffion  de  defav.mer.  Et  c'eft  ce  qui  a  donné  lieu  à  quelques 
autres  d'employer  encore  l'Euchariftie  contre  ces  Hérétiques, 
d-'une  manière  différente ,  mais  qui  n'eftoit  pas  moins  forte ,  &.. 
de  ne  fe  fervir  que  de  la  qualité  d'image  du  corps  de  J.  C, 
qu'elle  polîede  par  fa  partie  extérieure. 

Car  il  n'eftoit  pas  tant  queflion  de  prouver  contr^eux  qac. 
J.  C.  avoir  un  corps,  puifqu'ils  Taccordoient ,  quede  leur  mon- 
trer que  ce  corps  n'eftoit  pas  changé  en  divinité  ,  ôc  qu'il  n'é- 
toit  pas  confondu  avec  la  nature  divine.  Or  c'efl  ce  que  l'on 
ne  prouvoit  pas  diredlement  en  regardant  rEuchariflie  par  fa 
partie  intérieure,  &  par  ce  qu'elle  contenoit  au  dedans,  pui/que 
les  Eutychiens pouvoient  répondre,  &  qu'ils  répondoient  en 
effet,  qu'il  eftvray  qu'elle  contenoit  un  corps ,  mais  un  corps'' 
divinifé  &  abforbé  dans  l'océan  de  la  divinité,  au  lieu  qu'en, 
regardant  l'Eucirarrftie  commet antitype  êc  comme  image  ,oni 
éombattoir  direttement  le  fond  de  leur  erreur. 

Car  on  leur  faifoit  d'abord  avouer  que  les  fymboles  myfli- 
ques  n'eftoient  pas  les  fymboles  de  la  divinité,  mais  du  corps 
&  da  fangde  J.  C.  &  c'efb  ceque  Theodoret  fait  dans :fx3a 
premier  Dialogue^  on  il  propole  cet  argument.  Vous  aye%J>tert 
rcPovdu ,  dit-il  à  l'Eufvchien  ,  &•  en  amateur  de  La  'veritè.  Car 
J.  C.  oyait  pris  le  lymbole  .^  ne  dit  pas  :  Ccjî  ici  ma  divinité  ^  mais- 
i  /  dit  -,  Ccj  efi  mon  corps. 

Vu  ij 


I4i    L  I V.  V.  Explication  des pajfages-âe  Theodoret^ 

Et  de  ce  principe  on  concluoic  que  J .  C.  avoit  donc  un  vray 
corps  ,  c'eft-à  dire  un  corps  qui  n'eftoir  pas  la  divinité.  Car 
s'il  eût  efté  la  divinicémêmc,lcs  Tymbolcs  de  ce  corps  aiiroient 
anffi  efté  iyml)oles  de  la  divinité. 
C'eft  leraifonnemeat  qui  ell  contenu  dans  ce  paffagede  ce 
Vw:(ii»xc.i5.  dialogue  de  Theodoretdont  M.Claudeaburc.  Il  faut  que  toute 
ima^e  ait  fon  ort<^iruil ,  comme  les  f  cintres  ne  font  qu'imiter  la  na- 
ture y  ^  quils  tirent  des  chofcs  vifhles  tout  ce  qu'ils  reprefentent^ 
Jdefi  vray  ,  dit  l'Eranifte.  Si  donc  ,  répond  l'Ortlioxloxe,  les 
divins  my/hres  font  des  ftqnes  d'un  "jray  corps ,  il  faut  que  le  corps 
du  Sauveur  (oit  encore  un  corps  humain  ,Q-  qu'il  n'ait  pas  efié 
ckangé  en  la  nature  de  la  divinité.  Car  le  principe  de  cela  eft 
<]ue  les  fymboles  ne  (ont  pas  figures  de  la  divinité ,  mais  d'un 
vray  corps, c'eft-à- dire  d'un  corps  non  diviniféi  &  l'Eutychien 
ne  defavotiant  point  ce  rapport  de  l'Euchariftie  comme  figure 
au  corps  de  J.  C.  TJieodorec  avoit  droit  d'en  conclure  la  lub- 
iîftance  de  ce  corps. 

C'eft  en  vain  que  M.  Claude  s'écrie  fur  cela  de  fa  manière 
enjouée  ;  Que  vcvt. il  dire  d'alléguer  le  S.  Sacrement  ^  comme  une 
image  ^  une  fîiure  qui  prouz>e  la  venté  du  corps  de  J.  C.  fans  fe 
fûuvenir  que  c'eft  le  corps  même  réellement  ■  ^i  dans  cette  difpu- 
te  ,  il  n'euft  pas  parlé  de  l'Euchariftie  ,  a.  la  bonne  heure  ,  je  di- 
rais qu'il  ne  s'en  eft  pas  fouvenu  :  mais  l'alléguer  ,  ^  de  deux  ar~ 
g4fmens  qui  S'en  peuvent  tirer  ,  l'un  à  l'ufage  de  Rome  ,  é"  l'^tutre 
k  la  façon  de  Genève  ,  laifcr  celuy  de  Rome  ,  &  choiftr  celuy  de 
Genève  yc'cfl  fans  mentir  fcanda.li fer  tom  les  Catholiques  ,  ^  fe 
déclarer  Calvinjftc  trop  ouvertement.  Si  M.  Claude  eftoit  hom- 
me à  profiter  d'un  avis  charitable  ,on  l'avertiroit  que  rien  ne; 
'  licd  plus  mai  que  la  raillerie,  lorfqu'elle  eft  Faufle.  Ceft  fa-' 
faute  ,  s'il  n'a  pas  vu  que  l'argument  de  Theodoret  eft  plus  à 
l'ufage  de  Rome,  ^ju'à  la  fa(^cn  de  Genève ,  comme  il  parle. 
Il  eft  vray  cju'il  ne  fe  fert  pas  en  cet  endroit  de  celuy  qu'il  pou- 
voit  tirer  de  l'Euchariftie,  comme  eftant  le  corps  même  de 
J.  C.  ainfi  que  S.  Leon&  Anaftafe  Sinaïte  ne  fe  font  pas  fer- 
vis  de  celuy  qu'ils  pouvoient  tirer  de  l'Euchariftie  comme  fi- 
gure :  mais  ce  que  l'on  doit  conclure  de  là,  c'eft  qu'ils  ont 
tous  efté  dans  le  (entiment  des  Catholiques.  Car  au  lieu  que 
la  dodrine  des  Calviniftesne  donne  lieu  d'employer  l'Eucha- 
riftie contre  les  Eutychiens  qu'en  qualité  de  figure  ,  celle  des 
Catholiques  donne  droit  de  i'employercorame  figure  &  conv 


ff^de  trots  Auteurs  qui  ont  parlé  coffime  luy.  543 
•me  réalité  ;  &  c'efb  juftemenc  ce  que  les  Pères  ont  fait.  De  Ch.  XIL 
force  qu'il  paroift  par  tout  cet  examen  ,  que  comme  les  Euty- 
chiens  ont  parlé  de  l'Euchariflie  de  la  manière  qu'ils  en  dé- 
voient parler  en  joignant  la  dodrine  de  la  prefence  réelle  avec 
leur  erreur ,  les  Pères  an (îi  les  ont  combattus  par  tous  les  ar- 
gumens  que  Ja  docl:rine  Catholique  leur  pouvoit  fournir  rai- 
lonnablement  contreiesconfequenccsde  cette  erreur. 

J'ajoûteray  feulement  ici , qu'encore  queTheodorec  appel- 
le l'Euchariflie  du  mot  d'/;«^zgf  &de  type  ,  il  nous  avertit  néan- 
moins expreilement  ,  qu'il  faut  ajourer  un  fupplément  à  ce 
mot ,  &  croire  que  cette  image  efl:  l'original  même,  comme 
nous  l'avons  fouvent  remarqué,  &  qu'ileft  encore  vifible qu'il 
fefertdece  terme  au  même  fens  en  un  autre  lieu  dutroifiéme 
dialogue  ,dont  les  Minières  abufent  aulFi  fort  mal  à  propos. 
Le  voicy. 

Theodoret  ayant  deflein  de  prouver  à  l'Eutychien  que  J.  C. 
n'avoic  fouffert  que  dans  fon  corps ,  l'Eutychien  réplique  :  Ccjl 
donc  le  corps  qui  nous  a  procure  le  falut.  Comme  s'il  eftoit  ridi- 
cule de  dire  qu'un  corps  pufteftre  caufe  de  noflre  falut.  Pour 
réfuter  l'objeftion  contenue  dans  ces  paroles,  Theodoret  ré- 
pond ce  qui  fuit  :  Ce  rCeJi  pas  le  corps  d'un  Jimplc  homme  ,  maif 
le  corps  de  Notre  Seigneur  I.  C.  Fils  unique  de  Dieu.  Que  fi  ce 
corps  vous  femble  mèpri fable  ^  digne  de  peu  d' honneur ^  comment 
efiimez^vous  que  fon  type  cft  Jalutaire  ^  digne  de  refpefî!  Et  com- 
ment fe  pourrait- il  faire  que  le  type  meritafi  l" adora ti on  ^  la  vé- 
nération ,  ^''que  l" antitype  même  nefufi  digne  que  de  mépris .' 

Les  Miniftres  infèrent  de  laque  Theodoret  comparant  l'Eu- 
chariflie comme  image  avec  le  corps  de  J.  C.  comme  origi- 
nal ,&  concluant  que  fî  elle  eft  digne  d'honneur  ,  fon  origi- 
nal l'eft  auffi  ,  il  faut  qu'il  diftingue  l'Euchariflie  de  cet  ori- 
ginal ,  6c  qu'il  ait  cru  qu'elle  ne  contenoit  point  le  corps  de 
J.  C.  parce  qu'autrement  il  n'y  auroit  point  de  comparaifon 
à  faire  entre  l'un  &  l'autre:  Mais  ils  fe  trompent  ,  &  l'on  doit 
conclure  tout  le  contraire  de  ce  paflàge.  Car  ce  que  Theodo- 
ret veut  prouver  ,  c'efl  que  le  falut  nous  a  eflé  procuré  par  le 
corps  de  J.  C.  Et  quand  il  accufe  les  Eutychiens  de  l'eflimer 
vil&  méprifable,  il  veut  dire  qu'ils  nel'efliment  pas  capable 
de  nous  avoir  apporté  un  fi  grand  bien.  Le  moyen  qu'il  prend 
pour  les  convaincre,  c'efl  qu'ils  croycnt  que  l'Euchariflie  qui 
efl  l'image  du  corps,  eft  falutaire  &  digne  de  rcfped.  Il  fup- 

V  u  iij 


344     ^iV-  V.  Explication  despajfages  de  Theodoret , 
pôle  donc  qu'ils  diloienc  de  i'Euchariihe  ce  qu'ils  nevouloient 
pas  dire  du  corps  de  J.  C.  &  qu'ils  avoiioient  qu'elle  eft  caufe 
de  nôtre  (aiuc  en  la  manière  que  les  Orthodoxes  difoient  que 
le  corps  de  J.  C  en  efloir  la  caufe. 

Or  reconnoiftre  que  l'Euchariftie  eft  caufe  du  falut  comme 
le  corps  de  J.  C.  c  elt  reconnoiftre  proprement  qu'elle  eft  le 
vray  corps  de  J.  C.  n'y  ayant^fclon  la  Théologie  des  Peres^  que 
la  chair  du  Verbe  qui  ait  cette  torce  j  parce  que  ,  comme  dit  ici 
Theodoret ,  &  comme  S.  Cyrille  le  dit  en  tant  d'endroits  dif- 
ferens,  cen'eft  pas  la  chair  d'un  (Impie  homme,  mais  la  propre 
chair  du  Verbe.  Ainfi  l'argument  de  Theodoret  eft  que  lesEu- 
tychiens  ne  pouvoient  refufer  au  corps  dej.  C.  conlideré  en 
luy  mêine^  la  qualité  de  principe  de  vie  qu'ils  luy  accordoienc 
en  le  confiderant  dans  l'Euchariftie  &  couvert  des  voiles  qui  lui 
font  donner  le  nom  d'image  &:  de  type.  Cet  argument  eftoic 
bon  ,  mais  il  n'eftoit  pas  abfolument  convaincant  à  l'égard  des 
Eutychiens  ,  qui  pouvoient  répondre  qu'Us  accordoient  que 
l'Euchariftie  eftoit  principe  du  falut  ,  parce  qu'elle  contenoic 
le  corps  de  J.  C.  divinifé  ,  &:  qu'ils  ne  pouvoient  dire  la  même 
chofe  du  corps  de  J.  C.  confideré  comme  une  nature  feparée 
de  la  divinité  ,  tant  parce  qu'ils  ne  croyoient  pas  qu'il  euft  ja-  '. 
mais  fait  une  nature  feparée,  que  parce  qu'une  nature  non; 
divinifée  n'eft  pas  capable  d'eftre  principe  du  falut. 

Au  rcfte  comme  la  comparaifon  qu'il  vouloir  faire  en  cet 
endroit  entre  TEuchariftie  ôi  le  corps  de  J.  C.  l'a  porte  à  fe 
iervirdu  mot  d'image ,  &:à  la  comparer  avec  le  corps  de  J.  C. 
comme  avec  fon  original  ,  quand  il  a  une  autre  vue  ,  &  qu'il 
compare  l'Euchariftie  avec  les  fîmples  figures  du  corps  de 
J.  C-  qui  ne  le  contenoient  point  ,  il  marque  expreftemenc 
qu'elle  contient  l'original  même.  C'eftce  que  l'on  voit  dans  ce 
pafTage  de  fon  Commentaire  fur  l'Epiftre  aux  Corinthiens^ 
UApofire  ,  dit- il  :,  fait  re(fouventr  les  Corinthiens  de  cette  très- 
fainte  nuit  'dans  laquelle  le  Seigveur  mettant  fin  à  la  fafque  typi- 
que ,  montra  le  vray  original  ou  archétype  de  cette  fi'iftre  ,  ouvrit 
les  portes  du  Sacrement  fulutaire ,  ^  donna  fon  précieux  corps  ^  fon 
précieux  fang  ,  non  feulement  aux  onz^  y4p>ofires  ,  mais  à  Judas 
mime. 

Ainfi  félon  Theodoret  l'Euchariftie  eft  tout  en fembie  ar- 
chétype &type  ,  original  &  figure  Elle  eft  archétype  ou  origi- 
Jiial  à  l'égard  des  fîmples  figures  de  J.  C.  qui  ne  contenoient 


(^de  trots  Auteurs  qui  ont  pdrU comme  luy.  545 
poinc  fon  corps ,  parce  qu'elle  le  contient ,  &  que  les  médians  Ch.  XII. 
mêmes,  comme  Judas,  l'y  reçoivent.  Et  elle  efb  type  à  l'égard 
de  luy-même  confideré  dans  fon  état  naturel  ^  parce  que  ce 
corps  y  eft  caché  &  enveloppé  de  voiles ,  qui  ne  font  que  le 
fignifier  fans  nous  permettre  de  le  voir  ,  &  qu'il  efl  dans  le 
Ciel. 

On  a  crû  devair  traiter  avec  étendue  ce  qui  regarde  cet  Au- 
teur, parce  que  les  Miniftres  en  font  le  principal  appuy  de  leur 
herefie ,  &  qu'on  voit  fes  palfages  à  la  tefte  de  tous  leurs  Li- 
vres. Peut-eftre  qu'ils  y  regarderont  de  plus  prés  à  l'avenir, 
&  que  ceux  qui  fe  piqueront  de  quelque  fîncerité  changeront 
de  langage  fur  ce  fujec. 


Fin  du  cinquième  Livre. 


LIVRE  SIXIEME- 

QJJ  E    L'ON     REÇOIT     J  £  S  U  S  -  C  H  R  I  S  T 

corporellcment  dans  l'Euchariftie. 


CHAPITRE    PREMIER. 

Divers   fens  du  mot  de  mander  :  BxprcJJions  différentes   qui  eK 

doivent  naifire  à  l'éz^ard  de  l'Eticharifiie  fuivant  la.  doHrint 

de  la  frefence  réelle  ^  de  la  Tranffubjlantiation, 

A  plupart  des  difputes  des  hommes  ne  viennenc 
que  de  l'ambiguité  des  termes  ,  &  cette  ambi- 
guïté vient  ordinairement'  de  ce  qu'y  ayant  plus- 
de  chofes  que  de  mots ,  on  efl:  contraint  de  fe 
fervir  d'un  même  tesme  pour  exprimer  diverfes 
idées  qui  ont  quelque  rapport  enfemble.  Ainfî 
ce  même  terme  étant  lié  dans  l'efprit  avec  ces  différentes  idées, 
il  arrive  fouvent  que  l'on  peut  le  nier  &  l'affirmer  d'une  même 
chofe  ,  parce  qu'une  de  ces  idées  peut  convenir  à  cette  chofe, 
êcque  l'autre  n'y  convient  pas  ;  ce  qui  formant  une  contradic- 
tion apparentedans  les  termes,  qui  eft  nulle  dans  le  fond, en- 
gage fouvent  dans  l'erreur  ceux  qui  ne  prenant  pas  gardeàces^ 
divers  fens ,  veulentfe  fervir  de  l'un  pour  exclure  l'autre. 

On  verra  dans  la  fuite  que  toutes  les  difficultez  que  les  Mi- 
niftres  forment  fur  la  manducation  corporelle  de  la  chair  de* 
J'.  C.  ne  font  fondées  que  fur  des  équivoques  de  mots,  du  gén- 
ie de  cellesdontnous  parlons.  Mais  avant  que  de  les  propofer 
en  particulier  ,  il  eft  bon  de  coniîdéreren  gênerai  les  diverS' 

fens 


elî  mungê  corporelîement  dans  TEuchanfiie.  ^^j 
ièns  aufquels  le  mot  de  nungcr  ^eut  eftre  pris,  &  les  diverfes  Ch  II. 
expreiîlons  qui  en  peuvent  naiftre  à  l'égard  de  l'Euchariftie, 
afin  qu'on  puiïïè  prévoir  ce  qu'il  faut  s'attendre  de  rencontrer 
dans  les  Pères,  en  fuppofant  qu'ils  ont  parlé  de  rEuchariflie 
dans  le  fèntiment  des  Catholiques. 

Comme  il  n'y  a  gueres  d'a<n;ion  plus  ordinaire  dans  la  vie 
que  le  boire  &  le  manger,  il  femblerojt  d'abord  qu'il  n'y  deufl 
rien  avoir  de  plus  connu  &  de  moins  équivoque  que  ces  mots. 
Et  en  effet,  quand  on  s'en  fert  en  gênerai ,  6c  fans  les  appliquer 
à  aucun  fujet  particulier ,  tout  le  monde  prefque  fe  porte  à  la  ^ 
même  idée,  &.  conçoit  cette  f^uite  d'aiflions  corporelles  qui  s'e- 
xercent fur  les  alimens. 

Ainfi  parce  qu'on  les  divife  &  qu'on  les  coupe  avec  les  dents, 
qu'on  les  goufte,  qu'on  les  avale,  qu'on  les  reçoit  dans  l'efto- 
mach,  qu'on  les  digère,  qu'on  s'en  nourrir  i  le  terme  de  man- 
ger nous  reprefente  toutes  ces  différentes  actions  &:  les  com- 
prend toutes. 

Mais  parce  qu'il  arrive  quelquefois  que  quelques-unes  de  ces 
adions  font  empefchées  &:  ne  s'exercent  pas  toutes  fur  l'ali- 
ment j  il  doit  arriver  de  là  ,  ou  que  l'on  reflêrre  le  fens  du  mot 
de  mangerpouT  ne  luy  faire  fignifier  que  ces  acfiions  qui  ne  font 
pas  empefchées  5  ou  qu'en  le  laiffantdans  fa  fîgnification  gène-  - 
raie  on  le  nie  des  fujets  aufquels  on  ne  peut  appliquer  qu'une 
partie  de  cesacflions,  &  non  toutes  celles  que  ce  mot  renferme. 
Le  langage  ordinaire  autorife  l'un  &  l'autre  ufage.  Car,  par 
exemple,  quoy  qu'un  brochet  avalant  un  autre  brochet  ne  le 
brife  pas  avec  les  dentSj  néanmoins  parce  qu'il  l'avale,  qu'il  le 
goufte  &  le  digère,  nous  nelaiffonspas  de  dire  qu'il  le  mange. 

Au  contraire,  parce  qu'on  ne  brife  point  les  pillules  dans  la 
bouche,  qu'on  tafche  de  ne  les  goufter  que  le  moins  qu'on 
peut,  qu'on  ne  les  digère  point,  on  dit  bien  que  l'on  prend  des 
pillules,  mais  on  ne  dit  point  que  l'on  en  mange. 

Qiie  s'il  arrive,  que  ce  que  l'on  prend  non  feulement  ne  foit 
point  brifé  ny  goufté,  mais  qu'il  ne  faffe  aucune  imprelîion  fen- 
iîble  fur  nous,  alors  il  eft  très- rare  qu'on  fe  ferve  du  mot  de 
manger^  &  l'on  dirabien  plùroft  que  l'on  ne  le  mange  pas. 

On  neditpoint,  parexemple,  qu'un  homme  ait  mangé  du 
plomb,  parce  qu'on  luy  en  aura  fait  avaler  des  balles,  comme 
on  fait  en  certaines  maladies. 

On  ne  dit  point  que  l'on  mange  de  l'air,  quoy  qu'il  entre  par 

Xx 


54^  Liv.  VI.  ^e  le  corps  de  Jefks-Qhriji 

noftre  bouche.  Ecfi  nn  elprit  prenant  pcflèflion  du  corps  d'un 
homme  entroit  par  fa  bouche  ,  on  ne  diroic  point  qu'il  auroit 
mangé  cet  efprit. 

Cela  fait  voir  que  l'idée  qui  répond  à  ce  mot  de  w/z»grr,enfer- 
me  ordinairement  autre  chofe  que  le  feul  palTage  d'une  matière 
qu'on  prend  par  la  bouche  &:  qui  paflè  dans  refl:omach,&  qu'el- 
le comprend  cette  fuite  d'aclions  dont  nous  avons  parlé  :  de 
forte,  que  s'il  arrivoit  qu'il  y  euft  quelque  chofe  que  l'on  prift 
feulement  en  cette  manière^  6c  que  l'on  fift  paffer  de  la  bouche 
dans  l'eftomach  ,  il  arrivcroit  fans  doute  q^uon  diroit  qu'on  la 
mange  &  qu'on  ne  la  mange  pas. 

On  diroit  qu'on  ne  la  mange  pas,  en  renfermant  fous  cz^%  ter- 
me l'idée  entière  de  toutes  les  actions  qu'il  comprend  dans  fa 
fîgnificarion  ordinaire.  Car,  comme  il  ne  conviendroit  pas  au 
fujet  félon  ce  fens,  on  auroit  lieu  de  le  nier. 

Et  on  diroit  auffi  qu'on  la  mange  ,  en  relTerrant  l'étendue  de 
ce  terme,  6c  ne  l'appliquant  qu'à  une  de  cesaclions,  qui  feroit 
celle  de  faire  pafler  cette  chofe  de  la  bouche  à  l'eftomach. 

Ce  qui  d'onneroit  plus  de  lieu  de  tomber  dans  cette  contradi- 
(flion  apparente,  c'eft  que  quoy  que  l'idée  totale  qui  répond  aa 
mot  de  manquer  comprenne  ces  différentes  acftions,  néanmoins 
l'es  hommes  ne  font  point  convenus  s'il  n'y  en  a  point  quelqu'u- 
ne qui  y  foirefTentielle.  &  dont  les  autres  foient  feulement  des 
préparations  &  des  fuites.  De  forte  que  félon  les  différentes  im- 
prelîîons  dont  l'efprit  c  ft  frappé  fur  cela,  il  peut  regarder  tan- 
tort  une  de  ces  aclions  comiTie  cffentielle  &;  tantoftuneautre. 
Trad:,  de  "     Par  exemple,  Guillaume  Evefque  de  Paris  diren  un  endroit,, 
que- manger  c'eft  propremer.t  fe  nourrir,  &;  que  routes  les  au- 
tres aclions  qui  fe  font  en  mangeant  ne  font  que  des  prépara;, 
tiens  :  Incorporatio  cibi  ,  dit  -  il,  verè  comejîia  efl\  catera  antenv 
qua  ipfum-pracedîint  fraparationes  fiint  ad  comeftionem  ^    Et  fé- 
lon ce  fens  cet  Auteur  doit  nier  que  toutes  les  chofes  qu'on  ne 
digère  pas,  &  dont  on  ne  fe  nourrir  point,  foient  effccli - 


Suciur, 


vement  mangées. 


Mais  un  Auteur  qiii  aura  une  autre  vûë,  ne  laifîèra  pas  de- 
dire  des  chofes  mefmes  dont  on  ne  fe  nourrit  points  qu'on  les 
mange. 

Que  fron  prend' l'a  peine  d'appliquer  ces  notions  à  l'Eucha- 
riftie,  &  de  prévoir  de  quelle  forte  les  Pères  ont  dû  fe  fervir 
du  mot  de  manger  à  cec  égard  en  parlant  conformément  à  la 


êlî  mangé  corporeUement  dans  rEucharifiie.       549 
dodrine  delapreience  réelle,  donc  on  a  prouve  qvx'ils  ont  efté  Ch  II. 
très  perfuadez  j  A  eft  facile  déjuger  qu'ils  ont  pu  dire  que  l'on 
mange  le  corps  de  J.  C.  dans  l'Èuchariftie ,  &:que  l'on  ne  l'y 
mange  pas. 

Ils  ont  pu  dire  qu'on  le  mange  ,  parce  qu'en  efFetce  facré 
corps  entre  parla  bouche  dans  l'eftoniach  ,  &:  qu'il  y  entre  mê- 
me revêtu  d'un  voile  qui  donne  lieu  d'exercer  toutes  lesaélions 
ordinaires  qui  Te  font  en  mangeant;,  &.  d'attribuer  le  tout  au 
corps  de  J.  C. 

Ils  ont  pu  dire  auffi  que  l'on  ne  le  mange  pas ,  parce  que  le 
corps  de  j.  C,  n'eft  ny  brifé  ,  ny  rompu  par  les  dents,  ny  gouftë 
ny  digéré  en  luy  même  ^  5c  que  l'on  ne  dit  pas  ordinairement 
que  l'on  mange  les  chofes  lur  lerquclles  on  n'exerce  point  ces 
acliions. 

Ainfi  il  y  a  un  fens  &  un  fens  tres-commun  &  très  ordinaire, 
dans  lequel  on  doit  dire  que  nonfeulcment  les  méchans,  mais 
les  bons  mêmes  ne  mangent  pas  le  corps  de  J.C. 

Et  comme  les  aftions  corporelles  font  les  images  de  celles  de 
l'ame,  8c que  l'on  ne  fçauroit  gueres  exprimer  celles-  cy  que  par 
des  métaphores,  il  eft  aife  de  juger  qu'on  doit  dire  que  l'on  man- 
ge ou  que  l'on  ne  mange  pas  le  corps  de  ]•  C.  félon  que  l'on 
n'exerce  pas  les  aclions  fpirituellesqui  répondent  à  ces  actions 
corporelles  qu'on  appelle  du  nom  de  manducation. 

Ainfi  comme  manger  corporeUement  félon  fon  idée  totale 
c'eft  prendre  l'aliment  par  la  bouche,  le  divifer  avec  les  dents, 
le  goufter ,  le  faire  paflcr  dans  l'eftomach  ,  le  digérer  &  l'in- 
corporer à  la  maflcde  fon  corps  :  manger  fpirituellement  c'efl: 
s'unir  à  un  objet  fpirituel  par  la  connoiflance,  le  feparer  com- 
me en  diverfes  parties  par  nos  diverfes  penfées,  le  goufter  par 
noftre  amour,  le  fairepaffèr  de noftre intelligence  dans  noflre 
mémoire,  en  occuper  noflre  ame  pour  en  tirer  le  fuc,  &  l'y 
unir  Cl  étroitement  qu'elle  en  reçoive  une  force  &  une  vigueur 
Ipirituelle. 

Et  de -là  on  conclut  neceffairement  que  les  juftes  peuvent 
manger  fpirituellement  le  corps  de  J.C.  lors  même  qu'ils  ne  le 
reçoivent  pas^Sc  que  les  méchans  ne  le  mangent  pas  lors  même 
qu'ils  le  reçoivent. 

Que  l'on  peut  nier  de  plus  à  l'égard  tant  des  juftês  que  des 
méchans ,  qu'ils  mangent  le  corps  de  J.  C.  félon  le  fens  le  plu* 
ordinaire  du  mot  de  manger.  :i,i^:^ 

Xx  ii 


3_jô-  Lïv.  VI.  ^e  le  corpss  de  Jcfks~-y[hrïfi' 

.îl  'O  •  Ef  1"^  ^'""  P<^"^  affirmer  aulîi  cane  des  juftes  que  des  mê- 
chans  qu'ils  mangent  le  corps  de  J.  C.  puifqu'il  encre  dans  la 
bouche  des  uns  Se  des  aucres:  ce  qui  eu  un  autre  fens  du  mot 
de  manger, 

Voiià  les  diverfcsexprefll-ons  que  produit  la  doftrine  Catho- 
lique. Ec  tant'  s'en  faut  qu'on  doive  s'étonner  de  les  trouver 
dans  les  Pères ,  qu'il  feroit  tout  à- fait  étrange  qu'elles  ne  s'y 
trouvalîent  pas. 

Mais  les  Miniftres  ont  fi  peu  d'équité  qu'au  lieu  de  recon- 
noiftre  de  bonne  toy  qu'elles  s'accordent  toutes  parfaitement 
avec  la  dodrine.de  la  prefencc  réelle  ,  tL  qu'elles  en  font  mê- 
me des  iuites  neceflairesi  ils  précendent  fe  (ervir  de  ce  que  les 
Pères  difent  quelquefois,  ou  que  le  corps  de  J.  G  ne  peut  être 
mangue,  ce  qui  eft  vray  félon  l'idée  la  plus  ordinaire  de  ce  motj 
ou  que  les  méchans  ne  le  mangent  point,  ce  qui  efl:  tres-vray 
ielon  le  fens  métaphorique,  pour  en  conclure  ,  que  quand  ils 
nous  difent  qu'il  eft  mangé ,  ils  entendent  fimplement  qu  i?l 
l'efl:  en  figne  &  en  vertu  ,.  6c  non  pas  réellement  &  corporel- 
lemenc. 

Ain  fi  pour  rendre  inutiles  tous  leurs  efforts  nous  avons  deux: 
chofes  à  faire;. l'une  de  montrer  que  les  palfages  où  les  Pères  en- 
feignent  que  l'on  prend  le  corps  de.  J.  G.  par  la  bouche  du  corps, , 
ne  ic  peuvent  détourner  raisonnablement  à  ce  fens  Calvinifte 
d'une  manducation  en  figne  &  en  vertu  ;  l'autre,  qu'ils  n'allè- 
guent aucun  paiTage  qui  exclue,  la  manducation  que  l'Eglife 
Catholique  cr.oic  ôcenfeigne... 


,'.  CHAPITRE    II. 

gjis^tout  Ic.fccendTome  de  cet  ouvrage  contient  uve  preuve  de  lavs^ 
,jj,  r^itè  de  la  .manducation  corporelle .  Examen  des  vaines 
foluiions  parlefquellh  les  Afin/hes  prétendent. 
jj.  éluder  quelcj^ues  p^ijjaq^es. 

'■'  ■.■■  ■    ■ 
*  Cypr.  de  ^T     /^.j  Mii^jiflrcs  ne  fçauroient  nier  que  l'on  ne  trouve  danf 


£ 


debl^uf  ^V    ^  ^  ^^s  Perés,  ^'que  nous  touchons  le  corps,  de  I .  C.,^  avec  nos 
q.3.  mains  ^-^nvec  nofirer  langue  j  ç   Quii  nous  le  prenons  ^  a  ^«^  «''^-^ 

chryioft.     ^^  manQeons  abfolument  (^  véritablement  >  e  qtiil  entre  dans  nos 

liom.fi.  m  ^  /,     7  -111  ç  !■>        I    ■ 

Matth.i.4.  ia  corps  par  vo^e.  a  aliment  Q;-  de  breuvage  3  ^  que  Ion  boit  ce  qui 


efl  ruAngé  corporellement  dunî  VEuchiirïflk.         35I 

a' coule  du  cofié  de}.  C.  J  S  qu'il  norias  donne  fort  corps  à  manquer.,  ^  Epift.ail  cor. 
[on  fan^à  boire i  "^  que  I.  C.  nous pre fente  à  7?ianger  la  chair  qu  il^^^^^^^  lanati- 
a  prij'e  J  i  que  I.  C.  entre ,  s'introduit,  s'injinuê ,  fe  nielle  dans  nos  v"-  chr.  Cj- 
Cffrps  par  fa  chair  yp^r  fa  propre  chair  j  k  que  nous  fommcs  unis  "  "'"  '"  J°^"' 
corporellement  au  corps  de  celuy  qui  eji  la  vie  par  effence ,  &,  que  b  chryihom. 
leurs  écries  ne  foient  remplis  d'un  grand  nombre  d'autres  ex.  ^^-  "^  ^piH, 
preiFionsqui  marquent  toutes  litreralîemenc  une  m.anducation-]-hom.'î4.  j^ 
corporelle  du  corps  de  J.  C.  Ainfiils  ne  prétendent  qu'on  doive  Ep.  ad Cor. 
donner  à  ces  paflàges  un  fens  métaphorique  &  les  entendre  j^^^  mjoan. 
d'une  manducation  par  lafoy ,  ou  par  la  réception  du  ligne  6c  Aug.  in  pf.  ;;, 
de  la  vertu  du  corps  de  J.  C.  que  parce  qu'ils  fuppolent  d'une^  ^"^^S-  i^>''. 
part  que  le  corps  de  J.  C,  n'eft  pas  réellement  prefenc  dans-c.  .^  "'^^'•^' 
l'Euchariflie,  &  qu'ainlion  ne  l'y  peut  recevoir  réellemenr,  &/ ^"2;.  contr. 
qu'ils  croyent  de  l'autre  que  leurs  deux  clefs  à.Q  fî'iures  în:  de  J^""^'  '  ''■'^* 
vertu  fe  peuvent  appliquer  à  ces  exprelTions  Si  à  tous  les  autres^  id.  contr. 
de  même  genre.  *'^^"'-  '^g-  ^• 

Ils  ne  fçauroient  donc  nier,  que  ruppofc  la  prefence  réelle  ^c^'niu'di'aL 
du  corps  de  I.  C.  dans  l'Eucharillie,  ôifuppofé  encore  que  ces  <ie  mcar.  p. 
deux  explications  deyf^arf  &  de  vertu  foient  vaines,  frivoles,  \°q[^„  ^  ç 
Si.  fans  fondement ,  contraires  à  l'ufage  &àla  raifon,  &  mani-  adcatecli.  57, 
feftement  détruites  par-  les  Pères,  il  n'y  aie  aucune  apparence  cliryioftom. 


que  le  corps ^ 

dans  la  bouche  &  dans  le.  corps  des  fidelles.  ^iu  joan.  p. 

Et  par-là  il  eft  clairque  la  preuve  de  la  manducation  réelle,  ^^-• 
eft  infeparable  de  celle  de. la  prefence  réelle,  que  qui  prouve 
l'une  prouve  l'autre,  &  que  la  réfutation  des  diiiicukez  par  où 
les  Miniftres  tâchent  d'éluder  les  expreflîons  qui  marquent 
cette  manducation ,  efi:  comprife  dans  la  réfutation  de  leurs 
deux  clefs  de/gure  &  de  vertu.,  à  quoy  toutes  leurs  defTaites  le 
réduifent.  Il  n'eff  donc  pas  befoin  d'entreprendre  icynyl'un 
ny  l'autre,  puifque  c'eil:  le  fujet  de  touc  le  fécond  Volume  de 
cet  ouvrage,  &  qu'il  n'y  a  qu'aie  produire  tout  entier  pour 
établir  la  vérité  de  cette  manducation  ,  Se  pour  empeicher 
qu'on  ne  puilTe  détourner  les  endroits  où  elle  eft  marquée  à  un 
autre  fens  que  le  littéral.  le  me  réduiray  doix:  à  quelques  re- 
flexions fur  certains  paiïàges  qui  n'ont  efté  a^îlegaez  que  dans, 
la  foule  ,  afin  d'avoir  lieu  de  réfuter  en  particulier  les  répon- 
fês  qu'y  font  les  Miniftres. 

X  X  iij. 


jji  Li  V.  VI.  ^e  le  (^orps  de  Jefus-Qjrifl 

PASSAGE     DE     S.     HILAIRE. 

Je  commenceray  par  le  celcbre  Partage  de  S.  Hi'airetiréda 
huiciéme  livre  de  fon  ouvrage  fur  laTrinicë,  o{\  ce  Père  a  6.ç.{- 
fein  de  montrer  que  l'union  du  Père  &  du  Fils  n'eft  pas  une 
fimple  union  de  volonté,  mais  une  unité  naturelle,  par  la  com- 
munication d'une  même  njture.  Et  parce  que  l'Ecrituienous 
propofe  pour  exemple  de  cette  unité  celle  que  nous  avons  avec 
T.  C.  par  l'Euchariitie,  il  entreprend  de  faire  voir  que  celle- 
cy  n'ell  pas  une  (impie  union  de  volonté,   mais  une  veruabie 
union  naturelle,  qui  (e  fait  par  la  réception  de  la  chair  de 
»>  J.  C  dans  nos  corps.  Voicy  les  paroles  de  ce  Père.  Je  dcman- 
\y  de  à  ceux  qui  ne  mettent  qu'une  union  de  volonté  entre  le 
»>  Père  &  le  Fils,  fi  J.  C.  n'efl  pas  aujourd'huy  en  nous  par  la 
>,  vérité  de  fa  nature,  &  s'il  n'y  eft  feulement  que  par  une  union 
>,  de  volonté?  Car  Çx  le  Verbe  a  véritablement  efté  fait  chair, 
jj  &  (î  en  recevant  à  l'Autel  le  pain  du  Seigneur,  nous  recevons 
„  véritablement  le  Verbe  fait  chair,  comment  pouvons- nous 
,>  croire  que  J.  C.  ne  demeure  pas  en  nous  naturellement,  après 
„  qu'en  fe  faifant  homme,  il  s'eft:  revêtu  de  la  nature  de  noftre 
„  chair  pour  ne  s'en  plus  feparer  jamaii,  &a  mêlé  la  nature  de 
>,  fi  chair  avec  la  nature  éternelle  dans  le  Sacrement  de  fa  chair 
J,  qu'il  nous  y  devoit  communiquer  j  Car  c'eft  ainfi  que  tous  en- 
«,  femble  nous  ne  fommes  qu'un,  parce  que  le  Père  eft  en  I.  C.  & 
que  J.  C,  eft  en  nous.  Quiconque  donc  ne  voudra  pas  recon- 
noiftre  que  le  Père  eft  en  J.  C.  par  nature ,  qu'il  nie  donc  aupa. 
ravant  qu'il  foit  luy-même  en  J.  C.  par  nature,  ou  que  J.  C. 
foit  en  luy  ;  puifque  ce  qui  fait  que  nous  ne  fommes  qu'un  dans 
„  le  Père  &:  dans  J.  C.  c'eft  que  le  Père  eft  en  J.  C.  &  que  J  C.  eft 
„  en  nous. 

,.  Si  donc  J.  C  s'eft  véritablement  revêtu  de  la  chair  de  nôtre 
„  corps,  &  fi  cet  homme  qui  eft  homme  parce  qu'il  eft  né  de 
Marie  eft  véritablement  le  Chrift  ^  ôc  fi  fous  le  Myftere  (  c'efi-k- 
dire  fouj  le  voile  du  Sacrement)  nous  recevons  véritablement  la. 
chair  de  fon  corps ,  ce  qui  fait  que  nous  ne  fommes  tous  qu'un 
en  luy,  parce  que  le  Père  eft  en  luy  &  luy  en  nous:  comment 
peut- on  foûtenir  une  fimple  unité  de  volonté  entre  les  Per- 
fonnes  divines ,  puifque  l'union  réelle  &  naturelle  que  le  Ftls  a. 
avec  nous  par  le  Sacrement,  efl:  le  iacrement  d'une  parfaite 
unité  avec  fin  Ferei 


i» 

■)•) 


ejî  mangé  nr^orcllement  dans  l'EuchùirîJiie.        355'  " 

Gardons  nous  bien  de  parler  des  chofes  de  Dieu  fuivantles  ''  Ch.  II.' 
penfées  humaineij  &  de  détourner  par  une  inrerpretation  for-  " 
cée  &  téméraire  la  doctrine  celefte  à  un  fens  impie  &  étran-  " 
ger.  Attachons  nous  à  ce  qui  cft  écrie,  fi  nous  voulons  accom- " 
plir  les  devoirs  d'une  foy  parfaite.  Car  il  y  a  de  la  folie  &  de  " 
l'impiété  à  dire  ce  que  nous  dilons  de  la  vérité  naturelle  de  " 
J.  C.  en  nouSj  à  moins  que  iuy-  même  ne  nous  l'ait  appris.  " 
C'eft  Iuy  qui  nous  dit:  Ma  chair  cft  vraycment  viande  ^  (jr  7iion  '* 
fatig  efl  vraycment  breuvage  :  C(^luy  qui  tnange  mu  chair  ^t-  boit  ** 
mon  fang  demeure  en  moy  (jr-^noy  en  Iuy.  Il  ne  lajiîe  aucun  lieu  '* 
de  douter  de  la  vérité  de  fa  chair  &  de  fon  fang,  puifque  la  ** 
déclaration  du  Seigneur  &  noftrefov  portent  que  c'cfl  vraye-  ^ 
ment  la  chair  &:  vrayement  fon  fang,  &:  ces  chofci  eftanr  pri-  " 
Tes  2c  avalées  font  que  nous  Tommes  en  I.  C.  &:  que  I  C.  eft  en  "' 
Bous.  '* 

N'eft  ce  pas. là  la  vérité  pure  ?  Quecela  ne  foit  pas  vray  pour  '* 
ceux  qui  nient  quel.  C.  foie  vray  Dieu.  Il  efl:  donc  en  nous  par  " 
fa  chair,  Se  nous  lommes  en  Iuy  ,  parce  qu'il  ell  en  Dieu  avec  la  " 
nature  cp.ii  nous  eft  commune.  Or,  que  nous  foyons  en  Iuy  par  " 
le  mvricre  de  la  chair  qu'il  a  prife,  c'eft  Iuy- même  qui  le  té-  " 
moigne  en  dilant  :  Le  mondx  ne  me  voit  pltts^  mais  vous  me  ver-  " 
re\:  (^  parce  que  je  vis  ^  vous  vivret^  Car  je  fuis  dans  mon  Perd  " 
^  vous  en  moy,  gS  ynoy  en  vous.  *' 

S'il  avoit  voulu  marquer  feulement  une  union  de  volonté,  " 
pourquoy  diftinguoitil  divers  degrez  d'unité  pour  parvenir  à  la  " 
fuprême  '■:  N'eftce  pas  pour  nous  moncrer  qu'il  eft  dans  fon  " 
Père  parla  nature  de  fa  Divinité  :  que  nous  iomnres  en  Iuy  par  « 
là  nature  corporelle  qu'il  a  prifedansfanaiifance-,  &  qu'il  cft  en  " 
nous  par  le  mvftere  de  fes  Sacremens  ?  Et  pour  nous  faire  voir  " 
ainfi  que  le  Médiateur  formoit  une  parfaire  unité,  en  ce  que  f 
noftre  nature  étoiten  Iuy,  qu'il  demeuroit  dans  fon  Père,  &  que  " 
demeurant  dans  fon  Père  il  etoit  en  nous,  afin  que  nous  fuf  « 
fions  élevez  par  ce  moven  à  cette  unité  avec  le  Pcre.  I.  C.  étant  « 
dans  fon  Père  naturellement,  c'cft-à-dm  félon  fa  nature  par  fa  " 
naiffance  hemelle-^  &  nous  étant  dans  I.  C.  naturellement,  cef.  ^ 
a-dire  félon  noftre  nature  ,  qu'il  a  pri fe^  &  Iuy  demeurant  en  nous  ^ 
naturellement ,  c\ft-a-dtie  -par  la  nature  d?  fa  chair.  «c 

Or,  qu'il  airavec  nous  cette  union  naturelle,  il  le  déclare  Iuy-  ,£ 
même  quand  il  dit  :  CcUiy  qui  mange  ma  chair  C^  boit,  moii  Cang  ,  ^^ 
demeure  en  moy  ^  moy  en.  Iuy.  Car  perfonne  ne  fera  en  Iuy  par  ^ 


554  Li  V.  VI.  ^e  le  corps  de  Jcfks-Qhri^ 

la  nature  humaine  qu'il  a  prile,  finon  celuy  en  qui  il  aura'étë 
^^p*trfa  chair,  parce  qu'il  n'a  en  luy  que  la  chair  de  ceux  qui  au- 
„  ront  re^û  la  fienne. 

„  Et  pour  le  myfterede  la  parfaite  unités  ne  l'avoit  il  pas  déjà 
„  expliqué  en  dilànt  ,  coinmc  mon  Pcre  qui  eji  vivant  ma  en- 
^,  voyè ,  ^  que  je  vis  pour  mon  Père  j  de  mtfmc  ce  luy  qui  me  man^ 
^^vivra  auf/i  ponnnoy..  Il  vit  donc  par  fon  Père,  &  comme  il  vit 
,,  par  fon  Père  ,  nous  vivons  aulli  par  luy.  Car  le  but  des  cora. 
^,  paraifens-eft  de  nous  faire  concevoir  la  chofe  que  l'or  com- 
,„  pare,  fur  le  modèle  de  celle  àquoy  on  la  "compare.  La  caufe 
,,  donc  de  noftre  vie  eftque  nous  avons  en  nous  charnels  I.  C. 
„  qui  y  demeure  félon  fi  chair,  &  qu'ainfi  nous  recevons  la  vie  de 
.,,  luy  comme  il  la  re(^oit  de  fon  Père.  S'il  efl:  donc  vray  que  nous 
,,  vivions  naturellement  parï.C.  félon  la  chair,  à  caufe  que  nous 
„  avons  reçu  la  nature  de  fa  chair-,  comment  peut-on  dire  qu'il 
„  n'ait  pas  en  luy  naturellement  fon  Père  félon  l'efprit ,  puifqu'il 
,,  nous  afTure  qu'il  vie  par  fon  Père?  Or,  il  vit  par  fon  Père,  parce 
5,  que  fa  naiffance  ne  luy  donne  pas  une  nature  étrangère  &:  dif- 
3,  ferente  de  fon  Père,  parce  qu'il  reçoit  de  luy  ce  qu'il  efV,  &; 
j,  qu'il,  n'en  effcpas  feparépar  quelque  différence  de  nature,  parce 
„<]a'il  a  fon  Pereen  luy-même  par  fa  naiffance,  dans  l'eflencede 
„  fa  nature. 

j,  Nous  avons  allégué  toutes  ces  chofes,  parce  que  les  hereci- 
,^,  ques  foûcenant  fauiTement  qu'il  n'y  a  qu'une  union  de  volonté 
„  entre  le  Père  &.  le  Fils,  fe  fervoient  pour  le  prouver  de  l'e- 
^  xemple  de  l'unité  que  nous  avons  avec  Dieu,  comme  fi  nous 
„  n'étions  unis  avec  le  Fils ,  &:par  le  Fils  avec  le  Père,  que  par 
^,  une  foùmilHon  religieufe,  6c  qu'il  ne  nous  eufl  point  accordé 
,  d'union  propre  &  naturelle  par  le  Sacrement  de  fa  chair  5c 
de  fon  fang,  au  lieu  que  nous  devons  foutenir  lemyflerede  l'u- 
^,  nité  parfaite  &  naturelle  par  l'honneur  que  Dieu  a  fait  à  noftre 
j,  nature  de  l'unir  à  fon  Fils,  &  parce  que  ce  Fils  eft  en  nous  fe- 
^  Ion  fi  chair ,  &  que  nous  luy  fommes  corporellement  &  infe- 
^,  parableiiient  unis. 

C'eft  en  quelque  forte  afFoiblir  l'imprefîion  que  ce  paffage 
doit  faire  fur  les  efprits  qui  ne  font  pas  entièrement  prévenus, 
que  de  faire  remarquer  en  détail  &:  féparérnent  les  unes  des  au- 
tres les  preuves  particulières  qu'il  fournit  pour  établir  que  le 
corps  de  J.  C.  entre  réellement  Si  corporellement  dans  le  nô- 
.Ere_,pournous  communicperlavie  de  l'ame,  puifqu'on  voit  q,ue 

ce 


efl  niiings  corporellemerit duns  l'etichaviflie.  3^7 
ce  Père  enfeigne  &:  inculque  teilcmenc  cette  vericij  que  tout  p„  j  r 
(on  difcours  ne  roule  que  fur  cet  unique  principe.  Mais  parce 
qu'Aubertin  tafched'en  éluder  la  force  par  quantité  de  vaines 
defFaites ,  ce  font  ces  deffiiites  que  j'ay  delTein  de  détruire 
icy. 

S.  Hilaire  nous  dit  ^uc_  nous  prenons  véritablement  le  Verbe 
fait  chair  par  le  moyen  de  la  viande  du  Sei<inetir.  Aubertin  de- 
mande fur  cela^  fï  l'on  croie  que  le  Verbe  fait  chair  ne  puifTc 
eftre  pris  que  par  la  bouche  du  corps  ;  &  il  s'écrie  d'une  manière 
pedantefque  ,  ad populum  phaleras  ?  Mais  que  la  fierté  fied  mal 
quand  elle  eft  jointe  à  une  lî  grande  foiblelle  :  Car  il  n'y  a  qu'à 
luy  répondre  qu'on  lecroicen  effet  ,  &  qu'il  eft  déraifonnable 
de  ne  le  pas  croire. 

Je  ftj'ay  bien  qu'il  y  a  de  certains  mors  qui  marquent  des 
aciions  corporelles,  que  l'on  ne  laifTepas  d'appliquer  à  des  ob- 
jets fpirituels.  On  dit  que  l'amefe  nourrit  de  la  vérité,  & 
l'on  peut  dire  auffi  qu'on  mange  fpiricuellcmcnt  le  corps  de 
J.  C.  L'ufage  Ecclefiaftique  a  authorifé  ces  façons  déparier:  Et 
elles  ontTnême  leur  railon,  parce  que  ces  termes  reprcfenrenc 
certaines  actions  corporelles  qui  peuvent  fervir  d'image  à  des 
adions  (pirituelles.  Celuy  qui  mange  goufte  l'alimenr,  s'y  unit 
d'une  certaine  façon,  s'en  fortifie.  L'ame  en  fait  de  mcmc  à 
l'égard  des  objets  qu'elle  contemple.  Mais  c'ed:  fe  tromper  grof- 
Cerement  que  de  conclure  d'un  terme  à  un  autre,  6c  de  s'ima- 
giner que  parce  qu'on  peut  prendre  un  certain  mot  en  un  fens 
métaphorique,  on  en  peut  faire  autant  de  tous  ceux  qui  ont 
une  fignification  approchante. 

Il  n'y  a  gueresde  plus  faux  principe  dans  le  langage  que  celuy- 
là,ny  plus  capable  d'engager  à  desexpreffions  extravagantes.  Il 
nefautpas  feulement  qu'il  y  ait  de  la  raifon  dans  les  métaphores, 
il  faut  aulîî  que  l'ufage  les  authorifé,  ou  dans  l'application  par- 
ticulière que  l'on  en  fait ,  ou  par  quelque  exprefîîon  à  peu  prés 
iêmblable. 

Or  en  quel  Auteur  M.  Claude  &  tout  ce  qu'il  y  a  de  Mini- 
lires  au  monde  ,  montreront-ils  que  le  mot  de  Sumeri  ,  /'r(?«- 
«^^rt",  ait  efté  joint  à  quelque  objet  fpirituel  pour  fignifier  que 
l'on  s'y  unit  £c  qu'on  le  médite  ?  Dit-on  fmncre  Philofophiam^ 
pour  fignifier  méditer  la  Philofophie  ?  Dit-on  fuviere  mortem^ 
pour  dire  méditer  la  mort?  'D'xt-onvitam  Chri/li  vel  pa.fjïoncm 
fumerej  pour  dire  que  l'on  s'entretient  Sc  que  l'on  fe  nourrit  de 

Yy 


350  Liv.  V  I  ^e  le  corps  de  Jefus-Qorifl 

de  la  vie  &  de  la  paflion  de  J.  C?  Ces  exprelfions  ne  fontelles 
pas  abfolumenc  fans  exemple  ?  Et  ceux  qui  içavenc  de  quelle 
manière  on  parle,  ne  reconnoilTenc  ils  pas  tout  d'un  coup  que 
rien  de  cela  ne  s'eft:  die?  Il  y  a  même  une  raifon  particulière 
qui  fait  voir  que  ce  mot  de  fumcrc ,  ne  peut  eftre  employé  rai- 
fonnablement  pour  fignifier  fc  nounir  fpiritucllcmcnt.  C'eft 
que  les  mots  de  7nuny:r^  de  fe  nourrir  font  déjà  mer<iphori- 
ques  dans  cet  ufage,  &  ne  fignifient  pas  proprement  ce  qu'on 
leur  fait  fignifier:delorcequc  ceieroitune  métaphore  entée  fur 
une  autre  métaphore, fi  l'on  fe  fervoit  de  ce  terme  pour  exprimer 
ce  que  les  mots  de  manger  &  àc  fe  nourrir  ne  fignitîent  déjà  que 
métaphoriquement.  Il  faudroit  paffer  par  deux  dcgrez  pour  ar- 
river à  cette  Signification  dernière  que  l'on  auroit  dans  l'efprie, 
&il  efl:  vifible  que  cela  eft  écarté.  Auffi  Aubertin  n'en  rap- 
porte aucun  exemple ,  ôc  il  eft  contraint  d'avoir  recours  à  d'au- 
tres métaphores  toutes  différentes. 

Comme  l'on  ne  die  donc  point,  fumere  Verbum  carncm^  pour 
lignifier  que  l'on  s'en  nourrit  fpirituellement:  l'on  dit  encore 
moins  verc  fumere  J^erbum  camcm.  Car  encore  que  îe  mot  de 
verè  ne  fignifie  pas  toujours  que  l'exprefllon  où  il  entre  foie 
literalle,  &  quoy  qu'il  s'employe  quelquefois  pour  marquer 
lîmplement  la  vérité  de  l'exprefllon  figurée;  néanmoins  quand 
il  eft  joint  à  un  terme  qui  ne  fe  prend  pas  ordinairement  en  un 
fens  métaphorique,  il  éloigne  encore  davantage  l'idée  delà  mé- 
taphore, &fon  effet  eft  déporter  l'efprit  à  concevoir  plus  for- 
.  rement  la  vérité  de  cette  exprcfllon  littérale. 

Mais  l'abfurdité  du  fens  auquel  Aubertin  tache  de  détour- 
ner ce  paffage,  eft  encore  bien  plusvifible  dans  la  manière  donr 
il  eft  obligé  d'en  expliquer  la  féconde  claufe  o\x  S.  Hilaire  dit, 
quil  n'y  a  aucun  lieu  de  douter  de  la  ver' té  de  la  chair  &  du 
fang  de  I.C.  de  \ï.k\t: AT e  carnis  dj"  fanguinis  non  cji  reluius 
ambigendi  locns. 

Voila  un  doute  marqué  &  combattu  par  S.  Hilaire.  Il  s'agit  de 
fçavoirenquoy  il  confifte.  Aubertm  demeure  d'accord  que  ce 
n'eft  pas  (ï  I.  C  aune  véritable  chair.  Dico  primam  illam  intelli- 
^cntiam ,  c'eft  le  fens  que  je  viens  de  marquer ,  non  valde  elfe 
ad  Hilarii  propofitum.  Mais  au  lieu  de  ce  doute  là ,  il  enfubftituë 
un  autre  qui  luy  paroift  plus  probable.  Ile/}  clair,  dit  il ,  par  la 
fuite  du  di  fours  que  S.  Hilaire  parle  non  de  la  vérité  de  lachair 
fm^lcmcnt^comnc  unie  au  Verbe  ^  mais  comme  nous  devant  ejire 


ejî  mangé  coYporellement  dans  tEucharifiié.        3^7 
donnée  à.  manger  d'une  'manière  Jpirituel/e,  c'cd  à  dire  en  un  mot  r 
que  ce  que  S.  Hilaire  nousenfeigne  en  ce  lieu  félon  ce  Mini- 
ftre ,  ce  n'eft  pas  que  J.  C.  a  une  chair,  mais  qu'il  nous  fait  re- 
cevoir fpirituellemenc  cette  chair. 

Les  Catholiques  prétendent  au  contraire  qu'il  s'y  ap;it  de  la 
vérité  d'une  manducation  corporelle  ,&  que  S.  Hilaire  veut 
dire ,  qu'il  ne  faut  poMit  douter  que  ce  que  nous  recevons  cor- 
porellement  dans  la  célébration  de  cemyftere,  ne  foit  efFedi- 
vement  la  chair  de  J.   !^. 

C'eft  à  quoy  fe  réduit  le  différend  qu'on  a  avecAubertin 
furccpaflage.  Mais  ileftbien  aifé  à  décider  par  S.  Hilaire  mê- 
me, puifqu'il  n'y  a  qu'à  confiderer  de  quelle  manière  ces  deux 
differens  doutes  doivent  s'éclaircir. 

Un  doute  qui  auroit  regardé  la  manducation  fpirituellefè 
devroit  refoudre  en  affirmant  pofitivement  que  Ton  mange  la 
chair  de  J.  C.  d'une  manière  fpirituelle,  &  en  expliquant  en 
quoy  confifte  cette  manducation,  n'y  ayant  gueres  que  le  dé- 
faut d'intelligence  qui  puiffe  faire  qu'on  en  doute. 

Mais  le  doute  que  les  Catholiques  croyenteftre  combattu 
par  les  paroles  de  S.  Hilaire,  fe  doit  refoudre  au  contraire,  non 
en  expliquant  de  quelle  manducation  on  entend  parler,  puif- 
qu'ils  fuppofent  qu'il  entend  parler  de  la  manducation  corpo- 
relle, mais  en  affirmant  que  cette  manducation  a  pour  objet  le 
corps  de  J.  C.  2c  qu'il  eft  effedivement  mangé.  Or  que  fait  S. 
Hilaire^  dit-il,  2Vunc  autem  c^  T)omini profcjjione  ^  (^  fide  nof. 
tra^  vcrè  manducamus  fpiritualiter  carncm  Chrifii ,  c>r  ?  Nulle- 
ment jil  n'a  donc  point  eu  en  veuë  le  doute  marqué  par  Aubertin. 
Il  dit  Nunc  autem  ^  Domini profe/Jione  ^  fide  nojira  vcrè  caro  ^ 
fanyiis  efi.  Il  levé  donc  le  doute  qu'i  combat  la  dodrine  des  Ca- 
tholiques. 

Le  bons  fëns  devroit  apprendre  aux  Miniftres  qu'il  y  a  des 
doutes  qui  ne  font  fondez  que  fur  la  qualité  des  expreffions, 
ix.  d  autres  qui  naiflènt  de  la  nature  des  chofes  mêmes. 

Les  doutes  de  la  première  efpece  n'ont  pas  beibin  de  preuves, 
mais  feulement  d'éclaircifTement,  Se  les  autres  n'ont  befoin 
Cjue  de  preuves,  &  l'éclairciffement  n'y  fait  rien.  Or  fi  quel- 
qu'un doutoit  qu'on  puft  manger  fpirituellement  J.  C.  fon  dou- 
te  ne  pourroit  eftrre  fondé  que  fur  ce  qu'il  n'entendroit  pas 
l'expreffioiv.  Qu'on  luydife  que  manger  J.  C.  c'efl:  le  regarder 
par  la  fov  ,  &  qu'on  ajoute  fi  l'on  veut,  que  c'eft  le  confiderer 

Yyij 


II. 


3 


58  Liv.   VI.  ^e  le  corps  de  Jefus-Chrifl 

comme  aliment  de  l'ame ,  ce  douce  s'ëvanoiiira.  Que  fait  donc 
S.  Hilaire/  Donne-E-il  quelque  ëclairciflemenc  à  ces  paroles 
de  manger  la  chair  de  J.  C.  Explique  t  il  comment  on  peut 
manger  J.  C.fpiricuellemenc?  Faitil  voirquecetce  expreifion 
quoy  qu'extraordinaire,  ne  marque  qu'une  chofe  fort  commu- 
ne ,  &  que  les  fidelles  ne  fi^auroient  manquer  de  pratiquer  tant 
qu'ils  ne  renoncent  point  à  la  foy  ?  Nullement.  Il  prouve  par 
l'Ecriture  que  nous  mangeons  effedivement  la  chair  de  J.  C, 
Il  nous  exhorte  à  croire  ce  que  nous  y  lifons  fans  en  corrom- 
pre le  fens  par  des  adoucidemens  humains.  Il  déclare  qu'il  n'en 
faut  point  douter.  Et  après  nous  avoir  d\t,^ue  ccfi  vraye- 
ment  de  la  chair  <^  vrayemcnt  du  fang^  il  en  fait  l'objet  non  des 
actions  fpirituellesdenoftre  ame  ,  mais  des  aiflions  corporel, 
les  de  noftre  corps.  J^eré  caro  gS  vcrè  fanguis  cfi.  Et  h^tc  acccp. 
ta  atque  haufia  id  efficiunt  ut  ^  nos  in  Chrifto  ^  ^  Chrifius  in 
Ttobis fit.  Et  il  conclut  que  J.  C.  eft  en  nous  par  fa  chair,  comme 
la  nature  humaine  eft  en  luy  par  l'incarnation.  Ffi  cripin  nobis 
ipfe  pcr  carn,em^  (y-  fumus  in  co  dion  hoc  quodnos  fumus  in  Deo  cfi. 

Peut-on  douter  après  cela  delà  nature  du  douce  qu'il  a  pré- 
tendu lever.''  fut-il  jamais  un  procédé  comme  celuv  des  Mini, 
ftresplisnefë  contentent  pas  de  faire  trouver  aux  Pcrés  des  fu- 
jecs  de  douce  ,  où  il  n'y  en  eut  jamais  ,ils  veulent  encore  qu'ils 
nefe  foienc  jamais  mis  en  peine  de  les  éclaircir.  Car  enfin 
quelle  difficulté  y  a-t-il  à  comprendre  qu'on  puifïe  s'occuper 
fortement  delapcnféede  J.  C.  s'apphquerà  la  méditation  des 
Bierveilles  de  fa  vie,  méditer  fur  fa  mort,  £c  la  regarder  com- 
me lacaufe  de  noflre  falut  ;  Scqu'ainfi  il  foie  l'aliment  de  noflre 
ame  ?  Et  qu'y  auroit-il  de  plus  ridicule  à  S.  Hilaire  que  de 
nous  reprefenter  cette  docT:rine  comme  impie  &  comme  extra- 
vagante, fi  elle  n'eftoitauthorifée  de  l'Ecriture  ,&  défaire  tant 
d'efforts  pour  nous  empêcher  d'en  douter  ?  Mais  quand  ilauroic 
eflé  capable  d'avoir  un  doute  fl  bizarre  ou  de  le  fuppofer  dans 
les  autres ,  pourquoy  ne  den>efle-t  il  pas  au  moins  une  chofe. fî 
facile  à  éciaircir ,  6c  pourquoy  après  avoir  fait  naiftre  ce  doute 
fe  contente- C- il  de  repeter  les  paroles  mcmes  qui  l'ont  ex- 
cité ? 

Mais  fî  ce  pafTage  ed  cres-mal  appliqué  par  Aubercin  dans  ces 
deux  claufés  qui  decerminenc  tout  le  refte,  ce  Miniflre  n'efl 
pas  plus  heureux  à  expliquer  tout  le  corps  du  difcours  &  de 
l'intention  de  S.  Hilaire  II  s'imagine  que  l'an  ne  fonde  les  cou- 


c^  mj.ngé  coYporellement  cia.niïEmhxnftîe.  359 

fcquences  qu'on  en  cire  que  fur  le  mot  à' unité  naturelle  ^  de  Ch.  II. 
qu'ainfi  il  luy  fuffic  de  répondre  que  S.  Hilaire  admet  de  mê- 
me dans  tous  les  bapcifez  une  unité  naturelle  donnée  par  le  Bap- 
tême &  par  la  foy,  parce  que  le  Baptême  6c  la  foy  l'ont  de  mê- 
me nature  dans  tous  les  fîdelles. 

Mais  q  jand  on  fè  fonderoit  fur  cela,  la  réponfe  feroit  encore 
deffeclueufe.  Car  quoyqu'il  ioit  vray  que  S.  Hilaire  fc  contente 
qu'une  cliofe  foit  la  même  en  efpece  en  divers  fujets,  pour 
trouver  entre  ce  lujcc  une  unité  naturelle,  qui  fer  rem  eandcm 
unum  funt,  îiaturà  unum  funt  non  tantùm  voluntate^_  il  faut  néan- 
moins félon  luy  qu'elle  fait  réellement  unie  à  chacun  de  ces  fu- 
jets.  Ainfilafoy  efl  réellement  unie  à  chaque  Chreflien,  êc  cha- 
que fidelleeft  le  fujet  immédiat  de  fon  Baptême  3  de  force  que 
pour  fuivre  cette  comparaifon^il  faut  que  la  chair  de  J.  C.  luic 
reçue  par  chacun  des  tideliesauffibien  que  le  Baptême  &  la  fo y, 
fi  l'on  veut  qu'elle  forme  avec  eux  une  union  naturelle. 

Mais  ce  n'eft  pas  néanmoins  fur  cela  qu'on  s'appuye.  C'eft 
fur  la  manière  dont  S.  Hilaire  exprime  que  J.  C.  eft  en  nous 
par  l'Eucharirtie  ,  5c  fur  les  comparaifons  dont  ilfe  fert.  Car  il 
eft  vray  que  l'on  dit  bien  quelquefois,  que  nous  recevons  J.  C. 
en  nous  par  le  Baptême ,  que  les  Chrétiens  font  reveflus  de  J.  C. 
qttils  portent  I.  C,  caché  en  eux  :  quils  font  faits  participans  de 
J.C.&  delabrehy  fpirituelle.  Et  la  plufpart  même  de  ces  ex> 
prefTionsne  font  pas  métaphoriques,  parce  qu'il  efl  vray  que 
J.  C  habite  par  fa  divinité  dan^  tous  les  Chrétiens  comme 
dans  fon  temple.  On  trouve  auffi  deux  palfages  dont  nous 
avons  parlé  ailleurs ,  où  il  eft  dit  que  nous  participons  à  la  chair 
del.  C.  dans  le  Baptême,,&  que  cette  parole  :  Si  vous  neman- 
gez^la  chair  du  Fils  de  l'homme  (jS  ne  bcuvcz^fonfang  ,  s'accomplit 
dans  ce  Sacrement.  Mais  quel  rapport  ont  ces  deux  expreffions 
qui  fe  trouvent  une  fois  en  paflanc  en  deux  Pères  differens,  avec 
cette  foule  d'expreflîons  encafTées  les  unes  furies  autres  qui  le 
trouvent  dans  ce  lieu  de  S.  Hilaire  fur  le  fujet  de  l'Eucha- 
riftie? 

Où  eft  ce  que  les  Pères  ont  dit  du  Baptême,  que  par  ce  Sa- 
crement I.  C.  eftoit  en  no\xs, per  natura  yeritatem,  comme  S. 
Hilaire  le  dit  de  l'Euchariftie? 

Qui  a  jamais  dit  du  Baptême  ce  qu'il  dit  encore  de  l'Euchari- 
ÏWQ^que  de  même  que  J.  C.  vit  par  fon  l'ère  ,  de  même  nous  vivons 
far  fa  chair^^  que  la  caufe  de  nojlre  vie  cji  que  nous  avons  dans 

Y  y  iij 


360  Liv.  VI.  ^e  le  corps  de  Jejus-Chrin. 

noftrc  chair  ^j.  C.  qui  demeure  par  fa  chair.  Quod/«  nobis  cama. 
libus  manentem  fer  carnem  Chrifium  hahcmus ,  viEiuris  nobis  fer 
eam  ek  conditionc  qua  vivit  i  lie  fer  Patrem  ! 

Quia  jamais  dit  enfin  d'un  autre  Sacrement  ^  que  le  myflere 
de  la  vraye  ^  naturelle  unité  des  Perfonnes  divines  doit  efire  re. 
connu.,  farce  que  le  pils  demeure  en  nous  fclon  la  chair,  (S"  que  nous 
Jo'mmes  corforcllcmcnt  ^  infefarablcment  unis  à  luy\ 

Si  ces  paroles  pouvoient  eftre  métaphoriques  ,&  fignifier 
feulement  que  la  chair  de  J.  C.  eften  nous  par  Ton  figne,  ou 
que  nous  luy  femmes  unis objedivcment,  qu'y  auroit-il  d'alTu- 
ré  en  ce  que  l'on  fe  fonde  fur  le  témoignage  des  hommesi' 

Cela  fuffitpour  repondre  à  ce  que  dit  Aubertin,queS.  Hilai- 
re  parle  du  Baptême  comme  il  parle  de  l'Euchariftie.  Et  il  n'y  a 
pas  plus  de  folidité  dans  ce  qu'il  ajoute  que  S.  Hilaire  en  difanr, 
que  nous  recevons  véritablement  le  Kerbe  chair  far  la  viande  du 
Seigneur     diflinpie    manifefiement    l'Euchariftie.,  qui    efl    cette 
viande  du  Seigneur.,  du  Verbe  chair.  Car  il  l'en  diftingue  en  ef- 
fet, parce  que  ce  font  deux  idées  difFerentes,  l'une  confufe, 
l'autre  diftincfte^  l'une  qui  enferme  outre  le  corps  de  J.  C.  les 
accidens  du  pain  &  du  vin ,  l'autre  qui  ne  reprefente  que  J.  C. 
féul.  Mais  il  ne  diftinguepas  ces  deux  idées  comme  reprefen- 
tant  deuxobjetsentierementdifferens,  6c  il  les  unit  pkiton:, 
puifqu'il  dit  qu'en  recevant  l'un  on  reçoit  l'autre  3  ce  qui  marque 
Berp.  toni  i»  qyg  pm^  contient  l'autre.  On  a  refuté  ce  fophifme  à  fond  dans 
/.  iV.  *  ^'  ^'  1<^  fécond  Tome  de  la  Perpétuité,  c'eftpourquoy  on  ne  s'y  ar- 
reflera  pas  icy  plus  long-temps. 

La  troifiéme  objeciion  d'Aubertineft  fondée  fur  ces  paroles 
de  S .  t-lWairé:  2^ on  enim  quis  in eo^  erit nift in  quo  iffc  fuerit ,  ejus 
't'antùm  ajiicmftaînhabens  carnem  qui  fuam  fumpferit.  S.  Hilaire, 
dit- il,  nous  affure  que  far  cette  manducation  J.  C.  eft  en  nous .,  (^ 
nous  réciproquement  en  J.  C.  Or  il  n'entend  fas  que  nous  foyons 
en  J.  C  far  une  union  locale,  il  ne  veut  donc  fas  que  J.  C.  ftoit  aujjî 
en  nous  'far  Une  union  locale.  Et  ainfi  ce  que  dit  S.  Hila  re  ne 
s'entend  que  d'une  union  ffiritue lie. 

Mais  ce  que  prouve  cet  argument ,  efl:  qu'un  efprit  fortement 
préoccupé  eft  capablede  s'éblouir  dans  les  chofes  lesplus  claires. 
Car5.  Hilaire  ne  compare  point  du  tout  en  cet  endroit  la  ma- 
nière félon  laquelle  J.C.  eft  en  nous  par  l'Euchariftie  avec  celle 
dont  on  peut  dire  que  nous  femmes  au ffi  en  luy  par  la  réception 
delamême  Euchariftie,  mais  il  la  compare  avec  celle  dont  nô* 


eji  nmngé  corporellement  dans  fEucbarifiic.  ^-6t 
cre  nature  eft  en  en  luy  par  l'incarnacionj  Ton  fenseftant  que  j.  G  Ch.  I  I. 
ellen  nous  par  fa  chair  que  nous  prenons  dans  1  Euchariftie, 
comme  nous  fommes  en  luy  par  la  nature  humaine  qu'il  a  prife 
en  s'incarnant.  Ainfî  tant  s'en  faut  que  l'on  puiiTe  conclure  que' 
cette  union  n'eft  que  fpirituelle,  que  c'eft  tout  le  contraii  e  qu'il 
faut  conclure.  Car  la  nature  humaine  que  J.  C.  a  prife  repond 
dans  cette  comparaifon  àlachairde  J.C.que  nous  prenons.  Ain- 
fî  comme  cette  nature  efl  réellement  unie  à  J.  C.  fans  figure  ni 
métaphore,  de  même  la  chair  de  J.  C  nous  doit  eftre  réellemenc 
unie  fans  figure  2c  fans  métaphore  :  &  cette  chair  doit  eftre  auf- 
fi  eflPeJtiveinent  en  nous,  que  la  nature  humaine  eft  en  J.  C. 

Voila  le  fcns  véritable  de  ce  paiîage ,  qui  paroift  û  claire- 
ment par  la  fuite  même  ,  qu'il  eft  étrange  que  ce  Miniftreaic 
pii  s'y  tromper.  Car  S.  Hilaire  ne  dit  pas  feulement^  que  celuy  là-ne 
fera  point  en  I.  C.  en  qui  J.  C.  ti  aura  point  efiè-^  mais  pour  montrer 
en  quelque  fens  il  ledit,  il  ajoute  que  I.  C  n'a  en  foy  que  la  chair  de 
ceux  qui  auront  pris  la  jîenne  :  Ejus  tantjïm  afjumptam  habens  car- 
nem  qui  fuam  fumpferit.  C'eft  à  dire  qu'il  n'y  a  que  ceux  qui  ont 
pris  la  chair  de  J.  C.  qui  ayent  droit  de  prétendre  que  la  nature 
humaine  de  J.  C.  eft  leur  nature.  Eril  avoir  déjà  exprimé  cette 
même  penfée  troisou  quatre  fois  en  marquant  exprefîèment  que 
c'eft  par  l'Incarnation  que  nous  fommes  en  J.  C.  Car  c'eft  en 
ce  fens  qu'il  dit.  Ilejl  donc  en  nous ,  (^  nous  fomtnes  en  luy ,  parce 
quenojhe  nature  eft  en  Dieu  avec  luy.  Efl  erqo  in  nohis  ipfe  per  cat- 
nem^  d^  fùmus  in  eo  dum  fcctim  hoc  quod  nos  fmnus  ,  in  Deo  eft. 

C'eft  encore  dans  ce  fens  qu'il  entreprend  de  prouver  que  nous 
lômmes  en  I.  Q.per  Sacramcntuyn  co7nmnnicat.€  carnis  ^  (anyii- 
nis.  Ce  qui  ne  veut  pas  dire,  comme  l'a  cru  Aubertin  ,  que  nous 
fommes  en  J.  C.  par  le  Sacrement  de  l'Euehariftieoii  J.  C.  nous 
communique  fa  chair ,  ou  dans  lequel  nous  participons  à  la  chair 
&au  fang  de  I.  C.  mais  que  nous  fommes  en  I.  C.  par  la  chair 
&  le  fang  de  noftre  nature  aufquels  I.  C.  a  participé  en  fe  les 
uniflantpar  l'Incarnation.  Et  cela  paroift  manifeftement  parla 
fuite.  Car  S.  Hilaire  ayant  apporté  pour  preuve  de  cette  vérité 
ces  paroles  de  I.  C.  Ego  in  Pâtre.,  e^>  vosinme  ,  ^  ego  in  vobis.,  il 
ajoute  enluite  pour  expliquer  de  quelle  forte  nous  fon  mes  en 
I.  C.  que  nous  y  (omvaQS  par  fa  naifjance  corporelle.,  c'eft  à  dire  par 
l'^union  qu'il  a  faite  de  la  nature  humaine  à  fa  divinité.  Nos  con- 
train  eo  per  corporalem  ejus  nativitatem. 

Etainft  ces  deux  expreffions  que  nous  fommes  en  I.  Q.pcrS^ 


561  Liv.  VI,  ^le  le  corps  de  Jcfus-Qr/ifi 

cramentum  communicata  carnis  é^  finguinis  ,ii.  que  nous  fom, 

mes  en  luy/fr  corpomlemcjusnaùvùaicm-^  font  entièrement  (y 
nonymes  :  êc  comme  la  dernière  fe  rapporte  manifcftcment  à 
l'Incarnation  ^  non  à  l'Euchariftie ,  on  doit  dire  la  même  chofe 
de  la  première. 

Il  eft  donc  clair  &  qu'Aubcrtin  n'a  pas  entendu  ces  pafTagesde 
S.  Hilaire^êc  que  toutes  les  comparaifons  de  ce  faintDodeur, 
bien  loin  de  marquer  une  fimple  union  métaphorique,  en  mar- 
quent une  très  réelle,  6c  la  plus  grande  qui  puilTè  eftre  en- 
tre des  corps ,  c'eft  à-dire  une  union  corporelle.  Car  S.  Hi- 
laire  compare  l'union  que  la  chair  de  I.  C.  aavec  nous  dansl'Eu- 
chariftie,  à  l'union  de  I.  C.  avec  Ton  Pcre,  qui  eft  la  plus  intime 
&  la  plus  parfaire  de  toutes  les  unions,  puifque  c'eft  une  unité  in- 
dividuelle. Il  la  compare  encore  <à  l'union  de  la  nature  humai- 
ne avec  le  Verbe^  qui  crt:  encore  une  union  tres-fubftantielle.  Il 
exprime  ces  trois  unions  de  la  même  forte.  Illesi-eprefentecom- 
me  trois  degrez  qui  ont  beaucoup  de  rapports  &.  il  fe  fert  mê- 
me de  l'union  de  la  chair  del  C.  avec  nous  dans  1  Euchariflie, 
comme  de  moyen  &  de  modelle  pour  prouver  l'unité  réelle  de  la 
nature  de  I.  C.  avec  celle  de  Ton  Pcre  //  a ,  dit  il ,  diflinyié  di- 
vers degrez^d' unité  pour  parvenir  à  la  fuprème.  Gradum  qucmdam 
co7ifummandv  nnitatis  expo  fuit.  llc(i  naturellement  dans  fon  Pc 
wpar  l'unité  de  fa  nature.  Nous  fomme s  aufji naturellement  en  luy 
par  l'union  hypollatiquert^"-  il  deyneurc  naturellement  en  nous  pa.r 
l'Euchariftie. Quelle  apparencedonc  que  ce  dernier  degré  qui  eft 
propofé  comme  le  modelle  Se  la  preuve  des  autres,  ne  foit  que 
figuratifSc métaphorique 5  &:queS.  Hilaireait  expriaK;  parles 
mêmes  termes  des  idées aufîj  différentes,  que  celles  que  les 
Calviniftes  ont  de  ces  Myfteresi  Rien  n'eft  plus  aifé  que  de  dire 
en  l'air  que  cela  eft  très  pofl^ble  ;  mais  il  eft  très  difficile  de  fêle 
perfuader  finceremcntà  foy-même,  &.  de  le  croire  ferieufemenc. 

PASSAGB   DE    S.    CYRILLE.    Catec/7.  ^. 

Participons  y  donc  avec  une  entière  certitude  comme  au  corps  ($^ 
au  fang  de  J.  C.  Car  dans  le  type  du  pain  le  corps  vous  cfi  donné  i  le 
fang  vous  cfi  donné  dans  le  type  du  vin  ,  afin  que  vous  foye::^  rendu 
participant  du  corps  ^  du  fiang  de  J.  C.  n'ayant  ainfi  qu'un  même 
corps  ^  un  même  fiang  que  luy.  C'efi-  ainfi  que  nous  devenons porte- 
Chrifis^  fon  corps  ^/-fion  fiang  e fiant  difiribuezjians  nos  membres. 

REELEXION 


éjî  mcingê  corporellement  dA72s  tEuchariJiie.        365 

Ch.  II. 
REFLEXION. 

Ce  paîTige  ayant  ç?té  objecté  par  Bellarmin ,  &  ce  Cardinal 
ayant  remarqué  que  le  corps  de  J.  C.  quinouseft  donné  dans  le- 
type  du  pain  eltanc  clairement  diftingué  du  pain  ,  ne  pouvoit 
eftre  que  ie  corps  vericable^par  confequent  que  c'eftoit  du  corps 
véritable  que  S.  Cyrille  die  que  nous  y  participons ,  &  qu'il  ell 
diltribué  dans  nos  raembres^eequimarqueclairement  uflcman- 
ducation  corporelle:  Aubertin  rc^or^à  qu'il  y' étonne  qae  Bellar- 
min ait  ejiè  affez^hefie  pour  ne pof  voir  ce  que  l'on  pouvait  répondre 
à  ce paffage  5  ce  qui  efl^  dit-  il ,  très-facile  :  m  i  RU  m  e/l  Bellarminum 
adeo  bardum  fuifpc ,  ut  deprèhenderc  no7ipotuent  quidadhac  rejjj'on. 
deri po_(lit ,  quod  fane  facillimum  ejf. 

Voyons  donc  en  quoy  confifte  cette  facilité.  CV/,dit  il,^»if 
S.  Cyrille  en  difant ,  dans  le  type  du  pain  le  corps  vous  efi  donné  ,  ^ 
le  fang  vous  eji  donné  dans  le  type  du  vin ,  ve»t  dire  feulement  que  le 
pain  efi  un  corps  typique. 

Mais  cette  réponle  qu'on  nous  veut  faire  pafTcr  pour  facile  , 
efl:  (î  éloignée  du  fcns  commun  qu'elle  ne  peut  pas  même  s'ap- 
pliquer au  palTagedont  il  s'agit.  Il  y  eft  parlé  d'un  corps  deJ.C. 
qui  cjl  donne  dans  le  type  du  pain.  Je  demande  ce  que  fignifienc 
ces  mots,  Corps  de  j.  C.  Si  c'eft  le  corps  véritable  ,  Bellarmin 
a  raifon  de  conclure  de. là  que  c'efî:  donc  ce  corps  véritable  qui 
eftdiftribué  dans  nos  membres  •  &  (î  c'eft  un  corps  typique,  en 
vérité  Anbertin  croyoit.il  fincerement  que  ce  Pcre  l'auroit 
avoué  de  luv  faire  dire,  que  le  corps  tvpique  nous  eft  donné 
dans  le  type  du  pain,  c'eft-à-dire  dans  un  corps  typique?  A  quoy 
bon  cette  multiplication  de  corps  typique?  Et  qui  a  jamais  dit 
qu'une  image  loit  donnée  dans  une  image  ,  ôc  un  type  dans 
un  type  ? 

On  peut  bien  dire  que  l'original  eft  donné  en  quelque  forte 
dans  fon  image,  parce  que  l'on  poifede  en  quelque  force  l'ori-  j^  ja:in.].  j. 
ginal  par  l'image:  Et  c'eft  dans  ce  fens  que  S.  Cyrille  d'Ale-  c./.iesAoï. 
xandrie  dit  que  J.  C  eft  la  vraye  manne ,  ^  qu'il  a  cfté  donné  aux  •  !■  •       . 
Anciens  dans  le  type  de  la  manne.  C'eft  dans  ce  kns  qu  il  dit  que  Levu/' 
7.  C.  i"  eft  offert  pour  tous  dans  l'image  duveau\^c    C'eft  dans  ce 
ftnsqu'il  dit  encore,  qu'ilaefté  offert  dans  tous  les  ficrificcs  an^ 
ciens.  Mais  dans  tous  ces  lieux  il  eft  toujours  parlé  de  l'originak 
C'eft  cet  original  oui  eft  donné  ,  qui  eft  facrifîé  J  bi  1!  n'cft  die 

Z  2r 


.lA 


3^4  Liv.  VI.  ^e  le  corps  de  fc/ks-Chrifl 

en  aucun  que  l'image  foie  donnée  ou  facrifiée  par  l'image. 

Ce  pafllige  de  S.  Cyrille  dejerufalem  fournit  donc  un  ar- 
gument fans  l'eplique  pour  la  manducation  corporelle  Levt)i. 
cy.  Il  ne  faut  que  deux  chofes  pour  marquer  une  véritable 
manducation  corporelle  du  corps  de  J.  C.  l'une  qu'il  Toit  cer- 
tainement parlé  du  corps  véritable  deJ.  C  6c  non  de  fontype, 
l'autre  que  ce  corps  véritable  ne  (oit  pas  feulement  donné  en 
figure,  mais  réellement.  Or  quand  S.  Cyrille  À\t  que  dans  le  type 
du  pain  le  corps  nous  cfi  donne  ^  il  ell  évident  qu'il  parle  du  corps 
véritable  ;  &:  quand  il  dit  de  ce  même  corps  véritable,^»'// ^y^ 
diflrîbuè  dans  nos  membres  ,  Se  qu'il  veut  qu'on  en  ait  une  entière 
certitude,  il  marque  clairement  que  la  participation  en  efl: 
réelle  &  corporelle.  Et  par  confequent  ce  palfige  prouve  mani- 
feftement  la  manducation  corporelle  ;  puilque  c'efl  le  même 
corps  félon  S.  Cyrille  ,  C[ui  e/t  donné  dans  le  type  dupain  ,  qui  efi 
difirihuè  dans  nos  membres,  par  lequel  nous  fommes  Porte-Chrifis^ 
&c  qui  eft  pris  avec  U  certitude  avec  laquelle  ce  Saint  nous  ex- 
horte de  le  prendre. 


CHAPITRE    III. 

Saint  Ephrem  Diacre  d'EdeJJe ,  é^  S.  Epiphane. 

'  AiNT  Ephrem  dans  u  n  Traité  qu'il  a  fait  pour  montrer  qu'il 
'ne  faut  pas  fonder  curieufêmcnt  la  nature  de  Dieu  ,  tombe 
lur  le  diicours  de  rEuchariffie,à  l'cgard  de  laquelle  il  prétend 
qu'on  doit  avoir  la  même  retenue.  Et  après  avoir  exhorté  les 
Fideiiesà  participer  àce  Sacrement,  il  marque  que  pour  le  bien 
faire  il  faut  fuivre  J.  C.  par  la  foy  dans  tout  ce  qu'il  a  foufFert  à 
fa  pafîîon  ,  &  l'accompagner  en  efpritdans  fa  refurreclion  mê- 
me. Après  quoyil  ajoute  ces  paroles:  Confidcrei^toutes ces cho. 
fes  avec  prudence ,  avec  perfeition  ,  avec  foy ,  ^  croyezj^ermemcnt 
qu'elles  font  toutes  véritables  en  la  rnhne  manière  qu  elles  font 
toutes  rapportées.  Car  fi  vous  ne  les  contemplcz^parles  yeux  de  la 
foy  ^  il  ne  fera  pas  pojftble  que  vous  foyez^élevé  de  la  terre  au  ciel 
pour  y  voir  en  efprit  les  fouffrances  de  J.  C.  C'cft  la  foy  qui  bril- 
lant dans  nos  cœurs  comme  une  vive  lumière  ,  leur  donne  des 
y  eux  pour  contempler  avec  pureté  (^  fincerité  l'apieau  de  Dieu  qui 
efi  mort  ^quia  efie  immole  pour  nous ,  C^  q^i  nous  a  donne  [on  très- 


efi  mangé  corporellcment  diins  tEuchtirifiie.       365 

faim  ^  ires-pur  corps  ,  afin  que  nous  le  mangions  continuellement ,.  Ch,  I  H. 
^  que  nous  obtenions  en  y  participant  la  remijjion  de  nos  péchez^ 
Cclny  qui  poffcde  cet  œil  de  lafoy  voit  clairement  le  Seigneur,  ^ 
avec  une  foy  tres-pleinc  ^  trcs- ferme  il  mange  le  corps  ^  boit  le 
Ung  de  l'agneau  immaculé  Fils  unique  du  Perc  cel'efte  ^  fans  fonder 
avec  curiofitè  la  doctrine  toute  divine  (j^  toute  fainte  que  cette  foy 
notu  enfcigne.  Car  c^cft  la  foy  de  Dieu  qui  opère  en  nous  j  ceji  clic 
qui  voit  de  loin  les  chofe s  futures  ,  (jj^qui  s'appelle  toujours  foy  (j^ 
non  curiofté.  Vous  croycz^^  mon  cher  fil f  ^  ^nj.  C.  Fils  unique  de 
'Dieu  :  Vous  croyez^qu'il  cji  né  pour  vous  fiir  la  terre  dans  la  chair.^ 
Pourquoy  voudricz^vous  donc  fonder  un  abîme  qui  n'a  point  de 
fond ,  (^pénétrer  des  Mvfteres  impénétrables  ?  Si  vous  recherchez^ 
de  les  connoiflre  avec  curiofitè ,  vous  rtt  ferez^flus  fidelle  ,  mais  cu- 
rieux. Demeuret^donc  dayis  vofire  foy  toute  pure  (jr  toute  fmple. 
Participez^au  corps  fans  tache  (^  au  fang  du  Seigneur  J.  C.  avec 
une  foy  très -pleine  ,  e fiant  tres-affuré  que  vous  mangez^  l'agneau 
même  tout  entier.  Car  les  my fiera  de  Chrifi  font  un  feu  immortel. 
Gardez^vous  de  les  fondertemerairemcnt,  de  peur  qu'en  y  participant 
vous  n'en  foy  ez^confumé.  Le  Patriarche  Abraham  [ervit  des  vian- 
des terrcftres  à  des  Anges  du  Ciel ,  ^  ils  eyi  mangèrent.  Ce  fut  à 
la  vérité  un  grand  miracle  que  des  efprits  qui  n'ont  point  de  corps 
mangea ffent  ftir  la  terre  des  viandes  corporelles.  Mais  ce  que  J.  C. 
noflre  Sauveur  Fils  unique  de  Dieu  a  fait  pour  nom-  efi  au  def- 
fus  de  f  admiration  ,  de  l'intelligence  (^  des  paroles  de  tous  ks  hom- 
mes. Car  efiant  reveftu  de  chair  comme  nous  fommes  ,  //  vous  6i 
donné  à,  manger  un  feu  ^  un  efprit  ,  c'efl-à-dire  fou  corps  d^.fon 
fang. 

REFLEXION. 

Comme  il  y  a  pîufieurs  choies  dans  ce  paHaj^e  qui  n'accom- 
modent pas  les  Minières  ,  parce  qu'elles  forment  clairemene 
l'idée  d'une  mandueation  corporelle,  Aubertin  fait  anffi  di- 
vers efForts  pour  s'en  tirer.  Il  y  applique  d'abord  fes  clefs  de 
figure  &  de  vertu ,  &;  il  prétend  que  par  le  corps  ô:  le  fang  au- 
quel S.  Ephrem  dit  qu'il  faut  participer  j  on  peut  entendre  ce 
que  ce  Miniftre  appelle  le  corps  typique.  Mais  il  n'yaprefque 
rien  dans  cepafTage  qui  n'éloigne  cette  idée.  Car  S.  Ephrem 
d'it  que  l'ayieau  immolé  pour  nous ,  nous  a  donné  fon  corps  faim 
^  immaculé  ^  afin  que  nous  le  mangions  continuellejnent.  Or  c'eft 

Z  z  i] 


56,6  Li  V.  VI.  ^e  le  orps  de  Jefas-Chrifi 

fon  corps  véritable  qu'il  nous  a  donné,  puifquelelon  les  Ca'L 
vinifies  mêmes  J.  C.  ne  nous  donne  pas  feulemencla  figure  de 
fon  corps  ,  mais  fon  corps  même. 

N'eft  ce  pasencorele  vray  corps  de  J.  C.  dont  il  dit,^a*?  f^- . 
luy  qui  pfiffede  l'œil  de  U  foy  ,  m.nigc  avec  une  foy  tres.ferme  le 
corps  ires  fiint  de  l'ayficau  immaculé  Fils  unique  du  Père  celejiel 
Que  les  Miniftres  difent  s'ils  veulent  que  le  corps  de  J.  C.  fe 
mange  rpirituellcmenc,  il  efttoûjours  certain  félon  eux  mêmes 
que  ce  corps  de  J.  C.  qui  eH;  l'objet  d'une  foy  certaine  &:  très- 
ferme,  eft  le  corps  véritable.  Caria  foy  nes'arrefte  pas  ^  à.ç.s 
fymboles.  Elleie  porte  jufqu'au  corps  véritable  de  J.  C. 

C'eft  aufîî  du  véritable  corps  que  S.  Ephremdit,  qu'il  faut 
efbre  affurez  que  l'on  mange  l'agneau  même  tout  entier.  Car  le 
Sacrement  ne  fe  prenant  pas  entier,  cette  marque  ne  convient 
qu'au  vray  corps  de  J.  C. 

Cependant  s'il  efi:  indubitable  que  S.Epbrem  parle  du  vray 
corps, il  ne  l'eft  pas  moins  que  ce  Samt  ne  parle  pas  d'une  man. 
ducation  purement  fpirituelle. 

Cette  feulé  reflexion  ,  que  Von  mar^e  Vayieau  même  tout  en^ 
ticr^  en  eft  une  preuve  convaincante  ^  car  jamais,  par  exem- 
ple, perfonne  n'a  dit  qu'il  faîluft  croire  qu'en  recevant  le  Bap- 
tême on  reçcic  le  fang  de  J.  C.  tout  entier.  , 

■Et  l'on  ne  fçauroit  même  dire,  félon  l'opinion  des  Calvinif- 
-res,ce  que  c^'eft  que  cette  intégrité  Aq  l'agneau  dont  parle  Saine 
Ephrem  ,  6cdont.il  exige  la  créance. 

Eft-ce  qiï'il  faut  croire  que  l'on  reçoit  toute  la  vertu  du  corps 
&  du  fang  de  J.  C?  Mais  ce  feroit  obligera  croire  unefa.«ïîeré  , 
puifque  nous  ne  recevons  pas  la  vertu  de  ce  fang  dans  toutefois 
étendue. 

Eft  ce  qu'il  faut  croire  que  la  vertu  imprimée  au  pain  décou.- 
ie  de  tout  J,  C.  &non  pas  d'une  de  fes  parties  ?  Mais  ce  feroit 
une  imagination  fi  ridicule  que  de  croire  que  la  vertu  d'un  Sa- 
crement vint  d'une  feule  partie  de  J.  C.  &  non  pas  de  J.  C. 
tout  entier,  qu'il  eft  fans  apparence  que  ce  Père  fè  ioit  mis  en 
peine  de  la  prévenir  ,&  encore  plus  qu'il  l'ait  fait  en  exigeant 
bien  ferieufement  une  certitude  toute  entière  de  ce  poinr,com- 
nie  ''il  eftoit  très-difficile  de  ne  fè  laiiîèr  pas  aller  à  cette  ex- 


travagance. 


Eft  ce  que  la  foy  embraffe  toujours  tout  J.  C.  &  ne  le  con- 
;te;mple  jamais  que  tout  entier  £c  tout  à  la  fois  ?  Mais  il  n'y  am- 


ejî  nmngé  corporellement  ânns  î Etichuriflie .        567 
-roic  rien  de  plus  faux  que  ce  prétendu  fens.  Caria  foynepro-  Ch.  III, 
duic  Tes  actions  que  conformément  à  la  nature  de  l'efprit  hu- 
main. Or  l'efprit  non  feulement  a  le  pouvoir  de  feparer  les  ob- 
jets compofez,  &  de  s'attacher  à  une  partie  fans  regarder  ex- 
prelîement  l'autre ,  mais  ce  luy  eft  même  fouvent  une  neccflité. 
Ainfi   cette   intégrité  de  la  manducation  de  l'agneau  ne  fe 
peut  rapporter  qu'à  la  manducation  corporelle  ,  où  l'on  pour- 
rait croire  que  l'on  ne  mange  qu'une  partie  deJ.C.  parce  qu'on 
ne  reçoit  qu'une  partie  des  fymboles  i  &;  cen'eft  qu'à  l'égard 
de  la  manducanon   corporelle  qu'on  peut  raifonnablement  Perp.  t.i.^. 
avertir  qu'on  mange  J.  C.  tout  entier  ,  comme  nous  l'avons  '^•'^' 
prouvé  plus  amplement  ailleurs. 

Toutes  les  autres  rla'ules  &  routes  les  circonftances  de  ce  pafi 
fage  portent  à  ce  même  fens ,  &:  s'éloignent  de  celuy  des  Calvi- 
niûes.  Car  quel  fujet  y  auroit-il  félon  leur  doclrine ,  de  recom- 
commander  cette  foy  toute  fïmple,  &  d'avertir  fi  exprefie- 
mentdenepas  fonder  ce  myftere  avec  curiofiré?  Eft  il  difiici- 
le  de  comprendre  que  J.  C.  inftituë  une  figure  de  fon  corps  & 
de  fon  fang,  qu'il  nous  oblige  d'y  participer  en  penfant  à  fa 
mort  X,  &  que  par  cette  penfee  nous  participons  au  fruit  de  fâ 
mort?  Ne  devroit-on  pas  recommander  au  contraire  de  fonder 
ce  myftere  avec  curiofité,  puifqu'en  ne  le  fondant  point ,  on 
s'en  peut  former  de  grandes  idées,  maisfaufres,&:  qu'en  Le  fon- 
dant on  y  découvriroit  une  vérité  qui  ne  iéroit  capable  d'ef- 
frayer perfonne,  ni  par  confequent  de  brûler  &  de  fcandali- 
fer  q'ii  quecefoit. 

Quel  fens  aura  cette  comparaifon  des  Anges  qui  manient 
des  viandes  corporelles  avec  les  h.onMï\çs  ejui  mangent  le  corps  de 
J.C.  quiefiunfeu  é- an  efprit?  Car  Ci  Von  n'entend  cela  que  de 
la.raanducation  du  Sacrement ,  où  efl  cette  merveille  qui  fur. 
fajje  ,  félon  S.  Ephrem  ,  l'efprit ,  tadmiratton  ^S  les  paroles  de 
tous  les  hommes  ?  Yit  fi  on  l'entend  de  la  manducation  fpiritwei- 
le  du  corps  de  J.  C.quei  rapport  aura  la  manducation  corpo- 
relle &  réelle  des  Anges  avec  cette  manducation  (pirituelle  du 
corps  de  J.  C.  quinefcroit  quemetaphorique,&  que  S.Ephrem 
prétend  néanmoins  eflre  infiniment  plus  merveiileufe?  A  quoy 
fervira  dans  ce  léns  la  remarque  que  fait  faint  Ephrem,  que 
nous  fommes  revefius  ete  chair  ?  Eft-ce  que  le  corps  peut 
eftre  un  obftacJe  à  une  manducation  qui  ne  fe  fait  que  par 
la  foy  i 

Zz  iij 


3é8         Liv.  VI.  ^e  le  corps  de  Jejus-Chrifl 

Pourquoy  perfonne  ne  s'eft  il  jamais  avifé  de  faire  de  fem- 
blables  comparaifons ,  en  parlant  de  Tunion  qu'on  peut  avoir 
par  la  foy  au  corps  de  J.  C.  lorfqu'on  médite  ou  qu'on  écoute 
la  parole  de  Dieu? 

Pourquoy  n'a- t'on  jamais  exigé  cette /ôy/î/f/w^  dansaucune 
des  autres  occafions  où  la  manducation  fpiritaelle  fe  peuc 
trouver ,  &  qui  font  en  grand  nombre  félon  les  Mmiftres  ? 
,  Pourquoy  n'a  t'on  jamais  exigé  en  parlant  de  la  manduca- 
tion fpirituelle  qu'on  cruflque  l'on  mange  l'agneau  tout  entier? 
Pourquoy  n'a-t'on  jamais  averti  perfonne  du  danger  qu'il  y  a 
à  fonder  le  myftere  de  cette  manducation  fpirituelle  fi  fré- 
quente ? 

Pourquoy  n'en  a-t'on  jamais  dit  qu'il  furpafTe  toute  admi- 
ration ^  tout  efprit,  toutes  paroles  ? 

Tout  cela ,  qui  s'efl:  toujours  dit  de  l'Euchariftie,  ne  luy  con- 
vient, félon  lesMinin:res,que  parce  qu'elle  enferme  la  mandu- 
cation fpirituelle.  C'eft- là  l'unique  fondement  de  toutes  ces 
exprelîîons.  Et  puifque  cette  manducation  fe  rencontre  en  une 
infinité  d'autres  occafions  ;  commentée:  il  arrivé  c]u'on  ne  luy 
ait  jamais  attribué  toutes  ces  merveilles  qui  luy  conviennent 
par  elle  même,  &:  qui  en  font  infeparables,  qu'en  la  confide- 
rant  dans  l'Euchariftie,  qui  n'eft qu'une  des  moins  communes 
manières  de  la  pratiquer  ? 

C'eft  fans  doute  la  vue  de  toutes  cesabfurditez  qui  a  obligé 
Aubertin  d'avoir  recours  à  une  autre  folution  ,6c  de  dire  qu'il 
ne  s'agit  point  en  cet  endroit  de  la  manducation  du  corps  &:  du 
fangde  J,  C.  qui  fe  fait  dans  l'Euchariftie,  mais  delà  mandu- 
cation fpirituelle  qui  fe  fait  par  la  méditation  de  la  paffion  de 
J.  Q. far  laquelle  ^  dit-il ,  on  manque  J.  C.  tout  entier  ,  von  feulement 
comme  homme^mais  comme  Dieu.  Et  c'eft  en  cela  qu'il  fait  confif- 
ter  la  merveille  de  cette  manducation  ,  pane  ,  dit  il ,  que  s'il 
efi  merveilleux  que  de  purs  efprits  comme  les  Amics  fe  [oient  nour- 
ris de  viandes  corporelles  ,  il  l'cfl  hecmcoup  plus  que  des  hommes 
mortels  fe  nourrirent  du  pain  des  Anzçs  qui  ejl  7  C  non  comme 
homme^  mais  comme  Dieu.  Mais  ce  Miniftre  ne  pouvoic  mieux 
faire  voir  que  tout  luy  eft  bon ,  pourvu  qu'il  trouve  moyen 
d'échapperà  la  vérité  qui  le  preiîe. 

Car  y  eut-il  jamais  de  paflage  oii  l'Euchariftie  Ç\\x.  plus  claire- 
ment marquée  que  dans  celuy-làj  H  commence  par  l'explica- 
non  de  l'inilitucion  de  l'Euchariftie,  S.Ephrem  y  exhorte  ex- 


efi  mmgé corporellemsnt  dans  V Euchmfite .      569 

çreflemenc  a  participer  aux  Sacrcmens.  Que  s'il  exhorte  auffi  à  Ch.  III. 
méditer  1 1  paffion  ,  c'eft  que  la  participation   des  Sacremens 
doit  eftre  accompagnée  de  ces  penfées,  félon  que  S.Paull'or- 
donne  ,  mais  il  revient  enfuite  à  l'Euchariftie ,  &  il  fe  fert  de 
tous  les  termes  dont  on  la  défigne  ordinairement. 

M.  Claude  répliquera  peut-eftre  pour  Aubertin  ,  que  ces  ■ 
mêmes  termes  peuvent  auffi  fignifîer  la  manducation  fpiri- 
tuelleen  gênerai;  &  c'eftce  que  je  nie  paravancc.  Mais  quand 
cela  feroit ,  il  ne  montreroit  pas  par  là  qu'ils  fe  puifTent  expli- 
quer en  ce  lieu  icy  d'une  autre  manducation  que  de  celle  qui 
ie  fait  par  la  réception  de  l'Euchariftie.  Car  quand  des  termes 
ont  une  fignification  propre  ,  principale  &  éminente  ,  ils  ont 
beau  en  avoir  de  moins  propres  &  de  moins  ordinaires  ,1a  rai- 
fon  veut  qu'on  les  prenne  au  fens  propre  &  principal ,  lorfqu'il 
n'y  a  rien  qui  les  détermine  precifément  au  fens  moins  propre 
&  moins  ordinaire. 

L'équité  ou  plûtoft  la  neceffité  de  ce  principe  eft  toute  évi- 
dente, parce  que  quand  l'efprit  entend  un  mot,ilfe porte  tou- 
jours à  fa  principale  fignification  ,  à  moins  que  d'cneftre  dé- 
tourné. Et  comme  tous  ceux  qui  parlent  ou  qui  écrivent  fça- 
vent  cette  inclination  des  hommes^&quec'eft  la  leur  propre, 
ils  s'y  accommodent  naturellement  &:  fans  art;îcainfi  ils  n'em- 
ployent  jamais  les  mots  en  des  fignifications  éloignées,  rares, 
extraordmaires ,  fans  les  y  déterminer  expreflemenr. 

Il  n'y  a  qu'à  appliquer  cette  maxime  du  fens  commun  au  paf- 
fage  de  S.  Ephrem  pour  en  conclure  qu'on  ne  le  fçauroit  expli- 
quer d'une  autre  manducation  que  de  celle  qui  fe  fait  par  l'Eu- 
chariftie. Car  il  eft  certain  d'une  part  que  ces  termes  de  Saint 
Ephrem  ,  participer  au  corps  ^  au  fang  de  J.  C.  manger  le  corps 
immaculé  ,  ^ boire fon  fang,  ynanger  l\igneau  tout  entier^  le My- 
fterede  Chrift^  &  quantité  d'autres ,  ont  pour  fignification  prin- 
cipale &  ordinaire  la  manducation  Sacramentalej&ileft  vifi- 
ble  de  l'autre  qu'il  n'y  a  rien  dans  ce  pafllîge  qui  détourne  de 
ce  fens  5  &par  confequent  c'efl  une  chicanneiie  honteufèque 
d'en  vouloir  fubftituer  une  autre,  6c  de  rapporter  ces  paroles  à 
la  fimple  méditation  àç.^  fouffrances  de  J.  C. 

JepaflTemême  plus  avant,&  je  foûtiens  qn'Aubertin  nefçau- 
roic  faire  voir  que  ces  termes  ayent  jamais  eflé  employez  avec 
quelque  détermination  que  ce  foit  à  la  manducation  fpirituelle. 
Que  l'on  n'a  jamais  dit  d'une  autre  manducation  que  delà  Sa-- 


37©  Liv.  VI.  ^e  le  corps  de  fefùs-Chrifi' 

cramentale  ,  que  Dieu  7iuus  a  donné  [on  C'irps  &  fon  f^ïng ,  iifin  cte 
nous  en  nourrir ^(^  que  cette partieipaiion  nous  fervc  pour  la  remiijion 
dcnos pechez^Qt  lont  des  expreffions  cirées  de  la  liturgie 'qui  por- 
tent l'efpric  àla  communion  Sacramentale ,  bc  qui  ne  fe  dilenc 
qu'en  ce  fensv 

Je  foùriens  de  plus  qu'en  prenant  cette  manducation  pour 
uns  fimple  méditation  des  foufïrances  de  J.  C.  il  eft  ridicule 
d'exiger  qu'an  fe  tienne  pleinement  afîuré  ,  que  l'on  y  mange 
J.  C.  tout  entier.  Et  il  n^  a  rien  de  plus  impertinent  que  le  lens 
qu'Aubcrtin  donne  à  ces  paroles  ,  en  voulant  qu'elles  llgni^ 
fient  que  par  cette  manducation  fpirituelle  on  mange  J.  C. 
auffi  bien  lelon  Ton  humanité  que  félon  (a  divinité.  Car  puifque 
manger  fpirituellemenc  la  divinité  &  l'humanité  de  J;  C.  n'eft 
autre  chofe  que  d'embralfer  par  la  foy  &  l'humanité  &  la  divi- 
nité dej.  Cil  eftimpoffible de  le  faire  (ans  élire  allure  qu'on  le 
fait ,  la  connoiflance  &  la  certitude  de  l'acftion  eftanc  infepara- 
bles  de  l'action  même.  Ainfi  comme  il  feroit  ridicule  de  pref- 
crire  à  un  homme  qui  penferoitenDieu  ,d'efl;re  aflliréqu'il  y 
penfcjil  eft  ridicule  aulFi  deprefcrire  à  un  homme  qui  s'unir  par 
îa  foy  à  l'humanité  &:  à  la  divinité  de  J.  C.  qu'il  foitafTuré  qu'il 
mange  la  divinité  &  l'humanité,  puifque  ce  ne  feroit  en  ceièns 
que  la  même  chofe. 

Cette  reiiexion  qu'Aubertin  veut  que  S.  Ephremaiteu  en' 
vue,  que  c'eft  une  grande  merveille  que  des  homnVes  corporels 
fbient  nourris  du  Pain  des  Anges,  c'eft  à-dire  ielan  luy,  de  la 
divinité  dej.  C.  eft  une  pure  vifion.  Car  comme  cette  penfée 
elT:  extraordinaire  ,  ceux  qui  la  veulent  faire  entendre  aux  au- 
tres ne  manquent  jamais  de  l'exprimer,  &.ils  ne  (uppofenrpay 
qu'on  la  devinera  par  des  paroles  qui  ne  la  fignifient  point. 

S.  Auguftin  &  S.  Fulgence  qui  ont  (ouvent  marqué  ce  degré 
de  monter  à  la  divinité  par  l'humanité ,  fe  font  fervis  de  paroles 
très  claires  pour  exprimer  leur  penfée.  S.  Ephrem  en  auroic 
f-iic  autanr.s'il  avoiteûle  même  dcilcin  j&  de  ce  qu'il  ne  le  fait 
pas ,  c'eft  une  marque  certaine  qu'il  ne  l'a  pas  eu.  Il  ne  parle  ni 
de  l'humanité  ,  comme  degré  ,  ni  du  pain  des  Anges  ,  ni  de  la- 
divinité  de  J  C.  ni  duVerbe  comme  Verbe  îl  ne  fiit  point  con- 
fifterla  merveille  dontil  parle, en  ce  qu'on  mange  la  divinité, 
mais  en  ce  qu'on  mange  le  corps&  le  fmgde  j.C.  &ainfiilfau- 
droit  qu'il  n'euft  pas  eu  de  fens  commun,  s'il  nous  euft  voulu 
fairecomprendrepar  là  cette dodrine  fi  haute £c  (i  élevée  ,  65 

qui 


efi  mitigé  corpoYellemem  dans  lEuch.itiJîie.        371 
qui  il  befoin  poureftre  cr.cenduc  d'cftre  fi  precifcnient  expn    Ch.  TH. 
mce.  A  cepaflagede  S.  Ephr£m,on  en  peur  ajouter  un  autre  de  r"'^°'^Pfl, 
S.  Epiphane  dont  Aubcrtin  fe  (auve  par  ies  mcmesillufions.  icd.' 
Z'E'Z^l:fe ,  dit  ce  Père  ,  e[l  le  port  îrj.nqtdUe  de  la  paix.   C'eft  une 
l'igrie  qui  jette  une  odeur  -paretllc  à  celle  des  utyies  deCypre^d,^  qui 
nous  produit  le  raijin  de  l'Eulogie ,  (^  nous  donne  tous  les  jours  un 
breuvage  qui  foulage  tcus  nos  travaux  ^f^aveir  le  fan^  de  I,  C.  pur 
^  véritable. 

Aubertin  réplique  que  cela  ne  s'entend  pas  del'Euchaiinie  , 
mais  du  corps  &:  du  fang  de  J.  C.  qui  nous  eil  prcfe:;tc  ,  dit-il , 
par  les  indrudions  de  TEglife.  Il  ajoute  que  c'efi  en  ce  fens  que 
S.  Jérôme  dit  :  Confuetudo  y^cbis  ifiius  modi  efi  .^  ut  bis  qui  hapti-  AiJveif.Ert. 
Z^andi  funi ,  perquadraginta  dies  tradamus  fancLtm  Trinitaiem. 

Mais  ce  Miniftre  devroic  avoir  pris  garde  que  fi  l'on  fe  peut 
fervirdu  mot  àttraderetn  parlant  d'inftrudion,  il  n'en  efi  pas 
de  même  de  celuy  de  Urpri^  ya.i/t^o.i.^  &  qu'il  n'y  eut  jamais 
d'écrivain  aflez  impertinent,  pour  dire  que  l'on  fait  prefenc 
aux  baptifez  de  la  Sainte  Trinité  ,  en  voulant  faire  entendre 
qu'on  les  en  inflruir.  Ainfi  S.  Epiphane  difaot  de  l'Eglire,^//f//e 
nous  fait  prefent  du  fang.de  J.  C.  x'^a,  ^j^f/yot)  ')(aL?jQ).câyA  ,  c'efï 
le  comble  de  l'abfurdité  de  rapporter  cela  aux  inflruclions 
qu'elle  nous  en  donne.  Outre  que  S.  Epiphane  n^  difant  rien 
qui  puiiîè  faire  appliquer  ce  qu'il  dit  du  corps  &  du  fang  de 
J.  C.  â  l'inftrudion  ,  il  eft  ridicule  de  rapporter  ces  termes  à 
une  autre  ehofe  qu'à  l'Euchariftie  qui  fait  leur  propre  Se  leur 
principale  figniHcation. 

Aubertin  a  encore  recours  à  une  autre  défaire  pour  fe  tirer  Au6.p.4«<^- 
de  ce  paflage ,  qui  eft ,  dit  il  ,  qu'en  cas  qu'il  faille  l'entendre 
de  l'Euchariflie  ,  on  peut  dire  que  S.  Epiphane  entend  par  ce 
vrayfangyUn  vruy  Sacrement,  Sc  qu'il  l'appelle  vraj  pour  le  dif- 
tinguer  des  faux  Sacremens  des  hérétiques.  Mais  c'eft  encore 
là  une  de  ces  vues  éloignées  qui  ne  fe  fuppléenr  point ,  &  qui 
ont  necefTiirement  befoin  d'eftre  exprimées  pour  eftre  enten- 
dues. Si  S.  Epiphane  n'avoit  eu  deflein  que  de  diftinguer  par  le 
mot  de  verum^le  Sacrement  del'Euchariftie  des  faux  Sacremens 
des  heretiques-j  il  en  paroiftroit  alTurément  quelque  chofe  ; 
mais  comme  il  n'v  a  rien  d'approchant,  il  eft  vifible  qu'il  mon- 
tre par  là  qu'il  laiftc  ce  mot  dans  fon  fens  ordinaire,5v:  qu'il  l'op- 
pofe  au  doute  gênerai  que  le  myftere  même  produit, ôc qui  a. 
befoin  d'eftre  détruitj  en  nous  confirmant  dans  la  créance ,  que 

AAa 


372-         ^^iv.  VI.  j^<?  le  corps  de  yefm.Qmfi 

ce  que  rF.glifj  nous  donne ,  eH:  le  vray  (ang  de  J.  C.  comme  on 

raexplK]ué  dans  le  iecond  volume  de  cet  ouvrage. 


i.Perp.  1,  f. 
c.  II  p  s^-) 


CHAPITRE    IV. 

Saint  Ambrai fe ,  ou  l' Auteur  du  Livre  des  Sacremens. 

N  a  rapporté  dans  le  Tome  précèdent ,  le  premier  cha- 
pitre du  fixicme  livre  des  Sacremcns  attribué  à  S.  Am- 
&iuiv/  broi[e,&ceux  qui  prendront  la  peine  de  lire  les  reflexions 
qu'on  y  a  jointes ,  y  trouveront  fans  doute  une  preuve  convain- 
cante que  la  vraye  chair  de  J.  C.  efk  réellement  prifè  &  mangée 
dans  l'Euchariftie.  Je  ne  laifTeray  pas  néanmoins  de  l'inférer 
icy,  pour  avoir  lieu  de  réfuter  la  réponfe  qu'y  a  fait  Au- 
bertin. 

Comme  noftre  Sei<zneurJ.  C.  dit  cet  Auteur  ,efi  le  vray  Fils  de 
Dieu ,  C^  qu'il  ne  l'cft  pas  feulement  par  grâce  comme  les  hommes ,  ^ 
mais  quil  l'cji  comme  Fils  de  la  fubflance  du  Fcre  l  ainji  cefi 
fa  vraye  chair  que  nous  recevons  ,  ^  fou  vray  fang  qui  eft  nofire 
breuvage.  Vous  direz^  peut-  efire  ce  que  dirent  quelques  Difciplcs 
de  J.  C.  lorfquil  leur  dit  :  Ce  lu  Y  qui  ne  mangera  pas  ma  chair 
^  ne  boira  pas  mon  fang  ne  demeurera  pas  en  moy ,  ^  n'aura  point 
la  vie  éternelle  :  Feut  ejirc ,  dis  je ,  que  vous  dircx^:  Comment 
eft -ce  fa  vr-itye  chair  ^puifque  je  ne  vois  qu'une  ^reffemblance  de 
fang  ,  ^  non  la  vérité  du  fang  l  Je  répons  k  cela  premiererncnt ,  que 
ici  parole  de  Dieu  eft  fî  efficace  ,  quelle  peut  changer  les  loix  ordi. 
n  ires  de  la  nature.  Je  répons  en  fécond  lieu ,  que  c' eft  pour  empé. 
cher  qu'il  r^ arrive  ce  qui  arriva. ,  quand  les  Difciples  ne  purent 
fouffrirles  di (cours  de  J.  C.  ^  que  luy  entendant  dire  qu'il  dennoit 
fa  chair  k  manger  ^  fon  fang  à  boire ,  ils  fe  retirèrent  tous  à  la  re- 
fervc  de  s.  Pierre  ,  qui  luy  dit  :  Vous  AVEZ  les  paroles  de  la  vie 
éternelle.  Oà  pourrions  nous  aller  en  vous  quittant  ?  Pour  empêcher 
donc  qu'on  ne  dife  ce  que  dirent  ces  "Difciples  qui  abandonnèrent 
J.  C.  dr  pour  faire  en  même  temps  que  la  vice  du  fang  ne  eaufafi  p^M 
de  l'horreur ,  (^  que  néanmoins  la  grâce  que  J.  C.  nous  fait  pour 
noftre  rédemption  demcuraft  entière  ,  vous  rccevezje  Sacrement  fous 
la  reffemblance  du  fang,  mais  vous  obtenez^la  grâce  (^  la  vertu  de 
la  véritable  nature. 

On  a  fuit  voir  dans  le  lieu  que  j'ay  cité,  que  cette  exprcffion, 


ejl  mdr:gé  corporellcment  dans  l Enchaviflie.       375 

nous  recevons  la  grâce  Qr  la  venu  de  Li  véritable  na  are  ^  /îî^niiie    Gh.  IV. 
cjue  noui  recevons  la  vcnrable  nature  pleine  de  vertu  bL  de 
grâce  ,  &  il  n'eft  plus  neceflaire  de  s'y  arrcftcr  icy. 

Mais  ce  que  je  prétends  faire  remarquer,  c'til:  qu'Aubcrtin    -  ,^ 
pour  répondre  à  ce  pa{rage,invence  une  nouvelle  lolutioDaulIi  n4-5i;.  " 
contraire  à  ces  propres  principes ,  qu'au  bon  fens  &  à  la  vé- 
rité. 

Car  on  ne  conçoit  d'ordinaire, félon  l'opinion  des  Miiîiftres, 
que  deux  fortes  de  manducations  h  l'une  corporelle  ,  qui  le  rer- 
•mine  au  figneou  Sacrement  5  l'autre  fpirituclle,  qui  fc  te  mi- 
ne  à  la  vraye  chair  de  J.  C.  Cependant  la  manducation  a  la- 
quelle ce  Miniftre  a  recours  pour  expliquer  ce  paflôge  ,n'c{ljii 
de  l'une  ni  de  l'autre efpece,  comme  nous  l'aîlons  montrer. 

Premièrement,  il  demeure  d'accord  qu'il  cfl  qucftion  dans 
ce  paflagcde  la  vraye  chair  de  J.  C.  que  c'eft  de  la  vraye  chair 
qu'il  cft  dit  q^ùQ  ^veru  efi  caro  quam  acci-pnnus ^Ç;-  vtrtiS  poius. 
Ainfi  c'efi  de  cette  vraye  chair  que  S.  Ambroiié  explique  ces 
paflages  du  (ixicme  chapitre  de  S.  Jean  :  Ma  chair  cjivraye" 
ment  viande  ,  (^mon  fan'i^efl  vr.iycmcnt  breuv.iq^e. 

Il  n'a  ofé  dire  non  plus  qu'il  s'agilfe  en  ce  lieu  d'une  manda- 
cation  fpintuelle.  Caril  s'y  agit  d'une  manducation  qui  excite 
un  doute  qui  s'exprime  par  ces  paroles;  J^ohs  me  direz^commcnf 
efi  ce  devr.iye  chair  ,  fui  [que  je  ne  la  vois  pafl  Or  il  fèroic  ridi- 
cule de  s'imaginer  qus  parce  qu'on  ne  voit  pas  le  iang  de  J.  C, 
perfonne  pull:  douter  qu'on  le  reçoive  par  la  foy  j  puifqu'au 
contraire  pour  le  recevoir  ainfi  ,ileftde  necelîité  qu'on  ne  le 
vove  pas. 

Il  ell  donc  certain  que  cet  Auteur  parle  d'une  manducation 
corporelles  &  par  coniequent  voilà  une  manducation  corpo- 
relle qui  a  pour  objet  la  vraye  chair  de  J.  C. 

Il  (emble  qu'il  n'y  ait  rien  de  plus  à  délirer  ,  mais  cependant 
ce  n'eft  pas  afllzpour  Aubertin  II  a  recours  à  la  deriiiere  rei- 
fource ,  qui  eft  la  clef^iT  vertu  5  &:  chicannant  fur  ces  dernières 
^2iXo\ç.i  ^ver^c  nature  qratiam  virtttîcmqv.e  confequimur  ,  qu'il 
entend  contrela  fuite  de  tout  le  palfage  d'une  vertu  feparee  de 
la  chair  de  j.  C.  il  veut  que  la  chair  de  |.  C.  foit  mangée  &  re- 
çue ,  non  en  elle-même  ,  mais  en  ia  vertu  ,fic carnemQ-  fungui- 
nem  Chrijli  uccipimus  ^  non  rations  materia  ^fed  ratione  virtutis 
abfque  eo  quod  tilius  honor  fit  manducationis  earnis  (^  potus  fan- 
yiinolenii. 

A  A  a  i j 


574  Liv.  VI.  j^û  le  corps  de  Jejus-Qmli^ 

Par  là  il  établit  ce  croiiiéme  genre  de  manducation  inconnu 
jufqu'à  luy,  qui  confifteen  une  manducation  corporelle  donc 
l'objet  efl:  la  vertu  du  corps  de  J.  C.  De  force  que  comme  cette 
vertu  du  corps  de  J.  C.  efl:  une  qualité  fpirituelle,  ou  plûcoft 
qwe  c'eft  le  S.  Efprit  même  avec  cous  {qs  dons ,  il  faut  qu'il  foû- 
tienneque  nousman2;eonscorporellement  le  S.  Efpric  ,  malgré 
le  fens.  commin  &  la  doctrine  Formelle  des  Pères,  qui  enlei- 
gnencquela  Divinité  ne  Içauroic  eftre  mangée. 

On  repondra  peut  eftre  que  comme  lâchait  de  J.  C.  n'eftpas 
ma'igéeen  elle-même,  mais  par  favertu^  de  n>ême  cette  vertu 
eft  mangée  par  le  Sacrement  ,&  non  en  elle-même. 

Mais  qu'y  ac'il  de  plus  ridicule  que  de  faire  faire  tous  ces 
tours  à  noftre  efprit  pour  parvenir  à  l'expredion  de  l'Auteur 
dont  il  s'agit  !  L'expreffion  naturelle,  félon  Aubertin  ,  efl:  que 
l''on  mange  le  Sacrement ,  &  qu'il  n'y  a  que  cela  qui  foie  pro- 
prement mangé.  Il  veut  en  fuite  que  le  mot  de  manger  s'éten- 
de par  métaphore  jufqu'à  dire  que  l'on  mange  la  vertu  du  corps 
de  J.  C.  C'eft  déjà  un  étrant^elaut  qu'il  fait  faire  à  l'elprit  5  & 
Ton  ne  fçait  gueres  ce  quec'eft  c^viQAcsvertus  marigées.  Néan- 
moins il  ne  s'arrefte  pas  là  5  &  comme  fi  cette  manducation  de 
vertus  eftoic  la  chofe  du  monde  la  plus  claire  &  la  plus  éta- 
blie, il  veut  encore  que  d'un  fécond  fautnoftre  efprit  aille  dé- 
couvrir  l'idée  de  cette  vertu  mangée^  dans  cette  exprefîion,  W;^«- 
^er  la  chair  de  J.  C.  comme  fi  elle  ne  pouvoic  avoir  d'autre 
fens. 

Une  faut  pas  que  M.  Claude  prétende  qu'on  impofe  icy  à 
Aubertin  pour  le  rendre  ridicule  ,  parce  que  ce  Miniflre  ne  fe 
fert  pas  de  l'expreifion  de  manger  la  vertu  dcj.  C.&i.  que  l'ex- 
preffion  de  l'Auteur  qu'il  explique  eft ,  nattira  gratiam  virtutem-  ' 
que  confequcris.  Car  ce  mot  de  confequeris  fignifie  manger  en  cet 
endroit,  puifqu'il  eft  queftion  d'expliquer  ce  paflàge  :  Nifiman- 
ducavcritis  carncm  Filii  Mominis.  Or  il  eft  certain  ,  comme  il  a 
efté  prouvé  ,que  cet  Auteur  entend  cette  manducation  d'une 
manducation  corporelle.  Si  donc  par  le  mot  àccarnem  Filii 
Hominis ,  il  avoit  entendu  la  vertu  delà  chair, il  auroit  voulu 
qu'on  mangcaft  la  vertu  de  la  chair,  &;ilauroitattribuéà  J.  C. 
d'avoir  exprimé  cette  étrange  idée  par  cette  exprefiion  encore 
plus  étrange  :  Hijï  manducaveritis  carncm  Filii  Hominis  ,  (^ 
Cp  7.  p.  i?5-      bihcritis  cjus  (angiiinem  ,  noïi  habcbitis  vitam  in  vobis. 

Il  eft  bon  de  fe  fouvenir  icy  de  ce  qu'on  a  remarque  dans  le 


i.  pcip.].;. 


cji  mungé  corporellement  da,ns  TEucha.YÏÎlie.  37^ 
volume  précèdent,  que  quand  on  objede  à  Aubertin  le  paflage  Ch.  IV.  • 
delà  46.  homélie  de  S.  Chryfoflome  fur  S.Jean  ,oùilefl:  dit, 
qu'il  ne  fallait  pas  penfer  que  ce  fufl  par  èniyfne  (^  par  parabole 
que  J.  C.  dit  aux  Juifs  que  SA  CHAIR  ry?  vray entent  viande  ,  (^ 
fonfang  vrayemcnt  hrcuva<ie  ;  tnais  qu'on  devait  croire  qu  il  fallait 
ahfolument  manger  fan  corps  ,  'tcô.v^oû  S^û  (pa.yùv  to  <Tci)f/.<x, ,  il  ré- 
pond qu'il  eft  vray  qu'il  n'y  a  point  d'énigme  dans  le  comman- 
dement que  J.  C.  nous  fait  de  manger  fa  chair  ,  parce  qu'afin 
qu'il  y  ait  énigme ,  il  faut  que  nul  des  termes  de  la  propofition  ' 
ne fe  prenne  proprement  Or , dit-il,  cela  ne fe  rencontre  pas' 
dans  la  proportion  de  j.  C.  car  les  mots  de  chair  &  de  fang  ne" 
font  point  métaphoriques  ,  èi.  ils  fignificnt  toujours  la  vrayç 
chair  de  J.  C.  Il  n'y  a  que  le  mot  de  manger.  Cependant  il  eft 
bien  clair  que  cette  réponfe  ne  peut  avoir  lieu  ,  félon  l'explica- 
tion qu'il  donne  au  pafTage-precedent ,  dans  laquelle  ni  le  mot 
àtmangerviO.  fe  prend  proprement,  puifqu'on  ne  mange  point 
proprement  des  verttis  ^\)\  celuyde  r^^/>dej.  C.  puifqu'Au- 
bertin  veut  qu'il  foit  mis  pour  la  vertu  delà  chair,  C'eft  donc 
faire  du  difcours  de  J.  C.  un  difcours  purement  énigmatique 
que  de  l'expliquer  en  cette  manière  ,  quoique  S.  Chryfoftome 
déclare  formellement  qu'il  n'y  a  ni  énigme  ni  parabole  dans  ce 
quej.  C.  nous  dit  de  manger  fa  chair  &  fonfang. 

Je  ne  puis  m'empécher  d'ajouter  en  pafTant  une  reflexion 
fur  ce  paflage  de  faint  Chryfoftome  qu'Aubertin  prétend  élu- 
der  en  difant  que  ce  n'eft  point  changer  les  paroles  de  J.  C.  en 
énigme  que  d'entendre  par  ces  paroles ,  ma  chatr  eft  vray ement 
viande  y  (^  mon  fang  eft  vrayement  breuvage  ^  une  manducation 
purement  fpirituelle  delà  chair  de  J.  C.  C'eft  qu'il  eft  fi  faux 
que  ces  paroles  ne  foient  pointénigmatiques  en  ce  fens,  que 
faint  Auguftin  après  avoir  diftingué  dans  le  troifiéme  livre  de 
la  doctrine  Chrétienne  les  énigmes  des  fimples  métaphores, 
apporte  pour  exemple  de  ce  qu'il  appelle  énigme  ces  paroles  de 
J.  C.  T^iji  mandttcaveritis  carnem  Filii  Homrnis  ^  O"  biberitis 
ejus  fanguinem  ,  non  hdbcbitis  vitam  in  vobis ,  en  les  appliquant 
paruneraifon  particulière  qui  l'y  obligeoit  à  la  manducation 
fpirituelle ,  comme  nous  le  ferons  voir  en  traitant  à  fond  de  ce 
paflage. 

On  peut  réduire  ces  deux  dernières  remarques  à  un  argument 
aflez  embaraffant  pour  les  Calviniftes  en  cette  manière.  Ces 
paroles  de  J.  C.  Si  vous  ne  mangezja  chair  du  Fils  de  l'Homme  ,, 

AAa  iij 


^.37^'       'Liv.  VI.  ^e  le  corps  de  Jeftis-Çhrifi     " 

'  -  '  ^ne  keuvez^fon  fm'^  ,  vous  n'aurez^point  U  vie  en  vous  ,  ovr cel- 
le-cy  :  Ma  chair  eji  vravment  viande  ^  ^  mon  fanq^  efi  vrayment 
breuvage  ^x\e (ont  ^o'mz  énigmatiques  félon  S.  Jean  Chryfofto- 
me  &:  Aubertin. 

Or ellesferoïent  énigmatiques  ,fî  on  fes  enrendoir,  ou  de  la 
niandutation  de  !a  vertu  ,  ielon  Aubertin  même,  qui  n'exclut 
l'énigme,  qu'en  prétendant  que  le  mot  àechatr  de  J.  C.  fè 
prenne  proprement,  ou  de  la  manducation  fpiritueile  de  la 
chair  de  J.  C.  comme  S.  Auguftin  le  déclare  expreffement. 
Donc  elles  ne  s'entendent  ni  de  Tune  ni  de  l'autre  manière. 

'Il  fli.ùt  remarquer  feulement  que  quand  je  dis  que  ces  paflà-''' 
ges  ne  s'entendent  point  de  la  manducation  fpiritueile, je  veux^ 
dire  qu'ils  ne  s'entendent  pas  avec  exclufion  de  la  corporelle. 
Car  rien  n'empêche  que  ce  (ens  fuppofé,on  ne  les  rapporte  en- 
core à  la  manducation  fpiritueile  ,  &  nous  verrons  que  c'eft  ce 
qu'a  fait  S.  Auguftin  qui  les  entend  de  cette  dernière  manière 
dans  les  Livres  delà  dodrine  Chrétienne  par  une  raifon par- 
ticulière que  nous  éclaircironsen  fon  lieu. 


CHAPITRE     V. 

Pajîages  de  S.  Auqiiftin  qui  prouvent  clairement  la  manducation 

corporelle  du  Corps  de  'je fus-  Chnfi. 

GOmme  c'efl  de  S.  Auguflin  que  les  Minières  rirent  leurs 
principales  obiedions  contre  la  manducation  réelle  du 
Corps  de  J.  C.  il  eftjnfte  d'établir  d'abord  la  doctrmede  cefaint 
Doi.T:earpar  des  padages  claire  êc  décifîfs,  &  par  la  réfutation 
^es  délâites  dont  les  Miniftres  fe  lervent  pour  les  éluder. 
'     "    .'         ■■■■■■  V'--'-  ■■■J'-'  - 

-  -i     FReMer    PASSAGE, 

Tire  du  Livre  contre  t  Advcrfuirc  de  la  JFoy  ^  des 
i.^;:;  Prophètes  ,  chap.  9. 

'  'iTous  recevons  avec  un  cœur  ^  une  bouche  -fidelle  le  Médiateur 
de  Dieu  (^  des  hommes  J  C.  homme  ,  qui  nous  donne  fon  corps  à 
l/nhiUgèr'^  &fon  finq^  h  boire  ,  quoiqu'il fcmble  plus  horrible  de  man~ 
^erde  la  chair  a  un  homme  que  de  le  tuer  ,  ô"  d^  boire  dufang  hu- 
main que  de  le  répandre. 


«N 


eji  mungê  corporellcment  da,ns  TEuchartfiie.      yjj 
R  E  F  L  E  X  I  O  W. 

Tout  ce  qu'on  peut  fouliaiter  pour  rendre  un  pafiage  formel 
contre  les  Sacramentaires,  fe  rencontre  dans  celuy-cy.  Il  ne  s'y 
agit  point  d'une  manducation  purement  fpirituelle,  mais  d'une 
réception  par  la  bouche ,  fufcipmus  ore. 
II  nes'y  agit  point  d'une  figurée  d'une  vertu, mais  d'une  chaif 
&;  d'un  fang  capable  de  caulèr  de  l'horreur  à  ceux  qui  les  reçoi- 
vent 5  ce  qui  marque  en  même  temps  &;  la  realité  de  la  chair, 
&  celle  de  la  réception  ,  puifqu'une  chair  en  figure  ou  une  ré- 
ception en  figure  feroient  incapables  de  produire  cette  horreur. 

Cependant  Aubertin  y  veut  répondre,  il  y  eftoit  engage  r 
Mais  c'eft  une  chofe  tout  à  fait  divertilTante  que  de  voir  com- 
me il  s'y  prend. 

Ilvoudroit  bien  d'abord  fe  contenter  de  dire  que  par  cette 
chair  &  ce  fang  du  Médiateur  que  nous  recevons -^v^f/^^o»- 
the  ,  S.  Auguftin  n'entend  que  le  lèul  figne  de  l'un  6c  de  l'autre. 
Mais  cette  horreur  de  manger  de  la  chair  &;  de  boire  du  fang , 
&  cette  oppofition  entre  manger  &  tuer  ,  boire  &  verfer,  qui 
regardent  la  même  chair  Si  le  même  fang, rompent  toutes  for- 
tes de  mefures.  Car  je  ne  fcache  pas  que  perfonne  euft  grande 
horreur  de  manger  l'image  d'une  chair ,  ni  que  jamais  on  aie 
parlé  de  tuer  l'image  d'un  homme  ,  ou  qu'il  foit  horrible  de 
verfer  du  fang  en  figure. 

Aubertin  pafle  donc  à  un  fécond  fens  qui  a  cel  i  d'admirable 
qu'il  n'eft  fondé  que  fur  un  fouhait.  C'eft,  dit-il  ,  qu'il  eft  pro- 
bable qu'au  lieu  àt  fideli  corde  c^ore^'û  faut  lire  ^»rr.  Mais 
poiirquoy  cela  eft  il  probable  ?  Eft-ce  qu'il  y  a  quelque  manuf. 
critqui  autorife  cette  manière  de  lire  ce  paiîage  ?  Non.  C'eft 
qu'Aubertm  auroit  bien  fouhaicé  qu'il  s'en  troiiyaft  -^Utni^nn  , 
dit  il,  liceret  viicre  flurcs  ûcvemfios  codices^'m^mv.fcrîptos:  Mais 
cependant  il  n'en  a  point  vu  qui  euft  cette  correftion,  qxibiqu'il 
ait  vu  apparemment  tous  ceux  de  Paris  ^  où  il  y  en  a  plus  qu'en 
heu  du  monde. 

Ainfi  ,  comme  j'aydit ,  ce  fens  n'eft  fondé  que  fur  un  fou- 
hait ,  ScileftdémentipaT  tout  ce  qu'il  y  a  dans  Paris  d'exem- 
plaires imprimez  &;  manufcritsde  S.  Auguftin.  Vit-on  jamais 
rien  de  moins  iènfé  ? 

Il  y  a  néanmoins  encore  quelque  chofe  de  plus  e'trange  dans 


Ck.  V. 


j7§  Liv.  VI.  ^e  le  corps  de  Je/ùs-Chrifi 
le  troifiéme  fens,qui  confifle  à  dire  premièrement  que  cette 
claufe  ^fideli  corde  ^  ore ,  peut  fignitîer  fidclù  ore  cordis.  Mais  en 
quelle  langue  ces  mots  ^fidcli  corde  &  ore,  fignifierent-ils  jamais 
fideLi  ore  cordis^  Il  n'rmporte.  Aubertin  a  befpin  qu'ils  lefigni- 
fient  ,  afin  que  fa  folurion  fubfifte  ,  &  cela  luy  fuffic. 

Il  me  femble  que  j'entends  M.  Claude  qui  fe  recrie  qu'on  ob- 
met  un  exemple  confiderable  paroù  Aubertin  juftifie  ce  fèns 
qu'on  veut  faire  pafler  pour  extraordinaire;  c'eft  que  S.Jean  dit 
aumcmefens  dans  l'Evangile  que  J.  C.  baptiferafesdifcipIesSc 
par  le  S.  Elprit  &  par  le  feu  -.Ille  vos  Liptix^tbit  in  Spiritu  fanîh 
^  igné  ;  ce  qui  figmfie,dit  il  y  par  le  feu  du  S.  Efprit.  Il  eft  vray 
qu'Aubertin  allègue  cet  exemple  ,  mais  il  eft  vray  auffi  qu'il 
n'eft  propre  qu'à  faire  voir  que  ce  Miniftreentroitfort  impar- 
faitement dans  le  fens  des  expreiKons,  &  qu'il  s'arreftoit  à  la 
moindre  relîemblance  ,  fans  pénétrer  les  vrayes  caufes  qui  por- 
tent l'efprit  à  prendre  certains  tours,  &à  rejetrer  les  autres. 

Premièrement  ce  prétendu  fens  qu'on  donne  à  ce  paflàge  t 
jUe  vos  baptiz^bit  in  Spiritu  fanUo  (y-  iqric^  qui  eft  que  cela  figni- 
fie  iyie  Spiritùs  fanEli ,  eft  fort  incertain.  Il  y  a  bien  plus  d'appa^ 
rence  que  S.  Jean  prédit  la  manière  dont  les  Difciples  dévoient 
eftre  remplis  du  S.  Efprit  au  jour  delà  Pentecofte.  Et  ainfi  le 
mot  dQSfiritu  fancio  ,  marque  la  réception  intérieure  du  S.  Ef. 
prie  qui  baptifa  intérieurement  les  Apôtres,&celuyd'/g«f  mar- 
que le  figne  excerieurfous  lequel  le  S.  Efprit  defcendit  fur  eux. 
Mais  (uppofons  que  cela  (Tgnifîe  iyfie  Spiritus  fancii^  s'enfuit- il 
que  l'on  puilTe  dire  au  mcrae  fens ,  fidcli  corde  ^  ore  ^owrfideli 
ore  cordis  ?  Nullement.  Il  s'enfuit  tout  le  contraire.  Car  la  rai, 
fon  pourquoy  après  avoir  dit ,  Jlïe  vos  haptiz^tbit  in  Spiritu  fan^ 
Ho  ,  on  peut  ajouter  cj-  /g«^,  eft  que  le  mot  de  Spiritu  fancio  ne 
marque  pas  diftinclement  tous  les  attributs  du  S.  Efprit  qu'on 
veut  faire  concevoir,  &:  que  c'eft  ajouter  quelque  chofe  de  con- 
fiderable à  l'idée  qu'en  donnent  ces  termes,de  dire  enfuite  ô" 
igné  ,  pour  marquer  que  cet  Efprit  eft  un  feu  purifiant.  Ainfî 
l'efprit  foufFre  cette  addition  ,  parce  qu'il  y  apprend  quelque 
chofe  de  nouveau.  Mais  par  une  raifon  contraire^aprés  avoir  dit 
que  l'on  reqoit  la  chair  de  J.  C.  par  le  cœur,  corde  fufcipimus  ,  il 
feroit  tout  à  fait  ridicule  d'y  ajouter  é-  ore  ^  pour  marquer  que 
c'eft  par  la  bouche  du  cœur.  Car  cette  métaphore  ne  fait  rien 
connoiftre  de  nouveau,  ni  que  l'on  defire  de  fçavoir.  Des-là 
^u'ona  con^d  que  le  corps  de  J.  C.  eftreçû  dans  le  cœur  ,  on  a 

conçd 


ejl  mangé  corporeîlement  dans  TEucharifiie.        '379 
tfonçu  qu'il  y  eft.Et  fi  l'on  a  conçu  qu'il  y  eft  entré,  que  peut-  Ch.  V. 
on  concevoir  davantage  par  ces  mots  ore  cordi s  ,  puifque  ore  ne 
/îgnifieque/V»/rfV  ?  Qui  ne  fent  pas  cela  n'a  ny  difcernement 
ny  intelligence. 

La  quatrième  folution  qui  a  déjà  eflc  touchée  en  pafTant  dans 
1-e  fécond  Tome  de  la  Perpétuité,  &  à  laquelle  Aubertin  donne**  P"P-  ^  '^' 
cet  éloge  qu'elle  eft  très  folide  ,  /î'//W//^w.?,  mérite  bien  d'eftre 
encore  rapportée  icy  avec  plus  d'étendue  ,  puifque  c'efl:  cel- 
kà  laquelle  M.  Ciaude  s'arrefte  dans  fon  livre  contre  le  Père 
Noiiet. 

Cette  folution  confiée  en  ce  qu'Aubercin  prétend  d'une 
part  que  le  mot  de  darc^  fignifieinftruire  ou  cnfeigner,&;  qu'am- 
iî  dure  CciTïicni  mandncandam  ^  c'eft  enfeigner  qu'il  faut  »?,««- 
$;rr /^  r/'^i/r.  Et  en  ce  qu'il  foûtient  de  l'autre  que  ces  termes 
fufciptre  torde  ^orc  ^  peuvent  fignifier  approuver  de  cœur  & 
de  bouche;  &  qu'ainfi  ce  paffage  fignifie  feulement  que  nous 
reconnoillons  de  cœur  &  de  bouche  le  Médiateur  qui  nous  en- 
feigne  qu'il  faut  manger  fa  chair. 

Il  prouve  le  fens  prétendu  du  verbe  dare-^  parce,  dit- il,  que  S. 
Jerofme  fe  fert  du  mot  de  tradere  San^him  Trinitatem ,  pour 
dire  que  l'on  enfeigne  la  dodrinede  la  Trinité:  Parce  que  S. 
Paul  dit,  Sicvohis  fotv.ni  dcdi  ^  pour  dire  qu'il  a  donné  des  in- 
flruclions  aux  Corinthiens  3  êcqueTerence  dit:  Nunc  quamob- 
remhas  panes  didiccrim ,  faucis  dabo. 

■  Ce  que  Ton  peut  dire  de  cette  folution /;r/-/2'//'fl'^,  c'eft 
qu'il  eft  difficile  de  rien  inventer  de  plusabfurde^  &  que  tout 
e€  qu'Aubertin  fuppofe  pour  l'authorifer  eft  entièrement  ridi- 
cule. 

Jamais  le  mot  de  dure  ne  fîgnifia  par  luy-même  instruire  & 
enfeigner.  Ce  n'cft  jamais  que  par  ce  qui  s'y  trouve  joint  ou 
fous- entendu.  Si  ce  qu-e  dit  S.  Paul  qu'il  a  donné  du  lait  aux 
Corinthiens  fignifie  qu'il  les  ainftruits,  ce  n'eft  pas  à  caufeda 
mot  de  dare  ^  c'eft  à  caufe  de  celuy  de /^rr  qui  fignifie  métapho- 
riquement des  inftradions  proportionnées  à  ceux  qui  com- 
mencent. Il  en  eft  de  même  des  autres  exemples,  comme  nous 
l'avons  fait  voir  ailleurs  5  &:il  n'y  a  peuteftrc  point  d'enfant 
au  Collège  qui  n'en  voye  de  foy  même  la  différence.  Ainfi 
c'eft  une  pure  vifion,  que  de  dire  que  ces  mots,  mediatorem 
curnem  fuam  manducandam  dantem ,   puifTent  fignifier    que  le 

B  B  b 


jHo.  ^e  le  corps  de  Je/Hs-Chrift 

Médiateur  nous  inltruità  manger  la  chair,  &  j'ay  honte  pour 
M.  Claude  qu'il  aie  pu  approuver  une  penfée  fi  peurailonnable. 
C'eft  encore  une  autre  vifion  que  de  vouloir  que  fufcipcre 
7nediatorem,ipu'\iVe  Cighiûer ,  approuver  le  Mciiatcur.  Aubertm 
ne  diftinguejamais  entre  ce  que  fignifient  les  verbes  par  eux- 
mêmes,  &:  ce  qu'ils  fignifient  par  les  mots  fubftanrifs  que  l'on 
y  joint.  Sufcipete  fignifie  recevoir.  Et  parce  que  recevoir  une 
i^TI"'  ^'^'  <ioâ:rine  c'efl:  rapprouver,c'efl:  en  ce  fensque  l'Ecriture  dit:  Ad 
fufcipiendam  erudl  tionem  docirina  j  Si-  fufce péris  fcrmones  meoSi 
fufcipiat verbameacortHum.  Tous  les  exemples  qu'il  produira 
la  marge  font  de  ce  genre,  c'efl  à  dire  qu'il  prouve  juftemenc 
ce  qui  n'efb  pas  en  queftion.  Car  il  s'agit  de  fi^avoir  Ç\  fufcipere 
joint  avec  ur\t  perfonne ^  fignifie  approuver.  Erc'eft  de  quoy  il 
ne  produit  aucun  exemple.Enfin  il  s'agit,  Ci  fufcipcre  ore  me- 
diatorcm  ,  peut  fignifier  approuver  de  bouche.  Et  il  y  a  fi  peu 
de  rapport  de  ce  fensavec  le  fens naturel  du  mot  àz  fufcipere, 
dt^  à.. àxvQ  recevoir  ^(\\x' on  ne  voit  pas  comment  il  eft  poiTible 
d'employer  ce  terme  dans  une  fignification  fi  éloignée.  Auflî 
Aubertin  n'a  que  fa  feule  authorité  pour  appuyer  ce  prétendu 
fens.  Car  pour  ce  pafl^ige  defaint  Hilairequ'ilcite,  wa«<^rf//(?- 
nemafperjionis  labiisjnw^is  quàm  corde  fufcipicns  ^  c'q^l  une  illu- 
fion  vifible.  S.  Hilaire  expliquant  le  mot  Zyphei ,  dit  qu'il  fi- 
gnifie oris  ajpcrjîoncs,  &c  que  ces  aiperfions  fignifient  la  remif- 
iion  des  péchez.  Ainfi  en  fuivant  cette  figure,  il  dit  qu'il  yen 
a  qui  reçoivent  ces  afperfions  fur  les  lèvres  Ht  non  dans  le  cœur: 
2i/[undationcm  afperjionis  labiis  magis  quàm  corde fufcipiens  i  c'eft- 
à-dire  qu'ils  n'ont  que  les  lèvres  purifiées  &non.  le  cœur.  N'eflr- 
ce  pas  fe  mocquer  du  monde  que  de  conclure  de  là  que  fufcipere 
ore  mediatoreni^  fignifie  approuver  de  bouche  le  Médiateur? 

Ce  qu'il  y  a  de  pis  encore  eft  que  tous  ces  fonges  ne  fuffîfent 
pas  à  Aubertin  pour  expliquer  ce  pafTage.  Car  en  fuppofanc 
routes  ces  fignifications  bizarres,  S.  Auguflin  nous  dira  encore 
que  nous  approuvons  de  cœur  ^  de  bouche  le  Médiateur  qui  nous 
enfcigne  a  manger  sa  chais,  et  a  boire  son  sang. D'où 
Ton  peut  encore  conclure  que  nous  mangeons  danc  cette  chair, 
6c  que  nous  beuvons  ce  fang,  puifque  le  Médiateur  nous  l'enfei- 
gne  ,  6c  que  nous  le  mangeons  d'une  manière  capable  de  caufër 
quelque  horreur,  comme  (aine  Auguflin  ledit  enfuite  Et  c'efl 
pourquoy  Aubertin  pour  ajufler  Ton  explication,  ajoute  enco- 
re   que  nous  approuvons  cet  inJîruH ions  fans  les  entendre. 


cfi  mungê  corporellement  dans  l'Euchar/fiic.  3S1 
^aoy  qu'ih  contiennent  quelque  chofe  d'horrible  félon  les  termes. 
Verus  Chrifii  difcipulus  débet  ejus  verha  ,  licèt  non  intelleïia  ^ 
licèt  in  fpeciem  horrenda  ,  tanquam  veracia  ^  divina  corde  reci- 
fere  (^-  are  fradicare.  Mais  c'eft  encore  uneillufion  vifible.  Car 
il  ne  s'agit  point  en  cet  endroit  d'expredîons  non  entenducsj 
mais  il  s'y  agit  expreflement  au  contraire  d'exprclTions  enten- 
dues, dont  iaint  Auguftin  veut  qu'on  reçoive  le  (ens  quoyque 
choquant.  Car  il  veut  que  l'on  reçoive  ce  qui  eft  dit ,  de  manger 
Ja  chair  de  J.  C,  comme  on  reçoit  ce  qui  eft  dit ,  que  les  deux 
enfans  qu'Abraham  avoiteusde  Sara  &;  d'Acar  figuroientles 
deux  Tcftaments,  6c  que  l'union  du  mari  6c  delà  femme  figure 
l'union  de  J.  C.  6c  de  l'Eglife.  Or  ces  deux  exemples  n'avoient 
rien  qui  ne  hit  pris  dans  fon  vray  ienspar  les  Manichéens  mê- 
mes. Ainll  comme  S  Auguflinne  pretendoit  point  qu'on  les 
deufl  approuver  en  détournant  la  fignification  literale  à  quel, 
que  fens  myftique  ,  de  même  quand  il  vent  qu'on  croye  que 
I.  Cnous  do-nnefon  corps 6c fon  fang,  quoyque  cela  paroidè 
horrible,  il  ne  prétend  point  que  nous  croyons  ces  paroles,  en 
les  dccoLirnant  à  un  fens  deiîgure,  mais  il  veut  que  nous  rece- 
vions ce  fens  malgré  ce  qui  nous  y  paroift  d'horrible,  6c  que  ce 
foit  cela  même  qui  foit  l'objet  de  notre  foy  ^  de  notre  foû- 
miffion.  Car  il  n'y  a  pas  grande  difficulté  à  fe  foûmettre  à  des 
paroles  qui  ont  une  apparence  iracheufe^  lorfque  ce  n'eft  pas 
dans  ce  fens  qu'il  les  faut  prendre  6c  cju'on  y  en  entend  un  au. 
tre  qui  n'a  rien  de  choquant. 

SECOND    PASSAGE  DE  S.   AUGUSTIN",, 

tiré  du  Pfcaiime  ^9. 

Zes  Sacrifices  anciens  ont  efié  abolis  comme  rie  fiant  que  de  fim- 
fles  pro'meffcs^  ^  on  nous  en  a  donné  qui  contiennent  l'accomplif- 
fement^  Da.ta  sunt  completiva:  Qucfice  qu'on  nous  a  don- 
né pour  dcco'mpliffcyncnt  1  Le  corps  que  vous  connollfiez, ,  mais  que 
vous  ne  connoiffcz^pas  tous -^  ^  plu  fi  à  Dieu  qu'aucun  de  ceux 
qui  le  coiwoiffent,  ne  le  connoijfe  à  fa  condaynnation.  Vous  n'avez^ 
f  oint  voulu,  dit  I.C.  de  facrifice  &  d'oblation.  Quoy  donc^fommes- 
nous  maintenant  fins  facrifice  ?  A  Dieu  ne  plat  fe.  Mais  vous  m'a- 
vez, formé  un  corps.  Vous  avet^e'yctté  ces  facrifice  s,  afin  de  former  ce 
eorps  h  (^9- devant  qu'il  fufl  formé,  vous  vouliez^  bien  qu'on  vous 
les  offrill.  L' accomplijfement  des  cbofes  promifcs   a  fait  ceffer  les 

fiB  1  j 


jgi  Liv.  VI.   ^e  le  corps  de  Jefus-Qoïïsi 

fromcffes.  Carji  ces  projncjjes  fuhjïjiotcnt^  ce  ferait  une  marque  qu'el- 
les ne  feroient  pas  accomplies.  Ce  corps  efloit  promis  par  quelques  fi. 
qnes  ,  lesfignes  qui  marquaient  la  prom.e[fe ,  ont  efiê  abolis  ,  parce 
que  la  venté promife  a  ejîê  donnée.  Nousfo?nmes  dans  ce  corps ,  nous 
en  fommes  participans. 

V,  REFLEXION. 

Je  propofe  ce  paflage,  parce  qu'Aubertin  s*,  n  cire  par  la  même 
invention  que  du  précèdent ,  qui  eft  d'attribuer  aux  mots ,  des 
fens  dont  jamais  autre  queluy  ne  s'eftoit  avifé.  Comme  il  ne 
pouvoit  nier  qu'il  ne  s'agifticy  d'une  participation  corporelle 
au  corps  de  I.  C  ilchicanne  fur  le  mot  àc  corps  de  J.C.  6c il  pré- 
tend que  S.  Auguftin  ne  parle  que  d'un  corps  en  figure. 

Mais  quel  moyen  de  croire  qu'un  corps  en  figure  (oit  la  vérité 
promile ,  e.xhihita  efi  veritas pro7niffa>Qy\.Q\  moyen  de  croire  que 
ce  foit  ce  corps  en  figure  que  Dieu /?/^/>^/3«jF'/7i{uivant  la  pro- 
phétie de  Davidj  cornus  autem  perfecifii  mihi  ?  Quel  moyen  de 
croire  qu'un  corps  en  figure  puifle  eftre  l'accompliflemcnt  de 
tous  les  facrifices  anciens,  complctivum'».  Aubertin  ne  dit  rien 
fur  les  deux  premières  confiderationsque  nous  n'ayons  réfute 
vo  ezi  perp.  dans  le  deuxième  Tome  en  traittantde  la  comparaifon  des  fa- 
1. 6.C.9.&10.  orifices  anciens  avec  l'Eucbariftie. 

Mais  nous  n'avons  pas  encore  rapporté  ce  qu'il  dit  furie  mot 
V^"^"'  P' de  r<?w/'/f^/x'a/w,&  ce feroit  dommage  de  le  perdre.  Z)a<?  funt ^ 
dit  il ,  completivi  fnodi  j  prior  realis  ac  proprius  j  pofierior  declara- 
tivus  ^  teftificativus.  il  y  a  deux  manières  félon  lefquelles  on  peut 
dire  d'une  chofe  qu'elle  efi  l'accomplijjement  d'une  autrcj  l'une  réel- 
le ^  propre-^  l'autre  déclarative  &  par  forme  de  têmoignaqx  II  n'y 
a  que  le  corps  réel  ^naturel  de  J.  C.  qui  foit  l'accompliffement  des 
Sacrifices  anciens  au  premier  fens:  mais  au  fécond  fens  l'Euchari- 
(îie  peut  eftre  appcUéc  actompliffcment ,  parce  qu'^elle  efi  la  marque  de 
l'accomplificment  des  figures. 

Mais  qui  a  donné  droit  à  Aubertin  d'établir  ces  nouvelles  ma- 
ximes,  ces  nouvelles  diftinclions  qui  n'ontdufage  ny  d'exem- 
ple que  dans  la  bizarreexplication  du  pafifàge  même  pour  lequel 
elles  font  faites  ?  Qui  luy  a  donné  droit  de  faire  un  nouveau  di- 
£lionnaire,  &  d'attribuer  aux  mots  les  fens  dont  il  a  befoin  fans 
autre  raifon  finon  qu'il  en  a  befoin  ?  Qui  luy  a  dit  que  la  marque 
de  l'accompliflemcnt  des  chofes ,  indicium  rerum,  completarum^ 


e^  m^ngé -c^jrporellenmit d^mîtEuchariftie.  5^9 
fenommoit  l'accomplilTemenc  mêmejr(jw,''/f^/t'aw?QueIexenî-  Ch.  V. 
pie  en  apporce-t-il?  Auciini  luy  qui  n'en  manque  jamais  :  mais 
ce  qu'il  y  a  de  beau  ,  c'eftquele  partage  même  dont  il  s'agit  dé- 
truit ce  iens.  S.  Auguftin  ne  reconnoiil  que  deux  degrez,  les 
promcffes  ^  l'acco'mpl:lfement  ^  &i  il  prend  l'Euchariftiepour  cet 
accompliflement.  Pcrfcciio  pnruifjionis  ahjlttlit  verba  promitten~ 
ti.t.  SacrificictilLi  tanquamvcrha  fromifjïvu  ablata  funt^data  funt 
co^ipletiva.  Qu:d  cfi  qaod  datuyn  eji  çompletivum  ^corpus  quod 
mfiis. 

Mais  lelon  les  Miniftresily  a  trois  degrez.  Les  facrifîces  an- 
ciens qui  promectoient  le  corps  de  J.  C.  naturel.  Le  vray  corps 
de  L  C.  formé  clans  le  temps  par  le  S.  Efprit  qui  eft  le  propre 
objet  de  ces  promelTes  :  &  le  figne  de  ce  corps  5  c'eft  à  dire 
l'Euchariftie  ;  qui  n'efl  félon  eux  que  l'objec  impropre  de  ce* 
promefTes  &  de   ces  fignes. 

S.  AugLiftin  au  contraire  ne  diftingue  point  ce  fécond  degré 
du  troifiéme.  L'Euchariftie  eft ,  félon  luy,  ce  corps  que  Dieu  a 
fait  pour  abolir  les  fignes  de  promeiTes:  Ideo  ilLtvolmjliut  hoc 
pcrficercs.  Entre  la  promeile  &  l'Euchariftie  il  n'y  a  point  de 
milieu.  Il  faut  donc  qu'elle  contienne  le  corps  naturel  de 
L  C.  qui  eft  l'accompliflement  véritable  des  Sacrifices  de  l'an- 
cien Teftament. 

Cependant  ,  dit  Aubertin  ,  l'Eue  Iiariftie  tk  appellée  par 
fàint  Auguftin ,  indicium  complctarinn  rerum.W  eft  vray,  mais 
cela  ne  prouve  pas  qu'elle  foit  appellée  accomplilTement  au 
même  fens,  ny  qv\e  indicium  compictarum  rerum  ^  completivum 
foient  des  termes  fynonymes.  Ce  font  deux  qualitez  différen- 
tes que  l'Euchariftie  poflede  conjointement.  Elle  qÇz  une  mar- 
que de  i'accomplilîement des  facriffces  anciens,  parce  qu'elle 
figure  la  pafîîon  par  fa  partie  extérieure.  Elle  eft  l'accomplif- 
fement  même  ,  parce  qu'elle  contient  ce  corps  que  Dieu  a 
fubftitué  aux  facrifices  anciens.  Sacnficium  ^  oblationem  noluijll^ 
tune  dixi  ecce  venio. 

S.  Auguftin  exprime  l'une  de  c^s  qualitez,  par  le  mot /W/- 
cium  completarum  rerum  ^  &  l'autre  en  l'appellant  corpus  com. 
fletivum.  Et  il  eft  ridicule  de  vouloir  détruire  la  dernière  par 
la  première ,  puis  qu'elles  n'ont  rien  de  contraire. 


tbbii] 


3  s  4  Liv.yi.  ^e  le  corps  de  Je  fus.  Qmfl 

TROISIE'ME  PASSAGE, 
tiré  du?C^2. 

le  fus-  Chïiji  a  pris  la  terre  de  la  terre  ^  puifque  la  chaire  fi  tirée  de 
la  terre ^  (^  qu'il  a  tiré  fa  chair  de  celle  de  Marie  :  Et  parce  qu'il  à 
vécu  dans  le  monde  avec  cette  chair^  ^  qu'il  nous  a  donné  cette 
même  chair  a  manger  pour  noftre  filut  ^  perfonne  ne  mange  tint  cette 
chair  fans  l' avoir  premièrement  adorée  ,  on  trouve  par  Ik  comn^it 
l'efcabeau  des  pieds  du  Seigneur  cfi  adoré ,  d^  que  non  feulement  on 
ne  pèche  point  .en  l'adorant  ,  mais  que  l'on  pèche  en  ne  l'adorant  pas. 
Mais  efi-  ce  la  chair  qui  vivifie  ?  Le  Seigneur  même  en  nous  exal- 
tant cette  terre ,  nous  dit  que  c'ejî  J'efprit  qui  vivifie  (^  que  la  chair 
nefert  de  rien.  C'efi  pourquoy  en  vous  abaifant  Q-  vous  profiernant 
devant  quelque  terre  que  ce  foit  .^  ne  la  regardez^pas  comme  terre, 
mais  rcgardcz.~y  ce  Saint  dont  cette  terre  que  vous  adorez^efi  l'efca. 
beau.  Car  c'efi  à  caufie  de  luy  que  vous  l'adorez^ 

On  convient  de  part  6>i;  d'autre  fur  ce  pafTage  qu'il  s'agit  de  la 
vraye  chair  de  J.  C.  piiifque  cette  chair  dont  il  eft  parlé  eft: 
l'objet  d'une  adoration  fouvcraine.  La  difpute  n'eft  que  fur  la 
qualité  de  la  manducation.  Les  Miniftres  prétendent  qu'il  faut 
entendre  ce  terme  d'une  manducationfpintuelle.  On  prétend 
contr'eux  qu'il  faut  l'entendre  d'une  manducation  corporelle. 

C'eft  la  queftion.  Mais  cette  queftion  feroitbien  aifëeà  vuider 
s'il  y  avoitde  la  bonne  foy.  Car  quand  S.  Augiiflin  &  les  autres 
Pères  parlent  ablolunient  de  manger  la  chair  de  J.  C.  ils  n'en- 
tendent point  d'autre  manducation  que  celle  qui  fe  fait  dans 
l'Euchariftie  j  &  celaparoift  non  feulement  par  un  grand 
Hombre  de  paflàgesdeS.  Augu{î:in,où  ces  paroles  font  prifesen 
«e  fens,  maisauffi  en  ce  qu'il  déclare  formellement  que  les  Ca- 
téchumènes ne  fçavoient  ce  qu'on  difoic  quand  on  parloit  de 
manger  la  chair  de  J,  C. 

Or  Ci  l'on  euft  parlé  communément  d'une  autre  manière  de 
tnanger  la  chair  de  L  C.  que  de  celle  qui  fe  fait  dans  le  Sacre- 
ment, on  ne  l'auroit  pas  celée  aux  Catéchumènes,  puifqu'on  ne 
leur  cachoit  qae  ce  qui  regardoirlesSacremens.  Etparconfc- 
quent  ils  auroient  pûfçavoirla  fignifîcation  deces  mots, 
s  Decelafèul  que  ces  paroles  eftant  employées  fans  explica- 
ition,  s'entendent  toujours  dans  faint  AuguOrin  delà  manduca- 
tion quife  fait  dans  l'Euchariftie  ,  on  en  doit  conclure  que  cette 


eB  mangé  corporeîlement  dans  rEucharifiie.  58; 
manducation  eft  réelle  &:  corporelle?  &  non  purement  fpiri-  Ch.  V. 
ruelle.  Carlî  l'on  ne  mangeoic  dans  l'Euchariftie  la  chair  de 
Jésus- Ch  rist  que  fpiricuellemenc  ôc  de  la  mcnne  manière 
qu'on  peut  dire  qu'on  la  mange  en  une  infinité  d'occafions 
par  la  méditation  de  la  pafTion  de  |.  C.  hors  de  l'Euchariftie, 
par  quelle  phantaiiîe  ce  Père  ,  aulTi  bien  que  les  autres ,  auroit- 
il  réduit  une  exprellion  qui  marque  d'elle-même  un  genre 
^clion  (î  étendu  ôc  C\  commun  à  une  certaine  efpece  d'action  fi 
nire  &  fi  peu  commune  en  comparaifon  de  toutes  celles  qui  font 
comprifes  fous  le  même  genre:  Pourquoyne  nous  auroient-ils 
donné  nulle  part  cet  avis  fi  important  que  l'on  peut  manger 
en  tout  temps  &en  tous  lieux  la  chair  dcj.  C.  d'une  manière 
auflî  véritable  &  auffî  réelle  que  dans  l'Euchariftie  ?  Et  pour- 
quoy  auroient-ils  caché  aux  Catéchumènes  un  devoir  de  Reli- 
gion dont  ils  eftoient  capables,  &  qui  eftoit  i\  necefi^ire  pour 
leur  falut.'' 

Celaparoift  encore  par  ce  que  S.  Anguftin  ^ontQ  que  perfofi- 
ne  ne  viange  cette  chair  fans  t avoir  adorée.  Car  ces  paroles  mar- 
quent une  action  extérieure  de  Religion  qui  fe  pratique  dans 
un  certain  ordre  réglé,  &  elles  fiûnt  vrayes  à  la  lettre  en  les 
rapportant  à  la  manducation  corporelle  c]ui  fe  fait  dans  l'Eucha- 
riftie ,  perfonne  ne  devant  s'approcher  de  ce  Sacrement  fans 
avoir  premièrement  adoré  la  chair  de  J.  C.  Mais  fi  l'on  rapporte 
ces  mêmes  paroles  à  la  manducation  fpirituelle,  le  fens  n'en  fera 
ny  vraynyraifonnable,  comme  il  eft  facile  de  le  reconnoiftre  en 
fubftituant  la  définition  de  la  manducation  fpirituelle  au  lieu  du 
terme  même.  Cette  manducation  eft  lelon  Aubertin  une  fen- 
fèe  par  laquelle  on  reçoit  la  chair  de  J.  C.  comme  ayant  efiè  li-  "^' ''* 
vrèe  à  la  mort  pour  nofire  falut^  &  comme  V ayant  mérite  en  qua- 
lité de  caufe matérielle.  C'eft  ainfi  qu'il  la  définit  en  parlant 
de  ce  paflàge.  le  demande  donc  fi  c'eft  une  penfée  raifon- 
nable  que  de  dire  qu'on  ne  conçoit  jamais  la,  chair  de  J.  C^ 
comme  ayant  ejié  livrée  à  la  mort  \^  ^  comme  ayant  mérité 
nofire  falut  en  qualité  de  caufe  matérielle.^  fans  l'avoir  auparavant 
adorée. 

D'où  viendroit  la  necefiîté  de  cet  ordre  ?  Pourquoy  l'ado, 
ration  devroit-elle  précéder  la  manducation  par  un  ordre  fixe 
&;  invariable  ?  N'eft-il  pas  au  contraire  plus  vray  femblable 
que  la  penfée  de  la  mort  de  I.  C.  précède  ordinairement  l'ado» 
ration,  puis  qu'elle  contient  des  motifs  d'aimer  &  d'adorer  I.C. 


5S6  Liv.   VI.  ^e  le  corps  de  Jefm-Qmfl 

On  ne  peut  dor.c  entendre  railonnablemenc  cette  mandu- 
cacion  précedéeneceiïairemenc  d'une  adoration  que  delaman- 
ducation  quife  pratique  dans  l'Euchariftie^  6^  cet  ordre  mar- 
que de  plus  qu'elle  ne  fçauroiceftre  purement  fpirituelle,  par- 
ce qu'il  eft  ridicule  d'établir  un  ordre  entre  radoration  &  la 
manducation  fpirituclle,  &  de  marquer  précilëmentj  comme 
fait  S.  Auguftin,  laquelle  de  ces  deux  adions  doit  précéder 
l'autre. 

Enfin  cela  paroift  encore  manifeftement  par  ces  paroles  d^. 
K\i<^vS\^\w:  Idco  ad  terrain  quaniUbct  cnm  te  inclin.is  atquc  pro- 
//fr«/j-^ qui  marquent  que  cette  terre  par  laquelle  il  entend  la 
chair  de  I.  C.  comme  Aubertin  même  le  reconnoift,  quoy 
qu'une  en  elle-même,  peut  être  multipliée  par  la  divcrfiré  des 
lieux  où  elle  eft  reçue.  Ce  qui  donne  lieu  à  S.  Auguftm  d'en 
parler  comme  s'il  y  en  avoit  plufieurs. 

Aubertin  quis'eft  fenti  preilé  de  cette  preuve  tache  de  s'en 
échapper  à  (on  ordinaire  par  une  faufle  critique.  C'eft,  dt-il, 
que  le  mot,  cjua-iulihet  ^  n'cft  pas  en  ce  lieu  un  adjedit- \  mais  un 
adverbe  quifigniEe,  quamvis ^  &c  qu'ainfi  cela  veut  dire  que 
quoyque  cette  terre  ne  foitque  cerre^  il  ne  la  faui  pas  neanmoms 
regarder  comme  terre. 

Il  s'efForce  en  fuite  de  juftifiercefens  par  quelques  exemples. 
Mais  il  n3  prend  pas  garde  qu'il  en  abufe  vifiblement ,  &: 
qu'il  donne  lieu  d'en  conclure  tout  le  contraire  de  ce  qu'il 
prétend.  Car  il  paroifl:  par  ces  exemples  mêmes  que  le  mot  de 
qu.imlibct  n'eft  jamais  adverbe  ,  que  quand  on  le  joint  s  un 
adjectif,  quamlibet  exi'^uus  corporis  modulus  i  qnamlibet  fplen, 
didiljimus  fulqor.  Et  la  raifon  en  eft  que  l'on  marque  par  ce 
terme  le  fouverain  degré  de  quelque  qualité  dans  un  (ujet.  Mais 
par  cette  raifon  même  on  ne  l'applique  point  aux  noms  fubftan- 
i\h  co\x\vc\e  la  terre ^  parce  que  la  terre  eft  un  fujet,  5<non  pas 
une.  qualité  qui  puiiTe  recevoir  divers  degrez.ih  5b  ^.'o  ofc 

Il  n'eft  pas  mêmebefoin  de  ce  raifonnement  pour  faire  voir 
l'abfirdité  du  fens  d'Aubertin  à  ceux  qui  ont  quelque  gouft 
de  la  Langue  Latine.  Car  quoy  que  faint  Auguftm  n'écrive  pas 
taûjours  avec  la  dernière  pureté,  on  ne  trouvera  jamais  qu'il 
aie  prisuntour  C-bizarre,  &qu'il  ait eftécapablede  direct/ /^-r-- 
ram  quamlibet cimi  ff />/f/;>?^/ pour  fignifier,  lorfque  vous  vous 
proftcrnez  devant  cette  terre  quoyque  terre. 

.Qiii  a  jamais  die  ^2lx  e-x.em^\e^Kegem. quamlibet  cum  videam^ 

pour 


éji  mangé  corportttement  dans  l'EuchariJUe^  387 
pour  direqiioyquece  foie  le  Roy  que  jevoy  ?  Qui  a  jamais  dit  Ch.  V!i 
-pour  fjgnifier ,  quoyque  ce  foie  le  Soleil  qui  illumine  la  Luncj 
'Sed  quamlibet  cum  Lunam  illuminât?  Qui  a  jamais  dit,  pour  ex- 
primer, quoyque ce-foit  Dieu  qui  donne  la  vie  aux  s(^nis-^Deru 
quamltlx:t  cum  vitam  animrs  impertit. 

Mais  cen'eft  pas  une  affaire  à  Aubercin  quand  il  s'agit  d'élu- 
der un  paflage,  de  faire  un  diclionnaire  à  fa  phantaifie,  ôc  de 
renverfer  la  langue  &  l'efprit  de  tous  les  Auteurs. 

^Q;UATRIE*ME  passage  de  s.  AUGUSTIN.        ' 
du  Livre   i.i.  contre  Faujle  cli.  lo. 

Ze  fang  de  J.  C.  eftant  fur  la  terre  a  une  voix  forte  ^  fuiffante^ 
'lorfque  toutes  les  nations  après  l'avoir  re(^û  répondent  Amen.  C'eft  Ik 
lu  voix  haute  de  ceftng^  que  ce  fing  forme  luy-mefme  dans  la  bou~ 
<he  des  fi  de  lie  s  qui  en  ont  efté  rachetez.^ 

Et  dans  le  même  livre,  en  parlant  de  l'EucIiariftie  ,  S.  Au- 
-guftin  l'appelle  leSacrementd^efperance  qui  fait  la  liaijon  des  mem- 
bres de  l  EgUfe  pendant  ^ue  l'on  boit  ce  qui  a  coulé  du  -cojié  de 
JeJfu.ChnJî. 

REFLEXION. 

Aubertin  demande  /ur  ce  dernier  paflàge  comment  on  peut 
prouver  que  faint  Auguftin  ne  parle  pas  là  d'une  manière  ipiri- 
tuelle  de  boire  le  fang  de  J.  C.  mais  la  réponfe  efi:  aifée.  Cefl: 
^ae-S.-Augufl:in  attribue  au  temps  prefent  cette  boiflbn  du  fang 
<ie  J.  C.  au  lieu  que  la  participation  fpirituelle  à  ce  fang  n'y  eft 
point  attachée,  &  qu'elle  fera  bien  plus  pleine  Se  plus  entière 
en  l'autre  vie,  comme  les  Pères  le  déclarent  fou  vent.  Ainfi  ce 
paflage  s'entend  certainement  ^  du  véritable  fang  de  J.  C.  & 
d'une  manière  de  boire  véritable  &:  réelle  ;  puifqu'il  y  efl:  parlé 
d'un  fang  que  nous  avons  lur  la  terre,  &qui  eft  néanmoins  ce- 
luy  par  lequel  lésfidelles  ont  été  rachetez  j  &que  ce  fang  jette 
une  vaix  de  la  bouche  des  fidelles  où  il  eft  par  confequent  rei^u, 
comme  les  fidelles  le  reconnoiftent  par  le  mot  Amen ,  que  ce 
fang  même  leur  fait  prononcer. 

Qui  croiroit  après  cela  qu'il  reftaft  encore  quelque  chofc  à 
prouver  5  &  que  faint  Auguftin  parlant  vifiblement  d'une  man- 
ducation  corporelle  qui  a  pour  objet  la  ciiair  de  J.  C.  cène  fulî: 

CCc 


38g  Li  v.VI.  ^c  le  corps  de  fefas.(^hrifl 

pas  aflèz  pour  conclure  que  cette  chair  efl:  véritablement 
mangée  ?  Cependant  Aiiberrin  qui  ne  fe  rend  jamais,  s'cft  en- 
core avifé  d'un  dernier  retranchement.  Et  voyant  qu  il  ne  pou- 
voit  nier  que  ce  Père  ne  parlaft  d'une  manducation  réelle  &: 
d'une  chair  véritable  ,  il  Te  réduit  à  dire  que  cette  chair  n'eft 
mangée  qu'en  ligne  ,  &C  que  c'eil  ce  qu'il  entend  par  ce  mot,  in- 
Siicrumento. 

Mais  ficela  a  licusoùenfommes  nous?Etpourquoy  leshonii 
mes  (e  donnent  ils  la  peine  de  parler?  Qiiels  termes  nous  re- 
ftera-c  il  pour  exprimer  noftre  dodrine,  ôc  où  les  Calviniftes 
eux-mêmes  en  pourroient-ils  trouver  pour  Te  faire  entendre? 
Quand  les  Pères  auroient  dit  mille  fois,  que  noiis  y  cuvons  far 
la  bouche  (^  corporellcmcnt  la  propre  fuhftance  de  J  C.  ne  fe- 
roient-ils  pas  auflî  bien  fondex  à  dire  que  cela  fîgnifîe  manger' 
cette  propre  fuhftance  en  ligne  àcen  figure?  fit  quand  ils  n'au- 
roicnt  jamais  ditaurre  chofe  finon  que  nous  mangeons  la  chair 
de  J.  C.  en  figne  &  en  figure  ^  pourquoy  ne  dépendra-c  il  pas 
de  nous  que  celapuifle  aulFi  fignifier  ,  manger  corporcllemenf 
Ja  propre  chair  de  J.  C  ?  Si  les  termes  les  plus  oppofe2  font 
fynonymes  pour  eux,  pourquoy  ne  le  feront  ils  pas  pour  nous? 
Et  où  chercherons- nous  déformais  la  décifion  de  nos  difFe- 
rens,  à  moins  qu'elle  ne  nous  vienne  d'ailleurs  que  des  hom- 
mes ?  Il  feroit  prefque  aufTi  honteux  de  réfuter  ferieufement 
ces  fortes  de  chicaneries,  qu'il  Teft  de  lespropoler.  Il  fufEt 
de  dire  qu'elles  oftent  aux  hommes  tout  moyen  de  fe  faire 
entendre,  &c  qu'elles  font  de  tous  les  Pères  ou  des  trompeurs 
s'ils  ont  voulu  par  là  exprimer  l'opinion  des  Galviniftes,  ou 
des  gens  fans  efprit  s'ils  ne  fe  font  pas  apperçûs  combien  ces 
termes  étoient  capables  de  donner  d'autres  fencimens  ^  &  qu'- 
elles luppofent  de  plus  une  intelligence  miraculeufe  dans  les- 
peuples  pour  entrer  tout  d'un  coup  dans  lefens  decesexpret 
fîons  fi  obfcures. 

Il  eft  donc  prefque  inutile  de  dire  que  cette  bizare  folution" 
d'Aubertin  ne  fçauroit  s'appliquer  aux  autres  pafiages  que  nous 
avons  produits  dumêmeS.  Auguftiii,oùileftparle  d'une  man- 
ducation de  la  chair  de  J.  C.  qui  peut  faire  horreur  aux  fens  &-■ 
qui  fe  termine  à  un  objet  prefent  &  adoré  fur  la  terre. 

Et  nous  montrerons  de  plus  qu'Aubertin  prouve  fort  mal, que 
manger  la  chair  de  J.  C.  inSacramento  ,ce  ioic  la  manger  feule- 
aienc  en  figne  avec  exclufion  de  la  vérité. 


icB  mangé  carporeUement  dans! Eticha.rîHie.        3^9 

Ch.  V. 
C  I  N  Q^U  I  E'  M  E      PASSAGE. 
du  Livre  I.  de  Ftccat.  mer.  ch.  io. 

Ecoutons  ce  que  le  Sciyieur  dit  non  du  Sacrement  de  Baptcfmc, 
mais  de  celuy  de  ft  Table  fainte ,  dont  il  n'y  a  que  les  baptifcz^ 
qui ayent droit  d' approcher.  Si  vom  ne  mangcx^  ma  chaire  ne  heu- 
'vez^mon  fanz  vous  n'aurez^  foint  la  vie  en  voits.  Que  cherchons - 
nou-s  davantaq^e  ?  Et  que  peuvent  répondre  les  Pclaq^iens  â  une  au- 
thorité  fi  préeife.^  a  moins  qu'ils  ne  veuillent  oppofer  une  opiniâtreté 
inflexible  à  la  lumière  de  la  vérité  ?  Se  trouvera-  t-il  quelqu'un  affczj. 
hardy  pour  ofer  dire  que  ce  pajfage  ne  regarde  point  les  enfans  ,  ^ 
qu'il  efi  pojjible  d'avoir  la  vie  fans  la  participation  de  ce  corps  (^ 
de  ce  fang? 

Il  ne  s'agit  point  dans  ce  païïàge  d'une  manducation  par  la' 
foy,  puifque  les  enfans  en  font  incapables,  mais  d'une  mandu-: 
cation  corporelle  ,  comme  les  Miniftres  le  reconnoifTenc.  Il 
n'eftdonc  plus  queftion  que  de  montrer  que  par  le  mot  de  chair 
<ie  J.  C.  S.  Auguftin  entend  la  véritable  chair  de  J.C.Aubertiii 
le  nie,  &  il  prétend  que  quoy  que  S.  Auguftin  entende  ailleurs 
par  ces  paroles  le  propre  corps  &  le  propre  fang  de  J.  C.  il  n'en- 
tend néanmoins  icy  que  le  pain  Si  le  vin  comme  figures  de  ce 
corps  6c  de  ce  fang. 

Mais  il  n'y  a  qu'à  déveloperun  peu  ce  qu'enferme  cette  pré- 
tention pour  en  faire  voir  la  fauilèté. 

Premièrement,  on  peut  bien  dire  qu'un  Auteur  prend  ura 
paflage  en  divers  fens  lorfqu'il  y  a  quelque  marque  de  cette  di- 
verfitc:  mais  quand  il  fe  fert  des  mêmes  termes,  &  qu'il  ne  die 
rien  en  un  lieu  qu'il  ne  dife  dans  l'autre,  c'eft  une  bizarrerie 
dëraifonnable  de  s'y  figurer  des  fens  difterens.  Cependant  il  eft 
vifible  que  S.  Auguftin  ne  fe  fert  d'aucun  terme  dans  ce  paflàge 
c^  ne  fe  trouve  dans  ceux  mêmes  où  Aubertin  ne  dit  point 
que  les  mots  de  chair  &  de  fang  de  J  C.  fignifîent  autre  chofe 
-que  la  véritable  chair  &  le  véritable  fang  de  I.  C.  Pourquoy 
donc  expliquer  les  uns  de  la  véritable  chair  &:  du  véritable 
fang,&  les  au  très  d'un  pain  ôc  d'un  vin  figures  de  cette  chair  5c 
de  ce  fang? 

On  ne  fçauroit  fuppofer  que  S.  Auguftin  ait  pris  dans  cts 
paroles  de  J.  C.  Nifi manducaveritis  carnem  Etlii  Elomints  (^ 
bibcritis  ejus  fanguinem  ,  les  mots  de  chair  ôc  de  fang  pour  du 

CCc  ij 


39»  Liv.  VI.  ^e  h  corps  de  jfefus-Qjrifi 

pain  &  du  vin  qui  fuflenc  de  fimples  figures  avec  exclufion  de  la" 
réalité  de  cette  chair  6c  de  ce  fang  lans  luy  attribuer  d'avoir 
expliqué  les  paroles  de  I.  C.  de  la  manière  la  plus  contraire  au 
bon  fens  qu'on  fe  puiife  imaginer.  Car  cette  application  iuppofe 
quel.  C.en  parlant  aux  Iuifs&;  à  Tes  Difciples  leur  auroit  vou- 
lu defigner  par  les  mots  de  fa  chaire  à^  fonfang  de  fimples  fi-- 
gnes  2c  des  figures  qu'il  n'auroit  en  aucune  forte  marquez,  6c 
que  pour  faire  entendre  qu'on  ne  pouvoit  eflre  fauve  fans  par- 
ticiper au  pain  &  au  vin  fignesdefon  corps  &  de  fon  fang,  il  au- 
roit  été  capable  de  dire  qu'on  ne  fçauroit  être  fauve  fans  man- 
ger fa  chair  6c  fon  fang.  Or,  oh  ne  trouvera  point  que  jamais 
perfonne  ait  ufé  d'un  tel  langage  ^  &;  la  licence  même  des  Mi- 
niflres  à  prendre  les  chofcs  pour  àz^  fignes  ^  ne  s'eft  pas  encore 
portée  jufqu'à  cet  excès.  Car  ils  ont  bien  foûtenu  qu'on  peut 
appeller  un  figne  connu  &,  defigné  du  nom  de  la  chofe  figni- 
fiée  ^  mais  ils  n'ont  point  encore  prétendu  qu'on  puiflè  appel- 
ler des  fignes  inconnus ,  &  dont  il  n'a  jamais  été  parlé,  du  nom 
même  de  la  chofe  fignifiée^  fans  marquer  en  aucune  forte  que 
c'eft  du  figne  &  non  de  la  chofe  même  qu'on  parle. 

Cependant,  c'eftJà  le  feiis  auquel  Aubertin  prétend  que  S. 
Auguftinjou  plàtoft:  tous  lePeres  ont  entendu.Ies  paroles  del.C. 
&  cela  fans  autre  fondement  finon  qu'il  en  a  befoin.  Ainfi  il 
faut  qu'Aubertin  ait  tort,  ou  que  tous  les  Pères  n'ayent  pas  eu 
le  fens  commun,  &  qu'aucun  d'eux  n'ait  vixcequine  coûte  pre- 
fentement  rien  aux  moins  éclairés  des  Calvinifles. 

On  répondra  peut- eftre  pour  Aubertin,  que  cet  argument? 
prouve  bien  que  les  Pères  n'auroient  pas  dû  expliquer  en  ce 
fens  Tes  paroles  de  I.C.  mais  qu'il  ne  s'enfuir  pas  qu'ils  ne  l'ayenc 
point  fait  :  que  ce  faitefb  certain,  c'eft  à-dire  qu'il  eft  conftanc 
qii'ils  ont  entendu  de  l'Euchariftie  ce  paffage  de  S.  Jean:  Sivous 
ne  mangez^ja  chair  du  Fils  de  l'hommerqu'û  ne  faut  donc  point  pré- 
tend ne  le  renverfer  par  des  raifons  qui  prouvent  leulement- 
q.u'ils  ne  L'auroient  pas  dû  faire. 

Maiscen'eft:  là  qu'une  pure  illufion.  Car  il  efl;  bien  certain 
qpe  les  Pères  ont  entendu  ces  paroles  de  l'Euchariftie  ,&:  du  Sa- 
crement j,&:  c'eft.  le  fait  qui  eft  conftant.  Mais  il  eft  très,  faux 
qu'ils  les  ayent  entendues  de  l'Euchariftie  en  la  regardant  coniv 
me  un  figne  exciufif  du  corps  de  J.  C.  S>C  c'eft  ce  qu'on  prétend 
cftre  contraire  au  fens  commun.  Expliquer  ces  paroles  de  J.  C. 
^ijî.mandufavmik  çarnonifilii  hominis ,  du  Sacrement  de  l'Eu- 


ej^  mdngé  corporellement  dans  VÈuchtirijiic.  391 
chariftie,  en  fuppofanc  que  l'on  y  mange  véritablement  cette  Ch.  V. 
chair  ,  c'eft  une  explication  cres  naturelle  &  tres-julle;  &  c'ell 
ce  que  les  Pères  ont  fait  :  Mais  les  expliquer  du  pain  6c  du  vin 
comme  fîmples  fignes  de  la  chair  &:  du  fang  de  J.  C.  &  vouloir 
ainfique  ces  fignes  fans  avoir  eftë  marquez  en  aucune  forre 
ayentefté  défignez  par  les  mots  de  chair  &de  fang,c'efl;  ce  qui 
choque  le  fens  commun  j  6c  qu'Aubercin  attribue  néanmoins 
aux  Pères  fans  autre  raifon  ,  fînon  qu'il  neiçauroit  ailier  autre- 
ment leurs  palTages  avec  fa  doc'^rine. 

Ce  que  l'on  doit  donc  conclure  de  ce  que  les  Pères  dxpliquënc 
ces  paroles,  Nifi  mandy.caverith  carnem  filii  hoininis ,  de  i'Eu- 
chariftie,  n'eft  pas  qu'ils  ne  l'expliquent  que  du  figne  de  la 
chair  de  J.  C.  mais  qu'ils  l'expliquent  de  cette  chair  contenue 
ckns  l'Euchariftie.  C'eft  pourquoy  quand  Aubertin  entreorend 
de  prouver  que  les  Pères  ont  expliqué  ces  paroles  ou  de  la 
chair  de  J.  C- ou  de  l'Euchariftie,  &que  cefonrdeux  explica- 
tions différentes,  il  dilTimule  ce  qu'il  feroit  obligé  de  prouver 
pour  conclure  quelque  chofe.  Car  il  eft  bien  vray  que  comme 
la  chair  de  J".  C.  fe  peut  regarder  ou  abfolument ,  ou  dans  l'Eu- 
chariil:ie:r  on  peut  aulTi  expliquer  ces  paroles,  de  fa  participa- 
tion  à  la  chair  de  J.  C,  en  eHemême  ,  ou  de  la  participation  à 
cette  même  chair  dans  l'Euchariftie.  Mais  il  eft  faux  qu'on  le? 
puifte  expliquer  de  l'Euchariftie  en  fuppofanfqu'elic  n'eft  que  la- 
iiguredu  corps  dej.  C.  C'eft  auOi  ce  que  les  Percs  n'ont  jamais 
fait ,  &;  ce  qu'Aubertin  ne  pfouve  point  qu'ils  ayent  fait.  Il  fe 
contente  de  dire  en  l'air  qu'ils  ont  donné  deux  explications  à 
ces  paroles;  ce  qui  ne  luy  fert  de  rien.  Mais  il  ne  fait  point  voir 
qu'en  les  entendant  de  l'Euchariftie  ils  ayent  jamais  marqué' 
que  la  chair  de  J.C.  n'y  fuft  pas  réellement  contenue.  Et  nous  2.  perp.  i  , 
avons  prouvé  au  contraire  qu'ils  enferment  la  prelence  réelle  c.  1.  p^gf. 
dans  cette  explication',  comme  il  eft  impofflbie  auiTide  ne  l'y   ^  'î^'v^nte;,. 
pasenfermer,  à  moipsque  d'attribuer  à)-.  C.  un  dilcours  ft  dé'- 
^aifonnabk  ,    que  les  Miniftres  n'ont  point   trouvé  d'autre 
moyen  pour  éviter  cet  inconvénient,  que  de  démentir  tous  les' 
Pères,  en  foùtenant  contr'eux  , qu'il  ne  s'agit  point  de  l'Eucha- 
riftie dans  tout  le  fixiéme  chapitre  de  S.Jean, 


C  C  c  iij 


-    392-  Lrv.  VI.  ^e  le  corps  de  ^e fus- Qhrifl 

SIXIE'ME  ET  SEPTIE'ME  PASSAGES, 
du  Serm.  \ï.  de  Vcrbis  Domini. 

S.  Anc;ufi:in  expliquant  cette  parole  de  l'Evangile  :  «9»/'  hUf. 
'phcmavcnt  in  Spiritum  -fancium  non  habet  remUJtonem  7«  ictcr- 
nuni  ,  &  voulant  montrer  qu'on  ne  la  devoit  pas  entendre  de 
toute  farce  de  blafphcme  contre  le  S.  Efprit ,  il  apporte  divers^ 
exemples  d'expreffionsde  l'Ecriture  qui  paroilFent  générales^  Se 
qui  ne  fe  doivent  pas  néanmoins  prendre  généralement,  6c  il 
en  tire  un  de  ce  que  dit  I.  C.  de  la  manducation  de  ion  corps 
.dans  le  fixiérae  chapitre  de  S.  lean.  (Comment,  dit  il,  entendrons- 
noti-s  auljî  ce  que  dit  nojlre  Seigneur  :  Celuy  qui  mayiqe  ma  chair  (^ 
boit  mon  fang  demeure  en  moy  ^  moy  en  luy  ?  Pourrons-  noiis  au£i 
étendre  cela  a. ceux  dont  l''Apofire  dit  qu'ils  mangent  (^  boivent  leur 
jagefnem  quoy  qu'ils  mangent  LA  chaib.  mE5me  ET  boivent 
LE  SANG  MESME  DE  Jesus  ChR-ist  ?  Birons-nous  aulJï que  Ju. 
dos ,  cet  impie  qui  a  trahi  (^  vendu  fon  Maifire ,  eft  demeuré  en 
J.  C.  &  f  «^  7-  C".  efi  demeuré  en  luy^  parce  qu'il  a  mangé  avec  les 
autres  difciples  le  premier  Sacrement  fait  des  propres  mains  de  J.  C. 
coinme  l' Ev ange li fie  S.  Luc  le  marque  plus  ouvertement  que  les 
autres  ?  Dirons -nous  que  ceux  qui  mangent  cette  chair  ^  boivent 
ce  fing  avec  un  cœur  hypocrite  ,  ou  qui  après  avoir  mangé  cette 
£hair(^  beuce  fang  tombent  dans  l'apofiafie ,  demeurent  en  J.  C.  (^ 
que  J.  C.  demeure  en  eux  /  Mais  c'efi  qu'il  y  a  une  certaine  manière 
de  manquer  cette  chair  (jr  de  boire  ce  fang^  dont  il  efi  vray  de  dire^ 
que  celuy  qui  la  mange  ^  qui  le  boit,  demeure  en  J.  C.  ^  I.  C.  en 
luy  II  n'efi  donc  pas  vray  que  tous  ceux  qui  mangent  U  chair  de 
J.  C.  (j;-  boivent  [on  fdng,  demeurent  en  luy  e>-  luy  en  eux  de  quelque 
manière  qu'ils  le  fafi^ent  -^  ^  ceU  n'efi  vray  qu'a  l'égard  de  ceux  qui 
le  font  d'une  certaine  manière  qu'il  avait  en  vite. 

Toutes  les  chicaneries  par  lefquelles  Aubertin  prétend  ob- 
scurcir la  clarté  de  ce  palfage  font  détruites  par  avance.  On  a 
fait  voir  dans  le  fécond  Tome  de  cet  ouvrage  que  ces  paroles: 
a  pfip,i.  4    Ipfam  carnem  manducant  é"  ipfum  fanguinem   bibunt ,  ne  pou- 
c.ii.  p.  416.  voient  s'entendre  que  du  corps  même  &;  du  fang  même  de  I.C. 
&  non  d'une  figure  de  I.  C    Et  par  confequent  ce  corps  même 
eftant  reçu  par  ceux  mêmes  qui  n'ont  pas  la  foy ,  félon  S.  Au- 
guftin  ,  il  ne  peut  l'eftre  que  corporellement. 
Les  Miniftres  pretendrout-ils  que  quand  S.  Auguftin  dit ,  que 


eji  mdngé  corporellemem  dans\r Eucharijîie.  39^ 
-  j'  C.  demeuredans  ceux  qui  rec^oivent  fa  chair  d'une  certoine  Cii.  V. 
manière  ,  il  n'entend  pas  la  chair  véritable  I.  C  ?  Si  cela  eft,  il 
faut  donc  qu'ils  luy  attribuent  d'avoir  crà  qu'il  n'y  avoit  dan -^  ce 
chapitre  de  S.  lean  aucun  commandement  de  manc^er  la 
chair  même  de  I.  C.  Car  s'il  ne  le  reconnoKl:  pas  même  à 
l'égard  des  bons,  Une  le  reconnoift  à  l'égard  de  perfonne.  Mais 
quelle  apparence  d'attribuer  à  ce  Père  une  penfce  Ç\  extrava- 
^"mte;  quelle  apparence,  dis-je,  qu'il  ait  cru  que  J.  C.  recom. 
mandant  dans  tout  ce  chapitre  en  tant  de  manières  différentes- 
démanger  la  chair  &  de  boire  fon  fang,  &;  ne  parlant  en  au- 
cune forte  de  mansier  les  fisines  de  fa  chair  &  de  fon  fansr ,  ne 
nous  ait  voulu  néanmoins  obliger  que  de  manger  ces  fignes  donc 
il  ne  parle  points  &  ne  nous  ait  rien  commandé  à  l'égard  de  fa 
chair  même  dont  il  parle  inceffimment.  Eft  ce  là  expliquer  les 
Peres,  que  leur  imputer  des  penfées  fi  peu  raif^nnables  pour 
les  accommoder  à  nos  fentimens  ? 

Que  fi  l'on  avoue  que  c'ell  lavraye  chair  de  î.  C.  quiefl  re- 
çue parles  bons  ou  fpintuellemenf  ou  corporellemenr  ;  (car 
ce  n'eft  pas  furquoy  j'infifte  prefentement^  )  peut  on  nier  que  ce 
nefoit  cette  mêm.e  chair  qui  ell:  reçue  par  les  méchansv,puirque 
S.  Auguftin  ne  les  diftingue  pas  des  bons,  en  ce  que  les  bons 
mangent  la  chair  de  I.  C  &  que  les  méchans  ne  la  mangent  pas, 
mais  en  ce  que  les  bons  la  mangent  d'une  certaine  manière  qui 
.n'eft  pas  commune  aux  méchans  !  La  différence  n'cft  pas  dans 
làchofe  même.felon  S,  Auguftin,elle  n'eft  que  dans  lamaniere.- 
Et  p>ar  confequent  il  y  a  une  manière  de  manger  la  chair  mime 
deJ.C.  qui  efî:  commune  aux  bons  &:  aux  méchans. 

Aubertin  oppoie  à  cela,  que  S.  Auguftin  fait  afîèz  voir  ce 
qu'il  entend  par  cette  chair  mè.-ne  que  les  méchans  reçoivenr, 
puifque  dans  ce  mêmepaftàgeil  exprime  la  même  choie  en  ces 
termes,  que  Judas  récrit  le  -premier  Sacrement  que  J.  C-  fit  de  fes 
propres  mains  ^  qu'ainii  cettQ  chair  dont  parle  S.  Auguftifl  n'eft 
autre  chofe  que  le  Sacrement  de  la  chair.  Et  il  croit  cette  ré- 
ponfe  fi  ju(l:e  &  fi  folide  qu'il  l'applique  encore  à  un  pafîage  du 
premier  livre  contre  Crefconius  ,  oii  S.  Auguftin  parle  ainfi; 
Que  dirons  noris  du  cvrps  mtsWE  ô"  du'  fani^u.  E  s  m  E  de  noftre 
Seigneur  J.  C.  l'unique  fucrifice  pournofire  faht!  Car  encore  que  le 
Seigneur  affurc  que  celuy  qui  ne  mangera  point  fa  chair,  t>^  ne  boira 
po:nt  fon  fmg ,  n'aura  pas  la  vie  •  l'Apoftre  ne  noîis  affurc- 1.  il  pas 
qu'il  eft  pernicieux  à  ceux  qui  en  ufentmall  Tuutcela  ne  veut  rien 


394  L^v.  VI.  ^e  le  corps  de  Jepds-Qjrifi 

dire  ,  félon  Aubertin  ,  iinon  que  les  mcchans  reçoivent  5e  Sa- 
icrcmcnt  de  la  chair  de  J.  C.  parce  qu'il  le  trouve  un  endroit 
où  S.  Augiiftin  explique  les  mots  de  chair  même ^  par  ceux  de 
Sacranent  de  la  chair. 

Mais  qui  ne  voit  que-ce  Miniftre  raifonne  abfolument  contre 
Je  bon  iens,  &qu'au  lieu  de  conclure  de  ce  que  S.  Auguftin  ap- 
pelle en  un  endroit  S.urcment  de  la  chair ,  ce  qu'il  appelle  ea 
d'autres  la  chair  mcme,  que  cette  chair  même  n'eft  donc  qu  15^ 
pur  Sacrements  il  faut  conclure  au  contraire  que  par  ctS.tcre- 
7nent  de  la  chair  .,x\  entend  la  chair  même.  Car  les  mots  de  chair 
même ,  d'unique  facrifice  de  noftre  falut.  ,  ne  peuvent  jamais  fi- 
gnifîer  un  pur  figne.  Mais  les  mats  de  Sacrement -de  la  chair  de 
I.C.  peuvent  fort  naturellement  fignifier  la  chair  même  de 
L  C.  ou  un  Sacrement  qui  la  contient ,  puifque  le  vc^otAeSacre^ 
ment  eftun  de  ces  termes  généraux  &  de  cesidëes  confufes  auf. 
quelles  l'on  (upplée  d'ordinaire  (elon  les  fujets  auxquels  on  le^ 
applique,  comme  nous  voyons  que  tous  les  Catholiquesie font 
à  l'égard  de  ce  mot  même.  Et  par  confequentce  terme  eftant 
très-capable  d'un  fensplus  étendu  que  celuy  qu'il  a  naturelle- 
nientJ  &  S.  Auguftin  marquant  dans  ce  paflage  même  de  quelle 
manière  il  y  fuppléoit ,  la  raifon  oblige  d'entendre  &  dans  ce 
lieu  &  dans  tous  les  autres  par  le  mot  de  Sacre?nent  du  corps  de 
I.  C.  ce  que  tous  les  Catholiques  entendent  par  ceux  de  Sacre- 
ment de  l'Autel  ou  de  S.  Sacrement,  c'eft-à  dire  un  Sacrement, 
qui  contient  le  corps  même  de  I.C. 

j'ayjquslque  honte  de  m'arrefler  icyàun  fophifme  dont  Auber- 
tin (e  lert  fur  le  fujet  de  ce  même  palfage  ^  mais  il  le  répète  G. 
fouvent  qu'on  eft  obligé,  malgré  qu'on  ert  ait,  d'y  faire  quelque 
Scrm.  rr.  de    reflexiou;  il  cfl  fondé  fur  ce  que  S.  Auguftin  die  que ludas  reçut 
vcrb.Domiii.    /^  premier  Sacrement  du  corps  ^du  fanz^  de  I.  Cquc  I.  C-  avait  fait 
de  fes  propres  mains  :  d'où  Aubertin  conclut  que  ce  ne  pouvoit 
eftre  le  corps  même  de  I.  C.&;  que  le  Sacrement  eft  là  diftingué 
de  I.  C. en  ce  qu'il  eft  ditqueL  C. Ta  fait:  Abfurdi,fjimum  autem 
ejjet  dicere  Dominum  proprium  corpiis  fiium  ,  manibus  fuis  confc- 
cilfe.  Sacramentmn  ergo  corporif  ^  ^anquinis  cjus,  corjytis  tpjîus  (j/* 
fan'itiis  non  eft. 

Mais  cette  conclufion  eft  vaine  &fophiftique,  comme  nous 

î.  pcrp.p.jiiy.   l'avons  montré  ailleurs  fur  un  pareil  argument.  Car  qui  nefçaic 

qu'une  même  chofe  félon  differens  eftats&felon  les  différentes 

iv  inieresdont  onla  regaxde,peut  eftre  conçue -par  différentes 

idées 


'efi  mimgé  corporellement  dans  rEucharifiie.         5 9/ 
•idées  qui  font  qu'on  la  diftingue  en  quelque   force  d'elle-   Ch.    Yi 
imême. 

Qui  ne  fçaic  encore  que  quoy  qu'une  chofe  ne  puifle  eftre 
caufe  de  foy  même  ahfolumenr,  elle  le  peut  néanmoins  eftre 
■à  l'égard  d'un  certain  eftar,  c'eft  à  dire  qu'elle  peut  eftre  caufe 
de  ce  qu'elle  efl  en  cet  eftat.  Car  c'eft  ainfi  que  S.  Paul  dit  que 
y.  C.  a  apparu  par  [on  hofiie  ^  &  qu'il  a  offert  une  feule  hoftie, 
quoyque  cette  hoftie  ne  fût  autre  chofé  que  luy-mêrae  offert  en 
iacrifîce  à  fon  Père. 

C'efl  encore  ainfî  que  S.  Cyrille  d'Alexandrie  parlant  de 
l'Euchariftie  l'appelle  un  pain  qui  cfl  donné  par  J.  C.  quoyqu'il 
entende  que  c'efl:  fon  véritable  corps,  llparoifi,  dit  il, par  une  ia.Ua.al.  4 
preuve  indubitable  que  le  pain  qui  nous  efi  donné  par  J.  C.  c'ejl  â 
dire  fon  corps  ,  eft  un  pain  du  ciel ,  puis  qu'il  fait  vivre  éternelle- 
ment ceux  qui  le  mangent. 

C'eft  donc  auiE  de  cette  forte  que  S.  Auguftin  dit  que  J.  C. 
fît  le  Sacrement  de  fon  corps,  c'efi  à  dire  qu'il  mit  fon  corps 
fous  le  voile  du  Sacrement.Ce  Sacrement  eft  le  même  en  effet 
que  le  corps  de  I.  C.  ou  plûcoft  il  le  renferme, mais  l'idée  en 
efl  différente:  Elle  efl  plus  confufe,  8c  comprend  même  quel- 
que chofe  de  plus  que  I.  C.  .Etainfil'efprit  ne  fçauroit  s'empê- 
cher de  la  diftinguerde  I.C.  conçu  d'une  autre  manière.  &il  fè 
porte  naturellement  à  dire  que  I,  C.  eft^aufe  de  TEuchariffie  &: 
fait  l'Euchariftie,  parce  que  c'efl  luy.même  qui  fe  met  en  l'cflac 
où  nous  le  concevons  par  ces  idées  confufes  de  Sacrement  du 
•corps  de  I.  C.  &  d'Euchariflie. 

-On  pourroit  rapporter  quantité  d'autres  patTàgcs  où  ce  Pè- 
re enfeigne  que  les  bons  &  les  méchans  reçoivent  le  corps  Scie 
fang  de  I.  C.  Aubertin  reconnoifl:  luy-  même  qu'ils  font  en  très-  Aub.  p.  j^» 
grand  nombre  à  l'égard  des  méchans.  Mais  pour  ne  groflir  pas 
inutilement  ce  livre,  je  remarqueray  feulement  icy  que  tous 
ces  pafîages. font  decififs  en  y  joignant  quatre  remarques  déjà 
prouvées. 

I.  Que  ces  termes  font  déterminez  à  figniflerlevray  corps&: 
le  vray  fang  de  L  C.  par  l'ufage  confiant  de  toute  l'Eglife  du 
temps  de  S.  Auguflin  que  nous  avons  prouvé  dans  le  fécond 
Tome  de  cet  ouvrage. 

2.  Qu'ils  y  font  déterminez  parle  confentement  de  tous  les 
Chrefliens  qui  ont  vécu  après  S.  Auguflinj  comme  nous  l'avons 

DDd 


^^^ 


396  Liv.  Vl.  ^e  fe  corps  de  hJiis-Qrrill 

encore  prouvé  dans  le  premier  volume  de  cet  ouvrage,  &parla 
réponfe  générale. 

3.  Qii'ils  y  font  déterminez  ,  parce  que  les  fens  de  figure  &c 
de  vertu  font  des  chimères  abfoinment  inconnues  aux  Pères: 
ce  qui  eft  encore  prouvé  par  tout  le  fécond  Tome. 

4  Qi-i'ils  y  font  déterminez  enfin  par  ces  lieux  de  S.  Augd- 
flin  &  des  autres  Pères  que  nous  avons  rapportez  dans  ce  vo^ 
lumeicy.  De  forte  que  les  Minières  nefçauroientnous  ofterle 
droit  de  les  prendre  en  ce  fens,  qu'en  répondant  foiidemenc  à 
toutes  ces  preuves  :  ce  qu'ils  ne  feront  alTurément  jamais. 

CHAPITRE   VI. 

Que  les  Pères  en  fuivant  la  doFlrine   de  la  frefcnce  réelle  ont  dû 
dire  que  l'on  mange  ^  que  l'on  ne  mange  pas  J.  C. 

ON  a  veu  jufques  icy  que  la  dodrine  de  la  prefence  réel- 
le a  porté  les  Pères  à  toutes  les  expreffions  propres  à 
faire  entendre  que  nous  recevons  réellement  le  corps  &  le  fang 
de  I.  C.  par  la  bouche  du  corps.  Mais  ceferoit  mal  connoiftre 
l'efprit  des  hommes,  ou  juger  mal  de  celuy  des  Pères ,  que  de 
prétendre  qu'on  n'en  deuft  trouver  que  de  cette  forte  dans 
leurs  écrits.  S'il  eft  vrayen  un  fens  que  nous  mangeons  ce  di- 
vin corps,  parce  qu'il  entre  réellement  dans  les  noftres ,  il  eft 
vray  en  un  autre  fens  que  nous  ne  le  mangeons  pasj  &;  même  cela 
eft  vray  dans  le  fens  le  plus  ordinaire  du  mot  de  manger,  qui 
mettant  devant  les  yeux  de  l'efprit  toutes  les  adions  qui  s'exer- 
cent fur  les  alimens,  ne  peut  convenir  à  la  manière  dont  nous  re- 
cevons le  corps  de  I.  C. 

Car  encore  qu'il  femble  que  quelques  Grecs  ayent  crâ  qu'on 
le  divifoit  aduellement ,  ce  n'ell  pas  néanmoins  la  dotflrine  des 
autres  Pères,  &  leur  fentiment  au  contraire  eft  qu'il  demeure 
tout  entier,  quelque  divifion  qui  arrive  aux  fymboles. 

Il  n'eft  pas  vray  non  plus  que  l'on  goufte  proprement  le  corps 
<le  I.  C.  il  n'eft  pas  vray  que  l'on  le  digère.  Et  comme  divifer 
l'aliment,  le  goufter,  le  digérer,  eft  ordinairement  ce  qu'on  ap- 
pelle manger,  il  eft  certain  que  l'on  ne  mange  pas  le  corps  de 
J.  C.  en  ce  fens- là. 

Les  Pères  ontefté  d'autant  plus  obligez  d'exprimer  cette  ve- 


efî  mangé  corporeUentent  dans  ÎEuchariflïe.  597 
rite  &  d'éloigner  par  là  ces  idées  balfes  &;  groflleres  del'e/pnc  Ch.  VI 
des  Chreftiens ,  que  c'eft  ce  qui  fcandalifliles  Carphanaïtes  ^ 
quelques-uns  des  diiciples  des  J.  C.  &;  qui  leur  fie  dire  du  dif- 
cours  que  J.  C.  leur  avoitfait  pour  les  exhorter  à  manger  fa 
chair  &  à  boire  fon  Tang,  que  ces  paroles  eftoient  dures  -^durus 
efi  hic  fcrmo. 

Les  î?eres  nous  déclarent  en  plufîeurs  endroits,,  que  c'eftoit- 
là  la  caufe  de  leur  fcandale. 

Les  Juifs  ^  dit  S.  Cyrille  de  Jerufalem  ^n'entendant  pas  fe.  Caccch.  4 
l'on  le  [prit  ce  que  J.C.  leur  avait  dit  démanger  ff  chaire  de  loi.  ^'^^" 
re  fon  /^^wg,  en  furent  fcandahfez^^  Ô'  f  retirèrent  en  arrière  ,  far- 
ce qu'ils  crurent  que  J.  C.  les  voulait  porter  à  manger  de  la  chair 
humaine  y  voix!(^o>Tti  oTt 'tC^qS  a  aftioÇayicLv  atÎTV^  'TtpoTfî'KircLi.  Ain- 
fi  ce  Père  condamne  comme  une  penfée  ludaïque  ce  qu'il 
appelle  Sarcophagie,  c'eft  à  dire  proprement  la  manière  de  man- 
ger la  chair  humaine  que  concevoient  les  Carphanaïtes.  j^  , 

Quelques-uns  des  Difciples  du  Seigneur  jdit  S.  Cyrille  d'Ale-  p.  3-4. 
xandrie  ,  furent  fcandalifez^  de  ce  qu'ili  luy  avaient  ouy  dire ,  que  Jt 
en  ne  mangeait  fa  chair  Q-  qu'on  ne  bcufl  fon  fi'ng^  on  n'aurait 
point  la  vie.  Ils  crurent  par  là.  que  J.  C.  les  invitait  â  une  cruauté 
de  befte s  féroces  .^  ^  qu'il  leur  commandait  de  manger  inhumaine- 
ment de  la  chair  Qt' de  boire  du  fang  ,  ^  de  faire  d'autres  actions 
dont  on  ne  f<^auroit  parler  fans  horreur. 

C'eftoient-là,  félon  ce  Saine,  les  imaginations  de  ces  luifs, 
j6c  en  les  leur  attribuant  il  les  condamne,  &:  les  rejette. 

S.  Auguftin  explique  delà  même  forte  l'idée  qui  fit  fcûlc-  îuPfai.  ;>». 
ver  les  luifs  contre  ce  que  I.  C.  leur  enfeignoit:  ils  conçurent.^ 
àit-i\, ce  que  J.C.  leur  difoit  d'une  manière  infcnfie-^  ils  s'en  for- 
mèrent une  idée  toute  charnelle ,  ^  ils  crurent  que  noftrc  Seigneur 
devait  couper  des  petites  parties  de  fon  corps  .^  C  les  leur  donnera 
manger.  C'ejl  ce  qui   leur  fit  dire  :  Ce  difcours  cft  dur. 

Ils  ne  conscvoient  pas  ,  dit-il  en  un  autre  lieu,  quily  eiit  rien  Twâ:.  %^  'm, 
de  grand  dans  ce  que  7.  C.  leur  difoit  .^ny  que  ces  paroles  couvriffeut  î''*"- 
quelque  grâce  qu'il  leur  voulait  faire.  Ils  les  entendirent  Comme 
ils  voulurent  Q^  k  la  faisan  des  hofnmes  :  ils   crurent  que  J.  C.  pou- 
vait ,  ^  avait  dcffein  de  difinbuer fa  chair  coupée  par  morceaux  â 
ceux  qui  croyaient  en  luy. 

Ils  conçurent,  dit  il  encore  au  même  lieu,  qu'il  devait  couper  fa 
chair  par  morceaux  comme  on  coupe  celle  des  corpsmorts,  ^  comme  j^y^ 
an  expofe  la  viande  dans  le  marché  .^^'^  non  pas  qu'il  la  leur  deufi 

DDdij 


398  Liv.  VI.  ^e  le  corps  de  jfeJus-Qjrifl^ 

donner  vivante  ^  animée  far  fou  e [prit.  Sic  mtcUcxcnmt  quomo- 
do  in  cadavere  dilaniatur  aat  in  Macello  vinditur ,  non  quomodo.- 
fpiriiîi  vegetatur. 
■.  ,         Vous  cioycz^^  dit-  i  1  encore  ailleurs ,  que  je  vais  cotipermon  corps. 

veib.'  Apft.      i^n  morceaux  four  vous  le  donner. 

Ainfi  l'Auteur  du  livre  A^Cœna  Domini  ,n'a  faic  que  fuivre- 
le  fensdes  Per^s,  Ibrfqu'il  exprime  en  ces  termes  l'idée  que  s'ë- 
toient  formée  les  Capharnaïces. //j  crurent.,  dkiï  ,  que  cejhif. 
une  chofe  horrible  &  deteftahle  de  7nangcr  de  la  chair  humaine.,  s'i- 
maginant  que  J .  C.  entendait  quils  la  dévoient  manger  rojlie  ou\ 
bouillie  ^  coupée  far  morceaux. 

Les  Pères  eftoient  donc  oblieez  de  bannirces  idées  charnelles.. 
Et  comme  elles  s'expriment  naturellement  par  \çs\not^deman-. 
fer  delà  chair  &  de  boire  dufang,  ces  mots  pris  en  ce  fens  qui  eft 
ie  plus  ordinaire,  ont  dû  eftre  rejettez  par  les  mêmes  Pères.  Aufli 
.  avons-nous  veu  que  S.  Cyril  le  de  lerufalem  con damne  A^/2?rf<7- 
fhagie .,  c'cft:  à  dire,  motà  raor,  la  manducation  de  lacbair,  & 
que  Si  Cyrille  d'Alexandrie  rejette  ce  qu'il  appelle  aa.a%t<pyut. 
manger  de  la  chair,  &    ct/.u*  pojh.  c'eftà  dire  boire  du  iang. 

Cependant  il  n'y  a  point  de  Pères  qui  ayent  établi  plus  forte- 
ment que  ces  deux,  la  manducation  corporelle  en  un  autre  fensi 
Cateclî,  4.         Car  S.  Cyrille  de  lerufalem  qui  rejette  la  prr(7//'^/g;>  ou  man^ 
M}ft.  ducation  de  la  chair,  comme  une  imagination  judaïque,  eft  ce- 

luy  même  qui  enfeigne,  que  le  corps  6cle  fangdel.  C  font  di- 
Jlribuez^dans  nos  ryitmhres.  C'eft  luy  qui  nous  exhorte  k  frendrs 
avec  une  entière  certitude  le  corf>s  (^  le  fang  de  J.  C  farce  que  fous 
le  type  du  fain  le  corps  nous  eft  dènné ,  &  le  fang  fous  le  tyfe  du  vini 
afin  qu'ayant  receu  le  corps  ^  le- fing  dej.  C.  nous  n'ayons  qu'un 
mhne  corps  (^  un  7ncme  fang  avMC  luy^  ^  que  nous  devenions  ainfi 
F orte  Chrtfts. 

C'eft  luy  qui  nous  défend  de  juger  far  le  goufl.,  &  qui  marque 
par  là  que  l'idée  que  l'on  feformeroit  en  fuivant  le  gouft  n'eft 
pas  conforme  à  celle  que  la  foy  veut  que  nous  ayons.  C'eft  luy 
Catech.  r-  ^"^  nous  ordonne  défaire  un  trofne  denoftre  maindroite  fourrcce- 
voir  le  Roy.,  (jr  -de  fanclificr  nos  yeux  far  l'attouchement  de  ce  faint 
corps.  C'eft  luy  qui  marque  que  le  fing  de  J.  C.  laiffeune  humidi- 
té fur  nos  lèvres  ,  &  qui  par  tout  cela  fait  voir  &  que  ce  que  nous 
recevons  eft  le  corps  de  I.  C.  &  que  nous  le  recevons  d'une  ma- 
nière corporelle  &  par  la  bouche  du  corps. 
Nûus  avons  veu.de  mêmeque  S,  Cyrille  d'AiexâpdfieFCJet5e 


efi  mxngé  corporellement  dans  l'EuchariJUe.  399 
ce  qu'il  appel  acLf^o^a.yi7v  >^  aTfia.  po:pt7f ,  c'eft  à  dire  littérale-  Ch.  V. 
ment ,  manger  de  la  chair  &  boire  du  fang.  Et  cependant  en 
combien  de  manières  enfeiMet-il  la  manducation  corporelle 
dans  ce  même  ouvrage  &  dans  le  même  chapitre,  où  il  rejette 
la  Sarcophagie  ?  Ne  dit-il  pas  fur  ce  même  chapitre  de  S.  Jean  p.354 
^ue  le  corps  de  J.C.  vivifie  ceux  quiy  participent  ^  &quilen  bannit 
lu  mort  reçu  dans  des  corps  fujets  à  la  mort  ? 

N'enieigne-t  il  pas  C[\xq  parce  que  la  chair  du  Sauveur  a  eficren- 
due  vivifiante  par  j^on  union  au  J^crhe  qui  efi  la  vie  par  cljence , 
nour  aurons  la  vie  ennous  ^lorfque  nous  la  manderons  'i  tàh  olôtUs 

Ne  déclare  t  il  pas  en  comparant  l'union  intime  que  nous-  inToann.i-*^ 
avons  avec  la  chair  de  J.  C.  par  la  manducation  avec  le  ilmple- 
attouchement  de  cette  même  chair,  ^«^  fi  des  corps  morts  font 
vivifiez^  par  le  fcul  attoucbeynent  de  fia  fainte  chair^  nous  devons  • 
efiperer  de  plus  y  and  s  avantages  de  l'eulogie  vivifiante  en  la  qoù^ 
tant  elle-même  ,  (^  quelle  c  onmiuniqitera  Jon  propre  bien^  ccfi  à  dire- 
J^ immortalité  a  ceux  qui  y  participeront  ? 

Ne  li'^ons-nous  pas  o^t comme  l'eau  que  l'on- approche  du,  feu 
perd  prefque  fia  propre  nature  ^  pajfe  en  la  ver  tu  du  feu  qui  efi  le   in  J»a«iî.  ^ 
plus  fiort -^  de  même  quoyque  nous  fioyons  corruptibles  par  la  nature  '*^" 
de  nofire  corps ,  nous  ne  laififerons  pas  par  le  mélange  de  là  chair 
de  y.  G.  d'efire  dèpoiiillez^  de    nofire-  infirmité    (^  revefius  de  fies 
promefi^és  ,cefi  à  dire  de  la   vie -^   parce  qu'il  efi  oit  necefi aire  oue 
non  fieulementl'ame  fiiifi  renouvellée  aune  nouvelle  vie  parle  S.  Efi^ 
prit  j  mais  auljîque  ce  corps  grejjîcr  ^  terrefire  fiufi  fianciifié  ^  ré- 
tabli dans  l'incorruptibiliîèp^vr la  participation  d'une  chofie  terrefire. 
^  conforme  à  fa-nature  ? 

N'alFure  t  il  pas  encore  au  même  lieu,  que  Jefus-Chrifi 
eftant  enncus  comme. vie  par  fia  fiaintc  chair,  renvcrfie  l'empire  du 
crael  tyran  1 

N'y  voit-on  ^^^s  ,C[ViQquoy  que  la  tnort  qui  par  la  prévarication 
du  premier  homme  s' efit  emparée  du  genre  humain  ^  nous  pouffe  fins    -^^^       ^^j  ^,- 
xelàche  vers  une  corruption    inévitable ,   néanmoins  puifique  J.    C.   p.  563. 
efi  en  nous  par  fu  propre  chair  j  il  e(l.  indubitable  que  nou^s   reffufci. 
terons ,  parce  qu'il  n'efi  pas  croyable,  ou  philofi  qu'il  efi  impofiible 
que  la  vie  ne  vivifiic  pas  ceux  en  qui  elle  efi.  ? 

Ne  dit- il  pas  que  comme  on  met  une  étincelle  de  feu  dans  un  ibiJcm. 
monceau  de  paille  ^  pour  la  conferver^  de  même  nofire  Seigneur  J.  C, 
cacJu  la  vie  en  nous  par  fia  chair  ^  ^  il  y  fait  entrer  comme  ms 

D  D  d  lii . 


400'        /Li-^.Vl.  ^e  lecorpsâê  Jefm-Qoriji 

Jcmence'  d'immortalité  ,     qui    dejirutt    toute',  noji  e   corruption  t 

wijoann.3^4-  Ne  dit-il  pas  pour  expliquer  de  quelle  manière  s'accoinplic 
cette  parole,  ce  lu  y  qui  man<Te'ma  chaire  boitmonfan<^d,cnu;ii. 
re  en  moy  ^  moy  en  luy  :  que  comme  joignant  »u  morceau 
'de  cire  h  un  antre  ^  on  peut  dire  que  l'un  eft  dam  l'autre',  a.inS 
celuy  qui  reçoit  lor  chair  du  Sauveur  (j?-  qui  boit  fon  précieux  fan<i^ 
eft  un  avec  luy  ,  parce  qu'il  eft  mêlé  ^  confondu  avec  luy  par 
cette  participation  ? 

â«d.  p.5^;.  Ne  dit  il  pas  enfin  que  Chrifi  eftant  en  nous  appaife  la  ïoy 
de  nos  mem'arcs  ,  excite  la  pieté  vers  Dieu  ,  mortifie  les  pa.IJions'i 
11  efl:  donc  certain  qu'il  n'y  a  point  de  contradidion  à  dire 
d'une  part  que  l'on  mange,  que  l'on  reçoit  la  chair  de  I.  C.  6c 
que  l'on  hoit  Ton  fang ,  que  (o\\  corps  entre  dans  noftre  bou- 
che &  dans  nos  entrailles  ;&  à  nier  de  l'autre  que  l'on  mange 
la  chair  de  i.  C.  &:  que  l'on  boive  Ton  Tang,  Ces  expreffions 
.qui  paroiiîent  contraires  ne  le  font  point  en  effet,  parce  qu'el- 
les ont  des  fens  differens."  Les  premières  marquent  la  firaple 
réception  réelle  du  corps  &  du  fang  de  I.  C.  dans  noflre  bou- 
che &  dans  noflre  corps,  &  ainfi  elles  font  employées  par 
tous  les  Pères  quand  ils  n'ont  eu  que  ce  fens  en  veue.  Les  fé- 
condes excluant  du  corps  6c  du  fang  de  J.  C.  ce  que  l'on  appel- 
le proprement  i^ozVt?  ôcw-z^gfr,  c'efl  à  dire  ces  adions  anima- 
les qu'on  exerce  furies  alimens,  en  lesdivifant,en  \t^  goû- 
tant ,  en  les  digérant.  Et  c'étoit-là  le  fens  auquel  les  Caphar- 
naïces  les  entendoient.  Ainfi  les  Pères  ont  deu  tantoft  fe  fer- 
vir  de  ces  termes  ,  &  tantoft  les  rejetter,  félon  qu'ils  ont  eftç 
frappez'de  l'utie'ou  de  l'autre  de  ces  idées. 

C'eft  ainfi  que  TertuUien  déclare  en  un  endroit  de  fon  li- 
vre de  la,  Refurreftion,  que  la  chair  fe   nourrit  du    corps  ^  du 

©e  -efur    a  -  '''''''2  '^^  ^-  ^-  '^/^''^  f ^^  lame  s'engraiffe de  Dieu:  Caro  corporel 

Mif.  c.  s.        fan'îiiine  Chrifti  vefcitur  ^  ut  anima  de  Deo  fapnetur-^   &L  C[nQ 
dans  le  mêmeîWrè  en  parlant  des  Capharnaïtes ,  &  prenant 

'•  le  mot  de  inanger  feloh   l'idée  qu'ils  en avoient ,  il  dit,  ^»'//; 

c,  57,  s' v.ia2 inoient   que  7.  C   leur  donncroit  vcritahlcment  fa  chair  a, 

jiuni'ier.  JSTam  quia  durum  ^   intolerabilem  exiftimaverunt  fer- 

fhonerh  ù'jus  -,'  qu  if  vcrè  carnem  fuam  illis  edendam  determinaffet, 

Aubercin  conclut  de-là  que'J.  C.  félon  TertuUien  ,  ne  devait 

Aub.  p.  358-  donc  pas  d-niner  véritablement  fi  chair  a  manquer.  Et  il  a  raifon 
de  le  conclure;  mais  il  a  tort  de  croire  que  cette  propofition 
'  fôîc""co.ni:radicloire  dans  le  fens ,  avec  celle  cv:/.  C.  nom  domiff 


efi  nmngé  corparellement  dans  rEucharifiie.  401 
verit^iblemcnt  Ja  chair  k  yyiatiqer.  Elles  font  tontes  deux  verita-  Ch.  VI- 
bics  ôc  toutes  deux  authorifees  par  les  Pcres.Tertullien  avance 
Ja  première,  comme  nous  venons  de  voir,  quoy  qu'il  ne  laifîe 
pas  de  dire  avec  tous  les  Pères,  qite  la  chair  fe  nourrjt  du  corps 
de  1.  C.  Ft  il  auroit  dit  de  même  fans  d'fficultë  qu'elle  le  mange 
véritablement  ,  &  que  I.  C.  nous  donne  véritablement  /on 
corps  à  manger.  Car  Gelafe  Cyfique  n'en  fait  point  de  faire  dire 
au  Concile  deNicée,  que  nous  recevons  vcritahlement  le  précieux 
corps  é^  le  précieux  fang  de  L  C.  ro  ao'ra  ca/j.a.  yjji  BUfAx 
etxrijas  A c/xC a vovrti.  Et  faint  Auguftin  qui  parle  en  un  endroit, 
que  nous  verrons  tout  àl'heure  ,  de  la  même  manière  que  Ter- 
tullien,  n'en  fait  pas  non  plus  dédire,  que  I.  C.  nous  a  donné 
véritablement  ion  corps  à  manger:  Vere  qui  nobis  dedtt  man, 
dacare  corpus  fuum. 

L'illufîond'Aubertin  confifte  donc  en  ce  qu'il  ne  veut  pas 
camprendre  qu'on  peut  dire  lans  contradiction, &:  que  I.  C.ne 
nous  donne  pas  fon  corps  à  manger,  c'eft  à  dire  qu'il  ne  nous 
le  donne  pas  à  brifer,  à  couper,  àgoufter,  à  di  gérer  comme  les 
Capharnaïtes  fe  l'imaginoient,  &;  qu'il  nous  donne  verit^ble- 
ftient  fon  corps  à  manger,  parce  que  nousle  recevons  réelle- 
ment dans  nos  corps. 

Mais,  dit  Aubertin,  diroit  on  qu'un  liomme  qui  mangeroit 
de  la  chair  qui  auroit  la  forme  de  poilTonne  mange  pas  delà 
chair  ?  Ne  dit-on  pas  que  l'on  mange  des  pilules,  que  des  bro- 
chets mangent  d'autres  brochets,  quoy  qu'ils  les  avalent  tous 
entiers  i  Pourquoy  donc  ces  Pères  diroient-ils  que  l'on  ne 
mange  point  la  chair  de  I.  C.  s'il  eftoit  vray  qu'elle  entrafl 
réellement  dans  nos  corps  ? 

Aubertin  eft  tout  plein  de  ces  comparaifons  baïïès.  Mais  il  eiî 
étrange  que  s'y  eftant  fi  fouvent  appliqué  il  n'en  ait  jamais  re- 
connu le  défaut.  Car  il  efi:  bien  vray  que  l'on  peut  dire  qu'un 
brochet  mange  un  autre  brochet ,  &  qu'on  ne  fçauroit  dire  qu'il 
ne  le  mange  pas.  Et  larai(on  en  eft  qu'il  le  touche,  qu'il  le 
goufte,  qu'il  le  digère.  Mais  quand  une  chofe  n'agit  point  du 
tout  furies  fens,&  que  de  toutes  les  actions  en  quoy  confifte 
le  manger,  il  ne  s'y  rencontre  que  celle  d'entrer  par  l'organe 
Je  l'aliment  &  de  defcendre  dans  l'eftomach  ;  Il  eft  bien  plus 
ordinaire  de  dire  qu'on  ne  la  mange  pas,  que  de  dire  qu'on  la 
mange. 


Horail. 

CVK, 


DeEccle.   f. 
Tlieol.comr, 
Marcel.    An- 
cyi,  l.s.  c,  li, 


401  Liv.  VI.  ^c  h  corps  de  lefus.QhriJi 

Ainfi,  comme  nous  avons  déjà  remarqué  ,  pcrfonne  ne  dit 
qu'on  mange  de  l'air. 

On  ne  dit,  pas  n'en  déplaife  à  Aubercin,  qu'on  mange  des 
pilules.  Les  Miniftres  eux  -  mêmes  ne  difenc  point  qu'ils 
mangent  le  S.  F fprit  quoyqu'il  foir  prefent  dans  les  alimens  qu'ils 
prennent.  Les  Théologiens  nient  que  l'on  mange  l'ame  de 
J.  C.  quoyqu'ils  croyent  qu'on  la  reçoit  avec  Ion  corps.  Les 
Philofophes  de  l'échoie  ne  difent  pas  qu'on  mange  les  former  ^i 
fubftantielles,  quoy  qu'ils  fe  les  figurent  comme  deseftres  ma- 
tériels, qui  font  joints  à  tous  les  corps,  6i  par  confequentaux 
alimens.  Defortequ'en  s'atiachantàla  fignification  littérale  du 
mot  de  mander,  il  efl:  plus  difficile  en  quelque  forte  d'expliquer 
les  paflTages  où  les  Pères  nous  difent  que  l'on  mange  le  corps  de 
J.  C.  que  ceux  oii  ils  nous  difent  qu'on  ne  les  mange  pas  j  par- 
ce qu'en  effet  on  n'exerce  fur  le  corps  de  J.  C.  prefque  aucu- 
ne des  actions  qui  font  comprifes  dans  l'idée  que  nous  avons 
de  ce   mot. 

Qi.n  s'étonnera  donc  après  cela  qu'Origene  nous  difg 
par  rapport  à  ce  fens  des  Capharnaïtes  qu'il  y  a  dans  ces  paro- 
les, Si  vous  ne  mangei^la  chair  .du  FJls  de  rMomnie  ^  ne  heu. 
vez^fon  fang^une  lettre  qui\tuë  !  car  pourquoy  ne  le  diroit-il 
pas,  puifquele  fens  des  Capharnaïtes  efb  un  fens  littéral  à&s 
mots  de  manger  &c  de  hire  ,  &  que  ce  fèns  çll  véritablement 
une    lettre  qui  tuë? 

Qtii  s'étonnera  qu'Eufebe  de  Cefarée  faile  dire  à  J.  C.  JV> 
penfe::^pds  que  -je  pétrie  de  la  chair  que  je  porte,  comme  s'il  la  fal- 
lait manger^  &  ne  vous  imaglnez^pas  q  ne  je  vous  ordonne  de  boi- 
re un  fang  corporel (^  vifible  Qiie  -conclut  tout  cela  finon  que 
l'on  ne  mange  pas  la  chair  de  J.  C.  6c  que  l'on  ne  boit  pas  foa 
fang  de  la  manière  &:  félon  le  ieus  le  plus.commun  de  ces  ter- 
mes ? 

Il  faut  feulement  remarquer  qu'Eufebe  tf  explique  en  ce  lieu 
•le  fixiéme  chapitre  de  S.  Jean  ny  de  la  manducation  Sacramen- 
tale,  ny  de  la  manducation  fpirituellede  la  chair  de  L  G  mais 
delà  parole  de  Dieu  ;  ce  qui  eftun  fens  très,  rare  dans  les  Peresi 
&  qu'aifienfuppofant  que  cette  chair  dont  parloitJ.C.  eftoit 
fa  parole  &  non  fon  corps,  il  avoit  encore  plus  d'occafion  de 
-faire  dire  à  J.  C.  qu'il  ne  falloit  pas  manger  fa  chair.  Mais  cela 
ne  conclut  nullement  que  le  mêmeEufebe  n'aitcruque  ^onre- 
f  e,vo;c  réellement  la  cliair  de  J.C.  en  recevant  l'Euchariftie, 

.quoyque 


eji  mange corporellement  dans  l'Eucharifiie.  4*3 
quoique  d'une  manière  qui  n'eft  pas  fenfible  ,  puifqu'il  crovoit 
que  les  fynnboles  Euchariftiques  n'efloienc  point  des  figures 
vuides,comme  ceux  de  l'ancienne  Loy,mais  qu'ils  contenoient 
la  vérité  même  ,  aur  V  à.KYi')inv  itéOÎxj'^rA. 


C  H  APITRE    VII. 

Éclaircijfement  du  faffwie  de  faint  Auyiftin  tiré  du 
58.  Pfeautne. 

ON  pourroit  fans  autre façonajoûteraux  pafTages  que  nous 
venons  de  rapporter  celuyde  faint  Auguftin,  dans  Ton 
Commentaire  fur  le  Pfeaume  98.  où  pour  montrer  que  ce  fut 
à  tort  que  quelques-uns  des  Difciples  fe  fcandaliferent  de  ce 
que  J.  C.  leur  avoit  ordonné  de  manger  fa  chair  ^  parce  qu'ils 
durent  qu'il  la  devo!t  couper  par  morceaKX,  il  fait  dire  à  J.  C.  En- 
tendeT^irituellement  ce  que  je  vttis  ay  dit.  Ce  ne  fera  pat  a  corp 
que  vous  voyez^  que  vous  mangerez^^  ni  le  ptng  qui  fera  verfc  par 
ceux  qui  me  crucifieront  que  vous  boirex^  J'ay  voulu  par  la.  vous 
marquer  un  Sacrement.  Ce  Sacrement  vous  vivifiera^  ponrvà  que 
vous  l' entendiez  fpiri tue Uement.  Car  quoiqu'il  fe  doive  célébrer  k 
la  vite  des  hommes  ,  il'  faut  pourtant  concevoir  qu'il  s'y  paffe  qucL 
que  chofe  d'invifïble.  Car  en  effet  ce  paiîàge  ne  concienr  aucune 
difficulté  particulière  i  &  il  efl  vifibleque  faint  Auguftin  pre- 
nant le  terme  de  mangerdans  le  fèns  ordinaire  ,&  félon  l'idée 
que  les  Difciples  en  avoient,  a  dû  faire  nier  à  J.  C.  que  (on 
corps  dût  eftre  mangé. 

Mais  parce  que  ce  lieu  de  S.  Auguflin  efl  un  des  principaux 
appuis  desMiniftres,  fc  qu'on  ne  voit  autre  choie  dans  leuis 
écrits,  il  ne  fera  pas  inutile  de  remarquer  qu'il  y  a  dans  ce  Ser- 
mon fur  ce  Pfeaume  98.  une  contradiction  apparente  félon  les 
termes ,  qu'il  faut  que  les  Miniftres  accordent  par  lefensaufù- 
bien  que  nous. 

Car  faint  Auguftin  y  dit  d'une  part  que  J.  C.  nous  a  donné 
à  manger  la  chair  qu'il  a  apportée  dans  ce  monde.  Et  quia  in  e<i 
ipfa  carne  hic  ambuluvit ,  O"  ipfint  carnemnobis  rrutndncandam  ad 
falutem  dédit ,  nemo  autem  illamcamem  manducat ,  nifî  prius  ado- 
raverit. 
Etil  fait  dire  de  l'autre  à  J.  C.  que  IVn  ne  mangeroit  pas  la 

EEe 


404         L  I V.  V I.  j^<?  le  corps  de  Je/tts-Chrifl 

chair  que  l'on  voyoic  en  luy  i  non  hoc  corpm  quodvtdetis  manâtt. 

caturi  ejiis. 

On  demeure  d'accord  de  parc  &  d'autre  que  c'eft  de  la  vraye 
chair  de  J.  C.  donc  S.  Auguftin  dit  en  un  endroic  quil  nous  l'a 
donnée  a  man'zer ,  &  dans  un  autre ,  que  nous  ne !amangerons pat  i 
Ôc  chacun  Uiv  fait  cette  juftice  de  croire  que  la  contrariété  qui 
paroill  dans  ces  palFages  n'eft  que  dans  les  ternies  ,  6c nulle- 
ment dans  le  fens, 

C'eft  donc  un  devoir  commun  aux  Catholiques^  auxCaU 
viniftes  d'allier  cesexpreflionsqui  feniblentcontraires.  Et  com- 
me ils  entendent  dans  le  même  fensles  mots  àz  chair  dej.  C. 
Se  de  corps  de  J.  C.  il  faut  necellairement  que  les  uns  &  les  au- 
tres ayenc  recours  à  la  diftincftion  è^s  divers  fens  du  mot  de 
manger. 

AufTi  eft-  ce  ce  que  font  les  Calviniftes.  Car  en  donnant  deux 
fens  au  mot  de  manger.,  un  métaphorique  &  l'autre  propre  ,  ils 
fuppofent  que  quand  S.  Auguftin  dit  qtiej.  C.  nous  a  donné  fa. 
chair  à  manger.,  il  parle  d'une  manducation  métaphorique  ,  & 
que  quand  il  fait  dire  à  J.  C.  vous  ne  mangerezpoint  la  chair^e" 
vous  voye'z^.,  il  parle  de  la  manducation  propre  &  corporelle. 

Les  Catholiques  n'employent  que  le  même  moyen  pour  ac- 
corder ces  exprelTions.  Car  ils  diftinguentde  même  deux  fens  *• 
du  mot  de  manger  ;  l'un  commun  5c  ordinaire  qui  enferme  de 
brifer  l'aliment  avec  les  dents  en  diverfes  parties  j  de  le  goû- 
ter ^  de  le  digérer  J  l'autre  plus  extraordinaire  qui  n'enferme 
que  le  feul  paflage  d'un  corps  par  la  bouche  dans  l'eftomach. 
Ils  difent  que  félon  le  premier  fens  faint  Auguftin  a  eu  raifon  de 
faire  dire  à  J.  C.  pour  faire  lever  le  fcandale  de  fes  Difciples  : 
Vous  ne  mangerei^paf  la  chair  que  vous  voyez^.^  c'eft- à- dire  vous 
ne  la  briferer  point ,  vous  ne  la  goufterez  point ,  vous  ne  la  di^ 
gérerez  point  ^  &:  que  dans  le  fécond  fens  qui  eft  extraordinai- 
re de  foy,  mais  ordinaire  dans  l'application  de  ce  terme  à 
l'Euchariftie  ,  il  a  pii  dire  que  J,  C.  nous  a  donné  à  manger  la, 
chair  même  qu'il  a  eue  dans  le  monde  ;  ipfam  carnemmanducan. 
dwn  ad  falutem  dédit. 

Les  Calviniftes  n'ont  donc  rienà  dire  contre  ctitç.  voye  d'ac- 
corder la  contrariété  de  ce.'i  pairages,pui(que  c'eft  la  même  que    j 
celle  qu'ils  fuivent.  Il  s'agit  feulement  de  comparer  ces  deux 
manières;  &  dans  cette  comparaifon  on  trouvera  que  l'explica-  • 
Uon  que  les  Calviniftes  donnent  au  terme  de  manger  dans  ces 


efi  ma,ngi  corporellement  dans  lEuchartfiie .        405 
deux  différentes  expreluons  de  S.  Auguftin  ne  ibauroit  (iibli-   Ch.  VII. 
fter,  &;  qu'il  n'y  a  rien  au  contraire  de  plus  naturel  que  celle  des 
Catholiques. 

On  a  déjà  fait  voir  qu'ils  s'abufent  vifiblement  en  expliquant 
ces  paroles  j  Etquia  m  ipfa  carne  hic  ambulavit  ^  ^tpjam  carncm 
manducandam  ad  falutem  (^f<!^/>, d'une  manducation  métaphori- 
que ôi  fpirituelle.  Car  cette  manducation  dont  S  Auguftin  par- 
le doit  eftre  neceflliirement  précédée  de  l'adoration  ,  nemo  an. 
tem  illam  camem  manducat ,  nijî prius  adoravertt.  Or  il  eft  ridi- 
cule de  mettre  un  ordre  fixe  &  réglé  entre  la  manducation 
fpirituelle  de  la  chair  de  J.  C.  ôc  l'adoration  de  cette  même 
chair  ,  comme  nous  l'avons  fait  voir. 

Mais  il  n'en  eft  pas  de  môme  de  l'explication  des  Catîvoii* 
ques.  Elle  n'a  rien  que  de  conforme  au  bon  fens  &:  aux  paroles 
de  S.  Auguftin. 

Car  premièrement  on  ne  fçauroit  prendre  que  pour  une 
manducation  réelle  &  corporellecelledontfaint  Auguftin  dir 
quelle  efi  toujours  précédée  d'une  adoration,  &  d'une  adoration 
renducàun  objet  prefent  devant  lequel  on  fe  profterne  :/i?'V^.;7c/ 
terrain  quanilibet  cum  te  inclinas  atque projhmis.  Et  c'eft  de  cetE€ 
Bianiere  que  les  Miniftres  mêmes  entendent  ces  paroles. 

En  fécond  lieu  ,  il  eft  très-naturel  en  faifant  parler  J  C  à  des 
Difciple  qui  viennent  d'eftre  reprefentez  comme  concevant 
une  manducation  groffiere  &  ordinaire  d'une  chair  coupée  par 
morceaux  ,  carnahter  intelligentes  ^  putantes  quod  DornivM 
pr^tcifurus  effet  parti culas  quafdam  decorporefao,  ^  daturtisiOis  : 
il  eft  tout  natureljdis-je,  de  (uppofer  que  faine  Auguftin  a  pris 
le  mot  de  manger  dans  le  même  fens  auquel  ils  le  prenoient  > 
&(^ue  ce  qu'il  a  voulu  nier ,  c'eft  cette  idée  faufle  quieftoltlc 
fujetde  leurfcairdale. 

La  fuite  même  favorifé  manireftenrentce  fens^  pourvu  qu'on 
Fentende  félon  la  doctrine  de  l'Egnfe  du  temps  de  S.  Auguftin. 
[Car  après  avoir  dit,  non  hoc  corpus  quodvidetis  manducaturi  ef- 
nis  ,  nec  bibituri  tllum  fanguinem  quern  'ufuri  funt  qui  me  crticipgent-^ 
[il  ajoute,  pour  marquer  quel  eft  l'objet  corporel  qui  feroir  pro. 
jprement  mange  de  cette  manière  commune,  que  ces  Difciples 
[avoient  dans  Véiprïv.Sacramentumaliquod  vobis  commendavi quod 
Mritualiter  intelleHum  Divificabit  vos  :  ^  Ji  neceffe  eft  illud  vifi- 
fiilitercelcbrari^oportetiamen  invifîbiliter  intelligi.  C'eft  à  dire 
[en  un  mot  que  cette  manducation  groffiere   &  commune 

E  E  c  i  j 


•f4-96  Liv.  VI.  ^ele  corps  de  jfefùs-Qjrifl 

qui  ne  s'exerceroic  pas  furie  corps  de  J.  C.  avoit  pour  objet  le 

Sacrement  qui  fert  de  voile  à  ce  divin  corps  où  la  foy  nous  le 

découvre. 

Ainfî  tout  ce  paiTage  de  S.  Auguftin  dont  les  Miniftres  ont 
tant  fait  de  bruit ,  n'a  point  en  effet  d'autre  fens  que  celuy  qui 
eft  contenu  dans  la  paraphrafe  que  j'en  vas  faire,où  je  develo- 
p,eray  fimplement  ce  que  S.  Auguftin  dit  avec  plus  de  breveté  , 
fans  ajouter  rien  à  fa  penfce^  Ne  vous  fcandalifex  point  de  ce 
que  je  vous  dis  qu'il  faut  manger  ma  chair  &:  boire  mon  fangj 
vous  ne  mangerez  point  de  la  manière  que  vous  vousl'imagi. 
nez  ce  corps  que  vous  voyez  j  vous  ne  le  briferez  point,  vous  ne 
le  toucherez  point,  vous  ne  legoufterez  point,  vous  ne  le  di- 
gérerez point.  C'eft  d'un  Sacrement  que  je  parle,quand  je  vous 
ordonne  de  manger  ma  chair.  Ce  fera  ce  Sacrement  qui  fera 
touché ,  goiîté  ,  brifé  ,  &  qui  fera  ainfî  mangé  à  voftre  fèns;  Il 
i^ra  vifible  ,  afin  que  vous  y  exerciez  ces  adionsvifibles:  mais 
il  vous  vivifiera  par  l'intelligence  fpirituelle  de  la  foy  qui  vous 
découvrira  que  mon  corps  y  fera  invifiblemenr. 

C'eft  ainfi  que  les  fîdclles  inflruits  dans  la  dodlrine  de  la  pre- 
ience  réelle  ,  ont  dû  prendre  les  paroles  de  S.  Auguflin,  Ils 
cftoient  accoutumez  à  ne  pas  concevoir  l'Euchariftie  comme 
un  Sacrement  vuide,  mais  comme  un  Sacrement  qui  contenoic 
le  corps  de  J.  C.  Ainfi  ils  ajoiitent  fans  peine  au  terme  de  Sa- 
crement ce  que  les  Catholiques  y  ajoutent  encore ,  quand  on 
leur  parle  du  Sacrement  de  l'Autel.  Ils  fçavoient  au^'îi  ce  qu'il 
falloit  entendre  invifiblement  dans  ce  Sacrement  j  &  ainfi  ils 
ne  s'arrefloicnt  point  au  feul  voile  ,  mais  ils  y  joignoient  tou- 
-tiCs  les  idées  que  les  inftrudions  communes  de  l'Eglife  leur 
donnoient  de  ce  Myflere  ^  6c  par  confequent  rien  ne  leur  de- 
voit  paroiftre  difficile ,  ôc  ce  n'efl  qu'en  fe  tranfportant  en  ua 
autre  état  que  celuy  où  efloiencces  fidelles ,  que  l'on  y  peiyc 
trouver  de  l'obfcurité. 


f 

eft  mungé  corporeUement  dans  tEuchmflie.     jÇty 


Ch.  VITI. 


CHAPITRE  VIIL 

explication  du  f  affale  de  S.  Au(^ttflin ,  tiré  du  troifiime  Livre 
de  la  DoBrine  Chrejiienne  ,  cliap.  i6, 

ON  peut  dire  que  lepafTage  de  S.  Auguftin  du  troifiéme 
Livre  delà  Doctrine  Chrell:ienne,chap.r  6.  eft  le  plus  cé- 
lèbre de  cous  ceux  dont  les  Sacramentaires  le  font  fervis  con- 
tre la  dodrine  de  l'Eglife.  Car  il  ne  paroifl:  pas  <que  les  Beren- 
gariens  ayent  connu ,  m  celuy  de  Terrullien  du  livre  quatriè- 
me contre  Marcionj  ni  ceux  que  les  Miniftres  tirent  des  dialo- 
gues de  Tlieodoret,  ni  ceux  de  Gelafe  ,  de  S.  Ephrem  &  de 
S,  Chryfoftome.  Celuy  de  Facundus  n'eft  connu  que  depuis 
quelques  années  que  cet  Auteur  a  eftë  donné  au  public.  Mais 
pour  le  paffage  de  S.  Auguftin  dont  nous  parlons ,  il  n'a  jamais 
elle  inconnu  à  aucun  de  ceux  qui  ont  combattu  ce  Myftere.  Ils 
en  ont  tous  fait  le  fondement  de  leur  doctrine ,  ôc  s'en  font  fer- 
•vis  ordmairement  pour  l'infmuer  dans  les  efprits. 

On  voit  mêm.e  que  c'eft:  ce  pafTage  qui  avoit  fait  naiftre  à 
Trudegard  des  douces  contre  la  foy  de  la  prefence  réelle  où  ii 
âvoit  efté  élevé,  des  doutes  qui  le  portèrent  à  en  demander 
TéclairciiTement  à  Pafcafe. 

Il  eft  donc  jufte  de  l'examiner  avec  foin  5c  de  bonne  foy  , 
fans  rien  dilîimuler  des  difficultez  qu'il  peut  avoir.  On  évitera 
même  les  folucions  qui  pourroient  avoir  quelque  apparence 
de  lubtilité  ,  quoiqu'elles  puifTent  eftre  •  èits  dans  le  fond  j 
&  l'on  ne  prétend  fe  fervir  que  de  celles  que  le  paflage  four- 
nit, &  qui  fontfondées  fiir  des  chofes  qu'Aubercin  mêmere- 
connoift. 

Les  difficultz  de  ce  paflage  font  de  deux  fortes.  Les  unes 
font  fondées  fur  une  règle  que  S.  Auguftin  eftablic  pour  l'in- 
telligence de  l'Ecriture  :  \ç.s  autres  fur  l'application  qu'il  en 
fait. 

La  règle  ou  le  principe  de  S.  Auguftin  dont  les  Miniftres 
tirent  avantage  ,  eft  que  fi  une  exprcfflon  qui  porte  un  comman- 
dement ,  femble  prefcrire  une  aftion  honteufe  ^  criminelle  ,  ou 
empêcher  quelque  chofe  d'utile  ,    ou    défendre  qu'on  ne  fajfie   duj.^.^°^' 
lien  aux  hommes  ^,  il  faut  la  prendre  pour  figurée.  Si  pr^ceptiva  isl'  '  '^'** 

EEeiij 


j^.oi  Liv.  VI.  ^e  le  corps  de  Je/ks-Chrifi 

locutio  ,flagittum  autfacimis  videtur  jubere ,  aututiUtatem  ac  he^ 
neficentiam  vitare  ,  fiquraui  efi. 

Les  Miniftres  prétendent  avoir  droit  de  conclure  de  cette 
maxime ,  que  les  expreffions  où  J.  C.  nous  exhorte  à  manger 
fa  chair  hc  à  boire  Ton  fang ,  eftant  de  ce  nombre,  &  portant 
à  quelque  chofe  qui  paroift  horrible,  il  les  faut  prendre  pour 
figurées. 

Mais  on  peut  dire  avec  vérité  qu'à  ne  confiderer  que  ce 
ièul  principe ,  il  n'y  eut  jamais  d'objedion  plus  foible  que 
celle-là. 

Car  ce  principe  fê  pouvant  prendre  ,  ou  généralement ,  cm 
avec  diver/ès  rcftnctions ,  il  fe  trouve  qu'eftant  pris  générale- 
ment, c'efl:  la  plus  faufle  &  la  plus  dang^ereufe  maxime  qu'on 
puifle  avancer  ^  &  qu'eftant  joint  aux  reftridions  que  les  Mi- 
nières mêmes  y  jugent  necefîaires,  il  ne  prouve  rien  du  tout. 

Si  on  le  regarde  dans  fa  généralité^  qu'y  a  t'il  de  plus  dan- 
gereux &  de  plus  faux  ?  Car  n'eft-ce  pas  par.  là  queSocin  pré- 
tend prouver  qu'il  faut  entendre  en  un  Tens  métaphorique  tou- 
tes lesexpreflions  de  l'Ecriture,  qui  portent  que  J.C.  a  offert 
fa  mort  pour  nous  racheter  de  nos  péchez,  parce  qu'il  luy  pa- 
roift  indigne  de  Dieu  de  vouloir  la  mort  d'un  innocent  pour 
fauver  des  coupables. 

N'eflr-ce  pas  fur  ce  principe  qne  les  Pelagiens  fé  fondoienr 
pour  détourner  à  des  fcns  métaphoriques  tout  ce  que  l'Ecriture 
nousenfeigne  du  péché  originel ,  parce  qu'ils  ne  comprenoienr 
pas  que  fans  injaftice  Dieu  puft  reputcr  des  cnfans  coupables- 
pour  un  crime ,  où  leur  volonté  n'avoir  point  de  part. 
Cette  prétendue  maxime  n'efl-elle  pas  même  démentie  par  un 
grand  nombre  d'exemples  de  l'Ecriture,  qui  montrent  que  les 
Saints  fe  font  crus  obligez  d'obéïrà  Dieu  dans  des  chofes  qui 
paroilfoient  criminelles  félon  les  principes  ordinaires  de  la  jufti* 
cèdes  hommes.  Je  n'en  rapporte  point  icy  d'exemples,  parce 
qu'ils  font  communs  ,&  que  le  Cardinal  du  Perron  l'a  déjà  fait 
d'une  manière  fi  forte, qu'Aubcrtin  a  été  obligé  de  fe  rendre  lur 
ce  point,  &  de  reconnoiflre  que  ce  feroic  faire  tort  à  S.  Auguf 
tin  que  de  luy  attribuer  cette  règle  prife  dans  toute  l'étendue 
Aub,p.«7x,     des  termes  aufquels  elle  eft  conçue.  Il  avoue  expreflement  que 
l'intention  de  ce  Père  n'a  pas  efté  de  l'étendre  à  tous  les  lieux  de 
l'Ecriture ,  dans  le  [quels  il  femble  que -Dieu  coynmande  ou  confcille 
quelque  aHion  déréglée.  Carily  en  .^^.  dit- il ,  qui  font  tellement  atta- 


ejip  mxnge  corporelkment  dans  tÊucharlfile.       ^(.ogi 

chez^du  fens  Litteralpar  toutes  les  cireonjîances,  qu'oyme  les  fcauroit  Ch.   VIII, 
f  rendre  en  un  autre  fens.  Enfin  il  avoue  que  ce  principe  n'a  lieu 
jqu'à  l'égard  des  expreffions  qui  ne  font  pas  déterminées  au  fens 
littéral,  &  dans  lelquelles  il  n'eft  pas  neceiraire  d'avoir  recours 
à  l'autorité  de  cekiy  qui  fait  le  commandement. 
:"  Mais  en  reduifant  cette  règle  à  des  termes  raifonnablespar 
le  moyen  de  ces  reftriclions ,  il  ie  la  rend  entièrement  inutile 
^  détruit  toutes  les  confequences  que  les  Miniftres  en  peu- 
vent cirer.  Car  puifque  ce  principe  n'eît  pas  gênerai ,  6c  qu'il  re- 
çoit des  exceptions  ;  puifque  par  l'aveu  même  d'Aubertin ,  il 
ce  regarde  que  les  pafl'agesqui  ne  lonr  pas  déterminez  au  fens 
littéral  par  les  circonftances ,  quel  droit  ont  les  Miniftres  de 
l'appliquer  à  ces  paroles  :  Si  votes  ne  mangez^la  chair  du  Fils  de 
r H-onmie  ,  ^^  ne  beuve'^fonfang  ,  votis  n  aurezJJoint  la  vie  en  votis^ 
expliquées  au  fens  des  Catholiques?  Comment  prouveront-ils 
qu'elles  ne  fignifient  point  fi  clairement  une  manducation 
réelle  qu'il  foit  contre  la  raifon  de  les  entendre  autrement  ? 
Comment  prouveront-ils  qu'il  ne  foit  pas  neceflaire  d'avoir  re- 
cours dans  ce  commandement  à  l'autorité  de  celuy  qui  lefait , 
puifqu'il  paroiftau  contraire  que  les  Pères  nes'appuyent  que 
lurcela,  &  qu'ils  nous  ont  déclaré  que  ce  qu'on  dit  de  manger 
la  chair  de  J.  C.  feroit  impie  &  infenfé ,  fi  ce  n'eftoit  de  J.  C. 
même  qu'on  l'apprend  ?  De  naturali  cnim  in  nobis  Chrifli  veri- 
tate  qua  dicimtis^nifiabipfo  dtfcimns^ftultè  ^ impie dicimus.  Ipfe   -j-ri„it  * 
enim  ait ,  care  mea  verè  efi  efca  ,  ^J^tnguis  mcusverè  efi  potus  ,    Chryfoft. 
puisqu'ils  nous  déclarent,  qu'il  t'y  a  dans  ces  paroles  ni  parabole    h°^"-4<i- 1™ 
ni  ènyne,  (jj-  qud  faut  abfolument  mander  la  chair  de  J.  C.  puif-   B.if.  Reg.  J. 
que  S  Eafile  allègue  même  la  créance  que  l'on  doit  à  ces  parc-   ^.i. 


les ,  pour  montrer  qu'il  faut  croire  avec  certitude  ,  que  toutes      ^   „ 
rcp'-nne.  .  j^^J'^'^ 


les  paroles  de  Dieu  font  véritables  (^  pojjibles  ,  quoique  la  nature  y 


Mais  quelle  apparence  de  crime  ou  d'aclion  honteufe ,  peut-   ^;,  ;  ^i^„f 
on  trouver  dans  ce  commandement  pris  au  fens  des  Catholi-   fxa,v«To«. 
ques  pour  le  comprendre  (ous  cette  règle?  On  peut  bien  dire 
qu'il  choque  en  apparence  la  raiion  &:la  nature:  mais  qui  peut 
dia^queliionnefteté  y  foit  blelfée,  cec\a  on  appelle ^!gitium  , 
ni  qu'il  y  ait  rien  qui  nuife  au  prochain  ,  ce  que  l'on  entend  par 
le  mot  àefacinus  ,  félon  que  faint  Auguftin  explique  ces  ter-  ^^rift'^i 
mes  ?  Quod  autem  agit  indomita  cupidita-s  ad  cormmpendum  ani- 
mum  (^  corpus  fuum  ,  flagitium  vocatur  3  quod  autem  a^it  utalte- 
ri  noccat ,  facinus. 


c,  le. 


i|.io         laiv. y  \.  ^s  le  corps  de  Je  fus- Qjrifi  -  i 

On  ne  f(çauroic  donc  le  fervir  de  certe  maxime  pour  exclure  Te 
fens  des  Catholiques,  puifque  n'ayant  nen  de  honteux  ou  de 
criminel,mcme  félon  l'apparence, il  ne  peur  cflre  compris  dans- 
le  principe  de  S.  Augufïm.  Ainfi  il  faut  que  les  Calviniiles  fe  re- 
duiient  uniquement  à  la  feule  application  queS.  Auguftin  fait  de 
ce  principe  à  ces  paroles  :  Si  vous  ne  mangez^  la  chair  du  Fils  de 
l'I-Iomme^(^  ne  beuvcz^fonfani^^vous  ri aurez^foint  ht  vie  en  vousfii 
à  la  conclufion  qu'il  en  tire,  qui  t^  que  cette expre (/ion  eft figurée. 
C'eften  effet  la  feule  difficulté  raifonnable  qu'on  peut  propo- 
fer  fur  ce  fujeti  ^  pour  l'éclaircir,  jerapporteray  premièrement 
les  propres  termes  de  S.  K\x2^\i{\.'in  :Si  l'expreffion  de  l'Ecriture 
femble.  commander  quelque  ait  ton  honteufe  ^  criminelle  ^ou  inter- 
dire quelque  chofe  d'utile,  ou  défendre  défaire  du  bien  au  prochain^ 
elle  eft  fqurée.  Par  exemple  cette  parole  de  J.  C.  Si  Vous  «f  maU' 
çe\la  chair  du  Fils  de  l'Homme,  ^-  ne  bcuvez^fon  fan<i^^  vojisn'au- 
rez^point  la  vie  en  votis ,  femble  commander  une  aiiion  honteufe  ^ 
criminelle.  C'efi  donc  une  fi'iur''  qui  ordonne  de  participer  à  la  paf- 
fon  de  7    C.  (3^  À  confcrvcr  dans  la  mémoire  le  fouvenir  doux  0" 
utile  que  fa  chair  a  efiè  crucifiée  pour  nous. 

C'eft  ce  que  contient  ce  fameux  palîage  dont  les  Miniftres 
^concluent  que  l'on  ne  mange  donc  la  chair  de  J.  C.  qu'en  figu- 
re ,  6c que  la  manducation  commandée  par  ce  paffagene  con- 
filTie  que  dans  la  participation  aux  fouffrances  de  J.  C.  Mais  il 
eft  aifé  défaire  voir  la  témérité  de  cette  confequence  par  quel- 
ques remarques. 

Il  efi:  certain  premièrement  qu'on  ne  f^auroit  rien  conclure" 
precifément  de  ce  que  S.  Auguftin  explique  ce  pafTage  de  la 
manducation  fpirituelle.  Car  on  ne  fcjauroit  nier  qu'il  n'aiceftc: 
expliqué  de  la  même  forte  par  plufieurs  Auteurs  très  perfua- 
dezde  la  prefence réelle  6c  delarranfTubftaniiation. 

S.  Bernard  entr'autres  ,  dont  la  créance  n'eft  pas  doureufe 
fur- cette  matière,  y  donne  ce  fens  dans  le  Sermon  troifiéme  fur 
le  Pfeaume  qui  habitat.  Ces  gens  ,  dit  il  ,  ayant  oiiy  ces  paroles  de- 
J.  C.  Si  vous  ne  mangez^  la  chair  du  Fils  de  l'FIom?ne  ,  <jr  ne  beu- 
veZi /on  fan^  .^  ôcc.  trouvèrent  ce  difcours  dur  ^  fe  retirèrent.  Or 
qu'efi.ce-^  que  manger  fa  chair  ^  boire  fon  fang^  finon  communi- 
quer à  fes  pa.ffions  ,  ^imiter  la  vie  qu'il  a  menée  fur  la  terre)  Il  efl 
vifiblc  que  S.  Bernard  explique  là  ce  paflage  de  la  même  ma- 
nière que  S.  Auguftin  dans  le  lieu  dont  il  s'agir  ,  6c  qu'il  l'ex- 
glique  même  de  cette  force  pour  montrer  que  le  fcandale  des 

M* 


efim  ange  corporellement  dans  Vêuchari^ie.        4T1 
laifs  elloic  mal  fondé.  Cependant  qui  concluroit  de  là  que  S.  Q^^  VIII 
Bernard  ne  croyoic  pas  la  tranirubftantion,tireroic  une  con- 
fequence  tres-faufle  hi.  tres-temeraire  par  l'aveu  même  des 
Miniftres. 

Il  c(l  encore  certain  que  l'on  ne  fcauroit  rien  conclure  du 
fens  que  faint  Au^uftin  exclut  formellement  &.  expreirement. 
Car  il  e(l  bien  vray  qu'il  exclut  en  cet  endroit  un  certain  (ens 
littéral.  Mais  quel  cft  ce  fens  littéral  formellement  exclus?  Eft- 
ce  le  fens  des  Catholiques?  Les  Calviniffces  voudroient  bien  le 
pouvoir  dire  5  mais  les  termes  de  S.  Auguftin  ne  le  foufFrcnt 
pasi  parce  qu'ils  marquent  trop  cxpreflement  par  deux  carade- 
res  quel  eft  ce  fens  qu'il  defigne.  Le  premier  de  commander  ce 
qu'il  appelle  jîaytitim  ^  c'eft  à  dire  comme  il  l'explique  luy- 
mefme ,  une  aciion  honteufe par  laquelle  on  fc  fouille  foy-mhnej 
le  fécond  de  commander  ce  qu'il  z^^^cW^facinus^  c'eft  à  dire  un 
crime  contre  le  prochain  ,  quod  nocet  alteri. 

Que  les  Calviniftes  nous  difent  de  bonne  foy,  fi  ces  marques  .;û. 
conviennent  à  la  manducation  du  corps  de  I.  C.  telle  que  les 
Catholiques  l'enfeignent.Peut  on  croire  raifonnablement  que 
ce  foit  une  adion  honteufe,  bL  qui  nous  fouille?  Peut  on  croire 
qu'elle  nuifeà  I.  C?  Etn'eft-il  pas  clair  au  contraire  que  ces 
marques  déterminent  l'c/prit  à  la  feule  manducrtion  que  fefi- 
guroient  lesCapharnaites,  c'ellà  dire  à  la  manducation  d'une 
chair  fanglante,  coupée  par  morceaux,  gouAée&  digérée?  Car 
n'eft  ce  pas  celle  là  que  les  hommes  ont  jugée  honteufe  & 
brutale?  N'efc  cepasla  feule  que  l'on  puiiïe  concevoir  comme 
outragcufe  à  I.  C.  puifque  ceferoit  détruire  l'intcgritc  de  fon 
corp.>»?  Ce  n'eft  donc  que  la  manducation  conçue  par  les  Car- 
phanaïtes  que  S.  Auguftin  rejette  exprelTemeni.  Nous  verrons 
enfuite,  fi  l'on  en  peut  tirer  par  confequence  qu'il  ait  auffi  re- 
jette celle  que  foûtiennent  les  Catholiques  :  mais  il  eft  déjà 
clair  qu'il  ne  le  fait  pas  formellement. 

3.  Il  eft  certain  encore  que  quand  S.  Auguftin  en  rejettant  le 
fens  littéral ,  palTe  tout  d'un  coup  au  fens  métaphorique  qui 
confifcc  à  entendre  ce  paftiige  de  la  participation  auxfouft'ran- 
cesde  I.  C.  &à  la  mémoire  de  fa  mort ,  on  n'en  doit  pas  con- 
clure qu'il  propofecefens  métaphorique  comme  l'unique  fens 
des  paroles  de  I.  C  ny  mefme  comme  le  plus  ordinaire. 

Car  il  faut  que  lesMiniftres  reconnoifl^ent  qu'il  entend  or- 
dinairement ces  paroles  de  la  manducation  Sacramencale:que 

FFf 


4ii  Liv.VI.  .^e  le  corps  de  Jefus-ChriH 

c'eft  ainil  qu'il  l'explique  dans  le  livre  contre  l'adverfaire  de  la 

Loy  &:  des  Prophètes  ch.  lo. 

Dans  la  queftion  57.  fur  le  Levitique. 

Dans  le  livre  premier  du  mérite  éc  de  la  remilTion  des  pé- 
chez. 

Dans  le  Traité  11.  &:  26.  fur  S.  lean. 

Dans  le  Sermon  ir.  &  46.  des  paroles  du  Seigneur. 

Dans  e  premier  livre  contre  Crefconius   P.  25. 

Dans  le  Sermon  des  paroles  de  l^Evangile ,  rapporté  par 
Bede  fur  la  première  Epiftre  aux  Corinthiens. 

Dans  les  Sermons  fur  les  Pfeaumes  33.  &  98. 

Il  faut  qu'ils reeonnoiiTent  de  plus  que  quand  S.  Auguftin 
exprime  en  tant  d'endroits  ce  fens  delà  manducacion  Sacra- 
mentale ,  ce  n'eft  point  comme  une  fîmple  interprétation  al- 
légorique 6c  incertaine  qui  n'eft  pas  propre  à  fonder  un  dog- 
me-, mais  qu'il  le  regarde  comme  le  vray  fens  des  paroles  de 
I,  C.&commeun  fondement  folide,  fur  lequel  on  peur  éta- 
blir contre  les  hérétiques  là  neccffité  de  participer  à  ce  Sacre- 
ment pour  avoir  la  vie. 

Ainfi  quand  les  Minifrres  demandent ,  pourquoy  S.  Auguftia 
n'a  pas^en  corrigeant  cette  idée  de  la  manducanon  Carphanaïte 
qu'il  rejette  comme  criminelle  &  honteufe ,  fubftitué  celle  de 
la  manducation  Catholique,  s'il  a  cru  que  l'on  reçuft  réellement 
le  corps  de  I.  C.  on  leur  peut  faire  à  peu  près  la  même  que- 
ftion, &  les  obligera  nous  dire,  pourquoy  S.  Auguftin  en  ex- 
cluant ce  fens  criminel  de  la  manducation  d'une  chair  fanglan- 
te,  ne  propofe  pas  en  ce  lieu  l'explication  qu'il  donne  par  tour 
ailleurs  à  ce  même  pafthge ,  qui  eft  de  l'entendre  de  la  mandu- 
cation Sacramentale  ?  Pourquoy,parexemple, nefait  ilpas  en 
ce  lieu  icy,  ce  qu'il  fait  dans  le  Sermon  fur  le  98.Pfeaume,  où 
ayant  exclus  la  manducation  des  Carphanaïtes  par  ces  paroles: 
Vous  ne  mangerez^fas  le  corps  que  -vous  voyez^i  Non  hoc  corpus 
quodvidctis  manducaturi  cftis ,  il  fubftituë  au  lieu  de  ce  fènS5 
non  la  manducation  fpiritueîle  comme  il  fait  icv,  mais  la  man- 
ducation Sacramentale  : ^^rrrfWfw^»»/,  dit-il,  vobis  cornmendavi, 
c'eft  à  dire  que  ces  paroles  s'entendent  de  la  manducation 
d'un  Sacrement? 

Les  Miniftres  feroient  peut-  eftre  aflèz  embaraflèz  à  répondre 
à  cette  queftion  ,  félon  leurs  principes.  Mais  on  va  voir  qu'i 
nous  eft  cres  aifé  de  répondre  à  celle  qui  nous  font ,  c'eft  â  di 


efl  ma,ngê  corporcUement  diins  TEucharifiie.        4I5 
rc  de  rendre  raifon  pourquoy  Saint  Auguftinen  rejettant  l'i-  Ch.  VllI. 
dée  de  la  manducationcarphanaïte,  nefubfticuë  pas  celle  des 
Catholiques,  &  que  l'èclaircifTement  de  cette  queftion  difTipe 
entièrement  toute  la  difficulté  de  ce  pafTage. 

Il  ne  faut  pour  cela  que  confidercr  l'occafion  qui  luy  fait  rap- 
porter  ces  paroles  de  J.C.  Carfondefleinn'eft  nullement  de  les 
traiter  à  fond ,  ny  de  rapporter  tous  les  fens  dont  elles  font  ca- 
pables, ny  de  choifir  entre  ces  fens  le  plus  probable  &  le, plus 
naturel.  Il  ne  les  allègue  que  pour  fervir  d'exemple  de  la  règle 
qu'il  propofe,  que ^«^W  «w?  expreijion  femble  commander  quel- 
que chofe  de  honteux  é"  de  criminel ,  il  la  faut  conjïderer  comme 
figurée^  &  en  expliquer  les  termes  en  un  fens  métaphori- 
que. 

Or  afin  qu'un  exemple  répondît  à  cette  règle  ,  il  falloit  qu'il 
euft  deux  conditions.  La  première  qu'il  femblât  commander 
une  adion  honteufc&  criminelle.  La  féconde  qu'en  rejettant 
ce  fens  littéral ,  on  pût  paflerà  une  vérité  reprefentce  par  ces 
termes  figurez. 

Comme  on  ne  trouve  pas  facilement  des  exemples  d'une  ef-  ' 
pece  fi  particulière,  &  qu'en  écrivant  on  employé  d'ordinaire 
ceux  qui  fe  prefentent  les  premiers ,  pourveu  qu'ils  puiflent  fer- 
vir au  deflein  qu'on  a  d'éclaircir  le  fujet  pour  lequel  on  les  alle- 
■guCj  S.  Auguftin  a  cru  que  pour  confirmer  la  règle  qu'il  propo- 
fe,  il  pouvoit  fe  fervir  de  cette  parole  de  J.  C.  Si  vous  ncman- 
ver^  la  chair  du  Fils  de  l'Momme  C^*  ne  hcuvrz^  fon  fafJg ,  vous 
tCaurez^foint  la  vie-,  parce  qu'en  effet  ces  termes  fignifiant  dans 
iefens  ordinaire  ce  qui  fe  pafifè  à  l'égard  des  alimens,  comme 
<ie  les  brifer  ,   les  goûter  ,    les  faire  palier  dans   l'efromach 
pour  les  digérer  &  pour  s'en  nourrir  ,  il  y  trouvoit  la  première 
des  conditions neceffaires  pour  l'éclairciffement  de  fa  règle, 
c'eftà  dire  que  les  termes  femblafient  ordonner  une  action  hon- 
teufe  êc  criminelle. 

Mais  cela  ne  fuffifoit  pas  pour  fondefTein.  Il  y  falloit  auflî 
trouver  la  féconde  condition,  &:  qu'en  rejettant  ce  fens  litté- 
ral qui  porte  à  une  aclion  honteufe  6ccrimincllej  on  deût  re- 
garder cette  exprciïion  comme  figurée  ^  c'cft  à  dire  comme 
marquant  par  l'image  de  cette  acflion  une  vérité  toute  pure  & 
toute  fainte. 

Car  uneexpreiïion  n'eft  appelle  figurée  que   quand  eftanc 
faufle  félonie  fens  htteral,  elle  marque  néanmoins  une  vérité  , 

FFf  li 


4J4  Liv.   VI.  ^e  le  corps  de  Jefus-Chrift 

donc  cette  lettre  efc  l'image.  Ainfi  le  feus  littéral  doit  fubfi- 
fter  dans  le  fens  que  l'on  y  donne  ,  non  comme  vérité  ,  mais 
comme  image  de  la  vérité.  J.  C.  n'étoit  pas  effedivement  un 
lion  ,  mais  il  eft  figuré  par  un  lion  dans  cette  expreflîon  :  le  lion 
de  la  tribu  de  Juda  a  vaincu.  Et  ce  terme  de  lion,  qui  n'eft  pas 
vray  à  la  lettre,  ne  lailTe  pas  de  reprefenter  par  cette  lettre 
fauiïe  la  force  véritable  de  Je^us  Christ. 

Il  eft  facile  de  découvrirpar  làpourquoy  S.  Auguftinn'apas 
fait  rtiention  en  cet  endroit  de  la  réception  réelle  5c  Sacramentel- 
le du  corps  de  J.  C.  Car  il  eft  vifible  qu'il  ne  le  pouvoit  faire  rai- 
sonnablement. Il  propofoit  en  ce  lieu  cette  expreflîon  de  J.  C. 
Si  vous  ne  many:zj,a  chair  du  Fils  de  l'homme  ^  ne  beuvez^  (on 
y^«g,commeun  exemple  des  expreffions  qui  femblent  porter 
par  le  fens  littéral  à  une  adion  honreufe.  Et  il  avoit  raifon  de  le 
faire,  puis  qu'en  effet  le  fens  le  pkis  ordinaire  des  termes  de  man- 
ger êc  de^É7z>^,eftceluy  desCapharnaïtes.  Maisilfalloitdeplus 
que  ce  fêns littéral  eftantexclus  on  regardaft  l'exprefllon  coai. 
me  figurée  ,  c'eft  à  dire  que  pour  en  trouver  le  fens  on  palTaft 
de  la  lettre  confiderée  comme  figure  ,  à  une  vérité  fisiuree. 

Ilfe  trcuvoit  donc  engagea  marquer  quelle  eftoit  la  vérité 
figurée  par  le  fens  littéral ,  c'eft  à  dire  par  les  mots  de  mungerbL 
de  boire  pris  au  fens  des  Capharnaïtes.  Or  cela  l'engagoit  necef- 
fairemcntàne  point  parler  de  la  manducation  Sacramentale  ny 
de  la  réception  réelle  du  corps  de  J.  C  6c  à  parler  uniquement 
de  la  manducation  fpirituelle. 

La  raifon  eft  que  la  réception  réelle  du  corps  de  J.  C.  non- 
plusquela  manducation  Sacr3menta!e,n'eft  point  du  tout  la  vé- 
rité figurée  parla  manducation  Capharnaïte.  On  peut  bien  dire 
qu'elles  font  fignifiéesfccomprifcs  dans  les  paroles  de  J.  C.  fé- 
lon un  autre  fens  littéral  moins  propre  félon  les  termes.  Mais  el- 
les ne  font  nullement  reprefentées  par  les  idées  qu'impriment 
dans  l'efprit  la  manducation  queconcevoient  les  Capharnaïtes,; 
dont  S.  Auguftin  avoit  befoin  en  ce  lieu- là. 

Ce  n'eft  que  dans  la  manducation  fpirituelle  qu'on  trouve  les 
adions  figurées  par  cette  manducation  littérale.  C'eft  -  Là 
qu'on  fepare  fpiritueilement  en  plufieurs  parties  l'objet  que 
J'^on mange  fpiritueilement  j  qu'on  legouteavec  plaifir  j  qu'on 
Je  ferre  dans  la  mémoire.  C'eft  là  enfin  qu'on  en  nourrit  fon 
ame  comme  le  corps  fe  nourrit  par  les  alimens.  Rien  de  tout  ce- 
la ne  fe  rencencrc  ny  dans  la  manducation  du  Sacrement  ny  dans 
la  réception  du  corps  de  J.  C. 


cfi  mangé  corporellement  dcins  lEuchaviflie.  4I5 
Qiii  s'étonnera  donc  que  S.  Augi'iftineftanc  obligé  de  produi-  Ch.  VlII- 
re  un  exemple  de  fa  règle,  où  l'on  vift  qu'en  abandonnancla  let- 
tre comme  contenant  une  action  hontcufe  Si  criminelle,  on 
paffaft  au  fens  figuré  par  cette  lettre ,  &  ayant  pour  cela  allégué 
ces  paroles  :  Si  vous  ne  mangez^  Lt  chair  du  Fils  de  l'homme  ^  ne 
henvez^  [on  fanq^ ,  dont  le  fêns  littéral  ne  peut  fubfifter  5  qui  s'é- 
tonnera, di  je,  qu'il  p  afle  à  la  vérité  figurée  par  cette  lettre  qui 
ne  fçauroit  cflire ,  comme  j'ay  dit  ,  que  la  leule  manducation 
fpirituelle.'' 

Tout  ce  que  l'onpourroit  demander,  c'efl:,pourquoy  ce  Pè- 
re prend  le  l'ens  Capliarnaïte  pour  le  fens  littéral  de  ce  palTagc. 
Mais  pourquoyne  le  prendroitil  pas  en  cette  manière,  puifque 
c'eft  en  eiFet  le  fens  le  plus  littéral  &le  plus  ordinaire  des  ter- 
mes aufquels  il  eft  conceu/  D'ailleurs  il  y  eftoit  déterminé  par 
la  règle  à  laquelle  il  appliquoit  cet  exemples  Se  ces  paroles  ne 
luyauroientefté  d'aucun  ufage,  s'il  avoitconfideré  la  manduca- 
tion Sacramentale  comme  en  eftant  le  fens  littéral.  Il  a  donc 
recours  à  un  autre  fens  littéral  que  les  termes  expriment  effecti- 
vement, parce  qu'il  y  trouve  cette  condition  neceflaire  pour 
l'éclaircifTement  de  fa  règle,  décommander  en  apparence  une 
chofe  honteufe.  Mais  après  avoir  praduit  ce  paflage  ence  fens  êc 
avoir  confideré  cette  lettre  comme  une  figure  qui  fe  rapporte  à 
une  vérité,  il  ne  pouvoir  plus  parler  de  la  manducation  Sacra- 
mentale,mais  de  la  feule  manducation  fpirituelle,  parce  qu'il  n'y- 
a  quecelle-cy  qui  réponde  comme  vérité  figurée  à  cette  mandu- 
cationCapharnaïte  qu'il  confideré  comme  la  lettre. 

Que  refte  t  il  à  dire  aux  Miniftres  après  cet  éclaircifTement? 
Diront- ils  qu'il  paroifi:  parce  pafiage  que  S.  Auguftin  prend  la 
fens  de  la  manducation  Capliarnaïte  pour  la  lettre  des  paroles 
de  J.C?  On  leur  répond  qu'il  a  eu  droit  de  le  faire, parce  que  c'eft 
le  plus  ordinaire  fens  des  termes  de  manger  Se  de  i>oire.  Diront- 
ils  qu'il  s'enfuit  de  là  que  S.  Auguftin  ne  reconnoift  d'autre  fens 
dans  ces  paroles  que  celuy  de  la  manducation  fpirituelle  ?  Mais 
les  Miniftres  reconnoifiTent-ils  pas  eux  mêmes  que  cette  confe- 
quence  eft  fau{re,&;  qu'au  contraire  il  explique  ce  paflage  dans 
cet  endroit  d'une  manière  qui  luy  eft  extraordinaire  / 
Diront  ils  qu'il  reconnoift  au  moins  que  cette  cxprefiîon  eft  fi- 
gurée entant  qu'elle  femble  porter  à  une  aétion  honteufe  &  cri- 
minelle ,  c'eft  à  dire  qu'elle  eft  figurée  en  la  prenant  dans  lefens 
des  Capharnaices,  qui  eft  le  fens  qui  porte  à  cette  adion  honteufe 

FFfiij 


xi6  Liv.  VI.  ^e  le  corps  de  Jcfus-Chrifl 

6c  criminelle.  Mais  s'enluit-il  de  là  qu'il  là  reconnoifle  auffi  fî_ 
curée  en  la  prenant  en  un  aucre  iens  qui  n'a  rien  de  honteux  ny 
de  criminel  ? 

En  effet  n'avoûent-ils  pas  eux-mêmes  que  S.  Auguflrin  expli- 
que fouvent  ce  lieu  de  la  manducation  Sacramenrale?  Etce  fens 
néanmoins  atout  enfemble  ces  deux  qualicez,  d'eftre  différent 
de  celuy  que  S.  Auguftin  apporte  en  ce  heu  icy,  &  de  n'être 
point  la  vérité  figurée  par  ces  paroles  prifcs  au  fens  des 
Capharnaïtes. 

Diront-ils  que  S.  Auguftin  ne  marque  point  dans  ce  palTage 
d'autre  manducation  de  la  chair  de  J.C.  que  la  rpiriruel le?  ]e  ré- 
ponds qvi'il  n'^n  pouvoitmarqucr  un  autre  ^ïicç.  lieu-là, par  la  rai- 
ion  que  nous  avons  dite  ,  fçavoir  qu'il  n'y  a  que  la  manducation 
fpirituelle  qui  réponde  comme  vérité  figurée  à  la  manducation 
Capharnaïte.  Mais  comme  par  l'aveu  même  des  Miniftres ,  il 
ne  s'enfuit  pas  qu'il  n'ait  reconnu  une  manducation  Sacramen- 
tale,  quoy  qu'il  n'en  parle  point  en  cet  endroit,  il  ne  s'enfuit  pas 
auffi  qu'il  n'ait  point  reconnu  de  réception  réelle  delà  chair  de 
].  C.  puifqu'elle  eft  compnfe  dans  la  manducation  Sacramen- 
tale  ,  comme  nous  l'avons  tant  de  fois  prouvé. 

Ainfi  pour  juger  fainement  &  équitablemcnt  de  cepafîage, 
on  en  peut  dire  qu'il  n'a  rien  du  tout  de  fâcheux  pour  les  Catho- 
liques que  la  feule  apparence,  mais  qu'e'Hnt  confideré  avec  ton. 
tes  ccscirconrtances,  on  n'enfcauroit  rien  conclure  de  raifon- 
nable  contre  eux,  &:  qu'il  laiiTe  la  queflion  toute  entière  à. déci- 
der par  les  autres  pafîàges  de  S.  Auguftin. 

Car  il  eft  cerrain,  comme  j'ay  dit,  qu'outre  le  ïf^x^s  des  Ca- 
pharnaïtes que  ce  Pcrc  rejette  en  ce  lieu  ;  5c  cchiy  de  la  mandu- 
cation fpirituelle  qui  répond  à  ce  fens  des  Capharnaïtes  comme 
vérité  figurée,  il  reconnoiftdans  tous  fcs  ouvrages  un  autre  fens 
de  ces  mêmes  paroles  qui  eft  que  J.  C.  nous  y  ordonne  de  man- 
ger le  Sacrement  de  rEuchariftie&  de  manger  fa  chair  dans  le 
Sacrement.  Ce  fens  n'eft  certainement  pointexclus  pafcepaf- 
iàge  ,  &  il  n'eft  plus  queftion  que  de  fçavoir  ce  qu'enferme  ce 
même  fens.  Or  on  n  a  qu'à  voir  les  pafîàges  où  S.  Auguftin  ex- 
plique la  manducation  Sacramenrale  pour  rcconnoiftre  claire- 
ment qu'elle  comprend  une  réception  réelk  du  corps  de  J.  C. 
comme  nous  l'avons  déjà  faiï  voir. 


efi  mangé  corporellement  dans  fEucharifiie.       ^\g^ 


CHAPITRE   IX. 

Que  toutes  les  exfrcffîons  où  les  Percs  difent  tantofl  que  les  me- 

chans  manquent  le  corps  de  I.  C.  (^  tantofl  qu^ils  ne  le  man- 

qent  pas ,  font  des  fuites   naturelles  de  la  prefence  réelle. 

IL  ne  refte  plus  que  de  montrer  que  les  Pères  ont  parlé  de  la 
manducacjon  du  corps  de  J.  C.  à  l'égard  des  méchans  com- 
me la  do(flrine  de  la  prefence  réelle  les  en  a  dii  faire  parler.  Et 
e'eft  ce  qui  paroiftra  clairement  en  ramaflant  toutes  leurs  ex- 
preflîons. 

Car  qu'eft-ce  que  cette  doftrine  nous  enfeigne  à  l'égard 
des  impies?  Qu'ils  reçoivent  J.  C.  fur  leur  lèvres,  &  dans  une 
ame  foiiillée  5  qu'ils  l'outragent  par  leurs  mains  &  par  leur  bou- 
che, qu'il  va  une  manière  de  recevoir  la  chair  même  de  J.  C, 
qui  leur  eft  commune  avec  les  bons  :  que  Judas  reçut  le  corps 
qu'il  avoit  vendu,  que  c'eft  le  corps  de  J.  C.  auffi  bien  pour  les 
méchans  que  pour  les  juftes. 

Or  les  Miniftres  n'ignorent  pas  que  toutes  ces  expreilîons 
fe  trou  voient  dans  les  Pères ,  6c  qu'on  ne  ks  y  trouve  très- 
iouvent. 

Ils  n'ignorent  pas, par  exemple, que  S.  Chryfoftome  ne  pref-    inEpift.  ad 
fe  les  impies  par  ces  paroles  j  Comment  pourrsz^vous  paroiftre  de.  Eph-  Hom.j 
vantle  tribunal  de  I.  C.  vous  qui  avez^ofc  toucher  fon  corps  avec 
des  lèvres  (^  des  mains  iyyipures  Z 

Ils  n'ignorent  pas  qu'il  leur  reproche  en  un  autre  endroit  de 
recevoir  J.  C.  dans  une  ame  fouillée.  Macth. 

Ils  fçaventque  S.  Auguftinparlant^:/^'  ce  corps  é"  de  ce  fanq^qui    cont.  Crcf, 
font  nofire  unique  fucrifice ,  ^  dont  le  Seigneur affure  que Jî quel-  1.  i.c.i;, 
quun  ne  mange  pas  fa  chair  (^  ne  boit  pas  fon  fang  ,  il  n  aura  pas 
la  vie ,  ajoute  qu'ils  font  pernicieux  à  ceux  qui  C7i  ufent  mal. 

Ils  n'ignorent  pas  l'endroit  où  ilalTure  que  c'eft  toujours  le 
corps  de  J.  C.  a  l'égard  de  ceux  me  [me  s  dont  l'Apoflre  dit  que  ce- 
luy  qui  le  mange  indignement  mange  fa  condamnation. 

Ils  n'ignorent  pas  ce  que  dit  S.  Bafile  que  le  crime  de  ceux  -qz  bapt.i.  î-, 
qui  ayant  l'ame  fouillée.,  touchent  le  corps  de  J.  C.  efi  d'autant  plus  q-  î- 
y^and  que  celuy  de  ceux  qui  touchaient  les    Belers    é*  les  Tau- 
Taux  que  l'on  immoloit  fous  l'ancienne  loy ,  que  J.C.efi  fias  grand 
qtte  le  temple  des  Juifs. 


4i8  Iav.YI.  ^le  le  corps  de  Je/ùs-Ckifi. 

Les  Miniftres  ne  nieront  pas  fans  douce  que  les  méchans  ne 
foiencauflî  capables  de  recevoir  le  vray  corps  de  I.  C.  que  de 
le  facrifier.  Or  ce  même  Père  nous  allure  daus  le  chapitre  fui- 
vant  qu'ils  le  facrifienCj  puifqucpour  rcprefènter  le  crime  qu'ils 
commettent  en  le  faifanc  indignement,  il  dit  que  le  crime  d'jin 
Baf.  .le  bapt.  homme  foiiiUc  d'ordures  qui  ofc  ficnficr  le  corps  du  Seigneur  qui 
1.  i.'l-i.  s'efi  donné  luy-Tnhne  en  qualité  d'oblation  (^  de  fucrifice  à  Dieu 
en  odeur  de  fuaviié  ^  l'emporte  d'autant  fur  celuy  qu'on  commettott 
en  ocrant  indignement  les  anciens  facrifice s  ,  que  le  corps  du  Fils 
\i-^\(:y{jï.de  Dieu  pafie  en  dignité  les  Béliers  ^^  les  Taureaux. 
Ce  ncfi  pas^^]o\\x.t-t  ï\  ,  que  je  veuille  comparer  ces  chofes  Car 
il  y  en  a  une  dont  l'excellence  ne  foujfre  point  de  comparuifon , 
ct.<3vyx.^iToS  y)  »  u7repo^>j. 

Mais  quel  efl:  ce  corps  du  Seigneur  facrifîë  par  les  méchans 
félon  ûint  BafilerN'eft  ce  pas  ce  corps  qui  n'a  point  de  fro. 
portion  ,  (jr  qui  ne  fouffre  point  de  comparai  [on  avec  les  bejles 
immolées  dans  l'ancienne  Loy?  C'eft  donc  le  véritable  corps  de 
i.  C.  &.  ce  corps  eft  facrifîë  par  le?  méchans. Et  c'eft  ce  même 
corps  véritable  de  J.  C.  dont  S.  Bafile  dit  encore  dans  le  chapitre 
fuivant,  qu'il  eft  touché  pat  les  méchans ,  comme  il  arrivoic 
quelque  fois  que  les  vidimes  anciennes  l'eftoicnt  par  des  perfon- 
nes  impures. 

Il  feroit  inutile  de  ramafer  icy  tout  ce  qu'on  peut  trouver 
dans  les  Pères  pour  prouver  en  particulier,  que  les  méchans 
reçoivent  véritablement  le  corps  de  J.  C.  Car  les  Miniftres  ne 
defavoùant  pas  cette  confequence  ,  que  fi  le  corps  dej  C.  eft 
réellement  prefcnt  dans  l'Euchariftie,  il  eft  auflî  réellement 
reçu  par  les  méchans^il  faut  regarder  ce  point  de  la  doctrine 
de  l'Eglife  comme  appuyé  fur  autant  de  preuves,  qu'il  y  en  a 
qui  font  voir  la  vérité  de  cette  prcfence ,  5cil  n'y  a  plus  qu'à 
examiner  ft  les  Perés  ont  toujours  parlé  conformément  à  cette 
doilrrine,  &  s'ils  n'ont  rien  dit  qui  lemble  la  contraHer. 

Pour  en  juger  il  ne  faut  que  voir  à  quelles  expreffions  elle 
porte  à  l'égard  des  méchans,  outre  celles  que  nous  venons  de 
citer. 

Il  eft  vray  qu'ils  reçoivent  le  corps  8c  le  fang  de  J.  C.  com- 
me les  bons  '■>  mais  i!  s'en  faut  bien  qu'ils  ne  le  reçoivent  en  tou- 
Jes  les  manières  qu'il  eft  reçu  par  les  bons. 

Les  juftes  en  le  recevant  en  reçoivent  une  force^  une  vi- 
gueur ,  2c  u-ne  naurriture  fpirituelle. 

Le« 


ej}  mangé  corporelîement  ditns  fEucharifiie.       41  a 
Les  méchans  ne  font  au  contraire  en  le  recevant  que  feren-  Ch.  IX. 
dreplus  criminels  ,  &:  par  confequent  plus  toibles. 

Les  juftes  en  recevant  le  corps  de  J.  C.s'uniffent  àluy  par  la. 
charité.  Les  méchans  eftant  vuides  de  charité  ne  s'y  r<^auroienc 
unir  en  cette  manière. 

Les  juftes  en  le  recevant  font  unis  à  tous  les  fîdelles ,  parce 
que  le  corps  S^l'eTprit  de  J.  C.  en  font  le  lien  ^êc  ils  font  ainfi  in- 
corporez dans  lafocieté  des  Saints^  qui  eft  le  corps  de  J.  C. 

Les  méchans  au  contraire  n'étant  point  membres  vivans  de  ce 
corps  &  de  cette  fainte  locieté ,  ne  font  que  s'en  feparer  davan- 
tage, &:  Cl  J.  C.  eft  en  eux,  ce  n'eft  pas  pour  les  unir  à  fon  corps. 
Tout  cela  convient  aux  juftes ,  &  ne  convient  point  aux  mé- 
chans, &  tout  cela  s'appelle  manger  dans  un  fens  métaphori- 
que &:fpirituel.  Car  tirer  une  force  6c  une  nourriture  fpintuellc 
du  corps  de  J.  C  c'eft  le  manger. 

Recevoir  le  corps  de  J.C.  jufqu'à  la  participation  de  fonef- 
prit ,  c'eft  encore  le  manger  en  ce  fcns. 

S'unir  au  corps  de  J.  C.  par  amour ,  c'eftie  manger.  S'incor- 
porer dans  le  corps  myftique  de  ].  C.  parlemoyenderEucha- 
riftie  ,  c'eft  le  manger ,  &  c'eft  même  manger  au  même  fens  ce 
corps  myftique  dont  il  eft  le  chef,  &:  qui  le  comprend  ;  ^par 
confequent  les  jufles  mangent  le  corps  de  J.  C.  en  plufieurs  ma- 
nières dont  les  méchans  ne  le  mangent  pas.  Et  lorfqu'on  ref- 
tramt  le  terme  de  manger  à  ces  manières,  on  doit  dire  que  les 
juftes  le  mangent,  &  que  les  méchans  ne  le  mangent  pas. 

C'eft  ce  quifdicque  iîiint  Augultin  après  avoirjoint  les  jufles 
aux  méchans  dans  la  manière  commune  de  recevoir  le  corps  de 
J.  C.  attribue  enfuite  aux  feuls  juftes  une  certaine  manière  de 
le  recevoir  ,  qui  ne  convient  point  aux'méchans.  Dirons-nous  ,  Scrm  •..  <îi- 
dit-il  ,  que  ceux  qui  mangent  cette  chair  (y-  boivent  cefang  avec  un  ^''^'^'  ^*^"''- 
cœur  hypocrite  ,  ou  qui  deviennent  enfuite  apoflats  ,  demeurent  en 
J-  C.  d"  7-  c.  demeure  en  eux  ?  mais  cejlquily  a  une  certaine  ma- 
nière de  manier  cette  chair  ^  de  boire  ce  fav.g ,  dont  il  efi  vray  de 
dire  queceluy  qui  mange  cette  chaire  boit  ce  fang  demeure  en  J.  C. 
^J.C.  en  luy.  il  n'eft  donc  par  vray  que  tous  ceux  qui  mangent  la 
chair  de  J.  C.  é"  boivent  fon  ftng,  demeurent  en  luy  ^  luy  en  eux  :. 
JEt  cela  n  eft  vray  que  de  ceux  qui  le  font  d'une  certaine  manière 
quil  avait  en  vite. 

Or  comme  cette  certaine  manière  ne  convient  qu'aux  bons 
en  qui  J.  C.  demeure  ,  ôcnon  aux  méchans  en  qui  j.  C.  ne  de- 

GGg; 


410  Liv.  VI.  ^e  le  corps  de  Jefus-Chrifl 
meure  pas,  il  n'y  a  nulle  concradidion  à  dire  que  les  médians 
mangent  le  corps  dej  C.  Si  qu'ils  ne  le  mangent  pas,  Carilcft 
vray  qu'ils  le  mangent  de  cette  manière  communeauK  bons& 
aux  méchans  5  &  il  efl  encore  vray  qu'ils  ne  le  mangent  pas  de 
cette  manière  particulière  aux  bons  dont  les  médians  Tonc 
exclus. 

Qiiand  il  feradonc  qucftion  de  ces  manières  particulières 
aux  bons ,  on  dira  toujours  que  les  méchans  ne  le  mangent' 
point.  *  : 

Et  comme  ce  font  ces  manières  particulières  aux  bons  qui 
rendent  la  réception  du  corps  de  J.  C.  vrayment  utile  ,  il  efti 
naturel.d'exhorterlesfîdelles  à  ne  le  pas  contenter  de  la  récep- 
tion &  de  la  manducation  commune,  mais  de  cendre  à  la  man- 
ducacionquieft  propre  aux  juftes,  &  qui  ne  convient  po;ntauX' 
méchans ,  comme  eftant  la  fin  &  là  vérité  figurée  par  la  man- 
ducation  corporelle.  Car  nous  ne  recevons  J.  C.  dans  nos  corps 
qu'afin  de  le  recevoir  dans  nos  âmes  ,  &;  de  tirer  de  luy  une 
force  &  une  vigueur  fpirituelle. 

C'eft  ce  qui  fait  que  faintAuguftin  après  avoir  enfeigné  dans 
un  excellent  Sermon,  que  nofire  divin  Rédempteur  nous  a  parlé 
dans  le  (ïxicme  chapitre  defaint  Jean  du  prix  de  nofire  rançon  , 
Serm.  i.^e  ^^  ^a  r^^  r^^„  aprés  Dous  avoir  aiFuré  que  ce  corps  cfl  nollre 
z'i.inde ,  &•  ce  fang  noftre  breuvage  3  après  nous  avoi^r  dit  que  Lesji- 
delles  rcconnoiffent  dans  ces  paroles  le  Sacrement  de  l' Eucharifiie  , 
(jr-  que  les  Catéchumènes  n'y  entendent  rien  .-Sacramentu  ujïde- 
lium  agnofcunt fidèles  y  audientes  autem  quid  aliud  quant  audiunt  : 
ce-qui  marque  qu'il  neprctendoit  pas  qu'elles  hgnifiafiTent  une 
fîmole  manducation  fpirituel  le  du  corps  de  J.  C.  puifque  les  Ca- 
cechumenescn  font  aulh  capables  que  les  fidelles ,  &  qu'il  au- 
roitefté  ridicule  de  fuppofcr  qu'aucun  d'eux  n'avoir  allez  d'ef. 
prit  pour  pénétrer  une  métaphore  comme  celle-là  qui  ne  dé- 
pend-oi-r  d'aucune  connoilTance  qu'ils  n'euflent  pas^  après  avoir 
'  dit  encore  que  j.C.  pour  appiiTer  le  fcandale  de  les  Difciples, 
qui  croyoicnt  qu'il  dut  couper  fa  chair  en  morceaux  ,  leur  par- 
la de  Ton  Alccnfion,  afin  qu'ils  vilfent,  non  qu'eftant  dans  le 
Ciel  il  ne  pourroit  eflre  mangé  fur  la  terre,  mais  qut  mvntantau 
Ciel  tout  entier ,  ilnc  feroit point  confumé  par  ceux  qui  le  mangea 
roient  .•  Certe  qui  micgcr  afcendere  potuit ,  confioni  non  potuit: 
aprés  tout  cela ,  dis- je,comme  l'on  doit  rapporter  toutes  les  in- 
flru.dioni  dogmatiques  à  l'édification  de  la  pieté,  il  finit  ce  di/1 


eft  mange  coYpoTellement  duns  rEucha,riflie.  ^n 
cours  par  ces  belles  paroles  :  Que  ceux  qui  mangcvt  ce  corrss  le  Ch.  î  X. 
mangcru  l  que  ceux  qui  boivent  ce  f'in'i^  ,  le  boivent  i  qu  ils  e?i  ayent 
une  faim  Qr  vne  foi f  ardente  ;  qu''ils  manz^cnt  la  vie  ,  qu'ils  boivent 
la  vie.  Manger  de  cette  sorte,  c'est  estre  nourri -^mais 
ton  fe  nourrit  cnfunc  que  ce  dont  on  fe  nourrit  ne  diminue  ■point. 
"Boire en  cette  manière ,n  cft autre  chofe que  vivre.  Manifr^dcnc la 
\vie ,  ^  beuvezja  vie ,  vous  aurcz^la  vie  ,  (y^  l'*  vien'e  laijjcra  pas 
'i^e  demeurer  entière. 

J'ay  traduit  que  ceux  qui  maniant  ce  corps  le  ■ma7izcnt  .^  mandu- 
cent  qui  manducant-.^  parce  qu'il  eft  vifible  que  le  nom  2;ouverné 
parce  vtïhzmanocr.^  qui  n'eftpas  là  exprimé,  fe  doit  prendre  de 
la  période  précédente,  oi^i  les  mots  de  corps  &  de  fang  dej.  C. 
ie  rencontrent.  Erqo^de  corpore  ^  fdnguine  fuo  dédit nobis fa. 
lubrcm  refcciionem  ,  ^  tam  maffia  brevitate  folvit  de  fia  mtcgri- 
'tate  quafiionem. 

Ainfi  voilà  deux  manières  de  manger  le  corps  de  J.  C.  qui 
font  exprimées  par  ces  paroles  :  Manducenterzp  qui  'manducant^ 
Tune  commune  aux  bons&  aux  méchans ,  l'autre  particulière' 
aux  bons.  Saint  Auguftin  dënnit  enfuite  quelle  eft  cette  ma- 
nière propre  aux  bons,  à  laquelle  il  exhorte  tous  les  fîdelles ,. 
&  il  déclare  que  c'eft  celle ,  où  par  le  mot  de  manquer  on  entend 
eftre  nourri:  Illudmanducare  rcfci  eji. 

On  ne  doit  donc  pas  s'étonner  qu'après  avoir  ainfi  défini 
cette  forte  de  manducation,  il  la  rende  particulière  aux  bons. 
Car  il  ed  tres-vray  qu'il  n'y  a  que  les  bons  qui  foicnt  nourris 
du  corps  de  J.  C.  Et  jufqu'ici  il  n'y  a  rien  dans  ce  pallage  qui 
ne  foit  contraire  aux  Calviniftes.  Mais  voicy  ce  qu'ils  croyenc 
décifif  pour  eux.  C'eft  que  faint  Auguftin  ayant  dit  enfuite 
que  cette  nounirure  confifte  à  tirer  fa  vie  du  corps  deJ.  C.  il 
aioûre  ces  paroles  ,  pour  marquer  quand  cela  arrive  :Z<?  r*?/^/ 
d^  le  fanz^  de  j.  C.  dit  il  ,  feront  alors  la  vie  de  chacun.  Si  l'on 
inange  ^  fi  l'on  boit  fpiritucllement  dans  la  vérité  mhne  ce  que 
l on  prend  en  Sacrement ,  (ou  dans  le  Sacrement ) .,  vifïblement.  Car 
nous  avons  oiii  dire  au  Seigneur  :  c'eft  l'efprit  qui  vivifie  ,  la  chair 
ne  prof  te  de  rien. 

M.  Claude  qui  eft  un  homme  de  conclufions  pluftoft  que  de 
preuves,  a  crû  qu'il  luy  ruftifoit  de  dire  fur  ce  paflTage  ,  que 
l'on  y  voit  que  les  deux  manières  de  manger  que  S.  Angufïin 
établit ,  l'une  en  Sacrement  vifiblement, l'autre  dans  la  veri- 

GGgij 


411  Lîv.  VI.  c^^  le  corps  de  Jejus.[hrifl 

té  même  fpirituellemenc,  font  les  mêmes  que  celles  que  les 
Cal viniftes  admettent,  &  qui  font  incompatibles  avec  la  rea- 
lité que  Romeenfeigne.  Et  qui  voudroit  imiter  fon  procédé^ 
on  n'auroit  qu'à  dire  fimplement  le  contraire  de  ce  qu'il  avan-- 
ce  ;  mais  parce  qu'on  ne  termine  rien  en  agiiïant  de  la  forte  , 
il  vaut  mieux  examiner  les  raifons  qu'Aubertin  en  apporte  au 
lieu  de  luy.. 

Ce  Miniftre  pour  prouver  que  ces  paroles  combattent  la  do- 
â:rine  des  Catholiques,  propofe d'abord  deuxargumens  auffi 
Attb.p.714.  rares  en  abfurdicez  qu'on  enpuifl'e  voir.  Telle  ,  dit-il  ,  qu'eft 
.la  nourriture  dont  S.  Auguftin  parle,  telle  eft  la  manduca- 
tion.  Or  S.  Auguftin  parle  d'une  nourriture  fpirituelle.  Donc 
il  parle  delà  manducationde  Tamc  ,&  non  dexelle  du.corps. 
Mais  à  quoy  penfoit-il  en  propofant  cet  argument,  &  contre 
qui  difputoit-il  ?  Qui  doute  que  S.  Auguftin  ne  parle  en  cet 
endroit  d'une  raanducation  Ipirituelle  qui  ne  convient  qu'aux 
j  iftes  feulement? 

Mais  la  queftion  efl:  s'il  n'y  en  a  point  aufll  une  autre ,  &  fi  S. 
Auguftin  ne  la  marque  pas  clairement  par  ces  paroles ,  que  ceux 
qui  m.tïi'icyit  le  corps  de  /.  C  le  manquent  ^  ce  qui  veut  dire  que 
ceux  qui  le  mangent  cqrporellement  le  mangent  auffi  fpiri- 
tuellement. 

La  queftio^i  efl:  s'il  ne  la  marque  point  parce  lieu  de  l'Evan. 
gile  qu'il  cite  :  c'efi l'efprit  qui  vivifie ,  la  chair  ne  profite  de  rien^ 
Car  l'appliquant  à  ceux  qui  communient,,  &  qui  n'en  reçoi- 
vent point  de  fruit,  il  fuppofe  vifiblement qu'ils  reçoivent  la 
chair  de  J.  C.  quoiqu'ils  ne  reçoivent  pas  fon  efprit.;  puifque 
s'ils  ne  la  recevoient  pas,  on  n'auroitpas  fujet  de  dire  d'eux 
-,<jue  la  chair  ne  leur  fert  de  rien. 
/lub. ibidem.  Le  deuxième  argument  efl:  de  même  force.  Manger^.âit-i\^, 
félon  S.  Auguftin  ,  cefife  nourrir.  Or  les  mèchans  ne  font  point 
nourris.  Donc  ils  ne  mangent paf.  Eh  quoy  !  ce  Miniftre  igno- 
roit-il  encore  que  les  Catlioliçjues  reconnoifltntqu'il  y  a  plu- 
fîeurs  fens  félon  lefquels  les  méchans  ne  mangent  point  le 
corps  de  J.  C.  que  c'en  efl:  un  entr'autres  ,  quand  on  définie 
Je  mot  de  manger-par  celuy  d*efl:.re  nourri  ?Mai$  il  fe  trompe 
grolîïerement,s'il  s'imagine  que  ce  foit  l'unique  fens  de  ce  mot, 
,6c que  S.  Auguftin  le  prenne  toujours  de  la  f)rte.  Par  exem- 
ple dans  le  commencement  du  pafl!age  :  Manducent  ergo  qui 
pianducMt ^  qui  traduiroit  que  ceux  qui  fe  nourrifTent  (è  nour- 


ejî  mxngé  corponllemcnt  dans  l' Eucharifîie.  41J 
riflenc,  accribueroit  à  S.  AngulVin  un  fcns  ridicule  ;  la  repe-  Ch.  IX. 
îitionde  ce  terme  faifanc  voir  qu'il  eft  pris  neccflairemenc  en 
deux  fens  differeas  ,  &:  que  l'on  peut  manger  en  une  maniè- 
re fans  manger  en  l'autre.  Ainfi  comme  il  efl:  tresvray  que 
S.  Auguftin  marque  dans  ce  palîage  un  fens  du  mot  de  man- 
ger qui  ne  convient  point  aux  médians ,  il  efl:  très- vray  aulTî 
qu'il  en  marque  un  qui  leur  convient.  Et  il  n'y  a  qu'à  exami- 
ner ce  qu'enferme  celuy  qui  efl:  commun  &;  aux  uns  6c  aux 
autres. 

Ces  deux  argumens  efl:oient  donc  indignes  d'eflre  propo-  Aub.p.^w. 
fez  par  un  homme  de  fens.  Et  il  iê  trouvera  encore  par  l'exa- 
anen  du  troifieme  que  ce  n'eft  qu'un  pur  fophifme,  quoiqu'il  ait 
plus  de  couleur.  Il  efl:  fondé  fur  ce  que  S.  Auguftin  oppofe  , 
dit  Aubercin  , manger U chair  in  Sacramento  ,àce  qu'ilap- 
pelle  ,  la  manger  in  ipsa  veritate.  Par  confcquent ^  dit  il  , 
lu  manger  in  Sacramento  ncjt  pas  la  manger  réellement  ^  mais 
feulement  en  figne.  Il  veut  fortifier  ce  fens  par  quelques  pafla- 
ges  ou  il  paroifl:  que  S.  Auguftin  prend  ce  mot,  in  Sacramento  > 
appliqué  aux  Sacremens  de  l'ancienne  loy  Amplement  pour 
enfgne ,  avec  exclufion  de  la  vérité.  Mais  je  dis  que  tout  cela 
jî'eft  qu'un  pur  fophifme  par  plufleursraifons, 

La  première,  parce  qu'il  eft  certain  que  le  mot  de  Sacrement 
e{ï  de  telle  nature  ,  qu'il  eft  tantofl:  pris  pour  un  pur  fgne,  Sc 
tontoft  pour  un  figne  joint  à  la  realité,  félonies  opinions  donc 
l'efpric  eft  prévenu  ^  de  forte  que  ce  n'eft  point  du  tout  par 
le  fens  précis  de  ce  terme  qu'il  faut  jeiger  de  ccluy  d'un  Au- 
teur qui  s'en  fert ,  mais  par  la  connoidance  de  (a  doctrine  fur 
Je  fujec  dont  il  parle.  Ainfi  parce  qu'il  eft  certain  que  S.  Ber- 
iiardcroyoitla  prefence  réelle, £c  tenoit  pour  hérétiques  ceux 
.qui  la  nioient ,  quand  il  dit  dans  le  fcrmon  qu'il  a  fait  fur  fainc 
Jvlartin ,  que  la  vraye  fubflancc  de  J.  C.  nous  efl  anjji  fre fente  ,  d^ 
.qu'il  eft  indubitable  que  c' eft  dans  le  Sacrement  ,  haud dubium  quin 
in  Sacramento  ,  il  eft  certain  qu'il  entend  ,  non  qu'elle  eft  pre- 
fente  en  figne  ,  mais  qu'elie  eft  réellement  contenue  dans  le 
Sacrement. 

De  même  parce  qu'on  ne  doute  point  que  Geofroyde  Ven-  Gocrredar 
dofmenefuftaulh  dans  cette  dodrine  ,  quand  il  dit,  en  em-  L'ërt''dè''crr. 
pruntant  les  termes  de  S.  k\i2,vS!im  ^que pcrfonne  ne  craigne  de  porc  &  lan- 
dire  que  cette  chair  eft   devenue  la   chair  propre  ^'  naturelle  de  S"'"'^  Doa«- 
"}.  C.  qu'on  le  croye  en  le  difant ,  d^  qu'on  l'apprenne  en  le  croyant 

G  G  g  lij 


4^4  ^'V-  ^^'  '^^  ^^  ^^^P^  ^^  Jefus-Chrifl 

non  feulement  dans  le  Sacretnent ,  in  Sacramcnto  ,  ce  que  ■plufteun 
iiupics  font  av.,IJî ,  ynais  jufquW  Li participation  de  l'Efprit  :  1  es  Cal- 
viniftes  ne  nieront  pas  qu'il  ne  fuppleaffc  au  fens  précis  de  ce 
terme  in  Sacramento ,  &  qu'il  n'entendift  un  Sacrement  qui  con- 
tenoit  réellement  )e  corps  <je  J.  C. 

Ainiî quand  l'Auteur  du  Commentaire  furies  Epiftres  de  S. 
Paul  ,  attribué  à  S.  Anlelme, employé  ce  même  pafîiige  de'S. 
Augullin  dont  il  s'agit,  &  qu'il  dit ,  c'c/l  ce  qui  arnver-a  ^fi  l'on 
nuDi'ic  (^  (î  l'on  boit  dans  la  vcritc  jpiritiiellejnent  ce  que  l'on  reçoit 
vifïblcment  en  Sûrement^  il  eft  encore  indubitable  que  par  ce- 
terme  in  Sacranicmo  ,  cet  Auteur  entend  un  Sacrement  qui 
contient  le  corps  de  J.  C.  Car  il  enfêigne  un  peu  après ,  que  le 
pain  que  l'on  divife  a  plu  fleurs  eft  le  vray  corps  du  Seigneur,  P  anis 
quem  nniltis  dividiiniis  eft  verum  corprts  'Domini. 
dansfonCom-       Ainfî'  quand  le  même  Auteur  empruntant  les  paroles  de  S. 

nvtnrine  lur      ,       ,  ^, .  ,       i-  i      i         i      ■     „  '    i       /-  i       i:.  a  i 

S,  Miitdi.  )erome ,  dit  qu  au  heu  de  la  chair  6c  du  lang  de  1  Agneau  il  a 
fubriitué  le  Sacrement  de  fon  corps  &  de  fon  fang,on  ne  fçau- 
roit  douter  qu'il  n'entende  un  Sacrement  qui  contient  réelle- 
ment le  corps  de  J.  C. 

\  Et  ce  qui  eft  remarquable  ^  c'eft  que  les  mêmes  Auteurs 
qui  entendent  quelquefois  parle  mot  de  Sacrement  \\n  ligne, 
joint  à  la  vérité ,  quand  la  matière  dont  ils  parlent  les  y  porte  , 
n  entendent  d'autrefois  qu'un  pur  figne,  quand  elle  ne  \qs  y. 
porte  pas. 

Ainii  Robert  PuUus ,  comme  nous  avons  remarqué  ailleurs,, 
qui  fupplée  plufieurs  foi  au  mot  de  Sacrement,  quand  il  en- 
,  rend  l'Euchariftie  par  ce  terme  -,  c'eft-à-dire  qui  conçoit  par  ce 
mot  non  un  pur  figne-,  mais  un  Sacrement  qui  renferme  le 
corpsdej.  C.  entend  par  ce  même  mot  un  pur  figne  ,  quand  il 
l'apphque  aux  anciennes  figures  du  corps  de  J.  C.  que  Dieu 

paît.  s.c.  r.  avoit  établies  dans  l'ancienne  Loy.  Jly  a  donc  eu  ^  dit-il  ,  des 
Sacremens  du  corps  C^  du  fang  du  Seignetir  qui  ont  précédé  parmi 
l'ancien  peuple  ,  (^  ils  ont  eu ,  pour  ceux  qui  croy oient  la  même  uti- 
lité que  nos  Sacremens  ^  non  que  la  figure  puiffc  avoir  la  force  de  la 
chofe  même  ,  mais  parce  qu'il  a  plu  a  Dieu  ^  qui  peut  tout ,  de  leur 
donner  alors  par  la  figure  ,  ce  qud  luy  plaift  de  notis  donner  far  la 
vérité. 

Tous  les  Catholiques  en  font  de  même  ,&  prennent  ce  ter- 
me au  même  fens,  quand  ilsparlent  de  ce  qui  regarde  lan- 
cienne  loy.  Mais  cela  ne  conclut  nullement ,  que  quand  ils- 


ejimungêxorporclkmcnt  dam  t  Etichartflic .        415 
rappliquenc  à  l'Eucliariftie ,  ils  l'eutendem  auffi  d'un  figne  ex-  Ch.  XL 
cluiif  de  la  vérité. 

Ain(î  il  faudroit  avoir  prouvé  que  faint  Auguftin  ne  croyoit 
pas  la  prefence réelle,  avant  que  de  pouvoir  rien  conclure  de 
ce  terme  ,piiirqu'il  eft  certain  que  s'il  l'a  crue,  il  s'en  eft  fervi  , 
en  y  liipplcanr  ce  que  tous  ici  Catholiques  y  fuppléent  5  &  le 
fuppo(er  fans  le  prouver,  c'eft  juftcmentle  Tophifine  qui  s'ap- 
pelle dans  l'Ecole  pétition  de  principe. 

Mais ,  dit  Aubertin  ,  il  oppo(e  in  Sacramcnto,  à,  in  ipfci  veritate. 
Etpar.confequentcomme  inipfa  vcritateÇ\2^\\\'àt  réellement,/» 
Sacrumento  exclut  la  realité. 

On  peut  faire  trois  réponfes  à  cette  objection  qui  font  voir 
toutes  trois  combien  il  eftinjufte  de  faire  tant  valoir  une  objec- 
tion fî  vaine. 

La  première ,  eft  que  faint  Auguftin  n'oppolê  pas  feulement 
en  cet  endroit  ces  mots  in  Sacramento  à  ceux  de  in  ipfa  veritate  , 
mais  qu'il  oppofe  toute  rexprefllonyî</«^/T/'«  Sacramento2.\'3.\i. 
treexprelîîon  ^manducare  fpirituulitcr  in  ipfi  -veritate.  Il  entend 
par  la  première  recevoir  corporellemenc  J  C.  dans  le  Sacre- 
ment. 11  entend  par  la  dernière  s'en  nourrir  félon  l'efpritdans 
la  vérité,  c'eft-à-dire  dans  la  vérité  figurée  parla  manducation 
corporelle.  Recevoir  J.  C.  dans  le  Sacrement,  ce  n'eft  pas  ab- 
folument  parlant  s'en  nourrir  dans  la  vérité,  parce  que  cette 
réception  n'eft  elle-même  que  lafigurede  la  nourriture fpiri- 
tuelle.  Mais  le  recevoir  fpirituellemenr  ,  c'eft  le  recevoir  dans 
la  vérité  même,  parce  que  c'eft  ce  qui  eft  figuré  par  la  récep- 
tion corporelle. 

Le  fécond  fens ,  eft  que  quoi<]ue  ces  mots  in  Sacramcnto  fîgni- 
fîent  davs  un  Sacrement  contenant^.  C.  ils  ne  lailfent  pas  d'eftre 
oppofèz  à  ceux  de  ipfn  veritax ,  qui  fignifient  la  vérité  du  corps 
&du  fang  de  ].  C.  toute  pure  £c  lans  figure  ni  voile,  parce 
que  ,  comme  dit  Pafchafe  ,  ce  cjui  eft  cache  dans  l' Euchariftie  f:.i^,f''Doauiii 
ri  eft  point  fiquré ,  mais  la.  vérité  pare  :  Totom  veritas  gS  nu  lia-  c.  ^. 
tenus  adumhratioquodintrinfecus percipitur.  La  manducation  ex- 
térieure le  termine  au  Sacrement  qui  contient  J.  C.  Ai;ifi  par 
cette  manducation  on  reçoit  bien  J.C.  maisj.  C.  voilé  fous  des 
énigmes  &  des  ombres  dontil  eft  enveloppé,  comme  parle  faint 
Denis.  La  manducation  fpirituellc  au  contraire  ne  fe  termine 
pointau  Sacrement^  elleva chercher  J.C. en  luy-même  fousle 
voile,  elle  fè  nourrit  de  luy- même  fans  figure  6c  fans  Sacrer 


4i6         Liv.  VI.  ^e  le  corps  de  ye/ks-.  (^hrtjf 
ment  inipfa  vcritate ,  parce  qu'elle  a  pour  objet  unique  ce  qui 
cft  caché  dans  l'Euchariftie  qui  eft  purement  vérité ,  &.  nulle- 
ment figuie.  J.  C.  n'eft  voilé  dans  l'Euchariftie  qu'aux  Tensiilne 
l'eft  point  à  la  foy. 

S.  Auguftin  a  donc  raifon  de  dire  que  le  corps  ôc  le  fang  de 
J.  C.  feront  noftre  vie  ,  li  nous  mangeons  ficbeuvons  fpirituel- 
Jement  dans  la  vérité  même  ce  que  nous  recevons  vifibLemenc 
dans  le  Sacrement  j  c'eft-à  dire  fi  nous  ne  nous  contentons  pas. 
de  le  recevoir  extérieurement  dansle  Sacrement  ,  mais  que 
nous  percions  par  l'eTprit  juiqu'à  la  vérité  qu'il  cache,  &  que- 
nous  nous  nourririons  de  cette  vérité  toute  pure. 

V.ts  méchans  le  reçoivent  dans  le  Sacrement,  mais  ils  n'ont 
point  de  foy  qui  perce  le  voile.  Ils  ne  trouvent  point  J.  C.  ils  ne 
s'attachent  point  à  luy.  Ils  ne  s'en  nourriffent  point.  Et  fi  les. 
bons  le  reçoivent  comme  les  méchans  fous  le  voile  du  Sacre- 
ment ,  ils  n'en  demeurent  pas  là  néanmoins ,  ils  ne  s'arreftent 
pointau  voile, ils  découvrent  J  .C  même,  ils  fenourriflcntde. 
luy  même  dans  la  vérité.  On  reçoit  corporcllement  le  Sacre- 
,  ment  contenant  la  vérité  :  mais  on  n'eft  nourri  fpintuelkmenc: 
que  de  la  vérité  même. 

C'eft  dans. ce  même  fens  quePachymere  Commentateur  de 
îacRym;.  m      faint  Denis  ,  dans  le  même  lieu  où  il  dit  que  les  fymboles  font 

c.  3 .  de  Ecclel.  '  ,  /-  ,     o,    ^  \    ■  ,-^  i^    i-  > 

jjjeg.  changcz^au  corps  &  au  fang  de  J.  C.  ne  laille  pas  de  dire  qu  ait 

lieu  que  plufieurs  s'arreftent  aux  fèuls  fymboles ,  ne  pouvant 
s'c/evcr  plus  haut  ,,  le  Pontife  s' èleve  ju  [qu'aux  prototypes  ,  c'efta- 
dire  au  précieux  corps  &  au  précieux,  fang  de  J.  C.  croyant  que  les 
fymboles  propofez^  ont  eflé  changez^  en  ces  prototypes.  Car  cette 
contemplation  que  Pachymere  décrit ,  par  laquelle  le  Pontife 
s^'cleve  jufqu'aux  .prototypes  ,  c'eft  l'adion  de  la  foy  qui  dé- 
couvre la  vérité  même.  Mais  bien  loin  que.cetce  foy  exclue ,  fé- 
lon Pachymere  ,  la  créance  delà  prefence  réelle  &  de  latranf-  j 
rubftantiation,que  c'eft  de  là  même  qu'elle  naift  ,  •7tiq-ix)m  ért  t*  j 

^  croyant,  dit  il, que  les  donspropofez  ontefté  changezau  corps 

ôc  au  fang  de  J.  C.  par  le  Saint  El'prit  qui  opère  toutes  cho» 
fes. 

Quelle  difficulté  y  a-t'il  donc  dans  ce  paftàge,  en  le  pre- 
nant auquel  on  voudra  de  ces  deux  fens  ?  Et  qui  eft-ce  qui  nous 
empêche  de  l'y  prendre  ?  N'eft-ce  pas  undifcoursraifonnable, 
que  de  dire  que  le  corps  &  le  fang  de  J.  C.  ne  font  la  vie  de  ceux 
,  '  .  '  q«îi( 


ep  mangé  corporellement dan f  V Emhar'tjîic .  417 
qui  les  retçoivent  que  lorfqu'ils  ne  Ce  concencenr  pas  de  les  rece-  Ch.  X  h 
voir  fimplement  dans  le  Sacrement ,  mais  qu'ils  fe  nonrriiîenc 
de  la  vertu  de  ce  corps  &c  de  ce  fang  que  la  toy  leur  découvre  , 
&  qu'ils  en  tirent  la  nourriture  fpiriruellequiefb  la  vérité  figu- 
rée par  la  réception  du  Sacrement  ?  Etcediicours  railonnai-)le 
lâns  doute,  &  qui  ne  blefle  en  rien  la  doctrme  des  Catholiques, 
ne  peut-il  pas  eftre  exprimé  par  les  termes  de  faint  Auguftin  : 
Tune  vita  tmicuiquc  ent  corpus  Q-  fmguis  Chrijii  ,  fi  quod  in  Sa- 
crumento  vifiLili  er  j'^mitur ,  in  ij>pi  veritate  Jpir.tualitirmjnduce' 
tur,  fpiritualiter  bibatur. 

Mais  le  troifiéme  fens  doit  élire  d'autant  moins  fufpec't  aux 
Calvinillies  qu'il  eft  pris  en  quelque  lorte  d'eux-mêmes  ,  &  de 
la  comparaifon  qu'Aubertin  ^  M.  Claude  font  d'un  paflage 
tiré  de  la  Cité  de  Dieu  avec  celuy  dont  il  s'agit. 

Voicy  quel  eft  ce  palTage.  Ces  faroles  de  j.  C.  dit  faint  Au-  BeCiv.  Def 
guftin  ,  Ccluy  qui  nuiny:  ma  chair  (^  boit  ynon  funz^  demeure  en  ^'  ^'  '•"•-^ 
fiioy  ^moy  en  luy ,  noies  font  voir  ce  que  c'efi  que  de  manger  la 
chair  de  J.  C.  non  en  Sacrement  feulement ,  Sacramento  tenus  ^ 
mais  en  effet  ^  sed  reipsa  ou  rêvera,  comme  il  eftdic  en  utî 
autre  endroit  du  même  chapitre. 

On  accorde  donc  aux  Calviniftes, félon  ce  troifiéme  fens  , 
que  c'eft  la  mêmechofede  recevoir  en  Sacronent  ,  in  Sacrai 
mento ^commt  il  eftdit  dans  le  paflagedu  Sermon  dont  il  s'a- 
git ,  que  de  recevoir- Sacramento  tenus  ^in  folo  Sacramcnto  ,  com- 
me S.  Auguftm  parle  dans  ce  chapitre  de  la  Cité  de  Dieu. 

On  convient  encore  que  c'eft  la  même  chofe  de  dire  rece- 
voir in  ipfa  vcritate ,  comme  il  parle  en  un  endroit  de  ces  paf- 
iages ,  que  de  dire  recevoir  &  manger  r^i^^";-^?,  reipfa^  comme  il 
parle  dans  les  autres.  Mais  je  dis  qu'il  faut  apprendre  de  S.  Au- 
guftin  même  ce  que  c'eft  félon  luy  que  de  recevoir  ?r/^y2f. 

On  ne  içauroit  propofer  une  condition  plus  jufte.  Cepen- 
dant pourvu  qu'on  i'obferve,  il  ne  reftera  pas  une  ombre  de 
diiiiculté  dans  ces  pallages. 

Il  faut  feulement  fe  fouvenir  que  félon  fâint  Auguftin  le 
principal  rapport  de  l'Euchariftie  comme  Sacrement  ,  eft  au 
corps  myftique  de  J.  C.  c'eft- à  dire  à  la  focieté  de  tous  les  fi- 
delles  ,  Se  que  dans  la  dcclrine  de  ce  Père ,  c'eft  ce  rapport  du 
pain  &  du  vin  au  corps  myftique,quiafait  que  J.  C.  lésa  choi- 
lls  pour  la  matière  de  fon  Sacrement. 

Il  faut  encore  fçavoir  que  l'effet  principal  de  l'Euchariftie  , 

HHh 


4?.8  Liv.  VI.  ^e  le  corps  de  fefùs-Qjtifi 

c'eft  de  nous  incorporer  au  corps  myfbique  de  j.  C.  c'ed  ce  qui 
fait  que  faine  Aut^uflin  s'écrie  dans  le  z6.  Traité  fur  S.  Jean  : 
0  S^icroticnt  de  pieté  j  O  Jîgne  d'unité  !  O  lien  de  charité  ,  on  ccluy 
qui  de  (ire  de  vivre  trouve  ce  qui  le  fuit  vivre  !  Ou^il  s'en  approche  ^ 
au  il  croyc  ,  qu'il  fait  incorporé ,  afin  qu'il  foit  vivifié. 

L'effet  de  l'Eucharifbie  efl  donc  de  nous  incorporer  à  J.  C.  Et 
elle  le  fait  en  deux  manières,  premièrement  parla  communi- 
cation de  l'efprit  dej.  C.  car  c'cft  eftre  du  même  corps,  que 
d'cftre  animé  &  de  vivre  par  le  même  efprit. 

Secondement ,  par  le  corps  même  de  j.  C.  qui  lie  tous  les 
juftes  qui  le  reçoivent ,  &  qui  en  fait  un  même  corps.  C'eft  ce 
que  les  Pères  nousenfeignentexpreffement.  ^yf«  ,  ditS.Cyril- 
I    T    n  p       ^^  •>  1^'^  ^'^"■^  fulfions  réduits  en  unité  ,  d"  ^l'vec  Dieu  même  g^  entre 
j^g.  nous ,  quoique  feparez^  d'ame  (jr  de  corps  par  la  difttnBion  qui  fe 

conçoit  entre  noiis  ,  le  Fils  unique  de  Dieu  a  trouve  un  moyen  qui 
efl  une  invention  de  fifagcffe  (^  un  confcilde  fon  Père.  Car  unif- 
fint  dans  la  Communion  myftique  tous  les  fidellcs  par  un  feul  corps 
■qui  ejî  le  fien  propre  ,  /'/  en  fait  un  même  corps  é'  <^'vec  luy  ,  f-;-  en- 
trcux.  AtiJJi  qui  pourrait  les  divifer  ,  ^  rompre  l'union  naturelle 
qu'ont  entr  eux  ,  ceux  qui  font  licz^avec  J.  C.  en  unité  par  ce  corps 
unique!  Si  nous  participons  donc  tous  à  un  7nèmv  pain  ,  nous  ne 
fui  fans  touj  qu'un  corps .,  parce  que  J.  C.  ne  peut  eflre  divifé.  C'efi 
pour  cela  que  l' E<îlife  e/l  afpellée  le  corps  de  J.  -C.  ^  q^e  nous  en 
foynmes  nommc'X^  les  membres  ^  félon  S.  Paul.  Car  nous  fotnmes  tous 
unis  A  /.  C.  par  fon  faint  corps ,  recevant  dans  nos  propres  corps  ce 
corps  unique  ^  indivifible  j  ce  qui  fait  que  nos  membres  luy  appar. 
tienyient  plufqv'k  nous. 

Et  ai;  liv-re  douzième  expliquant  cet  endroit  de  l'Evangile, 
où  U  efl:  dit  que  les  foldats  diviferent  les  habits  de  J.  C.  en 
quatre  parties  ,  mais  qu'ils  ne  diviferent  point  fa  tunique ,  il 
f.  i3r^.  à^xtqus  les  quatre  parties  de  ce  monde  ont  obtenu  par  fort  .^  ^  qu'el- 

les poffedent  fins  divifion  le  faint  vcftement  du  l^crbe  ,  c'efl.k- 
dire  fon  corps  ,  parce  que  le  Fils  unique ,  quoique  difiribué  k  tout 
les  fi'^elles  particuliers  ,  Q-  fanBifiant  l'ame  ^  le  corps  de  chacun 
d'eux  par  SK  propre  chair,  efi  néanmoins  entier  S"  fans  divi- 
fion en  tous  .^parce  qu'il  efi  un  par  tout  ,  &  que  comme  dit  S.  Paulj 
il  ne  peut  ejire  divifé. 

Il  dit  la  même  chofe  dans  le  livre  quatrième  contre  Nefto^ 
rius,  6c  il  en  conclut  que  c'efl:  par  l'indivifibilité  de  ce  corps  que 
les  édelles  font  réunis  en  un  même  corps.  Le  corps  de  I.C.qui 


I    Epift.ad 
Cor. 


eji  mxngê  corporeUement  dans  rEucharifiie.         419 
e^  en  nous ,  (^  qui  n'eji  en  aucune  forte  divifé ,  nous  réduit  j  dit-  il  ,   C  H .  XL 
à  l'unité. 

Enfin  c't^L  ce  qui  efl  encore  clairement  enfeigné  par  faine  Hom  x^.m 
Chryfoftome.  Quefl-ce  que  le  fuin,  dit-  il  J  c'eft  le  corps  de  y.  C. 
^  que  deviennent  ceux  qui  le  frcnnent  ?  Le  corps  de  J,  O.  non 
flufieurs  corps ,  mais  un  feul  corps.  Car  comme  le  pain  ejî  compofê 
de plujieurs  grains  tellement  unis  cnfemblc ^que  les  grains  ne  pa- 
roiffent  plus  du  tout }  (y- que  quoiqu'ils  fuljili'ent  encore ,  tcute  la 
diftinciion  néanmoins  en  eft  tachée  :  Ainji  nous  femmes  unis  tj- 
entre  nous  gS  avec  J.  C.  Car  ii  ous  n'èftes  pas  nourris ,  vous  d'un 
corps  ^  ér  celuy-lu  d'un  autre -^  7naiî  vous  eft  es  nouviis  d'u7i  mhrîè 
corps. 

L'incorporation  au  corps  myftique  de  J;  C.  eft  donc  le  pro^ 
pre  effet  de  l'Euchariftie  ;  mais  ce  n'eft  c]u'en  ce  que  l'Euchari- 
ftieeft  le  corps  même  de  J.  C.  Ce  corps  eftant  reçu  dans  les 
fidelles ,  les  lie  enfemble ,  &  par  fa  propre  unité  ,  &  par  celle  de 
fon  efprit.  Il  peut  bien  eftre  prefent  dans  les  m.échans ,  m.ais  il 
n'y  eft  jamais  prefent  comme  lien  d'unité  ,  comme  fe  les  affo. 
ciant ,  parce  qu'il  ne  lie  à  foy  que  ceux  à  qui  il  communique  Ion 
efprit.  Ainfi  ce  grand  efFec  d'ellre  incorporé  au  corps  de  |.  C. 
par  l'union  réelle  avec  fon  corps  naturel  ,  qui  nous  communi- 
que fon  efprit ,  ayant  eflé  confidcré  par  faint  AuguAin  comme 
l'effet  principal  de  l'Euchariflie,  il  a  cru  le  devoir  exprimer  par 
les  termes  de  w./»;2;irr/f  corps  dej.  c.  rcellemeni.  Ceux  qui  le  man- 
gent enforte  qu'ils  foient  incorporez  le  mangent, félon  ce'iSaint, 
reipfk.,  revera.Ceny.  qui  le  mangent  fans  cette  incorporation  , 
ne  le  mangent  o^ç.Sacra7nento  tenus  ^  ou  folo  Sacramento  yC'cik. 
à-dire  qu'ils  reçoivent  le  Sacrement  de  l'incorporation  fans  re- 
cevoir l'incorporation  5  qu'ils  reçoivent  J.  C.  dans  un  Sacre- 
ment qui  fignifîe  l'aiTociation  à  fon  corps  ,  mais  qu'ils  ne  font 
point  afTociez  à  fon  corps.  Ainfi  ces  mots  in  S.icramento  fignific 
lont  dans  ce  fens  un  fîgne  exclufîf ,  non  du  corps  naturel  de, 
J.  C.  m.iis  de  l'incorporation  au  corps  myflique  ,'  qui  eft  félon 
S.  Auguflin  la  chofe  fîgnifiée  par  le  Sacrement. 

Cela  paroift  clairement  par  plufieurs  autres  lieux  des  ouvra- 
ges de  ce  même  Père.  Car  c'eft  dans  ce  fens  qu'il  dit  au  même . 
chapitre  :  Celuj  qui  eft  dans  l'unité  de  ce  corps  ,  c'eft-è-dire  dans  la 
focieté  des  inembres  de  J.  C.  duquel  corps  les  fidelles  reçoivent  le. 
Sacrement  en  communiant  l  c'eft  de  celuy-la  qu'on  doit  dire  qu'il 
mange  véritablement  le  corps  de  J.  C.  qu'il  boit  fon  fang.  C'cîl-à,.- 

HViiiij 


450  L  I  V.  VI.  ^c  le  c-yyps  de  Jefiis-Chrifi 

dire  que  les  autres  ne  mangent  pas  ce  corps ,  &  ne  boivent  'pas      i 

celang  vcricablemenc.  * 

Q'qÙ.  dans  ce  fens  qu'il  afllire  encore  qu'on  ne  doit  pas  dire 
que  ceux-là  mandent  le  corps  de  J.  C.  <pn  ne  font  pa^  dans  le  corps 
de  Je  fus-  Chriji. 

C'eft  dans  ce  fens  qu'il  dit  de  tous  les  médians  ^quil  ne  faut 
pas  dire  qu'ils  mangent  le  corps  dej.  C.  parce  qu'ils  ne  doivent  pas 
eftre  comptex^au  nombre  de  fes  membres. 

Enfin  c'eftdans  ce  fens  qu'il  dit  ce  qu'en  rapporte  Aubertin, 
dit-il  par  ces  ^zvoXas-.Celuy  quimany:  ma.  chair  (y-  boit  mon  finir 
demeure  en  moy  &  moy  en  luy  ^J-C.  fait  voir  ce  que  c'efi  que  tnanoer 
fon  corps  ^  boire  fon  fang  ,  non  quant  au  Sacrement ,  mais  dans  la 
vérité  j  non  Sacramcnto  tenus ,  fed  rcipfa.  Car  manger  le  corps  6c 
boire  le  iang  de  I.  C.  en  cette  manière ,  c'efi:  demeurer  en  J.  C. 
afin  qu'il  demeure  en  nous. 

Et  parce  que  c'efl:  par  cette  demeure  de  J.  C.  en  nous  &  de 
nous  en  luy  qu'il  nous  rend  ks  membres  ,  il  conclut  de  là  que 
ceux  cjui  ne  font  pas  les  membres  de  J,  C.  ne  demeurent  pomt 
qn  luy.  Nonitaquc  mancntin  Chnfoqui  non  funt  membra  ejus. 

Il  paroift  donc  clairement  que  quand  S.  Auguftin  dit  que  les 
médians  ne  mangent  point  le  corps  de  J.  C.  revera^\\  veut  dire 
qu'ils  ne  demeurent  point  en  luy,  qu'ils  rve  luy  (ont  point  m- 
çorporcz  •  5c  que  quand  il  dit  des  mêmes  médians  qu'ils  le  re- 
çoivent 5jfrir?«i'«/'«'  tenus,  infolo  Sacramento  ^\\  ne  veut  dire 
autre  choie,  fînon  qu'ils  ne  reçoivent  que  le  Sacrement  de  l'in- 
corporation fans  recevoir  l'incorporation.  Et  c'efl  encore  ce 
qu'il  exprime  dans'le  16.  Traité  fi-ir  S.  Jean,  quand  il  dit  :  le  Sa. 
er-  ment  de  cette  chofe ,  c'efl- à-  dire  ,  de  t unité  du  corps  d^  du  fang 
de  y.  .C.  ef  préparé  fur  la  table  du  Setyieur,&  il  en  c  fi  pris  par  quel- 
ques-uns pour  la  vie  ,  t^  par  les  -autres  pour  leur  propre  perte  yCn  ccr^ 
tains  lieu.x  tous  les  jours  ,  ^  en  d'autres  dans  certains  intervalles  de 
jours.  Mais  la  chofe  de  ce  Sacrement  cft  toujours  catife  de  vie  ,  ^ 
jamais  de  mort  a  ccluy  qui  y  participe. 

Et  plus  bas  expliquant  ces  paroles  :  M^a  chair  cfi  vrayment 
•viande  ,  (jr-  mon  fang  cft  vrayment  breuvage.  Zcs  hommes ,  dit- il  , 
ayant  pour  but  dans  le  manger  O"  h  boire  de  n'avoir  plus  de  faim  ni 
de  foif ,  ils  ne  peuvent  attendre  véritablement  cet  effet  que  de  cette 
viande  ^  de  ce  breuvage  qui  rend  immortels  (^  incorruptibles  ccu.v 
qui  les  prennent.  Et  cette  viande  ^  ce  breuvage\  font  lafocieté 
des  Saints  où  il  y  aura  ifne  paix  entière  ^  ^  une  unité  pleine  ^par- 
faite. 


ejî  ffiAngé  corporellement  dans  [Eucharifiie.  431 
Mais  pour  bien  entendre  cette  doctrine  de  S.  Augiiftin  ,  il  ne  Ck.  X I. 
faut  pas  prendre  l'explication  qu'il  donne  ici  à  ces  paroles  :  Caro 
mca  verè  cfl  cihus  ,  comme  entièrement  allegorie]iie ,  fie  comme 
n'ayant  rien  de  commun  avec  la  participation  au  corps  naturel 
de  J.  C.  par  TEuchariftie.  Car  encore  qu'il  en  parle  obfcurc- 
ment,  parce  que  la  prelence  des  noms  initiez,  comme  il  le  mar- 
que dans  ce  fermon  même  ,  l'obligeoit  à  une  grande  retenue  à 
l'-cgard  decemyftere,il  eft  clair  néanmoins  en  joignant  les  prin- 
cipes de  fa  dodrine  avec  celle  des  autres  Peres^que  quand  il  par- 
le de  la  focieté  des  Saints,  comme  d'une  viande  &  d'un  breuva- 
ge, il  entend  la  participation  ou  l'incorporation  à  cette  focieté, 
^  qu'il  veut  que  la  réception  de  l'Euchariflie  foitle  moyen  de 
cette  incorporation.  Or  elle  ne  l'cfb',  félon  les  Pères ,  que  parce 
que  nous  y  recevons  le  corps  même  de  J.  C.  qui  nous  unit  à  fon 
corps  myflique,  &  par  fon  corps  naturel  bc  par  fon  efprit. 

Ainfi  les  Miniftresfe  trompent  dans  l'intelligence  de  ces  pa- 
roles de  S.  Auguftin  ,  &:à  l'égard  desbons  &ài'ëgard  des  mé- 
dians :  Ils  fetrompentà  l'égard  des  bons,  en  s'imaginant que 
ces  }pa.r  oies  ^manger  le  corps  dcj.  C.  véritablement  ,fprituelle. 
7}ient ^  dans  la  vérité  ,(\uq  ce  Père  rend  particulières  pour  les 
jufles ,  n'enferment  point ,  félon  luy  ,  la  prelence  réelle  &  cor- 
porelle du  corps  de  J.  C.  dans  ces  juftes.  Car  encore  que  ces 
paroles  fignifient  precifémenc  ,  félon  le  lens  de  S.  Auguflin  , 
l'incorporation  au  corps  myflique ,  &  la  participation  à  î'efpric 
de  J.  C.  qui  nous  rend  membres  de  ce  corps ^  elles  enferment 
néanmoins  la  prefence  réelle  par  une  confequence  neccffaire  , 
parce  que  le  moyen  ordinaire  de  cette  communicarion  du 
S.  Efpnt  &  de  cette  incorporation  ,  cfl  ,  félon  les  Pères ,  la 
prefence  réelle  du  corps  de  j.  C.  dans  les  noflres. 
\  Ils  fe  trompent  à  l'égard  des  médians,  en  s'imaginant  que  S, 
Auguflin  les  exclut  de  toute  participation  à  la  chair  &;  au  fang 
deJ.C.  parce  qu'il  dit  qu'ils  ne  mangent  le  corps  dej.  C.quVw 
Zaerartiento ^owSacra^nento  tenues .Q-3iX^  il  eft  vifîbleque  par  ces  mots 
inSacramento^on  Sacramento  tenus ^  il  ne  les  exclut  que  de  l'mcor- 
poration  à  J.  C.  &  de  la  réception  de  fon  efprit  ,  qui  nous  fait 
membres  de  fon  corps,  puifquec'efb  cette  incorporation  qu'il 
entend  par  les  mots  de  manger  le  corps  de  J.  C.  in  veritate^  re. 
vera  ,  reipfa  i  mais  quand  il  s'agit  de  la  feule  participation  réel- 
le de  la  chair  de  J.  C.  il  joint  les  méchans  aux  jufles.  Et  c'efl  ce 
qu'ilmarque  clairement  parla  conclufîon  qu'il  tire  de  tout  ce 

HHhiij 


431  I^iv.  VI.  ^etè  corps  dé  Jejus-Qjrifl' 

dilcours  en  ces  termes  :  Que  tout  cclanous  jcrve^  mes  chers  frères  , 
afin  que  nous  ne  mawiions  pas  la  chair  de  J.  C.  é^  fan  fang  feule, 
ment  dans  le  Sacrement^  tantum  in  Sacramento  :  ff  qui  efi: 
commun  a/pltifcurs  mechans  ;  mais  que  nous  many.ons  fa  chair  (^ 
bcuvions  fonfangjufquù  la  participation  de  l' Efprit^  afin  que  nous 
demeurions  dans  le  corps  de  J.  Q.  comme  f  s  membres  ^  ^  que  notes 
foyons  animez^par  fon  Efprit^. 

Ce  partage  écLiircic  admirablement  toute  la  doclrine  de  S; 
AiigLiftin  à  l'égard  des  juftes  &  àas  mechans ,  Se  le  rend  parfak 
temenc  conforme  aux  autres  Pères. 

Cequeles.jufîesont  pardefliis  les  mechans,  félon  luy, ce  n'eft', 
pas  de  manger  la  chair  de  J.C.  mais  de  la  manger  ufquc  adparti- 
cipationem  Spiritiis.  Et  par  confequent  les  mechans ,  félon  luy, 
mangent  la  chair  &  boivent  le  fang  ,  quoique  fans  participera 
fon  Efprit.  Autrement  les  juftes  leroient  doublement  diftin- 
guez  d'eux  ,  en  ce  qu'ils  participent  à  fon  Efprit ,  fie  en  ce  qu'ils, 
participent  à  fa  chair  i  au  lieu  que  S.  Auguftin  ne  reconnoift 
qu'une  feule  diftiniftion  ,  qui  eil  qu'ils  participent  à  i'efprit  de. 
J.  C.  &  que  les  mechans  ne  le  font  point. 

La  manducation  des  juftes,  félon  S.  Augufl:in,enferme  la  par- 
ticipation à  i'Efprit  de  J.  C.  &  cette  participation  à  la  chaire: 
à  Tefpric  de  J,  C.  nous  fait  membres  de  fon  corps  myflique. 
Ainfi  comme  elle  efl:  infiniment  différente  de  celle  qui  convienÊ-. 
aux  mechans ,  on  ne  doit  pas  s'étonner  s'il  dit  ,  qu'ils  ne  man- 
gent que  dans  le  Sacrement,  parce  qu'ils  ne  reçoivent  point 
cette  incorporation,  quoiqu'ils  reçoivent  le  Sacrement  qui  en. 
eil:  le  figne. 

Voilà  quelle  efl  la  dodrine  de  S.  Auguflin  fur  lefujet  de  la- 
manducation  du  corps  6c  du  fang  de  J.  C.  Et  les  Miniflres  n'y 
trouvent  tant  de  ténèbres  ,  que  parce  qu'ils  ne  veulent  pas  , . 
comme  l'équicé  le  demande  ,  joindre  enfembîe  tous  ces  prin- 
cipes ,  ôcconfiderer  cette  manducation  par  rapport  à  laraifon, 
à  la  doftrine  de  ce  Père  £c  à  celle  de. tous  ceux  de  fonfiecle, 
dont  on  ne  doit  point  le  feparer. 

On  pourroit  produire  encore  quantité  d'autres  pafTagcsde  ce  ■ 
S.  Docteur  ^  mais  comme  ils  ne  difent  viffL>lement  que  la  même 
chofe  que  ceux  que  nous  venons  d'ëclaircir,  &c  qu'ils  ne  contien- 
jijenc  aucune  difficulté  particuliere,ilferoit  inutile  de  s'y  arrêter^. 


'éjî  mangé  corporelle  ment  dans  TEuchxrifiie.         43^ 


CHAPITRE   XII. 

^2»'//  ejl  naturel  que  Ion  dife  ^  fuivant  la  doflrine  de  la  prefcnce 

réelle  ,  que  J.  C.  cfi  prefent  fur  la  tirre  ^  abfcnt 

de  la  terre. 

LA  confequence  la  plus  immédiate  de  la  doctrine  de  la 
Tranflubftantiation  ,  c'efl:  que  J.  C.  efl:  prefenc  fur  la  terre 
&  parmi  nous:  mais  comme  cette  dovftrine  n'exclut  pas  toute 
forte  d'abfence  ,  elle  ne  doit  pas  exclure  non  plus  toutes  les  ex- 
prelfions  qui  marqueroient  qu'il  en  cfi:  abfent.  Quelque 
prefent  qu'il  y  foit  ,  nos  fens  ne  Tapperçoivent  pas ,  6c  ils 
font  au  même  état  à  fon  égard,  que  s'il  n'y  eftoit  point  du 
tout. 

Il  efl:  vray  que  nousne^ifonspas  pour  cela  que  Dieu  foit  ab- 
fent  de  nous ,  fi  ce  n'eft  par  métaphore  ^  mais  c'eil:  d'un  cofl-é 
qu'il  efl:  prefent  par  tout ,  &i  de  l'autre  que  nous  fçavons  que 
fon  eft;re  tout  fpirituel  ne  nous  a  jamais  efté  ni  ne  nous  fçm- 
roit  eftre  prefent  d'une  prefenc e  fenfible.  Mais  quand  il  s'agit 
d'un  corps,  nous  en  parlons  autrement,  parce  que  nousconnoif- 
fons  une  autre  prefcnce  des  corps.  L'idée  que  nous  en  avons 
enferme  une  prcfence  qui  fait  imprefîlon  fur  les  fens ,  &  qui 
s'apperçnit  par  les  lens.  Nous  fçavons  d'ailleurs  que  le  corps  de 
J.  C.  a  efté  autrefois  prefent  en  cette  manière  fur  la  rerre- Nous 
jçavons  qu'il  l'eft  maintenant  auffi  dans  le  Ciel.  Ainfî  nous  nous 
Tentons  privez  d'iin  bien  dont  les  hommes  ne  lont  pas  inca. 
pables,  &  dont  ils  ont  en  effet  joui.  Et  cette  privation  s'ap- 
pelle naturellement  abfence  ,  puifque  c'efl  la  privation  d'une 
efpece  de  preience  ,  -&  de  l'efpece  la  plus  connue,  &  la  feule 
dont  nous  ayons  naturellement  ridée.  ' 

On  voit  déjà  qu'il  s'enfuit  de  là  que  les  Pères  ont  dû  dire ,  & 
que  J.  C.  nous  efl  prefent ,  &  qu'il  eft  abfent  de  nous  ,  &  que 
dans  la  doctrine  de  la  prefencc  réelle  cesrernies  s'allient  natu- 
rellement, quelque  contraires  qu'ils  paroiiient.  Mais  il  efl  bon 
d'en  donner  d'abord  des  exemples  dans  les  Auteurs  mêTnes,qui 
ayant  vécu  depuis  la  naiflancede  l'herefiedesSacramentares, 
ontefté  plus  appliquez  à  éviter  tous  les  termes  dont  ils  rirc-ient 
avantage  ,  Si  n'ont  employé  que  ceux  qui  expriment  fï  precifç- 


454  Liv.  VI.  ^e  le  corps  de  Jefus-(^hrifi 

ment  les  idées   naturelles ,  qu'il  eftoic  prefque  impofTible  de 

s'en  abftenir  entièrement. 

Celles  qui  reprefententJ.C.  comme  abfent  de  nous  font  ab- 
folument  de  ce  genre.  Comme  nous  ne  le  regardons  prefenr 
que  dans  le  Ciel  de  cette  prefence  corporelle  dont  nous  avons 
une  idée  dill;incte,nous  fommcs  portez  à  nous  fervir  d'expref- 
fions  qui  ne  le  reprefentent  que  dans  le  Ciel ,  èc  comme  abfenc 
de  toutç  la  terre. 

Et  l'on  va  voir  des  preuves  de  cette  inclination  dans  les  Au- 
teurs les  plus  attachez  à  la  doctrine  de  l'Eglife  Catholique  teI-~ 
le  que  nous  la  concevons. 

On  ne  r(^auroit  douter  que  S.  Bernard  ne  foit  de  ce  nombre 
après  les  preuves  qu'il  en  a  données.  Cependant  il  marque 
enplufieurs  endroits  que  J.  C.  eftabfent  de  nous  ^  &  que  nous 
fommes  privez  de  fa  prefence  corporelle. 
De  Afccnf.         Il  dit  qu'il  eftoit  Utile  aux  Apoftres  que  la  prefence  corporel- 
lerni.  i.  jg  (^^g  j_  Q  j^^j.  p^,(^  fouftraitc  :  Expcdlehat  ut prafentiam  eis  fub~ 

firahcret  corporaletn. 

Il  dit  quele  S.  Efprit  n'a  pu  defcendrefur  les  Apoflres  tant 
que  J.  C.  a  efté  fur  la  terre  j  Chrifto  commorante  in  terrts  Spiri- 
tus  Sancius  vcnire  nonpotitit.  Il  n'y  eft  donc  plus,  diroient  les 
Miniflres.  Il  eftvray  qu'il  n'y  eft  plus  de  la  manière  que  faine 
Bernard  l'entendoit. 

Il  parle  encore  plus  exprefTément  de  cette  abfence  dans  le 
Scnn.deAdv,  premier  Sermon  fur  l'Advcnt.  Caraprésavoir  dit  que  \q.  Ver- 
be Cjl  defcendu  du  haut  du  Ciel  jufqu  aux  pkts  baffes  parties  de  la 
terre  ,  il  â]o{ne ,  ne  faut-il  donc  pax  nous  attacher  à  la  terre  ?  il  le 
faudrait  fans  doute  ,  s'ily  eftoit  demeuré.  Car  où  pourrions-nous  eftre 
bien  fans  luy .,  ^  avec  luy  ,  où  pourrions  nous  eftre  mal  j  Et  c'efl 
de  1.1  qu'il  conclut  avec  l'Apoftre  ,  qu'il  faut  s'élever  au  Ciel 
parce  que  ].  C.  y  eft. 

Ainfî,  félon  S.Bernard  ,  il  eft  vrayen  un  certain  fens  que 
J.  C.  n'eft  point  demeuré  fur  la  terre  ,  non  pcrftitit  in  terra ,  ôc 
nous  ne  pouvons  eftre  bien  ,  parce  qu'il  n'y  eft  pas. 

Mais  que  ne  diroient  point  les  Miniftres  de  cette  divifîon 
qu'il  fait  des  avenemens  dej.  C.  Comme  il  eft  venu,  dit  il  ,«»i? 
fois  dans  une  chair  vifible  au  milieu  delà  terre  pour  opérer  le  falutjl 
vient  aujji  tous  les  purs  en  efprit  ^  d'une  manière  inviftble  pour 
fauver  chacun  de  nous  :  SicuT  ad  operandam  falutem  in  média 
terrée  venit  femcl  in  carne  vijibilis  ,  ita.  quotidie  ad  falvandof 

animas 


efi  mange  corporellement  dans  ÏEuchariflie.  j^.^^ 
animas  (iri'iîdcntyn  in  fpiritu  vaut  invifibilis.  N'ya-  t'il  donc  pas ,  Ch,  XII. 
diroienc-ils ,  une  troificme  manière  de  venir  ,  (çavoir  avec  une 
chair  inviilble  i&.d'où  vient  que  iainc  Bernard  n'en  fait  point 
mention?  Mais  laréponfe  eft  bien  ailée.  C'cft  que  quand  on 
parle  naturellement  comme  luy  ,  on  n'eft  point  allervi  aux  rè- 
gles du  langage  des  Miniftres.  On  ne  fe  croit  point  obligé  de 
faire  en  tous  lieux  des  divifions  exades  ,&  de  définir  les  ter- 
mes comme  les  Géomètres  j  &:  l'on  le  contente  de  marquer  les 
efpeces  les  plus  communes ,  &;qui  fe  prefentent  les  premières 
à.  l'efprit ,  foit  que  l'on  parle  ,  ou  qu'on  écrive. 

Ce  n'eft  pas  le  langage  dufeul  laint  Bernard.  Tous  ceux  qui 
ont  eu  occalîon  de  parler  du  même  fujet  ,  font  tombez  dans 
les  mêmes  exprelTions  par  le  penchant  de  la  nature.  Vuifque  Serm.<!fAf- 
nous  fommes  privez^de  la  prcfence  eorporelle  de  J.  C,  dit  Yves  de  i^^"'*"'^^' 
Chartres  ,  cffcrcons-  nous  avec  toute  l'ardeur  de  ncjlre  caur  de par~ 
•venir  a  l'éternelle.  ) 

Hugues  de  faint  Viéloroppolê  la  feule  prefence  fpirituelle  à 
celle  que  J.  C.  nous  a  fouftraite  par  fon  Afcenlion,  comme  s'il 
ne  reconnoiflbit  que  deux  forces  de  prefences. 

J.  C.  dit-il,^ï  converfé  avec  les  hommes  félon  fa  -pr-efence  corps, 
relie ,  afin  de  les  élever  a  la  prefence  fpirituelh  ,  (^  ayam  achevé 
Can  œuvre  ^.il  s' efi  retiré  félon  la  prefence  corporelle  .^  mais  il  efi 
demeuré  félon  la  prefence  fpirituelle  :  fecundùm  fpiritualem  re- 
manfit. 

Pourquoy  ne  parle- t'il  point  de«  la  prefence  Sacramenrale ,  v^yvjpAer,. 
s'il  la  croyoir  ,  devroient  dire  les  Miniftres  ?  Cependant  il  eli  J^l'^n'' 'Jt '^''^ 
fans  doute  qu'il  la  croyoic  ,  comme  il  eft  fans  doute  qu'il  n'en 
parle  pas  en  ce  lieu- là,  quoiqu'il  la  dût  avoir  d'autant  plus  pre- 
lente  à  l'efprit  qu'il  en  avoit  parlé  dans  tout  le  refte  de  ce  dit 
cours.  Mais  c'eft  qu'il  n'y  a  rien  de  moins  naturel  que  cette 
exactitude  plufque  géométrique-,  àlaquelle  les  Miniftres vou- 
droienc  que  tous  les  Auteurs  le  fulTenr  airujettis. 

Ce  langage  des  Anciens  aeftéluivi  par  les  nouveaux  , parce 
qu'il  eft  prelque  impoflible  de  ne  le  pas  fuivre.  Puifcjue  la  fv-u.- 
veraine  félicité  ^  dit  Grenade,  confifte  dans  la  prefence  dit  Sei- 
<zneur ,  (^  /jue  cette  prefence  nous  efi  ofiée  dans  cet  exil ,  quels  efforts 
ne  devons-notis  point  faire  pour  y-  parvenir? 

Et  ils  le  fuivent  même  dans  les  livres  de  Controverfes  ,  où 
l'on  eft  en  quelque  forte  plus  fur  fes  gardes  ;  tant  il  s'allie  na- 
Éurellenrienc.avec  ce  que  la  foy  nous  fait. croire  des  myfteres;. 

Uï. 


43^  Liv.Vl.  J^e  le  corps  de  Jefus.Qmfi 

Feu  M.  l'Abbé  de  Bourzei,  dont  la  capacité  ne  doit  pas  eftre 
inconnue  aux  MinKtres  qui  l'ont  fouvent  éprouvée  &:  de  vive 
voix  &  par  écrit  ,,  parle  de  cette  lorte  dans  r.n  difcours  ou'il 
adrelFc  à  Monfieur  le  Prince  Palatin.  J.  C.  dit  il  ,  ravijfamfon 
propre  corps  aux  yeux  des  Apofircs  ,  pour  les  confoler  de  fèloigne- 
mcni  de  celuy  qu'ils  alloient  perdre  _,  voulut  leur  en  laiffcrun  autre  , 
mais  qui  fujl  vifible  d^  matériel  ^  comme  celuy  qu'il  avoit pris  de  la 
Vterqe  Mère ,  ^  quil  devait  Joujiraire  k  leur  vue ,  en  lefaifani 
monter  au  Ciel. 

Ne  feroit-ce  donc  pas  la  prétention  dumonde  la  moins  rai- 
sonnable ,  que  de  vouloir  que  la  doclrine  de  la  prefence  réelle 
air  dû  empêcher  les  Pcres  d'ufcr  du  même  langage,  8c  de  dire 
que  J  C.  eft  abfentde  la  terre,  que  nous  fommes  privez  de  fa 
prelcnce ,  &  qu'il  s'eft  retiré  du  monde  félon  Ion  humanité  ,en 
y  demeurant  (elon  la  divinité  ? 

Neluffit-il  pas  qu'ils  nous  aycnt  également  enfeigné  l'une 
&;  l'autre  de  ces  veritez  ,  &  que  J.  C.  s'eft  retiré  de  la  terre ,  6c 
que  nous  l'avons  encore  iur  la  terre  ?  Et  le  fens  commun  n'al- 
lie-t'il  pas  de  luy-méme  ces  deux  veritez  ,puifqu'il  nous  fait 
voir  d'une  part  que  J.  C.  ne  nous  eft  plus  prefent  d'une  ma- 
nière vifible  ,&:de  l'autre  que  c'eft  aflez  qu'il  ne  fort  plus  pre- 
fent de  cette  forte ,  pour  dire  en  un  certain  fens  qu'il  eft  ab- 
fent  ? 

Ne  fuffit  il  pasqucles  Pères  qui  parlent  de  cette  abfence de 

J.  C.  foient  ceux  mêmes  qui  enfeignent  le  plus  pofitivemenc 

la  prelence  réelle,  &:  fouvent  dans  les  lieux  mêmes  ou  ils  la 

marquent  ? 

c.uli?c.  14.  Ilefi  abfent  maintenant  félon  la  chair ,  dit  S.  Cyrille  de  Jerufà- 

lUuai.  lem  ,  e^  cependant  il  eft  reçu  fur  la  main  droite  comme  fur  un  trbne  ^ 

f .  niyft.  iltuuche  nos  yeux ,  il  ejl  dijlribuc  dans  nos  membres  . 

iiiEvnng.  -Les  Apioflrcs  3  dit  S.  Chryfoftome,  ncftoient  point  dans  laf- 

Ib  Ed  Vl*      fliciiun  pendant  que  J.  C  ejloit  avec  eux  ,  mais  après  qu'il  s'en  fut 

Cor.'hom.  i<..  a/lé.  Il  z  douc  quitté  les  Apoftres,  il  s'en  eft  al!é;,&  cependant 

'i'^''i^''^!i''      ft-'lon  ce  même  Père,  jjous  avons  devant  nous  fur  la  terre  ce  qu'il 

Ei>li7hoin,,}.    y  ^'de  plus  précieux  dans  le  Cief  fcavoir  le  corps  même  du  Roy.  Ce 

Hoiu.iiiEi'.     corps  qui  eflaffiilk  haut  avec  le  Père  Eternel  eft  touché  des  mains 


1  Hcbr. 


Hoinirde        '^  ^°^^-  ^^  ''fi  ^''"*  t^^'^  ^'^  temps  entre,  les  mains.  Celuy  qui  efi  ajjii 
^cro-pli.  a  la   droite  de   fm  Père   eft  icy.  il  y  eft  véritablement  prefent  , 

S.  Cyrille  d'Alc>:andrie  enfeigné  û  formellement  i'.une& 


efi  ma,ngê corporeîlement  dans  î Euchar'ifiïe ,  ^yj 
l'antre  venté  de  la  prefcnce  êc  de  rabfence  de  J.  C.  que  ici  Ch.  XII.' 
Minillres  mêmes  fe  lont  partagez  lur  (on  efprit  Car  comme 
Aubertin  qui  eil  incapable  d'eilre  perfuadé  par  l'évidence  ,  ne 
laiife  pas d'abuler contre  les  Catholiques  despafi^gesde  ce  Pè- 
re .  qui  marquent  l'abfence  de  J.  C.  il  s'eft  trouvé  au  C(n-.traire 
d'autres  Calvinifles^  qui  n'approuvant  pas  la  conduite  de  Tains 
Cyrille  contre  Neftorius  ,  ont  prétendu    le   décrier   parmy 

ceux  de  leur  fccle  ,  comme  enfeisinant  clairement  la  prelence 

'Il 
réelle. 

Ce  font  les  extremitez  contraires  où  les  hérétiques  ont  accou:- 
tumé  de  fejetter  en  prenant  pour  contrad:cl:oire  ce  qui  ne  l'ef}: 
pas.  L'Egliié  Catholique  Ibit  un  procédé  tout  opporcjâc  qu-ind 
elle  a  des  marques  certaines  qu'rl  fautprendre  fans  métapho- 
re ce  que  les  Pères  enici2;ntnt ,  elle  n'abandonne  pas  des  veri- 
rez  claires  fur  des  apparences  de  c.oncradiclion  qui  f-ont  fifaci. 
les  à  démêler.  Elle  reçoit  donc  avec  foumiflion  ce  que  S.  Cy- 
rille enfeigne  en  tant  de  lieux ,  que  J.  C.  efi  en  nor/s  Lins  nos  en- 
trailles ,  far  [on  corps ,  par  fa  chair ,  far  fu  -propre  chair,  qu'il  entre , 
qu'il  s'infinuc  ^  fe  mêle  dans  nés  membres  ;  qu'il  nous  cormv.uniqiie 
la  vie  par  [on  corps  ^  quil  e[î  indnhitahle  que  non^  rcffufcitcrons  ^ 
parce  qu'il  efî  en  notis ,  ^  qu'il  nous  joint  enfemble  corporcllc7nent 
^  fpiritnellcîncnt  f ar  jon efprit  ^  par  fon  corps  ,^xvA\q  z\yx.xç.s 
expreflions  aufîî  fortes  qui  ne  fe  peuvent  prendre  pour  méta- 
phoriques fins  renvcrfcrtout  le  langage  humain  ,  &  par  confe- 
quent  toute  la  foy.  Et  elle  n'a  garde  d'abandonner  des  veritcz 
ï\  claires,  fur  le  vain  prétexte  qu'il  fe  trouve  en  d'autres  en- 
droits du  même  S.  Cyrille ,  que  J.  C.  eft  abfent  de  nous ,  qu'il 
n'eft  plus  avec  nous  par  fa  chair,  &:  qu'il  y  eftparfon  efpnt.  Ce 
qui  fe  trouve  aulTi  dans  plufieurs  lieux  de  S.  Auguflin. 

Car  qu'eft-ce  que  toxisces  pafTages  difent  que  ce  que  nous 
avons  vu  dans  ceux  des  Auteurs  pofterieurs  au  fiecle  de  Be. 
renger  que  nous  avons  citez, comme  dans  le  palfage  dep-îugues^ 
de  S.  Viftor,  qui  nous  atllire  ,  quej.  C.  s'efi  retiré  félon  la  pre- 
fence  corporelle  ^  mais  qu'il  efi  demeure  félon  la  fpiritucHc  :  Se- 
€UN  DU  M  pK-efentiam  corporahm  rèce.ffît  ^fedfccundùm  fpiritualem 
remanfit. 

11  eil:  donc  ridicule  de  chercher  des  preuvescontre  la  prefen- 
ce  réelle  dans  des  pafîages  de  cette  nature.Que  fi  l'on  demande 
maintenant' comment  des  Auteurs  perfuadez  de  cette  créance 
ont  pi'iparlcr  delà  forte.il  eft  facile,comme  nous  avons  dit,d'en 

ïli  ij 


1.  -j   in  Evang. 
l-c,i. 


458  Liv.  VI..  ^e  le  coyps  de  Je/us -Chrifi 

chercher  la  raifon  dans  la  manière  donc  refpric  humain  con- 
çoïc  ordinairement  leschofes.  Car  il  faut  par  necelîîcc  que  les 
idées  qu'il  fe  forme  fur  l'dcac  naturel  des  choies  luy  loienc 
beaucoup  plus  prefentes  que  celles  qu'il  fe  forme  fur  ce  que 
Dieu  fait  par  fa  toute-puillance  contre  fes  règles  de  la  nature , 
parce  que  les  premières  font  fans  ceiTe  renouvcllées  par  tous 
les  objets  ^  au  lieu  qu'il  fout  une  application  particulière  de 
l'efprit  aux  veritez  de  la  foy  pour  former  les  autres. 

Or  l'idée  naturelle  que  nous  avons  de  la  prefen  ce  d'un  corps 
n'eftant  formé  que  fur  l'impreiîîon  que  nosfens  reçoivent  des 
corps  que  nous  appelions  prefens^c  eftfans  doute  celle  d'une 
prefence  fenlible  ,  8c  l'on  eft  naturellement  porté  àconfiderer 
:omme  abfens  les  corps  qui  ne  font  pas  preîens  en  cette. ma- 
nière. 

Nous  avons  donc  une  pente  naturelle  à  regarder  le  corps  de 
J.  C.  comme  abfent  de  la  terre ,  &  à  le  confiderer  dans  le  Ciel 
où  il  eft  prefent  de  cette  manière  de  prefence  que  nous  connoif. 
fons.  Et  pour  cette  prefence  qu'il  a  dans  le  Sacrement,  comme 
nous  n'en  fomraes  frappez  que  lorfque  nous  l'y  confiderons 
exprelTement:,  nous  ne  iommes  portez  à  en  parler  que  lorfque 
nous  parlons  expreffement  de  ce  myftere. 

Hors  de  là  les  idées  ordinaires  reviennent  5  &:  comme  nous  en 
avons  deux  à  l'égard  de  ].  C.  l'une  pour  fon  humanité  ,  qui  eft 
celle  d'une  prefence  feiifîble,  l'autre  pour  fa  divinité,  félon  la- 
quelle nous  concevons  qu'il  eft  par  tout  ,  il  n'eft  nullement 
étrange  qu'il  n'y  ait  que  ces  deux  idées  communes  qui  fe  pre- 
fentent  à  l'efprit  ,&queron  dife  ainfi  quej.  C.s'eft  retiré  de 
ce. monde  félon  fon  humanité,  parce  qu'il  a  cefle  d'y  eïlrc  vilî- 
blement  ^  &  qu'il  y  eft  demeuré  félon  fa  divinité. 

Ce  n'eft  pas  que  cette  divifion  foit  exacte  ,  puifqu'outre  les 
deux  manières  de  prefences ,  il  y  en  a  une  troifiéme  qui  eft  la 
prefence.invifible  des  corps.  Mais  commec'eft  uneprefencemi- 
raculeufe,  extraordinaire,  incomprehenfible,  furnaturelle, elle 
n'entre  pas  dans  les  divifions  où  Tonne  confiderequelesefpe- 
fcs  naturelles  &;  ordinaires.  Elle  ne  fe  prefente  pas  même  alors 
à  l'efprit,  fi  ce  n'eft  rarement,  comme  elle  s'cft  prefentée  à 
S  Ainbroife  ,  quand  il  a  écrit:  JV/  Caiflieni  Pihnc  n'ont pof  cala 
puilfancc  de  nous  ravir  I.  C.  (y-  nous  ne  pouvons  jeûner  ,  comme  fi  on 
nous  avait  ofiènoflre  Epoux  ^farce  que  nous  avons  I.C.  (j;- que  nous 
nous  nourrijfons  cie fpncorps  d^  defonfang. 


efi  mangé  corporellement  dans  rEuchariflte.       439 

Les  Miniftrespropofent  d'ordinaire  contre  cette  dodrine  un  Ch.  XII 
paflage  de  S  Chryfoftome ,  où  ils  prétendent  que  ce  Saint  ex- 
horte les  fidellesà  chercher  J.  C.  dans  le  Ciel  au  moment  mê- 
me de  la  communion. 

M.  Claude  fait  des  merveilles  fur  ce  paflage  j  &  comme  je  m.  ciauJc  t. 
me  fuis  quelque  part  obligé  d'en  parler,  je  prendray  cette  occa-  |^^P-i'"^"  ^•'^' 
fi-on  de  dégager  ma  promelîe.  Voici  le  palFage  dont  il  s'agit. 

C'efi  à  cette  union  ynutticUe  que  cette  terrible  O"  redoutable  viEii- 
me  nous  invite.  Elle  nous  commande  de  nous  approcher  d'elle  avec 
tin  cfprit  de  paix  ^  ^^  qtiainfi  cflant  faits  des  aigles  ,  nous  nous  éle- 
vions jufqu  au  Cielméme.  Car  là  oie  [craie  corps  mort ,  la  feront  auljî 
les  aigles.  Jl  appelle  fon  corps  un  corps  mort .,  parce  que  s'ilne  fujî 
mort .,  nous  ne  nous  ferions  jamais  relevez^  Jl  nous  appelle  aujfî des 
aigles  ^  parce  que  ccluy  qui  s' approtkc  de  ce  corps  doit  sftre  tout  ce- 
lefîe  ,  ^  ne  plus  tenir  à  la  terre  j  qu'il  ne  doit  pas  fe  traifner  ni  ram- 
per icy  bas  ,  7nais  fe  porter  en  haut  d'un  vol  continue  f  regarder  le 
Soleil  de  juflice  ,  î^  avoir  l'œil  de  l' entendement  clairvoyant.  Car 
cette  table  efi  la  table  des  aigles  ^  non  des  corneilles. 

AubertinSc  M.  Claude  concluent  de  là  quepuifque  S.  Chry- 
foftomeveut  qu'on  élevé  fon  efprit  au  Ciel  pour  y  chercher 
J.  C.  il  ne  croyoit  donc  pas  qu'il  fuft:  fur  la  terre,  n'y  ayant 
point  d'apparence  de  l'aller  chercher  fi  loin  ,  s'il  eftoit  fi  prés- 

Alais  que  ces  raifonnemens  Font  bien  voir  que  ces  gens  ne 
conçoivent  les  chofes  de  la  Religion  que  d'une  manière  bafle  6c 
charnelle,  &  qu'ils  n'ont  nulle  part  à  cet  efprit  dont  les  Saints 
ont  efté  animer  j  &  qui  les  a.  fait  parler  de  cette  manière  ! 

Pour  faire  fentir  leur  égarement,  il  n'y  a  q«'à  demander  (î 
quand  J.  C.  nous  commandoit  de  dire  à  Dieu  dans  la  prière 
cju'il  n(^us  a  prelcrite;  Noflre  Pcrcqui  cfles  dans  les  Cicux^xX  nous 
vouloit  faire  croire  qu'il  n'eftoit  pas  prefent  au  milieu  de  nous? 
Ç\  le  Prophète  qui  diioit  à  Dieu  :  fay  élevé  mon  ame  vers  vous  ^ 
Seigneur^  qui  habitez^dans  les  C/Va.'c, étoit  perfuadé  que  Dieu  n'é- 
toitaae  dans  le  Ciel ,  &  fi  ceferoit  bien  rai(onner  que  de  dire 
lur  cette  prière  de  David  ,  à  l'imitation  d'Aubertin  :  Qui d  ne. 
ceffc  foret  c  terra  in  coclum  voLirc,fi pcrpropriamfubflantiam  Deum. 
hubcremus  in  terra  pra:fentcm  ? 

C'eft  par  ces  faufies  &  honteufes  fubtilitez  qu'Epifcopius  Se 
les  Remontrants  qui  les  ont  tirées  de  l'école  des  Calviniftes , 
ont  depuis  attaqué  la  plupart  des  myfteres  que  leurs  maiflres 
avoient  épargnez,  Scentr'autresla  prefencede  Dieu  dans  tous 

•es  lieux  du  monde.  Ili  lij 


440        Liv.  VI.  ^e  le  corps  de  fefus-Chrifi 

Mais  pour  les  Catholiques,  ils  n'ont  aucune  peine  à  refifter 
aux  uns  &  aux  autres,  &  à  foûtenir  également  contre  les  Re- 
montrans,  que  ces  paflagesqui  portent  à  regarder  Dieu  comme 
prelenc  dans  le  Ciel  d'une  manière  particulière,  ne  doivent 
point  empêcher  qu'on  ne  le  croye  prefent  par  tout  ^  &  contre 
les  Calviniftes  ,  que  c'cR  une  choie  tres-fainte  &  tres-confor- 
me  à  la  doclrine  Catholique  d'adorer  en  même  temps  J.  C. 
comme  prelent  dans  le  Ciel  &  fur  la  terre  ,  &au  même  temps 
que  l'on  reçoit  Ton  corps  icy  bas,  d'élever  fon  efprit  à  ce  même 
corps  refidant  à  la  droite  de  Dieu.  Chaque  vue  a  fes  utilitez. 
Si  celle  cy  nous  remplit  plus  de  l'admiration  defa  bonté  &  de 
Ton  humilité  :  l'autre  nousinfpire  plus  de  rerpect,  en  nous  met- 
tant plus  vivement  fa  majefté  devant  les  yeux.  Si  l'une  nous  in- 
ftruit  davantage  de  ce  quenous  luy  devons  ,  pour  avoir  bien 
voîilu  demeurer  parmi  nous  5  l'autre  nous  détache  davantage 
de  la  terre ,  en  faifant  que  nous  nous  reprefentons  à  nous-mê- 
mes comme  éloigne?  &  bannis  de  noflre  patrie  &  du  bonheur 
où  nous  afpirons.  Si  l'une  nous  porte  plus  à  l'amour,  l'autre 
excite  plus  noftre  efperance.  Et  comme  tous  ces  mouvemens 
doivent  eftre  joints  dans  l'ame  fidelle,  l'Eglife  en  joint  auffi  les 
motifs  en  portant  fesenfansà  confiderer  J.  C.  de  cette  double 
manière.  Et  c'eft  ce  que  l'Eglife  Grecque  fait  exprefîémcnt  par 
cette  prière  de  fa  liturgie  -.  T^oas  qui  eftcs  aljts  dans  le  Ciel  avec 
voflrc  Pcre  ,  ^  qui  cfies  icy  invijîblemcnt  avec  nous  ^  daignez^par 
•uofire  mainpuiffante  nous  faire  partici-pans  de  vofire  corps  tres-pur 
(jr  de  vo[ire  précieux  fan^ ,.  ^par  nous  tout  le  peuple. 

Voilà  cequ'on  diroit  avecraifon  à  Aubertin  &à  M.  Claude^ 
quand  il  feroit  vray  que  S.  Chryfoflome  nousauroit  voulu  por- 
ter à  aller  chercher  J.  C.  au  Ciel  dans  l'afte  même  deiia  com- 
munion. Mais  ils  font  fî  malheureux  en  preuves,  que  quoiqu'ils 
n'en  puiîènt  rien  conclure ,  il  fe  trouve  de  plus  que  S.  Chryfo- 
ftome  ne  dit  rien  moins  que  ce  qu'ils  luy  font  dire.  Car  il  eft 
clair  qu'il  n'entend  point  parler  d'un  certain  afte  de  devotiori 
qui  fe  doive  pratiquer  àlacommunion,  mais  d'une  difpofirion 
permanente  où  doivent  eftre  les  fidelles  qui  s'en  approchent,& 
qui  efl  fortifiée  par  la  communion  même,  il  faut ,  dit  il  ^que  ce- 
liiy  qui  s'approche  de  ce  corps  ,  foit  élevé  ,  qu'il  ne  tienne  point  À 
la  terre  ,  quil  ne  fe  traifne  point  ^  ne  rampe  point  icy  bof  ,. 
mais  quil   vols    inccffamrncnt  en    haut  ,    à,m   •nlxi'ta.i    J^iytti' 


eji  mangé corporellemmt  dans  tEuchmfl'ie.  44I 
Ceft  donc  une  difpoficion  perpétuelle  qu'il  exprime  ,  êc  non  Ch.  XII. 
une  action  pafîagere.  Et  c'efl  encore  ce  qu'il  marque  bien  net- 
tement, lorfqu'il  àït^que  cette  redoutable  hostie  nous  com- 
mande de  nous  approcher  d'elle- même  avec  une  chanté  h iiLmte ,  qui 
nous  rendant  des  aiqles  nousfaffe  voler  dans  le  Ciel.  Car  cette  cha- 
rité eftant  une  dilpofîtion  permanente,el!e  a  toujours  pour  efFcc 
de  nous  rendre  aigles, &  de  nous  élever  vers  le  Ciel.  Et  S.  Chry- 
foftome  ne  prétend  pas  que  cela  fe  faiïe  plûtod  dans  l'acte  de 
la  Communion  qu'en  un  autre  temps.  Mais  cettecharité  qui 
nous  rend  aigles  félon  luy  ,  qui  nous  fait  voler  vers  le  Ciel ,  qui 
nous  aflemble  autour  du  corps  de  J.  C-  nous  fait  trouver  ce 
ciel  &  ce  corps  dans  l'Euchariftie. 

Et  c'eft  pourquoy  il  marque  exprefTement  que  ces  aigles  s'af- 
femblent  à  cette  table  :  Ce  n'efipas  ,  dit-il ,  la  table  des  corneilles^ 
2w.?;;j-(^^/^/g/w,&  qu'ils  s'y  approchent  du  corps  dej.  C.  Celuy, 
dit-il ,  qui  s'approche  de  ce  corps  ,  c'eft- à- dire  du  corps  de  J.  C. 
dans  l'EuchaFiftie,  doit  ejlre  élevé  (^  ne  point  tenir  à  la  terre  ^mais 
voler  inceffamment  en  haut.  Il  n'entend  donc  pas  le  ciel  à  la  let- 
tre ,  puifque  cette  terre  qu'il  y  oppofe  n'eft  pas  la  terre  où  nous 
fommes,  àlaquelleil  eftimpoflible  que  nous  ne  tenions  point, 
mais  les  pallions  terreftres  dont  il  veut  que  nousfoyons  déga- 
gez. Cependant  c'eft  fur  cette  oppofition  du  ciel  à  la  terre 
qu'Aubertin  prétend  que  S.  Chryfoftomea  voulu  parler  du  ciel 
véritable  :  T^fiatur  fe  pcr  cœlum  locum  fuhlimem  intcHigere  terra: 
çppojtium  ,  &;  qu'il  prend  fujet  de  quereller  Bellarmin  qui  fou- 
tient  le  contraire  5  an  lieu  que  c'eft  juftement  cette  oppofition 
à  une  terre  métaphorique  qui  fait  voir  que  ce  ciel  n'eft  qu'un 
ciel  métaphorique. 


CHAPITRE   XIII. 

Que  la  confideration  de  l' Eucharijlie  comme  mémorial  de  laPadîon 
de  J.  C.  n'efi  point  contraire  a  la  prefçnce  réelle. 

ILn'yauroitriendeplusaifé  que  de  fuivre  dans  l'examen  de 
ce  point  la  même  méthode  qu'on  a  fuivie  dans  les  autres, 
c'eft  à  dire  de  faire  voir  d'abord  par  l'exemple  des  Ecrivams 
Catholiques  qui  ont  écrit  contre  Berenger,  que  cette  vue  de 
i'efprit  qui  regarde  l'Euchanftie  comme  mémorial  de  J.  C. 


44Î.         Liv.  VI.  ^e  le  corps  de  Jefus-Qjrifi 
crucifie  n'a  rien  de  contraire  à  la  fov  de  la  preience.  Mais  parce 
que  M.  Claude  demeure  d'accord  de  ce  langage  ,  &:  qu'il  cite 
luy  même  dans  Ton  livre  contre  le  Père  Nouée  un  endroit  de 
Pierre  Lombard, où  l'Euchariftie  eft  appelléeun  lacrifice&;a«<f 
obi at  ion  ,  parce  que  ce  II  ht  mcmoire  du  facrifice  de  la  croix  :  que 
toutes  les  prières  de  l'Églife  retentiflent  de  ce  terme  àcmemoi- 
re,  que  l'on  y  appelle  par  tout  l'Euchariftie  mémorial  de  la  mort, 
de  J.  C.  Omemoriale  mortis  Domini  !  que  l'on  y  chù.x\tt  y  que  I.  C. 
nous  commandé  de  célébrer  ce  myfiere  en  msmoire  de  fa  mort  ,  je 
crois  pouvoir  fLippofer  ce  langage  comme  autonfc  par  toute 
l'Eglife  depuis  Berenger  i  &:il  ne  refteplusqu'à  demander  aux 
Miniitres  pourquoy  il  leur  plaift  que  ces  deux  vues  de  l'efprit  y 
dont  l'une  regarde  l'Euchariftie  comme  mémoire  de  J.  C.  6c 
l'autre  regarde  J.  C.  comme  prefent,  qui  fe  font  fi  bien  accor- 
dées depuis  600. ans  dans  l'eiprit  de  tous  les  Catholiques, ont 
dû  fe  combattre  neceffiirement  dans  celuy  des  Pères. 

Je  n'ay  qu'à  leur  demander  par  quelle  raifon  ib  veulent  bien 
qu'on  fe  puifî'e  fouvenir  de  Dieu  comme  David  :  Memor  fvi 
JDei  é^  dcleciatus  fum  :  &,  fe  fervir  même  de  toutes  les  images 
que  l'on  veut  pour  s'en  renouveller  fa  mémoire  ,  quoiqu'il 
loit  aduellement  prefent  dans  toutes  ces  images  &  par  tout  5  Se 
qu'il  ne  foit  pas  permis  néanmoins  de  fe  fouvenir  de  J.  C.  pre- 
fent d'une  manière  invifible  dans  l'Eucharillie  ^  &  de  fe  fervir 
de  l'extérieur  de  l'Eucliariftie  pour  renouveller  ce  fauve.- 
Dir  ? 

je  n'ay  qu^à  leur  dire,  comme  on  a  dcja  fait,qu'il  n'y  a  rien  de 
plus  vifiblement  contre  le  fens  commun  que  ce  principe  ima- 
ginaire que  la  mémoire  fuppofe  l'abfence.  Car  la  mémoire 
n'eft  oppofée  qu'à  l'oubli  ,  &  nous  pouvons  nous  fouvenir  de 
routes  îeschofesque  nous  pouvons  oublier.  Or  nous  pouvons 
oublier  une  infinité  de  chofes  prtfentes,  parce  qu'elles  ne  frap- 
pent pas  nos  fens.  Nous  n'oublions  que  tropfouvent  Dieu  en 
qui  nous  fon>mes ,  &en  qui,nous  vivons.  Nous  nous  oublions 
nous  mêmes.  Nous  oublions  que  nous  fommes- environnez  de 
Démons  qui  vont&  viennent  autour  de  nous,  cherchant  l'oc- 
cafion.de  nous  perdre.  Nous  oublions  que  les  Anges  font  avec  ' 
nous  pour'nous  fecourir.  Nous  oublions  nosbiens&  nos  maux, 
&  les  biens  èc  les  maux  de  ceux  avec  qui  nous  vivons,  quoique 
tout  cela  foit  prefent.  Et  comme  nous  pouvons  oublier  les  cho- 
ies, nous  pouvons  auiîinous  en  iouvenir  ^  nous  en  avons  la 

mémoire 


ejî  mmgé  corporeîlement  dans  rSucharifiie.  445 
TOCmoire.  Et  c'eftune  chicannerie  ridicule  à  Aubertin  de  vou-  Ch.  XIII. 
Joir  qu'on  ne  puilfe  appliquer  ce  mot  de  mémoire  à  ces  forces 
de  chofes  fans  le  prendre  en  une  (Ignification  impropre.Car  c'eft 
tellemenc  fa  fignificacion  naturelle  qu'il  n'eft  pas  polliblede 
^'exprimer  plus  proprement.  Ainfi  quand  quelques  Auteurs 
■ont  dit  que  la  mémoire  néregarde  pas  les  choies  prefentes,  il* 
ont  entendu  une  prefence  fenfible  &  non  une  prefence  réelle. 
Tout  ce  qu'ils  ont  voulu  dire  c'elt  qu'on  ne  fe  lert  pas  du  mot 
■de  mémoire  ou  de  fouvenir  pour  marquer  l'application  de  l'ef^ 
prit  aux  chofes  qui  frappent  les  fensque  l'on  ne  fçauroit  en  ef- 
fet oublier. 

Je  n'ay  encore  qu'à  faire  remarquer  qu'il  n'eft  vray  qu'u- 
ne chofe  ne  peut  pas  eftre  le  mémorial  de  foy-même  que  lorf- 
qu'elle  eft  découverte^  mais  que  lorfqu'elle  eft  voilée  ôc  cachée, 
bien  loin  qu'elle  ne  puiflTe  eftre  un  mémorial  d'elle-même  ,  il  eft 
impoflible  qu'elle  ne  le  foit  pas  à  l'égard  de  ceux  qui  fçavent 
qu'elle  eft  cachée  fous  ce  voile.  Et  cela  eft  fi  vray  que  comme  la 
veuë  de  l'hoftie  faitreflbuvenir  les  Catholiques  que  J.  C.  eft 
prefent  j  elle  fait  auflî  reflouvenir  les  Calviniftes,  qui  ne  le 
croyent  pas  prefent ,  que  les  Catholiques  le  croyent.  Tant  il  eft 
vray  que  le  voile  excite  naturellement  la  mémoire  de  tout  ce 
que  l'on  croit  qu'il  couvre. 

Je  n'ay  qu'à  leur  répondre  que  quand  on  veut  reprefenter 
des  gens  en  un  certain  eftat ,  ce  n'eft  que  le  défaut  de  leur 
propre  prefence,  qui  oblige  de  retournera  d'autres  fortes  de 
fîgnes. 

Enfin  il  n'y  a  qu'à  propofer  cinq  ou  fix  pafi^gesoù  les  Pères 
en  reconnoiflant  clairement  là  prefence  réelle  ne  laiftent  pas 
de  regarder  l'Euchariftie  comme  mémorial  de  lapaffion.  En 
voicy  quelques-uns  de  ce  genre. 

S.  Chryioftome  dans  l'homélie  17.  fur  l'Epiftre  aux  Hé- 
breux parle  en  ces  termes ,  félon  que  M.  Claude  les  traduit  luy- 
mêmedans  (on  livre  contre  le  Père  Noiiet.  Q^oy  donc  \  cfi-ce 
qtce  nous  n'offrons  paf  tons  les  jour  s}  "Nous  offrons^  il  efi  vray,  mais 
nous  faifons  la.  commémoration  de  fa,  mort  y  ^  cette  ablation  efi 
une  ^^  non  plufieurs .  Cotnmtnt  efi-e/Ie  une  ^  non  plufieurs  ?  par- 
ce qu'elle  a  efi ê  offerte  une  fors,  CcUe-la  a.  eflé  tranf^ortée  dans  le 
Saint  des  Saints  ^  ^  cecy  en  efi  une  figure ,  ^^  la  même.  Car  nous 
offrons  toiijours  le  même  I.  C.  non  maintenant  un  autre,  mais  to«- 
jours  le  même.  Et  pour  cette  raifon  <'efi  un  même  facnfice.  Efi- ce 

KKk 


444  ^^v.  V  I  ^e  le  corps  de  Jefus-Chrifi 

qu'il  y  a  plujicurs  Chrifis ,  farce  qu'il  efi  ojjert  en  plufieurs  lieux} 
2^ on  -.mais  c'eft puTtoutun  même  J.  C.quteji  entier  icy,  (^  là.  un 
feul  corps.  En  la,  mefme forte  donc  queflant  offert  en  pluffeun  lieux^ 
c'efl  un  fcul  corps ^  non  pluficurs  :  .Ainfi  c'cfi  un  mefme  (acrifice. 
l^ojlrc  Jouverain  Sacrificateur  efi  celuy  qui  a  offert  le  facrifice  par 
lequel  nous  fomtnes  punficz^^  (jK  nous  offrons  maintenant  le  mefme 
qui  fut  offert  alors .^  ^  qui  ne  peut  eftre  eonfumé.  Cecy  fe  fait  en 
commemonition  de  ce  qui  fe  fît  alors  :  Faites  cecy,  dit- il ,  en  com- 
mémoration de  moy.  Ce  îiefi  pas  un  autre  facrifice  comme  ceux  de 
l'ancien  Sactificateur.  N'eus  fiifons  toujours  les  mefme  s  ou  pour 
mieux  dire  nous  en  faifons  la  cortmiemoration. 

Les  refilexioniqui  oncefté  faites  fur  ce  paflàgedans  le  fécond 
2.  Perp.i.i.c.  Xome  de  cet  ouvrage  prouvent  manifeftement  que  S.  Chryfo- 
'■-  ?•  '■>-'  ftome  y  fuppoie  la  preîence  réelle  &  détruit  toutes  \qs  chicane- 
ries des  Calviniftes.  Cependant  il  y  eft  dit  plufieurs  fois  que 
nous  hiilons/^  commémoration  de  lamortde  I.C.  q^mqcqc'^  fe  fait 
en  commémoration  de  cette  mort  :  Tant  les  Pères  ont  peu  penfé  à 
la  contrariété  prétendue  que  les  Mmiftres  veulent  mettre  entre 
eftre  inftituë  pour  eftre  le  mémorial  de  la  mort  de  J.  C.&  con. 
tenir  néanmoins  réellement   J.  C. 

Il  y  a  une  difficulté  de  Critique  fur  la  première  partie  de  ce 
patfage  dans  laquelle  M.  Claude  abandonne  avec  raifon  Au- 
bertm.  Car  au  lieu  de  ces  termes:  Nous  offrons  .^il  efi  vray  •  mais 
nous  fuifons  co?nmemoration  de  fa  mort ^  Aubertin  prétend  qu'on 
devoit  traduire  :  Offerimus  :  irno  tncmoriam  facimtis  mortis  ejrcs. 
C'eft  à  dire  félon  ion  fens^  nous  offrons,  ou  piùtoftnous  ifai- 
Ibns  commémoration  de  fa  mort.  Mais  la  critique  d'Aubertin 
eft  tout  à  fait  fauiîe.  Car  la  partie uleetAXà^dontS.  Chryfofto- 
me  fe  fert  n'eft  pasdeftruélive  dece  qui  eft  étably,  comme  la 
particule  /wo,  qui  fubftituc  une  nouvelle  idée  à  la  place  de  celle 
qu'elle  bannit.  Ainfi  c'eft  corrompre  le  iens  de  S.  Chryfoftome 
que  de  traduire  ce  qu'il  exprime  par  «AÀrt,  par  le  terme  imo^ou 
potiusautem,  comme  il  fait  en  un  autre  endroit. 

On  voit  encore   clairement  l'union  de  la  qualité  de  mémo- 
rial avec  la  prefence  réelle  dans  ces  pafTages  de  S.  Cyrille  fur  S. 
1104  Jean  .•  Zes  paroles  de  l'Eglife  efiant formées  f.  C.  furvient,  ^  nous 

paroi/}  invifiblement  comme  Dieu  j  (^  vifblement  par  [on  corpsr 
0-  il  nous  permet  de  toucher  fa  ficrée  chair.  Aiyift  ufint  de  la  grâce 
que  Dieu  nous  fait  ,  nous  approchons  de  luy  pour  participer  k 
l'euloye  myftique  ^  recevant  J.  Q.  dans  nos  mains .,  croyant  ferme- 


efi  ma,ngé  coYporellement  dans  t EuchArijîte .        445- 

^ent  qu  il  il  véritablement  njfufcitè  fon  corps.  Car  que  la  conimu-  Ch.XIIL 
nion  à  l'eulogie  myjîique  fait  la  confcMon    de   la    refurreclion  de 
J.  C.  il  paraifira  facilement  parles  chofes  quil  a  dites  ^  lorfqtiil 
fit  parluy-mefme  le  type  de  ce  myjlere. 

Cette  prefence  invifiblcde  J.C  comme  Dieu  que  l'on  ne 
içauroic  faire  paiFer  pour  métaphorique  ,  ne  permet  pas  non 
plus  que  l'on  prenne  pour  figure  cette  prefence  du  corps  de  J.  C. 
«lont  il  efb  parlé  dans  ce  lieu.  C'eft  donc  auffi  ce  J.  C.  prelenc 
par  Ton  corps  qui  eft  reçu  dans  les  mains.  Cependant  (elon  S. 
Cyrille^  cette  réception  efl  une  confljion  de  fa  refurreclion  ,  c'eft  à 
dire  que  c'en  eft  un  mémorial. 

Il  y  a  une  infinité  d'autres  lieux,  où  les  Pères  en  même  temps 
qu'ils établilîent  le  plus  fortement  la  prefence  réelle,  nelaifienc 
pas  de  reconnoiftre  dans  l'Eucbariftie  cette  qualité  de  me- 
xiiorial. 

Nous  annon(^ons .,  dit  le  Concile  tenu  à  Alexandrie  contre 
Neftorius  ,  Umort  qu'a  fouffert félon  la  chair  J.  C.  Fils  unique 
de  Dieu  (^  fa  refurreclion  d'entre  les  morts  g?-  fon  Afcenfon  dans 
le  ciel^  en  célébrant  dans  les  Ez^lifes  le  fa  cri  fie  e  non  fanqjant.  Voi- 
la la  qualité  de  mémorial  bien  marquée^  mais  la  prefence  réelle 
ne  le  fera  pas  moins  par  la  fuite  du  paflagc.  Amfinous  approchons 
de  l'Ettlogiemyfiiqiie,^nous  fommes  fanHtfîc\  parla  participation 
de  la  fainte  chair  ^  du  précieux  fan^  de  I.  C.  Sauveur  de  tous.  Car 
nous  ne  la  prenons  pas  comme  une  chair  commune,  à  Dieu  ne  plaife.^ 
ny  comme  la  chair  d'un  homme  fanctifié.,  ^  joint  au  T^erhc  par  une 
union  de  di<înité  ou  d'habitation  divine..^  mais  comme  cftant  véritable- 
tuent  vivifiante  t^  la  propre  chair  du    Verbe. 

Les  Hébreux  ^  dit  S.    Auguftin  ,   cclebroicnt  par  les  viclimes 
^u^ils  offraient  à  Dieu  en  diverfes  manières  félon  qu'il    efioit  con-  Cont.  Fauft, 
venable^^là  Prophétie  de  la  victime  future  que  I.C.  a  offerte  fur  la  ^'  ^'   '*• 
Croix'}  (j;- les  Chreffiens   célèbrent  la  mémoire  de  ce  (acrifice  accom- 
fli  par  l'ohlation  fainte  ^  par  la  participation  au  corps  (^  aufang 
de  J.  C. 

Ainfi  félon  ce  Pcre,  c'eft  par  l'ohlation  même  du  corps  de 
J.  C.  qu'on  célèbre  cette  mémoire,  bien  loin  que  la  célébra- 
tion de  cette  mémoire  [oit  incompatible  avec  la  prefence  de  ce 
corps. 

Si  les  Pères  n'avoient  jamais  parlé  que  de  cette  forte  de  la 
qualité  de  mémorial  qu'ils  donnent  à  l'Eucbariftie,  les  Mini- 
tftrjcs  n'auroient-ils  pas  honte  de  s'en  fervir  contre  la  prefence 

KKkij 


440  I-iv.  Vï.  ^e  le  corps  de  fejus.['hrifi' 

réelle  ?  mais  en  font  ils  plusexcufables  foui  ombre  que  les  Pè- 
res parlent  quelquefois  différemment?  Car  encore  qu'ils  parlent 
de  l'Euchariftie  en  quelques  endroits  comme  d'un  facrificede 
mémoire  fans  marquer  expreflèment  la  realité  ,  ne  fuffit  il  pas 
qu'ils  la  marquent  en  d'autres  ,  pour  conclura  qu'ils  l'ont  tou- 
jours crue  ?Ne  fuffit-il  par  qu'ils  unifTent  quelquefois  ces  deux 
qualitez,  de  contenir  réellement  J.  C.  &  d'eftre  un  mémorial 
de  fa  pafîîion,  pour  conclure  qu'elles  l'eftoient  toujours  dans 
leur  eiprit,  quoyqu'ilsayent  efté  portez  par  desveuës  différen- 
tes à  exprimer  quelquefois.  Tune  fans  l'autre  ? 

Car  enfin  il  eft  tres-vray  que  ce  que  les  Pères  ont  dit  piu- 
lîeurs  fois,  ils  l'ont  toujours  penfé.  Mais  il  n'eft  pas  vray  qu'ils 
ayencdeu  exprimer  en  tous  lieux  ^  tout  ce  qui  eftoit  dans 
leurs  efprits.  Car  pourquoy  quand  Aubertin  conclut  en  un  en- 
droit que  Tertulienen  difantquej.  Ç.  aconfacréle  vin  en 
mémoire  de  fon  {■xv\<^^quoà  in  fanyiinis  fui memoriam  confecravity 
n'a  peu  remarquer  par  cette  exprelTion  que  J.  C.  ait  changé  le 
vin  en  la  fubftance  de  fon  fang  ,  il  tire  une  conclufion  qui  eft 
vraye  en  un  fens,  mais  inutile,  &:  qui  eu  tres-lauiîè  en  un 
autre. 

Il  efl  vray  que  cette  expreflîon  ne  fîgnifie  point  du  tout  litté- 
ralement que  J.  C.  ait  changé  le  vin  en  la  fubftance  de  fon 
fang  :  mais  elJe  n'exclut  pas  auffi  ce  changement 

Or  comme  il  y  a  des  expreflîons  qui  contiennent  la  fubftan- 
ce  de  la  foy,^^  d'autres  qui  fans  l'exclure  renferment  d'autres 
circonftances  des.  My fteres  j  celle  cy  eft  de  ce  dernier  genre. 
Elle  ne  marque  par  elle-même  frnon  que  I.  C  fit  le  vin  par  la 
confecration  le  mémorial  de  ion  fang.  Mais  comme  cette  cir- 
conftance  eiloit  jointe  dans  l'efprit  des  fidelles  avec  la  fubftan- 
ee  du  myftere  ,elleen  excitoit  l'idée  entière  :  de  même  que 
quand  on  die  aux  Catholiques  que  \.  C.  fit  du  pain  le  Sacrement 
de  fon  corps,  ils  entendent  qu'il  en  fit  un  Sacrement  qui  con- 
tient fon  corps. 

Il  n'y  a  donc  rien  qui  foit  plus  contre  le  bon  fens  que  de  vou- 
loir juger  de  toute  la  doctrine  des  Auteurs,  &  déroute  la  foy 
de  l'Eglife  de  leur  fiecle  par  cts  expreflions  imparfaites  quL 
n'en  font  connoiftre  qu'une  partie.  Et  la  juftelTe  de  l'efprit  &L 
la  bonne  foy  veulent  qu'on  juge  des  expreffions  par  celles  oit 
les  Pères  fe  font  expliquez  plus  amplement, &oùiIs  ont  réu- 
ni dans  leurs  difcours  cesdiverfes  parties  de  leur  dodrinequi 
«ftoienc  unies  dans  leur  efprit. 


eji  mangé  corporellcment  dans  ÎEnchuriflie.  447 
Que  s'il  u'elloic  pas  contraire  à  la  créance  que  le  corps  de  J .  C.  Ch.  XIII, 
eft  prefent  réellemenc  dans  l'Euchariftie,  de  donnera  ce  Sa- 
crement la  qualité  de  mémorial ^  il  ne  faut  pas  croire  que  celle 
de  gage,/>/^«a;,y  loit  plus  oppolëe,  puifque  ceux  qui  ont  ap- 
pliqué ce  terme  à  TEuchariftie^  n'entendent  par  là  qu'un  pre- 
fent donné  pour  nous  conferver  le  fouvenir  de  TafFedion  qu'a 
pour  nous  celuy  qui  l'a  donné.  C'efl:  ce  qui  paroift  par  le  pafla- 
ge  qu'Aubertm  &  M.  Claude  citent  fur  ce  fujet.  U  eft  tiré  d'un 
commentaire  qui  fe  trouve  entre  les  Oeuvres  de  S.  Jerofme, 
mais  qui  eft  le  Pelage  ou  de  quelque  Pelagien, 

Cet  Auteur  fuppofant  lefens  littéral  des  paroles  de  l'inftitu- 
tion  de  l'Euchariftie  comme  n'ayant  pas  befoin  de  commentai- 
te,  s'attache  à  éclaircir  la  fin  pour  laquelle  J.  C.a  inftitué  ce 
myftere,  qui  eft  marquée  par  ces  paroles  ;  Faites  cecy  en  mé- 
moire de  moy.  J.  C.  dit  ilj  efiant  prefi  de  fouffrirnous  a  Luffc ce 
dernier  mémorial  de  luy-mème.  il  a  fait  en  cela  comme  un  homme 
ifui  devant  faire  un  long  voyage  laifjc  un  gage  a  fon  amy  ,  qui  luy 
puiffe  renouveller  le  fouvenir  de  (es  bienfaits  ^  de  fon  affecHon. 
Qite  fî  cet  amy  a  four  luy  réciproquement  un  amour  fine  ère  ^  il  ns 
fcauroit  voir  ce  gage  fans  verfer  dxs  larmes  ^  fans  efire  touchi 
d'un  extr'em.e  regret. 

Ce  paftage  eft  fi  éloigne  de  cîioquer  les  idées  qu'aTEglifê  • 

Catholique  du  myftere  de  l'Euchariftie,  qu'on  le  voit  cite  par 
des  Auteurs  qui  ont  écrit  depuis  Berenger^  qui  n'ont  par  cru- 
pouvoir  donner  une  inftruction  plus  tendre  &  plus  importante 
que  celle  qu'il  contient.  Gérard  deZutphenqui  vivoit  au  qua- 
torzième fiecle,  &:  dont  on  voit  un  traité  intitulé  delà  Répara- 
tion des  forces  de  l'amej  imprimé  dans  la  Bibliothèque  des  Pè- 
tes, le  cite  deux  fois  dans  ce  petit  ouvrage,  feavoir  au  premier  ^'biior.  patr, 
livre  chap.  27.  &  au  fécond  chap.  3.  Mais  comme  les  Miniftres  °'"'  ^"  "*' 
ne  laifiTènt  pas  d'inlîfter  fur  cette  qualité  de  gage  ,  il  ne  fera 
pas  inutile  d'inférer  icy  la  réponfe  que  M.  le  Cardinal  de  Perron 
y  a  faite  dans  l'examen  du  pafiage  tiré  de  ce  commentaire  donc 
nous  avons  parlé,  &  de  juftifier  cette  réponfe  contre  leschicane- 
ries  d'Aubertin.  Ce  Hierofme  Apocriphe,  dit  ce  Cardinal,  écrit  ^^ 
que  no^re  Seigneur  s' eft  comporte  comme  ceux  qui  ayant  à  faire  un 
voyage  en  pais  lointain.^  laijjent  quelques  gages  à  leurs  amis^  afin 
qu^en  le  voyant  ils  fe  fouviennent  de  Icu  r  amitié  Q"  ^^  l^^^'^  bienfaits. 
Etdelàqueremporteralefieur  duPlefiis?N'appellons-nouspas/ 
cous  les  jours  les  corps  Se  les  reliques  des  Martyrs ,  gnges  &  oft^..  " 

kkkiij 


448  î-rv.  VI.  ^e  le  corps  de  Jeftis.QonH 

»t  go  ,  tant  de  leur  afllftance&interceffionence  fiecle,  quedelear 

15  refurredion  &:  prefence  future  en  l'autre'  A  la  Mémoire  du  Mar. 

A  "•  de  S   "  ty>\à\z  S.  AugLiftin  ,  parlant  des  Reliques   de  S.  Eftienne  ,  que 

Stcph.     "  )■)  tranfportoit  l'Evefque  Projettus  .  affluait  une  grande  concurrence 

«om,  7.    „  (^occurrence  de  multitude.  La  une  femme  aveugle  pria  quelle  fufi 

,,,■>■>  mcnéea  l' Evefque  qui  portait  les  gages  sacrez.  Et  S.  Ambroife. 

vid.  *  '      »»  il  nous  faut  prier  les   Martyrs^  dcfquels  nous  femblons  nous  vendi- 

ti  quer  un  certain  patronage  par  le  gage  de  leurs  corps.  Et  ne  proteftons^ 

11  nous  pas  tous  les  jours  que  la  prefence  invifible  du  corps  du  Sei- 

»»  gncur  fous  lesefpecesdu  Sacrement,  nouseftungage&un  ofta- 

»■,  ge  tant  de  faproteârion  invifible  en  ce  monde,  que  de  la  joùif- 

«I  fance  de  la  prefence  invifible  en  Tautre ,  lorfque  nous  luy  ferons 

i>  faits  femblables,  pourceque  nous  le  verrons  comme  ilefl: ,  à 

n  fcavoir  avec  la  fplendeur  de  fa  gloire  fur  laquelle  les  Anges  s'é- 

>,  jouifTent  de  jecter  les  yeux  ? 

„    Et  de  fait  quel  autre  allez  digne  gage  nous  pouvoit-il  laiflèr 

„  de  luy- me  ne  en  fa  propre  efpece  6c  figure,  que  luy, même  fous 

,,  une  autre  efpece  &  figure  ?  veu  que  tout  gage,  pour  eftre  vray 

•)■,  gage, doit  avoir  quelque  proportion  de  prix  &  de  valeur  avec 

„  la  chofe  dont  il  eft  gage.  Suivant  ce  que  dit  le  vray  S.  Jerofme  fur 

fîier ,   i"  11  ces  mots  de  S.  Paul  :  Z'efprit  qui  efl  le  gage  de   nofire   héritage^ 

*P-  ^^'      ,,  comme  de  l'arrhe.,  s'cflimequcl  fera  l'achapt  &c.  ainji  de  la  variété 

^  '  ,5  del'arrhe,  fè  juge  la  grandeur   de  l'héritage  futur  ;  ^  qu'il  n'y  a 

,1  nul/e  proportion  de  prix  entre  la  créature^  gr  le  Créateur. 

î»  pf.    81.  "       S-  Auguftin  ne  dit-il  pas ,  l'Epoux  donne  pour  arrhe  à  fin  Epoufe 

^1  fin  fang  (jS  fon   Efprit,  dont  il  nous  a  cependant  enrichi  en  ce  pelé. 

»,  rinage  :  mais  il  nons  garde  encore  fe s  richeffes  cachées.  Carpuifqu'il 

„  nous  a  donné  un  tel  gage  ,  que  doit'efire  ce  qu'il  nous  garde?  Et  S. 

„  Chryfoftomc  ne  crie  -t-il  pas  parlant  de  propos  délibéré  de  l'Eu- 

S»  Joau,    ^^  chanftie:  Celuy  qui  s'exhibe  ainfi  à  nous  en  cette  vie  .^  combien 

id""  t  '^"  •,»  plits  encore  en  la  future?  Et  ailleurs:  ^  partant  ne  perdons  point 

t.  ad  pop."  „  courage,  ne  nous  défilons  point  .^  ^n'appréhendons  point  la  difficuL 

Antiock-     ^^  ^^'  ^^^  {gj^p^^  Car  celuy  qui  n'apoint  refufè  d'èpandre  fon  fang  ne  re- 

„  fufera  rien  pour  nofire  filu/t?  Et  Gandentius  Evefque  de  Brefl^ 

„  leur  contemporain,  ne  prononce-t-  il  pas  en  termes  encore  plus 

,j  exprex  :  Cétuy-cyefi  levray  prefent  héréditaire  du  nouveau  Tefla- 

Gïwd.   tr.  ,>  ment.,lequel  en  la  nuit  où  il  fut  livré  pour  ejire  crucifié,  il  nous  laiffa 

''y^^^'^^o^'^- ^t  comme  un  gage  de  fa  prefence  ">  Y^t^Ç^n  (\\iQ  nous  ne  penfions  pa» 

,,  que  ce  gage  foitautre  fubftance  que  fon  propre  corps,  ne  crie- 

,,  cil  ^3.s:  Le  mime  Seigneur  ^  Créateur  des  natures  ^  qui  produit' 


eB  7na,ngé  corporellement  dans  t Euchiirifiie,         449 

de  la  terre  le  pain  :  du  pain  derechcfyource  qu'il  le  peut  é"  l<^  p'o-  Cm.  XIII 
mis,  fait  fun  propre  corps  i  é"  ItfJ  qtii  de  l'eau  a  fait  le  vin  ,  du  vin  „ 
fait  audi  fon  fang. 

Mais  l'Auteur  du  fieur  du  Pleffis,  répliquera  t  on  ,  compare  ** 
noftre  Seigneur  à  un  amy  s'en  allant  à  un  païs  lointain  qui  laiC  *' 
ie  un  gage  à  Ton  amy.  Or  le  gage  qu'un  amy  s'en  allant  à  un  " 
paie  lomtain  laifFeà  Ton  amy ,  n'eft  pas  Ton  propre  corps.  Et  a  "  Aug.  i 
quelle  fimilitude  ^  dit  S.  Auguftin,  a  jamais  efié  déférée  en  dif  "  P^-  ^°^ 
futant  une  fi  qrande  ccnvcnance ^  quelle  Je  puijfe  accomr/îoder  en  " 
tout  ^  par  tout  à  la  chofe  à  laquelle  elle  efi  appliquée ,  &■  quand  '' 
eji-ce ,  ajoute  t  il  ,  qu'il  fe peut  tirerrien  de  (cmhlable  de  la  créa-  ' 
ture  au  Créateur  ?  L'Auteur  du  fieur  du  Pleffis  compare  l'Eucha-  " 
riftie  avec  les  autres  gages  en  la  condition  qu'ils  ont  de  pouvoir  " 
exciter  la  fouvenance  de  l'amitié  &  des  bien-faits  de  ceux  qui  " 
les  laiiïènt  ;  mais  non  pas  en  la  condition  qu'ils  ont  de  ne  pou  " 
voir  pas  eftre  les  dons  &  les  donateurs  tout  enfemblej  les  gages  " 
&les  confignateurs  des  gages  tout  enfemble  :  Non  plus  que  '*■ 
quand  noftre  Seigneur  compare  Ton  Père  avec  un  père  de  fa-  ''^ 
mille  qui  envoya  Ton  fils  à  la  vigne ,  il  ne  le  compare  pas  en  ce  '* 
que  le  Perc  de  famille  en  envoyant  fon  fils ,  ne  le  retint  pas  ef-  " 
ientiellementavecluy  ,ny  en  ce  que  le  père  de  famille  &. le  fils  " 
defamille  ne  font  pas  une  même  fubftance  en  nombre  ;  mais  en  " 
ce  que  comme  le  fils  de  famille  meritoitd'eftre  traité  des  Fer-  '* 
miers  avec  plus  derefped;  que  les  ferviteurs  -,  ainfi  les  juifs  de-  " 
voient  porter  plus  de  révérence  au  Fils  de  Dieu  qu'à  fes  Pro-  " 
phetes.  " 

Ainfi  il  compare  l'Euchariftie  a^ec  les  gages  humains  en  la  '*  • 
condition  qu'ils  ont  d'exciter  la  mémoire  de  leurs  donateurs;  " 
mais  il  ne  la  compare  pas  avec  eux  en  la  condition  qu'ils  ont" 
denepouvoir  paseftreles  dons&  les  donateurs  tout  enfemble.  ''^ 
Il  la  compare  avec  eux  en  ce  qu'ils  ont  de  perfedion  &  depuif-  '^ 
fancei  mais  non  pas  en  ce  qu'ils  ont  d'imperfeclion  ou  d'impuil-  '' 
fance.Car  ce  que  les  gages  humains  ne  font  pas  les  dons  &:  les  do-  '' 
Dateurs  tout  enfemble  vient  de  l'imbécillité  des  hommes,  qui  '' 
ne  peuvent  pas  en  emportant  leurs  corps  avec  eux,  les  lailTer  en  '' 
même  tempsà  leurs  femmes,  enfans  &  amis.-chofe  qu'ils  feroient  "■ 
volontiers  s'ils  le  pouvoicnc^  afin  de  leur  configner  des  gages'' 
plus  réels  de  leur  afFedion  :  Là  où  notre  Seigneur  eftantmeu  de  '' 
pareille  volonté,  n'efb  pas  retenu  dépareille  infirmité.  Melie,*'- 
dit  S.  Chryfoftome, /<î///I/  fonmanteauitfonDifciplej^  le  J^ils"^^ 


45»  Liv.  VI.  ^e  le  corps  de  Jefus-Qhrifl 

de  Dieu  montant  du  ciel  nous  aLiiffé  fa  chair.  Mais  Helie  le  laiffa 
en  s'en  dépouillante  Là  où  Chrifi  nous  l'alaijjee^  d^  eft  monté  l'ayant 
avec  luy.  Et  pour  ce  comme  l'Auteur  du  fieur  du  PlefTis  confère 
ce  Sacrement  avec  les  autres  gages  en  cette  convenance  qu'ils 
font  propres  pour  ramentevoir  l'amitié  6c  les  bienfaits  de  ceux 
qui  les  laiflent:  aufll  ledifcerne-c-il  d'eux  encctte  différence^  qu'il 
eft  le  gage  &:  le  corps  du  confignateur  du  gage  tout  enfcmble, 
c'eft-à- dire  en  fomme  comme  il  ouvre  &;  délie  la  bouche  au 
fieur  du  Pleflîs  lorfqu'il  écrit  -,  Noftre  Seigneur  a  fait  comme  un 
homme  qui  entre prenantun  long  voyage.^  ^^iff^  quelque  gage  à  fin  amy 
afin  qu'il  fe  puiffe  reffouvenir  de  [on  amitié  ^  de  fes  bienfait  si 
ainfi  la  luy  ferme-t-il  toft  après  lorfqu'il  ajoute:  A  cett£  caufe 
nous  fommes  admonefiez^  par  les  Preftres  ,  quand  nous  le  prenons^ 
que  c'eflle  corps  &  fang  de  J.C.  afin  que  nous  ne  foyons  point  in- 
grats a  fes  bénéfices. 

Les  défaites  par  oh.  Aubertin  prétend  éluder  cette  répoofè  fî 
folide  font  tout  à  fait  rares  &  dignes  de  luy.  Il  dit  d'abord  qu'il 
n'y  a  pas  de  rapport  entre  l'Euchariftie  &  les  exemples  allé- 
guez parle  Cardinal  du  Perron  5  parce  que  dans  ceux-cy  il 
y  a  différence  entre  le  gage  &:  la  chofe  même^  que  les  corps  des 
Martyrs  ne  font  pas  leurs  âmes,  qu'ils  ne  font  pas  les  perfon- 
nes  donrils  font  les  gages  5  que  le  fang  de  J.  C.  eft  différent 
de  la  gloire  dont  il  eft  le  gage ,  félon  S.  Auguftin  ScS.  Chryfo- 
ftome. 

Mais  comment  ce  Miniftre  n'a-t-il  pas  veu  combien  tout  cela 
eftoit  vain  &  inutile?  Car  premièrement  cette  prétendue  dif- 
tindion  réelle  qu'il  exige  entre  1  e  gage  &  la  chofe  même  n'a 
aucun  fondement  dans  la  raifon.  Il  fuffit  qu'il  y  ait  une  diftin- 
élion  d'eftat.  Si  j'avois  promis  à  quelqu'un  un  diamant  mis  en 
œuvre  J  pourquoy  ne  luy  pourrois  je  pas  donner  pour  gage  de 
ma  promeffe  le  même  diamant  que  j'aurois  deffein  de  luy  don- 
ner en  cff>.'t  lorfqu'il  feroitenchâffé  ? 

2.  Il  eft-  facile  de  trouver  tou'-e  la  diftindion  qu'il  de- 
mande entre  le  corps  de  J.  C.  &  la  chofe  dont  il  eft  gage.  Car 
cette  chofe  n'eft  pas  proprement  le  corps  de  J.  C.  c'eft  fon 
amour;  c'eft  fa  protedion,  c'eft  la  2;loirc  qu'il  nous  a  promifè. 
Le  corps  de  J.  C.  nous  eft  un  gage  de  tout  cela.  Il  y  a  donc  au- 
tant de  diftindion  entre  le  corps  de  J.  C.  confideré  comme  ga- 
ge dans  l'Euchariftie,  &  la  chofe  dont  il  eft  gage  ,  qu'entre  les 

corps 


eji  mxngé  corporelîement  dans  lEucha.rifiie.        451 
corps  des  Martyrs ,  conflderez  comme  gages ,  &:la  protection  Ch.  XIIL 
des  Martyrs,  entre  lefangde  J.  C.&leS.  Efpric ,  ou  la  gloire 
des  entans  de  Dieu 

Ce  que  ce  Miniftre  ajoute  qu'un  homme  qui  s'en  va  en  voya- 
ge ne  Te  laifTe  pas  luy-même  en  gage  i  &  quainfî  J.  C.  n'a  pu 
laiflèr  Ton  corps  fur  la  terre  en  s'en  allant  au  Ciel,  eft  d'auill 
mauvais  fens  qu'une  chicanerie  le  peut  eftre. 

Car  il  ne  s'agit  nullement  de  fçavoir  fi  un  homme  peut  felaif 
fer  en  gage  en  s'en  allant.  Il  eft  queftion  fi  cela  répugne  à  la 
qualité  de  gage.  Si  les  hommes  ne  le  font  pas,  c'efl:  leur  im- 
pui/Tance  qui  les  en  empêche.  Mais  s'ils  le  pouvoient  faire ,  ôc 
qu'il  leur  fïit  poffible  de  fe  multiplier,  Se  qu'ils  puffent  fe  laiiîer 
d'une  manière  au  même  temps  qu'on  les  perdroit  en  une  autre, 
ce  feroit  le  gage  le  plus  naturel  qu'ils  pulfent  donner  de  leur 
afFecldon.  Et  en  effet  il  eft  alfez  ordinaire  aux  Rois  de  retenir 
des  gens  à  leur  Cour  pour  s'alTurer  de  leur  fidélité.  Ainfi  la  pre- 
iênce  de  leur  propre  perfonne  eft  en  même  temps  le  gaf!;e 
d'eux-mêmes  comme  fidelles.  Il  eft  vray  qu'ils  ne  foiK  pas  prc- 
fens&  abfenstout  eniemble  ^  mais  perfonne  n'a  dit  auili  qu'on 
puft  imiter  ce  qu'il  y  a  de  miraculeux  &  de  furnaturel  dans  ce 
myftere.  Et  je  ne  crois  pas  que  les  Miniftres  prétendent  qu'il 
n'y  ait  rien  dans  les  myfteres  de  la  Religion  ,  dont  on  ne  puifTe 
donner  des  exemples  dans  la  nature. 

Aubertin  a  recours  enfuite  à  quantité  de  petits  argumens  qui 
ne  font  que  des  fophifmes  tout  purs. 

Ce  que  J.  C.  laifîa  comme  un  gage ,  dit  il,  félon  cet  Auteur, 
n'eft  autre  chofe  que  le  pain,  qu'il  avoit  béni  &  rompu.  Or  ce 
pain  n'eft  pas  le  corps  de  J.  C.  Donc  &c.  Je  réponds  en  un  mot 
que  ce  que  J.  C.  laifîa  comme  un  g  ge  efl  le  pain  confacré  ,  & 
que  le  pain  confacré  eft  le  corps  de  J.  C. 

Ce  que  J.  C.laiffa ,  dit- il  encore,  eft  un  fujet  vifible,  puifqu'il 
dit  que  ce  gage  eft  tel,  que  l'ami  en  le  voyant  eft  touché  de  re- 
gret. Or  le  corps  de  J.  C.  n'eft  pas  vifihle,&c.  Je  réponds  que  le 
corpisdeJ.C.eft  vifible  dans  rEuchariftie|r.ar  le  voile  qui  le  mar- 
que comme  le  corps  d'un  homme  eft  vifible  par  fes  habits. 

Le  gage,  dit-il  ,  dont  parle  cet  Auteur  ,eft  lailTépour  fervir 
de  mémorial  de  l'ami  abfent.  Donc  ce  ne  peut  eftre  le  corps 
de  J.  C.  qui  ne  fçauroit  eftre  abfent  &  prefent.  Je  réponds 
^ue  le  corps  de  J.  C.  peut  eftre  abfent  &  prefent  félon  divers 

LLL 


452>    liv.  V I.  ^iû  le  corps  de  ^efus^(^'hrifi  y  ^c. 
égards.  Il  eftpreient  félon  fa  fubftance  ,  mais  il  eft  abfenc  fé- 
lon ce  qu'il  eft  dans  l'eftat  de  fa  gloire. 

Les  bienfaits  donc  ce  gage  nous  taie  reflouvenir,  qui  font 
tous  les  myftercs  de  fa  vie  ,  ne  ionc  pas  prefens-.  La  gloire  que 
nous  attendons  n'eft  pas  prefence.  Il  nous- fait  donc  reflTouve- 
nir  de  quantité  de  chofes  qui  ne  font  pas  prcfentcs.  On  voit 
quelle  eft  la  nature  des  répliques  d'Aubercin. 


JP'in  du  Jixième  Livre.. 


LIVRE  SEPTIE'xMf. 


CHAPITRE     PREMIER. 

• 
^e  M.  Claude  ']U<ie  fort  mal  de  U  force  ^  de  la  foiblcffe  des 
arpiiïiens  ncgatifs.  Deux  exemples  importunts  de  fon  feu 
de  d'.fcernement  fur  ce  point. 

\  î'erprir  des  hommes  comprenoit  les  preuves  des 
i'crirez  dans  toute  leur  étendue  ,  il  n'y  auroir 
point  de  lieu  aux  conreftations  &aux  difputes  ,. 
comme  on  voit  qu'il  n'y  en  a  point  dans  lesveri- 
cez  de  Mathématique,  parce  que  les  principes  en 
iont  il  iimpies  &  en  lî  petit  nombre,  qu'on  ne  les  comprend 
point  à  demi.  Mais  comme  les  faits  humains  &  les  choies  mo- 
rales font  d'un  autre  genre,  &  que  fouvenc  la  certitude  qu'on 
en  peutayoir,  ne  dépend  point  de  certains  principes  clairs,  que 
l'on  pénètre  tout  d'un  coup  ,  mais  d'un  amas  de  circonftances 
■qu'il  faut  joindre  enfembie  pour  former  la  conviclion,  il  arrive 
de  là  que  ceux  qui  ne  conçoivent  qu'une  partie  de  ces  circon- 
fl-ances,  ou  par  défaut  de  lumière  en  eux,  ou  par  lesdiverfes 
préoccupations  qui  naiilèntde  leurs  pafilons,  font  capables  de 
rejetter  les  plus  fortes ,  &de  s'attacher  aux  plus  foibles. 

Ces  deux  effets  font  même  comme  infeparabîes ,  &ilsfe  fui- 
vent  prefque  toujours  l'un  l'autre  ^aufli  naifient- ils  de  la  même 
caufe.  Car  c'eftle  manque  de  lumières  qui  fait  d'une  part  qu'en 
ne  voyant  pas  ce  qui  rend  fauifes  de  certaines  raifons ,  l'on  s'en 
remplit  Se  l'on  s'en  entefte  ;  de  l'autre ,  qu'on  entre  fi  peu  dans 
les-  preuves  les  plus  lumineufes  de  certaines  veritez ,  que  ce- 
qu'on  en  voit ,  n'efl;  pas  ca.pable  de  perfuader  l'efprit. 

LLlij 


454        Liv.  VII.  Exumen  des  argumens  negtttifs , 

Je  ne  precends  encore  rien  conclure  de  ce  dilcours  gênerai. 
Je  fçay  que  chacun  de  ceux  qui  difputents'en  fervent  d'ordi- 
naire réciproquement  pour  prévenir  l'eipric  à^s  lecleurscon- 
tre  leurs  adveriaires  M  lis  comme  il  efl:  injufte  de  vouloir  tirer 
avantage  de  ces  reproches  qu'on  (e  fait  de  part  &  d'autre  avant 
que  d'en  avoirétabli  la  vérité,  ileft  tres-jufte  au  contrairedc 
la  faire  remarquer  ,  après  l'avoir  bien  prouvée.  Ainfi  M.  Clau- 
de ne  peut  le  bleirer  que  nousufions  de  ce  droit  envers  luy,&: 
que  nous  luy  appliquions  ce  difcours  par  quelque  réflexion  par- 
ticulière. 

Les  argumens  négatifs  font  proprement  du  genre  de  ceux  où 
ces  illufions  peuventavoir  lieu,  1;  y  en  a  de  bons,  de  mauvais , 
de  probables  &  d'improbables.  Ils  reçoivent  divers  degrez  de 
clarté  5  &:on  les  peut  comprendre  parfaitement  ou  imparfaite- 
ment félon  l'étendue  de  l'efprit  &:  la  difp,ofition  du  tœur.  Le 
j-eproche  que  je  fais  à  M.  Claude  iur  ce  fujct,c'cft  qu'il  y  com- 
met prefquetoutes  les  fautes  qu'on  y  peut  commettre  :  Mais  je 
ne  l'en  accufe  pas  fans  preuves  L'on  en  a  déjà  vu  un  grand 
nombre  dans  le  corps  de  cette  difpute  ,  Se  nous  en  allons  voir 
de  nouvelles  dans  ce  Livre  icy. 

Tantoft.  il  avance  fur  le  fujet  de  ces  argumens  des  principes 
chimériques,  &  qui  n'ont  de  fondement  que  dans  (on  imagina- 
tion.Car  où  at'il  trouvé, par  exemple,cctte  plailante  maxime, 
qu'une  propofition  affirmative  ne  fe  peut  prouver  par  desargu- 
Répoiifc p.  mens  negatits  ?  La  thefe ,  dit-il ,  de  M.  Amauld cjlant  affirmati- 
^'  '  vc ,  fcavoir  que  les  Grecs  croycnt  la  tranffubftantiation  ,  il  fi.vut  qu'ai 

Xètablifje  claire?ncnt  par  des  preuves  affirmatives  :  (j;^  c'efi  de  ces 
■preuves  seules  que  dépend  la  dcctjïon  de  laqucfiion.  Et  quoy  !  ne 
fçauroit-on  prouver  cette  thefe  affirmative,  queU  ville  de  Ro- 
me a  fubftjiè  toute  l'année  mil  fi x  cens  foixante  douz^  ,  par  cette 
raifon  négative  ,  que  depuis  ce  temps- là  perfonne  n'arapporré 
qu'elle  aitefté  ou  abîmée  ou  détruite?  N'avons-nouspasune 
entière  certitude  de  la  vie  des  Papes  &  des  Rois  pendant  un 
certain  temps ,  par  cela  feul  que  leur  mort  n'a  eRé  mile  dans 
aucune  Gazette? 

Tantoll  il  fait  des  déclamations  en  l'air  contre  de<;argumeHS 
du  genre  dont  nous  parlons,commeceux  par  lefquelson  mon- 
tre que  certains  faits  ne  font  pas  arrivez  ,  parce  qu'on  n'en  a 
point  oiiy parler, &  qu'il  eftimpoffible qu'ils fuflént demeurez 
cachez.  Il  les  réduit  à  delimplesvray-feniblanceSjàdespreu- 


■^ 


ti  des  difficultcz^  tirées  des  fens.  ^jy 

T-esdouteufcs  ,  fans  conlidercr  ,  comme  l'on  luy  a.  fait  voir  ,  Ch.  I. 
qu'une  infinité  de  chofes  qu'on  croit  fçavoir  avec  le  plus  de  cer- 
titude ,  ne  font  appuyées  que  fur  des  preuves  de  cette  nature. 

Tantoft  il  trouve  mauvais  que  les  mêmes  perfonnesqui  onc 
rejette  l'argument  négatif  tire  du  filencedes  Payens  fur  l'Eu- 
chanftie ,  &  de  celuy  des  Pères  fur  les  difficulrez  naturelles  de 
ce  myftere  ,  fe  fervent  de  l'argument  négatif  tiré  de  ce  que  ni 
les  Grecs  ni  les  Latins  n'ont  jamais  marqué  qu'il  y  eût  aucune 
différence  entre  les  deux  Eglifes  fur  le  dogme  de  l'Euchaiiflie, 
&ilen  prend  fujet  de  railler  avec  fon  agrément  ordinaire.  Com- 
ment s'efi- il  fait  ,à\t-\\  ^  que  l'argument  négatif  ^  quincfioit  dans  5-rcponfcp. 
mes  mains  qu'une  foihle  vray-femhlance  ,  fait  devenu  dans  celle  de 
M.  Arnauld une  -puiffante  dcmonfiratiom  Cela  veut  dtre^  dit  il  plus 
bas ,  que  ces  Mefjieurs  confèrent  aux  argumens ,  quand  ils  leur  font 
l'honneur  d£  s'en  fervir^  un  cara&ere  de  bonté  qu'ils  ne  fcauroient 
avoir  d'eux-mêmes  ^  que  les  mêmes  argumens  deviennent  mAUvais 
quand  on  les  employé  contreux. 

Maispourquoy  M.  Claude  a- t'ilbcfoin  qu'on  luy  apprenne  ce 
que  nul  homme  de  fens  ne  devroit  ignorer  j&  qu'on  luy  difc 
que  les  argumens  négatifs  ne  tirent  pas  leur  force  de  ce  qu'ils 
font  négatifs,  puifqu'il  y  en  a  de  toutes  fortes,  de  forts,  de  foi- 
bles  ,  de  folides ,  de  vains,  de  certains ,  de  probables  ,  d'évi- 
demment faux:  mais  que  ce  qui  en  fait  la  forcé,c'efl:  qu'ils  fuient 
fondez  fur  un  tel  amas  de  circonftances,  que  la  raifon  demeure 
perfuadéequela  chofe  ne  fçauroit  eflre  autrement ,  êc  que  le 
liazard  ne  peut  avoir  joint  tant  d'cvenemens. 

Il  eft  donc  tres-permis  de  rejetter  un  argument  négatif,  & 
d'en  employer  un  autre,  félon  qu'ils  font  plus  ou  moins  con- 
cluants, comme  il  eft  permis  de  rejetterune  faufle  raifon,  &  de 
fe  fervir  d'une  bonne.  • 

Mais  il  n'y  a  rien  de  plus  extraordinaire  que  les  jugemens  que 
M.  Claude  porte  des  argumens  négatifs ,  quand  il  vient  à  com- 
parer enfemble  ceux  dont  on  s'efi:  fcrvi ,  &  ceux  qu'il  employé. 
Car  on  peut  dire  avec  vérité  qu'ils  ne  peuvent  eftre  ni  plus 
déraifonnabies  ni  plus  bizarres. 

Si  vous  demandez  à  M.  Claude  ce  qu'on  doit  croire  de  l'argu- 
ment tiré  du  fîlence  tant  des  Latins  que  des  Grecs  pendant  l'eC 
pace  de  fîx  cens  ans,  fur  le  différend  que  les  Miniflres  vou- 
droient  faire  croire  qui  eftoit  alors  entr'eux  touchant  la  prefen. 
ceréellej  il  vous  dira  nettement  que  le  contraire  de  cet  argu- 

L  L  I  iij 


4^6       L  I V.  VI  L  Êxcimm  des  ctrgU7Tîens  négatifs 
3.  rfp.  p.  397.  nient ,  cfi  non  feulement  trcs-pojjible ,  nuis  aujji  trcs  vray-femhla^ 
Lie ,  &  qfis  Is  raifonnement  de  M.  Arnauld  ne  conclut ,  ni  dans  le- 
genre  du  ncceff.iire  ,  ni  dans  celuy  du  probable,. 

C'eft  à  dire  ,  pour  développer  un  peu  ce  qu'enferme  cetta- 
g^nerlic      ^'  ^^^cirion  de  M.  Claude  ,  qu'il  (t^tres-pnfjwlc  bctres-vrjyfembla. 
tK.7.         5'  ^A' que  pendant  l'eTpace  de  fix  cens  ans,  il  y  ait  eu  une  certaine 
•)'  timiditérépand-uë  parmy  tous  les  Grecs  &.  les  autres  focietez 
•>■>  de  l'Orient  qui  les  ait  empêchez  de  s'élever  contre  les  Latins,. 
55  &  de  les  traiter  d'idolâtres  fur  la  doctrine  de  la  prefence  réelle,, 
■jj  &  que  pendant  tout  ce  même  temps  il  y  ait  eu  dans  l'Occi- 
r>  dent  je  ne  Tçay  quel  efprit  de  politique  qui  ait  empêché  tous  les^ 
5)  Latins  de  rien  reprocher  flir  le  même  point  aux  Grecs  ôc  au»; 
>î  autres  Chrétiens  Orientaux. 

■)■>  CUril  efl:  très  poffible  &  tres-vray.fembLible  que  ,  ni  la  charité ,. 
31  ni  le  zèle,  ni  l'inclination  naturelle  qu'on  a  à  dire  la  vérité,  ni 
51  la  haine, ni  l'intereft:,  n'ait  jamais  porte  aucun  ni  des  Latins  ni,; 
5>  des  Grecs  à  fe  démentir. 

j.-  Qu'il  cd:  trcs-poMole  &  îres-^ray-femhlahk  que  les  Latins 
55  ayent  craint  de  ble.'Ter  les  Grecs  par  ce  reproche  ,  lors  même 
55  qu'ils  les  faiToient  mourir  pour  d'autres  points  dedodrine  5  ôc 
55  que  les  Grecs  ayent  craint  d'offenfcr  les  Latins  fur  ce  même 
»  pointjors  même  qu'ils  mouroient  pour  leur  Religion  ,  ou  qu'é- 
55'fanc  en  feureté  ,,&  hors  la  puiffance  des  Latins,  ilss'abandon*^ 
55  noient  à  toute  la  violence  de  leur  haine. 

•)>•  Çm\\  eft  'trcs-po,fJible  dc  très  vn/y  fembLrble  que  les  motifs  6C' 
5)  lés  reîforts qui  ont  retenules Latins  dans  cette  politique fuflenc 
,»  tellement  cachez  qu'on  foit  encore  à  en  découvrir  les  moin- 
}>  dres  vefliges,  fi  étendus  que  perfonne  n'en  ait  eflé excepté  ,  ni 
„  les  Papes ,  ni  les  Cardinaux ,  ni  les  Evêqucs ,  ni  les  Preftrcs,  ni 
,5  les  Religieux  ,  ni  les  Soldats  ,  ni  les  Voyageurs  curieux  -,  &  en 
,.•,  même  temps  Ci  efficaces ,  que  de  tantde  millions  d'hommes , 
,3  jamais  un  (eul  n'ait  trahi  ce  fecrec. 

,5  Qii'ilefi:  ires-po_fJible  &  tres-vray-femblable  ,  qu'on  ait  laifle 
,?  agir  toutes  les  autres  paffions  contre  leî  Grecs ,  qu'on  air  cxer- 
i,  cécontr'eux  les  dernières  rigueurs,  qu'on  les  aitaccufexde  tou- 
„  tes  fortes  d'erreurs,  qu'on  leur  en  ait  même  reproché  qui  iem- 
,3.  bloient  porrer  naturellement  à  les  accufer  d'erreur  fur  la  prefer» 
„  ce  réelle ,  C\  on  l'eufl:  pu  faire  avec  vérité.  Si  que  tous  generale- 
„  ment  de  concert  ayent  juftement  arrefté  leur  plume  &  leur 
„, langue  fur  le  point,  où  il  auroiLefté  naturel  depaiTer  à  cere- 


-      fS  àes  àijficiilte%,nrces  dci  fens ,  457 

îprocke  ,  5c. cela  durant  l'efpace  de  fix  cens  ans,  non  dans  un  '   Cn.  ï. 
îeul  lieu  ,  dans  une  feule  ville  ,  dans  une  feule  province  ,  mais  " 
dans  la  plus  grande  partie  du  monde.  *' 

Voilà  ce  que  M.  Claude^;/'/>f//f  tres-fojjîhlc  &  trcs-vray-fem- 
iLéle  ,&c  {apposer  le  contraire,  c'eft  félon  luy  ne  coEnclure, 
ne  dans  le  genre  du  neceffair'e ,  m  dans  celtiy  du  probable. 

Mais  quand  il  vicnc  à  rapporter  des  exemples  d\irgumens 
négatifs  ,  qu'il  prétend  zïirQ  infiniment  plus  fohdes  que  ceiuy.  lu  : 
il  enpropofe  de  iî  étranges,  que  je  fuis  contraint  de  luy  dire 
qu'il  ne  ménage  pas.  affex  fâ  propre  réputation,  &  qu'il  abulê 
un  peu  trop  de  la  patience  de  fes  Lecl:eurs. 

Le  delîein  que  je  me  fuispropole  dans  ce  troinémc  Tome 
■cftant  d'examiner  ce  que  les  Miniftrcs  tirent  des  Auteurs  des 
£x  premiers  fiecles ,  je  traiteray  daas  la  fuite  avec  foin  de  deux 
de  ces  argumens  qu'on  appelle  negatii:s,  donc  l'un  cft  tiré  du 
Élence  des  Payens  lurle  dogme  de  la  prefence réelle  &:  de  la 
TranlFubrtanciation  ,  £<  l'autre  du  filence  des  Pères  fur  les  fui- 
tes pliilolophiques  de  ce  Myftere.  Mais  avant  que  d'entrer 
danscedifcours,  il  ne  fera  pas  mauvaisd'en  produiredeux  au- 
tres qui  feront  juger  de  la  juftelle  de  fon  efpnt  dans  la  compa- 
laifon  qu'il  tait  de  ces  fortes  d'argumens. 

Pour  faire  voir^à\x.-A,  que  l'arytruent  de  AT:  Arnauld  ne  conclut^  C.  ;.  réponC 
ni  dans  le  genre  du  necelfaire  ,  ni  dans  celuy  du  probaUs  ,  Q-  que  le  ^'"  ''" 
contraire  en  cfi  très  pojjiblc  ^  tres-z)ray. Icmblable ,  je  pmduts pre- 
mièrement l'exemple  de  tEglife  Romaine  même  qui  ne  condamne  pat 
plufieurs  créances  qu'elle  voit  en  des  focietez^  particulières ,  cS  rn'e- 
mc  en  des  focictez^  entières  ,  ou  en  des  corps  qui  luy  font  fournis  ,  ^ 
qui  pourtant  ne  les  reçoit ,  ni  ne  les  approuve.  Elle  garde  le  filence  à 
leur  égard ,  mais -elle  ne  prétend  p^u  qu'on  argumente  de  Jon  flence 
aulfi  bru  fquement  que  2s/[.Arnanld  fait  de  celuy  des  Grecs.  Il  rap- 
porteenluite  î'exempie  del'infail!ihilité  du  Pape  fur  laquelle  il 
prétend  que  l'Eglife  Romaine  carde  le  filence  5  &  de  là  il  cor- 
dut  que  s'il  dit  que  les  Grecs  ,  cn  ne  difputant  que  fur  quelques  ar- 
ticles  ,  rC ont  pas  prétendu  approuver  par  leur  filence  le  refis  de  la. 
Religion  des  Latins ,  ^  moins  en  particulier  la  doHrine  de  la  cor» 
verjion  (îibflantielle ,  ii  ne  dira,  rien  qu'on  ne  doive  trouver  raifionna- 
ble  par  l'exemple  de  l'E'^life  Romaine. 

On  n'auroit  jamais  fait  qui  voudroic  marquer  tous  les  défauts 
de  cette  comparaiion. 

I.  Ceprécendu  iilcnce  de  l'Eglife  Romaine  fur  l'infaillibilité 


45^       Liv.  VII.  Sxnmen  des  argumens  negiittfs  ^ 
du  P.ipe  n'ell;  un  filenccque  pour  M.  Claude  ,  Se  ce  feroic  au 
plus  pour  tout  autre  une  mutuelle  tolérance.  Car  on  içait  que 
les  défenfeurs  de  l'infaillibilité  ne  font  point  fi  muets  qu'ils  ne 
marquent  fore  diftincteraent  ceux  qui   loûtiennent  l'opinioa 
contraire  ,  &  que  parmy  ceux  qui  combattent  cette  dodrine  , 
aucun  ne  fait  difficulté  d'en  nommer  les  défenfeurs.  Il  n'y  a. 
<ionc  point  de  ûlence  réel  entre  ces  divers  partis^mais  il' y  aune 
tolérance  mutuelle  qui  les  empêche  de  le  traiter  d'heretiques,. 
parce  que  ce  différend  n'a  pas  efté  formellement  &  expreflè- 
ment  décidé  par  l'Eglife  univerfelle  en  corps.  Qify  a-t'il  en 
cela  d'étrange  fie  de  Surprenant  ? 

Mais  quandon  tire  un  argument  négatif  du  filence  des  Grecs 
&  des'  Latins  fur  le  prétendu  différend  où  M.  Claude  veut  que- 
ces  deux  Eglifes  ayent  vécu  pendant  fix  cens  ans ,  on  parle 
d'un  filence  réel  &  efFeétif  5  &  on  veut  dire  ,  non  que  les  La- 
tins onttoleré  les  Grecs  &  \çs  Grecs  les  Latins  i  mais  que  les 
Latins  n'ont  jamais  marqué  qu'il  y  eût  de  l'erreur  parmy  les 
Grecs  fur  le  fujet  de  la  prefence  réelle,  &  que  de  même  il  ne 
paroift  point  que  les  Grecs  ayent  jamais  crû  que  les  Latins  euf- 
fent  un  autre  fentiment  qu'eux  à  cet  égard.  Quelle  comparai- 
fon  y  a-c'il  donc  entre  ces  deux  filences ,  dont  l'un  efl  fi  réel ,  6c 
l'autre  (\  imaginaire  ? 

2.  Si  le  différend  d'opinion  qui  efl  entre  les  Théologiens  de 
i'Eglife  Romaine  fur  l'infaillibilité  n'a  pas  efté  porté  jufqu'à 
s'entr'accuferd'herefie,  chacun  néanmoins  a  donné  à  ladodri- 
ne  qu'il  corabattoit  les  noms  qu'il  a  cru  luy  convenir. 

Ilfaudroit  donc  que  M.  Claude  prouvaft  que  les  Latins  &  les 
Grecs  ont  fait  de  même.  Mais  c'efl:  ce  qu'il  ne  fçauroit  mon- 
trer ,  fie  qu'il  avoue  luy  même  eftre  très- faux.  Cependant  c'eft 
fur  cette  circonftancequ'efl:  principalement  fondé  l'argument 
négatif  qu'on  tire  du  filence  des  Grecs  fie  desLafin';.  On  ne  dit 
pas  r  Les  Grecs  ont  toléré  les  Latins  iur  le  point  de  la  prefence 
réelle.  Donc  ils  la  croyoient  auffi  bien  qu'eux.  Mais  on  dit  : 
Les  Grecs  durant  Tefpace  de  600.  ans ,  n'ont  jamais  accufé  les 
Latins  d'avoir  une  docT;rine  fauffe  fur  l'Euchariftie.  Donc  ils 
efloient  les  uns  fie  les  autres  dans  le  même  fentiment. 

Il  eft  tres-jufte  fie  très- naturel  que  des  Théologiens  particu- 
liers qui  font  divifez  de  fentiment  fur  quelque  point ,  fie  (oumis 
néanmoins  de  part  fie  d'autre  au  jugement  de  I'Eglife  univer- 
felle, évitent  de  fe  donner  les  noms  odieux  d'heretiques,  C'efl 

à' 


^  des  difficukez  tirées  des  fèns.  459 

âmioy  la  charité  les  oblige.  Et  ainfi  la  tolérance  dont  lesTlico-  Ch. 
lo2;iens  de  l'Eglife  Romaine  ufententr'eux  à  l'égard  de  l'infail- 
libilité n'a  rien  d'extraordinaire  ,  &  on  aiiroit  bien  fujet  de 
s'étonner  s'ils  en  uloient  autrement.  Mais  il  eft  ablulument 
contre  la  nature  fie  contre  le  fens  commun  que  les  Latins,  qui 
traittoient  partout  ailleurs  d'herefie  la  dodrine  contraire  àla 
prefence  réelle,  &  qui  condamnoient  ceux  qui  la  tenoienr, 
aux  plus  grands  fuppliceSj  ayent  évité  durant  fix  cens  ans  de 
reprocher  aucune  erreur  aux  Grecs  lur  ce  myfterc  ,  s'ils  les  en 
avoient  crus  infec1:ez,  lors  même  qu'ils  en  eftoient  les  maiftres, 
S:  qu'ils  les  traittoient  avec  la  dernière  rigueur  pour  d'autres  fu- 
jets  moins  importans. 

Les  Grecs  de  leur  cofté  n'auroient  guère  cfté  plus  difpofez  à 
tolérer  les  Latins  ,  s'ils  avoient  eu  quelque  différend  avec  eux 
furce  fujet-  puis  qu'ils  n'auroient  pd  s'empêcher  de  regarder 
leur  dogme  comme  uneherefie ,  qu'il  yen  auroiteu  fans  doute 
parmy  eux  ,  auffl  bien  que  parmi  les  Calviniftes,  qui  l'au- 
roient  pris  pour  une  idolâtrie,  6c  qu'au  moins  ils  l'auroientcon- 
fideré  comme  une  erreur  fchifmatique,  qui  les  divifoit  duref- 
te  des  Chreftiens. 

Ce  (croit  une  étrange  tolérance  que  celle- là, &  fur  tout  pour 
des  peuples  cjxii  ne  vouloient  pas  tolérer  dans  les  Latins  des  cé- 
rémonies indifférentes. 

Cependant  il  falloit  que  M.  Claude  fîfl  voir  tout  cela  dans  fa 
comparaiion  de  l'infaillibilité.  Mais  il  n'a  pas  accoutume  de 
poufîer  les  chofes  fi  loin.  Il  luy  fuffit  de  pouvoir  appliquer  le 
rnême  mot  des  deux  coflez ,  pour  en  tirer  une  comparaifon  & 
un  argument. On  fé  tait  dans  l'Eglife  Romaine  fur  l'infaillibi- 
lité :  On  s'efl  teu  parmy  les  Grecs  (ur  ce  différend  prétendu  avec 
les  Latins.  Qiie  ce  loit  la  même  cfpece  du  filcnce  ou  non  :  Que 
les  circonflanccsen  foient  les  mêmes ,  ou'totalemcnt  contrai- 
res ,  il  n'importe;  c'eft  le  même  ncm,  il  n'en  faut  pas  davan- 
tage pour  M.  Claude. 

Le  fécond  exemple  qui  fait  bien  voir  encore  rinjufiiice  de 
M.Claude  dans  fescomparaifons,  c'cfll'hiftoired'un  Docleur 
■nommé  Jean  de  Paris,  à  qui  il  arriva  d'avancer  une  opinion  té- 
méraire lur  l'Euchariftie,  Se  qui  n'ayant  pas  efté  condamné  par 
la  faculté  de  Théologie  de  Paris  fut  feulement  déféré  à  Rome, 
où  eflant  allé  pour  fe  juftifier,il  mourut  avant  que  fonafFui- 
re  fuft  inflruite  ;  ce  qui  fît  que  l'on  n'y  prononça  rien. 

MM  m 


r 


460  L IV.  VII.  Examen  des  Argumens  negutifs  ^ 
Comme  il  eft  certain  que  les  Grecs  n'ont  jamais  fait  aucun  bruic 
de  cet  événement,  ôc  qu'ils  ne  témoignent  pas  en  avoir  rien 
fçu,  M.  Claude  en  prend  fujet  de  faire  cetadmirable  dilemme: 
En  vérité  y.  dit  il  ^  7^  ^^^  Grecs  rient  rien  fck  de  cette  hijioire^  ^ 
que  ny  les  Pèlerins  ^  ni  les  Ambcijjciâenrs^  ni  les  <^ens  de  guerre , 
rép  p.  414-  ^^  ^^^  Croife-^  ni  les  Tnquifiteurs  ^  ni  les  Grecs  d'Italie^  ni  les 
Latins  de  Confiantinople  ne  leur  en  aycnt  rien  appris^  ils  peuvent 
avoir  ignoré  bien  d'autres  chofes  [  c'eft  à  dire  qu'ils  peuvent  avoir 
ignoré  le  lenrimentde  l'Eglife  Latine  lur  la  prelcnce  réelle  ÔC 
la  tranirubrtantiation;)  ô-  ji  M.  Arnauld  dit  qu'ils  l'ont  feu  ^  il 
ne  doit  pas  trouver  mauvais  qu'ils  i' en  fuient  fait  une  raifon  de 
Jîlence&  de  retenue. 

C'eft  àquoy  fe  réduit  ce  fameux  exemple  que  Je  choifls  a 
deflein,  parce  qu'on  fçait  que  les  Calviniites  en  ont  fait  plus 
de  bruit  que  tous  les  autres.  Mais  avant  que  d'en  faire  voi 
l'énorme  dirproporcion^  il  efl:  neccllaire  de  remarquer  que  M. 
Claude  pour  ajufler  fa  comparaifon^  s'aide  de  certains  moyens,, 
dont  une  fincerité  un  peu  délicate  auroit  delà  peine  à  s'accom- 
moder. 

Le  premier  eft  de  nous  avoir  transformé  l'écrit  particu- 
lier où  ceTheoloigen  explique  fonfentiment,  en  un  jugemenc 
delà  Faculté  de  Théologie,  ce  qui  ne  vaut  pas  la  peine  d'en 
parler^Sc  d'avoir  pour  cela  ou  fabriqué  ou  pris  \q  ne  fcjay  pas 
oh,  un  fauxtitrC;,  en  le  faifant  même  imprimer  à  la  marge  en- 
ces  termes,  TituUis  eft  :  ludicium  faeultatis  Thcologue.  Or  ja- 
mais cette  écrit  ne  porta  ce  titre,  &  les  copies  manufcrites  qu'on 
en  a  à  Paris,  n'en  ont  point  d'autres  queceîuy  cy.  Detcr?mna, 
tio  fratris  Joannis  de  P  ariftis  P/.-cdicatoris ,  de  modo  exiftendi 
corpus  Chrifti  in  Sacramento  aliaris  alio  quarn  fit  ille  qucm  te^ 
7ict  Eccle  fia. 

M.  Claude  ne  s'eft  pas  porté  gratuitement  à  inventer  ou  à 
authorifer  cette  faufleté.  Il  a  crcu  par  là  en  colorer  une  autre  en- 
core plus  in  excufable,  qui  eft  de  faire  palîèr  pour  un  décret 
de  la  Faculté,  uneclaufe  ajoiitéeà  la  fin  de  cet  écrit, qui  porte 
ces  termes:  In  pr^fcntia  Magifironon  in  Thcologia  diLium  eft 
utrum  que  modum  ponendi  corpus  Chrifti  cfjc  in  altari ,  tenet  pro 
opinione probabili .^^  approbat  utrumque  per  (  il  y  a  quelque  mot 
de  manque  )  ^  per  difia  Sanclorum .,  dicit  tanicn  quod  nullus  eft 
dctcrminatus  per  Eccle ftam  ,  ^  ideo  nulluni  cadere  fub  fi  de  5  ^  fi 
aliter  dixijfet  i   minus  bcne  dixijfet ,  é"  i^i  aliter  dicunt  minus 


t£  des  difficîiltez  tirées  des  fens.        ^  461 

bene  iicunt,  ^  qui  determinato    a(]creret  ,  alterutrum    cadere  jiih  Ch.  I. 
fide  ,  incurreret  Scntentidm  Cunonis  anathematis. 

M.Claude  prétend  à  la  faveur  de  ce  faux  titre  ,  lugcment 
deU  Faculté^  attribuer  toute  cetteclaufe  à  la  Faculté  deTheo- 
logie  de  Paris,  comme  il  paroift  par  la  traduction  qu'il  en  fait 
en  ces  termes:  En  prefcncc^  dit.il,</«  Muiftres  en  TheologiCy  il  a  eftè 
dit  quelle  tient  l'un  1^  l'autre  moyen  de  7nettre  le  corps  de  Jefus- 
Chrijl  à  l'autel,  fcavoir  celuy  de  la  converfon  de  la  [ubfiance  du 
pain  dj-  ce-luy  de  l'ajfomption  de  cette  fubflance  parle  Verbe  ,  pour 
une  opinion  probable.  Elle  dit  toutefois  qu'aucun  de  ces  deux 
moyens  n'a  efié  déterminé'  Et  fi  elle  eiiji  dit  autrement ,  elle  euji 
moins  bien  dit. 

C'eft  toujours  fclon  M.  Cliude,  la  Faculté  qui  tient,  qui  dit^ 
qui  euft  moins  bien  dit.  Cependant  ce  fens  eft  très  faux  &;  même 
tres-ndicule.  Car  cetteclaufe  ajoutée  à  la  fin  de  l'écrit  de  Jean 
de  Pans,  ou  par  luy.  même  ou  par  quelqu'autre,  marque  non  ce 
que  dit  la  Faculté  fur  l'opinion  de  Jean  de  Paris,  mais  ce  que 
dit  lean  de  Paris  Ity.mêmej  ou  quelque  autre,  pour  juftifier  Ion 
opinion  devant  la  Faculté.  Ft  ainfi  il  faut  traduire  non  comme 
a  fait  M.  Claude  :  En  prefence  des  Maiftres  en  Theoloye  ,  il  a 
efié  dit  qu'elle  tient  l'un  ^  l'autre-.^  mais:  En  prefence  des  Do- 
Heurs  en  Théologie ,  ila  eftè  dit  que  Jean  de  Paris  tient  l'un  ^ 
l'autre  moytn  pour  probable. '^x.  ainfi  tout  ce  que  M.  Claude  at- 
tribue à  la  Faculté,  fe  doit  uniquement  attribuera  lean  de  Pa- 
ris, C'efl:  luy  qui  tient,  c'eft  luy  qui  dit.,  c'eft  luy  qui  euft  moins 
bien  dit ,^  non  pas  la  Faculté. 

Le  necefîité  de  ce  fens  eft  évidente  par  fes  paroles  mêmes:  Fc 
il  eft  aflèz  difficile  à  concevoir  que  M.  Claude  ait  pu  s'y  mé- 
prendre de  bonne  foy. 

Car  quel  décret  delà  Faculté  a  jamais  efté  conçu  en  ces  ter- 
mes :  En  prefence  des  Docleurs  en  Theolozie  il  a  efié  dit  que  la 
Faculté  tient  ?  Eft-ce  que  la  Faculté  par  le  en  prefence  de  la  Fa- 
culté.*' 

Secondement,  le  mot  de  tenet  doit  avoir  un  Nominatif  Or 
il  eft  alfez  naturel  qu'un  Auteur  qui  écritfe  lous. entende  luy- 
même-,  mais  c'eft  fans  aucun  fondement  que  M.  Claude  y  a 
fous-entendu  le  mot  de  Faculté  qui  n'y  eft  point  exprimé. 

Ces  autres  termes  :  Bicit  tamen  quod  railhis  efi-  deterniinatns 
modus  per  cclefiam.  Et  fi  aliter  dixifiet  minus  bene  dixiffet  , 
marquent  encore  que  c'eft  un  Théologien  particulier  qui  parle 

MMm  ij 


4^1  Liv.  VII.  Examen  des  Argumens  négatifs  ^ 
&  non  pas  la  Faculté.  Car  depuis  qu'il  y  ades  Facukezau  mon- 
de, jamais  aucune  nes'eft  (ervie  d\in  tel  langage.  Ce  fontdes 
corps  qui  parlent  avec  authorité&;  avec  confiance,  &  non  pas 
avec  ces  tours  qui  ne  conviennent  qu'aux  particuliers.  Jamais  ny 
Dodeursny  Juges  fe  font  ils  avilez  de  mettre  dans  leurs  deci- 
fions  ,  que  s'ils  avoientjugé  autrement  ils  n'auroient  rien  fail 
qui  vaille  ? 

Qiie  M.  Claude  effiice  donc  s'il  luy  plaifl:  de  Ton  livre  toutes 
les  reflexions  qu'il  fait  fur  ce  prétendu  jugement  de  la  Faculté 
qui  ne  fut  jamais  ,&  qu'il  ne  luy  attribue  plus  d'avoir  qualifié 
deprobablei'opinionde  Jean  de  Paris.  C'eftàquoy  la  Faculté 
n'a  jamais  penfé.  Tout  ce  qu'il  y  ade  vray^c'eflqu'ellenelecon*. 
damna  pas  fur  le  champ:  ce  qui  peut  eftre  arrivé  par  cent  rai- 
fons  différentes  dont  onnefçauroit  rien  conclure  ,  &  «jue  cette 
affaire  ayant  efté  portée  à  Rome,  elle  y  fut  alfoupie  par  la  mort 
de  ce  Théologien  ;  ce  qui  conclut  encore  nioins^corame  nous  le 
dirons  plus  bas. 

Le  troifiéme  moyen  dont  M.  Claude  fe   fert  pour  trouver 
quelque  rapport  dans  fa  comparaifon  ,  n'eft    guère  plus  fincere. 
Car  félon  qu'il  reprefente  l'opinion  de  Jean  de  Paris ,  il  en  don- 
ne cette  idée,  que  ce  Théologien  nioit ,  &  la  prefence  réelle, 
êcla  tranfubftantiation,  &  qu'il  n'admettoit  point  ainfi  que  le 
corps  de  J.C.  fuft  réellement  dans  le  Sacrement.  C'eft  l'impref- 
fion  qu'on   reçoit  de  cette  Affomption  du  pain  par  la  prefence  d% 
/^i?r^f, qu'i-lluy  imputej    M.Claude  s'étant toujours  fervi   de 
ces  termes  en  divers  lieux  de  fes  ouvrages  ,  fans  y  enfermer  au^ 
cune  prefence  réelle.  Mais  ceux  qui  auront  leu  l'écrit  de  Jean  de 
Paris  reconnoiitront  tout  d'un  coup  que  cette  idée  eU  tres-fau£ 
fe.  Car  tant  s'en  faut  que  ceTheologien  niaftla  prefence  réelle, 
qu'il  ne s'eftoit  porté  à  ces  nouvelles  imaginations  que  pour  la. 
foutenir  plus  facilement. 

C'eftcequi  paroift  clairement  dans  tout  l'écrit  &;  par  les  ter- 
mes mêmes  qui  le  commencent.  Je  pretens  dit  ce  Docfteur, 
dcffendre  la  vrayc  ^  réelle  exiflence  de  corps  de  J.  C.  dans  le  Sa- 
crement de  l'Autel.  Etafin  qu'on  ne  s'imagine  pas  qu'il  n'admift 
dans  leSacrement  que  lecorpsdu  painuniàceluy  de  J.  C.dans 
le  cieljil  déclare  nettement  qu'il  y  a  félon  luy  deux  corporeïtés 
dans  le  S3.crQ\x\cr\t  .,fcavoir  celle  du  pain  éT'  celle  de  l'humanité ., 
c'efià  dire  l' humanité  ^  la  paneïtè  :  mais  qu'il  n'y  admet  qu'un 
eor£s,,  ^arce  qiCun  cor£s  n'ejl  fas  la  cor^orcité:  mais  ceji  ce  qui 


(^  des  difficultés  tirées  des  fens.  463 

a  la  corporel  té.  H  diten  un  autre  lieu  j  qu  avant  la  confecration  la  Ch.  I. 
fubjiance  du  pain  efioit  feule ,  mais  qu'après   la  confecration    elle 
n'e/i  pas  feule,  parce  que  le  corps  de  J.  C.  y  e/t    caché. 

Il  répète  les  mêmes  chofes  en  diveri  autres  endroits  de  (cm 
écrit  j  ce  qui  ofte  tout  lieu  de  douter  qu'il  n'admill  la  prefeii- 
ce  réelle. 

Il  ne  faut  pas  s'imaginer  auffi  qu'il  combattît  direclemcnt 
la  tranfubftantiation  :  Il  enrecevoit&  le  terme  Scies  principa- 
les expreïTions.  Son  opinion  le  reduifoit  donc  à  une  fubtilité  de 
metaphyfique,  par  laquelle  il  confèrvoitlepain  dans  le  Sacre- 
ment ^  en  luy  donnant  le  nom  d'accident.  Cette  fubtilité  efloic 
de  dire  que  le  pain  &  le  vin  eftoient  unis  à  laperfonne  du  Ver- 
be ,  non  immédiatement^  mais  mediatement  par  le  corps  de 
J.  C.  qu'ainfî  &  la  corporeïté  du  vin  &  celle  de  J.  C.  (e  trou- 
voient  enfemble  dans  le  Sacrement ,  mais  qu'il  n'y  avoi  t  néan- 
moins qu'uncorps,  parce  que  le  mot  de  corps  appartient  à  laper- 
fonne, &  qu'il  n'y  avoit  point  d'autre  perfonne  que  celle  de 
Jesus-Christ. 

Par  le  même  moyen  il  d'ifoit  que  le  pain  ne  fubfiftoi  t  plus, 
parcequ'il  eftoit  uni  hypoftatiquementà  la  corporeïté  duVerbe, 
gc  qu'il  perdoit  ainlî  (a  propre  fubiiftance.  De  forte  que  comme 
il  fauvoit  a  peu  prés  routes  les  expreffions  de  l'Eglife,  il  oûoit  aux 
iîmplesla  connoiflancede  ce  différend. 

On  ne  doit  donc  pas  trouver  étrange  que  cette  opinion  ne 
choquant  en  rien  la  réalité  ,  &  admettant  les  termes  dans  \e(- 
quels  la  tranfubftantiation  s'exprime  dans  l'Eglife,  elle  n'y  sit 
pas  fait  beaucoup  de  bruit,  qu'on  n'en  ait  pas  d'abord  pouffé 
l'Auteur,  qu'on  l'ait  laiffé  aller  à  Rome,  pour  juftifietles  fen- 
timens;  que  le  commun  du  monde  ait  regardé  cette queftion 
comme  un  différend  particulier, auquel  il  n'avoit  point  d'inte- 
reft,  &  dont  il  n'eftoic  point  obligé  de  s'informer,  6c  que  ceux 
même  qui  en  ont  pénétré  le  fond  en-ayent  ménagé  l'Auteur,  qui 
fe  mettoità  couvert  descenfurespar  îesproteftation.s  réitérées 
qu'il  faifoit  par  tout  d'une  foumilBon  entière  pour  1  Eglife  uni- 
verselle &  pour  le  Pape  qui  en  eft  le  chef  L'Eglife  a  toujours 
craint,6c  avec  grande  raifon,les  condamnations  qui  font  de  l'é- 
clat, parce  qu'elles  n'ont  pour  l'ordinaire  point  d'autre  effet  que 
d'engager  les  Auteurs  à  deffendre  avec  opiniâtreté  les  erreurs 
.■qu'ils  ont  légèrement  avancées.  Ainfi  elle  aime  beaucoup 
mieux  q;u'elles  s'étouffent  6c  s'anneantiffent  d'elles  mêmes,  5c 

M  M  m  ii] 


464     Li  V.  VIT.  Examen  des nArgmiens  negcitifs , 
elle  tente   d'ordinaire  ces  voyes  de  douceur,,  &.  ccb  inénage- 
rnens  de  prudence,  avant  que  d'en  venir  à  des  remèdes  plus 
forts,  qu'elie  n'employé  jamais  qu'avec  regret  Se  par  une  efpece 
de  neceflité, 

C'eft  une  partie  des  remarques  qu'on  peut  faire  fur  la  ma  lie- 
re  dont  M.  Claude  rapporte  cette  hiftoire.  Mais  fi  la  bonne  Foy 
fe  peut  fentir  bleflee  dans  ce  rapport,  la  raifon  fs  peut  bien  plain- 
dre à  ion  tour  de  l'ufage  qu'il  en  fait.  Car  il  en  conclut  que  files 
Grecs  ont  pu  ignorer  l'afFaire  de  Jean  de  Paris,  ils  ont  donc  bien 
pu  ignorer  la  créance  de  TEglife  latine  fur  l'Eucharidiie. 

C'eft  à  dire  que  fi  les  Grecs  ont  pu  ignorer  la  créance  d'm 
particulier  qui  écrivoit  dans  un  païs  étranger  Se  dans  une  langue 
qu  ieu  reftoit  inconnue:  ils  ont  bien  pîi  ignorer  auifi  la  créance 
décent  millions  de  Chrétiens  avec  qui  ils  avoient  un  commer- 
ce continuel. 

Que  s'ils  ont  pu.  ignorer  une  affaire  peu  célèbre  dont  on  n'a 

parlé  que  pendant  quelques  mois  5c  en  un  lieu  particulier  ,6i 

qui  s'eft  étouffe  en  fuite  ;  ils  ont  pu  ignorer  fix  cent  ans  durant 

un  difïerend  toujours  fubfiftant,  toujours  prefent,  &  qui  de- 

,  voit  attirer  leurs  attentions  par  mille  raifons. 

Que  s'ils  ont  pu  ignorer  une  erreur  obfcurc  embaraffée  de 
termes  rcliolaftiques,6(:  difficile  à  démeflersjils  ont  pu  ignorer 
auiïî  des  dogmes  très  clairement  marquez  ,  &  dont  il  eftoit  fa- 
cile de  comprendre  le  fond  pour  peu  qu'on  s'y  appliquafl. 

Q')e  s'ils  ont  pu  ignorer  une  chofe,  dont  perlonne  n'avoic 
intereft  de  les  informer,  ils  ont  pu  ignorer  aulîî  une  dodrine 
que  l'on  avoir  toute  forte  d'interefl;  de  leur  faire  encendre,qu'on 
expofoit  en  quelque  manière  à  leurs  yeux,  &  qu'on  auroit  tâ- 
ché par  toutes  fortes  de  moyens,  de  leur  infpirer  &:  de  leur  faire 
approuver ,  fi  l'on  eufl  cru  qu'ils  ne  l'euffent  pas  tenue. 
Que  s'ils  ont  pu  diOimulcr  une  erreur  qui  ne  formoit  aucun  dif- 
férend entr'eux  Scies  Latins,  puifqu'ilsia  condamnoientdeparc 
&:  d'autrCj  ils  ontpù  diffimuler  auifi  une  autre  doclrine  fur  la- 
quelle ils  auroient  efté  en  differendavec  toute  l'Eglife  latine. 

La  difproportion  de  ces  chofes  que  M.  Claude  compare  efl  ^\ 
énorme  ,  que  je  ne  fqaurois  croire  qu'il  n'en  ait  prefentemenc 
quelque  honte,  &  que  tout  homme  de  bon  fens  qui  examinera 
iYin  &  l'autre  fans  prévention,ne  juge  tout  d'un  coup  qu'il  étoic 
prefque  moralement  imnoffible  que  les  Grecs  fuffent  informez 
de  la  doctrine  de  Jean  de  Paris  j  £c  qu'il  efl  plus  que  moralement 


Sf  des  difpmlte\  tirées  desfens.  ^é^ 

impofïïb'e  qu'ils  n'aycnc  e(le  très  exactement  inftruits  de  celles  Ch.  Î. 
des  L^riis  fur  l'Euchariftie:  De  forte  que  quand  jj  auroic  eu 
deiïein  de  choilîr  les  exemples  les  plus  éloignez  &les  plus  con- 
traires en  toutes  choies,  il  n'auroit  pas  plus  heureufemenc  ren- 
contré. Cependant  comme  il  le  croit  en  pcfTeffion  de  faire 
tout  palfer  à  la  taveur  de  la  confiance  qu'il  témoigne,  il  propofe 
cette  hidoire  d'un  air  fi  fier  que  je  ne  m'éconne  pas  que  ceux 
qui  n'en  jugent  que  par  là  en  foienc  éblouis. 
Il  me  feroir  aufil  aifé  de  faire  voir  le  peu  de  juftefie  de  l'cf- 
prit  de  M.  Claude  dans  tous  les  autres  argumens  négatifs, 
qu'il  allègue  dans  ce  même  chapitre  ^  car  ils  ont  tous  les 
mêmes  défauts.  Mais  comme  ce  n'en  eft  pas  icy  le  lieu,  je  ms 
contenteray  d'examiner  avec  foin  ceux  qu'il  rire  du  filcncedes 
Payens  &  des  Pères  fur  les  difficultez  de  l'Euchariilie,  qu'il 
prétend  eftre  infiniment  plus  forts  contre  les  rnatholiques  ^  que 
ceux  qu'on  a  tirez  du  filenccdes  Grecs,  ne  font  contre  'es  pré- 
tendus Keformez;  6i  j'efpere  que  le  fuccésdecet  examen  fera 
de  perfuader  à  tout  le  monde,  qu'y  ayant  de  bons  &  de  mau- 
vais argumens  négatifs,  M.  Claude  eft  fi  peu  heureux  Aies  dif 
cerner,  qu'il  prend  les  plus  foibles  conjectures  de  ce  genre- là, 
pour  des  demonftrations  convainquantes,  &  des  demonflra- 
tions  convainquantes  pour  de  légères  conjectures;  &  en  un 
mot  que  pour  en  juger  félon  le  bon  fens ,  il  n'y  a  qu'à  en  juger 
tout  au  contraire  de  luy. 


CHAPITREII. 

Que 'M.Cla.udc  fuppofe  témérairement  que  les  Payens  ayent    con- 
nu la  docirïne  des  Chrejiiens  furl' Euchanfiie. 

M.  Clnude  compare  dans  fa  troifiéme  Répon/ê  l'argu- 
ment du  filence  des  payens  avec  celuy  qu'on  a  tiré  du 
filence  des  Grecs  &  des  Latins,  &;  cela  de  cet  air  d'authorité 
qui  luy  eft  propre. 

Il  fêmble,  dit-il,  que  ces  Me/fienrs  confultcnt  fur  toutes 'M.    rcp.  p 
ehofes  leurs  interefts.  Lorfque  les  Auteurs  les  favorifent,  les  "  ''**' 
Auteurs  font  dignes  des  louanges  publiques  -,  lorfqu'ils  ne  les  " 
favorifent  pas ,  ils  ne  font  dignes  que  de  mépris,  &:  les  argu-  '' 
mens  deviennent  forts  ou  foibles^  bons  ou  mauvais  félon  qu'ils  " 


466  Liv  .  VII.  Examen  des  aArgumem  négatifs^ 
leur,  fervenc  ou  qu'ils  leur  nuifent.  Il  eft  certain  que  fi  l'on 
compare  la  preuve  de  M.  Arnauld&la  mienne  1  une  avec  l'au- 
tre, à  l'cgard  de  la  forme  elles  font  égales.  Nous  fuppofons  des 
principes  femblables,  oc  nous  en  rirons  des  coniequences  lem- 
blables.  Mais  fi  on  les  compare  à  l'égard  de  la  matière  ,  l'avan- 
tage eil  tout  entier  de  mon  cofté  :  car  toutes  les  circonftances 
donnent  du  poids  à  mon  argument,  au  lieu  qu'elles  affoibliC 
fent  le  ficn.  Les  Payens  eftoient  fçavans.  Ils  avoient  en  maia 
toute  l'authorité.  Ils  n'avoient  rien  à  ménageravec  les  Chré- 
tiens. Ils  sc^avojent  fort  bien  les  doctrines  du  Chris- 
tianisme. Il  s'agitroic  de  la  ruine  entière  de  leu-rs  Autels.  Et  ils 
eftoient  interellez  pour  la  confervation  de  leur  ancienne  Reli- 
gion, de  décrier  ces  nouveautez  qui  s'introduifoient  dans  le 
monde.  On  ne  peut  prelque  rien  dire  de  femblable  à  l'égard 
des  Grecs. 

Il  ne  fait  néanmoins  dans  cet  endroit  que  recueillir  le  fruit 
de  Tes  vidoires.  C'eft  dans  fa  féconde  réponfe  qu'il  prétend 
les  avoir  remportées,  &  c'eft- là  en  effet  qu'il  traitte  avec 
étendue  cet  argument  du  filence  des  Payens,  &  qu'il  en  fait  la 
plus  pompeufe  de  fes  preuves  contre  la  prefence  réelle  &  la 
tranlîiibflantiation.  Il  y  employé  deux  chapitres  entiers ,  & 
il  le  relevé  tellement  par  toutes  ces  figures,  ces  exagérations, 
ces  railleries ,  cesinfultes  dont  il  a  un  fonds  inépuifablej  que 
ceux  qui  ne  font  pas  accoutumez  à  tout  ce  grand  bruit  pour- 
rpient  en  eftre  furpris.  Mais  comme  on  s'aguerrit  à  la  fin ,  6c 
que  nous  avons  aftez  veu  depuis  noflre  difpute  à  quoy  d'ordi- 
naire tout  cela  fe  réduit,  nous  ne  laifferons  pas  de  luy  foûtenir 
que  tout  ce  qu'il  ditfur  cette  matière  n'eft  qu'un  amas  d'illu- 
fîons  ,  &  un  vain  appareil  de  fauflè  éloquence,  auffi  bien  que 
de  faux  raifonnemcns:  ôc  pour  ne  pas  imiter  fon  procédé,  6c 
ne  pas  m'amufer  à  perdre  comme  luy  du  temps  6v  des  paroles, 
je  viendray  au  fond  &  aux  raifons  decifives. 

Tous  ces  argumens  tirez  du  filence  des  Payens  dépendent 
■de  la  vérité  de  cette  propofition,que  les  Payens  eftoient  com- 
munément informez  de  la  dodrinedes  Chreftiens  furl'Eucha- 
riftie.  Car  fuppofé  qu'ils  ne  le  fufient  pas,  quel  fujet  y  auroit- 
il  de  s'étonner,  qu'ils  n'euflènt  point  parlé  d'un  myflere  qui 
leurefloit  inconnu.'  M.  Claude  a  tellement  veu  que  cette  fup- 
pofition  efloit  effentielleà  fon  argument ,  qu'il  ne  manque  ja- 
mais delà  pofer  comme  un  principe  ferme  qui  luy  fert  de  fon- 
dement 


t^  des  diffcuhe\  tirées  des/cns,  467 

dément.  Z(?^  Puycns,  dicil  en  un  lieu,  cfloicnt  [cavdns.lls  (ca-    Ch.  I  ï. 
•votent  trcs-hUn  la   àocirine  du   Chrifiinmfme.^z  ailleurs  :  Za   î'*P-P-;*^' 
coutume  de  cacher  l' Eucharif  te  aux  Jnf,dcl!cs  ^n'cfi  nuEemcm  de   i. ,;«.  p.  144.. 
la  pratique  des  trois pcmiers  JiecUs ,  comme  M.  de  l' Auhcfpint 
Evèquc  d'Orléans  l'a  reconnu  ,    d^  coryirne   il  faroift  évidemment 
■par  Le  Dialogue  de  Jîijîin  contre  Triphon  luif  ^  Q^  par  la  féconde 
yîpolope  de  ce  mèine  Auteur.  An.IJi  ne  trouve-t'on  point  dans  les 
vrais  ouvrages  de  ces  premiers  Atiteurs  aucune  de  ces  réticences  ^ 
de  ces  forinules  qui  font  familières  aux  Ecrivains  du  quatrième  ^ 
du  cinquième  (tccle. 

Il  applique  dans  la  fuice  ce  principe  gênerai  aux  PhiloTophes 
qui  ont  écrit  contre  la  Religion  Chreftienne.  Les  Phtlofophes, 
dit- il  ,  recherchaient  curieufement  dans  nos  doclrincs  tctct  ce  qui 
peut  choquer  la  raifon.  D'otî  il  s'enfuit  que  Jt  les  Chrcfiiens  euffent 
crû  la  tranjfubji ant iation ,  ils  n'eujfent  p^^s  manqué  de  la  leur  re- 
procher. 

Je  foùiiens  ^  dit-il  encore  ,  qu'il  nefi  pas  concevable  que  Cclfe 
qui  a  fait  une  perquifition  fi  exacle  de  tout  ce  qu'il  a  cm  pouvoir 
efire  reproché  aux  Chrefiiens  ,  ait  oublié  une  doctrine  qui  luy  ou- 
vroitun  (î beau  chemin.  C'eft  à  dire  qu'il  n'a  pas  ignoré  ce  qu'ils 
crovoientde  ce  myfi:crej&  qu'il  n'y  a  rien  trouvé  qui  puftluy 
fournir  un  fujct  de  reproche.  S'il  fetrouvoit  donc  que  tout  cela 
fût  témérairement  avancé,  Se  que  non  feulement  M.  Claude 
n'euft  aucune  raifon  de  (uppofer  que  le  commun  des  Payens 
fuftinftruir  de  ce  myftere  j  mais  que  le  contraire  même  fufl 
certain,  que  deviendroient  tant  défigures  &:de  pbifanrcries  ? 
Ne  devroient-elles  pas  paflèr  pour  des  difcours  de  Sophi»- 
fte  ,  indignes  d'edre  employez  dans  une  difpute   de  Reli- 


gion? 


C'eft  néanmoins  ce  que  je  foûuens  d'abord  contre  M.  Clau- 
de. Et  pour  luy  marquer  nettement  en  quoy  je  me  renferme,  je 
prétends  que  quoiqu'on  ne  puiilè  peut-eftre  pas  dire  afTuré- 
ment  qu'aucun  des  Payens  n'ait  fçû  ce  que  les  Chreftiens 
croyoiencde  l'Euchariftie ,  ou  par  les  efclaves  ,ou  par  lesdefcr- 
reurs,  ou  par  l'Apologie  de  S.  Juftin  qui  en  a  parlé  plus  tlaire,- 
ment  que  les  autres ,  parce  qu'il  s'eft  cru  obligé  de  ne  rien  difîî- 
muler  en  parlant  à  desEmpereurs;  il  eft  pourtant  certain  que  la 
plupart  des  Payens  n'en  ont  rien  fcHi,  &que  les  Chreftiensont 
toujours  eûim  foin  particulier  de  leur  cacher  ce  myftere  ,aunî- 
bien  dans  les  premiers  fiecles  que  dans  les  autres. 

NNn 


4éS       L  I V.  V 1 1.  Examen  des  argumens  négatifs  ^ 

Cette  propofîtion  ainfi  reftrainte  luffit  entièrement  pour 
empêcher  qu'on  ne  s'ctonne  du  filence  des  Payens.  Car  ny 
avant  que  deux  ou  trois  Payens  dont  les  objidions  conrre  la 
Religion  Chrétienne  ioient  palîces  à  la  pofterité  ,  s'il  eft 
vray  ,  comme  je  le  prétends,  que  de  ce  nombre  infini  des  Gen- 
ti'.s ,  il  n'y  en  ait  eu  que  très- peu  qui  ayant  eftc  informez  en 
particulier  de  la  créance  des  Chrétiens  (ur  ce  myftere ,  quelle 
difficulté  y  a-t'il  à  croire  que  ces  deux  au  trois,  comme  Celfus, 
Porphyre  ,  Cecilius  ayentefté  plûtoft  de  ce  grand  nombre  de 
Payens  qui  l'ont  ignorée  ,  que  de  ce  petit  nombre,  dont  on 
pourroit  dire,  &,  encore  avec  incertitude  &  fans  preuve  pofiti- 
v.e  ,  qu'ils  l'ont  connue  ? 

Voilà  la  queilion  ouverte  &  marquée  diftincT:ement.  M. 
Claude  foûtient  que  les  Payens  fçavoient  communément  la 
dodriae  des  Chrétiens  fur  i'Euchanftie  ,  &  qu'ainiî  il  fcroïc 
étrange  que  ceux  dont  nous  avons  les  écrits  n'en  eulTent  point 
parlé.  Je  luy  foùciens  que  les  Payens  ignoroient  communé- 
ment la  docirine  des  Chrétiens  (ur  l'Euchariftie ,  &  qu'il  eft 
-  très- vray  l'cmblableque  tousceux  dont  il  nous  refte  des  obje. 
clions  contre  les  Chrétiens  l'ont  ignorée  5  &  qu'ainfi  il  y  au- 
roit  beaucoup  plus  de  fujet  de^'etonner  qu'ils  en  euflcntpar-  , 
lé,  que  de  ce  qu'ils  n'en  ont  rien  dit.  Il  ne  s'agit  plusicy  de 
difcourir  en  l'air.  Il  s'agit  de  produire  des  preuves  dece  qu'on 
avance  ;  &  c'eft  ce  que  je  prétends  faire. 

Les  Miniftres  demeurent  d'accord  qu'au  quatrième  fîécle 
la  pratique  de  l'Eglife  eftoit  de  cacher  les  Sacrcmens  aux 
Payens  5  &  principalement  celuyde  l'Euchariflie,  &  ils  ne  dé-' 
{avoueront  pas  fans  doute  que  cette  pratique  ne  fût  générale  , 
&  qu'elle  ne  s'obfervaft  alors  dans  toutes  lesEglifês  du  monde. 
Car  S.  Cyrille  de  jerufalem  fait  voir  que  c'eftoit  la  coutume  de 
fon  Eglife  .  lorlqu'il  écrit  -.  Nous  ne  parlons  fas  clairement  des 
myp.eres  devant  les  Catcchiimenes  j  mais  nous  femmes  contraints 
d'ufer  fouv.ent  d'exprcffinns  oh  [cure  s  ^  afin  qu'elles  puiffent  efire  en- 
tendues des  jî de  lies  qui  font  infiruits  ^  é^que  ceux  qui  ne  le  font  pas 
n'en  foient  pas  blcjfcx^ 
Apud  Ath.nn.  Le  Synodc  d'Alexandrie  rend  témoignage  pour  l'Egypte  , 
lojfqu'il  déclare  qu'il  ne  faut  pas  découvrir  les  myfteresà  ceux 
qai  ne  font  pas  bapciiez  ,  &  qu'il  reproche  aux  Arriens  de  les 
avoir  publiez  devant  les  Catéchumènes,  Se  ce  qui  eft  encore 
pisj  devant  des  Payens. 


C.itech..(; 
illmn. 


apol.  1 


^  des  dijffimîteT^  tirées  des  fens.  469 

S.  Epipliane  le  fait  pour  Tlfle  de  Chypre  en  reprodiant  aux  Ch.  I Y 
Marcionites  qu'ils  avoicnt  la  harûielFe  de  célébrer  les  Mvfteres  H<cxcf.4i. 
devant  les  Catéchumènes. 

S.  Bafile  parlant  même  du  Baptême  &  de  la  Confirmation-, 
fur  quoy  on  eftoit  bien  moins  exad  qu'à  l'égard  de  l'Euchari- 
ftie ,  dit  qu'il  n'efloit  pas  permis  à  ceux  qui  n'cftoient  pas  baptt. 
fez  de  les  voir  admimftrer.  Ce  qui  montre  que  c'eftoit  la  prati- 
que de  l'Eglife  de  Cefarée  en  Cappadoce  dont  il  eftoit  Evê- 
que. 

Il  n'y  a  rien  de  plus  fréquent  dans  les  écrits  de  S.  Chryfofta- 
meque  les  réticences  fur  le  fujet  de  l'Euchariftie,&  quelque- 
fois même  à  l'égard  des  autres  Sacremens  ,  à  caufe  de  la  pre- 
fence  des  Catéchumènes, ce  qui  montre  clairement  qucccrtc 
coutume  s'obfervoit  à  Conftantinople  &  dans  le  Dioccle  du 
Pont. 

Tlieodoret  qui  l'a  marquée  dans  ks  Dialogues, fait  voir  qu'el- 
le s'obfervoit  dans  le  Parriarcha  td'Antioche  ,  &  dans  les  Erlt- 
fesd'Afie  les  plus  éloignées ,  comme  l'eftoit  celle  de  Cvr. 

Il  ne  faut  point  d'autre  témoin  pour  l'Afrique  que  S  Au, 
guftin  ,  dans  les  écrits  duquel  on  voir  continuellement  ces  di^ 
cours  (ufpendus  &  obfcurcis  à  defTein  fur  le  liiict  deTEuciia- 
rin:ie,&:qui  marque  fans  ceOe  que  c'eft  la  prefence des  Caté- 
chumènes qui  l'obligeoir  d'en  uferainfi. 

Enfin  S.  Ambroile  rait  voir  que  c'edoit  auffî  la  coutume  de 
l'Italie, lorfau'il  dit  au  premier  chapitre  da  livrL'  qu'il  a  fait  pour 
les  nouveaux  baptifez,  que  s'il  cuft  parlé  des  myftcres  &:  des 
Sacremensavant  le  baptême,  fçauroit  efté  ,  non  les  en  inftrui- 
re  j  mais  les  découvrir  par  une  efpeee  de  trahiion  :  Prodidijje 
fottujcjuum  edidiffe  exiflimarenmr. 

Il  eft  encore  certain  que  ce  confentement  de  toutes  les^Fgli'ês 
au  quatrième  fîecle  n'a  pour  caufe  aucune  ordonnance  de 
Conciles  qui  les  ait  unies  dans  cette  pratique  ,  qu'il  ne  paroift 
point  qu'aucune  l'ait  empruntée  d'une  autre  ;  mais  qu'elle  fe 
trouve  uniformément  établie  par  tout,faDS  qu'on  en  puifîe  mar- 
quer lecommencement  en  aucun  lieu. 

Ainfi  il  n'y  eut  jamais  de  pratique  à  laquelle  on  eufl;  plus  Az 
droit  d'appliquer  cette  règle  de  S.  Auguftin,  que  les  chofes 
qui  fe  trouvent  obfervees  uniformément  par  toute  l'Eglife,  6c 
que  l'on  ne  fçait  point  iivoirefté  inftituécs  par  des  Conciles  j 
doivent  eftre  rapportées  à  la  tradition  des  Apoftres, 

NNni] 


47®      Lîv.  VII.  Exxmen  des  argumens  négatifs  ^ 

Qtie  (î  réquicé  veut ,  (elon  ce  Père  ,que  l'on  juge  ainfi  de 
toutes  les  pratiques  univerfelles  de  l'Eglife,  dont  on  ne  voit 
point  le  commencement ,  la  raifon  &:  le  bon  fens  nous  y  obli- 
gent encore  plus  à  l'égard  de  celle-cy. 

Car  fi  l'on  n'euft  ulc  d'aucune  referve  à  l'égard  de  l'Ei-icha- 
riftie  dans  le  troifiéme  fiecle,&:que  les  Payens  eufient  efté 
communément  inftruitsdece  que  l'Eglife  croyoitde  cemyfte- 
re,  comme  M.Claude  fe  l'imagine?  quel  fruit  auroit-elle  pu 
efpcrer  de  cette  retenue  8c  de  ce  filence  qu'elle  a  depuis  fî 
exadement  pratiqué  ?  Eft-cç  qu'elle  auroit  crû  effacer  par  là 
toutes  les  idées  que  lesPayensen  auroient  eues?  S'amafet'on 
à  cacher  les  chofes  publiques?  Et  les  Chrétiens,  par  exemple  , 
ont  ils  jamais  diffîmulé  aux  Payens  qu'ils  adorojent  J.  C.  ôc 
qu'ils  rcjettoient  ia  pluralité  des  Dieux  ? 

Ainfi  la  retenue  bc  le  filence  univerlel  des  fidelles  du  quatrié. 
me  fiecle  fur  l'Euchariftie,  prouve  non  feulement  que  ce  myfte. 
re  n'eftoitpas  connu  aux  Payens  de  leur  temps ,  mais  qu'il  ne 
l'eftoitpas  non  plus  à  ceux  des  trois  fiecles  precedens. 

Car  on.  ne  s'adreint  point  à  des  pratiques  gênantes  comme 
jcelle-là  fans  aucun  fruit  5  jamais  l'Eglife  n'auroit  commencé  à 
cacher  ce  myftere  aux  Payens  3  fi  elle  avoir  eu  lieu  de  croire 
qu'ils  le  connuffent,  6c  qu'ils  en  fuffent  informez.  Elle  a  donc 
cru  qu'ils  ne  fçavoient  pas  ce  qu'elle  prenoit  tant  de  foin  de 
leur  celer;  c'eft-à-  dire  c^ue  ion  filence  n'a  pas  efté  une  vaine  for- 
malité ,  êc  qu'elle  a  crû  confcrver'parlàdans  le  fecret  lesmy- 
ileres  qu'elle  vouloir  cacher  aux  infîdelles. 

Aufii  les  Pères  de  ce  temps  là  rapportent-ils  formellement 
cette  referve  à  la  tradition  des  Apoilres  jbien  loin  de  la  regar- 
der comme  une  pratique  nouvelle  qui  n'eût  commencé  que 
dans  le  quatrième  fiecle. 

C'cil  ainfi  que  S.  Bafilcen  parle  exprefîèment  dans  fon  livre 
du  S.  Eipric.  Car  après  y  avoir  mis  au  nombre  des  traditions 
r)on  écrites  les  prières  qui  fe  font  à  la  conlecracion  de  l'Eucha- 
riftie j  &.  qui  fe  diloient  avant  5c  après  les  paroles  de  S.  Paul  ou 
de  l'Evangile  ,  il  rapporte  cette  conduire  aux  Apoftres  ,  &  en 
rend  une  raifon  générale, qui  marque  que  ce  filence  que  l'Eglife 
gardoit  à  l'égard  de  (es  myftcrcs,  eftoit  conforme  à  leurefprit. 
Les  Apofires  é"  l^s  SS.  Pères  ^  dit- il  ,  qui  ont  prefcrit  certaines  ce - 
refnonies  au  commencement  de  l' E'^life  ,  ont  crû  que  ^^ir  conferver 
la  majejié  des  myjîeres  j  //  les  falioit  tenir  dans  le  filence  ^  dans 


f-.. 


^)  des  difficitltez.  tirées  des  Jens.  471 

le fecret.  Cur  ce  qui  devient  public  ,  (jr-  qui  paffe  jufquaux  oreil- 
les du  menu  peuple  ,  n'eft  fa^  un  myfiere.  C'cji  la  raifon  pour  la- 
quelle Dieu  nous  a  laijjé  plu  (leurs  dogmes  fans  les  faire  écrire  ,  de- 
peur  que  le  monde  cjiant  trop  accoujtumc  à  cesveritcz^^  on  ne  vint  à, 
les  méprijer. 

Mais  il  n'eft  pas  befoin  de  raifonnemens  pour  montrer  que 
cette  coutume  de  cacher  les  myfberesauxPayens  n'a  point  com- 
mencé dans  le  quatrième  liecle  ;  puifque  nous  en  avons  àes 
marques  certaines  dans  des  Auteurs  qui  l'ont  précédé.  Car  c'eft 
lur  cela  qu'eft  fondé  ce  que  le  Payen  Cecilius  dit  dans  Minu- 
tius  Félix  :  Que  tobfcurite  où  ton  tenoit  cette  Rcliy  on  prouvait  la 
vérité  d'une  partie  des  crimes  qu'on  luy  imputoit.  Pourquoy  ^  dit- il  , 
ont  ils  tant  befoin  de  cacher  (^  de  dérober  leur  culte  ajix  yeux  des 
hommes  ,  puifquon  ne  craint  point  d'expo  fer  a  la  lumière  ce  qui  efi 
honneflei  Qu'eft-ce  que  ce  culte  ,  iînon  les  myfteres  de^  Chrc- 
tiens  ,  entre  lelquels  l'Euchariftie  tient  le  premier  rang  ? 

C'eft  par  cette  même  raifon  que  Tertullien  juflitîe  les  Chré- 
tiens des  crimes  qu'on  leur  imputoit  de  commettre  dans  la  cé- 
lébration de  leurs  myfteres.  Car  après  avoir  montré  que  ceux 
qui  les  y  avoientfouvent  furpris,  n'en  avoient  jamais  rien  dé- 
couvert ,  il  ajoute  :  Qui  font  donc  ceux  qui  ont  fait  connoifire  ait 
monde  ees  prétendus  trimes  1  Sereient-  ce  ceux  même  que  l'on  en  ac- 
cu fe  .<■  Mais  comment  cela  pourrait-  il  eftre  ,  puifque  c'eft  la  loy  com- 
mune de  tous  les  myfteres  que  de  les  tenir  fecret  s  /  S'ils  nefe  fontd.o~nc 
pas  découverts  eux-mimes ,  il  faut  que  ce  foient  des  étrangers.  Mais 
■comment  des  étrangers  en  auroient-ils  eu  la  connaifunce  ,  puifque 
l'on  é  la  iqi'ie  les  profanes  de  la  vite  des  mvfieres  les  plus  fa:nis  ^^ 
que  l'on  fait  choix  de  ceux  que  l'on  en  rend  fpeFiatcurs  ? 

Si  les  myfteres  des  Chrétiens  euirent  efté  connus  de  la  pkl- 

part  des  Payens  ,  &  s'ils  évident  efté  informez  de  ce  qui  le  paf- 

foit  parmi  eux  dans  la  célébration  de  l'Eucharifticqu'y  auroit- 

il  eu  de  moins  iolide  que  cette  réponfe  de  Tertullien  :-  Quel 

droitauroit-il  eu  de  demander  comment  les  étrangers  auraient p» 

fçavoir  ces  chofes  ?  v'N DE  extraneis  notifia}  Et  comment  auroit- 

il  pu  fuppoferjComme  un  principe  conftant  &  capable  de  perfua- 

der  les  Payens ,  que  l'on  éloigne  les  profanes  de  la  vue  des 

myfteres,  êc  que  l'on  fait  choix  des  témoins  &;  des  fpedateurs  ? 

Cum  etiarn  pia;  initiationes  arceant  profanas   c'^  arbitris  careant.  ^      , 
ï#-ii  •  ^  in  ''  J-  J  Terrul  apq. 

Alaisies  calomnies  mêmes  que  les  Payens  repandoientdetou-  loa,  c.?. 
tes  parts  contre  les  Chrétiens  j  en  les  accufant  de  tuer  un  en- 

NNn  lij 


Tenu!,  ai 
8ȕor.  1.  1.  c.  j, 


47i       Liv.  VII.  Examen  des  argumens  négatifs, 
fantdans  leursaflt'mblccs,&  deccmmeitre  des  ]  m  pu  rctLZ  abo- 
minables, &  la  manière  dont  les  Pcres  s'en  font  défendus  fou r- 
nilîènt  encore  une  preuve  convaincante  du  fecret  où  les  Chré- 
tiens tenoient  leurs  myrteres. 

Car  ces  accufarions  même  font  voir  qu'ils  en  eftoient  très- 
mal  informez  :  &  comme  elles  eftoient  générales  ,  elles  font 
voir  que  cette  ignorance  eftoit  générale.  Il  paroift  d'ailleurs 
qu'encore  qu'il  infl  naturel  pour  repoufler  ces  calomnies  de 
fiureun  récit  decequiie  pafToit  dans  la  célébration  des  myfte- 
res ,  &  que  cette  voyefufi:  fans  doute  la  plus  propre  de  toutes! 
perfuadcr,aucundes  Apologiftesde  la  Religion  Chrétienne  ne 
l'a  prife,  excepté  feulement  S.  Jun;in,par  la  raifon  que  j'ay 
marquée.  Mais  on  ne  voit  rien  de  femblable,  ni  dans  Minutius 
Félix, ni  dans  Atenagore,  ni  dans  Tertullien.  Et  il  eft  remar- 
quable que  ce  dernier  Auteur  décrit  bien  dans  fon  Apologett- 
que  lesfeftinsque  les  Chrétiens  appelloient  Agapes,  qu'il  dé- 
crit les  prières  qu'ils  faifoient  dans  leurs  aflcmblccs,  le  foin 
qu'ils  avoient  de  s'y  infiruire  par  la  ledure  des  Ecritures,  la 
manière  dont  on  y  recueilloit  les  aumônes ,  &  dont  on  corri- 
geoit  les  fautes  ;  mais  qu'il  ne  dit  pas  un  mot  des  faints  Myfle- 
res  dans  ce  récit ,  quoique  la  célébration  des  myfteres  fuft  la 
principale  partie  du  cuite  chrétien,  &  qu'on  ne  doive  point 
douter  que  ce  f^javant  Auteur  ne  l'ait  regardée  auffi  bien  que 
S.  Epiphane  ,  comme  le  principal  moyen  du  falut  des  Chré- 
tiens :  Pï^cipua  Chrifiianonim  faUfs. 

Il  fait  encore  voiren  un  autre  endroitde  fêsonvrages  que  les 
Clirétiens  de  ce  temps,  là  fe  croyoient  obligez  de  cacher  leurs 
myfteres  aux  Payens  ,  puifqu'il  s'en  fert  pour  détourner  les 
femmes  de  fe  marier  à  des  infidelles.  Par  là  ,  dit-il ,  on  tombe 
d./ns  cette  fciute  que  les  Payens  'viennent  à  connoifire  nosmyjleres. 
Hoc  efl  igitur  delicium  qttod  gentiles  nojîra  noverunt  ,  qtiod  fub 
eonfcicyitia  inp'ftoruiyi  fumns.  Et'appliquant  cnfuice  cette  raifon 
générale  à  l'Euchariftie  que  les  femmes  Chrétiennes  prenoient 
fouvent  dans  leurs  maifons  pendant  ces  temps  de  perfccution , 
il  reprefente  comme  un  grand  malque  les  infidelles  en  puflenc 
avoir  connoiOance.  Voftre  mary  ,  dit  il ,  m  fcaura-t'il  pas  ce  qui 
V071S  qovfiez^  en  facret  avxnt  toutes  les  autres  -viandes  5  &  s'il  ap- 
perçoit  que  c'ejl  du  pain ,  ne  s'imaginera-  t'il  pas  que  c'efi  celuy  dont 
m  parle  tant  ? 

C'eft  un  des  grands  inconveniens  que  Tertullien  trouve 


^  des  diff^mlteT^tirées  des fens.  475 

dans  ces  mariages  j  ce  «.[ui  marque  rimpreffion  commune  où  Ch.  IL 
eiftoienc  cous  les  ChrécieHs  de  ce  temps-là,  qu'il  falloit  tenir 
leurs  myfteres  cachez  aux  Payens, 

Mais  on  ne  fcauroit  rien  defirer  de  plus  formel  &  de  plus  pré- 
cis (ur  ce  fujer,  que  la  plainte  môme  qu'en  fait  CeKus  dans  Ori- 
gene ,  où  il  appelle  pour  ce  fujet  ladoclrine  des  Chrctiens  , 
S^o-yf^A  ï^pv^ior  ,unedoc1rine  clandeftme ,  &  que  la  rëponfeque 
luy  fait  Ori2:ene  qui  reftraint  ce  fecrec  aux  feuls  myfteres  :  Par  o.-ig  contr. 
f  r  ,  dit- il,  ^a^'  Celfus  af)pclle  fouvent  nojhe  doïinne  une  docirine  '■•"'• 
cLtndeJline ,  il  luy  faut  répondrcfur  ce  fujct  ^  ce  qui  n'efi  p':i'y  difficile^ 
pnfque  le  monde  coymoifi  même  prefentement  mieux  la  docirine  des 
Chrétiens  que  celle  des  Philofophes.  Car  qui  eft-cc  qui  ignore  main- 
tenant quej.  C.  efi  ne  d'une  vierge  ,  quil  a  eflè  crue  j  fié  ?  Qui  efl.ce 
qui  n'a  p^is  cuy  parler  de  fa  Refurrcchon  qui  efi  crue  de  tant  de 
monde  ,  ^  du  jugement  dernier  où  les  mèchans  doivent  efire  punts 
^  les  bons  recompenfez^'i  Ce  que  nous  croyons  de  fi  RefUrreBion  cfl 
de  même  public  ,  quoiqu'il  fcrve  de  fujet  de  ri  fée  aux  Infidetles. 
Isf'efi-  il  donc  pas  ridicule  à  Celfus  d'appelier  après  cela  nofire  doc- 
trine c  lande  [fine  }  Jl  efi  vray  qu'il  y  a  certains  points  parmy  nous 
^ue  l'on  ne  communique  pas  %  tout  le  monde  imajs  cela  efi  fi  peu 
particulier  aux  Chrétiens  ,  qu'il  s'obfervoit  parmy  les  Philofophes 
aujji-bien  que  parmy  nous  ,  puifqu  ils  avoient  aufiî  deux  fortes  de 
doctrines  >  l'une  qui  pouvait  -efire  cormnuniquée  à  (^eux  de  dehors  j 
Vautre  qui  n'efioit  que  pour  leurs  difciples  particuliers.  Tous  les 
myfieres  des  Grecs  é- des  Barbares  font  aufji tenus  fccrct s,  fans  que 
perfonne  y  trouve  k  redire.  C'^fi  <^onc  en  vain  que  Celfus  entre- 
prend de  décrier  le  fecret  que  les  Chrétiens  gardent ,  ne  fcachant pas 
même  en  quoy  il  confifie. 

Il  paroift  clairement  par  ce  lieu  d'Origene  ,  que  non  feule- 
ment de  Ion  temps  il  v  avoic  des  dogmes  &  des  myileres  que 
l'on  tenoit  cachez  aux  Payens,  mais  qu'il  acruquecela-fe  pra- 
tiquoit  du  temps  même  de  Celfus,  c'eft-à- dire  des  le  premier 
fîecle,  ou  au  commencement  du  fécond. 

Il  paroift  que  Celfus  ne  croyoit  pas  fçavoirtoutela  docirine 
des  Chrctiens ,  £c  qu'il  en  eftoit  bien  éloigné,  qu'il  ne  fçavoic 
paî  même  félon  Origene  en  quoy  confftoic  ce  qu'on  luy  ca- 
choic.  Et  comme  il  eft  certain  d'ailleurs  que  Ton  n'a  rien  caché 
avec  tant  de  foin  que  TEuchariftie  ,  on  ne  doit  point  douter 
qu'elle  ne  ruft  de  ces  chofes  cachées  dont  CcHus  n'eftoitpas 
informé  j  5c  qu'il  ignoroit  abfolumenc. 


^"74      Liv.  VII.  Excimen  des  AYgumens  mgatifs , 

Ces  raifons  font  plus  que  (uffifantes  pour  faire  conclure  à 
tout  le  monde  ,  que  M.  Claude  a  fuppofé  très  témérairement 
que  la  doftrine  des  Chrétiens  fur  l'Euchariftie  fuft  connue 
aux  Payens-,  que  c'eft  fans  fondement  qu'il  reftraint  au  qua- 
trième fiecle  cette  referve  fur  les  myftcresj  &  qu'il  eft  conftant 
au  contraire  qu'elle  a  toujours  efté  pratiquée  ,  hormis  en  cer- 
taines occafions  rares,  où  les  Pères  s'en  font  difpenfez,  comme 
S.  Juftin  a  fait  dans  fon  Apologie.  Âinfi  le  foin  que  les  Chré- 
tiens ont  toujours  eu  de  cacher  leurs  myfteres  aux  Payens , 
ellant  certain  ,  on  ne  doit  pas  douter  qu'il  n'ait  eu  fon  effet  à 
l'éo-ard  delà  plupart  des  Payens  ,&:  même  des  plus  curieux  &C 
des  plus  paflîonnez;  De  forte  ,  comme  j'ay  déjà  dit ,  que  ce 
grrand  argument  tiré  de  leur  filence  fe  renferme  en  un  mot,  8c 
par  la  réponfe  du  monde  la  plus  vray  femblable ,  en  difant  que- 
ce  peu  d'Auteurs  Payens'  dont  les  objections  nous  reftent  ,. 
eftoient  compris  dans  ce  grand  nombre  ,  à  l'égard  de  qui  la  re- 
ferve des  Chrétiens  n'avoif  pas  efté  inutile. 

M.  Claude  remarquera,  s'il  luy  plaifï,  que  cette  réponfe  ne 
fuppofe  point  qu'aucun  Payen  n'ait  efté  informé  de  ce  que  les 
Chrétiens  croyoient  fur  l'Euchariftie  ,  quoiqu'il  euft  de  la  pei- 
ne à  le  montrer  d'aucun  par  des  preuves  pofitives.  On  ne  fup- 
pofe point  non  plus  qu'aucun  Payen  n'ait  rien  dit  fur  ce  fujec 
contre  les  Chrétiens. 

Je  veux  bien  luy  accorder  Tun  &  l'autre,  pourvu  qu'il  borne 
&,  cette  connoifTance  &  ces  reproches  à  un  petit  nombre  de 
Payens,  &  qu'il  me  permette  de  luy  dire  que  cène  fontpasceux 
dont  les  reproches  foient  venus  jufqu'à  nous» 

En  effet  combien  v  a.t'il  de  gens  qui  peuvent  connoiflre  le 
fond  d'une  doctrine,  dans  lefquels  cette  connoifTance  meurt? 
Tout  le  monde  n'eft  pas  d'humeur  à  faire  du  bruit ,  ni  à  pu- 
blier fes  penfées.  On  ne  s'applique  pas  à  tous  ceux  qui  le  fonr. 
Et  dans  la  multitude  des  chofes  qu'on  avoit  en  ce  temps  à  re- 
procher aux  Chrétiens ,  on  s'arreftoit  principalement  à  celles 
qui  eftoient  dans  la  bouche  de  la  multitude  qui  ignoroit  ce 
myftere. 

D'ailleurs ,  quand  quelque  Payen  en  auroit  fait  un  fujet  de 
reproches ,  il  ne  faut  pas  s'imaginer  que  les  Chrétiens  fe  fuf^ 
fent  crus  obligez  d'y  appliquer  le  monde  en  y  répondant  ex- 
prefTemcnt.  Leur  conduite  fait  voir  qu'ils  auroient  pluftofl- 
pris  le  parti  de  les  diffimuler.  &  de  les  laifîcr  étouffer  fans 

bruit 


^  des  difficulté^,  tirées  des  fens.  \-j^ 

bruit  j  que  de  s'engager,  ne  s'y  arreflantj  à  publier  des  chofes  Ch.  II. 
qu'ils  croyoienc  devoir  cacher. 

On  a  déjà  veudes  preuves  de  cette  conduite  dans  la  ma- 
nière dont  les  Pères  ont  répondu  aux  reproches  des  Payens  , 
que  dans  leurs  aflemblées  ils  couvroient  un  enfant  de  farine  Se 
le  mangeoient  aprcs  l'aveir  percé  de  plufieurs  coups.  Car  au- 
cun des  Pères,  excepté  S.  Jufl:in,n'en  a  pris  fujet  d'expliquer  la 
dodrinede  l'Euchariftie,  quoyqu'il  n'y  euftriendc  plus  propre 
iêlon  les  Miniftres  pour repoufjer cette  calomnie.  On  envoie 
un  autre  tres-confiderabîe  dans  les  livres  que  Saint  Cyrille 
d'Alexandrie  a  faits  contre  Julien.  Car  cet  Apoflat  ayant 
parlé  par  rencontre  du  baptême  ài^s  Chreftiens ,  &  s'eftanc 
mocqué  de  ce  que  ne  purifiant  pas  le  corps  de  la  Icpre  ny  des 
autres  maladies,  on  pretendoit  qu'il  purifiaft  l'ame  de  fes  cri- 
mes j  Saint  Cyrille  au  lieu  de  s'étendre  fur  ce  fujet  à  fon  ordi- 
naire, fe  contente  de  répondre  que  ces  myjhres  fintji  profonds  d^ 
fi  relevez^qu' ils  ne  peuvent  efirc  compris  par  ceux  qui  n^  ont  pas 
lafoy ,  ^  qui  font  dans  les  ténèbres  de  l'erreur:  Que  cefi  de  ces  ^  ^yrii  i 
veritez^^  quifaye  a  dit:  Si  vous  ne  croyez^  vous  ne  comprendrez^  comr.  lui.  p. 
rien  :  Que  lafoy  efl  la  four  ce  de  l' intelligence  ,  qu'ai'nfi  de  peur  ^^^' 
Cvu'en  DECOUVRANT  LES  M^SlïKts aux noniniticz^^ihï'offcnfafi 
y.  C.  qui  défend  de  donner  les  chofes  fiintes  aux  chiens .,  ^  de  jet- 
ter  des  perles  devant  les  pourceaux,  il  n'entreprendra  fa^  de  tr ai  t- 
terde  ce  qu'ils  renferment  le  plus  profond. 

Et  après  en  avoir  dit  quelque  peu  de  chofes,  il  ajoute,  qu'il 
en  diroit  bien  d'autres^  s'ils  ne  craignait  point  d'eftre  entendu  des 
non  initie?:,  ,'ti  /j-vi  t«4  tSc  clu.iïi  tuv  i'S't^iiv  «t'xoa  i  Parce  ,  dit-il , 
qu'on  fe  mocque  oTdinaire7nent  de  ce  que  l'on  ne  comprend  pas ,  (J^ 
que  les  ignoruns  ne  connoiffant pas  m'eriic  lafoibleffe  dejcur  efptit^ 
mèprifent  ce  qu'ils  devraient  le  plus  admirer. 

il  y  a  bien  de  l'apparence  que  fi  quelqu'un  parmi  les  Payens 
euft  découvert  quelque  chofe  delà  créance  des  Chreftiens  fur 
l'Euchariflie,  &  qu'il  l'eufl  voulu  tourner  en  ridicule,  les  Chré- 
tiens auroient  fuivi  cette  conduite  de  faint  Cyrille,  &:  qu'au 
lieu  d'expliquer  à  fond,  ils  fe  feroient  contentez  de  certaines 
réponfes  générales  qui  auroient  éludé  leur  curiofité  ,  êc  leur 
auroient  caché  ce  qu'ils  n'en  connoiiToient  pas  encore. 

C'eft  ainfi  qu'en  ufa  une  fainte  Martyre,  comme  il  efl  rap- 
porté dans  un  paflage  de  faint  Irenée  qui  fe  trouve  dans  les  œu- 
vres d'Ooeumeniusj  6c  dont  les  Minières  abufent  tres-mal  à 

oo# 


■^yé       Liv.  VII,  Examen  des  Argamens  négatifs  , 

propos.  Ce  paflage  porte  que  les  Fayens  ayant  pris  des  Efclavei 
des  Chreftiens  qui  n'efioient  encore  que  Catéchumènes^  ^  les  for- 
çant  de  leur  apprendre  quelque  chofe  de  fecret  touchant  les  Chré- 
tiens i  Ces  efclaves  qui  rt  avaient  point  Vautre  7noyen  de  les  fa~ 
tis faire ^  qu'en  leur  difant  qu'ils  avaient  ouy  dire  a  leurs  mai(hes  que 
lit  divine  Communion  ejlait  le  corps  d^  le  fang  de  J.  C.  g^  qui  s'i~ 
mazinoient  que  c'efioit  effectivement  de  la  chaire  du  fang^  le  di- 
rent en  effet  ainfi  a  ceux  qui  les  preffoicnt  :  c^-^  fur  cela  ces  Payens 
ferfuadez^  que  les  Chreftiens  .pratiquaient  en  effet  ce  qui  leur  ef~ 
toit  impute  par  ces  Efclaves ^^  répandirent  ce  bruit  parmy  l'es  autres 
Payens  3  ^  tachèrent  par  les  tourmens  de  le  faire  avouer  a  San- 
Uus  ^  a  Blandine.  Mais  Blandine  leur  répondit  avec  une  liberté 
pleine  de  faqeffe -^  Comment  ceux  qui  s'abjlienncnt  par  pieté  des 
viandes  qu  il  leur  ferait  permis  de  manger.,  feraient- ils  capables 
de  faire  ces  chofes  que  vous  nous  impute^} 

Voila  le  myftere  de  l'Euchariftie  découvert  en  partie  par  les 
Payens  j  &  le  voila  caché  à  ces  mêmes  Payens  par  la  prudence 
de  cetteMartyre.il  eft  indubitable,  6c  que  ces  Efclaves,  6c 
que  ces  Payens  avoient  dans  l'erprit  que  parmi  les  Chreftiens 
on  mant^oit  effectivement  de  la  chair  humaine  comme  on 
man^e  les  autres  viandes  :  c'elT:  à  direqu'ils  eurent  Tidéeque 
ies  Capharnaïtes  en  conçurent  quand  J.  C.  leur  parla  déman- 
ger fa  chair.  Cette  idée  eftoit  tresfaulTe  5  c'eft:  à  dire  qu'il  ef^ 
toit  faux  que  l'on  diviTaft  la  chair  de  J.  C.  qu'on  la  mangeafl 
de  la  manière  que  les  Payens  fe  l'eftoient  imaginez.  Etc'efb 
pourquoy  faint  Irenée  a  raifon  de  reprefenter  cette  idée  com- 
me faulFe  en  l'attribuant  à  ces  Efclaves  &  à  ces  Payens. 

Or  l'idée  que  les  Payens  avoient  eftant  faufle,  les  Chrétiens 
qui  vouloient  d'une  part  fe  juftiiîer,&  de  l'autre  cacher  leurs 
myfteres  à  ces  profanes  ,  n'avoient  qu'à  la  nier  fimplement. 
Et  c'efl:  ce  que  fît  auffi  fainte  Blandine.  Elle  defavoiia  cette 
action  brutale  &:  barbare  qu'on  imputoit  aux  Chrétiens, 
mais  elle  ne  découvrit  pas  ce  qui  fervoit  de  fondement  aa 
rapport  de  ces  Efclaves. 

Il  faut  que  les  Miniftres  reconnoiflènt  eux-mêmes  cette 
referve  dans  laréponfe  de  fainte  Blandine.  Car  elle  ne  dit  rien 
de  ce  qu'un  Calvinifte  quiauroit  voulu  fejuflifier  d'un  repro- 
che femblable  &  ne  rien  cacher,  n'auroit  pas  manqué  de  ré- 
pondre. Elle  ne  dit  point  que  ces  Efclaves  s'eftoient  trompez 
faute  d'entendre  une  expreffion  ordinaire  parmi  les  Chrétiens, 


^  des  difficulté^,  tirées  des  fcns.  477 

qui  efl:  que  mangeant  dans  leurs  myfteres  un  morceau  de  pain  Ch.  III. 
&  beuvant  un  peu  de  vin  j  ils  donnoient  à  ce  pain  &  à  ce  vin  les 
noms  de  corps  &  de  fang  de  J.  C.  parce  que  ce  font  les  fi- 
gures de  ce  corps  &:  de  ce  Tang.  Elle  ne  dit  point  que  l'on  ne 
mange  que  fpiricuellement  la  chair  &  le  fang  de  J.  C.  &:  que 
cette  manducation  n'efl:  autre  chofe  que  de  concevoir  qu'il 
eft  mort  pour  nous. 

Ainfî  ce  pafTage  n'efl  propre  qu'à  établir  tout  ce  que  nous 
avons  entrepris  démontrer  dans  ce  chapitre  contre  M.  Clau- 
de. Car  il  paroift  premièrement  que  ces  Payens  dont  parle  S. 
Irenëe,  eftoient  très  mal  informez  du  myflere  de  l'Eucharif- 
tie,  puifqu'ils  n'en  fçavoientrien  avant  le  rapport  de  ces  Efcla- 
veSj  &  que  fur  ce  rapport  même  ils  en  conçurent  une  idée 
fi  fau{Ie,que  les  Martyrs  n'eurent  qu'à  la  nier  fimplement. 

2.  Il  paroift  en  fécond  lieu  qu'il  eftoit  même  rare  que  les 
Payens  en  fçûflent  jufques  là,  puifqu'on  ne  voit  ny  dans  les 
autres  acies  des  Martyrs,  ny  ailleurs,  ny  que  desEfclavesayenc 
jamais  fait  un  pareil  rapport,  ny  qu'on  ait  voulu  faire  avouer 
aux  Chrétiens  qu'ils  mangeoient  le  corps  &  beuvoientlefang 
dej.  C.D'oùon  a  lieu  de  conclure  que  les  autre-*  Payens  ef- 
toient  dans  une  ignorance  de  ce  myftere  ,  pareille  à  celle  des 
Juges  de  faince  Blandine,  avant  que  ces  Elclaves  leur  euflent 
tait  ce  faux  rapport  ^  c'eft  à  dire  qu'ils  n'en  fçavoient  rien  du 
tout. 

3.  On  y  voit  en  troifiéme  lieu  que  les  Chrétiens  avoient  foin 
de  tenir  leurs  myfteres  trcs.cachsz  aux  payens  :  puis  qu'au 
lieu  de  fe  juftifier  de  la  calomnie  de  ces  Efclaves  par  un  éclair-, 
ciiTement  entier  de  ce  qui  fe  palfoit  dans  leurs  myfleres ,  &  de 
ce  qui  donnoit  lieu  à  cette  imagination:  fainte  Blandine  fe  con- 
tenta de  la  nier,  &  de  montrer  qu'elle  eftoiccontre  toute  ap- 
parence, fans  rien  dire  davantage  p  ^oaa'j.î 

4.  On  peut  enfin  conclure,  que  fi  des  Chrétiens  prèflèz  &l 
forcez  de  répondre  par  la  rigueur  des  tourmens  à  une  accufa- 
tion  fondée  vi-fiblement  fur  l'Euchariftie,  ont  gardé  cette  rete-. 
nue.  les  autres  qui  n'eftoienc  pas  dans  la  même  necefiîté,.orrc 
•dû  s'y  croire  beaucoup  plus  obligez, ôcqu'ainfi  les  Apologiftes: 
de  la  Rekgion  Chrèrienne,  qui  ont  cboifi  entre  les.  objediôns 
des  Pavens  çeHes  qu'il  eftpitle  plusneceâkircidie  diétrmre,  orrtreui 
t^vtes-fortes  de  raifons  de  diffimuier  celles  qui  auroienr regardé 
ce  myftere,qn.and  même  il  yen  auroit  eu^puifqoejd'iine  parcelles 

OOoij 


4yS  Liv.  VII.  Examen  des  Argumens  négatifs^ 

n'auroienc  efté  faites  que  rarement  &par  peudepayens,  &que 
de  l'autre  ils  n'auroient  pu  y  répondre  comme  il  faut, fans  don, 
ner  auxpayens  plus  de  connoiffance  de  ce  myftere  ,  que  leur  Re- 
ligion ne  leur  permettoit.  Ainfi  il  n'y  a  aucun  lieu  de  s'étonner 
de  ce  qu'on  n'en  trouve  rien  dans  leurs  écrits^.  Car  outre  qu'il 
eftfort  incertain, (î  jamais  cette objedion  a  efté  faite  à  d'au- 
tres qu'à  ces  Saints  Martyrs  de  Lion  ;  il  eft  vifible  de  plus ,  que 
quand  elle  auroit  elle  faite,  lés  règles  de  la  prudence  chreftien- 
ne  obligeoientde  l'éluder  par  le  filence. 

Ainfi  il  n'y  a  rien  de  plus  mal  concerté  que  ces  deux  pro- 
pofitions  fur  lefquelles^  de  l'aveu  môme  de  M.  Claude,  toute 
la  preuve  qu'il  tire  du  filence  des  Payens  efl:  établie;  l'une, 
que  fi  les  anciens  Chreftiens  ont  cru  la  tranffubftantiation 
Romaine, il  n'eft  pas  imaginable  que  les  Payens  ne  leur  en 
ayent  reproché  les  inconveniens  5  l'autre,  que  fi  les  Payens 
avoient  formé  contre  les  Chrétiens  toutes  les  plaintes  que  la 
raifon  5c  les  fens  peuvent  former  contre  la  tranfiubftantiation, 
il  feroit  impoffible  que  nous  n'en  trouvaffions  quelque  trace 
dans  leurs  écrits. 

Caril  efttres-imaginableau  contraire  que  la  plufpart  des 
Payens  n'ayent  point  parlé  de  ce  qu'ils  n'ont  jamais  fçeu. 

Il  efi;  tres-imaginable  que  ce  peu  de  Payens,  dont  nous  avons 
les  écrits,  ou  dont  il  eft  fait  mention  dans  les  Pères,  fufïent  de  ce 
grand  nombre  à  qui  le  myftere  de  l'Euchariftie  a  eftéabfolu- 
ment  inconnu. 

Il  eft  tres-imaginable  que  quand  quelques  Payens  en  eufiênt 
appris  quelque  chofe,  &  qu'ils  en  auroient  même  parlé  ,  ces 
reproches  ayent  efté  éludez  par  la  prudence  &  la  fidehtédes 
Chrétiens  à  cacher  leurs  myfteres  aux  profanes. 

Il  eft  très  imaginable  que  les  Apologiftes  de  la  Religion  Chré- 
tienne, qui  nous  parlent  des objedions  ordinaires  des  Payens,. 
n'ayent  rien  fçeu  de  celle-là  qui  eftoit  rare  &  extraordinaire. 

Et  il  eft  enfin  tres-imaginable  que,  quand  ils  l'auroient  fçeuë, 
ils  £e  foient  crus  obligez  de  ladifiimulerfans  y  répondre  autre- 
ment qu'en  defavouant  en  gênerai  ces  banquets  de  chair  hii- 
maine  dont  ils  eftoient  communément  accufcz. 

Que  M.  Claude  conçoive  donc  une  fois  s'il  peut  ce  que 
tout  autre  que  luy  auroit  peine  à  ne  pas  concevoir  tout 
d'un  coup  ,  &  qu'il  juge  là-defTus  de  l'cftat  qu'on  doit  faire 
de  fon  argument. 


g/  des  diffculte-z^  tirées  des  fens.  47^ 


CHAPITRE   m. 

Examen  particulier  de  ce  que  M.  Claude  avance 
touchant  les  livres  de  Celfus, 

L'Avantage  que  les  Miniftres  veulent  tirer  du  filence  des 
Payens  eft  tellement  décrait  par  le  chapitre  précèdent, 
que  je  m'en  tiendrois  là ,  fi  je  n'avois  àfaire  à  M.  Claude.  Mais 
comme  il  n'efl:  pas  homme  à  fe  rendre  fi  aifément,  j'ay  peur 
qu'il  ne  ramené  encore  fur  les  rangs ,  ce  farouche  ^  infolenten- 
nemy  de  la  Religion  Chreftienne  ,(c'z^  ainfi  qu'il  appelle  Cel. 
fiis)3qu'ilne  nous  fa  fie  un  long  dénombrement  des  points 
que  ce  payen  en  a  attaquez  j  qu'il  ne  nous  veuille  obliger  de  trou- 
ver dans  Minutius  FeliXj  dans  Athenagore,  dans  Arnobe,  des  ré- 
ponfes  aux  objections  que  les  Payens  auroient  deu  faire,  à  ce 
qu'il  prétend,  contre  la  doctrine  de  la  prefence  réelle ,  &;  en- 
fin qu'il  ne  nous  vienne  encore  fatiguer  de  fes  déclarations  en- 
nuyeufes  touchant  Julien  l'Apoftat ,  aufquelles  il  s'eft  déjà 
plaint,  qu'on  n'avoit  point  répondu. 

Epargnons  luy  donc  cette  peine  par  une  difcufîion  particuliè- 
re de  chacun  de  ces  Auteurs.  ComnTe  Celfus  eft  celuy  qui  a  le 
plus  attaqué  de  pointsparticuliers  de  la  Religion  Chreftienne, 
ôc  fur  lequel aufîî  M.  Claude  infifle  davantage,  commençons 
par  luy,  &  voyons  fi  M.  Claude  a  eu  raifon  de  décider  Ç\  magi- 
ftralement  quiln'efipas  concevable  que  Celfus ,  qui  a  fait  une  fer- 
quifîtion  fi  exacte  de  tout  ce  qu'il  a  cru  pouvoir  efire  reproché  aux 
Chrefliens ,  ait  oublié  une  do&rine  qui  luy  ouvroit  un  fi  beau 
champ,  ^  dont  ils  fe  pouvoit  promettre  bien  plus  d'avantage  que  de 
celles  qu'il  attaque  avec  tant  de  fureur. 

Si  je  voulois  me  contenter  de  faire  voir  à  M.  Claude  que  fa 
pafiîon  t'emporte ,  &  luy  fait  avancer  comme  indubitable  une 
chofe  très- incertaine,  je  n'aurois  qu'à  luy  dire  qu'outre  le  livre 
de  Celfus  qu'Origene  a  refuté,  &  dont  il  rapporte  les  objeclions, 
il  eft  probable  que  ce  Philofophe  en  avoir  fait  encore  deux  au- 
tres contre  les  Chreftiens  dont  il  ne  refte  rien  du  tout.  Car 
c'eft  Origene  même  qui  le  marque  en  ces  termes:  Platon  n'a 
nullement  cru  que  les  Poètes  comme  Homère  ^  Hefiode  eujfcnt  eflé- 
infpirex^de  Dieu,  Mais  l'Epicurien  Celfus  [fi  néanmoins  l'Auteur 

OOoiij 


t.    rfp.  p.    4. 


4S0  Liv.  VIL  Examen  des  Argumens  négatifs , 

que  je  réfute  cft  ce  Cclfus  Epicurien  qui  a  compofc  deux  autres  U. 
vres  contre  les  Chreflicns)  comme  s^il  efioït  meilleur  juge  que  Pla. 
ton,  déclare  que  ces  Poètes  eut  eflé  infpirez^de  Dieu. 

Il  eft  clair  par  ce  partage  que  l'Epicurien  Celfus ,  qu'Origene 
a  cru  probablement  eftre  le  même  que  celuy  qu'il  réfute,  a  fait 
deux  autres  livres  contre  les  Chreftiens.  Et  comme  il  eft  fort 
concevable  qu'un  Auteur  qui  fait  plufieurs  livres  contre  les  mê- 
mes adverfaires,  dife  des  chofes  dans  les  uns  qu'il  ne  dit  pas 
dans  les  autres^  à  moins  qu'il  ne  veuille  faire  trois  livres  qui 
n'en  foient  qu'un  3  il  e^  concevable  aulli  que  Celfus  ait  parlé  de 
l'Euchariftie  dans  ces  livres  que  nous  n'avons  plus,  quoy  qu'il 
n'en  ait  point  parlé  dans  ceux  que  nous  avons.  Ain fi  quand  ce 
feroit  une  neceflîtc  que  ce  Phiîofophe  euft  fîiit  quelques  obje- 
(ftions  aux  Chreftiensfur  l'Euchariftie,  M.  Claude auroit tou- 
jours tort  de  foutenir  fî  hardiment,  qu'il  n'efi pas  concevable 
qu'il  n'en  eufi  point  parlé  dans  ceux  quOrizene  a  refutez^^  puif. 
qu'il  auroit  pu  fatisfaire  dans  les  autres  à  cette  prétendue  ne- 
ceffité. 

Mais  je  prétends  pafter  plus  avant ,  &  montrer  qu'il  eft  fin 
concevable  que  Celfus  n'ait  point  parlé  de  l'Euchariftie,  quoy- 
que  l'Eglife  en  cruftce  qu'elle  en  croit  maintenant;  parce  qu'il 
eft  fort  probable  qu'il  n'a  jamais  rien  f^'eu  des  myfteres  des 
Chrétiens,  &  qu'il  a  efté  très  mal  informe  de  leur  véritable 
doctrine. 

Toute  la  fcience  de  cePayen  que  M.  Claude  nous  veut  per- 
fuader  avoir  fait  une  ' perquijîtion  fi  exafie  de  tout  ce  qui  pouvoit 
efire  reproche  aux  Chrcfiiens  ,  fe  reduifoic  prefque  à  l'égard  du 
nouveau  Teftament^  à  quelques  partages  de  l'Evangile  de  S. 
Matthieu.  Il  ne  cite  dans  tout  fon  ouvrage  qu'un  feul  de  S. 
Paul,  &;  Origene  le  luy  reproche  à  la  fin  du  livre  cinquième. 

Il  ne  paroift  pas  qu'il  ait  leu  les  autres  Evangeliftes ,  £c  il  n'en 
tire  aucune  des  objecT:ions  qu'il  en  auroitpiitirer.il  fait  même 
mention  en  un  endroit  de  la  généalogie  de  J.  C.  rapportée  par 
S.  Matthieu,  &  il  fe  contente  d'en  dire  par  une  froide  raillerie, 
que  la  femme  de  ce  charpentier  a  ignoré  qu'elle  euft  un  tel 
Prince  pour  tige  de  fa  race  ;  mais  il  ne  dit  pas  un  mot  de  la 
contrariété  apparente  qu'il  y  a  entre  S.  Matthieu  &  S.  Luc, 
Surquoy  Origene  a  fort  bien  remarque  qu'il  nef^avoit  pas  mê- 
^rieen.  i.z.  "^^  '^^  difficultez  êclcs  doutcs  raj.fonnables,  qu'on  peut  former 
conu-.  Ceifiim  ^nr  Ics  Ecritures. 


(^  des  diffctikcz^  tirées  des  fens.  481 

Pour  les  dogmes  il  eft:  vifible  par  tout  ce  qu'il  en  dit  qu'il  Ch.  IIT. 
ne  fçavoit  que  ce  qui  eftoic  connu  de  tout  le  monde  j  &  qu'il 
ignoroit  abfolurnent  ceux  que  les  Chrétiens  cachoient  aux  non 
initiez.  Cela  paroift  non  feulement  par  le  reproche  qu'il  fait: 
aux  Chrétiens,  de  tenir  leur  doctrine  cachée,  ce  qu'Origene 
avoiie  à  l'égard  des  myfteres  :  mais  aufli  par  toutes  fes  objec- 
tions contre  le  Chriftianifme.  Car  il  n'en  forme  aucune  fur  les 
myfteres,  non  pas  même  fur  le  Baptême  ny  fur  aucun  des  points 
de  la  Difcipline  Chreftienne  qu'on  tenoit  cachez.  Mais  il  fe 
plaint  en  gênerai  que  les  Chreftiens  tenoient  des  affèmblées  fe- 
crettes  contre  les  deffenfes  des  Loix  ,  fans  rien  dire  du  tout  de 
ce  qui  fe  faifoit  dans  ces  allemblées ,  parce  qu'il  n'en  fçavoit 
rien. 

Il  eftoit  même  fi  peu  inftruit  des  dogmes  les  plus  communs, 
&  dont  il  luy  eftoit  le  plus  aifé  de  s'informer,  qu'il  eft  éton- 
nant que  M.  Claude  l'ait  voulu  faire  palTer  pour  un  homme 
phis  inftruit  que  ne  font  beaucoup  de  Chrétiens,  &  qu'il  aie 
ofé  écrire  qti'à  peine  y  a-t-il  rien  qui  fuijje  cfire  relevé  avec 
quelque  apparence  contre  nojlre  fainte  Religion  ,  que  ce  Philo-  ^'  ^^'  ?•  ^^^' 
fophe  Epicurien  riait  relevé  avec  siutant de  fubtilité  que  de  ma. 
lice. 

Il  s'imaginoit  que  Dieu  n'eftoit  point  par  tout,  &  que  c'ef- 
toit  même  la  créance  des  Chrétiens  5  de  là  il  concluoit,  que  ft 
Dieu  eftoit  defcendu  en  terre,  il  avoir  donc  quitté  le  ciel. 

Il  fuppofoit  que  félon  les  Chreftiens  Dieu  eftoit  figuré  co-  q^-    j  , 
loré,  &  capable  de  mouvemens.  Il  ne  paroift  point  par  tout  ce  cont.  ccif, 
qu'on  voit  de  luy  qu'il  ait  connu  la  doctrine  de  la  Trinité,  ny 
ce  que  les  Chrétiens  enfeignoient  de  l'unité  du  Père  &  du  Fils  & 
du  S.Efprit.Il  ne  forme  aucune  objeclion  fur  ce  point,  &  il  ne 
nomme  pas  même  le  S.  Efprit  comme  une  perfonne  diftincTie  ; 
mais  il  prend  l'Efprit  de  Dieu  ra-veoV*  ^^  pour  le  Verbe  qui 
s'eft  incarné  :  C'eftpourquoy  il  fait  dire  aux  Chrétiens,  que 
Dieu  eftant  difficile  à  connoiftre  a  envoyé  fon  S.  Efprit  dans  ^onf  cd£ 
un  corps  femblable  au  noftre,  Tmi;^*  /J^ioi'  lin^àiKm  e/s  o«.aa  jî/*?'' 

Il  connoifloit  auffi  peu  l'Incarnation  que  la  Trinité.  Car  il 
s'imaginoit  que  J.  C.  n'eftoit  autre  chofe  félon  les  Chrétiens     . 
que  l'efprit  de  Dieu  revêtu  du  corps  humain,  c'eft  à  dire  qu'il 
ignoroit  l'union  de  l'humanité  avec  la  divinité,  &  qu'il  n'avoir 
garde  ainfi  de  former  aucune  des  difficukez  qui  naiflènc  de  ce 
myftere  incomprehenfible. 


Gii^, 


4^1        Liv.  V 1 1.  Exumen  des  Argumens  négatifs , 

Mais  rien  ne  fait  mieux  voir  le  peu  de  foin  qu'il  avoir  eu 
de  s'inftruire  delà  Religion  Chrétienne,  que  la  confufion  , 
&  le  mélange  qu'il  fait  de  toutes  les  fentes ,  en  attribuant  aux 
Chrétiens  en  gênerai,  les  rêveries  particulières  de  tous  les  hé- 
rétiques de  Ton  temps. 

C'eft  ainfi  qu'il  leur  attribue  d'enfeigner  que  les  fontaines 
chaudes  eftoient  venues  des  larmes  de  certains  Anges  jce  qui 
eftoit  une  folie  des  Valentiniens. 
i_  y°"^"  *  '  Il  leur  impute  ailleurs  les  erreurs  des  Ophites,  comme  de  re- 
connoiftre  fept  principaux  démons ,  &d'appeller  le  Créateur 
<lu  monde  ,  un  Dieu  deteflable  &  digne  d'exécration  pour 
avoir  maudit  le  ferpent  quia  donné  aux  hommes  la  fcience 
du  bien  &:  du  mal  :  Ce  qui  eftoit  une  des  folies  de  ces  impies, 
qui  bien  loin  d'eftre  Chrétiens,  comme  le  marque  Origene, 
ne  recevoient  pcrfonne  dans  leur  compagnie  qui  n'euft  maudit 
Jefus-  Chrift. 

Et  c'eft  ce  qui  donne  lieu  à  Origene  de  luy  reprocher  que- 
la  dodrine  de  ceux  qui  font  dans  la  vrayc  Eglife  ,  7^  "^ 
rr.s  i-tL-tiX-ftsm,  luy  eftoit  inconnue. 

Auffi  confond  c  il  tellement  toutes  chofes  qu'il  parle  même 
de  certaines  fedes  de  Chreftiens,  qu'Origene  ne  connoiffoit 

{Joint  àce  qu'il  dit  5  comme  de  certains  Marcelliensquijtiroienc 
eur  nom  d'une  Marceline,  de  jene   fçay  quels  Herporiens 
qui  venoient  deSalomc,  &  d'autres  qui  venoient  de  Marianne. 

Qui  croira  qu'un  efprit  fî  confus  ,  fi  rempli  de  fauiîès  idées, 
de  fables,  &:  de  rêveries,  ait  eu  grand  foin  de  s'informer  des 
vrais  fentimens  de  l'Eglife  fur  ces  myfteres  les  plus  cachez?  Qui 
croira  qu'il  ait  pénétré  ce  qu'elle  a  toujours  eu  foin  de  cacher 
à  ceux  même  qu'elle  recevoit  au  nombre  de  fes  enfans  5  puis 
-  qu'il  ne  fçavoit  pas  même  ce  qu'elle  ne  cachoit  à  perfonne, 
éc  ce  qu'elle  defiroit  que  tout  le  monde  connuft  ? 

Qiii  ne  voit  au  contraire,  que  tout  ce  qu'il  en  a  creu  fçavoir, 
fe  reduifoità  quelques  fables ,  qu'il  avoit  ramaflees  fans  difcer- 
nement  des  difcours  de  ceux  qui  ne  connoiftbient  point  les 
Chrétiens;  &;  à  quelque  leAure  fuperfîcielle  de  l'Evangile  de 
S.  Matthieu  &  du  livre  delà  Gcnefe? 

Que  fi  l'on  veut  encore  une  preuve  particulière  pour  mon 
crer  qu'il  n'eft  pas  croyable  que  Celfus  connût  en  aucune  forte 
le  myftere  de  l'Euchariftie  ,  en  voicy  une  très  vrayfemblable, 
c'çft  que  eePayen  a  entrepris  de  prouver  en  divers  lieux  que 

les 


&  des  di^fficahez.  tirées  des  fens.  4R3 

îes  Chrctiens  avoient  emprunté  ou  des  Philofophes,  oudedi-  Ch.îîî. 
verfes  iecles  barbares  une  partie  de  leurs  dogmes  6c  de  leurs 
pratiques, comme  par  exemple  ^  que  c'cftoit  de  Platon  qu'é- 
toit  tirée  cette  parole  de  J.  C.  quU  eft  plus  facile  qu'un  chameau 
paffe  parle  trou  d'une  eguille  que  non  pas  qu'un  homme  riche  entre 
dans  le  Royaume  de  Dieu.  Que  la  coutume  de  n'avoir  point  de 
temples ,  d'autels ,  de  ftatuës  ,  eftoit  pnfe  des  Numides ,  des 
ScytBes  &  des  Perles.  Cependant  quoiqu'il  rapporte  fur  cela 
entr'autres  exemples  que  les  Chrétiens  empruntoient  une  cer- 
taine doctrine  des  Prellres  de  Mitra  ,  on  ne  voit  point  qu'il  par- 
le nulle  part  du  rapport  que  S.  judin  marque  entre  la  célébra- 
tion de  î'Euchariftie  6c  les  facrifîces  de  Mitra,  ou  Ton  fe  fer- 
voit  auiïî  de  pain  ôc  de  vin.  Cet  exemple  auroit  fans  doute  efté 
plus  propre  qtierous  ceux  que  Cellus  aiie2;i]e.  Les  mvfteres  de 
Mitra  ne  luy  eftoient  pas  inconnus  ,  puifqu'il  en  rapporte  les 
chofes  les  plus  difficiles  6c  les  plus  obfcures.  D'où  vient  donc 
qu'il  ne  s'en  fert  point,  fi  ce n'eft qu'apparemment  il  ignoroic 
non  les  myfteres  de  Mitra,  mais  ceux  àss  Chrétiens?  Il  n'y  a 
point  d'autre  voye  pour  prouver  les  négatives  de  cette  nature-, 
puifqu'on  ne  fçauroit  nous  obliger  de  trouver  dans  ce  qui  refte 
de  ce  Payen  un  aveu  formel  qu'il  ignoraft  la  doctrine  des 
Chrétiens  fur  le  mvftere  de  l'Euchariftie  ,  6c  que  même  cet 
aveu  yeft  marqué  de  la  manière  qu'il  le  peuteflrepar  les  repro- 
ches qu'il  fait  aux  Chrétiens  decacher  leur  docl:rine,cequi  ne 
fe  peut  entendre  que  des  myfteres  ,  comme  dit  Orrgene. 

Mais  il  fuffit ,  pour  obliger  M.  Claude  à  fe  rendre ,  qu'il  n'aie 
aucune  preuve  queCelfus  fuftinftruit  de  cette  do<ftTine,  ni  au- 
cune raiion  pour  le  fepareren  cela  du  commun  des  Pavens ,  à 
qui  elle  eftoit  inconnue  ?  quand  même  il  n'y  auroit  pas  des  con-  ' 
jeftures  tres-raifonnablesqui  font  voir  en  particulier  qu'il  l'a 
ignorée.  Il  n'en  faut  pas  davantage  pour  avoir  droit  de  foùte- 
niràM.  Glaudef«'/7  f/?  tres-coneevahle  (\ut  Celfus  n'ait  point 
reproché  aux  Chrétiens  leur  doctrine  fur  l'Euchariftie  J  puif- 
qu'enfin  on  ne  fait  pointde  reproches  pour  àts  chofes  dont  on 
n'a  feulement  pas  d'idée. 


PPp 


484         L IV.  VIL  Examen  des  Argumens  négatifs^ 


CHAPITRE     IV. 

Qt^il  n'y  a  aucun  fujet  de  s'étonner  que  les  JÎpoloyJles  de  la 

Religion  Chrétienne  ,   nayent  Joint  Jarlé  de 

l'Eucharijlie. 

Prii's  Celfns  M.  Claude  nous  oppofe  les  écrits  de  Juliem 
l  Apoilac  ,  &  ceux  des  Apologiilesdela  Religion  Chré- 
tienne. Mais  comme  il  renverfe  en  cela  le  vcntable  ordre  ,. 
nous  commencerons  à  luy  répondre  par  ces  derniers. 

Il  en  fait  le  dénombrement  en  ces  termes  :  Nom  avons ,  dit- 
il  ,  la  difpîtte  de  Jujlin  Martyr  contre  Tryphon  ,  où  il  efi  fouvent 
parlé  du  pain  de  l'Eue harijite.  Que  veut  dire  qu'il  ne  fc  trouve  rien 
de  ce  que  nous  cherchons ,  non  plus  que  dans  fes  Apologies  ,  ni  dans 
celle  de  TertuUien  ,  7ii  dans  celle  d  Athenaqore ,  ni  dnns  Mmutitu 
Félix  ,  ni  dans  Arnobe ,  ni  dans  LaHance  ,  ni  généralement  dans 
toute  cette  partie  de  l' Antiquité  qui  noui  reflc ,  ^  qui  n'efi  pas  Jt 
peu  de  chofe  que  l' Antcur  nous  veut  faire  croire.  Et  je  l'ejiime  trop 
fcavant  pour  ne  l'avoir  pas  vii'é  à  fond  ^  ^  trop  judicieux  pour  ne 
l'eflimer  pas  autant  qu'elle  le  mérite. 

Mais  s'il  n'eft  pas  permis  de  douter  que  M.  Claude  ne  foit 
trop  ((gavant,  pour  n'avoir  pas  vu  à  fond  cette  partie  de  l'Anti- 
quité Ecclefiaflique,  il  faut  qu'il  nous  permette  q"ue  nous  dou- 
tions malgré  nous,  s'il  a  une  autre  qualité  d'efprit  infiniment 
plus  eftimable  que  la  fcience,quieft  lafincerite. 

Car  eft-ce  agir  lincerement  que  de  vouloir  tirer  avantage  de 
certaines  petites  raifons ,  lorfque  l'on  fçait  bien  qu'elles  font 
vaines  &  frivolfis  ?  Or  M.  Claude  peut-il  ignorer  qu'à  l'égard 
de  la  plupart  de  ces  Auteurs,  dont  il  entafle  ainfi  les  noms,  ce. 
ne  foit  même  une  chofe  ridicule  de  demander,  pourquoy  ils 
n'ont  point  parlé  del'Euchariftie  ? 

Y  a.t'il,par  exemple  ,  delà  fincerité  à  demander  pourquoy 
il  n'en  efl:  point  parlé  dans  le  Dialogue  de  Minutius  Félix,  pui<l 
que  l'on  n'y  trouve  pas  même  le  nom  de  J.  C.  6c  que  l'unique 
but  de  cet  Auteur  eft  de  répondre  aux  raifons  des  Pa.yens 
pour  la  pluralité  des  Dieux ,  &  de  repouflèr  les  calomnies  ordi- 
naires qn'il";  puWioienc  contre  les  Chrétiens,  &  qui  marquoicnc 
une  extrême  ignorance  de  leur  ReligionjComme  de  dire  qu'ils 


C$f  des  dijpculte\  tirées  desjens,  485 

âdoroiencune  tefte  d'afnei  ôc que  quand  ils  rccevoienc  quel-  Ch.1V. 
qu'un  à  la  iociecé  de  leurs  m\ itères,  ;ls  couvroient  un  enfant 
,de  iarine  ,  leperçoiencdecoups,  fie  ayant  bu  de  ion  (ang,en 
eoupoienr  le  corps  en  divers  morceaux  ,  comme  la  victime 
qui  les  unifloit  ^  qu'ils  commettoient  des  impuretez  horribles 
dans  leui s  teftins nocturnes,  qu'ils adoroienc  les  croix .&  ren- 
doient  des  honneursdivinsà  un  homme  puni  du  dernier  fup- 
plice. 

Comme  le  difcoursde  Ceci!ius  ne  contient  que  cela  ,  Octa- 
vius  qui  y  repond  ie  renferme  prefquedans  les  mêmes  bornes. 
Il  atcaque  la  pluralité  des  Dieux,  il  prouve  qu'if  n'y  en  peut 
avoir  qu'un  :  11  donne  une  haute  idée  de  fa  Maj^ilé  infinie  ;  il 
fait  voir  que  les  Philofophes  s'accordent  en  ce  point  avec  les 
Chrétiens  ^  il  reprefente  l'oric^ine  de  l'idolâtrie  j  il  en  décou- 
vre les  abfurdirtz:  Il  montre  quelle  part  les  démons  y  avoicnt: 
11  réfute  les  infâmes  calomnies  dont  on  chargcoit  les  Chré- 
tiens: Il  relevé  l'innocence  de  leur  vie,  leur  chaftcté  dans  les 
mariages,  l'amour  qu'ils  fe  portoient  les'uns  aux  autres  :  Il  les 
juftifie  de   ce  qu'ils  n'avoient  point   d'autels  à  la  mode  àçs 
Payens  :  Il  fait  voir  qu'il  n'y  a  rien  d'abfurdedans  ce  qu'ils  en- 
leignoient  de  l'embrafement  gênerai  du  monde  &de  la  Re- 
furredion:  Il  rejette  toii'iours  lut  les  Payens  les  crimes  dont 
ils  accufoient  les  Chrétiens  :  Il  fait  voir  que  leur  pauvreté  leur 
efl:  glorieufe,  &  que  c'cft  un  effet  de  la  bonté  de  Dieu  envers 
eux  .-Enfin  il  ne  fait^,  pour  le  dire  ainfi,  que  défendre  les  dehors 
de  la  Religion  Chrétienne  ;&  ileft  fi  éloigné  de  vouloir  entrer 
dans  les  dogmes ^  comme  la  Trinité ,  l'Incarnation  ,  2c  ce  qui 
regarde  en  particulier  J.  C  &  les  Sacremens^  qu'ayant  à  répon- 
dre à  ce  que  Ceciliusavoit  reproché  aux  Chrétiens  qu'ils  ado- 
roient  un  homme  puni  de  mort ,  il  fe  contente  de  dire,  qu'071  fe 
tromfoit ,  en  s'imaq^inant^  eu  qu'un  criminel  ait  fii  yneriter  d'eflte 
ejîimè  JDieu  parmy  les  Chrétiens ,  ou  qu'un  homme  forme  de  ter- 
re l'ait  pu  obtenir  i  ce  qui  étoit  une  réponfe  ambiguë  &  fufpen- 
duë,  bc  qui  donnoit  lieu  de  douter  à  ceux  quin'auroient  pas  été 
d'ailleurs  informez  de  fesfentimens ,  s'il  croyoit  que  J.  C.  fuft 
Dieu  ,  ou  s'il  ne  le  croyoit  qu'homme.  Quelle  apparence  donc 
qu'affectant  de  n'entrer  dans  le  détail  d'aucun  de  nosmyfteres, 
&  ne  parlant  même  point  de  J.  C.  en  particulier  ^  il  ailaft  fans 
fujet  é<:  fans  prétexte  parler  de  l'Euchariftie  ?  Rien  fans  doute 
n'auroit  eflé  plus  mal  à  propos.  Et  M,  Claude  ne  pouvoir  ails- 

PPpij 


4^6       Liv.  VIL  6xa,men  des  m'gumens  negut'ifs.^ 
guer  d'Auteur  donc  le  filence  fur  l'Euchariftie  kilt  moins  pro- 
pre à  faire  voir  qu'on  n'en  croyoic  pas  en. ce  temps- là  te  qu'on 
en  croit  dans  l'Egliie  Catholique. 

Gn  en  peut  dire  aucanc  d'Achenagore.  Jamais  cet  ancien 
Auteur  ne  s'eft  propofë  dans  l'Apologie  qu'il  a  faite  pour  les 
Chrétiens,  ni  de  prouver  tous  leurs  dogmes  ,  ni  de  repoulTer 
toutes  les  accufations  des  Payens.  Il  ie  réduit  à  trois  qu'il  mar- 
C|ue  diftinclement.  Onnotis  charge  ,  dit  il ,  de  trois  crimes  execra^ 
hhes  ,  d' impiété ,  de  manger  de  la  chair  humaine ,  de  commettre  des 
incefles  abominables.  Voilà  le  defïèin  de  Ton  Apologie.  Il  ne  die 
rien  en  particulier  d'aucun  dogme,  fi  ce  n'eft  de  la  Trinité  qu'il 
marque  fort  firaplement ,  &,  (ans  prévenir  aucune  des  obje- 
»3:ionsqui  en  peuvent  naiftre.  II  ne  parle  ni  de  la  naiflànce  de 
J.  C.  ni  de  fa  vie ,  ni  de  fa  mort ,  ni  de  (a  refarreclion  ,  ni  d'au- 
cun de  fes  myfleres.  Il  employé  tout  fon  Traité  à  faire  voir  les 
abfurditezde  laTheologie  des  Payens  par  leurs  Philofophes 
&:  par  leurs  Poëtes,  &à  repouffer  les  calomnies  dont  ils  noir- 
cifloient  les  Chrétiens  ^  en  repreftntant  la  pureté  de  leurs 
mœurs,  &  combien  leur  doctrine  efloit  oppofée  aux  crimes 
qu'on  leur  impucoic. 

Eft-ce  que  M.  Claude  voudroit  que  ne  parlant  pas  même  de 
J.  C.  il  euft  parlé  de  l'Euchariftie,  que  l'on  ne  fc^auroit  entendre 
fans  eftreinftruit  de  ce  qui  regarde  la  perfonne  de  J.  C. 

Mais  il  s'en(uit  au  moins  ,  dira.t'il  ,que  les  Payens  ne  rcpro- 
rhoicnt  rien  aux  Chrétiens  fur  le  fujet  de  l'Euchariftie  J'aydéja 
montré  qu'il  n'y  auroit  rien  là  d'étrange,  puifqu'ils  ignoroienc.. 
abfolument  ce  myftere.  Mais  M.  Claude  le  conclut  fort  mal 
du  lîlence  d'Atbenagore.  Car  s'enfuit-il  qu'ils  n'ayent  point 
fliit  de  reproches  aux  Chrétiens  fur  la  naiftanc^,  fur  la  vie&  fur 
la  mort  de  j.  C.  de  ce  qu'Athenagore  n'en  parle  point?  Qui  ne 
fçaicou'il  eft  permisàun  Auteurdechoifirentreun  grand  nom- 
bre d'objeclions  celles  qu'il  crcic  les  plus  importantes  ,&  que 
c'eft  proprement  ce  qu'Athenagore  a  fait  dans  fon  Traité  ? 

La  linceritë  permettoit  encore  moins  à  M.  Claude  de  mettre 
Arnobe  au  rang -r^.e  ceux  dont  il  prctendquele  filence  fur  l'Eu- 
chariftie luy  fournit  une  preuve  que  les  anciens  Chrétiens  ne 
croyoicntpasla  prefence  réelle  ni  la  tranlfubftantiation. 

Car  il  n'ignore  pis  fans  doute  que  lorfque  cet  Auteur  a  com- 
pofé  fes  fept  livres  contre  les  Payens ,  il  n'eftoit  ni  Ecclefiafti- 
que ,  ni  même  Chrétien  ,  mais  fimple  Catéchumène ,  ou  peut 


"&  des  âifficultci.  tirées  des  fins.  4^7  ^ 

aflre  moins  que  Cacechumene  ,  puifqu'il  ne  fie  ce  livre  qu'atin  Ch.  IV. 
de  mériter  d'eftre  reçu  dans  l'Eglife  ,  ce  qu'il  ne  pouvoir  obte- 
nir de  l'Evèque  de  Sicceen  Atnque,  qui  ne  crtivoir  pas  qu'il 
voulût  fincerement  embraiTer  la  Religion  Chrétienne. 

Cette  feule  qualité  de  Catéchumène  fuffiroit  pour  montrer 
qu'il  eft  ridicule  de  s'étonner  qu'il  n'ait  point  parlé  de  TEucha- 
riftie  ,  puifqu'on  voit  par  tous  les  Pères  que  l'ignorance  de  ce 
myftere ,  eftoic  jointe  à  cet  eftac. 

Detnaniez^^ài^\X.  S.  Auguftin  ,  à  un  Catéchumène ,  s'ïhnange  la  ^"5-  f--"-  '« 
ciitir  du  Fils  de  l'homme ,  (^  s'il  boit  fon  fing.  il  ne  fant  ce  que 
votis  luy  voulez^dire.  Les  Catéchumènes ,  dit  il  encore  ,  «f /tvz-  itij. 
•vent point  ce  que  reçoivent  les  Chrefiiens.  Nesciunt  Catechume. 
ni  qui d  accipiant  Chrifiiani.  C'efi  ,  dit- il  ,  une  chofe  'voilée  aux 
Catéchumènes  ,  que  la  manière  dont  rn  man'ie  la  chair  du  Seigneur. 
Quelle  raifon  a  donc  M.  Claude  de  tirer  Arnobe  du  rang  des 
autres  Catéchumènes,  ^  de  luy  donner  une  connoiflance  qu'il-s 
n'avoient  pas  communément,  Ainii  la  feule  qualité  de  la  per- 
fonne  d'Arnobe ,  anéantit  l'objeclion  de  M.  Claude  jMais  s'il 
kiy  avoit  plu  de  juger  par  les  livres  mêmes  de  cet  Auteur  de 
la  connoilTance  qu'il  avoit  de  la  doctrine  de  i'Eglife,  il  auroit  eu 
lionte  fans  doute  de  l'en  alléguer  pour  témoin  ,  &.  beaucoup 
plus  de  conclure  que  l'Eglife  ne  croyoic  pas  de  fon  temps  les 
articles  dont  il  ne  fait  pas  mention. 

Que  feroit  M.  Claude  ,  fi  par  fa  propre  règle  on  l'obligeoic 
è.Q  prendre  pour  doctrine  de  l'Eglife  tout  ce  qu'Arnobe  propofe 
comme  la  doctrine  des  Chrétiens,  &  retrancher  de  la  foy  cous 
les  points  dont  il  n'apas  parlé  ? 

Il  faudroit  qu'il  concluft  d"al:>ord  que  les  Chrétiens  du  temps 
d'Arnobe  croyoientl'ame  mortelle  de  fa  nature,  qu'elle n'é- 
toit  rendue  immortelle  que  par  une  grâce  particulière  qucDieu 
ne  faifoit  qu'aux  iufl:es,6c  que  lésâmes  des  méchans après  avoir 
efté  long-temps  brûlées  par  le  feu,  en  feroient  enfin  entière- 
ment coniumées. 

C'eft-à  dire  qu'il  faudroit  qu'il  attribuai  aux  Chrétiens  des 
premiers  fiecles  l'opinion  prelentedes  Sociniens  ,qui  n'ont  fait 
querenouveiler  en  ce  temps-icy  ce  qu'Arnobe  avoit  enieigné 
avant  eux  en  plufieurs  endroits  de  fon (êcond  livre, dont  je 
B''en  rapporteray  que  quel  ques-  uns. 

Que  diray-je  ,  dit  il  j  de  voflre  Platon^  Ne  parle^t'il  pas  dans 
fon  dialogue  de  l' immortalité  de  l'urne  ^  du  fleuve  d' Acher^n  ,  d» 

P  P  p  iij 


^88     L I V .  V  ï  I.  Examen  des  zArgumens  négatifs , 

iityx  ,  du  Cocyte  ^  du.  Purflegeton  ,  dans  lef quels  il  dit  ^qtie  les 
ames  font  roulées  ,  plongées  S^  hmlées  ?  En  quoy  ce  Philo fophe  , 
quoyque  d'ailleurs  tres-judicicux  ^  très,  intelligent  ,  ne  prend  pas 
carde  qu'il  s'engage  en  un  ernbaras  inexplicable ,  en  voulant  d'une 
■pari  que  le  s  ames  [oient  immortelles  ^perpétuelles  ^  incorporelles  j 
g)"  prétendant  de  l'autre  qu'elles  ne  laiffent  pas  d'ejlrc  punies ,  ^ 
qu  elles  reffentent  de  la  douleur.  Or  qui  ne  voit  qu'un  ejlre  itnmortel 
^  (impie  ejî  incapable  de  douleur ,  ^  que  ce  qui  en  peut  recevoir 
n'éji  p-ts  immortel  ? 

Aorcsavoirainfi  réfuté  Platon  parce  principe  ridicule  &  hé- 
rétique, que  ce  qui  eft  capable  de  douleur  ne  peut  eftre  iminor- 
Ecl  iil  propofe  enfuite  ce  qu'il  prétend  que  J.  C.  nous  ait  appris 
fur  ce  fujec 

Cependant^  dit-il ,  Maton  ne  s'efi  pas  beaucoup  éloigné  de  la  vé- 
rité en  ce  point.  Car  quoyque  fa  douceur  naturelle  luy  ait  perfuads 
au  il  y  aurait  de  l' inhumanité  k  condamner  les  ames  à.  lamort  yC'eJi 
pourtant  avec  raifon  qu'il  a  cric  qu  elles  eftoient  jettées  en  des  fleu- 
ves bridants  ^  horribles  par  les  flammes  qu'ils  roulent  avec  la  boue. 
Car  il  eft  vray  qu'on  les  y  jette  ,  d^  qu'estant  réduites  AU' 
NEANT  j  elles  periffent  abfolument.  Jefus-Chrift  nous  ayant  appris 
qu'elles  font  d'une  condition  moyenne  ,  ^  que  pouvant  périr  fi  elles 
Vcnor^  nt  Dieu  ,  elles  peuvent  aujjî  eftre   délivrées  de  l'aneantiffe- 
went ,  fi  elles  font  touchées  de  fcs  menaces.,^  qu'elles  fe  portent 
à  recourir  à  fa  mi fcri  corde. 

Laraifon.^  dit-il  encore,  nous  fait  voir  que  les  ames  ne  font  ni 
incorporelles  ni  immortelles  ,  ^  q%e  leur  vie  finit  comme  ailes  des- 
autres animaux. 
C'eft  ce  qui  fait  conclure  à  cet  Auteur  qu'il  y  a  fort  peu  de  dif- 
férence entre  l'homme  &:  les  autres  animaux.  Vultis .,  dit.il  j. 
turnore  depojïto  .^  cogitationibus  tacitis pervidere  animantia  nos  ejfe- 
aut  confrdilia  cajterk  ,  aut  nonplurima  differitate  diftantia. 

C'eftcequiluy  fait  douter  Çï  lésâmes  des  méchans  nepaf- 
fent  point  dans  les  corps  des  beftes.  .S'//  eft  vrav  ,  dn-i\,  comme' 
onl'cnfeigne  dans  les  myftcres  ,  que  les  ames  des  méchans  entrent 
après  leur  mort  dans  les  corps  de  divers  animaux. 

Il  faut  en  fécond  lieu  que  M.  Claude  attribue  auflî  aux  an- 
ciens Chrétiens  cette  opinion  impie  que  le  même  Arnobe  at- 
tribue à  J.  C.  que  les  ames  n'ont  pas  eflé  créées  de  Dieu ,  èc 
qu'elles  ont  un  autre  Père.  Apprenez,  dit-il  enfin  ^  de  J.  C.  qui 
sftoit  pUmement  inftruit  de  ces  chofes  y  d^  qui  les  a  découvertes  ai^ 


^dcs  dijficultez  tirées  des  fcm.  4^9 

monde ,  que  les  âmes  ne  font -point  filles  du  yand  Roy  :  que  ce  nc;i    Ch.  IV. 
■point  Itty  qui  les  a  eny:ndrces ,   mais  qu'elles   ont  un  autre   Pcre 
beaucoup  inférieur  en  puijfancc  ^  en  dignité  à  ce  fouverain  Em- 
pereur. 

Ec  quand  il  fe  demande  enruiceàluy  même  ,  quel  cft  donc 
celuy  qui  les  a  produites ,  fi  Dieu  n'en  eft  pas  le  Pere^  il  fe  coii. 
tente  de  répondre  qu'il  n'en  fçait  rien^Sc  qu'il  n'eftpasobligé 
de  le  fçavoir3  ce  qu'il  prouve  par  un  railonnemenc  touc-à-faic 
rare. 

De  même ,  dit  il ,  qu'encore  que  l^on  fâche  bien  que  les  mouches , 
les  arraignées  ,  les  efcatgots ,  les  papillons  ne  font  pas  des  ouvrages 
de  Dieu  Tout-puiffant ,  on  ne  peut  pas  pour  cela  non  s  obliger  à  dire 
^ui  eft  donc  l'Auteur  de  tous  ces  infectes  :  On  ne  doit  pas  trotiver 
mauvais  que  nous  ignorions  aufjï  d'oii  viennent  les  âmes  ,  quoyque 
mus  fâchions  que  Dieu  n'en  eft  pas  le  Père. 

Il  eft  clair  non  iêulement  que  cet  Auteur  ne  fçavoit  rien  de 
la  doctrine  àts  Chrétiens,  mais  qu'il  n'avoit  pas  même  leu  le 
commencement  de  la  Genefe,  quoique  ce  livre  nefuft  pas  in- 
connu à  plufieurs  Payens.  Car  autrement  auroit  il  pu  ignorer 
<jue  Dieu  eft  le  Créateur  des  hommes^  ni  attribuer  à  J.  C. cette 
horrible  doctrine,  qui  ofteà  Dieuie  plusexcellent  de  Tes  ou- 


vrages? 


Ce  qui  marque  encore  plus  l'excès  de  Ton  ignorance  ,  c'eft 
qu'il  paroift  par  les  raifons  dontil  fe  fert  pour  établir  cette  rê- 
verie, qu'il  n  a  rien  fçû  de  la  chute  de  l'homme ,  ni  du  dérègle- 
ment de  lanature  humaine  par  le  péché.  Car  ion  unique  argu- 
ment, pour  montrer  que  Dieu  n'cftpas  Auteur  des  âmes,  c'eft 
dit-il ,  qu'elles  font  trop  coiitrefaites  pour  avoirune  fiilluftre 
origine,  ^quelles  font  aljez^voir  par  leurs  défiuts  qu  elle  s  ne  font 
que  d'une  famille  très,  médiocre  :  Sca:vitate  innv.iyierabili  vitioram 
ipfos  fe  indicare  y  non  cffe  patricii  gcneris  ,  fed  ex  mediocrtbus  fa. 
tntliis  procréa  tos. 

Or  il  eft  clair  que  les  défauts  de  l'homme  ne  prouvent  point 
qu'il  n'ait  pas  Dieu  pour  Auteur ,  qu'en  fuppofant  qu'il  Toit  for- 
ti  tel  qu'il  eft  des  mains  de  fon  Auteur. 

Il  n'eft  pas  même  trop  certain  fi  Arnoben'a  point  crû  que 
fous  le  Dieu  fouverain  il  y  avoir  plufieurs  Dieux  inférieurs  i  car 
il  en  parle  en  quantité  d'endroits  fort  dooteufement. 

Cum  enim^  dit-il  ,  Dij  omnes  ,  (^  qu'cunque  funt  veri  vel  qui 
ejfe  rumore  atque  opinione  dicuntur ,  immortahs  ac  perpetui  volun. 
taie  ejus  fint. 


490       Liv.  VIL  Examen  des  argumens  négatifs  ^ 

Nos  contra^  diL-il  ,  fi  modo  Dij  cetti  Junt^  habcncqiie  hujusnO' 
minis  authontatem^  potentiam  ,  diyiitatcm^  aut  iriy^nita  effe  cenfe- 
mus  ,  hoc  enim  relizioftimeft  credere  ,  aut  fihahent  nativitdtis exor- 
dium ,  Dei  fummi  eft  fcire  qiiihns  eos  rationihus  feccrit. 

Il  eft  vray  qu'il  prouve  dans  la  fuite  que  Jupiter,  Efculape,  & 
cette  DeelTe  que  les  Romains  appelloient  la  Mère  des  Dieux  , 
n'eftoient  pas  de  véritables  divinitez.  Mais  il  ne  s'enfuit  pas  de 
là  qu'il  n'ait  cru  poflîble  qu'il  y  euft  des  Dieux  fubalternes , 
quoique  ceux- là  félon  luy  n'en  fuflent  pas. 

Que  Ç\  nous  voulions  faire  le  dénombrement  des  dogmes  de 
la  Religion  Chrétienne  dont  Arnobe  ne  parle  point  ^  &  par  un 
raifonnement pareil  àceluy  de  M.  Claudel'obligeràles' xtlure 
des  articles  de  Foy,à  peine  en  refternit-ii  qu'il  ne  fùfl  contraint 
de  rejetter.  Car  excepté  la  nailîance,  les  fouiFrances  6c  la  mort 
de  J.  C.  que  cet  Auteur  défend  fort  imparfaitement,  il  ne  parlt 
prelque  d'aucun  aurre  dogme.  Il  n'explique  diflindemcnt  au, 
cun  de  nos  myfteres ,  &  il  fait  parniftre  par  tout  qu'il  eftoit 
auffi  peu  inftruit  de  la  Religion  Chrétienne,  qu'il  eftoit  fça:- 
vant  dans  celle  des  Payens,  dont  il  reprefente  les  ablurdicez- 
d'une  manière  très- vive  &.  tres-ingenieufe. 

Voilà  l'Auteur  dont  M.  Claude  nous  propofe  le  filence  com- 
me la  règle  de  noftre  foy,  &  par  l'autorité  duquel  il  prétend 
prouver  que  les  anciens  Chrétiens  ne  croyoient  pas  de  l'Eucha- 
riftie  ce  que  nous  en  croyons,  parce  qu'il  ne  paroift  rien  de  cette 
doctrine  dans  ks  écrits.  Il  veut  même  qu'il  l'ait  dû  avoir  con- 
tinuellement en  vûë  pour  ne  rien  reprocher  aux  Payens,  qu'on 
puft  tourner  contre  la  dodrine  de  l'Eglife; 

Que  s'il  eftoit  permis  d'employer  des  preuves  femblables  à 
celles  de  M.  Claude,  il  feroit  facile  de  conclure  des  écrits  d'Ar- 
nobeque  l'ancienne  Eglife  ne  croyoit  pas  qu'il  y  euft  du  vin 
dans  nos  myfteres  j  car  autrement ,  diroit  on,  il  nauroitpas^ 
o{é  foûtenir  aux  Payens  quon  n'honore  -point  Jjtcu  a-uec  du  vin. 
JsFos  monfirum  ,  dit- il,  ac prodigium  judicamus  ex  roribus  exiguis 
■vint  Deum  fihi  ducere  fatis  fanBè  atqus  honorificè  fupplica- 
tum.  Qu'efi-ce  que  le  vin  a  de  commun  avec  Dieu  ,  dit  il  en  un 
autre  endroit  ?  QuiD  Deo  cum  vino  eft  ?  Mais  je  laiftè  debon 
cœur  ces  fortes  d'ârgumens  à  M.  Claude.  La  bonne  foy  ne 
s'en  accommode  pas,  ce  me  femble;&  pour  peu  qu'on  life  avec 
foin  les  Apologiftes  de  la  Religion  Chrétienne  ,  &  fur  tout  Ar- 
aobe ,  on  doit  reconnoiftre  qu'ils  n'ont  pas  fait  difficulté  d'ob- 

jeder 


g^  des  diffimkez.  tirées  des  Jens.  491 

^e£ter  diverfes  chofes  aux  Payens  qu'on  pouvoir  tourner  avec  Ch,    IV. 
quelque  vray-femblance  contre  la  Religion  Chrctj'cnne,  ou 
contre  la  Religion  Judaïque  ,  que  les  Ciirétiens  eftoient  ob  li- 
gcz  de  defFendre  ,  comme  inftituée  par  le  Dieu  qu'ils    ado- 
i-oient   &  comme  le  fondement  de  la  leur. 

Quand  Origene  prouve^  par  exemple  ,  que  les  erprits  qui  ef- 
toient attachez  aux  ftatuësêftoicnt  des  démons  ,  parce  qu'ils 
fe  plaifoient  à  l'odeur  des  facnficesj  a  t  il  craint  que  les 
Payens  luy  reparcilîent,  qu'on  offroit  de  pareils  lacrifices  au 
Dieu  des  juifs  ^  &:  qu'il  eft  dit  fouvent  dans  l'Ecriture  j  que 
l'odeur  luy  en  eftoit  agréable  ? 

Quand  Arnobe  demande  aux  Payens  à  quoy  fervoicnt  les 
temples  qu'ils  édifîoient  à  leurs  Dieux,  &:  quelle  utilité  ils  leur 
apportoient  j  les  Payens  ne  pouvoient-ils  luy  demander  de  me-  *  ^' 
me,  de  quelle  utilité  eftoit  au  Dieu  des  Juifs  ce  Temple  ma- 
gnifique qui  luy  avort  efté  bâty  par  Salomon  ,  &  qui  fut  depuis 
rebâty  par  Zorobabel  &  enfuite  par  Herode? 

-Quand  il  leur  demande   quel  gam  revenoit  à  ces  mêmes  j 
Dieux,  des  facrifices  qu'on  leur  offroit  ,  ne  pouvoient-ils  pas 
âufîî  demander  ce  que  gagnoit  le  Dieu  des  Juifs  aux  facri- 
fices qu'il  avoit  ordonne  qu'on  luy  fift? 

Qiiand  il  traittc  de  cruels  les  meurtres  des  animaux  qu'on  ijjii, 
tuoit  pour  les  oiTnr  en  facrifices  ,  que  ne  pouvoient  ils  point 
kiy  répliquer  furies  facrifices  que  Salomon  offrit  à  la  Dédi- 
cace du  Temple  ,  &  fur  ceux  que  l'on  offroit  continuellement 
dans  le  Tabernacle  ou  dans 4e  Temple  durant  le  temps  de  la 
religion  Judaïque  ? 

■Quand  il  combat  encore  CQ$  facrifices ,  fur  ce  que  les  Dieax 
n'cftant  point  capables  de  colère  n'ont  point  befoin  d'eftre  ap- 
paifez;  ne  leur  donnoic-il  pas  lieu  d'en  dire  autant^  5c  des  fa- 
crifices que  Dieu  avoit  ordonné  qu'on  luy  fift  pour  le  fléchir, 
&  de  celuy  où  J.  C.  s'eft  offert  luy-m-ême  fur  la  Croix, &  qui 
avoit  pour  fin  d'appaifer  Dieu  irrité  contre  les  hommes? 

Quand  il  demande  aux  Payens,  s'il  eft  raifonnablc  que  Dieu 
change  de  difpoiîcion  envers  les  hommes,  parce  qu'ils  luy  im-  '  " 
molent  àts  pourceaux:  Qic.c  cdufae/i  ut Ji  ego  porcum  occidcro^ 
Deus  mutet  affeciurrf.  Quand  il  fait  parles  les  beftes  pour  fe  plain- 
dre qu'il  eft  injufte  de  les  faire  mourir  pour  le  crime  de  l'hom- 
me.-qui  ne  voit  qu'on  pouvoïc  faire  lesmêracs  demandes  &le* 


491      Lîv.  VII.  Ex  Amen  des  Argumens  négatifs  ^ 
mêmes  proropopées  pour  les  beftes  q^Li'on  imraolok  dans  l'aiv 
cienne  Loy  ? 

Quand  il  allègue  contre  les  Dieux  que  les    Payens  atta- 

choienc  aux  fimulacres ,  qu'y  ayant  pluiîeurs  de  ces  fimula- 

crc's  ,  il  taudroif  qu'il  y  cuit  plufieurs  Dieux  du  même  nom,  ou 

que  l'eflre  de  ces    Dieux,  ftiil  multiplié  ,  &  qu'il  en  prétend 

montrer  l'impoilibilité  par  ces  principes  de  Philofophie.  Qu.e 

funt  prius  Jin'iulariaquc  natu-rà^  multa  jieri  non  fojftint  ^mplicatis 

fîi.-e  integriLite  fervatà.  Et  un  peuaprds:  Si iiutem  tenus  é^  idem 

in  omnibus  ejfe  perhihctur ,  penc  om.-iis  ratio  atque  imcyritas  ve- 

riLitis  Ji  hoc  fuerit  fumptum ,  pojfe  uvum  in  omnibus  uno  tempore 

pcrmancr^.  N'efl- il  pas  clnir  que  ces  mefmes   principes  pou- 

voient   eitre  alléguez  contre  la  doctrine  des  Chreiliens  qui: 

croyent  que  Dieu  efl  tout  entieren  chaque  lieu  ;  &:  n'eft  ce 

pas  en  effet  l'ufage  qu'en  font  les  difciples  d'Epifcopius  &les- 

Sociniens?  Cependant  Arnobe  reconnoifl:  ailleurs' cette  doc- 

Arnobe.  1.  f,  ^"'""^  T^^'^   femble  combattre.  Hoc  efi  ,  dit-il  ,  proprium  Deo~ 

rum  compUre  anmia  vi  fu-.i  ^  non  partialiter  ufpiam  ^fed  ubique 

effe  totos. 

C'efl  donc  une  pure   vifion  d'attribuer  à   ces    Apologiftes. 
une  application  continuelle  à  éviter  tout  ce  qu'on  pourroic 
tourner  contre  eux.  M.  Claude  qui  le  prétend  ,  confulte  plus 
en  cela  l'intereft  de  fa  caufe  que  la  vérité  &  la  bonne  foy.  Ec 
afin  qu'il  ne  m'impofe  pas  d'en  juger  aulfi  par  intereft ,  je  luy 
vay  faire  voir  qu'il  y  a  plus  de  douze  cens  ans  que  fàint  Jerofme^ 
qui  n'avoit  pas  nos   différends  en  veuc ,  en  a  jugé  tout  au- 
trement que  luy.  lly  a  bien  de  la  diff'crence ,  dit  ce  ^QTC  ^  entre 
les  écrits  Pcleptiques^  ^  où  l'on  a  un  advcrfaire  en  îefie^^ceux 
où  l'on  trait  te  fimplement  des  donnes.  Dans  les  premiers ,  la  difpute 
Hicron,  apol,  0'-^  vapic^^  fans  ordre  ^  (^  en  repondant  à  fonadver faire  on  pro. 
adp.miai.ich    pofe  tantofl  unc  chofe  (jf-  tantofl  une  autre.   (Xn  argumente  co7nme 
pro  iibl.  aJv.  ^^^  peut:  On  dit  Une  cbofe  ,  ^  l'on  en  fait  entcndn  une  autre.  On' 
montre  du  pain-.,   comme  dit  le  proverbe  .^  (^  l'on  cache  une  pierre. 
Origcne.^  Methodius.^Eufebe  (^  Apollinaire  ont  écrit  au  long  cen- 
tre Celfus  ^  contre  Porphyre.  Examinez^  la  qualité  des  argumens 
^  des  preuves  qu'ils  employent  pour  détruire  les  difcours  formez^ 
p.ir  l'efprit  du  diable  ,  (^  vous  verrez^  que  fuuvent  on  les  pourroit 
éluder.  Considéra  te  quibus  argumentis  (jS  qua?n  luhricis  pro- 
blematibus   diaboli  Jpiritu   contexta  fubvertant.  ils   font  quel- 
quefois contraints  ,  ajoute  t-il  ,    de  dire  ,   non  ce    qu'ils  pen^ 


Çgf  des  difficulté^  tirées  des  fens,  493 

Cent  ^  mais  ce  qui  cfi  ncccjfaire  à  leur  eau fe.  Interdum  coguntur  C  H.  1 V. 
loqai  ,van  quoi  Jentiunt^  fci  quodnccejjc  cfi.  Je  ne  dis  nen,  ajoû- 
te-C-il  encore, la'^/  Auteurs  -Latins.,  coynme  TertulUcn ,  Cyprien^ 
Minutîus  y  Vichrinus  ,  Ldciance  (j^  Hilairc ,  de  feur  qu'il  ne 
femble  que  j" aye  filufiqji  entrepris  d'acctifcrles  autres  que  de  me  dé- 
fendre ynoy  même. 

Je  ne  prétends  pas  icy  décider  ,fi  la  maxime  de  fainr  Jcrof- 
rne  pour  les  écrits  polémiques  eft  bonne  ou  mauvaife.  Mais  la 
bonne  foy  oblige  de  reconnoiftre  qu'elle  a  efté  tres-fouvent 
fuivie  par  plufieurs  de  ceux  qui  ont  écrit  en  cette  manière, 
&  que  c'eft  avec  raifon  qu'il  l'a  appliquée  en  particulier  aux 
Apologifles  de  la  Religion  CIrreftienne. 

Il'  ne  reftcroir  plus  que  d'exprimer  \zs  raifonsdu  filence  de 
Tertullien&  de  LaJlance  fur  l'Euchariftie  ;  mais  nous  avons 
déjà  fait  voir  que  TertuI lien  a  expreflcment  évité  d'en  parler, 
&  qu'il  paroirt  manifcftement  qu'il  aeuen  veuë  de  cacher  ce 
myftere  aux  infidellcs.   Et  quant  à  Laclance,  il  ne  faut  d'une 
parc  que  faire  reflexion  fur  les  matières  dont  ._il  traite  pour 
reconnoidre  qu'il  n'y  en  a  aucune  qui  l'obligeall  neceiîaire- 
ment  à  parler  de  l'Euchariftie,  &:  confiderer  de  l'autre  qu'il 
vivoic  en  un  temps  où  il  ne  le pouvoit  faire  fans  crime,  puis 
qu'un   des   reproches  que  le  Concile   d'Alexandrie  fait  aux 
Arriens ,  c''eft  d'avoir  parlé  de  l'Euchariftie  devant  des  Infi- 
delles.  Ils  ont  l'auduce ^  dit  ce  Concile,  de  farler  des  myfieres    .^^^  AtKaiw 
devant  des  Catéchumènes,  ^ce  qui  eft  encore  pis  devant  dc-s  Paycns,    apol.  1. 
quoyque  l' Ecriture  nous  ordonne  de  cacher  le  myftere  du  Roy,  ^ 
que  le  Seigneur  défende  de  donner  les  chofes  fiintes  aux  chiens , 
^  de'  jet  ter  les  perles  devant  les  pourceaux, 

J.'ay  {êparé  à  dciTèin  S.  Juftin  des  autres  Apnlogiftes  de   la 

Religion  Chreftienne,  parce  qu'an  n'en  peut  pas  dire  comme 

de  ceux-là,  qu'il  n'ait  point  parlé  de  l'Euchariftie    L'obliga^ 

non  où  il  a  cru  cftre  en  rendant  compte  denoftre  Religion  à  des 

Empereurs  fort  fages,  de  les  en  informer  à  fond,  l'a  porté  à  fe 

difpenfer  de  cette  rcferve  que  l'Eghfe  gardoit  pour  les  autres 

Payens,  &  qui  eftoit  plùtoft  établie  par  une  coutume  générale, 

que  par  une  ordonnance  eyprefle.  On  demeure  donc  d'accord 

que  ce  delTèin  d'exprimer  nettement  la  foy  de  l'Eilife  fur  ce 

point ,  paroiflant  autant  dans  S.  juftin  que  celuy  de  la  cacher 

dans  les  autres ,  on  doit  avoir  beaucoup  d'égard  au  rémojo-na- 

ge  qu'il  en  rend.  Mais  aufliilne  pouvoit  eftre  plus  formel 


V  4H       -^ïV.  VIT.  Examen  des  ^rgumens  négatifs  y 
pour  la  foy  del'Eglife  Catholique.  Nous  ne  recevons  pas  , dit-il, 
ces  chofcs  ,   c^efi  à  dire  ce  pain  (^  ceaftn  confacrez^comme  un  pain 
commun^  ni  comme  an  breuvay:  comymm:  mais  de  la  Jnéme  forte  que 
J.  C.  nojlre  Sauveur  qui  a  cfic  fait  chair  par  le  J^crbe  de  Dieu  y  s'cji 
rcvefiu  de  chair  ^defanT^-pour  nofire  filut.  Ainji nous  avons  ap- 
pris que  cette  viande  c'>  ce  breuva/^e ,  qui  par  le  changement qu' ils 
reçoivent  dans  nos  corps  nourri [fent    nofire  chair    (^   nofire  Jang ,  , 
for,j:  la  chair  ijr-  le  f-ing  de  ce  même  J .  C.  incarne.  Car  les  Apofires  . 
dans  les  écrits  quils  nous  ont  lai(fcz^ ,  que  l''on   nomme,  Evangiles , 
nous  ont  appris  que  J.  C.  leur  avait  co  mmandè  de  faire  cequilavoit 
fait^  (j>  qu'ay^mt,  pris  du- pain^- ayant  rendu  grâces  ,  \\-èi\X.\Fai. 
tes  cecy  en  mémoire  de  moy  :  Cecy  efi  mon  corps  ,  ^   que  de  même 

z.  pcrpet.  \.ay-ant  pris  le  calice.,  ildic  ;  Cecy  efi  mon  fang, 

5.C.8.  p.  J04.     On  a  fait  voir  ailleurs,  que  ces  paroles  (ontdecifivespour  la  , 
doclrine  de  l'Eglife  Romaine  ,  &  qu'il  eftcontre  le  fenscom- 
mun,  qu'un  Auteur  ait  parlé  de  cette  forte  à  des  Empereurs  . 
payensqui  ne  Içavoientceque  c'eftoit  que  Locutions  S acramen- 
talfis  ,  pour  leur  faire  feulement  comprendre,  qiie  lé  pain  &le  . 
vin  eftoFent  les  figures  du  corps  ôc  du  iang  de  J  C.  On  a  refuté  . 
aa  même  lieu  les  vaines  rcponfes  de  M.  Claude.  C'eft  pour- 
qu-oy  quand  il  nous  die  dans  l'endroit  que  nous  examinons  pre- 
I    fentement,  qu'il  ne  trouve  rien  dans  ce  lieu  de  S.  Juftin  de  ce.? 
qu'il  cherche,  il  fuffit  de  luy  répKjndre  ,   que   c'efl:  ou  qu'il  ne. 
cherche  pas  ce  qu'il  y   devroit  chercher,  ou  qu'il  cherche  ce. 
qu'il  n'y  doit  pas  trouver.  S'il  y  cherchoit  la  foy  fimple  de  la. 
prefence  réelle  &  de  la.rranlTubftantiation  ,    il  l'y  trouveroif: 
très-nettement  exprimée,  comme  on  leluy  a  fait  voir  dans  les 
]i:;ux  où  l'on  a  traitté  de  ce  paiTage  plus  à  fond. 

ÎViais-s'il  y  cherche  l'éclairciflement  desdifficultezPhilofophi-, 
ques  de  l'Èuchariftie ,  c'efl:  fa  faute  de  les  y  chercher.  Car  il  ne 
fakiit   que^  faireun  peu  de  reflexion,  non  feulement  fur  l'efpric. 
de^Percs  en  gênerai ,  mais  auffi  fur  le  génie  particulier  de  S.  Ju-, 
flin,  pour  eftre  convaincu  qu'on  ne  s'y  devoitpas  attendre. 

Ce  faint  Martyr  parle  de  tous  les  Myfl:eres  avec  une  extrême^ 
fimplicitc.  Il  fe  contente  de  les  propofer  fans  s'arrefter  à  en 
éclaircirles  difficulrez  -,  ou  s'il  y  entre  quelquefois  un  peu,  il  n'y 
ré.pond  que  par  de  certaines  raifons  communes  &  propres  feu, 
Icment  pour  ceux  qui  n'en  avoient  qu'une  connoiffancegroffie- 
re  &  fuperficielle  comme  lesPayens.  C'eft  ainfi  que  l'on  voie, 
qu'il  explique  ladodrinede  la  Trinité  d'une,  manière  très  fim-- 


1^' des  difficultcz,  tirées  des  /en s.  49J 

plê  ,  en  ayant  feulement  à.\t ^  que  nous  rêverons ^^ adorons  levé-  Ch.  IV. 
ritable  Dieu,  P  ère  de  toute  jufiice  ^de  toute  chajleté^  de  toute  ver- 
tu ,  ^incapable  de  tout  péché  ,  c^  fou  Fils  qui  efi  venu  vers  nous 
^  qui  nous  a,  appris  ces  chofesauJH  bien-qi^ aux  Anyss ,  ^  l'efprit- 
qui  a  parlé  par  les  Prophètes. 

Er  parce  que  les  Pavens  avoient  accoutumé  de  demanàer 
comment  il  eftoit  poffible  qu-e  Dieu  euft  un  Fiis,  il  repond  en 
un  mot  que  Jupireren  avoit  bien  plufieurs  félon  eux  :  ce  qui  elV' 
plutoft  éviter  de  parler  de  cette  difficulté  que  l'éclaircir,  puil. 
qu'il  n'efl:  pas  étrange  que  Jupiter  qui  n'eftoic  point  regardé 
comme  un  purefprit  par  les  Payens,  euft  desenfans,  &;  qu'on 
ne  comprend  pas  avec  la  même  facilité,  ni  qu'un  efpric  puiile  en- 
gendrer un  efprit ,  ni  que  cet  efprit  engendré  n'ait  cju'une  mê- 
me nature  avec  l'efprit  qui  l'engendre. 

S'il  y  euft  eu  quelques  objedions  populaires  fur  l'Euchariftie, 
S'.  Juftin  y  euftpeut-eftre  fatisfait  par  des  réponfes  de  cette  na- 
ture] mais  comme  il  n'y  en  avoit  point,  parce  que  ce  myftere 
eftoit  inconnu  au  commun  des  Payens,  il  nes'eft  pas  cru  obligé 
de  lesprévenir,  &:  il  ne  l'auroit  mômepirfans  fe départir  de  la 
conduite  générale  des  Pères  qui  onttoujoursévité  de  faire  envi- 
fager  les  difficultez  qui  n'eftoient  pas  encore  formées. 

Il  ne  tenoit  donc  qu'à  M.  Claude  de  trouver  dans  la  féconde 
Apologie  de  S.  Juftin ,  la  doctrine  de  l'Eglife  Catholique  fur 
l'Éuchariftie,  exprimée  de  la  manière  que  le  bon  fensfait  juger' 
qu'elle  devoir  l'eftre.  Et  pour  les  dialogues  contre  Tryphon,  il 
ne  faut  encore  qu'un  peu  de  fens  pour  voir  qu'il  y  dit  tout  cC 
qu'il  en  devoir  dire. 

Son  deftèin  dansce  dialogue  eft  de  prouver  à  Tryphon  Juif, 
quej  C.  eft  le  MelFie  ,  8c  il  employé  pour  cela,  outre  les  pafla- 
ges  des  Prophètes  qui  s'entendent  de  J.  C.  le  rapport  de  diver- 
fesfigures  à  ce  que  ].  C.  a  eftabli.Unedes  figures  dontil  fe  fêrr, 
eft  celle  de  i  oblation  de  farineprefcrir  e  par  la  Loy,&  il  pré- 
tend qu'elle  eftoitinftiruée  pour  fignifîerl  Euchariftic.  L'Analo- 
gie de  la  vérité  figurée  l<.  de  la  figure  l'obligeoit  donc  neceftaire- 
nien  de  parler  de  pain,  puifque  c'eft  par  le  pain  dont  l'Euchariftie 
eft  faite  qu'elle  a  rapport  à  cette  ancienne  oblation  de  farine. 
M'aisil  n'eftoicpointqueftion  d'expliquer  en  cet  endroit  ce  que 
l'Eglife  croyoit  decepain.  ïlnefaioirpasexpoferce  myftereà 
des  oreilles  profanes  fans  neceffité,  &  rien  n'vobligeoit ,  puif. 
qu'il-s'agiffoic  feulement  de  montrer,  qu'une  figure  légale  avoir 


496        Liv  •  VII.  Bxa.}mn  des  <iÀrgiimem  négatifs, 

cflé  accomplie  par  J.C.  Il  Cecofitente  donc  de  dire  ce  qui-eftoit 

ncced'aire  à  fon  detrçin,  que  tohlatian  de  farine  pour  ceux  qui 

cftoient  pmficz^  de  la.  Icpre  ,  cjioit  la  figure  du  pain  Eucharijlie  qus 

y.  C  nojhe  Seitncur  nop.s  a  commande  de  faire   en  mémoire  de 

la   Pa.ffîon  qu'il  a  foufferte  four  purifier  les  efpnts  des  homn:i>s.  de 

tout  pcchc.  ^^ 

Cela  fiiffifoit  à  la  preuve  de  S..  Juftin,^  ce  n'ei\oitnulle-  * 

ment  le  lieu  d'encrer  dans  une  explication  exaAe  de  cequ'il 
croyoic  de  ce  painde  l'Euchariftie.  Mais  comme  on  doit  fuppo- 
fer  que  qLioyqu'un  Auteur  judicieux  ne  dite  pas  tout  en  tout, 
lieu  ,  il  aneanmoins  partout  les  marnes  penf-ces  &  lamême  foyj 
on  ne  fqauroit  douter  que  fi  l'on- euft  demandé  à  S.  Juftince 
que  c'eftoic  que  ce  pain  fie  ce  vin  de  l'Euchariftie  qu'on  ofFroit 
en  mémoire  de  la  Paflionj  il  n'eufl:  répondu  comme  il  fait  dans 
fa  féconde  Apologie,. ^«£'  ce  n'eftoit  pas  tin  aliment ,  ni  un  brcu.- 
vaqe  commun^  m-ais  le  corps  &  le fangdej.<2.  connue  l'£vanplt< 
nous  l'apprend. 

Ain  fi  ce  paiTage  du  dialogue  contre  Tryphon  n'eft  propre 
qu'à  faire  voir  que  les  Pères,  qui  par  quelqueraifon  particulière 
n'appellent  l'Euchariftie  que  du  nom  de  pain,  ne  laiftbient  pais 
de  croire  en  même  temps ,  que  ce  pain  eft  le  corps  de  J .  C.  &que 
c'eft  tres.mal  raifanner  que  de  conclure  qu'un  Auteur  qui  n'ex- 
prime en  un  endroit  qu'une  partie  d'un  myftere ,  ne  croyoic  pas 
ce  qu'il  en  fupprime.C'eftà  quoy  fe  réduit  l'examen  particulier  à 
quoy  M.  Claude  nous  a  oWigez  touchant  les  Apologiftes  de  la 
Religion  Chreftienne  &  le  filence  qu'ils  gardentà  l'égard  de 
TEuchariftie  qui  ne  luy  eft  pas  comme  l'on  voit  fort  avantageux. 


CHAPITRE        V. 

Q^e  le  (ilencc  de  Julien  l' Apoflat  fur  l' Eficharijlie  ne  donne 
point  lieu  à  M.  Claude  de  conclure  que  l Eglifc  du  temps  de  cet 
Empereur  rien  avoit  pas  la  même  créance  que  l'Eglife  Romaine 
en  a  tnuintenant. 

Claude  ne  tire  pas  feulement  une  preuve  négative  de 
.ce  qu'il  n'eft  point  parlé  de  l'Euchariftie  dans  ce  qui 
nous  refte  des  écrits  de  Julien  l'Apoftar,  pour  en  conclure  que 
ks  anciens  Chreftiens  ne  croyaient  pas  la  p.refence  réelle  Se  la 


(^  des  difficnltex.  tirées  des  fe fis.  497 

ttanfTubftantiatron  j  il  en  tire  une  aufii  de  ce  qu'on  n'y  a  pas  Ch.  V. 
expreflement  répondu,  6c  qu'on  n'a  fait  dans  le  premier  traître 
cju'opporer  des  conhderations  générales  aux  arguinens  tirez  du 
filence  des  Phyens,  5c  il  en  prend  fujecd'infulcer  à  l'Auteur  de 
ce  Traitcé  à  fa  manière  ordinaire.  L'Auteur  div  il ,  ^^  bien  con- 
nu la  force  de  cet  exemple  ^  fuis  que  m'en  c liant  fcrvi  â.ms  mon 
jfibrezé  ^  tl  l'a  fort  adroitement  cou-vert  du  voile  de  [on  fiîênice. 
jl  a  cru  que  la  yneiUcure  rèponfe  efloit  de  ri  en  dire  mot  5  ce  qm  /5Ï 
une  ayeable  manière  de  réfuter  les  Ariumens  ^  fort  ai  fée  ^f  ni f 
qu'il  ne  faut  que  fe  taire  pour  triompher. 

Or  comme  cette  plaifantcrie  n'cft:  fondée  fur  rien  ,  fi  M. 
Claude  devine  mal  pourquoy  on  n'npas  parlé  de  cet  Auteur,  oir 
n'a  qu'à  luy  dire  en  un  mot  qu'il  fe  trompe,  ôi  luy  moritrer  en 
répondant  à  cette  objection  que  c'eft  plutoft  par  mépris  qu_e 
parimpuiffànce  qu'on  ne  s'y  cftcit  pas  arrefté. 

J'avoue  d'abord  qu'il  eft  un  peu  plus  fort  en  un  point  fur  le 
fujet  de  Julien  l'Apoftac  qu'il  ne  l'eft  à  l'égard  des  autres 
Payens.  Caraulieu  qu'on  a  toutes  fortes  de  raifons  depreten- 
dre  que  la  dodrine  de  l'Eucliariftie  elloit  inconnue  à  ce  petit 
nombre  d'intidelles ,  dont  nous  avons  ou  les  écrits  ou  les  obje- 
âions  contre  ladoArinede.rEglifè,  on  n'en  peut  pas  dire  tout  k 
fait  autant  de  J.ilien;  puis  qu'ayant  efté  Ledeur  dans  l'Eglifc,  5C 
ayant  participé  aux  myfleres  ,  il  a  pu  fçavoir  ce  qu'on  en 
croyoit. 

Mais  M.  Claude  eft  infiniment  plusfoiblepar  une  autre  rau 
Ion,  c'eft  qu'il  n'y  a  rien  de  plus  incertain  que  ce  qui  fert  de  fon- 
dement à  fon  argument; 

Il  fuppofe  que  Julien  n'a  point  parlé  de  i'Euchariftieen 
écrivant  contre  les  Chrétiens.    On  luy  demande  quelle  preu- 
ve il  en  a  ?  Car  s'il  n'en  a  point, c'eft  une  temerice  ridicule, 
que  de  fonder  des  argumens  fur  un  fait  dont  on  n'eft  point 
alTuré.   C'eft,    dira  t-il  ,  qu'il  n'en  eft   point  parlé  dans  ce 
que  Saint  Cyrille  rapporte  du  livre  de  cet  Empereur.  Je  ne 
penfe  pas  que  M.  Claude  ait  d'autres  raifons  à  nous  allé- 
guer que  celle-1-à.  Cependant  il  me  pardonnera,  fi  je  tuy  dis 
_  qu'il  n'en  içauroit    apporter  une  plus  mauvaife,   ny  qui    fafié 
mieux  voir  qu'il  n'a  pas  examiné  cette  mattiere  fort  à  fond. 
Cac  cette  preuve  eft  défedueufe  en  deux  maniei-es  qui  la  ren- 
dent même  ridicule.  -'      -v .      .     -.  ' 

La  première  eft  qu'elle  fuppofe  que  nous  ayons  roue  rêuytâ- 
ge  de  julien  contre  les  Chrcriens,  ou  au  moins  que  nous  en 


498         Lïv.Yll.  Examen  des  Argumens  négatifs^ 
Ayons  la  partie  où  il  avoit  deu  vray-lemblablemenr  parler  de 
l'Eucharidie.  Mais  M;Clau<je  n'a  pas  pris  garde  à  la  faulTetë 
de  cette  fuppofîrion  j  &  que  faint  CyrilJe  remarque  des  fa  pré- 
face que  cet  Apo  flat  avoir  hiit  trois  livres  contre  les  Chrétiens  , 

ç^  yjiavicLHi'  yruTiLiicLS. 

Or  de  ces  livres  il  n'y  en  aqu'im  qui  ait  efté  rapporté  &■  ré- 
futé par  faint  Cyrille  ^  ce  qui  paroift  fi  clairement  qu'il  n'eft  pas 
-poffible  d'en  douter. 
Cit.  contra     Premièrement  quoyq.ue  S.  Cyrille  ait  marqué  expreflèmerïc 
^ri?"    '"     ^"^  Julien  a  fait  trois  livres  ,  il  ne  rapporte  néanmoins  tout 
pbid.i.'i.p' 3:  ce  qu'il   en  infère  dans   Ton   ouvrage  que  comme  d'un  fèul 
livre.  Or  un  Auteur  qui  réfute  trois  livres  l'un  après  l'autre,  ne 
■manque  guère  de  remarquer  qu'après  avoir  refuté  le  premier, 
il  pafle  au  fécond  ,  &:  c'eft  ce  qu'on  ne  voit  point  dans  cet  ou- 
vrage de  faint  Cyrille. 

-.  De  plus  lorfque  faint  Cyrille  marque  en  particulier  lecara- 
dere  du  premier  livre  de  Julien ,  il  dit  qu'il  eftoit  cornpofé  de 
penfées  conFufês  entalTées  fans  aucun  ordre,  &  qu'il  y  repetort 
îouvcnt  lesmefmes  çho(es  au  commencement,  au  milieu  &  à  la 
fin;  ce  qui  l'avoit  obligé  à  ralTembler  en  un  même  lieu  ce  qui 
regardoir  la  même  matière,  &  à  digérer  tout  ce  livre  en  un  au- 
tre ordre.  Mais  il  ne  dit  rien  de  femblable  des  deux  autres  li- 
vres. Ce  qui  fait  voir  que  n'y  trouvant  pas  le  même  defordre., 
il  avoit  delîein  de  les  rapporter  &  de  les  réfuter  de  fuite. 

Orileftclairquetoutcequis'eftconfervé  de  l'écrit  de  Julien 
dans  l'ouvrage  Je  faint  Cyrille,  porte  ce  premier  caradere.  S. 
Cyrille  ne   le  rapporte  nullement  de  fuite.  Il  réunit  en  un 
même  lieu  ce  que  Julien  avoit  dit  en  divers  lieux.  Il  retranche, 
il  abrège  comme  il  veut  l'écrit  de  ctt  Apofbati   &  enfin  il 
pratique  exaftement  par  tout,  ce  qu'il  avoit  dit  qu'il  feroit  à 
l'égard  de  ccpremier  livre,  &  ce  qu'il  nepromettoit  point  de 
faire  à  l'égard  des  autres.  Ainfî  ilefl  plus  que  probable  qu'il 
n'a  refuté  que  le  premier.  Mais  ce  qui  rend  ces  preuves  entiè- 
rement: decifîves,   c'efl  que  Julien  témoigne  luy.même  en 
quelq-ues   endroits ,  devoir  traitter  des  chofes  dans  la  fuite 
de  fon  ouvrage,  &;en  particulier  dans  fon  fécond  livre,  qui  ne 
iê  trouvent  ppintdans  celuy  que  S.  Cyrille  infère  dans  le  fien. 
Cyr.  contra.    H  dit  en  un  endroit  en  parlant  d'une  circouffcance  qu'il  avoit 
jrihiu.  1.  7.-y^ppQj.j^g  jg  j^  y^g  jç  j  Q  qu'il  traitceroit  cela  dans  la  fuite , 

quand 


(^-  des  difficukez.  tirées  des  fens.  499      ^ 

quand  il  exaniineroic  en  particulier  les  faux  prodiges  &  les  Ch.  V. 
faufletez  des  Evangiles.    Iraj  (J^.k  TrepJ  T>?y  t^  îw.yfyixi'av  re- 
pxTUpy.'ttS  ti  a)Ltuù}fict.s  i%na.(f  à.pÇ,ûf^tJa..    Or   on  ne   voie  point 
qu'il  entre  dans  cet  examen  particulier  dans  tout  ce  que  faint 
Cyrille  rapporte  de  fon  ouvrage. 

11  ajoute  ailleurs  en  parlant  de  la  contrariété  apparente  des 
Généalogies  de  J.  C.  rapportées  par  S.  Matthieu  &;parjS.  Luc,  "  '" 
que  devant  faire  voir  dans  fon  fécond  livre  qu'il  y  avoit  là  une 
véritable  contradidion  ,  il  difreroit  d'en  parler  ,  aVa!  ttê^Î'  fier 
Tovry  fiiWo'Tii  ce  Ta  S^iVTÎfJù  cvJy^aLfJ.l^Av'  To  ai\yijii  cc^oQâs  ' 
i^iroi('Jv  Ù7Ci(riJiui')ii..  Or  il  eft  certain  que  cela  ne  fe  trouve 
point  encore  dans  le  livre  que  faint  Cyrille  a  confervé  ,  6c 
parconfequent  que  ce  n'eftque  le  premier  de  ceux  de  Julien, 
&quc  nous  n'avons  point  le  fécond  ,  où  il  combattoit  en  par- 
ticulier l'Evangile  ,  en  commençant  apparemment  par  ce  qui 
eft  dit  de  la  généalogie  de  J.  C. 

C'eft  ce  qui  montre  encore  que  non  feulement  nous  n'avons 
pas  tout  l'ouvrage  de  Julien  ,  mais  que  nous  n'avons  pas  en 
particulier  l'endroit  où  fon  fujet  le  pouvoit  porter  à  parler  de 
î'Euchariftie.  Car  comme  la  dodrine  de  l'Eglife  fur  ce  myfle- 
rc  eft  prife  de  l'Evangile,  fî  Julien  en  euft  voulu  tirer  quel- 
que objeétion, il  l'auroit  fait  fans  doute, lorfqu'il  auroit  expref- 
Jcment  attaqué  l'Evangile  ,  &:  il  auroit  mis  cette  dodrine  au 
nombre  des  chofes  qu'il  appelle  /es  faux  prodiges  ^  les  trom- 
peries  des  Evangiles  ^  TjpaToo'd^î  19  (TXêo«ôw.5     C'eftoit-là  le 
lieu  naturel  d'en  traitter  ,  &  ce  que  le  vray  ordre  demandoit. 
Qiie  M.  Claude  nous  reprefente  donc  ce  livre,  avant  que 
d'alTurer  comme  il  fait  que  Julien  n'a  rien  reproché  aux  Chré- 
tiens fur  le  fujet  de  I'Euchariftie.  Autrement  chacun  voit  qu'il 
eft  ridicule  de  conclure  que  Julien  n'en  a  rien  dit,  parce  qu'il 
n'en  a  point  parlé  dans  fon  premier  livre  ,  où  félon  toutes  les 
règles  du  bon  fens ,  il  n'en  devoit  point  parler  ,  puis  qu'aucune 
6e$  matières  qu'il  y  traitte  ,  ne  l'y  portoit,  ôc  qu'il  avoit  ail- 
leurs une  occafion  naturelle  d'en  parler. 

C'eft  le  premier  défaut  de  la  preuve  de  M.  Claude,  qui  eft  fî 
grofîîere  6c  fî  fenfible,  qu'apparemment  il  abandonnera  luy- 
même  fon  argument  quand  il  y  aura  fait  reflexion. 
Le  fécond  ne  l'eft  pas  moins. C'eft  que  non  feulement  il  eft  in- 
certain fi  Julien  n'a  point  parlé  de  I'Euchariftie  dans  les  deux  li- 
vres de  fon  ouvrage  que  nous  n'avons  point,  mais  qu'il   eft 

RRr 


^oo  L IV.  VII.  Examen  des  Argumens  négatifs , 
même  incertain  s'il  n'enavoit  point  parlé  dans  celuy  qui  nous 
aefté  confervé  par  faint  Cyrille.  Car  M.  Claude  fe  trompe, 
s'il  s'ima2;ine  que  nous  l'ayons  tout  entier.  S.  Cyrille  témoi- 
gne luy-même  en  pkifieurs  endroits ,  &  particulièrement  au 
commencement  de  Ton  fécond  livre,  qu'il  a  pris  la  liberté  de 
letranchcr  diverfes  cbofes  de  celuy  de  julien, qu'il  n'a  pas  mê- 
me (liivi  Ton  ordre,  qu'il  relinit en  un  même  lieu  les  ohjeclions 
qui  regardoient  la  même  matière.  Et  enfin  il  ne  faut  que  voir 
cet  écrit  de  Juhen  pour  reconnoiftrc  qu  il  n'y  a  fouvent  aucu- 
ne fuite ,  &  que  ce  ne  font  que  àt^  objedions  feparées ,  auf- 
qiiclics  faint  Cvrille  repond. 

Ainfî  faint  Cyrille  s'eflant  donné  îa  liberté  de  retrancher  ce 
qu'il  luy  a  plû.du  livre  de  Julien  ,  on  a  droit  de  conclure' 
qu'il  eft  incertain  s'il  n'en  a  point  retranché  quelque  chofe  qui 
rc-gardaft  l'Euchariftic  dés  qu'on  peut  faire  voir  qu'il  a  eu  quel- 
que raifon  de  le  faire.  Or  il  eft  certain  qu'il  en  avoit  eu  une 
tres-preflarte  ,  &  qui  doit  faire  juger  ,  que  quand  Julien  en 
auroit  parlé/aint  Cyrille  auroit  évité  de  le  réfuter.  Car  il  pa. 
roift  parce  livre  même,  qu'ayant  defTein  que  fon  ouvrage  peuft 
cftre  leu  par  les  Payens ,  il  évite  d'y  traitter  des  myfteres  que 
la  Religion  Chrétienne  obligeoit  de  leurcacher.  C'eftce  qu'il 
témoigne  expreiTément  à  l'égard  du  Baptême,  comme  nous 
l'avons  déjà  rapporté  ailleurs.  De  petir^  à^xtW^qu  en  publiant  nos 
myficres  devant  les  non  initiez^  je  n'offenfe  J.  C.  qui  défend  de  don- 
ner les  chofes  faintes  aux  chiens  ^  (^  de  jctter  les  perles  aux  pour- 
ceaux ;  je  ne  diray  rien  de  ce  qU^il  y  a  de  plus  profond  dans  ce 
myftere.  Et  plus  bas  il  ajoute  :  /<'  dirais  plu(îcurs  autres  chofes  de 
ce  7nyfiere  ,  fï  je  ne  craiyiois  d'eflre  entendu  des  non  initiez^ 

Et  il  ne  ferviroit  rien  de  répliquer  que  fiint  Cyrille  s'abftienc 
bien  de  répondre  au  long  à  l'objeftion  de  Julien  fur  le  Bap- 
tême,mais  qu'il  ne  la  retranche  pas. Car  cç.xt(t  objeclion  cftantr 
que  les  Chrétiens  croyoient  parla  fe  purifier  de  leurs  péchez  , 
elle  ne  contenoit  rien  que  les  Payens  ne  fçuiîènt  diftinéhement. 
îvlais  fi  Julien  avoit  attaqué  en  particulier  la  doéfrine  de  l'Eu- 
charifi:ie,il  en  auroit  bien  dit  3es  chofes, qu'il  falioit  cacher  aux^ 
Payens. Et  par  conlequent  S.  Cyrille  qui  auroit  eu  delTein  de 
les  cacher,&  qui  ne  s'eftoit  point  obligé  à  rapporter  tout  l'écrit 
de  Julien-,  auroit  pu  &  dû  les  retrancher ,  félon  l'efprit  qu'il 
fait  ■paroiftre  dans  cetiuivrace.  Aind  comme  il  eft  incertain  fî 
Julien  n'a  point  parlé  de  l'Euchariftic ,  il  eft;  certain  que  toutes 


&  des  dij^cuhez.  tirées  des  fens.  foi 

îes  Conjectures  qu  on  fonde  fur  fonfilence  font  vaincs  &reme-  Ch.  V. 
raires,&  que  quand  l'arçiumcnc  que  M.  Claude  en  tire  feroic 
auffi  preflanc,  qu'il  s'efforce  de  le  reprefcnter  ,  il  ne  faudroic 
que  ces  deux  remarques  pour  le  détruire. 

Mais  j'ajoûteray  de  plus  qu'il  s'en  faut  bien  qu'il  ne  foit  tel 
<ju'il  le  voudroit  faire  croire,  &;  qu'en  prenant  pour  vray  tout 
£6  quiy  fert  defondement,  ilnepourroit  tenir  lieu  que  d'une 
conjefture  alTez  légère. 

Ceux  qui  fçavent  le  veritab  e  u(age  de  ces  fortes  d'argumens 
négatifs,  n'infiftent  jamais  beaucoup  fur  le  iilence  d'un  feul 
Auteur  ,  parce  qu'ils  n'ignorent  pas  combien  il  efi:  ordinaire 
aux  Ecrivains  les  plus  judicieux  d'omettre  des  chofes  qui  pa- 
roilîént  importantes  pour  la  matière  qu'ils  traitent. 

Par  exemple  faint  Auguflin  examinant  dans  l'a  lettre  à  Hono- 
rat,en  quel  cas  un  Evêque  peut  ou  ne  peut  pas  fe  fouftraire  à  la 
perfecution  par  la  fuite,&  ayant  établi  pour  règle,  qu'illepeut, 
quand  c'eftluyqui  eft  particulièrement  en  butte  aux  periècu- 
tcurs,  Scquel'Eghfene  manque  pas  d'ailleurs  d'alFiftance  ,  & 
c]p'il  ne  le  peut  pas  quand  la  perfecution  eftant  générale  l'Fgli- 
fe  manqueroicdePafteurs  s'il  feretiroit,il  ne  pouvoit  apporter 
id'exemple  plus  naturel  pour  établir  cette  do<flrine  que  celuy  de 
faint  Cyprien  qui  crut  fe  pouvoir  retirer  par  ce  motifs  par  ce 
principe  durant  la  perfecution  deDecius,  parce  quelesPayens 
avoientune  animofité  particulière  contre  luy  ,  &  qu'il  reftoic 
afièz  de  Prêtres  pour  affifter  les  fidelles. 

Rien  fans  doute  ne  pouvoir  faire  plus  d'imprcffion  fur  l'ef 
prit  d'un  Evêque  d'Afrique  comme  Honorât  ^  que  l'exemple 
du  plus  célèbre  &  du  plus  grand  Evêque  d'AlVique  h  Se  il  n'y 
en  avoit  point  qui  fe  dût  plutôt  prefenter  à  l'efprit  de  faine 
Auguftin  que  celuy  de  faint  Cyprien  qu'il  honoroit  fi  particu- 
lièrement. Cependant  ilnes'eft  pasfouvenu  de  s'en  fervir,& 
il  a  recours  feulement  à  l'exemple  de  faint  Athanafe. 

Voicy  un  autre  oubly  decemême  genre,  6v  qui  efi:  encore 
plus  étonnant.  Le  même  S.  Auguftin  traite  une  infinité  de  fois 
dans  fes  livres  contre  IcsDonatiftes  de  l'effet  du  Baptême  con- 
féré par  les  Schifmatiques  ou  les  Hérétiques,  &  dans  tous  ces 
lieux  il  établit  toujours  cette  doctrine  qu'ils  peuvent  bien  don- 
ner le  Sacrement  &  le  caradere  du  Baptême  ,  parce  que  c'eft 
J.  C.  qui  baptife  ;  mais  qu'ils  ne  donnent  point  le  S.  Êfprit  &C 
laremiffiundcs  péchez,  qui  nefe  reçoit  que  dans  l'Eg'ife.   La 

RRr^ij 


50Z  Liy.  VII.  Eicumen  des  Argumens  négatifs ^ 
généralité  de  ces  termes  donnant  lieu  de  conclure  que  les  en- 
fans  meniez  baptifez  par  les  hérétiques  ne  reçoivent  pas  la  re- 
miflion  des  péchez,  fembloit  demander  que  S.  Auguftin s'ex- 
pliquât, &  qu'il  efltraignît  expreffement  cette  dodrinc  aux 
adultes,  qui  le  faifant  volontairement  Baptifer  par  des  here- 
tiques,ne  peuvent  recevoir  du  baptême  que  le  ftul  caradere. 
On  ne  voit  point  néanmoins  qu'il  ait  eu  foin  d'exclure  cette 
confequence.  Il  propofe  toujours  généralement  cette  maxi- 
me, qu'hors  de  l'Eglifc  on  ne  reçoit  point  la  remiflîon  des  pé- 
chez, en  fuppofant  qu'on  ne  l'appliquera  qu'aux  adultes,  mais 
ne  le  marquant  jamais. 

Eftce  que  S.  Auguftin  a  cm  qu'en  effet  les  enfans  des  héréti- 
ques ne  reçoivent  point  par  le  Baptême  la  remilîion  du  pcchc 
originel  ?  Nullement,  &  jamais  perfonne  ne  luy  a  imputé  ce 
fèntimcnt.  Pourquoy  donc  ne  fait  il  point  cettee^^ception  qtri 
femblefi  neceifaire.^  C'eft  qu'un  auteur  ne  dit  pas  toujours  tout 
ce  qu'il  femble  qu'il  devoir  dire.  Il  n'en  faut  point  chercher 
d'autre raifon.  La  feule  connoiflànce  de  l'efprit  humain,  qui 
n'étant  pas  infini, s'applique  fouvent  de  telle  forte  à  un  feui  ol?- 
jet  qu'il  perd  de  veuë  tous  les  autres,  fuffit  pour  diffiperl'éton- 
nement  de  ces  forces  d'oublis ,  quand  on  ne  les  trouve  qu'en 
peu  de  perfonnes. 

C'eft  donc  en  vain  que  M.  Claude  étale  avec  tant  de  pompe 
les  avantages  que  Julien  pouvoit  tirer  de  la  docT:rine  de  la  pre- 
fcnce  réelle  &  de  latranflubftantiation  ,  fî  c'eût  été  celle  des 
Chrétiens  de  fon  temps.  Il  eft  vray  qu'il  le  pouvoit  :  mais  il  ne 
s'enfuit  nullement  de  là  ,  que  ce  foit  une  necelTicé  qu'il  l'ait 
fait. 

L'Euchariflie  n'étoit  ni  le  feul ,  ni  le  principal  motif  de  fon 
averfion  contre  les  Chrétiens.  Il  étoit  attaché  par  une  paffion 
aveugle  à  la  Philofophie&  à  laTheologiedesPayens.il  ne  pou- 
voit fouffrir  que  l'on  préférât  aux  Dieux  honorez  parles  Sages 
du  paganifme,  &  par  ces  hommes  célèbres  dans  l'hiftoireGrec- 
quc  &  Romaine, dont  fon  imagination  étoit  pleine,Ia  dodrine 
d'un  homme  né  ftijet  des  Empereurs  Romains ,  Si  crucifie  par 
les  Romains. 

Il  haïfloit  donc  tout  le  corps  de  la  ReIi2;ion  Chrétienne,  & 
particulièrement  la  divinité  de  J.  C.  C'eft  dans  cette  difpofîu 
cion  qu'il  fe  mit  à  écrire  contre  les  Chtétiens  pendant  le  fcjouT 


fi  des  difficulteT^ùrées  des  fens.  505 

qu'il  fie  à  Antioche  en  allant  faire  la  guerre  aux  Perfes.  On  Ch.  V. 
peut  juger  qncl  temps  il  pouvoir  donner  à  ce  travail  ,  étant 
chargé  de  toutes  les  affaires  de  l'Empire,  des  préparatifs  d'une 
grande  guerre,  de  mille  dépefches  dont  il  ne  (e  dechargeoic 
iur  perfonne,&  de  la  compofition  d'autres  ouvrages,  dont  il 
en  reftc  encore  quelques- uns  :,  comme  ce  qu'il  écrivit  contre, 
ceux  d'Anriocheà  caufe  des  railleries  qu'ils  firent  de  luy  ,  ic 
qu'il  intitula  Mifopoqon. 

•Tout  ce  qu'il  put  donc  fairedans  un  tel  accablement, 'ce fut 
de  répandre  confufément  dans  ces  livres  le  venin  dont  il  étoic 
plein  contre  les  Chrétiens.  Or  qui  ne  fçait  quedans  ces  fortes 
d'écrits  tumultuaires,  le  hazard  a  fouvent  plus  de  part  que  la 
raifon  aux  choix  des  chofeSj&  qu'il  efl  comme  inévitable  qu'on 
n'en  oublie  plufieurs  qui  pourroientyentrer?On  efl  emporté  par 
le  fil  de  fon  difcours  j  une  penfée  en  attire  une  autre,  &  roue 
ce  qui  ne  trouve  pas  fa  place  dans  cet  enchaînement  fortuit, 
cnefl  exclus  par  cette  feule  raifon.  AufTi  voit-on  que  Julien  ne 
poufTe  prefque  aucune  des  dilîîcultez  tant  foit  peu  confidera- 
bles.  Etcequieft  de  plus  étrange,  c'efl  que  lors  même  que  U 
fuite  femble  l'y  conduire,  fon  emportement  l'en  détourne  in-, 
continent ,  6c  le  fait  paflér  à  d'autres  matières ,  comme  s'il  ne 
voyoit  pas  les  difficultez. 

-Son  deffein  ,  par  exemple,  étoit  de  décrier  le  Dieu  deMoife 
honoré  par  les  Chrétiens ,  ou  du  moins  de  décrier  les  Ecritu- 
res fâintes  qui  fervent  de  fondement  à  la  Religion  Chrétienne.- 
Il  fe  moque  pour  cela  de  ce  que  Dieu  dit  dans  lesNombres, que 
Phinées ,  en  tuant  un  Ifraëlite  qui  abufoit  d'une  femmeMadia- 
nite ,  avoit  détourné  fa  colère  de  deflus  les  enfans  d'ifracl ,  &: 
empêché  qu'il  ne  les  confumat  j  &:  il  en  prend  fujet  d'accufer 
le  Dieu  de  Moïte  d'une  colère  inhumaine.  Mais  combien  l'e, 
xemple  du  péché  originel,  pour  lequel  tous  les  hommes  ont 
été  condamnez  à  la  mort  temporelle  ,  &  une  fi  grande  partie  à 
la  mort  éternelle,  auroit-ilété  plus  vif  6c  plus  preflant,  que  ce- 
luy-fà  ?  Et  quelles  déclamations  ne  pouvoit  point  faire  Julien 
contre  cette  doftrine  ?  Cependant  il  n'en  parle  feulement 
pas,  &  il  s'arrefle  à  cet  exemple  de  Phinées  qui  a  infiniment 
moins  de  force. 

Il  efl  vray ,  comme  M.  Claude  le  remarque ,  qu'il  entre  un 
peu  dans  la  doctrine  de  la  Trinité  ,  &  qu'il  en  tire  quelques  lé- 
gères objedions  contre  les  Chrétiens  ;  mais  cette  remarque  n'a 

RRr  iij 


j04  Liv.  Vil.  Examen  des  tArgumem  négatifs, 
de  force  que  contre  M.  Claude.  Car  il  eft  trcs-  aiie  qu'un  Au- 
teur s'ctant  engagé  dans  un  difcours  n'y  taffe  pas  entrer  une 
autre  matière  quoy  qu'importante,  lorsqu'elle  n'y  ell  pas  na- 
turellement liée.  Et  ainlî  il  n'y  a  aucun  fujet  de  s'étonner  que 
Julien  n'ait  point  parlé  de  l'Euchariftie  dans  ce  qui  nousrefte 
de  Ton  ouvrage  ,  puifque  la  fuite  de  fon  difcours  ne  l'y  portcic 
pas,  &  que  s'il  en  eût  parié  ,  c'eût  été  en  quelque  forte  une 
chofe  hors  d'oeuvre ,  qui  eût  mrerrompu  la  fuite  de  tout  l'é- 
crit. Mais  il  efl:  étonnant  qu'un  homme  d'elprit  ne  faflfe  pas 
valoir  les  raifons  que  le  fujet  dont  il  traitte  luy  fournit.  C'eft 
pourtant  ce  qui  eft  arrivé  à  Julien  fur  le  fujet  de  la  Trinité  Se 
de  l'Incarnation.  Il  eft  vray  qu'il  marque  la  dodlrine  de  l'E- 
^life  fur  ces  points  ^  mais  il  femble  qu'il  n'ait  pasapperceu  les 
difEcultez  qu'elle  renferme  ,  &  qui  font  tout  auffi  naturelles  6c 
tout  auffi  aifées  à  trouver  que  celles  que  la  tranfTiibflantion  pro- 
duit. Il  fe  contente  de  reprocher  aux  Chrétiens  qu'ils  ado. 
rent  trois  Dieux  ,  &:  il  ne  dit  pas  un  feul  mot  de  l'unité  d'une 
nature  en  trois  Perfonnes ,  qui  eft  ce  qui  choque  le  plus  ceux 
qui  fou  mettent  les  myfteres  à  la  raifon. 

Qiie  M.  Claude  apprenne  donc  à  faire  un  autre  ufage&un 

a"utre  jugement  des  argumens  négatifs.  Le  filence  d'un  feul 

Auteur  eft  toujours  peu  confiderable.    Celuy  d'un  Auteur  que 

fon  fujet  n'oblige  pas  necelTairement  à  parler  d'une  certaine 

matière,  l'eft  encore  moins.  Celuy  d'un  Auteur  occupé  &  qui 

écrit  au  haz^lrd  tout  ce  que  faphantaifie  luy  prerente,kns  avoir 

le  temps  de  digérer  fes  penfées  ,  ne  mérite  en  aucune  forte 

qu'on  y  ait  égard.  Tout  cela  fe  rencontre  dans  le  filence  de 

Julien  a  l'égard  de  rÊuchariftie.    Et  ce  qui  eft  encore  plus, 

c'eft  que  cefilencemême  eft  incertain  ,  puifque  nous  n'avons 

plus  les  livres  où  il  auroit  eu  lieu  d'en  parler ,  &  que  celuy  qui 

nous  reften'eft  pas  entier.    De  forte  que  c'eft  une  divination 

téméraire,  pour  ne  pas  dire  ridicule,  que  d'avancer  qu'il  n'en 

a  point  parlé.  C'eft  à  quoy  fe  réduit  cet  argument  terrible  , 

auquel  M.  Claude  s'eft  imaginé  qu'on  ne  pouvoit  répondre 

que  par  le  fîlencc. 


^  des  dijficuhez.  tirées  des  fetis,  505 


CHAPITRE    VI. 

Que  t" Objection  tirée  du  Jtlcnce  des  Payens  ,  regarde  auffi  bien 
les  Culvinifles  que  les  Catholiques  ,  (^  qu'ils  n'y  fcuuroient 
fatisfaire  que  far  les  'inèmes  folutions  que  les  Catholiques  y 
apportent. 

CO  M  ME  il  a  de  l'aveuglemenc  ou  de  îa  mauvnife  foy 
à  fe  (ervir  de  preuves  qui  Ioi'>;nt  auffi  fortes  d  un  côté 
que  de  l'autre  ,  la  première  reflexion  que  doit  faire  un  Au- 
teur judicieux  ôcfîncere  ,  c'efb  depenferàévitercec  inconvé- 
nient. 

S'il  avoir  plu  à  M.  Claude  d'obferver  cette  règle  du  bon  fcns, 
il  fe  feroit  épargné  bien  des  difcours  inutiles  (ur  le  filence  des 
Payens  j  puifqu'il  auroit  d'abord  reconnu  que  cette  objcdion, 
quelle  qu'elle  foit^n'efl:  poinrarrachéeprecifémcnt  à  la  docTiri'- 
ne  Catholique  ^  &  que  s'il  y  a  lieu  de  s'étonner  de  ce  filence,  la 
chofe.efl:  égale  dans  l'une  &  dans  l'autre  opinion.  De  forte  que 
les  Câlviniil:esnc  font  pas  moins  obligez  que  nous  d'en  cher- 
cher des  raifons,  &que.pouren  alléguer  même  de  vray.fem- 
blables,  il  faut  qu'ils  ayent  recours  aux  réponfes  dont  nous 
nous  fommes  fervis  contre  eux.  M.  Claude  en  conviendra 
fans  doute  s'il  daigne  confiderer  qu'on  ne  fçauroit  s'imaginer 
ces  Payens,  donc  il  fait  tant  valoir  le  filence ,  qu'en  trois  lortes 
de  difpofitions. 

La  première  eft  d'une  entière  ignorance  du  myfleredel'Eu- 
chariftie. 

La  féconde  d'une  connoiffance  imparfaite  formée  fur  les 
paroles  ordinaires  dont  on  (éfervoit  pour  l'exprimer. 

La  troifiémeed  d'uneconnoiflance  diftinde  de  la  doclrine 
des  Chrétiens  fur  cet  article. 

LefilencedespremierSjC'eft  à-dire,deceux.qui  auroientété 
dans  une  entière  ignorance  des  myfteres  des  Chrétiens,  &  qui 
n'en  auroient  pasoûy  parler,  ne  feroit  pas  fort  étonnant  ,  & 
il  le  feroit  beaucoup  plus  fans  doute  qu'ils  en  euffent  parlé  fans 
en  rien  fçavoir.Tout  ce  qu'ils  pouvoienr  faire  en  cet  état,  c'é- 
toit  de  fe  plamdre,  comme  Celfus&  Cecilius,  que  les  Chré- 
tiens cachoient  leurs  myfteres.  Mais  cette  ignorance  les  mec- 


joô     Liv.  VII.  Examen  des  Argumens  négatifs  , 
tant  dans  une  impuiflance  entière  d'attaquer  l'Euchanftie  par 
aucune  objedion  particulière,  il  n'eft  pas  aifé  de  voir  comment 
ils  l'auroient  pu. 

M.  Claude  voit  déjà  bien  ,  qu'à  l'égard  de  ccux-cy  les  Ca- 
tholiques ne  font  pas  plus  embarafTez  que  les  Calviniftes  à  ren- 
dre rai  fon  de  leur  filence.  Et  comme  on  ne  fcjauroit  montrer 
d'aucun  Payen  en  particulier,  qu'il  ne  fut  pas  de  ce  nombre  , 
il  ne  faut  compter  pour  rien  le  filence  d'aucun  Payen  en  par- 
ticulier. 

Mais  on  veut  bien  luy  accorder  qu'il  y  en  avoit  apparemment 
quelques-uns ,  à  qui  les  expreffions  dont  les  Chrétiens  fe  fer- 
voient  fur  le  fujct  de  l'Euchariftie,  n'étoient  pas  entièrement 
inconnues ,  quoyqu'ils  n'entendiifent  pas  leur  fens.  Lepafîa- 
ge  de  faint  Irenée  conlervé  par  Oecumenius  en  eft  une  preu- 
ve ,  &:  l'on  a  lieu  de  croire  que  ces  Juges  d€  fainte  Blandine 
n'ont  pas, été  les  feuis  d'entre  les  Payens ,  quiayent  appris,  ou 
par  le  rapport  des  efclaves  &  des  faux  Chrétiens,  ou  par  quan- 
tité d'autres  voyes  ,  que  les  Chrétiens  difoient  qu'ils  man- 
geoient  la  chair  ,  &  beuvoient  le  fang  de  J.  C.  dans  leurs 
affemblées. 

Mais  quelle  efl  l'idée  que  ces  paroles  formoient  dans  l'ef- 
prit  de  ceux  qui  n'en  entendoient  pas  le  fens'Ce  mêmepafTage 
de  faint  Irenée  nous  le  marque.  Ils  croyoient,  dit-il ,  que  les 
Chrétiens  mangeoientefFedivement  de  la  chair,  c'eft-à- dire, 
qu'ils  la  mangeoient  à  la  manière  ordinaire.  C'efl  donc  aufll 
l'idée  que  ces  paroles  ont  deu  former  dans  l'efprit  de  ces  au- 
tres Payens,  qui  n'entendoient  pas  comme  nous  le  fuppofons 
le  fens  de  ces  paroles.  Cependant  on  ne  trouve  point  qu'au- 
cun en  ait  fliit  de  reproches  aux  Chrétiens ,  ny  qu'on  s'en  foie 
fervi  pour  décrier  leur  Religion.  Les  Apologiftes  du  Chriflia- 
riifme  ne  fe  font  point  crus  obligez  d'y  répondre  ,  ny  de  jufti- 
iier  les  Chrétiens  fur  ce  fujet.  Et  excepté  le  féul  pafiage  de 
faint  Irenée ,  il  ne  s'en  trouve  aucun  veflige  dans  tous  les  au- 
tres Pères. 

Je  veux  bien  avouer  à  Mr.  Claude  qu'il  y  a  quelque  fujet  de 
s'étonner  de  ce  filence.  Mais  qu'il  avoue  auffi  qu'il  n'y  en  pas 
moins  pour  luy  que  pour  nous.  Car  les  Payens  dont  nous  par- 
lons concevoient  une  prefence  réelle  &  une  manducation  réel- 
le du  corps  de  J.  C.  C'étoit-là,  dit  Aubertin  ,  ce  qui  les  cho- 
cjuoit.    D'où  vient  donc  qu'on  ne  voit  point  qu'ils  ayent  fait 

érl-  ;c 


&f  des  difficuîtcz,  tirées  des  fens.  507 

éclater  leur  fcandale,  ni  qu'on  ait  efté  obligé  d'y  remédier:  Ch.  VI.  \ 
qu'ils  n'en  ont  tiré  aucun  avantage  contre  lesCIiretiens,&que 
les  Chrétiens  n'ont  pas  efté  obligez  de  s'en  défendre  ?  Il  faut 
que  M.  Claude  en  trouve  la  raifon  auffi  bien  que  nous.  Et  fi  l'on 
dit  qu'il  eft  croyable  que  les  Payens  ont  fouvent  objecté  cela 
aux  Chrétiens,  &  que  les  Chrétiens  y  ont  fouvent  répondu  ; 
il  eft  donc  poffible  que  des  objections  ayent  efté  faites,  &  qu'on 
y  ait  fouvent  répondu  ,  fans  que  ni  les  objections  ni  les  répon- 
fèyfoient  venues  jufqu'à  nous.  Et  M.  Claude  voit  bien  que 
comme  cette  objeétion  regarde  auffi-bien  les  Calviniftes  que 
nous  3  cette  réponfe  auffi  n'eftpas  moins  bonne  pour  nous  que 
pour  eux. 

Maisjepalîe  plus  avant,  &  je  foûtiens  qnes'il  eft  vray  même 
que  les  Payens  ayent  fouvent  fait  ce  reproche  aux  Chrétiens  , 
le  filence  des  Apologiftes  de  la  Religion  Chrétienne  fur  ce 
point  eft  beaucoup  plus  étonnant  dans  l'hypothefe  des  Calvi- 
niftes que  dans  la  noftre. 

Car  en  fuppofant  que  l'ancienne  Eglife  ait  crû  de  ce  myfte- 
re  ce  que  nous  en  crovons ,  ceux  qui  la  défendoient  eftoient 
aflèz  empêchez  à  y  répondre ,  puilqu'il  ne  leur  eftoit  pas  per- 
mis de  découvrir  le  fond  de  leur  doftrineaux  Payens,  Cen'é- 
toit  pasjjle  moyen  de  les  fatisfeire.  Us  ne  pouvoient  donc  re- 
pouflèr cette objcclion qu'en  l'éludant  en  quelque  forte-,  &  en- 
difant  qu'il  eftoit  faux  que  les  Chrétiens  mangeaftènt  de  la- 
chair  humaine  dans  leurs  affemblées ,  de  la  manière  que  ces 
Payens  fe  l'imaginoient.  Or  comme  cette  manière  de  réponfe 
ne  fatisfait  pas  pleinement,  &  qu'il  eft  toujours  iùfpeél  d'éluder 
une  objection  ,.  la  prudence  les  a  pu  porter  à  prendre  le  party 
de  n'en  point  parler. 

Ainfi  le  filence  de  ces- Auteurs  peut  eftre  fondé  félon  nôtre 
hypothefe  fur  une  raifon  de  prudence.  Mais  quelle  couleur  v 
peut-on  donner, en  fuppofant  qu'ils  fuffent  dans  le  fentiment 
des  Calviniftes  ?  Evite  t'on  de  répondre  à  des  objedions  qu'on 
peut  Cl  facilement  détruire  ?  Et  ne  s'y  feroiton  pas  pîûtoft 
attaché  pour  convaincre  les  Payens  de  calomnie, fans  qu'il  leur 
reftaft  le  moindre  prétexte  de  rephqtie,  &  pourmontreràceux 
qui  auroient  encore  eu  quelque  bonne  foy,  combien  on  abu- 
fôit  indignement  de  leur  crédulité  &  de  leur  averfîon  contre 
les  Chrétiens? 

Ce  n'eft  donc  pas  à  nos  adverfairesquece  filence  des  Apo- 

SSf  . 


5o8  Liv.  VII.  Bxa,mendes  Argumens  négatifs  ^ 
logiftes  de  la  Religion.Chretienne  fournir  un  argunicuc  CeO: 
nous  qui  nous  en  pouvons  (ervir  conrr'eux  ,  puitqu'ils  ne  fqau- 
roienc  alléguer  une  raifon  apparente  ,  pourquoy  ces  Apolo- 
giflés  n'ont  point  exprelîement  répondu  à  ces  fortes  d'obje- 
clions,  s'ils  lepouvoient  faire  avec  tant  d'avantage  pour  l'E- 
glifeôc  tancdeconfufion  pour  lesPayens  Orc'eft  l'état  où  ils 
auroientefté  ,  s'ils  avoieiit  crû  que  l'Euchariftie  n'eit  appellée 
le  corps  6c  le  iang  de  J.  C.  que  parce  que  le  pain  eft  le  figne  de 
fon  corps  6c  le  vin  le  iîgne  de  fon  fang.  Car  qui  eftle  Payen  fî 
ftupide  à  qui  on  n'eull:  pu  faire  comprendre  fans  peine  une 
chofe  fi  facile  ? 

Il  faut  donc  que  M.  Claude  abandonne  malgré  luy  ces  deux 
genres  dePayens,  6c  qu'il  fe  reduife  à  dire  qu'au  moins  ceux 
qui  eftoient  informez  diftinclemcnt  de  la  dodrine  des  Chré- 
tiens fur  cet  article  ,  n'auroient  pas  manqué  de  s'en  fetvircon- 
tr'eux  ,(î  l'Eglifeeût  cru  alors  la  prefence  réelle  6c  la  tranflub- 
flantiation  ,  6c  qu'en  ce  cas  il  eft  incroyable  qu'ils  n'en  euffent 
point  parlé,  mais  qu'il  n'y  a  rien  de  lurprenant  en  fuppofant 
que  l'Eglife  ancienne  ait  efté  fur  ce  point  dans  la  créance  des 
Calviniftes . 

C'efttoutce  que  M:  Claude  peut  répondre  ,  êc  nous  n'avons 
plus  qu'à  luy  en  faire  voir  l'inutilité  ,6c  que  l'opinion  des  Cal- 
viniftes  devoir  fournir  à  peu  prés  aux  Payens  autant  de  fujec 
de  reproches  que  celle  des  Catholiques.  Il  faut  même  que  les 
Miniflres  l'avouent  s'ils  veulent  demeurer  dans  leurs  principes  : 
car  quand  on  les  preife  par  les  partages  des  Pères  qui  repre- 
fentent  la  doftrine  de  l'Euchariftie  comme  difficile  à  croire ,  &c 
comme  oppofée  à  la  raifon  ^  au  fens  humain  ,  ils  prétendent 
que  tout  cela  convient  aullibien  à  leur  doâ-rine  qu'à  celle  des 
Catholiques.  Quand  on  dit,  par  exemple,  à  Aubertin  que  félon 
S.  Hilaire  ce  qu'on  dit  de  manger  la  chair  ^  de  hoine  le  funz  de 
A*l3,.p.4i4.  y.  C.  faroifiroit  infenfé  é-  impie  ,  s'il  n'efloit  appuyé  de  l'afitorité 
de  l Ecriture  ,  il  répond  froidement  que  cela  s'entend  de  la 
manducation  fpirituelle  ,  6c  qu'elle  doit  paroiflre  abfurde  6c 
infenfécaux  efprics  charnels,  auffi  bien  que  la  régénération  par 
le  Baptême. 

Calvin  répète  plufieurs  fois  que  la  manière  dont  J.  C.  nous 

nourrit  de  fa  chair  dans  l'Euchariftie  eft  incomprehenfible.  Ec 

M.  Claude  t.     M.  Claude  ne  craint  pas  de  dire ,  quilya  dam  le  Sacrement  fans 

rcp.^  p.  137.     -prefence  réelle  ^  fans  converjton  defubjlance  ^  des  merveilles  S"  des 

incomj'rehenjîèiliUKi 


3,.  rep.p.  115, 


^des  dïjfimlteT  tirées  desfcns.  Ç09 

îl  ne  niera  pas  Tans  douce  que  ces  Payens  ne  fufTênt  des  gens  Ch.  VI. 
charnels ,  ôc  à  qui ,  félon  Aubeitin  ,  la  manducation  fpiricuelle 
,de  la  chair  de  J.  C.  devoit  paroiftre  pleine  de  folie  &:d'abrurdi. 
té.  Il  ne  niera  pas  auiîi  que  n'ayant  point  de  foy  ,  ils  nefudent 
peudilpoi'ez  à  croire  lur  le  témoignage  de  l'Ecriture  ou  de  TE^ 
glife  ces  merveilles  incomprehenfibles  de  l'Euchanftie  ,  &  tres- 
portez  à  les  rejecter  &  à  les  combattre. 

D'oà  vient  donc  que  nous  ne  voyons  rien  de  tout  cela  dans 
les  écrits  des  Payens  ?  Pourquoy  n'y  paroift-il  rien  de  tout' ce 
quela  dodrinede  l'EuLhariliie  ,  félon  l'idée  même  des  Minif- 
tres ,  devoit  exciter  dans  leur  efprit  ?  Pourquoy  ne  traitent  ils 
pas  de  folie  &:  d'abfurditéceque  l'Eglifeenfeignoit  de  la  man- 
ducation du  corps  de  J.  C  ?  Pourquoy  ne  fe  font  ils  peint  éle- 
vez contre  ces  incom.prehenfibilitez  ,  que  les  Minières  trou- 
vent dans  leur  doctrine  auffi  bien  que  dans  la  noftre  ? 

Que  M.  Claude  cherche  donc  à  fon  tour  des  raifons  au  fîlence 
des  Payens,  ou  qu'il  avoue  quetouccequedifent  les  Miniflres- 
&  luy-même  des  incomprehenfibilitez  de  l'Euchariftie  dans 
leur  dodrine^ne  font  que  des  défaites  artiiîcieufes  pour  éluder 
les  palîîigesdes  Pères  qui  marquent  la  créance  de  l'Eglife  de 
leur  temps  par  un  caraÂere  qui  ne  convient  point  du  tout  a 
celle  des  Calviniftes. 

Mais  quand  il  prendrait  ce  dernier  parry  ,  &que  fans  avoir 
égard  à  ce  que  difent  les  autres  Minifl:res,il  s'arrefteroit  à  la  do- 
ftrine  de  fon  Eglife  telle  qu'elle  efl  en  effet  ,  ce  filence  des 
Payens  ne  l'enibarafleroit  de  rien  moins ,  &;  il  faudra  toujours 
qu'il  avoue  que  c'efl:  une  difficulté  commune,  &  tout  auffi  force 
contre  luy  que  contre  nous. 

Car  quelque  foin  que  les  prétendus  Reformez  ayent  eu  de 
retrancher  de  ce  myftere  tout  ce  qui  pouvoit  choquer  la  rai- 
Ion  ,  il  a  fallu  malgré  eux  qu'ils  y  laiïïafTent  deux  chofes  qu'ils 
n'ont  pûchanger  jl'uneeft  l'efficacequ'ils  attrihuentauSacre-  j,^  o.màe. 
ment ,  ou  qu'ils  avouent  que  \ei  Pères  y  ont  attribuée;  l'autre  contre  i^- p. 
efl:  la  manière  d'exprimer  ce  myfliere  qu'ils  reconnoiflcnreux-  ^'"^«tp-  's^» 
mêmes  tres-écrantre  &  très  extraordinaire.  Carcomme  le  re- 

marque  S.  Chryfoftome,  jamais  perfonne  avant  J.  C  n'avoit 

parlé  de  manger  fa  chair  &:  de  boire  fon  fang. 

L'un  &  l'autre  dévorent  extrêmement  choquer  les  Payens. 

Car  Ç\  Julien  fait  tant  de  railleries  du  Baptême,  &  s'il  fc  moc- 

que  de  ce  que  n'ayant  jamais  guéri  ni  une  lèpre ,  ni  la  moindre 

SSfy. 


jio  L  I V.  VII.  Examen  des  argumens  négatifs  ^ 
e  evnrc  .  les  Chrétiens  précendoient  néanmoins  qu'il  purifioit 
lésâmes  des  rapines ,  des  adultères.  S:  de  tous  les  auties  cri- 
mes :  que  ne  pou  voit-il  point  dire  ,  fur  ce  qu'ils  appelloicntua 
morceau  de  painSc  un  peu  de  vin  ,  le  remède  d'immortalité  ,  l'an- 
tidote delà  mort,  la  vie  ^  le  bien ,  Scde  ce  qu'ils  luy  attribuoienc 
la  remifïïon  des  p,^chez  ,  la  communication  du  S.  Efprit ,  &:la 
refurreclion  à  venir  ?  Cette  dodrine  eftoit-elle  plus  favorable 
à  l'égard  des  Payens  que  celle  du  Baptême  <"  &  devoit  elle  eflre 
moins  en  butte  à  leurs  objeâiions  &;  à  leurs  railleries  ? 

Non  feulement  laraifon  ne  permet  pas  de  le  dire,  mais  elle 
oblige  même  d'avouer  que  les  termes  dont  fe  fervoient  \ti 
Chrétiens,  en  appellant  la  participation  a  l'Euchari(l:ie,mangejr 
la  chair  de  J.  C.  quoique  ce  nefull,  fclon  les  Minières,  qu'un 
morceau  de  pain  figure  de  J.C.  en  cnfeignant  que  cepaineftoic 
change  r.u  corps  de  J.  C.  &  en  ufimt  d'une  infinité  de  compa- 
raifons  étranges,  que  ces  termes,  dis  je,  auroicntefté  tres-ça- 
pabL's  d'attirer  les  railleries  des  Payens  par  le  peu  depropor- 
tion  qu'ils  avoiànt  avec  ce  qu'ils  auroient  fîgnifie. 

Car  c'cfl-  fe  tromper  que  de  crtM'rc  que  les  objedions  des 
Payens  fuiTent  fondées  fur  la  leulc  difficulté  des  myfteres ,  en 
forte  qu'ils  s'y  obUinaiPent  d'autant  plus  ,  qu'ils  clloient  plus 
mal.aiîcz  à  comprendre  On  voit  au  contraire  que  ceux  qu'ils 
ont  le  moins  attaquez,  font  les  myfteres  de  la  Trinité  &  de 
Hncarnation.  Tout  ce  qui  ell  couvert  de  la  toute-puillance  de 
Dieu,  eften  quelque  forte  moins  expofé  aux  objeÂionsi parce 
qu'on  n'efl  point  choqué  de  voir  attribuera  Dieu  des  choies 
qu'on  ne  fçauroit  concevoir.  Et  cette  raifon  auroit  pu  porter 
les  Payens  à  ne  fe  pas  élever  avec  tant  de  force  contre  le  my- 
flerede  l'Euchariftie ,  quand  même  ils  l'auroient  connu  j  ou- 
tre que  ce  qu'ils  croyoient  delà  prcfence  de  leurs  Dieux  en  di- 
verles  llatucs ,  pouvoit  fervir  à  le  leur  rendre  moins  incroya- 
ble. Mais  leur  pente  a  toujours  eflé  d'?traquer  la  B^eligion 
Chrétienne  &r  ce  qui  la  pouvoit  faire  puroillre  vile,  balîe  &; 
ridicule.  Tout  ce  qui  frappoit  l'efprit  de  ces  idées,  eftoit  tres- 
conforme  à  leur  inclination.  Et  c'cil  pourquoy  leurs  reproches 
ordinaires  contre  les  Chrétiens,  eftoientprisdela  naillance  , 
delà  vie  Se  de  la  mort  de  Jesus-Christ. 

Il  efl:  donc  certain  qu'ils  n'auroient  pas  laifîe  pafler  le  langage 
dont  les  Calviniftes  expriment  ce  qu'ils  croyent  de  rEucha,ri- 
ftie  .^puifque  rien  ne  leur  auroit  eftéphis  aifé  que  détourner  les 


I 


tS  des  diffciilnx.tmes  des  fens,  511 

Chrétiens  en  ridicules  fur  ces  expreffionSjSc  fur  les  effets  qu'ils  Crf.  V I. 
attnbuoientà  ce  pain  &  à  ce  vin. 

Enfin ,  puifqu'entre  les  raifons  qui  auroient  dû  porter  les  infi- 
delles  à  attaquer  les  Chrétiens  fur  la  prefence  réelle  &i  la  tranf- 
fubflantiation  ,  M.  Claude  allègue  que  cette  doctrine  leur  au- 
roit  fervi  à  repoufler  plufieurs  des  objedions  qu'on  faifl  it  contre 
la  Religion  Payenne  ,  il  doit  conclure  par  les  mêmes  principes 
qu'ils  auroient  dû  tirer  le  même  avantage  de  la  docîrine  des 
Calviniftes  fur  i'Euchariftie  ,  6c  s'en  fervir  pour  la  même  fin. 

Car  il  ed  certain  queCelfus&  les  autres  ennemis  de  la  Reli- 
gion Chrétienne,  ne  croyoient  point  que  leursûatucs  fufTenc 
des  Dieux  ,  &  qu'ils  déclarent  qu'elles  n'eftoient  que  des  ima- 
ges des  Dieux.  Et  CQs.  images  même  n'avoient  fouvent  aucun 
rapport  avec  ces  prétendus  Dieux,  puifque  l'image  de  la  Mère 
des  Dieux  n'cftoit  qu'une  pierre  ronde.  Or  félon  M.  Claude 
ces  Chrétiens  en  croyoient  autant  de  l'Euchariftie.  Ils  la  pre- 
noient  pour  une  image  du  corps  ào.  J.  C.  où  J.C.  habitoitpar  fa 
divinité  &  par  fon  eîprit. Pourquoi  cesPayens  ne  s'en  fervoient- 
ils  donc  pas  pour  repoufîér  les  objections  des  Chrétiens ,  &;  qu« 
pouvoient-ilsoppoferde  plusfpecieux  à  toutes  les  railleries  que 
les  Chrétiens  faifoient  de  leurs  idoles  ? 

N'avon^nous  pas  droit  lur  cela  de  faire  parler  ces  Payens,au(li 
bien  que  M.  Claude,  &  de  luydemanderde  même  ce  qu'il  y  au- 
roit  à  répondre  à  un  de  ces  Philofophesqui  diroit  à  des  Chré- 
tiens qui  feroient  dans  la  créance  des  Miniflres  :  Vous  prenez 
fujet  de  l'honneur  que  nous  rendons  à  nos  idoles ,  de  nous  re 
procher  que  nous  honorons  &  adorons  ce  que  nos  mains  ont  ' ^ 
fait ,  ce  que  nos  paroles  ont  confacré  ,  ce  qui  ne  (e  meut ,  ni  ne  «.^ 
parle,  ni  n'agit,  &  ce  qui  ne  montre  fa  divinité  par  aucun  effet  ^ 
furprenant,  quoique  vous  iijachiez  que  nous  n'adcrons  pas  le 
bois&lapierre,&que  nôtre  adoration  fe  rapporte  uniquement  *^' 
au  Dieu  dont  le  bois  &;  la  pierre  font  les  'mages.  Mais  comment  '' 
avez-vouslahardiefledenousfaireun  crime  de  ce  que  vous  pra- 
tiquez vous-mêmes  dans  vos  myfteres  ?  Car  n'avez  vous  pas*" 
aulfi  une  image  de  votre  Dieu  qui  ell:  faite  non  d'oroud'ar-  " 
gent,ou  de  pierre,  ou  de  bois ,  mais  de  pain  &de  vin  ?  Ces  " 
matières  en  font-elles  moins  images  pour  eflre  plus  viles  ?  Ne  '' 
font  elles  pas  les  ouvrages  de  vos  mains?Ne  font  ce  pas  vos  bou-  " 
ches  qui  les  confacrent  ?  Ne  font- elles  pas  mortes  ii.  fins  mou.  '''^ 
vement?  Cependant  ne  les  honorez-vous  pas  comme  nous  ho-" 

SSf  lij 


c 


jiz  Liv.  VII.  Examn  des  argumem  négatifs, 
,j  norons  nos  fîmulachres  ?  Ne.les  traitez-vous  pas  avec  refpe<fl , 
„  comme  nous  traitons  les  nôtres  ?  Et  enfin  n'adorez- voas  pas 
„  vôtre  Dieu  agifliint  fur  vous  par  ces  matières  ,  &  refidant  en 
j,  elles  par  Ton  efprit  iEt  que  failons-aous  davantage  à  l'égard  de 
j,  nos  idoles? 

„  Que  voulez-vousdireaufÏÏde  nous  reprocher  que  nos  Dieux 
„  font  expofez  aux  injures  du  temps ,  au  feu  ,  à  la  vieillefTe  ,à  la 
y,  pourriture  ;  qu'ils  peuvent  eftre  enveloppez  dans  le  pillage  des- 
„  ennemis  j  que  nous  avons  beioin  de  clefs  &;  de  verroux  pour 
,,  empêcher  qu'on  ne  nous  les  vole.  Tout  cela  n'tft  vray  qu'àl'é- 
y,  gard  de  nos  ilmulacrcs  ;  ôc  nos  lîmulacres  ne  font  pas  nos 
„  Dieux,  mûisles  images  de  nosDieux.  Le  bois  &  la  pierre fonc 
j,  expofez  à  ces  accidens,  mais  non  pas  la  divinité  qui  en  elle- 
„  même  eftimpaffible&inviolable.  Etfiellene  communique  pas 
,,  fcs  qualitezà  fes  images,  ce  n'efl:  pas  par  impuifîance,  mais  par 
^  volonté.  Qiie  trouvez- vous  là  qu'on  ne  puifl'e  dire  avec  autant 
j,  de  raifon  de  l'image  de  vôtre  Dieu  faite  de  pain  &  de  vin?N'eft- 
„  elle  pas  fujette  à  ces  mêmes  accidens,  quoique  vous  l'appelliez 
j,  vôtre  Dieu  ,  &:  qu'elle  foit  l'indrument  par  lequel  vous  dites 
„  qu'il  fe  communique  à  vous  ?  N'eftes  vous  donc  pasinjuftesde 
jj  nous  faire  des  reproches  dont  vous  ne  fçauriez  vous-mêmes 

vous  défendre  ? 
*'    Il  eft  clair  que  ce  difcours  n'auroitpas  eu  moins  de  vray- fem- 
blancedansla  bouche  des  Philofophes  qui  auroient  combattu 
une  focieté  de  Calviniftes,  que  ceux  que  M.  Claude  leur  fair 
faire  contre  nous.  Qu'il  fonge  donc  à  fon  tour  comment  il  ren- 
dra raifon  du  filence  des  Payens  fur  la  dodrine  des  Calviniftes,, 
lu  y  qui   nous  demande  avec  tant  de  fierté,  pourquoy  ils  n'ont 
point  parlé  de  celle  des  Catholiques.  Qii'il  nous  dife  pourquoy 
ils  ont  parlé  du  Baptême  &  point  du  tout  del'Euchariftie  ,  s'il 
eft  vray  que  ces  deux  myfteres  leur  fuflent  également  connus  ?• 
Qu'il  nous  démêle ,  s'il  peut ,  pourquoy  ils  n'ont  point  relevé 
les  abfurdirez  apparentes  du  langage  dont,  (elon  luy  ,  TEglife  fe- 
fervoit  à  l'égard  de  ce  Sacrement?  Et  pourquoy  ils  n'en  ont  pas 
tiré  des  réponfes  aux  railleries  que  les  Chrétiens  faiioient  de 
leurs  idoles  &  du  culte  qu'ils  leur  rendoient  ?  Qu'il  médite  fur 
cela  plus  attentivement  qu'il  n'a  fait.  Et  on  afliirepar  avance 
qu'il  ne  fçauroit  trouver  de  réponfes  raifonnables, fans  donner  . 
en  même  temps  aux  Catholiques  dequoy  prouver  que  le  filence- 
d-es  Payens  ne  conclut  rien,  ni  contre  la  prcfence  réelle,  ni  con^ 
Ere  la  tranlTubftiantiation,. 


ti  des  ciifficiilteT^  tirées  des  fens.  ^15 


C  H  AP  ITRE    VII. 

Que  l'arpiment  négatif  tiré  du  Jîlcncc  des  Feres  fur  les  difficultex^ 

de  l' Eucbarijiie  ,  a  efiè  abfolumcnt  détruit  dans  le 

cours  de  cette  contcfiution. 

M.  Claude  ayant  propofé  l'argument  du  filence  des  Pères 
fur  les  difficultez  &;  les  merveilles  de  l'Euchariflie  dés 
fa  première  réponfe  ,on  y  fatisfit  d'une  manière  qui  le  devoit 
contenter.  Et  en  effet  nous  ferons  voir  icy  que  tout  ce  qu'il  y  R^.fut.  i  parc. 
a  répliqué  ne  confifte  qu'en  de  faulTcs  fuppolîcions ,  qui  ont  p.i48.&iuiv. 
elbé  détruites  dans  le  cours  de  cet  ouvrage. 

On  a  depuis  fortifié  cette  réponfe  par  un  chapitre  exprés 
dans  le  premier  tome  de  la  Perpétuité  ,  où  Ton  montre  par 
l'exemple  de  toutes  les  Societex  d'Orient ,  que  la  créance  de  la 
prefence  réelle  &  delà  tranfTubftantiationell  très  compatible 
avec  un  fîlence  entier  fur  toutes  ces  difHculcez.  M.  Claude  y  a  Perp.tomei. 
encore  répondu  à  fa  mode  dans  fa  troificme  réponfe.  Et  c'eft  '  '°"  ^' 
ce  que  nous  allons  examiner  icy  ,  parce  que  cet  examen  fulKc 
pour  décider  cette  qucftion. 

On  avoit montré  dans  ce  chapitre,  que  ce  font  deux  veritez^ 
de  fait  également  certaines  ^  (^  que  les  Grecs  c^  toutes  les  autres 
Societcz^  d'Orient  croyent  la  prefence  réelle  éî'  l'-t  tranffubjhin- 
tiation i  &  que  ion  ne  parle  point  néanmoins  dans  ces  So- 
cietez  des  difKcultez  de  ce  myflere.  Et  (ùr  cela  on  preffe  M" 
Claude  par  ces  paroles  Ces  deux  ventcz^notu  font  voir  d'a- 
bord la  faujfeté  de  la  confequence  de  M.  Claude  ^qui  s' imagine  que 
la  doctrine  de  la  prefence  réelle  oblige  neceffairement  h  parler  de 
ces  fuites  Philofophiques  î  mais  en  même  temps  elles  montrent  in- 
vinciblement la  l'criîè  d'une  confequence  toute  contraire  ,  qui  efi 
que  la  dctlrine  de  la  tranffubjlantiation  peut  fort  bien  s'accorder 
avec  un  flence  entier  fur  toutes  les  difficultés^  que  la  nature 
humaine  trouve  dans  le  myflere  de  l' Euchariftie ,  (i"  qu'il  efi  très- 
po,flîble  que  cette  doctrine f oit  crue  univerfellcment  ^diftin'clement ^ 
fans  oppofition  ^  fans  contradiction  par  de  grandes  fecietez^pen- 
dans  l'cfpace  de  plufieuts  fiecles  5  que  l'an  écrive  ^  que  l'on  par- 
le tres-fonvent  de  l' Euchariftie  _,  C^  de  la  vérité  du  myftere  ,que 
Ion  établi  If e  la  tranffubftantiation  tres-cUirement  ^  tres-precifé- 


5Î4         Liv.  VII.  En  amen  des  Argimicns  négatifs  ^ 

ment ,  fans  faire  des  reflexions  exprejjes  furjoutes  ces  dij/itultexjia- 
turc  [le  s  qui  fcmblent  nuijire  de  cette  doctrine. 
„  Non  feulemenc  cetce  expérience  fenfible  prouve  la  compati- 
„  bilicé  de  ce  filcnce  avec  cetce  doûrine,  niais  elle  prouve  de 
j,  p'ius  qu'il  n'y  a  rien  en  cela  que  de  cres- naturel  ,  &  que  c'effc 
,j  mal  coiiRoiftre  l'efpricdes  hommes,  que  de  s'imaginer  que  la 
„  doclrine  de  la  prefence réelle  &  de  la  rranflubflantiacion  porte 
„  d'elle-même  à  s'embarallèr  de  toutes  les  difficultez,quela  Phi- 
„  lofophie  humaine  découvre  dans  ce  myftere.  C'eft  une  illufion 
,:,  qui  vient  de  ce  que  l'on  prend  pour  une  dirpofition  naturelle 
„  éz.  pour  un  effet  commun  une  dirpolîrion  d'efprit  extraordi- 
„  naire  ,  &  qui  vient  d'une  paffion  qui  change  les  idçes  ordinai- 
,,  res ,  &  k  pente  naturelle  de  refprir. 

,,  Les  Miniftres  Calviniftes  qui  ont  pris  pour  principal  objet  de 
„  leur  averfîon ,  &  pour  le  plus  grand  prétexte  de  leur  fchifme  , 
,j  la  dodrine  de  l'Eglife  Catholique  fur  l'Eucharidie ,  qui  ont 
jj  pour  but  de  la  faire  pjroiftreinfupporrable  à  ceux  qu'ils  veulent 
,,  retenir  dans  leur  pariy,  ou  qu'ils  tachent  d'y  attirer  ,  fe  font 
,,  fortement  appliquez  aux  difficultez  Philofophiques  de  ce  Sa- 
j,  cremenr.  Ils  rempliflént  leurs  livres  de  raifonnemens  pour  les 
„  augmenter.  Ils  en  font  undesfujetsles  plus  ordinaires  de  leurs 
,,  dilcours  ;  &  comme  ils  en  ont  la.tefte  pleine',  ils  tâchent  aulïï 
„  d''en  remplir  celle  des  autres. 

,j    M.iis  pour  les  détromper  de  ces  faufTesconjcdureSjil  nefaut. 
„  que  les  avertir  qu'ils  fe  règlent  fur  de  fort  mauvais  modèles,  6i 
^j  qlie  des  gens  que  leur  pafîîon  &  leur  préoccupation  ont  fait 
„  forrir  de  leur  naturel ,  ne  font  pas  propres  pour  faire  coniioî- 
,,  tre  la  pente  &  l'inclinatiou  naturelle  des  efprits. 

Enfuire  on  applique  l'exemple  fenfîble  de  toutes  ces  grandes^ 
Fgli  fes  d'Orient  à  celles  des  fîx  premiers  fiecles  en  cette  ma- 
nière; 
,.,  Or  ce  que  l'expérience  nous  fait  voir  de  nos  yeux  dans  ces 
^  Eglifes  Orientales ,  nous  donne  lieu  de  juger  de  ce  qui  a  dûar- 
„  river  dans  l'Eglife  des  fîx  premiers  fîecles ,  en  fuppofant,  com- 
j,  me  nous  avons  droit  de  le  faire ,  que  la  dotTirine  de  la  prefence 
„  réelle  £i  de  la  trantlubllantiation  y  ait  eflé  univerftllemenc 
„  établie  en  la  même  manière  qu'elle  l'efl  dans  tout  l'Orient , 
„  c'efl:  à.dire  fans  combat&  fans  conteftation.  Et  comme  nous 
^,  voyons  que  la  créance  de  ces  dogmes  cft  jointe  avec  un  entier 
j,.  filence  fur  ces  difficultez  Philofophiques ,  on  doit  juget  qu'il 

en 


^  des  dijjiciilte'z.  tirées  des  fèns.  p^ 

en  a  deu  eftre  de  même  de  l'ancienne  Eglife  ,  ôcque  les  Pères    Ch.  VIII 
qui  ont  cftë  excrememenc  retenus  à  ne  parler  de  ces  chofes'  " 
<]ue  par  nece-lîicé  ,  n'ont  point  deu  en  entretenir  les  peuples  ny  " 
en  parler  dans  leurs  écries.  S'ils  l'avoient  fait,  ilsfe  icroienten 
quelque  forte  éloignez,  &  de  la  nature  qui  n'y  porte  point ,  &: 
de  l'efprit  de  la  foy  qui  en  éloigne. 

M.  Claude  entreprenant  de  réfuter  cette  preuve  dans  fa. 
txoifiéme  réponfe,  abrège  la  queftion  fans  y  pcnfer.  11  de- 
meure d'accord  de  ce  filence  de  toutes  lesEglifes  d'Orient  fur 
les  difficultez  de  l'Eue hariftie  ,  &;  il  en   prétend  même  tirer 


avantage. 


Il  ne  combat  point  la  confequence  que  l'on  en  tire,  qui  eft 
que  les  Peies  des  lix  premiers  ilecles  ont  pu  tenir  ces  mêmes 
dogmes,  &  garder  le  même  filence  à  l'égard  de  ces  diffi- 
cultez, 

II  s'attache  uniquement  au  principe,  fçavoir  que  toutes  ces 
Societez  croyent  la  prefence  réelle  6c  la  tranlîubftantiation.  Il 
prétend  que  ce  fait  eft  conteftc,  qu'il  n'eft  pas  permis  de  le  fup- 
pofer  ,  qu'il  en  prouve  la  négative,  &  qu'il  la  défend  mille  fois 
plus  folidement  que  l'on  n'en  aprouve  l'affirmative;'  êcqu'ain- 
fi  il  le  faut  lailTerà  part ,  &  répondre  à  fon  argument. 

Oeft  donc  à  quoy  la  queftion  eft  maintenant  réduite.  Si  ce 
fait  eft  conftant ,  M.  Claude  voit  bien  qu'il  faut  renoncer  à  fon 
argument,  Se  qu'on  a  droit  d'enconclure  que  c'eft  une  pure  il- 
lufion.  S  il  n'eft  pas  conftant,  on  luy  avoue  auffi  que  ion  ar- 
gument fubfifte  ,  &  qu'il  y  faut  chercher  d'autres  répon'es. 
Mais  en  vérité  la  queftion  en  eftantre  duite  à  ce  point,  on  peut 
dire  qu'il  n'y  a  plus  de  queftion  ,  &  que  jamais  il  n'y  en  a  deu 
avoir.  Car  il  ne  faut  pas  que  M.  Claude  s'imagine  que  l'opiniâ- 
treté inflexible  d'un  particulier  à  nier  des  chofes  conft.mtes,  en 
puilTe  ébranler  la  certitude  &  la  notoriété.  Il  a  beau  dire  qu'il 
n'eft  ras  certain  que  les  Grecs  croyent  la  prefence  réelle  &:  la 
tranffubftantiation  iil  ne  fait  par  là  que  fc  décrier  luymême 
fans  diminuer  en  rien  l'évidence  du  fait  qu'il  cortefte.  Le  pu- 
blic nous  fait  juftice  à  l'un  &  à  l'autre  fur  ce  point.  Et  quoy  que 
lacrainte  de.fe  faire  des  affaires  parmy  ceux  de  leur  party  em- 
pêche les  Calviniftes  intelligens  de  fé  déclarer  fur  ce  point, 
on  a  pourtant  des  preuvesqu'ils  condamnent  M.  Claude  dans 
leurs  entretiens  particuliers  -,  &  je  fuis  mov  mêr/.e  témoin 
qu'une  perfonne  des  plus  considérables  de  leur  fecle  à    qui 

TTt 


p6  Liv.  VII.  Examen  des  Argumens  négatifs  ,, 
j'cftois  entièrement  inconnu  ,  eftant  prelîé  en  ma  prefence  par 
un  homme  d'erpricSc  de  qualicé  d  avouer  fincerement  ceqa'il 
penfoit  de  ce  point  de  fait,  ne  put  s'empêcher  de  dire  qu'il  y 
avoic  la  même  différence  entre  les  preuves  de  M.  Claude^fic 
celles  que  l'on  avoir  produites  dans  le  premier  Tome  de  la  Per- 
pétuité, ôc  dans  la  répoiife  générale  ^  ^«'^«^r^  un  Almanac  ^ 
une   douz^aine  de  bons  eontrafts. 

Je  ne  Hçay  nicme  fi  M.  Claude  perfiftera  encore  à  nier  ce 
fait,  après  avoir  ku  ce  que  je  produiray  à  la  fin  de  ce  Volume. 
W  y  verra  tout  ce  qu'il  a  avance  touchant  les  Eglifes  d'Orienc 
condamné  formellement  par  les  decifians  autentiques  de  ces 
même  Eglifes.  Noftre  diiputene  leur  efl:  point  inconnue.  On 
les  en  a  informées.  Etc'eft  fur  noftreconteftation  même  qu'ils 
nous  déclarent  ce  qu'ils  croyenr,  &  qu'ils  condamnent  M.  Clau- 
de. C'eft  l'avantage  qu'on  a  quand  on  difpute  du  fentiment 
des  Eglife  vivantes.  Monfieur  Claude  fe  joue  de  celuy. 
des  morts,  parce  qu'on  ne  fçauroit  les  refTufciter  pour  le  dé- 
mentir .•  Mais  il  n'en  eft  pas  de  même  quand  il  s'agit  de  Socie- 
tez  qui  lubfifbent  encore.  Il  ne  faut  point  de  miracles  pour  leur 
faire  déclarer  leurs  fentimens.  Un  peu  de  foin  fuffit.  Et  l'on 
verra  l'ÈfFet  de  ceux  qu'on  a.  pris  pour  cela  qui  ne  font  que 
fort    médiocres. 

Quoy  qu'il  en  foiî,  je  veux  attendre  à  fçavoir  de  !uy-mê- 
me  qu'il  demeure  dans  fon  premier  fentiment  ,  la  charité 
ne  permettant  pas,ce  me  femb'e,  deluy  attribuer  avant  cela  un 
enteftement  fi  déraifonhable.  Mais  quand  il  feporteroit  jufques 
à  cet  excès,  il  ne  fera  qu'attirer  la  compalîion  de  ceux  qui- 
comme  nous  n'ont  point  de  venin  contre  luy  ,  fans  afFoiblir 
en  rien  la  /olidité  de  cette  réponfe.  On  fera  feulement  o- 
bligé  de  le  mettre  à  part,  comme  une  perfonne  fur  qui  l'évi- 
dence ne  peut  rien ,  &  de  s'adreder  aux  autres  de  fon  party 
qui  ne  font  pas  dans  les  mêmes,  difpofitions. 

Si  cet  argument  tiré  du  filence  des  Pères  furies  difficultezde 
l'Euchariftiefait  donc  encore  quelque  impreflion  fur  eux,  il 
n'y  a  qu'à  les  prier  d'ouvrir  les  yeux,  &  de  voir  un  fiience  tout 
pareil  joint  à  la  créance  de  la  prefence  réelle  &  de  la  tranlTub- 
ftantiation  dans  toutes  cesSocietez,  de  lafoy  defqiielles  ils  ne 
peuvent  douter,  &  qu'ils  ne  fçauroient  foupçonner avecla 
moindre  apparence  d'en  avoir  changé  depuis  fix  cens  ans.  Il 
faut  que  les  conjedures  fe  taifent  quand  on  peut  s'aiïurer  des. 


Çjf  des  difjîmlter^  tirées  des  fens.  5T7 

•chofes  par  un  moyen  de  cette  nature.  Etiln'efl:  plus  queftion  Ch.  VII. 
<le  conclure  ,  comme  M.  Claude  auroit  voulu  faireen  fuppo- 
fanc  l'incertitude  de  ce  fait  ,  que  puHque  les  Societczd'Oricrc 
ne  parlent  point  de  ces  difficultez,  elles  ne  croycnt  donc  pas  la 
prelence  réelle  &  la  tranlTubftantiation.  Mais  il  Faut  conclure 
direclement,  que  puiique  ces  Socictez  croyent  très  certaine- 
ment ces  deux  points, gc  qu'elles  ne  parlent  point  de  ces  diffi- 
cultez ,  ce  filcnce  cft  tres-compatible  avec  cette  créance  ,  & 
<]u'ainri  l'argument  qu'ont  tiré  du  lilence  les  Pères,  &:  dont  o\\ 
prétend  conclure  qu'ils  n'eftoient  pas  danslefentiment  de  l'E- 
glife  Romaine    n'eft  nullement  confiderahle. 

Iln'efl:  pas  plus  ditKcile  de  convaincre  M.  Claude  de  la  foli- 
<lité  de  ce  qu'on  a  répondu  à  c<i.xx.Q  même  objection  dans  la  ré- 
futation de  (on  premier  écrit. 

On'luy  a  dit  qu'on  ne  doit  poinrtrouver  fî  érranc;e  que  les  Pè- 
res n'ayent  pas  mar  que  en  particulier  les  difficultez  Philofo- 
phiques  de  l'EuchariiVie ,  puifqu'il  ne  paroift  point  qu'ils  le 
loientplusmiis  en  peine  de  marquer  celles  qui  naifîènr  du  péché 
originel  ,  de  la  Trinité  ,  6c  de  l'Incarnation,  avant  que  ces 
myfteres  euflent  elle  attaquez  par  les  hérétiques,  Se  qu'il  y 
a  même  plafieurs  de  ces  difficultez  qu'ils  n'ont  point  dévelo- 
pées  dans  la  plus  grande  chaleur  des  difputes  qui  fe  font  éle- 
vées fur  ces  articles. 

M.  Claude  n'a  rien  à  repartir  fur  les  difficultez  du  péché  ori-  m.  Claude  t. 
ginei,finon  quec'eftun  mvftere  Spéculatif.  Mais  c'efl:  une  très.  '^P*  P'  "°' 
vaine  défaite,  puifque  d'une  part  l'exorciTme  que  l'on  prati- 
quoit  fur  les  enfans  pour  les  tirer  de  la  domination  du  diable, 
en  eftoitune  confeffion  publique ,  &:  expofoit  en  quelque  forte 
aux  fens  ce  que  l'Eglife  en  croyoit^&que  de  l'autre  les  repro- 
ches que  Julien  fait  fur  ce  fujet  à  S.  Auguftin,  qu'il  avoir  pour 
luy  lesarrifansSc  les  gens  de  boutique  ,font  voir  que  cette  doc- 
trine eftoir  populaire,  &  connue  des  moindres  fideiles. 

I!  chicane  encore  d'une  manière  plusdéraifonnable  fur  les 
difficultez  du  myftere  delaTrinité.  Premièrement ^à\x.-\\^  aqv.el.  M.  cia-adc  i. 
■propos  l'Auteur  met.il  encore  le  myfiere  de  la  Trinité  en  panileL  '^'•'P  P  '34. 
ïe  av-ec  celtiy  de  l' Euchariftie  ,  ^  quelle  proportion  y  a-t-tl  de  l'un 
(^  de  l'autre  }  Mais  il  n'y  a  que  M.  Claude  qui  croye  avoir  droit 
de  demander  à  fon  adverfaire  ,  pourquoy  il  propofe  un  exem^ 
pie  decifif  Car  celuy  de  la  Trinité  l'eft  en  cette  occafion  ,  &  il 
efl  aifé  de  le  faire  voir  en  le  reduifant  à  cet  argument  en  forme. 

TTC  i] 


jiS  Liv.  VU.  Examen  des  Argument  négatifs ^ 
Si  le  filence  couchant  lesdifficiilcez  de  la  Trinité  a  pu  compatir 
pour  les  Pères  avec  la  foy  de  la  Trinité  -,  le  filence  Car  lesditfir 
cultez  de  la  prefeiice  réelle  &  de  la  tranlFubltantiacion  a  pil 
compatir  pour  Ic^  mcme  Pères  avec  la  foy  de  la  prefence  ré- 
elle  delà  cranfllibftannacion.  Or  on  ne  fçauroit  nier  lepremier.. 
Donc  &:c.C'efl:  à  M.  Claude  à  repondre  à  cet  ar^jnmenc,  avant 
que  de  faire  de  ces  iortes  d'interrogations  figurées  qui  luy 
tiennent  lieu  de  raifons  folides. 

LaTrinité  ^  pour  fuit- il,  eft  établie  très- clairement  ^  très  fortement 
dans  l'Ecriture-,  la  tranjjubfiantiation  y  eft  combattue.  Celle  Ik  efi- 
erifeiqnée  formellement  (^-^  diftinci ornent  far  les  SS.  Pères  i  ^  ils 
n'ont  pas  feulement  fait  w.ention  de  celle,  cy. 

On  voit  que  M.  Claude  fe  fait  des  raifons  detoutce  qu'il  croit 
eftre  avantageux  à  fi  caufe,  fans  avoir  aucun  égard  au  fenscom- 
niLin.  il  n'y  a  donc  qu'a  luy  répondre  fimplement,  que  la  Tri- 
nité eil  clairement  établie  dans  l'Ecriture  &.  dans  les  Pères 
pour  les  efprits  ncn  préoccupez,  &  qu'on  a  fait  v^iir  la  même 
chofe  de  la  tranfîiibflantiation.  Maiscen'eft  pasdequoy  il  s'a- 
git icy.  La  queftivjn  eft  de  fçavoir  fi  l'on  peut  conclure  du  fi- 
lence des  Pères  (ur  les  difficulcez  de  la  prefence  réelle  ,  qu'ils 
n'ont  point  reconnu  cette  prefence.  Et  je  (oùriens  que  cette  con- 
clufion  eft  faufre,puifque  le  filence  des  mêmes  Pères  fur  lesdif- 
ficultez  de  la  Trinité  ne  prouve  point  qu'ils  n'ayant  pas  cru 
la  Trinité. 

Celle  là  ,  ajoute  M.  Claude  ,  a  des  difficultés  qui  ne  paroiffent 
qu  aux  yeux  trop  perçants  de  la  curiojitè  :  ^  l' autre  en  a  qui  ne  fa 
fcauroient  cacher  aux  yeux  des  plus  endormis.  Les  d/fficultez^de  cel- 
le-là  ne  (ont  pas  tout  à  fait  ejîranges  à  la  rat  fou  :  mais  celles  de  l'au- 
tre renvcrfent  toutes  [es  maximes  ^  choquent  ce  qu'elle  a  déplus 
inviolable.  Qifont-elles  donc  de   commun  / 

Si  Monfieur  Claude  n'avoit  luy-  même  les  yeux  endor- 
mis ,  il  faloit  au  moins  qu'il  fuft  bien  aveuglé  par  fa  paflîo  n  , 
paur  ne  pas  voir  la  faufleté  de  tout  ce  qu'il  entaffe  là  fi 
hardiment.  Car  ce  n'eft  que  par  un  enteftement  pareil 
au  Ç\i\-\ .,  qu'on  peut  dire  que  les  difficultez  du  myftere  de  la 
■Trinité  ne  paroifîenc  qu'aux  yeux  trop  perçants  de  la  curio* 
fité ,  &  qu'elles  ne  font  pas  tout  à  fait  étranges  à  la  raifon.. 
Et  quiconque  n'aura  pas  refolu  comme  luy ,  de  trouver  à  quel- 
que prix  que  ce  foit  des  différences  entre  les  difficultez  du  my- 
ftere de  la  Trinité  &  celle  de  l'Euchariftie,  reconnoiflra  fans 
peine  q^u 'elles,  font  grandes  de  part  &:  d'autre,  &  qu'il  n'y  a  de 


fi^  des  difficultez.  tirées  des  Jens.  519 

différence  q^e  félon  que  les  diverfes  paffions  dont  on  eft  polîè-    Ch.  VII. 
dé  ,  (ont  qu'on  s'applique  à  l'un  ou  à  l'autre  de  ces  myileres. 

Les  Calviniiles  s'appliquent  uniquement  aux  difficultczde  la 
tranilubftantiarion.Les  Sociniens  s'appliquent  principa'emcnt  à 
celles  delaTnnité:  &  ils  en  trouvent  les  uns  &  les  autres 
qu'ils  croyent  infurmontables.  Les  Catholiques  ne  s'appliquent 
ni  aux  unes  ni  aux  autres  ^  mais  jugeant  fainement  de  toures^ils 
les  regardent  comme  grandes,  parce  qu'elles  le  (ont  en  tffct-^  & 
ne  lailîènt  pas  d'embralTer  fans  répugnance  les  rayilcres  donc 
elles  nailîènr,  parce  qu'ils  font  accoutumez  à  foùmettre  leur 
raifon  aux  lumières  de  la  foy. 

Il  ne  faut  pa';  auffi  que  M.  Claude  croye  nous  donner  le  chan- 
ge lorfqu'il  dit  en  gênerai,  que  les  Pères  ont  connu  les  difHcuI- 
tîzdelaTrinitë,  &  qu'ils  ont  tà<:hé  de  les  éclaircir.  Un'eilpas 
qaeftion  s'ils  les  ont  connues  ni  s'ils  ont  dit  généralement  que  la 
Trinité  eft  incomprehenfible.  Cela  n'eft  pas  contraire  à  ce  fi- 
lencelurlesdifficulvez  de  la  Trinité  dont  il  s'agit,  &  ces  ex pref- 
^o-\s  générales  font  elles-  mêmes  un  véritable  filence,  puifqu'et 
les  ne  forment  que  des  idées  confufes  6c  ne  prefentencrien  de 
diftincl  à  Tefprit. 

Ils  ont  marqué  en  cette  même  manière  les  difficultez  de  la 
prefence  réelle  &  de  latranlTubftantiation.ris  ont  exhorté  dens 
les  pas  fonder  curie»  femcnt ,  de  les  confioner  far  l'ardeur  de  la  foy 
Ô"  du  S.  Efprit.  Ils  ont  dit  que  la  manière  du  changement  cftoit 
inconcevable'')  que  ce  qu'on  ^x\.  croix,  ferait  une  folie  ^  (i  l'Ecriture 
ne  l'enfeignoit  h  qu'il  n'y  faloit  pas  chercher  l'ordre  de  la  nature. 

Ce  n'efl:  donc  pas  là  dequoy  il  s'agit  ^  mais  de  Tçavoir  s'ils  ont 
particularifé  les  difficultez  (ùr  laTriniréde  la  manière  que  nous 
les  concevons  6c  qu'elles  iont  propofées  par  les  Sociniens.  C'efl 
ee  qui  ne  peut  eftre  avancé  que  par  des  gens  qui  aiment  mieux 
entretenir  ceux  de  leur  party  par  de  vaines  déclamations,  c|ue 
de  leur  dire  flnceremenc  les  chofc5  comme  elles  font. 


TTt  iij 


Tnii.  1.  ?. 


■  jio  Liv.  VII.  Exa,men  des  Argumens  négatifs ^ 


CHAPITRE   VIII. 

Que  la  maxime  des  Pères  eft  de  s\tttacher  à.  la  foy  fans  écouter 
les  raifonncmens  humains.  Qu^ils  ont  appliqué  cette  yyiaxime  à 
l' Eucharifiie  .,  ^j^  qu'elle  a  deu  les  porter  a  nenreprejenter  les 
difficulté z^que  d'une  manière  tonfufe  ^  (générale. 


l; 


'Exemple  de  ce  que  les  Pères  ont  pratiqué  à  l'égard  des 
'points  capitaux  delà  Religion  Chreftienne  qu'ils  ont  trai- 
tez, comme  l'avoue  M.  Claude  ,  avec  une fohnété  ^  une  rete- 
nue admirable .,  en  s'attachant  à  la  règle  de  la  foy  &:à  l'Ecriture 
fans  s'amufer  à  prévenir  les  difficultez  que  l'efprit  humain  pou, 
voit  former,  nous  porte  naturellement  à  conclure  qu'ils  en  ont 
deu  ufer  de  même  à  l'égard  de  l'Euchariftie  -,  &qu'airi{I  on  ne 
fe  doit  pas  attendre  de  trouver  dans  leurs  écrits  des  éclairciflè- 
mens  furies  difficultez  de  ce  myftere.  Mais  fi  l'on  s'efForce  d'en- 
trer dans  leur  efprit  &.  dans  les  principes  qui  leur  ont  fervy  de 
règle ,  on  fera  encore  plus  perfuadé  qu'ils  n'ont  point  deu  ex- 
pofer  ces  difficultez  aux  yeux  des  hommes  ,  qu'ils  n'ont  deu  ni 
s'y  arrefter  eux-mêmes  ni  apprendre  aux  autres  à  s^y  arrefteri  ôc 
enfin  qu'il  y  a  un  parfait  accord  fur  ce  point  encre  leurs  maximes 
générales  &  leur  conduicte  particulière. 

Si  vous  demandez  à  S.  Hilaire  quel  eftat  il  fait  de  la  raifon 
humaine,  quand  il  s'agit  des  myfteres  de  Dieu  ,  il  vous  dira 
Hilar.  Je  que  le  S  penféesdes  hommes  font  incapables  de  comprendre  les  œuvres 
Tcin,  1. 1.  ^^  Dieu  ,  parce  qu  elles  ne  conçoivent  rien  de  ce  qui  eft  au  deffus  de 
l'intc/lizcnce  ou  du  pouvoir  des  hommes .-  qu'ainf  ce  n'eft  pas  par  les 
fcns  qu'il  faut  juger  de  la  puijfance  de  Dieu ,  mais  par  l'étendue  in- 
finie de  la  foy  ,  que  cette  foy  rejette  d^  méprife  les  queftions  inuti- 
les ^  capticufes  de  la  Philo fophie  ;  ^  qu'elle  ne  fe  laiffe  point 
embarrajfcr  parles  raifon  s  trompeufes  des  hommes. 

Il  vovisàlra.  .,quiî  ne  faut  pas  prétendre  régler  les  effets  de  la 
Hilar.  de  puiffavcede  Dieu  par  les  opinions  des  hommes  :  Que  l'ouvrage  ne 
doit  pas  juger  de  fon  Jtuteur.  Qu^  il  faut  fe  revcftir  d'une  efpece  de 
folie  pour  arriver  d  la  fageffe  :  Que  cette  figeffe  conffte  a.  ne  point 
donner  de  bornes  a  ht  vertu  C^  à  la  puiffancc  de  Dicu^àne  pas  pré- 
tendre rcjfcrrer  le  Matfire  de  la  nature  dans  les  bornes  de  la  nature ^ 


^  des  difficulteT^tirées  des  fens.  jii 

é"  à  e/îre  feifuadé  que  ta  créance  qu'on  a  de  Dieu,  efi    toujours  Ch.VIII. 
faufje  ^  trompcufe ,  s'il  n'en   efi   luy-  même    l'Auteur   6^  le  té- 
moin. 

Voila  quel  eftoic  refpric  de  ce  grand  Saint.  C'eft  fur  ces  prin- 
cipes qu'il  établilîoic  fa  foy  &  fa  pieté.  Il  vouloit  qu'on  écou- 
tai! Dieauniquement,  &:  qu'on  n'écoutafi:  plus  eniuice  Icsrai- 
fon'iemens  ôi  les  opinions  des  hommes  ,  ny  les  difficultcz  qui 
pourroienc  naiftre  de  la  raifori  &  des  fens. 

On  devroit  donc  juger  par  la  feule  eonnoiOance  de  fon  ef- 
prit  qu'il  a  appliqué  ces  principes  à  l'Euchanftie  ,  quand  même 
on  n'en  verroic  rien  par  fes  écrits,  &  qu'ainfi  il  n'a  deu  avoir 
aucun  égard  aux  difficultez  que  la  raifon  ,  êc  les  fens  y  peuvent 
trouver.  Mais  il  paroiftde  plus  qu'il  l'a  fait,  £cque  rcconnoif- 
iânt  que  ce  myftere  choque  noûre  raifon  ,  A  nous  a  appris  à  la  ij_  ]_  ^ 
méprif'er  pour  fuivre  uniquement  ce  que  Dieu  nous  en  a  ré- 
vélé par  fa  parole,  Attachons  nous  ,  dit-il,  a  ce  qui  efi  écrit,  f 
nous  voulons  accomplir  les  devoirs  d! une  jov  parfaite.  Car  il  y  a  de 
la  folie  ^  de  l'impiété  à  dire  ce  que  nous  difons  de  la  venté  ni- 
turelle  de  J.  C.  en  nous,  à  moins  que  luy  même  ne  nous  l'ait  appris. 
C  efi  luy  qui  nous  dit:  Ma  chair  efi  vraycment  viande ,  (>  monf^ng 
vrayement  breuvage  :  Ccliiy  qui  manqe  ma  chair  ^  boit  mon  fan^ 
demeure  en  moy  g/-  moy  en  luy.  il  ne  laifie  aucun  lieu  de  douter 
de  la  vérité  de  fa  chair  &-  de  (on  fang  ,  puifque  la  déclara- 
tion du  Seiyieur  çj^  nofire  foy  concourent  à  dire  que  c'efi  vraye- 
men  de  la  chair  (^  vrayement  du  fang.  Et  ces  chofes  efiant  prifes 
^  avalées  font  que  nous  fommes  en  J.  C  &*que  J.  C.  efi  en  nous. 

Que  cette  conduite  eft  fage  6c  judicieufe  :  qu'elle  eft  digne 
de  la  pieté  des  Pères  "qu'elle  eft  conforme  à  lafoiblefTe  de  nos 
efprits  !  Elle  les  afTujettit  parfaitement  à  la  foy.  Elle  reprime 
le  foulevementde  la  raifon  dans  fa  naifTance  mefme  ,5i  au  lieu 
de  s'arren:erà  déveloper  desdifïîcultez  qui  ébranlent  toujours 
l'efprit  ,  elle  les  étouffe  tout  d'un  coup  par  le  poids  de  l'au- 
torité divine  ,  avant  même  qu'elles  foient  formées.  Qti'il  vaut 
bien  mieux  empêcher  ainfî  l'efprit  de  fe  laifer  aller  à  fes  vains 
raifonnemens,  que  d'avoir  à  le  ramener  après  qu'il  s'y  efi 
abandonné/ 

Qui  s'étonnera  donc  que  ce  Père  ait  fuivi  cette  règle  ?  Et  qui 
ne  jugera  que  les  autres  en  ont  dû  faire  autant,  puifq'  ''!s  ont 
efté  animez  par  le  mefme  efprit  j  6c  que  la  raifon  mefme  les  y 
a  portez  / 


ja.1  L IV.  VII.  Examen  des  /îrgumens  négatifs  j 

AufTi  c'eft  ce  qui  éclate  partout  dans  leurs  écrits. Etil  n'y 
a  ritnqu'ilsinfpirent  plus  univerlellement  que  ce  mépris  des 
raifonncmens  humains  dan.^  les  chofes  de  la  foy  ,  que  l'éloi- 
gnement  de  toute  curiohté  ,ôcque  l'attache  inviolable  à  l'au- 
thorité  divine. 
//  e/r  bon^  dit  faint  Ambroife  ,  que  la  foy  précède  la  raifort^ 
'Ambr.  de       de  peur  quil  ne  femhle  que  nous  exigions  de  Dieu  qu'il  >  nous  ren- 
Abrah.   patr.  ^g    rai  fan  des  chofes  ,  comme  nous    l'exigeons  des  hommes.    Car 
''  qu'y-,a-t  il  de  plus  indigne  que  de  croire  les  hommes  dans  les  té- 

moignages qu'ils  rcyident  les  uns  des  autres ,  Q^    de  ne  croire  pas 
Dieu  ,  dans  ceux  qu'il  rend  de  luy  même  .<"  , 

le  ne  demande  point  de  raifon  d  J.  Cditil  pilleurs-C^y 
s'il  me  fa  Ho  it  des  raifons  peur  me  convaincre  j  je  renonceras  a 
la  foy . 

C'efi  potirq-uoy  ,  dit- il  encore  ,  vn  ne  parle  point  d'argumens 
quand  il  eft  queflion  de  la  foy.  Au  fer  hinc  argumenta  ithi  fides 
quccritur ,  ^  que  la  Dialeflique  fe  taife  doins  les  Ecoles.  Et  au 
niême  lieu.-  Mettez^^  dit-il,  A/  main  furvoftre  bouche.  lin' e^ point 
permis  de  fonder  les  divins  myjhres  :  Manum  ori  admove  :  Scru- 
tari  non  licet  fuperna  myfieria.  Il  cjl  permis  dx  fc avoir  que  le  Fils 
a  l'ftè  engendre  i  mais  non  -pas  de  fcavoir  commenta 

11  eft:  vray  que  faint  Ambroife  applique  là  ces  principes  à 
d'autres  myft:eres  qu'à  l'Euchariftie.  Mais  ils  nous  font  toû. 
jours  voir  quelle  eftoit  la  difpofition  de  fon  efprit ,  Se  quelles 
maximes  il  infpiroit  aux  peuples  dort  il  avoit  la  conduite.  Ec 
ces  maximes  ne  laiiroient  pas  de  faire  leur  effet  à  l'égard  de 
l'Euchariftie,  comme  elles  le  faifoient  à  l'égard  de  l'Incarna- 
tion 5c  du  péché  originel  aufquels  il  ne  les  applique  pas  non 
plus.  Mais  il  fe  trouve  de  plus  qu'il  en  ufe  expreflement  à 
l'égard  de  rEucharift;ie,  puifqu'il  déclare  qu'il  ne  faut  point 
demander  l'ojdre  de  la  nature  dans  le  corps  de  J.  C.  &  qu'on 
doit  croire  ce  que  la  foy  enfeigne  malgré  l'oppofition  des  (ens 
qui  nous  fait  prendre  TEuchariftiie  pour  du  pain  &du  vin,  au 
lieu  que  la  foy  nous  ajfurc  que  ce  n'efi  point  ce  que  la,  nature  a, 
forme  ,  mais  ce  que  la  benediclion  a  confacré. 

S  Ephrem  Diacre  d'Edefîè  a  fait  un  trairré  entier  pour  dé- 
tourner les  hommes  de  fonder  l'abifme  de  la  nature  divine  &;  de 
Ja  génération  du  Verbe.  Quentrepreaez^vous  ,  dit-il  dans  ce 
Tvxnté,  homme  audacieux  ''  La  naijfance  du  pils  unique  de  Dieu 
cjl  une  mer  immenfc  (jr  infinie.    N'efi.  ce  donc  pas  un  excès   de 

folie 


^  des  àijficultcz^  tirées  des  fens.  515 

felic  ^  detenicritè  a  vous  qui  rCcjtcs  qu'un^-eu  de  poujjicre  lice  en~  Ch,  VIIT. 
fanhle ,  d^  pre fumer  que  vous  ponrrcz^fbnder  cet  abime  \ 

De  même  que  la  paille ,  dit-il  encore  ^  [croit  incontinent  con fu- 
mée ^  fi  elle  voulait  éprouver  Li  force  du  feu  :  Ainfi  l'jjomme  qui 
prétend  pénétrer  la  nature  de  Di  eu  ^c fi  confumé  (jr-  confondu  p^r  cet- 
te recherche  qui  efiun  feu  dévorant  pour  luy. 

Mais  il  ne  faut  pas  s'imaginer  qu'il  ne  prefcrive  cette  rete- 
nue qu'à  l'égard  de  la  génération  du  Verbe.  Il  l'exige  exprelTé. 
ment  à  l'égard  du  mylîere  de  l'Euchariftie.  Participez^,  dit- il , 
dans  ce  traitté  même ,  au  corps  immaculé ,  S"  aufiing  du  Seigneur  ' 
avec  une  foy  très -pleine  ,  ^  ne  doutez^point  que  vous  ne  mangicx^ 
l'agneau  même  tout  entier.  Car  les  myjlercs  de  Chrifi  font  un 
feu  immortel.  Gardez^  vous  de  les  fonder  avec  témérité ,  de  peur 
qu'en  y  participant  vous  n'en  foyez^confumé. 

Et  la  raifon  qu'il  en  rend  ,  eft  que  ce  que  J^  C.  a  fait  pour 
nous  dans  ce  Sacrement  ejî  au-dcffus  de  toute  admiration  ,  de  tout 
efprit .,  (^  de  toutes  paroles.  C'ejl pourquoy ,  dit-  il ,  je  noferois  en- 
trer plus  avant  dans  cefujet.^  ny  vous  entretenir  plus  lonq  -  temps 
de  ces  myfteres.  Et  qUand  je  l'entre  prendrai  s  ,  bien  loin  de  les  pou- 
voir pénétrer  ,  ce  ne  ferait  que  faire  paroifire  ma,  témérité  ^  mon 
imprudence.  Car  ces  faints  vénérables  ^  terribles  myfteres  jur- 
fafent  toutes  les  forces  de  mon  efprit.  J'aime  donc  mieux  m'adref. 
fer  au  Père  éternel ,  ^  luy  rendre  grâces  de  ce  que  par  fon  Fils  uni- 
que C^  bien-aimé  ,  d  a  eu  pitié  demoy  ,  quelque  indiine  pécheur 
que  je  fuffe  j  parce  que  je  croyais  en  luy  avec  un  cœur  Jimple  ,  (^ 
quefay  toujours  eu  de  l'éloignetnent  (j;-  de  l' horreur  pour  ces  curio- 
fite-z^  prefomptucufcs. 

Ainiî  ce  faint  Diacre  bien  loin  d'entretenir  les  peuples  de 
ces  difficultcz  du  myft^c  de  l'Euchariftie  ,  n'ofoit  s'en  entre- 
tenir luy-même  ^  &  il  établidoit  en  même  temps  leur  foy  fur 
un  principe  qui  anéantit  tout  d'un  coup  toutes  les  ditficultez, 
&  lesempêclie  même  de  naiftre. 

Mais  il  n'y  a  point  de  Saints  qui  ayent  plus  travaillé  à  im- 
primer aux  fidelles  cette  foùmiffionreligieufe  pour  lesveritez 
deUfoy&cet  éloignement  de  toute  curiofité  à  l'égard  de 
nos  mvfteres,  que  les  deux  Pcres  de  l'Eglife Grecque  qui  fem- 
blenr  choifis  de  Dieu  pour  eftre  les  principaux  témoins  de  la 
foy  de  l'Euchariftie.  Je  veux  dire  faint  CbryToftome  &:  faint 
Cyrille  d'Alexandrie. 

YVu 


JI4    Liv.  VIL  Ex  Amen  des  Argumens  nega,tip  ^ 
Le  premier  renferme  la  dilpodrion  à-l'égard  des  myfteres  de 

f 'hom.^''"^"  ^^  ^°y  '^""^  ^^^  paroles  admirables  :  Je  rei^ois  ,  dit  il ,  avec  fou. 

de  Séraphin,  mijjion  ,  ccque  L' Ecriture  dit ,  S^J^  ne  m'informe  point  de  ce  quelle 
taifi.  Je  comprends  ce  quelle  découvre  fans  me  mettre  en  pei^ 
ne  de  chercher  ce  qu'elle  cache  ipuifqu'elle  ne  le  cache  que  pour  m' é^ 
loigner  de  le  chercher.  S'iy^oixxi  roi  ùfïttdp'a.  4  •Tt.oXvTÇ^y/xo  a  ta 
(;iafyyt/^jJa.,xciTaL''oci)  Toi  "^hnyicLKv^^Jé/rai  ^'  Ttifii^ya.^opi.dLi  rà.<rtiyx,ÉZ<*- 
Au^^ii*,   J^(at  Tyro    y)    auyx^iya.Av(pJc(.i. 

Aulfine  répond-il  jamais  d'une  autre  manière  auxobjecftions 
que  les  hcretiqnes  tiroienc  de  la  raifon  ,  qu'en  les  méprilant, 
qu'en  diicinc  qu'il  ne  les  faut  pas  écouter,  qu'en  les  traittanc 
même  des  blaiphêroes. 

ihToaii  h.  3,  Si  quelqu'undemande  ^  à'\t-'\\^comment  il  fe  peut  faire  que  le  Fils 
de  Dieu  ne  foit pas  moindre  que  fon  Père  qui  l'a  eni^endré  :  je  ré- 
ponds que  ces  fortes  de  que  fiions  naifjent  des  penfées  humaines ,  que 
ceux  qui  les  forment  en  feront  encore  de  plus  ridicules  ^  qu'il  ne 
faut  pas  même  les  écouter. 

In  Joan.. h.r^  J^ous  demandez^^  dit  il  en  un  autre  lieu  ,  comment  il  fe  peut 
faire  que  cela  fe  trouve  dans  le  Fils  ?  Qnoy  !  il  s'agit  de  Dieu  ^ . 
vous  demandexcomment  il  fe  peut  faire  ?  Ne  tremhlci^vous  point 
de  l'excès  de  votre  témérité  /  Si  quelqu'un  vous  demandait ,  com- 
ment  il  fe  peut  faire  que  nos  corps  i^  nos  âmes  poffedent  la  vie  im. 
mortelle  i  ne  vous  mocqueriez^  vous  pas  d'une  telle  queflion  ,paice 
que  ce  n'eji  pas  a  l' intelligence  humaine  à  juger  de  ces  chofes  j  7nais 
qu'il  les  faut  croire  par  la  foy  fans  vouloir  pénétrer,  ce  qui  n'a  he- 
foin  d'autres  preuves  que  de  la  feule  authorité  de  celuy  qui  le 
fropofe  ]  Vous  avex^  oiiy  ,  dit  il  y  dans  le  même  ouvrage  ,  qu'il  y 
avait  une  véritable  lumière  :  Pourquoy  prétendez^-  vous  donc  ju- 
ger de  cette  vie  éternelle  par  la  lumière  de^  voftre  raifon  ?  Pour- 
quoy vous  efforcez^  -vous  de  fonder  des  chofes  qni  n'ont  point  de 
fond  /  Pourquoy  tachez.^  vous  de  comprendre  des  chofes  incompre- 
herifihles  ?  Pourquoy  voulez^-vous pénétrer  ce  qui  efl  impénétrable  ? 
Epuifez^vous  en  réflexions  ,  d^  faites  tous  vos  efforts  pour  décou- 
vrir la  produit  ion  des  rayons  d.u  Soleil  ?  Vous  n'y  réiifirez^jamais 
^  vous  avouerez  fins  peine  votre  impuifance.  Pourquoy  donc 
efle'.i'ov.s  f  prefomptucux  S"  fi  hardis  dans  des  chofes  qui  paf- 
fcnt  infiniîuent  celle  la  ?  Qtioy  !  le  Fils  du  tonnerre  a  qui  Dieu 
avoit  donné  une  trompette  f^iritu'elle  pour  annoncer  fes  m.jfleres  „ 
fe  tient  k  ce  qu'il  avoit  appris  de  l' Efprit  ,  fans  vouloir  aller  au- 
dsla  i^  vous  qui  n'avex^ien  de  cette ^race  ^  ^  qui  ne  vous  ap* 


^  des  difficuke'x^tirées  des Jens.  jij 

puyat^uejur  de  iHiferabies  raifonnemens ^  vous  tàchez^dc  ptijfer ces  Ch.  VÎII. 
.homes  ! 

Ne  prétendons  point ,  dit-il  encore ,  juz^er  des  chofes  (divines  par  Hom.  15.  i» 
la  raifon^  ny  les  affujctttr  aux  loix  i^aux  necc_IJiicz^de  la  nature.  J""^"' 
Recevons  les  avec  joumi.ljîon,  &•  que  l' Ecriture  règle  no ^ire  créance. 
'■Car  ceux  qui  les  veulent  pénétrer  avec  curiojité ,  bien  loin  d'avancer 
en  connoiffunce  ,  ne  font  que  s'attirer  de  grands  chktimens . 

Il  n'y  arien  de  pire  ,  ditil  dans  une  autre  homélie  ,  qued'affu-  Hom.  14. 
jettir  les  chofes  fpirituelles  aux  raifons  humaines.  C'ejî  ce  qui  rendu 
JSficodeme  incapable  de  concevoir  rien  de  grand  j   ^  l'on  ne  nous 
donne  le  nom  de  fide lies  qu  afin  qu'en  ynèprifmt  la  baffe jfe  des  pen- 
fèes  humaines  ,  nous  nous  élevions  a  la  hauteur  de  lafoy. 

C'efl:  ce  qui  a  porté  ce  même  Père  à  donner  de  fi  grandes  ^^^^  ^^^ 
louanges  à  la  foy ,  &  qui  luy  en  fait  reprefenter  la  neccffi- 
té  en  ces  termes  :  il  n'y  a  rien  ,  mes  chers  frères.,  où  nous  n'ayons 
iefoin  de  la  foy.  C'efi  elle  qui  eft  la  mère  de  tous  les  biens ,  g/^  le 
vray  remède  qui  procure  le  falut.  Sans  elle  pcrfonne  ne  f^auroit 
/irriver  a  la  connoiffance  des  chofes  hautes  :  ^  ceux  qui  en  [ont 
dépourveus  ,  reffcmblent  à  des  gens  qui  ayant  entrepris  de  pajfer 
la  mer  fans  navire  ,  ne  fontpas  plutoji  éloigficz^durivagc^que  leurs 

mains  é^  leurs  pieds  fe  laffent ,  ^  qu'ils  font  engloutis  par  les  flots . 

C'eft  ainfi  que  ceux  qui  ne  Lonnoijfant  pas  la  venté  parla  foy  ,  ^ 
prétendant  la  trouver  par  leurs  raifonnemens ,  n'ont  a.  efpercr  qu'un 

irifte  naufrage. 
II  ne  veut  donc  pas ,  quand  il  s'agit  des  œuvres  de  Dieu, qu'on  ibid, 

en  demande  aucune  raifon    3   &  il  dit  que  la  meilleure  folution'^^'^-  *f; 

qu'on  puiffe  apporter  à  ces  difficulté^.,    c'efi  qu' tin' eft  pas  au  pou-  ^^us  Ap. 

voir  des  hommes  de  les  comprendre  ,  £>--  que  lafoy  demande  notre  Hoai  17.  ia 

oheiffance  ,  é'  non  notre  curiofitè.  f /•  ^'^  ^°"*' 

Il  compare  ceux  qui  veulent  comprendre  les  chofes  de  la  foy  ed.  adcor. 

par  la  raifon  ,    à  ceux  qui  veulent  prendre  un  fer  rouge  avec  la  Hom  i.m 

Wam.  Hom.  1.  in  i. 

Il  dit  que  c'efi  nnblaf^hème  de  vouloir  juger  des  chofes  divines  Ep.adTina. 
parla  raifon  ,  parce  que  le  raifonnement  humain  n'a  rien  de  commun 
avec  les  myftefes  de  Dieu. 

Il  veut  que  ce  foit  le  crime  pour  lequel  Hymenéc&  Phile- 
tus  furent  livrez  à  Satan  par  iaint  Paul  ,  qui  dit  d'eux  r^aw/r^- 
didi  Sat.zn.v  ut  difcant  non  blafphetnare. 

Et  dans  un  autre  lieu  il  afFure  que  toutes  les  herefies  font  ve. 
liuës  ,  de  ce  qu'on  a  voulu  Juger  des  myfieres  par  la  raifon. 

V  V  u  ij 


526       Liv.  VÎI.  Examen  des  oArgumens  négatifs , 

Voilà  les  principes  généraux  de  faine  Chry(oftt)me,  fur 
quoy  on  doit  remarquer  qu'il  eft  bien  vray  que  ce  Père  &  lea 
aunresjes  ont  plus  fouvent  appliquez  au  Myftcre  de  la  Trini- 
té qu'aux  autres  pomts  de  la  toy ,  parce  que  ce  myftere  eftoit 
combattu  de  leur  temps  i  mais  qu'il  ne  paroirt  pas  qu'on  en  aie 
nié  de  même  avant  la  naiflance  de  l'Arianifme. 

Que  ,  quand  ils  ont  propofé  les  objedions  des  hérétiques  j 
ils  les  ont  peu  approfondies,  parce  que  ce  principe  les  ren- 
verluit  quelles  qu'elles  fullenc. 

Qu'ils  comparent  (ouvent  de  grandes  difficultez  avec  de 
beaucoup  moindres,  comme  la  Trinité  avec  lapoffibilité  de 
la  refurrcdion  ;  la  naifTance  du  Verbe  avec  la  produdion  des 
rayons  du  Soleil.  Ce  qui  oAe  tout  lieu  de  s'étonner  que  les  Pè- 
res pour  prouver  le  changement  qui  arrive  dans  l'Euchariftiej 
allèguent  quelquefois  des  exemples  de  changemens  qui  ne 
font  pas  fî  eftrange-ç. 

On  feroîten  droit  de  conclure  tout  d'un  coup  de  cette  dif- 
pofirion  de  S.  Chryioftome,  qu  il  n'a  pu  être  fort  touché  des 
difficultez  de  TEucharilliie,  ni  fort  porté  à  les  déveloper  de- 
vant des  peuples  qui  efloient  afTez  préparez  à  les  méprifer  par 
ces  maximes  i  mais  on  a  fait  voir  de  plus  qu'il  exhorte  les 
fîdclles  à  n'écouter  ni  leur  raifon  ni  leur  fens  fur  ce  myftere. 
Croyons  ^  dit  il ,  Dieu  en  toutes  chofes  ,  e^"  «^  ^^  contredifons point  ^ 
quoyque  ce  qu  il  nous  dit  fcynhle  contraire  a  nos  pcnfées  d^  à  nos  yeux. 
Que  l^authorité  de  fa  parole  foit  plus  forte  furnous  que  nos  yeux  (^ 
nos  penfées-  Pratiquons  cela  à  l'égard  des  myfleres.  Ne  regardons 
pas  feulement  les  chofes  propofèes ,  mais  attachons-nous  à  fa  pa- 
role. Car  fa  parole  ne  nous  peut  tromper  j  au  lieu  que  nos  fens  s'a^ 
bufent  facilement.  Sa  parole  eft  infaillible .^Q'  nos  fens  fe  trompent 
fouvent  :  Puifque  c'efl  donc  fa  parole  qui  nous  dit  :  Cccy  eft  mon 
corps  j  foyons  en  perfuadez^j  croyons,  le  ,  (^voyons  le  avec  les  yeux 
de  la  foy.  Car  J.  C.  ne  nous  a  rien  donné  de  fcnfible  j  mais  il  ne 
nous  a  donné  fous  des  chofes  fenfîble s  ,  que  des  chofes  qui  ne  s'apper- 
(^oivcnt  point  parles  fens. 
},om.  4^.  in  II  dit  en  un  autre  endroit,  que  ce  que  Dieu  nous  a  dit.,  quand. 
Joan.  jl  Yiaus  a  commandé  de  manquer  fa  chair  dans  l' Euchariftie  ,  n'e/l 

point  affujetti  à  la  neceffitéde  la  nature  ,(^eft  au  deffus  des  loix  des 
chofes  d'icy  bas. 

Ces  pafTages  comprennent  efFedivement  toutes  les  difficultez 
"que  lesMiniftresccalenc.Maisils  les  comprennent  en  la  manie- 


(^  des  dijfimlteT^  tirées  des  fens.  517 

re  qu'il  efl:  inutile  del^Faire  envifager  au  peuple,  c'cft-à  dire,  Ch.  VUI. 
d'une  manière  générale  ii  confufe  ,c]ui  ne  fait  peint  d'imprcî- 
/îon  fur  l'iiTiigination  ,&:qui  iaiffe  l'efprit  dans  un  parfait  affu- 
jettinèmentà  la  foy.Ils  les  comprennent  en  la  manière  que  ces 
mêmes  principes  généraux  de  foumiffion  a  la  foy  appliquez  aux 
difficultez  de  la  Trinité,  comprennent  celles  dont  les  Soci- 
niens  remplilîent  leurs  livres. 

Cette  conduite  de  S.  Chryfoflome  a  été  fuivie  par  S.  Cvril- 
le d'Alexandrie, dont  lespaflages  pour  la  prefence  réelle  font 
tellem.ent  au  deflus  de  toute  chicannerie,qu'il  y  a  des  JVî  iniftres 
qui  ont  trouvé  plus  court  de  l'abandonner  ,  &  de  faire  de  cette 
doctrine  une  des  erreurs  dont  ils  l'accufent. 

La  maxime  capitale  fur  laquelle  il  établit  fa  foy  ,  &:  dont  il  fe 
fert  pour  réfuter  les  objections  desheretiques  &  des  payens,c'en: 
que  toute  curiofité  doit  cefîer  à  l'égard  deschofes  de  la  foy  ]i°,"  1.  lo.p. 
To    'Tti'tit    «Sr^S'iKTo"    '^  \aT!f^fy.'ftyyiT(if     uvcn    ^c>t.      Ec   c'eft  3«o. 
par  cette  même   maxime  qu'il   fe    defFait  d'une  objeclioii 
tres^difficile  des  Apollinariftes  fur  l'Incarnation.  Que  répon- 
drons-nous  à  cela, dit  \\^  Jînon  qu'il  n'efi  pas  jufie  d'abandonner  la  DereAiM» 
tradition  ancienne  de  la  foy  ,  qui  cflvenu'é  des  Apbtres  iufquànous^  P-  'î- 
ySfr  des  fubtilitez^de  cette  forte  ,  ni  de  fotimcttre  à  une  vaine  curiofi- 
té desjtiyfieres  quifurpaffentla  capacité  de  nos  efprits.  Qjfil  ne  faut 
faf  même  les  mettre  en  quefiion  ,   ni  fuivrc  l'exemple  de  quelques 
^ens^  qui  fans  fc  foncier  de  leur  propre  péril,  ont  la  hardieffe  de  déci- 
der hardiment  des  dogmes  de  la  foy ,  d""  de  les  approuver  ou  de  les 
rejetter  comme  bon  leur  fernble.  N'cfiil  pas  plus  raifonnable  de  re- 
ferver  à  Dieu  la  connoiffunce  de  fes  œuvres  ^d^  de  n'avoir  pas  l'im- 
piété de  reprendre  les  chofes  qu'il  a  jugé  devoir  faire  ? 

Aufîi  n'avoit-il  point  d'autre  voye  pour  (e  délivrer  des  dou- 
tes fur  les  myfteres, que  de  s'en  rapportera  Dieu.  Quandnous 
Il  entendons  pa^  ,  dit-  il ,  comment  les  œuvres  de  Dieu  font  pofiblcs , 
nous  ne  laijfons  pax  de  dire  a  Dieu  en  renonçant  a  tout  doute  j  Je 
fcay  que  vous pouvezjout ^  C>  qu'il  n'y  a  rien  qui  vous  foit  im- 
pojfible. 

C'eft  ce  qu'il  veut  qu'on  pratique  à  l'égard  de  l'Euchariflic.  in  jcan.  p. 
Et  c'efV  par  cette  raifon  qu'il  condamne  ces  Juifs  qui  eurent  la  i?^. 
hardieffe  de  demander  comment  J  C.  leur  pourroit  donner  fa 
chair  à  manger  :  Ils  eurent  ^  dit- il ,  la  hardieffe  de  demander  ert- 
core  :  COMMENT  /  comme  s'ils  n'euffent  pas  fceu  que  cette  parole 
itoit  unblafph'eme.   Carcejr  le  prcrpre  de  Dieu  de  pouvoir  faire 

VVuiij 


52,8     Liv.  Vil.  Examen  des  cÀrgumem  négatifs ^ 

fans  peine  tout  ce  qu'il  T^eut.  Mdis  étant  c'kà^rnels  &■  animaux^  com- 
me parle  S.  Paul  ,  ili  ne  comprirent  pa/Ws  œuvres  de  l' Efprit  de 
Dieu.  Ce  niyjhreji  plcinde  fagcjje  leur  parut  une  folie.  Ainfi  pour 
proiiter  de  la  cheute  des  autres  ,  nous  devons  en  participant  au 
7nyjhres  y  apporter  uncfoy  exempte  de  toute  curiojitc ,  (^  nous  bie» 
carder  de  demander  comment  'ipuifque  cefi  une  quefiion  dejuif^ 
(j;-  qui  mérite  les  derniers  (upplices.  Que  Li  tcmcritè  de  ces  Juifs 
nous  rende  donc  plus  prudens  pournofire  propre  bien.  Evitons  .^à  l'é- 
q^ard  de  ce  que  Dieu  fait  ,  de  dcmaridcr  comment  il  le  peut  faire. 
Reconnoifjons  qu'il  fcait  bien  lemoyen  dt  exécuter  ce  qu'il  veut.  Car 
quel  fujet  y  a-til  de  s'étonner  que  ce  luy  qui  furpajfe  fî  fort  notre  fa~ 
1,^ ([<''&'  notre  force  ,  fiffe  des  œuvres  mcrveillcufes ,  qui.  foient  au. 
deffus  de  la  portée  de  nos  efprits  / 

Eft-ce  qu'une  difcuiîîon  particulière  de  chaque  difficulté  au- 
roit  plus  fortifié  les  fidèles  que  ces  principes  généraux,  &:  l'ap- 
plication que  S.  Cyrille  en  fait  àrEuchariilie/  Pourquoy  donc 
les  auroit  il  marquées  plus  diftinclemenc  ?  6c  pcurquoy  auroit- 
il  appris  aux  fidelles  à  s'y  arrêter  ? 

Cette  conduite  efb  (î  conforme  à  l'inftinâ;  du  Chriftianifme 
&  aux  lumières  du  fens  commun  ,  qu'on  ne  doit  pas  s'étonner 
qu'elle  ait  été  fuivie  prelque  par  tous  ceux  des  Pères  qui  ont 
parlé  en  gênerai  de  ces  difficultez. 

S.  Gaudenceles  marque  &;  les  étouffe  de  la  même  manière, 
c'efl:  dire  ,  en  n'en  donnant  qu'une  idée  confufe.  6'///ry/>,dit- 
il  j  quelqu?  doute  dans  l'cfprit  de  quelqu'un  ,  qui  ne  fit  pas  di.ffipé 
far  ces  paroles.^  qu'il  le  con fume  par  l'ardeur  de  lafoy.  On  voit  qu'il 
n'exprime  point  en  détail  ces  difficuItez^Sc  qu'il  ne  les  détruit 
qu'en  nous  obligeant  de  les  mépriler. 

Hefychius  en  fait  de  même  dans  Ton  fécond  livre  fur  le  Le- 
vitique.  Quandnous  n'avons  pas ,  à\t  W ,  a jfe\de  force  pour  many:r 
le  facrifice  ^  le  con  fumer  tout  entier  ;  c' efi  k  dire  quand  la  foiblejfe 
de  notre  e(J>rit  nous  empêche  de  comprendre  que  les  chofcsquilvoit.^ 
font  le  corps  du  Sei'zyicur ,  lequel  les  .Anges  défirent  de  contempler .,  il 
ne  fautfe  lai  fer  aller  à  ces  doutes  5  mais  il  les  faut jetter  dans  le  feit 
du  S.  Ejprit ,  afin  que  ce  feu  confume  é"  digère  ce  que  notre  foibleffe 
nous  rend  incapables  de  digérer  »  Mats  de  quelle  manière  les  pourra- 
t-ilconfumer  ?  Si  mus  penfons  que  ces  chofes  qui  nous  par oijfient 
impojjibles  ,  font  poffîhles  à  la  vertu  du  S.  Efprit. 

C'efl  tout  ce  qu'il  auroit  pu  dire  quand  ces  difHcultez  auroient 
été  exprimées  plus  en  détail.  Cette  raifon  fufîit  feule  pour  les 


^  des  dijf imitez,  tirées  des /ens.  519 

Ji{î)per,&  aucune  ne  luffic  (ans  celle  là.Et  ainfi  c'eft  avecgrande  C"-  ^'^* 
raifon  que  ces  Pères  n'ont  pas  voulu  aller  plus  avant,  &  qu'inf- 
pirant  aux  peuples  autant  qu  ils  pouvoicnt  le  mépris  à  la  rai- 
ion  humaine,  6c  l'attache  inébranlable  de  la  foy,  ils  n'ont  pas 
crû  qu'il  hit  utile  de  s'enfoncer  davantage  dans  l'examen  de 
ce  que  les  mvfteres  ont  d'incomprehendble,  de  peur  qu'ayant 
donné  trop  de  liberté  a  l'elprit  humain,  il  ne  leur  tût  plus  potli- 
ble  de  le  retenir  dans  les  bornes  de  la  foy. 


CHAPITRE    IX. 


Que  les  Pères  ont  quelquefois  marqué  les  véritables  difficv.ltex^  de 
L' Eu  char  1  fil  e  i^mais  qu'ils  rC  ont  JAmais  parlé  des  f  retendues  wer- 
veiUes  que  les  Cdlviniftes y  trouvent. , 

M 


Claude  ne  prétend   pas  tout  à  fair  que  les  Pères 

i.  rép.p.  i}7, 


n'ayenc  jamais  parlé  des  merveilles  de  l'Euchariftie,     ' 


&  ce  n'eft  pas  en  cela  que  confifle  precifément  nôtre  diffe 
rend.  Il  demeure  d'accord  en  gênerai  qu'ils  y  remarquent  des 
difficultei  Se  des  merveilles.  //)'^«,dic  il,  dans  le  Sacrement 
fans  prefence  réelle  S^  fans  converjion  de  fubfiance  des  mcrveiL 
les  (^  des  incomprclyenfibilitez^.^  c'efl  a.  dire  des  chofes  au  dcjjus  de 
tordre  de  la  nature  qui  dépendent  de  la  fuiffance  fouveniinc  de 
Dieu,  ^  fur  le  [que  lie  s  il  ne  faut  pas  confulter  les  fcns  ,  ny  fui^ 
vre  les  penfées  ordinaires  de  la  raifon  ,  mais  croire  à.  la  parole  de 
Dieu.  Les  Pères  les  ont  exaltées  ,  ^  nous  les  exaltons  avec  eux. 
2/rais  ce  ne  font  pas  les  merveilles  delà  tranjfubfiantiation.  C'eft 
fiir  ce  fondement  qu'il  accufe  l'Auteur  de  la  Perpétuité,  de 
donner  le  change  félon  fon  adreffe ,  &  celle  de  ceux  de  fon  party  ,  qui 
lorfquon  leur  demande  une  chofe  ,  en  proàuifent  une  autre  ,  Q'  fub- 
fiituent  ce  qui  nefi  pas  en  qnefiion  a  la  place  de  ce  qui  y  cft.^  i^  quils 
ne  pouvcnt  -montrer. 

Puifque  l'on  convient  donc  de  part  &  d'autre  que  les  Pères 
exaltent.,  comme  dit  M.  Claude  ,  quelques  merveilles  de 
l'Euchariftie,  &  qu'ils  y  remarquent  quelques  difficultez,  il 
c'eft  plus  queftion  que  de  voir  (\  ce  font  les  difficultez  &  les 
merveilles  reconnues  par  les  Calviniftes,ou  fi  ce  font  celles 
qui  naiftent  de  l'opinion  des  Catholiques. 

C'eft  la  queftion  i  mais  avant  que  M.  Claude  ait  droit  de  j|a= 


530     Liv.  VII.  Examen  des  Argumens  négatifs  y 
décider  en  fa  faveur  ,  il  a  des  ciiofes  à  faire  qu'il  nous  per- 
mettra de  luy  marquer. 

Il  prétend  que  ce  font  les  merveilles  Calviniftes  que  les  Pè- 
res ont  ^x^///^m.  Il  faut  donc  voir  quelles  elles  font.  Or  quelles 
font  ces  merveilles  Calviniftes? 

C'eft  félon  luy  que  la  chair  de  J.  C.  abfente  communique  fà 
vertu  au  pain.  Car  c'eft-là  l'opinion  qu'il  attribue  auxPercs. 
C'eft,  comme  parle  Calvin,  que  J.  C.  abfent  &  feparé  de  nous, 
nous  nourrit  delà  fubftancemême  de  fa  chair.  Il  doit  donc 
nous  faire  voir  que  c'eft  là  ce  que  les  Pères  ont  reprefenté 
comme  incomprehenfible, comme  contraire  à  la  raifon  Seaux 
fens.  Mais  comment  le  feroient  ils,  paifque  jufqu'icy  aucun 
Miniftre  n'a  feulement  ofé  le  tenter  ?  Ils  nous  diient  bien  en 
gênerai  que  ce  font  là  les  difficultezqueles  Pcres  remarquent 
dans  l'Euchariftie.  Mais  de  produire  aucun  pallage  qui  le  prou- 
ve, ils  ne  l'entreprennent  feulement  pas. 

M.  Claude  eft  donc  réduit  à  appliquer  fans  fondement  ôc 
fans  raifon  ce  que  les  Pères  ont  dit  en  gênerai  des  diiïîcultez  , 
&  des  merveilles  de  l'Euchariftie  à  celles  qu'il  y  trouve  félon 
fon  opinion.  Mais  pourquov  les  Catholiques  n'appliqueront- 
ils  pas  auffi  ces  difcours  généraux  des  Pères  aux  difficultez  qui 
nailTent  de  la  prefence  réelle  Scde  .la  tranlfubftantiation  .<"  Ec 
s'il  nous  demande  pourquoy  les  Pères  n'ont  point  particulari- 
fé  celles-cy  ,  nous  le  prierons  à  nôtre  tour  de  nous  apprendre 
pourquoy  ils  n'ont  point  particularifé  les  fiennes. 

Le  voila  donc  au  moins  dans  le  même  embarrasoù  il  croie 
nous  avoir  mis.  Mais  il  eft  aifé  de  montrer  que  le  (ien  eft  beau- 
coup plus  grand.  Car  quand  les  Pères  parlent  de  ces  difficul- 
tez  ,  s'ils  n'expriment  pas  en  particulier  les  fiitesPhilofophi- 
ques  de  la  prefence  réelle,  ils  expriment  au  moins  la  fubftance 
du  myfterc  d'où  ces  difficulté!  nailfent.  .Spr^/^r:;^, dit  S.Cyrille 
Citccli.  4.     de  Jerulalem  ,  que  le  pain  apparent  ri  eft  pas  du  pain  j  quoyque  le 

qoùt  fente  que  c'eft  dupain. 
\    s  dcTrin.       J l  ne  faut  point  douter  ^    dit  faint  Hilaire,  de  la  vérité  de  la 
myft,  chair  Qr  du  fan?^  de  yf.  C.  puifque  les  paroles  du  Seiqneur  ô^  nôtre 

foy  nous  ajjurcnt  que  c'eft  vrayement  de  la  chair  (^  vrayemcnt  du. 

P.articipci.  au  corps  immaculé  d^  au  fanq^  du  Scipicur^  dit  faint 
DenatuLiDci  ppi^ij-^fy,      ^-j,,^^  ji„g  f^y  parfaite,  é-  dans  l'affurancc  que  vous 

cunosc  non  t  '  _-'-'''  /  7  ;  r 

fcrut.  mange7y_^  layicau  même  tout  entier.    Car  les  myfteres  ae  J.  C.  font 

un  feu 


t^  des  difficulté'^  tirées  des  fens.  519 

un  feu  immortel.  Gardez^  votis  de  les  fonder  avec  témérité.  Ch.  IX. 

le  vois  une  aife  chofe  .  dit  S.  Ambroifs^ ,  comment  m'affurez-  ■^'"''-  demi- 
votis  que  fc  reçois  Le  corps  de  j.  C. 

Quand  nojhe  efprit ,  die  Hefychius  ,  manque  de  vigueur  pour  j  ^  mLevit 
comprendre  que  les  chofes  qu'il  voit  font  le  corps  du  Seigneur ,  ^c. 

Il  eft  clair  que  toutes  ces  expreffions  marquent  littéralement 
Ja  prefence  réelle,  Se  qu'ainfi  elles  nous  portent ,  quoique  con- 
fnfément  ,  aux  difficultez  qu'elles  produifent.  Mais  elles  ne 
nous  portent,  ni  parieur  fignification  fimple  ,  ni  par  aucune  li- 
gnification métaphorique  qu'on  y  puifîè  raifonnablement  don- 
ner ,  à  concevoir  une  vertu  feparëe  imprimée  au  pain  par  la 
chair  de  J.  C.  ni  que  le  corps  de  J.  C.  du  haut  du  Ciel  nous 
nourrilTe  de  la  fubftance.  Et  ainfi  ces  prétendues  merveilles  que  les 
Pères  ont  exaltées ,  félon  M.Claude  ,  ne  fe  trouvent  ni  diflin- 
éVemenc  marquées  par  les  Pères ^  ni  même  confufémenr. 

Quand  il  ieroit  vray  que  ces  partages  pourroient  cflre  rap- 
portez à  la  vertu  feparée,  l'argument  que  M.  Claude  a  tiré  de 
ce  que  les  Pères  ne  parlent  point  des  difficultez  de  la  prefence 
réelle  n'en  feroit  pas  moins  renverfé.  Car  afin  que  cet  argu- 
ment ait  quelque  force,  il  faut  qu'il  foit  certain  quecespalfa- 
ges  ne  s'entendent  point  de  là  prefence  réelle.  Or  ce  n'eft  pas 
le  montrer^que  de  dire  firnplement  qu'ils  peuvent  s'entendre  erï 
un  autre  fens,  fi  l'on  ne  montre  de  plus  qu'ils  s'entendent  ne- 
cefiTairement  en  un  antre  fens.  Cependant  c'eft  ce  que  M.  Clau-» 
de  ne  fe  met  jamais  en  devoir  de  prouver.  Il  croit  que  c'eft  allez 
dédire  fur  tous  les  palîages  qu'on  luy  allègue,  qu'il  ypeutdon-»- 
ner  un  autre  fens  ;  &  il  s'en  tient  quitte  pour  cela. 

Mais  il  s'enfuit  de  làmanifcftcmeat  que  la  preuvequ'il  veutr 
tirer  du  filence.  des  Pères,  fur  ces  diffi;i|jÉ||z  eft  un  pur  io^ 
phifme. 

Car  cet  argument  fîippofe  qu'il  eft  .certain  que  les  Pères  ne 
parlentpoint  des  difficultez  de  la  prefence  réelle;^  M,  Claude 
dans  {ç^s  réponfes  fe. contente  de  foûtenir  qu'il  n'eft  pas  certain 
qu'ils  en  parlent  J  ce  qui  eft  bien  différent.  La  première  proposi- 
tion peut  donner  lieu  à  un  argument  qui  a  quelque  couleur. 
Mais  la  féconde  dans  laquelle  M.  Claude  fe  retranche ,  ne  luy 
fournit  aucune  objection  qui  mérite  à  peine  ce  nom. 

Dequoy  fert  donc  à  M.  Claude,  quand  on  luy  allègue  ce  paf- 
fage  de  faint  Grégoire  de  NyfTe  :  Jlfaut  confiderer comment tlcjî  ^f^^-  Catecî» 
ppflibUqtis  cet  unique. corps  qui  eft  fans  ccffe  divifc  à.  tant  de  mil.    '^'' 

XXx 


530  L IV. VIL  Examendes  Argumens  négatifs ^ 

tiers  de  fidetes  par  toute  la  terre  ^  (oit  tout  entier e}i  chacun  d'eu>e 
par  la  partie  qu^ils  en  reçoivent  ,  O"  demeure  neanruoms  entier  en 
Çvy  A  qiioy ,  liiy  (ert ,  dis  je  ,  de  prétendre  que  ce  palfagepeuc 
fignifier  (eulemenc  que  le  corps  de  J.  C.  demeurant  entier  en 
foi  même^fa  vertu  efl:  communiquée  à  tous  les  fidelles  qui  par- 
ticipent à  la  famte  Table  par  la  partie  du  Sacrement  que  cha- 
cun d'eux  reçoit ,  chacun  le  prenant  en  la  plénitude  de  Ton  mé- 
rite ?  Et  de  là.  7iatfi  cette  merveille ,  dit  il ,  qui  furprend  d'abordla. 
rai  fan  qu'il  eji  divifé  k  tant  de  perfonnes  ,  (^  que  pourtant  chacune 
d'elles  le  pojfede  tout  entier. 

Je  n'examine  pas  encore  ce  fens  i  mais  je  foûtiens  que  M' 
Claude  ne  difant  pas  un  feul  mot  pour  montrer  que  c'eft  le 
véritable  fens ,  il  ne  peut  tout  au  plus  le  propofer  que  comme 
probable.  Or  ne  le  propofer  que  de  cette  forte,  c'eft  ne  riea 
faire  du  tout.  Car  quand  il  nous  viendra  dire  enfuite  que  les 
Pères  ne  parlent  point  des  diliîcultcz  de  l'Euchariftie,  on  n'au- 
ra qu'à  luy  demander  de  quel  droit  il  parle  ainfi,puifque  tout 
ce  qui  s'enfuit  de  fes  réponfes ,  c'eft  qu'il  n'eft  pas  certain  que 
les  Pères  parlent  de  ces  diflicultez3&:  qu'il  n'a  pas  même  en- 
trepris de  prouver  qu'il  foit  certain  qu'ils  n'en  parlent  point, 
quoique  ce  foit  le  fondement  de  fon  obje£lion.  J'ay  bien  voulu 
marquer  en  paffant  ce  défaut  de  M.  Claude,  parce  qu'il  eft 
très- ordinaire  dans  fes  écrits  ,  &  dans  ceux  des  autres  Mi- 
niftres. 

Mais  je  n'en  veux  pas  demeurer  là.  Et  puifque  l'occafion 
s'en  prefente  ,  ileft  bon  de  faire  reflexion  fur  cette  étrange  ma- 
nière d'expliquer  ce  paifage  de  S.  Grégoire  de  NyfTe,  qui  eft: 
très  propre  à  nous  faire  connoiftre  comment  les  Miniftresfe 
jouent  des  Peresi|fcfcy^a^  conjiderer  ,  dit  celui-ci ,  comment  il  efl 
pcffible  que  cet  uwqUê  corps  (oit  divifé  a  tant  de  milliers  d'homines , 
^  qu'il  foit  néanmoins  tout  entier  en  chacun  d'eux.  Cela  veut 
dire ,  dit  M.  Claude  ,  que  chacun  reçoit  toute  la  plénitude  du 
mérite  de  J.  C.&:  que  le  corps  dej.  C.  demeure  néanmoins  en- 
tier en  foy. 

Voilà  toute  la  merveille  que  (Iiint  Grégoire  remarque  dans 
l'Euchariftie ,  félon  M.  Claude.  Plaifante  merveille  qui  ne 
fçanroit  furprendre  quedes  infenfez.  Car  peut-il  tomber  dans 
la  penfée  de  ceux  qui  ne  le  font  pas ,  que  de  ce  que  chacun  re- 
ijoitla  plénitude  du  mérite  de  j.C.  le  corps  de  J.  C.  doive  erre 
divifé  ?  N'eft-ce  pas  au  contraire  une  conlequence  neceflai- 


(^  des  diffctiltCT^ùries  des  fens.  531 

re  de  ce  qu'on  ne  rea.ic  que  cette  plénitude  dn  merire  de  J.  C.  Ch.  IX. 
que  fon  corps  demeure  donc  entier  ?  Où  eft  donc  la  queftion  ? 
où  eft  la  m.;rveille  ?  S.  Grégoire  reprefente  cette  divifion  du 
corpi  de  J.  C.  comme  contraire  en  apparence  à  l'intégrité  de 
fon  corps.  Et  M.  Claude  entend  ce  pafTàge d'une  fimple  parti- 
cipation au  mente  de  ].  C.  de  laquelle  s'enfuit  Tmiegrité  de 
ce  corps ,  &;  qu'on  ne  fçsuroit  regarder  fans  folie  comme  con- 


traire n.  cette  integnre. 


Que  fi  l'on  prend  la  peine  de  joindre  à  cette  queftion  ainfî 
expliquée ,  les  réponfes  de  S.  Grégoire,  on  verra  que  M.  Clau- 
de porte  l'extravagance  qu'il  attribue  aux  Pères  au  delà  de 
toutes  bornes. 

S.  Grégoire  de  NyflCjfelon  M.  Claude,  demande  comment 
il  eftpollible  que  tant  de  milliers  d'hommes  participans  à  la 
plénitude  du  mérite  de  J.  C.  par  rEucharifiie.,  le  corps  de  j.  C. 
ne  lailfe  pas  de  demeurer  entier.  Et  la  répor.fe  àçce  Père,  eft 
que  cela  ^}:nvQ^p.irce  que  l.imème  vertu  qui  faifoitd.ms  le  eorps 
de  J.  C  que  le  pain  qu'il  manzecit  c(}oit  changé  en  la  nature  de  fon 
corps  ,fait  la  même  chofe  dans  l'Eucharifiie. 

Il  y  auroit  tant  d'extrayagance  dans  cette  rcponfe,  fi  la  quef- 
tion eftoit  teilequeM  Claudf  le  voudroitperfuaderjque  l'on  ne 
f(jauroit  l'attribuer  à  S.  Grégoire  de  Nyfle,fans  vouloir  qu'il 
n'euft  pas  de  fens  commun^  Cependant  M.  Claude  nous  débite 
cela  froidement  comme  la  chofe  du  monde  la  plus  claire  6c  la 
plus  plauilble  5  &;il  déci-ieen  un  mot  que  la  merveille  que  S. 
Grégoire  deNyffetouchejC'eft  que  la  participation  au  mérite 
de  J.  C.  ne  caufe  aucune  divifîonà  fon  corps-,  comme  fi  ce  fens 
efloit  fi  clair  qu'il  n'euft  pas  befoin  de  preuves. 

Mais  comme  cette  manière  de  répondre  n'eft  propre  qu'à 
des  gens  qui  ne  fe  foucient  ni  de  la  vérité  ni  même  du  juge- 
ment des  perfonnes  fages ,  elle  ne  fçauroit  donner  d'atreinte  à 
l'évidence  de  cette  preuve  ;  &  nous  avons  toujours  droit  de 
conclure,  que  comme  lareferve  que  les  Anciensont  cru  devoir 
garder  religieufement  en  traitant  de  l'Eucharifiie  devant  les 
Payens  n'a  point  empêché  S.  Juflin  d'en  parler  clairement 
danslafeconde  Apologie  adrefr:;e  à  Marc  Aurele  &  à  fon  frè- 
re ;  de  même  aufïî ,  quoique  l'efprit  gênerai  des  Pères  ait  cflc 
de  ne  propofer  que  d'une  manière  confufe  les  difficulrez  ^es 
myfleres  qui  n'efloient  pas  combattus ,  S.  Grégoire  de  Nyfîê 
néanmoins  n'a  paslaiffe  de  propofer  diflinclement  par  ce  paf^ 

X  X  X  ij 


^32-       Liv.  VII.  S xnmen  des  ^Argumens  négatifs  ^ 
iage  la  principale  difficulté  de  l'Euchariftie,  De  lorte  qu'il 
n'eft  point  vray  abfolument,  comme  les  Calviniftesle  préten- 
dent,  que  ces  difficultezn'ayenc  jamais efté  marquées  par  au- 
cun des  Pères. 

Cette  même  difficulté  n'a  pas  feulement  eftépropofée  paT 
S.  Grégoire;  elle  l'a  encore  eîté  par  d'autresPeres  ,  non  com- 
me une  difficulté,  mais  comme  une  fuite  neceflaire  dumyftere. 
£.  perp.i.  5.  C'efl:  ce  que  nous  avons  fait  voir  dans  un  chapitre  exprés  du 
C.5,  p-  f4i-  fécond  tome  de  cet  ouvrage  ,  où  nous  avons  montré  que  les 
Pères  ontêxpreflcment  enleigné  qu'on  divife  les  lignes  fansdi- 
vifer  le  corps  de  J.  C.  &  que  chaque  fidelle  le  re(^oit  tout  en- 
tier, quelque  partie  de  ces  fignes  qu'il  reçoive. 

On  y  cite  entr'autresces  paroles  des  Liturgies  de  S.Jacques, 
de  S.  Baille  &  de  S.  Chryfoftome,  L'Agneau  de  Dieu  &  le 
Fils  du  Père  cfi  divifè  fans  divtfion  ^  il-efi  coupe  en  parties  fans 
feparation  de  fes  parties  ;  /'/  ejl  toujours  m.in'gè  (j;-  Tamais  confumè. 
Et  nous  ajouterons  ici ,  pour  m  irquer  la  foy  de  l'Eglife  d'Oc- 
cident, ces  paroles  d'une  préface  qui  fe  lifoit,  dit  Guitmond, 
prefque  dans  toute  l'Eglife  Latine.  Cette  hofiie  qui  vozi^  eji  of- 
ferte par  pluficurs ,  cfi  faite  le  corps  unique  de  J.  C.  parl'infu- 
Jîon  du  S,  Efprit.  Chaque  fidelle  reçoit  noflre  Seigneur  J.  C.  Il  efi 
tout  entier  en  toutes  les  portions  de  l'Hcftte.  lin  efi  point  diminué 
four  efirc  communiqué  à  plufeurs  ,  mais  il  fe  trouve  tout  entier  en 
tous.  SiNGULr  accipiunt  Chriflum Doînimim  ^  ^infinyilisportio- 
nihus  tôt  us  efi  ,  nec  perfingulos  minuitur .,  fed  integrum  Je  prabet  in 
finyilis. 

S.  Chryfoftome  remarque  de  même  expreflement  l'unité 

Homil.  i7-m  du  corpsde  J.  c.  en  plufieurs  lieux.  Y  a  t'il plu(teurs  Chrifis., 

Epift.  ad         dit- il  ,  parce  qu'il  efi  offert  en  plufieurs  lieux}  Nullement ,  car  il 

r^y  a  qu'un  J.  C.  qui  efi  tout  entier  icy.,  ^  tout  entier.  Ik  .^^  un  me- 

wc  corps. 

Il  remarque  qu'il  efi;  dans  le  ciel  &  fur  la  terre.  O  miracle^ 
dit- il  !  O  bonté  de  Tiieu  /  Celuy  qui  efi  là  haut  avec  fin  Pcre  ..^  nous 
l'afuons  tous  entre  nos  mains. 

Ne  fonc-ce  pas  là  des  merveilles  de  TEuchariftie  ?  Et  n'ont- 
elles  pas  efté  exprelfement  propofées  &;  marquées  par  ces 
Pères  ? 

Ainfi  pour  réduire  en  abrégé  ce  que  nous  avons  lieu  de  con- 
clure de  l'examen  de  cet  argument  des  Minières,  il  eft  clair 
que  le  fîlencedes  Pères  fur  les  difficultés  de  l'Euchariftie ,  ne 


&  des  difficulté^,  tirées  des  fens.  j ^^ 

:j)eut  avoir  de  force  que  contre  les  Calviniftes ,  puifqu'ils  ne 
içauroienc  faire  voir  que  les  Pères  ayenc  parlé  ni  en  gênerai  ni 
en  particulier  ,  ni  diftinclement  ,  ni  confufëment  des  préten- 
dues merveilles  qui  naiflent  de  leur  dodrine  ou  de  celle  qu'ils 
attribuent  aux  Pères.  Et  il  efl:  clair  au  contraire  qu'il  n'y  a  rien 
plus  vain  que  l'argument  que  M.  Claude  prétend  tirer  du  fiien- 
ce  des  mêmes  Pères  lur  les  difficultezde  la  prefence  réelle  &: 
de  la  tranlîubftantiation. 

1.  Parce  quil  n'eft  pas  vray  abfolument  qu'ils  n'en  ayent 
parlé, 

2.  Parce  que  leur  efpritêc  leurs  miximes  les  ont  dû  porter  à 
n'en  parler  pour  l'ordinaire  que  confufément. 

3.  Parce  que  les  paflages  où  ils  marquent  en.  gênerai  lesdiffi- 
cultcz  de  l'Euchariftie  ne  le  peuvent  entendre  raifonnable- 
ment  que  de  la  prefence  réelle  5  &  ainfis'ils  ne  marquent  pas 
diftinctement  toutes  les  difîicultez  particulières,  ils  marquent 
au  moins  le  principe  qui  les  contient  &  qui  y  conduit. 

CHAPITRE      X. 

Rèponfe  a  ce  que  dit  M.  Claude ,   que  les   Pères  ont  eflabli  des 

principes  de  Philofophie  contraires  au  x  ynerveillcs  que  les 

Catholiques  rcconnoijfent  dans  l'Eucharifie. 

M.  Claude  ,  pour  fortifier  fi  preuve  tirée  du  filence  àss 
Pères  fur  les  difficultez  de  l'Euchanilie,  ajoute  qu'ils 
ont  propofé  des  ynaximes  contraires  aux  miracles  qui  s'y  trouvent 
félon  nozi-s ,  &  cela  d'abord  paroifl  avoir  plus  d'apparence. 

Il  ne  faut  néanmoins  que  faire  un  peu  de  reflexion  fur  la 
rature  de  l'eiprit  humain  &:  (ur  la  manière  dont  il  agit  ordi- 
nairement pour  reconnoiftre  l'inutilité  de  cette  remarque  ^  êc 
que  comme  le  profond  refpect  qu'ils  avoient  pour  les  myfteres 
les  a  dû  porter  à  ce  filence ,  ce  filence  auffi  les  a  portez  natu- 
rellement à  parler  des  chofes  de  la  nature  lans  aucun  égard  à 
cesdifficultez^ni  auxmyfteres  qui  lesproduifent. 

Car  en  parlant  peu  de  ces  diftîcultez,  6i;ne  les  regardant 
jamais  que  confufément,  ils  y  ont  peu  penfé,  &en  y  penfant 
peu  ,ils  les  ont  eu  peu  prefentes  à  l'efprit.  Il  y  en  a  même 
quelques  unes  aufquelles  ils  ont  pu  ne  faire  aucune  reflexion  , 

X  Xx  iij 


534  Liv.VIÎ.  Examen  des  a^rgumens  négatifs , 
parce  ,  comme  nous  avons  remarque  ailleurs ,  qu'us  n'ont  pas 
conçu  les  myfterespar  des  idées  philofophiques ,  mais  par  les 
idées  communes  6c  populaires.  Ils  onc  crû  qu'après  la  confe- 
cration  le  pain  eftoit  véritablement  changé  au  corps  de  J.  C. 
qu'ainfi  ce  que  l'on  recevoit  n'efloitpas  du  pain,  quoiqu'il 
parLifl  pain  ,  mais  le  corps  même  de  J.  C.  Mais  il  n'efl:  pas 
necefTiire  qu'ils  ayent  porté  leur  curiofité  jufqu'à  vouloir  con- 
noiftre  quelle  cftoic  la  nature  de  ces  apparences  de  pain  ,  que 
la  foy  leur  apprenoit  n'eftre  pas  du  pain.  Il  (uffit  qu'ils  ayenc 
cru  en  gênerai  que  J.  C.  leur  donnoitfon  corps  fous  la  forme 
du  pain  fans  qu'il  tuft  du  pain,  &  que  ce  qui  paroifloit  pain 
n'eftoit  pas  du  pain  ,  eftant  changé  réellement  au  corps  dé 
Jésus-  Christ. 

li  n'cft  pas  même  necelîlure  pour  la  créance  de  ce  myftere 
qa'ils  fe  (oient  formez  dogmacqiiemcnt  ces  maximes  fpecula- 
tives,  que  Dieu  peut  faire  qu'un  même  corps  foit  en  divers 
lieux  ,&  que  les  jjarties  d'un  corps  fe  pénètrent.  Carquoiqu'en 
expliquant  philofophiquement  ce  myftere  la  raifon  ne  voye 
pas  comment  on  en  peut  feparer  ces  luites,lafoy  néanmoins  ne 
les  regarde  pas  neceflairement.  Elle  s'attache  uniquementà  la 
revelnc(on  divine.  Elle  croit  fans  hcfiter  que  le  corps  de  J.  C. 
eft  réellement  prerent_,&  que  le  pain  &  le  vin  ne  hibfiftent  plus , 
parce  qn'ils  font  devenus  ce  corps  &  ce  fang  5  mais  elle  ne  va 
pas  plus  loin,&:  elle  laifle  à  Dieu  à  exécuter  par  les  voyes  qui 
ne  font  connues  que  de  luy  ce  qu'il  luy  a  plu  de  nous  révéler 
fans  fe  mettre  en  peine  fî  ces  voyes  s'accordent ,  ou  ne  s'ac- 
cordent pas  avec  les  principes  de  noftre  rai/on ,  èc  fans  décider 
fi  c'eft  que  ces  principes  ne  foient  pas  abfolument  vrais ,  ou  Ci 
c'eft  que  Dieu  a  des  moyens  inronnus  aux  hommes  pour  opé- 
rer ces  myfteres  fans  choquer  nos  principes. 

En  un  mot  la  foy  range  les  myftcres  dans  un  ordre  à  part, 
qu'elle  tire  de  la  jurifdiciion  des  raifonnemens  humains  &des 
vues  humaines ,  au  nombre  defquelles  elle  mec  ces  difficultez. 

Comme  les  Pères  en  eftoienr  donc  peu  occupez,  &  qu'ils 
ne  les  regardoient  que  fort  confufément  ,  il  efbfrcsnaturet 
qu'ils  n'y  ayent  eii  aucun  égard  dans  les  raifonnemens  qu'ils 
ont  fait  lur  la  nature  des  corps  5  &  qu'alors  ils  ayent  parlé 
felon  les  feules  lumières  de  la  raifon ,  &i  fclon  le  cours  ordi- 
naire des  chofes  du  monde.  Car  pourquoy  voudroit-on  qu'il? 
n'eufïént  jamais  parlé  des  chofes  naturelles  en  Philofophes  fans 


6f  des  difficulté^  tirées  de  s  fins.  5  5  y 

faire  en  même  temps  leurs  protellations  qu'ils  ne  prétendoienc  Ch.  X. 
pas  que  ce  qu'ils  auroient  dit  tuft  vray  dans  un  autre  ordre  que 
ce!uy  de  la  nature?  C'eftbien  malconnoiftrc  i'erpricdes  hom- 
mes que  de  les  vouloir  airujetcir  à  cette  exactitude  ,  &:  c'efl: 
avoir  tait  bien  peu  dereHexion  fur  la  manière  dont  ils  parlent. 

Car  dans  les  chofes  mêmes  qu'ils  ont  Je  plus  fouvent  dans 
refprit^  ne  leur  eft-il  pas  ordinaire  d'avancer  des  propofitions 
qui  paroiirent  générales  dans  les  termes,  &  qui  reçoivent  néan- 
moins diverles  exceptions  en  d'autres  matières  ?  Il  leur  fuffic 
qu'elles  foient  vrayes  ordinairement ,  &  qu'elles  le  foient  en 
particulier  dans  lesfiijetsaufquelsils  les  appliquent  :  mais  ils  ne 
ïe  croyent  point  obligez  d'examiner  fur  chaque  maxime,  s'il 
n'y  auroit  point  quelque  rencontre  extraordinaire  où  elle  ne 
ieroit  pas  véritable. 

Combien  ont  ils  eu  plus  de  liberté  d'agir  dé  la  forte  à  l'é- 
gard des  propofitions  univerfellement  vrayes  dans  tout  l'ordre 
de  la  nature,  &:  qui  ne  pouvoient  recevoir  d'exceptions  que 
dans  un  autre  ordre  qui  eft  naturellement  excepté  de  tous  les 
difcours  des  hommes,  &:  qu'ils  ne  prétendent  jamais  affujettir 
à  leurs  raifonnemens  Se  à  leurs  maximes. 

AufTi  n'eft-ce  point  à  l'égard  du  feul  myftere  del'Euchari- 
ftie  qu'ils  en  ontainfî  ufé.  C'eft  à  l'égard  de  tous  ceux  qui  font 
au  defTus  de  noftre  raifon.  Combien  trouve-t'on,par  exemple, 
dans  les  Pères  de  propofitions  générales  à  l'égard  des  péchez  , 
qu'ils  auroient  exprimées  d'une  autre  forte  ,  s'ils  avoient  eu 
€n  vilë  le  péché  originel  ? 

Quand  ,  par  exemple ,  faint  Juflin  &  plufieurs  antres  Pères 
ont  établi  cette  maxime  ,  que  le  péché  ne  confïfte  que  tLms  une  ^^°^-  '•*^-' 
eleclion  libre  ,  (j^-  que  fans  cette  èlcciion  l'honnne  ne  fcuuroit  ejlre 
coupable ,  n'auroient  ils  pas  pris  quelque  précaution  pour  cm- 
pcxher  qu'on  ne  puflabuler  de  ce  principe,  fi  le  péché  origi- 
nel  leur  fuft  venu  dans  l'efprit?  Et  de  même  quand  S.  Augu- 
ftin  dit ,  que  le  pechè  eft  tellement  un  mal  volontaire  ,  qu'il   ncef. 
roit  pas  pechè ,  s'il  neftoit  volontaire  j  s'il  avoir  penfé  à  l'avanta- 
ge que  les  Pelagiens  en  prirent  depuis,  auroiril  manqué  Je 
limit  r  cette   propofition   aux  péchez  acluels  &:  propres ,   & 
d'en  excepter  le  péché  originel ,  comme  il  .^'efl  crû  obligé  de 
faire  en  répondant  à  Julien  ?  Hoc  reBè  dicitur,  diril  ^propter  au't.  cont. 
fopritm   cujujque  peccatum  y  non  propter  peccati  oriynulis  cou-  Juiian.  !.  7. 
tayurn.  ^'  '• 


J35        LiV.  VII.  Examen  des  Argwmens  nega,tifs. 

Il  auroit  au  moins  marqué  que  la  volonté  neceffaire  pour  le: 
péché  n'eft  pas  toujours  la  volonté  propre  ;  &  qu'il  fuffit  à  l'é- 
gard du  péché  originel ,  qu'il  ait  efté  commis  par  une  volonté 
libre  ,  quoique  ceux  qui  le  contractent  ne  foient  pas  libres  de. 
ne  le  point  contracter  ,  comme  il  l'explique  en  divers  autres, 
lieux  de  Tes  ouvrages. 

Mais  quoique  S.  Auguftin  ait  remédié  par  ces  explications  a: 
l'abus  que  les  Pelagiens  faifoient  de  cette  maxime,  il  eft  vifL 
ble  néanmoins  qu'il  euft  évité  d'y  donner  lieu  ,  s'il  euft  eit. 
le  péché  originel  en  vue  dans  les  endroits  où  il  l'avance.  Ce. 
font  des  propofitions  générales   qii'on  forme  fur  la  vue  des. 
actions  des  hommes  qui  ne  font  péchez  qu'eftant  volontaires,, 
&  fur  l'équité  qui  y  paroUL  Et  l'on  ne  prend  pas  garde  alors, 
qu'elles  reçoivent  une  fort  grande  exception  j&:  qu'il  y  a  une 
très  grande  différence  de  les  appliquer  aux   enfans  ou  aux 
adultes. 

Combien  forme  t'on  de  même  d'argumens  fur  des  princi- 
pes qui  fe  trouvent  faux  dans  le  myftere  de  la  Trinité  ?La  pld- 
part  desjugemens  que  nous  portons  de  l'unité  ou  delà  diÎHn- 
dion  numérique  des  objets  de  nos  penfees  ne  font-ils  pas  ap- 
puyez fur  ces  maximes  .•  Qu^  funt  eadem  tmi  tertio  ^funt  sadem 
inter  fe.  Qu,euni  tertio  non  funt  eadem.,  non  funt  eadem  inter  fe.  Ce- 
pendant les  Minières  voudroient  ils  prétendre  que  ceux  qui. 
fe  fervent  de  ces  axiomes  fans  diftindion,  ou  qui  les  fuppofenc. 
dans  leurs  raifonneraens^  ne  croyent  pas  le  myftere  delaTji-r- 
nité  ? 

Ne  voit- on  pas  aufli  que  ces  maximes  générales  fur  k  nature- 
dés  corps  n'empêchent  pas  ceux  qui  les  établirent  le  plus  pre- 
cifément ,  de  reconnoiftre  en  d'autres  lieux  que  Dieu  en  peut, 
dï-rpenf-^r  5  &:  que  ce  qui  paroift:  impolïïble  félon  ces  maximes, 
ne  l'eft;  point  à  la  Toute- puiilance  ? 

Saint  Auguftinj  parexemple,eft  un  de  ceiixqui  foûtiennent: 
le  plus  formellement  qu'il  n'efl  pas  poflîble  qu'un  corps  pénétré, 
un  autre  corps.  Et  cependant  il  reconnoift  en  un  grand  nom- 
bre de  lieux  que  par  la  puiffance  infinie  de  Dieu,  des  corps  ont 
paffé  au  travers  d'autres  corps,  fans  avoir  jamais  recours  à  ces 
iobti-litez  Philofophiques  par  lefquelles  le^  Miniftres  tâchent 
d'expliquer  ces  fortes  de  miracles.  C'efl:  pourquoy  ayant  rap- 
porté dans  le  livre  de  la  Cité  de  Dieu  un  miracle  qui  ie  fit  dans, 
l'Oratoire  de  faint  Eftienne,  ou  l'on  vit  un  anneau  fortir  d'un. 

cordon 


(^  des  difïciihez.  tirées  des  fe fis.  ^37 

cordon  de  cheveux  dans  lequel  ileftoic  palîë  ,  fans  aucune  rup-  C  h.  X. 
ture  de  ce  cordon ,  il  Te  contente  d'ajouter  que  ce  miracle  pa- 
roiftra  incroyable  à  ceux  qui  ne  croyenc  pas  que  J.  C.  foitné 
fansfaire  tort  à  la  virginité  de. fa  mère,  6c  qu'il  foit  entré  dans 
le  lieuoùelloient  res'dilciples  ,  lansque  les  portes  en  fuITenc 
ouvertes.  Mais  il  ne  s'amufe  pas  à  chercher  des  voyes  Philofo, 
phiques  pour  expliquer  ces  miracles  ,  &  ilparoift  qu'il  n'en 
avoit  point  d'autre  idée  que  celle  que  les  paroles  impriment 
naturellement,  qui  eft  que  le  corps  de  J.  C.  paila  au  travers  de 
ces  portes  qui  eftuient  fermées  ^  &  que  ctz  anneau  eftoit  forti 
de  ce  cordon  de  cheveux  fans  le  rompre  5  ce  qui  enferme  l'idée 
naturelle  de  la  pénétration. 

Il  eftfî  vray  que  l'on  peut  avancer  ces  fortes  depropofitions 
générales ,  fans  croire  qu'elles  mettent  des  bornes  à  la  Toute- 
puiiTance  de  Dieu  ,  qu'Aubertin  en  cite  luy-même  de  deux 
Auteurs  qu'il  appelle  fes  adverfaires.  Car  l'un  qui eflGuitmonc 
dit  auiïî  fortement  qu'il  fepeut  qu'on  ne  fcauroit  concevoir  qii  un 
corps  fenêtre  un  autre  corps.  Ouomodo  enim  in  folido  corporc  panis  , 
alterum  corpus  latere po.ffit ,  videri  non  potuit.  Cependant  on  ne 
fçanroit  raifonnablement  douter  que  cet  Evêque  n'ait  crû  la 
pénétration  poifibiepar  lapuilfance  deDieu,puifqu'il  veut  que 
toutes  ces  propofitions ,  par  lefquelles  on  dit  que  quelque  cho- 
fe  ne  fe  peut  faire ,  enferment  toujours  cette  e>'ception,y^  J)/V« 
ne  le  veut  ^  &  que  de  ne  l'y  pas  ajouter,  ce  foit  mettre  en  doute 
la  Toute-puiflance  de  Dieu  :  Si  prêter  exceptionem  ajjcrunt  id 
naturam  non  pojfe  pati ,  etiatn  fî  Deus  velit  ;^  ?ion  ery)  credunt 
quia  omnia  quacumque  voluit  Dominus  fecit. 

L'autre  qui  eft  un  Auteur  qu'Aubertin  appelle  Francifcus 
Georgius ,  nie  formellement  qu'un  corps  puifle  en  mcmeteinps 
eftreen  plufieurs  lieux.  Cependant  il  c'eft  un  Catholique,  com- 
me Aubertin  le  fuppofe  ,  il  eft  bien  certain  qu'en  parlant  ainfi  , 
il  n'a  eu  égard  qu'aux  vues  communes  de  laraifon  ,  qui  expri- 
me les  chofes  félon  qu'elle  les  conçoit,  fans  prétendre  par  là 
borner  la  puiifance  de  Dieu  ,  ni  foùtenir  qu'il  ne  puifie  faire  ce 
qui  nous  paroift  impoffible. 

Auffi  voit-on  que  les  Auteurs  qui  ont  marqué  la  vérité  de  la 
prefence  réelle  &  de  la  tranlTubftantiation  de  la  maniere.la  plus 
claire  £<:  la  plus  indubitable,  &  qui  font  même  abandonnez  fur 
ces  dogmes  par  les  Miniftres  un  peu  finceres,  ne  laillent  pas   ~ 

Y  Y  y 


J38      L IV.  VII.  Examen  des  Argumens  négatifs, 
d'avancer  ces  principes  de  Philoibphie  donc  lesMmiftresabu- 
fent. 

On  ne  pourroit  raifonnablement  douter  du  fentiment  de 
S.Jean  de  Damas  fur  la  prefence  réelle ,  quand  il  ne  l'auroit 
déclaré  que  par  ce  paffage  qu'on  en  a  déjà  cité-  Zes  Anges  , 
dic-il,  ne  font  f  as  rendus  -participans  de  la  nature  divine  ^  mais 
feulement  de  fon  opération  ^  de  fes  grâces  3  mais  les  hommes  en  font 
rendus  participans ,  lorfqu^ils  rei^oivent  le  faint  corps  de  J.  C.  & 
qu'ils  boivent  fon  précieux  fang.  Car  ce  corps  efi  uni  hypoflatique- 
ment  a  la  Divinité  >  (^  il  y  a  deux  natures  dans  le  corps  de  J.  C. 
que  nous  recevons  ,  qui  font  unies  hypoflatiqucment  (^  infeparable- 
ment^  ér  nous  fommcs  rendus  participans  de  ces  deux  natures  ,  dît 
corps  corporcllement ,  (^  de  la  divinité  fpiritue tiennent  j  ou  pliitofl 
de  l'une  tc^-  de  l'autre  fc Ion  l'ame  S^  félon  le  corps  :  non  pas  que  nous 
y  foyons  unis  hypofiatiquement ,  car  nous  fubftftons  en  nous-mêmes 
avant  que  d'y  eftre  unis  ^  mais  par  le  mélange  qui  fe  fait  du  corps  de 
J.  C.  aux  nojîres. 

Auffi  M.  Claude  n'a  pas  mêmeofc  eirayerd'obfcurcir  la  clar- 
té de  ces  paroles,  quoiqu'on  fçache  ce  qu'il  fçait  faire  ,  quand 
il  ne  s'agit  que  d'éluder  les  palîages.  Cependant  Aubertin  ne 
laifTe  pas  de  rapporter  plufieurs  lieux  de  cet  Auteur,  où  il  éta- 
blit de  ces  fortes  de  principes  philofophiques,  commequ'il  ef 
de  la  nature  des  corps  ^non feulement d' eftre  cnfcnncz^dcins  un  lieu  ^ 
mais  aujji  d'avoir  une  furface  bornée  ,  ce  qu'il  appelle  circonfcri- 
ption. 

On  en  peut  dire  autant  de  Nicephore  Patriarche  de  Con- 
ftantinople.  Car  ayant  vécu  après  le  /econd  Concile  de  Nicée, 
oùlefens  de  figure,  que  les  Calviniftes  donnent  à  ces  paroles. 
Ceci  efi  mon  corps  ^ïwx.  rejette  3  &  l'ayant  luy-même  condamné, 
en  le  prenant  pour  une  figure  exclufive  de  la  realité ,  il  ne  peut 
eftre  foupçonné  avec  la  moindre  apparence  de  n'avoir  pas  crû 
la  prefence  réelle.  Et  quand  il  le  feroic,  il  fuffit,pour  diiîîper 
ce  foupçon,  d'en  alléguer  icy  unpaflage  qu'on  en  a  cité  ailleurs. 
Car  il  y  enfeigne  formellement  que  laraifon  par  laquelle  on  ne 
peut  pas  dire  que  l'Euchariftie  foit  l'image  du  corps  de  J.  C. 
c'efl:  que  fi  cela  eftoit ,  il  y  auroit  diftindlion  de  nombre  entre 
l'Euchariftie  &  le  corps  de  J.  C.  ce  qui  n'eft  pas,  c'eft-à  dire 
qu'il  veut  que  l'Euchariftie  &  le  corps  naturel  de  J.  C.  foient  le 
même  corps  en  nombre. 

Comment,  dit-il,  cet  îconoclafte  peut-il  accorder  que  ce  foit 


Çîf  des  difficulté 't;^  tirées  des/ens.  539 

tout  enfcmble  ^  l'image  de  J.  C.  &  le  corps  de  J,  C?  Carce"CH.X. 
qui  efl- image  d'une  chofe  ,  n'en  fçauroit  eftre  le  corps  ^  ôc  au  "  DeChe- 
contraire  ce  qui  efl  le  corps  ne  fçauroic  eftre  l'image.  Car  tou-  "  ^^  '  ''  ^* 
te  image  eft  autre  que  la  chofe  dont  elle  eft  image.  Ileft  vray" 
que  l'Ecriture  appelle  le  Fils  l'image  du  Père.  Mais  s'il  n'en  eft  '' 
pas  diftingué  par  fa  nature ,  il  l'eft  au  moins  par  fon  hypoftafe  " 
&par  fa  perfonne.  Si  donc  le  faint  corps  que  nous  recevons  " 
dans  la  communion  eft  l'image  de  J.  C.  on  dit  par  là  qu'il  eft  " 
diftingué  du  corps  de  J.  C.  Que  fi  l'on  dit  que  cen'eftpas  une" 
autre  chofè  que  J.  C.  mais  que  c'eft  une  partie  de  fon  corps ,  "^ 
nous  diviferons  donc  ce  corps  en  deux  ^ôc  il  faudra  dire  que" 
J.  C.  a  une  infinité  de  corps.  *' 

Aubertin  néanmoins  rapporte  aufiî  despafi!ages  de  cet  Au- 
teur, qui  contiennent  de  ces  fortes  de  principes,  comme  par 
exemple»  que  les  Anges  ne  fcauroient  efirc ,ni  opérer  en  plujieurs 
lieux ,  e>  que  cela  n'appartient  qu'à  Dieu  ftul.  Que  l'homme  efi  toit^ 
jours  da?is  le  temps  ,  toujours  en  un  feu l  lieu  ^  f^  dans  un  efpacc 
ho rné. 

On  voit  donc  évidemment  que  quand  ces  Auteurs  décri- 
vent les  proprietez  de  la  nature  corporelle  ,  ils  ne  prétendent 
marquer  que  celles  qui  luy  conviennent  par  fon  eftre  propre, 
&non  celles  où  elle  peut  eftre  élevée  parla  Toute-puifi!ance  de 
Dieu,6c  quien  effet  font  plûtoft  des  fuites  de  la  nature  de  Dieu, 
que  de  celle  des  corps.  Ils  expriment  ce  que  nous  connoiftbns  de 
la  matière ,  ôc  ce  qu'elle  pofl"ede  par  les  principes  de  (on  eftre. 
Mais  ils  n'ont  pas  defttin  par  là  de  mettre  des  bornes  à  la  pui(- 
fance  de  Dieu ,  ni  de  définir  precifément  ce  qu'elle  peut  opé- 
rer par  fes  créatures.  Et  enfin  on  voit  par  une  expérience  fenfi- 
ble  que  ces  principes  de  Phyfique  peuvent  fubfifterdans  un 
même  efprit  avec  la  créance  de  la  prefence  réelle  &  de  la  tranl- 
fubftantiation,foit  que  ces  Auteurs  les  ayentexprefi^émentref- 
traints  à  l'ordre  de  la  nature  ,  foit  qu'ils  n'ayent  pas  fait  une  re- 
flexion  expreffe  fur  la  contrariété  de  ces  principes  avec  ce  qu'ils 
croyoient  de  l'Euchariftie ,  foit  que  pour  allier  enfemble  &:  ces 
principes  bc  cette  créance ,  ils  fe  foient  formez  une  manière  de 
nuage  ,par  laquelle  on  allie  fouvent  deschofes  qui  paroiffent 
contraires ,  en  fuppofant  que  Dieu  f(^ait  bien  faire  fubfifter  la 
vérité  de  (qs  myfteres  avec  ces  principes  naturels  ,  s'ils  font  ve- 
litables,  quoique  nous  n'envoyions  pas  l'accord  &  l'union. 

Y  Y  y  ij 


540      Liv.  VII.  Ex  Mien  des  Argumens  négatifs^ 


CHAPITRE     XI. 

Que  la  Dochine  de  l'Eglife  fur  l'Eucharifiie  n'cfi  potJit  contraire 
au  ièmoiqriay:  des  Jens  ,  ni  à  ce  que  les  Pères  en  ont  dit. 

N  pourroic  rapporter  aux  difficulcez  naturelles  &  aux 
principes  de  Phylîque  que  ces  Pères  ont  établis  fans  fon- 
ger  s'ils  s'accordoient  avec  leurdoclrine  fur  l'Euchariftie,  tous 
ies  argumens  tirez  ou  du  rapurt  des  fcns  en  gênerai  ou  des  paf- 
fages  des  Pères  qui  les  autoiifenti  car  ce  n'ell:  proprement  que 
la  même  chofe.  Mais  parce  que  M.  Claudcles  étale  avec  tant 
de  pompe  &  d'étendue  dans  fon  livre  contre  le  PereNouet , 
qu'il  paroift  qu'il  n'y  en  a  point  où  il  ait  eu  plus  de  complai- 
fanccj  je  veux  bien  tâcher  de  luy  faire  voir  en  particulier 
qu'il  n'en  a  pas  defujet. 

La  principale  fource  de  Tes  égaremens  fur  ce  point  ,  c'efl: 
que   par  une  Philofophie  Rethoricienne  ,  il  fait  des  fens  de 
certains  eftres  intelligens  qui  jugent,  qui  connoifîènt ,  qui 
font  capables  de  vérité  2i  de  faulfeté,  d'/^w^^^^^^f  &dem»z^, 
M.  Claude  qui  ont  leurs  droits  &  leur  jurifdiclion.  ils  portent  ^  félon  luy  , 
contre  le  Père  ^^^  jugem'ens  formels.  Ils  parlent  de  la  fub/lance  é^  des  accidens.  ils 
1 1.  M.  Z4. 1  y.*  077t  dcs  chargcs  d^  des  emplois  ér  ««^  vocation .  Dieu  ^  dit  il  ^  leur 
5S.  Jt6.&iC6,    afoîimts  toutes  les  œuvres  7natericlles  :  il  les  a  fait  comme  les  por- 
tes de  l'ame  ,  Ces  guettes  (^^  fes  mefagcrs  >  C/-  //  a  imprimé  un  cara- 
itère  fi  fort  d'évidence  S^  de  certitude  dans  leurs  rapports ,  quil  ne 
nom  cft pas  po,irible  de  noti-s  en  défendre. 

D'où  il  conclut  que  les  fens  témoignant  que  J.  C.n'efl:  pas 
dans  l'Euchariftie ,  H.  ne  faifant  rien  en  cela  qui  ne  foit  entiè- 
rement conforme  a  leur  vocation ,  il  les  en  faut  croire. 
Je  ne  m'arrefteray  pas  icy  à  cenfurer  la  Rethorique  de  M". 
Claude  :  il  parlera  comme  il  luy  plaira  ;,  &  je  luy  pardonnerojs 
même  aifément  fafauife  philofophie,  s'il  n'en  tiroit  point  de  fî 
fauiïès  conclufions  contre  la  Foy.  C'cft  la  feule  chofe  qui  m'o. 
blige  à  la  réfuter  j  &:  à  m'engager  plusavant  que  moninclina- 
tionae  m'y  porteroit  dans  cesdifcuffionsdePliyfique. 

Pour  éclaircir  donc  cette  matière,  il  faut  par  necelfité  expli- 
(]ucr  de  quelle  forte  fefont  les  opérations  des  fens,&:  ce  qu'il  y  a 
de  certain  ou  d'incertain  dans  les  jugemens  que  l'on  en  porte. 


^)  des  diffimltex,  tirées  des  fens.  541 

Les  actions  des  fens  qu'on  appelle  fenfanons  ne  compren-  Ch.  XI. 
nencqiie  des  mouvemens  corporels  joints  à  de  certaines  per- 
ceptions confufes. 

Les  mouvemens  corporels  appartiennent  aux  organes  ^ôc  fe 
font  dans  les  organes ,  dont  le  cerveau  eftle  principal.  Lesper-  ■ 
ceptions  appartiennent  à  Tame  ,  &:  font  ainfi  des  impreiîions 
qui  fe  font  dans  lame,  6c  des  idées  qu'elle  conçoit. 

Maisquoique  ces  perceptions  ou  impreflions  fe  fafTent  dans 
l'arae  ,  elles  n'enferment  néanmoins  par  elles- mêmes  aucun  ju- 
gement. Ce  font  de  fîmples  idées  &  de  fimples  images  qu'elle 
le  forme  des  chofes  extérieures  qu'elle  expofe  à  laraifon  pour 
en  juger. 

Enfin  il  faut  remarquer  que  l'efprit  joint  fouvent  à  ces  idées  , 
qui  répondent  proprement  aux  mouvemens  corporels, d'autres 
idées,  ôc  qu'il  s'en  fait  une  idée  qui  va  plus  loin  que  celle  des 
fens.^ 

On  voit  de  loin  un  corps  qui  fe  remue.  On  s'en  forme  l'image 
d'un  homme.  On  voit  un  homme  qui  approche.  On  en  conçoit 
l'idée  particulière  d'un  homme  qu'on  connoift.  Cependant 
l'idée  d'un  homme  n'efloit  pas  enfermée  dans  celle  de  ce  corps 
mobile,  ni  celle  de  cet  ami,  dans  celle  d'un  homme.  C'eft  l'ef- 
prit qui  les  ajoute  à  l'idée  qui  répond  precifement  aux  mouve- 
mens excitez  dans  les  organes  des  fens. 

Mais  tandis  que  l'ame  demeure  dans  les  fimples  idées ,  foie 
qu'elle  ne  fe  forme  que  celles  qui  répondent  aux  mouvemens 
excitez  dans  les  fens,  fo-it  qu'elle  y  en 'ajoute  d'autres ,  toutes 
ces  idées  ne  font  point  capables  de  faulfeté.  Etc'eft  pourquoy 
il  n'y  en  avoit  point  dans  les  vifions  desProphetes  ,  quoique 
les  objets  qui  leur  eftoient  montrez,  leur  fuflent  fouvent  re- 
prefentez  on  comme  des  corps  effectifs  ,  ou  comme  des  corps 
vivans  &  animez  ,  6c  qu'il  n'y  euft  rien  de  tout  cela. 

Que  M.  Claude  ne  s'imagine  pas  que  cette  philofophie  foit 
ncRivelle.  Je  ne  luy  dis  rien  icy  qu'il  ne  puifle  lire  dans  S.  Au- 
guftin  en  termes  formels. 

C'eft  luy  qui  apprend  à  diftinguer  le  mouvement  corporel 
qui  fe  fait  dans  les  organes ,  de  la  perception  qui  fe  fait  dans 
l'ame.  In  animn  fiunt  vifiones-  corporulium  rerum  quiC  fentiuntnr  De  Genef,  ad 
fer  corpus  ;  ce  qu'il  explique  plus  au  long  dans  le  fixiéme  Livre  Htcj.  ii.c.i4- 
de  laMufique  ,  où  il  enfeigne  que  les  corps  n'agilîent  quelur 
les  corps  :  Corforalia.  qu.ccunq^ue  huic  corj^ori  in<irunnt  aut  ob- 

Y  Y  y  iij 


542-  Liv.  VII.  Examen  des  aArgumens  négatifs, 
jiciuntur  ,non in  anima  ^fedtn  ipfo  corpore  aliquid  faciunt ,  &  que 
Jes  actions  des  fens  ne  iont  que  des  attendons  de  l'ame  aux 
mouvemens  qui  fe  paifent  dans  le  corps.  Et  c'eft  ce  qui  a  mê- 
me efté  reconnu  par  les  Philofophes  Payens ,  dont  Ciceron 
avoit  pris  ce  qu'il  dit  dans  la  première  des  Queftions  Tufcula- 
nes.  Nos  enim  ne  nunc  quidcmoculis  cemimus  ea  qu.-cvide. 
7nus.  Neque  enim  cfi  uUus  fenfus  in  corpore  ^fed  ut  non  folùmPhy. 
jîci  doccnt ,  verum  etiam  medici  qui  ifta  aperta  ^  ptttefalla  vide- 
runt  ^vi.v  quidcm  [tint  ad  oculos  a  fede  animi  perforata.  Itaque 
fape  aut  cogitatione  ,  aut  aliqua  vi  morbi  impediti  aperiis  àtque 
intcyris  oculis  ^  aurihus  nec  videmus  ,  ncc  audimus ,  ut  facile  intel- 
ligi  po,ffït  anirmim  ^  videre  Q-  audire ,  non  cas  partes  qua  quafi 
feneftne  funt  animi.. 

S.  Auguftin  reconnoift:  auiïî  que  l'on  ajoute  fouvent  beau- 
coup à  la  fimpleidée  qui  eft  formée  par  les  objets.  C'eft  pour- 
quoy  j  encore  que  tous  ceux  qui  voyent  de  loin  un  corps  qui 
Te  remue  ,  &:  qui  a  la  figure  d'un  animal ,  fe  forment  l'idée  d'un 
animal  vivant ,  Se  qu'on  ne  demeure  jamais  dans  la  feule  idée 
de  la  figure  &:  du  mouvement  de  ce  corps ,  il  prétend  néan- 
moins que  cette  idée  n'eft  point  prife  des  fens ,  parce  ,  dit-  il , 
que  même  dans  les  animaux  ,  on  ne  voit  point  l'ame  par  les  fens 
du  corps.  Et  c'eft  de  là  qu'il  conclut  qu'on  ne  peut  pas  afteu- 
rer  que  la  colombe  qui  parut  à  S.  Jean,  lorfqu'il  baptifa  J.  C. 
fuftune  colombe  vivante ,  quoiqu'il  foit  difficile  que  S.  Jean 
l'ait  conçue  d'une  autre  manière. 

Mais  de  quelque  forte  que  foit  cette  idée  ,  pourvu  qu'elle 
demeure  dans  les  termes  de  fimpleidée  ,  on  ne  peut  pas  dire, 
félon  les  principes  de  faint  Auguftin  ,  qu'elle  foit  faufTe^  parce 
que  la  faulTeté  ne  confifte  que  dans  le  jugement  qu'on  en 
porte. 
DeCivit.  Dei  Car  c'eft  fur  ce  principe  qu'il  décide  que  ,  quoique  lapercep- 
i.  16.  c.  17.  tion  des  chofes  fcnfibles  appartienne  aux  fens  ,  le  jugement  ne 
leur  en  appartient  pas.  Si  les  yeux  ,  dit- il  ailleurs  ,  &  tous  les 
autres  fens  ne  rapportent  rien  à  l'cfprit  que  félon  l'impreffîon  qu'ils 
ont  rci^ué  ^  je  ne  vois  pas  que  nous  ayons  droit  de  leur  en  deman- 
der davantage.  Si  quelqu'un  croit  qu'une  rame  fe  rompt  dans  l'eau., 
ce  n'eft  pas  que  fe  s  yeux  luy  fajfent  un  faux  rapport ,  mais  c'ejî  luy 
qui  fait  un  faux  jugement  3  car  l'œil  n'a  pas  du  voir  autrement  félon 
fa  nature.  L'œil  voit  comme  il  doit  voir  ,  mais  l'efprit  rie  juge  pas 
comme  il  doit  juger. 


De  veraRc 
lig.  C.55. 


^  des  diffcultei.  tirées  desjens.    ■  Ç43 

11  faut  donc  d'abord  que  M.  Claude  retranche  cous  ces  Ch.  XF. 
grands  difcours  qu'il  fait  fur  le  témoignage  des  fens,  &:  toutes 
cesexprefTions  qu'il  répète  à  chaque  page  que  les  fens  feroienc 
trompez  dans  lEuchariftie ,  qu'ils  rendent  témoignage  que 
J.  C.  n'y  efl;  pas ,  &  que  ce  qu'ils  voyent  eft  du  pain  Se  du  vir. 
Car  il  iuffit  de  luy  dire  en  un  mot  que  les  fens  ne  jugent  dt 
rienj  &  que  ne  jugeant  de  rien ,  ils  ne  font  capables  ni  de  vé- 
rité ni  de  faufleté. 

Je  ne  prétends  pas  néanmoins  que  la  difficulté  foit  entière- 
ment refoluë  par  là.  Car  quoique  les  fens  ne  forment ,  com- 
me j'ay  dit,  aucun  jugement,  &:  que  les  fenfations  ne  foientque 
de  iimples  perceptions  attachées  à  des  mouvemens  corporels , 
il  eft  pourtant  vray  que  comme  les  mouvemens  corporels  qui 
fe  font  dans  les  organes  font  joints  par  l'ordre  de  Dieu  avec 
certaines  perceptions  qui  font  des  imprelîions  de  l'ame  ;  de 
même  l'ame  jomt  d'ordinaireà  ces  perceptions  des  jugemens , 
par  lefquelselle  conçoit  que  l'objet  extérieur  qui  lescaufè,eft 
tel  que  l'image  qui  le  reprefente.  Ainfi  lorfque  les  yeux  font 
frappez  par  un  corps  rond  ,  figuré  &  coloré  ,  l'organe  eftant 
remué,  &  l'ame  fe  formant  l'idée  de  ce  corps  par  la  perception 
des  fens,  elle  forme  enfuite  ce  jugement  qu'il  y  a  hors  d'elle  un 
corps  rond  qui  caufe  l'impreffion  qu'elle  a  reçiàë. 

Or  ces  jugemens  font  non  feulement  capables  de  vérité  6c 
de  fauHeté  j  mais  il  faut  de  plus  qu'ils  foient  capables  de  certi- 
tude. Et  il  eft  vrav  que  fans  cela  ni  la  Religion  ni  la  vie  hu- 
maine ne  peuvent  iubfifter,  &  que  c'eftavec  raifon  que  les  Pè- 
res ont  reproché  aux  Académiciens  qu'ils  ruinoient  l'une  &  Tert.deani- 
l'autre  ,  en  voulant  que  les  jugemens  fondez  fur  les  fens  fufîent  ""^^i*^-'^* 
incertains. 

Mais  M.  Claude  reconnoift  luy-même  qu'afin  que  ces  juge- 
mens foient  certains ,  ils  doivent  eftre  accompagnez  de  diver- 
fes  conditions.  Il  en  avoue  quelques-unes,  6c  il  ne  faut  pour 
démêler  toutes  ces  chicaneries  qu'établir  la  neceilité  de  quel- 
ques autres  qu'il  n'avoue  pas. 

Il  eft  vray,  comme  j'ay  dit  ,  que  par  un  ordre  établi  -de 
Dieu  dans  la  nature  de  l'homme  ,  6c  qui  n'a  d'autre  fonde- 
ment que  la  volonté  du  Créateur,  il  y  a  certaines  perceptions 
attachées  à  certains  mouvemens  corporels  j  enforte  que  toutes 
les  fois  que  le  corps  eft  remué  d'une  certaine  manière,  l'ame 
""onçoit  certaines  idées,  ^  que  l'ame  eft  portée  à  fuivre  ces 


J44       Liv  .  VII.  Examen  des  aArgumens  négatifs^ 
idées  dansfes  jugemens ,  pourvu  qu'il  n'y  ait  rien  qui  l'en  em- 
pêche. 

Mais  afin  que  l'on  fe  puiiîe  aflurer  dans  ces  jugemens ,  ou 
qu'on  aie  droit  de  les  former  ^  les  conditions  marquées  parles 
Philofophes  &;  par  M.  Claude,  &  qui  regardent  les  organes, 
le  milieu  6c  la  diflance  de  l'objet  ne  fuffifent  pas ,  êc  il  faut  de 
plus; 

1.  Que  nous  fçachions  que  les  perceptions  fur  lefquelles  nous 
les  formons ,  foient  des  idées  qui  naiiïent  des  fens ,  &  non  des 
idées  d'imagination  qui  demeurent  dans  l'efprit ,  lors  même 
que  les  objets  font  abfens. 

2.  Que  le  mouvement  corporel  ait  efté  produit  par  un  objet 
exteneur  à  la  manière  ordinaire  ,  ôC  non  par  quelque  efprit 


étranger. 


3.  Que  nous  demeurions  precifément  dans  l'idée  qui  naift 
des  fens ,  &:  que  nous  n'y  ajoutions  rien  davantage  ,  fi  nous  n'a- 
vons certiinde  que  ce  que  nous  ajoutons  y  eft  joint. 

La  première  condition  eft  neceflaire  ,  parce  qu'il  eft  certain 
quel'ame  eftant  capable  de  fe  former  de  deux  fortes  d'idées , 
les  unes  qui  font  jointes  à  des  mouvemens corporels,  par lef- 
quelsl'ame  conçoit  les  cliofes  prefeates  ^  &:  les  autres  qui  ne 
fuppofent  point  ces  mouvemens  ,  par  lefquels  l'ame  conçoit 
aufîi  bien  les  chofesabfentes  &  qui  n'ont  jamais  efté ,  que  cel- 
les qui  font  prefentes  &  efK^dives:  ces  deux  fortes  d'idées  fe 
confondent  quelquefois  tellement ,  bi.  les  dernières  deviennent 
fi  vives ,  qu'il  n'eft  pas  poffible  de  les  difcerner  des  perceptions 
des  fens. 

M.  Claude  le  reconnoift  à  l'égard  desPhrenetiques,  &  faint 
Auguftin  à  l'égard  àes  Prophètes,  &  de  ceux  que  Dieu  a  favo- 
rifez  de  vifions.  Il  y  a  ,  dit  ce  Père  ,  des  vifions  qui  paroiffent 
à  l'efprit  comme  Jî  elles  faroijjoient  aux  fens  du  corps.  Et  cela  hr- 
Epilt.  loi.  y^^g  ^  ^^^  feulement  aux  perfonnes  endormies  bu  phrcnetiques  , 
mais  quelquefois  auffî  à  ceux  qui  veillent  (jr  qui  ont  l'efprit  fain. 
il  y  en  a  qui  ne  font  point  caufees  par  l'illufton  des  démons  qui 
notes  trompent .,  mais  par  une  révélation  fpirituelle  qui  fe  fait  par 
des  formes  incorporelles  fî femblables  a  des  corps  ,  qtion  ne  les  en 
peut  difinguer ,  f  Dieu  ne  nou^  éclaire  par  une  lumière  plu-s  vive , 
(^  que  l'on  'n'en  juy:  far  l'intelligence  j  ce  qui  arrive  rarement 
pendant  les  vifions  mêmes  ,  mais  ordinairement  quand  elles  font 
Jaffées. 

Il 


■t£  des  diffîculuT^tïrées  des  fms.  ^4^ 

11  die  !a  même  chofe  dans  le  livre  douzième  fur  la  Genele.  Ch.  XI. 
Et  ce  que  l'Ecriture  die  de  S.  Pierre  ,  que  lors  qu'il  Fut  délivré 
par  l'Ange,  il  croyoit  que  ce  fufbune  vifion,  en  cft  une  preu- 
ve manif-efte  ,  puifqu'il  efl:  clair  qu'il  ne  difting.ioïc  pas  la 
realité  de  fa  délivrance,  des  viiîons  qui  nefe  paircntquc  dans 
l'efprir. 

La  féconde  condition  n'eft  pas  moins  neceflaire.  Car  iî  cfl: 
certain  que  fi  le  mouvement  extérieur  qui  eft  ordinairement 
imprimé  par  certains  corps,efl:oit  produit  dans  nos  crgancs  par 
quelqu'autre  caufe,  comme  par  une  maladie  ,  par  un  démon  , 
par  un  Ange  ou  delà  part  de  Dieu  même,  nous  aurions  les  mê- 
mes perceptions,  que  Çx  cesohjetseftoient  prefcns,c'efl:-à  dire, 
que  (î  un  démon  produiloit  dans  nos  yeux  le  même  mouve- 
ment qu'y  produit  une  montagne,  nous  verrions  une  monta- 
gne fans  qu'il  y  en  euft  devant  nos  yeux. 

Ainfi  parce  que  les  nerfs  du  bras  de  ceux  qui  ont  une  main 
coupéCj  peuvent  eftrc  remuez  de  même  qu'ils  l'efloient  lors 
qu'ayant  encore  leur  main,  les  imprefiions  qu'elle  recevoit  àts 
corps  fe  cômuniquoienr  par  ces  nerfs  jufqu'au  cerveau, il  arrive 
tres-fouvent  que  ces  perfonnes  fentent  les  mêmes  douleurs, que 
iorfqu'ilsavoient  la  main  qui  leur  manque,  i^  qu'ils  croycnt  les 
fentir  dans  cette  main  j-Que  il  l'on  avoit  coupe  la  main  à  quel- 
qu'un dans  une  aliénation  d'efprit,  &  qu'on  luy  euft -depuis  tel- 
lement envelopc  le  bras,  qu'il  ne  fe  fuft'poiivt  apperçu  de  ce 
retranchement  ny  par  la  veuc  ny  par  le  toucher, ce  (croit  alors 
qu'il  ne  douteroit  point  du  tour^  qu'il  ne  fentît  de  la  douleur 
dans  la  main. 

Enfin  la  troifiéme  eondition,qui  eft  de  n'ajouter  rien  à  l'idée 
formée  par  les  fens,  ou  de  n'y  ajouter  que  ce  qui  eft  neceilai- 
rement  lié  avec  la  chofe  que  nous  concevons,  eft:  encore  viiî- 
blement  neccftaire ,  puifque  fi  nous  y  ajoutions  des  chofes  qui 
n'en  foient  pas  infeparablesou  naturellement  ou  fjrnaturclle- 
ment,  nous  pourrions  nous  tromper  en  les  y  ajoutant. 

S'il  fe  pouvoit  que  nous  ne  fuffions  jamais  ailurez  que  ces 
conditions  fercnconcrentdans  les  jugemens  que  nousformoos 
fur'lcs  idées  des  fens ,  ils  feroient  tous  téméraires  &:  incertains. 
Mais  comme  la  vie  humaine  •&;  même  la  Religion  ne  fçau-' 
roient  fubfifter  fans  certitude,  &;  que  nous  fommes  aftîrez  par 
lafoy  que  Dieu  veut  que  l'un  6c  l'autre  fubfiftent,  nous  en  de- 
vons conclure  qu"'il  a  donné  des  moyens  aux  hommes  pour 

ZZz 


J46        Liv-  VH.  Examen  des  Argumens  négatifs  ^ 
s'alTurer  que  ces  conditions  eflentielles  s'y  rencontrent  efFedî- 
vement. 

Ainfi  quoyqne  les  vifions  d'imagination  ne  fe  diftinguent 
pas  toujours  des  perceptions  réelles  qui  naiiïent  des  objets 
extérieurs,  &  que  nous  ne  puilfions  peut-eftre  marquer  aucun 
fîgne  certain  pour  les  difcerner,  nous  pouvons  cependant  juger 
avec  certitude,  que  la  providence  de  Dieu  ne  fçauroit  permet- 
tre que  faifant  long  temps  reflexion  fur  des  idées ,  &  n'ayanc 
aucun  fujet  de  les  prendre  pour  desvillons ,  cène  foient  néan- 
moins que  des  phantômes  qui  n'ayent  point  de  realité  hors  de 
noftre  imagination. 

Il  en  eft  de  même  de  la  féconde  condition.  Il  n'efl:  pas  na- 
turellement impoffible  ny  aux  démons  ny  aux  Anges  de  pro- 
duire dans  nos  organes  les  mêmes  mouvemens  t]ue  les  objet» 
extérieurs  y  produifent.  Et  en  ce  cas  ces  mouvemens  feroient 
fuivis  des  mêmes  rcnrations,&;  nous fentiriôsdes  chofes  comme 
prefentes  qui  ne  le  feroient  nullement.  Cependant  la  même 
lumière  qui  nous  découvre  que  la  providence  de  Dieu  nous  ap- 
pelle au  (alut  par  la  véritable  Religion,  6c  qu'elle  nous  com- 
mande de  conlerver  la  focieté  civile  ,  nous  afl^re  auffi  que 
Dieu  ne  fçauroit  permettre  ,  au  moins  ordinairement,  ny  aux 
Anges  ny  aux  démons,  de  difpofer  ainfi  de  nos  fens.  Car  nous 
obligeant  de  juger  dçs  chofes  fenfibles,  &  fa  vérité  ne  permet- 
tant pas  qu'il  nous  engage  necedairement  dans  l'erreur,  il  faut 
par  confequent  qu'il  nous  ait  donné  le  moyen  d'en  connoiftre 
la  vérité.  Ce  qui  ne  pourroit  eftre  s'il  elloit  ordinaire  que  les 
Anges  ou  les  démons  imprimaiTent  dans  nos  corps  des  mou- 
vemens qui  nous  fiflent  voir  comme  prefens,  des  objets  qui  ne 
le  feroient  pas. 

Enfin  comme  il  y  a  de  la  témérité  d'ajouter  aux  idées  que 
nous  recevons  par  les  fens  les  idées  que  Dieu  en  peut  feparer^ 
quoyqu'elles  y  foient  jointes  naturellement ,  lorfque  nous  ne 
fommespas  afTurez  que  Dieu  n'agit  point  furnaturellementjir 
n'y  a  point  auflî  de  témérité  quand  nous  a^ons  fujet  d'avoir 
cette  afliirance.  Or  nous  l'avons  prefque  toujours.  Car  Dieu 
n'agit  furnaturellement  que  pour  des  fins  importantes,  &  il 
n'a  point  accoutumé  de  le  faire  fans  en  donner  des  marques 
ou  avant  ou  après  ces  effets  miraculeux.  De  forte  que  lorfque 
nous  ne  voyons  point  ces  marques,  &  que  rien  ne  nous  don-' 
ne  lieu  de  îbupçonner  un  miracle,  nous  pouvons  ajouter  aux 


(^  des  dif^ciilteT^  tirées  des  fens.  547 

i<îées  des  fens  toutes  celles  que  la  nature  y  joint,quoy  que  Dieu  Ch.  XL 
les  en  puille  leparer  quand  il  luy  plaift. 

C'eft  par  cette  raifon  que  quoyque  l'idée  que  les  hommes 
avec  qui  nous  vivons  ix)rment  dans  nos  fens ,  ne  nous  rcpre- 
fente  precifëment  que  des  matières  mobiles  &  colorées,  nous 
jugeons  néanmoins  fans  témérité  que  ce  font  des  hommes  et- 
fcétifs&non  des  Anges  ou  des'demons  reveftus  de  corps  fem. 
blables  à  ceux  des  hommes  à  l'extérieur. 

Voila  les  vrais  principes  de  la  certitude  des  jugemens  que 
nous  formons  fur  les  imprefTions  des  (ens,qui  n'eft  fondée,com- 
meil  eft  vifible,  ny  fur  une  force  naturelle  qui  mette  nos  fens 
à  couvert  des  illufions,  nv  fur  des  marques  certaines  que  nous 
ayons  pour  les  reconnciftre,  mais  lur  la  feule  providence  de 
Dieu  qui  ne  fçauroit  permettre  que  nous  en  (oyons  toujours  en 
doute  dans  l'obligation  qu'il  nous  impofe  de  juger  des  chofes 
fenfibles ,  &  d'en  juger  véritablement. 

Et  par  là  il  eft  clair  que  lorfque  la  vérité  de  Dieu  n'y  eft 
point  intercirée,c'tft  à-dire, lorfqu'il  ne  s'enfuir  point  que  nous 
ferions neceftairement  contraints  de  faire  de  faux  jugemens, 
il  y  a  de  la  témérité  à  dire  que  Dieu  ne  peut  pas  permettre  de 
certaines  chofes. 

Aind  quoyque  les  vifions  reprefentent  fouvent  des  objets 
-qui  n'ont  point  d'eftre  hors  de  l'imagination,  &  que  ces  vi- 
fions ne  fe  diftinguent  pas  toujours  des  perceptions  des  fens. 
Dieu  peut  néanmoins  non  feulement  les  permettre  ,  mais  les 
procurera  les  imprimer  dans  l'efprit,  parce  que  rien  ne  force 
ccluy  à  qui  il  les  envoyé  de  les  juger  véritables  dans  le  temps 
quil  les  a,  &.  que  Dieu  enfjiteou  luy  donne  des  figues  pour 
les  diftinguer  deceque  l'on  connoift  par  les  fens,  ou  l'obli- 
ge de  n'en  pas  juger,  &:c'eftce  qu'il  fit  à  l'égard  de  S  Paul. 
Car  il  ne  luy  fit  pas  connoiftre  Çx  c'eftoit  en  corps  ou  ename 
qu'il  avoir  efté  ravi  au  troifieme  Ciel ,  mais  il  l'empêcha  de 
juger  de  ce  qu'il  ne  fçavoit  pas. 

Il  permet  aulTi  quelquefois  aux  démons  de  caufcr  des  illu- 
fions aux  fens  de  ceux  qu'ils  poiledent.  Mais  s'il  leur  laiile  quel- 
que ufage  de  leur  raifon  ,  il  leur  laifle  auifi  le  moyen  de  ne 
pas  fuivrecesimprelfions.  Se  de  n'y  pasafleoir  de  jugemens. 

Que  Ç\  Dieu  peut  permettre  toutes  ces  chofes,  lor/qu'il  ne 
donne  que  des  fignes  tres-obfcurs  pour  empêcher  qu'on  n'en 
foit  trompé, qui  peut  douter  qu'il  ne  les  puifi!è  permettre  quand 

ZZz    ij 


54?     Liv.  VII.  Examen  des  Argumens  négatifs , 

il  en  donne  de  il  clairs  6c  de  fi  exprcs,que  l'on  n'y  puifle  eftre 

abiifc  que  par  une  intidelitc  volontaire. 

Or  il  n'y  a  point  de  ligne  fi  clair  &:  h  propre  pournous  em- 
pêcher d'ertre  furpris  ou  par  les  impreiîions  des  fens  ou  par 
l'imagination, qu'une  déclaration  formelle  de  Dieu  qui  nous 
alVure  de  la  venté  des  chofes.  Car  comme  nous  avons  déjà 
dit,  les  fimples  perceptions  des  fens,  &  même  toutes  celles 
"  de  l'imagination  eftant  incapables  d'erreur,  &  n'y  ayant  que 
le  feul  jugement  qui  en  foit  fufceptible  ,  quel  moyen  plus 
propre  pour  l'en  prererver,que  de  luy  marquer  precifemenc 
ce  qu'il  doit  juger  > 

Rien  n'approche  de  ce  que  dit  M.  Claude  furce  fujec. 
contKie'i'"  ^^t"  "T^^^gré  Ics  cmbarras  de  fa  faufTé  philofophie,  il  ne  laifTe 
Nouct.  p.  66.  pas  de  reconnoiftre  la  venté  i  mais  il  l'oblurcit  à  l'inftant  par 
une  chicanerie  làns  raifon.Il  veut  que  dans  toutes  les  apparitions 
des  ^nges  dontl'  Ecriture  fait  mention^  il  y  ait  toujours  eu  quelque 
caractère fcnjihle  .^  qui  marquait,  dit- il  ,  quelque  chofe  de  furnatu. 
rcl^  (jj-  qui  arreftoit  lu  conclu fion  des  fcns  ,  avcrtîfiant  la  raifon 
^  l'obligeant  de  fe  tourner  de  l'autre  cofiè  pour  faire  un  jugement 
droit.  Ainfi  ^à\x.  il ,  les  fcns  n'efioient  point  trompez. ,  parce  qu'il 
y  avait  dans  l'objet  même  de  quoy  les  defibufer.  Que  fî  l'on  deman>- 
de  quels  cfiaient  ces  caractères  fenjtb  le  s  ?  Je  réponds  ,  dit  il  ,  que 
l'hijioire  même  les  remarque ,  comme  la  clarté  qui  accompagna  les 
Anges  qui  apparurent  aux  bergers  à  la  naifjancc  de  J.  C.  d^  les 
ve/hmcns  refplcndiffans  comme  ceux  que  portaient  les  Anges  qtiigar- 
dotent  le  Sépulcre  de  J.  C.  é"  d'autres  femblables  qui  cmpef choient 
les  fcns  de  rapporter  que  c'eftoicnt  de  véritables  hommes. 

M.  Claude  auroit  bien  de  la  peine  à  découvrir  ces  caraderes 
fenfibies  dans  toutes  les  apparitions  des  Anges  raportées  par 
l'Ecriture.  Mais  quoy  qu'il  en  foit,  il  reconnoifb  par  là,  que 
poLirveu  que  l'efprit  foit  averti  de  ne  pas  juger,  Dreu  peuE 
permettre  qiie  ksfens  foient  frapez  d'une  manière  qui  pourroit 
l'engager  dans  l'erreur  fans  cet  avertiflement.  Or  il  n'y  en  a 
point  lans  doute  de  plus  formel,  qu'une  déclaration  poficive  de 
Dieu  qui  nousinftruit  delà  qualité  des  objets  5  &  ce  figne  eft 
tout  autrement  clair  que  toutes  ces  lumières  &  coures  ces  au- 
tres circonftancesque  M.Claude  jugefuffifantes  pour  obliger 
ceux  à  qui  les  Anges  apparoifToient  de  fufpcnJre  leur  juge- 
ment, &  de  ne  les  pas  prendre  pour  des  hommes. 
C'eft  pourquoy  lorfque  M.  Claude,  pour  empelcher  qu'on  ne 


(^  des  difficHltex.  tirées  des  fens.  ^^() 

tire  cette  coniequence,exige  quecescaraderes  foîent  fenfibles  Ch  XI. 
&  expofez  aux  fens,  il  eft  clair  que  c'eft  une  réponfe  de  caprice 
&dephantairie.  Car  il  ne  s'agit  pas  d'empefclier  les  fens  d'eftre 
trompez,  puilqu'ils  en  font  incapables,  &  que  s'ils  en  eftoienc 
capables ,  ces  caraderes  fenfibles  dont  parle  M.  Claude, ne  les 
en  empeicheroienr  pas.  Mais  il  s'agit  de  preferver  l'efprit  d'er- 
reur dans  (es  jugemens.  Or  un  avertilîcment  précis  de  Dieu  e(l 
infiniment  plus  propre  à  produire  cet  effet  que  toutes  ces  cir. 
confiances  aufquelles  M.  Claude  attribue  cette  force,  &  qu'il 
juge  fuffifanres  pour  obliger  l'efprit  dcfufpendrefon  ju2;eini2nr. 
Ges  principes  de  fens  commun  que  itous  venons  d'ef^ablir  , 
font  voir  tout  d'un  coup,  que  tout  ce  qu'on  allègue  pour  la  cer^ 
titudedu  témoignage  des  fens  contre  la  doctrine  Catholique 
eft  entièrement  vain.  Car  Dieu  ne  doit  rien  davantage  aux 
hommes  à  l'égard  de  toutes  les  chofes  dont  ils  jugent,  que  de 
ne  les  pas  mettre  dans  la  ncceflîté  d'en  porter  de  faux  jugemens. 
Or  la  déclaration  pofîtive  qu'il  a  nous  faire,  que  ce  qui  nous 
paroift  pain  ,  eft  fon  corps ,  &c  ce  qui  paroift  vin  ,  eft  fon  f.ang, 
eft  plus  que  fufîifante  pour  nous  exempter  de  cette  necelîirc,  éc 
pour  nous  faire  juger  au  contraire  que  cen'eftni  du  pain  ni  du 
vin,  mais  le  corps  ôc  le  iang  de  J.  C.  Car  comme  il  n'efl  pas 
vray  en  gênerai  que  tout  ce  qui  pa^-oift  homme  aux  fens,  foie 
effectivement  homme,  il  n'efl  pas  vray  non  plus  que  tout  ce  qui 
paroît  pain  foir  pain  5  &  que  tout  ce  qui  paroift  vin,roit  vin.Ccs 
propofltions  générales  font  téméraires  àmoins  que  d'y  ajouter 
diverfes  conditions. Il  en  faucpremierement  exclure  les  défauts 
des  organes  &  le  trouble  de  l'imagination.  Il  en  fautexclureles 
illufîbnsdu  diable.U  en  faut  enfin  exclure  les  miracles  de  Dieu. 
Et  quiconque  acquicfce  à  cette  propoiîrion  générale  :  Ce  qui 
furoifi pain,  cfipain^  fans  eftre  aileuré  de  tout  cela,  y  acquiefce 
témérairement.  On  peut  à  la  vérité  eftre afTuré  qu'il  n'y  a  point 
d'illuflô  du  diabIc.Mais  comment  le  pourroit-on  eftre  qu^il  n'y 
a  point  de  miracle  de  la  part  de  Dieu,  ni  d'opération  furnatui 
rellej  puil'que  l'Evangile  nous  affure  qu'il  a  dit  du  pain  quec'é- 
toit  fon  corps, £c  que  toute  l'Eglife  lui  demande  par  fes  prières 
une  opération  furnaturelle  pour  changer  le  pain  en  fon  corps  ? 
Mais  Dieu  ,  dit  M.  Claude,  ne  peut  eftre  Auteur  des  illu- 
/îons,  de  la  fauffeté,&  de  l'erreur.  Eft-ce  do^nc  qu'il  ne  com--' 
prendra  jamais  qu'il  n'y  a  aucune  erreur  dans  les  fens, qui  repre- 
fentent  fimptemenc  à  l'efprit  l'image  du  pain  Se  du  vin,  &  une 

Z  Zz  iij 


^^o      Liv.  VII.  Examen  des  Argumens  négatifs^ 
ima^^e  quiaronunliciiparlcs  rapports  qu'elle  contient,  &  qu'il 
n'y  en  a  peint  auflidans  l'elprit^qui  eftant  éclairé  par  la  foy, ju- 
ge que  ces  objets  qui  paroiilenc  du  pain  &:  du  vin^ne  ibnt  ni  du 
pain  ni  du  vin  ,  mais  le  corps  &  le  fang  de  J.  C. 

Pour  ajouter  neanmoiiàs  quelque  éclaircillement  à  cette  ma- 
tière ,  Si  faire  voir  plus  nettement  que  les  iens  ne  font  point 
trompez  dans  l'Euchariftie,  il  hiut  remarquer  qu'il  n'y  arien 
dansce  myftere  dece  qu'on  appelle  proprement  vifion,c'e{l-à 
dire  que  ce  n'eft  point  une  pure  imagination  où  le  rapport  des 
Iens  n'ait  point  de  part.  Car  nos  fens  y  agiiîent  effectivement. 
Ils  conçoivent  l'idée  d'un  objet  extérieur,  &  prelentent  cette 
idée  à  l'efprit  ;  ce  qui  ne  s'appelle  pas  vifion. 

Il  n'y  a  point  auflî  de  ce  qu'on  appelle  illufion  des  fens.  Car 
on  dit  que  les  fens  fouffrcnt  illuiîon,  quand  ce  ne  lont  pas  les 
objets  extérieurs  qui  caulent  l'impreffion  qu'ils  reiTentent,  mais 
quec'eft  quelque  elprit  qui  imprimant  par  luy-même  certains 
mouvemens  fur  les  organes  fait  (encir  comme  preient  ce  qui  ne 
i'eftpas. 

Orc'efl:  ce  qui  n'arrive  point  dans  l'Euchariftie.  Ce  n'eft 
point  un  efprit  qui  imprime  dans  nos  organes  les  mouvemens 
qui  nous  en  font  former  l'idée,  C'eft  l'c>bjct  même  extérieur 
réellement  preient  à  nos  fens.  Et  lorfque  l'efprit  s'arrête 
precifément  aux  imprefîîons  qu'il  en  reçoit,  il  n'en  porte  au- 
cun jugement  qui  ne  foit  entièrement  véritable. 

Il  juge  premièrement  que  les  organes  font  remuez,  &  que 
ce  qui  fe  pafle  en  luy  n'ell  pas  une  pure  imagination  :  6c  ce 
jugement  eft  vray.  .  i-b 

il  juge  qu'ils  font  remuez  par  un  objet  extérieur  réellement 
prefent,  &  qu'ainfi  ce  n'eft  point  une  illufion  :£c  ce  jugement 
eil:  encore  vray. 

Il  juge  que  cetpbjet  extérieur  eft  à  une  certaine  diftance* 
enfermé  dans  une  certaine  figure,  &;  qu'il  eft  en  un  ctîrtain  lieii'; 
&:  il  n'y  a  rien  en  cela  que  de  Véritable , 

Il  juge  que  cet  objet  fait  fur  ces  fens  telles  &  telles  impref-* 
fions  :  £c  il  eft-  vray  cju'il  les  fait. 

II.  juge  encore  fi  ro.n  veut!  /qu'il  y  a  un  corps  à  une  certaine 
diflance  :  &:  cela  eft  encore  vray.  Car  le  corps  de  J,  C.eft  preci- 
(pment  daniS  tout  ce  qui  écoit  occupé  par  la  lubftance  du  vin. 
Etainfiil  n'y  a  aucune  partie  de  cet  efpace  que  l'on  puifTe  dire 
vuide  de  corps,  puilque  le  corps  de  j.  C.  y  eft,  quoiqu'il  y  foie 


i^  des  di^aihez.  tirées  des  fens.  551 

d'une  manière  rcirnaturelle  i>:  incomprehenhble.  AinH  quand  Ch.   XÏ- 
l'elpric  conçoit  un  corps  dans  cet  efpace,  pourveu  qu'il  ne  dé- 
termine point  la  manière  ,  il  ne  fe  trompe  point  en  cela. 

Mais  il  veut  poufler  plus  loin  ces  jn2;cmens,  &  conclure  que 
cet  objet  eft  de  vray  pain&de  vray  vin,  &  qu'il  occupe  cet 
e/pace  à  la  manière  des  autres  corps  ^  ces  ju^emens  ne  feroient 
pas  fondez  lur  le  (Impie  rapport  de  (ens,  ny  fur  les  idées  qui 
naiiîenc  precifément  de  l'objet,  mais  fur  les  additions  que  l'ef- 
prit  Fait  aux  idées  des  lens.  Les  iens  rapportent  qu'il  y  a  dans 
cet  efpaceun  obier  lemblabîe  à  du  pain  6<.  à  du  vin  L'ei'prit 
ajoute  que  c'eft  du  pain  Sc'du  vm.  Les  ièns  rapportent  que  cet 
objet  occupe  un  e(pace  étendu  ,  mais  ils  ne  rapportent  poinc 
comment  il  l'occupa.  C'eft  l'eTprir  qui  fait  cette  addition. 

Il  eft  vray  que  l'on  peut  finvre  non  feulement  ces  idées  des 
fens,  mais  fufîî  ces  additions  de  l'efprit,  lorfqu'on  auncalili- 
rance  raifonnable-qu'il  n'y  a  point  d'opération  furnaturclle  de 
Dieu.  Mais  qu:i.nd  nous  femmes  alîurez  du  contraire,  parla  dé- 
claration de  Dieu  même&  de  Ion  Eglifc,  c'eft  fe  tromper  vo- 
lontairement &;  inexcufablement  que  delesfuivre&  d'en  for- 
mer des  jugemens. C'eft  conclure  témérairement  &:  fans  raifon, 
que  tout  ce  qui  parcuft  pain  &  vin  eft  en  effet  pain  Se  vin.  C'eft 
impofer  une  lov  à  Dieu  qu'il  ne  s'eft  point  impofée.  Enfin  ce 
n'eft  pas  juftifier  les  fens  qui  ne  font  point  inceriftez  dans  ce 
qu'enfeigne  l'Eglife  ^  mais  c'eft  vouloir  juftifier  en  effet  ms 
imaginations  5:  nos  mauvais  raifonneinens  contre  l'autorité 
de  la  parole  de  Dieu. 

Cetéiairciifem.entrenverfenon  feulement  toutes  les  décla- 
rations que  M.  Claude  fait  de  fon  chef  en  faveur  des  fens, 
mais  auffitoutce  qu'il  allègue  de  l'Ecriture  &:  des  Pères  pour 
montrer  leur  certitude.  Car  encore  qu'il  ioit  vray  que  ces  paf- 
fages  fe  doivent  entendre  ôc  de  l'impreiîion  precife  qui  eft 
toujours  exempte  d'erreur,  parce  qu'elle  n'en  eft  pas  capable, 
&mcme  des  jugemens  que  refprit  forme  en  fuivant  les  im- 
prefîionsdes  fens, c'eft  à- dire  que  félon  les  Pères  il  eft  cerram 
que  quand  on  voit  un  corps  par  les  yeux  ,  on  n  raifon  déjuger 
qu'il  y  a  un  véritable  corps  hors  de  nous  tel  qu'il  nous  paroifl:  i 
il  eft  pourtant  vifible  qu'ils  on tfuppofé  que  ce  jugement  dema- 
doit  deux  conditions  pour  eftrecsrtain,  l'une  qu'on  foit  afiuré 
qu'il  n'y  ait  point  d'illufion  de  la  part  du  Diable  ;  l'autre  qu'il 
n'y  ait  point  d'opération  furnaturelle  de  Dieu.  Car  il  eft  con- 


5^2.  Liv.  Yll.  Examen  des  A^rgifmms  négatifs , 
liant  qu'ils  n'ont  pas  prétendu  que  le  Diable  ne  puifle  caufer 
DcGen.ad  des  illufions  dans  nosîens,  puisqu'ils  en  parlent  tres-fouvent 
'"'  •  '*'  dans  leurs  ouvrages ,  comme  quand  S.  Auguftin  dit,  que  lorfque 
le  Diable  nous  trompe  par  des  phantômes,  l'illufion  qu'il  fait 
à  nos  yeux  ne  nous  nuit  point  fî  nous  ne  tombons  dans  aucune 
erreur  touchant  la  foy. 

On  ne  doit  pas  non  plus  leur  imputer  d'avoir -douté  que 
Dieu  ne  puilTe,  en  nous  en  avertifiant,  imprimer  dans  nos  or- 
ganes certains  mouvemens  qui  y  excitent  des  idées  des  cho- 
ies abfentes, qui  nous  paroiflènt  prefentcs,  comme  il  en  impri- 
me dans  l'imagination  par  l'aveu  de  tous  les  Peres^puifqu'il  n'y 
a  pas  plus  de  difficulté  à  l'un  qu'à  l'autre  ,  .&  qu'il  n'y  auroit 
pas  plus  de  faufleté  dans  ces  idées  des  léns  qui  ne  tromperoienc 
point  l'efprit,  que  dans  des  idées  de  l'imagination.  Mais  au 
moins  il  eft  certain  qu'ils  n'ont  point  cru  impoiîible  que  Dieu 
prefentaft  aux  fens  certains  objets  que  l'efprit  ne  puft  s'empê- 
cher de  prendre  pour  autres  qu'ils  ne  feroient  qu'en  fuppofant 
un  miracle. 

Ainfi  ceux  à  qui  les  Anges  apparoifTcient  ne  fe  pouvoient 
empelcher  de  les  prendre  pour  des  hommes  qu'en  fuppofanc 
un  miracle. 

Ainfi  S.Jean  ne  fe  pouvoir  empêcher  de  prendre  la  colombe 
qui  parut  (ur  J.  C.  pour  une  colombe  véritable  ,  qu'en  Tuppo- 
iant  un  miracle. 

Ainfi  ceux  qui  voyoient  la  Vierge  &  qui  fçavoient  qu'elle 
avoir  un  fils  5c  un  mari ,  ne  fe  pouvoient  deffendre  de  juger 
qu'elle  eftcit  devenue  mère  comme  les  aucres  femmes,  qu'en 
fuppofant  un  miracle. 

Ainfi  ceux  qui  voyoient  J.  C.  ne  fe  pouvoient  defFendre  de 
juger  qu'il  avoit  un  père  lur  la  terre ,  qu'en  fuppofant  un  mi- 
racle. 

Et  par  confequent  les  Pères  ont  cru  qu'afin  que  les  jugemens 
qu'on  forme  fur  les  objets  des  fens,  fullent  abfolument  cer- 
tains danscesadditions  quelaraifon  fait  aux  idées  des  fens,  il 
failoit  fuppofer  qu'il  n'y  eût  point  de  miracle. 

Cette  certitude  des  fens  ainfi  limitée,  &  qui  fuppofeTexclu- 
fion  d'illufion  &  de  miracle,  (uffit  pour  confirmer  tout  ce  que 
ks  Pères  ont  prouvé  par  les  témoignages  des  fens. 

Elle  prouve  la  vérité  du  corps  de  J.C.  &;de  fa  Refurreclion. 
Car  on  avok  droit^dc  l'aveu  même  des  heretiques,d'en  exclure 

toute 


&f  des  difficulté^,  tirées  des/èns.  5J5 

toute  illufîon  diabolique, &  il  n'eftoic  pas  moins  certain  qu'il  Ch.XI. 
en  falloit  encore  exclure  l'opération  lurnaturelle  de  Dieu, par 
ce  principe  gênerai ,  que  Dieu  ne  peut  nous  donner  des  idées 
qui  inclinent  nos  efprits  à  des  jugemens  qui  feroient  faux, qu'en 
nous  donnant  des  avertiflemens  fuffifàns  pour  arrefter  cette 
impreffion.  Or  il  eft  bien  certain  que  non  feulement  J.  C.  n'a- 
voit  donné  aucun  figne,  qu'il  n'eufl:  pas  un  corps  ,ou  qu'il  ne 
fuft  pas  refluicité  ,  mais  qu'il  avoit  fait  tout  ce  qu'il  falloir 
pour  perfuader  l'un  &  l'autre. 

Les  Pères  ayant  donc  droit  de  faire  cette  double  fuppofition, 
ont  conclu  diredement  que  les  jugemens  formez  du  rapport 
des  fens  par  ceux  qui  ont  vu  J.  C.&  dans  fa  vie  mortelle  ,  ôc 
après  fa  Refurredion  ,  ne  pouvoient  eftrefaux.  Et  leur  argu- 
ment eftoit  abfolument  concluant. 

Ils  ont  eu  raifon  dédire,  comme  fait  S.  Irenée  ,  que  y.  C.fe-  iren.adv. 
roit  un  feducieur.  (i  Ces  fouffrances  n  avaient  eltè  véritables.  h<cr.  1.5.0.10. 

Ti  A        .?•-'    J .    J     ■■'  r,    ^      >    n    ■  1  Tert.contr. 

lis  ont  eu  railon  de  prouver  ,  que  y.  C.  n  e[toit^as  un  phan-  Marc.i.  4.  c.s. 
tojme  ,  pttifqu' il foufroit  un  attouchement  violent. 

Ils  ont  eu  raifon  de  dire,  que  fi  J.  C  avoit  trompé  par  fa  fub^  Li  1  -  c  8 
fi^ance  extérieure  ,  il  ne  mériterait  pas  d'efire  cru  dans  ce  qu'il  nous 
a  dit  de  l'intérieure. 

Ils  ont  eu  raifon  de  conclure,  que  file  corps  de  J.  C.  n'eftoit  la.decarne 
le  corps  d'un  homme  qu'en  apparence,  on  auroitfujet  dédire  chnftic,  1. 
qu'il  n'eflaufli  Dieu  qu'en  apparence. 

Ils  ont  raifon  de  dire  que  ce  n'eftoient  point  des  pieds  ima-  Epiph.i.  i. 
ginaires  que  ceux  que  la  femme  pechereffè  arrofa  de  fes  lar-  adver.hxr.  i 
mes. 

Ils  ont  raifon  d'employer  pour  prouver  la  vérité  de  la  chair  Hiiar.inPf. 
deJ.C. ce  que  J.  C.  dît  luy  même  zÇqs  Apôtres  .-  Touchez^^  ^37- 
voycT^  Un   cfprit  tHa  ni  chair  ni  os  ,    comme  vous  voyez^  que 

Ils  ont  eu  raifon  d'accufer  les  Manichéens  de  faire  J.  C.  Aug.i.  14. 
menteur  ,  endifant  que  fes  fouffrances ,  fa  mort  fie  fes  cicatri-  '^°""'  ^^^^' 
ces  avoient  elte  imaginaires,  &:  de  leur  reprocher  que  la  vie  Eti.ij.c.i. 
de  J.  C.  avoit  efté  une  efpece  de  mag'e.  Tout  cela  efl:  tres-vray  &  ^• 
&  tres-folide.  Car  n'y  ayant  aucun  avertiflement  de  la  part  de 
Dieu ,  qui  dût  empêcher  de  juger  fur  le  rapport  des  fens  à  l'é- 
gard de  J.  C.  êc  de  fes  actions ,  c'eftoit  fuivre  l'ordre  de  la  Pro- 
vidence que  de  juger  qu'il  avoit  un  corps  tel  que  les  fens  le  re- 
prefentoient.  Et  par  confequent  fi  ce  jugement  eût  efté  faux  , 

AAaa 


^j4  Liv.  VII.  Examendes  Argumens  négatifs ^ 
cccce  faalîecë  feroic  retombée  fur  J.  C.  même.  Mais  que  peut- 
on  conclure  de  là  contre  ce  que  TEglife  Catholique  enfeigne  de 
l'Euchariftie  ?  Non  feulement  elle  ne  dit  point  que  les  fens  y 
foient  proprement  trompez,  mais  il  s'enfuit  même  de  fa  doc- 
t  rine  que  l'ef  prit  ne  s'y  trompe  point ,  en  fuivant  le  rapport  des 
fens ,  pourvu  qu'il  s'arrefte  precifémentà  ce  qu'ils  rapportent, 
qui  eft  que  nous  avons  devant  nos  yeux  un  objet  extérieur  ren- 
fermé dans  un  certain  efpace  avec  tels  &  tels  accidens ,  &  qui 
fait  telles  Se  telles  imprefîîons  furies  fens. 

Toutes  les  erreurs  dans  lelquelles  on  peut  tomber  fur  ce  fu. 
jet,-  regardent  les  additions  qu'on  fait  à  l'idée  precife  des  fens, 
&  l'on  eft  prémuni  contre  ces  erreurs  par  le  plus  claire  le  plus 
précis  de  tous  les  fignes ,  qui  eft  une  déclaration  formelle  de 
Dieu.  Qiiel  prétexte  y  auroit.  il  donc,  d'accufer  Dieu  de  trom- 
perie &  de  menfonge  ?  Trompoitil  les  Prophètes  à  qui  il  én- 
voyoit  des  vidons,  ou  les  Patriarches  qu'il  inftruifoit  de  tant 
de  chofes  par  des  apparitions  d'Anges  ,  quoiqu'il  fuft  beau- 
coup moins  facile  aux  Prophètes  de  diftinguer  ce  quîleurpa- 
roillbit  en  vifion,  des  objets  réels ,  Seaux  Patriarches  de  dif- 
cerner  les  Anges  des  hommes  effeiftifs^  qu'il  ne  l'eft  aux  fidel- 
les  de  diftinguer  le  corps  de  J.  C.  du  pain  commun  ?  Car  s'ils 
ne  le  difcernent  pas  par  les  fens  ,ils  ledifcernent  par  la  lumiè- 
re de  la  foy  ,  c'eft-à  dire  par  ce  qu'on  peut  avoir  de  plus  cer- 
tain en  cette  vie. 

C'eft  donc  en  vain  qu'on  allègue  ces  pafîîîges  des  Pères 
pour  la  certitude  des  fens,  puifqu'ileft  clair  qu'ils  la  fondent 
tous  fur  la  vérité  de  Dieu  ,  èc  que  par  confequent  tout  ce  qui 
n'eft  point  contraire  à  la  vérité  de  Dieu,  c'cft  àdiredontil  ne 
s'enfuit  point  que  Dieu  feroit  trompeur  ,  n'eft  point  contraire 
à  la  certitude  des  fens. 

Ainfi  il  n'y  avoit  nulle  neceiîité  que  les  Pères  exceptaflènt 

l'Euchariftie  de  leur  docftrine  touchant  les  fens,  puifqu'elle  n'y 

eft  pas  contraire  ,&  qu'elle  n'en  afFoiblit  en  rien  la  certitude. 

Et  c'eft  inutilement  que  M.  Claude  ajoufte  qu'ils  ont  eftabli  la 

vérité  du  témoignage  des  fens,  même  en  ce  qui  regarde  l'Eu- 

'chariftie:,&  qu'il  rapporte  fur  ce  fujet  ce  paflagedeTertuUien, 

qu'il  abrège  en  cette  manière.  //  n'e/  pof  permis  aux  Chrétiens 

Tcrt,  de  .Trii-  dg  rcvoquer  en  doute  le  témoignage  des  fens ,  de  peur  qu'on  ne  dife 

inac.17.        ^^g  J  c.a goujiéune  autre pivstir que  celle  dx  vin^u'ilaconfa. 

cré  en  mémoire  de  fonfung. 


^  des  diffiCHlte'z^  tirées  des  fens.  555 

Car  premièrement  il  n'efl  pas  clair  par  ce  pafTage,  (î  cette  Ch.  XL 
faveur  du  vin  que  J.  C.  a  gouftée^fe  rapporte  à  la  faveur  du  vin 
confacré  ,  &:  l'on  la  peut  fort  bien  rapportera  celle  du  vray 
vin  que  J.  C.  but  dans  la  Cène  légale  ,  &  dont  il  confacra  en- 
fuite  un  calice.  Comme  on  peut  fort  bien  dire  que  Judas  but 
du  vin  quej.  C.  confacra ,  pourfignifier  fimplement  qu'il  but 
au  fouper  où  J.  C.  confacra  l'Eucharifiie  ,  quoiqu'il  en  foie 
forti,  félon  quelques  Pères,  avant  la  confccration. 

Secondement,  en  s'arreflant  même  au  fens  de  M.  Claude, 5c 
fuppofant  que  Tertullien  a  voulu  dire  que  J  C.  avoit  gouftc  la 
faveur  du  vin  confacrc;  jil  n'y  a  rien  cians  cette expreiïi'on  d'où 
il  puifle  tirer  le  moindre  avantage.  Car  il  faut  remarquer  que 
Tertullien  établit  deux  cliofes  dans  tous  fes  ouvrages  à  l'égard, 
de  J.  C.la  vérité  "de  fa  nature  corporelle  qui  eftoit  niée  parles 
hérétiques  de  fon  temps, 5c  la  vérité  des  opérations  de  cette  na- 
ture, qui  eftoit  niée  par  les  mêmes  hérétiques.  Il  veut  donc 
que  non  feulement  il  ait  eu  un  vray  corps ,  mais  auflî  qu'il  aie 
efFedivement  mangé  ,  qu'il  ait  effectivement  foufFert  j  en  un 
mot  qu'il  ait  relîènti  les  mêmes  imprelîions  en  tous  fes  fens  , 
que  celles  que  nousreflfentons.  C'eft  ce  qui  luy  fait  dire  ,  quil 
n'eji  pas  permis  de  révoquer  en  doute  le  tèmoiyiay:  des  fens  ,  de 
peur  qu'on  n'en  prenne  fujet  de  faire  pJ-ffer  les  actions  de  J.  C. 
pour  des  iUufons  ,  ^  que  l'on  ne  dife  qu'il  a  fenti  une  autre  odeur 
que  les  autres  ,  du  parfum  qu'il  reçut  pour  l' appareil  de  fa  fepulturc  , 
^  qu'il  a  y)u(lè  une  autre  faveur  que  les  autres  dans  le  vin  qu'il 
confacra  en  mémoire  de  fon  fang.  Car  c'efl:  ainfi  que  fe  doivent 
traduire  ces  paroles  Latines:  JV(?/î'r/£'(^/rrf/ar  ....  quodalium 
poftea  unyienti  fenferit  fpiritum ,  quod  in  fepulturam  fuam  accepta^ 
vit ,  alium  poflea  vini  faporem ,  quod  in  fanyiinis  fui  mcmoriayn 
confecravit  3  &  non  pas  comme  fait  M.  Claude  ,  de  peur  qu'on  ne 
dife  que  J.  C.  a  y)ufié  une  autre  faveur  que  celle  du  vin  quil  a  con- 
facré en  mémoire  de  fon  ftn^.  Mais  de  quelque  maoiere  que  l'on 
traduife  ce  paflage ,  il  eft  clair  qu'il  ne  s'y  agit  ni  de  la  vérité  de 
ce  parfum ,  ni  de  celle  du  vin  ,  mais  de  la  vérité  de  l'impref- 
flon  qu'en  re(^ûrent  les  fens  de  Jesus-Christ.  Tertullien  veut 
avecraifon  que  Jesus-Christ  ait  fenti  la  véritable  odeur  de 
ce  parfum  ,Sc  qu'il  en  ait  reflenti  la  même  impreffion  que  les 
autres.  Il  veut  auffi  qu'il  ait  goufté  la  vraye  faveur  du  vin  con- 
facré  , Scelle  même  que  les  Apoftresgoufterent ,  5c  qu'il  n'y 
ait  rien  eu  de  particulier  dans  les  opérations  de  fes  fens.  Or  que 

AAaa  ij 


J56       L  I V.  V 1 1.  Examen  des  Argumens  négatifs  ^ 
faiccek  contre  la  doArinedel'Eglife?  Eft-ce  que  les  Catholi- 
ques difenc  que  le  vin  confacré  n'a  point  de  faveur,  &  qu'il  ne 
fait  point  d'imprefTion  fur  les  fens? 

Tout  ce  que  TertuUien  prétend  donc  eftablir  en  ce  lieu,  c'eft 

que  J.  C.  a  goûté  la  faveur  naturelle  de  ce  vin ,  qu'il  a  fenti  ce 

qu'un  autre  auroit  fenti  ,&qu'ainfi  il  n'avoit  pas  d'autres  fens 

que  les  autres  hommes.  Ce  n'eft:  que  de  cela  qu'il  s'agit,  &  point 

du  tout,  fi  ce  vin  conficrédont  J.  C  goûta  la  faveur,  eftoitou 

n'eftoit  pas  du  vin  véritable  ;  6c  s'il  n'y  eftoit  point  arrivé  de 

changement.  Si  l'on  eût  fait  cette  dernière  queftion  à  Tertul- 

lien,  qui  doute  qu'il  n'eût  dit ,  comme  S.  Ambroife  a  dit  de- 

Deiisquîmy-  puis,  que  Ce  ncjîoit  point  ce  que  la  nature  avait  forme  ^  mais  ee  que 

iler.init.c.9.  labcnediBion  avoit  confacré^  ou  ce  que  dit  l'Auteur  du  Livre  des 

\  i^  (:\    '      Sacremens  ,  qu  avant  la  confccration  c  efioit  un  calice  plein  devin 

Catcch.  4.       ^  d'eau,  mais  qu'après  que  les  paroles  de  J.  C.  ont  operè^  le  fanfi^  qui 

"^J'  •  a  racheté  le  peuple  fe  trouve  dans  le  calice  j  ou  ce  que  dit  S.  Cyrille 

de  Jerufalem,  que  ce  n'efi point  du  vin ,  quoique  Icgoujî  le  rapportct 

mais  le  fang  de  J.  C. 

Les  Pères  encore  une  fois  ont  donc  pu  confirmer  la  certitude 
à^s  fens ,  fans  donner  aucune  atteinte  à  la  doctrine  de  l'Eu- 
chariftie.  Mais  parce  néanmoins  qu'on  ne  didingue  pas  toujours 
fi  exactement  ce  qui  leur  appartient  en  effet,  6c  que  l'on  com- 
prend quelquefois  dans  ce  qu'on  appelle  le  témoignage  des 
fens,  non  feulement  l'idée  precifequi  répond  auxmouvemens 
corporels,  mais  auffi  celles  quel'efprit  yajoufte,  &  le  jugement 
qu'il  en  porte,c'eft  une  fuite  de  la  dodrine  de  la  prefen ce  réelle, 
qu'il  y  aie  des  Pères  qui  ayent  eu  foin  de  nous  avertir  de  ne 
croire  pas  nos  fens  fur  le  fujet  de  l'Euchariftie.  Et  c'eft  auffi  ce 
que  S.  Cyrille  de  Jerufalem  ,  S.  Ambroife  ,  S.  Epiphane  6c 
S.Chryfoftome  font  exprefTement. 

M.  Claude  qui  ne  l'ignore  pas ,  a  cru  qu'il  s'en  pouvoît  fàu- 
ver  par  une  folution  fubtile.  Il  y  a ,  dit-il,  deux  rapports  é^  deux 
M. Claudel,  témoiqnages  des  fens  fur  les  myferes  ^  l'un  affirmatif  ^  l* autre  ne- 
rép.  p.  13^.  gatif.  Par  le  premier ,  ils  nous  ajfurentque  le  Baptême  efi  de  l'eau  , 
^  que  l'Eucharifiie  efi  du  pain  ^  du  vin  -^^  par  le  fécond ,  ils 
nous  difent  que  ce  n'cfi  que  de  l'eau  ,  que  ce  n'cfi  que  du  pain  ^  du 
vin  ,  ou  pour  me  fervirdes  termes  des  Pères  ,  que  c'efi  de  l'eauvui- 
de ,  que  cefl  de  fîmple  pain  é^  de  fîmple  vin  ,  du  pain  ^  du  vin 
commun.  Le  premier  de  ces  témoignages  eft  vray  ,  //  ne  choque  point 
lafoy  ,  ^  fumais  les  SS,  Pères  n'ont  dit  qtiille  fa/Iufi  révoquer  en 


&f  des  di^mîtez.  tirées  des  Jens.  ^^7 

doute.  Mais  f  les  yeux  veulent  aller  plu  s  avant  ^^  dire  que  ce  n'efi  Ch.  X I. 
que  du  -pain  ,  que  c'eft  de  fimple  pain ,  du  pain  ordinaire',  alors  il  faut 
que  lafoy  les  corrige  ,  ^  quelle  fe  fortifie  de  la.  parole  deJ.C.  contre 
la  déception  de  leur  témoignage.  Et  cefi  ce  que  veulent  dire  S.  Am- 
brai fe  ,  S.  Cyrille  de  Jerufaletn  ^  S.  Chryfoftome. 

Mais  fi  la  philofophie  de  M.  Claude  s'ajufte  allez  bien  aux  in- 
terefts  de  fa  caufe,elle  s'ajufte  cres-mal  aux  paflages  dont  il  s'a- 
git. Car  il  n'y  a  qu'à  \qs  confiderer  avec  quelque  foinj  pour  faire 
évanouir  cette  fauflè  fubtilité. 

Les  Pères  ^  dit  M.  Claude  ,  ne  rejettent  que  le  tétnoignage  néga- 
tif des  fens  ^  qui  eft  que  l'Euchariftie  n'eft  que  du  pain  &:  du  vin 
commun.  Et  pourquoy  le  rejettent-ils  ?  C'eft  ,  dit  il ,  que  l'Eu- 
chariftie  outre  ce  pain  &  ce  vin  commun  ,  enferme  encore  une 
certaine  vertu  feparèe. 

Ainfi  l'expreflîon  naturelle  par  laquelle  ils  dévoient  rejetter 
ce  prétendu  témoignage  négatif  des  fens,  eft  celle-ci  ;  Ne  croyez^ 
pas  que  t Eucharifiie  foit  du  pain  d^  du  vin  commun.  Car  outre  le 
pain  ^  le  vin ,  elle  contient  encore  une  certaine  vertu  feparée  du 
corps  de  J.  C. 

D'où  vient  donc  que  jamais  aucun  d'eux  ne  s'eft  avifé  de  s'ex- 
primer de  la  forte  ?  Pourquoy  la  nature  ne  les  a-t'elle  jamais 
conduits  à  ces  expreffions  fi  naturelles  ?  Ils  les  trouvent  fi  bien  v 

à  l'égard  du  Baptême  j  6c  ils  nous  difent  fi  nettement ,  qu'il  ne 
faut  pas  feulement  croire  ce  que  l'on  y  voit  :  Jdeo  anie  pra:diEtum  efi  Ambr.dehs 
ut  non  hoe  folum  crederes  quodvidebas ,  dit  S.  Ambroife.   C'eft  à  ' 

dire  qu'il  faut  croire  ce  que  Ton  voit  &  quelque  chofe  déplus. 
Ils  nous  marquent  fi  precifément  ce  qu'il  faut  croire  de  plus,  Ambr.ibid. 
fçavoir  que  ces  eaux  nous  nettoyent  de  nos  péchez^:,  que  ces  eaux  pro- 
duifent  la  régénération  d^  le  renouvellement  qui  efi  une  chofe  fpiri.  pu    r  j, 
ifaf//^.  Mais  cependant  ils  ne  nous  difent  jamais  à  l'égard  du  Ea-  Sj.inMatth 
ptême ,  qu'il  ne  faut  pas  croire  que  c'eft  de  l'eau  j  au  lieu  que 
S.  Cyrille  de  Jerufalem  ditexpreflèment  à  l'égard  de  l'Eucha- 
riftieque  ce  n'eft  pas  du  pain. 

Ils  nous  difent  encore  moins  à  l'égard  du  Baptême  ,  que  ce 
n'eft  pas  de  l'eau ,  mais  le  fang  de  J.  C.  &  c'eft  ce  que  S.  Cyrille 
ajoufte  exprefièment  :  Tenez^  pour  certain  que  le  pain  que  voies 
voyezjîefipas  du  pain,  quoyque  le  goufi  le  jugejgfmais  le  corps  de 
Jeftis.Chrift. 

On  arefuté  ailleurs  la  chicanerie  des  Miniftres  ,  qui  préten- 
dent quequand  S.  Cyrille  dit  que  le  pain  n'eft  pas  du  pain,  il 

AAaa  iij 


cc8         Liv.  VII.  EXiimen  des  Argumins  négatifs  ^ 
entend  fimplemencque  cen'eftpas  du  pain  commun  jôciln'cfl 
pas  neceffaire  d'en  parler  icy. 

Mais  ce  qui  fait  encore  mieux  voir  que  les  Pères  n'ont  point 
fimplement  voulu  rejetter  ce  prétendu  témoignage  négatif  des 
fens  j.  ni  dire  fîmplement  qu'outre  le  pain  ôc  le  vm  quelesfens 
nous  découvrent  dans  ce  myftere ,  il  falloit  croire  de  plus  que 
ce  pain  &  ce  vin  avoientune  vertu  fpirituellei  c'eft  qu'ils  repre- 
fentent  ce  que  la  foy  nous  oblige  de  croire  fur  l'Euchariftie, 
comme  eftant  renfible&vifible  par  fa  nature,  &tel qu'il  s'en 
enfui ve  que  nous  ne  devrions  pas  voir  du  pain.  C'eft  à- dire 
qu'ils  enfeignent  que  la  foy  de  ce  m.yftere  eft  contraire  au  té- 
moignage pofitif  des  fens.  Et  de  même  ils  reprefentent  ce  que 
les  fens  nous  rapportent  pofitivement  comme  contraire  à  la 
vue  naturelle  &i  fenfible  que  nous  en  devrions  avoir. 

La  foy  eft  félon  S  Ambroife,  que  notu  recevons  le  corps  de  J.  C. 
Si  nous  en  croyons  les  Théologiens  Catholiques,  celafignifie 
que  nous  recevons  fon  vray  corps.  Si  nous  en  croyons  les  Mi- 
niftres ,  cela  veut  dire  par  une  manière  de  parler  bizarre  ,  que 
nous  recevons  la  vertu  de  ce  corps. Les  uns  ou  les  autres  fe  trom- 
pent. Mais  les  objections  que  ce  Père  propofe  font  allez  voir  de 
quel  cofté  eft  l'erreur, 

Voiis  me  direz^peut-ejlre  ,  ajoufte  S.  Ambroife  ,  je  vois  autre 
chofe  ,  comment  me  dites-vous  que  je  renvois  le  corps  de  J.  C.  c'eft  à 
dire  que  ceux  de  la  part  de  qui  il  fe  propofe  cette  objedion , 
concluant  de  ce  qu'on  leur  difoic  qu'ils  recevoient  le  corps  de 
T.  C.qu'ils  le  dévoient  voir,  àc  qu'ils  ne  dévoient  pas  voir  une  au- 
tre chofe, ils  doutoient,  parce  qu'ils  voyoient  autre  chofe j6c  s'ils 
n'euflent  point  vu  cette  autre  chofe ,  ils  n'euftent  point  douté. 
Ainfi  ils  concluoient  de  la  dodlrine  del'Eglife  qu'on  ne  dévoie 
pas  voir  du  pain^ôi  ils  concluoient  de  ce  que  l'on  voyoit  du  pain, 
qu'on  ne  recevoit  donc  pas  le  corps  deJ.C.  Tout  cela  s'accorde 
parfaitement  avec  la  doctrine  Catholique.  Car  de  ce  que  nous 
recevons  le  corps  de  J.  C.  il  s'enfuit  félon  la  nature  que  nous 
devrions  voir  le  corps  de  J.  C.  &  non  pas  du  pain  5  ôcdece  que 
nous  voyons  du  pain ,  il  s'enfuit  félon  la  nature  que  nous  ne  re- 
cevons point  le  corps  de  J.  C.  Mais  comment  ajufter  cela  à  l'hy- 
pothefe  des  Calviniftes?  S'enfuit-il  de  ce  que  nous  recevons  une 
vertu  feparée  imprimée  au  pain  ,  que  nous  la  devrions  voir ,  & 
que  nous  ne  devions  pas  voir  du  pain.''  Ne  s'enfuit- il  pas  aucon- 


I 


^  des  dïjficiike%_  tirées  des  fem.  559 

traire  que  nous  devons  voir  ce  pain  ,  &  ne  point  voir  cette  ver-  Ch.  XI. 
tu,  puifqu'une  vertu  ne  Te  voit  point  ? 

Ce  que  lafoy  nous  oblige  donc  de  croire  fur  l'Euchariflie  , 
cen'efl  pas ,  félon  S.  Ambroife,  que  nous  recevons  une  vertu, 
mais  que  nous  recevons  le  corps  de  J.  C.  Et  félon  le  même 
S.  Ambroife,  cette  foy  exclut  non  l'apparence  du  pain,  mais 
la  realité  du  pain.  Ce  ncfi  point ,  dit- il  ,ce  cjîu  lu  nature  a  formé  ^ 
7nais  ce  que  la  bencdi'ciion  a  confier  é ,  c'elVà-dire  ,  c'eft  le  corps 
deJ.C.&:  non  pas  du  pain.  Ainfilafoy  ,  félon  luy,  exclut  ce  té- 
moignage pofitif  des  fens,  dont  il  eft  icy  queftion. 

L'Auteur  du  Livre  des  Sacremens  reprefente  encore  plus 
clairement  cette  contrariété  naturelle  qui  efl:  entre  la  foy  de  ce 
my(lere&:  le  témoignage  pofitif  desfens. 

Car  qu'eft  ce  que  la  to  y  nous  enfeigne  félon  luy  ?  Qjie  cefi. 
la  vraye  chair  de  J.C.  ^ue  nous  recevons  ^  ^  fonvray  fang  qui  eji 
nofire  hrcuva'^e. 

Mais  que  s'enfuit-il  naturellement  de  cette  foy  félon  cet  Au- 
teur? Il  s'enfuit  que  nous  devrions  voir  la  vérité  du  fang,  &: 
que  nous  ne  devrions  point  voir  de  vin.  Et  c'eft  pourquoy  il 
exprime  le  doute  qui  s'élève  contre  cette  foy  en  ces  termes  : 
Voîis  me  dircx^fcut-eflre  -.comment  ejl.ce  fa  vraye  chair ,  fui fque 
je  ne  vois  qu'une  reffemblance  du  fang  ,  S^  non  la  vérité  du  ftng  ? 
C'eft  à  dire  qu'il  s'enfuit  félon  la  nature  ,  de  ce  que  c'eft  la 
vriye  chair  de  J.  C.  qu'on  la  devroit  voir,  ôc  qu'on  ne  devroit 
pas  voir  la  reffemblance  du  fang  ,c'cft-à  dire  du  vin.  Et  ainfi 
cet  Auteurreconnoît  encore  une  contrariété  fenfible  entre  ce 
qu'il  faut  croire,  &  le  témoignage  pofitif  des  fens.  Et  comme  il 
établit  ce  dogme,  ^ae  c'eft  la  vraye  chair  de  J.  C.  il  nous  apprend 
par  confequent  à  rejetter  ce  témoignage  pofitif,  qui  dit  que 
c'eft  du  vin  ,  comme  nous  l'avons  fait  voir  ailleurs  plus  ample- 
ment dans  l'examen  de  ce  palTage. 

Nous  avons  droit  d'appuyer  encore  ce  que  nous  venons  de 
dire  par  toutes  les  preuves  que  nous  avons  jufqu'icy  produites, 
6c  qui  font  voir  que  les  Pères  ont  crû  que  lepain  confacré  étoit 
réellement  Si.  véritablement  le  corps  même  de  J.  C.  de  qu'il 
eftoit  réellement  changé  en  ce  divin  corps. 

Car  tout  cela  prouve  que  quand  ils  ont  dit  que  le  pain  que  nous 

voyons  n'eftoit  pas  du  pain ,  ils  entendoient  que  ce  n'eftoit  pas 

du  pain  efFeclivement  j  c'eft-à-dire  qu'ils  ont  rejette  ce  que      • 


^6o  Liv.  VII.  E:famen  des  Argumens  négatifs^ 
M.  Claude  appelle  le  témoignage  pofitif  des  fens.  Et  M.  Clau- 
de au  contraire  n'a  aucun  droit  de  fefervir  de  fa  prétendue  fo- 
lution  ,  avant  que  d'avoir  détruittoutes  ces  preuves  ^Ôc  établi 
le  fens  chimérique  qu'il  donne  à  ces  paflages ,  en  prenant  les 
mots  de  corps  de  J.  C.  pour  une  vertu  feparée  3  &  comme  on 
eftafîuré  qu'il  ne  le  fera  jamais,  nous  aurions  fort  bien  pu  nous 
difpenfer  de  répondre  à  cette  vaine  fubtilité  de  témoignage 
pofitif 6c  négatif,  qu'il  n'aura  jamais  lieu  de  propofet  raifon. 
nablement. 

On  auroit  pu  étendre  beaucoup  davantage  ces  objedions  & 
ces  réponfes ,  mais  on  n'a  pas  crû  qu'il  fuft  ni  neceflaire  ni  utile 
de  le  faire ,  puifqu'il  eft  difficile  que  rien  puifTe  fuffire  à  ceux  à 
qui  les  éclaircifièmens  qu'on  a  tâché  de  donner  dans  tout  cet 
ouvrage  ne  fuffiront  pas  ^ainfi  l'on croiteftreen droit,  en  re- 
gardant cette  difpute  comme  terminée,  d'en  reprefenter  main- 
tenant l'origine  &  le  progrés,  &  de  réduire  la  queftion  au  point 
où  l'on  l'a  mife  d'abord,  dont  les  Minières  ont  tâché  vaine- 
ment de  s'écarter.  Ce  fera  le  fujet  du  Livre  fuivant. 


Fin  du  feptième  Livre. 


LIVRE 


f(^ 


LIVRE  HUITIEME 


CHAPITRE      PREMIER. 

Orizine  iy-  p'op'ès  de  ce  dijfcrcïtd  avec  M.  Claude.  Son  oplnih- 
frété  à  ruer  que  les  Socic'tcz^  d'Orient  croycnt  la  prejcnce  réelle. 
Cond'iration  des  Miniflres  à  nier  ce  même  fait.  Utilité  du 
dejjein  de  les  convaincre  pleinement. 

O  N  s  I  E  u  R  Claude  ayant  fujec  d'eftre  fatif^ 
fait  de  la  déférence  que  nous  luy  avons  ren- 
due, en  entrant  fur  les  in  (lances  qu'il  nous  en 
a  faites  dans  la  difcuffion  de. ce  que  l'Ecriture, 
&  les  Pères  nous  enlèignent  de  i'Euchariftie 
où  il  prctendoic  avoir  de  grands  avantages: 
il  eft  juOe  qu'il  nous  permette  de  nousdélaflerun  peu  dans  ce 
dernier  Livre,  en  le  rappellantau  premier  eftat  de  la  queftion, 
£c  en  luy  reprefentant  les  divers  détours,  aufquels  il  a  eu  recours 
pour  embaraflér  cette  matière. 

Il  fe  fouvienc  fans  doute  de  l'origine  de  noftre  difpute,  6c 
dudedeindu  traitté  qui  l'a  fait  naiftre,  dont  je  renouvelle- 
ray  la  mémoire  aux  autres  en  peu  de  paroles. 

Comme  il  y  a  quantité  de  gens  qui  n'ont  pas  moyen  de 
donner  à  l'étude  des  controverfes  autant  de  temps  qu'il  en 
faudroit  pour  examiner  toute  la  tradition;  qu'il  y  en  a  d'au- 
tres qui  n'en  font  pas  capables  5  &:  que  d'autres  enfin  après 
avoir  entrepris  cet  examen  n'y  trouvent  pas  toujours  afîèz 
de  lumière  pour  fe  déterminer  dans  le  choix  de  tant  de  diffé- 
rentes opinions  qui  partagent  ceux  qui  portent  le  nom  de 
Chreftiens  ,  on  crue  qu'il  eftoic  utile  de  propoferàcesdiver- 

BBbb 


562.  Liv.  Fil I.  Preuves  authent.  de  l' union  detEg.  d'Or^ 
(es  fortes  de  pcrfonnes  une  voye  plus  courte  pour  les  aider 
à  prendre  parti. 

Cette  voye  confiftoit  à  leur  montrer  d'une  part  toutes  les 
Eglifes  Chreftiennes  unies  au  temps  de  Berenger  &  depuis  Be- 
renger,dans  la  confefîion  de  la  prefence  rëelie^ôcde  lautreà 
leur  faire  tirer  de  là  cette  confequence,  qu  eftant  impolTible  que 
cette  créance  fe  foit  établie  de  nouveau  dans  toutes  ces  E2;lires 
fans  qu'il  y  ait  paru  aucune  trace  de  cette  innovation ,  on  doit 
croire  que  c'eft  la  dotflrine  perpétuelle  de  l'Eglife. 

Tout  cela  eftoit  compris  dans  un  fort  petit  Traître,  Se  ce  fut 
en  le  réfutant  que  M.  Claude  commenta  defe  fignaier  dans  le 
monde  èc  dans  fon  parti. 

Sa  première  réponfe  contenoit  toutes  les  ouvertures,  &  toutes 
les  adrelTes  qu'il  a  depuis  pouffees  plus  loin.  II  tafcha  première- 
ment d'éluder  cette  preuve  par  une  voye  d'exception  en  s'effor- 
^ant  de  détourner  les  efprits  de  cette  nouvelle  méthode  &  en 
leur  prefentant  un  amas  de  difficultex  tirées  des  Pères  des  fix 
premiers  fiecles,  pour  leur  perfuader  que  le  changement  qu'on 
pretendoit  eftre  impoffible  ,  eftoit  effeclivement  arrivé.  Mais 
comme  il  jugea  bien  que  le  monde  ne  fe  payeroit  pas  tout 
à  fait  de  cette  defFaite,  il  répondit  direc1:ement  à  l'argument 
du  premier  traitté  de  la  Perpétuité,  en  niant  le  fait ,  c'eft  à 
dire  cette  union  de  toutes  les  Eglifes  dans  la  dodrine  de  la 
prefence  réelle ,  S>c  en  avançant  un  fait  entièrement  oppofé 
qu'il  exprima  en  ces  termes  deciCifs. 
M.  Claude  i,  le  foutieïis  ,  dit-il  ,  ^ue  la  tîanl[uhfiantiation  (i^  l'adoration  au 
Rép.  p.  19.  Sacrement  font  deux  chofes  inconnues  à  toute  la  terre  à,  la  referve 
de  l'E'^life  Romaine.  Car  ny  la  Grecs  ,  ny  les  Arméniens  ,  ny 
les  RuIJtens  ,  ny  les  Jacobites  ,  ny  les  Ethiopiens  ,  ny  en  gênerai 
aucun  Chreflien,  hormis  ceux  qui  fe  foumcttent  au  Pape^  ne  croyent 
.  rien  de  ces  deux  articles. 

Or  comme  lemot  de  tran(Tubfl:antiation  comprend  tant  la 
dodrinede  la  prefence  réelle  que  celle  du  changement  du 
pain,  il  pretendoit  foutenir  par  \l ,  que  ces  Chreftiens  Orien- 
taux ne  croyoientny  l'un  ny  l'autre  de  ces  deux  points  ,  & 
qu'ils  n'eftoient  d'accord  avec  l'Eglife  Romaine  ny  dans  le 
dogme  de  là  prefence  réelle^  ny  dans  celuy  de  la  tranfllibftan- 
tiation. 

Après  avoir  ainfî  rejette  ce  fait  qu'on  avoit  pris  pour  fon. 
dément ,  dans  la  crainte  qu'il  eut  qu'on  ne  l'en  crufl:  pas,  il  at- 


I 


auec  l'Eglifè  Romaine  fur  rEuchmfiie.  jéj 

taqua  la  confequence  qu'on  en  avoit  cirée,  &  il  tafcha  d'expli  Ch.  T. 
quer  par  quelle  voye  ces  dogmes  auroient  pu  fe  glifler  dans 
l'Egliie  Latine,  depuis  le  neuvième  fiecle  jufqu'au  commen- 
cement de  l'onzième  5  mais  il  ne  dit  pas  un  feul  mot  de  tout 
l'Orient.  Il  s'arrefta  uniquement  à  nier  que  ces  Societez  crullent 
la  prefence réelle,  tant  il  eftoit  convaincu  qu'il  eftoit  ridicule 
de  prétendre  que  le  Livre  de  Pafchafe  etiffc  perverti  toutes 
lesÈglifes  Orientales  qui  n'en  oûirent  jamais  parler. 

On  fuivit  à  peu  prés  dans  la  réfutation  qu'on  fit  de  cette  ré- 
ponfe  de  M.  Claude  la  voyc  qu'il  avoit  marquée.  On  tafcha 
de  luy  faire  voir  l'injudice  de  ce  détour  artificieux,  par  lequel 
il  avoit  voulu  empefcher  qu'on  s'appliquaftà  confiderer  la  for- 
ce de  cette  preuve  tirée  de  l'impoifibilité  du  changement 
univerfel  de  créance  fur  un  article  fi  important. 

On  détruifit  les  voyes  par  lefquelles  il  avoit  tafcKé  de  mon- 
trer que  la  créance  de  la  prefence  réelle  s'eftoit  introduite 
infenfiblement  dans  l'Eglifè  Latine  durant  le  dixième  fiecle, 
ôcl'on  confirma  ce  confentement  des  Eglifes  d'Orient  avec  l'E- 
glifè Romaine,  par  quelques  preuves  convaincantes,  en  té- 
moignant eftre  étonné  que  M.  Claude  euftofé  nier  un  fait  fi 
confiant. 

Mais  cet  étonnement  venoit  de  ce  qu'on  ne  connoifToit  pas 
encore  fon  efpritSc  fon  génie,  &  que  l'on  s'imaginoit  que  pour 
l'obliger  à  fe  rendre,  il  fuffifoitque  les  chofesfufiènt  vrayes& 
bien  prouvées.  On  a  efté  bien  contraint  depuis  de  changer  de 
fentiment  ;  Et  il  eut  grand  foin  de  nous  détromper  fur  ce  point 
dés  fa  féconde  réponfe.  Car  bien  loin  d'y  demeurer  d'accord  de 
bonne  foy  de  ce  fait,  qui  nefepouvoic  raifonnablement  con- 
tefter  j  il  continua  de  le  nier  avec  plus  de  hauteur  &  de  fierté 
qu'il  n'avoit  encore  fait.  Il  s'efforça  même  de  tourner  l'Auteur 
de  la  Perpétuité  en  ridicule  fur  ce  fujet  .•  il  prétendit  répondre  à 
toutes  fes  preuves .-  il  en  propofa  pour  fon  fentiment  qu'il  appelle 
convaincances  5  &  il  les  conclut  en  ces  termes ,  qui  font  voir 
combien  il  croyoit  avoir  bien  xtvS^v.  Que l' Auteurne prétende  donc 
plus  mettre  de  fon  party  les  communions  fe  parée  s  du  Pape.  Car-qaoy  ^^  '      *"  ,   * 
qu'on  les  put  (fe  accuferd' eftre  tombées  dans  une  ignorance  ajjez^rof- 
Jteredes  myfteres  du  Chrifiianifme^^  d'avoir  corrompu  leur  première 
foy  par  beaucoup  d'altérations  ^  fi  cf. ce  qu'on  ne  fçauroit  leur  im- 
puter la tranffuhfantiation  {Cous  laquelle  M.  Claude  comprend 
la  prefence  xcqWq)  fans  leur  faire  tort. 

BB  bb  ij 


564  L I V.  V H I.  Preuves  authen.  de  t union  des  Eg.  d'Or. 

On  avoite  qu'on  fut  touché  de  quelque  force  d'indignation 
en  voyant  une  opiniaftrecé  Ci  déraifonnable  i  de  forte  que  pour 
elfayer  fi  l'on  pourroit  faire  céder  un  Miniftre  à  l'évidence  de  la 
vérité,  on  ralîèmbla  dans  le  premier  tome  de  la  Perpétuité  un 
fi  grand  amas  de  preuves  claires  ëc  precifes  fur  ce  points  qu'on 
craignit  avec  raifon  qu'il  n'y  en  cuft  trop  ,  ôc  que  les  ledeurs 
n'en  fuficnt  chargez.  En  effet  ce  fut  l'impreflion  que  ce  livre  fît 
fur  toutes  les  pedonnes  équitables:  &  fi  l'on  n'euft  eu  foin  de  di- 
verfifîer  ces  preuves  par  quelques  évenemens  hiftoriqnes  qu'on 
y  a  mêliez,  à  peine  en  euft-on  pu  fouftrir  la  multitude. 

Ce  fut  dans  cette  occafion  que  M.Claude  voulut  montrer  juf- 
qu'où  il  f<^avoit  porterfa  hardiefieànierles  chofes  claires ,  &: 
l'arc  qu'il  prétend  avoir-de  les  obfcurcir.  Car  s'eftant  engagé  de 
répondre  à  cet  ouvrage  pour  fatisfaire  ceux  defon  partie  il  ne 
voulue  rien  abandonner  de  ce  qu'il  avoic  avancé.  Il  foucint  de 
nouveau  plus  hautement  que  jamais  que  les  Grecs  ne  croyent  ni 
la  prefence  réelle  ni  latranfiubftantiation.  Il  s'infcriviten  faux 
contre  les  Conciles  qui  avoient  condamné  Cyrille  Lucar  ,  con- 
tre le  livre  d'Agapius,  &  contre  celuy  de  Gabriel  de  Phila- 
delphe.  Il  prétendit  faire  paiïèr  pour  faux  Grecs,  &  pour  pen- 
fionnaires  de  la  Cour  de  Rome  ceux  qu'il  ne  pouvoit  éluder 
autrement,  &  il  tafcha  de  mettre  defon  parti  les  Grecs  qui  a- 
voient  vefcu  avant  ces  derniers  temps ,  en  leur  imputant  une 
opinion  chimerique,qui excluoitSc  la  prefence  réelle  &  la  tranf- 
fubflantiation,  &  qui  n'eftoic  différente  de  celle  des  Calviniftes 
que  par  quelques  termes.  Il  en  fit  de  même  àj'égard  des  Armé- 
niens, deCopches,  des  Jacobites^  des  NellorienSj  8cdes  Ethio- 
piens. Et  tout  cela  avec  tant  de  hauteur,  de  confiance,  d'in- 
iultes,  que  cela  palîé  tout  ce  que  l'on  en  peut  dire. 

Quand  il  promet  dans  fa  préface  ce  qu'il  doit  traitter  dans 
fon  livre.  On  verra  ,  dit-il,  dans  mon  ouvrage,  i.k  fkuss'ETE^ de 
cette  fuppojition^  que  Li  vcritahle  Eglife  Grecque  ^  les  autres  So. 
ciclezJDricntcilcs  croyent  la  tranffubfia'ûtiation ,  &  qu  elles  adorent 
le  Sacrement,  comme  fait  l' Eglifc  Romaine.  On  y  verra  le  contraire 
y^  CLAIREMENT  eflabli  <^  les  preuves  de  M.  Arnauldjî  SOLIUE- 
MENT  deflruites^  qu^ on  s'étonnera^  je  rrCaffure^quHl  ait  irai tté  cette 
matière  avec  tant  d'êhlouijfement  j  ^  néanmoins  avec  tant  de  con- 
fiance ^  tant  de  hatiteur. 

Et  en  recueillant  à  la  fin  de  fôn  ouvrage  le  fruit  de  ces  preten- 
dues  victoires.  Si  M.  Arnauld,  dit-il  j  a  quelque  chagrin  de  fe 


avec  l'BgliJe  Romaine  fhr  l'Si'ichxrtfiie.  j^j 

•voir  déchu  de  cette  qrande  cfpc)\tnce  qu'il  avait  conccuc  touchant  les  Ch.  Î. 
Grecs ,  les  Arméniens^  é"  les  autres  Eq^ltfes  Orientales  ,  cela  mè^ 
me  luy  fera  connoi^rc  qn'ihie  faut  pas  juger  des  chofcs  fur  lespre- 
mieres  apparences.  Et  plus  bas  !  Quant  aux  véritables  Grecs ,  nous 
fommes  ajfurcz^  de  deux  chofcs ,  l'une  qu'ils  ne  tiennent  point  la. 
tranffuhfiantiation  des  Latins  5  ce  que  je  croy  avoir  prouvé  demo'H- 
ST  B<  AT  IV  EMI.'NT}  l'autre  que  ce  font  eux  fculs  qu'il  faut  appeller /a 
véritable  Eglife  Grecque,  quand  même  le  parti  contraire  deviendrait 
le  plus  fort. 

Si  l'on  veut  fçavoir  ce  que  c'efl  que  ces  prétendues  demon- 
ftrations,  on  n'a  qu'à  lire  la  Réponfe  générale,  ou  l'excellent  li- 
vre du  Père  Paris  Chanoine  régulier  ,  intitulé:  La  créance  de 
ï  glife  Grecque  touchant  la  tranjfubfiantiation  défendue  contre  la 
réponfe  du  Minifire  Claude.  On  y  verra  que  ce  ne  font  que  de 
miferables  chicaneries  indignes  d'eftre  propofées  par  un  hom- 
me fincere  &:  judicieux  ,  &:  que  jamais  perfonne  n'entreprit  au 
contraire  de  combattre  une  venté  iî  claire,  par  àts  raifons  fî 
peu  vray-femblables. 

Mais  il  me  fuffit  de  faire  remarquer  que  jufque  icy  M.  Clau- 
de a  perfiftc  à  nier  ce  fait  :  que  tout  ce  qu'on  luy  a  peu  repre- 
fenterneluy  apoint  fait  changer  de  refojution,  &  ne  l'a  point 
porté  à  reconnoiftre  qu'il  s'eftoit  mal  engagé  :  Que  bien  loin 
qu'on  ait  trouvé  mauvais  dans  Ton  partiiqu'il  ait  pris  cette  voye 
de  le  deffendre,  il  en  a  receu  au  contraire  des  recompenfes 
confîderables  &  il  s'y  eft  acquis  par  là  un  grand  rang  Se  une 
haute  réputation  :  &  enfin  que  quelque  fentiment  que  les  Mini- 
ftres  ayent  dans  le  cœur  des  prétentions  de  M.  Claude,  il  ne  s'en 
eft  point  encore  trouvé  d'aflez  fin ceres  pour  avouer  qu'il  s'é- 
toit  opiniaflré  mal  à  propos  àfoutenir  des  faits  évidemment 
faux. 

Il  paroift  donc  que  ce  deflein  defoûtenir  que  les  Societez 
d'Orient  ne  croyent  point  la  prefence  réelle  ni  la  tranfTubftan- 
tiation ,  n'eft  pas  un  enteftement  particulier  de  M.  Claude, 
mais  quec'eft  uneconfpiration  générale  de  tout  le  party.  Quel, 
que  partagez qu^ils  foient  de fentimens  parmi  eux  furcepoint 
de  fait,  cette  divifion  n'éclate  point  au  dehors.  La  crainte  em- 
pefche  les  uns  de  fe  déclarer  :£c  nous  verrons  que  l'impreifion 
qu'elle  fait  fur  les  efpritsefl  fi  forte,  qu'elleagitjufques  fur  ceux 
qui  font  à  Conftantinople,  &  qu'elle  les  empefche  de  rendre 
publiquement  témoignage  à  la  vérité  dont  ils  avouent  qu'ils 

BBB  b  hj 


^66  Liv.  VIII.  Vrewves  authen.  de  r union  des  ig.  d'Or, 
ionc  convaincus.  La  plufparc  des  autres  croyenc  fans  examen 
ce  qu'ils  voyenc  foutenu  avec  fierté  dans  le  livre  d'un  de  leurs 
principaux  Minières.  Enfin  ils  s'uniflenc  cous ,  quoyque  par 
divers  motifs ,  dans  cette  prétention. 

Comme  nous  avons  ainfi  moyen  déporter  encore  plus  loin 
l'évidence  de  ce  fait,  êc  de  le  mettre  en  un  tel  jour  qu'on  ne 
p  ourra  plus  le  nier  fans  une  folie  toute  vifible  j  il  efl:  important 
de  ne  pas  négliger  cet  avantage  ,  ô^de  faire  voir  aux  fimples 
Calvinifbes  par  cet  exemple  combien  ils  ont  peu  defujec  defe 
fier  aux  aflurances  que  leurs  Miniftres  leur  donnent,  que  l'Ecri- 
ture &  les  Pères  favorifent  leurs  opinions,  &:  combien  ils  en  onç 
de  croire  au  contraire  que  s'ils  font  aflez  hardis  pour  les  trom- 
'  per  dans  deschofesfi  notoirement  fauifes  qu'ils  en  font  con- 

vaincus par  des  millions  de  témoins  vivans,  ils  les  trompent  fans 
doute  avec  bien  moins  de  referve  lorfqu'il  s'agit  des  écrits  des 
morts,  quine  font  plus  en  eftat  delesdémentirj&qu'ainfi  pe- 
chantcomme  ils  font  dans  le  principe  de  toute  inftrudion  ,  qui 
eft  U  fincerité&  la  bonne  foy  ,  ils  ne  méritent  plus  d'eftre 
écoutez  fur  des  matières  de  Relidonoùron  a  tancd'intereft 
de  n  être  pas   trompe. 

Nous  allons  donc  reprendre  en  peu  de  paroles  l'argument 
capital  fur  lequelroule  tant  le  premier  traittéque  le  premier 
volume  de  la  Perpétuité,  afin  d'avoir  lieu  d'y  ajouter  ces  nou- 
velles preuves.  Il  fe  réduit,  comme  nous  avons  dit  ailleurs,  à  ce 
R.gener.c.  i.  fyllogifme  conditionel.  Si  toutes  les  Communions  feparées  de 
l'Eglife  Romaine  qui  font  répandues  par  toute  la  terre ,  fe  font 
trouvées  unies  au  temps  de  Berenger  avec  l'Eglife  Romaine 
dans  la  créance  de  la  prefence  réelle ,  il  efl;  contre  toute  appa- 
rence de  raifon  de  s'imaginer  qu'elles  puiflent  efl:re  venues  à 
cet  efl:at,  par  une  innovation  &  un  changement  univerfel  de 
""  créance  fur  ce  myfl:ere  ,  qui  fe  foit  introduit  depuis  Pafcafe 
jufques  à  Berenger,  comme  les  Miniflrres  le  prétendent.  Or 
toutes  les  communions  fchifmâtiques  d'Orient  fe  font  trouvées 
avec  l'Eglife  Romaine,  du  temps  de  Berenger,  dans  la  créance 
de  la  prefence  réelle.  Donc  il  efl:  impoflible  qu'elles  en  ayent 
changé,  c'efl:  à  dire  qu'il  eft  neceflaire  que  la  dodrine  de  la  pre- 
fence réelle  ait  efté  perpétuelle  dans  toutes  ces  focietez. 

Tout  cetargument,  comme  on  l'a  remarqué  au  même  lieu, 
fe  réduit  à  un  fait  que  l'ony  fuppofe,&;à  une  confequence  que 
Ton  en  tire.  Le  fait  eft,  que  toutes  les  communions  fchifmati- 


d'vec  ÏEglife  Romaine  furtêuchmfiie.  567 

que  d'Orient  eftoient  d'accord  avec  l'Eglife  R  omainCj  dans  la  q^    j 
doftrine  de  la  prefence  réelle,  au  temps  de  Bercnger. 

La  confèquenceeft  qu'il  eftimpoffible  qu'elles  foienc  venues 
à  cet  eftat  par  innovation. 

Ainfi  tout  confifte  à  prouver  ce  fait  &  cette  confequence. 
On  l'a  déjà  fait  pleinement  dans  le  premier  tome  de  la  Perpé- 
tuité j&  dans  la  réponfe  générale:  Et  on  le  va  faire  icy  encore 
plus  plemement, s'il  fe  peutjfans  qu'il  Toit  même  befoin  de  rnifon- 
nemenr,  parce  que  les  preuves  en  confiftçront  en  des  acles  qui 
le  décident  d'une  manière  qui  ne  fouffre  point  de  réplique. 

Je  fçay  que  ce  qu'on  eft  obligé  de  prouver  eft,  que  toutes  ces 
communions  Orientales  efloient  d'accord  avec  l'Eglife  Romai-  - 
ne, au  temps  de  Berenger  fur  la  dodrine  de  la  prelènce  réelle. 
Mais  comme  on  a  fait  voir  dans  la  réponfe  generale,qu'on  ne 
fçauroit  dire  fans  renoncer  au  fens  commun^  qu'elles  ayenc 
changé  de  créance  depuis  Berenger  jufques  à  ce  temps  icy,  il  eft 
vifible, qu'en  prouvant  que  toutes  ces  Societez  croyent  prefen- 
rement  la  prefence  réelle  6c  la  tranlTubftantiation,  on  prouvç 
qu'elles  la  croyoient  auffi  du  temps  de  Berenger.  Nous  com- 
mencerons donc  cette  preuve  par  l'établifTementduconfente- 
ment  prefent  de  l'Eglife  Romaine  avec  toutes  ces  Societez  dans 
le  dogme  de  la  prefence  réelle,  &  dans  plusieurs  autres  points. 
Car  quoy  qu'il  n'y  ait  que  celuy  de  la  prefence  réelle  qui  foie 
efîèntiel  à  l'argument  du  livre  de  la  Perpétuité  ,  on  ne  lailTera 
pas  de  voir  la  tranffubftantiation,  l'adoration,  le  facrifice,  &  di- 
vers autres  arti«;les  prouvez  avec  la  même  évidence  par  les  at- 
tefl:ations,&aLT-es  que  nous  allons  produire,  fur  lefquelsnous  ne 
ferons  aifcune  reflexion,  parce  qu'ils  font  fi  clairs  8c  fi  précis 
qu'on  ne  fçauroit  rien  ajouter  à  leur  évidence  ny  à  leur  force. 


568  Liv.  VII J.  Vrcwves  amhent.  de  l'union  des  Eg.  d'Or. 


CHAPITRE     II. 

Uwon  de  l'E'zlifc  Grecque  avec  l' Eq^Ufe  Romaine  fur  VEuchurifiie 
frouvèe  par  l'attention    He  ,fcpt  A'rchcvcfqKes  d'Orient, 

ON  a  déjà  prouvé  dans  le  premierTomede  la  Perpétui- 
té l'union  prefence  de  l'Eglile  Grecque  du  Patnarchax 
de  Conilantinople. 

Par  le  livre  d'Agapius  Religieux  du  mont  Athos  dont  on 
peut  voir  l'Extrait  au  livre  \i.  p.  43. 

Par  l'Ecrit  d'un  Seigneur  Moldave  infcré  tout  entier ,  p. 
50.  &c. 

Par  un  Synode  entier  tenu  en  l'Ille  de  Chypre,  l'an  1668. 
rapporté  p.  73. 

On  y  a  ajouté  dans  la  réponfe  générale,  p.  izS. 
L'extrait  d'un  Catechifme  de  l'Eglife  de  Conftantinople, 
imprimé  à  Venilé  en  1635.  &   autorifé  parle  Théologien  de 
cette  Eglife  Patriarchalc. 

L'Extrait  de  la  célèbre  ConfeOion  Orthodoxe  ,  fignée  àçs 
quatre  Patriarches ,  6i  de  plufieurs  autres  Evefques  d'Orient. 
p.  138. 

Une  confeffion  de  foy  exigée  par  Methodius ,  Patriarche 
de  Conftantinople.  De  Hilarion  Cicada  Théologien    de  la 
grande  EglifC:,  tirée  des  Regiftres  de  cette  Eglife ^  p.  149.  &; 
plus  au  long,  p.  i6i.  &c. 
L'atteftationde  huit  Religieux  du  mont  Athos  p.  150.  &  175. 
L'Atteftation  du  Patriarche  Methodius.  p.  151.  6rc. 
Le  témoignage  d'un  Preftre  de   Candie    nommé  Michel 
Chortacius ,  tiré   d'un  livre  imprimé    à  Venife,  l'an  1641, 
rapporté  p.  i<;i3. 

L'éclairciflement  exigé  du  même  Hilarion  fur  le  Synode  de 
Chypre, qui  confirme  encore  la  dodrinede  l'Eglife  Grecque 
fur  l'Euchariftie  ^p.  206. 

Mais  comme  M.  Claude  ne  s'eft  pas  encore  rendu  à  ces  té- 
moignages 3  nous  luy  en  allons  fournir  de  nouveaux,  dont  le 
premier  fera  celuy  de  fepc  Archevefque^  Grecs  ^  contenu 
(dans  l'Atceftation  fuivante. 

ATTEST. 


a^i'ec  ÏEglife  Komnine  fur  ÏEuchuriftie.         569 

'ATTESTATION     B  E     SEPT 
^Archevêques  d'Orient. 

C~^  Eux. là  cherchent  inutilement  la  vérité,  qui  ne  cher- 
^  chent  pas  fes  ruiiTeaux  par  les  fources  Evangeliques ,  & 
s'efforçant  de  l'établir  feulement  par  leurs  propres  raifonne- 
mens ,  &  par  une  vaine  Philofophie  s'éloignent  avec  jufle 
raifon  du  but  qu'ils  fe  font  propofez  ,  &  s'engagent  dans  des 
précipices,  tâchant  en  même  temps  d'y  attirer  leurs  frères  avec 
eux.  C'eft  le  propre  des  Calvinirtes  qoi  font  en  France,  qui 
enflez  de  vanité  6^  de  hardieffe ,  calomnient  impudem- 
ment noftre  tglife  Orientale ,  &  luy  impofent  hardiment  les 
plus  noires  impoftures,  publiant  par  tout  qu'elle  s'accorde  avec 
leurs  opinions,  &  confent  à  leurs  phantaifics ,  quoique  néan- 
moins leur  opinion  abfurdeSc  extraordinaire  touchant  le  Saine 
Sacrement  de  l'Euchariftie  &  quelques  autres  points,  aiteflé 
bafouée  &:  rejettée  par  des  Conciles  particuliers  alTcmhlez  à 
Conftantinople,comme  illégitime  5c  inconnue  à  l'Eglife  Orien. 
talc.  C'eG:  pourquoy  le  tres.illuftre  &  très-excellent  AmbalTa- 
deur  du  Sereniffime  ScTres-Chrétien  Roy  de  France,  Meiîire 
Charles  François  Olier,  Marquis  deNointel ,  nous  ayant  de- 
mandé un  jugement  véritable  bi  fincere  des  articles  à  nous 
propofez  :  Nous  fouffignez  avons  crn  devoir  eflTectuer  une  de- 
mandé fi  pieufe  6c  Çi  légitime  fur  les  fentimens  de  l'Eglife 
d'Orient. 

Premièrement  fjrle  Saint  Sacrement  del'Eucharifliejnous 
difons  que  le  corps  vivant  de  J.  C.  qui  a  elle  crucifié ,  qui  eft 
monté  aux  Cieux  ,  &  qui  eft  alfis  à  la  droite  du  Père ,  eft  véri- 
tablement prefent  dans  l'Euchariftie  ,  mais  invifiblement. 

2.  Que  le  pain  &  le  vin  ,  après  l'invocation  du  Preftre  ,  & 
après  la  confecration  ,  font  changez  de  leur  propre  fubftance, 
au  vray  corps  &  fang  de  J.  C.  &  que  quoique  Icsaccidens  qui 
demeurent  paroiflent  fous  les  apparences  du  pain&:  du  vin,  ils 
ne  lont  néanmoins  ni  pain  ni  vin. 

3.  Que  l'Euchariflie  eft  un  facrifice  pour  les  vivans  &  les 
morts ,  établi  par  J.  C  bi.  que  les  Apoftres  nous  ont  laiifé  par 
tradition. 

4.  Que  le  corps  de  J.  C.  dans  l'Euchariflie  eft:  mangé  tout 
entier  impaffiblement  par  ceux  qui  le  reçoivent,  dignes  ouin- 

CCcc 


Ch.  1 1. 


jyo  Liv.  VI 1 1.  Preuves  authen.  de  F  union  des  ig.  d'Or. 

dignes  j  l2s  dignes  le  rec^oivenc  pour  leur  faluc ,  5cle.s  indignes  à 
leur  condamnation  5  6c  qu'il  eft  immolé  fansefFafion  delang, 
Se  adoré  juftemenc  comme  Dieu. 

5.  Qj-ie  l'Eglife  ordonne  desjeunes&:  l'abflinencede  quelques 
viandes. 

6.  Que  les  Chrétiens  rendent  à  la  Vierge  une  vénération 
d'Hyperdulie  ,  §c  aux  Saints  qui  font  dans  le  Ciel  un  honneur 
particulier,  fans  dmiinuer  l'adoration  qu'on  doit  à  J.  C. 

7.  Qu'il  faut  honorer  relativement  les  images  des  Saints,  & 
non  pas  les  adorer  du  culte  de  latrie. 

%.  Qu'il  faut  honorer  bi.  refpecler  les  Saints ,  comme  ayant 
fpufferc  pour  J.  C. 

9.  Que  les  Evêques  par  un  ordre  établi  de  Dieu  font  au 
defTus  des  Preftres ,  qui  reçoivent  la  grâce  divine  par  leur  mi- 
niflere. 

10.  Que  rEpifcopateftrecefTaire  dans  l'Eglifede  J.  C, 

11.  Qiie  l'Eglife  Catholique,  baftie  lur  le  fondement  des 
Prophètes  Se  des  Apoftres ,  J.  C.  en  eftant  la  pierre  angulaire , 
fera  toujours  vifible  &  infaillible. 

II.  Que  le  Baptême  eO:  neceflaire  à  tous  les  enfans  des  fidè- 
les poureftre  fauvez. 

13.  Que  les  vœux  des  Preftres  &  des  Moines,  &  les  prières 
qu'ils  font  font  agréables  à  Dieu. 

14.  Que  les  Livres  deTobie  ,  Judith  ,  la  Sagefle  ,rEcclefîa- 
ftique,  Baruch,les  Machabées  ,font  partie  delà  Sainte  Ecri- 
ture ,  bi  ne  font  pçint  rejettez  comme  ceux  des  Payens. 

ij.  Qiie  lEglile  Orientale  reconnoîc  aulîî  lept  Sacremens, 
-comme  elle  l'a  appris  par  tradition. 

Nous,  Enfans  de  l'Eglife  Orientale  ,  croyons  toutes  ces  cho- 
fes  de  cœur  fans  aucune  difficulté,  6c  les  confelFons  de  bou- 
che, ayant  recjii  de  toute  antiquité  des  Pères  Scdesfaints  Con- 
ciles ,  la  tradition  qui  nous  fait  ainfi  croire ,  &  ceux  qui  ont  fur 
ces  points  d'autres  fentimcnsfont  dans  une  erreur  pernicieufe 
&  préjudiciable.  Outre  cela  ils  parlent  impudemment  dans  U 
fureur  qui  les  apte  contre  noftre  confeflîon  orthodoxe  &  con- 
tre l'Eglife  d'Orient  ,&  murmurent  contfelle  avec  la  der- 
nière infolence,  voulant  montrer  qu'elle  eft  tombée  dans  \c$ 
fcntimens  de  perfonnes  obfcures,  £c  qu'elle  a  abandonné  les 
coutumes  6c  règles  deies  Pères,  que  les  traces  de  ces  mêmes 
Pères  ont  autorifées,  ôcles  Synodes  ont  confirmées  j  comme 


a<vec  PEgUfe  Romaine  fur  VEuchurïflïe.        571  ' 
celuy  de  Conflantinople  fous  le  Patriarche  Cyrille  de  Beroce,  Ch   II. 
&:un  autre  peu  après  ^Parthenius  furnommé  le  Vieil  eflant  Pa-  Témoignage 
triar'.he  ,  qui  condamnèrent  des  articles  infâmes  fous  le  nom  ach^v^nlT 
de  Cvr''le  T.nrar    ^  'e'^  reietterent  comme  des  prodiges  ôc  dfs Conciles 
faufletez  qui  s'accordoient  avec  les  rêveries  des  Calviniftes.  Et  «""f<^°""e 

1  ,'  \  I  1      r   I       /->        n  1  1        CjriiltLucar, 

la  retutaiion  o«.^  ces  Chapitres  Janscherde  Cyrille,  dans  la-  rcjcttezpar 
quelle  fes  fauflltez  eltoient  renverfées,  a  efte  mile  dans  les  ^^-C'-u^e 
Archives  de  la  grande  Eglife.  C'eft  pourquoy  nous  avons  figne,  '^°"^"^*  ^ 
certifions  tous  les  articles  ci-defTus  mentionnez  à  tous  ceux  qui 
croyent  Se  pro^^siTent  la  véritable  Religion. 
DoNNi'àPera  1671.  18.  Juillet.  Signez, 

Barthélémy  d'Heraclee'.  Metrophane  deCyzique. 
Jer£mie  de  Calcédoine.    Antoine  d'Athènes. 
Methodius  qv.  Pisidie,       Joachim  de  Rhodes. 

Neophiti  de  Nicomedie. 

EXTRAIT  Jj'VlSfE  LETTRE  DE  M.  T)E  NO  INTEL  ^ 

yimbajfadeur  de  fa  Miijcj'lé  Très  Chrétienne  à  la  Forte 
de  Confiantineple  ce  i^.  Septembre  1671. 

LA  crainte  où  je  fuis  que  votre  zele  ne  nous  fift  foufTrir 
avec  impatience  de  recevoir  de  mes  lettres  fanseftre  ac- 
compagnées de  quelques  preuves  du  fait  qui  cft  en  queftion  , 
m'oblige  à  vous  en  envoyer  une  fort  authentique,  puifqu'elle 
eft  ïïgnée  de   fept  Métropolites.  C'efl  une  atteftation  de  leur 
foy  fur  l'Euchariftie  ,  l'invocation  des  Saints  ôc  quelques  autres 
points  importans.  Quatre  de  ces  Meflieurs.  là  eftoient  rerirez 
chez  moy,pour  fe  garantir  de  la  perlècution  de  Parthenius.  Les 
trois  autres  efloient  ou  dans  le  Palais  d'Angleterre, ou  chez 
leurs  amis  ^  &  quoique  feparez  de  demeure  ,  ils  ont  concouru 
enfemhledans  la  même  volonté,  d'atcefterune  vérité  Çi  publi- 
que ,&  qu'ils  avoient  déjà  certifiée  avec  Parthenius  j  même  en        „. 
la  profeffion    de  Cicada.  Ils  ont  lu  les  articles  à  loifir,  &les  mécdansU 
ayant  trouvez  conformes  à  la  doctrine  deTEglife  d'Orient,  ils  répouie gene- 
ont  commis  le  foin  d'en  drefler  l'atreftation  à  un  Papas  qui  a  "^"^^ 
efté  long  temps  en  Angleterre  &:  en  Hollande  ,  t<  qui  ne  parle 
point  en  Calvinifte  ,  ainfique  vous  le  jugerez  par  lale«^urede 
cet  acte. 

Ces  Evêques  m'ont  remercié  de  la  peine  que  je  prenoisde 

CCcc  \\ 


cyi  Liv.  VI  H.  Preuves  authen.  de  f  union  des  Eg.  d'Or. 

vouloir  afTurer  la  foy  de  leur  Eglife  contre  les  calomnies  dont 
on  s'efForc^oic  de  la  noircir  ,  &  m'ont  afTuré  qu'ils  auroient  bien 
de  la  joye  de  fijner  la  même  chofe  dans  un  Synode. 

CHAPITRE      III. 

Union  de  l' Eglife  Grecque  avec  l' Eglife  Romaine  fur  l' Eucharijîie  ^ 
prouvée  par  les  Atteflations  des  Eglifes  de  l'Archipclage. 

oAtte^Ation  de  l Eglife  de  tljle  Siphanto. 

Confcflion  de  la  'Ooclrine  de  l' Eglife  fainte  de  Siphanto  touchant 
le  Sacrement  de  l Euchariflie. 

AYant  eftc  informez  d'un  très-mauvais  bruit  que  quelques- 
uns  des  fuperbesHeretiques  de  nos  jours  font  courir,pour 
calomnier  malicieufement  nôtre  fainte  Eglife  Catholique  des 
Grecs,  nous  attribuant  fans  fujet  quelques-unes  de  leurs  here- 
fies,  quoique  la  fainte  Eglife  Catholique  de  J.  C.  ait  de  tout 
temps  efté  exempte  de  toute  mauvaife  doclrine&herefie  ,afin 
d'avoir  un  prétexte  deperfifter  dans  leurs  folles  opinions, prin- 
cipalement fur  le  fujet  des  faints  Sacremens  du  corps  &  du  fang 
de  J.  C  Et  quelques  perfonnes  demandant  à  fçavoir  exademenc 
nôtre  véritable  fentiment  fur  le  divin  myftere  de  l'Euchariftie , 
afin  de  connoiftre  clairement  fi  ces  Hérétiques  trouvent  dans 
des  Catholiques  comme  nous  un  prétexte  légitime  à  leurs  mau- 
vais fentimens ,  ou  enfin  fic'eft  tout  au  contraire  ,  nous  avons 
crû  qu'il  falloir  par  cette  confeflion  repoufier  leurs  vaines  pa- 
roles   &  nous  juftifier  de  leurs  injuftes  foup<;ons. 

Nous  confefions  donc  publiquement,  &  publions  clairement 
contre  cette  folle  perfuafion  noftre  fentiment,  quieftceluy  des 
Grecs  fur  ces  chofes;  &  noftre  opinion  que  nous  avons  reçue  de 
j.  C.  Car  il  a  dit  lui-même  ,  Cecy  ejl  mon  corps  ,  &  Cccy  efl  mon 
fang  ,  fur  lefquelles  eftant/ortement  établis ,  nous  confeffons 
comme  nous  le  penfons ,  &  difons  d'une  voix  de  tonnerre. 

Premièrement ,  que  le  corps  même  de  J.  C.  que  la  Vierge  a 
ccmçû  fins  corruption  qui  a  fon  ame  6c  fon  efprit,  crucifié,  réf. 
fufcitc  ,  élevé  aux  Cieux  ,  &:  afllsà  la  droite  du  Père  ,  eft  cer- 
tainement &:  verirablement  prefent  dans  l'Euchariftie  ,  bien 
qu'il  foit  invifîble  félon  fa  forme  fubftnnrielle  ,  6c  que  c'eft  le 
Verbe  même  ,Dieu  6c  Homme  j  qui  eft  dans  le  faine  Pain, 


•'  arvec  ÎEglifi  Romaine  fur  ÏEucharïflit.         575 
..  2.  Qu'il  entre  dans  la  bouche  de  tous  ceux  qui  le  reçoivent  Ch.  IIi, 
des  dignes ,  &  de  ceux  qui  ne  le  font  pas ,  pour  le  falut  des  di- 
gnes ,  &  pour  la  condamnation  des  indignes. 

5.  Que  le  pain  &  le  vin  font  changez  &  transélementez  j  de 
forte  que  leurs  fubftances  &  leur  nature  s'écoule  &  fe  détruit 
entièrement,  &  que  les  fubftances  du  pain  &  du  vin  ne  demeu- 
rent plus  après  la  confecration,  mais  le  corps  même  6c  le  fang 
de  J.  C.  prêtent  en  la  figure  &  gouft  du  pain. 

4.  Que  l'Euchariftie  eftun  véritable  facrifice  que  l'Eglife  fon- 
dée fur  les  loix  établies  par  J.  C.  offre  par  tradition  des  Apô- 
tres pour  lesvivans  &les  morts. 

f.  Que  le  faint  pain  devant  la  confecration  efl:  honoré  d'un 
culte  relatif  comme  antitype  du  corps  de  |.  C.  mais  qu'après  la 
confecration  il  le  faut  adorer  d'un  culte  de  latrie  ,  car  alors  il 
eft  J.  C.  tout  entier, 

6.  Qu'il  faut  que  les  Chrétiens  invoquent  la  fainte  Vierge  5: 
les  Saints  qui  font  dans  le  Ciel  à  leur  fecours,  &:  que  par  là  J.  C. 
nôtre  médiateur  n'efl:  ofFenfé  en  aucune  manière,  mais  qu'il  en 
eft  plus  honoré. 

7.  Qu'il  faut  honorer  les  Saints  &  leurs  Reliques. 

8.  Que  nous  Orthodoxes  devons  honorei:  leurs  images  d'un 
culte  relatif 

9.  Qu'il  y  a  fepc  Sacremens  de  l'Eglife  ,f<;avoir  le  Baptême  , 
le  S.  Chrefme  ,  la  Communion,  la  Pénitence  ,  l'Ondion  des 
malades ,  l'Ordre  facré  ,  &  le  Mariage. 

10.  QLie  les  Evêques  font  au  delfusdes  Preftres ,  Si  qu'ils  ont 
feuls  le  droit  de  les  ordonner. 

11.  Que  le  gouvernement  d'un  Evêque  Orthodoxe  &  ver- 
tueux eflneceifaire  à  l'Eglife. 

n.  Que  l'Eglife  Catholique  ne  peut  jamais  manquer  contre 
la  fainte  doclrine. 

13.  Queles  Livres  de  Tobie,  Judith  ,  laSagefTe,  l'Ecclefiafli- 
que  ,  Baruch ,  &  àts  Macabées , ,  quoiqu'apochry  phcs  chez  les 
Hébreux,  font  néanmoins  partie  de  la  fainte  Ecriture. 

Atlianafe  Archevêque  de  Siphanto,  ^ 

Parthenius  Choretis  Prédicateur  de  l'Evangile. 

Nicolas  Canditijs  Preftre  £c  Oeconome  de  Siphanto. 

Le  Preftre  Mancganaris  Sacriftainde  Siphanto. 

George  Preftre  Ruiïîen  Protopapas  de  Siphanto^ 

CCcc  iij 


X75  Liv.  VI M. Freuojes nuthen. detuniond^s Eg. d'Or, 
Antoine ,  Jeroulbeneris ,  Protofincelle  de  Siphanto. 
Le  Diacre  Ermartis  Protonocaire  de  Siphanto. 

ATTESTATION  B^  r EGLISE  D'ANDROS^ 

L'Atteftation  de  l'Eglife  d'Andros  contetiarit  a'&ïofuriTén'r' 
les  mêmes  termes ,  on  ne  l'a  point  inlerée.  Elle  eft;  fignée 
par  Jacques  Archevêque  d'Andros. 
Denis  ancien  Archevêque  de  Milo. 
Jean  Prcftre  Econome  d'Andros. 
Stamafius  PreftreSacriftain  d'Andros. 

ATT eSTATION    DE    L'EGLISE 

de  Siphanto  fur  Agapiîi^. 

N  nous  a  demandé  à  l'Eglife  de  Siphanto,  touchant  la. 

vie  du  Moine  Agapius  de  Crète,  qui  a  compofé  en  langue 
vulgaire  un  Livre  intitulé  ,  le  Salut  des  Pécheurs ,  fi  c'eftoit  un 
homme  qui  eull:  quelque  vertu  ;&  nous  témoignons  félon  la 
réputation  qu'il  a  parmy  la  plupart  des  Grecs ,  que  c'eftoit  un 
homme  vertueux  &•  vénérable,  &  qui  a  fait  honneur  à  l'Eftac 
Monaftique.  C'eft  pourquoy  nous  avons  donné  cecy  pour  faire 
eonnoiftre  la  vérité.  1671. 

ATTE  ST  ATI  ON     B  E    L' E  G  L  I  S  ^ 

de  l'ijle  d'-^naxia. 

NOus  foufïïgnez  Preftres  Se  Clercs  de  l'Ifle  d'Anaxia  „ 
ayant  appris  par  des  perfonnes  dignes  de  foy,  que  quel- 
ques Calviniftes  de  France  nous  impoloient  injcftement  de 
i'ouftenir  nous  &  noftre  (ainre  Eglife  Catholique  d'Orient  les 
opinions  qu'ils  ont  touchant  l'Euchariftie  &  quelques  autres 
points  particuliers ,  pour  leur  fermer  la  bouche  ,  &  que  noftre 
foy  paroifîè  à  toute  la  terre,  nous  faifons  ce  prefent  écrit  , 
afin  qu'il  eu  ioit  un  témoignage. 

Premièrement  donc  nous  confeiïons  que  dans  la  fainte  Eu- 
charift.e  eft  contenu,  &  fe trouve fubftantiellemcnt  &  réelle- 
ment nôtre  Seigneur  J.  C.  avec  fon  corps,  fon  fang,  fon  ame 
&  fa  divinité,  &  que  par  laconfecration  la  iubftancedu  painôc 
du  vin  eft  changée  au  corps  &  au  fang  de  J.  C.  lequel  chane- 


amev  tEglife  Romaine  fkr  l'Euchxridte.  çyj 

menteft  appelle  par  les  Théologiens  tranlîubllantiation  :  de  Ch.III. 
force  qu'il  ne  refte  plus  rien  du  pain  &:  du  vin  que  les  feules  ef- 
peces  ou  les  apparences  du  pain  &  du  vin,  &  que  la  fiinte  Com- 
munion donne  beaucoup  de  grâces  à  ceux  qui  la  reçoivent 
avec  un  coeur  pur  &:  net ,  comme  au  contraire  il  y  a  une  grande 
punition  pour  ceux  qui  la  reçoivent  avec  une  conicience  cri- 
minellCjôc  que  la  ïaince  Euchariftie  doit  élire  adorée  d'un  culte 
de  latrie. 

2.  Nous  confèfTons  que  lafainteEglife  a  pouvoir  d'ordonner 
le  jeune  Se  l'ahftinence  de  quelques  viandes. 
.  .3.  Que  nous  avons  befoin  du  fêcours  des  Saints ,  &:que  nous 
les  pouvons  invoquer  avec  toute  lorte  dejuftice,  fans  commet- 
tre aucune  injuftice  contre  J.  C.  nôtre  médiateur. 

.4.  Que  nous  honorons  juftement  leurs  faintes  Reliques. 
.  5.  X^e  c'eften  cela  que  confifte  le  culte  relatif 
,,  j6.Que  les  Sacreraensde  l'Eglife  font  fept^fçavoir  le  Baptê- 
me, la  Confirmation,  la  Communion,  la  Pénitence, l'Ondion 
des  malades ,  l'Ordination  &  le  Mariage. 

7.  Que  les  Evêques  font  au  defllis  des  Preflres,  &  fêuls  les 
peuvent  ordonner. 

8.  Que  le  gouvernement  de  l'Evêque  eft  neceffaire  dans  l'E- 
glife. 

9.  Que  la  fainte  Eglife  demeurera  jufqu'à  la  fin  du  monde 
inébranlable  &  vifible. 

10.  Que  cette  même  Eglife  eft  infaillible. 

11.  Enfin  que  les  Livres  deTobie,  de  Judih  ,  de  la  Sagefle  , 
del'Ecclefiaftique,  de  Baruch  &  des  Machabées  font  partie 
de  la  fainte  Ecriture. 

Nous  confelTons  toutes  ces  chofes^êc  pour  confirmation  de 
la  vérité  ,  nous  faifons  ce  prelent  écrit ,  6c  le  fienons  de  nnftre 
popre  main,  A  Anaxiale  11.  Juillet ,  l'an  du  Seigneur  1671. 

Tzan  Preflre  ,.Ecotwn>e  d'Anaxia. 

Séraphin  Religieux  &  Cor-  Evêque. 

Damafcene  Religieux  &  Vicaire  de  l'Archevêque. 

Sophronius  Religieux  &  Confefleur. 

Maciire  Reiisiieux. 

Le  Papas  George  fjLiXicropyoi. 

Le  Papas  Nicolas  Econome  de  Drimalia. 

Le  Papas  Nicolas  Sacrillain  du  même  lieu. 

Papas  Nicolas  Melifurgus, 


p6  LïV.YlU.  Preuves  autben.de  Tunion  des  Eg.d'Or, 
Le  Preftre  Marc  Raropulus. 
Callinicus  Religieux. 
Jacques  Preftre  x.êf/2êAAa«. 

ATTESTATJOl^  DES  EGLISES  BES  ISZES 

de  Cephalonie  ,  Zante  é^  Itaque. 

Payfius  par  la  mifericorde  de  Dieu  Archevêque  de  Cepha- 
lonie ,  Zante  5c  Itaque. 

ESTANT  venu  à  nôtre  connoiflance  que  quelques  héréti- 
ques de  France  calomnient  nôtre  Eghfe  d'Orient,  com- 
me eftant  participante  dé  leurs  here(îes,  non  feulement  fur  le 
fujet  du  faint  &  vénérable  corps  du  Seigneur  dans  l'Euchari- 
ftie,  mais  auffi  fur  d'autres  points^nous  avons  crû  eftre  obli- 
gez à  repoulTer  cette  calomnie  qu'ils  avancent  contre  nôtre 
Eglife ,  6c  de  faire  paroiftre ,  déclarer  &  témoigner  clairement 
que  nôtre  Eglife  d'Orient  a  toujours  cru  6c  croit  par  la  grâce 
de  Nôtre  Seigneur  J.  C. 

Premièrement,  que  le  corps  de  nôtre  Seigneur  J.  C.  crucifié 
pour  nous ,  qui  a  efté  élevé  au  Ciel  ,6c  eft  affis  à  la  droite  du 
Pere,eft  réellement  6c  invifiblement  prefent  dans  le  faint  pain, 
quand  il  eft  confàcré  par  les  Preftres. 

2.  Que  le  pain  6cle  vin  après  la  confecration  du  Preftre,  font 
changez  de  leur  propre  fubftance  en  la  véritable  ^  propre  fub- 
ftance  de  J.  C. 

3.  Qiie  l'Euchariftie  eft  un  facrifice  établi  par  J.  C.  pour  les 
vivans  6c  les  morts ,  6c  qui  nous  a  efté  donné  par  la  tradition 
des  Apoftres. 

4.  Que  le  corps  de  J.  C.  eft  abfolument  mangé  dans  l'Eucha- 
riftie impaifiblement  par  celuy  qui  le  reçoit,  qu'il  eft  offert 
d'une  manière  non  fanglante,  6c  qu'on  l'adore  comme  Dieu 
par  une  adoration  de  Latrie. 

J.  Que  l'Eglife  peut  ordonner  des  jeunes  ,  6c  défendre  de 
certaines  viandes. 

6.  Que  ceux  qui  prient  la  Vierge  Marie  6c  les  Saints  qui  font 
dans  le  Ciel ,  rendent  à  J.  C.  l'honneur  qui  luy  eft  dû. 

7.  Qii'il  eft  jufte  d'honorer  6c  de  loiier  les  Saints. 

8.  Qu'il  eft  à  propos  d'honorer  les  images  par  rapport  j  c'eft- 
à-dire  par  un  culte  relatif 

9.  Que  les  Evêques  par  l'ordre  établi  de  Dieu  font  au  deflus 
des  Preftres ,  donc  ils  re<^oivenc  la  grâce  facerdocale. 

10. 


i 


dnjec  TEgîifè  "Romaine  ftir  tEuchariflie.  577 

j^io.  Que  la  dignité  Epifcopale  eft  necefTaire  dans  l'Fgliie  de  Ch.  IIÎ. 
Jesus-Chmst. 

I  r.  Que  l'Eglife  Catholique  a  eflé  pendant  tous  les  fiecles  vi- 
£ble  fi  infaillible. 

II.  Qu'il  y  a  fept  facremens  de  TEglife. 

13.  Que  les  Livres  de  Tobie ,  Judith  ,  la  SagcHe  ,  l'Ecclefîa- 
ftique  ,  Baruch  &  les  Machabees,  font  partie  de  TEcriture 
Sainte  ,  6i  lonc  reconnus  pour  tels. 

Nous  avons  fait  cette  déclaration  ,  afin  que  notre  foy  pa- 
roille  afluréeSi  ferme  dans  les  chofes  où  oneft  en  peine  il  nous 
croyons  mal  &  autrement  que  cela,&  pour  en  faire  un  aCt& 
qui  puiiTe  fervir  d'Original  ,  nousavons  voulu  l'accompagner 
de  nos  foufcriptions  &  déclarations  de  nos  fentimens. 

PaysiuS  Archevêque  de  Cephalonie  ,  Zante  ^  Itaque  i^fouf. 

cris  ^  confens  a.  ce  qui  a  efté  écrit  ci-deffie^s, 
T I M  o  T  H  fc'£  ,  Ty pâlie  Protopapof  de  Cephalonie. 
Clément  Prcftre  Proto.Syncelle  de  la  grande  E^life. 
Gerasme  Coulompis  Prefire  (jr  Econamè  de  Cephalonie. 
EsTlENNE  Preftre ^  SAcelLirius  de  Cephalonie. 
Jeak  Lycoudis  Preflre  ChartophyUxde  Cephalonie. 
Nicolas  Mycalitzes  PreftreSicvophylax  de  Cephal&nie. 
Theophane  Religieux  Prcjire  de  Petinz^. 
Timothe'e  Samicus  Reliz^icux  ^  Abbé  du  Sepulchre, 
SiMEON  Genatha  Religieux ,  Abbé  du  Monajîere  dit iiffor. 
Metrophane  ComjTopulus  j  Abbé  du  Mona^ere  dit  ^x^- 

Parthenius  OloubarduS  PrcjIre  Abbé  du  Monajîere  du. 

Prophète  Elie. 
Caliopius  LitadaS  Rstiy  eux  Abbé  du  Monafiere  deS,  André. 
Daniel  Dania  Religieux  Abbé  du  Monaftere  de  S.  Jcafi- 

Baptijie. 
Chrysanthe   Zt R^ u s  Religieux  Abbé  du  Mono/} ère  de  tcuy 

les  Saints. 
Metrophane  Religieux  dit  Li'&.iardopulus ,  Abbé  du  Mona. 
fiere  de  Omalle. 
Chariton  Religieux  Abbé  du  Monaftere  de  la  Source  de  Vie. 
S1MEON  Grouspas  Religieux  Abbé  de  S.  Nicolas. 
Metrophane  Religieux  é-  Abbé  du  M.  de  la  Sainte  Vierge. 
loANNIOlUi  Religieux  Abbé  du  Mont  de l'Apoflre  S.  André. 

DDdd 


57^  Liv.  VI  î  I.  Preuves  authen.  de  V union  des  Eg.  d'Or. 

D I  o  M  E  D  E  Rclipcux  dit  Netaxai^  Abbè  du  Mont  de  S.  Michel. 

Constantin  Balsamon  Grand  Vicaire  de l' Archevêque  62 
Proropnpas  de  Zance  ,  j'afllire  ainfi  5c  déclare  que  non  feule- 
inentlEglife  Orientale  &  Oecumeniquede  J.  C.  croit  ain  fi  , 
&  rejette  ces  herefies ,  mais  enco're  qu'elle  anathematife  tous 
ceux  qui  ont  ces  fentimens ,  ôc-ks  rejette  de  (à  communion  , 
comme  des  membres  pourris. 

HiACiNTE  Matz^rgtis  Preflre  ^  Econome  de  Zante. 
George  Prc/Ire  SacelLtnns  de  Zante.  . 
EiJSTATHiuS  Pre/he  ^  Scevophylax  de  Zante. 
Hector  Pas  us  Preftre  (^Canophylax  de  Zante. 
Constantin  Eleaza-r  Preflre  &■  Sacellion  de  Zante. 
Jean  Calchias  Preflre  ^  Protecdicus  de  Zante. 
Anastase  Athanasakis  Preflre  Protonotaire  de  Zante. 
Pierre  Aboures  Preflre  Lo^o thêta  de  Zante. 
Basile  Catramis  Preflre  Ganticius  de  Zante.  T 

Stammatius  Roucanes  ^reftre  Jeroînnemon  de  Zante. 
Mathieu  Roucanes  Religieux  du  Monaflere de  Saint-Jean- 
Bapùfle  dans  le  Château  de  Zante. 

Cette  Attcftation eft  écrite  partie  en  Grec  vulgaire, 
partie  en  Grec  littéral. 

ATTESTATION   DE    L'EGLISE  DE  L'ISLE 

de  Mycone. 

A    LA   GLOIRE  DE    DIEU    LE   PERE. 

NOus  fouiïîgnez  Evêques  &  PreHres,  ayant  appris  par 
des  témoignages  certains  &  mamfeftes  qu'il  y  a  quel- 
ques Hérétiques  dans  le  Paysdela  France,  qui  avec  une  har- 
diellè  extraordinaire  ,  &  fans  crainte  de  Dieu  nous  im.pofenc 
quelques  erreurs  contraires  à  la  Foy  que  nous  profclFons.^  & 
principalement  fur  le  Sacrement  de  la  Sainte  Euc.':^'-iîli^-  ,  ^r 
quelques  autres  points  particuliers  :  Nous  avons  refolu  &:  dé- 
cerminé, félon  ies règles  qui  s'obfervent  dans  nôtre  Eglife,  de 
nous  oppoier  à  une  fi  grande  inlolcnce  ,  6c  de  la  reprimer  ,  en 
montrant  la  faulT;ré  de  leur  calomnie  par  uneexpofition  fin- 
cere  &  véritable  de  nôtre  Foy  fur  ce  Sacrement ,  &  furplu- 
ficnirs  autres  points  dont  nous  fommes  informiez. 
C'eft  pourquoy  nous  croyons  6c  certifions  c]i;e  le  propre  corps 


ai'ecrEgli/è  Komaîne  /uriBucharifîie,         ^79 
de  J.  C.  vivant  quia  eftë  crucifié  ^  qui  eft  monte  aux  deux  ,;2c  Ch.  III. 
qui  eftalFi^àla  droite  du  Pere,eft  prefenc  dans  la  fainte  Eu- 
charilbe  ,  bien  qu'il  loitinvifible  ,&  qu'il  ne  paroifle  point. 

Qu'il  entre  dans  la  bouche  de  ceux  qui  la  reçoivent  bons  &: 
mauvais,  pour  le  faluc  des  bons  &:  la  condamnation  des  roé- 
chans. 

Que  le  pain  &  le  vin  font  véritablement  changez,  &:  perdent 
leur  propre  iubllance  ;  de  forte  qu'après  la  Conlecration  la 
fubftance  cki  pain  6c  du  vin  ne  demeure  plus,  maisle  cor^sôC 
Je  fang  de  J.  C.  efi:  preient  fous  la  forme  du  pain  i>:  du  vin. 

Qi-ie  la  lamte  Euchanftie  eft  un  véritable  Sacri^fice ,  que 
jîorre  Eglife  fondée  fur  les  loix  établies  par  J.  C.  &L  avec  la 
Ks;a."!tion  des  Apoftres  ,  offre  pour  les  vivans  &  pour  les 
^orts. 

Que  le  corps  de  J.  C.  prefenten  la  fainte  Euchariftie  doit 
eûreadoré  d'une  adoration  de  Latrie. 

Que  l'Eglile  peut  ordonner  aux  Chrétiens  de  sVoilenir  de 
certaines  viandes. 

Que  les  Chrétiens  ontbefuin  d'invoquer  à  leur  fccoiirs  la 
-fainte  Vierge  &:  les  Saii  ts  qui  lont  dans  le  Ciel  ,&  que  cette  in- 
vocation nebleflèpoint  J  C.  nôtre  Médiateur. 

Qii'il  faut  honorer  les  Images  parun  culte  de  fervitude relatif. 

Qu'il  y  a  fept  Sacremens  de  l'Eglife. 

Qiie  les  Evêques  félon  l'ordre  établi  de  Dieu  font  au  deffus 
des  Preftres ,  &  qu'eux  feuls  peuvent  les  ordonner. 

Que  l'Eglife  Catholique  fubfiftera  toujours,  fine  deviendra 
point  invifibie. 

Que  l'Eglife  ne  fe  peut  tromper. 

Que  les  Livres  de Tobie,  de  Judith  .de  la  Sageffe,  de  l'Ec- 
clefiallique,  de  Baruch  £c  des  Machabées  lont  partie  de  la 
Sainte  Ecriture. 

Que  nous  devons  honorer  les  Saints  &  leurs  Reliques. 

Marc  Prcfire  Econome  de  M  icône  ,  Grand  T^icairc  de  l'Eve. 

que. 
Le  Papas  Laprianm  Sdccllamts. 
DemetriuS  SrevophyLix. 
Georges  Cartophylax. 
Joseph  Religieux. 
Le  PApas  Philoièe  premier  Chantre. 

D  D  d  d  i) 


580  Liv.  VWLVrewves tiuthen. de Tuntondes Bg.d^Or. 
Le  Papas  Isaye. 
Le  Papas  Pantelei. 
Le  Papas  Baptiste. 
Le  Papas  Gerasj.m  J^idus.  Je  certifie  ce  qui  eft  ci- deflus. 

ATTEST  AT  I  O  N     B^     L'EGLISE 
de  l'Jjle  de  Milo. 

AYanc  entendu  parler  d'un  très- mauvais  bruit  qu^oo  fait 
courir  contre  nous  qui  femmes  de  l'Eglife  Grecque, & 
Habitansdel'lflede  Milo,  à  fcavoir  qu^il  yaquelques  perfon- 
nesenfansdes  Calvmifl:es,quife  croyent  à  la  vérité  fortfages, 
&qui  néanmoins  ne  font  pas  dans  les  véritables  fentimens ,  qui 
difent  que  nous  autres  Grecs  Orthodoxes  avons  des  fentimens 
femblables  à  leurs  mauvailês  opinions,  nous  avons  crû  qu'il 
eftoit  à  propos  de  reprimer  leur  Folie  ;  parce  que  nousau- 
tres  Orientaux  &  Catholiques  ne  foufFrirons  jamais  d'eftre  fe- 
parcz  de  la  Foy  qui  nous  a  eftë  donnée  par  Jesus-Christ  ,  & 
des  Dogmes  des  Ap^oflres  &:  de  nosPeres. 

Seigneur  J.  C.  que  cela  n'arrive  pas.  C'efl:  pourquoy  pour  con- 
damner leurs  méchantes  herefies,  pour  repoufler  leurs  calom- 
nies, &diiri,per  le  mauvais  bruit  qu'ils  ont  fait  courir,  nous 
avons  donné  ces  Articles,  pour  fcrvir  de  témoignage  de  la  pieté 
de  nôtre  foy ,  &  pour  fervir  d'inftrudion  à  ceux  qui  voudront 
embrafler  la  Foy-Orthodoxe. 

Premièrement,  nousconfefTonscontr'eux  ,  félon  la  tradition 
très-  manifefte  de  J.  C.  du  Vaiflèau  d'Election, de  tout  le  Chœur 
des  ApoftreSjIe  confentement  gênerai  des  Saints  Pères  &  des 
Conflirucions  orthodoxes  ,  que  ce  faint  pain  de  l'Euchariflie 
<3ue  nous  qui  fommes  Preftres  consacrons  tous  les  jours,  eft  le 
propre  corps  àz]  C.  crucifié  ,  refiîifcité  ,  élevé  au  Ciel,&:afiîs 
à  la  d-roite  JuPerc  ,  &:  ce  qui  eftconfacré  dan*"  '^^  calice,  noa'- 
croyons  que  c'efl:  le  précieux  fang  du  Sauveur  répandu  pour 
nous. 

Secondement,  nous  difons  à  haute  voix  ,  que  dans  ce  terri- 
ble Sacrifice  de  l'Euchariftie  J.  C.  eft:  tout  entier,  c'efl:-à-dire 
le  Fils  qui  efl:  la  parole  deDieuincarnéeavecfaûinteame  &: 
fon  efprit. 

Troifiémement ,  que  depuis  ces  paroles  ,  cccy  efl  le  corps  ^ 
le  fin^i  ces  myfteres  re<^oiverii  une  puiiiance  qui  les  difpo- 


avec  r EgU/e  Komaine  fur  r Euchariflie ,  j8i 

fè  à  la  confecration  i  &  dans  la  deuxième  prière  il  ne  refte  Ch.  III. 
plus  nila  fubftance  du  pain  ni  celle  du  vin, mais  les  feules  efpeces 
&  accidens  du  pain  &  du  vin  i  &  le  pain  cfl:  tranflubftanciéêc 
eft  confacré  au  corps  de  J.  C.  vivant  Ranimé,  comme  nous 
avons  dit  ci- deffus.  De  même  le  vin  eft  tranflubftancié  &  de- 
vient le  véritable  fans  de  Dieu  d'une  manière  admirable. 

4.  Que  nous  adorons  ces  Mvfteresde  l'Euchariftiea'une  ado- 
ration de  Latrie.  Car  queile  autre  adoration  leur  pourroic-oa 
rendre  ,  puifquej.  C.  eft  en  eux  tout  entier? 

j.  Que  l'Euchariftie  eft  un  véritable  Sacrifice , que  nous  qui 
avons  l'honneur  d'eftre  Preftres ,  offrons  pour  les  vivans  Zc 
pour  les  morts. 

6.  Qye  ces  Myfteres  apportent  un  grand  avantage  à  ceux  qui 
.les  reçoivent  avec  une  amepure,  &  qu'ils  font  le  contraire  à 
ceux  qui  s'en  approchent  autrement. 

7.  Que  l'Eglife  peut  dans  les  temps  &  jours  neceflaires  fans 
aucun  fojet  de  fcandale,  ordonner  des  jeunes  aux  fidèles,  lorf- 
qu'ilya  quelque  neceffitéou  quelque  utilité  dans  JesieuTnes, 
comme  dans  les  temps  de  fecherefle,  de  guerres,  de  maladies 
contagieufes  &  d'autres  chofesfemblables,  ce  qui  ne  va  point 
à  la  deftruclion  des  traditions  Ecclefiaftiques. 

8.  Que  nous  invoquons  le  fecoursdes  Saints  ,  &  que  nous 
honorons  leurs  Reliques  comme  faintes ,  &  que  nous  les  pre- 
nons pour  nos  IntercelTèurs  fans  bleifer  la  fov  Orthodoxe  -,  ni 
l'honneur  de  J.  C.  Dieu  &  homme  notre  médiateur  auprès  de 
Dieu. 

9.  Nous  confeiTons  qu'il  y  a  fept  Sacremens  de  l'Eglife  ,  à 
fcavoir  le  Baptême  ,  le  S.  Chrcfme  ,  la  Communion  ,  la  Péni- 
tence ,  le  Sacerdoce  ,  l'Onclion  des  malades,  &:  le  Mariage 
honorable ,  Ttyn^s  ya.fJi.es. 

10.  Outre  cela  J.  C.  avant  promis  à  l'Eglife  Catholique 
d'eftreavecelle  jufqu'ala  fin  des  fiecles ,  nous  croyons  qu'elle 

•demeure  infaillible  dans  la  Foy,&:  qu'elle  demeurera  julqu'a  !a 
fin,  êc  après  la  confommation  des  fiecles. Pour  une  Eghfeparti- 
ticuliere  il  peut  arriver  qu'elle  fe  trompe  en  quelque  opinion-. 

11.  Nous  confclTons  encore  que  lesLivres  deTobie,de  lu- 
dirh,  de  la  Sageife,  de  Baruch,  de  l'Ecclefiaftique  &:  des  Mâcha- 
bées  font  parties  delà  fainte  Ecriture. 

II.  Qi-ie  les  Evêques  (euls  ont  autorité  fur  les  Preftres 
paç  lefquels  ,  quand  il  s'en  trouve   de  vertueux  &  d'ortho- 

D  D  d  d  ii  j 


jfi  Liv.  VMI.  Treu^ves  tvuthen.  de  l'unianJ-es  ig.d'Or. 
î  î  .hD   doxes ,  l'Eglife  elt  .ucilemeot  gouvernée  ,  &  comme  il  eft  ne- 
ceiTaire.  lr.n!nnt£. 

GiRASiME  humble  Archevêque  de  Milo ,  je  certifie  cecy. 

Matthieu  Prejhe  Econome  de  Mtlo  ,  certifie  comme  deflus. 

Guillaume  Prejhe  CLorevèque de Milo. 

Q^oKCi.  Prefire  Scevophiilax. 

M I C  H  A  E  L  Prejlre  Chanophylax. 

Georges  Prejhe  (^-  Sacnjhiin. 

Jean  Prcftre  Promoteur  de  Milo. 

^■HhW  hS  Religieux  ^  Abbé. 

N 1 C  E P II O  R E  Rcliyeux  é^  Abbé. 

N I  c  o  ij  E  M  E  Religieux  5-^  Abbé. 

D  A  M  A  S  C  t  N  f  Religieux. 

Germain  Religieux, 

NtGPHii  E  Relipiux  ér-  Archimandrite. 

ATT  ESTAT  10  N    T)  E    rBGZISE 
de  l'Jjle  de  Chio. 

S'Eftant  élevé  une  aflTez  grande  difpute  fur  la  Foy  des 
Clirétiens  qu'on  doit  eftimer  laine  Se  Orthodoxe,  &  plu- 
fieurs  allurant  que  l'Eglile  d'Oricnr  avoir  quelques  opinions 
m^iuvaifes,  &  contraires  aux  véritables  i'cntimens  ,  &:  qu'elle 
etoit  dans  les  mêmes  opinions  qu'eux,  ceci  a  efté  écrit  de  Chio 
pour  la  réfutation  de  ce  menfonge  &.  la  confirmation  de  la  vé- 
rité, ou  on  trouvera  ce  que  TEglife  d'Orient  tient  pour  Ortho- 
doxe ,  5c. comme  établi  par  l'Ecriture  &  par  les  faints  Pères. 
L'an  1571.au  mois  d'Odobre,  Indiclion  première. 

Premièrement,  nous  croyons  que  la  rranlfubftantiation  du 
pain  &  du  vin  au  corps  6c  au  fang  de  J.  C.  fe  fait  par  le  Preftre 
avec  les  poiroles  de  nôtre  Seigneur. 

•j  l-  Que  la  chair  &  le  lang  entrent  dans  les  Communians. 
-f  3-  Qu'après   la  confecration  le  corps  &  le  fang  demeurent 
dans  la  fainteEuchariftie.  •  i 

4.  Que  la  lainre  Euchariftieeft  offerte  parles  Preftrespour  les 
vivans  &  pour  les  morts. 

5.  Qu'on  luy  doit  une  adoration  de  Latrie. 

6.  Que  l'Eglife  ordonne  les  jeûnes  comme  elle  veut. 

7.  Elle  dit  que  ].  C.  eft  le  feul  médiateur  pour  le  péché 
originel  Se  les  perlonnels ,  &  qu'après   fa  Rciurredion  tous 


avec  rBgii/e  KomcLwe  jfur  tEuchmfllc.  583 
les  Saints  1-e  fane  pour  les  chofes  donc  noas  avons  befoin.  Ch.  1 1 1.4 

8.  Que  Dieu  eft  adoré  d'une  manière  différence  de  celle  donc 
on  honore  les  Saints  &  leurs  Reliques,  Dieu  par  un  culte  de. 
Latrie,  la  Saince  Vierge  d'Hyperdulie  ,  Scies  Saints  de     D 

<).  Elle  rend  un  lianneur  relatif  aux  Images. 

10.  L'Eglife  a  fept  Sacremens ,  le  Baptême,  le  Chrefme,  la 
fainte  Euchariftie  ,  la  Pénitence ,  l'Onclion  des  malades ,  le  Sa- 
cerdoce ,  &  le  Mariage. 

11.  Que  les  Preftres  font  ordonnez  par  les  Evêques,  par  qui 
l'Esilife  doic  eftre  neceflairement  gouvernée. 

12.  Le  gouvernement  des  bons  Evcqueseftfortutile. 

13.  Que  TEglilène  fe  trompe  jamais.  ,  ^  Jf 
14  Qu'il  y  a  deux  Eglifes ,  la  vifible  &:  l'invifîble  j  celle  d'icy 

bas  eft  vifible  ,  celle  d'en  haut invifible. 
15.  Que  les  Livres  de  Tobie  ,  Judith  ,  de  la  SageHe,  deSyrac, 
de  Baruch  ,des  Machabëes ,  ionc  partie  de  l'Ecriture,  &fonc 
lus  comme  tels. 

L'Archevesque^^  C^/>. 

\Gn ACE  Econome  de  Chio. 

AktoinE  Prcftre.  Le  Prcflre  Parthcnins  ,  Treforicrde  Chio. 

Constantin  Prejire ,  Sacrifiain  de  Çhio. 

NiCOLifs  Frcftre  ,  Ecclcjiarque  de  Chio. 

AflMEZiNUS  Prcfire  .^  Jeromnemon  de  Chio. 

Jean  Preftre  .^  Secrétaire  de  Chio.  v'Tto^Mjiu.xTÔypApas. 

"Nicolas  Prej2re  ,  Prédicateur  de  l'Ez\.'?:^i/e. 

Clément  Religieux  de  la  Com/niDiautê  des  SS.  Cojme  (^  T)a. 

mien. 
Parthenius  Religieux  des  fa  in  t  s  Apoflres. 
Manuel  Sakes  Protonotaire  de  chio.   ]  ay  fiçrné  en  fcy  de 

cecy.  '  ^--^'^^  .        ^    '     "  ^ 

George  Prefirc .^  Carlophylax  de  Chio. 
MiCHAEL  Prcfire  ,  premier Défenfcur  ,  ou  Promoteur  ,  ■z^piTj'îo- 

Nicolas  preftre ,  Rhetor  de  Chio. 
Michel  Officiai  de  Chio. 

VnoTiTjs  Pi Cjlre  Logothc ta.  '•>    f     .  ' 

G  A:  R.FL  Religieux  ,  Docleur  é^  MaiJIre  dé  la  Communauté  de 
fiim  f/'i.ctor. 


84  Li  V .  y  II  I.  Trewves  nuthen.  de  t  union  des  ig.  d'On 


CHAPITRE     IV. 

"Union  de  l'EqJ.ifc  Grecque  avec  l'E^life  Romaine  fur  lEuehd- 
rifiie  ,  prouvée  far  le  tèmoiyqa'ie  de  plujteurs  Jlbbez, ,  Religieux 
^  Papas  Grecs  ,  contenue  dans  quelques  Relations  de  Mon- 
fieur  de  N oint  cl  Ambaj]  ideur  de  Sa  Majcpè  à  la  Porte  ,  ^par 
la  Lettre  de  J^onjicur  Panaioti  y  premier  Interprète  du  Grand 
Seigneur. 

COmme  il  n'^y  a  point  de  moyen  plus  propre  pour  s'aflu. 
rer  qu'une  doclrine  eft  généralement  re(^ûë  dans  une 
Eglife,quede  ne  s'en  infoimer  pas  feulement  de  ceux  qui  y 
tiennent  les  premiers  rangs, mais  auffi  du  commun  des  Eccle- 
fiaftiques ,  des  Religieux ,  &:  même  dt;s  Laïques  qui  la  compo- 
fent  ,  je  ne  feray  pas  difficulté  de  rapporter  rci  divers  Extraits 
des  Relations  que  Monfieur  de  Nointel  AmbafTadeur  du  Roy 
à  la  Porte  a  envoyées  à  fes  amis  à  Paris ,  qui  en  contiennent 
des  témoignages  qui  perfuaderont  toujours ,  non  feulement 
tous  ceux  qui  connoiffent  particulièrement  la  parfaite  fînceri"- 
té  decePuy  qui  les  a  écrites  j'mais  aufîî  toutes  lesperlonnesfen- 
{ç.t%  qui  ne  s'imagineront  jamais  qu'un  homme  d'honneur  qui 
fert  de  Miniflre  à  un  grand  Roy  dans  un  employ  confiderable, 
voulufl  hazarder  fa  réputation  ,  en  publiant  des  faulïètez  dont 
tant  de  gens  auroient  inrerefl  de  le  convaincre,  &  tant  de 
moyens  de  le  faire. 

RELATION  De  MOM'SIEUR    DE  NOINTEL 

-^mbaffadeur  de  Sa  Majefic  Très-  chrétienne  à  la  Porte  ,  conte- 
nant Le  récit  d'un  entretien  avec  l'Abbé  du  Monafi^re  de  Mau- 
Tomate. 

LE  premier  jour  de  Septembre  j'allay  me  promener  à 
Mauromale,  qui  veut  dire  en.  Grec  vulgaire,  Pierre  Noire^ 
c'eftpourquoy  les  Turcs  l'appellent  Karatach  ,  qui  Hgnifiela 
mêmechofe.  C'eft  une  Abbaye  de  GrecS)  fituée  en  Europe  , 
au  delà  des  féconds  Châteaux.  Elle  eft  à  micofte  ,  &  dans  un 
enfoncement  auquel  on  arrive  par  un  chemin  large,  où  le  char- 

roy 


a.'vecïEgUfe'KomùnefurÏEuchû.riflle.  _f87    ' 

roy  peut  pafler ,  6c   donc  l'accès  n'efl  point  difficile  ,   parce  Ch.    IV 
qu'on  monte  en  coiirnanc. 

Les  Religieux  foie  au  nombre  de  quarante  cinq  qui  vi- 
vent fous  Ja  Règle  de  faint  Antoine ,  &  lous  la  conduire 
d'un  Abbé.  Us  gardent  une  perpétuelle  abftinence  de  chair, 
&  l'obfervent  plus  rigoureufeles  Lundis,  Mercredys^  ^  \'cn- 
dredys.  LeurEglife  eft  petite  &:  ornée  comme  les  autres  du 
pays,  de  quantité  de  tableaux  ôc  de  lampes  allumées  qui  font 
d'argent  éc  aflez  belles. 

Je  paflaydans  le  S.i^cfa  Sanfhmm  accompû^né  de  l'Abbé. 
Je  luyfîs  demander  où  efloit  l'Euchariftie.  Il  me  montra  une 
boëte  d'argent  ou  de  fzr  blanc,  pofée  iùr  le  coin  d'un  petit  au- 
tel, qui  efV  celuy  où  l'on  confacre.  II  paroiObit  qu'il  y  avoit 
du  papier  ou  de  la  toile,  parce  qu'on  le  voyoit  déborder.  Je 
"m'informay  de  fa  croyance  fur  cemivftere.  Il  me  dit  que  c'ef« 
toit  le  véritable  corps  de  J.  C  que  l'on  confacroit  le  Jeudy 
Saint  pour  fervir  de  Viatique  aux  Religieux  malades,  auxquels 
celuy  qui  adminiRroit  ce  Sacrement,  le  portoitfur  fa  tefte. 

On  l'interrogea  s'il  ne  crovoit  pas  que  c'eftoit  du  pain.  Il 
'repondit  que  c'en  eftoit  avant  la  Confecration  ,  mais  qu'après 
la  prononciation  des  paroles  &  de  rOraifôn^  le  pain  &  le  vin 
efloient  changez  au  corps  &  au  fang  de  J.  C.  On  luy  fit  la  de- 
mande, pourquov  donc  on  voyoit  du  pain?  Il  répliqua  qu'il  en 
paroifloit,  mais  qu'il  n'y  en  avoit  point.  Se  qu'il  en  relloit  feu- 
lement les  apparences  :  que  J.  C,  avoit  déclaré  que  le  pain  de- 
venoit  fon  véritable  corps:  Moc  cft  cnim  corpus  meum^tcXQ  sm 
fon  véritable  fang  :  Mie  cjl  calix  fany-'inismei  •  &:  que  tous  les 
Apoftres qu'il  me  nommaTunaprés l'autre,  avoient  enfeigné 
cette  vérité. 

Il  y  avoit  une  lampe  devant  l'autel  où  eftoit  ce  précieux 
depoft,  ce  qui  m'obligea  de  luy  faire  reproche  de  nç  l'avoir 
point  allumée  comme  les  autres  qui  pendoien^t  devant  des  ta- 
bleaux, ce  qui  fut  caufe  auffi  qu'on  l'âliumaen  même  temps, 
toute  la  matière  eftant  prefte ,  &  ne  reftant  plus  que  le  feu  à 
y  mettre!  L'Abbé  avoua  que  c'eftoit  le  moindre  honneur  que 
l'on  devoit  à  l'Euchariftie,  que  c'eftoit  une  faute  d'y  manquer, 
&  que  nous  devions  l'adorer.  Il  me  rapporta  de  grandes  hi- 
ftoires  de  pludeurs  miracles  arrivez  pour  confirmer  la  prefence 
réelle  de  |.  C.  au  S.  Sacrement,^  il  les  recitoit  avec  une  très- 
grande  affeclion  2i  volubilité  de  langue,  témoignant  bien  de 

EE  e  e 


j88  Liv  VllI.  Preuves  authent.  de  l\wion  de  ISg.  d'Or. 
la  joye  qu'il  eufl  plu  à  la  providence  de  Dieu  de  confondre 
alors  le  doute  &  l'incrédulité  de  quclques-uos  qui  approchoient 
de  ce  divin  myftere  en  manquant  à  la  foy  qu'ils  luy  dévoient. 
3c  luy  parlay  des  Sacremensdc  l'Eglifc.  11  me  fit  dire  qu'il  y 
en  avoit  fept.  On  luy  parla  auffide  l'invocation  des  Saints. 
II  répondit  que  les  prières  qui  leur  eftoient  addreflTées  fi  fré- 
quemment par  les  Grecs  en  faifoienc  foy ,  &  qu'on  adoroic 
leurs  Images  d'un  culte  relatif 

Je  le  priay  de  me  faire  voir  les  Livres  de  l'Abbaye.  La  réponfè 
fut  qu'il  n'y  en  avoit  point  d'anciens,  parce  que  leur  maifon 
n'eftoit  r'établie  que  depuis  cinquante  ans, que  ceux  qu'ils 
avoient,  fervoicnt  .à  l'Office,;!  l'exception  de  quelques-uns  de 
dévotion  qui  efloicnt  modernes,  entre  Icfquels  il  me  nomma 
le  Livre  intitulé,  A'/x^^toAuv  aar-Afict  compofe  par  Agapius 
Religieux  du  montAthos.  Je  ni'informay  dequoy  il  traittoit. 
lime  dit  qu'il  parloit  des  fept  Sacrcmens ,  Se  particulièrement 
de  l'Euchariftie,  Se  de  la  préparation  à  la  fainte  Communion. 
Luy  ayant  reprefcnué  qu'un  Miniftre  Calvinifle  foûtenoic 
qu'Agapius  n'avoit  point  efté ,  &  qu'en  tout  cas  l'ouvrage 
qu'on  luy  attribuoit  eftoit  celuy  d'un  impofteur  qui  s'eftoit  fervi 
de  fon  nom  j  il  m'alTura  qu'il  avoit  connu  ce  bon  Religieux  , 
qu'il  elloic  Auteur  de  ce  Livre,  lequel  il  avoit  rempli  de  tou- 
tes les  veritez,  qui  y  font  contenues,  dont  il  eftoit  inftruitpar 
une  longue  leAure  de  plufieurs  bonsmanufcrits.  Enfin  il  me 
protefta  qu'il  m'avoit  répondu  la  vérité.  Luy  ayant  demandé 
s'il  voudroit  bien  la  certifier  par  une  déclaration  authentique, 
ilme  témoigna  qu'il  en  auroit  de  la  joye.  Ainfi  ilprit  les  articles, 
me  promettant  de  drefTcr  une  profellîondefoy  fur  ces  points, 
ôc  de  me  l'apporter. 

Cet  Abbé  me  parut  de  bon  fens:  &  il  parloit  afièz  jufte  fur 
toutes  les  chofes  qui  tombèrent  dans  la  converfation.  Il  me  dit 
que  du  temps  des  Empereurs  Grecs,  il  y  avoit  depuis  Topana, 
qui  ell  à  l'entrée  du  port,  jufqu'àfa  maifon  365.  Monafieres, 
&  qu'il  n'avoit  point  de  connoilfance  de  l'antiquité  du  fien  ,  à 
caufe  de  la  perte  des  titres  caufée  par  les  guerres  Se  les  in- 
cendies. 

Après  le  repas  je  montay  au  haut  de  la  montagne  du  cofté 
du  Pont-Euîcim.  C'eft  un  grand  terrain  fur  lequel  on  rencon- 
tre un  Moulin  Se  une  Ferme  appartenante  aux  Religieux.  L'on 
"y  découvre  la  Mer  noire  Se  l'entrée  du  Bofphore,6c  l'on  voit 


d^vec  rEgllfe  Romaine  fur  l'Eucharifiie.  jS9 

fort  aifémcnc  le  Canal  ,  quoy  qu'il  ait  une  demie  lieuë.  Il  Ch  IV. 
ferc  de  bornes  au  territoire  des  Religieux  qui  s'étend  depuis 
ctt  endroit  en  retournant  juiqu'au  premier  Château  d'Europe. 
Le  Grand  Seigneur  d'aprefent  s'y  promenant  il  y  a  fept  ans, 
après  avoir  bû  de  l'eau  d'un  puits  qu'il  trouva  fort  bonne^  & 
qui  l'eft  efFedivement,  s'informa  de  la  vie  de  ces  Religieux,  ic 
lors  qu'ilfçuc  qu'ils  la  gagnoient  par  le  travail  de  leurs  mains, il 
leur  fit  donner  cinquante  fequins^  &:  ajouta  à  fa  libéralité  tout 
Je  terrain  dont  je  viens  de  parler,  quia  pour  le  moins  une  lieuë 
de  long  Scune  demie  de  large,  mais  qui  cft  fi  ingrat,  ne  pro- 
duifant  de  foy  que  de  médians  bois  d'épine,  que  dans  les  meil- 
leurs endroits  il  ne  rend  que  ce  que  l'on  y  feme  ,  &  rien 
davantage. 

Ces  Religieux  ne  font  point  tourmentez  par  les  Turcs,  auC 
quels  on  a  defFendu  d'y  aller,  principalement  durant  la  neu- 
vaine  de  l'AlTomption  ,  parce  qu'ils  avoient  accoutumé  de  s'y 
enyvrer,  d'yf^ure  du  defordre,  &  d'exiger  de  l'argent  de  tous 
ceux  que  la  dévotion  y  attire.  Ce  qui  n'empefche  pas  que  ceux 
du  Château  d'Aficnc  faiTcntpalTer  à  bord  les  Barques  de  ceux 
qui  y  vont  pour  en  tirer  des  Afpres.  Le  Boftangi  Bachi  qui 
a  la  fnperioritc  furies  codes  des  environs  de  Conftanrinople, 
&  par  confequcnt  fur  celles  du  Canal ,  eft  celuy  qui  profite  le 
plus  du  concours  qui  fe  fait  en  ce  Monaftere.  Cav  les  Religieux 
pour  n'en  eftre  point  inquiétez  fous  diiïerens  prétextes,  comme 
d'yvrognerie,  de  fedition  fc  autre?  ,qui  ne  manquent  jamais  à 
l'avarice  des  Turcs  ,  font  obligez  de  luy  donner  tous  les  ans 
une  certaine  penfion.  C'eft  ainfi  qu'il  devient  leur  Protedeur 
par  fon  intereft. 

ATTESTATIOIT  BV  SV  PERIEV  R  ET  D  E  S 

Relipcux  du  Moriiiflcre   de  Mauromale. 

LA  fainte  EgHfe  Catholique  &  Apcflrolique  d'Orient, 
fondée  fur  l'Hiftoire  Evangelique  ,  Se  les  Ordonnances 
des  Apoftres,  immole  par  ia  divine  Liturgie  lesmyfleres  purs 
&  falutaires,  &  accomplit  le  myftere  non  fanglant  en  mémoire 
de  noftre  Seigneur  Jhsus-CHRiST.  Son  fentiment  ell:  que  ce 
culte  divin  s'accomplit  avec  du  pain  &  du  vm  ,  comme  le  Sei- 
gneur même  l'a  ordonné,  difant  à  fcs  faints  Difciples  &:  Apof- 
tres ,  lorfqu'il  fit  le  banquet  myfterieux:  Prenez  &  mangez, 

EE  ee  ij 


59o  Liv  .  Vlll.  Preii'ves  autbefir.  de  lunicm  des  Eg.  d'Or. 
Ce cy  efi  mon  corps^Qw  prenant  du  pain  ;  &  lorlqu'il  prit  le  Cali- 
ce 3  beuvez  en  tous,  Cecy  efi mon  fang. 

Le  Preftredonc  de  même  manière,  difant  les  mêmes  paroles 
dans  la  fainte  Liturgie,    prie  que  le  pain  6c  le  vin  propolez  de- 
viennent le  corps  Scie  Tang  de  J.  C.  &les  benilTanc  par  l'invo- 
cation  du  S.  Efprit  duquel  dépend  la  Confecration,  l'un  &  l'au- 
tre fe  changentau  corps  parfait  6c  au  fang  parfait.  C'efl  ce  que 
penfe  ,confe{re  &  croit  la  fainte  Eglife  d'Orient,  fans  avoir  au, 
cun  doute  ou  aucune  dii^culté&  fans  en  rechercher  la  manière. 
Car  la  manière  feule  eft  l'invocation  du  S.  Efprit  qui  a  tiré  tou- 
tes chofes  du  néant.  Et  la  refolution  de  toutes  les  difficultez 
que  chacun  peut  avoir,  eft  lafoyqui  eft  un  confentement  af- 
iuré  qu'on  donne  aux  chofes  qu'on  entend,  avec  une  entière 
perfuafion  de  la  vérité  ,  comme  l'appelle  le  célèbre  Baille. 
Car  celuy  qui  croit,  neconfidere  pas  feulement  les  chofes  fen- 
fibles  qui  (ont  devant  luy,  mais  les  fpirituelles.  Et  comme  nous 
croyons  que  la  régénération  6c  le  renouvellement  fe  fait  dans 
le  Baptême  par  de  l'eau  fenfible  5  de  même  nous  fommes  per- 
fuadez  que  dans  le  S.  Sacrement,  le  pain  &  le  vin  ayant  efté 
propofez  oc  fandiHez,  fontfaits  le  corps  &  le  fang  de  J.  C.  Ec 
les  faints  Pères  ont  déclaré  que  ce  facrifice  fe  failoit  avec  du 
pain  levé,  parfait  6c  fans  aucun  défaut,  6c  du  vin,  comme  Dieu 
incarné  eftoit  parfait  félon  fa  divinité  6c fon  humanité.  Carie 
pain  marque  la  propre  chair  du  Fils  de  Dieu,  ôc  le  vin  fon  fang, 
comme  lafagefîèScla  vérité  même  l'a  témoigné  de  luy-même 
en  plufieursdifcours  devant  la  Cène  myflerieufe.  Jcfuis  ,  à\t- 
\\,  le  patn  qui  eft-  dcfcendu  du   ciel ,  (^  donne  la  vie  au  monde.  Ec 
en  un  autre  endroit:  y?  quelqu'un   manque  de  ce  pain,  il  vivra 
éternellement.  Et  encore:  Si  vous  ne  m^tni^ez^la  chair  du  Fils  de 
l'Momme^  C^  ne  beuvez^  fon  fano^^vous  7^ aurez,  point  la  vie  en  vous. 
Et  quand  il  mangea  avec  fes  faints  Difciples ,  il  leur  rompit  du 
pain  6c  non  des  azymes,  comme  déclarent  les  Evangeliftes , 
difant.-Jtsus  prenant  du  pain,  le  rompit  6c  le  leur  donna,  6c  die- 
Prcnez^f^  jnangez^.,  Cecy  efi  mon  corps.  Et  Jacques  frère  du  Sei- 
gneur ^  premier  Evêque  de  Jerufalem  ordonné  par  J.  C.  le 
grand  Prêtre,  ^  qui  nous  a  le  premier  montré  cette  fainte  Li- 
turgiCj  l'a  célébré  avec  du  pain  levé.  Et  parlant  de  J.  C.  il  dit: 
Prenant  du  pain  en  fes  mains  faintes,  pures,  fans  aucune  tache 
6c  immortelles   Et  après  luy  les  divins  6c  faints  Docteurs,  pré- 
dicateurs 6c  deffenfeurs  de  la  vérité,  le  divin  Bafilc  6cS.  Chry- 


a'vec  lEgîi/è'^mAine  fur  rêuchiirijîie.  591* 

foRomc  &:  les  autres ,  tant  de  l'Eglife  Orientale  que  de  l'Occi- 
dentale, jusqu'au  Pape  Alexandre  premier,ont  célébré  avec  du 
Pain  levé.  Et  depuis  luy  l'Eglife  Romaine  a  commencé  à  fe  fer- 
vir  d'azymes  en  la  célébration  des  myfteresi  au  lieu  que  celle 
d'Orient  n'a  jamais  quitté  le  pain  levé.  Car  les  Juifs  oblervoienc 
les  azimes,  comme  la  circoncifion  Scies  autres  cérémonies  de 
l'ancienne  loy.Et  nous  n'en  obfervons  aucune  chofe  étant choi- 
fîs  pour  le  nouveau  Teftament.  Il  ne  faut  donc  point  obierver 
les  azymesj  car  les  ombres  de  la  loy  font  arrivées  à  la  vérité, 
comme  enfeigne  le  divin  Chryfoftome ,  difant  :  là,  c'efl:  à  dire 
dans  l'ancienne  loy,  efloit  la  lettte  ,  6c  icy  l'efprit.  Là  eftoic 
l'Agneau,' 5c  icy  J.  C.  Là  efboient  des  azymes,  éc  icy  du  pain. 
Et  comme  les  Apoftres  fe  font  fervisde  pain  levé  ,  de  mefme 
l'Eglife  Orientale  fur  leurs  confefîîons,  6cne  s'eloignanten  rien 
de  la  veriré  oC  de  la  vraye  foy  ,  s'en  ferf  6c  enfeigne  qu'il  s'en 
fsut  fèrvir. 

LafainteEglife  Orientale  eftaufîl  ornée  avec  raifon  des  fain- 
tes  images  de  noftre  Seigneur  J.  C.  &  de  la  Vierge  Mère  de 
Dieu  6c  de  tous  les  Samts.  Efil  eft  ordonné  de  les  honorer 
non  pas  d'un  culte  de  Latrie  ,  mais  relatif.  Car  les  images 
ne  font  pas  Dieu  ni  la  Vierge  ni  les  Saints:  mais  ce  font  des 
protctypesôc  des  arclietypesdu  Créateur  déroutes  chofes,  de 
la  Même  Vierg-e  £c  mère,  &  des  Saints  i  êc  les  honorant  nous 
en  recevons  de  grands  bienfaits.  Car  voyant  dans  une  image 
la  croix  de  J.  C-  nous  nous  fouvenons  de  fa  fainte  paifion,  de  fa 
divine  charité, 6c  de  la  grande  mifericorde  qu'il  a  eue  pour  nous. 
Saint  Luc  eft  le  premier  qui  en  acnfci  gné  l'ufage.  Et  les  faints 
Pères  ont  ordonné  qu'on  leur  rendre  l'honneur  qui  leur  eft 
deu,ayan  t  jugé  leur  vénération  jufte  6craifonnable.  C'eftpour- 
quoy  quelques-uns  ayant  tafché  par  infidélité  6c  par  tyrannie 
cic  les  oftcr  de  la  fainte  Eglife  j  néanmoins  les  dangereux  Icono- 
maqiics  ayant  efté  condamnez  par  le  jugement  divin  dufëp- 
tiéme  Concile,  elles  furent  reftablies avec  l'honneur  6c  la  pié- 
té qui  efloient  neceflaires ,  6c  il  fut  ordonné  qu'elles  ieroienc 
honorées. 

Un-  certain  Agapius  natif  de  l'Kle  de  Crète  ,  qui  apafîe  fa 
vie  dans  l'eflat  Religieux  ,  d'une  manière  fort  pieufe,  a  fait  Atteftation 
plufieurs  livres,  6c  entr'autrcs  un  qui  s'intitule:  le  falut  des pe-  ''"r agapius. 
cheurs^  ^  les  a  fait  imprimer  pour  l'utilité  publique.  Tous  ceux 
qui  -les    lifent  y     peuvent  reconnoiftre     plufieurs    chofes 

EE  ee  iij 


5';i  Liv.  VIII.  Preuves  auth.  de  T union  des  fEfr.  d'Or. 
fur  cette  matière.  Et  luy  les  ayant  ramairées  de  pliifieurs  Do- 
cteurs tant  anciens  que  nouveaux,  les  a  compote?,  félon  la  com- 
mociité  du  temps.  Et  comme  véritable ôbtcrvateur  des  paro- 
les de  l'Evangile,  il  a  beaucoup  multiplié  le  talent,  &  ayant 
cftë  iaint  pendant  toute  fa  vie,  &:  continue  jufqucs à  la  fin 
dans  de  femblables  actions,  il  s'eflrcpofé  au  Seigneur. 

■  Ce  preferit  efcrir  pour  témoignage  certain  &:  confefïïon 
alTurée  du  faint  Sacrement,  de  la  vénération  qui  efl:  dciie 
aux  Images  ,  &z  de  la  vie  religieufe  2c  monaftique  du  même 
Agapius ,  efl:  rendu  par  nous  foud^gnez  à  tous  les  Chrefliiens, 
6c  principalement  au  tres-noble  &;  très. excellent  Seigneur 
Charles  François  Olier  Marquis  de  Nointel,  très- digne 
Ambatfadeur  du  très  puilfant  Roy  de  France,  qui  nous  a  de- 
mandé fur  ces  Articles  la  vérité  de  la  foy  de  l'Eglife  d'Orient. 
Dans  Nofl:re  Monafl:ere  de  JMauromoIe  le  14.  Octobre  l'an 
de  J.  C.  1671. 

EA'TRAIT  B'Vl^E  AVTRE  RELATION, 
contenant  le  rccit  d'un  ctitretien  avec    un  Papous. 

LE  onzième  Teptcmbre  j'allay  dans  l'Eglife  êiQS  Grecs  de 
BaKtchekhu.  Je  la  trouvay  dans  une  telle  propreté  ,  &: 
toutes  chofes  dans  un  li   bon  ordre  que  j'en  fus  furpris.  Elle 
efl:  petite,  bien  carrelée,  &  ornée  d'un  plafond  de  menuiferie. 
Il  y  a  deux  rangs  de  grandes  chaifes  aux  deux  coftez  &  des 
jaloulles  derrière  pour  les  femmes.  A  la  face  du  funHa  fane 
torum,  l'on  voit  trois  ou  quatre  tableaux  de  la  Vierge,  de  noftre 
Seigneur  &  de  quelques.  Saints,  dont  les  mains  font  en  relief 
d'argent  ou  de  cuivre  doré  auffi  bien  que  les  ornemens  qui 
font  fur  la  refl:e.  Il  y  a  un  crucifix  de  bois  au  deflTus  de   la 
porte  du  milieu.  C'efl:   celle  où  le  prefl:re  vient  montrer  le 
fàint  Sacrement  ,&  ce  fut  par  une  autre  que  j'entray  dans  cet 
endroit,  nonobfl:ant  que  le  Papas  m'eufl;  die  que  les  ieculiers" 
n'y  entroient  pas.  Il  y  vint  avec  moy. 

Il  y  a  deux  petits  Autels  dans  des  enfoncemens  ;  fur  l'un 
efl:oit  le  calice ,  fa  patène  &  le  voile ,  &  fur  l'autre  je  n'y 
remarquay  qu'une  boëte  qui  me  p?rut  d'argent  avec  un  pa- 
pier qui  d'ébordoit.  le  luy  demandé  ce  qu'il  y  avoit  dedans. 
]I  répondit  que  c'efl:oit  i'Eucharifl:iè  qui  contenoit  le  vray 
corps  &:  fang  de  I.  C.  le  m'informay  de  luy  fi  l'on  ne  pou- 


a.'-v:c  V Eglife '%oméne  fur  r Etichariflie .  i,^-!^ 

'voir  pas  dire  que  c'eftoic  du  pain.  Il  m'afflira  qu  aprcs  la  con-  C  h.  IV. 
fecration,  la  fubftance  du  pain  &  celle  du  vin  efl. lient  en- 
tièrement changées  au  corps  6c  au  fang  de  J.  C.  J'infiftay 
pourluy  taire  connoiitre  que  ce  pendant  nous  voyons  du  pain 
&  du  vin  .  Il  répliqua  qu'à  !a  vérité  il  paroiffoir  à  nos  yeux, 
mais   qu'il  n'y  en  avoit  point. 

Je  luy  témoignay  quelque  curiofité  devoir  la  boëte  ouver- 
te;, mais  je  me  contentay  de  fbn  refus  que  je  pris  en  bonne 
part ,  le  loiiant  d'en  ufer  de  la  forte  ,  fc  prenant  occafion  de 
luy  dire  que  je  m'eftonnois  de  ne  voir  pas  une  lampe  devant 
]e  faint  Sacrement^  y  en  ayant  devant  fes  images.  Sa  réplique 
fufi:  qu'elle  eftoic  caflee. 

Je  luy  dis  qu'en  France  les  Catholiques  adoroient  l'Eucha- 
riftie  ,  qu'on  fe  tenoit  dans  le  lieu  où  l'on  la  gardoit  avec  un 
grand  refped.  11  reconnut  que  c'eftoit  un  devoir  indifpenfable 
non  feulement  aux  François,  mais  aux  Grecs.  Je  l'interrogeay 
fur  le  Viatique,  lime  dit  qu'on  leportoitaux  mourans,  que 
c'eftoit  pour  eux  feulement  qu'on  le  confcrvoit  dans  une  boëte 
que  j'avois  veiie  j  qu'il  la  prenoit  fur  latefte ,  qu'on  l'accom- 
pagnoit  avec  un  cierge  allumé,  &  que  le  malade  eftant  con- 
fefle  ,  6c  ayant  recité  Ion  Credo  ,  recevoit  la  communion  du 
corps  de  J.  C.  avec  adoration  . 

n  me  montra,  en  fortant  du fanchi  fanciorum ,unQ.  bouteil- 
le, me  di&nt  qu'il  y  confervoit  la  fainte  Huile;  6c  m'in for- 
mant de  l'ufigeauquel  elle  eftoit  deftinée,  il  m'apprit  qu'on 
l'appliquoit  à  ceux  qui  eftoient  à  l'extrémité. 

Je  luy  fis  encore  plufieurs  demandes,  6c  entr'autres,  files 
paroiffiens  communioient  fouvent  ,s'il  les  inft:rui(oit  de  leurs 
devoirs  principaux,  s'il  les  confefToit,  6c  s'il  difoit  la  Mefle 
tous  les  jours.  Il  me  répondit  precifement  qu'ordinairement 
les  Grecsfe  contentoientde  la  communion  Pafchale,  qu'il 
inft'ruifoit  ceux  qui  eftoient  fous  luy  le  mieux  qu'il  pouvoir, 
que  des  Caloyers  les  venoient  confefler  ,  6:  qu'il  celebroit  la 
Liturgie  les  Feftes  6c  les  Dimanches,  s'y  préparant  auparavanc 
par  le  jeufne. 

Je  luy  demanday  quelle  opinion  il  avoit  de  ceux  qui  ne 
croyoient  point  la  preience réelle  6c  la'converfion  du  pain  6c  du 
vin  au  corps  6c  au  fang  de  J.  C.  Il  n'heflta  pas  à  me  dire, 
qu'ils  n'étoient  point  Chreftiens  y  6c  m'eftant  enquis  de  luy, 
fi  le  fieur  Cyrille  premier  Drogmande  Venife  qui  demeuré 


^<)j^Liv.yUl,  PreU'Ves  atahcnt:.  de  l union  des  E^.  d'Or. 
dans  fa  paroi(re,&:  qui  eft  du  rire  Romain  ,  aHiftoic  à  la  Li-., 
tLirgie,  &:  s'il  n'eftoic  pas  receu  dans  (on   Eglife  ,  il  me  die 
qu'il  y  venoic  fouvenc  poùralufter  à  la  Mefle,&  qu'il  y  écoic 
le  bien  venu. 

le  fis  enfin  tomber  la  converfation  fur  le  revenu  de  fa  Cure^ 
flir  celuyde  la  nomination,  &  fur  le  Diocefedans  lequel  il  ci-, 
toit.  Il  m'en  expliqua  les  parciculancez,  en  me  difant  que  les' 
chariccz  de  Tes  paroilTicns^aufquels  il  pn;  coic  de  l'eau  benice  tous 
les  mois  dans  leurs  mai(onSj  le  nourrifloient,    qu'il   n'y  avcjc 
point  de  dixme  ,  &  que  rousleurs  hienj-  confiiloient  en  bois 
^  en  quelque  beftail  ,  qu'il  pouvoir  avoir  environ  une  centai- 
ne de  communians  diftribuez  en  quarante  mailons  >   que  le 
Patriarche  de  Conflrantinopleefloit  patron  de  fa  Cure, qu'il  luy 
en  avoir  confie  l'adminiftrationpour  un  an,  moyennant  deux 
mille  afpres  qui  font  cinquante  livres.  Mais  luy  ayant  reprc- 
fcntc  que  c'eliolt  un  péché  ,  il  en  convint,  le  rejcttant  furies 
Turcs  comme  eftant  lacaufe  inévitable  du  deiordre.  Il  ajou- 
ra qu'il  efloit  du  Diocefe  de  Dcreon,&:  quefonEvêque  fai- 
foit  la  vifite  dcu);  ou  trois  fois  l'année. 

Je  m'informay  du  lieu  de  fa  naillance.  I!  me  dit  qu'il  eftoic 
de  la  Morée  allez  proche  de  Lutrin,  jercqarday  les  livres  im- 
primez à  Venife,  que  je  trou  vay  bien  conditionnez  &:  fort  en- 
tiers fans  eftre  déchirez  en  aucune  manière  ,  ny  à  la  couvertu- 
re ny  aux  fciiillets,  ti  je  m'en  fis  lire  les  titres  qui  eftoicnt  : 
farucliticon,  Anihologium^  Eucholoyum ,  Triodinm  en  douze  vo- 
lumes, y  en  ayant  un  pour  chaque  mois  de  Vz.x\\~\èQ  ^Pcntecofta- 
rium  horoloyum ,  qui  font  tous  en  grec  littéral.  Il  n'y  avoic 
que  la  vie  des  Saints  de  Maximus  qui  fuften  grec  vulgaire. 

Le  Papas  me  montra  que  dans  l'Euchologeelloient  toutes 
les  Liturgies  &:  les  prières necefTaires  pour  l'adminiftration  des 
Sacremens..Il  médit  même  par  cœur  celle  qui  conçernoit  l'Eu- 
chariftie.  Je  luy  témoignay  que  j'en  eftois  fort  édifié,  Siluy  de- 
mandant s'il  avoir  étudié,  Se  ^\  on  l'avoit  examiné  pour  le  faire 
Prêtre  ,  fa  rcponfe  fut  qu'il  avoit  réduit  fes  études  aux  chofes 
les  plus  neceflaires  6c  les  plus  ifïiportantes ,  &  que  c'eftoit  fur 
(telle  là  qu'on  exaRiinoic  îorfqu'on  admettoit  à  la  preftrife. 

Enfin  l'ayant  loiiéfur  la  propreté  de  fon  Eglife,  je  me  reti- 
ray.  Il  m'accompagna,  &:  lorfque  nous  fûmes  auprès  du  Ce- 
metiere,  je  luy  témoignayde  l'étonnement  decç  qu'à  chaque 
Sepulchre  des  Grecs  on  avoic  planté  une  pierre  droite  fuivant 

l'ufage 


a,<vec  l'Eglifè  Romaine  fur  VEucharifiie.         595 
l'ufage  des  Turcs  ,luy  remontrant  qu'il  falloit  y  mettre  des  Ch.  IV. 
croix.  Mais  ne  pouvant  répondre  fur  ce  point,  il  fe  lauva  fur  la 
coutume  qu'il  avoit  trouvée  ainfi  établie. 

EXTRAIT   D'VNE    AVTRE   RELATION   CONTENANT 
le  récit  d'un  entretien  avec  un  Papas  de  Calcédoine. 

ME  trouvant  il  y  a  quelque  temps  dans  l'Eglifè  de  Calcé- 
doine ,  où  l'on  prétend  que  le  Concile  a  efté  tenu ,  je 
demanday  à  un  Religieux  qui  me  montroit  ce  qu'il  y  avoit  de 
plus  remarquable  ,  où  eftoit  le  S.  Sacrement  j  il  me  montra  un 
fac  de  toile  pendu  à  un  clou ,  dans  lequel  il  y  avoit  une  bocte , 
où  eftoit  enfermé  ce  précieux  dépoft  de  noftre  falut ,  &  pour 
fatisfaire  ma  curiofité,  il  l'ouvrit  &  me  fit  voir  les  efpeces  éc  les 
apparences  extérieures  du  pain.  On  lui  demanda  quelle  eftoit 
fa  croyance  fur  ce  qu'il  voyoit.  Il  me  répondit  que  ce  n'eftoit 
point  du  pain ,  mais  le  corps  véritable  de  J.  C.  que  l'on  confer- 
voit  pour  les  malades,  aufquels  on  en  donnoit  une  particule  j 
qu'on  confacroit  le  pain  tous  les  Jeudis  Saints  pour  cet  ufage  , 
&  que  les  efpeces  fe  confervoient  d'une  année  à  l'autre. 

Je  lui  fis  demander  pour  quelle  raifon  il  ne  tenoit  pas  le 
corps  de  J.  C.  d'une  maniera ,  &  dans  un  lieu  plus  propre  & 
plus  convenable  à  fa  Majefté.  Il  me  fie  réponfe  que  c'eftoit  la 
coutume,  que  l'Eglifè  eftoit  pauvre,  &que  dans  celles  où  il  y 
avoit  quelques  revenus  ,  l'on  en  ufoit  autrement. 

On  ne  fera  pas  difficulté  de  joindre  au  témoignage  de  ces 
Papas  celui  d'un  Laïque  qui  eft  Monfieur  Panaiotti  i  parce  que 
c'eft  un  des  plus  confiderables  de  toute  l'Eglifè  Grecque,  ^  des 
mieux  inftruits  de  fes  léntimens,&  qu'elle  contient  des  faits 
importans,  contre  lefquels  M.  Claude  a  ofé  s'infcrire  en  faux. 

LETTRE    DE    MONSIEUR    PANAIOTTI 
à  Monfieur  l'AmbalIadeur. 


B^rCELT'  DOMINE  MIMI  COr"y 

ACccptis  Litteris  ExcELLENTii£    Vestr^  ,  fuatn  ergs 
Eccleftam  T)ei  pietaiem  ,  necnon  ■nrnvua.T'xyi  avpLTfoloLS  ,  de- 
(îdiriiim  ^  fiudium  ,  haud  parum  fumadmiratm  ,  ctim  in  tantis 

FFff 


596  Liv.  VIII .  Vrcwues  authcn.  de  l'union  des  Eg.  d'Or, 

re<z,iis  non  parvi  momcnti  neqotiis  ,  apudbanc  ampkffimam  aulam 

{jualibet  horaverfetur  ^  nihdominus  zclo  vcritatis  ^pietatisamore 

fretam  hicreticorum  Gcillia  contra  Orientalcm  Ecclefiam  bUfphe- 

pnia-f  quibus l^dere putant yxii  a.d'TtfiKw  s^  à.ixvtJL'^va.   't'v  vv!J.(pyiy  ,non 

potnijje  fiiffcrre ,  ^  gladio  vcritatis  illis  refecandis  fiudcre.  Mirum 

fine  eji  ,  t^ir  ExccllcntiJJimc ,  cur  nonpudeat  Calviniante  harefcos 

Conciles  con-  fcHatores  ^pofi  tôt  Ecclejî^  Oricntalis  contra  eos  facias  démon/ira- 

ire  Cyrille  rc-  tiones ,  poji  tôt  acius  Synodales  typis  evulyttos  ,  pofi  Cyrilliance 

vrri's'par  m"    confcjjîonls  damnationcm  ,  fo^  Meletïi  Siny.    Docioris  Ecclejî.x: 

Païuiotti.       Oricntalis  prolixam  cjufdem  refutationem  ,  pofi  denique  fcpe  me- 

morat/c  Ecclejia  fidci  fua  confeffioncm  omnium  fere  Antijiitumjîio- 

rum  unanimi  confenfu   ^  confirmatione  nuperrime  publicatam  , 

Cyrille  Lucar  IMPUDENTER.     ET     PERTIN AGITER    hmc    Ecclefîam    lit 

chaire  du  Pa-  confortiu>n  pcrnitiofarum  hicrefum  juarum  advocare  !  ji  enim  Gr^e. 

triaichat  à      corum  Ecclcfi.c  fidci  confcfTioncm  [cire  cupiunt ,  qtiare  cani  folum. 

foupcons        }nodo  à  Cyrilli  quater  ob  fufpicionem  hicrefeos  fede  Patriarchali  à. 

4hercr>e.        Gr.ccis  exptilfi  ^fofi  occifi ,  ac  ultimo  publico  anaîhemati  traditi  , 

tonfe.fjîone  petunt  ?  Si  quarunt  qtiid  de  veru  (^  fubflantiali  Jepi- 

Chrifii  Servatoris  in  divino  Euchariflia.  myflcrio  pnsfentia  Gneci 

trcdant ,  infpiciant  faulifper  libros  officionim  faccrdotalium  quoi 

«PoAoyjct,  vacant ,  O'  perlegant  onitiones  quas  quilibet  Sacerdos 

éinte  &  pofi  Saeramcntorum  aljumptione^n  tenetur  ahfolvere.  Si  de 

intercedione  Sanchrum  qiiid  fcntiant  infirui   cupiunt  ,  leclitent 

duodecim  Libros  rp^  i^''ii^o\Q'y'aiv  )(^  fUu   r^r^xKnc r;x.y]i  5,  ex  qui- 

bus  'clarè  patet  eos  nihil  7na<iis  quàm    Sanciorum  interceffzonem 

efflaptarc.  Sique  de  Sacramentorum  numéro  hicjttant ,  contemplcn- 

L'igMfaaee    ^^^  ^ihros  Ritualcs  j  Ei»;)^o Ao'y'*  intitulatos.  Intelligent  enim  Gr^~ 

n'cftdonc      (OS  cum  fanfio  Areopagita  Doclore  fuofeptcm  numéro  Sacramenta 

point  fi  îrran-  profitcri.  Si  denique  de  ima^inibus  ^  jeiuniis  fanius  fapere  /?«, 

de  que  ks        ^,  -  r^:  '         r  ■    t  l    ■  -r^        .•■      •  /r- 

Miniibcsle  ^''/^^  5  To  T^idS^m  perlcytnt  ,  qui  Libn  omnes  Venetits  imprejjt-^ 
publient.  Icvi  pretio  co'émi  pojjunt.  Nulla,  Ecclcjia  Oricntalis  fine  bis  Zibris  y 
nec  nllus  Sacerdos  efi  qui  eos  ignore  t  ^  bis  Gr^ci  Graca  j  Eulgari , 
Servi ,  Moldavi ,  Valacbi  ,  Ruteni  cum  Mofcis  lingua  Sclavo- 
n  ca  iituntur ,  Arabes  Arabica  ,  ^  utuno  verho  concludam  ,  cun~ 
fli  Orientales  Chrifiiani  in  Ecclefiis  fuis  eos  pr.t  manibus  habent , 
Us  perficiunt  orationcs  fuas  ,  &  iifdem  loquuntur  Deo  (^  Sanïtis. 
Ex  quibus  omnibus  exprefjè  ^  claré  liquet  vera  ip forum  opinio^  in- 
mixa  fancliC  Scriptur^  ^  Canonibus  Apoftolorum  ^  Conciliorum 
tam  Oecumenicorum  quam  Toptcorum.  MiCC  fcnitcnturCalvinifia^  , 
^  invjenieni  veram  Onentdts  Bccle^a  conjej'Jionem  y  (^  non  k 


aivec  l'Bglfe  Komaine  fur  ÏEuchur'iflïe.       .  ^9-7 

Cyrillo  oh  perverfa  fiia  do'iynata  feâc  expulfo  ,  occifo  é^d/imnaio.  ^^-  I  ^• 
7<fec  fin^antfbi  mlferrimi  Ecclejiam  Gr^cam  chimericayn  e([e  ,  ^  de^M  nrùd 
non  altbi  quant  in  ip forum  cerebns  exifiere  5  more  modernorum  He.  qui  fe  fimuc 
hneorum  ,  qui  (tbi  reqnumà,  nullo  vifumnec  auditum  in  quu  mundi  ""'^  Egi'i'i-Je 

1  r  r  n-  ^  vrais  Grecs 

playtfitumfitconfiituunt.  <ju.  ,Veft  nui. 

Ut  autem  veritas in  poflerum  (^  cum  gloria  piorum  ^  docirina^^p^'^'^  rcfutée 
Confpicuorum  virorum  Gallorum  ,  qui  Librum  illum  eyrey.um  ,  de  ^^^^j  ^"^ 
quo  annuit  Bxcellentia  veflra ,  ediderunt ,  ^  harefeos  Calviniflica 
Jingularem  effe pernicietn  tefiimoniis  confirm.trunt  ^  cl.iriîis  eluceat ,  cvflCnifius 
mitto  nunc  ExccUenti/e  vefine  MieremiiV  Putnanhie  C.  P.  ad  Cur  ProfL-ileut  de 
Jîum  ,  ^  alios  Gennania  Calvtnifias  anno  l'^-jG.  fcriptum  refpon.    "  '"^^* 
fum  ad  aliquot  articulas  Calvini  harefeos  ,  paria  litterarum  2Ve-.  Cet  Original 
^larii    atrio-rchiC  Hierofolymitani  nuper  ad  Fayfutn  Alexandri-  ,neiK  danf  la 
num  fcripta  ,    necnon  r^  ■w^ajirvx^t  fidci   confeffionis   Orienta/is  BvjUotïicquc 
EcclejFie   Antifiitum  fubfcnptionibus  confirmatiim  :  quod  ut  hxre-  ^"^  '^°''^' 
ticis  ad  declarandamveritatcm  (^  (^oriamperpetuam  Jucc  Maje-  .     . 

flatis  ChriftianiJJîm.'C  fcpius  monftretur ,  roqo  acceptetur  ,  ac  in  déclare  cu'il 
BibliothecA  Reya  confervetur ,  cui  ego  illud  humillime   ^f^/r(?.  =1  l'Original 
Credo  dorni  mcv  Conflantinopoli  a'jroypct^of  acluum  (ynodalium  jg  par°ju''s 
fenioris    Parthcnii  contra   confejjionem  CyriUi  ,   Meletii    Sirizi  contre  Cyrille 
Orientalis   Eccleji.v  Docioris  prolixam   a^Dipp/ff'/    contra  eandem  ^ucarque  M. 
Cyrillianam  confeffionem  ,  ^  Gennadii  fatriarch^  C  p.  de  tranf-  de  i'aux. 
fubftantiatione  panis  Q-  vini  in  Eucharifiia  orationcfu  elegantif. 
fimam  ac  docli^f/îmam  me  habere  i  h^c  omnia .  curabo  quam  pri- 
muyn  fubmitti  ,  ut  omni  diligcntia  pio  ^  fanBo  x^lo  injerviam  ac 
permuneam^ 

EXCELLINTI^    VeSTR^, 


Adje^liflîmus  8c  ad  fervicium  paratiffimus , 
PanaiottaNicusius. 

AdrianopoU  20.  Decemhris  iG-ji. 

Excellenti^mo  Domino  T)oynino  fuo  Marchioni  de  T^ointel  ^ 
facra  Majeltatis  Chrijtiani.fftm.i:  Legato  ad  Portam  Otto- 
jnanam ,  ^  Domino  mihi  eolendi.f/ïmo. 

FFffij 


C9S  L I V.  VIII.  Prewves  amhen.  de  r union  des  Eg.  d'Or. 

NO  S  Carolus  Francifcus  OUer  de  Nointel ,  Re'^is  Chriftia^ 
ni.IJiwi  aâ  Imperatorn  Turcarum  Portam  Leyitus  ,  omni- 
bm.  quorum  intererit  notumjït ,  Tios  cujufcunque  dubii  ac  nebula- 
ruru  ,  quihus  Heterodoxi  Culviniani  conati  funt  in  Gallia  Gra- 
coïjon  fidem.  imflicare ,  difcuticndarum  conjîlio ,  totius  rei  vcrita- 
tcm  non  foliini  à  Patrianhis  ,  Metropolitis  ,  Q-multis  aliis-  Eccle- 
fiafiki  Ordinis  ,  verum  etiam  a  Laïcis  dihgemer  inquijivifie  :  Inter 
hos  clams  efl  Panaiotta  Turcarum  Imperatoris  Jnterpres  ,  cximiis 
do-tibtis  injîyfiis  ^  qui  qnarus  (^  pcritijjimus  docirina  Ecclcjîa  Orien- 
talis  ,  ilUus  etiam  fe  patronum  gerit tn propuqnandis  articulis  ,  qui 
illdm  4b  Occidentali  disjungnnt,  llle  ad  î^os  Epifiolamfc'ripfit , 
cujus  par  omnino  (jr  ad  minimum  apiccm  ex  altéra  pArte  ley:n- 
dum  patet.  Muic  ne  quis  fidcm  adhihere  reçu  [et  ,  hanc  dcclaratio- 
nemfecimus  ^cui^  fubfcripfmus ^  nccnonJîgtHi  nofirorum  injîgnium 
contrappjitionç  coynmuniri  curavimus.  Datum  Fera  anno  réparât^  ■ 
f^lutis.  millejïmo,  fexcentefimo  Jeptuazejimo  feCimdo  ,  quinto  idni 
Januarii. 


Olier    de    Nointel. 


CHAPITRE     V. 

"Union  pre fente  de  l'Eglife  Grecque  avec  l'Eglife  Romaine  prouvée 

par  divers  autres  tèmoiyiayis  d'Abbe'z^  ,  Religieux  ^  Papas 

contenus  dans  la,  Relation  de  M.  l' Ambajfadcur. 

ON  a  crû  devoir  rapporter  ici  cette  Relation  toute  en- 
tière ,  quoiqu'elle  contienne  plufieurs  defcriptions  qui 
ne  regardent  pas  precifément  la  matière  dont  il  s'agit ,  parce 
qu'elle  fait  voir  d'une  manière  tres-fimple  &  très-naturelle 
avec  combien  de  bonne  foy  oc  d'exactitude  Monfieur  l'Am- 
badàdeur  s'efl:  informé  du  point  du  fait  qui  fait  le  fujet  de  nô- 
tre conteftacion. 


i'vec  FEgli/e  Komaine  fur  lEuchmflie.         599 

RELATION  DV  J^OrAGE  DE  M.  DE   HO  INTEL , 
Ambaffadeur  du  Roy  à  la  Porte ,  aux  ijles  des  Princes. 

LE  dix-huitiéme  je  partis  de  bon  matin  de  Topana  dans 
un  Caïque ,  accompagné  de  deux  autres ,  pour  m'en  aller 
aux  Ifles ,  que  l'on  nomme  communément  des  Princes.  Je 
pailay  à  la  pointe  du  Sérail ,  &  vis-à-vis  de  celuydu  fanal  éloi- 
gné de  Conftantinople  de  fix  milles ,  que  nous  fifmes  en  une 
heure  de  temps.  Il  nous  en  fallut  autant  pour  arrivera  la  pre- 
mière des  Ifles  nommées  Proca  en  Grec  vulgaire ,  en  Turc  Ke- 
na!i,  quieft  une  drogue  dont  ces  Infidèles  rougifTent  les  doigts 
de  leurs  femmes ,  de  leurs  enfans  &  des  efclaves  ,  ce  qui  les  a 
portez  à  en  donner  le  nom  à  cette  Ule ,  parce  que  la  terre  en 
paroift  rouge.  Elle  eft  petite,  &  ne  confifte  qu'en  une  feule  mon- 
tagne qui  a  une  pente  ou  vallée  à  l'oppofite  deTAfie^qui  fe  ter- 
mine en  une  petite  plaine  où  nous  abordâmes.  La  terre  y  eft 
fort  feiche  &:pierreufe,  peu  cultivée  &  découverte.  Les  arbres 
qui  s'y  trouvent  en  petite  quantité  j  ne  faifant  pas  beaucoup 
d'ombre,  Scie  refte  du  terrain  n'eftant  rempli  quedebroulîail- 
les  ,  de  petks  chefnes  verts  3  de  lavande  fauvage,  &:  d'herbes 
fortes.  Je  ne  m'étonne  pas  qu'il  ne  s'y  trouvepoint  de  villages, 
&  je  ferois  furpris  qu'il  y  en  ait  eu  autrefois,  comme  il  paroift 
par  les  mazures  qui  s'y  voyent,  &les  reftes  de  quelques  citer- 
nes ,  &  par  un  puits  dont  l'eau  eft  fort  bonne ,  s'il  n'y  avoit  lieu 
de  croire  que  les  Turcs  eftant  caufe  qu'on  arrache  jufqu'aux 
racines  des  arbres,  &  qu'on  renverfe  les  maifons ,  font  des  fo- 
litudes  des  endroits  qui  eftoient  les  plus  cultivez  C'eftce  qui 
e  ft  arrivé  à  cette  I  fie ,  ou  il  n^y  a  plus  qu'un  féul  Monaftere  de 
Caloyers  fîtué  fur  le  haut. 

L'Egltfe  qui  eft  très  petite  a  efté  confacrée  fous  le  titre  de  ia 
fainte  Vierge.  Elle  eft  baftieà  la  manière  des  autres. 

J'y  enrray  avec  l'Abbé  l  je  m'informay  de  fa  croyance  fur 
l'EuchariftieJl  me  répondit  qu'elle  contenoit  le  corps  vérita- 
ble de  J.  C.  Il  me  montra  un  fac  attaché  à  la  muraille,  où  il  me 
ditqu'eftoit  le  corps  dej.  C. enfermé  dansune  boëte_que  l'on 
confacroit  le  Jeudy  Saint ,  &  que  l'on  confervoit  pour  les  ma- 
lades. Je  me  promenay  dans  la  maifon  qui  n'a  rien  de  confide- 
ble ,  &  je  m'arreftay  pour  difner  fur  une  éminence  auprès  de  la 
porte,  oùil  y  a  uncabmet  que  les  Turcs  nomment  Kiofgue. 

FFffiij 


Ch.  V. 


6oo  Li V.  VI I L  Treuojes  authen.  de  V union  des  Eg.  d'Or. 

Je  m'informay  de  la  chafle  qu'il  y  avoit  dans  l'Ille  ;  unCa- 
loyer  qui  ni'entretenoit  ,me  répondit  qu'autrefois  elleeftoic 
pleine  de  lapins  qui  mangeoient  cous  leurs  grains ,  &  que  pour 
s'en  garantir  ils  y  avoienc  mis  des  renards  qui  leur  en  failoient 
raifon^  &  qu'on  y  voyoïc  quelques  ramiers  ou  pigeons  fauva- 
ges^quife  repofenc  ordinairement  fur  des  rochers,  mais  qu'on 
auroit  de  la  peine  d'en  approcher  5  luy  ayant  dit  adieu, il  me 
reconduifit  jufqu'à  la  mer. 

Nous  continuâmes  nôtre  chemin,  Se  en  une  heure  nous  ar- 
rivâmes à  la  plus  grande  des  llles  nommée  Prinkipo  par  les 
Grecs ,  &c  par  les  Turcs  Kefeul  Ada ,  figniliant  Ifle  Rouge.  Elle 
eft  fituée  dans  le  Golfe  de  Sinit  ou  de  Nicomedier,  qui  peut 
avoir  quatre-vingt  mil  de  long  ,  ôi  n'eft  feparée  de  l'Âfie  que 
parun  trajet  d'une  lieuë  Vrunqoife.  C'eftfur  cette  cofte  de  la 
terre  ferme,qui  eft  pleine  de  montagnes,où  font  fituez  fur  quel- 
ques penchans ,  &  même  fur  le  bord  de  la  mer ,  quelques  Vil- 
lages. Il  y  en  a  un  d'eux  entr'autres  que  l'on  nomme  Boujoux , 
&  KoutechouK  ,  Malrepe  ,  qui  veulent  dire  le  grand  &  le  petit 
de  la  montagne  du  trefor.  Nous  débarquâmes  à  l'endroit  de 
rifle  qui  eft  à  peu  prés  vis-à-vis,  dans  le  feul  Village  qui  y  refte. 
Il  eft  aflèz  grand  ,  confiftant  en  cinquante-fept  maiîbns  ,  qui 
font  fîtuëes  le  long  de  la  marine  pour  la  plus  grande  partie  , 
les  autres  eftant  derrière ,  où  elles  s'étendent  dans  une  vallée 
aflez  agréable,  mais  qui  eft  petite.  C'eft  dans  ce  lieu,  où  Busbe- 
quius  marque  qu'il  a  demeuré  trois  mois  à  caufe  de  la  pefte  , 
que  je  refolus  de  fejourner  quelques  jours,  pour  avoir  leloifir 
de  confiderer  tant  cette  Ifle  que  celles  des  environs. 

Le  19.  jemontaydu  grand  matin  en  Kaique,  afin  d'abréger 
le  chemin  qu'il  m'auroit  falu  faire  par  terre  pour  aller  à  une 
Abbaye  ou  maifon  de  Caloycrs  ,  qui  eft  fituée  fur  le  haut  d'u- 
ne montagne  à  un  bout  de  l'Ifle  de  PrinKipo.  Le  chemin  en  fut 
alTez  pénible,  la  montagne  qu'il  nous  faluc  monter  eftant  la 
plus  haute  de  toute  l'Ifle.  Elle  eft  couverte  de  brouflailles, 
fougères,  &c  herbes  fortes,  6c aflèz pierreufe, &  l'on  n'eft  pas 
bien  recompenféde  fa  peine  ,  quand  l'on  voit  l'Abbaye,  la 
court  eftant  cres-petice  ,les  chambres  des  Caloyers  mal  bâties, 
&  l'Eglife  âflez  mal  entretenue.  On  n'y  voit  clair  qu'à  grande 
peine.  Elle  eft  conftruite  de  la  même  manière  que  les  autres  , 
&:  paroift  fort  vieille-  Il  y  a  plufieurs  tableaux  de  J.  C.  de  la 
Vierge  &  des  Saints,  Se  entr'autres  de  faine  Georges  fon  Pa- 


avec  rEgîife  Romaîne  Jltr  ÏEuch,mflie.  601 
cron.L'ayancconfideree  exaclement.j'en  fortis  pourm'allerre-  Ch.I  V. 
poferfurun  Kioche,  qui  eftant  firué  un  peu  plus  haut ,  fait 
voir  une  belle  dëvouverce.  Cefut-làque  l'Abbé  qui  revenoit 
du  village  me  vint  trouver.  Il  eftoit  allez  mal  vêtu,  ayant  une 
robbe  en  mauvais  eftat ,  un  bonnet  lié  avec  un  turban  noir  j 
mais  il  eftoir  habillé  magniliquement  encomparaifon  des  au- 
tres Caloyers.  Nous  confiderâmesla  beauté  de  rafpécT:,  &  l'ex- 
trémité de  l'iHe  toute  couverte  de  grands  rochers.  Je  m'infor- 
may  du  revenu  de  l'Abbaye  êc  de  Tes  charges  ^  il  me  dit  que 
l'on  y  recueilloit  du  vin  de  deux  clos  de  vignes ,  qui  avoienc 
coutume  de  rendre  deux  cens  mitres  de  vin ,  mais  qui  avoient 
efté  réduites  cette  année  à  quarante  5  &;  qu'il  payoit  80.  afpres 
àraifon  de  dix  afpres  par  chacun  millier  de  Touches  :  que  de 
huit  gerbes  de  bled  il  en  donnoit  une ,  &  que  ce  tribut  appar- 
tenoit  à  la  mofquée  de  Sultan  Sclim.  Je  luy  demanday  de  quel 
Ordre  ileftoit  5  il  me  répondit  qu'il  fuivoit  la  règle  de  S.  Ba- 
zile  ;  Scluy  demandant  enquoy  elle  confiftoit ,  il  ne  fçut  me 
dire  autre  chofc ,  finon  qu'il  alloit  la  nuit  à  l'Eglife ,  qu'il  gar- 
doit  la  chafteté  ,  6c  qu'il  faifoit  abftinence  de  viande.  Je  fis 
tomber  la  converfation  fur  le  ménage  ,  m'informanc  quelles 
façons  il  donnoit  à  la  vigne,  Se  il  me  marqua  qu'il  n'y  en  a  voit 
que  deux,  qui  confiftoientàla  labourer  au  mois  de  May  ,  &:la 
tailler  en  celui  de  Mars  ,  &:  à  la  fumer  de  dix  en  dix  ans  •  & 
qu'à  l'égard  du  bled ,  on  ne  labouroit  la  terre  qu'une  fois  après 
les  premières  pluyes  vers  le  mois  d'Odobre  ou  de  Novembre  ; 
&  qu'on  femoit  en  même  temps  pour  recueillir  en  Juillet.  Il 
me  dit  encore  que  ce  labour  fe  faifoit  avec  mains  d'hommes  , 
&  qu'il  ne  femoit  pas  feulement  du  bled  ,  mais  de  l'avoine  6c  de 
l'orge. 

Après  avoir  ainfi  fatisfait  ma  curiofiré  ,  je  luy  fis  d'autres 
queftions  plus  ferieufes ,  pour  içavoir  s'il  difoit  la  MelTe  tous 
les  jours.  Sa  réponfe  fut  qu'ordinairement  il  n'y  manquoicpasj 
qu'hors  les  fe(l:es  il  celebroit  pour  les  morts,  &:  que  le  jour  qu'il 
me  parloir  il  n'avoir  pu  célébrer.  M'eftant  enquis  de  ce  qu'il 
croyoït  del'Euchariftie,  il  fe  munit  d'une  précaution,  qui  fut 
de  s'informer  fi  i'eftois  Papifte.  Mais  luy  ayant  efté  répliqué 
qu'il  n'imoortoit  pas  qu'il  le  fçùf ,  &:  que  j'eiiois  l'Ambafia- 
deur  de  France ,  il  dit  qu'il  croyoit  la  realité  de  J.  C.  au  S.  Sa- 
crement, de  telle  manière  qu'après  la  confecration  &  l'orai- 
lon ,  il  ne  reftoic  plus  que  \q.s  apparences  extérieures    du 


6oi  Liv.  VIII.  "Preuves  authen.  de  ï union  des  Eg.  d'Or. 

pain  àc  du  vin.  On  luy  reprefenta  de  ma  parc  qu'il  auroic  parlé 
autrement ,  (î  l'AmbafTadeur  d'Angleterre  l'avoit  interrogé. 
Mais  il  infifta  au  contraire  ,  difant  qu'il  avoic  demeuré  long- 
temps à  Belgrade  ,  où  il  defervoit  l'Eglile,  Se  qu'ayant  eu  en 
ce  lieu  de  grandes  conférences  avec  leMiniftre  du  Comte  de 
Vinceflay  ,  il  ne  luy  avoit  jamais  tenu  un  autre  langage,  je  luy 
fis  demander  où  il  gardoit  le  Viatique,  ne  l'ayant  point  ap- 
perçû  dans  le  Suncta  Samtorum.  Sa  réponfe  fut  qu'il  lemetcoit 
en  terre  j  Se  qu'il  me  le  montreroit  en  fortant. 

Ayant  fatisfait  félon  la  vérité  à  toutes  les  autres  queftions, 
comme  de  l'invocation  des  Saints  &:  du  nombre  des  Sacre- 
mens ,  il  m'accompagna  dans  l'Eglife ,  où  il  me  montra  l'Eu- 
chariftie  dans  du  papier  fort  blanc,  qui  eftoit  enfermé  dans  une 
boëte  qu'il  ne  tira  point  de  terre ,  mais  du  côté  droit  de  l'Au- 
tel,  devant  lequel  il  y  avoit  une  lampe  non  allumée.  Je  regar- 
day  Tes  Livres  qui  étoient  en  bon  ordre  ,  qui  concernent  l'Offi- 
ce des  Liturgies ,  &  les  autres  prières  accoutumées  dans  l'Eglife 
d'Orient.  Et  comme  il  fçutque  je  fouhaitois  de  voir  quelques 
manufcrits ,  il  m'en  apporta  un  contenant  divers  traitez  pour 
la  viemonaftique,  qu'il  confentit  que  j'emportafle  pour  le  faire 
examiner,  me  prometrant  de  m'en  apporter  d'autres,  lorf- 
qu'il  viendroit  reprendre  celuy  là. 

Je  luy  donnay  encore  une  attaque  fur  le  fujerde  l'Euchari- 
flie,  pour  fçavoir  s'il  n'avoit  point  déguifé  fes  fentimens  5  6c 
afin  d'en  eftre  mieux  convaincu  ,  comme  je  vis  qu'il  les  pouC 
foit  plus  fortement  qu'auparavant,  je  luy  demanday  s'il  m'en 
voudroit  donner  une  atteftation  en  bonne  forme.  Il  y  confen- 
tit,  me  promettant  d'y  ajouter  l'invocation  des  Saints,  &  les 
fepc  Sacremens ,  &  de  m'apporter  le  lendemain  le  modèle  qu'il 
en  drefièroit ,  difant  qu'il  le  feroit  fort  bien  ,  &  qu'il  en  eftoit 
plus  capable  que  tous  les  autres  de  fa  Religion  &mêm.e  que  le 
Patriarche  ,  ce  qui  m'obligea  de  (ourire  ^  en  voyant  cette  pre- 
fomption.  Luy  ayant  demandé  s'il  voyoit  foiivenc  l'Arabafla- 
deur  d'Angleterre  pendant  qu'il  eftoit  à  Belgrade,  je  pris  fu- 
jet  de  fa  réponfe, qui  fut  qu'il  conferoit  fouvent  avec  fon  Mi- 
niftre,  de  luy  dire  qu'alTèurément  il  luy  auroit  donné  quel- 
ques atteftations.  Il  le  nia  d'abord;  mais  comme  il  vit  que  je 
le  preflbis ,  luy  témoignant  que  j'en  eftois  bien  informé  ,  il 
convint  qu'il  avoit  accordé  aux  inftances  de  ce  Miniftre  une 
explication  de  la  manière  dont  les  Orientaux  invoquent  la 

Vierge 


iLwe<:  VEgl'ifi  %omAtne  fur  l'Euchmftie.  603 

Vierge  ,  les.  Anges  6c  les  S<iinc>-,  mais  qu'il  n'y  avoir  rcn  mis  ^^*  ^• 
contre  la  vérité,  &  qu'il  n'y  avoit  touche  aucun  point  con- 
cernant le  faint  Sacrement.  Ce  fut  par  là  que  finir  r.oftrc  ccn- 
verfatîon.  Il  me  reconduifit  dans  la  court,  où  il  me  pria  inuti- 
lement de  manger  du  fromage  de  Chèvre ,  du  vin  à  demy  fait 
&  tout  bourbeux  ,  6c  du  pain  cuit  à  demy  avec  tout  Ton  Ton. 
Mes  GianiflairesSc  kaidgisen  firent  bonne  chère,  &:  lorfqu'ils 
eurent  achevé  je  me  mis  en  chemin  pour  aller  dans  une  au- 
tre Abbaye. 

Il  falut  defcendre  la  montagne,  mais  non  pas  tout  à  fait^  &: 
en  remonter  une  autre  bien  moins  rude  ,  au  haut  de  laquelle 
nous  trouvafmes  unemailon  6c  une  Eglile  de  tTaioyersqni  vi- 
vent fous  la  règle  de  faint  Sabas,  Les  abords  en  font  agréables, 
y  avant  quantité  d'Oliviers  aux  environs,  6c  les  dedans  font 
fort  bien  bailis,  ôc  allez  Ipacieux  pour  le  païs.  LTglife  eft  gran. 
de,  propre  6c  des  mieux  peintes  6c  dorées  qi.e  j'aye  veiies.  li  y 
a  un  tableau  reprefentant  untemple  foutenu  d'un  cofté  par  S. 
Pierre  èc  de  l'autre  par  S.  Paul  chacun  d'une  main,  dans  le- 
quel on  voit  la  Vierge  tenant  J.C.  fur  loncftomach.  Il  yen  a 
d'autres  qui  reprefenrent  ].  C.  laiainte  Vierge,  ]arransfi2;u- 
ration  dont  l'Egiife  a  prjsle  nom  ,  ayant  efte  conlacrée  en 
l'honneur  de  cemyflerc.  J'entray  dans  \z  faniia  fanctorum^ovi 
dans  le  milieu  vers  un  enfoncement, ef!:oiti 'Autel.  Il  y  avoic 
dciTus  un  tapis  fort  propre  Le  livre  des  Evangiles  y  efloit  po, 
fe  ,  ?^  couvert  d'un  voile  brodé  d'un  autre  beaucoup  plus 
grand.  Le  faint  Sacrement  enferme  dans  unebocte  qui  eftoic 
ferrée  dans  un  fac  d'efirofe  de  foye  à  fleurs  d'or,Dendcit  à  un 
clou  dans  l'enfoncement,  6c  vers  le  milieu.  Et  comrae  un  Re- 
ligieux me  l'eut  montre  au  doigt,  6c  fans  ouvrir  le  lac  ,  je  luy 
demanday  ce  qu'il  en  croyoit.  Il  me  répondit  fans  hcfïterque 
c'eftoit  le  véritable  corps  6c  fang  de  J.  C.  Et  Luy  ayant  fait  la 
queftion  s'il  y  avoit  du  pain  ,  il  répliqua  qu'il  n'en  reftoit  que 
Je  gouft  bL  les  apparences,  6c  que  J.  C.  y  eftoit  tout  entier. 
Je  m'informay  s'il  voudroit  nous  donner  une  arteftarion  de 
cette  vérité,  comme  avoient  fait  plufieurs  autres,  6c  même  des 
Abbe7;  maisil  me  répondit  qu'il  ne  le  pouvoit  pas,  tant  àcaufe 
de  l'abfencedefon  Supérieur,  qui  eftoic  vers  la  Mémoire,  que 
parceque  les  déclarations  de  foy  regardoient  les  Patriarches  6c 
les  Evefques,  non  pas  de  (impies  Relis;icux,  is.  que  même"  elles 
dévoient  eftre  Synodales  poureftre  plus  authentiques.  Ne  le 

GGgg 


604L1V.  VI IL  Prewves  authént.  de  r union  des  Eg.  d'Or. 

prellant  pas  davancige^  je  luy  demanday  pourquoy  il  n\  avoir 
point  de  lampe  devant  le  S.  Sacrement.  Il  répondit  qu'un  des 
coftez  de  la  corde  queje  voyois  eftoit  rompu,  ce  qui  eftoit 
vra  y^maisla  raifon  ne  valoit  rien,  puifqu'onavoit  loin  de  bien 
entretenir  celles  qui  pendoient  devantles  Images  des  Saints, 

Le  20.  j'allay  me  promener  à  l'ifle  nommée  par  les  Grecs 
Calchit  â  caulé  qu'ils  prétendent  qu'il  y  a  une  mine  d'airam. 
Les  Turcs  la  nomment  heihcli  ^  parce  qu'il  y  a  deux  monta- 
gnes qui  fe  joignent  par  des  vallées  qui  aboutirent  à  un  ter- 
rain  élevé  entre  deux,  en  forte  que  cette  figure  leur  paroift 
celle  d'une  befaced'pù  ils  tirent  l'origine  du  nom  qu'ils  onc 
donné  à  cette  LHe  ,  dont  le  feul  village  eft  fitué  furie  bord  de 
la  Mer  dans  un  endroit  uni  qui  a  un  peu  d'étendue.  L'ayan-c 
traverfé  je  pafTay  fur  la  droite,  &  après  avoit  monté  des  mon- 
tagnes i'arrivay  à  une  Abbaye  dont  l'Eglife  efb  dédiée  à  la 
fainte  Trmité  ,  6c  dont  les  Religieux  fuivent  la  règle  de  faint 
Sabas.  Il  y  en  eut  deux  qui  me  vinrent  recevoir  à  îa  porte  avec 
à^s  cierges  allumez,  &  qui  me  conduifirent  en  chantant  dans 
J  Egiiie,  où  ils  allumèrent  les  lampes.  Se  me  montrèrent  ce 
qu'il  y  avoit  de  plus  curieux  ,&  entre  autres  chofesdes  Epita- 
phes  écrites  fur  le  plancher, dont  toutelinfcription  neconfîftoit 
qu'à  demander  des  prières,  fans  marquer  le  nom  du  defFunt. 

L'on  me  fit  aufîî  remarquer  le  portrait  de  ]eremie  Pa- 
triarche de  Conftantinople  qui  efl:  auprès  de  la  porte^  mais  ma 
curiofîté  allant  plus  loin  j'entray  dans  le  S^uiHa  Saniiorum  ^ 
devant  lequel  pendoitune  lampe  non  allumée,  oii  demandant 
de  quelle  manière  eftoit  gardée  l'Euchariflie  ,  un  Religieux 
prit  dans  l'ent-'oncement  derrière  l'autel  un  Ciboire  de  laton 
fait  comme  les  noftres,  à  l'exception  que  je  n'ay  point  veu  de 
croix  au  defîus.  Il  tira  une  petite  vis,  &:  l'ayant  ouverte,  & 
auflî  la  boëte  deiois  qui  eftoit  dedans,  il  me  fît  voir  lesefpeces 
du  pam  tenues  fort  proprement.  Je  luy  demanday  quelle  eftoic 
ix  croyance  fur  ce  qu'il  me  montroit,  &  fi  c'eftoit  du  pain 
que  je  voyois.  Il  répondit  que  c'eftoit  le  véritable  corps  & 
iang  de  J.  C.  fous  les  apparences  du  pain,  dont  la  fubflance 
avoit  efté  changée  en  celle  de  J.  C.  par  la  confecration. 

Me  contentant  de  luy  faire  cette  feule  queftion  fur  fa 
foy,  je  m'informay  oi\  efloit  l'Abbé,  fi  l'Abbaye  avoit  quel- 
ques revenus,  de  quelles  charges  elle  eftoit  tenue.  Il  me  dit  que 
fon  Supérieur  eftoit  à  Conftantinople  ^  que  luy  &  les  Re- 
ligieux au  nombre  de  vingt-  cinq  vivoient  de  ce  qu'ils  retiroient 


d'vec  ÏEglife  Romaine  fur  V Euchariflie .  605 

d'un  peu  de  terres  à  bled  ôc  à  vignes  qu'ils  culrivoienc  j  que  Ch  .  V. 
(îins  tes  aumofnes  ils  ne  pourroienc  pas  fobfiftcr,  &  qu'ils 
p-ayoienc  par  an  à  la  Molquecde  Sultan  Mehcmet  cinq  cens 
afpres  pour  toutes  chofes  en  confe.]nence  d'un  abonnement 
porté  par  un  Catacherif.  je  le  priay  de  me  Faire  voir  les  manuf- 
erits ,  mais  n'ayant  pas  le  temps  de  les  faire  tous  examiner, 
j'en  emportay  «juelqucs-uns,  à  condition  qu'il  les  viendroit  re- 
prendre à  Fera,  6c  qu'il  m'en  rapporteroit  d'autres,  principa- 
lement s'il  en  trouvoit  qui  euiîent  cfté  compofez  par  des  Pa- 
triarches, &  Abbez  des  derniers  temps,  lans  exclure  néan- 
moins ceux  des  anciens. 

Je  ne  goûtay  point  de  fa  collation  qui  ne  confîftoit  qu'en 
Melons  d'eau  ,  en  dattes,  &  en  pam  bis ,  aimant  mieux  m'ar- 
refter  quelque  temps  à  la  porte  de  l'Abbaye  d'où  l'on  dé- 
couvre le  codé  de  la  Mer  oppofé  à  celuy  par  lequel  j'eftois 
aborde.  J'y  vis  une  petite  lile  déferre  qui  eft  p  Ictte,  &cùil 
n'y  a  point  d'arbres.  Les  Grecs  la  nomment   Pifa. 

Par  delà  il  y  en  a  une  plus  grande  qui  conlîfte  en  un;  mon- 
tagne fort  haute,  dans  le  pied  de  laquelle  eft  un  enfonce- 
ment fur  le  bord  delà  Mer,  oùefl:  fitué  le  vifjgc.  Les  Grecs 
luy  donnent  le  nom  d'Antigonia,  ou  de  Pyregos  ,  les  Turcs 
celuy  de  Bourgas.  Elle  cmpelche  que  l'on  ne  voye  les  deux 
autres  Ilîes  abandonnées  qui  font  peu  confi derables  ,  dont 
la  première  en  venant  de  Conilantinople  s'appelle  Oxia, 
en  Grec,  &  en  Turc  Sivadct ,  iJÎe  pointue.  Elle  cft  un  peu 
montueufe,  ce  qui  fait  que-l'autre  qui  eft  unie  s'appelle  Platu 
en  Turc,  Touchanadaft ^  Ifle  des  Lièvres.  Je  ksav  confiderccs 
du  Monaftere  de  iaint  Georges  qui  eft  à  la  pointe  de  l'iile 
de  Prinkipo. 

Me  contentant  de  voir  ces  quatre  Iflesde  loin  fans  me  don- 
ner la  peine  d'v  defcendre,  jecontinuav  mon  chemin,  &  avant 
defcendu  !a  montagne,  je  montay  l'autre,  qui  forire  la  f gure 
d'un  des  pendants  de  la  befice;  c'eft  fur  lehaut  dr.ns  un  bois 
de  Pins,  &  de  Cyprès  qu'efb  fituéc  l'Abbave  de  nofrre  D.ime 
L'Abbé  n'y  eftoit  point  eftant  allé  s-Andrinople  pour  obtenir, 
un  commandement  pour  rebaftir  fi  maifon  qui  avoit  cftc  bnj. 
lée  depuis  peu  par  de:  Bnuftangis,  Iclqucls  s'cftant  enyvro2,  le 
feu  avoit  prisa  une  paillalfe  &;  avoit  conlumé  tout  le  bâ- 
timent qui  eftoft  fort  grand,  &  entouroit  toure  le;  cour, 
n  eftant  refté  que  deux  ou  trois  chambres,  &  rFî:;!ife  qu'il  n'a 

GGggij 


6o6  Liv.  VIII.  Preu^ies  Authent.  de  t union  des  Eg.  dOr. 

poinc endommagée,  Elleeft  petite  6<:  ne  confillequ  en  un  doime 
qui  efloit  autrefois  la  Sacnftie.L'on  m'y  montra  le  S.  Sacrement 
donc  la  boëce  eftoit  dans  un  (ac  de-  toile  pendu  à  un  clou  dans 
renfoncement  derrière  l'Autel.  Le  Religieux  qui  voulut  bien 
me  montrer  l'Euchariftie,  m'aiïi-ira  fur  la  demande  que  je  luy 
en  fis  faire,  qu'il  croyoit  quec'eltoit  le  corps  de  J.  C.  caché  fous 
Jesefpece5&  les  apparences  du  pain.  Je  m'informay  deluy  quel- 
le eftoit  fa  règle.  Il  répondit  qu'il  fuivoit  celle  deTheodofe  Ab- 
bc  d^Jis  la  PalcitmCj  Se  luy  ayant  fait  plufîeurs  autres  deman- 
des,  il  y  fatisfit  en  difant  qu'il  ne  payoitque  200.  afprcsà  la 
Mofquée  de   Sultan  Mehemet,  en  vertu  d'un  Catachinf ,  6c 
que  le  revenu  de  l'Abbaye  confiftoic  principalement  en  vignes 
&  en  bleds.  Et  j'ay  fçeu  d'ailleurs  qu'il  efloit  confiderablc  pour 
le  païs  ;  qu'il  fe  faifoic  dans  cette  maifon  un  grand  abord  aux 
Fefles  de  la  Vierge,  &:  particulièrement  à  celle  du  mois  de 
Septembre  i  &  qu'ainfi  il  y  avoir  un  grand  inrereft  de  la  faire 
rcb.uir  :  qu'on  efperoit  en  obtenir  la  permiffion  par  le  moyen 
de  Panajotri,  &  la  facilité  de  la  conftrudiun  parlescharitez. 
L'on  m'a  encore  appris  que  les  Turcs  n'y  entroient  pas  autre- 
fois comme  ils  vouioient,  &  que  même  on  les  repoufroit  non 
feulement  .T  coups  de  pierres,  mais  aufîî  des  pierriers.  Elle  efk 
fermée  de  bonnes  murailles,  &;  l'entrée  en  eft  comme  fortifiée. 
La  plus  grande  perte  à  mon  avis  que  le  feu  y  aitcaufée  ,  efl 
celle  des    manufcrits  dont   il  y  en   a  eu  une  grande  quan- 
tité de  perdus,  les  Religieux  m'ayant  aifeuré  qu'il  y  en  avoic 
une  chambre  pleine.  Ayant  fait  examiner  quelques  uns  de  ceux 
qui  reftentj  j'en  emportay  quelques  Volumes  que  l'on  me  don- 
na i  condition  de  les  venir  reprendre  à  Fera-,  mais  je  ftipulay 
qu'on  m'en  rapporteroit  d'autres.  Il  y  a  quelques  infcriptions. 
Grecques  en  difFcrents  endroits.  Ce  qui  prouve  que  cette  Ab- 
baye eftoitconfiderable  du  cempsde  la  domination  des  Chref- 
ti'.^ns. 

L'on  voit  à  la  porte,  mais  dehors  dans  la  campagne  unetennbe 
cie  pierre  avec  une  épitafe  qui  fait  foy  que  Edoiiard  Barton  Am. 
bailadeur  de  la  Reine  Elifi^beth  d'Angleterre  à  la  Porte  Ortho- 
mane,  &;  qui  eft  comme  je  le  crois  le  premier  de  cette  nation,  y 
eft  enterré.  L'infcripcion  eft  conçue  ences  termes,  ■E<^/z^r^oi?./r- 
ton  llltillnljimo  Serenifji^n^v  Anglorum  Repris  Orutori.^  viro  pr/e- 
Jhinti.ljmo^  qui poft  reditum  à.  bello  Hungarico  quo  ctim  inviHo  Tur~ 
car.  Impcratorc  profcHus  fuerat^  diem  ohijt  pieLrtis  crq^o^^^ctatis  tin.. 
'jp.fil.veroMD^YCVII.JLl^IIIJ^allanuar.  Mais  ce  qui  eft 


A^ec  ÏEgîïfc  %oma,ine  fur  ÏEuchciriflie.  éoy 

de  plus  remarquable,  ell  que  cet  Anibaliadeur  n'a  pas  efté  mis  Ch.  V. 
en  r^rre  SaincCj  le  cimetierre  de  la  maifon  eftant  d'un  autrecoté. 
Ainfi  il  y  a  lieu  de  croire  qu'on  n'a  pas  voulu  l'y  mettre  à  cauf'e 
de  fa  religion.  L'on  dit  qu'il  eft  more  de  la  pefte  s'eftant  refus^ié 
dans  cette  Ifle  pour  l'éviter  à  Conftantinople  où  elle  i'ailoic 
de  grands  degafls. 

Je  vifitay  encore  une  troifiéme  Abbaye  qui  eft:  du  cofté  du 
villao;e  iurune  cminence.  Elle  eft  dedice  à  faint  Georçres.  L'E- 
glife  en  eft  plus  large  que  les  autres,  fort  éclairée  &.biv'n  peinte. 
Le  Saniia  Sanciorum  eft  aufli  plus  fpacieux.  Le  faine  Sacre- 
ment y  eft  coniervé  dans  une  bocte  qu'un  Religieux  prit  avec 
rei'pecl  à  cofté  de  l'Autel,  fe  couvrant  les  mains  d'un  voile  Mais 
comme  il  l'eut  ouvert,  il  ne  trouva  rien  dedans,  &  il  me  dit  qu'il 
falloit  qu'on  l'euft  confumé  pour  les  malades.  Et  comme  je  de- 
manday  oià  il  prendroit  le  Viatique  s'ii  en  avoit  btfoin  ,  il  me 
dit  qu'il  auroic  recours  aux  autres  Abbayes,  j'interrogeay  le  Re- 
ligieux fur  la  réalité  du  corps  de  j.C.  en  l'Euchariftie,  cc  lur  le 
pain  &  le  vin.  Et  en  ayant  receu  réponfe  que  j.  C.  y  eftoit  prc- 
Tent  réellement,  &  qu'il  ne  reftoit  que  les  apparences  du  pain  6c 
du  vin,  je  remarquay  que  dans  un  trou  en  face  de  l'Aurel  efti.ic 
lecaliceavec  le  voile  qui  y  eftoit  liéj&;  qu'il  pendoit  une  lampe 
vis  à- vis  fans  eftre  allumée.  Je  me  promenay  dans  la  maifon 
qui  eft  propre,  mais  pauvre.  Je  m'inforraay  de  la  règle  que  l'on 
y  oblervoit,  que  l'on  me  dit  eftre  celle  de  S.  Bafile  ;  6c  avant 
demandé  à  voir  les  manufcrits,  l'on  s'excufa  fur  ce  que  l'Abbé 
qui  eftoit  abfent  les  avoit  ferrez  en  cas  qu'il  y  en  euft.  Ainfi  je 
m'en  retournay  par  un  aftcz  beau  chemin  le  long  delà  mer,  qui 
n'eftoit  point  cultivé,  n'eftant  rempli  que  de  brieres. 

Le  II.  lAbbé  de  S.  George  de  l'Ille  de  Prinkipo  m'a  apporté 
fon  atteftation.  C'eft  le  feul  des  Religieux  dont  je  viens  de  par- 
ler qui  m'en  ait  voulu  donner.  Car  les  autres,  aufli  bien  que  ceux 
de  la  Tranifiguration,  s'en  font  excufez  ou  fur  l'abfence  de  leur 
Abbé,  ou  lur  ce  qu'il  leur  falloir  une  permiiîion  du  Patriarche. 
Mais  comme  ils  m'avoient  fufïifammenc  témoigne  leur 
croyance,  je  n'ay  pas  jugé  à  propos  de  les  prefter. 

Ne  voulant  pas  feulement  eftre  informé  de  la  foy  du  Cler- 
gé régulier  ,  mais  encore  du  ieculier,  j'ay  vifiré  les  Egliies  Po- 
rochiales  du  village  de  Prinkipo.  J'ay  trouvé  dan^  l'une  oui 
eft  dédiée  à  Saint  Dimitre,  Se  qui  eft  aftèz  propre,  un  bon 
homme  qui  en  a  le  foin  en  qualité  de    Papas.  Il  alluma  en 

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6o8  Liv.  VIIÎ.  Preuves  amhent.de  t union  des  E<^.  d'Or 
même  temps  qu'il  me  vie  quelques  lampes,  6c  me  tonduii'îc 
dans  le  Sancluaire  où  il  me  montra  fur  la  requifition  que  je  luy 
en  fis,  deux  lacs  de  toile  qui  pendoient  au  codé  gauche  à  un 
clou  dans  un  enfoncement  derrière  l'Autel^  £c  dans   lefquels 
écoient  des  boctesquircnfermoient  le  corps  de  Jésus- Christ. 
Je  Juy  demanday  pourquoy  ilyenavoit  deux.  U  me  ditque 
l'une  eftoit  pour  l'Abbaye  de  b.  George,  parce  que  l'Abbé  n'y 
eftant  pas  le  Jeudy  Saint  dernier  on  avoit  confacré  pour  fa  mai- 
fon.  El- comme  je  luy  eus  reprefentë  que  l'on  m'y  avoit  montré 
une  bocte,  ôcmême  les  efpeces,  il  m'afîura  qu'il  falloit  que  ce 
fuft  de  l'année  précédente.  Je  luy  demanday  file  Viatique  ne 
pouvoir  cftre  adminiftré  que  de  la  confecration  de  Jeudy  Saint, 
&  m'ayant  alîeuré  qu'il  le  falloit ,  je  luy  fis  l'objeiftion,  de  quel- 
le manière  on  en  ufoit  quand  elle  eftoit  confommée  par  les  ma- 
lades. Aquoy  il  repondit  que  fi  le  malade  qui  en  avoit  befoin 
pouvoit  fe  rendre  à  l'Eglife,  qu'on  le  communioit  de  l'Euchari- 
ftie  qui  s'y  conficroit  à  la  Liturgie, &  qui  cftoitpourle  Preftre 
&  pour  luy  ,  Se    Idrfqu'on  ne  pouvoir  l'y  faire  venir,  qu'on  luy 
en  portoit  une  particule. Je  l'interrogeay  fur  la  réalité  de  J.C.  au 
S.  Sacrement,  &:  fur  le  pain.  Saréponfe  futque  la  confecration 
rendoit  le  corps  de  J.  C  prc-fent  fous  les  apparences  du  pain 
&  du  vin.  Et  comme  je  luy  eus  reproché  qu'il  n'alumoit  pas  fa 
lampe  qui  eftoit  devant ,  il  me  dit  que  pendant  le  Sacrifice  on 
avoit  foin  de  la  tenir  allumée,  jem'enquisdeluy  du  nombre  des 
Sacrei'nens,&:  après  m'avoir  répondu  qu'il  n'étoit  pas  aflez  ha- 
bile, je  luy  parlay  du  Bapcelme;  ce  qui  l'obligea  de  me  dire  que 
c'étoit  un  Sacrement ,  &.  enfuite  il  me  nomma  les  fix  autres, 
Se  répondit  à  mes  autres  queftions;  qu'il  inftruifoit  fon  peuple 
le  mieux  qu'il  pouvoir^  mais  qu'il  aimoit  mieux  aller  au  caba- 
ret que  de  venir  à  l'Eglife  5  qu'il  y  avoit  trois  perfonnes  dans  la 
Trinité,  quinefciifoient  qu'un  Dieu  ^  qu'il  ne  prenoit  pour  Tad- 
miniftration  des  Sacremens  que  ce  qu'on  vouloir  luv  ûv)nner-, 
que  c'eftoitun  grand  péché  de  contraindre  ceux  qui  lés  reçoi- 
vent à  donner  plus  que  leur  volonté?  qa'il  rendoit  par  an  defa 
Cure  à  l'Archevefque  de  Calcédoine  douze  piaftres,  quoyqu'il 
n'en  euft  touché  cette  année  que  dix.  Mais  qu'il  ne  prenoit  pas 
garde  à  cela,  fe  contentant  de  vivre  doucement^  qu'il  n'y  av-^ic 
que  dix-fept  maifons  qui  eftoientfous  fa  direction,  6c  qu'il  ap- 
prenoit  àlireauxenfanspour  lefquels  onluy  donnoicpour  cha- 
cun ,un  alpre  par  femaine. 


anjec  ÏEglife  Romaine  furVîuchcLriflïe.  609 

J'allav  à  l'autre  paroifie  qui  cil:  plus  coniiderable,  ^Çiz.vsx.  q-^  y^ 
coinpolée  de  quarante  maifons.  L'Eglife  eft  auffi  plus  grande, 
&  n'i-'ft  pas  moins  propre.  Il  y  a  comme  dans  l'autre  un  endroit 
leparc  pour  les  Femmes  qui  ont  veuc  dans  l'Eglile  par  des  ja- 
loufies.  Je  trouvay  le  Caloyer  qui  la  defTert  à  ia  porte  du  vcili- 
bule,  qui  appienoir  à  lirfàde  petits  enfansdans  des  livres 
imprimez,  où  eft  le  ?:tcr  S'"  le  Credo.  Je  luy  fis  plufieurs  quef.; 
tions,  6:  je  trouvay  Tes  réponTes  conformes  à  celles  de  l'autre 
touchant  la  prefence  réelle,  Sv  les  apparences  du  pain  &:  du  vin, 
&  la  raifonpour  laquelle  la  lampe  pendante  anprés  du  Saint 
facrementn'eftoitpas  allumée, 'ôc  encore  touchant  l'inftruc-. 
rion  qu'il  donnoit  à  Tes  Piroiiïîcns.  Jl  m'apprit  que  Ton  Eg'iie  - 
eftoit  dédiée  à  l'Airomption  delà  Vierge.  Il  memontra avec 
beaucoup  derelpecl  lesefpecesapparentesdu  pain  quieftoicnt 
à  gauche  dans  une  boëce  enfermée  dans  un  /ac,  me  rap{>ortant 
l'hiftoire  d'une  perfonne  laquelle  doutant  de  laToute-puiilance 
de  Dieu  eu  ce  myllere,  avoir  ede  fortifiée  par  le  miracle  d'une 
préfënce  vifible;  fie  luy  demandant  ce  qu'il  penfoit  de  ceux 
qui  ne  croyoient  pas  cette  vérité,  il  m'afleura  qu'ils  eftoient  ex- 
communiez, èc  qu'il  ne  les  enterroit  pas  enterre  famte  Je 
m'informay  de  quelle  manière  il  portoit  le  Viatique.  Il  me  dit 
que  c'eftoit  avec  beaucoup  de  refped,  fie  qu'on  l'a^compagnoit 
avec  des  cierges  allumez,  n'y  ayant  point  de  Turcs  qui  puflenc 
troubler  cette  cérémonie  comme  à  Conftantinople.  Il  ajouta 
qu'en  casquel'Euchariftie  confacréele  Jeudy  Saint  manquaft, 
on  pouvoit  faire  une  nouvelle  confecration,  dont  l'on  mcttoit 
les  efpeces  dans  la  boëte,  6c  enfin  il  m'avotia  que  c'eftoit  mal 
fait  de  donner  par  an  trente  Piaftres  de  fa  Cure,  mais  que  la 
tyrannie  des  Turcs  fur  les  Patriarches,  fie  les  Métropolites  en 
eftoit  la  caufe  :  qu'elle  ne  dcvoit  point  fervir  de  prétexte  aux 
Curez  pour  vendre  les  Sacremens,  àc  qu'il  recevoit  de  fon 
peuple  ce  qu'il  vouloir  luy  donner.  Etcomireil  m'eut  expliqué 
nettement  les  fepc  Sactemens  en  les  diftinguant  par  leurs 
noms,  je  me  retiray. 

Le  même  jour  je  partis  une  heure  &demieaprés  midy.  Je 
traverfay  la  mer  pour  gagner  les  bords  d'Afie,  Si.  dansl'efpace 
d'uiie  hei're  j'arrivav  à  cette  cofteeflcignée  de  l'Iflede  Prin- 
kipo  de  trois  mille.  )e  continuay  mon  chemin  prefque  terre  à 
terre  ,&  avec  un  vent  favorable.  Je  fis  neuf  mil  en  ept  quarts 
d'heure.  Je  vis  deux  villages  fur  le  cofté,  donc  l'un  fe  nomme  en  " 


6io  Ltv,  VIII.  Prewves  authen.  de  l'uniondesig.  d'Or. 
Turc  K.artal,&:  l'aucre  Peeudix  Et  j'aborday  l'abbaye  de  laint 
Dimirre  de  Toiifla  pour  y  fèjoiirner  quelques  jours.  Elle  eft 
ficucecn  Afiefur  le  bord  de  la  mer  en  un  endrcic  uni,  environné 
de  petites  collines,  de  petits  bois ,  de  vignes  &  de  terres  labou- 
rables ,  ce  qui  rend  Ion  aliiecte  fort  avanrageufe  pour  la  chaire. 
La  mailonert  aflcz  propre.  Elleconfille  en  une  court quarrëe 
prelque  entourée  de  baftimens,&  où  l'Eglifê  qui  eft  peiate 
&,  dirpoféceà  peu  prés  comme  les  autres,  eft  fermée. 
L'autel  qui  eft  dans  le  Sanduaire,efi:  orné  en  haut  d'un  petitba- 
luftre  qui  poiefur  la  table,  &:  qui  la  ferme  de  tous  coftez,  à  l'ex- 
ception de  celuy  où  fe  met  l'Officiant.  Au  milieu  eft  une  croix 
remplie  de  très-petites  figures  taillées  en  bolTe  dans  l'épailTeur 
du  bois.  Il  y  a  une  bocte  auprès  qui  eft  fur  l'autel,  &  qui  n'ef- 
tant  pas  fort  propre  ne  laiflc  pas  de  contenir  le  corps  de  noftre 
Seigneur  Jésus  Christ.  On  me  la  montra  avec  révérence 
après  avoir  allumé  quelques  cierges.  Et  comme  jedemanday 
pourquoy  la  lampe  qui  eiloit  devant  ne  brufloit  pas  toujours, 
on  fit  réponfe  que  la  pauvreté  en  eftoitla  caufe.  Eftant  forti  de 
i'Egiife  (e  me  mis  fur  un  banc  qui  eft  à  la  porte,  l'Abbé  &  quel- 
q\ics  Religieux  eftant  auprès  de  moy.  Je  m'informay  de  leur 
nombre,  que  l'on  me  die  cftre  de  vingt-  cinq  ,  de  la  manière  de 
faire  l'Abbc,  &  l'on  me  répondit  que  c'eftoit  la  voye  d'élec- 
tion,  en  prenant  néanmoins  la  confirmation  du  Mettropo- 
liîc  Archevêque  de  Calcédoine,  auquel  on  fait  quelque  petit 
prefenr.  Ils  ajoutèrent  fur  l'inftruction  que  je  defirois  d'en  avoir 
qu'un  Abbé  élu  &;  confirmé,  l'eftoit  pour  fa  vie,  à  moins  que 
les  Religieux  s'en  plaignant  ne  folicitaiîent  fa  depofition: 
Qu'ils  vivent  de  leur  revenu  confiiiant  en  bled,  &  en  vignes 
&,  encore  de  charitcz  :  Qu'i's  ne  payoient  point  de  Caratche, 
mais  feulement  i'aulîour  qui  eft  la  huitième  gerbe  de  bled,  ca 
d'autres  grains,  &dixafpres  pour  chaque  millier  de  f^i.chesj 
êc  que  la  receptes'en  failoit  par  un  Soubach^.  oemeurant  au 
village  voifin,  qui  eftoit  mis  par  le  Mutevelly  d'une  Mofquée 
de  Bourfe.  L'on  me  dit  encore  qu'à  cent  pas  de  l'Abbaye  il  y 
avoit  un  petit  baftiment  quiaccompagnoit  une  Eglife  dédiée 
à  l'AlFomption,  où  les  Religieux  de  Touftli  en  étant  les  Sei- 
gneurs ,  alloient  officier  quand  ils  en  étoient  requis  pour  fa- 
tisfaire  à  la  dévotion  des  particuliers. 

Efcanc  content  de  ces  éclairciftemens  fur  le  temporel,  je  fouhait- 
tay  d'en  avoir  d'autre  sfur  le  fpirituel,aufquels  &  l'Abbéôc  les 


Religieux 


Uvec  ÏEgliJe  Romaine  fur  rEuchmflie.  6ir 

Religieux  prirent  parc,  répondanc  chacun  félon  la  connoifîàn-   Ch.  "VT. 
ce  qu'ils  avoiencdemes  demandes.  La  réalité  dej.  C  en  l'Eu- 
chariftie ,  la  converfion  du  pain  &:  du  vin  en  fon  corps  &  en  Ton 
fang,  en  telle  manière  qu'il  ne  refte  que  les  accidents  du  pain  Se 
du  vin/urent  les  principales. L'Abbc  m'aiTeura  qu'il  croyoit  l'un 
&  l'autre  comm e  eftant  la  foy  de  toute  l'Eglife  d'Orient.  Il  me 
ref>eta  deux  ou  trois  Fois,  qu'après  la  coniecration  il  nereftoic 
plus  rien  dupain  &:  du  vin  que  les  apparences  &  les  accidents, 
confirmant  ces  veritez  par  des  hiltoires  arrivées  à  ceux  qui  en 
avoient  douté.  Et  luy  ayant  dit  que  les  Calviniftes  de  France 
foûrenoient  que  les  Orientaux  ne  crovoient  point  la  prefcnce 
réelle  ni  le  changement  des  fuhftances, il  n'hefita   pas  à  dire 
<5ue  c'eftoient  des  calomniateurs. Un  autre  ferra  les  épaules  &:  fe 
mita  rke,  témoignant  par  ià  là  fermeté.  Un  troifiéme  me  die 
que  ceux  qui  ne  croyoient  pcMnt  la  realité  6c  la  converfion  des 
fubftanceseftoient  des  excommuniez,  &  qu'ainfiils  nefailoient 
point  partie  de  l'Eglife  ,  &  tous  les  autres  quand  on  parloit  du 
S.  Sacrement  difoient  C/j///?<?/,  témoignant  par  cette  feule  pa- 
role que  l'Euchariftie  confient  I.  C. 

L'invocation  des  Saints  fut  encore  le  fujetde  noftre entretien. 
L'Abbé  me  dit  qu'ils  étoient  nos  Ambalfadeurs  auprès  de  Dieu, 
que  la  Vierge  eftoit  puifiancé  auprès  de  luy,  &  que  nous  réf. 
fentions  fouvent  des  effets  de  leur  protecTiion.  le  luy  fis  aufïî 
connoiftre  que  les  Calviniftes  qui  nereconnoillènt  que  deux 
Sacremens ,  le  Baptême  &  la  Cène,  pretendoient  que  les  Grecs 
«ftoient  dans  la  même  opinion.  Il  ne<-omprit  pas  bien  ce  que 
je  voulois  dire,  parce  que  ce  mot  de  Cène  en  matière  de  Sacre- 
ment luy  eftoit  nouveau  ;  mais  un  autre  prenant  la  parole 
répliqua  qu'il  y  a\ioitfept  Sacremens  qu'il  nomma-en  commen, 
çant  par  le  Baptême,  fans  oublier  l'Euchariftie. 

Ce5  points  de  doârine  furent  lesfeuls  fur  lefquelsje  lesinter- 
rogeav,  fans  dilcontinuer  néanmoins  de  les  entretenir  d'une 
matière  pieufe.  Car  ayart  envie  de  m'informerde  leur  con- 
duite à  l'égard  de  l'Office  divin,  &  de  la  difcipline  Monafti-- 
que  ,  j'appris  qu'il'  n'y  avoir  que  deux  Preftres  entre  eux, 
Icavoir  l'Abbé  qu'ils  nommoient  Izpumcnos,  c'eft  à  dire  le  Su- 
périeur j  6c  un  autre:  Qu'ils  fuivoient  la  règle  de  faint  Ba-'^ 
file  :  Qu'ils  ne  mangeoient  jamais  de  viande  :  Qu'ils  ef- 
toient  obligez  à  la  chafteté  .•  Qu'ils  faifoient  quatre  Carefmcs 
d'obligation,  de  Pafques,  des  Apoftres,  de  TAflomption,   6c 

HHhh 


éJt  Liv.  y III.  Prewves  authent.  de  V union  des  Eg.d'O'*'^ 
de  Noël,  n'ayanc  permiffion  cje  manger  du  poiiron  que  pen- 
dant ceux  de  l'Avent  2c  des  Apollresi  Qu'il  y  avort  crois  au- 
tres Carêmes  de  devonon  ,  qui  iont  de  laine  Dimitre,  de  la 
Croix,  &:  de  lainc  George;  Qu'après  avoir  tfté  éprouvez  dans 
une  niaifon  ,  ils  prennent  une  atceftation  du  Supérieur,  6c 
s'en  vont  trouver  l'Evefque,  lequel  eftanc  informe  de  leurdeH. 
fein,  les  exaorte  à  quitter  le  monde,  retjoic  les  vœux  dechafte- 
té,,  d'obeïiTànfe,  Vautres,  ôc  leur  donne  une  croix^  Qiie  l'on 
élevé  dan6  les  maifons  des  jeunes  garçons  qui  fervent  à  la 
Melfe,  &  à  l'Office,  Siquieftant  en  âge  peuvent  fonger  à  en- 
trer dans  la  vie  religieufe;  Qu'ils  Te  lèvent  deux  heures  devant 
le  jour  pour  aller  dans  l'Eglile  chanter  les  louanges  de  Dieu 
pendant  une  heures  Qiic  l'on  dit  la  Melfetous  les  jours;  Que 
tousiesfoirs  un  peu  avant  le  coucher  du  Soleil  on  fe  rafïèmble 
dans  l'Eglifè  pour  vacquer  à  la  prière. 

Voila  ce  que  j'ay  pu,  tirer  de  ces  Religieux.  Car  ils  font  fi  peu 
inftruits  de  leur  eflar,  qu'ils  n'enfijavent  point  parler  jufte,  fe 
contentant  de  connoiftre  leurs  principaux  devoirs.  Mais  ce  qui 
eft:  admirable,  c'efl:  qu'ils  n'hefitent  point  fur  l'Eue hariftie  tou- 
chant la  prefence  réelle.  Scie  changement  du  pain&  du  vin, 
6c  furîesmyfteres  plusimportans,  fi  vous  en  feparez  ce  qui 
efl  de  la  Schoîaftique  ^car  il  y  eria  peu  qui  en  ayent  quelque 
légère  connoifiance.  La  tyrannie  des  Turcs  leur  pourroit  fervir 
d  excufe  ,  comme  aufTi  les  ruines  de  leurs  maifons.  Celle  donc 
nous  parlons,  qui  eftoit  de  trois  cens  Religieux  avant  la  prife  de 
Conflancinople,  n'a  été  rétablie  que  depuis  trente  ans.  Ce  qui 
s'eft  fait  en  y  joignant  les  Caloyers  d'une  Abbaye  de  faine  Geor- 
ges qui  en  eftoit  voifine,  &quiefl:maintenantabandonnée.  Oiï 
y  a  bâti  un  Réfectoire  depuis  peu,  qui  eft  aflez  propre,  où  il  y  a 
une  table  feparée  pour  le  Métropolite.  Mais  comme  ces  Reli- 
gieux foufFrent  fouvent  de  mauvais  traitremens  de  la  parc  des 
Turcs,  Ion  peut  faire  pafter  pour  une  chofe  extraordinaire  les. 
reftes  derObrervancequel'on  y  voit.  Ils  font  tributaires  des 
Mofquées  du  Mahometifme,ôcils  font  foûmisfort  fouvent  à 
àcs  avanies. 

A  deux  heures  de  l'Abbaye  de  faint  Dimicre  il  y  a  un  village 
ou  bourgade  en  pleine  terre,  nommé  en  grec  Aretftu?n  ,  &  en 
Turc  Dargé^  où  il  n'y  a  que  trente  maifons  de  Turcs.  Le  refte 
quiconfifteen  deux  cens,  eft  habité  de  Grecs  qui  y  vivenc 
en  liberté  de  confcience  fous  la  diredion  de  quatre  Papas  qui  y 


avec  rBçlife  Romaine  fur  T EucharlJ^ie.  615 

<3ererveRt  quafcEglifes,  quifontdenofbre  Dame  la  Catholi- 
que, de  Saint  Nicolas ,  de  Sainte  Chrifalcine,  &  de  Saint  Ni- 
ceras.    La  féconde  eft  la  plus  conilderable,  Ion  étendue  efcant 
de  foixante  maifons,  luivanc  !e  rapport  que  m'en  a  fait  le  Curé, 
qui  en  a  l'adminiftration.  C'eftun  Caloysr,  lequel  eftantvcnu 
dans  l'Abhaye,  je  ne  négligeai  pas  l'occafion  de  lui  faire  plu- 
fïeusqueftions.  Il  répondit  à  celles  qui  concernoient  TEucha- 
riftie,  que  c'eftoit  un  facritice  non  fanglant,  inflituë  en  comme- 
moratiorde  la  Palficn  de  Nuftre  Seigneur  Iesus-Christ,  que 
le  même  corps  de  I.C.  qui  avoit  efté  crucifié  y  eftoit  offert, 
&  que  les  fubftances  du  pain  &  du  vin  fe  changeoient  par  la 
Conf?cration  au  corps  del.  C.  Luy  ayant  reprefentë  que  l'on 
voyoit  du  pain  &;  du  vin,  6c  que  le  goût  le  faifcut  croire  -,  il 
me  dit  que  les  apparences  extérieures   demeurent  fars  leur 
fubflance. 
le  lui  demandai  pourquoi  donc  l'on  ne  rendoit  pas  plus  de 
refpecl  dans  les  Églifes  au  Samt  Sacrement^  d'où  venoit  que 
l'on  ne  tenoit  pas  une  lampç  allumée  devant,  &  qu'il  n'eftoit 
pas  ferré  dans  une  boëte  ou  calice  plus  propre  j  6c  j'ajoutai 
que  cettemaniere  d'agir  fervoit   de  prétexte  aux  Calviriftes 
pourfoutenir  que  les  Grecs  eftoient  de  leur  opinion. Sa  réponfe 
fut  qu'ils  eftoient  des  calomniateurs^ qu'afllirément  on  ne  pou- 
voit  trop  témoigner  de  refpeclau  S. Sacrement,  mais  que  fou- 
vent  ia  pauvreté  emnefchoit  la  bonne  volonté  ;  qu'il  y  avoit 
.même  des  fimples  qu'on  ne  pouvoit  defabufer  de  rendre   des 
cultes  fi  extraordinaires  à  des    images   qu'ils  négligent  leurs 
principaux  devoirs  ;  6c  qu'enfin  la  tyrannie  des  Turcs  appor- 
toit  un  grand  trouble  à  toutes  chofes. 

le  m'informai  des  inflrudions  qu'il  donnoit  à  fcs  Paroiffiens, 
de  1  i  r  Çommnnion,5>:  de  la  minière  d'adminiftrer  le  Viatique, 
'&  jetiouvai  (  Cicç  qu'il  m'endir  eft  véritable)  qu'il  ne  tenoit  pas 
à  luy  que  (es Ouailles  ncfiîlL'nr  leur  devoir,   qu'autant  qu'il  le 
pouvait  il  lesenfeignoit,  principalement  les  Dimanches  ^  qu'ils 
commu?'ioient  ordinairement  quatre  fois  l'année,  à  Pafques,  à 
Noël  ,  à  la  Penrecofte,  &  aux  Apoftres;  que  la  Communion  de 
Pafques  ctoit  d'obligation  à  peine  d'excommunication,  6c  que 
le  Viatique  confacré  le  leudi  Saint  fe  porrcit  publiquement  aiix 
malades  avec  une  cérémonie  refpcclueofe.  le  lui  fis  l'ohjedion 
des  Turcs;  mais  il  répliqua  qu'ils  n'apportoient  point  de  trou- 
ble à  leur  miniftere  ,  qu'ils  eftoient  en  périr  non  l-je     qu'ils 

H  H  h  h  ij 


6i4Liv.VîIT.  Prewvas  authen.  de  t  union  des  Eg.  d'Or, 
avoiencunepetireMofquéedaos  le  Bourg  ,&  qu'il  y  enav  jic 
une  dehors  coûte  bâtie. 

Il  me  dit  encore  pour  fatisfaire  a.  ma  curiofité  qu'ils  dépen. 
dolent  du  Métropolite  de  Calcedoine,auquel  il  rendoit  quaran- 
te piaftresi  qu'il  y  avoit  vingt  quatre  autres  paroilîesdans  fa  dé- 
pendance, 6c  llx  Monafteresj  que  ce  Prélat  faifoit  ia  vifite  deux 
fois  l'année;  qu'il  examinoit  la  manière  dont  les  Eglifesétoienc 
tenues,  &  les  Sacremens  adrainiftrez5&  qu'il  inftruifoit  le  peu- 
ple ,  qui  lui  donnoit  par  tête  douze  afpres  à  chaque  vifite  , 
donc  il  y  en  avoit  la  moitié  pour  le  Patriarche.  Il  me  procéda 
qu'il  ne  prcnoitpour  les  fondions  curiales  que  la  volonté  de 
iès  Paroifîiens,  lefquels  ne  luy  payantaucune  dixme,  donnoienc 
ce  quileurplaiioit  à  Pafques  &  dans  les  autres  temps  qu'ils 
recouroient  aux  Sacrtmens ,  ou  de  dévotion. 

J'ay  viliré  le  Monaftere  de  l'AfTomption  où  il  y  a  dix  Re- 
ligieux, entre  lefquels  efl:  un  Abbé  &  unfeul  preftre  Us  fui- 
vent  la  même  règle,  &  lamcme  diicipline  que  ceux  de  faine 
Dimitre.  Leur  mailbn  eft  fur  le  haut  d'une  éminence  fort  ai- 
fée  à  monter,  d'où  la  mer  paroilTanr  l'entourer,  on  s'imagine 
eftre  dans  une  Ifle  i  mais  elle  tient  à  la  terre  ferme  par  un 
grand  chemin  large  de  dix  ou  douze  toifes,  &  fort  long.  Il 
eft  un  peu  en  dos  d'afne ,  &  paroift  un  pont,  parce  que  d'un 
cofté  eft  la  mer.  Se  de  l'autre  eft  un  lac  ou  eftang  d'eau  falée. 
Elle  a  encore  une  autre  communication  avec  la  terre  ferme, 
rnais  qui  eft  artificitlle  par  le  moyen  des  chauffées  &  digues, 
qui  fervant  aupaftage  d'une  Ifle  à  une  autre,conduifenc  juC 
qu'à  terre,  &  fervent  à  feparer  l'eftang  dont  nous  avons  parle 
de  l'autre  cofté  de  la  mer.  Il  y  a  des  temps  où  l'on  rompt  cer- 
tains endroits  des  digues,  afin  que  la  mer  donne  du  Poiflon 
à  ce  refervoir,  lequel  eft  toujours  fort  pacifique  à  caufe  de  fa 
ficiiation  dans  unenfoncemenc,dont  les  bords  eftantaftèz  bien 
cultivez  &  plantez,  rendent  la  promenade  fort  agréable. 

Il  faut  maintenant  retournera  l'Abbaye.  L'Eglife  eft  placée 
comme  eelle  de  Saint  Dimitre.  Elle  eft  peinte  à  peu  prés  de 
la  même  manière,  excepté  que  le  fanduaire  eft  un  peu  plus 
large  auffi  bien  que  la  nef,  Se  qu'il  y  a  de  gros  coffres  le  long 
de  la  muraille,  où  font  enfermez  les  ornemens.  Celuy  des 
Religieux  qui  me  montroit  toutes  chofes,  me  dit  que  la  boëte 
dans  laquelle  on  garde  le  Viatique  y  eftoit  aufli  ferrée  d  nsun 
ciboire  j,  Si  luy  demandant  la  raifon  quiobligeoit  de  la  tenir 


Anjec  tEgUfe  'T{oma.ine/ur  ÎEuchanflie.  615 

ibus  la  clef,  il  répliqua  que  c'eftoit  pour  une  plus  grande  {eu- 
leré.  le  pris  occafîon  de  cet  entretien  de  luy  demander  ce 
qu'il  croyoit  de  l'Euchanltie.  Ayant  réplique  que  c'eftoit  le 
véritable  corps,  6c  le  véritable  fang  de  I.  C.  &:  qu'il  n'vavoit 
point  de  pain  ,  il  ne  voulut  pas  me  rien  dire  davantage.  Et  cop.t- 
me  il  vit  que  je  continuois  de  l'interroger,  il  me  montra  la  mu- 
raille qui  eftderriere  l'Autel. 

C'eft  un  enfoncement  coupé  en  dt^mie  voûte, dans  lequel  i!  va 
trois  rangs  de  figures  peintes.  Dans  le  premier  tout  en  haut 
eft  la  Vierge  ayant  les  bras  étendus,  &  tenant  1.  C.  hir  {on 
eftomach.  t,)ans  le  fécond   l'on  voit  au  milieu  un  autel  avec 
un  dais  foûtenu  de  quatre  pilaftres,  aux  deux  bouts  I.  C.  fur" 
les  pieds  pofez  fur  l'autel ,  tenant  d'un   cofté  l'Euchariftie  & 
de  l'autre  le  calice.  H  y  a  à  droite    &  à  gauche  fix  Apôtres, 
qui  font  les  douze,  qui  viennent  l'un  après  l'autre  dans  une 
pofture  fort  dévote  recevoir  ce  gage  de  l'amour  divin.  Saine 
Pierre  d'un  coflë  re  çoit  le  laint  Sacrement  dans  fa  main ,  &  de 
l'autre  faint  lean  boit  au  Calice,  Se  tous  ceux  qui  le  fuivent 
font  fi  bien  peints  ,  que  par  leurs  geil:es  ils  témoignent  a0ez 
la  créance  delà  realité,n'y  ayant  que  ludas  lequel  eft  reprefenté 
le  dos  tourné  à  fon  Maiftre,  &  tenant  un  doigt  dans  fa  bouche, 
le  Peintre  avant  voulu  reprefenter  qu'iJ  trahilToit  celuy-là  mê- 
me qu'il   alloit  loger  dans  (on  cœur. 
Quoyque  ces  peintures  reprefentent  bien  la  vérité  du  Mvftere 
qui  eft  fuffifammenc  prouvé  parla  lampe  qui  pend   au  milieu 
du  dais,&  par  un  livreouvertpofé  fur  l'autel  où  (ont  écrites 
ces  paroles  :  Prcne\  &  manzezj.  ce  cy  eft  mon  corps  c^c.  les  figures 
du  troifîéme  rang  font  encore  plus  expreiTives.  Un  autel  qui  eft 
peint,  &  dans  le  milieu  le  calice  d'où  l'on  voit  fortir  I.  C.  en 
chair ,  en  figure  d'un  enfant,  avant  à  fa  droite  le  livre  des  Evan- 
giles, où  les  paroles  facrées qui  opèrent  cette  merveille  font 
écrites ,  &  à  fa  gauche  le  pain  dont  la  fubftance  eft  convertie 
en  celle  de  I.  C.  mè!ïie^&  au  de(rus  le  voile  du  calice.  Quatre 
Docteurs  font  reprefenter  dans  les  coftez  de  la  voûte,  deux 
dans  chacun  reveftus  de  leurs  habits  pontificaux  Les  deux  pre- 
miers montrent  d'une  main  la  reprefentation  du  Myftere  in- 
efFable,3c  tiennent  de  l'autre,  auffi  bien  que  ceux  qui  font  après, 
des  rouleaux  où  on   lit  des fenrences  Spirituelles. 

Ce  qui  m'a  furpris,c'eft  que  l'on  m'a  aduré  qu'il  n'vavoic 
point  d'Egli/e  Grecque,  qui fe fut  un  peu  confervée,  où  il  n'y 

HH  hh  lij 


éi6  Liv  VJIL  Preuves  authent.  de  f  union  des  €g.  d'Or. 
eût  dans  l'enfoncement  une  double  reprelentation  du  Myfte- 
re  der£uchariftie,figuréeàpeu près  comme  je l'ay expliquée, 
&:  cependant  je  n'y  avois  point  tait  de  reflexion  jufqu'alors 
Ayant  oblervc  ce  qu'd  y  avoit  de  remarquable  dans  cette  Ab-* 
bïyCj  je  palTay  dans  une  autre  vis  à  vis,  qui  cfl:  la  feule  maifon 
que  l'on  voye  dans  une  petite  Ifle,  où  elleeftfituée.  Son  patron 
ell  laint  André.  Deux  Caloyers  feulsy  demeurent  depnis  trois 
ans, afin  de  nela  pas  abandonner  ab(olumenf,comme  elle  l'a  cté 
durant  les  quatre  années  prefentcs, depuis  que  Ton  eut  la  cruau- 
té d'afLlîiner  deux  Relideux  ,  les  autres eftan'>ab(ens,&oue 
le  Soull>achi  defaint  Dim.tre  pouffé  d'une  avare  barbarie  con- 
traignit les  deux  Abbayes  voifînes  de  luy  payer  quatre  cens 
piaftres/autedereprefenter  les  meurtriers, comme  s'ils  vcuiTént 
manqué,  s'il  avoit  efté  en  leur  puilîance.  C'eftoit  auifi  pour 
leur  faire  payer  le  fangdes  morts,  fuivant  l'ufage  des  Turcs  qui 
en  exigent  le  paiement  des  voifin*.  L'un  des  deux  Caloyers  qui 
eft  un  bon  homme  me  mena  dans  l'Eglife  où  il  n'y  a  aucune 
peinture  qu'au  devant  du  Sanduaire^  le  dedans  n'ayant  nul  or- 
nement. Il  me  dit  que  ceux  du  Monaflcre  voilln,  qui  dépen- 
doit  autrefois  de  leur  maifon,  venoient  leur  dire  la  MefTe,  & 
luy  demandant  fî  c'efloit  bsFefl;es&  Dimanches,  il  mefitcon- 
noiflie  que  c'eftoit  quelquefois  tous  les  huit  iours,'&  que 
leur  pauvreté  les  empefchoit  de  la  faire  dire  plus  fouvent. 

je  l'interrogeay  de  fa  fov  fur  l'Euchariflie  ,  &  fur  le  nombre 
des  Sacremens.  Sa  réponfe  fut  que  J.  C.  eftcit  prefent  réel- 
lement dans  ce  myftere,  fous  les  apparences  du  pain  &  du  vin, 
qu'il  y  avoit  fept  Sacremens,  &:  que  tous  ceux  qui  croyent  au- 
trement efloient  des  heretiquesj  que  c'eftoit  la  croyance  de 
Ion  Eghfe,  mais  qu'il  faloit  du  pain  levé  pour  la  confecration. 
Il  m'expliqua  tous  ces  points  affirmativement,  &  fans  hefiter. 
Il  me  parla  anfîî  de  l'antiquité  de  fa  maifon  ,  me  montrant  le 
reftedes  voûtes  &  des  murai! les  du  temps  des  Empereurs  Grecs, 
Et  comme  je  me  promenoisdans  la  cour ,  il  me  montra  un  coin 
où  eftoit  autrefois  une  chambre  bâtie  par  un  Refîdant  d'Hol- 
lande, qui  venoit  y  pafîer  quelque  temps.  l!  me  dit  encore  que 
pw'ndant  le  règne  de  Sultan  Murât,  i!  y  avoit  des  Religieufes 
ou  Caloyeres,  dont  l'appartement  eftoit  feparé^  &:  qui  enten- 
diîiert  la  iMcfîe  d'un  Caloyer  deftiné  pour  elles. 

Filant  informé  de  toutes  ces  particularités,  je  retournay  à 
l'Abbaye  de  l'AfTomption,  &:  de  là  à  la  maifon. 


(tn;ec  l'Egl'tfè  Komùne  fiirTEucha.riflie.  617 

Je  ne  fus  pas  li  toit  de  retour  que  j'allay  dans  l'Eçlifë  de  l'Ab-  Ch  V. 
baye  ,  où  l'on  achevoic  la  prière  du  loir  avec  beaucoup  de 
dévotion,  Si  tofl:  qu'elle  fut  finie  j'entray  dans  le  SanduAire  , 
pour  y  remarquer  la  pciijture  qui  eft  dansla  demiecouppeà  la 
Face  de  l'Autel.  L'on  y  voit  J.  C.  communiant  les  Apoftres  de  la 
même  manière  que  nous  avons  remarqué,  à  l'exccpt'on  que 
S.  Pier'-e  paroift  recevoir  la  Communion  dans  fa  bou..he.  Au- 
delTus  eft  un  Autel  où  elt  dépeint  le  calice,  un  livre  d'Evangiles 
6c  l'haftieJ  &  l'on  voit  aux  deux  collez  les  figures  au  naturel, 
fçav&ir  adroite  de  faint  Blaife,  de  faint  Silveftre  Pape  de 
Rome,  ayant  une  triple  couronne  fur  la  tefte,  de  faint  Nico- 
las, &:  de  faint  Chryloftome,  &  à  la  gauche  de  faint  Bafile  ,  S. 
Grégoire  ,  S.  Spindion,  &  S.  Cvi-ille  ,  le  premier  deces  der. 
îiiers  ayant  ces  paroles  écrites  dans  ui\  rouleau  qu'il  tient,  O 
Dieu  ,  no^re  Dicu^  qui  avez^envoyé  nojhe  pain  celé  fie  ,  qui  eft  la 
nourriture  de  tout  le  monde. 

L'on  voit  à  peu  prés  la  même  reprefentation  dans  trois  des 
Eglifes  Grecques,  &  Paroillîales  du  village  de  Foulta,  où  j'ay 
efté  exprés,  tant  pour  examiner  ces  parricularitez, que  pour 
faire  interroger  le  Papa.  La  différence  qu'il  y  a  ,c'eft:que  la  fi, 
gure  de  J.  C.  en  quelques-unes  n'eft  pas  doublr,  &  qu'eflant 
au  milieu  de  l'autel ,  il  étend  les  deux  mains  en  forme  de  Croix 
pour  marquer  davantage  fa  paffionj&  que  de  Tune  il  commu- 
nie S.  Pierre,  &  de  l'autre  il  fait  boire  famt  Jean  dans  le  Calice, 
J'ayobfervé  qu'au  troifiéme  rang  il  y  a  un  autel  fur  lequel  nô- 
tre  Seigneur  Jesus-Christ  eft  couché  en  figure  d'enfant  fur 
la  reprefentation  de  l'hoftie  ,  eftant  couvert  julqu'auprés  du 
menton  d'un  voile  ,  qui  eft  celuy  du  Calice,  où  il  y  aune  croix 
delTjs,  8c  ayant  auprès  de  luy  d'un  celle  le  Calice  avec  une 
cuilliere  dedans,  &  de  l'autre  le  Livre  des  Evangiles.  Deux  fi- 
gures d'Anges  au  naturel  à  droite  &  à  gauche  y  marquent 
le  culte  de  latrie  qu'ils  luv  rendent.  Ils  ont  le  corps  courbé,  la 
tefte  un  peu  baillée,  les  yeux  prefque  fermez,  &  tiennent  un 
grand  bâton  au  baut  duquel  eft  une  tefte  de  Seraphim  figurée 
dans  un  rond.  L'on  voit  en  fuite  faint  Nicolas,  fie  faint  Chrylb-" 
ftome  à  la  droite,  &  à  la  gauche  faint  Bn.fi!e,&  faint  Athanalê 
tenant  chacun  un  rouleau  de  papier  où  lont  écrites  quelques 
louanges  de  Dieu, 
Les  Eglifes  dont  les  peintures  appliquées  derrière  l'Autel  fè 
trouvent  femblables  à  celles  que  je  viens  d'expliquer,  lont  de- 


6i8Liv.VIH.  Preuves  auth.  de  t union  des  Eg.  d'Or, 
diees  à  l'Annonciation  ,  à  faine  Dimicre,&;  à  faine  Tiicodore. 
Cette  dernière  comme  U  plus  grande  ç\k  defervie  par  deux 
Papas,  qui  ont  fous  leur  diredion  cinquante-cinq  maifons,  & 
familles.  Dans  la  première  il  n'y  en  a  que  trente,  6c  dans  la  fé- 
conde vingt-cinq.  Il  y  en  a  une  quacricme  dedice  àlaint  Mi- 
chel, ou  il  n'y  a  des  peintures  qu'au  devant  du  Sanctuaire,  n'y 
en  ayant  point  au  dedansà  caufe  qu'elleeftiort  pauvre,  quoy 
qu'elle  ait  trente  familles.  Le  Papas  de  celle-cy  rend  au  Mé- 
tropolite de  Calced^Mne  trente  cinq  Piailres.  Le  Caloyer  de 
l'Annonciation  en  donne  vingt.  Le  Papas  de  laine  Dimitre  au- 
tant,  &  celuy  de  S.  Théodore  cinquante. 

Jetrouvay  les  Papas  de  ces  paroilTes  bien  inftruit? ,  tc  en- 
tre autres  le  Caloyer  de  l'Annonciation,  lequel  ayant  plus  de 
vivacité  êc  de  promptitude  à  répondre,  me  dit  que  l'on    gar- 
doit  le  Viatique  dans  le  Sanctuaire,  qui  eftun  lieu  à  part&  fe- 
paré  du  commerce,  &  que  c'eftpit  le  fujet  pour  lequel  les  fe- 
culiers  n'y  venoient  point  prier,  qu'il  eftoit  feulemcnr  dcftiné 
pour  l'ufage  des  malades,  &  que  hors  le  temps  de  la  célébration 
on  n'y  tenoit  point  de  lampe  allumée,  que  J.  C.  eftant  la  lu- 
mière même  n'avoitpas  befoin  de  cet  honneur  extérieur.  Mais 
ces  raifons  ne  me  fatisfaifant  pas ,  parce  que  nousnc  devons  ja- 
naais  manquer,autantque  nous  le  pouvons, de  faire  paroiftreau 
de  hors  ce  que  nous  profefTons  dans  le  cœur;  il  me  répliqua  que 
c'eftoit  l'ufage.  Je  lui  dis,  &à  tous  lesautres^quele  peu  de  ref- 
ped qu'ils  portoientau  S.  Sacrement  parla  manière  dont  ils 
li  tenoient  dans  des  boëtes,enfermé  dans  un  fac^efloit  caufe  qix 
les  Calvmiftes  accufoient  les  Grecs  de  ne  pas  croire  la  pre- 
fènce  réelle,  8cla  converfion  du  pain  &  du  vin  au  corps  &au 
fano-  dej.  C.  Ils  s'écrièrent  en  difant  que  c'étoit  une  accufation 
téméraire,  &  que  l'Eglife  d'Orient  avoir  toujours  cru,  &  croyoic 
encore  le  corps  dej.  C.  pre  fent  réellement  dans  l'Euchariftie 
fous  les  appafences  du  pain  6cdu  vin.  Je  leurfis  plufieursquef- 
tions  fur  ce  divin  Myftere  ,  &  je  trouvay  leurs   rcpofc  s  uni- 
formes, aufquelles  ils  ajoutèrent  que  ceux  qui  croyoïent  autre- 
ment étoient  des  excommuniez.  Quantité  de  païfans  qui  nous 
environnoient,  apportoient  beaucoup  d'attention  à  nôtre  en- 
tretien. Et  lorfque  je  dis  à  leurs  Papas  qu'on  les  accufoit  de  ne 
pas  croire  la  prefence  réelle,  &;  le  changement  du  pain  &  du 
vin,  ils  remuèrent  la  tête,  ôc  quelques-uns  dirent  que  c'étoic 
une  faulîèté. 

je 


doiec  ÏEglïfe  Komx'tne JurVEucharïflïc.  619 

Je  m'informai  des  Papas  s'ils  avoient  foin  d'inftruire  leurs  Ch.  V. 
Paroiffiens  les  Dimanches  &;  les  principales  Feftes ,  de  ce  qu'ils 
leur  enfeignoienc  touchant  la  Sainte  Trinité  ,  les  fept  Sacre- 
mens  ,  &  autres  chofes  neceflaires  au  falut.  Ils  m'aiîurercnt 
qu'ils  s'acquicfoienc  à  ce t  égard  de  leur  devoir  autant  bien  qu'il 
leur  eftoit  polfible ,  6c  que  la  tyrannie  Tous  laquelle  ils  vivoienc 
le  leur  permettoit  ^  qu'ils  leur  enfeignoient  que  la  Trinité  con- 
/îftoit  en  trois  perfonneS;,  Dieu  le  Père  ,Dieu  le  Fils,  Dieu  le 
Saint  Efprit  :  Qii'il  y  avoit  fept  Sacremens,  &  qu'il  falloit  in- 
voquer les  Saints ,  &  particulièrement  la  fainte  Vierge.  Ils  me 
dirent  âuffi  que  leurs  Paroilîiens  communioient  d'obligation  à 
Pâques,  &:  par  dévotion  aux  autres  Feftes  j  qu'il  y  avoit  des 
gens  qui  apprenoient  à  leurs  enfansà  lire  ,  &  en  même  temps 
leur  croyance.  Et  comme  je  voulus  en  interroger  un  de  cinq  à 
jfix  ans ,  le  Papas  me  dit  qu  il  ne  fçavoit  encore  rien,  |e  lui  de- 
mandai s'il  ne  communioit  pas  ^  &  m'ayant  répondu  qu'oiii,  je 
lui  fis  reproche  de  l'admettre  à  ce  Sacrement  fans  lui  donner 
aucune  conno'iTance  de  ce  qu'il  faifoit.  Sa  réplique  fut  qu'étant 
dans  l'eftat  d'innocence ,  il  n'eftoit  pas  necefTaire  de  lui  donner 
desinftruclions  dont  il  n'eftoit  pas  capable.  Ce  qui  m'obligea 
de  lui  dire  que  cela  eftoit  bon  à  l'égard  àts  en  Fans  de  deux  ou 
trois  ans  que  l'on  corîimunioit  aufTi  dans  l'Eglife  Grecque^  mais 
non  pas  pour  ceux  qui  eftoient  déjà  capables  de  comprendre 
quelque  chofe,  &  qui  eftoient  bien  proches  de  fortir  de  leftac 
d'innocence. 

Je  m'enquis  errcore  d^e  favifTte  que  leur  Métropolite  Faifoit 
dans  leurs  EgliFes  &  Paroifles ,  &  je  trouvay  leurs  réponfes 
conformes  à  celles  que  l'on  m'avoit  faites  ailleurs.  Enfin 
m'ayant  déclaré  qu'ils  ne  prenoient  rien  de  leurs  Paroifl 
fiens  que  leur  volonté,  je  les  quittai,  6cm'en  retournant  je  paC 
fai  dans  une  petite  Eglife  dédiée  à  S.  Jean,  défervie  par  des  Ca- 
loyers,  mais  qui  eftoient  abFens.  Un  valet  de  la  maifon  me 
l'ouvrit  en  l'abfence  de  ces  Religieux.  Je  trouvai  que  la  de- 
mie voûte  derrière  l'Autel  répondoit  fufiifamm.ent  auxquefl 
rions  que  j'avois  envie  de  leur  Faire.  La  réalité  y  eftant  peinte  , 
puifquel'on  y  voit  J  C.  en  chair&figure  humaine  fur  la  repre- 
fentation  de  l'hoftie  5  la  converfion  du  vin  en  Ton  fang  touc 
de  même  par  le  moyen  du  calice  qui  eft  tout  contre  ^  l'adora- 
tion y  eftaufiienfeignéeparles  Anges  &  les  Saints  qui  fonraa- 
prèsreprefentez  dans  un  culte  de  latrie  5  ce  qui  Fait  bien  con- 

liii 


éio  Liv.  VIII.  n^reufves  authen.  de  r union  des  Eg.  d'Or. 
noiftre  de  quelle  manière  les  Grecs  encendcntrinfhcution  de 
la  Cène  figurée  au  deiïus. 

J'obfervai  toutes  ces  particnlaritez  le  vingt  deuxie'me,  &  le 
vingt-troifiéme  ellint  retourne  de  la  vifite  des  Papas  ,  je 
rencontrai  dans  TAbbaye  deux  Religieux  Grecs  du  Mont  de 
Sinaïj  qui  faifcient  leur  qucfte.  Nous  parlâmes  de  p.ufieurs 
points  qui  concernoient  le  temporel  ;  &  cftunt  tombé  fur  le 
fpintuel  ,ils  me  dirent  que  l'on  diioit  quatre  McfTes  tous  les 
jours  fur  le  mont  Sinaï  contre  la  coutume  de  l'Eglile  Grecque 
qui  veut  que  l'on  n'en  célèbre  qu'une  chaque  jour  ;&  que  le 
nombre  des  bienfaiteurs  qui  faifoient  leurs  aumônes  ,  afin 
qu'on  priaft  pour  eux ,  &  qu'on  les  nommaft  au  faint  Sacrifice , 
edoitcaufe  qu'on  s'cloignoit  de  la  règle  générale:  Qu'à  la  vé- 
rité il  n'y  avoitf qu'une  Mede  publique  ,  les  trois  autres  eftant 
particulières  ,  &:que  la  tyrannie  des  Turcs  eftoit  encore  le  fu- 
jet  pour  lequel  on  n'y  prenoit  pas  garde  de  fi  prés,àcaure  de 
la  necefTitéoù  ils  les  reduiloient  de  fe  procurer  leur  fubfiftance. 
Je  leur  demandai  d'où  vient  qu'ils  appellent  la  MeflTele  faint 
Sacrifice  ,  &  ce  que  Ton  Archevêque  ,  &  tous  ks  Religieux  _,  6c 
lui  même  en  croyoient.  Il  me  dit  quec'eftoit  le  Sacrifice  non 
fanglant  du  corps  &  du  fang  de  J.  C.  inftitué  par  lui  même  , 
qui  Te  faifoit  en  mémoire  de  fa  Paflion.  Et  fi.ir  lesobjedionsque 
je  lui  fis  du  pain  &:  du  vin  qui  paroiflent  vifiblement ,  6c  d'une 
prefence  de  vertu  j  il  répliqua  qu'après  la  Confecration&l'O- 
raifon  du  S.  Efprit ,  leslubftjncesdupain&  du  vin  eftoienttel- 
lemenc  changées  au  corps  Seau  fâng  de  J.  C.  qu'il  ne  reçoit 
plus  du  pain  &:  du  vin  que  les  apparences  extérieures  &  les  ac- 
cidens,  que  les  Grecs  nommoientcrtj^(^«/2«/.oTo!,.  Jeluireprefen- 
tai  que  les  Calvinifles  de  France  Vautres ioûtenoient  quel'E- 
giife  Grecque  ne  tenoic  pas  la  prefence  réelle  de  J.  C.  en  l'Eu- 
chariftie  ,  ni  le  changement  des  fubftancesdupain  &  du  vin. 
S'eftant  mis  à  rire  comme  d'un  fait  avancé  témérairement ,  il 
répliqua  que  ces  hereriques  reflembloient  à  ceux  qui  faifoient 
naufrage ,  lefquels  ie  fervoient  de  tout  ce  qu'ils  rencontroienc 
pour  tâcher  de  fe  f3uver,mais  que  malgré  leur  imagination  , 
la  croyance  de  l'Eglife  Orientale  fubfifteroit,  &;  que  par  fa  gr^- 
ce  elle  fubfifteroit  toujours.  Il  me  p  r!a  aiifii  du  nombre  des 
Sacremens ,  ou'il  m'aflura  eftre  de  fept ,  me  proteftant  que  ces 
vericez  eftoient  capitales  ,  &  qu'elles  eftoient  crues  par  fon 
Archevêque  &  tous  (as  Religieux,  comme  faifant  une  par- 


A^ec  ÏEglife  'Roma.ine  fur  rEuchurifiie.  éii 

tie  eflentielle  de  la  Fov  OxiencaiC.   Voilà  l'intormation  que 
j'ai  prife  de  ce  bon  Religieux. 

Le  Samedi  vingrquarrieme  je  retournai  tout  droit  à  Con- 
ftantinople,  d'où  je  n'ciluis  éloigne  que  de  trente  milles  ou  dix 
Jieucs  de  France,  &  j'arrivai  à  dix  lieures,  citant  parti  à  qua- 
tre heures  du  matin. 


CHAPITRE     VI. 

Union  de  fEglife  Grecque  avec  l'Eglife  Romaine  fur  l'^ncharifiie 

prouvée  far  une  Atteftation    authentique    du    patriarche   de 

Confiantinople  ^fî'inée  des  trois  autres  Patriarches  qui  Tant  efiè 

*  avant  lui  ,  du  Patriarche  d'Alexandrie  (^  de  trente  cinq  Ms~ 

tropolites. 

Election  du  p.rtriarche  Tiionyfîus  a  prefent  feant.  Zi fie  des  Patriar- 
ches depuis  Cyrille  Lucar.  Lettre  de  Aionfieur  de  l^ointel 
au  Roy  fur  L' Attcp  ation  de  Dionyfus. 

ON  doit  d'autant  plus  eftimer  l'Attcftation  authentique 
du  Patriarche  de  Confiantinople  que  nous  produirons 
ici,  que  quand  il  l'auroit  refufée,  il  n  y  auroit  pas  fujetdes'en 
étonner.  Les  Grecs  ne  manquent  pas  de  raifons  pour  ne  pas 
accorder  ces  fortes  d'Acles.  II  v  en  a  qui  s'imaginent  qu'on 
leur  fait  tort  de  demander  des  atTurances  de  kur  fov  D'autres 
craignent  que  l'on  ne  s'en  f.'rve  pour  avancer  les  prétentions 
de  la  Cour  de  Rome.  D'autres  peuvent  appréhender  de  Te 
brouiller  avec  les  Princes  Proteftans,  en  les  condamnant  for- 
mellement. D'autres  n'aimenr  pas  à  fa;re  plaifîraux  Latins  par 
la  feule  averfion  qu'ils  ont  pour  eux.  Enfin  ils  peuvent  pren- 
dre beaucoup  d'autres  prétextes  pi^v.r  s'en  exempter. 

Cependant  le  Patriarche  nouvellement  inftallé  dans  cette 
haute  dignité  eftant  prié  parMonfieur  l'AmbafTadeur  de  don- 
ner cette  atteftation,  n'a  eu  recours  à  aucur.e  de  ces  excufes.  ôc 
ayant  crii  au  contraire  qu'il  devoir  fignaler  Ton  zèle  pour  la 
vérité  de  lafoyen  luinccordant  l'acle  qu'il  lui  demandoit  ,  il 
l'a  fait  de  la  manière  du  monde  la  plus  foiemnelleS:  la  plusau- 
tkenti<^ue  >  comme  oa  le  verra  par  la  Lettre  que  Moniieur 

ï  1 1  i  i] 


6iz  Liv.  Vî  1 1.  Prewves  authen.  de  tunion  des  €g.  d'Or. 
l'Ambaffadeur  en  a  écrite  au  Roy,  qui  fera  rapporté  ci  deflous. 
Cependant  afin  que  l'on  fçache  quel  eft  ce  Patriarche  ,  & 
pourquoi  cetAcTieefi:  figné  dequatre  Patriarches  de  Conftan- 
tinople  cous  vivans ,  ce  qui  paroill  extraordinaires  on  remar- 
<^uera  ici  que  la  tyrannie  des  Turcs  jointe  à  l'ambition  &  à 
l'avarice  de  quelques  Grecs  eft  caufe  de  cedefordre.  Carie 
Sultan  s'cftant  mis  en  polFelBon  de  nommer  au  Patriarchat , 
quoiqu'il  permette  au  Clergé  d'examiner  &:  d'élire  celui  qu'il 
nomme,  &  exigeant  enfuite  de  celui  qui  eft  élu  une  grande 
fomme  d'argent  ;  pour  avoir  droit  d'exiger  fouvent  cette  fom- 
me,il  prend  des  prétextes  de  les  dépo(reder,&  de  conférer  le 
Patriarchat  à  quelqu'autre  qui  lui  donne  encore  de  l'argent. 
Ainfi  cette  grande  Charge  eft  fouvent  expofée  à  l'ambition  Se 
à  l'avarice  des  Evêques  des  autres  Sièges. 

Ces  révolutions  ont  efté  fort  fréquentes  depuis  quelques  an- 
nées, comme  on  le  peut  voir  par  la  Lifte  que  nous  donnerons 
ici  des  Patriarches  de  Conftantinople  depuis  Cyrille  Lucar. 

CATALOGUE      DES      PATRIARCHES 
de  Confiantinofle  depuis  Cyrille  Lucar. 

Cyrille  Lucar.  1610.  Paysius  \(>^\. 

Gregoir-E  Damasie  1(313.  Parthenudi  iéj6'. kranglé. 

Athanase  Batelare  1634.  Gabriel  1657. 

Cyrille  Lucar  1634.  Parthenius  1657. 

Cyrille  de  Bere'e  165J.  Clément  1662- 

Parthenius  leVieux  1639.  DiONYStus  pour  une  féconde , 
Parthe"nius  leJeune  1644.         foisi(>C6. 

JOANNICIUS  1646.  MeTHODIUS  1667. 

Parth  nius  le  Jeune  Kjjo.  Parthenius  pour  la  troijlème 

pour  une  fconde  fois.  fois. 

JoANNicuS  \G')\.  pour  une fe.  Dion-^ISWJS  Evcque  de Lariffe, 

condcfois.  16  ji. 

Parthenius  qui  gouvernoit  cette  Eglife  avant  Dionyfius  a  efté 
chadé  du  Patriarchat  d'une  manière  allez  canonique,  ayant 
efté  convaincu  d'exaclions  immenfes  fur  les  Eglifes,  tant  par 
lesMetropolites,que  par  les  principauxGrecs  qui  ont  demandé 
fa  dcpolîïion  :  Et  pour  la  manière  dont  Dionyfius  a  efté  élu, 
on  la  verra  dans  l'Extrait  d'une  Lettre  de  M.  l'Ambairadeur 
que  nous  inférerons  ici. 


itfvec  ÏE?life  Komaîne  fur  tEucharifiie.         615 

^  Ch.VI. 

EXTRAIT    D'VNE    LETTRE    DE     M.     VAMBASSADEVR 
de  Confiantinofle  ce  lé.  Novembre  1671. 

LE   Vifir  eftanc  refolu  de  chaiïèr  Parthenius  après  une 
preuve  fi  pofîtive  de  fes  démérites ,  fie  venir  devant  lui 
Jes  Evêques ,  pour  fçavoir  d'eux  s'ils  ne  fouhaitoient  pas  qu'il 
leur  rendift  Methodius.  Mais  l'ayant  prié  de  leur  accorder  «'eftun  Dio- 
Dionyfuis ,  ce  Miniftre  les  fit  avertir  que  ne  voulant  pas  leur  nyfiusq^'i'f; 

d-         T->         ■         f  1       ,    /i     •  ■     A       \      \  1  I     •  voit  dtia  elte 

ernier  Patriarche  ,  il  n  eftoit  pasiulte  de  leur  donner  celui  avant  panhc- 

qu'ils  defiroient  ;  mais  qu'il  valoir  mieux  prendre  un  milieu ,  en  mus. 
élevant  à  la  dignité  Patriarchale  Dionyfius  à  prefent  Arche- 
vêque de  Lari(fe ,  auquel  Methodius  avoit  donné  fa  demiflion.  ^fj^T'""^ 
Il  n'en  a  pas  fallu  davantage  pour  fa  défignation  ,  qui  a  efté 
rendue  publique  par  le  Coftan  qu'il  a  reçu  du  grand  Vifir. 
C'eft  ainfi  que  fansparoiftre  dans  le  commencement!  il  a  re- 
cueilli le  fruit  du  travail  des  autres  qu'il  s'eft  appliqué  par  la 
voye  ordinaire.  Il  eft  digne  de  ce  rang ,  &  il  pourra  s'y  mainte- 
nir par  fon  crédit  qui  eftconfiderable  dans  le  Sérail  &  auprès 
duVifirqui  s'eft  expliqué  de  fon  deiïein  ,  de  ne  plus  écouter  les 
propofitions  de  changerles  Patriarches.  Par  confequentl'éta- 
blilfcment  de  celui-ci  caufera  à  l'Eglife  le  bien  de  lui  ofter 
Parthenius,  &  lui  produira  celui  de  la  délivrer  de  ces  chan- 
gemens  {î  frequens  qui  ne  font  qu'augmenter  fa  mifere  6c  fon 
afflidioru 

DENIS  PAR  LA  MISERICORDE  DE   BI^V , 

Archevêque  de  Confiantimpie  la  nouvelle  Rome  , 

é^  Patriarche  Oecuménique. 

C"^  E  n'eft  pas  une  chofe  indigne  de  la  conduite  Evangeli- 
_j  que>  mais  au  contraire  c'en  eft  une  qui  lui  eft  tres-con- 
forme ,  d'ouvrir  toujours  la  porte  de  la  doctrine  à  celuy  qui 
frappe,  &  d'avoir  des  réponfes  favorables  prêtes  à  rendre  à  ce- 
lui qui  témoigne  avoir  quelque  paffion  de  les  écouter.  Il  faut 
que  ceux  qui  l'ont  comme  nous  reçue  du  Ciel ,  la  confervent 
toujours  avec  grand  foin  ,'  puifque  nous  avons  efté  difpofez 
par  l'ordonnance  Apoftolique  à  nous  tenir  toujours  j-refts  à 
en  rendre  raifon  à  tous  ceux  qui  nous  la  demandent ,  à  caufe 
de  l'efperance  que  nous  avons ,  le  faifant  avf^c  douceur  ,  & 

II ii  iij 


6Z4  Liv.VîII.  Trewves  authen. de T union  des  €g.  d^Or, 
dans  une  bonne  confcience,  comme  il  nous  a  efté  ordonné  ^ 
quoique  de  nous  mêmesnous  ne  foyonspas  capables  de  rien  di- 
re,ni  même  de  rienpenfer^  mais  tournant  nôtre  vue  vers  celui 
qui  a  trouvé  toutes  les  voies  de  la  rcience,&  qui  les  a  données  2 
Jacob  Ton  ferviteur  &  à  Ifracl  ion  bien  aimé  ,  &  tirant  la  ma- 
tière de  nodreréponfè ,  desialutaires  inftruclions  qui  or,t  efté 
révélées  par  luy,parron  Fils  &  (on  Verbe  dans  lequel  font 
tous  les  trefors  de  fagefîe  ti.  de  fcience  ,  &  par  l'Efprit  confo- 
lateur ,  à  ceux  qui  font  dans  les  véritables  fentimens ,  dans  lef- 
quels  la  pieré  eft  renfermée  comme  dans  fa  demeure  ordinaire; 
ayant  appris  à  éviter  avec  grand  foin  toute  paroleou  peniée 
éloignée  de  la  dodrine  de  J  C. 

C'eft  pourquoi  quelques  perfonnes  curieufes  ayant  efté  pouC 
fées  je  ne  fçay  comment  à  s'enquérir  de  quelques  chofes  qui 
nous  regardent ,  &  nous  ayant  fait  quelques  queftidns  fur  àts 
matières  Eccledaftiques  ,  defirant  de  fc^avoir  de  nous  com- 
bien noftre  Eglife  d'Orient   Catholique  &  Apoftolique  re- 
connoiftde  Sacremens^  quels  font  nos  fentimens  furie  divin 
Sacrement  de  l'Eucliariftie  touchanrle  Baptême,  s'il  eftnecef. 
faire  aux  enfans ,  avec  quelques  autres  queftions  fur  la  même 
matière  j  touchant  la  dignité  Epilcopale  ,  fi  elle  eft  neceflaire 
à  l'Eglife  j  &  fi  l'Evêque  par  un  ordre  divin  eft  au  defTus  des 
Preftres  :  fi  les  hommes  éc  femmes  qui  embraftènt  le  célibat 
font  une  chofe  contraire  aux  Ecritures-,  &  fi  l'Eglife  Catho- 
lique de  J.  C.  fera  toujours  vifible  &  infaillible  fur  la  véné- 
ration des  Saints ,  &  le  culte  relatif  des  Images  5  fur  les  jeû- 
nes ordonnez  &  Tabftinence  de  quelques  viandes  ;  fur  quel- 
ques Livres  de  l'Ancien  Teftament  dont  l'autorité  eft  en  con- 
teftation,  Tobie,  Judith  ,  laSagefte  ,  TEcclefiaftique,  Baruch 
&  les  Machabées  ,  Çi  nous  regardons  ces  Livres  comme  partie 
de  l'Ecriture  ,  ou  Ç\  nous  les  rejettons  comme  fuppofez  par  les 
Payens  :  Nous  n'avons  pas  cru  pouvoir  palTer  fous  filence  leurs 
queftions,  de  crainte  d'eftreentr'autres  chofes accufez  de  né- 
gligence, mais  nous  les  avons  jugez  dignes  d'un-e  prompte 
&  courte  réponfe  que  nous  faifons  dans  la  pure  venté  ,  autant 
que  le  temps  plein  de  plufieurs  contre-temps  nous  l'a  permis , 
pour  éviter  le  reproche  qu'on   nous  pourroit  faire  de  noftre 
filence. 

Pour  les   Sacremens  ,  nous   fommes  de  tout  temps  en 
poftcflîon -de  fept^  laines  &  vénérables.  Je  répons  à  la  quef- 


ifvec  ÏEgîife  Komxine  Jhr  ÏEuchuriflie .  62.J 

tion.  Depuis  le  temps  que  le  faint  Evangile  nous  .1  eflé  piê.  Ch.  VI. 
ché,  ils  font  tous  véritables  &  neceflaires  pour  le  faluc  des 
iideles. 

Le  premier  d'entr'eux  efl:  le  faint  Baptême ,  dans  lequel  efl: 
pardonné  le  péché  origmel ,  aulîî-bien  que  les  péchez  acT:uels , 
dans  ceux  qui  s'en  trouvent  coupables,  de  par  lequel  eftant  ré- 
générez ,  nous  fommes  de  nouveau  mis  dans  la  voye  de  la  vie 
éternelle. 

Le  fécond  efl:  celui  du  f-xint  Chrefme,  dans  lequel  nous  re- 
cevons une  force  fpirituelle  pour  pouvoir  prêcher  avec  afleu- 
rance  ce  que  nous  croyons  dans  le  cœur. 

Le  troiiîémeeft  celui  de  la  fainte  Communion,  dans  lequel 
«efliant  nourris  rpiriruellemenr,  nous  fommes  conrerveZjôccroiC 
fonsdansla  vie  fpirituelle. 

Le  quatrième  eft  celui  de  la  Pénitence  ,  par  lequel  efl;ant 
délivré  des  péchez  acl:uels,  l'homme  efl:  rétabli  dans  ks  biens 
que  te  péché  lui  avoit  fait  perdre. 

Le  cinquième  eft:  celuy  du  Mariage  ,  qu'il  paroift  clairement 
que  l'Apôtre  a  appelle  Sacrement. 

Le  fixiéme  efl:  celui  du  faint  Sacerdoce  établi  par  J.  C.  qui 
rend  parricipans  delà  grâce  divine  j  &  qui  donne  l'accomplif. 
fement  aux  autres  Sacrcmens. 

Le  feptiémeeft  l'Ondion  ,  que  nous  appelions  iv')^i\xiov,  qui 
a  deux  effets ,  l'un  de  fervir  à  !a  guérifon  de  l'ame  ,  ^  l'autre 
à  celle  du  corps. 

Nous  croyons  &  nous  confeflîins  fans  aucun  doute  fur  le 
terrible  Sacr.^mentdc  l'Eucharifliie ,  que  le  Corps  vivant  de 
nôtre  Seigneur  J.  C.  efl:  invifiblement  prefenr  ,  par  une  pi  e.'cr, 
ce  réelle  dans  le  Sacrement.  Car  lorfque  le  Prêtre  célébrant 
dit  après  les  paroles  du  Seigneur  ^  fa/ tes  ce  pain  le  véritable 
corps  de  voftre  Chrifi  ,  ^  ce  qui  efi  dans  ce  calice  le  véritable 
fanq_  de  voflre  Chrfi  ,  les  chany:ant par  vofire  Saint  Efprit  i  alors 
par  i'operaton  ciel'Elprit  très  Saint,  d'une  manière  furnaturel'e 
&  ineffable  le  pain  eft  changé  réellement,  véritablement  6c 
proprement  au  propre  corps  de  Jesus-Christ  ,  &  le  vin  en 
fon  fang  vivant  j  éc  nous  croyons  que  c'eft  Je.sus-Christ 
même  tout  entier ,  qui  ofFrc  &:  qui  eft  offert ,  qui  eft  reçu  6c 
diftrîbué  à  tous,  &  qui  eft  mangé  tout  entier  d'une  manière  im- 
paflible.  Ceux  qui  le  re<^civent  dignem.ent  font  vivifiez  eftanc 
unis  à  J.  C.  même  .  &  ceux  qui  le  font  indignement  font  con- 
damnez ,&:  fe  précipitent  eux-mêmes  dans  une  pertelnévita- 


6i6  Liv.  Vï  M.  Vrewves  authen.  de  l union  des  Eg.  d^Or. 
ble.  Ce  Sacrement  efl:  cligne  d'une  verirable  adoration ,  parce 
qu'on  y  adore  avec  le  même  honneur  qui  efl  dû  à  Dieu  le  corps 
divinif é  du  Sauveur  J.  C.  &  il  efl:  offert  en  facrifice  pour  tous  les 
Chrétiens  orthodoxes  vivans  6ctrépaflcz. 

Nous  croyons  du  Baptême  qu'il  efl  tres-necefîaire  à  tous  les 
enfâns  abfolumenr,  ôc  que  c'eft  par  ce  moyen  qu'ils  reçoivent  le 
iceaudeferviteurs  de  J.  C.  &  que  renonçant  à  Satan  par  la  bou- 
che de  leur  Parrain,  qui  eft  comme  leur  répondant ,  ils  font 
unis  à  J.  C.  poureflre  purifiez  de  la  tache  originelle,  ôcenfuite 
prefêrvez  des  filets  de  l'ennemi.  Car  un  trefor  qui  n'efl  point 
îcenéefl  facilcmentenlevé  par  les  voleurs,  6i  on furprend fans 
aucun  danger  une  brebis  qui  n'eft  point  marquée,  dit  le  grand 
Biflle.  C'cft  par  là  qu'ils  fë  font  rendus  capables  delà  beatitu- 
cle;car  celui  qui  n'efl  pas  régénéré  d'en  haut  ne  peut  pas  jouir  du 
Royaume  du  Ciel.  Et  quoiqu'ils  ne  foicnt  pas  encore  parvenus 
à  l'habitude  de  la  foy  ,  néanmoins  ils  en  font  capables  par  la 
grâce  de  Dieu ,  &  par  la  fbyde  l'Eglife  &  de  leurs  parens. 

Sur  les  queflionsqui  nous  ontefte  propofées  touchant  le  Ba- 
tême  ,   nous  difons  que  le  péché  originel  efl  parfaitement 
efface  dans  lefaint  Baptême  i  de  forte  que  s'il  arrivoit  enfuite 
à  quelqu'un  de  mourir  en  infidélité,  on  nepourroit  pas  dire 
qu'il  n^auroif  pas  obtenu  la  remifTion  du  péché  originel ,  quand 
il  a  eflé  baptifé.  Nous  confefîc:)ns  que  celui  qui  a  eflé  une  fois 
juflifié  ,  &fait  enfant  de  Dieu,  peut  après  la  juflification  dé- 
cheoir  de  la  grâce  par  infidelité^ou  quelque  autre  péché  mor- 
tel ,  devenir  efclave  de  Saran  &  enfant  du  diable  i  car  l'aAion  . 
du  péché  nous  éloigne  du  Seigneur  ,  &  fait  que  nous  apparte- 
nons au  diable  ,  comme  dit  l'Apoflre.  C'efl  pourquoy,  quoi- 
qu'un homme  ait  eflé  une  fois  juflifié  ,  il  ne  fçait  pas  néan- 
moins s'il  perfeverera  jufqu'à  la  fin   dans  la  juflice  j  &  par 
cette  même  raifon  il  ne  fçait  pas  quelle  fin  aura  fon  éledion 
qu'il   a  reçue  par   la  juftifîcation  ,  puifqu'il  peut  la  perdre  , 
comme  il  a  eflé  dit  ,  &  ne  pas  obtenir  la  part  des  Elus, 
C'efl  pourquoy  le  bien  heureux  Pierre  nous  recommande  de 
rendre  noflre  éledion  certaine  par  de  bonnes  oeuvres.  Princi- 
palement 5  dit-il ,   mes  frères  ,  ayez^  fcin  de  rendre  vofire  vocation 
S-  vofire  éleHion  certaine'-,  &c  il  ajoute  enfuite  ;  Car  faifant  cela, 
voiisne  tomherez^jamais  :  Et  le  divin  Paul  pour  nous  rendre  plus 
foigneux  ,  ditj  c'efi pourquoy.  celuy  qui  croit  élire  debout  -prenne 
garde  de  tomber^ 

Par 


awec  TEgUfe  'T{oma.me  fur  ÎEtichariflie.  ^ly 

P?rces  mêmes  paroles  on  trouve  la  refolution  d'une  autre  Ch.  VÏ. 
de  leurs  queftions ,  qui  eft  qu'un  homme-ayant  efl.é  première» 
ment  juftifië,  s'il  s'abandonne  enluite  à  la  débauche,  aux  adul- 
tères,. aux  homicides,  &  à  d'autres  fortes  de  crimes ,  s'il  ne 
revintà  luymême  parla  pénitence,  decheoit  entièrement  de 
l'adoption  &:  de  la  grâce  qu'il  avoit  reçue,  &  fe  met  en  eflac 
de  ne  pouvoir  acquérir  la  vie  éternelle  j  parce  oue  la  mort  eft 
\z  payement  du  péché. 

Sur  la  neceffité  de  l'Epifcopat  dans  l'Eglife  ;  nous  difons  que 
le  grand  Preftre  même,  qui  a  pénétré  les  Cieux,  a  établi  des 
Pafteurs  &  des  Docteurs  dans  l'Eglife ,  comme  dit  l'Apoftre, 
pour  la  perfection  des  Saints,  ôc  l'édification  du  corps  Eccle- 
fîaftique  ;  c'eft  pourquoy  autant  que  le  baftiment  du  corps  de 
l'Eglife  eft  necelTaire,  l'Epifcopat  l'eft  auffi ,  puifque  par  fon 
moyen  ce  bafliment s'accomplit: &  Iesus- Christ  n'eft  Preftre 
jufqu'à  la  fin  des  fiecles  félon  l'ordre  de  Melchifedech,  que 
par  lesPreftres  qui  font-crablis  par  fon  ordre,  parle  moyen 
defquels  il  agit  continuellement  dans  les  chofes  facrées,  ôc 
eft  confacré  jufqu'à  la  fin  des  fiecles. 

Les  Prcftres  ne  peuvent  eftre  faits  &  confacrez  par  aucun 
autre  que  par  l'Evêque,  comme  ditisint  Denis,  û.  perfonne 
ne  peut  eftre  Preftre,  qui  ne  foit  appelle  à  ce  miniftere  par  les 
confecrations  hiérarchiques.  C'eft  pour  cela  queT'ite^'Timo- 
thée  furent  neceftairement  ordonne?,  Evêques  par  les  Apoftres, 
afin  qu'ils  étabiiifent  parles  villes  des  Diacres,  des  Preftres  ôc 
autres  Miniftres  deschoies  laintes,  (e!on  d'aucp-s  diftétecs  de- 
grez  pour  un  entier  acccmpUlfement  du  lâinc  Ordre  qui  doic 
eftre  dans  l'Eglife  de  I'.  C. 

De-là  on  décide  une  autre  quertion,qui  eft  que  l'Evêque 
par  un  ordre  divin  eft  au  delfus  des  Preftres  qui  reçoivent  la 
grâce  divine  par  fon  miniftere,&:  qne  c'eft  un  Ordre  qui  luy  eft 
naturellement  fournis  Carie  morndrecftantbeni  par  ce  qui  eft 
plus  excellent,  luy  eft  fournis  en  route  manière. 

Nous  ne  difons  pas  que  les  hommes  &  les  femmes  qui  ne 
veulent  point  fê  marier,  &  aiment  mieux  vivre  dans  la  virgi- 
nité,faftènt  quelque  choie  qui  ioit  contraire  aux  laintes  Ecritu- 
res; au  contraire  ils  recevront  de  Dieu  des  couronnes  p'us 
glorieufes,  comme  ayant  choifi  le  meilleur  chemin  de  li.- 
lut,  puifque  fi  celuy  qui  fe  marie  fait  bien;  ceiuy  qui  ne  fe 
marie  point,  fait  encore  mieux,  comme  dit  l'Apcftrei  par- 

KKkk 


éi8  Liv.  VTJI.  Preuves  a.uthent.de  funion  des  Eg.  dOn 
ce  que  cekiy  qui  n'eft  point  marié  n'a  foin  que  des  chofts  qui 
regardent  le  Seigneu-r  pour  trouver  moyen  de  plaire  au  Sei- 
gneur,  au  lieu  que  celuy  qui  eft  marié  a  fî^in  des  chofes  du 
monde  pour  tafcher  de  plaire  à  la  femme.  C'eft  pourquoy  il  eflr 
bien  meilleur  de  n'avoir  (oin  que  des  chofes  du  Seigneur  que 
ésk  mettre  en  peine  de  celles  de  ce  monde,  ôc  cette  adion  mé- 
ritera auilî  une  plus  grande  recompenfe. 

Sur  l'Egli'e  Catholique  &  Orthodoxe  de  J.  C  Nous  difons 
qu'elle  eft  infaillible  comme  eftant  conduite  par  Ton  facré  chef 
J.  C.  qui  efl:  la  vente  même,  oC  enfeignée  par  l'Eiprit  de  vérité. 
Ilefl  u-npolfible  après  cela  qu'elle  fe  trompe.  C'eft  pourquoy 
l'Apoftre  l'aappcllée  la  colonne  ^  le  fovdement  de  la  venté.  Elle 
fera  toujours  vilîble,  par^e  qu'il  ne  manquera  jamais  d'y  avoir 
des  Orthodoxes,  jufqa'à  la  fin  des  fiecles.  Puifque  tous  ne  dor- 
miront pas,  &  que  néanmoins  tous  enfemble  feront  changez^ 
ce  que  l'Apoflres  a  dit  parlant  des  fidèles  ;  il  eft  évident  que 
juf  ]u  cà  la  fin  du  monde  l'Eglife  de  J  C.  ne  cédera  point  d'efire 
vifibieen  plufieurs  parties. 

Nous  honorons  les  Saints  qui  ont  combattu  pour  J.  C.  &  nous 
les  prenons  pour  nos  médiateurs  envers  Dieu  ,  comme  eftanc 
fes  amis ,  bi.  ayant  un  grand  accès  auprès  de  luy  ,  demandant 
par  eux  le  fecoursde  Dieu  ,  ce  qui  fe  tire  de  plufieurs  endroits 
de  l'Ecriture  Sainte  :&  nous  pratiquonsccîa  comme  uneadtion 
de  pieté  qui  nous  ferra  obtenir  l'alîîftance  qui  nous  eft  necef- 
faire.  Et  ce  que  difenc  quelques  per(onnes ,  que  rendre  hon- 
neur à  lafainte  Mère  de  Dieu  à  caufe  de  fa  dignité, comme 
eftant  plus  excellente  que  les  PuiiTances  fpirituelles,  Se  hono- 
rer les  Saints,  c'"ft  diminuer  l'honneur  de  J.  C.  nous  penfons 
quec'eft  un  raifonnement  ridicule;  car  la  manière  de  vénéra- 
tion eft  fort  différente,  &  ne  diminue  en  aucune  manière  l'ado- 
ration &  le  culte  fouverain  de  Latrie  qu'on  rend  à' J.  C. 

Nous  croyons  auflî  que  les-prieres  des  Preftres  &  des  hom- 
mes vertueux  &  leurs  oraifons  font  fort  agréables  a  Dieu  i  nous 
\ts  recherchons  toujours  avec  dévotion  i  ce  que  nous  appre- 
nons dans  plufieurs  endroits  de.  l'Ecriture  Sainte.  Et  nous  en- 
tendons Paul  même  deftiné  dés  le  ventre  de  fa  mcre  à  la  prédi- 
cation de  l'Evangile  de  Dieu ,  qui  dit  aux  Romains  :  Secourcz- 
moy  par  les  pneres  que  vous  ferez  pourmoy  envers  Dieu.  Il 
dit  la  même  chofe  écrivant  aux  Ephefiens  &  aux  Hébreux. 

Outre  cela  nous  confervons  avec  2:rand  foin  la  coutume  très- 
pieufe  èc  très-utile  de  la  vénération  des  faintes  Images ,  corn- 


âwec  r  EgUfè  %oma.ine' fur  r Eucharîjîfe .  éi^ 

me  eftanc  en  ufagedésle  temps  des  Apoltres  .félon  l'hiftoire  C  h.  VI. 
Eccieliaftique.  Et  comme  nous  ne  rendons  pas  aux  îmaç^es  un 
honneur  de  Lacrie,  mais  relatif  ^  n'arreftanc  pas  noftre  penfée 
à  la  matière  ou  aux  couleurs ,  nous  nous  en  fervons  pour 
nouslouvenir  des  originaux  à  qui  nous  en  rapportons  tout 
1  honneur. 

Sur  les  jeufnes,  nous  confeifons  que  l'Eglifepeut  ordonner 
des  jeufnes  &;  ahftinences  de  quelques  viandes  ,  comme  on 
fçait  qu'il  s'eli  toujours  obfervé  parmy  nous  ,  &  que  tous  les 
Chreliicns  font  purifiez  par  les  jeûnes  établis.-  Qiie  pour  lors, 
non  ieulement  nous  nous  abftenonsde  manger^,  mais  auflide 
différentes  fortesde  nourriture,  depoiflons,  de  fromage 6c  au- 
tres femblables  ^  ce  quia  eûé  fort  bien  ordonné  pour  la  mor- 
tification des  paffions  charnelles,  pour  une  dif  polition  à  la  priè- 
re ,  &:  une  humiliation  très- utile. 

Pour  les  Livres  de  l'Ecriture  nous  en  trouvons  divers  Cata- 
logues dans  les  Canons  Apoftoliques,  &des  faines  Conciles  de 
LaodicéeSc  de  Carchage  ,  en  exceptant  les  Conftitutions  de 
Clément,  que  le  i.  Canon  du  6.  Concile  rejette,  parce  qu'elles 
ont  efté  corrompues  par  les  hérétiques,  comme  chacun  le  peut 
voir  &  apprendre  des  Livres  qui  font  mis  au  nombre  de 
ceux  que  l'Eglife  reçoit.  Et  tous  les  Livres  de  l'ancien  Tefla- 
n'.ent,  qui  ne  font  pas  compris  dans  le  dénoi-nbremont  des 
Saintes  Ecritures,  né  font  pas  pour  cela  entièrement  rejettez 
comme  Pavens&  profanes  ,  mais  on  les  appelle  bons  6c  ver- 
tueux, 6c  ne  doivent  pas  eftre  entièrement  négligez.  Nous 
répondons  ces  chofes  pour  le  prefenr  comme  en  abrégea  ceux 
qui  nous  ontinterrogez.  Elles  déclarent  noftre  pieté  avec  une 
(Implicite  pacifique  ,  6c  ferviront  de  preuve  certaine  6c  con- 
vaincante des  (cntimens  orthodoxes  que  nous  avons,  de  for- 
te qu'on  né  peur  plus  douter  de  tout  ce  que  nous  avançons, 
qui  ne  peut  aulh  eftre  contefté  par  ceux  qui  nous  veulent  im- 
poser des  fentim.ens  éloignez  de  noftre  créance.  Ecrit  dans  la 
maifon  Patriarchale  de  Conftantinople  l'an  1672.  au  mois  de 
Janvier  indiclion  10. 

Denis  par  la  mifericorde  de  Dieu  Archcx'kque  de  Covftantiiio» 

pic ,  la  nouvelle  Rome   C^  Patriarche  OecuyncràqTie. 
Paisius  cy. devant  "patriarche  de  Conftantinople. 
DiNis  cy- devant  Patriarche  de  Conftantinople. 

KKkK  ij 


6jo  Liv.  VIII.  Freuwes  authent.  de  ïunion  clés  Eg.  d'Or. 

METHODius  cy. devant  Patriarche  de  Conft antinomie. 

Paisius  d'Alexandrie. 

Barthélémy  d'Heraclée. 

Metrophane  de  Cyzique^ 

Methodius  de   Nicée. 

Jeremie  de  Calcédoine. 

Grégoire  de  Cefarée  en  Cappadoce: 

Néophyte  de  Ni  comédie. 

Gabriel  de  philopolis. 

Anthime^é"  Paros. 

Cyrille  de  Serre, 

Joachim  de  Rhodes. 

Theodoret  de  Lacedemons.. 

Macaire  de  T>ryfte. 

Meleiius^i?  Sophie. 

A  NT  H I  ME    d'Athènes.. 

Jacques  de  Larijfa. 

Daniel  d'Euripe. 

Calliste  de  Corinthe. 

B  ARTHELîMY  de  Naupaïle  ^  d"C 

Daniel  de  l' -ancienne  Partras,  ^ 

Eugène  de  Chrïflianopolis. 

ZoZYME  de  Mcletine. 

Cornélius  de  Corcyre. 

Metrophane    de  Barri.- 

D  A  ni  EL  d'-dnchiale. 

Géras iME  d'Amasêe. 

Mêle  CE  de  Theffalonique. 

Joachim  de  Berèe. 

]ean  de  Trebiz^nde. 

Theophane  de Mefmbie,  '.; 

Laurent  de  Proilave. 

Daniel  de  Vidonie.  } 

Laurent  de  Monembajîe. 

G^'i.GOïK'E.  de  Didymotyqtie^ 

Daniel  de  Me  die. 

Gedeon  d'Aynos. 

David  deCalaune  ,  &Menocorb. 

Cetécricacfté  compofé,  &  écrit  de  la  marn  de  moy  le  grand 
Rhéteur  de  la  grande  Eglifc-ôc  ainfia  efté  couché  fans  y  rien 
changer  dans  le  faine  Livre  de  la  grande  Eglife  de  J.  C. 


Afvec  FEglife  Romaine  fur  tEuchariJîie.  631 

LETTRE    DE  MONSJEVRDE'NOJNTEL    AV  ROY. 

Ce  n'eft  pas  feulement  de  ceux  qui  vivent  Jans  la  foy  ca- 
tholique du  Rite  Romain  que  voftre  Majefté  eft  reconnue  pour 
le  Fils  aifné  de  l'Eglife,  &  pour  fon  proteéleur.  Car  fi  éten- 
due que  puifTe  eftre  l'Eglife  Romaine  en  plufieurs  parties  du 
monde,  Vôtre  protection  Sire,  va  encore  plus  loin.  Les 
.Chreftiens  Orientaux  y  recourent  de  tous  coftez  comme  à  un 
afyle  afïèuré  :  &  l'on  peut  dire  que  Votre  Majeftéefl  le  centre 
oià  ils  Te  réuniiTent  en  quelque  façon  au  chef  duquel  ils  font 
feparez  ou  par  une  necelîité  malheureufe,  ou  par  un  refte 
d'opiniaftreté. 

Les  ordres,  SIRE  ,  que  j'ay  reçus  de  Vôtre  Majefté  de  pré- 
venir ces  Chreftiens  affligez  dans  leurs  befoins,  font  exécutez 
avec  toute  la  ponctualité  qui  m'eft  polTiblei  ôc  parce  qu'ils  ne 
s'étendent  pas  feulement  fur  le  temporel,  mais  encore  furie 
fpirituel,  j'ay  cru  que  je  ne  devois  pas  borner  le  zcle  auin  puif 
fant  que  fecourable  de  Vôtre  Majefté,  à  donner  refuge  à  des 
Patriarches  ôc  des  Archevefques  dans  le  Palais  de  France  à 
Conftantinople,  mais  qu'il  fâlloit  encore  les  avertir  de  la  pré- 
tention d'un  Miniftre  Calvinifte  fujet  de  Vôtre  Majefté,  lequel 
foutient  dans  divers  traittez,  que  les  Grecs,  Arméniens  &  au- 
tres communions  Orientales  feparées  de  l'Eglife  d'Occident 
ne  eroyent  point  la  prefence  réelle  de  N.  S.  J.  C.  dans  l'Eu- 
chariftie,  ni  le  changement  réel  &  fubftantiel  du  pain  &  du 
vin  en  fon  corps  6c  en  fon  fang  ,  &  qui  s'opiniàtre  fur  ce  prin- 
cipe à  foûtenir  que  les  Orientaux  n'adorent  point  du  cuire  de 
Latrie  Jesus-Christ  prefcnt  réellement  dans  le  faint  Sacre- 
ment. 

J'ay  cru,  SIRE,  ce  point  de  fait  fi  important  que  je  n'ay 
rien  oublié  pour  Téclaircir,  &  je  puis  afiTurer  Vôtre  Majefté, 
en  luy  gardant  toute  la  fidélité  que  je  luy  dois,  que  les  Grecs 
&  les  Arméniens  eroyent  la  prefence  réelle  de  J  C.  au  faint 
Sacrement,  &  la  converfionfubftantieîle  du  pain  &  du  vin  en 
fon  corps  &:  en  fon  fang,  &:  qu'ils  adorent  J.  C  prefent  réel- 
lement &  invifiblement  daiTs  l'Euchariftie.  Jay  affiftéà'  leurs 
cérémonies 2c  à  leurs  Liturgies,  ou  cette  vérité  paroift  dans 

KKkk  iij 


6}t  Liv.  VIII.  Vrewves  nuthen.  de  r union  des  Eg.  d'Or. 
un  cclac  invincible, &:  les  Patriarches,  Archevelques  &;  Evef- 
qiies,  iesPreltres,  les  Gentils  hommes  Se  les  particuliers,  8c 
même  les  Papas  éc  le  peuples  à  la  compagne  me  l'ont  certifié 
avec  exécration  contre  ceux  qui  leur  miputoient  une  autre 
croyance,  les  traitrant  de  calomniateurs  &  d'hérétiques. 

Il  n'y  a  même  pas  un  du  cierge  qui  ofaft  faire  paroiftre  un 
fentiment  contraire  quand  il  l'auroit.   Et  lorfque  j'ay  deman. 
dé  des  atteftations  aux  Patriarches  Grecs,  ils  m'ont  dit  que 
les  anciens  Pères  de  leurs  Eglifes,  les  conférences  par  lettre 
du  Patriarche  Hieremie  avec  des  Luthériens  d'Allemagne ,  les 
Synodes  tenus  contre  une  prétendue  profeffion  defoy  de  Cy- 
rille Lucar,  la  confeffion  Orthodoxe  de  l'Eglife  d'Orient,  le 
livre  d'Agapius  êc  plufieurs  autres  traittez  faits  du  temps  de 
Cyrille  Lucar,  étoient  autant  de  preuves  inconteftables  de 
cette  vérité  ,  &;  que  l'imagination  contraire  d'un  particulier 
deftituéede  tout  fondement,  nelesengageoit  pasd'aiTembler 
un  Synode  ,  pour  ledefabufer.  Us  n'ont  pas  lailïede  me  four- 
nir plufieursjpieces  de  confequence,  &  entr'autres  une  profef- 
fion de  foy  fur  les  points  dont  ils  différent  des  Latins,  don- 
^„   Cl-      ■  née  par  un  de  leurs  Docleurs,  &  enreg-iftrée  dans  le  livre  de 
niée  dans  la  la   grande  Egluede  Conltantmople,  dont  j'ay  fait  certiher  la 
répoiifegcue-  copie  par  le  Patriarche  &:  plufieurs  prélats  &  Officiers.  J'ay 
Certf  à°di*rc  mêmc  obtenu  des  atteftations  du  Patriarche  gênerai  des  Arme- 
du  Patriarche  niens  5i  de  celuy  de  Conftantinople.  J'en  ay  eu  àes  princi- 
Armenicii  de  p^j^^  villes  de  l'Archipel.  T'yav  ajouté  le  témoiçrnage  de  la 
pie.     Voyez  pkifpartdes  Ambafladeurs  &  reprefentans ,  qui  font  en  cette 
Rep.  gen  p.  Porte.  Celuy  d'Angleteire  &  fon  Miniftre  m'ont  avoiié  ex- 
i9f.  preflement  que  les   Grecs  croyoïent  la  prefence  réelle  &  le 

changement  des  fubftances ,  mais  qu'il  ne  pouvoit  à  prefenc. 
le  témoigner  par  écrit.  Le  Refidene  des  Etats  m'a  confefTé 
quec'étoit  luy-mêmequi  avoir  apporté  de  Hollande  la  con- 
feîllon  Orthodoxe,  où  elle  avoir  efté  imprimée  Les  perfon- 
nes  les  plus  confiderables  du  Païs  après  ces  Meilleurs,  n'ont 
pas  hellté  de  fervir  de  témoins. 

Et  enfin  le  Patriarche  Dionifius  avec  trois  autres  qui  l'ont 
précédé  dans  la  même  dignité  6i  celuy  d'Alexandrie  6c  ti en- 
te fix  Métropolites  fe  font  aifemblez  ,£c  ont  déterminé  un 
acle  Synodal  qui  eft  dans  l'Eglife  de  la  grande  Eglife,  où  le 
point  de  l'Euchariftie  6c  plufieurs  autres  étant  expliquez,  il;; 
font  voir  clairement  quelle  eft  leur  foy. 


aaiec  tPglfe  Romaine  fur  T Eucharlflie .  635 

Le  Patriarche  m'en  a  envoyé  un  Original  en  bonne  forme  Ch>  VI. 
par  trois  Métropolites  &  fon  Référendaire  avec  prières  tres- 
inflrantes  &forc  iuûmifesde  le  faire  pafler  ettre  les  mains  de 
votre  iV'aiefté,  la  priant  très  humblement  de  vouloir  qu'il 
foitmisen  dcpofl:  dans  fa  Bibliothèque, ou  en  tel  autreendroic 
qu'il  luy  plaira  d'ordonner,  afin  que  les  calomniateurs  qui  les 
pcrfecutent  en  leur  imputant  de  ne  pas  croire  la  prefcnce  rcel- 
îe,  6c  le  changement  des  fubfrances  &  le  devoir  de  l'adora- 
tion à  |.  C.  prefent  réellement  dans  l'Euchariftie  ,  y  lifenc 
Jeur  condamnation. 

Ceux  qui  m'ont  porté  ces  paroles  ayant  eu  grand  entretien 
avec  moy  ,  je  prends  encore  îa  liberté  d'en  faire  tenir  une 
relation   à    votre  Maiefte. 

Elle  trouvera  encore  avec  ces  pièces  uneatteftation  du  Pa- 
triarche Grec  d'Anpioche  Se  une  de  celuy  des  Cophres,  quiefc 
celuy  desAbyiîins.Etelle  jugera  mieux  que  perfonne  qu'on  ne 
peut  fans  une  opiniâtreté  inexcufable  s'eievcr  contre  un  iî 
grand  nombre  cl'authorrcés,  Icfquelles  eftant  cl'cllcs-mêmcs 
très  fortes  deviendront  invincibles ,  lorlqu'elles  fetrouveront 
fous  la  proteclion  de  Vôtre  Majefté,  &:  qu'elle  s'en  fervira 
pour  la  gloire  de  l'Eglife.  Vous  en  êtes,  SIRE,  le  Fils  aifné. 
Ainfîfi  deffenfe  regardant  particulièrement  vôtre  Majefté 
me  fervira  dexcufe  Ç\  j'interromps  fes  grandes  occopations, 
&  de  moyen  pour  luy  prouver  le  zèle  ô:  le  profond  reipecl 
avec  lequel  je  fuis» 


SIRE  , 


DE    V.MAJESTE^ 

Le  très  humble  ^  très  obeïflrint  & 
tres-fidelle  ferviteur  5c  lujec 
Oliir.  de  Nointel. 


A  fera  lès    Confiant  inouïe  le 
'juillet  16/ z. 


634  ^ï V.  VI I  î.  Pnwves  autheut,  de  t union  des  Eg.d  'On 


CHAPITRE   VII. 

Union  de  l'Eglife  Grecque  avec  l'Eglife  Romaine  fur  l' Euchari- 
ftie  prouvée  far  l'attcjiation  des  Eglifes   de  Min^rclie  ,   de 
Géorgie  ^  de  la  coicbide. 


N 


Ous  avons  remarqué  dans  le  premier  Tome  de  la  Per- 
pétuité, en  faiiant  le  dénombrement  des  Provinces  foû- 
mifes  au  Patriarchac  de  Conftantmople;  que  la  Mingrelie  en 
faifoit  partiej  &  que  les  Géorgiens  qui  avoient  un  Patriarche 
particulier  &  indépendant,  luivoient  néanmoins  la  doctrine  & 
1.1,  c,  i.q.i.  la  difcipline  de  l'Églile  Grecque.  Ileftoit  difficile  de  le  prou- 
ver autrement  que  par  le  témoignage  des  Hiftoriens  qui  en 
parlent  de  la  forte.  Et  le  peu  de  commerce  que  l'on  a  dans  ces 
pays  Cl  écartez  oftoit  coût  lieu  d'en  eiperer  des  atreftations  par- 
ticulières. Néanmoins  les  foins  de  Monfieur  l'Ambafîàdeur 
de  Conftantinople  ont  iurmoncé  cet  obftacle,  £c  on  en  a  re- 
çu depuis  peu  deux  écrites  en  caraderes  Géorgiens  6c  en 
langue  Géorgienne  ^  l'une  de  l'Archevêque  de  Mingrelie 
qui  s'appelle  Catholique  j  l'autre  d'un  Evêquede  ces  quar- 
tiers là.  Comme  elles  ne  contenoient  l'une  &  l'autre  que  la 
même  chofe  ,1e  tradiKleur  lésa  jointes  dans  la  traduction.  Si 
M.  Claude  faifoit  difficulté  d'y  ajouter  foy  fur  ce  que  c'eft  un 
Millionnaire  Italien  ,  il  peut  avoir  recours  à  l'original ,  & 
chercher  quelqu'un  qui  entende ,  &:  qui  life  la  langue  Géor- 
gienne. 

ATTESTATION  des  Eglifes  de  Mingrelie, 
Colchide  j  Géorgie. 

EXPLICATION  I>ES  ErESQVES  DV  LEVANT  DE  LA 
Colchide,  Géorgie,  MiH'^cUe  ^  GoriejJ'e,^';;- autres  nations  Orien- 
tales qui  vivent  dans  la  Religion  Chrefliennc ,  contenant  lesfcn- 
timcns  de  ces  nations  fur  Ls  S'écrément  de  l' Eucharijiie  ^ 
d'autres  Articles  de  Foy. 

ÎLs  tiennent  premièrement  que  du  Temps  de  Moyfe  on  im- 
moloit  feulement  des  bœufs  &  des  brebis ,  &:  qu'on  n'offroit 
à  Dieu  que  des  facrificesoidesholocauft.es  de  beftesj  mais  que 

depuis 


a<vec  ÏEglife  Komaine  fur  l'Euchmliie.  é^K 

depuis  llncarndtion  &  l'avenemenc  de  J.  C.  on  n'offre  plus  le  Ch.  VII. 
iang  des  boucs  &  des  veaux ,  maislefangde  J.  C.  fous  l'efpece 
du  ^ain  &  du  vin  ,  &  que  tous  les  i'ours  à  la  Mefîe  les  Preftres 
facriri  jni  dans  le  Sacrement  de  l'Euchariflie  le  corps  de  Nôtre 
Seigneur  J.  C. 

Que  ceiui-là  eft  infidèle  ,  anarheme,  &  indigne  du  nom 
de  Chrérisn  ,  qui  ne  croit  pas  que  dans  le  Sacrement  de 
l'Euchanftie  la  fubflance  du  pain  &  du  vin  ne  dcmeiirent 
plus^  àcaufe  des  paroles  pronontéjs  par  le  Preftre  j  qu'il  faut 
croire  qu'après  la  Confecration  du  Preftre  la  fubftancc  du  pain 
&  du  vin  eft  tranffubftanciée  au  vray  corps  &  au  fang  de  J  C. 
né  de  la  Vierge  Marie,  qui  afouffert,  a  efté  cracitié,  &  eft 
refrufcité'. 

Que  ce  Sacrement  a  efté  infdtué  par  J.  C.  en  la  Cène  du 
Seigneur  dans  la  grande  Semaine  ,eftantà  table  avec  fes  Dif- 
ciples. 

Que  J.  C.  a  dit  &  qu'il  eft  de  foy  que  quiconque  mange  ce 
pain  vivra  éternellement-,  &  au  contraire  que  quiconque  ne 
mange  pas  cette  chair  mourra  j  Scn'eft  pas  digne  de  J.  C. 

Ils  déclarent  déplus  que  non  feulement  les  Preftres  Se  les 
Prélats,  mais  tous  les  Primats  tant  réguliers  que  feculiers  de 
la  Région  Orientale  desNations  de  la  Géorgie  ,  Mingrel  e,Ô£ 
autre*,  qui  font  Chrétiens  de  vie  &  de  moeurs ,  croyenc  fince. 
remenc  &  fermement  tout  ce  que  doivent  croire  tcus  b  ins  & 
parfaits  Chrétiens  fur  le  Sacrement  de  l'Eucbariftie  ,  f(javoii? 
que  la  fubftance  du  pain  eft  détruite  après  la  confecrntion  du 
Preftre  ,  ic  qu'elle  eft  rranlÏÏibftanciée  au  vray  corps  &aufang 
de  ].C.  &  que  les  Preftres  l'offrent  lui  même  pour  les  vivans 
&  pour  les  morts,  célébrant  tous  les  jours  des  Meftès  en  faveur 
des  défunts.  Ils  ont  aulîl  une  grande  vénération  pour  ce  corps 
&  ce  fang  ;  &:  dans  la  célébration  de  la  Meffe  ils  l'adorent  Se 
révèrent  avec  une  grande  dévotion. 

Ils  rendent  grand  honneur  aux  Reliques  des  Saints ,  5c  ont 
foin  de  les  placer  avec  beaucoup  de  refpecl  aux  lieux  honora- 
bles de  leurs  Eglifes. 

Dans  leurs  arîlicLions  &  dans  If^urs  maux  ils  invoquent  fans 
cefte  lefecours  de  la  bien  heurcufe  Vierge  Marie  ,  de  S.  Pierre 
te  S.  Paul  ,  &  de  tous  les  Apoftres  ,  de  S.  Michel  Archange,  &: 
particulièrement  de  S.  George  leur  Patron. 

Dans  leursmaladiesils  ont  beaucoup  de  confiance  aux  Saints 

LLll 


-ôj^  Liv.  Y'f  II. Trouves authûK. de r union  des €g.  d'Or. 
qu'ils  invoquenc,.f^raffiftancederqLieIsils  oncinimediatemem: 
•recours  en  leur  offrant  des  prefens,comme  des  cierges  &  autres 
rhofes.  Ils  leur  brûlent  de  l'encens  ,  &  leurfoot  des  vœux  & 
^iespromelîes  pour  en  obtenir  leur  guérifon. 

Outfe  l'adoration  &  la  vénération  qu'ils  ont  pour  les  Saints, 
ils  obfervent  dans  l'année  des  jeunes  à  leur  honneur.  Car  ils 
jeûnent  à  l'honneur  des  Apoilres  iliint  Pierre  &  Taint  Paul  ,  -Se 
en  celui  delà  bien  heureul'e  Vierge  Marie  quinze  jours  avant 
la  fefte  de  fo\i  Allompcion. 

Ils  oLttous  les  ans  quatre  Jeûnes ,  le  grand  qui  ert:  le  Carê- 
me, celui  de  faine  Pierre  &:  laint  Paul,  celui  de  l'AiTomption 
de  la  feinte  Vierge,  &  le  dernier  au  temps  de  TAvent  de 
Nôtre  Seigneur  J.C  Celui-ci  eft  de  quarante  jours,  ôiilss'ac- 
quittent  de  tous  avec  beaucoup  de  rigueur. 

Ils  obfervent  ces  quatre  jeûnes,  parcequ'ils  les  reconnoif- 
fent  établis  par  les  quatre  Patriarches  de  Conllantinople, 
d'Ancioche,  d'Alexandrie  6:  de  Jcrufalem^Sc  tout  ce  qui  vient 
d'eux  ils  le  (uivent  ponduellement. 

Donné  d  Mingrelie  darss  la  Région  de  la  Colchide  en 
Orient  l'an  1671.  au  mois  de  Décembre. 

Ce  qui  eft  dit, ci  deiTus  fait  voir  ce  que  contienn'?nt  véri- 
tablement &  confiammenc  les  atteflations  écrites  en  caraâ:e- 
res  Géorgiens  .quiontefté  très  fidellement traduites,  &;jufte- 
ment  e\'pliquécs  par  moy  Jofeph-Maiie  Zampio,  Clerc  Ré- 
gulier Miffionnaire,  &L  je  jure  que  cela  eft  la  vérité. 

Voici  ce  que  M.  de  Nointel  a  fait  écrire  au  bas  des  attefta- 
rions  Géorgiennes.  Au  bas  de  la  première. 

Ous  CharlesFrançoisOlier  de  Nointel  jConfeiller  du 
Royen  fes  Confeils,  en  fa  Cour  de  Parlement  de  Paris, 
Si  Amballadeur  pour  fa  Majefté  Très- Chrétienne  à  la  Porte 
Otchcmane,  certifions  à  tous  qu'il  appartiendra  que  le  Père 
Zampio  Theatin  refidant  en  Mingrelie  ,  nous  a  envoyé  l'ac- 
teftation  qui  eft  de  l'autre  part ,  nous  affuranr  que  pour  fatis- 
taire  à  nos  requiiitions ,  le  chef  des  Evêques  de  cette  Provin- 
ce ,  furnommé  le  Catholique,  l'ayant  compofée&:  écrite  en  ca- 
r,aderes  Géorgiens  ,  l'avoit  auiïî  authentiquée  de  fon  para- 
phe reprefenté  par  une  main  tenant  une  Croix  ,  dans  lequel 


aevec  r EglifeKomAine  Jur  l' Euchariflie:  dyj 

ît  trouve  écrit ,  Hilarion  ,  qui  eft  Ton  nom.  C'eftceque  nous  Ch.  Vil. 
confirmons  par  nôtre  fignature  ,  le  Iceau  de  nos  armes  &:  le 
contre  feing  de  nôtre  premier  Secrétaire. 

Donné  à  notre  Palais  (ur  le  canal  de  la  Mer  Noire  le 
Septembre  1673. 

OLIER  DE  NOINTEL  ,  AmbafTadeur 
pour  Sa  Majefté  Très  Chrétienne 
à  la  Porte  Otthomane, 

Par  mondic  Seigneur  ,  L  E    PICARD. 
Et  au  bas  de  la  féconde, 

NOus  Charles  François  Olier  de  Nointel ,  Confeilîer 
du  Roy  en  fes  Confeils  en  fa  Cour  de  Parlement  de 
Paris  ,  Se  Amballadeurpour  fa  Majefté  Très- Chrétienne  à  la 
Porte  Otthomane  ,  certifions  à  tous  qu'il  appartiendra  que  le 
PereZampioTheatin  refidant  enMingrelie  ^  nous  a  envoyé 
l'atteftation  quieftde  l'autre  part,  nous  aifurant  que po'irfatis- 
faire  à  nos  requifi^tions ,  l'un  des  Evcques  de  cette  Pnvince 
l'ayant  compofée  décrite  en  caracleresG-eorgienSjl'a-voitaAJtii 
authentiquée  die  Ton  paraphe.  C'eft  ce  que  nous  confirmons 
par  nôtre  fignature  ,  le  fceau  de  no^  armes  ,  ôc  le  contre- feing 
de  nôtre  premier  Secrétaire.  ~         ■ 

Donné  à  nôtre  Palais  fur  le  canaîdc  la  Mer  Noire  le. 
Sedtembre  1673^ 

OLIER   DE  NOINTEL,  Ambafladeur 
pour  fa  Majeflé  Très  Chrétienne 
a  la  Porte  Otthomane. 

Barmondi:  Seigneur  LE  PIGAR.D. 


J.LHij 


éjS  Liv.  Vf  1 1.  Prcuvûs  authen.  de  l'union  des  Eg,  d'Or. 


CHAPITRE     VIII. 

Union  de  l'Eglife  Grecque  avec  l'EqJ.ife  Romaine  fur  l'Euchariflie , 

prouvée  par  les  Attejiations  du  Vicaire  Apojioliqtie  ,  des  Re- 

fidens  de  plu(ïcurs  EJîats ,  &■  de  la  Communauté  des  Pcrotes. 

Zetire  de   Monfieur  de  Nointel  Ambajfadeur  de  Sa  Mnjejtc 

Très.  Chrétienne. 

COmme  il  n'eft  nullement  croyable  que  desperfonnesqui 
font  dans  de  grands  emplois  publics, veuillent  renoncer 
à  leur  honneur  &à  leur  coniuence  ,  pour  atteftcr  publique- 
ment unefaufleté  dont  il  feroit  aifé  de  les  convaincre,  Mon- 
fieur de  Nointel  a  jugé  avecraifon  que  le  témoignage  des  Re- 
ficiens  de  divers  Eftats  bL  autres  perfonnes  confiderables  qui 
font  à  Conftantinople  ,  quoique  Catholiques  ,feroitde  grand 
poids  à  i'egard  de  tous  les  gens  de  bon  fensi  puifque  leur  qua- 
lité les  mettant  à  couvert  du  foupc^on  de  poavcir  manquer  de 
lîncerite  dans  une  affaire  de  cette  nature  ^  8c  eftant  parfaite- 
ment informez  du  fait  dont  il  s'agit  parle  fejour  qu'i's  font  à 
Conftantinople  i  ils  ont  tout  ce  que  l'on  peut  juftement  de- 
mander en  des  témoins.  C'eft  pourquoy  il  n'a  pas  négligé  de 
tirer  d'eux  des  atteftacions  authentiques  que  nous  miererons 
dans  ce  Chapitre. 

ATTESTATION  DE  MONSIEUR  RIDOLPHI, 
Vicaire  Apoftolique  Rcfident  à  Conltantinople. 

1~2  Andréas  Ridolphi  Deidono  é^  Apofiolica;  Sedis  Gratia  EpijZ 
copus  Calimina; ,  Vicarius  Apofiolictis  ,  ^  Suffra^aneus 
Patnarchalts  Conftantinopoli, 

Annofa  confuetudine  a  nobis  cum  Gracis  habita ,  mainave  cura 
^  folertia  quid  eorum  Ecclcjia  credat  perquijïtione  conjiderata  , 
fnceram  m.irtyriam  univcrjîs  é"  finfitilis  praftanius  i^fam  ea  om. 
nia  credcre  quit  ab  aliquibus  heterodoxiis  livido  ore  in  controver, 
Sam  revocantur. 

Primo  vivum  corpus  vindicis  noftra  falutis  in  cruce  fuffixum  , 
quodquepofi  analypjm  ad  c^lum  fedet  ad  dexteram  Patns  ,  moda 


a,fV6c  tEglifc  Komninefur  fEucJuriJiie,  639 

invijîhili  ,  verè  é-  realiter  ejfe  frJ(cns  in  Euchanjiia  ,  ^Jfïrmare.  Ch.  VlII. 

iiccundo  ^  pancm  <^  vinurti  ,peruBa  à  Leiturgo  confecratume  ^ 
tranfmutan  a  propria  fub[tantiain  vcrum  fubfluntumi  Chnjli  ,  itn 
ut  folàm  accidentta  ^  fpecies  extcriores  panis  ^  vini  remancant 
edocere. 

Tertio  ,  Eucharifiiam  cfje  holocatiflum ,  càm  pro  omnibus  viven- 
iihus  ,  tàm  pro  dcfunilus  ordinatum  ab  authore  S ucramentoruni , 
nobifquc  ab  Apgflolis  traditum ,  tencre. 

Qu^irto  ,  in  Euchuriftia  corpus  Chrifli  integrum  manducari  ,  irti' 
falJibiUter  fumi  ^  offcrri  ,  (^  latria  adoratione  venerari  ,  afiruere. 

Quinto  ,  Ecclejtam  haberc  facultatem  indiccndi  jejunia  d^  ub~ 
ftincntiam  k  cibts  ^  credcre. 

Sexto  ,  chrifli  feUatores  Deiparxm  Virginem  exorantes  >  fan- 
Bofve  qui  ifl  cclo  exiftunt  frecibtis  ferientes  abfque  minimu  Re~ 
demptoris  ojfenfa  id pr^rflare ,  contendere. 

Septimo  ,  fanîlos  honore  illis  débita  profequcndos  ac  eelebrandos^ 
eorumve  exitviaf  ,  lipfana.  é"  reliquias  in  veneratione  habenda-s  , 
frojjteri. 

Ottavo  ,  Divorum  imagines  relative  revcrendas  eJfe  ,  fcntire. 

2^ono  ,  Epifcopos  divina  ordinatione  ,  c^cteri  Sucerdotibitj  infe- 
rior^s  hicrarchia  pracellere  ,  hofque  ah  ipjis  Antiflibiis  Jolùm  ordi- 
nari  ,  prxdicare. 

Decimo  ,  Epifcopatum  in  Ecclefia  Chrifli  efle  necejflurium ,  pro 
aris  (^-  focts  defcndere. 

Undccimo ,  Eccleflam  Catholicam  idque  ad  ultimam  faculi  cori- 
fiagrationem  jempcrvifïbilemfore  (f^  infallibilcm  ,  ajjeverare. 

Duodecimo  ,  feptem  e/Je  Sacramenta . 

Decimo  tertio  ^  ultimo.  Libros  Tobi^c  ,  Judith  ,  Sapicntia;  , 
Eccleflafles  ,  Baruch  ,  Machah.torum  ,  cfJe  partes  facra:  pagina:  , 
toto  annuere  capite. 

In  quorum  fidem  manu  propria  fubflripflmus ,  ^^  flgillnm  nof. 
trum  appofuimus.  Datum  Galata  apud  fanciufn  FrAncifciimnoflr^e 
refidcntia:  ^  K'ilendis  Augtifii  anno  Domi7ii  mille flmo  flexc ente flm» 
fepttiagcflmo  primo. 

ANDREAS  RJDOLPHJ  Epifcopus  Calamina:. 


LLII  iij 


640  Liv.VIII.  Vreu'vesauthetit.  de  t union  des  Bg.diOr. 

ATTESTATION  DE  MONSIEUR   CASIMIR 
Reildenc  de  Pologne  à  la  Porte. 

OS  Francifcus  Cafmnrus  de  V^ifocha  Rifochi  Eques  San^ 
cii,ffimi  Se-ppdchn  Microfolymitanus  ^  F  Incerna.  Socachovicn- 
Jis  ,  Secretariîi-s  Aidicus  ,  ^  Ableyitus  Sacra  Rey.^  Majcjiatif 
Puloniamm  ^  Reipublica  ad  Port um  Otthomanam. 

Cum  fer  expert entiam  ^  ^  colloquia  fapiui  habita  cum  Prima- 
tibus  (^  Frxlatis  Eceleji.e  Graciée  ,  aliifque ,  tam  in  Polonia  ,  in. 
cujiis  pcrmuliis  ditionibus  fovetur  ac  frotcq^itu.r  ri  tus  Gracus,  quant 
etiani  in  his  partibus  ,  ubi  jam  a  longo  tempvre  commoramur  \fide 
dignis  heminibus  ccrti/Jima  notitia  fciamus  quid  Graci  de  .Reli- 
(fionc  Chriftiana  un  a  cum  Latinis*teneant  quidve  non  tcneantifa^ 
cinms  plenam  &  indubitatam  fidcm  quikufcunque  quorum  interefi 
Chi'ifiianis-  ^  aut  Cat  ho  lui  s  Romanis  ,  Calvinianis^  aut  Luthiranis.^ 
Ecclejîam  Gracam  qu^:  fequuntur fupra  Eucharifiiam  ^  alia  ca^ 
pita  mù  cum  Romana  firmiicr  credere  5  Ncmpe , 

Primo  ,  Vivurn  corpus  Jefu  Chrifli  crucifixi  qui  in  cœlum  a  [ten- 
dit,, quiquead  dexteram  Patris  fedet  ,  realiter  in  Euchanfiia  rn- 
'vijîbiliter  adejje. 

Secundo  ^panem  (^  vinum  confecratoriis  a,  Sacerâote  verhis  ort 
froliitis,  expropria  fua  fubfiantia  inverayn  (^propriamjefu  Chrijii 
pibfiantiam  3  ita  ejje  commutata ,  ut  nihil tvmpliHs  rcmaneat prêter 
accidentia  g^  fpecies  exteriores  fanis  ^  vtni. 

Tertio. ,   Eucharijiiam  ejfe  holocaujltim  pro  vivis  ^  mortuis  à 

Chrifio  inftitutum  ,  &  per  traditionem  ah   ^pojiolis  tranf/niffum. 

Quarto  ,,  Jefu  Chrifli  carpus  totum  in  Euchariflia  tTnpalJibili^ 

ter  fumi  ab  eo  qui  illud  recipit  ^.facrificio  incruento  afferri  ,  atqne 

fupra  omnia  ut  Deurn  adorari. 

Quinto  ,,Ecclefiam  hubcre  authoritatsm  ftatuendi  jejunia  ,-  ci- 
hojque  quofdam  prohihcndi. 

Sexto  y  Chrijiianos  qui  fuis  precihus  ,  Deipara  T^irginis  ,  San- 
B  or  unique  qut  heat-is  fcdes  tncolunt  ^  au  xilium  implorant ,  dehitUM 
Jefu  Chrifîo  Servatori  honorem  nihil  imminuere. 
Septimo  ,  SanHos  honorari  ^  celebrari  dcbere. 
Octavo  ,  honorem  relativum  eorum  imaginibus  aut  relïquiis 
dcheri. 

2<fono ,  Epifcopos  fuperiores  effe  Sàcerdotibus  qui  ab  ipfis  Epij. 
sopis  folum  caruHerein  faccrdotalem  reci£iunt. 


d'vec  tEgîifè  Romaine  fur  TEuchuriflie.         641 

Decimo ,  Epifcopatum  in  Chrifii  Ecclefia  ejje  necejfarium-  Ch.  VIII. 

Unâecimo  ,  Eccle fiant  Cathoikam  ejfie  ^  fem^erque futuram  vif. 
■bilem  ^  infulli'oiUm. 
^   Duodecimo  ^  ejJe  fcptem  SacrAmentA, 

Denique  Libres  Tobnc  ,  Judith  ,  S  ipientiit ,  Ecclcfiafttci ,  Ba. 
ruch  C^  Mitchabaorum  ,  cjfe  partes  Scriptura  Sacra. 

In  fidem  quorum  huic  teftimonio  fubfcnbere  voluimus ,  g/-  ap- 
foni  curavimus  nofirum  fipllum  ^  contra  fignum  nofiri  primi  Se- 
cretarii. 

Datum  Conflantinopoli  die  feptimx  Scptembris  ,  ano  Domini 
mille fimo  fexccntcfimo  fcptuay^fimo  primo. 

IRA2\^CISCVS  CASIMIRVS  Vifochi  Ablegatus. 

Ex  mandata  pncfati  illufiri^mi  Domini  ,' 
.1  RANCI  se  US  DE  V^RT  -Secretarius. 

ATTESTAT lOJT  DE  MO^ S lEVR  QJJ IRINO 

■  Refident  de  la  Republique  de  V-cnife  a  Lt  Porte. 

"^.TOi  Giacomo  Quirino  Cavaîiero  per  ia  SerenifTimo  Re- 
X^  poblica  di  Venetia  Cailo  alla  Porta  Orchomana  ,  Eiîen- 
do  di  noftro  ordineil  Dragomano  Grillo  andato  da  Dionyfio 
prelenremenre-PatriarcadiConftantinopoIi,  da  Methodiouno 
de  (uoi  predecefîori,-c  damoltialrri  Mctropoliti-Grxci,  perin- 
formari  s'habbino  alcuna  oppofirionealli  fequenti  rrcdecl  atti- 
coli ,  ciriporto  che  cflî  fenza  alcuna  difficulcà  ë  francamente 
rirpofero,  de  confermono  è  tengono  pcr  indubitati,  è  di  fide 
i  medefimi  a-rricoli;  in  de  noi  afficuraci  di  qucfta  verita  ,  fac- 
ciaino  ampla  è  indubiraca  fide  a  qnafivoglia  Chriftinno ,  tanto 
Cattoiico  Romano,  che  di  qualiîiia  Tetra  o  Religione  ,  come 
laChiefa  Grxca  crede. 

i.-Che  il  corpo  vivo  di  Giefu  Chrifto  crocififTo^  che  fali  al 
cielo.  è  che  fede  alla  deftra  del  Padre  j  è  ver-^mente  prefente 
neir  Euchariftiainvifibile. 

2.  Che  il  pane  &  il  vino  doppo  la  Confecrationej  fonocom- 
mutaci  dalla  propria  (oftanza  loro^nella  vera  è  propria  foftan- 
za  di  Giefu  ChriftoJ  di  modo  che  reftono  flilanriente  gli  acci- 
denti ,  &  le  fpecie  efteriori  del  pane  è  del  vino. 

3.  Che  rEuchariflia  è  elocauilo  per  i  vivi  6c  per  i  mord  or- 


642-  Liv.  V\\\.  Treuwes  amhent.de  Vunion des  Eg.  d'Or. 
dinacoda  Giefu  Chrifto,  è  datoci  per  traditione  dalli  Apo» 
ftoH.  ^ 

4.  Che  il  corpo  di  Giefu  Chrifto  nell'  Euchariftia  rutto  fi  man- 
giaimpaffibilmente  dichilo  riceve,  s'offeriice  fenza  uccidere, 
è  coma  Dio  fommamente  s'adora. 

5'.  Che  la  chiefa  ha  authoricad'ordinare  digiuni ,  è  proibire 
alciini  cihi. 

6.  C!îe  li  Chriftiani i  quali  pregano  la  Vergine  Maria  e  i  Sandi 
non  diminiiifcono l'honore  dovuto  à  Giefu  Chrifto. 

7.  Che  fi  devi  honorare  i  Sandli  è  celebrare  la  lor  Fefta. 

8.  Chei  Vefcovi  per  ordinatione  divina  non  folo  fopraftan- 
no  agliaîtri  lacerdoti ,  ma  foli  conferifcono  loro  il  carattere 
facerdutale. 

10.  Che  l'Epifcopato  fia  neceflario  nella  chiefa  di  Chrifto. 

11.  Che  la  chiefa  Cattolica  è  &  Tara  fempre  vifibile  ôc  infail- 
Jibile. 

1 2.  Che  i  Sacramenti  fono  fette. 

15.  Chegli  hbri  diTobbia,  Guidit ,  Sapientia,EccIefiaftico. 
Bariich  è  Maccabei  fono  parce  délia  facraScrittura, 

In  fede  di  che  habbiamo  fottofcricco  la  prefente  di  noftra 
propria  mano  ,  c  muniia  con  il  noftro  figillo.  Data  in  Pera  dï 
Conftantinopoli  il  5.  Gennaro  1671. 

Zociis  fgiÏÏi. 
GTACOMO  QVIRINI  Can.  Bailo. 

BERNARBO  NJCOZAZI  Secretariô, 

ATTESTATION     Be     M.     FEJtCHI   RESIDENT 

de  la  Republique  de  Gènes  à  lu  Porte. 

NOi  Sinibaido  Fiefchi  Refidenre  per  la  Sereni/ïïma  Re- 
publica  di  Genova  afprefl'o  la  Porta  Ottomana  ,  per 

l'experienza  che  habbiamo  di  motd  anni  in  quefte  parti ,  è  per 
la  pratica  è  converfatione  dà  noi  ha  vuta  con  piimati  delta 
Chiefa  Greca  ,  Patriarchi,  Metropoliti ,  &  al  tri  j  facciamo 
piena&  indubitara  fcdedinanzi  à  qualfivoglia  Chnftiano,  o 
Catolico  Romano  ,6  Calvinifta,  o  Luterano,  qualmente  la 
Chiefa  Greca  crede. 

1.  Che  il  corpo  vivo  di  Giefu  Chrifto  crocififTo  ,  che  fali  a'I 

cielo 


avec  ÏEglife  %oma,ine  fur  VEud]mfîie.  645 

cielojèche  iedeailadeltradel  Padre,  è  realmente  preience  Ch.VIII. 
•nell'Euchâriftia,  invifibile. 

2.  Che  il  pane  &  il  vino,  fratta  d'al  facerdoce  la  confecracione, 
fono  commucati  dalla  propria  loftanza  loro,  in  vera  è  propria 
fbftanza  di  Gielu  Chrifto  ,  di  modo  che  rellano  lolamence  li 
accidenti,  le  fpecieefteriori  del  pane  è  del  vino, 

3.  Che  l'Eue bariftia  è  holocaufto  pcr  i  vivi ,  è  per  i  morri  » 
ordinato  dà  Giefu  Chrifto ,  c  daccci  per  rraditione  dà  gli  Apo- 
ftoii. 

4.  Che  ilcorpodi  Giefu  Chriflo,  nell'  Euchariftia  turto  fî 
afume  impaffibilmente  ,  da  chi  lo  riceve  ^  s'ofFerifce  Tenza  uccL 
dere,  c  corne  Dio  fommamente  s'adora. 

-5.  Che  la  chie(a  hà  authoricà  d'ordinare  djgiuni,  è  prohi- 
bera alcuni  cibi. 

6. Che  gli  Chriftiani  che  pregano  la  Vergine  Dcipara  ,  ègli 
fanti  quali  fono  nel  cielo,  non  diminuifcono  l'honore  dovuto  à 
Giefu  Chrifto. 

"7.  Che  fi  deve  honorare  gliSanti,  ë  celebrare. 
8.  Che  relativamente   dobbiamo  riverire  l'i'.i-iagini  de  fanti. 

•9.  Che  gli  Vefcovi  per  ordinatione  divina  fopraftanno  à  gli 
altri  Sacerdoti,è   dà  loro  Ç\  fanno  degni  deila  gratia. 

10. Che  l'Epifcopaco  fia  neceiTariG  nellachiefa  di  Chrifto. 

ii.Chelachicfa  Catholicafarà  fempre  vifibile,  è  mfaillibile. 
II.  Che  fono  fette  Sacramenri. 

13.  Che  gli  librideTobia,  Giiidir,  S-pientia,  Ecclefiaftico, 
Baruch  ë  de  Maccabei  (bno  parce  délia  Scrunra. 

In  fede  di  che  habbiamo  locto  fcritto,  ë  farro  apponer  il 
noftro  figillo  ë  concrafegno  del  noftro  primo  Secrerario.  Data 
in  Galatadi  Conflantinopoli  nel  palazzo  délia  noftra  folitâ 
habitatione  li  13.  Agofto  1671. 

LOCUS  flplli  FiNIBALDO    FlESCHI. 

D'ordine  del  Prefato  Illurtrillnno. 
Michel'  Ang,°  del  Noftro  Sec»^ 


MMmra 


I 


644  Lïv.  ^^^^-  'Pt'CU'ves  authent.  de  T union  des  Eg.d'On 

ATTESTATION    DES    AMBASSADEVRS   DE     LA 
République  de  Rciyife  à.  lu  Porte, 

'Oi  MarinoBernarJocirCaboga,S{,Giorgirecunclo  Bnc- 
hia  AmbafciatorialL^Porca  Otthomanaperriil'iftri-n- 
maôcEccellenrifîîma  Republicadi  RagLi(î,havendopicn.i  noti- 
fia per  pratica,  &in[ormationed'a  molti  predeceflori  n  ftri,  è 
per  un  comertio  continuocon  li  fubdici  dcU'  Imperio  Otcho- 
mano  è  con  li  principali  délie fette Chriftiane,che fî  Profelîa- 
no.,èparticolamente  délia  greca  dicharamoàtutti  quanti  che 
falfamentele  vien  imputato  d'cfTer  invilupata  in  molti  pundi 
ne  leherefidi  Calvino,  èper  rintuzar  queftacalumnia  faccia- 
mo  indubitata  fede  che  quefta  chiefa  crcde  corne  noiCatiio- 
lici. 

1.  Che  il  medefimo  corpo  vivo  di  Giefu  Chrifto  crocefiflo 
chefalia'!  (.ielo,  èche  fiedealla  deftra  del  Padre,  è  veramenpe 
prefenteneli'  Euchariftia  invifibile. 

2.  Che  il  pane  &  il  vino,  fatta  la  confecrarione,  fono  vera- 
mcnremutraci  dalla  propria  roft-anzaloFo,alla  foftanza  del  cor- 
po- c  fangue  di  Giefii  Chrifto,  di  maniera  che  non  reftano 
piu  che  lefpecie  c  le  apparenze  d'el  pane  è  d'el  vino. 

3.  Che  il  corpo  dr  Giefu  Chrifto  neli'  Euchariftia  ft  man- 
gia  tiito  impaffibilmente  dà  chi  lo  riceve,  fià  bono  6  fiacacti- 
vo,  è  che  come  Dio  fommamente  s'adora. 

4.  Che  TEuchariftia  cun  vero  facnficio  ordeneto  da  Giefu 
Ch.rifto^  è  dacoci  per  traditione  dagir  Ap-iftoli. 

Che  la  chiefa  ha  autorita  di  ordinare  deJli  diguini,  è  prcibi- 
re  ccrd  cibi. 

^  Che  la  y^rgine  èli  Santi  che  fono  n'el  cielo  debbaao 
eller  invochati,  è  ch'invochandogli  non  fi  fminuifce  l'onor 
dovuto  à  Giefu  Chrifto. 

7  C  he  dobb'amo  honorer  li  Sanri  cle  loro  reliquie. 

8,    Che  relativamente  dobbiamo   honorar   le  loro  ima^ini. 

9.  Che  iono  fette  Sacramenti  délia  Chiefa. 

10.  Che  gli  Vefcovi  per  inftitutione  divina  fopraftanoalli 
Sacerdori^  eche  da  loro  fi  fanno  degni  délia  gratia. 

11.  Che  l'Epifcoparo  è  neceflario  neila  chiefa. 

12.  Che  la  chiefa  fara  fempre  vifibile  &  infalibile. 

13,.   Che  li  libri  ^-  diTobia,  Guidith,  Sapienza,  del'Eccle- 


avH  TEgli/é  Ronjaine/ùrrEucharifiie,  64^ 

^aftico,  Baruch&  Maccabei  fono  parce  délia  Scrirura  facra. 

In  fide  di  che  noi  auchenticliiamo  ôcattefliamo  quefta  verâ 
dichiaratione  c'ol  noftro  proprio  piigno,  è  iafigilamo  c'ol  no- 
ftro  proprio  figillo. 
Data  in  Andronopoli  li.14.  Octobre  1^71. 

Locui  (Izilli. 
MARI  NO   bï  BERNARDO.  Cabota  è  Giory  di  fecundo 

Brucchia  Ambafciatori. 

ATTESTATION   DE    LA   COMMVNAVTE 

des  Perotes. 

NOi  che  cotnponiamo  laCommunita  di  Pera  efTêndo  în- 
formati  qualmente  certi  eretici  vogiiano  mecter  indu- 
bio  la  fede  délia  chiefagrecaintorno  alla  reale  prefenza  di  Gie- 
fu  Chrifto  n'el  fantiiîïmo  Sacramento  delT  Euchariftia,  Ja 
tranfubftantione  del  pane  è  del  vino  n'el  fuo  Tangue,  l'adoratio- 
nechegii  è  dovuca,  l'invocatione  de'  Santi,  egli  fecte  Sacra- 
menti,  habbiamo  ftimacoche  farebbi  ncceflario  per  fodis  far' 
al  richiederc  dell'  Illuftriirimo  &  Ecceilentiiîimo  Signore 
Carlo  FrancefcoOlier  Marchefe  di  Nointel  Iiribaftiadore  di 
fiia  Maefta  Chriftianiffima  alla  Porca  Otcomana,  di  dicliiarar 
€  palefar  quel  chi'intorno  a  quefta  materia  è  di  noftro  co- 
nekimento. 

Péril  che  fepza  ingerirci  diparIaredaTheologi,i-nà  percC 
plicare  Tolamence  quel  che  fappiamo  diqucili  articolidi  ^sdc 
che  fono  délia  dottrina famigliare,  atceftiamo  c  cerrificgiamo 
à  tutti  quanti  che  toccara  mhrifliiani ,  o  vero  Cattolici  Roma- 
ri,  Calviniani,  o  Lutherani,  corne  i  Greci,re  ben  Tepanui  dalla 
ChieTa  Romana,  nulla  dimeno  credono  fermamence  com'eira 
gli  infrà  fpecifîcati  articoli. 

I  Che  ^Eiefu  Chrifto  è  realmente  fe  beninvifibilmente  pre- 
fente  ne'l    fantiiîïmo  Sacramento  dell'  Euchariftia. 

1.  Ch'il  pane  e'I  vino,  doppo  la  confecratione  fono  cam- 
biatti  dalla  propria  loro  foftanza^  nella  veraepropria  fobftan- 
2a  de'l  corpo  è  fangue  di  Giefu  Chrifto,  di  modo  che  reftano 
folamentegl'accidenci,  è  Icfpecieefterioride'l  panée  de'l  vino. 
^.  Che  indifpenfabilmente  fiamo  obligaci  d'adorare Giefu 
Chrifto  in  quefto  facrofanto  myfterio. 

M  M  mm  ij 


646  Liv  VIJI.  Prcwves  authent.  de  ïimion  desê'g.  d'Or. 

4  Che  l'invocatione  de'  Sandi  è  legiuma. 

In  lomma  che  nellachiefa  iono  i.tce  Sacramenri. 

Ecco  tjuanro  Tappiamo  certiffimamence  intornoalla  confor, 
mica  dcila  tede  Greca  colla  Romana  toccante  gli  fnpra  fcritti 
£rtico!i,  il  pcr  labito  continue,  ë  là  prattica  ordinaria  che 
habbiamoconglidf  tri  Greci  feparati  délia  chiefadi  Rona,  co- 
rne per  gli  cnlloqui  da  noi  fpelTè  voire  havuti  colîi  Primati,  e 
Prelaci  dellaehiefa  {opr.i  accennaca  Sonoancor' alcune  délie 
noftre  mogli,  le  quali  encndo  rimafe  nel  rico  greco  adorano 
'  Giefu  '^hnllo  nel  rantifTiino  Sacramento  dell'  Euchariflia, 
è  non  f'.nno  difficoiti  nelTunadi  fendre  la  MelFa celebrata  fe- 
conJ'il  nco  Romano. 

Noiparimence  incontradonci  in  villa  fenza  fcmpulo  veru- 
•  Mo  affifli.'mo  aile  Liturgie  Grcce,  &  adoriamo  nelle  loro 
ChieTe  Chrnlo  rea! mente  iotto  le  fpecie  de'l  pane  è  del  vi- 
no.  Facciamo  fede  di  piu  chel.!habbrarao  vifto  portar  dalli  Pa- 
pa/îî  loro  à  noflri  amici  Greciammolati  per  viarico,  è  ricever 
Jodaloro  con  fomma  veneratione  e  riverenza,  che  giornal- 
mentefi  ved.>no  li  Greci  invocar  la  Vergine  madré  di  Dio,  e 
gli  Sanri ,  (c'ie  leggendogli  loro  catechifmi  fi  ritrova  la  lo- 
ro doctrina  conforme  à  tutte  quefle  verità  fopra  aciennate.  le 
quali'  Greci  infegnano  tutte,  com'anche  chefonoferte  Sacra- 
mencij  di  modo  ch'eiïfendotefti-oculari  fe  ben  amici  fiamo  di 
quelliche  fono'accufati  di  contraria opinione,  crediamo  nulla- 
dimeno  ch'il  noftro  teftimoniofara  irreprchcnfible,,  poiheh  à 
per  fondamentejàverkài  dalle  quali  fuprafcritre  ragione  fpin- 
ti  e  molfi  non  facciamo  diiîîcolcào  fcrupolo  veruno,  di  dar^e 
forrofcrivere  quefta  prcfence  diehiaratione  farta  in  Pera  di 
Confcantinopoli  al  fecondo  di-N.ovembre  1671; 

G  E  o  R  G I O  Dr  A  P  E  Br  1 1  s  P^riore  dclla  commun!  ta  di  perra  a  fer- 
mo  qu.iyito  di  fopra. 

D^o  MIN  ICO  Per-one  Sottopriore  délia.  Commtinita  afferme  qitan. 
to  di  fopra. 

Francesco   Testa   Confeglier  afferma  quanta  di  fopra. 
Antonio    Perone   Confeqjier  affcnno^  o"t. 
Antonio  Grillo  afferma  quanto   di' fopra-. 
NlGOROSO   DI   NfGRi   Confeglier:^    ^c. 
f  o .  A  B  R  A  M .  Fontana  P  afferma. 
Thomaso    Navone   Confeglier.^   é-c. 


A^ec  ÏEgûfe  Romaine  fur  tEHchurifiie.  647 

Antokio   di  Negri  l'affermo. 
Francisco  Dane  ConfcgUer^  é-c.. 
LoRENZO  SvMMAl'^iffermo. 
Thomaso  Glrachi  Confeglier^é-c. 
Pasqua    Navone  afferma  ut  fupra. 
GiasEPPE    d'Andréa  Confe^Uer^  é^c. 
Gro  BAVTXsrAToKSLrrx  afermoat  fupra. 
Francecho  di  Negri  Confrgiier  ^  é^c. 
Jo.  Christophoro  Tarsia  afferma  di  fopra, 
Bernardo    Baroni  Confeqlier .,  (^c> 
PiETRO   CuPlR  afferma  di  fopra. 

EXTRAIT  D'VNE     LETTRE    D\E  MONSIEUR 
V-Ambaffadeur  ce  jj.  Novembre  16  7 x. 

L'Opiniâtreté  dans  laquelle  le  Miniftre  Claude  s'efl: enga- 
gé mai  à  propos,  me  fai  Tant  appréhender  qu'il  nevcuille 
pas  fe  rendre  à  toutes  ces  preuves,  je  n'en  néglige  aucune  de 
celles  que   je  croy  capables  de  le  convaincre.  Ainfi  comme  la 
difpute  roule  fur  un  fait,  &  qu'on  a  coutume  d'éclaircir  ces 
fortes  de  conteftations  par  desmformationsdont  les  témoins 
font  d'autant  pins  croyables  que  leur  intégrité  &:leur  qualité 
les  élevé  davantage  &  les  met  au  delTus  de  tout  foupçonjj'ay- 
cru  que  les  depofitions  de  xVIefiieurs  les  Reprefentans  qui  font 
icy  ou  à  la  Porte,  méritent  une  croyance  entière.  Vous  verrez: 
ce  qu'en  dit  M.  l'/nrernoncede  Pologne.  LeRefîdentdcGenes- 
de  la  maifon  deFiefcy,  cft  le  fécond  témoin.  Il  eft  confidera- 
ble  par  luv-mème&  par  fanailTance,  pouvant  compter  dans 
fa  famille,des  Papes,  des  Cardmaux,  &  des  Evêques  en  grand, 
nombre.  Les  Ambafladeursde  Ragufe  donc  la  Republique  eft 
tributaire  de  fa  Hautefle  ,.  pourroient   feuls  retrancher  toute 
difficulté  par  la  raifon  du  grand  commerce  qu'ils  ont  dans  cet 
Empire.  Vous  lirez,  avec  plaiiîr  la  manière  dont  ils  s'en  expli- 
quent,  en  attendant  que  je  vous  falFe  tenir  une  atteftation  du 
nouvel  AmbafTadeur  de  Venife,  le  defFunt  ayant  cfté  prévenu 
delà  mort  lorfqu'il  m'en  vouloit  donner  une. J'en  attends -âufiî-de 
la  part  de  M.  le  Refidenr  d'Allemagne.  Et-  fi   M.  lAmbaf- 
fadeur  d'Angleterre,  qui  eft  convenu  de  la  vérité  de  lacroyance 
des  Grecs  comme  je   vous   l'ay  mandé,  me  tient  la  parole 
qu  il  m'a  donnée  ,  vous  recevrez  la  déclaration  qu'il  m'en  don- 
nera.. MMmiiiiij 


648  Liv.Vill.  Prewves  auth.  de  t union  des  Eg.  d'Or. 

Voila  ce  ni2  fembie  des  pièces  bien  anthenriques.  Malien 
voicy  encore  (i'aufes  qui  font  bien  precifes.  Il  y  aicy  un  Vi- 
caire Patriarche  latin  nomme  Monfieur  Ridolpln  qui  y  fait  fa 
refidence  depuis  quelques  années.  C'eft  un  homme  éclairé,  qui 
s'efl  inilmit  à  fond  de  la  doctrme  des  Grecs  pour  écrire  con- 
tre eux  ,  &  qui  a  déclaré  nettement  ce  qu'il  fçait  des  articles 
qu'on  luy  a  donnez  de  ma  part.  J'ay  joint  à  toutes  ces  preuves 
une  information  de  dix  neuf  témoins  qui  fontfujets  du  grand 
Seigneur.  Us  descendent  d'anciennes  familles,  &:  font  nom- 
mez les  Pcroties  comme  eilant  les  principaux  de  Galata  &,de 
Pera.  Leurs  anceftres  ont  obtenu  une  capitulation  particulière 
pour  eux  du  Sultan  qui  prit  Conftantinople.  Enfin  la  confi- 
nuelle  habitude  qu'ils  ont  dans  le  païs ,  leurs  alliances  avec 
les  Grecs  feparez  de  l'Eglife  Romaine,  &la  qualitéd'un  d'en- 
tr'eux  du  premier  Drogman  d'Angleterre, rendent  leur  témoi- 
gnage irréprochable. 


CHAPITRE       IX. 

Union  deVEglife  Grecque  avec  l'Lqlife  Ronidne  furl^Ettcharifiie^ 
■prouvée  parle  peu  de  difficulté  que  les  Grecs  font  de  communiquer 
avec  les  Catholiques  Romains,  en  même  temps  quils  excluent 
abfolument  les  Calvinifics. 

CEtte  uniformité  de  fentimens  fur  l'EucharifHe  &  fur  la 
plufpart  des  autres  points,  fait  une  telle  impreflion  fur 
l'efprit  oc  des  Catholiques  Romains  &  des  Grecs ,  qu'elle  ef- 
face quelquefois  la  mémoire  des  différends  qui  font  entre  ces 
Eglifes  ,  6Î  les  porte  à  recevoir  les  Sacremens  les  ups  des  au- 
tres: comme  on  le  pourra  voir  parles  extraits  des  lettres  de 
M.  l'Ambafladeur  de  fa  Majefté  j  que  nous  produirons  dans 
ce  chapitre. 

EXTRAIT     D'VNE    RELATION    DE    MONSIEVR 

l' Ambaffadeur  fur  le  Sieur  Tarfîa 

c'eft  qu'il  a  Y    E  témoignage  du  Sieur  Tarfia  mérite  4'eftre  diftingué 
S"o«£pÎ  -L  des  autres  .a.vec  lefquels  il  a  figné,  puifqu'ila  joint  à  Tes 


a,fvec  ÎEglife  T^omnine  fur  T Euchanflie .  649 

bonnes  qualicezia  la  patience  dans  les  toutmens  dont  il  a  eltc  Ch.  IX. 
bourrelé  juiqu'àu  moment  de  rendre  Tame.  On  l'a  attaché  fur  rottescomme 
une  croix  de  fer  j  on  luy  a  retourné  les  pieds  par  derrière  juf-  j^j]-^  ^ "^^ '^^' 
qu'A  la  telte  ^  on  luy  a  fait  boire  d'une  certaine  eau.  Toutes 
ces  cruautez  exercées  à  trois  diverfcstoisSc  durant  long  temps 
eftoient  pour  l'obliger  de  découvrir  la  perfonne  qui  cftoiticy 
de  la  part  des  Vénitiens,  s'il  avoir  de  l'argent,  &qoi  eftoienc 
lesefpions  qui  leur  donnoient  les  avis.  lî  a  ioufFert  toutes  ces 
tortures  fans  rien  déclarer.  Et  l'on  peut  juger  de  leur  violen- 
ce, puifqu'ayant  eftc  exercées  en  l'année  1646.  il  en  fouffre  en- 
core à  prefent.  Non  i'eulemenr  fa  confiance ,  fon  âge  avan- 
cé,  &  fa  probité  le  rendent  digne  de  foy,  mais  encore  fa  pro- 
pre expérience  de  quelques-uns  des  articles  en  qucftion.  C'eft: 
pourquoy  il  m'en  a  donné  une  at'ceftation  particulière  j  qui 
prouve  que  les  Grecs  adminiftrenc  le  Viatique  aux  mourans 
après  qu'ils  fe  font  confeflèzj  qu'ils  prient  Dieu  pour  le  repos 
de  leurs  âmes,  qu'ils  les  enterrent  en  terre  Sainte,  5c  qu'ils  ne 
font  pas  de  difficulté  de  rendre  les  Latins  participansdc  tous 
eus  avantages. 

Vous  y  verrez  aufî?  le  femiment  qu'en  ont  les  Prêtres  La- 
tins mêmes.  Le  Chapelain  de  Ragufe  n'ayant  pas  voulu  de 
nouveau  adminiflrer  le  Saint  Sacrement  au  malade  qui  eftoit 
'le  fils  de  Tarlïa.  Vous  verrez  qu'il  eft  enterré  dans  l'Eglife 
Grecque  de  Saint  Dimitred'Andrinople-,&  vous  apprendrez 
par  une  relation  que  je  vous  envoyé  d'un  voyage  que  j'ay  fait 
dans  quelques  ParoifTes  Se  Monafteres  des  Grecs  en  k(\i  Se 
dans  les  Iflesdcs  Princes, que  dans  l'une  de  celles  là  Edouard 
Barton  Ambaffadeur  d'Ançrleterre  eft  enterré,  mais  qu'il  eft 
hors  de  l'Eglife  6c  de  l'enclos  de  l'Abbaye  proche  la  porte,  5c 
que  le  Cimetière  eft  d'un  autre  cofté. 

uiTl  ESTATION  DV  SIEVR  TJRSIASVRLA 
mort  do  fon  fils  communia  par  les  Grecs  &  enterré  dans  leur 
Eglife. 

10  infrafcritro  nrteflo  comeil  quondam  Sig.  Leon'ardoTar- 
fla  mentreperinterpere  fi  trovara  in  Andrinopoli  appreffo 
V.  EcceIl''-^°.  Ballarino  Canceiliore  grande  délia  Sereniiîima 
Republica  de  Venetia  ,  è  ftnro   ferito  dalia  peflé  ,  ch'in 
quel  tempo  faceva  gran  ftrage  mqucUa  Ciîcà,  Se  che  doppo 


6^o  L I V.  V  H I.  Preuves  attthen.  de  l'union  des  Eg.  d'Or. 

freccegiorni  havendorefo  l'anima  Tua  aDio,il  (uo  corpoè  ella- 
to  con  pompa  accompagnaco  dalle  orti  delii  Rapprefentanci, 
&  datiitn  gli  Greci  principal!  d'Andrinopoli  infinoallachie- 
laGreca  difan  Dimitri,  dcntro  la  qiiale  è  ftaro  lotterraco  vi- 
cino  raltaremaggiore,c  frattedalli  ReligiofiGrechireflèquie 
le  folice  fiinerali  preghiere  per  l'anima  del  defonto,  coll'ap- 
pendere  al  di  fopro  délia  fuafepolcuraunalampadad'argento 
la  eiualefempre  è  accefa  per  la  commemoracione  dell'  anima 
fua,  è  col  poncrefoprail  fuo  tumulo  una  gran  piecra  con  lec- 
tere  latine  è  Greche  in  honore  délia  iua  vircù,  nafcica  è  con- 
ditioni. 
Jo  infrafcricto  atteftoancoche  pernonliaver  rEccellencifl 

fimoBellarino,  Capellano,  il  iopracennatoSig.  LeonardoTar- 
"lîaeflendoficonfeiïaco  àun  PapafloGrecoricevetedalui  l'aiïb. 
lutione,  &il  facro  Viatico  porcacogli  dal  lopradetto  Papafîô^ 
il  c]uale  fubito  che  fà  enrrato  nélla  cafa  fecela  Sacramentale 
fontione  Doppo  vi  è  andato  all'ammalacoil  Capellanodelli 
Sereniffimi  Ragafei,  è  non  eflendo  arrivatoà  tempo,  &  incen- 
daco  effer  data  fatta  la  fontione  da  mano  del  Papas  Greco,  gli 
diede  rulrimaaflblutione;  dichiarando  pero  il  detto  Sig.  Leo- 
«ardo  Tarfia  in  fcritti  al  detto  Eccellentiffimo  Cancelliere 
grande  che  avan  t'Iddio  è  il  mondo  confeffava  morire  vero  ca- 
toHco  &  Apoftoliquo  Romano,  raccommandando  alla  fua  pro- 
fettione  il  Vecchio  Padre  c  la  fua cariiïima madré.  Conftanti- 
nopoli  à  di  iz.    Novembre  1671. 

lo.    Chr.istophor.0  Tarsia   Padre  del  fopradetto    de 
fonto  afFermo  ut  fupra. 

EXTRAIT    D'VNE     LETTRE     DE     MONSIEVR 

l' ArnbaJJadcur  de  Confiunninoplc  furU  mon  de  Tctera'chef  des 

Coz^iques. 

E  vous  diray  par  une  efpece  de  préliminaire  &  pour  diver- 
llfier,  que  le  grand  Seigneur  ayant  accordé  fon  eilendart  à 
quelques-uns  des  Cozaques  au  préjudice  des  Capitulations  de 
la  Pologne,  DorozenKo  qui  le  recrut  fe  voyant  chef  des  rebelles 
ne  fongea  qu'à  fe  confervefidans  ce  porte.  Ainfi  craignant  que 
Tétera  qui  luy  avoit  quitté  la  place  ,  pour  fe  retirer  dans  un 
Monaffcere  en  Moldavie  ne  Teufl:  fait  par  foibleirej&:  pour  mieux 

chercher 


a^ec  VEglïfe  Komiine  jur  tEucha.vifiie.  6  çt 

chercher  les  moyens  de  fe  rétablir,  il  le  fie  prendre,  £c  l'en-  Cii.  ÎX- 
voya  au  Grand  Vifir ,  en  raccufant  de  trahir  les  intercfts  de  là 
Hauteire,  pour  ccablir  l'autorité  de  fà  Majcfté  Polonoile.  Le 
Vifir  ayant  entretenu  ce  nouveau  captif  en  fut  fort  fatisfait  : 
Il  lui  donna  un  logement  où  il  paroiffoit  libre  avec  lesdomefli. 
ques  j  &;  l'on  croit  qu'il  le  conlervoit  pour  le  (ubfliruer  à  Do- 
ro2enko  en  cas  de  beloin.  Mais  (es  deflèins  ont  efte  renverrez 
par  fa  mort.  Comme  il  vit  qu'elle  approchoit ,  il  fut  combattu 
du  defir  de  rendre  publique  fa  profeihon  de  Catholique  Ro- 
main ,  en  defavouant  la  profelhon  Grecque  qn'il  avoit  f  it  pa- 
roiftrc  à  l'extérieur  julqu'alors.  Mais  la  crainte  que  revenant  en 
ianté  cette  adion  ne  nuifiil:  à  (si  fortune  ,  l'obligea  de  confer- 
ver  fa  qualité  de  difciple  caché  de  la  véritable  E'j,lifei  c'eft 
pourquoy  il  crut  qu'il  devoit  prendre  un  milieu,  qui  même  a 
efté  approuvé  par  des  Catholiques  Romains ,  Evoques  &  Re- 
hgieux,  &:  par  les  principaux  Grecs  de  l'Egiile.  Ce  fut  de  !e 
confefTer  à  un  Francifcain  ,&  profefler  tous  les  points  de  la 
croyance  Apoftolique  6c  Romaine,  de  déclarer  qu'il  y  vouloit 
mourir,  &  qu'il  renonçoità  tous  fentirnens  de  rébellion  con- 
tre fon  Roy  ^  ce  qu'il  déclara  non  feulement  à  fonConfeifeiir, 
mais  encore  au  Refidentde  Pologne.  Mais  comme  il  vouloir 
recevoir  le  Viatique  ,  il  l'envoya  demander  à  l'Eglife  Grec- 
que ,  &  mourut  dans  fa  communion. 

L'on  auroit  pu  fort  bien  le  communier  en  noftre  manière  , 
quoiqu'en  l'un  &  en  l'autre  ce  foit  le  même  corps  de  J.  C.  Et 
fansdouteil  eftoit  bien  temps  au  moins  au  moment  de  la  more 
de  quitter  tout  déguifémcnt.Et  il  n'y  pouvoit  plus  avoir  de  pré- 
texte pour  le  continuer.  La  vérité  en  cette  occafion  ne  dévoie 
point  eftre  mife  en  balance  avec  des  avantages  temporels^ 
d'^autant  plus  que  Tétera  avoit  fait  une  donation  de  cent  mil 
écus  aux  Jeiuires  de  Varfovie  ,&:  qu'apparemment  il  luireftoit 
peudechofe  aménager. 

Vous  connoiftrez  néanmoins  par  cette  hiftoire  que  les  Grecs 
tiennent  la  tranfrubfi:antiation&:  la  realité  du  corps  de  J.  C. 
puifqu'un  particulier  qui  confefle  dans  le  cœur  la  croyance  Ca- 
tholique Romaine  ne  fidt  pas  difficulté  au  moment  de  fa  more 
de  recevoir  cet  augufle  Sacrement  confacréparunGrecSchif- 
matique,&fepare  de  nôtre  Eglife,  quifqu'il  l'areçrdu  confen- 
tement  des  Religieux  Romains  ,  6c  qu'il  lui  a  efté  apporté 

N  N  n  n 


6)2,  Liv.  VIII.  Trewvesautheft.de  PuniondesEg.d'Or. 

avec  un   refped  &c  une  adoration  qui  n'appartiennent  qu'à 
Dieu 

EJiTTRAlT    D'VNE  AVTRE   ^ELATI0  2T. 

LEs  Grecs  ne  font  pas  difliculté  d'afîifter  à  nos  Meilès, 
quoiqu'ils  n'ayent  point  d'empreffement  pour  y  venir.  Ils 
envoyent  même  leurs  enfans  &  leurs  femmes  à  confefl'e  à  nos 
Religieux  ,  &  pour  en  eftre  inftruits.  Mais  les  Catholiques 
trouvant  leurs  Liturgies  trop  longues,  n'y  vont  point ,  {î  ce  n'eft 
par  curiofité.  Vous  îçaurez  néanmoins  qu'à  Smirneles  Latins 
avoient  coutume  d'aller  un  certain  jour  en  proceffion  dans 
TE^life  des  Grecs,  ce  qui  fe  faifoit  publiquement  avec  la  croix, 
les  cierges  &  les  Preftres  j  mais  comme  il  arriva  du  defordre , 
on  a  cette  certe  cérémonie  -,  ce  qui  n'empêche  pas  les  Grecs  de 
venir  dans  nôtre  Eglife.  La  nuit  du  Vendredy  Saint  ils  y  vien- 
nent en  proceffion ,  &  y  font  leurs  prières. 


CHAPITRE     X. 

Union  de  l'EgUJ'e  Grecque  avec  l'Eglife  Romaine  fur  l' Euchariflie 
fïouvèe  par  une  Lettre  de  Nc[iuritis  Patriarche  de  Jerufalcm 
au  Patriarche  d^  Alexandrie  ,  ^  par  le  témoignage  du  même  Pa- 
triarche d'Alexandrie  touchant  les  Mofcovites. 

LA  Lettreque  nous  allons  produire  efl:  toute  d'un  autre 
genre  que  les  actes  que  l'on  a  inférez  jufqu'ici  dans  ce 
Livre  ,  Se  elle  mérite  une  reflexion  particulière.  Elle  n'cfl:  pas 
d'un  Grec  ami  des  Latins  j  mais  d'un  homme  qui  paroift  tres- 
envenimé  contr'eux.  Il  efi:  fi  peu  porté  à  la  compla.'ftnce  pour 
eux,  que  l'on  voit  que  fans  fujet  il  traite  avec  les  derniers  ou- 
trages celui  qui  avoir  demandé  une  profeffion  de  la  Foy  des 
Grecs.  Et  cependant  avec  toutes  ces  préventions  il  ne  laide 
pas  de  marquer  auffi  fortement  qu'on  le  fçauroir  faire  ,  le  con- 
fentement  des  deux  Eglifes  fur  la  tranfTubftantiation  Se  la 
prefence  réelle. 


(Ltec  ÎEglifè  T^omaine  fur  t€ucharijiie.  é^^ 

Ch.X. 

COPIE     DE    LA    LETTRE    DV    BIEN-HEVREV^Y 

Patriarche  de  '^erufalem  Neîiariîis  au  hien.henreux 

Seiqricur  Payfus  Patriarche  d'Alexandrie. 

NOus  avons  reçu  par  deux  fois  des  Lettres  de  vôtre  béa- 
titude, dont  les  unes  étoient  pour  nous  recommander  de 
certaines  perfonnes  arrivées  ici  pour  la  vénération  des  faints 
Jieux  ,  les  autres  fur  difFerens  lujets  contcnoient  entr'autres    Ce  Capuciu 
chofes  quelques  articles  touchant  le  Frère  Lazare  de  la  Con-  ^■';°'f '•'^'"^n- 
gregation  des  Capucins,  dont  le  premier  efl:  qu'il  demande  ment  cette 
une  confeilîon  de  foy  par  écrit  de  vôtre  (ainte  main  pour  té    prorcffiondc 
moigner  les  fcntimens  qu'a  l'Eglife  Orientale  fur  les  laints  &  mcmoiies  en- 
iacrczmyfteres  :  Le  (econd  qu'il  doit  par  cette  confefîion  con-  voycv.en 
vaincre  un  Luthérien  demeurancen  France  ,&  qui  tourmente  ^sn^'^.j^e. 
ies  Papiftes  ,  prétendant  que  l'Eglife  d'Orient  n'cfl:  point  d'ac-  m.nt  Je  cette 
eord  avec  les  Latins  fur  le  fujet  des  Sacremens  :  Le  troifiéme  contiftanon. 
<^ue  ce  Luthérien  a  entre  les  mains  une  confefiïon  de  foy  origi 
nale,à  ce  qu'il  dit,  de  Cyrille  autrefois  Patriarche  de  Conftan-  aemrnrent 
tinople.  Et  il  fembie  que  cette  confeflïon  foitces  articles  Cal    p" 'l'accord 
viniftes  qui  ont  trouble  toute  l'Eglife,  &  qui  font  attribuez  au-  f^l_  nnrnir  de 
dit  Cyrille  ,  qui  pour  lors  étoit    Patriarche  Oecuménique  :  cesartkici. 
Le  quatrième,  que,comme  il  dit,  les  autres  Patriarches  ont 
pour  ce  fujet  envoyé  chacun  en  France  leur  confeflîon  de  foy. 
Commençant  donc  par  le  dernier,  nous  finirons  par  le  pre- 
mier, allans  ^  rebours  avec  ceux  qui  ne  fçavent  pas  marcher 
droit. 

Nous  répondons  donc  à  ce  dernier  avec  aflcurance,  n'ayant 
pas  plus  d'envie  de  nous  délivrer  des  deffeins  malicieux  8c  de  la  ^^  Patmrche 

{•^•i  ,T  11  II-     cftoit-il  un 

langue  impudente  de  ce  Lazare,  que  de  le  convaincre  pubh-  desGrecsLati- 
quement  de  menfonge  fur  ce  fujet,  afin  que  vôtre  béatitude  nHezieW. 
puilfeconnoiflre  clairement  les fbphifmes  frauduleux  aveclcf-  ^^^"^  *■" 
quels  les  Latins  qui  viennent  à  nous  tâchent  de  nous  furprcn- 
dre.  Qu'il  dife  ce  bon  homme  de  Lazare  qui  font  ces  Patriar- 
ches ?  en  quel  temps  ,  en  quel  lieu  &  en  quelle  manière  ils  ont 
fait  ce  qu'il  dit?  Si  c'ert  celui  de  Confkanrinople ,  ou  d'Antio- 
ehe,oude)crufalem,  en  quel  temps  &  en  quelle  Ville?  S'ils  fe 
font  aflemblez  tous  trois  avec  leurs  Synodes,  ou  là  chacun  en 
particulier  a  écrit  &envové  cette  confeffion  ?  Qu'il  en  montre 
les  originaux  ou  au  moins  les  copies  5  mais  il  ne  peut  en  aucune 

NNnn  ij 


654  Liv.  VI  M.  Pieuses  authen.  de  fimiondes Eg.  d'Or, 

manière  rien  montrer  de  ces  cliufes.   Seulement  il  veut  faire 
palier  pour  véritables  des  cho(es  qui  n'ont  jamais  efté^&  qui  ne 
font  pas  même  venues  dans  la  penfée  des  Patriarches  ^  &  ne 
pouvant  iiîontrer  la  vérité  par  des  preuves  de  fait  ,  il  tâche 
de  nous  tromper  par  des  paroles.  Non  ,  divine  ôcfacréetefte  j 
non  ,  vos  confrères  les  Patriarches  qui  font  dans  les  mêmes 
fentimens  que  vous^  n'onc  point  donné  aux  Latins  des  coa- 
fellîons   de  foy  par  écrit.  Le  menteur  qui  avance  cette  fauf- 
fcté  en  dût  il  crever.  Car  fî  cela  eftoit  arrivé  dans  le  temps 
de  nôtre  PatriarchatjCommenc  l'auriunsncms  piiignorer^puifl 
qu'il  me  femble  que  nous  faifons  quelque  figure  dansl'Eglife 
d'Ofienc?  Si  cela eft  arrivé  devant  notre  Patriarchat,nousn'a. 
Il  fait  aiiu-  vons  jamais  entendu  parler  de  cette  aclion,  ou  pluflofl:  de  cette 
fiMiaumor!    fic^linn  :  car  c'eft  véritablement  une  ficT^ion  Se  un  jeu  plein  de 
^^l^'H"^;^^""'  diffimulation  &  d'hypocrilîeque  tout  ce  qu'a  dit  Lazare. 
auflî  iiiiepiere     Vous  vousêces  donc  fort  prudemment  délivré  de  ces  four- 
dc'TJieatre,     [5^5  ^  ç^-^  écrivant  cette  confelfion  fi  orthodoxe  6c  fi  bien  con- 
çue ,  en  Ja  leur  montrant;,maisneleur  donnant  point,  pour  les 
affliger  davantage  en  rendant  leurs  fourberies  inutiles. 

Et  quant  à  ce  qu''ondit  que  ce  Luthérien  pour  pafi^er  du  qua- 
trième article  au  troificme  ,  fe  fertde  laconfeiîion  de  Cyrille  , 
cela  ne  nous  a  pomt  tc;uchez  ,  ni  ne  noustouchera  jamais. 

Premièrement,  parce  queplufieurs  lont  en  peine  ,  fi  elle  efl: 
véritablement  de  Cyrille, ou  fi  c'eft  l'ouvrage  de  quelque  here- 
dquequi  ait  voulu  autoriler  fo-n  herefie  du  nom  de  Cyrille. 

Secondement  ,  quand  mcme  Cyrille  auroit  eftédans  cette 
opinion  ,  conformément  à  laquelle  il  auroit  donné  une  telle 
confeffio-n,  il  ne  s'enfuit  pasquetoutei'Eglife  d*Orientait  fui- 
vi  (es  fentimens.  Puifque  quand  même  d'autres  Papes  &  Pa^ 
triarches  ont  eflé  hérétiques  ,  ils  n'ont  pas  attiré  à  leurs  here- 
fîes  toutes  les  Eglifes  qui  leur  eftoiencioûmifes,  au  contraire 
ils  les  ont  rejettees  &  condamnées  fynodiquement. 

Troificmement ,  fi  quelqu'un  a  affez  d'imprudence  pour 
dire  que  Cyrille  a  compofé  cette  confeffion  au  nom  de  toute 
l'Eg!i(e  d'Orient,  &que  pour  cela  on  demande  Ci  toute  l'Eglife 
d'Orient  s'efl:  laiflee  aller»au  fentimentde  Cyrille  ;c'efi;une 
chofe  qui  paroift  fort  inutile  après  plufieurs  apologies  mani- 
feftes  que  les  Orientaux  ont  publiées  en  divers  temps  depuis  la 
mort  de  Cyrille  ,  parlant  6c  écrivant  pour  réfuter  la  confef- 
fion de  Cyrille,  Se  donner  des  preuves  de  la  foy  Orthodo- 


nwec  ï BgU/e  Komaine  fur  ÏEuchcinflie.  655 

se  que  nous  profellons ,  &  de  nôtre  fentiment  fur  les  faints  fepc  Ch.    X. 
Sacremensde  l'Eglife. 

La  première  pièce  eft  le  Tome  Synodique  fait  en  Moldavie  Conf.nionde 
fous  le  Duc  |ean  Bafile  Boibunda,  Parchenius  le  Vieil  eilanc  janinéc- Aiïo. 
Patriarche  de  Conftantinople.  Car  les  deux  vénérables  Pa-  dioucmente» 
triarches  Nicephofed'Aiexandrie&  Theopbanede  Jerufalem  ^°''^**i^- 
eftant  allez  en  Moldavie,on  parla,  de  cectcconfcffion  attribuée 
à  Cyrille  ,  &des  articles  qu'elle  contenoit  ,  &  tous  les  ayant 
déclarez  heretivnues   ,  &;  entièrement  differens  du  véritable 
ièntiment  de  l'Ei^life  d'Orient ,  ledit  Duc  Bafile  avant  un  zèle 
ardent  pour  l'Eglife  Orientale,  demanda  qu'ils  fuliencrejec- 
tezfynodiquement,  &:  qu'on  prononçât  anathême  contre  ceux 
qui  el^oient  dans  ces  lentimcns,  ce  qui  tv.t  fait  i  car  alors  le 
Patriarche  de  Conftantinople  Parthenius  envoya  deux  dépu- 
tez ,  dont  l'un  eftoit  Porphyre  Evêque  de  Nicëe  ,  qui  n'igno- 
roit  pas  les  belles  Lettres,  &:  Mclece  Syrigue  Théologien  & 
Prédicateur  de  l'Evangile  ,  pour,  approuver  le  Livre   que  les 
Rufles  avoienc  compofe  de  là  foy    Orthodoxe  ,  eux  mêmes 
l'ayant  demandé  j-ce  fut  pour  lors  que  fut  fait  ce  Tome  Syno- 
dique. Ces  deux  Patriarches  dont  nous  avons  parlé,  lesDc-pu- 
tez  du  Patriarche  de  Conftantinople,  &  piufieurs  autres  per- 
fonnes  confiderables  s'eftant  affeniblez.  Et  ayant  elle  porté  à 
Conftantinople  ,il  y  fut  confirmé  partout  lelacrc  Synode  des  n  oiri"  <'« 
Archevêques  &:  des  Clercs,  &  enfuite  imprimé  par  le  foin  2^  J »'"preinon da 
la  libéralité  du  Duc  Baille,  6c  envoyé  dans  ttairel'Egli.e  d'O    Pnhemu?, 
rient,  &:  tous  les  Orientaux  le  reçurent  avec  rcfpeâ:,  comme  quifcficen 
edant  délivrez  par  Ion  moyen  d'un  mauvais  foupçon.  rlrd/^d  ^^' 

Mais  aulîl  depuis  la  publication  d.e  ce  Tonve  nous  a  vons  plu-  Duc. 
iâeurs  autres  perlonnes  qui  ont  écrie  en  particulier  (ur  les  Sa- 
cremens ,  &  pour  dire  en  un  mot ,  qui  onr  cumbartu  genereu- 
(enient  ces  articles  hérétiques. 

Le  premier  efl;  George  Ciîrefius  homme  très  ortlioi^o::e,  at- 
taquant Screuverlanî  (es  Hérétiques  comme  un  capitaine  fore 
courageux,  qui  dans  plulîeurs  endroits  de  Tes  ouvrages  infè- 
re par  manière  d'iacident  des  difcours  fur  les  Sacremens,  fe- 
Um  le  fentimtnt  de  l'tglife  Orientale.   Et  oijtre  cela  il  en  a 
donné  en  particulier  un  ouvrage  complet  intitulé  des  Sacrç-^'fftl's"^^"^ 
mens.  De  touslefquels  le  Religieux  Grégoire  Proto- Syncelle  i"(.^ar.sb  "^ 
de  la  grande  Eglife  &  fon  vcrirabîe  diiciple  a  compofé  un  pe-  Rcponfegenc- 
tic  Traité  particulier  des  Sacremens,  ramaiTanc  de  la  bouche- -*^^- 

NNnn  iij 


6^6  Li  V.  VI 1 1.  Prswves  authent,  de  T union  des  Eg.d'Or. 

de  Ton  maîrre  comme  d'une  fource^  Tes  fentimens  qu'il  a  fait 
imprimer  à  Venile,  &  qu'il  a  ramaffés  dans  on  petit  Livre  com- 
mode pour  celui  qui  le  voudra  lire  ^  qui  eft;  à  la  vérité  fort 
court ,  mais  clair  &  aifé  à  comprendre  ,  parce  qu'il  eft  écrit  en 
langue  vulgaire.  Ces  deux  Docteurs  n'avoient ,  comme  je  pen- 
fe  ,  aucun  autre  deifcin  que  de  montrer  que  l'Eglife  Orientale 
n'a  pas  des  fentimens  femblables  à  ces  articles  hérétiques,  mais 
qu'elleloûtient  fortement  la  foy  orthodoxe  fur  lesSacremens, 
qu'elle  a  reçue  des  Pères  de  toute  antiquité. 

Outre  ceux  là,  celui  dont  nous  avons  parlé  un  peu  aupa- 
ravant, &  qui  eft  mort  fort  heureuiement,  MeleceSyrigus  a 
compoié  un  grand  ouvrage  contre  les  mêmes  articles ,  &  pour 
dire  la'  vérité ,  plus  étendu  &  plus  clair  que  les  autres ,  les  réfu- 
tant 6c  renverlant  mot  à  mot  8c  félon  les  expreflions  &  félon  le 
fens,  6c  les  dérruifant  comme  unetoile  d'araignée.  Il  expofe 
aufli  nôtre  pieté  6c  nos  fentimens  orthodoxes  fur  lesfaints  Sa» 
cremens.  Il  confirme  ce  qu'il  dit  par  des  demonftrations  tres- 
cxacles  ,  qu'il  appuyé  par  quantité  de  témoignages  des  an- 
ciens Doâeurs  de  l'Egliie,  6c  refout  en  même  temps  plufieurs 
contradictions  difficiles  quifémblent  fe  trouver  dans  les  paro- 
les de  ces  faints  DocfVeurs.  Cet  ouvrage  ayant  eftécompofé  fî 
exatftement  par  Melice,  fut  premièrement  recherché  par  des 
Jefuires  qui  eftoient  pour  lors  à  Galata  ,  qui  l'ayant  jugé  or- 
thodoxe ,  promirent  de  le  faire  imprimer  à  leurs  dépens ,  (î 
l'Aureurdu  Livre,  diient  ils,  vouioit  en  cfFIicer  quelques  pa- 
roles qui  déplaifent  aux  Latins.  Car  celui  ci  reeonnoifTant 
feulement  fepr  Conciles  généraux  par  un  nombre  déterminé  , 
ceux-ci  vouloient  qu'il  dit  fans  déterminer  aucun  nombre 
précis  ,^les  faines  Conciles  généraux  ,  afin  qu'il  paruftrecon- 
noiftre  ceux  qu'ils  ont  afïèmble?  en  leurparriculicr  ,  6c  qu'ils- 
oncinrirulé  Conciles  généraux.  Mais  ce  Prédicateur  des  véri- 
tables fènrimens  de  l'Esilife  d'Orient,  &  ennemi  de  tous  les  He- 
rerrqoes,  n'y  voulut  c  onfcnrir  en  aucune  manière,  eftimant 
qu'il  valoir  mieux  ne  donner  pas  la  moindre  occafTonde  ca- 
lomniera ceux  qui  font  prefts  à  en  i-nventer  ,  que  de  faire  im- 
primer fon  propre  ouvrage.  Cari!  ne  parloit  ni  n'écrivoit  pas 
comme  plufîeursfont^arfenviedeparoiftre  ,  mais  par  le  foin 
qu'il  avoir  de  la  veriré.  Mais  quoique  le  Livre  fojt  demeuré 
jufqu'à  prefent  fans  eftre  imprimé,  il  s'en  trouve  néanmoins 
plufieurs  exemplaires  particuliers. 


atv€c  ÎEgî'tfe  domaine  /urrEuchariJfîe.  é^y 

Voilà  ce  que  nous  avons  à  dire  touchant  les  articles,  ioit  Ch.  X. 
qu'ils  foient  de  Cyrille  ,  {bit  qu'ils  n'en  foicntpas ,  qu'ils  ionc 
faux,  &: qu'ils  ont  efté  non  feulement  rejetrez  lynodiqucment 
comme  difFerens  de  nôtre  véritable  fêntimenc  ,  mais  auffi  que 
plufieurs  des  nôtres,  comme  nous  avons  déjà  dit ,  ayant  écrit 
particulièrement  pour  les  réfuter  ,  ont  découvert  à  tout  le 
monde  les  véritables  fencimens  de  i'Eglife  Orientale  fur  les  Sa- 
cremens. 

Touchant  le  fécond  article,que  Lazare  fçache  là-defllis,  que 
fi  les  Caiviniftes  &:  Luthériens  difputent  avec  les  Latins  lur  les 
Sacreaiens,ils  ont  tort  de  demander  nôtre  témoignage.  Qii'ils 
foient  auparavant  d'accord  avec  nous  fur  tous  les  dogmes  de 
la  foy  ,  &  qu'ils  fe  réunilTent ,  pour  lors  ils  trouveront  en 
nous  non  feulement  des  témoins,  mais  des  perfonnes  de  nie. 
me  opinion  ,  &;  qui  combattent  la  même  caufe.  Mais  il  efl: 
manifeftc  que  les  Calviniftes  &  les  Luthériens  ne  lont  point 
d'accord  avec  nous  en  plufieurs  chofes  ,  non  plus  qu'en  la  ma- 
tière des  Sacremens,  par  ce  qu'ils  difent  eux  mêmes.  Car  ils 
reconnoilîènt  quelques  Sacremens  ,  mais  non  pas  comme 
nous,  &  ne  mettent  pas  même  les  autres  au  nombre  des  Sa- 
cremens. Les  Latins  afliirentque  nous  (omines  d'accord  avec 
eux,  quoique  nous  ne  trouvions  pas  en  toutes  chofes  cette 
conformité  qu'ils  prétendent.  Car  dans  les  uns  ils  différent 
en  la  matière  &  la  manière  dont  le  Preftre  demande  l'avene- 
mcnt  delagraceà  haute  voix,  &  en  d'autres  feulement  dans 
cette  forme  d'invoquer  la  grâce  fanc^tifïante. 

Si  donc  les  Latins  &  les  Luthériens  fe  combattent  les  uns  les 
autres,  qu'ils  combattentjcarl'herefle  des  Luthériens  &  Cal  vi- 
nifies cfi  forrie  de  i'Eglife  Latine  ,  &  il  n'efl  pas  temps  de  dn  e 
à  quelle  occafîon.  Mais  nous  dirons  feulement  que  les  Latins 
ont  plus  de  raifon  que  nous  d'entreprendre  cette  guerre  con- 
tr'eux  ,  6c  de  rappeller  ceux  qui  ont  efté  autrefois  de  1.  ur 
Egliie,  j'entends  de  l'Egiife  de  Rome.  Qu'ils  nous  laifïèntdonc 
conlerveren  repos  les  bons  fentimens  que  nous  avons,  car  à- 
chaqiie  jour  fufHt  fon  mal. 

Le  premier  article  eft  celuy  de  tous  qui  nous  a  femblé  le 
moins  fiipportable  i  c'eft  pourquoy  nous  l'avons  laiffe  le  der-  " 
nier,depeur  de  manquer  de  force  dans  la  fuite,  cflant  nctablé 
t!e  fa  pcfanteur.  Car  qui  eft  ce  Moine  Lazare  pour  demander 
û  impudemment  à  voftre  béatitude  ,  vous  qui  eiks  Pape  &c  . 


6^î  Li  V .  VI 1 1.  Ftewv'és  nuthen.  de  f union  des  fg.  d'Or. 
Patriarche  d'Alexandrie,  &  comme  j'ay  montre,  avec  trom- 
perie &  dillimulation  une  conFeffion  de  Foy  ,  ce  que  le  Pape  de 

iiparoiftpar  R-^^'^nc  n'a  abtenu  quelorlqu'ii  l'a  demandé  dans  une  prellante 

ià<]ue!cs        necelîiré.  :  . 

Grecs  n'ni-  ^^^  ^^^^  j^  Dieu  ,  divine  &  facrée  tefle  ,  ne  vous  laifTèz  pas^ 

m-tit  pas  a  ,.  ....  V       I   1    I  1  J 

donner  des  pcriuader  par  celui-ci  m  par  aucun  autre  lemblable,  quand 
attcftatiQns.  jij  VOUS  dcmandcroient  par  écric  l'Oraifon  Dominicale.  Car 
ils  ne  viennent  pas  avec  fincerité  ,  mais  avec  diffimulation  , 
afin  que  s'attachant  à  quelque  petit  mot  tel  quecefoit,  car  ils 
font  grands  obfervateurs  des  mots,  ils  médifent  de  ce  qui.  nous" 
regard  e. 

Qiie  fî  véritablement  ils  défirent  apprendre  dans  quels  fen- 
timens  nôtre  Eglife  fainte  &  orthodoxe  efl:  fur  les  iept  iaints 
SacremenSj  confeillez-leur  de  lire  nos  anciens  Docteurs  qui 
ont  traité  des  Sacremens  dans  leurs  ouvrages,  dont  le  pre- 
mier efl:  Denis  TAreopagite  ,  dont  les  ouvrages  paiTent  pour 
eflircs  femblables  aux  écrits  Apoftoliques  ,  &  avec  lui  Ton  in- 
terprète le  grand  Maxime,  &  après  lui  Sinieon  deTheifaloni- 
que.  Je  laifte  les  autres  faints  Pères  qui  ont  écrit  quelque  chofe 
touchant  les  Sacremens  en  differens  endroits  de  leurs  ouvra- 
ges, que  l'EgJifed'Orient  fijivant  tous,  &  ayant  toùjiTursla  vue 
arreftée  fur  eux ,  comme  fur  une  règle  fort  droite  ,  elle  ne  s'efl: 
jamais  écartée  du  droit  chemin. 
Loiianaede  A  l'cxTemple  de  ceux  là  cet  homme  admirable  Gabriel  de 
hî"t  '^'^^'  Pi^'i'^delphe  a  compofé  un  petit  Traité  des  Sacremens  en  lan- 
gue vulgaire  ,  afin  qu'il  fuft  intelligibleaux  perfonnesles  plus, 
iimples.  Tous  ceux-là  ne  font  ils  pas  des  témoins  irréprocha- 
bles,, &  des  Prédicateurs  qui  font  retentir  par  tout  l'opinioiv 
que  nous  avons  fur  les  Sacremens? 

Que  Cl  Lazare  vous  prefle  encore  ,  difant  ,cela  efl:  vray  ,,  6c 
je  ne  puis  pas  y  contredire  ;  mais  ce  petit  ouvrage  oe  Cyrille  j, 
'  comme  nous  avons  dit  ci-delTus,  a  fait  concevoir  un  grand 

foupçon  à  tous  les  Occidentaux,  que  vous  autres  Orientaux  ne 
vous  fufliez  laifléz  aller  à  l'opinion  de  Cyrille,  car  il  afTure 
que  cette  confeflion  eft  l'opinion  de  l'Eglife  Orientale  ;  fi  dis- 
je  ,  cet  importun  de  Lazare  avance  ces»cho(es,  commandez- 
lai  de  lire  exadement  les  Livres  dont  nousavons  parlé,  leTo- 
Ce  Tome  fait  me  fait  en  Moldavie  ,   le  Livre  de  Grégoire  Proto-Syncelle 
^ftks-node'  ^  '^  refutatiou  de  la  confeffion  de  Cyrille  faite  ,  comme  nous 
«k  Piitkauus.  avons  ditj  par  MeleceSyrigusi  Car  ils  fervent  d'apologie  fuffi^ 

fante 


llïl- 


avec  TEglife  Romutne  fiir  C Eucharifiie .  6^9 

Tante  &  très -accomplie  à  toute  l'Eglife  d'Orient  contre  ceux  Ch.  X. 
•tjui  nous  veulent  calomnier.  courre  cyrit 

Que  Cl  voftre  modeftie  luy  en  veut  donner  une  entière  cer- jec1u'&  ilr 
trtude,  faites-iuy  voir  le  livre  imprimé  qui  eft  intitulé  Confcf  primé. 
fion  Orthodoxe  de-  l'Eglife  Catholique  &  Apofioliquc  d'Orient. 
Car  il  déclare  toute  la  foy  Orthodoxe  de  l'Eglife  d'Orient,  &  ^"i^xe" 
noftre  fentiment  fur  les  faints  Sacremens  y  eft  expliqué  nette, 
ment.  Chacun  peut  apprendre  par  le  commencement  de  cette 
lettre  à  quelle  occafion  ce  livre  a  efté  fait  &  autorifé  par  toute 
l'Eglife  d'Orient,  &  s'il  eft  orthodoxe  en  remercier  particu- 
lièrement le  tres-fage  &  très- pieux  &  orthodoxe  Seigneur  Pa- 
najoti  premier  Interprète  des  Empereurs  d'Orient  &:  d'Occi- 
<lent.  Car  ce  livre  ayant  efté  imprimé  par  fes  foins  &  diligen- 
ces, a  efté  diftribué  gratuitement  à  tous  ceux  qui  en  ont  vou- 
lu, par  l'ordre  de  ax.  homme  pieux.  Comme  je  ne  fçavoispas 
fî  vous  en  aviez  chez  vous,  je  vous  en  envoyé  deux  exemplai- 
resj  dont  l'un  eft  relié  &  l'autre  ne  l'eftpas,  afin  qu'il  en  de- 
meure un  chez  vous,  &  que  vous  donniez  l'autre  au  bon  Laza- 
re, &  qu'il  ait  par  ce  moyen  une  confeflîon  de  foy  de  nous 
autres  Orientaux. 

Pardonnez-moy  divineôc  fâcrée  tefte,  fi  j'ay  parlé  Ç\  long- 
temps,car  on  ne  devroit  pas  faire  autrement  que  de  convain- 
cre fort  au  long  la  tromperie  &  finefle  de  cet  homme,  je  vous 
prie  donc  de  ne  me  pas  juger  indigne  d'une  réponfe  à  ce  que 
je  vous  ay  mandé  au  mois  de  Mars  1671. 

Nectarius  cy-devant  Patriarche  d;;  Jerufalem. 

EXTRAIT    D'VNE    LETTRE    DE     MONS  lEVR 
J'Ambaffadeur  de  Cor.ftantinople  du   \6 .  Mars  i6/i. 

onten^nt  la  Confirmation  de  la  Lettre  cy-deffus  imprimée  ,  ^- 
un  témoignage  authentique  du  PutrÎArchc  d'Alexandrie  fur  Li  foy 
des  Mofcovites. 

I^AïbiusParri.irche  d'Alexandrie  auquel  eftoitadrefte  i'ori- 
.  ginal  de  la  Lettre  de  Nectarius,  a  reconnu  la  copie  que  je 
vous  ay  envo^'ée,pour  luy  eftre  entièrement  conforme,  à  l'ex- 
ception de  quelques  fautes  d'écriture,  &  il  a  promis  de  luy- 
même,  lorfqu'il  feroit  àAlexandriCj  d'en  donner  l'original  à 

00  00 


(>6o  Liv.  VHl.  Preuves  Authen.  de  f  union  des  Eg.  dOr' 
M.  le  Conliil  de  France,  pour  me  le  faire  tenir.  Il  s'eft  au iïi  en- 
gagé fur  ma  prière  de  feuilleter  Tes  mémoires,  lorfqu'il  (croit 
chez  luy  pour  en  tirer  une  relation  exacte  de  tout  ce  qui  s'eft 
paflé  à  ion  voyage  de  Mofcovie^où  il  aififta  à  la  condamna- 
tion du  Patriarvihe  de  cet  Eftat.  On  luy  a  demandé  cepen- 
dant quelle  eftoit  la  croyance  des  MofcovitesTur  le  mvflrere  de 
l'Euchariftie.  A  quoy  il  a  répondu  qae  leur  Eglife  faifoit  par- 
tie de  la  Grecque,  qu'ils  croyoient  la  prefence  réelle  &  la 
tranllubftantiation,  éc  que  le  S.  Sacrement  porté  pour  viati- 
queaux  malades,  eftant  rencontré  dans  les  rues,  l'on  mettoic 
la  tefte  contre  terre  en  figne  d'adoration  de  latrie,  &:il  nous 
a  remis  pour  une  inftruclion  plus  circenftantiée  de  ce  point  6c 
de  plufieurs  autres ,  au  récit  qu'il  m'en  envoyera. 


CHAPITRE     XL 

"Union  de  l'Eglife  Grccqve  avec  l'Eglife  Romaine ,  prouvée  par 
la  dccijton  de  quelques  points^  envoyée  de  ConJI antinomie  en 
Mofcovie. 

L'AcTie  que  nous  produirons  dans  ce  chapitre  eft  encore 
d'un  autre  genre  que  les  autres^  car  il  n'a  pas  eflé  fait  en 
veuë  de  noftre  conteftarion,  ni  dans  la  penfée  qu'il  puft  eftre 
vcu  par  les  Catholiques  Romains.  C'efi  une  decifion  de  plir 
fieurs  difficultez  Theologiquesquele  Patriarche  de  Conftan- 
tin  pie  a  envoyée  à  l'Eglife  des  Rudes,  comme  on  l'apprendra 
de  l'Extrait  d'une  Lettre  de  Monfieur  l'Ambafladeur  que  nous 
mettrons  icy. 

EXTRyîIT     D'VNE      LETTRE     DE     MON  SIEV  R 
l' Amhaffudcur   de  Conjt antinomie  ce    12.  Otiobre    j6 /o^ 

JE  ne  fçay  fî  vous  avez  efté  inftruit  de  l'éclairciflèment  que 
i'ay  eu  avec  un  Officier  de  l'Eglife  Patriarchale  très  habile 
homme  qui  me  paroift  bon  Théologien,  qui  fçait  zrfi^  bien  les 
langues  Grecque,  Latine,  Italienne  &  Turque,  &  qui  eft  fort 
éclairé  dans  les  fcncimens  de  l'Eglife  Orientale, dans  la  con- 
noiflànce  du  gouvernement  Turc ,  &  encore  plus  dans 
la  médecine  qui  eft  fa  profelîîon.  lia  de  la  vivacité  &  du  fond 


avec  VEgîifè  Romaine  fur  l'Euchtriflie.  66i 

pour  s'expliqijeren  beaucoup  de  fciences  ;  il  fait  paroiftre  fes  Ch.  XI. 
ferrtmensavec  une  très  grande  facilicé  &  neccecëd'expreirion, 
&: ce cju'il  en  dit  efl:  toujours  tres.folide^  (1  J'on  en  excepte 
le  trop  grand  attachement  à  quelques  uns  de  fes  fentiinens, 
qui  divifent  l'Eglife  Grecque  d'avec  nous.  C'efl:  ce  qui  luy  a 
attiré  Ja  mauvaife  volonté  de  la  plufpart  des  Latins.  I!  ?.  aullî 
des  ennemis  parmi  les  Grecs,  &:  (î  les  premiers  l'nccufenc  d'ê- 
tre un  Shifmatique  zélé,  les  autres  ne  font  pas  difficulté  de  l'ac- 
cufer  de  Calvinifme. 

J'en  croyois  quelque  chofe  fur  l'imprefTion  que  l'on  m'en  avoit 
donnée.  J'ay  voulu  depuis  m'en  éc  aircir  avec  luyJ  &  prenant 
le  biais  de  luy  demander  Ton  fentunent  iur  l'Euchanllie,  j'ay 
vedqu'ily  répand(tit  en  Catholique  Romain,  à  l'exception  de 
la  qualité  du  pain  levé  &  de  l'oraifon.  Il  m'a  répondu  de  mê- 
me fur  tous  les  autres  points  principaux  propres  aux  Calviniftesj 
&  après  avoir  feu  de  moy  fincerement  &  de  bonne  foy  que 
l'on  me  l'avoit  dépeint  pour  un  autre  qu'il  ne  paroilloit  alors, 
m'ayant  eilé  indiqué  pour  eftre  un  fêdateur  de  Calvin ,  il  s'en 
défendit  par  une  proteftation  fort  exprelF^,  que  c'eftoir  une 
calomnie  dont  il  eftoit  redevable  à  fes  ennemis ,  bi.  il  en  ac- 
cufa  le  Dodeur  Cigala,  &  Ton  frère  le  médecin. 

Il  m'afleura  qu'il  n'y  avoit  eu  qu'un  nommé  Coridale  qîi'on 
ait  foupçonné  légitimement  de  Calvinifme, &  me  pria  trcsin- 
ftamment  d'effacer  l'opinion  qu'on  avoir  voulu  m'inlinucr, 
me  proteftant  qu'on  ne  luy  pouvoir  pas  foire  ime  plas  grande 
injure.  Il  me  promit  aulfi  pour  fon  entière  juftification  de  me 
donner  la  copie  d'un  écrit  fynodal,  quil  avoit  drcifépar  or- 
dre de  Methodius,  &  que  ce  Patriarche  envoya  en  Riifiie  for- 
tifié de  fi  fignature,  &:  de  celle  de  Neclnr&  de  Dozirhce  fon 
neveu  5c  fucceifeur  au  Patriarchat  de  Jerufalem.  Il  con- 
tient des  réponfes  iur  plufieurs  points ,  entre  lefquels  celuv  de 
l'Euchariftie  eft  bien  expliqué,  ainli  que  je  l'ay  veu  parla  ver- 
fion  Latine  qu'il  m'en  a  donnée  ,  &que  je  vous  envove  au.<Ti 
bien  que  l'original  grec.  Il  ne  croit  pas  qu'il  y  en  ait  rien  dans 
le  livre  de  la  grande  Eglife,  parce  qu'en  ce  temps- là  on  ne 
voulcic  pas  qu'il  y  demeurât  aucun?  preuve  d'un  commerce 
avec  les  Rudes.  Enfin  c'eft  une  pièce  de  confequence  paCiée 
entre  des  Grecs  du  même  rire  ;  car  ceux  de  Rufïie  qui  fon  di- 
vifez  de  l'Eglife  Romaine  vmilant  eftre  éclaircis  de  plufieurs 
articles  quiformoient  des  difputes  entre  eux,  fc  ceux  qui  font 

O  O  oo  ij 


66l  Liv.  VIII.  Preuves  authen.  de  l'union  des  Eg.  d'Or, 
unis  au  rire  latin  que  l'on  nomme  même  en  Grec  ,  uniani^,  ils 
eurent  recours  à    leur  Patriarche  de  Conftantinop,le  qui  leur 
répondit  en  la  manière  que  vous  verrez.. 

EXTRAIT  DE  QUELQUES  DECISIONS    DE 

l'Eglise  de  Conftancinople,  envoyëee  aux  Rufles. 

QVARTJ   QJJ^SITI    S 0 LUT  10. 

Varto  qiu-critur  :  tttrum  accent  unam  ^  ejtifdcm  honoris  ado- 
^  ratione?n  exhibera  Chrifio  ,  ut  Deo  Qj-ut  homini.  Et  hic  etiam 
cur.Oji  fcrtituiores  (jr  niiilitioji  deceptorcs  andcnter  Patrihus  adver- 
fantes ,.  dividunt  ac  difcerpunt  in  Chrijîo  nalmras ,  ^fi  conjuncia 
Rnt  inconfus è ,  indicibilibui  (^  Dco  foli  notis  vinculis  unionis  ,  d^ 
fubjificntes  in  unitate  fcrfona,  ac  difcindentes  altcrani  ab  altéra , 
altcrcantur  de  adaratione  ,  qualifnam,  alteri  fejunciitn  fumpt/c  de- 
beatur'y  (^  divine  quidcm  latriam.  offerunt ,  humun^  vero  hyper- 
duliam.  Sed  nos  talcm  novationsm  in  [ufpeHo  habentes ,  ac  teriti, 
iina  adoratione  Chrifium  colirnus.  Per  unionem  cnim  in  perfona  Fi- 
lij  divin^c  (^  hnmana  natur^e  (^  qn.-e  maxime  diffîta:  funt^  pro- 
prie ta  te  s  non  minus  quamnominainv.icemcommunicantur,ut  Theo- 
Loy  dicunt,  ratione  mutuationis.  Undc  homo  Deus  dicitur  ^  ^  Deus 
kûmo  ,  nedum  di camus   difcerni  rnodum  adorationis. 

QJJJNTI    QJJ  JÎ.SIT I    SOLVTIO. 

Quinto  qa^ritîir  :  utrum  anim^  SanHonim  po(^  emigrationem 
ex  bac  vita ,  vidcant  Deum  ad  faciem  ,  ^  ejus  beatitate  fruan- 
iîtr ,  feccatorum  veto  fiatim  abeant  in  iyiem  sternum  ?  An  omnes 
expecicnt  commimem  re (iirreHionem  ^  ut  ill^e  quidem  una  cum  cor- 
poribus  coronentitr  ,  hiC  vero  damnentur  ?  Patrum  itaque  traditio. 
jii  parentes^  confitemur^  non  abfque  corporibus  animas  accipere 
■promiffîonem  ,  ut  divtna  tc/hitur  do&rina^  ne  fine  corpore  prccmium 
fumant ,  quod  una  cum  corpore  meruertint^  fed  tamen  gaudent  îifque 
ad  refurrefhonem  corporis  ,  in  locis  lucidis ,  plenis  gaudio  S"  <-'on. 
folatione  ^  expefiantes  illud  dichm,  Venite  benedidi  Patris  mei 
&:c.  Si  vero  no[}ra  Ecclefia  his  canit  ut  fim  fruentibus  in  rcino 
c.clotum ,  hoc  ex  more  ftcit  ?o'éta  futuris  utens  ut prafentibus: 
fimilïter  anima  pcccatorum  haucPquaquam  fiatim  rapitmtut  in 
krriein  atcrnum.  Quid  enim  in  illo patercntur  ciim  immateriales  finfi 


a,^ec  ÏEgtife  Komaine  fur  l'Eucharifiis.  66 j 

fed  in  timoré  ^  dolore  in  tnfemo  crucianttcr ,  terrihilia  verùa  ti~ 
mentes  :  Abitei  me  maledidi  &c. 

OCTAVI    QV^SITI    SOZVTIO. 

Perfîcitttr  Euchar'ifti^  myfleritim  fer  aBionem  Spiritus  fancii 
invocati  k  Sacerdoie  orante  t^dicente  :  Dimitts.  Spintum  luum 
fuper  nos  g?-  fiiper propojîta  iftadona  ^(^fac  fanem  quideniifium 
honorabik  corpus  Chrifti  tui^  quod  vero  in  hoe  calice  eft  honora- 
bilem  fanqtiinem  Chrifti  tui  ^  mutans  Spiîitu  fanUo  Uto.  Per  lixc 
enim  verba  mucatur  panis  in  perfeclum  verè  corpus  Chrifti , 
tsL  vinum  inperfeâ;Lim  verè  fanguinem  Chrifti,  ut  nuda  relin- 
quatur  (pecies  panis,  6c  nudafpecies  vini  fine  ip(oruni  fubftan- 
tia  5  Chrifto  tanquam  inflitutore  dicente :  Hoc  eft  corpus-meum, 
d^,  Hic  eft  fanguis  meus.  Sacerdos  vero  ut  adminiflrator  per 
rnodum  fupplicis  invocet  Sancium  Spiritum  ,  ad  tramformationcm- 
propoJîtoruM  donorum  ,  fideni  Domini  verbis  qUiC  ad  vcrburn  ad 
bunc  finem  récitât. 

SOZVTJO     DECIMl. 

T^andem  qu-crcbatur:  ntrum  p^irticula  a,  Sacerdote  Deo  antè 
imrnaculatum  facnficinm  o  'yldta ,  mutcntur  in  corpus  Chrifti  /  Qui. 
dam  igitur  rccentiorum  prêter  Ecclcfta  confuciudinem  facnficant 
f  articulas^  qUiC  ad  honorem  fanciorum  ,  &  'inemoriam  fidclium  of- 
feruntur.  Nos  vero  acquiefcentes  traditioni  amatorum  Chrifti  Pa- 
trum  y  yteque  intcntionem  habemus  confccrandi  bas  particulas  tn 
Jacra  liturgia.^  neque  ck  hi'i  fidelibus  communicantibus  prabemus- 
fed  tantum  nt pancm  fanciificatum  honoramaSy  ô"  tanquam  parti- 
eulas  fanciificationcm  à  eorpore  chrifti  per  approximationern  mu- 
tuatas ,  (^  ordmum  c^clefiiumvicem  gèrent  es  colimus  ,  nequaquam. 
tamen  ut  corpus  Domini  adoramus. 


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6é4  Liv.  VII L  Vtewves  authen.  de  V union  des  Eg.  d'Or. 


CHAPITRE      XII.      . 

"Union  de  l'Eglife  Grecque  avec  l' Eglife  Romaine  fur  PEuchariJiie 
prouvée  par  la  réponfe  d'un  Grec   à   M.  Claude. 

TOut  ce  qu'il  femble  qu'on    puifîe  defirer  de  plus  fur  le 
fujec  de  ces  acceftacions  des  Grecs,  eft  qu'ils  eufîènc ré- 
pondu de  la  même  force  à  des  queftions,  qui  leur  auroienc        ,, 
efté  faites  pardes  Calvinin:es.  Et  peuteftre  que  nous  aurions        | 
bien  dequoy  facisfaire  le  monde  en  cette  matière  ^\  M.  Clau- 
<le  vouloic  bien  nous  faire  part  déroutes  les  nouvelles  quiiuy 
font  venues  d'Orient.  Mais  comme  on  ne  le  voit  pas  difpofé 
à  avoir  cette  complaifanc.e  pour  nous,  il  trouvera  bon  que  l'on 
tâche  à  y  fuppléer  en  inférant  icy    la  lettre   qui    luy  a   efté 
écrite  par  un  Grec  qu'il   avoir  confalté   par  luy  ou  par  {ç.s 
amis,  dont  on  a  eu  copie  par  un  canal  qui  ne  luy  peut  être 
{ufpecl.  Elle  fait  voir   au  moins  qu'on  ne  luy  peut  pas  repro- 
cher avec  juftice  de  ne  s'eftre  pas  mis  en  peine  d'obtenir  des 
atteflrations  des  Grecs  ,  &  que  ce  n'eft  pas  fa  faute  s'il  n'en  a 
point  à  produire.  Je  ne  penfe  pas  qu'il  foit  befoin  de  l'avertir 
qu'il  ayroit  tort  de  vouloir  tirer  avantage  de  ce  que  toutes  les 
citations  de  ce  Grec  ne  font  pas  exaAes ,  puifqu'il  fçait  bien 
qu'il   ne  s'agit  pas  icy  de  l'érudition  ou  de  i'exacT;irude  des 
Grecs ,  mais  de  leur  foy. 

JLIVSTRISSIMO  AC  TR^STANTISSÏMO  FIRO  DOMINO 
'joanni  Claudio  Reformata:  Parijienjis  Ecclefia  Pafiori.  Marcus 
T>onus  Crctenfs  falutem  S"  dileciionis  affecium. 

U  M  ad  me  delati  fuiiïent  articuli  quidam  defcriptî 
ut  fertur  exlatere  dominationis  tua:  Ilinftriflimx,  in  qui- 
bus  quarritur  ,  quid  Sancla  Mater  noftra  Oriencalis  Ecclefia 
fentiat  de  Tranfubftantiatione  panis  &  vini  in  Sacramento 
Euchariftix  ,  opetc-e  pretium  duxi ,  ejus  fêntentiam  pacefacere 
&  quibus  niticur  fundamencis  defcribere,  ut  qui  eadem  profi- 
tenrur  credere  qux  ipfa  Sarnfla  Ecclefîaj  ad  illius  unitatem 
âdvolent  &  concordiam. 

Nocum    fit   icaque  tibi ,  prXilantiffime  vir ,  quod  totus 


atec  l'Eglife  Romaine  fur  t  Eucluriflie.  665 
Oriens  conrentiencem  habens  &Occidentem  credidir  femper  Ch  XII. 
&  crédit  à  primis  EccleficX  incunabulis  ,/-;;«f?w  (y-vimimvnè 
^  Phyfïcè  tranfuhflantiari  in  corpus  ^  fanguincni^  Chrijii  depojiia- 
frima  fubfiantia  ,  &  hanc  tranfTiibfl:  antiacionem  tenet  articulos 
îidei  necefTarios,  ade6  ut  ncmini  liceat  eam  igoorare,  auc  m 
dubium  revocare,  aut  penitus  rejicere.  Hanc  antem  fldcm  ha- 
huit  à  Chnfto,  &  poil  fuccedionem  ab  Apoftolis  &  à  Patribus 
primitiva:  Ecclefix,  qui  columna:  fu  erunt&:  fundamencum  Or- 
thodoxix  gra:canic£e.  Et  quod  hoc  faceatur  paret  ex  fac1:o. 
Qiiemcumque   enim  dehoc  Sacramento  interrogaveris  ,   fta-  ' 

tim  tibi  affirmabit  hanc  ^ir^Jtccjiv ,  in  que  edoceri  potes  à  car- 
dinibus  &c  Sacerdotibus  fanclx  noftrcX  Ecclefix  ,  qui  neminem 
permittunt  participcm  fieri  fanctiiTmii  corporis  &  prctiofifliroi 
îànguinis,  nifi  prius  hanc   edat    confeflîonem    qu  a:    prolata 
primo  pro  fimplicibus  à  Sacerdoce,  profereur  quoqj.ie  de  ver- 
bo  ad  verbumab  iisqufad  myfticam  cœnam  accédant,  utunuf- 
quifque  nofcat  non  folum  ,  fed   faceatur  apertè    myfterium. 
'Tttfi'vcû  v-iiçii  ^  CjUî^oya  (verba  iunt   Chryfoftomi)  tn  av  (1  dhr 
^âi     ideft,  tu  qui  es  in  calice,  &:  obfervet  tua  quam  maxima 
virtus,  illud  (tlK^-')m  )  quod  non  iam  rYpum,  fed  vericatem  fî- 
gnificat  0   mis  tS     ^l'A    xeù  ^mroi,  %  i\Jcà*  tU  iw  7.Q<jy.ty  (t.\x.a.f- 
TtiK^S    aaaa.1  àf  nrcTùTOS  tlfj.1  iyco  e'fi  -Wi^i'ju)  ôri  rouro  Wvto  'éÇî  rô  /°  V"J"^^  ^ 
à-^çAvrev    ca'j.A  ^    T8ro    id  eft   quod  elt   m    calice  a'/r»    641  lité  que  tous 
To    Ti'fjLtot   a.îu   aou  &  cHii  crédit  ipfum  corpus  elle,  ^ipTum  !«  Grecs  font 
ianguinem,noi> crédit  cerce  parrem  elle  &  vinum.  Lx   qurbus  ^^^^^^^ 
clarè  confiât  fandam  noftram  Ecclefiam  hanc  rranlTubftantia- 
tionem  firmicer  creder;.  Si  enim  qui  eft  in  calice,  eft    vere  & 
non  typice  Filius  Dei    Se  quod  in  eodem,  ipfum  corpus  &  fan- 
guis,  profeiflo  non  eft  pan>s  nec  vinuna,.quia  hoc  qÛqz  abfurdum 
omnium  maximum. 

Quod  vero  fie  femper  crediderit  probatur  inexplicabili  con- 
jectura, qiiia  h.TC  fides  non  fuit  denovo  introduc'^a  in  Ecclefia  Argument  de 
J  >ei.  Omnes  enim  novitates ,  qua:    fandam  turbarunt  Eccle-  i^  pcrptiuité 
fiam,  habueruncproprios  aurores  ,utnosdocent  hoftoria\  At/"^"^!^''^  ^""^ 
hujus  fidei  nuUus  è  Neotericisfuit  autor.  Ergo  hanc  novit  ab 
antiquitare.  Qiiod  û  q^uem  habetis  hujus  vos  autorem  ,  often- 
dite&  in  priftinam  Orthodoxiam  redibimus.  Nec  fas  eft  calum- 
niari  qiiemquam  Parriarcharum  noftrorum,  vel  P^omanornm 
Poutificum  ,  cùnî-  calis  calumnia:  nulla  confturepofficpit  ba- 


66  6    Liv,  VII J.  Vreti'vcs  cLuîhcnt,  de  V union  des  Eçr.d'O 
tio.  Excanc  cnim  intégra  monumenra  anciquita  ris  j  excanc  hiflo- 
riarum   annales  ,  in   quibustalequid  neclegimusunquam  nec 
vidimus. 

Nec  nobis  obijcias  Conci  lium   Tridenrium  ,  in  quo  nec  in- 

terfuimus,  quod  criminaminiî,  juc    definitrit  haine  fivrhfo^tian 

Le  Concile  Quod  cnim  crcdimus  non  habemus  ab  aliis,  fed  è  concrai  cùm 

jien  dTfinide  ^^^  Oriente  ortum  habuerit  fidesSi  veriras,  6c  propagata  fueric 

nouveau  fur    ab  Oriente  per  univerfumterrarum  orbem.  Nec  tamen  mihi 

ce  poiac,        fuadeo  defînitum  fuifTe  ,uc  novum  dogma  inillo  Concilio ,  fed. 

renovatum  potius  ut  vêtus  quemadmodum  multaalia  i  cujus&: 

evidens  conftat  probatio  j  Romana  enim  Ecclefia  nunquam  à 

noftra  difcrepavit  inhoc  arriculo.  Erg©  fie  ipfa  quoqueabini- 

jamais  les  cio  crcdidic.  Cum  itaque  fie  fe  res  habeat  ut  talisfidei  nuUus 

deuK   Eghies  Neotcricorum  fit  autor,  aurvosut  neoterifinum  antiquitacem 

n  ont  eu  dif-     j  ......  ^ 

ferend  fur  la  damoatis ,  CU]US  vix  cxtat  iHitium. 

trjnifubftan-     Ut  autem  innotcfcat  tibi  vcritatis  hujus  origo,    fcias    quod 
dation.  ^^^  g^  nova  ifta  contcntio  ,  fed  ortum  habuit  ipfius   Chriûi 

cemporibus  qui  de  illa  quid  efîèt  conftituit.  Cum  enim   Sal- 
vator  nofter  dixifi^et  Judxis  ;  ^afiis  quem  ego  dabo  uobis^  caro 
7nea  efl  ,  dictum  illi  interpretati  pro  vera  &  phyfica  carne  (  in 
quo  non  aberrarunt  )  6c  impoffibile  hoc  exiftimantes,  ut  vos 
modo  injuriam  non  parvam  inferentes  divinse  Omnipotentiar, 
quomodo  ,  dixerunt  inter  fe  ,  foteft  ific  dare    nobis  fuam  carnem 
ai  manducandum  ?  Chriftus  autem  eor«m  increpans  increduli- 
tatem  ,  6c  oftendens  divinitatisfiixomnipotentiam  :  Nifi man- 
dacaveritis    (  fubdidit  )  carnem  finj  hominis  &  bïberitis e'pis  fan- 
guincm  ,non  habebitis  vitatn  in  vobis.   Ac  fi  diceret  :    Vos  non 
creditis  me  pofiTe  dire  vobis  ad  manducandvm  veram  meamôc 
phyficam  carnem.  Ego  autem  dico   vobis  ,  non  folum  pofii- 
biie  hoc  apud  me  ,  fed  6c  necefilirium  vobisad  fakitem.  Ideo 
prjjcipiout  eam  carnem  manducetis,  quam  vos  afi!eritis  impof. 
fibile.Ne  quis  putet  nunc  Chriftumprarcepifi'e  Judaris,  ut  car. 
nem  fuam  comederent  myfticè.  Prxcepitenim  utillam  man» 
dacarent ,  quam  ipfi  afi!erebant  non  polfe  eum  dare  ad  mandu- 
candum.Et  ciim  de  vera'Sc  phyfica  ha:fitarent,eam  ipfe  prjece. 
pit  utmanducarent.  AHcer  pra;ceptum  Chrifti  noncon(onarec 
eorumhiefitationi.  Jufllt  itaque  Chnftus,  ideos  facere  ,  quod 
opinabantur  inapofllbile  ,  quod  6c  necefiarium  ait.  Cùm  enim 
•caro  Chrifli fit  vivificatrix  5'(6c  vita.  Hinc  fit,  ut  qui  veram 
carnem  non  comedit ,  non   habeat  vitara. 

Un  de 


avec  ÎEglife  %omaine  fur  ÎEuchuriflie.        667 

Unde  &  os  aureum  fanclx  noftra:  Ecclefia:,  in  hujustexcus  C  h.  XII. 
explicacione  hom.  47.  cum  id  fieri  pofle  negarenc  ,  non  folum 
non  impoffibile  ,  fed  &  neceflarium  aflèric.  Ac  quid  oltendit 
non  impoffibile  ?  Id  fane  dixeric  unufquifque  ,  quod  ipli  aflè- 
rebanc  impoffibile  i  nempe  dare  illis  iuam  veram  carncm  ad 
iTianducandum,non  myfticam  ,  de  illa  enim  non  lixlitabanc 
Judcxi.  Hanc  ergo  eos  manducare  cumexiftimarenc  dégénère 
impoffibilium,  oftendic  ille  poflîbile. 

Ex  prardiclisitaque  ficargumenratur  fancla  noftraEccIefia. 
Iftam  carnem  prxcepic  Chriftus  ut  mandueaicnt  |udan,  de 
qua  ipfi  h^ûcabanc  ,fed  bxfirabant  de  vera  &  phylica.  Ergo 
illam  pnTcepit  uE  manducarenc.  Item:  lllud  Chriftiis  dixic 
poffibile  quod  Jud;Ei  impoffibile  ,  fed  Phyficam  kuim  carnein 
dicebant  impoffibile  eos  manducare.  Ergo  lilam  dixit  ChnÛLVs 
eos  manducare  poffibile. 

Chriftus  ipfe  in  fua  cœna  myflica  fanclis  fuis  prarcepir  Apo- 
flolis  ,dicens,  XcL^tri  (pcc/im^To'o^  ,non  o-mficL  /u.y,  fed  cum  ar. 
ticulo  demonftrativo  tô  oaux  p.ov ,  quod  ipfum  corpu.,  non  jsisi 
corporis  typum  fignificat.  Et  en  hujus^êTkff-Wêaj  author  j  non 
quis  Patriarcharum  noftrorum  ,  nec  alius  purus  hcmo,  fed 
Chriftusipfe  homo  Dominicus  &  Deificus  ,  qui  cum  fpopon- 
ditFec  nobifcum  elfe  ufque  ad  confummacionem  feculi ,  hoc 
quoqueinftituitSacramentuiTijUt  in  illoadimplererurpromiC 
fum&fponfîo. 

Hanc  edoélus  à  magiftro  doctrinam  Jacobus  Apoftolus^ 
crac  m  Licurgia  ,  ut  pams  converratur  in  GorpuSj&:  vinumm 
fanguinem.  F^c ^  fnquic  3  huncpanem  corpus  fanHumChrtJii  tui ^ 
^  hune  calicem  pretiofum  fanptinem  Chrifii  tm.  At  quomodo 
poceft  fieri  corpus,  nifi  craniTubllrâncietur  in  illud  ?  nifi  dicatis 
panem  ejufdemeiredivinitatis  cum  Verbo,  quod  caro  Fadum 
eft  fine  muratione  ,  quod  ipfa  damnaret  impiecas.  Ideoduo 
illa  nunquam  Occidentia  Ecclelut  noftra:  lumina  Balilius  H. 
Chryfeftomus  ,  ut  non  objiceres  duas  eiîe  in  Sacramenro  na. 
turas ,  panis  nempe  &:  corporis ,  planius  exponentes  mencem 
Apoftoli  ,  addiderunt  &  ip(i  in  fuis  Liturgiis  lUtTa^aAa,  tùù-« 
'KHjjua.TKjarjTaÀyiai.hç  fi  diceFent,nemo  h^rfuec  in  Sacramcnco 
Euchariftix  panem  eife  &  corpus  ^  ut  in  Verbi  Incarnatione 
divinicas  6c  humaniras.  Ibi  enim  fadlum  eil;  fine  ulla  miita- 
tione  :  hic  cum  mutatione  unius  natura'  in  aliam. 

Nec  dkas  }lUm  mutationem  eileftatus,  quia  mnratio  flatas 

PPpp 


668  Liv.VIII.  P'/ewoes  authent.  de  f  union  des  Eg.  d  Or. 
non  tfanfmucac  unum  in  alcerum.  Omnis  enim  mutacio  ,  ait 
Philofophusj.  Phyficorumcap.il.  t.  y.eft  ex  quodamin  quid- 
dam,  id  eft  in  quiddam  quod  non  fie  idem  cum  quodam^quod 
patec  ex  fubrequentibus.  Aliud  enim  pnus  fignificat ,  (ait  ibi 
idsai  Philofophas)  aliud  pofterius.  Ergo aliud  panis,aliad cor- 
pus ,  2c  fi  aliud  ôc  aliud,  quomodo  idem? 

At  quis  unquam  dixic  quod  mutât  ftatum  tranfmutari  in 
aliud?  Nam  &  qui  creatur  Imperator  mutât  quidcm  ftatum  , 
uc  &  qui  deponitur,4ion  propt.erea  dicitur  tranfmutari  in  aliud. 
Unde  fi  paiis  tranfmuraturin  corpus,  non  mutât  quidem  fta- 
tum  ,  fedipTam  fubftanciam. 

Et  fi  quarras  qua:  fie  ifta  tranfiiiutatio  ?  Dico  non  efîè  jam 
de  non  fubjeclo  in  rubjedum  ,  cum  non  fit  generatio  ,  (  divifio 
eO:  Pliilofophi  j  nec  defubjeéloin  nonfubjectum,  cum  non  fie 
corrupcio.  Reliquum  ergo  eft  ut  fit  de  fubjeclo  in fubjedum, 
ideft  de  uno  in  aliud  ^  &:  fie  dicimus  qnoddefinens  panis  elle 
pams,  tranfmutacur  in  corpus.  Talis  enim  eft  natura  hujus  mu- 
cationis,  id  eft  ut  definat  res  efi!e  quod  erat ,  &  incipiac  effè 
quod  non  erat ,  vel  quod  amictat  proprium  efie ,  &  in  alterius 
tranfear.  Aliter  pofterius  non  fignificarec  aliud  à  priori,  6c 
ficut  frigidum  tranfmutaturn  incalidum  Scnigrum  in  album  , 
definunc  elle  mgrum  6c  frigidum  j  fie  &  panis  cum  tranfmu- 
tatur  in  corpus. 

Nec  officit  quod  nec  Evangelifta: ,  nec  Apoftoîi ,  nec  Patres 

ufi  fuerint  verbo  jtc6TVo-/So9a/  ,  nec  \oct  [xtiSiolacitàS.  Ha:c  enim 

non  Fuerunt  in  ufu  apud  Autores  Grarcos ,  ut  nec  apud  Latinos 

plulîeurs  mots  tranfjubfiantiari  vel  tranjjubftantiatio .  Ideo  perxquipoUentes  vo- 

cquivaiens  au        ^  eumdem  fignificantes  efFeclum  explicaverunt  clarc  fuana 

mot  de  tram-  .  *        ■        •  ■  \  ir  i  -  i 

(ubitannation  fenccnciam   Antiquitascnim  ^ro  vcxbotranjliibjiantiatto  uceba- 

paniii  les         j.^, j-  ycrbis  facio ,  verto ,  tranfmuto  ,  c'tpi-i  yiyfoiJ.oj  ^ÊTctjSstMw  fxiltt- 

Lidrts*^  ^^      -TToiS,  &aliis  fimilibus,quod  probacurex  veteri&novoTefta- 

m^^nro  :  Legimus  enim  in  Genefi  cap.  19 .  refpicicns  uxorejus» 

poft  fe  ,  verla  eft  in  ftatuam  falis ,  iyhtro  ç'îÎam  aAoî.  Et  in  Exo- 

do   cap.   7.  Toile  virgam  tuam  ,  ôc  projice  cam  coram  Plm- 

raone  ,&vertaturincolubrum  ,  )(j:f V5*in  J^pstxûîv  Tulicque  Aaron 

coram  Pharaone  virgam,  qua:  verla  eft  in  colubrum,5(5y  èyêVn-o 

S^^xv-dv.  Et  in  Evangelio  Joanniscap.  3.  ut  autem  guftavic  Af- 

chirriclinusaqnam  vinuin  faclam  ,  û'J^a?  ol-'oi  yiyuyit^^ov.  Et  in  ' 

î  irurgia  prxdidorum  Sandorum  ,  iJiira.!ls.\à/  ra  Ttnv'/j.a.Ti'  aou 

1C4  àyîa.  Q£3e  omnia  fi  intègre  explicavens  ,  non  aliter  fane 


ajvec  ÏBglfe  "R.omAine  /lir  l'Eîich.mfiie.  66<) 
evolves  ^quam  unum  iubiedum  rranirubftannaciim  efTe  in  al-  Ch.  XII. 
rerMin.  Quod  lï  per  dcre<rtum  huius  neoterica;  vccis,  non  cre- 
dis  pani.s  rrannuollantiaiionem  in  corpus,  ergo  nec  fupradi{f^as 
de  quibus  nunquam  hxfiravirEcclefîa.  Er  lîcut  in  iis,  cùm  non 
atcendacur  vocula  ,  fed  clîecl:us&  operatio  ,  creditur  tranffnb- 
ilannario  ,  (k  &.  in  SacramentoEuchariiliTcactendendustfTec- 
tns,  &  prxdicanda  unius  fubftantix  in  aliam  tranTmiiratio  j 
eùm  per  rranfmucari.inem  intellexerir  femper  rranlTùblian- 
tiacionem  Ecclefia,  ut  paret  ex  ejas  fide&:  conreffione.  Unde 
qui  ju.êTxgo/^})!' admicrit ,  6c  f.uToL'm'm-iv  fecundùm  inierpreca- 
tionemEcclefi;r  j  à  q-iarremini  licec  deflecler?  ,  tranlTubdan- 
riacionem  negare  n.m  p oreric.  Darecur  enim  caufa  in  afta 
operandi  fine  etïèclu  ,  quod  implicat.Hibjs  iraquc  liane  tranl- 
fubftantiarionem  à  Clirifto,  à  primo  aucore.  llabes  eandem 
&  ab  Apoftolis  ,  ut  probauim  eft.  Videamus  jam  quid  de  hac 
erediderinc  eorum  (uccefTores  &  Patres  primirivxEcclefi^  jà; 
quibus  vos  non  puto  decidere. 

Qiii  Eplieiî  convenerunt  Pâtre?  vircure  quidem  fapientirer 
&  fanclimonia  prx^clarilîimi,  &,  hujus  dogmaris  interprètes 
prxftantilOiTii  jha:c  habent  de  hac  matenain  Epifboîaad  Ncf- 
torium,  ex  quibus  clare  patet  quxnam  fuerit  eoruinfentenna. 
J^eceffario  iytiir  O^  hoc  adjicimus.  A'nminciantcs  eni-in ,  Jîcut  fe- 
ciindùm  carnem  mortem  uniq^cniti  Filii  De:  ,  id  efi  Jefu  Chrifti  , 
^  rcfurrecTÏonem  ejtts  ,  (^  in  cœlis  afcenfîoncm  pnnter  cvnfiten~ 
tes  ,   incmeyUitni  celebramus  in  Ecdefiafticis  facri^ciis  verit.itcm  ,. 
êc  hic  non  dicunt  ipfi  typum  ,  ut  vos   crediris  ,  fed  verita- 
tem.  Er  quantum  diftar  tvpus  à  veritate  ,  tanrum  ab  eadenv 
veftra  opinio  J  quod  diclum  (it  pace  veftra  ,  Fratres  carilîimi. 
Sic  eciam  ad  'mv/ricar  benediciioncs  accedimus  ,  (y'  fanchficamur 
farticipcs  fancri  corporif  ,  ^  pretio(i  funy.inis   Chrtfii    omr.irzm 
nojirum  Redemptaris  effecii  ,   non   ut  csm-mnnem    carnem   fcrci-  ' 
fientes ,  quod  abfit ,  nec  Ut  viri  fanciïjîcati  ,  ^  nt  Verho  conjsnFii' 
fecundtmi  diqnitatis  itnit.rte/H-^  aut  ficut  divinam  pojjtdentis  h:ts. 
hitationem ,  fed  ut  vivificatriccm  ,  (y-  ipfius  Vcrbi  propriam  f.ic. 
tam.  Confiderentur  intègre  ,  qua:fo  ,  hit  voccs ,  nam  omnes  di- 
luant difficuitares.  Vita  enim  n.tturaliter  ut  Deusexiftens  ^  quia^ 
fropTiiC  curni  unit  us  efi  ^  .vivifiattricem  eam  ejfc  profeffus  efi  ,    ^ 
idcn  quamvis   dicat  nobis  :    Nif  manduca'veritis  carnem  Filii 
Mominis  ,  ^  biberitis  ejus  fangtanem  ,  no7i  tatnen  cam  ut  homi- 
nis  unius  ex  mhis  exifiinuire  dcbcmus  :    quotnodo    enim  juxta 

P-Ppp  ij        . 


éyo  Liv.  VIII.  Vreu^es  authem.  de  t union  des  Eg.  d'Or. 

juiim  naturani  vivificairix  efje  euro  honunis  foteji  l  fed  verè  pro~ 
priant  ejus  faïiam  ,  qui  propter  nos  films  hominis  ^  (^  efi  Q;-  vo^ 
catur.  Quid  liis  clarius  ?  quid  lucidias  ?  Manducamus ,  in- 
quiunr  toc  Patres  fandliffimi ,  veram  Chrifti  carnem  ;  &  fi  ve- 
ram,  ergo  non  myfticam  ,  neque  panem  :  vera  enim  caro  ve- 
ram fubftantiam  carnis  fignificac.  Et  quomodo  verum  panem 
comedens  poterie  veram  carnem  comedere,nifi  unum  cranf- 
fubftantietur  in  alterum  ' 

Chryfoftomus  homilia  45  in  Joannem.  Motjobjtgnificabat 
de  fervts  ,  qui  fuum  amorem  pra  fe  ferentes  itccbant ,  quts  darei 
nohis  ut  fuis  carnibus  impleremur  /  Quod  ^  Chnfius  fecit ,  ut  ma~ 
jori  nos  charitate  ajîringerct ,  ©^  ut  fuum  in  nos  oftenderet  dejide- 
rium  y  non  fe  tantum  videri  permittens  defiderantibus ,  fcd  ^  téiny. 
.^  mxnducari  ^  ^  dentés  carni  fu^  i^fip  -,  dl"  dejtderio  fuo  omne^ 
impleri.  InfiguHturne  dentés  myftic^  carni,  an  vera:  ôc  phy- 
fica:  ?  Et  in  eadem  in  diâo  Chrifti  :  Punis  quem  ego  dabo  vo- 
his  caro  me  a  ejl  :  cum  enim  ïn  petendo  cibo  infiarent ,  ^  patri~ 
bus  fuis  datum  memorarent  ,  ^  manna  tanquam  magnam  quid- 
dam  Uudarent^  omnia  illa  fiytram  ^  umbramfuifje^  rerum  ant^ 
"vcYitatem  prafentem  ofiendit.  Vides  quod  ifte  panis  non  eft  fi- 
gura corporis  Chrifti ,  fed  ejufdem  corporis  ventas.  In  homi- 
Jia  quoque  85.  in  Matth.  O  quomodo  dicunt  ,  vellem  formam 
^  fpeciem  ejus  ,  vcllcm  vcflimenta  ipfa  ,  vellem  calceam-enta  vi~ 
dere.  Ipfum  iymr  vides ,  ipfuyn  tandis  ,  ipfum  comedis.  Kefiimen- 
'ta  ejus  dcfdera^  vidcrc  ,  ipfe  vcro  feipfum  tibi  tradit  \  non  ut  vL- 
deas  fohïm ,  verùtn  ciiam  ut  tanyts  d^  in  te  habeas.  Ac  fi  dice- 
ret ,  qua:  magis  probant  corpus  Chrifti  ;  Veftimentane  ,  an 
ipfum  videre  ,  tangere  &;  comedere  ,  &  fi  tu  vides ,  tangis  êc 
comedis  ;  quid  veftimenta  qua:ris  ?  Vifus  autem  corporis ,  tac- 
rus  &:  comeftio  ,  nonne  corpus  ipfum  ceftantur,6:  veritatem 
ejus  aflirmant.? 

NyfTenus  quoque  horc  &:  ille  in  eadem  hypothefi  in  fer- 
mone  de  Catechumenis  cap.  37.  Relie  quidem  xredimus  verbo 
T)ei  fanciificiitum  panem  in  Corpus  Chrifti  tranfmutari  [  //era,- 
TTroiVcSiz*  J  verbo  Grxcanico.  Ex  quoinfero  quod  fi  panis  ille 
tranfmutatur  in  corpus  ,defimt  eiîe  panis.  Non  poteft  enira 
id;m  raanens  ,  tranfinutari  in  aliud  ,  ut  ex  didis  probavi- 
mus. 

Damarcenusquoquein4  Libro  de  Eucharifiia  .  Corpus  verè 
divinitati  unitum ,  quod  ex  SanHa  Virgine  corpus  ,  non  quod 
ipifum  AJfumptunft  corpus  de  cAo  dcfcendat ,  fcd  quod  ipfe  pa. 


a^ec  ÏEglife  Romaine  fur  t Euchartflie .  6yt 

nïs  ^  vinum  vertuntur  in  corpus  d^   fanzuincm  Dei.  Et  ne  quis  Ch,  XII. 

confugiac  ad  inrerpretationesad  placirum  ,  &  rypum  verfio. 

nem  illam  exiftimec,  clarius  explicac  fuum  fènfum  inferiùs. 

17 on  efi  typus  :,  aie ,  panis  ^  vinum  corpons  (^  fan'iumis  Chrijli. 

ylbfit  5  feâ  ipfum  Doyyiini  corpus  dcificum ,  ciim  ipfe  Dominus  dixe- 

jit ,  hoc  efi  ,  non  typus  corporis  ,  fed  corpus  ,  é-  non  typus  fanyiinis  , 

fed  fanffiis. 

Quod  fi  in  qua  allegatis  Epiftola,  qua;  non  eft  apud  nosaf- 
'feric ,  a'TiT-uTfct,  TV  x.v6ic(.x.«'  ffâ/xoLTos ,  isteiligendus  eft  antc  Tandi- 
ficationem  panis.  Sic  enim  ipfe  in  eodem  interpretaturaîfTi'rtJTrct,. 
Si  quidam  autem  y  ctirlri^n.  corporis  d^  fanytis  D«mini  ,  panent 
■C^  vinum  ,  ut  divus  dixit  Bafilius  ,  ncn  pofl  fancHficationcm 
dixerunt  ^  fed  ante  fanBificationem  ohlationis.  L'x  quo  evidens 
patec  hujus  fandi  Dodorisfententia  j  nempe  panem  &;  vinum 
non  eflert'r/rt^Tro. ,  ut  vos  modo  aflTeritis ,  fed  ipium  verum  cor- 
pus &  fanguinem.  Et  ut  modum  non  qiixras  hujus  tranfTub- 
ilantiationis  :  fufficiat ,  inquit ,  tibi  audire .  quod  per  Spiricum 
Sandum. 

Sandus  quoque  Ambrofius ,  Lucifer  "&;  ipfe  in  primitiva  Ec- 
clefia  de  Sacramentis  ait  ,  anteverha  Chrifii  ,  calix  vino  (^-^ 
aqua  efi  plefius  ,  ubi  vcrba  Chnfii  opérât  a  fucrunt ,  f inguis  ejfi. 
citur  qui  plebem  redemit.  Antc  ■heneditfioncm  verboium  aiia  fpe-  - 
des  nominMur  :  pofl  confccrationem  corpus  Chrtfti  vête  fignifica- 
tur.  Et  in  oratione  ante  Millàm  dicenda  :Z)o;«/«rZ)«/j,  »/^/f<r/- 
ro  tua  inveritate  fujnitur ,  uhi  fanpiis  tuus  inveritate  bibitiir  (^c. 
Et  in  primo  de  viduis.  Antequum  confccrctur  panis  <:ft  ^ubi  vero 
verba  Chrifii  accefferunt,  corpus  Chrifti  efi. 'Ex.  feipfum  clariusex- 
plicans ,  ne  illud  (  efle  )  quis  interpre-caretur  pro  typo  ,  ait  in 
MatthîEum  :  Chrifius  ajfiumpto  pane  qtti  confortât  corhominis  ^  ve~ 
ritatem corporis Juirepr^fentavit.  Eu  itaque  veritas  quir  typum 
omnem  evercit. 

Ex  his  teftu-nohiis  ut  reliqua  pneteream  brevitacisgratiâ,cùm 
fînt  innumera,  manifefta  patet  fandorum  Patrum  fententia  , 
quod  fciHcet  verum  fit  corpus  nontypicum  feu  myfticum  jUC 
aiîeritis,  in  quononparum  mihi  aflfert  admirationis  veftrappi," 
nio.  Nam  vel  polîlbile  credicis  liocapud  Deum,  vel  impoflî- 
bile.  Si  primum  rcurrantum  contendicis,  &  vosipfosfejungi- 
tis  àSanclaEcclefia?  Sifecundum  ,  cur  potentiorem  pnvdica- 
tis  naturam  ipfo  autore  naturx  ?  Natura  enim  ipfa  tranfub- 
ftantiat  panem  infubftantiam  comedentis ,  ut  probat  magiftra 

P  P  p  p  iij 


-éyi  Liv/ VIII.  Freuves  authent.  de  l'union  des  Eg.  d'Or, 
rerumexpcrienda.  Ac  quid  horum  putstis  majusomniacrea- 
re  ex  nihilo  ,  an  panem  in  corpus  convertere  ?  Et  fi  quod  ma- 
jusdivinitati  conceditis,  cur  quod  minus  negatis  ?  Audi  fuper 
'  hoc  ipfunr  Ambrolîum  in  4.  de  Sacramcntis  ••  Si  tuntum  valuit 

ferma  EltiC  ut ignemde c^clo  deponcret ^nonvalcb:t fermoChrifiiut 
fpccics  clementorum  muteturi  (  Pondéra  quod  non  mutatur  fta- 
t-us  clemencorum:  fed  fpecies)  de  totius  muriii  operihus  ,leq^i- 
fti  ,  quia  ip{e  dixit  &  fucia  funt ,  ipfe  manduvit  ^  creata  funt,. 
Scrmo  igitur  Chrtfii  qui potuit  ex  nihilo  facere  quod  non  erat  ^  non 
pote  fi  ea  qua  funt  mutare  in  illud  quod  non  funt  ,  &  ne  ftatus 
miicacionem  uc  fophifta  induceres ,  fubdir ,  nonenim  minus.efl 
novas  rébus  djre  formas  ,  quum  mutare  naturas.  Si   Deus  ergo 
mutât  non  ll:atum  natur.x  ,  fed  ipfam   naturam  in  aliam  , 
quomodo  natura  cranfmutata  eadem  remanebit  &  m  fua  prima 
fubftanria  ?  Ac  hoc  captu  perdifiîcile  dicis;  Mihi  vero  dilîî- 
ciHus  vidccur  rranfmutare  naruram  &  confervare  eamdem  in 
tranimutatione.  Hocenim  apertè  répugnât  &  imphcat.  Nam 
fi  Verbum  tranfmutaretur  in  carnem  ,  noneflec  ampHus-  Ver- 
bum,quiatranrmutatio  importât  converfionem  prioris  fubflan- 
ticC.  Sed  ilpropter  difficulratem  non  credis,  ergo  necTrinira- 
cis-,.necîncarnacionis.  myiVeria,  ut  longe  difficiliora  intelledlui. 
noltrOj&propter  hoc  magis  credendum,  non  inquirendum  .- 
F  ides  enifn  non  hubct  meritum  ^  ubi  humana  ratio  prabct  expcri- 
menttun  ;&  fides  nuftra  non  comprobatur  /yllogirmis  &;  ratidni- 
bus,  fed  fe  ipfa,  &;Dei  miraculis.  Unde  quod  non  capis  quod' 
non  vides  ,  animofa  firmat  fides.  Ecati  cnimqai  non  viderunt 
^9-  crcdiderunt.  Portenrofum  videcur  myrterium  ,  quiadivinita•- 
tds  eO;  non  humaniraiis,  &  obiTftic  fenfiii  ,  quia  rupernarurale 
eft.  Harc  enim  divinorum  natura  ,  ut- non  cadant.dibfenfu  ôc 
inrellec^u  noftro. 

Ut  jamad  veftros  veniamus  articuîos-  Scias  Fcclefiam  Gra:- 

camcredci-e,  quod  aiferis  credere  Romanos  Pontincios  in  i. 

z.  £c  3.  ar-ticuio.Hajicenim  fidemut&omne  bonum  habuerunr 

à  nobis ,  pr.xcerquod  iUis  imputas,  nempediabolum  polTeSnn- 

svftoirpasou-  ctidmio  corpori  iliudere ,  atquc  abuti  ad  malencasarîC5&  'ce- 

biiédekur       Icra  patranda  :  hoc  enim  apud  nosnon  eft  inrer  arriculos  fidei- 

^""/f-'r^'^'^V-  neceiîarios,  qui  &;pio  potius  filentio  quoque  talia  commend.ire 

îionsr  fuevimus,  quam-jurgiofis  dialogis.  Rodi  vero  à  muribus  illud 

Deificum  corpus  vei  manducan  abimpiis&à  canibus,  hoc  nul- 

lara  afFert  divinicaci  injuriam.  Si  enim  Deus  ubique  efl  iaten- 


a^ec  l'EgîiJe  "Romnine  /ur  ÏEUçhiinflk.         ^73 
dum,  efTe  quoqae  in  ventribus  animalium  ,  fed  lîcut  fol  per  Ch.  XII. 
impuricaces  tranfiens,  &:  in  iis  permanens  non  inquinatu-r ,  ne-  Qi'^ft'ons  n- 

*■  \\     ■  r  r   \-     /-^  o  ■  r\       r  diculcs  qui  ne 

que  polluicur,  11c  neciolis  Creator,  &  omnium  Opirex.  font  bonnes 

Quarcum  quoque  crédit  Sanda  Eccîefia.  Nequeinquiritom-  qu"a  épouvan- 
nipotendam  Dei  ,cuiomniatribuit,  quonam  modofervetac- ^^'^  '^^  ^'  ^"^' 
cidentia  fine  fubjeclo ,  aflerens  hoc  mirabiie  divinitatis  efle,  cui 
&  mirabiliora  poflibiha  funt.  Et  qui  non  totuin  tribuit  fenfui  fa- 
cili  negotio  ,  elevabitur  ad  cognitionem  Scfîdem  fupernatura- 
lium.  Legimus  enim  in  libris  Sapientix  c.  16.  quod  qui  manna 
comedebant ,  omnes  attingebant  fapores  prout  quifque  volue- 
rit.  Audi  Scripturam  liane  veritateai  docentem:/'r^fa/(^w/^«- 
gelorum  efca  nutrivifti  populum  ttium^  (jj-  faratum.  fancm  de  calo 
frafiitifti  illis  fne  labore  ,  omne  deleciamentum  in  fc  habentcm  j 
(^  omnis  faporis  fuavitaton.  Subjîantiam  cntm  tvam  (^dulcedtnem 
tuam  quam  in  filios  hahebas  o^endebas .,  ^  dcferviens  unmfcujuf- 
que  voluntati  ,  ad  quod  qui fque  volebat  convertebaUir.  Quod  lî  de 
converfione  faporis  in  fâporem  interpretatus  fueris,non  aber- 
raveris  à  veritate ,  &  eft  fapor  carnis  in  manna  &  aliornm  co- 
meftibilium  fine  re  (aporara.  Qui  ergo  hoc  mirabiie  perperratus 
eft,  ut  qui  manna  comederentpanis  experirentur  deleclairien- 
tum^carnis  raporem,&;cujurcumqneakerius  fijbfl:antia.%ut  quif. 
que  voluerit,  fine  fijbftantia  rci  fapidx  ,  car  non  valebit  efficere 
uccomedens  corpus  {uum,panis  attingat  faporem,  licet  abfic 
panis  fubftancia?  Atquiipfam  quoque  concemplatur  naturam, 
non  fi.ipernatura!e  hoc  fadum  conipiciec.  Si  enim  quanritarem 
•rofarum  in  Thalamo  tuo  pofi.ieris,  deinde  illas  extraxcns,  vel 
confiampferis-fenfijs  tameniine  re  odorataperji.:cuniJum  ilkina 
odorem  percipiet  h  quod  &  in  thure  patet  &  thymiamare  &  cx- 
terisolidis.  Quid  mirum  ergo  fi  panis  odor  in  corpnreconferva- 
tur  fine  ejus  fubftancia?  Hxc  lane  videtur  porccntofa  dcclri. 
na  ,  cura  plus  tribuat  naturx  quam  DeOj&  creatura:  quara 
Creatori.  Ideo  irt  irapia  à  noftra  fancta  damnatur  Ecclefia. 

■Qiiintum  parirer  crédit.  Et  quoad  fextum  ,adorar  corpus  in 
Euchanftia ,  adoraciooe  latrix  ;  deificum  enim  eft. 

Quod  habesin  feptimo  ,non  eft  in  ufu  apud  nos  circumferre 
corpus  fancliirurium  per  plateas  &  vicos ,  magna  feqnente  po- 
pulorum  caterva.  Non  damnaturramen  quodpietate  fit  in  ho- 
n.oremf\;  gloriam  Dei. 

Quod  quarrisin  oclavOjqui  crédit  panem  converti  rcalirer  in 
unum  corpus  Chnfti, crédit  quoque  Deumipftim  eiîèfiabftan- 


Voilà  fa  ns 


674  Liv.  Vu  I.  Vrewves  authen.  de  ï union  des  Sg.  d'Or, 
tialitcr  creacoremcxli  &  terra:  ,&.doceclubfi:antiam  illam  pa- 
nis  fanftifîcari  ,  quam  fidèles  lumunt  orecorporeo  jcfle  eani- 
dem  illam  particulam  macerix  ,  quam  fand.x  Trinitatis  fecun- 
da  perfonaVerbum  Patris  aflumpfit  in  veritatem  perfopiE  per 
unioneni  hypoftaticam- 
doute iia'i^ux  Qiioad  nonum  abhorrcc  Ecclcfia  noftra  ab  iiïa  dodrina  , 
Grfc  félon  quaiTi  docciit  Rcformati ,  nempe  illud  idem  quod  fecundum 
Mail'iemlifft  ^u^m  nacuram  panis  eft^  myfticë  &  fecundum  grariam  fandi- 
qu'ii  n'en  trou-  ficacionis ,  elfe  corpus.  Crédit  enim  corpus  elle  non  myflicè  , 
ve point  de       ç^^  ygj.^  5^  phvficè  ,  adco  Ut  Dcr  tranrmutationemlfubftantias 

vriis,&que  ■       ,~r     \    r  .^        r  n   j  n         ■      ■ 

fon  Eiriifc        panis  elle  delniat.  Tranjmu-tationcm  cmm  p'o  tranjjubjtantiattone 

Grecque  corn-    aCCipimUS. 

verkaWes"  ^  ^^  fanclilîimo  Patriarcîia  Cyrilîo  concive  meo  &  conter- 
Grecs  eft  une  raneo,  cum  Orthodoxus  natus  fit  ex  Orthodoxis  parentibus , 
chimerequi      nunquam  quod  fcribis  audivi  de  eius  fententia.  At  nec  illum 

ne  fut  jamais  '  .»,-.  c^        n        o     -ks  i- 

que  dans  fa  numcrac  landa  Eccielia  rater  Sandlosôc  Martyres  ,  licet  virtu- 
tefte.  te  ,  docirina  &  probitace  morum  poUueric.  Sin  autem  ille  ali- 

d"cyHnc"Lu-  ^^r  quam  patres  fui  crediderit  ,damnatur  profedo  ejusdoélri- 
carpcucon-  na&fides  tanquam  ha^retica.  Vale  ad  multosannos  5  utdepre- 
nus  des  Grecs.  ^^^  iUuflriffimc  Domine  ,  &  Spirirus  veritaris  qui  ex  Pâtre 
oerfiM.ciau-  procedit  ^  dirigat  in  viam  lalutis ,  corpulque  Domini  noltri 
de  aura  eftc      Tçfy    chriftl  cuftodiat  animam  tuam   in    vitam    xternam, 

fort  fatisfait  de   -. 

cette  réponle.     -«inicn. 

Ex  Arce  Zacyntlii  die  ir.  Maii  1(372. 


CHAPITRE    XIII. 

Union  de  l''Eq:Iife  Grecque  avec   l^'zlife  Romaine  -prouvée  far 

l'aveu  de  ceux  de  la  Religion  F  retendue  Reformée  , 

qui  font  a  Confiantinople. 

COmme  la  conteftation  que  nous  avons  eue  en  France 
avec  les  Miniftres  fur  le  fujet  de  la  créance  à^s  Grecs ,  a 
efté  rendue  célèbre  à  Conftaritinople  par  les  attefiarions  qu'on 
y  a  demandées,  &.  qu'elle  a  fervi  d'entretien  aux  Catholiques 
&  aux  Proteftans  qui  y  font  :  on  fera  peut  eftrc  bien  aife  de 
fçavoir  de  quelle  manière  ceux  qui  font  dans  les  (cntimens  de 
Monlieur  Claude  à  l'égard  des  dogmes,  parlent  à  Conftanti- 

nople 


Awsc  TEglife  KomAÎne  fur  ÏEucharifiie.  675 

nople  de  fa  prétention  touchant  la  créance  de  l'Eglife  Grec-  Ch.  XII. 
que  ,  ôc  c'eft  ce  qu'on  verra  par  l'extrait  de  deux  Lettres  de 
M.  l'Ambafladeur  que  nous  inférerons  icy. 

^EXTRAIT  D'VNE  LETTRE  DE  MONS  lEVR 
l'Ambajjudeur  ce  9.  Février  16/2. 

JE  croy  que  vous  ne  ferez  pas  fâché  d'apprendre  quelques 
traits  de  la  bonne  foy  des  Miriftres  Calvinilles  qui  font  icyj 
vous  en  avezveu  un  échantillon  par  ce  qui  fe  pafla  entre  nioy 
&  le  Miniftre  d'Angleterre  à  l'Eghfe  Patriarchale. 
J'en  ay  appelle  depuis  àMonfieur  l'Ambafladeur  d'Angleterre. 
J'avois  difné  avec  luy  ,  &  ne  voyant  point  (on  Miniflre  ,  je 
luy  dis  en  riant  que  je  croyois  qu'il  me  fuyoit.Il  merepliqua  qu'il 
avoit  eflé  malade  à  l'extrémité ,  &  que  feulement  de  ce  jour, 
il  commençoit  àeftrc  hors  de  danger.Nousentrafmesen  con- 
verfation  fur  le  fait  des  Grecs. 

11  me  protefta  qu'il  eftoit  fi  fort  perfuadé  que  les    Grecs 
croyoient  la  prefence  réelle  &  la  tranflubftantiation  ,  qu'il  ne 
feroit  pas  difficulté  de  m'en  donner  une   artefl;acion  ,  ians  la 
crainte  qu'il  auroir  qu'en  le  faifant  on  ne  le  fit  pafier  en  An- 
gleterre pour  Catholique,  c;  qui  luy  nuiroit  extrêmement.  Luy 
ayant  repondu  que  je  ivn^ii  bien  fâché  de  luy  nuire,  &  que 
je  me  contentcrois  quant  à  prefenc  de  la  déclaration  qu'il  me 
faifoit  ,  il  me  promit  de  luy  même  d'écrire  à  Meilleurs  de  l'A- 
cadémie de  Londres  la  croyance  des  Grecs  de  la  prefence  ré- 
elle &  de  la  tranfiibn:antation.  M.  l'AmbafTcid  ur  d'Angleterre 
s'eftoit  déjà  expliqué  des  raifons  qui   l'empêchoient  de  me 
donner  rattefi:ation  qu'il  m'avoit  promife ,  Se  il   l'avoit   fait 
en  des  termes  plus  forts  en  marquant,  ainfi  que  je  penfe  vou^ 
l'avoir  mandé,  que  s'il  la  donnoir,  ce  feroit  le  moyen  de  luv 
faire  perdre  fonemplov  ,5c  qu'eflant  de  retour  la  difgrace  qu'il 
encoureroit  auprès  de  Ion  Archevêque  luy  porteroic  un  très- 
grand  préjudice.  C'eft  ce  qui  m'a  efté  rapporté  par  une  perfonnc 
tierce  qui   s'eft  entremife  pour  foulager  M.    l'Ambafiadcur 
d'Angleterre  de  la  peine  où  il  fe  trouvoit  de  ne  pouvoir  exé- 
cuter fa  parole,  &  qui  defiroit  pourtant  avec  paillon  que  je 
n'eulTe  pas  lieu  de  me  plaindre  de  luy. 

J'ay  cru  que  ces  aveus   de  coiifiderations  politiques  &d'ia- 
terefts  humains,  pour  ne  pas  déclarer  nne  vérité  après  s'yeftre 


676  Li  V.  Vf  1 1.  Preuves  authcn.  de  l'union  des  Eg.  d'Or. 

engagé,  valoienc  bien  une  arceftation  formelle.  C'eft  pourquoy 
i'ay  voulu  vous  en  inftruire  ,  &:  vous  avercir  auffi  que  les  ex- 
cufes  de  Monfieur  l'AmbafTadeur  font  des  inventions  de  {on 
Miniftre.  En  voicy  encore  d'autres  qui  font  de  luy  ou  de  celuy 
d'Hollande,  dont  j'ay  veu  des  effets  en  la  perlonne  du  fieur 
Peftalorri  chef  des  Marchands  Allemans,quire(Ideà  Conftan- 
tinople  depuis  trois    ans.  Il  efl  Calvinifbe,    homme  de  con- 
fiderarion,  tant  par  luy-même  que  par  les  grandes  correrpon- 
dances  qu'il  a  partout  le  mjnde.  Il  a  delà  probité  &  de  l'in- 
telligence. Et  âinfî  tant  par  toutes  ces  raifons ,   que   parce 
qu'il  a  efté  en  France,  où  il  croyoit  avoir  entendu  le  prefche 
du  Miniftre  Claude,  fuivant  qu'il  me  l'a  dit,  j'ay  cru  que  je 
pouvois   m'informer  de  luy  de  la  croyance  des  Grecs  fur  les 
points  en  queftion.  Je  luy  ay  déclaré  la  raifon  qui  m'obligeoit 
à  cette  recherche.  Je  luy  ay  même  montré  les  aiteftations  que 
j'avois  déjà,  &  je  I'ay  prié  de  me  donner  une  déclaration  de 
ce  qu'il  en  fçavoit,  ou  de  ce  qu'il  en  fçauroit  après  s'eneftre 
informé.  Il  me  promit  de  le  faire  ,  me  difmt  que  pour  un  plus 
grand  éclairciflement  ,  il  iroit  voir  le  Patriarche  des  Grecs, 
&  il  ajouta  que  j'avois   déjà   dequoy    confondre  le    Miniftre 
Claude  ,  &  qu'il  ne  comprenoit  pas  pourquoy  il  s'eftoit  enga- 
gé dans  cette  conteftacion.  Il  me  pria  enfuite  de   luy  donner 
un  mémoire  des  articles  j  &  comme  il  l'eut  leu  avec  plus  de 
reflexion,  il  me  reprefenta  qu'ils  eftoient  tous  contre  l'a  croyan- 
ce de  fa  Religion.  Je  luy  remontray  qu'il  ne  s'agiiTo-it  pas  de 
leur  veriré  ,  mais  bien  de  fçavoir  files  Grecs  les  croyent.  Cet- 
te réponfe  l'ayant  fatisfait  ,  il  fe  retira, 

11  a  demeuré  huit  jours  fins  qie  j'ave  entendu  dîT-sn^^u  - 
velles,  &  enfin  il  m'a  fait  prier  inftammenî  de  l'exciirer  ,  s'il 
ne  pouvoir  fatisfaire  â  nia  jufte  d;mande.  Il  eft  convenu  que 
s'eftant  informé  d'un  Métropolite  grec  homme  habile,  delà 
vérité  de  tous  les  articles  en  qucftion  ,  ill'a  voit  afieuré  que  les 
Grecs  croyoient  comme  les  Romains,  fçavoir  la  prefence  réel- 
le,  la  tranlTubftantiation,.  l'invocation  des  Saints,  les  fept  Sa- 
cremens  &  les  autres;  mais  qu'il  ne  pouvoir  en  donner  aucune 
atteftation  ,  le  perri  où  il  s'expofoit  en  foumilîant  des  armes- 
aux  ennemis  de  fa  propre  croyance  eft  int  trop  grand.  Il  dit 
qu'allant  par  exemple  à  Paris,  le  Miniftre  de  Charenron  &: 
Claude  luy  même,s'il  fe  trouvoit  dans  la  fondion,  luy  refufe- 
roit  la  participation  à  la  Cène ,  fous  prétexte  pu'il  auroitattefté 


a^'ec  ÏEglife  Komaine  fur  l'Eucharifiie.  677 
un  fait  qui  luy  feroic  contraire.  Il  a  die  de  plus  qu'il  n'en  tau-  Ch.  XIII. 
droit  pas  davantage  pour  luy  caufer  un  grand  fcandale  ,&  luy 
procurer  même  l'inimitié  de  Tes  parens,  6c  qu'il  ne  feroit  pas 
raifonnable  qu'il  s'engageaft  dans  ces  extremirez.  On  luy  are- 
prefenté  qu'on  ne  luy  demandoit  pas  l'acteftation  des  points 
en  queftion,  comme  d'une  chofe  qu'il  fçût  de  fcience  certaine, 
mais  comme  l'aysnt  apprife  d'un  Métropolite  ,  &  même  du 
Patriarche  s'il  vouloit  s'en  informer  de  luy.  Il  a  répliqué  que 
l'un  ne  luy  feroit  pas  moins  périlleux  que  l'autre,  5:  que  quoy 
qu'il  fçùt  bien  là  vérité,  il  ne  pouvoit  néanmoins  la  déclarer 
par  écrit,  8c  qu'il  y  auroitmêmedeTentreprifeà  luy  dele  faire> 
puifqu'il  ne  tient  icy  aucun  rang  deperfonne  publique,  &  qu'il 
fë  trouveroitle  feul  de  la  Religion  qui  l'auroit  fait,  les  An- 
glois,  &  les  Hollandois  demeurans  dans  le  filence.  Onainfifté, 
en  luy  reprefentant  que  le  devoir  de  fa  confcience  ne  s'ac- 
cordoit  pas  avec  la  conduite  qu'il  tenoit  en  cette  rencontre, 
mais  on  n'a  pu  le  fléchir. 

Je  laiflè  le  champ  libre  à  toutes  vos  reflexions  fur  la  manière 
d'agir  de  ces  Meffieurs  les  Miniftre^  qui  employent  une  efpece 
d'excommunication  pour  fermer  I^  bouche  à  ceux  qui  veulent 
déclarer  la  vérité.  Il  n'y  a  point  de  doute  qu'ils  ne  foienr  les 
auteurs  de  ces  craintes  6c  de  ces  corjfiderations  politiques,  puit 
que  ceux  qui  s'en  fervent  n'y  fongoientpas  dans  le  commence- 
ment, &  qu'ils  ne  s'en  font  fervis  qu'après  coup. 

EJTTRAJT  B'V.ITE  AUTRE    LETTRE. 

VOus  fçaurez  que  le  Miniftre  de  xMonfieur  l'Ambafîadeur 
d'Angleterre  m'eftant  venu  voir^  je  luy  av  montré  l'at- 
teft:ation  (ynodale  6c  plufieurs  autres  Je  luy  ay  fait  lire  Xz^ 
paroles  qui  concernent  l'Eucharifliiei  Se  il  eft  convenu  pofiti- 
vementdela  croyance  que  les  Grecs  ont  delà  prefencc  réelle 
&  de  la  tranlTubftantiation.  Il  s'étonne  même  de  l'opiniâtreté 
à  difputer  ce  fait  delà  part  du  Miniftre  Claudei&:  il  prétend 
qu'il  n'y  a  aucun  Mémoire  venu  d'Angleterre  quiJuy  ait  pu 
donner  lieu  de  le  faire  avec  quelque  fondement. 

Vofla  comment  parlent  ces  Mcflîeurs  à  Condantinople  j  & 
comme  l'on  ne  croira  pas  aifement  que  Monfieur  Claude  & 
Jes  Miniftres  de  France  n'en  foient  avertis,  puifque  s'adreC 
Tant  comme  il  fait  à  des  Grecs  de  Crète,  ils  n'auront  pas  ne- 

QQ^qqij 


678  Liv.  VIII.  Treunjes  authenr.  de  T union  des  Eg.  d'Or.  ^ 
gligé  d'écrire  à  Conftancinuple  même,  &  à  des  gens  qui  Ton, 
liez  d'intercft  entre  eux  -,  il  faut  ou-  que  ces  Minières  qu^ 
font  à  Conftantinople  trompent  M.  Claude,  ce  qui  paroift.  peu 
vrayfemblable,  ou  que  M.  Claude  ne  les  croye  pas  bc  ne  veuil- 
le pas  fe  détromper,  ou  quequelque  détrompé  qu'il  foit,  l'en- 
gagement où  il  eft  le  porte  à  foutenir  jufques  au  bouc  con- 
tre fa  confcience  ,  ce  qu'il  a  témérairement  avancè._ 


CHAPITRE     XIV. 

Union  de  l'EgUfe  Grecque  avec  ^Eglife-  Latine  prouvée  far  te 
qui  eft  arrivé  au  fu]  et  du  terme  de  tranfTubftantiation ,  inféré 
dans  la  confejjion  Orthodoxe.  De  quelle  forte  cette  ConfeJ/ion  a 
eftè  imprimée  en  Hollande  aux  dépens    des  Ejiats. 

LA  Cbnfeflîon  Orthodoxe  de  l'Eglife  d'Orient  eft  une 
pièce  fi  authentique  &:  fi  decifive  dans  le  différend  que 
nous  avons  avec  Monfiéur  Claude,  que  j'ay  cru  qu'on  feroit 
bien  aile  de  fçavoir  pourquoy  elle  fe  trouve  imprimée  en  Hol- 
lande, d'autant  plus  que  le  récit  de  ce  qui  eft  arrivé  fur  le  fujçc 
de  cette  Confeffion  donnera  lieu  d'éclaircir  un  endroit  du  li- 
vre de  Monfiéur  Claude^  où  il  rapporte  une  Lettred'un  nommé 
Bafire^qui  afiêure  que  le  mot  de  tranflubftantiation  inféré 
dans  un  Catechifme  Grec  a  efté  cenfuré  par  les  Grecs.  Les 
Lettres  de  Monfiéur  l'Ambafiadeur  que  j'infereray  icy  éclairr 
ciront  parfaitement  ces  deux  points, 

EXTRAIT  D'VNE  LETTRE  DE  MONSIEUR 
de  Nointel  Ambajfadeur  de  fa  Majefté  très-  Chreftienne  à  la  Pone. 

LE  quinzième  de  Février  un  de  mes  amis  m'a  rapporté, 
qu'ayant  difné  avec  Monfiéur  le  Refident  d'Hollande,  & 
la  converfation  eftant  tombée  fur  la  Religion  des  Grecs,  on 
avoit  parlé  du  livre  intitulé,  Confe,IJton  Orthodoxe  de  l'Eglife 
Catholique  ^  Apoftolique  d'Orient.,  comme  eftant  juftifïicatif 
de  fa  croyance  de  la  prefence  réelle  &:  de  la  tranflubftan- 
tiation. 
Mpnficur  le  Refident  découvrit  l'origine  de  l'impreffion 


anjsc  TEgîi/è  l{omiiine /îir  ÎEuchxriflie,  679 

de  ce  livre.  Car  il  luy  dit  queMonfieur  Panaiotci  avant  en-  Ch.XIV. 
voyé  l'exemplaire  en  Hollande  pour  y  eftrc  imprimé  à  Tes 
frais,  Meffieurs  les  Eftats  n'avoienc  pas  voulu  qu'on  prift  de 
fon  argent,  &  que  pour  gagner  Tes  bonnes  grâces,  ils  l'avoienc 
fait  imprimer  à  leurs  propres  dépens  avec  un  très,  grand  foin, 
&  qu'ils  en  avoient  confié  plu  fleurs  cailfes  à  leur  Refîdcnt, 
pour  en  faire  prefent  à  Monfîeur  Panajotti. 

Voila  la  manière  donrce  Seigneur  Hollandois  s'eft  expliqué, 
&  je  croy  qu'il  auroit  donné  un  de  ces  livres  à  celuy  qui  luy 
parloit ,  s'il  ne  luy  avoit  pas  répondu  qu'il  en  avoir  un. 

C'eft  un«  cbofe  admirable^  non  pas  que  ce  livre  ait  eftc  im- 
primé en  Hollande,  puifque  tout  s'y  imprime  indifférem- 
ment par  le  defir  du  gain,  mais  que  l'impreflion  s'en  foit  faite 
par  l'authorité  publique  j  gratuitement  6c  avec  tant  d'exacli- 
tude.  Il  eft  vray  que  le  defir  d'acquérir  l'amitié  de  Monfieuf 
Panaiotti  y  a  contribué.  Mais  l'on  peut  croire  aufli  que  comme 
fans  une  confideration  auffi  forte  que  celle-là  ,  Meffieurs 
]ès  Effcats  n'auroient  jamais  confenti  à  fournir  des  armes  con- 
tre eux-mêmes.  Dieu  a  permis  qu'il  y  fulTent  comme  for» 
cez  par  des  veucs  temporelles, afin  que  le  remède  fufl  rendu 
public  par  ceux  mcme  qui  avoient  contribué  au  mal.  Le  Refî. 
dent  de  Hollande  nommé  Cornélius  Aga  avoit  corrompu  Cy- 
rille Lucar.  Il  en  avoit  tiré  une  profelTion  de  foy  Calvinîfle, 
fous  le  nom  de  l'Eglife  d'Orient.  Il  avoit  donné  à  ceux  de 
fa  fecle  un  moyen  d'éloigner  d'eux  le  reproche  de  fingularité 
dont  ils  fontaccufez;  &  comme  il  ne  fepouvoit  vanter  tourau 
plus  que  d'avoir  un  Patriarche  j  &  quelques  Evêques  partici- 
pans  à  fon  hcrefie  ,  il  commeitoit  unefaufFeté,  &:  faillie  une 
injure  à  l'Eglife  d'Orient  en  luy  imputant  l'opinion  d'un  Pa- 
triarche, &  de  quelques  particuliers.  Cette  manière  d'agir  eftoit 
d'  autant  plus  injufte,  qu'il  fçavoit  bien  que  fon  argent  avoic 
fiit  parler  ces  Mefîîeurs  comme  il  avrit  voulu.  Ainfi  il  eftoit 
raifoanable  que  la  réparation  en  fuft  authentique.  Deux  Sy- 
nodestenusà  Conftantinople  ,  l'un  par  Cyrille  deBerée,  Se 
l'autre  par  Parthenius  le  vieil,  onrrejetté  avec  anathcme  cet- 
te profefîion  de  fov  mercenaire  :  mais  comme  fî  des  ades  de 
cette  importance  n'eulfent  pas  fufK,  il  a  fallu  que  lacondam- 
rwtion  de  ces  principaux  articles  Calviniftes  ait  efté  réduite  en 
forme  de  Careckifme. 


4. 


Q^Qjiq  "'j 


68 o  Liv.  VII,  Prewves  auth.  de  ï union    des  Eg.  d'Or. 

Car  c'eft  pour  ce  fujec  qu'en  l'année  1641.  fur  la  recjuificion 
de  l'Eglife  de  Ruffie  ,  le  livre  intitulé  Confejfîon  Orthodoxe  de 
t'Eglife  Catholique  é^  Apojlolique  et  Orient  ^  a  efté  approuvé  de 
tous  les  Patriarches,  On  y  voit  la  prcfence  réelle,  la  tranflub- 
ftantiation  ,  l'invocation  des  Saints ,  les  (ept  Sacrements,  6:1e 
culte  des  Images  établis  nettement.Et  parce  qu'il  fembloit  inu- 
tile, s'il  n'efloit  imprimé,  on  afongé  au  moyen  de  le  mettre 
entre  les  mains  de  tout  le  monde  par  l'impreffion. 

Il  n'y  a  point  d'imprimerie  Grecque  à  Conftantinople.  Cel- 
les quife  pourroient  trouver  en  Valachie,  ouen  Moldavie  ne 
font  pas  afîèz  correAes.  Il  y  auroit  eu  du  danger  àfe  pourvoir 
en  Mofcovie.  Ceux  de  l'Eglife  Latine  n'auroient  peut-eftre  pas 
voulu  confentir  d'imprimer  un  livre  qui  ne  contient  pas  des  fen- 
timens  Catholiques  touchant  la  Proceffion  du  S.  EfpritjôC 
quelques  autres  points.  Ainlî  il  ne  reftoit  plus  que  les  Prote- 
ftans .-  &  je  ne  douce  point  que  Dieu  n'ait  permis  la  rencontre 
de  toutes  ces  difficulcez,  afln  qu'on  fe  trouvaftdanslaneceffité 
de  fe  fervir  des  Hollandois,  6c  qu'ils  reparaflent  ainfî  en  quel- 
que forte  l'injure  qu'ils  ont  faite  à  l'Eglife  d'Orient.  Et  comme 
leur  Refidenty  avoit  donné  lieu,  qu'il  l'a  voit  tramée,  &  qu'il  y 
avoit  employé  fon  induftrie  &  fon  argent,  on  ne  peut  pas  defi- 
rer  une  réparation  plusexprefTe  qu'un  defaveu  de  fes  calomnies 
par  fes  Supérieurs,  qui  font  imprimer  à  leurs  dépens  un  livre 
qui  découvre  la  faudetéqu'avoit  avancée  leur  Refident,ll  avoit 
corrompu  le  Patriarche  &  quelques  particuliers  par  argent,  & 
fes  Maitrcs  font  forcez  par  une  conduite  admirable  de  Dieu 
de  fe  fervir  de  leur  argent  pour  rendre  public  le  contraire  d'une 
profeffion  de  foy  toute  vénale. 

Il  pretendoit  cacher  une  vérité  de  fait  par  des  veuës  toutes 
humaines,  voulant  authorifer  à  quelque  prix  que  ce  fuft,  une 
chofe  qui  favorifoit  fa  Religion:  Se  d'autres  veuës  humaines 
contraignent  Met.  les  Eftats  de  delavouer  leur  Miniftre.  Enfin 
c'cfl  leur  Refident  même  qui  découvre  ce  myftere  fans  en  eflre 
autrement  follicité,&  qui  deluy  même  eft  entré  dans  ce  détail 
pour  fatisfaire  à  une  curiofité  générale  de  fonamy. 

Toutes  ces  reflexions  font  altez  fortes;  mais  il  faut  revenir  à 
l'entretien  de  M.  le  Refident,  dans  lequel  on  n'a  pas  oublié  de 
parler  aufiî  des  Arméniens.  Après  qu'il  eut  demandé  ce  qu'il  en 
eftoit,  &:  qu'on  luy  eufl:  repondu  qu'à  l'égard  des  Cérémonies , 
elles  approchent  fort  desnoftresj  que  pour  la  croyance  ,  ils 


ai'ec  ÏBgl'ife  Romaine  fur  ÏEuchariflie.  égi 

avoient  de  grandes  herefies,  mais  qu'ils  te  noient  la  prefence 
réelle  &  la  crunlfubftantiation  ,  il  s'ëronna  de  ce  dernier  point 
Redemanda  s'il  cftoitbien  véritable. On  luy  en  certifia  la  venté, 
&  ce  fut  ce  qui  finit  la  converlacion. 

Le  4. de  Mars,  j'ay  ordonné  à  Fontaine  d'aller  chez  M.  le 
Refirent  d'Hollande,  le  remercier  de  ce  qu'il  m'avoit  envoyé 
fon  Secrétaire  avant  (on  voyage  de  Smyrne,  Si  kiy  offrir  fcs  fer- 
vices  à  la  Porte  où  je  le  depèchois.  li  l'a  prié  de  mapart^  qu'il 
me  voulût  bien  faire  le  plaifir  de  me  donner  un  des  Livres  qui 
eftoienr  intitulez,  Confd/ion  Orthodoxe  de  l'Egltfe  Catholique  (jr- 
uipojiolique  d'Orient^  &c  de  me  dire  comment  l'impreffion  s'en 
eftoic  faite,  &  par  quelle  raifon  il  fe  trouvoit  laifi  de  quelques- 
uns  de  ces  exemplaires.  M.  le  Refidentayant  témoigné  m'cfire 
tres-fenfiblement  obligé  de  ma  civilité,  a  afieuré  Fontaine  que 
luy&  tout  ce  qui  fe  trou  voit  dans  fa  maifÎDn  eftoit  à  mon'ervice, 
&illuy  adonné  deuxdes  livres  que  je  deiîrois,en  luy  difant  que 
c'étoient  les  feuls  qui  luy  reftoient,  &  que  pour  leur  impreifion 
Des  brolles,  quieftoreut  icy  Secrétaire  de  Mef  les  Etats  en 
l'année  n'y  ayant  point  alors  de  Refident,  fut  recherché 

par  le  fieur  Panajotti  pour  faire  imprimer  en  Hollande  un  ma- 
nufcriî  de  Catechifme  qu'il  luy  donna  écrit  à  la  main,re  décla- 
rant d'en  vouloir  faire  les  frais:  Que  ce  Secrétaire  en  ayant  in- 
formé Mef.  les  Etats,  ils  le  firent  imprimer  à  leurs  dépens,  qu'il 
leur  en  coûta  4000.  francs  pour  en  remplir  des  cailTes  où  il 
y  avoir  plufieurs  exemplaires, 

M.  le  Refidentajoûta  qu'ayant  efté  nommé  en  ce  temps  là 
pour  venir  à  Conftantinople  y  refider  pour  Mef  les  Etats,  il  luy 
fut  ordonré  par  eux  ,  de  le  charger  de  ces  caifles  &  d'en  fai. 
re  prefent  au  fieur  Panajotti  .■  Qu'il  y  avoit  même  une  douzai- 
ne &  demie  d'exemplaires  reliez  à  la  Hollandoife  dont  il  luy  en 
prefenta  douze,  Se  que  pour  les  fix  autres,  il  n'en  avoit  plus  que 
les  deux  qu'il  venoit  de  me  donner. 

EXTRAIT    D'VNT:     LETTRE    DE     M,      VAMBASSADEVlt 
dn  Coïïfiantinople   ce   2^.  Septembre  16  7Z. 

J'AY  parlé  nu  Patriarche  Methodius  de  la  lettre  de  l'Anglois 
nommé  Bazire,  je  luy  ay  demandé  fi  le  mot  detranlfubftan. 
tiation  inféré  dans  le  Catechifme  qu'il  m'avoit  envoyé  parl'Ar- 
chcvefque  d'Andrinople  imprimé  à  Venife  en  1635,  fie  compolé 
par  Grégoire  Jeromonaqueavoic  efté  cenfuré. 


68i  Liv  VIIJ.  Preuves  authaat.  de  tun'wn  des  €g.  d'Or. 

Il  a  répondu  qu'il  n'avoic  poinc  de  connoiirance  qu'on  eût  ja- 
mais public  aucune  cenfure  contre  cette  parole  en  quelque  lieu 
quelle  fe  crouvaft.Mais  qu'ilfe  fouvenoit  fort  bien  d'une  hidoire 
arrivée  fur  ce  iujec  couchant  le  même  terme  qui  eft  dans  la 
confeffion  Orthodoxe  de  1  Egiife  d'Orientj  voicy  comme  il  l'a 
racontée. 

LorfqueParthenius  tenant  le  Siège  de  Conflantinople  vou- 
lut approuver  la  Con'-effion  Orthodoxe  de  l'Eglite  d'Orient,  il 
alTembla  Tes  Métropolites  &  les  Officiers  de  l'EgliTe  pour  ré- 
gler les  prétentions  de  Corydale  qui  foutenoit  qu'il  en  falloit 
retrancher  le  terme  de/ierfe'ffiaff/iOnluy  enjoignit  de  dire  Tes  rai 
/bns;  &  comme  il  eftoi:  grand  Philofophe  bc  qu'il  pofledoiraf- 
fez  bien  les  Langues  Latine  &  Grecque,  il  s'expliqua  avec  tou- 
te l'adrerte  6c  la  fubtilicé  qu'il  put.  Il  remontra  que  non  feu- 
lement cette  parole  ne  fe  trouvoit  point  ni  dans  les  Pères  Grecs 
rii  dans  les  Conciles  Ecumeniques,  mais  qu'elle  eftoit  contre- 
faite fur  celle  de  tranfliibftantiation forgée  parles  Latins,  bc 
que  fî  les  Grecs  la  recevoient ,  ils  donneroient  lieu  à  leurs  ad- 
verfairesde  fe  glorifier  qu'ils  les  fuivroienc  dans  une  chofe  qui 
eftoit  de  leur  invention. 

Cette  manière  de  parler  n'étonna  point  Syrigue.  Il  efloic 
grand  Théologien  &  intereflé  àdeffendre  la  vérité  du  livre  qu'il 
avoir  rédigé^  6c ce  qui  l'y  portoit  davantage, c'eft  qu'il  paroif- 
foit  dans  l'intention  de  Corydale  qui  n'en  vouloit  pas  feulement 
aux  paroles,  mais  qu'il  avoir  pour  but  de  détruire  le  Sacremenc 
même.  C'ell:  pourquoy  fouhaittanc  qu'il  s'en  declaraft,  il  luy  de- 
manda l'explication  du  mot  Mctoufiofis. 

N'olant  biaifcr,  il  fut  obligé  de  dire  qu'il  marquoit  le  chan- 
gement  d'une  fubftance  à  u  ne  autre.  Maisiln'cut  pas  fi  toft 
achevé  de  prononcer  ce  difcours  quetoute  l'afTemblée  luy  re- 
partit d'un  commun  confentement  que  l'Eglife  ne  prenoit  pas 
tant  gardeaux  motsqu'à  leur  {îgnification,&  qu'ainfi  le  terme 
de  tranflubftantiation  marquant  pleinement  le  changement  de 
la  fubftance  du  pain  8cdu  vin  en  lafubftance  du  corps  Se  du 
fang  de  Jesus- Christ,  n'eftoit  pas  plus  des  Latins  que  des 
Grecs  ,  puifque  de  l'aveu  même  de  Corydale  il  defignoit  fî 
bien  la  croyance  de  l'Eglife  d'Orient.  Ce  fut  ainfi  que  Syrigue 
fut  déclaré  le  vainqueur  &  qu'il  luy  fut  permisse  à  ceux  qui  le 
vcudroientde  fe  fervir  de  cette  parole. 

Methodius  m'a  affeuré  de  la  vérité  de  cette  hifloire  comme 

ayant 


a.'vec  l Eglifè '^ma.ine  fur  tiucharifiie,  685 

ayant  efté  rcmoin  de  toures  ces  parcicularitéz ,  parce  qu'il  afli-  Ch.  XIV. 
fka  à  rafTeinblée  où  elles  (q  font  paflces  en  l'année  1641.  î1 
eftoic  en  ce  temps  là  Supérieur  des  Preftres  d'une  Egli(e  de 
Galata  j  &  comme  il  s'eft  louvenu  de  ceux  qui  s'y  trouvèrent , 
il  m'a  dit  que  les  Métropolites  eftoient  Pacome  de  Calcedoi. 
ne  ,  Parthenius  d'Andnnoplc  ,  Daniel  de  Serres  ,  Grégoire 
de  Lariife  ,  Anthyme  de  Cyzique  ,  Cyri'le  de  Nicomci^ie  , 
Joannicius  d'Heraclée,  Macarius  deTornoue,  &  que  les  Offi- 
ciers de  la  grande  Eglile  eftoient  Lafcaris  grand  Logothetej 
Philippe  de  Chypre  Protonotaire  ,  George  Ecclefiarque,  Ni- 
colas Petit  Logochete. 

Vous  voyez  bien  que  celuy  qui  eftoit  l'auteur  de  cette  onpo- 
jfitionapprochoitfort  du  Calvinifme,  mais  vous  en  Icrez  con- 
vaincu ,  quand  vous  fçaurez  une  hiftoire  dont  l'on  m'a  afluré 
]â  vérité,  &  qu'il  ne  fera  pasmal.aife  de  juftificr,  comme  vous 
le  verrez  par  les  circonftances  qui  fuivent. 

Les  Patriarches  de  Conftantinople  eftant obligez  de  venir 
tous  les  ans  un  Dimanche  de  Carême  officier  en  l'Eglife  de 
Chrifopii  dédiée  à  la  Vierge  ,  &  iîruéeà  Galata  ;  &  Parthe- 
nius le  Vieil  fatisfailant  acette  vieille  coutume  ,  ibarriva  que 
Corydale  fie  une  raillerie  fort  téméraire  lur  J'Eucharjftie.  Ce 
fut  en  parlant  à  un  Religieux  qu'il  rencontra,  cherchant  de 
certains  poiiTons  nommez  des  Seiches ,  qui  feuls  font  permis 
aux  Grecs  pendant  le  Carême.  Comme  il  le  vitaiTez  cnpeine, 
parce  qu'il  n'en  trouvoic  point,  il  lui  reprocha  qu'il  fehxtiguoit 
inutilement  J  &  que  s'il  vouloit  prendre  un  vieux  Toulicr  qiù 
eflroit  auprès  de  lui  &  le  bénir,  iJ  fe  changeroiten  Seiches  , 
auffi  bien  que  le  pain  &  le  vin  après  la  confecration  eftoiene 
changez  au  corps  &  au  fang  de  j.  C. 

Le  Religieux  ne  répondit  rien  ,  mais  eftant  retourné  au  Pa. 
lais  Parriarchalavec  plufïeurs  autres  que  le  Patriarche  y  avoit 
menez  pour  les  traiter,  il  demanda  à  Mcthodiusà  prcfent  dé- 
pofé  du  Siège,  fi  la  bcncciclion  pouvoir  Kiire  d'un  fouher  un 
poilTon ,  comme  la  confecrarion  failoit  du  pain  &  du  vin  le 
corps  &  le  fang  de  J.  C.  mais  la  réponfe  eftant  que  c'eftoit  une 
impieté  de  parler  de  la  force,  &  une  grande  hardie/îè  de  faire 
une  telle  raillerie  ei  prefencc  du  Patriarche  ;  le  Religieux 
qui  l'a  voie  fait  exprès,  ann  d'eftre  entendu,  dit  q^ue  Corydale 
eftoic  l'auteur  de  cette  profanation. 

RRrr 


éS4  Liv.  VIII.  Preuves authent.  de  t union  desEg.  d'Or. 

Il  reullic  dans  Ion  deflein  :  car  le  Patriarche  eftanc  inftruic 
de  la  chofe  s'informa  le  lendemain  de  quelques  Métropolites 
&  Ofliciers  qu'il  aflembla,  de  ce  qu'ils  penioient  d'un  hom.me 
qui  auroit  tenu  un  dikours  de  cette  nature.  Leur  fentimentfuc 
qu'il  ne  pouvoit  eftre  moins  queCalvinide  Ainfi  l'on  lit  venir 
Corydale  qui  eftoit  alors  dans  la  maifon  Patriarchale  ,  on  l'in- 
terrogea s'il  avoit  dit  CCS  paroles  dont  le  Religieux  l'accufoit, 
&  parce  qu'il  le  nia  en  prefence  de  fon  accufateur  ,  &  qu'il  n'y 
avoit  point  de  témoignage  fuffifantpour  une  entière  convic- 
tion ,  on  l'obligea  feulement  de  faire  un  écrit  fur  ce  fujet ,  par 
lequel  il  declaroit  que  fi  on  pouvoit  le  convaincre  davoir 
avancé  une  telle  profanation ,  il  vouloir  fe  condamner  lui-mê- 
me à  fe  retirer  de   Conftantinople.  C'eft  une  condamnation 
qu'il  n'a  pas  feulement  prononcée ,  mais  qu'il  a  exécutée  depuis 
par  fa  retraite  dans  la  Morée,  voyant  bien  qu'il  n'y  avoit  que 
trop  de  preuves  qu'il  adheroit  au  Calvinifme. 

L'ade  de  cette  déclaration  eflc  inféré  dans  la  çrrahde  Eo;life , 
&)e  feray  mes  diligences  pour  l'avoir  ,  afin  que  la  preuve  foit 
authentique,  &  que  vous  voyiez  au  jufte  les  termes  qu'on  a  exi- 
gez de  Corydale3  mais  quand  je  ne  pourrois  pas  l'avoir ,  il  me 
lemble  qu'eltant  appuyé  fur  le  récit  d'un  homme  prefent  qui  a 
efté  Patriarche ,  ôc  qui  m'a  fait  cette  hiftoire  par  occafion  ,  la 
vérité  eft  fuffifàmment  établie. 

,.  Vous  connoifïrez  encore  mieux  l'efprit  de  Corydale,  quand 
vous  fcaurez  qu'il  a  étudié  à  Padouë  en  Philofophie  fous  le  pre- 
mier Rcgentde  l'Univerlité  de  cette  v'\\\e.r\omn\é  llCremonino 
qui  efi:  mort,  comme  je  crois ,  &  dont  les  écrits  qui  attaquoient 
l'immortalité  de  l'ame  ,  ont  efté cenfurez  par  la  facrée  Congré- 
gation. Il  ne  faut  donc  pas  s'étonner  qu'un  difciple  inft^ruit 
dans  cette  Ecole ,  fe  foie  feparé  de  fon  Eglife ,  qu'il  fe  foit  atta- 
ché à  des  opinions  nouvelles,  plutôt  par  intrigue  que  par  aucu- 
ne croyance  qu'il  en  eût-  Car  s'il  a  eilé  capable  de  croire  fon 
ame  mortelle,  il  y  a  grande  apparence  qu'il  n'avoit  point  d'au- 
tre Religion  que  fon  inrereft.  Quoiqu'il  enfuir^on  laccufe  d'a- 
voir travaillé  conjointement  avec  le  Miniftre  Léger  à  la  profcf 
fion  du  Calvinifme,  qui  a  paru  fous  le  nom  de  Cyrille  Lucar. 


Cette  hiftoire  éclaircit  un  endroit  de  M.  Claude ,  oià  il  rap- 
porte la  lettre  d'un  Anglois  nommé  Bafire,  qui  contient  ces 


anjec  l'Bghfe  Romaine  fur  tEucharifiie.        685 
termes  :  7^  fç^y  q^un  certain  Moine  du  nombre  de  ces  faux  Gréa  ^f  •^'^"''*  '•  1 
avoit  fuit  glifft'r  le  terme  de  tranjjubjiantiation  dans  fa  Calcchcfe 
que  j'ay  vke  a  Confiantinople  ^  a.nljifut  il -pour  cela  me7ne  cenfurè 
■pur  les  mêmes  Grecs. 

On  avoir  cru  d'abord  que  le  Catechifme,  dont  ce  Bafîrevou- 
loic  parler  elloic  celui  de  Grégoire,  qui  contient  en  effet  le  ter- 
me de  tranffubftantiation. 

Mais  comme  il  ne  paroift  point  qu'on  ait  jamais  fait  aucune 
oppofition  à  ce  CatechiTme^  il  y  atouteJorte  d'apparence  que 
ce  difcours  regarde  la  Confeffion  Orthodoxe,  dont  M.  Clau- 
de attribue  la  compofition  à  Meletius  Syrigus  ,  qui  eftoit  en 
effet  député  de  l'Eglife  de  Conftantinople  au  Synode  qui  fe 
tint  en  Moldavie  en  1643. 

Et  par-  là  on  peut  apprendre  quelle  créance  on  doit  avoir  pour 
les  mémoires  des  Calviniftes  i  car  cette  prétendue  cenlure 
n'eft  autre  chofe  que  roppofition  téméraire  d'unfeul  Calvini- 
fle  caché, qui  fut  lolemnellement  condamnée  parlesEvêqiies 
Grecs.  Ainfi  ces  véritables  Grecs  fe  reduifetit  à  un  feul  homme 
complice  de  Cyrille  Lucar,  difciple  d'un  Athée,  &  qui  defa- 
vouë  néanmoins  le  Calvinifme  par  une  déclaration  exprelfe. 

CHAPITRE    XV. 

Seconde  imprefjîon  au  Livre  de  la  Confedion  Orthodoxe.  Approba. 
tion  nouvelle  du  Patriarche  de  Conjlantinople.  Oriqjnal  de  cette 
ConfeIJion  envoyé  au  Roy  en  Grec  ^  en  Latin.  Article  de  l'Eu- 
charifiie  en  Latin. 


o 


N  en  eftoit  juftementà  l'impreflion  de  cesAcftes  &:  Ac- 
teftations  de  l'Eglife  Grecque,  lorfque  le  Secrétaire  de 
MonfieurrAmbad'adeureftant  arrivé  de  Conllantinopleà  Pa- 
ris, pour  apporter  à  Sa  Majeflé  la  Ranhcation  dei  Trairez 
conclus  avec  la  Porte, a  apporté  en  même  temps  les  Oric;inaux 
de  plufieurs  atteftations  authentiques  que  les  Patriarches  d'O- 
rientavoient  prié  M.  l'AmbafTadeurde  faire prefenter au  Roy 
pour  la  juftification  de  leur  loy  contre  les  calomnies  des  Mi- 
niftres  Calvmîiles.  Il  y  avoir  parmi  ces  atteftations  un  ManuC 
crit  magnifiquement  relié  ,  dont  le  lîeur  Panajotti  faifoit  pre- 
Tent  à  Sa  Majeflé ,  pour  eflre  confervé  dans  fa  Bibliothèque , 

R  R  r  r  ij 


686  Liv.  VI 1 1.  Vrewv€s  amhen.  de  Funion d^s  fg.  d'Or. 

S.-C  fervirà  jamais  de  témoignage  de  laFoy  de  l'Eglife  d'Orient. 

Cemanufcriteft  l'un  des  Originaux  delà  Coni^eflion  Ortho- 
doxe, lleft  figné  parle  Patriarche  de  Conftantinople,  par  plu- 
fîeurs  Evêques  &  divers  Officiers  de  l'Eglife  de  Conftantino- 
ple.  Mais  au  lieu  que  les  Exemplaires  imprimez  ne  font  que 
Grecs,  ce  manufcrit  eft  Grec-Lacin,  le  Latin  n'étant  pas  moins 
Original  que  le  Grec. 

On  y  a  mis  à  la  tefte  une  nouvelle  Approbation  de  Diony- 
fîuSj  qui  marque  que  le  Sieur  Panaiotti  en  a  fait  faire  une  fécon- 
de Edition  à  la  prière  de  ce  Patriarche,  &  que  ce  Seigneur  en  a 
diftribué  de  même  gratuitement  les  Exemplaires  dans  tout 
l'Orient.  Voici  cette  atteftation. 

jDEKJS  PARLA  MISERICORDE  DE  DIeV 

Archevêque  de  Confiantinople  la  nouvelle  Rome  ^ 
^  Patriarche  Oecuménique. 

CEux  qui  s'appliquent  continuellement  ,  &  qui  font  leur 
étude  jonrnaliere des  faints  Livres,  en  retirent  aiîèuré- 
ment  un  fruit  de  faluttrés-confîderable.  Car  elle  eft  comme  un 
chemin  où  on  ne  fe  peut  tromper,  qui  conduit  d'une  manière 
furnaturelle  ceux  qui  courent  droit  à  la  Gloire  éternelle  ,6c  qui 
leur  donneuneheureufefin,puilque  iélon  l'Ecriture  celui-là  eft 
heureux  qui  s'occupe  nuit  &  jour  dans  la  loy  du  Seigneur. 

C'eft  pourquoi  confiderant  que  la  ledure  de  cette  docftrine 
Orthodoxe  peut  eftre  fort  utile,  quiayanteftécompoféeil  y  a. 
qvielques  années  par  des  Docteurs  Orthodoxes,  approuvée^re- 
cûc  &:  confirmée  par  les  vénérables  Patriarches  qui  nous  ont 
précédé,  &  imprimée  quelque  temps  après  par  les  fouis ,  le  rra. 
•  vail  &  aux  dépens  du  très- fage&  très  Orthodoxe  Seigneur  Pa- 
najotti  Premier  Drogman  des  Empereurs  d'Orient  &  d'Occi- 
dent,  Tiôtre  très  cher  fils  fpirituel  plein  de  pieté  &  d'un  zèle 
4ivin,  avecune  fagefle  extraordinaire,  on  en  a  diftribué  gratui- 
tement de  Exemplaires  de  tous  collez  aux  Chrétiens  pour  l'u- 
tiUtc  commune  ;  &  que  tous  les  Exemplaires  ayant  eftéem-, 
ployezà  cette  diftnburion  qui  en  aefté  faite,  piufieurs  perfon- 
ncsqui  demandent  tous  les  jours  avecempreôeraent  une  pièce, 
.fi  utile  n'en  peuvent  avoir  ,  nous  avpns  crû  qu'il  eftoit  de  nôtre 
devoir  de  foigner  à  cela  ,  &;  de  follicirer  ce  même  Seigneur  de 
fuppléer  à  ce  défaut  par  fa  bonté  ordinairej&t  d'y  remédier  par 


unjec  ÎEgllfe  Romaine  fur  fEuchariflie.         6Sj 
une  féconde  impreffion  ,  lui  reprefentant  qu'il  s'acquerroic  par 
là  une  réputation  ,  non  feulement  égale  à  celle  qu'il  a  déjà  par 
toute  la  terre  ,&qui  n'eft  ignorée  deperfonne  ,  mais  une  meil- 
leure &  qui  la  furpaiîe  de  beaucoup  ,  quieft  celle  par  laquelle 
les  belles  actionsdeviennentimmortelles.  Et  comme  il  a  un  zè- 
le ardent  &  une  paffion  tres-grande  du  bien  public, i!  n'a  pas  né- 
gligé noftre  confeil ,  mais  au  contraire  il  l'a  aufli-toft  exécuté 
avec  l'aide  de  Dieu  ,  Se  par  une  féconde  impreiîîon  ,  a  donné 
de  nouveau  aux  fidèles  un  nombre  confîderable  de  livres^  ren- 
dant ainfi  un   fervice  important  à  celui  qui  en  eftoit  l'auteur  , 
en  ne  laiflant  pas  obfcurcir  fon  ouvrage.   Car  le  Sieur  Meletius 
Syrigus  Docleur  de  la  grande  Eglife  a  travaillé  avec  beaucoup 
de  fom,par  ordre  du  Patriarche  &  du  Synode, à  revoir  &:  à  met- 
tre en  ordre  ce  prefent  livre.  C'efl:  pourquoi,  Chrétiens  Or- 
thodoxes, recevant  ce  livre  de  la  Dodrine  Orthodoxe  favora- 
blement comme  pieux  &  utile  aux  ames^  rendez  en  grâces  k  ce 
commun  Bienfaci:eur,&  confervezlefansen  négliger  jamais  k 
leclrure  faluraire  ,car  on  trouve  la  vie  éternelle  dans  la  médita- 
tion des  Saintes  Ecritures,  laquelle  je  fouhaire  que  nous  ac- 
quérions tous  enjEsus- Christ  Notre  Seigneur, à  qui  /oit  gloi- 
re dans  tous  les  fiecles.  Ainfi  foie  il.  L'an  1672.  au  nîois  de 
Juillet ,  ïndicl:ion5. 

Sein  du  Patriarche, 
Denis   de  Constantinople. 

Mais  comme  cet  Original  efl  en  Grec  8c  en  Latin  ,  J'ai  cru 
que  s'il  eftoit  inutile  de  rapporter  le  texte  Grec  ,  qui  efbnt  en 
langue  vulgaire  feroit  entendu  de  peu  de  perfonnes,  il  ne  le 
feroit  pas  de  rapporter  ici  en  Latin  ce  qui  y  eft  dit  de  l'Eu- 
chariftie ,  qui  a  déjà  efté  cité  en  François  dans  la  rcponfe  ge, 
nerale. 

QJJ^STIO   C.   V.  I. 

Quodnam  Jît  tcnium  Afyfierium  ? 
Rcfponfuiti. 

Efl  Euchdrifli.a  flve  corpus  ^  fdH'Ziiis  Chrifii  T)or,iiyn  fuhfpecie 
fanis  Q-  vini  ,  &  realts  pr^cfeniia.  Hoc  Sucramentuyn  excellit  aliis 
(^  mugis  conducit  faliiti  avima  nofty^  ^  in  hoc  enim  Sacramento 
omnis  gratia  O' bonis  Chrijîifidclibusfnanifeflaturijj-  pr.vfentaiur. 

RRrr  iij 


Ch.  XIV. 


688  Liv.VIII.  Preuves  authent.de  tuniondes  Eg,  d'Or. 

D^NS   LA  QV  eSTION   SVIVANTE. 

Animaâvertendum  efl  ut  Sacerdos  haheat  talent  intentionem , 
quoi  ip fa  vera  (ubfiuntia  panis  ^  fubjlantia.  vint  tranffubfiantien- 
tur  in  verum  corpus  ^  funqutnem  Chrifii  ,  per  operationem  Spiri- 
tiis  Siincii ,  cujus  invocationem  facit  tu7n  temporis  ut  perficiat  My- 
fierium  hoc  ornndo  (^  dicendo^  mitte  Spintmn  Sancium  in  noi  ^  in 
hac prxpofita  dona^  ^fac  hune  fanem  pretiojum  corpus  Chrifii  tui  i 
quod  autcm  efl  in  hoc  calice  pretiofum  fanqtiinem  Chrifii  tui ,  tranf- 
7nutans  per  Spiritum  tuum  SanHum.  Statim  enim  ad  ha:c  verbafit 
îrav.ffubfiantiatio  ,  ^   tranfiubfiantiantur  panis  in  verum  corpus 
chrifii  ^  vinum  in  verum  faniuinem  Chrifii ,  remanentibus  folùm 
fpeciebiis  vifibilibtcs  ,  ^  hoc  fit  fecundum  divinam  difpofitionem 
propterduo.  Primo  ,  nevideamus  corpus  Chrifii ,  fedcredamus  illuà 
ejfc  propter  verba prolata à  Chrifio Domino^  Hoc  efl:  corpus  meum, 
O'  Hic  efl;  fanguis  tncws^plufijuam  fenjîbus  nofirts.  St  quidemfro 
hoc protnifit  nobis  beatitudinerrt  dicens  ,  beati  qui  non  vident  ^  cre- 
dunt.  Secundo  ,  quia  natara  humana  abhorretufum  viva  carnis,  ^ 
quoniam  débet  homo  uniri  Chrifio    Domino  per  communionem  car- 
nis chrifii  Domini  ^  fanyiinis  Chrifii  Domini.  Ne  igitur  abhor- 
reret  ,  confiituit  Dominm  dare  carnem  fuam  (^  fanyuncm  fuumin 
efum  ^T  potum  fub  fpecicbiis  panis  ^  vini.  De  quo  Divi  Damafce^- 
ntis  ^  Gregorius  1>7 ajfentts  fufius  difputant. 

DE  EJ^HIBENDO  MONO  RE  QVJ  DEEETVR 

huic  Myfierio  tanquam  ipfiChrifio. 

Quemadmndunt  SanEîus  Petrus  de  illo  ore  omnium  Apofiolorum 
dixit  :  Tu  es  Chrifius  Filius  Dei  vivcntis ,  ita  ô"  nos  dicifnus  cultu 
Zatri^e,  Credo  Domino  ,  ^  confiteor  quodtu  es  Chriftas  Filius  Dei 
vivi.  Efi  etiam  id  Myfierium  Sacrificium  pro  vivts  ^  defuniiis  iis 
qniin  fpe  refurreBionis  mortui  funt ,  quod  Sacrificium  ad  extremum 
jtidicium  non  ccffabit. 

Il  y  a  à  la  fin  du  Manufcric  un  ade  Je  legalifation  de  M.^ 
l'Ambafladeur,  qui  reijd  témoignage  de  la  vérité  de  ce  que  j'^ay 
rapporté.  En  voici  les  termes. 


N 


a^vec  ÏEgliJe  Romaine /ûr  tEUchiinfiie.  6S9 
Ous  CharlesFrançoisOlier  de  Noincel,  Confeillerdu  Ca.  XIV. 
_  .  Roy  en  Tes  Confeils ,  en  fa  Cour  de  Parlement  de  Paris , 
&  Ambalîadeur  pour  Sa  Majefté  Très. Chrétienne  à  la  Porte 
Otthomane  j  certifions  &  atteflons  que  le  prefent  Manufcrit 
Latin  &:  Grec,  intitulé  la  Confelhon  Orthodoxe  de  l'EoJile 
d'Orient  j  nous  a  efté  mis  entre  les  mains  par  le  Sieur  Pana- 
jotti  premier  Interprète  de  la  Porte,  qui  nous  ayant  afiuré  qu'il 
ferviroit  puiflammentàétablir  la  vérité  duLivredu  mêmetitre 
'imprimé  par  lés  foins,  puifqu'il  en  eft  l'un  àts  originaux  ,  &; 
que  les  fîgnatures  originales  des  Patriarches  s'y  trouvent,nous 
a  priez  par  le  zèle  de  venger  fon  Eglife  des  outrages  qu'on  iuy 
fait ,  de  faire  enforte  que  Sa  Majefté  ait  la  bonté  de  l'agréer 
pour  la  confufîon  de  ceux  qui  en  voudroient  douter.  Et  comme 
il  s'eft  fait  un  point  de  confcience  &  d'honneur,à  l'imitation  àas 
Patriarches  &  Prélats  de  fon  Eglife,  de  mettre  le  fait  contellé 
dans  toute  l'évidence  poffible,  il  nous  envoya  l'année  paiTce 
une  approbation  de  ce  même  Livre  par  le  Patriarche  Denis 
tenant  alors  le  Siège  de  Conflantinople,  que  nous  avons  mife 
à  la  tefte  de  ce  Manufcrit.  Toutes  ces  veritez  eftantconftantes, 
nous  nefaifons  pas  difficulté ,  afin  que  perfonne  n'en  doute, 
de  les  confirmer  par  noftre  fignatiire&  fceau  de  nos  armes,  6c 
lecontre-feing  de  notre  premier  Secrétaire. 

Donné  à  nôtre  Palais  fur  le  Canal  de  la  Mer  Noire  l'onzié" 
me  Septembre  1673. 

OlierdeNointel.  - 

AmbafTadeur  pour  Sa  Maiefté  à  la  Porte  Otthomanc. 

Parmondit  Seigneur, 

Le  Picard. 


wm 


m^"^ 


690  Li  V.  VI  H.  Frewves  authen.  de  l* union  des  Eg.  d'Or, 


CHAPITRE     XV. 

Union  de,  l'Eglife  Grecque  avec  l'Eqlife  Romaine  fur  rEucha- 
rifiie  éprouvée  par  l'Acie  Synodal  fait  far  le  Patriarche  de  Je- 
rufalcm  ,  ^  toute  [on  EZ^life  contre  les  calomnies  des  Calvi- 
nifies. 

Quelque  considérables  que  foient  les  Aâ:es  qui  ont  eflc 
produits  jufqu'ici,  on  peut  dire  que  celui  dont  nous  al- 
Ions  rapporter  l'Extrait  a  quelque  chofe  qui  mérite  d'eflre  par- 
ticulièrement confideré.  C'efl:  un  Patriarche  qui  y  parle  avec 
grand  nombre  d'autres  Evêques,qui  entreprend  lui  même  la 
défenfe  de  l'Eglife  Orientale  ,  &qui  ne  le  fait  pas  feulement 
entendant  témoignage  de  fafoy,  &  en  condamnant  les  Cal- 
viniftes,  mais  auflî  en  éclairciflant  les  principaux  faits ,  dont 
ils  ont  prétendu  abufer,  &  principalement  ce  qui  regarde  Cy> 
rille  Lucar.  On  y  voit  le  peu  de  fondement  de  l'avantage  que 
les  Calviniftes  ont  voulu  prendre  des  articles  qu'ils  avoient 
tirez  de  lui  ^  la  diffimulation  perpétuelle  de  Cyrille  5  combien 
l'Eglife  Orientale  a  toujours  efté  éloignée  de  participer  à  fes 
erreurs,  &  enfin  la  vérité  des  deux  Synodes  tenus  contre  lui, 
que  M  Claude  a  traitez  de  fuppofez  par  une  témérité  dont  il  y 
a  peu  d'exemples. 

Tout  cela  efl:  contenu  dans  un  Livre  manufcrit  adreflé  à  Sa 
Majefté  même  par  le  Patriarche  dejerufalem^  poureftre  mis 
en  fa  Bibliothèque  ,  où  ceux  qui  le  voudront  voir  le  peuvent 
faire.. 


EXTRAIT 


tt^ec  ÏEglîfe  l{omaine  fur  lEuchmftie.  égr 

EXTRAIT      LV      TRAIT  TE'      SYNODAL    COMPOSE'     PAR 

le  Patriarche  de  Jerufilem,  ^  far  [on  Synode^  intitulé^ 

Bouclier  de  la  Foy  Orthodoxe. 

Ou  Apologie  contre  les  hérétiques  Calvini/îes  qui  accufent  /'£- 
^life  d  Orient  d'avoir  des  fentimens  femblables  aux  leurs  fur 
Dieu  ^  les  chofes  divines. 

Compofèe  far  le  Synode  de  Jerufalem^  fous  le  Patriarche  'Djfithèe. 

Le  Froloyie  ne  contient  autre  chofe  que  l'entrée  du.  difcours  :  vers 
la  fin  il  y  a  cecy, 

NOuseftancdonc  aflemblez  parla  grâce  deDieu  pour  la 
Dedicacedela  Ste  Eglifede  Bethlcem  ,  lieu  de  la  naifl 
fance  ,  félon  la  chair  ,  de  J.  C.  noftre  Sauveur  &  noftre  Dieu, 
que  le  Seigneur  a  permis  qu'on  rebâcift  dans  ces  temps  mife- 
râbles  de  perfccution  :  &  qu'il  fût  donné,  embelli  de  nouveau, 
aux  véritables  enfans  de  l'Eglile  Catholique  par  toute  la  terre, 
s'eftant  trouvé  avec  nous  plufîeurs  PreflreSj  Religieux  ,  & 
autres  Chrefliens  venus  en  dévotion  des  extremitez  de  la  terre, 
nous  avons  cru  que  nous  devions  dire  en  abrégé  noftre  fen- 
timenc  fur  les  chofes  donc  on  accufe  l'Eglife  Apoflolique  , 
noftre  mère  nourrice,afin  de  rendre  manifefte  à  tout  le  monde 
la  foy  que  noftre  Seigneur  a  lailTée  par  tradition  ^  que  les 
Apoftresont  prefchée,  que  les  faints  Pères  ont  gardée^Sc  que 
rimpofture  des  adverfairesfoit  reconnue  d'une  manière  con- 
vaincante. 

Il  faut  donc  f(^avoir  que  ces  hérétiques  ne  fçachant  point 
les  opinions  de  l'Eglife  Orientale  fur  Dieu  &  les  chofe  divines, 
l'accufenc  exprés,  pour  tromper  par  là  les  plus  ilmples  Car 
s'eftant  déjà  feparez  des  Occidentaux,  &  ayant  enfuite  re- 
noncé à  toute  l'Eglife  ,  ils  font  évidemment  convaincus  d'ef. 
tre  hérétiques,  &  même  les  principaux  chefs  des  heretiquesi 
ayant  non  feulement  introduit  des  dogmes  nouveaux  &:  ridi- 
cules, fi  on  peut  néanmoins  appeller  dogmes,  de  pures  fa- 
bles^  mais  n'ayant  aucune  communion  avec  l'Eglife ..... 

L'Eglife  d'Orient  n'a  point  d'autre  fentiment,  &  d'autre 
<JD<f^rine  que  la  parole  de  Dieu,  crue  de  la  manière  qu'il  faut,  bc 
expliquée  par  les  Saints  Pères  d'une  manière  pieufe,&  lestra- 

S  S  lï 


Ch.  X  V, 


6<)iLiv.Vlîl.  Prewves  authm.  de  l'union  des  Eg^d'OK 

ditions  que  les  Apoftres  ont  lailTees  de  bouche,&;  que  les  Pères 
ont  gardées  jufqu'à  nous.  Au  lieu  que  les  hérétiques,  s'arref- 
tant,  comme  il  leur  eft  ordinaire,  à  leur  propre  rentimentfonc 
fourds ,  èi.  ne  reviennent  point  au  bon  chemin.  Mais  de  peur 
que  le  temps  ne  nous  manque.  Ci  nous  rapportions  les  paflages 
de  l'Ecriture  &  des  anciens  Pères  fur  ce  fujet,nous  nous  con- 
tenterons de  ra{.-porter  là  deflus  ce  qui  s'eft  pafle  parmi  nous. 
Cinquante  ans  après  Luther,  Martin  Crufius,  &  quelques 
autres  fçavans  Luthériens  de  Tubinge  en  Allemagne ,  envoyè- 
rent des  articles  de  leur  herefie  à  celuy  qui  gouvernoit  pour  lors 
l'Eglife  de  Conftantinople,  afin  de  voir,  comme  ils  difoient , 
«.'il  eftoient  dans  les  mêmes  fentimens  que  l'Eglife  d'Orient. 
Ce  célèbre  Prélat  leur  écrivit  trois  fois  ayant  compofé  des 
difcours  contre  eux,  ou  plikoftdes  traitiez  dogmatiques,  où  il 
refutoit  routesleurs  herefies  d'une  manière  orthodoxe  Si  theo- 
Iogique,&:  leur  enfeignoit  toutes  les  opinions  qui  fe  font  depuis 
tout  temps  confervées  dans  l'Eglife  d'Orient,  à  quoy  néan- 
moins ils  n'eurent  aucun  égard  ayant  renoncé  à  la  pieté.  Le 
Livre  eft  imprimé  en  Grec  ôc  en  Latin  à  Vvittemberg  l'an 
J584. 

Devant  ce  Patriarche  "^eremie,  Jean  Nathanaël  PreltreSc 
Econome  de  Conftantinople  dans  fon  expofîtion  delà  Litur- 
gie, &:  après  luy  Gabriel  Severe  Archevefque  des  Grecs  de  Ve- 
nize  dans  fon  petit  traitté  desfept  Sacremens de  l'Eglife,  ons 
rapporté  fort  clairement  les  fentimens  de  l'Eglilé  d'O- 
rient. 

Et  non  feulement  ceux-là ,  mais  encore  plufieurs  autres  ont 
écrit  de  ce  mcnie  iujet  depuis  peu  de  temps,  comme  nous  le 
rapporterons  quand  il  en  fera  temps. 

Il  y  a  fix  ou  fept  ans  que  Ton  a  imprimé  un  livre  intitulé,  Co«- 
fc,IJîon  Orthodoxe  de  l'Eglife  Oriennale ,  compofé  par  Pierre 
Mctropolitain  de  IQaibe^  de  mis  en  ordre  &  éclairci(  y  ayant 
quelques  endroits  qui  avoient  befoin  d'éclairciflement)  par 
Melece  Syrigus  Protofyncelle,  &.  Dodeurde  la  grande  Eglife 
de  Confbantinople,  par  l'ordre  du  Concile  tenu  à  '^afium.  Tou- 
te l'Eglife  d'Orient  la  reçut  alors  &  la  reçoit  abfolument,  & 
le  très  b.")n,  tres.illuftre  &  tres-fage  Seigneurie  Seigneur  Pa- 
najotti,  Drogman  Bacchi  du  grand  Seigneur  ,  extrêmement 
zélé  pour  la  pieté,  l'a  fait  imprimer  conformément  à  l'Original 
fans  y  rien  ajouter  ou  diminuer. 


» 


mec  ÏEgVîfi  Romaine  fur  VEuchariflie.  693 

Puifque  nos  adverfaires  Tçavenc  donc  coures  ces  cliofes,  &  que  Ch.  X  V. 
îaplurparcde  ces  livres  font  imprimez  chezeuxj  venant  après 
à  nous  accufer,  il  efl:  clair  ,  que  ce  n'eft  pas  qu'ils  ignorent 
nôtre  foy,  mais  quec'eft  par  une  grande  impudence  qu'ils 
tâchent,  pour  furprendre  les  plus  iîmples,  de  nous  attribuer 
des  chofes  qui  ne  nous  conviennent  point. 

Mais  on  leur  peut  bien  dire,  ce  qui  eft  vray,  que  la  vérité 
cft  fimple,  au  lieu  quelemenfonge  eft  tout  au  contraire. 

C'eft  pourquoy  ces  gens  fe  doutant  bien  que  le  menfono-e 
qu'ils  avoient  fait  à  plaifir  eftoit  appuyé  fur  un  fondement 
pourry,ils  ont  recours  à  une  autre  entreprife  très-  pernicieufe 
Se  auflî  mal  fondée.  Car,  afin  de  n'cftre  point  convaincus  par 
tout  ce  qu'il  y  a  de  Chreftiens  en  Europe,  &  pour  n'eftre 
point  condamnez  comme  des  impofteurs  publics  par  ceux 
d'Orient,  ils  oppofent  Cyrille  Lucar  natif  de  Crète,  Pa- 
triarche de  Conftantinopleil  y  a  quarante  ans,  comme  ayant 
donné  une  efpece  de  Confefîion  en  18.  chapitres,  &:  quatre 
interrogations,  au  nom  de  l'Eglife  d'Orient,  qui  montre  que 
cette  Eglifê  eft  dans  les  mêmes  fentimens  qu'eux.  Mais  cette 
invention  eft  aulTi  facile  à  détruire, &:  eft  auffi  impofîible  que 
les  autres,  quoy  que  ce  foie  la  plus  grande  dont  ils  fe  foient  avi- 
fez.  Car  on  montrera  avec  l'aide  de  Dieuj 

Premièrement  que  jamais  l'Eglife  d'Orient  n'a  connu  Cyril- 
le pour  tel  que  nos  adverfaires  difent  qu'il  eftoit,  &  n'a  jamais 
connu  ces  chapitres  comme  fon  ouvrage. 

Secondement,  que  fuppofé  même  qu'ils  fufîènt  de  luvj  il 
lésa  donnez  tout  à  fait  en  cachette,  fans  qu'aucun  des  Orien- 
taux, 6c  bien  moins  de  l'Eglife  Catholique,  en  euft  connoif. 
fance. 

Troifiémement  que  la  confelîîon  de  Cyrille  n'eft  point  la 
confefîion  de  l'Eglife  d'Orient. 

Quatrièmement ,  qu'il  eft  impoffible  que  les  Orientaux 
ayent  eu  connoiflance  de  cette  confefllon,  ou  que  le  (cachant 
il  eft  abfolument  impoffible  qu'ils  fuilenc  Chreftiens. 

Cinquièmement,  que  les  Orientaux  ont  toujours  eu  tant 
d'horreur  de  ces  chapitres , qu'on  a  fouventveu  Cyrille  pro- 
teftercontrej&  enfeigner  le  contraire  dans  l'Eglife^èc  que  feu- 
lement à  caufe  qu'il  n'avoit  pas  écrit  contre  ces  chapitres,  il 
avoir  eftc  frappé  d'excommunication  &  d'anathême  dans  deux 
Conciles  fort  nombreux. 

SS  ffii 


694  Liv.  VH I.  Preuves  authen.  de  l'union  des  Eg,  d'Or. 
CHAPITRE    PREMIER. 

TOut  homme  qui  voudra  agir  de  bonne  foy  reconnoiflra 
obfolumencque  jamais  Cyrille  n'a  efté  connu  dans  l'E- 
glife  d'Orient  comme  cftant  dans  les  fentimens  desCalvini- 
ftes.  Car  ayant  efté  patriarciie  d'Alexandrie  après  Melece,& 
élu  enfuite  par  le  Clergé  de  Conftantinople,  où  il  fe  trouvoit 
alors,  il  fur  transféré  à  ce  Siège,  fans  avoir  enfeigné  dans  au- 
cun Cond'e,  ni  dans  l'Eglife,  ny  dans  la  maifon  d'aucun  Or- 
thodoxe ,  en  un  mot  ny  en  public  ny  en  particulier,  ce  que  les 
adverfaires  luy  attribuent.  S'ils  difent  que  Cyrille  ait  dit  quel- 
que chofe  de  cette  nature  à  quelqu'un  en  particulier,  ou  à  plu- 
fîeurs,ils  ne  fçavent  ce  qu'ils  difent.  Il  falloit,  s'ils  vouloient 
porter  témoignage,  ne  le  pas  faire  d'eux-mêmes;  parce  qu'aine- 
fï  nous  les  convainquons  qu'ils  le  calomnient,  8c  que  n'ayant 
point  connu  Cyrille,  ils  ne  font  point  dignes  de  foy^  mais  fe 
îervir  du  témoignage  de  ceux  qui  ont  connu  Cyrille, dont  il  y 
en  a  encore  dix  mille  en  vie.  Ceux  qui  ne  1  ont  jamais  veuaflu- 
rent  qu'il  eftoitdans  leur  herefie,  &  ceux  qui  l'ont  fervi  pen- 
dant 1  cfpace  de  plufieurs  années,  &  qui  ont  veu  tout  ce  qu'il 
faifoif,  déclarent  qu'il  n'eftoit  point  tel. 

r.  On  ne  voit  point  aucun  écrit  de  fa  main,  qui  ne  foit  fuf- 
ped,  &C  qui  foit  conforme  à  ce  que  témoignent  ces  a-dverfai- 

1.  Nonfeulement  nous  avons  plufieurs  témoins  qui  confef 
fent  que  Cyrilk  profeiToit  publiquement  les  fentimens  de  pic- 
té^&  qui  ne  luy  ont  jamais  entendu  rien  dire  d'heretiquej  mais 
encore  nous  avons  un  2;rand  livre  écrit  de  la  main  de  Cvrille, 
dans  lequel  on  voit  les  homélies  qu'il  a  prechéesàConftanti- 
nople  les  Dimanches  &  jours  de  Feftes^  &:  qui  contiennent  des 
chofes  tour  à  fait  contraires  à  ces  chapitres  luppofez,  dont  nous 
rapporterons  quelque  chofe  pour  donner  une  certaine  afluran»- 
ce  de  ce  que  nous  difons, 

//  y  a  en  cet  endroit  quelques  paffages  tiret^  de  ces  homélies 
de  Cyrille^  contraires  à  ce  qui  eji  contenu  dans  chacun  des  Articles 
de  la  confc,ffîon  de  Cyrille  Lucar.  Koicy  ceux  qui  re^irdent  l'Eu- 
s  harifiie. 

Contre  le  dix-feptieme  chapitre,  de  l'hoinelie  fur  le  vaifleau 
agité  au  milieu  des  flots. 


î 

avecTEglife  Konmine  fur  ÏEuchmfiie.  69 j 

Quand  vous  recevez  la  Cemmurion  que  voyez- vous Z  Cm.  XV. 
Du  pain  êc  du  vin  i  Ne  diftinguez-vous  pas  ?  Vous  voyez  un 
phantôme ,  fi  vous  n'en  regardez  pas  davantage.  Mais  fi  vous 
ouvrez  vos  yeux  intérieurs .  ôc  que  vous  voyez  le  Seigneur  , 
vous  reconnoiflez  là  la  chair  du  Seigneur.  Vous  voyez  aujour- 
d'huy  comme  les  Dilciples.  Ils  virent  comme  unph  antôme,ik; 
ils  virent  auffi  en  vérité.  Quand  ils  virent  comme  un  phantô- 
me, ils  furent  troublez;  quand  ils  virent  en  vérité,  ils  reconnu- 
rent ,  êc  ils  furent  confolez  &  furent  délivrez  de  la  tempefte, 
le  navire  fut  fauve,  &  eux  avec  le  navire. 

Dans  l'homélie  fur  l'Evangile  des  cinq  Pains:  Le  Seigneur 
rompit  du  pain  trois  fois  i  la  première  dans  la  Cène  myftique 
en  faint  Luc  22,.  où  il  nous  ordonna  de  recevoir  la  puifiance 
infinie  de  la  Divinité  dans   la  tranfiubftantiation  du    pain, 

CHAPITRE        IL 

LE  chapitre  fécond  prouve  que  fi  Cyrille  e(l  fappofè  cjîre  fau- 
teur de  ces  chapitre  s  ^  il  les  a  faits  en  cachette  y  fins  que  pe  r- 
fonne  des  Orientaux  en  eufi  connoifjance. 

Le  premier  chapitre  eft  clair,  par  ce  que  nous  avons  dit.  On 
prouve  celuycy  par  quelques  autres  chofes  ineonteftnbles. 
Car  s'il  les  avoit  faits  publiquement,  il  s'en  feroit  enfuivi  ne- 
cefl^iirement  trois  choies,  entre  autres? 

Premièrement,  qu'ils  euflent  efté  fignezpar  lesPrelats  îv  au- 
tres Ecclefiaftiques  qui  demeuroient  avec  luy,qui  demeurent 
toujours  avec  le  Patriarchc,êc  qui  font  tout  avec  luy  (l'ancienne 
Rome  les  appelle  Cardinaux.  )  Mais  les  accufateurs  ne  le  peu- 
vent montrer  en  aucune  manière. Car  aucun  des  Prélats  &:  Ec- 
clefiaftiques  ne  connoiflent,  ny  n'ont  figné  cts  chapitres, &:  n'en 
ont  mêmejamais  entendu  parler  à  Cyrille. 

Secondement,  ils  euficnt  efté  tranfcrits  dans  le  livre  de  la 
grande  Eglife,&  cette  copie  euft  efté  fignée  par  les  mêmes  qui 
avoient  figné  l'Original.  Car  tout  écrit  concernant  la  fcy,  ou 
quelque  autre  affaire  Ecclefiaftique,  qui  eft  fait  par  le  Patriar- 
che &  pafi^e  pour  un  ade  fynodique  &  drelTé  par  délibération 
fynodalc,eft  infère  comme  tel  dans  ce  livre.  Mais  les  chapitres 

SS  ff  iij 


<j96  Liv.  VIII.  Prennes  authent.  detumon  des  Bg.d'Or. 

qu'on  die  eftre  de  Cyrille  ne  font  point  tels,  puifque  non  feule- 
ment on  ne  les  a  point  inférez  dans  ce  livre,  mais  encore  par^e 
qn'il  n'y  a  que  fort  peu  d'Evêques  &  d'Ecclefîaftiques  qui  jufl 
ques  icyen  ayenteuconnoiflànce,  tant  s'en  faut  que  le  peuple 
an  ait  au  cune. 

Troifiémement, il  faudroit qu'ils euflènt  efté  tranfcrits  dans 
le  livre  par  quelqu'un  des  Ecclefiaftiques.  Mai  au  contraire 
aucun  des  Ecclefiaftiques  ne  les  a  tranfcrits  dans  aucun  livre  de 
la  grande  Eglifc  ni  aucun  autre;  comme  au  contraire  on  voit  les 
ades  Synodiques  &;  les  autres  concernant  la  foy,  principale» 
ment  les  adles  du  Seigneur  Jeremie  contre  les  Luthériens, 
qui  font  couchez  dans  le  grand  livre  avec  le  nom  de  l'EccIe- 
iîaftique  qui  lésa  écrits,qui  eft  Théodore  Zygomale  le  grand 
Retheur.  La  vérité  de  ce  que  nous  difons  paroiftra  de  là  claire 
comme  le  Soleil.  Car  fi  Jeremie  écrivant  en  particulier  aux 
Luthériens,  &nonSynodalement,  mais  lui  feul, afin  de  rendre 
ce  qu'il  écrivoit  digne  de  foy,  &;  hors  de  coure  reprehenfion, 
crut  en  devoir  mettre  une  copie  dans  ce  livre  &  les  faire  figner 
enfuite  par  le  grand  Retheur3  comment  Cyrille  faifant  une 
confellîon  6c  parlant  au  nom  de  l'Eglife  d'Orient,  n'a  t  il  pas 
eu  foin  de  les  faire  tranfcrire  dans  ce  livre,  ni  de  les  faire  figner 
par  aucun  des  Prélats  ou  Ecclefiaftiques,  ni  par  aucun  autres 
Cela  fait  voir  qu'elle  a  efté  faite  en  cachette. 

CHAPITRE    TROISIE'ME. 

L  eft  auffi  évident  que  cette  confeffion  de  Cyrille  ne  peut 
eftre  la  confeffion  de  l'Eglife  d'Orient,  &  que  perfonne  ne 
le  peut  dire  fans  eftre  fol,  &  tâcher  de  contredire  les  chofes 
les  plus  évidentes.  Car  'à  ce  Cyrille  eftoit,  comme  on  dit ,  aC 
furément  &  véritablement  hérétique,  qu'il  ait  compofé  cef- 
dits  Chapitres,  &  qu'il  ait  enfeigné  à^s  chofes  en  public,  & 
qu'il  en  ait  cru  d'autres  dans  fon  cœur,  il  a  écrit  &  cru  contre 
fa  confcience&  non  pas  contre  l'Eglife  d'Orient  qui  eft  proté- 
gée par  le  Saint  Efprit.Quelesadverfairesne  tirent  donc  point 
avantage  d'un  trompeur  6c  d'un  vray  athée,  puifqu'on  peut 
ainfi  appeller  un  homme  qui  fe  joue  de  Dieu,  ayant  dans  le 
cœur  d'autres  fentimens  que  ceux  qu'il  confefioit  de  bouche, 
fe  jouant  dans  des  chofes  où  il  n'y  a  point  de  jeu.  Que  s'il  a 
écrit  de  la  part  de  l'Eglife  d'Orient,  qu'eft- ce  que  cela  nouj 


{ 


a'VecÎEgU/è  Romaine  fur  VEuchmdie.         697 
regarde.^  Qu'il  rougiiîè  le  menteur,  auffibien  que  tous  ceux  Ch.  a  V, 
€jui  s'arreftent  à  ce  menfonge  évident  comme  à  une  vérité.    * 

CHAPITRE    QUATRIE'ME. 

ON  peut  voir  clairement  de  tout  ce  qui  a  efté  déjà  dit,  que 
TEglife  d'Orient  eft  au  delfus  de  toutes  les  calomnies  que 
ces  adverfaires  ont  in\  entées  contre  elle  ,  &  qu'elle  n'a  jamais 
fait  ou  cru  ces  chapitres  de  Cyrille,  &  la  dotftrine  impie  qui  y 
eft  contenue. Car  elle  eft  fort  éloignée  de  n'cftre  pas  fortemenc 
appuyée  fur  la  foy  des  Apoftres  &:  des  Prophètes,  &:  d'eftre  agi- 
tée parles  vents,  comme  des  nues  fans  eauj  puifqu'elle  a  pour 
maiftrc  Se  pour  guide  le  S.  Efprit, 

Nous  difons  qu'il  eft  impoffible  que  l'Eglife  d'Orient  ait  cruce 
qui  eft  compris  dans  les  Chapitres  de  Cyrille,  bc  que  ft  elle  l'a- 
voitcru,il  feroit  impoffible  qu'elle  eût  de  paix  avec  Jesus- 
Christ.  Il  paroift  clairement  que  le  premier  eft  vray.  Car  il 
falloir  que  lesOrientaux,  s'ils  eftoient  tombez  dans  cette  extré- 
mité que  leur  impotent  leurs  adverfaires^  témoignaftent  leur 
foy  non  pas  par  de  fimples  paroles,  mais  par  des  effets.  Et  pre- 
mièrement il  falloit  qu'il  donnallènt  une  confeffion  par  écrit 
avec  toutes  les  qualitez  qui  font  marquées  dans  le  troifiéme  cha- 
pitre. Secondement  qu'ils  renverfaiîent  tous  les  degrez  du  Sa- 
cerdoce, èi.  principalement  la  différence  de  l'Epifcopat  avec  les 
autres  degrezj  de  forte  que  les  Evefques  ne  fuiîent  point  diftin- 
guez  des  preftres,  comme  la  confellion  de  Cyrille  pleine  de  fo- 
lie le  fait  obfcurement  entendre.  Mais  cela  n'eft  point  arrivé 
aux  Orientaux^  ni  cela  ne  leur  arrivera  point  avec  la  grâce  de 
Dieu  nôtre  Sauveur  ,  puifque  jufqu'à  prefent  les  dtgrcz  du 
Sacerdoce  font  diftinguez  réellement  parmy  eux.  Donc  les 
Orientaux  n'ont  point  ajouté  foy  à  la  folie  de  Cyrille. 

Il  falloir  anlîl  qu'ils  n'euifent  point  fept  Sacremens,  &  qu'ils 
oftalTent  des  EsiHfes  8c  Oratoires  le*;  S^"  Imagesi  qu'ils  ne  fîf- 
iènt  point  le  figne  de  la  croix  vénérable,  qu'ils  n'honorallenc 
point  les  Reliques  des  SaintSj  qu'ilsne  leur  fiftent  point  des 
Fêtes  5  qu'ils  neleur  chantalfent  point  d'hymnesi  qu'ils  s'ab- 
ftinfent  des  mémoires  &  bonnes  œuvres  pour  les  morts,  &  de 
faire  l'Office  des  faints  Myfteres  comme  veulent  les  adverfaires 
mêmes. 

Mais  jamais  les  Orientaux  n'ont  rien  fait  defemblable.  Car 


6<)%  Liv.  VIÏI.  Preuves  authen.  de  l'union  des  Eg.  d'Or. 
îion  Seulement  ils  confeflenc  lîmplement  qu'il  y  a  lept  Sacre- 
mens,  mais  ils  font  tousses  jours  landifiez  par  leur  moyens  & 
non  fcrulement  il  n'y  a  point  d'Oratoires,  mais  il  n'y  a  pas  même 
de  maifon  particulière  de  Chreftiens  où  il  n^y  aitdeiainte>Lna- 
ges  Se  des  lignes  de  la  croix  vivitîance^qu'ils  ont  toujours  con- 
tre les  démons  comme  une  arme  à  laquelle  ils  ne  peuvent  re- 
fifter.  Ils  honorent  tellement  les  faintes  Reliques,que  dans  tou- 
tes les  maladies,  ils  s'en  fervent  comme  de  médecin,  6c  les  ho- 
norent comme  des  Serviteurs  de  Dieu,  comme  témoignent  les 
livres  du  Paracliticon^  Triodion  ^  Martyrologes  ^  qu'on  chante 
tous  les  jours  chez  eux.  ils  ont  de  fi  bons  fentimens  (ur  les  mé- 
moires, que  toûjours,&  principalement  chaque  Samedy&  jours 
de  feftesjils  offrent  à  Dieu  le  Sacrifice  non  fangiant  pour  rou- 
tes les  âmes  des  Chreftiens  vivans  &:  morts ,  appaifant  Dieu 
par  des  aumônes  &  des  offrandes.  En  un  mot  les  Orientaux 
iont  fi  peu  attachez  à  la  foy  de  ces  chapitres,  qu'ils  y  (ont  com- 
me on  a  dit  diretflement  oppofeZj  ne  s'éloignant  en  rien,  non 
pas  même  dans  les  moindres  chofes,  des  traditions  des  Apôtres 
&des  Pères.  Il  eft  donc  impcfFible  que  les  Orientaux  ayenç 
connu  laconfelfion  de  Cyrille. 

Il  faut  enfuite  venir  à  l'autre  partie  qui  cfl ,  que  Ç\  par  hazard 
il  faut  accorder  que  les  Orientaux  ayeut  jamais  cru  ce  que  les 
ennemis  veulent  ,il  eft  impoffible  qu'ils  foient  Chreftiens.  Car 
il  y  a  trois  chofes  principales  qui  conviennent  necefîairement  à 
celuy  qifii  croit;  la  foy  du  cœur  exempte  de  doute  pour  la  jufi:!- 
ce,  la  confefTion  de  la  bouche  pour  le  falur,  &  le  fruit  de  Fa  foy 
&  de  la  confertîon,qui  font  les  œuvres  de  la  vie  Chreflicnne 
agréables  à  Dieu. 

Les  Orientaux  donc,  croyans  comme  prétend  la  confefîion 
de  Cyrille,  ne  l'ont  pas  cru  par  leurs  paroles,  ayant  jufqu'à  pre- 
fent  confeffé  tout  le  contraire  de  ces  Chapitres. 

Ils  n'ont  pasaufli  de  rciîemblanceavec  lesCalviniftes  paries 
çeuvres,commeon  a  dit  cy-deflus.C'eft  donc  du  cœurfeul  qu'ils 
font  d'accord  avec  les  hérétiques,  qu'ils  ont  compofc  la  foy  de 
ces  chapitres.  Car  nous  voulons  bien  faire  ces  fuppofitionsqui 
paroilîênt  peu  ferieufes  pour  réfuter  en  cette  manière  les  im- 
pertinences des  Calviniftes.  Si  cela  efl:  vray,  il  efl:  impoflible 
qu'ils  foient  Chreftiens,  puifque  celuy  qui  croit  une  chofe  dans 
le  cœur,  &  qui  en  confefle  une  autre  de  la  bouche  &  parfes  œu- 
vres, tel  qu'on  fuppofe  qu'a  efté  Cyrille,  eft  digne  tres-affuré- 

menc 


I 


a.'vec  ÎEglife  %omànefurTEucha.rijtie.        699 
ment  non  feulement  de  la  participation  avec  Jesus-Christ,  C  h.  XV. 
mais  auffi  du  nom  de  Chrétien.  Car  ainfi  Judas  quicroyojt,&: 
qui  paroiircit  un  Difciple  en  public ,  &  qui  dans  le  fond  eftoic 
un  trailtre  ,  a  efte  précipité  dans  le  feu  éternel. 

Que  fi  pour  quelqui's  empêchemens  les  Orientaux  n'ont 
pu  communiquer  de  bouche,  ni  même  par  les  œuvres  aux  Cal- 
viniftes ,  au  moins  r>e  dévoient  ils  pasj  ayant  le  cœur  de  leur 
côté  ,  s'emporter  contr'eux  d'une  manière  impitayable  ;  mais 
ils  le  font  d'une  telle  manière,  que  le  premier  Dimanche  après 
l'onzième  d'Odobre,  Scie  Dimanchedu  Carêmequ'ils  appel- 
lent ôp^oJ'u^/its ,  ils  prononcent  anathême  contre  les  Ii  onoma- 
ques ,  6c  ceux  qui  difent  que  le  pain  &  le  vin  de  l'Euchariftie 
ne  font  pas  réellement  &  véritablement  changez  après  la  con- 
fecration  au  véritable  corps  &:  fang  de  J.  C.  mais  par  image, 
iîmilitude ,  figure ,  ou  métaphore. 

Il  y  a  en  cet  endroit  des  Anathèmes  tirez^  de  ce  qui  fe  dit  dans 
les  Dimanches  marquez^ci-âefjiis. 

A  ceux  qui  difen  t  que  le  Sacrifice  qui  eft  offert  toas  les  jours 
par  ceux  qui  ont  reçu  de  J.  C.  la  puiflance  de  célébrer  les 
Éiints  Myfteres,  n'eft  pas  offert  à  la  Sainte  Trinité  ,  comme 
eftant  en  cela  contraires  aux  Saints  Pères. 

ânathe'me    trois    fois. 

'A  ceux  qui  écoutent  la  voix  du  Sauveur  difânt  de  la  célébrai 
rion  des  divins  Myfteres  qu'il  a  laiflce  par  tradition:  i^^/ze^rd'/^ 
en  memaire  de  moy  ^  mais  qui  ne  prennent  pas  bien  ce  mot  de 
mémoire  ,  &  qui  concluent  delà  que  ce  facrifice  eft  différent  de 
celui  que  le  Sauveur  célébra  lui  même  au  commencement,  6c 
qui  le  rapportent  à  celui-là  d'une  manière  figurée  êcimaginaire^.. 
comme  rendant  vain  le  Sacrement  de  la  divine  &  terrible  Li- 
turgie ,  par  lequel  nous  recevons  le  gage  delà  vie  future:  faint 
JeanChrvfoflofne,ce  divin  Pere,expliquan:  iibien  l'immurabj- 
lité  de  ce  Sacrifice  ,  &difantdans  plufieurs  de  fes  explications 
fiir  faint  Paul  que  c'eft  un  feul  6c  un  même. 

An  A  THE*  ME     TROIS      FOIS. 

Il  efi  dit  enfuitc  ,  que  fi  quelque  chofe  eilt  empêché  l'E'- 
glifed'Orienc  de  témoigner  extérieurement  ce  qu'elle  avoit 

TTic 


700  Liv.  yill.PreuvesAurhen.de  l'union  des  Eg.  d'Or. 
dans  la  cœur  ,  ce  ne  pouvoir  eftre  que  la  crainte.  MaJs  qu'il  y 
avoii  beaucoup  de  Pays ,  comme  ribcrie ,  la  C(dcl)ide'&  Min^ 
grelie  ,  la  Molcovie ,  Rulîîe  ,  Pologne ,  Sec.  où  il  y  avoic  un 
grand  nombre  de  Chrétiens  enfans  de  l'Eglifè  d'Orienr  ,  com- 
me aufll  à  Vcnife  &  dans  l'Archipel,  dans  l'Afie,  dans  la  Perfe, 
qui  n'eftoicnt  point  fujets  du  Grand  Stigneur,&:  qui  cependant 
avoicnt  la  même  croyance.  Que  s'il  eftoit  permis  u'eftre  Chré- 
tiens de  cœur  feulement ,  &  qu'on  pût  profelTer  de  bouche 
une  autre  Religion,  ils  pourroient  faire  femblant  de  profefTer 
celle  des  Empereurs  à  qui  ils  font  fournis,  mais  qu'au  contraire 
ils  foufFrent,  &  ont  toujours  foufFert  de  grandes  perfecutions , 
&  la  mort  même  pour  la  défenfe  de  leur  foy.  Enfuite  il  conclut. 
Puis  donc  qu'il  n'y  a  rien  qui  empêche  les  Orientaux  de 
croire  &:  de  confeiTer  ce  qu'ils  veulent,  il  eft  impoffible  qu'ils 
ayent  jamais  cru  d'autres  chofes  dans  leur  cœur  ,  que  ce  qu'ils 
ont  témoigné  &  confefle  débouche.  Ils  croyent  feulement 6c 
confefTent  ce  qui  eft  cru  de  toute  antiquité  par  l'Eglife  Catho- 
lique ,  pour  laquelle  ils  fouffrent  la  mort  avec  joye  ,  &  ainfi 
font  fort  au  deffus  des  calomnies  de  leurs  adverfaires. 

CHAPITRE      V. 

On  feulement  il  cftimpoffible  que  les  Orientaux  ayent 
jamais  efté  dans  les  mêmes  fentimens  que  les  Calvini^ 
ftes  de  quelque  manière  que  ce  foitj  mais  encore  outre  ce  qu'ils 
font  tous  les  ans  en  rejettant  les  Iconomaques,  &  ceux  qui 
nient  les  faints  Myfteres  ,  n'ayant  de  foy  que  dans  leurs  paro- 
les ,  ils  ont  encore  par  deux  fois  efté  animez  du  zèle  de  Dieu 
Tout  puifTant  dans  les  Synodes  tenus  contre  Cyrille.  CarCy- 
Dcciaration    j[\\ç^  ayant  vêcu  fix  ans  après  l'impreffion  de  ces  chapitres ,  &: 

dcCynlle  La-  j      t       '  r  .-i     .  rv    ■  i>  o         »i 

cAr  contre  CCS  ^v^nt  déclare  avec  lerment  qu  il  n  en  eitoit  pas  i  auteur,&qu  il 
chapitres.  ne  tCHoit  point  la  foy  qui  y  eftoir  enfèignée,  enfeignant  même 
publiquement  dans  l'Eglife  des  chofes  contraires  à  ces  chapi- 
tres :  néanmoins  feulement  à  caufe  qu'il  n'écrivit  point  con- 
tre,donnant  pour  raifon  de  fa  conduite  ce  qui  eftoit  aflez  vray, 
mais  qui  eftoit  indigne  delà  bonne  opinion  qu'un  bon  Paf- 
teur  doit  donner  de  foy,  que  ces  chapitres  n'avoient  rien 
qui  puft  faire  croire  qu'ils  fuffenc  faits  par  luy  ,  ou  qu'ils 
fuiîènt  Ja  confefficn  de  l'Eglife  d'Orient  .  &  que  les  Pè- 
res avoient  défendu  d'attaquer  des  choies  de  cette  nature  » 


a<vec  tEglife  Romame  fur  tEmha.riflie.  701 
^uandil  n'y  avoir  peine  de  prcflante  necefficë,  on  ne  refatisfit  Ch  XV. 
point  de  tout  cela.  Ce  n'eft  pas  qu'il  nedift  peut-eftre  bien  , 
mais  il  euft  encore  bien  fait  de  Te  fouvenir  qu^une  petite  étin- 
celle allume  un  grand  feu....  Enfin  Cyrille  déclara  qu'il  n'a- 
voit  aucune  connoilfancc  de  ces  chapitres.  Cependant  les 
Orientaux  animez  de  cezele,  parce  qu'il  ne  voulut  pas  écrire 
contr'eux  ,  le  condderant  comine  un  trairtre  ,  prononcèrent 
deux  fois  anathéme  contrelui&:  ces  chapitres  dans  deux  Con- 
ciles très- nombreux  ,  parce  que  les  chofesqui  paroidèiit  cftre 
picufes  dans  ces  chapitres  eftoient  dites  exprès  pour  corrom- 
pre adroitement  la  foydes  fimples  ,  comme  les  rochers  ca- 
chez fous  l'eau  renverfent  les  vaiffeaux. 

Que  les  adverfaircsdonc  ne  fe  glorifient  point  de  CyriHc,  ' 

car  il  ne  fut  point  tué  injustement ,  comme  ils  prennent  plai. 
fir  de  dire  ,  ni  pour  le  nom  de  j.  C.  maisePantpofTedé  d'une 
ambition  demefurée ,  que  S,  Bafile  a  z.-^^tWé.Ç.lamaladie  de  Lu- 
cifer ^  s'eftant  intrus  par  trois  fois  contre  toutes  fortes  de  loix  LiaifondeC^- 
dans  le  Siège  de  Conftantinople  outre  la  première  qui  pailoit  [.''''^^/^'•|: 
pour  eflre  légitime  après  mille  expulfions^  vexations  des  Ec-  d'Huiiande. 
clefiaftiques ,  infatiable  deschofesexterieuFes,  &  fe  fervant  de 
l'Ambafladeur  de  Hollande  en  fes  de{ïèins,ce  qui  lerendicen  Ce  font  les  ,^7- 
coreplus  f.ifpeA  ài'Eglie,  il  foufFric  enfin  cette  mort  honteufe.  airie  pre-  * 
Et  étant  vray  qu'il  cft  devenu  autour  d'une  impieté_,commeaf  tend cftre  %- 
furent  les  adverfaires^nousnele  reconnoiflons  pas  comme  un  ^°''^^' 
fàint,  mais  comme  un  miferable  qui  n'a  aucune  part  avec  J.  C. 
Nous  inferons  ici  les  Actes  de  ces  Synode.s  tirez  du  Livre 
que  nous  en  avons,  pouraflarance  de  ce  qui  a  efte  dit ,  &  que 
nous  fommes  en  toutes  chofes  dans  les  mêmes  fentimens.  Le  Jermer 

___.,/.  ,      .  >  V //      .  Concile  coiT- 

(jcs  Conciles  font  en  cet  endroit  comme  dans  AlL^tiiis.  j^e  Cynlle  fuc 

Ce  font  là  les  chofes  qui  ont  eflé  faites  contre  Cyrille  fc""«" -^o'- 
par  deux  Conciles  ^  qui  montrent  rrex-clairement  la  pieté  de  ^j^^g^g^^^j^"^* 
i'Eglife  d'Orient.  Le  dernier  fut  tenu  à  lajium  en  Moldavie  de  i-imprcnio.i 
fous  le  Duc  Bafile  Boibunda,&  le  Patriarche  de  Confbantino-  mé..,edeMoi- 
pie  Parthenius  je  Vieil,  homir.e  vénérable,  &  qnis'eftoit  occu-  main  des  Prer. 
pé  depuis  faieuneffedansles  chofes  divines ,  qui  ayant  envoyé  Cenvftquciâ 
une  Lettre  Synodale  à  ce  Concile ,  l'aflemblee  crut  qu'il  fufîî-  ^'^H  poTthê- 
foit  de  foufcrire  &:  de  confirmer  la  Lettre  Synodale  qui  leur  niusqui  yfuc 
avoir  efté  envoyée  de  Cnnftantinonle,  &qu'ainrî  onexccutoit  ^PP'°"'^'^'  - 
pleinement  ce  dont  il  citoit  queition.  Et  u  ce  v^oncile  ayant 
combattu  les  Calviniftes  ôcplufieurs  autres  chofes,  n'a  pas 

TTtc  ij 


70L  Liv.  Vl-n.  Vrewves  authen.  dt  ï union  des  £g,  d'Or.  ' 
néanmoins  prononcé  anathéme  contre  Cyrille  ,  non  plus  que 
celui  de  Conftantinople  par  fa  lettre  Synodale  ,  ce  n'a  pas 
efté  pour  faire  grâce  à  Cyrille,  les  Saints  Pères  qui  lescom- 
poloieiu  n'cftanr  pas  des  hommes  qui  euffent  égard  aux  per- 
fonnes,niqui  fullcnt  capables  d'honorer  les  hommesplusque 
Dieu  ■•  mais  parce  que  Cyrille  n'avoit  jamais  pafle  pour  Cal- 
vinifte  dans  l'Eglile  d'Orient ,  ni  pour  avoir  d'autre  fentiment 
que  cette  même  Egkfe.  Us  ne  crurent  donc  pas  qu'il  fut  à  pro- 
pos de  prononcer  anathéme  contre  un  homme  qu'ils  ne  fça- 
voient  pas  clairement  mériter  c  cttecondamnation  ,  quoique 
cependant  ils  l'ayent  prononcée  indifféremment  contre  l'au- 
teur des  chapitres,  lequel  aulïïnous  f:)ûmettonsà  d  éternelles 
maledîdions  ,  &  que  nous  reconnoifîons  eilre  éloigné  du 
.  Royaume  du  Ciel. 

Le  premier  Synode  a  efté  fait  fous  Cyrille  de  Berée  Patriar- 
che de  Conftantinople,  en  prefence  de  plufieurs  perfonnes 
confiderables  &  vertueufes,  &  il  a  anarhcmatifé  Cyrille  par 
fon  propre  nom  ,  non  pas  qu'il  le  reconnut,  ou  l'eût  jamais  re- 
connu pour  hérétique ,  mais  parte  qu'il  Içavoit  qu'ayant  vécu 
fîxans  après  l'imprefîîon  de  cts  chapitres,  &  qu'ayant  f(^û  les 
troubles  qui  eftoient  arrivez  en  Pologne  &  en  Ruffie  aux  fidè- 
les de  ces  Pays- là, plufieurs  difant  que  l'Eglifè  d'Orient  eftoic 
Calvinifte,  après  que  le  Patriarche  de  Conftantinople  avoit 
fait  une  telle  confeffion ,  il  n'avoit  pas  voulu  écrire  contre  ces 
chapitres ,  quoiqu'il  fût  prié  &  preflTé  de  le  faire ,  comme  nous 
avons  dit  dans  le  chapitre  cinquième.  C'eft  pourquoi  fe  défiant 
qu'il  n'eftoit  pas  exempt  detromperie  touchant  la  foy  Ortho- 
doxe, &  voyant  qu'il  ne  prenait  pas  le  foin  qu'il  dcvoitde  fon 
troupeau  ,  il  prononça  nommément  anathéme  contre  luy. 
Nous  n'acculons  pas  ce  Concile  qui  a  porté  une  fentence  iî 
jufte. contre  lui  .-  au  contraire  nousl'cftimons  heureux  d'avoir 
en  fon  temps  Ci  bien  combattu  pour  la  foy  ,  puifqu'il  a  eu  un 
affez  grand  fujet  dans  fon  long  filence  de  le  punir  de  cette 
manière,  Se  pourchaftier  ainfîle  coupable,  bc  pour  retenir  les 
autres. 

Et  fi  nous  ne  prononçons  pas  anathéme  contre  lui, cependant 
nous  le  pleurons,  comme  ayant  par  fon  Hlence  excité  une  Iî 
grande  guerre  des  ennemis  de  l'Eglife  contr'elle.  Que  ii  vérita- 
blement il  a  efté  hérétique  &:  dans  les  fcntimens  des  Calvini. 
(les,  &  qu'il  nefe  fbi^  pas  converti,  car  Dieu  reçoit  tous  ceux 


l 


iL'vec  ÎEglife  Romame  fur  rEucharifite.  70J 

qui  feconverciflenc  à  lui  quels  qu'ils  foienc  ,  mais  qu'il  foit  de-  Ch.  XV. 
meure  dans  des  fentimens  hérétiques ,  nous  le  foûmertons  avec 
ceux  de  fon  parti  fans  aucune  difficulté  à  un  anathéme  6c  ex- 
communication éternelle. 

CHAPITRE   VI. 

C^E  que  nous  avons  dit  fuffira  pour  apprendre  aux  perfo»- 
^  nés  qui  font  dans  les  bons  fentimens ,  &  qui  aiment  la  vé- 
rité, dans  quels  fentimens  efl;  l'Eglife  d'Orient,  qu'elle  n'a  ja- 
mais efté  d'aecord  avec  les  Calviniftes  dans  les  chofes  qu'ils 
ont  innovées  ,  ni  avec  aucuns  autres  ,  &  qu'elle  ne  connoift 
point  pour  tel  celui  qu'ils  veulent  faire  pafîer  pour  un  de  leur 
fecte.  Mais  enfin  pour  diffiper  &  détruire  entièrement  toutes' 
Jes  penfées  qui  ontefté  inventéescontre  la  gloire  de  Dieu  ,  6c 
pour  rejetter  entièrement  les  blafphêmes  contenus  dans  ces 
fameux  chapitres,  nous  avons  crû  devoir  faire  des  interroga- 
tions ic  des  chapitres  égaux  en  nombre  à  ceux  de  Cyrille ,  dans 
iefquels  il  a,  comme  on  fuppofe,  affilé  fa  langue  contre  Dieu, 6c 
qui  leur  foient  directement  oppofez  ;  de  forte  qu'on  puiile  les 
appeller  une  réfutation  &  correction  defdits  chapitres  de  Cy- 
rille ,  dont  nous  garderons  l'ordre  dans  ceux  que  nous  ferons , 
afin  que  chacun  des  fidèles  les  pui^Te  comparer  &  conférer  en- 
femble,  &  reconnoillre  facilement  la  pieté  de  l'Eglife  d'Orient, 
&  l'impcfture  des  hérétiques ,  à  quoy  nous  pourrons,  quand,  il 
fera  befoin  ,  y  ajouter  ou  diminuer  d'autres  ciiofesqui  contri- 
buent à  la  connoifîance  exade  de  la  quefliou. 

lE-nfuite  il  y  a  dans  le  Mdnufcrit  des  Articles  ^ynvdaux  oppofez, 

à  ceux  de  Cyrille  ,  dont  voici  la  lettre  qui  eji 

À  la  tefie. 

DOfithée  par  la  grâce  de  Dieu,  Patriarche  de  Jerufaleni:,  i 
tous  ceux  qui  nous  interrogent,  6c  ont  envie  de  fçavoir 
quelle  efl:  la  foy  gc  laReligion  desGrecs,ou  de  l'Eglife  d'Orient, 
&  quelle  efl:  fa  créance  rmichant  la  foy  Orthodoxe,  au  nom  de 
tous  les  Chrétiens  qui  font  fourni  à  nôtre  Siège  Apofl:oli- 
que  ,  &  de  tous  les  Orthodoxes  qui  viennent  en  dévotion  à 
cette  fainte  &:  grande  ville  de  Jerufalem,  avec  Iefquels  l'Eglife 
Catholique  efl:  d'accord  en  ce  quiconcerne  la  Foy ,  à  qui  il  pré- 

TTtc  iij 


^04  Liv.  Vil  î.  Tfemi'es  attthen.  de  Tunion  des  Eg.d!Or, 
lente  cette  confedion  abrégée  pour  fervir  de  témoignage  de- 
vant Dieu  2c  devant  les  hommes^ 

Dans    l' Article    ou    Définition    xv. 

LEs  Sacremens  font  compofëz  de  naturel  &  de  Tumaturel  j. 
&  ne  font  poinï  des  fignes  fimples  des  promelîes  de  J.  C. 
car  autrement  ils  ne-  diifercroient  pas  de  la  Circoncifion.  Ce 
qui  feroit  un  extrême  aneanriJièment  de  nos  Myfteres.  Nous 
confeiTons  qu'ils  opèrent  necelTairement  la  grâce  comme  in- 
(îrumens  effedi^s  dans  les  initiez.  Nous  rejettons  comme  une 
cliofe  éloignée  de  la  fîmplicité  du  Chriftianifme  ,  que  la  fim- 
piicité  des  Sacremens  demande  l'ufage  d'une  chofe  terreftre. 
Car  celâefl:  oppofé  au  Sacrement  de  l'Euchariftie,  qui  ayanc 
efté  établi  par  le  Verbe  fubflftant,  &:  eftant  Tanditié  par  l'in- 
vdçationd.uS.Eiprit,  efl:  accompli  par  Texiftence  de  ce  qui  eft. 
fjgnifîé  ,  r^avoirdu  corps  &  du  fang  de  J.  C.&c  Ton  accomplif- 
femenc  précède  neccflàircment  l'ufàge  qu'on  en  fait.  Car  fi  de- 
vant il  n'eft  pas  parfaic, celui  qui  en  ufe  mal  n'a  donc  pas  man- 
ge &'bûf6iVjugement  jpuifqu'il  n'a  reçu  que  du  pain  &  da' 
vin.  Cepe'ndanc  celui  qui  y  participe  indignement  boit  &  man- 
ge fon  jugement.  Donc  le  Sacrement  de  l'Euchariftie  ne  reçoit 
pasfonaccompliflémenE  da.ns  l'ulage,  mais  devant 


N: 


Article    x  v  i  î... 

Ous  crayons  le  très,  fâint  Sacrement  de  l'a  fainte  Euclia»- 
riftie,  que  nous  avons  mis  !e  quatrième  dans  l'ordre  des^ 
Sacremens,  &  que  c'cft:  le  même  que  le  Seigneur  a  donné  lar 
nuit  qu'il  fe  donna  lui  même    pour  la  vie  du  monde.  Car 
ayant  pris  du  pain  ,  &  l'ayant  béni  ,  il  le  donna  à  Tes  (aints  i  jifZ 
ciples  &:  Apofcres  ,  difant  ;  Prenez, ,  mjrty:%,  j  Cbcy  eft  moficorpSy, 
ficayant  pri^s  le  calice  &  rendu  grâces  ,  il  leur  dit  :  Bcuvez^en 
toui  >  Cecy  eft  mon  fang  ,  qui  eft  ver fè  pour  'vous  ,  pour  la  remiffioTl' 
des  péchez^ 
0-:  Tv-aïKa;       Noiis  croyons  quc  quand  ott  Ic  cclcbre  ,   noftre  Seigneur 
tCil  ÙAsis-  J.  C.  y  eft  prefent ,  non  par  reprefentation  ou  par  image  ,  ni 
xfs,  par  une  grate  furabondante,  commedans  les  autrcsSacremens, 

ni  par  une  fimple  prefence,  comme  quelques  Pères  ont  dit  du 
Bapïême,nipar  une  conjonction 3  en  forte  que  la  divinité  du 


I 


avec  ÏEgliJe  Romaine  Jùr  tEuch'iriflte.  yo^ 

Verbe  foie  unie  au  pain  propofé  del'Euchariiliehypofta.tique-  Ch.  XV. 
ment  j comme  penfent  les  Luthériens  avec  une  grande  igno- 
rance &  une  grande  mifere,  mais  véritablement  &:  réellement  : 
<ie  forte  qu'après  la  confecrarion  du  pain  6c  du  vin  ,  le  pain  eft  A'«T'»/3«w.e- 
chanffë ,  tranffuhlîuncié ,  transformé  éc  converti  au  véritable  &     "'  /''J'"' 
même  corps  de  J.  C.  qui  eft  né  en  Bethléemdela  Viergt,  qui  T«^4,s7,ja, 
a  efté  baptifé  dans  le  Jourdain  ,  qui  a  fouffert  ,  qui  aefte  en-  (..irapiuii^i- 
terré  ,  qui  eft  reflufcite ,  qui  a  efté  élevé  au  Ciel  ,  &  eft  affisà  ((ù<xi. 
la  droite  de  Dieu  le  Père,  ^  qui  doit  venir  fur  les  nuées  du  ^!,r^°a'^^  - 
Ciel ,  6c  le  vm  eft  change  5c  tranjjubftancie  au  même  &  veri-  ^jT^ffr»"^/* 
table  fang  du  Seigneur ,  qui  a  efté  répandu  pour  la  vie  du  mon-  eft  encore  re- 
de  ,  luy  eftant  attaché  à  la  croix.  ^"'■'' 

De  plus,  nous  croyons  qu'après  la  confecrationdu  pain  & 
du  vm  ,  la  fubftance  du  pain  Se  du  vin  ne  demeure  plus ,  mais 
le  corps  même  6c  le  fang  de  J.  C,  dans  l'apparence  6c  la  figure 
du  pain  6c  du  vin  ,c'eft-à-dire  fous  les  accidens  du  pain  6c  du     i,  ^^  ^^j- 

vin,  a  (rail     ait 

De  plus,  que  le  corps  même  5c  le  fang  immaculé  du  Sei-  raS  ^mu, 
gneur  eft  donné  6c  entre  dans  la  bouche  6c  l'eftomach  de  ceux 
qui  le  reçoivent ,  pieux  ou  impies ,  avec  cette  différence  qu'il 
donne  aux  dignes  6c  pieux  la  remiffion  des  péchez  6c  la  vie 
éternelle  ,  6c  aux  impies  S<.  indignes  la  condamnation  à  une 
peine  éternelle. 

Que  le  corps  6c  le  fang  de  J.  C.  font  coupez  6-:  divifêz  par 
les  mains  6c  par  les  dents  ,à  la  vérité  par  accident,  c'cftà-di- 
re  félon  les  accidens  du  pain  6c  du  vin  ,  félon  lefquels  oncon- 
fefte  qu'ils  font  vifibles  ^  maniables  ,  mais  que  par  eux  mêmes 
ils  demeurent  fans  eftre  feparez  ni  divifez  en  aucune  manière. 
C'eft  de  là  que  l'Eglife  Catholique  dit  :  //  c  fi  partagé  (j;~  m:s  en 
pièces^  hy  qui  eft  partage  d^  qui  n'eft  point  divifc ,  liiy  qui  eft  man- 
ge par  tout ,  fi^  qui  ttcji point  ccnfommé  ,  mais  qui  Jan'cii fie  tous 
ceux  qui  le  reçoivent  dignement. 

Nous  croyons  auffi  que  dans  les  plus  petites  particules  du 
pain  6c du  vin  changez  ,il  ya  ,non  une  partie  du  corps  6c  du 
fang  de  Chrift,  (  ce  qui  feroit  un  blafphéme  ^  un  AiheiTme,  ) 
maii  le  Seigneur  tout  entier  félon  fa  fubftance  ,  avecfcname 
&  fa  divinité  ,Dieu  parfait  ^  homme  parfait.  D'oi^i  vient  que 
la  célébration  du  myftere  fe  faifant  en  plufieurs  endroits  en 
une  même  heure  ,  il  ne  fe  fait  pas  plufieurs  Chrifts ,  ni  plu- 
fieurs corps  de  Chrift ,  mais  qu'un  feui  6c  même  Chnft  ,  eft 


7c6  Liv.  VIII.  Treunjes  duthent.  de  ï union  des  Eg.  d'Or. 

véritablement  &  réellement  prefenc,  &  qu'il  n'y  a  qu'un  corps 
bi  un  fang  de  J.  C.  dans  toutes  les  Eglifes  particulières  h  &  cela, 
non  pas  parce  que  le  corps  du  Seigneur  quieft  dans  le  Ciel  à<^i~ 
cend  lur  les  autels ,  mais  parce  que  le  pain  qui  eftofFert  dans 
toutes  les  Eglifes,  eftant  changé  bc  tranjfubfianaè  après  la  con- 
fecration  jCft  fait ,  &  eft  un  feul  &même  corps  que  celui  qui 
cft  dans  les  Cieux.  Car  le  corps  de  J.  C.  eft  un  dans  plufieurs 
lieux  jSc  non  plufieurs  5  &;  c'eft  pour  cela  que  ce  Sacrement 
eft  &;  s'appelle  principalement  miraculeux  ,&  compreheniî- 
ble  par  la  feule  foy  ,  non  point  par  les  fubtilitez  de  la  iagefle 
humaine  ,  dont  nôtre  pieufe  Religion  ,  qui  nous  eft  donnée 
de  Dieu  , rejette  la  vaine  &folle  inutilité  dans  les  chofes  di- 
vines. 

Nous  croyons  de  p'us  qu'il  faut  honorer  le  corps  &  îe  fang 
de  J.  C.  dans  îe  Sa*"r,ment  de  l'EucharilHe  d'une  manière 
extraordinaire,  &  l'adorer  d'une  adoration  de  Latrie;car  l'ado- 
ration de  la  Sainte  Trinité  &  du  corps  &fang  de  J.  C.  eft  la 
même. 

De  plus,qu'il  y  a  un  facrificc  véritable^  propitiatoire qu^bn 
offre  pour  toutes  les  perfonnespieulcs  vivantes  ou  mortes  ,  & 
pour  l'utilité  de  tous ,  comme  il  eft  porté  expreflement  dans 
les  prières  de  ce  Sacrement,  qui  ont  eftc  données  à  l'Eglife 
parles  Apoftres ,  félon  l'ordre  qu'ils  en  avoient  rec^û  du  Sei- 
gneur. 

Que  devant  l'ufage,  incontinent  après  la  confecrarion,  & 
après  l'ufage  J  ce  qui  feconfervedans  les  ciboires  pour  la  com- 
munion des  personnes  qui  font  preftes  à  mourir  ,eft  le  vray 
corps  de  |.  C.  ne  diff'erant  en  rien  de  lui  ;  de  forte  que  devant 
l'u fa ge après  1  a  confec ration  ,  dans  &;  après  Tufage,  il  eft  tout- 
à  fait  le  véritable  corps  du  Seigneur. 

Deplus^par  ce.motdcTranfÎLibftanriation  ,  nous  ne  croyons 
pas  que  la  manière  par  laquelle  le  pain  &  le  vin  font  chan- 
gez au  corps  &  au  fang  du  Seigneur  ,  foir  rendue  claire  &:  évi- 
dence 3  car  c'eft  une  chofe  incomprehenfiblei&quin'eftpoffi- 
ble  qu'^à  Dieu  fèul ,  &  qui  convainc  d'ignorance  &  d'impieré 
ceux  qui  croyent  la  comprendre  5  mais  que  le  pain  &  le  vin 
après  laconfecration  ,  non  par  type ,  non  par  maniered'ima- 
ge,  non  par  une  grâce  furabondanre  ,  non  par  la  communion, 
ni  par  laprefencede  la  divinité  feule  du  Fils  unique  de  Dieu, 
font  changez  au  corps  5c  au  fang  du  Seigneur  i  ni  que  quel- 
que 


avec  T€giî/e  Romaine  fur  Fincharifiie.  707 
qiie  accident  du  pain  &:  du  vin  foie  changé  en  quelque acci-  Ch.  XV. 
dent  du  corps  &  du  lang  de  J.  C.  par  quelque  converiîon  ou 
changement;  mais  veriablement,  réellement  6c  fubftantiel- 
lement  le  pain  eft  faitlevray  corps  de  J.  C.  &,  le  vm  Ton  mê- 
me fang,  comme  nous  avons  dit  cy-deflus. 

Enfin  que  le  Sacrement  de  la  fainte  Euchariflie  ne  peut 
eftre  fait  que  paj:  un  Preftre  pieux ,  qui  a  recju  l'ordination 
d'un  Evêque  canoniquement  ordonné,  de  la  manière  que  l'en- 
ièigne  l'Eglife  d'Orient.  C'eft-là  en  abrégé  le  fentiment  de 
i'fcglife  Catholique  fur  ce  Sacrement,  &  fa  véritable  confef- 
fion  ,  &  fa  tradition  trcs-ancienne  ,  que  nous  ne  voulons  point 
eftre  tronquée  en  aucune  manière  par  les  impies,  rejettanc 
fort  loin  les  innovations,  6c  vaines  opinions  des  heretiquesi 
mais  nous  voulons  que  la  tradition  qui  eft  établie  foit  confer- 
vée  dans  Ton  entier.  Car  l'Eglife  Catholique  de  J.  C.  renonce 
&  dit  anathéme  à  tous  ceux  qui  ne  l'obfervent  pas. 

C'eft  une  chofe  tres-ridiculede  conclure  de  ce  que  quelques 
Preftres  Orientaux  ont  le  faint  Pain  dans  des  boëces  de  bois 
hors  du  Chœur,  &  du  lieu  où  eft  le  faint  Autel,  pendu  à  quel- 
que co'lomne,  bc  qu'ils  ne  confefTent  pas  le  réel  &  véritable 
changement  du  pain  au  corps  de  J.  C.  Nous  ne  defavoûons 
pas  que  quelques  pauvres  Preftres  ont  le  corps  de  J.  C.  dans  des 
boëtes  de  bois  ;  car  J.  C.  n'eft  pas  honoré  par  des  pierres  & 
par  des  marbres,  mais  il  demande  de  nous  un  efprit  faint  & 
un  cœur  pur.  C'eft  ce  que  dit  faint  Vsiui^T^ousavonsun  Thrcfor^ 
dit  il,  dàins  des  vafes  de  terre.  Mais  dans  les  lieux  où  nos  Egli- 
izs  font  plus  riches,coinmeen  Jerufalem  parmy  nous,  le  corps 
de  J.C.  eft  honoré  dans  le  Sanduaire  avec  des  lumières,  &il 
brûle  toujours  devant  une  lampe  à  fept  branches. 

Au  refte  je  trouve  afTez  étonnant  que  les  hérétiques  ayent 
remarqué  que  le  corps  du  Seigneur  eft  en  quelques  Eglifes  at. 
taché  à  la  muraille  hors  du  Sanduéjire,  parce  que  peut-eftre 
les  murailles  du  Sanduaire  eftoient  tombées  de  yieillefle  ,  &  Raifon  reri- 
que  delà  ils  en  concluent  des  chofes  qui  ne  peuvent  eftre,  &  wbiedes 
qu'ils  n'ayentpas  veu  fous  la  voûte  du  Sanc1:uaire  J.  C.  repre-  lailfo"  a" 
fente  en  forme  d'enfant  fur  la  patène ,  afin  de  voir,  que  com-  Grecs  donc 
me  les  Orientaux  ne  reprefentent  fur  la  patène  ,   ni  la  fi-  ','  ^^   p^'''^ 
gure  ,  ni  la  grâce,  ni  quelque  autre  choie  ,  mais  ).  C  me-  Luion  de  m, 

me  j  ainfî  ils  croient  que  le  pain  de  l'Euchariftie  n'eft  rien  fait  ^^  Noincd. 

VV  V  V 


7o8  Liv.VIl.  Frewves  auth,  de  îunion  des  Eg.  d'Or. 
autre  chofè  que  le  propre  corps  de  J.  C.  iubflanciellement:  ôc 
ainfî  leur  conclufîon  feroic  véritable. 

Ze  Patriarche  cite  en  fui  te  divers  livres  où  il  dit  que  l'on  feut 

voir  la  Foy  de  l'Eghfe  d'Orient  ,  comme  la  Confelfion  Orthodoxe, 

Gabriel  Archevêque  de    Philadelphie  ,  GreQ:pire  Protofyncelle  en 

fon  traitté  des  Myfieres.  Theophane  Patriarche  de  Jerufalem  dans 

fon  Epifire  dogmatique. 

Et  il  finit  par  cette  confiderationtres-judicieufe. 

Ces  chofesfont  confirmées  parun  argument  que  les  Héré- 
tiques nousfourniirenc.  Car  les  Neftoriens,  &les  Arméniens^ 
les  CophteSj&  les  Syriens,les  Ethiopiens,  qui  demeurent  fous 
la  ligne  équinoc1:iale,&  au-delà  même  vers  la  tropique  du  Ca- 
pricorne ,  qui  font  feparez  depuis  plufieurs  fiecles  de  l'Eglife 
Catholique,  &  qui  ont  chacun  uneherefie  particulière, com- 
me on  le  peut  apprendre  des  Ades  des  Conciles,  font  néan- 
moins d'accord  avec  nous  fur  la  fin  &  le  nombre  des  Sacre- 
mens  j  &  fur  tout  ce  que  nous  avons  dit  jufques  icy,  &en  onC 
les  mêmes  fentimens  que  TEglife  Catholique,  comme  nous 
le  voyons  de  nos  yeux,  oc  comme  nos  fens  2c  noftre  raifon 
nous  l'apprennent  dans  cette  fainte  Ville  de  Jerufalem  oh  il  y 
a  des  gens  de  tous  les  lieux  du  monde  qui  y  habitent,  ou  qui  y 
viennent  en  pèlerinage,  tant  fçavansque  (impies. 

Que  ces  vains  difcoureursSc  ces  novateurs  hérétiques  fetai- 
fent  donc,  &  qu'ils  ne  s'efforcent  plus  de  tirer  artificieufe- 
inenc,  (oit  de  l'Ecriture,  foit  des  Pères,  quelques  petits  pafîa- 
ges,  pour  établir  le  menfonge,  comme  ont  fait  de  tout  temps^ 
tous  les  Hérétiques  2c  les  Apoftats  qui  ontefté  jufques  icy. 

Dosithe'e  par  la  mifericorde  de  Dieu   Patriarche  delà  fain- 
te Jerufalem  ^  de  lu.  Palejîine  ^je  déclare  (^S  eonfcjje  que  c'efi  la 
foy  de  l' Eglife  d' Orient. 
Dorothe'e  de  Petra, 

P  A  II  T  H  E  N I  u  s  Métropolitain  de  la  fainte  Kfax^reth. 
JosAPHAT  Métropolitain  de Ptolemaïàe  é"  de  Sidon. 
Neopphyte  Métropolitain  de  la  fainte  Bethléem. 
Antoine  Archevêque  de  Lydda. 

Christophe  Archevêque  de  Naples  ^  orpoe/^/io';  de  Scbafe, 
Daniel    qrand  Archimandrite  du  S.  Sepulchre. 
Cyrille  Prefire  ^  ^rand Protofyncelle  de  Jerufalem  _,  ^  Prieuf 
du  Monajlere  du  faim  Sepulchre  de  Trebiz^ndc, 


Anjec  ÎEglife  Komn'me fur  tV-uchariflie.  jo^ 

Melece  indigne  Pnfire  é-  archimandrite,  Nonce  dv fdnt  SepuL   Ch.  XV. 
cbre  auprès  du  Roy  des  Ilcriens ,   ^  Princes  de  Colchide  avec 
le  Synode  de  la  haute  Iberic. 
JostPH  Preftre  O-  Prieur  du  Monajîcre  des  Iberiens   de  Jeru. 

fale?n. 
Grégoire  Prieur  de  la  fainte  Bethléem. 
A-BEK-Hius  Religieux  &  Fricur du  vénérable é-  Royal  Monafiere 

de  C Archange. 
Daniel  V  rieur  de  la  fainte  Laure  de  faim  S  a  bas. 
Denis  Religieux d^  Frieur  de  faim  Elie. 
Arsenius  Religieux  Prieur  de  faim  George   en  Pez^la. 
Néophyte  Prieur  de  fainie  Tecle. 

Germain  Religieux  e fiant  ordinairement  au  faim  Scpulchre. 
Callinicus  Religieux.^  <^  Confcjfeur  des  Rcligieufes. 
h'LK.^K^  grand  Archidiacre  de  Jerufalem  avec  les  autres  Dia~ 

cres. 
Mac  A I  RE  Religieux  ^  Prieur  de  faim  Jean  Baptifie. 
Habacuc  Scevophylax  du  faim  Sepulchre. 
Daniel  Religieux  ^  Sy  ne  elle  de  Jerufalem. 
Timothl'e Religieux  de  Rufjïe  la  grande,   Confcffe  que  c'efi-la, 

nojhe  poy  ^  celle  de  l'Eglife  à! Orient. 
Ze  grand  Econome  PapaMichel,  croit  ^  confeffe  que  c'efi.  là  nb~ 
tre  créance  ^  notre  foy  que  commande  ^  ordonne  l'EglifApo- 
ftolique  ^  Orthodoxe. 
Le  grand  Scevolax  Papa  Isaac. 
Ze  grand  Sacellarius  Papa  M  i  c  H  A  E  L 
MoYSE  Preftre  de  la  grande  chapelle. 
Se  ROUE  Preftre  Protopapas. 
Helib  Vreftre  Econome  de  Zydde. 
Soliman  Preftre  Econome. 

Habie  Protopapas  de  Lydde .,  avec  tous  les  Preftre  du  même  lieu. 
Mac  AI  RE  Religieux^  Exarque  de  l' Anhevèchè  dejoppè. 
Le  chetif  Curé  George  Econome  de  Cefirée  en  Paleftinc. 
SiMEON  Curé  de  faint  Elie  aU  Mont-Carmel. 
Grégoire  Protofyncelle  de  Moldavie.,  [Moldoblaquie  je  confeffe) 
que  ceft.  là,  noftre  foy  é"  de  l'^glife  d'Orient. 
SiKXVHiîA  Diacre  de  Milet  déclare  la  même  chofe. 
GtNNADius  Prefire  Sy  ne  elle  de  Jerufalem, 
Ze  Curé  Mo^fe  Econome  de  Naples. 

VVvvi] 


yio  Liv.  VIII.  Prewves  authent.  de  tunion  des  Eg.  d'O^' 

Philemon  Religieux  é"  Vicaire  du  Métropolitain  (^^  ^o/r^- 
Mac  AI  RE    Reliyeux  de  Crète  ^  prédicateur  du  S.  Evangile  ^  « 

tous  ceux  de  Macédoine^  Achaie  é-  -^fie  qui  font  dévots  au  fairt^ 

Sepulchre. 
Jésus  P.'f/?r^  Econome  de  la  fainte  Bethléem. 
S  ERGius  Preflre  é^i{f*îcxoç  t5  efyiV  ff'aniActîy 
Jeremie  preftre   Econome  de  Pez^le. 
Le  Curé  Campimpis  Econome  de  Petra. 

P  ASC  H  AL  Prcfirei(pnixitMiS  du  S.  Mont  de  Tabor^  Adminiflra.. 
teiir  du  village  du  même  endroit  ^  du  village  de  Naim  é'  autres 
d'alentour.  *■. 

Le  Exarque  de  Hythopolis. 

SiMEON   Religieux  Exarque  ou  adminijirateur  de  Gabaon  ^ 

Ramla 
A  G  A  p  I  11  s   Econome  de  Gaz^  ^  les  Vrefires  qui  font  avec  moy, 
Antoine  Logotheta  de  Rcmlie  ^  économe. 
Galaction  Religieux  éi"  Scevophylax. 
Grégoire  Prefire  ^  Econome  de Ptolemaïde. 
Gabriel  Religieux  Protofyncelle  ^  Pontopfaltesde  Jerufalem. 

l'ay  Jïgné  cette  Apologie  contre  tes  hérétiques  que  nous  avons 
eompofèe  d'un  commun  confentement  pour  l'Eglife  Catholi- 
que. 

Justin  Diacre  S-  Domcfîique  de  Jerûfalem. 
Joseph  Diacre.  Jacob  Diacre. 

Athanase  Diacre.  Joachim  Grand  Ecclejiarquë. 

JoACHiM  Religieux  Commiffaire. 

|ean  grand  Logotheta  de  la  fainte  RefurreUion. 

Pierre  fils  de  chanil  protonotaire. 

Nacer  Primiceirus.  AntoINE  Lampadanus. 

Cyrille  Ahbè. 

Le  prefent  écrit  comme  il  eft  couché  cy-defTus  avec  les  fignat- 
tures,  &  tout  ce  qui  s'eft  fait,  a  efté  mis  dans  le  livre  de  noftre 
Thrôue  ApoRolique  ,  pour  fervir  de  mémoire  éternelle  & 
d'aucori'"é  le    lo.  Mars    1671. 

Dosithe'e  Patriarche  de  Jerufulcm  le  déclare  ^  ^  le  Jîgne de 
ma  propre   main. 

Nectarius  cy- devant  patriarche  dejerufilem  déclare .^^ coli- 
feffe  que  tclU  efi  nofire  foy  (^  ceUe  de  l'Eglife  d'O  rient. 


(Lwec  ÎEglife  '^tna.ine  fur  tEuchArifiie.  yn 

Ne  CT  A  RI  us  Reltpeux  é"  Mypomncmato.Graphus  de  la.  Re. 
furreilion  de  No/ire  Seigneur^  ay  Jîgné  déclarant  lu  même  chofe 
que  le  faint  Concile. 


CHAPITRE     XVI. 

Union  des  Eglifes  d'Orient  avec  l'Eglife  Romaine  fur  l'Eucha* 
rijlie  ^  autres  points,  prouvée  parunAcie  ou  Traitté  du  Pa. 
triarche  des  Maronites  d'Antioche.  Signé  de  plujieurs  Metro- 
folites  é"  Prejhes  de  [on  fatriarchat. 

ON  n*a  rien  à  ajouter  pour  faire  connoiftre  les  Maroni- 
tes à  ce  qu'on  en  a  dit  dans  le  premier  volume  de  la  Per- 
pétuité. La  profelîion  qu'ils  font  d'eftre  fournis  au  Siège  de  Ro- 
me, ne  laifîè  pas  lieu  de  douter  de  leurs  fentimens  fur  l'Eucha- 
riftie.  Néanmoins  comme  M.  Claude  a  voulu  chicaner  fur  quel- 
ques extraits  qu'on  avoit  faits  de  leurs  livres,  &  que  d'ailleurs 
ils  ne  rendent  pas  feulement  témoignage  pour  eux-mêmes , 
mais  auffi  pour  toutes  les  Eglifes  de  l'Orient ,  dans  lequel  ils 
font  répanduSj  nous  n'avons  pas  cru  devoir  négliger  d'inférer 
icy  unade  dreiïe  par  les  Maronites  d'Antioche,  à  la  follicita- 
tion  d'un  Jefuite. 

Le  préambule  contient  divers  faits  hiftoriques  très  peu  ex.icT:5j 
mais  ce  n'efl  pas  dequoy  il  s'agit,  ci.  l'on  fçait  aïïez  que  l 'Orient 
eftrempli  de  livres  où  les  hiftoires  font  fort  altérées.  Mais  il 
y  a  bien  delà  différence  entre  les  hiftoires  dont  les  particuliers 
nefont  point  obligez  d'eftre  informez,  &  la  foy  desmyfteres 
qui  fubfiftent  dans  la  connoiftance  de  tout  un  peuple. 

ACTE  OV  TRAITTE'  DES  MARONITES  D'ANTIOCHE. 
Au  nom  du  F  ère  ,  du  Fils  &  de  l'Efprit  de  S^mtctè  ^  un 
feul  Dieu. 


V 


Terre  le  chef  des  Difciples  dans  fa  première  Lettre  qu'il  ad- 

dreflèaux  élus,  difperfez  en  tous  les  pays,  leur  ordonne 

d'eftre  toujours  difpofez^  k  rendre  réponfe  à  celuy  qui  les  interro- 

.q£ra  de  la  parole   touchant   l'efperance  qu'ils  ont.  Les  gens  du 

monde  gardent  même  cet  ordre ,  à  combien  plus  forte  raifon, 

nous  que  Dieu  par  la  ra  ce  de  fa  libéralité  a  eftabhs  Pafteursde 

y  V  vv  ii] 


y  il  Liv.  VI  H.  Prewves  authent.  de  tuniondes  Eg.lor, 
fes  ouailles  ,  fommes  nous  obligez  d'ellre  prorapcs  à  rendre 
réponfe  à  celuy  qui  nous  incerroge,  à  conduire  celviy  qui  de- 
mande noftre  diredion ,  afin  que  noftre  condamnarion  ne  foit 
pas  avec  ce  ferviceur  qui  enfouie  dans  la  terre  le  talent  de  Ton 
maiftre,  ôc  qui  mérita  d'eftre  exilé  dans  les  ténèbres  exté- 
rieures. 

Ceft  que  dans  le  pays  d'Occident  le  Diable  a  élevé  plu- 
fieurs  troupes  infidelles  &  dévoyées  du  bon  chemin ,  cher- 
chant leur  propre  gloire,  6c  l'impiété,  qui  par  leur  infpira- 
tion  dépravée  ont  voulu  renverfer  les  tondemens  du  Siège 
Romain  que  le  Seigneur  a  placé  de  fes  mains  fur  Pierre,  qui 
eft  la  pierre  ferme  de  la  fby,  &  qui  Iny  a  promis  que  les  portes 
d'enfer  ne  prévaudront  point  contre  luy  dans  la  fuite  conti- 
nuelle des  teinps.  Et  parce  qu'ils  n'ont  point  de  foutien  pour 
s'appuyer  deffiis,  ils  ont  calomnié  l'Eglife  d'Orient,  difanc 
qu'elle  eftoit  de  leur  opinion  6c  qu'elle. s'accordoit  à  l'impu- 
reté de  leurs  fentimens  Or  Dieu  a  mis  le  zèle  de  fa  foy  dans 
le  cœur  de  la  Seigneurie  de  l'illuftre  &  élevé  de  Nointel 
AmbafTadeur  du  grand  Roy  de  France  la  gloire  des  Chré- 
tiens ,  afin  qu'il  s'informa!!:  de  cette  chofe,ôcila  envoyé  le 
Révérend  Père  Michel  Jefuite  pour  fçavoir  de  nous  ce  que 
nous  penfons  6c  ce  que  nous  croyons  fermement,  des  points 
principaux  dont  on  a  douté  6c  difputé. 

Pour  le  comprendre  ,  que  le.  fage  Leéleur  fçache  que  noftre 
Nation  des  Maronites,  bien  qu'elle  foit  éloignée  du  peuple 
de  Rome  d'un  éloignement  extrême  au  regard  de  fon  langa- 
ge, 6c  de  l'étendue  des  pays,  n'a  jamais  cefTé  par  la  grâ- 
ce du  vray  Dieu,  dont  la  louange eft  haute,  d'en  efbre  proche 
dans  les  quartiers  d'Orient.  Elle  s'eft  tenue  attachée  à  Rome, 
&  elle  s'eft  foutenuë  par  elle  d'un  foutien  parfait  à  la  loy 
Chreftienne,  comme  il  eft  manifefte  par  les  lettres  des  Pon- 
tifes du  Siège  Romain  6c  par  leurs  Bul'es  glorieufes,  qu'ils 
ont  enyoyé^s  à  ceux  qui  nous  ont  précédé  dans  le  haut  Siè- 
ge'd'Antiothe.  Ec  pour  ne  nous  pas  étendre  à  expliquer 
cela,  nous  ferons  mention  icy  d'un  feul  témoignage  tiré  d'une 
lettre  envoyée  par  le  Pape  Paul  cinquième  parlant  aux  Ma- 
ronites en  cette  manière: 

Beny  foit  le  Seigneur  qui  par  fa  grande  mi fertforde ,  lorfque 
le,  déluge  de  quantité  d'eaux ,    c'ejî  k  dire ,  de  divers  fthifmei^ 


anjec  VEgUfe  Komaine  fur  rRuchurifiie,  .       715 

hère  fie  s  ^  méchancetcz^  a  inondé  le  fays  d'Orient,  (y^  lorfqu'il  Ch.  XVL 
tient  encore  prefque  tout  le  monde  abifmè ,  rHa  -point  permis  qu'il 
approcha^  de  vous ,  mais  qui  a  daigné  vous  conferver  tant  de 
fie  de  s  dans  la  vérité  de  lafoy  Catholique  ^  par  un  don  tout  par- 
ticulier de  fa  clémence.  C'efl  pourquoy  vofirefoy  efi  annoncée  dans 
tout  le  monde,  é^  elle  e(l  louée  dans  l'Eglife  Romaine  qui  efl  la 
JM'ere  ^  la  Maiflreffe  de  toutes  les   E'ilifes. 

Lorfqiie    le   fcelerac    Severus    prie  pofleffion    du   Siège 
d'Antioclie  &:  reduific  par  fa  malice  le  cœur  d'Anaftafe  Em- 
pereur àQ%  Grecs,  Se  qu'ils  fe  mirent  cous  deux  à  perfecucer 
l'Eglife  de  Dieu  &  à  femer  la  zizanie  des  hérétiques  dans  les; 
quartiers  d'Orient,  les  difciples  de  S.  Maronleur  refifterent 
&  s'oppoferent  à  leur  docT;rine  corrcmpuë, comme  il  paroifl: 
par  les  lettres  qu'ils  écrivirent  au  Pape  de  Rome  S,  Hormif- 
das,  &  les  requeftes  qu'ils  prefenterent  au  cinquième  Con- 
cile aiTembléàConftartinople,puirqu'ils  yconfeiTent  que  ce- 
Juy  qui  tient  le  Siège  de  Rome  efl:  le  Chef  de  toute  la  terre 
habitable  ,  le  Dodeur  de  l'Eglife,  le  Médecin  des  Ames,ôc 
Je  Pafleur  des  Ouailles  Chreftiennes. 

"  L'année  depuis  l'Incarnation  du  Seigneur  691.  Callinicus 
Patriarche  de  Conftantinople  s'égara  de  la  droiture  de  la  foy. 
L'Empereur  des  Grecs  Juflinien  Rhinotmet  commanda  qu'on 
afTemblafl:  un  Concile  ,  Se  on  dit  que  ce  fut  à  Conftantinoplc 
dans  le  Palais  fous  le  dôme,  pour  changer  ce  qu'avoient  or- 
donné le  SS.  Pères  qui  eftoient  venus  au  fixiéme  Concile. 
En  ce  temps-là  le  Patriarche  Jean  qui  eftoit  du  Monaftere 
de  S.  Maron,  eftoit  en  pofTeffion  de  la  Prclatnre  du  Siège  d'An-  - 
tioche.  Ils  firent  un  Concile  dans  î'Eglife  de  S.  Jean  de  La- 
tran  ,  Se  ils  frappèrent  d'excommunication  lefauxSvnode  & 
celuy  quile  fuivoit.  Le  Patriarche  Jean  retourna  en  Syrie 
fous  l'écendart  du  Pape/&  i!  y  apportai  le  manipule,  la  mître. 
Se  l'anneau  félon  qu'en  ufe  l'Eglife  Romaine. 

Or  Jufl:inien  l'Empereur  des  Grecs  voyant  que  le  Concile 
qu'il  avoit  ailemblé  avoit  efl:é  rejette  Se  n'avoit  point  eflé  re- 
ceu  ,  il  envoya  fes  foldats  fous  la  conduite  du  gênerai  Zacha,  ' 
rie  pour  luy  amener  le  Pape  enchaifné.  Dieu  ne  luy  donna 
pas  la  force  de  le  faire. 

Cependant  il  commanda  qu'on  fift  tourner  fon  armée  du 
coftéde  la  Syrie  contre  le  Patriarche  Jean,  Se  les  Généraux 
de  l'armée  eftoient  Marrie  Se  Marcian  hommes  cruels,  Se  fans 


7I4I-IV'  VHI.  Prewves  authent.  de  Vunïon  des  €g.  d'Or. 
picié.  Ils  ruinèrent  le  Monafbere  de  faine  Maron  qu:  eftoit  bafti 
fur  la  rivière  dite  Rebelle,  6c  qui  renfermoit  près  de  800.  Re- 
ligieux. Ils  feduifirenc  le  monde  &:ils  mirent  à  mortplufieurs 
perfonnes  dont  le  nombre  n'a  point  de  bornes ,  &c  quand  ils 
furent  arrivez  avec  leur  armée  au  bas  de  la  montagne  du  Ly- 
ban  au  deflusde  la  ville  de  Tripoly  de  Syrie,  les  Princes  de 
la  ville  de  Hidet  fondirent  fur  eux  avec  l'ëpëe ,  &  depuis  ce 
temps-là  fut  la  divifion  des  deux  nations  des  MelkitesSc  des 
Maronites  dans  le  pays  de  Syrie. 

Ceux  quifuivirent  Juftinien  &  fon  Synode  dépravé  fe  nom- 
mèrent Melkites  ou  Melkic,  quieft  un  nom   dérivé  de  ce- 
luy  de  Roy.  Et  ceux  qui  fuivirent  le  Patriarche  Jean  &  les 
loix  de  Rome,  s'appellcrent  Maronites,  d'un  nom  pris  du 
Monaftere  de  S.  Maron  où  le  Patriarche  Jean  s'eftoit  fait 
Religieux.  Et  après  la  mort  de  ce  Père  fufmentionné,  fuc- 
ceda  au  Siège  d'Antioche  le  frère  de  fa  fœur,  le  Patriarche 
Cyrus,  lequel  receut  auffi  (a    confirmation    de  Rome  ,  juf- 
que  là  même  qu'au  temps  d'Innocent  III.  un  des  Papes  de 
Rome,  entrai  Rome  le  Patriarche  Jeremie,  &  fe  trouva  au 
Concile  qui  fe  célébra  à  Rome,  fie  il  fut  confirmé  Patriar- 
che  de  la  nation^  des  Maronitesj  puis  il  retourna  au   mont 
Liban  avec  de  glorieufcs  lettres  èc  quantité  de  faveurs  ôc  de 
grâces ,  &  ainfi  tous  ceux  qui  luy  ont  fuccedé  jufqu'à  nos 
joursj  comme  nous  fommes  prefts  avec  la  grâce  de  Dieu  de 
faire  voir  ces  chofes  par  une  explication  fort  longue,  Et  nous 
n'avons  abrégé  cette  déclaration  quieft  hors  de  ce  qu'on  fou- 
haite,  qu'afin  qu'un  chacun  fçache  que  la  nation  des  M^ro^ 
nites  n'a  jamais  ceflc  en  tout  temps  depuis  l'ancien  tempî^ 
d'cftre  unie  sveclEglife  de  Rome  comme  les  membres  avec 
le  chef,  iSc  foumis  au  SuccefTeur  de  Pierre  Se  au  Vicaire  du 
Mefîîe,  comme  fes  enfans.  Et  en  confequence  necefl^ire  dç 
cette  déclaration, 

PREMIEREMENT 

Nous  croyons  j  &:  nous  profeflons  d'une  profeffîon  ferme 
^ue  dans  l'Office  de  la  Sainte  Méfie  fe  trouve  affeurément 
éc  véritablement  le  corps  du  Sauveur  Meffie,  &c  qu'il  y  eft 
vivant  6c  vivifiant,  fie  parfait,  fans  qu'il  luy  manque  rien 
de  tout  ce  qui  appartient  aux  deux  natures  la  divine  fie  l'hu- 
mainÇj  &  que  celuy  qu'a  annonce  l'Ange  Gabriel  à  Naza- 
reth 


û/vec  VBglife  Romaine  fur  ÏEu-chiiriflie.  71; 
ret  qui  eft  né  à  Bethléem  de  Notre-Dame  la  pure ,  &  qui  a  elle  Ch.  XVI. 
crucifié  en  Jerufalem  fur  le  mont  de  Calvaire  ,  &  qui  cftaflis 
dans  le  Ciel  à  la  droite  de  la  Grandeur  ,  celui  là  même  ,  &: 
non  un  autre ,  eft  offert  fur  les  faines  Autels  par  les  mains  des 
Preftres  ôc  à^'s  Pontifes ,  comme  nous  croyons  que  l'a  fait  le 
Seigneur  en  prefence  de  {&%  Di  fciples,  5^  qu'il  leur  a  commande 
de  le  faire  juft]u'au  temps  de  fa  venue. 

SECONDEMENT. 

Nous  croyons  &  nous  profefïons  qu'après  la  Consécra- 
tion des  myftcres  par  la  vertu  de  la  parole  ôc  de  l'clpric  ,■  le 
pain  &  le  vin  font  changez  dç  leur  eftac  au  corps  du  Seigneur 
&  en  fon  fang  vivifiant  par  un  changement  véritable  i^  iub. 
ftantiel  y  de  forte  que  les  deux  natures  du  pain  6c  du  vin  font 
détruites  en  leur  cjire  ,  &  qu'au  lieu  d'ellt;s  'Xiiw^  le  trouve  le 
corps  du  Sauveur  &  fon  fang  à  la  manière  des  efprits  ,  &  que 
les  accidens  du  pain  &  du  vin  ,  &:  les  rcflembkinccs  viiîblcs  loe 
perdent  point  leur  eftre^  mais  qu'ils  font  rranfporrez  de  l'un 
&  de  l'autre  au  corps  du  Meilîe  &  à  fon  fang^  comme  il  cftévi- 
dent  &  manifcfte  des  Meffes  des  fiincs  Apoftres  &  des  Per«s 
élus  les  colomnesde  tTgUiè.  Et  s'il  pUift  à  Dieu  dans  peu  àç. 
temps  nous  ferons  voir  aux  curieux  delà  icienee  les  copies  de 
toutes  les  Méfies  qui  fe  trouvent  dans  nôtre  Pavs  d'Orient  , 
avec  un  long  Commemaire  qui  comprendra  tout  ce  qui  con- 
cerne l'Office  de  la  faii>te  Meflè. 

T  R  O  I  S  I  E'  M  E  M  E  N  T- 

Nous  crovons  &  nous  profeiTors  que  le  pain  Ju  Seigneur^ 
que  nous  offrons  tons- les^  jours  (iir  les  Autels  vénérables,  & 
que  nous  diftribuonsaux  oiiaillcs  railonnables, eftâfîiirtirenc 
un  facrifice  raifonnablc  &  vivant  &-  làinr  ,  mai:  noa  fanglant  & 
fans  paillon  &  douleui ,  &;  qu'il  eft  offert  pour  les  Fideies  v'- 
vans  &  Erëpalfez  ,.pourefFaccr leurs  offènfes,  ^i  Icui-faifc  avoir 
le  pardon  de  leurs  péchez  ^  lelon  la  parole  du  Seigneur  à  fcy 
purs  Difciples,  que  fon  corps  eft  donné  5i  fon  (ang  répandu  , 
pour  eux  £c  pour  le  pardon  des  péchez. 

XXxx. 


■-/ 


•ji6  Liv.  Vif  I.  Pmufves authen.de Cunion des €g.£OK 

QJJ  A  T  RI  F  M  E  M  E  NT. 

Nous  croyons  &  noas  profeflbns  que  tous  les  Fidèles,  lorf- 
qu'ils  communient,  reçoivent  véritablement  le  corps  du  Sei- 
gneur &:  fon  fang  précieux  ,&  que  celui  qui  reçoit  les  deux 
Myfteres  enfemble  ,  ne  reçoit  rien  de  plus  que  celui  qui  re- 
çoit une  des  deux  efpeces  ou  une  de  Xtwïs particules,  parce 
que  nous  profefTons  que  le  corps  du  Seigneur  fe  trouve  vivant 
&  dans  Ton  entier  fur  la  patène ,  &  dans  le  calice ,  &  dans  cha- 
que partie  des  deux, efpeces.  Celui  qui  le  reçoit  avec  dévotion 
.&  avec  pureté  d'intention ,  il  lereçoit  pourfon  falut  &  pour  la, 
vie  éternelle  5  &  celui  qui  le  méprife  ,  &  qui  le  reçoit  fans 
épreuve,  il  le  reçoit  à  fa  condamnation  ,  &pourfupplice  des 
feux ,  comme  il  eft  marque  dans  \qs  Evangiles  .&  les  Epiftres  du 
.bien-.heureux  Paul. 

C  I  N  Ç^U  I  F  ME  M  E  N  T. 

Nous  croyons  &  profeflTons  que  la  fainte  Hoftie  etl  toute 
adorable  &  vénérable  ,  non  feulement  comme  les  croix  & 
les  Images  dignes  de  refpecl ,  mais  comme  l'unique  Fils  de 
Dieu ,  puifque  nous  confeHons  que  dans  elle  eft  toute  la  divi- 
nifé,  &  que  la  perfonnedu  Seigneur  Sauveur  s'y  trouve  non 
en  figure  &  reprefentation ,  mais  en  vérité  &  en  perfection  fé- 
lon (a  véritable  parole,  Je  fuis  le  pain  de  la  vie  ^  ôc  ailleurs  . 
Ory  cfl  mon  corps. 

SIXIEMEMENT. 

Nous  croyons  &  nous  profeflbns  que  le  Sacrement  du  S. 
Baptême  eft  abfolument  neceflaire  pour  le  falut  ,  bien  que 
l'homme  foit  né  de  perfonnes  faintes,  parce  que  comme  le 
meurier  bien  qu'il  foit  enté  ,  ne  produit  que  des  meures  fauva- 
ges  ^  de  même  bien  que  Thomme  foit  faint ,  il  ne  mer  point 
d'enfansau  monde  qui  ne  foient  enfans  de  colère.  Et  pour  cela 
le  Seigneur  a  dit  :  En  vérité  en  vérité  jeté  dis  :  Celui  qui  n'ejl 
point  né  de  l'eau  (^  de  l'efprit  de  fainteté  ^  ne  peut  entrer  dans  le 
Royaume  de  Dieu. 


(Lwec  ÏEglifi  'Romaine  fur  t Eucharifiie,  717 

S  E  P  T  I  E'  M  E  M  E  N  T.  ^"'  ^^^' 

NousconfeflTonsquele  Sacrement  de  la  Confeffioneftabfo- 
lument  neceflaire  pour  le  pardon  des  pecKez  ,  félon  la  parole 
du  Seigneur  ;  Celui  à  qui  vous  fardonnerez^fes  péchez^  ^  ih  Imfe. 
'  ront pardonnez^:  c'eft  pourquoy  quiconque  tombe  en  péché  par- 
-  fait ,  c'eft-à  dire  mortel ,  il  ne  trouve  point  de  pardon ,  s'il  ne 
s'en  confefle  au  Preftre,  fî  ce  n'eft  qu'il  n'y  ait  point  de  Prê- 
tres. Alors  que  l'homme  le  repente  du  péché  dontils'eft  rendu 
coupable ,  &  qu'il  propofe  de  fe  confeffer  ,  quand  Dieu  le 
Très- haut  lui  en  donnera  le  pouvoir  ,  &  qu'il  ne  deferpere 
point  de  la  mifericordedeDieu  &  du  pardon. 

HUITIE'MEMENT. 

Nous  croyons  &  nous  confefTons  que  l'Intendant  de  nôtre 
falut  a  honoré  Ton  Eglife  du  Sacrement  du  Sacerdoce  ^  oc  qu'il 
'  eft  divifé  en  trois  ordres ,  le  Diaconat ,  la  Prêtrife  &  la  Prela- 1<"  Orientaux 
ture,à  la  refiemblance  des  trois  Ordres  des  Anges  qui  font  dans  "ousTIccord 
le  Ciel.  Et  dans  ces  trois  Ordres ,  comme  il  eft  écrit  dans  les  deiadivifioa 
faints  Livres ,  l'un  eft  plus  élevé  en  honneur  que  l'antre  ,  &:  il  h'frirl'hw^  * 
faut  que  le  degré  inférieur  foit  obeïflànt  à  celui  qui  lui  eft  fu-  des  Anges. 
perieur ,  le  Diacre  au  Preftre  ,  &  le  Preftre  à  l'Evcque  ,  &  l'E- 
vêque  au  Patriarche  ,  d'une  foumiflîon  telle  qu'eft  celle  des 
membres  au  chef  dans  le  corps,  afin:  que  le  corps  de  l'Eglife  fe 
conferve,  &  que  le  fchifme  en  foit  banni.  Et  comme  il  n'eft  pas 
poffible  qu'un  troupeau  foit  bien  gouverné  fans  Pafteur  ,  il  en 
eft  de  même  des  OiiaJlles  du  Meflie ,  s'il  n'y  a  point  de  chef  en 
l'Eglife.  Et  pour  cette  raifon  nous  profeiîons  que  le  degré  des 
Evêqueseft  neceiïaire  dans  l'Eglife  pour  fon  gouvernement, 
&  pour  l'ordination  des  Preftres  ,  Se  la  Preftrife  pour  la  con- 
fecrationdu  corps  du  Seigneur  &  fa  diftribution,  &  les  Dia- 
cres pour  le  fervice. 


N  E  U  V  I  E'  M  E  M  E  N  T. 


1    ./-,';! 


Nous  croyons  &  nous  profeiTbns  que  l'Epoufe  du  Melïïe 
éft  une  fur  la  terre  ,  c'eft  à- dire  la  fâinte  Eglife  Catholique  ^ 
Apoftolique,  qu'il  aacquifeau  prix  de  fon  fang;  &il  lui  a  don- 
né les  clefs  pour  lier  celui  qui  lui  obéît  au  bonheur  de  la 

XXxx  ij 


7i8  Liv.VIII.  Freunjes  authent.de  Tunion  des  Eg.  d'Or. 
Communion  des  Saints,  6c  celui  qui  luiefl  rebelle  eft  comme 
un  Payen  &  un  Publicain.  Etcetcê  Eglife  n'a  jamais  ceiréd'c. 
tre  manifefte  &  vifible  dans  tous  les  iiecles  Se  dans  tous  les 
temps,  comme  une  ville  placée  fur  la  cime  de  la  montagne  , 
qui  ne  peut  eftre  cacliée  ,  afin  que  les  hommes  y  viennent  de 
tous  lesxroins  du  monde  J  &  par  lapuilî^incequiluia  eûëdon- 
nce  d'enhaut,  elle  a  ordonné  les  Conciles  &.  les  Canons,  &  elle 
a.  déclaré  avec  aflûrance  les  laints  Livres  qui  doivent  eftre  con- 
fervez  ,  &  aux  loix  defqucls  il  faut  fe  tenir  J  &  du  nombre  de  ces 
Livres  reçus  font  les  Livres  deTobie,  de  Judith,  delà Sagefle, 
de  l'Ecciefuilique  ,  de  Barucfa. 

D  I  X  I  E'  M  E  M  E  N  T. 

^  Nous  aflurons  que  î'Eglife  a  ordonné  avec  bonne  raifon 
les  abftinences  Se  le  jeûne  du  Carême  aux  Fidèles  fes  enfans 
pour  brider  la  concupifcence  &  l'empêcher  de  faire  mal ,  pour 
diriger  les  Fidèles  dans  l'acquifition  des  vertus.  Et  la  preuve 
de  cela  eft  la  parole  du  Seigneur  :  Quand  l'Epoux  fera  enlevé  ^ 
alors  ils  jeûneront. 

ONZIEMEMENT, 

Nous  difons  que  le  recours  qu'on  a  aux  intercefïïons  de  celle 
a  qui  il  appartient  d'intercéder^  qui  eft  la  minière  du  bien  &:  de» 
bénédictions ,  qui  eft  nôtre  Dame  à  nous  tous ,  qui  eft  la  Mère 
du  Salut,  eft  du  nombre  des  chofes  convenables ,  parce  que 
ç'eft  par  elle  que  vient  toute  la  grâce  de  la  vie ,  &  qu'il  eft  im-  ' 
poffible  que  fon  bienaimé  Fils  confonde  fon  vifage,  lorfqu'elle 
'offre  pour  nous  fes  demandes,  &;  nous  fupplions  les  Saints  de 
'Dieu  ôvi  fes  Anges  de  lumière  qu'ils  lui  prefentent  nos  prières , 
2c  qu'ils  intercèdent  pour  nous  devant  leur  Seigneur  ,  parce 
qu'ils  font  nos  médiateurs  entre  lui  êc  nous ,  comme  I'Eglife  en 
fait  mention  dans  l'Office  des  Martyrs,  difant  que  Dieu  a 
exaucé  les  prières  des  Pères,  Abraham,  Ifaac,  Jacob  &;Jofeph. 
En  cette  manière  'es  enfans  du  jufte  Abraham,  bien  que  mis 
dans  leurs  fepulchres  ,  ont  pu  détourner  la  mort  du  peuple. 
Et  à  canfe  de  David  Jerufilem  a  efté  fauvée  de  l'armée  des 
Egyptiens  aux  juurs  d'Ezechias.  Lesos  du  glorieux  Jofcph  ont 
efté  un  rempart  aux  enfans  de  Jacob ,  lorfqu'ils  fortirent  de  la 
terre  d'Egypte. 


n'vec'lEgUje  Romaine /nr  t€uchxriflie.  719 

DOUZIE'MEMENT. 

Nous  difons  que  c'eft  une  bonne  chofê  d'honorer  5c  ado- 
rer la  Croix  du  Seigneur  ,  8c  les  Images  des  Saints  vénérables, 
parce  que  la  Croix  reprerente  la  qualité  du  Sauveur^SclesIma- 
^es  fe  rapportent  à  celui  qui  ell  reprefenté  par  elles.  C'efl  pour 
•cela  que  nous  les  honorons  comme  nous  honorons  le  Livre  du 
iainc  Evangile  ,  &nous  baifons  les  reliques  des  os  des  Saints  , 
&nous  vifirons  les  Eglifes  bâties  à  Dieu  en  leur  nom,  pour 
avoir  le  bonheur  de  leurs  bénédictions  &  des  miracles  qui  pro- 
cèdent d'eux.  Et  les  Pères  anciens  ont  ordonné  que  les  Images 
des  Saints  fufTent  dans  les  Eglifes,  comme  leurs  âmes  font 
dans  le  Ciel,  &  que  le  figne  de  la  Croix  fuft  fur  les  Autels,  & 
les  baluftres  ,  &  furies  habits  du  Sacerdoce,  &  fur  les  tombes 
des  Martyrs  3  &  fur  les  portes  des  Egiifes ,  &  que  les  Prélats  à 
leurs  MelFesôc  Proceffionsôc  autres  chofes  eufîènr  toujours  la 
Croix  enleur  main  droite,  parce  que  c'eft  par  elle  que  le  Fils 
de  Dieu  a  dompté  le  Diable  ,&  qu'il  nous  a  délivrez  de  la 
damnation,  6c  il  en  a  fait  la  clef  du  Paradis  éternel. 

TREIZIE'MEMENT. 

Nous  difons  que  l'Etat  Religieux  eft  un  chemin  pour  arri- 
ver à  la  vie  éternelle ,  l'homme  méprifant  le  monde,  &:  ce  qu'il 
y  a  dans  le  monde  ,  &  s'ofFrantà  Dieu  en  vidime  volontaire. 
C'efl:  pourquoy  cette  manière  de  vivre  efl:  vertueufe ,  êc  fcs  rè- 
gles font  droites ,  &  fes  vœux  font  bons ,  &  on  eft  obligé  de  les 
maintenir  Se  de  les  garder.  Nos  purs  Pères  Se  nos  bons  Saints 
ont  tenu  cette  voye  par  l'inipiration  de  l'efprit  de  fainreté. 
Celui  quilacombat.j  combat  leur  nxafliere  de  vivre  ,  êc  celui 
qui  la  r^iéprife ,  mcprife  la  vertu  ^  la  perfedion  :  Le  Seigneur 
ayant  dit ,  St  tu  vetix,ejtre  Jfarfait ,  va  ^^  vends  ce  que  tu  as  ,  é- 
donne -le  aux  pauvres  3  ô"  tu  auras  un  trefor  dans  le  Ckl  ^  ^  viens 
^  fuis  moy, 

.,     Q^UAT  ORZIE'MEMENT. 

■  Nous  difons  que  les  prières  5c  la  manière  d'adminiftrer  les 
(acrez  Myftcres  ont  efté  ddcmenc  compofez.  Elles  fe  dilênc 

XXxx  iij 


Ch.  XVI. 


yio  Liv.  VIIÎ.  Freumi  authent.  de  t union  desTg.  d'Or, 
en  langue  Syriaque ,  en  Grec  &  en  Latin,  &  en  d'autres  lan- 
gues, bien  qu'elles  ne  foient  pas  entendues  du  peuple  ,  parce 
que  nos  anciens  Pères  ont  compofé  en  ces  langues,  les  priè- 
res ,  les  Meflès ,  &:  le  rite  de  l'Eglife  ,  &  que  ceux  qui  leur  onc 
fuccedé  ,ont  marché  fur  leurs  traces  jufqu'à  nos  jours.  Quoi- 
que le  peuple  n'entende  pas  la  fignificaiion  des  paroles,  il  lui 
fuffit  que  ion  intention  (oit  conforme  à  l'intention  de  l'Eglife. 
Et  à  propos  de  cela  il  cft  écrit  dans  les  hiftoires  des  Religieux , 
de  ce  Religieux  qui  vint  à  l'Abbé  Paftcur ,  Se  fe  plaignit  à  lui 
qu'il  ne  fentoit  aucun  gouft  ni  plaifir  à,  prier ,  parce  qu'il  n'en- 
tendoit  pas  le  fens  des  paroles ,  le  vieillard  lui  répondit  :  Mon 
fils, ne  fois  point  parefleuxà  continuer  de  prier  inceflammcnt, 
parce  que ,  comme  l'enchanteur  endort  le  ferpent,  bien  qu'il 
n'entende  pas  les  paroles  du  fortilege  ,  de  même  tu  confon- 
dras le  Démon  ,  &  tu  le  dompteras  par  la  prière ,  bien  que  tu 
ij'entende  pas  la  fignification. 

Q^U  I  N.  Z  I  E' M  E  M  E  N  T; 

Nous  croyons  &  nous  profeflons  que  Dieu  àquiefl  là  puif- 
ikncefic  la  gloire  àcaufe  de  l'abondance  de  l'amour  qu'il  porte 
au  genre  humain,  defire  le  falut  d'un  chacun  des  hommes,  & 
que  par  lès  mérites  de  fon  Fils  bieiî  aimé  qui  a  livré  fa  vie  pour 
BOUS  tous,  il  donneàunchacundenous  la  grâce  qu'il  fçaitnous-^ 
fuffire  pour  garder  fcs  Commandemens,  &  fauvernos  âmes.. 
Et  celui  quife  damne,  fon  péché  eft  fur  lui,  parce  que  de  fa  prol 
pre  volonté  il  a  rejette  la  grâce  deDieu,&  a  fuivi  la  cupidité  de 
Ion  corps  Et  celui  qui  fê  fauve,  il  faut  qu'avec  la  droiture  de  fa 
foy,il  ait  encore  l'amour  déDiieu  &:  la  bonté  des  œuvres,efl:ant. 
certain  chez  nous  que  la  foyfans  les  œuvres  eft  une  foy  morte. 

Enfin  pour  ne  pas  étendre  davantage  cette  déclaration,  nous 
Qc  nôtre  peuple  des  Maronites  ,  recevons  fans  déguifcrhent  &: 
de  bonne  foy  ce  que  re<^oit  l'Eglife  de  Rome  la  grandcj  Se  tout: 
ce  qu'elle  rejette  nous  le  rejettons ,  parce  qu'elle  poflede  le- 
premier  Siège,  &  que  c'éft-là  qu'efl:  mort  Pierre  le  Chef  d&s 
Apoftres,  que  le  Seigneur  lui-même  a  établi  la  pierre  vivede 
la  foy ,  &  pour  lequel  il  a  prié  que  la  foy  ne  manquât  point ,. 
afin  qu'il  confirmât  Ces  frères ,  qui  font  les  Patriarches  Sx.  les 
Prélats  difperfez  dans  les  quatre  coins  du  monde. 

Or  poux  ce  qui  eft  de  toutes  les  autres  Nations  Chrétien-- 


^wec  ÏEglife  Romaine  /ur  fEuchayifiie.  jn 

•nés  qui  font  dans  les  climats  d'Orient,  il  eft  vray  qu'elles  font  Ch.  XVL 
oppoieesen  quelque  chofeà  nous&àl'Eglife  de  Dieu  la  Ca- 
'tholique  &  rApofl-olique.  Mais  pour  ce  qui  regarde  les  quinze 
articles  dont  nous  avons  fait  mention  ci-delTus,  ils  les  croyent 
fermement ,  2c  d'autres  Myfteres  encore  que  nous  paiTons  fous 
(îlence ,  6c  ils  croyent  cela  parfaitement  fans  doute  &  fans 
fraude  -,  &  nous  prions  TUnité  Divine  dont  la  louange  eft  éle- 
vée ,  qu'il  conduife  les  cœurs  de  tous  les  liommes  à  la  charité 
-  &  à  l'union ,  afin  que  tous  foient  unfeul  troupeau  fous  un  feul 
Pafteur:  &;  Dieu  eft  témoin  de  ce  que  nous  difons.  Et  voici 
nôtre  Cgnature  -&  le  fceau  de  ce  haut  Siège  fur  lequel  nous 
fommes  affis ,  qui  témoigne  pour  nous ,  écrit  dans  le  Monaf- 
tere  de  Cannobin ,  le  béni  de  Dieu  le  i  z.  jour  de  Juin ,  le  béni 
<ieDiew  l'année  1684.  des  années  d'Alexandre  le  Grec,  qui  i"e 
rapporte  à  l'année  1673.  depuis  l'Incarnation  du  Seigneur  ,  & 
qu'à  Dieu  foit  la  gloire  éternellement. 

Suit  le  fceau  4u  Siège  Patriarchal ,  dans  lequel  eft  gravée 
l'image  de  la  fainte  Vierge  tenant  fon  Divin  Fils.  Elle  eft  com- 
tne  fur  une  nuée ,  ■&  on  voit  trois  Croix  autour  de  fa  teftc ,  tc 
autour  ces  paroles  fontécritcsen  Syriaque^  l'humble-ôcrabjec 
Pierre  Patriarche  d'Antioche.  Et  fous  ce  fceau  eft  la  fignaturc 
de  la  main  de  Monfeigneur  le  Patriarche  en  ces  termes  ; 
Eftienne- Pierre  l'humble  &  l'abjet  Patriarche  d'Antioche. 

Signatures  des  Evêqaes  &  des  Prêtres ,  Religieux  y 

&  de  quelques  Séculiers. 

■Georges  t humble  d^  l'abjet  Métropolite  d'Acoura  ,  fils  de 
Habnoux. 

Joseph  P humble  ^  l' objet  Métropolite  de  CebaeL 

Jean  l'humble  ^  abjet  Métropolite  de  Sydon. 

Le  Cure  de  PlERRE^^f/i  de  Mas.iouf,  Religieux  de  S.  Antoine. 

Ze  Curé  ^f  Geo  kg  ES  ,fils  de  Jacques  ,  Religieux  de  S.  Antoine. 

Moy  le  Curé  Elie  ,fils  d!Aonyta  de  Caz^i  ,  Religieux  de  S.  An- 
toine. 

Moy  le  Prefire  Stmeon  ^fils  de  Jean  de  Heden  y  Religieux  de 
S.  Antoine. 

Moy  le  Prefire  Abduccas  ,  au. village  de  BeK^faya  ,  Religieux 
de  S.  Antoine. 

Moy  le  Prefire  Gabriel  de  Belorza  ,  Religieux  de  S.  An- 
toine. 


711  Li  V.  VI I  ï.  Trewves  authen,  de  fumon  des  Eg.  d^Or, 

Jlfoy  le  Prefire  Georges  ,  Religieux  de  Saint  Antoine. 
Moy  le  Cure  Moyse  ,  qui  dejfert  le  Village  d'Afchkout. 
Moy  le  Curé  Harfouch  du  villaqe  diBohel.,  qui  dejfert  l'E- 
^life  de  S.  Doumat. 

Suie  le  feing  des  Jeux  principaux  Séculiers  qui 

font  Gouverneurs  du  Pays  de  Xerroan 

fousle  Prince  Hamed,. 

Dit  le  Serviteur  qui  abefoin  de  "Dieu  le  très -h  ont  é"  glorieux. 
Moy  Nader  Abonnonsel  ,  JîU  de  JTiafen  d'Agelton  dans 
le  JCerroan  ,  Chevalier  Romain  ,  ^  Conful  des  Francs  dans 
la  Ville  de  Barut ,  que  nous  Lt  Nation  des  Maronites  confef- 
fons  ^  profcffons  tout  ce  qui  efi  expliqué  dans  ce  cahier  .^d^  qui  efi 
la  parole  de  notre  Seigneur  le  Patriarche  Ejlienne  ,  ^  des  Sei- 
gneurs Archevêques  df  Prêtres  touchant  certaines  chofes  delapoy 
Catholique. 

Moy  le  Serviteur  qui  a  h e foin  de  Dieu  le  très,  haut  Fi  ad  ,/7f 
fl'f  Nador  KaSEN  ,7>  confejj'e  é- 1^  frofejje  ce  qui  efi  expliqué 
dans  ce  cahier  des  chofes  de  la.  Foy  Catholique  félon  la  parole  des 
Seigneurs  fu [mentionne  ■î^ 


CHAPITRE     XVII. 

Union  de  l'Eglife  Grecque  avec  l'Eglife  Romaine  Jur  l'Eucha- 
nfiie  dî'  autres  points  ,  prouvée  par  deux  condamnations  des 
Erreurs  des  Calvinifies  faites  par  deux  Patriarches  dAn- 
tioche.. 

LE  Siège  d'AntiocRe  qui  eftoir  autrefois  le  rroinéme  cîes 
Patriarches  ,&  qui  fut  enfuire  le  quatrième  depuis  que 
les  Patriarches  de  Conftantinople  fe  furent  élevez  au  fécond 
rang  par  la  faveur  des  Empereurs ,  fubfifte  encore  à  prefenr,  &: 
fait  partie  de  l'EgHfe  Grecque ,  efïantunr  de  Communion  avec 
les  Patriarches  cje  Conftantinople ,  d'Alexandrie  &  Jerufalem, 
&c'èfl:  l'autorité  de  ces  quatre  Pattiarchcs  qui  en  règle  pre- 
fentement  la  foy  &  ladifcipline.  Ainfi  après  avoir  vu.  par  les 
Atteftaeions  précédentes,  les  fentimens  du  Patriarche  de  Cotj- 

ûajitmople 


avec  lEglife  Romaine  fur  l' Eucharijile,  yij 
ftantlnople  dans  l'Ade  Synodal  que  nous  en  avons  produit  Chap. 
de  celui  d'Alexandrie  dans  une  Relation  de  M.  rÂmbalîa.  XVII, 
deur  ,  rapportée  ci-deiïus ,  chap  10.6c  dans  les  fignaturesde 
l'atteftation  de  Conftantinopie ,  &  de  celui  de  Jerufalem  dans 
laLettre  de  Ne(flarius,&  l'Acle  Synodal  de  Dofithëe  :  nous  fe- 
rons voir  ici  que  le  Patriarche  d'Antioche  n'a  pas  d'autres  fen. 
timens  qu'eux  fur  l'Euchariftie  ,  &:  fur  les  autres  points  pour 
lefquels  \&s  Calviniftes  fe  font  feparez  de  l'Eglife  Romaine. 
C'eft  ce  qui  paroiftra  clairement  par  deux  condamnations 
authentiques  de  leurs  erreurs ,  qui  ont  efté  faites  par  deux  Pa- 
triarches confecutifs  ,  Macaire  &  Néophyte  à  l'occafîoa 
delà  difpute  prefente.  La  traduâiion  en  a  efté  envoyée  d'O- 
rient ,  &  elle  eft  apparemment  du  P.  Jefuite  qui  les  a  obte- 
nues. Les  Originaux  font  Arabes,  &  font  dans  la  Bibliothè- 
que du  Roy. 

C07TBAMNu4TION    DES    C ALV J N I ST E^S. 
far  Monfciy/ieur  l'ilh'flrifftTne  (^  Rsverendi.ljîme  Dom  Ma-    ^ 

C^ire  Patriarche  d'Antioche  de  la  Uation  des  Grées. 

Au  nom  dn  Père  ,  du  Fils  e^  de  l'E/prit  de  Sainteté ,  un  féal 

Dieu  ,  ^'^  c'cj^  à  lui  que  nous  demandons  ajjijiance. 

Voici  les  nouvelles  des  Hérétiques  qui  ont  paru  depuis  peu  ^ 
qui  fe  trouvent  à  prefent  dans  le  Pays  de  la  Gaule,  c'eft  à  dire 
de  la  France  &:  d'autres  Provinces  de  I  Europe ,  &  qui  fejfio'n- 
ment  Calviniftes.  Ils  nient  toutes  les  traditions  de  l/Eglifê 
d'Orient:  Ils  ont  change  &:  annullé  tout  ce  queles divins  A pô^ 
très  &les  faints  Pères  qui  ié  font  trouvez  dans  les  fepc  Conci- 
les  Oecuméniques  ont  ordonne  :  Usent  rejette  les  coutumes 
de  l'Eglife  Orientale ,  &  ils  ont  aboli  treize  articles  de  fa  bon- 
ne croyance.  ^    , 

Voici  ce  qu'a  compofé  le  tres-faint  &  très  heureux  Père  le 
Seigneur  Patriarche  Dom  Macaire  Patriarche  de  la  Ville  de 
Dieu  Antioche  la  grande ,  6>:  c't  ft  pour  les  réfuter  &  pour  dé- 
truire leurs  difcours  téméraires, 

CHAPITRE      L 

ILs  difent  touchant  les  purs  Myfteresqu*Sl|)rès  que  le  Prêtre 
les  a  offjrrs  à  l'Autel ,  &  qu'il  a  prononcé  îur  eux  les  paroles 
fubftantiellesjls  font  la  figure  du  corps  de  J.  C.  &  de  fon  fang  ^ 
mais  qu'ils  ne  font  pas  en  vérité  fon  corps  &  fon  fanç. 

Ytyy 


7X4  L^v.  VIII.  Preuves authent. déTunion des Eg.  d'Or. 

RE'P  ON  SE. 

S  Cachez  que  chacun  des  quatre  bienheureux  Evangeliftes 
a  rapporté  par  rinfpiracion  du  S.  Efprit  dans  fon  Evan- 
gile quelques  uns  des  miracles  de  J.  C.  Se  une  partie  de  Tes 
îàintes  Ordonnances:  mais  pour  ce  qui  regarde  ces  facrez  My- 
fteres ,  ils  en  ont  tous  parlé  clairement.  Us  ont  dit  que  le  mê- 
me Seigneur  Mciîie  dans  ce  même  fouper  prit  du  pain  dans 
fes  faintes  mains ,  qu'il  le  bénit,  le  rompit ,  êc  le  donna  à  Tes 
Difciplesles  faints  Apoflres,  leur  disant  ,  Prcnez^^mangez. ,ceci 
efi.  mon  corps  ,  lequel  ejl  rompu  pour  lu  remi.ljton  des  péchez,  :  En- 
fuice  il  prit  le  calice  ,  i5<:il  le  mêla  d'eau,  il  le  bénit,  &  le  pre- 
fênta  à  fesDifciples  ^  leur  difant  ,^faT'f^^»  ,  Ceci  eft  mon  fan(^ 
du  nouveau  Tejlament  répandu  pour  votis ,  ^  pour  plufïeurs  pour 
le  pardon  de  'vos  pcchez^._  Puis  il  leur  fît  ce  commandement  ; 
Quand  vous  vous  affeynblerez^^  faites  ceci  en  mémoire  de  moy.  Ce 
fera  le  pardon  de  vos  péchez.  Et  il  dit  encore  dans  l'Evangile 
de  Jean  :  Celui  qui  mange  mon  corps  ^  boit  monfang  a  la  vie 
éternelle  ,  ^  je  le  rejfuf-iteray  au  dernier  jour  ^  parce  que  mon  corps 
efi  un  vray  manger  ,  ^  mon  fang  une  vraye  boiffon.  Celui  qui 
manie  mon  corps  ^  boit  monfing  demeure  en  moy  ^  je  demeure  en 
lui.  Et  il  leur  dit  ces  paroles,  parlant  du  pain  Ôt  du  vin  qu'il 
leur  a  prefenté  ,  aflurantque  c'eft  véritablement  Ton  propre 
corps  Se  fon  propre  Tang,  Comment  donc  fera  ce  la  figure 
de  fon  corps  ?  Ceux  qui  diîent  cela  ont  menti  ,  &  ils  ont  donné, 
le  démenti  à  l'Evangile  de  Nôtre  Seigneur  J.  C.  &  leur  men- 
fongeeft  une  doctrine  du  diable  ,&:celaeft  clair  comme  lefo- 
leiL 

CHAPITRE     II. 

Ls  difent  que  le  pain  &  le  vin ,  quand  le  facrifîce  s'accom- 
plit, ne  font  point  changez  &:  tranfportez  de  leur  propre 
fubftance  en  un  autre  eftat. 

^    RE'P  ON  S  E. 

■     * 

S  Cachez  que  Nôtre  Seigneur  J.  C.  n'a  pas  coupé  la  chair 
de  fon  corps ,  &  qu'il  n'en  a  pas  faitfortir  du  fangpour  le 
donnera  (qs  Difciples,  lorfqu'il  leur  a  dit:  Frenez^^  manzez^. 


A'vec  ÏEglife  Komcùne  fur  V BîichAriflie ,  yij 

Cccy  eflmon  corps  :  tî^  beuve^-,  Cecy  efi  ynon  fung  :  Mais  ,  comme  Chap. 
nous  l'avons  rapporté  ,  il  leur  prefencaen  veritcdupam  &du  XVII. 
vin,&  il  leur  die  :  Cecy  efi  mon  corps  :  Cccy  efl  mon  fu/ig.  Que 
foienc  donc  confondus  ceux  qui  parlant  de  ces  Myfleres  diienc        ' 
que  ce  font  la  figure  de  Ton  corps  &c  de  Ton  Tang.  Ce  difcours 
efl  tout  à  fait  éloigne  des  traditions  del'Eglife  Orientale  Ca- 
tholique ,  parce  que  le  pain  6c  le  vin  par  l'oblation  du  Preft.re, 
&  parla  confecrarion  qu'il  en  fait ,  &  parles  paroles fuhflan- 
tielles  qu'il  profère  fur  l'un  fie  fur  l'autre,  en  dilant  :  Cecy  efl 
won  corps:  ^  Cecy  cjl mon  fnig^  (ov\t  changez,    &   tranfportez 
deleur  propre  fubfi:ance,c'eft  à  dire  de  la  fubftance  du  pain  fie 
du  ym ,  fie  palTent  en  la  vraye  bi  propre  fubftance  de  Notre 
Seigneur  J.  C.  6c  a|.rcs  il  ne  refte  plus  du  pain  fie  du  vin  oue 
leurs  apparences  ,  comme  nous  l'a  appris  le  Grand  entre  les 
Saints  Jean  Bouche  d'Or  dans  les  Oraifons  de  fa  MeiTcadref- 
fëes  à  Nôtre  Seigneur  J.  C.  en  cette  manière  :  Vous  efles  pre- 
fent  parmi  nous  d'une  fac^oninvifible,.  rendez  nous  dignes  de 
recevoir  comme  de  votre  puifTinte  fie  glorieufe  main  votre 
corps  tres-pur  fie  vôtre  très- précieux  fang.  Oui  je  crois  que 
c'eft-là  vôtre  corps  très  pur  fie  vôtre  très- précieux  fang.  Il  dit 
de  plus  que  la  grâce  fie  la  puiflance  appartient  à  Dieu.,  qi;'elle 
émane  de  ces  paroles  qu'il  a  proférées ,  Cecy  cji  mon  corps  :  que 
ces  paroles  depuis  ce  temps  là  jufqu'à  la  fin  du  monde  font 
opérantes:  que  ce  font  elles  qui  changent  l'offrande  piifée  fur 
les  Autels  desEglifes  de  tout  le  monde ,  parce  que  le  Meffieeft 
là  prefent  lui  même  en  ce  moment-là  ,  bi.  que  c'eft  lui  qui  ho- 
nore la  fainte  Table  ,  qui  donne  raccompliffement  au  faine  Sa- 
crifice. 

CHAPITRE     III. 

GUtre  cela  ces  Prévaricateurs  ont  die  queîes  vivansSeqne 
les  morts  ne  reçoivent  aucun  profit  des  Méfies  que  l'on 
dit  pour  eux. 

R  E'  P  O  N  S  E. 

APprensque  les  grands  fie  les  faints  Pères  nous  ont  com- 
mandé défaire  commémoration  des  vivansfie  des  morts 
dans  toutes  les  prières,  ^  dans  toutes  les  Meifescous  les  fame- 
dis  pour  le  repos  des  trépalîèz ,  fie  ils  ont  établi  un  certain  nom- 
bre de  famedis  de  l'année  qui  font  connus  ,  &  toutes  les 

YYyyij 


72,6   Liv.  VFîI.  Preuves  authen.  de  Funion  des  Eg.  dOr. 

prières  fon^  pour  le  repos  de  t©us  les  mores.  C'efl:  ce  qu'a  pref- 
cric  Denis  le  Juge  &  le  Prefidcnt  desScjavans.  Et  ce  que  nous 
difons  efl:  aulîî  confirme  par  Bafile  le  Grand  &  Grégoire  le 
Théologien,  &  Jean  Bouche  d'Or,&  le  grand  Athanafe,  6c 
d'autres  Dodeurs  de  îa  fainte  Eglife  :  &:  ils  nous  ont  ordonné  de 
garder  &  de  pratiquer  cette  bonne  coutume.  Celui  qui  lob- 
ierve  eft  Sedareux  de  ces  Saints  i  &  celui  qui  la  nie  ôc  qui  la  re- 
jette eft  du  nombre  des  Hérétiques  rebelles ,  parce  que  ces 
Mefles  font  des  Sacrifices  purs  &  faints  établis  de  Nôtre  Sei- 
gneur J.  C.  Se  iesvivans  &:  les  morts  en  reçoivent  du  profit  , 
leur  faifant  mifericorde,  &  leur  pardonnant  leurs  péchez, 
quand  ils  font  offerts  pour  eux  félon  la  tradition  que  nous  en 
avons  des  faints  Apoflres  &  des  divins  Pères  que  nous  avons 
citez  ci-delfus.  Et  c'efl:  de  ces  Sacrifices  dont  le  Dieu  Tres> 
haut  a  prédit  par  la  bourbe  du  Prophète  Malachie ,  en  difant  : 
Depuis  l'orient  du  Soleil  jufqu'à  fon  couchant  mon  nom  eft 
grand  dans  toutes  les  Nations ,  on  facrifie  en  tous  lieux ,  &  on 
offre  à  mon  nom  une  oblation  pure,  parce  que  mon  nom  eft 
grand  dans  toutes  \^s  Nations. 

CHAPITRE    IV. 

D  Avantage  c^%  Hérétiques  ont  dit  que  celui  qui  reçoit  les 
faints  Myfteres,  ne  les  reçoit  pas  véritablement  &  par- 
faitement. 

REPONSE- 

S  Cachez  que  nous  avons  par  tradition  que  le  Preftre  qui 
reçoit  tout  ce  qu'il  a  confacrc  à  la  Méfie  ce  jour-  là ,  &  que 
le  Séculier  qui  reçoit  une  particule  des  Myfteres,  reçoivent 
tous  deux  entièrement  &  parfaitement  le  corps  du  Meffie  & 
fonfang,  &;  non  feulement  une  partie»  &  ceux  qui  le  reçoi- 
vent en  bon  eftat  &  en  eftant  dignes.^  en  reçoivent  le  par- 
don de  leurs  péchez  ^  mais  ceux  qui  le  reçoivent  en  mauvais 
eftat,  Sceneftantindignes,  en  reçoivent  leur  jugement  &une 
peine  éternelle.  Et  cette hoftie  n'eft  pas  la  figure  du  corps  du 
Meffie  &  de  fon  fang.  Dieu  garde  d'une  telle  créance.  Mais 
c'eft  le  corps  du  Meffie  même  8c  fon  fang  précieux  répandu  ■■■ 
pour  nous  fur  la  Croix.  Et  celui  qui  en  reçoit  une  petite  ou  une 
grande  partie  reçoit  tout  le  Mefiîe  entièrement  comme  ce- 


A^vic  fEglip  T{omaine  fur  ÏEuchuriflle.  717 
lui  qui  confidere  fon  vifage  dans  Ton  miroir  y  voit  Ton  corps  Cha? . 
&  fon  image  dans  fa  perfeclion  -,  &  ainfi  lorfqu'ii  rompe  le  mi  XVIL 
roir,5c  le  réduit  en  petites  pièces,  il  voit  en  chacune  de  ces 
pièces  fon  image  parfaite  en  fon  entier.  De  mêmic  ceux  qui  re- 
çoivent les  faints  Myfteres  les  reçoivent  entièrement  ^  parce 
que  dans  l'Euchanftie  le  corps  du  Melfie  fe  mange  entière- 
ment ,  &  dans  toute  fa  perfedion  par  ceux  qui  communient , 
fôit  dignement,  loit  indignement,  fans  qu'il  endure  aucune 
douleur.  C'eft  pour  cela  que  le  Preftredit  devant  qu'il  prenne 
les  Myfteres ,  6c  qu'il  s'en  communie  :  Nous  partageons  &  nous 
divifons  l'Agneau  de  Dieu,  &:  nous  en  mangeons  toûjourSj&. il 
n'ellpoint  diminué. 


c 


CHAPITRE    V. 

Es  Hérétiques  encore  rejettent  tous  les  jeunes  que  Die» 
nous  a  prefcrits, 

R  E'  P  O  N  S  E. 


S  Cachez  qui  que  ce  foit  que  le  premier  commandement  que 
Dieu  a  fait  à  nôtre  Père  Adam  ,  eft  cette  fienne  parole  , 
mange  de  cela  &  ne  mange  pas  de  celajd'où  paroift  l'ordonnan- 
ce du  jeûne.  De  plus  lorîqu'il  donna   un  précepte  au  jufte 
Noéau  fortir  de  l'Arche,  &  qu'il  lui  dit  qu'on  mangeaft  delà 
chair  comme  on  mangeoit  les  légumes  &:  les  herbes  ,  mais 
qu'on  ne  mangeaft  point  de  la  chair  avec  fon  fang,  on  voit  en- 
core clairement  de  là  l'ordonnance  du  jeûne.   D'ailleurs  le 
Prophète  Moyfea  jeûné  deux  fois  quarante  jours,  &:  pour  cela 
il  reçut  les  deux  Tables  de  Pierre.  Voila  encore  une  preuve 
manifefte  du  Précepte  du  jeûne.  Et  après  eux  Nôtre  Seigneur 
J.  C.  fut  baptifc,  &  eftant  forti  du  Baptême  il  monta  à  la 
Montagne,  il  jeûna  quarante  jours  ,  &  il  nous  a  appris  que 
toute   perfonne  baptifée  doit  jeûner  quarante  jours  chaque 
année.    De  même  les  faints  Apoftres  après  fon  Afcenfioa 
dans  les  Cieux  firent  une  facrée  alTemblée  dans  Jerufalem  , 
&  ils  établirent  plufieurs  Canons  qui  font  connus.  Et  en- 
tr'autres  ils  ordonnent  aux  Chrétiens  de  jeûner  deux  jours 
de  chaque  femaine  ,  fçavoir  le  Mercredy  fie  le  Vendredy  , 
&  de  jeûner  encore  le  grand  jeûne  de  chaque  année ,  comme 

Y  Y  y  y  iij 


yzî  Liv.  VH I.  Prewves  authen.  de  l'union  des  êg.d'Or. 
a  jeûné  nôtre  Seigneur  J.  C.  Et  de  plus  ils  lui  prefcrivirent  de 
jeûner  un  autre  jeûne.  Et  la  raifon  de  ce  fécond  jeûne  eft  que 
les  Pharifiens  ayant  interrogé  Nôtre  Seigneur,&:  lui  ayant  die 
pourquoy  les  Difciples  de  Jean  &  ceux  des  Pharifiens  jeûnent- 
ils  beaucoup ,  6c  vos  Difciples  ne  jeûnent  ils  pas  ?  il  leur  répon- 
dit :  Il  n'eft  pas  à  propos  que  les  enfans  des  noces  jeûnent  pen- 
dant que  l'Epoux  eft  avec  eux  j  mais  quand  l'Epoux  leur  fera 
enlevé,  alors  ils  jeûneront.  Et  de  cette  manière  les  SS.  Pères 
ont  fait  plufieurs  Canons  dans  les  faints  Conciles  par  lefquels 
ils  nous  ordonnent  les  facrez  jeûnes  ,  &  ils  nous  commandent 
de  nous  abftenir  de  manger  de  certaines  viandes.  De  cette  forte 
les  enfans  de  l'Eglife  Orthodoxe  ont  rec^û  par  tradition  de  fie- 
cle  en  fieclcj  qu'ils  doivent  obferver  cela  jufqu'à  la  fin  du 
monde.  Ceux  qui  le  rejettent,  &:  qui  contreviennent  aux  tra- 
ditions de  la  fainte  Eglife  ,  feront  comme  des  Payens  Se  des 
Publicains,  félon  ce  qu'a  dit  Nôtre  Seigneur  J.  C.  que  celui 
qui  n'écoute  point  la  fainte  Eglife  foit  comme  unPayen  &  un 
Publicain. 

CHAPITRE     vr. 

D  Avantage  ces  Hérétiques  difent  qu'il  ne  faut  point  ho- 
norer les  Saints ,  parce  qu'ils  ne  profitent  point  du  toutà 
aucun  de  ceux  qui  les  honorent ,  qui  ont  recours  à  eux,  &  qui 
Jes  invoquent. 

R  E'  P  O  N  S  E. 

APprens  qui  que  tu  foiSj&  dis- moi  files  Saints  ne  doivent 
pas  eftre  honorez  ;  pourquoi  Dieu  le  Très  haut  les  a  t'il 
honorez  dans  l'ancien  &dans  le  nouveau  Tefcam.'nt  ?  Et  pour- 
quoi  a  t'il  fait  par  eux  défi  grands  prodiges  &  ce  grand  nombre 
de  miracles,&  les  at'ilprotegez  5<:  confervez  plusque  les  autres? 
Car  il  a  confervédans  l'Arche  de  Noé&lfes  enfans  &  leurs  fem- 
mes à  caufede  leur  vertu  ,  &  il  fit  périr  en  ce  temp^lâ  tour  ce 
qu'il  y  avoir  d'hommes  dans  toute  la  terre  habitable.  De  plus  il 
a  fauve  Loth  &  fes  deux  filles  de  l'incendie, &  il  fit  alors  périr 
tout  le  monde  qui  eftoit  dans  Sodome  &:  Gomorre.  Il  a  rendu 
célèbre  la  mémoire  d' Abraham, d'ifaac  5c  de  Jacob,  en  difant  : 
Je  fuis  le  Dieu  d' Abraham,d'Ifaac  8c  de  Jacob,  &  il  a  fortifié  les 
Prophètes  Moy  fe  &;  Jofué  fils  deNum  6c  Elie  le  zélé  ôc  d'autres. 


avec  VEgliJe  Romaine  fur  F  Euch<irifiie .  729 

Il  leura  donné  les  vidoircs  contre  les  Nations  étrangères,  &  il  Cka?, 
a  fait  par  leurs  mains  ces  grands  miracles^  &  parlant  de  David ,  XVII. 
il  a  dit  .-Je  protegeray  la  Ville  de  Jeru/âlem  pour  l'amour  de 
Il  moi  même  &  pour  l'amour  de  David  mon  ferviteur.  N'efl:  il 
pas  vray  que  Dieu  a  ainfi  honoré  d'une  manière  particulière  les 
Prophe:es&  les  Saints?  Comment  donc  n'efl:  il  pasneceflaire 
de  les  honorer  ?  Il  faut  que  nous  les  honorions,car  cefontles 
amis  de  J.  C.  &  les  héritiers  de  Ton  Royaume.  Nous  élevons 
des  temples  de  Dieu  en  leurs  noms,  nous  leur  prefentons  dçi 
vœux,  nous  multiplions  les  prières  que  nous  leur  adreflbns, 
principalement  à  Nôtre  Dame  la  Vierge  Marie  Mère  de  Dieu 
qui  eft  l'efperance  de  ceux  qui  n'ont  plus  d'efperance.  Car  le 
Seigneur  nous  a  commandé  d'eftre  faints  par  fa  haute  parole.- 
Soyez  faints,  dit  il ,  parce  que  je  fuisfaint5  car  en  faifantcela, 
nous  accompliifons  l'obligation  que  nous  avons  de  /ervir  le 
Melîie  ,  &  cela  eft  un  accroiflement  d'honneur  que  nous  lui 
rendons.  Tous  les  Livres  rendent  témoignage  à  cette  vérité. 
Car  d.ins  ces  Livres  on  demande  aux  Saints  qu'ils  intercèdent 
pour  les  vivans  &  pour  les  morts.  Parce  que  les  Chrétiens  of- 
frent leurs  prières  à  la  Mère  de  Dieu  &  à  tous  les  Saints ,  ils  ne 
diminuent  pomt  le  culte  8c  le  fervice  qu'ils  doivent  au  Meiïie , 
l'honneur  &  la  gloriiication  qu'on  rend  aux  Saints  eftantchofe 
d'oblieation. 


D 


CHAPITRE   VIL 

E  plus  ces   Hérétiques  déclarent  la  guerre  aux  faintes 
Images  ,  6c  ils  les  appellent  des  idoles. 

R  F  P  O  N  S  E. 


Apprend  qu'anciennement  Moyfe  ayant  vu  que  les  en- 
fans  d'Ifmaël  avoicnt  adoré  de  fouines,  des  poifTIms,  des 
oifeaux,  des  bêtes  brutes,  le  Soleil  6c  la  Lune^  Dieu  leur  dé- 
fendit d'adorer  aucune  reprelentation  ,  de  crainte  qu'ils  ne 
tombaflènt  dans  l'idolâtrie.  Mais  Nôtre  Seigneur  J.  C.  qui  efl: 
le  Soleil  de  Juft:ice,lorfqu'il  commenc^a  à  paroiftre  dans  le  mon- 
dc,£c  que  le  Roy  d'EdelTe  Abagarus  lui  envoya  le  Peintre  Ana- 
nias  pour  lui  rapporter  fon  image ,  6:  que  ce  Peintre  ne  put  la 
tirer,  le  Seigneur  Mcflie  l'appella  .  ôc  ayant  demandé  de  l'eau 
dont  il  lava  fon  très- pur  vifage,  il  lui  demanda  la  toile  laquelle 


7îô  Liv.  VII  î.  Preuves  amhen.  de  Vunion des  Eg.  d'Or. 

Abagarus  Rov  d'EdeiIeavoit  envoyée  avec  lui.  Il  enefTuyafon 
vil'age  5  Se  auffi  tofl:  l'image  de  la  facrce  face  y  parut  avec  des 
couleurs  vives  6c  bien  teintes  qui  y  furent  imprimées.  Il  la  lui 
donna  &  il  l'envoya  à  fon  maiftre.  Et  cette  image  fit  enfuite 
paroiftre  des  miracles  fans  mefure  &  fans  nombre.  Elle  fut  en- 
fin portée  à  Conftantinople,  &  de-là  à  Rome.  Davantage  après 
l'Afcenfion  du  Sauveur  Melîie  dans  le  Ciel, Luc  l'E va nge lifte  fît 
J'imace  de  Nôtre-Seiçrneur  T. Cil  fit  encore  les  images  des  deux 
Apôtres  Pierre  &:  Pauli&il  peignit  trois  images  de  Notre-Da- 
me la  Mère  de  Dieu.  Quand  il  les  eut  achevées^il  alla  trouver 
la  Mère  de  Dieu ,  car  elle  eftoit  encore  en  vie,  &  il  lui  raconta 
ce  qu'il  avoit  fait.  Il  la  pria  de  venir  avec  lui,  &:  les  ayant  vues, 
elle  fourir,  puis  elle  les  bénir,  &  elle  prononc^a  ces  paroles  fur 
elles,  que  la  grâce  qui  cfl  (ortie  de  moy,  &  qui  eftoit  dans  moy 
foit  fur  elles  &  dins  elles  Ces  trois  images  ont  opéré  de  grands 
miracles, &  elles  en  opèrent  encore  aujourd'hui.  De  même  en- 
core lorfque  Pierre  ôc  Jean  bâtirent  une  Eglile  à  la  Vierge  dans 
la  Ville  Je  Lyde,  les  Juifs  &  les  Payens  la  voulurent  enlever 
aux  Chiêtiens.  Ayant  porté  cette  afFaire  devant  le  Juge  delà 
Ville,  il  commanda  que  l'Eglife  fut  fcellce,  8c  qu'elle  demeurât 
fermée  pendant  tro;.^  Tonrs,après  quoy  il  entrâ-dedans,  &  aufîî- 
tol  â  l'improvifte  l'image  de  la  D-emc,qm  eft  Nôtre-  Dame,vinc 
à  paroiftre  fur  un  pilier.  Il  ordonna  à  1  inftant  que  cette  Eglife 
reftât  aux  Chrétiens.  Et  cette  image  produifit  une  infinité  de 
miracles.  Ainfi  cette  image  que  les  Juifs  firent  faire  à  la  Tybe- 
riade,Iorfqu'ils  corrompirent  par  prefens  un  Peintre  Chrétien 
&  qu'il  leur  peignit  félon  leur  demande  l'image  du  Meffie  en 
Croix,  &  qu'ils  la  reçurent  de  lui,  lui  ayant  donné  des  prefens  , 
6:  qu'ilsla  mirent  dans  un  lieu  fecret  près  de  leurSynagogue  im- 
pure ,  ils  commencèrent  à  s'en  mocquer ,  &  un  d'eux  fauta  def- 
fusj&  planta  dedans  fon  couteau.  Au  même  inftant  fa  main  def^ 
fecha ,  £v  il  fortit  quantité  de  fang  de  l'image,  &  ce  farg  fit  un 
grand  nombredeguerifons.il  y  eut  desaveugles  dont  les  yeux 
s'ouvrirent  ,  des  fourds  qui  oiiirent,  des  muets  qui  parlèrent , 
des  boiteux  qui  forent  redrefre2,&  toutes  fortes  de  maladies  &L 
dedouleursquifurent  gueriesXa  main  même  de  celuiqui  l'avoic 
frappe  re(^ut  la  f^nté.  Pareillement  S.  Athanafe  le  Grand  ra« 
conte  que  «Jans  h  Ville  de  Berithe  de  Syrie  ,  un  Juif  fe  logea 
dans  une  noaifon  de  Chrétiens ,  que  lui  &  les  Juifs  fes  compa- 
gnons s'apperçûrent  d'une  image  de  Nôtre  Seigneur  le  Mef^ 

fie 


Afvec  rêgUfe  Komnine  fur  r Eucharijîie.  751 

/îe  quieftoic  en  cette  maifon.Ils  s'en  mocquerent,  &  le  Juific  Chap. 
levant  la  frappa  d'un  couteau.  Il  en  fortit  fur  l'heure  une  XVII. 
grande  abondance  de  fang-,  la  main  de  ce  Juif  devint  feclie  •  il 
Ja  frotta  incontinent  de  ce  fang  ,  &  elle  fut  guérie.  Ce  fin"- 
guérit  aufl]  plufieurs  perfonnes  incommodées  &  malades.  En 
outre  l'imnge  de  la  Vierge  Marie,  lors  qu'on  l'apporta  de  je- 
rufalem  dans  le  Monaftere  Said  naïa,qui  fe  nomme  de  fon  nom 
comment  trouvât- on  qu'elle  eftoit  devenue  corps  (&  chair)? 
Et  une  liqueur  en  découloic  continuellement,  &  en  décou- 
le encore  à  prefent ,  &  elle  a  fait  de  grands  miracles.  Qiiantitë 
d'autres  chofes  ont  paru  par  le  moyen  des  faintes  Imacres  à 
Conftantinople  &;  ailleurs.  Et  il  s'efl:  fait  des  miracles  dont  on 
ne  peut  trouver  le  nombre.  Où  eft  doncceluy  qui  ofe  dire 
qu'il  ne  faut  pas  adorer  les  Images  &;  les  honorer,  puis  qu'il 
eft  évident  de  ce  que  nous  avons  rapporté  cy-deflus,  que  nous 
fbinmes  obligez  d'honorer  toutes  les  faintes  Images.^Car  l'hon- 
neur qu'on  rend  à  l'image  va  à  fon  prototype  félon  ce  que  die 
S.  Bafile  le  Grand.  Et  les  faints  Pères  du  feptiéme  Concile 
Oecuménique  ont  excommunié  tous  ceux  qui  n  adorent  pas  les 
Images,  6c  ceux  qui  difent  que  les  Chreftiens  en  font  des  Dieux. 


c 


CHAPITRE     VIII. 

Es  hérétiques  difent  qu'il  n'eft  pas  neceiïaire  qu'il  y  ait 
dans  l'Eglife  une  Hiérarchie. 

RE'PONSE. 


SCachezquel'Eglifeeftappelléeun  Ciel  terreflre,  oii  com- 
me dans  le  Ciel  il  y  a  neuf  Ordres  d'Anges  qui  fervent 
Dieu  dans 'es  lieux  hauts  &  qui  le  louent ,  il  y  a  de  même  dans 
la  fainte  Eglifedu  Meffie,  qui  eft  fur  la  terre,  des  Ordres  Ec- 
clefiaftiques  qui  fervent  Dieu  ,  &  qui  communiquent  aux 
fidelles  la  glorieufe  grâce  du  Sacerdoce.  Car  vcila  comme 
parle  le  Patriarche  avec  les  Evêques  qui  l'afTiftcnt  lors 
qu'il  prie  fur  luy.  0  Seigneur^  donnez^a  voflre  fervitcur  que 
•voila  icy  la  force  de  la  grâce  de  vojhe  Saint  Efprit  j  Fortifiez^ 
le  comrne  vous  avez^fortifié  les  faints  Apoflres^  (^  comme  vous  ave-z^ 
oint  les  Prophètes  (^  les  Rois  ,  ^  comme  vous  avez^fanciific  les 
Pontifes-^  fanBifiez^le  ^  rendez- le  irreprehenfble  ^  fans  defmt 
dans  la  dignité  du  Sacerdoce  j  ^  ornez^  le  de  toute  pureté  ,  '  C^ 

ZZ  zz 


732.  Lîv.  VIII.  Vreu^es  authent.  deVunion  des  Eg.d'Or. 

faites  qu'il  (oit  le  conducteur  des  aveu'ilcs  &  la  lumière  de  ceux 
qui  font  dans  les  ténèbres ,  gS  l'infiruticur  des  iz/iorans ,  ^  le 
maifire  des  enfans  ^  l'afirc  du  monde.  Il  paroift  de-là  qu'il  efl: 
neceiraire  qu'il  y  ait  dans  l'Eglife  un  ordre  de  dignité  dans 
le  Sacerdoce.  Et  le  grand  S.  Bafile  dit  dans  fa  MelTe:  Souvenez 
vous, Seigneur,  desPreftres  lesferviteurs  du  MeiFiCj  2c  de  tous 
les  Ordres  du  Sacerdoce. 

CHAPITRE  IX. 

Es   hérétiques  ont  encore  dit  quM  n'efl:  pas  neceflàire 
qu'il  y  ait  d'Evêquesen  l'Eglife. 

RE'PONSE. 

k  P  prend  que  le  degré  desEvêques  eft  neceflaire,  &  qu'il' 
doit  élire  dans  l'Eglife  Orthodoxepour  la  conduite  des 
eroyans;  parce  que  l'Evêque  veut  dire  furveillant  &:  Pafteur 
d'un  troupeau,  &  toutes  fortes  d'animaux  ont  leur  Pafteur. 
Comment  donc  les  Chreftiens  qui  font  des  ouailles  raifonna- 
bles  feront  ils  fans  pafteur,  c'efl  à  dire  fans  Evêque?  Le  Pro- 
phète David  appelle  Dieu  Pafteur,  lors  qu'il  dit:  O  Pafteur 
d'Ifracl  ,  écoutez:  le  Seigneur  Meffie  parlant  de  foy  3  Je 
fuis,  dit-il,  le  bon  Pafteur,  Scje  connois  mon  troupeau,  &mon 
troupeau  me  connoifl::  Et  le  Seigneur  a  dit  qu'au  jour  du  j'ige- 
ment_,  il  fepareroit  les  Juftes  des  pécheurs,  comme  le  bon  Paf- 
teur  fepareles  agneaux  ces  boucs,  &  c'efl  luy- même  qui  avanc 
fapaiTion  confacra  l'Apoftre  Jacques  fils  de  Jofeph  &  le  fit  pre- 
mier  Evêque  de  Jeruf-ilem,  &  c'eft  luy  qui  après  fa  fainte  Re. 
furredion  interrogea  Pierre  par  trois  fois,  &  qui  luy  dit,  M'ai- 
mes- ta  Pierre?  &  il  luy  repondit,  Oiiy,  Seigneur.  Le  Seigneur 
luy  dit,  Pais  mes  béliers,  pais  mes  brebis,  pais  mes  agneaux.  Que 
il  le  Seigneur  &:  le  Seigneur  à  qui  eft  la  gloire,  s'eH:  appelle  luy- 
même  P^'ideur  ,  bc  a  commandé  à  fes  Àpoltres  de  paiftre  fon 
peuple,  il  (uit  delà  qu'il  eft  necefifaire  que  dans  route  l'Eglife  il 
y  ait  un  Evêque,  c'efl:  à-dire  un  Pafteur  pour  les  agneaux  du 
Mefiîe.  Et  l'Apôtre  Paul  dit;  Soyez  vigilans&  fur  vous-mêmes 
&:  fur  le  troupeau,  fur  lequel  Dieu  vous  a  établi  Evêque.  En 
effet  le  degré  d'Evêque  doitcflre  de  neceffité  dans  les Eglifes 
du  J\leiîie. 


.mjst    ÎBglifi  T{omaine  fur  tEuchariflie.  733 

Chap. 
CHAPITRE  X.  XVir 

CEs  hérétiques  ont  auflî  dit  que  l'Eglifedu  Meffîeavoit 
péché  6c  manqué,  pour  avoir  ordonné  certaines  cho- 
fes ,  &  établi  des  Canons  qu'il  ne  faut  pas  garder. 

RE'PONSE. 

SCachezquerEglifeCathohquedu  Meffiene  pèche  jamais 
en  aucune  manière.  Elle  eft  vifible  Se  perpétuelle  fur  la 
terre,  &  elle  efl:  mcapable  d'erreur.  Elle  eft  le  fondement  &  la 
colomne  de  la  vérité  ,  6c  le  Meffie  eft  avec  elle  jufqu'à  la  con- 
fommation  du  mcnde.  L'Efprit  Paraclet  eft  en  elle,  6c  il  de- 
meure avec  elle  éternellement.  C'eft  luy  qui  a  infpiré  les  di- 
vins Apôtres  6c  les  faints  Pères ,  6c  qui  a  parlé  par  leurs  lan- 
gues, afin  qu'ils  établiffent  des  loix  6c  des  canons,  des  précep- 
tes 6c  des  ordonnances,  &  ils  n'ont  point  péché  en  cela  ,  mais 
ils  ont  touché  le  but,  6c  toutes  leurs  paroles  ont  efté  (elon  la 
loy,  ^  le  bon  chemin.  S.  Bafile  le  Grand  dit  dans  la  MefTe  en 
addreftànt  fa  parole  au  Seigneur;  Nous  zous  demandons  en- 
core^ 0  Seigneur ,  que  vous  -vous  fouveniex^  de  voflre  fainie  Egli- 
fe  Catholique  ,  Apofioltque  qui  eft  depuis  les  extremitez^  de  la 
terre  jufquk  fes  autres  extremitez^  que  vous  avez^acquifes-parle 
fang  précieux  de  voftre  Chrift.  Faites-la  fubfîfler  en  paix^  &  af. 
fermijjcz^  cette  fainte  maifon  jufquk  la  fin  du  ^ecle. 


c 


CHAPITRE    X. 

Es  gens  là  cntaufll  dit  qu'il  n'eftoit  pas  vray  qu'il  y  euft 
fept  Sacremcns  dans  l'Eglife. 

RE'PONSE. 

Pprend  que  les  Prophètes  premièrement^,  &  après  eux 
^  _^  les  Apôtres  en  ont  parlé  ,  6c  ils  ont  fait  mention  de  fept 
Efprits  de  Dieu.  Qiielques-uns  les  ont  appeliez  dons,  d'autres 
les  ont  nommez  colomnes ,  d'autres  leur  ont  donné  le  nom  de 
grâces,  6c  en  vérité  ce  font  fept  dons.  Le  premier  c'eft  le  Bap- 
tême jle  2.  le  divin  Chrefmei  le  3.  les  faints  Myfteres;le4. 

ZZ  z  z  i  i 


'  7H  L^v.  VI 1 1.  Treunjes  nuthent.  de  l'union  des  Eg.  d'Or, 
la  Confeffion  ;  le  5.  la  fainte  Huile  pour  les  malades  ,1e  6. 
la  Couronne  du  Mariage  j  6c  le  7.  le  Sacerdoce.  Celuy  qui 
croit  à  ces  facrez  dons,  il  les  poflede  ,  &  ils  defcendent  fur 
luy  ,  6c  celuy  qui  les  rejette  n'y  a  point  de  part. 

CHAPITRE    XIL 

Eplus  ces  hérétiques  ne  croyentpas,  6c  n'admettent  pas- 
tous  les  faints  Livres. 

RE'PONSE. 

S  Cachez  que  les  faints  livres  font  le  fondement  de  noftre 
foy,&  que  c'efl:  d'eux  dont  parle  le  Seigneur  dans  le  pur 
Evangile  où  il  nous  dit  :  Recherchez  dans  les  Ecritures  -,  car 
elles  rendent  témoignage  de  moy.  Et  il  dit  encore  :  Moyfe  a 
écrie  pour  moy.  Et  outre  cela  il  dit ,  comme  il  eft  rapporté 
dans  le  S.  Evangile ,  Kaie  n'at  -  il  pas  bien  dit  de  vous.?  De  plus 
leSeigneur  cite  dans  l'Evangile  des  témoignages  delà  Prophé- 
tie de  David  &:  d'autres.  Et  pour  cela  noftre  Seigneur  a  confir- 
mé ces  fainrs  livres  qui  eftoient  devant  la  venue  du  Seigneur 
Meffie  ,  en  ayant  rapporté  des  témoignages,  6c  les  ayant  con- 
firmez Davidadicencore  que  Dieu  a  parlé  dans  Tes  Saints. Que 
ces  defobeïirans  opiniaftres  (cachent  que  nous  recevons  tous 
les  facrez  6c  divins  Livres ,  dont  il  eft  fait  mention  dans  les 
Conciles  de  l'Eglife  Orthodoxe,  ^  dans  tous^les  autres  livres 
des  faints  Pères.  Et  du  nombre  de  ces  livres  font  l'Apocalyp- 
fe,  l'Epiflre  de  Jacques  frère  du  Seigneur,  Tobie,  Judith  ,1e 
livre  de  la  Sageife  de  Salomon,le  livredeTEcclefiaftique,  6r 
\cs  Macabées.  Nous  les  recevons  tous.,  ôc  nous  les  lifoas  dans 
l'Eglife  pure,  fainte,  6c  orthodo^^e.. 

CHAPITRE  XIIL 

CEs  hérétiques  nous  reprefentent  auffi  avec  honte  la  fer- 
meté avec  laquelle  nous  nousattachons  aux  traditions  de 
l'Eglife  iaince  j,  orthodoxe  jdonc  nous  avons  fait  mention. 


',  a<vec  tEglife  Koma,me  fur  rEchurifiie.  735 

RE'PONSE. 

S  Cachez  que  ces  chapitres  mentionnez  font  venus  jufques  à 
nous  par  la  tradition  des  divins  Apoftres  &;  des  famts  Pè- 
res, &  connoifîant  que  ce  font  les  bonnes  &vrayes  croyances, 
nous  les  profelfons  d'une  profeflion  parfaite  bi  entière  du  fond 
du  cœur  &  d'une  langue  véritable)  6c  nous  prions  le  Créateur 
qui  veut  que  tout  le  monde  fe  fauve,  6c  qu'il  arrive  à  la  con- 
noiflance  de  la  vérité.  Nous  le  prions  qu'il  confirme  tous  les 
fidelles  dans  cette  vraye  &  droite  foy,  &:  qu'il  amené  à  fa 
croyance  ceux  qui  n'y  croyent,  parce  qu'on  n'eftlauvé  qu'en 
la  recevant,  &  qu'on  eft  damné  en  la  rejettanc.  Que  tous  ceux- 
là  foienc  confondus  qui  calomnient  noftre  pure  6c  fainte  Eglife, 
&  qui  luyimpofent  d'embrafler  de  mauvaifes  croyances,  6c que 
leurs  langues  deviennent  m.uettes.  Ayant  confirmé  la  vérité, 
nous  l'avons  foufcrite  de  noftre  main,  6:  nous  l'avons  fcellée 
de  nôtre  cachet  dans  la  ville  bien  gardée  de  Dieu  la  ville  de 
Damas. 

Mo^  le -pauvre  Mac  Ai  RE  Patriarche  d'Antioche  la  ville  de 
Dieu ,  le  20.  jour  dumois  d'Oclobre  de  l'année  Chreftienne  1671- 
répondante  à  l'année  jzSoo.  de  noflre  Père  Aàam,^  a  l'année 
J0S2.  de  l'Hepre ,  ^  nous  demandons  à  Dieu  qu'il  nous  ajjîfte^ 
qu'il  fait  glorifié   à  jamais. 

Suit  le  Seing  que  le  Seigneur  Patriarche  a  écrit  &  cacheté  de 
fa  propre  main,  en  cette  manière. 

Gloire  a  Dieu  a  jamais. 

Ma  CAIRE  par  la    mifericordc  de  Dieu    Tres-haut  Patriarchs 
âAntioche  O^  de  tout  t Orient. 

Dans  le  cachet  eft  l'image  de  Pierre  afîîs  dans  fon  Siège  Pon- 
tifical, hc  fon  nom  en  lettres  Grecques,  Se  l'écriture  d'alentour 
eft  Grecque  d'un  cofté,  6c  Arabe  de  l'autre,  6c  elle  eft  conçue 
en  ces  termes ,.  Macaire  par  la  grâce  de  Dieu  Patriarche 
<i'Antioche. 

JEnfuite  font  divers  Seings  en  cette  forme. 

Cette'  croyance  expliqués  par   la    langue  de  Isfojlre  Seigneur 

ZZzz  iij 


730  Liv.  VII  i  ^nwves  authent.  de  l"  union  des  €  g.  d'Or, 

le  patriarche  efi  ncjîrc  croyance  de  nous  autres  Grecs ,  C?"  j'en 
rends  témoignage  moy.tndizne  (J!^  l'aiijei  G K.i.GOi ke  nommé  l^r- 
chevefque  de  Befra  (^  du  pays  de  Hoaran. 

Cette  croyance  expliquée  par  la  bouche  de  noftre  Patriarche ,  efi 
la  croyance  que  nous  avons  nous  autres  Grccs.']e  le  témoiqne  moy  le 
pauvre  Ctiré  ]iK^'fils  de  Taschat,  qui  fuis  tm  de  ceux  qui  fer-  ■ 
vent  aujourd'huy  dans  l'Egltfe  de  Damas  ^  de  Syrie. 

£t  moy  au^z  ^oszvH    de  Saudah. 
Cette  croyance  cft  ma  croyance  le  pauvre  Curé  Abd-Pla7,im  Helar. 
Et  c'efi  auljî la  mienne  moy  le  Curé  Michel  Akem. 
"Je  croy  ^  je  profejfe  de  cœur   (^  débouche  cette  croyance  moy  l'in- 
digne &  l'abjet  entre  les  Prefires  le  Curé  Jean  qu^on  nomme 
Ebneldib. 

le  croy  ^  profejfe  cette  croyance  moy  le  Curé  Michel  le  Gra- 
veur., ^moy aufji  le Preflre  Mo^sv..,^ moy auj/i le Preftre Joseph. 
A  la  fin  efi:  lafoufcription  du  plus  confiderable  des  feculiers 
Grecs  qui  foient  à  Damas.  C'eft  le  Seigneur  Michel  Gon- 
doles Maiftre  de  l'arcilleriedu  Chafleaude  Babylonne.  Elle 
efl:  de  fa  main  5  &  comme  il  ferait  6c  écrit  un  peu  Italien  ,  il 
l'a  voulu  écrire  en  cette  langue.  Au  bas  efl  Ton  cachet  dans 
lequel  Ton  nom  &,  fa  qualité  font  écrits  en  Turc. 

Ce  font  les  veritex^  faintes  (jr-  indubitables  de  l'Ecriture  divine, 
qui  efi  l'ancienne  ^  la  nouvelle.,  que  ce  dont  il  efi  fait  mention  en 
ce  livre .^  (^  nous  tenons  fermement  celte  croyance  dont  nous  conve- 
nons univcrfcllcment  avec  les  Romains.  C'cji  nofire  témoignage 
donné  à  U  ville  bien  gardée  de  Sidon  de  la  propre  main  de  moy  K  E- 
RARAMA  Evefque  V'icairedu  Seigneur, Père  Macharius  Patriar. 
che  d'Antioche  ,  l'année  du  Mcjjie  16/1.  dans  le  cinquième  pur 
au  mois  de  Décembre. 

C'ejl  icy  nofire  foy  ^  nofire  croyance.^  la  benediclion  fait  fur  eux 
ceux  qui  la,  croy ent  fermement ,  S"  qui  font  alliez^  dans  cette  foy. 
C'efi  fur  quoy  font  fondezje  frère  le  Curé  Jean  le  frère  le  Curé 
Michel  ,  é/"  /^  /rrr^  le  Curé  Paul,  le  cinquième  Décembre.- 
C'efi  dans  la  mèm.e  ville  (^  dans  la  même  année. 

Et  moy  encore  l'abjet  Jer-Emie,  je  confeffe  avec   nofire 

S'='igneur  le  Patriarche  que  tous  les  Grecs  conviennent  en  ce- 

avec  la  fainte  Eglife  de  Rome  qui  l'a  pris  de  l'Ecriture 

divine  à  l'imitation  des  Apoftres,  &  je  Ta  y  attelle  à  Sidon 

l'an   du  Meiîie  1671.  le  5.  Décembre 

Le  plus  vil  6c    l'abjet  parmy  les  principaux  des  Prefires 


A^ec  l'êgUJe  ^{omatrtefiir  tSuchari^ie.  737 

Jeremie  ferviteur  delà  Chaire  de  T'r,  Sidon  &c  leursdëpen-  Chap. 
dances.  Il  nous  eft  parvenu  un  livre  plein  de  foy  compofé  par  XVII. 
n6tr<ïSeigneurPacriarched'AnciocheKt;pAta.x;ocpio;  pour  la  con- 
verfion  des  Hérétiques,  donc  les  paroles  font  fauftes  &;  defec- 
tueiireSjainfi  qu'il  l'a  attefté  parla  fignacure  defamainfanclifiëe 
Scfceliée  de  Ton  noble  fceau.  Nous  l'avons  mis  avec  noftre  bé- 
nédiction entre  les  mains  de  Monfieurde  Bonnecorée  Conful 
de  France  refidentàla  Ville  de  Sydon  quialemêmedefirque 
nous.  Et  quant  à  la  croyance  qui  eft  expoféeparnoftre  Sei- 
gneur le  Patriarche  fur  le  fujet  de  lafainte  Euchariflrie  &  des 
autres  mvftéres  de  l'Eglife  Chreftienne,  je  l'avoiie,  le  croy  6c 
le  confeffe  de  coeur  &  débouche  moy  le  pauvre  abjet  parmi 
les  Preftres,  le  Curé  Jean  de  Chehirban  Tachât ,  Serviteur  de 
l'Eglife  de  Damas  defireux. 

^infi  le  croit  é-  leconfeffe  moy  le  Curé  M  i  cwel^Is  de  KTachab. 

Et  -moy  le  Curé  AbdELAZIN  Elma  Keneba//j-^^  Halab. 

AVTRE  CONDAMNATION  DE  PLVSIEVRS  AVTRE3 
erreurs  des  Calvinifies  portée  far  ledit  Seiytcur  Patriarche 
d'Antioche  de  la  nation  des  Grecs. 

Au  nom  du  Fen^  é"  du  Fils,  é-  de  l'EJprit  defainteté  unfeulBieu. 

CHAPITRE    PREMIER. 

Après  avoirappofc  noftre  cachet  ,&  fignë  de  noftremain 
l'explication  que  nous  avons  faite  cy-deiTus  des  chapitres 
fufmentionnez^Nous  avons  oiiy  dire  que  les  prévaricateurs 
dont  nous  avons  parlé  ont  ajouré  à  leur  blafphême  (uf- 
ditj  &  qu'ils  ont  aboli  l'ufage  du  figne  de  la  croix,  &  qu'ils 
ne  le  font  point  fur  leur  front.  Ne  fçavenc-ils  pas  que  c'efi: 
une  coutume  prife  du  temps  même  de-Noflre  Sei^neuf  J.  C. 
Carlorfqu'il  rompit  le  pain  il  forma  defTus  le  lïo-ne  delà 
croix  ,  comme  nous  le  tenons  par  la  tradition  que  nous  en 
avons  receûe  de  S.  Bafile  le  Grand  ,  bi.  des  autres  Saints.  Les 
Apoftres  duMeffieont  fait  le  même  fùivant  les  traces  de  leur 
maiftre,  &:  S.  Ignace  le  reveitu  de  Dieu  Patriarche  de  la  Vil- 
le d'Antioche,  a  ordonné  de  cette  manière  aux  fidelles  d'en 
ufer  ainfi,  &:  c'eft  par  luy  que  cette  chofe  s'eft  épanduë,&  ren. 
duc  célèbre  par  toute  la  terre  habitée.  Enfin  ce  fîgne  a  paru 
parmy  les  cclacantes  étoiles  du  ciel  par  trois  foisàl'Empe- 


758  Liv.  VI I  ï.  Preuves  authcnt.  de  r union  des  Sg.  dOr. 
reur  Conflancin  le  Grand.  Et  il  y  avoic  à  l'cntourune  écriture 
Grecque  qui  eftoit  conçue  en  ces  termes:  Conftantin  tu  vain- 
cras les  ennemis  p^r  ce  figne.  La  première  fois  ce  figne  luy 
parue  dans  le  païs  de  la  Gaule  5  la  féconde  foib  fur  la  rive  da 
fleuve  Thanofis,  &  la  troifîëme  fois  lorfqu'il  eftoit  à  Bizan- 
ce.  De  cette  forte  on  voit  l'obligation  qu'ont  tous  les  Chré- 
tiens de  faire  le  figne  de  la  croix  fur  le  front  &  fur  leur  corps 
pour  en  eftre  fandifiezj  &  pour  chalfer  loin  d'eux  les  démons, 

CHAPITRE     SECOND. 

Touchant  l'eftat  Religieux,  fes  voeux,  &  fes  obligations. 
Ces  prévaricateurs  ont  dit  que  c'ëtoic  une  invention  de 
Satan. 

R  E'  P  O  N  S  E 

S  Cachez  qu'auparavant  la  venue  du  Meffie  Noftre  Sei- 
gneur J.  C.  le  Prophète  Elle  ,  &  faint  Jean  Baptifte  ont 
mené  cette  fainte  vie  ,&  que  lorfque  Noftre  Seigneur  J.  C. 
vint  a  paroiftre,  il  voulut  confirmer  cette  bonne  coutume,^ 
il  die  que  celuyqui  veut  me  fuivre  renonce  à  foymême,  qu'il 
porte  fa  croix,  &  cju'il  me  fuive.  Or  pour  l'amour  de  cette 
parole  l'on  a  veu  dans  le  monde  un  nombre  infini  de  grands 
hommes  qui  ont  embrafTé  Paufterité,  &  habité  les  Deferts, 
&  les  Anges  les  fervoienr,  &  ils  ont  fait  de  grands  miracles. 
Si  cela  eftoit  une  invention  de  Satan,  comme  ces  gens  là  di- 
fent,  elle  n'auroit  pas  été  recherchée  par  aucun  des  Saints 
tels  qu'ont  efté  Antoine,  Macaire,  Sabas  &  Symeon  le  Stilite, 
&  plufieurs  autres  qu'on  ne  peut  nombrer  qui  ont  fuivi  leur? 
traces 


CHAP. 


c 


Anjec  tEglife  Koma-ine  JuYÎEuchiinflie.  759 

Chap, 

CHAPITRE     III.  XVII. 

I  Es  Prévaricateurs  ont  dit  auflî  qu'aucun  des  grands  Pa. 

triarches  &  Prélats  n'avoient  la  puiiïance  de  donner  à 

qui  que  ce  fût  des  Fidèles  des  indulgences  pour  Tes  péchez  ,  6c 
qui  hilTènt  utiles  aux  vivans  &  aux  morts  qui  ont  pechéj  &:  qui 
font  obligez  à  des  pénitences. 

R  E'  P  O  N  S  E. 

S  Cachez  que  Nôtre  Seigneur  à  qui  foit  gloire  a  dit  à  {ts 
Apoftres  en  plufieurs  endroits  :  Tout  ce  que  vous  lierez^fur 
la  terre  fera  lié  dans  le  Ciel ,  (^  tout  ce  que  vous  delierez^fur  la. 
terre  fera  délié  dans  le  Ciel.  Et  cnfuite  après  fâ  fainte  Refurrec. 
tion  il  fouffla  fur  le  vifage  de  fes  Difciples ,  £til  leur  dit  :  Re~ 
cevte^le  S.  Efprit.  Les  personnes  à  qui  vous  remettrezjcurs  pechcx^^ 
ils  leur  feront  remis  ,  (jr  ceux  à  qui  vous  les  retiendrc:^^  ils  leur  fe. 
ront  retenus.  Qiie  fi  on  dit  que  Nôtre  Seigneur  J,  C  le  Mcfîie 
a  donné  cette  puiiïance  à  fes  Apoftres  feulement  ,  &  que  les 
Apoftres  du  Meliie  font  fortis  du  monde  ,  &que  les  gens  da 
temps  où  nous  fommes  n'ont  pas  le  pouvoir  de  faire  comme  les 
Apoftres^  nous  répondons  que  fi  la  parole  du  Mefîîe  eftoit 
adreffee  feulement  aux  Apoftres  ,  il  s'enfuivroit  que  la  fov  du 
Meffie  &  fa  fainte  Eglife  ne  font  plus  depuis  que  les  Apoftres 
font  trépaflèz.  Mais  leur  ayant  dit  :  Voilà,  que  je  fuis  avccvoiis 
tous  les  jours jufqu'à  la  confommation  du  ftecle  j  il  cA  afTeuré  que 
le  Meffieeftavec  les  Prélats  leurs  fucceflèurs  jufqu'à  la  fin  du 
monde.  Et  faint  Paul  l'Apoftre  après  avoir  livré  a  Sataa  celui 
qui  avoit  pris  pour  femme  la  femme  de  fon  père,  lui  pardonna 
enfuite ,  &  lui  donna  indulgence.  Ainfi  plufieurs  àz%  Patriar-  . 
ches  &  des  Prélats  ont  donné  ab(olution ,  &  indulgence  à  plu- 
fifurs  des  pécheurs  coupables ,  afin  qu'ils  en  reçulîent  abon- 
dance de  bénédictions  ,  &  que  ce  leur  fut  un  payement  auprès 
de  Dieu  pour  ce  qu'ils  lui  doivent  à  caufe  des  peines  penicen- 
tielies  aufquelles  ils  font  obligez. 


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740  Liv.  VI I  î.  Preuves authent.  de  tunion  des  Eg.  d'Or. 
•CHAPITRE    IV. 

CEs  Prévaricateurs  ont  cic  de  plus  que  Dieu  a  impofc  aux 
hommes  des  Commandemens  qu'il  ne  Jeur  tiV  pas  poffi- 
ble  d'accomplir,  &  qu'il  ne  les  aide  pas  de  ù  grâce  èc  de  ion 
afliftance  fuffifante. 

R  E'  P  O  N  S  E. 

PArce  que  les  Conrimandemens  de  Nôtre  Seigneur  fonc 
aifez  &  légers ,  il  nous  a  dit  :  Venez^  à  nioy  vous  qui  efies  fa- 
tiguez^^  ^  qui  avezjle  pefants  fardeaux  ,  (^  je  voui  mettray  en  re- 
pos.  11  paroît  de- là  queNôtre  Seigneur  n'impofe  pas  àfes  fervi- 
teurs  de  pefancs  fardeaux  ,  mais  des  choies  bonnes  bc  légères  ^ 
êcil  nous  a  donné  fa  grâce  Se  la  pcilTance,  c'eft  à-dire  le  libre 
arbicre  fur  nour..mêmes  pour  fuir  le  mal  Refaire  le  bien.  Et  ce- 
lui qui  tombe  en  pechéy  tombe  par  la  malice  de  fa  volonté ,  6c 
il  eft  rebelle  au  S.  Efpritquil'appelleàobéïr  àDieu  ,2càiâuver 
fon  ame. 

CHAPITRE     V. 


c 


Es  Prévaricateurs  ont  dit  que  le  Meffie  n'eftoit  pas  mort 
pour  tous  les  hommes  5. mais  pour  quelques-uns  lèule-      1 
.   narce  Qu'il  n'a  oas  voiiiu  le  falut  de  tous.  * 


"âîient ,  parce  qu'il  n'a  pas  voulu  le  falut  de  cous. 

R  E'  P  O  N  S  E. 

S  Cachez  que  ce  difcours  efl:  contraire  à  la  Foy  Chrétienne, 
parce  que  l'Apoftre  S.  Paul  dit  que  tous  les  hommes  eftanc 
pécheurs,  le  Meffie  efl:  mort  pour  tous ,  afin  de  les  fauver.  Com- 
ment donc  n'eft-il  mort  que  pour  quelques  uns?  Et  outre  tous 
les  hommes  eftanE  fous  la  maledidion  originelle  qui  eftoit  fur 
Adam  ôc  fur  fa  race,  &: aucun  des  Saints  ni  des  Prophètes  n'é- 
tant capable  de  les  fauver,Ie  Mefîie  apparut  en  perfonne,&  il  les 
a  fauvez  par  fes  fouffratices,  &  par  fa  mort ,  &  par  fa  Refurrec- 
tion,  &:  il  les  a  tous  fauvez.  Et  pour  ce  qui  regarde  cette  paro- 
le des  Heretiques,qu'il  ne  veut  pas  le  (alut  de  tous,  comment 
eft  ce  donc  qu'il  a  dit ,  lui  dont  le  nom  eft  très-  haut  j  je  ne  fuis 
pas  venu  pour  appeller  les  juftes,  mais  les  pécheurs  à  pénitence? 


Afvec  tBgîi/è  "Romaine  /ur  ÎEuchurifiie.  741 

Ec  il  a  die  encore  que  le  Ciel  &la  terre  fe  rejouironc  pour  un  Chap. 
pécheur  qui  fait  pénitence  plus  que  pour  quatre-vingt-dix-neuf  XVII. 
juftes  qui  n'ont  pas  befoin  depenitence.Ecil  nousaapportéplu- 
/ieurs  paraboles  à  ce  fujec  ,  &  celle  de  celui  qui  avoit  cent  bre- 
bis dont  une  s'égara,  l'ayant  trouvée,  il  en  eut  une  extrême 
joye.  Ecil  a  dit  que  Ton  Père  fe  réjouit  pour  le  retour  d'un  pé- 
cheur à  la  pénitence ,  &  il  nous  a  apporté  la  parabole  de  l'en- 
fant qui  prit  fa  part.  Le  feul  mot  Aralafchather  Hgnifie  tout 
cela  II  «xprime  mieux  que  celoi  de  Prodigue  qui  eut  averfîon 
de  fa  maifon  paternelle,  qui  la  quitta ,  &  s'en  alla  dans  un  Pays 
éloigné  5  &•  d'autres  exemples.  Et  S.  Paul  a  dit,  que  Dieu  foit 
béni,  lequel  veut  que  tous  fe  fauvent,  ôc qu'ils  arrivent  à  la 
connoiflance  de  la  vérité.  Il  y  a  quantité  de  témoignages  pour 
cela  dans  les  faints  Livres.  Ceux  que  nous  avons  produits  nous 
fuffifentv 


c 


CHAPITRE     Vî. 

Es  Prévaricateurs  ont  dit  que  les  pèlerinages  aux  lieux 
fàints  eftoient  chofcs  vaines  &  fans  fruit. 

R  E'  P  O  N  S  E. 


Comment  donc  Dieu  commanda  t'il  'à  Moyfe  d'ordotr- 
ner  aux  Enf ans  d'Ifraël  des  vifîces  à  }erufalenrtrois  fois^ 
l'année  à  la  Fête  de  Pafques,à  la  Fête  de  la  Penref-oOcySc  à  cel- 
le desTabernacles,qu'ilsadorafl?nt  en  ce  lieu  là,&:  qu'ils  y  pre, 
fentaflent  des  facrifices  &  des  ofîi'andc*?  Si  les  pèlerinages  ionc 
chofes  vaines,  comment  Dieu  commandoit-il  celui-là  ?  Si  ce 
font  chofes  vaines  ,  pourquoi  les  Apoftresdu  Meffie  parcou- 
rant  la  terre,  &  prêchant  la  Foy  Chrétienne, retournoient-  Ip-o,, nomme 
ils  à  Jerufalem  pour  y  adorer  >  Ce  fut  !à  qu'ils  firent  un  (aint  ia  FefteHcia 
Concile ,  &  qu'ils  établirent  de  faints  Canons.  Et  comment  eH-  ^^t"'^^^  " 

I  I        A  T         1  n  Aritje,  parce 

ce  que  S.Luc  l'Evangelilte  raconte  dans  tes  Adesdes  Apoftrcs,  qu<;c'eftfe 
<jueS  Paul  l'Apoftrefe  preffoitfort  pour  pouvoir  faire  la  fefte  commence- 

ir>-\T/-i  -  ment  do  la 

du  Principe  a  Jeruialem  ?  ^  Lq,.  Mofnïqne 

Il  y  a  plufieurs  preuves  femblables,  &;  la  pIûparB  des  grands  iciuc-icn:c. 
Saints  font  allez  en  ces  faints  lieux ,  8c  ils  y  ont  adoré  ,  &  ils  y  j^,"  ^'j^-^'™' 
ont  reçu,  heureuienient  lagracedu  S.Efprit,àcaufe  delà  pet-  conjcamc. 

AAaaa  ij 


e 


013  r- 
c 


74i  Liv.  VIII.  Preuves  authent.  de  l'union  des  Eg.  d'Or. 

ne  qu'ils  avoient  prife  ,  êc  de  Ja  foy  qu'ils  avoient.  Il  s'enfuit 
que  ceux  qui  adorent  dans  les  fajnts  Lieux  en  retirent  un  grand 
profit. 

CHAPITRE    VII. 

C  Es  Prévaricateurs  difent  encore  qu'il  efl:  permis  aux  Re- 
ligieux &  aux  Evêquci  de  ie  marier,  Se  qu'en  le  failànc 
ils  ne  pèchent  point. 

R  £■  P  O  N  S  E. 

S  Cachez  que  tous  ces  Evcques  &  ces  Religieux,  auparavant 
que  de  vêtir  l'habit  Angélique,  fe  font  obligez  par  vœu' 
de  leur  plein  gré ,  &  fans  contrainte ,  &  fans  violence ,  &  ont 
dévoilé  leurs  corps  pour  eftre  les  Temples  de  Dieu.  De  plus  les 
Apoftres  du  Meiîîe ,  &  tous  les  faints  Pères  ont  ordonné  aux 
Evêques&  aux  Religieux  de  ne  fe  point  marier  ,  6cde  garder  la 
continence  &  la  chafleté.  C'eft  pour  cela  que  mille  &  mille 
perfonnes  vertueufes  &  mortifiées  ont  tenu  le  facré  chemin  , 
(Se  ils  ont  beaucoup  plu  à  Dieu  en  cela. 

CHAPITRE    VIII. 

EN  outre  ces  Hérétiques  ont  dit  qu'il  n'eftoit  pas  permis 
d'ufer  dans  les  Eglifes  de  langues  étrangères  qui  ne  font 
point  entendues  par  le  peuple  du  Pays  pour  les  prières  que  l'on 
fait. 

R  E'  P  O  N  S  E. 

S  Cachez  que  les  faints  Apoftres  ont  parle  de  toutes  fortes  de 
langues  dans  tout  le  monde ,  &  que  les  Docteurs  de  l'Eglife'  ^ 
s'énonçoienten  plufieurs  langues,  &  ils  nous  ont  laiilé  ordre  de 
nous  fervirdes  plus  nobles.  L'oiiye  du  peuple  ert:  fanftifiéeen 
prononc^ant  ces  faintes  paroles,  &:  les  entendant  dire.  Elles  font 
que  les  Anges  qui  les  entendent  fe  rendent  prefens,  Si.  leur 
vertu  oblige  les  démons  de  fuir.  C'eft  pour  cela  que  nous  prions 
dans  nosÈglifes  &  dans  nos  maifons  en  Grec  Se  en  Syriaque. 
Il  y  a  des  lieux  près  de  Damas  ou  les  Grecs  prient  en  langue 
Syriaque  dans  leurs  Eglifes. 
Tout  ce  que  nous  avons  expliqué  dans  ces  chapitres  fait  par- 


I 


awec  ÏEglife  Romaine  /urr€ucha,njîie.  745 

cie  de  nôtre  Foy  &  de  notre  profeffion  Orthodoxe.  Et  nous  Chap. 
avons  confirmé  la  vérité  par  la  foufcription  de  notre  main  ,  &  XVII. 
par  notre  cachet  dans  la  Ville  de  Damas  gardée  de  Dieu.  Le 
quinzième  du  mois  de  Novembre  de  l'année  Chrétienne  i6;^i. 
répondante  à  celle  d'Adam  nôtre  Pure  7i?>o. 

Gloire    a   Dieu    a   jamais. 

'M.KCKiK'È.parla  mifericorde  de  Dieu  très  haut  Patriarche  d'An, 
tioche  (^  de  tout  V Orient.  Le  Cachet  Patriarchal  cft pofe  au  mime 
lieu.  Enfui  te  font  diverfes  foufcriptions  en  cette  yyitintcrc. 

C'e/i  ainfi  que  je  crois  moy  l'indigne  ^  l'abjet  Grégoire  ^r~ 
chevelue  de  Bofra  ,C^  du  Pays  de  Houran. 

Je  crois  (y-  je  profcffe  cette  créance  de  cœur  (^  de  bctiche  ,mo\  le 
pauvre  d^  l' indigne  d'entre  les  Preflres  le  Curé  Jean  connu  fous  le 
nom  de  T  ASCHAT, qui  fuis  un  de  ceux  qui  fervent  aujourd'  hui  dans 
l'Eglife  de  Damas  de  Syrie. 

Et  moy  aufftle  Cure  Abdelazez  .^fumonirnè fils  de  Helal. 

CcJiauJJî  ce  que  je  confejfe  ?noy  le  Curé  Michel  _/f/j  du  Gra. 
veut. 

HOVVELLE   CONDAMNATION  DES    CALVINISTES 

par  l'Eglife  Grecque  du  Patriarche  d'Antioche. 
Au  nom  du  Père  ,  ^  du  Fils  ^^  du  S.  Efprit. 

CEci  cfl:  une  explication  abrégée  faite  fur  des  demandes 
qu'on  a  propofées,  &des  réponfes  qu'on  a  rendues,  pour 
'  établir  &;  confirmer  la  vérité  des  iept  Sacremens  de  l'Eglife 
Catholique  j  &:des  autres  chofes  qui  font  écrites  en  ce  Livre. 
C'eftce  qu'a  éclairci  5c  démontré  le  Pcre  desPcres  ,  letres- 
faint  élevé  parmi  les  hommes  en  voix  &  en  fcience  ,  le  Sei- 
gneur Neophytos  Patriarche  delà  Ville  de  Dieu  la  grande, 2c 
de  l'Orient. 

I L  A  D  IT. 
S'eft  venu  prefènterànous  le  Père  Michel  Religieux  Jefuire 
Preftre  Théologien.  C'cft  le  grand  Se  le  trcs-haut  Ambafîa- 
deur  de  Nointel  ,  qui  eft  Ambaifadeur  du  Roy  de  France  ,  la 
gloire  des  Rois  Chrétiens  ^  qui  nous  l'a  envoyé ,  pour  s'infor- 
mer d'eux  de  certaines  chofes  de  la  Foy  ,  afin  de  faire  voir  que 
les  Eglifes  du  Meffie  en  ont  le  même  fentiment,  &  font  d'ac- 
cord en  cela.  Que  foit  donc  confondu  quiconque  les  a  calom- 
niées ,  &  que  retourne  dans 'le  droit  chemin  celui  qui  s'en  eft 
égaré  fans  connoiflance ,  ou  par  obftination. 

A  A  ai  a  iij 


744^^'^' ^^^■''  JP^^^'^^^  authenL  de  î union  des  ig.  d'Or. 

hA    PREMIERE  DEMANDE  A   ESTE'   TOVCHANT 
le  nombre  des  Sacremcns  de  l'E'ilife. 

R  F  P  a  N  S  E. 

NOus  difbns  que  Dieu  a  donné  à  la  /âinte  Egîife  fepE 
Sacremens.  Le  premier  eft  le  Baptême ,  félon  la  parole 
du  Seigneur  Sauveur,  qui  a  dit  .•  Que  celui  qui  n'efi  point  né  de 
l'eau  &  de  l'efprit  ne  peut  entrer  au  Royaume  de  Dieu.  Le  fécond 
eft  le  Chrême  ,  &  l'Apoftre  nous  le  donne  à  connoiftre.  Que 
Dieu  efl  celui  qui  nous  confirme  avec  vous  dans  lu  JEoy  du  MeJ]îe  y 
far  lequel  nous  avons  efié  oints  S"  fit^H^^^,  Ô'  q«i  nous  a  donné 
l'arrhe  de  l'e [prit  dans  nos  cœurs.  Le  troifiémc  eft  l'hoftiefainte^ 
puifque  Nôtre  Seigneur  qui  eft  tout  mifericorde,  a  dit  :  Si  vous 
ne  mange z^le  corps  du  Fils  de  l'homme,  ^ne  bcuvez^fon  fa?ig.,  vous 
n'aurez.,  point  la  vie  en  vous.  Le  quatrième  eft  la  confeffion  des 
péchez  qu'on  fart  au  Preftre ,  comme  nous  le  fçavons  de  la  pa- 
role du  Mtfiie  ,  qui  a  dit  à  fes  Difciples  ;  Celui  à  qui  vous  re^ 
mettrez^  fes péchez^,  ils  lui  feront  remis  ,  ^  celui  à.  qui  vous  les  re^ 
tiendrez^  ,  ils  lui  feront  retenus.  Le  cinquième  eft  la  prière  de 
l'huile  fainte  pour  les  malades ,  comme  Jacques  l'Apoftre  frère 
du  Seigneur  le  témoigne  par  fa  parole  :  Si  quelqu^un  de  vous  efi 
malade  ,  qu'il  appelle  les  Prefires  de  l'EqJife  pour  prier  fur  lui  ,  ^ 
qu'ils    l'oignent  d'huile  au  nom  de  Notre  Seigneur  J.   C.  ô"  l^ 
prière  faite  avec  foy  fauvera  le  malade  ,  (jj'  le  Seigneur  le  relè- 
vera ,  ^  s'il  a  commis  péché ,  il  lui  fera  pardonné.  Le  fixiéme  eft 
l'Ordre  pour  laconfecration  des  Myfteres  Divins  ,  &:  le  par- 
don des  péchez  ,  félon  ce  que  dit  le  Meffie  aux  Difciples  t 
Faites  cecy  en  mcrnoire  de  moy  ,  6c  encore  -.Ccluyà  qui  vous  re- 
mettre\fes  péchez^,  ils  luy  feront  remis ,  &  ce  qui  fuit.  Le  feptiéme 
c'eft  le  Mariage  ,  duquel  l'Apoftre  Paul  a  dit  :  Ce  Sacnmenteft 
grand ,  S^  ce  que  je  Jîgnifie  par  cette  mienne  parole  j  c'eft  le  Meflîe 
&l'Eglife. 

SECONDE    DEMANDE. 

Touchant  l'Hoftie  fainte,  Qu'eft  ce  ?  Eft  ce  la  figure  du 
Corps  du  Meffie  j  ou  bien  eft-  ce  fbn  corps  pur  en  fa  pro- 
pre eflènce  i 


anjec  tBghfe  Romaine  fur  ÏEuchxnfiie.        74; 

Chap. 
R  E'  P  O  N  S^E.  XVII. 

LE  Seigneur  Meflîequieftcout-puiiTant,  ayant  pris  du  pain 
dans  les  faintes  mains ,  l'ayant  béni ,  &:  rompu ,  Se  don- 
né à  Tes Difciples ,  en  difanc  :  Prenez^mangezj.  Cecy  efi  mon  Corps^ 
qui  efi  rompu  pour  le  pardon  de  vos  péchez^  Puis  ayant  pris  le  Ca- 
lice, ôc  l'ayant  béni,  &  donné  aux  Difciples,  en  difant  :  ^^»- 
vez^tous  de  cecy  :  Cecy  efi  mon  fauq^  du  nouveau  TefiameJit ,  rèpun- 
dttpour  vous  é^  pour plufieurs  pour  le  pardon  des  péchez^  Il  eft  vray 
que  le  pain  &  le  vin  changèrent  d'eftat,  &  furent  tranfportez 
de  leur  propre  fubftance  en  la  fubftancedu  corps  &  dufangdc 
Nôtre  Seigneur  J.  C.  &  ce  qu'il  Ht  lui ,  il  a  donné  puillance 
aux  Preftres  de  le  faire  par  fa  haute  parole:  Faites  cecy  en  mé- 
moire de  moy.  Pour  nous  nous  profeflons  d'une  foy  ferme  ,  que 
le  pain  &  le  vin  qui  font  mis  fur  la  faince  Table  font  tranfpor- 
cez  &:  changez  de  leur  propre  fubftance  du  pain  &  du  vin,  &  ils 
font  tranfporrez  en  la  propre  &  véritable  fubftance  de  Notre 
Seigneur  J.  C.  par  la  parole  fubftantielle  que  l'on  dit  fur  eux  , 
f(^avoir  :  Cecy  efirnon  Corps ,  6c  Cecy  efi  mon  fang  :  &  après  cela  il 
ne  refte  rien  du  pain  &  du  vin  que  les  apparences,  comme  l'a. 
expliqué  félon  la  vérité  le  vénérable  Père  Macaire  nôtre  pre- 
deceftèur  dans  le  Siège.  Et  comme  le  Meiïie  eftoit  véritable- 
ment dans  les  flancs  de  la  Vierge  après  qu'elle  l'eut  conçu  du 
Saint  Efprit  3  de  même  il  eft  véritablement  dans  la  poitrine  de 
ceux  qui  le  reçoivent,  &1I  eft  le  faluc  de  ceux  qui  le  reçoivent 
dignement,  &  le  jugement  deceuxqnile  reçoivent  fans  en  ' 
cftre  dignes.  C'eftpour  cela  que  levafe  d'élection  lepredeftiré 
Paul  a  publié  par  ces  paroles  i  que  chaque  perfonne  s'examine 
premièrement,  &  qu'il  fe  mette  en  bon eftat, qu'il  mange  en^ 
fuite  de  ce  pain  ,  &  qu'il  boive  de  cette  coupe  ;  celui  qui  en 
mange  Se  en  boit  fans  en  eftre  digne  ,  il  mange  &  boit  fon  ju- 
gement ,  ne  connoilTant  pas  le  corps  du  Seigneur  de  la  con- 
noillance  dont  il  doit  eftre  connu. 

DEMANDE    TROISIE'ME. 

CElui  qui  reçoit  une  partie  de  la  fainte  Hoftie  ,  foit  que  ce 
foit  de  l'efpece  du  pain ,  foit  que  ce  foit  de  l'efpece  du  vin, 
communie- t'il  parfaitement  ? 


74^  Liv.  VI 1 1.  Vreu^ues  authent.  de  t union  des  Eg.  d^Or. 

R  E'  P  O  N  S  E. 

S  Cachez  que  quand  le  Preftre  rompt  l'efpecc  du  pain  ,  il 
ne  rompt  pas  le  corps  du  Meffie  par  morceaux,parce  que  le 
Meffie  eft  prefent  tout  entier  fous  chaque  partie ,  Toit  qu'elle 
foit  petite,  foie  qu'elle  foit  grande^  Scie  malade  que  nous  com- 
munions fous  l'efpece  du  pain  qui  a  efté  trempée  dans  le  facré 
fans;  le  jour  du  grand  Jeudi,  il  reçoit  le  corps  &  le  fang  de  Nô- 
tre Seigneur  entièrement,  bien  qu'il  ne  boive  point  du  Calice j 
&  ainfi  à  la  Mefle  qu'on  nomme  la  Mefîe  des  Myfteres  déjà 
confacrez  ,  &  qui  fe  dit  en  Carême  pendant  le  grand  jeûne, le 
Prêtre  communie  parfaitement  fous  l'efpece  du  pain,  bien  qu'il 
ne  reçoive  pas  le  fang  lous  l'efpece  du  vin ,  puifque  le  Meffie  n'a 
rien  de  manque ,  &  qu'il  eft  en  fon  entier  fous  chacune  des  eC- 
peces ,  6c  fous  chaque  partie  de  l'une  ôc  de  l'autre. 

DEMANDE    QUATRIE'ME. 

Touchant  la  fainte  Mefle,  eft  ce  un  Sacrifice  véritable, 
qu'il  foit  permis  d'offrir  à  Dieu  pour  les  vivans  &  pour  les 
morts  ? 

R  E'  P  O  N  S  E 

NOus  croyons  que  la  MefTèeftun  vray  facrificenon  fan- 
glant,  d'autant  plus  parfait ,  que  les  facrifices  qu'on  of- 
froit  dans  la  Loy  de  Moyfe ,  que  l'Agneau  de  Dieu  qui  ofte  les 
pechex  du  monde  ,  eft  plus  parfait  que  les  agneaux  qui  n'ont 
point  d'ame  raifonnable,  &  que  le  Preftre  éternel  félon  l'ordre 
de  Melchifedec  eft  plus  parfait  que  celui  qui  eft  vêtu  d'infirmi- 
té ^  5c  capable  de  pécher,  parce  que  le  Meffie  dans  la  divine 
Meffeeft  celui  qui  eft  offert  6c  qui  offre ,  qui  reçoit  6c  qui  don- 
ne, comme  dit  le  grand  parmi  les  Saints  Jean  Bouche  d'Or.  Or 
nous  offrons  ce  facrifice  raifonnable  non  fanglant  au  Dieu  très- 
haut  pour  le  pardon  des  péchez  qu'ont  commis  les  Fidèles  vi- 
vans 6c  trépaffèz  ,  comme  nous  ont  appris  les  faints  Apoftres 
inftruits  par  le  Meffie  à  qui  foit  gloire. 


DEMANDE 


E 


a.^ec  tEgli/è  Tlomaîne  fur  tSucharifiie.         747 

Cha?. 
DEMANDÉ    CINQJJIE'ME.  XVII. 

Sr-ii  permis  d'adorer  même  de  la  plus  grande  adoration 
la  fainte  Hoftie  ? 

R  E'  P  O  N  S  E. 


Estant  perfuadez  que  cette  Hoftie  par  la  vertu  de  la  parole 
effentielle  que  le  Mefîle  prononce  par  la  langue  du  Prêtre, 
efl:  le  MefTie  lui-même  ,  le  (uprême  degré  de  l'adoration  lui 
eft  dû.  Car  il  eft  dit  ,  Tu  adorerai  le  Scio^neur  ton  Dieu.  Et  com- 
me lorfqu'il  entra  dans  le  monde ,  le  Père  Celefte  dit  que  tous 
les  Anges  l'adorèrent,  comme  nous  le  tenons  par  la  tradition 
de  l'Apoftre  en  ion  Epiftre  aux  Hébreux ,  ainll  nos  laints  Pè- 
res nous  ont  rapporté  que  les  Anges  fe  lont  trouvez  prefensà 
la  Meffe  ;  6c  il  eft  hors  de  doute  que  lorfque  Nôtre  Seigneur 
entre  (ous  les  apparences  du  pain  Se  du  vin  par  le  change- 
ment de  leur  fubflance  dans  la  fienne,  ils  l'adorent  de  la  plus 
grande  adoration. 


T 


DEMANDE    SIXIE'ME. 

Ouchant  le  Sacerdoce  :  s'y  trouve  t'il  des  degrez  difFe- 
rens  dont  les  uns  foient  élevez  au  delîus  des  autres  ? 

R  E'  P  O  N  S  E. 


S  Cachez  que  le  Livre  faint  fait  mention  des  Apoftres&des 
Difciples ,  des  Evêques,  àcs  Prêtres  &  des  Diacres.  Les 
Pj-êtres  font  devez  au  defllis  des  Diacres ,  &  les  Evêqiies  au 
defllis  des  Prêtres,  &  le  plus  grand  des  Evêques  ,  c'ell l'Arche- 
vêque, Et  pour  ce  qui  eft  du  Patriarche,  il  a  puiflance  fur  eux 
tous  dans  (on  Pays  ,  comme  nous  l'avons  appris  des  faints  Con- 
ciles i&  celui  qui  efl  établi  en  autorité  félon  la  voye  delaLoy 
&  des  Canons  ,  doit  eftre  obcï  de  cous  ceux  qui  font  fous  fa  ju- 
rifdidion  ^  &  comme  dans  le  Royaume  celefte  de  Dieu  on 
voit  des  Ordres  des  Anges  plus  hauts  &  plus  bas  les  uns  que  les 
autres,  ain(î  dans  fon  Royaume  terreftre  ,fçavoirfa  fainte 
Eglife,il  a  établi  des  ordres  \qs  uns  plus  hauts  que  les  autres 
pour  la  bonté  du  gouvernement  &  i'utihté  des  Fidèles. 

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748  Liv.  VH I.  Vrewves  duthen.  de  ï union  des  Sg,  d'Or. 

DEMANDE     SEPT  lE' ME. 

Touchant  la  Vierge  Mère  de  Dieu  &  cous  les  Saints  :  efl:- 
il  permis  de  les  invoquer,  ôc  d'avoir  recours  à  leurs  in- 
terceffions  ? 

R  E'  P  O  N  S  E. 

LE  Dodeur  de  l'Univers  ,&  la  langue  du  S.  Efprit  Paul 
l'Apoftre  ayant  demandé  les  intercellions  des  Fidèles  de 
fon  temps,  lorfqu'ils  eftoient  vivans  dans  le  lieu  du  banniflè- 
ment ,  &;  le  lieu  des  dctauts  6c  du  péché ,  à  combien  plus  forte 
raifon  devons  nous  demander  cela  des  Saints  qui  font  allez  au 
Seigneur  ,  qui  font  logez  dans  les  pays  celeftes ,  &  qui  font  en  la. 
prefencede  Dieu  puifTant  Se  glorieux  avec  uneextrême  con- 
fiance ,  qui  n'ell  point  vaine  ni  fans  fruir  ?  ^t  il  faut  principale- 
ment avoir  recours  à  celle  qui  fait  les  affaires  importâmes, 
Nôtre  Dame,  la  Dame  Marie  Mère  de  Dieu  ,  dont  la  puif- 
fance  aui.-rcs  de  Dieu  ,&  l'amour  pt'ur  les  hommes  funtinefFa- 
bles.  Di;u  dont  le  nom  eft  béni  eft  honoré  en  cela  ,  comme  il 
fut  honoré  du  Centenier  ,  lorfqu'il  lui  envoya  les  principaux 
des  Juifs  pour  lui  demander  de  venir,  &;  de  fauver  fon  fervi- 
teur.  Et  le  Meflle  ditcn  l'admirant  -.^e  vous  dis  que  je  n\iy  point 
trouve  parmi  les  Ifraélites  une  foy  commue  celle-là.  Et  comme  il  fut 
encore  honoré  de  la  femme  Cananéenne  ,  quand  elle  crioit 
derrière  les  Apoftres  ,  6c  qu'ils  intercédèrent  pour  elle  ,leMe(^ 
fie  lui  dit  :  Femme  ta  foy  eft  grande  ,  aycs  fe  que  tu  dejîre. 

DEMANDE     HUITI'EMF. 

Touchant  les  faintes  Imnges  :  Efl:  il  défendu  de  leshono. 
rcr  d'une  adoration  qui  retourne  à  celui  qui  y  eft  peint  ? 

R  E'  P  O  N  S  E. 

Ous  ne  prenons  pas  les  Images  pour  dei  Dieux  ,  mais 
nous  les  honorons  pour  glorifier  feulement  leur  proco- 
rype  delà  manière  qu'on  honore  le  fceau  du  Prince  ,&  l'image 
de  ion  nom  ,&  qu'on  Téleve  fur  la  tefte  :  fie  Dieu  a  fait  plufieurs 
miracles  pour  confirmer  cette  dévotion  qui  lui  eft  agréable  à 
lui  très  haut ,  &  à  qui  foit  louange  5  du  nombre  defquels  eft 
ce  qu'on  raconte  de  S.  Jean  Damafcene  furnommé  le  Cou, 


a^vec  lEglife  Romaine  fur  t Eucharijiie .  j^^ 
lart  d'cr  ,  leDet^^nfeurdes  fliintes  Images,  lorfqu'onlLiicou-  Chap. 
p.i  1.3  mam  ,  &que  la  Vierge  Marie  nôtre  Dame  la  lui  remit,  XVII. 
co'isme  il  la  prioit  devant  fon  Image:  6i  de  ce  nombre  eft  en- 
c<Tc  ce  que  rapporte  ce  Saint  du  Roy  de  la  Ville  d'EdeflcAba- 
gare ,  Icirrqu'ii  envoya  un  Peintre  pour  lui  peindre  le  portrait 
de  Notre  Seigneur,  que  le  Peintre  ne  pouvoir  pas  le  tirer  à 
caufe  de  la  fplendeur  éclatante  de  fon  viiage.  LcMeffiepritun 
mouchoir,  &:  le  mit  fur  fa  face  vivifiante.  Son  image  s'imprima 
furie  mouchoir,  &;  il  l'envoya  de  ce  coté  là  à  Ab^gare.  Ily  a 
d'autres  hiftoires  fans  nombre  ,  &L  fuffit  pour  cette  demande  ce 
qui  a  efté  déterminé  dans  le  feptiéme  Concile. 

DEMANDE     NEUVIE'ME. 

Touchant  la  Croix  :  Faut  il  l'adorer,  &:  en  fcairele  figne 
fur  fon  front  ? 

REPONSE. 

QUe  vous  fuffife  ce  qu'a  écrit  l'honneur  de  notre  Ville  de 
Damas,  S.  Jean  dont  nous  avons  fait  mention  ci- devant 
touchant  la  Croix,  dans  fon  Livre  connu  fous  le  nom  de  Traité 
des  chofes  de  Dieu  ,  où  il  dit  que  le  Meffie  s'efl:  veritablem.ent 
offert  pour  nous  fur  ce  vénérable  bois  en  honorable  facrifice  , 
&  qu'il  a  confacréceboispar  l'attouchement  de  fon  tres-faint 
corps  bc  de  fon  fang,&  il  efljufte  de  l'adorer.  Nous  n'hono- 
ronspas  la  matière,  à  Dieu  ne  plaife,  mais  nous  honorons  ce 
quireprefente  la  pafllondu  Mcffie,  &  de  cette  manière  nous 
adorons  toutes  les  chofes  qui  font  préparées  &  rapportées  à 
Dieu  ,  &  nous  lui  déferons  honneur.  Il  faut  aufli  que  tous  les 
Chrétiens  fafTent  le  figne  de  la  Croix  fur  levifage  ,&  qu'ils 
s'en  arment  pour  combattre  le  Diable,  &  rejetter  fes  trompe- 
ries ,  &  nous  avons  reçu  cette  illuftre  coutume  par  tradition 
des  faints  Apoftresj  &  fi  vous  vous  informez  des  miracles  qui 
fe  font  faits  par  le  figne  de  la  Croix ,  ils  font  fans  nombre.  Paul 
Apoftre  a  dit ,  Pour  moy  que  je  n'aye  point  de  gloire  que  dans 
la  Croix  de  Nôtre  Seigneur  J.  C. 

DEMANDE    DIXIE'ME. 

Touchant  la  vinte  des  lieux  fanélifiez  par  les  vertiges 
du  Meffie ,  ôc  de  ks  Saints  :Eft  ce  une  vaine  dévotion  , 
ou  non  j 

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750  Liv.  VIII.  Preuves  authent.  de  t union  des  Eg.  d'Or. 

R  E'  P  O  N  S  E.  ' 

Dieu  commande  aux  enfans  d'Ifraël  dans  l'Ancien  Tefta- 
mcnt  de  vifiter  la  fainte  maiion  rrois  (ms  tous  les  ans, 
pour  y  célébrer  la  mémoire  de  les  bientiits ,  ôc  pour  honorer 
le  lieu  qu'il  avoir  choifi.Cefl:  à  cet  exemple  que  nous  vifitons 
les  lieux  fancliHez  par  les  vertiges  du  Meffie  &  de  Tes  Saints  , 
pour  les  honorer,&  leur  témoigner  notre  amour.  Nous  y  joiiifl 
Tons  du  bonheur  d'une  grâce  plus  abondante  ,&  tous  les  faints 
Pères  ont  approuvé  cette  œuvre,  &  s'y  font  appliquez. 

DEMANDE    ONZIE'ME. 

Touchant  l'eftat  Religieux  &  Monaftique  :  Eft-ce  une 
des  chofe;.  louables  &  agréables  à  Dieu,  &  tous  ceux  qui 
s'y  font  liez  font-ils  obligez  d'en  garder  les  vœux  5c  les  condi- 
tions? 

R  E"  P  O  N  S  E. 

S  Cachez  que  c'eft  Dieu  qui  a  établi  dans  la  fainte  Eghfe 
l'eftat  Religieux  j  &;  qu'il  en  a  fait  un  chemin  qui  conduit 
à  laperfeclion  Chrétienne ,  félon  la  parole  du  Mefîie  à  qui  foie 
gloire:  Si  tu  veux  efire  parfait ,  va  ^  vends  tout  ce  que  tuas  ,  dr- 
donne,  le  aux  pauvres  ,  afin  que  tu  ayc  un  trefor  dans  le  Ciel  ,  ^ 
viens  ,  fuis  moy.  Et  il  a  dit  encore  ;  Quiconque  aura  quitté  en 
mon  nom  ,  maifon  ,  ou  frère  ,  ou  faur^  ou  pcre  ,  ou  mère  ,  ou  fem- 
7ne  j  ou  fis  ,  ou  champs  ,  il  recevra  le  centuple  ,  f^  il  aura  la  vit 
éternelle  pour  héritage.  Et  l'Apoflre  a  <dit  ;  Je  defire  que  vous 
foyez^fans^  foin  ^parce  que  celui  qui  n'a  point  de  femme  prend  foin 
de  ce  qui  regarde  fon  Seigneur  ^  de  quelle  tnaniere  il  luy  plaira. 
J^ ai  s  celui  qui  a  une  femme  prend  foin  des  affaires  du  monde ,  com- 
ment il  plaira  a  fa  fcmm^ pour  l'amour  du  Seigneur.  Et  celui  qui 
a  rcfolu  en  fon  jugement  de  garder  fa  virginité  ,  <^  que  la  necef. 
fîîè  ne  porte  pas  au  contraire  ,  qu'y  a-t'il  de  meilleur  que  ce  qu'il 
faif>.  Avez-vous  remarqué  l'excellence  de  l'eftat  Religieux  ? 
C'eft  pour  cela  que  la  plupart  des  faints  Pères  bL  à^s  Doc- 
teurs de  l'Eglife  y  font  encrez  ;  &:  dans  nôtre  Eglife  on  ne  choi- 
fit  aucun  Evcque  qu'il  nefoit  Religieux  :  6c  pour  ce  qui  appar- 
'lient  aux  vœux  ,  Si  aux  conditions  qu'on  y  fait ,  on  efl  obli- 


awec  TBglîfe  Romaine  fur  ÎEuchmflte.  y^x 

gé  de  les  garder ,  félon  la  parole  de  David  le  Prophète  :  P^'oncz^^  Chap. 
(^ payc\_au  Seigneur  votre  Dieu  ,  &  le  Seigneur  Meiïîe  encore  XV IL 
dit ,  que  celui  qui  mec  la  main  à  la  charrue  ,  6c  regarde  derrière 
foy  ,  ne  mérite  pas  le  Pvoyaume  de  Dieu. 

DEMANDE    DOUZIEME. 

TOucliant  les  jeunes  &  les  abftinences  quel^'Eglife  a  com- 
mandez :  sll  efl  permis  de  ne  les  pas  garder  ? 

R  E'  P  O  N  S  E. 

NOus  difons  que  Dieu  a  fait  les  jeûnes  un  inftrument  di- 
vin ,  pour  rectifier  les  vertus ,  &  pour  prefcrver  des  ma- 
ladies fpirituelles.  L'Eglife  les  a  ordonnez  ,  &:  a  obligé  de  les 
obferver.-  Scie  Seigneur  MeiTieaditque  celui  qui  n'écoute  pas 
l'Eglife  foit  comme  un  payen  &  un  publicain.  Celui  qui  défo- 
beït  en  ce  Commandement ,  eft  celui  que  reprend  aigrement 
Paul  l'Apoflre  par  fa  parole  :  Je  dis  maintenant  ,  ^  je  pleure 
fur  ces  gensJa  qui  font  les  ennemis  de  la  Croix  du  Mcffîe  ,  dont  la. 
fin  efi  la  déflation  j  ces  gens-là  qui  ont  leurs  ventres  pour  dieux  ^(^ 
dont  la  gloir c  ejî  leur  confufion.  ..         ^ 

DEMANDE    TREIZIEME. 

Touchant  les  prières  pour  les  morts.  Sont  elles  vaines  5^ 
fans  fruit ,  &:  ne  leur  en  revient-il  ni  pardon  de  leurs  pé- 
chez 5  ni  repos  de  leurs  âmes  ? 

RE'P  O  N  S  E. 

Dîeu  ne  rejette  pas  les  prières  de  fon  EgHfe  bien  aimce  î 
ma-is  il  l'exauce  en  ce  qu'elle  demande  ielon  la  parole  du 
'isXt^xz-.Demandex^^  ^  onvous  donnera.  Qiiand  donc  l'Eglife  le 
prie  par  la  langue  des  Prêtres,  6c  des  autres  Fidèles  pour  le 
pardon  des  péchez  de  fss  ferviteurs  orthodoxes  tr.épairez  ,  &C 
pour  le  repos  de  leurs  âmes  avec  lésâmes  des  Saints^  dans  un 
lieu  lumineux  ,  oùil  n'y  a  poiiît  de  triftefîè  ni  dé  foupir,  où  il 
les  vifite  de  la  lumière  de  fon  vifage,  comment  ne  lesexauce- 
roit-il  pns  ?  Certainement  les  morts  tirent  un  grand  profit  des 
Meffe^  5  des  aumônes  £c  des  prières.  Et  nos  pères  les  revêtus  de 

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751  Liv.  VI  l-Î.Pyeufves  authcn.  de  t union  de  s  E^.  d'Or. 

Dieu  nous  onr  appris  cela  3  &i.  la  chofe  aeftémanifefteepar  ce 
qui  eft  rapporté  dans  le  Synaxarion  Triodicon  le  premier  Di- 
manche de  Carême  touchant  l'Empereur  Théophile  ,  qui 
après  avoir  perfecuté  les  Fidèles  à  Toccafion  des  faintes  Ima- 
ges, mourut  fidèle  &  repentant.  L'Impératrice  Théodore  de- 
manda  au  Patriarche  &  au  peuple  de  prier  pour  le  pardon  des 
péchez  de  Ton  mari.  Ils  le  firent  ,&  elle  vit  pendant  Ton  fom- 
meil  Théophile  qui  éftoitdansun  grand  tourment  ^  &  elleen- 
tendit  le  Meffie  qui  lui  difoit ,  Maintenant  6  femme  à  caufe  de 
ta  fay  èc  de  tes  prières ,  &  de  tes  larmes  ardentes ,  &  à  caufe  des 
prières  des  Evêques  èc  des  Preftres ,  je  pardonne  à  Théophile 
ton  mari. 

DEMANDE'    OU ATORZIE'ME. 

Touchant  rhomme. va- t'il  un  libre  arbitre ,  Scpeut-il  faire 
le  péché  ,  ou  ne  le  pas  faire  ?  Et  Dieu  l'aflifte  t'il  toujours 
d'une  grâce  qui  foitfuffifante  ,afin  qu'il  fepreferve  de  pécher. 

R  E'  P  O  N  S  E. 

Dieu  ed  reprefenté  dans  l'Evangile  femblable  à  un  hom- 
me Roy  qui  envoyé  fes  ferviteurs  pour  appeller  à  la  noce 
ceux  qui  efioient  conviez  ,  &  ils  ne  voulurent  pas  y  venir ,  &  le 
Meffie  pleura  fur  Jerufalem  ,en  difant  :  O  Jerufalem  ,  o  Jerli- 
falem  ,  ô  toy  qui  mets  à  mort  les  Prophètes  ^  &  qui  lapide  ceux 
qu'on  t'envoye  ,  combien  de  fois  ayje  voulu  faire  revenir  tes 
enfans,&  les  affembler  comme  la  poulie  aflemble  les  pouffins 
fous  fesaifles,  &:  vous  n'avez  pas  voulu?  Donc  celui  qui  veut  le 
bien  a  puilFance  de  le  faire  ,  &  celui  qui  le  quitte  &  tombe  en 
peché,reiette  la  grâce  qui  fe  trouve  en  lui ,  ôc  il  repouflcdelui 
le  Saint  Efpric  qui  l'aide.  Et  cela  fevoit  encore  par  ce  que  dit 
S  Eflienne  le  premier  des  Martyrs ,  en  reprenant  lés  Juifs  .• 
O  du  rs  de  tefie  ,  ^  incirconcis  de  cœur ,  vous  reffiez^au  S.  Efprit  à 
tous  momens. 


L 


DEMANDE     QJQ I  N  Z  I  E'  M  E. 

A  Foy  feule  fuffic- elle  pour  juftifier  une  perfonne  de  Tes 
péchez? 


a.'vec  ÏEgli/è  Romaine  fur  ÎEuchiriflle.  753 

Chap. 
R  E'  P  O  N  S  E.  XVII. 

JAcques  le  frere  du  Seigneur  a  déjà  répondu  que  Ufoy  qui 
efl  fans  œuvres  efl  une  foy  -morte  e/iant  feule.  Regarde '::^nbtre 
l'erc  Abraham  ,  n'a  t' il  pas  cfiè  jufitfié  far  les  œuvres  ?  Et  Paul 
l'Apoftre  eft  conforme  à  cela  par  faparoie-Quandj'aurois ,  dit- 
il  toute  la  foy  jufques-Iàque  je  pûfTetranfporter  les  monta- 
gnes, &  que  jefuflefans  charité, je  ne  ferois rien. Tout  l'Evan- 
gile rend  témoignage  de  cela. 

DEMANDE    SEIZIE'ME. 

Touchant  Dieu  dont  la  juftice  eft  glorieufe.  Nous  donne- 
t'H  des  Commandemens  qu'il  foit  impoflîble  de  garder  , 
même  à  quelques  juftes,  biej  qu'ils  failènt  tous  leurs  efforts 
pour  les  obferver  ? 

R  E'  P  O  N  S  E. 

ADieuneplaife  que  nous  profefîlons  que  Nôtre  Seigneur, 
qui  eft  abondant  en  mifericorde  ,  nous  foit  tyran  de  cet- 
te manière ,  parce  qu'il  nous  a  dit  que  fon  joug  eft  doux  ,  &  fa 
charge  légère  :  2c  c'eft  lui  qui  fortifie  continuellement  notre 
faiblelTe. 

DEMANDE     DIX- SE  PTIE'ME. 

Touchant  le  Meflie  dont  la  bonté  eft  parfaite  en  to.ute 
manière.  Veut-il  le  falut  d'un  chacun, fie  eft-il  mort  pour 
tous  les  hommes  ? 

R  E'  P  O  N  S  E. 

C'Eft  une  chofe  vraye  que  le  Meffie  l'amateur  des  hom- 
mes ,  veut  que  tous  fe  i'auvent ,  ôc  viennent  à  la  connoif- 
fance  de  la  vérité  :  o-  il  cjl  mort  four  un  chacun^  afin  que  U 
vie  des  vivans  ne  foit  pas  pour  eux-mêmes  ,  mais  en  celui  qui 
tft  mort  four  eux  ,  comme  dit  l'Apoftre  Paul  en  fa  féconde 
Epiftre  à  ceux  de  Corinthe  ^  5c:  le  Melîie  eft  le  bon  Pafteur  , 
qui  quitte  les  quatre- vingt  dix  neuf,  fe  va  à  celui  qui  s'eft 
égaré. 


754  Liv.  VIII.  Prewves  authent.  de  Vunîon  des  Eg.  d'Or. 
DEMANDE    D  IX-HUITIE'ME. 

Touchant  l'Eglifc  Univcrfelle  Se  Apoftolique  :£(!:- elle  fer- 
me ,  &  toujours  vifible  fur  la  terre  ,&n'eft-ilpas  poffible 
qu'elle  fe  trompe,  &  qu'elle  trompe  en  ce  qu'elle  nous  enfei- 
gne  des  chofes  de  la,foy ,  6C  ce  qu'elle  nous  ordonne  des  cho- 
fes  de  Dieu  > 

R  E'  P  O  N  S  E. 

Our  ce  qui  regarde  la  vifibilitéde  l'Eglifc  Aportolique,. 

nous  difons  qu'elle  a  toujours  paru  depuis  le  temps  du 
Meffie,  &  qu'elle  demeurera  conftamment  vifible  jufqu'à  la 
fin  du  monde  ,  parce  qu'elle  eft  comme  une  ville  placée  fur  Te 
harut  d'une  montagne  qui  ne  peut  pas  eftre  cachée.  Etpource 
qai  eft  d'eftre  trompée  Se  de  tromper,c'efl:  urïe  chofe  qui  lui  eft 
impolUble  ,  puifqu'elle  eft  gouvernée  par  le  S.  Efprit,  félon  la 
parole  du  Meffie  dans  le  li^u  où  il  dit  :  Je  frieray  mon  Pcre ,  d"  il 
'VOUS  donnerai  un  autre  Confolateur pour  demeurer  avec  vous  éter- 
nellement, l' Efprit  de  vérité  que  le  monde  ne  peut  recevoir^  parce 
qt^il  ne  le  voit  pas.  Et  vous  vous  le  connoifire'Z^ ,  parce  qu'il  de- 
meurera avec  vous  ,  &  fera  confiamment  dans  vous.  Et  il  a  dit  : 
Le  S.  Efprit  ConfoLtteur  que  mon  Père  envoyera  en?non  nam  vous 
enfeiyiera  toutes  chofes. 

DEMANDE    D  IX- NElTVIÊ'MË, 

Touchant  l'Eglife  :  les  Prélats  qui  y  font  ont  ils  puiflànce 
de  diftribuer  aux  Fidèles  les  dons  du  Meffie  ,fçavoiFles 
pardons ,  par  le  moyen  defquels  les  obligations  que  leur  impo- 
fent  les  Canons  leur  font  remifes,  6c  la  peine  auffi  qu'ils  ont  mé- 
ritée par  leurs  péchez. 

REPONSE. 

'Cachez  que  Dieu  a  établi  les  Prélats  pour  gouverner  /on 
'  EgHfe ,  &  qu'il  leur  a  dit:  Tout  ce  que  vous  lierex^fur  la  ter- 
re fera  lié  dans  le  Ciel ,  (^  tout  ce  que  vous  de  lierez^  fur  U  terre 
fera  délié  dans  le  Ciel.  Ils  ont  donc  puiflànce  de  Dieu  d'impo. 
1er  des  loix  pénales  aux  petheurs ,  ôc  ils  les  en  délivrent  en- 


d^ec  Ttglïfe  %oma,îne  fur  ÏEmhmflie.         y^^ 
fuite  avec  raifon  ,  en  leur  donnant  pardon  ,  &:  ce  pardon  n'eft  Chat. 
autre chofe que  leprixdufang  du  Nôtre  Seigneur  J.  C.  Les  XV  IL 
Prélats  le  diflribuent ,  &  celui  qui  le  reçoit  eil  délivré  de  Tes 
péchez  ,6c  Dieu  ne  lui  en  fera  plus  ibuffrir  la  peine. 

DEMANDE    VINGTIE'ME. 

LEs  Livres  qu'on  nomme  Tobie ,  Judith ,  la  Sageiïe  de  Sa- 
lomon  ,  rÈcclefîaftique ,  Baruch  &  les  Machabées  .^  ne 
fonç-ils  pas  du  nombre  des  Livres  facrez  ? 

?  R  E'  P  O  N  S  E. 

NOus  recevons  tous  les  Livres  Divins  qu'ont  reçu  les  SS. 
Pères  £.<.  les  Conciles;  &de  ce  nombre  font  ceux  donc 

on  a  fait  mention  dans  la  demande  j  àc  nous  croyons  que  la  pa- 
role de  ces  Livres  eft  la  parole  de  Dieu ,  qu'il  n'eft  pas  permis 
de  contredire  mcm?  dans  une  feule  lettre. 

Tout  ce  que  nous  avons  expliqué  dans  toutes  ces  réponfes 
d'une  manière  abrégée  eft:  delà  foy  de  TEglife  Orthodoxe ,  & 
nous  le  croyons  &  le  profelfons  fermement  -,  &  celui  qui  la  re- 
jette eft  du  nombre  des  Refraclaires  haïs  de  Dieu ,  &  fon  fort 
eft  celui  d'Arius  &:  des  autres  Hérétiques.  Q^e  Dieu  éclaire 
les  efpnts  aveugles  ,  &  qu'il  amolifte  les  cœurs  endurcis  &  re- 
belles. Pour  nous  nous  rendons  des  louanges  ôc  des  actions  de 
grâces  à  Dieu  pour  la  grâce  qu'il  nous  a  faite  de  nous  donner  la 
droiture  des  fentimens  &  la  vérité  de  la  Foy,  Et  tout  ce  que 
nous  avons  explique  dans  ce  Livre  ,  nous  l'avons  confefîé  ,  ôc 
confirmé  de  récriture  de  nôtre  main  ,  &  deTapplication  de 
nôtre  fceau  ^  à  Damas  la  confervéede  Dieu  le  troifiéme  jour 
du  mois  de  May  le  jour  de  Samedi  de  l'année  Chrétienne 
1673.  qui  fe  rapporte  à  l'année  7181.  depuis  Adam  ,  ficl'année 
1084.  de  l'Hegire. 

Suit  le  fceau  où  eft  gravé  S.  Pierre  avec  fes  clefs  ,  ficfon 
Siège ,  &  à  l'entour  eft  écrit  en  Grec  oc  en  Arabe 
le  nom  du  Patriarche. 
Au  deftbus  de  la  fignature  en  Grec  en  cette  manière^ 


CCccc 


75é  Liv.  VI I  î.  Preu'ves  authent.  de  ïunïon  des  Eg.  d'Or. 

NEOPHTiE/'rf/"  la  mifericorde  de  Dieu,  Patriarche  de  Li  VilU 
de  Dieu  ,  Antioehe  ,  ^  de  tout  l'Orient. 

Suivent  enfuite  les  fignatures  des  Archevêques  _,  Curez,  Prê- 
tres, Diacres  ,&  des  principaux  Laies  Seculit-rs. 

Grégoire  A>xhevèque  de  Bafjera  ^  de  Houran.  Antoine 
\Archevcque  de  B^lbc  k .  R  O  m  A  i  N  An  hcveque  de  Zehda. 

Z'abjet  en:re  les  Prejires  le  Curé  ^ea'H  Jih  de  DiB.  Zt-  Cure  Mi- 
chel Graveur.  Le  ?ncpri  fable  cnt  e  les  Pn'Jires  le  Cure  Aboila- 
ziN  Heal.  Z'humble  Curé  Mi ChiiiL  BtGAY.  Ze  Curé  )t-AN 
Taschal  ^unde  ceux  qui  dejjervent  l'Eii^hCt:  de  Damas  de  Syrie, 
L'humble  Curé  Michel.  L'humble  Càré  El  c^  un  de  ceux  qui  def. 
fervent  l' E<^ife  de  D-imas.  Vhumble  Pe/ire  Moyse  le  Dcvideur, 
L'humble  Prêche  Nicolas  Sasi.  L'humble  Prcfire  MesuaD 
Sansal-  V humble  Prefire  Geokg hS.  L'humble  entre  les  Prêtres 
le  Curé  So'LiMAN  Racca.  Le  c^vr^  J  accrues.  Le  pauvre  Curé 
MAUSOnR  Le  Diacre  Siuï-Oti  fils  du  Jils  de  t Archevêque.  Ls 
Diacre  Michel  TaschAl.  Le  Diacre  Michel  Athaya. 
L'humble  entre  les  Diacres  Jean.  Le  Diacre  Michel  Saidah. 
Le  Diacre  Barkat. 

Et  nous  les  Chrétiens  demeurans  a  Damas  de  Syrie  la  Ville  gar- 
dée de  Dieu  j  nous  croyons  ^  nous  -profefjons  ce  que  croyent  nos  Sei- 
qïieurs  les  patriarches  ô-  Prefires  ,  ^  cela  eji  expliqué  dans  ce 
Li vre  Michel  CondolEO  avec  le  cachet  de  fes  armoiries , s'ejl 
trouvé  prefent  à  cela.  Nicolas  le  Médecin.  Georges  Semou- 
Rou.  NicoiAs  0s  du  Curé  El  A  FR  A  ngi.  Eli  AS  yf/i  «'^Geor- 
ges K tLATH.  ¥ Ao ALLAH j/?ls de  MoYSEdâ Tripoli.  Georges 

J^ls  f/^-SELiiMEI.ScUTHF'  jfls  de  GeoRGES.  jEAN_/f/.f  de  DaBD 

ElmefrehHjLEuthf  a  ll  ARA  A  Vj  Constant  in,  Michel 
Médecin .,}e  Ali  Afedecin.,  JosEVHjÇls  de  M  ADOLxjMyGhOKGES 

BaRREIc,  V AXJL fils  du  Curé  VeDL ALLAH. 

Suit  mon  témoignage  en  Larin.  Eqo  infra  fcriptus  ^c. 

Puis  celui  que  m'a  donne  l'Archevxque  de  Stïde  en  cette  ma- 
nière. Au  yiom  du  Père ,  (^  du  Fils ,  ^  du  S.  Efpnt.  Amen. 

Isfous  efl  venu  c^  cahier ,  ^  ce  que  témoigne  des  chofes  de  no- 
tre foy  le  tres-faint  (^  bien  heureux  Père  y  le  Père  ^f  Seii^neur  Pa- 
triarche le  vénérable  Seigneur  Neophitos  avec  fon  illuftre  fiqna- 
ture ,  ^  fon  glorieux  fceau  :  ^  cela  eji  U  foy  ^  la  profeffion 
de  tous  les  Grecs.  Et  fn'jy  le  pauvre  entre  les  Prélats  Jerçmje 
Archevêque  de  Tyr  Q-  de  Si  don  ,  f  affirme  que  cette  pro^edion 
fi  fainte    ^   gloricufe  ,  cfi    notre  frofc_l]ïon  ^  notre  créance. 


awec  TEghfe  Romaine  fhr  tEuchariflie.        757  ^'^  ' 

^crit  k  Scidc  le  quinzième  de  May  l'année  7181.  jufqu'à  notre  Chap, 
fcre  Adam,  falut  à  lui.  Et  ceci  cfl  ma  Jîgnature ,  mon  témoignage  XVII. 
^  monfccau  ,  e^  que  [aient  bénis  tous  ceux  qui  ont  cette  foy. 

Suivent  les  noms  des  Preftres. 

"^e  refids  avjjî  témoignage  moy  humble  Curé  Jean  Difciple  de 
t Archevêque  a  Sidon,  Et  moy  le  Cuté  Paul.  £t  moy  le  freflre 
AIansouk. 

Le  fceau  de  l'Archevêque  efi  une  Croix  ^  ^  l écriture  d'alentour , 
l'humble  entre  les  Prejires  ,  Jeremie  Archevêque  de  Tyr  &  de 
Sidon. 

Les  deux  Car^r^jEAN  d^  Paul  fu [nommez^ font  aUez^cn  Chan- 
cellerie rendre  témoignage  de  la,  vérité  de  ces  attefiations  de  la  part 
de  Monfeigneur  l' Archevêque  Jeremie.  Vaîie  en  efi  décrit  ^ 
fçellé  du  grand  fceau  de  fa  Majefié  Très -Chrétienne. 

En  fuite  efi  ant  allé  à  Barut  autrefois  Beryte  .^  l' Archevêque  du 
lieu  m^ a auljî donné  le  témoignage  fuivar.t. 
Au  nom  du  Père ,  ^  du  Fils ,  é-du  S.  Efprit^  un  feul  Dieu. 
Premièrement ,  ]e  fujet  de  tracer  ces  lignes  eft  que  nous 
avons  vu  ce  que  nôtre  Père  bc  Patriarche  le  Seigneur  Neo- 
phitos  a  attefle  des  chofes  de  la  Foy  dans  ce  Livre,  &  nous 
avons  reconnu  la  vérité  de  fon  fens  par  foniliuftre  fignature  , 
Ôcfon  glorieux  fceau.  Et  je  dis  moy  humble  entre  les  Prélats, 
Philippes  Archevêque  de  Barut  la  gardée  de  Dieu,  que  cette 
foy  efl:  nôtre  foy  à  nous  autres  Grecs  ,  &  celui  qui  la  contre, 
dit ,  contredit  l'Evangile  &  les  Conciles ,  &  les  faints  Pères,  & 
celui  qui  contredira  ce  qui  efl  écrit  en  ce  Livre  n'a  point  de 
part  avec  les  Fidèles.  C'eft- là  nôtre  foy  &  nôtre  témoignage, 
écrit  à  Barut  l'année  7i8r, 

Témoigne aufft-ccLt  le  Curé  Saba  ,  ô"  ^"y  auffî  le  Curé  Geor- 
ges. 

Au  milieu  du  fceau  de  l'Archevêque  ces  paroles  font  écrites 
en  Ara  Se. 

Philippes  Archevêque  de  Barut ,  6c  elles  font  en  Grec  à 
l'entour. 


CCccc  ij 


';^^$  Liv.  VII  î.  Preuves  authen.  de  l'union  des  Eg.d'Or. 


CHAPITRE      XVIII. 

Union  des  E'zjifcs  d'Orient  avec  l' Eglife  Romaine  fur  l'Eucharifiie 

^  autres  f  oints  ,  prouvée  par  la  condamnation  des  Qutvinifies 

far  L' E'ijije  des  Syriens  de  Dama^. 

CE  Patriarche  ne  s'ert:  pas  contenté  d'une  condairnatioii 
des  Calviniftes.  Il  en  a  fait  deux  ,  l'une  plus  ample ,  l'au- 
tre plus  courte  ;  mais  comme  elles  ne  contiennent  que  la  mê- 
me chofe  dans  le  fait,  nous  nous  contenterons  d'inférer  celle 
qui  eft  plus  courte ,  &  d'avertir  que  l'original  de  la  plus  longue 
eft  dans  la  Bibliothèque  du  Roy. 

CONDAMNATION    DES    CALVIN ISTES 

par  l'Eglife  des  Syriens  de  Damas. 
Au  nom  du  Père  ,  ^  du  Fils  ,  ^y  de  l'Efprit  de  Sainteté ,  un 

feul  Dieu. 
Que  les  impies  ,  ^  que  toutes  les  Nations  qui  s'oublient  de  Dieu 
retournent  en  enfer.  C'efi  ce  que  dit  le  Prophète  David. 

Avant- Propos. 

G  Loire  foit  à  Dieu  qui  fait  tout  par  le  choix  de  fa  liberté  , 
qui  par  fa  faveur  &:  fa  grâce  a  donné  l'eftre  au  monde,3c 
qui  a  mis  Adam  pour  Roy,  pour  Prophète  &  pour  Preftre  ,  le 
douant  du  franc  arbitre,  aHn  qu'il  marchât  dans  la  voyedel *o- 
béïflance  ,  lorfqu'il  manqua  à  fon  devoir  ,  qu'il  fe  rebella  ,  & 
qu'il  ofa  goufter  du  fruit  défendu  ,  fon  Seigneur  le  bannit,  ôC 
il  marcha  avec  peine  dans  le  pays  de  la  triilefTe  &  des  miferes. 
Après  y  avoir  bû  ce  qu'il  y  a  de  plus  {ale&;  de  plus  amer  ,  pour 
avoir  quitté  les  lieux  de  délices  où  il  efl:oit,&  après  que  plu- 
fîeurs  années  fe  furent  écoulées  pour  le  temps  de  fa  pénitence, 
alors  Dieu  qui  n'a  que  des  inclinations  de  mifericorde  en  eut  pi- 
tié. Après  lui  avoir  envoyé  des  Prophètes,  quand  il  vie  que  le 
rebelle  ne  retournoit  point,  &:  que  le  remède  n'avoit  point 
d'effet  ,&  que  le  malade  vouloit  un  pleigequi  vint  s'employer 
à  fa  guénion  pour  une  manière  de  médecine  excellente  & 
glorieufe,  le  Très-haut  envoya  fa  Parole  fubftantielle par  la 
coopération  de  fon  Efprit,  à  la  pure^  la  dévote  &:  l'humble  Ma- 


a,wec  ÎEgltfe  Romaine  fur  VEucharifiie.         7^9 
rie.  Le  renom  de  la  laincerë  de  là  s'eft  répandu  jufqu'auxçx-  Chai». 
tremicez  du  monde.  Et  ce  Verbe  fe  revêcic  d'un  corps  doiié  XVIII. 
d'une  ame  raifonnable  s'y  unifTantiScil  y  eut  alors  une  caution 
pour  notre  falut.  Il  relfuicita  le  more  ,  6c  rendit  la  vie  à  celui 
.  dont  on  faifoit  les  obfeques  ^  &  il  fît  revivre  le  Lazare  ,  le  reti- 
rant du  Imceul  où  il  eftoit  coufu.  Il  fut  béni  de  toutes  les  créa- 
tures déraifonnables,  desinfenfibles,  &de  celles  qui  ont  de  la 
voix.  Ilhic  admiré  avec  étonnement  de  toutes  les  perfonnes 
d'efpnt ,  intelligentes  £c  éclairées.  Ce  fut  lui  qui  s'afîèmbla 
dans  le  Cénacle  avec  fes  Difciples  ,&  qui  leur  lava  les  pieds 
pour  aller  devant  eux  ,&  leur  donner  l'exemple  de  marcher 
dans  la  voye  de  la  foùmiffion  &  de  l'obcillance.  Le  Tres-haut 
voyant  que  le  falut  ne  pouvoit  eftre  que  par  une  conduite  infi- 
niment excellente,  il  a  établi  la  robe  du  Baptêmej&  prefenté 
une  table  &  une  boiflon  qui  eft  toujours  prefte  ,  bi  dont  on  ne 
peuts'excufer.  O  qu'heureux  eftceluiqi.:i  la  defire,  6c  quis'em- 
prefl'e  d'en  approcher  ,ne  s'écartant  point  des  grandes  chofes 
qui  font  dans  l'Eglife,  ou  celui  qui  y  vient  avec  dévotion  ,  & 
qui  s'attache  à  la  pureté  de  (qs  principes  &;  des  effets  qui  en 
naiflenti  Le  Seigneur  a  établi  tout  cela  pour  nous  foulagerdes 
pefants  fardeaux  des  facrifices  Mofaïques  ,  qui  rendoient  té- 
moignage à  la  vérité  des  Myfteres  fpirituels  que  nous  offrons, 
qui  nous  délivrent  des  facrifices  des  animaux ,  dzs  pigeons,  des 
béliers,  des  paiTereaux  &  des  tourterelles. 
'     Le  glorieux  Evangile  ,  dont  l'autorité  efl;  fuprême ,  rapporte 
qu'après  que  le  Sc-igneur  fe  fut  afiis  avec  la  compagnie  des 
jufles  dévouez  à  Dieu  ,  il  prit  du  pain  ,  le  bénit  &le  rompit , 
&  le  donna  à  (qs  Difciples,  &  il  leur  dit  :  Mangez^-.  Cccyeftmon 
corps  :  qu'enfuite  il  prit  le  calice  ,  &  qu'il  leur  dit  :  Prcnez^?^ 
heuvez^-en  tous  :  Cecy  efimonfan^  du  nouveau  TcJ},iment ,  ^  vous 
ftrei^  ainjt ,  quand  vous  vous  affemblert'z^  en  mémoire  de  moy.  De 
même  Paul  l'Apoftre  le  Bàtifieur  de  l'Eglife  ,  le  Preftre&i  le 
Publicateurdela  Loy  ,a  tranicritces  illuftres  paroles,  &  il  les 
a  prêchées  à  tout  le  monde  ,  à  l'adverfaire  opiniaftre  ,  6c  à 
J'ami  docile  j  6c  il  a  dit  de  plus  que  celui  qui  a  fait  (on  manger 
du  corps  de  Notre  Seigneur  ,&:  qui  a  fait  fa  boifion  de  Ion 
fang  fans  en  eflre  digne ,  en  a  fait  fon  jugement  6c  fa  condam- 
nation ,  parce  qu'il  n'a  pas  connu  le  corps  de  Nôtre  Seigneur 
4'une  connoiffance  jufte  6c  véritable. 

CCccc  iij 


yéo  Liv.  VHI,  Treufves  duthen.  de  l'union  des  Eg.  d'Or. 

Or  maintenant  ,  6  incrédule,  qui  faispafler  pour  figure  ce 
qui  eft  la  caufede  ton  falut^  il  eft:  à  propos  que  tu  fçache  que 
ces  paroles ,  Ceci  efi  ,  ne  fonffrent  rien  de  ce  qui  fignifie  figure, 
mais  qu'elles  établifTenr  la  vérité  de  ce  qui  eft  affirmé  dansl'et 
prit  de  toute  perfohne  f(çavante  &  intelligente. 

Pour  ce  qui  eft  de  nous  autres  Syriens  d'Orient  &  d'Occidenr, 
nous  croyons  &  nous  femmes  perfuadez ,  &  nous  aflurons  con- 
ftamment  ,  que  les  paroles  fubftantielles ,  que  le  Seigneur  de 
la  gloire  profera  la  nuit  de  fa  pafTion ,  endifant:  Ceci  eft  mon 
Corps  ^  cftant  prononcées  par  un  Preftre  véritable  fur  les  My- 
fteres ,  ils  font  changez  de  leur  bafleire  en  un  état  fou^eraine- 
ment  c;levé,&i'ls  pafTent  de  la  reflemblance  6cde  la  figure  à  la 
veriré  ,  6^  qu'ils  deviennent  un  Theriaque  infiniment  efficace , 
hL  le  falut  même  de  ceux  qui  font  liez  des  chaînes  du  péché. 

En  fécond  lieu  ,  pour  ôtcr  tout  doute  &  toute  faufte  imagina- 
tion, nous  ajoutons  que  comme  Dieu  au  commencement  du 
monde  fit  une  divine  ordonnance  qu'il  profera  en  cette  haute 
manière  :  Croljjez^^multipltei^^  d^  rcnip liffe^z^la  terre  5  &  comme 
ces  paroles  fubfiftent,&  s'accomplilTent  encore  aujourd'hui 
dans  la  propagation  de  l'efpece  :  Ainfi  cette  parole  vivantes^ 
fubftantielle,  eft  celle  qui  opère  dans  le  myftere  de  ce  Sacrifice 
par  un  commandement  fuprême  connu  de  celui  qui  connoift  la 
puiilance  du  Seigneur,  qui  tire  l'eftre  du  néant  ;  &  cette  puif- 
fanteforce  émane  de  fa  faintc  bouche.  Allons  donc  nous  pre- 
fenter  à  ces  myfteres  avec  ardeur ,  la  tefte  bailTce  ,  &  avec  une 
profonde  adoration. 

Troifiéraemmt, nous  croyons  que  cette  grande  grâce  &  cette 
communjg  mif^ricorde  eft  pour  les  vivans  &  pour  les  morts ,  & 
qu'elle  délivre  du  defefpoir  ceux  qui  (ont  dans  l'un  ôidansTaii- 
treeftat,  comme  nous  l'ont  allure  nos  Pères  les  A  poftres,  les 
maiftres  de  la  direction  &  des  lumières  qui  diflîpent  i'obicurité. 
Attachons  nous  y  fermement,  c'cft  toute  l'efperance. 

Quatrièmement,  celui  qui  reçoit  dans  la  communion  cette 
Hoftic  toute  fainte  ,  mange  dans  fa  bouche  le  Corps  de  Nô- 
tre Seigneur  &:  de  nôtre  Dieu ,  &  il  ne  le  mange  pas  en  figure. 
De  plus  il  eft  facrifié  véritablement  pour  nous  fur  l'autel ;&  c'eft 
un  facrificeplus  noble  que  tous  les  facrifices.  Nous  l'adorons  , 
mais  d'une  adoration  fincere  ,  fouveraine  &:  très  afTurée. 

JCinquiémement ,  nous  jeûnons  les  facrez  jeûnes  deTEgli/ê, 
qui  nous  ont  efté  donnez  de  Dieu.  Et  il  n'y  a  pas  moyen  que  ce- 


'fii^ec  ÎEgîifè  Romaine  fur  î Euchcivifiie.  .761 

lui  qui  eft  accoutumé  à  nier,  nie  cela,  que  nos  foins  ne  font  pas  Chap. 
pour  Jes  plaifirs  du  ventre  Scdcs  chofes  honteufes ,  comm.e  il  XVIII. 
eft  écrit  dans  l'Epiftre  de  PauH'Apoftre  en  ces  termes  :  C^^y^»»^ 
des  qcns qui  ont  leurventre  -pour  Dieu  ,  ^  qui  mettent  leur  zloire  en 
ce  qui  efl  leur  confujion  &  leur  honte. 

Sixièmement,  celui  qui  arecours  à  la  Vierge  Marie  Mère  de 
Dieu,  &  qui  fe  met  fous  la  protedion  des  Saints,  &  fe  repciê 
fur  leur  providence ,  de  les  prie ,  6c  fe  fortifie  des  lieux  qui  leur 
font  confacrez  ,  obtient  fon  affaire,  &  jouit  de  ce  qu'il  deman- 
de. De  plus,  nous  lommas  obligez  de  garder  les  Images  des 
Saints,  les  honorant  d'un  honneur  qui  retourne  à  celui  qu'elles 
reprefentent.  Et  comment  celui  qui  révère  la  robe  du  Roy  ôc 
fon  fceau  ,  ne  revere-t'il  pas  l'image  des  Rois  du  Ciel ,  qui  font 
enfansde  Dieu,  &  frères  de  J.  C 

Septièmement ,  le  degré  des  Evêques  eft  un  degré  illuftre  Se 
une  dignité  relevée ,  parce  qu'ils  font  le  Pafteurs  des  âmes  rai- 
fonnables  qui  les  font  paiftre  dans  les  prez  des  vrayes  fciences; 
&les  Preftres  font  obligrz  de  leur  obéïr,  fie  ils  leur  font  fou- 
rnis ,  comme  ils  ont  eu  le  Patr'arche  pour  Supérieur. 

Huitièmement,  il  y  afept  Sacremcns  de  l'Eglife,  &:ces  fepc 
Sacremens  font  le  Baptême  ,  la  Confirmation  par  le  Chrême, 
l'Euchariftic,  laConfefîion  despejhez  pour  en  avoir  le  pardon, 
l'Huile  des  malades ,  le  Sacerdoce  &  le  Mariage.  * 

Neuvièmement,  l'Eglife  Chrétienne  Catholique  ne  défaut 
point  jufqu'à  la  fin  desfîecles  &  des  temps ,  comme  leMeffie  le 
lui  a  promis:  J^oilk  que  je  fuis  itvecvous jufqu'à  la  dejîruclion  du 
monde.  Et  elle  eft  une  ville  placée  fur  le  haut  d'une  montagne, 
parce  que  c'eft  d'elle  d'où  vient  le  faiut.  Or  cette  Eglife  du 
Meflîe  reçoit  Je  Livre  de  1  Ecriture  Sainte  ,  comme  eftant  forti 
de  la  bouche  de  Dieu.  Il  eft  divilé  en  plufieurs  parties,  du 
nombre defqaels  font  les  Livres  nommez  Tobie,  Judith  ,  la 
SagefTe  de  Salomon,  Cohelet,  c'eftà-direrEcdefiafte,  le  Pro- 
phète Baruch  ,  &  les  Machabées. 

CONCLUSION.  ■: 

JE  dis  en  fuite  moy  l'indiqne  ^  l'abjut  entre  les  chefs  des  Prhres 
Grégoire  nommé l'Eveque^ e  a n  /<•  Syrien  de D.'.masyque c'ej}. 
làmaprofe^on^mafiy  ,  ma  volonté  .,  mm  élévation  dr-  ma  con- 
fiance. Jette  la  vii'é  fur  cela  avec  un  œil  dejujHce  ^  non  de  contra. 


76i  Liv.  VI 1 1.  Preuves  a,uthent.  de  tunîon des ig. d'Or. 

diBion.  Dèfais-toy  de  la paffion  de  la  haine.  2Ve  parle  point  tant. 
Quitte  le  babil  ^  l^ erreur.  Koilk  la  conclufion  de  mes  paroles,  après 
avoir  faluè  les  âmes  faintes  qui  abhorrent  ^  qui  fuyent  le  mal.  Et 
louan'^e  à  Dieu  au  commencement  ^  a  la  fin.  Ainjt  foit.il. 

Suie  le  cachet  qui  porte  ces  paroles  écrites  au  milieu  -J'ai  mis 
ma  confiance  en  Dieu  j  &  à  l'entour  ,  Grégoire  Evéque  nommé 
Jean  5  &;  aux  coins^  la  croix  dompte ,  la  Croix  uainc. 

Au  defTous  du  cachet  font  les  fignaruresde  tout  ce  qu'il  y  a 
dePreftres  Syriens  à  Damas.  Et  prcmicrement  celle  que  l'E- 
vêque  a  voulu  écrire  de  fa  propre  main  en  caraderes  Syria- 
ques, qui  font  ceux  dont  les  Syriens  fe  fervent  mcme  pour  le 
langage  Arabe.  Elle  efi:  conçië  en  ces  termes  : 

Je  dis  moy  l'indigne  ^  l'abjet  entre  les  chefs  des  Prefires,  le  »o»?- 
»2i?  Grégoire  é^  l'Eve  que  Jean  le  Syrien  de  Damas  .^que  ce  qui 
efi  tracé  ^  écrit  ici  efi  mafoy  ^  ma  ferme  croyance.  JeprofeJJe  cela 
dans  lefecret  du  cœur  ^  en  public ,  ^  avec  cela  )e  rencontrerai  ^  je 
foutiendrai  la  face  de  mon  Juge  a  qui  appartient  d'eftre  éternelle- 
ment loué.  Ainfi foit-il. 

Et  moy  le  Serviteur  de  Dieu  GtOKCE/ indigne  ^  l'abjet  entre  les- 
Prefires ,  nommé  Curé ,  je  frofejfe  cette  foy  que  notre  Père  G  R E G  O  i- 
RZ  nommé  l'Evèqne  Jean  ^  expliquée  dans  ce  pre fient  cahier. 

Et  ynoy  l'indigne f^  l'abjet  entre  les  Prefires  Jean  nommé  Cure , 
je  Crois  é"  j^  p^ofefife  cette  foy  ,  ^  ceft  celle  que  profeffient  générale" - 
ment  tous  les  Syriens. 

Et  moy  le  ferviteur  de  Dieu  l'indigne  ^  l'abjet  entre  les  Prefires 
nommé  le  Curé  Jean  Kessan^^V  crois  d^  je  profcffie  cette  vrayefoy , 
^  c'efi  cette  foy  que  tous  les  Syriens  prof ejfient. 

Et  mof  encore  Moy  SE.^  l'indigne  (^  l'abjet  entre  les  Prefires, nom- 
mé Curé  de  la  Nation  des  Syriens  qui  demeurent  dans  la  Ville  de 
Damas ,  c'efi  ce  que  je  profeffie ,  ^  ce  que  je  crois  j  ^  notre  Seigneur 
Je  fus  Chrifi  en  fait  mention  dans  l'Evangile  ,  é"  encore  Paul  l'A- 
fbtre  &  tous  les  Pères. 

Et  moy  le  ferviteur  de  Dieu  ,  l'indigne  (^  l'abjet  entre  les  Prefires., 
nommé  le  Pre  [ire  Amr-allah  ,;>  crois  Ô"  je  profeffie  cette  foy^  ^» 
e'efi  celle  qu'ont  tous  les  Syriens. 


CHAPITRE 


tinuec  ÎEglife  Romaine  fur  T Eucharifiie.  76  j 


CHAPITRE    XIX. 

Vnion  des  ^glifes  d'Orient  avec  l'Exil fe  Romaine  fur  l'Hucharifiie , 

prouvée  par  deux  attefiations  authentiques  du 

Patriarche  des  Cophtes. 

ON  n'a  point  encore  produit  d'attefliations  en  forme  de  fa 
Foydes  Cophtes,  quoique  les  preuves  d'un  autre  genre, 
que  Ton  en  a  alléguées  dans  le  premier  Tome  de  la  Perpétuité, 
ne  permettent  pas  d'en  douter.  Mais  la  durée  de  cette  contef- 
tation  ayant  donné  moyen  à  Monfieur  l'Ambafladeur  de  Sa 
Majefté  à  la  Porte  d'en  obtenir  deux,  que  le  Patriarche  a  en- 
voyées au  Roy  avec  toutes  les  formes  qu'il  y  a  pu  obfcrver , 
pour  les  rendre  plus  authentiques ,  on  fera  bien  aife  d'en  voir 
ici  la  tradudion. 

Il  eft  bon  feulement  de  fe  fouvenir  que  la  jurifdiclion  d"e  ce 
Patriarche  s'ctendant  dans  l'Ethiopie  ,  il  rend  témoignage  , 
non  feulement  de  la  foy  des  Chrétiens  d'Egypte  ,  mais  auili  de 
■ous  ceux  qui  font  dans  le  Royaume  d'Ethiopie. 

ATTESTATION   DV    PAT  RI. ARC  HE  DES    COPHTES. 
Au  nom  de  Dieu  clément  ^  miferlcordieux, 

LA  paix  de  nôtre  Seigneur  J.  C.  &  la  grâce  de  fon  Éfprit 
faint  &  vivant,.qui  eft  defcenduë  fur  lesfaints  Difciples, 
&  les  fiints  Apoftres  dans  la  faite  de  la  fainte  Sion  i  la  pre- 
cieufe  ellence  de  cette  paix  divine  ,&  cette  même  bénédic- 
tion ,  dem.eurent  à  jamais  fur  les  faints  frères  Orthodoxes  ,  & 
fur  les  Princes  Chrétiens  illuftres,  que  Dieu  beniffe  tous  des 
bénédictions  celeftes.  Nous  vous  faifons  fçavoir  après  avoir 
réitéré  les  benediélions  fur  vous ,  &  vous  avoir  adreffé  un  fa- 
lut  fpirituel ,  que  nous  avons  oui  dire  ,  &;  que  nous  avons  efté 
informez,  que  l'ennemi  parle  parmi  vous  de  différentes  for- 
tes de  manières  &  d'opinions  à  nôtre  fujet ,  difant  que  nous 
ne  fuivons  pas  lesCommandemens  dej.  C.  qui  doivent  eftre 
gardez  ,  m  les  Canons  Apoftoliques,  ni  la  foy  Orthodoxe. 
Cela  n'eft  arrivé  parmi  vous  qu'afin  d'y  femer  une  grande 
diminution  de  foy  &:  de  charité.  Et  comme  l'ennemi  ne  ceûe 
point  de  faire  tenir  de  femblables  difcours,  pour  vous  délivrer 

DDddd 


764  Liv.  VIII.  Preuves authent.  de  t union  des  Eg.  d'Or. 

de  ce  doute ,  nous  vous  avons  écrit  cette  lettre ,  moy  le  pauvre 
Matthieu  ferviteur  de  J.  C.  par  la  grâce  incomprehenfible  , 
quoique  rres-indigne  Patriarche  de  la  grande  Ville  d'Alexan- 
drie ,&:  du  Pays  des  Cophtes  en  Egypte,  Ethiopie  &  Nubie  , 
Afrique  6i  Nicée  ,  qui  ay  écrit  ceci  à  la  charité  de  quiconque 
s'inftruira  dans  cette  écriture  bénite  delà  foy  Orthodoxe  des 
Cophtes.  Et  comme  j'ay  appris  _,  moy  miferable  ,  que  vous 
cherchez  la  grâce  de  Dieu  Très-haut ,  afin  que  nous  foyons 
vous  Se  nous  une  même  chofe  par  l'amour  dé  la  jafticeSc  de 
la  dodrine  rpirituelle ,  qui  efl:  conforme  à  Ja  foy  Qrthodoxe  , 
par  le  Verbe  Incarné,  &:  pour  ofter  entièrement  toute  forte  de 
divifion  ,  nous  commencerons  premièrement  au  nom  du  Père, 
du  Fils  J&:  du  S.  Efprit,  un  feul  Dieu  ,  qui  fo;t  glorifié  jufqu'à 
la  fin  des  fiecles.  Amen. 

Nous  croyons  véritablement  un  feul  Dieu, Dieu  le  PereTout- 
puilTant ,  Créateur  du  Ciel  &  de  la  terre  ,  de  ce  qui  eft  vifible. 
Nous  croyons  auffi  un  feul  Seigneur  J.  C.  Fils  unique  de  Dieu 
engendré  du  Père  devant  tous  les  ficcies ,  lumière  de  lumière  j 
vray  Dieu  d'un  vray  Dieu  ,  engendré  &  non  créé  ,confubil:an- 
tiel  à  fon  Pcre  ,  qui  pour  nous  hommes,  &  pour  nôtre  fàluc 
efb  defcendu  du  Ciel,&:a  pris  un  corps  du  S. Efprit,  Scde  la 
Vierge  Marie  ,  a  efté  fait  homme ,  &:  a  efté  crucifié  pour  nous 
fous  Ponce  Pilate,  a  foufFert,aen:éenfeveli ,  eft  relFufcité  le 
troifiéme  jour,  eft  monté  aux  Cieux  ,  &efl:  affis  en  haut  à  la 
droite  du  Père,  &  qui  viendra  encore  dans  fa  gloire  juger  les 
vivans  6c  les  morts ,  dont  le  Royaume  n'aura  point  de  fin. 
iisnecroyent,  Nous  croyons  au  S.  Efprit,  le  Seigneur  vivifiant,  qui  pro- 
difc-nt  ils,       j,çjg  jy  Père,  &  nous  l'adorons  &  le2;lorifions  avec  le  Père  & 

ou  une  iiatu-      ,,  ,,  it>i  t  r  ■ 

re,  &  iis.id-     le  Fils,  qui  a  parie  par  les  Prophètes.  Nous  croyons  une  lainte 

mettent  ncan-  EgUfe  Univcrlclle  &  Apoftolique,  Nous  confeffons   un  feul 

eorps"en\  C.  Baptême  pour  la  remiffion  de  nos  péchez.  Nous  attendons  la 

reiurredion  des  Morts ,  la  Communion  des  Saints ,  &  la  vie 

éternelle. 

Nous  recevons  cette  foy  Orthodoxe  &fainte,  que  les  trois 
cens  dix.  huit  Pères  afTemblez  dans  la  Ville  de  Nicée  ontcom- 
pofée.  Nous  croyons  auffi  &:  nous  confeifons  que  nôtre  Sei- 
gneur J.  C.Dien  incarné  n'a  qu'une  nature  &  qu'une  volonté, 
&que  l'humanité  n'a  pas  efté  leparéede  la  divinité  une  heure 
ou  un  clin  d'œil.  Gloire  lui  foit  à  jamais. 

Nous  confeffons  &:  nous  croyons  fon  faint  corps,,  qu'il  nous 


a.njec  ÏEglifè  Romaine  fur  tiuchAnflie.  yéj 

a  fait  lenouveau  Teftament  le  faine  jour  de  Pafques,  lorfqu'il  Chap. 
dit  à  Tes  Difciples  :  Prenez^ ,  Ceci  eft  mon  corps ^  ^  ceci  efimonfanz  XIX. 
du  nouveau  Tejlament  ^  far  lequel  vos  peche'z^vous  feront  remis.  Ec 
Ja  fainte  oblation  efl  J.  C.  même, qui  doit  eflre  glorifié  avec  ^'^'""^ *^ 
fa  divinité  &  Ton  humanité.  Spari»" 

Nous  croyons  que  la  fainte  Vierge  Marie  Mère  de  Dieu  in-  Cophtcs. 
tercede  pour  le  faluc  de  nos  âmes. 

Nous  confelTons  le  Sacerdoce,  qu'il  a  donné  à  fon  Vicaire  le 
Prince  des  Apoftres  faint  Pierre,  en  difant:  Ce  que  vous  lierez^ 
fur  la  terre  fera  lié  dans  les  deux ,  &  ^^  f  *^  '^o^^  délierez^fur  la 
terre  fera  délié  dans  les  deux. 

Nous  recevons  aufli  les  fepc  faints  Sacremens  del'Fglife  Or- 
thodoxe, qui  font  le  Baptême,  le  Chrême  faint  &  l'On(fl:ion 
facrée,  la  Confeflion  faite  au  Prcftre,  comme  dit  S.  Jacques  en 
fon  Epiftre  :    Confcffcz^vous  l'un  à  tautre.  Car  il  n'y  a  point  de 
remiffion  de  péchez  par  la  pénitence  parfaite  ,  par  la  main  du 
Preflre  fans  confeffion.   Le  yrand  Sacrement  a^\\  t'î!iVo\A^i\on 
vivifiante,  dont  nôtre  Seigneur  J.C.  a  dit  lui  même  -.Je  fuis  le 
pain  vivifiant  qui  cj}  défendu  du  Ciel.  Celui  qui  en  raano-era 
vivra  éternellement ,  il  demeurera  dans  moy,&  je  demeure- 
rai dans  lui  Nous   CROYONS  ^  nous  confcffons  que  ce  pain  vi. 
vif.int  efl  7.  C.  même  avec  fa  divinité    ô-  fon  humanité  tout  en-  P'^'""'^,^ 
JembLe.W  eit  le  lalutde  toute  créature  ,&  de  quiconque  le  con- 
férera &  fes  faints  Sacremens.  Le  refte  desfept  faints  Sacre- 
mens font  l'Ordre  du  Sacerdoce  dont  nous  avons  déjà  parlé 
le  Mariage  Canonique  5c  l'Huile  des  malades ,  qui  eft  l'huile 
delà  lampe,  lly  a  douze  dcgrez  d'Ordre  reçus  dans  la  fair.re 
Eglife,  qui  font  les  Exorcif^'es,  les  Moines,  les  Séculiers,  les 
Chantres ,  les  Lecteurs ,  les  Soudiacres ,  les  Diacres ,  les  Prê- 
tres ,  les  Archiprêtres,  les  Evêques ,  les  Archevêques  6c  les 
Patriarches. 

Nous  confefTons  que  quand  nous  mourons  ,  6c  que  nous 
avons  quelques  péchez,  nous  fommes  tranfportez  dans  le  Pur- 
gatoire, dont  nous  fommes  délivrez  par  les  prières  6c  Mefîès 
devant  6c  après  la  mort,  ^  les  prières  particulières  pour  les 
morts  qui  ont  efté  de  tout  temps  enufage. 

Nous  honorons  encoieles  faintes  Images  qui  font  marquées 
avec  du  faint  Chrême,  àcaulede  ceux  dont  elles  portent  le 
nom,  afin  qu'ils  intercèdent  pour  nous. 

DDddd  ij 


j66  L IV.  VIII.  Trewves  duthent.  de  F  union  des  Eg.d'Or. 

Voilà  un  petit  abrégé  de  l'expofition  de  nôtre  foy,  que  nous 
avons  déclarée  pour  quiconque  le  lira  ,  ôc  recevra  ce  qui  y  eft 
contenu  avec  une  charité  fpirituelle,  Se  obéira  aux  Commun, 
démens  Evangeliques  èc  Apoftoliques, comme aufll  aux  Ecri- 
turesTaintesôc  divines,  qui  font  reçues  dansTEglife  Orthodo- 
xe. Et  je  prieray  celui  qui  poflede  un  tre(or  de  mifericorde  qu'il 
éclaire  vos  efprirs  ,&c  qu'il  vous  conduife  à  tous  les  biens  fpi- 
rituels  qu'il  lui  plaira,&:  que  vous  foyez  enfans  de  TEglife  fainte, 
dont  la  mémoire  eft  répandue  jufqu'aux  extremitez  de  la  terre 
par  les  benedidions  de  la  fainte  Vierge  Marie,  des  Anges,  Ar- 
changes, de  tous  les  Martyrs  &:  Saints  qiu  fe  fon^  rendus  agréa- 
bles à  Dieu  par  les  bonnes  œuvres ,  depuis  ce  temps  jufqu'iiux 
ilecles  des  fiecles.  Le  i8.  du  moisdeHatur. 

ATTESTATION  DV    MESME    PATRIARCHE 
fur  l'EuchariJiie  en  particulier. 

'AV   NOM    LE    DIEV    CLEMENT  ET  AffSERICORDlEVX, 
j  ,  Zouange  à  Dieu  à  tout  jamais .  Ze  falut  vient  du  Seigneur. 

bleMat-  y     ^  p^j^  ^g  nôtre  Seigneur  J.  C.  &  lagracede  fonEfprit 
"^^^'        1.  J  vivant  Sifaint,  quieftdefcenduc  fur  ki  pursDifciplesSC 
faints  Apollres  dans  la  chambre   haute  de  la  fainte  Sion  , 
l'etrence  precieufe  de  cette  paix  ,  &  cette  même  benedidion 
defcendentSc  demeurent  à  tout  jamais  fur  les  Chrétiens  nos 
frères  bons  &  illuftres.  Beniffez-les  tous  ,  Seigneur  ,  des  bene- 
didions  celeftes.  Ainfî  foit  il.  Nousleur  faifons  fçavoir  après 
avoir  reïteréfureuxles  benedidions, 6c leur  avoir  envoyé  un 
falut  fpirituel  ,  que  nous  avons  appris  que  l'ennemi  parloit  de 
nous  parmi  vous  fur  le  fujet  de  la  foy  3  Nous  avons  déjà  en-  ' 
voyé  un  écrit  fur  ce  fujet,  &  nous  vous  écrivons  encore  cette  • 
lettre.  Moy  le  pauvre  Matthieu  fervitciirde  J.C.  parla  grâce 
de  Dieu  incomprehenfibie ,  quoique  je  ne  mérite  pasce  nom  ,* 
Patriarche  de  la  grande  Ville  d'Alexandrie,  des  Provinces  d'E- 
gypte, d'Ethiopie,  de  Nubie,  d'Afrique  &  de  Nicée  ,  j'écris  ce- > 
ci  à  toutes  les  perfonnes  remplies  de  charité  qui  verront  cet 
écrit  6c  le  liront.  Nous  avens  fçû  que  les  Hérétiques  de  Fran-' 
ce  attaquent  opiniaftrement  &  particulièrement  le  grand  Sa-''/» 
crcment  du  corps  de  J.  C.  qui  eft  la  fainte  Euchariflie  ,  &  en 
nient  la  vérité ,  difant  que  J.  C.  ne  s'y  trouve  point  réellement, 


aivec  ÏEgîlfe  'R.omxine  furîîmhunftïe.  767 

mais  feulement  en  figure.  Ils  difènc  aufllde  nous  que  nous  ne  Chap. 
croyons  que  ce  Sacrement ,  c'eft  à-  dire ,  que  nous  ne  croyons  XIX. 
pas  le  changement  de  la  iubftance  du  pain  ôc  du  vin  àlafub- 
flance  du  corps  &  du  fang  de  J.  C.  ni  la  prefence  véritable  dans 
l'Eucliariftie  iur  le  S.  Autel  après  la  confecration.  Ils  difent  en- 
core que  la  fainte  Euchariflie  n'eft  pas  le  véritable  corps  de 
J.  C.  dans  le  pain  qui  efl:  appelle  corps  de  J.  C.  à  caufe  de  la 
vertu  du  S.  Efprit  qui  s'y  trouve.  Et  ils  difent  que  l'Euchariftie 
qui  eft  appellëe  le  corps  de  J.  C.  n'eft  pas  fon  corps  même  qui 
efl:  dans  le  Ciel ,  &  ils  difent  que  J.  C.  efl  feulement  dans  le  Ciel 
rccUcment,  non  fur  la  terre,  &;  que  ce  que  nous  voyons  n'efl:  pas 
le  véritable  corps  de  J.  C.  mais  feulement  du  pain.  Ils  difent 
auffi  de  nous  que  nous  n'adorons  point  le  corps  de  J.  C  dans 
l'Eucharifliic  d'un  culte  qui  foit  particulièrement  propre  à  Dieu. 
Ils  difent  auflî  que  les  pécheurs  qui  reçoivent  l'Euchariftie  ne 
reçoivent  point  le  corps  de  J.  C  Nous  demandons  à  Dieu  pour 
eux  pardon  de  ces  chofes  que  nous  avons  entendues  ,  &  nous 
leur  confeillons  de  ne  tenir  point  fur  nous  des  difcours  fi  im- 
portuns, qui  ne  font  que  menfonges  &:  fottifcs,  où  il  n'y  a  point 
de  vérité  ,  &:  qu'ils  ne  regardent  point  un  petit  fétu  dans  nos 
yeux  ,  ayant  une  grofTe  poutre  dans  les  leurs. 

C'eft  pourquoi  ,  afin  d'ôter  toute  forte  de  doute  ,  qu'on 
pourroit  avoir  dans  le  cœur,  nous  leur  déclarons  à  prefent  nô- 
tre créance ,  &  nous  leur  difons  devant  tous  les  hommes ,  que 
\t^  Cophtes  Jacobites  reçoivent  &  croyent  fermement  cette 

f-Li  I  jT/->^  -n.  '  M,  Claude  diJ 

oy  véritable,  que  le  corps  de  J.  C.  même  qui  eit  monte  aux  ^^^j,!  f.^^^^^ 

Cieux  ,  qui  eft  affis  en  haut  à  la  droite  du  Père  ,  que  ce  même  queics  jaco- 
corps  rcellem.ent  en  perfonneS:  en  fa  propre  fubftance,cft  dans  '^""  "^    . 
la  (ainte  Euchariftie,  où  il  eft  invifible  àcaufe  de  la  prefence  que^  Caic^ 
de  fon  proprecorpsfur  le  faint  Autel.  Nous  l'adorons  d'un  cul-  «ncorps.^ 
te  qui  eft  particulièrement  propre  à  Dieu;  nous  croyons  dans 
ce  point  particulier  tout  ce  que  croyent  les  Latins  avec  lef- 
quels  nousfommes  d'accord  fur  cela,  quoique  divifez en  d'au- 
tres chofes.  Et  ces  Hérétiques  nous  impofent  une  calomnie  , 
quand  ils  difent  qu'après  la  Confecration  nous  ne  l'adorons 
point  ,6c  nous  ne  nous  profternons  point  devant  lui. 

Nous  croyons  &  nous  difons  que  les  méchansauiFi.  bien  que 
les  bons  reçoivent  le  corps  de  J.  C.  dans  leur  bouche  ,  les  pre- 
miers à  leur  perte  ,&  les  autres  pour  leur  falut. 

Nous  difons  ôcnous  crovons  que  le  pain  &Je  vin  fcntchan- 

D  D  d  d  d   iij 


yéS  Liv.  VIII.  Preuves  authent.  de  l'union  des  Eg.  d'Or. 
gez  vericablemenren  lafubftancedu  corps  de  J.  C.dc^tn  la  fub- 
Itance  de  fon  Ikng  prea -ux  ^  de  forte  qu'apiés la  confecration 
la  fuhftance  du  pain  &  Li  fubftance  du  vin  ne  demeurent  plus. 
Que  ce  faint  Sacrement  fe  donne  aux  malades,  afin  qu'ils  meu- 
rent dans  la  grâce  de  Dieu  ,  &  qu'ils  ayenc  un  trefor  dans  le 
Royauriie  de^  Cieux. 

Nuus  difons  qu'il  n'eft  point  incomprehenfible,  &  qu'il  n'y 
a  point  d'mconvenientàdire,  queplufieurs  corps  qui  n'en  font 
qu'un  foif  en  plufieurs  lieux  en  une  même  heure.  Car  celui  qui 
a  Fait  le  ciel  &  la  terre  d'une  feule  parole  peut  faire  ces  miracles. 
Il  fait  fon  corps  par  fa  parole,endifant  paria  bouche  du  Prêtre^ 
Ccciefimon  cvrps.  Il  donna  foncorpsàfesDifciplcs enEmmaùs, 
&  il  écoit  en  d'autres  lieux  :  Et  comme  la  divinité  ëtoit  renfer- 
mée dans  le  ventre  de  la  Vierge  Marie  -,  ainfi  il  efl:  fous  les  acci- 
dens  du  pam  6c  du  vin  ,  la  chofc  eftanc  égale ,  parce  qu'il  étoic 
neceiTaire  que  Dieu  éprouvât  ainfi  nôtre  foy ,  &  afin  que  nous 
n'eneuflîons  point  d'averfioni&  que  quand  J.C.  nous  eût  com- 
mandé de  manger  fon  corps ,  cela  ne  nous  fift  point  de  peine. 

Nous  croyons  &  nous  tenons  pour  afleuré  que  c'eft  là  la  foy. 
tirée  des  paroles  dej.  C.  Nôtre  Seigneur,  qui  eft  venue  à  nous 
jufqu'à  prefent  par  la  tradition  de  nos  Peres,les  faints  Apoftres 
&;  les  SS.  Pères,  Scelle  que  nous  garderons  jufqu'à  la  mort; 
Nous  excommunions  tous  ceux  qui  (ont  dans  des  fentimens 
contraires  à  la  foy  Apoftolique,  c'eft  à  dire  à  cette  foy  donc 
nous  avons  parlé  ci-deilus  touchant  la  fainre  Euchariftie  ,  & 
tqui  nient  le  changement  delà  fubftance  du  pain  en  la  fubftan- 
cede  J.  C.  Nous  allarons  celaà  tous  ceux  qui  liront,  ou  im- 
pugneront  ctx.  écrit. 

Ceux  quidifent  que  nous  ne  recevons  pas  le  changement  de 
la  fubftance  du  pain  &du  vinen  la  ^ubdance  du  corps  &du  fang 
précieux  de  Nôtre  Seigneur  J-  C.difentdes  chofes  inutiles  ,& 
s'opiniâtrent  contre  la  vérité  en  ce  qui  concerne  ce  fiint  Sacre- 
ment, parce  que  nous  tenons  en  cela  la  même  chofe  que  les  La- 
tins. Nous  le  déclarons,  nous  le  faifons  fçavoir ,  nous  le  fcellons, 
afin  qu'il  vienne  à  vôtre  connoi'Jance  ,  6l  que  vous  le  receviez 
dans  la  charité  Chrétienne  ,  c'eft.là  mon  deifein.  Et  le  pauvre 
miferable  prie  celui  qui  a  un  trefor  de  mifericorde  d'éclaircir 
vosefprits,&  de  vous  conduire  à  tous  les  biens  celeftes  qui  lui 
font  agréables, &  que  vous  foyez  enfans  del'Eglife  Orthodoxe, 
dont  la  mémoire  eft  répandue  par  toute  la  terre  par  les  benedi- 


d^ec  fEgli/e  Komnine  fur  lEucharifiie.  769 
clions  de  la  fainte  Vierge  Marie,  des  Anges  &  des  Archanges, 
de  cous  les  Martyrs  &:  Saints  qui  ont  eflrë  agréables  à  Dieu  par 
leurs  bonnes  œuvres  à  prefenc ,  de  tout  temps  Se  jufqu'aux  fie» 
clés  des/îecles.  Amen.  Amen.  Anaen. 

Fait  le  5.  du  mois  de  Mefein  l'an  âcs  SS.  Martyrs. 

Au  basefl:  le  cachet  du  Patriarche  en  Cophte  ,oùil  y  a 

quelques  mots  qui  veulent  dire  Jefu-s. 

Chrifi  Fils  de  Dieu. 


CHAPITRE     XX. 

Union  des  Eglifes  d'Orient  avec  l^'ijife  Romaine  fur  l'Eucharifiie 

^  autres  points  ,  prouvée  par  divcrfes  atteftations  des 

Patriarches  ,  Evèques  é^  Prcflres  Arméniens. 

N  a  tellement  juftifié  iafoydes  Arméniens  fur  l'Eucha- 
riftie  dans  le  premier  Tome  de  cet  ouvrage  qu'il  femble- 
roic  fuperflu  d'y  rien  ajouter,  principalement  avec  les  attefta- 
tions  authentiques  du  Patriarche  d'Ermeafus  &:  de  l'Archevê- 
que Arménien  de  Confl:antinople,que  l'on  a  ajoutez  dansla  re- 
ponfe  générale  à  l'atteftationdes  Arméniens  d'AlepSc  de  deux 
Evêques  Arméniens  ,  dont  l'un  étoit  en  Hollande,  l'autre  à 
Rome  ,  qui  avoienc  efté  produits  dés  le  premier  volume. 

Néanmoins  comme  la  Nation, 5c  par  confequent  l'Eglife  Ar- 
ménienne eft  fort  étendue  ,&  qu'ils  (efonr  établis  par  le  moven 
du  commerce  dans  les  principalesvilles  d'Orient,on  croit  qu'on 
fera  bien  aife  de  trouver  ici  des  atteftations  des  autres  Eglifes 
Arméniennes,  comme  celle  du  Patriarche  de  CiSj  qui  eft  celui 
qui  partage  toutes  les  Eglifes  des  Arméniens  avec  celui  d'Er- 
meazin.  Celle  des  Arméniens  d'Ifpahan,&  celle  des  Arméniens 
du  Caire  :  après  quoy  il  M.  Claude  contefte  encore  lur  ce  fait , 
il  nous  dira, s'il  lui  plaift,par  quels  moyens  on  peut  donc  établir 
la  vérité  des  faits  de  cette  nature.  On  a  joint  à  ces  atteftations 
des  extraits  des  lettres  de  M.  de  Nointel  ,  dont  l'une  contient 
les  cérémonies  qu'il  a  vu  pratiquera  la  Melîe  des  Arméniens  , 
&  entr'autres  l'adoration  de  TEuchariftie.  Les  autres  autori- 
fenc  les  atteftations  du  Patriarche  Arménien  de  Cis ,  6c  celle 


77©  Li  V.  VI  H.  Treuaies  authmt.  de  T union  des  Eg.  etOr, 

de  l'Evêquedes  Arméniens  dlfpahan.  On  alaifle  les  artefta- 
tions  du  Patriache  de  Cis  &  des  Arméniens  d'Ifpahan  en  Latin, 
parce  que  ces  traductions  ont  efté  faites  en  Orient,  &  vérifiées 
iur  les  lieux,  &  peuvent  ainfi  pafTer  pour  Originaux.  L'on  a 
néanmoins  auffi  ces  aéles  en  langue  Armenienne,dans  laquelle 
ils  ont  efté  envoyez  à  Sa  Majeftë. 

EXTRAIT  D'VNE  LETTRE  DE  MONSIEVR  DE  NOJNTEL  , 
■Ambajfudeur  dit  Roy  k  la  Porte. 

IL  ni'eft  venu  une  belle  atceftation  d'Alep  avec  fa  tradudion 
en  Latin.  Je  vous  envoyé  celle-ci ,  me  refervant  l'original 
pour  le  faire  tenir,  lorfque  j'en  auray  un  Duplicata.  Ellem'aété 
accordée  par  le  Patriarch'e  des  Arméniens  ,  refidant  à  Cis  en 
Cilicie  ,  lequel  l'ayant  fait  figner  de  plusieurs  Prélats  &  Eccle- 
fiaftiquesdans  une  forme  fort  authentique  ,  l'a  fait  paflèr  par 
AIep,où  rArchcvcque^:  le  Clergé  l'ont  approuvée,&c'eft  de 
ce  dernier  lieu  qu'elle  m'eft  venue.  Vous  y  trouverez  quelques 
noms  qui  font  peut  eftre  les  mêmes  que  ceux  de  l'atteftation 
Arménienne  imprimée  dans  vôtre  Livre  de  la  Perpétuité  au 
nom  de  David,  qui  s'intitule  Patriarche  des  Arméniens,- 

Ce  David  eftoit  en  ce  temps  là  Patriarche  de  Cis,  &bien  uni 
avec  le  grand  Patriarche  Jacob  ;  mais  la  cabale  d'Eleazar  Pa- 
triarche ,  ou  pour  mieux  dire  Archevêque  des  Arméniens  de 
Jerufalem  l'ayant  emporté,  Cruciador  qui  edoit  de  fon parti 
fit  chafler  David  ,  &  obtint  le  Patriarchat  en  fa  place. 

Il  me  femble  que  maintenant  la  croyance  Arménienne  furies 
points  en  difpute  ,  eft  établie  d'une  manière  fans  réplique.  Car 
je  me  perfuade  que  la  conformité  d'une  déclaration  de  foy 
donnée  par  des  gens  auffi  éloignez  que  Iefonclfpahan,Cis,Alep 
&,  Jerufalem  eft  au  deiTuscle  toute  coilulion, Se  qu'il  eftimpoffi- 
ble  d'en  foupçonner  avee  raifon,  quand  l'on  confidereque  lâ 
divifion  des  Patriarches  qui  fêchaflent  les  uns  les  autres, n'em- 
pêche pas  leur  union  dans  les  fentimens  del'Euchariflie  ^& 
autres  points  qui  nous  font  conteftez. 

ATTESTATION  BV  PATRIARCHE   De  C75'. 

Ekvus  Jesu-Christi  CruciadorPatriarcha  &:  Primas exi- 
gurcpartis  Armeniorumquimoranturin  Cilicia  &Pala:fl:i- 
na,dextra;  divi  Gregorii,eiufdemque  throni  minifter,  oui  ne- 
cefTarium  valde  fuie  hxc  fcribere.  Siquidemaudivimusàmukis 

fide 


aivec  tEgltfè  Romaine  JurtEuchciriftie.  771 

fidedignisSc  eciaminfignibus, elîeqLiofdamharrecicosin  Gai-  Chap. 
lia  Lucheranos  Se  Calviniftas  nuncupatos ,  Armenis  Orien-  XX. 
talibusfallo  imponentes,  alTerendo  ubiquequod  ipfis  fîntcon- 
formes  Religione,&fide,quodabfitomnino;  quin  potius  faxic 
Deus,  utnacio  noftratantum  diftetà  talibus  icfimilibuserro- 
ribus  Calviniftarum  &  Lutheranorum  quantum  cxluni  à  terris. 
Eorum  autem  propofitiones  func  ejufmodi. 

I.  Dicunt  corpus  Chrifti  non  efle  realiter  in  facra  Euchariftia, 
fed  paoem  tanrummodo  &  vinum,  figuras  &  figna  corporis  6c 
fanguinisJefu-Chrifli,  qua:  vim  ÔC  vircutem  eorum  recipienti- 
bus  communicant. 

z.  Afleruntgloriofum  &  immortale  corpus  Domini  fedens 
ad  dexteram  Patris ,  nullomodo  efTe  prc-çfens  in  Euchariftia, 
nec  ctiam  introitre  in  os  accipientium  facram  hoftictm,  (ed  tan- 
tummodo  panem  &  vinum  uniri  penetrativè  ac  perfonaliter 
divinitati  virtute  confecrationis,  &  ita  fieri  novum  corpus 
Chrifti,  quod  primo  uniri  dicitur,  fiquidem  ab  eadem  divi- 
nitate  fervatur  acque  fuppofitatur  non  fecus  ac  primum. 

3.  Dicunt  rubftannam  panis  &  vini  non  converti  in  cor- 
pus &:  fanguinem  Chrifti,  fed  panem  &  vinum  manere  poft 
confecratioiiem. 

4.  MifTam  non  efle  verum  Tacrificium  propitiationis,  nec  de- 
bere  ofFerri  pro  vivis  &  defun<flis. 

y.  Incongruum  efle  adorare  Chriftum  in  facra  Euchariftia, 
imo  nec  poflfe  adorari  fine  idololatria. 

6.  Non  concedi  omnibus  &  quibuflibet  baptizatis  univer- 
faliter  loquendo  remiflîonem  culpx  originalis ,  fed  pra:defti- 
natis  folummodo,ita  ut  fiquisadultus  baptizatus  moriaturin 
infidelitate,  nuUam  prorfus  gratiam  recepifl^e  in  baptirnio 
fuo, 

7.  BaptiHifium  non  efle  necefl~arium  filiis  fideHum,ira  ut  Ci 
moriantur  fine  ipfo  poflînc  falvari,  undefuperfluum  eft  adeo 
folicitumefle  ut  baptizentur   antequam   moriantur. 

5.  Jiiftitiam  femel  receptam  non  poflle    amitti  ,  fiquidem 
talis  adoptione  fadus  eft  filius  Dei,  nec  poteft  unquam  filius' 
efle  diabolij  nec  excidere  à  gratia  adoptionis. 

9.  Si  quis  juftuscadataliquandoidololatriam,aut  homicidium 
vel  fornicationem  ,  aut  fodomiam  ,  in  furtum  ceu  eriam 
blafphemiam,  non  polTe  nihilominus  primam  juftitiam  fuam 
amittere. 

EE  eee 


I 


77i  L I V .  V  H  L  Freu'ves  authen.  de  tmion  des  Eg.  d'Or. 

lo.  Vota  perpétua  caftitatis  &  aliaemifla  à  Religiofis,  ini- 

qua  efi[e,contraria  Tacris  Scripturis,nec  non  inventa  à  diabolo. 

II.  Ecclefiam  Dei  non  pofle  fineinjuftitia  &tyrannideprae. 
cipere  jejunia,  &ceriis  quibufdamcibis  interdicere  fidelibus. 

II.  Chriftianosnon  poiTe ,  nec  debere  patrocinium  Deiparx^ 
Virginis  aut  Sancflorum  qui  in  cîclis  funt,  ullo  modo  implorare 
nec  eos  deprecari,  aiioquin  damnum  inferre  Chriflo  mediatori 
noftro. 

13.  Incongruum  effe  ac  ridiculum  Sandos  &  eorum  rcli- 
quias  venerari. 

14.  Chriftianos  non  poffe  etiam  honorem  exhibere  eorum 
imaginibus  cultu  relativo. 

15.  Non  elfe  feptem  EcclefiiE  Sacramenta,  fed  duo  tantùm. 
î6.  Sacerdotes  ex  inftitiito  divino  pares  efTe  &  squales  Epif- 

copis  ,  &  pofTe  alios  Prefbyteros  confecrare. 

17.  Ecclefiam  non  indigeie  regimine  Epifcoporum  ,  imo 
/atius  efle  quod  multirudo  Sacerdotum  ab  aliis  competenti 
numéro  conftitutorum  regant  eam  quam  Epifcopi. 

18.  Univerfalem  Ecclefiam  pofle excidere ,  feu  in  exitum  ire, 
invifibilemquefierialiquando,eandemquenoneflèin'fallibilem. 

19.  Juftos  nullisunquam  pœnis  corporalibiTs  affici  in  tem- 
pore  propter  deliifta  fua. 

20.  Libros  Tobix,  Judith,  Sapientia:,  Ecclefiaftici ,  id  efl: 
Sirac,  Baruc,6cMachaba:orum,non  eflfe  libros  facrn;  ScriptutcX. 

Nos  igitur  fupra  fcriprus  Cruciador  Patriarcha,  unà  cum 
noftris  Ecclefiaftiris,  Epifcopis,  DocfVoribus,  &  prefbyteris , 
mox  ut  audivimus  bas  fupra  allatas  propofitiones  mendaciis 
refcrtas,  horrendas,  ac  totalitcr  penitufque  contrarias  Ecclefias 
Catholicae  &  Apoftolicae  ejufdemque  fed:atoribus,uri  patet  fîn- 
gulisj  pro  viribus  conati  (umusè  medio  tollereejufmodi  erro_ 
res  ac  fpurcitias  hucufque  auribus  noftris  inaudiras  ;  imo  ab/îc 
ut  talium  harrefium  folacogitatioin  mentem  noftram  rn^idac, 
quin  potiusab  ipfis  totoaminoabhorremus,  tanquam  àmorti- 
fero  veneno,  &  adeo  deteftamur  eas  ut  nequidem  de  ipfis 
aliquid  audire  velimus. 

Tandem  Ecclefia  noftra  firmirerac  fideliter  obfervat  do- 
«flrinam  à  Domino  Jefu  Chrifto  acceptam  ,  ipfique  traditam 
ab  Apoftolis  qui  erunt  pleni  Spiritu  fan<flo,imopluries  exami- 
nata,  inventa  eft  omnino  conformishucufquefacrisConciiiis, 


anjectEgli/è  Romaing  fur  lEuchAnfiie.         775 
fiqiiidem  fides  noftra  eft  abfolutè  &  evicJenterconirariafupra  Cha?. 
allâcis  hxreucorum  vigintipropoficionibus.  In  hoc  quod  non  XX. 
tancum  modo  admittat  feptem  Sacramenta,  verum  etiam  cece- 
rosarticulos  pr.xdicTiis  oppoficos,  prxfertim   confccrationem 
panisin  corpus  Chrifti.  £c  licet  profîreamur  unam  in  Chrifto 
naturam,non  inde  fequitur  liumanicatem  deftrui,  &:  Chnftum 
non  habcrecorpus, QUIA  NON  DfciMusuNAM  esse  Christc 
nacuram  deperditione  unius,  vel  commixtioneucriufquei  fed  En  quel  fens 
perineffabilem  unionem  proficemur  inconfuTani  unicatem  na-  '"  Z^™^""-'* 
turarum  Chriltij  imo  etiam  nrmirercenemus  ac  credimushu    quii  nya 
manitacem  Chrifti  nullomodo  deftrui,  eamque  habere  corpus,  qu'une  nature 
&quod  idem  corpus  pro  nobis  crucifixum  &;  fedens  ad  dex- 
teram  Patris^  Ç\t  prefens  realicer,  licecinvifibiliter  in  Euchari- 
ftia  fub  folis  fpeciebus  panis  &  vini;,  quia  panis  &  vinuni   ira 
xronvertuncurin  verum  corpus  &  fanguinem  ChriftijUtutriufqj 
fubftantix  non  remaneatamplius,  niftfola  accident'ia.  Quam- 
ob  remadoramus  Chriftum  in  fancliflimo  Sacramento.  Haro 
•eft  Ecclefia:  noftfc^  orthodoxa  doclrina  quam  accipimus^  quam- 
que  toco  corde  &  pro  viribuscolimus,  cuiufque  fpegaudemus 
ac  femper  gloriamur,  &  medianre  ipfa  fperamus,  uc  cum  Chri- 
fto  fimul  rapiamur  in  aéra,  cui  gloria  œcerna,  laus  &  honor 
in  fecula.  Amen. 

Has  refponfionesftriclimac  paucis  verbis  fcriptas  ea  civita- 
te  Sirenfi,qux  eft  fedes  noftra^  mifîmus  profupradiclisChrif- 
tianis  qui  funt  in  Gallia. 

In  quarum  fidem  ego  Crtjciador.  Pacriarcha  manu  pro- 
pria fubfcripft  eas  ac  figillo  munivianno  Armenorum  lui.  6c 
a  partu  Virginis  1671. 

Eqo  Pau  LU  s  DoBor  ^  Archiepifcopus  Armenorum  Vicarius 
gênera  lis  periSuJîris  D-  Patriarcha.  in  civitate  Sifenji^  afientioT 
veritati  ^  teflimonio  data. 

Ezp  JoANNES  Docior  ^  Archiepifcopus  civitatis  Kcnnanic^ 
adh^reo  fanciis  Patribus ,  (j;-  condcmno  (upradichi  h^reticos. 

Ego  GaE.GOR.ius  Archiepifcopus  Mcrdinicondemno  ^  àna- 
thcmati^o  cum  fan&is  Patribus  [npradicios  hcvreticos. 

Ego  AzARlA  Bocior  é"  Archiepifcopus  Alcpenfis  accepidh  il- 
lujfri.ljïmo  patriarcha  hafce  Itttcras  tcfiimoniales  è  civitate  Sifen. 
Jî j  congregavi  Sacerdotesac  Minijiros  Ecclefa  ,  ^  uni  cmnipfs 

EE  eee  ij 


774  L^v.  VIII.  Prewves  authent.  detunîon  des  Eg.d*Or. 

confirmavimus  fanam  doîirinam  contra  hos  hareticos  anno  Arms- 
norum  ii2t.  'juin  25. 

By)  DomBaptista  Sacerdos  (^  Archipreshyter  Ecclefia  Kir- 
pnis  Deipara  ajj'entior  veritati  ^  condemno  do^rinam  horuM 
hareticorum, 

E70  Do  M.  fervus  T>ei  adharens  favBis  Patrikus  refpuo  pravas 
opiniones  ifiorum  hareticorum. 

Ego'DoM.-hm.O'DA'rus  Jimiliter  anathematixo  doBrinam  ho- 
rum  Schifmaticorum. 

Ego  DoM-GREGORius»W(i  cum  fauïHs  Patrihus  damno fer- 
verfa  ijiorum  hareticorum  doynata. 

Ego  DoM  Theoûorus  unàcumCatholicis  rejicio  doclrinam 
hoTum  hiereticorum. 

Ego  DoM  M-iCRKii.  anathematixs  f«pra  allatam  haretice^ 
rum  doBrinam. 

NOs  Carolus  Francifcus  Olier  de  Nointel  Régi  Chriftia- 
niffimo  ab  intimis  fecretis  &  in  Parlamenci  Paridenfis- 
Curiâà  ConcilHs,  nen  non  ejufdem  ad  OtEhoraanum  Impe- 
rarorem  Legatus  ;  teftamur  ac  notum  facimus  Ecclefix:  Si- 
fenfrs  qua:  eft  in  Caramania,  Patriareham  Armenum  nonnul- 
]is  ha:retica  quçdam  dogmata  fibi  calumniosè  imputantibus 
Calvinianis  occurrendigratia,  propri^  fimul  ôc  ArmenorunTï 
omnium  fidei  declarationem  mififfe,  cujus  apud  nos  fervato 
prutotypogenuinam  affîrmamuseilèrupra  fcripcam  interpreta- 
tionem  qnie  dido    prototypo  junda  Alepo  perlaca  eft  5  cujus 
rei  certioris  faciend;^  fidei  caufa,  hacce  noftra  fubfcripcione, 
chirografb,acnoftrorum  infigniumfîgillo  munivimus,  quibus- 
te  ejus  qui  nobis  primus  eft  à  fecretis  fubcriptionem  contraponi 
curavimus.  Dacum  Perxad  Conftantinopolim  3.  Noh.  Odo- 
bris  an.  rep.  fal.hu.  1671. 

Olier  De  Nointel. 

Par.  mondit  Seigneur. 

Le  Picard  Secrbtaire> 


A^ec  liglifè  Romaine  far  rSuchariJite.  77  j 

Chap. 
'ATTESTATION    DES     ARMENIENS    DV    CAIRE.  ^  X. 

v^»  nom  du  Pere^  du  Fils    ô"  du  Saint   EJ^rit  qui  efi  un  feul 

Dieu.  Amen. 

JE  croy  de  tout  mon  cœur  en  un  feul  Dieu  Créateur,  au 
Fils  de  Dieu  engendré  du  Père,  &au  S.Efprit  procédant  du 
même  Perei  Je  croy  c]ue  le  Verbe  de  Dieu  eft  Eternel  fans 
commencement  &  fans  fin,  comme  le  Père  eft  éternel.  Je  croy 
au  faint  Elprit  immortel  procédant  du  Père,  &  qui  eft  adoré 
a\  ec  le  Père  Se  le  Fils.  Je  croy  en  la  fainte  Trinité  qui  n'eft 
qu'un  feul  Dieu  dans  une  même  fagefle  ,  &c'eft  lui  qui  a  créé 
toutes  les  chofes  vifîbles  &  invifîblcs.  Je  croy  en  la  fainte  Eglifê, 
en  la  Remiflîon  des  péchez,  en  la  Communion  des  Saints.  Je 
croy  l'unité  dans  la  Trinité.  Je  croy  en  J.  C.  Fils  de  Dieu 
engendré  defon  Père  de  toute  éternité,  qui  defcendantdu 
Ciel  a  pris  un  corps  dans  le  ventre  de  la  bien-heureufe  Vierge 
oiiiis'eft  fait  homme,  &:  eft  demeuré  uni  à  la  divinitépen- 
dant  neuf  mois  entiers.  Ainfî  il  eft  vray  Dieu  &  vray 
homme,  compcfé  d'ame ,  d'efprit  &  de  corpsj  il  n'a  en  luy 
qu'une  feule  nature.  Ce  même  Fils  de  Dieu  qui  eft  éternel 
&  immuable ,  s'eft  fait  homme  fans  corruption  &  fans  impu- 
reté. Comme  Dieu  eft  immortel ,  de  même  l'humanité  de 
J.  C.  eft  immortelle.  Noftre  Seigneur  J.  C.  eft  aujourd'huy 
comme  il  eft  hier,  &  il  demeurera  fans  fin-. 

Je  croy  que  noftre  Seigneur  J  C  a  converfé  /lirla  terr^, 
&  qu'après  trente  ans  il  a  efté  baptifé,  que  le  Père  prononça 
cette  parole  5  c'eft-là  mon  Fils  bien  aimé,  &  qu'on  vit  dcC 
cendre  fur  luy  le  S.  Efprit  en  forme  de  Colombe.  Je  croy  que 
noftre  même  Seigneur  confondit  le  diable  lors  qu'il  en  fut  ten- 
té, que  préchant  aux  hommes  le  Royaume  de  Dieu  pour  les 
fauver,  il  fouffriten  fon  corps  beaucoup  de  peines  £cla  faim  6s 
lafoifj  Qu'il  porta  volontairement  toutes  les^xiffrances^  Qull 
voulut  eftre  crucifié  &  mourir  en  fon  corps ,  Se  qu'il  fut  enfe- . 
vely  j  Que  la  divinité  n'abandonna  point  fon  corps  dans  le 
tombeau  non  plus  que  fon  ame  quand  elle  descendit  aux  En- 
fers où  il  parla  aux  âmes  des  Pères,  brifa  leur  fers ,  &  déli- 
vra ces  âmes  de  la  captivité.  Le  troifiémejour  il  reftufcita,^: 
apparut  à  fesDifciples.  Je  confefle  que  noftre  Seigneur  J.  C. 
eft  montéaux  Cicux  avec  le  même  corps  qu'il  a  reçu  de  k 

EE  eee  iij 


77é  Liv.  VIII.  Vvewvcs  authem.  de  Vunion  des  Eg.  d'Or. 
Sainte  Vierge, qu'il  y  eft  aflis  à  la  droite  de  fon  Père,  que  de 
là  il  reviendra  en  ce  même  corps,  Se  qu'avec  une  grande  Ma- 
jeftéil  jugera  les  morts  &:  les  vivansj&ccux  qui  auront  biea 
vécu  iront  en  la  vie  éternelle  ,  6c  les  autres  en  enfer. 

Cette  foy  eft  necefTaireà  tous  les  hommes,  ôcaux  juftesmê- 
mesj  &il  faut  qu'ils  enfaflent  profeiïion  en  tous  temps  &de 
tout  leur  cœur  comme  de  la  bouche.C'eft  cette  foy  qu'ont  en- 
feignéeles  Apôtres,promettant  le  falut  à  ceux  qui  l'obferverorc 
exadlement.  C'eft  cette  même  foy  que  protelfe  l'illuminé  S. 
Grégoire.  Je  reconnois  auiîî  qu'il  y  a  fept  Sacremens,  le  Bap- 
tême, la  Confirmation,  l'Euchariftie,  la  Pénitence,  l'Ordre, 
le  Mariage  &  l'extrême  Ondion.  Nous  adorons  la  fainte  Croix 
&nous  rendons  la  même  adoration  aux  Images  de  la  bien  heu- 
rtw^z  Vierge  Marie  Mère  de  Dieu.  Nous  honorons  les  Images 
de  tous  les  Saints,  &  nous  célébrons  leurs  feflcs  par  de  tres-de- 
votes  commémorations  Je  croy  que  la  bien- heureufe  Vierge 
ed:  Mère  de  Dieu.  Je  croy  en  la  chair  Seau  fangdej.  C. ôcque 
ce  pain  &:  ce  vin  que  nous  voyons  eft  changé  au  corps  Se  au 
fang  de  J.  C.  aulîl  toft  que  le  Preftre  a  prononcé  les  paroles  de 
la  confecration,  &:  qu'ils  font  propitiatoires  pour  les  morts. 

Donné  au  temps  de  noftre 
Carefme  de  S.  Nicolas  l'an 
1671. 

Moy  je  Gaspar  Preftre  &  Supérieur 
de  1  Eglife  des  Arméniens  au  Caire 
d'Egypte  déclare  Se  confefle  que  cet 
écrit  eft  de  noftre  véritable  foy. 

RELATION  DE  MONSIEUR  DE  NOINTEL. 

LE  fécond  Juillet  trois  Marchands  Arméniens  m'ayant  fait 
leurs  civilitez,  l'un  deux  venu  par  la  Caravane  m'a  ren. 
du  une  lettre  du  Père  Rapliaël  du  Mius  écrite  d'Ifpahan  le  14/. 
Décembre  1671.  Il  m'informe  que  l'atteftation  que  je  defirois 
ayant  efté  accordée,  la  difficulté  qu'on  a  eue  n'a  point  efté 
fondée  fur  ce  que  les  Arméniens  ne  crufTent  point  les  mcme« 
chofesque  nous  fur  l'Euchariftie  Se  les  autres  points  dans  lef- 
quels  ils  conviennent,  mais  fur  l'apprehcnfion  de  leur  clergé. 


li 


Afvec  ÏEglife  %omaine  fur  lEuchAriftie.  777 
que  le  noflre  ne  fe  veuille  rendre  maiftre  de  leur  Egiife  j  que 
néanmoins  la  confiderarion  du  Kelontcr  des  Julfalius  nommé 
Agapiri  aiifli  généreux  que  civil  &  honnefte,  &:  qui  foûcienc 
fes  bonnes  qualirez  par  Tes  grandes  richeflès  au  defTiis  de  tous 
ceux  de  fa  nation  dont  il  eft  le  chef  par  Ton  rang  auflî  bien  que 
par  fon  mérite,  l'a  emporté:  Ce  Seigneur,quieft  fort  Catholi- 
que,s'efl:  fervi  de  tous  les  moyens  les  plus  convenables  pour  ob- 
tenir cette  déclaration  delà  vérité  à  laquelle  on  s'eft  déterminé 
par  le  refped  que  l'on  a  pour  le  Roy,  pari  cgard  qu'ils  ont  eu  à 
mes  lettres^principalement  parcelles  du  grandPatriarche  join- 
tes à  la  copie  de  l'atteftation  que  luy  êc  les  Arméniens  de  Tur- 
quie m'ont  accordées  &:  qu'enfin  l'mimitié  des  Arméniens  con- 
tre les  Loutrans,qui  elt  le  nom  qu'ils  donnent  à  tous  les  héréti- 
ques d'Occident,  a  levé  tous  les  obftacles  quife  prefentoient  y 
ceux-là  eftant  bien  aifesd'avoir occafion  de  convaincre  l'impof. 
ture  de  ceux  cy,  d'imputer  à  l'Eglife  Arménienne  leurs  fen- 
timens. 

Ce  bon  Père  me  témoigne  que  pour  le  faire  avec  plus  d'éclaf^ 
l'Archevefque  &  r£vêqueVertabjets,le  PreAreKelonderôi  au- 
tres des  plus  confiderables  ont  voulu  écrire  cette  atteftation  fur 
velin  orné,  peint  6c  doré  en  leur  manière,  afin  qu'elle  fufl;  digne 
d'eftre  prcfentée  à  noflre  Monarque, 6c  que  celuy  qui  l'a  rradui  - 
te  en  Latin  fuivant  la  phrareArmenienne,6c  oui  a  travaillé  audî 
à  l'obtenir,re  nommePetrus  EbediK  qui  a  étudié  à  Rome,  qui 
eftfçavant,  fort  7elé,  6c  que  Kelonder  a  retiré  chez  luy. 

Il  me  parle  enfuice  de  l'aufterité  des  jeûnes  de  cette  Egiife 
pendant  lefquels  ceux  qui  en  font,  ne  fenourriiTent,  plus  de  la 
moitié  de  l'année  que  d'herbages,  y  cftant  tellement  attachez 
qu'ils  taxent  ceux  qui  manquent  à  les  obferver,  de  n'eftrc  pas 
Chreftiens.il  m'obfervc  auiîl  non  feulement  la  longueur  de 
leurs  MefTes,  pfalmodies,  confeffionsSc  communions,  mais  en- 
core la  célébrité  qu'ils  y  apportent  par  Icsiichefes  de  leurs 
ornemens  d'Eglife,  où  ils  n'épargnent  rien,  failant  ainfi  écla- 
ter 6c  revivre  dans  un  païs  Ci  éloigné,  ce  qui  fert  à  exciter 
dans  le  Chriftianifme  la  dévotion  6c  le  refpecl;  d'où  il  pafle 
àcctte  reflexion  que  nos  Occidentaux  qui  crovent  6c  pra- 
tiquent les  Cérémonies  de  l'Eglife  par  grimace  00  les  Miniftres 
de  la  Reiieion  prétendue  reformée  qui  les  trait- ent  de  fraif- 
che  datte  Romaine  6c  comme  inventées  pour  tenir  le  peuple 
dans  fon  devoir  ,  n'ont  qu'à  pafTer  dans  le  Levant  poureftre 
dfabafe  z  de  cette  nouveauté  imaginaire. 


778  Liv.  VH I.  Preuves  authen.  de  t union  des  Eg.  d'Or. 

Ce  bon  Pere  qui  depuis  vingt- cinq  années  eft  dans  la  Perfe, 
avertit  ces  novateurs  qu'ils  trouveront  dans  ce  voyage  les  Egli- 
fes  Grecques  Se  Arméniennes  qui  font  les  principa.'eSj  celles 
des  Cophtes,  Maronites  &  autres,  en  poiTeffion  des  Icpt  S^cre- 
raens,  de  quantité  d'Eglifes  richement  ornées  d'habits  Sacer- 
dotaux, d'un  Clergé  compofé  de  Patriarches,d'Archevêques, 
Evêques,  R.eligieux,&  Predicateursqui  font  élevez  à  ces  rangs 
fubordonnez  les  uns  aux  autres, par  la  voyed'é'eclion,&c]ui  ob- 
fervent  régulièrement  avec  les  feculiers  les  Feftes  annuelles,jeû- 
nes  6c  MelFeSjtoutes  ces  chofes  ayant  paflTé  dépuis  l'antiquité 
jufqa'à  eux,  ôc  s'y  eftantconfervécs  inviolablement  malgré  la 
dowiiination  Mahometane,  laquelle  par  fa  tyrannie  ayant  pu 
réduire  ces  peuples  dans  une  grande  ignorance, qui  commence 
néanmoins  à  celî'er,  n'a  pas  efté  capable  toutefois  de  les  faire 
départir  du  principal  &  de  leurs  cérémonies  anciennes,  donc 
il  y  a  des  preuves  irreprocli:^-bles  dans  les  médailles  antiques, 
qui  ne  font  plus  frappées  au  coin  deRome  depuis  tant  d'années. 
Et  il  conclut  que  de  cette  union  de  fentimens  des  Chreftiens 
Orientaux  dans  des  points  fieffentiels,  quoyque  d'ailleurs  les 
Arméniens  &  les  autres  ne  s'accordent  pas  avec  nous  ny  en- 
tr'euXjil  faut  croire  que  nous  &  eux  les  avons  pris  dans  la  même 
fource  que  l'on  doit  nommer  indubitablement  la  tradition 
Apoftolique,  puifque  tant  d'herefies  n'ont  pu  la  détruire  ny 
nous  en  priver,  &  qu'au  contraire  parleur  feparation  elles  ont 
attefté  que  noftre  Eglife  eft  celle  dont  le  laint  Evangile  diç 
qu'elle  eft  fondée  fur  le  rocher    inébranlable. 

ATTESTATION     BES    ARMENIENS      D'ISPAHAN. 

POTENTISSIMO     CHRISTI  CORONATO    LVDOriGO 
Régi  Gentis  viHricis  Francorum.  '  -^ 

Natio    Armena     SCR.1BIT. 

Eleberrimus  eft  definitioneatque  ordine  regni,  five  Re- 
_  gum,  heroïcx  cogitanonis  jufti  confilii  atque  fecreti , 
cledio  circajudicîum,  vider  robuftusinPalçftra  belli,tremor 
adverfusveritatirebel!es,fundamentum  &:dîfpofitio  Chriftia- 
nac  cultura:  Dei,in  luce  natus  &  primogenitus Ecclefix  Ca- 
tholicxqux  eft  mater  beatitudinis,  exftirpe  antiquorum  Rex 
U.  forris  virtuofe,  bonum  germolium  &:  planta  benediélionis 
ornacus  gloriis ,  H.   viclor    excellens ,   iupra   tuam  fortif- 

fîmam 


Anjec  ÎEglife  Koma.ine  Jur  VEucharifiie,         -j-ji^ 
fimamprogeniem  ,  fupremuSj  altum  thronum  regni  habens  ,  Cm.  XX. 
omnibus  prjeledus  in  circumfcribendofamauniverrum  ,  fpes 
&  refugium  omnium  Chriftianorum  ,  cum  divina  piecace  c^e- 
fareas  Se  abfolutus  Rex  amator  Dei  &  Chnftianorum. 

Sâlutem  exhibemus  juxta  traditionem  Chrifli  amore  fpiri- 
tuali  cum  Dei  benedidione  tuo  regno  Deum  amatori ,  Nos  ^y"  ^  ^^"^1^ 
'humiles  Archiepifcopi ,  David,  Ifaacus,  Se  Stephanus  Se  Ka-  cercmoniedcs 
lanter  Ae;a  Piri,  SeDodores  ,&:cum  Maçinanbus  ,Se  unanimo  Arméniens, 

,       ^  n  •       '  •  /r      j        J  ■  V  comme  fi  c't- 

populo  noitro  continuas  orationes  eftundendo  ,  petmiusama-  toicpourmeE- 
eno  Reee  Chrifto  ,  uc  cum  fuo  alto  Se  omnipotente  brachio  "c  le  nom  du 

r  ri  r  ■•••11  Ro\,quiuy 

conlervet  ialvum ,  cum  perpétua  perleverantia  mvincibile  re   eft  pas  nean- 
gnumtuum  juxta  didum  Apofloli  ad  ThelTalonicenfes  i.  cap.  moins,  cequi 
2.  ôc  juxta  benediârionem  Jacob  ,Gen.  49.  cap.  ôc  non  deficiant  "J^sT^f^ni-V 
tibi  proies  germinanda;  in  purpuris  ufquead  advcntum  xterni  lef^ed. 
Régis, Se  tr.ndem  cum  tuis  fplendidis  Magnatibus  Satrnpis , Se 
quàm  plurimo  exercitu ,  quo  abundas  gloriis  Se  honoribus ,  in 
eifdemgaude  Se  jugiter  fruere ,  ad  laudem  Se  gioriam  Redern- 
ptorisJefu-Chnfti  totiufque  orbis  Chriftianr. 

Notum  fit  Magnirudiniveftrarquod  aliqui  fegrcgati'Se  fcifîî 

&  maledicentes(  fcilicet  Novatores  )  pofuerunt  falfam  nobis 

impofturam  fingendo  nos  cfie  communicantes  eorum  mali- 

tix.  Idcirco  Celfitudo   veftra  jufTerat   cultori  boni  Domino 

Carolo  Olier  Marchioni  de  Nointel  ,ut  fciatur  veritas,Se  ma- 

pifeftctur  tua:  Magnitudini.  Ipfe  quc'efivic  ab  univerfali  Pâtre 

Jacobo  Patriarcha  Generis  Armeiiici,  d  qub  verè  fcivit  nori  ita 

e{îè  ,  ut  dicunt ,  Se  eriam  Icripfit  ad  anriquum  Se  prudentiffi- 

mum  niiffionarium  Patrem  Raphaclem  Capudnum  in  Perfide; 

fcitugratia  modum  fentiendi  nofcrum  dehac  re.  Etillecontu- 

lit  hoc  ne2:brium  cum  noftro  gloriofo  Domino  Kalanter  Aga 

Piri  ,  qui  eft  Princeps  Armenorum  Perfidis,  mediante  Domino 

noftro  Petro  BadiK  fortirer  in  litteris  Larinis  perito.  Oftendit 

nobis  fi:ripta  fcilicet  Pariarcba;  Se  Domini  Legati,  Se  nobis  fas 

fuit  fcribere  ad  Sublimitatem  veftramnoftramacceptationem, 

quia  omnino  longinqua  eft  fcientiaSe  ienfatio  noftra  à  talibus 

imperfeclis  Seerroneis  opinionibus,  quar  diftant  àtraditioni- 

bus  illuminatoris  fandi  Gregorii   Se  aliorum  fandorum   Pa- 

trum  noftrorumj  Se  taies dubitationes  nunquam  fueruntapud 

nos ,  neque  in  mentem  noft;ram  afcenderunc,  Se  erant  argu- 

HienEa  eorum  ha:c. 

FFfff 


ySo  Liv.  VI  M.  Prewves authcn.  de tuniondes Eg. d'Of. 

I.  Contra  fandlidimum  Sacramencum  Euchaiilb.'E cjuinquc 
capicibus.  In  primo  dicant  ChnftumDominum  non  eiîë  reali- 
ter in  illo  Sacramento  , 

i.  Gloriofum  corpus  Chrifti  fedens  in  dcxtera  Paris ,  non  ell 
illic  ,  &  non  ingredicur  in  os  iapientium. 

3.  Quod  fubltantia  panis  2c  vini  non  tranfmutatur  in  corpus 
Chrifti. 

4.  Qiiod  Mifla  non  efl:  facrificium  remilîîonis  peccacorum,, 
ideoquenon  eft  celebrandum  pro  vivis  &  defundis. 

5.  Quod  peccatum  eil  colère  in  illa  Chriftum  Dominum.  Ac 
nos  contrariam  partem  eorum  tcnemus  -,  abfque  dubio  fundati 
in  verboDomini,  in  craditionibusfandorumPatrumJ  &quam- 
vis  non  pofTuiTius  a:quariin  dando  refponrionem  cuilibet  illo- 
rum  veftrx  fublimiflima;  fapienria: ,  atcamen  cum  noftro  hu- 
mili  fciencia  habita  ex  traditionibus  fanAorum  Patrum  ,  quod 
idem  corpus  Domini  crucifixum  5c  afcenfum  in  ca;ium  ,  &:  fe- 
dens ad  dexteram  Patris  efl:  realiter  in  illo  Sacramento,  tamen 
invifibiliter  ,  fub  fpeciebus  panis  &  vini ,  &  ita  eorum  fubftan- 
tia  tranfmutatur  in  corpus  Chrifti  Domini. 

Deinde  quamvis  credimus  unam  naturam  Verbi  Incarnati 
juxta  Cyrillum  Alexandrinum  ,  non  tamen  confufam  juxca 
Euthychum  hîcreticum.  Sed  ex  pcrfcdla  Deirate  ,  &  perfeéla 
humanirate,  &:exuna  perfona  unum  Dominum  Jefum  Chri- 
ftum unitum  cognofcimus  inconfusè  j  èc  unde  credimus  &  dif- 
cimus  Chriftum  habere  corpus  &  naturam  humanam ,  quod 
largitur  pretiosè omnibus  digne  accipientibus,  &  habcmus  fîr- 
mum  fundamentum  in  verbo  Domini  Matth.  cap.  i6.  Moc  efi 
corpus  mcum  ^  fanquis métis  ,êi  non  fignum  j  &  in  Joan.  cap.  G  . 
Panis  quem  ey)  dabo  corpus  meum  eft  ,  Q-  qui  manducat  ex  illovi^ 
vet  in  sternum  ,  ^  ey)  fum  panis  vit/e.  Undc  indubicatè  ado- 
ramus  Chriftum  in  illo  Sacramento  ,&il}cqui  tafia  non  cré- 
dit, fit  ipfi  idololatria  ,  nobis  vero  fidelibus  eft  iàlutaris  atque?^ 
optimus  cultus.  Pariter  credimus  efle  veram  propitiationem 
pro  vivis  Scdefundis. 

6.  Dicunt  baptifma  non  efle  neceflàrium  filiis  fidelium  ,  & 
quoduniverfaliter  non  fitremiffio  peccatorum  pcr  iliud  omni- 
bus ,  fcd  folum  eledis  ;  quorum  contrarium  dicit  Dominus  : 
Qui  non  baptix^tus  fuerit  ex  aqua  (^  Spiritu  ^c,  EtApoftoI.  ad 
Rom.  cap.  6. 

7.  Gracia  femel habita  non  poteftamittijcujus  contrarium  di- 


A^vec  TEglife  Romaine  fur  tEuchariJîie,  y  Si 

cit  idem  Apoftolus  ad  Cor.  i.  cap.  lo.  ^/  exiftimat  feftare^  vi-  Ch.  XX. 
deaf  ne  cadat. 

8.  Quod  perpétua  caflimonia  efl  peccatum  ,  contra  faclum 
Domini  probancis  per  fuum  exemplum  ,  ôc  dicentis  Matth.  9. 
funt  EuriHchiqui  feipfûs  cajiraverunt  fropter  rcgnum  calornm. 

Cf.  Quod  Ecclefia  Dei  injuftè  jubet  jejunium  ,  contra  faclum 
Domini  jejunantis  per  40.  dies  &:no(fles,  &in  principio  Deus 
interdixit  comedere  de  arbore  ilJa-  Igitur  eft  bona  traditiodc 
jejunio. 

10.  Quod  interceffîo  San(5torum  efl  peccatum  ,  contra  illud 
Pauli  ad  Cor.  cap.  5.  Ohfecramus  fro  Chrifio  rcnonciliamini ^^ 
Danielis  3.  Neque  aufera^  mifericordiam  tuam  ànobis  propter  di. 
leHum  tuum  jlbraham  ^  Jfaac  fervum  tuum. 

ii.QuodSacramenta  non  funt  reptem,contra  illud  proverbium 
cap.  lo.Sapientia ^difitavit Jîhi domnm,  excudit  columna-s  fcptem. 

11.  Quod  Ordo  Epiicopi  &  Sacerdotis  eft  xqualis,&  quod 
affiftentiaEpifcopi  non  eO:  neceflaria  eeclefiisj  contra  ea  quac 
habentur  in  Acl.  Apolt.  cap.  8. &i.  ad  Cor. cap.  \x.  Et quofdam 
■pofuit  Detis  in  Ecclefia  fuos  Apoflolos  ^c.  Et  prxcipua  circa  Sa- 
cramenta  &  ordinem  Eccleiiafticum  clarè&  diffusé  traclac 
ianctus  Dionyfius  in  lib.  %. 

13.  Quod  univerfalis  Ecclefia  potefterrare  coorra  illud  Marth. 
r6.  Tues  Fetrtis  ,  ^  fuperhanc  petram^c.  ^adverfus  eam  non 
pr^cvalebum  porta  inferi  5  &:  Lucx  22.  ^y>  rogavi  pro  te  ,  Petre 
ut  fides  taa  non  deficiat. 

Et  tandem  dicunt  Librum  Sapientix  ,  Sirach  ,  &  Tobix  ,& 
Baruchj&Machabxorum  non  eiTe  partes  Scriptura:  rancla:,fic 
item  dicunt  reliquias  Sanclorum  non  eiîê  colendas ,  neque  eo- 
rum  imagines,  &  quod  fidèles  non  polFunr  pati  poft  mortem 
pœnam  temporalem  j  cujus  contrarium  habetur  in  Libro  Ma- 
chabxorum  ,ubi  jubeturorarepro  defunclisfidelibus,  fed  prce- 
cipuè  liabemus  contra  fupradicîaex  traditionibusantiquorum 
SS.  PP.  &  Coneiliorum ,  Se  confervamus  &  hunoramus  ea  qu* 
illiparvipendunt. 

Taies  funt  intentiones,  Potentifiîme  Rex  ,'  Epifcop^orum  Se 
Doclorum  Ecclefia:  Arménie  noftr^  ,quibus  breviter  oflendi- 
mus  veracitati  veftr^  quod  non  fumus  taies,  ut  diffamarunc 
nos  receptorestalia  enormia,  fed  prxcipuè  militamus  contra 
illa  fequendo  orthodoxam  viam  antiquorum  Sanclorum  Pa- 
trum  &  Apoftolorum  Chrifti  Domini ,  cujus  benedidio  fit 

F  F  ff  fij 


ySi  Liv.  VI 1 1.  Preuves  authent.  de  ï union  des î g.  â' Or. 
iuper  ce  ,  tiuimque  regnum  Se  fuper  dilediffimum  liberum 
tuum,  coronaque  dignifîîm'.im,  6c  Chrifto  forrificatum  Del- 
THiNUM  ,  teque  ipfe  Dominus  confervec  feniper  juxta  cuam 
filiacionera  legitimam  6i  fîdelem,  cum  Macre  tuafanda  Ro- 
mana  Ecclefia. 

Scripcafiiithxc  juxta  computûfionem  Latinorumannoi^yr. 
menfis  Decembris  lo.  &;  Armenorum  luo.  in  Conventunof^ 
tro,  quod  eft  in  Regia  Civirace  Spaham  ;  êc  in  veritatem  hu- 
jus  Epiftolx  ,  nos  infra  fcripti  acteflamur  cum  noftris  propriis 
figillis&manibus. 

£go  'D k.v\T>  Archiepifcçpus Civitatis  ^eya  Sfaham  ^  accepta  ea 
qua  verè  fcrifta  funt  in  hac  Eprfiola  ,  ^^  illis  utimur  ^  credU 
mus. 

1.  -EgolsAAC  Archiepifcopus  (^  StiperiorCon-vevti funili  ibate^ 
tedii ,  t^  fuccejfor  univerfalis  PatriarcbiC  noflra  Gentis  fi-miUter 
atteftor  S"  accepta ,  illifque  utimur. 

3.'Eg<?STEPHANUs  Epifcopus^ Superior Convenu Dei  Genitrifis 
idem  accepta. 

4.  Ego  M I  c  H  A  E  L  DoHor  idem  accepta." 

5.  Ey)  Jo  A N N  ES  DoHor  idem  accepta. 

6.  Ego  JoANNES  DaHor filius  Buniut  idem  accepta. 

7.  Ego  Parochus  Ecclejîx  fincii  Burtholomai  qu^  efi  BaflicA 
in  Julpha. 

8. Ego  Jo  ANNES  Gimala  idem  accepta. 

9.  Ego  Zacharias  Diglicrat  idem  accepta. 

lo-  E-ro  Manuel  Dizi'imatum  idem  accepta. 
\  \i    Ego  Deodatus  m igifieriomus  Domini  Kalanter ,  ^  vi- 
cem  gerens  ejufdem  idem  accepta. 

1 2 .  Ego  A  G  A  M  A  L  di  Thobii  Idem  accepta. 

l'if.Ega  Agajar  di  Cumal  idem  accepta. 

Ega  Aga  F  tri  Kalanter  Julfa  qu/v  efi  in  Civitate  Regia  fervus 
Chrifio  Domini  ,  tu^eque  Magnitudinis  creda  ^  accepta  ea  qua 
fcripferunt  Archiepifcopi  nofiri  ,  cum  meis  ynagnati'ous  idem  fen- 
timus  ,  unde  henignitas  vcfira  non  cenfeat  ita  ejfc  ,  ut  diffama- 
runt. 

Ey)  PETR.US  Viî.'Dl.'K.  Ecclejîa:  Armcnx  DoBar  idem  accepta. 

'Bga  Sergius  Is aaci  quondam  Dochris  Difcipulus ,  teftor  hanc  " 
,e[fe  veram  Ecclefi^e  Armena  profcfiionem  ,  quemadmodum  fupra 
Armenis  çaraUeribu^, 


A'vec  ÏEglife  Romaine  fur  ïEuchxrifle.  785 

Ha:c  incerpreiacio  Ladna  ad  nos  miira  eft  unà  cum  exem-   Ch.  X}C. 
plari  Armenoab  Archiepifcopis ,  Epifcopis,  &.  CleroSc  Prin- 
cipe Gencis  Armenx  qua:  verfatur  in  Perfia,  uc  fimul  facr^ 
Majeftaci  veftra:  ofFerrecur. 

Oliir  de  Nointel. 

Sacra  Majefiatis  Vejîra;  ad  Portant  Otthomanam  Zcgàtas, 

RELATION    DE    MONSÏEVR    DE   NOINTEL. 

LE  feiziéme  Janvier  1671.  les  Arméniens  faifancIaFefte  de 
Noël,  de  la  Circoncifion ,  des  Rois  &  du  Baptême  de 
nôtre  Seigneur,  j'eus  la  curiofité  d'aller  à  leurEglife  de  Ga- 
laca  pour  y  obférver  leurs  cérémonies.  J'y  affiliai  à  la  Mefîe 
qui  fut  célébrée  par  un  Abbé  ou  Supérieur  d'un  Monaftere  en 
Afie.  Il  avoir  en  refte  un  bonnet  rond  doré  ,  fur  le  corps  une 
manière  de  chappe,&  autour  du  cou  un  efpece  de  collier  com- 
pofede  plaques  d'argent  doré  ,reprerentanc  les  Apoftres  ,  qui 
écoit  haut  de  cinq  doigts.  Cinq  ou  fîx  Diacres  fe  tiennent  au- 
tour de  lui  ayant  des  bonnets  à  peu  prés  de  même  façon  6c  des 
furplis  de grofTe  toile  blanche  qui  alloient  jufqu'aux  talons,  &: 
dont  les  manches  joignent  à  leurs  bras.  Ils  étoient  bigarrez  de 
croix  &  de  bordures  de  foyesde  diverfes  couleurs ,  &  ils  por- 
tent fur  leur  épaule  gauche  une  étoile  qui  pendoit  par  derrière 
jufqu'à  terre,  je  les  obfervai  après  que  l'on  eut  tiré  le  rideau 
qui  eft  de  velours ,  &  fur  lequel  eft  figurée  une  grande  croix. 
Je  vis  auffi  que  l'Autel  eftoit  orné  de  trois  grandes  croix  pofées 
fur  des  gradins  &  de  fix  chandeliers  avec  des  cierges  allumez, 
difpofez  comme  les  nôtres  i  il  y  avoir  un  ornement  au  devant 
de  c  air  doré  ou  d'autre  matière  femblable,  &au  dellus  du  der- 
nier gradin  un  tableau  delà  Vierge. 

La  première  cérémonie  que  je  diftinguai  fut  la  proceffion 
du  Livre  de  l'Evangile  ,  &  la  féconde  fut  celle  du  pain  &:  du 
vin  avant  la  confecration  qui  fe  font  en  grande  cérémonie ,  &: 
av;ec  un  grand  culte  de  la  part  des  affiftani,  qui  fe  mettent  pour 
la  plus  grande  partie  à  genoux ,  &  témoignent  leur  refpecî  par 
de  grands  fignes  de  croix.  Lorfque  l'Officiant  eut  re(jû  ie  cali- 
ce qui  eft  fort  haut,  &  fur  lequel  étoit  la  patène  avec  le  pain 
fans  levain  couverte  d'un  grand  voile  de  tafecas  orné  de  faces  de 
Chérubins,  il  le  pofa  refpcclueufement  fur  l'Autel  ,  &c  quel, 

FF  iïï  lij        V 


7S4  Liv.  VII I.  Preuves  a.uthen.  de  l'umondes  Eg.  d'Or, 
ques  momens  après  il  doubla  le  voile  en  le  relevant ,  &  tira 
l'hoftie  fur  le  bord  de  la  patène. 

Quand  le  temps  de  la  confccration  fut  venu,  il  releva  une 
féconde  fois  le  voile  ayant  tiré  la  patène  à  lui.  Il  avança  la  tê- 
te ,  &  la  baiifant  furriioftie  qui  eftoir  deflus  ,il  profera  les  pa- 
roles, Il  prit  enfuite  le  calice  ,&  s'eftantbaiiTé  de  même  ,  il 
confacra  le  vin  par  les  mots  Sacramentaux,&  lorfqu'il  eutache- 
Eiev.nion pra-  y^  ^  jj  jevatout  douccmcnt  au  deflus  de  fa  telle  le  précieux 
Anuemenlr   corps,&:  l'ayant  pofé  fur  l'Autel,  il  fit  l'élévation  du  calice.  Le 
peuple  qui  s'eftoit  misa  genoux  dés  le  commencement  de  la 
confecration ,  témoignoitun  grand  refpe<5l.  Et  dans  le  temps 
Adoration,      qu'elle  s'operoit ,  6c  lorfqu'il  vit  le  corps  &  le  fang  de  Nôtre 
Seigneur ,  on  l'entendoit  proférer  des  prières  ferventes ,  &  l'on 
le  voyoit  faire  des  fignes  &  des  ades  d'adoration. 

Je  remarquai  que  l'Officiant  ayant  pris  l'hoftie  la  baigna  dans 
le  fang,  fans  néanmoins  la  quitter,  &; qu'après  l'y  avoir  tenue 
quelque  temps ,  il  la  tint  fur  le  calice ,  enforte  qu'on  la  pou- 
voit  voir.  Ses  deux  mains  eftoient  employées  à  ce  miniftere  ,• 
pendant  lequel  il  paroilToit  faire  des  prières  avec  beaucoup  de' 
dévotion.  C'eftoit  apparemment  la  préparation  à  la  Commu- 
nion dont  je  ne  fus  pas  témoin,  parce  qu'on  tira  le  rideau.  Lorf- 
qu'il fut  ouvert,  le  Preftre  lui  mcmefe  tournant  du  cofté  du 
peuple  lui  montra  le  calice  couvert  du  voile  où  eftoient  les' 
efpeces.  Tout  le  monde  fe  profternant  &  priant,  il  donna  la- 
benediclion  ,  &  retourna  à  l'Autel,  àc  en  un  moment  après  , 
lorfque  la  Mefle  fut  finie, il  defc'endit  accompagné  dedeux 
Diacres ,  &  ayant  dans  fes  mains  un  Livre  d'Evangile  ,  il  le  fît 
baifer  à  un  Prêtre  ou  Evêque  qui  eftoit  en  bas ,  &  à  tout  le  peu- 
ple qui  concouroit  à  cette  dévotion  avec  grand  zèle  ,&jettoit" 
quelques  afpres  dans  un  baffm. 

Lorfqu'il  fut  remonté,  un  de  fes  affiftans  s'eftant  revêtu  d'une' 
ehappeavançafur  leborddu  Sanduaire  ,&  un  autre  tenant  le 
calice ,  il  communia  quatre  ou  cinq  jeunes  gardons  de  dix  ou 
douze  ans  ,  ce  qui  fe  fit  peu  refpedueufement  &  avec  afifez 
de  confufîon  -,  &  c'eft  ce  qui  obligea ,  comme  je  crois ,  le  Prêtre 
de  donner  la  benediâion  &  de  fe  retirer ,  fans  vouloir  commui- 
nicr  les  autres  enfans  que  l'on  prefenroit. 

L'on  tira  alors  le  rideau  ,  &  lorfque  les  Preftres  eurent  mis 
leurs  chappes,ils  defcendirent.  Celui  qui  avoir  célébré  tenoic 
une  manière  de  foucoupe  de  bois  couverte  d'un  voile  fin  ,  fur 


avec  TEglife  l^omaine  fur  ÎEuchmJlie.  ySj 
lequel  il  y  avoir  une  pecice  figure  de  colombe  d'argent,  £cau-  Ch.  XX. 
tour  des  pains  pareils  à  ceux  que  les  Arméniens  confacrenc  ;  il 
méfie  compliment  en  m'en  donnant  un.  11  en  donna  unauffi  à 
un  Père  Capucin:  Et  comme  il  voulait  lui  baifer  la  main  ,  le 
Religieux  s'en  défendit  en  lui  baifant  la  fienne.  Ce  pain  efboic 
de  palte  bife  fans  levain.  Sa  figure  ronde  &  bordée  feulement 
d'un  codé  reprefentoit  dans  une  feule  face,  l'autre  eftant  toute 
unie ,  le  calice  duque)  on  voyoit  fortir  le  corps  de  Nôtre  Sei- 
gneur J.  C.  Il  ya  aufîl  des  caractères  Arméniens  à  droite  6c  à 
gauche.  11  eftoit  un  peu  plus  grand  que  nos  écus  de  France ,  &: 
l'eftoit  quafi  le  double  moins  que  l'hoftic  de  la  Méfie  du  Sa- 
medi de  Pâques,  qui  eftoit  aufii  bien  plus  blanche.  Pour  ce  qui 
eft  de  la  grandeur  ils  l'augmentent  quand  il  y  a  plufieurs  com- 

/munians ,  parce  que  la  communion  fe  fait  d'une  feule  hoftie. 
L'on  me  dit  la  raifon  pour  laquelle  il  avoit  communié  fi  peu 
de  monde,  c'eft  que  le  jour  précèdent  on  s'eftoit  acquitte  de  ce 
devoir  à  la  Mefi"e  de  l'aprës-difnée  que  l'on  célèbre  à  cette 
heure- là  au  lieu  de  minuit. 

Lorfque  j'eus  fait  remercier  celui  qui  m'avoit  faitprefent  de 
ce  petit  pain  ,  je  le  fuivjs  &  fon  Clergé.  Nous  fortîmes  del  E- 
glile,  &  lorfque  nous  fômcs  entrez  dans  un  endroit  fermé  de 
baluftresàjour  ,  l'on  ferma  la  porte  en  empêchant  que  le  peu- 
ple n'y  entraft.  C'eft  pourquoi  il  fe  cenoit  dehors  avec  des  pots 
à  la  main.  Cependant  les  Preftres  ayant  entouré  une  grande 
cuve  pleine  d'eau  ,  l'on  chanta  plufieurs  oraifons  ou  prophé- 
ties. L'on  chantoit  aufll  des  motets  qui  eftoient  entremêlez 
d'une  mufique  de  deux  plats  de  métail  que  l'on  frappoit  l'un 
contre  l'autre,  &du  fon  d'un  timbre  que  l'on  tenoit  frappant 
deflus  avec  un  fer ,  ce  qui  faifoit  une  mélodie  qui  n'eftoit  point 
defagreable.  Le  principal  Miniftre  tenant  une  croix  en  faifoit 
de  temps  en  temps  des  fignes  fur  l'eau  en  la  croifant  &  la  divi- 
fant  parlehaut  de  la  croix  &  parle  pied  5  &  comme  le  defiein  , 
après  la  bénédiction  réitérée  de  l'eau  ,  eftoit  de  reprefenrer 
le  Baptême  de  Nôtre  Seigneur,  le  même  Officiant  ayant  po- 

'  fé  la  croix  au  fond  du  vafe  &  au  milieu  ,  enforte  qu'on  ne  la 
voyoit  plus ,  on  approcha  de  lui  la  petite  figure  de  la  Colom- 
be dontj'ay  parlé,  2clorfqu'on  eutôté  une  petite  vis  qui  em- 
pêchait de  fortir  la  liqueur  qui  eftoit  dedans ,  il  pria  l'Evê- 
que  qui  eftoit  auprès  de  lui  de  faire  l'afpcrfion.  Ils  fe  firent 
l'un  6c  l'autre  de  grandes  cérémonies  ^  fe  renvoyant  recipro- 


786  Li V.  VU  I.  Preuves  authen.  de  t union  des  ig.  d'Or. 
quemenc  cec  honneur.  Enfin  il  demeura  à  celui  qui  l'avoit  of- 
ferc.  Il  prie  îa  colombe  d'argent, 6c  en  ayant  répandu  de  l'huile 
dans  l'eau  en  forme  de  croix,  un  des  Aflîftansla  mêla  ,5ccefut 
ce  qui  finir  la  cérémonie.  Ceux  de  dehors  qui  avoient  des  amis 
au  dedans ,  eurent  des  premiers  de  l'eau  bénite ,  pour  moy  je 
me  retiray  avec  le  Clergé  par  une  porte  dérobée  fichors  de  la 
foule. 

J'ay  réduit  cette  Relation  le  plus  en  atwegé  qu'il  m'a  eftc  pof- 
fible  pour  éviter  la  répétition  de  ce  qui  pourroitfe  rencontrer 
de  pareil  dar^s  la  cérémonie  que  font  les  Arméniens  la  veille 
de  Pâques  j  c'eflrce  qui  m'a  fait  oublier  une  particularité  dont 
je  feray  maintenant  la  remarque.  Avant  que  le  Preftre  com- 
mençât la  célébration, il  s'avança  fur  le  bord  de  l'endroit  éle- 
vé  où  efi:  pofc  l'Autel  j  6c  tenant  un  papi.'r  en  fa  main ,  il  lettt 
les  noms  de  tous  ceux  qui  avoient  donné  pour  participer  aux 
prières  du  faint  Sacrifice  ,  il  remontra  les  befoins  de  l'Eglife  , 
&  fit  une  exhortation  à  ceux  qui  n'ctoicnt  point  écries  avec  des 
reproches  de  leur  avarice  j  &  au  temps  de  la  confecration  il  re- 
prit la  lifte  pour  faire  commémoration  des  noms  de  ceux  qui  y 
étoient  couchez. 


CHAPITRE     XXI. 

Qu^on  ne  fc^auroit  dire  fans  extra'Oagan'ce  ,  que  la  doflrine  de  la 

frefence  réelle  ait  pu  s^  introduire  dans  les  Societez^d' Orient 

depuii  Bereny^r  jufqu'a  ce  temps  ici. 

Confefjîon  de  Foy  de  SotherictM  Patriarche  d'Antioche. 

A  Foy  prefente  de  l'Eglife  d'Orient  fur  l'Euchariftie  étant 
auffi  certaine  quele  peut  eftre aucun  fait  humain  d€  cette 
nature  ,  il  ne  refteroit  plus  à  M.  Claude  que  de  dire  que  cette 
créance  s'y  eft  introduite  depuis  Berenger  j  6c  c'eft  auffi  ce 
qu'il  a  tâché  d'infinuer  dans  le  fécond  Livre  de  fa  troifiéme 
réponfe. 

Maison  a  auffi  tellement  détruit  cette mauvaifé  défaite  par 
voyezrép.      kréponfe  générale,  êc  on  y  a  fi  bien  fait  voir  que  cette  préten- 
tion renfermoit  un  amas  d'abfurditez  6C  d'extravagances^qu'on 
r'a  pas  fujetde  craindre  qu'il  puilîè  refter  quelquedoutefurce 
point  à  des  efprits  tant  Jfoit  peu  fenfez. 

.  Il 


Ky>ec  tEgUfe  Romaine  fur  ÏEuchmflie.  -j%-j 

Ily  a  rnêmecence  différence  entre  le  faic  de  la  créance  pre- Ch  XXI. 
fente  àzs  Societez  Orientales,  que  nous  avons  établie  par 
rette  foule  de  preuves  qui  font  produites  dans  cet  ouvrage, 
&  la  conlequence  que  l'on  en  tire,  qui  eft  que  ces  Societez  ef-  ■ 
coienc  doncdanslamêmefoy  au  temps  de  Berenger,  qu'il  faut 
au  moins  examiner  les  preuves  qui  fervent  à  l'établiffement 
du  fait,  ce  qui  a  befoin  de  quelque  application.  Mais  la  con- 
fequence  n'a  point  du  tout  beloin  d'exan:>en.  La  moindre  lu- 
mière du  fens  commun  la  découvre  tout  d'un  coup  Se  com- 
prend clairement  qu'il  eft  impoffible  que  les  Latins  ayant  efté 
mêlez  dans  tout  l'Orient  depuis  l'onzième  fiecle avec  ces  So. 
cietez  feparées  de  l'Eglife  Romaine,  eflant  occupez  de  la  pre- 
fence  réelle  plus  que  d'aucun  autre  article,  puniffant  en  Occi- 
dent ceux  qui  en  doutoient  avec  toute  forte  de  rigueurs,  ôc 
examinant  avec  foin  tous  les  points  de  la  créance  de  ces  So- 
cietez qui  ne  s'accordoient  pas  avec  la  leur,  ne  fe  foicnt  point 
point  apperi^us  fix  censans  durant  que  ces  Societez  euflcnt  une 
autre  foy  qu'eux  touchant  cet  article,  ouques'en  eftant  ap- 
perçus ils  ay entera  le  devoir  diirimuler,&:  que  de  même  ces 
Societez  Orientales  ayenc  pu  demeurer  fîx  cens  ans  durant 
ou  fans  remarquer  dans  les  Latins  cette  différence  de  créance 
dans  un  article  fl  important,  ou  fans  le  leur  reprocher  en  tant 
d'écrits  qu'ils  ont  fait  contr'eux. 

De  ces  deux  partis  qui  font  également  ridicules,  Monfieur 
Claude  s'efl  réduit  au  fécond  dans  fa  troificme  Réponfe,en  foiî- 
tcnant  que  cela  efl  arrivé  par  la  Politique  des  Latins  d'une 
part  5c  par  la  timidité  des  Orientaux  de  l'autre.  Etc'eft  ce  que 
l'on  a  refuté  dans  la  réponfe  générale  en  reprefentant  feule- 
ment Tabfurdité  de  cette  hypothefeenla  manière  que  nous  Je 
rapporterons  icy. 

Monfieur  Claude  fuppofe  dans  les  Grecs  5c  dans  toutes  les  au  '•'^ 
tresSocietez  d'Orient,  c'efl:  à-dire  dans  un  nombre  infini" 
d'hommes ,  une  timidité  de  (îx  cens  ans,  qui  les  ait  tous  em  '' 
pêchezdes'élever  contre  les  Latins  Se  de  les  traitter  d'idolâtres  *' 
fur  la  dodrine  de  la  prefence  réelle.  11  ferme  la  bouche  à  tous  " 
les  Latins  fur  le  même  fujet  par  une  politique  de  fîx  cens  ans.  «' 
Ni  la  chanté, ni  le  zclc,  nila  vanité,  ni  l'inclination  naturelle  " 
qu'on  a  à  dire  la  vérité,  ni  la  haine,  ni  l'interefl,  ne  porte  jamais  " 
aucun  ni  àç^,  Latins  ni  desGrecsà  fe  démentir.  Les  Latins  crai  *' 
gnent  de  bleffer  les  Grecs  par  ce  reproche,  lors  même  qu'ils  les  " 

GGggg 


788  Liv.  VIÏI.  Treuves  authen.  de  ï union  des  Bg.  d'Or. 
„  Font  mourir,  &  les  Grecs  craignent  d'ofFenfer  les  Latins  fur  ce 
„  point,  lors  même  qu'ils  meurent  pour  leur  Religion,  ou  qu'ef- 
„  tant  en  feuretc  ils  s'abandonnent  à  la  plus  grande  violence  de 
.,  leur  haine. 

„  Ce  qui  eft  encore  plus  admirable,  eft  que  les  m&yens  par 
„  lefqueîs  on  unit  les  Latins  dans  cette  referve  politique,  font  fi 
„  cachez  que  l'on  n'en  n'a  pu  encore  rien  découvrir  5  fi  étendus 
„  qu'ils  font  pratiquez  par  les  Papes,  par  les Carditvaux,  parles 
„  Evêques,  par  les  Preltres,  par  les  Religieux,  par  les  foldats,  par 
j,  les  voyageurs  curieux  J  &.  fi  efficaces  qu'ils  n'ont  encore  permis 
j,  à  perfonne  de  manquer  à  ce  fecret.  Ils  laiflTent  agir  toutes  les 
j,  autres  paffians contre  les  Grecs:  ils  permettent  qu'on  exerce 
,,  contre  eux  les  dernières  rigueurs  Çc  qu'on  leur  fafî'e  toutes  for- 
,,  tes  de  reproche  5  ils  fouffrent  qu'on  en  failè,  qui  femblenC 
„  conduire  naturellement  par  la  fuite  du  difcoursàlesaccufer  de 
„  ne  pas  croire  la  prefence  réelle,  fi  on  l'avoit  pu  faire  avec  ve- 
„  rité^  mais  ils  arrêtent  juftement  la  plume  6c  la  langue  quand 
„  elle  feroit  fur  le  point  de  paiferà  celuylà,  ôcceJa  durant  Tef- 
„  pace  de  fix  cens  ans,  non  dans  un  feul  lieu  ,dans  une  feule 
j,  ville,  dans  une  feule  province,  mais  dans  la  plus  grande 
„  partie  du   monde. 

„  Voila  ce  que  Monfieur  Claude  tâche  de  perfuader  a  ceux  de 
„  la  feAe,  &  qu'il  prétend  avoir  rendu  vrai  femblable.Sanscet- 
,,  te  double  hypothefe  d'une  timidité  de fix  cens  ans,  qui  do- 
,j  mine  tous  les  Chreftiens  d'Orient,  &  qui  étouflFe  toutes  leurs 
„  autres  pafllons,  &  celle  d'une  autre  politique  aufîi  longue  par- 
„  my  les  Latins,  pratiquée  par  eux  avec  une  fidélité  inviolable, 
„  6c  qui  étouffe  de  même  en  eux  tous  les  fenrimens  de  la  nature  J 
„  i.l  faudra  qu'il  avoue  luy-même  que  les  Grecs  &  les  vSocietez 
j,  croyent  la  prefence  léelle.  C'eflà  quoy  fe  reduifent  toutes  Ces 
„  réponfcs.  C'eft  cette  rare  invention  qui  fait  le  fujet  de  la  fatif- 
,,  fadion  extraordinaire  qu'il  témoigne  de  fon  ouvrage.  C'eft 
„  par  là  qu'il  prétend  avoir  renverfé  l'argument  de  laPerpetuité. 
„  IN-Iais  s'il  eft  homme  à  fe  repaiftre  de  fes  vifions,  j'efpere  qu.il 
„  y  en  aura  peu  qui  foient  en  cela  de  fon  humeur  èc  qui  ne 
„  me  permettent  de  conclure  contre  luy. 
„  1.  Que  l'union  de  ces  faits  que  nous  avons  alléguez  prouve 
„  avec  une  entière  certitude,  que  les  Grecs  &les  autres  Socie- 
,,  tez  d'Orient  aufquelles  on  les  peut  appliquer,  croyent  la  pre- 
„  fence  réelle,  comme  l'union  de  ces  mêmes  faits  prouve  que  les 
CalviniHes  croyent  la  Trinité  &  l'Incarnation. 


tifvec  î'Eglïfe  Komainefar  V Euchariflie.  •789 
1.  Que  cette  confeqiience  s'étend  plus  loin  ,  oc  qu'elle  fait  Ch.XXI. 
voir  non  feulement  que  les  Grecs  S:  les  autres  Chrcftiens  d'O-  " 
rient  font  prcfentement  perfuadez  de  cette  docT:rine  mais  '^ 
qu'ils  Tont  toujours  efté  depuis  Berenger.- &:  qu'ainfi  elle  ren-  '^ 
ferme  entièrement  le  fait  que  l'on  prouve  dans  le  I.  Tome  de  la  " 
Perpétuité,  &:  qu'elle  ruine  en  particulier  tout  le  fécond  livre  " 
de  la  réponfe  de  M.  Claude  auquel  il  a  donné  pour  titre  " 
Nullité  delà  confequence.  Etc'eft  ce  qu'il  efl:  très,  facile  &  très.  " 
important  de  faire  voir.  " 

Il  s'efforce  dans  ce  livre  de  prouver  que  la  docflrine  de  la" 
Tranffubftantiarion  a  pu  s'introduire  parmy  les  Grecs  &:  les  aa-  '' 
très  focietez  Schifmatiques,  par  le  mélange  de  l'Eglife  Latine  " 
avec  elle5  par  les  Miffionnaires  que  les  Papes  y  ont  envoyez^  " 
&  par  le  pouvoir  que  les  Latins  ont  eu  fur  ces  Chreftiens  " 
d'Orient.  Mais  en  accordant  à  M.  Claude  tous  les  faits  qu'il  " 
rapporte,  il  n'y  a  qu'à  luy  dire  en  un  mot  qu'ils  prouvent  ju-  '" 
ftement  tout  le  contraire  de  ce  qu'il  prétend,  &  que  l'on  ne  le  " 
peut  même  mieux  prouver  que  par  ces  faits.  " 

Ce  qui  le  trompe  toujours  efl:  qu'au  lieu  que  les  cliofes  hu-  " 
maines  font  attachées  à  une  infinité  de  circonfl:âncees,&  que  " 
c'eft  le  plus  fouvent  ce  qui  les  rend  poffibles  ou  impoffibles,  " 
faciles  ou  difficiles, il  les  détache  de  toutes  les  circonftances  " 
aufquelles  elles  font  liées,  pour  en  faire  des  qucftionsmetaphy-  " 
fîques  qu'il  confidere  d'une  manière  abflraite  Se  fpeculative,  " 
comme  s'il  s'agifToit  d'un  monde  fcparé  de  celuy-cy  ,  dont  '* 
nous  ne  fcjuffions  aucunes  nouvelles.  " 

Il  examine  en  l'air  cette  quellion,  s'il  efl;  impoffible  que  la  " 
Tranfrubfl:antiation(  fous  laquelle  il  veut  bien  que  l'on  com.  ** 
prenne  la  prefence  réelle,  quoyqu'il  ne  l'ofe  pas  dire)fe  foit  " 
introduite  depuis  Bcrenger  dans  les  focietez  d'Orient,&:  il  croit  " 
qu'il  luy  fuffit  detrouverde  certaines  caufes  vagues  qui  ayent  *'^ 
une  proportion  éloignée  &  metaphyfiqueavec  cet  effet,  C'efl:  " 
pour  cela  qu'il  nous  conte  deshiftoires  qui  font  auffi  inutiles  " 
pour  luy  qu'elles  font  utiles  en  les  tournant  contre  luv..  Mais  " 
pour  le  defabufer,  il  n'y  a  qu'à  l'obliger  de  confîderer  les  chofes  " 
celles  qu'elles  font,  &  de  les  revêtir  de  toutes  les  circonftances  " 
qui  y  font  effedivement  attachées.  " 

Il  efl:  donc  certain  premièrement  que  les  Latins  n'ont  point  " 
réduit  entièrement  ces  focietez  à  s'unir  avec  l'Eglife  latine;  " 
que  s'ils  en  ont  converti  quelques  particuliers,  ils  n'en  ont  " 

GGgggij^ 


f  790  Liv.  Vin.  n?réuues  Authent.  de  ï  union  de  s  B g.  d'Qr 

j,  point  converti  le  corps,  qu'ils  ne  les  ont  pu  porter  ny  à  quitter 
,,  leurs  anciennes  opinions^ni  à  changer  leur  ancienne  difcipli- 
„  ne,  &  qu'elles  y  demeurent  la  plus  parc  auffi  attachées  que 
„  jamais. 

„  Que  M.  Claude  enferme  donc  d'abord  cette  circonftan- 
,j  ce  dans  la  queftion  qu'il  traitce,  &  qu'il  examine  ,  non  s'il  eft 
„  pofTible  en  gênerai  que  les  Millionnaires  Latins  ayent  per- 
„  fuadé  tous  ces  peuples  de  la  doctrine  de  la  prefence  réellcj 
,  mais  s'il  el1:  croyable  que  ces  Miflîonnaires  n'ayant  pu  faire  re- 
,  cevoir  dans  aucune  de  ces  focietez,  ny  les  dogmes  de  l'Eglifé 
,  Romaine,  ny  les  points  de  difciplin^  furlefquels  ils  font  div^- 
,  fez  d'elle;  &  n'ayant  pu  adoucir  leur  efprit  envers  cette  EgU- 
„  fe,  &  les  empefcher  de  la  traitter  d'heretique,  ayent  générale  - 
„  ment  reùffi  à  faire  recevoir  par  toutes  ces  focietez  une  dodri- 
,>  ne  auffi  étrange  que  celle  de  la  prefence  réelle  le  devroicpa- 
■yy  roiflre  à  ceux  qui  auroient  eflé  nourris  dans  une  autre  foy. 
5,  Il  faut  de  plus  ajoutera  cette  queftion  fa  double  hypothe- 
„  fe  d'une  timidité  générale  parmy  les  Chreftiens  Orientaux,  6C 
,y  4'uns  politique  générale  parmy  le  Latins  pendant  tout  le 
„  temps  qu'il  deftine  à  ce  changement.  Car  comme  dans  lepro- 
„  grés  de  cette  introdudion  on  ne  pourroit  faire  voir  que  les 
j,  Grecs  &:  les  autres  Orientaux  non  convertis,  fe  foient  élevez 
j,  contre  les  Latins  fur  ce  point,  en  ayant  pris  fujet  d'en  faire  des 
„  reproches  à  ceux  qui  n'avoient  pas  encore  embraffé  leur  foy, 
„  M.  Claude  efl:  obligé  de  nous  montrer  que  cette  introdudion 
„  eft  pofTible  avec  ces  deux  circonrtances,c'en:-à-dire qu'il  doit 
„  faire  voir  qu'il  eft  pofîible  que  tous  les  Orientaux  non  conver- 
„  ris,  voyant  répandre  parmy  eux  une  dodrine nouvelle, ayent 
,,  étouffé  par  la  crainte  des  Latins  toucceque  la  jaloufie  natu- 
j,  rcll.e  êc  les  principes  de  leurReligioil  pouvoient  fournir  de  rai- 
j,  fons  contre  une  dodrine  fî  étrange,  &:  qu'ils  Payent  tous  laif- 
„  fé  introduire  fans  aucune  refiftance  dans  tout  le  monde. 
„  Il  faut  qu'il  montre  auffi  qu'il  efl:  poffible  que  tous  ces  Miffion- 
„  naires  qui  fe  trouvoienr  parmy  ces  peuples ,  &  qui  connoif- 
„  foient  qu'ils  eftoient  infeétez  de  Terreur  de  Berenger,  qui  re- 
„  gardoient  tous  cette  erreur  comme  une  herefie  damnable,  qui 
„  les  ir.flrui foient  fur  ce  point  avec  foin,  qui  voyoient  leur  do- 
„  élrine  reçue  par  quelques- uns  5c  rejettée  par  d'autres,  ayent  pu 
„  tous  garder  fans  aucune  raifon  apparente  un  filence  fi  religieux 
„  fur  ce  point ,  qu'aucun  n'ait  accufé  ces  nations  de  I  erreur  de 


aun  ÏEgliJe  %omaine  fur  t Euchariflic .  791 

Berengerj  qu'aucun  ne  l'aie  inférée  dans  le  catalogue  de  leurs  Ch.XXL 
Jierc{iesjqu'aut.un  n'en  ait  averti  les  Papes;  que  nul  d'eux  n'ait 
rajt  aucun  ecnc  pour  les  convertiriqu  aucun  n  aie  ule  de  rigueur 
envers  ceux  qui  refufoienc  de  recevoir  la  Doclrine  de  la  pré- 
sence réelle,  quel«|ue  pouvoir  qu'il  eneaftj  qu'aucun  nefêfoit  ' 
vantédans  aucun  livre  du  fuccés  de  fespredications  en  ce  pointi 
qu'aucun  n'ait  témoigné  d'admirer  cette  alliance  étonnante 
à  une  docilité  fi  extraordinaire  à  recevoir  cette  dodrine  ,  6c 
d'une  opiniaftreté  fî  inflexible  à  rejetter  tous  les  autres  dogmes 
qu'on  tafchoit  de  leur  infpirer,  &  qu'enfin  ils  ayent  tous  conf-  ' 
pire  à  nous  dérober  la  connoiflance  d'un  fi  grand  événe- 
ment. 

Voila  ce  que  M.  Claude  devoit  entreprendre  de  faire  croire 
poflîble,  s'il  euffc  voulu  détruire  cette  confequence,  qu'il  com- 
bat dans  le  titre  de  ce  fécond  livre,  5c  qu'il  établit  par  tout  le 
livre  même.  Mais  comme  il  n'a  pas  feulement  ofé  le  tenter,  il 
n'y   a  pour  renverfer  tout  ce  livre  qu'à  luy  montrer  ce  qu'il 
avoir  à  prouver,  6t  à  faire  remarquer  que  le  mélange  de  ces  ' 
Millionnaires  &  ce  pouvoir  des  Latins  fur  les  Grecs  ïi.  les  au- 
tres Chrétiens  d'Orient,  prouve  très  mal  qu'ils  ayent  pu  leur 
faire  recevoir  la  dodrine  de  la  prefence  réelle  avec  ces  cir- 
•onftancesj  mais  qu'il  prouve  parfaitement  qu'il  efl:  impoffible 
d'une  part  qu'ils  n'euflènt  pas  découvert  cette  erreur  dans  les 
Grecs  6c  les  autres  Chreftiens  d'Orient  fi  elle  y  euft:  efi:é,6c  qu'il  ^ 
efl  encore  moins  pofiible  de  l'autre  qu'ils  ne  la  leur  euffent  pas 
reprochée,  &nc  fe  fufîènt  pas  appliquez  à  la  déraciner  s'ils  l'y 
euflènt  découverte  1  D'où  il  s'enfuit  que  ne  l'ayant  jamais 
fait,  par  l'aveu  même  de  M.Claude,  il  faut  qu'ils  en  fufîènt  en- 
tièrement exempts.  C'effcla  iéuleconclufionraifonnable  qu'on 
puifTe  tirer  des  faits  alléguez  par  M.  Claude  dans  Ton  fécond 
livre,  &  ce  feroit  perdre  le  temps  que  de  le  réfuter  d'une  au- 
tre manière. 

Il  ne  faut  point  de  preuve  pour  établir  une  chofe  que  la  rai- 
fon  penettre avec  tant  d'évidenceJ  il  faudroitau  contraire  plus 
que  des  demonfirations  pour  rendre  probable  le  changement 
de  créance  dans  ce  fociertz  depuis  Berenger.  Cependant  on 
a  fait  voir,  &  dans  la  réponfe  générale,  &:  dans  le  livre  de  la  ,'j'u%frVi'a! 
créance  des  Grecs,  que  la  prétention  de  M.  Claude  n'efloit  pas  ns  chanome 
appuyée  de  la  moindre  preuve,  ôc  qu'au  contraire  il  y  en  avoit  rcguiici. 
tant  ôc  de  fi  demonftratives  de  l'union  de  ces  focietezavec 

G  G  g  g  g  iij 


791  Liv.  VI  n.  Preufves  authent.  de  t union  des  €g.  d'Or, 

l'Eglife  Romaine  dans  la  dodrine  de  îa  prefence  réelle  ôcde 
la  cranlTubftanciation  ,  qu'elles  fuffiroient  pour  periuader  les 
chofesles  plus  incroyables.  On  les  peut  voir  ramaflees  dans 
les  deux  livresque  j'ay  marqués,  ê^l'on  y  en  ajoutera  enco- 
re quelques  autres  ici  qui  font  tres-confiderabics,  Se  qui  mon- 
trent pofitivement  que  ces  dogmes  ont  toujours  efté  crus 
par  toutes  CCS   focierez. 

La  première  fera  tirée  d'un  Synode  tenu  fous  l'Empereur 
Manuel,  dans  lequel  un  Diacre  nommé  Soterichus  élu  au  Pa- 
triarchat  d'Antioche,  fut  obligé  de  (e  juihtîerrir  l'Eiichariftie. 
Cesades  fe  trouvent  dans  la  Bibliothèque  de  B>dlei  à  Ox- 
ford num.  lOf.  Des  perfonnes  curieufes  de  Paris  en  ont  obtenu 
copie  de  M.  Bernard  qui  en  eft  Bibliothécaire  ,  &  qui  eftanc 
très  habile  dans  toutes  fortes  de  fciences,  anffi  bien  que  dans 
les  langues  Orientales,  eft  très  porté  de  plus  à  communiquer 
tout  ce  qui  dépend  de  luy  aux  perfonnes  de  lettres  qui  s'ad- 
drelTent  à  luy.  Comme  il  n'y  a  proprement  que  l'Apologie  de 
Soterii  hus  qui  (crve  à  la  preuve  dont  il  s'agit,  on  s'efl:  conten- 
té de  la  rapporter  icy. 

On  a  joint  à  cette  Confeflîon  de  foy  deux  autres  Extraits 
de  deux  pièces ,  l'une  plus  ancienne  &  l'autre  plus  récente. 
La  plus  ancienne  eft  un  traitté  Arabe  d'Elie  Patriarche  de 
Jerufalem  ,  qui  eft  dans  la  Bibliothèque  du  Roy,  fur  les  prin- 
cipaux myfteres  de  la  Foy,  dont  on  a  tiré  ce  qui  y  eft  dit  de 
l'Euchariftie. 

Et  la  plus  récente  eft  une  lettre  de  Melece  Patriarche  d'A- 
lexandrie, qui  a  efté  envoyée  de  Conftantinople.  Ce  Melece 
n'eft  pas  pourtant  le  Patriarche  d'aprefent,  car  il  s'appelle  Paï- 
fîus,  èi.  c'eft  luy  dont  on  a  eu  la  lettre  de  Nectarius,  qui  eft  rap- 
portée cy  devant. 

APOLOGIE      DE     SOTERICHVS    PANTEVGEKVS 

au  Patriarche  (^  au  Concile  fur  les  chofes  touchant  leffuelles 
on  l'a  accufé  d'avoir  de  mauvais- fentimens. 

TRes  faint  Seigneur  ,  divin  &  facré  Concile.  Quelques 
Archevêques  m'ont  il  n'y  a  pas  long  temps  mis  entre  les 
mais  un  paquet,  oùeftoit  contenu  undifcours  qu'ils  avoient 
condamné,  comme  avançant  des  chofes  différentes  &  éloi- 
gnées de  la  dodrine  de  l'Eglife,  me  demandant  avec  d\£- 


atec  rSgiî/e  Komaine  fur  tSucharifiie.  y^j 

émulation,  fi  ce  difcours  eftoic  de  moy.  D'abord  je  pouvois  Ch.XXI. 
ne  point  répondre  leur  opporant  rauthontë  qui  a  efté  donnée 
d'enhauc  au  Throfiie  Pacriarclial3  mais  obeilfanc  à  la  parole  du 
Sauveur  (qui  ordonne  d'honorer  tout  le  monde  ,  6c  de  ne  pas 
fcandaliier  Tes  frères,  i'ay  cru  qu'il  falloit  me  foûmettre  à  la 
puiflance  Scme  juftifier  d'une  manière  fimple&  fans  l'ornemenc 
qui  m'eft  ordinaire,  &  je  vous  prie  d'écouter  mon  Apologie. 

Je  me  fouviens  d'avoir  fait  il  y  a  quelques  jours  un  difcours, 
pcufl'é  à  celaplus  par  un  de  mes  amis  que  par  ma  propre  inclina- 
tion. Ce  dilcoursn'avoit  aucun  ornement  fophiftique.  Le  feul 
deflèin  pour  lequel  il  eftoit  faic,efl:oit  pour  réfuter  une  opinion 
nouvelle  &  extraordinaire,  &:  qui  avoit  quelque chofe  du  Nef- 
torianifme,  qui  s'eftoic  glilTèe  depuis  peu.  Perfonne  ne  me  peut 
reprocher  d'avoir  écrit  la  réfutation  de  cette  nouvelle  opinion. 
Carj'aurois  honte  dene  pas  employer  toutes  chofes,&  même 
ma  propre  vie,  pour  les  fentimens  pieux  que  j'ay  reçus  de  mes 
anceftresj  &  que  j'ay  gardez  en  mon  particulier  jufqu'à  prefent 
fans  aucune  tache:  croyant  2c  confeffant  immuablement  la 
foy  qui  eft  établie  &  prêchée  dans  l'Eglife  Catholique  & 
Apoftolique,  recevant  lesfeptfaints  Conciles  Oecuméniques, 
prononçant  anathême  contre  Arius  &;  fes  fecT:ateurs,  contre 
leur  abominable  adoration  d'une  créature,  6c  toutes  leurs  au- 
tres fottifes,  de  même  contre  le  fol  Macedonius,  qui  eftanc 
poiledé  d'une  fureur  prefque  femblable  à  celle  d'Arius,  n'a  pas 
eu  de  honte  de  mettre  le  S  Efprit  au  nombre  des  créatures, 
&  ainfi  de  rendre  à  une  créature  une  même  adoration,  &:  avec 
eux  contre  Neflorius  l'impie,  qui  divifoit  la  perfonne  unique  de 
).  C.noftre  Sauveur  en  deux  hypoftafes,  qui  avoit  rêvé  que  le 
Fils  unique  de  Dieu  n'eftoit  qu'un  pur  homme,  &  qui  nioit  que 
la  fainte  Vierge  fuft  Mère  de  Dieu.  Déplus  contre  EutycheSc 
Diofcore  &  leur  folle  imagination  que  la  chair  du  Seigneur 
ne  nous  eAoit  pas  confubftantielle,  6c  qu'après  Tunion  elle 
a/oitefté  changée  en  une  autre  nature, fan >^  que  l'autre  confer- 
vaft  les  propnetez.  Pareillement  contre  Didymus,  Evacrrlus  ôc 
leurs  feclateurs,  contre  tous  ceux  que  le  cinquième  Concile  a 
condamneZjCeuxqui  fuivent  Honorius,Sergius  6:  Macaire,qui 
n'attribuent  qu'une  feule  volonté  6c  une  feule  opération  par 
une  grande  méchanceté  à  J  C.  noftre  unique  Dieu  6c  Sau- 
veur, qui  efl  de  deux  6c  en  deux  nature^:  ceux  qui  eftanc 
ennemis  de  J.  C.  6c  fentant  la  puanteur  des  Manichéens, 


794  Liv.VIII.  Prewves  authenr.  de  l'union  des  Eg.^Or. 
avoient  horreur  de  peindre  le  très  faine  corps  de  J.  C.  qui  n^u* 
eft  confubftantiel. 

Je  dis  donc  anathêmeà  tousceux  que  je  viens  de  nommer, 
&:  à  toutes  leurs  fotifes,  êc  à  ceux  qui  dilcnt  que  ce  qui  aeltc  pris 
.,%  ^    ,     dans  l'Incarnation,  eftrerviteur,&  qui  l'adorenc  d'une  manière 
^    lervile  aulli  bien  que  tous  les  autres  elprits  employez  au  mi- 
niltere.  Et  comme)  apprens  que  quelques   peiionnes  me  ca- 
"■f*    "<"■-     lomnient  d'une  manière  très  irapudentccommedifanr  que  les 
^*'  falutairesSc  divins  Myfteres  font  des  figuresj  il  falloit  premiè- 

rement que  ceux  qui  me  font  ce  reproche,  eufïent  trouvé 
dans  le  difcours  que  j'ay  fait  dequoy  les  perfuader  d'une  cho. 
fe,  dont  je  n'ay  pas  même  eu  la  moindre  penfée.  Caroùa  t'on 
trouvé  cela  écrit  danscedifcours?Et  comme  le  pourrois-je  di- 
«tuTt/rù  re  fans  me  contredire  moy-  même  ?  Mais  pour  en  donner  ui\e 
«*.  plus  grande  certitude  )E  MAUDiKAY  delà  plus    grandi 

malcdiHion  ceux  qui  ne  penfent  ou  ne  dijent  pas  que  les  vénérables  S* 
faints  dons  que  nous  offrons  font  changez^  furnaturelicment  par  le 
faint  Efprit  au  corps  é^fan'i^  vivifiant  &-fi  lut  aire  de  J.  C.  &  que 
ceux  qui  les  reçoivent  ont  par  eux  union  avec  J.  C.  &C  je  pro- 
nonce anathême  contre  eux. 

Lifancenfuite  le  difcours  qui  m'a  eftémis  entre  les  mains, 
j'ay  trouvé  qu'on  en  avoit  mis  quelque  chofe  par  écrit,  &  qu'on 
en  âvoit  omis  quelque  chofe.  Ce  qui  me  fait  demander  que 
l'examen  des  chofes  qui  y  font  contenues,  &  de  cette  nourelle 
opinion,  qui  eft  tout  le  fujet  de  mon  difcours,  fe  falfe  &  fc 
termine  en  la  prefence  del'Empereur.  jediray  même  quelque 
chofe  de  plus  hardy,  qui  eft  qu'on  fafle  une  aflcmblce  dans 
l'Eglife  de  la  fainte  Vierge  ,  compofée  de  quelques  membres 
du  Senat,&  d'autant  de  vous  autres  qu'il  s'y  en  voudra  trouver, 
&.  qu'on  examine  enfcmble  ce  qui  concerne  ce  difcours. 

EXTRAIT    DV     TRAITTE'      D'EL/E,     ErESQVE 

de  J  erufaletn  ,  dans  lequel  il  explique  en  abrégé  les  principaux 
Myfteres  de  la  Religion  Chreftienne.  C  eft  unmanufirit  Arabe 
de  la  Bibliothèque  du  Roy. 

LE  faint  Evangile  dit  que  ].  C.  a  pris  du  pain  dans  les 
mains  pures  &:  fainres,  le  bénit,  le  rompit  &  le  donnai 
iti  Difciplc*  ^§C  leur  dit  :  Cecyeft  mon  corps  qui  eft  mis  en  pièces 

pour 


àfVec  TEgli/è  Romaine  fur  îîuchArïflie.  -79^ 

foiir  la  vie  du  monde  &  la  remiffion  des  fichez^  Et  il  mêla  du  vin  Chap. 
&  de  l'eau  dans  le  calice ,  il  rendit  grâces  delfus ,  hc  die  enfuite  :  XXI. 
Ceci  eft  mon  fang  du  nouveau  Teftaynent  qui  eft  répandu  four  plu. 
Jteurs  ^  &  pour  la  remi.ljton  dès  pech^K  ;  prenez^en  tous ,  mangezjde 
ce  pain  ,  éi-  beuvez^de  ce  calice  :  F^dtes  ainji  lorfque  vcus  ferez^ 
ajjemblez^pour  faire  mémoire  de  moy.  C'eft  la  perfedion  de  la  pu- 
reté êc  la  fortification  de  la  Foy  de  ceux  qui  les  reçoivent ,  & 
le  falut  de  leurs  âmes. 

Ces  chofes  fontlandifiées  par  la  communication  de  la  puif. 
fance  du  S.  Efprit,  6c  SONT  change'es  de  leur,  première 
NATURE,  &  le  pain  eft  fait  fon  corps  faint  6c  fonfang  précieux, 
qui  fervent  à  la  remiffion  des  péchez  ,  la  purification  ,  la  fain- 
teté,  l'illumination  &  la  grande  efperance  de  la  refurreclion  .  ^ 
des  morts ,  Se  l'héritage  de  la  vie  éternelle  &  du  Royaume  du 
Ciel  &du  plaifir  véritable.  Et  nous  cous  qui  participons  à  ces 
Sacremens,  nous  allons  au  devant  de  nôtre  Seigneur  J-  C.  Nous 
le  portons  fur  nos  mains ,  nous  le  baifons  :  6c  dans  la  Commu- 
nion nous  fommes  unis  à  lui  par  un  mélange  de  fon  corps  avec 
les  nôtres ,  6c  la  mixtion  de  fon  fang  avec  le  nôtre.  Car  il  die  : 
Celui  qui  manize  de  7non  cerps  ^  boit  de  mon  fang  ,  //  efi  uni  avec 
moy  ,  (^  moy  avec  Iwy. 

EXTRAIT     DE     LA    LETTRE     DE    MELECE 

Patriarche  d' Alexandrie. 

DAns   les  paroles  par  lefquelles  les  faints  Myfteres  nous 
ont  efté  donnez,  ,  il  n'y  a  aucune  figure  ,  car  elles  font 
prifes  dans  leur  propre  fcns,  &  fe  doivent  entendre  de  la  même 
manière  fans  aucune  divifion.  Car  le  Pam  de  vie  a  pris  du  pain 
êcdu  vin,  fçachant  bien  qu'il  eftoic  lui  même  d'une  manière 
plus  excellente  le  pain  de  vie  ,  mais  n'ignorant  pas  auffi  que  le 
Mfftere  ne  fe  dérruiioit  pas, mais  s'accompliiïbir  p'ûtoften'?''*  '^''  ô 
prenant  auffidu  vin  ,  afin  que  comme  le  pain  rend  prefente  la  à'T"^  1^* 
chair  j  de  même  le  vin  rendiffc  le  fang  prefent.  L'un  ce  corps  fl-a.,'x,a 
qui  a  eflé  brifé  pour  la  remiffion  des  péchez  ,  £c  j'^autre  ce  fang  1  f^  Ksf]  0 
qui  eft  répandu  pour  nous  6cplufieurs  autres ,  èc  la  remiffion  or^w  'xa.px 
des  péchez.  W"*'  to 

Ces  paroles  ne  reçoivent  point  de  fens  figuré.  Car  il  n'y  a  aTiza. 
lien  d'indecenc  ,  qui  nous  puifle  obliger,  comme  dit  S.  Au- 
guftin,  d'avoir  recours  aux  expreffions  figurées.  Car  le  corps 

HHhhli 


79^  Liv.  VIII.  Prewves  duthent.  de  t union  des  Eg.  d'Or. 
nefê  change  pas  en  pain,  mais  le  pain  en  corps,  &  ceschofes 
ne  foufFrent  poinc  de  divifion  ,  car  le  Sauveur  qui  efl:  la  fagellè 
du  Père  lésa  données  toutes  cnfemble.  C'efl  lui  dont  nous 
écoutons  la  voix  ,  &;  que  nous  fuivons ,  mais  nous  ne  iuivons 
point  un  étranger  ,  parce  que  nous  ne  connoifTons  point  la  voix 
des  étrangers.  Et  c'eft  par  cette  raifon  que  nous  ajourons  l'oy  3. 
■  ce  que  le  Sauveur  a  fait  d'une  manière  !i  illuftre,  &  qu'il  aen- 
feigné  fi  clairement.  Car  nous  recevons  fimplement  les  chofes 
que  Dieu  nous  a  données, &  qu'il  a  diies  fans  aucune  obicu- 
rité  y  &  lorfqu'il  nous  parle  par  figures ,  nous  confiderons  ces 
figures,  &C  les  chofes  dont  elles  font  les  figures. 

C'eft  pourquoi  lorfque  le  Verbe  s'appelle  lui-même  la  pierre 
angulaire  ,  la  porte  &  le  chemin  ,  par  une  Théologie  fymboli- 
que,  nous  trouvons,  lorfque  nous  les  confiderons,  qu'il  efl  tou- 
tes ces  chofes  par  la  refi!emblance  qu'il  a  avec  elles ,  &  que  ces 
chofes  le  fignifient. 

Il  ya  des  figures  qui  ne  font  pas  fimplcs.  Se  qui  ne  fignifienc 
pas  feulement  la  grâce,  mais  qui  ont  en  elles-mêmes  la  grâce 
qu'elles  fignifient ,  comme  l'eau  dans  le  Baptême.  Car  elle  ne 
fignifie  pas  feulement, mais  aufii  elle  opère  lapunfication  qu'elle 
fignifie  par  l'avènement  du  S.  Efprir,  &  par  la  parole  divine  qui 
a  la  force  d'agir.  Il  en  eft  de  même  du  faint  Chrême. 

Nous  trouvons  auilî ,  comme  difent  quelques  perfonnes  , 
des  figures  reprefentées  par  d'autres  figures,  comme  les  cho- 
fes mêmes,  &:  qui  font  elles  nicmesfiguresd'autres,c'eft  à  dire 
qui  font  les  chofes  des  figures  Se  les  figures  des  chofes.  Caries ef- 
peces  qui  fontconfervccs  dans  le  Sacrement,  font  des  figures  , 
Scie  corps  &  le  fang  font  des  choies  ;&  on  dit  encore  qu'ils  font 
les  figures  du  corps  myfiiique  de  j.  C.  qui  efl  l'Eglife.  C'eft 
pourquoi -il  faut  que  ceux  qui  parlent  des  chofes  divines ,  re- 
çoivent les  paroles  de  J.  C.  dans  leur  fens  naturel  i  &;  ne  les 
confondent  pas  enfemble.  » 

Lors  donc  que  le  Sauveur  dit  :  Je  fuis  le  pain  de  vie  ,  il  s'eft 
fignifie  par  le  pain  d'une  manière  figurée  ,  comme  eflant  l'au- 
teur de  la  viCj  que  nous  entretenons  avec  du  pain  ,  non  pas  • 
comme  eftanc  lui  même  changé  en  pain. 

Et  lorfqu'il  dit  du  pain  &:  du  vin  dans  le  Sacrement  de  la 
Communion  ;  Cecy  efl  mon  corps  ,  &  Cecy  efl  7nonfanq^,  il  a  fi- 
gnifie fa  chair  &  fon  fang  par  ces  figures.:  de  forte  néanmoins 
fju'elles    font  réciproquement  la  chair  5i  le  fîmg.    Car    le 


I 


(Lfvec  t'Eglifè  'Romaine  fur  tEucharifiic.  -j^-j 

pain  eft  la  chair  ,&  le  vin  le  Tang.  Ecils  y  fontveritabicmenc 
changez j les  efpeces  demeurant  pour  fervir  de  figures,  &  les 
fubftances  eftanc  changées  dans  les  fubftances  fignifiées. 


CHAPITRE     XXII. 

Union  des  SocietexJDrientales  avec  ï't'ilife  Romaine  fur  t  Eucha- 

riflie  , -prouvée  far  l'Extrait  d'un  Manu  frit  Arabe 

de  la.  Bibliothèque  du  Roy. 

E  pallage  que  nous  produirons  ici  ne  prouve  pas  feule- 
ment que  les  Jacobites  ont  toujours  crû  la  prefence  réel- 
le depuis  Berengerjufqu'à  prefent  j  mais  comme  ceux  qui  ont 
rapporté  l'hiftoire  qu'il  contient  font  plus  anciens  que  Beren- 
ger,  ils  font  voir  que  c'eftoic  la  foy  du  dixième  lîecle^  ce  qui 
eft  encore  plus. 

Ce  paflage  eft  tiré  d'un  Manufcrit  ancien  delà  Bibliothè- 
que du  Roy,  &  il  ne  contient  pas  feulement  une  confefîion' 
claire  ficprecife  de  la  tranfTubftantiation  ,maisla  confirme  de 
plus  par  un  miracle.  Or  quoique  les  Miniftres  fe  mbcqucnc 
d'ordinaire  de  ces  fortes  d'hiftoires ,  ils  ne  fçauroient  nier  néan- 
moins qu'elles  ne  contiennent  une  preuve  certaine  de  la  foy  de 
ceux  qui  les  rapportent ,  &  de  TEglife  où  l'on  les  a  crus. 

EjirTRAir  D'VT^  MANUSCRIT  ARABE 
de  la  Bibliothèque  du  Roy ,  contenant  les  -vies  des  Patriarches 
d' Alexandrie  ^dans  la  vie  de  Philo  te  e  63.  Patriarche  ^  q  tu  fut 
élu  fur  la  fn  de  l' Empire  de  Muaz^  en  Egypte  ,  qui  mourut  l'an 
57y.  deJ.C.  coynme  dit  l'hijîoire  de  ce  Livre  y  ou  c)2>\.  félon  un 
autre  Auteur. 

VAfah  fils  de  Reja  raconte  dans  fa  vie  qu'il  a  écrite  lui- 
même  que  Severe  Evêque  d'Afchmonin  lui  a  conté  . 
qu'il  y  avoit  dans  Bagdad  un  Prince  de  famille  Royale  nohi- 
mé  Elhafchami  ,  &  qu'il  nefongcoit  en  aucune  manière  aux-^ 
affaires  de  rErat,ni  aux  beaux  habits, ni  à  la  mag-nificence.mais 
tout  Ion  plaifir  ctoit  de  monter  tous  les  jours  à  cheval  ,  6c  de 
s'en  aller  accompagné  des  foidacs  de  ia  fuite  dans  les  Eglif^s 
yinirn  -fttj'b  :  HHhhh  ij 


79^  Li  V,  Vr  I  î.  Trewves  authent.  de  F  union  des  Eg.  d'Or. 

des  Chrêciens  pendant  le  temps  de  la  Licurgie.  Il  y  entroit  à 
cheval  ,  &  commandoit  qu'on  prift  Thoitie  dans  la  place  mê- 
me du  San(ftuaire.  Il  la  failoic  rompre  Se  fouler  aux  pieds  &  ré- 
pandre le  calice.  Quand  il  avoir  fait  cela  dars  une  EgUie  ,  il  al-  . 
loit  enfuite  dans  une  autre  ,  où  il  en  faifoit  autant  Cela  in- 
commoda fi  fort  la  Ville  de  Bjgdad  ,  que  lesEgli'es  com- 
mencèrent à  n'avoir  plus  de  Liturgie,  &  la  plupart  des  Prêtres 
ne  la  vouloient  point  célébrer  ,  pour  la  crainte  qu'ils  a  voient 
de  cette  profanation.  Maislefecoursde  Dieu  vint  lorlqu'on  n'y 
penfoit  point.  Car  ce:  homme  eftant  un  jour  entré  dans  l'Egli- 
le  félon  fa  coutume  ,  Dieu  lui  ouvrit  les  yeuXj  &  il  apperçuc 
fur  la  patène  de  l'hoftic  un  enfa^c  beau  &  très  bien  fait  ^  dans 
le  temps  de  ladivifion  del'hoftie:  il  vit  que  le  Preftrel'immo- 
loit ,  &.  recevoit  f)n  (ang  dans  le  calice.  Se  divifoit  fa  chair 
par  morceaux  fur  la  patène.  Elhafchami  fut  fi  étonné  décela, 
qu'il  demeura  prefque  immobile.  Apres  cela  le  Prêtre  eftanc 
forti,  donna  au  peuple  de  la  chair  ,&  le  Diacre  du  fang  dans  le 
calice  ,  comme  il  vit ,  ce  qui  le  lurpritexrremement  5  6cil  dit 
àfe.s  foldats:  Ne  voyez  vous  pas  ce  Célébrant,  c'èft-àdire  ce 
Preftre?  Ils  lui  dirent  oiii ,  nous  le  voyons.  Il  leur  dit:  Souffri- 
rons nous  que  cet  homme  prenne  un  enfant,  l'immole  &divife 
fa  chair  à  cette  aflemblée  ,  Se  qu'il  les  fafle  boire  de  fon  fang  ? 
Ils  lui  dirent ,  Dieu  vous  maintienne  ,  Seigneur  ,  mais  nous  ne 
voyons  que  du  pain  &:  du  vin  -,  ce  qui  augmenta  la  crainte  &  fon 
admiration.-  le  peuple  n'eftant  pas  moins  furprisde  le  voir  fl 
hors  de  lui-  même  ,  &;  de  ce  qu'il  ne  faifoit  point  de  l'hoftie  ce 
qu'il  avoit  accoutumé. 

Le  Prêtre  ayant  achevé  l'Office,  5c  le  peuple  eftant  forti,  il 
appelIacePreftre  ,&Iui  demanda  ce  qu'il  avoit  vu.  Il  lui  dit  , 
Je  vous  aiTure  devant  Dieu  que  ce  n'écoit  que  du  pain  Se  du  vm. 
Ayant  donc  ainfi  reconnuqueceMylleren'avoit  pat^i  qu'à  lui 
feul  ,  il  dit  au  Preftre  :  Je  veux  que  vous  me  fafllez  connoî- 
trele  Myftere  de  cette  Euchari(lie&  fon  inftitut'on.  Il  luiap-' 
prit  comment  le  Preftre  Jefus  Chriftpritdu  pain  &;  du  vin  ,1e 
partagea  entre  fes  Difciples  ,  Si  leur  die  :  Prenez^^  manq^i^C 
Ceci  efi  mon  corps ,■  Si.  enÇhito:-.  Bfuvc^:  Ceci  efi  mon  ftn%  .,  bcu-'- 
vez^en  tous  four  Lt  remiMon  de  vos  pechaz^  Et  ks  lJ>i{ciples  ^ 
dit  il  ,  nous  ont  appris  une  prière  que  nousdifons  furie  pain&:.*- 
fur  le  vin  ,  quand  nous  les  mettons  furTAuteL,  Se  le  pain  eft 
changé  &  eft  fait  chair,  Se  le  vin  eft  fait  fang  d'une  manière 


Awec  tBgltfe  RontAÎne  Jur  fEucbarifiie.  799 

fecrete,  comme  Dieu  vous  l'a  fait  voir  aujourd'hui.  Cepen- 
dant en  apparence  c'ell  du  pain  &  du  vin  ,  parce  qu'il  n'y  a  per- 
fonne  au  monde  qui  puiife  prendre  un  morceau  de  viande,  ni 
boire  du  fang  qui  vient  d'eftre  répandu. 

Cet  homme  le  fît  enfuite  Chrétien  ,  ScfoufFrit  le  martyre. 

Celui  qui  a  écrit l'hiftoire  des  Patriarches  d'Alexandrie  efl: 
Severe  Evêque  d'Afchmonin.  Elle  a  efté  contmuée  par  un 
nommé  Michel  Diacre:  &  c'eft  dans  cette  continuation  d'hi- 
ftoire  que  (e  trouve  ce  miracle,  &tout  ce  que  j'en  ai  rapporté 
eft  traduit  de  là.  Vazahou  Vadah,  fils  de  Reja  eft  un  Jacohite 
fameux  qui  a  écrit  fa  propre  vie  -,  &c  c'eft  dans  cet  ouvrage  qu'il 
dit  avoir  entendu  dire  à  Severe  Evêque  d'Afchmonin  ,  ce  mi- 
racle arrivé  à  Bagdad.  Michel  Diacre  d'Alexandrie  l'a  tiré  de 
cette  vie  de  Vazah  fils  de  Reja  écrite  par  lui  même.  Ainfi 
cette  hiftoire  a  trois  témoins,  i.  Severe  Evêque  d'Afchmonin, 
qui  l'a  dit  à  Vazah.  z,  Vazah  qui  l'a  mis  dans  fa  propre  vie 
écrite  par  lui-même.  3.  Michel  Diacre  continuateur  de  l'hi- 
ftoire  des  Patriarches  d'Alexandrie  ,  d'où  on  l'a  tirée. 


CHAPITRE      XXIII. 

VNION  DES  EGLlSlSB'ORlElsfT  AVEC  L'EGLISE 

Romaine  fur  l'Eucharifiie ,  prouvée  par  les  Liturgies  des 
Nefioriens  ,  Eutichtens  d^  Maronites. 

ON  a  rapporté  dans  la  réponfe  générale  une  atteftation 
authentique  de  la  foy  des  Ncftoriens  fur  l'Euchariftie, 
qui  confirme  tout  ce  que  nous  en  avons  dit  dans  le  premier  to- 
me de  cet  Ouvrage,  &  condamne  formellement  tout  ce  que 
M.  Claude  a  voulu  impofer  aux  Chrétiens  d'Orient.  Je  n'y 
ajouterai  ici  que  des  extraits  de  leurs  Liturgies ,  afin  de  laire 
voir  que  cette  profefiion  de  foy  ne  contient  que  la  doclrine 
commune  de  leurs  Eglifes,  don:  leurs  Liturgies  leur  renouvel- 
lent tous  les  jours  la  memeirc,  &dont  jIs  fontainfi  tous  les 
jours  profeïïion  publique  ,  en  célébrant  les  facrez  Myfberes. 


HHhhh  iij 


800  Liv.  VllI.  Preuves  authent.  de  l'union  des  Eg.d'Or. 

BJ^TRAIT  DES  MISSELS    ^T  LIVRES-   DE 

prières  des  Ncfioriens  ^  Euty chiens  ,  Maronites ,  dont  tly  aun 
exemplaire  dans  la  Bibliothèque  de  Monjieur  Hardy  Confeiller 
au  Chajielet. 

V  E  la  grâce  de  votre  S.  Efprit ,  Seigneur ,  vienne'  fur  noîts 

f3>  fur  cette  ablation  ,  é"  qu'elle  demeure  ^ qu' elle repofc  fur 

ce  p.ùiié'  ftirce  calice.  Qu^clle  les  bemljejes  fanEéifie^  (jr  les  [celle 
au  nom  au  Père  ,  du  lils ,  ^  du  S-  Efprit  ,  5c  que  ce  pain  par  la 
puiffance  de  -votre  Nom,  ce  pain ,  dis  je  .^foit  le  Corps  faint  de  No- 
tre Seigneur  je  (us  Chrifi ,  &  ce  Calice  le  Sang  précieux  de  Notre 
Seigneur  Je  fus  Chriji  j  ^  que  ccluy  qui  mangera  de  ce  pain  (^  boira, 
de  ce  calice  avec  une  vraye  foy  ,  ils  luy  foient  a,  l'e-xpiation  de  fes 
cffcnfes  ,  ^  à  la  remiljton  de  fes  pecbe^ 

Dans  la  Meffe  qu'ils  accribuent  à  Nefîorius  .^  comme  enefFet 
Echellcnfis  dans  les  Notes  lurle  Catalogue  d'HebedJelu, en 
parl-e. 

Seigneur.,  que  la  grâce  de  votre  S.  Efprit  vienne  ,  demeure  ,  &[: 
repofe fur  cette  oblation  que  nous  offrons  devant  vous  -.Qu'elle  la 
fan'chjie  ,  &•  falfe  ce  pair,  d?"  ce  vin  le  Corps  é^  le  Sang  de  Nôtre 
Seigneur  Jefus-Chrifi  ,  les  changeant  ^  les  fan&ifiant  vous-même 
far  l'a.ffifhince  de  votreS,  Efprit. 

Dans  le  Livre  des  Offices  delà  femaine  des  mêmes  Nefto- 
riens ,  dans  une  des  Oraifonsil  y  a  mot  pour  mot. 

Dans  le  moment  que  U  Frcjire  monte  au  Santiuaire  ,les  armées 
et efprits  bien- heureux  fe  tiennent  audcffus  de  luy ,  &  regardent  le 
Frcftre  .^ui  rompt  à-  divife  le  corps  de  ChriJ}  pour  la  remifjion  dts^ 
fcchez^ 

Dans  lin  autre  endroit  du  même  Livre. 

Tons  nous  autres  Fidèles  allons  ^  confejfons  avec  une  joye  fpiri. 
tue'ic  fans  aucun  doute  ..que  nous  voyons  fur  le  faint  .Autel  l'Agneau 
de  Dieu  ,  qui  ef  tous  les  jours  facrifiè  facramentalement  .^quoiquil 
foitvirvant  à  l'Eternité ,  ô"  q^i  ejl  difiribué  a,  tout  le  monde  ,  ^ 
n'efl  point  confumé  ni  diminué. 

Dans  un  autre  endroit. 

Moname  fouhaite  avec  pj,ffion  vos  tabernacles  .^  o  l'EglifeJîdele  .^ 
où  nous  voyons  dans  le  Sacrement  l'-^gneau  vivant  de  Dieu ,  qui  ejt 
fofè  fur  votre  -Autel. 


a^vet  tEgUfe  Romaine  Jïtr  lEucharifiie.  8ot 

Dans  une  autre  Oraifon.  C  ta  p. 

Vous  tous  qui  approchez^pour  jouir  des  délices  de  ces  glorieux  (^  XâIIL 
divins  Myjîeres  ,  confcjjons  d"  adorons  enfcmblc  le  Seiq^neur  de  tou- 
tes chojes ,  gr  recevons  avec  pieté  &  fiy  l<^  corps  du  Fils  ,  le  Chnj}^ 
qui  a  ejîè  immolé  pour  nôtre  vie  ,(^  qui  a  expié  nos  crimes  ^  gS  qui 
a  reconcilié  fin  Père  avec  nous  par  l'efufionde  fin  Sang.  Et  voici 
qu'il  efi  apporté  fur  l'ylutel  dt  la  droite  du  Père ,  qui  l'a  envoyé.  Et 
quoiqu'il  fiit  Un  ,  ^  incapable  d! aucune  divifion  ,  cependant  il 
efi  tous  les  jours  fiacrifié  dans  l'Eglife  ,  fans  qu'il  fouffre  pour  nos 
crimes.  Vc7iez^,  approchons  avec  rcfpefl  du  fiacrifice  de  ce  Corps  , 
qui  fianHifie  toutes  chofes  ,  Q-  crions -luy  tous  enfemble  .^  ^  di fions 
luy ,  Gloria  tibi. 

Une  autre. 

Ifiaye  bai  fia  du  fieu  dans  des  charbons ,  ^  ne  brida  point  fes  Ut 
vres ,  mais  [on  iniquité  fiut  expiée.  Les  mortels  rei^oivent  du  fieu 
au  milieu  du  pain  ,  qui  conficrve  leurs  corps  ,  ^  leurs  pechez^fiont 
.hridiz^ 

Il  faut  remarquer  fur  cette  Oraifon  ,  i.  qu'elle  fe  trouve 
dans  cous  les  MiCTels  des  Neftoriens  &  des  autres  Orientaux 
■que  j'ai  vus.  On  en  a  vu  quatre  de  ceux-  là  ,  &:  fept  ou  huit  des 
autres,tant  Eutychiens  que  Melchites.  Elle  fe  trouve  auffi  dans 
la  MeflTe  de  Malabar  altérée  par  Alexis  de  Menezes  Archevê- 
que de  Goa ,  donc  la  traduction  eft  au  bout  de  fon  voyage } 
l'Original  efl:  imprimé  in  folio  en  Portugais  à  Lisbonne  j&  de 
là  dans  la  Bibliothèque  des  Pères. 

i.  Que  le  feu  veut  dire  la  divinité  unie  à  ce  charbon  ,  c'efl- 
à  dire  à  l'humanité  de  J.  C.  comme  on  le  peut  prouver  parplu- 
lleurs  de  leurs  paflages.  Et  c'eft  pour  cela  qu'ils  appellent  la 
Vierge  l'Enccnfoir  d'or  ,  qui  a  porté  le  charbon  vivant  J.  C. 
Nôtre  Seigneur.  On  peut  voir  ce  qui  a  efté  dit  fur  ce  fujet  dans 
la  réponfe  générale  fur  S.  Jean  de  Damas. 

Dans  le  Miffèl  Maronite  ,  p.  m.  dansla  Méfie  de  S.  Denys, 
après  la  prière  pour  les  morts  ,  ils  ajoutent. 

Et  les  regardant ,  Seigneur.,  avec  pitié  ,  pardonnez^  leur  Ictirs  pe- 
chex^,  d"  remettexj,eurs  défauts  ,  à.  caufe  du  Corps  &  du  ^ang  de 
votre  Fils  unique  ,  qui  efi  caché  ^  enterré  &  cnjevcli  daiit  leurs 
membres. 

Pag.  115.  dans  la  même.  Chrifi  pain  véritable  qui  efi  défendu 
du  Ciel  ^  ^  qui  nous  aefié  une  viande  qui  ne  périt  point  .^gardezjîos 
Mme's  (^  nos  corps  de  la  géhenne  qui  ne  s'éteint  point. 

Dans  le  Bréviaire  ou  Livre  d'Oraifons  de  la  Semaine,  &  des 


Soz  Liv.  VHI.  Vreunjes  authen.  de  ï union  des  Eg.  d'Or. 

Eutychiens  Syriens  ,qLUcfl;  dans  la  Bibliothèque  de  Monfieur 
Hardy. 

Donnez^Fils  de  Dieu  un  bon  repos  ^  une  heurcufe  mémoire  aux 
morts  qui  ont  mangé  votre  corps  ,  ^  qui  ont  bu  votre  fang  avec 

En  un  autre  endroit. 

Notre  Sauveur  a  donne  un  gage  de  la  vie  nouvelle  aux  Fidèles  3 
pour  paffer  de  la  mort  a  la  vie  par  le  moyen  du  Corps  ô-  du  Sang ,. 
qui  fait  le  bonheur  des  morts  qui  l'ont  mange  ,  d"  ^«^  ej}  celui  qui 
les  rejfufcite. 

Dans  l'Office  de  Pâques. 

J^ous  foyez.  heureux  ,  vous  qui  eftes  morts  dans  ce  jour  de  la  Re- 
furreclion  5  Carie  corps  vivant  que  vous  avez^mangè  ,  é-  ^e  fan^ 
propitiatoire  que  vous  avez^  bit  vous  fera  tenir  debout  au  cojlè 
droit. 

r ATTESTATION   SVIVANTE    AyaNT    ESTE' 

ézarèe  au  temps  quon  imprimoit  l'endroit  où  elle  devait  efire  infé- 
rée ,on  a  cru  la  devoir  ajouter  ici. 

Attefiation  du  Supérieur  du  2<^onafiere  de  S.  Georges. 

LE  très  illuftre  &:  très  excellent  Seigneur  Charles  Fran', 
(jois  Olier,  Marquis  de  Nointel ,  Ambaffadeur  du  tres- 
puilTantRoy  de  France  ,  ayant  dcfire  d'eltre  informé  exacle- 
ment  de  la  foy  de  l'Eglife  Orientale  touchant  les  terribles  & 
immaculez  myfteres  d-e  nôtre  Seigneur  J.  C.  &  les  autres  Sa- 
creirens  de  nôtre  Fglife.  Voici  ce  que  nous  avons  écrit  tou- 
chant le  facré  corps  U  (acre  lang  de  J.  C. 

Nous  croyons  &  nous  confcffons  qu'après  la  confecration  &: 
la  prière  du  Preftre  le  pain  &  le  vin  font  véritablement  &  prcr- 
pren1entchange2.au  corps  &  au  fang  de  J.  C.  nous  pronon- 
çons ces  paroles  luivantcs  :  Je  crois  ,  Seigneur  ^  é^  je  confeffeque 
vous  eftes  véritablement  le  Chrift  Je  Fils  de  Dieu  vivatit ,  qui  eftes 
venu  dans  le  monde  pour  fauver  les  pécheurs ,  dont  je  fuis  lepre?mer. 
Je  crois  encore  véritablement  que  e'eft- là.  votre  Curpsmkme  tres-ptir, 
^  que  ccft-là  votre  facré  fang.  Je  vous  prie  donc  d'avoir  pitié  de 
Tnoy  ,  ^  de  me  pardonner  mes  péchez^  tant  volontaires  qu'involon- 
taires ,  fait  en  paroles  ^folt  en  œuvres^ 

Ee 


» 


a'vcc  tEgUfe  Romaine  fur  rEucharifiie.  803 

Et  quand  le  Prellre  après  avoir  porté  les  faines  dans  le  San-  Chap. 

fl:uaire,èc  avoir  prononcé  les   paroles,  du  Seigneur,  ajoute,  XXIIL 

J<.utii  dece  fMïi  le  ficré  corps  de   vofire  Chnfi ,  Amcn^   &  ce 

que  dans  le  calice  le  facré  fang  de  vojîre  Chrijl^  Amcn^'û  dit  de 

l'un  &.  de  l'autre  ces  paroles-cy,  les  changeant  par  vo/Irc  faini: 

Bjprtt ,  Amen-^  marquant  clairement  par  là  qu'ils  font  changez 

&  convertis  véritablement  au  corps  même  &  au  fang  même  de 

J.  C.  n'y  ayant  que  les  efpeces  &  apparences  du  Pain  êc  du  vin 

qui  demeurent.  C'eft  pourquoy  nous  ne  les  appelions  plus  fim- 

plement  du  pain  &  du  vin  :  mais  nous  confefTons  qu'ils  font  le 

corps  même  &  le  fang  même  de  J.  C.  qui  a  efté  verfé  pour 

nous  pour  la  remifTion  des  péchez  &  la  vie  éternelle,  êctous 

ceux  qui  faifantprofeffîon  de  cette  foy  participent  dignement 

&  avec  pureté  à  ces  myfleres ,  ont  part  avec  tous  les  Saints  au 

Royaume  du  Ciel, 

Nous  avons  beaucoup  de  refped  pour  les  Saints,  pour  les 
Anges,  pour  la  fainte  Vierge  ,  &  nous  les  employons  pour 
Ambafladeurs&intercefTeurs  auprès  dej.  C.  pour  nos  péchez, 
&  pour  ceux  de  tout  le  monde,  afin  que  par  leurs  faintes  priè- 
res nous  foyons  délivrez  à^%  fupplices  éternels:  &  nous  avons 
un  refped  encore  plus  grand  pour  la  S^^  Vierge  comme  ayant 
plus  de  pouvoir  que  tous  les  Saints  auprès  de  fon  Fils  &:de  fon 
Dieu  pour  obtenir  le  pardon  de  nos  péchez,  &  de  ceux  de  tout 
le  peuple  qui  porte  le  nom  de  Chreftien.  Nous  honorons  de 
même  les  Anges,  &  nous  les  invoquons  afin  qu'ils  délivrent 
nos  âmes  des  malins  efprits  ,&  qu'ils  les  afîîftcnt  lorfqu'elles 
fe  feparent  du  corps. 

Nous  croyons  de  plus  que  dans  la  fainte  Eglife  il  y  a  fept 
SacremenSj  le  Baptême,  le  faint  Crefme,la  Communion, 
l'Huile  de  prières,  le  Sacerdoce  &  le  premier  Mariage.  C'eft 
pourquoy  nous  Supérieur  &  autres  Pères  du  Monaftere  de 
faint  George  de  l'Iflede  Principo,  nous  avons  donné  ce  té- 
moignage de  noftre  foy,  qui  eft  celle  de  l'Eglife  Orientale, 
audit  Seigneur  &  à  tous  les  autres  Chreftiens,&  nous  y  avons 
foufcntle  10.  Odobre  mil  fix  cens  foixante  &  onze. 

Ji/[oy  Supérieur  fay  fou fcrit. 

Moy  Damascene  Eccnome  j  ay  fou  fer  it. 
NicoDEME  fayfoufcrit. 

II  iii 


8C4L1V.VIÎI.  Preu.<ves  auth  de  t union  des  Eg.d'Or, 

CHAPITRE     XXIV. 
Conclusion. 


A  Prés  avoir  juftifîé  par  une  infinité  de  preuves  dans  le 
premier  volume  de  cet  ouvrage  que  depuis  le  fiecle  de 
Berenger  jufqu'à  celuy  cy,  l'Eglife  Romaine  ôc  les  Sorieccz 
Orientales  ont  eu  la  même  foy  fur  les  dogmes  de  la  prefence 
réelle  6c  de  la  traniTubrtantiation  :  après  toutes  celles  donc 
on  a  fortifié  ce  fait  dans  la  réponfe  générale,  &  cette  foule 
de  témoignages  authentiques  qu'on  y  vient  d'ajouter:  il  n'efl: 
pas  croyable  qu'il  fe  trouve  déformais  perfonne  qui  le  puiffe 
contefter  de  bonne  foy,  &  fi  quelqu'un  n'en  paroilToit  pas  en- 
core perfuadé,  on  auroit  tout  fujet  de  croire,  ou  que  la  préoccu- 
pation l'auroitempefché  de  faire  attention  à  ces  preuves ,  ou 
qu'il  en  parleroit  pliitofl:  félon  (es  pallions  ôc  fes  interefts 
que  félon  fes  véritables  fentimens. 

Ce  feroit  même  en  vainque  M  Claude pretendroit  fejufti- 
fier  de  l'a  voir  nié  fur  ce  qu'il  n'eftoit  pas  obligé  de  deviner  tou- 
tes les  preuves  qu'on  a  depuis  produites,  car  il  y  en  avoit  allez 
dans  les  premiers  ouvrages  pour  l'obliger  àfe  rendre  s'il  n'eufl: 
point  eu  envie  de  montrer  au  monde  ce  qu'il  fçavoit  faire  pour 
obfcurcirune  vérité  certaine.  Et  il  ne  pouvoit  au  moins  s'en- 
gager à  nier  ce  fait,ny  en  parleravec  la  confiance  qu'il  a  témoi- 
gnée, fans  avoir  pris  les  loins  necelTaires  pour  s'en  informer, 
dont  le  premier  eftoit  deconfulrer  les  Patriarches  &:  les  Evef- 
ques  des  Eglifes  d'Orient^  ce  qui  auroit  fuffi  pour  le  conduire 
à  la  même  convickion. 

Que  l'on  ne  dife  plus  auffi  que  cette  voye  que  nous  avions 
voulu  faire  palier  pour  courte  &  abrégée efl:  tellement  longue 
qu'il  a  déjà  fallu  plufieurs  volumes  pourenéclaircirles  difH- 
cultez.  On  fçait  qu'une  des  veucs  deM.  Claude  en  s'opiniâ- 
trantànier  ce  fait,  àefté  d'embarafler  par  làcertedifpute.  H  9, 
cru  que  s'il  nepouvoitempefcher  que  l'on  n'emportaft  ce  point, 
il  en  rendroitau  moins  par  ces  chicaneries  la  difcufhon  diffi- 
cile :  2c  qu'ainfi  fi  l'argument  efloit  invincible  on  n'en  tireroic 


Afvec  FEglife  Komnine  fur  rRuchariJiie.  gof 

du  fruit  de  long- temps.  Mais  il  a  mal  pris  fesmefuresen  cela 
comme  dansjes  antres  cho(csj&:  fi  la  neceffité  où  il  nous  a  mis 
d'accumuler  tant  de  preuves  pour  établir  une  vérité  confiante 
a  allongé  la  dilputepour  quelque  temps,  ces  mêmes  preuves 
l'abrègent  déformais  pour  tous  ceux  qui  voudront  s'inllruire 
de  ce  différend,  puifqu'elles  forment  pour  l'avenir  une.cerfi- 
tude  6i  une  notoriété  fi  reconnue  de  ce  fait  qu'il  ne  fera  pas 
moins  certain  que  ce  qui  fe  pafle  parmi  nous,  &  qu'on  n'aura 
plus  befoin  de  le  prouver. 

Ainfi  l'effet  de  cette  longue  difpute  fera  de  pouvoir  dire 
maintenant  fans  dilpute,  comme  a  dit  autrefois  Lanfranc,  que 
du  temps  de  Berenger  tûus  ceux  qui  avaient  quelque  connoijfancc 
de  la  langue  latine  é"  des  livres  latins^  les  Grecs,  les  Arméniens, 
^  généralement  ious  les  Chrcjliens,  croyaient  de  l'EuchariJIie  ce 
quen  croit  l'Eglife  Romaine,  dcqu'ils  ont  toujours  continué  de- 
puis de  faire  profeffion  de  la  même  foy,  c'eflà  dire  en  un  mot 
que  ce  fait  capital,  qui  fert  de  fondement  à  l'argument  de  la 
Perpétuité,  eft  parfaitement  établi,  qu'on  le  peut  fuppoferfans 
preuves,  &  qu'on  nefçauroit  fe  tromper^pourveu  qu'on  n'en 
cire  que  les  confequences  qui  s'en  tirent  necelîàirement. 

Peut-eflre  fe  trouvera-t  il  des  Minières  qui  croiront  nous 
pouvoir  arrefler  fur  ces  confequences,  &  qui  eftant  forcez  de 
reconnoiftre  queM.  Claudes'eflma!  engagé,  &  qu'il  n'a  point 
dû  nier  ce  qu'il  a  nié,  prétend  roient  s'en  pouvoir  tirer  d'une  au- 
tre manière  que  luy,  en  difant  que  c'eft'a  faute  d'un  particulier 
dont  on  ne  peut  rien  imputer  à  tout  le  corps:  qu'après  tout  il 
ne  s'enfuit  pas  de  là  que  la  dodrine  de  la  prefence  ait  efté  per- 
pétuelle dans  l'Eglife,  qu'il  eft  bien  vray  qu'elle  efloit  univer- 
fellement  répandue  dans  tout  l'Orient  aufîi  bien  que  dans  lOc- 
cident  au  fiecle  de  Berenger,  comme  on  l'a  fort  bien  montré,& 
que  M.  Claude  a  eu  tort  de  le  nier,  mais  que  cette  docflrine  a  pu 
s'introduire  dans  toutes  les  focietez  Orientales  par  innova- 
tion depuis  le  fiecle  de  Pafchafe,  &  que  c'efl  par  là  que  M. 
Claude  fe  devoit  deffendre. 

C'efl-Ià  tout  ce  qu'ils  peuvent  répendre .-  mais  cette  réponfe 
en  nous  abandornant  M.  Claude,  ne  juftifie  néanmoins  ny 
leur  procédé  ny  leurcaufe.  Car  à  l'égard  de  leur  procédé, 
ont  ils  dû  fouffrir  que  dans  une  caufc  commune,  celuy  qui 
's'efloit  chargé  de  leur  deffenfe  ,  l'établifl  fur  une  fauffeté 

1 1  iii  ii 


8o6  Liv.  Vlll.  Preuves  amhent.  deVumon  des  Eg.d'Ot 

notoire,  &  qu'il  conteftat  quatre  ou  cinq  ans  fur  un  fait  donc  la 
bonne  foy  &  la  fincencé  le  devoir  faire  convenir  dés  le  premier 
jour?Nedevoient-ils  pas  defavotier  publiquement  cette  con- 
duite ,,  &  ne  point  permettre  que  dans  le  delTein  de  deffendre 
ce  qu'ils  prennent  pour  venté^  onbleflall:  la  vérité  ,  en  impo- 
faut  à  toLit  rOnent  de  croire  ce  qu'il  ne  croit  pas  ?  N'eftoienc- 
ils  pas'obligczde  rendre  témoignage  à  la  vérité  dans  ce  point^ 
puifque  ceux  qui  l'honorent  véritablement  l'honorent  en  tout 
6c  ne  la  regardent  jamais  comme  ennemie? 

Cependant  qui  eft:  le  Miniftrequi  ait  defavoué  M.  Claude 
depuis  tant  de  temps  que  cette  dilpuce  a  duré, 8c  qu'en  peut-on 
conclure  finon  qu'on  n'a.  nul  égard  à  la  vérité  dans  leur  parti, 
&  que  ceux  qui  y  régnent  par  la  créance  &:  par  Tauthorité  ne 
fe  (oucient  pas  par  quel  moyen  ils  y  tiennent  les  peuples  at- 
tachez; que  lei  fauflecez  leur  font  auffi  bonnes  que  les  veritez 
quand  elles  produifencceceffetJ  6c  que  pourveu  qu'un  Auteur 
fadedu  bruit  ,&  qu'il  foitcapable  d'araufer  le  monde  par  le 
ion  de  fe.s  paroles,  les  plus  intelligens  d'entre  les  CalvmifteS' 
font  bien  aifes  de  le  laifler  faire,  &  regardent  toujours  com- 
me un  avantage  rimprefllon  qu'ils  font  par  là  fur  le  commun- 
de  leur  parti. 

En  un  mot  quand  ils  prétendront  pafîèr  à  l'avenir  pour  des- 
gens qui  n'ont  point  d'autre  interelî  que  celuy  de  la  vérité,. 
&:  qui  fuivent  en  tout  les  mouvemens  de  leur  confcience,  on 
n'aura  qu'à  leur  dire  qu'au  veu  &  au  fçu  de  tous  les  Miniftres 
de  France,  M.-Claude  a  foîitenu  pendant  le  cours  d'une  difpute 
de  plufieurs  années,  fKÉ'  U  tranJfubjLintiation  S''  l'adoration  du 
Sacrcûjcni  fam  des  chofes  inconnuvsj.  toute  la  terre  à  la  re  férue  de 
l'Eglifc  Romaine,  (jp-  que  ny  les,  Grecs  y  ny  les  Arméniens^  ny  les 
Rufjlcns ,  iiy  les  Jacobites^  uy  les  Ethiopiens- ,  ny  en  ^encrai  au- 
cun Chrefiicn^  hormis  ceux  qui  fe  foumetîent  au  P^pe,  ve  croyent 
rien  de  ces  deux  articles^  &  que  bien  loin  que  perfonne  parmy 
eux  s'y  foie  oppofé^c'efi:  en  publiant  6c  en  loûrenant  cette  inlî- 
gne  fauiîeté  qu'il  a  efté  élevé  auxprejïiiej:s  degrez  d'honneur 
de  leur  prétendue  Eglife.    .       .,  ., 

Mais  s'ils  i^e  fçauroient  fe  mettre  \  couvert  eux-mêmes 
des  juftes  reproches  que  l'on  leur  peut  faire  de  leur  peu  de 
fincerité  ,  il  leur  eil  encore  moins  poffible  d'éluder  les 
confequences  qu'on  en  tire  necelîaireraenc  contre  leur  do- 
cirine. 


a,fvec  tEgliJe  ^o^nxine  fur  ï îiucharïfiie .  807 

Car  il  ne  fau:  pas  s'imnginer'que  M.  Claude  fe  foie  engagéXXI  V. 
/ans  de  grandes  S:  importances  raifons  à  foi^tcnir  comme  il  a 
-fait  qu'il  n'y  avoir  que  l'Eglife  Romaine  où  ces  deux  articles 
fulTcnc  crus.  Ileft  trop  habile  pour  s'eftre  porté  gratuitement 
à  une  telle  extrémité  ,&  ce  qui  l'y  a  forcé  malgré  luy  en  cet- 
te occafion  n'eft  pas  difficile  à  deviner. 

Il  avoit  entrepris  de  répondre  au  traitté  de  la  perpétuité,  ce 
qui  l'obligeoit  de  montrer  la  poffibiliré  du  changement  que 
\qs  Miniftres  prétendent  eftre  arrivé  dans  l'Eglife  par  le  moyen 
de  Pafcafe  depuis  /e  neuvième  fiecle  jufqu'à  l'onzième.  S'il 
euft  donc  avoué  qu'au  fiecle  de  Berenger  les  focietez  d'O- 
rient faifoient  profeflîon  des  dogmes  de  la  prefence  réelle 
&  de  la  tranfTubftantiarion^  il  eût  fallu  dire  par  neceflîté  que 
fans  que  le  livre  de  Pafcafe  euft:  efté  veudans  l'Orient,  fa  doc- 
trine néanmoins  s'y  eft:oit  répandue  ,  6c  qu'en  moins  décent 
cinquante  ans  elle  s'yeftoic  glilTée  dans  tous  les  efprirs ,  qu'ils 
l'avoient  tous  retjuë  comme  l'ancienne  foy  en  oubliant  celle  , 
dans  laquelle  ils  avoient  été  élevés  jufques  alors^  queperfonne 
ne  s'y  eftoitoppofé,  que  perfonne  n'avoir  même  remarqué  ce 
changement,  &:  qu'il  avoit  efté  embraftTé  univerfellement  6c 
fans  contradidion  partoutescesfedes  divifées  depuis  plufiei'.rs 
fiecles  de  l'Eglife  Romaine,,  6c  qui  avoient  pour  fufpeci;  tout 
ce  qui  venoic  d'elle. 

Cela  a  paru  tres-juftemenc  ridicule  à  M.  Claude  ,  &  quelque 
hardy  qu'il  foit  d'ailleurs^  il  a  bien  veu  qu'il  ne  reuifiroit  pas 
s'ilentreprenoicde  faire  goùr;r  au  monde  une  celle  abfurdiié. 
II  a  craint  avec  raifon  que  s'il  reduifoit  le  différend  à  ce  point, 
il  fuft  trop  tôt  terminé,  6c  que  le  fens  commun  ne  fe  declaraft 
tout   d'un  coup  contre  luy. 

Il  a  donc  jugé  qu'il  valloit  encore  mieux  contefter  le  fait,  6c 
nier  abf-)!ument  que  les  focietez  d'Orient  crrfTent  la  prefence 
•réelle  5  que  par  là  au  moins  la  difpute  ne  feroit  pas  fi  roft  finie, 
que  peut  cfîre  on  ne  s'attacheroit  pas  à  prouver  ce  fait  avec 
tant  àt  foin,  ^  qu'il  pourroit  demeurer  enfevely  fous  cet  amas 
de  nuages  qu'il  tafcheroic  d'y  répandre. 

Il  y  a  lieu  de  croire  quec'efl  par  ces  veuës  que  M.  Claude 

s'eft  porté  à  prendre  ce  parci.  Si  elles  ne  font  pas  d'un  homme 

fincere,  elles  font  au  moins  d'un  homme  habile  6c  intelligenr, 

.6c  ce  feroit  aux  Miniftres  qui  le  voudroienc  condamner  à  nous 

1 1  iii  iij 


8o8  Liv.  Vî  î  I.  Preuves  authent.  de  tunion  des  êg.  d'Or, 
dire  auparavant  ce  qu'ils  auroic  pu  fc'.ire  de  mieux.  Qu'ils  le 
tencenc  s'ils  en  ortc  envie,  &:  qu'ils  fçichcnt  qu'ils  yreiiiïironc 
encore  plus  mal.  Car  au  moins  a  c-  il  trouvé  un  grand  champ  à 
faire  paroiflre  ronefpritjêc  <à  étaler  Tes  figures  &:  Tes  hypo- 
thefes.  11  a  trouvé  le  moyen  defufpendre  les  efprits,  bi  de  les 
éblouir  pour  quelque  temps. 

Mais  il  n'en  feroit  pas  ainfi  de  ceux  qui  auroient  pris  un  autre 
chemin,  &:  abandonné  les  focietez  d'Orient.  On  les  auroit 
condamnez  fur  la  feule  propofition  de  ce  qu'ils  auroient  voulu 
foutenir.  Car  qui  voudroit  écouter  un  homme  qui  diroit  fe- 
rieufement,  î'avouë  qu'au  commencement  de  l'onzième  fiecle 
toutes  lesEglifesdu  monde  croyoient  la  prefente  réelle;  mais 
je  prétends  que  c'eft  le  livre  de  Pafcafe  q'-i  fans  avoir  efté  con- 
nu dans  l'Orient  y  a  tait  tous  cesdefordrei  &'.  tous  cesrenver- 
femens,  que  c'eft  ce  livre  qui  a  fait  recevoir  fans  contradidion, 
fans  bruit,  fans  diCpute  la  créance  de  la  prefence  réelle  par  les 
Neftoriens,  les  Arméniens,  les  Ethiopiens,  les  Copthes,  les 
Grecs ,  Se  enfin  par  tous  les  Chreftiens  du  monde,  &  cela  fans 
que  perfonne  (e  foit  apperçu  qu'il  cnangeoit  de  fentimens. 

Qu'on  ne  blafme  donc  M.  Claude  que  d'eftre  Calvinifte  , 
&  d'avoir  voulu  défendre  fon  parti  à  quelque  prix  que  ce  (nty 
6c  qu'on  ne  dife  de  luy  que  ce  que  S.  Auguftint  dit  de  Faufte. 
2^ala  caufa  vana  te  loqui  coept^  fed  maldm  caufam  habere  nemo 
te  eoegit  :  mais  qu'on  reconnoifTe  en  même  temps  que  c'efl:  un 
étrange  parti  que  celuy  du  Calvinifme,  puifqu'on  ne  le  peut 
deffendre  qu'en  s'engageantà  foutenir  des  faudetcz  notoires 
&  palpables,  &  à  nier  des  faits  qui  ont  toute  la  certitude  que 
des  faits  peuvent  avoir  &  par  la  raifoo  &c  par  les  fens .-  c'eft 
à  dire  qu'on  ne  le  fc^auroit  deffendre  fans  le  détruire  en  même 
temps;  puifque  rien  de  ce  qui  dépend  neceifaireraent  d'une 
faufleté  ne  f^auroir  eftre  véritable. 

Ainfi  les  livres  de  M.  Claude  par  un  effet  bien  contraire  à 
fon  intention  peuvent  eftre  juftement  appeliez  la  deftrudion 
du  Calvinifme,  puifque  faifant  voir  qu'on  ne  le  peut  deffendre 
avec  quelque  forte  d'apparence  qu'en  fourenant  que  lesEgli- 
fes  d'Orient  ne  font  pas  d'accord  avec  l'Eglife  Romaine  fur  la 
prefence  réelle,  ils  font  voir  auffi  qu'il  eftimpofîible  de  le  dé- 
fendre raifonnablement,  puifque  ce  fait  eft  abfolumenc  infou- 
tenable. 


f'^  afvec  ÏBglïJe  Romaine  fur  rEucharîflie,         8o9 

C'eft  la  conclufion  qui  fetire  naturellement  de  toute  cette 
difputeôcoii  le  fens  commun  conduit  tout  d'un  coup  ceux  qui 
i'ëcouteront  tant  foit  peu. 

Que  s'il  fe  trouve  encore  des  gens  qui  ne  concluent  pas  ainfi 
d'eux  mêmes,  ou  qui  rejettent  cette  confequence,  on  les  peut 
regarder  comme  ayant  plus  beloin  de  prières  que  d'éclair- 
ciiTemens  &  de  raifons.  Qiiand  on  en  eft  venu  dans  les  écrits 
jufques  à  contenter  pleinement  toutes  les  perfonnesde  bonne 
foy  ,  on  peut  s'arrefter  là,  puifquelamauvairefoy  &  l'opiniâ- 
treté n'ont  point  de  bornes.  Je  croy  pouvoir  dire  qu'on  y  efl: 
arrivé  dans  les  matières  qui  font  le  fujetde  ces  trois  volumes, 
&  principalement  dans  l'argument  capital  de  tout  cet  ouvrage. 
Ainfî  on  me  permettra  bien  fans  doute  de  le  regarder  défor- 
mais comme  achevé,  S^  comme  n'ayant  plus  befoin  d'eftre 
foutenu  par  de  nouvelles  réponfes  contre  les  attaques  des  Mi- 
niftres.  C'efl:  la  règle  que  S.  Auguftin  donne  expreflèment  à 
Marcel  lin  à  qui  il  dédie  les  livres  de  lu  Cite  de  Dicu^  en  luy 
marquant  qu'il  n'yauroit  pas  dejuftice  à  luy  demander  des 
réponfes  toutes  les  fois  qu'on  verroit  {ts  écrits  combattus  par 
des  perfonnes  opiniâtres  &  déraifonnables.  Quamobrem  nccte- 
ipfum^  mi  fit  MancUine,  nccalios  quibuihic  nofierlaboî  in  Chrifli 
charitate  utiliter  ac  liberaliter  fervit ,  taies  fcriptorum  meorum 
velim  judices  qui  relponjîonem  femper  dejiderent  cum  his  qu^e 
leyintur  atidierint  aliquid  contmdici.  Qiie  s'il  y  a  jamais  eu  lieu 
de  pratiquer  cette  règle,  on  peut  bien  dire  que  c'eft  en  cette 
occafion,  &  qu'on  a  pliitoft  fujet  de  craindre  d'avoir  ennuyé 
le  monde  par  un  trop  grand  nombre  de  preuves,  que  d'avoir 
laiiïë  lieu  à  perfonne  d'en  defîrer  davantage.  Mais  quoy 
qu'il  en  foit,  il  nouseft  au  moins  permis  en  finiffant  cet  ou- 
vrage d'emprunter  les  paroles  par  où  ce  S.  Dodeur  finit  celuy 
de  la  Cité  de  Dieu,  &  de  dire  comme  luy^que  l'on  croit  avoir 
fatisfait  avec  l'affiftance  de  Dieu  par  çt%  trois  vi^lumes  de 
la  Perpétuité  de  I2  Foy  de  l'F.gUfe  Catholique  fur  l'Eucha- 
riftie,  à  l'engacrement  où  l'on  eftoit  entré.  Que  l'on 
conjure  ceux  qui  y  trouveront  de  l'excès  ou  du  défaut 
de  le  pardonner  aux  Auteurs  qui  y  ont  travaillé  félon  la 
mefure  de  leur  lumière  qui  ne  s'eft  pas  étendue  plus  loin  ; 
Et  ceux  qui  en  feront  contens  de  ne  leur  en  rien  attribuer  , 
mais  de  fe  joindre  à  eux  pour  en  rendre  grâces  à  Dieu.    Vi- 


8io  Liv.  VIÎI.  ^reunues  authent.  de  t union  des  B g.  d'Or. 

deor  mihi  debitum  ingentis  hujus  operis  adjuvante  Domino  red^ 
didijfe^  quibus  parmn  vel  qv.ibus  mmium  efi  mihi  ignofcant  ^ 
quibus  auiemfatis  efi  non  mihi,  fed  Dommo  mecum  gratias  con- 
gratulantes agant. 


FÏN. 


TABLE 


l 


ADDITION. 

On  a  parlé  en  divers  endroits  de  lit  Réfutation  que  Jlùîetitis  Syrinus  le 
pt:is  cdcbre  Théologien  des  Grecs  avoit faite  des  an' clés  de  Cyrille  hucar: 
mais  on  nen  a  rien  mftrc  parmy  les  autres  pièces  ,  parce  qu'on  ne  l'a  receu'e 
de  Conflantinople  qn  après  que  cette  impreffion  a  efté  entièrement  achevée. 
On  a  cru  neamtioins  qiiil  ejloit  bon  d'en  ajouter  icy  quelque  chofe  ,  ny 
ayant  point  d'écrit  ou  l'on  puijfe  mieux  voir  le  fentiment  des  Grecs ,  ce 
livre  ejiant  généralement  eflimé ,  comme  on  l'a  pu  voir  dans  la  lettre  de 
Neclarius  Patriarche  de  feritfakm  ,  qui  y  renvoyé  pour  apprendre  la  fby 
de  l'E^.ife  Grecque  :  &  par  cille  du  ftcur  Panajotti  ,  qui  le  met  au  nombre 
de  ceux  qui  tant  le  pins  nettement  expliqué. 

EXTRAIT     DU    LIVRE   DE   MELETIUS    SYRIGUS, 
contre  Cyrille  Lucar. 

Du  nom   de  Tranjuhftantiation. 

NOus  demeurons  d'accord  que  ce  mot  de  Tranflubftan- 
tiation  ne  fe  trouve  point  dans  les  anciens  Théolo- 
giens. Carne  s'eftant  point  élevé  aucune  herefîe particulière 
fur  ce  Tujet,  fî  ce  n'eftoit  de  ceux  qui  nioient  la  véritable  pre- 
fencedu  Verbe  en  la  chair,  les  faints  Pères  ne  fe  font  point 
mis  en  peine  de  chercher  de  nouveaux  mots.  Mais  nous  ne 
difputons  pas  des  mots,  &  nous  ne  faifons  pas  tant  confîfter 
la  force  de  la  pieté  dans  les  paroles,  que  dans  les  chofes.  Si 
donc  nous  trouvons  dans  les  Théologiens  ce  qui  eft  fignifié 
par  le  mot  de  Tranflubftantiation,  qui  peut  empêcher  de  le 
fervir  de  ce  mot,  ou  de  quelque  autre  qui  ait  la  même  for- 
ce.'' Car  nous  ne  trouvons  point  dans  l'Ecriture,  que  le  Père 
foit  appelle  fans  principe,  incapable  d'eftre  engendré  5  nous 
n'y  apprenons  point  en  termes  exprès,  que  le  Fils  foit  confub- 
ftantiel  au  Père ,  ny  que  le  S.  Efprit  (oit  Dieu.  Mais  il  eft  con- 
forme à  la  pieté,  &  même  tres-neceflaire,  à  caufe  des  here- 
flesqui  s'élèvent,  de  tirer  ces  mots  de  plufieurs  autres  cho- 
fes qui  les  établirent,  pour  donner  une  connoiftànce  plus 
claire  des  véritables  fentimens,  &  renverfer  les  fentimehs 
contraires. 

Car  enfin  quel  defavàntage  peut-îl  arriver  aux  fîdelles, 
d'enfeigner  un  même  fens  pieux  par  de  différentes  manières 
de  parler?  Pour  moy  je  ne  le  vois  pas.  Et  les  paflages  que  nous 
avons  rapportez  font  voir  que  les  Théologiens  en(eignent 

'KkKKk 


unanimement  ;,  que  le  pain  fandifîé  eft  proprement  changé  en 
la  fubftance  de  la  chair  du  Seigneur^  ce  qui  eft  la  tranflub- 
ftanciacion.  Car  S.  Juftin  die  ,  quil  a  pu  faire  fon  corps  du  ^ain, 
de  la  même  manière  qu  il  a  pii  s'incarner.  Et  faint  Cyprien  dit, 
que  le  pain  que  J.  C.  donna  à  fes  difciples  e/lant  changé  non  pas 
en  apparence ,  mais  en  nature,  eft  fait  chair  par  la  toute.puijfance 
du  J^erbe, 

Et  Cyrille  de  Jerufalem  à'\t,queJ.C.  ayant  changé  de  l'eau  en 
•vin  en  Cuna  de  Galilée  ,il  mérite  qu'on  le  croye  quand  il  change 
le  'Vin  en  fang. 

Et  en  un  aurre  endroit.  Le  pain  ,^\x^'^^  qui paroijl  rùeft  pas  du 
pain,  quoyqu'il  paroijfe  tel  quand  on  le  goitte,^  mais  le  corps  de  Jé- 
sus CnaiST  ,  S^  ce  qui  paroift  du  vin^  n' eft  pas  du  vin  quoyque 
les  fens  femhlcnt  le  perfuader .,  mais  le  fang  de  J.  C. 

Saint  Ambroife  dit  auffi,  Ce  pain  devant  les  paroles  facramen- 
t  elle  s  eft  du  pain  '■>  (^  après  (lue  la  confecration  a  cfté  faite  ^  de  pain 
il  devient  la  chair  de  J.  C. 

Grégoire  de  NyiTefe  fertdeces  termes,  TVsus  croyons  que  le 
pain  confacré  par  la  parole  de  Dieu  eft  changé  au  corps  de  J.  C. 

S.  Jean  Chryfoftome  dans  l'Homélie  83.  (ur  faint  Mathieu 
dit,  2Vous  tenons  icy  le  rangdes  Miniftres  ^  mais  ceftluy  qui  les 
fanHifie  ^  qui  les  change. 

S.  Jean  Damafcene  dit,  Le  pain  de  propofttion,  le  vinQ^  l'eau 
par  l'invocation  S'-  l-i  prcftcnce  du  S.  Efprit  ^font  changez^furna. 
turcllcînent  au   corps  (y-  au  faivg  de  J.  C. 

Theophylacle  de  Bulgarie  ,  Jefus  qui  aime  les  homncs  ,  con- 
ferve  l apparence  du  para  ^  du  vin ,  (^  les  change  en  la  puiffance 
de  fon  corps  &  de  fon  fmgy 

Or  ce  que  les  anciens  Uoâ:eurs  de  l'Êglife  ont  entendu  par 
devenir,  eftre  fait,  eflre  changé,  &  trarfclementé  ,  ou  s'jl  y 
a  quelque  autre  manière  d'exprimer  cela  ,  les  Théologiens 
d'aprelent  entendent  la  même  chofe  par  le  mot  de  Tranf- 
fubftantiation.  Comme  ceux  làdilenc  que  le  pain  eft  propre- 
ment &  véritablement  changé  au  corps  de  J.C.  de  même  ceux- 
cy  entendent,  fans  aucune  différence,  la  même  chofe  par 
le  mot  de  Tranflubflantiation,  ayant  trouvé  ce  mot  nouveau, 
à  caufe  de  la  nouveauté  de  l'herefie.  Car  un  certain  Beren- 
ger  &:  Tes  difciples,  publiant  que  véritablement  le  pain  rece- 
voir quelque  grâce  du  corps  de  J.  C.  que  Dieu  luy  commu- 
niquoitpar  accident,  mais  qu'il  n'eiloit  pas  fubflantiellemeni 


changé  au  corps  de  J.  C.  au  contraire  qu'il  demeuroit  fans 
eftre  changé,  tel  qu'il  eftoit  avant  la  conlecration,  les  Théo- 
logiens qui  eftoient  dans  le  véritable  feanment,  pour  ren- 
vericr  la  tolie  ,  dirent  que  le  pain  eftoic  cranflubftantié  au 
corps  de  J.  C.  afin  de  montrer  que  quelque  accident  du  pain 
n'efloit  pas  changé  en  quelque  accident  du  corps  de  J.  C  par 
quelque  changement,  mais  que  le  pain  eftoic  fait  fubftan- 
tiellement  le  corps  de  j.  C.  Et  de  même  qu'auparavant  The- 
refie  Arrienne,  on  ne  ie  fervoit  du  mot  de  confubftantiel, 
ny  en  écrivant,  ny  en  parlant,  &  qu'après  qu'il  eut  eu  l'im- 
pudence de  feparer  le  Fils  de  la  fubftance  du  Père ,  ce  moc 
fut  publié  par  les  Pères  du  premier  Concile,  qui  confeGe- 
rent  que  le  Fils  eftoic  confubftantiel,  de  la  même  fiibflauce, 
&uny  fubftantiellement  au  Pere^  pour  renverfer  cc.->  divisions 
de  la  Divinité.  De  même  en  tous  temps,  ceux  c^\:  ont  gou- 
verné l'Eglife  comme  il  faut,  ont  efté  obligez d'invent»  de 
nouveaux  m.ots ,  à  l'occafion  de  quelques  nouvelles  herefies5 
ce  qui  femble  eftre  arrivé  dans  ce  Sacrement.  Car  devant  le 
7.  Concile  prefque  tous  en  ont  parlé  fimplement,  mais  après 
]'an  700.  de  J.  C.  ces  ennemis  des  faintes  Images  s'eftant  aC 
fembiez  à  Conftantinople,  ce  qu'ils  appellerent  fort  mal  à 
propos  le  7.  Concile,  ils  déclarèrent  impudemment  qu'il  n'y 
avoit  qu'une  feule  image  de  J.  C  qui  eftoit  le  pain  de  l'Eu- 
chariftie.  Depuis  ce  temps  là  les  Pères  qui  vinrent  enfuite  , 
commencerez  ta  déclarer  dans  leurs  écrits,  que  lepaincon- 
facré  n'eftoir  point  la  figure  du  corps  de  J.  C.  mais  la  vérité, 
comme  on  peut  voir  dans  le  7.  Concile,  Saint  Jean  Damaf- 
cene,  &  les  autres  qui  l'ont  fuivy.  Et  l'herefie  de  Berenger 
qui  ne  vouloir  pas  que  le  corps  &  le  lang  de  J.  C.  fulfent  fub- 
liantiellement  prefens  dans  les  divins  myfterés,  eftant  venue 
jufques  dans' nos  Provinces,  on  inventa  le  mot  de  pLu^ctuati 
TranfTubflantiation,  qui  fe/on  le  fens,ne  diffère  en  aucune 
manière  du  changement  ,converfion  ,  &  tranfehmentation, 
dont  les  anciens  Pères  fe  font  fervis, comme  nous  avons  dit. 
Si  donc  il  y  a  quelque  perfonne,qui  craignant  de  s'éloigner 
de  la  pieté,  ne  veuille  pas  toucher  aux  expreffions  des  an- 
ciens,  ny  les  chan2;er  en  d'autres,  qui  neanmois  conf-rvent 
entièrement  le  même  fens,  quoyqu'il  fade  une  chofe  ridi- 
cule, néanmoins  pourvu  qu'il  reçoive  ces  paroles  félon  la 
penfée  des  Pères  qui  s'en  font  fervis,  oousne  dirons  rien  de 


contraire  à  cela,  mais  nous  le  recevons  au  contraire  comme 
eftanc  dans  les  mêmes  kncimens  que  nous ,  louans  fa  pièce, 
&  ayant  quelque  condefcendance  pour  fa  fmiplicité.  Mais  je 
ne  crois  pas  auffi  qu'il  doive  s'éloigner  de  ceux  qui  expriment 
le  même  fens  par  desexpreffions  qui  paroitrenc  plus  expref- 
fes  &  plus  éloignées  de  la  duplicité  des  hérétiques  ,  ou  qui 
expliquent  plus  clairement  la  penfée  des  Pères.  Car  c'eft  élire 
animé  d'un  efprit  de  contention,  que  de  dilputer  des  mots, 
quand  on  demeure  d'accord  de  la  lubftance  de  la  chofe. 

Que  s'il  nie  la  Tranfiubllanciation  à  caufe  de  la  force  de 
ce  mot,  à  fçavoir ,  parce  qu'il  ne  croit  pas  que  !e  pain  &  le 
vin  foient  changez  au  corps  èc  au  fangde  J.  C.  alors  nous  le 
rejettons  comme  n'eftant  pas  d'accord  avec  noftreEgliie,  & 
comme  eftant  éloigné  de  noftre  foy,  &  avançant  des  chofes 
abfurdes  de  fa  propre  invention.  Car  nous  avons  receu  de  nos 
divins  Pères  une  autre  doctrine,  qui  eft  que  nous  communi- 
quons au  corps  de  noftre  Sauveur  d'une  manière  fenfible,  le 
voyant  de  nos  yeux,  le  recevant  dans  nos  mains,  le  portant 
à  noftre  bouche  êc  le  mangeant  i  ôcqu'ainfi  nous  fommes  faits 
cuïïacùi^o  d'un  même  corps  avec  J.C.  eftant  nourris  myftique- 
menc  de  fa  chair  ôcdefes  os.  Car  participant  corporellement 
aupain  fenfible,  changé  fubftantiellement  en  fon  corps  parla 
divinité  toute-puilTante  du  Verbe  ,  nous  en  approchonsd'une 
manière  fenfible,  comme  du  pain  &  du  vin  ,  &:  d'une  manière 
fpiritue'le  &;  myftique,  à  caule  qu'on  ne  voit  pas  un  corps  hu- 
main qui  ait  de  la  chair  ôcdesos  ;  qu'il  ne  fortifie  pas  les  cœurs 
de  ceux  qui  le  reçoivent  corporellement,  félon  la  manière  des 
autres  viandes  corporelles,  mais  fpirituellement  par  fa  Divi- 
nité, qui  comme  on  a  dit  y  eft  contenue. 


TABLE 


TABLE    DES    MATIERES 

CONTENUES    DANS   LES   TROIS  V  O  LUMES 
de  la  Perpecuicéj  &  dans  la  Rëponfe  générale. 

JLepremier  nombre  marque  le  Tome  ,   le  fécond  Livre ,  le 
troijiéme  le  Chapitre  ,   le  dernier  la.  fa  y:. 

R.  G.  marque  la  Rèponfe  /générale. 

On  a  marque  les  pages  du  premier  Volume  félon  la  troijîéme 

Edition ,  parce  que  les  chiffres  ne  continuaient  pas 

dans  les  deux  premières. 

A 


B  D  1 1  s  n  Patriarche  des 
Neftoriens   reiini   au  Pape, 

.  1.  f.  c.  le.  p.  389. 

■ihrcgement  des  paxoles  con- 
formes   a   l'inclination    des 


ment  traittés  par  Daillé  i.  1.  i,  c.  11.  p. 91 
^hjjfuis  Témoignages  de  trois  ^bj'- 

fr.s  fur  l'Euchariftie  ,  i.l.j.  c.  15.  p,  40* 
jéccidem  eflentivls,  1,  f.c.S.  p.  lyS 
^dions  contraires  à  des  atîtions  cxte- 


hommes,  foûtenu  contre  les  Sophifmes  rieures  de   refpeCi    peuvent  marcjucr  un 

de   M.  Claude  r.  g.  1.  z.  c.  if.  p.  îifi.  que  plus  grand  refpe^l:  ,  i.  1.  j.  c.  4.  p.  ;îé 
l'on  s'en  eft  toujours  fcrvi  dans  les  ma-  filions  de  refprit  connues  jufqu'a  u« 

ticres  de  Religion,   $%(,.   que  félon  M.  certain  point,  combien   ildlaiféde  s'y 

Claude  tous   !es   Auteurs  Ecclefiaftiqucs  embroUiller  2. 1. 1.  c.  i.  p.  148 


le  n;roient  feroient  fervis  de  paroles  abré- 
gées d'une  niamere  contraire  au  (ens 
commun  ,  p.  51',. 

^bfence  réelle  peut  eftre  conçue  lans  nier 
formellement  la  prefence^i.  1.6.  c.  i.p.4 1  ? 
J.  C.  abfent  &  prefent  de  nous  lêlon 
fon  corps  en  divers  fens,).l.  C.  c.  ii.p,  545 
que  ce  langage  cft  commun  auT:  nou- 
veaux Auteurs  &  aux  Pères, p.  414  &:c. 


.^da-m  Supérieur  des  Religieux  de  Ca- 
riée cnvové  au  Pape  par  le  Patriarche  des 
Neftonens,   i.  1.  f.c.  10.  p.  550 

Son  écrit  pour  allier  la  foy  de  fa  nation 
avec  celle  de  l'Eglilè  Romaine, /^.•^.  p.î^l 

Argumens  négatifs  &  pofitifs  pour  la 
rranifubflantiation  tirez  de  la  conduite  Se 
des  écrits  de  ce  Légat,  ibid.   p.  ^^j  393, 

^//f/.;/<^e  Impératrice,    (es  mœurs  oc- 


^bflinencc    des   viandes   commandée      cupcnt    prcfque  tout   le  dixième  lieele. 


dés  le  quatrième  &  le   cinquième  fiecle 
félon    les  MiniftreSj    i.  1.  i.c.  i  i  p.  91 
n'a  pu  eflre  obfetvée  félon  eux  par  qui 
que  ce  loit  fans  apofla/îe  ,  ihid,  p.  95 
Ceux  qui  l'ont  commandée  outrageufe- 


adore  l'Eucharilbe  en  mourant  ,  fa  vie 
écrite  par  faim  Odilon,  1. 1.  9.  c.  rf.p.  C184 
^debnan  marque  que  de  Ion  temps 
tous  les  Allemans  elloientdans  la  dotiri- 
ne  de  la  prelence  réelle ,  1. 1.  9.  p.  -nf* 

KKkkk 


Su 


TABLE   DES  MATIERES. 


adoration  véritable  en  quoy  confite. 
Deux  fortes  d'adoration,  i.  1.  7.  c.  9, 
p.  54f- 

adoration  de  l'Euchariftie  prouvée 
avant  l'Epoche  chimérique  de  M.  Clau- 
de, 1.  10.  c.  9,  par  les  Pères  ihid, 

^doration^  prouvée  parmy  les  Grecs , 
&  à  l'égard  des  Mofcovites ,  1. 1. 10.  c.  j, 
p.  779-  &  des  Arméniens  i.  1.  10.  c.  9> 
p.  779. 

adoration  enfermée  dans  la  prelènce 
réelle  ,  mauvais  railonnement  de  Mon- 
/îeur  Claude  fur  ce  fujer,  i.  1.  10.  c.  9-, 
P    7S7- 

adoration    fouveraine   non  attachée    à 
aucun  fli^ne  ,  itid. 

^d.orariott  le  fait  plus  tard  dans  FEpili- 
fe  Grecque  que  d.ins  la  Latine,  raifon  de 
cette  difcipline,  T.  l.io  c.  9.  p.  778. 

^Vitfius  Moine  du  Mont  Athos  a  fait 
divers  ouvrages  qui  font  dans  la  Biblio- 
thcque  de  fainte  Geneviève  ,  cite  luy- 
mefme  fon  livre  du  falut  des  pécheurs 
r. g.  1.  I.  c  II,  p  778.  Approbation  de  ce 
livre  pat  les  Supérieurs  du  mont  Athos, 
ibid    p.  779.  par  l'Eglife  de  Siphanto,  j,, 

1.8.  O.^ 

Son  témoignage  pour  la  prefence 
réelle  &  la  tranlfubflant,  i.  1.  4,  c.  «.p» 

nr- 

Réfute  les  objeiflions  ordinaires  des 
Calviniftes  ,  i.Lii  p.  49. 

Extrait  de  fon  livre,  i.  1.  ii.  p.  45. 

Alexandre  Gaguin  fur  les  Mbicovites, 
».  l.f.c.  r  p.  541. 

Alexis  Commene  zélé  contre  les  héré- 
tiques a»  raport  de  fa  fille  ,  I.  1, 1.  c.  II, 
p.  i7(;. 

alliance  ne  peut  eftre  ellablie  en  ter- 
mes métaphoriques  obfcurs,  1. 1. 1.  c.  17. 
p.  140. 

^kemati-ue  fâcheufe  pour  les  M'ini- 
ilres,  ou  faint  Bernard  eft  un  fourbe^  ou 
ils  font  hérétiques  ,  i.  1.  u.  c.  i.  p.79(î. 
^malarius  parle  fur  l'Euchariftie  le  lan- 
gage des  fens,  1. 1.  8.  c.  +.  p.  f  69.  &  ce- 
luy  de  la  foy,  p.  f7i.  J75.  item  c.  7.  p. 
io(,. 

^mttlarlus  peut  eftre  jnftement  accufc 
de  Stercoranifm?,  i .  1.  8.  c.  u.  p.  8  5  3. 

^mbajjadeitr  d'Angleterre  mal  infor- 
mé de  la  créance  des  Mofcovites  r.  g.  \. 
".  c.  t4.  p.  ll«. 

^/wii/r«//(?' des  termes  caufe  ordinaire 
des  disputes,  d'où  vient  qu'il  y  a  tant  de 
îfrmes ,  j.  1.  6.  c.  i.  p-  346. 

^mhigttiti  des  niots   de  manger  âc 


boirej  thtd,  ;4.7. 

^;«f».fens  de  cette  parole  dans  la  recep-- 
tion  de  l'Euchanllie  1. 1.  i.  c.  6.  p,  44^ 
&  fuiv. 

Avanônincf  figure  >  fa  nature,  peut 
avoir  lieu  dans  le  célèbre  paffage  de  Ter- 
jullien  contre  Marc  ,    ;.  1. 1.  c.  5.  p.  S6.. 

^tajfa/e  Sinaïre  ,  temps  où  il  a  vefcuv 
a  crû  le  corps  de  J.  C.  corruptible  dans 
l'Euchariftie.  p.  480. 

^ndroni^ue  fils  de  Michel  renouvelle 
le  (chilme  ,  prive  fon  père  des  honneurs- 
funèbres  deus  aux  Empereurs,  1. 1. 3.  c.  4» 
p.  115. 

Excez  de  la  paffion  des  fchifmatiques 
conrre  les  Latins  &  ceux  qui  les  avoient 
fuivis, nulle  mention  de  la  tranf./W.  izfi 

^ngelonus  Benediftin  fur  l'Euchari- 
ftie j  1. 1.  8.  s.  4.  p,  571. 

^nne  Comnine  montre  dans  (on  his-- 
ftoire  qu'il  n'y  avoir  aucun  différend  en-- 
tre  les  Grecs  &  les  Latins  fur  la  prefence 
réelle  &  la  tranfubft.  1.  1.  r.  c.  lo.p.ifitf. 
anonyme  du  P.Ctlot  a  velcu  dans  l'on- 
zième fiecle,  1.1.  li.p.  ly 

^rstitjjie.  terme  d'^nt/tyfe  a  un  double 
fens.  peut  eftre  affirmé  &  nié  fans- 
coutradicîlion  ,  1. 1.  7.  c.  z,  p.  474 

^fologiflei  de  la  R^'ligion  chrétienne,, 
leur  procédé  félon  S.  Jcrôme,3,  \.  7,  c.  4, 
P,49i 

^^f offres  n'ont  point  fait  de  queftions. 
fur  le  fens  de  ces  paroles  :  Cecy  efl  morf 
Corps  ,  &  ils  les  ont  prifes  pour  claires,, 
1.  1.  I  c.  17.  p.  141 

^fojîres  fîmples  &  dociles,refpe(îlueuT, 
incapables  de  prendre  des  paroles'en  des 
fens  éloignez,  /^/^.  &  i.  I.4.  c.  «.  p.  37) 

^rcudius  àz  naturel  aigre,  fait  des  re- 
proches injuftes  aux  Grecs  fur  l'adora- 
tion ,  1. 1.  10.  p.  777 

^rgumens  négatifs  de  divcrlês  fortes,, 
5.1.  ?.  CI.  p.  4.f4. 

La  nature  de  ces  argumcns  mal  connue 
par  M.  Claude.  Ses  mauvaifes  maximes- 
fur  ce  fujer,  p.  45-f 

^rgumens  tirez  du  filence  d'un  fëul' 
auteur  en  un  feui  point  foible.  5.  1.  7.C.  f;. 
p.-,(oi  ,. 

arméniens  fchifmatiques  ,  lieu  de  la 
tefidence de  leur  Patriarche,  i.  1.  2.  c.j. 

Leur  difcipline  touchant  le  jeûne  ihii. 
temps  de  leur  fchifme,  p.  114. 
T runes  ^rmtn -ens  ca t  l.oliqucs.  ■  efî  ien— 

ce dekur  Patriarche,  I..'.  i.c.j.p  n.  3 


TABLE   DES 

^rjnettieHS  ,  Cérémonies   qu'ils  prati- 
quent à  la  Mcflc.  1. 1.  II.  p.  Si 
arméniens  accufez  injuftement  de  ne 
point  croire  la  prcfencc  réelle  par  divers 
Auteurs,  mais  injurt:emcnt,i.I,j.  c. y. p.iXi 

Source  de  cette  accufation ,  erreurs  qui 
leur  (ont  imputées  devant  Benoifl:  XII. 
dont  celle-là  fait  partie  ,  p.  jSj. 

Cette  erreur  détruite  par  leur  liturgie, 
p.  3  S+.  dcfavoiiée  par  le  Roy  d'Arménie, 
p.58f 

accufation  renouvellée  devant  Clé- 
ment 6.  détruite  par  la  déclaration 
CïprciTe  du  Patriarclied'où  elle  peut  eftre 
«ce,    p.  585 

CIcment  V  I.  envoyé  un  formulaire 
.âi:x  Arméniens,  R.  g.  1. 1.  c.17.  p.  171 

Plainte  de  ce  Pape  contr'eux  ,  171 

Jugement  fmcere  de  l'information  de 
Benoift  XII,  &  de  toute  cette  affaire, 
R.g.  I.i.c.  17.P.171 

Erpreffions  des  Arméniens  rejettées 
înjiiftement  par  les  Théologiens  de  Ro- 
me, r.  g.  1. 1.  c.  17.  p.  175.176 

Que  cette  accnfation  détruit  la  poli- 
tique que  M.  Claude  impute  aux  Latins. 
R.g.  1. 1.  c.  1  f .  p.  lié 
,  La  créance  des  arméniens  fur  l'unité 
d'une  nature,  R.  g.l.  i.c.  1  y.  p.  ij9 

^rmeruem  n'ont  point  cru  que  le  corps 
-de  J.  C.  fût  détruit ,  i.  1.  5,  c.  (t.  p.  361 

Preuves  qu'ils  ont  cru  laprefence  réelle 
•jusqu'au  1 4.  (îecle.  1. 1.  f .  c.  tf.  p.5é5 

Commerce  des  arméniens  avec  l'Egli- 
fe Latine  1. 1.  5.  c.  S.  p.  366 

arméniens  difoicnt  que  le  corps  de  J. 
C  dans  l'Euchariftieeftoit  le  corps  de  la 
Divinité ,  1. 1.  5.  c. <>.  p.  5f 9 

arméniens  s'unilfent  avec  le  Pape  au 
Concile  de  Florence  d'une  manière  qui 
fait  voir  qu'ils  croyent  la  pretence  réelle, 
I  1.  f.  c.  -7.  p.  371 

Objedlions   fur  la  créance  des  ^rme- 

Biens  de  ce  dernier  tempSj  i.l.ç.  C.8.P.378 

^rgîimens  à  quatre  termes  fur  le  mot  de 

tec-^  fait-;  par  tous  les  Miniftres  ,  i.l.  1. 

C.5.  p.  176 

^rgume/js  qu'on  auroit  pu  tourner  con- 
tre les  clirefliens  ,    471 

^rnobe  Catéchumène  ,  &  par  confe- 
quent  ignorant  dans  les  niyfteres ,  3 . 1.  7- 
c.  4.P.4S7 

S;s  crrîurs,  ibid,  &c. 

articles  de  foy  ne  peuvent  eftre  établis 
en  termes  métaphoriques  quand  la  meta- 
plore  feroit  obfcure.  Faux  exemples  allé- 
guez par  les  Miniftres,  i.l.  i.  c,  17.  p.  113 


MATIERES.  gr5 

^Jfomfrtcn  du  pain  par  le  Verbe  impu- 
tée par  Blondel  à  S.  Jean  de  Damas  fur 
des  raifons  frivoles,  i.l. 7. c.ro.  p.  f  f  i.&  pat 
M.  Claude  à  Jean  de  Paris,}.!.  7,c.  i 

^thenugore  n'i  point  eu  intention  de 
traitter  les  dogmes.  Points  dans  lefquels 
ils'eft  renfermé,  3.I.  7.C.  4.  p.  48* 

yl-vantages  de  la  caufe  de  î'Eglife  fur 
celle  des  Calviniftes  avant  l'examen  d» 
fond  ,  1.  l.j.  c.  I,  p.  n6 
^ubertin  fon  livre  n'eft  point  le  premier 
fujet  de  cette  contcftation  ,  i .  1,  i.  c.  i ,  p 
13.  &c. 

Pourquoy  ileft  difficile  d'y  répondre, 
I.I.7.C.     p,  499 

jiMhertin.  retranche  onze  lignes  d'ua 
palfage  après  avoir  fait  profeflion  de  le 
rapporter  tout  entier,  i,l.  6.  c,  8.p.(^4j 

Prétend  éluder  tous  les  palfages  des 
catholiques  par  d'autres  expreflîons 
aulquelles  il  les  compare  ,  produit  lii 
vingt  palTager  pour  éluder  ceux  qui 
marquent  le  changement  du  pain  au  corps 
de  J.C.  1. 1.  (1,  c.  5.  p.  <!04 

Prouve  vainement  que  les  mots  de 
changement  &c.  ne  (îgnificnt  pas  tou- 
jours un  changement  fubftanciel.  Inuti- 
lité de  ces  paifages ,  1  1.  é.  c.  4.  p.  Sio 

Raifonnement  d'Aubertin  où  il  n'y  z 
pas  de  fèns  commun  ,    5,  1.  j.  c.  4,  p. 

Réfutation  de  fa  principale  objeftio» 
fur  Thcodoret  à  l'égard  de  la  prefence 
réelle, 3. 1.  f.c.  4.  p.  i(;4 

Sophifmes  d'Aubertin  fur  le  même  (ît- 
jet,  3.1.?.  C.4.  p.  16g  &  c.  3.  p.  170 

Reconnoift  que  le  fens  de  la  tranfliii». 
au  pu  venir  dans  l'efprit ,  p.  i6y 

Sa  mauvaife  foy  fur  Thcodoret,  3.!, 
r.c.  14? 

Solutions  d'Aubertin  fondées  fur  des 
fens  impertinens  qu'il  lui  pUift  de  donner 
aux  termes,  3.  1.  É.c.  i.p.  3  v6  &c.  f.p. 
879.  &?8'..    3«6 

^uflerite  utile  ,  i.  1.  i.  c.  j.  p.  ro? 

auteur  de  l'hiftoiredel'Euchariftie  a 
pour  caradere  l'inaplication.Deux  exem- 
pl«s  remarquables ,  1, 1.  6.  c.  u.  p.  6j-f 

auteur  de  la  réponfe  à  l'Office  du  laint 
Sacrement.  Sa  confiance  ,  i.I.  i.c.  j.p.f/ 

auteurs  font  le  portrait  de  leur  efpriï 
en  faifantceluy  des  chofes  dont  ils  écri- 
vent, 1.1.7,  f.p-4!^8 

^«/exri  peuvent  u(êr  des  mefnies  ter- 
mes en  des  fens  fort  difterens.  Comment 
on  les  diftingue  ,  j.;l  3.  c  i.  p.  14  6  &'c. 

auteurs c^xowt  parlé  de  l'Euchariftie^ 

KKkkk    ij 


Si4  TABLE    DES     MATIERES. 

comme  Theodoret,  éclaircis  par  les  me 
mes  lolucions ,  3. 1, 5.  c.  10,  p.  3 14 


E 


Byiftefme  a  dû  produire  de  jurandes 
métaphores  ,  &  avoir  pluficurs  ex- 
prellions  communes  avec  l'Euchariftie, 
1.1.6.0.  if.p.  717 

Pourquoy  les  effets  du  Bttftefme  ne 
niartiuent  point  la  prefence  réelle,  &L]ue 
les  effets  attribués  à  rEuch.itiftic  la  mar- 
quent, i.l.  6.  c.  if.p.  718 

EiFet  du  Batcme  inteliigthle  ^  mifs 
différent  de  celuy  de  l'Euchariftie,  1. 1.6. 

c.  If.  p.  7^0 

B'iptc/me^ie^Wzz  &  veriré  à  l'égard  «les 
Sacremensde  l'ancienne  Loy  fanstrani- 
fijb!Kint.  1. 1.  6.  c.  If.  p.  750- 

fondement  de  diverfes  métaphores 
touchant  le  B.iptêmCj  7^1 

Djfftrence  des  exprt (Tions  des  Pères  à 
l'égard  du  Baptême  &  de  l'Euchariftie , 
ï.l.  6.  c.  if.  p.  711.  &  fuiv. 

M.  Baron  Coniul  d'Altp  confirme  par 
fà  fignatute  la  vérité  des  atteft.itions  des 
Grecs  d'Antioche  ^  des  .Syriens,  des  Ar- 
méniens d'i\lep  j  I.  1.  II.  p.  56.  81.  SI, 

Btiftle  Archevefquc  de  ThelFilor.ique, 
fa  moicration  ,  protclte  que  les  deux 
Eglifes  lont  unies  dans  la  foy,  1. 1.  i.  c.  10, 
p.  I6>^. 

Bede  parle  le  langage  des  fcns  &  ce- 
luy  delà  foy  ,  1. 1.  8.  c.4.  p.  po.  sTi- 

Berenger  n'avoit  tiré  fon  (cntiment 
d'aucun  auteur  de  fonllecle,  i,i.  9.  c.  i. 
p.  6y6 

Son  opinion  regardée  comme  nouvelle 
&  inoiiie ,  ibid.  n'a  pas  eu  grand  nombre 
de  partifans, /^/^.  6f7 

Sereng.irïensr\i  (ê  font  jamais  prévalus 

du  confentenient  d'aucune  EgIi(e,difoient 

que  l'Eglife  eftoit  perie,  r.  1. 1.  c.7.  p. 171 

Combien  ce  filence  eft  convaincant , 

p.i4i 

Bertram  n'a  point  combattu  direde- 
mcnt  ladoûrine  de  Pafcafe.  Qiie  fon  li- 
vre eft  fait  contre  d'autres  adverfaires  j 
preuves  claires  pour  ce  point,:.  1.  8.  c.  ir. 
p.  638 

Diff.-rences  de  ces  adverfaires  combat- 
tus par  Bertram  ,  &  de  Pafcafe  ,  p.  640. 
641 

Que  le  livre  de  Bertram  doit  eftrede 
nulle  canfideration  pour  la  decifion  des 
differens  entre  les  Catholiques  &  les  Cal- 
viniftcs»,  n'a  commencé  de  paroiftrc  fous 


fon  nom  qu'à  la  fin  deronziriïie  fïêcle, 
qu'il  eft  pollible  qu'il  n'ait  point  efté  pu- 
blié durant  fa  vie,  i.  1.  u,  p.  1?.  f^oyexj 
Jean  Scot 

Véritable  difficulté  du  livre  de  Ber- 
tram non  entendue  par  M.  Claude,  i.T. 

Il,  p.  51.33. 54.  55.  ,(•■  57 

Bejfirion  au  Concile  de  plorence.  éta-- 
blit  la  tranilubftanti.uion  écrivant  con- 
tre Marc  d'Ephefe,  fait  voir  clairement 
que  l'Eglife  Grecque  eftoit  d'accord  avee 
la  Latine  fur  le  doi/me  de  la  tranlfub.!,  1, 
4.C.  i.  p,  176 

Bizarrerie  des  Miniftres  qui  font  pen- 
fer  tous  les  hommes  en  un  certain  temps 
d'une  certaine  façon  ,  &  d'une  autre  en 
un  autre,  1. 1.  6.  c.  ii.p.  9J 

Blondit,  fon  fonge  fur  l'introduélion 
prerendue  des  Evtlques,  i .  1. 1  c.  8.p.74 

Avoue  que  la  prééminence  des  Evef- 
ques  eftoit  reconnue  par  tout  à  la  fin  da. 
Iccondfîecle,  i.  ).  c.  S.  p.  is 

Bogomiles  hrretiques  nioient  l'Euchari- 
ftie,  I.  l.i.c.ii.p.  776 

Bre-uetè  authorile  certaines  expreffions 
i.  1.7.  c.  5.  p.  Soi 

Bucer  Dominicain  apoftat  auteur  de 
l'eftat  politique  de  l'opinion  Zuinglien- 
ne  ,  taxé  de  timidité  par  les  Calriniftes, 
l.l.  I.c.  4.  p. 41,  Cache  la  différence  des 
Calviniftcs  &  Luthériens  dans  la  confef^ 
fion  de  Strasbourg  ,  ilud.  Prétend  qu'il 
n'y  avoit  point  de  différend  entre  eux  fur 
ce  point,  41.  Defavolic  parles  Luther 
riens,  donne  lieu  de  croire  qu'il  admet., 
toit  la  prefence  réelle ,  p.  41..  tnperfuade 
Luther  à  Coburge,  p.  43 

Artiffce  de  Buccrpcu  approuvé  à  Bafle, 
47.  Miniftres  Ziiinglicnsfc  laiffent  ga- 
gner .  leurs  équivoques,  jo.  Voyez  Coiv- 
cordede  Vvittemberg.  Luther. 


CAbasilas  fleurit  fous  Cantacuzené 
ennemy  des  Latins. Ses  paûages  pour 
laprefenceréelle  &  la  ttanffubftant.i.  I.5. 
c.  8.  p.  145.  fa  dodriiie  particulière  fur  iè 
facrifice. 

Erreur  de  M.  Claude  fur  cet  Auteur, 
p.  149.  livre  de  Cabafïla  de  la  vie  de  J.C. 
Beaux  paffages,  p.  ifi 

Erreur  de  Grammaire  reprochée  in- 
iuftement  par  M.  Claude  fut  cet  auteur, 
R.G.  1.  i.p.  487 

Caietan  a  cru  que  l'on  pouvoic  enten- 
dre ces  paroles  .-  (ecy  ejl  mon  corfi  en  ua- 


TABLE    DES 

iéns  de  figure,  &  pouRjucy  i.  1,  2.  c.  } 

Calomnie  dç  M.  Claude  contre  Arcu- 
dius,  en  luy  imputant  d'avoir  nié  que  ics 
Grecs  adorent,  i.l.  10.  c.  9.  p.  776 

Calomnie  ,  que  l'on  air  enfermé  l'im- 
poffibilité  du  changement  de  créance 
dans  les  feuls  myller>.'s  populaires,  1. 1.  i 
c.  7.p.  6S 

Calomnie  de  Mon/leur  Claude  qui  at- 
tribue au  Pape  Alexandre  7.  d'avoir  fait 
Une  herefîe  de  l'opinion  de  faint  Bernard 
fur  la  Conception  de  la  Vierge,  i.  1.  9. 
c.  9.  p. 7  08 

Calomnie  de  Monfieur  Claude  contre 
l'auteur  de  la  Perpauitc  ,  qu'il  n'ccrivoit 
que  par  politique  de  l'EuchanlIie,  1.I.17. 
c.  9.p.  Sif. 

Autre  calomnie  ,  d'imputer  au  mefme 
auteur  du  chagrin  contre  les  myfteres,  r. 
1.  I.  10.  p,  8l8.  l^ojeiL  M   Claude. 

Calomnie  contre  l'auteur  de  la  Perpé- 
tuité fur  l'infaillibilité  de  l'Eglife,  R,  G. 

1.  l'.t.  7.  P.Î95 

Camatei-e  Patriarche  de  Conflantino- 
ple  j  n'eft  blalmé  que  de  foibleife  par  Ni- 
ceras  Choniate ,  &  c'efl  une  vifion  d'Au- 
Kettin  qu'il  ait  cru  les  myîlcrcs  corrupti- 
bles. I  1  i.c.  14.  p.  194 

Caraéleres  divers  du  fens  catholique  & 
du  fens  calvinifte  fur  ces  paroles ,  cecj  efl 
mon  corps.,  1.  I.3.  c.i.  p. 141 

Ceifauhon.  1«  fentimens  (urles  CalviniC- 
tesj  principalement  lur  du  Moulin,  i.l-i. 
c.î.p.48.49 

Catechijme  de  Conftantinoplc  en  grec 
vulgaire  où  la  tranll'ubftant.  cft  expri'- 
mée  en  termes  formels.  R.  G.  1.  i.  c,  9, 
p.  118,  Autheritéde  ce  livre,  p.  1  jt 

Catholiques  peuvent  tomber  en  certai- 
nes erreurs ,  non  en  d'autres ,  en  demeu- 
rant catholiques ,  1.1.  6,  c.i.  p.  481 

Catholiques  comment  doivent  cftre 
dilpofez  a  l'égard  dei  Caviniftes,  i.  1,+. 

p.  846 

Catholiques  obligez  à  la  retenue  en 
écrivant  contre  les  hérétiques^  i.  1, 1.  c.i 
p,790 

Crf/W/^««  ont  droit  de  fuppofer  que 
les  paflàges  des  Pcres  qui  peuvent  rece- 
voir leur  fens  l'ont  en  effet  en  vertu  du 
confentement  prouvé  de  toutes  les  Eglifes 
dans  leur  doctrine  depuis  mille  ans ,  r, 
1,10. c. y.  p.  748 

C*rW/5'«f i  n'enfeignent  point  que  c«s 
paroles,  cecjejf  mon  corps  11e  /igiiitient 
iienj'.î.,l.  1.  c.  3. p.  175. 


MATIERES.  8,5 

Cal-un,  .ivoue  que  tous  les  Pères  fe  font 
trompez  lur  la  prière  pour  les  morts,!. l.i. 
c.  j.p.  ïi 

Cahi/ti/me  ou  dodrine  des  Sacramen- 
taircs  traitté  d'hcrtfie  au  commtncc- 
mentde  l'ouziéme  (îécle  ,  1.  1.  9.  c.i, 
p.  * !i 

Qu'il  y  avoit  lors  peu  de  perfonnes 
qui  erraiiént  fur  rEuLhanlbe  ,  &  qu'ils 
efloient  regardez  comme  des  Novateurs 
en  ce  tcnips-là  ,  ihid.  p.  éf4 

Cal-jinijlcs  n'ont  pu  lo'uer  Cvrille  Lu- 
car  fans  trahir  leur  confcieiice ,  i.  1.  4. 
e.  n.  p.  ;u 

Cal-uinifies  appellent  toutes  les  autres 
fedes  du  nom  de  leur  feâe  ^  &  ne  veu- 
lent pas  fouffrir  qu'on  les  nomme  Calvi- 
nifles,  1. 1.  lo.c.  i.  p.  803 

Calviniftes  anciens  ont  reconnu  que  le 
fens  cpe  les  Catholiques  donnent  a  ces 
paroles  cecy  efl  mon  cerfs ,  ePLoit  clair. 
Divers  degré  de  phantailie  par  où  ils  ont 
paffé,  1.1.  1,  o,  i.p.  I4(; 

Cahiniftes  interrogez  juridiquement 
par  Luther  à  la  conférence  de  Vvitani- 
berg,i.  l.i.c. +.p.  49 

Se  trompent  en  îout  dans  l'explicnion 
de  ces  paroles ,  cecj  efl  mon  corps  ,  1,  1. 
i.c.i.p.i64.  Ils  renferment  l'examen 
des  controverfcs  dans  la.  feuk  écriture , 
t.\.  i.c.  r.p.18' 

Rejettent  les  Pères  &  les  ConcilesaTcc 
infolence  ,  p.  19 

CJualité  des  premiers  Miniftres  CaU 
vinillcs,  p.  10,  &  11 

Témérité  de  cette  voye  reconnue  par 
Melanûon,  i.  1.  i.  c.  1.  p.  1;.  14 

Seîle  des  Calviniftes  fondée  fur  un 
jugement  injufte  &  précipité.  Qu'ils  ont 
attiré  les  peuples  à  eux  par  des  faulfes 
promelTcs  de  la  venté  comme  les  Mani- 
chéens,  1.1. 1.  p.  i« 

Cahinifles  ne  fçauroient  efperer  de 
falut  qu'en  luppofant  que  faint  Ambroife 
&  faint  Auguftin  &  pluiieurs  autres  Saints 
ont efté  des  fourbes,  i.l,  i.c.'i6.  p,  85 
y,  alternative. 

Les  Calviniftes  ont  befoin'  d'une  évi- 
dence perfonnelle  à  l'égard  de  tous  les 
points  de  foy  pour  lefquels  ils  condam- 
nent l'Eglife  Romaine,    i.l.  ic.  e.p  6} 

Perlonne  ne  fc  fait  Calvinifte  par  rai- 
fon,  1. 1.  I.  C.3.  p.  ?4- 

Cafuimfles    ont  alTcz  e'j  de  grandeur 
humaine,  &•  n'ont  eu  aucune  ombre  de 
gtandeur  divine, i,  1. 1 1.  c.  t.  p.  S    i. 
Cahiniftes  fcparent  les  veiitez  aulic'l 
KKkkk    lij 


tld 


TABLE   DES     MATIERES. 


de  k-s  unir,  1. 1. 5.  c.  y.p.  301 

Cal-uinilles  qui  prouvent  (împlement 
qu'un  palfjge  (n  peut  prendre  en  leur  fens 
ne  prouvent  fien,  1.  1. 10.  c.  f.p.  74^ 

Leur  hardieire  à  nier  les  chofes  tbires, 
utilité  qu'on  en  peut  tirer  ,  i,  1.  4.  c.  4. 
p.  t8i. 

Pour  eftre  Calvmiftes  ,  il  faut  avoir 
l'eCprit  faux  &  rcmuanr,  i .  l.S.  c.é.  p.  J  9<; 
Catvtnifies  rai'bnnables  ne  peuvent 
dcfaprouver  le  procédé  qu'on  a  renu 
contre  eux,  i.l.  6.c.II■p.S4■'• 
Crf/■D/»'/?e■f  ont  anathemrvtilé  avec 
grand  foin  l'erreur  qu'ils  appellent  »«a!rf 
y^»rf  tenue  par  les  Sociniens,  &  ils  font 
néanmoins  dans  l'impuillince  de  les  ré- 
futer fur  ce  point ,  1. 1.  i.c.   8.  p.  67-  (îî? 

/'S'- 
il cft  douteux  fi  les  Calviniftes  ne  font 

poinr  cng'gez  dans  l'hereiîc  des  fignes 

nuds  II  fouvent  an:itheniatizée  par  eux  , 

3..  1.  I.  c.  10.  p.  ,81. 

Enfeignent  que  les  Sacremcns  n'opè- 
rent que  dans  les  élus  ,  1.  1.  i.  c,  io_ 
■p.  S5 

Q_^ic  le  Baptême  ne  produir  quelque- 
fois foneffer  que  dans  la  vieilkire.  Ikij. 

Cahiinijies  ne  fç.iuroient  prouver  par 
l'Ecriture  l'efficace  jointe  à  l'Eucliariftie, 
en  l'expliquant  dans  un  Icns  figuré,  7)  Ç^ 
fut-v.  Item.  c.  9.  p.  78.  Çj  fun. 

Cal-vinijies  ne  peuvent  s'empefcUer  de 
dourer  du  fens  de  figure ,  que  par  un  en- 
te ftcmencdéraifonnable,  i./o-^/ip.  4 

Deux  clefs  des  Calviniftes  pour  lé  dé- 
mefler  des  paflages  des  Pères, i.l  i.c.  9. 
p.  I    t. 

Caufes  Phyfiques  agilTent  par  la  pofition 
de  leur  fubftance.  Efficace  PhyCquc  de 
l'Eucliariftie.i.  1.5.^.  î.  P-4!;9 

Cjcufe  Phylîque  doit  une  fois  avoir  efté 
unie, mais  iln'eflpas  neceifaire  qu'elle  le 
foit  toûiours ,  1.1.  r.c.  4.p.  Î15 

On  peut  eftre  caufc  de  foy-même  à 
l'égard  d'un  certain  eftac,   %.  1.  c  c,  7. 

p.  "53.3. 

Célibat  des  Prsffres  injuftemcnt  atta- 
qué par  Monfitur  Claude,  gardé  par  les 
Doaatiftes,  1. 1.  9  c,  7.  p.  701 

Celfus.  qu'il  n'eft  point  certain  que 
iK>us  avons  tous  fes  livres  contre  les 
Clirefticns,  }.\.6.  c.  5.  p.  479 

Combien  il  eftoit  ignorant  dans  les 
dogmes  des  Chreftiens,  iliid.  p.  .^.So  481 
Qi^i'il  cft  très- probable  qu'il  n'i  point 
connu  l'Euchariftie,  p.  48^. 


Ceci  eft  mon  corps.^  pris  en  divers  fens 
par  les  Sacramentaires  fuivit  des  raifon- 
ncmcs  metapliyliques ,  i.  1. 10.  p.  71I 

Double  ffry  dans  cette  propofîtion.  Ce- 
cj  ejl  mon  corpi .,   t.  1. 1.  C.  1.  p.  1(7, 

Kîtrai  fignifie  aufil  bien  eftre  mis , 
eftre  prefent  ^qu'eftre  gilant.  i.l.  7.0,4. 
p.  810. 

Ccnjeurs  de  Rome  n'ont  point  eu  dç 
parc  a  rimprefTioa  du  texte  Ethyopien 
du  cd.nowuninjerjtiiis  .^x.^z,-  1.  t.  c,  J5.  p, 

Objeiftions  de  M.  Claude  fondées  fur 
des  alterarions  de  ce  texte  dans  la  ver- 
fion  ,  148.  149. 

Cerul.iriHs.  fon  différend  avec  le  Pape 
Léon  9.  prouve  que  les  1 ,  Eglifcs  eftoient 
d'accord  fur  la  rraulfubftant.  i,l.i.c.  5. 
p.  113.  G?  /«'•". 

CeruLinus  excommunié  par  les  Légats 
du  Pape  ,  les  veut  faire  alfommer.  Ecrit 
à  Pierre  Patriarche  d'Antiocbe.  Ses  accu- 
fations  contre  les  Latins,  nulle  fur  la  pre- 
fciKC  réelle,  &c.  i.  l.i.  c.  f,  p.  119 

M.  Claude  confond  deux  Lettres  de 
Cerulanusenune  T.  g.  1. 1,  c.  10.    p.  43S 

Ch.iiràc  j.  C.  vivifie  immédiatement 
fdon  les  Pères  i.  l.J.c.é.  p.  515, 

Ci.iOT/fr raille  avec  infolence  les  Catho- 
liques fur  les  divers  fens  qu'ils  donnent  4 
cette  propofition ,  ceci  eft  mon  corps  1, 1, 

i.c.i.  p.  7fi 

Impudence  du  même  Clianiier  ^  1.  l.i. 

c.  lé.p.ir? 

Chungemens  infenfibles  alléguez  pat 
M.  Claude  nullement  femblables  à  celuy 
qu'ils  prétendent  eftre  arrivé  fur  l'Eucha» 
rifti^,  I.  1.9. CIO. p.  7if 

Ch.tnxement  arrivé  dans  fa  pratique  de 
la  communion  fous  les  deux  elpeces,qu'il 
n'eft  point  univcrfel,  1. 1.  9.  C  'O.  p.  7i<» 

Ch.tngement  du  pain  levé  en  azime,que 
ce  changement  n'eft  ny  certain  ny  uiii- 
yerfcl,  1. 1.  9.  c.  10  p.  7i(; 

Changement  dan^i  l'éledion  des  Evef- 
qucs  ,  que  ce  changement  n'a  point  cfté 
infenfible,  i  1.  9.C.  10,  p,  717 

changement  dans  les  cérémonies  du 
Baptême ,  qu'ils  ne  font  point  unifor- 
mes ,   tbid. 

Ci.«»»f/«^»/ fur  les  images ,  qu'il  n'efl 
point  univerfcl ,  qu'il  n'elt  point  cftrange 
que  l'opinion  des  Evefqucs  du  Concile  de 
•Francfort  n'ait  point  eu  de  lieu  dans  l'E- 
g!ife  ,  I.  1.  9.  c.  10.  p  7i«. 

Autres  clitFerenccs  de  çe«  exemples  de 
changement,  P' 71? 


TABLE  DES 

Oubli  gênerai ,  tbid. 

changement  infeniible  ,  impoffible 
fur  l'Epifcop.it^  I.  1.  I.  c.  8.  p.  71. 

Changemens  infcnfible  impofTible  fur 
la  pricrcpouries  iiioKs ,  1. 1. 1.  c.9.p.  8î. 

CArf»fi,wf«/-inrcnrible,  impoflîble  iur 
l'invocation  des  Saints,  i.l.  i.c,  lo.  p,  90 

Surl'abftinence  des  viandes,  i.l.i.cii 

p.  9f. 

Degré  de  certitude  de  l'impo.Tibilité  de 
ce  prétendu  changement  Tur  l'Euchar.  i. 
1,  J-  c.  II.  p.  711. 

Changement  reconnu  par  les  Pères  a 
deux  cjujlitcz  ,  d'eftre  réel  ,  d'ellre  une 
fiiite  de  ces  paroles ,  cecj  ej}  mon  corps. 
Ce  qui  exclut  le  fcns  de  figure  &  de 
vertu,  z.l.  6.C.  4.  p.  619. 

Termes  de  ch,wgement  lignifient  ran- 
tofl  un  changement  fubftanciel ,  tantoft: 
un  changement  accidentel  ^  &  les  hom- 
mes ont  des  règles  pour  le  difterner^a.l. 
6.  c.  f.  p.  éi8. 

Termes  de  changeaient  clairement  dé- 
terminez pour  la  (uitedes  pafFages ,  à  fi- 
gnifier  un  changement  Tubitantiel,  1.  l.é; 
e.  6.  p.  634  z£  f'"^. 

Autres  qualitez  de  changement  qui 
jjrouvenc  que  c'eft  im  changement  de 
lubftance  ,2.1.6.c,.  r.p.  (Sii.  ǣ  fui'u 

Changement  marqué  par  les  Pcies  ne 
peut  eftre  changement  de  vertu,  r.  1.  é. 
c,  (..  p.  (.u.  Ç^/i,i-v. 

Changement  marqué  par  les  Liturgies 
&  les  petes,  i.l.  6.  c.  3SS.  Les  Pères  le 
fervent  toujours  de  ces  ternies  iiuis  expli- 
cation, p.  601, 

Aubertin  reconnoît  que  ces  termes  por- 
tent a  la  prelènce  réelle,  1  1.  6.c.  z.p. 
<oi 

changement  de  fens  dans  plufieurs  ex- 
prefTions,  impoifible,  1. 1.  ro.  c,  i.p,^j4 

On  ne  dk  point  qu'une  choie  cft  f/i.î»- 
/ff  en  une  autre  pour  marquer  qu'elle  en 
cil  rendue  figne.  2.1.  C.-c.  j.p.  (.\6. 

changement  reconnu  p.ir  les  l'cres,  n'a 
point  pouf  terme  l'éiablillement  d'une  fi- 
gure,!. î.é.  c. 4.  p.  (îlé. 

changement  réel  ne  fe  conclut  point  du 
fens  de  figure,   i.l.  <i.c.  j   p.  <i:f 

Deux  fortes  de  changement  marquez 
par  M,  Claule.  r,  g.l.  i.c.  8.  p.  m. 

Chapitre  /îxiéme  de  (aint  Je.in  donne 
naturellement  l'iiléc  d'une  maniucation 
réelle  du  corps  de  J.  C  LifFerence  des 
exprelïïons  du  commenccm  nt&  de  la  fin 
de  ce  chapitre  reconnue  par  les  Dilciples 
de  J.  C.  &  parles  Juifs,  r.l.fi.c.ifi.p.  678 


MATIERES.  817 

Que  c'eft  la  crainte  des  Hullîtcsquia 
poité  quelques  Catholiques  a  l'entcndr* 
de  la  manuucarion  Ipiiituellé ,  ibid.  p. 
(■79. 

Qu'il  cft  moralement  impolTible  qu« 
ceux  qui  ont  le  fens  de  figure  dans  VeÇ- 
prit  l'fjpliquent  de  l'Euchar.  &  que  ceux 
qui  oat  la  réalité  ne  l'eu  eipjiquentpa"*, 
tbid.p.  681. 

Auteurs  qui  l'ont  expliqué  de  l'Eucha^ 
riftie  ,  p.  6S }  • 

Les  Pères  ont  allié  ce  chapitre  avec  les 
paroles  de  l'inllitution  ,   6S3. 

Qu'ils  l'ont  entendu  d'une  manduca- 
tion  réc-llcdela  chair  de  J.  C.  «84, 

l^  Charb<in .  c\\ie  vit  Kaic  fignifie  dans 
Saint  Jean  de  Dan,as  le  corps  de  J.  C, 
uni  à  la  divinité,  1.  1.  7.  c  4.  p.  49  f. 
Prouvé  invinciblement  par  un  pa(l.:ge 
de  la  ttoifiéare  orailbii  fur  les  Images  , 
p. +9«^. 

•  Chanté  qne  l'on  doit  avoir  pour  prc- 
ferver  les  fidellcs  des  hcrcfics,  1. 1.  ir  c,. 
11.  p.  ï)^ 

S.  Chryfoflome  explique  avec  un  grand 
foin  toutes  les  métaphores  de  l'Evaneile 
de  faint  Jean  fans  jamais  expliquer  en  un- 
fèns  métaphorique  ce  qui  y  regarde  l'Eu- 
haiiftie,  1. 1.  3.  c.  7.  p.  187.  ^  /u/-u. 

Déclare  mén-ie  qu'il  faut  ablblumcnr 
manger  la  cLiir  de  J.  C.  fans  énigine,  & 
fans  parabole,  p.  153. 

Chjtnus.  Ses  erreurs  fur  les  Grecs,  i,  1. 
1.  c.  4. p.  jiS. 

Cmlité  des  M-iniftres,.  ils  traitent  de 
Saints  ceux  qu'ils  croyentapollars  &  nu- 
niftres  des  démons. 

Clarté  ne  coniifte  pas  feulement  dans 
les  termes,  mais  auflî  dans  les  détermina- 
tions qui  en  font  connoiftrc  le  fens,  z. 
1. 1.  C.  I.  lé.p.  150. 

M,  Claude.  Son  génie  :  n'eft  jamais  fi- 
éloquent  quequ.ind  il  parle  de  ce  ou  il  ne 
peut  fçavoir  ,  prJif.  p.  T 

Nouveau  genre  d'humilité  &  de  dou- 
ceur  de  M.Claude,  qai  coniille  en  trois 
chofes  J  t.  à  s'attribuer  des  vertus  qu'on 
ne  voit  pointji.àfe  plaindre  de  bagatelles, 
3,  à  charger  d'injures  atroces  fcs  adver- 
laires,  r.  g..I.  i.  c.  i.  p.  3  i  6.  Çy  ftn'u. 

Aigreur  &  violence  de  M.  Clau  k,  lors 
qu'il  cnacul'e  les  .'urres,r.g  I.i.c.iS.p.ff  o 
Sou  caracîlcre  ell  la  confiance,  il  trouve 
tout  ce  qu'il  veut  dans  les  Percs  par  fVs 
explications  chimériques.  Exemple  (ut 
un  paUàge  tle  faint  Jean  de  Danx.'is,  l'I.  i.. 
c«rp-  Î7. 


8i« 


TABLE    DES     MATIERES. 


Son  éloquence  emportée,  i.l.  ii.p.51 

Propres  aux  eftats  popuiaires  ,  i.  1.  f. 
c. 4.  p. 5?i 

Tranl'port  de  la  Rhétorique,  i.  1.  8. 
ce  p.  f.;t. 

Fait  un  nouveau  Di<Sionnairej  1.1.7. 
c.  i.p.4(f)- 

Difpofe  des  éyenemens  félon  Ces  vewè's, 
itiii. 

Décide  cavalièrement  les  queftions  du 
Concile  de  Florence,  i.  1.  4.c.  1.  p.  163 

Place  mal  les  exclamations,    i.  1.  7. 

C.  7-  p.  3^1 

•Change  les  figures  enraifons,  1. 1.  i, 
C.  I.   p.   79Î- 

Sçait  toujours  des  nouvelles  desfiecles 
padcz  quiontelté  inconnues  à  tous  ceux 
qui  Y  ont  vefcu  ,  1. 1.  6.  c.  7.  p.  4fi 

Domine  fut  l'efprit  des  hommes ,  il  les 
fait  penfer  comme  il  veut,  i.  1.  6.  c.  7, 

A  eu  intention  de  faire  pitié  ,  &  pour 
cela  raporK  les  reproches  qu'on  lui  fait 
dans  une  faufl'e  application ,  r.  g.  1. 2. 
c.  u.p.  47f 

Fertile  en  peur-efire ,  &  en  faulfes  hy- 
potef-s  ,  1. 1. 1.  c,  f 
-En  fvftemes,  i.l.  i.c.  8.  p.  I45- 

Caraderes  extraordinaires  ne  coudent 
rien  à  M.  Claude,  r.  g.  1.  i.g.iz,    p.  i'?? 

N'arcfte  pas  long-temps  l'efprit  à  fes 
fuppolîtions  déraifonnablcs ,    i .  1.  7.  c.  f 

p.  fOi 

Doncque  M.Claude  s'attribue  de  péné- 
trer dans  les  intentions  de  fes  adverfaires, 
1, 1.  II.  p.r7 

Prend  pour  accordé  tout  ce  qu'on  n'e- 
xamine pas  fur  le  champ,  liid,  p.  17 

Tout  eft  poffible ,  tout  cft  impolTIblCj 
quand  il  plaift  à   M.  Claude,   i.  1.  ir., 

p.  19. 

S.x  milignité  contre  les  Religieux,  t. 

1.  9.  c.  .9.p.  69» 

Abufe  des  maximes  communes  faute 
de  les  entendre.  Sophifmc  qu'il  taie  fur 
les  moyens  généraux  des  preuves,  i.l.i, 

c.  4.  p.  4i 

Maxime  de  M.  Claude  dans  l'examen 
des  auteurs ,    i.  l.i.  c.  i^.  p.  188 

La  dureté  de  fes -oreilles  n'empefché 
pas  la  force  des  raifons  qu'on  luy  oppo- 
lé  ,  I.  I.  C.c.  li.  p.  470. 

Abus  qu'il  fait  des  -règles  de  la  Logi- 
que, \.  6,c.  i.  [■>.  ^-ir-.Ç^ /hiv. 

Ne  prend  jamais  garde  que  c'cfc  à  luy 
à  prouver,  i.l.  i(i.c.  <;,.p.  7 

M.  Claude  coutredicAubertin  fur  le  fa 


jet  desGtecs,  1.  1.  1.  c.  4.  p.Ii-i 

Porte  fes  prétentions  plus  loin  qu'au- 
cun autre  Minillre ,  it/d 

Argument  impertinent  fur  la  vertu  de 
M-  Claude,  fcmblable  a  celuy  qu'il  attri- 
bue à  Nicolas  de  Mcthotie,i.l.i.c.5.  p.i8<C 

■Q£'il  admet  politivement  tout  ce  que 
l'on  a  voulu  dire  touchant  la  connoiflan- 
ee  dillinftede  laprefence  réelle,  i.  1,  6, 
C>4.  p.  4îî 

Supercherie  de  M.  Claude  qui  décrit 
l'eftat  de  l'onzième  tiéclc  pour  faire  con- 
noiftre  l'eftat  du  mélange  prétendu  dans 
le  dixième,  1. 1. 5.  c.  440 

Sa  cronologie  eftrange,  par  laquelle  il 
fait  mourir  le  jeune  Eftienne  après  le  fé- 
cond Concile  de  ttficée,  quoy  qu'il  fuft 
mort  vingt  ans  auparavant ,    i.  1.  /.  c.  .8. 

p.  ^38 

Autte  faute  du  mefnie  M"  Claude  fur 

ccttehiftoire  ,  1,1. 7.  c.  S.  p.  149 

Son  emportement   injufte  contre  ce 

Concile,  s'40 

Fauffeté  qu'il  commet  dans  le  lecit  qu'il 
en  fait,  p.f4t 

Abus  qu'il  fait  de  l'authoriré  de  Bellar- 
niin  &:de  Syrmond  1. 1.  S.c.  10.  p.  éjo 

Sa  faulfe  chronologie  fur  deux  ouvra- 
ges de  Pafcafe  1. 1.  8.  c.  10.  p.  616 

Le  contredit  fur  les  moyens  par  lefquels 
il  a  cru  que  la  prefence  réelle  fc  loir  éta- 
blie, I.  1.  9.  c.  6.  p.  67e.  &  (Î77 

Infulte  fansxaifon  fur  ce  qu'on  a  com- 
mencé par  la  méthode  de  prcfcriptionj 
1.  pref,  z.  8 

Il  fuit  la  méthode  des  Sociniens  en  vou- 
lant rendre  les  pafl.iges  de  l'Ecriture  équi- 
voques,  &les  déterminant  par  Les  fens, 
1.1.  !..c.  1.  p.  171.  &C.S.  p.  177 

Ses  nouvelles  lumières  fut  les  rapports 
des  S.icremens  anciens  à  l'Eucliariftie  re- 
futées,!. 1.  ^.c.  9.  &  10.  principale  illufioa 
fur  ce  fujet réfutée,  lA.  6.C.9.  p.  660 

M.  Claude  doit  exhorter  à  lirele livre 
de  la  Perpétuité  félon  fes  principes.i.1.7 
c.  7.  p.  840. 

Avoiie  par  fon  filenceqae  fî  toutes  les 
focietez  d'Orient  croyoieiH  la  prefence 
réelle  au  temps  de  Berengcr,  le  change- 
ment eft  impolTihle  ,  r.  g.  1. 1,  c.  r.  p.  10 

Répond  (ans  conteftcr  ni  lama  jeure  ni 
la  mineure  d'un  argument  dcci(îf./^/i^. 

Veut  nier  da  pcrfencc  réelle  &  ne  veut 
pa<  qu'on  la  proijve,r.  g,  p.  60 

Vcutf.iire  croire  qu'il  n'a  point  parlé  de 
la  feule  cho{è  dont  il  étoit  obligé  de  parle; 
r.g.l.;.c.5.  p.jS. 

■Pourquoy 


TABLE    DES 

Pcurquoy  il  s'eft  porté  à  cette  illuiîon 

p-  4+. 

Prétend ^ansraifon  qui  n'a  point  parlé 
delà  prefcnce  réelle  dans  fcs  deux  pre- 
mières réponfes,  conviction  de  cette  faul- 
fcté  par  un  grand  nombre  de  preuves  r.  g, 
1.  i.c.  4.  p.  !4. 

Accufe  injnftement  l'auteur  de  la  Per- 
pétuité de  mauvjile  foy  fur  ce  point  p.  fg 
Afaufedes  paroles  de  l'auteur  du  premier 
Traitté  peur  faire  croire  qu'il  a  parle  de  la 
Tranflubd.  r.  g.  1,  i.  c.  +.  p.  48 

Prétend  injuftemcnt  qu'il  n'a  jamais  nié 
que  les  Grecs  &  les  Latins  qui  ont  efté  dé- 
puis l'oaziéme  flccle  ne  connullent  pas  ks 
l'entimens  les  uns  des  autres.  Conviction 
de  cette  faufleté  r.  g.  1. 1.  c.  ç.  p.  66. 

Traittciiient  injurieux  qu'il  fait  à  l'au- 
teur de  h  perpétuité  fur  cette  prétention  p. 
ii.avoue  maintenantle  contraire  p.é7.(iS 
Injufte  reproche  fur  l'omiffîon  de  quel- 
ques miffionsj:.  g.  1. 1.  c.  6,  p.  8^ 

Abfurdité  extrême  de  la  fuppofition 
qu'il  fait  d'une  politique  &  d'une  timidité 
de  600. ans,  r.g.  l.i.  c.7.  p.  697 

Juge  fans  raport  aux  circonflances  des 
cliofcs  qui  font  attachées  à  mille  circon- 
ftances  r.  g.  1.  i.  c.  7.  p.  loi 
Se  yante  de  n'eftre  pas  d'humeur  à  pren- 
dre parti  fur  les  premiers  objets ,  &  prend 
neâmoins  parti  fur  des  choies  qu'il  avoue 
qu'il  ne  fçait  pas  r.g.  1.  i.c.io.  p.  161 

Avance  témérairement  que  les  Grecs  ne 
fc  fervent  du  mot  de  Tranfubftantiatiô  ni 
ordinairement  ni  cxtraordinairement.i^t 
Son  erreur  grofllcre  qne  ce  n'eft  pas  à 
J.  C.  que  l'on  offre  fon  corps  &  fon  fang, 
r,  g- 1. 1.  c.if.  p.  iji 

DifFerens  jugemens  qu'il  a  porté  du 
traité  de  la  perpétuité  félon  fcs  divetfes 
paffionSjr.  g.  l.i.  c.;.p.  3  fi 

Ouverture  qu'il  donne  à  la  confulîon  des 
Religions  &  à  toutes  les  herefies  r.  g,  1. 1. 

c.  5.  p.  577  . 

Prétend  fans  raifon  qu'on  ne  puifle  nen 
conclure  de  certain  par  les  preuves  de 
raironnement,r.  g.  l.i.  c.6.p.58t.&7^/'j. 
Voye  ridicule  propofce  par  M.  Claude 
pour  s'aflurer  du  fentirrtent  de  l'ancienne 
Eglifer. g,  1  z.c.S.p.  414 

Son  éblouiircment  fur  le  fujet  de  Nico- 
las de  MethonCj  r.  g.  l.i.c.  11.  p. 454 

Se  plaint  injuftemcnt  fur  le  fujet  de  For- 

befius,  r.  g. 1.1.  c.  li.  p.  470.  l'accufe  fans 

rnifon  detrahifon&  de  vilaine  falfifica- 

tiorr,  p. 47e 

Reproche  fans  raifon  une  f  a«te  de  Gram- 


MATIERES.  Sig 

maire  à  l'auteur  de  la  perpétuité ,  r.  g. 
1.  i.c.  13.  p.  481 

Qu'il  a  iujct  de  fe  défier  de  luy-mcmc 
en  matière  de  Grammaire,  traduit  le  mot 
iS'Iuliif  qui  fignifie  particulier  par  ce-, 
lui  d'idiot  EvTidilJ.i.\of  quifignifie»?// 
dedans jinditiim,  par  cchiy  d'appliqué,r.g. 
I.i.c.  13.  p.  4S)- 

Sourticnt  p:r  de  vains  paralogifmes 
qu'il   a   pu  appellcr  les     huit  premiers 
Siècles  les  beaux  jours  de  l'Eglife  ,  r.  o-.  • 
l.i.  c.  I?.  d.4S8 

Détours  dont  il  ufê  pour  pallier  une 
faute  de  Chronologie^r.g.  I.i.c.i5.p.4^i 
Ses  caradfcrcs  qui  paroiflent  dans  les 
reproches  qu'il  fait  fur  un  palFage  de  Jean 
21.  Erreur  groffiere,  fur  laquelle  il  fonde 
ce  reproche  j  r.  g,  1. 1.  c.  14  p.  fio 

DeHx  CUudes  ridiculement  inventez 
par  Balée,  1. 1. 11,  p.  19 

Clément  4.  envoyé  une  profeffion  de 
foy  aux  Grecs  contenant  la  tranlfub.  en 
termes  formels,  1. 1.  c.  i.  p.  ziy 

XO/,&)jT*  csmmunicatio  corforis  Chri- 
y?/.,  expliqué  par  Zuingle  non  de  la  par- 
ticipation ,  mais  de  la  fbcicté  qui  eflle 
corps  de  J .  C.  z.  1. 1.  c.  8.  p.  74 

Commerce  des  deux  Eglifès  dans  l'on- 
zième fiéclc,  I.  1. 1.  c.  8,  p.  147 

Commerce  fpirituel  entre  l'Eglifê  Grec- 
que ,  &  la  Latine  dans  le  douzième  fic- 
elé I.  1.  i.c.  10.  p.  169 

Comparaijofis  extravagantes  des  Sacrc- 
mens  de  l'ancienne  loy  avec  ceux  de  la 
nouvelle  faites  par  M. Claude,!.  1.  6,  c.  9 
p.  661. 

Comfaraifans  inégales  ordinaires  dans 
l'explication  desmy(Veres,3.1  j-,  £.7.p.i9i 
Comfaraifons  n'exigent  pas  un  parfaic 
rapport,  1. 1. 7.C.  4.  p.49+ 

Corr.fitmifons  des  changemens  infenC- 

bles  avec  celuy  de  l'Eucharifliejque  celuy- 

cy  eflleplus  impolfiblede  tous  i.l.i.c.ii.97 

Co>:ciles  tenus  contre  les  Berengarien^ 

1.  l.i.  c, S.  p. 14e 

Que  CCS  Conciles  n'ont  pu  eftre  incon- 
nus aux  Grecs,  ihid. 

Concile  de  Florence.  Grecs  forment  le 
dcllein  de  s'y  reunir  avec  les  Latins.  167; 

Exaflitude  des  Latins  pour  éclaircir  les 
queftions  dans  ce  Concile,  r,  1.  4.  c.  1. 
p.iéS 

Argumens  negatifs,&  pofitifs  tirez  dece 
Concile  pour  le  confentement  des  Egli.'es, 
p.  1É9. 172. 

Suites  du  Concile  de  Florence  prouvent 
l'union  des  deux  Eglifes  dnns  le  dogme 
LLIU 


gio   ■"*  TABLE   D 

de  la  rranfTub.  Argumens  négatifs  rirez 
de  ces  fuites,   1.1.4.  c.  5.  p.  174 

Concorde^  Vvittemberg  lource  des  cx- 
prclTions  Luthériennes  emplojces  par  les 
Calviniftv-s ,  i.l.i.  c,f.  p.  jt 

Calvin  imitant  la  diffimulation  de  Bu- 
cerj  éclaircit  cesexprcffions  fans  les  chan- 
ger, i.l.i.  c.  J.  p.  fi 

Effet  naturel  de  ces  exprefîîons  fur  qua- 
tre villes  d'Allemagne,  çi 

Concorde  de  Vvittemberg  prouve  qtte 
les  Calviniftes&  les  Luthériens  eftoient 
des  gens  fans  confcience,  p.  51.  Rompue 
par  Luther,  i.l.  i  c.  6.  p.  60 

Conférence  ^ouï  unn  l'Eglife  Grecque 
à  la  L.itiue  tenue  a  Barry ,  on  n'y  parle 
point  de  l'Euchar.  1. 1. 1.  c.  8.  p.  187 

Confeffion  de  foy  pour  les  Sarazins  au 
douzième  Sieclej  claire  pour  la  ttanilub. 
Import  mec  de  ces  fortes  d'écrits ,  i.  1,  1. 
e.  15.  p.  100  101.    . 

Confejfion  d'Ausbourg  clairement  con- 
traire aux  Calvinifl:c;s.  Chicanerie  indi- 
gne de  ceux  qui  l'expliquent  en  un  fens 
iguré,  1.  l.i.  c.j.p.  î»; 

€o-/ifefion  orthoiloxe  de  l'Eglile  Orien^ 
lale ,  de  qu  lie  forte  elle  fut  drciréc,  r.  g. 
1,  1.  c.  5>.p.  I5t 

Son  authontc  ,  136.  Sadecifion  fur  la- 
ftanlfublTiant.  158.  v.  v  1.8.  c.  14.  &  if 

Cottnoijf.tnce  confufe  de  la  pref.  r.  cft  un' 
niot  en  l'air,  &  au  cas  qu'il  fignific  quel- 
que chofej  on  ne  peut  y  réduire  le  10, 
fiecle  j  1.  1.  9.  c.  4.  p.  i   5 

Connoijfunce  claire  n'a  efté  fuppofée 
par  l'auteur  de  la  perpétuité  qu'à  légard 
de  laprel'ence  réelle,  i.\.6.  c.  i.p.  41  f 

Connoijfance  dilHndle  de  la  prefeiice 
réelle  de  trois  fortes  :  quel  degré  eft  ne- 
ceifaire  pour  la  preuve  de  la  Perpétuité, 
r.  1.  6. Cl.  p.  416 

Que  fouventil  n'y  a  point  de  différen- 
ce entre  ne  connoiftrepas  qu'une  choîe 
ibit,  &  connoiftre  qu'elle  n'eft  pas.  411. 

Fauflfc  fubtilitéde  M.Claude  fur  ce  fu- 
jct,  1. 1.  <f.  c.  1.  p.  4ii.  41^. 

Termes  de  confejfer  Ç^  ajfurer  peuvent 
eftre  joints  à  des  termes  métaphoriques, 
&:  non  à  des  termes  proprement  figura- 
tifs,  1.1.  4.  c.y.p.  3;i 

CDiifentement-  des  (ocictez  fchifmati- 
ques  avec  l'Eglife  Romaine  marque  de 
l'Egiife&efferde  la  providence  ,  i.  1,2. 
p.iof 

Canfentement  des  focietez  d'Orient 
avec  l'Eglife  Romaine  fur  l'Euchar.  n'cfl: 
^goiiuunc  chofe  incertaine  ,  &  qui  puilic 


ES   MATIERES. 

être  difputée,&  l'erreur  qu'on  commet  en 
le  niant  n'efl  pas  humaine,    1. 1.  i.c.t, 

p.  'Of 

Canfentement  de  tous  les  peuples  dans 
la  doftrine  de  la  prefence  réelle,  fait  voit 
que  c'cft  l'impreifion  naturelle  de  ces  pa- 
roles :  Hoc  efi  corfus  meutn  ,  1.  1, 10.  C.  I. 
p.  727.  &  z.  1.  i.c.ii.p.jo.  91 

Canfentement  de  l'Eglife  depuis  mil' 
ans  dans  la  doftrine  de  la  prefence  réelle 
&  de  la  tranfTubftant.  explique  les  ex- 
prefTions  des  Pères,  i.  1.  10.  c.  z.  p.  75* 

Détruit  les  clefs  de  figure  &  de  vertu, 

P-735  .     j 

Cenfenteynent  de  toutes  les  Eelifes  de- 
puis mil  ans  dans  la  doûrine  de  la  pre- 
fence réelle  prouve  que  plufieurs  eiprct- 
iîons  que  les  Miniftres  oppofent  à  cette 
doftrine  n'y  font  point  contraires^  1. 1,  lO' 
c.4.p.-4i. 

Cat:feqnences  du  fcns  catholique  Ce 
trouvent  dans  les  Pères.  Confequence» 
du  fens  calviniffe  ne  s'y  trouvent  point , 
i.l-î.  c.  S.  &9 

Deux  confequences ,  l'une  qui  prouve 
le  fait,  l'autre  qui  nailldufaUj  r.  g.l.  !,■ 
p.  16 

Que  M.  Claude  ne  nie  que  la  confc- 
quence  qui  prouve  le  fait,&  non  la  con- 
le.]uencc  qui  naift  du  fait,  tbid. 

Confequence  du  témoignage  des  GtecS^ 
d'aprefent  à  ceux  dn.'tcmpsde  Bcrengcr, 
r.  g.  1. 1,  c,<).  p.  ijf.  '«w,  15».  Pi  joj.  (î^ 
fufv, 

ConfeefUence  neceffairc  des  faits  avouez 
pir  M.  Claude  à  la  perpétuité  de  la  foy 
des  focietez  d'Otienr  dans  la  prefence 
réelle  depuis  Berenger  ,  r,  g,  1.  i.  c.  7. 
p.  106. 

ConffirJtfion  des  Pères  à  parler  contre' 
le  fens  commun  félon  les  MiniftreSj  1.. 
1.  «.p.  él7 

Contenir  pris  ridiculement  pour  décla- 
rer par  Aubertin,  z,  l.é.c,  i«.  p.  é7î 

Controverfe  ■çîs.\xxzvX\ttc  décifîve  delà' 
générale,!.  1.  i.c.  11. p.  56 

Confanttnofle  prile  par  les  Latins. 
Leur  cruauté.  Haine  des  Grecs  contre  eux 
marquée  parNicetas ,  Baudouin  élu  Env 
pcrcur,Grecs  rciinis  an  P.ipe.  Nul  vertige 
d'erreur  de  Berenger,  reconnu  parmi  eux. 
Force  de  cet  atgument,  i.  l.j.c.  i.p.  104 
Cofhies  &i  Ethiopiens  n'ont  que  la  mê- 
me créance.  Pattiarche  des  Ethiopiens 
nômé  Abuna  confirmé  par  le  Patriarche 
d'Alexandrie.  Preuves  négatives  de  leur 
confentcment  avec  l'Eglife  Romaine  fut 


TABLE  DES 

t'Euchar.i.l.f .  c.  15.  p. 402.  Leur  rclinion, 

Corfs  de  J.  C.veu  &  touché  en  quel 
fcns ,  i.l.S.c.  i+.  p.  7  f  7.711.715. 

Corfs  de  J.  C.  ne  peut  iignifieï  l'cffi- 
cace  félon  Beze ,  i.  1.  6.  c.  6.  p.  617 

CoTfs  de  J.  C.  reconnu  indivifible  dans 
l'Fuchariftie  par  tous  les  Pères,  1. 1,  f. 
sC.?.p,j43, 

Curfi  dj  J.  C.divifé  fans  divifiondans 
l'Euchaiifti.-  fclon  tous  les  Pères,  i.l.  7. 

c.  5.  p.4i,8.e:y«'T- 

Corruption  de  la  moraie  des  Calvi- 
niftes ,  I.  1.  9.C.9.  p.700, 

Queflioii  de  la  corruptibilité  des  my- 
fteres  rapportée  par  Zonarc  &Nicecas. 
Chon,  prouve  que  les  Grecs  croient  la 
prefence  réelle  &  la  tranffubft.  i.  1.  1. 
c,  14.  p.  191.  Ç^fui-M. 

Aubertin  contredit  mal  à  propos  par 
M.  Claude  fiir  ce  point,  p.  155 

Sophifmes  de  M.  Claude  fur  la  quef- 
tion  de  la  corruptibilité  des  mjftcres,  ré- 
futez,!. 1.  1.  c,  14.  p. 19e 

Cour  de  Rome  fort  rabailTéc  au  dixic- 
xre  fiecle,  i.  1.  9.  c.  6.  p.  678 

Ottflume  de  donner  l'Euchariftieaux 
enfans ,  rejcttce  par  M.  Claude  comme 
ane  erreur  au  mime  temps  qu'il  l'attri- 
bue à  l'ancienne  Eglife  ,  i.  1.  9.  c,  10, 
p.  710 

«oufiume  générale  de  cacher  l'Eucha- 
liftie  aux  payens ,  ;.1,7,  c.  1.  p.  4*S 

Doit  efbrc  eftimée  de  tradition  ,  ibid, 
K'a  point  commencé  au  quatrième  fic/- 
(rie  ,  p.  470 

Marquée  par  plufîeurs  auteurs  du  fé- 
cond, 471.  471.  &c. 

Crexnce  confufe  à  l'égard  de  l'Eucha- 
riflie  admile  par  M.  Claude  durant  mille 
ans.  Supercheries  dont  il  uic  pour  le  jufti- 
iîer  de  ce  reproche.  Retranche  4.  lignes 
d'un  de  fes  paffages  ,  1. 1.  fi.  c.  5.  p.  42-7 

Croifjtde  refoluc  au  Concile  de  Cler- 
jnontjl'an  i09f.  Concours  des  peuples  de 
"l'Occident.  Progrez  de  Godefroy ,  mé- 
lange des  deux  Egliics  pendant  ces  temps, 
1. 1.1. CIO.  p.  161,  (^ ftiiv. 

Cruautés  réciproques  des  Grecs  &  des 
Latins  ,1.1.5  c.  i,  p.  107.  ic>3 
Crujtus  Luthérien, fes  qualitez  bien  infor- 
mé des  fentimens  des  Grecs.  Reconnoift 
qu'ils  croyent  la  tranffubfl:.i.l.i.c.4.  p. 116 
Ses  negotiations  avec  le  Patriar- 
che de  Conftantinople ,    1. 1.  4.    c.  4. 

Cjrille  Lucar  «u  Lacaris  difciple  de  Me- 


MATIERES.  Rii 

Ictius.  Sçavoit  diverfcs  langues  ,  1. 1.  .\, 
c.  «.p.199 

Lié  d'amitié  avec  de  Domini^.  Franc 
Calvinifte.  p.  500.  Dillimule  fes  fenti- 
mens ,  i^id.  Eli  fait  Patriarche  d'Aleran- 
tfarie,  jci, 

EmpoifonncTimothée  Patriarche  de 
Conftantinople  lelon  Allât,  ibid.  Eft  élu 
Patriarche  de  Conft.  tiid. 

Public  fes  erreurs  fans  éclat ,  &fans  y 
contraindre  perfonne  ,  p.  501.  Grecs  s'é- 
lèvent contre  luy.  Ses  diverfes  depofitioiis 
&  rétabliiremens,  ihid. 

Déclaration  de  Cyrille  comte  ceux  qu'ii 
appelle  Papiftes,  p.  505. 

Gppofîcion  qu'on  luy  a  faite  durant  fa 
vie  &  après  fa  mort ,  i.  1.  4.  c.  6.  Se  7.  p, 
310.  g?  /u/%1. 

Cjrille  ne  fuivoit  point  les  opinions  de 
l'Eglifc  GrecquCj  ittd.  p.  509 

Cjrille  de  JBeréc  anatheniatife  Cyrille 
Lucar  dans  un  Concile,  i.l.  4.C.7.  p.  ;n. 

Parthenius  Patriarche  condamne  Cyril- 
le Lucar ,  1. 1.  4  c.  7.  p.  514.  v.  3. 1,  c,  if 


D  Aille'  prétend  qu'on  ne  peut  déci- 
der le  différend  fur  l'Eucbarifte  par 
les  pères,  &  que  cea.'c  qui  ne  trouvent  pas 
leurs  paiTiges  difficiles  font  bonne  mine 
à  mauvais  jeu,  1. 1.  r.  c.  5 .  p.  ^S 

Didlé  avoiie  que  l'invocation  des  SS. 
eftoit  eftablie  au  quatrième  fieclc,  1. 1. 1. 
c,  10.  p. 84 

La  tiaitte  d'aveugle,  de  fuperftitioR 
p.88 

Datllé  avo'iie  que  la  prière  pour  les 
morts  eftoit  eftablie  dans  le  fécond  fiecle, 
1.  l.i.  c.  9.  p.  87 

Civilité  extraordinaire  de  Daillé  envers 
faint  Ambroife,  1. 1.  i.c.  10.  p.  84 

Vaille  n'a  pas  fçu  que  les  Catholiques 
de  France  ne  font  pas  obligez  de  jeunet 
l'A  vent,  1. 1. 7.  c.  7.  p.  V  37 

DAmafcene  de  Theflalonique,  r.  g.  1. 1. 

c.i7f 

Damien  Goez.  Son  écrit ,  preuves  ti- 
rées de  cet  écrit  pour  la  foy  des  Ethia- 
piensfur  l'Euchar.  l.l.  f.c.  ij.  p.  404. 

D'innaruerus  Luthérien  impute  la  tranC* 
fubft.auK  Grecs  comme  une  erreur,  i.l.i. 
c.4.p.i7.avoiiequeles  Mofcovitescroienc 
latranlTubft.  1. 1.  f.c.i.p.î4* 

Dangereux  de  vouloir  nier  un  miracle 
&  une  œuvre  de  Dieu,  parce  qu'on  n'en 
xoit  peint  la  fin.  Turcs  Socinienspavens 

LLlll  ij 


îiz  T  A  B  L  E    D  E 

détruits  pat  la  ifligioii  chreftienne  ,  i 
1,1,  «.  4.  p.  191 

D^fe  pris  par  Aubertin  pour  déclarer) 
1.  1.  ^.c.  10.  p.  (îyfi 

Dialogue  des  deux  natures.  Sommaire 
de  ia  dodririe  de  ce  livre  ,  &  des  erreurs 
qu'il  contient  j  i,  1.  ii.  p   3 

Qiie  Jean  Scot  en  cA  l'auteur,  p.  4 

Ditie  ne  doit  pas  aux  liommcs  l'éclair- 
cilFement  de  toutes  les  diffieultez  des  my- 
ftcres  ,  3.1.  T.  c.  i.p.  4  , 

Différence  entre  le  lens  métaphorique  & 
lefensfiguratif.i.  1.  4,  c.iJ.p.394..  &p.4ii 

Différence  des  propofitions  vraiment  fi- 
gurât ives^Sc  des  littérales,!.  I.3.  c.4.p.iéî 

Différends  perfonnels  ne  doivent  eftre 
mêlez  avec  ce  qui  regarde  la  caufe  de  l'E- 
glife  félon  S.  Àugullin,  1. 1  11.  ci.  p.  789 

Dijjic»ltez,  des  Myfteres  ne  font  dar,ge- 
reules  à  coiilîJercr  que  pour  les  Calvinif- 
tes ,  &  non  pour  les  Catholiques.  Riifon 
de  cette  diftetence  fondée  fur  les  difFercns 
principes  des  uns  &  des  autres, i.l. 11  c.  10. 
p.  8  ;4 

liiffculfez,  des  myfteres  peuvent  eftre 
des  marques  de  leur  vérité  en  un  certain 
fens,  &  non  généralement.  Reproche  in- 
jufte  de  M.  Claude  fur  ce  fujet,  i.  1.  11 
c. 10.  p. 836 

Difficulté  reconnue  parles  Pères  dans  la 
chofe  figuif éepar  ces  paroles,cirf;y  efl  mon 
corps,  1. 1.4  c.  i.p.jzy.  Ç^  fecj.  Sens  de  fi- 
gure n'a  aucune  difficulté  dans  la  chofe 
mefme,  iL-id. -ç,  ^i^ 
Difficrt/tcz.'^m  nailfent  de  ladodrinedes 
Calvinilles  lelon  M.  Claude ,  3. 1.  7  c.  9. 
p.fiS 

Qiji'il  ne  fçauroit  les  faire  voir  dans  les 
Percs  ,  iiid. 

DiffimlteK.  qui  naiifent  de  la  doilrine 
catholique,  exprimées  quelquefois  par  les 
pères,  3.I.  7.0,9.  p.  J19 

Difyojition  necelfaire  pour  communier 
dignement,  i.l.  ii.p.  44.'Vices  plus  op- 
pofcz  à  la  réception  de  l'Euchariftie  ,  43 

Pureté  neceifaire  pour  recevoir  l'Eu- 
chariltie  ,  ihid. 

Impudence  des  Preftres  déréglez  qui 
s'approchent  de  ce  myftere,   46. 

Qjj'il  eft  honorable  de  fc  retirer  des 
foniiîions  du  facernoce  par  révérence  en- 
vers ce  myftere.  ibid, 

De'uotion  neceifaire  pour  communier. 

Confideration  pour  exciter  la  dévotion  & 

l'amour,  47.  Nece/Tité  du  defir  &  delà 

faim  de  ce  pain.  ibid. 

Difiinltitn  neccflaire  entre  les  images  & 


S     MATIERES. 

originaux  n'empefche  point  l'union  & 
l'indentité,  5. 1.  j.  c.  z.p.  ij  i 

Reconnoilfance  d'Aubertin  fur  ce  point, 
p.  ifi 

Une  chofe  peut  eftre  image  d'elle-mê- 
me c  n  un  autre  eftat ,  ibtd.  &  p,  1  y  j 

Dnerfitè  d'opinion  n'eft  pas  toujours 
ridicule  ,  1.  1.  z,  c.  2.  p.  lyi 

Do/lrine  de  la  prefence  réelle  infepa- 
rable  de  l'adoration  intérieure,  Faulfe  dif- 
tinéiion  des  Miniftres  fui  l'adoration , 
1,1.  10.  c,  j),  p.  783 

Dogmes  renfermez  dans  l'opinion  des 
Calviniftes  fur  l'Euchar.  aucune  ne  fe 
trouve  dans  le  fermon  de  faint  Aguftin  id 
infantes,  ;.  1.  2.  c,  8.  p.  ni 

Doiife  feul  oblige  les  Calviniftes  de  lê 
rendre  catholiques,  1. 1. 1.  c.  fi.  p.  fii 

Doute  fur  l'Euchariftie  marqué  par  les 
anciens,  fes  qualitez  félon  les  catholi  \\Ki, 
&  félon  lesproteftans,  1.  1.  i.c.  13.  p.  187 

El  prcllions  oppofées  au  doute  fur  l'Eu- 
chariftie, comme  que  c'eft  le  vraycorp», 
ufitées  dans  tous  les  lieux  de  l'Eglife,  i.l. 
8.  c.  5.  p.  ySi.  gfyâ/i'. 

Expliquées  ridiculement  par  les  Calvi- 
niftes, p.  585 

Témérité  crimin^elle  de  ceux  qui  hazar- 
dent  leuf  falut  fur  cette  explication,   ibid^^ 

Réfutation  t'u  fens  de  vertu  qu'ils  y 
appli.iuent ,  p.  f  i>7. 

Ufage  des  mots  de  -vraj  &  àt-verité,  de 
■venruhlement  dans  les  cxpreffions  figu- 
rées pour  exclure  ce  doute  j  1.  1,  8.  c.  c 
p.ySS. 

Doute  que  M.  Claude  atttibucà  3,  de  (es 
ordres  inconnu  aux  Pères.  Deux  (brt<s 
de  doutes  fur  la  chofe  mefme,  ?■  furl'ex- 
prÉ-flioUj  f.  1.  é.c,9.p,  46}. 

Se  diftinguent  par  la  manière  de  ks 
refoudre ,  4S4. 

Qiie  les  Pères  n'ont  point  connu  de 
doute  fur  l'Euchar.  fondé  fur  l'ignorance 
du  fens  des  paroles,  ihid. 

Diiference  du  doute  connu  par  M.- 
Claude ,  &  de  ccluy  que  les  Pères  ont 
connu  ,  p.  466 

Doute  furl'Euch.irrftie  prévenu  par  les 
auteurs  des  8.  &  5. fiecles,  1. 1.  8,  c.  4. 

p.  574.  y7tf. 

Doutes  fur  l'Euchariftie  marquez  par  les 
Pères  determirjent  leur  foy ,  2,  1,  4.  C 1. 

p.  m 

Ce  ne  font  point  des  doutes  d'expref- 
fions  ny  de  figurc,/^/:^.&  ;3f.ny  des  douces 
d'efficace,  c.  3.  p.  358.  (^Jui-v. 

Dtute   d'efficace  nettement  exprimé 


TABLE   DES 

par  les  Pères  à  l'égard  des  autres  Sacre- 
mens  ^  1. 1.  4.  c.  5.  p.  1 40 

Ne  peut  eftrc  fondé  fur  ce  qu'on  ne  voit 
point  J.  C.  comme  ctluy  que  les  Percs 
marquent  a  l'égard  de  l'Euchariftie ,  3  41 
Doute  marqué  par  les  Pères  regarde  la 
realité  j  1,  1,  4.  c.  -5.  p.  34U  n'elt  nyun 
doute  de  vertu  ny  de  figure  félon  M. 
Chude,  p.  Hf 

Doute  mai  que  par  les  Pères  n'cft  point 
fondéfur  rigaoraacedufens  des  ternies^ 
1.1,  4.'-".  5.  p.  54^. 

Doute  fondé  fur  l'incompatibilité  des 
t:rmes,ftiifij  corfs^  inconnu  aux  Percs,i. 

1,  4.C.4.  p.3f3^ 

'  Doxte  marque  par  Nicolas  de  Metho- 
ne.  Fauflis  lumières  de  M.Claude  fur  ce 
fujet,  2'.  1.  4.  c.f.p.  56Î.  &r.g.  1.  1.  c.  II. 
p.  451,  Et  fur  celuy  de  Theophilaclc,  565 

Doutes  qui  nmjfent  de  Vob\c't  extérieur 
expliquez  par  faint  Auguftin  dans  1;  fer- 
mon  iid  infantes  par  les  rapports  de  la 
matière  Euchariftique,  3.  1. 1.  c.  9.  p.  130 
/n'i'au/f  fe  prend  en  trois  fens  qui  ne 
favorifent  point  les  Calvinilles ,  i.l.  1, 
C,  j.p.  1)7.  &1.I.  f.  C.15.P.  574 

S.  Dunflan ,  haine  des  Miniflres  contre 
ce  Saint. Generollté  avec  laquelle  il  reprit 
le  Roy  Edgar  ,  blafmée  par  M.  Claude 
d'une  manière  peu  Iionnefte  ,  i,  1.  9.  c.  9. 

p.  703- 

Calomnie  de  M,  Claude  contre  ce 
Saint,  p.  707 


ED  G  A  R  Roy  d'Angleterre.  Combien 
fes  déreglemens  ont  duré.  Repris  par 
S.  Dunftan,  i.l.  9.  c.  9.  p.  705.  704. 
Combien  il  fied  inal  2\ix  Minillres  de 
rrouver  à  redire  à  fa  pénitence,  ibid. 

Efficace  de  l'Euchariftie  ne  fuit  point 
du  fens  de  figure,  eft  un  fens  à  part.z. 

1.4. c.  3. p. 358 

Efficace  de  l'Euchariftie  reconnue  par 
les  Pcres,  exclut  le  fens  de  figure,  s'enfuit 
du  fens  des  Pcres ,  p.  478 

Efficace  de  l'Euchariftie  ,  1.  1.  f .  c.  i, 
p.  481.  {^/«'•"■'. 

f    Efficace  rcconntrè' pat  les  Pères,    4S1, 
Se  tire  de  la  prefence  réelle  ,  fi>id.  &  c.  z. 

P.4S7.  &491 

Efficace  de  la  chair  de  J.  C.  n'elt  que 
méritoire  félon  les  Miniftrcs,  %,  1.  j.  c.i. 

P.4S7 

Efficace  phyûquc  de  l'Euchariftie  félon 


MATIERES.  8î3 

faint  Cyrille  par  l'aveu  d'Aubertin ,  1, 

l.).C.2.p.  4Î9 

Efficace    chimérique  attribuée  par  1« 
Miniftres  aux  Sicremens  de  la  loy  nou- 
velle au  dcflus  de  cenx  de  rancienne,qui 
ne  dépend  que  d'un  tour  d'imagination 
i.  1.  6.  c.io.  p.  670 

Elfric  &  l'Auteur  des  Sermons  An- 
glois  luivent  les  expreflions  de  Bertram. 
Peuvent  eftre  expliquez  en  un  bon  fens.i, 
1.  u.  p.  40 

Miracles  rapportez  par  cet  auteur ,  p.4t 
Confequence  de  ces  miracles  ^  ikid. 

Homélies  atuibuées  à  S.Eloj  fur  l'Eu- 
chanllie  ,   1. 1.  8.c.4.p.  5-77 

Encristites  réfutez  par  Clément  d'Ale- 
xandrie, 3.1.4.  c.  j. p. 250 

Eitèe  Evefque  de  Paris  réfute  les  Grecs 
au  neuvième  fieclefans  parler  de  la  pre- 
fence réelle,   1. 1.  B.c. r.p.  jjy 

Enigmes  en  quel  fens  pris  par  les  Pères, 
1.1.  3.  c.  7.  p. 194. 

Epiphane  Diacre  ,  ce  qu'il  dit  de  l'Eu- 
chariftie dans  le  lecond  Concile  de  Ni- 
cée,  1. 1.  7.C.  j.  p.  joo. 

Euthymeme  du  Cardinal  du  Perron  pri# 
pour  un  lyliogilme  par  Aubertin&  trait- 
té  ridijulement  de  monftrueux  3.  1.  x, 
c.  y.p.  88 

Ernuphe  Evefque  dans  l'Angleterre 
contre  les  fuites philofophiques,  1.  1.  i®. 

c.8.p.775 

Erreurs  ne  font  pas  toujours  reprochées 
aux  auteurs  par  les  anciens.  Prouvé  par 
divers  exemples ,  1. 1.  ii-  p.  iS 

Epïfcopat  non  attaché  à  lige  dans  le 
premier  fiecle  ,  i.^.  i.  c.  S.p.  7S  . 

Ecriture  félon  quelques  Pères  en  quel 
fens  corps  de  J.C.  1. 1.  4.  c.  9.  p.  408.  409 

S.  Efprtt  habite  en  nous  par  fa  fubftan- 
cemcme,  &  non  pas  par  fa  feule  opéra- 
tion, z.l.  J-C.4.  p.  J08 

Fjfrit  gênerai  des  Pères  à  l'égard  des 
difficulté!  des  myfteres, 3. 1.  7.G.  S.p.  jie 
Appliqué  par  eux  à  l'Eiichar.  thid. 

Ejfence  du  myftere  diftinguéedes  con- 
fequences,  i.  1.  6.  c.  i .  p.  417 

£/?  n'cft  jamais  pris  pour  ejlre  en  effica- 
ce ,  1. 1.  J.C.  I.  p.  479 

Que  cette  exprefllon  efi  appelle  ǣ  efl 
exclut  le  fens  de  figure  &non  le  fens  de 
methaphoî- ,    1. 1.  4.  c.  14.  p.7i 

Ejlre  en  figure  &  eftre  en  efficace  font 
deux  fens  differens,  ibid.  480 

£/ ne  fig.iifie  jamais  c'eft-à-dire  ^  i.l.  <;. 
c.  I.  i.p.î70.  pourquoy  l'on  dit  qu'il  y  a  un 
^explicatif,  ibid. 

LLlll  iij 


8z4  TABLE   DES 

Eitchariflie  compofée  de  deux  parties 
qui  produifent  ttois  regards  diffcrcns  & 
trois  genres  d'expreflioiis ,  1. 1.  8.  c.  %, 

T.xcite  un  trouble  félon  S.  Chryfofto- 
me.  Ce  qui  ne  convient  point  à  la  doc- 
trine des  Miniftrcs ,  1. 1.  4.  c.  6.  p.  571 

Euchariflie  ,  moyen  ordinaire  de  la 
vivification  des  âmes  &  des  corps ,  1, 1.  f,, 
c.  4,  p.  yro,  eft  neceiiaire  pour  cet  effet , 
cncjuel  fcns  ,  yii 

Euchttr.  ne  (croit  point  prcforablc  aux 
Sacremens  de  l'ancienne  Loy  comme 
corps  de  J,  C.  fî  elle  n'elloit  elle-même 
que  figure,!.  I.  C.c.  9.  p.  664 

Euhar.  ridiculement  préférée  aux 
veftemens  de  J.  C.  fi  elle  n'cft  que  figure, 
1. 1. 6.  c.  13.  p.  706.  8c  de  mefme  au  fc- 
pulchre,  p.  708 

Eftchar.  comparée  avec  le  facrifice  de 
Jvielchifcdec,  3.   1.  4.  c.  4,  p.  iii 

E-uefyues  dans  toutes  les  locietez  fciiif- 
matiques,  t.l.  i.c.y.p.  73. 

E-vefyuesopl\  reforment  les  Monaftcres 
au  10.  ficelé  avec  grande  feveritc  ,  i,  1. 9, 
C.9.  p. 693 

Eiiidcnce  égale  de  part  &  d'autre  doit 
fulpendre  les  efprits  ,    1,  1.   i.  c.  6.  p. 

E-uidence  eftant  au  moins  neceffkire 
pour  condamner  l'Eglife  Catholique  , 
x^uiconque  doute  ne  la  peut  condamner, 
1.1.  r.c.  6.  p.  61 

E-vidence  de  ces  paroles ,  Cecj  eji  mtn 
orfs,  reconnue  pat  les  Proteftans  &par 
Luther,  i.l.  lo.c.é.  p.  754 

E-vide>ice  fondée  furia  mémoire,  eft 
foible  &  n'exempte  pas  de  doute.  Que 
les  Calyiniftes  ne  peuvent  prétendre 
avo;r  d'autre  évidence  que  celle-là,  1. 1. 11. 
e.  1 1 .  p .  S5  5 

Ev/deme  qui  naift  de  l'application 
ptefentc  aux  preuves  plus  vive  &  plus 
convainquante  que  celle  delà  mémoire. 
Celle  des  Catholiques  efl:  de  ce  genre  à 
•«ufe  de  l'article  de  l'Egli/b,  i.l.  u.  c,  u. 

p.'n- 

Eulegie  eft  la  chair  mîme  de  J.C. 
■lèlon  S.Cyrilk  j  1. 1.  f  c.  7  .  p.  fi7 

zutichiens  leurs  difFcrens  fcntimens  & 
leur*  diverfesexpreffions  3.1.  f.  c.7.p.iSt 
En  quel  fcns  ils  difoient  que  la  nature 
humaine  eftoit  abforbée  ,  ikid.  p.  283, 
Theodoretne  taifonne  bien  qu'en  fuppo- 
fant  qu'il  conrenoit  avec  les  Eutichicns 
de  la  traiifiubfl:.  3. 1.  f .  c.  7.  p.  iS4. 

tHtichiens  n'ont  janaais  prétendu  que 


MATIERES. 

J.  C.  n'cuft  plus  de  corps ,  &  qu'il  fuft 
purement  incorporel.  Pallagcs  pour  5c 
contre,  3.I.  j  c.  n.  p.  513.  Réfutation 
des  objcdions  de  M  Clau4c  fur  ce  point. 
5.1,  f.c.  u,  p.  354.  &c.  &  r.  g.l.  1.  c.  i;. 
p.  239.  &lél 

EHtjchiens  réfutez  par  l'Euchai^ftie. 
Suppolition  téméraire  de  M.  Claude  fur 
ce  point.  5.  1.  î.  c.  rz.  p.  359 

Eutychius  ■vindicAtus  compofé  par 
EKcUenfis,  1.  témoignages  conCdera- 
bles  de  la  foy  des  Copthes  tirez  de  ce 
Livre,  r. g.  1. 1.  c.  13. p.  215 

YMthjmtus  Zigabenus  fournit  des  preu- 
ves négatives  &  polirives.  Beaux  paffa- 
ges  tirez  de  fbn  Commentaire  fur  Saint 
Mathieu.  Reflexions  liir  ces  palTages,  i.l, 
Z.c.  11. p.  179.  (^ fuiv, 

ïXitToeit  des  fix  premiers  ficelés  ne  peut 
cftre  niellé  avec  la  méthode  de  prefcrip- 
tion  ,  i.l.  II.  c.  Il,  p.  S49 

s.xfrelJtons  évivoqucs  fe  doivent  dé- 
terminer par  le  coiifent»mcnt  confiant 
de  tous  les  fidclles ,   i .  1,  7.  c.  r.  p.  471 

txpre0o>is  abregéts  &  leur  ufage  dans 
la  matière  de  l'Euchariftie ,  i.l.7,c,  7, 

p.  555 

txfrejftons  qui  naiffent  de  la  ntture 
même  du  myftere ,  autres  que  celles  qui 
naiffent  des  diljuxs  ,  1. 1.  8.  c,  1.  p.  f j^, 
Ç^  fuit], 

\xfrejfions  oppofées  au  doute  qui  naift 
fur  l'Euchariftie  ,  quelles  elles  doivent 
eflte,  1. 1.  8,  Cl.  p.6  t9 

ixfrelfions  abrégées,  i,  1,  S,c,  i,  p.  ftfa 

zxprejjîons  dont  les  Miniftres  abufenr, 
employées  par  des  Auteurs  certainement 
Catholiques,  r.  1.  to.c.  4.  p.  741,  On  n'en 
doit  pas  régler  le  fens  par  le  langage  qui 
s'eft  introduit  depuis  quelques  temps, 
tbid. 

Exfrejfions  qui  marquent  la  prefence 
réelle  ,  font  toutes  ordinaires,  &  feroient 
toutes  extraordinaires  eftantprifes  en  un 
fens  métaphorique  ,  1. 1,  7.  c.  5.  p.  798 

ixi'relfions  figuratives,alleguées  par  les 
Miniftres,  prouvent  tout  le  contraire  de 
ce  qu'ils  prétendent,  x.  l.i,  c.  15.  p.  101, 

I.  Exemple.  Je  fuis  une  vigne.:  Je  fuis 
une  porte,  105 

î.  Les  fept  Vaches  grafle*  font  7.  an- 
nées. il>;d.  lOf 

^.Tu  es  caput  aureum,  p. 106. 

4.    Semenefiiicrbum  Dei.  lorf. 

txemfUs  tirez  des  expreffiont  ficra- 
mentales ,  prouvent  tout  le  contraire  de 
es  que  prétendent  les  Miniilrcs  ,    iq% 


TABLE    DES     MATIERES. 


».  La  Circoncilion  eft  l'alliance,  p.  i  Jo 
1 .  £y?  enimfhaje,  id  efl  tranfitus  Domi- 
ni.  II ; 

3.  it  intmlnt Rex glor'iA. ,  p,  iitf 

4.  La  pierreeftoitChrift,  117 

5 .  Ce  Calice  eft  le  Nouveau  Tcftament 
p.  118 

Confequence  de  tous  ces  exemples, 
p.  119^ 

ixfrejfions  literales  ,  ont  quantité  de 
fuites  réelles ,  non  les  métaphoriques  , 
i.l.J.c.^.p.^oj 

ixfrejftons  Euchariftiques  différente» 
de  celles  qui  marquent  les  autres  fignes 
d'inftitution  ou  les  pauvres,  i.  1.  6,  c,  16. 
p.  41  &c. 

B*^rf^9w  touchant  les  pauvres,  1. 1,  tf 
c.  té.  p.  741 

Les  différences  de  celles  qu'on  employé 
fijrl'Euchariftie,  ibid,  p.  74J 

Expressions  Eucharistiquis 
reunies,  z.  1.7.c.  i.p.  7fi.  &c. 

Euch,  corps  &  fang  de  J.  C.  x.  1.  7.  c.  r. 
p.  7fi 

Pères  n'ont  repris  perfonne  de  croire 
qu'elle  fuft  le  corps  de  J.  C.  ibid.  7^1 

Ils  ont  confideré  ces  paroles  comme 
claires ,  félon  l'exprcffion,  comme  diffi- 
eiles  quant  à  la  chofe  lîgniHée  ,  ttid. 

Ils  ont  exigé  la  conferfion,  7f  ;. 

Cette  foy  produit  naturellement  des 
doutes,  ibid, 
Expreflîons  naturelles  de  ce  ddute.  7J4 
Naift  de  la  différence  du  rapport  des 
fcns  &  de  celuy  de  la  foy.  75'4 

Huit  moyens  de  combattre  ce  doute, 
pratiquez  par  lesPcres,  qui  prouvent  la 

réalité.  p.7f4.7fî. 

Noms  de  l'Euch.  naiffant  de  la  realite. 

Pain  changé  fuite  de  l'Euchariftie. 
p.7f8 

Changement  marqué  comme  réel.  758 

Corps  de  J.  C.  pris  pour  le  corps  na- 
turel. 7f9 

Changement,  fuite  de  cette  parole, 
Cecj  efl  mon  corps  7  j 9 

Comparaifons  approchantes  de  la 
trinfubft.  emp'oyéi.'spnr  les  Pères.  760 

On  s'eft  adreffé  à  Dieu  pour  l'opcrer. 

On  a  dû  s'exprimer  par  les  termes  de 
faire  le  pain  le  corps  de  J.  C  thid 
Corps  de  J.  C.  propofé  gifant.  75^1 
Il  eft  fur  l'autel. -'61. 
Sanftifîe  l'autel  &  lesvafes.  7<;t 
Le  corps  de  J.  C,  eft  fui  1»  leric.  671 


11  eft  entre  les  mains  des  hommes. 
7«i 

II  eft  touché,  j6i 

Nos  mains  reçoivent  le  Roy.  7^; 

On  doit  éviter  qu'il  ne  tombe  ,  &  re- 
garder cela  coinine  un  grand  malheur. 
7«3 

Il  eft  prefent.  764, 

Celuy  qui  eft  à  la  droite  du  Père  eft 
entre  nos  mains.  71S4 

Nous  en  approchons,  nous  7  partici- 
pons ,  nous  le  recevons  ,  nous  le  pre- 
nons. 7^4, 

Nous  le  mangeons  abfolument  &  fanf 
énigme.  7^  f 

Nous  le  mangeons  d'une  manière  qui 
ne  peut  convenir   à  la  divinité,   ysy 

Le  corps  de  J.  Centre  dans  nous  par- 
vôyed'r. liment,  ji^ 

On  boit  le  fang  de  J.C,  fans  aucua 
doute  j(-6 

J.C.  nous  donne  véritablement  foif 
corps  à  manger  &{bn  fang  à  boire.  ■j6é 

On  difpenfede  l'autel  la  viûime  fain- 
te.  ibid. 

JC.  nous  dreffe  une  table  de  fon  corps 
&  de  fon  fang.  ihid. 

Loy  nouvelle  différente  de  l'ancienne , 
parce  qu'on  commande  d'y  boire  du' 
fang.  767 

3 .  C.  a  bû  luy-  même  fon  fàng.  ibid. 

J.  C.  s'eft  porté  luy-mêmc  en  fes 
mains,  ibid, 

J-.  C.  n'eft  pas  dans  ce  myftere  fous  f* 
propre  forme,  ibid. 

On  prend  J.  C.  par  la  bouche,  y 6% 

Les  méchans  le  reçoivent,  ibid. 

Adoration  eiterieuie  commune  aux 
bons  &  aux  méchans.  770 

Les  méchans  outragent  direiSement' 
le  corps  de  J.  C  ttid. 

Il  entre  dans  nous,  s'introduit  dans 
nous.  771 

Eft  méfié  avec  nous.  ibid. 
Comparaifons  naturelles  pour  erprimcf 
ce  mélange  d'un  levain, d'une  cire,  773. 

J.  C,  eft  dans  nous  par  fa  propre 
chair.  775. 

Nous  luy  fommes  unis  corporelle- 
ment.  ibid. 

Il  eft  dans  nos  entrailles,  ibid. 

Nous  prenons  le  même  pain  dont  noBS 
vivrons  éternellemenc.  itid. 

Nous  portons  J.  C.  en  nos  corps,  ibid, 
J  .  C.  eflant  en  nous  y  produit  de  grands 
ffcts.774 

jCeux  qui  f«  fèpaxent  de  l'Eue  IwuiiUc 


8i6  TABLE    DES 

font  feparcz  de  la  vie.  774 

Corps  de  J.  C.  indivifibk.  jy.f 

Unit  Icschreftiens.  77(S' 

Nous  n'avons  qu'un  pain  &  un  calice, 

tiid.  J.  C.  cli  effet,  777. 

Picftres  foinient  le  corps  de  J.  G.  tiiJ, 

Nos  myftercs  font  terribles,  /iid. 

11  f,-.ut  s'approcher  comme  du  corps  du 

Roy  en  portured'adorntion.777.&  778 

Il  hîut  en  le  recevant  reconnoiftre  Ion 
indignité,  778 

Le  corps  de  J.  C.  dans  l'Euchar.  attire 
les  Anges,  qui  y  font  prefens,  779 

On  les  y  voit.  ttid. 

Prefencedc  J.  C.  fur  l'autel ,  favOraKIe 
pour  obtenir  des  grâces  pour  les  vivans 
&  les  morts.  780 

Honorable  aux  M-irtyrs  d'eftre  nom- 
mez enprefence  du  corps  de  J.  C.  7S  i 

Seize  comparaifons  de  l'Euchariftie 
avec  diverfes  cliofcs ,  dans  le(l]uelles  les 
Pères  ont  dit  ce  qu'il  falloit  dire  félon 
la  doiitrinc  de  la  prcfencc  réelle.  781 

Il  eft  jufte  félon  cette  do^rine,  d'ex- 
pliquer de  l'Euchariftie  le  6.  chap.  de 
S.  Jean.  78e.  de  parler  à  l'Eucharirtic 
comme  vivante,  riid. 

Il  efl  jurte  d'exhorter  à  la  recevoir 
comme  le  corps  de  J.  C.  d'en  parler  com- 
me du  corps  de  J.  C.  &c.  lèid, 

Confequences  naturelles  de  cet  amas 
de  partages  qui  donnent  l'idée  de  lapre- 
fcncc  réelle,  qu'il  prouve  comme  un  chi- 
fre  dechifré.j,,  I.7.  c.  t. p.  750.  &c. 


FAIT  fuppofé  dans  la  perpétuité, que 
coûtes  les  communions  fchifmatiques 
le  font  trouvées  dans  l'onzième  /îecle  , 
perfuadées  de  li  dodrine  de  la  prcfence 
réelle, non  contcfté  par  M,  Claude,  r.  g, 
l.i.  c.  I.  p.iL.&  C.2.  p,  88 

Faiu  enfermez  dans  l'aveu  prcfent  fait 
par  M.  Claude ,  que  les  Grecs  &  les  La- 
tins ont  connu  mutuellement  leur  do- 
ctrine, r.g.  1. 1.  C.6.  p.So.c.  S.  p.  107  Se 
fuiv. 

faits  a-youez  par  M.  Claude  j  r.  g,  i.  i , 
e.  f.  p.  69  . 

F»>ts  humains,  de  quelle  forte  de  certi- 
ie  peuvent  eftre  connus,  3.  1,  7.  c.  i. 
p.4S5 

lalfficatian  de  deux  endroits  du  Livre 
de  la  perpétuité  par  M.  Claude  ,  1.  1.  il 
c.  10.  p.  819 
-  ^'vin  autre  palFagede  la  PerpetHitc^t.g 


MATIERES. 

l.t.c.  !<;.  p.f57 

FiilJJf cation  d'un  partage  de  Jeremie 
deConllantinoplepar  M.  Claude, prou^ 
vée,r.  g.l.i.  c.  Il,  p.463  ^ 

Faljijication  d'un  partage  de  S.Chry- 
foftorne,  injullement  reprochée  à  l'au- 
teur de  la  Perpétuité,  1. 1,  7.C.  4.  p.  S19 

Fierté,  caradere  d'."  u'jcrtin  &  de  M. 
Claude^  1. 1.  1.  C.  z.p.  104. 
Figure  nue  attribuée  aux  Calviniftes  par 
Parthenius  &  pourquoy^  1. 1.4.  c.  7.p,  31^ 

Figure}  fe  dilccrnent  par  le  fens  com- 
mun des  exprertîons  fimples,&  fe  meflenc 
fans  confu lion  ,1.1.7.  c.  3.P.490 

Figure  niée  formellement  de  l'Euchar, 
par  divers  auteurs ,  1. 1.  7.   c.  f .  p.  fot 

Sens  de  figure  notoirement  obfcur ,  2, 
1.  I.  c.  17.  p.  154 

Que  J.  C,  ne  l'auroit  pu  propofer  Çins 
exphc.ition  ,  13* 

Oçie  les  Evangeliftes  l'auroient  expli- 
qué, ibid.  Exemples  de  ces  explications  j 
757 

Fitux  exemples  alléguez  par  les  Mi- 
niftres,  des  métaphores  non  expliquées  j 
tbid. 

Sens  de  figure  tres-difFercnt  àa  fimplcs 
métaphores ,  z.  I.  4.  c.  8.  p.  39? 

Figure,  image  J  vérité  pour  la  Loy, 
l'Eglife  &  le  ciel,  i.  1.  6,  c.  10,  p.  67^ 

Mots  de  ^«rf  &  de  fignes.  Suites  de 
laprefence  réelle,  3. 1.  i.c.  j.p.14 

Mots  de  figures  &c,  employez  par  des 
Pères  qui  marquent  en  même  temps 
qu'ils  croyent  le  corps  de  J.  C,  joint  à.  Iz 
figure  ,  5.  l.r.  c.  4.  p.  51 

Figure  Se  lacrement  du  corps  de  J.  C. 
exprellions  indéterminées,  3.I.  z.c.  i.  p. 
<Î9.  Comment  il  les  faut  déterminer,  p. 70 

Ftaviut  Luthérien,  prouve  que  la  con- 
fertion  de  Cyrille  ne  contient  point  la 
foy  de  l'Eglife  Greque.  1. 1.  1.  c.  4.  p.  117 

fléchir  les  genoux  ,  c'eft  adorer,  quand 
cette  cérémonie  cft  jointe  à  une  rcvcren- 
ce  intérieure,  i.  1.  7.  c.9.p.  Si9 

Florus  fur  l'Euchar,  1. 1,  8.  c.  4.  p,  jyj 

&  Sl\ 

PartTage  de  cet  auteur  dont  M,  Claude 
abufc.  1. 1.  S.  c.  7.p.  J9J' 

Pourquoy  il  ne  demande  le  chatige- 
mcnn  du  pain  au  corps  de  J.  C,  que  pour 
les  fidellcs,  ttid.  p.  5-90 

Ftndement  des  métaphores  doit  eftrC 
connu.  Application  de  ce  principe  contre 
la  yerftt feparée,  z.  1.  tf.  c,  i.p.  J9+ 

Forank 


TABLE      DES 

/■«>•»?? œconomique  de  M.  Claude  fans 
âuthoiité  &  fans  preuves ,  r.  g.  1. 1,  c.  8. 
p.  iii 

torbefitis  auteur  de  tinfiruBion  hiflo- 
rjqiie  ,  dit  qu'il  n'eft  pas  fcur  d'imiter  les 
Pères  fur  la  prière  pour  les  morts ,  i .  1. 1, 
c.  9. p.  Si 

Ferbejlus  auteur  des  confidcrations  ba- 
cifîqi/es  ,  dit  que  les  Grecs  tiennent  la 
tranfiubltantiarionj  1. 1.  i.c,  4.  p.  117 

Aigrement  &  injuftement  repris  par 
M.  CJaude.  i.l.  4.C.  4.  p.  186 

Foj.  Bçnne  foy  neccfl'aire  à  tous  les 
r^ifonnemciis.  i,  I.7.C.  f.p.4?^ 


G^i/vf/Archeveique  de  î'hiladelphie 
pour  la  tranliubftantiation  &  l'ado- 
ratiùn  ,  I.  1. 10.  c.  8. p.  776 

Gujanttes  Eutychienscrovoient  lapre- 
fence  réelle,  i.  1.  j.c.  S  p.  340 

Cennadtus  Scholatius  fur  la  tranfTub- 
ftatiation  ,  1. 1.  4.  c.  5.  p.  17Î 

Gergan  allégué  par  M.Claude  à  contre- 
fens,  r.  g.  l.i.  c.  14.  p.  zij 

Gerlacl^  Luthérien  ,  entremetteur  des 
Luthériens  envers  le  Patriarche  de  Con- 
ftantinople ,  1. 1.  4.  c.  4.  p.  183 

Marque  dans  une  Lettre  que  les  Ar- 
meniins  croyent  la  cranflubftantiation  , 
*.l.f.  c.  7,p.  579. 

Germain  Patriarche  de  Conftantino- 
ple  au  7.  fîecle.  Il  n'eft  pas  certain  que  la 
Théorie  des  myftcres  foit  de  luy.  R.aifons 
de  ce  doute,  i,  1.  7.  c.  3.  p.  484 

Témoignage  de  cet  auteur  fur  l'Euchi- 
xiftie,p.  48f 

Grâce,  peut  eftre  prile  pour  la  grâce 
eflentielle,  5. 1.  j.c.4.p,  i6f 

Grandeurs  de  deux  (orte  de  mefmeque 
la  baflelfe.  Les  Apoftres  grands  d«  la 
grandeur  divine  ;  petits  par  le  défaut  de 
grandeur  humaine.  i.l.4.c.(;.p.}7î. 

Grecs  attachez  à  l'ancienne  difcipline, 
leur  aufleritc  ,  leur  4.  carefme,  i.l.i. 
C.  ?.  p,  IC9 

Grecs  anachez  à  1  invocation  des  Saints 
félon  ChytrcuSj  1. 1.  i.c.;.p.  iio 

Grecs  en  Italie  tolérez  dans  leurs  coû- 
tâmes,  1, 1.  i,  c.  f.  p.  1 14 

Grecs  modérez  &  emportez,  i.  1.  1. 
<.  lo.p   169 

Criff/ quiont  mKquéau  11.  fiéclc  leur 
différend  avec  l'Eglife  Romaine ,  n'ont 
point  parlé  de  \n  prc/cnce  réelle  ni  de  la 


MATIERES.  23y 

tranffubftantiation,  i.l.z,.c.ii.p.i7i&  174 

Grecs  attachez  a  leur  religion  ,  ne  peu  • 
■vent  eftre  foupçonnez  d'avoir  dilTimulé 
par  complaifance  l'erreur  des  Latins  fur 
l'Euchariftie ,  1. 1.  ;.  c.  i,  p.  icc 

Grecs  Ipciîlatcurs  de  l'adoration  de 
l'Euchariftie,  ne  s'en  font  pouit  fcanda- 
lifez,  i.l.  5.C.  i.p.  169. 

Reunis  a  l'Eglife  Romaine  fans  inftiu- 
dion  furl'Euch.  1. 1. 5.C.  i.  p.io;) 

Adorent  l'Euchariftie  a  Florence  ,  i.  1. 
4.  p. 171 

Ecrits  des  Grecs  &  des  Latins  du  i;. 
ficelé,  1. 1, 5.  c.  4.  p.  116. 

Eftat  de  l'Eglife  Greque  au  1 4.  ficde  ^ 
i.l.;.  c.  7.p.i54.    Nui  différend  lur  la 
■  tranifubftan  iation ,  liid. 

Grecs  ont  peu  parlé  des  fuites  phi lofo- 
phiques  de  l'Euch.  quelques  exemples 
quien  reftent ,  1. 1.  10.  c.  8.  p.  770 

Gr-ecs  félon  M.  Claude  ,  retiennent  le 
fens  littéral  de  ces  paroles  :  Cecj  efl  mon 
corps,  r.  g.  1.  I.  c.  8.  p.  iic.  Vont  aux 
Eglifcs  des  Catholiques  quand  ils  n'ea 
•  nt  point,  r.g.  l.l.  c.  11.  p.  210.  reçoi- 
vent les  Catholiques  à  la  communion,;. 
1.  8.C.  9.p.  «48 

Grégoire  VU.  n'a  point  connu  d'autres 
différences  entre  les  Grecs  &  les  Latins  , 
que  la  procelfiôdu  S.Efprit,i.l.î.c.8  p.147 

Grégoire  IX.  traitte  avec  les  Grecs  pour 
la  réconciliation  des  Eglifes.  Leur  décla- 
re par  occafion  la  doélrine  delà  tranf- 
fubftantiation. Nulle  oppofition  de  la 
part  des  Grecs  dans  ce  traitté.  Diffcrcns 
réduits  à  1.  Il  n'eft  point  parlé  de  la 
tranflubftantiation  ,   i.  1.  3 .  c.  f .  p.  211 

Greotius  avoué  que  les  Grecs  croyent  la 
tranflubftantiation ,  i.  1  z,  c.  4.  p.  ii5 

H 

Hilton  Hiflorien,  Prince  d'Armé- 
nie,fe  fait  Religieux  de  Pténiontréj 
1.  l.f.  c.  6.  p.  ^6<) 

Hamond  proteftant  Anglois  ,  réfute 
Blondcl  fur  rEpifcop.it  par  rimpollibilité 
du  changement ,  1. 1.  i.  c.  S.  p.  76. 

Herbert  a  augmenté  le  récit  de  fou 
voyage  en  la  i.  édition  ,  ce  qui  a  efté 
caufe  d'une  mépnfe.  Erreur  dp  ce  Voya- 
geur fur  les  Arméniens.  1. 1.  y.  c.  8.  p.  580 
Hil.trion  Religieux  Grec  ,  enleigne  la 
prefence  réelle  &  la  tranfubftantiation  , 
,  I.I.4.C.  î.p.199 

HiLtrion  Cicada  de  l'Ifle  de  Chypre, 
fa  profellîon  de  foy.  r.  g.  1.  c.  li.  p.  101 

M  M  m  m  m 


8z8 


TABLE   DES 


Son  Ecrit  pour  l'échirciircment  du  Sy- 
noui;  de  Chypre.  p,i07 
']-lincmar  condamne  ceux  qui  donnoient 
atteinte  en  lecret  à  la  doftrine  de  la  pre- 
fence  ici.-lle.  i.l.8.c.4.p.s^é9 

Il  parle  de  l'Eucliar.  comme  eftant  du 
pain,  1. 1,  8.C.  4.  p.  569 

Autres  Auteurs  qui  ont  fait  le  même , 
ibid. 

Hijforiefis  du  lO  fiecle  ,  ne  font  aucu- 
ne mention  d'erreur  contre  l'Euchariftie, 
ï.l.9.c.<^.p.  (Î85.  nidezelepaniculier  a 
en  fourenir  la  foy,  ibid. 

Hoc.  CCS  paroles  ;  Hoc  tft  corpus  meum , 
propofées  fans  explication  comme  objet 
de  la  foy  par  dix  Auteurs  ,  z.  1.  5.  c.  <). 
p.  3ii.&:c. 

Q^'il  s'enfuit  de  là  qu'elles  ont  eftc  en- 
tendues littéralement  parles  Petes,  p-3tf 

Hocfucite  in  me.tm  commemorationem  ; 
que  ces  paroles  ne  (ont  point  explicatives, 
i.  1.  I.  c.  ly.p.  iio.  Nul  Père  ne  les  a  pri- 
fcs  pour  explicatives,  ibtd.  ni  les  premiers 
Calvinift.'s.  Omifes  par  S.  Mathieu  & 
S,  MarCj  ib'd. 

Hommes  capables  de  toutes  fortes  d'ab- 
furdicez.  Qii'il  ne  faut  pas  les  nier  lors 
qu'elles  font  attirftées  ,  1. 1. 1,  c.  6.  p.  i  ■  7 

Horreurs  naturelles  naiflTent  d'imagi- 
nation. 11  faut  peu  de  choies  pour  les  didî- 
per,  1.1.4.  c.  6.  p.  J7f 

Ho//» /«/»»  approuve  des  aillions  toutes 
contraires ,  1. 1. 1.  c.  f.  p.  f  i 

Hu^o  Eteiianus,  écrit  contre  les  Grecs^ 
ne  leur  fait  aucun  reproche  fur  l'Eutha- 
rilHe  ,    i.I.i.c.ii.  p.173 

i/«/«éf7-/^ impute  Ibuvent  aux  Grecs  des 
confequences  non  avouées,    i.  I.  i.c.tf. 

p.  154 

Dif^Tcns  qu'il  a  eu  avec  Cerularius  & 
NicetaSj  1.  1.  1.  c.  f.&  6.  prouvent  l'u- 
nion des  Eglifes  fur  l'Euchariftie- ,   p.  ij7 

Traduction  d'un  partage  de  Humbert 
juftifiée  ,  r.  g.  1. 1.  c.  10.  p.  4i-i 

Hujfites  cnvoyent  en  Orient  pour  s'in- 
former s'il  n'y  avoi:  point  de  Chrcftiens 
à  qui  ils  fe  puifeut  joindre.  Les  Luthé- 
riens en  font  de  même.  1. 1. 1.  c.  7.  p.  141 

Hjferbitte  dans  un  pa(raj;e  de  Tertullien 
félon  le  Cardinal  du  Perron.  Autres 
exemples  de  la  même  figure  j  j,  l.i.  c.  3 

P.78' 

I 

J^cohites.    Leurs  Eglifes,  leur  Patriar- 
che, I.  1.  i.cvp.n? 
Preuves  ncc;uivcs&  pofitivesdc  la  foy 
des  jacofaitjsfur  la  prcfence  réelle  &:  la 


MATIERES. 

tranlfubft,  i,l.  f.  c,  11,  p.  399.  MilfionS 
qui  leur  ont  efté  envoyées ,  tbid.  p.  356. 
C'onfe/fion  de  foy  qui  ne  park  point  de 
rEuchafiftie,/^/»^.  597  Témoignages  po- 
fïtifsds  leur  créance  par  leurs  Livres,  398. 
'Extrait  d'un  Livre  Jacobite.  3.  1.  8.  p  767 
Iconocl.iflei  alfemblez  à  Conftantino- 
ple.  Leurs  fentimens  fur  la  realité  ,  1.1.7. 
c.7.p-fi9 
Jean  Bafile  Boibonda  Defpote  de  Mol- 
davie,r.g.l.i.c.i,p.  H4 

Jeun  Cantacuzene  ,  d'Empereur  Reli- 
gieux de  S.  Bafile.  Sa  conférence  avec 
Paul  Patriarche  latin.  Ses  erreurs ,  1. 1.  5^ 

c- 7. p.  13  y 

S.Jean  de  Damas  rejette  par  les  Mî- 
niftres.  Beaux  palfiges  de  cec  Auteur  fur 
l'Euchar.  mal  éludez  par  Aubertin,  1. 1.  7, 
C.4.  p.  494.  ^  /«/-u.  Traduftion  jufti- 
fiée, r.  g.  1.».,  p.  411. 

Jean  le  Fevre  marque  que  les  Mofco- 
vites  croyent  la  tranlliibftantiation^i.l  ;. 

Cl.  p.  544 

Jean  Patriarche  d' Antioche  reftabli  pat 
les  Latins,  i.  1.  1.  c.  10.  p.  165 

Jean  Phurne  Prieur  de  Montagne ,  fon 
témoignage  pour  la  prefence  réelle, 1 .  Li 
c.  II.  p.  171 

Jean  Plufiadene  pour  la  tranflubft.i.l.  4,. 

c.  4.  p. 177 

fean  de  Paris.  Son  hiftoire  alléguée 
mal  à  propos.  Divcrfcs  fnlfifications  que 
M.  Claude  a  faites  dans  ce  qu'il  rapporte 
de  fon  écrit  ,  3.  I.7.C.I.  p.  45?-  n'a 
jamais  nié  la  prefence  réelle  j  461.  Son 
erreur  confiftoit  dans  unefubcilité  deme- 
taphyfiquc,  461.  Pourquoy  il  ne  fut  pas 
condamné  à  Paris  &  a  Rome,  ihtd.  Com- 
bien il  cft  ridicule  de  prétendre  que  fi  les 
Grecs  ont  pu  ignorer  l'Hiftoire  de  Jean 
de  Paris ,  ils  ont  bien  pu  ignorer  la  créan- 
ce des  Latins.  4(^4. 

^ean  Scot  n'a  jamais  cfté  Abbé  d'Ete- 
lige  Difierentde  Jean  Saxon, i.  l.ii.p.io 

Jean  Scot  n'a  point  cfté  difciple  de 
Bede  ,  prouvé  par  l'âge  de-  tous  les  deux 
Qu'il  n'eft  point  compagnon  d'Akuin, 
m  fondateur  de  l'Univerfité  de  Paris,/W. 
Hiftoire  de  fon  martyre  peu  alfuré,  il. 
qu'il  n'a  point  efté  mis  au  rang  des  Mar- 
tyrs parles  Papes ,  if. 

Jean  Scot  auteur  des  Dialogues  des 
natures, 1. 1. 11.  p.  5.  &  du  Livre  attribué  à 
li'-rtram.  Preuvesde  ce  fentinient,  i.  l.u. 
p.  S.  9.  lo,  &c. 

Tout  ce  qui  e(V  dit  dans  les  anciens  du 
Livre  de  Scot  fe  trouve  dans  le  Livre  d  c 


TABLE  DES 

èertram,  remarques   particulières  ,    9, 
10.  II. 

Conformité  du  génie  de  Bertram  &  de 
Jean  Scot.  Auteurs  qui  ont  parlé  de  Ber- 
tram ,  If. 

Jcitn  Vcccus  grand  deffenfcur  des 
Grecs  contre  les  Latins,  t.  l.vcj,  p.  119. 
Se  convertit  dans  la  prifon,  ibid.  Eftfait 
patriarche  de  Conftmtinople  ,  p.  111, 
Approuve  la  tranflub.dans  fes  Lettres  Sy- 
nodales. Eft  cluiré  du  Patriarchat  par 
Andronic,  1.1.3.  '^-  4-  P- 1^  f-  Relégué  au 
Chafteau  de  S.  George.  Y  meurt ,  ibid, 
p.  iî6.  Fait  fon  Ttitamcnt,  &  déclare 
qu'il  meurt  pour  la  procelîîon  duS.Elprit 
parle  Fils^  ibid,  &  r,  g.l.  i.c.  11. p.  19$ 

Jeremie  Patriarche  de  Conftjntinople. 
Sa  ncgotiation  avec  ies  Luthériens.  Sa 
rcponfe  au  10.  article  de  leur  confcilîon, 
,1.1.  4.  c.  4.  p  i8f 

Explicition  d'un  partage  de  cette  ré- 
-ponfe,  p.  z8f.  Divers  pallages  pour  la 
prefence  réelle  &  latranilubUantiation  , 
p,  190.  191. 193. 

Confeflion  de  Jcremic  traittée  de  Cal- 
vinifle  par  Aubertin  &  par  M.  Claude, 
1.1.  t.c.  4.  p.  m.  Traduiîlion  juftifiécj 
r.  g.  p.  478. 

j^eitnes  avant  la  réception  de  l'Eucha- 
rifte,  r.  1.  it.  p.  48 

/.  C.  a.  eu  des  delFeins  de  mifericorde 
&  de  juftice  en  prononçant  ces  paroles , 
Cfy  efl  mon  corfs  ,  (ans  autre  éclair- 
ciiTement,  Que  ce  font  les  Calviniftes  qui 
éprouvent  des  effets  de  fa  juftice  ,  1. 1. 1. 

c.  17..  p.  145 

/,'C.  a  participé  à  l'Euchariftie  fclon 
S.  Chryfoftome,  i.l.  4.C,  «.p.  S7r- 

S.  Ignace.  Auteurs  qui  ont  cité  fes 
Lettres,  i.l.  i.  c.8.p.74. 

Ignorance  monftrueufe  fuppofée  par  M. 
Claude  à  l'égard  de  l'Euchariftie  dans 
l'Eglife  Gr-cque  &  Latine  ,  i.l.i.  c.  f. 
p.  \i(i. 

^»orrf»f<;  mutuelle  des  fentimens  des 
uns  &  des  autres  entre  les  Grecs  &  les  La- 
tins ,  eft  toujours  le  dernier  remède  de 
M.  Claule,  r.  g.l.  I.c.  f.p.yz. 

Image.  Que  cette  propofîtion  5  l'image 
tîefl  pas  la  chofe  dont  elle  efi  l'image  ,  ne 
iî:;niffe  pas  qu'elle  n'en  contient  pas  la 
verru,  1.1.  7.  c.  f.  p.  j-05.  Réfutation  des 
e;:é'^les  alléguez  par  M.  Claude  pour  fou- 
tenir  ce  fens  chimérique,  i.l.7.c.7.p.  fi9 

Termes  à'image  rejette  par  Charle- 
magne  furie  fujec  de  l'Euchariftie,  i.L^  "^ 

c.  4.  p.  r7 


MATIERES.  819 

Ce  que  c'eft  que  d'ofFrir  en  image  fc- 
lon S.  Ambroife,  i.l.  (î.c.  10.  p.  674. 

Impofibiluc  du  changement  doit  déter- 
miner tous  ceux  qui  ne  font  pas  Capables 
d'exammer  ces  matières  par  voyc  de  dif- 
culTion,  1. 1.  i.c.  f .  p.  5j 

Imfojfdilitè  du  changement  fur  l'Eu- 
chanllie,  prouvée  en  abrégé  dans  tous  les 
fîecles  j  I.  1. 10.  c.  16.  p.  -•'Ï6 

Preuve  tirée  de  '\!imfo(fth:li.tè  du  chan- 
gement doit  déterminer  les  Calviniftes 
qui  doutent  de  la  folidité  des  preuves  de 
fait,i.l.i.c.f.  p.  4f,  &  qu'il  y  en  aplu- 
fieurs  entr'eux  de  ce  genre ,  ibid. 

Impojfthle  que  la  vérité  du  myfterc  de 
l'Euchar.  ne  (oit  connue  que  d'une  focietc 
d'heretiques.  Cela  fuppolc  toute  erreur 
dont  on  convainc  les  Calviniftes, les  con- 
vainc au/îî  d'erreur  fur  l'Euchar.  i.  1.  7 
c.  -i.p.  840.  confequence  de  cette  preuve, 
p.  844- 

Imfrefjtans  fcmblables  s'expliquent  fou- 
vent  tres-difFeremment,  ;  1.  i.c.  1.  p.  75 

Imprudence  (îgnalée  de  M.  Claude  dans 
ce  qu'il  ofe  avancer  que  l'on  a  refufé  pri- 
vilège au  I.  Volume  de  la  Perpétuité  , 
dans  un  temps  où  il  fçavoit  que  le  livre 
avoit  efté  leu  &  approuvé  parplufieurs 
Evefques,  l.l.  11.  p.  841. 

Impudence  des  hommes  a  des  bornes , 
&  n'eftpascapablede  toutjT.  g.  1. 1.  c.  17. 
p.  181 

Pourquov  les  hommes  ne  £e  portent 
pas  à  certains  excez  d'impudence,  i.l.  S. 
C.9.  p.  f-ii. 

Incompatibilité  apparente  n'empefche 
pas  de  concevoir  l'union  des  termes  lors 
qu'on  s'appuye  fur  li  révélation  de  Dieu, 
I.  1.  é.c.  I.  p.  418 

Incomprehenjibilité d'opinion, &  incom- 
preheniibilité  d'exprefilons  que  le  dogme 
de  la  prefence  réelle  eft  incomprchenfïble 
en  la  première  manière,  &  que  les  ei- 
prellions  des  Calviniftes  le  lont  en  la 
1.  ce  qui  eft  un  renverfement  de  ce  que 
les  Pères  nous  ont  dit  de  l'Euchar.  1.1.8. 

c.6.p.  f9? 

Incorporation  avec  le  corps  de  J.  C, 
comment  doit  cftre  conçue  (clon  Calvin, 
plufîeurs  fortes  d'incorporation  z.  l.i  c.9. 
p.  78.  Celle  qui  eft  un  effet  de  l'Eucha. 
riftic,  confifte  félon  M.  Cluide  en  de 
nouveaux  'ayons  de  lumière  &  une  abon- 
d.- ntc  mefure  de  fi  paix ,  ibid.  p.  7 j 

Indiefls.  Chreftiens  Indiens,  forme  de 
leur  confecration  ,  i  1.  5.  c.   10.  p.  394 

M  M  m  m  m    i  j 


S30  TABLE    DES  MATIERES. 

Autres  preuves    àe  leur  foy  tirets  de       pellcr  le  pain  confactc  divinité  >  i 
leurLitur'^ie,  v;î 


1.   f 


I/idmJiLilite  de  l'original  dans  les  fi- 
gures n'a  jamais  eflé  rcmarijute ,  i.l.  j. 
c.  9.  p.  f+o. 

tnfuilUbiiité  de  l'Eglifc  confiilerL-e 
comme  un  privilège  &  comme  une  grâ- 
ce ,  cft  un  principe  à  prouver ,  &  elle  s'é- 
tend à  tous  les  myftcres  ,  i.  1.  r,  c.  7. 
p.  69 

Inftillibil'tté  du  peuple.  Chimère  de 
M.  Claude.  Qiie  l'auteur  de  la  Perpétui- 
té ne  luy  attribue  rien  que  ce  que  tout  le 
monde  luy  attribue,  1. 1. 1.  c.7.  p.  6r.  69 
Intelligible  en  quel  fens  employé  par 
H-ficKius,  qu'il  fignifîe  la  vérité  oppofée 
à  la  figure  j  1. 1.  4.  c.  7.  p.  37^.  &  jSo. 
&c. 

Le  changement  qui  fe  fait  dans  l'Eu- 
chariftie  fe  fut  intelligiblement  félon 
Pafcife,   1.  1.  8.C.  4.p.  575 

Itnoc.'.tioit  des  Samts  comment  con- 
damnée par  les  miniftres,  1. 1,  i.  c.  10. 
p.  S3.  84 

I»-uocittion  des  Saints  enfcignée  au  4. 
5:  y.  Siccle  par  cous  les  Percs ,  i.  1,  r.  c. 
rc.  p.  %6 

Les  Pères  ont  cru  dans  tous  les  Siècles 
qu'elle  avoir  eflé  pratiquée  dans  les  prc- 
cedcnSj   i.l.i.c.  10,  p.87 

Imocation  du  S.Efprit  pour  changer  le 
pain  ,  &  faire  qu'il  fbiî  le  corps  de  J.  C. 
contenue  dans  toutes  les  Lirurgies,&  dans 
les  Pères,  1. 1.  6.  c.  j.  p.  fS/.  Les  fîdclles 
ont  conclu  que  ces  paroles  ,  Cecy  efi  mon 
corps  ne  fe  pouvoient  accomplir  fans  cetîe 
invocation  f9o 

Paroles    de  l'invocation    odicufcs  auv 
C  ilviniftes ,  1.  1,  6.C.  5.  p.  $9 
Jours. 

Beaux  Tours  de  l'Eglife.  Leur  defcri- 
ptioa  félon  M.  Claude,  r.  I.7-  c.  t.  p. 
4,(,6,  Se  terminent  au  huitième  iîeck', 
tbui. 

Jours  obfcirrs  &  leur  defcription  ,  i  1. 
7.  c.  1.  p.  497.  Quels  cftoient  ces  b.  aux 
jours  félon  les  auttes  Mniiftres  ,  ibid. 
p.  498.  £^/«™. 

P.iralogifincs  de  M.  Claude  poijr  foû- 
tenir  fes  beaux  jours  ^  r.  g.  1.  1.  c,  13, 
P.4S8 

Ironie  méchante  Kguré\,  fort  familière 
à  M.  Claude  i.1. 11.  c.  10.  p.  845.  Mau- 
■yjiisufage  qu'il  en  f.iit  ,  p.  844. 

Ijaac  Evc'fi-jue  d'Arménie,  fbn  témoi- 
gnage pour  la  prcfc-nce  réelle,  i.i.  i.  c. 
ji.  p.  174,  Accufe  les  Armenièiis  d'ap- 


c.  6  p.  55^ 

S.  ijuiore  de  Seville  parle  fur  l'Ea- 
charilliCj  le  langage  des  fens,  1. 1.  8.c.  4. 
p.  fK9.  Celuy  de  la  foy ,  p.   ^70.^71. 

Julien  l'apoftat.  Q^c  nous  n'avons  que 
le  tiers  de  (on  ouvrage  contre  les  Chré- 
tiens ,  5. 1. 7.  C.  y.  p.  499.  &  que  nous  n'a- 
vons pas  mefme  le  premier  entier  &  de 
fuite,  p. foo. 

Ciue  faint  Cyrille  n'auroit  point  rap- 
porté ce  qu'il  auroit  dit  de  l'Euchariftic  , 
fbid.  Temps  où  Julien  a  écrit  contre  les 
chrcfticns ,  s 05 

S  .Jujlin  martyr.  Sa  retenue' à  parler  de 
tous  les  myftercs,  approfondit  peu  les 
objeftioiis ,  parle  de  l'Huchariftie  com- 
me il  a  du,  3.1.  7.  c.  4.  p.  498, 


LAnfRanc,  fbn  pai's.  Temps  auquel 
il  a  compofé  fon  livre  du  Corps  du 
Seigneur  :  enfêrgne  que  toutes  les  Eglifes 
du  monde  croyent  la  prefence  réelle,  &c. 
1. 1.  1.  c.  7.  p.  140.. 

Double  langage  des  fens  &  de  hraifon 
ou  de  la  foy.  Exemple  de  se  double  lan- 
gage ,  1. 1. 7.  c.  7.  p.Jii.  ZSf"'-". 

Liingage  des  fens  lur  l'Euchariflie  dans 
les  Auteurs  Latins  du  8.  &  duj.fiecle,  i, 
1.  8.C.  4.  p.  ^(îc).  ^ fui-u, 

DefFenfc  de  ce  qu'on  a  dit  du  langage 
des  fens  dans  le  premier  tome,  5. 1.  4.  c. 
i.-p-i9f 

Ufase  du  lan"-a2e  des  fens  dans  les 
Auteurs  déclarez  pour  la  Iran (Tubd.  3. 1.  H 

c.  3.  P-i>4 

Latins.  La  durée  de  leur  Empire  en 
Orient,  1.I.3  c.  i.p.107 

Lutins  maffacrez  à  Co.iflantinoplè 
fous  le  jeune  Alexis  ,  leur  multitude  à 
Conftanrinople,  i.  l.i.  c.  lo.p- 168 

/«^rV/ai  combat  les  Mofcovites  fur  ce 
qu'ils  croyent  la  rranlfubfl:.  par  une  rai- 
fon  pitoyable,  r.  1.  s.c.  2  p.  34? 

Léon  Roy  d'Arménie  defavouë  les  er- 
reurs imputées  aux  Arméniens,  r.g.  l.i, 
c.  17.  p.  171. 

Ltgaridtus  Archevefque  de  Gaza  flir 
la  créance  des  Mofcovites  &  auttes 
Grecs  touchant  l'EucharilHc,  i.l.  y.  c. }. 

P-3fi  ,       .  ,., 

Circonflance  du  témoignage  qu  il  a 
renc'u  de  la  créance  des  Mofcovites ,  & 
■des  autres  Grecs  fur  l'Euchir.  1.  1.  y.  c. 
■^4ip.3ji.  Son  écrit  i.l.u.p.;9.Adora- 


TABLE    DES 

on  cflablie  pir  cet  écrie,  p.io.  c.j.  p. 779 
Traité  irijuftemen:  par  M.  Claude,  r. 
g.  1.  I.  c.  :i.p.  101 

Lihental  Rîfilcntrfe  Suecic  ,  à  Lettre 
au  Metropolit.iin  de  Gaze  pour  s'infor- 
mer de  hiy  de  la  créance  des  Grecs  ,  i. 
1.  ii.p.  j8 

Liturpc  Latine  appellée  ordre  Romain, 
1.I.8.C.5.P  f^iî 

Liturgie  d'IIlyricus  ,  i.  1,  8.  c.  ?.  p.  CCi, 
PaiHiges  de  ces  Liturgies  ^  ihtâ.  p.  ^  f  4 
Ç£  fuiv.  Suffirent  pour  convaincre  les  hé- 
rétiques, liid.  p.f67 

Liturgie  Ethiopienne  |appellée  Cinon 
nai-uerfalis  ^  Jcc.  t.  1.  f.  c.  13.  p.  /\o6 

M.  Claude  avance  témérairement 
cju'on  n'a  pas  l'original  Erhyopicn,  r.g. 
1.  i.c.rf.  P.14J 

Occafion  pour  laquelle  elle  fut  impri- 
mée, ibid. 

Verllon  latine  imprimée  à  Rome  ,  p. 
146.  Altérée  en  quelques  endroits ,  mais 
nullement  dans  l'original ,  liid.  14  6 

Tous  les  partages  alléguez  de  ces  Litur- 
gies pour  la  tranirubft.  (ont  dans  le  texte 
original,  r.  g.  1. 1.  c.  if.  p.  i.fy 

Et  de  même  dans  les  Liturgies  Cop- 
thes ,  traduite!  par  Viélor  Sciala,  zjf 

Elles  contiennent  une  confcirion  clai- 
re des  deux  natures  &  de  la  prefence 
réelle,  ibid.  p.  ijé,  g°  (ui-v. 

Liturgie  d'Alexandrie  rapportée  par 
EKcUentis  admirable  pour  la  prefence 
réelle  j  i.  1.  f.  c.  f.  p.  ^y8 

Li-ures  Ecclefiaftiquts  des  Grecs  pour 
latranflubft.  i.  1.  4  c,  16.  p.  32:1 

Luther  approuve  la  ligue  de  Scamal- 
cade  contre  l'Empereur,  quoy  qu'il  eue 
cnfèignc  le  conrraire ,  1. 1.  i  c.  4.  p.  44. 
Empreifement  de  Bûcher  après  la  mort 
de  Zuingle  pour  s'unir  aux  Luthériens , 
p.  4f 

Démarches  des  Calviniftcs  d'Allema- 
gne, 4tf.  Leurs  déguifemens ,  ibid.  Ga- 
gnent Melandlon  ,  47.  Concorde  con- 
clue à  Vvittcmbergj  en  accordant  tout  à 
Luther,  4S. 

Articles  qu'ils  ne  condamnèrent  pas 
formellement,  ibid.  Le  mot  ore  rctra'i- 
ché  par  Bûcher ,  quoy  que  le  fens  en  de- 
meure, ibtd. 

Luthériens  diffimulent  hontcufement 
leurs  opinions  aux  Grecs,  i,  1.  4.  c.  4. 
p.z82.&iS?. 

Luthérien  accufé  fans  fondement  de 
rhertfie  d:  Bcrengcr , ,  1. 1. 9.  c.  i.  p-  6jo 


MATIERES. 

M 


S3' 


Machine;  de  M.  Claude  pour  produi  • 
rc  le  changement  infenfible,  i.  !,  9. 
c.  2. p.  lél 

M.uhines  de  retranchement,  t. 1.9.  c.i, 
p.  «61.  &  c.  3.  p.  (S«y.  Inutilité  de  ces  ma- 
chines, tG. 

Machines  de  preparatiaa,  i.  1.9.  c.  i. 
p.  ('61,.  &  4.  p   6(^9 

Machines  d'adouciflement ,  j.  1.  9.  c.  1. 
p.  6é!.  Se  c  f.  p. «74 

Machines  d'oijbli ,  1 . 1.  9.  c.  1,  p,  f  64 
&c.  8. p.  691. 

Déclamation  de  M.Claude  peu  railon- 
nable  fur  ce  fujct ,  tbid.  693 

Malignité  de  M.  Claude  dans  une  com- 
paraifon  honteufe  qu'il  fait  de  fes  aver- 
faires ,  1. 1.  11.  c  11.  p.  S48 

Mandiication  du  corps  de  J.  C.  eft  cor- 
porelle félon  les  Pcies,  1. 1.  5.C.  î.  p.  514. 
Ne  peut  convenir  à  la  Divinité  ,  p.  yij- 

Munducation  du  corps  de  J.C.  a  dû 
eftre  affirmée  &  niée  par  les  Pères ,  5.I.  6. 
c.  6.  p.  39e 

Manducation  corporelle  cflablie  par 
les  palfiges  des  Pères,  5. 1.6.  c.i.  p  3fi 

Manières  particulières  à  M.  Claude. 

Première  manière.  Sufpenfioude  juge- 
ment. Combien  il  en  ufe  mal  à  propcs  à 
l'égard  de  Gabriel  de  Philadelphie,  quife 
fert  vingt  fois  du  terme  de  tranllueftan- 
tiation  ,  r.  g.  1. 1.  c.  10.  p.  iêo 

11  feconrente  que  ces  réponfes  durent 
un  an  ou  deux  ,  ihid.  Dccidc  par  avance 
les  chefes  fur  lefquelies  il  dit  qu''l  ful- 
pcnd  (on  jugement ,  &  les  décide  mal, 
r.g.l.T.  c.  :  C.p,  161 

C'eftune  de  fes  manières  de  direpo/î- 
tivcment  le  contraire  de  ce  qu'il  fçait,  r. 
g,  1. 1.  c  lo.p.  ifi4 

Seconde  tnanitic  de  M.  Claude  de 
s'inicrire  en  faux  contre  les  Auteurs,  qu'il 
ne  peut  éluder  autrement.  Ufagedecec- 
te  manière  contre  Agipius,  r.  g.  1.  i.  c. 
II.  p,  170.  Et  contre  les  Conciles  tenus 
contre  Cyrille  Lucar  ,  i8i.  Réfutation 
des  raifons  de  M.  Claude  contre  ces  Con- 
ciles, p.  194.  Ses  railons  pitoyables  con-. 
trccet  AUteur,p.  17!.  ^yw/T/. 

Troifiéme  manière  de  M.  Claude  de 
traitter  de  faux  Grecs  ceux  qui  parlent 
contre  luy ,  r.  g.  1.  i .  c.  11.  p,  lîf 

Ufage  qu'il  fait  de  cetre  manière,  19^ 

S'imagine  qu'on  peut  tirer  toutes  for- 
tes de  confeaucn.-cs  de  toutes  fortes  de 

M  M  m  m  m     ii] 


83t  TABLE   DES 

reproches ,   197 

Qn.itncme  muniere  de  M.  Claude,  de 
dire  des  injures  à  ceux  qui  rapportent 
des  partages  qui  l'incommodent.  Ulagc 
qu'il  en  tait  contre  AUatius,  r.  g.  1. 1,  c.  3 
p.  113,  contre  EKcUenfis,  p.  114 

M^mne  changée  au  corps  de  J.  C.  en 
quel  Cens,  1. 1. 11.  p.  41 

Af^»«f/ Calccas  Dominicain  Grec  en- 
feigne  la  tranff.ibftantiation.  N'accule 
point  les  Grecs  de  la  nier  ,  i.  1. 5.  c.  9. 

p.  i95 

Mm-c  d'Ephefe  contredit  par  Jofeph 
Êvelque  de  Mcthone  fur  ce  qu'il  dit  qu'on 
refufoit  l'argent  aux  Evelques  G  recSji.l. 
4.C.I.  p.  107 

Déclare  que  le  principal  fujet  du  diiFe- 
rend  entre  les  deux  Eglifes  cft  l'addition 
Fiiioque^iciid, 

M.trc  d'Ephefe,  Son  opiniaftretc  ,  fi 

haine  contrôles  Latins j   meurt  dans  le 

fchifme  j  enfeigne  la  tranllubll.  l,  1.  4. 

C.  j.p.i/f.  i7«. 

Murcionites  difoient  que  J.  C.  avoir 

adopté  le  pain  pour  en  faire  fon  corps , 

5.  1.  z.  c.  5.p.7f 

Mirgunnius  Evefque  de  Cythere  grand 
ennemi  des  Latins,  ne  leur  reproche 
point  la  doûrine  de  la  tranirubftantia- 
tion.  L'approuve,  1. 1.  4.CA.  p.  19S.199 

Muronttes^  leur  reunion  avec  l'Eglife 
Romaine,  i.  l.t.c,  5.  p.  m 

M.ironites  foûmis  au  Pape.  Aucun  ne 
les  a  acculez  d'avoir  une  opinion  diffé- 
rente des  Catholiques  fur  l'Euchar.  Leur 
reiinion,  i.l.f.  c,  u.  p.  598.  Preuves  po- 
fitives  de  leur  foy ,  ihid.  40 

Manques  différentes  du  fens  catholi- 
que &  du  fèns  calvinifte  en  ce  qui  regar- 
de noftre  vivifîcationparlachairdc  J.  C. 
1.1.  ç.c.  6.p.5ii. 

Que  toutes  celles  du  (èns  catholique  fe 
trouvent  dans  les  Pères,  &  que  celles  du 
fens   calvinifte  ne  s'y  trouvent  point, 

p.U4. 

Méch.tns  mangent  &  ne  mangent  pas 
le  corps  de  J.  C.  félon  divers  fins ,  3. 1.  6 
c.  9  p.  417 

MèUn/e  monftiujux  au  dixième  fie- 
clededeuxdoftrinesfcloa  les  Miniftres, 
I.  !■  9.e.  7.  p.fSS 

Monfk'ur  Claude    s'en  démêle  par 
dtsantithefes,   P.1ÎS9. 

M-'lunçes  des  exoreffions  Luthériennes 
&  Calviniftcs  ,  nrincipalemenr  après  la 
concorde  de  Vvjttemberg.  DifFc-rente 
conduite  des  Suilfes  &  de  Calvin  ,  mots 


MATIERES. 

de  fubllaïuicllement  ,  corporellement 
condamnez  parles  Suilies,  fo.ucnui  p.ir 
Calvin,  1.  1.  i.c.  f.p.  si •i'ojc^.co/icorde 
de  V-vittemherg.  Luther.  Cai'um,  Bu- 
cer, 

McUnge  continuel  des  meraphores  & 
des  exprelfions  fimples  dans  les  dilcours 
des  hommes  :  comment  on  les  difeerne 
fur  le  fiijet  de  la  prelence  réelle  ,  i.\.  6 
c,  14.  p.  710.  711. 

Mekhites  ou  Syriens  ;  preuves  négati- 
ves &  pofitives  qu'ils  croyent  la  tranlTub, 
i.l.  f.  c  j.p.  5f7 

Aîelerius  Patri.uche  d'Alexandrie  en- 
nemi du  Pape  n'a  rien  écrit  contre  la 
cranlfubft.  i.  1.  4.  c.  y.  p.  1^8 

Meietius  pour  la  tranlfubltant.  3. 1,  8, 
p.  79f. 

Mémoire  ne  fuppofe  point  l'abfence,  & 
n'cft  oopofée  qu'à  l'oubly.  On  peur  ou- 
blier les  choies  prefcntes  J   1. 1.  i,  c.  if, 

tAcmoriul.  Qualité  de  Mémorial  qui 
convient  à  l'Euchar,  n'eft'point  contraire 
à  la  prelence  réelle ,  3. 1,  6,  c.  i?  p.  44t 

Mefine.  Combien  cette  exprelïïoH , 
l'Euch-ririie  efl  le  corfs  mefme  de  J  C, 
ellcomnnine  dans  les  Pères,  x.l,  4.  c.  ii, 
p.  4-7-  ($  ft"-^. 

Qjje  les  Minillires  ne  produifent  aucun 
exemple  où  le  mot  de  mejme  foit  pris 
dans  un  lens  de  figure,  p.  454. 

En  quel  fens  S.Chryfoftome  dirqucles 
fidellcs  font  le  corps  mefme  de  J  C.  p. 
431.  &  que  les  pauvres  font  J.  C.  440, 
On  ne  dit  jamais  des  (îgnes  qu'ils  font 
les  chof.s  mefiTies,  441 

Metuphores,  vraie  nature  des  meta- 
piiores,  qu'elles  font  concevoir  deux  cho- 
fes  ,  ce  font  des  comparaafons  fecrettcs, 
l.^.f.  c.  II.  p.  4'^9 

Met.ifihoresnz  fe  peuvent  renverfer,  t. 
1.  I.C.  16.  p.  131 

Met.tfhores  rnifonnibles  ,  ne  juflifîent 
point  les  métaphores  dérailonnables ,  t. 
1.1. c. 5. p. 111 

Quarre  conditions  neceffairespourin- 
fifèer  fur  la  venté  des  propolîtions  meta. 
f  boriques  &  pour  dire  qu'il  les  faut  croi- 
re ,  1.1.  5.C.9.P.377 

Les  mots  ne  fe  prenncnr  point  en  un 
f-is  métaphorique,  à  moins  qu'il  n'y  aie 
quelque  chnfe  qui  y  détermine  l'efprit^ 
I.  1  4.  c.  13. p.  4f^ 

Rapport  ciu  terme  métaphorique  à  la 
chofe  fîgnifiée  ,  doit  eltre  connu^  ibid, 
4Î  + 


TABLE    DES 

Fondement  de  métaphores  doit  cflre 
nofoitre,  1. 1.  6.  c.  5.  p.  62.1 

Métaphores  qui  nailliiitde  ces  paroles: 
Cecj  efl  mon  corps.  Source  ordinaire  des 
fophifmes  d'Aubertin  ,  1. 1.  6,  c.  14.  p. 

Métaphores  (ê  peuvent  diftinguer  des 
eiprellîons  simples  ,  1. 1.  6,  c.  14.  p.  yif. 
Peuvent  prouver  des  veriteZ  littérales 
comme  la  pre(ènce  réelle,  716,  711.  Ori- 
gine des  métaphores  furie  fujet  de  l'Eu- 
charillie,  717 

Métaphores  (ur  un  mefme  fujet  ne  font 
pas  liées,  1.1.7.  c.  1.  p.  79^3 

Exprcffions  Eiichariftitjues  liéoç  ,  791 
Métaphores  fondées  fur  un  rapport  tcn- 
Cble  ne  font  jamais  obfcures  ,   z.  1.  7.  c. 
3.  p-  800 

Métaphores  dont  on  n'ufe  point  pour 
s'eiprimer  fimplcment  ,  ou  pour  s'ex- 
primer fortement,  1.  7.  c.  p.  Soi 

Métaphores  qui  ne  prefentent  plus  deux 
in^ges  ceflent  d'eftre  mctaphotcs,!.  1.  7. 
c.  5.  p.  805 

Eïpreffions  fimples  plus  ordinaires  que 
les  métaphores  en  4.  cas ,  1.  1,7.0.5.  p. 
804 

Métaphores  ne  font  jamais  continuées, 
en  quel  fens  cette  règle  eft  vraie ,  1.  1. 7. 
c. 4. p.  837-  S13.819 

Quand  on  peut  prouver  des  métapho- 
res,!. 1.7.  c.  f.  p.  814 

Faufleté  infigne  de  M.  Claude  que 
les  métaphores  ne  foient  employéi-s  par 
les  Pères  que  dans  les  grandes  occafions, 
1.1.7.  c.  6.  p  S33 

FauflTes  règles  de  M.  Claude  fur  les 
métaphores ,  1.  1.  7.  c  6.  p.  ;  55 

Dénombrement  des  métaphores  con- 
rinuées  félon  les  Miniftres  fur  le  fujet  de 
l'Eucharirtie,  1.  1.  7.  c.  4.  p.  Su. 

Ce  n'eft  oas  le  terme  métaphorique  , 
mais  les  chofes  fignifiées  qui  fervent  d'i- 
Biagcs,  5.1.  i.c.  f.p.  84 

Métaphores  fondées  fut  le  defir  d'abré- 
ger. 5. 1.4.  c.  I.  p.  lOI 

11  eft  contre  la  nature  d'expliquer  par 
tout  les  métaphores ,  3. 1.  4.  c.  4.  p.ii+ 

Metaph^fitjue  éblouit  l'efprit  dani  les 
chofes  qu'on  entendok  clairement  aupa- 
ravant, i.l.  10.  c.  i.p.  7i8 

Méthode  qu'on  a  fuiviedansle  premier 
tome  ,  &  fcs  raifons  ,  prsfat.  p.  7.  qu'il 
a  fallu  commencer  par  la  queftion  du 
changement,  ibid.  p.  7.&  8. 

Méthode  de  prefcription  fur  l'Eucha- 
liftie  j   ne  laiilc  pas  d'eftre  courte  quoy 


MATIERES.  833 

qu'elle  ait  efté  fouftenuc  par  un  gros  li- 
vre, pnf.  p.  1 7 

N'cft  point  nouvelle  ,  &  a  efté  em- 
ployée par  Tertullien ,  Bakazard  Lidius  , 
Bellarmin,;'r.f/.  p.  18,19.  Qu'il  eft  permis 
de  traitter  une  queftion  lans  en  traitter 
une  autre  ,  mais  il  n'eft  pas  toujours 
permis  de  conclure  abfolument  d'une 
queftion  fans  examiner  l'autrCji.  1. 1.  c.  1. 

P.M. 

Méthode  de  difcuflîon.Ses  avantages  i: 
dcfavantageSj  1.1.  i.c.j.p.ji 

Méthode  de  prefcription  necellaire  à 
l'Egiifc  j;  marque  de  l'Eglife  ,  1. 1. 1.  c.  5. 

P-  5  3-  .    . 

Les  Calviniftes  n'en  ont  aucune,  ihid. 

Méthode  de  prefcription  doit  eftre  fe- 
parée  de  celle  de  difcuffion,  i.l.i.c.î.p.jf' 

Deux  manières  de  regarder  les  mé- 
thodes en  i<iy  &  par  rapport  aux  luires , 
1,  prxf.  p.  1.  ' 

Ciu'il  n'y  a  point  de  methoie  certaine 
par  rapport  aux  autres  ,  1.  /"•«/".  p.  i 

Méthode  peut  eftte  utile  quoy  qu'elle 
ne  le  foit  pas  à  tous .  x.pmf.  p.  3 

Méthode  de  dilcuffion  n'eft  nrcefliire 
que  par  rapport  a  ctnains  efprits  préve- 
nus, x.prdf.  p.  6. 

Methodius  Patriarche  de  Conftanti- 
nople.  Confellion  exigée  par  luy  de  l'un 
de  les  Officiers  Se  fes  cuconftances ,  r.  g. 
1,  i.c.p,i48 

Sa  confellion  propre,  p.  lyr 

Metropb.tne  élu  Patriarche  de  Con- 
ftantinople  après  l'union  ,  foûlevemenc 
contre  luy  ,  fa  depolîtion ,  1.  1.  4.  c.  3. 
p.iSo 

Metrophane  Patriarche  d'Alexandrie. 
Extrait  de  fon  livre  ,  i.l.  11.  p.7i 

Michel  Paleologue  recouvre  Conftan- 
tinople  ,  traître  de  l'union  :  à  quoy  fe 
reduifoient  les  differens,  i.l.  3.  c.  i.p. 

Le  Patriarche  Jofeph  y  lelifte,  tbid. 
c.  3.  p.iiS 

Veccus  refifte  à  l'Empereur  ,  fe  con- 
vainquit de  la  fincerité  de  la  foy  des  Lar- 
cins fur  la  procefllon  du  S.  Eprit,  nj 

Lettre  de  Michel  au  Concile  de  Lion, 
où  la  tranlfubft.  eft  contenue,  111 

Lfgatjdu  Concile  des  Grecs  pour  la 
mcfme  profcflîon,  p.  m.  Eledion  de 
Veccus,  ibid.  p.  iii.  Ses  Lettres  au  Pape 
contenant  la  tranlfubft.  ibid.  Excommun, 
de  Michel  par  Nicobs  i.  1,  3.  c,  j.  p. 

113. 

Violences  de  Michel  Paleologue  ,  ne 


§54 


TABLE    DES     MATIERES. 


prouvent  point  qu'il  n'ait  point  figné  lîn- 
ceremfat  la.  tranHubll.  r.  g.  1,  i.  c.  8, 
p. lit. 

Michel  Cortacius  Grec  de  Candie.  Son 
témoignage  fur  la  traniïliblt.  r.  g.  1,  i. 
c.  lo.  p.  iSs.  &c.  II.  p.  lyç 

Mimftres  de  J,  C.  ne  doivent  pas  bif- 
fer voloniairemcnt  les  Chrcfticns  dans 
les  ténèbres,  1. 1.  4.c.4.p.  5fi 

Minijh-es  font  acception  de  pcrfonnes 
à  l'égard  des  Saints  en  ne  tr.iitant  pas 
les  P^'tcs  avant  le  (îxiéme  Siècle  d'idoli- 
trcs  ,  i.l.  I.  c.  10.  p.  8o. 

Mépris  que  les  Miniftres  font  des  Pè- 
res, prouvé  1. 1.  n.  c.  10.  p.  851 

Miniflyes  méprifent  &  traittent  les  rai- 
fons  des  Catholiques  pour  le  fens  de  rea- 
lité avec  un  mépris  étrange,  Aubcrtin 
Charnier,  1.1.  i.c.itf.p.117 

Minutias  Félix  ne  parle  point  de  J.  C. 
dans  fon  Dialogue,  &  ainli  on  ne  doit 
point  rien  conclure  de  ce  qu'il  ne  parle 
point  de  rEucharidie.  Points  traitiez  par 
cet  Auceur,  5. 1.  7.  c.  4. p.  485 

Mii-mUs  de  S.  B'.'rnard  contre  les  Hen- 
riciens  atteliez  par  un  auteur  contempo- 
rain ,  par  faint  Bernard  mefmc,  1. 1. 1. 
c,  II.  p. 793 

Mauvaife  defFaite  d'Aubertin  pour  élu- 
der ces  miracles,   ibid.  p.  794. 

11  prétend  infirmer  ces  miracles ,  parce 
qu'ils  n'ont  pas  arrefté  les  progrés  de  cet- 
te fedle, que  cette  raifon  deflruit  tous  les 
miracles  de  J.  C.  &  des  ApoflreSji,  1.  11, 

c.  ï.  p.  795. 

Mijfions  en  Orient  prouvent  qu'il  cft 
impoillble  que  la  doiflrine  de  la  prefence 
i'y  foit  in'^roduite  par  innovation  ,  r.  g, 
1. 1.  7.C.  504. 

Motda-ve  Voyez  Nicolas  Sfadanus, 

Prière  pour  les  morts  dans  le  Canon 
de  la  Merte,  i.  l.i.c.  9.p.  8r 

Mofctniites  quand  convertis  à  la  foy  , 
i.l.fc.i.  p  357 

Nul  Auteur  ne  les  accufe  de  nier  la  pre- 
fence réelle.  Ce  filence  efl;  decifif,  ibid. 

P-  55^        . 

Ambafl'adcurs  Mofcovites  à  Pans  ,  ré- 
cit de  ce  qu'ils  ont  dit  chez  M.  de  Sens. 
Leur  témoignage  fur  l'Euchariflie  j  1.  1. 

Il   p.  7f. 

A/;</?frw entièrement  feparez  de  l'ordre 
de  la  nature  n'ont  point  eflé  alTujettis  par 
les  Pères  aux  règles  de  la  Philofophie,  i 

1.  7.C   4.p.493 
Les  mylteres  égalent  tous  les  cfpritSj  i. 

Î.8.c.6.p.y74 


My/fcres  révélez  de  Dieu  fans  cclair- 
cili'ement  des  difficultez ,  1. 1. 1.  c.  6. 114, 
Ccluy  de  l'Euchanftie  revclé  eu  cette 
manière,  ibid,  plus  clairement  &  expref- 
femcnt  que  les  autres ,  i.l.  i,  c.6. p.  tii 

N 

NAtioe  /ignifie  fouvent  l'amas  des 
accidens ,  3. 1.  f .  c.  6.  p.  178 
Autres   fens  des  mots  de  nûtuie  &  de 
lubftance,  qui  ouvrent  un  nouveau  fens 
du  pallage  de  Théodore: ,  3.  1.  j    c.  9, 
p.  30'*.    . 

Diverles  fignifîcations  de  ce  terme  & 
fa  véritable  (ignifi:.ition  dans  Th'oào- 
ret,?.l.f.c.8  p.  191.  RertraiutparTheo- 
dotet,  ibid.307. 

Termes  de  nature  efl  fouventptis  pour 
l'eflat  &  la  qualité  par  l'aveu  d'Auber- 
tin ,  1.1.  é.c.  f    p   éOf 

Neftoriens.  Leurs  Eglifes,  Patriarches,- 

&C.  I.  1.  l.  c.  5,  p,  (fl 

Ils  croyent  la  prefence  ré-elle  ,  1. 1,  f. 
C.  10.  p.  3lï7 

Millions  vers  les  Neftoriens,  p.  588, 

On  n'a  exigé  d'eux  aucune  retraéla- 
tion  lut  l'Euchar.  589.  Leur  réunion  avec 
l'Eglife  Romaine ,  ibid. 

Niceus  Pedorat  Religieux  de  Studc 
écrit  pour  Cerularius  contre  les  Latins  , 
ne  forme  aucune  accufation  contre  eux 
fur  la  prefence  réelle  ny  fur  la  tranlTub- 
ftantiation.  Enfeigne  l'un  &  l'autre  dog- 
me aulfi  bienqu'Humberr ,  i,  1. 1.  c.  6.  p. 
131.  &  feq.  Anathematizefcsécrits,  p.i;7 

Nicetas  Chon. marque  le  facrilegc  com- 
mis par  les  Latins  fur  l'Euchar.  Note  hé- 
rétique de  Volphius  fur  cet  endroit  dans 
l'impredîon  du  Louvre,  1. 1.  1.  c.  1 3.  p.198 
Nicetas  fait  voir  par  le  commerce  des 
Grecs  &  de«  Latins ,  qu'ils  eftoient  unis 
de  créance  fur  l'Euchanftie  ,  1. 1. 1,  c.  10. 
p.  U7 

Nicolas  premier  repris  injuftementpat 
M.  Claude,  r.  g.  1. 1.  c.  i.  p.  itf 

Nicolas  Evefquede  Methone fous  Ma- 
nuel, grand  ennemi  des  Latins,  écrit  con- 
tre  un  doute  fur  l'Euchar.  dont  les  minif- 
tres ne  fçauroient  fe  former  d'idées  rai- 
fonn.^bles,  1. 1. 1.  c.  15.  p.  iSî 

Palfage  de  cet  Auteur  pour  la  prelênce , 
&  la  trand'jbftantiation  ,  p.  1S4  Ç^ fun. 

En  quel  fens  Nicolas  de  Methone  dit 
que  le  pain  eft  joint  à  la  divinité  ,  i,  1, 
1.  c.  15.  p.  1S9 

M.  Nom  tel.  M,  dcNointel  Ambafladeur 

da 


TABLE   DES 

du  Roy  à  la  Porte  Ottomane.  Relation 
de  Ton  entretien  avec  le  Patriarche ,  r.  g. 
1.  r.c.  14.  p. 119 

Extrait  d'une  de  fes  Lettres  Cur  l'attc- 
•ftation  de  lept  Métropolites  d'Orient ,  5. 
J.  S.c.i.  p.  (71 

Relation  de  Ton  entretien  avec  l'Abbé 
du  monaftere  de  Mauromale,  3 . 1.  8.  c.4. 
p.  fS6.  d'un  entretien  avec  le  Papas  de 
Baktchekhu,  p.  f  91.  avec  un  Papas  de 
Calcédoine ,  59;.  de  fon  voyage  aux  Ifles 
des  PrineeSj  8.  c.  f .  p.  Î99 

Lettres  de  M.  de  Nointel  fiir  l'cleiftlon 
de  Dionyfius,  c.  6.  p.  615. 

Lettre  du  mefmeau  Roy  fur  l'atteftation 
du  Patriarche  de  Conftantinopic,   p.  651 
Extrait  d'une  lettre  du  melme  fur  les 
atteftatiorts  des  Refidens  j p.  647. 

■Extrait  d'une  autre  fur  le  fieur  Tarfîa  , 
648.  D'une  autre  fur  la  mort  de  Tétera 
chef  des  Cofaques,  p.  650.  D'une  autre 
fur  la  Lettre  de  Neftarius,  p.  6V-  D'une 
autre  contenant  l'hiftoire  des  decifions 
envoyées  enMofcovie./i/(^- 

Extrait  d'une  Lettre  du  nie&ne  fur  les 
eonfideratioiis  politiques  qui  empefchent 
les  Calviniftesqui  (ont  à  Conftantinople 
de  rendre  témoignage  à  la  vérité,  p.  675 
D'une  autre  furie  mefmc  fujet,  p.  (79 
Extrait  d'une  autre  fur  l'imprellionde 
,ia  conteflion  orthodoxe ,  p.  6  80. 

Extrait  d'une  autre  contenant  l'hiftoi- 
re de  Corydale,  p.  6ii 

Relation  de  M.  de  Nointel  fur  les  at- 
teftations des  Arméniens,  p. 776 

Relation  du  mefmc  fur  la  Liturgie  des 
Arméniens,  p. 78 4 

NicûUs  Spada.rius  Moldave.  Son  Ki- 
ftoire,  1. 1.  4.C.9.  p.  311.  Son  écrit  tou- 
chant la  créance  des  Grecs,  1. 1.  n.  p.  fo. 
Témoignage  que  la  prefence  réelle  &  la 
tranflubft.  font  crues  de  tous  les  Grecs 
«lu  monde,  p.  ji.  &  qu'ils  conviennent 
avec  l'Eglife  Roroame  fur  les  fept  Sacre- 
Diens ,  fur  l'invocation  des  Saints,  &:c.  f?. 
Nouiieaux  baprifez  avoient  efté  inU 
truits  de  l'EucharLftic  le  Samedy  Saint, 
avant  que  de  la  recevoir ,  5, 1. 1.  c.  9,  p. 

Ii4- 

Nouneaux  baptifez  maj  inftruits  dans 
la  dodrine  des  Calviniftes  par  faint  Au- 
guftin,  expliquépax  M.  Claude,  j.  1,  i.  c, 
S.p.ioi 


o 


i'^et  extérieur  diftinguc  du  corps 
de  J.  C.  par  des  auteurs  qui  croient 


MATIERES.  i'^^. 

la  trandubft.  j.l  i.c.  8.p.  ^<? 

ObUtiou  détruite  par  les  Miniftres  p.-r 
une  iuite  de  leurs  pimcipcs,  le  fens  de  fi- 
gure ne  portant  point  a  oblation,  1. 1.  6. 
c.  li.p.  f  89 

ObUtion  du  corps  de  J.C.  reconnue  par 
les  Pères,  1. 1.  (..<:.  u.  p.  Ê30.  Ç^ /un. 
Suite  de  la  prefence  réelle,  ihid.  699 

Occaftons  où  l'explication  de  ces  paro- 
les, Cecj efl  mon  corfs  AMto'n  ^Çtk  neceflai- 
re  s'il  les  eufl:  fallu  entendre  dans  un  fens 
de  figure,  &  où  les  Pères  ne  les  expliquent 
jamais,  1. 1. 5.C.  8. p.  joi 
En  parlant  aux  payens  ,  /^/^.  304. 
En  parlant  aux  nouveaux  baptilez,  5  p.  5 
En  parlant  aux  Catéchumènes,  p.  507 
Oderbonus    Luthérien  fait  voir  que  les 
Mofcovites  adorent  l'Euchariftie ,  i.l,  j 
c.i-p.344 

S.Odilon  Abbé  de  Cluni.Son  témoigna- 
ge pour  l'adoratiô  del'Euch.i.l. 9.c. p. 684 
S.  Odon  premier  Abbé  de  Cluny.  Son 
jugement  fur  les  écrits  de  Pafcafe ,  1. 1.  8. 
p.  éiy.&1.9.c.  C,  p.  fSf 

S.  Odon  Arcbcvefque  de  Cantorbie, 
convertit  des  gens  qui  doutoient  de  la 
realité  ,  p.  éSo, 

OecoUmfa.de  devient  Sacramentaire  en 
renonçant  aux  Pères,  &  n'a  pu  le  devenir 
en  s'y  attachant,  i.  1.  i.  c.  j.  p.  47 

EÂranglé  parle  diable  félon  Luther, 
1.1.  I  c.4. p.  4J 

Offinius  Roy  d'Arménie  envoyé  des 
AmbalTadeurs  au  Pape  Jean  li.  qui  re- 
connoiflent  la  tranlîubft.  i.  I.f.  c.6.  p  37» 
Clear'tus  confirme  par  une  lettre  ce  qu'il 
a  écrit  touchant  la  créance  des  Mofco- 
vites fur  la  tranlfubft,  i.l.  5.  c.  5.  p.  347 
&  ii.p.  ftf 

Témoignage     que    les    Arméniens 
croyent  latranifuhft.  i.l.  f.c.7.p.  574 

Déclare  que  les  Luthériens  adorent  J.C. 
prefentdans  la  Cène  ,  mais  qu'ils  ne  l'a- 
dorent pas  hors  de  l'ufage  ,  1. 1.  ii.  p.  jy. 
Ordres  chimériques  placez  par  M.  Clau- 
de dans  les  huit  premiers  fiecles  touchant 
la  connoilfance  de  l'fuchariftie ,  i,  \.6, 
c,  5.p.  4?9 

Premier  ordre  des  ignorans  coritenx- 
platifs  refuté ,  1. 1.  6.  c.  6.  p.  441 

Vifion  de  M.  Claude  fur  les  notions 
d'ufage,   443. 

Alliance  de  llupidité  &  de  lumières 
dans  cet  ordre,   44f 

1.  Ordre  des  ignorans  pareflTeux  refuté  , 
I.  1.  6.  c.  7.  p.  4fO.  ^  fnn. 

Ordres  de  M.  Claude  composés  de  gens 

NNnnn. 


83<î      '  TABLE   DES   MATIERES. 


extraordinaires  j  p.  j^.^  i 

5.  Ordre  de  M.  Cnudc  conipofé  de 
catholit-)ucs.  c.  8.  p.  4,-3 

4.  Ordre  de  M.  CLiude  compofé  de 
ealviniftes  devenus  tels  après  une  lon- 
gue recherche  :  C]ue  cet  ordre  avoit  l'i- 
dée delà  prefcnce réelle  ,   i,l.  6.  c,  s,p. 

j.  Ordre  de  M.  Claude  compofé  de 
calvuiiftes  lans  reflexion,  1. 1.  6. c. ii.p. 
468 

6.  Ordre  de  gens  qui  félon  M.  Claude 
n'entendoient  pas  le  fens  de  ces  paroles , 
Cecyefi  mon  corps  ^  inconnus  aux  Peres^i. 
1,6. c.  10.  p.  46} 

0)v/>-f  chronologique  peu  ntile ,  t.  1.  3 
c,  I.  p.  ^58 

0''^>'t-de  fuivre  pas  à  pas  fon  adverfai- 
re.  Ses  avantages  &:  fes  inconveniens. 
1.  /■«/.  p.  y.S;  6. 

Origine  &progrezde  cette  dilpute  ,  5. 
r,  S.c.i.p.  yéi 

Hardielfe  avec  laquelle  W.CIaudc  a  nié 
que  les  focietez  d'Orient  cruifent  la  pre- 
fcnce réelle  ,  fé-î. 

Confpiration  des  M-iniflres  fur  ce  point. 

Utilité  de  les  confondre,  p.  jj^ 


P^chymere  ,  diverfes  omifiîons  &  er- 
reurs de  cet  auteur,  dans  le  cecit 
qu'il  fait  de  l'uilion  de  Michel  Paleolo- 
gue  avec  l'Eglife  Romaine.  1. 1.  j.  c.  j. 
p.  118.  &c. 

Palefiine.  Eftat  des  Es^lifes  de  Palefti- 
ne  après  la  prife  de  Jcrufaleni  par  Godc- 
froy,  r.  1.  i.c.  10.  p.  I'^  4.  qu'il  y  a  eu  fous 
les  Saralnis  des  Evefques  en  Paleftine 
contre  la  prétention  de  M.  Claude,  r.  1. 
3.C.  6.  p.  131 

Ptifes  du  quatorzième  fiecle  n'onr 
point  foupçonné  les  Grecs  d'erreur  fur 
la  prefcnce  réelle  ny  fur  la  tranlfubftan- 
tiation  ,  1. 1.'5.  c,  7.  p.  140 

Paradoxe  de  M.  Claude  fut  les  propo- 
lîtioiis  dont  les  termes  font  incompati- 
bles,  r,  g.  1. 1.  c.  17.  p.  f  49 

Abfurditez  qu'il  enralle  fur  ce  iiijet  ^ 

■j-tfp/faKl  fignifie  rendre  prefcnt^ 
dans  unpaflagede  Zonare  ,  1.  1.  5.  c,  fi. 

p.  lïo 

P.iroles  de  Dieu  toujours  conformes 
au  langage  humain  ,  i.  1.  i.  c  i<;.  p.  iS 
Particifam,  En  quel  fens  les  Pères  difeat 


qu'il   eft  impolfible    d'efttc  p^rticip.rm 
de  ioy-mefme,  1. 1.  4.  c.  7.  p.  j8f 

Pafcafe  Abbé  de  Corbie  n'a  pas  tou- 
jours efté  l'objet  de  la  haine  des  Calvi- 
niftes  1. 1.  S.  c.  8.  p.  607.  Protellans  qui' 
l'ont  mis  de  leur  parti,  (>o8 

Pourquoy  il  a  elté  choifi  par  Aubertin' 
pour  le  faire  auteur  de  la  dodrine  de  la 
prefcnce  réelle  ,  609.  Admirable  focieté 
des  Palcafites  félon  les  defcripcions  de 
M.Claude,  ibid. 

Qualitez  extraordinaires  que  M.Claa- 
de  attribue  a  Pafcafe,  010.  Hiftoire  que 
M.  Claude  en  fait,  ibid.  Temps  auquel  il 
compofa  fon  livre,  p.  éif.  Pourquoy  il 
foùleva  quelques  cfprits  ,  fin.  Perfonne 
ne  l'acoatredit  durant  fa  vie,  p.  6iî.  fit} 
Qli'iln'a  expofé  dans  fon  livre  que  la 
doctrine  commune  de  fon  temps,  1. 1.  8. 
C.9.  p.fii4 

Abfurdité  de  l'hypothefe  de  Mordïeur- 
Claude«  p.  615.  &c.  Que  Pafcafe  a  tou- 
jours cru  que  l'Eglife  crtoit  de  fon  fenti-- 
ment ,  p.  6i8.  Supercherie  de  M.  Claude 
pour  éluder  cet  argument,  p.  610 

Réfutation  des  preuves  par  Icfquelle»' 
M'.  Claude  prctend  montrer  que  Pafcafe 
efloit  inventeur  de  fa  dodrine  ,  J.l,  8,  c*, 
10.  p.  (îi* 

Adverfaires  prétendus  de  Pafcafr^ 
Difputcs  qui  s'élevèrent  après  fa  mort, 
I.  I.  S.c.  a.  p.  fijo.  Faits  certains  fut  ce 
fuj«-  ihid. 

Vifion  de  M.  Claude  touchant  Pafca- 
fe ,   i.l.  S.  c.  15.  p.  «47. 

Pafcafç  parle  de  l'Euchariflie  comme 
cftant  du  pain  &  du  vin  ,  fuivant  lelan- 
g.igedes  fens,  i.  1.8.  c.  4.  p.  i6y 

Pafcaftes  &  Bertramiftcs  &  leurs 
qualitez  fclon  M.  Claude,  i.l.  j.c.  ■<)>. p. 
47;.&p.  687.  </ffOT  c.  (5.  p.  677.    ' 

Pa/tjae  figure  d'une  figure.  En  quet 
fens  ?  1.  1.  (î.c.io.p.  675 

Pajfuies  plus  étendus  où  la  matière  eft  ■ 
fraittée  à  deflein,    préférables  aux   paf- 
fages  écartez  ou  elle  eft  traittée  en  pafr 
fant,  z.l.  î.  c.  f.  p.  i?9 

/'.«//•//ïri-Wde'Conftantinople.Sagtan- 
deur  dans  l'onzième  fieclc  ,  1.  1.  z.  p, 

Pntriarchat  de  Jerufalem  quarid  éta- 
bli, l.I.  i.  c,*'j.p.  m. 

Patriarche  de  Conftantinople  ne  veut 
point  baifer  les  pieds  au  Pape  en  arri- 
vant à  Ferrare ,  i ,  1.  4.  c.  i.  p.  ifio 

Autres  Patriarches  en  Orient  outieles 
«quatre.  1.1,1.  c,  J.  p.iu 


TABLE   DES 

^-  Deux  Patriarches   des    Cophces  coii- 

foûdu'i  p.ir  divers  auteurs  mal  à  propos, 
&  diltiiigucz  par  AUatius,  i.  1.  i.  c,  j 

p.  III 

AmbafTade  du  Patriarche  des  Cophtes 
au  Pape  rraittée  de  luppefce  par  divers 
auteurs ,  bien  deJtcadue  par  AUatius  ^  i, 

1.2,.  C.'i.p.IIl 

Pau/  Jovc  fur  les  Mofcovites,  1. 1.  5. 

p.  559 

Pauluiert^  hérétiques  dctruifoient  la 
prerciice  réelle  &  la  tranllubll.  parmi  les 
Grecs  réfutez  par  Euthymius.  c.  11.  r.  1. 2, 
p,  x8i.  Réflexions  fur  le  choix  des  palfa- 
gcs  qu'il  fait  pourcela,  P..1S5.&  1. 7.C.9. 

■P.tyeKs  fuppofcr.  par  M.  Claude  inf- 
•truitsde  la  doanue  de  l'Eglife  fur  l'Eu- 
char,  ;.l.  7.C.  i.p.  ^66.  FaulTeté  de  cette 
•  fuppofuion  ,  468.  On  ne  fuppofe  point 
qu'aucun  payen  n'ait  fçu  ce  que  les  chré- 
tiens croyoient  de  l'Euchar.  p.  470.  Les 
Chrétiens  n'auroient  pas  relevé  les  repro- 
ches que  les  payens  leur  auroient  fait  fur 
c&fujet,p,47y 

.  Péché  que  commettent  ceux  qui  com- 
munient indignement,  i.l.  ii.p.<ri.é5, 

Pourquoy  J.  C.  a  voulu  que  fon  corps 
fuft  couvert  des  accidens  du  pain,  68 

Pères  ont  eu  les  mefmes  penfées  des 
myfteres,  quoyqu'ils  s'en  expriment  di- 
.verfement  j  .5.  \.z,  c.i.  p./i.  &  99. 

Percs  fe  font  fervis  du  langage  des  fens 
avec  toutes  les  précautions  qui  le  déter- 
minent au  fens  catholic]uej  5.I,  4.  c.  3. 

p. 114 

Pétition  de  principe  ordinaire  aux  mi- 
riiRres:tous  les  argumens  tirez  du  mot  de 
figure  font  de  pures  pétitions  de  princi- 
pe^ ?.  1.  z.  c.  1.  p.  65 

Peufles  à  deuxqualitez,  docilité  &  dé- 
faut d'intelligence  ,  1.1.  8. c.  6.p..f9f 

Phibfofhie  rheroricienne  de  M .  Claude 
qui  anime  les  fens,  &  les  fait  raifonner, 
3.1.  7.  c.  II. p.  640 

Pierre  Pacri3rçhe  d'Ant'oche  répond  à 

Cerulariusi.l.  1.  c.  5.  p.  iy%.  envoyé  fa 

j      confedîon  au  Pape,  n'accufc  point  les  La. 

tins  d'erreur  fur  rEuchariftie,i.l.  i.,c..$. 

p.  1-9 

Pierre  Strozza  Secrétaire  du  Pape  Paul 
V.  Son  livre  de  Dogmatihus  Chald^orum  , 
I.  \.  f.C.TO.p.  \90 

Pierre  Eve(que  de  Seb.-.fte  frère  de  faint 
Bjfilc.  Palfage  qui  luy  eft  attribué^  1. 1, 5. 
c.  f.p.  Îf8 

Pierre  de  Sicile.  Ses  partages  fur  l'Eu- 
char. 1. 1. 7.  t.  9«p.  f++. 


MATIERES.  837 

Li  pierre  efcit  Chrifl  expliquée  par  la 
plufpartdes  commentateurs,  z.l.  3.C.  4. 

p.  if<5 

M.  Piquet  cy-dcvant  Conful  d'Alcp 
pour  les  François,!,  l.f.c.  14.  p.  407.  Son 
témoignage  fur  la  créance  des  Eglifcs 
d'Orient.  il>id.  Son  zelc  pour  la  Religion 
catholique  j  tbid. 

Attcftarion  du  mefme  M.  Piquet  fur  la 
qualité  des  témoins  qui  ont  (igné  les  at- 
teftations  de  la  créance  des  Syriens  &  au- 
tres, i.l.Ji.p.85 

Plaintes  injuftes  de  M.  Claude  fur  la 
manière  dont  on  traitce  les  Calviniiles  , 
1. 1.  iii.c.i.  p.  791 

plaintes  touchant  Bertram,i.  1. 11.  c.<>. 

p.814 

Plaintes  de  M.  Claude  fur  les  mauvais 
raifonnemens  qu'on  luy  reproche^  il  fait 
luy- mefme  des  reproches  faux  ,  &  lans 
fondement,  1. 1. 11.  c.  3.  p.  80s 

Plainte  iur  une  accufaiion  de  contra- 
diiflion  touchant  Bertram  loiiépar  Trite- 
mCj  i.l.  w.c.  5.  p.  Soé.  Sur  une  faute  im- 
putée à  Blondel,  i.l.  11.C.4.  p.  80S. 

Aigreur  de  M.  Claude, /i/<i?.  Sur  ce  qu'il 
prétend  qu'on  attribue  à  Blondel  ce  qu'il 
n'a  point  dit,  i.  1.  u.  c,  f.  p.  S 10. 

plainte  injufte  que  fait  M.  Claude 
qu'cii  attaque  les  C^ilviniftes  dans  toutes 
fortes  d'cctits,  1.  c.  11.  p.  84^ 

Points  qui  regardent  la  difcuïïîon  trait- 
tez  dans  le  premier  volume,  i .  frs.f.  p.  10 
n.  11.13. 14.  if.&j- 1.  i.c.  I.  p.f  .6. 

Points  de  la  troifiémc  réponfe  de  M. 
Claude  refutés  dans  le  fécond  tome, 
1.  frjif.  10.  ǣ  finii. 

Politique  des  Iiommes  bornée  ne  peut 
pas  fervir  de  principe  pour  expliquer  tout, 
1.1.4.  Cl.  p.  1S4 

■  M.de  Pr/nfone  Ambaffadeur  en  Suéde 
Sa  lettre  fur  l'i'crit  du  Métropolitain  de 
Gaza  &  les  affaires  de  Mofcovic  ,  i .  1.  f. 

C.8    p.  349  _.      . 

Pojfe-vm  furies  Mofcovites ,  i.l.  j.c.i 

Pratiques  contraires  peuvent  eltrc  éga- 
lement convenables,  1.1. 10.  c.  7.  p.  761. 
Exemples,  ibid. 

Prefence  réelle  porte  à  concevoirdcux 
chofts  dans  l'Euchar.;.  1.  i.  c,  1.  p.  S. 

Propofitionsqui  CB  naiifent ,  9.  Qne 
faint  Irenéca  rudirefeloncettedodirine 
que  l'EuchanlUe  cil  compofée  de  deux 
chofes,3.1.i.c.  3.l-'-ii. 

Prefence  de  J.  C  d-nsl  Elichar.  con- 
le  cndiverfes  nnniercs,  les  unes  iccl- 

NNnnn    ij  " 


çue 


§38 


TABLE  DES 


les,  les  autres  métaphoriques ^i.I.  6.  c.  8. 
p.  460 

Pr.fince  réelle  produit  naturellement 
&  ncceUaircmcnt  pluficurs  métaphores, 
a.  1.  6.C.  14.  p.  717 

Q^ie  le  premier  traité  ne  parle  que  cle 
la  prefence  réelle.  Supercherie  de  M. 
Chude  fur  ce  point,  r.  g.  1.  i.c.  j.p.  34. 
^  fui-u.  item.  c.  4.  p.  47 

Que  ce  n'cH  point  par  préoccupation 
(que  les  Catholiques  trouvent  la  prefence 
réelle  dans  ces  paroles ,  Cecj  eji  mtn 
cer^s  ^  1.1.  1.  c.  î.p.  168 

Preu-\jes  de  l'immortalité  de  l'ame  &  de 
la  béatitude  éternelle  cachée  dans  le  li- 
vre de  l'ancien  Tcftamcnt,que  M.  Clau- 
de a  tort  de  trouver  à  redire  à  ces  exprcf- 
fioas,  1. 1.  II.  c,  ro.  p.  %-■,% 

Preuijes  de  la  venté  d'un  myftere , 
doivent  detetminer  l'eTprit  fans  la  réfu- 
tation de  l'erreur  oppofce  ,  1. 1.  7.  c.  7, 
P.8'?. 

Pr/ere  pour  les  morts  dans  le  facrifîce 
ic  la  mcfle.  Preuves  de  la  réalité  j  1. 1.  é. 
8.  i.p.î7i 

Pnnafe  de  la  morale  de  M.  Claude,!,. 
1.  u.c.  II.  p.  Î4f 

Prêb.ihilite  d'un  fens  prouvée  donne 
lieu  quelquefois  d'en  conclure  11  cerri- 
tnde  ,  5. 1.1.  c.  1.  p.  <4 

Prffeffion  de  foy  de  Clément  4.  ptopo- 
fée  à  divers  peuples  ;  i,  1.  ;.c.  7.  p.i3i. 
Sh^néc  par  l'Empereur ,  tbid. 

ProjofttiBns  fau/Fcs  ont  un  fcns,r,  g.  l.i. 
«.  i7.p.  ffo 

Le  mot  de  Profre  jamais  employé  dans 
l«s  propoiîtions  figuratives  ,  5,  1.  i.c.  1, 
p-  11 

Termes  de  propres  corjis ,  frofrcmint 
cerfs  de  J,  C.  ordinaires  dans  les  Percs, 
1.  1.  4.  c.  10.  p.  ^10 

Qii'ils  ne  fe  peuvent  prendre  en  un  fens 
de  fi2;urc  ,   411 

Qiie  ce  terme  de  frofre  exclut  le  féns 
iSguratif,  p.  4ii.  413.  Ç$ fuiu, 

Pretefïtws  qui  ont  fiiûtenu  que  les 
Grecs  ne  croyent  point  la  tranflubflan- 
tiation  ,  i.  1.  î.  c.  4  p.  119 

Puijfance  des  Papes  en  Orient  as  13, 
isckj  I.  1.  3,c,i.p.  lie 


MATIERES 
CL 

^~\  Veftions  que  l'on  peut  faire  aus 
V^Calviniftes  femblables  à  celles 
quiii  font  fur  cette  propofition  .-  Cecj  eft 
tji  mon  corp-s.  1,  L  i.  c.  I.  p.  ijo 

Qusd-vuhdeus  Evefque .  Demande 
qu'il  fait  à  faine  Augultin  de  luy  faire 
en  abrégé  le  dénombrement  des  here- 
fies ,  &  de  l'inftruirc  de  ce  que  l'E^life  en- 
feigne  contr'eux,  ne  peut  eflre  Site  par 
les  Calviniftcs ,  i.l.i.  c.}.p.  jy. 


R 


R^bam  Arckevefque    de   Mayence  , 
en  quel  temps  il  a  éciit  fa  lettre  a 
Egilon  ,  t.l.  c.ï.  p.  611 

Accuf é  témérairement  de  Stercoranif- 
mepar  Thomas  Valdcnfis,  5.1.;.c.8.p.i87 

r^'a  jamais  diredement  attaqué  Paf-    * 
café,  I.  I.c.  ti.p.  6;f 

Quel  fens  pcat  avoir  ce  que  l'on  cite  de 
fou  penitentiel  &  de  cette  lettre,  p.  ^37 

Railleries  de  M.  Clau<le  fur  l'infaillibi- 
liré populaire,  i.l.  i.c.  7,  p.  67.  Ç^fun. 

Railleries  de  M.  Claude  faulles  &  mali- 
gnes, I.  1.  ri.c.7.  p,  87.  &r.  g.  1. 1.  c,i. 

p.  ?+!• 

Kairttildus  ;  que  ce  qu'on  en  dit  dans  Ift 
Perpétuité  n'cft-  point  contraire  à  «e 
q-.i'on  en  lit  dans  certains  écrits  ,  r.  g.l.i, 
c.  5.  p.  jç?.  ^  fufv.  Qy'on  ne  peut  foap- 
çonncr  cet  auteur  d'infidélité  dans  l»s 
faits ,  x6» 

Raifort  de  l'inftitution  du  myftcre  de 
l'Euchaiiftie  &  de  la  prefence  réelle,  t. 
1.1.  c.  4.  p.  194 

R.iijonnement,  Principe  de  W'.  Claude, 
qu'il  n'cft  pas  permis  d'oppofcr  les  preu- 
ves de  raifonnemcnt  aux  preuves  de  faits, 
commodes  à  mette  en  antithefe  ,  mais 
tres-faiix,   T.  1. 1.  c.  i.  p.  17 

Preuves  de  faits  fondées  fur  des  preu- 
ves de  raifoiincmentj   liid  z% 

Preuves  de  raifonnemcnt  quiprouvenc 

là  vérité  des  mir.acles  de  Moyfe,;W.  p.  19 

Preuves  de  raifonnementjqui  montrent 

la  vérité  du  témoignage  des  Apoftres  fur 

la  Rtfutreiflion  de  J.  C.iiid.  p.  30. 

Nulle  règle  générale  dans  la  compa- 
raifoii  des  faits  aux  raifonnen^ens  ^  1. 1.  j. 
c,  4..  p.  3f4 

Raijonnement  non  contefté  prouve 
mieux  qu'un  fait  contefté,  r.  g.l.i.c.i.p.if 

Ruifonnemens  abfurdes  impofez   aux 


TABLE  DES 

î-eres  par  les  Miniftres  par  leur  Icns  de 
figure,  1. 1.  é.c.  13.P.  699  iJ5'/«/-u. 

Ritpfort  de  la  matière  Euch.infticjuc 
avec  la  vérité  intérieure,  fuppofé  par  les 
Grecs  &  par  les  Latins,  comme  fonde- 
ment de  leur  argument,  z.l.  5.C.É.  p.  187 
Rapport  de  la  matière  de  l'Eucliariftie 
adueftre  conûdcré  par  les  Pères,  3. 1. 3, 
c.  i.p.  1)8 

Qiic  ces  confldcrations  s'allient  avec 

lafoy  de  la  prcfence  réelle,  ibid.  p.i;?  &-c. 

Auteurs  déclarez   pour  la   tranirubft. 

qui  en  ont  parlé  de  la  même  forte  que 

les  Pères ,  14®.  &c. 

Que  ces  rapports  font  cftablis  par  les 
Percs  dans  le  pain  &  dans  le  vin  ;  mais 
qu'il  n'eft  pas  necelfaire  pour  cela  que  le 
pain  &  levinfubfiflent,/W.  p.145, 144, 
Rarramne  réfute  les  Grecs  au  neuviè- 
me lîecle,  1.1.8.  CI.  p.  îf} 

Riitramne  Religieux  de  Corbie.  Sa  ré- 
putation, 1. 1,  1 1.  p.  f. 

Ulferius  eft  le  premier  qui  luy  a  attri- 
bué le  livre  de  Bertram  Raifoiis  de  cette 
•pinion  refutées  ,  p.  6.  &:? 

Recejfus  Fianco-Furdienjls  contient 
une  profeiTion  exprelfc  de  la  prcfence 
réelle,  &  néanmoins  eft  fîgnée  par  les 
Princes  Calviniftc  s  ,  1. 1. 1.  c.  y.  p.  y f 

Réformateurs  prétendus  veulent  refor 
mer  les  erreurs  de  tous  les  fiedes  félon 
Daillé,    1. 1.  II.  c.z.  p.  7^9. 

Combien  leurs  quiilitez  perfonnelles  ré- 
pondent peu  a  cette  vocation,  il/iA.  800, 
Refroidijft-ment  A\i  zèle  pour  la  convcr- 
fion  des  Calviniftes,  i.praf.  p.  z.Sc  ^ 

Regards  difFerens  de  l'Euchariftie ,  & 
propoficions  qui  en  nailTent,  5.  l.i.c.  i. 
p.  fiv.  Contrariété  apparente  de  ces  pro- 
portions, p.  (.7 

Règles  qui  fouffrent  des  exceptions  ne 
lailfent  pas  A:  fervir  de  preuves  ,  quand  il 
eft  clair  que  le  cas  donc  il  s'agit  ne  tombe 
point  fous  l'exception,  i.  I.7.  c.  5  p.  ~9f 
Règle  pour  difccrner  ce  qui  eft  injurieux 
^  ce  qui  nel'eft  pas,  r.  g.  1.  i.  c.  i.p.  .lé 
Relations  produites  par  M.  Claude  té- 
moignent que  les  Grecs  croyent  la  pre- 
fence  réelle  j  r.  g.  c.  6.p.  99 

Religie»»Aw  mont  Athos  ,  i.l.i.c.5. 
p.  108.  Noviti-r  dp  l'Orient,  tbid.  Leur 
témoignage  fur  l'Euchariftie  ,  r.  g.  1. 1, 
fi.  9  p.  MO 
>  Religion  n'a  pas  fait  le  langage  des 
Wommes  ,    5,1.4.c   i.p.  loi 

KcmjUKxdiiw  parle  clairement  pour 


MATIERES.  839 

la  prcfence  réelle,   i.  1.  t.  c.  7.  p.  599 

Reprtjextare.  Terme  équivoque  de  (by 
fignific  rendre  prejent  dans  Ict  pafliges 
de  faint  Jerofme  &  de  Tertullien,  allé- 
guez par  les  miniftres ,  1. 1.  }.  c.  j.  p.  168 
&c. 

Reproche  de  politique  ,1,1.  11.  c,  il, 
p.  84t 

Reprocher  doivent  eftrc  véritables, 
certains^necelfaircs,  i.l,  u.c.  i.p. 791. 

ReJurreHion  ne  peut  eftre  raifonnable- 
mcnt  prouvée  par  l'Euchariftie,  fi  elle 
n'eft  qu'une  figure,  1. 1.  4,  c.  13.  p.  704 
ReJurreHion  prouvée  par  l'Euchariftie 
fuppofé  la  prcfence  réelle  &  non  autre- 
ment ,  3.   1.  i.  c.  1.  p.  10. 

Rhetoricjne  véritable,  i.l.  11.  p.  814. 

Ridicule  de  fe  vanter  qu'on  n'ait  point 
répondu  à  de  certains  livres,  1. 1.  i.p.  814 

Rojy  Se  l'on  image  ne  lont  pas  deux  Rois 
félon  les  Pères  non  plus  que  l'Euchari- 
ftie, &  le  corps  de  J.  C.  en  quel  fens  cela 
eft  vrjy  5.  1. 3.C.  4.  p-  i(î  i. 

Cette  maxime  ordinairement  appliquée 
à  la  Trinité,  ibid.  p.  i«4 


S^cranus  Ciianoine  de  Cracovie  fur 
les  Mofcovites ,  i.  1.  c.  f.  i.  p.  341 
Objeûion  fur  ce  qu'il  dit  que  les  Mof- 
covites ne  vénèrent  point  le  pain  confà- 
cré  ,  refoluc,  i.  1. 5.C. i.p.  !45. 

S.icrement  n'eiclut point  la  realité,  i, 
1.8.  c.3.p.fé8 

Saciemens  ne  peuvent  eftre  eftablis  en 
paroles  figurées  qi  and  il  y  auroit  de  l'obf- 
curiré.  faux  exemples  alléguez  par  les 
miniftres  ,  1.  1.  i.  c.  17.  p.  738.  &c. 

Sacremens  Judaïques  ne  (ont  pas  figu- 
res de  l'Euchariftie  félon  Aubertin  ,  i.l.  6, 
c.  8    p.  i\i 

Ces  rapports  marquez  par  tous  les  Pe- 
rcs ,  p.  (^43  ^  fuiii.  Confequences  de 
ces  rapports,  p.<;5i 

Sacrement  pris  pour  un  pur  figne  ,  U. 
pour  un  figne  joint  à  la  vérité  par  les 
mêmes  auteurs,  5. 1.  (î.  c.  11.  p.  414 

Samonas  n'eO'  "oint  un  phantofme. 
Raifonfrivol  d'AÏJcrtin,  il  y  avoir  du 
temps  que  l'on  le  fait  vivre  des  Evêqucs 
dans  la  Paleftnie  ,  1. 1.  3,c.  <;.  p.130 

Son  témoignage  pourlatranllubftan- 
tiation,  131 

SardiHs  avoliè'  que  les  Grecs  croyent 
ktxanflub.  i.l.  i.c.  4p.  né 

N  N  n  n  n    iij 


84®  TABLE    DES 

Scaliger  avotte  que  les  Percs  o  iitcru 
que  le  pain  devient  corps  de  J.  C,  1. 1,  i. 

Cf.  p.  47  . 

Sia~jitijs  ne  le  (çauroicnt  faiiver  pax 
une  autre  voye  que  les  /impies  j  i.l.  l. 
c,  6.  p.  60 

Scriijme  avec  l'Eglife  catholique  n'eft 
janiais  permis,  d'où  l'on  conclu:  qu'elle 
ne  peut  enfcigner  d'erreur,  i.  l.i.  c.S.p  61 

Sens  ne  fout  pis  contraires  à  la  prefeu- 
ce  réelle,  3.  1.  7.  c  n.  p.  540 

Sens  ;  en  quoy  confident  leurs  adlions, 
idées  ajoutées  a  leur  rapport,  3. 1.  7,  c.  11. 

P'  ^''■5 

Inc.ipables   de    faufT-'té  ,    $4.1,   félon 

S.  Auguftin  ne  jugent  de  rien,  f  4;.  Joints 
par  l'ordre  de  Dieu  à  certaines  percep- 
tions, i'ûid.  Conditions  nece(l.iires  pour 
juger  félonies  fens  ,  y44.  Principe  de  la 
ccn-itude  des  fens ,  f4(;.  f47.  Qu'il  n'y  a 
dans  l'Eucliarillie  ny  vifion  ny  illufion 
iiy  erreur  des  fens  ,«549.  &c. 

Di.u  peut  prefenter  au  fens  des  objets 
que  l'efprit  ne  peut  s'em^jêcher  de  pren- 
dre pou^  autres  qu'ils  ne  font  qu'en  fup- 
pofantun  miracle,  }.  1. 7.  c.  11.  p.  ffî.. 
Que  les  Pères  n'ont  rien  dit  des  fens  de 
contraire  à  ces  principes ,  ibid.p,  ff;.  &e. 
Témoignage  nîgatif  &  pofirif  des  fens. 
;^6.  Diliinftion chimérique  refutée,  ff7 

Sens.  Aveu  des  Proteflans  que  le  fens 
de  la  tranlTubft.  eft  littéral,  i.  1.  6,  c.  7, 
p.  4f7,&i.  1.  z.c.i.  147. 

Sens  des  Catholiques  fur  cette  propo- 
fition  ,  Cecj  cfl  mon  corps  ,  z.  I,  z.  c.  1. 
Que  CCS  fens  font  parties  d'un  même 
fens  complet ,  p.  ij- 4.  Explication  de  ce 
fens  pnr  les  principes  de  la  Logique, 
p.  If  4.  CS"/^?'  Qii'^1''  nenailfent  que  du 
dlferent  regard  d'une  même  chofe ,  p. 
16$   Ç^fiq. 

Sus  de  figure  révélé  dans  l'Ecriture 
felcn  l"s  Calviniftes  de  la  manière  du 
monde  la  plus  extraordinaire ,  il  n'en  eft 
jamais  parlée  i.  l.i.  c.  7.p  l'.i. 

Sens  de  ces  paroles  :  Cecj  e/f  mon  corps , 
regardé  comme  clair  par  les  Percs  ,  1. 

I.  5.C.5.  p.  i4f 

Ils  ne  fe  font  jamais  mis  en  peine  de 
l'expliquer ,  quoy  qu'ils  ayent  eu  foin 
d'expliquer  toutes  les  métaphores  diffi- 
ciles de  l'Ecriture ,  p,  147.  item  p.  i  f  1. 

Sens  e.ïtraorJin lires  ceifent  de  nous 
choquer  par  l'accouftumance,  i.l,  i.c. 

II.  p.  S8 

Vray  fens  doit  convenir  avec  toutes  les 
exprelilons  des  auteurs,  5. 1.  f.  c.  3.  p.  ifi 


MATIERES. 

Sens  de  figure  ,  fans  exemple  dâ.ns 
rétab'ùllement  des  lignes,  2,  l.i.  c.i.  &  f. 
p.iij. 

Sentiment  ou  imprc-ffion  fimple  règle 
la  plus  feure  pour  trouver  le  fens  de  ces 
paroles  :  Cecj  ejl  mon  corps  ,    r.  1. 10.  c.  i. 

p.  719 

Quec'eftce  ffntimentqui  a  uni  tous 
les  Clireftiensdu  monde  dans  la  même 
foy,  &  qu'on  ne  s'eft  defiini qu'en  s'en  fe- 
parant ,  ibid,  p.  750. 

Que  J.  C.  a  conformé  fes  paroles  à  ce' 
fentiment  &  à  cette  iniprelTion  preveue, 
p.  730,  Que  les  fentimens  de  tous  les 
peuples  depuis  m  ;lle  ans  jrauvent  celuy 
des  fixprcmicrs  (iécles ,  p.  731. 

Sentimens  diftingaent  les  exprelTions 
qu'Aubextin  pro^  çfe  comme  (cmblables, 
ibid. 

Se  partition  c^'un  m"me  objet  en  di- 
veIfe^  idées  ignoréï  par  •\ui>ertin.  Sour- 
ce de  diversfophifmes,  5.1. 5.  Cf.  p.iéf 

Siede-p.&L  8. félonies Miniftres,  1.I.7, 
c.  i.p.  468 

Siècle  10.  defFendu  contre  les  repro- 
ches de  M. .Claude ,  1. 1.  9.  p.  696.  Qu'il 
ne  faut  pas  juger  des  fiecles  par  certai- 
nes accufations  générales ,  ibid.  p.  697. 

.Qiie  lesconverfions  faites  au  10.  (îecle 
prouvent  qu'on  y  croyoit  la  prefence 
réelle,  i.l.  9.c9.p.  710 

Sigebert ,  faute  dans  fon  texte  en  ce 
qu'il  dit  que  le  livre  de  Bertram  de  la 
PredelHnation  eftoit  dédié  à  Charlc  le 
-Chauve,  1. 1.  ii.  p.  if 

Sigifmond  Baron  d'Herbeftain  fur  les 
Mofcovitcs ,  1. 1.  f .  c.  I.  p.  540 

Signes,  Qu'on  n'en  peut  pas  affirmer  les 
chofes  fignifiées  en  toutes  occalions  ny 
en  toutes  circonftances.  1. 1. 1.  Règles  qui 
font  voir  quand  on  le  peut,  p.  94.  Que 
l'on  ne  l'auroit  pu  faire  raifonnablement 
dans  l'occafion  où  J.  C.  a  prononcé  ces 
paroles  :  Cecj  eji  mon  corps  ^  p.  98.  Autre 
chofe  de  parler  des  lignes  dans  leur  éta- 
bliflemcnt ,  &  d'en  parler  lotfqu'ils  font 
déjà  eftablis&  connus  pour  fignes,  99 

Signes  conjoints,  figncs  leparez ,  oti 
ne  conclut  de  la  qualité  de  ligne  ny  Ia 
prefence,  ny  r.ibfencc  des  chofes  figni- 
fiées ,  5,1.  i.c.  6.  p.  9^ 

Signe  comme  figne  ne  demande  que  la 
fuhfiftancc  extérieure  des  apparences  , 
&  non  de  la  fubftance  intérieure,  1. 1,/, 
c.  7.p.fi8.  &  5.  1.  3.C.  I.  p.  144. 

S'gnijicrtion  du  mot  de  Cecy,  i,  I.  1, 
c-M'-iff.  i5<».  Ap^irouvée  par  Zuingic, 
p.iCi. 


TABLE    DES 

Signifcaiion  des  propofitions  operati- 
■vres  ,  &  en  quoy  elles  font  différentes 
des  autres,  1. 1,  2,c.  f.  p.  iCj  . 

SiUnce  fur  les  fuites  Philofopliiqucs 
compatible  avec  la  dodlrine  de  la  pre- 
fence  réelle  &  de  la  tranifubft,  prou- 
vé par  le  confentement  des  Eglifes 
Schifmatiques  avec  l'Ei^lile  Romaine 
fut  l'Euchar.  c.  7.  p.  7é9.qu'cllescro)-ent 
le  péché  originel,  i,  1.  10.  c.  8.  p.  5(^9. 
&  ne  parlent  point  des  fuites  philofophi- 
qucs  ,ibid. 

Silence  des  Grecs  fur  les  difficukez  de 
l'Eucharifbie  détruit  l'argument  qu'on 
peut  tirer  du  filence  des  Pères  fur  ces 
difficukez ,  ^.1.  7.C.  y.p.  nî 

Silence  des  Pères  gênerai  pour  toutes 
les  difficukez  des  mylleres ,  5.  1.  7.  c.7. 
{>.f«7 

Silence  des  Payens  fur  l'Euchariftie, 
Difficulté  commune  aux  Calvinilles,  & 
aux  Catholiques ,  j.  1  7.  c.  6,  p.  fo; 

Simfles  qui  croyent  l'Euchariftie  fur  la 
foy  de  tous  les  Chreftiens  du  monde 
ufenc  bien  de  leurraifon  ,  &  par  ccnife- 
quent  ne  fe  peuvent  tromper  dans  cejur- 
gement,  i,  1,  i.c.  6.  p.  6f 

■  Sntaleius  Socinien  dit  que  la  doûrine 
delà  prefenCe  réelle  a  eftc  inventée  par 
l'Eglife,  dans  laquelle  S.  Chryfoftome 
prefidoit ,  1. 1. 1.  c.  y.  p.  fo 

Socin  avoiie  que  fi  l'on  s'arrefte  aux 
Pères,  tous  les  adverfaires  de  l'Eglife 
Romaine  ont  petdu  leur  caufe ,  1.  1.  i. 
c.  V.  p.  Ji 

Sociniens  n'admettent  que  de  purs 
fignes  dans  l'Euchariftie  ,  c'eft-à-dire 
nulle  efficace,  r.  l.i.  c.S.  p.^i&c.  Suivent 
les  principes  des  CalviniJles- plus  exacte- 
ment qu'eux,  6\ 

Différence  réelle  entre  les  Sorinicns 
&  tes  Calvmiftes,  «f 

Sofhifn-.e  de  conclure  de  l'expreiïîon , 
à  lapenfée,  ?.  l.i.c.  J.p.17 

Sophtfme  d'Aubettin  fur  la  diftinclion 
des  images  des  originaux  ,   5,  1.  5.  c.  5. 

p.  if7 

Sprituellement ,  les  hommes  reçoivent 

le  corps  de  J.  C.  fpirituellement  &  my- 
ftiauement  félon  Pafcafe ,  i.  1.  8.  c.4, 

p.î74 

gfirituellemenr  &  myftiquement  ,    i. 

1.  5.  C.7.p.9« 

Stercor.tni[me  reproché  à  Nicetas  par 
Hunrt'jert  i.l.z.c.é.  p.iu.  Sophifinc  de 
Claude  fur  ce  fujet ,  $bid. 


£41 


MATIERES. 

Qu^'il  n'eft  point  vray  que  les  Grecs 
ayent  cfté  Stercoraniftes.  ibid. 

Siibfldnce  pris  pour  l'amas  des  acci- 
dens,  5.!.  5.C.  s. p.  178 

SaLtilité  des  Minifttes  n'a  pour  effet 
que  d'obfcurcir  le  fens  commun  ,  ?•  de 
les  emp^-fcher  d'entendre  ce  qui  cft  en- 
tendu de  tous  les  autres,  i.  1,  10.  c,  3. 
p.  7  +  0 

Siifet  &  attribut  font  toujours  les  mê- 
mes dans  toutes  les  propofitions  affirma- 
tives ,  3.1.  ?•  c.  f.  p.  t(i7 

Suites  necellaires  &  non  necefTaires  du 
dogme  de  la  ptefence  réelle  fe  diftin- 
gucnt  par  le  confentement  de  tous  ks 
peuples  eftabli  danslei.l.  10.  c.  7.  p.  761 

Suites  nonneceffaircs  de  l'Euchariftie 
qui  donnent  lieu  à  M.  Claude  de  cirer  de 
faulfes  confequences,  1. 1. 10.  c.  7.  p.  761, 

5«/?efyi'//^/o«  introduite  depuis  le  6,  fie- 
cle  félon  Hofpinien,  i.  l.i.  c.  10.  p.  86 

Saffojitions  contraires  à  l'imprcllîon 
publique  ridiculeSji.  1.  i.  c.  r.  p.  iz.&c  ij 

SHpfofltions  faullès  de  M.  Claude  fur 
l'onzième  fiecle  ,  1. 1.  9.  c.  1.  p.  6f9 

Symboles  peuvent  eftre  pris  pour  l'ob- 
jet prefent ,  &  font  le  corps  de  J.  C.  3, 

1.  ).  c.vp.  159 

Sjmeon  Evefque  de  Jerufakm  du 
temps  des  Apoftres,  i.  1.  i.c.  8.  p. 78 

Stmeon  le  jeune ,  paffage  de  cet  auteur 
pour  la.  prefence  réelle  ,   i.  1.  1.  c.  ir, 

F-  H7  .  ,       . 

Sjmeon  Archevefque  de  Theflaloni^- 
que  n'a  pu  ignorer  la  doctrine  des  La- 
tins ,  fes  livres  des  Sacremens  &  contre 
les  herefies ,  i.  1.  4.  c.  i.  p.  lyS.  Paffa- 
ges  pour  la  prefence  réelle  £c  la  tranf- 
fubft.  p.  x<8. 

Sa  doArine  fur  les  particules  ,  1  <;i 
Symeon  Sulacha  Patriarche  des  Ncfto- 
riensuniau  Pape  ,  i.  1  î-c.  10.  p.  ^89 

Synode  à  Conftancinople  fous  Manuel 
pour  la  relinion  des  Eglifcs  ,  on  n'y 
parle  point  de  l'Euchaiiftie,  i.  1.  1.  c.  it 

p.  17)" 

Sjnode  de  la  Rochelle  où  l'on  condam- 
ne ceux  qui  rejettoient  le  terme  de  fub- 
ftance  ,  1. 1.  1.  c.  J.  p.  f9i-  Plaintes  des 
Suiffes  contre  ce  Synode  ,  ibid.  Modeué 
par  celuy  de  Nifme,    p.  $•). 

Syyiode  de  Sandomir  en  Pologne  où 
les  Liith-riem,  Vvaudois  &  Calviniftes 
de  Pologne  conviennent  d'une  forcnule 
captieufe ,  ii  1. 1.  c.  6.  p.  «o 


^À 


84t  TABLE    DES 

SyrieH)  avoient  kur  propre  Evoque 
du  temps  que  k-s  Latins  domuioient  dans 
la.  Paleftine.  Mauvaife  raifoa  de  Mon- 
fîcur  Claude  contre  ce  fait ,  r.  g.  1.  t. 
c,  y.  p.  70 

Syfiéme  ic  M.  Claude  touchant l'cftat 
de  l'Eglifedans  l'onziéiTie  lieck' ,  &  dans 
les  fuivans ,  tonde  fur  une  tripk  igno- 
rance qu'il  doit  attribuer  aux  diverks 
focietcz  qui  eftoient  alors  dans  le  mon- 
de ,  1. 1-1.  c.  8.  p.   I4J 

Syflcme  àe  l'opinion  de  M.  Claude  fur 
la  créance  diftuide  &  confufe,  i,  J.  6, 
c,;.  p.  4S7.&feq. 


Ttmo'fgnitge  des  hommes  doit  paiïcr 
quelquefois  pour  '  indubitable  ,  ôc 
quand, 1. 1.  9.  c.  i.  p.  fijf 

Conditions  fuffifantes  pour  rendre  des 
témoins  croyables  ,r.g.  1.  I.  c.ii.  p,  197. 

Temps  inexplicable  pour  les  Minif- 
tres,  i.l.  9. CI. p.  é4> 

Termes  qui  ont  un  double  fens ,  1. 1.  7. 
C.  t. p.  47f.ibid. 

Termes  abrégez  auxquels  on  fùpplée  , 
&  qui  donnent  une  idée  plus  étendue 
que  leur  fignifîcation  precife^  3.  1.  i.  c.  j 
p.  if.  Peuvent  elhe  réduits  à  Iciu  signi- 
fication literale  ,  ibid.  p.  17 

Que  l'efprit  ne  demeurant  point  dans 
la  fignifîcation  grammaticale  de  ces 
termes  j  ils  peuvent  eftre  employez  en 
toutes  forces  d'occafîons  j  5,1.  :,  c.  ;.  p, 
50.  fi 

Thebutis  premier  corrupteur  de  la  foy 
de  l'Eglife  ,  parce  qu'on  ne  l'avoir  pas 
voulu  faire  Evefquc,  i.  1.  i.  c.  S.p.yS 

Théodore  Abucara  Evêque  des  Ca- 
riens, 1.1.7.  c.9.  p. 541.  Paifage  de  cet 
auteur  fur  l'Euchariftic,  p.  543 

Theidore  de  Mopfuefte  qui  combat  le 
péché  originel  ,  approuvé  par  Photius, 
I.l.  II.  p.  45 

Que  cette  erreur  ne  luy  a.  point  eflé 
reprochée  au  f .  fîecle ,  1. 1.  ii.  p.  18 

Theodoret,  Difpute  fur  Theodorct  nul- 
lement decifive  ,  5. 1,  5,  c.  i.p.  144. 

Theodoret  établit  la  prefence  réelle 
clairement ,  ;.  1,  j.  c.  ^.  p.  if  1 

Tbeo^hiUde  a  fleuri  dans  l'onzième 
jecle,  fait  Archevêque  d'Acride  ,  n'ac- 
cufe  point  les  Latins  d'erreur  fur  l'Ea- 
chariftie^i.l.i.  c.y.  p.  149. 

Ses  pùfiages  pour  U  prefence  réelle  & 


MATIERES. 

naQlI'ubft.  p.  ifo.  Aveu  de  Saum 
&  la  contradidion ,  ibid.    Fauifcs  (blu- 
tions des  Mimltres  refutées  ,   p.  jyi  ^ 

M- 

Doute  propofé  par  Th;ophilaéle  n'eu; 
jamais  venu  dans  l'efprit  d'aucun  Calvi- 
nifte  ,  ibid.  p.  16S 

S.  Thomas  écrit  contre  les  Grecs  par 
l'ordre  d'Urbin  4.  Sa  rcponfe  au  chan- 
tre d'Antioche  marque  que  les  Sarra- 
zins  reprochoi.'nt  aux  Chrefticns  la 
créance  de  la  prefence  réellcj  1,1,3.  c,  ;, 
p.  iiS 

Tout  colleftif  différent  d'un  tout  con- 
notatif  :  ce  qpi  demefle  un  fophifme 
d'Aubertln,  5.  1,  i.c.  i.p.  16 

Tradition.  Règle  de  faint  Auguflin 
poux  les  traditi<>ns  apofloliqucs ,  i.  1. 1 
c.9.  p.  S; 

Ttaitté  d'accord  entre  les  Grecs  &  les 
Latins ,  où  il  n'eft  point  parlé  de  la. 
tranffub.  i.l.  3.  c.7.  p. 137 

Tranjfubflantiation  fignée  par  les  Grecs, 
r.  g.  1.  I.  c.  8.  p.  114.  Mot  de  change- 
ment déterminé  au  changement  lub- 
ftantiel  par  tous  ces  a£tcs ,  p.  117 

Tranjfiibfi.  Sc  changement  ,  termes 
équivalens  parmi  les  Grecs  j  r.  g.  1,  i. 

c.,9.  p.  144 

Tranjfubjtantiat'ion  exprimée  par  cer- 
tains auteurs  par  une  élévation  à  un  pins 
haut  eftat,  5. 1.  f.  c.  u  p.  17? 

Triode  office  de  Carefmc  parnji  les 
Grecsjes  Calviniftes  y  font  anarhemati- 
zez,  I.l.  4.C.  ro.p.  515 

Tritheme  parle  de  Bertram  fans  l'a- 
voir leu  ,  1. 1.  II.  p.  16 

Tyfe  du  corps  de  la  Vjerge  pris  pour 
l'Euchariflie  confacré  par  Aubertin  & 
par  Blondel,  i,1.7,c,3.p.  487 


Vyilenttn  fe  fait  hérétique  pour  n'a^ 
voir  pas  efté  Evêque,  i.  l.t,  c,8.p.79 
Valfridus  Strabo  pajle  le  langage  des 
fens  fur  l'Euchariflie.  t.l,  S,  c,  4.  p.  J6y, 
Celuy  de  la  foy ,  f  74 

Veccus.  Voyez  Jean  Veccus, 
yerice^  de  foy  ne  font  pas  toutes  éta- 
blies fur  les  mêmes  preuves^  1. 1.  6.  c,  r 

p-4if 

Vérité    prifc   pour  clarté  par  S.  Am- 

broife,  1.  1.6.  c.ii.p.<^9'5 

Comment  la  realité  le  conclut  de  ce 
que  rEuchjri,ftic   çft   appell.éc  vérité  à 

l'égard 


TABLE    DE 

l'égard  des  anciens  Sacremens,  i.  1.  6 

c.  to.  p.  éyi 

Procédé  des  Miniftres  dans  l'étibiif- 
•feineat  de  leur -ver/u  (eparée  ,  i.l.;.c,4. 
p.  fSo. 

yertu  fcparce  tirée  de  Marcellus  Pho- 
tin  &  Sophronius,  &  employée  par  eux 
à  détruire  la  divinité  du  Verbe,  i.  1.  f . 

c.  I4.p.^S4 

Vert»  feparée  cirée  mal  à  propos  d'un 
palTage  de  faint  Cyrille  rapporté  par 
Viilor  d'Antiojlie.  Examen  de  ce  paf- 
fàge,  i.l.j.c.  lo.  p.  584 

Pfeuves  fubfidiaires  de  la  vertu  fepa- 
j-ée,i.l.f.c.ii.p.  JJ7 

rl-'ertu  du  corps  de  J.  C.  danc  Theo- 
philavSc  cV-ft  le  corps  de  J.  C.  pldn  de 
vertu.  Réfutation  des  chicaneries  de 
M,  Claude  fur  ce  point,  1.  1.  j.  c.  13. 

p.  f74 

Sens  de  vertu  ne  peut  raifonnable- 
ment  eftrc  enfermé  dans  ces  paroles: 
Cecy  efl  moncorfs  ^  1. 1.6.  c.4.  p.  68 

Vies  des  Saints  du  10.  liecle,  1. 1  9.C.  tf 
p.  679.  Il  n'y  eft  parlé  d'aucune  dilpute 
îiir  l'Euchar,  ibid. 

Vnion  des  preuves  pour  le  confente- 
ment  des  deux  Eglifcs  eft  d'une  force  in- 
vincible, i.l.  1  c.  II.  p.  178' 

Vnion  de  la  divinité  au  pain  comme 
caufe  efficace  ,  marquée  par  Nicolas  de 
Methone,  1.  1.  4,  c.  $.  p.  ;6o. 

Vnion  d'objets  différents  en  une  mé- 
nie  idée,  ?.1.3.ç.é.  p.  17J 

Vfuge  de  cette  union  dans  les  auteurs 
déclarez  pour  la  tranrtubft.  171.  &c. 

Sophilmes  des  Miniftres  qui  naiflenc 
de  l'ignorance  de  ce  principe,  3.  l.j.  c.  7. 
p.  176 

Nourriture  &  autres  accidens    attri- 
buez à  l'Euchar.   confequence  de  cette 
,    union  de  divers  obj  ;ts  en  une  même  idée, 
3.1.  5-  c.  8.  p.  187.  &c. 

Auteurs  qui  ont  dit  que  l'Euchariftie 
eftoit  exempte  de  la  condition  des  vian- 
des communes  J  5.  l.  }.  c.  8.  p.  191 

Vnitez^  inégales  fe  diftinguent  par  fcs 
diverfes  expreffions ,  1. 1.  8.  c.  7.  p,  «01 

Vnité  de  viftime  reconnue  par  faint 
Chryfoftome  dans  l'Euchar.  preuve  de 
la  realité  ,  1.  1.  6.  c.  11.  p.  691 

Vra-1.  Qjie  le  terme  de  vray  dans  ces 
propoiîtions  ,  Cfejl  le  niray  corps  de  J.  C. 
&c.  exclut  la  figure  &  marque  la  realité 
2. 1.  4.  c.  8.  p.  587  &  ch.  9.  p.  411.  Ç^ 
fui-v. 
Combien  ce  langage  eûoit  commun 


S    AUTEURS.  ^45 

dans  l'ancien.ie  Eglife  ,  p.  3S8.  ^  fun. 

Chicaneries  de  M.  Claude  llir  le  ter- 
me de  vray  ,  1. 1.  4.  c,  8,  p.  jsi.Faulics 
coniparaifons,    ibid. 

yere  employé  par  oppofition  au  dou- 
te ,  1.  1.  4.c.8.p.  ?94 

Sens  chimérique  du  mot  de  vray  corps 
de  J,  C.  allègue  par  M.  Claude ,  i.  1.  4, 
c.  9.  p.  411.  ^ Jui-v. 

VrAj  marque  une  affirmation  foite 
oppofée  au  doute,  1. 1.  4.  c.  15.  p.  41  g 

Ufage  ridicule  du  mot  de  vray,  1. 1.4. 
c.  13.  p.  457 

Grands  efforts  de  M.  Claude  pour  élu- 
der la  preuve  tirée  des  mots  de  vraj  corps 
z.l.  4.C.  9. p.  400.  Généralité  de  cette  ex- 
prclTïon,  ibid.  Qu'elle  a  efté  prife  en  un 
mêmelêns,  401.  Que  -vere  Ç£  -verHf  ne 
peuvêt  /îgnifierla  vérité  de  la  vertu, p. 404 

Sens  particulier  du  mot  de  "vertus  dans 
quelques  palTages,  407 

Volonté  humaine  a  dej  effets  réglez  8c 
déréglez,  i.  l.io.  c.  17.  p.  761 

Vjlatus  Evéque  Arme  nien.    Son  at- 
teftation  fur  l'Euchariftie  ,  r.l.  11.  p.^S 
Réponfe  du  même  Evéque  fur  diverfes 
queftionSj  ibid. 

Extrait  de  la  Liturgie  Arménien  ncdon- 
né  par  cet  Evêque  79. 

Réponfe  du  même  Evêque  fur  diver- 
fes queftions  touchant   l'eftat  prefeut  de 
l'Eglife  d'Arménie ,  1. 1,  îi.  p.  So. 
Z 

Z^nchius  figne  la  concorde  de  Vvi- 
temberg  avec  une  équivoque  hon- 
teufe,   1. 1,1.  Cf.  p.f4. 

Zumgle  avoué  que  S.  Auguftin  a  cru  la 
prefence  réelle ,  1. 1.  i.  c  ;.  p.  47 

N'apprend  le  (êns  de  figure  que  long- 
temps après  avoir  rejette  la  doârine  de 
la  prefence  réelle  ,  i.l.i.c.i.p.î^.  Cona- 
ment  il  a  trouvé  les  adrefles  pour  le  dé- 
fendre ,  ibid.  Premier  eftat  auquel  il  pro- 
pofa  fon  opinion  qu'on  peut  appeller  eftat 
de  fincerité.  thid.  Il  ne  reconnoift  d'abord 
dans  le  Sacrement  que  la  figure,  p.  ?o. 
&  ;i.nie  que  ce%-p2.To\es,Hoc  ejfl  corpts  ç£c. 
contiennent  une  promelTe  de  grâce,  p.?  i , 
Ne  parle  point  de  l'efficace  jointe  a«  figne 

p.  33- 

Que  Zuingle  n'a  admis  que  de  purs  fî- 
gncs  dans  le  Sacrement,  1. 1.  r.c.j.p.  ?o. 
il  n'a  pas  reconnu  plus  d'efficace  dans 
l'Euchariftie  que  dans  tous  les  autres  fi- 
gnes  arbitraires  ou  naturels  de  J.C.p,  78 
Oecolampades  en  fait  de  même,  p.  59 
fin  de  U  Table  des  Matières, 

O  O  000 


TABLE 

DES    PASSAGES    DES    AUTEURS, 

SUR      LESÇ^UELS    ON    FAIT     QUELQ^UES 

reflexlom  particulières  dans  les  crois  tomes  de  la 
Perpétuité  ,  fc  dans  la  réponfe  générale- 


De^MAN'Us  Epift.  nd  Bgreng, 
^malàrius  Ipirilcgiiidm.yl  p^tyi 

cte  officiis  Ecclcfîaft.  1  î.'cîf     .      ....-.^.i.^ -. 

^mhrofists  deiisquim/fteriis  iiii-  ''  "i-il.jjVCi  8..  p.  J07.  &  p.  p  3 
liaiitur ,  c; -y-  m  -:•     .•  ;:■ -'Ji    .j'i 


r.  1.9.  c.  I.  p.  (.  f},  &  70f' 
I  1.  8.C.4.P.  f7i 
".c.  7.p.6oS. 


1.1.8. 


Defacrameiitis, 
1.  (S.c.  I 


+.C.+ 


iilPfal,-3  8 
^mhroftafler  in  prima  Epiftoland  Cojint.c.  ir 
^naftafius  Synaira  ,    traft  .a'hx-^of  c.  15 
C.  15 

Orat.  de  facra  Synaxi, 
u4n(ehnus  de  5.  Valeriaiij  qusft.  c,  4. 
^ugnltiuKs  contr.x  Adiinanmm-,.tf;'ii' 

Êpiftol.adBonifac.  -'    '•;'' 

1.  3.  dedoûrin.  Chirifti  /c,  is     ' 

de  fcrm.  Doinini  in  mont'e.  •    • 

de  Civitate  Dei,  1.  ii.'c.  if*  ' 

de  hïref.ad  Quolvultdeum,  •"' 

cont.  Fauft.  1.  u.c.  10. 

&1.  lo.c.iS  ••' 

contra  adverf.  leg.  Si  proph.  ■!.%.■  c.. 5» 

d.-  pfcca  torum  meritis;- î.'=>! .  ç. ^o 

courra  Crcfcon.  1.1.  c.2f!    '   ''-       "'■'■'•■ 
^Kj;iin,  p(al.  j 

iaiD^il.  55. 

inpr^l.îg 

in  pfal.  7j( 

in  pfal.  pS 

tra^.  15.  in  Joann, 


1.4.  c.v.p.Hi.  ^P-^ff?-  ^  ^•'^•• 
c.  ?   p.  f07.  &  c.S.p.  644 
;.  1.;.  c.  7.p.i85 
z.l.4.c.3.p,!4i.c.8.p.î90. 
&1  f.c.ii.  p,5t9.&3'-<'-'^-'*"'' 

p.  171.  i.i.6.c.ii.p.6^y 

i.  1.  5.  C.4.  p.ij7       '    .  .j 

1.  1.  -".c.  i.  p.  471. 

iitd.  p.  480. 

ti>td,  p.  48J 

1.1.  3  C.S.p.  1^5 

3'l.i.c.i.p.H.&1.2-.c-^  P-9f' 

3. 1.  i.c.  é.  p.  99 
-  3. 1.6.  c.  8.  p.  407 

5.1  é'.  C.  f.p-i^î- 

3.  1.-6.C.  9.  p.  417 

1. 1.  i.c.  3.p.î4 

3;1.6-.c.j.p.  3»7 

3.1.«.c.n.p.  44y. 

j.ll^.'c.  5'.'p-^76 

3.  1.  6.Ç.  f.'p.  78:? 

3.1'.6.c.f-p.  v;3 

'3.1.1.0.4.  p.  46 
^■ia\i,.dans  Lir'-ff. 

i.U.c.g.p.C+S&î-l-^-'^-f-P'^' 
1. 1.  6.  c.  10.  p.  6715 
3.1.  S.c.f.  p.  ?84.&P-'^°' 
p,  3 .  </«»».>  la  P:-efac^' 


24J 


TA,&.LEÏ!)ES    AUTEURS. 

Traa.  26.  in  Jpaii.                ,  i .  1.  tf .  c.  5.  p.  4}« 

traa.  injoan.                          ;     ,  ^.■>,.  dans  Ufref. 

Scrm.i  devetbo  Apoiloli,.  3.1- U.c.  <>.  p.  410 

St-rm.  gj.  de  diverlis.  3, 1_  i_  (..  9. p.  u6 

c            ,  ■   f  5.1-i.c.8.p,ii5.&c.^.p.ii4. 

Scnn.admEint.  &/^/^.p.i35 

^uthor  Commentarii  in  pf.  incer  opéra  Hieron,  in      i.  1,  4.  c.  9.  p.  407 

pl'al.  1+7 

,u<uthor.  Homil.  de  cruce  inter  opéra  Chrjfoft.  i.  1,  j.,  c.  3.  p,  500 
^«r,i.  Comm.  in  epift.  PauL  incer  opéra  Anfelmi ,      3*  l'  4',  c.  1".  p.  lu 

inl.io.&ii,  Epift.i.'ad  Cor. 

"'  .  B 

BAS  tl:us  deBaptiCl.  i.quxft.i.&j  3. 1.  S.  c.  9.  p.  418. 

BedumU^^.tc.\.^  1.1.5.  c.  4.p.  léS 

Bejfarmn   de  Sacram.  Euchari/lis.  I  1.  7   c   6  P,  f  14 

Bernardus^  ferm.  5.  in  pfal.  Oui  habitat.  3.'l.'l.c.i  'p.25.&  î.l.«.c.8  p  410 

Bertramus  de  corp.  &  fang.  Domini.  ,,  i,g_   c.iz.  p.539.  ,5  ^/-v. 

&  U.  p,  5t.  ǧJui-v, 

5/o»</e/ Eclaircitr.  fur  rCuch.  c.  itf.  I.I.7.C.  io.p,j'49              • 


C 


AsAsiLAsin  EipoC  Litureis,  , 

C.24  i.l.}.c.8.p.i4J 


c.  17 
c  19 


c,  50 
c.  îi 
c.  j9 


in  Jean.  hom.  41 
hom.  4y. 
liom.  46 


ibid, 

ibid.  p.  145 

»*/(/.  p.  147. 248.  &  R.G.Î.z^ 


C.52  C.  5,p.4So 

I.  1.  J.c.  8.p.  140 


de  vira  Chrifti  14  1. 1.  j.c.  8.p.  251.5?', 

Cîfarius  dialogo  j  5.  inter.  r,  1.  9.  i-1.5.  c.  9-  p.  31^. 

Caietan  in  5.  p.  S.  Thom.quxft.  75.  art.  i  2.  l.t.c.j.p.  i«9 

C-.ÏW»,  gêner,  ^thiop.  i.I.  f.c.i  j.  p.  40tf 

R.G.I.  i.c.ij-.p.i45 

C<»ro/«j  Mag.  de  imag.  1.  4.  c.  14  i.l.S.  c.4.p.  J77 

epifl.  ad  Alcuin.  ■'*"^- 

Crfj^^Wifrin  liturgia  Armenorum,  J.  1.  5.c.  s.p.  379 

Chryfoftomus.  Hom.  2.  ad  pop.  Antioch.  *.  L  *•  '^^  '5'  P-  71} 

in  pfal.  no.  3.1,4.  c.  j.  p.  216 

defacerd.l.  3.  i.l.é.  c.  i3-p.7iî 

Hom.  de  Cruce.  2.  1.  6.  c.  13.  p.  70S, 

hom.deEuchar.  3.  1.  4.  c.?.  p.  216 
hom.  51.  in  Math.                                                        '    "•  •^- '^^ ''■  P'^^  ,  »  „  ,,0 

hom.  8,.  m  Math.  ^-  M-  '^•--  P-'^°-  ^  ^/:  P-^ °' 

&1.  4.  <:.2.  p.  33J  &c.  4.  p. 

319.  &c.  é.p.  371.  1.  <!.c-  13. 

p.  708.  &  5.1.  4-  c.  3.  p.  2lé. 

&  G.  4.  p.  220 

1,  1,  6,  c.  II.   p.  694 

2. 1,  5  •  c.  7.  p.  292.  &c.  &  1.  6 


\.    '       r  c.  13-  p.  709 


4.  1.  6.C.  12.  p.  694 

„     ,  ,    1.  I  C.4.p.2é4.&1.4.C.ll. 

in  Afta  hom.  il.  '•     '•'"^    .  r  o  n  c  a6  &  U 

j"  Ep'^-  -'^^°"-^^'  rii'p.?o9;i;,.T.Ko:p.4'<^ 

■■*''"•  ^^  iil.  6. c.  12.  p.  691.  &    3.1.6 

cm.  17. in  Epift.adHeb.  3. 1. 5.  c.  lo.p.  îU 
pift.  ad  Ca:f.  O  O  O  Ô  O   ij 


84<î 


TABLE   DES   AUTEURS. 


hom.  17,  in  ep.  adHeb. 

epift.  ad  Cxfar. 
Chriftitin.  Diutinarin  Marh.  c.itf 
Clemens  AlcvXand.  pedag.,1.  i.c.  x 

Comment,  in  cpift.  Paul,  inter  oper.  Hicron, 

incpilt-  ad  Cor.  c.  to 
Concilimn  Conllantinopol.  in  Conc,  Nicxn.t,  ait,  S 
Concdium  Nicxnum ,  adl.tf 
Concil.    Florent,    fefl".    zj 
Confejfis  Auguft.  an.  1^51 
Confi'JftonAc  iay  de  l'Egl.  Orient, 

ConflitHnones  Apoft.  ).  ;,  c. 5. 1.  «.  C,  13.  &  x^.  &  1. 8. 
Cil.  &  n 
l.Cortnfh,  10.  v.  17 
10.  V.  16. 
•  10.  V.  4 

Cyprianus  epift.  «5.  ad  Catcilium» 

epift.  76 

de  orat.  Domini. 
Cy'illus    Hicrof.   Catech.   4.  myAi, 
Cjrillui  Cath.  4s  nij;ft^ 


GatecH.  f 
Cjrillus  Alex,  de  adoïrat.  1.  7.  p.  ijr 
1.1. 
in  Joann.  p.  314^ 
1.  4.  in  J"oan.  p.  3^5 
p.  3«o.  &  365. 36J; 
p.  861 
1.  Il,  p.  104 

1,  4,adverf.  Neft.  c.  f.  p.iir 

apolo^.  adycrf.  Orienr, 
1.  7.  contr.  Jul, 

homil.  de  cœna  myftic* 

iiïcatena  in  Mith.  Tolofx. 


5.  1.  6.C.  to,  p.  459^ 

2.  1.  6.  C.  11.  p.  6jl  & 

î.  l.é.c.  13.P.44J 

5.1.  î.  c,io.p.3iî 

1.1.  S.c,4.p.  f79 

».l.  J.c.  4.  p,  166,  &  5. 1.  4» 

c.  f.p.îi^ 

).  I,  (f.  c.  ri.  p.  4+7 

1. 1.  7.  C.7.  p.  fil.  fi  6.  517. 518^ 

r.  1.7-.  c.  f.  p.yoa.&c.S.  p.yjy- 

I.  1.  4.  c.  1.  p.  171 

1. 1.  i.c.  f.  p.  5f 

R.  g.  l.i.  c.  9.  p. 13  (,  13 j.  &  J». 

1.  S.  c.  If.  p.  687 

}.  !..  1.  c.  4.  p.  4i 

r.  1.  I.  c.  8.  p.  71 

i,  1.  t.  c.  8.  p.  75.  Sa 

1.1.1.  c.  14.  p.  117 

i.  1,  j.  c.  i.p.  48}»  &  J.l'-f 

CI.  p.  141 

t.I.  3.  c.  4.  p.  I6tf 
t.l.  tf.  C.  II.  p.  684 

x,r.  10. c. 5%  p  751 

t.  1.  3.C.  S.  p.  507.  &c.  9-.pt 
jii.&l.  4.  c.  I.  p  377.  &î^. 
r.  4.C.  i.p.  5^6.  &  p.  U5.  & 
}.l.  i.  e.  4.  p.  u.  53.&  3  '■4'. 
c.  5.  p.  114.  &  5.  1.6-  c.  X. 
p.  J<Ji 

f.  1.  i.c.  4.  p.  3r 

i»  1.  f  C.7.  p,  jisr 

i.I.  f.  c.  i.p.  494 

a,  1.  r.  c.  i.  P-  49  f 

i.  1.  Î-.  c.  7.  p.  fi9 

*.  1.  f.c.  r.  p.  49*.  &c. 

t   I.  r.  c.  8.  p.î34 

3.  l.r.  C.4.  p.  57.  &   î-1-  ^' 

c.  ii.p.  444 

ï,  1.   f.  c.  3.  p.  fi.&  »••  1-ï» 

e.  i.  p.  49+ 

1.  I.5.C.  r.p.îi7 

3.  1.7.  c,  1.  p.  47î'&î-  ^•7« 

Cf. p.  499 

s.  1.  f,  c,  1.  p.  494         . 

z.l.y.cio.  p.  5JI 


DA  II  i  e'  dans  fon  lirre  du  vray  cmploy  des  Pe- 
resp.  Iî8.  131. 1  îf.ljif.i99 
advcrf.  latinor.de  reliq.  ciiltu,  1.  4.  c.  13 
Eionif.  Alexand.  epift.  Canon, 
dcEcckf,  Hier.G.5&4 


1.1.  i.c.  f.  p,  îi.  n 

I.  1.  r,  c.  10.  P-S7 
1.1. 6. c.  15.  p.  707 
3. l.I.C.4'P,4i.&  J.l  i.C.  l.p.f  ^ 


TABLE  DES    AUTEURS,  847 


ELiAS  Cretertf.  in  r.  orat.  Greg,  Nanz,  i.  1.  f.  c.  lo.p.  ff4 

£fiph.  in  a.ncot,  1. 1.  f.  c.  9.  p.  511 

m  comp.  fi-iei  i,l.  f.c.  ii.p,  ySi 

in  comp.  ferm.  ie  fîde  Eccle.  5.  ],  6.  c,  3.  p.  571 

t.}h>em  i'j'n..  de  natara  Dei  curiofe  non  fciutanda ,  j.  1. 1.  c.  4.  p,  44.  &  5.  1  «, 

c.j.p.  3^4. 
Ephrem    Antiocn.  apud  Photium  cod,  3.1,5.0.  lo.  p,  jié.  &  jij 

Zthertus  &  beat,  lib;  adverf,  Elipand.  i,l,  4.  c.  9.  p.  405,  &  1. 1.  «• 

Eufeb,  de  demonft,  Evun^.  1. 1,  c,  lO  c-  8,  p.  643.  &  c.  10.  p.  67U 

idem  1.  8,  j,l.  i,c,4.p.4j 

de  Eeclef,  Theol.  contra  Marccll,  an.  1.  f-,  j.  1,  <.  c.«.p.  40* 

c.  II 

apudEhimafccn.  3.paral.c.4y,  z.l.tf.c.  i.p.fSS 

£)»/^OT/«/ in  Matth.  c.  6-4  ^1  ,_ ^  jj^  „   j^. 

&   I.    1.  t.  c.  li.   p.   179,  a 

in  panop  tit.  de  Paulician,  p.iSi 

i.l,  1.  c.  it, p.  i8t 


FA  eu  NOUS    lib.  9.  p.  +04  ^.l.t.c.  7.  p.  101.  &c. 

florus  inexpl.  milH  ,_  1_  «_  c_  ^_  p,  y7j_  &  c.  7; 

.    ^  p.f97 

rMertEpM.j  f.  1.  8.  c.  7.  p.  éotf 

fulgentius  de  baptif.  iEchiopif,  c.  ir.  j_  i_  4,  j.    ,_  p_  ^jg_  ^  ^  y  y^ 

C.5.  p.joo.  &;03 


G 


Abriei.    Archiep;    Philadelphia;  ,  j.l.  3.C.  ^.  p.  171.  &  r.  g.  1. 1. 

C.ro.  p.  I6ré 

Gaudentiuî  Brixian.  tiaft,  i.  in  Exod,  j.l.  3.  c.  4.  p.  1^4.  &  i.l.4. 

e.  I.  p  317.  &  3.  1.  I.  c.  +. 
p.  5S.&Î.  1. 4.C.  4.  p.  »i» 
1.1,  10.  c.  y.  p.  7ÎI 
}.l.  1.C.4  p.  45 

CeUr.  Cyzicèn.  »•  }■  ^-  <=■  "^^  P-  +* 

in    diatvp.    Gelaf.  J.l.  f.  c.  10.  p.  3if 

traft.  de  1.  nuur.  cont,   Neft.  &  Eutych.  ?•  ^  +•  <^-  *•   P-^*?' 

de    duabus  natur.  * 

Ctmma  anima: ,  1,  i.  c.  ioj> 


t.l.  -.c.  I4.p,  iio 


c.   (î 


Cen.  17. V. ro 


i.  ^.  1. 1.  c.  14.  p.  1^4 


c.  41.  V.  i<î  l.i.7-c.3.p.48fef/'"'^ 
Cer^anus 

Cermurus   Patriarch.    Confiant.  '           }.l.  ?.  c.  é.  p.  I7î 

in  theor.  myftcr 
Cotfrid  Vin  foc.  trîcîl.  de  corp.  &   fang.    tom.  i;      J.  1. 1.  c.  r- P- 49 

BiSliot    Patr.  p.  f+4  '•|"''*^'^''''^°É7i 

Creeorius  Nazianz.  orat.   il.  i.l.é.  c  10.  p.  67Î 

"*  T   1  1    c    «    P.  iî9  oc  '■  ^•^' 

orat".  4''  ,                    x..p.i-'9.&^.lf-<:.t.P.-4»I 

CresoriMt  Nyff.  orat.  Catech.c,}?.  ^'•';-Z  ^^-r^"^  ... 


S48  TABLE   DES   AUTEUES. 

Guillelmus  Malinesb.  iii  OJone  ,  i.  ^.  9.  c.  (,.  p.  €8 

in  Vuiklmo  .  1. 1- }.  1. 1  9.  c  i.  p.  6,6 


H' 


H 


E  1  G  A  L  D  II  s  in  Epitome  vita:  Robeiti  Reg, 
Henric.  Boxoinius  ,    1.  i.  p.  <0 
chsu-s .  1,  r  in  Leviticiira. 


Patriarcha    Conft, 
I,  c.  lo.    p.   %6 


yiierem 

R.-'lp 
Hieron.  Epift.  ad  Hedib 

in  Jerem.  c.  îi 

in  41.  Ezech. 

in  Matdi.16 
HiUrtus  de  Ttin.  1.  8 

I.  i.&> 
Hildebert  Csnom.  in  carn. 
Htncmxtc    de  pridcft.  c.  J 
Hoff.  p.  1.  f.  m  &iii 

f.  144. 

f.  3'o 

//0«/»^.    fec.  16.  p.  f  O 

inappend.diflertationis,  S.p.fî5  .^ 

«««.ie.r^.'  cont.  Grxc.  calum.  Bibliot  Part.  Pat.I. 
t.  4.  p.  10 1 


contra  Nicct. 


I.  h  9.c.i.p.iîr7 

I.  l.i.c.  4.p.iio 

A.  1.  4.  c.  z.  p.  35f.  &  i.  ,1, 

4.C.7  P  ^78  .    i 

i.l.  4.  c.  4.p.iS5  ■•. 

thiil  p,  ii/O  V 

.3.  1.  4.C.  é.  p.i}6 

î.  1.  t.  c.  4.  p,  46 

3.1.  I.C.4.  p.  44 

a.  1.3.  c.  4.  p.  i^^ 

1.  1.  4.  c.  I.  p.  JiS,  &  c.  8, 

p,  589.  &3.I.  *■  c.  1.  p.  3^1» 

3J.  7.  c.  8.  p    fio 

5,  1.  5.  c.  6.  p  i7i 

1.1.8.  c.  11.  p.  «43 

1.1.  i.c.9.  p.  78 

1,1.  I.  c.   s 

1.  1.  I.  C.9.  p.  79 

I.  1.  4.  c.  4.  p.iSi 

i.l.  4.  C.6.  p.  3°° 

î.l.  3.  c.â.  p.  182,  &    3-  '•  î 

c.  I.  p.  140. &C.;;.  i.c.io. 

p.43y 

I.  l.i.c.6.  p. 131 


IGnatius  Epift. ad Smirn. 
/crfw.ii.aux  Arni. 
7»^»»«  Datnafceuus  de  fide  orthodox.  1.  4-  <:•  1+ 
idem  orat.  3.  de  imagin. 

Joannes  de  Parifiis , 
Jaannes  RusbrocW  in  fpcculo 
l,en<)iifs  1.4.  adverf.  hxr.  c.  3  4 

1.  f.  Cl. 
apud  Oecum. 
Jfidor.   in  Exod.  C  ï% 
DeEcclefiaft.offic.cxv. 

lufitntii  apolog.  1 


1.1, 


10.  c.  f.  p.  748.  749. 
.1.1.  c.  14.  p.joo 
7.  C.4.  p.  491 
p.  49é.&  r.  g.  1.1.  c.  9. 

II 

7.  c.  I.  p.  460.  &c. 

3.  c.  8.p.  i8« 

6.C.  13.  P.704.&Î 

c.  1.  p.  10.  &  1.  3.  c-  T 

7« 

4.c.i.p.  337 
7.  Cl.  p.  47^ 

î.l.8.c.4.P-f70 
i.l.io.c.^.  p.  7fo  &i.lî. 
c,  8.  p.  504.  Sec.  &  1.  !•  6» 
c.  13-  p  703 


r.  g. 
I.l. 

3.1. 
2..1. 
1.1, 

p.i 

1.1. 

î.l. 

LAnfrancus  decorpore&fanguineDomini,c.iz 
La-^ate,-us  Hiftor,  Sacrament.  p.  5 
irfî:,<f/«j apud  Forb,  p.  4oS 
Léo  IX.  Epift.  I.  tom.  3.  E^j^om. 
LttHrghi  BAÛlii. 


Pont.  C.  5> 


I.  1. 1.  c.  7-  p.  140 

i.l.i.c.y.p.46 

i.l.f.c.4.P-3fr 
T.l.i.c.  f.p.  114 
*.1.4.<:.ii.p.4>5. 


TABLE      DES 


Luci  ■>  o 


AUTEURS.  S49 

i.l.I.C.I4.  p.  118.  &tjg 
I.I.7.C  9.  p.y45 


VL 


MAcARius   hom.  tj. 
Manus    Euhefîn, 
Matth.    15.  V    î8 

2A.  V.  iC 

Maximus  in  Eccleflall^ 

Hierar,  c.  3. 
M.jj.t  II  ;.ici  , 


N 


3.  1.  I.  c.  4,  p.  4« 
1.1.4.  c,  3.  p.  tyj 
ï.  1.  I.  c.  15.  p.  107 
1.  1.  I.  c.  9. p.  76 

j.  l.i.  c.  i.p.  f7 
l.l.  8. c.  3.  p.  jtff 


NiCEPHOR.Patriarcha  Conft.in  AntirreticoapuJ 
Allacium  de  perpétua  con(enl'  p.  1121. 
idem  de  Chcrub.  c.  6 
Nicetai  Cbor.  in  Alfxio  ann.  g.  1  5. 
NtceLis  Methon.  deiisqui  dubi:ant  &  Biblior, 
vec.  Patr.  1.  1.  Gnecol. 

O 

OEcoLAMPADras  Epift.  apol,  ad  Philipp, 
Melaricl.  apuJ  Ho  p.  p.  z.p,  71 
S.  Od$to  in  vita  AdeUidis 
Origenes   hom.   4.  ia  Levit. 
in  Matth.  c  ij 
concr.  Celf.  1. 1. 

P 

PAcHYMïRES  in  c.;.de  Eccl.  Hier. 
Pafc.tJ.  Ratber.  de  corp.  &  faiig.  Domini , 
in  Mjth.  c.  i6. 
Epift.  o.d  f  rudeg. 
V'itit'~.:us  Ration.  1.  ^.pîrt.  i.  c.  7 
Pctrus  Chryfolog. 

Vetrus    Damian.  traifï.   de   Domin.  vobircum 
Petrus  Siculus  Bibl.   Patr.  Colon    fjcculo  9. 
Photius  Eftfiol.  ad  Ntcol.i-fud  ^liat. 
erercit.  adveri,  Chreigt  p.J  é  +  j 
Pfal  14 

R 

RA'BAnus  in  Math.  i6 
Rainatdtts  ann.  1^7 7,  m  '-,6 
n.  <9- 
ann.  n:8.n.8 
Rtïiigius  Aliidî'or.  inEïPofit.M'  T^e, 
in  c.  10. 10. 1.  Eu- 1.  aa  Corint. 

S 

SAcRANus  de  Relig.  RiilTorum  errore,  10 
:  ■■.'i,i,'.!  Ev>.-ry.'e de  Gaze, 
S.iiéicen.  Mr.hunji-Xa,  p  .  89 
Sct'li^/A.na  ^    P- "^ 
S<:■uerus■'Y^czX.t■^.■^.  Aiitucrpiï 

:!  :.  G.  joan. 
Sfi  ro.n.  z.  p.  ^74 

.5.  î^a  demorib.  Chai,  p- 117 


ï.l.  7.C.  5.p.  foi  &  fii&fio 

tkidem 

l.l.i.  c.  14.  p.  191 

i.l.i.c.i?.p.iS3.&:i.l.)4.c.f 

p.56t.  &r.  g.l.  i.c.  !i.p,45i 


p.jfi 

1. 1.  9  c,  (î.p.  6^4. 

^1.   6.  C.   6.   p.  401 
3,  1.  3.   C.  8.  p.  188 
3.1.7.  c.  i.p.  47J 

},  l.i.c.  é.p.  94 

1. 1.  8.C  8.p.6iî.  &  6'.€.  (l'i. 

rttd.p.  615.  i^  /'"'''. 

C.   9.  p.  <5i8.&  c.  lO.  p.  614 

1.1.7.  C.  8.p.  n9 

1.1.  6.C.  ij.  p.  707 

3.  I.c.  I.  p. 11 

1.1.7.  C.9-  P-  Î44.  Î4r 

1. 1. 10.  c.  4.  p-741 

1.  1.  I.  c.  14.  p.  ii« 

l.l.  3.C.4.P.  ^f6 
R.  g.  1.  iS.p.  ÏI9 
1.  1.  ?.  c.  3.  p.  m 
1. 1.  r.c.  <f.  p.  570 
I.  1.  ».C.4  p. '74 
1,  1.  8    c.  7.  p.  6.00 

1.1  5.  c.  i.p.  Hî- 

1.1.3-  <-■  7-  p-  -5^ 
I.  1.  1.  c.  15.  p    100. 
1.  1.  1.  c.  s.  p. 4'' 
1.1.  5.C.  É.  P-  fi7 

I.  1.  9.  c.  1.  p.  ^Ji 
ï.\,  5.  c.  10.  p.  393 


Sjo  TABLE    DES   AUTEURS. 

exercic.  comr.  Cfueigron.  p.  4i(;  -r     .   .^.    )<» 

lib  de  Sacr.ai.  apud  Arcud.  1.  j.  c.  ir.p.  ^77  ,W.  p.  rs: 


P 
SjrofuLus 


I.  1.  4.  c.  7.  p.  i(Ç9 


X    rW/,^„«.  apoiog.  c.  7  3.  1,  7    c.    z.p    47 

de  pra.'(cnpt.  adverf.  Jia:rec.  c.  iS  i.  1.  2.  g.  i    p  10/ 

de  amni.  c.  17  '  ^' 

de  refurreftione  carn.  c.  8  5.  1.  <?.  c.  6.  p.  408 

•  '•  =^'*^"'-  Marcion.   c.  i*  i.l.  5.  c.  f.p.fyô  &c. 

J-  '•  ''•  '»  ;.l-i.  c.i.p.jg 

^•'^•'^-  *°  &5.1.i.c.z.  p.  71    &    c. 

p.  76  &C.4.    p.  Si    &    c. 
p.   86,    8S 

Theodoreftfs  Epift.  ad  Corint.  c.  11.  i.  l.J.c.  4.  p.ifS 

'J'ai.  I  5- 1.  r.  c.  1,  p.  Z47  &  c.  3. 

dialog.  z  p.iy5 

,      ,  &3.I.1.  C.4.  p.  4f  &  ^l 

Theodorus  Abucara  Epifcopus  Cariar,  opus  11  c.  7.  p.  lS4. 1. 1.  7.  c.  9   p.  j 

Theodorus  apud  AUatium in exercita:,  adverf,  1. 1.  7.  c;  j.  p.  488,  &  551' 

Clireigt.  p.  416 

Theodorus  apud  Clément,  Alex.  2.  1.  f.c.  tt.  p.ytfj 

Theodorus  Antiochenus  apud  Buline,  3, 1. 5.  c.  4.  p.  ifii. 

TheofhiUlius  in  Math.  c.  lé  1. 1. 1.  cy.  p.  145.  Ç^  fui-v^ 
in   Joan.  c.  lî 

in  Marc.  c.  14  r,  1.  i.  c.  9.  p.  if? 

inMattli.  C.14  -      2. 1.  4.  c,  f .  p  j-îi 

in  Marc.         -  a.  1.  C- c,  ij.  p.  574 

Thetfhjlus   Antioch.   comm.  in  Matth.  li  1. 1. 3.  c.  4.  p.  ifif 

Theorian.   Légat,  ad  Armen.  1.  1.  f.  c.é.  p.  jtff 

S.Thomas    in  opufcujo  cui   titulus    eft,    déclarât  i,  1,3,  c.y,  p.jiS 
quorumdam  dubiorum  contra  Grxcos  Armenos 
&  Saracen.                                                        1 

Trkdus  ou  l'office  de  Carême  parmi  les  Grecs.  i.  I.  4.  c.  10.  p.  31e 

TttrcogrMta^    p.  414  1.  1.  4,  c.  4.  p.  i8j 


V 


IcTOR,    Antiochenus  comm,  in  Marc.  14      i.  1.3.  c.  4.  p.  160 


Z 

ZOnaras  ou  Glycas  apud  All.in  excrcicat,  ad-     i,  1.  i.  c.  14.  p.  19* 
vcrf.  Chreigt.  p,  544 
Epift.   ;i.  Calcera. 
«.  tom.  fanfti  Cyrilli^  fiveGlicas^  2.  1.     3.£.  6.  p.  17? 

apud   Allât.  Exercit.  adverf. 
Chreigt.  p.  544 
Zuingims  de  vera  Relig.  p.  m  2-  1.  i.  c.  2.    p.  ;•> 

Refp.  ad  Struth.  f.  31Î 
Expof.  fidei  fol.  /H  *.  1-  ï-  c  5-  P-  H 


TABLE 


TA  BLE 

DES  ATTESTATIONS  ET  ACTES  DES  EGLISES 
d'Orient ,  produits  dans  les  trois  Volumes  de  cet  Ouvrage, 
&  dans  la  Rëponfe  générale  ,  pour  juftifier  l'union  de  cci 
Eglifes  avec  l'Eglife  Romaine,  dans  la  créance  de  lapre- 
fence  réelle  &  de'Ia  TranfTubftantiation  ,  &;  autres  pumis 
conteftez  entre  les  Catholiques  èc  les  Calviniftes, 

POUR    L'EGLISE     GRECQ^UE. 

D'^ns  le  premier  Tome  de  la  Perpétuité. 

ES  c  R  I  T    d'un    Seigneur  Moldave   fur  la    créance  des  Grecs,  intitulé  ,  Enchiri^ 
dton^fne  flelUOrientalts  ,  &c.  l.tt.-j).  jo 

ProfefTion  de  foy  des  Grecs  du  Patriarchat  d'Antioche  fur  l'Euchariftie^&c.  1.  ii    p.  ff 
Lettre  de  M.  Olearius  fiu  la  créance  des  Mofcovices  &  Arméniens.  1.  12..  p.)  <î 

Ecrit  du  Métropolitain  de  Gaze  fur  la  créance  des  Grecs  &des  Mofcovites,  1. 11.  p.  f? 
Extraitd'un  Synode  tenu  en  l'Ifle  de  Chypre ,  lééX  l.lip.75 

Atteftation  d'un  Prefl:re&  Chanoine  de  Moufcou,  &  de  trois  autres  Mofcovites  de  la 
fuite  de  l'Ambaifadeur ,  touchant  la  foy  de  leur  nation.  '    1.  ii.p.  77 

'Dans  la  Rëponfe  générale. 

ConfefTion  de  foy  exigée  par  Methodius  du  Dodeur  Cicada ,    1.  1 .  c,  9.  p-  i4^.  &  loi 
Atteftation  de  huit  Supérieurs  &  Religieux  du  mont  Athos.  I.1.C.9,  p.  ifo 

Atteftation  de  Methodius  Patriarche  de  Conftantinople  ,  1. 1.  c.  9.  p.  ifi 

Atteftation  des  Supérieurs  du  mont  Athos  fur  Agapius ,  1. 1.  c.  n-  ?•  '7? 

Dans  le  troijtéme  Tome  de  la  Perpétuité. 

Atteftation  de  fepc  Archevefques  d'Orient.  '■  8-  c.  1.  r.  î*^» 

Atteftation  de  l'Eglife  de  l'IAe  de  Siphanto ,  1.  8.  c.  z .  p.y/i 

Atteftation  de  l'Eglife  de  l'Ifle  d'Andros,  l.S.c.3.  pr  « 

Atteftation  de  l'Eglife  de  Siphanto  fur  Agapius,  1   8c.5.p.  f,6 

Atteftation  de  l'Eglife  de  l'Ifle  d'Anaxia,  ''•  »•  C-  ?•  P-  f76 

Atteftation  des  Eglifcs  des  lOes  de  Cephalome.Zante,  &  Icaquf:,  1.  8.  c,  5.p.  r^S 

Atteftation  de  l'iflc  de  Mico,ne,  '•  "  c.vp-'^^ 

Atteftation  de  l'Eglife  de  ritle  de  Milo,  l.S.c.J.p-    »- 

Atteftation  de  l'Eglife  de  Chio  ,  1.8.  c.  3.  p.  f  H 
Atteftation  d'un  Supérieur  &  des  Religieux  du  Monaftererde  Mauromale,         c.  4.  f!^f 

Lettre  de  Monfieur  Panaiotti ,  1-  ^•<^-  +•  P/^f 

Atteftuion  du  Patriarche  de  Conftantinople,  &  des  Métropolitains  de  fon  Pam,  r- 
chat,  1.8c,«.p6  5 

Atteftation  des  Eglifcs  de  Mingrelie,   Colchide,  &  Géorgie,  1.  8.  c.  7.  p.  «3+ 

Attcft.;ition  i^u  Vi-aire  Aporto'liqueRcfidentàConftantinpplc,  1.8.  c.  8.  p.  K-,8 

Atteftation  de  M.  CafimirRcfidcnt  de  Pologne,  c.8,p.é+o 

AtteftotionaeM.QiiiiinoRefidentde  la  Republique  deVenife,  c.  g.  n.  641 

Atteftiation  de  M.  Fiefchi  Refident  de  Gène ,  c.S.p.  611 

Ppppp 


Atteftations  des  Ambafladeurs-de  la  Republique  de  Ragufe ,  c,  S.  p.  ^4+ 

Actcftation  de  la  Comunauté  des  Perottes  ,  p.  é+j 

Arcellatioii  du  (îi.urTai(Ia  fur  la  mort  di;  (on  fils,  commencée  par  les  Grecs. c,  9.  p.  649 
Lettre  de  Nedlarius  Patriarche  de  Jerufalcm  à  Payfius    Patriarche    d'Alexandrie  , 

c.  10. p.  <;j5 
Extrait  de  quelques  decifîons  de  l'Eglife  de  Conftantinoplc,  envoyées  aux  Ruffes , 

c.  II.  p.  6(L 

RéponfL' de  Marc  Doinis  de  l'Ifle  de  Candie  à  M.  Claude,  c.ii.p.6é4 

Approbation  de  la  féconde  confe/Tion  orthodoxe  par  Denis  Patriarche  de  Conftan- 
tinoplc, c.  i4.p.  6S6 

Extrair  d'un  traité  Synodal  compofc  par  Pofîthée  Patriarche  de  Jcrufalem ,  &  pat 
l'on  Synode  à  la  dédicace  d'une  Eglife  de  Betlehem ,  c.  15.  p.  ^91 

Condamnation  des  Calviniftes  parMacaire  Patriarche  d'Antioche  de  la  nation  des 
Grecs,  c.  17.  p.  iij 

Autre  condamnation  de  plufieurs  autres  erreurs  des  Calviniftes  par  le  même  Patriar- 
che, p.  7J7 

Nouvelle  condamnation  des  Calviniftes  par  l'Eglife  Grecque  du  Patriarchat  d'An- 
tioche fous  le  Patriarche  Néophyte ,  c.  17.  p.  743 

Apologie  de  Soterichus  Panteugenus  au  Patriarche  &  au  Concile,  furies  chofcs  tou- 
chant lc(quclles  on  l'a  accufé,  c,ri.  p.  y^i 

Extrair  du  traité  d'Elic  Evefquc  de  Jerufalem  fur  les  myfteres ,  tiré  dun  manufcrit  A- 
rabe  de  la  biblioteque  du  Roy  ,  c.  ir.  p.  794 

Extrait  d'une  lettre  de  Melece  Patriarche  d'Alexandrie  envoyée  de  Conftantinoplc , 

F-  79f 
Atteftation  du  Supérieur  du  Monaftere  de  S.  George ,  c.  tj,  p.  Soi 

ïitrait  du  traité  de  Meletius  Syrigus  contre  Cyrille  Lucar,  dans  l'addition. 

POUR     LES    MARONITES. 


*l.P.7i 


Dans  le  Tome  troijîème. 

E  ou  traité  des  Maronites  d'Antioche  fur  la  foy  de  leurs  Eglifes,  1,  J.c,  16. 
P- 


POUR    L'EGLISE    ARMENIENNE. 
Dans   le  premier  Tome. 

ATTESTATION  d'un  Patriarche  Armenicnquieft  prefcntcmcnt  àRome  ,  touchant 
la  créance  des  Arméniens  furl'Euchariftie.  1.  ii.  p.  78 

Atteftation  d'Ufcanus  Evefque  de  S.  Serge  en  la  grande  Arménie,  donnée  à  Amftcr- 
<l3m,  1.  II.  p.  78 

Attclbtion  du  Patriarche  &:  de  plufieurs  Preftres  &  Evefques  Arméniens  refidens  à 
jAlep,  lu,  p.  81 

Hans  la  Rèponfe  générale. 

Atteftation  du  Patriarche  Dermeazim  fur  la  créance  des  Arméniens ,  1.  r.  f .  1 8.  p.  187 

Atteftation  des  Archevefques  Arméniens  de  Conftantinople ,  d'Amafce  &  d'Andrino- 

Ple,  p.  19J 

Dans  le  troijî'eme  Volume. 

Atteftation  du  Patriarche  de  Cis ,  1.  8.  c,  lo.  p.  770 

Atteftatisn  des  Arméniens  du  Caire,  ,  p.  77r 

Atteftation  «les  Arméniens  d'Ifpahan  ,  p,  77Î 


8|3 
POUR    LES     SYRIENS. 

Dans  le  premier  Tome. 

f  A    Ttestation  du  Patriarche  des  Syriens  touchant  1»  foy  de  leurs  Eglifès 
A     fur  l'Euchariftie.  l.ii.p.»* 

Dans  le  troifème  Tome. 

Condamnation  des  calviniftes  par  l'Eglife  des  Syriens  de  Damas  ,  c.  iSp-  7î8 
Extrait  d'un  manufcrit  Arabe  de  la  bibliothèque  du  Roy ,  qui  fait  voir  la  créance  d«S 
Jacobites  fur  l'Euchariftie  au  dixième  fiécle.  8ij.  p.  7*7 

POUR    LES    NESTORIENS. 

Dans  la  Réponfe  générale. 

A 

Dans  le  troijtème  V'olume^ 
Extrait  des  MiiTelsSc  livres  de  prières  des  Neftoriens.  1.  S.c.rf.p.  8«o.  &s 

POUR   L'EGLISE    DES    COPHTES. 

Dans  le  troijîème  Volume. 

r/k   Ttes  TATioN    du  Patriarche  des  Cophtes.  1,  S.c.  i^.p.  7*? 

^\.  Autre  atteftation  du  même  fur  l'Euchariftie  en  particulier,  P-  5*^ 


Ttestation  du  Patriarche  des  Neftoriens  de  la  ville  de  DiarbeKcr,  i .  c^  i  J. 
p.  i?* 


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