■'^.
O)
'(<
■^
.ce
■CD
■o
co
tA
(R^
9P
pS
V
^*#^"
*v -2^
Sfe,-
^pp
..^
11
.'R
''■'*
K
i
'^:«r"^<-
*s-c
LA
PLANÈTE MARS.
ŒllVHES DE CAMILLE FLAMMARION.
La planète Mars et ses conditions d'habitabilité. Synthèse et discussion de
louloslos observations. Un vol. prainl in-S^do COO papes, illustrt? de 580 dessins
télescopiqucs et 23 cartes W' o
Astronomie populaire. Exposition des grandes découvertes de l'Astronomie
luodorne. l'n vol. in-S», illustré de 400 figures, cartes célestes, etc. Ouvrage
couronné par l'Académie franc^aise. Nouvelle édition, 1890. 100" mille Tî «
Les Étoiles et les Curiosités du Ciel. Supplément de VAslronomie populaire.
Description complète du Ciel, étoile par étoile. Instruments, Catalogues, etc.
L'n vol. in-8'. illustré de iOO gravures, cartes et chromolithographies. 55' mille. 12 »
Les Terres du Ciel. Description physique des planètes de notre système et étude
des conditions actuelles de la vie à leur surface. Un vol. gr. in-8°, illustré do
photographies célestes, vues téiescopiques, cartes et 400 figures. 50' mille. . . l"i »
L'Atmosphère. Météorologie populaire. Nouvelle édition, illustrée de 307 figures,
1'. j.lainhes en chromotypographie et 2 cartes en couleur. 28» mille 12 »
Le Monde avant la création de l'Homme. Origines du monde. Origines delà vie.
Origines de l'humanité. Un vol. in-8°, illustré de 400 figures, 5 aquarelles,
8 cartes eu couleur. 56* raille 12 »
Astronomie sidérale. Les Étoiles doubles. Catalogue des étoiles multiples en
mouvement. L'n \<A. iii-S° 8 »
Études sur l'Astronomie. Recherches sur diverses questions. 9 vol. in-18.
Le volume 2 50
Uranie. Un vol. in 18, illustrations de Faléro, É. Bavard, etc. (Collection Guil-
laume'. 30' mille 3 50
Dans le Ciel et sur la Terre. Perspectives et harmonies. Un vol. in-18, orné
de 4 eaux-fortes de Kauffmann 5 »
La Pluralité des Mondes habités, au point de vue de l'Astronomie, de la Phy-
siologie et de la Philosophie naturelle. 37' édition. Un vol. in-18 avec figures. 3 50
Le même ouvrage, édition bijou 4 »
Les Mondes imaginaires et les Mondes réels. Revue des Théories humaines
sur les habitants des Astres. 23" édition. Un vol. in-18 3 50
Dieu dans la Nature, ou le Spiritualisme et le Matérialisme devant la Science
moderne. 28* édition. Un fort vol. in-18 avec portrait i »
Récits de l'Inflni.— Lumen. La Vie universelle et éternelle. Un vol. iii-18. 13* édit. 3 50
Les Derniers Jours d'un Philosophe. Entretiens sur la Nature etsur les Sciences,
deSirHumphry Davy. Traduit de l'anglais et annoté. Un vol. in-18 3 50
Mes Voyages aériens. Journal de bord de douze voyages en ballon, avec plans
topographiques. Un vol. in-18, nouvelle édition 3 50
Contemplations scientifiques. Première série. Un vol. in-18; 1870 3 50
Contemplations scientifiques. Deuxième série. Un vol. in-18; 1887 ........ 3 50
Les Merveilles célestes. Lectures du soir. Un vol. in-18, illustré. 44' mille . . 2 25
Petite Astronomie descriptive. Un vol. in-18, illustré de 100 figures 1 25
Lumen. Collection des auteurs célèbres. Petit in-18 » 60
Rêves étoiles. Petit in-18 » 00
L'éruption du Krakatoa et les tremblements de terre. Petit in-18 » 60
Copernic et la découverte du système du Monde. Petit in-18 » 60
Qu'est-ce que le Ciel? Astronomie élémentaire, avec figures » 75
Grande Carte céleste, contenant toutes les étoiles visibles à l'œil nu, étoiles
double:^, nébuleuses, etc. Grand format : 1™,20 sur 0™, 90 6 »
Planisphère mobile, donnant la position des étoiles visibles tous les jours de
lannf-e k une heure quelconque. Monté sur fort carton 8 »
Carte géographique de la Lune. Grand format ; diamètre O^jG'i . 8 •■
Globes géographiques de la Lune et de la planète Mars ô »
LA
PLANETE \IV]{S
CONDlTIOiXS D'IIABITABILITi;,
SYNTHESE GENERALE DE TOUTES LES OBSERVATIONS.
CLIMATOLOGIE. MKTKOnOLOGIE.
ARÉOGRAI'HIE. CONTINENTS, MEUS ET RIVAGES. EAUX ET NEIGE.S.
SAISONS. VARIATIONS OBSERVÉES.
ILLUSTRÉ DE 580 DESSINS TÉLESCOPIQ UE S ET 23 CARTES.
CAMILLE FLAMMARION.
Et major Martis iam apparet iinaso!
(ViUGiLE. — Bii.,Vin, o;)7.)
Région m
<J Ts
EQion ^
isis =
Un coin du monde de Mars
Mi
^
PARIS, ^^ q
GAUTIIIEK-VILLAKS HT FILS, IMPIiniKURS-LIBll.VlllES
DE l'observatoire DE PARIS,
Quai des Grands-Augastlns. 55
18'J2
(Tous droits réservés.)
IBll.Vll
.A
V-S
^
ê4\
PHÉFACE.
L'A>lrùnoniic ne «loit ));i> s'arréler
à la mesure des positionn des astres :
elle doit s'élever jus(|irà rétude de
laiir naluvc.
En cédant au désir qui nous a été exprimé de voir publier un Ouvraf,'c spécial
sur la planète Mars, établissant et fixant l'état actuel de nos connaissances posi-
tives sur la constitution physique de ce monde voisin, dont l'étude est déjà, en
oiTet, assez avancée pour mériter une synthèse et une iliscussion générale, nous
avons longtemps hésité sur la méthode à employer pour arriver au meilleur ré-
sultat scientitique.
Deux méthodes se présentaient tout naturellement à l'esprit.
Ou bien classer nos diverses observations et études de Mars en chapitres spé-
ciaux, tels que : distance à la Terre, révolution autour du Soleil, années, jours,
saisons, climats, calendrier, lumière, chaleur, masse, densité, pesanteur, volume,
géographie, continents, mers, neiges polaires, atmosphère, eaux et nuages,
mouvements et changements observés, satellites, etc., et traiter chacun de ces
sujets séparément; ou bien prendre la planète dans son ensemble et exposer
simplement dans leur ordre historique, chronologique, tous les progrès réalisés
par les observations et par les déductions qui en résultent.
Nous avons choisi la seconde méthode, d'abord parce qu'elle nous a paru plus
intéressante, en ce qu'elle placera devant nos yeux la marche des faits et des idées,
qu'elle écrira d'elle-même l'histoire astronomique do la planète, et que, par là,
nous nous rendrons mieux compte du développement graduel de nos connais-
sances, ensuite parce qu'un sujet domine tous les autres dans l'étude de ce monde
voisin et eût fourni un chapitre plus considérable à lui seul que tout le reste
ensemble; c'est celui de sa géographie physique, mers, continents et glaces
polaires. C'est là, sans contredit, l'objet principal et essentiel îles observations
télescopiques. Il nous a donc paru plus logique d'exposer dans leur ordre chrono-
logique les études faites jus([u'à ce jour sur ce monde qui, par sa proximité de la
Terre et par sa situation favorable pour nos observations, parait appelé à répondre
le premier aux grandes et profondes questions que l'humanité pensante s'est
posées dans tous les siècles, en face des silencieuses énigmes du Ciel étoile.
Un traité technique expose ce que nous savons; la méthode historique nous
apprend commonl les choses ont été- apprises. 11 y a ici un avantage, les progrès
V, PHftiACK.
»lo la .^oicncc parlent iroux-nuMUOs l't roiulraiont suporflii tout ombollissemont.
littéraire.
On peut ci>nvenir, ilaillours. que le moment est Itien choisi pour une rcchcniie
«lu genre de eellc-oi. L'étude astronomique de la planète Mars est très avancée.
Nous possédons un très grand nombre d'observations et d'excellentes, commen-
cées depuis deux siècles et demi et qui sont allées sans cesse en se perfectionnant.
Mais ces observations auraient beau s'entasser par centaines et par milliers, elles
ne serviraient jamais ;\ rien si l'on n'entreprenait de les comparer toutes ensemble
et d'eu l'aire la synthèse complète afln d'en dégager tout ce que nous en pourrons
tirer pour la connaissance de cette planète.
L'Astronomie mathématique devait évidemment conduire à l'Astronomie phy-
sique, sans laquelle, d'ailleurs, elle perdrait la majeure partie de son intérêt.
Chercheurs du grand problème, ne voyons pas seulement des pierres en mouve-
ment dans l'espace. Les masses sidérales ne sont pas tout; la valeur du Soleil
ne consiste pas seulement dans son poids , non plus que celle de la Terre, Le
philosophe voit plus haut et plus loin : il cherche le but. Il admire les bases méca-
niques du système de l'Univers, mais ne s'y arrête point. Lorsqu'il contemple au
télescope un monde perdu au fond de l'immensité, il peut s'intéresser à sa distance,
à, ses mouvements et à sa masse, mais il veut savoir davantage et se demande
quelle est la nature de ce monde, ([uelle est sa constitution physique au point de
vue de son habitabilité. 'Voilà ce qui l'intéresse; le reste n'est que la voie qui
doit conduire au but.
Dès le temps de Galilée, l'Astronomie physique était fondée ( ' i. Ses progrès ne
pouvaient être que directement liés à ceux de l'Optique, et, en efTet, ils ont suivi
graduellement les perfectionnements apportés à la construction des lunettes et
des télescopes, surtout en ce qui concerne l'agrandissement et, plus encore, la
netteté des images. Mais l'ardeur des observateurs, leur patience, leur persévé-
rance, le perfectionnement pratique de leurs méthodes, l'adaptation même de
leur rétine à la difficulté des recherches, n'ont pas moins contribué au succès
que les progrès de l'Optique proprement dits.
(') Mais rarement comprise, même par les astronomes qui se servent du mot. Ainsi,
pour n'en citer qu'un exemple, les bibliothèques astronomiques possèdent toutes, sur un
bon rayon. Je Traité d'Astronomie physique, en cinq volumes in-8, de J.-B. Biot,
membre de l'Académie des Sciences, de l'Académie française, de l'Académie des In-
scriptions, du Bureau des Longitudes, professeur à la Faculté des Sciences, au Collège
de France, etc., etc., etc. Ces cinq volumes « d'Astronomie pkysiqiœ » ne comprennent
pas moins de 2916 pages — sur lesquelles il n'y en a pas un cent qui aient vraiment pour
objet la constitution physique des corps célestes! La constitution physique de Mars y a
reçu, en tout, une page (tome V, 1857, p. 401 ). Le titre de cet Ouvrage devrait être beau-
coup plus justement : Traité d'Astronomie malhémalique. On pourrait en dire autant
de la plupart des auteurs. Delambre, parlant des observations faites sur la rotation de
Vénus, sur Ja constitution physique de Mars, sur les taches du Soleil, fait entendre que
c'est là du temps perdu ! Etc., etc. ,
l'UKI'ACi:. M,
L'Ouvra.£,'e que nous entreprenons iei se partajje donc naturollomont de lui-
même en deux Parties. La preniit'n! donnera l'r'.xposé et la dinrusaion de tontes
les ohaervations faites sur Mars, depuis les plus anciennes, qui datent de la pic-
mière moitié du xvn* siècle, jusqu'aux dernières. La seconde Partie résumera les
rèsull-ii'i «•()/), /u.s de cette étude iji'-m'i-nh' Je /,/ jtl:iiii-ii>.
Notre première Partie, d'autre part, se partagera en trois périodes. La première
période i-ouunence avec la plus ancienne observation, de l'an 163G, et s'étend
jusqu'à, l'aïun-e IS30. Llle comprcuid ainsi presque deux siècles. Les dessins faits
pendant toute cette |iériode sont rudimentaires et étaient absolument insuffisants
pour donner une idée quelque peu exacte de la constitution physique de la pla-
nète. La seconde période commence en 18;{0 et s'étend jusqu'à l'année 1877.
Elle a inauguré la géographie martienne, ou, pour parler plus exactement, l'aréo-
graphie. Durant cette période, les grandes oppositions de Mars, les époques
où cette planète s'est le plus rajiprochée de la Terre, ont apporté des notions do
plus en plus étendues et de plus en plus précises sur l'état de ce monde voisin.
La troisième commence en 1S77, par le premier plan géodésique (aréodésique)
de triangulation qui ait été fait de la surface continentale et maritime de la pla-
nète, et se continue jusqu'à l'heure actuelle par les surprenantes découvertes de
détails faites coup sur coup pour ainsi dire dans la géographie bizarre et par-
tiellement changeante de ce singulier pays.
Dans la première période, on connaît de Mars son volume, sa masse, sa den-
sité, la pesanteur à sa surface, linclinaison de son axe, la durée de son année et
de ses saisons, la durée de sa rotation diurne ainsi que de ses jours et de ses
nuits, l'existence de ses taches polaires et leurs variations d'été et d'hiver ; on
devine que ce sont des neiges analogues à celles de nos pôles ; on commence
à penser que les taches foncées peuvent représenter des mers et que les conti-
nents sont jaunes. L'atmosphère est plutôt soupçonnée qu'étudiée.
Dans la seconde période, on trace' les premières cartes géographiques de la
planète, on confirme l'assimilation des taches polaires à des neiges en constatant
qu'elles fondent régulièrement sous l'action des rayons solaires. Ou reconnaît
que la seule explication à admettre des taches foncées est de les considérer
coinme représentant des étendues d'eaux et l'on s'aperçoit que leurs contours
.sont soumis à des variations, on trace en détail des golfes et des embouchures
de grands Heuves, on analyse chimiciuemeut l'atmosphère au spectroscopc et
l'on y constate la présence certaine de la vapeur d'eau ; on démontre que cette
atmosphère ne peut pas être la cause de la coloration rougeàtre de la planète,
puisque cette coloration est plus marquée au centre du disque, où l'épaisseur
atmosphérique traversée est moindre que sur les contours où cette coloration
est presque efTacée ; on trouve rpie la temp(M-ature dé'pcnd principalement, non
de la distance au Soleil, mais de l'état de l'atmosphère (exemples : le sommet et
Mil PHKrAr.K.
le pied du .Mont-lU;iU(.'i, cl que certaines a apoiirs. notamment la vapeur d'eau,
exeroeut une inlUiencc absorbante sur les rayons calorifiques bien supérieure
à celle de certains gaz, tels que roxyir<''ne et l'azote, et l'on reoonuait (pie les
conditions de la vie ù la surface de Mars ne dilTôrent pas essentiellement de
celles de notre planùte.
Dans la troisième période, les détails de l'aréographie sont de mieux en mieux
distingués et étudiés, les mers, les lacs, les golfes, les détroits, les rivages sont
dessinés, épiés, suivis avec soin, et l'on constate que les variations soupçonnées
sont incontestables; on découvre un ré'seau énigmatiquc de lignes foncées tra-
versant tous les continents comme un canevas trigonométrique, on propose
d'expliquer ces aspects par des variations dans le régime des eaux, on reconnaît
en même temps que l'atmosphère est généralement plus pure que sur la Terre
et que les nuages sont rares, surtout en été et vers les régions équatoriales.
Los analogies avec la Terre s'accroissent t\ certains points de vue, tandis que des
dissemblances inattendues se révèlent et se confirment.
Ces trois périodes forment donc les divisions naturelles de la première Partie
du présent Ouvrage. La seconde Partie donnera les résultats à conclure de toute
cette discussion.
Nous autres habitants de la Terre, accoutumés à juger des effets par les
causes que nous avons sous les yeux et ne pouvant, d'ailleurs, imaginer l'in-
connu, nous avons une difficulté extrême à expliquer les phénomènes étrangers
à notre planète, et leur constatation seule nous plonge souvent dans le plus
désespérant embarras. Nous observons, par exemple, sur Mars, des variations
certaines et non médiocres dans l'étendue comme dans le ton de ses taches som-
bres, considérées comme mers. Il n'y a rien d'analogue sur la Terre, au moins
comme proportions. Nous observons aussi sur cette planète toute une série de
réseaux géométriques dont les lignes réticulées et croisées sous tous les angles
ont reçu, non sans quelque analogie, le nom de canaux. Nous n'avons aucune
comparaison non plus sur la Terre pour nous guider dans l'explication de ces
aspects. Il s'agit ici véritablement d'un nouveau monde , incomparablement
plus différent du nôtre que l'Amérique de Christophe Colomb n'était diflérente de
l'Europe. Saurons-nous interpréter exactement les découvertes télescopiques ?
Tous nos efforts doivent tendre ù, cette interprétation, sans aucune idée préconçue
et avec la plus complète indépendance d'esprit.
Nous confronterons ici toutes les observations, et pour cela nous traduirons et
résumerons les Mémoires en quelque langue qu'ils aient été écrits.
Il est bien évident que le seul moyen d'arriver à une connaissance un peu
précise de l'état de cette planète est de comparer entre elles ces observations. La
méthode historique s'imposait donc pour ainsi dire d'elle-même. Les lecteurs qui
désireront acquérir une connaissance précise de la planète que nous allons étu-
dier auront sous les yeux toutes les pièces du procès, tous les documents.
t*tl
p^ONtont.ersplu:s loin qu'URANUS,ou à q'Vzz^
URANUS fif
SATURNE Ij
JUPITER ^
l'LA.N m; SVSTLMli SULAlIlf, A r.MailïLLli PlILCIàli Ht: 1""" l'OUn 'JU MILLIONS IIU KILO.MU fllliS.
\ l' H Kl- A ci:.
Nous ixv viiiilitus pas tL'riiiintM- celte Préface sans remercier MM. ('lautliier-
Villars du dévoue concours qu'ils nous ont apporté en éditant cet Ouvrage
tle science pure avec un soin délicat. Ils savent aussi que la recherche scienti-
fique est lauie «lu inonde moderne et qu'il est utile de répandre le plus possible
dans le public intellectuel les f^randes et lumineuses notions do l'Astronomie
contemporaine.
Avant d'entrer en matière, prenons dabord une connaissance cxaetc de, la
position de la planète Mars dans le système solaire. Nous étiulicrons plus loin
son orbite au point de vue de sa forme elliiUiquc précise et de ses relations avec
celle que nous décrivons nous-mêmes autour du Sfdeil. Ici, il nous suffit de re-
mettre sous nos yeux l'ensemble du système au point de vue des distances au
Soleil et de la ])Osition de Mars dans la région de ce .système.
nist:iii.-fs .111 Soliil,
T'IaiiL-tus. celle <lo la en mille •
Terre étant 1. kiloniélrcs.
Mercure 0,387 .^7 678
VÉNUS 0,723 107 77-2
L.^TERni: 1,000 l'iO 000 '"""'""
' «le
Mars l,52i '2Î7 031 kilomètres.
I 2, as 02 i
\ 2,74 3Ô5
Petites planètes — •2,175 a 4,'2tJ2. Zones maxima...
' ' ' 1 3,12 408
1 .'!,Î2 4fi4
JupiTEn 5,203 775 217 r.io
.Saturm: 0,538 1421 2sl .535
Uranus 10,183 285S 312
Neptune 30,055 4 i78 105
La figure ci-dessus a été construite sur ces données numériques, à l'échelle
de 1 millimètre pour 20 millions de kilomètres. C'était là le seul moyen de tracer
un plan du système solaire dans le format de ce livre, encore avons-nous été
obligé de supposer Neptune au delà de la figure. Ce plan montre que Mars vogue
comme la Terre dans une région relativement fort voisine du Soleil. C'est là un
fait important que nous devons avoir constamment en vue, et il était intéressant
de nous rendre exactement compte de cette position avant d'écrire les annales
terrestres de cette ile, sa^ur de la notre.
Nous adoptons pour la parallaxe solaire le nombre 8", 82, qui i»araît actuellement
le plus probable. La distance correspondante est 149 millions de kilomètres.
Lt maintenant, commençons l'histoire astronomique de Mars, et étudions ce
monde voisin sans aucune idée préconçue.
OI)-iervatoiie de Jiivisy, 4 août I8y2.'
PllEMIEUE PERIODE.
1636-18:]0.
Flammaiiion. — Murs.
PREMIERE PERIODE
163G-1830
La première période de ce que nous pourrions appeler les Annales histo-
riques terrestres de la planète Mars commence à la première vue télescopique
qui ait été obtenue de cette planète par les astronomes de la Terre. Le
premier dessin a été fait à Naples, par Fontana, en 163G. Il s'agit ici d'Astro-
nomie physique et non d'Astronomie mathématique, autrement, nous devrions
commencer cette monographie de Mars à l'ouvrage de Kepler De Motibus stellae
Marlis, publié enl6Û9(').
Jusqu'à l'invention des instruments d'optique, l'observation des planètes
s'est bornée, comme celle des étoiles, à la détermination de leurs positions
apparentes sur la sphère céleste. Nous ne voyons, en effet, à l'œil nu, que
des points brillants circulant dans le ciel. Les penseurs avaient deviné que les
planètes sont des corps 'célestes sans lumière individuelle, analogues à la
Terre, et ne brillant que parce qu'ils sont éclairés par le Soleil. Copernic
avait annoncé, lors de son immortelle réforme astronomique (1543), que
l'homme inventerait probablement dans l'avenir des instruments à l'aide
desquels on constaterait les phases des planètes, et par là leur absence de
lumière propre et leur analogie avec la Terre, de même qu'aujourd'hui nous
osons espérer que le jour viendra où des moyens inconnus de notre science
actuelle nous apporteront des témoignages directs de l'existence des habitants
des autres mondes, et même, sans doute, nous mettront en communication
avec ces frères de l'espace. Un souriait assez dédaigneusement de l'idée assu-
rément téméraire de Copernic, comme les sceptiques sourient aujourd'hui
(') Cet ouvrage de Kepler commence ainsi : « Durissima est liodie conditio scribendi
libres mathematicos, praecipue aslronomicos ». On pourrait faire la même réflexion au-
jourd'hui pour les ouvrages d'Astronomie pure. Combien ce livre-ci aura-t-il de lec-
teurs? Assurément fort peu. Les haliitants do la Terre s'oi-cupent peu des choses du
ciel, ils ne savent même pas que le monde qu'ils habitent fait partie du ciel, ignorent
où ils sont, et vivent dans une remarquable ignorance de la réalité. Cette ignorance
sufïit à Itiiir indilTérence native.
4 1. A PLANÈT1-: MARS.
de la noire : il est si simple de suivre IranquillemeiU rorniùre du passé.
Cependanl, dans le siècle même de Copernic, en 1590, 47 ans seulement après
la mort du chanoine de Thorn, un opticien de Middelbourg, Zacharie Jansen,
inventait, selon le témoignage de la plus ancienne autorité ('), la première
lunette d'approche qui. perfectionnée seize ans plus tard par Hans Lippershey,
autre opticien de la même ville, ne tardait pas à être dirigée vers le ciel. En
effet, en 1609, sur les rapports qu'il avait reçus de Hollande relativement à
celte invention, Galilée construisait la première lunette qui ait été dirigée
sur le ciel et découvrait immédiatement (janvier 1610) les satellites de Jupiter,
puis bientôt après les phases de Vénus, réalisant la prédiction de Copernic
et apportant ainsi un témoignage direct à la vérité du nouveau système. Les
premières observations publiées par Galilée sont celles des satellites de
Jupiter, faites les 7, 8, 10, 12 et 13 janvier 1610.
Dès les années 1610, 1611, lGI2,nous voyons les découvertes astronomiques
se succéder rapidement, taches du Soleil, géographie et montagnes de la
Lune, satellites de Jupiter, nature sidérale de la Voie lactée. Galilée, Kepler,
Fontana, Scheiner, Rheita, inventent des lunettes, les perfectionnent et dé-
couvrent dans les mystères des cieux les réalités restées cachées jusqu'alors
pour les yeux de l'habitant delà Terre.
La grandeur du disque lunaire, l'étendue des plus grosses taches solaires,
le diamètre de Vénus, l'éclat des satellites de Jupiter, la richesse de la Voie
lactée permettaient ces premières études, ces premières découvertes, à l'aide
des primitives lunettes rudimentaires dont les grossissements étaient faibles.
(') L'invention de la première lunette d'approche se perd un peu déjà dans l'inconnu.
Il est certain qu'en 1609, Galilée s'était construit une lunette, puisque le 7 janvier 1610
il découvrait les satellites de Jupiter (nous avons publié le fac-similé de ses premiers
dessins dans les Terres du Ciel, au chapitre des Satellites de Jupiter); il est certain
également que, de 1606 à 1608, le nom de Lippershey était connu en Hollande comme
fabricant de lunettes d'approche. Mais un ouvrage de Pierre Borel, médecin du roi,
membre de l'Académie des Sciences, auteur du Discours prouvant la pluralité des
Mondes dont nous avons parlé dans les Mondes imaginaires, établit en 1655, c'est-
à-dire environ un demi-siècle seulement après l'invention, l'historique de cette découverte,
affirme que le « premier inventeur » est Zach.\rias J axsex, dont il donne le portrait, et que
le « second inventeur ^ est Hans Lipperhev {sic ) dont il donne également le portrait. Cet
ouvrage a pour titre De vero télescopa invenlora ( 1655). Le chapitre XII de ce Traité,
intitulé : « De inventons vero nomine », discute spécialement les titres. L'auteur écrit
le premier nom tantôt Zacharias Jansen, tantôt Zac. Joannides, et le second tantôt Lip-
perhev, tantôt Lipperseim. On latinisait tous les noms à cette époque, et souvent on les
retraduisait du latin en français, en leur faisant subir de nouvelles métamorphoses. Ainsi,
par exemple, Jean MûUer prit le nom de sa ville natale, Kœnigsberg, qui veut dire mon-
tagne royale et s'appela Regiomontanus. Ce nom, traduit en français, a fait Dumontroyal.
Quoi qu'il en soit, quels qu'aient été les premiers essais de l'optique, l'année 1609 est
celle de la construction de la première lunette astronomique par Galilée, et l'observation
du 7 janvier 1610 est la première de toutes, pratiquement parlant.
MARS i:t les instruments nOPTIQUi: 5
L;i premicro lunette de Galilée ne grossissait que 4 fois. L'immortel astro-
nome porta successivement ses grossissements à 7, à 10 et même à 30 fois
en diamètre; mais il ne put dépasser ce chiffre. Son habileté, sa patience,
.sa persévérance obtinrent do ce modeste instrument les découvertes les plus
merveilleuses. Cette célèbre lunette de Galilée a été religieusement conservée
et elle se trouve aujourd'hui à l'Académie de Florence. L'astronome Donati
la remit un jour entre mes mains, ainsi qu'un doigt de Galilée qui a été
conserve par la même Académie. Ce ji'est pas sans émotion que je touchai
ces reliques vénérables. Il me semblait que cette première lunette d'approche
de l'Astronomie moderne avait gardé quelque chose de la gloire des siècles
passés, et je revoyais en esprit l'astronome florentin debout, après le coucher
du Soleil, sur une de ces belles terrasses italiennes, à l'heure où s'allument
les étoiles, dirigeant avec une fiévreuse impatience ce tube merveilleux vers
les mondes nouveaux découverts par lui dans les cieux ; je revoyais ce doigt
montrant le ciel aux incrédules de son époque, et nous le montrant encore
à nous-mêmes du fond de son victorieux tombeau.
Le disque de Mars étant toujours très petit, même lorsque la planète
s'approche le plus de la Terre, ces instruments primitifs, grossissant à peine
ce disque, et n'ayant pas encore un pouvoir de définition bien net, ne pou-
vaient rien montrer à sa surface.
Galilée a observé Mars dès sa première année d'observation, dès 1610. La
planète n'offrait dans son instrument qu'un disque à peine sensible ('). Le
(') Lorsque Mars passe à sa plus grande proximité de la Terre, il se présente à nous
sous la forme d'un disque de 30". A l'œil nu, ce n'est qu'un point très lumineux, une
étoile de première grandeur, très éclatante pendant la nuit, quoiqu'il n'y ait la que la
lumière reçue du Soleil et refl»jtée.
La lunette de Galilée, grossissant 4 fois, montrait Mars de la grosseur d'un petit pois
de 7"" de diamètre vu à 12°" de distance.
Une lunette grossissant 60 fois la montre comme un petit pois vu à G"", 80 ou à peu
près de la dimension de la Lune vue à l'œil nu.
Un grossissement de 100 fois, comme un petit pois vu à G"", 47.
Un grossissement de 200 fois, comme une pêche de 0",0G de diamètre vue à 2", 28.
Un grossissement de 300 fois, comme une pêche de 0'",0G de diamètre vue à 1",42.
Un grossissement de 500 fois, comme une orange de G",G8 de diamètre vue à 1'", 12.
Un grossissement de 1000 fois, comme une orange de 0"',08 de diamètre vue à 0'',G0.
Un grossissement de 1500 fois, comme une orange de G", 08 de diamètre vue à 0",3G.
Tout objet éloigné de l'œil à 57 fois son diamètre parait sous un angle de 1°.
La Lune, dont le diamètre est de 3482 kilomètres, est éloignée à 110 fois son diamètre,
et mesure par conséquent un peu plus d'un demi-degré, soit 31'.
Une orange de 0",08 de diamètre, éloignée à 4~,5G, soustend un angle de 1", parait
deux fuis plus grosse que la Lune, vue h l'œil nu, et égale Mars vu avec \n\ grossisse-
ment de 120 fois. Un grossissement de 1200 correspond à une distance de G", 456 pour
le même objet. Si l'on y rélléoliit un instant, on appréciera que des grossissements
de 500 à I2G() pour Mars représentent déjà de belles dimensions apparentes.
f, l.A PI.ANKTI- M A US.
;^0 décembre 1610, il écrivait an P. Castolli : " Je n'ose pas assurer que je
puisse observer les phases de Mars; cependant, si je ne nio tronipo, je crois
déjà voir qu'il n'est pas parfaitement rond. » Kepler signale les phases de Mars
dans son Epilomcs AslronoviLr. Liv. Y, Part. Y (1(V21), où il nomme la plus
grande phase de Mars « perfectio phases dichotoniat^ «. Mais il ne dit point
l'avoir observée et ne traite le prohlcnie qu'au point de vue géométrique.
Cependant, ces instruments allaient en se perfectionnant assez rapidement.
Un grand enthousiasme animait les cœurs. On aurait voulu pouvoir décou-
vrir sans relard les habitants de la Lune ou tout au moins leurs œuvres;
on frémissait d'impatience; on fondait d'immenses lentilles qui restaient
troubles et remplies d'imperfections; on inventait de nouvelles combinai-
sons d'oculaires pour accroître la netteté des images, mais Fart et l'indu-
strie ne marchaient pas aussi vite que les désirs. Des l'année 1636, néan-
moins, c'est-à-dire vingt-sept ans seulement après la première lunette de
Galilée, un savant napolitain, Fonlana, parvenait à construire lui-même,
comme Galilée et Kepler, une lunette encore plus perfectionnée et obtenait,
sous le beau ciel de Naples, des observations assez bonnes des taches de la
Lune, des Pléiades, des phases de Yénus et de la planète dont nous nous
proposons d'écrire l'histoire.
Yoici les observations de Fontana. Nous exposerons successivement toutes
les observations, dans l'ordre chronologique, nous les discuterons et compa-
rerons, et nous en déduirons progressivement les conclusions qui en dérivent
pour la connaissance de la constitution physique de la planète.
L 1636-1 038. — Fontana.
L'astronome napolitain publia ses observations dans un ouvrage intitulé :
Novœ cœlestium tcrreslriumque rerum observntio7ies. Naples, 1655. Nous avons
cet ouvrage sous les yeux, et nous sommes heureux d'en offrir les curiosités
principales à nos lecteurs (').
(') Nous reproduirons ici par la photogravure, et sans retouches de dessinateurs ou
de graveurs, toutes les fois que cela sera possible, tous les dessins de Mars que nous
nous proposons de réunir. Ce procédé nous permettra de conserver dans cette mono-
graphie, les dessins authentiques, exacts, tels qu'ils ont été faits par leurs autours;
cette fidélité absolue nous parait indispensable pour identifier aussi siirement que pos-
sible les dessins modernes aux anciens et pour juger ensuite de la permanence des con-
figurations géographiques de la planète ou de leur variabilité. Ce sera là, nous semble-
t-il, la principale valeur scientifique du travail que nous entreprenons ici.
Nous possédons la plupart des ouvrages et documents qui vont être analysés, dans
la Bibliothèque que nous avons longuement formée pour notre Observatoire de Juvisy.
Mais, pour certaines pièces anciennes et rares, nous avons dû recourir à la Bibliothèque
163G. PREMIERKS OBSERVATIONS. 7
Voici les deux plus anciens dessins <le Mars, laits par cet astronome-opti-
cien, le premier en IG.'ÎG (il n'indiriue pas le jour), le second le 24 août 1G38.
Ou lit on légende :
lG3(i : Martis llirura pcrfeeto splierica distincte atquo clarc conspif^if'l>atiir.
Item in medio atiuin habcbat conum instar nigerrima) pilula;.
Fie. I. Fier. ?.
Premier dessin du dis.iue de Mar.s. Deuxième dessin de Mars, fait par Fontana,
Fontana, 1636. • en 1638.
Martis circulus discolor, sed in conrava parte ignitusdcprehendebatur.
Sole excepte, reliquis aliis planetis, semper Mars candentior demonstratur.
Ce que nous pouvons traduire ainsi :
1G36 : La figure de Mars a été observée parfaitement sphérique. Elle avait en
son milieu un cône sombre en forme de pilule très noire.
Le disque était de diverses couleurs, mais paraissait enflammé dans la partie
concave.
A l'exception du Soleil, Mars est plus le ardent de tous les astres.
Voici la seconde observation :
Die 2i augusti, anno IG3.^. — Martis pilula, vcl niger eonus, intuebatur dis-
tincte ad circuli, ipsum ambiontis, doliquium, proportionalitcr deficere : quod
fortarse Martis gyrationem circa proprium ccntrum signilloat.
« La pilule de Mars, ou le cône noir, se montrait distinctement, avec une phase
de l'Observatoire de Paris. Nous adressons à ce sujet nos plus vifs remerciements à
M. l'amiral Mouchez, directeur de l'Observatoire, et à M. Fraissinet, bibliothécaire, dont
l'obligeance a déjà rendu tant d'appréciés services aux savants et aux bibliophiles.
s LA PLANKTl- MARS.
proportionnollo ;\ colle du disque, ce qui peut-être signifie un mouvement do
rotation do Mars autour de son centre. » (Nous avouons ne pas bien comprendre
c«tte phrase : veut-elle dire que la tache était proportionnellement déplacée?)
Cette piluln ou « petite houle >% vue au contre du disque do Mars, est la
première tache qu'on ait jainais vue et dessinée. Ce sont là les deux premiers
dessins de la planète, et nous les offrons à nos lecteurs, dans leur aspect
naïf, comme curiosité historique.
La phase de la seconde figure est très exagérée. Jamais Mars n'en arrive là.
Nous avons vii au Chapitre préliminaire quelle est la valeur exacte de cette
phase. Mais on n'en doit pas moins à Fontana la découverte des phases de
Mars. Quant à la tache, pour nous, elle n'a rien de réel : elle doit provenir
d'une réflexion, d'une sorte d'extinction de rayons dans le jeu des lentilles
de la lunette de Fontana.
Tout concorde en faveur de cette interprétation : 1° la posilion de celte
Fie.
P'ie. 4.
^'^i^^jjj^^^^l
^^^^^^Uly'
Dessin de Vénus par Fontana, en I64ô.
Dessin de Vénus par Fontana, en 1G4G.
tache ronde au milieu du disque dans la première observation ; 2" la phase
correspondante à celle de la planète dans la seconde observation ; 3° des effets
analogues dans ses dessins de Vénus, dont nous reproduisons deux ici
comme curiosité, du 11 novembre 1G45 et du 22 janvier 1646, et dans la
description desquels il signale en mêmes termes la « pilule » de Vénus. Ces
figures de Vénus n'ont d'intéressant que la phase.
163G. PRI-Mlf.RKS OBSK U VATIONS. 9
Mais, tels qu'ils sont, il n'était pas sans inlérùt de publier, pour être con-
servés, les doux premiers dessins ijui aieut été faits de notre planète.
Fontana comnienco son livre par une étude historiiiue sur l'inventeur de
la lunette d'approche. Il pense que les anciens la connaissaient (mais on
sait aujourd'hui que c'étaient là des tubes sans verres). Il rappelle ce que dit
Porla ihi miroir de Ptolémée, qui permettait do voir h's navires à sept cents
milles de distance. Il ajoute qu'il n'a pu trouver Torigine de la redécouverte
des instruments d'optique, et pense que Porta est pour J)eaucoup dans cette
invention. Voici, en effet, un passage qu'il cite de la Magie naturelle de cet
auteur, imprimée en lôSO, Livre XVII, Chap. X :
Les lentilles concaves font voir très churfnieut les objets lointains, et les
convexes les proches. On peut s'en servir commodément pour l'usage des yeux.
(Il s'agit évidemment ici de ce que nous appelons aujourd'hui des lorgnons de
presbytes et de myopes : ces lentilles sont en usage depuis le \w siècle, et elles
étaient connues depuis longtemps, quoique fort rares, puisque pour suivre les
jeux du cirque, Néron, qui était myope, se servait d'une émeraude taillée en
verre concave). Mais l^orta ajoute ensuite :
n Concave, longe parva vides, sed perspicua : convexo propinqua majora, scd
turbida : si utramquc lentcm recte componere noveris, et longinqua, et proxima
majora, et clara videbis. Non parum multis amicis auxilii projstitimus, qui et
longinqua obsoleta et proxima turbida couspiciebant, ut omnia perfectissime
cernèrent ».
Il y a là, sans contredit, l'invention, au moins théorique, de la lunette
d'approche.
On peut lire dans Roger Bacon (mort en 1-292) des expressions montrant
que les besicles étaient en usage de son temps. Il est probable que l'on a
combiné la disposition des verres entre le xiii^ siècle et l'an 1370, car, dans
un ouvrage publié en 1570 [Euclid's Eléments), un auteur anglais, Dee, recom-
mande aux commandants d'armée l'usage des « verres perspectives », et un
ouvrage de Digges, Panlomctria, publié en 1.571, dit que « par la combinaison
de miroirs concaves et convexes et de lentilles transparentes on peut rap-
procher de beaucoup les objets ». Ces appareils devaient être rares. Ce n'est
qu'en 1590 ou môme en 1G06 que les deux opticiens de Middelbourg construi-
sirent les premières lunettes réellement pratiques.
Fontana ajoute : « On attribue aussi l'invention à Galilée, mais, à mon
jugement, ou Galilée a simplement mis en prati([ue la théorie de Porta ou il
a perfectionné une invention allemande. »
Pour lui, Fontana, il a construit lui-même ses instruments, et assure que
c'est dès l'année 1008. Il les a considérablement perfectionnés d'année en
10
LA PI.VNKTi: MARS.
année, surtout à ilater de l'anuoo liU L marquée par l'ouvrage de Kepler sur
la dioptrique. Le premier dessin (pi'il pulilia fut eelui de la Lune, le IM oc-
tobre HV21). Nous le reproduisons ici comme curiosité historique, c'est,
croyons-nous, le premier dessin de la Lune qui ait été fait (ceux de Galilée
ne sont que des croquis). Nos lecteurs y reconnaîtront les bandes qui irra-
Fis. ô.
Le plus adcic-Q dessin tùlescopiquc de la Lune.
dient de Tycho, ce cirque (G) et celui de Copernic en D. Cette figure fait
apprécier l'état rudimentaire de ces premières lunettes.
L'ouvrage de Fontana est orné d'un élégant frontispice que nous offrons à
nos lecteurs comme curiosité bibliographique et astronomique. Autour de la
fontaine de Vérité sont groupées la Géométrie, les Mathématiques, la Cosmo-
graphie, la Poésie, la Philosophie, l'Architecture et l'Astrologie. Sur la droite,
l'Astronomie porte la Lune de la main droite et l'ouvrage de Ptolémée sous
son bras gauche.
Ce livre porte la date de 1646. L'année précédente, en 1G4."), le capucin
Schyrle de Rheita avait publié, à Anvers, son livre bizarre intitulé Oculus
Enoch et Elix, dont nous parlons plus loin, dans lequel il expose la môme
invention dans les termes suivants :
1630.
PREMIERES OBSERVATIONS.
M
l'n 1:111 IGOO, un opticien batave nommd Joannc Lippensum de Zt';lande, ayant
réuni i>ar hasard un verre convexe et un verre concave, vit avec admiration que
Fip. r,.
Frontispice de l'ouvrage de Fontana (Naples, IGVJ).
cette combinaison faisait paraître les objets plus gros et plus voisins. Ayant donc
■placé ces deux lentilles dans un tube à la distance la plus convenable, il faisait
voir aux passants le coq du clocher. Le bruit de cette invention s'étant répandu,
les curieux vinrent en foule pour admirer ce prodige; le marquis de Spinola
acheta la lunette et en fit prdsent h l'archiduc .Mbort. Les magistrats ayant mandé
le 1- A PLAM^TI- MARS.
l'opticien, lui payèrent assez chèrement une lunette pareille, mais à la eondition
singulière, qu'il n'en vendrait, ni même n'en ferait aueuneautre; ee qui explique,
nous dit Rlieita, comment une invention si fortuite et si admirable est restée
assez longtemps inconnue. Elle se répandit enfin; elle fut perfectionnée, et
Galilée, par ses découvertes, lui donna la plus grande célébrité.
Cette hinetle, cependant, était assez incommode, parce qu'elle avait trop
peu decliamp. Rheita sentit l'utilité de mettre en pratique les idées de Kepler;
il assemMa deux lentilles convexes; mais, comme tout a ses inconvénients,
les objets se montraient renversés, ce qui, au reste, ne lui parut pas un
grand mal. Il y remédia depuis, en ajoutant un second oculaire. Il est in-
croyable, nous dit-il encore, combien le champ fut augmenté : on pouvait
apercevoir à la fois et compter de 40 à ."lO étoiles, parce que le champ était
devenu cent fois plus grand que celui de Galilée. Animé par ce succès, il
chercha si, en réunissant deux lunettes pour les deux yeux, il ne verrait pas
encore mieux: et il y réussit. Le Gentil, qui a renouvelé l'épreuve au siècle
dernier, en parle dans le même sens; cependant les lunottos binoculaires
sont restées inusitées; elles ne peuvent convenir d'ailleurs qu'aux observa-
teurs qui ont les deux yeux parfaitement égaux, ce qui est assez rare.
Rheita explique ensuite la manière de tailler et de polir les verres, et de
leur donner la forme hyperbolique, suivant les idées de Descartes. Il est
aussi l'auteur des mots objectif et oculaire, qui sont restés.
Le livre de Rheita est de 1645. Cependant, les recherches de M. Govi ont
montré qu'en fait, les pi'emières lunettes binoculaires ou jumelles ont été
présentées au roi Louis XIII par un opticien de Paris, nomme Chorez, dès
l'année 1620.
Mais continuons notre exposé chronologique des observations de Mars.
IL 1640-1644. — RicciOLi.
Ce fécond auteur a publié en 16.Ô1 son grand ouvrage Almarjestum novum,
que nous avons également sous les yeux. L'auteur reproduit (p. 486) les
deux dessins de Fontana réduits d'un tiers. Il ajoute que le P. Zucchi, son
confrère en la Compagnie de Jésus, a observé Mars le 23 mai 1640 et n'y a pu
distinguer aucune tache, ni noire ni rouge : « sine macula seu nigra seu
rubra. » Le P. Bartoli, son érudit et éloquent confrère de Naples, a observé
Mars le 24 décembre 164i et a vu deux taches dans la partie inférieure du
disque. Il ajoute que la postérité en verra bien davantage, si Dieu le permet :
« Multa itaque observando .supersnnt, nobis aut vobis, o posteri! » Il ne croit
pas aux satellites de Mars observés par Rheita: c'étaient, en effet, des étoiles
fixes.
iGi.NKif.C. ANCIENNKS OIJSi: m A IK )N S. \:,
III. 1043. — IliiiZ(iAiiTi;ii.
Dans son oawsif^Q Deleclio dioptrica roriioniin planelcu'um veranim (Franc-
fort, l(!i;5), ('ci'il en allemand, cet auteur parle longuemout des planètes;
mais il ne donne que de mauvaises observations. Il présente un dessin de
Mars, qui paraît être une caricature du second dessin de Fonlana. Xûus ne
le signalons que pour n'omettre persorftie.
IV. 101.^. — SCHVRLE I)K RhEITA.
Ce savant était un religieux, livré avec ferveur à l'étude des sciences, aux-
quelles il mariait la théologie de son époque. On trouve dans son livre bi-
zarre, OriiUis Enoch clEliiv, siier-uUits sndcrcomysticus (Anvers, 1045), dédié à
Jésus-Christ, un chapitre non moins bizarre sur la planète Mars et un dessin
plus bizarre encore, dans le genre du précédent et dénué d'ailleurs de toute
valeur intrinsèque. Ce capucin pourtant était un homme relativement in-
struit, et avait construit lui-même de bonnes lunettes d'approche, comme
nous l'avons vu tout à l'heure. Nous ne reproduirons pas le dessin deRheita,
qui est absolument fantaisiste.
V. 1045. — Hévélius.
Astronome laborieux, observateur habile, Hévélius a consacré dans son
grand ouvrage Selenographia, sive Lunx dcscriptlo, etc. (Gedani, 1647) un
petit chapitre à la planète Mars et surtout à ses phases (p. 06-68). Il rapporte
une observation qu'il a faite lui-même le 20 mars 1045, à 7'' du soir, ainsi
que le 28 du même mois. La phase qu'il reproduit par une ligure {PL G,
fig. h) est considérablement exagérée. C'est presque la Lune en quadrature,
le huitième jour de la lunaison. Le diamètre du cercle est de 46'"'" et la lar-
geur de ce quartier est de 26'"'" seulement. Jamais Mars n'atteint cette phase.
L'auteur parle du calcul de Kepler sur les phases de Mars, des observations
de Fontana et du traité d'Uirzgarter.
\ I. lO.jO. — liUYi.ENS.
L'astronome hollandais rapporte, dans son Syslema Saluntium ('), que
dans ses observations <le l'année 10.")0 (-) il vit une fois le globe de Mars en-
(') Christiaxi HuGENU aZu/ù"/tem Ope/'a ya/'ja, tome II, llagie ComiUiin, 172i,p.JiU.
{') Ce ne doit pas être en lOôG, mais plutôt en lOôô ou 1G57. En IGJU, Mars était dans
la région de son orbite la plus éloipnoc de la Terre. Nous respectons toutefois la dulo
de l'uutuur. Pourrait être ou janvier ou décembre.
14
I.A l'LANKTl-; MA US.
veloppé d'une large ceinture, bande sombre ollusquant la nioilié du disque,
el il eu donne le dessin que nous reproduisons ici en fac-similé. Cet astro-
Dessiii (!._• .M:,!-.- laii ji.ir lluy.rn- en 1GÔ6.
nome est un observateur éminent. Toutefois ce dessin n'a, lui aussi, qu'un
intérêt purement historique. Cet aspect de Mars peut avoir été dû à un effet
des taches polaires. — Huygens s'était construit lui-même, comme Galilée et
Fontana, les lunettes dont il se servait et à l'aide desquelles il découvrit
le principal satellite de Saturne en 1G55 et l'anneau en 165G.
(Nous remarquons, en passant, dans ces œuvres de Huygens, le charmant
FlR. 8.
Médaillou des œuvres de Huygens.
médaillon de la feuille de titre, que nous offrons par circonstance à ceux
d'entre nos lecteurs qui aiment les curiosités bibliographiques.)
I6Jl-lfi5'J. ANCIENNES OHSKK VATION S. 15
Huygens a fait d'autres observations et de plus iuiportants dessins de la
planète en 1659, 1G72, 1683 et 1694. Ces croquis, faits à la plume, ont été
conservés à la bibliothèque de l'Université de Leyde où M. Terby, astronome
belge, les a examinés et œllationnés^ivec les dessins modernes et sur les-
quels on peut reconnaître, pour la première fois les principales taches des-
sinées aujourd'hui sur nos Cartes. Si le croquis de l'année 1656 montre le
disque sillonné par une large bande sombre, qui n'a rien de caractéristique, il
n'en est pas de même des suivants, que nous allons examiner tout à l'heure.
VII. IGÔl-lG.")?. — RicciOLi.
Le P. Riccioli expose à la page 372 de son ouvrage Astronomia refor-
mata, etc. (Bononiie, 1665) qu'il a observé des taches sur la planète Mars, en
compagnie du P. Grimaldi, les 4, 5, 6, 18 avril, 29 mai 1651, juillet 1653,
juillet et août 1655, septembre, octobre et novembre 1657. Il rappelle les
observations de Fontana et de Bartoli, dont nous avons parlé plus haut.
Pas de figures.
Ces origines de l'étude physique de la planète Mars sont, comme on le voit,
on ne peut plus rudimentaires. Mais nous allons entrer, avec Huygens et
Cassini, dans une période plus importante.
VIII. 1659. —Huygens.
En 1659, notamment le 28 novembre et le 1" décembre, Huygens a fait
des observations de Mars et esquissé quatre dessins.
Xous reproduisons ici, d'après M. Terby ('), le croquis du 28 novembre 1659
(7'' du soir). La tache qu'il représente est devenue, comme on le verra plus
loin, pour les observations modernes, une tache tout à fait caractéristique de
la géographie de Mars. En voyant cette tache se déplacer, il écrivait sur son
journal, à la date du 1" décembre 1659 : « Débet Martis conversio fîeri spatio
circiter diurno, sive 24 horarum nostrarum quemadmodum item Telluris. »
« La rotation de Mars paraît s'effectuer comme celle de la Terre en 24 de nos
heures. »
Quelque temps après, comme nous allons le voir, en 1666, Cassini décou-
vr.iit, indépendamment, ce mouvement de rotation, duquel, fait assez bizarre,
Huygens douta ensuite, comme s'il avait attribué trop d'importance à ces
variations d'aspects, doute qu'il consignait sur son registre à la date du
9 avril 1683 : « Mars maculis aliter distinctus quam biduo ante, uude de con-
(') Tkriiv, Avéographie (Acadcmie de Belgique, 1875), p. 8.
16 LA PLANETI-: M A US.
versioiie '2'i lioraruin quam Cassinus prodidit dubilo ( ' ) ». L'illuslro [iliilosophe
ne couserva corlaiiiemeiil pas ces doules, car on lit dans son CasDioilicoros,
description des terres célestes et do leur haJiilabilitc, ouvrage posthume,
publié en I('i08. (|ue la rotation de Jupiter et de Mars est prouvée avec corli-
Croquis de Mars par lliiygons, le 28 novembre lUJO.
tude (='), et que les habitants de cette dernière planète ont des jours et des
nuits peu différents des nôtres (-^j.
Huygens a fait un certain nombre d'observations de Mars, notamment
en 1672, 1683 et 1694 et a tracé d'autres croquis rudimentaires. Nous y
reviendrons à leurs dates.
IX. 1666. — C.4SSINI.
Le brillant astronome italien (il était du comté de Nice, mais d'un tem-
pérament plus italien que français) a consigné ses observations de Mars dans
deux Mémoires ayant pour titre : Martis circa proprium. axcm revolubilis obser-
vationes BononÙE habilx (Bononice, 1666), et Disserlalio apologetica de maculis
Jovis et Martis (Bononiaî, 1666), ainsi que dans le Journal des Savants du
31 mai 1666 et dans les Philosophical Transactions du 2 juillet de la même
année (*).
Nous avons ces quatre publications sous les yeux. La première est la plus
intéressante pour nous au point de vue de l'originalité des dessins, dont les
figures publiées par le Journal des Savants et les Philosophical Transactions
(') Tekby, Aréographie (Académie de Belgique, 1875), p. 9.
(') Huygens, Cosmotheoros, 1698, p. IG.
(') Ibid., 1608, p. 96.
-(•) Journal des Savants, 2" année, 166G,p. 310. Cette publication s'est perpétuée jusqu'à
nos jours, comme on le sait. Mais, remarque assez singulière, elle est scientifiquement
beaucoup moins intéressante actuellement qu'il y a deux cents ans. Du moins les auteurs
scientifiques y sont-ils beaucoup plus rares, et, quant aux observations astronomi-
ques, il n'en est presque plus jamais question.
1666 ANCIENNES OBSERVATIONS. — CASSINI. 17
ne sont que des copies sensiblement différentes, accusant beaucoup lro[.
fortement les esquisses de Cassini. Nous reproduirons ici en fac-similés ces
dessins originaux.
Jean Dominique Cassini, ijui allait «Hrc ai)pclé en France par Louis XIV
pour être le premier directeur de lObservatoire de Paris, alors en construc-
tion, était à Bologne, astronome du pape, et déjà célèbre par son tracé de la
méridienne de Bologne cl par un grand nombre d'observations jjrillantes.
Le mémoire de Cassini est exactement résumé comme il suit par le Journal
des Savants du 31 mai IGGG.
Ces observations compreunont une nouvelle découverte dans la planète d<'
Mars, qui n'est pas moins curieuse que celle qu'on fit l'année dernière dans .Jupiter,
de laquelle nous avons parlé dans le journal du 22 février, et dont les savants onf
tant fait d'estime.
M. Cassini, astronome de Bologne (le rédacteur écrit Boulogne), ayant observf
au commencement de cette année KIGG avec des lunettes de 25 palmes ou de
16 pieds et demi, faites de la façon du S"" Campani, a reconnu que Mars tourne
sur son axe, et a remarqué qu'il y a plusieurs taches différentes dans les deux
faces ou hémisphères de cette planète qui paraissent successivement dans cette
révolution.
Dès le G février au matin, il commença à voir deux taches obscures dans la
première face, et le 24 février au soir il aperçut dans la seconde face deux autres
taches semblables ù, celles de la première, mais plus grandes. Depuis, ayant con-
tinué ses observations, il a vu les taches de ces deux faces tourner peu ù, peu
d'Orient en Occident et revenir enfin à la même situation dans laquelle il avait
commencé de les voir. Le S"" Campani, ayant aussi observé à Rome avec des lu-
nettes de 50 palmes ou de 3.5 pieds, a remarqué dans cette planète les mêmes
phénomènes. M. Cassini a fait graver plusieurs figures qui représentent les
diverses positions.
La fiij. A (voy. fl'j. 10) représente une des faces de Mars comme M. Cas^^ini
l'a observée à Bulogue le troisième jour du mois de mars au soir, avec une
lunette de 25 palmes ou de IG pieds et demi.
La fig. B représente l'autre face comme il l'a vue \(f-l\ fi'vrier au soir.
La /(;y. C représente la première face de cette planète, comme le S"" Campani
l'a vue à Rome le troisième jour du mois de mars au soir, avec une lunette de
50 palmes ou de 25 pieds.
La fig. D représente la seconde face comme le S"" Campani l'a observée le
28 mars au soir.
A ces figures M. Cassini ajoute plusieurs remarques. Premièrement, il dit que
quelquefois il a vu pendant la même nuit les deux faces de Mars, l'une lo s<.ir
et l'autre le matin.
Flammarion. — M.vns. 2
IS l-A IM.A Ni: T1-: M AH s.
Il reiiKir<]ue qno lo inouvoincnt do ces taches dans la partie ini'érioiiro de
l'hémisphère apparent de Mars va dOrient imi Occident coinmo <^clui de tous les
autres corps célestes et se fait par des parallèles qui déclinent beaucoup do
l'équateur et peu de l'écliptique.
Il assure que ces taches reviennent le lendemain dans la mémo situai ion
40 minutes plus tard que le jour précédent, de manière que tous les 3G ou 37 jours
environ et à la même heure elles reviennent à la même place.
Il promet de donner dans peu de temps des Tables particulières de ce mou-
vement et de ses inégalités avec des épliémérides, comme il a di'jàfaii du mou-
vement de Jupiter.
Quelques autres astronomes ont aussi public ù, Rome les observations qu'ils
ont faites depuis le •24 mars jusqu'au 30 avec des lunettes de 2.") et de 45 palmes
travaillées par le sieur Divini. De la manière qu'ils représentent ces taches, elles
sont peu diiïérentes de celles de la première face de Mars dont nous avons ci-
devant rapporté la figure. Ils ajoutent seulement que Mars fait son tour environ
en 13 heures.
Mais M. Cassini prétend qu'ils se sont trompés dans leurs observations, car
ils assurent que les taches qu'ils ont vues dans cette planète le 30 mars étaient
petites, fort distantes l'une de l'autre, éloignées du milieu du disque, et que la
tache orientale était plus petite que l'occidentale, comme elles sont représentées
dans la figure marquée E qui semble être celle de la première face de Mars.
Cependant M. Cassini trouve, par les observations qu'il a faites en môme temps
à Bologne, que ce même jour et ù, la même heure ces taches étaient fort larges,
proches l'une de l'autre, dans le milieu du disque, et que la tache orientale était
plus grande que l'occidentale, comme on voit dans la figure marquée F, qui est
celle de la seconde face de cette planète. De plus, il estime que c'est aller bien
vite que de déterminer sur cinq ou six observations en combien de temps Mars
achève son tour, et il ne demeure pas d'accord qu'il le fasse environ en 13 heures.
Quoiqu'il ait observé bien longtemps, il n'ose assurer si Mars ne fait qu'un tour
en '24 heures 40 minutes ou s'il en fait deux, et il dit que tout ce qu'il sait de cor-
tain, c'est qu'après 24 heures 40 minutes Mars parait de la môme façon que le jour
précédent.
Mais, depuis ces premières observations, M. Cassini a publié un autre écrit,
dans lequel il conclut par plusieurs raisons que Mars ne fait son tour sur son axe
qu'eu 24 heures 40 minutes et qu'il faut que ceux qui ont assuré que cette planète
fait sou tour en 13 heures n'en ayant pas bien distingué les deux faces, mais
qu'ayant vu la seconde face, ils l'aient prise pour la première. Il avertit aussi que,
lorsqu'il définit le temps de la révolution de Mars, il n'entend pas parier de la
révolution moyenne, mais seulement de celle qu'il a observée pendant que Mars
était oppo.sé au Soleil, laquelle est la plus petite de toutes. Il en donnera la réduc-
tion dans des Tables particulières qu'il fait espérer.
Cet exposé est un résumé complet des deux mémoires de Cassini dont nous
1666
ANCIHNNKS OBSERVATIONS. — CASSINI.
19
avons donné le litre plus haut ('). Nous olFrons à nos lecteurs {fjg. 10) un
fac-similé (même grandeur) de la page du Journal des Savants contenant les
Dessins de la planète Mars, faits en février et mars 1666. Cassini et observateurs de Ronu-,
( Journal des Savants du 31 mai 1666).
si.\ figures auxquelles renvoie le texte précédent.
Voici maintenant {fig. 11) les dessins originaux de Cassini, reproduits
également en fac-similé, d'après son Mémoire Marlis circa proprium axent
revolubilis observationes (Bologne, 1666).
On trouve aussi dans le recueil des écrits de Cassini renfermant la « Dis-
sertation » dont nous venons de parler (Bibliothèque de l'Observatoire de
Paris, G. 7, 15) deux éditions, sous deux titres diirérents, d'un même opus-
cule, la première ayant pour titre : De planetarum facie, maculis et revolulione ;
(') Ces observations sont toutes de l'année 1660. Il est donc surprenant de Hrc dans
le Cosmos de Humboldt, généralement si bien informé, l'assertion suivante :
« La première observation faite par Cassini sur la rotation d'une tache de Mars parait
avoir eu lieu peu de temps après l'année 1670. » [Cosmos, t. III, p. IVJ).
Humboldt renvoie à Delambre, Histoire de l'Astronomie, t. Il, p. 09i, pour cette
assertion. Mais Delambre est muet sur ce point.
10
l.A rLANKTK MARS.
Prima Marris iacies
M.
Sccunda Mwis lacicâ
M.
R-ima? facieî
Succcfijua- conuersKJ
Sccunds: iaciei
Succcffiua. conucrsio
I I yVlartis reuolutio ctrca axem[ f
/ proprium a 1. D. C aiTino Tel ef:
copio L Campa ni obfcruata
mcnfc Fchr. Mart. ApriL 1666.
A
Quardam alia: hiards facies
B C D E
Fig. U. — Conri;îuration caractéristique des deux hémisphères de Mars, d'après les observations de Cassini
en février, mars et avril 16C6
(la rangée de gauche et la ftg. II représentent un hémisphère, la rangée de droite
et la fig. G l'hémisphère opposé).
Le changement du à la rotation est bien visible sur la série de gauche.
16CG ANCIENNES OBSERVATIONS. — CASSIM. 21
la seconde : Nioicii syderci interprcs. C'est une réponse au \uncius sidcreus
de Galilée. Il y a quinze chapitres : les trois premiers sont différents dans
les deux mémoires, et les douze suivants .sont les mêmes. Dans les trois pre-
miers chapitres de l'cdilion qui a pour titre : De planetariim 7naciilis, Cassini
compare les planètes à la Terre, montre que notre globe, vu de loin dans
fcspacc, ressemble aux autres planètes, que les mers doivent paraître foncées à
cause de l'absorption de la lumière solaire, tandis que les continents doivent
paraître clairs ('); que les variétés du sol doivent donner naissance à des
variétés d'aspect correspondantes, que la figure de la Terre change suivant
que le rayon visuel arrive aux régions polaires ou aux régions équatoriales,
que robliquité de l'éclairement solaire, les nuages et leurs ombres, les chaînes
de montagnes et leurs ombres, sont autant de causes de variations dans
l'aspect de notre planète vue de loin, et qu'il doit en être de même pour
l'aspect de la Lune et des planètes vues de la Terre. Ensuite il passe aux
analogies que les autres planètes présentent avec celle que nous habitons
et considère l'observation astronomique au point de vue philosophique.
Il expose que les irrégularités du sol de la planète Vénus ont été soup-
çonnées par Fontana dès le 22 janvier 1643 et observées par lui, Cassini, à
Rome, avec les frères Campana, dans leur excellent télescope — sans doute
en 166G.
Pour Mars, il expose que le 7 février (1G66), pendant l'aurore, ainsi que les
17 et 18 du même mois, également pendant l'aurore, il a distingué sur le
disque de Mars, près du cercle terminateur de la phase, une tache blanche
s'avançant dans la partie obscure et représentant sans doute, comme celles
de la Lune, une aspérité, une irrégularité de la surface.
Il parle ensuite des bandes de Jupiter, observées dès 1630 par Fontana, et
de l'aplatissement de cette planète. Il compare les zones foncées de Jupiter à
des chaînes de montagnes.
Le reste de l'opuscule est consacré aux mouvements des satellites de
Jupiter. Cet ouvrage ne paraît pas avoir clé terminé, car les deux éditions
finissent par une moitié de mol coupé à la dernière ligne de la dernière
page ( Lxiii).
X. Même année 1666. — S.vlvatore Serra.
Pendant que Cassini faisait à Bologne les observations qui viennent d'être
exposées, Salvatore Serra en faisait d'analogues à Rome, et les publiait
au mois de mai 1666 sous le tilre de : Martis revolubilis observaliones romanx
(') C'est ce que Galilée avait dit, dès 1632, dansf son Dialojo inlcrno ai duc nias-
sir.ii sislcmi dcl monda. Œuvres complètes, édition de 18 12, p. 72.
LA rLANKTI' MARS.
ab affîctis crronbiis viiidicat.v. Uonia. Ex Castro Sancti Grcgorii. Calendes de
juin 1GG6 : « Observations romaines de la rotation de Mars vengées des erreurs
Fiff. t2.
1 t!Ous Marris cuni inficmibus macutis Pu}m^ primuiri uifis D-D ■ Fratrihus Saluatori^
a: Francifco de Scrris tubo Eiistachii Diutni palinorutn xy^ac fuhmàe 6^0-dcie ■ijj
Mizrtii ah jû^ijuadic in çdibus ÎI/î'^'D- Cejani Giorii hord prçâicca^ ezipfometîu"}^
Diw âefcnhenle tuhp- ^ç- apparvir ut lue exprimitur inuerjh mobq,nignore inter ali-
as exisrente macula Orietirali, pro Jitus obferuata uariatione eiusdem pla-
netç circd proprium axem. reuolutionis periodum itiâic atura/horis nempe cir-
citer
Dessin de Mars, par Salvatore Serra, 30 mars IGGG.
imaginées ». C'est une réponse à la déclaration de Cassini, qui assurait que
la rotation est de 24'' 40"" et non pas de 13 heures comme l'avaient con-
clu « des observateurs romains ».
Cette réponse est accompagnée du dessin que nous venons de repro-
duire {fig. 12).
1666 ANCIENNES OBSERVATIONS. 23
L'original de ce dessin existe à la Bibliothèque de l'Observatoiie de Paris
(C. 7, .3). Comme on le lit par la logende, ce dessin représente la vue toles-
copiquc de la planète prise à llonie, à l'aide d'une lunette de 21} palmes de
Diviiii, par les frères Serra, le 30 mars ICOfl, à 2 heures (de la nuit , lo môme
aspect ayant été observé du 24 mars au 30, et conduisant à une période de
rotation de 13 heures.
La querelle a été très vive entre Cassini et Serra, comme on le voit dans
l'ouvrage de Cassini signalé plus haut et intitulé : Dissertât ioucs aslronomica-
apoloijcticœ, recueil comprenant un mémoire de 10G5 (sur l'ombre des satel-
lites de Jui»iter dont on lui contestait la découverte) et un de 10GG sur les
taches et la rotation de Mars cl de Jupiter. Dans celui-ci, il com])at les pré-
tentions de Salvatore Serra et met en doute l'authenticité de ses observations.
Il expose que Fontana, Ilévélius, Gassendi, Riccioli et Sirsalis ont vu avant
lui les taches de Mars, mais que c'est lui, Cassini, qui le premier a reconnu
la rotation, et, i)ar une longue discussion sur les positions des taches obser-
vées en février et mars 1GG6', prouve que la rotation ne peut pas être voisine
de 12 ou 13 heures, comme le disait Serra, mais doit cire fixée à 24'' ■10'".
On trouve dans ce.mémoire une petite esquisse de Mars, assez rudimcn-
Fi-. in.
Croquis de ^lars, par Cassini, 2'i mars 1600, vers 7 heures.
taire d'ailleurs, du 24 mais au soir, ayant pour but de montrer que, contrai-
rement aux assertions de Serra, la planète ne présentait à l'observation
terrestre ni la première face ni la seconde des dessins de Cassini publiés
plus haut, mais un autre cùlé... '< aliam quemdam maculam semilunarem...
qualem nos eodum die hora 1 noctis observavimus ». Cassini ajoute quil
l'avait déjà remarquée le 22 février, à G heures de la nuit, < ce qui corres-
pond à un retard de 40 minutes ».
Cassini parle ensuite des observations de Mars faites le 3 mars à Home par
Campani et concordant avec les siennes faites à Bologne.
On voit par la /ig. 11, surtout par la rangée de gauche, le déplacement des
taches dû à la rotation de la planète. Les fig. 12 et 14 s'expliquent également
par le texte qui les accompagne. Le dessin supérieur de celte dernière
planche est une reproduction, faite par Cassini, du dessin des frères Sal-
vatore et François de Serra. Le premier des petits dessins a été fait par
Cassini le même jour (3U mars) et à la même heure.
■•* LA IM.AMVn; M AU s.
Les observations d." Serra se rattacheiU de très près à celles de Cassini (•;
Anna ifÇf di^ so Mardj h-i.NS.Romcc
Tdcsco^io Eiifluchij^Dunm pal. 4.5'.
Eaâem duc xt hora Bonon'i(X Tclcscopio
losephi Campani palmov^ 2,^.
et die 17. ag . 25 . 5 r y^ ~~~"X, «-'f ^/'^^^'•^ d.i.-^. 6'.
Uesperc t /(:■, /^^, \ circa,(ît pou: med.noéi.
Fkm^ Mards Jaciei apparent rcsilienna uespertin'acircct crcpusôdilS Mcme Aprih
Dies 5 ^ ^ 6" 7
n
F)?. 14. — Comparaison faite par Cassini de ses dessins (tous les petits)
avec le dessin des observateurs de Rome.
;•) On trouve dans les manuscrits de Cassini, conservés à l'Observatoire de Paris,
plusieurs lettres de Salvatore Serra sur ce même sujet, écrites en latin et en italien. Dans
IGGG ANCIENNES OBSERVATIONS. 25
Des observations de Cassini on iieul conclure qu'il a découvert la durée de
la rotation de Mars ( elle est de 24'*37"'22»,G), et nous concluerons aussi que l'on
peut découvrir la rotation d'une planète sans reconnaître la forme exacte
des taches.
En ellet, à mesure (juc nous avancerons dans la connaissance de ce
monde, nous nous verrons obligés de constater que les dessins de Cassini
(publiés ici en originaux) ne ressemblent pas du tout à la configuration
géographique de la planète. Devrions-nous penser que, depuis plus de deux
siècles que ces observations sont faites, Mars a changé d'aspect à ce point?
Non, car en cette même année IGGG, l'astronome Hooke a fuit, comme nous
allons le conslater, des dessins qui se rapprochent davantage de la réalité,
et dès 1G59 nous avons vu que lluygons en avait obtenu qui peuvent encore
être utilisés aujourd'imi. Les yeux distinguent et apprécient différemment
les choses plus ou moins vagues qui sont à la limite de la visibilité.
On a vu plus haut que les premières observations de Mars faites par
Cassini sont des 6 et 24 février IGGG. En môme temps que cet astronome et
d'autres observaient en Italie, l'astronome anglais Hooke observait à Londres
et découvrait aussi le mouvement des taches et la rotation.
Mars brillait alors en une opposition peu favorable, presque en aphélie ;
l'attention générale dont il devint l'objet avait pour cause le perfectionne-
ment des lunettes. De plus, on venait précisément de découvrir les taches
de Jupiter et sa rotation et l'on espérait obtenir le même résultat pour Mars.
La première notification des observations de l'astronome anglais est une note
publiée dans le numéro du 2 avril (p. 198), des Philosophical Transactions,
annonçant l'existence des taches de Mars et la rotation. Le numéro suivant
du 7 mai renferme le mémoire et les dessins. Voici ces observations :
XI. Même année IGGG. — Hooke.
L'astronome anglais Hooke, contemporain et rival de Newton, apubliéses
observations de la planète Mars dans les Philosophical Transactions de IGGG
sous le titre The particulars of those observations of the planet Mars, formerly
intimated to bave been made at London in the mouthsof february and mais
la première, du 27 février IGGG (Home), il est dit que Serra a observé les taches de Mars
avec une lunette de 25 palmes et que le tube de 50 palmes est incommode.
Dans une autre, du 2i mars, on lit la phrase à laquelle Cassini vient de répondre :
« Maculas aliquot quarum una cœteris nigrior aliquantulum jam superarat diei
médium »; dans une autre du 27 mars, on trouve des observations analogues; dans la
dernière, du 10 avril, il discute si la rotation est de 12 ou 2i heures. Le même recueil
(C, 7, 3) renferme une lettre de Campani du 3 mars : « A observé les taches de Mars
et a reconnu le mouvement de rotation. »
•:6 1. A rLANi:TK mars.
aniii 1GG6 | ('). Nous constatons iiuo ce mémoire a été traduit textuellement
dans le Journal des Savants du ?l^ août suivant, et nous donnons ici cette
traduction du temps, qui ne manque pas de parfum pour les bibliographes.
Les observations ont été faites à l'aide d'un télescope de 36 pieds; nous
reproduisons les dessins, non d'après la copie réduite qu'en donna le Jour-
nal des Savants, mais d'aprcs les originaux eux-mêmes, publiés dans les Pliilo-
sophical Transactions, ^■oici cet exposé:
M. Ilookc, ayant observé les taches de Mars et leur mouvement avec une lu-
nette de 36 pieds, en a écrit le 29 mars à la Société Royale d'Angleterre eu ces
termes:
0 Ayant une grande passion d'observer le corps de Mars durant (ju'il serait
achronique et rétrograde, parce que j'avais ci-devant remarqué avec une lunette
d'environ 14 pieds quelques espèces de taches dans sa face, quoique à présent il
ne soit point dans le périhélie de son orbe, mais proche de son aphélie, néanmoins
jai trouvé avec un oculaire qu'une lunette de 30 pieds dont je me servais porte
fort bien, que sa face, quand il était proche de son opposition au Soleil, paraissait
quasi aussi grande que celle de la Lune paraît quand on la regarde sans lunette,
ce que je remarquai en le comparant avec la i^eine Lune qui était tout auprès de
lui le 10 du mois de mars.
« Mais la disposition de l'air a été telle pendant quelques nuits que de plus de
vingt observations que j'en ai faites depuis qu'il est rétrograde, je n"ai pu être
satisfait d'aucune, quoique je crusse souvent voir des taches, car les veines
inflectivcs de l'air, sil est permis d'appeler ainsi ces parties qui étant espacées
çà et là en haut et en bas, peuvent causer une plus grande ou une plus petite
réfraction que ne fait l'air contigu avec lequel elles sont mêlées, rendaient la
chose si confuse que je n'en pouvais rien conclure de certain.
« Le 3 du mois de mars, quoique l'air ne fût pas fort commode, je ne laissai pas
de remarquer que le corps de Mars paraissait comme la fig. A (voy. fig. 15),
laquelle je dessinai suffisamment et, environ 10 minutes après, je dessinai avec
toute l'exactitude imaginable ce que je voyais avec la lunette, comme il est repré-
senté dans la fig. B, et je fus alors entièrement persuadé, après avoir mis mon
œil en diverses positions, que ce que je voyais ne pouvait être autre chose que des
taches et des parties plus obscures que les autres dans la face de cette planète.
a Le 10 mars, trouvant l'air fort mal disposé, je me servis d'un oculaire plus
faible, ne voj'ant rien avec un oculaire plus fort, et le corps de Mars me parut tel
qu'il est représenté dans la fig. C (voy. fig. 16), mais je crus que ce pouvait être la
même représentation des taches précédentes, regardées avec un oculaire plus
faible. Le même matin, sur les 3 heures, l'air étant fort incommode (quoiqu'il fit
très clair en apparence, qu'on vit toutes les étoiles briller, et que les plus petites
(') Philosophical Transactions, giving somc accompt of thc présent undertaking stu-
dies... of the world. Vol. I, IGG5-1666, p. 239.
I6CG
ANCIENNES OBSERVATIONS. — IlOOKE.
27
parussent assez grosses), sou corps parut oomnio il est repr(?sentd par la fij. i)
et je supposai que c'était la représentation des mêmes taches regardées au tra-
vers d'un air plus confus et plus brouillé.
a Observant le 21 mars, je fus surpris de trouver l'air cxtraordiiiaircmcnt
transparent (quoiqu'il ne le fût pas assez pour voir les petites étoiles) et la face
de Mars si bien arrondie et si bien distincte que je remarquai fort nettement
([u'il était, sur les '.I heures et demie du soir, justement comme il est représenté
dans la /(;/. I]. La tache triangulaire du côté droit renversée (comme elle l'était
par la lunette, ;\ cause que toutes les figures précédentes ont été tracées comme
Fi-, i:,.
Dessins tic la plunolc Mars faits par Ilooke à Londres, dans la nuit du 12 au 13 mars IG'JG.
à minuit 20 et à minuit 40.
on les voyait) paraissait fort noire et distincte, et l'autre qui était vers le côté
gauche, semblait plus obscure, mais toutes deux pourtant assez nettes et assez
bien terminées. Je l'observai, la même nuit, avec le même verre, environ un quart
d'heure avant minuit, et le trouvai justement comme il est représente dans la
fiil. F, et je crus que la première tache triangulaire se mouvait; mais ayant des-
Fig. 10.
Dessins de la planète ."Mars faits par llooke à Londres, du -'U mars au 7 avril.
sein de l'observer encore le même matin, sur les trois heures, j'en fus empêché
parce que le temps fut couvert de nuées.
« Toutefois, le 22 mars, sur les S heures et demie du soir, trouvant les mêmes
taches dans la même situation, je conclus que la précédente observation n'était
rien autre chose que l'apparence des mêmes taches dans une autre hauteur et
épaisseur de l'air, et je me confirmai dans cette opinion quand je les trouvai
presque dans la même situation le 2;> mars, sur les 'J heures et demie, quoique
l'air ne fût pas si favorable qu'auparavant.
•:s LA r LA m: II- mars.
€ Et quoique j'eusse desseiiule faire dos observations tous les malins, do co jour-
là il survint toujours quelque chose qui m'eu empêcha jusqu'au 28 mars, vers les
3 heures, que l'air se trouvant léger en poids, quoiqu'il fût humide et un peu
brouillé, je vis qu'il dtait justement de la forme représentée dans la //;/. I, ce
qui ne se peut accorder avec les autresapparences,si cen'ostque nous admettions
un mouvement de Mars sur son centre. Si cela était, nous pourrions, par les
remarques des "21, CC et "28 mars, conjecturer que ce mouvement se fait une ou deux
foison "M heures, si ce n'est qu'il ait quelque espècede mouvement de libration.rc
qui ue semble pas si vraisemblable. J'observerai à l'avenir, autant (juil me sera
possible, si cela est véritablement ainsi, oui ou non. »
Explication des figures dont il est parlé dans le précédent discours.
« A. — Lit figure que j'ai observée le 3 mars, à0''20"' au matin, lair étant pesant
commeon le reconnut par le baromètre à roue et ayant plusieurs parties inllec-
tives (c'est-à-dire qui faisaient réfraction) dispersées en haut et en bas,
« B. — L'autre figure que j'ai tirée de l'observation que je fis le même matin,
environ dix minutes après. Ces deux remarques ont été faites avec des oculaires
fort convexes.
0 C. — Le 10 mars, 0''-20'" au matin, l'air étant pesant et plein de parties infiec-
tives, je me servis d'un oculaire assez faible.
« D. — Le 10 mars, 3''0'" au matin, l'air étant pesant et plein de parties intlec-
tives, ce qui le rendait plus rayonnant et plus confus qu'il n'était à 3 heures ou
environ auparavant, je me servis d'un oculaire faible.
« E. — Le 21 mars, 9 heures et demie du soir, l'air étant léger et clair, sans
parties infiectives, sa face paraissait distinctement de cette forme : je me servis
d'un oculaire faible.
« F. — Le 22 mars, ] I heures trois quarts du soir, l'air continua d'être léger et
clair, sans vapeurs inflectives; l'oculaire était faible.
«G. — Le 21 mars, S heures et demie du soir, l'air était clair avec quelque peu
déveines inflectives et indifféremment léger. L'oculaire était faible.
« II. — Le 23 mars, 9 heures et demie du soir, l'air était assez léger, mais hu-
mide et en quelque façon épais, mais il paraissait avoir peu de parties inflectives.
« L — Le 28 mars, 3 heures du matin, l'air était à peu près comme le 23, hu-
mide, brumeux avec des veines. »
Cet exposé des observations de l'astronome anglais est une traduction à
peu près textuelle de sa communication à la Société Royale de Londres, le
28 mars 16C6. Nous avons reproduit ici, parla photogravure, en fac-similés au-
thentiques, sans retouche aucune et de même dimensions que les originaux,
les neuf dessins de Ilooke. Les dates des observations doivent être augmentées
de 10 jours, parce que la réforme du calendrier adoptée en Italie des l'an 1582
n'a été adoptée en Angleterre qu'en 1752. Le 3 mars correspond donc au 13.
IGGG ANCII-NNES O.HSKU VATIONS. — I100KI-. 20
La niL'inc planclic des Philosophical Transactions, d'où nous reproduisons
ces dessins, renfornio aussi les dessins de Cassini et des observateurs italiens,
mais iiueliiue pou exagi-rés, notamment le grand dessin de tète de la fig. \\
sur lequel les deux taches sont si massives que l'on pourrait prendre cet
aspect pour celui d'une haltère de fonte!
Ici nous pouvons faire une pause d'un instant et nous demander si nous
avons déjà une première conclusion à tirer de cet ensemble de croquis
primitifs.
Bien i)rimit!fs, en effet. Il faut croire que les lunettes no possédaient pas
à cette époque une grande puissance de définition, car il est à peu près
impossible de reconnaître sur aucun de ces dessins les configurations géo-
gra[»hiqucs qui existent réellement sur le globe de Mars. Trois dessins
seuls permettent une identification certaine, il est vrai, mais assez vague :
ce sont les dessins de Iluygens, 28 novembre 1659 [fig. 9, p. 16), et Ilooke,
i;^ mars 1066, à 0''20'" et C'-iÛ™ (fig. 1.")). Pour commencer dès maintenant
notre connaissance de la géographie martienne, je reproduirai ici [fig. 17)
une photographie du globe de Mars que j'ai construit, il y a quelques
années, sur l'ensemble des observations. Un hémisphère, le plus carac-
téristique, suffit ici. La nomenclature adoptée sur ce globe est celle de la
Carte générale de la planète construite par M. Green en 1877 et publiée par
la Société Royale Astronomique de Londres, à l'exception des noms de « mer
du Sablier », appelée aussi « mer de Kaiser » et do la baie du Méridien
appelée aussi « baie de Dawes ». (Nous avons conservé le nom de mer du
Sablier à cette mer triangulaire si caractéristique parce que l^elle est depuis
très longtemps désignée sous ce nom (.< ihe hour-glass sea », que 2" ce nom
est bien approprié à sa forme, et que 3" cette tache a véritablement servi de
sablier pour déterminer la durée de la rotation de Mars, car c'est par son
passage au méridien central et son retour, et par la comparaison des dates
de ses anciens dessins à celles des modernes que l'on a exactement mesuré
le tcmi)S martien.)
Cette projection nous montre le globe de Mars vu perpendiculairement
à son axe, le pôle sud en haut, le pôle nord en bas. Ce globe ne se présente
pas souvent juste i)erpendiculaire, comme on le voit ici, mais légèrement
incliné, nous offrant tantôt son pôle sud, tantôt son pôle nord. Mais cette
projection perpendiculaire suffit actuellement pour nous orienter. Nous
nous occuperons des autres aspects un peu plus loin.
Les trois dessins dont nous venons de parler représentent cette mer du
Sablier. Que le lecteur veuille bien les comparer à notre fig. 17, et il consta-
tera comme nous que le premier montre cette mer très élargie et plus
30
LA PLANi:Tr. MARS.
vague, que le second la montre plus clroito, ratlaclice en haut à la mer
Flammarion et en bas à la mer Delambre. Il en est de même du troisième
dessin. Ce n'est pas précis, ce n'est pas net, c'est vu de très loin, à l'aide
d'instruments imparfaits, mais c'est bien cette configuration, et le calcul le
prouve, attendu que la rotation martienne de 24'' 37™ 22',6 a bien réellement
fait passer cette mer en ces méridiens aux dates précises des observations.
A cette carte-figure, nous ajouterons une petite vue de la planète prise à
POLE NORD
'•en.r fiti ht ro?j?.iuny
Le grlobc de Mars avec la mer du .Sablier an centre.
l'aide d'une petite lunette (lunette de To""") jjour montrer que les configu-
rations les plus étendues sont perceptibles dans ces modestes instruments,
pourvu qu'ils soient bons, qu'on ait un œil excellent et qu'on sache obser-
ver. Les lunettes actuelles de cette dimension sont tout à fait comparables,
pour les images qu'elles donnent, aux grands instruments primitifs dont se
servaient Hooke et Cassini. Quels progrès! Un instrument de cet ordre ne
coûte pas 200^'" aujourd'hui. Ne devrait-on pas en posséder au moins un par
département, un par école primaire ? Les citoyens de la Terre auraien t au moins
une notion des réalités de l'Univers. Mais, en France memC; il n'y a certai-
nement pas un humain sur mille qui ait jamais vu une seule des merveilles
célestes, ou ijlutôt pas un sur dix mille, peut-être à peine un sur cent mille!
IGOG
ANCIENNES OBSERVATIONS. — IIOOKK
31
Cette vue do Mars a été prise le 18 février 1884. Elle est satisfaisante. Le
ciel était nuageux, mais, en affaiblissant l'éclat de la [)lanète, ces nuages ne
nuisaient pas à l'observation, au contraire.
On remarque sur le disque (bcure do l'observation : 9''35'") une tache
grise rappelant la forme d'une coupe à Champagne, s'évasant considérable-
ment par le haut, de sorte qu'on croirait voir les ailes étendues d'un oiseau
de mer. Cette tache allongée est la mer du Sablier dont nous venons de
[tarler à propos des deux dessins de llookc du 12;mars IGGG. A elle seule, cette
observation suffirait pour prouver la permanence des taches de la planète
Petit dessin de Mars, obtenu en lS8't, à l'aide d'une petite lunette de 75""".
Mars. Le pùle nord est très marqué sur le bord inférieur du disque par la
neige polaire qui y forme une tache blanche circulaire.
Quant aux autres dessins de Hooke, ainsi qu'à tous ceux de Cassini,
Serra, etc., nous avouons n'y rien reconnaître, n'y rien pouvoir identifier.
La surface de Mars était-elle alors très masquée par des nuages? Les instru-
ments manquaient-ils de définition? Pourtant ces taches ont servi à déter-
miner la rotation. Elles existaient donc réellement ; elles ont été plus ou
moins précisées, plus ou moins bien exactement dessinées; mais ce ne sont
pas de fausses images, puisque la rotation déterminée par elles est exacte.
De ces premières observations, comme on vient de le voir, Cassini avait
déjà pu conclure, dès 1066, la rotation de la planète à 24'' 40™ environ (sans
tenir compte du déplacement de la Terre). Pourtant, cette opposition de 1666
est loin d'être l'une des plus favorables ; elle a eu lieu le 18 mars, c'est-à-dire
à une épo(iue où la planète est fort éloignée de la Terre et vers son aphélie.
Cette opposition est analogue à celle de 1886.
Continuons notre étude.
LA ri.ANKTi: MARS.
xir. iGTe. — iiuYGExs.
Nous avons déjà signalé une observation de cet astronome faite vers 1G56
et quatre de l'année ICôO; plusieurs autres dessins, dont deux de 1GG2, sont
Fip. m.
Dessin de Mars fail par Iluygcns, le 13 aoiil 1G72, à lO"" 30"".
conservés aussi à l'Université de Leyde, l'un du 0, l'autre du 13 août. Le
premier ne montre aucune tache sombre, mais seulement la tache blanche
polaire méridionale; le second montre ce pùle et, dans la partie inférieure
du disque, la mer du Sablier. Nous reproduisons ici ce second dessin, d'après
le fac-similé qu'en a publié M. Terby.
En 1672, Mars passait en une opposition périhélie, c'est-à-dire dans la
Fi?. 20.
Le globe de Mars nous présentant son pôle supérieur (Oppositions périhéliques).
1672-1689-I704-17l9-173i-175l-1766-1783-1798-18l3-I830-184J-18G0-lS77-1892.
jilus favorable de toutes. Il y revient tous les 15 ans environ. Les années
1072-1683 ANCIENNES OHSKK VATIONS. — HLV(il-NS. 33
1089,1704, 1719 ont été dans 1g même cas. Alors la planète se présente à nous
inclinée, avec le pôle supérieur visible et la mer du Sablier très basse. Le
dessin do lluygons peut être parfaitement identifié avec la réalité, comme
on peut s'en rendre compte par la projection ci-dessus.
XIII. Même année 1G72. — Fi.vmsti;i:i).
Le premier Directeur de l'Observatoire royal d'Angleterre, fondé en 1G7G,
avait observé, notamment le 11 octobre 1072, la planète dont nous écrivons
riiistoirc. Cet astronome, voulant prendre la position de la planète Mais, fit la
remar(iue suivante :
« rianetie seraper circa médium obscuritas aliqua appai-uit, quam ut
poiui in figura adumbravi. » C'est tout ce qu'il dit sur notre planète. L'es-
quisse qu'il en a tracée montre simplement dans l'intérieur du disque, vers
la région centrale, « l'obscurité « dont il parle, c'est-à-dire une tache irrégu-
lière environnée d'une large pénombre. Celte figure nous paraît peu intéres-
sante à reproduire (').
Cette même opposition a été observée par L.\uREXTris (-), sans résultat
utile pour le progrès de la connaissance physique de Mars.
XIV. 1GS3. — IIUYGEXS.
Aux observations de Iluygens signalées plus haut, nous devons adjoindre
Vis. 21.
Esquisse de Mars par Iluygens, le 17 mai 1083, à l0''o ".
ici celles qu'il a faites en 1083, les 7 et 9 avril, 7, 13, 17 et 23 mai. Ces six
observations, accompagnées d'autant de dessins, ne donnent encore que de
vagues esquisses, analogues à celles du même astronome, de 1659 et de 1072 ;
mais ces esquisses permettent de reconnaître notamment la mer caractéris-
(') On la trouvera Ilisloria Cœlaxlix, 1725, tome I, j). 17, fig. 33.
{') Joannis Fraiicisci de L.tURENxns Observationes Saturni cl Marlis Pisauvicnscs.
In-fol. — Pisauri, 1G72.
FLA.MMARION. — Mars. .3
34 LA IM.ANKTK M A US.
tique du Sablier avec laquelle nous avons déjà lait connaissance. Nous signa-
lerons entre autres le croquis du 17 mai, à IC'iiO'", fait à la [dunio comme
tous les autres, et qui dessine bien celle forme. Mars était alors fort éloigné
de la Terre, tandis qu'en 1G7C il était passé en opposition vers son périhélie.
Iluygens a encore fait, le 4 février 1694, une esquiise du même ordre.
On en était là de l'étude de Mars lorsque Fontenelle publia ses Entrciiens sur
lapluralilcdcs Mondes. Remarque assez curieuse, Mars était passé très près de
la Terre en 1G72, et on ne l'avait observé qu'au point de vue de l'astronomie
de position : la connaissance de sa constitution physique n'a pas fait un
seul pas, si ce n'est la constatation de la tache polaire australe par Iluygens.
XV. 1G80. — FONTENELLK.
Le spirituel auteur des Entretiens sur la pluralité des Mondes [') s'occupe de
toutes les planètes, du Soleil et des étoiles fixes, et nous expose dans le plus
élégant des langages ce que l'on en savait à son époque. Quoiqu'il parle assez
longuement de Vénus, de sa rotation, de ses années, de ses climats et même
de ses montagnes, il semble dédaigner quelque peu la planète qui nous
occupe ici. « Mars, dit-il, n'a rien de curieux que je sache; ses jours sont de
plus d'une demi-heure plus longs que les nôtres, et ses années valent deux
de nos années, à un mois près. Il est cinq fois plus petit que la Terre, il voit
le Soleil un peu moins grand et moins vif que nous ne le voyons ; enfin Mars
ne vaut pas trop la peine qu'on s'y arrête. Mais la jolie chose que Jupiter
avec ses quatre lunes ou satellites ! »
C'est tout ce qu'il dit de Mars. Il y revient un peu plus loin à propos de
« l'absence de satellites », qu'il regrette infiniment au point de vue de la
logique. « On ne peut pas nous le dissimuler, répond-il à la marquise, il n'en
a point, et il faut qu'il ait pour ses nuits des ressources que nous ne savons
point. Vous avez vu des phosphores, de ces matières liquides ou sèches,
qui, en recevant la lumière du Soleil, s'en imbibentet s'en pénètrent, et en-
suite jettent un assez grand éclat dans l'obscurité. Peut-être Mars a-t-il de
grands rochers fort élevés, qui sont des phosphores naturels, et qui prennent
pendant le jour une provision de lumière qu'ils rendent pendant la nuit.
Vous ne sauriez nier que ce ne fut un spectacle assez agréable de voir tous
ces rochers s'allumer de toutes parts dès que le Soleil serait couché, et faire
sans aucun art des illuminations magnifiques, qui ne pourraient incommoder
par leur chaleur. Vous savez encore qu'il y a en Amérique des oiseaux qui
sont si lumineux dans les ténèbres qu'on s'en jjeut servir pour lire. Que
(') Première édition; Paris, 16S6.
ITOi ANCIENNKS OltSI- It V A TIONS. — MAItAI.DI.
savons-nous si Mars n'a pas un ;,uaud nombre de ces oiseaux, (jui, dès que l.i
nuit est vouuc, se dispersent ilo tous côtés et vont répandre i:n nouveau
jour? .)
C'est cliarnianl. Si Fontcnelle n'avance pas l'élude leclini(]ue que nous fai-
sons en ce uionieiit. du uioius nous y intcressc-t-il et nous convie-l-il à allrr
plus loin.
Les deux satellites de Mars ont été découverts l'Jl ans plus tard.
Le dix-septième siècle se couche (juelques années après la divulgation du
livrede Kontenelle, (jui marijue une ère nouvellcdans l'iiistoirc du la lillt'-ra-
lurc scientifique ou, pour niieux dire, qui ouvre cette ère. Le dix-huitièuie
siècle s'ouvre au point de vue du sujet qui nous occupe ici par les recherclii;s
de Maraldi (neveu de Cassini) à l'Observatoire de Paris.
X\l. ITOi. -^ Maualdi (').
La planète était passée en llJ7-2 en une opposition périhélique très favo-
rable, que l'on avait appliquée avec succès à la détermination de la paral-
laxe de Mars. En septembre et octobre 1704, elle revint à une situation
presque aussi rapprochée delà Terre. On Tob-serva spécialement à l'Ob-^erva-
toirede Paris pour une nouvelle détermination de saparallaxc, et Maraldi uti-
lisa cette circonstance pour observer les lâches et véritier le mouvement de
rotation. Sa conclusion est que ces taches sont variables. Voici du reste son
mémoire, auquel nous adjoignons les trois dessins qui raccompagnent.
Dans les mêaies circonstances de la plus petite distance de Mars à la Terre,
nous avons observé avec une lunette do 34 pieds de Campaui les taches de Mars,
([ui nous ont servi à vérifier ki révolution autour de son axe, qui, suivant la décou-
verte de M. Cassini, est d'environ îi** iO'".
Les taches que l'on voit avec de grandes lunettes sur le disque de cette planète
ne sont pas pour l'ordinaire trop bien terminées, et elles changent souvent de
figure, non seulement d'une opposition à l'autre, qui est le temps le plus projirc
pour ces observations, mais aussi d'un mois à l'autre. Ncjnobstant ces changements,
il ne laisse pas d'y avoir des taches d'une assez longue durée pour pouvoir éirc
observées pendant un espace de temps suffisant h déterminer leurs révolution."-.
Parmi ces difl'érentes taches, nous en avons remarqué une en forme de band<-
vers le milieu du disque, ili peu près comme une des bandes di- Jupiter. Elle n'<Mi-
vironnait pas tout le globe de >hirs, mais elle était interrompue, comme il arriv.'
quel<iuefois aux bandes de Jupiter (pfj. \ ), et occupait seulement un peu plus (run
(') Observations des taches de Mars jiuur vérifier sa révolution autour de sun . \*
Histoire et Mémoires de l'Acadi'nnie des Sciences. Année 170G, p. 71.,'
3(1 I A rLANKTl- MARS.
hcmisphtTcdcMarsicc que l'on a reconnu en observant cette planète à différentes
licures de la miMne nuit et aux mêmes heures de différents jours. Cette bande
notait pas partout uniforme, mais environ à 00" de son extrémité jirécédente dans
la révolution de Mars, elle faisait un cnude avec une ])i>iiitc tournée vers son
hémisphère septentrional. C'est cette pointe, assez bien terminée, contre l'ordi-
naire des taches de cette planète, qui nous a servi à vérifier sa révolution.
Nou.s vîmes la bande dès les premières observations que nous fîmes avec la
grande lunette au mois d'août, lorsque le disque de Mars qui s'approchait de la
T«rre commençait ;\ paraître assez grand ; cependant nous n'aperçûmes la pointe
dont nous venons de parler qu'au mois d'octobre suivant. Elle arriva au milieu
FiK. 2-2.
Aôpect (Je Mars les 14 octobre 1704, à 10'' 24'", lU octobre I7Û4, à 'Ji' j"', et nicaïc jour n /''O"'.
Fac-similé d'un dessin de Maraldi.
du disque de Mars le 14 octobre, à 10''2i"". Le lô, elle arriva à 11''9™.
Le 16, à 71" du soir, proche des deux pôles de la révolution de Mars, on
voyait deit.v taches claires qui ont été observées plusieurs fois depuis cinquante
ans ifto- 3). Outre ces deux taches claires, on en voyait une obscure vers 1<3 bord
orientai, qui était l'extrémité de la bande qui commençait à entrer dans l'hémi-
sphère de Mars exposé à la Terre. Le même jour, à 9^5™, l'extrémité de cette bande
avait déjà passé le milieu de Mars, et la bande se voyait continuée jusqu'au
liord oriental (fig. 2) où l'on voyait une marque de la tache adhérente à la bande
qui arriva ensuite au milieu de Mars, à IP'38'". On continua les jours suivants les
mêmes observations de la bande interrompue, qui n'était pas si avancée dans
l'hémisphère apparent aux mêmes heures que les jours précédents, et nous
oljsorvâmes aussi que la tache principale arriva le 17 octobre au milieu de Mars,
à 1 1"" 18'". Dans la comparaison de ces observations, les retours de la même tache
au milieu de Mars ne paraissent pas précisément égaux, et il y a quelques minutes
(Je différence, ce que nous attribuons à la difficulté de déterminer exactement le
temps de son arrivée au milieu. Mais, en comparant l'observation du li octobre
avec celle du 17, entre lesquelles il y a trois révolutions, on trouve le retour de la
tache au milieu de l'hémi-sphère apparent de 21'' 38"".
On connaîtra mieux cette période par la comparaison des observations de la
I
ITOi ANCIENNES OHSK II NATIONS. — M A HA LDI. 37
tacho plus éloignées entre elles, comme sont celles que nous fîmes le Î2 noveuilirc,
auquel jour, après avoir reconnu qu'à T'Mim l'extrémité de la bande était avam^ijc
dans le disque de Mars, nous observâmes que la tache arriva au milieu à II''.")'".
Si l'on compare cette dernière observation avec celle (jui fut faite le I i octobre,
;\ IO''J'i'", on trouve entre ces deux observations 3'.l jours et 51'", qui (-tant parta'^é*^
par i!>!, nombre des révolutions dues h cet intervalle, donnent un j<nir et 3îi minutes
pour chacune, à une minute près de celle qui a été déterminée par M. Cassini.
Ces périodes sont telles qu'elles résultent des observations immédiates et sont
presque les plus courtes qu'on puisse trouver, à cause que le mouvement que
Mars a fait durant cet intervalle n'a pas été considérable. Si de ces périodes
ai)parentes on en voulait conclure les périodes moyennes, ces dernières se trou-
veraient un peu plus longues que les apparentes; mais nous négligeons ces
équations, aussi bien <(ue la différence qu'il peut y avoir entre l'arrivée de la
tache au milieu de Mars, lorsque son disque paraissait rond comme dans l'obser-
vation du mois d'octobre, et l'arrivée de la même tache au milieu de Mars lors-
qu'il n'était plus rond, mais sensiblement ovale, comme dans la dernière obser-
vation du Î2 novembre.
Nous avons cru qu'il était inutile de tenir compte de ces équations, parce qui-
nous n'espérons pas d'arriver ù la précision qu'on peut attendre dans cette déter-
mination, à cause des changements qui sont arrivés aux taches que nous avons
observées. Car la pointe adhépente à la bande que nous observâmes pendant
plusieurs jours, vers le milieu d'octobre, était fort diminuée le 1-2 novembre, en
sorte qu'on ne l'aurait pas jugée la même, si la distance à l'extrémité de la bande
qui la précédait et qui était la même que dans les observations précédentes, ne
l'avait pas fait reconnaître. Après le 22 novembre, nous ne pûmes pas continuer
les observations de la tache pour voir le changement qui lui est arrivé dans la
suite, à cause du temps couvert qui dura près d'un mois, après lequel temps Mars
était trop éloigné de la Terre pour pouvoir bien distinguer les taches; mais les
observations faites au mois de septembre précédent nous donnent lieu de croire
qu'il y a eu des changements considérables; car, en prenant pour époque <lcs
retours de la tache l'observation du 1 4 octobre, et supposant qu'avant cette époque
ses retours au milieu de Mars soient à peu près égaux à ceux qui l'ont suivie, on
trouveque la tache auraitdùparaitre au milieu dudisquedeMarsdepuisle 'ijus'(u';iu
10 de septembre, à peu près aux mêmes heures que vers le milieu d'octobre, ('epeii-
dant, parmi les observations que nous fîmes avec soin en ce temps-là. à diverses
heures de la nuit, on ne vit aucune marque de cette tache, quoiqu'on distinguât
fort bien la bande à, laquelle on a remarqué depuis la pointe. Dans le commen-
cement de septembre, au lieu de cette pointe, nous observcàmes au milieu de Mars
une autre tache séparée de la bande vers le septentrion, et cette tache avait dis-
paru lorsqu'on remarqua la pointe; ce qui nous donne lieu dr croire que la tache,
qui au commencement de septembre était séparée de la bande, peut avoir eu un
mouvement particulier du Nord au Sud, par lequel elle s'est approchée de la bamle
et y a formé la pointe que nous observâmes vers le milieu d'octobre et le 2J no-
3S I,A P LA m: il". M A II S.
vcinbrr qu'elle parut diinimu^o. Ces clianpoinonfs oui (iiK^lqiio ivssioinblaïu'e avec
ceux qui ont été observés par M. Cassini dans les taehes île Jupiter, et avec eeux-
niêmes qui s'observent quelquefois dans les taches du Soleil.
Ces observations do Maraldi en 1704 conlirniaient, comme nii le voit, la
durée de rotation trouvée par Cassini et l'existence des taches de iliverses
natures h la surface de la iilancte, les unes foncées, les autres blanches. Ces
taches lui paraissent variables, en étendue et eu position, comme celles de
.Tu pi ter.
Kn 1704, Mars se présentait à la Terre comme en liM-J, en opposition péri-
hélique, et les dessins de Maraldi devraient pouvoir s'accorder plus ou moins
avec les aspects suivants, qui représentent l'ensemlile du tour de la planète
Fie. 23.
Aspects de Mars pendant les opposilions périhûliqucs.
en cette position. La fig. A, dont le méridien central est 270°, et qui montre
la mer du Sablier, correspond presque à la face représentée fig. 20.
Xous avouons ne pouvoir identifier avec certitude, et môme avec proba-
bililé. les trois dessins de Maraldi. Cette bande existait réellement, plus ou
moins pareille au dessin, puisqn'elle a servi à déterminer la rotation, mais
elle ne ressemble pas à ce qui a été vu par Cassini et Ilookc, cL Maraldi con-
stata lui-même des changements d'aspect pendant ses observations. Il n'est
I>as douteux, non plus, que cette sorte de gonflement de la bande que l'on
voit sur les deux premiers dessins n'ait varié sous les yeux mêmes de l'obser-
vateur.
Nous avons donc dès maintenant, en 1704, quatre faits établis parles obser-
vations, dont la première utile date de 1656 (Huygens), c'est-à-dire de 48 ans :
Le globe de Mars a des lâches, comme le globe lunaire;
H est animé d'un mouvement de rotation analogue à celui de la Terre : 24'' 39'" ;
.1?/ contraire de celles de la Lune, les lâches de Mars sont variables;
L/'s pôles sont marqués par des taches claires.
A l'opposition pcrihélique suivante, 1710, Maraldi renouvela les mômes
observations à l'Observatoire de Paris. Xous allons également les publier, avec
les quatre dessins qui les accompagnent. Les voici.
171!) ANCir-XNKS OHSi: H VATI ONS. - .MAKAI.I»!. 39
XVII. ITl'J. Mmiai.di (•>.
Pendant raulomnc de raiinéc 1719, la siluatioa de la [ilaiiète se présenla
de nouveau d'une manière particulièrement favorable pour les observations.
Lorsfjuc la [ijauètt; ai-riva en opposition, le 27 aoiU de cette année, elle n'était
<ju'à i^SO' de distance du péribélicet, on raison do son rapprochement de la
Terre, elle brillait d'un éclat si extraordinaire qu'un grand nombre de per-
sonnes virent en elle une nouvelle (Hoile ou une comète inattendue. Le
19 août, Maraldi, ayant observé la plauùle, avec une lunette de 3i pieds de
longueur, remarqua sur le dis(jue deux jjandes foncées formant Tune avec
l'autre un angle obtus, ce qui présentait une particularité très digne de
remarque. Le "25 septembre, il observa de nouveau la planète et remarqua
que le tracé angulaire dont nous venons de parler occupait la même posi-
tion sur le disque. Pendant l'intervalle de 37 jours qui s'étaient écoulés entre
les deux observations, la planète avait par conséquent effectué 36 rotations
sur son axe, ce qui donna 2i''-i0'" pour la période, résultat en parfait
accord avec celui de Cassini.
L'observateur conclut, connue en 170(, la varialjilité des taches.
\'oici du reste le mémoire de Maraldi, daté du "29 mai 1720 :
Sur la lin d'août de l'annéo 171'.), la planète de Mars s'est trouvée plus proche
de la Terrr- quelle non avait été depuis longtemps.
Comme cette situation était des plus avantageuses pour la recherche de la pa-
rallaxe de cette planète, et pour l'observation de ses taches qui ne peuvent se bien
distinguer que dans les oppositions les plus proches de la Terre, nous en avons
profité autant que le ciel nous l'a permis.
En observant Mars avec la lunette de 31 pieds, nous avons remarqué des taches
difTiTcntes, qui, par la révolution autour de son axe, ont paru en divers temps dans
la partie de son disque exposée à la Terre. Parmi ces taches, il y avilit une bande
obscure un peu large qui n'occupait (ju'environ la moitié de l'hémisphère de Mars.
Elle n'était pas perpendiculaire à l'axe de sa révolution, comme le sont pour
l'ordinaire la plupart des bandes de Jupiter; mais elle eu était fort inclinée, en
sorte que quand elle se trouvait tout entière dans l'hémisphère exposé i\ la Terre,
l'extrémit*; terminée par le bord oriental était entre le pôle septentrional et son
équinoxial et l'autre extrémité terminée par le bord occidental tombait assez
proche du pôle méridional. Vers l'extrémité orientale de la bande, il s'y en
joignait une autre inclinée à la première, qui faisait à cette jonction un angle,
avec une pointe assez sensible, l'autre extrémité de la bande étant dirigée vers
le p<Me méridional {ftfj. B).
(') Nouvelles observaliuiis de Mars. Ilisluirc cl Mcmoivcs de l Académie des
Sciences, année 17'20. p. lîi.
40 LA IM.ANKTK MARS.
Cet angle, avec la pointe assez hieu marquée, nous a servi à vérifier de nou-
veau le temps de la révolution de Mars autour de son axe.
Le l;i juillet, jobservai à 3'' -iO'» du matin la irrando liande ol)li(|uo éloaduc on
ligne droite dun bord à laulre (/î;/. A), mais on ne remarqua aucun angle, quoique
la pointe dût paraître alors dans le disque apparent proche de son bord occiden-
tal; ce qui diume lieu de croire iprellt> n'était pas encore visible, et ({u'elle s'est
formée depuis ce temps-l;\ par quelque changement assez ordinaire qui arrive en
peu de temps aux parties qui forment les taches de cette planète.
La bande oblique et brisée n'est pas la seule tache que l'on ait remarquée sur
Mars : il y en avait une autre de figure triangulaire et assez grande dans une partie
de sa circonlrrence éloignée de plus de 130° de l'endroit où était la bande coudée.
Nous l'observâmes le 5 et le (3 août, vers le milieu du disque apparent dont
elle occupait la plus grande partie, ayant une des jiointes du côté du pôle sep-
tentrional, et sa base proche du pèle méridional {fuj. ])).
Elle disparut les jours suivants, en passant dans l'hémisphère oppose et on l'a
vue retourner une autre fois le i6 et le 17 octobre, après avoir fait 72 révolutions,
chacune de 24''40'"10s comme par les observations d(^ l'autre tache.
Outre ces taches obscures qui étaient situées en différents endroits de la sur-
face de Mars, il y en avait une autre fort claire et fort éclatante proche du pôle
méridional, qui offrait l'aspect d'une zone polaire {fig. C et D).
Durant nos six mois d'observations, elle a été sujette à diffé'rents changements :
ayant paru très claire eu certain temps, et en d'autres très faible, et après avoir
disparu entièrement, elle reparut avec le même éclat qu'auparavant.
Toutes les fois qu'elle était claire, le disque de Mars ne paraissait pas rond, mais
la partie méridionale du bord qui la terminait paraissait excéder et former en cet
endroit une espèce de tubérosité ou de calotte d'une portion de cercle plus grand
que le reste du bord; de sorte que, dans cette rencontre, cette planète, vue avec
la lunette, offrait à peu près la même apparence que fait à la vue simple la Lune,
lorsque, dans son croissant et dans son décours, une petite partie seulement du
disque éclairé par les rayons directs du Soleil est exposée vers nous (.'t que l'autre
partie est éclairée par les rayons réfléchis de la Terre qui nous la rendent visible,
car pour lors la partie du disque de la Lune éclairée par les rayons directs paraît
être une portion d'un plus grand cercle que le reste qui est éclairé par les rayons
réfléchis. Or, comme cette apparence de la plus grande portion de la Lune n'est
formée dans l'o.'il que par la plus forte impression des rayons plus lumineux, de
même il y a lieu de croire que l'apparence de .Mars était causée dans l'œil par
l'éclat de sa partie plus claire et plus vive que le reste de son disque.
En comparant ensemble les observations de la txiche claire, nous avons reconnu
que la diversité d'apparences qu'elle a présentée avait quelque rapport à la révo-
lution de Mars autour de son axe, car en prenant pour époque l'observation que
je fis le 17 mai 1719, dans laquelle la tache parut fort claire, si l'on ajoute
.37 jours qui font 30 révolutions entières, on aura le 23 juin pour premier retour
de la tache au même endroit du disque. En ajoutant de nouveau 37 jours au 23 juin,
71'J
ANCII'NNKS OliSKIlVATIONS. ^ .MAUALDI.
on aura pour secoutl retour le :i(i juillet, le troisièuie retour sera le 5 septemlire,
le quatrièuie au 1. octobre, et au IS uoveuilire le einriuièiue retour.
La taclio a paru fort claire aux temps uiarqutîs par ces diUerents retours toutes
les fois (juc le ciel a été favorable, et elle faisait raf)parence dont on a parlé, et
si ce jour-là le ciel n'était pas serein, elle a i)aru quelque-s jours avant et après;
car elle occupait proche du pôle méridional une grande portion du globe de Mars,
elle était visible jwndant phisieurs jours. Ces apparences peuvent donc S('X-
l-'ig. -24.
A. — i;; juillet 1710.
15. — 19 août, 25 .sept., 28 octobre 1710.
C. — Aoùt-octobrc 1710. D. — .") août, 10 octobro 171'.).
Ucs>ius lie Mars faits par MaraUli en 1710.
pliquer par la révolution de .Mars autour de son axe, qui ramène la même partie
claire dans l'endroit du disque exposé plus directement à notre vue.
Présentement, si l'on prend la même époque du 17 mai oîi la tache parut fort
claire, et qu'on y ajoute 18 jours, on aura le temps oîi la partie du disque de Mars
opposée à la ])artic claire doit être exposée à notre vue. Ce temps tombe au
4 juin. Nous vîmes le premier du même mois dans cette partie du disque une
clarté assez sensible étendue ilun bord à l'autre, mais elle ne paraissait pas aussi
claire que celle de la partie opposée, ce qui fait voir que la matière qui formait
la clarté était pour lors répandue tout autour du pôle austral de Mars, mais que
dans un endroit elle avait beaucoup plus d'éclat que dans l'autre.
4Î LA PLAM/n: MAHS.
l'ouravoir les temps des autres retours do la partit^ moins claire ilaiis l'iu'ini-
sphèro expos(5 à la Terre, on ajoutera au i juin eontiniiellement ;!7 jours, et
on aura le temps du seeoud au 11 juillet, le tmisième retour sera au 17 août, le
quatri<>me au "^o septembre et le einquième au 30 oi-tobre. Le 12 juillet, elle jiarut
à peu près eomme au commeneemeut de juin : mais depuis le 12 août, qui est le
temps du troisième retour, jusqu'au 22 du même mois, elle a été moins claire et
moins étendue, de sorte que cette troisième fois elle paraissait diminuée par
rapport à ce qu'elle avait été le i juin et le 12 juillet. Cependant, sur la (In d'août,
elle aurait du paraître plus graude et plus belle par raison (roi)tii(ue, ;\ cause que
Mars était pour lors plus proche de nous que dans les apparitions précédentes,
ce qui fait voir qu'elle était diminuée réellement.
Dans le quatrième retour, qui tombe au 23 septembre, non seulement elle avait
encore diminué comme dans les jours précédents, mais elle avait disparu, ayant été
entièrement invisible depuis le 16 septembre jusqu'au 26 du môme mois ; cependant
37 jours après, c'est-à-dire le 30 octobre, lorsque les mêmes parties du disque
qui, le 23 septembre, avaient été exposées à la Terre, devaient retourner au même
endroit, ainsi que nous l'avons vérifié par le retour des taches obscures et que
par conséquent la tache claire devait être invisible, elle parut de nouveau, l'ayant
observée le 28 octobre, le 3 novembre, le 5 et le 9, c'est-à-dire deux jours avant
le temps marqué par la période, et trois jours après. Ainsi, il n"y a pas lieu de
douter (pi'on l'aurait vue aussi le 30 octobre aussi bien que les jours précédents
et suivants, à cause de la grande étendue qu'elle occupait, sice jour-làle ciel eut
été serein.
On voit donc par ces observations que de toute la clarté répandue autour du
pôle méridional il y en avait une grande partie qui, pendant plus de six mois que
nous l'avons observée, a paru toujours avec beaucoup d'éclat, au lieu que l'éclat
de l'autre partie qui était dans l'hémisphère opposé a été sujette à des variations,
ayant paru assez claires en juin et juillet, et ayant ensuite diminué d'éclat et
d'étendue jusqu'à disparaître entièrement au mois d'aoiàt et de septembre, dans
le temps même que Mars était plus proche de nous.
Cette diversité d'apparences dans une partie de la tache située proche du pôle
méridional marque qu'il y a eu quelque changement physique dans la matière
qui forme la clarté, ou bien que rincliuaison de l'axe de la révolution de Mars a
été sujette à quelque variation.
Mais il faut remarquer que, si la diversité d'apparences et la disparition de
cette partie de la tache claire de Mars avaient été causées par la dilTérente incli-
naison de l'axe, les autres taches obscures situées vers h' milieu du disque
auraient dii paraître en même temps plus proches qu'auparavant du bord méri-
dional, ce qui n'est point arrivé, ayant paru au môme endroit, sans aucune diver-
sité sensible, autant que nous l'avons nu remarquer. Il y a donc lieu de croire
qu'elle est arrivée j)cir quelques changements physiques.
Il est vrai que ces changements doivent être supposés bien grands et subits
pour qu'ils fassent de si loin les apparences que nous avons remarquées, mais
1719 ANCIENNES OHSE II VATIONS. — \I\U\I.lil i3
ils no sont pas sans exemple dans ([uol(|iios aiitiTs jtlanètcs, coimnr' dans li-
Soleil, dans Jupiter et dans les taches de Mars.
Bien qu'une jj^rande partie de la tache claire ait (';U: sujette aux chan,i,'ements
qu'on vient de remarquer, elle subsiste néanmoins depuis près de 00 ans qu'on
observe cet astre avec do {^'ramlcs lunettes, et l'on peut dire qm* r'nsl In seuln
tache ([id s'est conservée, qnoiqu'av<>e ([uelque diversité de grandeur et de clarti',
peiid.iul que /es autres ont clminji'- it,> /'l'iurc, de situation, et mémo ont disparu
entit'rement.
C'est ce ([ui est arrivé aussi à une autre tache claire située proche du pôle sep-
tentrional, et qui faisait à l'éLrard de ce |)ûle la môme apparence que fait la tache
située proche du jiole méridional. On l'a vue pendant plusieurs années avec dif-
férents degrés de clarl»'. KIli' iiarut encore assez souvent vers l'opposition de
Mars qui airiva en ITOi. Ses apparitions furent plus rares pendant l'année 1717,
ne l'ayant pu voir qu'une fois ou deux. Et enfin elle n'a point été visible durant
l'année 171'.), quoi(|u'on y ait fait attention pour la voir, ce qui lait connaître qu'elle
s'était dissipée entièrement au lieu que celle qui est du cùté du pôle méridional
a paru pendant la m<"me anni-e 171'.» beaucoup plus claire que les années pri'-
fédiMites.
Les taches obscures qui ont ]>aru on divers temps sur Mars ont <'t('' aussi
sujettes ;\ de g:rands changements, ayant varié considérablement de figure, de
situation et de grandeur. Nous nous contenterons fie rapporter seulement ici ceux
qui leur sont arrivés dans les deux dernières oppositions, lorsque Mars était plus
jiroche do la Terre.
En !7()î, nous observâmes une bande étendue d'Orient en Occident qui occu-
pait un hémisphère de Mars. Elle était située vers le milieu de son disque, et
était assez uniforme, hormis une pointe tournée vers le pôle septentrional qu'elle
avait au milieu de sa longueur. Durant ([uelques mois que nous l'observâmes,
(die fut sujette aux changements rapportés (voir plus haut, p. 30 et /irj. 22). Dans
les autres parties de la surface de Mars, il y avait des taches confuses et mal
terminées.
Vers l'opposition de rannée 1717, parmi les différentes taches que nous remar-
quâmes dans Mars, il y avait encore une bande assez bien marquée, mais boau-
cou)) plus ('tendue (!'( >rient en Occiilent (pie celle de 170 1, ocrupant jilus d'un
hémisphère, ce que nous avons reconnu par les apparences qu'elle faisait à diffi'-
rentes heures de la m(jine nuit. Elles étaient partout uniformes, au lieu que celle
de I7ii'j avait au milieu une pointe. Outre ces diiïérences dans la figure, il y en
avait encore une considérable dans la situation, car celle de 1717 était située
entre le centre apparent de Mars et le pôle méridional, plus proche du p("ile que du
milieu : au lieu que celle de I7(l'i s'était trouvée fort proche du milieu.
Depuis le iviois de juin jusqu'au eommen("ement de septembre, nous la vîmes
disparaître trois fois sur le bord oriental, ayant passé dans rin-misphère supérieur
qui nous était caché: elle est retournée autant de fois dans rhémisphère inférieur
au\ mêmes heures du jour, et dans la morne situation. Mars ayant fait dans cet
44 I. \ iM. A Ni: ri: ma us.
iiittM-vallo plus do 70 révolutions. Dans l'autro iK'iuisiiliôro tlo M;irs. il y avait iino
taclio en forme de croissant, dont les pointes ôtaitMit sitiiccs vers les doux polos
et la courbure tournée du cotd de l'Occident. Toutes; ces taches ne furent sujettes
;\ aucun changement sensible durant iilusieurs mois que nous les observâmes
en 1717; mais en I7!',i (dlcs n'étaient plus les mêmes.
Un voit doue (ju'il y a de i^rands changements sur la surface de cette planète,
non seulement dans les parties qui sont proches de son é(iuinoxial, où le mou-
vement doit être plus grand, mais même dans celles qui sont autour des pùles,
où le mouvement est beaucoup moins sensible.
Telles sont les observations de MaralJi. Nos lecteurs auront excuse la
longueur de cette narration et son style un peu diffus en faveur de la sin-
cérité et de l'intérêt de ces observations. Les quatre dessins de Maraldi ont
été reproduits ici [fig. 24) en fac-similés. Le premier (A) représente la bande
oblique dont il parle au commencement de son mémoire, et qu'il observa
notamment le 13 juillet. Le second (B) représente l'angle qui lui a servi à dé-
terminer la rotation, du 19 août au "28 octobre. Le troisième (G) paraît avoir
eu surtout pour but de montrer la tacbe polaire méridionale, et le quatrième
la tache triangulaire située à 130° de la bande coudée, et observée notamment
les 5 et G août ainsi que les IG et 17 octol)re. Cette tache rappelle les croijuis
de Huygens des 28 novembre 1G59 (p. IG) et 13 août 1G72 (p. 32) et repré-
sente certainement la mer du Sablier. La large bande obKquc de lu fig. B doit
être la mer Schiaparelli, située à 130" de la mer du Sablier. 11 faut avouer
que les instruments n'avaient pas alors un grand pouvoir de délinition (*).
En 1704 nous avions déjcà quatre points d'acquis : 1° Mars a des taches
sombres; 2*' Mars lotirne sur lui-même en 24''30'" environ; 3*" ses taches sont
variables; 4° les pôles sont marqués par des taches claires. Les observations
de 1719 confirment ces quatre points et lui en ajoutent un cinquième : la tache
polaire australe est excentrique au pôle; tantôt elle se présente à nous et tan-
(') A propos des anciens dessins de Mars et de la valeur optique des instruments qui
servaient à ces observations, il n'est pas sans intérêt de rapporter la remarque suivante
de Cassini II, écrite le "24 avril 1720, sur les lunettes de l'Observatoire :
« Les deux étoiles qui composent l'étoile double y de la Vierge occultée par la Lune
le 21 avril 1720, sont si proches l'une de l'autre que par une lunette de 11 pieds elles
ne paraissent que dans la forme d'une seule étoile allongée et que par une autre
lunette de 10 pieds, la distance entre ces deux étoiles ne paraissait tout au plus que de
la longueur du diamètre de chacune de ces étoiles prises séparément. •>
Or, en 1720, les deux composantes de cette étoile double, qui sont de 3° grandeur,
étaient écartées à 6" l'une de l'autre. Nos plus petites lunettes actuelles, de 57""" d'ou-
verture, suffiraient pour opérer ce dédoublement.
La lunette dont se servait Maraldi pour ses observations de Mars en 1710, était une
lunette de 3i pieds. Elle ne valait i)as nos lunettes actuelles de 108""" de diamètre et
de l^jGO de longueur.
ITl'.l ANCIENNES OBSERVATIONS. 4-,
tôt elle est c;irh('C. MaraKli n'ose pus chercher la cause de ces taches polaires
et ne prononce ni le mot glaces, ni le mot neif,'es, ni môme le mot nuages. Il
sera réservi- à William llerschel de délinir ce cimjuième fait par des mesures
précises et de prouver (jue ce sont là des fjlrices polnircs analogues à celles
dos pôles terrestres, fondant en été et se reconstituant en hiver.
Nous avançons donc graduellement dans la connaissance do ce monde
voisin. Mais un i)Oinl reste hicu mystérieux : c'est hi variation d'aspect,
d'étendue et même de situation dos taches somhres, qui existent bien
réellement puisqu'elles servent à déterminer exactement la rotation. Ces
quatre nouveaux dessins ne ressomldent encore ni à ceux de 1704 ni à ceux
de IGGO. 8eraient-co, comme dans Jupiter, des bandes nuageuses de nature
purement atmosphéri(]ue? Maraldi le croit. Cependant, nous avons vu plus
haut qu'il y a des taches de nature géographique, puisque la mer du Sablier
dessinée par lluygens [fig. 9 et 19), llooke [fig. 15) et Maraldi lui-même
[fiij. 24 D), existe encore de nos jours. Les mers de Mars donneraient-elles
naissance à des brumes sombres? Les bandes observées en 1704 et en 171'J
étaient-elles des bandes nuageuses? Mais des nuages vus d'en haut, éclairés
par le Soleil, peuvent-ils paraître sombres? En ballon, passant au-dessus
d'eux, je les ai toujours vus blancs comme de la neige. Pourtant, il y a cer-
tainement sur Jupiter et sur Saturne des bandes nuageuses sombres. Que sont
donc ces taches variables de Mars? La continuation de ces recherches nous
éclairera peut-être.
Un mot encore, à propos de ces dessins, plus ou moins vagues. Xous avons
Fie:. "[).
Ce que deviennent les dessins astronomiques.
pris soin de les reproduire tous par la photogravure et de n'admettre aucune
relouche. C'était le point le plus important [lour notre élude. Il est urgeni
de ne consulter que les dessins originaux, car bien souvent, de proche en
proche, graduellement, insensiblement, de copie en copie, ils subissent les
plus étranges métamorphoses. C'est ainsi, par exemple, que des dessins d(^
Cassini et de Maraldi on a été jusqu'à tirer la ftg. ^ô, (]ue nous reproduisons
d'après un ouvrage de Pierquin, Œuvres physiques et géographiques, imprimé
fort luxueusement à Paris en 1744.
46
l.A PLANKTI-: M A II S.
VA on lit dans cet ouvrage, à l'appui de ce dessin : « M. Cassini a dccouvcrl
dans le disiiue de celte planète quatre taches obscures semblables à celles
de la Lune; trois représcnlenl d'un côté un jhckjoI cl tnic /î(/iire tVhomme;
et dans la face opposée, on voit connue une forme de pilon, (ju'on pourrait
nommer le pilon d'Esculape. »
Celle fantaisie montre qu'il faut se défier des interprclalions, lors même
qu'elles n'atteignent pas ce degré, cl que nous devons nous-niénics ne voir
et ne dessiner que ce qui existe. Mais conlinuons notre étude. Les instru-
ments ne s'améliorent pas vile, car le pilon d'Esculape, que nos lecteurs ont
pu remarquer, en effet, dans les dessins de Cassini (p. 19), semble encore se
retrouver ici.
XVill. -M.-me année 171!». — Uianciiim {').
Blanchinus (ou Diancbini, en italien), astronome de Vérone, ami des papes
Fig. %.
Y..
21 septembre, lûi-SV". 24 septembre, 7''. ■:4 septembre, U'' 30"-.
Dessins de Mars faits par Bianchini en 1710.
Alexandre VIII, Clément XI et Innocent XIII, auquel on doit de si curieuses
observations sur Vénus, a observé Mars pendant l'opposition de 1719 et ne
{') Observations de Mars faites en 1719, publiées en 1737. Francisci DUnchini vero-
nensis aslronomica; ac geographicœ observaiiones, seleclœ ex ejus aulographias. —
Vérone, 1737.
I7i(i-ITTI ANCIENNES OBSEU VATIONS. 47
paraît pas avoir été aussi bien servi par celle planète que par la première.
Nos lecteurs en jugeront par les six dessins ci-dessus [fig. 2G), que nous met-
tons sous leurs yeux. Le premier est du 10 septembre, à 10''28'" (lunette
de 23 palmes, de Campani). Le second est du lendemain 20 septembre,
à 10''30"', Mars étant au méridien comme dans le cas précédent. Lo 21 sep-
tembre, dans les mêmes conditions, il obtint la figure suivante. Les trois
autres sont du 21 septembre, doux lieures et demie après l'observation précé-
dente, du 24 septembre, à TTt"', et du même jour, à 9''.'}0"'. Ces figures ne
prouvent pas grand cbose, et sont plnbjt faites pour accroître notre per-
plexité. Ne croirait-on pas voir des os de mort sur un disque blanc?
Ses observations et ses dessins « géographiques » de Vénus, qui ont été en
partie confirmés en notre siècle, ont été obtenus à l'aide d'instruments plus
nets et plus puissanls sans doute. On trouve dans le même ouvrage un dessin
de Vénus, fait le 7 janvier 1728, à l'aide d'une lunette de Campani de
9t palmes, par une très belle nuit, de ti'' à 7'' du soir, ijuatre observateurs cer
tifîent avoir reconnu absolument les quatre mers représentées; l'un d'entre
eux ajoute même : « maxima voluptale. » Les quatre taches sombres vues
sur le disque de Vénus en quadrature ont été baptisées par Blancliinus des
titres de « mer de Vespuce, de Galilée, Royale, et de l'infant Henry. » Cette
observation est curieuse, et l'on ne se serait pas douté alors que la géogra-
phie de Mars serait plus rapidement connue que celle de Vénus.
Cette figure est analogue à celles du même observateur que nous avons
reproduites dans notre ouvrage les Terres du Ciel, au chapitre de A'énus.
Signalons encore ici, pour mémoire, deux publications sur Mars faites, la
première en 1731, par B. H. Ehrenberger : De Marte (Coburgi); la seconde,
en 1738, par Cî. M. Bose : De Marte Conglacianlc (Lipsiœ).
XIX. 174U. — Cassini If i').
Cet astronome, fils de Dominiijue Cassini et son successeur à l'Observatoire
de Paris, a réuni dans cet ouvrage les observations de son père et celles de
Maraldi. Il n'y ajoute rien. L'auteur ne reproduit aucun dessin, quoiiju'il en
donne de Vénus. Il semblait alors que la géographie de Vénus serait plus
rapidement connue que celle du Mars.
X.\. 1704, I7l't(>. — Messie».
Le .L'rand découvreur de comètes a fait à Paris (il y avait son observatoire
au-dessus de Phùtel de Cluny) une observation de*Marsle3 mai 17(>4, vers
('1 Éléments d'Astronoruic, p. iôT-iOl.
48 I.A IM.AXr.TK MARS.
deux heures du nialiu. Ou voyait sur le dis(iue trois baudcs analogues à celles
de Jupiter, d'une nuance très faible, la bande du milieu plus large que les
deux autres, et sa moitié plus ombrée. Cette figure a été publiée quarante
et un ans plus lard, dans la Connaissance des Temps pour 1807. Nous ne la
reproduisons pas ici parce qu'elle ne nous apprend rien.
Le même astronome a observé Mars les 7 et 27 novembre de celte année et
eu a fait deux dessins, publiés également dans la Connaissance des Temps pour
1807. On remarque deux taches faibles. Observation insignifiante pour le but
de notre travail.
En celte même année 1766, au mois d'août, le cardinal de Luynes, à Nolon,
et le duc de Chaulnes, àChaulnes, observèrent la même planète et en en-
voyèrent à Messier chacun un dessin (publiés dans le même recueil). Dessins
vagues, indécis, qui n'apportent aucun document à notre discussion.
XXI. 1771. — Lalande.
Voici tout ce que cet astronome dit de Mars dans son grand ouvrage (') :
Le globe de Mars ne paraît jamais en croissant, comme Venus et Mercure,
parce qu'il est au delà du Soleil; mais on lui voit prendre une figure elliptique,
et sa rondeur est diminuée à peu près comme celle de la Lune trois jours avant
sou plein.
Foutana observa en 1G3(J une tache obscure sur le disque de Mars. Le
P. Bartoli, jésuite de Naples, écrivait le 2i décembre 1644 qu'avec une bonne
lunette de Sirfali il avait vu Mars presque rond, avec deux taches au-dessous du
milieu; cependant il y eut des temps où Zucchius ne les vit point, et cela fit
soupçonner le mouvement de Mars autour de son axe. M. Cassini observa mieux
que personne les taches de Mars en IGGO, et elles lui firent connaître que Mars
tourne sur son axe eu 24** 40'»; il publia un mémoire à ce sujet, qui a pour titre :
Martis circa 'propriuni axem revolubilis observationes, Bononiœ, 1666, in-fol. ;
dans lequel on voit que l'axe de Mars est à peu près perpendiculaire à son orbite,
autant qu'on en peut juger par des taches qui sont peu propres à cette détermi-
nation. Il observa encore ces taches à Paris en 1670. M. Maraldi les observa en
1704 et 1706 et trouva aussi la durée de sa rotation de 24''39'". Ces taches sont
fort grandes, mais elles ne sont jtas toujours bien terminées et changent souvent
de figure d'un mois à l'autre; cependant elles sont assez apparentes pour qu'on
soit assuré de la rotation de Mars. »
C'est là un résumé, assez incomplet, des observations qui précèdent. L'exis-
tence des taches sombres et la rotation : voilà tout ce que le célèbre astro-
(') Astrûnomie, tome 111, p. 430.
1777-1783 ANCIENNES OBSEIl VATIONS. — W II I-IISCII KL. 40
nome signale sur Mars au point de vue de sa constitution physique. Ou ne
parle pas encore des taches pohiircs hianchcs déjà visihles sur les dessins de
Iluygeus et surtout sur ceux de Maraldi; on no les assimile pas encore à
des glaces soumises à l'inlluence des saisons; on remarque l'inclinaison de
l'axe sans pouvoir encore la mesurer. Le progrès subit un temps d'arrêt (jui
va être rapidement réparé.
X.\ir. 1777, 1779, 1781, 1783. — Willi.vm IIerschel (•).
L'illustre astronome s'est spécialement occupe de la planète Mars pendant
les oppositions de 1777, 1770, 1781 et 1783 et a publié ses observations en
deux mémoires ayant pour titre, le premier, Aslronomical observations on thc
rotalion ofthe plancts, etc. ; le second. On llic rcmarkable appearanccs al thc polar
régions of thc planct Mars, the inclination ofits axis, etc. Ces observations sont
accompagnées de dessins que nous publions plus loin. Dans ces deux
mémoires, le but de William Herschel a été spécialement l'étude de la durée
de rotation et des variations polaires : la géographie de Mars y est h peine
étudiée, la plupart de ces dessins étant de simples esquisses. On croit pour-
tant y reconnaître quelques-unes des principales mers visibles; ces croquis,
comme les précédents, plaident également en faveur de variations, dans les
taches sombres aussi bien que dans les claires.
Les instruments dont il se sei-vit pour cette étude étaient très supérieurs
en puissance à ceux qui avaient été employés jusque-là. L'aspect, la blan-
cheur et la variation des taches polaires le conduisent à conclure que ces
taches représentent des masses de glaces et de neiges accumulées vers les
pôles et il attribue leurs variations à l'influence dissolvante des rayons
solaires auxquels elles sont exposées pendant la révolution de la planète le
long de son orbite. Observés avec soin par lui, les changements qui arrivèrent
dans ces taches apportèrent une confirmation immédiate et ponctuelle à ces
vues. Ainsi, pendaut Tannée 1781, la tache polaire australe se montra très
étendue, ce à quoi l'observateur s'attendait, puisque ce pùle venait de demeu-
rer pendant douze mois dans une nuit perpétuelle. En 1783, cette tache était
devenue considérablement plus petite et ou la vit continuer de décroître
pendant toute la série des observations, depuis le 20 mai jusqu'au milieu de
septembre. Pendant cet intervalle, le pôle austral avait déjà reçu pendant
huit mois le bénéfice de l'été et continuait encore de recevoir les rayon»
(') PhilosopJiirnl Trans:actions for 1781, vol. J^XXl, Part. 1, page 115. ~ /(/., for
1784, vol. LXXIV, Part, il, page 233.
Flam.marion. — Mats. 4
:,o i.A I'I.am:th m. vu s.
bolaircs, (]iioi(iue, vers la lin de cette période, dans une direction si oblique
qu'ils ne devaient plus guère avoir d'efficacité sur la fonte des neiges. D'un
autre côté, pendant l'année 1781, la tache polaire boréale qui avait été expo-
sée à la chaleur solaire pendant douze mois et allait s'en retournant vers la
nuit, paraissait petite et s'accroissait graduellement. Cette explication de
William Herschel sur les taches polaires de Mars a été adoptée depuis cette
époque comme la plus naturelle, la plus simple et d'ailleurs la plus logique
puisqu'elle est identiijue à celle de nos propres taches polaires terrestres.
Nous pouvons penser, il est vrai, que les conditions physiques, climatolo-
giques et météorologiques ne sont pas les mêmes sur les autres mondes que
sur le nôtre. Mais rexplication par analogie est évidemment la première que
la nature nous offre elle-même. Lorsqu'elle suffit complètement pour expli-
quer un phénomène observé, il n'y a pas de raison pour en chercher une
autre.
Pendant cette même période d'observations en 1777 et 1779, William
Herschel conclut du mouvement des taches une période de rotation de
24^ 39" 21 ',67. Nous verrons plus loin que cette période a été corrigée en
1840 par Miidler, d'après les observations d'Herschel même-
Il trouva en même temps que l'inclinaison de l'équateur de la planète sur
l'écliptique est de 28"42' et que son nœud ascendant est situé à 19"28' du
Sagittaire.
Nous donnerons ici une analyse détaillée de ces deux importants mémoires
de William Herschel ( • ) .
PREMIER MÉMOIRE (2)
Lu le 11 janvier 1781, envoyé de Batli le 18 octobre 1780.
Comme son titre l'indique, ce travail a pour but de déterminer la durée de
la rotation des planètes, afin de vérifier par cette durée si la rotation diurne
de la Terre reste toujours égale. L'auteur commence par traiter des mouve-
ments de la Terre et principalement de son mouvement diurne, et il suggère
l'idée de vérifier la constance du mouvement diurne d'une planète par le mou-
vement diurne d'une autre. 11 s'occupe principalement ici de Jupiter et
de Mars.
Les observations de la planète ont commencé le 8 avril 1777 et n'em-
brassent que quatre jours de cette année, les 8, 17, 26 et 27 avril. L'illustre
(') Philosophical Transactions, 1781, page 134, et 1781, page 273.
(^) Aslronomical observations on the rotation of the plancts round their axes,
made \\^itli a view to détermine wliether the Earth's diurnal m.otion is perfectly
equable.
iT77-i7T'.i an(.ii:nm;s t)Usi:uvvri((NS. — w . iii:i{S(:iii:l. ji
astronome les a reprises le U mai 1771) et les a cuiiliauées jusqu'au T.) juin
de cette même année.
^'oici les i)rinci|)alcs :
s avril, "''.ÎO'". — J'observe deux taches sur Mars séparées par uiiu ljaud<; hril-
laate ( \cw/c'c ci-dessous, fij. 1 i).
//u/./J.
*/t/^. 7 à
: f-
'%'/•
e\-
,9^.j8.
<:^i^.Tç.
rL
'////. 2à.
tJ'/ç.2r.
%
rj'l^.22
Fit,'. 27. — Dessins do Mars par William Ilcràchul, eu 1777 et 177'J (/•ac-simi/t-).
Même soir, 9''3U'". — Les taches sont avaucées sur le disque et l'on un voit
davantage [fvj. \'.)).
La rotation de Mars sur son axe est maintenant très évidente ( /Zy. IG).
(Observations faites avec un télescope uewtoiiien de il» pieds; grossisse-
ment = 300).
17 avril. — Télescope newtonien de 10 pieds, grossissement = "211. 1^ 50'". Mars
paraît comme dans la /?;/. 17. En a et h, on voit deux taches brillantes si luiiii-
r.e i.A iM.ANKTi: mars.
lieuses quV'Uos soniblcnt se projeter hors du di.S(jue. Eu c et d, on voit deux
taches très foucées réunies par une ligne noire, croisées dans la direction cf par
uue séparation blanchdtro.
•26 avril. — Même instrument, même oculaire. ',)'■ 5"'. Les taches sont très faibles
et apparaissent comme dans la /?;/. 18.
"J7 avril.— Momc instrument, grossissement = 3-24. 8''-iO'". Très belle soirée, té-
lescope en bon ordre; les taches se présentent comme dans la fuj . l'J.
A\'illiani Herschel a repris, avons-nous dit, ces mêmes observations du
0 mai au 19 juin 1770. Voici les principales :
9 mai, il'' I'". — Je trouve la situation des taches telle qu'elle est représentée
fig. "0; il y a une tache très remarquable non loin du centre.
Même jour, 1 1''o0'". — Les taches se sont éloignées du centre.
1 1 mai, lu'' IS'". — La tache du 9 mai est visible sur le disi[ue, sa région la plus
foncée se trouvant au sud-est du centre {fig. 21).
Même jour, 11''43'". — La région la plus sombre est arrivée au centre {fig. 22).
13 mai, 11'' 20*". — Mars parait tel qu'il était le 11, à 10''18".
22 mai. à 10'' 10'». — On voit sur le disque de Mars les mêmes configurations
que le 8 avril 1777, à 7'' 30"" {fig. 14).
15 juin, à 9''45'". — La planète présente la figure qu'elle présentait le 9 mai, à
H'-l"" (fig. 20), mais plus avancée.
17 juin, de 9'' à 10'', même aspect.
19 juin, SI* 40™, même aspect que le 26 avril 1777, à 9'' 5'", représenté fîg. 18.
Telles sont les observations d'Herscliel; en combinant entre elles les
figures de 1777 avec celles de 1779 ainsi qu'en vérifiant celles de cette der-
nière période les unes par les autres, il conclut pour la rotation sidérale de
Mars la valeur suivante :
24''39'»21%67.
Nous avons reproduit ici un fac-similé des dessins d'IIcrchel lui-même, tels
qu'ils ont été publiés dans la PI. VI des Philosophical Transactions, à laquelle
renvoient les descriptions précédentes. Notre fac-similé est de la même
dimension.
La fuj. 17 représente certainement la mer du Sablier, de c à la zone
ponctuée ef. Nous pouvons aussi reconnaître celte même mer sur les fig. 20,
21 et 22, et Ton a en même temps l'impression évidente que chaque ob.ser-
vateur voit et dessine à sa façon. En 1777, Mars se trouvait en une opposition
presque aphélique, nous présentant non plus son pôle austral supérieur,
comme en 1672 [fg. 20, p. 32), mais son pôle boréal inférieur. L'hémisphère
ayant la mer du Sablier à son centre offrait la configuration représentée
ci-dessous [fig. 28), jjar la projection du globe dont nous avons parlé plus haut.
1777-1779 ANCIENNES OBSKH NATIONS. — \V. HEUSCIIKL.
53
L'identificalion n'est pas difficile pour les fij^'ures 17, 20, 21 et 22d'rierschel.
II n'en est pas do même pour les cinq autres, La Ijimdc blanche est digne
d'attention.
I']vidomincnl, dans tous les dessins que nous avons eus jusqu'ici sous les
yeux, les observateurs n'ont vu qu'à peu près et assez vaguement ce qui
existe à la surface de Mars.
A propos de la comparaison des figures de 1777 avec celles de 1770, Ilors-
Le globe de Mars nous présentant son pùle inférieur (oppositions aphéliques).
1777-l7!.v;>-1807-lS?M8:]7-l8ô-2-18G9-18Si-86.
chel examine comment on doit réduire les rotations observées, qui sont des
rotations synodiques vues de la Terre mobile, en rotations absolues ou
sidérales :
Supposons, dit-il, que l'orbite de Mars MABC (ftg. 20) soit sur le même plan
que l'orbite de la Terre EDP'G et que l'axe de Mars soit perpendiculaire à son
orbite; soient MEjne les positions respectives de Mars et de la Terre le 13 mai
et le 17 juin (ITT'.t), la li.^nc KM qui joint les contres de Mars et de la Terre indique
la position ;îdocentrique de Mars le 13 mai, et la ligne cm la position géoccn-
trique de la même planète le 17 juin. Menons maintenant les lignes cr et 7ns,
parallèles à ER, alors la ligne cr indiquera la position géocentriquc de Mars le
13 mai; l'angle sme est égal à l'angle nier. Nous savons par les epbdmérides
que la position géocentriquc de Mars à n'i^Om était à 7 signes 20° 50' -21' et le
54
l-A PLANKTl- MARS.
17 juin, ;\ '.i'".'™, ;\7 signes l'>"27'-2"iî' ; par quoi nous obtonons la (lilTôroncc ou l'angle
rem = oins = 8° 31' 59*.
Maintenant, une taclie sur Mars située dans la direction Mli aura fait une rota-
tion sidérale lorsqu'elle reviendra dans cette mémo direction ou sur une parallMe
à la direction jïjs. De là nous concluons que la tache du 17 juin, après êtrcî arri-
vée ;\ la ligne me où finit sa rotation synodique, devra encore parcourir un arc
FiK. 29.
Variation apparente de la durée du mouvement do rotation de Mars, selon la position de la Terre.
de 8°31'50" afin d'arriver dans la direction de la ligne ms où elle finit sa rotation
sidérale.
Le temps qu'elle emploiera pour parcourir cet arc au taux sidéral de 2i''3n'"20s
pour 3G0'5 ou 4% 109 par minute do degré sera de .lô^S^jS, chiffre qui, divisé par
le nombre de 3'i rotations, donne 1"'1=, 8, lequel, ajouté à 24'' 38"' 20% 3, nous donne
24'' 39'" 22», 1 pour la rotation sidérale de Mars résultant du tiers des périodes
mensuelles.
Remarquons que le mouvement de Mars est rétrograde dans l'exemple précé-
dent; c'est pourquoi la mesure de l'angle ems a été ajoutée à la rotation synodique
pour compléter la rotation sidérale. Mais si ce mouvement avait été direct, ou si
la planète avait été plus avancée dans l'écliptique que la position que nous avons
considérée, si elle avait été par exemple on [j., alors la ligne [in parallèle à EM
indiquerait la direction à laquelle la tache devrait retourner afin d'accomplir une
ITSI-1T8:! ANCIHNNKS OUSF- Il VA TIONS. — W, Il i: IISCII !• L. r,5
rotation siddralc et par consc'quGnt la quantitc' de l'angle 7;xc = [ter ou la dillV-
rcnee des positions gdocGntriquos devrait être soustraite de la rotation syno-
diquc pour obtenir la rotation sidérale.
r)i:r.\ii:MK mkmoiiœ d'iiehsciiel,
Lu le 11 mars 178 i (').
Comme le titre de ce second mémoire rindiqiie, l'auteur a eu principale-
ment pour objet rétudc des pôles de Mars et de l'inclinaison de son axe. Il
rappelle d'abord l'observation et le dessin du 17 avril 1777 [voir plus haut,
page 51, fîij. 17), et remarque que pendant les observations de 1779, aucune
tache polaire n'a frappé son attention. Ses nouvelles observations s'étendent
du 13 mars au 7 septembre 1781 et du 20 mai au 17 novembre 1783. Nous
donnerons ici les principales.
La fig. 1 a pour but unique de montrer les deux taches polaires observées le
17 avril 1777 (;\ 7''rjO™). Quant aux taches sombres, l'auteur ne s'en inquiète pas
du tout ici, comme on peut s'en convaincre en comparant la fîg. 17 du mémoire
précédent, à la fig. 1 de celui-ci, qui représente la même observation.
La fig. 2 signale la tache polaire australe, d'une étendue considérable, obser-
vée le 13 mars 1781, à 17''40"', à l'aide du télescope de 20 pieds. La figure sui-
vante {fig. 3) reproduit l'observation du 25 juin, à 11 ''36™, faite à l'aide du
télescope de 7 pieds. « Deux taches brillantes, écrit l'auteur, se montraient en a
et 6, a étant plus grande que b. »
Le 28 juin, h 1 1 '' I.j™, la diflerence entre les deux taches était plus considérable
encore, comme on le voit fig. 4.
Le 30 juin, ù, 10''48'», la tache supérieure est seule visible {fig. 5), mais, à M'-Sôm,
on les voit toutes deux.
Le 3 juillet, à 10'»54'", la tache polaire supérieure se montre très considé-
rable {fig. 0); à, ll''2i™, on ne voit pas encore l'inférieure {fig. 7); à I2''30™, on
l'aperçoit ifig. 8). Le 4 juillet, l'astronome remarque que les deux taches ne sont
pas diamétralement opposées l'une à l'autre.
Le 15 juillet, à n'>54'", la tache supérieure est visible {fig. '.)),
Le 22 juillet, à 11'' 14™ {fiig. 10), on distingue bien les deux taches polaires; la
supérieure est plus vaste. « Très probablement, écrit l'autour, le pôle sud est
tourné vers nous, tandis que le pôle nord nous est caché. Si ce sont là des taches
polaires, la tache supérieure australe doit nous paraître, en ciTet, plus grande
que l'inférieure, et si celle-ci s'étend un peu plus d'un cùtc que ilc l'autre du
(') 0)1 Ihe remarUable nppearanccs al Ihe polar i-cgions of Ihe planet Mars, the
inclination of itfs axis, tlic position of ilx ]>oles, a)Kl ils spheroidical figure-, wilh a
few hints relating lo ils rcal diametcr and atmosphère, by William Heiisciiel, Esq.
F. U. S.
56 I.A IM ANF.Tl- M. VHS.
pôle nord, elle doit uous otVrir dos variations apparentes provenant de la rotation
do la planète autour do son axe. »
8 août, à 10'' 4'», on ne voit que la tache supérieure (/?;/. 11 ).
23 août, ;\ 8''4'», on voit la tache supérieure bien évidente comme d'habitude,
et l'on aperçoit un peu de la tache inférieure {firf. 12).
Telles sont les observations faites par l'illustre astronome pendcant l'oppo-
sition do 1781 : on voit qu'elles ont eu pour but unique les lâches polaires.
Nous résumerons également aussi complètement que possible celles de 1783.
20 mai. La planète Mars offre un singulier aspect; on remarque eu a {fig. 13) la
tache polaire brillante, et son éclat est tel qu'elle semble se projeter au-dessus
du disque et s'en séparer au point c.
20 août. La tache brillante de Mars marque son pôle sud, car elle reste fixe à
la même place, tandis que les taches équatoriales foncées effectuent leur rota-
tion constante. Cette tache polaire australe est sensiblement circulaire.
22 septembre. Vue magnifique de la planète lorsqu'elle est vers le méridien.
Une légère brume empêche le rayonnement désagréable et donne une grande
netteté aux objets. Mesure de la tache polaire australe : son petit diamètre, dans
la direction de l'équateur = ["iV".
23 septembre, à O^'ôô"", tache polaire a visible comme d'habitude ifig. 14).
25 septembre, à 12''30'" (fig. 15), tache polaire parfaitement ronde, détachée
du bord du disque. A 12'' 55"», on reconnaît que le cours dos taches équato-
riales est curviligne et convexe vers le Nord, comme ou le voit par la ligne
eq [fig. 23), ce qui prouve que la tache blanche marque bien le pôle sud, et, à
l'aide d'une longue attention, j'arrive à reconnaître le bord du disque au delà de
la tache polaire : la distance entre la tache et le bord est d'environ le quart du
diamètre de la tache.
26 septembre, 12'' 10™, la tache polaire est en ligne avec le centre du disque et
l'extrémité du crochet « hook » (fig. 16).
30 septembre, la planète se présente comme on la voit fuj. 17.
\" octobre. Je suis conduit à penser que la tache blanche a un petit mouvement
de rotation et que, par conséquent, son centre ne marque pas exactement le pôle
de Mars. Le pôle réel doit être dans l'intérieur de la tache, mais près de la
circonférence, vers un tiers de son diamètre. J'espère le savoir dans quelques
jours.
Ici William Herschel suspend la description de ses observations pour dé-
clarer qu'aucune des deux taches polaires ne marque exactement le pôle et
que ce fait est prouvé par leur rotation. Il ajoute qu'elles n'en sont pas très
éloignées; puis il continue dans le journal :
9 octobre, à 10'' 35 ; la planète Mars se présente telle qu'elle est dessinée fïg. 18.
La tache polaire tourne et arrive ensuite vers nous, comme on le voit fig. 24.
FiR. 30.
Ohscrvatioas do la planète Mars faites par William Ilcrschel en 1781 et 178J
r,s i.A PLANi:!!-: m mis.
10 octobre, i\0'' i)") (p'j. 10).
Môme jour, à 0»' ").") (pg. 50).
17 octobre, :i 7'' M ipO--^)-
"23 octobre, à 7'* 11 {pQ- "^^l • ^^ tache polaire doit être à l'extrémité de sou
parallèle de déclinaison.
L'auteur passe ensuite à rexamen du mouvement de rotation des taches
polaires et de leur excentricité. II arrive à la conclusion que la latitude do la
tache polaire boréale, étudiée pendant les observations de 1781, doit éiro 7G°
ou 77" Nord : « car, dit-il, je trouve que pour les habitants de Mars, la déclinai-
son du Soleil le ilô juin 1781, à 1-2'' 15'" de notre temps, était environ 9° 5G Sud
et que la tache polaire doit avoir été assez éloignée du pôle nord pour se trouver
à quelques degrés dans la partie éclairée du globe et être invisilce à nos
yeux. )^ II ajoute :
Le pôle sud de Mars ne pouvait être éloigné du centre de la tache brillante
australe de l'année 1781 ; cette tache était d'une étendue assez grande pour couvrir
toutes les régions polaires jusqu'au 70<^ ou même jusqu'au GO" degré de latitude.
En 1781, la tache polaire australe s'étendait sur un arc de grand cercle
égal h 45°, 50° ou peut-être 60° du globe de Mars : elle ne pouvait avoir une
grande distance polaire ; cependant son centre n'était pas juste au pôle.
11 résulte de cette étude que le pôle nord de Mars doit être dirigé vers 17" 47'
de la constellation des Poissons, et que l'inclinaison de l'axe sur l'écliptique
est de 59° 42'. Puis l'observateur ajoute :
« Ayant ainsi déterminé ce que les habitants de Mars doivent appeler
l'obliquité de leur écliptique, ainsi que la situation des points éqilinoxial
et solsticial, nous pouvons nous rendre compte des saisons de Mars et nous
expliquer ainsi les variations si remarquables des taches polaires. « Ecou-
tons Herschel lui-même :
L'analogie entre Mars et la Terre est certainement la plus évidente parmi toutes
les planètes du système solaire. Leur mouvement diurne est presque le même ;
l'obliquité de l'écliptique, cause des saisons, est analogue; de toutes les planètes
supérieures, la distance de Mars au Soleil est la plus rapprochée de celle de la
Terre, et il en résulte que la durée de l'année martienne n'offre pas avec la nôtre
ces énormes différences que présentent les années de Jupiter, de Saturne et de
Georgium Sidus (Uranus). Si donc nous savons que notre planète a ses régions
polaires glacées et couvertes de montagnes de glaces et de neiges, lesquelles
glaces et neiges fondent en partie lorsqu'elles sont alternativement exposées aux
rayons solaires, il est permis de penser que les mêmes causes produisent proba-»
blement les mêmes effets sur le globe de Mars, que ses taches polaires, si bril-
lantes, sont dues à la vive réflexion de la lumière sur ces régions de neiges et
1781-1783 ANCir-NNES OBSK II NATIONS. - W. il K l{ SCiii-L. 59
de glaces et que la diininution de ces tarlics doit être également attribuée à
l'action dos rayons solaires.
llerschcl passe ensuito à re.vamcn de la ligure sphéroïdalc do Mars et de
son aplalissemont polaire, il ronsidèro d'abord cet aplatissement comme
certain au point de vue théorique de la gravitation et remarque qu'il ne peut
être que rarement mesuré, puisijue nous no voyons entièrement l'hémisphère
éclairé de Mars (ju'au moment des oppositions, c'est-à-dire seulement trois
ou quatre semaines sur deux années.
Ses observations sur ce point s'étendent du 25 septembre au 9 octobre 1783.
Dans les suivantes, le disque de Mars offre déjà une phase sensible. Par ces
mesures, il trouve que l'aplatissement de la planète est évident et même aussi
sensible à première vue que celui de Jupiter, ce qui est vraiment assez sin-
gulier : jamais nous n'avons eu cette impression. « Le 29 scptcmlire, dit-il,
la planète ne se trouvait qu'à 37 heures de l'opposition et la veille, 28 sep-
tembre, jour où elle se trouvait à 2 jours et demi de l'opposition, Taplatisse-
menta été reconnu, non seulement par moi, mais encore par trois autres
observateurs, MM. Wilson, Blagden et Aubert, les mesures micrométriques ont
donné 29" 35'" ou 1355'" pour le diamètre équatorial et 21" 29 ' ou 1289"' pour
le diamètre polaire, de sorte que le diamètre équatorial est au diamètre
polaire dans le rapport de 1355 à 1289 ».
En réduisant le diamètre polaire à cause de l'inclinaison de l'axe, il conclut
que les deux diamètres sont entre eux dans le rapport de 1355 à 1272 ou à
peu près comme IG à 15.
D'après ces mesures, l'aplatissement serait donc do yc,-
Voici le résumé de tout le précédent mémoire par Ilerschel lui-même :
L'axe de Mars est incliné de 50° -ii' sur l'dcliptique.
Le nœud do l'axe est à 17° 47' des Toissons.
L'obliquité de l'écliptique est sur le globe de Mars de •28°42'.
Le point équiuoxial sur l'écliptique martien répond à 19» -28' du Sagittaire.
La figure de Mars est celle d'un sphéroïde aplati dont le diamètre équatorial
est au diamètre polaire dans la proportion de 1355 à, 127-2, ou à peu près comme
If. ;\ 15.
Le diamètre équatorial de Mars, réduit à la distance moyenne de la Terre au
Soleil, est de 9" 8'".
La planète a une atmosphère considérable mais modérée, de sorte que ses
habitants jouissent probablement d'une condition à plusieurs égards analogue t\
la nôtre.
William Herscbcl s'occupa aussi, comme on le voit, de l'atmosphère de
Mars. Il pense qu'elle doit être assez considérable, parce qu'il y a souvent
CO I A IM.ANKÏF, MARS.
observé des variations dans certaines régions plus brillantes, variations qui
lui paraissent attribuables à des nuages et à des vapeurs flottant dans l'at-
raosphère. Il admet même (|u'uno bande soiiibri^ dessinée fuj. 18, 'i une très
haute latitude pourrait aussi représenter des nuages. Il rappelle une obser-
vation de Cassini, dans laquelle cet astronome vit une étoile du Verseau
disparaître à la distance de G minutes du disque de Mars, mais ne croit pas
que cette disparition puisse être attribuée à autre cliose qu'à l'éblouissement
causé par l'état de la planète. Les 26 et 27 octobre 1783, il observa deux
étoiles de 12* et 13" grandeur à S'O" et à 2' 56" du bord de la planète, et leur
éclat ne parut pas diminuer autrement que par l'effet du voisinage de la
lumière de Mars.
Il conclut donc que l'atmosphère de Mars n'est pas aussi démesurément
étendue que l'interprétation de Cassini aurait pu le faire supposer (').
De cette nouvelle série d'observations et de dessins de AVilliam Ilcrschel,
résulte la môme conclusion que nous avons tirée des séries précédentes :
Vaspect de la planète Mars varie considérablement. On peut attribuer tout ce
qu'on voudra à la négligence de certains dessins, et notamment de ceux-ci,
puisqu'ils avaient pour objet non la configuration de la planète, mais les
taches polaires; cependant, lorsqu'il y a, comme en 1777 et 1779, des confi-
gurations dessinées avec certains détails, nous sommes bien forcés de penser
que la planète ressemblait plus ou moins à ces aspects. Or, ces aspects ne
sont ni ceux de Cassini, ni ceux de Hooke, ni ceux de Iluygens, ni ceux de
Maraldi, ni ceux de Bianchini,
Chaque observateur voit à sa façon, lorsqu'il s'agit d'aspects légers, vagues,
peu définis, comme ceux d'un monde lointain entouré d'une atmosphère plus
ou moins vaporeuse. Voilà pourquoi l'identification des dessins est souvent
difficile, lors môme que le fond des croquis est sûr.
Les observations de l'illustre auteur de la découverte d'Uranus viennent de
faire avancer grandement notre connaissance cosmographique de la planète;
nous savions déjà avant Herschel (p. 38) : 1° qu'elle a des taches sombres ;
2° qu'elle tourne sur elle-même en 24'' 40"" environ; 3" que ces taches sombres
sont variables; 4° que les pôles sont marqués par des taches blanches;
5" (p. 45) qu'elles n'occupent pas le pôle géographique, mais lui sont excen-
(') Cette conclusion a été confirmée depuis. Le 28 novembre 1832, James South
observa l'occultation, par Mars, d'une étoile de 8° grandeur, spécialement en vue de cet
objet. Là ne se montra pas le moindre changement dans l'étoile; elle garda au contraire
toute sa lumière et sa couleur bleu clair jusqu'au moment de sa véritable entrée; à sa
sortie, nul changement ne se montra non plus; c'est une preuve que l'atmosphère de
Mars n'est pas sensible au bord de la planète, vue d'ici. La lunette de South, longue
de 5"", 70 et d'une ouverture de SO""", avait une remarquable puissance de définition. On
trouvera plus loin ces observations.
1783-1780 ANf'.IKNNKS OMSKIl VATK i.NS. — MKSSI !• 15. ItAlLI.V. (.1
triques. Nous savons de plu^ inaiiiloii;inl (j' que ces lâches sont analugi tes aux
tjlaces polaires terrestres, rouilciil on été et se reconsliliK'Ul en hiver; 7" (]ue le
centre des neiges polaires boréales se trouvait en octobre 1781 vers 7(? ou 77"
(le latitude; 8" que l'atmosphère paraît analogue à celle de la Terre; 9" que
ruhli(|uité de réclipti(iuc est sur Mars de 28" 42'. Nous ne parlons pas de
l'aplatissenient polaire trouve par llerschel. Cet élément sera discuté plus
tard.
Voici donc un grand progrès d'accompli. Années, jours, saisons, climats
sont maintenant déterminés : les saisons sont analogues à celles de la
Terre comme intensité, quoique près de deux fois plus longues; de même
que sur notre planète, le pôle du froid ne coïncide pas avec le pôle géogra-
phique.
Ce sont là assurément des faits intéressants; ils sont découverts depuis plus
de cent ans.
Ouanl à la connaissance géographique do la planète Mars, on voit que les
travaux d'Herschcl ne l'ont [)as fait avancer d'un seul pas. Ce n'était du reste
pas là leur hut.
XXIII. 1783. — Messier.
Mcssicr, à Paris, réobserva Mars les 15 et IG septembre de cette année et
remar(|ua la tache polaire australe en forme de cercle bien défini égale en
diamètre à celui du premier satellite de Jupiter, lorsqu'on l'observe sur son
disque. Le grand découvreur de comètes lit une observation analogue les
3 août, 10 et 23 septembre 1798. Le dessin publié par la Connaissance des
Temps pour 18Û7 ne contient absolument que l'indication de cette tache
polaire, sous forme d'un petit cercle, au pôle austral.
XXIV. 1785. — Baillv (•).
L'illustre historien dont la tète devait tomber huit ans plus tard, avec celle
de Lavoisier, sous l'idiotisme des partis politiques, résume ce que l'on savait
en France de Mars à son époque. Il ne connaît pas les travaux d'Herschel.
Les astronomes français en sont restés à ceux de Maraidi, de 1719.
Ou voit, dit-il, sur ce globe une tache vers le pôle méridional eu forme de
zone polaire; elle était susceptible do changer d'éclat et, quand elle était très
claire, Mars ne paraissait pas rond. On jugea que c'était par la même apparence
que la partie claire de la Lune parait excéder les bornes du dis(pie obscur, et
(') Histoire de iA<trono)nic moderne, tome II, p. G03.
G-2 I.A IM.ANKll': MAI! S.
appartouir à un plus j,q"\iul oorclo. C'est IVlVol de l'irradialioii dos parties éelai-
rdcs sur les parties obscures. On crut s'apercevoir «pie le retour ilc l\'clat de
cette tache avait qucUpic rapport avec la révolution diurne de Mars, et qu'il
arrivait après 30 de ces révolutions. Cette apparence claire est la seule tache
qui se soit couservée, quoiqu'avec quelque diversité de grandeur et de clarté,
pendaut que les autres ont change de ligure, de situation, et même ont disparu
entièrement. Ce qui est singulier, c'est qu'on a vu au pèle septentrional de cette
planète une clarté semblable à celle qu'un observe au pôle méridional, mais
i[ui subsiste seule, l'autre a disparu. Ces deux lumières étaient placées aux deux
pôles, comme si elles avaient quelque analogie avec le fluide magnétiiiue, ou
avec les aurores boréales.
Il est bien singulier que Bailly, auteur philosophe dont les idées n'étaient
pas restreintes à un cercle étroit, ne songe pas à des neiges polaires. Au
surplus, comme nous venons de le voir, les travaux d'ilerschel font que
l'historien est en relard de soixante ans sur ce que la Science connaît à son
époque, relativement à Mars.
Nous arrivons maintenant à l'un des plus éminents et des plus passionnés
observateurs de notre chère planète, à Schrœter. Elles embrassent dix-huit
années, de 178.") à 1803.
XXV. 1785 à 1803. — Schuoeter [^).
Les observations de ce laborieux astronome sur la planète dont nous tra-
çons ici la monographie sont les plus importantes et les plus considérables
de toute celte époque. Elles forment un grand ouvrage comprenant 447 pages
accompagnées de 230 dessins, publié seulement en 1881, par les soins de
M. Van de Sande Bakhuyzen, directeur de TObservatoire de Leyde (^). Les
observations commencent en 1785 et s'étendent jusqu'à l'année 1803; elles
continuent donc sans interruption les recherches de William Herschel,
terminées en 1783.
Cet ouvrage, intitulé Areographische Fragmente, était resté à l'étal manus-
crit entre les mains de la famille de l'astronome de Lilienthal. On en a dû la
première connaissance aux recherches dévouées de M. le docteur Terby de
Louvain, qui, en 1873, a pu l'examiner en détail et en apprécier la haute
{') Observations aréographiques faites à son observatoire de Lilienthal.
(') Areographische Beilrage zur genauern Kcnntniss und BeurlhcUung des Pla-
netenMars, in malhemalischHinsichl, von !>' J. H. Schroeter; mit 16 Kupfertafeln.
A'ac/i c/em rnanuscriple auf der Leidiyaer Slcrnwarle, herausfje(jeben von H.-G Van
DE Sande Bakhuyze.n, Director der Sternwarte. 1 vol. in-8° avec 230 dessins. Leyde, 1881.
1785-1803 ANCIKNNKS UHS i;u\ A TK (N S. — SCIl |{()I:t1;|{. 63
valeur. Nous donnerons nous-mêmes ici, comme excellent résumé de l'anivie
do Schrœler sur la planète Mars, un extrait du raiiport présente sur ce point
[lar l'astronome de Louvain à l'Académie des Sciences de Belgique.
NATURE DES TACHES SOMIIHES OE MAHS d'aI'UÉS SCHHOETEH.
Lastronoaic do Lilieuthal rai)pcllo une upiuiuu émise par \V. llerschel dans
un mémoire sur la planète Vénus, publié en 1793. Voici la traduction du passage
auquel Schrœter fait allusion : « Je suppose que les bandes brillantes de Jupiter,
comprises entre les bandes obscures, sont les zones où l'atmosphère de cette
planète est le plus remplie de nuages. Les bandes obscures correspondent aux
régions dans lesquelles l'atmosphère, complètement sereine, permet aux rayons
solaires d'arriver jusqu'aux portions solides de la planète, où, suivant moi, la
réllexion est moins forte que sur les nuages. » L'explication que Schrœter
donne des taches sombres de Mars est diamétralement opposée : pour lui, les
taches sont dos nuages réfléchissant moins de lumière que le corps solide plané-
taire. Aussi s'élève-t-il énergiquemeut contre l'opinion d'IIerschel, qu'il déclare
tout à fait inacceptable. Il cite à l'appui do sa théorie l'observation suivante qu'il
lit dans une ascension sur le mont Brocken. « Un épais brouillard précéda le
lever du Soleil; lorsque cet astre commença ù, monter au-dessus de l'horizon,
les vapeurs descendirent peu à peu dans les vallées, sous les pieds de l'observa-
teur. Au-dessus de celui-ci, le ciel devint d'une sérénité parfaite. Au-dessous, les
rayons solaires veijaient se réfléchir sur les sommets des montagnes qui se
dégageaient peu h peu à mesure que le brouillard s'aff'aissait. Ur, dit Schroi'ter,
l'aspect grisâtre du nuage réfléchissant la lumière solaire était à la splendeur
des sommets de nK^ntagnes ce que sont les taches sombres des planètes à
l'égard de la surface vivement illuminée. »
Schrœter traite longuement de tous les points de ressemblance que présentent
la Terre et la planète qui fait l'objet de son étude : « Nous trouvons, dit-il, une
analogie si grande entre ces deux corps célestes, leurs atmosphères présentent
une telle similitude, que l'on est porté à en déduire une disposition naturelle
complètement semblable des deux sphères elles-mêmes. Mais il faut se garder de
conclure ici d'une manière trop absolue, caries preuves directes nous font défaut.
Je n'ai jamais observé avec certitude des taches obscures complètement fixes,
comme le seraient nos mers et nos lacs, réfléchissant moins de lumière. »
Schrœter expose ensuite les motifs qui expliqueraient pourquoi, suivant lui, on
n'aperçoit pas distinctement la configuration de la surface planétaire elle-même.
Cependant les grandes taches se terminant en pointe du coté du Nord attirent
au plus haut degré l'attention du célèbre astronome; il leur consacre un para-
graphe spécial : « En étudiant sérieusement ces observations, dit-il, on sera con-
vaincu que ces masses de nuar/es obscurs en forme de pyramides se produisent
surdilVércntes i)arties de la surface planétaire. Quelle force naturelle les déternii-
nait à prendre cette forme, pourquoi leur base s'appuyait-elle toujours à la bande
64 I.A IM.ANr.TI- .MARS.
principale'/ ruuniiioi li>ur pointe se tUriiriMit-elle toujours vers ]c Nm-d ? 11 srraiL
impossible de répoiulre i\ ces questions. Mais à la surface de la Terre se pro-
duisent aussi des phénomènes qui sont en liaison avec les pôles et se rattachent
aune force naturelle appelée magnétique, l'eut-ètre jetterait-on bientôt du jour
sur ces phénomènes, si l'on pouvait observer notre Terre d'une distance
convenable.
nOT.VTION DE MARS ET MOUVEMENTS DES NUAGES DE SON ATMOSPHÈRE,
d'après SCIinOETER.
Les comparaisons faites on 1787 et en 1702 ont donné des valeurs principales
assez différentes, d'où l'auteur conclut comme Dioyenne une durée de
î't'' ;W'» 50'
qui, dit-il, se place entre la période d'IIerschel (2i''3*J'"2I»), celle de Cassini
("24''40"') et celle de Maraldi (24'' 39'»). Désespérant de pouvoir obtenir un résul-
tat parfaitement précis, à cause lies changements observés dans les taches, il se
rallie à la période cassinicnne et l'emploie dans tous ses calculs.
Attribuant les taches sombres ù, des nuages flottant dans l'atmosphère de Mars,
l'auteur explique les irrégularités apparentes qu'il trouve dans la durée de rota-
tion par des mouvements réels. Une tache le conduit-elle à une durée de rotation
beaucoup trop courte, il conclut qu'elle était douée d'un mouvement propre
direct, c'est-à-dire dans le sens de la rotation, et réciproquement. Schrœter est
amené ainsi à parler des vents de l'atmosphère de Mars, de leur vitesse et de
leur direction. Il calcule soigneusement le déplacement de la tache qui lui semble
en désaccord avec la rotation connue, et dresse un Tableau anémométrique dans
lequel se trouvent consignées la vitesse et la direction de quarante-cinq mouve-
ments atmosphériques qu'il a constatés pendant ses longues et laborieuses
recherches.
Si Schrœter s'est cru fondé, dans certaines circonstances, à étudier sur une
aussi grande échelle les phénomènes atmosphériques de Mars, il faut l'attribuer
à trois causes : l'absence de points de repère suffisamment précis dans les taches
observées, la confusion de taches qui se ressemblent plus ou moins et l'exclu-
sion de toute défiance à l'égard des changements apparents de cette surface pla-
nétaire.
Si les taches sont sujettes à de tels mouvements, comment Cassini est-il par-
venu, au point de vue où se place Schrœter, à déterminer si exactement la durée
de la rotation? C'est la question que s'adresse l'auteur vers la fin de son ouvrage.
« Il est naturel, dit-il, que les taches soustraites à l'action de vents notables seules
conviennent à cette détermination; de même les bandes se dirigeant vers le Sud
ou vers le Nord et qui ne se meuvent pas vers l'Est ou vers l'Ouest; il en est de
même des taches isolées, caractéristiques d'une région de la planète, et c'est dans
de telles conditions que Cassini et Maraldi ont trouvé une valeur si approchée
de la rotation. »
17S5-1.S0^ ANCIENNES (JUS h II VAX IONS. — SCllIUH^TKK. O.'i
Ainsi, Sclirœlcr a éto amené par ses observations à croire que les lâches
foncées de Mars sont des nuaycs. C'est assurément fort étrange. Et no l'oublions
pas, cet astronome est un excellent observateur.
OUSEUVATIONS DE SCHUOETEU SUR LES TACHES POLAIRES.
Dans la nuit du IS au 19 juillet 1798, rastronome Olbers, qui se trouvait à
robservatoire de Lilicnthal et observait Mars avec le réllecteur de 13 pieds, aperçut
la tache polaire méridiuiuile. C'est la preuiicrc fois que l'on voit figurer ce
phénomène dans les dessins de Schrœter. Les deux astronomes constatèrent
ensemble que le bord de la planète était plus brillant que le centre; ce dernier
était rougcàtre et tacheté; mais la région polaire méridionale était très claire,
très blanche et très tranchée. Schrœter ne cessa point d'observer cette tache
brillante, jus([u'à la fin de l'année.
D'après l'auteur, le solstice méridional de Mars a eu lieu le 27 septembre.
Quoi qu'il eu soit, les observations se rapportent en grande partie à l'été de l'hé-
misphère méridional. L'extrémité sud de l'axe s'inclinait vers la Terre, et la
région brillante australe a été figurée dans tous les dessins à partir du 18 juillet,
tandis que la tache septentrionale resta longtemps invisible.
A l'époque de sa découverte par Olbers, la tache méridionale se faisait remar-
quer par sa grandeur; les jours suivants, elle présenta des variations d'éclat et
d'étendue; mais, à partir du 2 septembre, elle parut entrer franchement dans une
phase décroissante et devint ensuite extrêmement petite. A partir du 8 octobre,
elle se réduisit à un petit disque lumineux nettement séparé du bord de la planète.
Dès ce moment, sa fixité, en dépit du mouvement de rotation, permit de déter-
miner la position du pôle. Le 2.J octobre, elle sembla se rapprocher du bord;
le 2G, Schrœter la trouva aussi petite que l'un des moindres satellites de Jupiter.
Les jours suivants, il la vit se rapprocher de plus en plus du bord, et enfin se
confondre à peu près avec lui le 15 novembre.
Le 20 novembre, l'habile astronome retrouve encore la petite tache dans la
même position; mais une grande lueur qui s'étend à l'occident du petit disque se
confond en partie avec lui. Cette nouvelle lueur se déplace par la rotation, comme
il fallait s'y attendre, car l'auteur a établi que le pôle est contenu dans la petite
tache.
Aprèsce jour, on ne voit plus figurer que très exceptionnellement dans les dessins
la petite zone polaire; mais l'auteur observe constamment une tache brillante
considérable et présentant des différences d'aspect et d'étendue. Enfin, le 20 dé-
cembre, la tache polaire boréale parait à son tour et, pour la première fois, depuis
cette date jusqu'au !'■ janvier 179'J, c'est-à-dire jusqu'à la fin de cette série d'ob-
servations, l'auteur voit à la fois les neiges des deux pôles.
Ces phénomènes conlirmeut absolument les observations d'PIerschel que
nous venons de résumer; on voit la tache polaire australe réduite à ses
i''i.AM.\iAUioN. — Murs. ô
ce, I.A PI.ANKTi: M VHS.
moimlres dimensions pendant l'olé de sou hémisphère. Nettement séparée
du bord, elle apparaît comme un point lumineux. Klle reprend ensuite du
développement tandis que le Soleil s'abaisse vers réqualcur do Mars. Les
climats et saisons de ce monde voisin sont donc bien indi(|u6s dès cette
époque.
IIÉSUMÉ DES OBSERVATIONS.
Ainsi Schrœter a observé presque toutes les particularités que l'on remarque
aujourd'hui en étudiant les taches polaires : la variabilité de l'éclat et de l'exten-
sion, l'inégalité de cette extension dans diverses directions, et, sous ce rapport, il
dit expressément que ces taches n'ont pas un contour circulaire régulier, tache
polaire éclatante entourée de lueurs moins vives, zone brillante bordée d'un trait
obscur, saillie apparente de la tache par irradiation.
De plus, l'auteur attache une certaine importance à une difTcrence d'aspect
qu'il signale entre les deux taches polaires : la méridionale lui paraît blanche et
jaunAtre, la septentrionale un pou bleuâtre.
Rappelant les observations de Cassini, de Maraldi et de W. Ilerschel, Schrœter
remarque d'abord que la constance de ces apparitions aux pôles doit être en
relation avec un climat particulier de cette région de la planète ; les modifications
de ces taches dénotent, selon lui, l'influence des phénomènes atmosphériques.
Cependant l'auteur ne peut admettre que les apparitions et les disparitions de
ces taches .soient en rapport régulier avec les saisons. En comparant les obser-
vations de Maraldi, de W. Herschel et les siennes propres, il constate, en effet,
qu'à une saison donnée de Mars ne correspondent pas toujours des observations
identiques des taches polaires, ou, en d'autres termes, que la présence d'une
tache neigeuse déterminée ne caractérise pas toujours la même saison : il trouve,
par exemple, que la tache méridionale a été observée tantôt pendant l'été méri-
dional, tantôt pendant l'été septentrional. Mais une telle régularité n'est pas
nécessaire pour que l'on puisse attribuer les grands phénomènes des taches
polaires à l'action du Soleil. A l'époque des solstices martiens, en effet, deux
circonstances favorisent l'observation de la tache brillante d'un pôle donné : ou
bien l'inclinaison de ce pôle du côté de la Terre coïncidant généralement avec
une faible extension de la tache neigeuse, ou bien le plus grand développement
de la zone brillante coïncidant avec la situation du pôle dans la région invisible.
La première condition est réalisée pendant l'été d'un hémisphère, la seconde
pendant son hiver. La tache polaire méridionale, prise comme exemple, peut être
observée pendant l'été méridional à la faveur de la première condition et pendant
l'été de l'hémisphère opposé à la faveur de la seconde.
« Les zones polaires, dit-il, doivent sans doute leur éclat à un précipité atmo-
sphérique éblouissant. Que l'on s'imagine un ciel couvert, qui donne lieu, sur ces
surfaces polaires, à un précipité blanc, éblouissant, semblable à notre neige; que
l'on s'imagine aussi les liquides de la surface transformés par le froid en une
1785-1803 AN(:ilîNiNi«S OBSKK VATIONS. — SCIiUOliTKK. 07
surface solide miroitante, et celte explication établira une analuj,^io de jikis entre
Mars et notre Terre. »
FORME SrirÉnOÏDALE DE MARS, nÉFORMATIONS APPARENTES ET ACCIDENTELLES.
En janvier 17S8, Schra-ter portait déjà son attention .sur la forme du disijue de
Mars. Son journal mentionne expressément ({u'il n'a pas constaté de diU'ércnce
entre le diamôtre polaire et le diamètre équatorial. Mais, le 11) mars 1702, il
remarque un aplatissement et le trouve plus petit que celui de Jupiter. Le
20 mars 17'J-2, il mesure le diamètre de la planète et trouve un aplatissement
de j'j. Cependant la position du petit diamètre ne s'accorderait pas avec le dépla-
cement dos taches, et Schrœter attache peu d'importance à ce résultat.
Les observations les plus importantes ont eu lieu pendant l'année 1798, époque
où la planète Mars se trouvait à une grande proximité relative de la Terre. C'est
alors que le savant observateur, après des recherches multipliées et exécutées
dans les conditions les plus favorables, trouve l'image de Mars plus conforme à un
disque parfaitement circulaire qu'à un disque dont les diamètres étaient dans le
rapport de 80 à 81; que, par conséquent, si cette planète est aplatie aux pôles,
l'aplatissement est inférieur à ^-.
\V. Ilerschel a déduit de ses observations un aplatissement de ,V' 6t Schrœter
entre dans une longue dissertation à ce sujet. Il rend hommage à l'habileté de
l'astronome de Slough, il considère le résultat de celui-ci comme exact pour
l'époque où les observations ont été faites et se demande ensuite à quoi il faut
attribuer ces divergences; il pense qu'on doit en chercher la cause dans l'atmo-
sphère de Mars et établit un rapprochement entre l'aplatissement constaté à
certaines époques et des déformations locales d'un disque dont nous devons dire
quelques mots.
L'auteur a relaté dans ses autres ouvrages des observations relatives à des
déformations singulières du contour de Jupiter et de Vénus. Le 21 septembre 1798,
il observa jtour la première fois dans Mars un fait analogue. Le contour de la
planète sen)blait aplati depuis la tache polaire méridionale jusqu'à une distance
d'environ 70° à l'Ouest. Une apparence de ce genre se présenta encore le
12 novembre 1800, à 7'' 29'" du soir. De légères vapeurs couvraient le ciel et obscur-
cissaient un peu la planète, mais l'image n'en était que plus nette. Dans la région
comprise entre le Sud et l'Ouest, elle se terminait par une ligne droite, au lieu
d'être limitée par la continuation de sa circonférence. Ce fait a été l'objet de la
plus grande attention; Tauteur a donné successivement à l'astre des positions
très différentes dans le champ de son télescope de 13 pieds, armé d'un grossis-
sement de liiG fois, et lillusion n'avait pas encore disparu à 7''3j'". Quelques
minutes plus tard, le phénomène devint moins évident, mais les vapeurs qui
couvraient le ciel s'épaissirent bientôt au point d'interrompre toutes les recherches.
Schro^ter expose ensuite quelques réflexions sur ce genre de phénomènes : il
croit devoir laltribuer à des déviations subies par les rayons lumineux dans
certaines régions de l'atmosphère planétaire.
Cî< LA PLANi-Tli M A lis.
Schrœter inentioiiue souvent ravantage que peut tirer l'observateur de la pré-
sence de légères vapeurs qui, eu alïaiblissaut uu peu l'iiuage, lui donnent un
grand calme et une grande netteté. C'est daus ces circonstances qu'il procède de
préférence à ses observations et à ses mesures les plus délicates. Il en est de
môme des observations faites daus le voisinage de la Lune et, en général, par
un ciel éclairé. Tous les observateurs ont pu apprécier les elïets salutaires
de pareilles conditions.
DIRECTION DE L'AXE; OBLIQUITÉ DE L'ÉCLIPTIQUE ;
SITUATION DES POINTS ÉQUINOXIAUX ET SOLSTICIAUX; DIAMÈTRE APPARENT DE MARS.
L'astronome de Lilienthal ne laissa point échapper l'occasion de prendre toutes
les mesures nécessaires à la détermination des éléments que nous venons d'énu-
mérer, et il profita spécialement de la tache polaire méridionale, parfaitement
fixe, très petite, observée du 8 octobre au 16 novembre 1798 pour rechercher la
position exacte du pôle et en conclure la direction de l'axe.
Les résultats déduits de ces nombreuses mesures, prises avec l'aide de
Marding, ont été soumis au calcul par Olbers. Les voici :
Latitude céleste où aboutit le pôle sud de Mars C0°33' 12"
Longitude » » » » 172.5'i .'j4
Obliquité de l'écliptique de Mars 27.ôC.5i
Longitude du point équinoxial du printemps pour Miémi-
sphère boréal (■) 204.53.35
Dans la matinée du l^"" septembre 1798, en des conditions très favorables, et
au moment du plus grand rapprochement de Mars, Schrœter a mesuré le dia-
mètre apparent de la planète et, par des observations répétées, a trouvé pour
ce diamètre
26', 17.
Il croit ce résultat digne de toute confiance et il déduit de toutes ses mesures
prises vers cette époque une moyenne de
26",0.4,
qui ne diffère que de 0",13 du résultat obtenu le le-- septembre dans les circon-
stances les plus favorables possible.
Schrœter évalue ensuite le diamètre apparent de Mars, vu de la distance
moyenne qui sépare la Terre du Soleil, à
9",8i.
(') \V. Herschel avait trouvé pour les mêmes éléments :
Latitude céleste du pôle sud 59° 42'
Longitude » 107.47
Obliquité de l'écliptique de Mars 28.42
Longitude du point équinoxial du printemps pour, l'hémi-
sphère boréal 259.28
70 I.A PLANKTK M. VU S.
W. llorschel avait trouvé pour le môme dlémeut
O'.S.
Toutes ces observations de Schrœter sont extraites, comme nous l'avons
dit, du mémoire académique du D'' Terby sur ce sujet (').
Voici maintenant une série de Gô dessins cboisis parmi les plus curieuses
des 230 figures de Schrœter. Sans doute, malgré tout notre désir d'être aussi
complet que possible, ce serait dépasser le cadre de cet ouvrage que de repro-
duire ici ces 230 dessins. Cependant, ce sont là des documents si importants
pour l'histoire de la planète qu'il est de notre devoir d'en présenter à nos
lecteurs le plus grand nombre possible. Nous les reproduisons directement
d'après le livre même de Schrœter, pulilié en 1 881 , comme on l'a vu plus haut.
Comme nous les reproduisons en fac-similé par la photogravure afin de
leur conserver toute leur authenticité, nous leur laissons en même temps les
numéros des figures qui leur appartiennent dans l'original. Voici les dates de
ces dessins et une description sommaire de chacun d'eux (-).
Mais ici déjà, nous commençons, malgré Schrœter lui-même — ce qui est
assurément assez bizarre, — à entrer dans la géographie de Mars. Les trois
cartes reproduites plus haut [fuj. 17, 20 et 28), qui ne représentent qu'un
même côté de la planète, vu sous trois inclinaisons différentes, ne suffiraient
plus pour nous reconnaître. Il est indispensable que nous ayons dès à
présent sous les yeux une carte de la planète entière. Nous plaçons donc ici
comme type de comparaison perpétuelle la Carie générale de Mars que nous
avons construite sur l'ensemble des observations modernes. Comme nous
l'avons fait remarquer plus haut (p. 29) à propos des projections précédentes,
les dénominations de cette carte sont celles qui sont adoptées en général,
depuis la publication de la carte de M. Grecu par la Société royale astrono-
mique de Londres.
12 novembre 1785, à 7'»44"'.
» » à 6i'49™.
I. » à 7'>0™. Ces trois vues de Mars ont été prises à l'époque
de l'opposition qui a eu lieu le 26 novembre. On croit reconnaître, sur
ces dessins, la mer du Sablier. C'est bien elle, en efTet, sur les flg. 1
et 2, mais sur la fig. 3, c'est la mer Flammarion et la mer Ilooke, et
la pointe qui descend est la baie de Gruithuisen, très élargie, rare-
ment aussi large.
(') Terby, Areographische fragmente. Manuscrit et dessins originaux et inédits
de l'astronome J. II. Schrœter, de Lilienthal. — Bruxelles, 1873.
(') Le Mémoire de M. Van de Sande Bakhuyzcn, Unlersuciuingun ùber die Rota-
tionszeit des Planelen Mars, nous a été fort utile pour ridentification des taches.
Fig.
1,
12
Fig.
18
Fig.
3,
21
i78r.-isn:î Axr.iFNNFS onsrnvATiON?. — sc.iiRŒTrn.
71
Fig. ■'«, 10 décembro 1787, ;\ 7'm)'". Seule observation do 17S7, faite -J^ jours avant
l'opposition. Figure assez singulière.
^ûrc
Vïç. yi. — Dessins de Schrœtcr, novembre 178.J
Fig. 5, 1") janvier 178S, h ô*'30'". Huit jours après l'opposition, qui avait eu lieu
le 7 janvier.
Fig. .33. — Dessins de Schrœter, décembre 1787-ianvier 1788.
Fig. G, -28 janvier 1788, à C'-jS".
Fig. 9, K» mars 1792, à. 1 1''3"'. Deux taches a et b se voyaient sur le méridien ccn-
Fig. 3i. — Dessins de Schrœter, mars-avril 1792.
tral.s'y dirigeant depuis le commencement de l'observation, \ ~>^ 'r^™, 1-Jlles sont
difficiles à identifier : la longitude du méridien central est r»!».
LA rLANl.TI- MARS.
Fiq. I<\ "JO mars. ;\ iV'.MV". [.os doux taolios a o\ b uo sout pas los momos que los
pri:=0(5dontcs : la longitude du mc^ridion contrai est 3'iS». b est pout-ôlrc
la baie du Méridien. Ces taches se mouvaient vers le centre par la
rotation de la planète. L'opposition a eu lieu le IG mars. L'auteur
observe la planète au point do vue de l'aplatissement et ne la trouve
pas aplatie comme Ilerschol l'indique.
Fiij. IS, '2 avril, à l^'i^.
Fiq. 10, même jour, à 10'' 2™. Ces nouvelles observations le confirment dans son
es. qs.
Fig. 35. — Dessins de Schrœter, avril 1792 — mars 1794,
opinion que les taches de Mars sont variables et d'une natiire atmo-
sphérique comme celles de Jupiter. En effet, ces taches ne sont pas
faciles à identifier avec la géographie de Mars.
FxQ. 25, 24 mars 179-4, à 8'>4'i'". 30 jours avant l'opposition.
FxQ. 26, 25 » » à 8^2.5".
Fig. 36. — Dessins de Schrœter, juin 179i, août 1796, juillet 1798.
Flcj. 27, 1" juin 179i, à lO»-.
FxQ. 28, 17 août 1790. Pendant la soirée, deux mois après l'opposition, qui avait
eu lieu le 15 juin. Phase très marquée.
FxQ. 29, 1798. Opposition périhélique excellente. 15 juillet, à 11'' du soir.
Fig. 30, 18 juillet, à minuit. Observation faite, comme la précédente, en com-
pagnie d'OLbers, tache polaire australe très marquée.
Firj. 32, 19 juillet, àll''40™. Avec Olbers également, tache polaire très marquée
en a, petite tache sombre en b. Méridien central 05".
1785-1803 ANCIENNES OBSERVATIONS — SCIIROETER. 73
Fig. 33, 23 juillet, h I I^'O. On roinarriuo la tache polaire australe très brillante
en .T, uno tache sombre en c, et en d une petite tache rappelant celle
de la figure précédente. Méridien central 'Î3'^. Nous ne pouvons iden-
Fiff. 37. — Dessins de Schrœter, juillet 179S.
tifior aucune de ces taches, aucun de ces dessins, avec ce
savons actuellement de la géographie de Mars.
Fig. 3i, "24 juillet, à iP'îOn'.
3^. .'1 Ô7.
que nous
Fig. 38. — Dessins de Schrœter, juillet 1798.
Fig. 36, -28 juillet, h lO^îT»-. Longitude du centre : 32Go.
Fig. 37, 31 juillet. Dans la matinée, occultation de Mars par la Lune. L'auteur a
observé la planète en compagnie de Ilarding. Long, du centre : 332"
.?.? À 7 48
Fig. 39. — Dessins do Schrœter, août I79S.
Fig. 38, 2 août, ;\ I0'«'(['". Tache polaire australe très brillante. Beaucoup de
détails. La tache triangulaire est la mer du Sablier.
Fig. iT,
Fig. 48,
l.A ri.ANKTK MARS.
'26 août, ;\ 10'';»'". Graiulo taclic avec los ramilicatioiis a, c, cl, b, o.
'-7 août, à 10'' 10'". Détails non moins marquées. Longitude du centre : 51".
Fig. 40. — Des.çins de Schrœter, 30 août, 2 septembre 179S.
Fig. 40, 30 août, à I0i>-2 'i'". La tache foncée s'étend en e et /", vers les deux extré-
mités de la tache polaire. Longitude du centre : 27». Comparez avec
notre carte, vous ne trouverez rien de sûr.
Fig. 51, 2 septembre, à iO''47'n. Lendemain de l'opposition, qui a eu lieu en 1798,
le 1<^'" septembre. Longitude du centre : 6»; môme réflexion.
53
Fig. 41. — Dessins de Schrœter, 3 et 4 septembre 1708.
Fig. 52, 3 septembre, à 10'^ 5™. Dans ces doux dessins du 2 et du 3 septembre,
la tache a marque la baie du Méridien, et la tache h le détroit Arago.
Fig. 53, 4 septembre, à 10^46'". La tache a est encore la baie du Méridien.
SJt ss 56
FiL', 'i2. — Dessins de Schrœter, 9 septembre 1798, la mer du Sablier.
Fig. 54, 9 septembre, à 7'' 55".
1785-1803
AN( IKNNFS ORSi: KVATIONS. — SCllRŒTHH.
Fig. 55, mémo juiir, "2 liciin's plus lard : '.(''rtô"".
Fig. 56, même jour, :\ II ''S'». Ces trois dernières observations sont précieuses
parleur continuité et permettent d'identifier sûrement la tache trian-
gulaire avec la mer du Sablier. Elle était plus foncée à la pointe, ce
qui est rare.
Fig. 57, 10 septembre, à 10'" 15'», à peu près même face que la veille, à 9*'55"';
mais on remarque en plus une tache supérieure {bc}.
Fig. 43. — Dessin de Sclirœtcr, 10 septembre 17'. S.
Fig. G.j, 19 septembre, à 7'' 31'".
Fig. G6, 20 -> à 7'' 27"'.
Fig. G7, même jour, à 9^48"". Ces trois figures montrent également à peu près
une même face de la planète (mer Maraldi), 19 septembre, à 7'>3i"',
65
66
61
Fig. 44. — Dessins de Schrœter, tSet ÎO septembre 170S.
correspondant au 20 septembre, à S'» 1 1™ environ, et la différence entre
la deuxième et la troisième observation étant seulement de 2''21'".
C'est la même tache qui est avancée au milieu du disque i\ la troi-
sième observation : la dilTérence de forme est sensil»le. La pointe qui
descend et qui se trouve vers 193' de longitude est le détroit que
l'on voit vers la mer Oudemans.
Fig. 83, 8 octobre, à C'/jO".
Fig. 84, 9 . ti 7»'35'».
I \ PI.AXKTr MARS.
Fig. 85. 10 octobre, ;\ T'Cjô'". Voilii encore trois figures représentant ;\ peu près
la même face de la planète (mériilion central — 341"). Les doux prc-
Fig. 45
Dessins «le Schrœler, 8, 9 et 10 octobre 1708.
mières se ressemblent; la troisième dilTère. Impossibles à idcntiûer
avec la carte. Ou comprend les conclusions de l'auteur.
Fiij. 10-?, 1.") novembre, à G^'ôO""
102
W3
Fig. 4i). — Dessins de Schrœter, 15 et 10 novcmljre 1798.
Fig. 103, !G novembre, à G'' 13™. Môme face également, la seconde figure étant
en avance de \'^\'.^'^ environ sur la première. Différence sensible.
La planète est très éloignée de la Terre et la phase très marquée.
Wâ
I';.
isins de Schrœter, "20 novembre 1798.
FxQ. 104, 20 novembre, à GMC-».
Fig. 105, même jour, à S'»2'" Très grand changement en moins de deux heures.
1785-1S03
ANCIi:.\M-S OnSF-UVATIONS. - SCII lUJLTl' H.
77
dans tout l'aspect. (M. SchiaparcUi reconnaît dans l'extrémité infé-
rieure do la tacho, dans ce coude diri-é vers la f,'auche, l'extrémité
de la Mer du Sablier, à laquelle il adonné le nom de Nilosyrtis; mais
cette sorte de canal se dirige vers la droite, tandis que dans cette
//;/. 105, il se dirige vers la gauche.) La tache blanche e est la Terre
de Lockyerou une ile parfois couverte de neige.
Fiij. ll'J, 10 décembre, à i'- jj"». Deux bandes équatoriales parallèles a et 6,
Fig. 48. — Dessin de Schrcoler, 10 décembre 17i)S.
comme dans Jupiter. Sans la phase, ou prendrait plutôt cette figure
pour celle de Jupiter que pour celle de Mars, assurément. Nous
comptons dans les Areographische Beitrage 16 figures analogues,
de deux bandes parallèles, appartenant ù cette époque.
Fig. 1.55, 8 octobre 1800, à [Q^-20"-.
Fig. 15G, 0 » à iOKO-.
/
Fig. 4'J. — Dessins de Schrœler, octobre ISOJ.
Fig. lUl, \ 1 octobre, à 10'' 32". Figures intéressantes pour les taches a, 6, c, qui
confirment Schrceter dans sa conviction de changements perpétuels
à la surface de la planète.
Fig. ir.O, 20 octobre, :\ 10'' ÎC-.
/•'/;/. lui, Ji ;i 8'' 17"'.
78
LA ri.ANKTK M A US.
Fi(j. lOC, 2ô octobre, îi 9'' ;VJ"-. Observation faite en cumpaiinie dOlbers à sou
observatoire de Brème. Le poiut noir est la baie du Méridien, vue
Fig. 1)0. — Dessins de Schrœtcr, mer du Sablier et baie du Méridien, octobre 1800.
sous forme d'un disque très noir par Bcer et Mildlcr en 1830. La
tache b est la mer du Sablier.
Fij. 17-2, 1" novembre, à Si- 10™.
112
V
.-^\
Fig. 51. — Dessin de Schrœtcr, \'^' novcnilirc ISOO.
Fi'j. I7i, 2 novembre, à 7"'i-2"'.
Fi(j. 175, même jour, à lli^îU'". Comme M. Tcrl)y l'a dôya rcmar(|uc, ces trois
dessins sont particulicrerneat intéressants. Le second montre une
tache triangulaire qui vient de traverser le méridien central, et le
troisième, fait S^SS™ plus tard, montre une tache de même forme
et beaucoup plus étendue, qui occupe à peu près la même situation
(un peu plus avancée), et qui, par conséquent, se trouve à environ
un sixième de la circonférence plus à droite, ou environ GO" de lon-
gitude. La fig. \~r2, faite le l'-'' novembre, confirme cette interpréta-
tion eu ce qu'elle montre les deux taches indiquées en b et c. Les
régions marquées f, g, d, sur les fig. 174 et 175, sont des régions
très claires. Schrœter voit là des témoignages de variations nou-
velles. La grande tache triangulaire de la fig. 175 est la mer du
Sablier. Celle de la fig. 17i est une poiulc vers 228°, c'est-à-dire
J 785-1803
ANCIENNES OBSERVATIONS. — SCIl l(( H;T1; U.
à l'cxtrémilt' droite de la nior Maraldi; la (ij. 17 v' laontro ces deux
taches. Les dessins qui vont suivre coufirineut cette interprétation.
Fig. ô2. — Dessins de Schrœter, mer ilu Sablier (/1V7. \lh) et autre mer pointue (fUj. 174)
vers 228» de longitude, l»' et 2 novembre 1800.
Fi(j. 17G, 4 novembre, à8''"20"'.
Fig. 177, même jour, à 10'' 41"". Le premier de ces deux dessins montre la même
face de la planète que la fig. 17-i, et le second la même que la
fig. 172, avec les deux taches si singulièrement ressemblantes.
/Z^
..•»^»i»%«*ii<i^
'. >•'
Fig. L;>. — Dessins de Schrœter, 'i noveinljre ISOO.
Excellentes conditions d'observation. L'opposition do la planète en
1800 a eu lieu le 0 novembre.
Fig. 10."), 8 décembre, à .j''l!)'".
Fig. lOG, même jour, à (j'-'ij"'.
80
l.A l'LANKTI-; MAItS.
Fitj. 107. luèiuo jour, t\ y'-iy»". Ces trois dessins conduisent à la même conclusion.
La /([/. l'JT représente la nier du Sablier.
*'<
Fip:. 54. — Dessins de Schrœtcr, 8 décembre ISÛO.
Fig. 191, 3 décembre, à G''27'".
Fig. 192, même jour, à T^'IG'". Nous plaçons ces deux dessins après les trois pré-
cédents à cause de la concordance des fig. 195, 19G et 197 avec les
fig. 172 à 177. Ceux-ci offrent un intérêt d'un autre genre. Trente
dessins faits du 24 octobre 1800 au 8 janvier 1801 sont à peu près
101
X
/
Fig. 55. — Dessins de Schrocter, 3 décembre ISUO.
identiques à la fig. 191, et sept à la fig. 192, c'est-à-dire possèdent
la traînée grise qui monte jusqu'à la droite du pôle. On comprend
que l'observateur soit de plus eu plus convaincu de changements.
Fig. 56. — Dessin de Sclirœler. Déformation apparente du disque de Mars, VI novembre 1800.
Fig. 182, 12 novembre, à 71- 20™, et 224, 18 décembre 1802, à S»'. Curieux exemple
de déformation du disque dont il a été jiarlé plus haut (p. G7).
ANCIKNNES OBSI-IIVAIIONS. — SCIlU()i:TK IL
si
17SJ-1803.
/•'(Vy. JIT, Il octobre 1802, :\ I P' 5"'. Longitude du centre : iTô-*.
Fi(f. il^, I 1 h lu'' î.j'». 11 y n, pour le 10 octobre, une (igure absolument
pareille à celle du II, c'est à-dire montrant la traînée grise à droite
do la tache x. Le 1 i, on ne voit plus cette traînde grise. Lo 10, la
tache ronde a est seule visible. Il n'y a rien de pareil à ces aspects
dans les observations modernes, car ce n'est pas la baie du Méri-
dien. Longitude du centre : Cii?".
Fig. 1)1. — Ucssiiis lie Schrœlcr, octobre 180'.
Fiij. i^i, 18 décembre, à S^O'". Longitude du centre : 333°. Lu planète parait
coupée en bas.
Fi(j. 2-25, "23 décembre, à 5''d8'". Longitude du centre : iGO".
/•'/;;. 227, 2i » à S"" 12"'. Nouveaux aspects encore. Dessins fait au moment
de l'opposition, qui a eu lieu le 2"). Lonçàtudc du centre : 284''.
9Ç4
ses
297
\.
l"ig. SN. — i'cssius de Sclirœter, déeembre 1802.
J'
Toutes ces observations con (iraient Schrœter dans sa conviction de variations
porpèlucUes à la surface de >Lars; cet éminent observateur a toujours pensé que
les taches de cette étrange planète ne pouvaient être que de nature atmosphérique.
T(illcs sont les observations de Schrœter [' . Ce sont les plus importantes
('> Les observations de Schrœter ont été faites à l'aide de télescopes de i, 7, 13 et
11 pieds de longueur, armés de grossissements de 7i, 'Jô, I3i, 10}. 180, 270. 288 et mémo ôlJ.
l''LA.MM,\muN. — Mars. G
80 1. A I'I.am;!!'; maks.
de toutes celles (lue nous avons ou ii examiner depuis les pi-eiuières pages du
col ouvragi'.
Tout ce qui a été déterminé par les travaux des observateurs antérieurs
est confirmé : rotation diurne, inclinaison de Taxe, saisons, glaces polaires,
atmosphère. Nous entrons graduellement dans la connaissance de ce monde.
L'aplatissement polaire reste douteux.
La détermination de la topographie martienne n"a pas encore fait de grands
progrès. Nous venons de voir que Schrœter est môme convaincu, par sa
longue série d'observations, que les taches sombres de la planète ne sont
pas des mers, mais sont formées par des nuages. C'était également la con-
clusion à laquelle Maraldi avait été conduit.
Malgré toute Thabiletc de ces observateurs et malgré l'excellence de leur
jugement, cette conclusion ne peut pourtant pas être adoptée. En effet, plu-
sieurs des taches observées et dessinées par l'astronome de Lilienthal sont fixes,
permanentes. Notre fameuse mer du Sablier, la plus caractéristique de toutes,
se montre, comme nous venons de le voir, sur un grand nombre, entre autres
sur les ft;]. 1, 2, 5i, 55, 56, 161, 162, 175, 197. La baie du Méridien se voit sur
les ftg. 52, 53 et 161. Ce sont même là les premières observations certaines
de ce point si important choisi en 1830 par Béer et Madlcr pour origine des
méridiens de Mars. La mer Maraldi estreconnaissablesurla/?r/. 67 cl ailleurs
sous forme de bande analogue à celles de Jupiter. D'autre part, les observa-
lions modernes prouventla permanence des taches principales. Ainsi Sclivœler
se trompe sûrement dans sa conclusion, et il en a été de môme de Maraldi.
Pourtant toutes ces observations nous prouvent qu'il s'opère sur Mars des
changements réels et considérables. Il n'y a plus à hésiter dès maintenant.
11 nous faut admettre que les taches sombres de Mars sont formées d'une part
par des régions fixes, qui, sans doute, sont des mers, puisqu'il est connu que
l'eau, les liquides, absorbent une partie de la lumière incidente, tandis que les
surfaces continentales la réfléchissent mieux. D'ailleurs, qu'il y ait de l'eau
sur la planète Mars, c'était plus que probable dès le jour où l'on eut observé
ses neiges polaires et ses nuages, et c'est aujourd'hui rendu certain par l'ana-
lyse spectrale.
Il nous faut admettre, dis-jo, que les taches sombres de Mars sont formées
d'une part par des mers fixes., et d'autre part par un élément instable. Cet élément
instable est peut-ôtre de môme nature que les mers : c'est peut-ôtre égale-
ment de l'eau, sous uij autre état.
Ce fait est absolument démontré par les observations que nous venons de
discuter jusqu'ici, de Maraldi à Schrœter. Les croquis de Huygens, Cassini,
Hooke concordent avec cette déduction.
Parfois peut-ôtre, lorsque les changements sont faibles, on peut admettre
iTOi. am:ii;nm-;s ()ijsi':it\ a iions. s;{
«fuc des mers débordent sur des plages, sur do vastes plaines cl cliangcnt
leurs contours.
Mais la diversité des dessins de Schrœter, llorschel, Maraldi, Cassini, Bian-
chini, etc., est telle qu'il est impossible d'admettre que ces dessins aient
jamais rigoureusement représenté la géograpliie de la planète. Tous les
observateurs qui ont dessiné Mars savent iju'il est extrêmement difficile de
reproduire juste ce que l'on voit, parce que les formes sont presque toujours
indécises, dilluscs, vagues, sans contours arrêtés, et parfois tout à fait incer-
taines. Les aspects sont vagues, faibles, douteux, difTicilcs à dessiner, les ins-
truments dillerent, les yeux et la manière de voir diffèrent plus encore peut-
être. Néanmoins, il est manifestement impossible de tout attribuer h des
erreurs d'observation, d'autant plus que toutes ces taches ont servi à
déterminer la rotation de la planète et la position de l'axe. Il faut donc que
ces observations aient une base réelle.
Les mers martiennes donnent-elles naissance, par l'évaporation, à des
brumes sombres, sombres vues d'en haut, lorsqu'elles sont éclairées en
plein par le Soleil? Ces brumes, ces nuées, se disposent-elles selon les
formes observées? — Il nous paraît difficile d'éviter cette douille interpré-
tation.
Sur la Terre, on ne voit pas de nuages noirs — d'en haut, du cùté de Tillu-
minalion solaire. (L'observation de Schrœler, citée plus haut, a dû être
faite obliquement.) La surface supérieure des nuages est blanche comme de
la neige. Mais il peut exister des brumes dont la constitution moléculaire soit
telle qu'elle réfléchisse mal la lumière incidente. Nos observations exclusi-
vement terrestres ne sont pas suffisantes pour tout nous apprendre. Les autres
mondes doivent plus ou moins différer de celui que nous habitons. D'ailleurs,
nous voyons sur Jupiter et sur Saturne des bandes sombres et des taches
foncées dont un certain nombre sont certainement de formation atmosphé-
rique.
Ces variations sont désormais incontestables.
Mais n'ayons pas la prétention de résoudre dès ce momenl tous les pro-
Ijlèmes olferts par l'analyse des aspects de Mars. Signalons sincèrement
tous les faits à mesure (ju'ils se produisent. Et poui-suivons notre étude.
\X\1. l7Ul. — \UN llAIlN.
Un trouve dans Y Astronomischcs Jahrbuch fiir IT'.IT un dessin de cet observa-
teur, qui n'ajoute rien aux travaux (]ui précèdent, et que nous ne signalons
([ne [lour nif^moii'e.
84 i.A PLANfcTK MA US.
XXVII. ITOi). 1708, 1800, ISOC, 18115. 1807, 1800. I8|:^ Fi.AUdKncci.s (M.
llûiioro l'huigorgues avait son obscrvalûirc à Viviers (Ardcclic), qu'il a
illustré par un grand nombre d'observations intéressantes. Il observa Mars
notamment de 1700 à 1800, puis, de nouveau, en 1813. Les [n-emières obser-
vations ont paru dans le Journal de Physique, tome LXIX, année I8U0, p. li^G,
et les secondes dans la Correspondance astronomique du baron de Zacli, tome I,
1818, p. 180. Voici d'abord un extrait du premier mémoire, avec les sept dessins
[ftg. 59) qui raccompagnent. L'auteur constate que ces taches sont variables, et
se propose surtout de décider si elles appartiennent au sol ou à l'atmosphère.
.l'ai observé Mars quelques jours avant et après ropposition et toujours dans
le méridien ou fort proche, et j'ai dessiné, avec le plus grand soin, les taches qui
paraissaient et dont je vais donner la description et la figure réduite ù, la phase
qu'elles présentaient au passage de Mars par le méridien, le jour de l'opposition,
environ à minuit, temps moyen. Dans toutes ces figures, l'axe de Mars est disposé
suivant le diamètre vertical, le jiolc boréal en haut.
Opposition di-: ITUG.
LuncUc aslronomiquo de dix-huU pieds de foyer; (jrossissemcnl = lOÔ.
.]'ai VU constamment dans la partie australe du disque une tache d'un rouge
obscur en forme de croissant ou de fer à cheval, dont les branches étaient tour-
nées vers le Nord {fi<j. A).
Opposition ue 1798.
Luiietlc achi'omalique de quavunle-qualrc ]touces de foyer; grossissement — 00.
J'ai VU constamment dans la partie australe du dis-quc de cette planète deux
bandes parallèles assez larges, d'un rouge obscur, dirigées de l'Est à l'Ouest et
séparées par une bande plus étroite et plus claire. J'ai vu encore, dans la môme
partie australe, une tache blanche, ovale, immobile, placée près du bord, environ
seize degrés à droite du vertical dans la lunette qui renversait les objets {fhj. 13 ,i.
Opposition de 18uu.
Même luneUe.
J'ai vu constamment une grosse tache ronde, d'un rouge plus foncé que le reste
du disque, dont le centre était un peu plus boréal que celui de la planète. Cette
tache, dans sa partie australe, était terminée par un appendice en forme de cro-
chet, dont la courbure était semblable à celle de la grosse tache {flg. C).
(') Les taches de la planète Mars. — Aux observations de Flaugergucs, en 1796, nous
pouvons en ajouter une, faite le 18 avril, sur le contact de la planète avec l'étoile de
6' grandeur h du Sagittaire : Mars venait de passer devant cette étoile, qui ne reprit
complètement son éclat que lorsqu'elle fut éloignée à la moitié du diamètre de la pla-
nète. L'observateur attribue avec raison cotte diminution à l'éclat de Mars.
I79G-Ifil3. WCII'NNKS onSI-KV ATIONS. - II. A rc 1". IKi l'K S.
85
Opposition di-: 180.'.
Môino luncllr.
.lai VU constamment sur le disque de cette planète une grosse tache ronde, d nu
rouge plus obscur, i\ pou près concentrique au disque et coupée transvcrsalomcnl
sous un anjjflo de 'jô" avec la verticale do l'Ouest à l'JOsI, suivant un de ces dia-
uiètros par une bauile plus clairo qui avan(;ait jusqu'aux i\o\\\ tiers de la tache
(//^. D).
Opposition de 1805.
Momf lunette.
J'ai vu constamment sur son disque une grosso tache d'un rougo plus foncé que
Fis. A. -Juin 17%.
I-"ig. B. — Aoul 17'."8. Fig. C. — Novemijre 1800.
K
Fig. n. — Décembre I80:.
Fig. K
Janvier 1805. Fig. F. — "^ Mars 1807. Fig. (.. — .A\iil 1801).
Fig. bit. — Croquis de Mars, par Flangergucs.
le reste du disque, d'une figure irrégulière et indécise, plus étendue et d'une
teinte foncée dans la partie boréale de Mars {fig. E).
8G I A PI ANKTI- MAP» S.
Opposition nr: ISOT.
Mcmc htnellc.
J"ai vu consfamnicnt sur le disque de cette planète, et dans la partie australe,
une tache en forme de bande, d'une teinte tant soit peu plus foncée que le reste
du disque, longue, étroite, mal terminée et dirigée de l'Est à l'Ouest; cette bande
était très peu sensible (pg. F). Jai remarqué de plus que toute la partie boréale
du disque ("tait parfaitement blanche et avait beaucoup d'éclat, particulièrement
autour du tioini rorpo^pondaut au pôle boréal.
Opposition de 1809.
Avec la nicme hmcltc achromaliquo.
Le bord occidental de cette planète paraissait blanc et brillant, le bord oriental
rouge foncé; on voyait deux taches, une longue en forme do bande, dirigée de
l'Est à, l'Ouest dans la partie australe du disque, et l'autre, plus petite, irréguliè-
rement arrondie, placée dans la partie boréale, proche du bord occidental; ces
deux taches étaient d'un rouge plus foncé que le reste du disque {fîg. G).
Ces taches m'ont paru en général confuses et mal terminées, au point qu'il
était difficile de distinguer exactement leurs contours et leur juste étendue : on
peut remarquer que c'est principalement dans la partie australe du disque do
Mars que paraissent ordinairement les taches.
A l'égard de la tache ovale, très remarquable par son éclat et par sa Ijlancheur,
que j'ai observée en 1798 et qui correspondait sur le disque au pôle austral do
Mars, elle fut aussi observée par MM. Messier, Duc la Chapelle et Vidal.
Ces taches blanches, ovales, constamment correspondantes aux pôles de Mars,
nous offrent exactement les mêmes apparences que doivent présenter, vues de
Mars, les calottes de glace et de neige qui entourent les pôles du globe ter-
restre; aussi M. ITerschel n'a pas balancé d'attribuer ces taches blanches aux
neiges et aux glaces dont les pôles de Mars doivent être entourés, et on ne peut
qu'applaudira cette explication qui paraît parfaitement bien fondée.
Pour ce qui est des taches rouges et obscures de Mars, dont l'apparence a
toujours été différente dans les diverses observations que j'ai faites, on pourrait
peut-être penser que ces changements étaient purement optiques et qu'ils pro-
venaient de ce que, à raison du mouvement de rotation de Mars autour de son
axe, l'hémisphère visible de cette planète n'étant pas le même que dans les ob-
servations précédentes, ne pouvait présenter les mêmes apparences. Pour ap-
précier cette objection, et évaluer l'effet du changement produit par le mouvement
de rotation, j'ai pris pour terme de comparaison le méridien de Mars dont le
plan passait par le centre de la Terre au moment de la première observation,
ouïe 14 juin 1796 à minuit, temps moyen. Ce méridien, que je nommerai premier
méridien de Mars, doit être censé fixé au globe de cette planète, et tourner avec
ce globe tout comme le premier méridien du globe terrestre est supposé fixé à
rîle <\o Fer.
iTOO-isiif. \n(:ii-:nni> "i.^i.nN ATioNs. — i-i.\u(;i:ii<;ui-:s. s:
Ici l'aiiteiir fait un calcul du méiiflicn central do Mars f[u'il appcUo nir-
lidicn i^ôdialténiquo (do vr,, Terre, et oiaSaivo), je passe), et compare les posi-
tions de la planète pour les sept figures ci-dessus et trouve que les premièi-e.
quatrième et sixième observations se rapportent à pou près à la même posi-
lion, et que la seconde et la septième sont très rapprochées. Puis il ajoute :
L'apparence des taches do Mars aurait du (•tro à i)eu près la mémo dans les
première, quatrième et sixième observations et pareillement cette apparence
aurait dû être à, peu près semblable dans la seconde et dans la septième, on sup-
posant que la fi^rure des taches de la planète soit constante, et que leur apparence ne
varie qu'à raison du mouvement de rotation de cette planète autour de son axe.
Donc, puisque la figure, le nombre et la disposition des taches ont toujours paru
très difTèrents dans chaque observation, on doit en conclure que les changenir-nts
qu'on observe dans les taches de Mars sont réels, et que ces taches peuvent phy-
siquement changer de figure, augmenter et diminuer, disparaître et reparaître
de nouveau, ainsi qu'on l'observe dans les taches du Soleil. Mais nous remar-
querons en même temps que les variations que nous avons observées sont si
grandes, que pour produire des apparences semblables dans le globe terrestre, vu
à la même distance que Mars, il ne faudrait pas moins que la submersion d'un
continent, tel que l'Amérique, ou le dessèchement d'une mer, comme l'océan
Atlantique. Ces changements sont trop considérables pourqu'on puisse en supposer
de pareils dans le globe solide de Mars, et y placer la cause des variations que
nous avons observées dans ses taches. Cette supposition ne s'accorderait pas avec
l'état d'équilibre et de consistance auquel les planètes, à en juger par la Terre,
sont parvenues depuis longtemps ; et il est beaucoup plus probable que ces
taches, et les grands changements qu'elles éprouvent, n'ont lieu que dans l'atmo-
sphère de Mars dont plusieurs observations indiquent l'existence.
Il parait même que le fluide dont .elle est composée a beaucoup de rapport
avec notre air; il lui ressemble au moins dans une propriété remarquable, celle
d'absorber les rayons bleus et violets, et de ne transmettre sensiblement que les
rayons jaunes et rouges. Cette propriété nous est indiquée par la couleur rouge
de Mars. Dans cette supposition, qui parait prouvée, les grandes taches rouges
que nous avons observées pourraient bien être de grands amas de nuages
flottants dans l'atmosphère de Mars, ou plutôt d'immenses brouillards pareils à
celui qui couvrit, pendant plusieurs mois, une grande partie de notre globe
en 1783. dont l'étendue, la figure, le nombre et la situation peuvent facilement et
considérablement varier par l'elTet de la chaleur, par celui des vents, ou par
d'autres cause? inconnues, et qui peuvent même, par l'efl'et de ces mêmes causes,
se dissiper et renaître ensuite, comme nous le voyous sur la Terre.
Telles sont les observations de Flaugergues de 179i) à 1800, Elles ajoutcui
peu aux précédentes. Les variations polaires sont confirmées ainsi que celles
des taches sombres. Quant à admettre que ces taches soient de nature atino-
!^8 I.A PLANKTi: M AU S.
sphcritliie, nous ne le pouvons pas, comme nous l'avons oonclu itlus liaul à
propos de Schrœter. Son liypollièse sur ratmosphèrc de Mars n'est pas soutc-
nable non plus : le disque se montre plus rouge dans sa région centrale que
vers les liords; donc ce n'est pas l'épaisseur de l'almosphère qui cause cette
coloration, puisque la lumière réfléchie par la planète a d'autant moins
d'épaisseur atmosphérique à traverser que l'on observe plus près du centre.
En 1813, Flaugergues fit de nouvelles observations. Voici un extrait de son
second mémoire.
J'ai observé Mars plusieurs fois aux environs de sa dernière opposition, ainsi
que je le fais depuis plusieurs années, pour dessiner I as taches de celte planète et
noter les variations considérables et singulières qu'elles présentent. J'ai remarqué
de plus cette année une tache blanche ovale, placée sur le pôle austral de Mars
et si brillante qu'elle paraissait dépasser le disque. Cette tache fut surtout très
brillante la nuit du 31 juillet, jour de l'opposition, elle a (liininué de grandeur,
beaucoup plus rapidement que si cette diminution eut été purement optique et
seulement relative à laugmeutation progressive de la distance. Le 22 août, cette
tache était à peine sensible et, quelques jours après, on ne la voyait plus. J'ai vu
en 1798 une pareille tache blanche au pnle austral de Mars, mais elle avait
beaucoup moins d'éclat.
Le printemps, pour la partie australe de Mars, avait commencé le 1-2 mars, et la
déclinaison australe du Soleil, vue de la planète, était le .31 juillet de 21"0'; par
conséquent la tache ou la calotte blanche que j'ai observée était alors depuis
plusieurs jours totalement et continuellement éclairée et échauffée par les rayons
du Soleil, et elle l'a toujours été depuis, cet astre ne se couchant plus pour cette
partie du globe de Mars, de sorte que si cette calotte était de glace ou de neige,
semblable à la glace et à la neige de notre globe, comme tout porte ;\ le penser,
il n'est pas douteux qu'elle n'ait dû se fondre très rapidement.
On voit dans Mars de grandes taches irrégulières, variables et présentant les
mêmes apparences que doivent offrir nos nuages et nos brouillards à un spectateur
placé sur Mars. Les deux planètes ont leurs pôles entourés de calottes blanches
qui diminuent lorsque le Soleil s'approche du pôle où elles sont placées, et qui,
par cette circonstance, paraissent devoir être de la même nature, c'est-à-dire de
neige ou de glace sur ce globe, comme sur la Terre.
Si cette conjecture était réelle, la fonte des glaces polaires do Mars est bien
plus prompte et bien plus complète que celle des glaces terrestres, dont la
majeure partie résiste aux chaleurs de l'été ; il parait donc que la chaleur sur ^Mars
est plus forte que sur la Terre, quoiqu'elle dût être plus faible dans le rapport de
43 à 100, si l'on avait égard seulement à la différente distance de ces deux planètes
au Soleil; c'est une raison de plus à ajouter à celles qui ont déterminé les plus
habiles physiciens à penser que les rayons du Soleil ne sont pas chauds par eux-
mêmes, mais qu'ils sont seulement la cause occasionnelle de la chaleur. »
iSOMSOÔ
ANCII'NNKS OIISIIKVA riONS.
SI)
Flaiiîïcrgiios, comme on viont d^; le voir, romaniuc poiii- la liivmiérc luis
que ]os neiges polaires de y\;\Y?, varienUn plus forte propori ion qtic celles île
la Terre et que la tompéraliiie inoyoïiiic de celle planèlc y)fH/ rire plus élevée
que colle de notre monde. C'est parfaitement exact, et nous verrons les mesures
modernes confirmer ce fait fort intéressant pour la climatologie marlieniK-.
XXVllf. IS0:-I807. — KniTscn .').
Le pasteur Frilsch a puljli(''. dans l(^s volumes annuels auxquels nous
renvoyons (p. 188 et 218), nn sommaire de ses observations de la planète,
faites pendant son opposition de 1802, observations accompagnées de cinq
dessins, que nous reproduisons ici' [fig. GO) [pris les 21 novembre, 24 no-
i»/ flov lSû2
rç SJc
17 mars 1S07.
Fig. GO — Dessins de Mar?, par Fritsch, en ISOÎ, 1803 et 1807.
vcmbre, 20 novembre, 11) décembre 1802 et 10 janvier 1803] et une obser-
vation du 17 mars 1807, à 0". Ce dernier dessin montre la tache polaire
débordant le disque, par un effet d'irradiation certainement, et deux bandes
éqnatoriales parallèles rappelant celles de Jupiter. Il dit quolquesmolsdc l'al-
mosphère de Mars et de la rotation de la planète, mais ne donne aucun détail.
Ces croquis, comme ceux de Flaugergues, ont le sud en bas.
XXIX. 180.-. - IluTu (-).
Ces observations n'ont pas grand intérêt. Elles sont accompagnées d'un des-
sin du 22 février 1805, montrant au pùle nord une forte tache blanche ovale
qui dépasse le disque par l'irradiation. On voit également au pôle sud uuo
indication de la tache polaire. Hormis ces deux taches polaires, le disijue est
(') Observations tic Mars faites à Qnedlinburs en 180^ publiOes dans VAslvo,\o-
mischea Jahrbiirh fin- 180G et 1810.
{'■ ) Observations faites à Mamibrin ol lM-aiicf'»rt. eu isil.'). AslroitomiacUox Jnltrlnirh
Inv 1808. p. 2.38 (Merlin 180.".}.
00 I. V PI. ANf-Ti: M A us.
vide. 11 nous semble inulilc do reproduire celle lltiuro. Los ohservalions di'
rnulour lui ont donné 2'i''i3'" pour la durée do la rolalioii. 11 parle do l'ana-
logie de Mars avec la Terre, au point de vue de son atmosphère et des météores.
X.W. 181.!, 181 î. 18-2-:. 1830, 18i7. - Grutiiuisen ^'\
I/auteur a exposé d'aliord, ses observations de la planèlo Mars faites
en 1813, et notamment do la tache neigeuse (Schneefleckon) du pôle sud. 11
fÙMV
f-!-.JwnM.
.y:-.^^
»■
Fif^. Gl. — Dessins de Mars faits par Gruithuiscn, en 1S13 et ISIV
donne trois dessins, reproduits ici (fig. Gl), des l"'" juillet et 31 août 1813 et
1 i janvier 1814. On remarque dans la zone équatoriale des traînées sombres
qu'il identifie avec celles observées par Maraldi.
Les études des autres années traitent de la rotation, de la position de Taxe
et des taches, mais ne sont accompagnées d'aucun dessin.
XXXI. 1811, 1813, 1815, 1817, 1845, 1847. — Ap.ago.
Arago a fait un certain nombre d'observations de Mars, qu'il a réunies dans
un mémoire lu à l'Académie des Sciences le 31 janvier 1853, l'année môme
de sa mort. Ce mémoire est publié dans ses œuvres complètes, tome XI,
p. 245-304.
L'illustre directeur de l'Observatoire de Paris commence par célébrer la
valeur de l'Astronomie physique, que les triomphes de l'Astronomie mathé-
matique éclipsaient un peu trop. Après une rapide esquisse historique, il
consacre un chapitre à l'aplatissement de Mars et donne en détail ses obser-
vations commencées dès 181 1. Les résultats varient considérablement suivant
les années, depuis -pj jusqu'à jl-^. Arago conclut après discussion que l'apla-
tissement de Mars surpasse y^.
On se souvient que William Herschel avait trouvé ^6 et Schrœter < ^j.
En appliquant à la détermination de l'aplatissement de Mars la théorie qui
{') Einigephysisch astronomische Beobachtungen des Saturns, Mars, des Mondes.
des Venus, etc. { Aslronomisches Jalirhuch (de Berlin) fàr 1817, p. 185; — Zd., de Mu-
nich, édité par Gruitlniisen, 1839, p. 72; 1840, p. 98; 1841, p. 109; 1842, p. 155; 1847,
p. 149; 1848, p. 12'i.;
ISII-lsiT. VNCII-NNKS ()|{Si;itV.\TI()NS. — AKACO. 01
il doniit' pour Jupitoi- un résultat si Mien d'accoril avec l'observation, on trouve
pour cet aplatissement ^l^,- H y :» là un faraud désaccord avec la théorie.
Arago fait remarquer que, pour expliquer le fait, il faudrait supposer la masse
de Mars huit fois [diis faihle que celle qui ost adoptée, ce qui est inadmissible,
lien parlaàLaplaceetcelui-ci lui répondit que « des bouleversements locaux,
analogues à ceux dont on voit les effets en diverses parties de la Terre, sur-
tout dans les régions équatoriales, avaient pu avoir une plus grande influence
sur la figure d'une petite planète que surcelIedcTupileroude notre globe. «
La diversité des résultats o])tenus pour cet aplatissement est aussi très
digne d'attention. A plusieurs points de vue, Mars paraît vraiment un monde
;'i part. Son premier satellite tourne autour de lui beaucoup plus vite que la
planète ne tourne elle-même, sa révolution s'effectuant en 7''39'", tandis que
la rotation du globe de Mars demande 24''37™. La surface présente des varia-
lions énigmatiques. C'est unmonde fort différent de celui que nous habitons.
Nous arriverons sans doute, à la fin de cet ouvrage, à des conclusions tout à
fait particulières.
Arago trouve pour le diamètre de Mars à la distance 1 (distance de la Terre
au Soleil) :9",o7.
Ses observations des taches ont commencé en 1813. La lunette dont il se
servait était une lunette de Lerebours de 4 pouces (108""") donnée par Napo-
léon à l'Observatoire : on l'appelait « la lunette de l'Empereur « ( ' ) . C'était peut-
être alors le meilleur instrument de l'Observatoire. Le progrès a marché :
aujourd'hui, la plupart des étudiants du ciel sont à cette hauteur. Cette lunette
était armée de grossissements de 150 et 200 fois.
L'observateur remarque qu'il a commencé par distinguer sur le disque de
Mars d'abord une tache blanche indiquant le pôle supérieur ou austral,
ensuite une tache sombre en forme de crochet {fi(j. 62, A). L'intervalle b parais-
sait plus petit que le tiers du disque de la planète : IG juillet 1813.
Le 22 juillet, vers la même heure (minuit à 1'' du matin 'i, il observa de
nouveau la planète. La fg. B a été prise à l''iry" : •( .Te crois, écrit l'obser-
vateur, que l'intervalle c est un septième du disque; je n'apercevais pas, il y a
une heure, la portion verticale de la bande noire ». — Cette portion verticale
n'est-elle pas la mer du Sablier?
') En ISOi, Napoléon, projetant de se rendre au camp de Jîoulognc, fit venir Delambre
ût lui demanda la meilleure lunette du Bureau des Longitudes, pour être pointée vers
les côtes anglaises. — « Sire, répondit le fonctionnaire, nous pouvons vous donner la
lunette de Dollond; Votre Majesté ferait une chose agréable aux astronomes si elle vou-
lait nous accorder en échange une excellente lunette de \ pouces, que vient de construire
M. Lerebours. — Elle est donc meilleure? repartit l'Empereur. — Oui, Sire. — Eh bien
alors, je la prends pour moi ».
Au rotmir du ramp de Boulogne, Napoléon on fit don ;i lObsorvatoirc de Paris.
0? LA PI. \m:ti: m a us.
Lo -JT juilK'l, vers l(V' '«.")'", on n'apoiroit p;is la baiulo crochue dessinée ces
jours derniers, et qui semble si propre à (L'Ierniiner la rotation de la planète.
Les IS, 10. -20, '23 et '2'i août, on voit une tache sombre en l'orme do
/
/
t','''\
B' f '• !
Fi£ï. G?.— Observations de ^lars faites par Arag-o, on juillet 1S1.3.
croissant. La tache blanche polaire est toujours très lumineuse. Les cinq des-
sins se ressemblent fort. Nous en reproduisons deux [fïQ. G3 1, des 20 et 23 août.
/ T
y
c
Fig. G.3. — Observations de Mars faites par Arago, en août 181:).
Le 1 i octobre, on apercevait encore très distinctement la tacho brillante du
pôle, quoique Flaugergues ait cru observer le contraire. 19 octobre et 5 no-
vembre à 30 décembre : cette tache est devenue très petite et presque imper-
ceptible.
181.5. 2 octobre au 6 novembre. La tache polaire est très petite. Le 20 oc-
tobre, la planète offre l'aspect représenté pj. E et le 2G octobre celui de la
l>:i-IS-2?. ANCIENM-S OBStllVATIONS. - Kr.\U\V>KV. :ij
/?,'/. D. Dans le pi-cmiei- dessin, le croissant esl tonrnf'; en sens contraire des
li^nires prises en 1813. Dans le second, on aperçoit une bande droite qui ne
louche d'aucun cùlc le bord de la planète.
Ka ISlT. IS'i.j et ISiT, Arago a encore fait (juebjues observations. Elles ne
nous en apprennent pas davantaye.
D'après ces observations, la tache polaire aurait mesuré 3', G6 de diamètre le
/
[ .
/
Kl
Fiijr. (il. — ul)servali JUS do Mars f.ii'os pur Arago, on oclobic 181."'.
7 juillet, 3",GÛ le 12 (la planète mesurant 22", 8(J), 2", 25 le 22 (planète: 24", lOl.
2'',G3)e 2 août (planète : 24". DG). C'est souvent, comme on le voit, plus de la
di.xèmc partie du diamètre. (Juantaux lâches, elles ne peuvent être idenliliées
et plaideraient comme les autres en faveur de variations. Mai< n'oublions pas
ffuc la lunette n'avait que 4 pouces ou lOS""'" de diamètre.
XXXII. 1821-1822. — KuNOWSKv (').
L'observateur a fait ses observations de l'automne de 1821 au printemps
Fig. Gj. — Doux do^siiis de Mars, faits par Kuiiowsky, en IS2I et IS-2:.
de 1822, à l'aide d'une luiielte de Fraunhofer de 4 pouces 7 d'ouverture. Il
parle (p. 225 ) des taches de Mars et de sa rotation, décrit les zones neigeuses
« Schneezonen » et les taches sombres, et publie deux dessins {fi(j. C5\ dont
(') Einiijii ijhysisclw Beobac!ila)i{jon dos Mondes, des Snlitnis und Murs, etc.
{.\slronomisclic< Jahrbuch fur iSîô. Berlin, 182'2.)
0-i i.A PL A m: 11': .M Alt s.
le premier paraît ùlrc du mois de novembre 1821, el dont le second est du
13 mars 18'2-2. Il conclut à la fixité des taches. En cITet. ces deux dessins, faits
à quatre mois d'intervalle, se resseml)lent fort. L'auteur remarque que la
ligne grise qui longe le bord occidental est un commencement de phase. On
reconnaît, surtout sur la première, non loin du pùlc sud, la tache ronde que
Béer et Mildler ont choisie en 1830 comme origine des longitudes de Mars
( voir plus loin, p. 103 et 100, la remarque de ces auteurs eux-mêmes sur cette
confrontation). Kunowsky combat les inductions de Schrœter sur le prétendu
caractère atmosphérique et variable des taches, et conclut à leur caractère
géographique et fixe. C'est la première fois, depuis les premières pages de
cet ouvrage, que nous voyons affirmer cette opinion. Elle s'accorde avec les
déductions conclues plus haut de la comparaison des observations, depuis
les premiers dessins de Huygens et Hooke, jusqu'à ceux de Schrœter, malgré
les variations incontestables qui se sont révélées dans le cours de toutes ces
observations.
XXXIII. 1824. — Hardixg (').
L'astronome auquel on doit la découverte de .lunon passe d'abord en revue
dans ce mémoire (p. 173) les observations d'Herschel et de Schrœter et dis-
cute les mesures de l'aplatissement. Pour lui, la planète semble varier de
Jbm-tl-n s. f^
' -^kS^ ^-^^' '■■^Shsi^''
Fig. G6. — Croquis sur la forme do Mars, ijri? par Ilarding, en 18-24.
forme dans le sens équatorial comme dans le sens polaire, sans doute par
suite d'un effet de son atmosphère. Il publie les six figures, des 4, 8, 14, 15,
20 et 25 avril 1824, reproduites ici [fvj. 6G), qui sont assez singulières.
Voici encore du nouveau. Est-il possible d'admettre une pareille con-
clusion? Elle s'accorderait assurément avec la variété des valeurs trouvées
pour l'aplatissement. Mais une telle variation ne paraît guère admissible.
Ces effets ne sont pas supérieurs aux erreurs possibles des observations, sur-
tout aux grands éloignements de la planète, comme celui de 1824.
Celte observation n'ajoute rien non plus aux documents précédents. Elle
clôt la première période de cette histoire de Mars, qui nous a déjà appris
(') Beobaclitunrjen itnd Berner kunrj en ubcr den Mars vora Jahr 1824, vorn Prof.
Habdixg in Goltingen [Astr. Jahrbuch fur 1828. Berlin, 1825). — En 1824, Pxctet> à
l'Observatoire de Genève, a également observé Mars, mais c'est seulement au point de
vue de sa position et de la parallaxe. Il en avait été de même de L \lande en 1798. Nous
n'avons pas à parler ici de ces observations de positions.
i^.., an(;ii;nm:s (jbsi-MVATioNs itr»
})eaucoup sur cette pUinètc, mais (jui n'a pas encore in.ui^uri; la géographie
(le ce monde voisin.
Par ce qui précède, nou:? savons que cette planète a des années, des saisons,
des jours et des nuits, comme le monde que nous liabitons, (]nedes précipités
météoriques analogues à nos neiges se montrent chaque hiver à ses pôles;
que le centre de ces glaces ne coïncide pas avec le pôle géographique, mais
en est assez éloigné; qu'une atmosphère dans laquelle se forment des nuages
et des neiges environne ce globe ; que les glaces polaires y fondent plus com-
plètement (juici, soit que cette fusion y soit rendue plus facile par la con-
stitution même de ces neiges, ou par la nature de l'atmosphère, ou bien peut-
élre même que la température de Tété y soit plus élevée que sur notre planète.
Nous savons de plus qu'il y a sur ce globe des taches sombres ; plusieurs
de ces taches sont fixes et permanentes et doivent représenter des mers;
elles semblent toutefois soumises à des variations d'étendue visibles d'ici. Et
en cela l'aspect de Mars dillèrc essentiellement de celui de la Terre.
>hiis la diversité des dessins est telle, que nous devons attribuer la plus
grande cause de cette diversité à la difficulté des observations précises sur
un disque si petit, au manque de netteté des configurations, en un mot à
des incertitudes d'observations. Néanmoins, un certain nombre des taches
observées par Iluygens, Cassini, Ilookc, Maraldi, Herschel, Schrœter, etc.,
ont donné des résultats précis pour le mouvement de rotation et pour la
position de l'axe : ces dessins avaient donc un fond de réel (\). On ne peut pas
admettre que le sol de la planète subisse de pareilles perturbations, parce
(iuc,s'il en était ainsi, il n'y aurait rien de stable à sa surface, tandis que les
observations elles-mêmes nous prouvent que l'esquisse générale est stable.
Muehiues-unes des taches sombres de Mars doivent donc être de nature atmo-
sphérique.
Nous allons maintenant entrer dans une période de découvertes nouvelles.
') Plusieurs ont étù identifies plus haut. Pour compléter les documents relatifs à celte
première période, nous ajouterons ici, d'après M. Van de Sande Bakhuyzen, les longi-
tudes du centre des meilleurs croquis d'Herschel, reproduits p. 51 et Ô7.
1777. li<J.
11
37°
1779, fî(j- 20
: 310°
1781,
fi'l-
8
317'
1781,
fin. IS
230
Il 1
lô
m
u " 21
•26-1
"
1)
11 .
3i:i
..
n 19
107
le. .
7'i
. » 2-2
.303
«
i-
li
I
»
» 20
211
17
.3-2i
•■
»
15
21
»
» 21 .
118
18 .
202
1781, //f/. G
292
u
»
10
8
1, 00
55
„
19 :
•l'il
)) )) 7
300
u
»
17 .
3ÙS
Ce que l'on reconnaît de plus sur, c'est la mer du Sablier, au.\ /Zf/. 17 de 1777, 20, 21.
22 de 1779, G, 7, S, U et 17 de 1781. Les détroits llcrschcl JI cl Arago sont rcconnais-
sables sur ce dernier croquis.
CONCLUSIONS DE LA PREMlÈlli: PÉRIODE.
De la discussion des documents nonibreux, variés cLsouvciiL conliadicloires
(jui précèdcnl, nous pouvons déjà commencer ù nous former une opinion sur
la ualuro du monde marlien, à fixer les premiers cléments de la connaissance
(jue le présent travail a pour but de nous faire acquérir.
Nous pouvons considérer comme acquis les faits suivants :
1° La révolution de Mars est approximativement fixée depuis l'anliquitc.
Depuis Copernic, nous savons que celte révolution s'cfTccLuc autour du Soleil.
Nous savons aujourd'hui qu elle s'accomplit en G87 jours, soit en un an ter-
restre plus 322 jours. Les années sont donc prÎ3S de deux fois plus longues
que les nôtres.
2° La distance de Mars au Soleil est à celle de la Terre dans le rapport de
1,5237 à 1,0000. La lumière, la chaleur, les radiations qu'il reçoit de l'astre
central sont donc plus faibles que celles que nous recevons dans le rapport
du carré de ces deux nombres, c'est-à-dire de 2,32 à 1,00 : elles sont plus de
deux fois moins intenses. — Mais il est utile de remarquer que c'est la con-
stitution de l'atmosphère qui régla les températures. La température de la
surface de Mars pourrait être égale et môme supérieure à celle de notre monde.
3° Le diamètre de Mars, à la distance 1, c'est-à-dire à la distance de la Terre
au Soleil, est de 9", 35, ce qui correspond à 0, 528, c'est-à-dire à uu peu plus de
la moitié de celui de notre globe. Ce diamètre donne pour volume 0, 1 i7.
4'' La masse de la planète Mars, en fonction de celle du Soleil, est évaluée,
dans V Annuaire du Bureau des Longitudes pour 1830, îi-YTï^Jïo- C'était la masse
obtenue par Delambre par les perturbations de la Terre et adoptée par Laplace
dans la Mécanique céleste (1802). Aujourd'hui elle est connue avec plus de
précision par les mouvements des satellites et nous savons qu'elle est de
j-ôâTjTô* Ce chilfre donne, relativement à la Terre, 0,105, soit environ -/„.
5" La densité, obtenue en divisant la masse par le volume, est de 0, 71 1.
G" La pesanteur à la surface, conclue de la masse et du rayon de la planète,
est de 0, 37G.
1" La durée de la rotation est déjà, en 1830, connue avec une assez grande
précision, et évaluée à 24'' 39"'.
8" Il y a sur Mars des taches plus ou moins foncées. Ces taches sont ditli-
ciles à bien discerner. En les dessinant, les observateurs leur donnent forcé-
ment plus de précision qu'elles n'en présentent en généj-al, de sorte (ju'il ne
co.NciAsioN Di; I. A I'im;mii:im: I'Kkiodi:. '.it
lauL pas prendre les dessins à hi Icllic. Cepcndiint les variétés observées sont si
grandes que nous sommes conduits à considérer ces taches comme certaine-
nienl variables. Nous venons de voir passer sous nos yeux 191 vues de la
planète Mars, dessinées par les observateurs les plus dillerents : ces vues
doivent constituer l;i première base de notre connaissance du monde de Mars.
9" Il y a également sur Mars des taches blanches, manjuantses pôles. Ces
taches varient avec les saisons, augmentent eu hiver, diminuent eu été*. Elles
subissent les iniluences du Soleil comme nos glaces polaires. Nous pouvons
les considérer connue des glaces ou des neiges.
10' Ces neiges polaires ne sont pas situées juste aux extrémités d'un même
diamètre, et ne marquent pas absolument les pôles géographiques. Ces pôles
eu sont généralement couverts. Mais, à Tépoque du niininium, elles se
réduisent à un point blanc sensiblement circulaire qui est éloigné à une
certaine distance du pôle, llerschel a trouvé, en 1781, 13" à 14" de distance
l)0ur le centre de la tache polaire boréale, alors très petite après son été
alors la glace australe était très étendue et son centre était voisin du pôle
et, eu 1783, S^S' pour la distance de la tache polaire australe, alors aussi très
petite après son été ( ' )• Un degré du méridien de Mars équivaut à 60 kilomètres.
On sait que sur la Terre aussi le pôle du froid ne coïncide pas avec le pôle
géographique.
1 1" L'inclinaison de l'axe de Mars ne diffère pas beaucoup de celle de l'axe
de la Terre, de sorte que les saisons y sont analogues, quoique près de deux
l'ois plus longues.
12° Il y a sur cette planète un second ordre de saisons, causé par la grande
excentricité de l'orbite. Mars étant beaucoup plus près du Soleil au périhélie
iju'à l'aphélie, dans la proportion de 1,3820 à 1,00.58 ou de 10 à 12.
(') Voici toutes les observations de William Herschel sur ce point important :
En 1781, la neige polaire boréale tournait très loin du pôle et était à la latitude do
7G° ou TT" (P/i/7. Traiis., 1784, p. 245). En 1783, la latitude de la tache polaire australe
était 8l°ôl'{PhiL Trans., p. 251 ). Cette tache était alors (octobre) très petite et bien rondo.
— En 1781, le centre de la tache polaire australe n'était pas très éloigné du pôle « not
niany degrees » et cette tache s'étendait jusqu'au 70° ou au 65° degré (Phil. Tran><..
p. 240) étant extrêmement étendue après douze mois d'hiver (p. 2G0). En 1783, on nu
Voyait pas la tache polaire boréale à cause de l'inclinaison do la planète.
1781 : Tache polaire australe très large (après sou hiver)
• 1 boréale très petite (après son été).
178;) : Taclic polaire australe 1res petite (après .son été).
■> boréale invisibleà eux de l'inclinaison.
Distances au pùle :
Taclie australe : I7SI, voLsinc du i)olo.
178.!, à 8»8 .
Taclic boréale : 1781, à 13» on 14
• ■' I78;i, invisible.
Flam.m.miign. — Murs. *
U>s LA l'I.A.NKTK MAKS.
13" I.a pl;iiit'lo est ciivii'oniK'C d'une alinûsphcre, dans laqucdlc se l'onnent
les neiges dont il a èlc question plus haut, et dans laquelle llotteut des nuages
blancs et probablement aussi des nuages sombres.
Telle est la conclusion naturelle, logi(jucmcnt fondée, que nous pouvons
tirer de l'examen critique de toutes les observations faites pendant cette pre-
mière période de 193 années. Cette planète possède-t-cUe une surface géogra-
phique Uxe, comme la surface du globe (]uc nous habitons? 11 serait impos-
sible de le conclure des observations comparées qui précèdent. Peut-être les
progrès de l'Optique et de l'Aslronomic uous permettront-ils, dans la période
d'observation dans laquelle nous allons entrer, de résoudre cette importante
question. Nous allons en eilét entrer dans ce (]uc nous pourrions appeler la
phase ijcoyrujilui/tic des études de Mars.
DELXIEME FEKIODE.
I8:i0-I8"7,
DEUXIEME PEIUODE
1830-1877
La deuxième période de notre étude commence aux grands travaux aréogra-
Iiliiques de Béer et Madler, aux premières observations continues qui aient per-
mis à leurs auteurs de construire une carte fjéo'jraphiqur de la planète Mar?.
Avec ces observations, nous entrons dans la connaissance physique de ce
monde voisin. Les difficultés, les incertitudes ne disparaissent pas; mais la
science prend corps, une base solide est offerte à l'examen, et la découverte
définitive dun nouveau monde se prépare.
Heureux fut Christophe Colomb d'être arrêté par le continent américain
dans son voyage de circumnavigation vers l'Asie. Mars n'aura pas son
Cbristophe Colomb. Ce que celui-ci a fait en une minute, en une seconde,
par le seul acte de toucher l'Amérique, une phalange d'astronomes emploiera
plus d'un siècle peut-être à le renouveler pour ce continent du ciel. Mais
Béer et Miidler mériteront d'être inscrits les premiers sur la bannière des
pionniers qui auront marché à la nouvelle conquête — précédés d'ailleurs
par les éminents précurseurs que nous venons de voir passer devant nous,
précurseurs parmi lesquels William Herschel et Schrœter méritent la pre-
mière place. Béer et Madler ont publié leurs observations de Mars dans les
Asironomisclie Nachrichlen de 1831, 1834, ISS."), 1838 et 1839, et ont réuni ces
études dans un ouvrage intitulé Fragments sur les corps célestes du sysicme
solaire, pour l'édition française (Paris, 1840) et Beilrage zur physischen
Kenntuiss der himmlischcn Kurpcr ivi Sonncnsysteme^ i^ouv l'édition allemande
Weimar, 1841). Ces deux éditions sont identiques. Nous extrairons de
l'édition française tous les documents et dessins importants.
L'instrument dont se sont servis ces observateurs, pour leur étude de Mars
comme pour leur carte de la Lune, est encore une lunette de 4 pouces (108""")
analogue à celle que nous avons remarquée plus haut, lors des observations
dWrago. C'est un instrument relativement modeste, mais, construit par
Fraunhofer. il était excellent et les ol)scrvateurs élaient des plus haliiles, des
I t." I A PI ANi'-Ti: MAIIS.
plus niinulieiix et îles plus pationls. On pciil souvonl tlii-e (\\\o tant vaut
riionimc. tant vaut rinstruniont.
X\.\\. l8;^n-lSil. --Bei:h ot MXdleu ['].
La planète passait en IS30 à l'une de ses moindres distances do la Terre.
L'opposition de celte annce-là était une opposition périhélique, comme nous
l'aA'ons vu au chapitre préliminaire. C'est la raison principale qui engagea
les observateurs à entreprendre les études que nous allons examiner. Voici
un exposé succinct de leur grand travail :
Notre but principal, écrivent les auteurs, a été do déterminer exactement la
période de rotation sur laquelle on a des opinions sensiblement diverses.
Ilcrschel père avait déduit de ses observations de 1778 et 1780 une période
de -24"' 39"' il', Ilutli à Mannhcim {voy. plus haut, p. 89), en avait trouve une
de 25*'i3n', et les observations de Kunowsky dans l'hiver de 1821 à 1822, qui
manquent cependant d'une détermination exacte du temps, donnent 24'' 30^40'.
Dans les observations d'IIerschel, le nombre des rotations entières était douteux
et, eu outre, il n'avait pas eu égard à l'aberration et à la phase; les deux autres
données ne sont que le résultat d'une seule opposition. Il importait avant tout
de déduire d'une opposition la période avec un degré d'exactitude qui permît
de déterminer avec assez de certitude le nombre des rotations entières qui
devaient avoir lieu jusqu'à, l'opposition suivante. L'erreur moyenne du premier
résultat ne devait donc pas dépasser 30 à 40 secondes, et on ne pouvait espérer
d'atteindre ce but que lors d'un rapprochement de la Terre aussi grand qu'il a ou
lieu cette fois.
Puis, en même temps, des observations prolongées devaient démontrer si les
taches que présente la surface de Mars sont variables ou non dans leur forme,
leur grandeur et leur couleur, si elles ont un mouvement propre et si l'on doit
les regarder comme des condensations ou des obscurcissements semblables à
nos nuages ou comme des parties fixes appartenant à la surface. Des observa-
teurs précédents avaient déjà laissé là-dessus des données importantes. Déjà
Maraldi, à Paris, avait en 17 IG distingué la tache blanche au bord boréal de Mars,
et presque tous les observateurs subséquents en font mention. Cette tache s'était
aussi montrée au bord austral de la planète, et même quelquefois les deux taches
avaient été visibles en même temps. Même avant Ilerschel, on avait dcîjà conçu
l'idée qu'il y avait là des neiges comme aux pôles de la Terre. Quelques-uns
avaient cru remarquer que ces taches formaient comme de petites élévations qui
rassortaient en dehors du bord moyen de la planète, ce que d'autres attribuèrent
avec beaucoup de vraisemblance à l'éclat considérable de ces taches. La plupart
(•) Fragments sur les corps célestes du système solaire [Paris, \8A0). Beilraye, etc.
Weimar. \S'i\) et Aslronomische Nachrichlen. 1831 à 18'i2.
1830- is il i{i:i;i{ i;r \i ai>ij:u. m:;
des observateurs rej;,'aril;ucnt aussi les autres taches comme variables ; cepen-
dant M, Kunowsky, ;\ Berlin, assura qu'elles sont permanentes. Plusieurs obser-
vateurs font mention d'un ùclat particulier du bord oriental et du bord occidental
do Itt planète, ce qui donne l'idoc de ménisques étroits entourant lo i^lobe. parti-
culiôroment à ces endroits. Les contradictions qui se présentaient dans ces
observations faites avec des instruments différents, ou, si l'on veut, les chan-
gements physiques qui s'opèrent avec le temps, ("'taient par conséquent très con-
sidérables.
Depuis lo 10 septembre jusqu'au -20 octobre 1830, nous fîmes des observations
pondant 17 nuits plus ou moins favorables, dans lesquelles tous les côtés de Mars
visibles dans cette opposition se présentèrent plusieurs fois à notre vue. Nous
obtînmes 3.") dessins de son disque. Nous navons pas trouvé à propos d'em-
ployer lo micromètre, car la faiblesse des taches aperçues ne nous aurait
permis de prendre aucune mesure proprement dite, et une appréciation d'après
les parties du diamètre du disque nous parut promettre une certitude d'autant
plus grande que la tache blanche du pôle austral, qui se montra dès lo commen-
cement avec beaucoup de précision, était bien propre à déterminer un méridien
divisant le disque. II s'écoula ordinairement un certain temps jusqu'à ce que la
masse de taches, que l'on apercevait d'abord vague et indéterminée, présentât
des formes parfaitement distinctes. Le dessin a été exécuté immédiatement
devant le télescope : les coordonnées dos points les plus distincts ont été déter-
minées par l'appréciation et représentées graphiquement, le reste du détail a été
dessiné plus tard.
La tache la plus caractéristique qui ait frappé les observateurs est la petite
tache ronde paraissant suspendue à un ruban ondulé que l'on voit sur les
dessins n°' 1, 2, 3, 14, J5 et IG de 1830 et 4 de 1832 voyez la fig. G7). Cette
tache est la baie du Méridien de notre carte, à proximité du détroit llers-
chel II. Mais écoutons les observateurs eux-mêmes.
Une petite tache a, d'un noir très prononcé, se distingua si fortement des autres
dès la première observation, par ses limites bien marquées, et fut si rapprochée
de l'équateur supposé, que nous crûmes devoir la choisir pour notre tache nor-
male dans la détermination de la rotation i'). Elle parut à O'-SO™ i/hj. h h la
faible distance de ~« d'arc de Mars du méridien central. Le 1-i, nous la vîmes
depuis 10'' (fig. 2) jusqu'à l^'-Iô"' i/îj/. i) s'avancer depuis l'hémisphère oriental
jusque dans la proximit(= du bord occidental; nous ou avons pris cinq dessins.
Le 15, à 8»' 50™ i/ig. •")). elle n'était pas encore visible; elle ne le fut qu'à 13'' l."»»'.
i') Cette petite tache si caractérisiique a été oi»scrvcc \<"nv la première fois le 3 sep-
tembre 1798, par Schrœter. ( Voy. plus haut, p. 7i, la //;/. 52 do cet astronome.) Elle a été
observée aussi le lendemain 4 septembre {fig. 53) et le ii octobre. Elle est aussi sur
les deux dessins de Kunowskv. eu lS\!l--22 fvoy. /7</. f.5. p. 0;r. Mais (luellcs différences
d'aspects :
nv, I. \ PI. \m:ti: m \ms.
Le 11), à "J'', cUo no lôtait également pas; en revanche, ù minuit, elle était très
distincte. Alors nous pûmes déihiire la périotlc de rotation : il était évident que
le 10 et les soirs suivants, jusqu'au milieu d'octobre, la tache ne pourrait plus
être observée dans les heures commodes de la nuit. Le 19 (fig. (i et 7), l'image
dtaut parfaitement distincte, il se montra deux places rouges (limitées sur le
dessin général par des points), semblables h la belle couleur rouge des crépus-
cules de notre Terre. Au bout d'une heure, elles (Haient déjà plus faibles, et plus
tard elles furent encore assez claires, mais jamais elles ne reparurent avec une cou-
leur rouge distincte. Eu outre, il se montra (à iOi-O'») une petite tache g, peu
foncée, i\ côté de la pointe f {voir, pour les lettre.s, la carte p. 107), mais que plus
tard on cessa d'apercevoir. Probablement elle n'avait été visible qu'à cause de la
grande sérénité de l'air, ou lorsqu'elle reparut, ce fut toujours réunie h /", car
l'espace qui les sépare fut toujours extrêmement difficile à distinguer.
Dans les observations du 2G septembre au ."i octobre ifig. 10 h 12), il se montra
plusieurs taches d'une couleur passablement sombre, s'étendant sur le disque en
forme de zone, qui étaient très fortement limitées, surtout du côté du Nord et y
formaient un contraste très prononcé, avec cet espace tout h fait libre de taches
et présentant une lumière entièrement claire. Tne saillie de ces taches, au
point m, était distincte et large, surtout au côté ]-)oréal; au côté austral, au con-
traire, elle était si étroite qu'on ne pouvait l'apercevoir qu'avec beaucoup de
peine. La tache p??! était très noire, surtout à son extrémité occidentale p qui
était arrondie. Entre cette tache et la tache blanche du pôle austral, se montra
constamment une bande q, assez large, mais d'une teinte blafarde. Du 5 au 12 oc-
tobre, des nuages suspendirent nos observations. Le 13 seulement, nous aperçûmes
de nouveau une petite tache foncée près du bord occidental {fig. 13), et le l'i,
h 7'' 37" (pg. 14), nous nous assurâmes que c'était la tache a de la première
observation. Maintenant, il importait de distinguer dans les soirées suivantes,
avec la plus grande précision possible, son passage par le centre, et c'est ce que
nous pûmes faire les 10 et 20, par une atmosphère remarquablement pure
[fig. 15 et IGi.
Ces observations constituent vraiment le premier essai méthodique sur la
géographie martienne. Nous offrons à nos lecteurs [ftg. G8) la carte que
Miidler et Béer ont construite d'après ces précieuses observations. Cette figure
reproduit les deux hémisphères dessinés par ces astronomes, et représente
l'ensemble de la planète d'après leurs propres observations de 1830 à 1839.
(Nous publions ici la figure môme qui accompagne le mémoire de ces obser-
vateurs.) C'est là, en fait, la première carte géographique qui ait été tracée
du monde de Mars. Elle est restée seule pendant trente ans, et est devenue
pour ainsi dire clas.sique pour tous les observateurs subséquents.
L'hémisphère boréal contient évidemment une erreur : l'extrémité de la
tache ehf (tache qui n'est autre que la mer du Sablier) qui ressort, en ponctué,
1830-1.^ H
Hi'i;i{ 1. 1 M \i>i,i:i;.
Mars
1 ftô-O
\
\
/
^
V&.. . \
Mi a 2
/
/
y V
'?■■ y
Fifo'. G7 — Dessins de Mar- p"^!" Deer et M;nllerun IS.10 cl IS32.
KIG l.A IM.AM'.TI' M. VU S.
en dehors ilo riiémisphôre austral, outre 00" et 73" de loiigilude, est Iracéc,
dans cet hémisphère boréal, entre IV^^el 1 10'. Il y a eu là iiuelque méprise. 11
eût fallu la tracer entre G"2° et 73'^' et la continuer suivant le ponctué indiqué
en dehors de l'hémisphère austral (']•
Los astronomes hanovriens ont choisi la petite tache ronde foncée a comme
origine des méridiens. Nous avons agi de môme dans la construction de
notre carte, et c"est à cause de cette origine que nous avons proposé le nom
do « Baie du Méridien » pour cette tache caractéristique.
Les longitudes de Béer et Miidler sont comptées de la droite vers la gauche,
lorsqu'on regarde Téquateur en ayant le pùle sud en haut. Nous les comptons
en sens contraire, c'est-à-dire de la gauche vers la droite, dmn Ir sens du
mouvrmnit dr rolalinn, le méridien 0 passant avant le méridien 10.
Les auteurs arrivent ensuite au calcul de la rotation qu'ils ont obtenue.
Ils la trouvent, par les observations de 1830, de 24''37'»9S 9 ; par 1830 à 1832,
24'' 37'" -23% 7; par 1830 avec 1835, 24''37'"20%4 ; la seconde leur paraîtlaplus
sûre, et c'est celle qu'ils adoptent.
On ne peut pas avec certitude établir do comparaison avec les observations
faites neuf ans auparavant par Kunowsky, dans lesquelles la morne tache fut bien
distincte, car les limites de l'incertitude devraient être quatre fois moindres qu'elles
ne le furent pour qu'on pût penser qu'il n'y a pas d'erreur. En revanche, ces
observations confirment évidemment la constance des taches que nous avons
aperçues, du moins pour a et pour l'arc fortement recourbé qui s'étend en ser-
pentant de a à c. Les taches qui se trouvent plus au Sud ne furent aperçues alors
que dans des positions tout à fait défavorables, ou môme quelques-unes no le
furent pas du tout, et il en apparut d'autres vers le Nord qui, en 1830, ne furent
plus visibles; tandis que cette tache normale s'était montrée entièrement iden-
tique depuis le mois de novembre 1821 jusqu'en mars 1822 et, cette fois-ci, du
10 septembre au 20 octobre 1830 : elle n'était donc pas analogue à nos nuages.
Au reste, surtout lorsqu'on observe la planète pour la première fois et qu'on
ne répète pas souvent les observations, on peut facilement remarquer dans ces
taches une variation que l'on regardera comme variation physique. L'état
atmosphérique de la Terre, et peut-être aussi de Mars, est plus ou moins favo-
rable, c'est pourquoi quelques erreurs d'appréciation et de dessin, petites en
elles-mêmes, mais considérables relativement à leur objet, sont inévitables : une
tache qui s'approche du bord disparait avant do l'avoir atteint (ce qui provient
sans doute, conmie pour Jupiter, de l'atmosphère de la planète); enfin, on n'a pas
souvent l'occasion d'apercevoir une seconde fois dans la même opposition exac-
tement le même côté de la planète, qui était auparavant tourné vers la Terre.
(') Tous les traités d'Astronomie, et même l'excellente Aslroiiomie populaire
d'Arago, ont reproduit, depuis 1840, cette carte avec cette erreur sans s'en apercevoir.
I830-1^^4I
BKi:u i:t \i \i>i.i:i{.
107
Og 3
I0« I.A l'I.ANKTi: M A US.
En oulro, les distances des oppositions varient, la iilanèto n'arrive que très rare-
ment aussi près de la Terre qu'en 1830, et ;\ dos distances plus considérables il
est nécessaire d'avoir des grossissements plus forts et une puissance optique plus
grande que la plupart des observateurs précédents n'en avaient à leur portée.
La tache blanche du pôle austral s'était montrée distinctement dans chaque
observation, même lors des circonstances atmosphériques les moins favorables,
mais sa grandeur a été très variable. Déji\ le 31 août, lors d'une observation tout
;\ fait superficielle, elle avait été appréciée de ^^ à jL du diamètre de Mars. Le
10 septembre, l'appréciation (faite dans la direction de l'Est à l'Ouest) donna pour
résultat y'y, le 1"» septembre ,'^, le 2 octobre -^\, le 5 octobre ^'^ et le 20 octobre ,'...
Admettons pour le 31 août la valeur l, on aura pour les jours indiqués, qui
correspondent pour la saison aux mois de juin et de juillet de notre hémisphère
boréal, les limites suivantes de la tache blanche, supposé que le pôle soit h son
centre :
M août 83° 37' de latitude; répondant au IG juin de la Terre.
10 septembre 84° 15' » » 23 " >>
15 » 86°25' >' » 26 )■ -
2 octobre 86°50' » » 7 juillet »
5 " 87° 7' '■ » 0 11 )>
20 .. 85° 50' » » 19 .) ..)
C'est-à-dire que les limites se rétrécirent toujours jusqu'à une saison de Mars
qui répond au milieu de notre mois de juillet, et de ce point-là elles commen-
cèrent de nouveau à s'élargir successivement; fait qui vient fortement à l'appui
de l'hypothèse que le pôle de Mars est réellement couvert de neige. En outre,
presque tous les observateurs donnent la grandeur de cette tache comme variable,
et. lorsqu'elle est plus éloignée du maximum de chaleur, elle est considérablement
plus grande qu'on ne l'a vue en 1830.
L'hémisphère boréal de la planète, autant qu'il fut visible cette année-là, no
présenta en revanche aucune trace de tache blanche, quoiqu'il se trouvât au
milieu de son hiver. La forte inclinaison de l'axe de Mars explique ce fuit et en
reçoit en même temps une confirmation indirecte.
Les observateurs donnent ici un tableau de leurs dessins et des longitudes
aréographiques des taches.
L'opposition de 1832 se présenta dans des circonstances atmosphériques
constamment si défavorables et l'éloignement beaucoup plus grand de la
planète eut une influence si fâcheuse qu'on ne put obtenir que des observa-
tions peu nombreuses et très imparfaites. Do seize essais de dessiner les
détails du disque, quatre seulement méritent d'être comparés à ceux de 1830.
(on les trouvera au bas de la fig. G7). La tache «, si remarquée et si carac-
téristique deux ans auparavant, n'a pu être reconnue qu'une seule fois el
encore à un assez grand éloignement du centre !" 16 décembre'.
I
1830- 18 îl BKEH I-: I M \l)LI-;i{. iU'J
Cependant, ùcriveut les auteurs, ces observations, quoique peu nombreuses,
nous ont paru suffisantes pour nous convaincre qu'aucune des taches bien
visibles n'avait change de position depuis i8:j0. Cela fut parfaitement évident
polir les trois taches principales, en particulier pour la région j^m, et pour l.i
laibbî i>ando </. Cotte derniùro était du reste si rapprochée de la partie qui formait
alors le bord austral, qu'on ne put l'apercevoir qu'avec beaucoup do difliculté,
et celles (jui étaient encore plus rapprochées des pôles, (jui sont comprises dans
les dessins do 1830, ne purent cette fois être aperçues, par des raisons faciles
;\ concevoir. Le pôle austral n'était, en suivant les éléments d'IIerschel, le
■10 noveiuliro, (juà lU" en de(;à du bord apparent, et ainsi la plus grande partie
(le la hiniiére, si éclatante en IsiU, ne fut que très faible; elle ne fut même
aperçue que deux fois avec certitude (nov. 20, 9'', et uov. 23, 8i'Ii">); pendant
toutes les autres soirées, elle resta incertaine ou n'apparut pas du tout. Sur
l'hémisphère boréal, environ depuis 180° jusqu'à 230° de longitude et de 0» l'i
35'' de latitude nord, se montra deux fois une bande faible, large et concave du
côté de prit, mais son extrémité boréale seule fut distincte. I:]ntro cette bande
et piH apparaissaient souvent des lueurs rouges. En général, la lumière do
l'hémisphère boréal, dans la partie qui ne contient pas de taches, ne paraissait
l»as être aussi pure et aussi uniforme que deux années auparavant. On ne voyait
pas de trace de lumière blanche dans les environs du pôle boréal (ce pôle était
encore caché à la vue).
Les oppositions de 1834-35 et 1837 furent également, comme les deux pré-
cédentes, très peu favorisées par les circonstances atmosphériques, et connue
en outre l'éloignement de Mars atteignait alors son maximum (pour les opposi-
tions i, « les résultats de nos observations, écrivaient les auteurs, auraient été
très insigniliants, si nous n'eussions pu avoir recours au grand télescope
établi en 1835 à l'Observatoire royal. i>
Cet instrument, dans toutes ses dimensions parfaitement égal à celui deDorpat,
permettait un grossissement au moins du double plus fort et fournit six fois plus
de lumière que le nôtre; un mécanisme très commode lui communique un mou-
vement par letiuel, sans le concours de l'observateur, il suit le cours des pla-
nètes. Depuis le 12 janvier jusqu'au 22 mars, nous avons obtenu, pendant I j nuits
en partie sereines, 32 dessins qui toutefois ne nous ont fait particulièrement
comiaitre que 1 hémisphère boréal, et encore avec beaucoup moins de détails que
nous en avions en 1830 pour l'hémisphère austral. Dans toutes les observations
sans exception, la tache blanche du pôle boréal fut visible avec un degré de
clarté (juc nous no nous rappelons pas avoir jamais vu dans celle du pôb.'
austral; en même temps, elle était considérablement plus grande que celle
de 1830 et apparut, surtout pendant les mois de janvier et février, tellement dis-
tincte des autres parties du globe, qu'au premier coup d'œil on n'aurait pu croire
que la planète fût en cet endroit couverte par une autre planète.
La vraie grandeur de la tache du pôle austral, aux mois de février et de mars 1837,
11(1 I. \ l'I. AM. ri- \l AHS.
;i surpassé de plusieurs l'ois celle des mois de septembre et d'octobre 1830.
La tache du pôle boréal, daus la première observation du 12 janvier, fut si bien
limitée iiuon put apprécier son ('tendue avec assez de certitude; elle comprenait,
le long du bord de Mars, 0/27 du diamètre de la planète, et sa largeur fut de
0.!;^. La première donnée nous fait conclure A un demi-diamètre de \')'>,1 du
globe de Mars ou ii une latitude nord do son bord de Ti»,.?; la seconde, en admet-
tant les éléments de rotation donnés par Ilersohel et en admettant que le pôle
a occupé le centre de la tache circulaire, nous conduit h une latitude nord de
78», 7, car le pôle boréal s'était avancé de 18" 13' en dedans. La première de ces
données a au moins le double du poids de l'autre. En tout cas, on voit évidemment
par là que la tache du pôle boréal, dans l'opposition de 1837, fut considérablement
plus grande que la tache du pôle austral en 1830, et beaucoup 'plus petite que
la tache du pôle austral en 1837. Dans les observations suivantes, son étendue ne
parut cependant pas se disposer à diminuer; ce qu'on remarqua avec plus de certi-
tude, c'est que la netteté de sa délimitation devint plus faible après l'opposition.
Nous avions le projet de mesurer, avec le micromètre, l'angle de position delà
tache blanche, pour obtenir les données nécessaires à un examen direct de la
position de l'axe de Mars. Le temps défavorable a, eu grande partie, stérilisé
notre intention. Le peu de mesures qui aient réussi nous apprennent seulement
que l'excentricité de la tache polaire est, daus tous les cas, très faible. Cette
distance au pôle a été estimée à 4" en 1837 pour la tache boréale, et à 8° pour
l'australe, mais d'une manière très incertaine.
Nous ne pouvons pas cependant passer sous silence la circonstance que, dans
le peu d'observations où nous avons distingué une trace de la tache du pôle aus-
tral, cette tache ne s'est pas montrée directement opposée à celle du pôle boréal :
le 7 février, à liji'li'", elle s'écartait d'environ 12" du point opposé à cette tache
boréale, et à 18'' IG"» seulement de 8° à l'Est; le 7 mars, à 10''34"', elle s'en écar-
tait d'environ b" à l'Est; enfin, le 18 mars, à 7'' 50", de 3° à 5» à l'Ouest.
De toutes les taches de l'hémisphère austral observées avec quelque précision
en 1830, une seule, marquée p?n, put être reconnue avec certitude. Nous la vîmes
d'abord le 7 février, à 16'' i"» (/if/. G), avec précision; ensuite le 28 février, c\6''49"'
(fig.'i). et dans trois observations pendant la nuit du 7 mars ifig. 14, 13, 16);
enfin, un peu moins déterminée le 10 mars, de /''7"' à 9''22'", et le 11 mars,
à 8''22°' [fig. 17). La latitude aréographique de l'extrémité occidentale p fut
déterminée, d'après onze observations, à -h 43o29'; en 1830, nous l'avions trouvée
entre 39° et 42° par trois observations, et ce fait, aussi bien que l'accord de la
figure, parle en faveur de l'identité des deux tacheS; Un essai de réunir la lon-
gitude observée cette fois-ci avec celle de 1830 donna 24'' 37"' 29% 0; ce résultat,
quoique suffisant pour en confirmer l'identité aussi sous ce rapport, n'est pas
propre à corriger la rotation calculée précédemment, à cause de la position
fortement excentrique de la tache. Cependant on peut être assuré qu'il ne s'est
pas glissé d'erreur dans le nombre dos rotations entières.
Une .«econde tache, marquée efh sur notre carte, a été reconnue le 12 janvier
I830-I8il
Hi:i;u i; I madli-k
i8o7
N
X^*
J \
] ('
/ v^^-^ii^'
J
s-^at***- ' ■ v
7J
X
•^-■'. .r...--"'
Kig. (.i'.i. — Dessius lie .M;ir.><, lails par Uccr et .Mailler eu ISJT
ir: LA ri..\Ni:ii; m au s.
et le ^iî février, ainsi que le 11 mars; mais aucun point n'en a été assez fortement
marqué pour qu'on pût en tirer une détermination précise.
Celle remarque est curieuse et dlL^nc tl'une atleiUion loulc itarliculière,
car celle tache cf/i est la mer du Sablier, qui, généralement est, au contraire,
si nelle et si Lien caractérisée. Pendant ropposilion dernière ^1890), par
exemple, elle frappait la vue clia(]uc fois que riiéniis[>licrc (jui la renferme
était tourné vers nous.
Quant à l'opposition de 18:19, toutes les observations ont été faites avec le
grand télescope de l'Observatoire royal. Mars exiiJ^oait un fort grossissement et,
par conséquent, une grande traïKjuillité dans l'atmosphère. Cette dernière con-
dition se réalisa rarement dans l'hiver de 1838 à 183'J, ce qui fait que les obser-
vations n'ont pu être nombreuses. L'hémisphère austral cachait 02° de sa surface
à la vue, de sorte qu'il était en grande partie non observable, et aucune des
taches de cet hémisphère ne put être distinguée avec précision.
Les dix dessins publiés pour cette année 1830 par les auteurs sont telle-
jnent pâles et indécis qu'il serait absolument inutile de les reproduire ici.
Voici les conclusions générales qu'ils tirent de l'ensemble de leurs obser-
vations sur les pôles cl les saisons :
La couleur des taches polaires, toutes les fois qu'on put les apercevoir dis-
tinctement, fut toujours un blanc pur et brillant, en aucune façon semblable à
la couleur des autres parties de la ])lanôte. En 1837. il arriva une fois que Mars
fut, pendant l'observation, complètement obscurci par un nuage, à l'exception
de la tache polaire qui se montrait distinctement à la vue. Cette grande différence
est aussi cause que son étendue et sa figure peuvent être appréciées avec beau-
coup plus de certitude que pour aucune autre tache de la planète, et même il ne
serait pas impossible qu'on n'appliquât avec succès sur elle des mesures au mi-
cromètre eu l'observant avec de puissants instruments.
11 faut aussi remarquer la diminution et l'accroissement do ces taches qui
conservèrent malgré cela toujours la môme figure, ainsi que la circonstance que
les pôles de rotation formèrent ordinairement les centres de ces taches ou du
moins ne s'en éloignèrent jamais que de quelques degrés. Nous avons déjà indi-
qué plus haut les variations de la tache du pôle austral, ainsi que les saisons de
Mars qui répondent aux données de l'observation et que nous avons exprimées
dans leur rapport avec les saisons de la Terre. La tache du pôle boréal de son
côté présenta les variations suivantes :
1837 Janv. 12. Limites à 74" 18'; saison correspondante au 4 mai.
Mars 7. » à 7G » y 4 juin.
1839 Févr.2G. » à 78 33 » •> 17 juin.
Avril 1. " à 80 48 » » 4 juillet.
Avril 1<;. .' à 82 20 « » 12 juillet.
Mai 1. -à 81 » » 20 juillet.
1830-1841 HKKK l-T .M\|)I.i:i{. 1|.{
D'après cela, le minimuiu pour li:s d«iix taclu^s toiiibt; (-uvirûii ~ d'aiinùt' après
le solstice d'été, C(,' qui correspond au l'J juillet (ft 12 janvi(.'r) de uotr«i Terre
Mais, tandis (jue la tache du pèle austral a diuiinuo jus(iu'à G" de diamètre, celle
du pôle boréal avait eucore à son minimum l.» à I i» de diamètre, c'est-à-dire
une surface environ cinq fois plus considérable que la première.
Réciproquement, la tache du pôle austral, en 1837, pendant sou hiver (les jours
d'observation correspondent, pour la saison, aux i et 10 décembre), a pris une telle
extension sur la planète, qu'on put encore la distinguer, lors même que le pôle
était déjà ;\ 18« au dek\ du bord extrême, ce qui conduit ù. environ :>:>'> de latitude
et ainsi à un diamètre de la tache de lu-'.
Nous n'avons jamais aperçu uu cas semblable au bord boréal, pendant que le
bord austral avait son été. Les variations de la tache du pôle austral sont, d'après
cela, vers ses deux limites, considérablement plus grandes que celles de la
tache du pôle boréal.
Par suite de la position de Taxe do Mars, le pôle austral est le plus exposé an
Soleil, lorsque la quantité de la lumière (et de la chaleur) qu'il eu reçoit, peut
être exprimée par 0,52 de la lumière que reçoit la Terre, et le pôle boréal,
lorsque cette quantité est de 0,37. Mais cette différence est, eu ce qui concerne
l'année dans son ensemble, complètement détruite par le rapport contraire qui a
lieu en hiver; et même pour les dilTérenles saisons, on trouve une compensation
partielle, eu ce que la longueur du semestre d'été, dans l'hémisphère boréal, est
i\ celle de l'hémisphère austral dans le rapport de 19 à 15; cependant, dans les
points culminants de chaleur et de froid, il reste évidemment une différence très
considérable. D'après cela, le pôle austral a des étés plus chauds et des hivers
plus froids que le pôle boréal, et cette différence est beaucoup plus considérable
que celle qui se présente sur notre Terre : chez nous elle est très peu sensible,
mais l'excentricité de Mars est cinq fois plus grande que celle de la Terre.
Les différences que nous avons remarquées s'accordent ainsi parfaitement
avec ridée que ces taches blanches représentent uu précipité analogue à notre
neige; et il est eu effet presque impos.sible de rejeter une explication qui se con-
lirme d'une manière aussi surpreuaute. Notre Terre, vue de la distance d'une pla-
nète, doit présenter des phénomènes tout à fait semblables; seulement, chez nous,
le rapport réciproque de l'hémisphère boréal et de l'hémisphère austral est
moins inégal.
Les autres taches delà planète paraissent pour l'essentiel appartenir à la sur-
face. "Vu la position et l'éloiguemeut de Mars, nous n'aurions pu, en aucune cii-
constancc imaginable, distinguer des ombres produites par des montagnes,
quelque gigantes(iue que fut leur élévation (la forme sphérique toujours bien
prononcée du disque leur prescrit du moins un maximum); ces ombres sont donc
des différences dans la rétlcxion de la lumière, qui peuvent très bien provenir
des mêmes causes que celles qui ont lieu sur uotre Terre. C'est dans l'opposition
de 1830 que s'est montrée la plus grande précision relative à la délimitation dan?
les taches de l'hémisphère austral, qui étaient situées entre l'équateur et -ih' de
Flammauiu.n. — Mars.. %
m 1 A PIAM-Ti: MAHS.
lalitudc uonl; cependant aussi alors la noirceur et la aettelc relatives des
taches ne sont pas restées coustamuient les mêmes, et ce fut encore moins le cas
eu IS37 et ISJ'J. Ainsi, quoique ces taches elles-mêmes ne paraissent pas être ana-
logues à nos nuages, toutefois elles présentent certaines analogies opti(iues avec
des condensations semblaMcs ù. des nuages, car elles se montrent plus déter-
minées, plus précises et plus intenses dans leur été, et au contraire plus vagues,
plus pales et plus confondues pendant leur hiver.
Quelquefois nous avons aperçu une coloration rougedtre eu certaines régions
particulières du disque. Mars apparaît à l'œil nu comme l'étoile la plus rouge du
ciel. Avec le télescope, cela ne se montre pas au même degré et la couleur géné-
rale est tout au plus un rouge jaunâtre; la coloration de ces régions rappelle celle
d'un beau crépuscule de notre Terre.
Si tout cela nous conduit déjà avec beaucoup de certitude à admettre pour Mars
une atmosphère très sensible et semblable à celle de notre Terre, cela explique
aussi en même temps la remarque que uous avons faite qu'en s'approchant des
bords les taches apparaissent toujours fondues ou s'efl'acent entièrement; l'éclat
du bord, que nous avons souvent aperçu, parait aussi provenir de procédés atmo-
sphériques particuliers.
Au reste, il ne faut pas s'attendre à ce que l'atmosphère de Mars, lors de l'im-
mersion d'une étoile fixe ou d'autres corps célestes, puisse être rendue sensible
par la réfraction. Môme aux époques où Mars est le plus rapproché de uous, une
étendue de 20 lieues sur lui no uous paraît que sous un angle de 0",30; à une
telle distance, la réfraction est entièrement insensible, lors même qu'elle serait
à la surface considérablement plus forte que sur la Terre.
Les observations nous font admettre la plus grande variation, aussi bien pour
la grandeur et la forme que pour l'intensité, dans la tache sombre voisine de la zone
polaire boréale, et cela s'explique probablement d'une façon particulière. Si les
taches polaires sont véritablement de la neige, leur diminution à l'approche de
l'été ne peut avoir lieu que par la fonte et l'évaporatîon continuelles; l'épaisseur de
cette neige est, selon toute vraisemblance, très considérable; ces parties de la sur-
face, se disposant à s'évaporer, doivent par conséquent être extrêmementhumides ;
or un sol vaporeux et marécageux est certainement de toutes les parties d'une
surface celle qui est la moins susceptible de réflexion et qui doit par conséquent
nous paraître la plus foncée. Le maximum de cette noirceur doit arriver à l'époque
où la fonte s'opère avec le plus de rapidité, c'est-à-dire, pour les hautes latitudes,
entre l'équinoxe et le solstice d'été. Ainsi s'explique pourquoi la tache sombre
qui environne le pôle boréal, qui n'avait pas du tout été aperçue auparavant,
se présenta en 18.37 avec une intensité et une étendue si considérables et en 1839,
au contraire, fut très pâle et au commencement très petite.
Ce n'est pas aller trop loin que de regarder Mars comme présentant und
très grande ressemblance auec notre Terre, même sous le rapport physique,
comme une image de la Terre telle qu'elle nous apparaîtrait au firmament, vue à
une grande distance (environ une distance double de celle où se présente la Lune
1830-1811 i{i;i:n i; 1 m adm li iiâ
;\ lœil mi). Les différences les plus essentielles entre Mars et la Terre consistent
dans la petitesse de son volume et la forte excentricité de son orbite. En revanche,
la durée des jours est sensiblement la même.
L'inégalité que l'excentricité amène dans la durée des saisons peut se déter-
miner de la manière suivante, si l'un admet la position de l'axe d'après llerschel
et notre période de rotation :
Une anuéo do Mars contient GC'J -= rotations,
!>ar conséquent '^*^° | jours solaires île Mars.
Le printemps de riiémisplière boréal contient ''''4 joui's de Mar- .
L'été . . I s I
L'automne I Vt -
L'hiver. . 1 17
296 1
de telle sorte que le printemps et l'été réunis ont 7G jours de plus dans l'hémi-
sphère boréal que dans l'hémisphère austral. Les deux moitiés de l'année sépa-
rées par les équinoxes sont donc dans le rapport de 19 à l'j.
Béer et Miidler terminent leur mémoire par l'examen de la durée de la
rotation de la planète, comparée aux résultats obtenus par William Herschel.
Nous avons vu plus haut (p. lOG) qu'ils ont trouvé -24'' 37'" 23% 7 pour la pé-
riode la plus sûre.
La période de rotation que nous avons trouvée, remarquent-ils, diffère de 2 mi-
nutes de celle d'IIerschel qu'on avait admise jusqu'à présent, et comme cette
période est aussi basée sur la combinaison de deux oppositions, une aussi
grande différence peut étonner. Cependant cette différence disparaîtrait presque
entièrement si l'on voulait admettre dans l'une des deux années une erreur
d'une seule révolution entière, si l'on voulait diviser l'intervalle des oppositions
d'IIerschel avec un diviseur augmenté d'une unité, ou le nôtre avec un diviseur
diminué d'une unité. Toutefois, comme une période de 2 i''39'" 22' est inconciliable
avec nos observations comparées entre elles, et supposerait des erreurs que nous
ne pouvons pas regarder comme possibles, il ne sera peut-^étrc pas sans intérêt
de se reporter aux observations d'IIerschel et d'examiner quel résultat elles pré-
sentent lorsqu'on les réduit avec une plus grande exactitude.
En 1777, du 8 au 2G avril, il avait observé différentes taches, qui n'offraient,
cependant seules aucune combinaison certaine, c'est pourquoi il résolut d'attendre
l'opposition suivante. Elle arriva le 12 mai 177'J et Mars atteignit alors un dia-
mètre de 13',."), grandeur qui diminua jusqu'au 1'.) juin où il fut de 11".
Le 1 1 mai, à 11'' 13'", il aperçut au centre une tache qu'il avait déjà vue le 9 mai,
à 1 1''0"» i.'j', mais un peu en dehors du centre. La même tache se montra le 19 juin
où Mars avait déjà une position très basse. Voici son observation :
116 I. A 1'I.am:ti-; m a us.
Juin 11». Il'- 30". Tlie figure of mai il is nol corne lo llie position; it was llien at 11''43"',
luit cannol bc far from il. 1 foar as Mars approaclics to liorizon, I sliall iiot be able to
fallow him lill the figure cornes to the centre.
If'iT"'. Tiio slàte of the air near the horizon is very unFavorablo. Wilh nuich difli-
culty I can but just sec that tlio la (igure is not quitc so far advanccd as il was mai 1 1
al ir'4i''. but can certainly not be abovc two or threc minutes from it.
Kn trois ininutos une laohc do Mars s'écarte du centre d'un espace égal à -~
du diamOtre de Mars; elle ue se meut ainsi, avec la grandeur apparente qu'elle
avait alors, que de -^ de seconde d'arc, et Mars u'élait qu'à 9'^ au-dessus de l'ho-
rizon ! Cependant, adaiettons l'appréciation d'IIerschcl, ainsi que le passage de la
tache à Il''i0'"30*. Lo calcul se présente de la manière suivante :
.luin 19 IP'VJ'nGO'
Mai Il II '.:î 0
Intervalle yj' 0^ 6™ 30»
Correcliou I... . +07™ 3G» à. cause du changement de la lon^iUule géoccnirique.
Correction II. .. — 16"» 14» à cause de la phase de Mars.
Correction lll. . — 0'" 4i>» à cause de l'aherralioii.
38 rotations de •^4''38'»36*,4
Ilerschel observa une autre tache le II mai, ù 1U''17'" j1\ et le 13, à 11''25'"5I^
après quoi elle reparut le 17 juin ù 9'' l-2"'-]0\ Toutefois il dit :
.luin 17, 0*'['2'" (clock 20' slow). ïlie dark spot is rallier more advunced ihan it was
mai 11, lu" 18"-.
Et Ilerschel admet encore une correction de 3'", d'après quoi lo muiueat véri-
table est 9''9™■20^ Cela donne les résultats suivants :
Juin 17 in- O-nJO'
Mai Il 10 17 '.8
Con eclion I . + 37"" 28»
H - 15 0
III - 0 4i
36' 23'- 13™ 10»
36' 241- 38™ 42', y
Juin 17 O"- O-^O'
Mai 13 11 25 51
34' 21 ''43™ 29»
Correction 1 . . . + 34™ 31»
H — 15 0
« ni — 0 43
34' 22'' 2™ 17»
34' 24'- 38™ 53», 4.
La moyenne de ces trois déterminations extrêmement incertaines est donc
24'' 38'" 44% -2.
i.'^.'to-isii u\:\'.\\ \:\ .M A nu; II. ii:
et, an lion de cela, Ilorscliol, n'ayant é^'anl qnVn passant à la correction qni pro-
vient (In rhangoment do la lonfritndo et ne faisant pas dn tout attention anx autres,
admet comme résultat final p'nir 1770
24''39'"22',l.
11 faut cependant encore avoir égard -X une circonstance qui no peut guère être
soumise au calcul. Nous calculons la grandeur de la pliase au moyen de l'angle
que forment la Terre et le Soleil avec le centre de Mars, mais l'expérience nous
apprend, dans Vénus et Mercure, que la'largeur de la partie obscurcie se trouve
être toujours un peu plus grande que le calcul ne le demande. En outre, avec un
instrument d'une irradiation aussi forte qu'a dû l'être le télescope d'IIerschel, le
bord entièrement ('clairé s'avancera beaucoup plus dans la partie obscurcie que
le bord opposé; or, comme les 11 et 13 mai le dis(pic complet a été aperçu, mais
que les 17 et 10 juin il manquait déj;\ au bord oriental 2>î°lG' et 20"22', il faut donc
d'après toute vraisemblance augmenter la correction II et diminut'v par consé-
quent la période de rotation.
Herschel, prenant pour base la période de 2i''39'"22% I, qu'il avait trouvée,
admit qu'entre les jours suivants, où les mêmes taches furent aperçues.
1777 avril X et 1770 juin 0, il s'étai écoulé 7G8 rotations ;
1777 .. 17 et 1779 ■> lô .. .. 7G8
1777 0 2G et 1770 .. 10 » » 763
d'où résulta alors la p»!-riode :
24''39'»23',03
24 39 18,94
24 39 2^ .04
Moyenne 24'>39">2l',l.7.
En augmentant les diviseurs «l'une unité et en ayant égard aux corrections
exigées, on obtient :
24'- 37™ 28', ô
24 38 22,3
24 37 28,11
Moyen ne 24'- 37"- 20", 27 ;
de sorte que la diiTérence de 2 minutes qui se trouve entre le résultat d'IIerschel
et le nùtre se trouve réduite ;\ 2 -J- secondes.
Il est évident que, pour le résultat exact des observations. les deux diviseurs
sont également ;\ peu près possibles et vraisemblables, tandis qu'une diminution
du diviseur que nous avons appliqué dans la combinaison de 1830 et IS32 ferait
supposer une erreur moyenne de I''|."j"' dans les intervalb^s observés en 1830, ce
qui est inadmissible.
Il est bien loin de notre pens<'c de vouloir mettre en doute l'exactitude et le
talent d'observation d'IIerschel; seulement les circonstances de beaucoup plus
favorables qui ont accompagné nos observations en 1830, ainsi que la stricte
118 I A Pl.ANKTi: MAKS.
exactitude que nous avons mise dans le calcul, paraissent décider en faveur de
notre résultat (7ui. comme on le voit, peut être mis d'accord avec les observations
d'IIerschel.
Nous adopterons cctlo correction, d'aulanl jilus que les iléLcrniiiialions
récentes les plus précises confirment la période de Bcer et Miidler, la durée
de rotation de Mars étant, ?ans aucun dmite possible, de 2i''37'"2J%(t. I^a
période de Béer et Miidlerest, avons-nous dit, de i?i'':n"'i?;V, 7. Klle aiiprocliail
donc de 1% 1 de la précision absolue.
Les observations qui précèdent ont été continuées par Miidler, à l'obser-
vatoire de Dorpat, pendant l'opposition de 1841, elle résumé en a été publié
dans le numéro 43'i des Asironomisclie Nachrichicn, année 1842, accompagné
d'une plancbe de 40 dessins. Il est assez difficile d'identifier ces dessins aux
précédents. Nous avons choisi dans cette planche, pour être reproduits en
fac-similés, une série de neuf croquis parmi les meilleurs et les plus voisins
de l'opposition ; ce sont les fig. 6, 7, 8, 14, 15, 16, 22, 23 et 24 de la planche
que nous venons de citer; ils se rapportent aux- dates suivantes (l'opposition
a eu lieu le 1" avril : distance à la Terre = 0,591 ; diamètre =: 15", 1) ;
Fiij. ('» ou 1 : l""'' avril, à minuit 8'", temps moyen de Paris.
Fif}. 7 ou 2 à gauche : 5 avril, 0'' 13'", temps moyen de Paris.
Fig. 8 ou 3 : Même jour, à 10'' 13"', temps moyen de Paris
Fig. 14 ou l"-* du 2'^ rang : 26 avril, à O"» 12"'.
Fig. 15 : Même jour, à 9'' 52"^
Fig. 10 : 29 avril, à 8'' 50"'.
Fig. 22 ou 1"= du 3<^ rang : 8 mai, à Si> i\"\
Fig. 23: 9 mai, à S^'U'".
Fig. 2i ou dernière : 11 mai. à 7'' 5i"'.
Ces observations complètent les précédentes sans y ajouter de nouveau.\
documents.
Telles furent les recherches de l'astronome Miidler, auquel s'était associé
son ami Guillaume Béer (frère do Meyerbeer), passionné comme lui pour
l'étude du ciel. Ces recherches sont les plus fécondes de toutes celles qui
aient été faites jusqu'à leur époque, car elles inaugurent i-éellement la con-
naissance de la géographie martienne, ou Yarêographic.
La durée de la rotation, déterminée avec une précision supérieure à toutes
les évaluations précédentes et adoptée, est 24'' 37™ 23% 7.
Les glaces polaires sont spécialement étudiées, ainsi (]ue les saisons de
chaque hémisphère. On sait désormais que l'hémisphère austral a des étés
1830'iail \Mi\i\\ I:T MADir-H. ll'J
plus r.haucls et des hivers plus froids que riiémisplière boréal, à cause de la
plus frrandc c.xccntririté do la planète et de l'inclinaison de l'axe : les varia-
tions des glaces polaires australes sont plus grandes que celles des glaces
polaires boréales, et elles correspondent aux saisons. L'hémisphère sud a
dos étés courts et brûlants et des hivers longs et rigoureux; l'hémisphère
nord, au contraire, a des étés longs et tempérés et des hivers courts et doux.
Fi{?. 70. — Dessins de Mars aits par Mâdler en I8il.
Les mesures de distance des pôles de froid aux pôles géographiques ne
concordent pas avec celles d'IIerschel [voy. p. 97), quoiqu'il reste constant
que les deux calottes polaires ne sont pas diamétralement opposées. Peut-être
les pôles du froid ne sont-ils pas fixes.
Les taches foncées de la planète ont une certaine fixité; une certaine per-
manence. Cependant il y a des changements incontestables. Ce que nous
avons pressenti depuis le commencement de cet ouvrage est confirmé.
Comme stabilité, la tache a, prise pour origine des méridiens, paraît aux
observateurs la plus sûre. Elle est la mieux marquée de la planète, la plus
foncée. i^C'est la baie du Méridien de notre carte.) Si nos lecteurs veulent bien
remonter aux pages 30 et G9 de cet ouvrage, ils trouveront cette région à
droite de l'hémisphère renfermant la mer du Sablier et remarqueront que
IIÎO I A PI.Wf'Ti: M MIS.
l'aspect n'est pins le mcMiie que coliii di^ la carie de Becr cl Mlidlcr : le ruban
ne se dclache plus sur un fond clair et est moins étroit; // s'opère incnutcsin-
blrvicnl là f^'s variations d'aspccls, pcut-ùlrc périodiques.
Ce détroit d'IIerschel II a paru stable aux auteurs, comme ayant été ob-
servé aussi par Kunowsky en 1821 (voy. fig. G5). Ainsi l'arc serpentant ac et
la lacbc a leur paraissent appartenir sûrement à la surface de la planète. La
longue et large tacho pm de leur carte est également considérée comme fixo
(c'est la mer Maraldi). Du reste, malgré les incertitudes et la confusion de
certaines images, ils écrivent en 1832 qu'aucune dos tacbcs bien visibles
en 1830 n'a cbangé de position. En 1837, ils reconnaissent de. nouveau avec
certitude la mer Maraldi. Toutefois il n'y a pas moyen de se soustraire à
l'impression de variations considérables, dans la teinte comme dans la forme
et l'étendue de ces taches sombres. Les auteurs seraient disposés h attribuer
ces variations, du moins dans les latitudes élevées, aux effets de la fonte des
neiges, le sol devenant marécageux et sombre aux endroits où les neiges
sont fondues.
L'atmosphère martienne doit également jouer un grand rôle dans ces va-
riations d'aspects. Il semble bien que nous devions admettre sur Mars deux
espèces de taches sombres, les unes dues à des mers, les autres à des brumes
ou brouillards. Peut-être même arriverons-nous à la déduction que l'eau n'est
pas dans le mémo état qu'ici, n'y forme pas, à proprement parler, des mers
liquides, mais plutôt des nappes de brouillards très denses, visqueux, voisins
de l'état liquide sans l'être tout à fait. Ces nappes aqueuses varieraient
d'étendue et d'intensité suivant les conditions atmosphériques et suivant les
saisons.
On le voit, la connaissance de la planète avance graduellement, d'année
en année, avec le progrès des observations. Nous pouvons affirmer dès
maintenant ce qui n'était que probable précédemment : Stabilité, mais va-
riations. L'étude fjéographir/ue de la planète Mars devient une étude de pré-
cision; ^lars est un globe géographique comme la Terre, non pas nuageux
comme .Jupiter et Saturne; il a sûrement des continents et des mers; mais
ces mers ne ressemblent pas aux nôtres : elles subissent des variations énig-
matiques qui feront l'objet des études futures de la Science.
XXXVl. 1830. — Sip. John Herschel.
Après avoir donné sur Mercure et Vénus l'opinion suivante [Outlines ai
Astronorny] : « La conséquence la plus naturelle à tirer de l'extrême ténuité
des taches, qui ne sont même que passagères, c'est que nous ne voyons pas,
comme dans la Lune, la surface réelle de ces planètes, mais seulement leurs
1830 JUIIN lIKHSCIli;!,. 1î|
atmosphores très chargées en nuages et qui peuvent servira adoucir léclat
d'ailleurs très intense de leur clarté «, l'illustro astronome ajout(3 :
u Le cas est très différent pour Mars. Dans cette planète, nous distinguons
avec une parfaite netteté les contours de ce que nous pouvons regarder comme
des continonts ot des mors (voyez fuj. 71 où Mars est représenté tel qu'il a été
vu, le 10 août 1830, dans le réllectour de 20 pieds de Slough). Les continents
se distinguent par cette couleur rougeatre qui caractérise la lumière de celte
planète et qui annonce, à n'en pas douter, une teinte iVocrc dans k sol eu
général (comme les carrières do pierre à sal)lon rouge dans quelques lieux
de la Terre peuvent en offrir l'image aux habitants de Mars); seulement le
ton est plus prononcé; par un contraste qu'expliquent les lois générales de
l'optique, les mers, comme nous pouvons les appeler, paraissent verdàtres.
Fig. 71. — Vue de Mars, par sir John Ilcrschel, le IG août 1830
Ces taches cependant ne se voient pas toujours d'une manière également dis-
tincte, quoique, quand on les voit, elles offrent toujours la même apparence,
Gela peut venir de ce que la planète n'est pas entièrement dépourvue d'at-
mosphère et de nuages; et ce qui donne beaucoup d'aulorilc à cette hypo-
thèse, c'est la présence de taches blanches et d'un vif éclat à ses pôles (dont
une est représentée dans notre dessin). On a soupçonne, avec beaucoup de
probabilité, que ce sont là des neiges : elles disparaissent lorsqu'elles ont été
longtemps exposées au Soleil, et sont au plus haut degré de leur grandeur
lorsqu'elles ne font que sortir de la longue nuit do leur hiver polaire. «
En 1828, le 22 juin, le D' Pearson avait observé sur le disque de Mars une
tache sombre allongée verticalement, non loin du liord gauche ou occi-
dental, et, quatre jours après, il revoyait cette tache, non plus verticale, mais
horizontale et allongée le long du bord supérieur. Il en écrivit à sir John
llerschcl (jui lui-même communiqua le fait à Smyth. Celui-ci en parle dans
sou ouvrage Cycle of Celestial objects et eu donne même la figure. Il s'agissait
i.;-2 1. A rLANi: ri; m a us.
cei'taincmoni là tic deux taches dilTorcnles, car la planclc no inunio pas dans
ce sens : nous ne sommes pas dans la direction du pôle.
Nous retiendrons de sir John Ilerschcl deux faits. Le premier, c'est que
dès cette époque, 1830, l'opinion que les régions jaunes représentent des
continents et les grises des mers devient à peu près générale; le second, c'est
que le ton jaune des continents est celui de la surface du sol. Mais l'expli-
cation du lils de "William Herschel est soumise à caution. Pour l'admettre, il
faudrait supposer qu'il n'y ait aucun genre de végétation à la surface du sol
de Mars. Une telle supposition n'est guère acceptable, puisqu'il y a comme
ici de l'air, de l'eau et du soleil. Si la surface du sol est rougcàtre, cela ne
proviendrait-il pas de ce qu'elle serait recouverte d'une végétation de cette
nuance? Cette coloration n'est pas rouge d'ailleurs, c'est un jaune chaud
que nous ne saurions plus exactement comparer qu'à celui des Liés mûrs.
XXXVir. 1830 à 1837. - Bessel {'\
Le grand astronome-mathématicien Bessel a fait de 1830 à 1837 à l'obser-
vatoire de Kœnigsbcrg une série d'observations de Mars qui n'avaient point
pour objet sa constitution physique, mais seulement la mesure de son dia-
mètre et de son aplatissement. Il trouva pour le diamètre, à la distance I
celle de la Terre au Soleil), 9", 33. L'aplatissement polaire lui parut tout à
fait insensible.
Les mêmes mesures ont donné pour l'excentricité de la tache polaire au-
strale G^SG'. On se souvient que William Herschel avait trouvé en 1783, pouj-
cette môme tache australe 8%8, Béer et Madler 8°.
OuDEMANs, de Leyde, a publié en 1852 une nouvelle réduction de ces
mesures (-). Il conclut pour le demi-diamètre 4",GG4, ce qui, combiné avec
la parallaxe solaire alors adoptée de 8"..">71, donne 0,5 ii pour le diamètre do
Mars relativement à la Terre, et O.lGl pour le volume. Il trouva par les
mêmes observations de Bessel :
Longitude céleste où pointe le pôle nord de Mars. .349° 1' (')
ou ascension droite SlT^S-i
Latitude 61° 9
ou déclinaison 50° 5
(') Kœnigsberg Beobachlungen, t. XXtlL 18i7, p. 9i,95.
{') Astronomische Nachrichlen, n» 838, 1852, p. 351.
(') Nous avons vu que Hersctiel avait trouvé :
Longitude ... .j'i?» 'i7'
Longitude 59° 42
et Schrceter ;
Longitude 352°55'
LaUtude. . 00» 33
I83I-I83-2 siii .iA.\ii:s sorni 1-23
XXXVIII. 1831-183-:. — Siii J\Mi:s Soi-tii ^'i.
L'astronome anglais sir James South, auquel nous devons d'intéressantes
mesures d'étoiles doubles, a présenté à la Société royale de Londres, le
10 juin 1831, puis le 13 décembre 183-2, une série d'observations sur Catmo-
sphtre de Mars, montrant que cette atmosphère n'a pas l'extension que lui
avait fait supposer l'interprétation des observations de loccultation de
l'étoile '} du Verseau par Mars, le 1" octobre 167-2.
Cassini avait observe à Briarc : « Le l""" octobre 1G72, dil-ii, à 2''45"' du
malin. Mars, vu par une lunette de 3 pieds, semblait toucher par son bord
septentrional la ligne droite tirée par la première et par la seconde étoile
de l'eau d'Aquarius marquée •!/, d'où il n'était éloigné que do G minutes. Cette
étoile paraissait si diminuée et afTaiblie de lumière qu'où ne la pouvait dis-
tinguer ni à la vue simple ni par une lunette un peu faible. y>
L'étoile i/ du "\erscau est de 5" grandeur. Nous avons déjà parlé de cette
observation p. GO (en note).
Cette même occultation fut observée à l'Observatoire de Paris par Rœmer :
« Les nuages ne permirent pas d'en voir la sortie, et l'on ne sait même pas
si l'on aurait pu la voir immédiatement, car, trois quarts d'heure après, le
ciel s'étant découvert, M. Rœmer la chercha attentivement autour de Mars
et il ne la trouva qu'après l'attention de deux minutes, quand elle était déjà
éloignée du bord oriental de Mars de deux tiers de son diamètre. Il com-
mença de la voir sans difficulté quand elle était éloignée de Mars des trois
quarts de son diamètre «. ' Jlém. de l'Acad., t. Vif, p. 350i.
Voilà donc une étoile de 5" grandeur qui aurait subi à la distance de
six minutes l'influence de la planète. '( Cette difïïculté de voir celte étoile de
ia o" grandeur très proche de Mars est considérable, d'autant qu'il n'y
a point de difficultés à voir des étoiles de la même grandeur au bord de
la Lune. Ce qui pourrait faire juger que Mars est environné de quelque
atmosphère. »
Sir James Soulli remarque d'abord que William Ilerschel a fait une obser-
vation contraire le 27 octobre 1783, puisqu'il a pu suivre une étoile de
13" à li" grandeur à la distance de 2'oG" de la planète : « Not othcrwise
affected by the approach of Mars ihan what the brightness of its superior
light might account for. >. Nous avons signalé cette observation.
« Le 19 février 1822, dit sir James South, j'ai observé à Londres, à lUackman-
slreel, une étoile de 9" à 10" grandeur qui n'a péis subi de diminution d'éclat
à r i3" du bord de la planète.
(•) On (lio cxtciisivc atmospliere of Mars, l'hilo^ophiral Tran.'^.iriinn^. 1S3I. |i. 117.
- /(/. 1833, p. lô.
i-:4 LA pi.ANr.Ti: m a us.
« La nuil suivante, conlimio-l-il. l\Hoilc iO du Lion, de 11'' grandeur, s'esl
approcliée de Mars; à 'i'' du malin, clic était tout proche et présentait une
belle couleur îdoue. Klle a été occultée. Je n'ai pas pu saisir le moment
précis de l'occultalion, mais à réniersion j'ai revu l'étoile à environ une
minute et demie du bord; elle était nette, indigo bleu, ce qui faisait un
contraste exquis avec la couleur de Mars. La planète n'était qu'à i7 heures
de son opposition, et son diamètre était do 10', G. »
Le 17 mars 183L le même astronome fit encore une observation analogue
1*1 propos de l'occultation de l'étoile 37 du Taureau par Mars. L'étoile ne subit
aucune diminution d'éclat ni de couleur. Il n'y avait pas de contraste de
couleur comme dans le cas de 42 du Lion. L'étoile 37 du Taureau a à peu près
la couleur de Mars.
Le 28 novembre 1832, sir James South fit encore une observation analogue
Une étoile de G* à 7' grandeur précédait Mars au Sud. Elle offrait une belle
couleur bleue, en contraste frappant avec celle de la planète. L'objectif de
l'équatorial mesurait 11,85 pouces anglais et supportait bien un grossisse-
ment de 520 fois. On suivit l'étoile (."R = 3"29"M9% (0 -h 2G°22') jusqu'au
bord de la planète : il n'y a pas eu l'ombre d'un changement optique dans
l'éclat de l'étoile, pas plus que dans sa couleur, ni à l'immersion ni à l'émer-
sion.
La planète avait passé son opposition depuis 9 jours.
L'auteur conclut que l'ancienne hypothèse d'une atmosphère considérable
est insoutenable. C'est aussi ce que Flaugergues avait conclu en 179G d'une
observation analogue {voy. p. 84, en note).
X.XXl.X. 1837-1839. —J. -G. Galle.
Cet astronome a fait en 1837 et 1839, à l'aide du réfracteur do 9 pouces de
l'observatoire de Berlin, une série d'observations et de dessins fort remar-
quables. Di.\-huit de ces dessins ont été reproduits par M. Lohse dans le
tome I des publications de r^ls?rop/i?/5i/ia/. Observatorhim zu Postdam (1878).
Parmi ces croquis nous reproduisons, entre autres, les suivants :
Firj. 72 A : 12 mars 1837, à iO^Zl'^.
Fi(j. 72 B : 12 mars 1839, à lO^'O™. — Dans ces deux vues, on remarque, en bas, la
tache polaire boréale, très petite dans le deuxième dessin. Ce dessin de 1839
offre une ressemblance remarquable avec celui de Kunowsky, du 15 mars 1822 :
la tache supérieure représente le détroit d'FIerschel II et la baie du Méridien.
Fi g. 7-3 C : 12 mars, à ll''30">.
1837-1839
.!.-(;. (JALLi:.
125
Fiij. 1) ; 13 mars, à •J'* il'".
Fiij. V'j : li murs 1839, ;\ 10'' 0'". — Cette sorte de tète •!(,' canard représente
A. — 1-2 mars 18;}7, :i 1U''37". 15. — 12 mars 18311, à ICO™,
l'ig. l'i. — Dessins de Mars par Galle, I837-It>39.
également la baie du Méridien, llcaiarquer cet aspect l'uurcliu, biir lequel nuus
reviendrons plus tard.
C. — I,! mars, a ll''3u'°. D. — 13 mars. K. — li mais. F. — 30 mar.^, à 'J"'40"'.
l'ig. 73. — Dessins de Mara ]iar Galle, eii IS'J'J.
Fi(j. F : 30 mars. — La tache noire a est passée à 10'' 'iO'» au méridien ccnlral
(,'ette R'j^uve a été prise ù. 0'' iO™, et la suivante (G) à M'' 10'".
Fi'j. H : ;il mai, à 1 1'' 3 >'". — Ou distingue les deux taches polaires, qui ne sont
G. — 30 mars, ll''lU'°. II. — 31 mai. 1.— l"juiii.
Fig. 7i. — Dessins de Mars par Galle, en 1S3'J.
J — 7 juin.
pas u l'extrémité il un mémo diamètre. Un remarque en a une échancrure assez
singulière. (Nous avons déjà vu une observation analogue dans Schrœter. i
Fi(j. I : l'^''juiu, à li'' [b"'. — La trainée sombre, qui descend d'un polo à l'autre,
parait correspondre à la mer du Sablier, qui est encore mieux recouuaissable sur
103 croquis H, D, L et II.
Fiij. .1 : 7 juin, ;'i II''..'-!'".
Ces dessins do Galle sisiiiûeul égaloinciit : stabilitc )nais carialions de ions.
126 I A n.\Ni:TK M A H s.
XI.. I83<). — Xapoi.kon III.
Nous avons dôcouverl celle obscrvalion dans un ouvrage ou nous ne l'au-
rions certainement pas cherchée ('), et nous hi signalons plulùt pour sa
curiosité tjuc pour son importance.
Au mois de juin 1830, le prince Louis-Napoléon et M. d'Abbadie, aujour-
d'hui membre de Thislilul et du Bureau des Longitudes, qui l'accompagnait,
étant en visite à l'observatoire de sir James South, à Londres, observèrent
Mars et remarquèrent surtout la calotte polaire supérieure, alors très accen-
tuée. M. d'Abbadie en fit un petit croquis qu'il serait superflu de reproduire, et
Louis-Xapoléon Bonaparte en écrivit une courte description qu'il signa Napo'
li'on ni (en 1839). La planète offrait une phase marquée. La tache polaire
était si brillante qu'elle allongeait le disque de Mars en forme de pointe cl
lui donnait l'aspect d'une poire.
C'était sans doute une semaine ou deux après le dernier dessin qui précède.
XLI. 18-13 à 1873. — Julius Sgumidt.
Le savant Directeur de l'observatoire d'Athènes a fourni une des collections
les plus nombreuses d'observations de Mars, faites en 1843, 1845, 1846, 1847;
1854, 185G, 1860, 1862, 1864. 1866, 1867, 1860, 1871 et 1873. Mais celle belle
série n'a pas été publiée, et nous ne la connaissons que par les relations qu'en
a données M. Terby. Les dessins de Schmidt s'élèvent à 107. Les observa-
tions ont été faites successivement à Hambourg, en 1843, avec un grossisse-
ment de 00 fois; à Bilk, près Dusseldorf, en 1845; à Bonn, en 1846 et
en 1847, avec un réfracteur de 5 pieds et un héliomètre; à Olmûtz en 1854 et
en 1856, avec un réfracteur de 5 pieds, et enfin à Athènes, de 1860 à 1873,
avec le réfracteur de 6 pieds et un grossissement de 550 fois. On y reconnaît
avec une grande évidence, dans la plupart des cas, les principales configu-
rations géograjjhiques de la planète.
Les quatre dessins ci-dessous, reproduits d'après M. Tcrby, dunnent une idée
des observations de Julius Schmidt. En voici les dates; nous les publions dès ici
quoiqu'ils anticipent un peu sur notre ordre chronologique.
Fi<j. A. 26 septembre 1862, à 8»>36"' (heure d'Athènes).
Fig. B. !«"• octobre 1862, à 7«'28"'. id.
Fig.C. 16 mai 1873, à 8'' 15™. id.
Fig. D. 23 mai 1873, à 7i'41>". id.
La fig. A permet de reconnaitre la mer du Sablier. Au-dessus, comme une île
très vaste, la terre de Lockyer, et, plus haut, la tache polaire australe, bien détachée
(') Révolutions de la Mer, par Adhémar. 2' édition, p. 242. Paris, 1800.
isi.j-is:,(; jl:lil> sciimiki. .mi iciii:!.. \\ahi(i;n di; la uui:. i.'t
du bord. Le reste est muius sur. La /hj. li, t[u\ coutient la nier Maraldi, montre
au-dessous d'elle une bande sombre que nous ne reconnaissons pas. Lufirj. C rap-
pelle la ftj. 7 de Mildler eu isW. uuiis n'e.st d'identilicatiou sure pour aucune do
.V, — :g septembre 1862, a Si-aG"
B. - 1" octobre 1862,à7''28"
C. — 16 mai 1873, ii 8'- 15"'. D. — 23 mai 1873, à 7i'41™
Fig. 75. — Dessins de Mais, par Julius SchmiUt, 1862 et 1873.
SCS taches. La (Ij. D parait représeutcr la mer Flammariou et la mer lluoUe
séparées par un isthme.
Ces observations militent également en faveur de variations notables clans
les aspects de Mars.
XLlI. l8-'i.j à 1850. — MiTcHiïL, Gu.vxr, W'aiuien de la {{ijë,
.Jacob, Brodie, Wehu.
Les observations de Mars se multiplient à mesure que s'étendent dans ;le
inonde les connaissances astronomiques et que se développe le goût des ob-
servations, 11 serait inutile, pour notre étude de la planète, d'exposer ici tous
L'S iravau.w qui souvent se répètent ou n'apportent aucun élément nouveau
à la question. Nous n'eu omettrons pourtant aucun d'intéressant et nous don-
nerons toujours en détail les plus importants.
En 1845, Mitchel a fait plusieurs observations de cette planète, au grand
équalorial de Cinciiuiatti, s'appliquanl surtout au\ neiges polaires : il crut
128 l.A IMAM. ri: MAItS.
remarquer un point noir dans la laclie polaire, le 1"2 juillcL 1H45, cl des niou-
vomenls aux bords de ces neiges. Granl a présenté à la Société royale aslrono-
miiiue de Londres deux croquis pris en octobre 1847 et en mars 185i
[ilonl/ily i\oliccs, ISôl, p. 165). Le premier montre la taclie polaire australe
cl le second la boréale. L'auteur est James William Cirant (qu'il ne l'aul pas
confondre avec Robert Grant, auteur de Vllislonj oj physical AslronoDiy,
London, IS52). Jacob a l'ait, en mars 185 î, deux dessins sur lesquels on
reconnaît les principales laclies. En 185(i, ^\'arren de la Hue, brodie et
Webb en ont obtenu de plus importants.
Dans toute cette série, ce ^sont certainement les dessins de Warrcn de la
Hue qui méritent la plus liante attention, et parmi ces dessins, il en est deu.x,
Fig. 70. — Dessin de Mars, par Warrcn do la Rue, le :^0 avril 1800 à 'J'' 40'".
du 20 avril 185G,à9''4Û°' et à 11''45"', qui sont particulièrement remarquables.
Nous les reproduisons ici. Le premier {/ig. 7()) montre bien clairement la
mer du Sablier, assez étroite. Dans le second (//y. 77), fait deux heures plus
tard, cette mer arrive au bord occidental ou gauche du disque et le détroit
d'Herschcl 11 occupe la partie supérieure de la ligure.
La baie du Méridien se présente vers la droite, comme une langue pointue.
Les taches polaires sont bien évidentes aux deux pôles. Elles n'ai)pai-
liennent pas à un même diamètre. Ces deux dessins sont peut-être les meil-
leurs que nous ayons eu sous les yeux depuis les premières pages de cet
ouvrage. Ils ont été obtenu» à l'aide d'un excellent télescope newtonien do
13 pouces anglais, ou 0"',:33 de diamètre, monté en équatorial,
1856
WAHUI-N Dli LA IlLK, BKODIi:, ETC.
1-20
Nous pouvons adjoindre à ces vues deux croquis de la planète pris à peu
près à la même date, au milieu d'avril 1850 : le premier, assezdélaillé, dans la
l-'ig. 77. — Dessin l'ait deux heures après (à 11'' 4J"').
soirée du 18, par Fr. Brodie; le second, simple esquisse, pris « vers le 15» par
le pasteur Webb. Voici ces deux observations [Monthly Notices, XVI. 204 et 188) :
Fig. 7S. — Dessin de la plauele iMars, 18 avril l8oG, par Fr. Brodio.
1°« 18 avril, 10'' 10"' de temps sidéral, Mars près delà Lune, très bonne
Flammarion. — Mars. 9
130 I.A PLANKTK MARS.
imago, objectif Je 6 pouces |, grossissements de 396 et 578. Les pôles sont
resplendissants de blancheur, surtout le pôle sud. On remarque aussi deux
autres régions plus blanches, en AB et en CD «.
2" Le croquis de Webb, quoique moins détaille, indi(|ue ccpcndanl mieux
que le précédent ces quatre régions blanches (les deux pôles et les deux
Fig. 79. — Croquis de la plaoLte Mars, par T. W. Webb, vers le 15 avril 18.56.
points AB et CD, de sorte que Mars paraît presque de forme équilatérale. —
Cette esquisse ressemble d'une manière remarquable à celle qui, dans les ob-
servations de Cassini publiées par le Journal des Sava7its, porte la lettre A
{voy. p, 19) el qui est aussi ja première en tête du mémoire de Cassini
(p. 20). — Le laborieux "Webb a fait un grand nombre d'autres dessins. Nous
y reviendrons à propos de son ouvrage d'Astronomie pratique.
Une étude physique de la planète a été publiée par Taylor dans le Madras
Speclator du 26 août 1845, observations faites avec un télescope d'Herschel.
Gruithuisen en parle dans son Aslronomische Jahrbuch fur 1848. La planète
avait une large bande équatoriale et était, à l'exception de cette bande, très
lumineuse. Son aspect rappelait celui de Jupiter.
XLIII. 1845-1875. — Main.
M. Main a fait, tant à l'observatoire de Greenwich qu'à celui [d'Oxford, un
certain nombre d'observations de la planète ]\[ars, principalement au point
de vue de la mesure du diamètre. En 1845. il a fait quelques observations de
la surface ('). Le 22 août, à IPSO"", à l'époque de l'opposition, il examina la
surface, en compagnie de l'astronome royal (M. Airy).
Vers 10'' à l'ouest du Nord apparent, sur le bord de la planète, on voyait un cap
blanc qui formait un contraste frappant avec la zone sombre qui était immédiate-
ment au-dessous. Un peu au-dessous de cette bande foncée, on en remarquait une
plus claire. La tache sombre la plus apparente du disque se voyait à gauche de
la grande masse foncée qui occupait une partie considérable de la surface supé-
rieure, et il y avait aussi une autre tache sombre à droite.
(') Examination of Uie surface of Ihc planet Mars wilh the télescope of Ihe Soulh-
East equatorial. Royal Observatory, Greenwich, 184.5, p. 172.
I
1853 ARAGO. 131
Les meilleures descriptions ne valent pas le plus simple dessin.
29 août, 11''. L'aspect de la planète est entièrement changé, à l'exception du
cap polaire. La coloration dtait d'un beau rouge de terre « rich rod oarth «. Les
taches sombres avaient une très légère teinte bleue.
Le même astronome a fait d'autres observations à l'observatoire d'Ox-
ford ('). Il a surtout pris des mesures de l'aplatissement polaire et du dia-
mètre. Les voici :
Aplatissement: .Vplatisscmcnt :
1855 9",84 Jj 1871 9",25 J^
1862 9", 377 J^ 1875 9", 185 ^\
1864 9" 38 ^'g
XLIV. 1856. — WlNNECKE.
Le but de ce travail étant l'étude de la constitution physique de la pla-
nète, nous n'avons pas donné ici les observations et calculs relatifs aux élé-
ments de l'orbite, à la parallaxe, à la masse et au diamètre. Cependant, pour
ce dernier point, nous avons signalé les mesures les plus importantes, telles
que celles d'Herschel, Schrœter, Arago, Bessel. Nous signalerons aussi les
mesures faites par Winnecke, en IS.ôG, à l'observatoire de Bonn (-). Il trouve
pour le diamètre, à la distance I, 9", 213. Aucune trace d'aplatissement, au
contraire, car il obtient pour le diamètre polaire 9", 227 et pour le diamètre
équatoriaL 9", 186.
XLV. 1853. — Arago {').
Nous avons déjà signalé et résumé le mémoire d' Arago sur Mars ainsi que
ses observations (p. 90-93). Dans le Livre XXIV de son Astronomie populaire,
dictée la dernière année de sa vie, lorsque sa vue, fatiguée par tant de travaux,
était déjà en partie perdue, il s'est occupé en outre des saisons de Mars, de
sa couleur et de son atmosphère.
Les saisons sont adoptées telles que nous les avons vues exposées par Béer
et Miidler.
11 est un point intéressant, relatif à l'excentricité de l'orbite, que nous
aurons lieu d'examiner plus loin, et sur lequel Arago s'exprime dans les
termes suivants :
(') Memoirs of Ihe Royal ,Utr. Society, t. XXV, p. 48; W., t.XXXll, p. 112; Rad-
cliffe Obscrvalory Results, t. XXII, XXXI et XXXIII.
(') Aslronomische Nachrichlen, n' 1135, 1858, p. 97.
(') Astronomie populaire, œuvre posthume, publiée en 1854-1857. Arago est mort le
3 octobre 1853.
130 LA ri. A M- 11- mai; S.
MM. MaJIor et Béer ont suivi, jusque dans les dernières conséquences suscep-
tibles d'être vériûées par nos instruments, l'explication qu'on a donnée des
taches polaires brillantes de Mars en les assiniilani à de la neige.
Sur les 6GS jours | dont se compose une année solaire de Mars, ces astronomes
trouvent que les saisons estivales de l'hémisphère boréal de la planète ren-
ferment en nombres jronds 37'2 jours et que les saisons hivernales contiennent
Î96 jours {voyez p. 115 1.
Ces mêmes résultats s'appliquent aux saisons de l'hémisphère sud, en rempla-
çant seulement le mot estivales par le mot hivernales et réciproquement.
Cette inégale durée entre les saisons froides et les saisons chaudes n'empêche
pas les deux hémisphères de pouvoir jouir de la même température moyenne.
Quant aux extrêmes de ces températures, ils peuvent être très dissemblables si
l'on compare un hémisphère à l'hémisphère opposé.
Ainsi, au solstice d'été de l'hémisphère sud de Mars, cette planète est actuelle-
ment à sa moindre distance au Soleil et par conséquent reçoit alors de cet astre
le maximum de chaleur qu'il puisse jamais lui communiquer. Cette chaleur sera
à son minimum au solstice d'hiver.
Il résulte de là que si la matière qui produit la tache blanche du pùle austral
de Mars jouit des propriétés analogues à celles de nos neiges, cette tache doit
varier considérablement plus que la tache bluuche du pôle boréal.
Nous parlerons lAas loin du théorème en vertu duquel la quantité totale
de la chaleur solaire reçue de Téquinoxe de printemps à l'équinoxe d'au-
tomne est identiquement la même que celle qui est reçue de l'équinoxe
d'automne à l'équinoxe de printemps, la durée de l'exposition au Soleil
compensant exactement la différence des distances. Mais si la quantité totale
de chaleur reçue est la même, il n'en est pas moins vrai que l'hémisphère
qui est exposé au Soleil au solstice périhélique reçoit à ce moment-là plus
de chaleur que. l'autre n'eu reçoit au solstice aphélique, et que, par consé-
quent, son été est plus chaud. La neige polaire doit donc y être plus
réduite.
On pourrait imaginer une orbite assez allongée et une iuclinaison de l'axe
telle que la neige ne fondrait jamais aux environs d'un pôle qui aurait son
hiver au périhélie et son été à l'aphélie.
A propos de la coloration d(; la planète et de l'atmosphère, Arago s'exprime
comme il suit :
Quelques astronomes, physiciens et géologues onf, parlé à cette occasion de
terrains ocreux, de grès rouges, sur lesquels la lumière solaire serait réfléchie.
Lambert, pour expliquer le même phénomène, supposait que dans cette planète
tous les produits de la végétation sont rouges; d'autres, se rappelant qu'au soleil
levant ou au soleil couchant les objets terrestres sont quelquefois rougeâtres,
1853 ARAGO. 133
ont voulu voir dans la coloration de Mars le résultat des modifications imprimées
aux rayons de lumit^rc par Tatmosphèro dont la planète serait entourée.
Mais cette explication ne saurait être admise. En la supposant exacte, c'est sur
les bords et dans les régions polaires que la coloration devrait atteindre son
maximum, et c'est pré<Msément le contraire qu'on observe.
On a remarqué que la couleur rouge de Mars parait beaucoup plus intense à
l'œil nu que dans une lunette; en interrogeant mes souvenirs, il me semble
qu'avec des lunettes la teinte s'affaiblit notablement quand le grossissement
s'accroît.
Les taches permanentes de Mars ne sont jamais visibles jusqu'au bord de la
planète. Ce bord parait lumineux. Ces deux faits ont conduit à la conséquence
que Mars est entouré d'une atmosphère. La prédominance d'éclat du bord oriental
et du bord occidental a paru telle à quelques observateurs, qu'ils ont comparé
ces deux bords à deux ménisques étroits et resplendissants entre lesquels serait
enfermé le reste du disque comparativement obscur.
Quelques observateurs ont remarqué que les taches sombres présentent une
légère teinte verdàtre, mais cette couleur n'a rien de réel. Elle est un phénomène
de contraste, ainsi que cela se voit toutes les fois qu'un objet blanc et faible est
placé à coté d'un autre objet fortement éclairé en rouge.
La disposition de taches permanentes de Mars près des bords de son disque,
considérée comme un effet et comme une preuve de l'existence d'une atmosphère
dont la planète serait entourée, mérite d'être développée ici.
Sans entrer dans le détail des principes de Photométrie qui pourraient trouver
une application dans l'examen actuel, nous pouvons regarder comme un résultat
d'observation que, lorsque la lumière solaire éclaire librement la partie matérielle
d'un corps sphérique et raboteux, le bord et le centre de son disque apparent, vus
de loin, ont à peu près la même intensité. Ce fait, nous le tirons de l'observation
de la Lune dans son plein.
L'égalité en question n'aurait plus lieu si les rayons qui vont éclairer les bords
et le centre de l'astre n'avaient pas le même éclat.
Les rayons solaires qui illuminent les bords de l'astre sont-ils plus faibles que
les rayons qui frappent le centre, les bords paraîtront moins éclairés que le
centre.
Or, si Mars est entouré d'une atmosphère imparfaitement diaphane, les rayons
qui vont atteindre le bord de la planète doivent être plus faibles que les rayons
aboutissant au centre, puisqu'ils ont eu à traverser une plus grande étendue de
couches atmosphériques; donc, par cette raison et même sans tenir compte de
l'affaiblissement que la lumière éprouve en traversant une seconde fois les deux
régions atmosphériques dont il vient d'être question, la partie solide ou liquide
des régions voisines du bord doit être plus sombre que la partie solide ou liquide
des régions centrales.
11 est une seconde cause qui, sans changer le résultat, peut en modifier nota-
blement les conséquences optiques. En effet, dans la direction de chaque point
13 i I.A IM ANf:TK M A US.
m.Ttériel de la planète, on doit voir à la fois la huniùro renvoyée par ce point et
colle qui nous est réfléchie dans la môme direction par les parties correspon-
dantes et interposées de l'atmosphère planétaire. Cette seconde lumière est évi-
demment d'autant plus intense que l'atmosphère a plus de profondeur : on conçoit
que. près du bord, la lumière atmosphc'rique, en sajoutant par portions égales ù
la lumière d'une tache et i\ celle dos portions voisines plus éclatantes, les rend
à peu près égales, d'après ce principe que deux lumières paraissent avoir le même
éclat lorsque leur dilïcrence n'est que de^.
Supposons, par exemple, qu'une tache et la portion avoisinante aient entre elles
des intensités représentées par 30 et 31 ; supposons qu'on ajoute à chacune des
deux parties des lumières représentées par 30, les intensités définitives devien-
dront GO et 61. Avant l'addition, la tache était très différente des parties qui l'en-
tourent; après, la dififéreuce est insensible.
Des considérations de ce même genre, combinées avec quelques mesures
photométriques des parties obscures et des parties lumineuses faites près du
centre et à différentes distances du bord, conduiront à des conséquences qui
semblent devoir nous rester h jamais cachées sur les propriétés optiques de
l'atmosphère de Mars.
Nous n'ajouterons qu'une réllexion aux considérations d'Arago, c'est que
les bords du disque de Mars étant réellement plus blancs que la région inté-
rieure et les taches étant effacées sous cette clarté, nous devons en conclure
que l'atmosphère de Mars est assez profonde, absorbe et réfléchit une partie notable
de la lumière solaire qui lui arrive. Toutefois, elle est incontestablement plus
transparente que celle de la Terre, et, de plus, moins souvent chargée de
nuages.
Arago a mesuré l'intensité de la lumière réfléchie par les caps polaires et
l'a trouvée double de celle que renvoient les bords du disque.
XLYI. 1858. — Le P. A. SECcni (').
La planète devant arriver dans le cours de Tannée 1860 en l'une de ses
positions les plus favorables, le savant Directeur de l'observatoire du Collège
romain voulut se préparer dès l'opposition précédente de 1858 à toutes les
observations qu'il serait intéressant de faire, tant pour l'étude de la con-
stitution physique de Mars que pour la détermination de la parallaxe solaire.
Il prit pour collaborateur dans cette étude son collègue le P. Cappelletti, et
les deux astronomes réussirent à faire un grand nombre de dessins excellents.
L'instrument employé a été l'excellent équatorial de l'observatoire, de
(') Osservazioni di Marte, fatte durante iopposizione del 1858. Memorie dclV
Osservatorio del Collegio romano. Roraa, 1859.
1858 LE P. A. SErniI. 13ô
9 pouces ou 0'",244 d'ouverture libre et de ^''^IJ^H de distance focale, muni de
grossissements de 300 et iOO fois.
Les heures les meilleures pour l'observation do Mars ;i Home ont été celles
du coucher du soleil jusqu'à deux ou trois heures après, et seulement dans
ler. journées de beau temps fixe.
On observa sur la planète des taches de colorations très variées, rousses,
bleues, jaunes et même, peut-être par contraste, verdàtres. Les dessins, avoue
Secchi, ne peuvent pas donner une idée de ces teintes. La gravure sur cuivre
ne peut les reproduire, et même les essais tentes en chromolithographie ne
sont pas satisfaisants. Le pastel seul a réussi, et quarante dessins de ce
genre sont conservés à l'observatoire du Collège romain (*). On a remarqué
que Mars paraissait moins rouge h l'œil nu lorsque, dans la lunette, on ne
lui voyait aucune tache azurée notable. Cette remarque peut apporter quelque
lumière sur l'origine de la variabilité des astres.
Le meilleur moyen de juger de la forme des taches observées n'est peut-
être pas de les décrire, mais plutôt de les examiner directement sur les dessins.
Les plus caractéristiques sont ceux des 13, li, 15 et IG juin, qui montrent
une grande tache azurée, de la forme d'un triangle et que les observateurs
désignent dans leur journal sous le nom de Scorpion. Elle rappelle en effet,
la forme de cet animal et de cette constellation. Le P. Secchi l'appelle aussi
canal Atlantique. Cette tache caractéristique n'est autre que notre fameuse
mer du Sablier avec laquelle nous avons fait depuis longtemps connaissance.
Mais traduisons ici littéralement les descriptions de l'auteur.
Ce canal Atlantique est vaste. Un autre canal {-), petit, et qui réunit entre
elles doux taches plus larges, se voit sur les dessins des 3, 4, D et 7 juin : nous
l'avons surnommé l'isthme. (Cet isthme, situé vers liO» à droite de la mer pré-
cédente, nous parait être la mer étroite à laquelle nous avons donné le nom de
Manche sur notre carte, au-dessous de la baie Christie, et que M. Schiaparelli
appelle le Gange. Les trois baies doivent être : 1° la baie du MériiHen; 2« la baie
Burton ou bouche de l'Indus; 3° l'embouchure de la IManchc.
Ces deux canaux, dit le P. Secchi, entourent une espèce de continent rougeâtre ;
les deux canaux et le continent occupent environ iriO" de longitude aréographique
le reste est couvert de taches indécises, très difficiles à reconnaître et ;\ dessiner.
Les taches polaires sont environnées de contours cendrés et mal définis; mais,
entre le continent rougeâtre et la tache polaire supérieure, on voit une autre tache
très blanche que l'on pourrait facilement confondre avec la calotte polaire. L'éclat
(') .le les ai eus sous les yeux lors de mon séjour à Rome, en 1872.
(') Cette désignation de canal qui revient dans toutes les descriptions de l'auteur
nous paraît on ne peut plus mal choisie. La mer du Sablier, par exemple, ne corres-
pond pas du tout à une désignation de ce genre.
136 I A ri.ANKTi: MARS.
de ces régions est si vif que par irradiation elles paraissent sortir du bord de la
planète et cette illusion tend ù exagérer le dianièiro polaire.
Les dessins des hémisphères polaires faits par le P. Secchi ne s'accordent
ni avec ceux de Béer et Miidler, ni avec ceux que nous aurons h étudier plus
loin.
Parmi les nombreuses questions que suggère l'étude de la constitution phy-
sique de la planète, ajoute l'astronome romain, il ne semble pas que l'heure d'en
donner la solution soit arrivée. On ne saurait, par exemple, décider si les taches
bleues sont telles seulement par contraste ou en réalité. J'incline i\ croire que la
coloration est réelle parce que j'ai pu observer de petites portions séparément
au moj'en d'un minuscule diaphragme; cependant une observation faite de jour
me les a montrées presque noires. L'autre question serait de décider si les régions
obscures représentent de l'eau, les rougeâtres des continents, et les blanches des
nuages, et il est également difficile d'y répondre : il faudrait d'abord reconnaître
si ces taches sont permanentes ou variables. Si les taches blanches changent de
formes, on pourrait les considérer comme des nuages; sinon, on pourrait voir en
elles des glaces ou des continents.
En faveur de l'opinion que les régions blanches sont des nuages, semble militer
le fait que nous voyons quelquefois la grande tache du canal Atlantique comme
couverte de cirri, tandis qu'en d'autres circonstances ce fait ne s'est pas présenté.
Il faudra voir si ces aspects se reproduiront.
Les régions rougeâtres comme les bleuâtres semblent trop permanentes pour
que l'on puisse douter de leur nature : il est probable que les premières sont
solides et les secondes liquides. Le ton des premières n'est pas uniforme, mais
marqueté « screziato» et comme rempli d'un poiutillage sur la nature duquel nous
n'avons aucune idée.
La comparaison de nos dessins avec ceux obtenus par Madler, de 1830 à 1837,
semble prouver l'existence de changements très notables. Toutefois, si nous réflé-
chissons à l'influence que peuvent exercer dans cet ordre d'observation la force
des instruments et la qualité de l'atmosphère, nous devons suspendre notre juge-
meat. Nous avons notamment été très surpris de ne pas retrouver la curieuse
tache en forme de boule suspendue à un fil qui était alors si caractéristique, et il
y a là une grande probabilité de changement; mais peut-être était-ce la tache
inférieure de notre isthme. Le grand canal, aujourd'hui si marqué et si fort, était-il
invisible à cette époque? Mais n'était-ce pas la grande tache marquée pn dans les
dessins de cette époque? Des recherches ultérieures résoudront ces énigmes (').
Mars paraît certainement avoir une atmosphère, La clarté de son disque est
beaucoup plus faible vers les bords qu'au centre; de plus, la netteté des contours
des configurations s'efTace dans le voisinage des bords, ce qui semble démontrer
qu'il y a là une atmosphère, mais très faible, et certainement beaucoup moins
(') Nous pouvons affirmer aujourd'hui que ces changements sont certains.
1858 LE P. A. SF-r.r.HT. 137
dense que celle do Jupiter et probalilement même que celle de la Terre; mérite de
frapper l'attention la taclio ovale claire que l'on voit dans le dessin du 9 juin,
ainsi que dans ceux du 10, du 1 1, du 13, du M et du 15, bien séparée de sa voisine
de gauche. Mais dans le dessin du 8 juin elle lui est réunie. Cette réunion n'a pu
être qu'apparente et produite par la nuance apportée sur sa division par l'atmo-
sphère de la planète {').
Il résulte aussi des observations que l'axe de rotation n'est certainement pas
concentrique avec les taches polaires. Cette conclusion avait déjà été entrevue
par Béer et Miidler qui pourtant ne la considéraient pas comme certaine. (L'autour
aurait pu dire par Herschel, et démontrée par lui.Voi?' plus haut, p. 56-58 et 97).
Le P. Secchi s'est également occupé de la rotation de la planète. En com-
binant une observation faite par lui le 25 avril 18.jG, ;\ IPSO"" du soir, avec
une observation identique du 24 juillet 1858, à 8''20™, il trouve 24''37"'35*.
Voici quelques extraits du reL;islre d'observations :
1858, 7 mai. 1 P', temps moyen de Rome. Mars présente, au milieu de son disque,
une grande tache triangulaire de couleur bleue et, au-dessous, une tache rou-
geàtre. L'atmosphère est mauvaise, et il n'est pas possible de faire de bonnes
observations. Cette tache doit être le canal Atlantique, dénomination donnée T^tav
brièveté à cette grande tache bleue qui paraît jouer le rôle de l'Atlantique qui, sur
la Terre, sépare le nouveau continent de l'ancien.
IG mai. Le disque se montre parsemé d'un pointillage roux.
3 juin, 9''4.j'». Bonne atmosphère. On voit bien Visthmc. La calotte polaire su-
périeure est bien définie, mais l'inférieure est indécise. Ou voit bien un canal
mince que nous appellerons Visthme [fig. 80, A).
4 juin, 9''30™. Vue analogue à celle d'hier [fig. 80, B).
5 juin, 9''40. îd. L'isthme est plus avancé, et il en est de même de la tache
claire de gauche [pg. 80, C).
7 juin, IQi^. Entre l'isthme et le canal Atlantique, est un grand continent rou-
geâtre (ftg- 80, D).
8 juin, 9*" 10™, et 0 juin, 0'' iôm. Observation de ce continent rougeâtre. On voit
dans sa partie inférieure une espèce de promontoire se dirigeant vers la tache
polaire inférieure {fîg. 81, A, B).
10 juin, O^O"'. L'aspect inférieur de la figure doit particulièrement attirer lat-
tention parce qu'entre la tache polaire et le continent rouge, s'étend une région
de couleur claire (fîg. 81, C).
11 juin, 9'' iri™. La planète présente une variété de teintes prodigieuse et in-
descriptible. Le grand canal bleu est suivi d'une bordure verte à gauche qui
s'étend jusqu'à une tache jaune. Au contour inférieur du canal, on aperçoit
(') Cette tache ovale claire est l'ile Pliillips de notre carte (p. 69), et sa voisine de
gauche serait la terre de Lockyer rejoignant l'ile Dreyer et la terre de Kunowski. Il
y a là l'indice de variations importantes.
138
I A PLANÈTE MAUS.
plusieurs stries blanches très petites. Elles sont très remarquables. Sont-oe des
nuages? Si on no les revoit pas par une bonne atmosphère, on sera bien forcé
d'en conclure qu'elles auront changé {ftg. 81, D).
13 juin, 0''30"' Iflg. 82, A). Le grand canal bleu se trouve presque au milieu
Fi p. so.
]um, '.'''■
■'i juin, 'J'';i0°
0 juin, 'J''iU"'. 7 juin, lU".
Dessins de Mars faits par le P. Sccchi. Rome, ISôS.
du disque; cette tache est si vaste que Mars paraît à l'uni nu moins rouge
que d'habitude. On prend la direction des trois bras principaux de cette tache en
forme de -, ou plutôt de Scorpion :
Directions des taches polaires excentriques, 200° 5;
Direction de l'axe de la tache triangulaire, 218°;
Bras droit, 283° ;
Bras gauche, IGO-.d;
Largeur de la tache noire, 3", 175
Diamètre polaire de la planète, 18",371 ;
Distance de la tache au pôle supérieur, 7'',304.
Ces mesures ont été prises à 9^^. Le dessin a été fait à 9'' 30™.
1858
II- r. A. SECCIII.
139
1 î juin. !i''l.")"'. Mémo asp(,'ct iiuc la veille. Très remarquable {fig. 82, B).
15 juin. Môme aspect que les doux soirs précddonts {pg. 8-2, C).
IG juin. Atmosphère trouble (//;/• 8-2, D).
17 juin, 9^'3C{fîg. 83, A). Aspect qui rappelle absolument celui du 2.") avril 1850,
Fier. .SI.
s juin.'.iMo"'.
'Jjuin, 9''4ô"
lu juin, 'J'-U™. 11 juiu, 'J''45.
Dessins de Mars laits par le P. Secclii. Rome, 18."i8.
h. l'3^31'" de temps sidéral, ce qui nous permet d'affirmer 1« la rotation de la pla-
nète et 2° la permanence du canal Atlantique que l'on voit à droite. Le corps de
la tache sombre est traversé de plusieurs voiles blancs. Que sont-ils? Le lô,
on ne les voyait pas.
18 juin, 0'' 20'". Mars est particulièrement intéressant. Un commence à apercevoir,
à gauche, une traînée obscure. La planète est jaune en cet endroit, et sur tout le
reste rougcàtre et bariolée. Dans cette phase (fîg. 83, B), le grand canal tend à
disparaître et semble se prolonger jusqu'au bord en bas; mais, lorsqu'on le voit
au milieu du disque comme du 13 au ;iô juin, on constate qu'il est interrompu
longtemps avant d'arriver vers le pôle.
140
I. A PLAN^^TK MARS.
20 juin, 9^40". Le dessin a été fait quand le canal était déjà au bord du disque
et l'on ne voit que de légères traînée? cendrées sur un fond roux \ftg. 83, C).
Fig. 8-:.
l:; juin, 9'' TA"".
14 juin, 0^ lj">.
lô iiiin.
IG juin.
Dessins de Mars faits par le P. Secchi. Rome, 1858.
24 juin, 0^50"". Atmosphère épaisse, le disque semble de couleur marron
(/îg. 83, D).
le»" et 2 juillet. Peu de taches. Mars paraît du reste à l'œil nu plus rouge que
d'habitude.
23 juillet. La grande tache bleue ressemble tout à fait à un scorpion.
24 et 31 juillet, 5 et 13 août. Etude de la tache polaire inférieure : elle est cer-
tainement double et se compose de deux taches contiguës.
Telles sont les observations relatives à l'opposition de 1858. Le P. Secchi
n'a pu les continuer pendant celle de 1860, comme il se l'était proposé, mais
1860
EMMANUKL LIAIS.
141
il les a rei>rises en 18G"2. Nous aniverons biijiilùl à ces obsei'valion.s. (juant à
celles que nous venons de rapporter, elles sont excellentes et peuvent compter
17 juin, 'J''3G'".
IS juin, V'-JU"
20 juin, 'J"" 40™. -4 juin, 'J''5u°'.
Dessins de .Mar.s faits par le P. Secchi. Rome, I8"8.
parmi les meilleures que uous ayons eu jusqu'ici. Les autres seront encore
supérieures. '
XLVII. 1860. — Emmanuel Liais (')
M. Emmanuel Liais, astronome de l'Observatoire de Paris, nomme quel-
ques années plus tard par l'Empereur du Brésil, directeur de l'Observatoire
de Rio de Janeiro, a observé la planète Mars pendant Toppositiou de 1860,
au point de vue de son aspect physique et de la parallaxe du Soleil. Il obtint
pour moyenne des mesures 25", 35, ce qui donne 0",01 pour la distance 1. Le
{*) L'Espace céleste. Aspect de Mars et diamètre.
li"? I.V Pl.ANl-.TF MAHS.
23 juillet, il dessina le croquis de Mars que nous reproduisons ici d'après
rouvrage du savant astronome, r Espace céleslc, publié en 1865. On reconnaît
sur cette ligure le pôle sud alors tourné vers nous, un peu du pôle nord en
bas, et, selon toute apparence, la mer Ma raidi.
L'auteur rappelle que la coloration rougeàtre do la planète ne peut pas
être due à l'atmosphère, comme Arago l'a montré, et doit rcpréscntci- soit la
couleur du sol, soit celle de la vêgciation. Cette dernière explication nous
Fiff. S'..
Croquis de Mars, par .M. Liais, le 23 juillet 1860.
paraît la plus naturelle, comme déjà nous l'avons fait remarquer à propos
des terrains ocreux de sir John Ilerschel.
Nous allons arriver aux observations de l'année 1862 qui ont été très pré-
cieuses, ainsi que celles de l'année 1864, pour le progrès de la connaissance
de Mars, à cause du grand rapprochement de la planète en ces deux oppo-
sitions. Mais déjà nous avons une base d'opinion suffisamment fondée sur
la constitution physique de ce monde voisin. L'extrait suivant montre ce que
nous pouvions dès cette époque en penser.
XLVIII. 1862. — G. Flammarion (').
, Dans la première édition de la Pluralité des Mondes habités, publiée en 1862,
nous résumions dans les termes suivants (p. 21), l'opinion, fondée sur l'en-
semble des observations, que l'on pouvait avoir à cette époque, relativement
aux conditions d'habitabilité de la planète Mars.
a Environ vingt millions de lieues au delà de la Terre, circule la planète
Mars, qui présente aussi de frappants caractères de ressemblance avec les
(') La. Pluralité des Mondes habités.
186-:
C. KLA.M.MAHION.
1«
précédentes. Elle est éloignée de l'astre central de r)8178G0(J lieues, achève
son année en G87 jours et sa rotation diurne en 24'' 39'". Les enveloppes
atmosphériques qui entourent cette planète et la précédente (la Terre), les
neiges qui apparaissent périodiquement à leurs pôles et les nuages qui s'é-
tendent de temps en temps dans leurs atmosphères, la distribution géogra-
phique de leurs surfaces en continents et on mers, les variations de saisons
FiL'. s:,.
L'hémisphère le mieux connu de Mars (18G2-1864).
(Figure extraite de la 2'' édition 'le la Pluralité des Mondes habités).
et de climats communes à ces deux mondes, nous fondent à croire que ces
planètes sont toutes deux habitées par des êtres dont l'organisation doit
offrir plus d'un caractère d'analogie, ou que si l'une d'elles était vouée au
néant et à la solitude, l'autre, qui se trouve dans les mêmes conditions,
devrait avoir le même partage. »
De la seconde édition de cet ouvrage (1864) à la seizième (1871) nous avons
publié l'esquisse ci-dessus [fuj. 85), que nous avions conclue dès cette époque
de la comparaison des diverses observations, comme représentant l'hémi-
sphère le plus sûrement connu de la planète. Cette petite carte contient la mer
du Sablier et les mers environnantes, et avait surtout pour but de montrer les
différences caractéristiques de la géographie martienne avec la nôtre. A partir
de la dix-septième édition ( 1872), nousavonsdonné (planche coloriée) le même
hémisphère, d'après les observations plus récentes. Continents, atmosphère,
nuages, neiges, mers et glaces polaires sont admis comme définitivement
prouvés.
144 LA TLANÈTE MARS.
Dans cette lii;ure comparative, nous avons placé l'Est et l'Ouest, comme sur
la Terre, c'est-à-dire connue ils se trouvent pour les habitants de Mars.
Nous arrivons maintenant aux observations faites par le P. Secchi
en 186-2 et publiées en 1803.
XLIX. 1862. — Le P. X. Secchi (»).
Nous allons traduire, en le résumant, le mémoire publié par le savant
astronome italien ('). Ces observations ont été faites à l'observatoire du Col-
lège romain, en continuation de celles de 1858, cl avec le môme instrument.
L'auteur a voulu profiter de la circonstance du passage de la planète à sa
plus grande proximité de la Terre et en même temps à son périhélie, pour
continuer ses recherches sur sa constitution physique.
« Mars, écril-il, est le corps céleste que nous pouvons le mieux étudier
après la Lune. Herschel et d'autres astronomes assurent avoir observé sur
cette planète non seulement des mers et des continents, mais encordes effets
des saisons d'hiver et d'été; pourtant les discordances qui existent entre les
observations modernes et les anciennes laissent un certain doute dans
l'esprit. Les instruments modernes devraient permettre de résoudre la
question, car ils sont supérieurs môme à ceux de William Herschel. Nos
dessins de l'année 1858 ne s'accordent pas avec ceux de Miidler, notamment en
ce qui concerne la tache blanche polaire, qui, dans les observations de cet
astronome, s'est montrée réduite à un petit cercle brillant, tandis que nous
l'avons trouvée vaste et compliquée. A la dernière opposition, elle a repris la
forme dessinée par Miidler.
» Les différences observées ont deux causes. La première est la perspective
sous laquelle Mars s'est présenté en 1858, car alors les deux pôles étaient
également visibles, tandis que maintenant le pôle boréal s'est caché et que
laustral est tourné vers nous. Le 26 septembre 1862, à 9*'4o"', la planète se
présentait à nous, dans une position correspondante à celle que l'on a vue
sur la fig. 2 (4 juin), des dessins de 1858, mais obliquement, en raccourci,
avec le pôle supérieur incliné vers nous comme dans le troisième dessin de
Miidler de 1832.
» La seconde cause de variation est qu'en réalité les taches polaires changent
constamment. Les vastes champs blancs se sont évanouis et restreints à la
petite calotte polaire de Miidler. Il est clair que ces variations ne peuvent
s'expliquer que par une fonte de neiges ou par une disparition de nuages
(*) Osservazioni del pianeta Marte. Memorie deW Osservatorio del Collegio
liomano. Xuova Série, vol. II. Roma, 1863.
1862 IJ-: 1". A. SKCCllI. 145
couvrant les régions polaires. Kl, en lait, c'est ce qui doit arriver, puisque
le pùlc visible dans l'opposition de 18G2 est précisément le pôle tourné vers
le Soleil, qui passait alors par son été, et qui n'est éloigné que de 1")°
du périhélie : il se trouve donc à l'époque de sa plus haute température,
c'est-à-dire à celle qui correspond au milieu de notre mois de juillet. Remar-
quons en même temps la forte inclinaison de l'axe de Mars sur son orbite
qui donne à la planète des saisons très notables.
» Ces aspects prouvent également qu'il existe sur Mars de l'eau liquide et
des mers, conséquence naturelle de la fusion des neiges. Cette conclusion
est conCrmée par le fait que les marques bleues que l'on découvre dans
les régions équatoriales de la planète n'ont pas sensiblement changé de
formes, tandis que les champs blancs voisins des pôles sont contigus à des
champs rougeâtres, qui ne peuvent être que des continents. Ainsi, l'existence
des mers et des continents, de même que les alternatives des saisons et des varia-
tions de l'atmosphère, sont aujourdlmi entièrement démontrées.
» Il résulte de ces observations de 1862, que les traits caractéristiques de la
planète dessinés par Béer et Miidler ont été retrouvés d'une manière non
équivoque. Ainsi, la tache qu'ils ont notée par les lettres efh correspond
à celle que nous appelons mer de Cook; celle qu'ils ont marquée np est
pour nous celle de Marco Polo; leur tache a doit être le canal de Franklin.
Nous n'avons donné aucun nom aux régions rougeâtres et nous nous sommes
borné à indiquer par quelques dénominations les taches foncées les plus
sûres et les plus constantes.
» Nous avons rapporté de ces recherches la conviction qu'en outre des
taches permanentes, il y en a là de variables qui mériteraient d'être étudiées
lilus à fond et avec persévérance. L'existence de l'atmosphère est rendue
indubitable par l'absorption de la lumière vers les bords du disque et indé-
pendamment des observations spectrométriques. »
EXTRAIT DES OBSERVATIONS.
21 septembre 1862, à 20'» 50"' de temps sidéral, Mars nous présente sa calotte
polaire supérieure, très réduite et tout entière tournée vers nous. Sa direction
est vers 145» du centre. On voit clairement la tache bleue qui offre la forme
d'un Y et rappelle l'aspect d'un scorpion; mais sa partie étroite est cachée.
Par brièveté, nous appellerons ce canal bleu canal de Cook, appliquant à Mars
les noms de quelques navigateurs célèbres, et nous donnerons le nom de conti-
nent Cabot au continent rougeàtre qui s'étend sur la droite {fîg. 80, A).
26 septembre, à 9*»45" de l'après midi. Le canal de Cook se trouve presque
exactement au milieu du disque Mais, tandis que dans les dessins de 1858 sa par-
tic la plus large, que nous appelions le corps du Scorpion, se trouvait fort aii-
Flammahion. — Mars. lu
116
i.A iM.AM.ri. M ai; S.
dessus (lu centiv, oWo est inaintiMiant juste au contre. ( \'oir uotainiiUMit les
figures des li et t."» juin IS58, p. liO.lC'est là une alTaire de perspoclivo. Cette ré-
gion offre cette année précisément l'aspect que Béer et Miuller ont représenté
sur leur f'nj. 3 de 1S32 [voy. p. 105). Ou ne distingue pas les détails près du bord,
ce qui prouve que ratmosphèr(^ do Mars est très absorbante. Entre la tache
•21 septembre, 20'' oO"', T. S.
•26 septembre, 'J''4jm^ t. M.
l>i octobre, 8''!..
25 octobre, S^O"
Fig. 86. — Dessins de Mars faits par le P. Secclii. Rome, 1862.
polaire et la rner de Cook, on remarque plusieurs ramifications de couleur
bleue, mais parsemées de taches jaunes et rousses, difficiles à dessiner. On
croirait voir un archipel ( fig. 86, B).
18 octobre, 8''I3" {fig. 86, C). La calotte polaire est bien détachée du bord. On
remarque une tache obscure d'un ton différent des tons accoutumés et que je
n'ai jamais vue. Elle semble entourée d'un anneau ou d'un cyclone eu spirale.
Les régions voisines du pôle sont rougeâtres : elles étaient certainement blan-
ches l'autre année. On croirait voir une grande bourrasque sur Mars (').
(') Cette tache, comparée ici à une bourrasque, n'est autre que la « mer Terby » de
notre Carte. " La crederei, écrit Secchi, una rjran burrasba in Marte ».
ISli:
i.i: r. A. siicciii.
•.'5 octobre, 8'' U'" (//;/. S(i, D). i'aclie polaire l>ieu marquée el bien détacliee. lùilrc
clic et le canal, est uue grande rc<,Mon roiigeàtre que nous appelons Colombie.
20 octobre, O''!.')"' {fig. 87, A). On reconnaît mieux le canal de Franklin adroite.
Entre le pôle et la mer qui réunit le canal de Cook avec celui de Franklin, on
voit un espace rougeàtre parsemé de lignes courbes (la Colombie i.
M Oi.-toln'o, '.f'
:» iiuvombre, T'oîi"
Il novcinljie, 7'' i."i"'. Id novembre, 7'' 30'".
I-'ii^. 87. — Dessius de .Mars lalt.s par le 1'. Seeclii. Rome, IS6"2.
0 novembre, à "''38'" (fuj. 87, B). La figure de ce soir est remarquable par une
grande tache bleue que je n'ai jamais vue dans cette proportion. C'est manifes-
tement un prolongement de la mer do Cook. Si on ne l'a j)as vue en 18.J8, c'est
sans doute par suite d'une variation réelle plutôt que par la diflerence de pers-
pective ou à cause de l'atmosphère de Mars. Très nébuleuse en cette région,
notammentles ISet 20 juin 1858, cette tache offre bien la forme de celle que Béer
et Miidlcr ont désignée sous les lettres pm.
Il novembre, 7'' iô"' (fîg- 87, C). La grande tache pm que nous appelons ?)}c?-
de Marco Polo parait de plus en plus nette. Entre cette tache et le pôle blanc, on
remarque une nuée obscure très curieuse.
lis I \ IM.ANKTK M A 15 S.
10 novembre, "''30"' (fig. 87, D). On voit toujours très biou la grande nier bleue.
La tache polaire inférieure ou boréale est double.
IS et '26 dccenibre. La continuation des observations prouve que les neiges
polaires supérieures ou australes ont considérablement diminué et sont réduites
:\ un tvHit petit cercle blanc.
Ces observalions du P. Sccchi sont aussi curieuses qu'importantes. Elles
nous confirment dans toutes nos déductions précédentes sur les continents,
les mers et les influences atmosphériques de Mars, ainsi que sur les varia-
tions certaines qui arrivent à la surface de celte planète dans la forme et
rétendue des mers.
Nous pouvons pénétrer maintenant, plus complètement que nous ne l'avons
fait jusqu'ici, dans la détermination de la géographie martienne. Afin de no
y mieux reconnaître, il est indispensable de remonter ici jusqu'à la carte
générale de la planète, publiée à la p. 69 de cet ouvrage, et de comparer à
celte carte tous les dessins du laborieux astronome romain.
■ Considérons donc l'ensemble des dessins du P. Secchi et comparons-les
à la carte ci-dessus.
Dans ceux de 1858, d'abord, nous reconnaissons avec certitude notre célèbre
mer du Sablier sur cinq dessins, ceux des 10. 11, 13, 14 et 15 juin (uot/. p. 139
et 140^. On la devine sur le suivant.
Celte mer a été, comme nous venons de le voir, qualifiée de « Scorpion »
par les astronomes romains, et, en cfTet, la ressemblance ne manque pas de
pittoresque. La queue du Scorpion s'appelle sur notre carte passe de Nasmyth
et se termine eu une petite mer appelée mer Lassell; la tentacule de droite,
au-dessus du corps, est l'océan Dawes qui se prolonge vers le pôle par la
mer Lambert, et la première branche à droite est le détroit Herschel 11; la
grande tentacule de gauche est la mer Flammarion qui se prolonge par la mer
riooke; la petite tentacule au-dessous est probablement lu mer Main, exa-
gérée. Cette région est très variable sur tous les dessins. Au bas de la figure
on remarque, sur les cinq dessins, une zono blanche, qui est la terre de
Laplace, puis une zone grise, qui est la mer Delambre, enfin encore une
zone claire, suivie d'une zone foncée entourant le pôle inférieur.
Nous retrouvons cette même .mer du Sablier dans les dessins des 21 et
26 septembre 1862 (p. 146). Le P. Secchi donne trois noms à cette mer :
Scorpion, Atlantique et mer de Cook.
Dans les dessins des 3, 4, 5 et 7 juin 1858, nous avons sous les yeux un
autre côté de la planète. Cette mer étroite et allongée (voy. p. 138) est le
second aspect caractéristique de Mars dans ces observations. Les astronomes
romains appellent cette mer allongée l'isthme, et aussi le canal de Franklin.
lS(j-2 IJ-: p. A. SKCCIII. 149
Elle se trouve à près de 180° à droite do la mer du Sablier, car on no voit
jamais ces deux taches en mémo temps. Dans nos cartes de Mars, nous avons
donné le nom de Manche à cette mer. M. Schiaparelli l'appelle lo Gange. Go
détroit n'existe pas sur la carte de M. Green, dont nous avons déjà parlé à
propos des dénominations et sur laquelle nous reviendrons plus loin.
Si l'on étudie avec attention ces quatre vues de Mars, on arrive à conclure
que la première langue pointue, en allant de la gauciie vers la droite, est la
baie du Méridien; que la seconde, située à 20° vers la droite, est la. baie
Burton, appelée par M. Schiaparelli Margaritifer Sinus et embouchure de
rindus, et que la troisième, située à la même distance au delà, doit être la
baie Christie et la Manche. L'identification n'est pas absolument satisfaisante,
car même en donnant 25° pour longitude à l'embouchure de l'Indus, celle de
la Manche ne se trouve pas à 50i°, mais à 5G°; toutefois il nous est impossible
de faire aucune autre identification. Cette « Manche » est absente d'un grand
nombre de dessins; cependant nous la retrouverons plus loin, parfaitement
marquée sur deux dessins de Dawes des 12 et 14 novembre 1864, et sur un
dessin de M. Schiaparelli du 28 novembre 1879. Les observations de Secchi
et Dawes nous ont conduit à donner plus d'importance à cet isthme sur
notre carte qu'il n'en a sur celle de M. Schiaparelli.
Les dessins de 1862 ne la montrent pas. Sur les huit croquis faits à Rome
cette année-là, les deux premiers montrent, comme nous venons de lo voir,
la mer du Sablier. Le troisième montre la mer Terby, prise par le P. Secchi
pour une bourrasque. Le quatrième laisse deviner les trois baies des dessins
de 1858 (Méridien, Burton et Manche) et il en est de môme dans le cinquième.
Le sixième, le septième et le huitième montrent la mer Marakli. que l'astro-
Fifî. 88.
Croquis fait par le P. Secchi, le l^ décembre 18G4.
nome romain appelle mer de Marco Polo et que Béer et Madler ont désignée
sous les lettres pm.
Ces dessins nous confirment donc dans l'opinion que le globe de Mars pos-
sède des configurations géographiques permanentes, mais que ces configu-
rations manifestent des dilTérences notables, dont un certain nombre .sont
i:>0 I \ ri. \m:ti-: \i vi;s.
imputables aux observateurs et aux iiistrunienls , mais dont plusieurs,
comme par exemple la largeur de la Manche, doivent tenir à la constitution
physique de la planète elle-même. Ce dernier point est de la plus haute
importance.
Le P. Sccchi a continué ses observations en 180 î. l'arnii It^s dessins do cette
année, nous signalerons, d'après M. Terby [fi'i. 88), celui du 1" décembre 18G'i,
à T*", qui paraît au premier aspect représenter la mer du Sablier, très étroite,
mais qui. au contraire, renferme la mer Maraldi et montre un détroit descen-
dant sous forme dun triangle allongé. (Test un nouveau témoignage des
changements qui se produisent sur cette planète, dans une région que nous
avons déjà remarquée, car cet allongement correspond probablement à celui
de la fig. 17-i (p. 70), observé parSchrœter. lo2 novembre 1800, et aux pointes
de gauche des fig. 172 et 177,
XLVI. 1862. — LocKYEH. (').
Nous venons d'entrer ici dans une période féconde pour l'élucidalion du
grand problème de la géographie de Mars. Pendant la très favorable oppo-
sition de 1862, plusieurs astronomes se sont consacrés à un travail analogue à
celui que nous venons d'examiner, et parmi eux, en première ligne avec le
P. Secchi, Lockyer en' Angleterre et Kaiser en Hollande. Continuons notre
étude par le travail de l'astronome anglais. Nous donnerons de cet important
mémoire le résumé le plus complet possible.
Les doutes et les difficultés relatives à la permanence des configurations
géographiques de la planète ont surtout pour origine le désespérant manque
de ressemblance des dessins pris aux diverses époques. Les opinions sont
remarquablement contradictoires ; ainsi, pour n'en citer que deux exemples,
tandis que Cassini reconnaissait en 1670 les taches qu'il avait découvertes
en 1666 avec sa lunette Campani de 16 pouces j de distance focale, Maraldi
déclare en 1720 qu'il lui a été impossible de concilier entre eux les dessins
faits en 1704, 1717 et 1710 ; et de nos jours le P. Secchi a trouvé en 1858 ses
dessins inconciliables avec ceux de Béer et Madlcr en 1830 et 1837.
L'inclinaison de la planète entre pour beaucoup dans ces différences
d'aspect, par suite des effets de raccourci qu'elle donne aux configurations,
vues parfois tout à fait de face tant en latitude qu'en longitude.il serait donc
convenable de ne comparer les dessins entre eux que lorsqu'ils appartiennent
à des positions identiques de la planète. Ainsi l'opposition du 5 octobre 1862
(') Measures of Ihe plane l Mars, made al Ihe op'position of 18G2. Mcmoirs of Ihc
royal aslj'onomical Society, t. XXXJL p. 179-190.
|,%2 LOCKVEH. 151
ayant eu lieu dans la longitude héliocenlrique 12*',est comparable à celle du
Fig, 89. — Dessin de Lockyer. 17 septembre 1862, àlO^SO"
■ Fig. 90. — Dessin de Lockyer. 17 septembre 186-2. après lOi-ôO».
10 septembre 1830, qui a eu lieu à la longitude héliocentrique de 356°.
En admettant que l'instrument de Béer et de Miidler ait été le même que
ir.e 1 A PI am:ti: m ah s.
celui dont cos obsorvntours so sont sorvis p(^ur lom- carte de la Lune, c'est-
Fig. ni. — I)c-sin de Lockyer. 23 septembre l8oJ, à 'Ji- iU"
Fig. 92. — Dessin de Lockyer. 23 septembre 1862, à lû''25"'.
à-dire un objectif de 42 lignes d'ouverture et de 4 pieds ^ de longueur focale,
M. Lockyer constate que ses dessins concordent parfaitement avec ceux de
1862 LOCKYRR. 1j3
1830, étant dorme querinstnimentdonl il s'est ?ervi montniit plus de détails,
Fig. 03. — Dessin de Lockycr. 2:5 septembre 18G'2, à, 1 1''55'".
Fi;:, '.l'i. — Dessin de Lockyer. 23 septembre lsti2, i, lv!''r)5"'.
attendu que son objectif mesurait 6 pouces | d'ouverture avec 8 pieds ^ de
longueur focale.
i:.i I A PlANKir. MAHS.
Ces observations de 186-2 confirment donc delà manière la iilns salisfai-*
santé la théorie de la permanence absohie des configurations de la planète.
Il va néanmoins des discordances inexplicables entre les observations faites
à l'aide d'instruments dilTérents, même entre les mains des observateurs les
plus habiles.
Quoique la fixité complète des configurations générales de la planète soit
maintenant hors de doute, cependant journellement, et nous pourrions dire
lieure par heure, des variations dans les détails et dans les tons des dill'érentes
Fig. 9J. — Dessin de Lockyei*. 25 septembre 18G2, ix lO''^'!"".
parties de la planète claires ou sombres peuvent être observées. L'auteur ne
doute pas que ces changements ne soient causés par le passage de nuages
sur les différentes configurations : « Thèse changes arc,I doubt not, caused
by the transit of clouds over the différent features. »
T.'ne atmosphère pure et sans nuages, tant ici que sur Mars, écrit l'auteur,
a pour effet de rendre les régions foncées de la planète plus foncées et plus dis-
thictes; les Hgnes de rivages, si l'on peut s'exprimer ainsi, étaient si fines et si
légères qu'il est complètement impossible de les représenter exactement. Béer
et Madler ont déjà remarqué que généralement un certain temps s'écoule avant
que les taches, d'abord vagues lorsqu'on commence l'observation, deviennent
nettes et bien distinctes.
Des nuages, au contraire, auront pour effet de rendre les régions sombres
\m
I.OCKVHH,
moins foncées, on proportion do la densité de ces nuajjres, et les régions claires
plus claires dans la môme proportion. Us ne peuvent jamais d'une rogion
claire faire une région sombre ('). S'il eu est ainsi, lorsque nous observons une
tache foncée bien définie, nous pouvons être certains qu'il n'y a pas de nuages
au-dessus d'elle et que nous voyons bien la surface mémo de la planète. Nous ne
pouvons pas être assurés cependant, à moins que nous connaissions bien la loca-
lité par des observations antérieures, que des régions sombres ne sont pas au-
dcjîsous de réf'ions claires.
Fis,'. 9G. — Dessin de Lockyer. 2 j septembre 1862, à lO^ôO".
Quelques exemples de passages de nuages ont été soupçonnés par lo
P. Secchi, en 1858. M. Lockyer en présente ici qu'il qualifie d'incontes-
tables ^unmislakeable) : les voici. Dans le dessin pris le 3 octobre, à 10''30"'
[fig. 97) l'espace qui s'étend de x ii y se montrait dépourvu de toute tache
sombre: dans le croquis pris le même soir à 11''23"' [fig. 98), une tache se
montra vers y, laquelle s'accentua progressivement et s'étendit jusqu'à x
à ll''ôl"', heure à laquelle fat faite la fig. 99.
Maintenant, ajoute l'auteur, cette localité est une de celles que nous connais-
sons le mieux, car elle a été admirablement observée par Warren de la Rue, le
P. Secchi et d'autres, et il n'y a aucun doute que le dessin n° 8 de ce dernier
observateur ne représente l'aspect normal de cette région située sur l'équatenr.
;• ) Est-ce bien sur?
136 1 A rLAMVri: mars.
à la longitude de ÎS». Les changements observés s'expliqueront facilement enad-
nivttant qu'au commencement do mes observations la configuration dont il s'agit,
qui est persistante dans les fhj. 10, 11, Kî, l'i, IJ, 1" et 18 du P. Socchi, a été
voilée par des nuages qui se dissipèrent graduellement jusqu'il la fin; quoique
la configuration n'ait pas été entièrement découverte, elle était devenue beaucoup
mieux visible à la fin de mes observations.
Il s'agit d'une région que nos lecteurs connaissent fort bien, de notre fa-
meuse mer du Sablier. Eb bien, tout en admettant avec l'auteur l'influence
Fig. 97. — Dessin de I.ockyer. 3 octobre 1802, à 10'' SO".
de nuages blancs, nous verrons plus loin que le Ijord gaucho de cotte mer,
précisément sur la zone marquée /"et y, est très variable.
Pour prendre un autre exemple, ajoute l'auteur, dans le n^ l\ de mes dessins
i/jg.95), la tache a de Béer et MHdler est entièrement invisible, tandis que dans
le n» iôifig. 96) pris quelques minutes après, elle est absolument évidente et
très remarquable.
Mais, outre les nuages qui, comme nous venons de le voir, oblitèrent de temps
en temps, en totalité ou en partie, les régions sombres de la planète et donnent
naissance à des variations de contours et de tons déformant en apparence l'as-
pect des configurations, l'atmosphère assez dense de Mars avec ses brouillards
et ses brumes doit jouer aussi un certain rôle. Je mentionne ce fait spécialement
dans le but d'établir que quoiqu'on l'observe avec certitude dans l'hémisphère
austral au milieu de l'été sur les taches, lorsqu'elles apparaissent au bord du
IS6-2
i.<m;kvi:i(.
disque et lorsiiuclles le ([uiltcnt.on peut le constater avec plus d'cvidcnce encore
dans riiémisphùie boréal au milieu de l'Iiiver, ciïacant même sur le méridien
central toutes les configurations gdograpliirjues situées au nord du 30» degré
de latitude. Il y a là un nouveau témoignage de la grande intensilii des saisons de
Mars, intensité' dc''j;\ manifestée par le fait de l'étendue considérable des neiges
polaires en hiver et de leur fusion si rapide en été. Comme l'ont remarqué Béer
et Mildler, l'hcniisiilière austral de la planète sera toujours le plus facile h étu-
dier pour nous, puis(|u'ilse présente ù, nous aux époques de la plus grande pro-
ximité de la planète.
Fig. 'JS. — Dessin de Lockycr. 3 octobre 16Ù2, ù 11'' 23
A l'égard des colorations rouges et vertes si souvent décrites pour les configu-
rations géographiques de Mars, mes observations, ajoute l'astronome anglais,
mont conduit à la même opinion sur leur nature que celle à laquelle le P. Secchi
est arrivé lui-même dans ses études de 1858. Pour moi aussi, les régions rouges
représentent les continents et les régions vertes des mers. Je ne crois pas non
plus que ces colorations vertes soietlt dues ;\ des effets de contraste ; elles me
paraissent réelles.
Les régions foncées se sont montréesiù, moi certainement vertes, ainsi qu'à tous
ceux qui ont observé Mars dans mon instrument ; cette couleur s'est montrée
particulièrement évidente dans la tach^î marquée pm sur la carte de Béer et
Màdler (dessin du l.j octobre, à Oi'S"! et à 0'>-20"'i. Cette coloration n'était certaine-
ment pas due à l'objectif de mon instrument.
Les taches (jui se sont montrées les plus foncées en 1S02 sont les même.s que
158
i.A PI \m:ti; m \
celles qui ont ollort le incmc aspect eu is.iii : ces mers sont iiiMUM'aleiiicnt
presque entièrement entourées de terres.
La variation des neiges polaires est un sujet bien intéressant d'observa-
tion. En 1830, le solstice d'été de l'hémisplière sud de Mars est arrivé le
8 septembre et le minimum des neiges polaires {-^^ du diamètre apparent
de la planète) a été observé le 5 octobre, c'est-à-dire 27 de nos jours après la
plus baute élévation du Soleil sur cet liémispbère. En 1862, le solstice csl
arrivé le 30 aoiU; or, le 23 de ce mois, la zone neigeuse offrait un diamètre
Fig. W. — Dessin do Lockycr. 'ô octobre ISO'2, u 11'', M"'.
égal au i de celui de la planète, mais le 25 du mois suivant elle a été réduite
au yV> c^ ^<?' ^1 octobre au ^ de ce même diamètre, et c'est à peine si Ton
pouvait la distinguer. Puis, ces neiges recommencèrent de nouveau à s'ac-
croître.
Cette fusion très rapide des glaces polaires australes doit être attribuée à
la grande excentricité de l'orbite de Mars et au fait que l'été de l'hémisphère
sud arrive lorsque la planète est voisine de son périhélie. Le centre de la
calotte polaire neigeuse ne coïncide pas avec le pôle, mais se trouve à
quelques degrés du pôle géographique et vers le 20^ degré de longitude ; au
contraire, au pôle nord ou inférieur, \'isible en 1857, le P. Secchi a constaté
que la calotte de glace est centrée sur le pôle.
Parfois la neige polaire a paru si l)rillante que. comme le croissant de la
ISG-2 i.dCKVKir Ib'J
Xouvellc Lune, elle semblait se projeter eu dehors de hi planète, lii soir,
comme des nuages passaient devant la planète, cette neige polaire resta seule
visible comme une étoile nébuleuse. ( Remarque déjà faite au .wiii* siècle).
L'auteur rappelle en terminant que son objectif de 6 pouces •f(0"',lG) de
diamètre e::;t monte cquatorialement et mu par un mouvement d'horlogerie,
généralement appli(jué pendant les dessins des vues télescopiques; le gros-
sissement a été habituellement celui de 191. Le dédoublement des étoiles ■/
de l'Aigle, •;- d'Andromède elX Cassiopée est une garantie du pouvoir de défi-
nition de cet instrument.
Fig. 100. — Dessin de Lockycr. 'J octobre 1S02, à lui-^T'-.
Nous avons reproduit en fac-similés les 16 dessins de M. Lockyer. Ce sont
les plus importants pour la connaissance de Mars de tous ceux que nous
ayons étudiés depuis les premières pages de cet ouvrage. Ils ont été placés
ici par ordre do date.
Dans la première et la seconde de ces vues télescopiques, on reconnaît la
tache circulaii'e en forme d'œil qui a reçu le nom de mer Terby; au-dessus
d'elle et à gauche, l'océan de la Rue; au-dessous, une région grise sujette à des
variations fréquentes ; à gauche, une première baie arrondie, la baie Christie,
el un peu plus loin une seconde baie, la baie Burlon. Les glaces polaires
australes sont éclatantes et nettement marquées sur toutes les figures.
M. Lockyer appelle cette tache en forme d'œil la mer Baltique.
Dans la troisième, on remal-que surtout le détroit d'IIerschel H et la tache a^
ino 1. A im.\ni:ti: ma us.
qui n'est aulre que la baie du Moridieii. Un peu plus lanl, dans la soirée, ce
détroit cl celle tache sont un peu plus avancés vers la gauche (// ,7. 92) et, une
heure et demie après, plus avancés encore [fig. 93). Il y a une grande ressem-
blance entre ces dessins ol ceux de Becr et M.idlcr. Au-dossus de celte mer
allongée, on en distingue une seconde, le détroit Arago, et entre les deux il y
a une langue de terre blanche ou plutôt grise. C'est une contrée variable,
qui paraît tanlot continentale et tantôt maritime. La fig. 94, plus avancée en-
core, montre au centre du disque ce détroit Arago terminé par deux langues
l-'i,:.'. |iil. — I)cs.siQ de Lockyer. Il octobre 180..', à 11'' i'".
pointues, puis, à droite, la baie Christie, et ensuite, un peu déformé, l'OEil.
On voit qu'insensiblement, la configuration géographique de la planète se
dessine avec une certaine précision.
Les fig. 95 et 96 du 25 septembre nous montrent de nouveau le détroit
d'Herschel II (la baie du Méridien est voilée dans le premier, et ces voiles
sombres doivent être de nature atmosphérique, quoi qu'en ait dit l'auteur).
Le détroit se rattache en ç à la mer du Sablier. Les trois dessins du 3 octobre
[fig. 97, 98, 99) représentent avec une complète évidence la mer du Sablier,
la mer Flammarion, la mer Hooke, et au-dessous la mer Maraldi. La mer
ZoUner et la terre de Lockyer -^ Bont également faciles à 'reconnaître. A
gauche de la mer du Sablier, la région xy est brumeuse.
Le dessin du 9 octobre montre la mer Hooke et la mer Maraldi. Au-dessus,
la mer Maunder, entre les mers Hooke et Maraldi, l'isthme de Xiesten, au-
186-2 LUCKVKH. lOI
dessus (le la nier Uooko, à droite, la terre de Cassiiii i-l l'ile Dreyer, puis, vers
Fig. 102 — Dessin de Lockycr. 15 octobi-e 1862, à O»" S-
1 it:. lÛC. — Ucssiu ilc Lockycr. IJ oclobre I8G2, i 9'' ■20"'.
le bord, la mer ZOiluer. Au-dessous de la mer Maraldi s'étend le continent
llerschcl T.
[•'LAMMAUiu.N. — Mars.
16-2 LA l'LANKTI-. MAIiS.
Celui (lu 1 1 ociohrc olTrc les mêmes aspects: mais,;'! qauchc de la mer Ma-
nilJi, ou voit une autre mer, la mer ScliiaparcUi, séxDarce de la mer Maraidi
par la terre de W'Qhb (la carie de Green est inexacte sur ce point).
Kniîn, les deux dessins du 15 octobre moutreul celte mer Schiaparelli plus
loncée que la mer Maraidi et qui lui paraît réunie (mais elle ne l'est pas tou-
jours ' : au-dessus, la mer Maunder ; à gauche, TOEil ou mer Terby ; et celui du
18 octobre présente cet UEil au milieu du disque, entouré par l'océan de la
Rue, dont il est séparé par la terre de Kepler. La région située au-dessous de
Fig. 104. — Dessin do Lockyer. 18 octobre 1862, a 8''0"'.
cet Œil est' moins foncée et moins étendue que le 17 septembre : c'est aussi
une région très variable.
Sur tous les dessins, la moitié inférieure ou boréale du disque est presque
toujours dépourvue de détails, excepté vers la pointe de la mer du Sablier.
Il résulte clairement de toute cette série d'observations :
1° Permanence des configurations comme positions;
2° Variations dans l'étendue et dans le ton plus ou moins foncé de ces con-
figurations;
3° Degrés divers d'obscurité dans les mers : la mer du Sablier, le détroit
d'Herschel 11, la mer Maraidi, la mer Schiaparelli paraissent généralement
les plus foncées.
Au mémoire que nous venons de résumer, M. Lockyer a ajouté la note sui-
IS62 l'llll.l.ll>S. 16:^
vaille à propos des observations faites à la même époque sur la m('ino planète
l>ai' le professeur Phillips cl par le Il6v. Dawcs.
« M. Phillips conclut do ses observations que, sur un fond permanent de
configurations claires et foncées, il y a sur Mars une enveloppe atmosphé-
ri(|ue varialile (iiii se condense elllolte « a variable envelope gathers and lluc-
luales», niodillantparliellcment l'aspect des configurations fondamentales, et
les déguisant même jusiju'à un certain point en leur adjoignant des clartés
et des ombres ^') nouvelles (lui ne présentent aucune conslance, atmosphère
légère, vaporeuse, reposant sans doute sur une surface de terres, d'eaux, de
neiges. »
Celle induction est aussi remarquable qu'intéressante, et elle va être con-
firmée par le progrès des recherches.
Xous parlerons tout à l'heure des observations de Dawes. M. Lockyer fait
remarquer qu'elles s'accordent parfaitement avec les siennes et que notam-
ment un dessin, fait quelques minutes après celui du 3 octobre, à IPôl™,
confirme le passage des nuages dont il a été question plus haut et prouve
qu'à l'heure du dessin de M. Dawes les nuages avaient entièrement disparu
et laissaient voir nettement la configuration géographique de cette région.
Ces exccllcnls dessins télescopiques de notre savant ami M. Lockyer, qui
depuis cette époque a attaché son nom sous une forme impérissable aux
progrès de l'Astronomie contemporaine, représentent un pas en avant très
important dans Pétude physique du monde de Mars.
XLVII. Même année, 18G2. — Phillips.
Pendant celte même opposition de IBGi?, le professeur Phillips, dûxlord.
a fait, comme on vient de le voir, de très minutieuses observations de la
planète, qu'il a communiquées le 12 février 18G3 à laSociélé royale de Londres.
Eu voici le résumé.
L'auteur remarque d'abord que les diverses vues de Mars sont bien dis-
cordantes entre elles et que leur comparaison doit nous rendre très perplexes.
Ces taches sont-elles permanentes? Sont-ce des mers? soul-ce des terres?
Les assurances que nous avons vues formulées plus haut par Secchi et
Lockyer forment un contraste absolu avec les incertitudes de l'observateur.
Les télescopes sont préférables aux lunettes pour Papprécialion des cou-
leurs ; les lunettes aux télescopes pour la netteté des détails. Phillips a fait
(') « New lighls and nhadcs wicii présent no constancy, a thiii, vaporous atmo-
sphère, probably resting ou a surface uf land, snow and wator. » Cela nous paraît plus
probable que l'assertion de M. Lockyer remarquée plus haut, quoique nous ne nous
expliquions pas facilement des nuages noirs vus d'en haut, éclairés par le Soleil.
104
I.A IM.ANKTi; M VUS.
ses observalions à l'aide d'une luiiottc de G pouces (Û'",I5-^) monlcc en équa-
torial et mue par un mouvemeiU d'iiorlogcrie.
De ses divers dessins, l'auteur en a choisi trois, que nous repi'oduisons ici.
L'} premier montre la mer du Sablier, le détroit d'IIerschel II, l'occan Dawcs,
la mer Lambert qui monte vers le pôle, et une mer polaire supérieure. Le
second montre, à gauche de la mer du Sablier, la mer Maraldi, la nier Ilooke
et la mer Zollner. Le troisième permet de reconnaître la mer Maraldi adroite,
la mer Scliiaparelli au milieu et la mer Tcrby à gauche. — Le premier de
Fig. 105.— Dessin de Mars par Phillips. 27 septembre I8G2.
ces trois dessins oflre une grande analogie avec celui de sir John llerschel,
du IG août 1830 {voy. p. 121).
L'auteur exprime ses regrets qu'on ne puisse encore être sûr que ces taches
grises représentent vraiment des mers et ne soient pas, comme celles de la
Lune, de simjjles plaines grises. On aurait, dit-il, une preuve positive en
faveur de la première interprétation si l'on pouvait y voir une réflexion de
l'image du Soleil. Cette image du Soleil, réfléchie par les mers martiennes,
n'aurait que 2*0 de seconde, sans tenir compte de l'irradiation, mais elle
paraîtrait plus grande par cet eflet. Une boule de thermomètre d'un pouce
de diamètre (25""°) réfléchissant le Soleil est visible à 25 yards (22 mètres)
de distance, comme une étoile; la surface réfléchissante n'a guère dans ce
cas que ^h de pouce de diamètre et par conséquent sous-tend, abstraction
faite de l'irradiation, environ 1", En employant pour l'observation de Mars
un grossissement de 300, yo de seconde devient io". Ce serait perceptible.
1862
Ml.
105
I/aiiteiir pense donc qu'en certaines conditions nous pourrions voir l'iynafjc
du Soliil rcflcchie dam Irx eaux de Mars, soit calmes, soit peut-Otro encore
mieux difTuséo par i'aoriiafion des va,Q:nos.
Fig. lutj. — Dessin de Mars par l'hiUips. 11 novcmbio lsC2.
Fig. 107. — Dessin do Mars par l'iiillips. I.'. octobre 1802.
L'atmosphère mai tienne doit jouer un grand rùle en modiQant les aspects
géographiques vus d'ici.
166 I. A PI.AM-.Ti: MARS.
La tache polaire neigeuse est à côléàn pôle sud, cl même assez loin.
Au télescope, les continents sont rouges et les mers vertes.
I/auteur ajoute, en terminant, que les différences d'aspects doivent pro-
venir d'un certain état nuageux. 11 y a, dit-il, une énorme transposition d'hu-
midité d'un hémisphère à l'autre, pendant l'hiver de l'un et Tété de l'autre,
qui doit donner naissance à des tempêtes el à de vastes nuées flottantes, les-
quelles nuées ne se disposent pas comme sur Jupiter, à la rotation si rapide, le
long de parallèles à l'équateur, mais subissent dans leur arrangement l'in-
fluence des terres et des eaux.
XLVllI. Mémo année. 18G?. — Observatoire de Lord Rosse ('j.
Lord Rosse a communiqué à la Société royale astronomique de Londi'cs
six dessins faits par son assistant Ipendant la période si favorable de cette
année 1862. Ces vues ont été prises aux dates suivantes, à l'aide du grand
télescope de six pieds de diamètre :
l'p, 22 juillet, à 22^30™ de temps sidéral. Définition imparfaite.
2'', 14 septembre, à C''26"> de temps sidéral. Définition assez bonne.
3<", 16 septembre, à 23^55'» de temps sidéral. Très bonne définition. Grossisse-
ment de 1200. 11 y avait un léger brouillard, etpourtant la netteté acte la meilleure
de la saison.
4*, 6 octobre, h 2'' 10'" de temps sidéral. Définition bonne.
h", 29 octobre, à 1'' id. Définition mauvaise.
6'^, 6 novembre, à I''40"' id. Définition très mauvaise.
Un peut reconnaître dans la première et la dernière de ces vues la mer
du Sablier. La troisième montre avec netteté la mer circulaire de Terby. On
reconnaît aussi sur la seconde, à la droite de ce lac, la mer Schiaparelii. Il
semble bien qu'il y ait quelques nuages épars sur chacune de ces vues
faites au grand télescope de lord Rosse.
Si nous comparons ces dessins à ceux qui précèdent, nous constatons qu'ils
les confirment. Ainsi, par exemple, celui du 10 septembre ressemble beau-
coup à celui du 18 octobre du P. Secchi (voxj. p. 146) et à ceux de Lockyer
des 18 octobre aussi (p. 162) et 17 septembre; celui du 6 octobre offre les
mêmes aspects que celui de Lockyer du 3 octobre (p. 151 ) ; toutes les confi-
gurations reconnues plus haut sont représentées sur ces dessins, selon le
côté tourné vers nous.
Ces dessins nous montrent en môme temps que chaque observateur voit un
{'] Observations faites à TObservatoire de Parsonstown (Irlande).
Î9 octobre, à 1'' 29" T. S. i' iiuvcmbrc, à !'• ÎÛ". T. S.
Fig. lOS — Vues têlescopiques (le Mars prises en 1862 à lObservaloire de lonl Rosse
J68 l-\ PI.ANCTK MARS.
peu à sa façon, selon son œil et son exercice, et dessine également à sa manière.
M. Faye nous racontait l'autre jour que s'étant essayé à dessiner Mars un beau
soir ;\ l'Observatoire de Paris, du temps d'Arago, en compagnie d'un de ses
collègues (Goujon), et ayant ensuite comparé leurs dessins, faits au même in-
strument et au même quart d'heure, les deux croquis se ressemblaient à peine.
Nous avons fait plus d'une fois la même remarque.
XLI.X. Même année, 1862. — Lapsell.
La même année encore, M. Lassell a fait, à l'aide de son grand télescope de
4 pieds anglais (l^iO) de diamètre, une série d'observations remarquables
et a communiqué notamment à la Société royale astronomique do Londres
vingt-quatre dessins pris depuis le 13 septembre jusqu'au 11 décembre I8G2.
Nous choisissons, parmi ces croquis, les huit plus curieux pour les offrir à nos
lecteurs. Voici l'ordre de leurs dates :
1*',25 septembre; 2% 27 septembre; 3', 1 1 octobre ; 4^ 13 octobre ; 5% 23 oc-
tobre; 6% 25 octobre; 7% 4 novembre; 8% 5 novembre.
Les grossissements employés ont été de 474 et de 760.
La calotte neigeuse du pôle supérieur ou austral est nettement visible sur
tous les dessins. L'observateur remarque que les taches ont varié pendant
les observations. Ainsi, dit-il, la face présentée le 27 septembre est la même
que celle du 5 novembre, et pourtant les figures ne se ressemblent guère, et il
en est de môme des autres.
L'auteur en conclut à des changements sans doute produits par des nuages
assez denses, d'une grande étendue et d'une grande variété de formes.
Cette conclusion n'est pas aussi absolue qu'elle le semble à l'auteur, car une
différence d'une heure ou deux amène parfois un changementsensible. La diffé-
rence entre les dessins du 27 septembre et du 5 novembre est dans ce cas : la mer
du Sablier est plus avancée vers la gauche dans le premier que dans le second.
Nos lecteurs reconnaîtront très distinctement, sur les figures des 4 et 5 no-
vembre, la mer du Sablier avec les mers Flammarion et Hooke à gauche,
la mer Zollner au-dessus, le détroit d'Herschel II à droite, et au-dessus le
détroit Arago et la mer Lambert; sur les croquis des 23 et 25 octobre, la mer
Terby, l'océan de la Rue et les trois baies (Christie, Burton et du Méridien).
Ces deux derniers dessins s'accordent bien avec ceux de Lockyer, de lord
Rosse et de Secchi pour montrer au-dessous de l'CEil une région très foncée,
dont nous constaterons bientôt la variabilité.
Il est digne d'attention que les vues de la planète prises à l'aide des gigan-
tesques télescopes de lord Rosse et Lassell, ne contiennent pas plus de détail
que celles obtenues à l'aide d'instruments de moyenne puissance.
X^'-
\
2') septembre.
septembre
f
Il octobre.
IZ octobre.
13 octobre.
25 octobre.
'i novembre. 5 novembre.
Fig. 109. — Vues télescopiiiues do Mirs prises en I8G2 par Lasscli
i:0 LA PLAXKTK M A II S.
L. Même année, I86C. — Main, Lixsser, Nasmyth, IIarkness, Gnovi:,
Knott, Iu.lehy, BtTAnn, etc.
Presque tous les astronomes qui avaient de ])ons instruments à leur dispo-
sition, en cette remarquable année marlienne ]86t?, ont fait des observa-
lions de cette planète. Nous ne pouvons les rapporter toutes, ni reproduire
tous les dessins. Nous n'en extrayons pour ainsi dire que la moelle. Aux
observations de Secchi, Lockyer, Phillips, lord Rosse, Lassell, que nous
venons d'examiner, nous allons ajouter celles de Kaiser, non moins impor-
tantes, que nous étudierons tout à l'heure en même temps que celles de
l'année 1864, parce qu'elles leur sont associées par l'auteur même. Mais nous
devons ajouter tout de suite celles de Main, Linsser, Nasmyth, Grove, Knott,
Harkness, Ellery, Bulard, et prendre une idée des principales.
Nous avons parlé plus haut des observations et des mesures de l'astronome
Main, à Oxford [voyez p. 130).
Parmi les observations de cette période, remarquons celles de Linsser à
l'Observatoire de Poulkowa (Russie). Cet astronome a publié en 1864, dans
le Wochenschrifl fur Aslronomic de IIeis, une intéressante notice dans laquelle
il déclare que les dessins qu'il a pris s'accordent parfaitement avec ceux de
Béer et Madler. Il se demande si les taches sombres ne représenteraient pas
des continents plutôt que des mers, à cause des divers degrés de tons som-
bres qu'elles offrent à l'observation. Il fait un nouveau calcul de la durée de
rotation et trouve
24''37">22S9.
Ses dessins confirment ceux de Becr et Madler; on y retrouve notamment
le détroit d'Herschel II, qu'il appelle « Schlangen fôrmige Fleck «, la mer Ma-
raldi [pn] et la mer du Sablier.
Nous devons également adjoindre aux précédentes les observations faites
par Nasmyth en Angleterre. Cet astronome a pris notamment un dessin, le
25 septembre, sur lequel on reconnaît le détroit d'Herschel II, et au-dessus
l'île Phillips. [Mcmoirs of the lillcrary and phil. Society of Manchester, 1862-63,
p. 303).
M. Harkness, de l'Observatoire de Washington, a publié dans les Annales
de cet Observatoire (1862 p. 152) deux dessins faits par lui les 6 et 30 sep-
tembre 1862; le premier de ces dessins représente les mers Maraldi et
Hooke, le second, le détroit d'Herschel 11.
Signalons encore, pour cette môme période de 1862, les observations de
Knott en Angleterre, et Ellery à Melbourne. Elles confirment les conclusions
1862
onSKKV AilONS |)I\i:i{SRS.
171
tirées des éludes précédciilcs. Nous reproduisons ici, d'après M. Terby.
ijuatre dessins de Knolt, pris les 2:^ septemliro, ;"i8''30, -22 octobre, k la même
beure,3 novembre, à9'', et 27 novembre, à 7''iô. Ces dessins conduiraient à
une conclusion contraire à celle do M. Lockyor et plaideraient en faveur de
23 septembre.
•22 octobre.
3 novembre. 27 novembre.
Vi^. 110 — Dessins de Mars faits par Knott en 186?.
cliangcmenls rapides et considérables dans les aspects de Mars. Ils ont été
obtenus à l'aide d'une lunette de 7 pouces .'.
M. Grove a décrit [Montlily Xotices, tome XXIII, p. 7ô'i une série de dessins
qu'il a pris en octobre et novembre 1862, à l'aide d'une lunette de 4 pouces {,
prouvant des variations certaines à la surface de la planète. Pour expliquer ces
variations, l'auteur propose d'admettre que des nuages se condensent sur de
vastes districts aqueux.
D'autres observateurs encore, comme nous allons le voir, ont fait une série
d'études pendant les oppositions de 1862 et 1864.
En France, M. Bulard a présenté à l'.Vcadémie des Sciences, dans la séance
du 15 décembre 1862, plusieurs dessins de la planète, qui n'ont pas été repro-
duits, et sur lesquels nous n'avons aucun détail.
17? 1. A ri \m:ti-. mars.
Ll. l8(r:-I8Gi. — GnKKN cl \\".-I-. B.vnks.
MM. Gi'ccn cl \\'.-L. Ilanks, arlislcs pcinlrcs cl amateurs d'Aslronomie,
habitant en Angleterre, près de Londres, le i»remier à Sainl-John's Wood,
le second à Ealing, ont ohservé chacun séparément la planète pendant ses
oppositions de 1862 et 1804; le premier à l'aide d'une lunette française de
4 pouces { munie d'oculaires grossissant de IGO à 240 fois, le second à l'aide
d'une lunette anglaise do 3 pouces },. Ils en ont pris une centaine de dessins
dont 24 ont clé publiés dans l'ancien journal astronomique The Aslronomkal
Registcr, février 1865.
Ces petits dessins sont charmants, et nous regrettons de ne pouvoir vrai-
ment tout reproduire ici. Leur comparaison met en évidence deux faits in-
contestables : le premier, c'est que, malgré l'habileté pratique des dessinateurs,
ils ne s'accordent pas toujours dans leur appréciation des aspects do la pla-
nète, et le second, c'est que la permanence des configurations géographiques
martiennes n'exclut pas des variations assez considérables dues, au moins
en partie, à des causes atmosphériques martiennes, lesquelles produisent
parfois des traînées claires ou foncées en forme de bandes équatoriales.
Dans plusieurs de ces figures, on reconnaît admirablement la mer du
Sablier et sur l'un d'eux notamment, sur celui du 24 novembre 1864,
à 10'' SO", fait par M. Green, on remarque la région brumeuse indécise qui,
dans ces dernières années surtout, a été signalée par plusieurs observateurs
comme soumise à des variations d'aspects pouvant être dues à des inon-
dations.
LU. 1862-1864. — .1. Joynson, Noble, Williams.
Pendant les oppositions de 1862 et 1864, M. Joynson, dont l'observatoire
était situé à Waterloo, près Liverpool, en Angleterre, a présenté à la Société
royale astronomique de Londres (' ) une série de 92 dessins de la planète, pris
durant l'opposition de 1862, et de 104 autres pris pendant celle de 1864. Les
Monthly Notices (10 mars 186.5) n'ont reproduit que deux croquis que l'auteur
signale pour la bande grise qui contourne la planète. Ces deux dessins sont
des 8 et 12 décembre 1864. On y reconnaît la mer Terby, très noire; la bande
est formée par la succession des mers Schiaparclli, Maraldi, Flammarion,
Herschel II et de la Rue.
L'observateur a employé pour ces études, en 1862, un oljjcclif de trois
{')0n the appearance of Mars, Monthly Notices of Iho royal astronomical Society,
1865, p. 66 et 160.
1862-1864 K. VISE II. 173
pouces et demi et, en 180i, un objectif de six pouces. Dans les deux cas,
le grossissement employé a été de 350. L'auteur croit que la bande tracée
sur ces deux dessins fait le tour de la planète sans interruption. A la même
séance de la Société, M. Lockyor a fait remaniucr que cette mer n'est pas
continue, mais traversée en plusieurs points par des terres. 11 ajoute que les
dillercnles laclies de la planète offrent divers degrés d'intensité et que cer-
taines d'entre elles sont beaucoup plus foncées que d'autres. Ces dilFérences
de tons ont été constatées en 18G2 par cet observateur, ainsi que par
MM. Phillips et Frankland, exactement teUes qu'elles avaient été marquées
par Béer et Miidler en 1830. En combinant ses croquis de 18G2, l'auteur
trouve, pour la période de rotation, 24'' 37" 37'.
Kn Angleterre, M. Noble a fait un certain nombre de dessins à l'aide
d'une lunette de 4 pouces. Il en avait pris dès l'opposition de 1858, et les a
continués jusqu'en 1877. M. Williams a obtenu six dessins pour l'opposition
de 1862, douze pour celle de 1804 et douze pour celle de 18G7 (voy. Monlhly
Xotices, XXV, p. 170 et Teubv, Aréographie, p. 27) à l'aide d'un télescope de
4 pouces 4- les principales taches de la planète y sont représentées avec leurs
caractères les plus saillants. Cette période de 18G2 à 18G4 a été très féconde.
Le travail le plus important est celui auquel nous arrivons ici, celui de
Kaiser, directeur de l'Observatoire de Leyde.
LUI. 1862-1864. — K.^iser (•).
Ce laboricu.': astronome a fait, pendant les oppositions de 1862 et 1864, de
très importantes recherches sur la planète dont nous écrivons ici la mono-
graphie. Le Mémoire qu'il a publié dans les Annales de l'Observatoire de
Leyde est partagé en plusieurs sections qui ont pour objet, d'abord l'étude
des anciens dessins de la planète Mars de 1636 à 1864 et ensuite les observa-
tions faites à Leyde sur les configurations géographiques de ce globe, sur
la durée de sa rotation, sur les taches polaires et sur l'aplatissement. Ce Mé-
moire est accompagné de dessins et de cartes dont nous allons offrir les
principaux à l'attention de nos lecteurs.
Ces dessins, que nous reproduisons ici, portent leurs dates respectives. Étu-
dions-en les aspects :
Voici d'abord quatre dessins de 1862.
Le premier nous montre les mers du Sablier, Flammarion, llooke et Ma-
(') Unlcrsuchunrjen iïbcr dcn planelon Mars bel dessoi oppositioneu in der
Jnhren 1S62 tind ISG't. — Aiinalcn der Sternwarlc in Leiden. Dritter band, llaag,
187-2, p. 1-87.
174
LA l'LANKTI-: M A US.
raidi, locéan I)a\ve<, la mer Zollner, le conliiieiil IJecr, le coulineiU llers-
chel I'■^ risthmc do Nicstcn, les terres dcCassiiii et Drcyer: on devine même
D octobre 1.%?. h \-2^ 3û"
•:'4 oclo!)ro isCù', a IP' ^li
31 octûljrc à S*- 45"". 10 décembre 180-2, a h'- Ij-,
Fig. lu.— Dessins de Mars pnr Kaiser, en 1862;
la terre de Lockyer Le pôle supérieur qu austral est marqué par un petit
I862-18G4 KAISHK. 175
cercle de neige. A gauche de la mer du Sablier, ki région est brumeuse. Ce
dessin est complet, en conformité parfaite avec notre carie construite sur
l'ensemble des observations (n. 01)). 11 semble donc (|ue ce jour-là (ô octo-
bre 18G2, à minuit 35™) l'aspect de la planète n'était modifié par aucun nuage.
Les tons eux-mêmes sont notés.
Le deu.xième dessin nous montre la mer Tciliy, Tucéau de la Hue qui ia
surmonte, la mer Schiaparelli à droite. Au lieu de la Manche, on voit une
traînée brumeuse. La neige polaire est détachée du bord.
Sur le troisième dessin, nous trouvons le détroit d'IIerschel II et la baie
du Méridien : ce ruban sombre se montre tout à fait détaché du fond clair,
comme au temps de Miidler, seulement, au lieu d'être circulaire, la baie est
rectangulaire et terminée par deux pointes. Cette haie a été vue fourchue
pour la première fois par Dawes, le 22 septembre 1862, à l'aide d'un objectif
d'Alvan Clark de 8 pouces |. Au-dessus, la mer Lambert; à gauche, la mer
du Sablier. L'île Phillips est très claire.
Le quatrième figure semble réunir la première et la troisième.
On peut comparer avec intérêt la fig. 1, du .5 octobre, à la fig. 98 (p. 157) de
Lockyer du 3 octobre, à 11''23'", et à la fig. 4 de lord Rosse du 6 octobre
(p. 1G7) : elles s'accordent toutes les trois, en laissant la marge qu'il convient
aux facultés d'observations de chaque astronome et aux divergences inévi-
tables du dessin. On éprouvera la même impression en comparant la fig. 2 à
celles de Lockyer du 17 septembre. Toutes ces configurations existent, sans
l'ombre d'un doute. Mais on les distingue plus ou moins bien.
Ainsi se précise graduellement dans notre esprit la forme géographique
réelle de la surface martienne. Son analogie avec la Terre comme distribu-
lion de cette surface en continents et en mers s'affirme de plus en plus avec
le progrès des observations.
Cette précision va s'accroître encore et très rapidement, par les six excel-
lents dessins de 1864, que nous mettons maintenant sous les yeux de nos
lecteurs (//'i/. 112 à 117;.
Dans le premier {fig, H 2), nous retrouvons la baie du Méridien, élargie
et confondue avec la mer voisine, la baie Durton, élargie et doublée, la baie
Cliristie. Tout cela paraît trop large.
Dans le deuxième {fig. 113), nous reconnaissons la mer du Sablier, irès
foncée, et au-dessus l'océan Dawes, la terre de Lockyer. Au-dessous de
la mer du Sablier, la passe de Nasmyth. Sur la droite du disque, une traînée
inconnue (qui pourrait être l'Euphrate de M. Schiaparelli, avec lequel nous
ferons plus loin connaissance).
Dans le troisième dessin de Kaiser: TOEil ou mer Terl)y, la terre Copernic,
au»dessous, une traînée sombre; à droite, la mer Schiaparelli {/ig>. 114).
76 I A PI .\m:ti-: maus.
Dans le qiialriôiiio. à ih'oite, la niei TL'il)y,cl au-dessous la traînée sombre,
Hg. 112. — Vue tolescopique de Mars par Kaisur, le H novembre 1Sr,4, a lÛ"" 20"'.
Fig. 113 — Vue tclcscopuiue de Mars par Kaiser, le 22 novembre [S<A, a 10'' 45™.
dont nous venons de parler, la terre de Kepler, l'océan de la Rue avec la baie
18G2-lSGi K.MSKIl. 177
Chrislie, le détroit Arngo avec la baie Burton double, la baie du Méridien
l-'iy. 114 —Vue télescopique de Mars, par Kaiser, le 10 décembre 1864, à 10" 10™.
Kig. 11 j —Vue télescopique de Mars, par Kaiser, le 18 décembre 1864, à 10»' G".
tout à fait à gauche.
Dans le cinquième [fuj. 116), le détroit Herschel II, très foncé et bien
Flamm.uuon. — Ma.ys. 1'
17S l-A IM.ANKTK M A H S.
Jélaché, l'île Phillips (presqu'île), le détroit Arago; en bas, la mer Delaaibre.
Fig. 11b. — Vue tulescopique de Mars, par Kaiser, le '^3 décembre IStii, a O"" 25"
Fig. 117. — Vue télescopique de Mars, par Kaiser, le 28 décembre IBW, à S"" 0™.
Dans le sixième [fig. 117), la mer du Sablier avec son appendice, la mer
Main, diffuse, et toutes les configurations précédemment décrites.
1867-1864 KAISKH. 179
Nous sommes donc désormais im'liraiilaliloiiit'ul aircrmis dans la cer-
litudc que les confij^'uralions de Mars sunl lixes, c'est-à-dire de nature géo-
gra[iliique, mais varialdes d'aspects, notamment sans doute par suite de
variations atmosphériques (]ui s'y superposent.
L'astronome de Leyde a tiré de tous ses dessins une carte géographique
de la planète. Nous la reproduisons également ici [I'kj. 118) en fac-similé.
On la comparera avec intérêt à celle que nous avons publiée plus haut
(p. 09). Plusieurs dillérences sontmanii'e.-tes. Ainsi, nous n'avons pas détaché
le détroit llerschcl II coninic Kaiser, parce que pour nous ce croquis de
l'astronome de Leyde ne représente pas une configuration permanente : géné-
ralement ce détroit se confond avec la mer (océan Dawes); généralement
aussi le détroit Arago est moins large à son extrémité. Il y a là deu.x régions spé-
ciales de variabilité, soit que l'eau qui forme ces mers se retire ou s'évapore,
soit (ju'elle change de ton et soit tantôt foncée et bleu sombre, tantôt jaunâtre
et claire. Plus nous avançons dans notre étude, plus l'idée de variations
d'eaux, évaporations , inondations, précipitations aqueuses plus ou moins du-
rables s'impose à notre esprit.
Dans les observations de Kaiser, la tache caractéristique la plus remar-
quable pour lui a été la tache ovale par laquelle il fait passer son premier
méridien, et qui se trouve à la longitude 0 et à 26'' de latitude australe.
L'auteur l'identifie avec la tache d de Béer et Miidler. ( Voir leur carte, p. 107).
C'est le lac circulaire qui porte le nom de mer Terby sur notre carte. Remar-
quons sa forme ovale sur la carte de Kaiser. Celle forme change selon les années.
Elle est quelquefois tout à fait ovale, comme ici, quelquefois parfaitement
circulaire. Or, ce lac a l'étendue de la France.
La mer du Sablier descend en pointe au-dessous de léquateur, oblique-
ment, vei'S 150". La tache ronde circulaire prise par Béer et Miidler pour
origine do leurs longitudes est carrée dans le dessin de Kaiser et à 90" à
gauche de la tache ovale prise par lui pour méridien initial. On voit que
les longitudes de Kaiser diffèrent de 90" de celles que nous adoptons.
Le même astronome a entrepris pendant les années 1802, 18G3, 1864 et
1865, àl'aide du réfracteur de 7 pouces de l'Observatoire de Leyde, muni du
micromètre à double image d'Airy, une série de mesures des diamètres po-
laires et équatoriaux de la planète Mars ( ' ) . L'ensemljle de ces mesures donne :
Diamètre i-quatorial... .. 9", 468
Diamètre polaire 0", 387
Aplatissement -^-^
(') Durchmesser des Planeien Mars, gemessen ira Jahrc 1862-l863-lS6i, mil Aivy's
Doppelbild M icrometer am 7 zôllifjen Refractor. — AiDialen der iSternwarle in
Leiden. Drillcr Band. — Haaij, 1872, p. 227, 241, Uj.
180 1, A ri.ANKTi: M vus.
La mesure ilc raplatissenient de Mars reste, comme on le voit, tout à fait
problématique :
AV. IliT^cliel a trouvé. . . . '
1 s
Schrœtcr ^i -
Arago y-
Bessel 0
Main » -• -i^ .'- et -'
G 2 ; 3 8 1 i G ; 7 I 3 G
AVinnecke, Dawcs el Johnson, un allongement polaire.
Kaiser s'est également occupé de la rotation de la planète, en comparant
ses observations aux meilleures choisies parmi celles de ses prédécesseurs
et en identitiant avec raison la tache verticale dessinée par Ilookc dans ses
deux observations du 3 mars 16GG cà la tache marquée f dans les obser-
vations de Béer et Miidlor en 1830 et désignée sous le nom de « mer du
Sablier », Ihe Hour-glass sea.
L'observation de Hooke du 3 mars 1G6G (ancien style) correspond au
13 mars du calendrier grégorien, qui n'a été adopté en Angleterre qu'en 1752.
Elle a été faite, la première à minuit 20'", la seconde à minuit 30™. La tache
n'était pas encore au milieu du disque : elle y est arrivée à 2'' 46'". Dans ses
observations de 18G2, Kaiser a constaté le passage de la même tache au mé-
ridien central de Mars le 1" novembre, à G"' 10'". Il en conclut le calcul
suivant :
Passage de la mer du Sablier par le méridien central du disque de Mars.
Hooke, 1G6G, mars 14, à 2''5G"'.
Kaiser, 1862, nov. l,àGMO'°.
Différence : 71 621 juui-s S'^li™.
Pendant cet intervalle, la planète a fait TU 004 rotations, ce qui donne pour
la durée de la rotation :
24''37"'22', 735.
Par l'observation de Hooke et celle de Béer et Mudierdu 30 septembre 1830,
à 17^22°, le même astronome a obtenu :
Différence GO 101 jours 14'' 2G"'. 58581 rotations.
Rotation = 24''37'"22s 70G.
Par l'observation de Hooke et celle de Huygens du 13 aoiit 1G72, à
minuit 11"" :
Différence : 2 344 jours 9'' H"". 2 285 rotations.
Rotation - 24'' 37"- 22', C2.
La concordance est remarquable, malgré les doutes de Kaiser sur ridcnLité
1 «62-1804
KM si: II.
I.^l
Oot,
■lOO
OS' Oh oc 0! 01 0 0^0^ ('C ^ /'^
■•>'«.4^<
•r-f
"^-t---
l
iÇ
;-t~
..-#^-
.*i
'•~M
i^-: i.A PI. \Ni;Ti'; mai; s.
de l.\ taclio voilicale de llooko avec la mer du Sablier. Il ne doute pas de
l'identité de celte mer avec la tache triangulaire du dessin d'IIuygens du
13 aoiU 167.?, par laquelle il trouve d'autre part :
Huygens, 107-2, août 13, ;\ l'ÎMO'".
Kaiser, ISGÎ, nov. 1. à G"' 10'".
Différence :G9476 jours 18''.
Pendant cet intervalle, la planète a effectué 67719 rotations; doù l'auteur
«.onclut pour la durée de rotation :
24''37'"22', 643.
Cette même observation de Huygens, combinée avec celle de Béer el Miidlcr
du ;^0 septembre 1830. à 17''2-2"', lui donne comme résultat :
Différence : 57757 jours 5'' 12™. 5G29G rotations.
Kntation - 2 'i'' 37"- 2-2', 595.
En résumé, la rotation de la planète Mars est fixée, depuis 18G4, à
24'' 37™ 22% 6,
à un dixième de seconde près.
LIV. 1862-1804. — Analyse spectrale de l'almosphcre de Mars, par Hucgins,
Miller, Piltherfurd et Vogel.
Dans le cours de l'année 1862, M. William Huggins, membre de la Société
royale astronomique de Londres, et M. A. Miller, professeur de Chimie à
King's-College de Londres, essayèrent pour la première fois d'appliquer
l'analyse spectrale à l'étude des planètes Vénus, Jupiter, Mars et Saturne.
Les résultats obtenus ont été publiés dans les Pliilosophical Transaclions de
l'année 18G4. Aux États-Unis, llutherfnrd enlropril en même temps la même
recherche (').
Nous n'avons pas à nous occuper ici des autres planètes. En ce qui con-
cerne Mars, son spectre fut observé notamment le 6 novembre 1862 et le
17 avril 1863. Les principales raies du spectre solaire s'y montrèrent nette-
ment marquées et l'on n'y découvrit aucune autre ligne un peu forte.
Les 10 et 29 août 1864, les mêmes savants examinèrent de nouveau la pla-
nète à l'aide d'un spectroscope perfectionné. Ils ne découvrirent dans le
rouge aucune des raies d'absorption qu'ils avaient constatées dans les
spectres de Jupiter et Saturne, mais tout à fait à l'extrémité du rouge, vers
(') RuTHERFURD, Astronomical observations with Ihe spectroscope (Amer. Journal
o/" Science, janvier 1863).— Miller et Huggins, On tliespectrum ofMars {Phil.Trans
1864). — VoGEL, Beohachtungen aufder Sternwarte zu Bollikamp. Ileft I, p. eG{Aslr
Nach., n' 1864).
ISnM«f.i ANALVSI- SPT-CTRAr.P H F- I,' AT^f OSPII f: H F DF M A H S. 183
les raios B qI n du spectre solaire, ils cunslatèrent la présence de trois lignes
fortes.
Vers la rair /•' du spectre solaire, c'cst-fi-dire au commencement du bleu,
immédiatement après lo vert, le s[tecti-e de Mars montre nu grand nombre
de bandes d'absorption qui diminuent considérablement son éclat. Ces bandes
fortes sont à peu près équidistantes, et se continuent jusqu'à l'extrémité
violette du spectre. L'absorption de ces bandes est évidemment la cause de
la prédominance des rayons rouges dans la lumière de cette planète. L'ap-
pareil spectral à gi-and pouvoir dispersif résout ces bandes en groupes de
lignes.
La conclusion de cet examen est que, d'abord, Mars ne brille que par
la lumière solaire réfléchie, et renvoie comme im miroir une image du
spectre solaire. Ensuite, son atmosphère donne naissance aux raies d'ab-
sorption dont nous venons de parler. Qu'est-ce que ces raies spectrales
indiquent? Nous le saurons bientôt.
Au mois d'août 1804, MM. Iluggins et Miller ont remarqué que l'éclat du
spectre de Mars avait diminué d'une manière remarquable vers la ligne F,
par suite d'une série de groupes de lignes assez fortes et équidistantes com-
mençant vers la raie F et se continuant vers la ligne la plus réfrangible du
spectre. Au mois de novembre 1864, ces lignes étaient beaucoup plus faibles
et pouvaient à peine être distinguées des lignes nombreuses appartenant au
spectre solaire. L'impression de M. Huggins a été que la lumière de Mars,
les 10 et 27 août, se montrait plus rouge et que les taches se voyaient plus
distinctement qu'au mois de novembre. « Si cette opinion, dit-il, était con-
trôlée par les autres observations, on pourrait admettre que, vers la fin de
l'année, l'atmosphère de Mars a été plus chargée de brouillards et de vapeurs.
Ces brumes réfléchiraient une partie considérable de la lumière incidente, et
par là ombreraient et cacheraient les couches inférieures de l'atmosphère de
la planète ainsi que la surface du sol d'où provient probablement la couleur
rouge ; c'est cette couleur qui donne probablement naissance aux lignes
d'absorption qui affaiblissent les rayons bleus et violets du spectre de Mars.
Par une série d'ob.servations télescopiques et prismatiques correspon-
dantes, on pourrait sans doute faire des études efficaces sur la météoro-
logie de la planète. »
Les recherches faites en Allemagne, par Vogel, s'accordent avec celles
faites en Angleterre et aux États-Unis, sur les lignes d'absorption du spectre
atmosphérique de Mars.
En réponse à une question de M. Pritchard : si un simple brouillard pro-
duirait dans le spectre de la planète des lignes indicatrices des substances
qui le composeraient, M. Huggins répond que le brouillard n'a aucune
ISS i.A iM. A Ni: Ti: m a us.
faculté d'absorplion sélective pour produire des lignes définies. Les petites
particules du brouillard étant grandes relativement aux ondulations de la
lumière, diminuent l'intensité des rayons bleus et verts en proportion plus
grande que pour l'extrémité rouge du spectre. La lumière réfléchie d'une
masse de brouillard oiriirait une couleur ])louàtre.
A propos des remarques précédentes, M. Lockyer rappelle que la planète
Mars a paru, en 1862, plus rouge à l'œil nu qu'en 18Gi, D'autre part, l'at-
mosphère de Mars s'est montrée, sans contredit, meilleure et plus transpa-
rente en 1862 qu'en 1864. Celte observation concorde avec ce que vient de
dire M. Ihiggins. On pourrait en conclure que, lorsque l'atmosphère de Mars
est pure de nuages et de brumes, la lumière de la planète est plus rouge, en
même temps que ses taches se montrent plus distinctement.
Nous examinerons la suite de ces recherches en 1867.
Nous voici arrivés dans le cours de cette étude à l'année 1864, qui a été en
quelque sorte la continuation de l'opposition de 1862 par la proximité à
laquelle la planète s'est présentée, quoique pourtant elle ait été un peu
moins proche qu'en 1862 et surtout qu'en 1860; mais l'attention des astro-
nomes y était particulièrement dirigée, et l'on espérait arriver à quelque
découverte capitale.
Nous venons déjà d'étudier les importantes observations de Kaiser et des
spectroscopistes. Continuons cette période par l'analyse des observations de
l'astronome anglais Dawes, l'observateur « à l'œil d'aigle ».
LV. 186'i. — Observations du Rév. W.-K. Dawes (').
Cet habile et éminent observateur a présenté à la Société royale astrono-
mique de Londres, dans sa séance du 9 juin 1865, huit magnifiques dessins
que nous reproduisons ici et qui proclament un progrès considérable dans
l'étude de notre planète. Ces observations ont été faites de novembre 1864 à
janvier 1865. à l'aide d'un excellent objectif de 8 pouces construit par Cookc
and Sons.
« Plusieurs détails curieux et intéressants que je n'avais jamais reconnus
aussi distinctement, dit l'auteur, se sont manifestés pendant cette opposition
(de 1864 I. L'un des plus remarquables est un détroit long et mince qui court
dans la direction N.-E. et S.-W., dans l'hémisphère nord, et qui se voit
distinctement dans les dessins des 12 et 14 novembre, et plus faiblement
dans celui du 10 novembre ainsi que dans celui du 21 janvier. J'avais déjà
(') Hopepeld Observalûnj, Haddenharn. Bucks, Angleterre.
isni W.-U. DAW'ES. 185
rernarqué et dessiné ce di'lroit dès ranuéc 1852, le pôle nord étant alors
également tourné vers nous , mais quoique la planète ait été alors en
excellentes conditions d'observation (ayant une déclinaison nord de 24°), je
ne l'ai pns vu aussi distinctement avec l'instrument de G pouces J de Munich,
dont je me servais alors, qu'à l'aide de mon 8 pouces actuel.
« Un autre ol)j(.'t intéressant a été l'ombre fourchue, dessinée notamment
le 11 novembre ainsi que le 20 et le 12 (moins distinctement). Je l'avais
souvent remar(]uée on 1852 sous la forme d'une baie ovale avec un rivage
régulier et n'ai pas soupçonné une seule fois qu'elle piU être partagée ou
irrégulière dans son contour. Mais, le 22 septembre 18G2, j'ai constaté très
nettement son aspect fourchu et il en a été de même pendant toute la durée
de la dernière opposition. Cet aspect donnait l'impression de deux embou-
chures de fleuves très larges; mais je n'ai jamais pu reconnaître ces fleuves.
Les excellents dessins faits par M. Lockyer en 1862 montrent plusieurs fois
cette baie, mais ne la montrent pas ainsi partagée en deux pointes. Il sera
fort intéressant, dans les oppositions futures, de vérifier si cette forme est
permanente ou variable. // peut se faire que la mer se soit retirée de celle -partie
du rivage et ait laissé une langue de terre visible.
« Il est très difficile de noter avec certitude des variations dans l'aspect
des différentes taches qui peuvent être dues à des causes atmosphériques
dans la planète elle-même. Celte difficulté pourrait sans doute être diminuée
si l'on prenait soin de comparer les vues télescopiques aux configurations
déjà connues des régions observées ; mais il me paraît préférable de s'abstenir
de toute référence et de toute idée préconçue, afin de faire des dessins abso-
lument indépendants. L'atmosphère doit néanmoins jouer un certain rôle
dans les causes de variations. Ainsi, pendant trois soirs consécutifs, les 20.
21 et 22 janvier, j'ai observé une tache très blanche se montrant exactement
à la même place au point marqué a sur le dessin du 21 janvier. Cette tache
blanche n'était certainement pas visible les 10 et 12 novembre. Celte tache
donnait l'impression d'une énorme masse de neige et était aussi brillante
que la tache polaire australe de 1862. Malheureusement, une série de nuits
nuageuses m'empêcha de continuer ces observations.
« Kien ne me paraît mieux prouver que la teinte rouge de Mars n'est pas
produite par l'atmosphère de la planète que ce fait que la coloration rougeâtre
est toujours plus manjuée vers le centre du disque, précisément où l'enve-
loppe atmosphérique est la plus mince. Vers les bords du disque, les taches
grises sont presque entièrement effacées par la densité de l'atmosphère, et la
couleur réllécliie de ses bords est blanche ou blanche verdàtre, cette dernière
coloration étant peut-être un effet de contraste avec le rouge du centre.
» Le 1" décembre, quelques heures après l'opposition, j'ai obtenu quelques
I8r.
I \ PI, A\f:TI- M VHS.
mesures du disque h l'aide diin exrellenl niicromèlre ;i douMo iniaj^o. Il no
m'a pas ^\ô possible do reconnaître aucune trace d'aplatissement; au contraire,
j'ai trôuv.' 1.- dianirlro pol;iin> i-lntùt plus irrand ([ne le diamètre éqnatorial.
i novembre ISiJi. IJ^-^i"'.
10 novembre 1864. lîMj"
12 novembre 1864. 12'' SO"-. 14 novembre 1864. t2i'0'".
Fig. 1 19. — De.ssins de Mars, par Dawes, en 1864-65.
d'une quantité insignifiante d'ailleurs i0",02). Ce résultat rappelle les
mesures de Mars faites par M. Johnson avec l'héliomètre d'Oxford (').
{•) Ces mesures publiées au tome XI, page 292, de l'Observatoire de Radcliffe, donnent,
pour la distance moyenne de la planète au Soleil :
Diamètre équatoriai — 5", 901
Diamètre polaire G", 503
Ici le diamètre polaire est sensiblement supérieur au diamètre équatoriai.
1«64
W.-Ii. DAWFS.
1S7
» Mon impression est que ratniosphère de la planète Mars n'est pas liabi-
tuellement très nuageuse. Pendant la deriiièrn opposition, les principales
ronfifîurations se sont presque constamment nionlnVs clairement et nottr-
20 novembre ISf.'.. \\>'?,v,'
■:r. novembre ISf/i. i\<'?,r,"
t-' décembre ISG'i. I2i'0'". 21 janvier. ISGj. SHL
Fia:. 120. — Dessins de Mars, par Dawes, en 18G4-G5.
ment. .le n'ai pas une senlc fois pu constater qu'il y ail eu avec certitude des
régions masquées par du brouillard et des nuages. La seule exception à cette
permanence consiste dans les taches très blanches notées en quelques rares
circonstances et qui donnent l'impression soit de masses de neige, soit de
masses nuageuses dont la surface réfléchit vivement la lumière solaire. On
pourrait ajouter aussi à ces variations le fait assurément remarquable que
l'on constate en comparant le dessin du 1 i novembre à ceux du 10 et du 12
188 I.A PI.Wf^Ti: MA H s.
pour le pôle inforicur : il y avait au point marqué a dans les dessins du 10
et du \'2 une petite traînée grise bien évidente le 14 novembre, à minuit; elle
n'existait certainement pas aux deux autres dates, où cependant les détails
voisins étaient parfaitement visibles. »
A ces observations si inloressantes, Dawes ajoute en post-srripium les re-
marques suivantes :
Kii recourant à mon registre et à mes dessins de l'année ISôî, jo vois que,
cette année-là, j'ai souvent observé une traînée particulièrement blanche le long
du rivage marqué a sur lo dessin du 20 novembre 18(Vj comme attirant particu-
lièrement lattention par son éclatante blancheur. Il scml)lo donc qu'il y aurait 1;\
quelque cause permanente ou du moins assez fréquente amenant cet éclat parti-
culier. Cependant, comme cette ri'gion est voisine de l'équateur, il ne paraît pas
vraisemblable d'attribuer cette blancheur à des nuages et encore moins à de la
neige, à moins qu'il n'y ait là dos plateaux très élevés au-dessus du niveau de la
mer (').
Ces magnifiques dessins de Dawes constituent, comme nous l'avons re-
marqué plus haut, un progrès considérable dans notre connaissance des
détails de la topographie martienne : la baie fourchue du Méridien y est dé-
couverte dans sa forme normale, ainsi que le détroit lierschel ïï, les rivages
de la mer du Sablier, et la plupart des configurations représentées sur notre
carte ^p. 69). A la baie du Méridien, qui donne naturellement l'idée de Vem-
boitchiirc de deux fleuves, l'observateur a cherché ces fleuves sans parvenir à
les découvrii" : M. Schiaparelli les a découverts treize ans après, en 1877.
I/Ile blanche observée le 21 janvier se trouve sur notre carte, à l'inter-
section du 60* méridien et du cercle polaire austral. Elle n'est pas toujours
visible, non plus que sa voisine.
Remarquons aussi ce qu'il dit de la coloration de Mars et de son atmo-
sphère. La colloration rougeâlre de la planète est toujours plus marquée dans
la région centrale du disque que vers les bords. Donc elle n'est pas produite
par l'atmosphère, puisque c'est justement vers le centre du globe que la
lumière réfléchie par la surface a la moindre épaisseur d'air à traverser. C'est
ce qu'Arago avait déjà conclu (p. 133).
La visibilité presque constante des taches de Mars, la rareté des nuages,
la faiblesse de la pesanteur à la surface du globe, conduisent à penser que
l'atmosphère de Mars est très faible. Celle de la Terre est si dense que les
détails de la surface terrestre doivent être bien moins visibles de loin que
ceux de Mars. D'après les recherches de Langley, 40 pour 100 des rayons
solaires qui arrivent verticalement sur notre atmosphère sont absorbés par
(') Royal astronomical Society, Monthly Notices, t. XXV, et Meraoirs, t. XXXIV.
18G4 JOHN PHILLIPS. 189
elle. Des 00 (jui arrivoiil ;i la surlace du sol, moins du <]uurt peut èlre
rclléchi par le sable jaune même, et ce quart doit encore perdre iO pour 100
en traversant ralmosphère. Il n'y aurait donc, pour la Terre, pas plus de
8ou9pour 100 des rayons lumineux qui pourraient atteindre l'œil d'un obser-
vateur lunaire. De loin, la Terre doit donc paraître blanchâtre ,m(}me par le
ciel le plus pur (').
La comparaison de ces dessins avec notre carte conduit à une conclusion
identique à celle que nous avons tirée tout à l'heure des observations de
Kaiser. La mer Terby est allongée au lieu d'Olrc ronde : elle ressemble à
une feuille au-dessous, une seconde tache, offrant le même aspect, est beau-
coup trop vaste; le détroit Herschel II se détache nettement, mais la baie du
Méridien n'est pas ronde et isolée comme dans les observations de Béer et
Madler. Tout conclut en faveur de variations certaines dans ces aspects géogra-
phiques.
LVr. 18G4. — John Phillips.
Le professeur émérite de l'Université d'Oxford, dont nous avons déjà re-
marqué les observations de l'année 1862, a continué l'étude de Mars pendant
l'opposition de 18G4 et en a présenté les résultats à la Société royale de
Londres dans sa séance du 12 janvier 1865 (^).
11 constate d'abord que les aspects géographiques se sont présentés en 1864
à peu près tels qu'on les avait dessinés en 1862. Ou en a fait de nouveau
plusieurs dessins, du 14 novembre au 13 décembre, et l'on en a construit un
planisphère que nous reproduisons ici. L'auteur donne le nom de terre (/anrf)
aux régions orangées, et de mer [sea] aux régions vcrdàtres, comme on
l'admet généralement, mais, à l'opposé de ce que l'on voit, en général, il
note les premières plus foncées que les secondes. \ln certain état brumeux
[foggines] a été noté en plusieurs circonstances, entre autres les 18 et 20 no-
vembre. Les mers ont paru moins vertes qu'en 1862. En général, tout était
moins net. Mais la planète était plus loin de nous en 1864 qu'en 1862.
« Des taches blanches, sans doute des neiges, ont été vues d'une part entre
45" et 50° de latitude sur le 30^ méridien de la carte construite par l'auteur,
d'autre part au 50* degré de lalituJe, à la longitude 225**. Il y avait moins de
neiges autour du pôle sud qu'en 1862. «
Phillips se demande ensuite si les couches atmosphériques inférieures ne
jouent pas un rôle dans la coloration de la planète, qui rappellent souvent
(') American Journal of Science, t. XXVIII, p. 163.
{') Proceedings of Ihe Royal Society, 18G5, p. 42-40.
190 I. A IM.ANÎ-TF. MARS.
celle des nuages éclairés par le soleil couchant. « Il faut, du resU?, qu'il y ail
de grands transports de vapeur d'eau pour amener les neiges d'un pôle à
l'autre, suivant ralternance des saisons. »
L'auteur a observé des neiges jusqu'à 50" ou même 45° de latitude;
M. \Varren de la Rue jusqu'à 40" au mois d'avril 1856. C'est à peu près
comme sur la Terre en hiver. L'étendue des neiges se ressemble parfois beau-
coup en des années martiennes différentes, comme on peut le reconnaître
en comparant le dessin de sir John Herschel du IG août 1830 [voij. p. 1"2I)
avec celui de l'auteur du -27 septembre 1862 (p. 16 i).
« Les climats de Mars paraissent presque identiques à ceux de notre monde,
car là comme ici, de 50" de latitude aux pôles, la vapeur d'eau donne nais-
sance à des neiges périodiques, et de l'équateur à 40" environ la lempéra-
27Û ' ' 7èû '
Planisphère de Mars, ea projection équatoriale, parle professeur Phillips.
ture reste toujours assez élevée pour produire une évaporation normale :
atmosphère généralement pure dans les régions équatoriales et tropicales,
neiges variables jusqu'à une certaine distance des pôles. C'est sans doute la
constitution de l'atmosphère qui permet ces climats quasi-terrestres sur une
planète plus éloignée du Soleil que la nôtre dans le i-apport de 152 à 100, et
pour laquelle la chaleur reçue de l'astre central n'est que dans le rapport
de 231 à 100. L'atmosphère, en atténuant le rayonnement, en conservant la
chaleur solaire, rend les hivers et les nuits moins froids qu'ils ne le seraient
sans elle. L'influence atmosphérique paraît être la même sur Mars que chez
nous, et plus importante encore. Il en résulte que, selon toute probabihté,
nous pouvons regarder Mars comme habitable. »
1864 FKI.IX VON l'KA.NZHNAL'. 191
Tel est le résultat, des observations du professeur Phillips. Nous repro-
duisons ici, en fac-simil(', le planisphère (jui accompagne ce Mémoire.
Ces observations paraissent avoir été faites avec ie niénie instrument (|uc
celles de 18G-2.
Il n'est pas très facile de se reconnaître sur cette carte. D'abord, il faut par
la pensée voir foncé ce qui est pâle, et réciproquement. On devine alors la
mer du Sablier daiiç la configuration pâle triangulaire qui descend presque
verticalement sur le 20" méridien. Au-dessus.de cette mer, la grande tache
blanche est la terre de Lockyer. Le continent sur lequel est écrit Land est le
continent Ilerschel f. Le 0° ou le premier méridien de ce planisphère corres-
pond à peu près au méridien 315" de notre carte. Les méridiens sont comptés
de la droite vers la gauche, de l'Est à l'Ouest, au lieu de l'être de l'Ouest à
l'E>;t. Notre zéro se trouve sur le SIS*" méridien de cette carte, à l'extrémité
du ruban clair qui prolonge comme un golfe long et étroit la mer du Sablier
à droite. 11 y a 45° de différence entre les deux méridiens initiaux.
LYII. Même année. — Félix von Fr.\nzenau.
M. de Franzcnau a fait ^à l'Observatoire de Vienne une étude fort intéres-
sante accom.pagnée de six dessins remarquables que nous reproduisons ici.
Nous traduisons textuellement ce petit Mémoire (•).
La situation assez favorable de la planète Mars, pendant sa dernière opposition,
m'a engagé à faire les observations qu'on va lire, et que j'ai effectue'es à l'aide
du réfracteur de 6 pouces qui m'a été gracieusement prêté par l'Observatoire. Je
me proposais d'obtenir des représentations aussi fidèles que possible de la surface
de la planète, de la forme de ses taches, et de ses conditions atmosphériques.
Malheureusement, le temps extraordinairement mauvais qui n'a cessé de sévir
a entravé un grand nombre de mes observations. En somme, je n'ai pu en effec-
tuer que sept, et encore la dernière a-t-elle dû être laissée de côté comme im-
parfaite.
Ces quelques dessins permettent de constater la permanence des taches de
Mars, et leur ressemblance saisissante avec celles des dessins de Miidler.
Pour léclaircisscment de ces dessins, il est entendu que N. S. P. signifient Pôle
Xurd, Pôle Sud et Phase; par b' je désigne la neige ou du moins ce qui y ressem-
ble, au pôle nord.
I. 8 novembre 1804, 'J''3U"', heure de Vienne, a, b sont deux grandes taches
très sombres séparées par k. La couleur noire et la netteté des contours des trois
pointes de a est tout à fait remarquable; ics environs c, ij, It, i, k sont des um-
{') Mars in A'oi;e?7ii(t'>' 18G4. Sit:unijsbericlitc der K. K. Acad. der Wissenschaften
Wien, 1863, LUI, Band ; p. JO'J.
192
LA ri .\n(;ti: .mams.
8 novembre, à 9'' 30"
10 novembre, à 3i'30™.
15 novembre, à 9'' 30™.
Flg. 122. - Observations de la planète Mars, par von Franzenau, en 18b4.
ISG'j
FKLIX VON I'KAN/j:.NAL.
193
20 novembre, à 1'' 45"".
•20 novembre, à 9'' 20"
22 novembre, à 'j*.
ri?. 123. — Observations de la planète Mars, par vou Franzcnau, en ISGi.
1"'l.\m.\iaiuon. — Mars
13
191 I.A PI.ANKTK MARS.
bres grises ii pciue visibles, sans contours ueltcmcul arrêtés; .v, y, :, sont les
parties rouge clair de la plauètc.
II. 10 novembre, O^^SO". Les taches sont restées les mêmes, modifiées seulement
par la rotatiou. La tache 6 s'est beaucoup augmentée eu d; la bande /', que je
n'avais fait que soupçonner, apparaît très distinctement. Quant à la neige polaire
inférieure, elle se montre divisée en deux parties séparées par un intervalle sombre.
III. 13 novembre, Qi'SO'". Les progrès de la rotatiou commencent à influer beau-
coup sur la l'orme des taches. La tache a a perdu complètement son aspect pri-
mitif et descend beaucoup plus vers le Nord; b s'est encore agrandie vers c; quant
t\ cette dernière partie, elle est, ainsi que d, très faiblement éclairée dans les en-
virons de b; le continent rougeâtre x est arrivé vers le milieu de la figure et a
atteint son plus grand développement; s semble à peu près disparue, car les en-
virons du pôle nord sont presque aussi sombres que h et f. Tout l'hémisphère
nord semble couvert d'innombrables petits nuages gris.
IV. 20 novembre, T'^iô"». La tache a est tout près de disparaître, b a atteint le
milieu de la figure et, dans la partie ouest, c est ainsi que d plus nettement visible
qu'auparavant, u est une partie claire entre les taches b, c et d; quant à \v, c'est
une nouvelle tache rouge clair.
A remarquer l'extraordinaire obscurité de la tache f, qui semble se rencontrer
avec d.
V. 20 novembre, 9'',20'°. Ce dessin a été fait le jour même, deux heures plas
tard ; les taches principales sont plus rapprochées du méridien central de la planète
et présentent, par conséquent, plus de détails à observer; c est bien plus vaste et
plus net; u se distingue plus facilement, comme une séparation; f se réunit à d
au point q ; une nouvelle tache, ]?, est apparue.
VI. 22 novembre, 9^. L'intervalle entre ce dessin et le dessin n" IV embrasse
presque deux périodes de rotatiou de Mars. La seule modification est on r: la neige
du pôle nord semble s'étendre beaucoup plus vers le Sud, mais sans limites bien
définies. A remarquer la teinte sombre des parties nord de la tache b et de la
pointe de d.
Telles sont les observations de von Franzenau. Ce qu'elles offrent de plus
remarquable, c'est, d'une part, leur conformité avec celles de Béer et Mildler,
conduisant à l'opinion de la permanence des configurations, et, d'autre part,
un détail assez curieux, celui d'un isthme blanc au-dessus de la mer du Sa-
blier, visible sur les dessins IV et VI, des 20 et 22 novembre. (Nos lecteurs
ont reconnu cette mer dans la tache d. ) Était-ce une bande de nuages ? Ce
n'est pas probable, car on retrouve cette même solution de continuité sur
des dessins de M.ïdler en 1841 [voij. p. 119), W. de la Rue en 185G (p. 128),
lord Rosse en 1862 (p. 167). Est-ce une profondeur moindre, cl variable, de
la mer? Ces divergences seront discutées plus loin. Les dessins de Franzenau
nous conduisent donc encore à notre double conclusion ; permanence et
variaiions.
1864 J. C. ZÙLLM'K. SKIDI-L, SCIIMIDl. — IMIOTO.M I:T U 1 1:. 10.".
LVIII. Même année, 18G4. — Talmage. Si-Cfini, Uldolf Wolf.
Pendant celte même opposition de 18G4, M. ïalmage ('), observateur an-
glais, a remarqué, principalement à la date des li et 18 novembre, que le pôle
sud présentait une élévation très accentuée au-dessus du disque de la pla-
nète, élévation causée sans doute par un effet d'irradiation de cette intense
lumière blanche, réfléchie par la neige, et qui, mesurée au micromètre, attei-
gnait 2", 5. L'auteur fait remarquer que cette observation est identique à
celles faites par William Ilerschel, les 17 avril 1777 et 20 mai 1783 [voir
plus haut, p. 51, fi(j. 17 et p. 57, ft(j. 13).
Le 24 novembre, les taches de Mars ont paru plus distinctes que jamais, et
pourtant, ce jour-là, notre atmosphère était assez trouble; l'observateur croit
pouvoir en conclure (jue plus noire atmosphère est claire et moins les détails
de la planète Mars sont visibles. (Il avait observé Mars sans grand succès
en 1862, sous le beau climat de Nice.) Nous aurons lieu de discuter cette as-
sertion qui n'est pas tout à fait paradoxale.
Le P. Secchi a réobservé Mars pendant cette même opposition de 1864.
Nous avons signalé plus haut ces observations (p. 149).
Remarquons encore, parmi les études de 1864, celles de M. Wolf. de Zurich {-),
Dans le but d'obtenir une nouvelle détermination de la durée de rotation
de la planète, le savant directeur de l'Observatoire de Zurich a comparé
un dessin fait par lui le 19 novembre 1864, àlû''30"', avec un dessin de Secchi
du 26 septembre 1862, à 9''45'" [Voir plus haut, p. 146, /ig. 86, B) et a trouvé
pour cette durée
24" 37™ 22', 9.
LIX. Même année, 1864. — T. C. Zollxer, Seidel, Sghmidt, Pholométrie.
Zolhier et Seidel, physiciens allemands, ont fait, pendant cette même oppo-
sition de Mars, des observations photométriques (') d'oti il résulte que Mars
ressemble à la Lune quant à la variation de lumière réfléchie suivant les
phases et quant au grand éclat des portions marginales du disque. D'autre
part, Zullner trouve que Valbedo de Mars, c'est-à-dire son pouvoir réfléchis-
sant moyen, n'est guère plus grand que celui de la Lune, à peine de moitié
en plus. Jupiter et Saturne ont, au contraire, un grand pouvoir refléchissant.
La cause paraît due à ce que, sur ces deu.\ planètes, ce sont les nuages de
• i On an appearance prescnlcd by thc spots oa tlie planct Mars {Monlkly yolices
vl li. A. S., 1865, p. 193).
(•) Aslronoinischc Miltheilunrjen, n" '2-2, p. 57.
) Ptiotomelrischc Untersuchungen ; Leipzig, I8G5.
I9G 1. A ri. A M'; II- MARS.
leurs atmosphères qui réflcchisscnl la lumière solaire, tandis que, sur Mars,
c'est surtout le globe planétaire lui-même. Ces deux planètes ont un alhedo
respectivement quatre cl trois fois plus grand que celui du sol lunaire.
La dégradation d'éclat de la Lune, avant comme après la Pleine Lune, tout
aussi bien que le grand éclat du bord, peuvent être expliqués par les inégalités
de la surface. Zollner trouve que, pour (jue ces inégalités produisent les varia-
tions d'éclat observées, l'angle d'élévation moyen de ces inégalités devrait
être de 52° pour le sol lunaire. Dans la même bypollièse, les changements
iDcaucoup plus rapides de l'éclat de jMars demanderaient pour ses montagnes
un angle deTG" en moyenne.
Zolluer donne la Table suivante pour exprimer raI])cdo ou le [louvoir ré-
fléchissant, autrement dit l'éclat moyen, de cha(]ue planète
La Lune renvoie 0, 174 de la lumière reçue.
Ln Sable blanc « 0,237 »
Mars » 0,267 »
Saturno » 0,498 »
Jupiter )' 0, G24 »
Le papier blanc » 0.700 »
On voit que, d'après ces évaluations, Mars garderait les l'SÀ millièmes ou
plus des 7 dixièmes de la lumière solaire qui lui arrive, et n'en renverrait
dans l'espace que les 2G7 millièmes, tandis que Jupiter avec son atmosphère
nuageuse paraît presque aussi brillant que du papier blanc et renvoie plus
des 6 dixièmes de la lUmière qu'il reçoit. Mars utiliserait donc pour lui bien
plus de rayons solaires que .lupiter.
Seidel (') avait trouvé pour l'éclat de Mars relativement aux étoiles :
Mars en opposition = 2,97 x Véga,
soit près de trois fois celui de Véga, observations faites à l'aide du photo-
mètre objectif de Steinheil. Relativement au Soleil, Zollner a trouvé avec son
photomètre :
Mars en opnositiou = ■ ; x Soleil.
Cette détermination de Zollner correspond à une grandeur dètoilcs — 2,25.
Jules Schmidl (-) a déterminé, par de nombreuses observations, les dates
auxquelles Mars devient égal en éclat à diverses étoiles de première gran-
deur. Appelant r le rayon vecteur de la planète à un moment donné et A
sa distance à la Terre au même instant, il trouve, par exemple, que
Mars = Sirius, quand log = i/J-ii
A- r-
= Aldébaran — — 1,2.J8.
(') Bayerische Akademie der Wissenschaften, Mûnchen. 1850.
(') Asir. Nach., t. XCIIL 1880, p. 93.
l8Gi-l875
I.K i)' TF'IUJV. — OBSi: I5VAI IONS.
l'JT
LX. 18Gi;i 187.-). - Le Ir Ti:niiv.
M. F. Torhy, docteur es sciences, à Louvain, auquel l'.Vréograpliic e.sl re-
devable Je travaux si persévérants et si considérables, a lait une observation
a.ssiduo do la planète Mars depuis l'opposition d») 1864 jusqu'au moment oïi
nous écrivons ces lignes, et a pris soin d'en publier régulièrement les résul-
tats dans les Bulletins de r Académie des Sciences de Belgique. Les premières
observations de cet astronome ont été obtenues à l'aide d'une excellente lunette
Secrélan de lOB™", munie de grossissements de 120 et 180 fois, et parfois
même 240. Nous parlerons d'abord ici |de celles qui sont antérieures à l'op-
position do 1877. (]ui a commencé un nouveau cycle dans l'étude de notre
1" m.ii, h lO*" ;
10 in:ii. h lOl'ii
! J mai, .i .S''2J
,20 mai, ;i 8'' 40™. -ii mai, à 8'' 40'". 29 mai, a 8^Z0"
Fig. 124 . — Croquis de Mars, par M. Terby, en 1873.
planète. Les Notices présentées à l'Académie de Belgique par notre éminenl
collègue sont accompagnées de 23 dessins pour 1864 et 1807, 36 pour 1871,
12 pour 1873 et 22 pour 187.5. Les croquis de ces deux dernières années sont
ceux qui offrent le plus de détails. On y reconnaît notamment la mer du Sa-
blier, la mer Maraldi, le détroit Herschel II, la tache polaire boréale, ainsi
que l'australe. Parmi ces nombreuses figures, nous en reproduirons d'abord
six de l'année 1873 comme particulièrement intéressantes. Elles ont été prises
aux dates indiquées au-dessous de chaque dessin.
Dans ces dessins, la lettre a indique la mer Knobcl; la lettre b, l'océan de
a Rue ; la lettre c, la baie du Méridien et le détroit Ilerschcl II : la lettre d. la
198
LA PLANKTK M A US.
incr du Sablier; la Ictlrc r, la mer Delambrcct ses environs; la letlre^ la mer
Maraldi. Dans le dessin dn "^i mai. on voit en mu une scparalion, qui esl
assez curieuse, observée également le 2-2 mai. Cette division existe également
sur deux dessins de 187."), faits le 20 juillet. Sur le dessin du 20 mai 1873, ou
aperçoit en eh la passe de Nasmytli.
En 1871 et 1873, la tacbe la plus foncée et la mieux visible a été (comme
d'habitude d'ailleurs! , la mer du Sablier. L'atmosphère de Mars a paru plusieurs
fois assez trouble, notamment en 1871, pour elîacer les configurations el
interdire tout dessin.
Plusieurs dessins de 1875 offrent également un intérêt particulier. Le pre-
mier, du 1 i juin [fig. 125, A), fait à 1 1 ''30'", montre en m une dentelure et en
Fig. 12:..
li juin, il ]1''30"
1 1 juin, .'1 minuit.
17 juillet, a Oi-lO"
20 juillet, il Oliio™. 20 juillet, il 10i'20"'. 24 juillet, ii 8'''S0"'
Croquis de Mars, par M. Terby, en 187j.
d une pointe anguleuse très foncée. Cette longue tache grise, formée par les
mers Hooke, Maraldi et du Sablier,- se retrouve sur un dessin presque iden-
tique fait par Schrœter le 9 septembre 1798, à 9''55"' [Voir plus haut, p. 7i,
fig. 55). Or, cette pointe anguleuse sombre est la région droite de la mer du
Sablier, alors plus foncée que la région inférieure, comme on lo voit sur la
figure suivante, faite par M. Terby une demi-heure plus tard. On distingue
alors la partie inférieure que l'on n'avait pas aperçue plus tôt, et l'on s'ex-
plique, en regardant ce dessin d'un peu loin, que parfois on ait pu arrêter
la mer du Sablier à cette région plus foncée, comme dans le premier des deux
dessins. C'est encore là un témoignage incontestable en faveur des variations
de tons qui arrivent dans les mers martiennes, car parfois cette même région
s'est montrée plus claire que l'axe vertical de cette mer.
|86r. C. l'LA.MM.MUON. — M f- TKOHOf.Ofil l- MARTIENNI-. 100
Le troisième montre à gaiirlie de la mer du Sablier [d) une dentelure m et
une lan.que do terre en n, rappelant la séparation signalée tout à l'heure pour
18715, et que nous avons remarquée aussi dans les dessins de Franzenau
(p. 193) . Cotte même séparation se retrouve dans les deux figures du 20 juillet.
Les pôles sont marqués par une tache neigeuse; il y en avait même deux
au pôle inférieur, le 20 juillet, à 10''20"', ce qui rappelle encore un dessin
de Franzenau du 10 novembre 18G4, et un de Secchi du 16 novembre 18G2
IP. 1171.
Le dernier croquis montre la mer Maraldi et la baie de Iluggins et
rappelle une observation de Schrœter,
Ces observations de M. Tcrby conduisent aussi à notre conclusion perpé-
tuelle : permanence des taches fondamentales, mais variations réelles dans
les détails.
Si l'on se reporte à notre carte (p. 69), on reconnaît la nécessité de tracer
un 'banc de sable, une ligne de fond parfois découverte au-dessus de la
mer du Sablier, à gauche, obliquement, à travers la mer Flammarion.
L'ensemble des observations donne l'impression que ces eaux ne doivent
pas être très profondes.
LXi. 1865. — C. Flammarion. Recherches sur la planète }Iars (').
L'interprétation des observations de Mars est soumise à discussion. Dans
la revue scientifique le Cosmos du 26 juin 1863, nous avions discuté les obser-
vations de neiges polaires et émis l'idée que ces neiges pouvaient être dues à
une eau chimiquement différente de la nôtre; et nous avions en même temps
exprimé Fespérance de voir bientôt une mappemonde méridienne complète
deMars succéder aux projections polaires de Béer et Miidler ( Cosmos, 1863, 1. 1,
p. 751). En 1865, revenant sur le même sujet, nous constations que, d'après
les observations de 186 i, la ligne isothernie de 0" oscille comme sur la Terre,
pour les deux hémisphères, jusqu'à 45'' de latitude, ce qui paraît indiquer une
température moyenne peu différente de notre globe, malgré la plus grande
distance de Mars au Soleil. Mais, ajoutions-nous, « qui nous assure que le
degré de congélation de Icau terrestre et de cristallisation de notre neige
soit celui auquel se produisent sur cette planète les mêmes phénomènes? On
pourrait plutôt penser le contraire, puisque l'ébullition dépend du rap-
port spécial qui existe entre la vapeur du liquide et la pression atmosphé-
rique et que la congélation diffère semblablement selon les substances. C'est
aller trop vite et trop loin que de transporter les phénomènes terrestres sur
une région étrangère à celle où ils se produisent. » [Cosmos, 1865, t. II, p. 3151.
V)Co!<nios des G, 20 septembre et 11 octobre ISGô.
200 I.\ PI.AM'Th; MARS.
LMI. 1!^('>T. — ITuor.ixs, Src.nin : inalyne spectrale de ralmnaphcrc de Mars.
Nous avons vu plus liant (I8G2, p. 182), les premières recherches sur le
spectre de Mars, faites par Rutherfurd, Iluggins, Miller et Yogel. M. Iluggins
y constata la présence des principales lignes du spectre solaire, et Rutherfurd,
notamment, les raies C, D, E, ^ et G de Fraunhofer. A la séance de la Société
royale astronomique de Londres du 8 mars 18G7, M. ^\'illiam Iluggins pré-
senta sur ce sujet un nouveau mémoire dont voici le résumé.
"Mars ne hrille que par la réflexion de la luniiùre solaire. Son atmosphère
ahsorbe une partie de celte lumière et indique par son spectre quelles sub-
stances la composent. Dans la région bleue et indigo de ce spectre, les raies
ont paru trop faibles pour pouvoir être sûrement identifiées. Dans la région
rouge, la raie C du spectre de Fraunhofer est parfaitement visible et son
identité a été certifiée parles mesures du micromètre. A partir de cette ligne
jus ju'à l'extrémité la moins réfrangible du spectre, on aperçoit un grand
nombre de raies sombres. Une ligne très forte a été mesurée micrométri-
quemcDt au quart de la distance de C à B. Comme on ne voit rien d'ana-
logue en ce point du spectre solaire, on peut la considérer comme résultant
de l'absorption causée par l'atmosphère de la planète. Les autres raies dans
le rouge peuvent être identifiées, au moins en partie, avec C et a, ainsi qu'avec
les lignes voisines du spectre solaire.
Le 14 février 1867, l'observateur remarqua des raies faillies des deux eûtes
de la ligne D. Celles du côté le plus réfrangible étaient plus fortes que celles
de l'autre côté. Elles occupent des positions qui paraissent coïncider avec
les groupes que l'on voit lorsque la lumière solaire traverse les couches infé-
rieures de l'atmosphère et qui sont produites par l'absorption de gaz ou de
vapeurs, notamment de la vapeur d'eau. Ces lignes indiquent probablement
l'existence de substances semblables dans l'atmosphère de la planète. Elles
n'étaient pas causées par l'atmosphère terrestre, car elles étaient absentes
au même moment du spectre de la Lune, quoique celle-ci fût alors à une
moindre altitude que Mars.
M. Huggins a également observé le spectre des portions les plus sombres
du disque de Mars, c'est-à-dire des mers. Leur spectre est beaucoup plus
faible dans toute sa longueur. Les matières qui forment ces régions foncées
absorbent également tous les rayons du spectre. Nous pouvons en conclure
que, comme couleur, elles sont neutres ou à peu près.
La couleur rouge de Mars ne doit pas être attribuée à une absorption élec-
tive, c'est-à-dire à une absorption de certains rayons seulement qui produi-
raient des intervalles sombresdans son spectre. D'ailleurs, il n'est pas probable
ISG7 IIL'(;(W.NS, SKCnil - SPrCTROSCOI'IK. 201
que cette coloration si cai-acti-ristique ail son origine dans l'atmosphère de
la planète, car la lumière réflèciiic des régions polaires reste blanche, quoi-
qu'elle ait traversé une plus longue épaisseur d^atmosphcre que celle qui
nous arrive des régions centrales du disque; c'est dans ces régions centrales
que la couleur est la plus marquée. Elle tire certainement son origine de la
surface de la planète.
Les observations photomélriques de Seidcl et Zolluor confirment cette
interprétation. Elles montrent que Mars ressemble à la Lune, quant à la va-
leur anormale de la variation de la lumière réfléchie selon l'accroissement ou
le décroisscment de la phase, et également pour le plus grand éclat des régions
marginales du disque. De plus, Zullncr a trouvé ( p. 196) que l'albedo de Mars,
c'est-à-dire le pouvoir réfléchissant des diflerentes parties de son disque,
est seulement une fois et demie plus grand que celui de la surface lunaire. Ces
caractères optiques s'accordent avec l'observation télescopique pour montrer
que, dans le cas de Mars, la lumière solaire réfléchie vient presque entière-
ment de la vraie surface de la planète, et non pas d'une enveloppe de nuages
comme pour Jupiter et Saturne. Dans ces deux dernières planètes, le disque
est moins brillant sur les bords que dans la région centrale. Nous avons vu
plus haut que ces deux planètes ont un albcdo quatre et cinq fois plus
grand que la Lune.
En même temps que Iluggins s'occupait de cette question en Angleterre,
et Zollner en Allemagne, en Italie, le P. Secchi étudiait de son côté les pla-
nètes Jupiter, Saturne, Uranus, Mars et Neptune dans ses recherches spec-
troscopiques sur les corps célestes (').
« Mars, écrit-il, a montré des raies atmosphériques terrestres, assez faibles
au centre du disque, mais fortes vers le bord; ce qui prouve l'existence d'une
atmosphère analogue à la nôtre. » L'auteur donne plus loin deux observa-
tions, des 1 r février et 28 avril 18G9, qui se bornent à témoigner d'une zone
nébuleuse voisine de la raie G et d'une autre dans le rouge extrême. Les
atmosphères de Jupiter, Saturne et Uranus diffèrent beaucoup plus de la
notre.
L'atmosphère de Mars paraît faible et raréfiée : '< La sua atmosferac assai
piccola e sotile. »
La même recherche a été reprise en 187'2 par Vogel en Allemagne, et les
résultats ont confirmé ceux de Huggins et Secchi, quant ii l'existence sur
Mars d'une atmosphère analogue à la nôtre au point de vue de la vapeur
d'eau qui donne naissance aux raies observées. Nous retrouverons plus loin,
en 1872, les recherches de Vogel sur le même sujet.
{'} Sufjli Spetlri iirismalici di Corpi celoiti. ! lu-. in-S; Rome, 1SG8. 1 lu-, n-'i,
Home, 1S72.
20Î Ï-A PLANÈTE MAHS.
LXIil. 180)7-1873. — John Browning, Darnes, Johnson, Elger,
Grover, Knight, Backhouse, Noble et Williams.
Le premier de ces observateurs, John Browning, excellent constructeur
d'instruments d'optique à Londres, a publié dans The Intellcctual Observer
huit chromo-lilhographios de Mars, d'après ses dessins faits du 8 janvier au
24 février 1867.
Il a également présenté à la Société astronomique de Londres, le 10 mai 1867,
une série de treize dessins coloriés (y compris ceux dont nous venons do
parler), faits par lui, du 29 décembre 1866 au 24 février 1867, à l'aide d'un
télescope à verre argenté de 8 pouces ^, construit par Barnes. La colora-
lion du disque varie depuis le rose jusqu'à l'ocre, la nuance étant d'autant
plus rouge qu'il y a plus d'humidité dans notre atmosphère. Les bords du
disque sont très pâles. Les taches sombres sont d'un gris bleuâtre ou ver-
dàtre.
On a vu assez fréquemment de légères taches blanches paraître sur le disque,
être emportées par la rotation et devenir presque aussi blanches que les
neiges polaires en approchant du bord du disque. Ces nuages étaient, en gé-
néral, mal définis dans leurs contours et de formes circulaires. On les a
toujours observés dans la région de l'équateur.
Le 31 mars, à 7 heures, on a fait un dernier dessin qui correspond exacte-
ment à celui qui avait été obtenu le 23 février, à 9 heures. « Dans ces deux
dessins, écrit l'auteur, la tache désignée habituellement sous le nom de mer
du Sablier [Hour-Glass Sea), est représentée comme venant de passer au
centre du disque de la planète. »
Le constructeur Barnes a fait en môme temps des dessins de Mars qui
s'accordent très bien avec ceux de Brov^^ning. Dans cette double série, on
retrouve également deux vues identiques cà celles de Warren de la Rue, re-
produites plus haut ; mais elles n'offrent qu'une lointaine ressemblance avec
celles de Secchi, et pas la moindre avec celles de Béer et Mâdler.
Browning a construit en 1868 un globe de la planète Mars, d'après la carte
de Proctor, dont nous allons parler, et en a tiré des vues stéréoscopiques
assez curieuses. Depuis plusieurs années, Warren de la Rue avait obtenu
d'excellentes vues stéréoscopiques directes de la Lune, en combinant entre
elles des époques de libration correspondant aux mômes phases et donnant
un angle suffisant pour le relief. (L'angle est même un peu trop grand sans
doute, car nous ne voyons pas d'autre cause à laquelle nous puissions attri-
buer la forme ovale trop allongée de ces vues stéréoscopiques de la Lune. )
Parmi les autres observations faites en 1867, signalons celles de MM. Joyn-
18(iT WH-MA.MS. — PIlOCTOIl. 203
son, Klger, Grovcr cL Kiiight en Angleterre. Un trouve dans The Aslronomical
Rcgiatcr des études faites pendant l'opposition de 18G7 parles observateurs
dont nous venons de ciler les noms. La conclusion des premières est que,
près du pùle sud, il y a une bande permanente. M. Elger remarque que
la coloration du disque est toujours plus forte dans la région centrale
que vers les contours et que les taches s'elîacent vers ces bords, liien de
nouveau.
La bande australe que M. Joynson croit continue est celle que nous avons
remarquée dans les dessins de M. Terby, de 187.5. Elle est formée par la
presque continuité des mers Maraldi, Hookc, Flammarion, du Sablier, océan
Dawes, océan de la Rue, mer Gottignez et mer Schiaparelli (voy. p. G9).
Signalons encore pour cette époque les observations de T.-W. Backhouse,
faites pendant les oppositions dç 18G7. 1809, 1871 et 1873. Elles n'ajoutent
rien de nouveau aux précédentes.
MM. Noble et Williams, dont nous avons déjà parlé plus haut (p. 173), ont
Fig. 12G.
Croquis de Mars, par Williams, le 11 janvier ISC7 a 11'' 40,
pris cette mcrfte année 1867 de nouveaux croquis, peu détaillés en général.
Nous signalerons, parmi ceux de M. Williams, celui que nous reprodui-
sons ici, du 11 janvier [fig. 126). Télescope de 4 pouces { d'ouverture. On y
remarque une solution de continuité dans le détroit d'iîcrschel, corres-
pondant probablement à celle qui est indiquée sur la carte de Kaiser
(p. 181), au 130*" degré de longitude. La neige polaire inférieure ou boréale
était fort étendue.
LXIV. 1867-1877. — U.-.V. Pnor/roii.
Nous devons à Richard-Anlhony I'uoctou, né en 1837, mort en 1888, de
1res importants lravau.\ sur l'Aréographio. 11 coinmença, en 18G7, par ron-
204 i.A PI A.NKTi: M \ns.
struiro une carte (') d'après les dessins de- Dawes dont nous avons piésenlc
plus haut (p. 1 86- 187) les principaux.
Nous avons vu (p. 107) le premier essai de carlographic de la planèlc
^lars dil aux travaux de Béer cl de Madler, d'après leurs observations de
1830 h 1837, en Allemagne, et plus tard (p. 181), le planisphère construit par
Kaiser d'après ses observations faites en Hollande en 1862 et 186-'i. ainsi que
celui de Phillips. d'Oxford, d'après ses observations faites en Angleterre a
même année (p. 190). A ces trois essais, nous pourrions ajouter celui du
P. Secchi, d'après ses observations faites à Rome 'en 1858, et celui que nous
avons tracé, pour l'hémisphère le mieux connu de ^lars, dans la deuxième
édition de notre ouvrage sur la Pluralilé des Mondes habiles (1864).
Les dessins de l'astronome anglais Dawes ayant apporté une précision
nouvelle dans la connaissance du monde de Mars, Proctor, son compatri'otc,
voulut les appliquer à une cartographie aussi complète que possible, et
construisit, d'après eux exclusivement, la carte que nous reproduisons ici
(fig. 127), et qui est la première carte publiée avec un système de nomen-
clature déterminé.
Une nomenclature, des dénominations fixes, s'iuiposaient d'ailleurs. Tant
que, sur la représentation d'une planète par le dessin, il n"y a qu'un très
petit nombre d'objets, quelques lettres suffisent pour les désigner. On peut
dire la tache a, la tache b, la tache c, etc. Mais, lorsque les détails se mul-
tiplient, de telles désignations deviennent insuffisantes et impropres aux
comparaisons. Des noms se fixent incomparablement mieux dans l'cspriu
C'est d'ailleurs ce qui arrive également en Géographie. L'indication d'une
contrée par une lettre, par un chiffre, par sa position précise même, est
tellement insuffisante pour l'esprit, que, dès sa découverte, l'île la plus mé-
diocre se voit baptisée d'un nom déterminé qui la distingue de toutes ses
sœurs. Les noms sont indispensables en tout, même, et peut-être surtout,
dans la grande famille humaine. On ne s'imagine pas facilement les hommes
existant sans noms 1
Malheureusement, il y a toujours une grande part laissée à l'arbitraire
dans la conception des nomenclatures géographiques, comme pour les autres,
d'ailleurs. Il a paru tout naturel, dans le cas de la planète Mars, de suivre le
système qui a prévalu dans la nomenclature lunaire. La Lune a été le pre-
mier globe céleste dont on ait pu tracer des cartes géographiques ; Mars est
le second, car ce que l'on a essayé, dès le xv!!!*" siècle, pour Vénus, est extrè-
C) Cliavt of Mars, from 27 drawinrjs by M' Dawes. — Ilalf-hours witli Ihe téle-
scope, London, 18C9, pi. YI. —Ollier Worlds Ihan Ours, London, 1870, p. 92.— Tkeorbs
around us, London, 1872, frontispice. — Essays on Aslronomy, London, 1872, p. GI. -
Flowers oftheShy, p. 107.
I
ISG7-IS77
H. -A. puocron. - A lu: 0 G II Al' Il 11-:.
20b
mcmcnt inoerlain, cl Mars cf.1 la seule planète dont on connaisse assez sûre-
ment les ronfi.iiîurations géographiques pour on dresser la carte. Il a semblé
(ju'en donnant (\^ia noms aux continents ot aux mers de cette planète pour les
distinguer, les reconnaître, les limiter et en étudier les formes exactes, on
devait choisir de préférence ceux des astronomes célèbres et ceux des sa-
vants qui se sont le plus occupés de l'étude de la planète, sans distinction
de nationalités terrestres, naturellement.
On a reproché à Proctor d'avoii- fait la part un peu trop largo aux astro-
Kig. 127.
CarLe de la planète Mars, par R.-A. Proctor, en 1867.
nomes de son pays, et d'avoir répété les mômes noms. Le premier reproche
serait excusable. Mais ce qui n'est pas sans inconvénient pour la clarté, c'est-
à-dire pour le but même de la nomenclature, c'est que certains noms y sont
répétés plusieurs fois, ce qui peut amener des confusions que l'adoption
d'une nomenclature a précisément pour but d'éviter. Ainsi, le nom de Dawes
n'y est pas inscrit moins de six fois (Dawes Océan, Dawes Continent, Dawes
Sea, Dawes Strait, Dawes Isle, Dawes Bay) ; Ccer deux fois (Bccr Sea et Bcer
Bay); Lockyer deux fois (Ijockyer Land et Lockyer Sea); Phillips deux fois
(Phillips Sea et Phillips Island), etc; doubles emplois qui auraient pu être
occupés par des noms d'une valeur non moindre, tels que ceux de Galilée,
llalley, Lalande, Lambert, Leverrier, ou d'observateurs de Mars, tels que
Galle, Schmidt, Lassell, Knott, Green, Franzenau, Yogel, etc. Ces défectuo-
sités dans la nomenclature expliquent que plusieurs astronomes aient été
liorlos à la niodiller.
Mais c'est l;i une considération insignifiante au point de vue de la géo-
•206 LA Pl.ANKTH MARS.
graphie intrinsèque de la planèle, autrement dit de raréographic. Proctor
a rendu un service émiuent à la science en construisant la première
carte aréographique bien délimitée, en jetant pour ainsi dire les bases de
rAréographic, et, ne serait-ce que pour ce progrès — auquel se joignent
un nombre considérable d'autres travaux, — le nom de Proctor restera in-
scrit en caractères ineffaçables dans l'histoire de la première des Sciences.
Ce laborieux astronome s'est occupé, dès l'origine de ses travaux sur Mars,
d'obtenir une détermination aussi précise que possible de la durée de rolaUon de
la planète. A la séance de la Société astronomique de Londres du 14 juin 1867.
il présenta un premier essai sur ce sujet. Reprenant des comparaisons ana-
logues à celles que nous avons eu plus haut sous les yeux dans les détermi-
nations de Cassini, Maraldi, Herschel, Schrœter, Béer etMadler, Kaiser, etc.,
et comparant entre elles les vues dessinées par Dawes, il trouve pour cette
durée
88 643 secondes, ou 2i''37™23^
Assuré que ce nombre est très rapproché de la réalité, il compare les ob-
servations de Dawes avec celles d'IIerschel, puis avec celles de Ilooke, et
trouve définitivement
2'ih37'"22s745rr0s005.
79 révolutions sidérales de la Terre sont égales à 42 de Mars, à deux jours
près.
Le même auteurest revenu sur le même sujet à la séance du 10 janvier 1868.
Comparant les dessins pris par Browning en janvier et février 1867 avec
ceux de Dawes en 1864 et 1856, il en choisit trois bien nets et bien précis
[Dawes, 24 avril 1856 et 26 novembre 1864, et Browning, 23 février 1867) dans
lesquels la mer du Sablier est proche du méridien central, et comparant
ensuite ces trois croquis avec celui de Hooke du 12 mars 1666 {voij. p. 27,
firj. lô), il trouve :
Correction
Intervalle pour la longitude Correction lutervallo Nombre Période
en secondes. géocentrique. pour la phase. corrigé. de rotations. résultante.
1 5999524200 0' —12- 5999ô2124Gs 67682 88642%737
2 6270050760 —248 G G270589696 70740 88642,734
3 G34I394300 —273 ^ 3 6341320590 71538 88 642,73-1
Le nombre qui résulte de ces comparaisons, comprenant 201 années d'in-
tervalle, est donc la moyenne des trois périodes ainsi conclues, c'est-à-dire de
88642,735 ou 24^37'° 22», 733.
L'erreur probable de ce calcul ne dépasse pas 0%00o.
1807-1877 11. -A. PUOCTOIl. — PKIllODK DK UOTATION. •207
Ueprenant encore la même queslioii en 18U'J, le même auteur trouve,
à l'aide d'un dessin l'ait spécialement dans ce but par Browning, le 4 fé-
vrier 186'J,
241' 37'» 2-2% 730.
11 en conclut que le premier nombre doit être adopté.
Kaiser avait trouvé 24''37'" 22% G2 ; mais cette dilTérencc de 0' , 1 15 produirait
pour l'année IGGG un diiïércncc de 2''20"', ce qui aurait éloigné la mer du
Sablier à 50" du centre, tandis que sur le croquis de Ilooko elle n'en est
qu'à 18" : celte mer n'aurait pas été visible du tout sur le cro(]uis de llookc
cl aurait été perdue dans la brume des bords du disque.
Proctor reprit encore la morne question en 1873. Cette différence de -,V de
seconde a été l'objet d'une recherche nouvelle. Il a trouvé qu'elle est due à
une légère erreur de calcul. En comptant le nombre do jours écoulés entre
le 13 août 1G72 et le 1" novembre i8G2, le directeur de l'Observatoire de Lcyde
a trouvé 6947G jours : c'était deux jours de trop, parce que l'auteur avait
oublié que les années 1700 et 1800 n'ont pas été bissextiles.
De plus, Kaiser aurait écrit pour l'observation de Hooke 14 mars au lieu
de 13 mars. L'auteur reproduit la figure de Iluygens que nos lecteurs ont
vue à sa date (13 août 1672, p. 32) ainsi que celles de Hooke (12 et
13 mars 1GG6, à minuit 20'" et minuit 40°", p. 27). les considère de nouveau
comme pouvant tout à fait servir de base sérieuse pour la détermination de
la rotation par la mer du Sablier qu'elle représentent, et conclut que la durée
de la rotation diurne de la planète est certainement comprise entre
24''37>"22s71
et
24ii37in22s 7 "2.
Nous pouvons donc adopter, comme période très approchée de la réalité,
cl en nous bornant aux dixièmes de seconde :
24'' 37"' 22% 7
11 s'agit là du jour sidéral, de la vraie durée de rotation, cl non du jour
solaire. Le jour sidéral terrestre étant de 23''5G"4', 09, on voit que la période de
rotation de Mars est de 41'" 18% G plus longue que la nôtre.
Proctor s'est occupé de la planète Mars dans la plus grande partie de ses
ouvrages, jusqu'au dernier, dont la publication venait de commencer lorsque
la mort arrêta ses travaux. Nous y reviendrons plus loin.
20S I.A PLANKTK M A II S.
I.W. I8TI-I873. — Lkiiardelav, Croslly, Glediiim., J^urtun, Denning,
WiLSOX, GUVON, LOWDON. JOYNSON, Sl'EAll.
M. Lehardclay, observateur à Fontenay (Normandie), a lait en celle année
1871, si troublée d'ailleurs, un certain nombre d'observalions à l'aide d'un
objectif de Steinlieil de lG-2'""' d'ouverture ('). Ces observations ont eu lieu
les 2, 11, 13, 23, 24 mars et 23 avril. La neige polaire boréale était bien visible.
Fig. 128.
Croquis (le Mars par M. Lehardclay, 23 mars 1871, 10'' 30™.
La soirée du 23 mars a été l'une des meilleures. On apercevait aussi la neige
polaire australe. La planète paraissait couverte par deu.x taches en forme de
lobes arrondis, très légèrement festonnés sur leurs bords contigus, de cou-
leur jaunâtre, et séparés par une ligne grise d'une grande ténuité. Nous
reproduisons ici le dessin de ce jour, publié par M. Terby (-)\ il a été obtenu
à l'aide d'un grossissement de 547 fois. Ce qu'il offre de plus curieux, c'est un
fleuve, ou plutôt un canal qui porte le nom de baie Burton sur notre carte
[voy. p. G9) et celui d'/.s-^/i me sur les dessins de Secclii [voy. p. 138).
X l'Observatoire d'Halifax, M>L Crosley et Gledhill se sont consacrés à
Fis. 129.
Mars le 4 avril 1871, a W^. Dessin de M. Gledhill.
l'observation de Mars pendant cette opposition peu favorable de 1871 et en
ont publié six croquis dans The Astronomical Register (''). La tache polaire
(') Bulletin de l'Associntion Scientifique de France, ^\ décembre 1871, p. 2VJ.
{') Aréographie, PI. III.
{') Octobre 1871, p. 233.
I871-IS73 CHOSLFV. (iLKDllll.l., 111 HTON. — OESSINS. 200
iiiléncurc ou Ijoréalo est relevée vers la Terre et se nioiUre ronde et bril-
lante. (Ml reconnaît la mer du Sablier, et la région circumpolaire australe se
nioiilrc enlourcc, vers le 30* degré de latitude, d'untî bande sombre, doù trois
langues descendent vers le Nord. Sur deux croijuis on remarque, contiguë à
la tache polaire inférieure ou boréale, une tache sombre en forme de ballon,
dont la pointe toucherait la neige polaire. (Cette figure ressemble un peu à
celle de IJurlon du 23 mars 1871, (^ue l'on verra tout à l'iieure, celle de Gled-
hill est du même jour et de la môme heure : la configuration était donc cer-
taine. ) Nous indiquons ces six dessins sans les reproduire, on les retrouvera,
en lithographie, dans la publication précitée ; nous donnons seulement
[pg. 129) celui du 4 avril 1871 (11'') : les deux caps polaires sont en vue; la
mer du Sablier est au méridien central.
Le solstice d'été de l'hémisphère nord de Mars est arrivé le 2 mars; l'oppo-
sition, le 19 mars.
M. C.-E. Burton a fait à Longhlinstone en Irlande, à l'aide d'un télescope
ncwlonien de 12 pouces ('), d'excellentes observations en 1871 et 1873, et
les a continuées pendant l'opposition de 1879. Nous aurons lieu plus loin,
dans notre troisième période, comprenant le cycle fécond de 1877-1892, de
nous occuper des dernières et de la carte qui en est résultée. Mais nous
devons signaler dès à présent les dessins de 1871 et 1873.
Le point capital des observations de M. Burton est qu'il conclut à des
changements considérables à la surface de la planète. Trois dessins de 1871
et quatre de 1873, et, en général, tous ceux qui représentent ce côté de la
planète, portent une immense tache sombre en forme de poire ou de ballon,
correspondant à la mer Tycho. Elle est voisine du pôle nord et appartient au
cercle polaire boréal.
.V l'époque des observations. Mars tournait en effet vers nous son pôle
inférieur ou boréal. Cette tache paraissait très sombre, d'un vert bleuâtre.
« Si c'est une mer, écrivait l'auteur, l'affaissement a considérablement
surpassé en étendue et en vitesse ce qui est jamais arrivé d'analogue à la
surface de la Terre depuis les temps historiques. »
Cette curieuse observation confirme encore nos déductions précédentes.
Nous reproduisons ici {fi(j. 130-131) deux des dessins de M. Burton re-
présentant cette mer, faits le 23 mars 1871 et le 7 avril 1873. Plusieurs
observateurs ont vu la mt-ine forme, notamment M. Terby, à Louvain,
le 12 mai 1873, et l'auteur l'a revue constamment pendant les observations
de 1873. Celte tache, remarque-t-il, était aussi apparente et aussi caractéris-
tique que la mer du Sablier.
(') Transactions of Ike royal Irisli Academu, vol. XXVI, p. Vil.
Klammaiuux. — M-tr.t. li
•:io I A iM. \m:ti: m a us.
M. lUirloii a cgalcmcul dessine l;i iiior du S;ihliri' eu ircxccUontcs ciicoii-
slances, par exemple dans ses vues du 7 avril et du i mai 1871. (]iuMiousrepro-
Dessins de Mars, par UurLon. La mer Tycho en 1871 et 1873.
duisons aussi [fifj. 132. 133). On remarque dans la première, à gauche de la
mer du Sablier, une région variable sur laquelle l'attention sera appelée plus
l-'ig. i:;-2, i:]3.
•-- ■ •■■ — ""S, par Burton. La mer du Sablier un \x.'ii
lard, et adroite, un cap très pointu (le cap Banks) qui se présente générale-
ment sous l'aspect figuré sur notre carte (p. 69).
On a vu souvent, sur la droite du rivage de la mer du Sablier, au point indi-
qué par un cercle ponctué sur la firj. 134, une tache blanche extrêmement
brillante. L'auteur pense quxdlc indique la présence d'un plateau très élevé,
situé non loin du tropique, et couvert déneiges. « Summilsofaclusterof loftv
IR7 1-1873
lu'irroN, wii.soN, — dhssins.
211
iiioiiiilaiiiï;, or au liiL;li Tahlc-laiitl ». (le iilaloau alpestre serait situé dans la
zone lr()[)icale.
*
\ ;3c£?ïf^^^^K- /
Fig. [o'i. — CrO(iuis ilc Mai-s.jiar IJurton, 2i mai 1.S7.5, iinliiiuaut la posilioii d'un idateau neigeux
sous les troi)ique.'5.
Signalons encore le dessin du 29 mai 1873 (/Ig. 130), sur lequel ou constate
Fig. lob. — Vue de Mars, le i'i mai 1873 ( Ijurton ), iiiuutranl le banc de sable
au-dessus de la mer du Sablier.
une ligne de séparation entre la mer du Sablier et la mer Ilooke, à travers la
mer Flammariofi. Nous avons déjà parlé de cette ligne à propos des dessins
de Franzenau et Terby et nous l'avons reconnue sur des dessins antérieurs
( voy. p. 194 et 199). Il y a certainement là un banc de sable parfois découvert.
M. Wilson a l'ait en 1871 à lûbservatoirc de Rugby un certain nombre
Fig. ioG. — Mars le i mai 1871, à 'J^-M"'. Dessin de M. NVilson.
de dessins fort intéressants aussi. Nous reproduisons [/iy. 130) celui du
2i2 LA IM. Wr.Tl'. M AHS.
•I mai 187 L à 0''30"', à raide i.raii réfracteur de 8 4- pouces, nimii (ruii
grossisscmcnldeSOO.M.Wilsonafailpendantcoltcopposilion.ainsiqu'eu 1877,
plusieurs dessins de Mars, qui rappellent surtout ceux de Béer et Miidlcr.
A ces éludes ajoutons encore pour 1871 et 1873, celles de MM. Denning,
Guyon, Lowdon, également en Angleterre. M. Guyon a fait notamment six
dessins en 1871 et dix en 1873. Ces croquis ne changent rien aux données
précédentes.
Signalons aussi, pendant celte même opposition, les observations de
M. John Joynson à Waterloo, près Liverpool, et celles de M. J. Spear, à Ghur-
krata, au Bengale ('). Le premier remarque que la neige polaire boréale était
beaucoup moins étendue qu'en 1867 et offrait à peu près l'aspect de celle du
pôle sud. en 1862. « Le canal en forme de verre de vin, « Wine-glass shaped
a channel «, ajoute l'auteur, est certainement permanent, ainsi que la mer
qui le domine. »
.\u Bengale, M. Spear remarque, à la date du 9 novembre 1870, que « la
neige du pôle nord offre un éclat d'une intensité remarquable. »
LXVL 187'2-1873, — D"" Vogel. Analyse spectrale de l'atmosphère de Mars (-).
L'habile astronome-physicien de l'Observatoire de Bolhkamp a observé
Mars dans le but de continuer les recherches spectrales dont nous avons
parlé plus haut, les 19 novembre 1872, 2, 20 et 22 avril et 3 juin 1873. Il
donne en détail, dans le Mémoire cité ci-dessous, la position et les longueurs
d'onde de 25 lignes de ce spectre. Voici le résumé des résultais obtenus :
a Dans le spectre de Mars, on retrouve un très grand nombre de raies du
spectre solaire. Dans les portions les moins réfrangibles du spectre apparais-
sent quelques bandes qui n'appartiennent point au spectre solaire, mais qui
coïncident avec celles du spectre d'absorption de notre atmosphère. On peut
conclure avec certitude que Mars possède ime atmosphère qui, pour la compo-
sition, ne diffère pas essentiellement de la nôtre, et doit être riche, en particu-
lier, en vapeur d'eau. La coloration rouge de Mars semble résulter d'une
absorption qui s'exerce généralement sur les rayons bleus et violets dans
leur ensemble; au moins il n"a pas été possible de discerner, dans cette
portion du spectre, des bandes d'absorption tranchées. Dans le rouge, entre
G et B, on devine des raies qai seraient spéciales au spectre de Mars; mais il
n'a pas été possible de fixer leur position, à cause de la trop faible intensité
lumineuse. »
(') Monthly Notices, 1871, p. 208 et 2G2.
(') Untersuchungen ucber die^[jeclra der Planeten, verfassl von D' H. -G. Vogkl.
SlerriMarle zu Bolhkamp. Leipzig. 1874.
IS73 C. KI.A.M.MAHION. - OUSF. |{ V A TIONS. Î13
Vocel pense avoir idenliné \o^ lignes suivantes du spcctro do Mars avec
celles du speclre solairo, ronimo litrnes d'absorption ducs à l'atmosphère,
dites lignes telluriques.
Longueurs U'omlcs.
^■'O : / • . . ,.
roA \ près 0 (le IJrewstor.
5oO : )
*' [ ''Pnes telluriques près U.
G28,0 a.
G48,8 raie assez sombre.
055, G iiffiies telluriques près C.
G87,8 B.
Nous continuerons l'examen de ces recherches speclroscopiques sur
l'atmosphère de Mars en 1877. Elles seront plus complètes et plus précises.
L.W II. 1873. — C. Flammarion. Observations de la plaucte Mars.
L'opposition qui a eu lieu pendant le printemps de l'année 1873 a placé la
planète en de bonnes conditions d'observation. Voici le résultat des études
que nous avons faites nous-nième sur sa surface, à l'aide d'une lunette de
Secrétan, de 108""" d'ouverture. Grossissement habituel 202, rarement porté
à 288, souvent réduit à 1.50, en raison de la faible élévation de la planète au-
dessus de l'horizon.
Nous reproduisons ce résumé tel que nous l'avons présenté à l'Académie
des Sciences (M.
Pendant la période d'opposition qui vient de s'écouler, la planète Mars
nous a découvert son hémisphère septentrional, qui est moins connu que
son hémisphère sud. Le pùle nord, fortement incliné vers nous, se décèle
lui-même par une tache blanche très brillante qui, dans certaines conditions
de transparence atmosphérique, semble dépasser le contour du disque.
Cette calotte polaire n'est pas actuellement très étendue; elle offre parfois
à l'œil l'impression d'un pois blanc qui scintillerait sur le limbe inférieur
du disque, et sa position indique que le pôle se trouve à environ 40 degrés
de l'extrémité inférieure du diamètre vertical, dans la direction de l'est
'image renversée dans la lunette astronomiijue). Les neiges polaires boréales
ne s'étendent pas actuellement au delà du 80® degré de latitude aréogra-
phique. On sait qu'elles couvrent parfois une étendue beaucoup plus consi-
dérable, puisque, dans certaines années, elles ont dépassé le GO*" degré. Les
variations des neiges australes paraissent plus grandes encore.
[') Comptes vendus des séanci's de l'.\r:i<li''iiiie des ^Sciences, t. LXWII, p. 278.
séance du 28 juillet 1873.
■:\\
I \ Pl.AM-.TI' M AHS.
Il y a très proliablenicnl une mer polaire autour du pôle nord, car une taclic
sombre y esl constamment visible, quelle que soit la face que la rotation do
Mars amène devant nous. Cette mer polaire paraît s'étendre jusque vers le
45° degré de latitude, et nirine au delà, en ecrtains points; mais elli' doit
être partagée on deux par une langue do lorro (jni s'étendrait du G 5" au
iy degré. Ouclle que soit cette terre intermédiaire, que l'on distingue à peine,
la mer s'étend, d'une part, jusqu'à la glace, c'est-à-dire jusqu'au 80" degré au
moins, et, d'autre part, jusqu'au 4.5".
l'ne méditerranée longue et iHroito cour! du nord au sud, ol rejoint une
Fi-'.'i:,7.
^'lle de la planète Mars, le 29 juin IsTli, à 10'' tki soir.
vaste mer qui s'étend au delà de l'équateur dans l'hémisplière sud. Entre
l'extrémité septentrionale de celte méditerranée et la mer Ijoréalc dont je
viens de parler, il y a une autre énigme. Ordinairement cette méditerranée,
cette passe, semble réunir les deux taches. Parfois on croit distinguer à
l'extrémité septentrionale une solution de continuité, et môme un retour
à angle droit. Ce détail n'empêche pas la physionomie générale d'être telle
qu'elle vient d'être décrite : pôle nord marqué par une pclile tache très
blanche, mer boréale s'étendant dans le .sens des latitudes, large fdct d'eau
s'étendant dans le sens des longitudes, et mer australe considérable.
Mars est actuellement dans la saison d'automne de son hémisphère nord.
La plus grande partie des neiges polaires boréales sont fondues, tandis
qu'elles s'amoncellent autour du pôle austral, invisible pour nous. La région
I
I.ST;"! •■. II.A.M.MAIIIO.N. — OUSK U \ A IIONS. -215
sud csL \ isiitli'un.'iil inarcjiK'c iruiie traînée lilaiicho près des bords. Ksl-ce la
neige qui descendr.iil jus(ju"au iO" degré di- latiliidc sud? Il csl plus pro-
bable que ce sont dos nuages.
L'étude détaillée de la planète montre (|uc sa surface est bien dllFércnte
de la surface terrestre, au point de vue du partage des teri-cs et des mers.
Chez nous, les trois (juarts du globe sont couverts d'eau; sur Mars, au cor.-
traire, il y a plus de surface continentale que de surface maritime. Toute-
fois, l'évaporation y produit des effets analogues à ceux ijui constituent la
météorologie terrestre, et l'analyse spectrale montre que l'atmosphère de
Mars est chargée de vapeur (rcau comme la nôtre, cl (]ue ces mers, ces neiges,
ces nuages sont récUonicnl composés de la même eau i\iu' nus mers et nos
météores aqueu.\.
Il m'a seml)lé que la coloration rouge des continents est moins intense
celle année qu'en général. On a souvent discuté la cause de cette coloration,
et d'abord on l'a attribuée à l'atmosphère; mais cette explication a été rejetéo
puisqu'il est constaté que les bords du disijue de la planète sont moins
colorés que lo centre: ils sont presque blancs. Ce serait le contraire si la
coloralion était due à l'atmosphère, car elle croîtrait en raison de l'épaisseur
d'atmosphère traversée par les rayons réfléchis. Est-elle due à la couleur des
matériaux constitutifs de la planète? On pourrait Tadmettre si des raisonne-
ments d'analogie ne nous engageaient à penser que les continents do Mars
n'ont pu rosier à l'étal de déserts stériles, mais que, sous l'influence de l'at-
mosphère, des pluies, de la chaleur fécondante du Soleil et des éléments qui
ont amené sur la Terre la production du moudo végétal, ils ont dii se re-
couvrir aussi d'une vcgéiation quelconque, en rapport avec l'état physique et
chimique de cette planète. Or. comme ce n'est pas l'intérieur du sol que
nous voyons, mais la surface, la coloration rouge doit être celle de la végé-
tation de Mars, quelle que soit d'ailleurs l'espèce de végétation qui s'y pro-
duise. Il est vrai que, quoique les saisons de celle planète soient à peu près
de même intensité que les nôtres, on ne voit pas de variations de nuances
correspondant à celles que l'on observe avec les saisons sous nos latitudes
terrestres; mais la végétation qui tapisse la surface de Mars peut être fort
différente de la nôtre et subir moins de variations dans le cours de l'année.
Ouoi qu'il en soit, les études faites sur cette planète voisine sont assez
nombreuses maintenant pour nous permettre de nous former une idée géné-
rale de sa géographie et même de sa météorologie. On peut résumer comme
il suit les faits qui semblent désormais acquis à rA.sfronomie physiijue sur
la connaissance de cette planète :
I" Les régions polaires se couvrent alternativemonl de neige suivant les
saisons et suivant les variations dues à la forte excentricité de l'orbite; ac-
?I6 I. V ri. ANf^TI- MARS.
tiicllemonl les glaces du pûle noi-il no dépassent pas \o 80'' doirri'' de l.ilitndo.
2° Des nuages et des courauls atmospliénqucs y cxislcnt comme sur la
Terre ; ratmosphère y est plus chargée eu hiver (]u'en été.
3° La surface géographique de Mars est plus également partagée que la
nôtre en continents et eu mers; il y a un peu plus de terres que d(^ mers.
1° La météorologie de Mars est à peu près la môme que celle de la Terre ;
l'eau y passe par les mêmes états que sur noire propre globe, mais sans
doute à des degrés de température différents.
5° Les continents paraissent recouverts d'une végétation rougeàtre.
G" Enfin les raisons d'analogie nous montrent sur cette planète, mieuT
que sur toute autre, des conditions organiques peu difTérenles de celles qui
ont présidé aux manifestations de la vie à la surface de la Terre.
L.W m. Même année. 1873. — F. Hoefer, Stan. Meunier.
Quelque temps après la présentation de ces résultats à l'Académie des
Sciences, notre savant ami le D"" Hœfer objecta à l'explication qui précède
sur la couleur de Mars que cette couleur ne doit pas être due à des végétaux,
parce qu'elle ne varie pas avec les saisons, et qu'il est beaucoup plus pro-
bable que c'est simplement celle du sol.
Celle du sol? Mais alors ce sol serait nu! Le soleil, la pluie, l'air le lais-
seraient stérile à travers les siècles! Le D' Hœfer, qui est un partisan fervent
de la doctrine de la pluralité des mondes, ne peut admettre celte stérilité,
contraire à tous les effets connus des forces de la nature. Il faut bien qu'il y
ait quelque chose sur ces terrains, serait-ce de la mousse, ou moins encore.
L'objection de l'invariabilité de la couleur pendant Tannée martienne
n'est pas fondée, et il suffit de voir les choses un peu largement pour en
reconnaître l'insuffisance. Pourquoi astreindre la nature à avoir construit
sur Mars des végétaux de même espèce que les nôtres? Les conditions de
milieux, de température, de densité et de pesanteur s'y opposent ; donc la
différence qui existe forcément entre la végétation martienne et la végétation
terrestre peut parfaitement s'étendre jusqu'aux variations de couleurs. Mais
il y a plus : sur la Terre même, la nature répond à cette objection en nous
montrant des espèces végétales qui ne changent pas. Dans le Midi, les bois
d'oliviers, de citronniers, d'orangers sont aussi verts en hiver qu'en été. Dans
le jSord, le sapin, l'if, le cyprès, le laurier, le fusain, le buis, le houx, le rho-
dodendron, etc., conservent leur verdure au milieu de la neige. Dans nos lati •
tudes même, l'herbe des prés et mille espèces végétales ne varient guère.
Pourquoi donc rejeter une explication si simple, quand, sur la Terre môme,
I
I>!73 r. IIŒFEH. STAN. MKL'MKH. — VÉGÉTATION. MKUS. ÎIT
nous avons les mêmes exemples et (iiiaiid les différences de conditions de la
vie sur Mars et sur la Terre ne peuvent pas avoir dévelopi)é sur celte planète
la même végétation qu'ici!
L'ne seconde objection nous a été faite en disant que sur la Terre les con-
tinents ne sont couverts de végétaux que par places très restreintes et que
leur couleur dominante est celle des terrains, que par conséquent ceux de
Mars peuvent être de couleur d'ocre; mais, les déserts sont des exceptions,
L'eau seule suffit pour amener la verdure, et les contrées stériles sont celles
où la pluie ne tombe pas sur Mars. Les mêmes agents qui ont amené la for-
mation des premiers végétaux sur la Terre, les forces fécondes de la nature,
existent sur cette planète comme sur la nôtre. Nous voyons actuellement des
nuages et des pluies, comme sur notre planète. 11 est donc probable que la
couleur dominante de Mars provient de la végétation quelconque qui revêt
son sol.
Dans l'une des séances qui suivirent celle où j'avais présenté les obser-
vations qui précèdent, M. St. Meunier adressa les remarques que voici sur la
forme des mers martiennes comparée à celle des océans terrestres :
« Au moment où l'attention des observateurs est dirigée vers la planète
Mars, je crois intéressant de soumettre à l'Académie une remarque relative à
cet astre, remarque qui confirme la théorie déjà développée de l'évolution
sidérale.
« On sait que, à ce point de vue, Mars se présente comme un globe actuel-
lement plus âgé que le globe terrestre, et offrant, dès maintenant, des
conditions que celui-ci ne présentera que dans un avenir très éloigné. Une
foule de considérations appuient cette donnée, et parmi elles la minceur de
l'atmosphère et le peu d'étendue des océans par rapport aux surfaces
océaniques.
)) Le fait que je veux signaler aujourd'hui concerne la forme des mers
martiennes comparée à celle des mers terrestres. J'y vois un nouveau signe de
la vétusté relative de Mars, car il paraît évident que nos mers prendront
sensiblement les mêmes contours que celles de Mars, lorsqu'elles auront suf-
fisamment diminué de volume, à la suite de leur absorption progressive par
le noyau solide.
» Un des traits les plus remarquables de la planète Mars consiste dans le
grand nombre des passes longues et étroites, et des mers en goulot de bon-
tcilte. Cette disposition dilfère essentiellement de tout ce que l'on connaît sur
la Terre.
» Or, si Ton prend une carte marine, telle que celle de l'océan Atlantique
boréal, et que l'on trace les courbes horizontales successives pour des profon-
deurs de plus en plus grandes, ou reconnaît que ces courbes tendent j»rogres-
•21S I A iM. am; I i: mai; s.
sivcment à limiler des zones donlla forme est de plus en pins allongée. A
4000 nièlres, par exemple, on obtient des formes comparables, de tous points,
à celles des mers de Mars. *
i II en résulte que, si Ton suppose l'eau de l'Atlantique absorliéo par les
masses profondes actuellement en voie de solidificalion, de façon que le
niveau do cet océan s'abaisse do 4000 mètres, on aura à la fois une bien
moins grande surface recouverte par l'eau et une forme étroite et allongée
de la mer. c'est-à-dire exactement les conditions que présente Mars. »
Cette remarque de notre confrère est ingénieuse; nous avons voulu la
signaler, mais il n'est pas certain que la forme géologique de Mars soit ana-
logue à celle de la Terre, et que la diminution de l'eau puisse amener ces
configurations. Sur la Lune, par exemple, l'orograpbie n'offre point cette
forme, et toutes ses plaines basses sont circulaires : l'absence d'eau y donne
l'exemple d'un tout autre type. L'orographie de deux mondes très voisins
peut être fort différente. Il est probable que Mars est plutôt plus plat, que
les siècles l'ont plus nivelé, que le fond des mers s'est exhaussé, étendu,
tandis que la hauteur des montagnes diminuait, sous l'influence des pluies,
des gelées, des vents et des divers agents atmosphériques.
LXIX. Mrme année. 1873. — Xathaniel Grt.kn.
Cet artiste, avec lequel nos lecteurs ont déjà faii connaissance, a publié,
dans The Astronomical Register, 1873, p. 179, un choix de six de ses dessins
de la planète faits pendant cette opposition, et un planisphère, esquissé d'après
ces dessins. Ceux-ci ont été exécutés à Londres, du IG au 30 mai 1873. La
planète est restée assez basse au-dessus de l'horizon, à cause de sa déclinai-
son australe.
Nous reproduisons ici quatre de ces dessins (fig. 138), pris aux dates et
heures indiquées pour chacun d'eux. Nos lecteurs reconnaîtront la marche
de la mer du Sablier, de la droite vers la gauche, due à la rotation.
La neige polaire inférieure ou boréale a été très marquée : au mois de dé-
cembre 1872, elle était beaucoup plus étendue qu'au printemps et à l'époque
de l'opposition. Après l'opposition, au contraire, la neige australe s'accrut
considérablement. L'opposition est arrivée le 27 avril.
Dans le petit planisphère que nous reproduisons au-dessous [ftg. 139),
M. Green a représenté tout ce qu'il est assuré d'avoir exactement observé;
chacune des six vues dont nous venons de parler a pour méridien central les
points situés au-dessous des chiffres. Si l'on compare ce planisphère à notre
carte (p. 69_i, on reconnaîtra, en A, la j)ointe de la mer Maraldi, en 13, la mer
1,^73 N ATIl.\Mi:i. (ilU'HN. - DKSSINS KT C MITES. UO
Flammarion, en H. la nior Main, en K. la nior dn Sablier, en f'i, la mer Lassell.
2S mai. il Si'
•io mai, à 11''.
IC m.ii, il O'-lô"-.
Fiff. 138 - Dessins ilc Mars, par :M. Grccn. en 1873.
en II. la mer Knobel supérieure, en I, la baie Ghrislie et en .1 la mer Tycho.
1
Fi'T. 139. — Planisphère de Mars, par .M. Grccn, d'après ses observations de 1873.
On voit en D une traînée grise parallèle à la mer du Sablier, qui n'existe pas
220 I- A IM.ANKTi: .MARS
sur notre carte; « tliis was thc most délicate î>lrcak observcd in any of ihc
drawings », écrit l'observateur; cependant il paraît certain de son existence.
Cet aspect n'est sûrement pas durable. Rcniar(juons aussi le roiiflcmeuL F,
qui ne se voit presque jamais.
La mer du Sablier était très sombre près de la lettre K.
^ On regarde généralement, ajoute l'auteur, le^ taches sombres comme des
mers; mais, dans ce cas, no devrait-on pas apercevoir quelque chose comme
une réflexion de la lumière solaire lorsqu'il est au méridien? »
Cette question a déjà été posée, en 1862, par Phillips [voy. p. 184), sous une
autre forme, celui-ci se demandant si l'on ne pourrait pas voir l'image du
Soleil lui-môme réfléchie à la surface des mers martiennes, et l'auteur y a ré-
pondu affirmativement. M. Schiaparelli a traité, en 1878, cette mcrne question
derimagesolaire.il trouve -.V de seconde de diamètre pour celte image, dans
les plus grands rapprochements, tels que celui de 1877, 'y septembre (Phil-
lips avait trouvé un chiffre analogue : ..V) ^^ une intensité lumineuse
2 100 000000 fois inférieure à celle du Soleil, pour la distance 1, c'est-à-dire
à la distance de la Terre au Soleil. Zollner, dans ses recherches photomé-
triques (1865, voy. p. 196), a déterminé la quantité de lumière solaire effecti-
vement réfléchie par le disque entier de Mars en son opposition moyenne, et
a trouvé 699»o^ououo d® ^^ lumière solaire à la distance de la Terre. On trouve
par là que la lumière totale dans une opposition minimum, telle que celle
de 1877, est j^ôtïïôttûv ^g celle du Soleil à la distance 1. Donc, l'image lumi-
neuse du Soleil réfléchie par les mers martiennes aurait dû, en celte opposi-
tion, donner plus de lumière à elle seule que tout le disque de la planète.
Ce résultat a pour base la supposition d'une réflexion totale des rayons
solaires. Mais, en réalité, un liquide transparent, tel que l'eau, avec l'indice
de réfraction |. ne réfléchit que ^ de la lumière incidente. Il faut tenir
compte aussi de l'absorption produite par le double passage du rayon lumi-
neux à travers l'atmosphère, qui doit réduire de moitié l'intensité. Au lieu
de 4*9, nous avons donc, en nombre rond, j^. L'intensité de l'image solaire,
vue par réflexion des mers martiennes, devient donc
de celle du Soleil.
21 X lU'"
Dans l'ouvrage précité, Zollner donne pour la lumière de l'étoile « Cocher
]
(Capella) £-^1= j-^^;; de celle du Soleil.
Donc, à la meilleure époque d'opposition, l'image solaire aurait dû appa-
raître dans le miroir sphérique des mers martiennes, avec un éclat égal à {
de celui de a Cocher, c'est-à-dire comme une belle étoile de 3* grandeur.
isT.î (iREFN. im\(;k sof.aihi: — KNoni:i. <>nsi:itv\TinNS. 2îi
C-L'lti; image pourrait donc ôlrc visililc, sur le fond sombre des mers mar-
tiennes et malgré l'éclat du disque. Mais il faudrait supposer pour cela la
mer calme et unie comme un miroir. Or les observations de nuages mobiles,
de traînées nuageuses, de neiges polaires formées par les vapeurs qui y sont
amenées, prouvent qu'il y a du vent à la surface de la planète. I/i surface des
eaux doit donc y être ordinairement plus ou moins agitée, et les moindres
rides ont pour effet d'empêcher la formation d'une image solaire unique et
de donner naissance à une multitude de facettes et de petites images. Il est
vrai (jue l'intensité lumineuse totale de ces images est la môme que celle
d'une image unique, mais elle est dispersée sur un vaste espace, variable
d'étendue, et devient nébuleuse, surtout si les crêtes des vagues sont élevées,
et cette clarté nébuleuse peut passer inaperçue pour l'observateur.
En résumé, il ne serait donc pas impossible, dans les meilleures condi-
tions, d'arriver à découvrir l'image du Soleil réfléchie à la surface d'une mer,
sur la planète Mars, mais ce ne pourrait être qu'en des circonstances excep-
tionnelles.
Telle est la réponse à la question posée par M. Crreen. Nous retrouverons
cet observateur aux travaux de l'année 1877.
LXX. Même année, 1873. — E. B. Knobel, ^^'E»B, fliiovER.
Pendant celte même période, un habile observateur anglais, M. Knobel.
a fait à son observatoire de Burton-on-Trent, une série d'observations qui
ont été publiées par la Société astronomique de Londres ('), accompagnées
de 17 dessins. Ces observations ont été faites à l'aide d'un télescope à verre
argenté de 8 ^ pouces (0'",2l), d'excellente qualité, armé de grossissements
de 250 et 300.
En général, les dessins concordent parfaitement avec ceux de Dawes et avec
la carte de Proclor, construite d'après eux. Cependant, il y a certaines excep-
tions dignes d'attention. Ainsi huit dessins, pris du 11 au 22 mai, montrent
avec la plus grande netteté une tache foncée circulaire qui se trouve dans
l'hémisphère inférieur ou boréal, au-dessous de la baie du Méridien, et qui
correspondrait à la terre de Le Verrier, ou à la mer Knobel reculée vers la
gauche et continuée vers le haut, après une sorte de pont de séparation. Cette
séparation est tracée obliquement du Sud-Ouest au Nord-Est, tandis que sur
notre carte [voij. p. 69, au 30- méridien), elle est tracée de l'Est à l'Ouest, De
plus, à la droite de cette mer, l'observateur a vu, du 8 au 22 mai, une tache
blanche comme de la neige, et même, comme ce point se trouvait le 22 mai
,'j Moiilhlij .\olices, 1.^7:!, i>. ITC.
•:•:•: i \ pi. a m: ri. ma us.
sur le lorniinatcur, la blancheur éclatante ilcpassail \r (iistjuc, et aurail [ni
èlrc prise pour la neige polaire. Cette noiye devait se Irouver vers l'inlcr-
seclion du 25'' deirrê de lonj^ilude avec le 50'-' deiiré de lalilude Lorcalc
Cette mer Knobel est celle que Ton voit dans la région droite du quatriùmc
dessin de Green, reproduit plus haut.
Dans ces croquis, la continuation oblique de la mer du Sablier, la passe de
N'asmylh, est également très marquée; mais la mer Lassell ne l'est pas,
taudis qu'elle est très accentuée sur les dessins de Green.
Pendant ces observations, la ligne des côtes de la baie du Méridien a tou-
jours été vue avec une netteté admirable. L'hémisphère boréal de la planète
a toujours paru plus clair que riiémisphère austral. La neige polaire boréale
a été mieux visible que l'australe. La mer du Sablier a toujours paru très
foncée; la mer Main est visible, mais moins roncée.
L'astronome anglais regretté T. -AV. Webb. Tauleur apprécié de Celeslial
objccts for Common télescopes, afait.de 1839 à 1873, ([ualrc-vingt-cin(| dessins
de Mars, dont il nous a communiqué les principaux ; nous en avons déjà
parlé plus haut, en 1856, p. 130. Cet observateur avait une vue perçante et
une excellente méthode ; ses croquis, quoique de petites dimensions, sont
précieux pour un grand nombre de détails. En Angleterre également , M. C. Gro-
ver a pris cinq dessins en 1873, à ajouter à ceux de 1867, dont nous avons
parlé plus haut, et qui étaient au nombre de douze.
LXXl. Même année, 1873. — Jlles Schmidt : période de rolation de Mars.
Jules Schmidt, directeur de l'Observatoire d'Athènes, a publié au mois de
novembre 1873, dans le numéro 1965 des Astronomische Nachrichten. un mé-
moire mathématique sur la durée de rotation de la planète, d'après ses
propres dessins, s'étendant de l'année 1843 à l'année 1873 (on a vu plus
haut, p. 127, quatre de ces dessins). L'auteur a comparé ses observations à
celles de Kaiser, de Mildler, d'Herschel et de Iluygens. Le résultat général de
ce travail conduit, pour la période précise de celle rotation, au nombre
24" 37"' 22», 6027.
Laissons de côté, comme d'un intérêt purement arithmétique, les dix-miU
lièmes de seconde, et môme les millièmes, et môme les centièmes, et inscri-
vons : 24*37'"22',6.
Nous avons vu plus haut que cette même durée de rotation a été très soi-
gneusement fixée par Proctor à 24^ 37"', 22% 7. Elle est donc connue, très
certainement, à un dixième de seconde près.
is:;: sciiMinr. ikuaiion. thoin i;i.(> r. dessins. 223
(les deux séi-ies ilc Proriur el SchiiiiiU paraissent faites toutes deux avec
la même rigueur et avoir une valeur égale. Le chillre réel doit être compris
entre 22', G et 22\7. En portant l'approximation au centième de seconde,
nous pouvons dès maintenant proposer le cliillVe 22', 65 comme très rapproché
de la réalité, sinon peut-être même comme absolument précis.
C'est la rotation sidérale. L'année de Mars, tiui est composée de G69 -1 de
ces rotations a, par conséiiuent 668 f jours solaires dans son année,
puisqu'il y aune rotation de moins causée par la révolution annuelle, qui
s'exécute dans le même sens que la rotation. Le ji'xir sohiirc est donc, sur
Mars, de
24''3T"'3ô'.
Pondant l'opposition de 187;i, Jules Schmidt a lait, à l'aide du réfracteur de
9 pouces de l'Observatoire de Berlin, une importante série d'observations cl
de dessins, qui ont été publiés dans le tome Ides Publicationen des Aslrophy-
sikalischen Observatorium zu Polsdam (1878). Ces six dessins de 1873 ne sont
pas faciles à identifier, à l'exception de celui du 25 mai (à 10'' 5'") qui repré-
sente la mer du Sablier. Les autres paraissent déceler de vastes variations.
Nous retrouverons le même observateur en 1877 et en 1879.
LXXll. Même année. 1873. — Thouvelot : Dessins de Mars ('
M. Trouvelot a publié dans le tome VIII des Annales de l'Observatoire de
Harvard Collège (1876) les quatre dessins de Mars que nous reproduisons ici,
faits à l'équatorial de lô pouces de cet établissement. Le premier est du
23 mai, à 1 1''30'", le second, du lendemain, à lt''30'", le troisième, du 26 mai.
à 8''3Û"', et le quatrième, du 29 mai, à 9''8"'.On peut reconnaître, sur les deux
l)remiers, le détroit d'ilerschel II et, dans ses deux échancrures, la baie du
Méridien et la baie Burton; au-dessous, les mers Knobel et Tycho. La mer du
Sablier et son prolongement inférieur vers la droite (passe deNasmyth)sont
visibles sur les troisième et quatrième dessins. Les neiges du pôle inférieur
ou boréal sont très apparentes. Dans une petite notice, annexée à ces dessins,
l'habile observateur se borne à dire que l'on présume que les taches de Mars
appartiennent à la planète elle-même plutôt qu'aux nuages de son atmo-
sphère. Les bordures blanches continentales que l'on remarque sur ces des-
sins donnent l'idée de nuages.
M. Trouvelot a donné en 1882 une excellente Noiicc générale à propos dd
(') A)inalsof Ihc aslrononiiatlUbscrvalonj ofllurvard Collège, Cainbridçjc, t. VIII,
t87G.
•224 LA rLANKTK MAKS.
la piibliontioii de ses eran'ls dessins aslroiioiiii(jucs ;'\ dans la(|iicllc ilcx-
23 ir.ai, à 11 30™.
FiL'. l'iO. — Dessins de Mars, par M. Trouvclot, cii 1870.
prime les opinions au.xquelles ses observations l'ont conduit sur les diffé-
Fîg. Ul. — Dessins de Mars, par M. Trouvelot, en 1S73.
rentes planètes de notre système. Son étude sur Mars peut être résumée
dans les termes suivants ;
('; The Trouvelot astvonornical Drawings rnanuul. New- York, 1882.
1873 TROUVELor. - DKSSINS. lib
Les tucUcs sombres offrent dillcreuts tons, depuis le fj:ris pâle Jusiin'au noir
•2G mai, à 8'' :>'.
Fig. 14Q. — Dessin de Mars, par M. Trouvclot, en 1873.
loncé. L'auteur n'y a jamais remarqué de coloration verte ou bleue et croit qu'il
•J'J mai, ;i 'J*" b.
Fig. l'tO. — Dessin de Mars, par M. Trouvelol, en IS/O.
n'y a là qu'un oiTet optique de couleur complémentaire avec le ton roux des
continents,
riusieurs changements sont certains, notamment celui de la mer représentée
FLAXiMAnioN. — Mars. 15
•2%
I \ IM ANKTi: MAKS.
par n«>t'r rt Madlor î-ur loin- hc-tnisphère siul, par '210° do longitiulc, au-dessous
de la mer eiroulaire d {voij. p. 1U7). C'est le lac que Ton voit sur notre carie,
p. GO. au-dessous de la mer Terl'v. au OO» de longitude. I/auteur écrivait en 1882 :
« En 1877, pendant l'une des oppositions les plus favurables de la idaiiète, cette
tache n'était pas visilde; mais en 1881 et 188-2 on voyait fort bien là une tache
foncée. Il n'y a pas le moindre tloutc à avoir sur ce changement. » Cette opinion
vient confirmer celle que nous avions exprimée en I87G dans /es- Terres du Ciel.
Mais nous retrouverons la conliuualiou des observaliuiis de M. Trouvelul
en 1882-I884, et nous reviendrons sur l'ensemble de ses déductions.
LX.Xll!. Même année. 1873. - Osw. Luiisl;. ,'i.
A l'Observatoire de butbkamp, cet observateur a l'ail une série d'eludes cl
de dessins d'où vraiment il semblerait que l'on doive conclure à des varia-
lions considérables dans l'asjiect pbysiijue de la planéh.'. Six dessins sont
v\''. [',:>.
licssin liu .^].■lr^, [lar (J. Lolise, k- 'J mai Islu.
présentés, dont aucun ne ressemble aux aspects connus. Nous en reprodui-
rons trois, plus un tracé schématique qui explique le premier.
Le premier de ces dessins (fig. 144) a été fait le 9 mai 1873, à 10'' 10"'. Le
tracé qui l'accompagne [fig. 145) indique pour les tons : .7 = fond gris,
dr = rouge foncé, r = rouge clair, h — blanc, hli = très blanc. La tache
polaire sud hh n'est pas diamétralement opposée à la boréale.
Le second îfig. 146) est du 25 mai. à 10''5'". On croit y reconnaître la mer
du Sablier, près de laquelle une tache blanche allongée fait un peu l'ofrcl
de la Lune se cachant derrière un nuage.
(') Pablicationcn de-^ aslrophysikalisGhen Ob<ert:alorinms zu Potsdam, 1878.
I
IS7-2-IS80
I uu.Mi; i)i; I, \ i'i..v.M;ri; ma lis.
•227
L(.' tntisiénie [fuj. 147) oslilii L'jaiu,.'i '.)•' i5. Oii y icli-ouve encore un cercle
sniiilirc (|iii niitiH.'Ur raïuirau de la preiiiiérc' lii:iin'.
HiiL' conclure de ces représentalions de la plaiiùle. sinon rjui,- rjunjuc ob-
Fig. lie.
Imk. i;:.
iJcssius du Mars, par 0. Lolise, les Jj mai et 2 juin ISTJ.
servaleur a vraiment sa manière de voir un peu personnelle et que l'on
donne de la précision à des aspects^ vagues et incertains?
LXXIV. 187-2-1880.
A.NliGuËS, Hen'n'essv. g. -H. Darwin. Fl.amm.vhion.
Forme de la planète Mars.
La plupart des valeurs trouvées pour l'aplatissement de Mars sont trop fortes
pour la théorie de l'attraction. Le glol)C de Mars, tournant moins vite que la
Terre et étant plus petit, ne développe à son équateur qu'une force centrifuge
beaucoup plus faible que celle qui est développée par le mouvement de rota-
lion de la Terre, et son aplatissement polaire devrait être plus faible que celui
de notre globe, qui est de ^J-r.
Laplace rendait compte de cette discordance en supposant que des soulè-
vements locaux, analogues à ceux dont on voit les effets en diverses régions
du globe, avaient pu avoir relativement une plus grande influence sur la
figure d'une petite planète que sur celle de notre globe. Arago conteste la
valeur de celte explication en répondant que la forme de ^fars semble très
régulière : tout paraît semblable au nord et au midi de l'équateur; ses me-
sures de diamètres à iô degrés lui ont donné des longueurs intermédiaires
entre ceux des pôles et de récjualeur, comme l'exige la forme elliptique;
cependant Schrœter avait admis, d'après ses observations, qu'il y a dans
rhémisphère méridional des montagnes plus élevées que dans l'hémisphère
228 LA n \m:ti: m au s.
norJ. M. Aniigiie.^ a propose ;i rAcadomic des Sciences (') uiicexiilicalion dillV'-
rcnle et fort originale, fondée sur l'analyse gconii-lriiiue de la ijucslion.
Imaginons un corps placé à Téquateur d'une planète. Appelons F l'allrac-
lion du corps par la planète. V la force centrifuge causée par la rotation. On
sait que le rapport — est le même pour tous les corps placés à lÏMjuatcur d'une
même planète : Laplace le représente par la lettre 9. Le nombre -f change de
valeur d'une planète à l'autre, mais il est toujours assez petit.
Les géomètres, partant de cette hypothèse que la matière du système
solaire a été fluide à l'origine, en ont tiré cette conclusion que, pour toute
planète ressemblant à une sphère, l'aplatissement doit Olro compris entre
1 r ^^ T i-
Ces prévisions se trouvent justiliées par les observations. Il y a pourtant
une exception pour la planète Mars, dont l'aplatissement, admet l'auteur.
dépasse | -f . On a vu dans cette circonstance une objection sérieuse à l'hypo-
thèse de la fluidité primitive des astres.
Mais les géomètres n'ont peut-être pas abordé le problème des sphéroïdes
avec toute la généralité désirable.
En effet, ils ont tous admis dans leurs théories que la densité des couches
diminue sans cesse depuis le centre du sphéroïde jusqu'à sa surface. Or, rien
ne prouve a priori que toutes les planètes soient placées dans ces conditions.
Imaginons, par exemple, qu'une planète se soit refroidie et durcie en prenant
une certaine forme et que, plus tard, par suite de circonstances qu'il n'est
pas impossible d'imaginer, un amas de matière cosmique passant dans le
voisinage de cette planète et attiré par elle se soit répandu à sa surface comm.e
un torrent de lave. Voilà un sphéroïde dans lequel les couches superflcielles
pourront être plus denses que les couches centrales.
L'auteur présente le problème général des sphéroïdes sous la forme
suivante :
ti Une masse sphéroïdalc dont les parties superficielles sont fluides tourne autour
dua axe passant par son centre de gravité. Le mouvement est lent, c'est-à-dire
que le nombre o est petit. On imagine une sphère ayant pour centre le centre de
gravité du sphéroïde, sphère presque aussi grande que lui, mais ne le dépassant
en aucun point de sa surface. La matière située à l'intérieur de la sphère a pour
densité moyenne p (la densité moyenne est la densité d'un corps homogène de
même volume et de même masse). Quant à la matière qui est située hors de la
sphère et qui est répandue sur sa surface en couche mince et continue, on la suj)-
pose fluide, homogène et de densité p'. Dans ces conditions, supposé qu'il y ait une
figure d'équihbre peu diff'érente de la sphère, on demande de trouver cette figure.
(') Comptes rendus da séances de l'Académie des b'cicncei, 1874, t. I, p. 1657.
1872-1830 API. ATIsSI:MI;.\ I l>l. M MIS. i»29
Ce problèino est (^videniiiK'iit imlctoriiiiiK', et l'on voit .sans peine que la figure
cherchée dépeutl de la disposition de la matière dans rintorieur de la sphère. On
peut faire disjjaraîtro cette inddtormination incomplôtemcnt ou complètement.
C'est ce dernier parti que nous allons prendre.
Nous supposerons que la sphère ci-dessus se compose de couches sphériques.
concentriques à cette sphère et homogènes. Cette hypothèse a plusieurs avan-
tages : \o elle paraît s'écarter assez peu des conditions physiques de la question:
'2" elle conduit à un problème déterminé, quelle que soit la loi suivant laquelle
varie la densité des couches; 3° elle donne lieu ;\ un calcul facile.
Ce calcul, fait par les moyens ordinaires, c'est-à-dire en employant les fonc-
tions de Laplace et en négligeant les quantités du second ordre, conduit au résul-
tat que voici.
La masse prend la forme d'un ellipsoïde dont l'aplatissement est donné par la
formule suivante :
9
2(1-^^)*
N'oublions pas que notre calcul n'est relatif qu'à un sphéroïde et que, par con-
séquent, la formule n'est légitime que lorsqu'elle donne pour l'aplatissement
une valeur positive et assez petite. 11 faut pour cela que — ne soit pas un nombre
P
trop grand.
Discussion :
i" Pour p'= ,:, on obtient | o, résultat de Newton.
2° Pour p' — 0, on obtient |'f, résultat d'Huygens.
S'' Quand 0 ^ '^ -; 1, l'aplatissement est compris entre l 'f 6t f y : c'est ce qui
arrive dans le cas traité par Laplace et la plupart des géomètres.
4" Quand ^ > I, l'aplatissement dépasse { 'f : tel est le cas qui n'a pas encore
été examiné.
Appliquons la formule à la planète Mars. Son aplatissement probable est 3';, : il
est assez faible pour qu'on puisse faire cette application. La valeur de cp relative
;\ la planète Mars étant d'ailleurs 0,001 J86G, nous obtenons la relation suivante :
1 _ 0.00458fifi
Nous avons ainsi une équation du premier degré, qui donne sans peine
Les conclusions de M. .Vmigues sur la forme de Mars sont les suivantes :
1» la planète s'est formée en deu.v ou plusieurs fois; -2° la densité moyenne
des couches superficielles est 1 , 54 de la densité moyenne du noyau, c'est-
à-dire, en somme, de la planète.
'23(1 1-A im..\m:ti-: m. mis.
Le k'Ul est lie savoir si les prémisses iln raisoiiui'iuiMil sont cxacles, si
raplalissemcnt de Mars est vraiment de .J^.
Mais cet aplatissement est très difficile à mesurer. Il pctil rlro inrérieur,
et de beaucoup, à ^V Nous avons pour mesures jusqu'en 1877 :
1862
1861 Main
1871
1875
1784 Uerschel ^\.
1797 Schrœter ^\.
1798 K.L'lher ,,', .
1811 à 1847.. Arago .,\.
1830àl837.. Besscl Insensible.
1852 OuderaanSjd'a- j 1864 Kaiser y^ï-
près Bessel. Id. j 1864 Dawes Insensible.
1855... . Main t'î- i '^~'' Young jfy.
' • • • 3 B •
185G Winnecke Insensible.
(La dernière valeur est probablement la plus sûre.)
Un géomètre anglais, M. Ilennessy, a répondu (') à la communication qui
précède en faisant remarquer que les résultats obtenus par M. Amigues pa-
raissent vérifier complètement ceux au.xquels il était arrive lui-môme, depuis
longtemps.
M. Amigues, dit-il, s'est proposé de lever la grande objection (l'objection à
riiypothèse de la fluidité primitive des astres, en raison de la grandeur exception-
nello'de l'aplatissement de la planète Mars], en faisant voir que les géomètres
n'ont point abordé le problème des sphéroïdes avec toute la généralité désirable,
Et, après avoir indiqué la méthode dont il se sert, il a ajouté :
Ce calcul, fait par les moyens ordinaires, c'est-à-dire en employant les fonc-
tions de Laplace et en négligeant les quantités du second ordre, me conduit aux
résultats que voici...
Relativement à ces points, M. Hennessy fait remarquer qu'il a depuis
longtemps recherché le même problème des attractions sphéroïdales, et
précisément par la même méthode, savoir l'application des fonctions de La-
place (-).
Dans le premier cas, il a appliqué les résultats de ses solutions à la ques-
tion de la figure de la Terre, dans le but d'étudier à fond la théorie qui essaye
d'expliquer sa forme sphéroïdale par le frottement de sa surface.
Cette théorie a d'abord été proposée par Playfair dans ses Commentaires
sur le système de Newton, et elle a de nouveau été mise en avant par sir John
Herschel dans ses OulUnes of Astronomy. Elle acquiert aussi quelque inté-
rêt, parce qu'elle a été citée par sir Charles Lyell et sert de base à l'opinion
qu'il soutient dans ses Principes de Géologie.
''') Comptes rendus des séances de l'Académie des Sciences, 1878, t. II, p. 590.
I Proceedings of thc Royal Irish Acaderay, t. IV. p. 33.3.
I>!7MS8it .\1M. ATISSF-MRNT 01- MARS. 231
Les résultais obtenus par l'autour ne conlirmcnt pas cette théorie, car la
l)lus grande ellipticité que la Terre puisse avoir, en tant quo surface de
frottement, ne peut dépasser ,i;, fraction qui s'écarlo considérablement de
ce qui est admis comme résultat des observations.
Kn 1804, écrit l'autour, j'avais, pour la première fois, appliqué mes calculs i la
question de Mars, dans une communication à l'Association Britannique, et un
court extrait de mon travail fut publié.
En février 1870, jo publiai un mémoire dans VAllaniis sur la configuration
de la planète Mars, et j'appliquai à Mars les résultats mathématiques de mes
recherches précédentes. Je trouvai une équation donnant l'ellipticité en fonction
de la donsité moyenne Di et de la densité D de la surface de la planète
Dans l'équation, q est le rapport de la force centrifuge à la gravité.
Maintenant, si nous employons la notation de M. Amigues, q sera remplacé
par 'f, et D' par o'. D par p, ce qui donne
10 - 6 ^' î ( I - ^ )
formule qui est précisément celle que donne M. Amigues.
J'ai aussi déduit de ma formule cette conclusion que, si le plus grand aplatis-
sement attribué quelquefois à Mars est admis, nous devons conclure que sa den-
sité superficielle est plus grande que la densité de l'intérieur de la planète. Mais,
comme une telle conclusion me paraît contraire aux lois de la Physique, si la con-
stitution de Mars ressemble à celle de la Terre, je préfère accepter les conclusions
de Bessel, Oudemans et Winnecke, qui, jusqu'à ce que des observations plus com-
plètes aient été réunies, admettent pour Mars un aplatissement presque insensible.
Un extrait de mes premières recherches sur la théorie de la forme de la Terre,
d'après le frottement, a paru dans plusieurs journaux scientifiques, il y a bien des
années; je suis cependant convaincu que les résultats obtenus par M. Amigues,
relativement à Mars, l'ont été d'une manière tout à fait hidépendante et sans qu'il
ail eu aucune connaissance do mes recherches.
La conformité complète des calculs de M. llenuessy avec ceux de M. Amigues
le coniirmc donc dans son opinion soutenue précédemment, en opposition
à la tiiéorie de Playfair. Ilerschel et Lyell, sur la forme et la structure de la
Terre ' .
■ Dans le mémoire d'Arago sur .Mars, il est fait allusion à ces difficultés. {Voir plus
haut. p. 91.
CSC i.A pi.am-:tk mars.
l/auttuiv ost ilo nouveau rcvomi ?ui" celto inriiic (|ucsli(>n on IS80 (' .
\I. l'..-A. Yoiing, des Etats-Unis, venait de publier une série d'observations
sur les diamètres équatoriaux et polaires de la planète Mars. Ces mesures
paraissent avoir été laites avec le plus grand soin et dans les circonstances
les plus favorables; les observations étant réduites et corrigées dos légères
influences d'aberration, on a la valeur linalc de r ou de raplatisscmeiil polaire
_ J^
Il est facile de démontrer, dit M. Hennessy, que cette valeur s'accorde
mieux avec l'iiypothèse d'une fluidité antérieure de la planète qu'avec l'hy-
pollièse d'une érosion superficielle par l'action d'un océan liquide ayant la
même densité que l'eau.
Si la planète Mars avait été primitivement dans uu état de lluidilé dû à la cha-
leur, la masse se trouverait distribuée en surfaces sphéroïdales d'égales densités,
la densité croissant de la surface au centre.
L'ellipticité dépendrait de cette loi et de la périodicité' du temps de rotation de
la planète, comme c'est le cas pour la Terre. Dans un pareil liquide sphéroïdal
e'^-f F (a'),
où Q' est le rapport de la force centrifuge à la gravité à l'équatour et F (a') une
fonction du rayon dont la forme est subordonnée à la loi qui régit les variations
de densité en allant de la surface au centre.
Si nous désignons par T' le temps de rotation de la planète, par a' son rayon
moyen_, par M' sa masse et par g' l'intensité de la force de gravitation à sa sur-
face, nous aurons
et, conséquemment,
pour la Terre, nous avons
do là
et, par conséquent,
An'n' , M'
Q — irr. — ;' H ~ -r
Q' '-'''"
T^ M"
TTT — et g = —]
ry - 0
M'
M
{'] Comptes rendus des séances de l'Académie des Sciences, 1880, t. I, p. l'ilO.
I872-I8S0
API.ATISSFMRNT HI- M AHS.
233
Los astronomes admottont généralement que ^ — 54 environ.
r — ,S6lGi% T' - 24''37"'2-2\7 ou 886 i27«. Si nous àilmcttons pour les masses de
Il Terre et de Mars les valeurs détcrmindes par Le Vi-rricr, nous aurons
par suite
M
324i39
^^ ^^' ~ -imm^ - l¥y
Q' - .1
1
'224,07
Tour la Terre, e = ^-j QF(a), et, si F (a) a la même valeur dans Mars ou, pour
mieux dire, si la densité varie de la surface au centre comme pour la Terre.
0'
n' Q'
- = -- ou e
« Q
Q
1
Mais, comme la dernière détermination de c donne e ~ „„., , > le calcul con-
293,4b
^"■'^^^*''= 2-27^701 •
Comme la planète Mars olTre ù, sa surface l'apparence d'un fluide aqueux, on a
pu recourir à une théorie quelquefois invoquée pour expliquer la figure de Mars.
On a suppose une érosion de la surface combinée avec la force centrifuge qui
résulte de la rotation autour de l'axe planétaire. Cette théorie a été soutenue par
sir Charles Lyell.
En ce qui regarde la théorie de l'érosion par un li(iiiide en mouvement sur la
surface d'une planète, j'ai trouvé, pour l'ellipticité du liquide enveloppant,
_ 5QD-+-6(D'— !)£
^~" Q(5D-3) '
£ étant l'ellipticité de la surface solide, D la densité moyenne et D' la densité de
ses matériaux solides à la surfaco; la plus grande valeur que c puis-se prendre
correspond à e — e, et alors
^ 5QD
^ ^'giôU — 3)-(J(D'— n'
Pour ce qui regarde la T(M're, les valeurs généralement admises pour la den-
sité moyenne de la planète et la densité de la croûte solide sont, en nombres
ronds, D = 5,G et D' = 2,0. Avec ces nombres, il est évident que e ne peut excé-
der
41'
La plus petite valeur que l'on puisse donner à D dans le présent état de nos
connaissances est î\ peu près égale A deux fois D'; et par suite
L'auteur conclut que la lliéorie de l'orosion ne peut rendre compte de la
•::u I- \ iM \Nr:TF m Ans.
Ilgiiro de la ToiTO irmio niaiiièrc aussi salisfaisanl'* ([iii' la ihcorio il(^ ['(Miliorc
nnidilo iirimitivo :
a Si Mars ctail un solide homogène, la lliéorie de rrrosiou rendrait aussi
bien compte do rolliplicité observée que s'il s'agissait d'un lluidc lioniogcne,
car, dans l'un et l'autre cas, c serait alors '- 0', d'où c' — pïTpv ' valeur qui
est sensiblement plus grande que le résultat ol)teuu par les observations.
)) Les recherches de divers astronomes ont récemnieul déniouli'é (juc la
surface de Mars ofTre une distribution jjien définie de matière solide et de
matière liquide. Les terres paraissent lormcr des groupes d'îles et non do
grands continents.
« Si la figure de la planète diirérait de celle qui est déduite de l'hypothèse
de la Uuidité primitive, si son aplatissement était moindre ou beaucoup plus
grand, une pareille distribution de terre et d'eau ne pourrait exister. Avec un
fort aplatissement, les terres formeraient une grande ceinture vers l'équa-
leur; avec un aplatissement minime ou une figure sphérique, les terres for»
nieraient deux continents circumpolaires ayant un océan équalorial intcr-
médiaire. Tous les observateurs récents s'accordent à donner à la planète
une distribution différente de celle qui aurait lieu dans ce dernier cas. ^>
Pour nous, il nous paraît probable que les anciennes déterminations do
l'aplatissement de Mars (sur lesquelles le raisonncmcnl de Laplacc était
basé} étaient trop fortes, et que la valeur réelle doit se rapprocher du nombre
trouvé par M. Young et s'accorder avec la durée de rotation et un accroisse-
ment graduel de la densité.
Sur cette même question. M. G, -II. Darwin, riiabile mathématicien, a
examiné et discuté en 187G (') les formules de Laplace sur la densité, la rota-
tion et l'aplatissement des planètes. Appelons tp le rapport de la force centri-
fuge produite par la rotation (à rextrémité du rayon moyen de la ]danète) à
la pesanteur; Mars tourne en 24^ 37'" 22% 6 ou 1 ,02.5950 jour sidéral uKjyen ; la
densité adoptée par M. G. -II. Darwin est 0.9i8 de celle de la Terre; le jour
sidéral martien est 0, 997271). Ou a pour la Terre
^ 289, G(j
et pour Mars
_ _ J_ ,'0,097-270 > "- 1
^"948 1.1,025950/ 289,00
= 0,0034409:.^-^^.
;*; On an oy.ersiQhl in Ihe Mécanique céleste, and on tlio inlernal densitios oj lin
planeli^. {Monlhhj Notices, Dec. 187C. p. 77.)
IS7-2-I8SI)
Al'LATlSSi: MI'NT 01- NfAllS.
Les mesures de l'aplatissemenl doivent avoir élé influencd-cs par dos
cireurs d'observations. Eu adnictlant que la loi de la densité intérieure soit
la iiiéii)<' pour Mars que pour la Ti'rre, l'aplatissement qui en résulterait
serait .3t.
Mais l'auteur a cerlaincment adopl<' une densité beaucoup trop forte, car
cUe n'est guère (jue de 0,70.
Nous avions nous-mêmc cberché, en 1872 ('), quel est le rapport de la pe-
sanlriir à la l'orcc centrifuge, à l'équateur delà planète Mars. Adoptant pour
la rolalion sidérale "2 i'' 37"' 2?', 7 ou 88643% nous avons :
Vitesse. w =
3^=0,0000709.
w' = 0,0000000050239,
a - 6371000"" x 0,53 - 337tiC30.
Force centrifuge. w=« — 0,01G96.
Pesanteur g = 9'»,8088 x 0,370 = S^.CSS.
r/
I
Sur la Terre, — ^
Aplatissement
= 217,5.
_ 0.808S
(ù'a " 0,033858
292"
-289.
Le rapport de la force centrifuge à la pesanteur, qui est :^ à l'équateur
terrestre, est ■:rpi-- à l'équateur de Mars. L'aplatissement ne doit pas dif-
férer beaucoup de cette valeur, si, comme il est probable, la densité de ce
globe va en croissant de la surface au centre, comme pour la Terre ; il doit
. . , I
être voisin du -pr-r-
Si Mars tournait sur lui-même en vertu de sa propre force de gravitation
seule, comme le ferait un satellite à l'équateur autour de la masse de la
planète condensée à son centre, la rotation s'effectuerait en 1'' iO"'. Il faut
inultixjlier ce chiffre par 1 i,77 pour former la durée réelle de la rotation de
la ijlanète. Ce nombre est en même temps la racine carrée du nombre 217,5
trouvé plus haut, rei)résentanl le rapport de la force centrifuge à la pesan-
teur à l'équateur de Mars.
Nous avons la relation
dans laquelle T — la durée de rotation réelle, ji la i»ériode de rotation
(,'; Eludeii sur l'Aslronomic. t. Itl. 1872.
?36 I.A PI ANÈTn: MARS.
thôoritino do «gravitation, fj la j)csantciir à la suii'are. o la vitesse angulaiie
et a le rayon.
Mais
9r , lit'
Nons avons donc, pour toutes les i)lanéles, l'équation
ou
tjui lie le rayon de la planète à la i)ériode satellitaire.
LX.W. 1874. — Teiu5V. Aréogmpliie.
Le savant astronome de Lonvain a présenté, le G juin 1874, ;i l'Académie
des Sciences de Belgique une « Elude comparative des observations faites sur
l'aspect physique de la planète Mars depuis Fontana (1636) jusqu'à nos
jours , 1873; « ('). Ce travail très important commence par l'exposé de toutes
les observations, et se continue par la comparaison des diverses représenta-
lions faites sur chaque région de la planète. C'est une élude minutieuse de
l'aréographie et une discussion détaillée et soigneuse des dessins les plus
importants. Les principales questions relatives à la géographie et à la mé-
téorologie de la planète y sont posées. Le but que s'est proposé M. Terby a
été surtout d'être utile aux observateurs. « Dirigée vers les points douteux,
écrit-il en terminant, leur attention ne manquera point d'élucider un grand
nombre des questions énoncées dans ce travail, et la précision de la carte
de Mars ne pourra qu'y gagner. Je serai heureux si ces prévisions se réalisent
et si ce mémoire, en faisant atteindre ce résultat, contribue à préparer la
solution de notre connaissance de l'état physique de Mars. »
Cette monographie martienne a été de la plus grande utilité, non seule-
ment aux observateurs, mais encore à tous les savants qui ont voulu s'oc-
cuper de l'étude de Mars, et la Science est redevable à M. Terby de l'un des
meilleurs documents sur la question, de l'un de ceux qui ont fait, on effet, le
plus progresser la connaissance générale de la planète Mars.
Signalons encore, en cette rnêmeannée 1874, une excellente élude duRév.
T.-W. Webb (-). résumant l'œuvre de Kaiser, mort le 28 juillet 1872, étude
accompagnée de deux des dessins de l'habile observateur hollandais. L'un
(•) Mémoires de l'Académie royale des Sciences de Belgique, t. XXXIX, 1875.
(') Xalure of 12 and 19 feb. 1874.
1875
KTUDIiS KT DKSSINS.
23"
des points particuliers de cotte étude est l'assertion de Kaisor, que les dill(>
ifucos de tons (|ui distinguent les diverses tarlies sombres et 1(.' man'iue de
netteté de leurs (•onl<iurs conduiscnl à penser ijiie ces mers ne ressendjlent
pas aux nôtres. Huant à leur coultiir vrrl IiIlmi. Webl) la considère comme
rcelle el non dm' au cimlraslc des conlint.'nls jaunes.
LXXVl 1875.
HOLDEN, HeRNAERTS, Kr.LERV, Fl.A.M.MAHION.
X l'Observatoire national de Washington, M. Holden a fait, pendant l'op-
position de 1875, à l'aide du grand éqnatorial de 26 pouces (O^'.Gô), le plus
grand instrument d'optique existant alors, un certain nombre de dessins,
dont six ont été communiqués à la Société Royale astronomique de Lon-
dres ('). Ils ont été pris aux dates des 14, IG, 21, 23 juin, 2 et 5 août. Gros-
sissement employé : iOO. Malgré les dimensions de l'instrument, ces vues
Fi?. l'iS.
Fi'.'. IV.».
Mars, i»ai- .M. llnlacn, a W ashinLjton, les lGct2J juin 1875.
s'accordent mal avec les aspects connus de la planète. On en jugera par les
croquisdesi6juin,del0''40'"à llMo", et 23 juin {fig. 148 et 149), de 10»'20'"
à il»" 7™, qui sont les meilleurs de la série. Ce n'est pas encourageant pour
les grands instruments.
L'auteur ayant dessiné ces vues au pasteL a constaté que c'est la couleur
rouge-saumon qui se rapproche le plus de celle des continents de Mars, et en
même temps, remarque assez inattendue, de celle de la principale bande de
Jupiter, dont plusieurs dessins au pastel ont été faits au même moment :
le niL'me crayon a dil servir pour les deux.
Le 12 août 1875, Mars a été occulté par la Lune, et l'observation en a été
[') Monthly Xolices, nov. Is7j.
•:3S 1 \ n.AM'.ri; m a us,
faite en plein jour, à "^''^H'", ù rubservaloiic de Windsor (Nouvelle-Cialles du
Sud) par M. John Tebbult. Aucune renianîuc.
Pendant la même opposilion, M. Dernaerts a l'ail à Malincs une série d'ob-
servalions et de croquis ;'\ (jui n'ajoulenl à tout ce (jui précède aucune
donnée importante.
Nous nous sommes occupés, pendant l'année 1875, à faire un certain
nombre de comparaisons entre diverses planètes, diverses étoiles, et la lu-
mière du gaz. à l'aide d'un sextant mobile autour d'un pied fixe, en amenant
en contact deux astres dilTérenls ou un astre avec un bec de gaz ( -K Les astres
ont été pris autant que possible à une hauteur de 40" à 50° au-dessus de
l'horizon, tandis que le gaz de comparaison était à l'horizon, à environ un
kilomètre au sud de l'Observatoire de Paris. Il n'y a là qu'un essai provisoire,
l'épaisseur atmosphérique tendant à accroître les rayons de rexlréniilé
rouge du spectre, au détriment de ceux de l'extrémité bleue. Ces essais ont
donné pour les couleurs et les contrastes :
Sirius Blanc bleuâtre.
Lune ,. Jaune clair.
Jupiter. Jaune laiton.
Mars J:uinc orant^e.
Antarès Orange.
Gaz Orangé rougeàtre.
11 y a des contrastes Un-l curieux :
Mars et la Lune Orange vif et bleu pâle .
Mars et Jupiter Orange et vert marine pâle.
Mars et Saturne Orangé et vert.
Mars et Véga Rouge et bleu.
Gaz et Mars Orange et citron.
Gaz et Lune Rouge cerise clair et argent éclalanl.
Ainsi, cette planète qui parait comme Antarès, sa rivale étyniologi(jue et
historique, si rouge h l'œil nu. est moins rouge (pi'un bec de gaz vu à un
kilomètre de dis lance.
Nous avons pris également cette année-là plusieurs dessins de la pla-
nète.
LXXMl. I87G. — C. Flammarion. Les Terres du Ciel.
La première édition de cet ouvrage a été publiée au mois de novembre
1876 (^i; le Livre VI (p. 307 à 440) est consacré à la planète Mars.
[') Bullelin de l'Académie de BcUjiqne, 2" série, t. XLV, p. 3J.
'') Voy. Bulletin delà Société Astronomique de France, l" année, 1887, p. ÔO'.
1=^ l vol. in-8% librairie académique Didier et C'".
IS7G C. FL \.M.M AinoN. - G ÉO(i l{ A l> Il I K |;t CLIMATS l)I- MAIIS.
239
Nous y donnions d'iiltord la ligure suivanlc [ftij. JJU), qui sera tout à fait à
sa [ilaceici pour ri'suincr le cycle antérieur à 1877 e.t nous préparera roiii)Osi-
tion [)ériliéli([ue de 1.S77. 0 est le centre de lorbile de Mars, 1' le point du i)éri-
hrlic de Mars, a raitliclic île la Terre, p le périhélie de la Terre, Q la ligne
d'inlerseclion des deux orbites. Un Aoit (jne, depuis 1869. chaque opposition
J/. Afiir
Fis. IJÛ.— Relation cutre l'orbite de Mars et celle de la Terre, de 18G7 à 1877
ramiMiait Mars un peu [ilus près de la Terre, et que le plus grand rapprodie-
ment se préparait pour 1877.
Nous avons mari]ué sur cette orbite les [)oinls des solstices et des e(|ui-
iio.ves de Mars. A propos de la climatologie martienne, nous écrivions :
Ce monde présente coinine le nôtre tr(/is zones bien distinctes : la zone tori'ide,
la zone tempérée et la zone glaciale. La première s'étend de part et d'autre de
réquateur jusqu'à 28''42', la zone tempérée s'étend depuis cette latitude jus-
qu'à Glo|8', la zone glaciale entoure chaque pôle jusqu'à cette distance.
La planète tournant comme la Terre dans le zodiaque, le Soleil tourne égale-
ment en apparence pendant l'année martienne tlevant les constellations zo-
diacales. Seulement, au solstice d'été de riiénnsphère nord, ce n'est pas dans le
Cancer que le Soleil se trouve, mais dans le Verseau, et au solstice d'hiver, ce
n'est pas dans le Capricorne, mais dans le Lion. De sorte que nous, pouvons ap-
peler les tropiques de Mars tropiques du Verseau et du Lion.
L'existence de l'atmosphère martienne est démontrée. Lorsque les taches de
la surface sont au centre de l'iiciuisphère, on les distingue nettement; mais lors-
•MO i.\ n.ANKII': MAHS.
que, emportées par la rotation, elles arrivent vers les bords (.lu disque, non scu-
lenicut elles se présentent en raccourci suivant la perspective géométrique de
leur position sur la sphère tournante, mais encore elles perdent leur netteté,
devieuueut pdles, et cessent d'être visibles avant d'atteindre le bord. Cet eiTet
est cause par l'atmosphère, qui absorbe les rayons lumineux, et interpose un
voile de plus en plus épais à mesure que le rayon visuel approche du bord. De
plus, le bord de la planète est tout autour, dans son intérieur, plus pâle que la
région centrale, à cause de la même absorption atmosphérique.
D'autre part, les neiges, les nuages et les recherches de l'analyse spectrale
prouvent la présence de la vapeur deau dans cette atmosphère.
La géographie martiemio forme Tobjel d'un autre Chapitre, dans lequel
nous exposions l'ensemble des observations depuis 1636, et qui se complète
par une Carte représentant nos connaissances les plus sûres. On trouvera
cette Carte un peu plus loin, p. "251, à propos des préparatifs faits en vue de
l'opposition de 1877. Nous la résumions ainsi :
L'examen de ce planisphère nous montre d'abord que la géographie de Mars ne
ressemble pas à celle de la Terre. Tandis que les trois quarts de notre globe sont
couverts d'eau, la distribution des mers et des terres est à peu près égale sur
Mars. Au lieu d'être des îles, émergées du sein de l'élément liquide, les conti-
nents semblent plutôt réduire les océans à, de simples mers intérieures, à de vé-
ritables méditerranées. Il n'y a point là d'Atlantique ni de Pacifique, et le tour
du monde peut presque s'y faire à pied sec. Les mers sont dccoui)écs eu golfes
variés prolongés en un grand nombre de bras s'élançant comme notre mer
Rouge à travers la terre ferme. Tel est le premier caractère de l'aréographie. Le
second, qui suffirait aussi pour faire reconnaître Mars d'assez loin, est fourni par
la mer du Sablier et la Manche.
Nous nous rangions aussi à l'opinion (jue les taches foncées représentent
réellement des étendues d'eau, et les claires des continents, interprétation
discutée et contestée par plus d'un observateur (Liais, Cruls, Ijrett, Trou-
velot, etc.).
Qu'il y ait de l'eau sur ce monde, écrivions-nous, c'est ce qui est évident,
attendu qu'on la voit à l'état de glaces polaires, de neiges variables, et aussi à
l'étatde nuages flottant dans l'atmosphère, et que de plus on en constate la présence
à l'aide du spectroscope. Les mers, vues de loin, doivent paraître plus foncées que
les terres, parce que l'eau absorbe une grande partie de la lumière et n'en réflé-
chit que fort peu.
11 faut remarquer cependant que les mers de Mars ne sont pas également
sombres; plusieurs sont particulièrement foncées (la mer du Sablier, le golfe
Kaiser, la mer Lockyer. la mer Maraldi (carte, p. 2.51). On pourrait penser que les
moins sombres sont parsemées d'îles que nous ne distinguons pas à cause de leur
1876 C. FLAMMAIIION. - r, flOO H A PIII I- ET CLIMATS DF- MARS. 211
petitesse, et qu'en certains jxjints uK'ine l'eau n est pas très profonde, comni(; il
arrive chez nous, par exemple, pour le Zuyderzf'e. Ces difTdrences m'ayant sur-
pris, j'ai cherclK' à les expliquer, mais sans y parvenir, par des variations de
transparence dans l'atmosphère de Mars ; elles sont ruelles, mais n'en avons-nous
pas une image dans les eaux terrestres elles-mêmes"? La coloration des eaux de
la mer est loin d'être la même à toutes les latitudes; la dilTérencc est énorme
pour les fleuves : la Marne est jaune, la Seine vert pâle, le Rhin vert foncé, etc.
De plus, il scmlile que ces mers ne soient pas invariables, car, depuis 1S30,
certains changements paraissent incontestables, par exemple le golfe Kaiser, qui
présentait alors, comme à la fin du siècle dernier, l'aspect d'un fil terminé par un
disque, et qui depuis 18G2 est beaucoup plus large et se termine, non par un
cercle noir isolé, mais par une baie fourchue. Peut-être y a-t-il sur cette planète
des déplacements d'eau et des variations de couleur de l'eau, qui n'existent pas
sur la notre.
Tel est le résumé des connaissances qui résultaient déjà de l'ensemble des
observations physiques. Pour la première fois (187G), les variations dans les
mers, comme ton et comme étendue, sont établies sur un nombre suffisant
de faits observés.
A cette longue série de travaux qui constituent notre deuxième période, on
pourrait encore en ajouter quelques autres, dus à : Gapocci (1862) , Schultz (id.),
Vada(1863), Michez (1865), Folque (1867), Fabritius (1873), etc. Mais ces
pierres détachées n'ajouteraient rien à notre édifice.
Toutes les observations que nous venons d'examiner ont leur valeur intrin-
sèque, assurément; mais, en arrivant à la clôture de celte deuxième période,
nous pouvons remarquer que celles de ces dernières années surtout semblent
n'avoir été pour ainsi dire que des préparatifs pour l'opposition si éminem-
ment favorable de 1877. Les astronomes s'y préparèrent longuement, comme
ils l'avaient fait pour 1862, et mieux encore, la planète devenant de plus en
plus connue, et les progrès de l'Optique accroissant encore toutes les espé-
rances.
Avant d'arriver à cette troisième et dernière section de notre examen,
résumons les progrès qui viennent d'être acquis pendant celle seconde pé-
riode, de 1830 à 1877.
Fl.vmmarion. — Mars. !6
COiNCLUSlOiNS DE Li DEUXIÈME PÉRIODE.
1830-1877
Ueporlons-nous un instant à la page 96 de cet ouvrage, et relisons les
conclusions que nous avons tirées de la première période.
Les 13 articles de cette conclusion sont confirmés. Plusieurs sont dévclop
pés. De nouvelles lumières sont apportées.
1 i. La durée de la rotation diurne est désormais fixée avec précision à
24''37'"2-2S65,
à quelques centièmes de seconde près : la valeur est sûrement enti'c
22% 6 et 22», 7.
En 1830, on était encore loin de cette précision.
15. La géographie de la planète est esquissée dans ses traits piincipaux.
Plusieurs cartes ont été construites, d'abord par Béer etMiidler en 1840, puis
par Kaiser en 1864, Phillips la même année, Proctoren 1867, Grecn en 1873.
A ces tracés géographiques on peut ajouter l'essai que nous avons publié en
1864 sur l'hémisphère le mieux connu de la planète, celui qui a la mer du
Sablier pour centre. Les taches sombres essentielles sont permanentes, et il
n'est plus possible d'admettre, avec Schrœtcr, qu'elles puissent être de na-
ture atmosphérique. Cependant notre première conclusion (Art. 8) est à
conserver : les formes et les aspects de ces taches sont variables.
200 vues nouvelles de Mars viennent de passer sous nos yeux pendant
cette deuxième période. Jointes aux 191 premières, ces vues représentent
391 dessins différents de la planète, faits par tous les observateurs. Leur
étude comparative établit que chaque observateur voit selon ses yeux, sou
habileté, ses instruments, et dessine aussi selon ses aptitudes.
16. Il y a donc pour chaque dessin ce que nous pourrions appeler une équa-
tion personnelle, une interprétation individuelle, et comme les détails d'un
globe vu à la distance de Mars et à travers deux atmosphères sont toujours
plus ou moins vagues et excessivement délicats, plusieurs même se trouvant
à la limite de la visibilité, il ny a peut-être pas un seul dessin qui représente
rigoureusement, exactement, ce que paraîtrait le monde de Mars à un obser-
vateur très proche de sa surface.
CONCLUSIONS 1)1- LA DEUXIÈMK PÉUIODL (1830-1877). 243
17. Néanmoins, de toute celle variél»': reste un fond certain, celui qui est re-
présenté sur notre Carte générale de la page 69. D'autre part, les causes de
diversité attribualjles aux observateurs n'cxpli(|uenl pas certaines diver-
gences, qui doivent être considérées comme réelles, .\insi, la mer du Sablier
varie certainement de largeur et de ton ; sa rive gauche, surtout en haut, à
la péninsule de Ilind, paraît indiquer des terrains tantôt secs et tantôt
inondés; la mer circulaire Terby a tout autour d'elle, et surtout au-dessous,
des régions tantôt claires et tantôt foncées; la mer Flammarion est quel-
quefois traversée par une sorte de banc de sable; la baie du Méridien a paru
parfois ronde, parfois carrée, parfois allongée et fourchue, etc.
18. Ces aspects et ces variations conQrment l'interprétation déjà faite pen-
dant la première période, savoir : que les taches sombresreprésentent des éten-
dues liquides, des mers, des lacs, et les taches claires des étendues solides,
des continents, des lies.
19. Les variations des neiges polaires conGrment cette assimilation avec une
eau douée des mêmes propriétés que celle de notre planète, susceptible de se
convertir en neige, en glace, en nuages.
20. L'analyse spectrale, créée pendant cette deuxième période, établit que
ces eaux sont analogues aux nôtres comme composition chimique.
21. Toutefois, ces étendues aqueuses doivent être dans un autre état phy-
sique que nos mers, moins denses (?), moins liquides (?), nappes de brumes
visqueuses (V).
22. L'atmosphère est moins troublée que la nôtre, moins chargée de nuages
et de brumes, moins productrice de pluies, plus raréfiée; plus transparente.
L'eau doit s'y évaporer et s'y condenser plus facilement qu'ici. On n'y
observe pas de cyclones, comme avait cru le faire le P. Secchi. Mais on
observe parfois des neiges très étendues (voy. fig. p. 121, 128, 129, 130, l-'i7)
à d'assez grandes distances des pôles, notamment sur la terre de Lockyer,
que Ion a prise parfois pour le pôle.
23. Il y a moins d'eau sur Mars que sur la Terre, d'abord comme étendue
( car cette étendue, au lieu d'occuper les trois quarts du globe, n'en occupe guère
que la moitié), ensuite comme profondeur sans doute, car les variations de
tons des mers peuvent être attribuées à ce que parfois le fond devient visible,
et les inondations paraissent fréquentes sur de vastes plages (jui doivent être
regardées comme très plates.
24. L'hémisphère supérieur ou austral de Mars est surtout aquatique ; l'hé-
misphère boréal, surtout continental. Le sol de celui-ci estdonc à un niveau
supérieur à celui du premier. Les causes géologiques qui ont agi dans la
formation de la planète ont élevé l'hémisphère boréal et déprimé l'hémisphère
austral. Remarque digne d'attention, il en a été à peu près de même pour
'2ri LA PLANf/rK M A US.
la Terre: les i:raiuls couliMeiils, l'Asie el riùiropc, rAmérique du Nord, la
Minilié di' l'Afrique, occupcut l'hruiisphère boréal; l'austral a rAniériijUc
(lu Sud. l'Afrique du Sutl cl l'AusIralit', donl la surface est de beaucoup
inférieure.
Celle dilTérence peut provenir tic raelion de rallractiou solaire sur l'iié-
misphére marlien le plus rapproché du Soleil, pendant la demi-période de
révolution de la liiine des apsides, à l'époque critique de la consolidation de
l'ècorce de la planète; celte attraction aura eu pour ellel de surélever léiiè-
rement et obliquement rhéniispliére nord. Le centre continental paraît être
dans le continent Huygens, vers 150° de longitude et 20° de latitude; le
centre maritime, à peu près à l'antipode, dans l'océan Dawes, vers 330° et
30". Pour la Terre, ces mêmes points sont à [)cu près les Karpalhes et leur
antipode.-
25. L'aplatissement polaire de Mars est certainement plus faible que ne
l'avaient cru Ilersclicl, Laplace et Arago, et les objections faites contre la
théorie paraissent sans fondements.
La figure géométrique du globe de Mars ne paraît pas différer beaucoup
de celle de notre globe, comme on l'admettait sur la croyance d'un aplatis-
sement trop fort. Le rapport de la force centrifuge à la pesanteur est de
YrTJ- L'aplatissement polaire doit peu différer de cette valeur.
20. 11 doit exister des fleuves à la surface de Mars, puisqu'il y a des mers,
des nuages et des pluies. La baie du Méridien paraît être l'embouchure de
deux grands fleuves.
27. Quoique le globe de Mars paraisse moins irrégulier que le nôtre dans
ses reliefs orographiques, il semble cependant qu'il y ait quelques montagnes
assez élevées, quelques plateaux supérieurs. Ainsi les deux îles dessinées sur
notre carie aux 47' et 297'- degrés de longitude sont tantôt visibles et tantôt
invisibles : ce sont sans doute des montagnes parfois couvertes de neige. II
semble aussi qu'il y ait un plateau fort élevé vers l'équateur, à la droite de
la mer du Sablier, et un autre vers l'intersection du 185' degré de longitude
avec le 65^ degré de latitude sud.
En résumé, les analogies de ce monde avec le nôtre continuent de s'établir
par la série des observations. La climatologie y paraît même singulière-
ment semblable à la nôtre, soit que la température s'y maintienne à peu près
au même degré qu'ici, soit que les conditions physiques de pression atmo-
sphérique, de densité, de pesanteur, y déterminent des effets analogues à une
température différente.
TROISIÈME PÉRIODE.
LE CYCLE MARTIEN DE 1877 A 1892.
TROISIÈME PERIODE.
LE CYCLE MARTIEN DE 1877 A 1892.
Notre troisième période comprend le cycle martien do 1877 à 1892, plus
fécond à lui seul que tous les précédents.
Rappelons d'abord que la combinaison des mouvements de translation de
la Terre et de Mars autour du Soleil produit un cycle de quinze ans, com-
prenant tout l'ensemble des aspects que Mars peut nous présenter. La pla-
nète accomplit sa révolution autour du Soleil en 686 jours 23'' 30™ 41% la
Terre en 365 jours e*" 9" 11\ Il résulte de ces deux mouvements que la
Terre et Mars se rencontrent sur la même ligne relativement au Soleil tous
les deux ans environ ou tous les 780 jours en moyenne. L'intervalle n'est pas
régulier, parce que ni ce monde ni le nôtre ne marchent avec une vitesse
uniforme, leurs orbites n'étant pas circulaires, mais elliptiques. On se rendra
compte de ces périodes de rencontre ou d'opposition de Mars relativement
au Soleil, par les dates suivantes du cycle que nous allons passer en revue.
OPPOSITIONS DE MARS, DE 1877 A 1892.
Distaiicp minimum à la Terre.
Rayon orbite Diamètre
Dates. Ô étant 1. en kilomètres. maximum.
1877. 5 septembre 0,3767 55.532.000 30'
187'J. 12 novembre 0,/i824 71.877.000 23
1881. 20 décembre 0,0028 80.817.000 18
1884. 31 janvier 0,6691 99.000.000 16
1880. 6 mars 0,6699 99.830.000 14
1888. 11 avril 0,6050 90.145.000 18
1890. 27 mai 0,i8i9 72.265.000 23
1892. 4 août 0,3773 56.217.000 30
En raison de l'ellipticitc des deux orbites, ces oppositions diffèrent sensi-
blement quant à la distance qui sépare les deux plauctcs. Quand la ren-
contre arrive à l'époque du périhélie de Mars, lequel a lieu à la longitude
Î48
LA PLANKTE MARS.
334", où la Terre passe le 27 août, la tlislance est réduite à son minimum.
La position la plus favorable revient tous les quinze ans. Les années 1877 et
1802 représentent des oppositions périhéliques. Nous avons calculé les dis-
tances en kilomètres pour la parallaxe solaire 8". 81 cl la dislance moyenne
de la Terre de 149 millions de kilomètres.
Ce n'est pas exactement le jour de Topposilioii que le minimum de dis-
tance se produit, attendu que l'opposition représente une différence de 180°
de longitude entre le Soleil et la planète, et que celle-ci peut se rapprocher
du plan de l'orbile terrestre les jours qui précèdent ou qui suivent cette
Fig. 151.
o^'''
E DK
M ^ ;
Cycle des oppositions de Mars.
situation. Mais il n'y a jamais qu'une différence de quelques jours. Les
nombres exprimés plus haut indiquent le plus grand rapprochement atteint
chaque année.
Si nous évaluons ces distances en kilomètres ou en lieues, nous voyons
qu'elles varient pour ces sept intervalles d'opposition entre 55 et presque
1 00 millions de kilomètres, entie 1 4 et 25 millions de lieues, ce qui est considé-
rable. Nous avons représenté ce cycle par la petite figure ci-dessus [fig. 151),
qui n'a besoin, pour les lecteurs de cet Ouvrage, d'aucune auire explication.
Ce cycle de 1877 à 1892, qui va former la troisième section de notre étude
historique, constitue en même temps une période naturelle dans l'observa-
tion de Mars, et si cette monographie de notre île céleste voisine est conti-
nuée dans l'avenir, les périodes suivantes seront pour ainsi dire tracées
d'avance par les cycles futurs... 1892-1907,.., 1907-1922, etc.
L'année 1877 a été fertile en résultats magnifiques. Si l'opposition de 1830
1877 C. FLAMMAHiON. — CAUTI- K T OUSKU V ATIONS. 249
;i ouvert vraimcnl pour nous l'élude géographique et climatologique de la
planète Mars, l'opposition de 1877 a inauguré l'ère dune analyse assuré-
ment plus intime que l'on n'aurait jamais osé l'espûrer.
Nous allons passer successivement en revue tous les travaux accomplis.
Maintenant (juc les ohsorvations deviennent plus détaillées et plus pré-
cises, et qu'(.'ll(_'S peuvent nous mettre sur la trace des effets des saisons à la
surface de la planète, nous prendrons soin d'inscrire en tète de chaque oppo-
sition les dates des solstices et des cquinoxes corres^jondant aux époques
des observations
lfi77
Opposition : 5 septembre.
Pôli' incliné vevfi la Terre : austral.
(]\r.ENDBIER DE MaRS.
IK-mispliiTe austral ou supérieur. llémispliiTe burûal ou inférieur.
1" mai 1877 Équinoxe de printemps. Équinoxe d'automne.
27 septembre Solstice dV-té. Solstice d'hiver.
G mars 1878 Équinoxed 'automne. Équinoxe de printemps.
L'opposition de septembre 1877 se présentait comme si privilégiée, que
notre premier soin a été de construire un planisphère au niveau de toutes
les connaissances acquises. Cette carte de Mars a été publiée au mois d'avril
par l'Académie des Sciences, avec la note suivante qui l'accompagnait et en
expliquait l'opportunité. Il nous a semblé que les cartes antérieures, même
celle de Proctor, laissaient beaucoup à désirer, et nous avons essayé de faire
un peu mieux, surtout pour aider les observateurs à identiûer leurs dessins.
LXXVIII. 1877. — C. Fla.mm.\rion. Cai-le de la planète Mars et observations.
Voici cette note avec la carte {fig. 152), présentée d'ailleurs comme
« provisoire » et destinée à de grands perfectionnements (*).
Au moment où la planète Mars passe à sa plus grande proximité de la Terre,
il peut être intéressant pour un grand nombre d'observateurs d'avoir sous les
yeux un planisphère exposant l'état actuel de nos connaissances sur ce monde
voisin. J'ai l'honneur de présenter à l'Académie une carte que j'ai commencée il
y a bien longtemps déjà, en 18G3, époque à laquelle je travaillais à la seconde édi-
tion de mon ouvrage sur La pluralité des viandes /la^i^és.danslaquellejepubliai
un premier croquis, comme comparaison avec la géographie de la Terre, carte que
(') Voy. Cornplcs rendus de l'Académie des iSciences, séance du 'Zl avril 1877,
p. 476.
•:r,0 I A PI.ANftTl- MARS.
j'ai souvent rccommonrc'O depuis, qui a seulement ét(.^ terminée l'année dernière,
et qui ne doit encore être eonsidérée toutefois que comme un trncc provii^oirc
des taches permanentes de cette planète.
Nous possédions déjà trois essais principaux de représentation c:éo£:raphique
de Mars. Le premier date de quarante ans, et a été donné par Beor et Madler, pour
résumer leurs observations faites en Allemagne de 1830 à 1839; le second est dû
à Kaiser, do Leyde, qui traça une carte de Mars, après les oppositions de 1SG\Î et
ISilî. pendant lesquelles il observa assidûment la planète; le troisième est dû ;\
M.Proctor qui, en 1800, dessina une carte remarquable, beaucoup plus complète
que les deux précédentes, d'après les observations faites en Angleterre par Dawcs,
en 180 î. Ces trois cartes offrent entre elles des dissemblances considérables.
Mon but a été de représenter, non une seule série d'observations comme dans
les cas précédents (les miennes, quoique nombreuses, eussent été, du reste, fort
insuffisantes pour ce but), mais l'ensemble général des observations faites depuis
le commencement, si c'était possible. J'ai comparé, pour construire cette carte,
plusieurs centaines de dessins, dont les premiers datent de plus de deux siècles
( iG3G), et dont les principaux, indépendamment des trois séries précédentes, sont
dus à Iluygens, Maraldi, Herschel, Schrœter, Secchi, Lockyer, Lassell, Phillips,
lord Rosse, Knobel. La bibliographie aréographique de M. Terby m'a été fort
utile dans ce travail.
Le degré zéro des longitudes aréographiques a été placé au point choisi par
Béer et Mildler, méridien remarquable par une petite tache très sombre, signalée
vers 1T9> par Schrœter, remarquée de nouveau en 1822 par Kunowski, prise
comme origine en 1830, par Madler, revue par Dawes en 1854 et 1862, placée par
Kaiser à 90 degrés, et qui est incontestablement un point fixe du sol de Mars.
D'après l'ensemble des observations, cette tache me paraît isolée de celle qui
s'étend à sa droite (orient). Kaiser a pris pour origine la tache ronde, non moins
caractéristique, que l'on voit près du 270* degré, et Phillips, le cap équatorial du
continent traversé par notre -iô* degré. Il m'a paru préférable de conserver l'ori-
gine précédente, déjà adoptée par Madler, Lockyer, Proctor, etc.
La configuration la plus anciennement connue de la géographie de Mars est la
mer verticale sombre que l'on voit descendre au-dessous de l'équateur, vers le
70' degré de longitude, s'amincir et se terminer par un coude qui se dirige vers
l'est en forme de canal. Au-dessous, se trouve une autre mer qui s'avance dans
l'intérieur des terres en formant un angle. Lorsque le globe de Mars est tourné
de façon à nous présenter cette région à peu près de face, ces deux mers pa-
raissent réunies vers le coude, et l'ensemble rappelle la forme d'un sablier. On
la désigne depuis longtemps sous ce même nom : the Hour-glass Sea. La pre-
mière observation que nous ayons de cette tache date du 28 novembre 1659, et
est due à l'astronome Huygens.
Cette mer, représentée sous forme de sablier partons les anciens observateurs,
a, coïncidence bizarre, servi véritablement de sablier ou de mesure du temps,
pour déterminer la durée de la rotation de la planète. Il semble donc que la meil-
1877
C. Kr.AM.MAIUON. — CAUTK KT OUSKH V ATFONS.
251
Icuro désignation i\ doiuu'r ;\ cette mer soit de lui conserver son nom déjà véné-
rable de mer du Sablier. Aucune dénomination n'a jamais été si légitime. Le
1*. Secchi a propos(' le nom de mer Atlnntique, et M. Proctor celui de mer de
Knii^er. Or, d'une part, elle est bien étroite pour mériter le nom il A tlnnlique, et
d'autre part, si elle devait porter un nom d'astronome, ce serait celui d'IIuygens,
qui l'a découverte. Pour toutes ces raisons, il nous a paru logique de lui conserver
le nom de mer du Sablier.
Klle est généralement plus sombre et mieux marquée que la plupart des autres
Fiff. 152.
Ucfr^,.l'S ljn.Uu<li-
iil^^^Éfe^MAlllj>^>^UAjaiMfeë^^^f^^^
Carte géographique provisoire de la planète Mars, par M. Flammarion, en 1876 ('I.
taches, surtout vers le centre. Du reste, les diverses taches qui parsèment le
disque de la planète sont loin d'avoir une même intensité.
La mer du Sablier et l'océan Newton, dont elle est le prolongement, forment
la configuration aréographique la plus anciennement connue.
On peut leur associer la mer Maraldi, vue aussi par Huygens, en 1659, sous
la forme de bande analogue ù, celles de Jupiter. Ilooko l'a dessinée en 1606, et
Maraldi en 170i. Le P. Secchi lui avait donné le nom de Marco Polo, mais il est
évident que celui de Maraldi, proposé par M. Procter, lui convient à tous les titres.
Le golfe Kaiser, dont l'extrémité orientale forme la baie fourchue (longitude
zéro), est, comme la mer du Sablier et les mers Maraldi, Hooke et Huygens,
l'une des configurations géographiques de Mars les plus anciennement dessinées.
On en trouve un vestige dans deux dessins de Huygens de 1650 et de 1683. Herschel
(') Cette carte est la mf'ine que celle qui a été publiée dans la première édition des
Terres du Ciel (novembre 187C) et dont il a été parlé plus haut.
?.V2 LA rLANKTi: M A H S.
a dessiiu' le même ^'olfo on 1777 et 1783, notanimeut le fer à cheval formé par le
golfe d'Arago avec celui ilo Kaiser, et il est nuMiie le premier qui ait bien figuré
ces détails; mais il a été, en 18G'2, l'objet de l'étude la plus soignée de la part
lie Kaiser.
A l'est du golfe de Kaiser, on rencontre : 1° une baie émergeant au nord de
lùcéau Kepler; "2'^ une Ma)ichc conduisant de cet oc('an à la mer Mildlcr. Cette
Manche, comme cette mer, sont également connues depuis fort longtemps.
Le bras de mer qui s'étend de l'océan Kepler i\ la mer Madler, qui est si
caractéristique, et pour lequel le nom de Manche est certainement la dénomina-
tion qui convient le mieux, est surtout connu par les dessins du P. Secchi. La
mer Madler paraît se prolonger vers le Nord et devenir d'abord plus claire, puis
plus foncée, et jeter uu bras à l'Est vers une autre mer plus orientale.
L'océan Kepler est connu par un grand nombre d'observations, dont les plus
anciennes remontent à William Ilerschel et Schrœter.
On remarque à l'Est une tache ronde sombre, qui a reçu le nom de mer Lockyer.
Cette petite mer est très curieuse : on la voit dessinée pour la première fois par
Béer et Madler, en 1830; on la retrouve dans leur carte, sur le 270*= degré de lon-
gitude et le 30"^ degré de latitude, mais isolée de l'océan Kepler, dont la lim'ite
orientale ne dépasse pas le 274« degré. On la reconnaît aussi en 18G0, dans les
dessins de Schmidt, d'Athènes, isolée aussi. En 18ri2, le P. Secchi l'a prise pour un
cyclone, à cause de la forme circulaire de sou entourage. La même année, le
même jour (18 octobre), elle était dessinée en Angleterre, par M. Lockyer, et il
la nommait « mer Baltique x. Les dessins de Lassell lui donnent la forme d'un
œil et on la nomme aussi « Oculus ».
Les mers de la Hue, Dawes, Airy, Faye et Iluygens ne sont pas aussi exacte-
ment connues. Il eu est de même des terres de Laplace, Fontana, Cassini, Secchi,
Schrœter, Tycho, Webb, et des golfes Arago et Foucault.
L'avantage pratique de donner des noms aux objets, au lieu de simples numéros
d'ordre, m'a conduit à, inscrire les noms que l'on voit sur ce planisphère : ce sont
ceux des principaux astronomes, à l'exception de la mer du Sablier et de la
Manche, déjà nommées par leur propre forme. J'ai suivi en cela le même prin-
cipe que M. Proctor, mais étendu sur une plus vaste échelle et afTranchi de répé-
titions.
Très certainement il reste encore bien des points douteux, surtout à partir du
00* degré de latitude, et principalement au Nord; mais j'ai l'espérance que, telle
qu'elle est, cette carte représente, aussi exactement que possible, l'état actuel de
nos connaissances sur la géographie de ce monde voisin.
Sur cette carte, les degrés de longitude sont gradués de l'Est à l'Ouest pour
l'observateur terrestre, et de l'Ouest à l'Est pour les habitants de Mars, leur orient
étant à gauche lorsqu'on regarde la planète, le Sud en haut.
Telle est la noie par laquelle nous résumions alors nos connaissances
aréographiques. En même temps, à l'aide d'un télescope de 0'°,20, muni de
1877
C. l-LAMMARIOX. — CARTF- KT ( ) BSI- H V ATIONS.
253
gro.ssisseincnls dt; JIO ol 3U0 fois, nous pi-ciiions un .ur-iud iioniltre de des-
sins de l;i planète. Nous en reproduisons d'abord ici quatre [fig. 153), réduits à
rcclielle de 1""" pour 1", qui montrent exactement l'aspect et la grandeur du
disque aux dates indiquées. Le premier a été fait le 30 juillet, à 11''0™; la mer
Ki" I-.:;.
Crotiuis (le Mars, les oO juillet, 1.) août, li septembre cl -- 'njlabro l.s^7.
du Sablier est à peu près au centre du disque et l'a léirèrement dépassé (lon-
gitude du méridien central: 312»). Le second est du 23 août, à IPSO"; la mer
circulaire, ou l'OEil, a sensiblement dépassé le méridien central, dont la lon-
gitude était alors de 105°. Le troisième est du 14 septembre, à 10''10"; il
Fig. iri4.
Mars, le 'J7 septembre 1877.
laisse deviner la mer Maraldi ri la mov llookc (longitude .'du méridien cen-
tral : 240°). Le quatrième est du 2G octobre, à 7'' 55'", et esquisse vaguement
la figure de deux ailes ouvertes d'un grand voilier, qui paraît formée par la
réunion des mers Schiaparelli et Maraldi (méridien central à 190°). A cette
dernière date, la planète était déjà fort éloignée de la Terre.
'2o\ I.A l'LANKTK MA US.
Ces quatre croquis imailrent en uièinc temps d'une manière frappante la
diminution de In neige polaire supérieure ou australe. Le Sdlsliee dété tle
riiémisplière austral de Mars est arrive, en 1877, le i?7 seplemluv.
A ces croquis, (jui représentent la cireonfcrcnce totale de la planète,
nous pourrions en joindre ici un certain nombre dautres faits durant cette
opposition. Nous nous ])oruerons ù reproduire celui du 27 septembre, à
8'' 35"' (ftg. 154), sur lequel le lac circulaire se dctaclic comme un point noir
bien net. Lu mer (]ui l'environne ne paraissait pas se continuer au-dessous,
comme dans le croquis du 23 août. L'océan de la Rue et la baie Ghrislie
étaient bien liniilés.
Remarque digne d'attention : pendant toule celle période de juillet à oc-
tobre 1877, riiémisplière visible de Mars s'est pres(jue coiislamment montré
très pur cl sans nuages.
LXXIX. 1877. — Paul et Prosper Henry. Dessins.
A l'Observa loire de Paris, MM. Henry frères ont fait un certain nombre
de dessins de la planète, pendant la même opposition, à l'équatorial de
Fi?, l.-j.-,
Crociuis de .Mar.^, les ~-l aoul 1x77, .'> »e|.tt;iiibi-o. lu sei'lcmljre, â'J''iO™, et mcuic jour u. 11'' 4J"'
par M.M.IIcnry frères.
0'",24 du jardin. Ces dessins concordent d'une manière rcmaiqua])le avec
la carte. Quelques particularités cependant sont à signaler. Ainsi, la mer
circulaire paraît, dans plusieurs dessins, presque rattachée à une traînée
légère, comme si la mer Scbiaparelli se continuait en un mince filet jusqu'à
elle. Tel est, par exemple, celui du 22 août, à 11 ''50'". Un beau dessin du 5 sep-
tembre, à minuit, montre nettement la baie du M(!;ridien et la baie Burlon,
mais l'océan Lawes paraît limité au sud par un courant, qui correspond
d'ailleurs au détroit Arago. Fait plus remarquable encore, les observateurs
ont vu, à plusieurs reprises, la mer Hooke traversée par une ligne blanche.
1H77
ASAIMI HALL. — Df- (H • l \ I. H I i; DliS S ATliLLITKS.
coninio un poiil gigaiiL(;st]uu tle nuagos rrciiligiics ou uu l)anc de sable; tel,
par exemple, le dessin du 10 septembre, ;i 'J''rjO'°. La rive droite de la mer
du Sablier était très loncée.Deux heures après, cette mer, amenée parla ro-
tation du globe, se présentait ilaus toute son ampleur. Ces quatre dessins,
Tort curieux, sont reproduits ici {fly. 155). Un les comparera avec intérêt
avec notre carte complète de la'p. 69.
A ces dessins, nous ajouterons, des mêmes observateurs, celui du 27 août
(fig. 15G), qui reiu'i'scnlc la prciuicre observation faite, en France, de l'un
Fier. r.n.
Mars, le 27 aoiit 1677. Premièro observation faite en France d'un sateUite de Mars
des satellites de Mars. Ces satellites ont été découverts à TObservaloire de
Washington, par M. Asapli Hall, le plus éloigné,' le 11 août 1877, le plus
proche, le 17 août suivant. La nouvelle fut télégraphiée en Europe, no-
tamment à Le Verrier, directeur de l'Observatoire de Paris (qui ne devait
pas tarder à quitter cette terre : il est mort le 23 septembre suivant), et l'on
s'eilorra de vériticr cette découverte, aussi curieuse qu'inattendue. Le
27 août, MM. Henry réussirent, en masquant la planète, à apercevoir le
satellite le plus éloigné. Mars tournait alors vers nous riiémisphcre ayant la
mer circulaire à peu près à son centre.
Avant de continuer notçe étude de la planète, c'est ici le lieu de rappeler
cette étonnante découverte des satellites.
L.\X.\. 1877. — AsAiMi Hall. Dccouvcrlc des satelliles de Mars (').
La découverte des deux satellites de Mars est assurément l'une des plus
curieuses et des plus intéressantes des tom[is modernes. On peut dire qu'elle
(') Observations and orUits of llic salcUilcs of Mars, by Asai'H II.\ll. Washington
1678.
'256 I.A PLANT. TE MARS.
a été faite exprès, — oc qui ii est pas h^ cas i^cnéral dans les (Iceouvertes. —
et qu'elle est le résultat de la plus louable persévérance. Nous venons de
voir que l'année 1877 a été particulièrement remarquable à cause du rap-
prochement maximum auquel Mars devait se trouver de la Terre, l'opposi-
tion des deux planètes ayant été fix^'C par le calcul pour le 5 septembre do
cette année-là. Le professeur Asaph Hall, astronome de l'Observatoire de
"Washington, pensa que ce serait là une circonstance extrêmement favorable
pour véritier le voisinage de Mars, à l'aide du grand équatorial de cet Ob-
servatoire (•). Il se disait avec raison que, quoique plusieurs observateurs
eussent déjà été déçus dans leurs espérances en cherchant un satellite à
celte planète, ce n'était pourtant pas là une raison suffisante pour y renon-
cer délinitivement, surtout en considérant que les conditions actuelles de
la recherche étaient exceptionnellement favorables. Il se mil donc à l'œuvre
des les premières soirées du mois d'août, scruta les environs de la i^lanète
avec un soin minutieux, et, pour ne pas être gène par son grand éclat,
prit soin de la masquer ou de la faire sortir du champ de la lunette, de
façon à pouvoir saisir la plus légère trace de satellite visible dans son voi-
sinage.
Les premières nuits furent infructueuses, fatigantes et désespérantes, et
l'astronome renonçait à continuer sa recherche, lorsque M""* Hall, secrétaire
de son mari, insista vivement pour qu'il y consacrât « encore une soirée ».
C'était le 11 août. M. Hall se mit à ré<]ualorial, et, trois heures plus tard,
crut apercevoir un petit point lumineux qui fit battre son cœur. Mais à
peine avait-il bien constate son existence qu'un épais brouillard, s'élevant
de la rivière Potomac, vint interrompre l'observation. Le ciel resta obstiné-
ment couvert pendant les nuits suivantes. Enfin, cinq jours plus tard, le 16,
le ciel s'étant éclairci, l'astronome se précipita à sa lunette, retrouva le petit
point, ne le perdit plus, et, en deux heures d'observation, constata qu'il
marchait dans le ciel avec la planète. Ce petit point n'était donc pas une
étoile fixe. Mais peut-être, — le hasard est si grand! — l'une des innom-
brables petites planètes, qui gravitent entre Mars et Jupiter, passait-elle
justement par là en ce moment? On consulta les éphémérides et l'on trouva
qu'en effet la planète Europa devait justement passer à cette date derrière
Mars.
Un calcul préliminaire montra que si le petit point observé était un satel-
lite, il devrait être caché par la planète pendant une partie de la nuit sui-
vante du 17, mais devrait reparaître avant l'aurore, près de sa position
(') Celle lunette, alors la plus puissante, a pour objectif une lentille de 26 pouces
anglais = O^iCG.
1877 ASAPIl IIAI,L. — DÉCOUVERTE DES SATELLITES. 257
originale; tandis que, si c'était la planète Europa, elle devait se trouver le
soir même un peu au sud-est de Mars.
Cette nuit du 17 fut merveilleusement claire, et à peine Mars était-il levé
au-dessus des hrumesde l'horizon, que l'équatorialfut impatiemment pointé
sur lui. Aucun satellite n'était visible, ce qui était de bon augure. A 4''
du matin, l'astronome, radieux, vit le petit point lumineux émerger tran-
quillement des rayons de la planète, comme le calcuU'annonçait: c'était bien
un satellite de Mars.
Ce n'est pas tout. En observant ce satellite et en suivant son mouvement,
M. Hall ne tarda pas à en remarquer un second, encore plus petit et plus
proche de la planète!
La nouvelle fut télégraphiée aux principaux astronomes du globe, et,
malgré le scepticisme qu'elle excita d'abord, elle ne tarda pas à être confir-
mée par toutes les observations ultérieures.
Ces deux petits satellites ont été suivis, à l'aide des grands instruments,
pendant les mois de septembre et d'octobre 1877; puis on les perdit de vue,
à mesure que Mars s'éloigna de la Terre. On les retrouva en 1879, lorsque la
planète revint dans notre voisinage, et l'on put même les observer à l'aide
d'instruments moins puissants, car, lorsqu'on sait qu'une chose existe, on la
voit beaucoup plus facilement que lorsqu'on ignore son existence. On les
a encore retrouvés pendant l'opposition de 1881, et depuis on les suit pep-
dant toutes les oppositions.
Ces deux petites lunes ont reçu de leur découvreur les noms de Deimos
(la Terreur) et Phobos (la Fuite), en souvenir de deux vers de l'Iliade d'Ho-
mère (Liv.XV),qui représentent Mars descendant sur la Terre pour venger
la mort de son fils Ascalaphe :
Il ordonne à la Terreur et à la Fuite d'atteler ses coursiers,
Et lui-même revêt ses armes étincelantes.
Phobos est le premier, le plus proche; Deimos le second. Voici les élé-
ments de leurs orbites :
Demi-diamètre de Mars = 3 304 kilomètres.
Distance de Phobos =2,77 demi-diamètres de Mars.
= 9 321 kilomètres-
Distance de Deimos — 0,92 demi-diamètres de Mars.
= 23 281 kilomètres.
Ces distances sont comptées du centre de la planète. Si nous en retran-
chons le demi-diamètre de Mars, il reste, pour la distance de la surface de la
planète à la surface des satellites, moins de 6000 kilomètres pour le premier
et moins de 20000 pour le second.
Flammarion. — Mars. 17
25S
i.A pi,.\m:ti-; m.mjs.
Li' (liamètiv aiii^ulairc de Mars riant ilcO", T)". l<'s plus i^raiidcs oldiiualions
ne sont que do 13" pour le proinior rt de '^-r pour le second.
La révidutiiui du [U'cniier s'clTeelardaiis la pi'riddc (■iraugiMiicnl rajiide
de 7''30m !">', et ecUc du second, dans la période également très rapide de
30'' 17"'."vi', période à peu près égale à quatre fois la première, ce qui indique
un lien de parenté entre les deux satellites. Leurs orbites sont, toutes deux,
presque circulaires, à peu près dans le iilan de r('((iialeur martien, et incli-
nées l'une et lautre de 26" environ sur l'écliptique. — Nous avons repré-
senté ce petit système sur notre fig. 157 : c'est ainsi ([u'ils circulent actuelle-
ment dans le plan de l'équateur d(^ Mars.
\ cause de rexiguïté de ces satellites d de leur voisinage de la planète,
Orbite apparente des satellites de Mars, pour une lunette astronomique.
il faut (rexcellents instruments pour les distinguer. Toutefois, comme un
objet qu'on sait exister est plus facile à d('Coiivrir qu'un objet dont on
ignore l'existence, des inslninKMits fort inb'.M'icurs à l'iMpialorial de W'asbing-
ton sufTisent aujourd'lini pour permettre d"o]jS(_!rver ces deux })oints lumi-
neux, et môme pour mesurer leur position.
L'analogie avait déjà fait soupçonner l'existence de ces satellites, et plu-
sieurs astronomes, W. Ilerschel, d'Arrest, etc., avaient même passe de
longues heures à les chercher. On avait dit : la Terre a un satellite, .Tupiler
en possède quatre, et Saturne huit ; Mars, f[ui se trouve entre la Terre et
.Jupiter, pourrait bien en avoir un ou plulùl deux. C'est Kepler lui-même
qui, le premier, a tenu ce raisonnement, dès 1 ann(''e 1610, et Voltaire a suivi
cette tradition dans Micromégas.
Ces deux globules célestes sont si petits qu'il est impossible de leur trou-
ver aucun diamètre appréciable, et qu'on no peut oJjtenir quelque estima-
tion de leur volume probable, qu'en mesurant avec soin la quantité de
lumière qu'ils réfléchissent. C'est ce qui a été fait à l'Observatoire de Harvard-
Collège, par le professeur Pickering, et il résulte de ces mesures photomé-
triques, confirmées du reste par les estimations des autres observateurs,
1877 ASAl'll IIALI.. — DKCOUVKU ri-; |)i:s s A I i;i.MTi:S. 250
(]u'('ii aJinellaiil (juc leur surface soit aualo-ue a ojlle do la plauèlu elle-
même, leurs diauiètrcs ue sur])asseut pas dix à douze kilumùtres. Le premier,
Pliobos, est \r plus Itrillaiil ri jimhablement le plus gros des deux; il n'offre
que le faible tl-clat d'une étoile de 10° ^^randeur, et le second, seulement
celui d'une étoile de 12"; cependant le second est plus facile à découvrir,
parce qu'il est plus éloigné de la planète et moins éclipsé dans ses rayons.
II n'en est pas moins bien remarquable que ces deux points lumineux,
dont le diamètre ne surpasse (juère relui de Paris, soient visibles à quinze et
vingt millions de lieues de distance dans les instruments dus au génie de
l'homme (') !
Les mouvements apparents de ces satellites dans le ciel de Mars sont par-
ticulièrement curieux. Le satellite extérieur tourne, avons-nous dit, autour
de sa planète, en 30 lieures 17 minutes 54 secondes, tandis que la planète
tourne sur elle-même en 24 heures 37 minutes 23 secondes. Il en résulte
que ce petit globe paraît marcher très lentement de l'Est à l'Ouest dans le
ciel de Mars.
La différence entre la période du satellite extérieur et la rotation de Mars
étant de 5 heures 41 minutes, ce satellite emploie en apparence 131 heures
pour accomplir son circuit dans le ciel de Mars; c'est une période de 5 jours
martiens plus 8 lieures, et c'est là un petit mois dont les habitants doivent
se servir pour leur calendrier.
Tout autre est le mouvement du satellite le plus proche. Comme il
accomplit sa révolution entière de l'Ouest à l'Est en 7 heures 39 minutes,
et que la planète tourne dans le môme sens en 24 heures 37 minutes, il se
lève à l'Occident et se couche à l'Orient après avoir traversé le ciel avec une
vitesse correspondante à la différence des deux mouvements, c'est-à-dire
en 11 heures environ (-). C'est là un exemple uni(|ue dans le système du
monde.
Quelle est la grandeur apparente de ces deux lunes, vues de la planète?
Chacun sait qu'un objet éloigné à la distance de 57 fois son diamètre,
(') «En admettant pour le satellite extérieur un diamètre do 0",031, écrivait M. Hall
lui-même {Monthly Notices, fév. 1878, p. 207), cet angle correspond, à la distance de
notre Lune, à. un cercle de 187 pieds ( = 57 mètres), de sorte que la proposition d'éta-
blir un système de signaux lumineux pour communiquer avec les haliilants de la Lune
n'est pas du tout un projet chimérique : « Is by no means a chimerical project. »
(') « En observant les passages de cette lune au méridien, écrit M. Hall {Monthly
Notices, id., p. 208), les astronomes de Mars ont une méthode très exacte de déter-
miner les longitudes martiennes, puisqu'au lieu du facteur 29, qui, dans le cas de
notre Lune, multiplie l'erreur d'observation, les Martiens ont un facteur inférieur à |.
Cependant, on ne peut guère douter que les astronomes martiens aient aussi leurs
difficultés, dues peut-être surtout à une dense atmosphère et à une forte réfraction ;
et puis, ce n'est pas une sinécure que d'observer trois passages au méridien par jour! »
«60 LA rLANËTH MARS.
apparaît avec uiio grandtnir apparente de 1 dcirré, et (lu'an ol)jct éloigné à
570 fois son diani»''lre sous-tend un angle dix fois i)lus petit, ou do G mi-
nutes. Le premier satellite de Mars étant à 0000 kilomèlres de la surface de
la planète et ayant, selon toute prolialdlité, 1"2 kilomètres de largeur, est
éloigne à 500 fois son diamètre et oITre par conséijucnt un disque de 7 mi-
nutes environ.
C'est un peu moins du quart du diamètre apparent de notre Pleine Lune,
lequel est de 31 minutes.
C'est en même temps le tiers du diamètre moyen du Soleil, vu de Mars, ce
diamètre étant de 21 minutes.
Le second .satellite, éloigné à 20 000 kilomètres de la surface de Mars, est
réduit à un petit disque de 2 minutes et demie.
La lumière renvoyée par ces deux satellites aux habitants de la planète
doit être extrêmement faible. Le satellite extérieur n'offre en effet, môme
au zénith, qu'un disque égal au quinzième environ de celui de notre Pleine
Lune, ce qui équivaut à une surface 225 fois plus petite. D'un autre côté,
la lumière reçue du Soleil varie, suivant la position de Mars, de la moitié au
tiers de celle que reçoit notre astre des nuits. Il en résulte que la clarté de
Deimos doit être comprise entre les fractions -^ et -^ de celle de notre
clair de lune. Phobos doit être trois fois plus large, offrir un disque de 6
à 7 minutes et donner une clarté dix fois plus forte, c'est-à-dire comprise
entre ^V et -^. de l'intensité de notre clair do lune. Ce sont là deux lunes
minuscules.
La découverte de ces satellites a permis de déterminer avec précision la
masse de la planète, jusqu'alors assez incertaine. M. Hall a trouvé, relative-
ment à celle du Soleil, âTsi-ôû) ce qui donne relativement à la Terre : 0,105 (•),
Jje spectacle de Mars vu de chaque satellite, surtout du premier, doit être
admirable, et son éclat merveilleux. Vu de Phobos, il occupe près d'un quart
(') Los principales déterminations do la masse de Mars antérieures à la déduction très
précise tirée du mouvement des satellites étaient :
1802. Delambre,parlesperturbationsdelaTerre (valeur adoptée parLaplace). ^^/p ■,...:
1813. Burckhart, par le même procédé .,,.^,..,-,
1828. Airv, en corrigeant Delambrc par les observations de Greenwich ^^o, .•»»•
' " ^ 3/34b02
1853. Hansen et Olufsen, toujours par les perturbations de la Terre a^ , •
1858. Le Verrier, par le même procédé ^q», -„■.
1870. Le Verrier, par les perturbations de Jupiter 9«i'2S2fi
On voit que la valeur la plus approchée était celle de Hansen et Olufsen.
1877 ASAl'II HALL. — DÈCOUVIîHTK DES SATELLITES. 261
de l'étendue de la voûte céleste, ot, vu de Deimos, environ ,',. Sa siufacf
apparente surpasse dans ht i)remier cas de 6i00 fois celle de la Pleine Lune,
et dans le second cas de 1000 fois, sa lumière de 2000' oÀ iOO fois.
Une remarque de cosmogonie à propos des satellites de Mars.
L'hypothèse qui rend le mieux compte de la formation des corps célestes
est celle qui les considère comme dos condensations d'une matière diffuse pri-
mordiale (Kantct Laplace). Le Soleil proviendrait d'une nébuleuse immense
et les planètes seraient des condensations partielles dans celle nébuleuse;
leur mouvement de révolution autour du foyer central aurait pour origine
l'ancien mouvement de rotation de la nébuleuse.
II en serait de môme des satellites relativement à leur planète : la Lune
proviendrait de la nébuleuse terrestre ou se serait détachée de l'équateur;
les satellites de Mars, de Jupiter, de Saturne, etc., auraient eu une origine
analogue.
Dans cette hypothèse, tout satellite devrait circuler autour de sa planète
en un temps plus long que la rotation de cette planète, attendu que, depuis
son détachement, la planète a continué de se condenser et de tourner de plus
en plus vite, en vertu du principe de la loi des aires.
Le mouvement si rapide du premier satellite de Mars est-il en contradic-
tion avec la théorie nébulaire?
Non. Déjà, dans le système saturnien, les corpuscules qui forment l'an-
neau intérieur effectuent leur révolution en une période moindre que celle
de la rotation de la planète. La période à laquelle la force centrifuge égale
lapesanteur est, pour les dislances 1,36 à 1,57 de l'anneau transparent, 5*'50'°
à T*"!!", et pour le bord intérieur du large anneau central, 7''12'" ('). La
rotation de Saturne est de 10'' 15°.
On peut penser que, dans la zone équatoriale de Mars, comme dans celle de
Saturne, une atmosphère est restée, après le détachement du satellite comme
après l'isolement de l'anneau ; que celle atmosphère supérieure très raréfiée
a néanmoins opposé une résistance au mouvement du satellite et qu'il s'est .
graduellement approché de la planète. Cette approche croissante a eu pour
résultat l'accroissement de son mouvement. Il est probable qu'il se meut'
maintenant dans un vide parfait, dans l'élher pur, et que sa période est (
stable. Un satellite qui graviterait à l'équaleur même de Mars, tout près de W'^
la surface, dans le vide, effectuerait sa révolution eu l''40'", comme nous ^'-'iv-t
l'avons déjà vu (p. 235). iLr^n^
Mais continuons notre étude comparative des observations de Mars.
...-^
•) Voy. nos Études sur iAslronomic, t. III, 1872, p. 30.
26-2 I-A rLANKTl- MAIUS.
LXXM. 1877. — NiESïEN. Observations et dessins (').
M. L. Nicsten, astronome à l'Observatoire de Bruxelles, a fait, du 21 août
au 10 novombrc 1877, un grand nombre d'observations à l'aide de l'équato-
rial de 0'",lôiî, muni do grossissements de 90 à 450, ceux do 180 et 270 ont
été les plus fréquemment employés. Ces observations comprennent 42 des-
sins, parmi lesquels nous en reproduirons quatre représentant : 1° la mer
circulaire Tcrby; 2° la mer du Sablier; 3° la mer Maraldi et la mer Hooke,
réunies par l'islbnic de Niosten ; 4° la mer Maraldi et la mer Hooke isolément.
Voici le résumé que l'auteur donne lui-même de ses observations.
Tache polaire. — L'iiémispbère méridional de Mars étant dans son été,
a présenté sa tache pulaire pendant tout le cours des observations. Ovale le
21 août, cette tache s'arrondit, devient plus petite à partir du 14 septembre,
pour s'aplatir de nouveau vers le 20 octobre. Sa couleur était d'un blanc
franc. Son éclat a varié sensiblement d'un jour à l'autre, ainsi que dans le
courant d'une même soirée (21 septembre, 8''15'" et 11'' 15"). Notons son
aspect terne du 21 août et du 18 octobre et son éclat exceptionnel du 22 sep-
tembre, du 26 août et du 2 novembre.
l/V;-5. — Dans toutes les observations, la tache poliirc est entourée d'une
mer, peu marquée sous le méridien 150°, plus sombre vers les méridiens
0°, 90° et 180°.
La mer ZoUner est plus apparente que la mer Lambert, le II septembre.
Elles se rejoignent ( Voy. la carte p. 69). La terre de Lockyer est très claire le
13 octobre.
Les dessins des 14 et 15 septembre, 18 et 20 octobre [fig. 158) représentent
l'extrémité orientale de la mer Maraldi, à laquelle se joint la mer Hooke.
La terre de Burckliard présente la forme d'une péninsule ovale.
M. Niesten pense que la mer que nous avons arrêtée, sur notre carte de 1876
{voy. p. 251), au 180° de longitude et au 80° de latitude australe se prolonge
au delà. C'est parfaitement exact, et notre carte de la page 69 montre ce pro-
longement (mer Maunder).
Sur cette carte, nous avions conservé le nom de mer Lockyer au lac
circulaire qui a reçu depuis le nom de mer ïerby (que nous avions donné
à une autre mer sur le premier dessin delà carte précédente, Terres du Ciel).
1 L'aspect de nos dessins, écrit le savant astronome belge, se rapproche
(') Arnia/e.s astronomiques de l'Observatoire royal de Bruxelles, t. II, 1878.
\^"
MKS ri-N
>usi:it\- \ iKiNs i: r dkssins.
263
Itoauciiiiii iUi l;i n''<^'ion rorrespoiidaiilr sur la carlt,' de M. Flammarion.»
Eu l'Il'i'l, la cailo (h' M. l'ioci^r [voij. p. 20.")) est cerlaiiioinonl trùs loin do la
FiLT. r.s.
Observalions Uo Mars, par M. Nicaten on IS77.
vc'i'ilé pour la « Dawcs sea » rnninio pour le long ruban de nier (jui s'élève
sur celte carte le long du 240*-" méridien.
Le détroit d'IIerschel II se montre tel que le représente notre carte de
la page 60, mais sans trace de l'Ile Phillips.
Les taches ont présent»' une couleur d'un gris hleuàlrc plus ou moins
foncé; les plus sombres ont t'l(' b' lac cirrulaire. la réL^ion nord et la région
centrale de l'océan de la Une et l'extrémité orientale de la mer Maraldi. Le
disque de la planète était généralement d'un jaune très pâle, parfois jaune
'264 LA rLAMlTK MARS.
orangi'. ocrousc le '^1 août. Notons aussi des rellets rougeàtres lo long de la
mer Marakii et parfois au sud de l'océan Dawes, ainsi qu'aux environs du
lac circulaire et du dolroit d'IIerschcl. lis ont clé surtout sensibles sur la
terre de Burckhard.
LXXXII. 1877. — F. Terby. Éludes sur la planète }[ars (').
Le savant astronome de Louvain a communiqué à rAcadémic de Belgique
le résumé de ses observations. Nous en extrairons les points les plus
importants. (Lunette de 9''"' d'ouverture; grossissements de 120 à 1-iO fois).
La tache polaire méridionale a été constamment visible, comme il fallait s'y
attendre ; sa forme légèrement ovale attestait bien souvent qu'elle était tournée
du cùté de la Terre. Cette tache a été la plus brillante, la plus blanche, la plus
étendue lors des observations faites à la fin du mois d'août, tandis que le
détroit d'IIerschel II apparaissait sur le disque (fig. 1). Elle a été plus faible et
moins étendue pendant mes observations du milieu de septembre {fig. 2, 3, 4 et 5),
tandis qu'on observait les mers llooke et Maraldi. A partir du 21 septembre, elle
fut vue de nouveau plus blanche et plus brillante, tandis que l'on observait l'extré-
mité occidentale de la mer ?*L^raldi j'jf, l'océan de la Rue, la mer Lockyer, le
détroit d'IIerschel II et la mer du Sablier. Pendant la période qu'embrassent ces
observations, et qui s'étend du 30 août au 20 octobre, Fauteur n'a pas observé
de neiges septentrionales.
Fig. 1. Le 30 août 1877, de lOi'30'n à 10''45°'. La tache polaire méridionale est
très brillante, très blanche et arrondie. La bordure sombre qui l'entoure (mer
Phillips) est la région la plus noire du disque. La région observée est celle du
détroit d'Herschel IL En c, on aperçoit deux baies ; en b se trouve l'océan de
la Rue. Le grossissement de 120 fois fait voir une région brillante en a; c'est
celle qui correspond aux îles de Philipps et de Jacob. Par moments cette zone
donne à la tache l'aspect de deux bandes parallèles. La partie septentrionale du
disque, située sous la zone sombre, est beaucoup plus brillante que la région
située entre celle-ci et la tache polaire. La zone sombre est plus foncée de chaque
coté, dans le voisinage du bord de la planète.
Fig.1. Ee 11 septembre, de 10''5"' à 10'' 30™. La tache polaire est beaucoup
plus petite et plus faible que le 30 août. Les taches sombres sont elles-mêmes
très faibles. On y remarque pourtant très bien des parties inégalement foncées.
On voit la mer du Sablier d, la mer Hooke mr, la mer Maraldi f, la terre de Bur-
ckhard P; la mer Zollner / est douteuse. En résumé, cette observation a été peu
satisfaisante à cause de la faiblesse étonnante de ces taches habituellement si
bien visibles.
(') Bulletin de l'Académie des Sciences de Belgique, 1878, t. 1, P- 33.
i,S77
F. ri;iti{Y.
l'iTUDES SIH I.A l'LANKTK.
>C5
Fi'j. ;î. Lo \'i septoiiibi-o, de 10'' ;"i 10'' J.")'", L'iinajjp est admirablomont nette,
grâce au passage de légères vapeurs. La tache neigeuse semble entièrement
tournée vers nous, mais elle n'est pas franclieinent blanche ni brillante. La mer
Ilooke mr apparaît avec une forme dill'érente de celle de la carte de M. Procter,
La cote qui longe la terre do Burckhanl mérite toute confiance et pourra être
FiL'. i:.!t.
4-.
7 8. 9.
Uessius de Mars, par M. Terby, en 1877.
corrigée. La terre de Burckhard est plus large au nord qu'au sud et présente
une courbure qu'on ne soupçonnait point. On voit aussi que la mer llooke ne
longe pas celle de Maraldi jusqu'à l'extrémité la plus occidentale de cette der-
nière. Entre la petite zone sombre qui entoure la tache polaire et les mers
Ilooke et Maraldi, on voit une bande foncée.
Fitj. A. Le 17 septembre, de 8'' 30"" à 8'' 35'". On voit la nier Maraldi /" la zone
sombre présente une baie hf. « J'ai vainement cherché, en 7, à, l'est de cette
baie, la langue de terre que j'ai proposé de nommer Terre de A\'cbb, et qui est si
marquée dans plusieurs dessins de cet astronome. Cette solution de continuité de
la bande est demeurée douteuse dans ma lunette astronomique ». Entre la mer
Maraldi et la tache polaire, on voit encore distinctement une bande sombre La
tache polaire est toujours plus petite et moins brillante que le 30 août.
•266 LA PI.ANKTI- M A II S.
Fij. Ti. Le 17 septembre. ;\ 10'» ir.'». La lâche polaire semble eiuoro plus petite,
mais est devenue plus brillante qu'à 8'' 30"'.
Fiij. 6. Le '21 septembre, de 8''ir»'» à Si" 30'". La tache polaire est redevenue
plus blanche et plus brillante sans toutefois égaler en éclat son aspect du 30 août.
On voit que l'estrémitù hf à pf de la mer ^laraldi est conformée autrement que
ne l'indique la carte de M. Proctor. La région septentrionale du disque était évi-
demment grisâtre.
Fiij. 7. Le '27 septembre, à S^» !."»"'. La tache polaire est blanche et brillante ;
on voit l'océan de la Hue 6, une petite mer q qui est la région la plus sombre du
disque, arrondie comme l'ombre d'un satellite de Jupiter ; elle correspond à, la
région occupée par les mers Lockyer et Dawes de M. Proctor. Ces deux petites
mers sont-elles confondues ici, ou n'en existe-t-il qu'une seule en réalité? On voit
aussi l'extrémité/)/', la mer Maraldi.
Fig. 8. Le 27 septembre, de 8'>i0'" ù, 8'' 05'". Cette observation porte à admettre
une communication entre l'océan de la Rue et la mer Maraldi.
Fi'j. 'J. Le 28 septembre, de S^b"' à 8''15'". Tache polaire blanche et brillante.
La petite mer q est toujours la région la plus sombre.
L'auteur a continué ses observations jusqu'au 20 octobre ol a publié encore
si.\ autres dessins. Ces résultats sont remarquables, surtout si l'on considère
rinstrumcnt à l'aide duquel ils ont été obtenus : 0'",09 seulement d'ouver-
ture. Objectif excellent de Sccrétan. Sans aucun doute, cxccUentc vue et
excellente méthode d'observation.
LXXXIII. 1877. — 0. Van EuxuonN. Observations et dessins.
Ces observations ont été faites également en Belgique, à Acrtselaer, près
d'Anvers. M. le baron Octave Van Erlborn a commencé ses études de Mars
dés l'année 18G0 et en a fait plusieurs dessins presque à chaque opposition.
En 1877, il a publié dans les Mémoires de l'Académie de Belgique (') -C des-
sins faits du 15 août au 3 novembre, à l'aide d'une lunette de 108""° montée
en équatorial. Grossissements 125, 205 et 255.
L'hémisijhère austral de la planète a présenté généralement d'une manière
très nette le contours de ses continents et de ses mers, tandis que ceux de
l'hémisxjhère boréal ont été rarement visibles et sont restés comme voilés
par des brouillards.
Les principales configurations géographiques peuvent être reconnues sur
ces dessins. L'auteur croit avoir distingué la passe de Bessel, mais il lui a
(•) Observations de la planète Mars pendant iopposilion de 1877. (Mémoires des
Savants étrangers, t. XLH, 1879).
1877
VAN BUTBORN. — OBSEIIVATIONS ET DESSINS.
267
été impossiblf de voir la uht Dawi'S. Il iiuil ausi^i avoir rciuarijiié un lilfjt
roliant la mer circulain; à l'acéau voisin. Les mers Iluuke et Maraldi sont
admirables de iiettelé. La mer du Sablier est un pou courte. Le cap polaire
est Tort brillant sur lous lus dessins, très remanjuablcs pour l'instrument
employé.
Alin d'oblL'uir un rijuilibrr de température pariait, la coupole a été
ouverte plusieurs beures avant le commencement des observations, l'objec-
tif découvert et le tube de l'instrument ouvert. L'équatorial est mû jiar un
Kig. KiO.
Kig. liil.
Dessins Je yi Van Erthorn. 5 et 20 septembre is7'/.
mouvement d'horlogerie parfaitement régulier, fait très important, ajoute
l'observateur, car, pour apercevoir de minutieux détails, il faut regarder
longtemps, et ce n'est que par une sensation continue qu'ils affectont la
rétine. La situation à la campagne est aussi de la plus haute importance
pour le calme et la netteté des images. L'auteur, ayant été aidé dans ses
observations par plusieui's personnes, ajoute ;
LVimI de l'observateur joue un rôle capital dans l'observation des objets très
petits ou très faibles. Il est un fait que l'on ne peut perdre do vue et que l'on a
né^'liiré jusqu'ici, c'est de faire faire les observations délicates par des personnes
dont la vue ne soit pas fatiguée. Il est des rétines dont la sensibilité et la définition
sont telles que leur rule doit être supérieur ;V celui des meilleurs instruments.
Mon neveu aperçoit qiiator/c Ph-iades à l'o'il nu; les étoiles et les planètes
lui apparaissent dépourvues de rayons. Il aperçoit ;\ '.V? mètres do distance des
points blancs de I centimètre carré sur fond noir. Le 5 septembre |S77, il vit à
268 l.A P1.ANKTI-: M A US.
l'aide de mon quatre pouces le conipaij:iioa de ;xd'Anilroiiiède, dont il n'avait jamais
entendu parler et qui est un test très sévère, môme pour les objectifs de huit
pouces.
Nous reproduisons ici deux des iiieillcurs dessins de M. Van Erlborn,
faits par une excellente atmosphère. Le premier, du 5 septembre à
11''30™ (fig. 160), montre les océans Dawes et de la Hue, la mer du Sablier,
le détroit d'Hcrschel IL Le second, du 29 septembre à 7'', 45 [fig. 161),
montre l'océan ;de la Rue, sans doute la baie P.urlon dans le ruban infé-
rieur, la mer circulaire Tcrby rattachée par un fil, el la passe de Bessel.
Très certainement, le dessinateur termine, accuse plus ou moins nette-
ment des contours vagues, indécis, douteux. Il n'en peut être autrement
et telle est la principale cause de la diversité des dessins.
LXXXIV. 1877. — C.RULs, Observations, dessins, durée de rotation.
On doit à M. L. Cruls, alors astronome à TObservaloire de Rio de Janeiro,
aujourd'hui directeur de cet établissement, une belle série d'observations et
de dessins photographiés (•). Ces observations ont été faites à l'équatorial
de 0"',25, généralement muni d'un grossissement de 240 (une fois, le 13 oc-
tobre, la planète étant voisine du zénith, de 340 et 580).
Les observations s'étendent du 16 août au 13 octobre. Durant toute cette
période, le pôle austral s'est constamment montré d'un blanc intense. La
tache polaire a visiblement diminué d'étendue. Le 13 octobre, elle n'était
plus en contact avec le bord de la planète, mais intérieure, isolée et plus
réduite.
Circonstance rare pour la plupart des observatoires, grâce à la position
de Rio de Janeiro, la distance zénithale méridienne de Mars pendant cette
opposition n'a pas dépassé 12°.
M. Cruls cite une opinion de M. Liais, alors directeur de l'Observatoire de
Rio, d'après laquelle les taches sombres ne seraient pas des mers, mais des
terrains plus foncés que les autres, et se range à cette manière de voir. Ces
tons varieraient avec les sécheresses et les pluies. Les terrains pourraient
être considérés comme différant plus entre eux que des mers, les eaux
offrant plutôt une teinte intermédiaire entre des terrains clairs comme du
sable ou foncés comme des forets et des prairies.
Dans cette appréciation, toutes les taches sombres ne seraient pas dues
(•) Cruls, Mémoire sitr Mars. Taches de la plani'tc et durée de sa rotation. 1 vol
in-8*. Rio de Janeiro; 1878.
1877
CRULS. — OBSEF{VATK)NS ET DESSINS.
269
à des étendues d'eau; plusieurs représcateraicnt des terrains couverts de
végétation.
Les taches sombres voisines des rcp:ions polaires ont paru vagues; celles
comprises entre 50° de latitude sud et 40° de latitude nord ont paru plus
distinctes.
La présence dans notre atmosphère d'une légère couche de vapeurs, tem-
pérant l'excessive lumière de la planète, accroît la netteté des taches.
Une belle série de 21 dessins photographiés accompagne ce Mémoire.
Lun deux est reproduit ici, celui du 16 septembre (fig. 162). Nos lecteurs
Fig. 162.
Dc'iîin de Mais, par M. Cruls, le 10 septembre 1377.
y reconnaîtront tout de suite la mer Maraldi, la mer Hooke, la mer Flam-
marion et la mer Zôllner, ainsi que le continent Herschel, la terre de
Burckhard, lilc Drcyer, les terres de Webb et deCassini, etc.
M. Cruls s'est servi de ces observations pour déterminer directement la
durée de rotation, d'après le retour delà mer circulaire au méridien central
les 24 août, 3 septembre et 3 octobre, ainsi que par le retour de la pointe
occidentale de la mer Maraldi, les 16 août et 27 septembre, et a trouvé pour
cette durée, correction faite des positions de la Terre: 24''37'"34».
Ces observations du savant astronome de Rio ont ajouté de précieux docu-
ments à l'étude de la planète. Nous ne partageons pas toutefois l'opinion de
notre illustre ami sur les taches sombres. La plus grande probabilité, à nos
yeux, est en faveur des mers. D'abord, la présence de la vapeur d'eau dans
l'atmosphère martienne est démontrée par quatre faits distincts : 1" l'analyse
spectrale; 2" les neiges polaires, qui varient avec les saisons: 3" les voiles de
vapeur parfois étendus sur de vastes coutrées; 4° les nuages, rares, mais
i:o
LA l' LA m: II'; M Alt s.
cxislaiiL Ur, CL'llr v.ii)ciir lie pciil provenir (]uu ir(Jlenihi(.'S d'eau; (■c:i élcii-
(liics d't'aii (loivcnl [taraîlre plus foncées ([iic les coulincnls puisqu'elles ab-
sorbent plus la lumiiTc iiicidciilc. ri ce sont plulôl les Liclies sduihi-es (|ue
les taches claires qui les nqiréseiilenl. Kiisuile, leur mobililc est un indice
de leur nature ; innis avons d('jà ct)nslal(', et nous reconnaîtrons plus loin,
plus sûrement encore, (juc plusieurs taches sombres varient de lar;,'eur ; or,
l'eau ii'est-elle pas l'élémentmobile par cxcellencey 11 nous semble donc que
les taches foncées représentent les étendues d'eau (|ui existent incontes-
tablement à la surface de la itlanète.
Affirmer qu'il n'y a pas autre chose, — peut-être, connue l'indiquent
MM. Liais et Cruls, des forêts, des prairies, etc. — serait dépasser les limites
d'un raisonnement motivé. T/est fort possible, et cest même vraisemblable.
Nous avons uous-mème bien souvent remarqué, dans nos voyages en ballon,
que des prairies, des marécages couverts de joncs, jtaraissent plus foncés
que les fleuves. Mais l'eau doit y jouer le rôle fondamental.
LXXXV. 1877. — .I.-L.-E. Diieyeii. Observations et dessins.
A l'Observatoire de lord Rosse à Parsonstown, M. ,T.-L.-E. Drcyer a appli-
Fig. 1G3. Fig. IC.
Dessins de Mars par M. Drcyer, 7 septembre et .3 octobre 1877.
que le télescope de trois pieds à l'observation de la planète. Oculaires gros-
sissant 160 et 21.5 fois. Le télescope de six pieds n'a pas donné d'images
meilleures.
L'observateur a publié douze dessins (M- î^'ous reproduisons ici les deux
plus intéressants, le premier du 7 septembre à IPSO'" {fig. 163), le second du
3 octobre à 11'' 10"' (fig. 164). Dans le premier, on remarquera le détroit
(«) Notes on the pliynical appearaiicc of tho planet Mars. The scientifîc Transac-
tions of tlie royal Dublin Society, 1878, t. I, p. 64.
1
1877 LOIISE. - OBSERVATIONS ET DESSINS. 271
d'Herschel et la baie du Méridien, sous forme d'un ruban détaché, rappelant
la flg. 96 de Lockyer, '25 septembre 1862 (p. 155), ainsi que celle de Knott,
du 23 septembre 1862 (p. 171 ), et celle de Kaiser, du-31 octobre 1862 (p. 174).
Tous les dessins de Dreyer représentant cette partie de la planète offrent
le même aspect. Le détroit d'Herschel est donc parfois très sombre.
Dans le second dessin, on remarque la mer Terby, bien détachée aussi de
l'océan environnant, nettement circulaire, ou plutôt légèrement allongé de
l'Est à l'Ouest. Le lac situé au-dessous n'est pas marqué. Il l'est, faiblement,
sur les dessins du 28 septembre et du l*' octobre.
L'hémisphère inférieur ou boréal est très pâle et presque dépourvu de
taches, dans tous les croquis, excepté pour la mer du Sablier.
La longue bande verticale nommée Bessefs Inlel sur la carte de Proctor n'a
pas été vue une seule fois.
LXXXVL 1877. — 0. Lohse. Observations et dessins (•).
Cet observateur, dont nous avons déjà remarqué les éludes en 1873, a fait
pendant l'opposition de 1877 une nouvelle série d'observations et de dessins.
Ceux-ci se rapprochent plus des aspects connus que les premiers ; toutefois,
les dilTèrences sont encore dignes d'attention. On en jugera par les quatre
que nous reproduisons ici {fig. 165).
Le premier est du 8 septembre, à 9''30'° (heure de Berlin). On y reconnaît
la mer du Sablier au centre, et au-dessus le vaste espace clair qui repré-
sente la terre de Lockyer.
Le second est du 21 septembre, à Q^SS"". La longitude du méridien central
devait être alors 158^ et la mer Maraldi traversait ce méridien : on ne la
reconnaît guère.
Le troisième est du 26 septembre, à 9''27'°. Le lac Terby vient de traverser
le centre; il est allongé, et à droite, la mer voisine est singulièrement
recoîirbée et retournée vers lui. Dans un dessin fait la veille, la communica-
tion est même complète. Comparer ce dessin à celui de M. Schiaparelli, que
l'on verra plus loin, pris le même jour.
Le quatrième dessin est du 3 octobre, à 9'' 36"". La longitude du méridien
central devait être alors de 51", et ce que nous avous devant les yeux, c'est la
baie Christie.
Ces observations ont été faites avec un équatorial de 5 pouces {.
(«) Beobachliingen uml L'nlersuchungen ùber die phijsische lieschaffenhcit des
Jupiter und Beobachtungen des Plancten Mars. Observatoriwn :u Potsdam, 1878.
n-2 i.A rLANKTi: M A us.
De rcnscmblc des observations, l'auteur tire les conclusions suivantes :
Le disque de Mars devient plus Idanc. plus clair à mosuro que l'on ap-
Fig.i 165.
6 se|iteu»l>ri'. à &''34;i«' (heure »lf IKrliu
21 septcnibri-, iiO*-»;!".
i>', -rptemtire, à 9'>2:». 3 octobre, h n'-.'ÎC"'.
Dessins de Mar.'. par M. Lohse. en 1S77.
proche des bords, et, sur tous les dessins, les taches ?ont effacées par cette
clarté circulaire. Le disque de Jupiter, au contraire, diminue d'éclat du
centre vers les bords, comme on le constate perpétuellement par les passages
des satellites, qui paraissent brillants lorsqu'ils passent sur la zone péri-
phérique, et sombres lorsqu'ils arrivent sur les régions centrales. L'atmo-
sphère de Mars diffère donc essentiellement de celle de Jupiter.
Les Grandes différences observées dans les dessins de Mars doivent pro-
1877 N.-i:. GREEN. — DESSINS ET CARTE. 273
venir en partie «le ce que celte atmosphère n'est pas absolument transpa-
rente. Il semble que cette transparence soit soumise à des oscillations,
comme l'indiquent les variations de la coloration roU"ge, vue à travers cette
atmosphère. Il paraît exister là des vapeurs, des brumes qui, pour une
cause quelcunijue, ne se condensent pas en nuages analogues aux nôtres.
Ce brouillard léger, de distribution inégale, est plus ou moins transjjarent et
laisse apercevoir les configurations géographiques, excepté vers les bords
du globe, parce qu'ici l'épaisseur est plus grande et que les lacunes ou
éclaircies sont masquées par l'angle de la projection; il réfléchit par consé-
quent mieux la lumière solaire au bord qu'au centre.
Quant à la cause qui empêche les nuages d'être aussi denses que sur la
Terre, l'auteur déclare qu'il considère comme raisonnable l'opinion d'un
observateur anglais, M. Brett, dontnous parlerons plus loin, d'après laquelle
la planète serait encore très chaude : cette chaleur empêcherait la conden-
sation des nuages, à l'exception des régions polaires.
Comme l'observateur anglais aussi, l'astronome allemand pense que les
taches polaires ijourraient être dues, non à des neiges, mais à des nuages fort
élevés dans les régions supérieures de l'atmosphère. Cette opinion est en
contradiction avec celle qui est généralement reçue, mais l'éclatante blan-
cheur de ces taches jjolaires, qui paraissent même parfois dépasser lô bord
du disque, est favorable à cette appréciation.
Nous examinerons bientôt ces assertions, en arrivant aux observations de
M. John Brelt.
LXXXVII. 1877. — X. E. Green. Dessins et Carte.
M. Nathaniel Green, artiste peintre anglais, avec lequel nous avons déjà
précédemment fait connaissance, s'était rendu à l'île de Madère et installé
à une altitude de 1200 pieds anglais, et même ensuite à 2200, avec un téles-
cope de 13 pouces, du système newtonien. dans le but d'obtenir les meil-
leures vues de la planète. L'oculaire le plus fréquemment employé a été
celui de 250 diamètres, parfois celui de 400.
Dans ces conditions très avantageuses, il a étudié le monde de Mars avec
le plus grand soin et en a fait un grand nombre de dessins (41). Il remarque
avec raison que le crayon ou le pinceau donnent toujours trop d'intensité,
trop de force aux aspects délicats, et parfois très vagues, reconnus souvent
avec difûculté par l'œil même le plus exercé.
L'auteur a présenté à la Société Royale astronomique de Londres (') et
(•) Itoyal astronomical Society. Mcmoirs, t. XLIX, 1877-1879, p. 123, et Monthly
Notices, t. XXXVIII, 1S78, p. 38.
Flammarion. — Mars. 18
174
LA rLAM/n- M A H S.
publio douze de ses dessins en litlio.u'niphic, plus dvn\ dessins du [.ôl." sud,
et a tire de cet ensemble une Carte izénérale, la jdus coniplèle ([ui ait
jusqu'alors étô publiée. Cette carte est, pour ainsi dire, devenue classique.
Nous reproduisons ici [fig. 166) d'abord quatre de ces vues, représentant;
n-. Kv,.
Jjessins de Mars, par M. Greea. à Madère en 1877.
l'ensenJjle de la planète, in-hes : l» le 1«' septembre à lOMO-" (heure de
Greenwich), longitude 7°; 2' le 29 septem.bre à ^^0"", longitude 94%- S" le
18 septembre à ll''45'^ longitude 232»; 4<' le 15 septembre à IIMO", longi-
tude 250'. Le méridien central traverse dans la première la baie Burton, à
droite de la baie du Méridien; dans la seconde, l'extrémité orientale de la
mer Terby ; dans la troisième, la mer Hooke et la mer Maraldi; dans la
quatrième, la baie Gruithuisen : la mer du Sablier arrive par la droite.
L'ensemble des dessins faits du 19 août au 5 octobre (26 nuits favorables,
,i • =_i — â i !••■ il.
- ^
,:■■■ LA rLANKTK MARS.
vl iiiiUiles) a condiiil Ihabile ubsorvaleui" à conslruii'c, coiiiiiic nous lavons
dit, une Carie générale que nous reproduisons également ici {ftg. 167). Elle
mérite d"ètre étudiée dans ses moindres détails.
Les régions circumpolaires australes et boréales sont représentées au-
dessus du planisphère.
M. Green n'a tracé sur cette carte aucun détail qu'il n'aie vérifié lui-même.
Elle diffère considérablement, en plusieurs points, de celle de Proctor.
.\insi, malgré l'attention la plus soutenue, il a été impossible de constater
l'existence de la longue passe appelée Bessellnlet. (Nous l'avions, d'ailleurs,
déjà supprimée de notre carte avant même les observations de 1877.) L'au-
teur pense qu'un aspect de ce genre pourrait être produit parfois par un
courant atmosphérique du Nord au Sud.
Les environs du lac circulaire, mer Terby, sont également très différents;
ce lac circulaire" est une tache sombre nettement définie : on l'a observé dix-
huit fois à Madère sans apercevoir la mer Dawes, mais en devinant plutôt une
ombre grise assez vague, La carte est particulièrement intéressante à étu-
dier sur ce point. Examiner notamment le petit lac Schiaiiarelli et l'île
neigeuse de Hall.
La mer Maunder, tracée sur cette carte, au-dessus de la mer Maraldi,
entre la terre de Webb et la terre de Gill, et visible entre autres sur le des-
sin du 18 septembre, a été tracée pour la première fois sur notre carte
de 1877, s'étendant du 247^ degré de longitude au 180% c'est-à-dire, en
comptant ouest-est, du 112^ au 180'. Sur la carte de M. Green, cette mer est
tracée un peu plus à droite et beaucoup plus longue, du 130^ degré au 220®. Elle
a été observée en même temps par M. Maunder à l'Observatoire de Greenvvich
comme bande intermédiaire entre la mer Maraldi et la mer Joynson.
Les rives des océans se sont montrées plusieurs fois d'une blancheur de
neige. A ce propos, nous croyons devoir traduire ici, à peu près textuelle-
ment, ce que dit l'auteur.
« Neiges. — En dehors des neiges polaires, on en remarque sur plusieurs
points des continents. Dans le dessin du 20 avril 1850, de M. Warren de la
Rue [voy. plus haut, p. 128), tout le continent au sud de la mer du Sablier
est évidemment couvert dé neige, car à ce moment le pôle sud était hors de
vue et la forme de la région blanche est précisément celle de la terre de
Lockyer, vue en raccourci. Cet aspect se voit aussi clairement sur les /ig. 3
et 4 imbliées par l'auteur en 1873 dans Y Astronomical Regislcr [voir égale-
ment plus haut, p. 219) : là aussi, le cap polaire sud est hors de vue, mais
la neige couvre toute la terre de Lockyer. Il y a également une indication
très marquée de la présence de la neige sur la ligne blanche qui forme les
1877 N.-E. GKKEN. — DESSINS KT CAUTE. 277
bords (lu conlincnl Béer, près de Téqualcur, el il n'y a aucune témérité ù
supposer que ce continent soit borné jiar des cliaînes de montagnes d'une
grande hauteur coinnie les continents américains sud et nord, sur leur côte
occidentale, par les Andes. Ces lignes claires ne sont pas confinées aux Ijor-
dures du continent Heer, on en voit aussi en d'autres régions, telles que la
terre de Kepler, au sud de la mer Terby, à la péninsule de Ilind, et à l'île
neigeuse de Dawes.
» Nuages. — Les nuages de Mars, écrit aussi M. Green, sont évidemment
beaucoup moins denses que ceux de la Terre, à ce point qu'aucun nuage
proprement dit ne parait exister dans les régions équatoriales, M. Brett a
été conduit à considérer les caps polaires comme des formations nuageuses,
mais cette hypothèse est contredite par la forme de ces caps et spécialement
par les points fixes nettement définis auxquels les neiges se réduisent en
fondant, et que l'on voit, après plusieurs années, occuper les mêmes places,
Mais, s'il n'y a pas de nuages proprement dits, il y a sûrement des vapeur:;
suffisantes pour voiler souvent complètement de vastes étendues continen-
tales. Dans le dessin du 29 septembre, par exemple [voy. plus haut, p. 274),
non seulement l'océan de la Rue est voilé, mais encore sa partie orientale,
vue nettement définie en seize fois différentes, était ce jour-là cachée par un
nuage. Dans le dessin du 18 septembre [voy. aussi p. 274), la zone qui envi-
ronne le pôle sud est devenue très nette, tandis qu'elle est indistincte sur
d'autres dessins. En 1877, à Greenwich, et en 1862 dans les observations de
Lockyer, des régions de l'océan Dawes ont été temporairement masquées par
des nuages blancs. A ces faits on peut ajouter l'apparition de masses blanches,
rivalisant d'éclat avec celles du pôle, observées sur le limbe près du pôle nord
et spécialement du côté oriental; l'une d'elles est représentée sur un dessin
publié par l'auteur en 18G5. Ces masses blanches ont été observées sur le bord
seulement, et n'avançant pas avec lui; donc elles n'étaient pas attachées à la
surface et la seule explication à en donner est de les considérer comme def.
nuages ou des vapeurs, qui furent dissipés par le soleil levant, comme il
arrive assez souvent aussi dans nos climats.
» Atmosphère. — Le témoignage principal de l'atmosphère de Mars consiste
dans l'affaiblissement constant des aspects géographiques et des colorations
à mesure que l'on approche du bord. M. Noble a remarqué que cet affaiblis-
sement est plus prononcé vers le bord occidental que vers l'oriental, ce qui
indique que le lever du Soleil est généralement plus clair que le coucher.
L'évidence la plus marquée do cet anneau atmosphérique concentrique au-
tour du disque s'est présentée le 20 septembre :1c blanc l)leuàlre de cet an-
LA rLAMlïK M A US.
ncau oirrail un coiilrasle très grand avec le ton orange de la région auslralo,
contraste (jui s'accroissait considérablement lorsque des nuages passaient
devant la planète. I/héniisphère nord n'a pas montré de taches géogra-
phiques : l'alraosphère y était peu transparente. Il semble que les environs
du pôle nord devaient être au loin chargés des vapeurs destinées à se con-
denser bientôt pour former les neiges polaires.
» Une observation intéressante a été faite le '21 août. Une série de lignes a
été vue, convergeant vers le pôle nord, indiquant sans doute un courant d'air
froid vers l'équateur.
» Mers. — Les mers ont présenté un ton gris vcrdâlre, qui peut être dû en
Fier les.
Aspect ilo Mars le 2 seplembre 1877. Dessia de M. Green.
partie au contraste des continents jaunes presque orangés, mais qui peut
être en partie réel, si l'on en juge par les variations de tons observées. Si
l'intensité de ces tons foncés correspond à des profondeurs d'eau, la mer du
Sablier et la mer Terby doivent être très profondes.
» Cette dernière mer a des contours bien nets, et se montre légèrement
allongée de l'Est à l'Ouest. Cette mer est généralement représentée comme
rattachée à l'océan de la Rue par un canal foncé, et elle offre en effet
cet aspect quand elle arrive et qu'on la voit obliquement. Mais, lorsque la
vision est directe et bien nette, ce n'est pas un canal que l'on devine, c'est un
petit lac, que Ton distingue très nettement, comme on le voit ici {fig. 168)
sur le dessin fait par l'auteur le 2 septembre à 1'' lO"" du malin. »
Ce petit lac est désigné sur ce dessin par la lettre a. La lettre b indique
la position de l'île neigeuse de Hall.
1877
N.-l'. CIIHKN. — DKSSINS KT CAUTK.
270
L'observateur rcmarqiio à oc propos que, lorsqu'une tache allongée est vue
inqiarfaitemont, on a une tendance à la tcrniinor.cn pointe, et que cette
tendance de tout dessinateur peut expliquer certaines lignes étroites tracées
par Dawes et Schiaparelli. C'est le cas, pense-t-il, pour la réunion apparente
de la nier Terby à l'océan de la Iluc.
Neiges polaires. — M. (Ircen a fait sur ce sujet de fort intéressantes observa-
tions. Tout d'abord, on peut remarquer sur le premier des dessins que nous
Fier. IW.
Les ueiges du pôle sud de Mars, le l»-- septembre 1877.
avons reproduits (p. 274), celui du l" septembre, à l'ouest du cap polaire,
un point blanc, qui, selon toute probabilité, représente de la neige. On le
Fi-. 170.
Le même pôle, le 8 septembre.
voit mieux encore sur le dessin ci-dessus {fig. IG'J). .Mais laissons parler
l'auteur.
« Selon toute probabilité', écrit l'observateur lui-même, c'Jtait \\ de la neige
restant encore sur un sol élevé, tandis qu'elle avait fondu tout autour, t\ des
niveaux inférieurs. Ce point brillait comme une étoile et il était impossible de ne
•:S0 LA PLANKTF, MARS.
pas le roinarqucr. Le S septembre, ;\ ininuit 30'", j'eus do n«»Livcau l'occasion de
robscrvcr; mais alors on distinguait parfaitement deux points sdparés, et, deux
jours plus tard, de 10'' à il'»30'", on en distinguait encore d'autres concentriques
h la zone des neiges, comme on le voit {fig. 170). Ces altérations de formes étaient
sans doute dues ;\ la perspective, ces diverses taches neigeuses s'étant présen-
tées presque de profil lors de l'observation du 1" septembre. On ne les a jamais
vues ;\ l'est du cap polaire, et c'est là une circonstance d'un intérêt particulier.
En effet, leur grand éclat à l'ouest du pôle, leur décroissance en passant par le
méridien central, et leur invisibilité en arrivant au côté oriental, s'expliquent
naturellement en supposant que les pentes des montagnes qui conservaient cette
neige étaient tournées au Sud-Ouest; de cette sorte, elles étaient abritées des
raj'ons solaires pendant la plus grande partie d'une rotation; mais elles étaient
pleinement exposées à sa lumière et par conséquent mieux vues, justement lors-
qu'elles s'éloignaient vers le bord occidental.
» Il est curieux de remarquer que ce point de lumière a été observé et figuré
de la même façon dans un dessin fait le 30 août 1845, à Cincinnati, par Mitcliel; il
se rattache certainement à une configuration locale de la planète. Je lui ai donné
le nom de Mitchel, en souvenir de cet enthousiaste ami de l'Astronomie. »
Un autre observateur, M. Brett, examinant Mars dans la nuit du 1" sep-
tembre, a décrit ce point blanc près du pôle, comme an auxillarypalch. C'est
une confirmation de Tobservation précédente.
Le décroissement de la zone polaire neigeuse a été manifeste. Au mois de
juillet, cette zone occupait un espace deux fois plus vaste qu'à la fin de sep-
tembre.
Telles sont les observations de l'habile peintre anglais, qui a consacré
d'ailleurs une partie de sa carrière à la représentation des curiosités du ciel.
L'examen de sa Carte générale résume tous les faits dégagés par ses minu-
tieuses recherches. Nous avons tenu à la reproduire par la photogravure,
aOn que nulle modification n'y soit apportée par une main étrangère; mais
il en résulte que les continents sont moins clairs qu'ils ne devraient être, à
cause de leur ton jaune trop photogénique : le lecteur peut suppléer facile-
ment à cet effet photographique inévitable.
Parmi les dessins de M. Green, nous tenons encore à en présenter deux
ici [fuj. 171), comme dignes de la plus haute attention et particulièrement
remarquables, obtenus en des circonstances atmosphériques tout à fait
exceptionnelles, le premier surtout.
Celui-ci sera, pour un observateur attentif, un véritable régal de l'œil
et de l'esprit. Il a été obtenu le 10 septembre, à 11''20'". L'atmosphère
était si transijarenle et si calme que l'on croyait distinguer les moindres
détails de la surface de la planète. On a pu se servir d'un oculaire construit
1S77 N.-H. GIIEKN. — DKSSINS KT CAUTK. 281
spécialement par Ilrowiiinix pour l'oljservalion de Mars, fini .'ivcc le plut
grand soin, grossissant iUÛ lois en diamètre. Autour du cap polaire, se
Ki!,'. 171.
Vues lélescopiques de Mars, par M. Grecn, le 10 septembre à il'' 20™, et le 8 à minuit 30".
voyaient plusieurs flaques de neige isolées. La région occidentale de la mer
Fig. 172.
Diagramme explicatif.
w = Montapnes de Milchci ; — r = Terre <lo Lockyer ; — ij = Ile ilc Ilirst ; — t = Cap Ilaiiks ; — » = Continent
BciT; — 7 = Mer du .'Jablier; — s = Mage inondée entre la mer Main et la mer Flammarion;
j- = Péninsule de Ilind.
du Sablier monire, à l'endroit de la mer Main et de la péninsule de Hind, une
demi-teinte, qui n'est ni continentale, ni maritime, et qui donne Tidée de
2S-: I. A n. A Ni: ri': m vu s.
terres inondées ou do marais. Nous l'avons (ir'jA roniarqur sur les dossinsdc
Dawes, el nous rcvienilrons jilus tard sur ces inondations apparentes — cl
peul-rlro réelles.
Sur les rives orientales de la même mer, à l'angle du détroit d'IIerschcl,
on a distingué une baie ou petite mer, presque séparée par une sorte de
presqu'île. Au-dessus et à l'est, on apercevait un cap déjà observé et dessiné
en 1862 par M. 15anks à KaliuLr (voy. Thr Aslronomical Rcgislcr). L'auteur a
distingué aussi, enlro la mer du Sablier et la lerrc de Lockyer, une sorte
d'île triangulaire, à peine différente du fond (jui l'entoure; cette île a été
vue et dessinée le 3 août de la même année par M, Ilirst à Sydney et par
M, Trouvelot à Cambridge, le 10 sipicinhre.
La secondi' vue, pris(» le 8 soiilcmlire à iniiiuil et demi, complète la précé-
dente, surtout pour It^iute la région orientale de la mer du Saljlier, jusqu'à
la baie du Méridien.
Remarquons enfin (jue l'oljservateur constate qu'il n'a vu aucun des ca-
naux signali's jiar M. Schiaparelli, el dont nous parlerons bientôt. Mais il est
juste d'ajouter que celui-ci ne les a découverts qu'aux mois de février et
mars, quatre mois après le dernier dessin de M. Green.
Ces observations de M. Green peuvent être mises au premier rang de toutes
celles qui ont été faites sur la planète dont nous écrivons l'iiisloire.
LXX.W'III. 1877. — IIarkxess, Noble, Pratt, Jonx Brett, G.-D. IIirst,
Bredichix, Berxaerts, IIartwig, ScnuR, Ellerv, de Koxkoly, Boeddiker,
\\'eixek, Klein, Duval, etc. Observations diverses.
Avant d'arriver aux plus importantes obscrvalions de cette précieuse
oijposition de 1877, qui sont celles de M. Schiaparelli à Milan, nous com-
pléterons les notices précédentes en passant en revue tous les autres obser-
vateurs qui ont obtenu des résultats plus ou moins satisfaisants.
Les observateurs de Mars sont un peu comme les jours, ils se suivent
et ne se ressemblent pas. On a parfois plus d'une désillusion.
Le plus puissant instrument du monde était en 1877 le grand équatorial
de 26 pouces anglais, ou 0"', 6G de diamètre, de l'Observatoire de Washington,
à l'aide duquel M. Hall a découvert les satellites de Mars. Le professeur
William Harkness le dirigea plusieurs fois sur la planète, depuis le 18 août
jusqu'au 18 octobre 1877, mais jamais il ne put obtenir de bonnes images
avec l'oculaire de 400 : il dut se contenter du grossissement de 175. On put
prendre huit dessins, et, après chaque soirée, M, Hall constata qu'on ne pou-
vait rien obtenir de meilleur.
1877 IIARKNESS. NOBLE, PIIATT, lolIN UUHTT, ETC. 283
Ces huit dessins ont donné pour résultat le planisphère ci-dessous
(fig. 173) (*), construit dans la projection de Mercator.
C'est là, comme l'observateur l'avoue lui-mrmo, un assez maigre butin.
C'est à peine si Ton reconnaît la mer du Sablier, la mer Maraldi, la mer
Terby et l'océan de la Rue. Tout cela aurait pu se voir avec une lunette
de 108""°!
Le seul résultat intéressant de ces observations a été une détermination
Fi-'. i:n.
E Hellé. Si.
Carte de Mars faite en ls77 a 1 Observatoire de Washinsrton.
de la position du centre de la neige polaire australe, par M. Hall. 11 a trouvé
pour cette position: Longitude, 20°, 6G; distance au pùle. S'il' (*).
A la Société Royale astronomique de Londres, le capitaine Noble a pré-
senté, à la séance du 9 novembre 1877, une série de dessins faits à son
observatoire de Forest Lodge, Maresfield (Uckfîeld) à l'aide d'une lunette
équatoriale de 4,2 pouces d'ouverture et de 61 pouces de distance focale, don-
nant de bonnes images avec un grossissement de 255. L'observateur, accou-
tumé depuis longtemps à l'étude de Mars — car il avait commencé ses obser-
vations dès l'année 1858, —signale que les taches deviennent invisibles vers
les bords du disque; il remarque notamment, comme M. Green le rappelait
plus haut, que l'on peut en général les distinguer plus près du bord suivant
« following limb » ou oriental que du bord précédent ou occidental. Il en
(') On Ihc physical Configuration of Mars, Monthly Xulices, nov. 1870, p. 13.
(") Astronomische Nachrichten, t. X(^, 1878, p. 223.
2S4 I-A PLANlITli .MARS.
conrliil que sur Mars le lover du Soleil est plus clair que le coucher. Les
matinées seraient plus }iures que les soirées. Il en est de mémo ici, du
moins dans nos climats: h\ soleil est jilus fn'Mjuent le matin (juc le soir, et
tous les phcMoeraphes ont remarijué (jUc la lumit-re du malin est meilleure
que celle de l'après-midi.
A la même Société, à la séance suivante, de décembre. M. II. Pralt a
présenté d'aulre part une série de dessins faits à l'aide d'un équatorial
newtonien dont le miroir mesurait 8.15 pouces d'ouverture, oculaire gros-
sissant 400 fois. Le temps n'a pas été favorable, et en général les images
n'ont pas été bonnes. Les dessins ont été extrêmement difficiles à faire. Ce que
Ton voyait en d'heureux instants disparaissait quelques moments après. La
teinte rouge de la planète a i)aru plus pâle que dans les oppositions précé-
dentes. L'observateur confirme la remarque du capitaine Noble sur la meil-
leure visibilité des taches près du bord pour lequel le Soleil vient de se
lever que près de celui pour lequel il va se coucher.
La persistance avec laquelle un grand nombre de taches bien connues
sont revues d'années en années, comme on les a revues de nuits en" nuits
pendant cette opposiiion, prouve sûrement qu'elles appartiennent au globe
et non à l'atmosphère. Pourtant, les différences dans les détails observés
au même instant par la même personne, au même instrument, dans les
mêmes conditions atmosphériques, témoignent de variations certaines dans
la transparence de l'atmosphère martienne. L'idée (ï obscurcissements locaux
provenant d'une condition nuageuse de cette atmosphère paraît sufûsante
pour expliquer les divergences, quoiqu'il ne soit pas facile de décider pour-
quoi certaines formes seraient visibles à certaines époques et oblitérées ou
grandement modifiées en d'autres temps.
L'atmosphère de Mars s'est montrée en général bien transparente, mais
de temps en temps les configurations sont devenues invisibles, certainement
à cause de l'opacité temporaire de cette atmosphère, opacité qui n'est jamais
comparable à celle des masses de nuages de Jupiter. L'effet dont on vient
de parler n'était pas dû à un défaut de transparence dans notre atmosphère,
car, en même temps que Mars était brumeux, Saturne, à une attitude
moindre, était très net. Le fait a été observé plusieurs fois, notamment le
14 novembre.
Un autre observateur anglais, M. John Brett, a présenté à la même
séance (') une série d'observations faites du 2 août au 8 octobre, à l'aide
d'un télescope de 9 jjouces de browning, à rextrémité sud de l'Angleterre,
(') Monthly Notices, t. XXXVIII, p. 58.
1877 ruAi 1. JOHN iniKiT, hic. 28 J
prés de Lizard. Ses résultats ne sont pas eiicouragcaiils, ils sont plutôt con-
tradictoires.
Le disque de Mars s'est toujours montré beaucoup, moins net que Jupiter
et Saturne : c'est un « mauvais objet télcscopique » : l)ad tcloscopi(tol)ject.
L'observateur pense que ratniosphère de la planète est tellement opa(]ue
qu'elle empêche de rien distinguer exactement, si ce n'est vers le centre du
disque. Il la compare avec celle de Jupiter et pense que celui-ci n'a pas
d'atmosphère proprement dite. « Le disque de Mars est très blanc sur ses
bords : preuve d'épaisse atmosphère. Jupiter est, au contraire, plus bril-
lant dans sa région centrale que sur ses bords : preuve opposée. Il doit être
liquide et demi transparent jusqu'à une grande profondeur au-dessous de
sa surface; Mars, au contraire, est un corps solide, sa topographie générale
étant permanente, avec une atmosphère considérable. Pourtant il n'a pas
de nuages. Du 2 août au 8 octobre, l'auteur a observé la planète sans en
découvrir un seul. Les principales taches ont été reconnues. Ce ne sont pas
des mers, car elles donneraient nécessairement naissance à certaiïies éva-
porations, par conséquent à des nuages. Qu'un hémisphère entier puisse
être tout à fait dépourvu de nuages pendant plus de deux mois, c'est fatal
à l'hypothèse des mers. Personne ne peut prétendre que l'atmosphère de
Mars ne soit pas assez dense pour soutenir des nuages, car cette densité
saute aux yeux. »
Ainsi parle M. John Brett. Et les neiges polaires? « Les taches blanches des
pôles, dit-il, sont généralement regardées comme des neiges, mais il y a
une ou deux objections contre cette assimilation, outre l'absence de nuages
pour les former. D'abord, la tache polaire australe, actuellement en vue,
est entourée d'une teinte sombre, qui est du même ton qu'une prétendue
mer qui la continue jusqu'à l'équateur, et dont elle n'est séparée par aucun
détroit. Donc, si la tache blanche est de la neige, elle rej)Ose sur la mer ou
sur une île polaire. »
L'auteur ne peut pas l'admettre, et remarque en même temps que cette
tache blanche polaire est vue très souvent non pas sur le globe même, mais
au-dessus de lui. On attribue cet effet à l'irradiation, mais la distance est
trop grande pour être ainsi expliquée, et, de plus, cette suspension blanche
porte ombre à l'Est lorsque la planète a passé son opposition, comme on le
voyait notamment le 28 septembre à 9^ meilleure^soirée de l'année. « Ce n'est
pas de la neige, mais un nuage énorme, qui se forme au seul endroit de la
planète où il puisse s'en former, au pôle. C'est la seule région assez froide
pour condenser de la vajteur, car le reste de la planète est très chaud. »
Voilà assurément du nouveau, et nous avons déjà vu que plusieurs obser-
vateurs semblent accepter ces conclusions. Mais toutes ces assertions sont
iîSG l.A IM AM-Ti: MA US.
di?culaMes. cl il iiost iin'nio p;is (liflicilo de les renverser. D';ibord, il n"es
pas e.xaot (jiie ralmosiilière île Mars soit d'nuo telle opaeitr. car. au contraire,
presque tous les observateurs s'aeconlent à reconnaître sa transparence.
Elle est incomparablement plus limpide que la nôtre. A la distance de Mars,
et dans les mêmes conditions, il serait impossible de distiniLruor s\ir la Terre
autant de dôlails que sur Mars, même par les journées les plus pures.
L'absence absolue de nuages est également une erreur. S:ins doute, ils sont
très rares; mais il nous a suffi de comparer les excellents dessins de
Lockyer et de drcen, dès 18G"2, pour reccmnaitrc leur existence et leurs
mouvements, La vaprur d'eau, dont la présence dans l'atmosphère de Mars
est démontrée par l'analyse spectrale. s"y condense moins en nuages que
sur la Terre, mais elle jette parfois un voile qui empêche de distinguer de
vastes contrées, et il n'est pas douteux qu'elle ne produise les taches polaires,
qui.ijuoi qu'en dise l'auteur, ne planent pas au-dessus du niveau (hi globe,
mais semblent parfois, par l'irradiation, former une protubérance sur le
disque, parce qu'elles ont la blancheur de la neige.
Ce que M. Brett prend pour la densité de l'atmosphère martienne, c'est
l'effet de la présence de la vapeur d'eau, qui exerce une action absorbante
très marquée dans sa plus grande épaisseur, sur tout le contour de la pla-
nète.
L'autour ajoute que tous ces faits sont contraires à l'opinion que Mars
puisse être habité.
Pendant que les observations précédentes avaient lieu en Europe, un
autre observateur zélé, M. Hirst, étudiait la planète à Sydney (Nouvelle-
Galles du Sud) et en prenait un dessin soigneusement exécuté à l'aide d'un
télescope de 10 pouces v. L'auteur remarque que c'est seulement vers le
milieu d'août que les configurations géographiques sont devenues bien
nettes, soit à cause de notre atmosphère, soit à cause de celle de Mars (').
A l'Observatoire de Moscou, M. Rredichin a observé l'opposition de Mars
au point de vue de la parallaxe solaire. Nous n'avons pas à parler ici de ces
mesures de positions, mais, le 6 septembre, l'auteur a pris un dessin (^)
qui montre surtout l'éclatante blancheur de la tache polaire et laisse deviner
la mer Maraldi sous forme d'une envergure d'ailes.
Nous avons vu plus haut les observations faites en Belgique par M. Tcrby.
On peut leur ajouter celles qui ont été faites à Malines par M. Bernaerts (')
à l'aide d'une lunette de 9'''" d'ouverture, et qui sont accompagnées de
(') Monthlij Xolices of the royal nstronomical Society, décembre 1877, p. 5S.
{') Annales de l'Observatoire de Moscou, t. IV, 1878.
(') Bulletin de l'Académie de Belgique, 1878, t. I, p. 33.
1877 Hi;ilNAEUTS, IIA 151 W Hi, SCIILU, Kl.LKKV, hTC. 287
dessins. Le point le plus intéressant de ces cnxiiiis csl (juils font conmm-
niquerles mers Zollncr et Lambert avec la mer polaire australe, comme on
le voit sur notre carte de la page G9.
Le diamètre de la planète a été l'objet do nouvelles mesures, notamment
à rObservatoirc de Strasbourg, par M. Hartwig ('). Cet observateur a trouvé :
Diamètre équatorial 0\\1l ±:0',012.
Diamètre polaire 9 ,300 rh 0 ,011.
Aplatissement . J .
A l'Observatoire de Breslau, M. Scliur a trouvé, pendant la même opposi-
tion:
Diamètre équatorial 9",2G2 ± 0",01G.
Diamètre polaire 9 ,108=^0 ,018.
Aplatissement ^'j.
L'ensemble [des mesures d'Arago, Besscl, Kaiser et Main, comliiné avec
les précédentes, donnerait pour le diamètre moyen, à la distance 1 : 9 ",352.
Pendant la même opposition, à l'Observatoire de Melbourne (Australie),
M. Ellery a fait une série de mesures des diamètres polaires et équatoriau.x
de Mars (-). Résultat assez bizarre : tantùt le premier est plus petit que le
second (ce qui devrait être constant), et tanlùl il est plus grand. E.xemxjles :
27 août. Diamètre polaire = 24", 185; Diamètre équatorial = 24°, 550.
29 » » 24,918; » 25,488,
30 » » 25,172; » 25,082.
G sept. » 23,002; » 25,287.
A son observatoire de 0 Gyalla en Hongrie, M. de Konkoly a fait de son cùlé
une série d'observations intéressantes (') et a publié notamment lôdessins
pris du 19 octobre au 16 novembre, étude qu'il a continuée pendant les op-
positions suivantes. Les principales configurations géographiques y sont
reconnaissables, sauf les variations d'aspects, dues surtout sans doute aux
observateurs, auxquelles nous sommes accoutumés.
A l'Observatoire de Prague, M. Weinek, auquel on doit de si charmants
dessins des cratères lunaires, a pris trois vues de Mars, les 8, -21 et 29 sep-
tembre, qui n'oll'rent, remarque assez étrange, aucun délail intéressant,
quoique l'instrument ait été un équatorial de 8 pouces, armé d'un grossis-
sement de 192, et que l'observateur soit des plus lKi])iles (*).
(') Untcrsnchungcn ùbcr die ilurchmcsser des jolanclcn Venus uud Matw Publ
der Ast. Geselhchaft. Leipzig ; 1879.
(') Monthlii Notices, t. XXXVllI, 1878, p. 409.
(') Beobachlungen aïKjcstellt an aslrophysihaliscJien Ohservalorium in OGyalla in
Ungari, I. Bond, 1878.
(*) Berichte der K. Sachs. Gesellschafl der Wissenschaflen, 15 déc. 1877.
-28!^ l.A PLANÈTE MARS.
A rObservaloire de rioltiniruo, M. lUcddikor, (|iii dopuis a poursuivi ses
études à l'Observatoire île IJirr Castlc eu Irlaude, a observé lOppositidu
de 1877 et pris dix vues de la plauète ('). Xous regrettons de ne pouvoir
publier tous les dessins. Ils ont ebacun leur valeur, sans contredit, mais il
nous parait indispensable d(? eoncenln-r toute celle nionograpbie de Mars
en un seul volume, et déjà le cadre devient bien resserré! Nous tenons
à signaler tous les travaux, tous les documents qui sont parvenus à notre
connaissance, lors même que nous ne pouvons pas les utiliser entièrement.
Il faut avouer, du reste, que l'opposition de 1877 a été, comme on pouvait
s'y attendre, particulièrement féconde, et ({u'un certain nombre de dessins
se répètent inévitablement.
Remarquons encore deux dessins de M. Klein, à Cologne, pris les 27 sep-
tembre et 24 octobre, publiés dans la Revue astronomique allemande 5t>iws.
En France, plusieurs observateurs amateurs nous ont envoyé un assez grand
nombre de croquis, parmi lesquels nous signalerons principalement ceux
de M. E. Duval, agriculteur à Saint-Jouin (Seine-Inférieure) (^).
Nous pourrions encore signaler les travaux de Dreyer (^), Grover {*) avec
six dessins de septembre et octobre 1877, Lamcy (^), Fergola C'), Lind-
stedt ('), etc. Ils n'ajouteraient aucun document important aux précédents.
Les deux derniers consistent seulement en observations de positions au
cercle méridien, avec des étoiles de comparaison.
LXXXIX. 1877. — ScHi.'V.PARELLi. Observations, cartes et étude générale.
Nous arrivons ici au plus grand travail que Ton ait effectué sur la planète
Mars.
L'illustre directeur de l'Observatoire de Milan, aussi habile dans les ob-
servations que dans le calcul, auquel la Science doit plus d'une brillante
découverte, notamment celle des orbites des étoiles filantes et de leur assi-
milation aux orbites cométaires, s'est engagé, relativement à la planète Mars,
dans un travail des plus heureux et des plus féconds, qui éclipse, pour ainsi
dire, tous ceux de ses devanciers.
Chaque période d'opposition, depuis cette fameuse année 1877, a été mar-
(•) Verôffentlichunjen von dcr KiJiiirjl. Stcvnwarte zu Guttingen. 1877.
{') Ils ont été publiés dans le journal hebdomadaire La Nature, déc 1877, p. 80.
(') The aspect of Mars in 1877, Ast. Nacli., t. XCIII, 1878.
{') EnglistiMechanic, t. XXVI. 1878.
('■) Considération sur un essaim d'astéroïdes autour de Mars. Autun, 1877.
(») Osservazioni di Marti. Naplcs, 1879.
(') Beobachtungen des Mars, Lund, 1878.
1S77 SCllIArAUKLLI. — UHS KK V ATION.S I: T TU I AMi L LA IION . 2S'.i
quée par des recherches considérables de hi part de l'éniinent astronom<'.
Nous exposerons ici celles de l'année 1877, que l'auteur a rédigées lui-
même en un ouvrage spécial (').
Ces observations ont été faites à l'aide d'un excellent équatorial construit
par Merz, de Munich, de 0"',218 d'ouverture et de 3™, 25 de distance focale.
Le grossissement employé a été celui de 322; seulement en janvier, février
et mars, la planète étant très réduite par la distance (de 30" à 5"), on a em-
ployé celui de 4G8.
En commençant ces observations, l'auteur ne s'attendait pas à les pousser
aussi loin; mais les résultats obtenus ont été si encourageants, les conditions
atmosphériques restèrent si favorables, qu'il se lança avec plaisir dans ce
grand travail.
L'œuvre de M. Schiaparelli, en 1877, se divise en cin(i sections : l" nou-
velle détermination de la direction de l'axe de rotation; 2" triangulation
topographique des points fondamentaux de la surface de Mars; 3' descriptipn
des diverses régions de l'hémisphère austral et d'une partie du boréal; 4" la
tache polaire australe: 5" l'atmosphère de Mars. Nous allons examiner avec
soin tout cet ensem])le.
Il était important de commencer par connaître exactement la direction
de l'axe de rotation de la planète. L'auteur a pris comme base d'approxima-
tion la direction déterminée par Oudemans, d'après l'observation des taches
polaires australe et boréale de Bessel en 1830, 1835 et 1837 (*). Cette déter-
mination donne, pour 1834 :
Ascension droite : 317"'34'; Déclinaison : -t-50°5'.
La variation annuelle due à la précession terrestre est de-i-0',485 et
+ 0',247. Les coordonnées pour 1877 deviennent donc :
Ascension droite : 317° 55'; Déclinaison : -+-50" 16'.
L'origine des longitudes géographiques a été placée au point a de la carte
de Béer et Miidler, à la baie du Méridien, comme l'a adopté notamment
M. Marth, qui, à chaque opposition, depuis 1875, prend soin de calculer les
éphémérides des aspects quotidiens de Mars ('). La graduation des longi-
tudes est faite de la gauche vers la droite, — pour le disque vu dans une
lunette qui renverse les images et montre la planète le Sud en haut, —
(') Osservazioni aslronomichc e fisiche .su//' asse di rotazione e siilla topografla
del pianela Marie. Reale Accadeuiia dei Lincei. Un vol. gr. in-8 de 136 pages et plan-
ches. Rome. 1878.
{'] Aslronomisckc Nacln-ichle.i, n' 838. Voy. plus haut. p. l'2l.
■ ; Yoy.MonUilij Notices, 1875, p. 305; 1877, p. .301, etc.
l''LA.MM.\niON — Mars. 19
■290 I, A iM.A Ni:! i: M vus.
c'est-à-tlire île r(Hic>l à l'i;>t [nnir l'observalrur (]ui loganlo Mai'S. ou tic 1 Ksi
à rdiiost iiour un liaiùtaiil de Mars, aulremenl «lit encore, les longitudes
vont en croissant du bord précédenl au boni suivant .
Pour calculer la longitude areograplii(iue du point central du cirfjue,
M. Marth adopte 88G-i'2,7 secondes de temps solaire moyen terrestre pour
la durée dune rotation complète de Mars relativement aux étoiles. C'est ce
(jue M. Schiaparelli adopte également.
66 observations de la position de la tache neigeuse [macchia ncvosa) ont
donné, pour la position du point austral de Taxe de Mars vu do la Terre ;
164'\90. pour la date du 27 septembre, à O*" de Greenwich. qui correspond
à la moyenne des observations.
En adoptant le diamètre polaire déterminé par Kaiser (9", 387 et 8". 80
pour la parallaxe horizontale équatorialc du Soleil, on trouve qu'un degré
d'arc de grand cercle du globe de Mars équivaut à 0°,533 de léquateur ter-
restre, soit à 59 kilomètres. L'erreur probable de la position obtenue pour
la neige polaire est d'environ 7 kilomètres. L'auteur conclut que les angles
de position de la tache polaire pris pendant une opposition seule de la pla-
nète ne suffisent pas pour une détermination précise de l'axe, et a remis
cette vérification précise à l'opposition suivante, de 1879.
TKiANiiLLAllO.N' AUÈOGKAPHIUUi; DES POINTS FONDAMENTAUX.
Les observateurs avaient déclaré jusqu'ici qu'il était impossible de me-
surer au micromètre les taches du globe de Mars. Telle n'est pas l'opinion
de l'auteur. Il pense que, lorsque le diamètre de la planète n'est pas in-
férieur à 20", on peut prendre des positions au micromètre, et que l'erreur
probable ne dépasse pas un degré d'arc de grand cercle.
Voulant donc établir la topographie de Mars sur une base exacte, l'astro-
nome milanais a suivi les principes de la topographie terrestre. Il a choisi
un certain nombre de points distincts et faciles à reconnaître, distribués sur
l'ensemble de la planète, et les a pris comme réseau fondamental pour y in-
terpoler tout le reste.
La détermination du lieu aréographiqued'un point de la surface s'obtient
en notant le moment auquel ce point traverse le méridien central, et en im
surant en cet instant au micromètre la distance. qui le sépare du centre du
disque. Il est facile ensuite de traduire en longitudes et latitudes.
Les points ainsi mesurés micrométriqtiement sont au nombre de 62. Nous
les avons inscrits au Tableau suivant, avec les noms nouveaux (]ue M. Schia-
parelli leur a donnés.
1877 S(;illAl'.VI{i:i,l.l. - unShllVAllONS l'T TUIANijLLATION. JM
N* DcnuiMinntinii r.oii^'itude
1 Verticu d'A ryn 0% 00
2 Secondo conio dcl golfo Sabcu 3.,ôi
3 Istmo dcll.'i Terra di Dciicalionc 17 ,82
•i Ombra deiristiiio stessu 17 .83
5 (iolfo «lellc Perle, bocca dcir Indu.. . . 23,59
(j Docca dcir Idaspc 27 ,38
7 Capo dej,'Ii Aroini 38 ,40
8 Capo délie Ore in Arj,'yrL' 30,78
9 Capo délie Grazie in Arf^yrc 51 ,86
10 Golfo delTAiirora, bocca del Gange. . . . 55,74
11 Puuta dell'Aurea Cherso GI ,'i9
12 I*rimo puntu di Tliaumasia GG ,30
13 Ccinlluente dci Clirysorroas col Milu 84 ,16
li La,<,'0 del Suie, centre 90,24
15 \jiitro délia Fenice, centro 106 ,45
10 Hocca del Fasi 100,93
17 Colonne d'Ercole, bocca eslerna 119,81
18 Centro d'Icuria 1 19 ,02
19 Primo piinto del Mare délie Sirène 131 ,37
20 Primo punto di Thyle 1 134,12
21 Colonije d'Ercole, bocca interna 138 ,02
22 Centro di Thyle J 151,86
23 Base australe d'Atlantide T 159 ,80
21 Primo punto del Mare Cimmerio ...... 165 ,80
25 Golfo d(,'l Titani 174,24
26 Ultime punto del Mare dellc Sireuc 176 ,52
27 Stretto d'U lisse, mezzo 187,08
28 Punto délia riva australe deU'Oceano. . 188 ,15
29 Fiume dei Lestrigoni, bocca suli'Oceano. 200,19
30 Golfo dei Lestrigoni, ultimo seno 201 ,79
31 Scamandro, bocca sul Mare Cronio 202,52
32 Scamandro, punto di mezzo 202 ,57
33 Fiume dei Ciclopi, bocca suli'Oceano... 205 ,05
3i Base australe d'Esperia 211 ,10
35 Capo boréale di Thyle I i 221 ,61
36 Centro di Thyle II 223,53
37 Golfo dei Ciclopi 22'i ,98 '
38 Primo punto del Mare Tirreno 22G ,il
39 Centro d'Esperia 231 ,62
40 Bocca australe délie Xunto 234,11
41 Ultimo punto del Mare Cimmerio 238 ,87
42 Esperia, base settcntrionale. .• . 250,28
43 Piccola Sirte . 256,94
44 Capo Circeo, m Ausoniu 266,59
45 Punto délia costa d'Ausonia. . 266 ,79
46 Lago Tritone 267,15
47 Primo punto dell'Ellade 270,74
48 Lago Merido 277 .09
49 Biforcazione d'Ausonia • • 282 ,32
50 Congiunzione del Nci)ente col Milo 286 ,25
51 Cran Sirte et Ijoccu del Nilo • 290,45
Latitu<lu.
- 4-,
56
— 2
37
_ 0
52
4 ,
56
- 4 ,
90
- •'« ,
41
•- « ;
,30
-+- 39
,38
-+■ 53 ,
,84
-•- 2
,32
-- 25 ,
,26
-t- 2.5
,79
- 18
,88
-^ 25
,22
- 19
,42
-4- .ii
,88
- 44
,88
-^ 37
,86
- 31
,32
T- 65
,08
-+- 65
,08
H- 37
,54
-r- 37
,49
-i- 18
,17
-1- 25
,34
-h 74
,08
— 7
,12
— 4
,50
-h 18
,01
-i- 55
,41
+ 48
,98
— 15,
77
-+- 62
,28
-+- 69
,93
+ 12
,43
-h 37
,81
-f- 22
,79
-r- 51
,13
-+- 9
,85
-- 13
,22
-'- 6
,24
-r- 15
.08
-i- 22
.70
- 20
,38
-- 49
,i9
H- 13
.33
-26
,26
- 17
,09
?92 I, V PI. vm; 1 1: MAKs.
N* nénomiiintioii. Longituilc. I.atituilc.
52 l'imio pii'i australe doU'Ellailc -f- 57 ,99
53 Centro doir Ellade 29i ,12 h- 'lO ,30
")4 Piinlo piii boréale dell'ElIade.. . - 30 ,38
55 Ultinio punto del Marc Tirreno i'JO ,0'J — 0 ,G7
56 Ultimo punto dell'ElIade 315 ,07 -;- i4 ,08
57 Corne d'Ammone 318 ,:)2 h- 10 AQ
58 Scilla e Carridi 324.17 -^ 20 ,31
59 EUesponto. punto di mezzo 320 ,1 1 -+- i8 .22
60 Primo punto délia Noachidc 334,82 -4-18,40
61 Bocca del Phison, nel golfo Sabeo 338,85 -+- 5,05
62 Primo corno del golfo Sabeo 357 ,27 — 2 ,37
Ces noms sont, comme on le voit, tirés de rancienne géographie et niriiic
quelque peu mythologiques. Un grand nombre sont d'une euphonie fort
agréable. ^ L'auteur expose que ceux de la carte de Proctor lui ayant paiu
insuffisants pour le nombre des détails comme pour les changements à
apporter à sa carte, il a dû faire une nouvelle nomenclature pour son usage
personnel.) Le méridien initial a été nommé verlicc d'Aryn « sommet d"A-
ryne », en souvenir d'une opinion légendaire du moyen âge. La prétendue
ville d'Aryne ou coupole du monde était supposée, dans les cartes du
moyen âge. située juste à égale distance du Nord, du Sud, de l'Orient et de
l'Occident: elle était donc censée sur l'équateur et marquait un méridien
central (').
C'est notre baie du Méridien, dont les deux pointes sont nommées première
et seconde corne du golfe Sabajus, la première étant celle qui passe la pre-
mière devant l'œil de l'observateur par suite du mouvement de rotation de
la planète. Ce sens est également celui de la numération des degrés,
A cause des circonstances atmosphériques, ce point zéro des longitudes
de Mars n'a pu être l'objet que d'une seule mesure, et comme il est l'origine
de ces longitudes, il pourrait y avoir une erreur constante dans la nu-
mération des degrés, ce qui ne changerait rien d'ailleurs à l'exactitude
des positions relatives. L'auteur se promet de vérifier plus tard ce point
initial.
Si l'on compare ce méridien zéro à celui de la carte de M. Green (p. 275),
on remarquera entre les deux une différence de 7° : celui de M. Grreen
passe à droite de la Jjaie du Méridien; cette différence s'étend à toute la
carte; comparez, par exemple, le 90% le 290% etc.
Nous reproduisons ici [fig. 174) le planisphère de Mars, construit d'après
la projection de Mercator, tel que M. Schiaparelli l'a donné dans son Mémoire
(') Voy. S.\XTARE.M, Essai sur l'histoire de la Cosmographie an moyen âge, t. \,
pp. 94, 368, et tome IIJ, p. 310.
'. ii.'iiii j 'ir,
^Tn
• _
SUOIJ()
•:9i I. \ PI. ANKTl- M AKS.
précité. On y trouvcM-a les tlO points précédonls. l'.'o^t là uu travail [oui à
fait remarquable, et dont aiu-un des anciens ol)servateiirs (1(> Mars n'aurait
soupçonné In possiliilité. 11 a fallu, pour y réussir, une inébranlable per-
sévérance, un œil excellent, une niétlunle d'observation rigoureuse et un
bon instrument.
Si l'on compare ce planisphère à notre carte de la page 09, on pourra assez
facilement identifier les configurations géographiques. La mer du Sablier y
devient la « Syrtis Magna », trop peu accentuée sur la carte de M. Schiapa-
relli, sans doute parce qu'en 1877 elle était moins large et moins sombre que
d'habitude. Le détroit d'Herscliel II s'appelle « Sinus Sabious ». la mer circu-
laire Terby s'appelle « Lac du Soleil », la terre de Kepler. '( Thaumasia Fœ-
lix », le continent Huygens, « Memnonia ». la mer Maraldi. « Cimnierium
Mare », la mer Hooke, « Tyrrhenum », etc., etc. Cette carte ne dépasse pas
le 40'' degré de latitude boréale, attendu qu'en 1877 la planète n'en mon-
trait pas davantage. L'astronome italien l'a complétée dans les oppositions
suivantes.
Remarquons que l'auteur place l'Ouest à droite et l'Est à gauche, au lieu
du contraire, qui est le sens de toute image céleste dans une lunette astro-
nomique. Ces désignations se rapportent non pas à l'observateur terrestre,
mais à un observateur qui serait sur Mars. Sur cette planète, comme sur la
Terre, un point est à l'orient d'un autre quand il passe au méridien avant
lui : Vienne est à l'orient de Paris et passe au méridien avant lui. Celte ma-
nière de voir est très logique, seulement il faut la définir pour éviter tout
quiproquo.
Le bras de mer que nous appelons la Manche, sur notre carte, à l'extré-
mité de la baie Christie, est très large, et a reçu le nom de « Granges ».
Les deux pointes de la baie du Méridien sont prolongées jusqu'à une mer
australe par deux tracés qui ont reçu les noms de « Hydaspes » et de « Ge-
hon ». Nous avons vu plus haut (p. 188) qnCn 18G4, Dawes, convaincu qu'il
y a là deux embouchures de grands fleuves, avait cherché ces fleuves sans
parvenir à les découvrir.
Non loin de là, on voit un autre grand canal, le Phison.
Nous reviendrons plus loin sur ces curieux tracés et sur ces fameux
a canaux ».
De ses nombreux dessins, faits surtout au point de vue des détails et ra-
rement comme disques entiers, l'auteur a publié les quatre que nous repro-
duisons ici (fig. 175), embrassant l'ensemble de la planète. Ils sont des 20 oc-
tobre, 26 septembre, 18 septembre et li octobre, les longitudes du méridien
central étant respectivement 18°, 8.5». 181" et 298°. La latitude du centre est.
en movenne. de —24°.
(■s., SCIIIAI'AIU-I.i.l - OUSI-UVAlKiNS Kl CAini:. 595
Lg second da ces dossins semble en coiilnnliclion avec les caries, en c-
.luil présonlo un appendice blanc à gauche de la terre de Kepler .|ui ru-
toure le lac circulaire. C'était, écrit lobservaleur; une niasse de nuùes
Fig. i::..
20 octobre.
2C^scpteinbre.
H octoliri-.
j>< septcmbr'-.
Dessins de Mars, par M. Schiaparclli, en 1877.
éclairées inia massa di nubi iUuminatc i'). Dans le premier dessin, le môme
désaccord se montre pour la grande « île d'Argyre ». et l'explication est la
même.
L'auteur arrive ensuite ù la description générale de la planète.
,) Uemarquc mléressante. M. Grcen a observé un clïct analogue le Î9 septembre
V'oy. p. 271;.
•:% 1 \ IM.ANLTi: M MIS.
DESCnil'TION DK LA SI RIAOE DK MAlli^.
M. Schiaparelli commence par l'aire remaniuer (|ue, lors(]u'il s'agil d'in-
scrire rapidement ce que l'on observe dans une lunellc, l'imporlant est do
ne pas perdre de temps en périphrases et que les désignalions les plus
courtes sont les meilleures. La ressemblance des aspects à ceux de la géo-
graphie terrestre fait tout naturellement inscrire les noms usités dans le
langage habituel, tels que île, isthme, détroit, canal, péninsule, promon-
toire, etc. Mais ces désignations « ne font rien préjuger sur l;i nature des
taches et sont un simple artifice pour aider la mémoire et abréger les des-
criptions. )^ L'auteur ajoute : « Nous parlons de la même façon des mers
lunaires, que nous savons fort bien n'être pas de véritables mers. «
Jusqu'ici, l'observateur ne se compromet pas. Mais il est, avec raison.
selon nous, plus explicite un peu plus loin. Quelle est son ()[»inion précisée
La voici :
« Sur la nature des taches sombres, on peut faire un nombre infini d'iiypo-
thèses plus ou moins arbitraires. Pourtant, nous n'en voyons que deux qui juiis-
sent se soutenir par une analyse suffisante, et, sur ces deux, il n'y en a qu'une
qui donne une explication plausible de tous les faits observés.
» La première, qui assimilerait les taches de Mars à celles do la Lune, fait
supposer la surface de la planète entièrement solide : la variété des tons pro-
viendrait de celle des matériaux constitutifs de cette surface. Une telle hypotbèsc,
quoique non entièrement impossible, ne réussit pas à expliquer les faits obser-
vés, à moins qu'on ne la cumpliquc d'autres bypotbèses subsidiaires plus ou
moins bizarres. L'existence des neiges polaires, dont la probabilité confine à la
certitude, celle des brumes et des nuages, prouvent que, dans l'atmosphère de
Mars, il y a une circulation météorique, que des vapeurs s'élèvent en certaines
régions et se condensent en d'autres. On ne comprendrait pas que cotte circu-
lation se fit exclusivement en haut, sans que la surface de la planète y prît
part. Si les vapeurs de Mars se condensent en cristaux en certains lieux, on
d'autres elles doivent se condenser sous l'orme liquide. Ces condensations liquides,
à moins de supposer que la surface de la planète soit exactement une surface
équipotentielle, doivent se réunir dans les lieux les plus bas et donner naissance
ou à des mers ou à des lacs plus ou moins étendus. Les voies par lesquelles ces
condensations liquides se rendent à leurs réservoirs ne peuvent être que des ruis-
seaux ou des fleuves, de cours régulier ou intermittent. Tout ce système, il est
vrai, pourrait être caché ou souterrain, comme la circulation de l'eau dans les
déserts de l'Afrique; ou encore les lacs en question pourraient être très petits
et invisibles d'ici, et, en définitive, le mécanisme de la circulation des vapeurs
atmosphériques pourrait être inobservable. Tout est possible; mais les supposi-
et
■<L)
o
m
ces
f-1
o
o
■-PS
Ph
f;
w
cd
(15
o
r i
IH
Ph
1
O
o
X
CQ
1 — 1
&7
W
rH
(U
1— 1
g
f^^
-H
'OkO S
Oi
r^
(rf
00
m
rd
^
C<0
oo
s
oo
ai
•>->
rc3
'au
S
o
sa-,
T>
eti
to
o
OJ.
p-
r^
i^
03
05
â
^H
dj
Ph
o
1
1
W2
rr)
CO
t«
fJ
>>•
Ph
r>
^
^
lU
Ph
eo
^
.S
"S
.&^
os
s
OJ
c
1877 SCIII \l'AI<i:i.M. — nUSI-UVATlONS l'T CAini:. 207
lions doviouneiit inutiles du iiionicnl que, sur la ijlauèlc, on voit d(;s apparences
précisément semblables à celles que présenterait à un observateur placé sur
Mars la circulation des vapeurs de l'atmosphère terrestre. »
Ce raisonnement, piihlié par M. Schiaparclli en 1878, est du même ordre
que celui que l'on peut lire dans la première édition des Terres du Ciel ( 1870,
p. 420). El comment pourrait-il en être autrement? L'analogie est trop évi-
dente ici pour ne pas être notre guide, tout en nous gardant de toute con-
clusion trop étroite, trop « géomorphiquo », pourrions-nous dire. Nous
demanderons à nos lecteurs la permission de reproduire ce passage.
« La météorologie martienne est une reproduction très ressemblante de celle
de la planète que nous habitons. Sur Mars, comme sur la Terre, en effet, le Soleil
est l'agent suprême du mouvement et de la vie, et son action y détermine des
résultats analogues à ceux qui existent ici. La chaleur vaporise leau des mers
et l'élève dans les hauteurs de l'atmosphère; cette vapeur d'eau revêt une forme
visible par le même procédé qui donne naissance à nos nuages, c'est-à-dire par
des différences do température et de saturation. Les vents prennent naissance
par ces mêmes différences de température. On peut suivre les nuages, emportés
par les courants aériens, sur les mers et les continents, et maintes observations
ont, pour ainsi dire, déjà photographié ces variations météoriques. Si l'on ne voit
pas encore précisément lapluie tomber suv les campagnes de Mars, on la devine
du moins, puisque les nuages se dissolvent et se renouvellent. Si l'on ne voit pas
non plus la neige tomber, on la devine aussi, puisque, comme chez nous, le sol-
stice d'hiver y est entouré de frimas. Ainsi il y a là, comme ici, une circulation
atmosphérique, et la goutte d'eau que le Soleil dérobe à la mer y retourne après
être tombée du nuage qui la recelait. Il y a plus : quoique nous devions nous tenir
solidement en garde contre toute tendance à créer des mondes imaginaires à
l'image du nôtre, cependant celui-là nous présente, comme dans un miroir, une
telle similitude organique, qu'il est diflîcile de ne pas aller encore un peu plus
loin dans notre description.
y En effet, l'existence des continents et des mers nous montre que cette planète
a été, comme la nôtre, le siège de mouvements géologiques intérieurs qui ont
donné naissance à des soulèvements de terrains et à des dépressions. Il y a eu
des affaissements et des soulèvements modifiant la croûte primitivement unie du
globe. Par conséquent, il y a des montagnes et des vallées, des plateaux et des
bassins, des ravins escarpés et des falaises. Comment les eaux pluviales retour-
nent-elles à la mer? Par les sources, les ruisseaux, les rivières et les fleuves. La
goutte d'eau tombée des nues traverse, comme ici, les terrains perméables, glisse
sur les terrains imperméables, revoit le jour dans la source limpide, gazouille
dans le ruisseau, coule dans la rivière, et descend majestueusement dans le
fleuve jusqu'à son embouchure. Ain;^!, il est difficile de ne pas voir sur .Mars des
scènes analogues à celles qui constituent nos paysages terrestres : ruisseaux
•298 I> A PI, A ni: 11- M Ali S.
oourautdans leur lit de railloux dorés parle soleil; rivières traversant les idaines
ou tombant en casca<les au fond dos vallées; fleuves descendant lentement à la
mer i\ travers les vastes campa?:nes. Les rivages maritimes reçoivent là, comme
ici, le tribut de canaux aquatiques, et la mer y est tantôt calme comme un mi-
roir, tantôt agitée par la tempête. »
Nous n'avons reprodiii! ce ]ins?ngc que pour inoiilrcr l'aceoid des ilcux
raisonnements. Pour notre part, nous conlinuerons à penser que les lâches
foncéesdu globede Mars représentent des mers. Nous verrons pins loin ( 1879]
que M. Schiaparelli a changé d'avis et est redevenu fort sceptique à cet égard.
Mais continuons l'exposé de l'œuvre de cet éminent observateur. Il arrive
ensuite à l'examen des mers et rapporte la variété de leurs tons à la profon-
deur, les plus profondes absorbant davantage la lumière solaire et devant nous
paraître plus sombres, les moins profondes laissant transparaître leur fond à
travers leur épaisseur. La nature du liquide et celle des matières qu'il peut
tenir en suspension peuvent aussi avoir leur influence. « Sans faire aucune
hypothèse spéciale sur la nature de ces liquides, la variété de leurs tons
peut s'expliquer simplement par des différences de profondeur, de transpa-
rence et de constitution chimique. «
a La salure différente des mers terrestres détermine, ajoute l'astronome de
Milan, de grandes différences de teintes dans ces mers. Plus l'eau est salée,
plus elle est sombre. En général, la salure des mers terrestres décroît avec
la latitude, en raison de la moindre évaporation et d'une plus grande précipita-
tion, et c'est ce qui explique que les mers polaires sont plus claires que les
équatoriales. C'est ce qu'a montré Maury, à propos du contraste des eaux du
Gulf-Stream avec l'Atlantique, du vert clair de la mer du Nord et des mers po-
laires, de l'azur sombre des mers tropicales et de l'océan Indien. Il en est de
même sur Mars. Là aussi, la mer polaire est de couleur moins sombre que celles
de la zone torride, et les mers de la zone tempérée ont une teinte intermédiaire.
Tout cela nous conduit à assimiler les mers martiennes aux mers terrestres. »
Et l'auteur ajouta' encore :
Cl Le réseau compliqué de lignes sombres qui réunissent entre elles les taches
que nous regardons comme des mers, est un autre argument en faveur de la
même hypothèse. Ces lignes doivent leur couleur à la même cause que celle des
mers, et ne peuvent être que des canaux ou des détroits de communication.
Leur élargissement à leur embouchure est toute naturelle dans cette explication.
Rien d'analogue à ce réseau ne se voit sur la Lune. Si c'étaient là des matériaux
diversement colorés, il faudrait chercher comment une telle distribution réticulée
a pu se produire.
» On voit donc, flit encore M. Schiaparelli, que Thypothèse d'une constitution
IS77 si;iii.\i'.\i{i;i,i.i. ni{si;i{\ A iinNS i:t CAin i:. -29'.)
inaritiiiie et ooutinoiitalc du la surface do Mars est douée de la plus grande pro-
babilité. Kilo deviendrait presque une certitude si l'on réussissait à affirmer
tl'uno manière indubitable la disparition réelle de l'émissaire oriental du lac du
Soleil. Ce canal, qui a été vu par Mildler en 1830, par Kaiser, Lockyer, Rosse et
Lassoll en ISGC, ainsi que par Kaiser et Dawes en 18G'i, n'a pu être retrouvé en
1877, malgré les recherches les plus diligentes, qui ont conduit à découvrir des
détails bien jikis minutieux. Si cette variation est constatée dans l'avenir, il sera
dilTlcile de trouver une explication plus simple et plus naturelle qu'un changement
de rdgimo hj'draulique en cotte région, analogue sans doute à ce qui est arrivé
en Chine dans le cours du fleuve Jauno
Lo lecteur a certainement deviné qu'il s'agit ici de ce que nous pourrions
appeler la queue de la poire dans les dessins suivants : page 107, Béer et
Miidler, au point d de l'hémisphère de gauche ; page 151, Lockyer, fig, 89 et
90; page lG-2, id., fig. 104; page 16G, lord Rosse, fig. 3; page 177, Kaiser,
fig. 115; page 18G. Dawes, fig. 119 et 120, c'est-à-dire de l'appendice de la
merTerby, lequel n'a pas été représenté sur notre carte de la page 69, parce
que nous le considérons précisément comme essentiellement variable.
En 1879, M. Schiaparelli l'a retrouvé : il était redevenu visible. Il lui a
donné le nom de « canal du Xectar ».
En 1877, M. Green a signalé là un petit lac [voy. p. 278, fig. 168 a), auquel il
a donné le nom de « lac Schiaparelli )'. Il croit que ce petit lac, formant un
point intermédiaire entre l'océan de la Rue et la mer Terjjy, fait croire, par
des images indécises comme elles le sont le plus souvent, à un canal réunis-
sant les deux mers.
pour nous, il se passe là des changements certains d'une année à l'autre,
et l'explication basée sur des variations liquides est juslitiée.
Reprenons l'œuvre de l'astronome italien.
Il y a sur Mars des régions de teintes intermédiaires entre les mers
sombres et les continents clairs. Que représentent-elles?
a Si l'on regarde les taches de Mars comme de simples colorations d'un sol
solide, ces variétés de tons ne demandent aucune explication particulière. Le
règne minéral et également le règne végétal peuvent oftYir toutes les gradations
de tons et toutes les colorations possibles. Mais, si nous attribuons cette variété
de clair-obscur à des couches liquides, nous trouverons une explication plus na-
turelle et plus instructive des faits observés. Il nous. suffira, pour cela, de consi-
dérer le ton comme proportionnel à l'absorption des rayons solaires jiar la couche
liquide, et, dans ce cas, les régions grises dont il s"agit seront des bancs sous-
marins ou des bas-fonds. On voit sur la mer Erytrée les nuages se condenser là
de préférence, ce qui s'accorderait avec une température plus basse, due précisé-
ment à des bas-fonds ou à ries bancs. L'isthme de rilospéiio. à l'endroit où la mer
300 !. A PI ANKTi: MAIJS.
Tyrrhénioune et la mer Cimmrricnno sont \o plus rapprochées, doit laisser place
à une coiimninication possible entre les deux mers. )>
Il s'ngil ici de risthmc de Mcsleii, au point teinté sur notre carte de la
page 69. Il y a probablement là, presque toujours, une légère couche d'eau,
et quand on la voit obliquement, elle paraît plus foncée que (juand on la voit
de face.
Quant à la profondeur de ces mers, M. Schiaparelli rappelle que, d'après
les expériences du P. Secchi dans la Méditerranée, un objet même très blanc
cesse d'être visible à une profondeur de 60 mètres. Cependant, d'après M. de
Tessan, à l'extrémité australe do l'Afrique, le banc des Aiguilles paraît atté-
nuer la sombreur des eaux, quoiqu'il soit à 200 mètres au-dessous de la sur-
face. L'épaisseur de l'eau sur les bas-fonds martiens dont nous parlons doit
être très petite, ainsi que dans les canaux.
L'atmosphère est parfois voilée; elle paraît généralement plus claire
quand le Soleil atteint sa plus grande hauteur pour une localité donnée.
(Juelquefois le voile est si épais que l'on ne dislingue plus rien à travers.
Les nuages ont pour effet de blanchir les régions au-dessus desquelles ils
planent. Si donc on voit dans une région donnée une teinte sombre, puis
une teinte claire : dans le premier cas, c'est la surface de la planète que l'on
a eue sous les yeux; dans le second, c'est une couche de nuages ou de
biouillards.
Entrons maintenant dans les détails de la géographie de Mars.
Continent Béer ^- Grand diaphragme, contenant Aoia, Arabia,
Corne d' Ainnwn.
(11 est nécessaire, pour suivre ces détails de l'aréographie, de placer devant
soi notre carte de la p. 69 et la carte précédente de M. Schiaparelli.)
C'est la plus vaste étendue claire continue qui existe sur le globe de Mars.
Pendant toute la durée des observations, de septembre 1877 à mars 1878, il
a été impossible d'y découvrir une seule tache. La Corne d'Ammon (57 de la
triangulation) correspond au cap Banks. Le rivage de la mer du Sablier et
du détroit d'Herschel II est net et sans dentelures frappantes; les mers sont
sombres, probablement profondes.
Détroit d'Herschel II — Golfe Sabœus. Phison. Baie dît Méridien.
Uiddehel et Gehon.
A l'opposé du continent Béer, la région qui s'étend au sud du détroit est
non pas lumineuse, mais gri.se. C'est ce qui fait que ce détroit ne doit pas
1S77 sciii Ai'\in:i.i.i KTL'Ki: (;r:Nf:iiAi.i:. m
ùtrc détaché comiiic sur les anciens dessins. In petit golfe, la baie dr
Sclunidt, reçoit un cours d"eau, le Phison, di-jà apeivu par Kaiser le 22 no-
vembre 18Gi (rojrplus haut, p. 17G). M. Schiaparelli l'a vu s'étendant jus-
([u'au Nil. On voit ensuite, à la baie du Méridien, deux Meuves ou canaux,
riliddekel et le Gehon, le premier parallèle au Phison, le second coudé.
L'IIiddekel a été découvert seulement le 28 février 1878, alors que la planète
était toute petite et qu'on ne distinguait plus les deux pointes do la baie : ce
n'est qu'au juger que Tobscrvateur a mis son embouchure à la première
pointe. Cours incertain. La péninsule de Deucalion paraît être une terre sub-
mergée; elle n'a pas du tout l'éclat et la netteté du continent.
Détroit Arago — Goll> des Pci-lfs. — Baie Burton = Bouch's 'Ir r Indus.
Continent Màdler --Chrijsc. Hydaspe.
Le détroit Arago est une mer assez sombre. Quand les images sont incer-
taines et que l'on ne s'est pas sûrement orienté, ou peut le prendre pour la
mer du Sablier, ce qui est arrivé plus d'une lois. L'Indus. large fleuve, s'y
jette, après être venu du Xil en formant un coude. Ce cours n'a ])u être suivi
jusqu'au Xil qu'à partir du 24 février 1878, car auparavant ce continent
était couvert de nuages: mais alors on l'a fort bien vu, quoique le diamètre
de Mars fût réduit à .5", 7. La péninsule de Pyrrha paraît une terre submer-
gée, comme celle de Deucalion.
Manche = Gange. — Baie Christie — Golfe de l'Aurore.
Il faut convenir que la nomenclature du célèbre astronome milanais est
tout à fait euphonique et charmante, sans compter ses qualités d'antique
érudition. Golfe des Perles, golfe de l'Aurore, lac du Phénix. Icarie, Champs
Elysées. terres de Deucalion et de Pyrrha : que pourrait-on imaginer de plus
gracieux. Pour notre part, nous souhaitons de tout notre cœur voir cette
ingénieuse aréographie remplacer toutes les précédentes. Mais peut-être un
grand nombre de ces légères configurations sont-elles essentiellement va-
riables, diminuant même parfois jusqu'à l'invisibilité complète.
Le golfe de l'Aurore est vaste et sombre; aussi a-t-il été représenté par la
[dupart des observateurs. Là, se jette le Gange, ' l'un des canaux les plus
larges et les mieux visibles de toute la planète. » L'auteur l'a vu en toute
circonstance, depuis le 28 août jusqu'au 25 février. 11 va jusqu'au Nil. C'est
la Manche de noire carte. En 1858 [coy. p. 138), le P. Secchi l'a admirable-
nienj; dessinée; il lui avait donné le nom d'isthme ou canal de Franklin.
A droite de cet isthme, on voit un canal plus étroit, vertical, c'est-à-dire
tracé dans la direction Nord-Sud. qui a reçu le nom de Chrysorrlioas, et qui
30-: I V l'I.AM'.Ti; M \|{S.
joint un cours deau non moins léger :'), tracé do 1 Ksi à rnuesl au-dessous
du L:ic circulaire ou nier Terhy.
Mer Terby Lar du Soleil.
Terres de Kepler et de Copernic -; Thaiimasia.
Nous arrivons à ce lac circulaire, que l'on a aussi C(tmparc à un d'il donl
il formerait l'iris. Il est bien rond, écrit M. Schiaparelli en 1877. peut-être
même un peu allongé dans le sens vertical. Le 30 septembre, le diamètre
apparent de la planète étant de 21", 79, celui du lac était de 2", soit 10". 5.
Très foncé, surtout au centre. La teinte diminue de la région centrale vers
les bords, mais non graduellement, par échelons. C'est l'une des plus cu-
rieuses configurations géographiques de toute la planète. Un petit canal le
rattache, vers la droite, au lac du Phénix. Un autre tracé, moins foncé, mais
plus large, monte au Sud. Il a été impossible de voir là autre chose.
(Celte région est le siège de variations considérables. Voir ce que nous
avons dit plus haut, p. 243. Nous y reviendrons plus loin. Les tracés de
M. Schiaparelli, intitulés : Xectaris fons, .luventœ fons, Aurea Cherso, Aga-
thodcTmon, Eosphoros, Chrysorrhoas, Lacus Phenicis, ne paraissent pas
stables.
Terre de Jacob — Terre de Noê el Argyrc.
C'est une île qui paraît claire dans sa partie droite, et sombre dans sa
partie gauche, comme si celle-ci restait constamment submergée sous une
légère couche d'eau. Poui'tant elle paraît quelquefois entièrement claire,
comme le montre le dessin du 20 octobre 1877 (p. 295\ Mais, en général, elle
offre Uaspect représenté sur notre carte. L'observateur pense que, dans la
région blanche, il y a souvent de la neige ou des nuages. Le dessin de
Dawes, du 21 janvier 1865 ivoy. p. 187 . représente cette île blanche, que
Ton a appelée aussi « île neigeuse de Dawes. »
Ile Phillips = Terre de Deucalion.
N'ous en avons déjà parlé tout à l'heure. Elle offre l'aspect d'une péninsule
submergée. <c La terra di Deucalione, c tutti le altre simili, écrit l'auteur,
siano continenti sottimarini, » selon toute apparence. Nous avons vu. dans
presque tous les dessins anciens, cette presqu'île aussi blanche que le con-
tinent auquel elle aboutit et le détroit d'Herschel, terminé par la baie du
Méridien, se détacher nettement en noir sur ce fond clair. Sur la carte de
Proclor p. 205', faite d'après les dessins de Dawes. la baie du Méridien
;',' Et non moins variable, prùbablement.
\><" SCIII AI' Al{i:i.l.l. -- KTUDI-: (if-NÈUALK. 303
communiqiK.' avec Ir détroit Araj^o, cl l'ail de la rcgioii dont il s'a^'it une ile
complète (île Phillips). Il en est de incme des dessins de Secchi, de 1858
(p. 139). M. Tcrhy paraît incliné à conclure que c'c'St là la vraie conligura-
lion, et que le rattachement de celte île au continent est une illusion pro-
duite par des nuages LlanT;hissant ce passage.
La terre doPyrrha est dans le même cas.
Ne pourrail-il se faire ({ue l'eau prit un état intermédiaire entre l'état
li(]uide et l'état nuageux et se condensât au-dessus de la surface sous forme
de nappes de hrumes visqueuses, foncées, très denses Vj
M. Schiaparelli pense que toutes ces terres entourées d'eau doivent donner
naissance à des vapeurs qui se condensent plus ou moins et dessinent leurs
formes en hlanc pour un observateur placé au loin, ces formes variant beau-
coup, selon les diversités de la condensation et avec le vent. Pourtant il n'en
a pas observe en 1877 dans tout l'hémisphère austral de Mars, excepté des
nuées sur la terre de Jacob.
Ile de Hall ~ Terre de Protêe.
C'est une île isolée dans locéan de la Rue, presque sur la même latitude
que la mer Terby. Nous l'avons vue sur les dessins et sur la carte de Green
p. 275 et 278). Elle est plus rapprochée de l'équateur que l'île neigeuse de
Dawes. Observations rares. M. Green l'a dessinée le 2 septembre à T'IO™ et
2'' 20'", très blanche; M. Schiaparelli l'a vue le 2 octobre et le 4 novembre;
il pense que le 26 septembre et le 4 octobre il a observé, non l'île elle-même,
mais son image météorique, une nuée blanche indiquant sa forme.
Mer Schiaparelli — Mer des Sirènes. Colonnes d'Hercule, Araxes,
Lac du Phénix.
On doit à l'habile astronome de Milan d'avoir apporté de nouvelles
clartés dans cette curieuse région martienne. Jusqu'à lui, la mer qui porte
aujourd'hui son nom était confondue avec la mer Maraldi. Ses observations
l'ont définie avec précision.
Cette mer se prolonge par deux bras étroits, l'un qui descend vers la
gauche jusqu'au lac de IJessel, l'autre qui monte vers le Sud jusqu'à la mer
Gottignez. Le premier de ces deux bras porte le nom d'Araxes sur la carte
(le M. Schiaparelli, et, au lieu d'être rectiligne, est sinueux (') ; le second
[)orlc le nom de Golounes d'Hercule; le lac est uommé lac du Phénix. La pé^
'; « Alla sua curvalura, dit-il, clie e mollo évidente, e custituisce un caso piutosto
laro nei canali onde è sparso il i)ianeta, ho posto particulare attenzione. » Il y a eu là
aussi quelque changemenl. Voir i)Ius loin les observations ultérieures.
301 I A IMAM-TI- MAHS.
ninsule de Lagrangc s'appelle Icarie. (-elle région est dessinée sur le croquis
de Kaiser du 10 décembre 1864 (p. 177); mais le Phase est invisible. On la
voit aussi sur un dessin de Lockyer du 18 octobre 1862 (p. 16:2).
Le canal des Sirènes a été vu à dater du 18 septembre, mais la partie inlc-
rieure. plus large, était pâle et sans limites précises. L'auteur attribue cet
aspect à des troubles dans l'atmosphère de Mars, qui paraît avoir été couverte
de brumes assez longtemps. Le 6 janvier 1878, le diamètre de cette région de
la planète étant réduit à 8", 2, ledit canal était beaucoup plus net que
jamais, et cette netteté durait encore le 21 mars. L'auteur pense que le Soleil
en arrivant à l'équateur (le 22 février) a dissipé les brumes. C'est possible.
Mais, il est également possible que les canaux changent avec les saisons.
Déjà nous avons vu que plusieurs autres canaux n'ont été bien évidents
qu'en février.
L'élargissement de ce canal, comme celui de rEosphoros, du canal des
Géants, et celui des Titans, etc., est attribué par l'auteur à une division à
l'embouchure, à des deltas, comme on le voit pour le Rhône, le llhin, etc.
Dans ce cas, l'eau s'écoulerait là du Sud vers le Xord, de la mer des Sirènes
vers le fleuve Océan : il y aurait une pente du Sud au Xord.
Mer Maraldi -^ Mer Cimmêrienne. Baie Huggins. Fleuve des Cyclopes.
Nos lecteurs connaissent cette mer depuis longtemps. La particularité la
plus curieuse de cette région est l'existence du canal qui porte sur notre
carte le nom de baie Huggins et sur celle de M. Schiaparelli celui de fleuve
des Cyclopes. Ce nous paraît être aussi là l'une des configurations variables
de la planète. Aux mois de septembre, octobre et novembre, on ne distin-
guait qu'une ombre grise indistincte : l'auteur attribue cet aspect à l'atmo-
sphère de Mars, alors, dit-il, assez nuageuse sur les terres équatoriales.
Mais les 25, 28 et 30 décembre, le canal était vu très nettement, quoique, le
disque fût réduit à 9". Cette vision nette dura jusqu'à la fin des observa-
tions. Ce canal descendait verticalement de la mer Maraldi, le long du 223*=
degré. Pour nous, il est plus oblique, et se rapproche du dessin de Dawes,
du 1" décembre 1864 (p. 187), ou peut-être son cours est-il soumis à cer-
tains changements.
Mer Hooke. Mer Flammarion — Mer Tyrrhênienne. Petite Syrtc.
Ces mers succèdent à la précédente et nous conduisent à la mer du Sablier.
La mer Hooke est plus foncée au nord qu'au sud. Entre la mer Hooke et la
mer Flammarion, s'avance dans les terres un golfe aigu qui a reçu le nom
de baie Gruithuisen cl (|ue M. Schiaparelli appelle Petite Syrie. Il y fait
1877
sc.iii \1'A1m:i.i.i ktude gknkiiau:.
;'o:
aboutir .leiix llcuves. le Léllic cl le Triton. Cours singuliers et douteux. Très
difficiles à distinguer. Non loin de là. on voit aussi le ileuve des Ethiopiens.
Mer du Sablier - Grande Syrie. Ml. Lilnjc. .\vpcnllics.
Lac Trilon. bic .Mœrls.
C'est la région la plus anciennement connue de la planclc, et .son premier
Ki-. 170.
■^-^'
v^-â:m-l '^
^ / .-
■•>< '
- -4 ,.-
'^i'^^i.
L'Jiomisphcrc austral .!.■ Mars, eu 1877. Dessin île M. SchiaparclU.
dessin date, comme nous l'avons vu, de l'année 1659 (p. IC). M.Srhiaparclli
a donné à la mer du Sablier le nom de Grande Syrte, qui nous paraît moins
h^ureu.x que ses autres dénominations. îl donne le nom de Xil à sa
l"i,\MMAr.iuN. — -l/ar.s. "-^^
306 1. A IM.ANKTI- M A H S.
réjrion inl'erieuiv (|ui tourne vers la tlroilt^ on un long canal, el iiui, sur
notre carte, s'appelle Pas^se de Nasmylh.
A gauche de la mer du Sablier, vers la petite mer Main, loltservaleur a
dessiné un canal, le Népenlliès, qui aboutit à un lac, le lac Triton, el porte
en son milieu, comme un chaton de bague, un autre lac, le minuscule lac
Mœris. Un autre fleuve, « très facile à distinguer «, le Triton, va du lac de ce
nom à la Petite Syrte en décrivant une courbe gracieuse. La région conti-
nentale entourée par ces eaux a reçu le nom de Libye. Cette région nous
paraît soumise à des variations fréquentes et considérables, et sans doute
à des inondations, surtout au nord, sur les plages de la mer. Voyez les bords
estompés de ces plages sur les dessins de Dawes, 26 novembre 1864 (p. 187),
Kaiser, 28 décembre 1864 (p. 178), id., 22 novembre (p. 1761, Lockycr, 3 oc-
tobre 1862 (p. 157 et 158).
La mer du Sablier est beaucoup plus étroite sur la carie de M. Schiaparelii
que sur les dessins de Miidler, Secchi, Lockyer, Kaiser, Franzenau, etc.
Nous pouvons en conclure que ses rivages sont également variables.
Au-dessous du Népenthès, dans la « région d'Isis )>, qni est par elle-même
très blanche, l'auteur a observé, le 14 septembre, un point aussi brillant
que la neige polaire. Il lui parut former un carré de \",o de côté (environ 8"
ou 480 kilomètres). Si c'était de la neige, on en devrait conclurai l'existence
d'un groupe de hautes montagnes sur les rives occidentales du lac Triton.
Terre de Cassini. Ile Dreyer = Ausonie. Japygie.
L'astronome de Milan conclut de ses observations que sur Mars les nuées
ont une tendance marquée à se former sur les terres entourées d'eaux. C'est
à ce fait que Ton doit sans doute l'aspect si fréquent du détroit d'Herschel et
de la baie du Méridien se détachant isolément comme un ruban sombre, la
péninsule de Deucalion étant souvent blanchie par ces nuées. LAusonie
devient sombre à la Japygie. Dans l'état normal, quand l'atmosphère de
Mars est pure, ces régions se présentent comme sur le dessin du 14 oc-
tobre 1877 (p. 295).
Terro de Lockyer = Hellade. Fleuve Alphée.
Région singulière aussi. Ile ronde, légèrement allongée du sud-est au
nord-ouest, dont le diamètre ne mesure pas moins de 30» ou de 1800 kilo-
mètres. Coloration jaune comme les continents, mais parfois blanche comme
la neige. Cette île s'est montrée, en 1877, partagée du sud au nord par un
canal auquel l'auteur a donné le nom de fleuve Alphée.
IS77
sciiiAi'AiJKij.i. — rrirni. (jknkij mj-:.
:{(IT
Mer polaire australe.
Si l'on l'ail ubslraftion des deux îles do Tiiulf. la f:aIotte polaire dr Nfars
limitée au GO" parallèle de latitude australe est eulièremcnt maritime. Ji'O]»-
position de 1877 a été extrêmement favorable pour l'exanicn de cette région :
l'axe était incliné, en octobre, do 65" seulement sur notro rayon visuel, de
sorte que toute la nei^^e polaire est restée conslainuient en vue, entourée par
la mer sombre. L'atmosphère a paru sans nuages.
Tel est le résumé des observations géographiques. Muehjues mots encore,
sur les neiges polaires.
La position du centre de la neige polaire australe a été trouvée à :
Longitude : 29°,47; Distance au pOle : (1°, l.'i.
M. Asaph Hall a trouvé, en même temps (p. 283) 20" GO et ô'1 1. La moyenne
des deux déterminations donne 25'',06 et 5',63. La moyenne des mesures
laites par Kaiser, Lockyer et Linsser en 18G2 avait donné lô'\51 et 4°, 26:
en 1830, liessel avait trouvé 21% 55 et G», 59. M. Schiaparelli conclut que, dans
les divers solstices méridionaux de Mars, la tache polaire australe, lors-
qu'elle est réduite à son minimum, occupe toujours à peu près la même po-
sition sur la planète. Sans doute y a-t-il là quelque bas-fond.
La carte de l'hémisphère austral de Mars, construite par M. Schiaparelli
[flg. 176) montre bien cette position de la calotte de neige triangulaire res-
tant près du pôle.
Ces neiges polaires ont varié de grandeur avec les saisons. Voici les
observations :
nate.
Jours
avant ou après
le solstice.
Uiaiuotre
(le la
lu'ige i)olairc'.
nate.
Jours
avant ou après
le solstice.
Diamètre
•le !a
neigre polaire.
23 août.
- 34
28", 6
22 septembre.
— 4
14% 7
28 »
— 29
23, 9
24 »
0
13, 8
3 septembre.
— 23
20, 0
25 »
- 1
11, 5
10 <;
- IG
23, 9
26 »
0
II, 5
10 »
- IG
18, 5
30 »
-- .',
12, 5
11
— 15
20, 2
1 octobro.
- 5
13, 7
12
- 14
17, 4
0 „
-- 6
11, 8
13
- 13
16, 9
4
- 8
12, 7
14 »
— 12
17, 4
10
-+- 14
10, 4
15 »
— 11
14, 1
12
-: 16
9, 5
15 »
- 11
Kl, 1
i;i
17
9, 3
16 »
- 10
16, 1
14 »
^ 18
7, 0
18
- 8
19, 1
27 X
+ 31
7, 0
20
— (i
is, r.
'i novembri'.
39
7. 0
oUS 1. A rLANKTI'; M A 11 s.
A travers les lliictiialioiis iiiévilables dans des mesures aussi dil'liciles, on
constate la diminution rapide de ces nci.ues polaires, de 28° à 7". En les
voyant se réduire à ce point, l'observateur s'attendait à les voir disparaître
tout à fait. Il n'en fut rien.
Les observations n'ont pu èlrc continuées (jue dillicilement après la der-
nière date, à cause de la grande obliquité de la vue, de l'invasion graduelle
delombrcet delaformation des nuages en ces régions. Au commencement de
décembre, les neiges parurent croître de nouveau. Le solstice d'été était arrivé
le 26 septembre. Le minimum des neiges l'a donc suivi d'environ deux mois.
En ce minimum, la neige présente une forme triangulaire.
M. Schiaparelli termine son admirable travail par des considérations sur
la météorologie et la géologie martiennes. Nous reprendrons ces questions
plus loin. X'avions-nous pas raison de dire, au début de cet exposé, que le
progrès accompli par l'illustre astronome de Milan dépasse d'un bond tous
les précédents? Nous retrouverons la suite de ces recherches dans toutes les
oppositions qui vont suivre.
XC. Même année, 1877. — Mauxder. Analyse spectrale de )lars (').
Pendant (|ue les belles observations physiques qui précèdent étaient faites
par d'habiles observateurs, d'autres investigateurs continuaient les recherches
d'analyse spectrale déjà commencées dès 1862 et 1864 par Huggins, Miller,
Rutherfurd, Vogel [voy. p. 182), continuées en 1867 par les mêmes, plus
Secchi [voy. p. 200), et en 1872 par Yogel (p. 212). .V l'Observatoire de Grcen-
wich, M. Maunder a trouvé pour le spectre de Mars les longueurs d'ondes
suivantes, exprimées en décimètres.
RAIES DAlisURPTIO.N DANS LE SPECTRE DE MARS.
23 août. 21 sept. 26 sept.
_ , , . j T. , \ premier bord ôG40 5639
Bande ô du spectre de Brewstcr. , , , ro,., r-n-
( second bord oGfjl 571/
, ,. .^ \ premier bord 5889 5887
Groupe de lifc'nes vers D
' / second bord o90/ jh'.t/
Faible bande. Milieu UUIU 0022
Bande a. Milieu C287 6287 0208
Très faible bande. Milieu 6511
, ,. ,, i premier bord 63 ii 0537 0544
Groupe de lignes vers L. • , _, ^^ —
^ " / second bord Oo/2 6ob7 Oo/o
Très faible bande. Milieu 0695
Très faible bande (Bïj. Milieu 6852 .... 6895
Si nous comparons ces lignes d'absorption avec celles trouvées en 1867
p. 213 , nous constatons une correspondance remarquable.
', Montltlij Polices, '. XXXVIII, riûveinbre 1877. p. 3'i-.38.
1877 MAUNDI-U. - ANALYSE SPliCTIt A LK. 300
De ces bandes, les trois plus marquées, la baiule a et les groupes près D
cl C du spectre solaire, ont été observées en mémo temps sur la Lune, qui
était à la même liautcur au-dessus de l'iiorizon; mais elles étaient plus
élroites sur la Lune que sur Mars.
On a essayé do reconnaître une dilTérence entre le spectre des taches
sombres et celui des taches, claires. Les taches sombres donnent un spectre
beaucoup plus faible que le reste du disque, le contraste étant très marqué
dans le rouge et le jaune et moins dans le violet. On n'a remarqué aucune
ligne ou bande particulière. Toutes ces bandes d'absorption ont paru plus
faibles vers les bords que dans l'intérieur du disque.
Les taches claires ont paru orangées, variant insensiblement depuis le jaune
blanc jusqu'au rouge, suivant les jours,
(On a fait, pendant cette précieuse opposition do 1877, un certain nombre
d'observations de positions de Mars relativement aux étoiles voisines, pour
la détermination de la parallaxe solaire. Nous n'avons pas à en parler ici.j
Remarquons enfin que la première photographie de Mars a été essayée
cette année-là. M.Gould, directeur de l'Observatoire de Cordoba, expose, dans
un discours relatif à l'Exposition de Philadelphie ('), qu'il a réussi à obtenir
la photographie de 84 objets célestes, parmi lesquels Mars, .lupitcr et Saturne.
Les principaux tons clairs ou foncés sont reconnaissables ; mais ces photo-
graphies ne peuvent pas encore supporter d'agrandissement.
Opposition de 1879.
La période de 1879 a été à peine inférieure à la précédente par l'impor-
tance des observations. La planète n'approchait pas autant de la Terre, il est
vrai, mais elle était plus élevée au-dessus de l'horizon, et il y avait presque
compensation pour la netteté des images. De plus, les découvertes récentes
étaient un puissant encouragement pour tous les observateurs.
SITL-ATION DE LA PLA.NKTi:.
Opposition : 11 novembre. Diamètre : 19", 3.
Pôle incliné ccrs la Terre : austral, mais moins qu'en 1877.
Phase
Latitude Diamètre ( zone Angle
Dates. ilii centre. apparent. manquant). Soleil-Terre.
12 août — 1J»,2 11", 'i r,7 4G"
12 septembre — 10 ,'> li ,2 1 ,7 -il
12 octobre — 9,8 17,8 0,9 2fi
12 novemb. (op7i.\ — l'i ,5 19 ,3 0 ,0 0
12 décembr..' — 18 ,2 lô ,3 0 ,G 23
12 janvier —17,2 11 ,0 1 ,o 35
12 février — 12 ,7 8 ,1 0 ,'.i 38
i^) Address of prof. GoiiM {Tlu.' Obsi-rvatorii, mai 1878. p. 19.
;^I0 I.A IM \M:T1'. MAHS.
Hoinisplirro au-tr.il imi >ii|H-ri<>nr. lliini-pluTi' boréal ou infériiMir.
li aortl 1879 Solstice d'été. Solstice d'hiver.
21 janvior I8S0 Kquinoxe d'automne. Éqiiinoxe de printemps.
XC.l. 1S70. — X.-K. CiHEivN. Obnervalions '/].
L autour oxpose d'abord (]ue le liut de ses obsorvalions a été surtout d'iden-
tifier les aspects observés en 1877 et de voir si rfuelrfuescbanpfements seraient
arrivés dans l'intervalle.
L'atmosphère de IWngleterre n'a pas été favorable et les meilleures vues
ont été prises lorsque Saturne était presque entièrement effacé par le brouil-
lard, l'éclat de Mars étant, par conséquent, très tempéré.
On a pu identifier toutes les configurations de la carte (p. 275), à l'excep-
lion seulement de quelques détails. MM. Niesten à Bruxelles, Burton près
Dublin et Denning à Southampton ont pris des dessins portant les mêmes
vth-ifications.
Certaines variations d'aspects ont été observées. L'une des principales est
une bande blanche à la latitude australe de 20° s'étendant de 260° à 360° de
longitude, unissant en une longue ligne blanche les îles Dreyer, Hirst et
Phillips. A l'est de l'île Phillips, cette bande claire tourne vers l'équateur et
passant entre la baie du Méridien et la baie Burton va rejoindre le continent
Béer. Or, c'est précisément l'aspect vu et dessiné par Béer et Mâdler en 1830,
Lockyer en 1862 et Kaiser en 1864, tandis qu'à Madère, en 1877, cette partie
du globe de Mars était marquée d'une demi-teinte sur laquelle les îles
n'étaient vues qu'indistinctement; l'espace compris entre la baie du Méridien
et la baie Bnrton était toujours resté assez foncé pour continuer la bande
équatoriale.
Au nord de la mer Terby, la tache sombre nommée mer Dawes sur la carte
de Pioctor a été dessinée par Dawes, Lockyer et Kaiser ; mais elle était cer-
tainement invisible en 1877. M. Green avait fait l'impossible pour la retrouver.
Elle avait donc disparu, ou à peu près. Or, elle est revenue en 1879 telle
qu'elle avait été vue précédemment.
Quant aux canaux de M. Schiaparelli, Tauteur croit en avoir aperçu
quelques-uns, mais « il ne pense pas que ce soient là des marques géogra-
phiques permanentes, car si toutes les lignes sombres vues par les observa-
teurs étaient réunies sur une même carte, la plus grande confusion s'en-
suivrait.
>, Il est possible que plusieurs de ces lignes soient les limites de taches
^') O/i some changes in the markings of Mars {Monthly Notices, mars 1880,
p. 331). Voy. aussi The Aslronomical Register, déc. 1879, p. 295.
IS79 N.-K. GUE EN. — OBSEH V A TIONS. 311
très faibles el pour ainsi dire invisibles, ou bien des espaces entre des voiles
atmospliériqiies. Dans les deux cas, leurs positions varieraient.
» Ces observations nous conduisent à regarderies grandes taches sombres
comme les configurations les |)lus permanentes, niais sujettes h dr s oblité-
rations partielles ou môme à de longues disiiaritions, par l'interposition de
quelque voile atmospbérique plus clair. »
A la séance de la Société astronomique de Londres du 12 mars 1880, on
remarque ( ') une intéressante discussion sur la difûcultéde dessiner sûrement
certains détails douteux des aspects de Mars, entre les observateurs Green,
Brelt, Knobel et Clirislie. La conclusion est qu'il est souvent impossible
d'être sûr, et que l'atmosphère de Mars aussi bien que la nôtre produisent
des variations plus ou moins grandes dans ces aspects. Quant à des change-
ments réels, M. Oreen n'y croit pas : « The changes that I speak of I do nol
suppose for a moment lo be actual changes in the planet, but changes in
llie appearance of the planet, and doubtless in a great measure due to its
atmosphère. »
Telle n'est pas notre opinion. Pour nous, il s'opère actuellement sur Mars
des changements réels, assez considérables pour être visibles d'ici.
Il a été question à cette même séance de neuf dessins faits par M. Brewin
pendant l'opposition de 1879.
XCII. 1879 — D' Terbv. Observations et dessins (^).
Ces observations ont été faites, comme les précédentes du môme auteur,
à l'aide d'une excellente lunette de 108""™, de Secretan, et aussi à l'aide de
l'équatorial de six pouces de l'Observatoire de Bruxelles. Elles s'étendent
du 28 septembre au 18 décembre, et contiennent 23 dessins. Voici les prin-
cipales :
Le 27 octobre, de 9^\i)"' à 10'' (flg. 177, A). — Il est évident que ce dessin est in-
complet, mais il y a impossibilité totale de découvrir d'autres détails. Je vois en Z
l'Œnotria de ^L Schiaparelli. Le détroit d'IIerschel justifie parfaitement ici l'épi-
tliète de SchlangenfOnnig qui lui a été donnée autrefois. Cette observation est
très bonne et très exacte.
Le 25 novembre, de 8i»45™ à, 9'' 1.')'" {flg. 177, B). — Très bonno image. La grande
tache est très faible (océan de la Rue). La tache a est la plus noire, plus noire
que le ir» octobre (mer Tyclio); vient ensuite la Mer circulaire, moins fonce'e,
mais le 15 et IG octobre, elle était, au contraire, très foncée. A '.»''!/", blancheur
('^ The Obseriulory, avril 1880, p. 309.
['■, Aaperl (hr la planète Mars pendant l'opposition de 1870 {Bulletins de l'Acadé-
iiùe de lielijiqup, mars 1880).
312 1. A i'lam:ti; m a us.
polaire boréale; la tache n semble disparue. La pusition du taches .1. b et q a él(''
relcvde avec beaucoup de soin et se rapporte à Iheuro ino\ oune de l'observalioii
11 est très iutéressant de noter que, le '^ri novembre, la nier Tycho était beau-
coup plus noire que le 16 octobre. Cet elTot ne peut être attribué à un relèvement
de cette tache sur le disque, puisque, bien au contraire, le pôle sud s'abaissait,
encore vers la Terre au îô novembre.
Le 29 novembre, do G*» à Gi'30'» (fig. 177, C). — Très bonne image. On voit en l
l'Œnotria (Schiap.), en / la mer Lambert très faible. Le Sinus Saba-us Z/. est
bordé de blanc jusqu'à la ligne pointillée. 11 en était de même à 8'' 'lO"". Une
ombre très légère apparaît en ;. Les deux taches polaires sont tout à fait cer-
taines cette fois : la supérieure est extrêmement petite, comme eu 1877, mais
moins brillante. L'inclinaison progressive du pôle sud vers la Terre rend donc
enfin visi'ole la petite tache polaire méridionale; elle est réduite à ses moindres
dimensions, et même a perdu son éclat par suite de l'été méridional qu'elle tra-
verse (' K 11 est diftîcile d'indiquer la limite de la grande tache sombre du côté
du Sud. L'image, d'abord excellente, devient très ondulante à rapproche d'un
nuage qui s'élève de l'horizon est h la fin de l'observation.
Le 6 décembre, de 5''41"' à C'I'» (fig. 177, B), et à 6»»11'". — L'image étant fort
agitée, j'ai employé un diaphragme qui réduit l'ouverture de l'objectif à 0'", 077, et,
comme je l'ai souvent constaté, l'observation a immédiatement pu continuer dans
de meilleures conditions. Les terres de Burckhardt j3 et de Cassini -, l'Iapygia <l,
la mer Zôllner t sont devenues beaucoup plus certaines. 0 = terre de Lockyer.
Le continent .Eria p, très brillant, très blanc. L'attention soutenue avec laquelle
on a examiné ces détails a introduit quelque doute dans la position précise des
taches sur le disque. Néanmoins on peut dire que la position de la mer ZOllner
/ se rapporte plutôt à l'heure moyenne de l'observation (5'' 51'"), celle de la mer
du Sablier au commencement et celle de la terre de Burckhardt à la fin. Cette
dernière terre est donc un peu trop rapprochée du bord occidental eu égard à
l'heure moyenne et la configuration générale en a subi une légère déformation.
Dans ces observations de M. Terby, la tache polaire boréale ou inférieure
s'est montrée quelquefois double. On a pu voir trois fois la tache polaire su-
périeure, beaucoup plus petite.
Remarquons surtout dans ces dessins la bordure blanche du détroit
d'Herschel, de la mer du Sablier à la baie du Méridien (nuages ou neiges?)
et la mer noire a du 25 novembre, correspondant à la mer Tycho.
L'habile astronome de Louvain a présenté la même année (6 décembre 1879)
à l'Académie de Belgique un mémoire (*) ayant pour but d'établir que les
{') 14 août 1870, solstice d'été pour l'hémisphère sud; 21 janvier 1880, équinoxe d'au-
tomne.
{") Mémoire à Vappui des remarquables observations de M. Schiaparelli sur la
planète Mars. Bruxelles, 18S0.
HTll
I i;i{in
(>usi:i!\ A riiiNs !■; r iti;ssi.\s.
3i;
«■.iiKitix découverts par M. Schiapan'lli <'!i 1H77, l't mis en doulf pai un coi-
taiii noiiilnc d'aslroiiuines, pciivenl Olrc relrouvOs surdes dessins antérieurs.
Fi--. 177.
A. — 27 u.tolir.'
i:. — 2'.> iMivfinbrc. I). — G (lèconiliri.'.
Des8iiif5 <le Mars, par M. Teiljy, les 27 octobre, 2b et 29 novembre et G décembre 187'.'.
notamment sur ceux faits [lar M. Holden en 1870, au grand équatorial de
•JG pouces de l'Observa luire de Washington.
M. Holden a fait cette année-là six dessins, dont nous avons reproduit
plus haut (p. 237) les deux meilleurs. Nous ne partageons pas roptimismc
deM.Tcrhy sur la correspondance de ces vues avec la carte de M. Schiaparelli.
M. Terlty croit également retrouver la conlirmalion des canaux dans les
dessins de Knott et Schmidt en 1862, Secchi en 18G4, Ciledhill. Lehardclay,
Vogel et Lohsc en 1871. Knoljel, Lohse et Trouvelot en 1873. Cruls et
3H I A l'I.ANKTI M VUS.
NiesltMi on 1877. ('.fltt' cnn'i'siiond.-iiicc m- iimis |);\i';iîl pas, non plus, abso-
lnin<'nt snro... loin de là !
XCIU. 187'.). - XncsTKN. Observations cl dessins (H.
Les observations de M. Niosten. pendant celte opposition, s'étendent du 3 oc-
tobre au 26 janvier et ne comprennent pas moins de quarante dessins, faits
à l'équatorial de 6 pouces anglais (0"',15) de la tourelle orientale de l'Obser-
vatoire de Bru.xellos. Grossissement variant de 00 à ir)0. L'observateur a été
aidé par M. Stuyvaert : deux croquis successifs étaient pris, et aucun détail
n'a été fixé sur le dessin final sans avoir été contrôlé par les deux observa-
teurs.
Avant de faire leurs observations, les deux astronomes prenaient con-
naissance de la position du globe de Mars et de ce qu'ils avaient à y trouver
d'après les cartes de Grcen et Scbiaparelli. Ils ont reconnu plusieurs canaux ;
d'autres n'ont pas présenté une délinéation nette, mais semblaient plutôt
produits par la démarcation de teintes différentes recouvrant des régions
adjacentes. En relevant les contours de certaines configurations, légèrement
teintées de gris, ou de gris orangé, on pourrait les identifier avec certains
canaux.
M. Niesten propose d'employer les dénominations de la carte de Green
pour les mers et les continents, qui sont stables et certains, et celles de
Scbiaparelli pour les fleuves et les canaux, qui paraissent variables et incer-
tains. C'est là une proposition qui nous semble de tous points acceptable
et recommandable.
Signalons d'abord, parmi les dessins, les quatre que nous reproduisons
ici en héliogravure et dont le méridien central correspond aux longitudes
67°, 150°, 250° et 330° : ils embrassent donc l'ensemble de la planète.
Dans le premier, du 29 octobre à minuit (/(^. 178, A), on remarque au centre
la baie Ghristie avec l'île de Hall. L'île Phillips ne rejoint pas le continent.
Au-dessous de la mer Terby. on remarque un autre lac. Ce lac est visible sur
les dessins des 15 et 29 octobre, 25, 26 et 27 novembre et 19 décembre; l'île
de Hall sur ceux des 15 et 29 octobre, 26 et 27 novembre.
La partie ombrée au nord marquerait les confluents du Nil, de Jamuna et
du Gange.
Dans le second dessin (fig. 178, B), du 19 décembre, à 0^ du soir, la mer
Scbiaparelli se développe dans toute son étendue. Sa réunion avec la mer
Maraldi produit l'aspect bien connu de deux ailes ouvertes pour le vol.
;'; O hue rv a lions sur ia^pecl physique de la planéle Mars pendant l'opposition
de 1879-80 (Annales de iOhservaloire de Bruxelles, t. VII. 1890).
1879
MI'STKN. — OBSERVATIONS KT HKSSINS.
315
I>;iiis lo Iroisièmt' dessin (/îr/. 178, C), du 0 iiov.'inbn; à miimil iJfr. la terni
de Hurdvhardt, (]iii sépare la mer Maraldi de la mer Ilooke, est au centre.
Isthme de Niesten. Terres de Wehb et do Cassini. Ile Dreyer. Ombre grise
contournant la calotte polaire boréale : UEnostos et Astajius.
Dans le quatrième dessin (/îpf. 178, D), du 27 octobre à 10'' 15"', on reconnaît
Fig. 178.
^'
A. — CI octobre.
11. — lit décembre.
C. — 0 novembre. D. — 27 octobre.
Vnc-s iJc !\[ars, par M. Niesten. los 29 octobre, 10 décembre, 9 novembre et 27 octobre IS79.
la mer du Sablier, le détroit «l'Herschel, très sinueux, bordé de blanc, nuages
ou neiges? La même bordure blanche est visible sur les dessins de M. Terby
du 29 novembre. Les terres australes ressortent sur le fond gris. En bas.
l'ombre grise suit la trace du Nil.
Ces quatre vues donnent une idée de l'ensemble. « Les taches les plus
l'oncées (bleuâtres) ont été le détroit d'Herschel, la baie de Schniidl, la baie
du Méridien, l'océan de la Rue, la baie Ghristie, la mer Terby, la mer Ma-
raldi, la mer Flammarion, la mer du Sablier. Une légère teinte grise s'éten-
dait sur les terres inondées de Jacob Land. Au nord des taches grises qui
3IG I.A Pl.ANtTi: M A II S.
forment Hcrscliol Stiail, Maraldi Son cl Flammarion Soa,on ioniai-(juait une
zone blanche. Continent Secclii, jaune-orange; continent llcrschel, jaune;
terre de Lockyer. jaune; continent Béer, jaune-orange; continent Miidler, id.,
terre de lliowning, jaune-orange; terres de Fontana et de Rosse, blanches.
Un a reconnu les traces correspondantes aux canaux (^-hrysorrlioas, IMiasis,
Agathodœmon. Gangcs, Indus. Araxes, La^slrigon, Astapus, Alphée, Nil et
plusieurs autres, souvent plutôt comme délimitations de grandes taches de
teintes dilTérentes que comme lignes détachées. »
XCIV. 1879. — C.-E. lUivrox. Observations et dessins ('1.
Les observations de M. lUirlon continuent celles que nous avons analy-
sées en 1871 et 1873 (p. 209). Elles embrassent une période de trois mois,
du 5 octobre 1879 au 5 janvier 1880, et ont été faites à l'aide d'un réfracteur
équatorial de G pouces, de Grubb, d'un réflecteur newtonien de 8 pouces,
de John Brett, et d'un autre télescope de 12 pouces; grossissements : 220 à
514 fois. Le mémoire de M. Burtou est accompagne de 2i dessins cL d'une
carte. L'observateur emploie la nomenclature de la carte de Green.
Aucune comparaison avec les résultats des autres observateurs n'a été
faite avant que les dessins ne fussent entièrement terminés. C'est là, à notre
avis, la meilleure méthode. Elle évite les illusions provenant d'idées pré-
conçues.
Les conditions atmosphériques ont été habituellement bonnes, et la plus
grande altitude delà planète en 1870, relativement à l'année 1877, paraît
avoir compensé l'accroissement de la dis lance et la diminution du dia-
mètre.
L'auteur pense que l'on peut attribuer presque toutes les différences
d'aspects à la projection variable de la planète et à l'obscurcissement tempo-
raire et partiel dû aux brumes, bouillards ou neiges, dépendant des saisons.
M. Burton a été aidé dans ces observations par M. J.-L.-E. Dreyer, qui a
fait un certain nombre de dessins.
Il ne nous semble pas nécessaire de donner ici les dessins de M.M. Burton
et Dreyer, car leur ensemble se trouve réuni sur la carte suivante {fig. 170/,
construite par ces deux observateurs. On remarquera certains aspects d'au-
tant plus surprenants qu'ils ont été mieux observés. Ainsi, par exemple, la
mer du Sablier offre une forme à laquelle nous ne sommes pas accoutumés ;
de plus, elle se détache comme une jambe, entièrement séparée du détroit
d'Herschel. On ne reconnaît pas la mer Schiaparelli- L'entourage de la mer
['■ j Physical observations of Mars, 1879-80 {Scienlific Transactions of the royat
Dublin Society, 1880). Voy. aussi The Astronomical Register, mai 1890, p. IIG.
1879
r. -K. minoN
{)i{si:u\ ATiuNS i:i dessins.
:h:
'rerhy n'est pas assez circiilain-. C'est encore là presque une cailo nouvelle,
quoique le i'ond suit MfU niarlicii.
Un V remarque plusieurs canaux : I' à la j.aie.ilu Méridien, rappelant
riliddekel.leSchiaparclli: •2" à la baie Ikirton, rappelant Tlndus ou l'Hy-
daspe: 3" à la baie Chrislie : la Manche ; 4" au-dessous de la mer Terby, sans
doute' r.Vraxo, coupé par la longue train.-c descendant obli(iuement sur notre
318 I. A l'LANKTI-: M A US.
carte [[). 69' et ijui correspond an l'yriphiégeloii. On croil reconnaître ensnile
le Gigas ^niais incomparablement plus large), puis 1(> Titan et le Tartare, mais
bien différents, par leur position même, de ceux delà carte de Milan ; à lex-
trémité de la mer Maraldi, la baie lluggins, très contournée, Aiendrait re-
joindre la mer Oudenians : l'auteur lidentilie avec le canal des Cyclopes;
ce n'est pas être exigeant. Enfin, vers la baie Gruithuisen, un autre canal .
pourrait correspondre au Léthe. — (les comparaisons conduisent àpenser que
l'on voit bien mal, que l'on ne dessine pas les choses où elles sont, ou que
tout cela change singulièrement, comme s'il s'agissait de formations atmo-
sphériques, de condensations glissant à la surface du sol! Pourtant Tauteur
assure avoir ncltemcnl et sûrement vu et dessiné la baie Huggins (méri-
dien 2 lO^. Comparez avec la carte (p. 293).
M. Burton pense que ces canaux sont identiques en nature avec les mers :
tt I bave little doubt that thèse canals are identical in nature with the seas,
though the connexion between them is occasionally singularly complex
and difficult to define accurately. »
La neige polaire boréale s'est montrée dans toutes les observations beau-
coup plus brillante et jjIus vaste que l'australe, quoique le pôle nord ait été
au delà du bord, sur l'hémisphère invisible, et le pôle sud au contraire, en
deçà, sur l'hémisphère visible. L'auteur estime qu'à la date du 10 décembre,
les neiges boréales s'étendaient sur un cercle ayant 90° de diamètre. Le cap
polaire austral se montrait évidemment excentrique au pôle. Les nuages,
nuées ou brouillards qui voilent de temps eu temps certaines régions ne
sont pas blancs comme les neiges, mais de la couleur des continents, c'est-
à-dire jaunâtres, et ne ressortent pas en blanc. Le ô janvier, la neige polaire
australe n'était plus blanche ou brillante, mais jaunâtre, mal définie.
Peut-être était-elle en partie fondue, remplacée ou couverte par du brouil-
lard, celte région étant depuis plusieurs mois exposée aux rayons du Soleil.
XCV. 1879. — Observations diverses. D' 0. Lohse, Xicolaus von Konkoly,
E. Hartwig, etc.
M. Lohse, dont nous connaissons déjà les observations antérieures, a fait
une nouvelle série d'études ('), du 17 septembre au 2 décembre. Ces études
se résument en six dessins et une carte. Nous reproduisons ici cette carte
^fig. 180), qui ne ressemble pour ainsi dire à aucune des précédentes.
Entre autres divergences, le fameux lac circulaire que nous voyons depuis
longtemps passer sous nos yeux, n'est pas rond, ni ovale, mais carré (Cette
^\ Bcobachtungen und iintersuckungen iXber die pliynisclte Be^chaffenheit der
planelen Jupiter und Mars {Publ. des aslr. Observ. zu Polsdurn, t. IX, 1882j.
IS7',)
n. i.oiisi;, N. VON KoNKoi.^. i:. iiaimuk;.
319
loriiie sorail-clle <liie à une vision confuse des canaux (jui y aboutissemy) la
mer duSal)licr est à ijcii près arrèlôc au milieu do son élendue: on norecon-
JSiZ
SfC
I. w:
KARTE DES PLANETEN MARS.
NACH ZEICHNUNGEN AUS DE.N JAHREN 1877 1
ENTWORFEN VON.'O'Il'OHSE
zm:.
3e:
-W
I-'ig. 180.— Carto de Mais, i.ar ."M. I.nhso, en I87'.l.
naît pas la mer Maraldi, qui est traversée par un sillon hlanc Le détroit
d'IIerschel et la baie double du Méridien représentent à peu près tout ce qui
l-'ig. 181. — Croquis de Mars, par M. do Konkoly, les 19 et 29 octobre [RIO.
reste de la configuration générale, avec la terre de Lockyer, (|ui se devine
au-dessus de la mer du Sablier écourtée.
Les observations ont été faites à l'Observatoire de Potsdam, au grand
équalorial de 298""". Grossissements de 120 à 350.
M. de Konkoly a fait un certain nombre d'observations de Mars pendant
lu même opposition et a publié trois dessins, des 19 octobre à ll'':?0"', 29 oo^
lobre à 9'''t0"' et t3 novembre à 8''5G'" (ftg. 181). Le dernier est très vague, et
il est difficile de s'y reconnaître. Les deux premiers, le second surtout, sont
meilleurs, el nous les reproduisons ici par la pbologravurc. Les observations
3:o
I.A l'I.ANKT!. M \I{S.
«ml Ole faites à laide d'un réfracleur do (> iioucos. aniu' d'un lirossissoiiionl
de?ir..
On roconiiail sur la proniioro la moi" cii'oulairo do Toiby, mais doultloo
ou »iucl(juo sorte. 11 y a cvidciiimont ici uno j;raiidc érjuation pcrsonnoUo.
Le second monlre avec évidence la nier du SuMior et toutes lerj configura-
lions adjacentes.
M. E. Ilarlwig a pris de nouvelles mesures micromélriqucs du diamètre
de Mars (''. Ces mesures ont donné, combinées avec celles d'Arago, Bossel,
Kaiser cl Main :
Diamètre polaire — 0",3i9. — l"lllipticité douteuse.
.Mesures de llartwii; :
Diamètre polaire 9 ", 3 1 1
» équatorial 9,519
Aplatissement (combiné avec lea résu liais de Encke et Galle) : ^\.
Le 30 juin 1870, les planètes Mars et Saturne se sont rencontrées en pcr-
Fitr. 182.
Conjonction de Mars avec Saturne, le 30 juin 1870.
spective dans le ciel [fig. 182), leur moindre dislance a été rt-duitc à 87". centre
à centre. Le phénomène a été observé par un grand nombre d'observateurs
'quorum pars minima fui '. La remarque capitale qui a été faite en celte cir-
constance a été celle du contraste frappant entre la coloration rouge de Mars
et le ton plombé de Saturne, qui. paraissait vert par contraste. L'aspect de ces
deux astres dans le champ de la même lunette était tout à fait merveilleux.
[^; A-^li'onomi<'cho Gesellschaft. Leipzig, 1879.
1^7'j .1.-11. sciiMicK. — i:rui)i;.s slu .maus. 3-2I
Les caps polaires sud ul nord dt; Mars élaiciiL d'mic cclalaiilc blan-
cheur.
Il y avail déjà eu une conjoncliou dus deu.x planèLes le 3 novembre 1877,
mais elle avail élé moins (M roi Le, et les deu.v aslrus n'avaient pas élé réunis
dans le même champ d'une lunette astrononiiipn,'.
Le plus yrand rapprochenit'ul a <;u lieu vers 7'';iU"' du soir.
1879. — .I.-IL Si:iimk:k. EIkcIcs sur Mars (').
L'auteur de cet opuscule a pris principali'nienl pour but de résumer les
observations faites par M. Schiaparelli en 1877. Son travail est divisé en six
Chapitres dont voici 1<_'S titres :
I. — La i)l;inèti' Mars considérée comme membre de la famille des mondes
de notre système solaire.
II. — L'observation de Mars dans les instruments astronomiques.
III. — Ce que révèle l'observation spéciale de Mars : — (-^O au point de vue
des régions neigeuses; — ((>] au point de vue des régions foncées; — (c) au
point de vue de l'anneau lumineux qui entoure le disque.
IV. — Résultats de l'étude de Mars au point de vue de la surface solide de
la iilauèle.
V. — Qnc nous révèle la connaissance actuelle de Mars sur le développe-
ment de la Terre y
M. — (Continuation du même sujet.
Le Chapitre I expose la situation cosmographique de Mars et ses mou-
vements, réels et apparents.
Le Chapitre II est consacré aux taches, à la rotation, aux neiges et à l'at-
mosphère.
Dans le Chapitre III, l'auteur passe en revue les variations des taches po-
laires, les elfets des saisons, et expose les résultats des observations, princi-
palement celles de M. Schiaparelli. Les régions foncées sont considérées
comme des mers.
Les taches claires ou continentales font l'objet du Chapitre suivant. L'au-
teur partage l'opinion que la planète a perdu une partie de ses eaux, et fait
remari|uer la [)rédominance continentale de l'hémisphère nord. 11 pense que
le [)ùle nord doit avoir un Jjassin, connue le pôle sud, mais plus petit.
Enlln, dans les deux derniers Chai)itres, l'auteur examine si les observa-
tions faites jusiju'alors sont favorables à la ihôorie d'Adlniiiar et de Croll
sur les périodes glaciaires et conclut négativement.
(') Dur Pluncl Mars, ciiu: cwcilc Krdc, nack Scliiuiiarclli. Leipzig, 167'J.
I"'(..\MMAKiON. — Mars. 21
322
LA I" LA m; II'; ALVIIS.
1870. — (1. Flammaihon. I^ludcs .sur Mars (').
Exposant (laiib ÏAslroiiomic jioiiiilalir nos connaissances sur la planèto
Mars et reprenant surtout nos arguments déjà émis dans les Terres du Ciel
{voy. plus liant, p. 241), nous insistions, comme caractéristique do la consti-
tution de ce monde voisin, sur les diflerences do Lons eiilrc les mers cl sur
les variations de ces tons, ainsi que sur certains changements de ibrincs et
d'aspects qui nous paraissaient dès lors établis avec certitude par l'obser-
vation. — Nous avons remarqué, non sans curiosité, que plusieurs astro-
nomes qui auraient dû ne point parler de ce qu'ils no connaissaient pas, cri-
li(|uèreut avec une grande désinvolture ce résultat acquis par notre étude
spéciale de la planète. — Parmi les régions de Mars les plus variables, nous
signalions surtout le détroit d'IIerschel II et la mer Terby. Voici un extrait de
ce Chapitre.
Une autre diflféreuce avec la Terre paraît être ollerte par ia variabilité de quel-
Fig. 183.
Variations dans les mers de Mars, Le détroit d'Herschcl II en 1830, 18U2 et 1877.
qucs-unes de ses configurations géographiques. L étude conslantc du détroit
d'IIerschel II pourrait conduire sur ce point à des résultats fort curieux. En 1830,
Madler l'a plusieurs fois très nettement et très distinctement vu tel qu'il est repré-
senté ci-dessus (fUj. 183). En 1862, Lockyer l'a vu avec la même netteté comme il
est dessiné à coté, et, en 1877, Schiaparelli l'a observé tel que nous le voyons sur
le troisième dessin. Ce point, vu rond, noir et net eu 1830, si net en réalité que
Miidler le choisit pour origine des longitudes martiennes comme étant le point le
plus noir, déjà vu sous la même forme par Kunowsky, en 1821, et inditpié aussi
dès 1798 par Schrceter comme globule noir, n'a pu être distingué en 1858 par
JSecchi, malgré la recherche spéciale qu'il en a faite. Ce même point a été vu bi-
(') Astrononile populaire, première édition, IbT'J, p. 484.
187'.) C. KLA.M.MAinoN. — VA K I ATIO.NS () US i; Il V K H S SUK MAKS. -il-i
furquô par Dawes eu ISGi, (.-t il l'csL ccrlaiuemcut; mais la rét,'ion «jui reuvirouue
au sud paraît couverte de marais et variable d'aspect suivant les années^; tous
les dessins do 1877 ne montrent plus le même point, comme un disque noir sus-
pendu i\ un 111 serpentant, mais le fil s'est dlai-gi au [toint do ne plus pouvoir sou-
tenir cette comparaison : le golfe est aussi large au centre et à l'origine qu'à son
extrdmitd orientale.
» Actuellement, la tache la plus noire et la plus nette, celle que l'on choisirait
de prc'fcreuce pour marquer l'origine des méridiens, serait la mer circulaire de
Terby : on la choisirait certainement de préférence ù, la première. En 1830, la
préférence a été donnée à la précédente, et sur plusieurs dessins on voit les deux
faire exactement pendant de chaque côté de l'océan (//;/. I8'i ). Ces dessins ne pour
Fil,'. 18'i.
1830 laei 1077
Variatious daus les mers de .Mars. La mer circulaire de 'IVrby en 1830. 18G2 et 1877.
raient plus être faits aujourd'hui. Voilà une première variation. Une deuxième est
présentée par l'aspect même de la tache : en 18G2, les différents observateurs l'ont
vue allongée de l'est à l'ouest; en 1877, on l'a vue au contraire parfaitement
ronde (correction faite de la perspective) et certainement non allongée dans le
premier sens. Troisième variation : elle paraissait, en 1862, réunie à l'océan voisin
par un détroit, et, en 1877, instruments de même puissance et observateurs delà
même habileté n'ont rien vu de ce détroit et en ont distingué un autre au nurd-
est. Autre exemple do variabilité : d'excellents observateurs ont aperçu en 1802
et iSGi, dans l'océan de la Rue, un point lumineux ([ui aurait pu être formé par
une ile couverte de neige et que j'ai cru devoir indi(iuer sur ma première carte.
Personne ne l'a jamais revu depuis.
» Sans doute, il ne faudrait pas prendre pour des changements réels toutes les
diirérences qui existent entre les observateurs. Ainsi, par exemple, en 1877, plu-
sieurs ont vu réuiùes à l'occident les mers de llooke et de Maraldi, tandis que la
séparation est restée visible pour les autres; l'œil est dilleremment impressionné
et l'on pourrait jiresque dire que pour certains détails il n'y a pas deux yeux ((ui
voient identiquement de la même façon, même les deux yeux d'une même per-
sonne. Mais, lorsque l'attention s'est tout spécialement lixée sur certains points
remarquables ([ui auraient dû être rendus parfaitement visibles dans les iustru-
3-24 LA PI.AM-TH M A US.
mctUï; ciiipli'vcs, et que l'on constate ainsi des différences qui paraissent incom-
patibles avec les erreurs d'observation, la probabilité penche en faveur de la
réalité cITective des changements signalés.
u De quelle nature sont ces variations? c'est ce que l'avenir nous apprendra.
Nous ne pourrions émettre actuellement que de vagues conjectures à, cet égard.
Mais quelles qu'elles soient, elles n'empêchent pas les principales configurations
de la géographie martienne d'être permanentes, par conséquent réelles, et d'être
vues actuellement telles que nos pères les ont vues et dessinées il y a plus de
deux siècles.
» Autre remarque non moins intéressante. Cette planète voisine paraît avoir
beaucoup moins de nuages que celle que nous habitons.
» C'est là un grand contraste avec notre globe, car il y a des années où nous n'en
Sommes vraiment pas privés. Eu une année entière, du mois d'août 1878 au même
mois 1879, nous avons eu à, Paris 1G7 jours pendant lesquels il a plu, et seule-
ment 37 jours de ciel pur ou peu nuageux, 37 jours faits pour les astronomes. Sur
l'hémisphère austral de Mars, c'était absolument le contraire lors des observa-
tions de 1877 : on a pu observer la planète toutes les fois qu'il a fait Ijoau chez
nous. 11 ne faut pas oublier, en elTet, que, pour que l'observation de la géogra-
phie martienne soit possible, deux conditions sont requises avant toutes autres :
il faut qu'il fasse beau chez nous et que notre atmosphère soit pure, et il faut
aussi qa il fasse beau sur Mars, autrement nous ne pourrions pas mieux per-
cer sa couche de nuages que nous ne pouvons en ballon traverser de la vue
les nuages qui nous cachent les villages terrestres. Eh bien, il est remarquable
que, sur Mars, neuf mois entiers se soient écoulés à peu près sans nuages et nous
aient permis de perfectionner grandement les counuis.sances géographiques r{uc
nous Voulions avoir de ce monde voisin.
I) Nous nous trouvions en septembre et octobre 1877 au milieu de l'été de l'iié-
misphcre austral de Mars, alors très incliné vers nous, et au milieu de l'hiver de
son hémisphère boréal, tourné de l'autre côté. Tous les nuages paraissaient relé-
gués sur cet hémisphère-ci. Sur ce globe, encore plus (jue sur le nôtre, l'été est
la saison de l'atmosphère pure et l'hiver celle du mauvais temps. Les taches per-
manentes se montrent tranchées, vives et nettes, pendant l'été de l'hémisphère
où elles sont placées; l'hiver arrive-t-il, elles deviennent vagues, confuses et
faibles; c'est, sans doute, que l'atmosphère de Mars devient trouble en hiver et
reste très transparente en été. On remarque aussi une préférence pour les nuages
à se former sur les marais et les bas-fonds teintés en gris sur la carte, plutôt que
sur les mers obscures et profondes, et c'est ce qui retarde la connaissance pré-
cise que nous cherchons à acquérir de la contrée située au-dessus du détroit
d'Horschel II; mais on n'y remarque pas de zones constamment nuageuses et
pluvieuses analogues à celle des calmes équatoriaiix terrestres, où il pleut
toute l'année.
M Quant à l'épaisseur de cette atmosphère relativement au disque de la planète,
elle est inévitablement trop mince pour être visible d'ici, lors même quelle serait
IST!) c ri.AMM A itrox - ciiKis rii:. .lîo
l)(\'iiiciiiip plus (''Icv('o 1(110 l;i iii'ttrc. Va\ lui .sup|io.saiit SO kiloiiuHres de liruitciir,
cette épaisseur ne formerait encore que U'i^lorsque la planMeest la plus rappro-
eht'e (lo nous; la r^'^fraction y serait donc insensiltlo. »
Toi était, en 1870, ronsomblc des idées auxquelles nous avait conduit l'ilude
des observations faites sur la planète Mars. En cette même année, la revue
astronomique T/ie Ohscfvatnry, dirigée par M. Oliristic, astronome de l'Obser-
vatoire de Grcenwicb, dont il est maintenant directeur, a pris soin de tem-
pérer l'opinion qui considère les taches foncées de Mars comme des mers et
les claires commodes continents. « Ces prétondues mers, dit-il, ne sont-elles
pas aussi imaginaires que dans le cas do la Lune? Les « continents » parais-
sent plutôt arrondis, comme nos mers, tandis que les « mers « reproduisent
les formes aiguës de nos continents. Nous ignorons le vrai caractère de ces
configurations, qu'il serait plus scientifique d'appeler simplement des taches,
comme pour Jupiter » (').
On voit que tous les astronomes n'avaient pas les mémos idées. Il ne nous
semble pas douteux cependant que les taches foncées représentent les eaux
de Mars. Dans l'ouvrage dont il vient d'être question (Aslronomie populaire),
nous avons publié une seconde carte de Mars (-).
(') Tlie Obxervntonj, novembre 1870, p. 200.
(*) Les détails suivants peuvent intéresser coux d entre les lecteurs de ce livre qui
s'occupent plus particulièrement delà cartographie de Mars. Nous avons construit sur
l'ensemble des observations, après la carte tirée par M. Procfor des seules observations
de Dawes, noire première carte géographique de la planète en 187G. Nous ne parlons
pas du croquis de 18G2, reproduit p. 1 Î3, puisqu'il ne représente qu'un liémisphère et
ne constitue pas une véritable carte. Elle a été publiée dans la première édition des
Terres du Ciel, 1876, p. 42'i, et dans les Comptes rendus de iAcadémie des Sciences,
27 août 1877, p. 178. Nous en avons donné une seconde en 1879. Astronomie populaire,
première édition, p. 480; une troisième en 1882, Revue d'Astronomie, 1882, p. 170-171,
une quatrième en 188i, les Terres du Ciel, grande édition, frontispice. Nous avons
publié cette môme année un globe de Mars contenant l'aréographie la plus sûre. Enfin,
nous avons construit en 1889 notre dernière carte {Astronomie populaire, centième
mille) publiée également ici, p. GO, corrigée d'après les plus récentes observations, et
dans laquelle nous avons adopté la nomonclature de Green ( voij. p. 29). Ce n'est pas
sans regret que nous avons renoncé aux dénominations de nos anciennes cartes, qui
avaient paru dignes de l'histoire de l'Astronomie et de ses apôtres, Copernic. Galilée,
Kepler, Newton, Huygens, Cassini, Hooke, Maraldi, Lacaille, Lalande, J^aplacc, La-
grange, Herschel, Sclirœlcr, Béer, Madler, Arago, Secchi, Le Verrier, Faye, etc. Mais
la carte de Green étant généralement adoptée, et celle do M. Schiaparelli ayant fait double
••m|tIoi avec elle, nuus avons pensé qu'il importait d'éviter toute complication et toute
confusion dans un sujet qui est d'ailleurs encore assez loin d'être complètement élucidé,
et qu'il était préférable de ne laisser en présence que deux systèmes d<> nomenclature,
celui de M. (îreen et celui do M. Schiaparelli.
3Î6 1 V pi.\m":ti: mars.
XCVIIl. 1870. — Hrr.r.iNs. Photor/raphir du sprc/rr iJc Mura (').
Lo savant physicien a roussi à ulitonir dos iiliolo.m'aphios dii-oclcs des
spectres des oloilcs principales ainsi que dos planoles Mars, Jupilor et Vénus.
La fente do l'appareil ;\ l'aide duquel ces photographies ont été prises a
doux volets, de sorte que, lorsque le speelre d'un astie a été photographié sur
une plaque, un volet peut èlre fi'nné et l'autre ouvert, et un second spectre
peut èlre photographié sur la même plaque, comme comparaison. Ce second
spectre peut être celui du Soleil ou de la Lune, ou d'une étoile connue, ou
d'un clément lerrestre.
Dans h\ photogra^ihie des spectres planétaires, l'auteur opérait avant la
nuit, de sorte qu'il ohtcnait le spectre du ciel, puis celui de la planète. Par
celte méthode, toute difTéroncc entre la lumière de la planète et celle du
ciel aurait pu être reconnue. Il a obtenu do col le manière les s])octrcs des
trois planètes signalées plus haut, mais on n'y i-emarque aucune difrérence,
aucune modification du spectre solaire dans la région photographiée, de la
ligne G à la ligne 0.
Le même procédé, appliqué à de petites régions de la surface lunaire, n'a
révélé aucune trace d'atmosphère.
XCIX. 1879. — ScHiAPARELLi. Nouvcllcs observations (-).
Le lahorieu.x astronome de Milan a continué, pendant l'opposition de 1870,
la série d'études entreprise en 1877 et résumée plus haut (p. 283-308). La
division du travail est la même, et c'est également le môme instrument qui
a .servi.
Ces nouvelles ohservations s'étendent du 30 septembre 1870 à la fin de
mars 1880. La froide température de cet hiver a eu pour résultat un air
calme et transparent, permettant d'excellentes images.
Remarques intéressantes, pour placer l'œil dans les meilleures conditions,
l'observateur a pris soin d'éclairer fortement le champ de sa lunette, ce qui
supprimait l'effet fâcheux du contraste entre l'éclat de la planète et l'obscu-
rité environnante ainsi que du passage d'un champ obscur à la clarté du
papier sur lequel les dessins étaient faits. En second lieu, il ne gardait l'œil
(') The Ohseriatory, février 1880, p. 295.
(») Osservazioni astronomiche efisichestdiasse di rotazione e snlla lopografia del
pianeta Marte. Reale Accademia dei Lincei. Memoria seconda. 1 vol. grand in-S° de
110 pages et planches. Rûme; 1881,
IS70 sciii \r Ain-r.i.i. — nouvf-ijj-s orsfhv axions. 327
à l'oculairo que le tomps nécossairc [loui- Iii<'ii voir cl se l'cposail de temps
en temps, ce qui permettait de Iravaillrr plusieurs heures consécutives,
quand l'atmosphère était excellente. Enlin. il trouva- avantaj,'cu.\ de placer
devant l'oculaire un verre colorié jaune routre. I/oJtJectif est parfaitement
achromatique pour les rayons roup;es, ce qui est également avantageux pour
l'observation de Mars.
Ces observations nouvelles complètent et modifient celles de 1877.
Le diamètre apparent de la planète n'a jjas atteint 2.")", comme en 1877,
mais, au maximum, 19", 3 au moment de l'opposition ( 12 novembre). Il était
descendu à 5",0 à la lin de mars. Lincliuaison de la planète était de 9%.') au
commencement des observations, de 18\5 à son inaximum (20 décembre) et
de 3" seulement à la lin df mars.
Position de la tache polaire australe. — L'auteur a fait 89 observations de
positions de cette tache, du 30 septembre au 2 décembre. Le résultat de ces
observations, combiné avec celui qui avait été obtenu en 1877, donne, pour
la projection du pôle boréal do Mars sur la sphère céleste, le point suivant
(équinoxe 1880) :
^^ 31807', 8; (î)-}-53".37',l.
L'inclinaison de l'équateur de Mars résultant de cette position est la sui-
vante :
Sur l'orbite de Mars 2i'52'.()
Sur l'orbite de la Terre 20 20 , G
Sur l'équateur terrestre. ."lO 22 .0
William llerschel avait trouvé, pour l'inclinaison de l'axe de Mars sur le
plan de son orbite, 28°42', et Bessel 27" 10'.
D'après cette nouvelle détermination de M. Schiaparclli, l'inclinaison nesl
que de 24°52', ce qui rapproche davantage encore les cniiditiim-; climatolo-
giques et saisonnières de Mars de celles de la Terre.
La jilanrte passe à son périhélie quand sa longitude héliocentrique est de
333" 49' et à son solstice austral quand cette longitude est de 356" 48'. L'in-
tervalle du premier au second est de 3G jours.
Les dates des solstices doivent être retardées de huit jours sur les déter-
minations anciennes et d'^'iennent :
Dnte (l\i fiolfftici' austral.
1830 18 septembre.
1862 9 septembre.
1877 26 septembre.
3:8 I A pi.am:!!: mars.
TRIANC.rLATION AnKOr.RAriIIOlE Di:s POINTS FONDAMKNTAUX.
Nous avons vu plus haut (p. 290-292) les mesures micromi'lriques de 1877.
Rt^commtMirant ces mesures el les comparant aux précédentes, l'auteur ob-
tient les résultats inscrits au Tableau ci-dessous, plus précis encore que ceux
de 1877.
\-» ni-nomiiiatioiis. I-ongitiidc.
1 Vertice d'Aryn 0%92
2 Secondo corrio de! Golfo Sabeo 4 ,'i'J
4 Canale di Deucalione, punto di mezzo 1 1 ,91
ô Golfo délie Perle, bocca dcir Indo 22 ,07
5 a Divisione deirindo e deirO.xo 14 ,0G
5 b Bocca del Gehon nel Nilo 10 ,70
5 (-• Bocca del' Indo nel Nilo 27,33
C Bocca dcir Idaspe nel Golfo délie Perle 24 ,4i
G a Gorno d'Oro 19,31
G h Bocca deir Idaspe nel Nilo 34,92
7 Capo degli Aromi 38 ,00
7 a Bocca délia Jamunanel Golfo dell'Aurora .Jl ,40
7 b Boca délia Jamuna nel Lapfo Niliaco 41 ,74
8 Capo délie Ore in Argyre 40 ,40
8 a Centro d'Argyre 29,12
8 b Canale fra Argyre e Noacliide (2°) l.ô ,77
9 Capo délie Grazie in Argyre 47 ,10
9 a Centro d'Argyre II : 00 ,80
10 Golfo dell'Aurora, bocca del Gange ôG ,20
11 Punta deU'Aiirea Clierso 00,99
lia Bocca delTAgatodemone (iO ,12
12 Bocca del Nettare nei Mar Eritreo OG ,42
12 a GonfluentedeirAgatodemoneedel Glirysorrlioas. 78,57
12 6 Confluentedi AgatodemoneedelFdellaFortuna. 82,38
13 Lago délia Luna, centro 05 ,98
13 a Isola Sacra 08,04
13 b Golfo Ceraunio, parle austraie 97 ,27
14 Lago del Soie, centro 90 ,87
14 a Bocca dell'Ambrosia nel Mare austraie 89 ,05
15 Lago dell Fenice, centro ... 107 ,9 'i
IG Bocca del Fasi 111 ,70
IG a Divisione del Fasi e deU'Arasse 112,09
17 Colonne d'ErcoIe, bocca esterna 124 ,33
18 Centro d'Icaria 120,89
19 Bocca deir Arassc nel Mare dell Sirène 129 ,15
19 a Bocca australe del canale dell Sirène 131,80
19 6 Confluentc del canaledell Sirène Icon Eosforo 11 . 130,97
19 c Nevc Olimpica, 1879 129,41
19 d Canale Flegetonte, mezzo 127 ,20
20 Primo punto di Tliyle 1 141.81
Distance
.111 pôle
austral.
Nombre
(les
oliservations
90%98
8
95 ,77
G
86 ,92
3,4
95 ,80
7
112 ,10
3,2
120 ,13
0, »
125 ,G3
1
88 ,2G
3
90 ,75
1
120 ,80
3
80 ,05
7
82 ,45
3
112 ,77
3
50 ,20
8
43 ,17
2
42 ,73
1
38 ,78
7
2'i ,08
2,5
84 ,58
7
variabiie
0
variabiie
5
07 ,94
G
80 ,38
5
77 ,35
1
117 ,00
7
118 .13
1
119 ,45
0
07 ,00
12
44 ,74
5
73 ,70
8
51 ,47
G
05 ,70
1
42 ,89
8
52 ,80
6
Cl ,14
9,8
59 ,98
1
77 ,27
1
110 ,03
C
122 ,31
1
28 ,XU
3
1877 SCIIl \IV\lti:i.I.I. - THIANCri. \T|iiN A It l'.i Xi U A l'Ill ( )Ur- . 3i')
NO Mi-iioiniiiiitiuiis. I.diigUiicIc.
-M Colonne il'ErcoIc, bocca interna 135 ,87
'Il .1 Bocca del Termodonle ne! Mare dcU Sirène 139 |74
'.M h iJocca del Termodonte ne! Marc Cronio 137 ,83
22 t:<>iilro di Tliyle 1 158 ,57
23 Base australe di Atlantide 1 lôG ,00
2'i Bocca dol Simocnta ncF Mare Ciinnicrio lf;8 ,70
2'i .( Primo punto dcl Mare (ùimnierio IGI ,15
2'i h Bocca del Simoenta del Marc (Ironin 172 ,10
25 Golfo dcl Titani 170,17
25 a Bocca del F. dell (iorgoni ncd Marc dello Sireno. 152 ,08
25 b Punto dcITErebo 102 ,00
20 Ultime punto del Marc délie Si rcno 175,80
26 a Base inferiore d'Atlantide 1 180,30
27 Strctto d'Ulisse, mezzo 180 ,30
29 Principio délia paludc Stigia 198 ,7 'i
29 a Bocca délia palude Stigia ncl Mar Boréale 300%83
20 b Gapo di Buona Sperauza 205 ,73
30 Bocca del canaledeiLestrigoni ncl Marc Cimmerio 199 ,95
30 a Gûlio (Ici Lcstrigoni, nel 1879 183 ,55
30 0 Base d'Atlantide II, ncl 1879 187,92
31 Bocca dello Scamandro snl Marc Cronio 203 ,'i3
31 a Bocca dello Scamandro sul Mare Cimnicrio. . . . 202 ,00
31 Base australe d'Espcria 213 ,GS
35 Capo boréale di Thylc II 221,51
30 Centro di Thylc II 223,13
30 a Ultimo punto di Thylc II 212 ,00
37 Golfo e bocca del canale dci Ciclopi ncl 1877... 221 ,01
37 a Golfo di Ciclopi nel 1879 229,81
37 b Bocca del canale dei Ciclopi ncl 1879 223 ,50
38 Primo punto del Mare Tirreno 227,00
■10 Bocca del Xanto ncl Golfo di Promctco 234 ,89
40 a Bocca del Xanto nel Mare Tirreno 236 ,17
41 Ultimo punto del Mare Cimmcrio 239,97
41 a Bocca dcl canale degli Etiopi ncU'Eunosto 212 ,49
4i Base settentrionale d'Esperia 249 ,23
43 Piccolo Sirtc 257,29
43 a Bocca del Golfo Alcionio nel Mar Boréale 225 ,09
44 Capo Circeo, in Ausonia 260 ,72
45 a Primo punto dell'Adria 204,49
40 Lagd Tritone 205,21
40 a Ncvc Atlantica 269 ,00
A6 b Bocca dcl Thoth nel Golfo Alcionio 201,23
40 r Bocca dell'Eunosto nel Golfo Alcionio 258 ,13
47 Primo punto deirElIadc. 1877 270,48
47 a Bocca del Peneo nel M;ire Adriatico, 1879 280 ,11
48 Lago Meride 275 ,72
49 Bifurcazionc d'Ausonia 278 ,'M
50 Congiunzione dcl Nepente col Nilo 1877 286 ,15
50 a Bucca del Nepente nclla Gran Sirte, 1879 285 ,0.5
51 (;ran Sirte et bocca dcl Nilo. IS77 2!U) .31
nut.'iîii-c
Noinlire
:iii ix'ili'
lie»
iiustral.
observations
52 ,08
7,5
54 ,04
1
38 ,15
1
20 ,58
2
53 ,04
4
52 ,09
5
50 ,37
4
37 ,2s
5
70 ,07
8
.59 ,01
3,4
143 ,84
2
03 ,25
8
60 ,58
5
24 ,27
2
108 ,01
7
131% 05
5
128 ,98
l
08 ,49
11
00 ,09
4
39 ,04
4
35 ,53
5,1
51 ,31
l
52 ,20
3,2
30 ,72
1
23 ,07
1
12 ,02
1
80 ,57
1,2
70 ,'û
2,3
73 ,48
4
53 ,07
7
38 ,0i
6,5
50,91
4
79 ,48
6
121 ,92
2
79 ,48
5,4
83 ,29
8
132 ,90
1
74 ,90
8
48 ,51
4
100 ,32
8,8
107 ,00
1 -l 'i 1 ">
o
1
1.0
43 ,11
40 ,49
5
95 ,57
2,1
71 ,77
4
121 ,26
1
100 ,10
3
110 ,0:)
6,5
330 I A PI.ANKTi; MA US.
\* nônominations. I.niipituili'.
51 a Punta australe di Mcrso. 187'.) 2!fO .08
51 /> Hocca «IcH'Astabora nella (îran Sirto '2'.t'.i .Ui
51 c Divisioiie dcl Nilo c dell'Astapo '.'81 .72
52 Bocca australe deU'Alfeo
53 Centro 0 croce (IcirEllaile Î9i .'.r»
5i Bocca settentrionale dell' Alfen 208 .81
55 Ultimo punto del Mare Tirreno 297 .37
56 Ultimo puuto doIl'EIlade, 1877 31 'i ,07
5G .T Bocca del Penoo nel Marc Australe 315 ,99
57 Corno d'Ainmone 317 ,99
57 a Bocca del Tifone nella (iran Sirte 300 ,2G
57 b Palude Sirbonide 327 ,22
58 Scilla e Cariddi 323,46
59 a Novissima Tliyle 355,10
CO a Centro dello Noachide 34j ,93
61 Bocca del Phison nel Gollb Sabeo 336 ,28
Gl a Uscita del Phison dalla palude Goloe 302 ,52
Gl b Ingresso del Nilo nella palude Goloe 303 ,59
61 c Bocca dell'Eufrate nel Golfo Sabeo 337 ,88
61 d Divisione dell' Eufrate e dell' Oronte 330 ,93
61e Bocca dell'Eufrate nel Nilo 334,30
02 Primo corno del Golfo Sabeo 357,17
02 a Golfo di Edoni 345,24
62 6 Canale ed istmo di Xisutro (mezzo) 347,90
Soit il4 points détermin(''S par 482 ohservalions.
On voit par ce Tableau que la baie du Méridien, appelée par M. Schin-
parelli vertice d'Aryn, comme nous l'avons vu, a pour longitude U°,92,
au lieu deO-.OO. Si donc on veut ramener toutes les autres positions à
un méridien initial, il faut soustraire de tontes leurs longitudes ce petit
nombre 0%92.
Par ces positions, et à l'aide de 30 disques complets et de 104 esquisses
partielles obtenues pendant cette période, l'éminent observateur a construit
la carte reproduite ici (fifj. 185), dessinée non plus seulement par traits,
mais par tons, et dont l'objet est de représenter plus fidèlement que la pre-
mière les aspects martiens tels qu'on doit les voir à la surface môme de la
planète. Cette carte est plus étendue que la première. Au lieu de s'arrêter au
40*= degré de latitude inférieure ou boréale, elle va jusqu'au C0^ Nous allons
l'examiner en détail.
Et d'abord, quant aux dénominations de mers, terres, fleuves, canaux,
golfes, lacs, l'auteur paraît regretter (p. 5 et 51) d'avoir admis dans son pré-
cédent mémoire que ces expressions pouvaient être conformes aune réalité.
Elles ne doivent signifier rien déplus que pour la Lune. Elles servent àindi-
nistaiiop
iiii 111)1. ■.
aiistiiil. '
Nombro
(ll'S
iilistM-vatioii:
lO.T .10
r.,4
101 ,01
1
128 .3'.
3,4
3,^ .01
0,1
40 .;!8
(
01 ,70
1,3
96 ,70
6,5
48 .02
4,3
44 .05
3
81 .21
13,11
94 ,0!)
1
lOi ,01
2
00 .75
3
19 ,25
1
53 ,24
3
85 ,24
0,5
128 .29
3,4
134 .29
^,1
82 ,74
3
105 ,60
2
132 ,38
4
96 ,30
8
85 ,98
2
81 ,48
4
IS70 >^(:ill \I' \F{FI.I.I. - TItl WCl'I, \TlON A H (":< ir; K \ l'IUOUE. 331
«jucr les o])S('rvations, voilà Iniit. Clioirhor ce qu'elles représenlcnt serait
sortir de la science pour entrer dans l'hypothèse, et, cette fois-ci, l'auteur
s'en df'fcnd a])snlumcnt. Nous prenons, non sans q^ielque regret, acte de sa
déclaration. Il est juste d'ajouter, toutefois, que le rôle de V observateur s'ar-
n^te strictement là, en effet. Celui du chercheur va plus loin et consiste, au
contraire, à se servir des ohservalions iiour raisonner.
Quant à la nomenclature, M. Schiaparelli continue celle qu'il a adopt(';e,
en rétendant aux formations nouvellement oltservécs.
Les résultats génrraux ohtcnus sont de trois sortes. D'ahord, tous les aspects
ohservés en 1877 ont été revus, nirme les plus minutieux, à l'exception do
deux : le « canal Hiddekel » et la «■ Fontaine de Jeunesse ». On a cru seule-
ment distiniiuer quelquefois le premier, mais avec confusion et ineerti-
tude. La Fontaine de Jeunesse n'avait été vue qu'une seule fois en 1877;
malgré toutes les recherches faites, on n'a rien retrouvé en 1879. Ces deux
ohjets sont donc absents de la carte nouvelle.
Un second résultat, qui modifie, mais qui ne détruit pas le précédent, c'est
que les configurations observées, tout en restant les mêmes, avaient pour la
plupart change d'aspect, de ton, de degré de visibilité, et môme de largeur
pour plusieurs canaux. L'inclinaison de la planète sur notre rayon visuel et
sur l'éclairement solaire peut expliquer la différence de visibilité et de blan- •
cheur de certaines régions, telles que l'Argyre et l'ilellade. Peut-être aussi
des causes locales font-elles varier le degré de blancheur de certaines con-
trées. Plusieurs de ces variations de tons du jaune au blanc ou, au contraire,
au gris, sont réelles, et l'auteur croit prolialdo qu'elles sont périodiques. Ces
variations, dit-il, seront probablement la clé qui nous ouvrira les secrets de
la constitution physique de la planète.
Le troisième résultat a été de confirmer les observations faites par Dawes
en 18G4, entre autres d'avoir retrouvé la passe de Bessel{i). 205), qui correspon-
drait au canal vertical dessiné à droite du lac du Soleil, par le Phase et l'Iris.
Ce canal de l'Iris n'existe pas sur la carte de 1877. Changement?
Parmi les détails explorés, nous remarquerons l'Hydaspe, que l'observateur
est porté a identifier avec le canal de Franklin de Sccclii, identifié d'abord
avec le Gange. Telle est aussi l'opinion du D' Terby.
Le lac ilu Soleil a offerl un peu la l'orme d'une poire, par l'adjonction
du canal du Nectar, déjà dessiné par Màdler en 18."50, Kaiser et Lockyer
en 18G2, Dawes en 180i, etc., mais absolument invisible en 1877. Celte sorte
de canal étroit et léger faisait un angle de 15° à 30° avec le parallèle de
latitude.
Ce nouveau témoignage de variation réelle, absolument incontestable, con-
firme ce que nous avons dit plus haut (p. 3-23, fig. 184).
33? i.A im,\m:tk ma h s.
IjO canal i\o l'Ambroisie s'est numtiv mince ot noir pondant toutes les oli-
«P XWP TfO £f« fSO SJX) tSe SS9 BTf S90 tSO 300 3/0- 320 330 340 3SJ 0
::j c-.o c^? 0
Deuxième cartf-; de Maus
servations de 1879, tandis qu'il s'était montré larp:e et gris X'cndaat tontes
celles de 1877. Autre exemple de variation certaine.
Nous avons vu, sur la carte de 1877, l'Araxe se détacher du Phase pour se
rendre à la mer des Sirènes par un cours sinueux dessiné avec une atten-
IS79 SCIllAl'AUhLLI. - TUI ANG UL ATIUN A Ilf- OGU AIMIIQUIÎ. 3:i3
tion spcJcialc \mi' r<)l)?orv;itoiir. Ce cours )i'ex!ste fihis en 1879 : cette ligne, au
$0 JO ^ C'J CJ 7J C3 OO ISJ /fO tXO fSO tiO tto W> '70 '^ '"' ""
:3 ^ 47 C3 CO 70 CO Zi IM 110 tgO f30 lAO IS3 ICO 173 tCO iSO COO
M. ScHi\rAiiEi.i,i, d'après ses observations ue I87'.i.
lieu (l'èlrc courbe, est pi-esque droii»^, et légèreuiout concave vers ricarie.
Comparer le dessin du 1 1 novemiirc 1879 {fuj. 189) ou celui du 22 décembre
de cette même année \li<j- 187) à celui du 2j seplemin-e 1877 [fi(j. 180). Entre
1877 et 1870, le cours do ce lleuve a donc été reclilié vers la merdes Sirènes.
334
LA PLAMiri- M A II S.
L'observateur afliriuc la précisiou de ses dessins, ces soirées d'obsorviilioii
ayant été particulièrement excellentes et les vues parfaiteuienl nelles.
Cours reclilié? Comment? Par quels agents? C'est ce tiu'il faudra cliorchcr.
Mais le fait est là.
Le lac du Phénix a ull'ert les changements que l'on constate également ici
par la comparaison des dessins.
Mais la découverte la plus imporlante faite en ces contrées pendant ro[)posi-
Fig." ISO.
Kiir. 187.
ê
L'Araxe, le 25 septembre 1877. L'Araxe, le 22 dccembrc.1879.
tion de 1879 est peut-être encore celle du canal de l'Iris (Koy. la carte, à la lon-
Fig. 188.
Fijr. 189.
Mars, le 20 décembre 1879,û i^il-". Mars, le 11 novembre 1879, â5''3j"'.
Dessins de Mars par M. Schiaparelli.
gitude 105*), absent en 1877. Sa première observation est du 11 novembre 1879
(fig. 189 j et est représentée sur le dessin ci-dessus. C'est ce canal vertical que
l'on voit sur la gauche du disque, descendant du petit lac situé à droite et
au-dessous delà mer Terbv ou lac du Soleil. Il était net et noir, 11 fut observe
1879 SCIIIAI'AIU-LM — TUIA .\(j UI. A I K ».\ A U KOii H \ IMI inUli. 335
jusqu'au 20 décembre, alors moins noir et plus large, M. Schiaparelli pense,
comme on l'a vu plus haut, ({u'il peut rtrc iJentilie avec la passe de Besscl de
la carte de l'roctor.
Pendant les observations de 1871), la région du Tharse a olïert plusieurs
fois des voiles blancs passagers, qui, s'ils ne sont pas dus à qucLjuc précipi-
tation météorique ou quelque efflorescence, ont été causés par des troubles
atmosphériques. Des blancheurs analogues se sont montrées sur un grand
nombre d'autres régions. Elles n'étaient pas aussi blanches (]ue les neiges
polaiies « niolti inferiore a quello dclle nevi polari ». Le "20 décembre, par
une atmosphère calme et pure, l'observateur a découvert une traînée blanche,
de 8" à 10" de largeur, traversant cette région du Tharse, allant du lac
I9U.
Traînée blanche traversant le canal rurluua et les deux Nils.
du Phénix au Xil double et paraissant se rattacher à un rameau des
neiges boréales (indiqué en pointillé sur la carte, vers le G5° degré de longi-
tude). Comme la vision était excellente, l'observateur chercha avec soin si
cette traînée blanche passait sur les Nils en les interrompant, ou si, au con-
traire, elle était interrompue par eux, comme de la neige fondue. Les Nils
n'étaient pas interrompus, mais leur largeur était notablement diminuée,
réduite à deux filets presque imperceptibles, comme on le voit sur le dessin
i/i'J- 190).
L'auteur ne cherche pas à expliquer le phénomène observé.
Il est difficile pourtant de se demander si ce ne serait pas là une traînée
de neige plus ou moins légère, d'autant plus qu'elle paraissait en rapport
avec une extension de la neige polaire boréale. Dans l'hypothèse que c'eût
été de la neige et que le Xil fût de l'eau, la neige aurait dil fondre et être
entièrement coupée par le Nil. N'aurait-elle fondu qu'au centre du cours?
Ou son éclat seul aurail-il cliuiiniié en apparence la largeur de ce cours par
irradiation? Ou bien encore, cette eau n'est-elle pas la même que la noire":'
Mais l'analyse spectrale paraît prouver cette identité^ Voilà éviden^ment
des questions (|ui peuvent être posées.
336
i.A im.am:ii; maks.
rendant celle opposiliou de KsTlK surloul on ukus. Ai\u\ re 1 cl AiLiyrc II
onl Ole éclalanles de blancheur, rivalisant avec la neiL^e polaire ahsolumenl
comme si ces deux régions eussent été couvertes de neige.
A gauche de la région de Deucalion, on a revu la forme scrpenLiiio des-
sinée par les anciens observateurs, notamment par Lockyer en 18G2 (p. 155),
Kaiser la même année (p. 174 et 181 :. Cet aspect, qui nexisle pas sur la
carte de 1877, est reconnaissable sur celle de 1871).
Sur celte même carte, au point G-2 n, le détroit illlcrschel est resserré par
un singulier étranglement.
• On peut remarquer sur le l-.'O"-' degré de longitude de la caite, au-dessous
Fitr. 101.
Fi-. 10-2
/
Mari, le 28 octobre l^i'.'J, a T'-U".
Mars, le -28 novembre 1870, à 8'' ■40"'.
Dessius de M. Scliia)iarelli.
d'une traînée grise à laquelle M. Schiaparelli a donné le nom d'Océan, un
petit cercle désigné par la qualification de neige olympique. C'est un point
blanc, qui a été observé neuf fois, minuscule'(une demi-seconde), mais aussi
blanc que la neige polaire. Tin voit ce point Ijlanc représenté plus haut dans
le dessin du 1 1 novembre.
Le canal des Ltestrigons, sur le 200'^ degré de longitude, ne païaîLpas avoir
changé de place, mais son embouchure, qui en 1877 aboutissait à l'extrémité
de la mer détachée de Mare Cimmerium par .Vtlantis II, aboutit en 1879 à
Mare Cimmerium elle-même. Ce sont les rivages et les plages qui paraissent
avoir subi là une variation considérable : comparez les deux cartes. Entre le
21 octobre 1877 et le 10 novembre 1879, le canal des La-slrigons est passé de
la gauche d'Atlantide II à la droite, par suite de la variation des rivages !
De tels changements sont d'une importance capitale pour nous éclairer
sur la vérilable nature des taches foncées et claires de la planète.
^ K
Klammahiun. — .V/.ir,s.
388 lA im.anCti: m vus.
Le Simoïs, très difficile h disi'iM-nor en 1877, a élc' en 1870 run des canaux
les plus évidents. Sa courbure est restée la même.
L;i péninsule de l'Ilespério a été moins facile à o])server en 1870 qu'on
1877. Elle paraissait légèrement ombrée.
Le canal des Ethiopiens et le Léthé ont élé pai-faiteintMit visibles, lundis
qu'en 1877 ils ne l'avaient été que difficib'ment : «Ils aboutissent sûrement
tous deux, comme la carte l'indique, au golfe des Alcyons, ainsi que l'Eu-
noslos : ce tracé est le véritable, celui de la première carte n'était pas sûr. >-
Toutefois, nous trouverons, sur les cartes à venir, que cette forme de TAlcyo-
nus Sinus n'est pas stable du tout.
La Petite Syrte, ou la baie de Gruithuisen, a paru, le 1*"" octobre 1879, sépa-
rée de la mer du Sablier ou Grande Syrte. par une région claire traversant
la mer Flammarion sur le 280'= méridien, comme l'avaient déjà observé
Lockyer, Kaiser, Rosse, Schmidt et Hurton.
La mer du Sablier a été observée sensiblement plus large en 1879 qu'en
1877. Cette fois-ci elle correspond mieux à l'aspect classique sous lequel nos
lecteurs l'ont vue passer devant leurs yeux depuis les premières pages de
cet Ouvrage.
C'est là un point fort important aussi pour nuire élude de la planète, pour
les idées que nous pouvons nous former sur sa constilution physique.
L'étendue de cette mer varie. Il n'y a ni tergiversations, ni faux-fuyants à
invoquer, pas plus que notre incompétence d'expliquer les choses incon-
nues. Celle variation est certaine, comme celles que nous avons déjà rele-
vées dans le cours de ces comparaisons, et plus encore, s'il est permis de
mettre des degrés dans la certitude.
Si les taches foncées de Mars représentenl des mers, ces accroissements
d'étendue correspondent à des inondations et conduisent à ponscr que ces
rivages (la gauche surtout de la mer du Sablier, le long de la mer Flamma-
marion) sont très plats.
Ces inondations durant plusieurs mois ne sont pas dues à des marées.
Pour éviter ces conclusions, il nous faudrait admettre que les taches de
Mars ne sont pas des mers. Ijien difficile.
Par suite de l'élargissement de la mer du Sablier sur ses rivages de gauche,
la mer Main, ou le lac du Népenthès, s'en est trouvée plus rapprochée en
1879 qu'en 1877, la pointe de terre que M. Schiaparelli avait baptisée du
joli nom de promontoire d'Osiris ayant à peu près disparu. Comparez avec
soin la carte de 1877 (p. 393) avec celle-ci.
L'Ausonie, qui correspond à la terre de Cassini et à l'île Dreyer, s'est mon-
trée, le 26 et le 28 octobre, traversée par une traînée grise (l'Euripe) variable
de ton et de largeur. C'est là aussi une formation variable, qui, la plupart
ISTlt SCIII M'AiU-IM ^ ()H^i;U VA I IONS. 3;{'.)
ilii temps, n'exisle pas. M. Schiaparclli ne l'avait pas vue une seule fois «mi
1877. Toutefois, M. Green l'avait vue une fois, le 10 soplomhro.
L'IIollade a paru très brillante, parfois aussi ficlalante (juc la neige, (l'ol
« 1 une tics régions destinées à donner les lurilleures infornialicjns sur les
changements apportés par les saisons dans les aspects de la planète ».
Neige polaire oiislrdh'rn 1879. —Les observations de la lâche jiolaire aus-
trale ont donné pour sa position 5",0di' (lisUinceau pôle géographi(iiit* *.'l V.)"~
de longitude. Kn comparant cotte détermination aux pi-cc<'denlcs. on a :
Distance iiu pi'ilc. I.niiu'itiKlL'. (ibservuti-iirs.
1830 G°,G '^l',') Bessel.
186"^ i ,3 1.3 ,5 l\;iiser. Lockyer, Linsseï-.
1877 5 ,G 2.T ..î Hall.Schiaparelli.
l.ST'.i .'■) ,0 V.) ,7 Schiaparelli.
Malgré les différences en longitude, on voit que la neige polaire australe.
lorsqu'elle est réduite à son minimum après l'été, occupe sensiblemeni l,i
même position aréographique.
Du 30 septembre 1879 au 9 mars 1880. l'auteur n'a pas fait moins de
180 observations de cette tache polaire australe. Elle a été réduite à son mi-
nimum (i") dans la seconde moitié de novembre, c'est-à-dire trois mois un
quart après le solstice d'été, qui était arrive le 14 août. Plusieurs irrégula-
rités ont été observées dans son conloiir. iiolaiument le :2-i octobre, par une
atmosphère admirable.
En admeltantque la diffraction augmente du doul)le le diamètre delaclif^
aussi brillantes que les neiges polaires de Mars, ces 4", réduits à -2", repr(.'-
sentent 120 kilomètres.
Xeige polaire boréale en 1879. — Pendant la durée des observations de
celle opposition, du 30 septembre au 24 mars, les neiges boréales paraissent
avoir ])assé par un maximum d'étendue, avec certaines fluctuations curieuses.
Elles ont envoyé six ramilications au cercle leruiinalour.
Le premier rameau a été observé au-dessous du Xil, à la longitude zéro,
Sa distance au pôle paraissait inférieun^ à 20°.
Le deuxième a été observé également au-dessous du Xil, vers 0.")" de lon-
gitude. Il paraissait s'étendre jusqu'à 30" du pôle noid.
Le troisième a été vu vers la longitude UQ^età la dislance poLiire de 30".
Paraît n'être pas sans connexion avec la neige olyuqiique.
Le ({uatrième se trouvait à la longitude 155" et atteignait le 30" cercle de
distance polaire.
Lecinquième avait jiour longitude |89" et pour ilislance au pôle ■29".
o-,." l.A lM.ANi;ii: MAIJS.
Lr M\i''iiii- «1.111 !«• plus large de tous, s'tMoiidaiU du i^lK au .'100" méri-
dien, soit sur 70 deirrés de Ioni:iludc, jusqu'à '.W d(\c:i-os environ de dis-
tance au pôle nord.
Ces six ramifications allongeaient donc les neiges polaires boréales, en
certains points jusqu'à 3(1» cl même 8(5 " de distance polaire, c'est-à-dire jus-
qu'au 6W et au 54'' degré de latitude. Les neiges polaires terrestres peuvent
être considérées comme se prolongeant aussi parfois jusque là, en hivei-,
en Sibérie.
D'après ces mêmes observations, c'est au milieu de novembre, soit trois
mois après le solstice d'biver boréal que ces neiges auraient été le plus éten-
dues. Ensuite elles diminuèrent. Le minimum de la tache polaire australe
et le maximum de la boréale arriveraient donc à peu près en même temps,
comme la théorie semblait naturellement l'indiquer d'ailleurs.
Telles sont les splendides observations faites sur Mars parl'éminent astro-
nome de Milan pendant l'opposition de 1879 et les conclusions qui peuvent
en être déduites. I/opposition suivante, de 1881-1882, sera plus riche encore.
('-. 1879. - Satellites de Mars. Observations et mesures.
A la séance de l'Académie des Sciences du 10 novembre 1879 ('). M. Asapb
Hall a fiiit part de ses observations nouvelles des satellites de Mars. En compa-
i-ant les positions mesurées à celles qu'il avait calculées d'après ses éléments
de 1877 [voy. p. 2.58), il trouva pour Phobos une différence légère de — l\07'i
dans sa période, qui devient ainsi :
7'' .^g-" 1.3% 996.
Parmi les observations faites sur les satellites de Mars, nous signalerons
d'abord, outre celles de l'auteur de la découverte, M. Asaph Hall, à Washing-
ton (*), celles de M. Common, à son Observatoire d'Ealing, près Londres, à
l'aide d'un télescope de 36 pouces d'ouverture. Grossissements 220, 240 et
380. Nous ne donnerons pas les positions déterminées, car elles n'ont rien
à faire ici. mais nous donnerons les résultats relatifs à l'éclat et à la colora-
tion de ces petits globes (').
Deimos paraît avoir Téclat d'Encelade. Phobos paraît un peu plus brillant
que Téthys. Mais le caractère de la lumière e.st différent. Tandis que les
satellites de Saturne offrent une clarté tranquille, ceux de Mars ont plus
d'éclat, sont plus étincelants, presque stellaires. Cet aspect peut être dû à
l'absence de tout disque apparent ou au contraste avec le plein éclat de
(') Comptes rendus, 1879. t. ff. p. lit;. — ') Monttibi Notice^, mars 1880, p. 272. —
{=) /'/., <Jéc. 1S79, p. 95.
IS7'J SATI:LI,I I KS l)K M A us. 3il
Mars, Deiiiios paraît légèrement bleuàti-.-; IMioltos |»r(;s(|uc blaiic. Ils m; ii.ir-
tagent pas la coloratidii de Mars.
M. ('omnion a essayé de photograpliicr Mars, mais sans oIil"iiir aucun
détail l'j.
A rObservaluiic du (Injenwicl), ou a pu observer le sreoud satellite, à
l'aide du grand équatorial de IJ pouces j d'ouverture, mais jamais le pre-
mier [■ . Ou a pris quelques dessins de la planète.
Ou connaît le ;4rand télescope de l'Observatoire de Melbourne, dont le mi-
roir ne mesure pas moins de l'",.?0. Dirigé sur Mars en iH77, il fut impos-
sible de découvrir aucmi satellite. En 1879, cependant, on a pu observer le
satellite le plus éloigné ^';.
Kn novembre 1879, à l'Observatoire d'Oxford. M. PI mu mer a pu observer
le satellite e.xtérieur à l'aide de l'équatorial de 12 pouces -;, armé d'un gros-
sissement de 125 (■•).
.\ Princeton (Etals-Unis), MM. Youuj.j et brackett ont pris des mesures mi-
crométriques des deux satellites (^;. Équatorial de 9 pouces h A l'Observa-
toire de Harvard-Collège, M. Pickering n'a pas fait moins de 207 séries de
mesures ('',.
D'après les observations de M. Pickering ('), Deimos aurait été plus bril-
lant eu 1879 qu'en 1877, et plus brillant sur le côté suivant ou oriental de
son orbite que sur le côté précédent ou occidental. Il va plus d'observations
du premier côté que du second. Le diamètre de ce satellite paraît être de
G milles, et celui de Phobos de 7 milles, d'après les mesures photométriques.
Deimos n'est pas rougeàtre, mais bleuâtre.
CI. 1879. — G. 11. D.xKwiN. 1). KruKwoon, K. Ledgei; -SalellUes de Mars,
marées et période de rotation
Une planète lluide prendrait une forme sphéroïdale sous riniluence de sa
rotation.
Mais si un satellite tourne dans une orbite circulaire autour de la planète,
dans le plan de son équateur, il se produira des marées telles (jue le sphé-
roïde sera déformé en un ellipsoïde à trois axes inégaux, le plus grand axe
de ICquatcur restau! toujours dirigé vers le satellite.
.Vinsi la figure de la planète tourne avec le satellite, tandis que chaque
nxtlécnle du fluide tourne av(,'(; la planète. Il en résulte, par ronséciuent.
[') Monlhly Notici's. février 1880, p. '2-26. — (0 /(/., janvier I88U, p. l(Jl. — (') Id., fé
vncr 1880, p. V,l. — /) /((., mars 18S0, p. 292. — {■') The 06.s<'riMMn/, janvier 1881»,
p, 270. - ;M Aali'on. Nnrltrirlilci. ii" 2312. — (') AnnuU of Ihii'caril-Collcijc Obser-
rnlonj, t. XI, part. II. — (' The (Jhseraitovu, juillet 187'.». \>. 7'.i.
34Î 1-A im.\m:ti; .mah>.
une élévation ri un abaissement deux l'ois par cha(|ue rc'vulution do la pla-
nele relativement au satellite.
Maintenant, supposons que le fluide soit soumis à un frottement. Alors,
les particules de lluide qui arrivent à cet instant à former hi protubérance
équatoriale ne peuvent pas retomber aussi vite qu'elles le faisaient avant
(jucle frottement cxislàl. Le plus grand axe do ré(iuateur se met <mi avance
sr.r le satellite.
La Terre a commencé par être Uuidc, et, dans le cours de son refroidis-
sement, elle est devenue vis(|ueuse et a donné naissance aux frottements
dont nous venons de parler. MaiuliMianl. elle esl probablement pâteuse,
presque solide, et n'a sans doute plus de marées internes.
Si le lluide formant la Terre avait été sans frottement, les protubérances
équatoriales causées par l'attraction de la Lune seraient restées en ligne
droite avec la Lune. Mais ce frottement modifie cet état primitif, et par con-
séquent la Lune exerce ses forces sur les protul)érances, qui tendent à les ti-
rer en arrière. Depuis (jue l'axe protubéranliel de l'équateur pointe toujours
• •a avance de la Lune, celle-ci exerce un frein sur le mouvement de rolation
diurne, et, réciproquement, la Terre a pour tendance d'accélérer le mouve-
ment de la Lune. Le premier résultat est un i-alentisseraent du mouvement
(b- rotation de la Terre. Le second est une accélération de la vitesse linéaire
de la Lune sur son orjjite et une augmentation de sa distance.
Les deux résultats sont un allongement de la durée du jour et du mois,
surtout de la première, dans la condition actuelle de la Terre et de la Lune.
Delaunay et Adams étaient déjà arrivés à une conclusion analogue, quoique
ne l'attribuant qu'au frottement des marées extérieures, des marées océa-
niques.
M. G. -M. Darwin considère surtout, et même exclusivement ici, les ma-
rées internes anciennes.
Dans l'état actuel des choses, le taux de diminution de la vitesse angulaire
de rotation de la Terre est beaucoup plus grand que celui de la vitesse an-
gulaire du mouvement orbital de la Lune. Si le premier était exactement
27 I fois plus grand que le dernier, le jour et le mois auraient été réduits
autrefois dans la même proportion. On trouve que, lorsque le jour était de
1.5 heures et demie, le mois devait être de 19 jours.
L'auteur calcule qu'à une certaine époque, le jour a dû être de GT^U'", et
qu'alors le mois n'était que de 1 1 jours et 14 heures. Cet énorme changement
aurait pu s'effectuer en 5G millions d'années.
En remontant plus haut encore, M. Darwin arrive à une époque à laquelle '
le jour et le mois étaient identiques, 5 heures et demie seulement. Alors la
Lune était très proche de la Terre, à 80U0 kilomètres seulement, d'une surface
IS70 SATKI.I.ITKS DK M VUS. ;ii:î
à l'autre. Anléricuremenl, elles oui pu »Hre presque en contact. En fait, 1.»
Lune sorait née de l;i Toitc. par la force centrifuge de rotation, s<.'lon la
lliéoric lie Laplacf.
Si, au lieu de remonter dans le passé, nous anticipons sur l'avenir, nous
tn)uvons que, d'après les mêmes principes, le mois et le jour tendent à de-
venir égau.x et à durer 50 de nos jours actuels.
L'auteur termine son mémoire en remarquant que le " satellite anormal «
de Mars — le plus proche — qui tourne plus vite que la planète « olîre une
confirmation de ces vues, car il semble probable (lue sou extrême petitesse
l'a conservé comme un témoignage durable de la période |iriniitive de la
rotation de Mars autour de son axe ».
.V cette théorie du mathématicien anglais sur l'(;v<dutioii des satellites el
surtout à son application au premier satellite de Mars, M. Iiaiiiid Ivirkwood.
l'astronome américain, a répli(j[ué dans les termes suivants (' :
La masse du satelHtc intérieur de Mars est à celle de uotre Lune (approximati-
vement) dans le rapport de 1 à 30 000 000. Par conséquent, il ne peut produire
aucune marée sensible sur la planète. C'est, en fait, de cette absence de marées
((ue ^L Darwin infère la distance constante du satellite. Alors, quelle est la cause
qui a allongé la durée de rotation de Mars de moins de 8 heures à près de 25?
M. Darwin a réjiondu '-) :
Mon mémoire n'est qu'un extrait d'un long travail, actuellement sous presse.
Je puis cependant répondre à la questioa posée par M. Kirkwood, conunent la
théorie des marées explique le fait que le jour martien est plus long que le mois
du satellite intérieur, qu'un tel résultat dérive nécessairement des effets du frot-
tement des marées solaires. J'espère pouvoir étudier numériquement le cas parti-
culier de Mars.
D'autre part, à propos de cea satellites, M. E. Ledger a étudié les marées
et les éclipses qu'ils peuvent causer à la surface de la planète (^). « L'exiguïté
de leur nuisse, dit-il, nonojjstant leur proximité, interdit la formation de
marées sensibles, et ils ne jouissent pas de la propriété (jui leur a été ima-
ginée d'empêcher la stagnation des mers martiennes. » Ouant à leur lumière,
im peut estimer à ^\, de celle de la Lune celle du premier satellite, et celle
du second à une clarté vingt l'ois plus faible, soit «i^. C'est peu. Phobos reste
sur l'horizon d'un lieu donné pendant 5 heures et demie à la fois, sur les-
(juelles il peut être éclipsé pendant 53 minutes. Deimos reste au-dessus de
l'horizon pendant GO heures de suite, pendant lesquelles se produisent deux
éclipses, et quelquefois trois,
(') The Observalorij, seplemhw: 187'J, |i. Ii7. ■;/'/.. novembre 187'J, p. iO'i —v'^ /(/., no-
vembre 1879, p. l'Jl.
;U4 LA PI.AM-TK m a II s.
CM. 187'.). — .l.-C. Adams. I'. TlssiciiAM) — liirUnnisnn (Irs siihllilis ^').
Lct^ orlnles des deux satellites do Mars soûl légeieiueiit iacliiiées sur le
plau de lôquatcur de la plauète. Le professeur Adams s'est demandé si cet état
de choses est peruiaueut. Le plau de l'orbite de Mars est incliné de 27' à 28°
>ur son équateur. Si donc les jdaus des orbites des satellites conserventuue
inclinaison constante sur l'orbite de la planète, comme il arriverait si la
force perturbatrice du Soleil était la seule tendant à altérer ces plans, leur
inclinaison sur le plan de l'équateur martien, et encore plus leur inclinai-
son l'un sur l'autre, deviendrait, avec le temps, considérable.
M. Marth a calculé (-) les mouvements des nœuds des orbites des satel-
lites sur l'orbite de la planète dus à l'action solaire et a conclu que, s'il n'y
a aucune force dépendant de la structure interne de Mars qui contrarie ou
modifie l'action solaire, les nœuds des orbites seront en opposition l'un sur
l'autre dans un millier d'années, et alors l'inclinaison mutuelle des orbites
des satellites s'élèvera à 49^
Dans ce cas. la presque coïncidence actuelle entre l'équateur et la planète
et les plans des orbites des satellites serait fortuite et passagère. Mais c'est
bien improbable.
S'il n'y avait aucune force perturbatrice extérieure, l'aplatissement d'une
planète ferait rétrograder les nœuds de l'orbite d'un satellite sur le plan de
l'équateur de la planète, tandis que l'orbite conserverait une inclinaison
constante sur ce plan. Laplace a montré que, si l'on prend en considération
à la fois l'action du Soleil et l'ellipticité de la planète, on trouve que l'orbite
du satellite se meut de manière à conserver une inclinaison presque con-
stante sur un plan fixe passant par l'intersection de l'équateur de la planète
avec le plan de l'orbite de la planète, et se trouvant entre ces pdans, et que
les nœuds de l'orbite du satellite ont un mouvement rétrograde presque uni-
forme sur ce plan fixe.
L'auteur entre dans le détail du calcul appliqué aux satellites de Mars et
étudie l'eiTet de l'aplatissement delà planète sur les orbites de ses deux sa-
tellites. Il trouve que le mouvement des nœuds des orbites des satellites
produit par l'ellipticité de la planète surpasse de beaucoup celui qui peut
être produit jjar l'action du Soleil, de sorte que les plans fixes pour les deux
satellites sont seulement légèrement inclinés sur l'équateur de Mars.
D'après les mesures du diamètre de la jjlanète et des jjIus grandes élon-
■ ; Un the ellipticity of Mars, and ils effect on tite 'inolionof Ihe satellites {Monlhly
.Vo/ices, novembre 1879, p. 10).
,' Afilronomische Xnchrichlen, \i° 2280.
1870 .l.-C. .\I)AM>. - INCLINAISON l)i:S S ATliU-liKS. U:^
f,Mlions (les salelliLcs, combinées avec la poriodc de rolatiou de Mars et les
révolutions des satelliles, on trouve que le rapport delapesanteur à la force
cnitrifu^M' à réqualcur dr Mars est denviinii .^î^,^. 11 suit du là que, si la pla-
nète était homogène, son aplatissement serait d'environ -,4-j. Si, au lieu
d'être homogène, la densité varie suivant la même loi que celle de la Terre,
de telle sorle que la diirérence entre l'aplatissement et le rapport entre la
force centrifuge et la pesanteur soit la même (jue pour la Terre, laplatisse-
semcnt serait ,1^. Selon toute judlKiMlité, il est entre ces ileux limites.
M. Ailams a calculé la Table suivante des mouvements aunuelsdes nœuds
des deux satellites, causés par l'action solaire et par l'ellipticilé de la pla-
nète, pour les valeurs précédentes de l'aplatissement, etmême pourj^î », trouvé
par jvaiser, (juoiiiue celle-ci soit certainement trop forte.
Satellite l.
Muuvoiiieul annuel du nœud du à l'action solaire :
Satellite 1 O.Ot). Satellite II O'.'îi
Pour l-elliplicité j|g, jl^, ^k'
le niouvemenl annuel du nu-ud dû à cette ellipticité serait
Satellite 1 333° lis;.!'' 113*
Satellite II 13", 4 7«.3 4°, 5
et les inclinaisons correspondantes du plan fixe à l'équateur de la planète.
Satellite 1 17" 31" 50"
Satellite 11 '27' 50' l-TJ'
Un voit, par cette Table, que l'orbite du premier satellite conserve une
inclinaison constante sur un plan incliné de moins de 1' sur celui de l'équa-
teur martien, et que l'orbite du second satellite conserve aussi une inclinai-
son constante sur un plan incliné qui ne peut guère dépasser plus de 1° celui
du même équateur.
L'aplatissement de Mars produit aussi des mouvements rapides dans la
ligne des apsides des orbites des satellites, particulièrement pour le premier,
et peut-être môme un jour pourra-t-on déterminer l'aplatissement par ce
mouvement.
M. Tisserand est arrive aux mêmes conclusions que M. Adams i'). Les
satellites sont maintenus presque dans le plan de l'équateur par l'ellipti-
cité de la planète. Telle est aussi l'opinion de M. Hall [*]. Voici la note de
M. Tisserand.
Les deux satellites se uieuvent à très peu près dans im luèine plan, tpii
\' ) Comptes remlKS. 8 décembre i.S7'J, p !>(il.
'] Monthlij Xolices. mars IHiSO, p. "278.
;^46 I A l'I.ANKTI-: MAUS.
iliffOre pou du plan do réquatour do la plauèto. La prosquo oo'nuMdeucc do ocs
trois plans ost-ollo fortuito. on liion ddil-ello exister toujours? C'est là une (lues-
tiou intéressante qui a cHé traitée en partie par M. Adani.s à la Société royale
astronomique de Londres (14 novembre ITT'J). Je me suis proposé de reprendre
par une autre analyse la question traitée par le savant directeur de l'Observatoire
lie Cambridge, et je crois être arrivé ;\ des conclusions plus précises, malgré
l'incertitude dans laquelle nous nous trouvons encore relativement i\ la vraie
position de léquateur de la planète Mars. L'analyse dont je parle m'a déjà servi
dans une étude relative à l'un dos satellites de Saturne.
.lusqu'ici, les observations n'ont pas permis de découvrir ilans la planète Mars
un aplatissement sensible; si cet aplatissement était tout à fait nul, par le lait des
perturbations provenant du Soleil, les plans des orbites de Pliobos et Deimos,
étant supposés coïncider à un moment donné, finiraient par s'éloigner l'un de
l'autre dune quantité considérable. Je vais montrer qu'en supposant la loi des
densités dans l'intérieur de Mars la même que dans l'intérieur de la Terre, et
en lui attribuant par suite un aplatissement que les mesures directes ne peuvent
pas mettre en évidence actuellement, les plans des orbites des deux satellites ne
^'éloigneront jamais que très peu du plan de l'équateur de la planète. Pour cha-
cun des satellites, la force perturbatrice R proviendra de l'action du Soleil et de
celle du renflement équatorial de Mars; je ne m'occuperai ici que des inégalités
séculaires. En vertu de ces inégalités, on a l'intégrale R — const. Eu négligeant
les excentricités des orbites des satellites, (jui sont extrêmement petites, sinon
nulles, l'intégrale ci-dessus peut s'écrire
( I ) K cos=Y K' cos'y' — C,
où K et K' ont les valeurs suivantes :
l K r :|M -,
[i)
aUl-eï
1^' ï'^ttIp-Ô-?^
en désignant par M la masse du Soleil, m celle de Mars, a le demi-grand axe de
l'orbite du satellite, a' le rayon équatorial de Mars, ao le demi-graud axe de l'or-
bite que décrit Mars autour du Soleil, Co l'excentricité de cette orbite, p l'aplatis-
sement de la planète à sa surface, et 'f le rapport de la force centrifuge à l'attrac-
tion pour les points de l'équateur de Mars; enfin, 7 désigne l'angle que fait l'orbite
du satellite cousidéré avec l'orbite de Mars, et ■;' l'angle de la même orbite avec
le plan de l'équateur de lu planète.
Le terme Kcos^y provient de l'action du Soleil; le terme K'cos^y' est dû à
l'action du renflement équatorial de Mars. Si l'on n'avait égard qu'à l'action du
Soleil, on aurait 7 — const.; l'orbite de chacun des satellites ferait un angle con-
stant avec l'orbite de Mars. Si l'on ne tenait compte, au contraire, que do l'apla-
tissement de la planète, cette orbite ferait un angle constant avec l'équateur de
Mars. En tenant compte des deux actions, le pôle de l'orbite de chacun des
1879 F. TISSKUAM». - I NCI,! N A 1S(1N DKS S ATKIJJT KS. 347
satellites décrit vino ellipse sphérique; c'est une conséquence de l'équation ( 1 ).
Cherchons à cvaluei* le rapport -p- ; on tire de {'l)
en appelant u cl /ly les moyens mouveiueuts du satellite et de Mars; no et eo sont
bien connus; n et n ont été donnés par M. Hall pour les doux satellites; enfin je
prendrai, d'après un mémoire de M. Ilartwig, où il est tenu compte de toutes les
déterminations antérieures, 2a' = '.)',3ô2, correspondant à une distance de Mars
au Soleil égale à 1 .
L'expression (3) me donnera
' K'
l -T^ - ; 3,91061) (p— ! ?1 pour D-'inics,
(4) ^ ^
( ^ = (3,99005) .^r,- \<f] |)our Pliobos;
(i se détermine aisément avec les données ci-dessus et en ayant égard à la valeur
bien connue de la durée de la rotation de Mars; on trouve
Jusqu'ici, il n'y a rien d'hypothétique; je vais faire maintenant deux iiypo-
thèses :
Hypothèse 1 — Mars est homogène; alors, p ^ Vf. (Ju déduit de ( i) et (û)
K'
log-gr = l.'iijG? pour Dcimos,
iv
K'
log -rr = 3,52570 pour Phobos.
llijljothèse II. — La loi des densités est la même à l'intérieur de la Terre et
de Mars; ou en conclut
f »,
pi et 'il désignant les valeurs correspondant à p et o dans le cas de la Terre; il
en résulte
et ensuite
log-rr 1, ■23000 pour Deimos,
log -r- 3,31654 pour Piiobos.
Soient, sur la sphère, D le pôle boréal de l'orbite de Mars, D' celui de son équa»-
leur, M celui de l'orbite do l'un des satellites; soient, en outre, DD'= A l'angle
de l'orbite et de l'équateur de Mars, et C un point situé sur lare de grand cercle
D'D et déterminé par l'équation
G tang2i-r- ; ^r ' oi» i =; CD .
"^ K K eus 2 A
348 LA !M..\m: 1 i; m a us.
Le point C soni le rentre de l'ellipse sphcM-jinio ([ui siM'a il(*ci'itc p;ir li' pùle M ; (Ui
voit inuiiLHliatoment (pie, peur les deux siitellitos, dans les di'iix li\ inilhèses eoii-
sidérdes, -tt- t'tant irraiul. le point C sera veisin du point I)'.
Soient '? ;' et '2p' le irrand axe et le petit axe de l'ellipse ; en désignant y,, et y'o les
valeurs initiales de •; et-;', par HelN des angles auxiliaires ddlinis par les lorniules
(•) sin2 n -- T.- ,. , sinA,
K -+- Iv
;8) sin'N ^^^^,>±]^:fi}li:!
k -+- k
i»n aura
cosl3 ^ cos2B
l'J) cosp =3, cos2p - —
La grandeur du rapport -j^ l'era que l'angle H, tiré de la loruiule (7), sera tou-
jours petit; les formules (9) montrent que p' et p" seront pou dilTërents. Imi l'ail.
si l'on calcule p' et p" d'après les positions assignées à l'équatcur de Mars par
divers observateurs, on trouve que la différence p'— p" n'atteint qu'un petit nombre
de minutes d'arc. Nous pourrons admettre, en résumé, avec une précision actuel-
lement suffisante, que le point M décrit uu petit cercle ayant pour centre le point
C défini par l'équation (C) et pour rayon la valeur de p' déterminée par l'équation
suivante :
(10) cos2p ^ - '" '" - .
V (K -T- K')^— 'iKK' sm^A
Si l'on a p' ^ i, la valeur de •(' sera comprise entre les limites p' — i et p'~ /,
qui diffèrent de 2 i.
Si l'on a p' < (', la valeur de y' sera comprise entre les limites i — p' et i -.- p',
qui diffèrent de 2p'.
J'ai effectué les calculs en prenant, pour déterminer la position de l'équateur
de Mars, les nombres fournis par les observations de W. llerschel, par les obser-
vations de Bessel calculées par Oudemans, et enfin les nombres indiqués par
M. yiarth {Monthly Notices, vol. XXXIX, p. 473) (' ). Les positions correspondantes
de l'équateur de Mars diffèrent notablement; toutefois, dans les trois cas, j'arrive
à des conclusions peu différentes. Soient •;! et yô les limites inférieure et supé-
rieure de l'inclinaison de l'orbite de Deimos sur l'équateur de Mars. J'ai trouvé
les résultats suivants :
Ilypolluise I.
Horscliel. Oudemans. MarMi.
Y, 4", 9 2", 7 .0,1
V, C .r, 'r .'( I .'i
Y2-Y; 1 - 1%' 1".3
('> Les nombres d'Herschel et de Bessel sont publiés pins haut; ceux de M. Martli
sont : inclinaison du plan de l'équateur de Mars sur celui de la Terre ^ 3G°,2G0;
nœud = -'t7"/J45.
i.-^TO l'ASSAiiK 1)1-: LA ii-inu-: i)i:v\Ni i,i-: soi.i-ii.. :uo
llypollu'sr
//.
lIlTSi-ll.-l.
iiii
li-'iiaïK.
Martii.
. 3°, 9
l",!)
()• ,2
G ,7
i ,3
2 2
ri— V, 2",X 2",0 2*.0
On voit quo, dans tous les cas, rinclinaison do l'orbite do Deimos sur IV'quatciir
do Mars ne peut osciller qu'entre des limites distantes seulement de 3° au plus.
Pour riiobos, les limites sont encore plus restreintes.
Concluons donc que, si Mars est homogène ou bien si dans son intérieur la loi
des densités est la même que pour la Terre, les 07-bites des deux satellites coïn-
cideront toujours avec léquateur de Mars, ou, du moins, ne s'en écarteront
jnmais que do très petites quantités.
La morne chose aura lieu évidemment si l'aplatissement <]o Mars est compris
entre los doux limites qui répondent aux hypothèses I et II.
cm. 1879. Passafjc de la Terre devant le Soleil pour les habitants de Mars.
A tous ces documents martiens nous pouvons ajouter le suivant, qui u(Tre
un intérêt d'un autre genre.
Le jour do l'opposition de Mars en 1879, le Soleil, la Terre et Mars se sont
trouvés si parfaitement on ligne droite que la Terre et la Lune se sont pro-
jolées devant le disque du Soleil pour les habitants de Mars, comme Vénus ol
Mi-rcuro lo font quelquefois pour nous.
Voici, d'après les calculs de M. Martli. les conditions dans lesquelles ce pas-
sage s'est opér(' :
KNTRKE.
.SORTIi;.
12 no.-. .
heure lU-
Greenwioh.
Aiijrlc
de
l>ii$itioii.
!•.' iiiiv.
heuru <lc-
GreLMiNvich.
Aiii.'le
.lu
position.
iM'.r
125». 7
Contact externe de C-
!V' 40-
225% 3
Contact interne de C •
1 55
12G .i
■' interne de C.
'J 40
226 .1
externe de C
'i m
123 .3
externe de Ô-
U 39
225 .9
» interne de c! .
i 37
125 ,'.J
interne de Ô.
12 n
228 ,5
■> externe de ô.
Le rayon apparent du Soleil, vu de Mars, était de 650", 5, celui de la Terre
de 18". I. et celui de la Lune de 4". 9. Les angles sont comptés du point du
disque solaire marquant la direction du pôle nord de lorhite de Mars.
Ce passage ne serait ])as visible à l'œil nu pour des yeux analogues au.\
nôtres. Quand Vénus passe devant le Soleil pour nous, son disque mesure
H(i" de diamètre; celui de la Terre ne mesure ici que 36". Mais un instrument
d'optiijue grossissant 1res pou snflirail pour l'apercevoir.
3Ô0 I. A IM.AM-.Ti: M A lis.
lu iiluMiomèin' analogue esl ariivr le 8 uovomlu'L' 1800 cl se lOjiioduiia en
mai lOOô et en mai 1984.
Les passages de Mercure et Vt^nus devant le Soleil pour Mars sont beau-
coup plus fréquents, mais ils n'ont pas la même importance : Vénus est sen
siblement plus petite que la Terre (vue de Mars) et Mercure est plus minus-
cule encore.
Au mois d"avril I88G, il y a eu un passage de Mars devant le Soleil pour
Jupiter.
Opposition de 1881-1882.
Pendant cette opposition, Mars est resté plus éloigné de la Terre que pen-
dant celles de 1877 et 1879; mais cet éloignement a été en partie compensé
par la déclinaison plus boréale de la planète, lui permettant de s'élève;-
davantage au-dessus de notre horizon. L'hémisphère nord de Mars se pré-
sentait mieux à notre vue, la latitude du centre du disque étant -4- 1" e:i
novembre 1881 et le pôle nord étant à l'intérieur du disque, à 7° du bord.
Mais cette inclinaison diminua assez vite, car, au commencement de dé-
cembre, elle descendit à .5" et, à la fin de ce mois, le pôle nord cessa de nou-
veau d'être visible, l'équateur occupant le centre du disque au moment de
l'opposition. P^n janvier et février, la planète se présentait à peu près de
face, et Ton voyait semblablement les deux pôles.
D.\TE DE l'opposition : 2() DÉCE.MBllE.
Présentation de la planète :
Le pôle austral est encore incliné vers la Terre, mais le pôle boréal arrive.
A la date du G janvier, le plan de l'équateur de Mars passe par la Terre.
Latituilf Diamètre Phase
4n rentre. ;if)parent. i /.one manquant).
•22 octobre 1881 6%7 10", 7 1",2
26 décembre ( 0pp. -1,5 15,5 0 ,0
G janvier 18«2 0,0 14.9 0,1
1" févric" - 2 ,0 12 ,0 0 .G
27 » 0,0 9.4 0,8
21 mars —.3,4 7.7 1,2
CALENDRIER Di: M.VRS.
Hémisphère austral Hémisphère boréal
ou sui)érieur. on inférieur.
1" juillet 1881 Solstice d'été. Solstice d'hiver.
8 décembre 1881.... Équinoxe d'automne. Équinoxe de printemps.
25 juin 1882 Solstice d'hiver. Solstice d'été.
18«l W l.llU - I, \ IM.ANKTI- MAUS. 3.M
r.W. 1881 . — ^^'En^. La planète Mars [^\.
Cet observateur snij^nciix et érriv.iin distingué, avec leciucl nous avons
déjà fait connaissance (185G, p, 130; 1873, p. 222), et ijuc la Science a eu l.i
douleur de perdre il y a quelques années, a consacré un chapitre de son
excellent Traité à la planète dont nous écrivons l'hisloiro. Ce chapitre est
illustré de la carte de Burton et Dreyer, publiée plus liant (1879, p. 317).
Il remarque entre autres l'analogie de ce monde voisin avec celui que nous
habitons et le considère, sans une trop grande témérité, comme habitable
par la race humaine. Pour lui, les taches sombres sont teintées d'un gris
bleu et représentent des mers, les régions claires et jaunâtres représentent
des continents. La proportion de terres étant relativement plus grande que
sur notre globe, <( l'aire habitable peut être beaucoui» plus étendue que
le diamètre ne le ferait supposer ». Les mers paraissent en communication
les unes avec les autres par d'étroits canaux, dont l'observation pourtant est
si difficile que l'on ne peut encore rien affirmer de certain à leur égard.
Peut-être sont-ce seulement les bords de régions faiblement teintées. Les
cartes de Mars ne doivent être considérées que comme approximatives et
provisoires. Les neiges polaires sont très éclatantes et varient avec les sai-
sons. Parmi les observations curieuses, Webb en cite une de Ward, du
22 décembre 1879, dans laquelle le lac circulaire (mer Terby) se mon-
trait aussi noir et aussi nettement défini queTomLi-e des satellites de Jupiter,
quoique la définition générale de la planète fût, à cette heure-là, très mau-
vaise. Quant aux variations de tons foncés ou clairs observés, l'auteur pense
que les nuages vus de l'extérieur doivent toujours réiléchir une lumière
plus vive que les terres ou les eaux. C'est là une question fort importante et
assez épineuse pour l'explication des variations observées.. 11 semble bien,
sans doute, que des nuages vus d'en haut, éclairés par le Soleil, doivent
toujours paraître blancs, et nous les avons toujours vus ainsi en ballon.
Cependant, ne pourrait-on imaginer des brouillards composés de particules
sombres? La fumée de certains charbons de terre ne donnc-t-elle pas nais-
sance à des fiocons gris, parfois presque noirs?
CV. 1881-82. -- ScuiAi'ARELLi. Ohservalions et dessins.
L habile astronome de Milan a continué pendant cette opposition la série
(le ses étonnantes découvertes, et celte fois il passa de merveille en mer-
veille, comme nous allons le voir.
(') Celeslial objectfi for common télescopes. Fourth édition. Loiidon, 1881.
35? 1 \ im.\ni:ti: m mis.
I/cnsomble de ses obsorvalions do colto ép^qui' m- fui imlilic iiu'ou 188(1.
dans un troisième mémoire, faisant suite aux deux premiers analysés plus
haut. Mais, dés le milieu de Tannée 1882, il lit connaître, par l'Académie ro-
maine des Lincei, le fait le plus curieux de cette nouvelle série : le dédou-
blement des canaux de Mars.
Voici ce premier résumé, tel que nous nous sommes empressé de le pu-
blier nous-mémt^ 'M sous la signature de l'illustre astronome, d'api-és l'envoi
qu'il avait bien voulu nous adresser.
Rappelons que la date de cette opposition était le "26 décembre.
« La dernière opposition de Mars a pu être observée à Milan en d'excel-
lentes conditions météorologiques. Octobre et novembre ont été peu favo-
risés, mais nous avons eu, du 26 décembre 1881 au 13 février 1882, cin-
quante jours particulièrement beaux. Les hautes pressions atmosphériques
qui ont dominé à cette époque ont produit une série de belles journées,
calmes et sereines, extrêmement favorables pour les observations. Pendant
seize jours on a pu utiliser toute la puissance de notre excellent équato-
rial (*), et pendant quatorze autres jours l'atmosphère n'a laissé que fort
peu à désirer. Aussi, quoique le diamètre apparent de la jjlanète n'ait pas
atteint IG", tandis qu'il avait dépassé 19" en 1879 et 25" en 1877, il a été
possible, dans cette troisième période d'opposition observée par moi, d'ob-
tenir sur la nature physique de ce monde un ensemble de renseignements
qui surpassent, par leur nouveauté et leur intérêt, tout ce que j'avais ob-
tenu précédemment.
» La série des mers intérieures comprises entre la zone claire équatoriale
et la mer australe s'est montrée mieux dessinée qu'en 1879. Dans la mer
Cimmérienne, on voyait une espèce d'île ou de traînée lumineuse qui la
partageait dans sa longueur, ce qui lui donnait de l'analogie avec l'aspect
de la mer Erythrée. La mer Chronienne a subi des modifications très nola-
])les depuis 1879. Plus surprenante encore est la variation d'aspeet présentée
par la grande Syrte qui a envalii la Libye et s'est étendue, en forme de ru-
ban noir et large, jusqu'à 60° de latitude boréale. Le Népenthès et le lac
Mœris ont augmenté de largeur et d'obscurité, tandis qu'il restait à peine
quelques vestiges du marais Coloé, si visible sur la carte de 1879. Ainsi,
des centaines de milliers de kilomètres carrés de surface sont devenus
sombres, de clairs qu'ils étaient, el. ;'i l'inverse, un grand nomljre de régions
{'; L'Astronomie, Revue mensuelle d'Astronomie populaire. !" année, 1882, août.
p. 126.
{'] Objectif de Merlz. de Munich, de 0'",218 de diamètre et de 3"", 25 de longueur fo-
cale; oculaires grossissant 322 fois et '(68 fois.
IS8I-S-2 Sr.lllAl'.VlMJ.I.I. - OIJSliUN A 1 IONS Kl Dl-SSINS. 353
foncées sont devenues claires. De telles métamorphoses prouvent que la
cause de ces taclies foncées est un agent mobile et variable à la surface de
la planète, soit de l'eau ou un autre li(|uide, soit de la végétation, qui se
propagerait d'un point à un autre.
» Mais ce ne sont pas encore 1;\ les observations les plus intéressantes. 11 y
a sur cette planète, traversant les continents, de grandes lignes sombres
auxquelles on peut donner le nom de ca/ia(a-, quoique nous ne sachions pas
encore ce que c'est. Divers astronomes en ont déjà signalé plusieurs, no-
tamment Dawes en 18Gi. Pendant les trois dernières oppositions, j'en ai fait
une étude spéciale, et j'en ai reconnu un nombre considérable qu'on ne
peut pas estimer à moins de soixante. Ces lignes courent entre l'une et
l'autre des taches sombres que nous considérons comme des mers, et for-
ment sur les régions claires ou continentales un réseau bien déflni. Leur
disposition paraît invariable et permanente, au moins d'après ce que j'en
puis juger par une observation de quatre années et demie; toutefois leur
aspect et leur degré de visibilité ne sont pas toujours les mêmes et dépen-
dent de circonstances que l'état actuel de nos connaissances ne permet pas
encore de discuter avec certitude. On en a vu en 1879 un grand nombre qui
n'étaient pas visibles en 1877, et en 1882 on a retrouvé tous ceux qu'on avait
déjà vus, pendant les oppositions précédentes, accompagnés de nouveaux.
Quelquefois ces canaux se présentent snu? la forme de lignes ombrées et
vagues, tandis qu'en d'autres occasions ils sont nets et précis comme un
trait fait à la plume. En général, ils sont tracés sur la sphère comme des lignes
de grands cercles : quelques-uns montrent une courbure latérale sensible.
Ils se croisent les uns les autres, obliquement ou à angle droit. Ils ont bien
2" de largeur, ou 120 kilomètres, et plusieurs s'étendent sur une longueur
de 80° ou 4800 kilomètres. Leur nuance est à peu près la même (jue celle des
mers, ordinairement un peu plus claire. Chaque canal se termine à ses
deux extrémités dans une mer ou dans un autre canal : il n'y a pas un seul
exemple d'une extrémité s'arrètant au milieu de la terre ferme.
» Ce n'est pas tout. En certaines saisons, ces canaux se dédoublent, ou.
pour mieux dire, se doublent.
» Ce phénomène parait arriver à une époque déterminée et se produire à
peu près simullanéiuent sur toute l'étendue des continents de la planète.
Aucun indice ne s'en est signalé en 1877, pendant les semaines qui ont pré-
cédé et suivi le solstice austral de ce monde. Un seul cas isolé s'est présenté
en 1879 : le 26 décembre de cette année (un peu avant l'équinoxc de prin-
temps, qui est arrivé pour Mars le 21 janvier 1880), j'ai remarqué le dédou-
blement du Xil, entre le lac de la Lune et le golfe Céraunique. Ces deux
traits réguliers égaux et parallèles me causèrent, jf lavoue. une profonde
Fi,AMM.\itio.N. — M;us. i'i
3ôi 1 A IM ANi: I I. M Ali S.
surprise. (r.uUaiit plus givuiile qii«^, quel([U('s Jours au[(;iravanl. lo '2',i cl le
•2\ (lécenibre. j'avais observé avec soin cctlo uiênio région sans rien décou-
vrir de pareil. .T'attendis avec curiosité le retour de la planète en 1881 pour
savoir si quelque phénomène analogue se présenterait dans le même endroit.
et je vis reparaître le môme fait le II jamirr ISSO. un mois après l'équi-
noxe de printemps de la planète (qui avait eu lieu le 8 décembre 1881 ; le
dédoublement était encore évident à la lin de février. A cette même date du
Il janvier, un autre dédoublement s'était déjà produit : celui de la section
moyenne du canal des Cyclopes, à côté de l'Elysium.
)' Plus grand encore fut mon iHonnement lorsque, le 1!) janvier, je vis le
canal de la Jamuna, qui se trouvait alors au centre du disque, formé très
correctement par deux lignes droites parallèles, traversant l'espace qui sé-
pare le lac Xiliaque du golfe de l'Aurore. Tout d'abord je crus à une illusion
causée par la fatigue de l'œil et à une sorte de strabisme d'un nouveau
genre ; mais il fallut bien se rendre à l'évidence. A parlir du 19 janvier, je
ne fis que passer de surprise en surprise; successivement l'Oronte, TEu-
phrate, le Pinson, le Gange et la plupart des autres canaux se montrèrent
très nettement et incontestablement dédoublés. II n'y a pas moins de vingt
exemples de dédoublement, dont dix-sepionl été observés dans l'espace d'un
mois, du 19 janvier au 19 février.
» En certains cas, il a été possible d'observer quelques symptômes précur-
seurs qui ne manquent pas d'intérêt. Ainsi, le 13 janvier, une ombre légère
et mal définie s'étendit le long du Gange ; le 18 et le 19, on ne distinguait
plus là qu'une série de taches blanches; le 20, cette ombre était encore
indécise, mais le 21 le dédoublement était parfaitement net, tel que je l'ob-
servai jusqu'au 23 février. Le dédoublement de l'Euphrate, du canal des
Titans et du Pyriphlégélon commença également sous une forme indécise
et nébuleuse.
» Ces dédoublements ne sont pas un effet d'optique dépendant de l'ac-
croissement du pouvoir visuel, comme il arrive dans l'observation des
étoiles doubles, et ce n'est pas non plus le canal lui-même qui se partage
en deux longitudinalement. Voici ce qui se présente : A droite ou à gauche
d'une ligne préexistante, sans que rien ne soit changé dans le cours et la
position de cette ligne, on voit se produire une autre ligne égale et parallèle
à la première, à une distance variant généralement de 6° à 12", c'est-à-dire
de 350 à 700 kilomètres ; il parait même s'en produire de plus proches, mais
le télescope n'est pas assez puissant pour permettre de les distinguer avec
certitude. Leur teinte paraît être celle d'un brun roux assez foncé. Le paral-
lélisme est quelquefois d'une exactitude rigoureuse. Il n'y a rien d'analogue
dans la géographie terrestre. Tout porte à croire que c'est là une organisation
356 I. A IM.A.NKTi; M Ai; S.
spéciale à la iilanète Mars, luoliaitleinent radachée au cdiirs de ses saisons.
r Voilà les faits observés. L'éloignement île la planète et le mauvais temps
empêchèrent de continuer les observations. 11 est diflicile de se former une
opinion précise sur la constitution inlrinsè(jue de celte géographie, assuré-
ment fort différente de celle de notre monde. Si le phénomène est réellement
lié aux saisons de Mars, il est possible qu'il se reproduise pendant le pro-
chain retour de la planète. I.f 1" janvier 1884. la i)Osition de Mars à r<'gard
de ses saisons sera la même que celle du 13 février 188-2, et le diamètre ap-
parent sera de 13". Tout instrument capable de faire voir sur un fond clair
une ligne noire de 0".2 de largeur et de séparer l'une de l'autre deux lignes
comme celle-là, écartées de 0",5. pourra être enqiloyé à ces observations.
« Dani Tétat actuel des choses, il serait prématuré d'émettre des conjec-
tures sur la nature de ces canaux. Quant à leur existence, je n'ai pas besoin
de déclarer que j'ai pris toutes les précautions commandées pour éviter
tout soupçon d'illusion : je suis absolument sûr de ce (jue j'ai observé. »
Ainsi s'exprimait l'habile astronome dans son premier article sur ces
étranges observations. 11 suffit, d'ailleurs, de regarder la carte qui accom-
pagne cet article {fig. 195) pour être absolument étonné de pareilles décou-
vertes et en croire à peine ses yeux. On s'explique aisément le scepticisme
général qui les accueillit. Nous les examinerons avec soin ; mais nous de-
vons tout de suite exposer dans tous ses détails les observations complètes
de M. Schiaparelli, d'après son troisième mémoire (').
Ces observations s'étendirent sur un espace de six mois, du 26 octobre 1881
au 29 avril 1882. « On a retrouvé tous les canaux vus en 1877. entre autres
rHiddekel, resté douteux en 1879, et la Fontaine de Jeunesse, invisible en
1879. Des causes, probablement en rapport avec le Soleil, mirent à nu une
grande quantité de particularités nouvelles. La couleur rouge clair mêlée
de blanc qui occupait, en 1877, toute la zone équatoriale au nord du grand
Diaphragme et, en 1879, s'étendait encore considérablement, disparut presque
entièrement en janvier et février 1882. On commença à distinguer, dans ce
voile lumineux, des o)nbres indistinctes entourées de taches informes, de
couleur orangée ; ces ombres devinrent graduellement plus sombres et mieux
définies et ne tardèrent pas à se transformer en groupes de lignes plus ou
moins noires. En même temps, la coloration orangée s'étendit et finit par
prendre, à part quelques exceptions, toute la zone dite continentale. La vaste
étendue nommée océan et golfe Alcyonien qui, en 1879, paraissait grise et
indéterminée et qui semblait plutôt de caractère maritime, se résolut en
('; Osservazioni aMlronomiche c fisiche, etc. ^lemoria terza ' Ueale Accademia de
Lincei. Roma, 188G).
1880-81' SCIIIAI'AMKIJJ. - OUS i; |{ \ A TIONS l- T DIvSMNS. Xr,
loulTcs très compliquéos do p(;tilo.s ligues. Alors iili.i (,'n se dévoilant le fait
curieux et inattendu delà gémination des canaux, lc(|uel probablement con-
duira à modifier considérablement les opinions courantes sur la (•onstilulion
pbysique de la planète. »
L'auteur reprit la détermination de la direction de l'axe de rotation, et
trouva des résultats qui conlirmeut absolument ceux ({ue nous avons exposés
plus baut. d'après les mesures de 1877 et 1879.
Pendant cette opposition de 1881-1882, 1G2 esquisses partielles ont été
prises, et 1.') dessins d'ensemble du disque. 11 est bien préférable, lorsque
la vision est excellente, de ue pas perdre son temps à faire des dessins d'en-
semble.
La carte que l'on trouvera plus loin ifig. 195, p. 361 )a été publiée dans le
mémoire de M. Schiaparelli, que nous analysons ici, et construite, pour la
partie australe et jusqu'au 20" degré de latitude nord, d'après los observa-
tions de 1877 et 1879, et pour la partie boréale, d'après celles de 1881, 1884
et 1880, qui permirent de compléter l'examen total du globe martien.
Lorsqu'il s'est agi de construire la carte de Mars pendant cette opposition,
une grande difficulté s'est présentée, par le changement singulier qui com-
mença à se produire dans l'aspect de la planète vers le milieu de janvier,
spécialement par suite du dédoublement des canaux. Pour éviter de con-
fondre ensemble en une seule représentation des choses qui appartiennent
probablement à des conditions physiques différentes, il eût été nécessaire
de séparer toute la série des observations en deux périodes et de dresser
une carte pour chacune. Mais, pour la première période, les observations
étaient insuffisantes. Les géminations appartiennent toutes à la seconde pé-
riode, mais peut-être certains aspects remontaient-ils déjà à la première.
L'auteur a construit la carte ci-après sur l'ensemble des observations de cette
opposition, sans distinction de temps, et lui a adjoint une autre carte, que
nous retrouverons plus loin (à la seconde Partie de cet Ouvrage), représen-
tant l'hémisphère boréal. La carte publiée plus haut (p. 355) n'était que
provisoire.
Les lecteurs de ce livre ont déjà remarqué sur la première de ces cartes,
et remarqueront aussi sur la seconde l'extrémité inférieure do la mer du
Sablier, qui se contourne en forme de serpent. L'astronome italien ayant
donné le nom de Grande Syrte à cette mer, et celui de Nil au fleuve qui s'y
rattache, a donné le nom de Xilosyrtis à cette extrémité si singulièrement
élargie et assombrie, et le nomdeBoreosyrtis à la continuation de ce serpent.
Le Xilosyrtis ressemble à la queue du Scorpion des dessins de Secchi en
1858 (p. 140 ■. Comparer aussi un dessin de Dawes en 1864 (p. 187), un de
nous-méme on 1873 (p. 214), et ceux de Green la même année (p. 219). Mais
35Ç L \ iM. am;ti-: m mis.
le Boreosyilis nous paraît liien incertain ou signale des variations plus con-
sidéraLles encore que toutes les précédentes.
L'auteur a ajouté semblablement de nouveaux noms pour les configura-
tions nouvellement dessinées.
Nos lecteurs saventque.dc toutes les régions do la planète, l'une des plus
claires est le continent Becr de notre carte (p.GOl, (jui s'étend à la droite de
la mer du Sablier. C'est, en général, une région brillante et uniforme. Pen-
dant l'opposilion de 1881-188-2. M. Scliiaparolli a l'ait là des observations fort
curieuses.
Au commencement (0-1 -i novembre 1. on ne trouva là aucune différence
notable avec ce qui avait été vu en 1879. Les mêmes canaux s'y voyaient,
non tous également distincts, et l'unique difTérence importante fut l'appa-
rition du lac Isménins, que l'on commença à voir ie 12 novembre sous ki
forme d'une tache, au point où l'Euphrate vient couper le cours du Proto-
nilus. Dans la seconde période des observations ( 14-29 décembre), un voile
de nature inconnue parut s'être retiré de celte région; le Protonilus, qui
d'abord avait l'aspect d'une ligne unique, se montra sépare en deux cours
parallèles, portant chacun son lac Isménius. Dans la troisième période d'ob-
servations [ 17 janvier- 4 février), l'Oronte, l'Euphrate, le Phison, le Tipho-
nius apparurent tous géminés, i'Hiddekel, invisible en 1870, reparut, et
rOxus prolongea son cours au delà du Gehon jusqu'au Deuteronilus {voir la
carte, p. 361). Ainsi voilà une tache, le lac Isménius, qui se montrait bien
nette et unique les 12, 13 et 14 novembre, sans que personne pût y soup-
çonner aucun indice de séparation, et. le 23 décembre, on voyait là deux
lacs égaux, qui s'allongèrent dans le sens des latitudes pour aboutir les
28 et 29 décembre aux aspects dessinés sur la carte. Il en était encore de
même le 22 janvier.
L'Oronte a été l'un des canaux les plus évidents. Il se dédoubla le 18 jan-
vier. L'Euphrate et le Phison restèrent également nets, simples et évidents
jusqu'au 18 janvier. Le 19, ils parurent élargis et indécis. Le 20, observation
empêchée par des nuages. Le 21, tous deux étaient doubles, et dans une ad-
mirable netteté. Leur couleur n'était pas celle des mers, mais une sorte de
brun rougeâtre 'c una specie di bruno rossegiante ». Ces canaux n'avaient
pas changé de place, mais il s'était formé, non loin d'eux, une ligne secon-
daire absolument parallèle.
L'Indus s'est montré très large pendant toute cette opposition, la moitié
environ de la largeur de Nilosyrtis. (C'est la baie Burton de notre carte : même
hirgeur. •
Le lac Niliacus s'est montré séparé de la mer Acidalium par un isthme
jaune que l'observateur a nommé Pont d'Achille. Les contours de ces deux
ISSI.8Î sciii \i* \Mi:i.i.i. - nnsr.nv \TioNs i;t DKSSiNS. :<:.•.*
taches ne sont pas ciitièrenient leniiinés. excepté au |innl (rAchillc. Ce lac
Niliacus n'est pas noir, mais d'un lu-un jaunâtre.
On reconnaît cette tache (lac Niliacus et mer Acidaliuni) sur les dessins
de Knobel en 1873, H IVeddicker en I88I-188-2.
En observant le Gange, on constata maintes fois A sa droite la présence
d'un point noir, qui n'était autre que la Fontaine de Jeunesse. Ce point se
rattachait au Gange par un lil. Puis un dédoublement du Gange passa à tra-
vers, du golfe de l'Aurore au lac de la Lune [ Voy. la carie, p. 3GI.)
Au lac de la Lune, qui paraissait simplement formé par l'intersection des
lignes qui s'y croisent, le Nil se montra dédoublé à partir du 12 janvier, et.
très nettement à partir du 19, comme des fils gris à travers des champs de
neige. Il en fut de même le 18 février. Cette gémination du Nil avait déjà
été observée, comme cas unique, en 1879, le 2G décembre, un mois avant
l'équinoxe, qui arriva le 21 janvier suivant. En 1881, le phénomène ne com-
mença à se présenter, d'une manière indécise et confuse, que le 11 janvier,
un mois apti-s l'équinoxe, arrivé le 8 décembre. Si donc le phénomène est
lié à la révolution annuelle de Mars, ce n'est pas par un lien étroit et rigou-
reux, mais plutôt par une relation analogue à celle des saisons terrestres,
oii l'on observe des irrégularités plus ou moins étendues.
Au-dessus du lac du Soleil, la Thaumasia est d'une couleur jaune brun,
rsssemblant entre autres à celle de la Libye, ton tout différent du jaune clair
et presque blanc d'Ophir et de Tharsis.
Le lac du Soleil n'était plus rond, comme en 1877, ni pointu, comme en
1879, mais ovale, comme on le voit sur la carte. Ces variations de forme sont
irrécusables. L'observateur a cherché, sans succès, à retrouver la forme qua-
drilatère ou rhumboïdale dessinée par Lohse et Burton (voy. p. 318 et 319).
Très foncé, et plus noir au bord du disque qu'au centre.
L'Araxc a présenté la forme rectiligne de 1879. et non la courbe sinueuse
de 1877.
Le Ceraunius, avec l'Isis et le Phase, occupent bien la place de la passe
de Bossel de la carte de Proclor.
L'île neigeuse de Dawes (Dawes'Snow Island) ou Argyre, a toujours paru
très blanche, comnn! eu 1877.
Le détroit d'Herschel a été revu sous la forme serpentine dessinée par
Kaiser en 1862, les 31 octobre et 10 décembre (p. 17-'f).
La Icrro d'Ogygès, dont ou n'avait eu, en 1879, ([Uf de légers indices, a
été observée plusieurs fois ou 1882, mais beaucoup plus blanche et plus
brillante au bord du disque (jue dans l'intérieur. — Nuages y
Dans la mer Erythrée, on a remarqué certaines régions foncées, mais non
pas noires, telles que les terres de Deucalion, de Pvrrha. de Protée. mon-
360 l-A PL A Ni: il-; MAHS.
trant avec évidence (juil twist»' sur Mars dos ivyioiis de transition, entre les
obscure? et les claires.
Le canal des Titans a fait l'objet d'observations trrs porjdiwes et plus ex-
traordinaires encore que les précédentes. On le voit le long du 170" méridien :
cette ligne a été visible jusqu'au 9 janvier. Du 10 janvier au 10 février, on
voyait à côté une second canal, partant aussi, en liaut, du golfe des Titans,
mais se dirigeant vers l'extrémité droite de la Propontide. Dans une troi-
sième période, les 1-2 et 13 février, ce second canal avait disparu et l'on
voyait une autre ligne, celte fois parallèle à la première. Quelle part faut-il
faire à l'illusion?
La « neige olympique » de 1870 n'a pu être retrouvée.
Sur sa carte de 1879, M. Schiaparelli avait donnr le nom de mer Polaire
boréale (comme on le voit aussi sur notre carte, p. G9) à une longue tache
grise qui semble en effet entourer le pôle nord. Pendant ses observations de
1881-82, il .se convainquit qu'il n'y a pas là une étendue assez vaste pour
être comparée à la mer Polaire australe, mais plutôt plusieurs mers ou lacs,
tels que la mer Acidalium, la Propontide, le détroit d'Anian, le Tanaïs,
l'Alcyon, ne formant pas un ensemble continu et laissant probablement une
terre libre au pôle boréal.
La mer Maraldi ou mer Cimmérienne a été vue avec sa forme habituelle, et
très foncée sur ses bords. Mais, dans sa région médiane, elle était si claire que
l'observateur considère cette région comme une longue île, ressemblant à
une queue de comète, étroite et brillante à droite, large et moins claire en
s'étendant vers la gauche.
Les deux îles de Thulé ont montré des taches blanches aussi brillantes que
les neiges polaires, moins grandes que ces îles, et qui ont changé de place.
A droite de l'Elysée, on voit un canal courbe, double aussi, rilyblœus.
C'est un cas à peu près unique, sur la planète, d'une gémination curviligne.
'Comme nous Pavons déjà remarqué plus haut, la partie inférieure de la
mer du Sablier, nommée Nilosyrtis, a été vue pendant cette opposition, élar-
gie et assombrie, atteignant presque la largeur de la mer Tyrrhénienne, ce
qui n'existait pas en 1879. Cet élargissement avait déjà été observé par Sec-
chi en 1858, Burton en 1871, 1873, et Green en 1873. Il y a là aussi des varia-
tions certaines.
Nous pouvons appliquer la même conclusion ;"i la région voisine nommée
Boreosyrlis.
La Libye présenta une coloration rouge foncé, et sa surface rappelait l'as-
pect d'un tissu pelucheux, velu, ou, si l'on veut, donnait l'impression d'être
parsemée de petits pores.
La « neige atlantique » a été visible pendant toute cette opposition. De plus,
Q- s >
302 l.A l'LANKTK MA H S.
In roLTion d'Isis a montré d'autres taches l)lanclios, surloul au promontoire
qui forme un angle entre la nier du Sablier et le Xf'pcnllics. Le marais Goloo
n'a plus clé revu.
En résumé, ce (juil y a do plus curieux dans les découvertes faites pendant
cette période, outre les variations de tons et d'étendue signalées, ce sont
évidemment les dédoublements de canaux qui doivent le plus frapper notre
attention. Il n"y en a pas moins de trente, sûrement constatés. Plusieurs se
sont opérés sous les yeux mêmes de l'observateur, et l'opération s'est souvent
accomplie en vingt-quatre iieures. Si l'on réfléchit qu'il s'agit là de lignes
larges de cent kilomètres environ et longues de mille et davantage, la rapi-
dité avec la(}uelle le phénomène se produit mérite la plus sérieuse attention.
Il ne s'agit pas ici d'un effet optique analogue au dédoublement d'une
étoile obtenu par le grossissement d'un oculaire, ni de la séparation d'une
ligne simple en deux autres, mais de Vaddition d'une ligne nouvelle à côté
d'une autre antérieure, et parallèlement, à la distance de 4" à 12°, c'est-à-dire
de 240 à 700 kilomètres.
Aux intersections de ces lignes doubles qui se croisent dans tous les sens,
on remarque un accroissement dans la teinte de ces lignes. On croit voir
comme un réseau géométrique de lignes parfaitement régulières, faites à la
règle, au compas et à l'encre de Chine.
Cette régularité, ainsi que le caractère transitoire et probablement pério-
dique de ces étranges formations, ne permettent pas de les assimiler aux
formations de caractère géographique, par exemple aux taches qui ont reçu
le nom de mers, de lacs, de continents ou d'îles. Il semble aussi que les gé-
minations ont pour résultat de régulariser, d'uniformiser la ligne anté-
rieure. Ainsi, l'Euphrate, vu simple en 1879, avait quelques irrégularités ou
ondulations; dédoublé en 1882, il était parfaitement nettoyé et régularisé.
La Jamuna, en 1879, n'avait pas une largeur uniforme, mais elle l'acquit
en 1882, après la gémination. L'Hephestus formait avant son dédoublement
une tache allongée irrégulière, mais ensuite deux traits parfaitement
uniformes.
La gémination s'annonce en général par un état nébuleux du canal. Il
semblerait que celui-ci devînt une nébulosité avant de donner naissance au
phénomène et de se partager en deux. C'est comme des soldats disséminés
qui, insensiblement, s'aligneraient sur deux colonnes.
Ce sont donc là des formations variables, déterminées par des causes
locales et susceptibles de se reproduire périodiquement sous les mêmes
aspects. En combinant les dates d'observations, on trouve que le phénomène
correspond à certaines saisons de Mars, qu'il commence à se manifester
vers l'équinoxe de printemps de l'hémisphère boréal (arrivé le 8 dé-
IS81-S-J SCIII AI' Al{i;i.l.l. — (Hi<i;i{V ATIONS KT DF'SSINS. 363
rembrt' 1881), el i^'efleclue siuloul dans le second mois après cet (''(juinoxe.
(|irapi-ès avoir duré plusieurs semaiiK's un iiièiiH.' (juolques mois, il disparaît,
de sorte (juil n'en reste aucune trace à l'époque du solstice boréal. Ces gé-
minations occupent donc toute la saison que nous appelons printemps de
riiémisphère boréal. Existe-t-il quelcjne chose d'analogue en automne VCest
ce (fue les observations qui précèdent ne permettent pas de décider.
On peut remanjucr (jue, sur la planète entière, il y a une grande ten-
dance au dualisme el à la symétrie. Des lacs sont séparés en deux par un
isthme; le détroit d'Herschel a été vu longiludinalement blanchi dans sa
région médiane, ainsi que la mer Maraldi; la mer du Sablier a son pendant
à la baie IJurton, la i)aie du Méridien est double, etc.. etc.
Quant à l'cxpUcalion... Il n'y a rien danalogue sur la Terre.
Après la publication de ces trois cartes de M. Schiaparelli fig. 17-i, 18.")
et 195;. la revue astronomique anglaise The Observatory, dirigée par
.M.M. (Jhristie etMaunder, publia un article spécial sur ces travaux f '),dont la
conclusion est que, sur ces trois cartes, la seconde est plus conforme que les
deux autres aux tracés bien connus de la planète et doit être préférée à celles
de 1877 et 1881, et que certains canaux peuvent être les limites de districts
nuancés de demi-tons, tandis que d'autres peuvent être des illusions dues
peut-être à l'emploi de grossissements trop forts. " Xor would it be the first
time that a distinguished astronomer has fallen into that mistake. »
En général, les astronomes anglais partagèrent le même sentiment de scep-
ticisme à l'égard du réseau de lignes tracé par l'astronome italien sur ses
cartes, comme on peut le voir en se reportant aussi aux autres publications
périodiques spéciales, telles que Enrjlish Mechanir, Nature, etc.
A la séance 'de la Société astronomique de Londres, du 14 avril 1883 (-).
il y eut une discussion fort intéressante sur les observations de M. Schia-
parelli, entre MM. Green, Maunder et Rand Capron. M. Proctor venait de
publier, dans le Times, un article sur les « canaux » el leur dédoublement,
article dans lequel il suggérait que les habitants de Mars doivent être en-
gagés en des travaux d'ingénieurs d'une vaste étendue, attendu que ces
canaux sont tracés dans toutes les directions et gardent entre eux une éton-
nante régularité de distance. » M. Green ajoutait : « Je n'ai pas l'intention
d'introduire aucune espèce de plaisanterie dans un sujet aussi sérieux, mais
je crois que nous ne devons pas reconnaître ces singuliers aspects de Mars
comme réels jusqu'à ce que d'autres observateurs les aient revus avec cer-
titude. Les .canaux qui ont été vus, il y a un certain nombre d'années, ont
constamment changé, soit dans les dessins d'un même observateur, soit
(', The Obscrviitoru. May. 1, 1882.
[') I<l. 1(1. May. 1. 1882.
3<'.i i.A I'l\m:ii: mahs.
dans ceux dr iilusiours. On en trouve dans les dessins de Dawes, mais les
lignes tracées par Dawes n'existent pas dans les dessins de M. Schiapart'lli.
On retrouve, au contraire, les lignes tracées par Dawes dans les dessins de
M. Burton. Je ne pense pas que ces tracés soient imaginaires, mais il me
semble que ce ne sont pas là des choses permanentes sur la planète. «
M. Maunder exprime, de son côté, l'idée que les canaux dessinés jiar l'ob-
servateur de Milan ne sont pas des lignes réelles. Plusieurs peuvent être
ducs à des illusions d'optique: plusieurs paraissent être des bordures de
districts ombrés. M. Schiaparelli paraît prolonger ses lignes au delà de leur
longueur réelle, par exemple, lorsque deux lignes sombres se dirigent l'une
vers lautre, il les prolonge jusqu'à ce quelles se rencontrent, ce qui ne
paraît pas être réel.
M. Green pense, comme .M. Maunder, que les canaux dont il s'agit indi-
quent tout simplement les bords de taches légèrement ombrées.
Les astronomes anglais s'accordent à réclamer des observations nouvelles
avant d'admettre l'existence réelle de cet étrange réseau de lignes droites
(]ui s'entrecoupent dan? tous les sens.
CVl. Même opposition, 1881-1882.— Otto I^oegdicke-r. Observations et dessins [^).
A la séance du 17 avril 1882 de la Société royale de Dultlin, lord Rosse
Fis- 10G.
Desoins de Mars, par M. 0. liœddicker, le.sj2Ù et 20 décembre 1.S*îI.
communiqua les observations faites à .son Observatoire de Lirr Castle, par
(') Notes on the physical appuarence of Ihe planet Mars. Birr Ca-stle Observalory
Scicnlific Transactions 0/ Ihe Royal Dublin Society, 1882.)
1881-81» (». lUH.DItlCKKH. — C-K. mUiON. 3fi5
M. iHtii IJœddickcr. (Jes observiiliuiis s'éteudeiil du l'.l novenibie 1881 au
23 jauvier 188-3, et sont accompagnées de 18 dessins. Elles ont été faites au
grand télescope de trois pieds d'ouverture, grossissement = 21G.
En général, les taches claires ou continentales ont paru orangées, et les
taches foncées ou maritimes ont paru bleues.
La mer du Sablier « Ilour-glass n a paru bordée, le long de son bord
précédent, dune zone claire assez brillante.
Parmi ces dessins, nous en reproduirons deux iflg. 19G), remarquables
par leurs détails et qui montrent, en môme temps, combien il est facile de
donner corps à des images transitoires et indécises. Dans le premier, du 20
décembre, la baie du Méridien se trouve au centre : elle ressemble à une
feuille à l'extrémité d'un ruban, et rappelle les anciens dessins de 1830. On
remarque, à sa droite, le détroit Arago et la baie Burton descendant à la
merKnobel : c'est llndus de M. Schiaparelli. Sur le second dessin, du 20 dé-
cembre, à 11'' 36'", on voit la mer du Sablier présenter, à son extrémité infé-
rieure, un étranglement et un coude certainement exagérés.
CVII. Même opposition, 1881-1882. — (1.-E. Burton. Observations et dessins(').
Ces observations ont été faites en février, mars et avril 1882, à l'aide d'un
Fia. 197.
Mars, Il |:J mars I88-.', dossiu de M. Durloii.
tL'lescope de 9 poucfs d'ouverture, armé de grossissements de 270 et GOO. et
présentées à la même Société, le 17 avril 1882. L'auteur remarque d'abord
que « la neige polaire boréale a été vue constamment, et surtout en deux
(') \olcs 0)1 llie aspect ofMavs in I8ii. {Scienlific Transactions of thc royal Du-
blin Societij, 1882.;
366 I. A PLAN r ri: M A II s.
soirées dcxcellcnlo ilcfinition.dc forme compliquée cl lobée, une échancrure
étant surtout bien visible dans le contour ellipliiiue. vers la longitude 300".
comme si la matière blanche avait fondu là plus vite qu'ailleurs, sous l'in-
fluence d'un Soleil alors presque au solstice )■. Nous reproduisons ici le dessin
du 13 mars(/jf/. 197;, qui montre cette neige du pôle inférieur l»ilobée. Deux
autres régions blanches sont visibles sur la planète, l'une voisine de Textré-
mité nord de la terre de Burckhardt, l'autre correspondant à la « neige atlan-
tique». La mer du Sablier a paru bordée d'une zone blanche, du côté gauche,
ou suivant, comme nous l'avons déjcà signalé en d'autres circonstances.
Dans ce dessin, on voit la mer du Sablier s'arrêter à la mer Flammarion,
comme si la Libye, au lieu d'être envahie par la teinte grise, s'avan(;ait, au
contraire, dans la mer. Le 11 mars, cette blancheur était encore plus marquée.
L auteur croit avoir identifié plusieurs canaux de M. Schiapparelli, mais
n'a aperçu aucun dédoublement .
CVIII. Même opposition. 18S1-8-2. - NrcsTEX. Observations el dessins ('^
L'habile astronome de l'Observatoire de Bruxelles a fait ces observations
du 12 décembre au 16 mars, à l'aide du même instrument et dans les mêmes
conditions que celles de l'opposition précédente ; elles présentent vingt
dessins avec leur description sommaire, montrant un grand nombre de dé-
tails. Il est bien certain, ici aussi, que l'œil de l'observateur joue un grand
rôle dans le résultat obtenu. Considérons, par exemple, parmi ces dessins, ceux
que nous reproduisons ici, et qui montrent presque exactement la planète
du même côté, la mer du Sablier étant au méridien central (longitude de ce
méridien = 303° pour la figure de gauche et 304° pour celle de droite). Le
premier est du 31 janvier 1882, le second du 21 décembre précédent. "\'oici
un extrait de la description de M. Xiesten. L'auteur emploie, non sans rai-
son satisfaisante, l'ancienne nomenclature pour les grandes taches qui sont
certaines, et la nouvelle pour les canaux, qui paraissent si variables (-).
[' j Observations sur l'aspect physique de la planète Mars en ISSl-SL Annales de
l'Observatoire royal de Bruxelles, t. VII, 1890.
(■•)A propos de ces nomenclatures, voici ce qu'on lit dans le Rapport annuel de la.So-
ciélé royale astronomique de Londres, février. 1884 :
n II is most désirable that there should bc some agreement established among astro-
nomers onlhe question. The principle adopted by M. Proctor, of designating the « land
and seas n by the namcs of astronomers, wat provisionally a convenient one, and this
was continued by M. Green and M. Flammarion in their maps, but with modifications.
Prof. Schiaparelli has adopted the divisions of land and water, but selected his names
from ancient geography and history, and the confusion in the nomenclature thus intro-
duced renders the discussion of any particular région of the planet rather difficult. Jt
is désirable that thèse différent Systems should not continue, and that somc agrecd
nomenclature should be generally adopted. »
1881 -8-:
mksti:n.
ohsi:m\ A I i(»Ns i;r dessins
367
31 janvier.— Dessin Iréscmifiix [fuj. I98,A). Les ombres paraissent romme
de minces lignes grisAtres qui sont (Jodoublées. La mer du Sablier est plus
foncée vers l'Est. La Libye est teintée de gris, c'est-à-dire que la mer Main
s'étend jusqu'à la nier Fiainniarinn. LfîTbolb rsl très a^tparent, ainsi que le
l'rolnnilus et l'Arethusa.
.\insi, dansée dessin. leTbotb.que i (ju voit à gauche de la mer du Sablier,
serait aussi large ((u'elle. Ce n'est pas probable, et l'effet a dû être produit
par une vue imparfaite de la région, les détails se confondant en une sorte
d'ombre grise. On est ici à la limite de la visibilité.
Ce dessin csl Iiicn curieux par l'espèce de dédoublement longitudinal du
détroit d'IIerschel. assez rare, mais réel.
La figure v(tisine {fin. 198, ]V, du 21 décembre, montre une différence assez
r^
Fis. l'.)8.
r..Jn.r
Lr.hU"
^gf^^^-^-
iiiÀuw.iS82
2iD«.tm
Dessins île Mars, i)ai- M. Niestun, 31 janvier 1882 et '21 décembre l,S8i.
sensible avec la précédente. La mer du Sablier y revêt mieux sa forme clas-
sique ; elle est sombre à l'Est, grise à l'Ouest. La mer Main se prolonge pour
tourner vers le Nord-Ouest et commencer le Thoth. Le détroit d'Herschel
semble finir en golfe au-dessus de la mer du Sablier. On reconnaît le Proto-
nilus, duquel s'élève l'Euphrate, dont la contrée contiguë à l'est est teintée
de gris. Dans un autre dessin, du 21 décembre, on trouve aussi un aspect
analogue: les «canaux n^semblent des limites de régions teintées ou voilées,
comme le pensent plusieurs observateurs anglais.
('es observations sont, comme on le voit, très précieuses, en ce
qu'elles reculent aussi loin que possible les limites des choses obser-
vables sur Mars. PUles confirment celles de Milan, sans toutefois les
préciser, en les faisant flotter, pour ainsi dire, dans un plus grand
vauue.
368 LA IM ANKTK M A US.
M. N. (lo Konkoly a publié ^') les observations faites à son observatoire
par M. A. ilo Golbard. Il y en a 30 de Jupiter et 9 de Mars, dont trois dessins
sont reproduits : ceux des 10 novembre, 22 et '2') décembre. On ny relève
rien de particulier, sini^n que la mer du Sablier y est représentée assez large,
surtout à la dernière date. L'instrument est un bon réfracteur de Merz. Pas
de détails. L'observateur a surtout remarqué que les couleurs des taches
sont plus évidentes dans la région centrale du disque que sur le contour. Le
cap polaire nord s'est constamment montré d'une belle couleur blanche.
CIX. 188"2. — TiioLVELOT. Remarques sur la planète Mars.
Nous avons déjà signalé les observations faites par M. Trouvelot en 1873
et nous avons commencé d'exposer les déductions formulées par lui en 1882
dans son excellent Manuel (*). Continuons ici cet exposé avant d'arriver aux
observations de 1884.
Les aspects de la planète demandent à être analysés avec un soin particulière-
ment méticuleux.
On peut facilement prendre des nuages pour des neiges polaires. L'obser-
vateur a remarqué que, pendant l'hiver de l'hémisphère sud, la neige polaire
est la plupart du temps invisible, cachée par les nuages qui s'amoncellent dans
ces régions. En 1877, pendant plus d'un mois, il prit pour le cap polaire cette
couche de nuages, qui recouvrait au moins un cinquième de la surface totale du
disque; il ne reconnut son erreur que lorsqu'à l'approche de l'été ces nuages
ayant graduellement disparu laissèrent voir réellement la neige polaire, d'abord
très vaporeuse, ensuite parfaitement nette, sous forme d'une calotte beaucoup
plus petite que la couverture antérieure de nuages. Ces nuages ressemblent à
des nappes de cumulus, se formant pendant rautomuo et l'hiver, et se dissolvant
au printemps.
L'observateur croit que la glace polaire disparaît entièrement en été, et que
cette disparition est arrivée notamment en 1877. — Cette observation n'est pas
conforme aux autres. En réalité, il reste toujours un peu de neige, une tache
d'environ 120 kilomètres de largeur, excentrique au pôle.
L'auteur conclut, d'autre part, que les neiges et les glaces (quelles qu'elles
soient d'ailleurs) fondent sur Mars à une température supérieure à celle qui
opère la même réduction sur notre planète, car ici les neiges arctiques et an-
tarctiques ne fondent jamais entièrement, « If the polar spots are composed of a
white substance melting under the rays of the Sun, as seems altogether probable,
its melting point must be above that of terrestrial snow. » (Nous avons émis,
(') Beobachlungen angestell am aslrojjhysikalischcn Observatorium in 0 Gyalla,
Vierter Band. Halle, 1882.
(') Voyez p. Tl'u
1882 DOWMNC, l'Hl m.iii;tt. — 1)1 ami; I lii; IH, MAUS. 360
18G5, page 19'.», une pensée sensiblement dilVérenle, Les conditions de pression
atmosphérique, de pesanteur, etc., étant au//'es, les neiges peuvent être d'une
nature physique autre, et fondre à un degré thermométrique plus bas, lequel
serait, pour la température moyenne de Mars, le zéro do la planète, ce point zéro
pouvant nous paraître, d'ailleurs, supérieur au nôtre, parce que les effets qui se
produiraient à ce degré thermométrique seraient analogues à, ceux qui se pro-
duisent ici à un degré plus élevé.)
Plusieurs dos taches sombres de Mars, et spécialement celles dont les rives
septentrionales forment une bande irrégulière sur les régions équatoriales, se
montrent bordées de ce coté par une bande blanche suivant toutes les sinuosités
du rivage. Cette bordure blanche est variable. Parfois elle est excessivement
brillante, surtout en certains points, qui égalent presque la blancheur polaire;
parfois elle est si faible que l'on peut à peine la reconnaître, malgré la transpa-
rence de l'atmosphère martienne et la visibilité des taches. Adoptant les vues
exposées par M. Green à la suite de ses observations de 1877, l'auteur attribue
ces franges blanches des côtes des mers martiennes à des condensations de va-
peurs sur les sommets de chaînes de montajnes élevées bordant ces mers, ana-
logues aux Andes et aux montagnes Rocheuses qui bordent l'océan Pacifique. Ces
plateaux élevés dessineraient même parfois des protubérances le long du termi-
nateur; le district montagneux le plus élevé parait être situé entre G0° et 70° de
latitude sud, vers l'extrémité occidentale de la terre de Gill, entre les longitudes
180° et 190°.
L'ile de Hall, parfois couverte de neige et parfois invisible, est sans doute très
élevée aussi : elle parait rattachée à la côte.
En général, il y a peu de nuages sur Mars. Mais il y a de temps en temps des
brumes voilant plus ou moins la transparence de son atmosphère. Une fois, pen-
dant huit semaines consécutives, du 12 décembre 1877 au 6 février 1878, un hé-
misphère entier est resté entièrement brumeux, l'autre restant très clair.
En résumé, cette planète offre les plus grandes ressemblances avec celle que
nous habitons.
Nous retrouverons tout à Tlieure la conlinualioii des observations de
M. Trouvelot.
ex. 1882. ■— DowNiNG, PiuTCHETT. Diamclrc de Mars.
De 537 mesures du diamètre vertical de Mars prises au cercle méridien de
l'Observatoire de Greenwich, de 1851 à 1880, M. Downing a conclu la va-
leur y", 697 pour ce diamètre {\.
Pendant les deux oppositions de 1879 80 el 188I-8J, M. Pritchctl a fait à
(') Monthlii Notices, t. XLI, p. ïi.
1<'la.mm.\hion. — Mars. 2i
370 l.A IM.AM'.ri; M A us.
réquatorial do Monisini ^Klals-Unis; de bonnes séries do mesures de ce
même diamètre. En voici les résultais (') :
Diamètre Uiamotri
('i|iialoriul. polaire.
1879-80. . "/.G38 9",42î
ISSt-SI 0 .03.^ '.) ,30i
à l'unité de distance.
Si Ton néglige raplnlissoment, on a 0",48G _:: 0'',û3;3 pour 1870 et
9",-i84± 0". 036 pour 1882.
Celte valeur s'accorde avec celle de M. Ilarl\vig(9",352) et celle que M. Dow-
ninga conclue des passages méridiens de Greenwich. donnée ci-dessus.
Salellitcs.
l'cudanl l'opposition de 1881, le professeur Pickering a trouvé pour l'éclat
de Deimos, ramené àla distance de l'opposition moyenne, la grandeur 13,13,
celle de la planète étant prise pour — 1,29. L'éclat trouvé en 1877 cl 1879
avait été 13,57 et 13,06 ('-).
L'éclat des satellites de Mars varie dans la proportion suivante en prenant
pour unité cet éclat au 1" octobre 1877, d'après l'auteur de la découverte:
1877, 1" octobre...
1,000
1881, 16 novembre. .
0,303
1879, 21 septembre.
0,490
» 14 décembre . .
0,399
» 18 décembre..
0,372
1882, 13 janvier
0,330
lis ont été observés à Ealing, près Londres, par M. Common, le 21 sep-
tembre 1877, et à Washington, jjar M. Hall, jusqu'en décembre suivant.
Deimos, le satellite extérieur, a été observé pendant l'opposition de 1884,
par M. Asaph Hall. 11 en résulte que ce satellite peut être vu pendant toutes
les oppositions.
D'après les observations faites par M. Pickering, en 1881, la coloration
rouge de Mars n'est pas partagée par ses satellites, notamment par son
satellite extérieur.
CXI. 1883. — Mahïh. Hotalion de Mars.
L'habile et zélé calculateur auquel les observateurs doivent à chaque
opposition les éphémérides de leurs positions précises, remarque (^) que le
chiffre du taux diurne de rotation de Mars, 3.50°, 8922, qui! empbjyait depuis
1864 pour ses calculs, et qui est déduit de la période de Kaiser de 24'' 37'" 22% 62,
est d'une grande précision.
f') Aslronomisclie Nachrichlen,26b2.~ TfieObservalory, 1885, p. \3ô. — Publications
of Ike Morrison Observalory. Gla.scow, Missouri, t. I, p. 7i.
{') A.'itron. Nachr., 2437.
{') Monthbj Noiices, 1883, p. 493.
\bSk
I.IlKMISIMIi: Hi- Ndltl» 1)1-: \l VHS.
371
Oïl peut le corrobonn* p;ir les dessins de Maraldi, de 1704, (jui, mal;,u-6 leur
aspect rudimcnlaire, montrent cependant ijue la tache qui arrive au milieu
du disque en octobre 1704, léLri3rement au nord du centre {voy. p. 36), est le
Sinus Titanum (long. 170") de M. Schiaparelli, qui revient à la même posi-
tion apparente en 1877, 1894 et 1909. La comparaison des observations de
Maraldi avec celles de M. Schiaparelli en novembre 1870, où la tache traver-
sait le méridien central au sud du contre, montre que le taux de rotation
adopté est presque correct, car de 1704 à 1879 la différence ne s'élève qu'à
G**, 3948. Le calcul le plus précis indique pour le taux de rotation diurne
350°, 89217 de rotation tropi(]ue, ce qui conduit pour la rotation sidérale à
2 !'■ 37™ 22-, 6-20.
Opposition de 1884.
DATE DE L"opposrrio.v : 31 janvieu.
Orbite de Mars pour une opposition aphéli<|Uo.
Présentation de la planète : Le pôle boréal est incliné vers la Terre
posrnoNs de mars.
Latitude Phase .\iiglc
Dates. <lu centre. Diamètre, zone manquant. Soleil-Terre.
31 octobre 1883 - 16*,3 7' ,6 0",0 39°
31 janvier 1884 -r- 14 ,8 13,9 0,0 3
30 avril 1884 -f- 17 ,0 7,4 0 ,8 37
37-2 i-A im,am:ti-; m a us.
('-Ai.EMUUKU ni; M mis.
IK-iuispluTO austral H^'inispherc hoii-al
ousupiTiciir. ou infOricur.
1:1 mai If^Si Solslicc d'IiivLi'. Solstice d'olé.
Celte opposilion. c(Viiu-idanl uvlm- liipliélic do Mars, csl la couli-c-parlic
de celle de 1877. comme on en peut juger par la fij. 199, comparée à celles
des pages '239 cl -248. Le Soleil est à l'un des foyers de l'orhite de Mars, C est
le centre de celle orbile, Ms le perilK-lie de Mars, M/i son aphélie La planùle
présente à la Terre son hémisphère n^rd.
Nous inaugurerons les observations de cet le opposition par celles de
M. Trouvelol, faites à l'Observatoire de Meudon.
r,XIL 1884. — Trouvelot. Observations et dessins l'I.
Voici l'article même publié par lauleur et les quatre vues qui raccom-
pagnent.
« L'hémisphère austral de Mars est assez bien connu des astronomes :
il ne leur reste plus guère aujourd'hui à étudier que quelques détails de
surface, et les variations assez nombreuses qui résultent des saisons et des
phénomènes météorologiques martiens. Mais il n'en est pas de môme de son
hémisphère boréal, qui, en raison du plus grand éloignement de la planète
aux époques où il s'incline vers nous, est beaucoup plus difficile à observer,
et nous est par conséquent moins bien connu. Les observations de Mars
faites dans la présente année offrent un intérêt particulier, surtout parce
que cette planète vient précisément de nous présenter cet hémisphère nord
si peu connu, dont il s'agit d'étudier la configuration. Aussi les observateurs
se sont-ils mis à l'œuvre, et peut-on espérer que les résultats acquis par
eux suffiront pour compléter dans son ensemble la carte générale de cette
intéressante pdanète.
» Dès la fin de l'année, je me mettais moi-même à l'œuvre, et bien que les
conditions atmosphériques n'aient pas toujours été aussi favorables que je
l'eusse désiré, cependant, comme la série de mes observations embrasse une
période de temps assez étendue qui m'a permis de revoir à plusieurs reprises
les différents points de la surface de ce globe voisin, je suis à peu près cer-
tain d'en avoir reconnu toutes les taches importantes.
h Parmi les dessins assez nombreux que j ai obtenus durant cette opposition ,
j'en ai choisi quatre, que je reproduis ici [firj.WO: 1, 2, 3 et 4), parce qu'ils
C; L'Astronomie, iievue mensuelle d'Astronomie populaire, septembre lS8i.
|S8i
TUOUVELOT. - OUSKUVAilONS K T DI-SSINS.
373
donnent ensemble, à peu de chose prés, tout le pourtour de riiémisphèrH
nord do Mars, et permettent ainsi de reconnaître les princiiialos taches vi^
siblcs sur cet hémisphère.
«Pour rendre ces dessins compréhensibles, je donnerai ici la copie textuelle
des observations originales qui s'y rapportent, ce qui permettra au lecteur
ri(lenlifi(\uion df? taches déjà connues.
» F/;/. I, IG mnr.s, Tt-JO-" — .\ii ?iid-Ouesl, on voit rextrdmité est du dt'troit
Fitr. -200.
A>iiLft iclc.-cui.iiiuc lie l;i [jUiiiile M.ir-; cii b'^■|
(Observations ot dessins ilc M. Trouvclot.)
Ilcrschol II, qui se termine par la baie du Méridien. Au Sud-Est, on distingue
l'océan do la Hue qui s'avance jusqu'au terminateur. La baie Burlun forme la
pointe extrême nord, qui se trouve un peu :\ l'ouest du méridien central. Entre le
T,\ I. A PI am:ti: m a us.
massif qui vi<Mit aboutir à In baio Burton et colui «lui aboutit à la baie ibi Mr-
ridien. on aporcoit uue ôtroito bando blancbàtrc ^ui réunit, le continent Becr à
nie Phillips. Au sud-ouest do ces irrandos taches [sombres, ot prrs du bord, on
voit une tache blanche causée sans doute par des vapeurs. La tache polaire nord
diminue, elle est surmontée au Sud par la mer Campani et la mer Knobel, qui pa-
raît très sombre, et se détache avec vigueur de la terre Rosse, qui est cependant
moins brillante ce soir que d'habitude. La mer Knobel se recourbe un peu à
l'Est, vers la mer Tycho, et est séparée de cette mer par une bande blanchâtre
assez larire, mais aussi très va,i:ue. La mer Tycho forme d'abord un quadrilatère
sombre qui. vers le haut, est surmonté d'une tache angulaire plus p;ile, qui se
trouve séparée du quadrilatère par une bande blanchâtre. A l'Est, ce quadri-
latère est larçrement séparé, par une bande blanchâtre, d'une tache grise qui
atteint le terminateur et appartient â la mer Airy. Au Nord-Ouest, sur le bord, on
voit l'extrémité de la mer Lassell et la terre Le Verrier.
» Fiij. 2, 15 février, f>'»4.''). — La mer du Sablier vient de traverser le méridien
central. Comme toujours, elle est beaucoup plus sombre, et presque noire sur
son bord oriental, qui est borde d'une frange irrégulière très brillante. Vers le
haut, la frange brillante pénètre dans Tycho, et forme le cap Banks, qui s'avance
assez loin dans l'intérieur. La mer Flammarion, à l'Ouest, est également frangée
de blanc, ainsi que la mer Hooke qui la surmonte. La mer Flammarion se trouve
séparée de la mer du Sablier, à l'Est, par un isthme étroit qui, au Sud, s'élargit
et forme un triangle blanchâtre au milieu de cette dernière mer, La baie qui
forme la mer Main est visible, mais fort vague. Vers l'extrémité inférieure ou
boréale de la mer du Sablier, là où elle est très étroite et, par un gonflement à
l'Est, donne naissance au passage Nasmyth, il semblerait que cette étroite
mer est séparée du reste par une petite bande blanche; ceci doit être causé
par des vapeurs ou des nuages traversant le détroit, car je n'ai jamais remarqué
cette rupture auparavant. La tache polaire nord est bordée par la mer Delambre
qui, vers l'Ouest, s'accentue fortement, et s'élève vers le Sud, où elle se termine
angulairement dans le voisinage de la mer Main. La terre de Laplace semble
communiquer directement avec le grand continent Merschcl I, par une langue
étroite et blanchâtre. Entre l'extrémité sud-ouest de la mer Main et la baie
Huggins, on voit une tache blanche assez vive.
» Fig. .3, 27 février, l^'ih^. — Au Sud, non loin du bord, on voit cette partie de
la mer Maraldi qui s'étend delà terre Burckhardt jusqu'au delà de la baie Trouve-
lot. La bordure nord de cette longue mer est frangée d'une bande lumineuse qui
suit ses nombreuses sinuosités. Un peu à l'ouest du milieu de l'arc énorme formé
par cette tache, on distingue très nettement le cap Noble, formant sur Maraldi
une dentelure d'une blancheur éclatante. Non loin du centre du disque, on dis-
tingue une tache grise ovale très singulière, à bords très diflfus, qui, à l'Est et à
rOuest, se rattache aux baies Huggins et Trouvelot par une étroite et vague
bande grisâtre qui se recourbe pour remonter vers elles. Cette singulière tache
ovale n'était certainement pas visible en 1877, 1878 et 1879, alors que Mars
188i TUOUVr-LOT. — OUSI- K VATIONS I- T DHSSINS. 375
était ;>/u8 rapproclié de nous ('j. Cette tache ovale est encore rattachée à Ma-
raldi par une autre bande grise étroite, qui va du Nord au Sud, et que j'ai sou-
vent observée auparavant. Des bords de la tache polaire nord on voit deux taches
angulaires qui s'avancent vers le Sud. La plus orientale se dirige vers la tache
ovale en se recourbant à l'Ouest, et s'cfl'aco un peu avant de l'atteindre. La plus
occidentale forme une courbe très prononcée, et, revenant vers l'Est ens'effaçant
graducUenient, elle s'unit à la tache ovale par une bande à peine sensible. A
l'ouest de cette tache recourbée et s'avançant jusque sur le bord, on voit une
tache blanche brillante.
" Fig. 'i, 2 mars, ()''40'". — Au Sud, on distingue la partie occidentale de la mer
Maraldi, la baie Trouvelot formant un angle un peu ù, l'est du méridien central.
Au Sud-Uuest, tout près du bord, on distingue la grande et étroite tache qui du
Sud descend et va se terminer sous la mer Terby. De la baie Trouvelot, on voit
une vague tache grisâtre, déjà reconnue, qui va s'élargissant et se recourbant
vers l'occident. Cette vague tache se trouve réunie à Maraldi par une étroite et
faible bande grisâtre qui se trouve un peu à l'ouest de la baie Trouvelot. La
tache polaire nord est entourée au Sud par une grande tache sombre (sans doute
la mer Oudcmans), qui remonte vers le Sud, où bientôt elle se trouve séparée
par une étroite bande blanchâtre. Puis, continuant au delà, mais plus vague, elle
forme une tache angulaire, à contours très diffus et difficiles à reconnaître. A
l'est de la mer Oudemans, près du bord, on voit la terre Fontana, qui n'est pas
très lumineuse. A l'ouest de cette même mer, et un peu au-dessus de la tache
polaire, se trouve une tache blanche allongée, très facilement visible, qui est
brillante près de la mer Oudemans, et perd de son éclat à mesure qu'elle s'ap-
proche du bord avec lequel elle se confond. L'endroit où le terminateur rencontre
le bord sud de la planète est manifestement d r formé ; car sa courbe, au lieu
d'être elliptique, comme elle devrait être si la surface était parfaitement sphé-
rique en cet endroit, forme un angle obtus très prononcé, qui indique pour ce
point nne élévation considérable de la surface. Cette partie du bord parait aussi
plus lumineuse que les autres régions.
» Tel est le résumé de ces observations. Un coup d(uil suffit pour se con-
vaincre que l'hémisphère nord de Mars diffère notablement de son hémi-
sphère sud, au point (le vue géographique. Sur ce dernier hémisphère, les
taches sombres sont beaucoup plus grandes, plus nombreuses, plus vigou-
(.') Cet article a été reproduit dans Tlie Observatory, décembre 1884. et l'éditeur re-
marque que cette tache ovale est l'océan de Schiaparelli et que les trois canaux qui le
rattachent à la mer Maraldi sont ceux des Titans, des Laestrigons et des Cyclopes, \o
tout vu eu 1877 par M. Schiaparelli. L'Océan a été remarqué la même année à Green-
wich, le canal des Cyclopes en 1879 et en 1882. Le mémo aspect aurait été vu en 1877
à Potsdam et en 1879 par M. Burton. M. Trouvelot a répliqué à cette remarque {Tlic
Observatory, 1885, p. 2G) que cette tache ovale occupe bien la place du fleuve Océan,
mais ne ressemble pas à ce que l'on voit là ordinairement. Cette tache était plus foncée
et presque isolée.
■24*
T.G I. A PI ANCTI- MAKS.
reuses et mieux déliiiies (lue celles de riicniisiiliùn' nord. Ici. il n'y ;i iruéro
que les mers Knobel et Delambre qui se montrent avec un peu de netteté,
tandis qu'au Sud presque toutes sont d'une netteté remarqualde, particu-
lièrement le loni: de leur bord boréal. En {.M-néral. les tachrs sombres de
rhémispbèrc nord ont leurs bords si vagues et si dilTns. qu'il est dirncilc de
rt'connaître leur forme.
'^ D'après mes observations, il semble (]ue certaines taches soient variables
dans leur forme et leur couleur. Jusqu'ici nous n'avons jjas de données
suffisantes pour décider avec certitude de la cause de ces changements,
s'ils résultent d'un effet d'illumination, ou bien s'ils sont amenés par les
variations de sai.sons. par des pluies, des brouillards ou des nuages (').
Les observations futures permettront sans doute de résoudre ces divers
problèmes. »
CXIII. Même oppositiozi, 1881. — Knobel. Observalions et dessins i').
L'intérêt passionnant et perpétuel qui s'attache à l'observation astrono-
mique de la planète Mars s'explique tout naturellement par l'espérance que
nous avons d'entrer en relation déplus en plus intime avec ce monde voisin,
de pénétrer dans sa vie et d'arriver à nous rendre compte aussi exactement
que possible de ce qui se passe à sa surface. C'est l'hémisphère boréal de
Mars qui est le moins bien connu, parce qu'en raison de l'inclinaison de
l'axe, analogue à celle de la Terre, cette planète nous présente son pôle
nord pendant les époques où elle est le plus éloignée de nous. Il est donc
doublement important d'étudier avec soin ces régions dans ces conditions
désavantageuses.
Les observations de M. Knobel, notre laborieux collègue de la Société Royale
astronomique de Londres, ont été faites pendant les mois de janvier, février
et mars 1884. lors de l'opposition de la planète, qui, alors à .son maximum
de distance d'ojjposition, passait à 100 millions de kilomètres d'ici et n'offrait
qu'un disque de 13" à 14".
['] Dans une Note publiée aux Comptes rendus de l'Académie des Sciences, séance
du 31 mars 1884, l'auteur inclinait à penser que certaines taches de Mars peuvent être
dues à de la végétation, subissant l'influence des saisons. « Les grands continents de
l'hémisphère nord sont occupés par des taches grisâtres plus ou moins faibles, qui sont
disséminées sur eux. A en juger d'après les changements que j'ai vu subir à ces taches,
d'année en année, on pourrait croire que les taches grisâtres variables sont dues à une
végétation martienne qui subit l'alternative des saisons. »
Quant à la disparition de la neige polaire, l'observateur dit aussi là : « Ce n'est guère
que trois mois après le solstice d'été de l'hémisphère sud que j'ai plusieurs fois vu dis-
paraître complètement la tache polaire australe. »
{^) L'Astronomie, juin 188C, p. 201. —Memoirs of the royal astronomical Society,
1885, t. XLVIII, p. 2.
IS84 KNOnFL. - OBSi: K VATIONS I-T DESSINS. 377
Parmi les noiulireiix dessins pris par M. iùioljel à l'aide d'uu télescope en
verre argenté de llrowning, de 8 pouces et demi ((J"',21G), armé d'oculaires
grossissant de 'JôO à iôO fois, nous avons choisi les quatre plus intéressants
[)Our les régions boréales, dont la connaissance laisse encore à désirer. Ces
A Fitr. îdl. B
(• D
Aspect de la pianote Mars, d'après les observations faites en 1884, par M. Knobel.
A. 29 février lO". Lonp. 215». 1 Cil février 7''15"'. Long. 334».
B. 26 février 11''. Lonp. 25C°. I P. 11 février iiiiSU™. Long. 1".
dessins (/i^. 201 ) et surtout lacarteconstruite par l'auteur (/?^. 202) complètent
une partie des lacunes que les cartes de Mars laissaient encore dans ces ré-
gions circumpolaires.
On peut d'abord remarquer que l'hémisphère austral de la planète diffère
géographiquement ou peut-être météorologiquement de son hémisphère
boréal, non seulement parce qu'il est plus riche en taches sombres, ou
378 l.A IM.ANKTl- M A US.
mers, mais encore en oc que ces observations n'ont pas laissé voir une
seule fois un seul contour géographique parl'aittMnent net, si Ton en excepte
toutefois l'allongement nord de la mer du Sablier, longitude 200°, latitude
30" à iO". Tous les contours se sont montrés vagues et mal définis. Cet effet
peut être dû à une moins grande transparence de ratmosplière, ou bien à
des rivages réellement moins nets, moins arrêtés, moins rudes par eux-
mêmes. M. Knobel émet l'idée que, sans doute, dans l'hémisphère austral
les falaises sont plus escarpêeS; plus profondes, et les eaux plus brusquement
seiTées entre les rivages, tandis que dans l'hémisphère boréal les plages sont
plus douces, plus plates, et les rivages en pentes graduellement inclinées. Les
observations ont été faites pendant l'été de cet hémisphère austral. C'est là,
comme on le voit, un premier point fort intéressant pour notre connais-
sance de la planète.
L'auteur n'a pas réussi à reconnaître les canaux signalés par M. Schia-
parelli ; cependant les observations suivantes sont dignes de remarque.
Le canal désigné sous le nom de mer Huggins et de Cyclopum Mare (lon-
gitude 300° à 223" ; traversant l'équateur) a été observé à plusieurs reprises
avec une très grande netteté. (Il est absent de la carte de M. Green. ) Il part
de la mer Maraldi et se dirige sur la mer Oudemans. Le dessin A {fig. 201 ),
fait le 29 février, à 10'', a été exécuté par une définition excellente.
Sur ce dessin, comme sur la carte, on remarque aussi un second canal,
qui correspond à celui des Léestrygons.
L'espace situé à l'est de ces canaux, écrit M. Knobel, s'est montré couvert
d'une sorte de réseau réticulé très délicat; non seulement il paraissait pommelé,
marbré, mais les bords de ce pommelage, pour ainsi dire, semblaient être des lignes
légères. Je n'ai pas pu distinguer les canaux droits et parallèles, ajoute-t-il;
mais, si j'avais pu faire un dessin, le résultat naurait pas été très différent de
l'aspect général des dessins de Milan, quelque chose comme une toile d'araignée.
Cependant il est juste de remarquer que ce jour-là (29 février) il n'y avait
rien de visible sur la terre de Fontana (200» à 238° et 13° à 46° B. ) et que peut-être
les nuages, qui sans doute cachaient cette région, ont produit l'aspect dont il
vient d'être question.
Le 26 février, la terre de Burckhardt — Ilcspérie — (220° à 255°; 'iO° à 10° A. )
était parfaitement visible. A la même date, le ton de la région sombre occidentale
de la mer du Sablier, appelée mer Flammarion, ne s'est pas montré uniforme.
La partie inférieure était certainement moins foncée que la partie supérieure.
La baie du Méridien se trouvait sur la ligne centrale du disque le 17 fé-
vrier, à 7''50". L'astronome anglais propose de prendre pour origine des
longitudes de Mars, au lieu de ce point adopté par Becr et Madler, Proclor,
S S
u >^
« t-;
-M K
a —
e. ...
X
to ::;
^
" 3
Ci
~ —
O
o e
o
£, a
Z O
m) \.\ IM.ANKTK MA H S.
Schiaparelli. elc. la mer Terby, comme étant niiiMix dôtachôo et d'une dé-
terminalion plus sûre. Nous jjcnsons qu'il est inutile de changer. An temps
de Béer cl Madler, cette baie du Méridien était la configuration la plus carac-
téristique de toute la planète, elle ne s'est pas sensiblement modifiée à cet
égard, et elle peut do nouveau redevenir très foncée.
M. Knobel s'est encore attaché à l'examen du curieux prolongement de la
mer du Sablier connu sous le nom de canal Nasmylh. Le 1 1 février seule-
ment, cette extrémité a été bien visible : elle se recourbe, non d'une ma-
nière abrupte, mais insensiblement, dans la direction de la baie burton,
sans s'étendre jusqu'à elle.
L'île Phillips ^Deucalionis Regio) au-dessus delà baie du Méridien, s'est
montrée rattachée au continent le 10 et le 11 février, dans une vue si dis-
tincte qu'il n'était pas possible d'en douter. Cependant l'auteur, le 21 octobre,
et M. Green, en 1877, avaient bien vu celte région séparée du continent par
une teinte grise. Variations.
La mer Knobel (long. = 20°, lat.z^SO" à G5° B.) a paru s'étendre jusqu'aux
neiges polaires boréales. Sa configuration diffère des dessins anciens par
l'absence de la traînée blanche vue en 1873 cl de la tache blanche vue à
l'est de son centre. L'attention la plus scrupuleuse a été portée sur cette ré-
gion, dans le but de vérifier les observations faites en 1873 sur l'existence
d'étroites bandes sombres croisant la terre de Le Verrier, et l'ouest de la mer
Knobel. En aucune circonstance on n'a pu revoir ces bandes aussi nette-
ment tracées qu'en 1873; cependant les dessins du 1 1 février (/z^'. 201 ) confir-
ment, à n'en pas douter, ces observations anciennes. On peut remarquer
que les dessins faits par Madler en 1839, Jacob en 1854 et Schmidt en 1873
montrent tous des bandes étroites en cette région, ce qui nous conduit à
modifier la carte de M. Green sur ce point. En 1884. chaque fois que la mer
Knobel a été observée, on a' toujours vu, contigu à son côté occidental, un
espace sombre; soit homogène, soit partagé en bandes. On n'a pas revu
l'espace blanc désigné sous le nom de terre de Le Verrier.
En des conditions d'observation excellentes, la mer Terby a été vue très
distinctement les 5 et G février, ainsi que la petite tache sombre, au Nord,
nommée Agathodœmon par M. Schiaparelli. A cette dernière date, à 11 ''45™
(heure de Greenwich), le centre de la mer Terby passait exactement par le
méridien central, ce qui la placerait par 83° de longitude, au lieu de 90^
Ce même soir, G février, la mer Airy était Ijien distincte; elle s'étendait
assez loin vers le Sud. D'après les observations des 24, 29 janvier et
8 mars, la limite occidentale de la mer Oudcmans s'étend à jdus de 10" à
l'ouest du tracé de M. Green.
L'Achéron a été aperçu, comme un large tracé gris, de 100° à 1GÛ° de Ion-
I88'« ii:iM(V. - lu: M A un II- s. ;^si
giludo par 3"»'' de latitude nord, mais il est l)eaucoup plus large que sur la
carte de M. Sciiiaparelli : il ne lui ressemble guère, quoitjuc celui-ci ait
écrit : a L'Acheronte e uno dci canali di Marte che ebbero la sorte di esser
veduli dislinteniente da più di un osservalore : trovasi, infatti, disegnato con
tutla la possibile chiarezza del signor Knoliel sulla rarla che accompagna le
suc osservazioni areografiche del 1848. >> i lll. i(i .
Telles sont les principales observations faites par M. Knobel. Elles con-
firment nos conclusions précédentes : // s'opère des chanijemcnls ccrlains dans
(es détails.
C\l\. 1884. — Teiuiv. Remarques sur la planète Mars (').
a Le fait ([ui m'a le plus frappe et le plus étonné, écrit l'auteur, pendant le
cours de la discussion à, laquelle j'ai soumis les dessins de Mars de Schrœter, est
la présence, dans les figures des Areographisclie Fragmente, de plusieurs
taches ressemblant à s'y méprendre à la mer du Sablier. Je disais : Schrœter
a fait soixante-treize dessins de cette planète en 1800 et 1801, et, dans ce
nombre, nous en trouvons au moins trente-cinq, qui, à première vue, sem-
blent représenter évidemment la mer du Sablier et l'océan de Da\':es. En y re-
gardant de plus près, au contraire, on constate que ces trente-cinq dessins ne
se rapportent pas tous à la même région et accusent la présence de plusieurs
taclies donnant lieii A la même apparence. » Et plus loin : « Comment expliquer
la présence de ces nombreuses taches se terminant en pointe du côté du Nord dans
les dessins de Schrœter, taches si semblables entre elles et pourtant correspon-
dant à des portions différentes de la surface? Elles ont souvent, comme on le
conçoit sans peine, mis l'habile observateur lui-même dans une grande perplexité.
Nous ferons remarquer que, dans la carte de M. Proctor, on trouve, outre la mer
du Sablier, plusieurs autres baies et détroits dirigés vers le Nord : tels sont les
passes de Iluggins et de Bessel, et les baies de Béer et de Dawes, le détroit de
Dawes. Mais aucune de ces régions n'offre des dimensions aussi notables que la
mer du Sablier.
I) On remarque les mômes singularités dans les dessins de W. Herschel.
» A côté de cette explication imparfaite, la pensée m'était venue que ces baies avaient
pu diminuer de grandeur depuis les observations de ces deux illustres astronomes
mais cette opinion m'avait semblé trop hasardée pour la formuler. Il était impossible
aussi d'accorder plus de confiance aux dessins de \V. Herschel et de Schrœter qu'à ceux
des observateurs modernes, exécutés à l'aide d'instruments évidemment supérieurs. La
question restait donc sans solution.
» M. Schiaparelli, dès ses premières découvertes en 1877, a fourni un élément précieux :
les baies dont il s'agit se prolongent toutes vers le Nord par des canaux très déliés, il
est vrai, mais qui nous rapprochent déjà davantage des objets vus par Schrœter. Les
mervoilleuscs observations faites à Milan en 1877 et en 1879 combinées nous montrent
{') L'.islronomi'j, juin 188G, p. "207.
382
1. A im,am:ii: mars.
l'élargissement de la mer du Sablier et des changements de détails dans les configurations
supposées fixes de la planète.
u Los travaux de M. Schiaparelli en 1881-8-2 n.' font que confirmer toutes ces merveilles.
et, dans sa carte do cette époque, nous trouvons Vliidus tcUemcnt développé, telle-
ment élargi, tellement obscurci, qu'il est presque tout à fait identique à la mer du
Sablier. Ce canal a subi un élargissement, un agrandissement manifeste depuis 1877.
Avec cette modification étonnante coïncide le [diénomène mystérieux de la géminalion
ou d'un dédoublement spécial de presque tous les autres canau.\. >-
CX\ . 1884. — Utto Bukddickkr. Obscr valions cl dessins.
A rubservaloirc de lord Uûs<, à Bin- Casllo, M. lin-ddickL'i' a fait une série
■jS février 1861. l-i inar.s 1S84.
Croijuis de Mars. i)ar M. liœddicker, au grand télescope de TObservatoire de lord Ro.is.
d'esquisses, du 24 février au 2 avril. Ces esquisses, au nombre de treize, ont été
fjrésentées le 16 juin à la Société royale de Dublin, et publiées dans ses Trans-
actions ('). Réflecteur de trois pieds d'ouverture. Grossissements 144 et 216.
Il est bien remarquable que ce grand télescope de l'Observatoire de lord
Ross ait donné si peu de détails. Nous reproduisons ici les deux meilleurs
de ces dessins afin qu'on en puisse juger. Le premier (fig. 203) est du
24 février, vingt et un jours après l'opposition, et le second [fig. 204) est du
22 mars. On reconnaît dans le premier la mer du Sablier et toute la côte du
détroit d'Herschel, et dans le second ( longitude du centre = 25° ), le détroit
Aragoet la baie Burton de notre carte, l'indus de M. Schiaparelli, descendant
au lac Niliacus et au Deuteronilus. Et c'est à peu près tout ce qu'il y a à
glaner de sûr dans ces petits dessins obtenus par un habile oljservateur à
l'un des plus grands télescopes. Les puissants instruments valent donc moins
que les petits pour Tétude de Mars? Les vagues d'air chaud trop grossies effa-
cent-elles les trop légères images ?
CJ T. m. Série II, 1885. Notes on Ihe aspect of Ihe planel Mars, etc.
1884 Dli.NMMi. -- IHHKi; Kl. I. \ HOIATION. 383
(]X\I. 188i. — DENNiNd. Uarèe de la rolation dr Mars[^).
Malgré la petitesse relative do son diamolrc, et la lenteur de son mouve-
ment de rotation, la |ilanùte Mars otlrc cependant des facilités remarquables
pour la déterminalion de la durée de sa rotation. Il n'y a certainement
pas d'autre planète ([ui se présente à nous dans des circonstances aussi fa-
vorables sous ce rapport ; les principales taches de Mars se sont en elfet
montrées à de nombreuses générations successives avec les mêmes formes
caractéristiques, tandis (|ue les détails (ju'on a pu discerner sur les autres
planètes sont dus à des phénomènes atmosphériques temporaires, ou bien
sont accompagnés de circonstances défavorables qui les rendent peu dis-
tincts et empêchent complètement de les observer pendant une longue durée.
De plus, on peut admettre comme certain que les détails observés sur Mars
sont des objets permanents appartenant à la surface même de l'astre, tandis
que les taches aperçues à l'aide du télescope sur quelques autres planètes pa-
raissent n'être que des effets produits par des changements arrivés dans
leur atmosphère.
La durée de la rotation de Mars a déjà été donnée avec une telle précision
qu'il pouvait sembler superflu de rouvrir une discussion sur ce sujet; mais
il est toujours intéressant de rechercher comment les observations récentes
s'accordent avec les anciens résultats. La Mer du Sablier^ qui est générale-
ment considérée comme la tache la plus facilement visible de la planète, se
prête admirablement à l'étude de la durée de la rotation. Dès 18G9, M. Den-
ning a observé son passage dans la partie centrale du disque de la planète à
l'aide d'une lunette de 4 pouces j : le 2 février elle était centrale à 10'', le 4
à 11 "et le 5 à Jl^SO"..
Il observa la même tache au mois de février 1884 avec une lunette d'une
ouverture de 10 pouces et d'un grossissement de 252 fois et nota qu'elle tra-
versait la région centrale aux époques suivantes :
1 i février 1884 5'' 55"
15 6 35
19 9 5
22 M ',
L'observateur combine son observation du 4 février 181j9 avec celle du
14 février 1884. Cet intervalle comprend 5487 jours 18 heures 55 minutes
— 474144 000 secondes. Il faut le corriger de la différence des longitudes
entre Mars et la Terre aux deu.\ époques, et aussi de la phase.
Il est inutile d'appliquer aucune correction relative à la vitesse de la lu-
mière, parce qu'aux deux dates choisies pour la comparaison le diamètre
(') L'Astronouiie, t. III, août I88i. p. 2'Jli.
38 i LA rLANKTi: M A US.
apparent de la planète était d'onviron IG secondes, de sorte que la distance
de la planète à la Terre était à peu près la même. Toutes corrections faites,
M. Dennini: trouve, pour la durée de la rotation,
Ce nombre, (jui résulte d'un intervalle comprenant 534i) rotations, pré-
sente un accord satisfaisant avec les périodes calculées par Kaiser, Schmidt
et Proctor, d'après une série d'observations beaucoup plus longue. Voici les
principales déterminations antérieures :
1837 J.-H. Madier •2i"37'"23',8 Astronomische Nachrichten, n" Vid.
ISCi F. Kaiser 2'i 37 22,62 Astronomische Nachrichten, n° 1468.
1866 K. \Volf 24 37 22,9 Astronomische Nachrichteii, w 162^.
1869 R.-A. Proclor ... 24 37 22 ,735 Monthly Notices, t. XXIX, p. 232.
1873 .T.-F.-J. Schniidl. 24 37 22 ,57 Astronomische Nachrichten, n» 1965.
1873 F. Kaiser 24 37 22,591 Annalender Leidenen Sternwarte, t.lll
1884 W.-F. Deimiug. 213722,34
Il est visible que la période de Madier, de 2i''37"':?3%8, est d'environ une
seconde trop grande. Si nous prenons la moyenne des six autres valeurs, qui
ne diffèrent entre elles que de O'.G. nous trouvons la période
24" 37'" 22', 626
qui ditfère bien peu de celle que nous avons indiquée comme la plus appro-
chée (p. 242) et qui est absolument identique à la période corrigée par
M. Marth, que nous venons de voir il n'y a qu'un instant (p. 371).
CXVII. 1885. — Vax de Sande B.\ckmuyze.v. Période de rotation de Mars (').
M. Van de Sande Backhuyzen, directeur de l'Observatoire de Leyde, a donné
là, sur la période de rotation de Mars, un laborieux mémoire dans lequel,
après la discussion soigneuse d'un grand nombre d'observations s'étcndant
depuis celles de Huygens en 1659 jusqu'à celles de Schiaparelli en 1879, il
détermine une valeur plus précise encore que toutes celles que nous avons
vues précédemment. Sa méthode consiste à admettre la valeur donnée par
Proctor pour cette période et la position déterminée par Schiaparelli pour le
pôle nord de Mars, et ensuite à en déduire les longitudes aréographiques des
principales taches à l'aide de ces éléments. En comparant cette durée aux
observations, il obtient les corrections indiquées par celles-ci. La valeur
ainsi obtenue est
24''37"'22',GG=û',0132
qui s'accorde presque exactement avec celle de Kaiser, laquelle était de
24^37'"22^62.
[') Untersuchungen ûber die Rolationszeil des Planelcn Mars und iiber Aender^
ungen seiner Flèche. Leyden, 1885.
1885 VAN [)i: SA.M)i; li ACK IIU V/Ji.N. - ROTATION I)l'; MAHS. 385
La valeur obtenuo par Proclor paraît un peu trop grande, comme on peut
1(5 voir dans la Table suivante de la longitude moyenuQ de la pointe nord de
la mer du Sablier, calculée par elle pour diirérenlos oppositions :
Dates. Obscrvnti'urs. Longituil^'s. l'oiils.
IGGl Iluygeiis 315°,7 l',5
16GG llooke 290 ,4 0 ,3
1782 llerschel 305,8 3,0
1799 Schrœter 303 ,3 IG ,3
1830 Béer et Miidler 290,5 3,0
1862 Kaiser, Lockyer, Lord Uoss... 294,9 7,5
1864 Kaiser, Dawes 294,3 3,0
1877 Schiaparelli, Lohse, Green, Nies-
tcn, Dreyer 289 , G 15 ,0
1S79 Schiaparelli 288,4 8,0
11 y a un lent décroissement de la longitude avec le temps, à rcxceptiou
de Hooke, et comme c'est sur les deux dessins de Ilooke que Proctor s'est
basé, l'excès de sa détermination s'explique aisément.
M. Backhuyzon termine son mémoire par une appréciation des change-
ments observés à la surface de Mars. Il établit un fait important à propos
des variations que nous avons si souvent signalées, c'est que la mer allongée
qui, sur notre carte (p. G9), porte le nom de baie Huggins, et qui, sur celles
de M. Schiaparelli, porte celui de Gyclopum, était beaucoup plus large à
l'époque de William Herschel et de Schrœter que de nos jours, et compa-»
rable par sa forme et son étendue, à la mer du Sablier. Schrœter paraît avoir
observé le canal des Lœstrygons, ce qu'il n'aurait guère pu faire si cette ré-
gion n"avait pas été plus marquée que de nos jours.
Opposition de 1886.
Date de l'opposition : G m.vrs.
Présentation : Le pôle boréal est incliné vers la Terre.
Latitude Phase Anplo
ilu feutre. Diamètre, zone iiianquaut. Tcrrc-Soloil.
6 janvier -f- 23«,3 9", 20 0" ,75 33"
G février 22 ,5 12 ,18 0 ,40 21
G mars (opposition}... 21,9 13,95 0,01 2
6 avril 21 ,9 12 ,43 0 ,50 23
G mai 23 ,4 9 ,82 0 ,88 35
G juin 25 ,3 7 ,84 0 ,89 39
Galendriicu dl Mars.
Hémisphère .lUstral ou supérieur. Ikiiii>i>hère boréal ou ir.férieu.
31 mars 188G Solstice d'hiver. Solstice d'été.
Flam.mauiu.n. — M art-. 25
386 LA l'LVNtTi: MARS.
CXXI. 1886. — IiEXNiNG. Observations et dessin^
M. Dtiiuing a efTeciUf pendanl les mois de mars et d avril ibiib. a son
observatoire de Bristol, une série d'observations de la planète Mars, à Taide
d'un télescope à miroir de verre argenté de 10 pouces (0",254) de Wiih, de
Hereford. Les grossissements employés ont été de 2ô'2 à 475 diamètres: mais
il n"a pas trouvé d'avantage à se servir du dernier, qui a paru trop fort. En
général, l'oculaire grossissant 252 fois a été largement suffisant, quoique,
en certaines circonstances, un grossissement de 350 fois se soit montré
avantageux.
La planète était en opposition le 6 mars: mais, pendant les trois premières
semaines de ce mois, on eut à subir de fortes gelées et il ne fut guère pos-
sible de commencer les observations avant la fin du mois. 11 s'en faut de
beaucoup que la position de Tastre ait été favorable, tout au moins sous le
rapport de ses dimensions apparentes. Mais ce qui fait l'intérêt des obser-
vations actuelles, c'est que l'hémisphère boréal, qui jusqu'ici n'a pas été
étudié aussi complètement que l'hémisphère austral et qui n'offre pas autant
de détails bien nettement caractérisés, se présentait très bien poui- l'obser-
vation, la latitude du centre du disque étant d'environ 22"' X. pendant les
mois de mars et d'avril.
Les taches observées éiaicni a ia fois nombreuses et variées ; li y a évi-
demment une quantité de détails sur la planète; mais il est extrêmement
difficile de les relier entre eux par une représentation satisfaisante. \^n grand
nombre de tach^ très faibles frappent l'œil assez distinctement pour qu'on
puisse affirmer leur existence ; mais on ne peut pas les distinguer avec assez
de netteté et de précision pour reconnaître leurs contoui's, ou assigner cor-
rectement leurs positions relatives. Il n'y a que les traits les mieux pronon-
cés qui puissent être dessinés d'une manière satisfaisante. Le petit diamètre
de Mars pendant ces observations a certainement contribué dans une large
mesure à l'incertitude de l'aspect physique du disque. Une autre cause de
cette incertitude réside dans la rareté des images télescopiques réellement
bonnes. Non seulement il faut que l'atmosphère se trouve dans des conditions
particulièrement favorables à la parfaite netteté des images, mais encore
une absence complète de vent est indispensable. Les plus légères vibrations
empêchent de suivre et d'étudier un système compliqué de taches et de dé*
tails. Enfin, comme objet télescopique. la planète Mars est beaucoup moins
satisfaisante que Jupiter ou Saturne. Toutes ces circonstances expliquent
• L'AstronoTiiie. septembre 1886. p. 32f
|s6(i I)I:NMN(;. - nHsi:u\ a IIONS K l DKSSLNS. 387
rincorlitiulc de cciUiiufs oJ».sei'v;ilioiis el les discordances (jifon peut relever
dans les dessins des détails visibles à la surface.
Voici les observations de M. Deniiin!,^ :
t Du -i.i mars au ;iO avril la planète a été examiiK^e vingt-doux soirs, et un
Fijr. '205.
.\-;pccl lie la iiluuclc Mar>, dain\'!> les ol'scrvaiiun-- tic |».vj.
u M. Uciiiiiii^.
f. 17 avril, 8'' SO"'. Long. 187".
ji, 13 avril, S"» O-". Long. 30.j".
m. 1:: avril, yi'5U"'. Long. 3.Î2»
IV. a avril, ThaO"-. Long. 28<>
nombre considérable de dessins a été obtenu, l^endant cette période, il y eut une
série exceptionnelle de belles nuits, et toutes les fois que les images furent
suffisantes, les détails observables ont été rigoureusement notes; puis les résul-
tats ont été ensuite comparés les uns aux autres, ainsi qu'avec ceux des travaux
analogues effectués antérieurement,
u Mes dessins se correspondent exactement entre eux et présentent une concor-
388 1. A imam; II-: m a us.
ilanoo bien inarquOc avec les cartes de Circcn, i?cliiaparelli, Flaimnarion, Kiio-
bel, etc. Je les ai aussi compares avec les vues doimces dans VAréographie de
Tcrby et avec les dessins de Bœddicker olitenus en iSSl et 1884 à l'aide du té-
lescope de trois pieds (0'",'.M5), de lord Ross (von. plus haut [). 3Gi et 382).
Cette comparaison ma encore fourni une nouvelle confirmation de mon travail.
Quelques discordances sont plus fortes que celles qu'on s'attendrait à rencontrer
comme probables ; mais l'expérience nous a appris qu'il serait illusoire d'espérer
l'uniformité dans la représentation des détails planétaires.
» Pendant les cinq semaines qu'ont duré mes observations, je n'ai trouvé aucune
preuve certaine d'un changement quelconque dans aucune des taches; mais la pé-
riode a été trop limitée, et les circonstances dans lesquelles s'est effectué le tra-
vail ont été trop défavorables pour que je puisse me prononcer avec certitude sur
ce point. Les légères différences que présentent mes dessins sont simplement du
même ordre que celles qui seraient causées par des changements dans les condi-
tions atmosphériques locales. Pendant une mauvaise nuit, des marques très
faibles, distinguées auparavant, se sont effacées, tandis que pendant les meilleures
nuits j'ai vu des détails délicats qu'il était impossible de soupçonner dans des
circonstances moins favorables. Je suis convaincu que de pareils changements
dans les conditions de la vision exercent une influence considérable sur la confi-
guration apparente de la planète, plus considérable même que les observateurs
ne l'admettent généralement. On a quelquefois conclu trop hâtivement à des
changements réels; de véritables modifications ne peuvent être affirmées qu'à
la suite d'un examen scrupuleux et sur la foi de preuves indiscutables.
■) La plupart des mers les mieux définies présentent des bords extérieurs très
brillants avec des limites très nettes. Ces bordures brillantes rappellent les aires
lumineuses qui souvent, sur Jupiter, confinent aux taches sombres; seulement,
sur Mars, elles sont plus étendues, plus permanentes, et aussi de formes plus
dissemblables. Je dois citer, comme un cas particulier de ces bords brillants, la
région qui longe la rive orientale de la mer du Sablier. Je l'ai vue quelquefois
si lumineuse qu'elle rivalisait d'éclat avec la tache blanche du pôle nord. Elle
s'étend sur plusieurs degrés à l'est du contour obscur de la mer, et se trouve
limitée par une tache faible, irrégulièrement condensée, qui se prolonge vers le
Nord en sinclinant à l'Est, à partir d'un point de longitude 290», immédiatement
à l'est de l'extrémité boréale de la mer du Sablier (voy. fig. 205, II et III). Cette
traînée est fort longue : elle s'étend jusqu'au-de-ssous de la baie du Méridien et de
la baie Burton auxquelles elle se relie par de légers ligaments qui rappellent
les canaux de Schiaparelli (voy. fiO- 205, IV). Cette tache spéciale, qui ne
figure pas sur la carte de Grecn, est peut-être identique avec le réseau d'étroites
bandes sombres dessiné dans cette région par Schiaparelli sur sa carte (i). On la
trouve aussi plus ou moins nettement définie dans quelques autres dessins, no-
tamment dans un dessin de Schmidt.
(') Vu»;, plus loin, p. 393. Comparer les dessina ûc M. Dcnning, II, III cl IV {fi(j. 205),
ù la région Il.^GGK et baie du Méridien 0'.
ISKC DI'NNINO. — OUSKUV ATIONS liT DESSINS. .'jSS'.i
» Quant h la mer tlii Sablier, clic se montre très faible et très étroite, siuon
brisée tout ;\ fait, dans la région qui se trouve à 10'> ou lô» au sud de son extré-
mité boréale (voy. fuj. -20^), II et III). Cette particularité est bien représentée
dans les dessins do Bœddicker, Sur d'autres dessins, je n'ai pu retrouver cette
circonstance suffisamment indiquée. Il est évident, du reste, qu'on ne peut la
bien remarquer que lorsque la réi/ion on question se présente auprès du centre
apparent du disque, comme lors do la dernière opposition.
i) Les dessins do Knobel de 1873 concordent généralement beaucoup mieux avec
les miens que ceux que le môme auteur a dessinés en 1884 ('). Sur la carte de
Greon, la mer Knobel est, à son extrémité australe, séparée de la faible bande
courbe qui s'allonge à l'Est, comme dans les dessins n"' 6, 7, 8 et 9 de 1873. Cette
rupture n'est plus figurée dans les dessins ultérieurs de 1884, de sorte que cette
région paraît avoir subi quelque changement d'aspect, i\ moins que la différence
d'inclinaison no soit la cause du défaut de concordance entre les observations. II
est probable que telle en est effcctivoment la véritable raison, car l'inclinaison de
la planète en avril et mai 1873 était presque exactement la même qu'en mars et
avril 188G, et c'est justement dans ces deux périodes que les dessins présentent
la plus grande resseml)lance dans leurs formes les plus 'remarquables. Je vois le
rivage boréal de la mer Knobel distinctement séparé do la bande obscure longi-
tudinale immédiatement contiguë à la calotte polaire boréale {fig. 205, W). Le
dessin n" 12 du 19 mai 1873, par Knobel, représente les principaux traits de cette
région tels que je les ai récemment observés. En 1884, cet astronome a dessiné
toute la masse d'ombre qui entoure le pôle nord comme obscurcie sans inter-
ruption; mais ces différences d'aspect sont dues, sans aucun doute, aux variations
d'inclinaison.
u Pour ce qui est des détails en forme de canaux observes par SchiaparcUi, j'ai
distingué un grand nombre d'apparences qui suggèrent fortement l'existence
d'une semblable configuration ; mais les dessins effectués en Italie pendant les
trois mois d'octobre 1881 à février 1882 leur donnent un caractère défini et, sans
parler de leur dédoublement, une rectitude de forme et une uniformité générale
de ton que les observations ne confirment pas. Les détails les plus délicats et les
plus complexes de la planète se présentent, à mes yeux, dans les meilleures cir-
constances, comme des ombres linéaires extrêmement faibles, avec des grada-
tions évidentes de ton, et des irrégularités qui produisent qh et là des ruptures
ou des condensations. S'ils existaient sous le même aspect, et avec la même
sûreté de direction que les a représentés Schiaparelli, ils eussent été facilement
aperçus ici, toutes les fois que la définition eût été suffisamment bonne; car ces
objets sont indiqués comme aisément observables dans la lunette de 8 pouces de
l'Observatoire de Milan, en février 1882, alors que le diamètre de la planète était
seulement de 13". Le dédoublement do ces lignes pouvait aussi se reconnaître
dans les mêmes conditions peu favorables. Ce qu'il y a do plus étonnant, ce n'est
(') Voir plus haut, p. .377.
390 lA Pl.ANKTK MARS.
pas que l'i-minont astronome italien aitddcouverl do si morvoilloux détails à la sur-
face de la planète, — car ces dt'tails existent sans aucun doute, — c'est bien plutôt
qu'il soit parvenu à observer leur configuration si complexe et si difficile i\ uno
époque où Mars se trouvait justement placé dans des conditions particulièrement
défavorables pour des observations d'une nature aussi délicate.
D Pendant les derniers mois, la calotte polaire boréale de Mars s'est montrée très
brillante ; elle présentait souvent un contraste frappant avec les régions les moins
réfléchissantes de la surface. Il y avait aussi d'autres parties du disque notablement
brillantes. Ces régions lumineuses de Mars méritent au moins autant d'attention
que les parties obscures, car c'est probablement dans leur aspect que des chan-
gements peuvent être observés d'une façon bien nette, si tant est qu'il se pro-
duise des modifications réelles à la surface do la planète. On n'a pas attaché
suffisamment d'importance t\ ces taches blanches.
» La plupart de nos principaux Traités d'Astronomie attribuent à Mars une atmo-
sphère dense; pendant mes observations, je n'ai rien vu qui soit de nature à con-
firmer cette théorie. Il me semble beaucoup plus vraisemblable d'admettre que
l'atmosphère de cette planète est extrêmement raréfiée. Les principales taches
sont invariablement visibles, et les différences observées paraissent plutôt dues
à l'influence de notre atmosphère qu'à celle de Mars. Jupiter et Saturne sont sans
doute enveloppés de vapeurs épaisses qui cachent aux yeux terrestres la véritable
surface du globe. Les taches qu'on y observe sont atmosphériques, quoique, en
certains cas, très persistantes; elles subissent constamment des modifications
d'aspect et des changements de position dus ;\ des courants longitudinaux. Sur
Mars, la nature des choses est tout autre. Ici. les aspects observés sont des cou-
figurations géographiques incontestables, et elles ne présentent aucune de ces
variations qui sont si remarquables parmi les détails de Jupiter. Il est probable
que « la plupart, sinon la totalité, des changements qu'on a cru observer dans l'as-
pect des taches de Mars sont dus tout simplement à la diversité des conditions
dans lesquelles la planète a été nécessairement étudiée ». Si les circonstances des
observations se trouvaient toujours les mêmes, il y aurait une bien plus grande
uniformité dans les résultats obtenus. Le caractère si nettement accusé des taches
et leur grande permanence sont tout à fait opposés à l'idée que la planète puisse
être entourée d'une atmosphère épaisse et chargée de nuages. »
Telles ont été les intéressantes observations de M. Denning en 188G. Malgré
les excellentes raisons invoquées par l'auteur, raisons que nous adoptons
sans réserve, nous ne pouvons douter toutefois que la surface de la planète
ne subisse des variations réelles, considérables et fréquentes.
A la séance de la Société astronomique de Londres du 14 mai 1886 (*),
M. Green a fait d'importantes remarques sur les observations de M. Knobel
en 188i. Il expose qu'en 1886 il a confirmé plusieurs de ces observations,
mais qu'il a trouvé néanmoins certaines différences assez curieuses. M. Kno-
(•j Moiithlij Xo lices, 188G, p. 4'i.j.
I8.sr. (;i<i:i-;.\. pkiuki 1 1.\ - ()itsi;i{\ .\ rioxs :i\n
bol ('l;iit d'avis (juc l;i carte de M. llrocii réclamait une rectification près
(le la mer Knobol, attendu qu'il avait inmvé là des bandes sombres au lieu
de l'espace clair nommé terre de Le Verrier. Or M. Grecn a reconnu cet espace
très nettement pendant l'opposition de 1880. a La comparaison des deux séries
d'observations montre que des changements s'accomplissent de temps à autre
en plusieurs régions de Mars. La mer Lasscll, qui était pendant la dernière
opposition presque aussi distincte que l'Oculus, et la baie de Iluggins sont
citées comme exemples; celle-ci s'est montrée large et bien marquée. >-
L'un (les faits lesplus remarquables observés pendant l'opposition de 188C.
a été l'apparition fréquente de masses lumineuses sur le bord, qui n'arrivent
jamais au méridien, et de portions orangées vues au méridien qui deviennent
blanches en arrivant au bord. N'en peut-on conclure qu'une condensation
nuageuse prévaut sur le côté droit de la planète et que ces masses nuageuses
sont dispersées quand elles arrivent au méridien, devant le Soleil?
(IXXII. 1886. — Perrotin. Ohaevvnlion ilrs rannK.r.
(i Pendant la dernière opposition de la i)lanète Mars, écrit M. Perrotin ['}.
nous avons, M. Tbollon et moi, consacré plusieurs soirées à l'étude des con-
figurations de la planète, à l'aide de l'équatorial de 0"',38 de l'Observatoire
de Nice.
)> Commencées seulement à la fin du mois de mars, à cause du mauvais
temps, les observations ont été poursuivies jusqu'au milieu de juin, toutes
les fois que les circonstances l'ont permis. Elles avaient surtout pour but
la reconnaissance des canaux simples ou doubles' découverts par M. Schiapa-
relli et qui n'avaient guère été observés jusqu'ici que par lui seul.
r La planète était dans des conditions relativement défavorables, en raison
de son faible diamètre apparent, dont la valeur, au moment de l'opposition,
le 6 mars, était de 11" à peine, tandis qu'il atteignait près de 2.V' lors des
observations de 1877 du savant astronome italien.
» Nos premières tentatives pour apercevoir les canaux ne furent pas
encourageantes et, après plusieurs jours de recherches infructueuses, qui
s'expliquent en partie par la mauvaise (]ualité des images, en partie aussi
par la difficulté propre à ce genre d'investigations, après avoir abandonné
une première fois, puis repris cette étude, nous allions y renoncer définiti-
vement, lorsque, le 1.") avril, je parvins à distinguer l'un des canaux situé
à l'ouest de la mer du Sablier, Grande Syrie de Schiaparclli, et mettant en
communication cette mer avec le détroit d'IIerschel (Sinus Sabxus).
' liiiUelin nslrononi iijuc. iuUlcl !8(SC>. p. 324.
;v.»2 I A pi,.\m:ti- ma us.
» M. Tlinllon lo vit égalemeiU aussilùl après.
)) A partir do ce jour, par de bonnes conditions, nous avons pu rcconnailrc
successivement un certain nombre de canaux présentant, à quelques
détails près, les caractères que leur attribue le directeur de rubscrvaloiro
de Milan.
» Ces canaux, tels que les a décrits M. Schiaparelli et tels que nous les
avons vus. en partie, constituent, dans la région équatorialo de la planète,
un réseau de lignes qui paraissent tracées suivant des arcs de grand cercle.
Ils traversent dans toutes les directions la zone des continents et font commu-
ni(|uer entre elles les mors des deux hémisphères ou simplement les canaux
entre eux. Ils se coupent sous tous les angles et se projettent sur le fond
brillant du disque suivant des lignes de couleur grisâtre de nuance plus ou
moins foncée. «
Sur la carte que nous avions publiée dans L'Astronomie, et que l'on a vue
plus haut (p. 355), M. Perrotin a indiqué par des lettres les vérifications
faites. En voici le détail. Grossissements employés, 450 et 560. Observations
faites généralement de 8'' à 10''.
Première région, comprise entre 290° et SôO» de longitude aréoccntrique.
Le 15 avril, nous voyons distinctement le canal AB {Phison) [fîg. 200] et, par
moments, nous croyons soupçonner une ligne plus fine CD, parallèle à la pre-
mière. Nous apercevons également FEA {Aslaboras) et IIG et DK {Euphrates),
ces deux derniers parallèles et non divergents comme dans le dessin.
Les 19 et 21 mai, quand cette région repasse au centre du disque à une heure
convenable, nous voyons les mêmes objets, et en plus, le canal FG qui coupe le
canal Phison à angle droit. FG ne semble pas prendre naissance en F, comme le
montre la carte, mais en un point plus voisin de l'équatcur, presque à la hauteur
de lac Mœris, a.
Deuxième région, comprise entre 180° et 200" de longitude.
Les 23, 24 et 25 avril, nous distinguons LM (Stygia palus), LN, LO et 01^
(Çijclopum), comme canaux simples. Par moments, nous croyons dédoubler LO;
mais c'est une impression fugitive.
Nous revoyons les mêmes canaux les 25, 20, 31 mai et le ]'"■ juin; les deux pre-
miers jours nous voyons, en outre, RQ (JEthiopum) et ll'Q' qui, contrairement
au dessin, est une ligne droite continue parallèle à RQ.
Le 20, je réussis avoir comme un tronçon du canal double QO (Eunostos), qui
se détache de l'extrémité nord du canal simple QR.
Le l*^"- juin, M. Gautier voit LO, en même temps que nous.
Depuis nos premières observations, le canal LN a subi un changement consi-
dérable : on ne le distingue plus que sur une faible étendue et du côté de N
seulement. Marqué sur la carte de M. Schiaparelli de 1882, ce canal n'existe pas
sur celle de 1879. Nos observations ne font donc que confirmer des changements
I ssc.
rr.lUlOTIN. — OHSK UVATION DliS CANAUX.
393
fli^jà constak'S, mais elles montrent encore c{ue ces ciian^'emcnls peuvent se pro-
duire dans uno courto période de temps.
Troisième région, comprise entre 30° ot 100» de longitude.
Lo 11 mai, les canaux doubles R'S {\ilus II ) et TU ( IriOis) apparaissent avec
netteté. M. Trépied, do passage à l'Observatoire, les voit sans trop de difficulté,
ut, bien qu'il ne connaisse pas la carte, il est lo premier à. remarquer les deux
lignes parallèles, estompées, qui constituent le canal double TU. M. 'iliolb^n
soupçonne seulement le dédoublement.
Fig. 206. — Canaux observés par MM. l'erroliii et Tliollon, en I.SSO,
Dans le canal R"S, les doux lignes qui composent la portion IV'Z nous paraissent
plus fines que ne l'indique le dessin; les deux lignes de la portion ZS semblent,
au contraire, plus ombrées.
Nous voyons également la ligne VZ.
Le 16, je vois, en plus, avec certitude, le canal double roctiligneXY (Jamuna).
Par contre, ni le 11, ni le IG, nous n'apercevons le canal XZ {Ganges), indiqué
comme double sur la carte.
Le 12 juin, nous distinguons très bien lo canal TT' {Fortunn^) qui pourrait bien
être double.
Durant ces observations, le Nil nous apparaît avec beaucoup de netteté dans
toute son étendue et l)i<^n plus marqué (|uc sur la carte.
3iii I. \ plani:ti- m \i{s.
Los canaux que nous vouons tlrnuindrer, vus pour l;i ])lnpart doux fois ou par
plusieurs obsorvateurs, sont dans la position où les a dossinôs M. SchiaparcUi en
I88C. Leur aspect diffère pou en général de ce qu'il est sur la carte; seulement,
quelques-uns portés comme doubles sont simples, ce qui peut tenir i\ la plus
jrrandc distance de Mars dans cette opposition. Ils semblent donc constituer dans
la région équatorialo do la planète un état de choses qui, s'il n'est pas absolument
permanent, ne se modifle pas non i)lus d'une manière essentielle.
Changements observés sur Mars. — Pendant nos études sur les canaux, il
s'est produit un changement notable, mais passager, dans la région occupée par
la mer du Sablier, et digne d'être signalé. Lors de nos premières observations,
cette partie do la surface était sombre, comme le sont les mers, et sensiblement
conforme à la carte; mais, lorsque nous la revîmes, le 21 mai, l'aspect en était
tout différent. Ce jour-là, la portion de la Grande SjTte qui s'étend entre lo
10» degré et le 55^ degré de latitude boréale était cachée par un voile lumineux,
de la couleur des continents, mais d'une lumière moins vive et plus douce. On
aurait dit des nuages ou des brouillards disposés par bandes régulières et paral-
lèles, orientés, sur la planète, du Nord-Ouest au Sud-Est. Par moments, ces nuages
devenaient transparents et laissaient entrevoir les contours du prolongement de
la Grande Syrte. Le 22 mai, ils étaient plus uniformément distribués que la veille;
on les voj-ait encore les 23, 24 et 25, mais ils avaient beaucoup diminué d'inten-
sité. Ils s'étendaient probablement assez loin, sur les continents, à l'est et à
l'ouest de la mer, car d'un jour à l'autre, quelquefois dans le courant d'une même
soirée, les parties voisines sombres, entre autres le lac Mœris à l'Est, le Nil à
l'Ouest, étaient tantôt visibles, tantôt invisibles.
Le 25 mai, nous vîmes reparaître l'isthme dessiné dans le prolongement de la
Grande Syrte, au delà de sa jonction avec le Nil, vers 300° de longitude et 52° de
latitude boréale, et qui était resté caché jusqu'à ce jour. A cette même date, nous
constations un assombrissement très accentué des continents dans le voisinage
immédiat de lamor.
Durant ces apparences singulières, la partie australe de la Grande Syrte, qui
n'avait pas été atteinte par les nuages, était devenue plus sombre et présentait
une teinte bleu verdâtre bien caractérisée.
Des phénomènes de ce genre sont-ils réellement produits par des nuages ou
des brouillards circulant dans l'atmosphère de Mars? C'est probable. Ils sont,
dans tous les cas, le fait d'un élément appartenant à l'atmosphère ou à la surface
de la planète, susceptible de se mouvoir et de se modifier dans un temps relative-
ment court.
Pendant que nous observions ce qui précède, nous avons noté autour de la
tache blanche du pôle boréal, à une faible distance de la tache, entre 200» et 280»
de longitude, deux ou trois points brillants, semblables à ceux qui furent remar-
qués par M. Green, en 1877, à Madère, autour de la tache australe, à l'époque du
solstice d'hiver de la planète. Notre observation, faite cinquante jours en moyenne
après le solstice d'été, rapprochée de celle de l'astronome anglais, semble indi-
is8r, \v.\i,ii;it w isi.ici'Nus. — iîotatkkn dk maks. :i%
ijuei' t(uo la diminution qui a liou clans chaque tache polaire, au moment du solstico
<'orres])ondant, apr^s le solstice surtout, sous l'action proluni^de dos rayons so»
lajros, n'est pas ('•trant^ùre h cotte appai-ition.
Tel est rensciuljic des faits observés ;ï Mec par .MM. i'crrotiii et TlioUon.
De (luelque nature qu'ils soient, cette étude confirme-les belles découvertes
de M. ïSi'liiaparelIi sur la singulière constitution physique de Mars. Ueniar-
(ju<»ns aussi les nuages observés sur la uier du Sablier, fait très rare.
("..\.\iil. I8S(», — W'alti-h Wisligenls. Etudes sur la durée de rotation
dr Mars (M.
I/anleur de ce travail, astronome à rCjbservatoire de Strasbourg, passe
d'abord en revue rcnsemble des observations faites sur la planète, puis exa-
mine les cartes publiées et discute les divers systèmes de nomenclature dont
il donne un Tableau synoptique, el calcule ensuite les projections du globe
de Mars vu de la Terre.
D'après les observations faites par Winnecke à Strasbourg en 1877. on a
pour la position de la tache polaire sud :
Distance au pôle aréograpliique -4°, 43 ~ Q" ,5^1
Longitude aréographique 20 ,G7 ;:: ô .71 1
La direction de Taxe de Mars sur la sphère céleste est pour son pùle nord :
Ascension droite SlT^SoM; Déclinaison -;- 50°15', 7.
Comparant entre elles les principales observations déposition des taches
de Mars, depuis celles de Iluygens en 1659 jusqu'à celles de Bœddicker en
jSHi. M. Wislicenus trouve pour la durée la plus précise de la rotation :
■2'i''37">2-2%C55±0s008Gl
avec un degré d'approximation (jui paraît, en effet, considérable.
Aux études précëdcntes, nous pourrions encore ajouter celles de divers obser-
vateurs moins spéciaux, telles que celles de MM. Guiot, à Soissons (L'Astro-
nomie, octobre 188G, p. 393), Lihou, à la Société scientifique Flammarion de
Marseille, etc., qui montrent surtout quel parti une grande habileté peut tirer de
modestes instruments.
licmarquoDS encore que le l.l avril 1S8(), Mars est passé devant le Soleil pour
.Tupitcr, de même que la Terre y était passée, pour les habitants de Mars, le
le novembre 1879.
['] Bcilrafj :ur licstimmuii'i dcr Rol:itions:<:it dcsi Plancton Mnrs. Leipzig, 188G.
3% I- \ l'i \M Ti: M ai; s.
Opposition de 1888.
DATE DE L'orPOSITION : 11 AVRIL (').
Prcscntatiou : Le pôle boréal est tourné vers la Terre.
I.iititiulc Pliase Angle
r>ates. «lu centre. Diami^tre. ( zone manquant ).Tcrre-Soli'il.
Il février -4- 19°/» 9".0 0",77 33"
11 mars ^ 18 ,G 12,7 0 ,'i7 2'2
11 avril (opposition;... -+- 21 ,1 I.'j /i 0 ,00 1
limai -T- 24 ,0 li ,2 0,59 23
U juin ^- 24 ,8 II .'1 1 ,10 37
11 juillet -i- 23 ,i 9 ,2 1 ,20 42
C.M.ENDniEa DE MaTî-ï.
ULinisiiliérc austral ou supérieur. Hémisphtro borûal ou inférieur.
10 février 1888... Solstice d'hiver. Solstice d'été.
15 août 1888 Équinoxe de printemps. Equinoxe d'automne.
S janvier 1889. .. Solstice d'été. Solstice d'hiver.
C.\XI\'. 1883-1888. — 0. Lohse. Observations et dessins.
Cet observateur a continué [voy. plus haut, 1879, p. 318), ses études do
Mars pendant les oppositions de 1883, 1884, 1886 et 1888, et en a publié les
résultats en 1891 (-). Il s'est principalement occupé des mesures de l'angle
de position de la tache polaire boréale et a fait, de plus, un grand nombre
de dessins de la planète, dont 3G sont publiés dans ce mémoire et suivis d'une
carte qui les résume.
D'après ces observations, on a pour l'angle de position de l'a.xe de Mars :
1884 8 février. O'-O- (Greenwich). P = 357° ,226 ± 0»,185
1886 22 février. 0 0 Id. 21 ,84 ±: 0 ,31
1888 24 mai.... 0 0 Id. 30 ,66 ± 0 ,491
Les dessins sont du 15 septembre 1883 au 17 mars 1884 et du 30 janvier au
7 avril 1886. En 1888, il a trouvé 289", 5G pour la longitude de la mer du
Sablier.
Nous offrons à nos lecteurs la carte [fuj. 207) que cet astronome a conclue
(') Conjonction de Mars oA d'Uranus, le 5 mai. — Plusieurs observateurs, notam-
ment MM. Bruguière à Marseille, Guiot à Soissons, Valdorrama à l'île de Ténérifïe, ont
observé la rencontre de Mars avec Uranus, le 5 mai 1888. Mars est passé à 35' au nord
d'Uranus : les deux planètes étaient visibles dans le même champ. Mars rougeàtre, de
première grandeur, Uranus bleuâtre, par contraste, de sixième grandeur, éclipsé à l'œil
nu par l'éclat de Mars. Cette curieuse conjonction a eu lieu non loin de l'étoile de qua-
trième grandeur 0 de la Vierge.
I-) Beobachtunrjen des Planeten Mars. Publicationen des astrophysikalischen
Observaloriirms z^i Potsdam. X' 2><. I^ril.
1888
(). Umsi;. — ()HSi;i; VA I IONS I.T l)i;SSINS.
307
de ses observaliuiis de 18b3-yi, faites à laide de léqualuriui de 1 1 pouces de
robservatoire de Potsdam. Elle inspire les mêmes rélloxions que la première
et,vraiiiieiit, ne ressemble guère à Mars. La baie du Méridien, le détroit d'ilers-
chel, la mer du Sablier, sont à peu près les seules conOgurations que l'on
reconnaisse. Mais qu'est devenue la mer Terby, que, dans son autre carie,
l'auteur avait représentée quadrangulaire? Que reconnaître dans la région
t'ig. 207. — Carte de Mars, par M, Lohse, (faprès ses observations de 1883-8i.
gauche de la mer du Sablier ? L'observateur nous offre pourtant 18 points de
repère pour identifier sa carte avec celles de M. Schiaparelli. Les voici :
. Longitude. Latltuilo.
Cote orientale du golfe des Perles ;.......... 27* — *»
Région de Prêtée. Milieu.....;;.;..: .::.. 38 — î?
Tcmpé. Milieu. ......;..;...;...* :::;.:... 76 -'-4*
Lac du Soleil. Milieu 81 =- 31
Arcadie. Milieu 125 4- -'lî
Elysée. Milieu 218 -31
Golfe des Alcyons. Pointe sud 2Gô -f- 35
Lac Mœris 265 — 7
Promontoire de Gircé 275 — 10
Nilosyrtis. Côte orientale 293 - 30
Mer du Sablier. Côte orientale 294 -r- 7
Golfe Sabœus ,. 320 -Il
Baie fourchue (Gabelbai). Pointe ouest 340 0
1 4 Fastigium Aryn 357 — 10
15 liaie fourchue. Pointe est 357 — 2
10 Baie fourchue. Cote orientale 7 —12
17 Golfe dos Perles. Cote occidentale 7 — 23
18 Golfe dos Perles. Pointe 'J -h 0
Malgré l'habileté de l'astronome de Potsdam, la différence entre cette carte
et l'aspect général de la planète est vraiment énorme. C'est une preuve de
plus (lue les observations de Mars sont fort difficiles,
398 i.A iM..\M;ri; .m vu s.
C\X\". 1888. — pROCTOii. Les canaux de Mars. Xoioelle carte de la plancle.
Derniers travaux (').
.V la séance de la Société astronomique de Londres du 13 avril 1888,
M. Procter a communiriué la note suivante sur les canaux de Mars {-) :
Mars devrait être soigueuseincnt observe en juin et juillel procliain pour le
dédoublement des canaux, car l'automne martien approchera. Considérant ces
curieuses raies sombres doubles (ou plutôt les raies claires entre elles et les raies
plus faibles de chaque coté) comme des images de dilTraction des lleuves lorsque
le brouillard reste suspendu sur leurs lits, comme je l'ai interprété depuis quatre
ans, nous pouvons nous attendre à revoir le phénomène à. l'approche de l'au-
tomne ou après le commencement du printemps, pour l'hémisphère nord, dans
lequel ces doubles canaux se montrent principalement.
Je suppose que personne ne regarde ces doubles canaux comme des réalités ;
mais, d'un autre côté, on ne peut pas non plus voir en eux des illusions d'op-
tique. Si nous les considérons comme des phciiomcnes de diffraction, c'cst-à-dirc
comme des produits optiques, as opticalproducts, nous trouvons une explication
de leurs variations d'aspects (puisque, lorsque les fleuves paraissent sombres, ce
qui est le cas ordinaire, sur un fond clair, la duplication ne pourrait pas être
observée), de leur synchronisme avec les saisons et du fait qu'ils ne sont visibles
qu'aux instruments d'un certain diamètre. Cette dernière considération suggère
une méthode effective pour vérifier cette théorie de diffraction.
Il serait désirable que les aspects observés par Schiaparelli fussent vus et
dessinés par des observateurs doués d'une véritable habileté artistique. Nul de
ceux qui ont vu Mars à l'aide d'un bon instrument ne peut accepter les confuju-
rations rudes et anti-naturelles dessinées par Schiaparelli. Les dessins de
Dawes, Burton, Knobel, Denning et Green sont beaucoup plus satisfaisants.
Proctor sest occupé de la planète Mars dans la plus grande partie de ses
ouvrages, jusqu'au dernier, dont la publication venait de commencer lorsque
la mort arrêta ses travaux. Aux dijduclions ingénieuses que nous avons di'-jà
publiées de cet auteur (p. 203-207) nous ajouterons ici celles qui sont expo-
sées dans son dernier ouvrage ( ■ .
Toutes les considérations s'accordent pour nous conduire ù penser que les
taches foncées représentent des mers et les claires (jaunes), des continents.
L'auteur propose d'admettre que là quantité d'eau et d'air doit être propor-
tionnelle aux masses des planètes, et que Mars étant neuf fois moins lourd
(') Pi. -A. Proctor, né le 31 mars 1837, est mort le 12 septembre 1888.
[') Monlhly Notices, t. XLVIir. p. .307.
v=) OldundXew Aslronomij. J^ondres et Ne%v-York, 1888.
IS8S PHOCTDU. ^ I.KS CANAl \. NOUVKIJj: CAUTi:. MO'J
(juc la Terre doit avoir neiil lois inoins d'eau et d'air, ('omme la surface de
la Terre surpasse celle de Mars dans le rapport de 7 à 2, la (Quantité totale
d'eau et d'air sur chaque hectare de notre planète surpasserait la même
quantité sur cha(jue hectare de Mars dans la proportion de 18 à 7.
(Kien ne nous autorise à penser strictement que les conditions originelles
de la formation des deux planètes aient été les mêmes.)
Kn ce qui concerne la dcnsUé de l'atmosphère, au niveau de la mer, il faut
prendre en considération l'état de la pesanteur à la surface de Mars. Or la
proportion entre ces deux états est la même que la précédente : 18 à 7.
•Vinsi, tandis qu'il n'y aurait là que les yV de Teau et de l'air qui existent ici .
par mètre carre, ces deux éléments devraient être dans la proportion du
carré de 7 au carré de 18, ou de 49 à 324, ou de 5 à 33.
Si l'on admettait que l'atmosphère de Mars eût ce degré de ténuité, tandis
que la quantité d'eau par kilomètre carré ne serait que les y'g de ce qui
existe sur la Terre et que l'action du Soleil est de moitié plus faible qu'ici,
il serait difficile de concevoir qu'il y eût assez de vapeur d'eau dans l'atmo-
sphère de Mars pour être perceptible au spectroscope. Même en doublant la
quantité d'eau et d'air, on diminue à peine la difficulté.
Quoique l'atmosphère de Mars soit probablement beaucoup plus rare que
la nôtre, elle doit être plus élevée, étant comprimée par une force très infé-
rieure à celle de la gravite terrestre. Sur notre globe, une élévation de
4000 mètres suffit pour diminuer de moitié la pression atmosphérique; sur
Mars il faudrait une élévation de 10400 mètres pour arriver au même ré-
sultat. Ici, aune altitude de 21000 mètres au-dessus du niveau de la mer, la
pression atmosphérique est réduite à -.jV; à la même altitude sur Mars, elle
n'est réduite que de 4-. En admettant qu'au niveau de la mer sur Mars cette
pression soit 4 de ce qu'elle est ici, l'air martien serait plus dense à une alti-
tude de 29000 mètres que chez nous à la même hauteur. A de plus grandes
élévations, la différence s'accroît encore en faveur de Mars.
Il n'est pas facile de déterminer ce qui se passe dans Mars lorsque nous
croyons y reconnaître des signes météorologiques tels que les nuages se for-
mant ou se dissolvant eu les brumes du matin et du soir, ainsi que d'autres
phénomènes qui ne paraissent pas compatibles avec l'idée d'un froid ex-
trême : même la présence de la glace et de la neige impliquent l'action de la
chaleur. Le froid seul, comme l'a montré Tyndall, ne pourrait produire de
glaciers : les vents du Nord-Est les plus rigoureux pourraient souffler pen-
dant tout l'hiver sans apporter un seul flocon de neige. Pour que le froid
produise de la neige, il faut qu'il ait à sa disposition de la vapeur d'eau dans
l'air, et cette vapeur ne peut être produite que par la chaleur. Le Soleil
exerce donc sur Mars une action calorifique suffisante pour élever une cer-
400 i.A pi.am":ti-: m au s.
taiue quaulilé de vapeur d'eau dans sou atmosphère, et cette vapeur est
transportée d'une manière quelconque vers les régions polaires où elle est
précipitée sous forme de neige.
Mais, d'autre part, la surface entière de Mars semblerait devoir être au-
dessus de ce que nous pourrions appeler la ligne de neige pour une planète
analogue à la Terre, car toute région terrestre où le froid serait aussi grand
qu'il doit être sur Mars et où l'atmosphère serait aussi raréfiée serait certai-
nement au-dessus de la ligne des neiges éternelles. Comment donc se fait-il
que la neige fonde sur Mars comme elle le fait manifestement, puisque nous
y voyons des régions neigeuses variables et des régions rougeâtres?
A cette alternative Proctor répond dans les termes suivants :
La neige qui existe à la surface de Mars peut être en faible quantité, la cha-
leur solaire n'y étant pas assez active pour produire beaucoup de vapeur d'eau.
Il n'y aurait point là d'accumulation de neiges analogues à celles qui existent ici
au-dessus de la ligue des neiges perpétuelles, mais il pourrait exister à la surface
de Mars, excepté près des pôles, une mince couche de neige, ou plutôt il n'y au-
rait ordinairement qu'une couche de gelée blanche. Maintenant, le soleil de Mars,
quoique incapable d'élever de grandes quantités de vapeurs dans l'atmosphère
ténue de la planète, pourrait cependant fondre et vaporiser cette mince couche
de neige ou de gelée blanche. La chaleur directe du Soleil brillant à travers une
atmosphère si rare doit être considérable partout où l'astre est à une élévation
suffisante, et la pression atmosphérique est si faible que la vaporisation est très
facile, attendu que le point d'ébuUition doit y être très bas. Par conséquent,
durant la plus grande partie du jour martien, la couche de gelée blanche ou de
neige légère qui peut être tombée pendant la nuit précédente serait complète-
ment fondue, et le sol rougeâtre ou les verdâtres océans de glace redeviendraient
visibles pour l'observateur terrestre. Les régions marginales du disque de Mar.s
seraient blanchâtres, puisque ce sont celles où le Soleil est très peu élevé au-
dessus de l'horizon.
Si l'on adoptait cette vue de la climatologie martienne, le fait le plus caracté-
ristique de cette situation serait la fusion quotidienne de la couche de gelée
blanche ou de neige légère avant midi, et la précipitation d'une nouvelle couche
blanche lorsque le soir approche. Pendant la durée du jour, l'atmosphère reste
assez pure, autant qu'on en peut juger du moins, d'après l'aspect télescopique de
la planète, quoique pourtant rien n'y empêche sans doute la formation éventuelle
de légers cirrus ou de nuages de neige, surtout dans la matinée. En fait, les phé-
nomènes qui ont été généralement regardés comme dus à la précipitation de la
pluie de véritables nimbus sur les océans et les continents de Mars peuvent être
attribués, avec plus de probabilité, à l'évaporation de cirrus par la chaleur so-
laire. Les régions polaires seraient perpétuellement couvertes de neige, les
limites des caps polaires variant avec les saisons et ne présentant sans doute que
des accumulations de neige fort inférieures à celles qui existent sur la Terre.
J88S l'KoCTOK. - NOUVELLE CAKTi:. CANAUX ET KLEUVES. 401
Telles sont les considérations de l'aslronome anglais sur cet intéressant
sujet. Nous y reviendrons plus loin, pour le discuter .complètement. L'auteur
a examiné également, comme nous venons de le voir, les curieuses observa-
lions de M. Schiaparelli sur le.^ canaux et leurs dédoublements. Il ne croit
pas que ces canaux soient réels. « We cannot regard them as objective rea-
lities, écrit-il en 1888, this is manifestly incredible. » L'auteur pense que ce
sont là des images optiques, non des illusions, mais des images explicables
Fig. -îiis. — Nouvelle i-arte de Mars, par Proctor. en 1888.
par les lois connues de l'Optique. Il les considère comme des images de
diffraction produites dans les yeux des observateurs de chaque côté des lignes
des fleuves de Mars, lorsque ces fleuves deviennent blancs par la gelée ou
par des nuages allongés le long de leur cours. L'existence de ces canaux a
conduit Proctor à remanier sa première carte et à lui substituer celle que
nous reproduisons ici {fig. 208), dans laquelle un grand nombre de fleuves
sont tracés, aboutissant aux golfes et aux mers. Nous avons vu, aux obser-
vations de Dawes (1864, p. 185), que cet éminent observateur regardait la
baie du Méridien comme formée de deux pointes donnant l'impression de
deux embouchures de fleuves très larges. Treize ans plus tard, en 1877, .M. Schia-
parelli a pu apercevoir ces fleuves vainement cherchés par Dawes, et les a
considérés commodes canaux auxquels il donna le nom deGehon etlliddekeh
L'idée de fleuves est, en effet, simple et naturelle : Proctor y revient avec
raison, et sa carte ainsi conçue offre un aspect ({ui n'est pas sans analogie
avec les principaux caractères de la géographie terrestre. Mais reste toujours
Flammarion. — Mars. "2 G
-uv: i.A riAM/n: mahs.
une gnndo ohjection : c'est que ce? « canaux " uo ciMunieuci ut mille part,
vont dune niei- à l'autre, son! reelilii^iirs cl tMili'e('r()is(''S Ces ileuvcs, si
tleuvos il y a. ne ressemblent donc, pas aux noires. L'auteur, prolKaut des
criliijues qui lui avaient été adressées pour ne pas ré[iéler plusieurs l'ois les
niènu'S noms et faire la part moins exclusive aux Anglais, a modillé les déno-
minations tle sa première carte. Le mieux eût été pour lui de s'en tenir à la
carte de Grecn.
Les conclusions de Proctor sur la planète Mars sont qu'elle est plus
avancée que la Terre dans son existence astrale; qu'elle ne possède plus
depuis longtemps aucune chaleur propre; que la chaleur reçue du Soleil est
plus de moitié inférieure à celle que la Ten-e reçoit ; que cette chaleur y produit
un climat spécial, assez froid, car il y aurait dans les régions tempérées de la
gelée blanche et peut-être de la neige toutes les nuits, fondue tous les ma-
tins; que l'atmosphère est très raréfiée: que les océans sont sans doute gelés
et les fleuves aussi, la plupart du temps. L'auteur ne paraît pas penser que
l'atmosphère de Mars pourrait être constituée autrement que la nôtre et
posséder dos gaz et des vapeurs capables de conserver la chaleur reçue du
Soleil et d'agir comme une serre un peu moins diathermane que l'atmosphère
terrestre, gardant les rayons obscurs, et donnant à la planète une tempéra-
ture moyenne peu dillerenle de celle de la Terre.
CXX\ 1. 1888. — Perrotin. Les canaux de Mars. Nouveaux changements.
Inondation de la Libye.
« 11 m'a été possible, par de très bonnes images, écrit l'auteur (M, de re-
voir, avec notre grande lunette (équalurial deO"',7G], une partie des canaux
de Mars que j'avais observés en 188(5.
.)' Ils sont à la place où je les ai vus à celle époque et présentent les
mêmes caractères : ils se projettent sur le fond rougeàlre des continents de
la planète, suivant des lignes droites sombres (des arcs de grand cercle pro-
bablement), les unes simples, les autres doubles, — les deux composantes,
dans ce dernier cas, étant, le plus souvent, parallèles, — se coupant sous des
angles quelconques et paraissant établir des communications entre les mers
des deux hémisphères ou entre les diverses parties d'une même mer, ou
bien encore entre les canaux eux-mêmes.
» Leur aspect est en général le même qu"en 188C. Pourtant, quelques-uns
paraissent plus faibles, d'autres ont peut-être disparu en partie.
(') Comptes rendus de l'Acad.des Sciences, 14 mai 1888.— L'Aslrononiie, 1888, p. 213.
i888 l'KHUOTIN. — I.KS CANAUX DK MAIlS, 403
» Dès à présent, je dois si^^iialcr trois modificalions importantes qui se
sont produites d(3puis 188G dans l'aspect de la surface de la planète, modifi-
cations d aulaiil plus C(M'tain('S ([u'cllos (»nl leur siè^'C dans les rodions sur
lescjuelles mon att^nliou s'iMail plus particulièreiue'nt portée en 1880.
» 1° C'est d'abord la disparition d'un conlinent qui s'étendait alors, de
part et d'autre de l'équaleur, par 270" de longitude {Libya, carte de Schia-
parelli). De forme à peu près triangulaire, ce continent était limité au Sud
et à l'Ouest par une mer, au Nord et à lEst par des canaux.
n Nettement visible, il y a deux ans, il n'existe plus aujourd'bui. La mer
voisine (si mer il y ai l'a totalement cnvalii. A la leinlc blanc rougeâtredes
continents a succédé la teinte noire ou plutôt bleu foncé des mers de Mars.
Un lac, le lac MuM-is, situé sur lun des canaux, a également disparu.
» L'étendue de la région dont l'aspect a ainsi complètement changé peut
être évaluée à 600000 kilomètres carrés environ, un peu plus que la superfi-
cie de la France. En se portant sur le continent, la mer a abandonné, au Sud,
les régions qu'elle occupait antérieurement et qui se présentent maintenant
avec une teinte intermédiaire entre celle des continents et celle des mers,
avec une couleur bleu clair, analogue à la couleur d'un ciel d'hiver,
légèrement brumeux.
r> Cette inondation (ou autre chose) du continent fJbya. si j'en crois un
dessin antérieur (de l'année 1882). pourrait bien être un phénomène pério-
dique. S'il en est ainsi, les observations en donneront la loi à la longue.
» 2° C'est ensuite, au nord du continent disparu, à -i- 25° de latitude, la
présence d'un canal simple qui n'est pas indiqué sur la carte de Schiaparelli,
bien que ce savant astronome en ait noté de beaucoup plus faibles, et que
je n'ai pas vu non plus lors de la dernière opposition. Ce canal, long de 20°
environ et large de 1° ou 1°,5, est sans doute de formation récente. 11 est
parallèle à léqualeur et continue en ligne droite une branche d'un canal
double (b'jà existant, (pi'il mri en comnuinicalion avec la mer.
)' 3" La troisième modification consiste dans la présence assez inattendue,
sur la tache blanche du pôle nord, d'une sorte de canal qui semble relier, en
ligne droite, à travers les glaces polaires, deux mers voisines du pôle.
» Ce canal, qui se détache avec une grande netteté sur la surface de Mars,
coupe la calotte sphérique blanche suivant une corde (jui correspond à un
arc de 30° environ. »
Une nouvelle communication du même astronome adressée à l'Acadé-
mie ('', était accompagnée des dessins suivants :
La dilTérence entre les dessins I et 2 de cette année (//y. ^(J'J et 210) et le
(') Couiplrs: renilu<. lu inill-'t ISSX. p. 1(11.
404
LA IM.AM'.TI-: MARS.
dessiu rûrrospondant o. de 1880 (//;/. Olli, «lii l'auioiii', osl iVappiiiitc en ce
qui concerne la rëcriou Libya, de Schiaparelli. A un mois irintiM-vallc. les des-
sins 1 et "J, de leur eotr. iiidi(Hieiit. dans la mèiue rcgioii. des nicililications
notables.
Les dtnix premiers dessins contiennent le nouveau canal A. ci \o canal de la
calotti' Manche du inije bori'al.
Vvj:. m*.
.Mars au grand é(|iiatorial de Nice, par .M. Penotiu. , Dessin n" 1. S mai l.SSS. j
Dans le dessin n" 2 se trouve, en outre, un canal simple, U, vu le [! juin pour
la première fois.
Le dessin n« 4 (fig. 212) contient quatre canaux simples et trois doubles, dont
un seulement double sur une partie de sa longueur, mais tous bien caracté-
risés.
Deux de ces derniers, C et D, partent des régions voisines de l'équateur et
viennent, en suivant à peu près un me'ridien (longitude : 338» pour l'un. H» pour
l'autre), se perdre dans les environs de la calotte blanche du pôle nord.
Sont-ce bien là des canaux dans le sens que nous attachons à ce mot? Il me
semble que les deux canaux doubles singuliers que je signale pourront un jour
ou l'autre nous donnera ce sujet d'utiles renseignements. Si ce sont de vrais ca-
Fig. 210 — .\:ar.s au grand équatorial de Nice, par M. Perrotin. i Do>>in n» 2. 12 juin 1888.1
Fig. :i I. — Mars au .T.iii.l ■^^inalorial do N'ice. |>ar M. Perrotin. i Dessin n" '■'•. .'1-'.' mai ISSU i
■iOf.
LA ri.AM-lK MAlîS
naiix, il> ne |kmi\i'iii, ci\ elTot. luaiiqucr d oprouvor de profondes niodilications lors
dos chauirements do saison, au moment surtout où. sous l'inlluencc des rayons
solaires, la tache blanche du ]t«Me boréal tond ;i disparaitro. ;\ fondre, comme le
pensent certains astronomes.
Ainsi considoros, les canaux en question et doux autres du mc'mc genre se
recommandent d'une faijon particulière à l'observateur.
Mars au
grand cquatorial de Nice, par JI. Perrolin. (Dessin n° 4. 4 juin 1888.)
Ainsi s'est exprimé M. Perrotin. Ou voit que ce qui ressort surloul de ses
observations de 1888, c'est la constatation de rexislence de nouveaux canaux
et celle d'une strie sombre analogue traversant comme une corde la calotte
polaire boréale. C'est, disait à ce propos M. Faye, comme si l'on était venu
travailler là pour faire communiquer ensemble les deux côtés du pôle.
L'éminent auteur de la découverte de ces canaux, M. Schiaparelli, nous
écrivait de Milan à la date du 12 juillet :
" L'opposition actuelle a été remarquable par une fréquence de lignes doubles
bien plus grande qu'en 1884 et 1886. Plusieurs lignes qui étaient restées simples
tS88
riilUtOTlN. — LES CANAl'X l)i: MAHS.
407
dans toutes les oppositions précédentes (Laostrygon, Népenthès, Astaboras, H61i-
conius, Callirrhoô), se sont doublées cette fois. »
Ces aspects dépendent donc évidemment de certaines époques critiques.
Quatre nouveaux dessins font suite aux précédents (').
Fie -'13.
Mars au grand iciuatorial de Nice, par M. Perrolin. (Dessin n» 5. 12, 13, 14 mai, is, l'j juin 1888.)
Voici les coordonnées du centre de la planète au moment où ces dessins
ont été pris :
NumiTiis. I,iint;ituclo L.itiliidc N.
5 195" Vi"
0 liO M
7 1-20 -ii
8 UO 1\
Le dessin n» 5 (/?>/. 213), écrit M. l'errotin, montre une partie de la sur-
face de la planète fort accidentée, surtout dans le voisina;.ro de la calotte de
glace du pôle nord, et, en même temps, une région R, comprise dans une sorte
(') Comptes rendus de l'Acailémie des Sciences, 10 septembre 1888.
■iOS
I.A ri ANKTi: Al A 15 s.
de pcntagono forint' do canaux, et qui, par sa ooiilour hlanchc o\ l'-clatante (').
trancho d'une façon singulière avec la eouleur rongeât re des parties (Miviron-
naules.
Le dessin n" 8 (//'</. OKi) présente deux canaux, un sinijde et l'autre double.
KL, MX, analogues à ceux dmit il a été questitui plus haut. Ces canaux partent
Fi!.'. :i4.
Mars au grand équatorial de Nii.e, par M. Pcrrotin. (Dessin n- C. 17 mai, 2:! juin 1888.
des régions équatoriales et se dirigent, en suivant à peu près un méridien, vers
le pôle nord.
Ce dessin est à rapprocher de celui portant le n" A, dans la première sé-
rie (fîg. 212). Il reproduit, d'ailleurs, des régions voisines de celles de ce n° 4
et situées seulement plus à l'est sur la pdanète.
Les dessins 6 et 7 (fîg. 214 et 215) sont malheureusement incomplets. Je les
donne parce qu'ils mettent en évidence l'existence d'un nouveau canal qui, ainsi
que celui déjà signalé précédemment {flg. 200 et 210), coupe suivant une ligne
droite sombre la calotte blanche des glaces polaires.
Cy L'éclat est presque aussi vif que celui de la calotte polaire. Cet étut de choses
n'existait plus ou n'avait pas été remarqué quand on a fait les dessins 1 et 2; mais il
est probable qu'il s'est produit là encore un changement notable durant les observations
dp cette année
ISSS
l'IUUnilN
I.KS (. \.\ MX m: M MIS.
'id'.t
(,'o noiivoaii canal est peiil-<}(ro un poii moins not <iiio \o prom'iov , mais s<>n
existence et son caractère ne sont pas douteux ( ' (.
Le dessin n» 5 ((hj. ?I3) montre les d<'iix canaux; celui de droite est 1 ancien,
celui do gauche est le nouveau.
On voit encore mieux co derniei- dans les dessins n"^ ('< et 7; le dessin n" 7 le
fait voir dans tout son développement.
Mais au giauil ciiualorial de Nice, par M. Pcirotiu. (Dessin ii' 7. 18, 20 in;ii I8<SS.
J'ai beaucoup regretté que les circonstances atmosphériques ne m'aient pas
permis de revoir en juillet, par de bonnes images, la région Libya. Ce que j'ai
entrevu me fait croire à de nouvelles modilications qui se seraient produites dans
cette partie de la surface de la planète depuis le mois de juin, et je crains beau-
coup qu'il ne soit trop tard pour qu'on puisse encore en roconnaitre la nature.
C'est la continuation des changements sur lesquels j'ai appelé lattention au mois
de mai dernier et qui ne sont, sans doute, qu'une partie des changements, à
période plus ou moins longue, qui se produisent fréquemment à la surface de la
planète. En ce qui me concerne, pondant mes longues soirées d'observation, j'en
'; Circonstance bizarre, le noiiveau canal coninience sur le [.ourtour de la calotte de
glace, au peint inciiio ou finit je «;anal priniitivonient reconrni.
•ii(t I \ l'i \M;ri-: :\i.\ks.
ai coustatt' plusiours. plus partioiilièroinciit dans li^ \\)isinai:::o de la calotte do
glace. Ces chani^emcnts, qui ont lieu quelquefois du jour a\i lendemain, ne mo-
difient pas l'aspect général, mais portent seulement sur les détails; ils all'ectent
surtout les parties sombres de la surface.
.l'en ai remarqué aussi d'autres de nature différente; c'est ainsi que, le 18 et
le 19 juin, j'ai vu, en peu de temps. ]iendaiil 1(^ cours de mes observations, la
-Mars au granU cquatorial de Nice, par .M. Perrotin. ( Dcs.sin ii" 8. 25, 20, 27 mai ; 2 juillet iSS8. )
région R du dessin n" ô se couvrir et se découvrir tour à tour dune sorte de
brouillard rougeâtre qui s'étendait jusque sur les canaux environnants, tandis
que le reste de la surface de la planète continuait à se montrer avec une grande
netteté et une rare pureté de détails.
Je ne puis mieux comparer ce phénomène qu'à celui que nous donnent ici
souvent, pendant l'été, les brouillards de la mer qui, le soir, après les journées
chaudes, envahis.sent le littoral en quelques minutes, pour disparaître ensuite
presque aussitôt.
Je nai pas besoin d'ajouter que tout ceci, même dans notre grande lunette,
ne saute pas aux yeux et qu'il faut, pour le voir, une attention soutenue, un bon
instrument et par-dessus tout des images non pas seulement bonnes, mais excel-
lentes.
18S8 NIESTEN. ^ OHSHUN ATloNS KT DESSINS. ill
(IX.Wli. 1888. — NiESTEN. Ohscrvadons Pt dessins.
A propos des observations publiées par M. IVrrotin. M. Nicston a présenté
Fig. '^17. — Mars, le '."J avril 18S8, à 9'' Ib"- (31i>). Dessin ilc M. Nicsten.
à l'Acadcmie de Belgique quelques remarques déduites des observations
Fig. 218. — Mars, le h mai 1888 i^lb-). Dessin do M. Niesten.
faites en môme temps par lui à l'Observatoire de Bruxelles, ainsi que deux
dessins se rapportant aux régions de la planète qui auraient subi certaines
412 I. \ PI. \m:tk m \ijs.
modifications. Ces deux dessins montrent la mov du Sahlier [à gaucho dans
celui du 09 avril (//;;. •2\li. à droite dans cidui du T» uiai {fig. 218)]. La Libye
n'a pas disparu : le 5 mai, elle était ])ien visible, cl colorée de jaune-orange.
L'auteur pense que les diiTérences d'aspects souvent observées proviennent
surtoiU ili' la variation d'inclinaison des régions dessinées, vues jdus ou
moins obliquement et éclairées par le Soleil, sous des angles différents.
En 1888, les régions australes se présentaient très obliquement.
Remarquons, de notre côté, que ces deux dossinsde M. Niesteii ne donnent
pas, surtout le second, l'impression habilnrllc (pie nous lecevons de l'ob-
servation de Mars. La in<'r du Salilierserecoiiuail, surla gauche dans le pre-
mier, sur la droite dans le second; mais elle ne ressort pas sur l'ensenihle,
comme elle le fait généralement, et des configura lions d'une importance beau-
coup moindre, passagères même et indécises, dont quelques-unes incer-
taines, dessinent une géographie presque imaginaire, suilnut dans la figure
du 5 mai. Le crayon ne devrait pas fixer des aspects à peine entrevus. Mais
comment faire autrement? On distingue à peine certaines ombres légères,
on n'est pas sûr de leurs contours, et plus d'un détail n'apparaît qu'en ces
moments, aussi rares que fugitifs, de parfaite transparence. Illusion ou réa-
lité';' Il semble que de telles vues télescopiques ne puissent rester que dans
la pensée. On les indique au crayon, et ce qui est incertain, fugitif, atmo-
sphérique peut-être, prend le même rang que ce qui est incontestable et per-
manent. La même remarque peut s'appliquer aux dessins de Nice : il y a, là
aussi, des aspects incertains, et tel est le cas général des dessins de Mars.
Malgré les difficultés inhérentes à ces observations si délicates, on voit
néanmoins que, grâce à la persévérance et à l'habileté des observateurs,
nous pénétrons de plus en plus intimement dans la connaissance de ce
monde voisin. Nous sommes arrivés, à cet égard, à une période fort inté-
ressante et quelque peu critiijue. celle de l'interprétation des nombreux
faits accumulés par l'observation. Le point essentiel est de ne pas reculer,
et c'est ce qu'on a failli faire à l'Académie des Sciences.
CXXVUL 1888. — FizEAU. U?ie explication des canaux.
Voici la communication de l'illustre physicien à l'Académie (') :
" Les apparences singulières observées à la surface de la planète Mars par
M. Schiaparelli, et auxquelles plusieurs observateurs, et notamment M. Perrotin,
de r(Jbservatoire de Nice, ont ajouté récemment des particularités nouvelles,
sont demeurées jusqu'ici sans explication plausible. On s'accorde à les designer
(') Séance (lu r* juin 1888 (//A-s/ronomie, aoiit 1888, p. 287J.
I8S8 FIZliAU. - INK KX IMJC ATK tN DKS CANAIX. W.i
sous lo nom de caiiaux, d'aprùs leur ressemblaueo loiutaiue avec des canaux
d'irrigation, mais sans vouloir rien prcguger au sujet de le.ur véritable nature.
11 semble cependant que les observations les plus récentes permettent d'es-
sayer aujourd'luii do réson<lre cette (''nigme, en s'appuyant sur les considérations
suivantes :
Et d'abord, on s'acrordo généralement à reconnaître la présence de l'eau à la
surface de Mars, et l'on admet que l'eau joue un rôle considérable dans les
changements que l'on y observe. Ou connaît les taches polaires à aspect neigeux,
qui s'étendent et diminuent suivant le cours des saisons. On sait, de plus, que
l'analyse spectrale de la lumière de Mars a fait reconnaître à M. Jaussen la pré-
sence de l'eau comme très probable ( ' i.
Les canaux de Mars apparaissent comme des lignes plus obscures que le reste
de la surface, de directions rectilignes, souvent parallèles entre elles ou se
coupant suivant des angles plus ou moins grands. Le réseau de ces lignes n'a rien
de fixe et, à des époques peu éloignées, a présenté des dessins fort différents
les uns des autres; changements qui rappellent ceux des taches plus étendues
(appelées conh"ne?i/.s- ou mers), lesquelles paraissent, se modifient et dispa-
raissent parfois dans l'intervalle de quelques mois. Tout récemment, une ligne
très nette a été signalée comme traversant, suivant une corde, le cercle de
glaces polaires tourné vers la Terre.
Il parait naturel de rapprocher de ces apparences singulières les phénomènes
(') M. Jansscn n'est pas cité dans les observations spectroscopiques exposées plus
haut (180-2. p. 18Î; 18G7, p. 200; 1872.. p. 212; 1879, p. 32G). et on lisant cette assertion de
M. Fizc'au, nous regrettions de n'avoir pas connu les travaux de M. Janssen sur ce point.
Nous lui écrivîmes pour lui demander une information. Voici la réjwnse de l'éminent
directeur de l'Observatoire dcMeudon :
« Mon cher Collègue, Vous voulez bien me demander où j'ai publié mes observations
sur Mars au point de vue de la présence, dans son atmosphère, de la vapeur d'eau.
1) L'annonce de la présence de la vapeur d'eau dans l'atmosphère de Mars a été insérée
dans les Compte-^ rendus, t. LXIV, 18G7, p. 130i.
» Les études qui y ont conduit ont été faites ;\ l'Observatoire de Paris avec le télescope
Foucault «pie Le Verrier avait mis à ma disposition en 18G3; sur l'Etna, où jesuis resté
trois jours (pour annuler autant que possible l'action de l'atmosphère terrestre), à Pa-
lorme où je me suis servi du grand équatorial de l'Observatoire, à Marseille, avec le
télescope de Foucault de 0'",80 douverlur<\ Ce n'est qu'a])rès avoir observé dans des
conditions aussi variées et surtout après avoir obtenu le spectn- pur de la vapeur
d'eau à l'usine de La Villelte en 18GG que j'ai cru pouvoir annoncer cette présence.
') Les autres observateurs, même postérieurement, n'ont pu que prononcer sur la pré-
sence du spectre tellurique en bloc. »
Vfiiri îe tc.Kle des Comptes remlus signalé dans la leUro précédeutt.'. On lit on effet, 1807, t. I,
p. tOo'i, le parairraplie suivant terminant une lettre écrite par X. Janssen à M. Charles Sainte-
Claire Deville s\ir l'ilo Saiitorin.
• Je ne veux point terminer cette lettre sans vous dire que je suis monté sur l'Etna pour y faire
des observations d'analyse spectrale céleste qui exigeaient une y>"ande altitude, alin d'annuler en
majeure partie l'influenee de l'atmosphère terrestre. De ces observations et de celles que jai
faites aux Observatoires de Paris, de Marseille et de Palernie, je erois pouvoir vous annoncer la
présence de la vapeur d'eau dans les atmosphères de Mars et do Saturne. »
■lli LA PLANKTi: MA US.
variés qui ont cUt^ siiriuUtfs sur notre jiflobo, ;\ la surface des grands glaciers, tels
que la mer de glace i mont Blanc), le i^lacier du klione cl surtout la vaste région
glacée du Groenland, i)our ne «'iter que les pluf? coiuius. On sait i|iii'. iKirmi les
changements incessants (jni so produisent sur C(^s surfaces de glace par la suc-
cession des saisons, on remarque surtout, au point de vue qui nous occupe, des
rides parallèles, des crevasses, des fentes rectilignes s'étendant sur des longueurs
considérables et se coupant entre elles suivant des angles variés. M. NordenskiOld
a notamment rencontré, au Groenland, des phénomènes de ce genre tout à fait
remarquables par leur grandeur et par les caractères plus précis qu'ils permettent
d'assigner aux régions soumises au régime glaciaire.
En rapprochant ainsi les principales circonstances que présentent les canaux
de Mars de celles qui ont été observées sur nos glaciers, on remarquera que les
analogies et les ressemblances entre les deux ordres de phénomènes sont réelle-
ment assez marquées pour que l'on puisse, avec une grande i)robabilité, rappor-
ter les uns et les autres à une même cause, l'état glaciaire.
On est donc conduit ii Ihj-pothèse de l'existence à la surface de Mars d'im-
menses glaciers, analogues à ceux de notre globe, mais d'une étendue beaucoup
plus considérable encore, et dont les mouvements et les ruptures doivent être
également plus prononcés. On doit remarquer, en efTet, que la longue durée des
saisons sur la planète (double de celles de la Terre) favorise manifestement le
développement et le bouleversement périodique des masses glacées, sous l'in-
fluence des dilatations et contractions dues aux changements de la température ;
effets auxquels il faut joindre ceux qui résultent de la faible pesanteur à la sur-
face de la planète {-^ de celle de la Terre).
Mais, d'autre part, l'hypothèse dont il s'agit va-t-elle s'accorder avec plusieurs
circonstances bien connues de la constitution physique de la planète?
Et d'abord les distances au Soleil de Mars et de la Terre étant comme 3 à 2,
les intensités du rayonnement sont comme 4 à 9; le rayonnement solaire est
donc sur Mars | de ce qu'il est sur la Terre. Sans vouloir décider ici ce que
deviendraient nos climats si le Soleil ne nous envoyait plus que les | de ses
rayons, on peut assurer que toutes les températures moyennes seraient fort abais-
sées et que la plus gran'ie partie de notre globe entrerait dans une période glaciaire.
La température de Mars doit donc être bien plus basse que celle de la Terre,
même en attribuant à la planète une atmosphère semblable à la nôtre.
De plus, on a des motifs sérieux de penser que l'atmosphère de Mars est
moins développée que celle do la Terre-
D'abord, l'absence de bandes équatoriales montre que des mouvements atmo-
sphériques réguliers ne se produisent pas là, comme sur notre globe; ce qui
parait indiquer une atmosphère d'une étendue plus limitée et, par suite, moins
propre à absorber et à conserver la chaleur solaire que l'atmosphère terrestre.
Ensuite, on peut remarquer que la lumière de Mars présente une teinte rouge,
reconnue de tous temps et par tous les observateurs. Or cette couleur rouge
fournit une nouvelle preuve que l'atmosphère de Mars n'a pas une constitution
18S8 C. n.A.MMAHlON. — Ur.MAUnUKS. 0 BSK II V ATlONS. 415
semblable à cellL' do ratiiiusphùrc tle la Terre; c'est ce que 1 ou peut conclure eu
considt^rant la couleur que possède la Itimiï'rc cendri'o «luc la lame renvoie vers
la Terre à certains jours des premier et ilornier quartiers. Cette; lumii-re est en
eiïet empruntée à la Terre directement t'-clairt-o par le Soleil, et jK-iit nous donner
une idée assez exacte de la couleur que possède la Terre, environnée de son
atmosphère et vue de l'espace. Ur la Uimii.'re cendrée est, d'après Arago, d'une
teinte bleu verdùlre et nullement rouge, comme elle le serait si notre atmosphère
était semblable h celle de Mars. La teinte rouge dont il s'agit indique avec une
grande probabilité la prédominance relative do la vapeur d'eau sur les gaz dans
l'atmosphère de Mars. On voit que l'hypothèse de létat glaciaire do Mars paraît
s'accorder assez bien avec les principales données physiques que nous possédons,
jusqu'à ce jour, sur cette planète. »
A celte conclusion nous avons cru devoir opposer, à la séance suivante du
2 juillet, les oliscrvalions concordantes (|ui les contredisent.
CXXIX. 1888. — C. Flammarion. Remarques sur la planète Mars. Observations.
Voici celte réponse ( ' ^ :
« Je demande à l'Académie la permission de lui soumettre les faits suivants, en
réponse aux considérations qui ont été présentées à la dernière séance par l'un
de ses membres les plus illustres.
Les glaces polaires fondent plus sur Mars que sur la Terre. C'est là un fait
d'observation constante. Tandis que chez nous les expéditions les plus hardies et
les plus aventureuses ne sont jamais parvenues à s'approcher à moins de 7" du
pôle nord, et sont restées beaucoup plus éloignées du pôle sud, tandis que nos
deux pôles paraissent constamment entourés de glaces, sur Mars la fusion de ces
glaces avec l'élévation du Soleil au-dessus de l'horizon s'opère presque com-
plètement pendant l'été aux deux pôles de la planète, surtout au pôle sud, dont
l'été arrive au périhélie de l'orbite.
En cette année 18.S8, la planète nous a encore présenté son hémisphère nord,
par suite de son inclinaison. La limite des glaces polaires boréales a été nette-
ment déterminée : elle s'est graduellement rapprochée du pôle pendant les mois
de février, mars, avril et mai derniers. J'estime qu'à la fin du mois de mai,
à l'époque de leur minimum, le diamètre de la tache polaire mesurait environ
300 kilomètres. ( Le solstice d'été est arrivé, pour l'hémisphère boréal, le 10 février
dernier, et l'équinoxe d'automne arrivera le 15 août prochain.)
Les neiges des deux pôles ont été depuis longtemps l'objet d'une attention
scrupuleuse et de mesures très précises. Il est constant qu'elles fondent considé-
rablement, beaucoup plus que sur notre planète. L'ensemble des observations
montre d'ailleurs que le niininuim arrive environ doux mois et demi à trois mois
.'} Comptes rendue de l Académie t/e>- Science'^, '2 juillet 1888.
416 l.A IM.AM-.Tl-. MAUS.
après le solstice. lOn sait (jnc raiinre do Mars dure dST jours, i Lo plH'iiom(''ne est
donc absolument du uirnic ordre (|uo oelui ((ui se passe aux pi'des (orrostres, mais
plue marqué.
Les mesures micrométriques do la tache jtolaire australe, faites par M. Schia-
parelli en 1S79, montrent que cette tache a été réduite à \" de dimension
apparente à la fin de novembre (le solstice austral étant arrivé le li août). En
admettant que ces quatre degrés de dimension apparente représentent, h cause
de l'irradiation, le double des dimensions réelles, on voit qu'en 1S70 les dimen-
sions réelles de cette tache polaire ont été réduites à î" ou 1^0 kilomètres de
diamètre. Elles varient au moins dans la proportion de 900 à 120 kilomètres de
diamètre.
Comme sur la Terre, ce pôle du l'rnid ne correspond pas au pôle géographique,
mais lui est excentrique'; il est placé à environ 0° du pôle géographique, ;\ peu
près sur l'intersection du Si" degré de latitude et du 3h'' degré de longitude,
La tache polaire boréale subit, comme la précédente, des variations corres-
pondant aux saisons et à la température.
Cette fusion des taches polaires pendant 1 "été est en contradiction manifeste
avec l'hypothèse que les continents de Mars seraient des champs de glace et
que la température de la planète serait inférieure à celle de la Terre. Elle
prouve le contraire, si l'on admet que ces neiges et ces eaux soient de même
nature que les nôtres, ce qui n'est pas absolument certain, malgré les investi-
gations de l'Analyse spectrale, car la pression atmosphérique, les points de fusion
et de saturation, la composition chimique de l'atmosphère et des liquides, doivent
offrir des différences originaires et permanentes avec ce qui existe sur notre
planète.
C'est peut-être ici le lieu de remarquer que la température d'un lieu n'est pas
uniquement réglée par sa distance au Soleil, mais encore et surtout par les pro-
priétés physiques de l'atmosphère qui le recouvre. Il y a beaucoup de vapeur
d'eau dans l'atmosphère de Mars, ce qui est démontré par les raies d'absorption
de son spectre (mats la coloration de la planète n'est pas due à cette cause, puis-
qu'elle est plus forte au centre du disque, oiî il y a moins d'épaisseur à traverser
que vers les bords). Or, c'est la vapeur d'eau qui joue le plus grand rôle dans la
conservation des rayons calorifiques reçus. On sait que le pouvoir absorbant d'une
molécule de va])eur aqueuse est IGOOOfois supérieur à celui d'une molécule d'air
sec. Sans la vapeur d'eau ou quelque protection analogue, notre propre planète
resterait constamment glacée. Les vapeurs des éthers sulfurique, formique, acé-
tique, de l'amylène, du gaz oléfiant, de l'iodure d'éthyle, du bisulfure de car-
bone, jouissent des mêmes propriétés, d'après les expériences de Tyndall.
Remarquons aussi que l'aspect des continents de Mars diffère considérable-
ment de celui des glaces polaires et des neiges qui, parfois, blanchissent cer-
taines régions. Les neiges et les glaces resplendissent d'une 6ianc/iewr éclatante,
tandis que les continents sont colorés d'un jaune très chaud, rappelant le ton des
blés mûrs vu du haut d'un ballon.
I sss
C. FL A.M.M AIUON - lU: M \ It nlTS KT OUS K li \ ATloNS.
L'ensemble des observations faites sur Mars et l'application des connaissances
qui se rattachent à l'étude de la constitution physique des planètes conduisent
donc à conclure que les glaces polaires n'envahissent point la surface entière de
ce globe, mais, au contraire, subissent plus que les nôtres l'influence de la tem-
Fiir. -^lO.
m
La pianote Mars au mois de jiiiu 188S. (Croquis 'le M. Flammarion.)
pdrature; que, relativement ù, la constitution physique de ces neiges et de ces
eaux, la tempr-raturc produit 1:\ des effets au moins aussi sensibles que sur notre
planète, que le monde de Mars n'est pas dans un état glaciaire et que les
« canaux " ne sont pas des crevasses dans des trlaciers.
Parmi les observations que nous avons faites pendant celte opposition
à noire Observatoire do Juvisy, nous signalerons les quatre croquis ci-
dessus {fiy. 219 .
Flammarion. — Mars. 27
•US 1. \ l'I \S\\\' M \ltS.
Nous n'avons pu ilisiin.LiUir aucun ^ canal» à l'aido do noti'O ôqual(^i'ial
de 0"',vij. Nos dessins de celte année exposent simplement, comme nos
croquis antérieurs, le canevas général de rai-éographie. Nous n'avons
représenté que ce que nous sommes absolument sur d'avoir vu, et rien
de ce qui nous a paru douteux. La planète était alors fort bien placée
pour l'observation de son pôle boréal, doiil la connaissance laisse encore
beaucoup à désirer. Le solstice d'été de cet bémisphère ayant eu lieu
le IG lévrier, la fonte des neiges polaires a dû réduire la glace à son mi-
nimum à la fin de mai. Il en est toutefois resté une quantité très sensible,
comme nous le disions tout à l'beure, et comme on peut en juger par les
quatre dessins reproduits ici (fJg. "2191, pris le 2 juin, de six à neuf heures
du soir.
A propos de ces beures, il n'est peut-être pas inutile de remarquer ici
que, lorsque l'air est calme et transparent, les vues prises de jour, en plein
soleil, sont aussi belles, aussi nettes, que celles de nuit.
Dan.«s le premier de ces dessins (A = G^'O), la mer du Sablier venait de passer
parle méridien central; on remarquait au-dessous une trace de son prolonge-
ment, vers l'Est (passe de Nasmyth), et, plus bas, la mer polaire boréale; la
mer du Sablier était de beaucoup la plus sombre ; le pôle inférieur était d'une
éclatante blancheur, les continents d'IIorschel et de Béer, bien évidents, étaient
colorés d'un ton jaune d'ocre bien clair, les mers grises et très variées de tons,
et au sommet du disque, vers les terres Cassini et Webb, les régions étaient
blanchâtres (nuages ou neiges sur l'hémisphère austral?). Le reste du disque
paraissait très pur et sans nuages. On ne remarquait aucune trace des inonda-
tions signalées à l'Ouest ou à gauche de la mer du Sablier, et il en a été de même
dans toutes nos observations du mois de juin.
Dans le second de ces dessins (B — T^O), cette même mer est plus avancée
vers l'Ouest; on remarque la terre de Laplace.
Dans le troisième (S'^O), la mer atteint presque le bord occidental du disque
et la baie du Méridien arrive par l'orient; la mer Knobol se montre au-dessus
du pôle; la région supérieure du disque est toujours blanchâtre.
Dans notre quatrième dessin (D), pris à 9'' du soir, la baie du Méridien vient
de traverser le méridien central; on devino, au-dessus du pôle, à l'est de la mer
Knobel, la terre de Ross et une mer qui semble envelopper le pôle.
Cette journée du 2 juin et celle du 3 (dans laquelle le thermomètre s'est élevé
jusqu'à 33" à l'ombre) ont été remarquables par la transparence de l'atmosphère
et par le calme des images. Ces observations ont été faites avec un grossisse-
ment de 400 l'I.
' L Astronomie, juillet 1888, p. 251.
1888 Ti-Min, — OHsi: it\ \Ti()Ns i; I i>i:ssins. ii«j
(!.\\.\, IHSH. — Tuiiiiv, Observations et dessins [*].
Lo savanl astronome de l,oiiv;iiii iiuiis a adressa le résniiK' snivaiil îles
dessins (lu'il a ]m prendre à laide de son équatori.il de n"'.i?i).
Les canaux ont parti, la pliipnii. d'une (Iifficul1(= toile H les circonstances si
D E I'
Aspects géograpliiiiucs de la planète Mars. (Dessin de M. Tcrhy à Louvaiu i
défavorables qu'il fallait cliercher ces détails pour les vérifier; vous V(ius rappe-
lez que M. Porrotin a été dans le môme cas en \SSC). Cependant, jo puis garantir
que mes dessins ne contiennent que des lignes réellement observées, aucune
n'étant due h la connaissance préalable que j'avais de la région observée. Je ci-
terai doux preuves : d'abord les imperfections de mes dessins qui n'échappent
pas à un œil cxercr, quand ou en compare certains rigoureusement entre eux;
je me suis bien gardé d'essayer de concilier les détails dans <'C cas, voulant re-
présenter exclusivement ce que j'ai vu; ensuite l'invisibilité do l'Euphrate et de
sa gémination. .l'avais une connaissance parfaite de l'existence de ce canal, de
'') L'Aulronon^ic, septembre 1888, p. 32i.— Voy. aussi Enaornble dfs obaerrationx
faites .'( Louvain en IMHS, par le D' Terby. Bruxelles. 1889.
iîo L.\ PLANKTi: MARS.
ga gf'mination, de sa forme exacte jiar des dessins que M. t^çhiaparelli a bien
voulu ni'onvoyer pour m'aniener ;i la vérifier ; cet astronome croyait que je
laurais vu avec quoique facilité. Malgré tous mes ctTorts, et j'y ai mis do
l'obstination, je n'ai pas vu trace non seulement de la gémination, mais môme
de l'Euphrate. Il n'eu a pas été de même du Phison, comme vous le savez
déjà.
Chaque dessin est le résultat de plusieurs jours d'observations; tous les détails
n'ont donc pas toujours été vus en même temps.
Jai rarement pu dépasser le grossissement de 280 à 300 fois, ou, si je l'ai dé-
passé, ce fut sans utilité réelle, i\ cause des conditions abominables d'observation
de cette année. Vous savez que j'ai lait un nombre très grand de dessins; j'ai
choisi ceux qui présentent le mieux la plus grande partie de la surface. Voici les
régions observées :
Fig. ^2^0, A (12 mai. O^^iS"). — Au centre, Trivium Charontis, sous forme de
tache plus noire, qui se prolonge, vers le bas, par Erebus, vers le haut, par
Cerberus, et vers la droite, par Styx perpendiculaire à Cerberus; le reste du
contour d'Elysium s'achève par l'Eunostos et l'ilyblaîus. En haut figure la mer
Maraldi avec le Sinus Titanum près du bord gauche et la baie de L?estrygonum
dans le diamètre vertical; un filament réunit cette dernière baie à Cerberus, c'est
l'Antsous. Les deux rectangles gris dans le quart inférieur droit du disque sont
la Propontide. On voit le filet noir dans la tache polaire, dans la position qu'il
occupait le 12 mai, à 9*'15™. La fig. 222 en montre le déplacement par la rotation
jusqu'à lO^'âS™. La fig. 223 donne l'aspect de la tache polaire pour le 13 mai.
J'ai observé également des points blancs au bord inférieur, sur le prolon-
gement de r Erebus; quand ils arrivaient au bord, ils brillaient et débor-
daient comme la tache polaire. Un troisième point blanc a déjà disparu au bord
au moment de ce dessin. On distinguera les régions blanches et les régions
rougeâtres. Le Cerberus m'a paru souvent rosé, ainsi que tout le périmètre
d'Elysium.
La fig. 220, B (9 mai, minuit), montre, un pou au-dessus du centre, le confluent
du Triton, du Thoth et du Népenthès; en bas, Alcyonius; à gauche, Elysium.
L'Eunostos, le 12 juin, se prolonge par une ligne fumeuse jusqu'au Thoth.
Fig. 220, C (29 avril, 8i'16'°). — Triple confluent du Triton, du Thoth et du
Népenthès à gauche du centre; Libye bien visible. Mare Tyrrhenum très pâle.
Astusapes visible; Protonilus avec Ismenius lacus au bord droit; un peu plus
bas Callirrhoe. Au méridien central : Nilosyrtis et Boreosyrtis. L'interruption
dans Nilosyrtis, au centre, doit avoir été une illusion ou leff'et d'un nuage dans
l'atmosphère de Mars, car M. Schiaparelli a fixé toute son attention sur ce fait
avec son 18 pouces, lorsque cette région s'est de nouveau prêtée à l'observation
et il ne l'a pas confirmé. En haut brille une très petite tache neigeuse.
Fig. 220, D (29 avril, ll'^SS'"). — Hellas bien visible au bord gauche; on voit
la baie du Phison; la baie fourchue dédoublée très bien par moments au mois
d'avril; puis le golfe des Perles; Edom promontarium très blanc. Le Phison
188S
r I-: n n v
()HSi:i;VATI(>NS HT DI-SSINS.
4-21
parait double le l""" et le 3 juin; l'Cxus jii.s(|u'au lai- Ismenius. Ce dernier lac est
rougeâtre. Tempe au bord droit.
Fig. îiO, E (27 mai, 8*'4'"). — Argyrc brille en haut du disque comme une
tache polaire. On voit trC'S bien Deucalionis regio entre Sinus Sabaeus et Marga-
ratifer Sinus; une région plus claire dans la grande tache supérieure correspond
à PyrrhcTc et Protei regio: De gauche à droite, en remontant légèrement, nous
trouvons le Gchon, l'Indus-Oxus et le Gange. Au bord inférieur, à gauche du
Fig. 221.
Golfe de l'Aurore .
Fk
Fig. Î23.
Aspect de la tache polaire le 12 mai,
dea'>43-â 10»" 48"-.
Aspect de la tache polaire le 13 mai.
à Oh 3™.
diamètre vertical, la petite tache noire est Lacus Ismenius; le Deuteronilus,
rosé, la réunit au lac Xiliacus ; celui-ci est séparé de Mare Acidalium par le
Pont d'Achille; en bas, figure le petit lac Ilyperboréen, contre la tache polaire;
le Gange aboutit à une tache noire qui est le lac de la Lune. Le reste du contour
de Tempe s'achève par le Nilokeras, le Nil, rougeâtre, et par Ceraunius. L'ombre
qui descend de Mare Acidalium vers le limbe inférieur est Callirrhoc.
La fîg. 220, F (23 mai, 8^28"), montre la forme ou partie polygonale de Tempe;
nous voyons encore Argj-re, le Gange arrivant au lac de la Lune, les principales
régions de la (igurc précédente et mieux le Tauaïs qui va de Ceraunius au bord
droit. Sous le Tauaïs on voit le laxartes.
La fig. 221 représente le golfe de l'Aurore avec les lacs Solis et Tithonius
que j'ai vus une seule fois, le IG avril. Xectar et Agathodaîmon bien visibles.
Les pO- 2'^"^ et 223 montrent les variations de perspective de la ligne polaire
causées par la rotation.
LA PLANE IL M A II S.
('.XXXI. 1888.— ScHiAi'AHELLi. Observations nouvelles (').
r.es observations nouvelles de M. Schiaparelliont été adressées sous forme
de lettres à notre savant collègue M. Terby. de Louvain, dont nous venons
de voir les propres recherches. Elles ont été obtenues à l'aide du nouvel
cquatorial de Milan, de 18 pouces, lequel dirigé sur les étoiles doubles
a prouvé sa puissance de définition : létoile £ Hydre a été découverte triple ;
distance des composantes = 0\"20 à 0",25 (moins d'un quart de seconde !K
Notre fîg. "2-24 représente l'aspect de Mars les 8, 9 et 10 mai 1888. « De
grandes nouveautés, écrit l'auteur, se sont présentées dans la région de Pro-
pontis: avec les faibles grossissements, on ne voit qu'une traînée d'ombres
confuses; en employant 500 et 650, cela se résout en une espèce de triangu-
lation curieuse, dont un côté est double; cette triangulation continue encore
à gauche, où il y a au moins deux triangles. Les côtés sont estompés, les
sommets forment des taches noires assez visibles, de forme quelquefois al'
longée, le fond est jaune comme partout. «
Après l'existence des canaux, après leur gcmination, remarque à ce propos
M. Terby, cette tviangulalion vient mettre le comble aux mystères de Mars.
Quelle analogie entre cette figure et le canevas trigonométrique de nos opé-
rations géodésiques. Et ce côté double! Et ces sommets plus foncés!
M. Schiaparelli ajoute : « Le Triton s'est changé en un golfe très large
do la mer Cimmérienne; c'est là un fait des plus frappants et des plus in-
structifs. '
Dans une lettre du 21 mai, l'astronome italien ajoute encore :
Le 20. le lac du Soleil, à peu près au méridien, était très pâle et peu visible;
le lac Tithon se voyait mieux. Iris, Fortuna, Clirysorrhoas, Ganges, Jamuna,
llydaspes, toUs visibles, Ganges et Chrysorrhoas surtout, simples et droits, mais
avec de lrî;s petite>< ondulations dans leurs deux bords, qu'on pouvait distin-
>juer Vun de l'autre. La couleur cependant est si peu foncée (je crois que c'est
iiue nuance de rouge), qu'il y a quelque difficulté à constater toutes ces lignes,
et je doute qu'elles soient visibles avec un 8 pouces : avec 200 et 350 je n'ai pu
les voir, mais avec .jOO et G.jO elles étaient distinctes. La môme couleur peu
foncée rend difficile à voir les deux lignes du Nil, qui est bien double; les dcUx
bandes sont assez larges et leui- position est exactement celle de ma carte; elles
Sont bien dessinées. Double aussi, mais mal dessiné et estompe est le Nilokcras.
Le trait de droite du Nilokeras coupe le pont d'Achille, qui se trouve par là in-
terrompu à son extrémité droite; le reste de ce pont existe encore, mais enfumé
(') Ciel et Terre, août 1888.
SCm AI'AKI-LIJ
nus I- U V A 1 IONS No U V !•: I.L RS.
423
et mal dtliiii. l>a nier Aeidaliunno et le la.- llyperboreus ont plusieurs ramifica-
tions que je vois pour la première fois.
Ainsi, on distinguerait maintenant les deux bords de certains canaux. les-
quels Lords sont iiii peu plus foncés que ririlericur. Cette nouvelle décou-
verte ajoute encore au mystère.
Fig. m.
1%
Vue télescopitiue de M;iis, d'aprùs M. Schiai)ai-elli, les 8, '.) et 10 mai I88«.
(6 = espaces blancs).
Le 28 mai, le directeur de l'Observatoire de Milan écrivait de nouveau :
Hier, la longue traînée de l'Euphrate se présentait à peu près comme dans le
dessin ci-joint (fîg. "220 1. Le tronc ax paraissait simple avec une direction diflé-
rente de l'ordinaire; ai», gémination très régulière, un peu sombre mais distincte;
bc, gémination forte mais mal définie, blanc des deux côtés et au milieu; ed,
triangle fort allongé, lignes fortes mais peu définies; (/, autre lac hyperboréen;
h, Lacus Ismenius, double; c, autre lac moins grand, double; .(, Lacus Sirbonis
de 1879, double; af, Orontes, bien visible; /6, lliddekcl, peu sur; ec, ligne déliée
mais bien marquée; be^, Oxus et Indus, faciles à voir; lac c un beau point noir:
beh, Deuteronilus, bien visible; ch, Caliirrlioc, bien visible. ( »n le voit, tous ces
lacs sont doubles!
La fuj. 225 était accompagnée d'une noie datée du 7 juin, dans laquelle
l'astronome italien s'exprimait comme il suit :
Je croyais avoir vu assez bien la planète les '.i, 2.'i et 27 mai et je couimençais
4:4
LA IM.ANKTK .MAU>.
à être presque satislaii. a>aiil pu constater au ni.iiiis iruis mi ipiatrc uiMiiiiiations.
Mais j'ai ctc ilétrumi»é do la manière la plus heureuse le -J et le i juin; et seule-
ment alors j'ai pu me faire une idée de la l'orce d'un 18 pouces sur Mars! Je me
suis aperçu alors que les mémorables journées de 1S7'J-1880 et de 1882 étaient
/
.-■1»»'^'' é" if t -s V S n
b J
Fig. 2-2j. — Vue lélescopiqiic de Mar>. d'aiircs M. Schiaparelli, les 2, 4 et G juiu 188S.
revenues jiour la première fois, et qu'enthi je revoyais ces images prodigieuses
l'ig. 22G. — Fragment de la géographie de Mars, d'après M. Schiaparelli. (Dessiu du 27 mai 1888.)
qui se présentaient dans le champ comme une exquise gravure sur acier, relevée
de toute la magie des détails, et mon seul regret était d'avoir le disque réduit ù
1888 SCIIIAI'AKKI.I.I - OIJSKUVATIONS NÛU V KIJJ' S. 425
1-2" de diamètre. Non soulemcnt jai conllriné la géinination du Népenthès {quan-
tum mulatus ah illo!) et ki réapparition du lac Triton do 1877, mais j'ai revu
aussi le lac Mœris réduit àun très" petit point, mais toutefois parfaitement visible
et à peine séparé de la Grande Syrte. llephœstus a disparu tout à fait. La Nilo-
syrtc n'avait aucune interruption; il est vrai cependant que, dans la Syrtis Magna,
les derniers jours de mai, on voyait une petite île assez brillante (Œnotria) qui.
avec les grossissements faibles, produisait l'apparence d'une espèce de pont;
mais cela disparaissait avec ôOO. Maintenant, ce phénomène a cessé tout à fait et
Œnotria n'est presque plus visible. L'I-Juphrate est encore double tout entier,
mais il n'est plus aussi évident que le 27 et le 30 mai. Cependant hier il se pré-
tait encore assez bien, les deux traits un peu estomi)és et la partie du dessous du
lac Ismenius mieux que la partie au-dessus... Callirrhoe et Protonilus sont deux
gcminations très étroites, mais géométriquement parfaites et très noires, Cal-
lirrhoe surtout; avec le grossissement de 650 cela se voit sans le moindre doute.
Les deux traits de Callirrhoe sont égaux; dans le Protonilus, le trait supérieur
est beaucoup plus mince que l'inférieur, quoique parfaitement tracé. Le Phison
est double, à peu près comme Euphrates ; Astaboras double aussi, mais plus visible
à gauche du Phisou. Tiphouius et Orontes simples; simple aussi une ligue nou-
velle marquée .v sur le dessin.
L'Oxus a faibli beaucoup, et (Icrnièrement je ne le voyais plus, tandis que
rindus a reparu. LHiddekel est presque invisible; le Gehon est un peu enfumé,
il va à un petit lac, d'où sortent deux lignes à droite vers le Lacus Niliacus. Mais,
ce qui est le plus extraordinaire et le plus inattendu, ce sont les changements
survenus depuis un mois dans la Boréosyrte et dans les régions environnantes;
l'esquisse que j'en donne n'est pas définitive, car il y a quelques petits détails
sur lesquels j'ai besoin de répéter encore mon examen; cependant leurs gémiua-
tions et leur disposition sont hors de doute. Quel étrange enchevêtrement! Que
peut signifier tout cela? Évidemment la planète a des détails géographiques
fixes, semblables à ceux de la Terre, avec golfes, canaux, etc., à plan régulier.
Vient un certain moment, tout cela disparait pour faire place à ces grotesques
polygonations qui, évidemment, s'attachent à représenter approximativement
l'état antérieur, mais c'est un masque grossier et je dirai presque ridicule,
li'étude du Népenthès, sous ce point de vue, est fort instructive, et ce qui arrive
dans la Boréosyrte est du même genre; seulement ici la grande obliquité de la
vue rend l'étude plus difficile. C'est en vain qu'en 1884 et en 1886 j'ai tâché de
démêler avec le 8 pouces ce qui arrive dans cette région. Il fallait le 18 pouces
ixjur cela.
Voilà certes des observations qui paraissent laites avec la plus rigoureuse
précision. Comment penser que l'auteur d'une analyse aussi soignée soit
dupe d'illusions? Lapplicalion de son équatorial aux mesures d'étoiles
doubles comme à l'examen des détails de la géographie martienne, témoigne
que les résultais obtenus correspondent aux grossisscuieuls employés, selon
i26 i.A ri,AM:ri: m ah s.
la position de lasliv et la (ransparence alniosphériquc. Dans un cas comme
dans l'autre, il est bien dilïieilc de mettre en doute la valeur de ces obser-
vations.
Pourtant, dès que le gigantesque équatorial de près d'un mètre de dia-
mètre (Û"',91 d'ouverture libre) du nouvel Observatoire du mont Ilamillou
fut installé, les astronomes de cet Observatoire se sont empressés de le diriger
sur Mars pour vérifier ces belles découvertes, et n'y sont pas parvenus. On
abien vudes a canaux », mais larges, vagues, à peine identiiialdes. eljaniais
dédoublés.
Il faut donc admettre que M. Schiaparelli a une vue extraordinaire, une
persévérance qui sait attendre très longuement les plus fugitifs moments
de visibilité parfaite, et, en troisième lieu, un excellent instrument. Nous
l'admettons.
Mais que conclure de ces merveilles V
C'est ce que nous examinerons à la seconde Partie de cet Ouvrage, à la-
quelle nous renvoyons aussi les dissertations générales que nous avons
publiées à propos des observations précédentes (' ).
CXX.MI 1888. ~ IloLDEN, ScH.KBEKLE. Keelkiî. Obscrvaliom failcs à l'Obscv-
valoire Lick à l'aide de la plus puissante lunellcdu monde '-' .
Ces observations sont faites pour nous désespérer. Plus on consacj'c de
temps, d'études et de soucis à l'analyse des observations nombreuses et
variées faites sur cette mystérieuse planète, el plus on est embarrassé pour
en déduire une opinion définitive. Et pourtant, il n'y a pas d'autre moyen
de nous instruire sur ce point. Des observations, encore des observations,
et toujours des observations. Examinons, comparons, discutons. Mais nous
. ne pouvons pas sortir de là. Ah! il serait facile d'éviter tout tracas. Ce serait
de regarder comme non avenues les observations qui ne concordent pas
avec les dessins les plus sûrs, avec les configurations certaines des taches
de la planète, et de ne pas s'inquiéter des divergences, en les attribuant
tout simplement à des erreurs. Ce serait là un moyen commode et expé*
ditif. Mais il serait dangereux de l'employer; car ce sont peut-être préci--
sèment ces divergences, ces difficultés, qui nous mettront sur la voie de
déterminer les caractères physiques spéciaux de cette singulière et énigma-
lique planète.
La plus puissante lunette du monde a été appliquée à l'étude du globe dé
(•) Voy. L Asli'onomie, novembre 1888, p. ilO;
(-) L Asflronomie, mai 1889, p. 180.
IS8S ii(HJii;n. scii.kmkuij;, kki-jj-ii. - OHSK KV ATIONS. 427
Mars, par un astronomt: distin^^ué et accoutumé depuis longtemps aux ob-
servations, M. Ilolden, le sympathi(|ue directeur de lObservatoire du mont
Hamilton. L'immense objectif de Û"',91 d'ouverture libre a donné les meil-
leurs résultats dans les mesures d'étoiles doubles et possède une remar-
ijuablc puissance de définition. Eli bien, il faut avouer que les dessins
obtenus par MM. Holden, Scli;t'berlc et Keeler, à l'aide de ce colossal équa-
torial armé de grossissements de 350 et 700 fois, ne correspondent ni avec
ceux de M. Schiaparelli à Milan, ni avec ceux de M. Perrotin à Nice. Chaque
astronome a-t-il donc, au physique comme au moral, sa " manière de voir »?
Pourtant, il y a des limites à lequation personnelle. L'Astronomie est la
science la plus exacte entre toutes ses sœurs. Il ne faut pas qu'elle perde
son renom. Et elle ne peut pas le perdre. Les observateurs peuvent différer
dans certaines appréciations de nuances, d'étendue, de formes, de positions
même, lorsqu'il s'agit d'aspects à peine perceptibles, mais vraiment nous ne
pouvons pas admettre que nous voyions des choses qui n'existent pas.
Les observations de la planète Mars n'ont pu commencer à l'Observatoire
récent du mont Hamilton que le IG juillet 1888, c'est-à-dire plus de trois
mois après l'opposition, qui avait eu lieu le 11 avril. La planète était déjà très
éloignée de la Terre, diminuée à un disque inférieur à 9", et à une distance
zénithale de 60°. Cène sont pas là assurément de fort bonnes conditions.
Cependant les satellites étaient bien visibles.
Du 16 juillet au 10 août, les astronomes de Californie ont pu faire, entre
autres, vingt et un dessins de la planète. Nous choisissons'parmi ces des-
sins une série de huit pour être offerte à nos lecteurs. Le Directeur de l'Ob-
servatoire Lick reconnaît lui-même qu'ils ne concordent pas avec ceux que
nous avons publiés. « Pour la Libye, en particulier, écrit M. Holden, nos
observations des 25, 26, 27. 29 et 31 juillet, qui s'accordent bien entre elles,
diffèrent matériellement de celles de Nice faites en avril et mai. et publiées
par L'Astronomie de juin 1888. p. 214. Nos dessins montrent cet aspect à peu
près tel que M. Schiaparelli l'a vu en 1877 et 1878. j)
Considérons notamment les dessins 1, 2, 3 et 4 [fig. 227 \ Les longitudes
du méridien central de ces disques sont respectivement 305°. 310°, 318° et
278°, c'est-à-dire que la mer du Sablier, qui est à droite du méridien central
sur le premier de ces dessins, arrive juste au centre sur le second, l'a un
peu dépassé sur le troisième, et un peu plus encore sur le quatrième.
Il est impossible de regarder avec un peu d'attention ces quatre vues de
Mars, prises respectivement le 27 juillet, à 8''0"'. — le même jour, à S'' 15"", —
le 26, à S'' 10'", — et le 29, à 7''28"', sans être frappé de leurs dissemblances.
Ainsi, par exemple, la fig. 1 et la fig. 2 ont été faites à peu près à la même
heure d au même instrument, la première, à 8''0"'. par M. Holden, la se-
4:8
LA PLANKTi; M A US.
condc, à 8''15'", par M. Kooler. Nous iiouvoiis coiiaiiicmenl penser que l;i
diUereuce des deux dessins provient de la dillerence de la manière de voir
des deux observateurs, ear il serait di; la dernière lémérilé triniaainer
Ki?. '2-27.
Dessins de la planète Mars, faits a l'Observatoire Llck, en 1888.
1. — 27 juillet, à S'-O™ (M. Holden) ; a, ilc blanchâtre. 2. — Même jour, à8''15"»(M. Keelcr).
3. — 2« juillet, à Si-lO (.M. IloUlcn). 1. — i'.i juillet, à 7'' 28™ (M. HoUleii).
qu'en un quart d'iieure la planète ait subi une pareille métamorphose,
même en faisant intervenir les nuages de son atmosphère.
Tout diffère dans ces deux dessins : largeur de la mer, canaux de gauche, etc.
Cette divergence nous montre qu'il faut mettre la plus grande circonspection
dans nos conclusions relatives aux changements observés à la surface de la
planète- Nous devons penser notamment que les deux larges traînées verti--
cales dessinées par M. Huldcn surla/ïf/. 1 , représentées également par lui
(H{?i:u\ A TIONS.
\V.i
|.>^S8 IKH.ORN. SC.II.KIJI-Hl.i:, KI-IILTH
/ig.Z, el dont rune est ('gaiement représentée A'f/. '«,i»arl<! même observatonr,
ont été exagérées sur ces dessins,
Si nous choisissons une série de quatre autres vues, nous en recevrons la
nu-me impression. Comparons, par exemple, la fuj. 5 (fifj. 328^. prise lo 5 aoûl.
Fie. 0-38.
Dessins de la planète Mars, faits à l'Observatoire Lick, en 1S88.
:.. — .-) août 1888, à 7'' iS-. I.oiig. = 21lM >•■ ""l''"?" ' • ''• — î> -^oiit 1888, à TMo-. Long. = 213» (M.Holdeii).
7. -2Ô juillet 1888,;i8''.I.on(;.^325°(M. Kecler). 8. — 2f, juillet 1888, à 8'' SO™. I.on-.= 325» (M.Keclcrt.
•i 7" SS-" (longitude = 211") et la fig.O, prise le même jour, à T'-'iO'" (longitude
= 213"), toutes dcii.K par M. Ilolden. Croirait-on qu'il s'agisse là de la même
face de la planète? Considérons également les fig. 7 et 8 dessinées, la pre-
mière le 25 juillet, à S"!)"", la seconde le lendemain, à S^W", et représentant
aussi l'une et l'autre le même hémisphère marlien, à la longitude centrale
de 325.° (croquis de M. Keeler). Quelle différence d'aspecls! La dernière nous
donne assez bien l'impression de la géographie [de Mars, mais celle de la
veille en diffère essentiellement. Et ne concluons pas non plus à un chan-
-130
I \ IM \M-.Ti: MA US.
gement rrcl oprré on vingt-(|uatn' lieiiivs dans 1 aspect de la plaiific;
ce même jour, 25 juillet, à 7" iô'" cl 8''-20"\ deux aulres esquisses diU'èrem
presque autant de notre /ir/. 7 que celle-ci diffère de la ftç]. 8 : au lieu d'un
aspect rectangulaire, l'ensemble des taches sombres ofTre un aspect ovale
parfaitement prononcé.
Les auteurs de ces vues de la planète Mars déclarent d'ailleurs qu'ils iioiU
fait là que de simples esquisses et non des dessins complets. Regreitons que
le gigantcf^que équatorial.à l'aide duquel ces observations ont été obtenues,
n'ait pu être monté que trois mois après le passage de Mars à sa situation
la plus favorable.
.Vvouons néanmoins sans fard que ces observations, venant après celles
de M. Scbiaparelli et obtenues à laide de la plus puissante lunette qui existe
au monde, sont un peu faites poumons déconcerter.
CXXXilI. 1888. — WiSLiGExus. Mesures micromètriqiies ^ ''.
Par une nouvelle méthode, cet observateur, astronome à l'Observatoire de
Fig. 229. — Mesures micromc'triques de M. Wislicenus, en 1S88.
Strasbourg, a pris, du 2 au 13 mai 1888, la position de sept points pi-inci-
paux de la sphère martienne et a construit la petite carte ci-dessus. 11 s'est
(') Astronornische NachriclUen, X" 2872.
l'^'SS PII. (ifllUCNV. — l,i:s MAIlf-I-S SUK MARS. i3l
servi «riiii»- Imioiio do f. ponces armée d un grossissement do 256. Cos points
soni les suivants :
).i)ii(ritii<li'. • I.atiluilf.
I. Mer du Sablier 294'..'» -4- H*,C
'.*. Point iionl du marais Colo<- 295 .1 - 42 i
3. A gauche do la mer du Sablifr... 271 ,G — 15 .4
4. (Milnotria ot Japygie 293 .(j —7^9
0. Sty^ia Palus 108,0 h- 28 ,1
G. Eiinoslos 223 .7 -^ 25 ,0
7. Cyclopum 219 ..'> ^ - 2 ,0
Angle de position de l'axe de Mars... 3i»,j
Distance polaire de la neige boréale... 3 ,.">
Longitude de la neige polaire boréale 281 .1
Cette nouvelle carte ne ressemble guère aux précédentes. Il est vrai quelle
ne représente qu'une esquisse.
CW-Xn'. 1888. ~ Pu. (îi';Rir,Nv. La^ marées anv .ïïarx (').
Cotte question a déjà été (iudi<'0 plus h.iut ip. 311). Nous avons prié
M. Gérigny, le savant secrétaire de L'Astronomie, d'en faire un nouveau
calcul, et voici le résultat de son invesli.ïation.
Les Diodifications si remarquables qui ont été observées dans ces dernières
années à la surface de la planète Mars, paraissent causées par de srrands déplace-
ments de la masse liquide qui recouvre en partie ce globe planétaire : nous
aurions ainsi assisté tantôt à de véritables inondations, tantôt à des retraits de la
mer sur de vastes étendues. De pareils phénomènes suggèrent naturellement
l'idée que les marées qui peuvent exister à la surface des océans de la planète
n'y sont peut-être pas étrangères. Il serait donc d'un haut intérêt de pouvoir cal-
culer l'importance des marées produites par les deux satellites et par le Soleil.
J'ai cherché, sur l'invitation de M. Tlammarion, à entreprendre ce calcul; mal-
lieureusement, en ce qui concerne les satellites, les éléments font presque abso-
lument défaut, puisqu'on en ignore les masses. On sait seulement qu'ils sont
très petits, et l'on connaît la faible distance qui les sépare de la planète. On peut
donc penser n priori que leur proximité compense leur petitesse et leur permet
dexercer des effets appréciables sur le niveau des océans de Mars; mais, pour
calculer ces effets, on est réduit à des hypothèses.
En raison du peu d'éclat de ces petits astres, on est conduit à leur attribuer un
diamètre extrêmement petit. J'ai supposé 12 kilomètres de diamètre pour le pre-
mier, 10 pour le second, qui est un peu moins brillant. Ces nombres m'ont été four-
nis pai- M. Flammarion. J'ai supposé la densité des satellites égale à celle de la
])lanète. J'ai admis, pour la distance du premier, 2,771 rayons de Mars, et pour la
.' L'Asironomie, 1889, p. 384. — Bullrtin do la Société Astronomique de France,
septembre 1889, où l'on trouvera tous les détails du calcul.
UV: I.A PI.ANT-.Ti: M. MIS.
«lislanco du second, 6.Î0I. Co sont les uombros donnés par M. Hall, l'our sim-
plifier le calcul, j'ai supposé un globe spliérique solide ayant le rayon do la pia-
note recouvert dune couche liquide dont j'ai négligé l'épaisseur, et j'ai déter-
miné l'équation de la surface libre de cette couche, supposée en équilibre rclatil
sous l'action des attractions de Mars et do chaque saiollite isolément, ce qui m'a
permis de calculer les hauteurs des deux protubérances produites sur cette sur-
face aux deux points de Mars qui ont le satellite à leur zénith et à leur nadir.
11 se présente ici un résultat remarquable qui n'a point son analogue dans les
marées terrestres : c'est que, grâce à la proximité des satellites, les deux protu-
bérances opposées sont loin d'être égales. Ainsi, pour le premier satellite, la
protubérance qui a le satellite au nadir est seulement un pou plus do la moitié,
les - de celle qui a le satellite à son zénith. Pour le second, la protubérance
nadirale est les W de celle qui lui est opposée. Ces résultats sont indépendants
de la masse des satellites, et ne dépendent que de leur distance à la planète.
Quant à la hauteur même de ces protubérances, il ne faut pas la confondre
avec la hauteur de la marée : celle-ci est généralement beaucoup plus grande et
dépend de plusieurs éléments inconnus, parmi lesquels figure essentiellement la
configuration des côtes. C'est ainsi que, sur la Terre, on observe dans la Manche,
en un lieu bien éloigné de ceux qui peuvent avoir le Soleil ou la Lune à leur
zénith, des marées de 13 mètres, tandis que la protubérance due à la Lune n'est
que de 0°, 50, et celle qui est due au Soleil 0'", 25, soit au total O», 75. A la latitude
de Granvillo, cette protubérance serait réduite environ de moitié à la surface
du niveau des mers. La hauteur de la marée est donc égale à celle de la protu-
bérance multipliée par ■ „,■ , ou environ âo.
Pour interpréter les nombres que nous allons donner, il faut donc bien se garder
de les considérer comme donnant les différences de niveau entre la haute mer et
la basse mer; il faut les comparer avec les nombres correspondants pour les
marées terrestres, soit :
0",50 pour la marée lunaire,
0 ,1ô 1) solaire,
0 ,75 pour les grandes marées des syzygies.
Avec les dimensions adoptées pour les satellites, les hauteurs des protubérances
sont extrêmement faibles. J'ai trouvé :
1' Pour le premier satellite,
Protubérance zénithale : 1""",79,
i> nadirale : l ,05;
20 Pour le second satellite,
Protubérance zénithale : 0""',088,
» nadirale : 0 ,082.
Ces résultats sont tout à fait insignifiants : ils correspondent à des marées
1888 IMl. (;i^:iU(iNV. — LliS MAilfiES SUU MARS. 433
beaucoup plus faibles que celles que l'un observe dans la Méiliterranéc : ils ne
représentent ipruiie fraction inûme de la marée solaire de Mars, pour laquelle le
calcul donne une i)rotubc'rance de 5'2™"', soit à peu près le cinquième de la marée
solaire sur la Terre.
Si donc les satellites sont aussi petits que nous l'avons supposé, il faut renoncer
à attribuer aux marées une influence appréciable sur les phénomènes d'inon-
«lation dont nous avons été témoins; mais les dimensions admises sont peut-être
bien au-dessous de la réalité, et la hauteur des protubéruncos est proportionnelle
à la masse du satellite correspondant, c'est-à-dire au cube de son diamètre.
Si l'on double les dimensions adoptées, ce qui porte les diamètres à i'i et 20 ki-
lomètres, les protubérances deviennent huit fois plus grandes, c'est-à-dire
14""
",35
et
8™"
\40,
0
,704
et
0
,GGG,
En admettant le triple pour les diamètres, soit 3G et 30 kilomètres, les chiffres
primitifs seront multipliés par 27 et deviendront
48™"', 43 et 28""", 4G,
2 ,38 et 2 ,21.
Les marées dues au second satellite restent négligeables; mais celles du pre-
mier deviennent comparables à la marée solaire. Enfin, si l'on multiplie les dia-
mètres primitifs par 10, ce qui donne 120 et 100 kilomètres, diamètres encore bien
petits pour des astres visibles à la distance de Mars et dans sa proximité immé-
diate, les hauteurs primitives seront multipliées par 1000 et deviendront :
l'",79 et l'",05,
G ,088 et 0 ,082.
Les marées dues au second satellite restent encore bien faibles ; mais celles du
j)remicr atteignent le double des marées océaniques terrestres.
H résulte des calculs précédents que le second satellite est, en toute hypo-
thèse, sans inlluonce appréciable, son action n'étant guère que la vingtième partie
de celle du premier; mais celui-ci, si sa masse est assez forte, peut donner nais-
sance à des marées au moins aussi importantes que celles que nous observons
dans nos mers.
Comme nous l'avons fait remarquer plus haut, la hauteur de la protubérance
de la surface de niveau n'est qu'un des éléments qui interviennent dans le phé-
nomène des marées. La mer ne prend jamais son équilibre; mais la masse liquide
exécute, sous l'attraction du satellite, une série d'oscillations dont la durée est
l'galc au temps qui s'écoule entre deux retours consécutifs du satellite au même
méridien et naturellement, dans cette oscillation, elle dépasse sa position d'équi-
libre, de sorte que la hauteur de la marée est nécessairement plus grande que
e.oUo de la protubérance. Il est assez naturel d'admettre i[uc, plus les oscillation.^
Kl.vmmabio.n — Mars. 28
134 I.A l'LAM/n- M AU S.
sont rapides, plus furioiix sont les mouvements de la mer, et plus haute est la
marée. Or, le premier satellite, le seul qui paraisse intéressant dans la question,
exécute sa révolution autour de Mars en 7''3'.)'" i^)^ taudis que la planète tourne
en î?i''37"''235; \i en résulte que ce satellite revient au même inéridieu au bout
lie n*'G'""2i'. C'est donc dans ce court intervalle de moins de douze heures que
s'exécute la double oscillation de la marée; c'est pendant ces douze heures que la
mer est deux fois haute et deux fois basse, de sorte qu'il ne s'écoule pas six heures
entre deux pleines mers, et à peine trois heures entre la haute mer et la basse
mer. Cette rapidité des mouvements de llux et de reflux contribue vraisembla-
blement à augmenter dans d'assez grandes proportions la hauteur de la marée.
La configuration des mers de Mars, évasées d'un côté et se terminant par
d'étroits canaux, se prête encore admirablement à l'augmentation du niveau des
pleines mers. Il doit se passer dans ces mers allongées un phénomène ana-
logue à celui qui se produit dans la Manche. La vague du flux, produite au sein
de l'Océan, se propage dans un bassin dont les bords se rapprochent l'un de
l'autre : la masse d'eau se trouve ainsi de plus en plus resserrée, et la vague doit
nécessairement s'élever à mesure qu'elle avance, pouvant ainsi atteindre à des
hauteurs considérables. Le satellite tournant plus vite que la planète, les marées
de cette planète se propagent en sens inverse des nôtres, c'est-à-dire de l'Ouest
à l'Est. Qu'on examine sur une carte la configuration de la mer du Sablier, et l'on
comprendra que le flux arrivant dans l'océan Dawes viendra s'engoufl'rer du Sud
au Xurd dans la mer du Sablier, s'élevant à des hauteurs de plus en plus consi-
dérables à mesure que les rives se rapprochent. Un phénomène analogue doit se
manifester dans une foule d'autres régions de la planète. Il est assez vraisemblable
que. dans ces longs détroits, il doive se produire à chaque marée de véritables raz
de marée, des barres analogues à celles de la Seine ou du fleuve des Amazones.
De idus, comme les oscillations d'une masse liquide se propagent indifféremment
dans tous les sens, et que les bras de mer de Mars mettent en communication
des océans différents, il doit arriver dans certains d'entre eux au moins que le
flux provenant de deux océans opposés s'y propage en sens inverse. Qu'on juge
de ce qui peut se; produire quand les deux vagues, marchant en sens inverse,
viennent à se rencontrer.
Enfin la marée solaire, quoique faible, existe cependant aussi sur Mars, et elle
se propage en sens inverse des marées dues aux satellites. Deux fois par jour, en
un même lieu, les deux flux lunaire et solaire, marchant l'un vers l'autre, vien-
nent à se rencontrer, ce qui ajoute encore à la grandeur du phénomène.
Il est enfin une dernière cause qui doit contribuer à donner plus d'importance
aux marées de la planète Mars. Nous avons déjà dit que, dans ces oscillations, le
niveau de la mer dépassait de beaucoup la position d'équilibre. En réalité, le pro-
blème des mouvements de l'Océan est beaucoup plus compliqué que la simple
détermination de la forme d'équilibre. Les plus grands analystes du siècle der-
nier, Lagrange, Laplace, Legendre, se sont occupés de cette importante question,
etLagrange est parvenu à démontrer que les densités relatives de la mer et du
188« IMl. GKiJKi.NV. — IJ:S MAUf-ESSUIl M.VUS. 435
noyau solide du hi planète ont une grande induence sur le résultat. Il a prouvé
que si l'amplitude des oscillations do l'Océan reste contenue entre certaines
limites, cela tient à ce que la densité de l'eau des mers est plus faible que la den-
sité moyenne de la Terre. Dans le cas contraire, si par exemple l'Océan était
composé de mercure au lieu d'eau salée, toute la niasse des mers abandonnerait
son lit î\ chaque marée, pour se répandre en une inondation formidable sur le
sol des continents. Sans doute, ce cas extrême ne se rencontre pas sur Mars : la
densiti"' des mers y est probablement inférieure à celle de la planète ; mais la den-
sité de Mars n'atteint pas les trois quarts de celle de la Terre, tandis que l'eau
y est vraisemblablement la même qu'ici-bas. Le rapport des densités de la mer
et du noyau intérieur y est donc environ les quatre tiers de ce qu'il est sur la
Terre. D'après l'analyse de Lajzrange, cette augmentation doit se traduire par
une augmentation correspondante dans lamplitudu des oscillations du niveau
maritime.
Pour toutes ces raisons, si, sur la Terre même, la hauteur de la marée peut
atteindre jusqu'à 35 fois la hauteur de la protubérance à l'état d'équilibre, il n'y
aurait rien d'étonnant à ce que, sur Mars, la différence de niveau entre la haute
et la basse mer atteignît jusqu'à 50 fois et même 100 fois la hauteur de la protu-
bérance d'équilibre.
En résumé, les marées solaires sont bien certainement sur Mars de beaucoup
inférieures à ce qu'elles sont sur la Terre ; les marées dues au second satellite
atteignent seulement le vingtième de celles que produit le premier. Quant à ces
dernières, leur importance est entièrement subordonnée à la masse de ce satel-
lite. Il se peut quelles soient insignifiantes; mais il se peut aussi qu'elles soient
considérables. En tout cas, si l'influence mécanique de ce satellite est comparable
à celle de la Lune sur la Terre, les mouvements des mers de Mars sont certaine-
ment plus tumultueux et plus importants que ceux de nos océans, et si, de plus,
comme on le suppose assez généralement, le relief de Mars est très faible, et les
côtes très peu élevées, ces marées doivent donner lieu, quatre fois par jour, à des
inondations couvrant de vastes étendues de rivage. La Science astronomique
n'est pas encore assez avancée pour trancher entièrement la question^ puisqu'on
ignore la masse des satellites de Mars; mais on i)cut être assuré que la solution
ne se fera pas bien longtemps attendre, car, fort heureusement, les satellites
sont au nombre de deux qui exercent une action l'un sur l'autre. Après un nombre
suffisant d'années d'observations, on pourra certainement déterminer les per-
turbation*» du mouvement de ces deux astres, et en déduire par conséquent
leur masse. Alors, ou pourra reprendre sur des bases certaines le calcul que
j'ai essayé d'entreprendre, et l'on sera certainement fixé sur l'importance des
marées de la planète Mars, et le rôle qu'elles ont pu et peuvent encore jouer
dans les phénomènes et les modifications (jue nous observons à la surface de
ce îrlobe.
4;^G LA l'LANKlK M A US.
l'.XX.W . 1888. — Sc.iiiAi'Anr.i.i.i. La coustiliilinii i>liijsitiuc de Murs.
I/cmincnt astronome île Milan a puhlié dans la Revue astronouii(|uc alle-
mande Himmel und Erde et dans LWsironomic {^) une synthèse générale de
ses recherches. Nous nous faisons un devoir d'en rei)ro(luire ici les extraits
les phis importants et nous sommes heureux doifrir en même temps à nos
lecteurs les deux dernières cartes dessinées par M. Scliiaparelli lui-même
sur l'ensemble de toutes ses observations (p. iiOl.
A. -- l.ES RÉGIONS DE TONS INTERMÉDIAIRES ET LEURS \ARIATI0NS.
L'ensemble des régions que nous nommoais mers ou conlincnts, selon
qu'elles sont foncées ou claires, occupe la plus grande partie de la surface
de la planète; mais il y a d'autres contrées dont l'aspect est varia])le et qui
ont parfois le caractère apparent des mers, parfois celui des continents,
p irfois même les deux à la fois.
Telles sont, entre autres, dans Marc Erythrœum, les deux zones désignées par
les noms de Deucaliouis Régie et de Pyrrhic Regio, ainsi que les deux îles nom-
mées Ilellas et Noachis. De cette nature sont aussi, dans la Syrtis Magna, les îles
lapygia et Œnolria et en général toutes les parties de mer qui ont sur la carte
une teinte plus claire que celle du reste. Mare Cimmerium et Mare Acidalium
renferment chacune une contrée de ce genre. Ces régions peuvent, selon des
différences d"époques et d'angles visuels, présenter complètement ou en grande
partie les diverses nuances que l'on observe sur les continents comme sur les
raers de Mars; elles forment ainsi une série de transitions. Elles ne paraissent
pas être toutes de même caractère, autant que j'ai pu l'observer jusqu'à présent.
Il semble que les unes sont plutôt de nature maritime et les autres de nature
continentale. Ces régions ne sont pas toujours séparées nettement des continents
et des mers environnantes, mais elles se relient souvent aux uns et aux autres
par des dégradations insensibles de lumière et de nuances, ainsi qu'on le voit jiar
divers exemples sur nos cartes.
Une des plus remarquables parmi ces régions intermédiaires est la Deucaliouis
Regio, qui se trouve dans Mare Erythrseum, où elle forme une presqu'île coudée
à angle droit. Elle est nettement limitée du côté qui touche au continent, tandis
que, do tous les autres côtés, elle se perd en tons dégradés. .Sa couleur tient le
milieu entre celle des continents et celle des mers; elle tire tantôt sur le jaune,
tantôt sur le gris; près du bord, on la voit parfois prendre une coloration gris
blanc. En tout cas, elle m'a paru assez claire pour être nctteuicnt distinguée sur
le fond sombre qui l'environne. On ne peut en dire autant de la Pyrrhœ 'Regio
{') Himmel und Erdc. 1888. — L'Aslronomv', janvier, février, mars et avril 1889.
I88.S sciii \i'.\iii:i i.i - coNSTirr I ION l'iivsioui- di: mxks. jh:
oUo peut (IcYfuir assf^/. loncée isurttnit dans la partie voisine du continent) pour
([u'on no puisse pas la distiiiiiruer du reste «le la Mare Krythricum.
l/ii(? Cimmeria, longue bande qui, sur la P/. //, occupe une partie considé-
rable de la Mare Cimineriuin est plus n.Mnarquable h cet t'igard que toutes les autres
récrions mixtes.
En 1877, cette mer Cimméricnno tout entière parut d'une couleur très foncde;
elle fut même désignée alors comme une des parties les |)lus foncées de toute la
surface de Mars. Hn l.'^70, elle ne présenta aucun changement; tout ce que l'on re-
marqua alors, ce fut que la couleur, tout en restant très foncée, était moins sombre
qu'on 1877. Vers la fin de 1881, cette tache contrastait encore fortement avec le
jaune qui l'entourait; mais, le 3 février 1882. lorsque cette partie de la planète
devint visible, on aperçut, pour la première fois, une longue bande en forme de
comète, qui s'étendait sur plus de 30", entre 20r)O et 230° de longitude. Cette obser-
vation put être confirmée le i, le .'3, le 6 et le 7 février; plus tard, il ne s'ofl'rit aucune
occasion de bien observer cette localité. Je ne trouve dans mon journal aucune men-
tion relative à l'île Cimmeria pendant l'opposition de 1884. En 1886 et en 1888, cette
région se présentait sous un angle très oblique; aussi les observations n'étaient-elles
pas très précises. D'après l'impression ressentie, l'ile Cimmeria était visible.
Les métamorphoses de la grande île nommée Ilellas sont plus complexes, mais
non moins remarquables. En 1877, vers la fin du solstice austral de Mars, cette
région formait une île très régulièrement ronde ou très peu allongée, dont le dia-
mètre ne comprenait pas moins de 30 degrés; ordinairement jaune, elle paraissait
plus blanche quand elle se trouvait près du bord du disque que quand elle était
voisine du méridien central. Une fois (le IG décembre 1877), je l'ai vue presque
aussi blanche et aussi brillante que la région polaire; le 21 décembre, cependant,
la couleur primitive était presque déjà rétablie. Pendant l'opposition de 1879 à
ISSO, elle avait encore une forme approximativement ronde, mais elle présentait,
au lieu d'une surface brillante, un éclat trouble et inégal, qui devenait plus mat
vers la partie supérieure gauche (dans l'image télescopiquc renversée). Elle était
traversée par deux canaux nettement visibles, dont l'un était à peu près paral-
lèle au méridien et l'autre au cercle do latitude. (En 1877, on ne voyait que le
premier de ces canaux; encore n'était-il que difficilement visible.) C'est ainsi que
l'île paraissait être divisée en quatre quarts. Au mois de janvier 1880, les deux
quarts inférieurs seuls étaient jaunes; les autres présentaient une couleur bien
plus foncée, et de ces derniers, le gauche était plus foncé que le droit. Pendant
cette opposition également (1879 à 1880), Ilellas se montra plus brillante vers le
bord que vers le milieu du disque; plusieurs fois elle a paru blanche. Eu 187D et
1880, elle parut, à vue d'œil, un peu plus petite qu'en 1877. Pendant l'opposition
de 1881 à 1882, on constata que son éclat avait sensiblement diminué; sa couleur
était gris cendré clair; ses contours manquaient de précision, et parfois elle n'ap-
paraissait que comme un nuage qui se dissipe. Dans quelques cas seulement, et
vers le méridien centra!, elle prit une couleur brun jaune, comme celle de la
Regio Deucalionis. Elle fut en outre divisée par les deux canaux en croix, mais
538 I \ IM \M:TI: m \I{S.
ses dimensions avaient notablement diminué, et en divers endroits, ses anciennes
limites éUiient plus ou moins occupt^es par la mer, de sorte qu'elle avait pris la
forme de trapèze aux angles arrondis, comme on le voit /*/. / et //. Lors des
oppositions suivantes, llellas apparut toujours plus obliquement par rapport au
rayon visuel; elle avait l'air d'une tache blanchâtre d'aspect nébuleux et de forme
peu précise. Sou diamètre ne dépassait certainement pas 12« à, lô". Parfois plus
blanche et plus brillante que d'ordinaire, on aurait pu la confondre avec la tache
polaire boréale.
.V certains égards, la région nommée Libye paraît appartenir elle aussi à la
catégorie dont nous parlons ; elle se trouve sous l'équateur, et par,conséquent on
peut l'observer facilement dans toutes les oppositions, quelle que soit l'inclinaison
de l'axe de la planète. Kn 1877, cette région avait pour limite, du côté de la Mare
Tyrrhenum. un arc élégant et régulier se terminant vers le Nord en une pointe
mince et allongée (Osiridis Promontorium). La surface de cette pointé était recou-
verte d'une ombre qui était d'autant plus forte qu'elle se rapprochait davantage
de l'extrémité. Vers le Nord, la Libye était bornée par un canal à peu près semi-
circulaire, sur le milieu ou sur le sommet duquel on apercevait quelque chose
ressemblant à un point sombre; je donnai à cette localité le nom de lac Mœris.
En 1879, je trouvai qu'une partie de la Libye avait été envahie par la Syrtis Magna,
de sorte que cette dernière arrivait jusqu'à la ligne AB (fig. 230); la région de la
Libye, à droite de la ligne AB, était devenue complètement foncée, de jaune qu'elle
était d'abord, et elle avait pris la teinte de la mer voisine avec laquelle elle s'était
fondue. Le promontoire d'Osiris avait été supprimé par cet envahissement de
la mer, le cours du Népenthès s'était raccourci et sou embouchure s'était trans-
portée en B ; le littoral de la Syrtis Magna avait pris une autre courbure et s'était
notablement rapproché du lac Mœris. Enfin l'ombre indécise qui, en 1877, recou-
vrait le promontoire d'Osiris, s'était avancée jusqu'au milieu de la Libye; elle
enveloppait en même temps le lac Mœi-is, qui, auparavant, était situé tout à fait
en dehors d'elle. L'autre partie de la Libye (c'est-à-dire la moitié gauche) avait
pris une couleur rouge bien plus foncée que pendant l'opposition précédente. Pen-
dant les années 1881 et 1882, je ne vis point se produire do changement; je remar-
quai seulement que la surface de la Libye, offrant toujours une teinte rouge, res-
semblait à un tissu grossier tellement rempli de petites taches, qu'il n'était pas
facile de les distinguer les unes des autres. Lors de l'opposition de 1884, l'enva-
hissement de la mer avait progressé jusqu'à la ligne CDF, ainsi qu'on le voit à
l'inspection du dessin {fig. 230), de sorte qu'elle avait fait disparaître une grande
étendue de la Libye et une petite partie de Regio Lsidis. Le lac Mœris qui, en 1877,
se trouvait au milieu du Népenthès, était maintenant arrivé presque contre son em-
bouchure. La Libye, au lieu de présenter un arc de bollo courbure, formait, entre
la Grande Syrte et la mer Tyrrhénienne, un promontoire ressemblant à un angle
a pointe émoussée. Elle conserva aussi, en 1884, indépendamment de la couleur
foncée qui la distinguait de son entourage immédiat, l'aspect d'un tissu d'appa-
rence floconneuse, comme si cette région eût été couverte d'innombrables petites
1888
SCIIIAPAUKUJ.
VARIATIONS I)i:S !UVA(ii:S.
i;i!)
taches so confondant les unos avec lus aiiiros. l'ondanl l'opposilidn de IS8G, l'étal
des choses ne parut pas dilTeront, eu f,'én(5ral, do celui "[ni avait été oliscrvé on
ISSi; jo dois toutefois faire remarquer <pic cette partie des observations ne fut
pas très favorisée par le temps. Enfin, au mois de mai 188S, la Libye parut très
raccourcie au voisinage du méridien, comme on le voit aussi dans les observations
faites î\ Nice par M. Perrotin, Cependant les observations des G, 7 et 8 mai la
Kig. 230.
Mare Tyrrhenur
3yptl3
Variations observées sur la planète .Mars dans le rivage de la mer du Sablier (Irande Syrie ' .
montrèrent d'une couleur blanchâtre sale, au voisinage du bord droit du disque
de Mars, phénomène qui complète l'analogie de cette région avec celles dont il
vient d'être question. Le lac Mœris resta visible, bien que très difficilement; il so
trouvait tout près de l'angle inférieur droit de la Libye, près de l'embouchure du
Xépcnthès, dans la Syrtis Magna. A diverses reprises, la Isidis Regio (au-dessous
du Népenthès) parut très claire, et le contraste avec la couleur brunâtre de la
Libye en devint plus sensible. Pendant cette même opposition, la couleur de la
Syrtis Magna ne fut pas aussi noire que dans les oppositions précédentes de 1877
à 1884, mais d'un gris plus clair^ sauf dans quelques petites bandes dont il n'y a
pas lieu de parler pour le moment. Il n'y avait donc pas grande différence de ton
entre la Libye et la Syrtis Magna, bien que la coloration ne lût pas la même et
que la limite entre l'une et l'autre restât assez nette (')•
■y'j Ce qui vient d'ùlrc dit du ton gris et changeant de la Libye se reconnaît depuis les
dessins de Lockyer (18G2, p. 157 et 158,, Kaiser (lS(ii, p. 178), Davves (I86'i. p. 187).
(îreen ''1873, p. 219), etc., comme déjà nous l'avons remaniuc.
ijO I-A PLAN tri- M A II S.
Je pourrais prendra, linns mon journal, plusieurs autres exemples de cas ana-
logues; mais les doux que je viens de citer, de Ilellas et Libya, suffisent pour
donner une idée de ce genre de variations observées. Pour ces deux cas, la série
d'événements que je viens de décrire a été observée dans le laps de temps compris
entre les six oppositions de 1879 à 1S88. Il ne faudrait pourtant pas en conclure
que ces variations soient lentes et exigent des périodes d'une durée séculaire.
Il est possible et même, dans certains cas, très vraisemblable que les faits cités
se renouvellent périodiquement, à cliaque révolution de Mars. ]\Iais, à chaque
nouvelle opposition, le point où se trouve la planète sur sou orbite est situé à 48'>
de longitude en avant du point où elle se trouvait lors de l'opposition précédente;
par suite, les saisons de Mars avancent de ^ de la période entière, entre une oppo-
sition et la suivante; et cette circonstance nous permet de retrouver la série des
phénomènes qui ont lieu à la surface de INIars, bien qu'une partie de ceux ob-
servés appartienne à une révolution et la partie consécutive à la révolution
suivante. Un météorologiste pourrait étudier de la même manière le mouvement
du climat d'une région s'il répartissait sur plusieurs années les observations des
divers mois et s'il faisait ses observations, par exemple, en janvier 1888, en
février 1889, en mars 1890, etc., les dernières en décembre 1899.
B. — Les régions continentales qui blanchissent suivant l'obliquité.
Nous avons vu que souvent les régions d'un caractère douteux sont plus claires
dans les positions obliques au voisinage des bords de la planète qu'au méridien
central; cette observation s'étend aussi à quelques régions d'un caractère pure-
ment continental. Il faut citer particulièrement, à cet égard, les deux régions
polygonales ou presque rondes qui sont désignées sur la carte par les noms de
Elysium et de Tempe. Ces régions sont d'un blanc d'éclat variable, mais, en tout
cas, moins brillant que celui des pôles. Ce blanc s'aperçoit plus habituellement
lorsque ces régions se trouvent au voisinage du bord du disque de Mars, et je
l'ai souvent observé même quand, quelques heures avant ou après, ces régions,
à leur passage par le méridien central, n'avaient rien offert d'extraordinaire.
Les transformations analogues de l'île Argyre sont tout particulièrement inté-
ressantes: cette île, en certaines circonstances, est devenue si brillante sur son
bord qu'elle a fait illusion aux observateurs et que ceux-ci l'ont prise pour une
tache polaire. Cette île avec son éclat intense avait déjà été remarquée par
Dawes en 1852; les savants anglais qui ont étudié Mars la désignent sous le nom
de Dawes'-Snow-Island (île neigeuse). Par contre, je l'ai vue souvent d'une cou-
leur jaune ou même rouge foncé, au voisinage du méridien central. Je considère
comme analogue la nature de l'île voisine. Celle-ci est désignée par le nom
d'Argyre II; elle est plus petite et située plus au Sud; son existence ne s'est
révélée à moi que le 8 novembre 1879. Elle se trouvait sur le bord gauche de
Mars, et son éclat était plus faible que celui de la région polaire; en passant au
méridien central, elle présenta une couleur rouge trouble et une faible clarté.
{Af^H SCIIIAl'AUKIJ.I. — CONSTITITION PlIVSlnlK DK MAItS. 'j i I
Indépendamment de ces cliangenicnts de couleur subordonnds h la rotation
diurne, on remarque des changements analogues dans les régions continentales;
mais ceux-ci sont plus lents et souvent ils embrassent des régions très étendues.
Tel est celui qui eut lieu pondant les années 1877 t\ 1S70, sur la grande région
qui s'étend entre les méridiens de 120" et de 170° jusqu'à 40" de latitude nord, et
qui est connue sous le nom de mer Sircnum. Cette mer présenta sur toute sa
surface, notamment dans sa partie supérieure, voisine de la mer susdite, un
éclat bien plus grand que celui des autres régions continentales.
A cette classe appartiennent aussi les observations faites par moi, de 1X77 ^t
1882, sur une petite tache (i'un blanc clair, qui se trouvait à l'extrémité gauche
du Népeuthés, par 269" de longitude et 17" de latitude nord. Je vis cette tache
pour la première fois le li septembre 1877; elle avait un diamètre de 8" environ
et elle était à peu près carrée; elle brillait bien plus qu'aucune autre partie de la
planète et en même temps elle présentait des contours bien distincts. Cette
tache, dont j'ai pu, sans hésitation, comparer la blancheur h celle des taches
polaires australes, était encore visible le 1 i octobre. J'observai le même phéno-
mène, au même endroit, pendant l'opposition suivante, de novembre 1870 à jan-
vier 1880; la grandeur n'avait pas changé, seulement la figure était devenue à
peu près ronde. Surpris de la constance de cette tache claire, je lui donnai le
nom deNix Atlantica. Je la vis de nouveau, pendant l'opposition de 1881 à 1882,
de novembre à mars, mais pas toujours avec la même facilité; elle présentait
des différences d'aspect et des variations d'éclat qui pouvaient bien ne pas être
toujours imputables à la différence de netteté de l'image télescopique. Mais je
l'ai cherchée vainement dans les oppositions suivantes, et elle était encore in-
visible cette année. Si son apparition dépend de la période des saisons de ^lars,
nous devons nous attendre à la revoir pendant les oppositions de 1892 à 1897, et
il est facile d'apprécier de quelle importance sera sa réapparition pour l'étude de
la constitution physique de cette planète.
Une tache analogue, mais bien plus petite et difficile (Nix Olympicai sost
montrée avec une grande persistance en 1870, par 129" de longitude et 21" de
latitude nord; son diamètre pourrait être de 4" ou pas beaucoup plus. Je n'avais
pas vu cette tache en d'autres oppositions; je ne l'ai pas revue. D'autres taches
apparaissent, tantôt par ci, tantôt par là, dans les diverses parties des régions
continentales; elles sont d'un blanc plus ou moins vif et plus ou moins pur,
généralement pendant quelques jours et sans aucune loi apparente. C'est ce qui
est arrivé assez souvent, pendant les dernières oppositions, le long de la rive
droite de la Syrtis Magna, et sur le littoral qui va de là au Sinus Sabœus, ainsi
qu'en plusieurs autres endroits. Souvent une partie notable du disque se montre
parsemée de taches blanches, ce qui a eu lieu, par exemple, le 18 et le 19 janvier
1882, dans les pays entre le Gange et l'Iris et le 31 janvier entre le Nilosyrtis et
l'Indus. Il est arrivé aussi que des bandes blanches, sous forme de ceintures
régulières, d'une largeur uniforme, se répandaient un peu obliiiuement, du Nurd-
Est vers le Sud-Ouest, avec une faihle inclinaison sur les méridiens.
•U-: I. A IM.ANKTi: .MAKS.
Les variations dic ton hks mi;r;
Los mors prôsenteut, olles aussi, de très remarquables chanjïcmcnts de cou-
leur, mais plus lentomeut et plus réguliCremont. Au point où on sont arrivées
les études «luo j'ai commencées, j'ose anirincr qu'eu passant du méridien central
aux positions obliques, sous l'inllueuce de la rotation diurne, elles ne changent
pas de couleur. J'ai h maintes reprises suivi les changements de couleur de l'île
d'Argj're, qui virait du rouge foncé au blanc le plus brillant, au fur et h mesure
que l'inclinaison du rayon visuel augmentait, sans que l'on eût constaté aucune
variation dans la couleur ou dans l'obscurité des mers environnantes. J'ai observé
plus d'une fois le même phénomène sur la petite île Œuotria, dans la Syrtis
Magna. Ce fait prouve ([ue la surface de ces mers est, dans un certain sens, dif-
férente de celle des autres régions considérées jusqu'à présent; en tout cas, il
doit être regardé comme fondamental dans l'étude de la nature physique de Mars.
II n'est pas moins certain que, d'une opposition à l'autre, on aperçoit, dans les
mers, des changements de tons très remarquables. Ainsi, les régions nommées
mer Cimmerium, mer Sirenum et lac du Soleil, qui, pendant les années 1877 à 1879,
pouvaient être mises au nombre des plus sombres de la planète, sont devenues
de moins en moins noires, pendant les oppositions suivantes, et en 1888 elles
étaient d'un gris clair qui suffisait à peine à les rendre visibles dans la position
bien plus oblique où elles se trouvaient toutes trois. Pendant ces années 1877 à
1879, la Syrtis Magna et le Nilosyrtis ont paru très noirs, mais en 1888 le Nilo-
syrtis n'avait pas varié, tandis que la Syrtis Magna (à part une petite raie au-
dessous de l'embouchure du Népenthcs et quelques autres zones très étroites)
était devenue si claire qu'elle se détachait très peu sur les régions avoisinantes,
notamment sur la Libye. La mer Erythrée était devenue très claire, elle aussi, à
l'exception de ses trois golfes, le Sinus Sabajus, le Margaritifer Sinus et l'Au-
rorae Sinus, qui, par conséquent, auraient pu être désignés, non comme trois
golfes, mais bien plutôt comme trois grandes îles isolées. Par contre, au même
moment, la mer Acidalienne et le lac Hyperborée ont paru très foncés; ce dernier
paraissait en effet très noir, bien qu'il ne fût pas sous une plus faible inclinaison
que la Grande Syrte et les mers méridionales mentionnées plus haut. L'état des
régions appelées mers n'est donc pas constant : cela est indubitable. Peut-être la
modification qui se produit est-elle en rapport avec les saisons de la planète.
D. — Les canaux.
Lorsque l'on considère sur la carte I le grand golfe placé au-dessous de l'équa-
teur de la planète, par 290" de longitude, on voit qu'il se prolonge vers le Nord
jusqu'au delà du 45« parallèle par un long appendice appelé Nilosyrtis. C'est une
bande ordinairement très sombre qui même (peut-être par contraste avec les
1888 S(:illAI'.\lli:i.l.l. - LKS CANAUX. -M
espaces lumineux ((ui l'cnvironncnl^ parait souvent tout à fait noire : sa largeur,
de 4° ou ô" à peu prùs, paraît exactement uniforme dans .la partie septentrionale
au delà du 20" parallèle nord. Ses bords sont .sensiblement tranchés, et leur par-
cours ffénéral est courbé d'une manière réirulicrc; il y a bien l'apparence de trù.s
petites dentelures sur toute leur longueur, mais il ne m'est jamais arrivé de voir
ces dentelures une ;\ une. Si les taches sombres do la planète sont des mers, une
semblable formation doit être considérée comme un canal; nous emploierons ce
nom sans nous prononcer sur la véritable nature de la chose.
Le Nilosyrtis n'est pas le seul canal qui existe sur Mars, mais c'est de beaucoup
le plus large et le plus visible ; on le trouve déjà dans les dessins de Schrœter et,
pendant les trente dernières années, il a été remarqué par un grand nombre d'ob-
•servatcurs. Secchi, en 1858, et Dawes, en ISGi, ont reconnu d"une manière plus
ou moins distincte l'existence de plusieurs autres formations analogues; leur
nombre s'est multiplié dans les derniers temps d'une manière inattendue, et il est
maintenant hors de doute que ces canaux forment un réseau fort compliqué,
qui couvre toutes les régions continentales do la planète.
Le Planisphère I ivoy. p. 4i0) a donné une représentation schématique de ce
réseau, comprenant à peu près tous les canaux dont j'ai pu constater d'une ma-
nière distincte l'existence par les observations de 1877 à 1888. Par le mot sché-
matique, j'entends dire que les lignes ou bandes du réseau sont tracées de ma-
nière à donner approximativement la longueur et la direction de chaque canal,
les rapports de position des uns à l'égard des autres, et la forme des polygo-
nations qui en résultent, sans tenir aucun compte ni de leur degré de colo-
ration ou d'obscurité, ni de leur largeur (à l'exclusion du Nilosyrtis qui est
d'une largeur tout à fait exceptionnelle), ni de leur apparence plus ou moins
nettement définie sur les deux bords, ni de la duplication à laquelle beaucoup
d'entre eux sont sujets à certaines époques. En effet, ces éléments de visibi-
lité, de largeur et de forme sont plus ou moins variables d'une opposition à l'autre,
et même d'une semaine à l'autre pendant la même opposition; et leurs variations
ne sont pas simultanées pour tous les canaux, mais dans la même région et à la
même époque, elles peuvent être très différentes d'un canal à un autre canal
contigu. Il s'ensuit de là qu'on peut bien concevoir une représentation de ces
canaux, correspondante à une époque donnée; mais qu'il est impossible d'en
tracer une carte permanente. Qu'on ne s'attende donc pas à trouver une ressem-
blance exacte (ou même approchée) entre notre /'/. / et l'aspect des canaux de
.Mars; car une telle ressemblance n'est possible ni d'une façon absolue, ui même
pour un espace de temps un peu long. Chaque canal de la carte désigne tout
simplement un espace linéaire, ou plutôt une bande étroite, sur laquelle
peuoent se développer dans la suite des temps les différentes apparitions qui
se rattachent à un canal déterminé. On voit donc que cette carte (en ce qui
regarde les canaux) n'est qu'une sorte d'index topographique, nécessaire pour
l'intelligence et la coordination des détails très nombreux et très variables qu'on
observe à chaque instant sur les différentes régions. Une telle rei)résentation ne
•i44 I. A PI. A M": 11: M \|{S.
pont pas servir à la descriplion i\o l'aspect physique des canaux ; mais elle su!-
lira complètement à montrer Irs proprirtds géomclriquos et topiques du r(?seau
et de ses éléments.
Oa verra en premier lieu que, pour la jdus yrantle partie, los canaux suivent
un cours peu différent de celui d'un grand cercle de Mars. II y a cependant
quelques exceptions, dont le Phasis, le Simoïs, le Gehon, l'Indus, le Boréosyrtis
et surtout le Xilosyrtis offrent les exemples les plus remarquables.
On constatera ensuite une autre propriété, qui est tout à fait générale : tout
canal aboutit par ses deux termes, soit à une mer ou à un lac, soit ù, un autre
canal ou à l'intersection de plusieurs autres canaux. Je ne me rappelle pas avoir
jamais vu une des lignes s'arrêter court au milieu de l'espace continental, en
forme de tronc isolé et sans connexion ultérieure. Ce fait est de la plus grande
importance pour l'étude de la nature de ces formations.
Les canaux peuvent se couper deux à deux, sous tous les angles possibles. Il
existe sur la planète plusieurs régions où trois, quatre, même six ou sept, se
rencontrent sur un petit espace; cet espace est alors ordinairement distingué
par une tache plus sombre, ou un lac, dont la grandeur et l'apparence peuvent
varier entre certaines limites. Un nœud très important de cette espèce est le lac
du Phœnix (long. lOS», lat. australe 16°) formé par la rencontre de sept canaux,
Acrathodfpmon, Eosphoros, Phasis, Araxes, Eumenides, Pyriphlégéthon, Iris, qui
en divergent sous forme d'étoile assez régulière. Un autre nœud moins régulier,
appelé Trivium Charontis (long. 195", lat. boréale 17») est formé par la rencontre
plus ou moins excentrique de Cerberus, Lœstrygon, Tartarus, Orcus, Ercbus,
Ilades et Styx. Dans le Lacus Ismenius (long. 335°, lat. boréale 40°) convergent
l'Euphrates et sou prolongement boréal, Protonilus, Deuteronilus, Astaboras,
Iliddekel, Jordanis. Il est facile de reconnaître plusieurs autres exemples sur la
carte, comme Propontis, Lacus Niliacus, Lacus Titlionius, Lacus Luna) et le
Xodus Gordii, le plus étendu et le plus imparfaitement marqué de tous.
On voit aussi, par l'examen de la carte, que la longueur des canaux peut être
très différente; plusieurs ne dépassent guère 10° ou 15° (Xanthus, Scamander,
Eosphoros, Nectar, Ambrosia, Issedon). D'autres, au contraire, suivent sans irré-
gularité sensible une ligne de grande étendue qui atteint quelquefois au quart de
la circonférence de la planète; tels sont l'Euphrates, qui avec son prolongement
boréal arrive de l'équateur jusque près du pôle nord, et l'Erebus-Achéron, qui
occupe 90° au moins : en considérant comme prolongations de ce dernier le Dar-
danus d'un côté et le Cerberus de l'autre qui paraissent s'y rattacher sans so-
lution appréciable de continuité, on aurait une ligne étendue sur une longueur
do ICO» environ, du lac Niliacus jusqu'à la mer Cimmerium.
La grande uniformité et la composition de tout le système a quelque chose
d'étrange et d'inattendu, et l'on serait presque tenté de rechercher si la distri-
bution des lignes n'est pas sujette à quelque loi simple, de même qu'autrefois
Elie de Beaumont avait pensé pouvoir assujettir les directions des grandes mon-
tagnes de la Terre ù son fameux réseau pentagonal. J'ai lieu de croire qu'une
1888 SCIIl.U'AlU;i.l.l. — l.i:S CANAUX. i45
semblable recherche aurait A présent peu de probabilité d'aboutir à des résultats
plausibles; de plus, il ne faut pas oublier que notre esquisse est loin d'être assez
exacte et assez complète pour un tel but.
Je vais e.ssayer maintenant de .si^^naler d'une manière gt'-nérale les dilTéreuts
aspects physiques sous lesquels peut se présouIcT un canal quelconque de la
planète.
E. — \'.VIU.\TIONS DANS LES ASPECTS DES r.ANAU.V.
(.-«) Un canal peut être plus ou moins lungtemps incisiblc. Sur quoi il faut re-
marquer qu'il ne s'agit pas ici de l'invisibilité produite par les mauvaises circon-
stances de l'observation, mais bien d'une invisibilité réelle, qui persiste dans des
conditions d'image et d'atmosphère suffisantes pour bien montrer le canal à
d'autres époques. De plus, l'idée d'invisibilité doit être ici prise relativement
aux moyens optiques dont j'ai pu disposer pour ces recherches ('); c'est-à-dire
qu'elle n'exclut pas la possibilité de voir le même objet avec un instrument de
puissance plus considérable. Voici un exemple bien frappant de cette invisibilité.
Pendant les .soirées des 2 et 4 octobre 1877, par une atmosphère excellente, le
diamètre apparent de la planète étant de ÎT, la région continentale entre le Mar-
garitifer Sinus et rAurora2 Sinus était tout à fait claire et dépourvue de canaux,
sans le plus petit indice de taches quelconques; Indus, Ilydaspes, Jamuna.
llydraotes complètement invisibles. Cet état de choses persistait encore le 7 no-
vembre, le diamètre apparent étant de lô". Quatre mois plus tard (21-26 fé-
vrier 1878), rindus était parfaitement visible, le diamètre apparent étant réduit
à 5', 7. Pendant l'opposition de 1879, l'Indus demeura toujours très évident; le
21 octobre (diamètre apparent 19"), parut lllydaspes pour la première fois, et le
27 novembre (diamètre apparent 17", ,ô) j'eus la première vue de la Jamuna. Le
28 novembre, tous les trois, Indus, Ilydaspes et Jamuna, étaient larges, noirs et
visibles au premier coup d'oeil. L'Il3-draotes a été découvert en 1882, le diamètre
apparent étant de iV. Tous ces canaux sont restés plus ou moins visibles pendant
toutes les oppositions suivantes; mais, dernièrement (1888), Indus et Ilydaspes
étaient redeveuus très difficiles. Sans fatiguer le lecteur par Texposition d'autres
cas semblables, je considère comme bien établi que les canaux de Mars peuvent
devenir invisibles à certaines époques.
ib) Dans beaucoup de cas, la présence d'un canal a commencé à se rendre sen-
sible à l'œil d'une manière très vague et indéterminée, par une légère ombre qui
s'étendait irrégulièrement dans le sens de sa longueur. Il est difficile de décrire
exactement un semblable état de choses, qui est en quelque sorte la limite entre
la visibilité et l'invisibilité. Quelquefois j'ai cru reconnaître que ces ombres ne
;■) Pour les oppositions de 1877, 1873-80, 1881-82. 188i, un réfracteur de .Merz de
8 pouces; pour l'opposition de 1888, un réfracteur de 18 pouces du même auteur. L'oppo-
sition de 1886 a été observée-cn partie avec l'un et en partie avec l'autre de ces deux
instruments, qui doivent être rangés parmi les plus parfaits qui existent de ces di-
mcnsious.
446 L.V rLANKTl- MAKS.
sont on réalité qu'iiu simple reuforccmcut de la couleur rougcàtrc qui tloiuinc
sur les continents, renforcement peu intense d'abord, (jui ne devient visible qu'à,
l'aide de sa largeur assez considérable, dont cependant on ne saurait assigner ni
la mesure ni les limites. D'autres fois, l'apparence a été plutôt celle d'une bande
grisâtre et estompée, comme un léger nuage oblong. C'est par l'uiio ou par
l'autre de ces formes indéterminées que, en 1877, j'ai commencé à reconnaître
l'existence de Phison ('i octobre), Ambrosia (22 septembre), Cyclops (15 sep-
tembre), Eunostos (20 octobre) et de beaucoup d'autres. Des exemples analogues
n'ont pas manqué non plus dans les oppositions suivantes.
(c) Très souvent les canaux ont l'aspect d'une bande grise estompée des deux
cotés, ayant au milieu un maximum d'intensité, qui peut être assez sombre
]iour donner l'idée d'une ligne plus ou moins bien marquée. Cet état présente un
certain nombre de variétés, selon la prépondérance de cette ligne centrale sur
les parties nébuleuses latérales, sous le double rapport de la largeur et de l'inten-
sité. Les bandes ainsi formées sont ordinairement assez régulières, sans exclure
toutefois la possibilité de certaines anomalies dans la largeur et dans l'intensité
de l'ombre, anomalies que la puissance de la lunette employée peut ordinaire-
ment faire soupçonner, rarement mettre en complète évidence. Le cas d'une
structure différente des deux côtés est très rare; cela a été constaté indubitable-
ment le 30 janvier 1882 pour le Gelion, dont le côté seul était estompé, l'autre
étant bien défini; et pour l'Euphrates, le 19 du même mois, qui était nébuleux à
droite et bien défini à gauche. En 1879, plusieurs canaux ont montré le long de
leur parcours une structure inégale, qui changeait peu à peu d'une extrémité
à l'autre. Lajstrygon, Tartarus, Titan, Gigas, Gorgon, Sirenius étaient minces,
noirs et assez bien définis à leur extrémité australe, qui débouche sur la mer
Sirenum ou la mer Cimmerium en pénétrant vers le Nord; dans la région con-
tinentale, ils s'élargissaient en forme d'une queue de comète, et finissaient en
forme d'ombre large et mal terminée à l'extrémité boréale. La même année,
l'Astapus sortit du Nilosyrtis très mince et bien défini; il s'élargissait considé-
rablement et allait se perdre dans l'Alcyonius sous l'aspect d'une ombre large et
fort légère. C'est par suite de semblables défauts d'uniformité dans les canaux
environnants, que la région claire appelée Elysium affecte souvent la forme
circulaire, quoiqu'elle soit encadrée dans une espèce de pentagone de cinq
canaux.
(di Le type le plus parfait des canaux, que je regarde comme l'expression de
leur état normal, est une ligne sombre (quelquefois tout à fait noire) et bien dé-
finie, qu'on dirait tracée à la plume sur la surface jaune de la planète. L'aspect
des canaux dans cette phase de leur existence est très uniforme sur toute leur
longueur, à fort peu d'exceptions près; leur cours général est régulier; et, dans
les occasions très rares où il a été possible de distinguer nettement les deux
bords l'un de l'autre, j'ai pu y remarquer de très petites sinuosités ou dentelures.
Ce cas s'est présenté, en 1879, pour Euphrates et Triton, et pour Ganges en 1888.
Chaque bord est, du reste, parfaitement tranché, aussi parfaitement que les
IS88 S(;iilAl'Ain;LI,l les canaux. i'n
bords des continents sur les mers ( '). La larjreur est très dillérentc d'un canal à
l'autre, depuis le Nilosyrtis, qui peut arriver (m même . dépasser 5" (300 kilo-
mètres), jusqu'à de simples lignes sans largeur appréciable, telles que Galaxias.
Issedon, Anubis et Erynnis en 1882, /Ethiops en 188S, dont la largeur probable-
ment no dépassait pas 1' (GO kilomètres). Cette largeur est uniforme, i très peu
d'exceptions près; cependant Janiuna et Iris, en 1870, Ilades et Athys, en 1882,
Nilokeras, en ISsC, ont montré des exemples bien certains de canaux plu? larges
i'i une extrémité qu'à l'autre.
La largeur d'un même canal peut changer avec le temps entre des limites très
différentes, depuis le fjlet à peine perceptible dans les meilleures conditions
atmosphériques, jusqu'à une large bande noire visible au premier coup d'œil.
Nous avons un exemple bien reman[uable de ces variations dans l'histoire du
Simoïs, qui, invisible en septembre 1S7T, se présentait en octobre comme une
ligne extrêmement fine. En 1870, il était noir et assez large pour compter parmi
les canaux les plus considérables. Au commencement de janvier 1870, le Simoïs
était aussi large et aussi noir que le Nilosyrtis; largeur estimée 4°. En même
temps parut, à droite du Simo'ïs, le canal appelé Ascanius; et la portion de con-
tinent comprise entre l'Ascauius et le Simoïs {voir la carte) prit une teinte
beaucoup plus sombre que les régions environnantes. Malheureusement cette
partie de la planète n'a pu être bien observée les années suivantes, sa position
étant trop australe et trop voisine du bord.
Un cas tout à fait identique a été ofTert par le Triton dont, en 1877, j'ai pu voir
seulement la moitié à droite entre le Léthes et le Népenthès. Dans les opposi-
tions suivantes, il a été possible de le suivre tout entier depuis le Népenthès
jusqu'à la mer Cimmcrium, avec plus ou moins de facilité. Mais, dernièrement
(en mai 1888), il devint extraordinairement large, et formait un vaste détroit. Et,
ce qui est bien remarquable, la Syrtis Parva s'est élargie considérablement aux
dépens de la Libya et cette dernière s'est fort assombrie, comme je l'ai déjà
rappelé plus haut. Cette coïncidence de l'élargissement du Simoïs et du Triton
et de l'assombrissement d'une vaste région contiguë n'est probablement pas un
simple hasard. Du reste, tous les canaux de la planète paraissent plus ou moins
sujets à de semblables variations. Le Nilosyrtis lui-même m'a offert un maximum
de largeur en 1882 et un minimum en 188G; mais la ditTérence entre le maximum
et le minimum était, dans ce cas, bien moins considérable. Nous savons aussi par
les observations de Dawes et de Secchi, que l'Hydaspes en 1864 et en 1858 était
un des canaux les plus visibles, ce qui n'a plus eu lieu pendant la période de mes
observations (1877-1888). Et M. Van de Sande Backhuyzen a reconnu, dans les
dessins de Schrœter, l'existence de taches sombres considérables qui n'ont plus
('; Cette précision de la limite entre les continents et les racrs de Mars est nice ab-
solument par quelques observateurs. Un coup d'œil sur la planète, telle qu'on la voii
dans nos deux réfracteurs de Milan, suffirait pour les détromper. Il y a naturellement
exception à faire pour les régions de nature intermédiaire entre les mers et les conti-
nents, où le passage est quelquefois très graduel. (Scn.)
448 1- V PLANÈTi: M Ali S.
été observées do nos jours, et qui avaient ï;ans doute pour cause des phcnoaièues
de même nature.
Un semblable fait s'est produit aussi sur une vaste échelle, dans le voisinage
du pôle boréal, pendant les oppositions 1884-1886. Autour de la calotte blanche
polaire, plusieurs canaux étaient devenus très noirs et très larges et, en même
temps, les espaces interposés étaient devenus assez sombres. Lorsque la défini-
tion du télescope était insuffisante, la confusion de tous ces détails produisait
autour de la calotte blanche polaire une zone grise, et c'est probablement une
semblable observation qui a donné naissance aux tracés d'une mer polaire bo-
réale, qui n'existe pas.
Les variations d'intensité d'un canal bien tracé embrassent simultanément toute
sa longueur. Mais lorsque, par l'intersection avec d'autres canaux, il est partagé
en plusieurs parties, il peut arriver que l'intensité, uniforme pour chaque partie,
soit différente d'une section à l'autre. Nous avons déjà dit qu'en 1877, le Triton
était visible seulement à droite du Léthé, et invisible dans la section entre le
Léthé et la mer Cimmerium. En 1870, le Phison a été très noir dans sa section
boréale entre le Nilosyrtis et l'Astaboras, tandis qu'il était bien moins évident
dans la partie australe, entre l'.Vstaboras et le Sinus Sabaeus. En 1882, Ilydraotes
était très délié dans sa section à gauche de la Jamuna, assez gros et visible (et
même double) dans la section à droite du même canal. Dans ces cas, le change-
ment d'intensité, en passant d'une section à l'autre, se fait par un saut brusque,
sans transition appréciable, chaque section étant ordinairement bien uniforme
dans toute son étendue.
!•'. — Les DOUIJLD.Ml-NTS ou r.ÉiMINATIONS DES CANAUX.
Nous allons considérer la dernière et la plus remarquable des transformations
des canaux de Mars, celle qui donne naissance aux {yé;ni?îah'o?is. Ces phénomènes
sont bien propres à imposer un frein à l'essor de notre imagination, lorsqu'elle
veut essayer d'appliquer à l'étude physique de Mars l'analogie tirée des faits que
nous observons sur la Terre. Un canal quelconque a été reconnu sous l'une des
formes précédemment décrites, ou même sous plusieurs successivement; en peu
de jours (ou peut-être d'heures), par un procédé de transformation dont le détail
a échappé jusqu'à présent, il se présente doublé et composé de deux bandes très
voisines entre elles, ordinairement égales et parallèles : le cas d'une légère di-
vergence ou d'une différence d'épaisseur étant assez rare. Dans plusieurs cas, il
a été possible de constater, par la comparaison minutieuse avec les détails envi-
ronnants, que l'une des deux bandes a conservé (exactement ou à peu près) l'em-
placement du canal primitif; mais dernièrement, en 1888, j'ai pu me convaincre
que cette règle n'est pas générale, et il peut arriver que ni l'une ni l'autre des
nouvelles formations ne coïncident avec l'ancien canal. L'identité de la direc-
tion générale et de l'emplacement est alors seulement approximative ; toute trace
de l'ancien canal disparait pour faire place aux deux lignes nouvelles.
\8>^8 S(;iiiAi'.\iu;iJ.i. -- Li:s canaux. •'i40
La distance entre les deux lignes parallèles est fort dilTérente d'une géinina-
tion à l'autre ; la limite supérieure peut être estimée à 10« ou 12", même à lô» pour
certaines gémiuations très longues et imparfaitement marquées, comme celles
du Titan en 1882 et du Gigas en iSSi. Quant à la limite inférieure, elle ne peut
être déterminée que par rapport à la puissance du télescope employé et aux cir-
constances de l'observation; en 1888, Protonilus et Callirrhoe étaient résolubles
en deux lignes espacées de S» au plus. Il arrive quelquefois qu'on peut conjectu-
rer qu'une ligne est double, par son aspect particulier, sans ([u'on puisse séparer
complètement les deux lignes composantes. Le dédoublement d'une ligne peut
donc échapper même à un observateur attentif.
La largeur, ordinairement uniforme et égale pour ces deux bandes, est très
différente d'une gémination à l'autre, depuis une ligne d'épaisseur imperceptible
jusqu'à ;f' environ. Le rapport do cette largeur des bandes à l'intervalle lumineux
qui les sépare est très variable. Ordinairement l'intervalle est plus large que
chacune des bandes; souvent il a été égal ou môme un peu plus étroit.
La couleur est presque toujours la môme dans ces deux bandes, sous le double
rapport de la qualité et de l'intensité; mais elle présente des variétés considé-
rables d'une gémination à l'autre. Elle est généralement noire, ou du moins,
foncée dans les géminations composées de lignes très minces; les bandes plus
larges sont rarement noires ou brunes (un cas remarquable a été la gémination
du Cyclops en 1882, si forte et si marquée, que nul autre objet sur le disque ne
pouvait lui être comparé) ; elles se montrent assez souvent d'un rouge-brique de
nuance plus ou moins sombre. Quelques bandes ont été tellement pâles, qu'on
pouvait à peine en constater la présence sur le fond jaune de la planète, malgré
une largeur considérable de plusieurs degrés. En diverses occasions, j'ai pu
constater que l'intersection de ces bandes plus pâles avec un autre canal produit
un renforcement sensible de couleur dans la place de l'intersection. Je suis porté
à croire que, dans tous les canaux doublés, la couleur est toujours la môme en
qualité, et que les différences ne regardent que l'intousité.
Si un canal double est coupé en deux sections par un autre canal, et si l'une
Fig. 231.
Élargisscmcut des deux bandes d"un cuiuil, prés d'une interscclioii.
des bandes est plus large ou plus intense d'un côté de l'intersection, l'autre bande
le sera aussi, comme le montre la figure ci-dessus (fig. 231 ). Tels ont été Antœus-
Eunostos en 1882, Euphrates en 1888. Si l'une d'elles est très mince ou peu visible
d'un coté de l'intersection, l'autre sera aussi très mince ou peu visible, et, dans
ce cas, il peut arriver que l'une des deux manque complètement ou soit invisible.
On a alors l'exemple d'un canal qui est double dans une section de son cours et
Fl,.\.M.MAlUO.S. — Mni.<. 29
450 LA PLANÈTK MAItS.
simple dans une autre secliou.Cerberus, llydrantes. Aclicron ont Courni do pareils
cxeniides en 18SÎ.
Quelquefois les ileux lignes sont régulières et louis axes parfaitement paral-
lèles; mais le tout est entouré d'une espèce de pénombre, comme Cerberus en
1S82. Ilebrus en 1888. Mais, ilans le plus grand nombre de cas, les deux lignes
sont tracées avec une régularité absolue et tout à fait géométrique; l'uniformité
de la largeur, de la couleur et de l'intervalle est complète. Leur examen, fait
dans d'excellentes circonstances avec des grossissements variés, depuis 322
jusqu'il CôO. n'a pu faire découvrir la plus petite irrégularité, ni même un soupçon
d'irrégularité: tout paraît tracé avec la règle cl le co)npas. Telles ont été, entre
autres, eu 1882, Cyclops, Euphrates, Pinson, Jaimina, llepha:;stus; en 1886, lly-
draotes; eu 1888, Euphrates. Phison, Astaboras, Protonilus, Callirrhoe. S'il exis-
tait quelque trace d'anomalie dans le canal simple primitif, elle disparaît com-
jdètement après la gémination. Des canaux sensiblement courbes ont même
donné naissance à des géminations parfaitement droites, comme la Jamuna en
1882 et la Boreosyrtis en 1888. Il y a, en un mot, une tendance prononcée à l'uni-
formité plus absolue et h la suppression de tout élément irrégulicr.
L'aspect d'une gémination change souvent suivant les époques. En 1882, les
deux bandes de l'Euphrates montraient une sensible convergence du côté du
Nord : l'une d'elles était à très peu près dirigée suivant un méridien de la pla-
nète. En 1888, les deux bandes étaient absolument équidistautes dans toute leur
extension entre le Sinus Sabœus et le lac Ismenius; leur angle avec le méri-
dien était, au point moyen, 8° ou 10" environ. Elles étaient minces et bien défi-
nies en 1882; en 1888, les deux bords de chacune étaient estompés, leur couleur
était plus claire, leur intervalle était sensiblement moindre qu'en 1882. De même,
pour rilepha?stus, les deux larges bandes rougeâtres de 1882 étaient réduites en
1888 à des ligues plus fines et de couleur plus sombre, l'intervalle mitoyen était
réduit à la moitié. Une semblable réduction de l'intervalle paraît avoir eu lieu
pour le Protonilus.
La gémination des canaux s'accomplit dans un intervalle de temps relative-
ment court, et par une métamorphose rapide. Assez souvent il a été possible
de restreindre, par des observations sûres, à un petit nombre de jours la limite
de cette durée. Quelquefois la métamorphose a été complète dans l'intervalle
de vingt-quatre heures, entre deux observations consécutives. Autant que j'ai pu
en juger, le phénomène a lieu simultanément sur toute la longueur du canal
doublé.
Dans un petit nombre de cas, il a été possible de constater quelques phases du
procédé de gémination. Pendant le mois de janvier 1882, l'Euphrates a été visible
jusqu'au 18 du mois sans rien offrir de bien remarquable. Le 19, il parut consi-
dérablement plus large et un peu nébuleux du côté gauche. Le 20, un brouillard
dense m'empêcha d'observer. Le 21, la gémination était complète et tout à fait
évidente. Dans le même mois de janvier 1882, le Ganges s'est montré simple
jusquau 12. Le 13, il parut accompagné, à droite, d'une légère bande lumineuse.
1888 S(;iiiaiv\im:i.!,i. - les canaux. 451
qui le côtoyait sur toute sa luu^'uoui- à une distance de 5" environ entre le Lacus
Lun.T et le Fons JuventcTC. Cette bande n'ctait plus visible le 18 et le 19; toute la
réj,non environnante dtait parsemde de laclics blanches. Ces taches n'existaient
plus le '20: mais la bande nouvelle avait repai-u, plus noin', jjjus étroite et mieux
définie, cette fois; elle ressemblait au Ganprcs, quoiqu'elle fût un peu plus faible :
le Ganges était doublé, et son aspect ne changea plus jusqu'il la fin dus obser-
vations de cette année 188-2. L'apparition d'une nappe blanche ou blanchâtre de
part et d'autre d'un canal î\ l'époque de son doublement a été siirnaléc plusieurs
fois; en 188-2 pour le Thoth, en 1888 pour le Protonilus et le NVpenthès : cette
nappe blanche se montrait très distinctement entre les deux liy^nes de la gémi-
nation.
J'ai vu assez fréquemment les deux liprnes se dépraver simultanément d'une
nébulosité fjrise plus ou moins intense, allonj,^ée dans la direction du canal; j'in-
cline même à conclure que cet état de nébulosité est un phénomène essentiel
dans la production des géminations. .Mais il ne faut pas croire qu'il s'agisse ici
d'objets cachés par une espèce de brouillard, (jui deviennent visibles par sa dis-
parition. Autant que j'ai pu en juger, ce qui apparaît sous l'aspect de nébulosité
n'est point un obstacle à la vision d'objets préexistants, mais c'est plutôt une
matière dans laquelle se prononcent des formes qui n'existaient pas. Pour expli-
quer ma pensée, je dirai que le procédé n'est pas comparable à des objets qui se
dégagent d'un brouillard devenu plus rare, mais plutôt à une multitude de soldat.s
dispersés irrégulièrement, qui, peu à peu, se forment en rangs et en colonnes.
Je dois ajouter que ceci doit être considéré comme une impression, et non comme
le résultat rélléchi d'observations proprement dites.
Puisqu'il y a une époque d'apparition pour les géminations, il faut qu'il existe
aussi une époque oij elles disparaissent ou s'effacent de quelque manière. Mal-
heureusement, je n'ai encore pu rien observer de bien sûr à l'égard de cette
phase du phénomène. Je puis seulement dire que plusieurs géminations de 188-2
n'étaient plus visibles dans les oppositions suivantes; le canal était redevenu
simple, ou même avait disparu entièrement. Dans beaucoup de cas, l'éloignement
de la planète ou l'état insuflisant de l'atmosphère terrestre donnait une explica-
tion plausible ou du moins possible des géminations disparues. Je crois que le
caractère de ces phénomènes est périodique. Réellement, on ne pourra affirmer
sans hésitation une telle périodicité qu'après les avoir vues paraître et disparaître
plusieurs fois de suite; cependant les observations faites jusqu'à présent suffisent
pour la rendre probable. En 1877, aucune trace de gémination n'a pu être con-
statée pendant les semaines qui ont précédé ou suivi le .^^olstice austral. Un seul
cas isolé a été remarqué en 1870 : le 20 décembre, j'ai constaté la duplicité du
Nilus entre le Lacus Lunaîet la large traînée appelée C(;raunîus. C'était un mois
Hvnnl l'équinoxe vernal, correspondant au passage du Soleil de l'hémisphère
austral à l'hémisphère boréal de la planète. Ce phénomène nie surprit un peu.
mais je le considérai alors comme quelque chose d'accidentel. Pendant l'oppo-
sition 1S81-82, j'ai attendu la répétition du même fait; il se produisit, eu effet.
\h-l l\ ri.ANi-TK M AU s.
mais un niuis :iprÙ6 l'équinoxc vcnial, le 1-2 janvier 1882. A cette époque, plusieurs
autres irominations avaient iléj;\ paru, et bientôt la planète en fut remplie, en
lieux mois, depuis le !;• décembre jusqu'au ^O février, jai pu constater Irentc
Lféminations. Tendant l'opposition de lS8i, j'ai pu en voir distinctement encore
quelques-unes; plusieurs autres paraissaient probables, mais elles n'étaient plus
assez distinctes. C'était de deux à quatre mois avant le solstice boréal. En 188G
(i\ l'époque du solstice boréal, un mois avant et un mois après), la plus grande
partie des géminations n'existait plus, beaucoup de canaux étaient redevenus
simples, d'autres avaient disparu; toutefois plusieurs étaient encore évidemment
doubles, entre autres l'Ilydraotes, très nettement. Quelques-uns de ces double-
ments furent constatés à la même époque à l'Observatoire de Nice par M. Per-
rotin et ses collaborateurs. Enfin, en mai et juin 1888 (deux et trois mois après
le solstice boréal), commença une nouvelle reprise des géminations, pendant
laquelle on vit se doubler plusieurs canaux, qui jusque-là étaient restés simples,
et rester simples plusieurs qui étaient doubles en 188-2. L'ensemble des observa-
tions donne quelque poids à l'idée que le phénomène doit être réglé par la pé-
riode des saisons de Mars; qu'il se produit principalement un peu après l'équi-
noxe du printemps et un peu avant l'équinoxe d'automne; qu'après avoir duré
((uelques mois, les géminations s'effacent en grande partie à l'époque du solstice
boréal, et disparaissent toutes à l'époque du solstice austral. La vérification de
ces conjectures ne se fera pas attendre longtemps, et une première occasion de
la faire se présentera en 18'J-2. L'opposition de cette année aura lieu dans les
mêmes conditions à peu près que celle de 1877, et il faudra s'attendre ù une ab-
sence complète de géminations.
La PL II I p. 440) a donné une idée de l'arrangement général des géminations
observées en 1882 et en 1888. Il n'est pas besoin d'avertir le lecteur que cette
carte ne représente l'état de la planète à aucune époque, car les géminations ne
se produisent pas toutes ensemble. C'est encore ici un index graphique de ces
formations, qui comprend à peu près toutes celles que j'ai pu constater jusqu'à
présent.
Nous avons remarqué plus haut qu'il existe sur la planète un certain nombre
de nœuds ou de points d'intersection, de convergence, où plusieurs canaux se
rencontrent sous une forme plus ou moins régulière. L'aspect de ces nœuds
change d'une manière analogue à celle des canaux. Lorsque les canaux qui abou-
tissent à un nœud sont tous invisibles, le nœud est invisible aussi, ou s'annonce
tout au plus par une ombre légère et diffuse. L'apparition des canaux comme
lignes simples ou doubles de cours déterminé produit dans le nœud un réseau de
lignes dont il est ordinairement impossible de démêler la structure, à cause de
la grande quantité de détails qui s'accumulent alors dans un espace relativement
petit. La confusion est accrue dans le plus grand nombre de cas par une espèce
d'ombre confu.se assez forte qui entoure le nœud et le rend visible comme une
tache plus ou moins forte qui se transforme quelquefois en un vrai Jnc h couleur
noire et à contours bien déterminés (Lacus Niliacus 1879-86, Triviuui-Ciiarontis
1888 SCIil \l'.\lti:i.l I — I.MS CANAUX i53
1882, et autresj. De cette ombre (iiiit |);ir se tk'^gaffer, ;V do certaines époques,
une double tache allongée, Tonnant une sorte de gémination composée de doux
bandes courtes et larges, qui occupent à peu près la surface de l'ombre ou du lac
en question. Voyez dans la PL II le Trivium Charontis et le Lacus Lunro ainsi
transformés. Autant que j'ai jiu m'en rendre compte jusqu'à présent (ces obser-
vations étant de la plus grande difliculté), la direction de cette gémination change
considérablement d'une époque à l'autre et coïncide tantôt avec un, tantôt avec
un autre des canaux doubles qui aboutissent à la région en question. Ce fait
étant de la plus haute importance pour l'histoire des géminations, je rapporterai,
avec détails, quelques exemples que j'ai observés.
Le lac Ismenius est formé, dans son état ordinaire, d'une tache sombre de
forme ovale, allongée dans la direction du parallèle. Le 23 décembre 1881, je l'ai
trouvé divisé en deux bandes qui formaient une courte gémination, étendue dans
Fig. 232. Fig. 233.
Proto- ifiL^Ak, - ni lus
Dc'doublemonl du lac rsmeniu.=;, le 23 don. 1881, r)(''doubloment du même lao, le 27 mai 188S,
dans le sens de l'Est à l'Ouest, .sous forme de deux petits lacs circulaires.
la direction du Protonilus qui était double aussi. Protonilus et Ismenius auraient
pu être considérés comme formant une seule gémination, mais les bandes do
rismenius étaient beaucoup plus larges, ainsi qu'on le voit dans le croquis ci-
dessus (fig. 232). Le 27 mai 1888, un semblable phénomène eut lieu; mais la divi-
sion en deux bandes suivait cette fois la direction de l'Euphrates.qui était double
(voir la fig. 233). Les dimensions de l'Ismenius dans la direction de l'Euphrates
étant peu considérables, les bandes n'étaient pas plus longues que larges; en un
mot, la gémination prit la forme de deux petites taches presque rondes, juxta-
posées et alignées dans la direction du Protonilus. Plus tard, le Protonilus étant
doublé aussi bien que l'Euphrates, je m'attendais à voir l'Ismenius divisé en
quatre; cela n'est point arrivé. Le 4 juin, le lac avait repris sa forme ovale d'au-
trefois, avec des contours ombrés et peu définis.
Le Trivium Charontis n'existait en 1879 que comme point de rencontre des
canaux Laîstrygon, Styx, Cerbère et Tartare, seuls visibles alors dans cette région.
En 1881-82, les intersections de canaux se multiplièrent dans cet endroit, le tout
étant enveloppé d'une ombre confuse assez étendue, quoique mal terminée. En
1884, cette ombre se divisa en deux bandes très fortes, allongées exactement dans
la direction de l'Orcus. En 1888 (13-1") juin^ la division en deux bandes existait,
mais leur orientation suivait la direction do l'Erèbe. L'un et l'autre système de
154 I. A PI \Nr.Ti: M A us.
baudcs sont représentas dans notro /'/. H. superposés l'un ^ raulro. Mnis une
telle superposition n";\ pas été observée.
Un phénomène identique a été observe sur le lac de la Lune, (|ui, on 187',) et on
lss-2. était divisé en doux fortes bandes orientées suivant le double Nil. tandis
quen 1884, l'orientation était dans la direction do 1 LJranius : l'une et l'autre
formes se trouvent superposées dans la PL II. Le Nœud Gordien a présenté aussi
des phéuGinènes analogues, quoique bien plus difficiles i\ observer.
11 paraît résulter de tout ceci que la cause productrice des géminations n'opère
pas seulement le long des canaux de Mars, mais aussi sur des surfaces sombres
de forme quelconque, pourvu qu'elles ne soient pas trop étendues; dans ce der-
nier cas, la direction de la même gémination peut être très différente d'une
époque à l'autre, tandis que, dans le cas des canaux, elle ne peut osciller qu'entre
d'étroites limites. Cette cause paraît étendre sa puissance même sur les mers
permanentes; car l'apparition de l'île Cimmeria au milieu de la mer Cimmé-
rieune n'est au fond qu'une transformation de cette mer en une grande gémination
composée des deux bandes obscures qui restent des deux côtés de l'île susdite.
L'n semblable pbénomène semble se produire sur la mer Acidalienne, quoique
avec moins d'évidence et de régularité.
Cette tendance à diviser un espace sombre par une bande jaune semble se
manifester aussi par la production de certains diaphragmes ou isthmes lumineux
d'étonnante régularité qui se forment en certains endroits de l'hémisphère boréal
de la planète. Tel est le pont d'Achille, qui, en 1882-84-86, séparait le lac Niliacus
de la mer Acidalium, et qui disparut partiellement en 1888; telle est aussi l'in-
terruption qui sépare parfois le Nilosyrte de la Boreosyrtis, interruption qui se
montre lorsque le Protonilus est doublé, et qui est en quelque sorte une conti-
nuation de la bande claire qui sépare les deux lignes composantes du Protonilus.
Une autre interruption semblable dans le cours de la Boreosyrtis, qui existait en
1882, n'a plus été vue depuis. Enfin la duplicité du Sinus Sabœus et de la pres-
qu'île Atlantis, qui sépare la merCimmerium de la mer Sirenum, paraît dépendre
de phénomènes de la môme nature.
G. — l'HÉNOMÈNES OBSERVÉS SUR LES CANAUX.
Telles sont les diverses apparences sous lesquelles peuvent se présenter les
canaux de Mars et les formations analogues. Chacun d'eux a ses métamorphoses
et son histoire particulière; et cette histoire est liée sans doute à celle des canaux
voisins, quoique cette connexion ne soit pas toujours bien apparente.
Pour donner une idée de la manière dont se développent dans leur succession
les phénomènes des canaux de ]\Iars, je choisirai un seul exemple entre cinquante.
11 .s'agit ici du canal appelé Ilydraotes {ftg. 234) et du Nilus, son prolongement.
Pour mettre en évidence la correspondance des faits avec les saisons de Mars,
j'ai inséré, parmi les observations, les dates des solstices et des équinoxes, en
ISSS
sciiiAPARKfjj. — [j:p canaux.
(k'sip:nant par (.'quinoxc^ vornal le inoriK.'nt où le Soleil passe du côté sud au C(»té
nord de l'équateur de la planète, i'our plus de clarté, je désigne par des lettres
les différentes sections de l'IIydraotcs-Nilus. Ce canal aboutit d'un côté au Cerau-
nius, qui tantôt offre l'aspect d'une grande hande nébuleuse, tantôt présente
une gémination imparfaite, qui au Nord s'élargit en forme de trompe ; do l'autre
côté, son extrémité arrive aux bords du beau golfe appelé Margaritifcr Sinus.
Les trois canaux Jarauna. Ganges, Chrysorrhoas, le divisent en quatre sec-
lions AB, BC, CD, DE. Il semble que le canal se prolonge encore davantage à
droite au delà du Coraunius, par le IMilegethon; mais nous bornerons notre exa-
I-iK. 234
Phénomènes observOs sur Mars. Le canal Hydraotes-Niliis.
men à la partie AK.Dans les environs de la section CD convergent, d'une manière
excentrique et imparfaite, quatre autres canaux, Ganges, Chrysorrhoas, Nilo-
keras et Uranius; il y a donc ici un des nœuds dont nous avons parlé plus haut,
qui donne origine au Lacus Lun-f, tacho ombrée de grandeur et d'intensité
variables.
Voici l'extrait de mes observations.
Opposition de ls77.
Septembre 27. — Solstice austral.
Septembre 28, octobre 4. — Tous les canaux invisibles, à l'exce ption du Ganges
Novembre i. — Première apparition du Chrysorrhoas, large et nébuleux. Sa conver-
gence avec le Ganges forme une tache mal définie, mais assez forte; c'est la première
indication du Lacus Lunrc.
Février 21. — Première vue du Xilokeras et du Nilus sous forme de bandes sombres
près du limbe inférieur. Observations difficiles, diamètre de la planète réduit à 5", 7.
Février 24-25. — Première vue de l'indus. Ganges encore visible dans toute son
étendue; il forme, à sa rencontre avec le Nilokeras et le Nilus, une forte tache triangu-
laire, le La<Mis Lunae.
Mars 0. — Èquinoxe vornal.
i56 I \ IM. A NKTr. M. VUS.
Opposition dk 187;).
Août li. — So/.s/Jre nus^lral.
Octobre 13-11-18. — Ganges largo, C.lirysorrhoas et Xilus bien niannu's. Laciis Imuiv
est une tache informe trts sombre.
Octobre 21. — Première vue de l'IIydaspes.
Novembre 27-28. — Première vue de la Jamuna. Nilokeras très fort. Nilus visible.
Décembre 21. — Lacus Luna* très grand et très noir.
Décembre 23. — Le Lacus Lunœ a pris la ligure d'un trapèze CG'DD' formé par
quatre bandes noires, les bandes CD, CD' sont beaucoup plus larges que les autres,
mais CD encore plus large que CD'. L'île lumineuse au milieu est bien définie, et de
la couleur jaune ordinaire. Nilus s'étend dans la direction D'E' sous forme d'une bande
grise peu définie. Ceraunius a le même aspect. A leur point d'intersection E, grande
tache nébuleuse plus sombre.
Décembre 26. — Le Nilus est double ; les deux traits parfaitement égaux et assez
bien définis suivent les directions DE, D'E' des côtés parallèles du trapèze formé
par le Lacus Luna;, mais ils sont moins larges et moins sombres que ces deux côtés.
.Janvier 1. — Nilokeras noir et bien visible.
Janvier 22. — J-Jquinoxe vernal.
Opi'OSition de 1881-1882.
Décembre 9.— Équinoxe vernal. Ganges et Lacus Lunaî bien marqués. Nilus CD'
peu visible; CD n'existe plus.
Décembre 14. — Hydaspes, Jamuna, Ganges; Nilokeras peu visible, large et es-
tompé, ne paraît pas double.
Janvier 10. — Xilus et Lacus Lunœ marqués par des ombres légères; première vue
de rUranius.
Janvier 11-12. — Nilus certainement double, les traits sont un peu nébuleux. Nilo-
keras imparfaitement doublé.
Janvier 13-20. — Doublement du Ganges.
Janvier 13. — Première vue de l'Hydraotes AB sous l'aspect d'un fil nébuleux.
Janvier 19. — Le Lacus Lunse a repris la l'orme trapézoïdale, avec son île lumineuse
au centre. Nilus forme deux lignes DE, D'E' bien reconnaissaijles, qui se détachent
assez bien sur un fond blanchâtre. La disposition paraît identique à celle de l'année
précédente; Hydraotes AB très visible. Jamuna doublée.
Février 18. — Nilus encore double; le trait supérieur paraît se prolonger par le
Phlegethon.
Février 22. — Hydraote,s divisé par la Jamuna en deux sections AB, BU, dont BC
est plus large et plus visible que ÀB.
Février 23-24. — Hydraotes doublé dans la section BCB'C, mais toujours simple
dans la section AB. Les deux traits de BG sont sur le prolongement des deux côtés
CD, CD' du trapèze formé par le Lacus Lunœ, mais un peu plus faibles. La ligne simple
AB est sur le prolongement de BC. mais plus faible que BC. .famuna et Ganges tou-
jours doubles.
Juin 20. — Solstice boréal.
Opposition de 1883-1881
Octobre 26. — Équinoxe vernal.
Décembre 31. — .Tamuna, Ganges. Nilokeras bien visibles; rien de l'Hydraotes;
Lacus Lunée, tache peu apparente; Nilus très confus, peut-être double.
ISf^,^ SCIIIAI'AUKLI.I. - Li:S CANAUX. i57
Janvier i. — Jo crois apercevoir confuséinent tout l'HydraotoB ALI sans pouvoir dire
s'il est simple ou double; la partie BC est plus inanileste. Ganj^'CS beau; Chrysorrhoas
faible; Jamuna large, probablement double.
Janvier 2'J-30. — Uranius double, Nilus simple. On voit seulement D'IC. Le Lacus
Iauxx forme une ombre confuse, dans laquelle on apen-oil deux taches plus noires,
allungées suivant la direction de l'Uranius ot qui forment le prolongement de ses deux
bandes. Nilokeras sombre, mais simple. Ganges faible.
Kévrier 3-1. — llydraotes comme le 2 janvier.
Février 5. - Uranius a disparu, mais le Lacus Lunaî est encore divisé en deu.x
Fi p. 235.
C'h.inçemeuts observés sur Mars. Canaux doubles et épaissis de l'Hj'draotes-Nilus, de Nilokeras
cl de Jamuna. Indus et Ilydaspes élargis.
bandes qui en suivent la direction. îsilus double mais très faible. llydraotes doublé en
BGB'C, simple en AB.
Mars '.). — Lacus Lunaî toujours double dans la direction de l'Uranius; ce dernier
est simple, on aperçoit seulement le trait supérieur; Nilus doublé. De l'Hydraotes on
voit seulement le trait AC. Chrysorrhoas fort large, très probablement double, Jamuna
aussi; Ganges assez faible. ( Voir f\r}. 235).
Avril 5. — Malgré le diamètre très réduit de la planète, le Nilus paraît encore double.
Mai 13. — Solstice boréal.
Opposition de 1886.
Mars 27. — Hydraotes et Nilus, clairement doubles, forment une seule gémination
gigantesque, qui se présente au premier coup d'œil depuis le Margaritifer Sinus,
jusqu'au Ceraunius, comme la pg. 2.3G l'indique. Les deux bandes sont très larges
4° peul-élre), d'une couleur rougeâtre plus foncée que le fond jaune environnant.
IjCur intervalle i^entre les lignes mitoyennes des deux bandes) est de 9* ou 10°. Nilo-
keras noir et très fort, aboutit à un gros point noir placé en G'. Les autres canaux
Ilydaspes, Jamuna, Ganges, Chrysorrhoas, F'ortuna sont visibles, mais aucun d'eux
ne paraît double.
Mars 31. — Solstice boréal.
Avril 2. — Les deux ligues de l'Hydraotes encore visibles, quoique très pâles : elles
sont un peu plus sombres dans la section BGB'C. Jamuna paraît simple.
S5S I.A PLA.NKTK MAKS
Mai 7. — La liandc Hydraotes-Nilus paraît encore donliIc, du moins elle est très
large, quoique peu apparente; atmosphère mauvaise.
I-ig. 230.
Changements observé.-; sur Mais. Ilydraotes-Nilus cloul)lc. .Nilokeras élargi.
Mai 8-9. — La section BCB'C de THydraotes est certainement double; elle est plus
facile à voir que l'autre section AB, sur laquelle je n'ose me prononcer.
Opposition de 1888. •
Février 16. — Solstice boréal.
Mai 23. — Je crois reconnaître la partie BG de l'Hydraotes, qui paraît assez sombre,
peut-être double; mais l'atmosphère est mauvaise.
Mai 24. — Hydraotes entièrement visible; la partie BG est plus sombre. Je ne puis
dire s'il est simple ou double. Mais Nilus est certainement double.
Juin 27. — Nilus est toujours double, les deux traits paraissent un peu plus faibles
vers leur milieu.
Juillet 2. — La partie BG de l'Hydraotes bien sombre et visible; l'autre partie AB
est douteuse. Atmosphère mauvaise.
Août 15. — Équinoxe (Taulomnc.
Ces variations observées sur le Nilus-llydraotes, de 1877 à 1888, montrent une
certaine suite re'gulière, et il est possible qu'elles donnent son histoire pério-
dique et renouvelée à chaque révolution, depuis le solstice austral jusqu'à l'équi-
noxe d'automne.
II. — Les neiges polaires.
On a remarqué depuis longtemps que, par l'effet de ces saisons, les taches po-
laires de Mars subissent des variations périodiques d'amplitude à peu près sem-
blables à celles qu'on constate sur les glaces polaires terrestres pendant les
saisons analogues. Depuis- 1877, j'ai observé ces taches avec une attention parti-
culière, et j'ai pu vérifier que les changements périodiques en question sont bien
réels. Il y a cependant certaines particularités qui constituent des différences
avec ce que nous voyons sur la Terre; et il ne faut pas les négliger. Voici, en
IS88 SCIII Al' \1U;IJ,I. — M'S NHKJKS |M)I.A I UKS. 'i50
ix'SiuiK-, les rcsiiliats (le mes observations, en roinnieneant par la tache australe:
Avant — I.IAMKTUK Al-rAKENT
JOCBS
Après -f de lu
le Sdistii-c nustni! lu-lie pulnin! Iiuréalc
1877. -23 août — 35 29»
o 2'2 septembre .... — 5 15
u i novembre. .4-38 7
1879. 21 octobre ... -4-59 8
•) 2S novembrr. - lOG 5
« 27 décembre H- ISf) 11
Aux premiers jours do janvier 1880, la tache polaire a commencé à dispa-
raître dans l'hémisphère obscur do la planète; pendant les années suivantes, elle
a toujours été invisible, se trouvant dans rhémisph^rc opposé à la vue de h
Terre. On a vu souvent, dans le haut du disque, des taches blanches ou blan-
châtres; c'étaient des îles connues, brillant de cette clarté passagère.
La diminution de la tache australe a lieu d'une façon assez régulière.
Il aurait été bien intéressant de fixer l'époque du minimum d'extension de cette
calotte australe. Dans mes publications antérieures, j'avais pensé pouvoir fixer
ce minimum environ quatre mois après le solstice austral; mais la base de cette
conclusion me parut peu solide. En effet, par des considérations assez plausibles,
je crois pouvoir affirmer que, pondant les journées des 17 et 2î janvier 1882
( c'est-à-dire 200 jours après le solstice austral), cette tache ne pouvait avoir plus
de lO» de diamètre, si toutefois elle y arrivait. Il est donc possible que le mini-
mum retarde plus de quatre mois sur le solstice austral; ce qu'on peut affirmer
avec certitude, c'est qu'en IS79 il a retardé au moins de quatre mois.
Nous allons considérer maintenant la tache boréale. Comme pour la tache
australe, son décroissement s'est fait assez régulièrement par degrés successifs.
Il serait naturel de supposer une semblable régularité dans la phase d'accroisse-
ment qui a pu être observée. Cela ne s'est point vérifié; la tache boréale, très
■petite au commencement de janvier ISS2, avait déjà, atteint, à la fin du même mois,
son diamètre maximum de 45" environ, pour donner lieu immédiatement à une
diminution graduelle. Ce fait important mérite quelque explication plus dé-
taillée.
Les oppositions de 1877 et 1879 nous ont montre le pùle boréal constamment
caché dans l'hémisphère invisible de Mars. Aucune observation relative h. la
tache polaire boréale n'a été possible en 1877. Mais, pendant toute la durée des
observations de lH7i), on a aperçu souvent, près du limbe inférieur du disque, une
et quelquefois deux taches blanchâtres qu'on aurait pu, à la rigueur, considérer
comme des ramifications de la calotte polaire en question, étendues jusqu'à plus
de 30" de distance du pùle boréal. Mais elles n'étaient ni aussi éclatantes, ni
aussi bien terminées, ni aussi constantes de position et de contour, que les vé-
ritables taches polaires le sont ordinairement. Ces taches étaient au nombre de
cinq, disposées en couronne entre 30" et 40" de distance polaire; leur connexion
■ir.O I. A PI.ANKTi: MARS.
rt'ciproquc dans les hautes latitudes, et leur connexion avec une tache polaire
centrale et l'existence de cette tache centrale elle-même, n'ont pu former l'objet
d'observations, à cause de la position défavorable de l'axe de la planète. Cela est
arrivé entre octobre 1879 et février 1880, quatre mois avant et un mois après
l'équinoxc vernal de Mars.
Pendant l'opposition suivante, 188i-8î?, le pôle boréal s'est trouvé toujours
presque exactement sur la limite de l'hémisphère visible; si la calotte polaire
boréale avait eu seulement 10" ou !."•" de diamètre, elle aurait été visible sans
doute Ma place que le calcul lui assignait. Le fait est que, depuis le 26 octobre 1881
jusqu'au 25 janvier 1882, aucune tache polaire permanente n'a pu être observée
dans l'endroit du pôle. Il s'ensuit que, pendant cet intervalle, la calotte boréale
(si même elle a existé) n'a pu dépasser en aucune façon 10° ou 15° de diamètre.
A la vérité, certaines apparences blanchâtres n'ont pas manqué de se présenter
jiresque journellement dans la partie plus boréale du limbe. Mais cette fois,
comme en 1879, il a été facile de reconnaître que de telles apparences ne pou-
valent être produites par une tache polaire fixe. Non seulement elles étaient
ordinairement pâles, peu définies, variables d'éclat et de grandeur; mais, comme
en 1879, le changement sensible de leur direction, par l'effet de la rotation de
la planète, accusait une distance assez grande du pôle et donnait même le moyen
de déterminer approximativement cette distance. L'irrégularité de leur appa-
rition et la visibilité simultanée de deux taches semblables, à peu de distance
l'une de l'autre, montrait avec la plus grande évidence qu'il s'agissait ici, non
d'un seul objet, mais de plusieurs ramifications blanches semblables à celles
qu'on avait vues en 1879. Un examen attentif a même fait reconnaître que les
différentes branches avaient à peu près la même position en longitude que les
taches de 1879; mais, en 1881-82, la distance polaire était peut-être un peu
moindre.
Vers le commencement de janvier 1882, on commença à reconnaître dans tout
ce système de taches blanches, les symptômes d'une concentration progressive
vers le pôle. Les branches raccourcies et ensuite augmentées finirent par se
réunir entre elles, en formant une seule calotte compacte et concentrique au
pôle. Le 20 janvier, après quelques jours de mauvais temps, apparut pour la
première fois la tache polaire proprement dite, telle qu'on l'a vue toujours de-
puis, jusqu'à la fin de cette opposition. Elle était bien formée en une masse
unique brillante, à peu près ronde, avec 45° environ de diamètre, à contours
bien déterminés et assez réguliers. Cette phase de la rapide coagulation de la
tache a donc eu lieu un mois et plus nprès l'équinoxc vernal, et cinq mois avant
le solstice boréal. Il faut bien avouer qu'ici l'analogie avec les glaces polaires
terrestres ne se soutient plus que d'une manière imparfaite. La diminution pro-
gressive après cette époque est démontrée par le Tableau suivant des diamètres
apparents. Chaque diamètre est la moyenne de plusieurs jours d'observation.
La tache a diminué rapidement d'éclat en juillet 1888, par suite de l'énorme obli-
quité de l'illumination solaire, suivie bientôt par son immersion dans la nuit du
1888 SCIIIAPAIIKLI.I. — M:S NliKJi-S l'OLAlKES. 461
pôle. Le pùlo bort'al est entré dans lumbrc le 15 août, jour de l'cquinoxe d'automne.
( Avant — ijUMtTBE appàbent
J0UB8 {
DATE. I Apris -f <Io la
LE «.«iLSTirE BotiÉAL. taclic (Hilairc borcalc.
1882. 30 janvier — liG il'
X 10 février. — 135 37
» Il mars.. — lOG 33
« 10 avril.... — 77 2G
1883. la décembre - 138 38
1884. 20 janvier — 114 30
15 février — 88 31
» 13 mars — 51 23
2 mai — Il 15
1886. 16 janvier.. — 02 25
» 2G février — 33 10
" 14 mars — 17 G
• 28 mars.. . — 3 6
» 21 mai. ... -^51 5
» 1 juin -{-62 9
1888. 7 mai -+- 81 12
2 juin.... -^107 11
» juillet.. — peu visible.
Des mesures exactes ont démontré quen i88'2 la laclie boréale était exactement
centrée sur le pôle; la même chose, à peu près, parait avoir eu Heu dans les
oppositions suivantes. En 1888, MM. Perrotin et Terby y ont remarqué une divi-
sion en deux parties fort inégales, que j'ai pu confirmer par mes propres obser-
vations. ( Cette division a été indiquée sur nos deux planisphères. ) La tache a été
presque constamment entourée d'une zone étroite plus ou moins sombre, qui en
partie peut être due à un effet de contraste. Mais cette bordure n'a pas été tou-
jours uniforme dans toutes ses parties, et souvent elle a été noire ou presque
noire; ce qui fait croire à une coloration réelle de la surface dans la contiguïté
immédiate du contour de la tache polaire. La zone m'a paru accompagner la tache
dans son rétrécissement; si cette observation est confirmée par la suite, on aura
k\ un fait très important. Au reste, les dernières oppositions ont démontré que
les environs du pôle boréal ne sont occupés par aucune grande mer, mais plutôt
par un réseau de canaux et de petits lacs. II est donc possible que les condi-
tions des deux hémisphères de Mars soient fort inégales sous le rapport météo-
rologique.
Ou i)eut se demander si les colorations blanches qu'on observe en diverses
latitudes, même sous l'équateur, colorations dont nous avons exposé avec assez
de détails les apparences dans les articles 11 et III, .^ont des phénomènes de
même nature que les taches polaires. Mon opinion serait que ce sont des for-
mations de nature différente. En effet, ces colorations nu sont pas toujours d'un
blanc éclatant, elles varient souvent du blanc cendré au gris et au jaunâtre.
Lorsque ces colorations se produisent sur les régions continentales, elles ont
40-2 1. A IM. VM.Tl' M \1{S.
d'ordinaire des contours mal déliuit>. Leur existence est irrégulière et transitoire.
Enfin r<5olat de ces colorations est toujours plus grand près du bord que dans la
proximité ilu méridien central; c'est exactement le contraire qui arrive pour les
taches polaires. Cela est surtout évident pour la tache polaire australe, qui étant
sensiblement excentrique à l'égard du pôle, peut changer de distance au ])ord
pendant une rotation de la ]danète : elle présente toujours son maximum d'éclat
lorsqu'elle arrive à son minimum de distance au centre du dis({ue. La tache po-
laire australe parait occuper, pendant son maximum, un grand espace delà mer;
au contraire, les colorations blanchâtres se produisent sur les continents et sur
les iles, jamais sur la mer, comme nous l'avons vu plus haut.
Quant aux taches blanches que nous avous décrites comme étant des ramifi-
cations de la tache polaire boréale, et qui ont précédé en 1881-82 la formation de
cette tache, nous n'osons rien affirmer; mais il est avéré que leur plus grande
visibilité coïncidait avec le passage au méridien central, et que près du bord elles
devenaient invisibles. Cette observation nous conduirait à penser qu'elles sont
de nature identique à la tache polaire ; ce serait comme des matériaux épars,
qui, réunis en masse, auraient formé la tache polaire proprement dite. Les taches
Nix Atlantica et Nix Olympica sont dans le même cas.
Il ne serait pas difficile d'imaginer un ensemble d'hypothèses capables d'ex=
pliquer d'une façon plausible ces phénomènes des taches blanches polaires et non
polaires, en les mettant en relation avec Tévaporation des mers supposées et avec
l'atmosphère de Mars, dont l'existence est indubitable. Je crois cependant plus
utile de remarquer que les taches blanches de toute espèce sont, parmi les divers
phénomènes du Mars, les plus faciles à bien observer; elles n'exigent qu'un in-
strument de moyenne puissance, employé avec une attention très persévérante.
Les particularités que j'ai exposées sur ces taches prouvent que c'est là un
champ fort intéressant de recherches, très importantes pour l'étude physique de
Mars, et sur lequel peuvent s'exercer utilement même les observateurs qui ne
peuvent arriver à déchifirer les détails bien plus difficiles des canaux et de leurs
géminations. >■
(LXXXM. 1888. — C. Flammarion. Les fleuves de la planète Mars.
Changements observés à la surface.
La première de ces deux études établit que, si la planète Mars a des pluies,
des fontes de neiges, des condensations aqueuses quelconques, et si l'eau
ruisselle à sa surface par des rivières et des fleuves pour revenir à la mer,
ces fleuves doivent avoir leurs embouchures élargies, et que ces embou-
chures pourraient être les baies que l'observation constate, notamment :
1° aux deux pointes de la baie fourchue du Méridien, auxquelles abou-
tissent rOronte, THiddekel et le Gelion ; -Z" à la baie Burton, où aboutit l'In-
1888
C. FLA.MMAKKhN. — Cil ANC K.MKNTS OBSKIIVÉS.
iG3
(lus; 3" à la baie Christic, où aboutit, IHydaspe ('}. Nous prenions conimc
témoignages de celte manière de voir les dessins de Dawes en 180i. Ccttr
question sera examinée en détail dans la seconde Partie de cet Ouvragr
(Résultats conclus), dont cette recherche formera un chapitre.
La seconde élude (-) a eu pour but d'exposer tous les exemples de chan-
gements observés à la surface de Mars et de les discuter en les analysant
scrupuleusement. Comme ce même sujet des variations incontestables qui
arrivent acluellemenl sur celle planète fera l'objet d'un Chapitre important
de la dernière Partie de cet Ouvrage, à laquelle nous allons arriver, il serait
superflu de résumer ici cette étude, reproduite d'ailleurs à peu près inté-
gralement plus loin.
Nous avons vu, en 1879 (p. 3'20), une conjonction de Mars et Saturne. Le 20 sep-
tembre 1889, on en a observé une nouvelle. Les planètes sont passées à r>.y' lune de
l'autre. Mars étaitd'un rouge ardent, Saturne jaune livide. — Le 25 décembre IS89,
Mars est passé non loin d'Uranus, à 55'. Par contraste. Iranus paraissait bleu.
Opposition de 1890.
DATE DE l'opposition : 27 MAI.
Présentation de la planète : Le pôle boréal est incliné vers la Terre jusqu'au
23 septembre ; puis c'est le p61e austral.
Latituile Angle.
Dates. (lu centre. Diamètre. Phase. Soleil-Terre,
27 février -4- 9», 85 8', 38 0" ,86 37"
27 mai -^9,48 19,02 0,00 1
7 juillet -14 ,30 IG ,79 1 ,10 31
27 août — 7 ,32 11 ,50 1 ,70 i5
23 septembre 0 ,0U 9 ,06 1 ,49 46
31 octobre 11 .'il 7 .81 1 .12 45
U.\Li;.MjruEn de Maiss.
Hémisphère austral Hémisphère liorOal
ou supérieur. ou inférieur.
2 janvier... Solstice d'hiver. Solstice d'été.
3 juillet Ivquinoxe (le printemps. Équinoxe d'automne.
20 novembre Solstice d'été. .Solstice d'hiver.
(') Bulletin de la Sociélê Astronomique de France, l' année, 1888, p. 111-115;
L'Astronomie, décembre 1888, p. 457.
(') Bulletin de la Société Astronoumiue île France, 1888, p. 125-159.
La Société Astronomique de France, dont il est question ici pour la première fois,
a été fondée le 28 janvier 1887. Elle a eu pour Présidents consécutifs : 1887 et 1888,
M. Flammarion; 1«89 et 1890, M. Fave; 1891 et 1892, M. Bouquet de la Grve. Elle a
son siège à Paris, hôtel des Sociétés savantes, rue Serpente, et tient ses séances le
premier mercredi de chaque mois. Observatoire et bibliothèque. Elle compte déjà jilus
de cinq cents membres.
464 l.A IM.AM.ri: M A us.
l'.W.W 11. IvS'JU. — William II. I'ickliung. Plioloyiapliic de Mars. Chuledcnc'uje
pliokvjrapli iéc. Observations.
Nous avons déjà reucoutrc plus liaul quelques essais pliolograpliiques de
Mars. Voici les premiers résullals satisfaisants. M. Pickriing a ])ien voulu
nous adi'csscr des pliolograpliies olilcnues au iikmiI A\'ils(iii ((ialifoi nie). Sept
de ces photographies ont été prises le î) avril 1890, entre 22''5G"' et 23'' if".
temps moyen de Greenwich. sept autres le lendemain de 23''20"' à 23''32"'.
C'est donc la mcMue face de la planète (]ui a clé photographiée dans les
deux cas. On reconnaît sur toutes les épreuves des configurations géogra-
phiques assez distinctes: mais, dans celles du second jiuir. la tache polaire
Fig. 237. — IMiotocrraphiodu Murs en 1S9Û, par M. W.-H. Pickciing.
Jdanche qui marque le pôle sud est beaucoup plus vaste que dans celles du
premier jour. Nous savons depuis longtemps que l'étendue de ces taches
polaires varie avec les saisons de Mars, diminuant avec leur été et s'ac-
croissant avec leur hiver. Mais c'est la première fois que la date précise
d'une extension considérable de ces neiges a été enregistrée. Le bord austral
de la planète était à la latitude — 8.5°. La neige s'étendait, d'une part jus-
qu'au terminateur qui était à la longitude de 70° et le long du parallèle — 30"
jusqu'à la longitude 110% puis, de la longitude 14.5'' et de la latitude — 45"
jusqu'au bord de la planète. Elle devait s'étendre également sur l'hémi-
sphère opposé à la Terre et alors invisible pour nous. « L'étendue visible
de ces neiges, écrit M. Pickering, est véritablement immense, puisqu'elle
s'élevait à 2500 milles carrés, ou presque à la surface des Étals-Unis. «
Dans la matinée du 9 avril, ces neiges polaires étaient faiblement marquées,
comme si elles avaient été voilées par une brume ou par de petits corps
séparés, trop faibles pour être reproduits individuellement; mais, le 1 0 avril,
la région entière était brillante, égalant en éclat la neige du pôle nord.
La date de cet événement correspond à la fin do la saison d'iiiver de l'hémi-
sphère sud de Mars, ce qui correspondrait pour nous au milieu de février.
L'explication de ces observations est donnée tout naturellement par des
analogies terrestres. Nous avons assisté d'ici à une immense chute de neige
dans l'hémisphère sud de Mars.
1890 WILLIAM II. ri(;Ki:HIN(J. — OIJSHIIV A riONS. 465
Ces aspects sont si évidents siii- cliaciiuc des (jualurze photographies, (juil
siiftit (le les voir [mur mettre sur chai-iuic (rdlcs hi date à laquelle elle a
été faite. Nous en avons reproduit deux {/iy. 237;, du mieux qu'il nous a été
possible, par la photogravure, mais on n'a pu obtenir l'asitect délicat des
clichés. Ces photographies ont été prises à ré(|uatorial do 13 pouces.
M. William II. Pickering avait déjà réussi de satisfaisantes photographies
de Jupiter et Saturne. Sur Jupiter on dislingue admirablement les détails
des bandes; sur Saturne on reconnaît l'anneau sombra, la division de Cas-
sini sur les anses, et les bandes de la planète.
Le savant astronome s'est occupé aussi de l'observation directe de la
surface de Mars, à l'aide d'un réfracteur de 12 pouces.
L'observateur a reconnu une partie des configurations signalées par
M. Scliiaparelli; mais il proteste contre le nom de canaux donné à ces tracés
rectilignes, car, dit-il, >< il n'y a pas la moindre probabilité à supposer que
ce soit là de l'eau. » M. Pickering toutefois ne donne pas son opinion sur ce
que cela pourrait être.
Le plus facile à voir de tous ces canaux, dit-il, est la passe de Nasmyth, que
nos lecteurs connaissent par les cartes, qui prolonge en bas, par un retour
presque à angle droit, la mer du Sablier et à laquelle l'astronome de Milan
a donné les noms de Protonilus, Ismcnius lacus, Deuteronilus et Jordanis.
Un a également revu facilement Boreosyrtis et Astapus. A ces trois exceptions
prés, les autres canaux ont été d'une découverte très difficile, et l'auteur
attribue ces difficultés à l'emploi de grossissements trop forts et à son manque
d'exercice en ce genre spécial d'observations. Lorsqu'il fut accoutumé à l'exa-
men de Mars, il reconnut sans difficulté les canaux qui ont reçu les noms de
Styx, Fretum Anian, Hybkeus, Cerberus, Eunostos, Ilephéestus, Alcyonus,
Gyclops, Laîstrygon. Ils ont tous été découverts sans se servir de la carte,
et dessinés plusieurs fois. L'astronome de Cambridge n'a pas pu constater
leur dédoublement ni découvrir les plus faibles, mais il exprime la plus haute
admiration pour la vue de celui qui a pu faire cette découverte à l'aide d'un
télescope de 8 pouces. Il pense que tout observateur exercé peut trouver les
principaux à l'aide d'une lunette de 10 ou 12 pouces d'ouverture et que, sauf
des circonstances exceptionnelles, le grossissement employé ne doit pas
dépasser lUU ou 200.
En résumé, les observations de M. W. II. Pickering confirment celles de
M. Schia{)arelli, quant à l'existence de ces lignes énigmatiques.
l'i.AMMAïuoN. — Mars. 30
i(.G 1-A n.ANi:Ti: m a us.
CXX.W m. I8'JU. -- As.vrii Hall. Obscrcalioiis de Mars à Wasliiiujloii.
M. Asapli Hall, l'émincnl asti'onomo aii((ucl oiidoil la découverte des satel-
lites de Mars, a fait, du -28 mai au 25 juin 18DU. uuc nouvelle série d'obser-
vations de ces satellites. Elles confirment les orbites.
(^n a essayé, en plusieurs nuits, de rcciuinaîlre les canaux doubles, mais
sans y réussir. L'image de la planète était dilTuse et ondulcuse. On sait (|ucla
planète est restée très basse.
Le grand équatorial de l'Observatoire naval de Washington mesure, ci.imme
on le sait, 2G pouces anglais ou U'",G6 d'ouverture.
Cette persistance d'invisibilité dans ce gigantesque instrument est bien
curieuse.
nXXXIX. 1890. — Keeler. Taches blanches sur le lerminateur de Mars.
Un aspect analogue h celui que l'on observe au bord de la Lune, le long
du lerminateur de l'hémisphère éclairé par le Soleil, lorsque les sommets
des montagnes lunaires et des cirques se montrent en dehors de la région
complètement éclairée, a été observé sur Mars à l'aide du .grand équatorial
de 36 pouces de l'Observatoire Lick, pendant les soirées des 5 et 6 juillet. Une
esquisse par M. J.-E. Keeler, le 5 juillet, à 10'', montre une tache blanche
elliptique fort étroite mesurant de 1"| à2"de longueur, se projetant au Nord
en formant un petit angle avec la ligne du lerminateur. La soirée était très
belle et l'atmosphère excellente. A 10''30'", cette petite tache blanche était
entrée dans le disque et restait visible sur un fond plus sombre. Le lende-
main G juillet, le môme aspect a été observé avec le plus grand soin. On put
suivre une tache blanche analogue pendant plus d'une heure ; on en observa
même deux qui se réunirent. De ces deux taches, l'inférieure était située à
l'extrémité d'une longue bande brillante de la surface de la planète allongée
au nord de Deuteronilus. L'interprétation la plus simple de ce phénomène
est naturellement de considérer cette bande comme élevée au-dessus de la
surface générale de la planète. A 10'' 25'", l'aspect était le même que celui de
la veille et avait certainement la même cause.
Les observateurs ont fait plusieurs esquisses. Les principaux canaux de
M. Schiaparelli ont été vus sous forme de bandes larges et diffuses assez
faibles, excepté le Gehon qui était très fort. On les a vus doubles {Aslrono-
mical Society of the Pacific y t. II, p. 299. — V Astronomie, 1890, p. 46.5.)
Les deux satellites de Mars ont été aperçus par un visiteur, une dame, qui
ignorait leur existence. La planète était au centre du champ et n'était pas
masquée par une Ijarre.
l8'.Hi (. I I. VMM \l;|(».\. -^ (U{Si;U\ A I |(»N> i; I (liOnllS.
407
(!l,\. I8!l(l. (!. l'i, \M\i \i!iit\. Ohsrrriiliiiiis ) f rrni/iiis.
La planète osL rcsléc très basse pour nos latitudes et les observations onl
été des plus diflicilcs. D'autre part, les belles nuits ont été très rares pendant
l'été de 1890 ; presque sans arrêt, le ciel est resté pluvieux ou rouvert. La pé-
OiicKiues aspccls de la pianote .Mar» eu 1890. (Troquis de .M. Flainmariyii.)
riode de ropposition, i|ui rùi pu rtrc très favorable à cause de la proximité
de La planète, a été en partie perdue. L'illustre et laborieu.\ M. Iluggins, (jui
avait bien voulu nous promettre de faire cette année une nouvelle étude
spectrale de Mars, nous écrivait de Londres que la faible hauteur de l'astre,
jointe aux mauvaises conditions atmosphériques, avait rendu impossible
la réalisation de ce désir.
Parmi les observations (]ue nous avons pu faire à notre Observatoire de
.luvisy, nous signalerons seulement celles des 27, 30 et 31 juillet, que nous
olTrons à nos lecteurs comme moins mauvaises que les autres. C'est déjà
loin de l'opposition, qui a eu lieu le 27 mai, et la phase était très marquée.
La distance de la Terre était de O.GGO, ou de 98 millions de kilomètres.
468 lA im.am:ik m a us.
Les observalions ont clé l'aitos à l'aide do l'equalorial de U"'.24, muni de
grostiissemenls de liO, ':?"30 et 300, vers Theure du passage au méiidicn et
généralement avaiil la nuit lonibce. \oici un extrait relatif aux dessins
reproduits ici [fnj. 238) :
'27 juillet, 7''ii, oc. 1 iO [/'nj. A). — Uiol ])arl'aitoincnt pur; vue assez bonne, ricino
lumière solaire (coucher du Soleil à 7'' 'il'"). Le continent a est très jaune. Le
pôle inférieur (boréal) est très blanc. Le pôle supérieur est blanchâtre en cl et
en c. La mer du Sablier, qui était bien visible au méridien central du disque,
à 5'* vO"', et assez avancée vers l'Ouest dans un dessin pris à d'', approche du
bord occidental. Elle est plus foncée dans sa région moyenne, en face du point
marqué c. Il en était déjà de morne à G''0'".
Diamètre : 14", i. — Passage au méridien à 7''3;i"'.
30 juillet, G''4Ô'", oc. 1 iO (/ig. B). — Ciel parfaitement pur. Journée cliuude, soleil
ardent. Atmosphère calme. On aperçoit les deux pôles. L'inférieur est mieux
marqué et plus blanc. La pointe de la mer du Sablier est dirigée vers la droite
ou vers l'est de la calotte polaire. Elle est plus foncée vers son rivage oriental.
En a, cap certain.
Même jour, 7''20"', oc. 2io (fig. C). — Mars au mcridicu. Le pôle inférieur est
très blanc. La mer du Sablier a dépassé le méridien central. Elle est plus foncée
dans sa région centrale. Le détroit Ilerschel II se détache du fond et se montre
plus foncé au point marqué. On devine une mer au-dessus du pôle inférieur. La
pointe de la mer du Sablier se dirige vers Test de la calotte polaire.
Même jour, à S^^^S"'. De nuit (coucher du Soleil à 7''40"'). Observé sans dlu-
ndnation de chami». Bonne image. Oc. 300 {fig. Dj. — Le pôle inférieur est bien
marqué. Détroit d'IIerschel II assez bien détaché. En a, cap ; en b, golfe; b est
la baie du Méridien : on la devine et, au-dessous, on aperçoit une traînée grise.
La mer du Sablier est très foncée sur la région indiquée. Le continent est d'un
beau jaune de blé mûr. Le tour du disque, à gauche ou à l'occident, est très clair
et presque blanc.
Diamètre : 14", 1. — Passage au méridien à 7''25'".
31 juillet, 7''20'", oc. 300 (fig, E). — Journée magnifique, ardent soleU, mais
atmosphère calme et ciel très pur. La mer du Sablier passe au méridien central
de l'hémisphère martien tourné vers nous. Toute sa région orientale est sombre,
presque noire. Sa pointe inférieure se dirige non vers la calotte polaire, mais
sensiblement vers sa droite. On distingue assez bien son prolongement (passe
de Xasmyth), ainsi que la mer polaire boréale au-dessus du pôle. Le cap polaire
est bien blanc, mais ne dépasse pas le disque par irradiation. Kn liaut, la région
est blanchâtre et vague. Au-dessus de la mer Flammarion, la région b se montre
très pâle (ile Dreyer). La terre de Lockyer c est pâle, au-dessous du pôle austral.
Même jour, kS^ib"», oc. 300 {fig. F).— L'image est plus onduleuse qu'au coucher
du Soleil. (Le meilleur moment pour dessiner Mars est certainement la demi-
heure qui précède le coucher du Soleil/. On distingue fort bien le détroit
18'JO C. rr.AMM AIIIOX. — (UtSKUV ATIONS I:T CUOQUIS. 'i09
iriForschol ot l;i baio du .ML-riilicn. lui ;i, le cap liaiilvS est de ton»ps on temps
trt'S évident. La mer du Sablier est sombre, Au-dossus de la calotte polaire, mer
<,'rise. Bonne imago. I/oculaire 400 ne montre ni mieux ni autre chose.
Diamètre: l-i'^U. — Passage au nif-ridion kV'li'".
Ces observations no nous apprennent pas grand'chose de nouveau, si ce
n'est peut-être qu'il faisait fort l)eau sur Mars, que les nuages y étaient
rares, et sans aller trop loin peut-être, que le vent n'était pas très fort à la
surface de la mer du Sablier pendant les observations. En effet, cette mer a
constamment paru très sombre. Il n'est pas douteux que l'agitation de la
surface d'une mer par le vent n'ait pour effet de rendre cette surface moins
unie, moins absorbante pour les rayons solaires, et de la décomposer en
millions do petites facettes réflcclnssanl la lumière incidente et par consé-
quent donnant à cotte surface, vue d'en haut, un ton plus clair que lorsqu'elle
estcalmo ot unie. Nous pourrions donc apprécier d'ici l'état de la mer, calme
ou agitée, à la surface de la planète Mars. Mais il y a d'autres causes de
variations de tons.
Le pôle inférieur ou boréal s'est montré couvert de neiges. Cependant il
n'est arrivé à son solstice d'hiver que le 2G novembre. Il est vrai que cet
hémisphère boréal de Mars était entré dans son équinoxe d'automne depuis
le 3 juillet; sa saison d'été était donc passée, et sa saison d'hiver commencée.
Nous avons estimé le diamètre de la calotte polaire boréale à iV^i^tliamètre
du disque, ce qui correspondrait à 480 kilomètres, et sans doute plutôt à 240,
en admettant que l'effet dû à l'irradiation augmente de moitié ce diamètre.
Nous avons souvent trouvé ces neiges beaucoup plus brillantes et plus éten-
dues, notamment au mois de juin 1873 où, dans une lunette de 108""", elle?
semblaient sortir du disque par irradiation.
Continuées au mois d'août, les observations montrèrent que la neige du
pôle inférieur s'accrut lentement, de semaine en semaine. Celle du pôle
supérieur resta à peine perceptible, La latitude du centre du disque étant
de +' G% il était naturel que l'on vît mieux le pôle boréal que le pôle austral ;
mais, comme cette latitude diminuait et que la planète se présentait déplus
en plus de face, on aurait dû voir de moins en moins la neige du pôle nord.
Klle devint au contraire plus apparente. Donc elle augmentait.
.V la fin de septembre et en octobre, on distingua la neige australe, qui
mesurait de 25° à 30", Elle diminua en.suitc visiblement. Dans une obser-
vation que j'ai pu faire à l'Observatoire de Nice, le 13 décembre, elle mesurait
environ 10". et elle se réduisit encore davantage ensuite.
S70 LA PI. \Ni:Tr M \us.
(IM.I. ISOd. — Trr.in. I^titdt'x nouvelles. Observalinns de MM. Srhinpitrrlli
rf Sfanleii W'illinms.
L'apparence de can;uix simples du géminés à la surface île Mars, signalée
pour la première fois par M. Schiaparelli, écrit M. Terby i ' . a-t-elle été vérifiée
rt'ellement par d'autres observateurs ? Malgré les résultats positifs obtenus pen-
dant l'opposition de 1888, certains doutes semblaient encore rester dans l'esprit
de quelques astronomes. On invoquait surtout les résultats en partie négatifs de
l'Observatoire Lick ; on oubliait que MM. Ilolden et Kceler avaient, on réalité,
observé quel([ues canaux, eu commençant leurs investigations seulement trois
mois après l'opposition, h une époque où la planète, trop éloignée, est déjà aban-
donnée par les aréographes.
On attendait donc avec impatience les premières nouvelles de l'opposition de
1890. Un astronome anglais bien connu, M. Stanley Williams, est en voie do
rendre pleine justice à M. Schiaparelli.
Mars s'est présenté, cette année, dans des conditions déplorables : sa décli-
naison australe de 230 ne lui permet de s'élever que de 16« environ au-dessus de
notre horizon, à son passage au méridien ; aussi les ondulations continuelles de
l'image ne m'ont-elles permis, jusqu'au 23 juin, que de distinguer nettement les
grandes lignes de la configuration, sans aucun détail délicat ; malgré des tenta-
tives répétées, poursuivies chaque fois pendant une heure ou deux au moins,
je dois dire, avec le plus vif regret, que mes résultats ont été d'une nullité abso-
lue jusqu'à cette date.
Le 23 juin, pour la première fois, de 9^ à 10'', j'ai pu utiliser avec quelque
avantage l'oculaire 450 de mon 8 pouces -, j'ai vu alors, avec une grande netteté,
et pour la première fois aussi, la baie que M. Schiaparelli figure sur la côte de la
Grande Syrte, et d'où partent les deux canaux Astusapes et Astaboras ; par mo-
ments, et avec une grande certitude, je voyais la Syrte se bifurquer en ce point :
d'un côté, elle se continuait par la Nilosyrte, très visible, et de l'autre par le
i-anal Astusapes, qui partait de la baie en question et circonscrivait l'île Meroe.
liC Protonilus avec le lac Ismenius et le Callirrhoe étaient encore plus visibles.
Le 24 juin, de 10'* à 10''3o™, l'image fut assez bonne pour supporter les ocu-
laires 250, 280 et 450 ; je revis les mêmes détails que la veille ; de plus, par mo-
ments seulement, mais avec une certitude complète, je vis le canal Astaboras se
rendant en ligne droite de la baie dont j'ai parlé au lac Ismenius ; j'observais ce
canal pour la première fois. Le Népenthès était extrêmement visible en cette
occasion, et je crois même avoir vu à son origine le lac Mœris.
Le 25 juin, de 9*» à lO*», l'image était de médiocre qualité ; une agitation conti-
nuelle rendit presque invisibles les canaux Astusapes et Astaboras, ce dernier
surtout, mais sans effacer la baie où ces deux lignes prennent naissance ; par
('; Académif de Belgique. — L'Aslronornin, novembre l<^9(i.
1800 TRRBV. — r:TL:i)KS NOUVKI.IJ- S. /i71
contre, je vis assez bien la Bordosyrte, parfaitement la Nilosyrto et le N('pentli("'s ;
<'galenicnt le Protonilus et le lac Ismonius ; le Callirrhue était plus difficile.
I/accord avec la carte était remarquable. L'oculaire 2.j0 seul donnait la netteté
voulue, mais il était insuffisant comme force; 280, 4'20, 450 et 5G0 manquaient
de netteté, tout on rendant pourtant quelques services. La région blanche Ilellas,
bien limitée, brillait au bord supérieur, et au bord septentrional, sous le CaU
lirrhoe, régnait également une vive blancheur.
Toiles sont les seules observations utiles que j'aie pu faire.
Circonstance à noter.: la vue de l'observateur semble avoir une influence
énorme dans ces recherches délicates. Il est certain qu'une condition essentielle
de visibilité des canaux est une netteté irréprochable du contour des taches ;
n'oublions point que, dans ces circonstances de visibilité, l'image a été comparée
à une gravure sur acier. La vue de tous les observateurs ne semble point se
prêter à des résultats aussi parfaits, et les premiers dessins de Milan ont même
soulevé des objections à cause de leur netteté extraordinaire.
.M. Stanley Williams a publié récemment ses observations sur Jupiter pour 1887
et, au lieu d'ofi'rir l'aspect nuageux et vague que l'on rencontre si souvent dans
les dessins de cette planète, les figures de l'astronome anglais semblent quelque
peu étranges, uniquement à, cause de la précision inusitée des contours i ' i.
Par une heureuse coïncidence, ayant observé Jupiter indépendamment à la même
époque, j'ai pu identifier presque tous ces détails.
Or, il se fait que M. Stanley Williams vient d'obtenir le plus magnifique succès
on étudiant Mars cette année : il observe au sud de l'Angleterre, avec un téles-
cope à miroir de 6 pouces ■?, de Calver, et des grossissements de 320 et de
430 fois. A la date du 31 mai, il avait été favorisé déjà au point de pouvoir iden-
tifier trente-trois canaux : Cyclops, Eunostos, Ilyblaeus, Hades, Styx, Cerberus,
Tanaïs, Laestrygon, Alcyonius, Ceraunius, Gigas, Chrysorrhoas, Ganges, Nilo-
keras, Jamuna, Nilus, Indus, Protonilus, Hiddekel, Deuteronilus, Gehon, Léthes.
."Ethiops, Titan, Erebus, Sirenius, Orcus, Pyriphlegeton, Euphrates, Népenthès,
Pinson, Asclepius, Triton.
Il avait remarqué la gémination de cinq canaux (Nilokeras, Cerberus, Erebus
ou Ilades, Titan, Euphrates) et soupçonné celle du Phison.
Enfin l'astronome anglais parle aussi de la Libye ; il l'observa les 18, 20, 21 et
24 mai, aussi le 24 juin ; cette région ofi'rait un éclat très faible le 21 mai ; mais,
le 24, elle était plus brillante ; toutefois elle paraissait obscure en comparaison
de l'Isidis Regio, plus blanche et plus éclatante.
J'ai remarqué moi-même cette teinte grisâtre de la Libye les 23, 24 et 25 juin,
à l'occasion des observations du Népenthès, citées plus haut.
M. Williams signale que les canaux les plus délicats devenaient visibles
seulement à leur passage par le centre du disque ; rarement donc on en voyait
plusieurs à la fois : leur observation était généralement d'une grande difficulté.
;•; Vuy. L Astronomie, octobre 1889. p. 3r.l à. 371.
47? LA l'I.ANKTK .MA|{S.
.lai jdiut à cette noie les cinq beaux dessins inodits de l'ohsorvatour anglais
{ftg. ^39 ;\ »i3) ; ils font apprécier, mieux i|ue toute description, les rc'sultats
iMK. iaa.
Fis. 2'i0.
29 avril, de ISi-nS-^ à I4M> (')
25 avril, do li^W"' à loMô-" {'
extraordinaires, pour cette période défavorable, que cet astronome a eu le
bonheur d'obtenir.
M. Stanley Williams a réussi à distinguer, de plus, dix autres lignes : Boreas,
Agatliodœmon (eu partie), Fortunaî, Nectar, Eumenides, Oxus, Ilydaspes, Thoth,
Callirrhoe, Astusapes ; ce qui porte à quarante-trois le nombre des canaux véri-
Fig. 241.
FiR. 242.
Fiff. 243.
I8mai.de 12'' 15" àl.>0" (')
24 mai. de 12'' à 12'' 50" (*)•
27 juiu, àlO'- (')
fiés par lui. M. Williams a vu distinctement la gémination du Gigas le 0 juin.
Le 31 mai. à 1 1'- .')•", pendant quelques moments d'une grande netteté, il a vu le
(') b, PropontLs; c. Triviiim Charontis; d, tache grise très faible; c. Titan: /". Errbus nu Hades;
(). Boreas? U, Sirenius; i, blancheur ovale; /, région plus brillante.
(') b, Trivium Charontis; g, Laestrygon ; h, Cyclops; i, Cerberus; /;. Hades; /, Styx; m. Eunos-
îos;/), .^thiops; r, Elysium ; s, Hyblaeus; t, Propontis.
C) h, Nilosyrtis; i, Protonilus; h, Hiddekel; s, Libya; /. Euphrates; e, Ismenius lacus; m, petite
tache grisâtre.
(M h. Triton: /. Libya; k, Isidis Regio; c. Nilosyrtis; '/, Protonilus; e, Boreosyrtis: f, Asclepius;
g. Nf'-penthès.
( = ) f], Libya; 7i, Nilosyrtis; i, Thoth; m, Astusapes; p. Asflcpius; r. Protonilus; s. Pliison;
f. Hellas; u, petite tache noirâtre.
ISOd TKlUiV. - r.Tl'DKS N()UVi:iJ,KS. 17:1
CorlK'M-e ot ri]r<'bo travoi-sant In disfiuo sur le prolon^onicut l'un do laiitro, et
formant comme un seul canal qui tHait distinctement double ; les doux traits fur-
inaiit il' iirciiiier ('taicnt plus larges et plus noirs que ceux qui constituaient
l'Kn'be et donnaient lieu ;\ un élargissement du canal, à partir du point où
commençait le Cerbère.
La tache polaire septentrionale est rostôo très petite jusqu'au commencomont
do juin ; vers le milieu de ce mois, elle fut ou complètement invisible ou repr(?-
sentécpar une faible trace. Vers la fin de juin, elle s'accrut beaucoup, subitement,
et devint plus brillante. Ainsi, les 2i et 20 juin (O"";)!)"), on la voyait à peine;
le 27, au contraire, ;\ 10 heures, elle apparaissait comme le montre la fifj. 2'»3.
Le même dessin montre un point très noir, dans la Nilosyrle ; malheureuse-
ment, l'image se troublant un peu, M. Williams n'a pu étudier ce détail avec tout
le soin nécessaire. Je me demande si cette tache n'était pas due à la présence
du lac Mœris.
^L Schiaparelli ayant bien voulu, comme >L Williams, m'autoriser à faire
connaître des nouvelles absolument inédites jusqu'ici, je terminerai cette com-
munication en donnant quelques extraits des lettres qu'il a bien voulu m'a-
dresser ; celles-ci étaient accompagnées des trois superbes dessins ci-dessous
{fig. 244 à 240).
C'est depuis le 10 mai seulement que M. Schiaparelli a pu faire des observations
utiles :
« Tout ce que j'ai vu jusqu'à présent, écrivait-il à la date du 12 juin, est
résumé presque entièrement dans les dessins que je vous envoie. A l'égard du
troisième (16 mai) [fig. 244]. je dois observer que les canaux situés eu bas,
Protonilus et Deuteronilus, Callirrhoe, Boreosyrtis, Astusapes, Pyramus, et les
lacs Ismenius et Arethusa, avec le fragment d'Euphrates qui les réunit, étaient
très visibles, surtout le Callirrhoe et lo Protonilus. (Le Callirrhoe a été vu aussi
à Florence par M. Giovannozzi as'ec un 4 pouces de Fraunhofer (voy. p. 479),
L'étranglement du Protonilus était marqué avec beaucoup d'évidence. Pour ce qui
concerne les canaux près du limbe droit, Iliddckel. Gehon, Oxus..., ils étaient
fort déliés, et l'on no pouvait juger ni de leur forme, ni de leur couleur. Au
contraire, Euphrates, Phison, Typhon et Oroates avaient disparu comme canaux,
et il ne restait à leur place que des bandes d'un rouge un peu plus foncé que
le champ environnant, bandes qui ne paraissaient pas bien terminées, et dont il
n'était possible de constater que l'existence et la couleur. Il n'était pas même
possible d'estimer leur largeur, qui, du reste, devait être considérable, puis-
qu'elle rendait visibles ces bandes malgré le peu de contraste dans la couleur.
Le même jour, la terre de Deucalion était fort belle, et, ce qui est remarquable,
beaucoup plus large à l'extrémité gauche qu'à la racine ; chose que je vois pour
la première fois. Tout était confus de l'autre côté, Ilellas, Ausonia, Libya, etc..
>Kiis Japygia était assez évidente.
» Les 4 et 0 juin, j'ai pu examiner avec une certaine netteté toute la grande
région comprise entre Iris et Titan (méridiens Iiuo-I70"i. hx Mare Sirennni et
M\
LA pl.\\I:ti-: m a m s.
l'Eurotas (parallMcs 30° sud ot .".Où nord) : elle est do nouveau à peu prrs vide
d'objets romarquables, connue en 1877, 1870 ; des ennnux il ne subsiste (luc des
traces douteuses vers les bords île la région; le reste est une bigarrure de rouge
et de jaune de dilliirentes intensités, éventuellement avec un peu do blanc par-ci.
par-l;\, sans délimitation exacte ; c'est la région la plus difficile et la moins inté-
ressante de toute la planète. L'Araxes et le Plïasis existent, bien que fort diffl -
ciles ;\ voir : l'Iris peut :\ peine (Hre conjecturé ; le double Ceraunius est assez
Fig. 24'..
Mars en ISfln. — Canaux transformé.';. Dessin de M. Schiaparelli ( IG mai)
visible à cause de sa grandeur, mais sa teinte est d'un rougeâtre à peine marqué.
Les deux Nilus ne sont pas bien sûrs. Seulement, en bas du disque, on voit
l'Eurotas, qui forme une gémination imparfaite, et l'IIébrus qui, double en 1888,
est maintenant simple.
'• La soirée du 0 juin a donné des résultats plus nouveaux, qui sont représentés
d'une manière assez satisfaisante par l'autre dessin (/Ig. 245). Vous verrez la grande
gémination du Cbrysorrhoas et du Nilokeras, cette dernière plus foncée et plus
évidente, bien que l'autre soit très visible aussi ; les deux lignes ne sont pas
bien définies, mais plutôt estompées, soit du côté intérieur, soit du côté exté-
rieur. La mer Acidalium ne présente rien de nouveau, mais il faut remarquer
l'absence totale du lacus Hyperboreus : les régions Baltia et Nerigos sont mal
définies et d'apparence nébuleuse. Pas d'IIydaspes, Jamuna comme un fil délié ;
Ganges et Ilydraotes plus larges ; je ne puis les dédoubler, mais leur aspect est
résoluble. En haut, Argyre très brillante. Mais c'est Thaumasia et le Lacus Solis
I.^'.MJ
ri'iinv
rrriDKs NOL'vi-LLi:s,
qui olTront lo plus d'intérêt. Le lac «lu Soleil, cette tache si bollo, si noire ot si
l'égulièrc. n'a pu se soustraire au principe do la géniination (pii tyrannise toute
lu planète : il est coupé en travers pa)- une bande jaune qui le dici>ie en tU-ux
parties d'extension inégale. Lo lac Tithonius est aussi partagé en deux noyaux
•l'ombre très forte, auxquels aboutissent les deux lignes qui composent le
double Chrysorrhoas. Les anciens émissaires du lac du Soleil ont disparu :
■seulement j'ai cru obsorver une faible trace de rKosphoros: mais r/ua/re émissaires
Fie-. 24:..
Mars L'ii 1800. — Lai- fonilu en deux. Des^^in de ^r. Schiaparelli (',) juin >.
tout h l'ail nouveaux se sont ouverts, dont le plus à gauche passe sur l'Aurea
Cherso. Cette presqu'île, autrefois si belle, est k peu près abolie, ou du moins
tran.<formée. La région Thaumasia est d'un jaune sombre qui contraste beaucoup
avec la surface brillante des environs, surtout du limbe supérieur d'Ophir. qui
est tout à fait blanc... Voyez sur ce dessin le canal marqué 1 : lo i juin, il était
beaucoup plus fort que le (i ; le mémo jour, i juin, il n'y avait pas de trace vi-
sible des canaux marqués 2 et 3; quarante-huit heures après, ils étaient de la plus
grande évidence. ■>
Dans iino autre lollre datée du 01 juin, le Direchnir de lObsorvaloirc do
Milan ajoute :
' -M. Stanley Williams avait bien raison eu voyant l'Iùiphratos doublé; il l'est
elTectivement (voir fin- -'iG), et mieux qu'en 1888; les deux bandes sont parfaites
et la coulf^ur (^st de ce rouge caractéristique que j'ai déjà plusieurs fois signalé
W6
|.A n.ANÏ:TK MAIiS.
dans do semblables l'urmations; .seulement elle n'est pas tr^s intense. Avec luiei
dans le même style, sont doublés Pinson, Orontes, l'rotonilus et Boreosyrtis : peut-
être Astusapes, Astaboras, Oxus, Deuteronilus. Mais il y a quatre .eéminations
composées de lijïnes fortes, et je suis persuadé qu'on les verra ailleurs, si l'on y
apporte une attention suffisante : l'une est le Népentln'S, qui est tout à l'ait eomme
en J888; seulement le lac Mœris est beaucoup plus large et plus visible qu'alors.
Deux autres géminations ont rendu pro!<(iuc mrconnnissahlc le Sinus Sabn^us,
:\Iars on 1890. — DtHroit fendu on denx. Dessin do M. Schinpnrolli (^0 juin).
depuis Ilammonis Cornu jusqu'à la double baie de Dawes. Kiifin, la quatri(''mo
gémination est dans l'isthme de la Deucalionis Regio (qui cette année se présente
plus brillante et mieux terminée qu'autrefois). Les lignes de ces quatre gémina-
tions sont peut-être de la même couleur que les autres, mais cette couleur est si
forte qu'on la dirait presque noire. C'est comme l'encre de Chine qu'on peut char-
ger au point de la rendre noire. »
Ainsi s'exprime M. Schiaparclli. Les deux faits les plus surprenants que
renferme sa communication sont évidemment le dédoublement du lac du
Soleil et celui du détroit d'Herschel II. qui se montre composé de deux
bandes rectilignes, larges, parallèles, mais très rapprochées, très diffici-
lement séparables. (Nous avons déjà vu un aspect analogue, cartes des
p. 355 et 3G1.) Les lacs Ismenius et Tithonius sont également dédoublés. Il
semble donc que nulle formation à la surface de cette planète ne soit sous-
traite à ce curieux phénomène de la gémination !
S'JU
.1. (lUIl.L.VU.Mi;. ()USi;il\ ATIO.NS.
47'
;\l,ll. 18110. — .1. (iuiLLAL.Mii:, Ciiov.vNNo/.zi . \\'isLi(:KM>j. (•Htscrculions cl dessins.
M. GuilIaiuno, ohscrvalcui- ;ï l'ôronnas, aiiiioiio- cju il est parvenu àdis-
l'J-17 mai, minuit 2-')"
l'.l mai, Jo'-.j™.
■23 mai, 11'-.
10 mai. l'v
II) juin, 10'' lô"
2(1 juin, 9i'2.>"'.
23 juin, 8''30"'.
10 juillet. S"-
Lu canal iliJcloubK'.
Fig. 2Ï1. — Dessins de ."Mars en IS'.id. par M. J. Guillaume, à Péronnas.
tiugiier un certain iioniJirc de canaii.K ut mùinc à en dédoubler ([uelques-uns,
(') Hiilleliii <le i'Acud.Jinic de licl<,'ii|iic, 1890. — l.'A^trouuiiiic, UKii I8'J1.
i78
I. A l'I.AM:ii; \IAKS
;"i l'aide d un excellent télescope réllecteur do Willi <1»' 2Ui""" de diamètre ci
l^.Oô de foyer, armé en général de grossissements de l'JJ. Il les voit d'un
rose-brique. Il a observé souvent des variations de teintes sur certaines mers
et les attribue à la présence de nuages dans l'atmosphère de Mars, (lomme
témoignage en faveur de cette explication, l'observateur signale son dessin
du m mai. à 10''")'". comparé à celui du 23 mai, à IP' : •< Il est évident.
remarque-1-il. que le lit l'atmosphère était moins pure sur celte région que
le 23 )..
Nous reproduisons {/iy. 2i71 une partie des dessins de M. riuillaumo.
Cet astronome ne parle pas de la séparation si curieuse du lac du Soleil
observée à Milan [voy. p. 475 , ni de celle du lac Ismenius, ni de celle du
détroit d'IIerschel.
M. Giovannozzi, directeur de l'Ubservaloire Ximenienà Florence, a observe
Fig. '2'i8.
b'
'i l'?
jy
Aspect général lie .Mars, flapres les obscrvalions de M. diovanaozzi. en 18'-'0.
Mars, de son côté, à l'aide d'une lunette de 108'"''', de Fraunhofoj-. munie de
grossissements de 10.5 et même 240. Nous reproduisons ici {fig. 248) la petite
carte que cet astronome a tracée sur l'ensemble de .ses observations. Comme
concordance avec les précédentes, remarquons l'éclaircissement observé au-
dessus de la mer du Sablier et à droite et le pi-olongement inférieur de celte
mer (comparer le dessin publié plus haut, p. 474). Comme discordances atlii-
buables à l'indécision des détails, remarquons deux dessins des 16 et 24 juin
[fig. 249 et 250 j , comparés à ceux de M, Guillaume. Le premier a été fait sensi-
blement à la même heure que le sixième dessin de la page précédente, à 1 1*" de
Rome, ce qui correspond à 10''20'" de Paris, celui de Péronnas ayant été fait
à lO^'lô'". Le point p indique la baie du Méridien et le point g la baicBurton :
ces deux baies sont très courtes ici, et très allongées au contraire sur le
dessin de M. Guillaume. On ne peut pas attribuer cette différence à celle
IS'.M)
(JION ANNOZ/I \N ISI.ICKNUS. — ( HiSKUN A IK »NS.
îT'.i
deluvut; ou de rinslninient. i)iiis(iiir M. Ciiovaiiiiozzi a aperçu le lac du So-
leil que M. Guillaume u'a pas vu. On remarque encore, au point n, un aspect
sensihlomenl difTefent do celui de l'autre dessin.
La comparaison des deux dessins du 23 juin n'esl pas moins instruclivc
t'isr- -"'" Fig. 250.
ni juin. :i ll^d"'
Dessins de Maiv
11 IS'.IO, par .M. (jiovaiiuozzi. ii Florence.
Concluons, en résumé, que. lorsqu'on arrive aux détails légers et à peine
sensibles qui sont à la limite de la visibilité, nous devons attribuer les di-
vergences inévitables à la difficulté des observations et à l'obligation dans
laquelle nous nous trouvons- tous, en dessinant une planète, de marquer par
un trait de crayon ce que nous n'avons observé que par instants et sous des
aspects plus ou moins vagues et indécis. La Photographie nous sauvera
peut-être un jour de ces incertitudes. Mais quand y
Malgré la latitude australe assez forte de la planète, M. Wislicenus, astm-
nome à Strasbourg, est parvenu à quelques résultats intéressants (''. Le
temps n a pas été très favorable, et llnstrument a été souvent employé à d'au-
tres recherches; de sorte que l'auteur n'a pu faire que vingt observations,
du 12 avril au 1" août. Au maximum, la planète ne s'est élevée qu'à moins de
20° au-dessus de l'horizon. Les premiers essais ont été faits à l'aide du réfrac-
teur de 18 pouces ; mais, à cause de la faible hauteur de l'aslre et de l'ondu-
lation des images, il n'y avait aucun avantage à employer de forts grossis-
sements, et l'observateur s'est servi de préférence d'une lunette de 6 pouces
seulement, armée de grossissement de 182. 11 a été possible de prendre
21 dessins, de mesurer en seize jours différents l'angle de position de
l'axe de rotation, el, pendant six autres jours, de prendre les mesures des
lâches*.
L'équateur de Mais était alors si peu incdiné sur notre rayon visuel (|ue la
tache neigeuse du pôle nord était à peine visible. Mais celle qui environne
",i Axlroii. .\ach.. \r Mi'i. - L Aslrunomic, juillet IS'.U.
480 I. A IM.ANKTi: M A II S.
le pôle sud a élu visible ciiKj l'ois et roliscrvaleur jnil cssayor do pi-riidrc
l'augle de position du point cculral de la laclie. Sur ces cinq jours, la lâche
boréale a été en même temps visible trois l'ois, de sorte que l'on pouvait voir
la position des deux pôles. La tache neigeuse boréale était petite et assez
nettement définie, tandis (|uc les aspects polaires sud ressemblaient davan-
tage à des champs de neige largenicnl étendus, ce (lui rendait dillicile la
détermination du point central.
L'auteur donne, dans une Table, la position du [miiii central des taches
p<daircs nord el sud el l'angle de position de l'axe de la plancle. du il avril
au 13 juillet. Par la furniule de réduction de ces données, il trouve :
Aiifrle de position (te l'axe de Mars 28° ,U9
Distance polaire de la neige boréale 7 ,19
Longitude de la tache polaire boréale 199 ,85
L'auteur n'a pu mesurer des taches de sa première carte (p. 430) que celle
qui porte le n° 1 (la mer du Sablier) ; mais, en outre, il a pu prendre les po-
sitions de 13 autres points indiqués sur celle carte (ir 8 à n" 20), et les me-
surer micrométriquement. C'est une nouvellr triangulaliim.
A'tdci les points mesurés :
1.
8.
9.
10.
11.
12.
13.
14.
15.
16.
17.
IS.
19.
20-
Ces positions nous paraissent toutes un peu trop à droite. Le méridien 0''
est à peu près au point 1 1 de cette carte (/ig. 251 ). Le point 1 ( mer du Sablier;
devrait être à 283", le point 18 (lac du Soleil) à 89°, le point 14 (laciSiliacus)
à 33% le point 13 (golfe des Perles) à 18\ Les différences varient de -r- 5"
à -^ 12°.
Les configurations correspondent, dans leur ensemble, à celles des cartes
de Schiaparelli. Quelques points peuvent être remarqués. Le 3 mai. le lac
Tilhonius paraissait rattaché au lac du ."^olcij. mais, le !J juin, il n'en était
I.oiiiïitiule.
Latitude.
295° ,82
•4- 15° ,07
300 ,63
— 16 ,85
321 ,G5
— 29 ,55
323 ,91
- 8 ,12
8 ,52
-^ 7 ,09
11 ,74
— 24 ,11
28 ,71
-^ 7 ,28
45 ,77
-^ 19 ,32
48 ,05
-h 36 ,89
62 ,34
- 14 ,40
06 ,46
- 7 ,12
94 ,02
— 23 ,70
96 ,91
— 2 ,61
123 ,28
— 9 ,13
I.S90 (il()VA.\.\U/./.l. W ISIJCI-NLS, (.UKliN. 4.S1
plus ainsi. Un a r<'inai'(|uc, lo -i mai. unr lacin- blaudic Ircs Jtiillaiitc .'-ui'lc
lermiiuUour. à l'aiij^le «le posiliou 112",.")5 (à rt''ll"'\
Quant aux canaux, si nombreux dans riiémisplien.' nonl. les csijuisses
exécutées les 27 et 28 avril, :] et -29 mai, 2, :l, !), 16 <.'t 2'J juin, ainsi (jac le
|:j juillet, en laissent voir des traces plus ou moins marquées. Mais l'étal de
l'alniosphère n"a jamais permis de distinij^uer les détails, et surtout de cher-
cher à reconnaître les dédoublements.
La question des dessins de Mars a fait l'objet d'une discussion importante
Fig. -201 .
—4
1^ :
! ■ iJ
— |fPE>
Nouvelle triangulatioa ilc Mais, par IM. WUlicenu-, eu IS'JU.
à la Brilish Aslronomical Association, séance du 31 décembre 1890, lors d'une
conférence de M. Green, relative à ces représentations si variées.
Cette conférence a été illustrée de projections dont nous reproduisons ici
les six principales (/?//. 252) et qui résument l'esprit de celle communication.
Pour M. Green, M. SchiaparcUi n'est pas un dessinateur parlaitemeut sur, et
l'on ne doit accorder qu'une confiance limitée à ses représentations de la planète
Mars. L'auteur rappelle qu'il est depuis son enfance accoutumé à la peinture et
au dessin, et qu'on ne peut pas s'empêcher de remarquer que les dessins de
l'astronome de Mikui dllfèrent beaucoup, même pour l'aspect général de la pla-
nète, des dessins de tous les autres observateurs.
C'est la remarque que M. ^\'.-II. Pickering avait déjà faite iSidereal Mes-
senger, G octobre 1890), en déclarant que la carte de Green est celle qui repré-
sente la planète sous son aspect général le plus conforme aux observations.
M Les contours généraux dessinés par M. Schiaparelli dans ses cartes, ilil
I"r-.\MMAiuûN — Mars. 31
-i8;
LA l'LAXKTK M A US.
M. Green. no sont pas exacts. Non souleiiu'nl ils dilVoronf considorablcmoiil des
aspects représentes par les observateurs expérimentés, mais ils diilV'i'ont même
entre eux. Si donc les formes générales des contiiients et des mers sont mal
dessinées et ne sont pas conformes à la réalité, nous pouvons douter encore
davantage de l'exactitude des détails minuscules qui sont encore plus difficiles
;\ représenter.
' La carte de l'astronome de JMilan, ajoute-t-il, altère la forme de la mer du
Sablier, spécialement dans son prolongement oriental et pour la forme particu-
lière de la mer Main. La mer Knobel, l'une des configurations les plus distinctes
et les plus faciles à reconnaître de la planète, n'y est pas représentée du tout.
Au lieu de cela, la [ilanète se montre couverte d'un réseau de fines lignes droites
étroites.
D Si nous comjjarons, notamment, trois dessins de M. Scliia]3arelli faits en 1877,
Schiapàrènr^_ /377. ôchiapare/l' — /87S.
Gree/r
Sch/apare/// /35c.
f877. Maunde/- /87S. Bascfôf/cker
Fig. 252. — Comparaison de six dessins de Mais.
m2.
1879 et 1882, avec trois autres dessins faits aux mêmes époques par MM. Green,
Maunder et Bœddicker, nous devrions nous attendre à ce que |les trois dessins
d'un même observateur s'accordent entre eux mieux que ceux faits par trois
observateurs différents. Or, c'est le contraire que l'on remarque. Ne croirait-on
pas plutôt que les trois dessins inférieurs ont été faits par une même main et les
trois supérieurs par trois mains différentes. '/
I) Pourtant, ajoute encore M. Green, qu'est-ce que l'observateur de Milan a
vraiment vu, car enfin il doit avoir vu quelque chose qui donne une base quel-
conque à ses canaux ? Un examen attentif peut résoudre en partie cette question.
1890 DO.M i.A\u:v — coi:ij:ui{ dk i,a rLANiVri- mars. 483
J'ai sous Ips yeux un dessin de .Solii;ii»;u'(lli, de sa série .de 1877, sur lequel la
mer Terby est au méridien. On y remaniue, allant directement au Sud, une légère
traînée sombre. Sur la carte de 18711, le dessin montre deux lignes lortes et, en
1882, on en voit une fine, de sorte que nous avons là trois méthodes pour repré-
senter une seule forme. Observant à Madère, en 1877, j'ai eu plusieurs vues très
belles de cette région de la planète, et s'il y avait eu 1:\ quelque chose ressem-
blant ;\ ces lignes, je l'aurais remarqué. On m'objectera que d'autres les ont vues.
(Ju'on ait aperçu quelque chose de vague, je n'en doute pas un instant ; mais je
suis convaincu que les observateurs ont représenté sous forme de lignes nettes
et claires des aspects tout à fait vagues et indéfinis.
') D'autre part, si l'on compare ifuj. 252) les dessins de 1877, on voit ({ue la ré-
gion vague représentant la mer Main à gauche de la mer du Sablier, dans le
croquis de Grecn, est dessinée par Schiaparelli sous la forme d'un trait de pin-
ceau se terminant par une pointe. En 1879, l'observateur de Milan dessine tout
autrement et d'une manière toute différente que M. Maundcr la même année.
Mais, en 1882, il revient à son premier aspect. Tandis que MM. Green, Maundcr
et Bœddicker ont observé cette région comme une ombre diffuse, M. Schiaparelli
parait n'avoir vu que son bord boréal, nettement arrêté. »
M. Green ajoute que ses dessins du pôle sud de Mars établissent que sa vue et
son instrument ne sont pas inférieurs à ceux de Milan.
M. Noble, président, confirme ces appréciations et assure qu'il nest pas pai--
venu à. retrouver dans les dessins de M. Schiaparelli ce qu'il a observé sur Mar^
depuis longtemps déjà.
La discussion s'est prolongée, laissant l'impression que l'illustre astronome de
Milan serait meilleur observateur d'étoiles doubles que de configurations plané-
taires. Nous publions cette dissertation sous toutes réserves, notre devoir étant
de mettre entre les mains des lecteurs de ce livre toutes les pièces du procès.
CXLllI. 1890. — HoM L.vMEV. Variations de couleur de la planète Mars.
A son Observatoire de (îrignon (Côte-d'O; ), Dom Lamey a fait une série
d'observations qui l'ont conduit aux résultats suivants :
Parmi la série, déjà, assez nombreuse, des aspects physiques de Mars dessinés
à l'Observatoire de Grignon, j'ai eu soin d'en exécuter plusieurs aux crayons
rouge, jaune et bleu, de manière à représenter suffisamment les teintes domi-
nantes de la planète. Or, faisant l'an dernier une revue générale de tous ces des-
sins coloriés, les conclusions que j'avais peu à peu pressenties par l'observation
successive des faits, se sont affirmées avec une telle évidence, qu'en les formu-
lant dès maintenant, je ne crois pas qu'elles puissent être sérieusement modifiées
par des observations ultérieures.
I. Au voisinage de 1 opposiiion, le lund de la planète est assez uniformément
484 I.A l'LANLTl- MA US.
teinte en jiune rougeàtre; les arcs el sinuosités, dont on a voulu faire des canaux,
sont d'un bleu plus ou moins accentué, tournant souvent au gris bleuâtre; les
taches neigeuses des pôles et les autres taches moins hrillanlos des régions
centrales ne paraissent pas varier beaucoup d'éclat par le fait de leur position
l)lus ou moins orientale ou occidentale; toutefois, c'est au centre de la planète
que les taches blanches équatoriales brillent du plus vif éclat.
2. Avant ou après l'opposition, surtout quand les phases deviennent bien
accentuées, les taches blanches équatoriales sont brillantes et nettement déli-
mitées au soleil levant, pâlissent et s'évanouissent en approchant du midi, et
redeviennent particulièrement brillantes, mais vagues, vers le couchant. Leurs
formes varient aussi ; à l'Orient, elles sont arrondies, souvent bordées d'une
arcature bleuâtre. A l'extrême Occident, ces taches assez larges, alors, sont limi-
tées par des arcs moins clairs, dont le centre est fréquemment dirigé à l'Orient;
quant aux arcatures moins occidentales, elles présentent une bordure blanche
et brillante du coté de l'Occident, bleuâtre ou du moins plus sombre du côté de
l'Orient.
3. Après l'opposition, à mesure que la planète gagne la quadrature, les teintes
bleuâtres s'accentuent à l'Orient, tandis que celles tournant au jaune rougeàtre
se concentrent vers l'Occident. Ce phénomène paraît provenir de l'envahisse-
ment, vers l'Orient, des arcs et taches bleuâtres, dont le nombre se multiplie et
dont la teinte se prononce d'autant plus qu'on approche de la quadrature.
En dehors de toute hypothèse et de toute interprétation des formes constatées
pour les taches de Mars, les phénomènes de coloration que je viens de résumer
indiquent avec assez d'évidence qu'ils sont dûs, moins à la qualité intrinsèque
des matérioux répandus à la surface de la planète, qu'à la manière dont ils réflé-
chissent pour nous la lumière du Soleil.
Toutefois, je ne voudrais pas de là inférer que la vaporisation et la conden-
sation des précipités atmosphériques ne jouent pas un certain rôle dans les iné-
galités de coloration de la planète ; mais je suis ])orté à ne leur attribuer qu'un
effet assez secondaire.
A toutes ces observations nous pourrions encore en adjoindre un certain nombre
d'autres, notamment celles de MM. Guiot, Schmoll, Bruguière, Bressy, Léo-
tard, Lihou, Vimont, Courtois, Leclair, Fenet, ïramblay, E. Duval, V. Loiseau,
Duraéuil, Quénisset, Norguet, Ilenrionnet, Cap. Noble, Denning, Antoniadi, Lan-
derer. José Comas, "Valderrama, Decroupet, Lorenzo Kropp, Stenberg, etc. ; mais
elles n'ajouteraient aux précédentes aucun document nouveau ( ').
(') 11 y a eu conjonction de Mars et Jupiter (50'), le 13 novembre 1890, observée,
entre autres, par M.M. Duthcil et Deval, à Billom. Jupiter, brillant du plus vif éclat,
paraissait jaune d'or et Mars offrait une teinte rouge remarquable.
I/()IMM)SITI().N DK l.»^!):. — 1)1 \ M KT lU- l)i; MAUS. -iSû
Opposition de 1892.
Noire but en écrivant cet Ouvrage a étc surtout d'Otre utile aux observa-
teurs, et nous avons pensé qu'il était préférable pour eux do le recevoir au
moment même do l'opposition périhéliquc do 1892. Nous n'attendrons donc
pas les travaux de cette année-ci pour publier cette synthèse aréographiquc.
D'aillours, on peut penser que l'opposition de 1894 donnera aussi des résul-
tats fort intéressants, e-l Ion ne se déciderait jamais àpublier une œuvre du
genre de celle-ci si l'on attendait qu'elle fût vraiment achevée, « Transibunl
generationes, et angel)itur Scionlia ».
Au moment où nous motions la dernière main à ces pages (août 1892 ,
nous possédons déjà nous-méme une bonne série d'observations faites pen-
dant l'apparition actuelle de Mars, à notre Observatoire do .luvisy, observa-
lions dans lesquelles nous sommes heureux d'avoir ou pour collaborateurs
aussi habiles que zélés, MM. Guiot, nuénisset, SchmoU et Mabiro. Malgré la
grande déclinaison australe do la planète (24") et sa trop faible élévation
au-dessus de notre hoiizon (17''^, des ])rumes duquel elle se dégage à peine,
même à son passage au méridien, plusieurs canaux ont été vus et dessinés,
notamment la passe de Nasmyth, fine et déliée, l'indus, le Gange, le Gigas,
riris, le Gorgon, le canal des Titans, celui des Euménides, le Pyriphlégéton
^avec une différonce de cours), l'Hiddekel, le Gehon, l'Oxus. l'Oronle, le
Phison, le Léthé, la Jamuna. Aucun n'a été vu double: ce fait est conforme
à ce qui a été dit plus haut, que les géminations ne se produisent que vers
les équinoxes de printemps et d'automne. (de Mars), non en été, ni en hiver.
Or on a pour 1892 :
Date ni: l'opposition : 4 août.
Équinoxe de printemps austral et d'automne boréal : 20 mai.
Solstice d'été austral et d'hiver boréal : i;] octobre.
La planète incline son pôle sud vers la Terre. La calotte neigeuse a con-
stamment diminué depuis les premières observations faites en mai de 42" à 16'^
( août .
Nous ne citerons des observations qui viennent d'être faites /", à parties
remarques précédentes, que les mesures micrométriques que nous avons
cru utile de prendre du diamètre do Mars.
Il y a, en effet, une divergence toile entre les diamètres adoptés, quelle
nous a paru insoutenable, dans l'état actuel de précision de nos connais-
sances aréographiques.
''} L' Astronomie en |)iiblic lo détail chaque mois.
48fi I. A ri.ANKTI- M A II S.
Voici les diamètres donnés dans les publications astronomiques officielles :
Conuaissaiicr yautiral KphiSnK-riilcs
ISna. fli-s Triniis. .tlmanac. Martli.
1" juillet -ir.î 2r,0 20M7
ir. » 27/2 27 ,0 22 ,75
1" août 29,'» .29,3 24 ,G6
k u (Opposition).. 29 ,4 29 ,4 24 ,70
15 » 29 ,0 29 ,0 24 ,43
1" septembre 2G ,2 26 ,i 22 ,18
La Connaissance des Temps cl le Xautical Almanac sont sensiblement
d'accord, parce qu'ils partent tous deux d'une môme valeur, celle des
Tables de Le Verrier ( 1 1". 10 à la distance 1 ), tandis que M. Marlli a adopté
la valeur résultant de la discussion de M. Hartwig (9"35). Un tel désaccord
est un peu choquant. C'est pourquoi nous avons tenu à profiter de l'oppo-
silion actuelle pour faire de nouvelles mesures niicrométriques.
A notre équatorial de 0'",24, à l'aide d'un micromètre à fils d'araignée et
à l'oculaire 380, nous avons pris une série démesures, à l'houre du passage
de la planète au méridien, les 22 et 23 juillet, 4, 5 et 6 août.
Ces mesures ont donné 24". 50 pour les deux premières dates et 24", 91 jiour
les trois suivantes.
Elles montrent que les valeurs adoptées par la Connaissance des Temps
et le Nautical sont trop fortes, et donnent pour le diamètre à la distance 1 :
9", 39.
Pour éliminer autant que possible l'effet de Tirradialion, iricmc en champ
éclairé, nous avons pris soin de mettre les fils tangents inléiieuremenl aux
bords du disque.
Le diamètre des Tables de Le Verrier est certainement beaucoup trop grand.
CONCLUSIONS DE LA TROISIÈME PÉRIODE.
1877 A 1892.
Nous prions instamment le lecteur de se reporter à la page 96 et à la
page 2Î2 de cet Ouvrage, et de relire les conclusion? do la première et de la
deuxième périodes.
A ces conclusions il ne nous reste à ajouter que les résultats des progrès
réalisés depuis 1877, résultats d'ailleurs de la plus haute valeur. Les voici,
en continuant la notation des séries précédentes. Aux 391 dessins des deux
premières période^, l'observation assidue de la planète vient d'en ajouter
180 autres, ce qui nous représente un ensemble de 571 vues télescopiques
ou cartes aréographiques.
28. Nous adopterons pour le diamètre le plus probable de la planète celui
qui résulte de la discussion de Hartwig (p. 287 et 320) : 9", 35. Pour la paral-
laxe 8", 82, ce diamètre — 0, 530, celui de la Terre étant 1 . Le volume qui en
résulte est 0,149 du globe terrestre.
29. La masse est fixée à 30^3500 de celle du Soleil ou à 0, 105 de celle de la
Terre.
30. La densité (jui en résulte est 0,705, celle de la Terre étant 1, et la pe-
santeur à la surface est 0,376. Un kilogramme terrestre transporté sur Mars
n'y pèserait que 376 grammes. Tout y est plus léger qu'ici.
31. La géographie de Mars, ou l'aréographie, s'est complétée par d«s dé-
couvertes inattendues. Aux continents, aux mers, aux îles, aux lacs, aux
golfes, aux neiges polaires, aux neiges intermittentes, l'observation télesco-
pique a ajuuti- un réseau de tracés rectilignes allant d'une mer à l'autre et
auxquels on a donné le nom de canaux.
32. La nature de ces lignes n'est pas encore déterminée par l'observation.
Cependant, leur emplacement, correspondant avec celui de fleuves arrivant
à des embouchures connues, leur jonction avec les mers, leur couleur, leurs
variations delargeurct parfois momede cours, toutconduit à penser qu'elles
sont dues à un élément mobile, analogui^ à l'eau. Sont-ce vraiment des ca-
naux? Est-ce la même eau qu'ici y Ne s'y ajoute-t-il pas des formations mé-
téoriques aqueuses ou de la végétation ? C'est ce que les observations futures
décideront sans doute.
4SS l.A PI.WKTK MA US.
33. Ya\ corlaines iMi'Constancos, vers les éqiiinoxos de iiriiilcmps et d'aii-
tomne, ces canaux sont vus i1ou1)1ps. Lo phénomène est itcut-clre causé par
une réfraction atmosphérique, comme il arrive dans notre atmosphère par
les cristaux de glace qui produisent les halos et parhélics et rappelant la
double réfraction du spath dislande. Cependant la substance qui forme les
mers, lacs et canaux paraît douée de la propriété do se séparer parfois en
deux parties à peu près épfales. Nous no connaissons rien d'analogue sur la
. Terre.
34. Dos variations inassnnlcs sont observées dans les mers, lacs et canaux,
comme étendue, comme couleur et même comme positions pour ces der-
niers. La planète Mars est un monde vivant.
35. Le ton général des continents est la couleur jaune-roux des blés
mûrs. C'est sans doute celle de la végétation quelconque qui doit recouvrir
ces surfaces.
3G. La carte de la planète est construite par une triangulation géomé-
trique aussi précise que les cartes terrestres, lli points ont été mesurés
micrométriquemcnt.
37. L'inclinaison de Taxe est de 24° 52': les saisons sont donc très peu dif-
férentes des nôtres.
38. La rotation de Mars est fixée avec précision à 24'' 37"' 22% 65. La durée
du jour solaire est de 24'' 39"" 35% 0.
3V). La planète est accompagnée do deux petits satellites, dont lo diamètre
ne paraît pas excéder 12 Ivilomolros pour le premier et 10 pour le second, qui
tournent autour délie, lo premier. Phobos, en 7''39'"14% c'est-à-dire beau-
coup plus rapidement que la planète, le second, Deimos, en 30'' 17"" 54% aux
distances respectives df 6000 kilomètres de la surface pour Phobos et 20000
pour Deimos. Le premier offre un petit disque de 7' et le second un plus petit
encoro, de 2' -i. Vu de Mars, le Soleil offre, en moyenne, un disque de 21'.
40. Le premier satellite ot le Soleil peuvent produire de légères marées
sur les plages unies des mers martiennes et peut-être dans les canaux.
41. L'atmosphère de Mars est plus légère et généralement plus pure que
la nôtre. Les nuages y sont rares. Cependant, outre les neiges polaires, fort
étendues on hiver et très réduites en été, il paraît exister on certaines ré-
gions continentales ou insulaires des neiges et de la gelée blanche. La cli-
matologie martienne est, parmi toutes les planètes, celle qui ressemble le
plus à la climatologie terrestre.
42. Le monde de Mars paraît habitable au môme degré que lo monde ter-
restre. Il est plus ancien, cosmogoniquomont, et S(tn humanité peut être plus
avancée que la nôtre.
SECONDE PARTIE.
RESULTATS CONCLUS DE L'ÉTUDE GÉNÉRALE
DE LA PLANÈTE.
CHAPITRE I.
LORBITE DE MARS
Distance au Soleil. — Durr*^ de la révolution. — E-Kcentricilô. — PiTiode synodique.
— Retour des oppositions. — Variations de distances. — Comment Mars est vu de
la Terre.
Les discussions, les analyses, les comparaisons qui précèdent ont mis
entre nos mains tous les faits de la connaissance astronomique que nous
pouvons avoir actuellement de la planète Mars. Il nous sera facile de com-
pléter maintenant cette étude générale eu exposant brièvement chacun des
grands sujets entre lesquels peut se partager cette connaissance d'un monde
aussi voisin.
Il importe d'abord que nous ayons une idée exacte et précise de tout ce
qui concerne sa révolution autour du Soleil et des relations de cette orbite
avec celle que nous parcourons nous-mêmes annuellement autour du môme
astre. Voici les éléments astronomiques de l'orbite de Mars, et toutes les
données essentielles relatives à cette planète. Nous n'avons pas besoin de
dire ici que, de ces éléments astronomiques, le plus anciennement conmi
est la durée de révolution. 11 y a plus de deux mille ans que l'on observe la
position de Mars dans le zodiaque avec la précision correspondante à chaque
époque. La plus ancienne observation précise de Mars qui nous ait été con-
servée se trouve dans ÏAbnagcste de Ptolémôe, Livre X, Chap, IX. Elle est
datée de la h2° année après la mort d'Alexandre, ou de la 476" de l'ère de
Nabonassar, le matin du 21 Athir, la planète étant voisine de l'étoile f:; du
Scorpion. Cette date correspond au 17 janvier de l'an 272 avant notre ère.
Mais la planète roiigc était observée depuis bien des siècles, et les inscrip-
tions cunéiformes trouvées dans les ruines de Xinive montrent que 2500 ans
avant notre ère le troisième jour de la semaine portail déjà son nom comme
aujourd'hui.
(Mars est passé juste devant le disque de .lupiter le 9 janvier 1591. )
La coloration rougeàlre de Mars a été signalée de toute antiquité. Elle
explique que cet astre ait personnifié le dieu des combats et ait reçu pour
signe un bouclier flanqué d'une flècho o'. Elle nr paraît pas avoir changé
depuis quatre ou cinq mille ans.
49e I. \ IM.AM-TK MARS.
liLÉMENTS ASTRONOMIQUES DU MONDE DE MARS.
Distance moyenne au Soleil : 1,5236913 r- 227031000 kilomètres.
ICxcentricité : 0,0932611.
Variation séculaire (liM'cxcentrioi té ; -0,000090170.
Distance périhélie : 1,3820 =206007000 kilomètres.'
Distance aphélie : 1,0658 = 248207000 kilomètres.
Durée de la révolution. Année sidérale, 086i23''30'n41' = 6S6'.079 = 1,8808 i.
Année tropique : 686', 929.
Période synodique : 779',9i.
Inclinaison sur l'orbite terrestre : l''5r2'.
Longitude du nœud ascendant : 18''23'53".
Longitude du périhélie : 333» 49'.
Variation séculaire du périhélie : -h 1582". 'i3.
Longitude du solstice d'été austral : 356° 48'.
Distance du périhélie au solstice : 36'.
Longitude du solstice d'été boréal : 170° 48'.
Longitude de l'aphélie : 153° 49'.
Longitude de l'équinoxe d'automne austral et de l'équinoxe de printemps boréal: 86° 48'.
Longitude de l'équinoxe de printemps austral et de l'équinoxe d'automne boréal: 266" 48'.
Distance du solstice d'été austral (ou hiver boréal) à l'équinoxe d'automne austral
ou de printemps boréal j : IGQJ.
Distance de l'équinoxe d'automne austral (ou de printemps boréal) au solstice d'hiver
austral (ou d'été boréal) : 199'.
Distance du solstice d'hiver austral (ou d'été boréal) à l'équinoxe de printemps au-
stral (ou d'automne boréal) : 182'.
Distance de l'équinoxe de printemps austral (ou d'automne boréal) au solstice d'été
austral (ou d'hiver boréal ) : 146'.
Obliquité de l'écliptiquc : 24°52'.
Rotation sidérale : 24''37'"22>,65.
Durée du jour solaire : 24'' 39"" 25% 0..
Aplatissement polaire : environ —„.
Diamètre : 9',Zb = 0,530 Ô.
Surface : 0,281 o .
Volume : 0.149 ô.
Masse : 0,105 ô.
Densité : 0,705 ô = 3,91 eau.
Pesanteur à l'équateur : 0,376. f/ = 3°,69.
Diamètre moyen du Soleil : 21 '2" = 0,656 O vu de Ô.
Lumière et chaleur reçues du Soleil : 0,43 Ô.
Valeur de 1° aréocentrique à la surface de Mars : 60 kilomètres.
L'orbite de Mars est très elliptique. Sa distance au Soleil varie de 20G à
248 millions de kilomètres, soit de 42 millions, ce qui équivaut à i de sa
distance moyenne.
Nous avons représenté, par la construction de la fig. 2.53. toutes les situa-
lions relatives à celte orbite et à ses rapports avec les positions de la Terre.
L'ellipticité de chaque orbite est dans ses proportions réelles. Le grand axe
i.oinnii: di: m a us.
'm
de l'orliilc de Mars csl liorizoïiUil. l..- Soleil brille à riiii des loyers cl le
lioint {] nKu-(|ue le cenlre de Tellipsc parcourue parMa(s autour du S(deil : la
distance de (1 au centre solaire représente donc rexccntricité. Le périhélie
Equinoxe d'Autonvne auslr&l
.Viltr,, df/,,„l,^„„: /r ,iul,
^IfajM- nottsprtiscntr son
pote rurrti t/ut apt m et/'
et rioit.c r^chc San pôtc
.nui aiit twi m httxr
Solstice d'Hiveraustral-»- 20 Mars
^fi7i£m de l'hiver, M sud, \
et de l'été, a. nord.
Solsticed'Eté
austral.
yraieii tie rété ,
jJI.siid,ei<if I
// TuocrM- ■•"^mj
^u
Equinoxe de Printemps austr?.!
,(/(//>// d„ /u-i/i/<yii/'<.t' '■'"/,
et de l'JuJUtmJu-,tJ.nui\i.
FiL'. .iôS. - I/orbitc do Mars aulour du Soleil et ses relations avec l'orbite terrestre.
se trouve à la longitude héliocenlriquc 333''49', à laquelle la Terre passe
cUe-inème le_27 août. Le solstice d'été de l'hémisphère austral n'est pas fort
éloigné de là et se trouve à la longitude 356''48'. La ligne des apsides va donc
de cette longitude à celle qui lui est diamétralement opposée.
Le périhélie de la Terre est en ;;, l'aphélie en a.
On voit par là que la planète Mars présente son pôle austral au Soleil non
loin de l'époque du périhélie, le solstice d'été austral suivant le périhélie
40 'i I.A PLANKTK M A US.
de 30 Jours seulement. Un sait que. sur la Terre, le solsliee d'élé austral
arrive lo "21 décembre et le périhélie le l" janvier : chez nous, le solstice
précède donc de dix jours le périliélie. Malgré celte différence entre les po-
sitions de Mars sur son orbite et celles de la Terre sur la sienne, la situation
de cette planète relativement au Soleil est analogue à la nôtre : c'est son
hémisphère austral qui est tourné vers l'astre illuminateur à l'époque du
périhélie, c'est-à-dire que l'été de l'hémisphèn' austral coriespond à la
moindre distance de Mars au Soleil, comme il arrive pour la Terre. Cet hé-
misphère reçoit donc plus de chaleur que le boréal au moment du solstice.
Le solstice d'été boréal arrive à l'aphélie. Au point de vue de la variation
des neiges polaires, celles du pùle austral, recevant plus de chaleur à leur
solstice que les boréales n'en reçoivent au leur, devraient donc fondre davan-
tage, toutes circonstances égales d'ailleurs.
La planète présente au Soleil la position dessinée au bas de la ligure, et
tourne en gardant constamment son axe parallèle à lui-même. On voit que
c'est son pôle nord qui est exposé au Soleil — et à la Terre — au solstice
d'hiver austral, et aux époques d'oppositions aphéliques, tandis que la pla-
nète présente au Soleil et à la Terre son pôle sud au solstice d'été austral et
aux époques d'oppositions périhéliques.
Quelle est la période qui règle les rencontres de Mars avec la Terre sur le
même rayon vt-cteur mené au Soleil, rencontre analogue à celle des deux
aiguilles d'une montre?
L'intervalle moyen entre deux oppositions successives de Mars peut se
calculer par la formule suivante. La Terre marche plus vite que Mars. Son
avance par jour est, en moyenne, en longitude héliocentriquc. de
3C0° 360"
abôj'iO 68t),"J6
Par conséquent, la rencontre des deux planètes sur une même ligne droite
menée du Soleil s'exprimera par
, . / 1 1 \ . ^ 686,98X365,26 . _„ ^, .
C'est là la période synodique moyenne. Mais cette période est en réalité
très irrégulière à cause des énormes variations de vitesse orbitale causées
par l'excentricité de l'orbite de Mars. On jugera de cette diversité en compa-
rant les dates suivantes des opijositions qui ont eu lieu depuis vingt ans :
1871 20 mars , intc-naiics. j^gj 27 décemjjro . , "•''-■"••-'l'^•^•
1873 27 avril \ f J^"''^' ^-. ... ......... > ~6G jours.
lo — oft • • ( "84 »
18/D 20 juin
1C7-7 - I u 809 »
1877 o seplombrc.
1879 12 novembre. ! J^f "
1881 27 décembre. ! ''''^ *
1881
27 (léceinbro .
ini
i 760
1884
1" lévrier
1886
G mars
) 705
; 767
1888
11 avril
' 777
1890
27 mai
' 799
WJi
i août.
L'OHKITK I)i; M A II S. 405
Voici toutes les claies des oppositions de Mars obsorv/'cs. Les plus avanta-
geuses par la proximité delà planète sont celles (|ui arrivent en août et sep-
tembre. Nous venons de voir que la longitude pcriholi(iue de Mars est cell<'
où la Terre passe le 27 août. Les meilleures oppositions ont été : 1° celle du
'21 août 1710 : -J' celle du 1''' septembre 1708 : 3° celle du ô septembre 1877.
OlTOSITIONS. l'UISCll'AUX OUSËUVATEUIIS.
163G Observée par Fontaïui.
1638 i»l. i(l.
10-10 Observée par Zuoclii.
1614-1.") Observée par Bartuli et llévélius.
1651 Avril et mai, par Riccioli.
1653 Juillet, id.
1655 Août, id.
1657 septembre, id.
1659 Novembre, par Iluygens.
1662 Août, id.
166G 18 mars, par Gassini, Hooke, Serra.
1672 Août à octobre, par Huygens, Flamsteed.
1683 Avril et mai, par Huygens.
1694 Février, id.
1704 Octobre, par Maruldi.
1717 Juin, id.
1719 27 août, à 2°,5 seulement du périhélie, par Maraldi, Biancbini.
1764 Mai, par Messier.
176G Juillet, id.
1777 Avril, par William Herschcl.
1779 Mai-juin, id.
1781 Septembre, id.
1783 1" Octobre, id.
1785 2G novembre, par Schrœter.
1788
7 janvier.
id.
1792
16 mars,
id.
1794
23 avril,
id.
179G
15 juin.
id.
1798
1"" septembre.
id.
1800
9 novembre,
id.
1882 25 décembre, par Schrœter.
1805 28 janvier, jtar Flaugergues.
1807 4 mars, par Fritsch.
1809 8 avril, par Flaugergues.
1811 Juin, par Arago.
1813 31 juillet, i)ar Arago, Flaugergues,
1821-22 par Kunowsky, Gruithuisen.
1824 25 mars, par Ilarding.
1830 19 septembre, par Béer et Màdler.
1832 20 novembre, id.
1835 2 janvier, id.
1837 G février- par Bcer et Madler. Galle. Bessel.
1% l. A n.ANKÏi; M Ali s.
i>i'po3iTio>- l'iiiNcn'Aix iiBSi;i:vAïia'i;s.
ISiO 11 iiKirs. par licer cl Madicr. Ualk-, llessel.
1841 17 avril, par Becr et Madior.
IS43 5 juin, jiar Jules Schinidt.
1845 17 août, par Alitchell. Arago, Main.
1847 30 octobre, par W. (irant, .1. Schinidl.
1854 Mars, par «lacob.
I85G Avril, jtar Warrcn de lalUir, Brodic.
1858 15 mai : Secohi.
18G0 17 juill.-i : Liais.
1S62 5 octobre : Secohi, Lockyer, Pl]illi|is^ Hiiggins.
1864 30 novembre : Kaiser, Dawos, Franzenau, Vogel.
1867 10 janvier : Terby, AVilliams, Huggins.
1869 13 février: Secchi.
1871 20 mars : Gledhill, Burton, Terby.
1873 27 avril : Grcen, Trouvolot, Flammarion.
1875 20 juin : Terby, Hnlden.
1877 5 septembre : Schiaparelli, Green, Hall, Lohse, Cruls.
1879 12 novembre : Schiaparelli, Terby, Niesten, Burton.
1881 26 décembre : Schiaparelli, Terby, Bœddicker.
1884 3,1 janvier: Green, Trouvelot, Knobel, Denning.
1880 G mars : Schiaparelli, Denning, Perrotin, Lohse.
1888 11 avril : Schiaparelli, Terby, Perrotin, Niesten, Holden, Flammarion.
1890 27 mai : les mêmes, Wislicenus, Pickering, Keeler, Stanley Williams.
OPPOSITIONS PKRIHÉLIQUES.
1672 — 1689 - 1704 — 1719 - 1734 - 1751 — 1760 - 1783— 1798- 1813 - 1830 - 1845
- 1860-62 — 1877 — 1892.
Les mieux observées ont été celles de 1719, 1783, 1798, 1830 et 1877.
Les oppositions périhéliques arrivent tous les quinze ù seize ans, comme
on le voit : 15 ans 366 jours ou lô''"', 92. La distance moyenne entre l'orbite de
Mars et celle de la Terre est de 0,5237 x 149 millions de kilomètres, soit de
78 millions de kilomètres. Aux oppositions périhéliques, la distance des deux
astres peut descendre jusqu'à 56 millions.
Au lieu de cette période comme cycle, il serait un peu plus précis encore
de prendre 32 ans comme double cycle. En effet, la révolution synodique de
Mars est de 779J.04. 15 fois ce nombre donnent :
779,94 X 15 = 11699 jours.
Kt d'autre part; 32 années terrestres donnent
.365 X 32^8= 11688 jours.
La différence n'est donc que de II jours.
D'autre part, 25 révolutions de Mars équivalent à i7 révolutions de la
Terre : la période de u ans peut encore être substituée aux précéJentcs.
i; ou 15 ni-, m-; m a us, 497
\nici les dislancos niiuima ijendaiil les oppositions du dernier ryrlf de
tiiiiiize ans, 1877-1892.
1877. Distance ininiinuin, le 2 septeiid)rc : 0,37tjGG - 50 122000 kilomètres.
Opposition, le 5 sopteinbiv : Diamètre — 21", 8.
Passage au méridien à minuit, le G septembre.
1879 Distance minimum, le 4 novembre : 0,48243 = 718820C0 kilomètres.
Opposition, le 12 novembre : Diamètre — lli'.t.
Passage au méridien à minuit, le U novembre.
1881. Distance minimum, le 21 dOcembrp : 0,G0282 = 89820000 kilomètres.
Opposition, le 20 décendjro : Diamètre — iJ'jS.
Passage au méridien à minuit, le 27 décembre.
1884 Distance minimum, le 30 janvier : 0,CG909 - 99G94000 kilomètres.
( )lipositiun, le 31 janvier : Diamètre = 13%9.
Passage au méridien à minuit, le 4 février.
1886. Distance minimum, le 8 mars : 0,66989 = 99813000 kilomètres.
Opposition, le 6 mars : Diamètre — 14", 0.
Passage au méridien à minuit, le 9 mars.
1888. Distance minimum, le 17 avril : 0,00500 - 90145000 kilomètres.
Opposition, le 11 avril : Diamètre = 15", 4.
Passage au méridien à minuit, le 11 avril.
1890. Distance minimum, le J juin : 0,48495 — 72255000 kilomètres.
Opposition, le 27 mai : Diamètre = I9M.
Passage au méridien à minuit, le 26 mai.
1892. Distance minimum, le 6 aoiit : 0,3773C = 50226000 kilomètres.
Opposition, le 4 aoilt : Diamètre = 24", 8.
Passage au méridien à minuit, le 0 août.
Ainsi, la distance de Mars à la Terre peut descendre à 56 millions de kilo-
mètres, aux oppositions périhéliques, et elle ne descend pas au-dessous de
99 millions aux oppositions aphéliques. Les oppositions reviennent environ
tous les deux ans. comme nous l'avons vu, les périhéliques tous les quinze
et dix-sept ans. Dans l'intervalle d'une opposition à l'autre. Mars s'éloigne
à des distances considérables, dont le maximum correspond naturellement
aux époques où la planète passe au delà du Soleil relativement à la Terre :
elle est alors inobservable. Si l'on considère comme périodes d'observation
les trois mois qui précèdent et les trois mois qui suivent la date de l'oppo-
sition, la dislance pour cet intervalle présente une grande variation. On en
jugera par une période, par exemple celle de 1892 :
Distance de la Terre.
4 mai
4 juin
4 juille:
4 août
4 septembre
4 octobre
4 novembre
Flammakion — Mara. 32
Perre-Soleil = I
En kilomètres.
Diani
être,
0,84172
125 416 000
ir
,1
0,01455
91568 000
15
o
0,4.5073
67 159 000
20
.S
0,37706
56 271000
24
,8
0,43177
64 334 000
21
,7
0,57412
85 544 000
16
,3
0,77493
115 646 000
12
.1
i08
i.A pi.AM:ri; m ai; s.
Mars pcul s'éloigner jusiiuà ItHl millions do kilomètres, el son iliamclrc
pnil descendre à '-V.
La variation i»erp6luelle de distance de Mars à la Terre est rcpiésenlée sur
l"\'j. 254. — Mouvement apparent de Mars relalivciuciit a la i erre.
le diagramme du mouvement apparent de Mars relalivenienl à la Terre ( ' ) sup-
posée fixe au centre, de 1875 à 1892 {flg. 254). Tel serait le mouvement qu'il
faudrait appliquer à Mars dans l'hypothèse de la Terre immobile au centre
du monde, pour rendre compte de ses variations d'aspects et de positions.
La distance de Mars à la Terre est indiquée de dix en dix jours par des
points. Mars est à son périhélie aux endroits marqués P et à son aphélie aux
(') La première (igure de ce genre a été tracée par Kepler dans son Ouvrage sur
Mars, publié en 1009, Pars prima, (^apiii i.
L'OIUUTK DK M \US
409
endroits manjués A. La cDiirbf.' circulaire qui ciivelojtpe la Terre à une cer-
taine distance indique le cours apj)arcnt du Soleil et sa i)lace dans le ciel aux
dates inscrites. On voit en nirnie temps sur cette figure que les oppositions
consécutives ne sont pas à égale distance de la Terre.
Les dimensions apparentes du disque de Mars vu de la Terre varient dans
Fig. 2Jô. — DiincQsioii.s apparcatcs cleMars à ses distancer extrêmes et moyenne (2""" = l'i.
la proportion indi<|uée à la. fuj. i.jS, tracée à l'échelle de 2""" pour 1". La gran-
deur de gauche ne se présente qu'aux oppositions périhéliques. Celle de
droite n'est jamais observable, car elle correspond à la conjonction de Mars
au delà du Soleil.
I^es angles que Mars forme avec la Terre dans ses diverses positions autour du
Soleil produisent des phases qui atteignent leur maximum vers la quadrature,
mais ces jthases ne présentent jamais la grandeur indiquée par les premiers des-
sinateurs fie >Lars au xvip siècle. ÎjC maximum du croissant non éclairé ne dépasse
jamais le ' du diamètre i ' i.
(') On peut s'en rendre conii>te par (luelques exemples :
l'HASES DE MAIIS.
1888. — Opposition le II avril. Quadrature le 22 juillcl.
Zone
Zone
niunijiiiint. Diamètre. Ilii|iiiurt.
5 juillet \',-2-2
1' 22
9"
,08
0,12?
1 .21
<i
,33
0,129
1 ,2U
■J
,10
0,132
1 ,!'J
8
,'J9
0,133
1 .1S
8
,83
0,134
1 ,17
8
,li7
0,135
23 juillet.
25 »
27 .
30 «
31 ..
2 août .
nian(|uant. Diamètre. Itapport,
r.lii 8', 57 0,135
. 1 .15 8 ,47 0,13G
.. I .14 8 ,38 0,13()
,. I ,1.J 8 ,20 0,135
. . 1 ,11 S ,20 0,135
. I ,10 8 .11 0,135
500
i.A l' LA m; ri; .mars.
Il est très iniporlanl de nous ronilre compte des aspecls divers sous les-
quels la planète se présente à la Terre selon ses époques d'opposition, selon
ses inclinaisons relativement à notre rayon visuel el selon ses dislances. Il
nous a semblé indispensable de construire, pour chaque période d'opposition
consécutive des cycles de quinze ans (1877-1802), trois projeclinns se rap-
portant respectivement an commencement, au milieu el à la lin de rlia(|ue
periddf d'oliservalion. (lliacune de ces projections permet de juL;er au pre-
It^'JO. — Opposition le -J' in.ii. Qnivlratuvc le \'L sepleiitbrc.
Zone
niiin<|uunt Diainùtrc. Itnppurt.
I.'i septembre... \' .hO 10', 15 0,15:5
17 » ... 1 .:>:> 10 .02 0,151
l'.i " . I ..'.3 0 ,!lil 0,1.">5
•:i .1 ,.".1 '.1 ,7S 0,155
Zone
iii:in(iiiaiit Dinnu'-tri'. Itaiiport.
■J.j sciitcmbrc. . . I".V.) 0" ,(iii 0,l.')4
•:5 .. . . I .i7 !i .j-'i 0,l.'i4
27 .. ... 1 ,i(i '.) ,4:) 0,1.">4
29 1 ,41 y ,32 0,1 .Vl
1892. — Opiiosition le i aoùl. QnadraUu-o le il décembre.
Zone
tnniiiiuant. Diamètre. Rapport.
novembre..
r.(;5
12'
.11
0.133
.
1 .01
11
,w
0,135
1 . 57
11
.53
0,136
1 .53
II
,13
0,137
1 .4S
10
,74
0,137
1 , 13
10
,38
0,138
1 .3S
10
,0.3
0.137
Zone
miinquant.
I)ia;iiotrc.
l'iiipiiart
20
novembre . .
. 1",34
9 ,7U
o;i37
1-=
■■ décembre.
. 1 ,31
9 ,54
0, 1.37
3
»
. 1 ,29
9 ,39
0,137
5
),
. 1 ,26
9 ,21
0,136
7
..
, 1 ,24
9 ,10
0,136
!l
. 1 .21
8 ,95
0.136
11
. 1 ,19
8 ,81
0.135
21
La grandeur de la zone niaiiquaut, qui peut s'élever à 1",76, ne suffit |jas"i)our appré-
cier la phase : il faut avoir soin de tenir compte du diamètre. On voit que la ])roportioii
de O.iôj, voisine du maximum, équivaut à peu près au -} du diamètre.
La /«•/. 2ôG représente la phase maximum à une quadrature moyeune, celle du
Fig. 256.
l'intie de Mars à sa quadrature moyenne.
22 juillet 1888. Elle est un peu plus forte lorsque la planète est voisine de son périhélie
et un peu moins vers l'aphélie. La planète était ici à sa distance moyenne vers son
équinoxe d'automne, c'est ce qui fait que la phase suit à peu près un méridien.
L'OUHlTIv l)i; MAKS.
MM
micr coup d'œil des latitudes que le j^lobe de Mars présente à la vue d(*s liai)!-
tanls de la Terre.
Nous avons considéré comme périodes d'observations la date des opposi-
tions pour l'époque centrale, les deux à trois mois qui précèdent (suivant la
saison) etles trois mois qui suivent. Dans lesfigures ci-dessous (p. 502 et 503),
le disque central représente le globe de Mars dans son inclinaison réelle vers
la Terre le jour même de l'opposition, le disque de gauche représente la po-
sition et la grandeur relative de la planète à la date indiquée avant l'oppo-
sition, et le disque de droite l'aspect trois mois après la même époque cen-
trale. Dans tous ces croquis l'échelle est de 2°"" pour 1".
Voici les nombres correspondant à chaque projection :
1877
1870.
1881-8-:.
188-i
188G.
1888.
1890.
189Î
Latitude
du rentre.
5 juin — 2i° ,1
.') scptcni. (Opp. ). — 22 ,5
5 décciiibro — 28 ,0
12 août - 15 ,i
12 novcm. (0pp.). — li ,5
12 février — 12 ,7
22 octobre ^- 6 ,7
26 décembre (0pp. } -^ 1 ,5
26 mars — 4 ,3
31 octobre 1883.... — 16 ,3
31 janvier (Opp.V -h 14 ,8
30 avril - 17 ,6
24 décembre 1885. -f- 23 ,5
G mars (0pp.} ... -+- 21 ,9
G juin 4- 25 ,3
31 janvier -t- 20 ,2
11 avril (0pp.) ... -+- 21 ,1
11 juillet -V- 23 ,4
27 février -r- 'J ,8
27 mai (0pp.) -+- 9 ,5
27 août -^ 7 ,3
4 mai — 13 ,0
4 août (0pp.).... — 12 ,7
4 novembre — 21 ,2
niainètre.
12", 5
21 ,8
1(1 ,8
Il .4
19 ,1
8 ,1
10 ,7
15 ,5
7 ,4
7 ,G
13 ,9
7 ,4
8 ,3
14 ,0
7 ,8
8 ,6
15 ,4
9 ,2
19 ,1
11 .5
11 ,1
24 ,8
12 ,1
Phase.
Croissant
nian(|uant.
1",7
0 ,0
1 ,3
1 ,7
0 ,0
0 ,9
1 ,2
0 ,0
1 ,2
0 ,9
0 ,0
0 ,8
0 ,8
0 ,0
0 ,<)
0 ,8
0 ,0
1 ,2
0 ,9
0 ,0
1 ,7
1 ,4
0 ,0
1 ,<;
Angle
Terre-
Soleil.
43°'
4
41
4G
0
38
43
2
42
39
3
37
35
2
30
35
o
42
37
I
45
41
5
43
Hauteur
au-dessus
Décli- derborizun
naison. de Paris.
— 14° 27°
— 12
2
+ 13
- 18
22
-^ 24
-h- 27
-i- 26
+ 20
4- 21
-h 19
7
9
6
— 6
— 10
— 19
— 23
— 25
22
— 24
— 14
29
39
54
59
63
65
68
67
Gl
62
60
48
50
47
34
35
31
2^
18
16
19
17
Quant à la phase, avant la date de l'opposition, elle est à gauche du disque :
après cette date, elle est à droite, et à l'opposition mcnie elle est nulle, natu-
rellement [à moins que l'on ne veuille pousser l'appro-Kimation au.K centièmes
de seconde (différence de latitude), quantités insensiblos].
Voici les projections qui montrent comment Mars fsl vu de la Terre sui-
vant ses distances et ses inclinaisons.
50J
I. A n. \m:ti; m ams.
5 Juin 1877
12 Avril 1879
%o
22 Octobre 1881
31 Octobre 1883
5 Décembre 1877
5 Septembre IÔ77
S
\\::0
12 Février 1880
12 Novembre 1879
S.
26 Mars 1882
26 Décembre 1881
S.
30 Avril 188'*
SUanvier ISS'»
Fiç. 257. - Comment Mars est vu .le in Terre.
Ô03
t» Novembre 1892
^♦Ma.1 1892
FÏL'. 258.
k Août 1892
_ Cnmincnt Mnrs osl vu 'le l;i 1 i^n'
504
1 V PI. ANKTi; M A 11 S.
CHAPITRK 11.
DIMENSIONS DE LA PLANÈTE.
Masse. — Densité. — Pesanteur,
Les dimensions réelles conclues des dimensions apparentes dilfèrent sen-
siblement, selon les observations et selon la parallaxe solaire adoptée. D'après
la Connaissance des Temps et le Xautical Almanac, le diamètre angulaire de
Mars serait 11", 10 à la distance de la Terre au Soleil, celui de la Terre étant
17", 72. C'est le diamètre adopté dans les Tables de Le Verrier.
Ce diamètre conduit à 29", 4 pour les oppositions périhéliques de 1877 et
1892. Mais nous allons voir qu'il est trop grand.
Voici l'ensemble des mesures et déterminations du diamètre de Mars,
rapportées à la distance 1.
Les mesures antérieures à celles de William Herschel s'écartent trop de
la précision des mesures modernes pour qu'il y ait la moindre utilité à les
donner ici. Nous commencerons donc par celles-là. Nous donnons les me-
sures directes (M) et les déterminations (D) conclues des observations méri-
diennes.
Diamètre
Dates. Obscrvataurs. équatorial. .Xplatissement.
1784 ^Villiam Herschel. M 9", 13 -^
1798 Kohler. M 9,10 ^^
1798 Schrœter. M 9 ,84 ^V
1824 J.-J. de Littrow. D 8,87 —
1837 Bessel. M 9 ,33 Insensible.
1845 Schmidt. M 9 ,44 —
1847 Arago. M 9,57 ^V
1852 Johnson. M 8 ,99 Disque allongé.
1854 Peirce. D 10,11 —
1851 Main. M 9,84 -^
1856 Winnecke. M r 9,21 Insensible.
1856 Schmidt. M 9,73 —
1861 Le Verrier. D 11,10 -
1860 Main. M 9 ,38 -^^
1862 Main. M 9,38 ^
1864 Main. M 9,18 —
1864 Kaiser. M 9 ,52 j\-g
1864 Winnecke. D 9,83 —
1864 Dawes. M — Insensible.
1871 Main. M 9,44 —
1873 Engelmann. M 9 ,25 ^
1873 Main. M 9,40 —
IJIMI-NSIO.NS iJi; LA TLANÉTE. bOO
biatutrt ro
Date». ObserTat^nr». •^(juatorUI. ApUtl*»*ment.
1877 Pritchctt.M 9*.l?î -,',-
1877 Hartwig. M 9 .30 -J,
1877 Uariwig. Discussion générale . . 9 ,3."> —
1879 Uariwig. M 9,41
1879 Hartwig. Discussion générale.. 9.35 —
1879 Pritchett. .M '• ''• .\
1879 Young. M j^
1881 Downing. D. (Greenwich 18Ô1-6!) • ,,u —
1881 Stone. D. (;reenwich 18M-65) 10.73 —
1881 Pritchet. M . 'J M —
1892 Flammarion. M 9,39 —
11 y a d'assez fortes différences. Le diamètre le plus probable, résultant
des mesures de Bessel, Main et Hartwig (discussion générale) est 9', 35. C'est
celui que nous adopterons. Le diamètre des Tables de Le Verrier [W", 10) est
manifestement trop grand.
Pour la parallaxe 8' 82, le diam»'lre de 9% 35 est à celui de la Terre ; 17". 64
dans le rapport de 530 à lOCO.
Le diamètre réel ne peut être beaucoup éloisné du nombre 0.530. soit
Fig.-2ô9. — Grandeur comparée de la Terre. Mars. Mercure et la Lune.
un peu plus de la moitié de celui de la Terre. Ce diamètre se trouve être
d'environ un tiers supérieur à celui de Mercure (0,37) et environ le double
de celui de la Lune (0,27), comme on le voit sur la figure ci-dessus.
Le diamètre 0,530 correspond à 6753 kilomètres.
Les surfaces des deux sphères sont donc entre elles comme 28 à 100, et les
volumes comme 149 à 1000.
La surface du globe de Mars est par conséquent denviron 143 millions de
kilomètres carrés, et son volume de 161 000 millions de kilomètres cubes.
506 I.A PL AM-Ti: M MIS.
I/aplatissemoiil iiolairc l'sl 1res dillirilt» ;ï iiiosurcr. Il iloil rive d'envi-
lon j^ {voy. p. '230, '23.'), 345 'i :{iT .
L.-i niasse de la planète est déteiininoe avec la précision la plus absolue
depnis la découverte des satellites. On a vu plus haut (p. 200) les principales
valeurs obtenues par le calcul antérieurement à cette découverte. Celle
masse est :
Relativement au Soleil âTslTôu"
Relativoment à la Terre. . . 0,105,
c est-à-dire que le monde de Mars pèse environ le jô d(i celui (]ue nous
habitons.
On en conclut que la densité moyenne do la planète. ol)lenue en divisant
la masse par le volume, ]^. est de 0.70"».
En prenant Teau pour unité, cette densité est 3,91.
On en conclut également que la pesanteur à la surface do la planète
est 0,376. C'est la plus faible pesanteur planétaire. Celle do la surface lunaire
est seule inférieure à celle-là.
Un corps qui tombe, et qui sur la Torre parcourt 4"\9U pendant la pre-
mière seconde de chute, ne parcourt, sur Mars, que 1'", 84 dans la même unité
de temps. La vitesse au bout d'une seconde, ou l'accélération de la pesanteur,
£/, qui est sur notre globe de 9"", 81 . est sur Mars de 3'",G9.
CHAPITRE III.
ROTATION. DURÉE DU JOUR ET DE LA NUIT
Récapitulons ici l'ensemble des observations faites sur la rotation de
Mars, dont les détails sont donnés dans la première Partie de cet Ouvrage.
DÉTERMIN.VTIONS DK I>.\ DURÉE DE liOTATIOX DE M.VIlS.
.\uteurs et dates . Observations comparées. Périoile. Pages.
Huygens, 1659 1659, novembre 28 au 1" décembre 24'' 15
Cassini, 1666 1666, mars 3-28 2'i 40"- 18
Sa!vatorSerra,1666 1660 12 20 22
Maraldi, 1704 1704, octobre 14-17 24 38 36
Maraldi, 1719 1719, août 5 à octobre 17, 24 40 39
^V. Herschel, 1779 1777, avril 8 à 1779 juin 19 24 39 21», 07 52
Schrœter, 1792.... 1792, mars 19 à avril 20 24 39 50,2 64
Hiith, 1805 1805 24 43 90
lu HA no. \ i)i: M ai; s. [jot
Aiiti'urs ft ■late<. lll)serviitiuiis roiiipiir''-- l'i-rin'lc. Piiires.
Kiinowsky, 1822 1821 , décembre ;i 182'2 mai J'i :Ui iO 9'»
lîecret Mâdler, 1837. 1830, septemliro 10 — octobre Ju 2'i 37 9 ,t> KiG
» » . 1830. octobre 20— 1832 novembre 17.. 2i 37 23 .7 100
» » . . 1830, octobre 20 — 18.30 mars 12 24 37 20 , i inc.
» .' . 1830, octobre 20 — 1837 mars 11 2i 37 23 ,7 118
Mitchell, 18i."> 1830, septembre l'j — ISi.'i aoiit :îO. ... 21 37 20 ,0 128
Secchi, 1858 185G, avril 25 — 1858 juillet 24 24 37 35 137
.loynson. 1804 1802, à 1864 24 37 37 173
II. Wolf, 18G4 1802, à 18G4 24 37 22 ,'• 195
I.insser, 1804 1830, septembre 14 — 1802 septembre21. 24 37 21 ,') 170
Proctor. 1867 166G, mars 13 — 1864 novembre 20. . . . 24 37 22 745 206
» 18G8 1666, mars 13 — 1867 fcivrier 23 24.37 22,735 206
)' 1S69 1G66, mars 13 — 1869 février 4 24 37 22,736 207
1873 1672, août 13 — 1862 novembre 1 22 37 22 ,715 207
Kaiser, 1864 1072, août 13 — 1862 novembre 1 24 37 22,62 182
Jules Schmidt, 1873. 1672, août 13— 1850 avril 21 24 37 22 ,603 222
Criils. 1878 1877. août 10— octobre 3 24 37 34 269
.Marth, 1883 1704, octobre — 1879 novembr.' 24 37 22.020 370
H;ikhuyzen, 1885.... 1659, ;i 1879 24 37 22,60 384
NVisiicenus. 1886.... 1659, à 1881 24 37 22,655 395
Nous adopterons, pour la valeur la plus approchée de la période ('). la
moyenne arithmétique des.déterminations les plus précises :
Proctor 22-,715
Kaiser 22 ,62
Schmidt 22 ,603
Marth 22,626
Bakhuyzen 22 ,66
Wislicenus 22 ,655
Moyenne 22", 6465
soit :
24*'37"22%65 88642'. 65
Nous pouvons la considérer comme connue avec la plus grande précision.
à vn centième de seconde prés.
La rotation sidérale de la Terre s'effectue en ■23''56'"4*,091, ou 86164 se-
condes, 091. Celle de Mars surpasse donc la nôtre de 2478', 56, .«^oit 41"' 18", 56.
et est plus longue que noire jour solaire de 24 heures de 37 minutes environ.
Si l'on supposait que sur Mars le jour fût partagé on 24 h('ures comme ici,
chaque heure durerait seulement une minute et demie de plus que chez
nous.
('; Il est assez curieux de remarquer que les dessins a l'aide desquels la rotation
de .Mars a été déterminée sont des plus rudimentaires : Hooke, Huygens, Cassini, Ma-
raldi, Hcrschel. On peut donc découvrir la rotation d'une planète et la fixer même avec
précision sans en distinguer la configuration exacte et même en la dessinant fort vague-
ment. Il suffit d'un itomt dont on soit sûr.
508 1-A PLANKTK M.\n>.
L'année sidérale de Mars est de (j86j23''30'" il*, soit de ôQSôôOil secondes.
Si nous divisons ce nombre par le premier, nous trouvons que cette année
martienne se compose de G69 rotations sidérales martiennes environ : 669, G.
Mais sur Mars, comme sur la Terre, il y a par au une rotation sidérale de
plus que de jours solaires. L'année civile de Mars se compose donc de
068 jours solaires martiens : 668, 6.
11 en résulte que la durée du jour solaire martien est plus longue que celle
du jour sidéral dans la proportion de ^U^ soit 132'. 4, ou de 2'"12%4. Celte
durée est donc de
24''39"'.35',0 = 88 77.')',0.
Nous avons vu tout à l'heure que la rotation sidérale de Mars est plus
longue que notre jour civil de 37 minutes environ. Dans l'observation de la
planète, le passage d'une tache par le méridien central retarde donc de
cette quantité chaque jour sur l'heure solaire moyenne d'un observateur
terrestre (*). Ce retard est un peu plus long avant et après l'opposition, et
peut s'élever à 40 minutes pour trois mois d'intervalle.
Cette différence diurne ramène la même face de la planète devant l'obser-
vateur au bout de 38 jours.
;•) Mouvement de rotation de Mars, heure par heure et minute par miaule.
Heures.
Mouvement.
Minutes.
Mouvement.
Minutes.
Mouvement
1
14«
,62
1
0» ,24
31
7» ,55
o
29
,24
2
0 ,49
32
7 ,80
3
43
,86
3
0 ,73
33
8 ,04
4
Ô8
,48
4
0 ,91
34
8 ,29
5
73
,10
5
1 ,22
35
8 ,53
G
87
72
0
1 ,40
36
8 ,77
7
102
^34
7
1 ,71
37
9 ,02
8
116
,90
8
1 ,95
38
9 ,20
!t
131
,58
9
2 ,19
39
9 ,50
10
l'iC
,21
10
2 ,44
40
9 ,75
11
DiO
,83
11
2 ,68
41
9 ,99
12
175
,45
12
2 ,92
42
10 ,23
K
190
,07
13
3 ,17
43
10 ,48
14
204
,69
14
3 ,41
44
10 ,72
IJ
219
,31
15
3 ,66
45
10 ,97
10
233
,03
10
3 ,90
46
11 ,21
17
248
,55
17
4 ,14
47
11 ,45
18
203
,1"
18
4 ,39
48
11 ,70
19
0--
.79
19
4 ,63
49
11 ,94
20
2îk:
.41
20
4 ,87
50
12 ,18
21
307
,03
21
5 ,12
51
12 ,43
22
321
,65
22
5 ,30
52
12 ,07
5«
33C
,27
23
5 ,60
53
12 ,91
24
350
,89
24
25
5 ,85
6 ,09
54
55
13 ,10
13 ,40
20
6 ,34
56
13 ,65
27
6 ,58
57
13 ,89
28
6 ,82
58
14 ,13
29
7 .07
59
r. ,30
30
7 ,31
00
14 ,02
;{8 jours terrestres de Icmps solaire inoyoïi l'iMit .{ -^83 000 secondes.
37 rotations martiennes font 3 279 778 secondes.
La (lillcrence n'est que de 3'r2-2 secondes ou <!<• r>7 niinulos, soit moins
d'une heure, dont le globe de Mars relarde pour lobscrvateur terrestre.
Le taux de rotation diurne est 350'',8Î)-217. D'un joui- à l'autre la longitude
rétrograde donc de 10° environ pour la même iieure.
Il y a toujours une correction à faire [tour ramener celte dilTérence de re-
lation sidérale à la rotation apparente ou synodique provenant du déplace-
ment de la Terre relativement à Mars, correction tantôt addilive et lantcM
négative, suivant la position, l'n astronome, qui s'est consacré avec dévoue-
ment à ces utiles éphémérides, M. Mari h, les calcule pour chaque opposition,
et nous nous faisons un (hjvoir de les publier dans //.l.s7ro/(o»/j>.
Dans le calendrier de Mars, on a, sur trois ans, une année longue de
G69 jours, et deux courtes de 068, autrement dit deux années bissextiles sur
trois, et moins simples que les nôtres, car trois fois GG8, G ne donnent pas
exactement le même nombre que 2 fois 668 -f- 669. On aura dû, comme ici,
réformer plus d'une fois le calendrier sans le rendre parfait.
Le jour et la nuit suivent sur ce globe le même cours que sur le nôtre. A
l'équatcur, ils sont d'égale durée, de 12'' 19"" i7' pendant l'année entière. 11
en est de même dans tous les pays du monde martien le jour des équinoxes.
La (luiéc du jour augmente dans chaque hémisphère avec la latitude jusqu'aux
pôles, aux solstices correspondants; elle atteint une demi-année martienne,
soit 334 jours à chaque pôle, à l'époque de son solstice d'été.
Les 88775 secondes dont se compose le jour civil de Mars sont aux 86400
dout se compose le jour civil terrestre dans le rapport de 1,26 à 1. Le jour
terrestre — 0, 97 jour marlieu.
CHAPITRE IV.
GÉOGRAPHIE DE MARS, OU ARÉOGRAPHIE.
Toutes les observations réuuies dans cet Ouvrage iiiouireiit que le globe
de Mars est diversifié de taches sombres et de taches claires, fixes à la sur-
face. Nous avons ici sous les yeux plus de deux siècles de résultats concor-
dants. Mars est la seule planète de notre système dont nous puissious ainsi
étudier la géographie. Vénus, Jupiter et Saturne se montrent constamment
enveloppés de nuages. Les autres ne laissent rien apercevoir de bien si\r.
Si l'on considère les régions de la [)lanétc en général, on peut les parlager
510 I. A l'I ANKIi; MAKS
eu deux fiasses. La prcniiOre conipreud les cuuUees cUiires, préseiilant une
coloration ordinaiirmenl jaune foncé ou orangé, mais (jui iitnit v;irier mo-
mentanément, et selon la localité, d'une part entre toutes les nuances du
jaune jusqu'au blanc pur, d'autre part entre toutes les teintes comprises
entre l'orangé rouge et un rouge fouGc que l'on peut comparer à celui de la
brique bien cuite, ou mieux peut-être, à celle du cuir fortement usé. La
seconde classe est celle des régions foncées qui constituent les taches dans le
sens propre du mot et dont la couleur fondamentale paraît une sorte de gris
de fer teinté de vert, présentant toutes ks gradations depuis le noir jus-
qu'au gris cendré. En général, les régions de la seconde classe paraissent
être plus sombres que les premières; mais il arrive aussi que dans le chan-
gement de couleur auquel sont soumises certaines étendues de la planète.
les taches de la première catégorie prennent une coloration rouge foncé el
celles de la seconde une teinte claire; alors on ne" peut pas dire quelles sont
lesjjlus claires ou les plus foncées ; en un mot, il s'agit plutôt de différences
de couleurs que de différences d'intensité lumineuse. Néanmoins la distinc-
tion qui existe entre les deux genres de régions est à peu près permanente
à part quelques exceptions.
L'invariabilité séculaire des taches de Mars ne doit pas être comprise dans
un sens absolu et aussi rigoureusement que celle des taches de la Lune.
L'observation assidue a montré que plusieurs régions de la surface de la
planète changent de nuance dans certaines limites et que les rayons
solaires sont réfléchis avec une intensité différente, selon les moments. Les
contours des taches sombres peuvent subir des déplacements qui, à vrai
dire, sont très minimes, comparés aux dimensions de la planète et à celles
des taches elles-mêmes, mais qui n'en sont pas moins incontestables; d'autre
part, la netteté des contours est tantôt plus grande, tantôt moins précise.
Beaucoup de fins détails sont plus facilement visibles à certaines époques
qu'à d'autres, même si l'on tient compte de l'influence inévitable exercée
jjar les diverses circonstances de l'observation; ces détails peuvent subir des
changements d'aspect relativement notables, mais insuffisants pour rendre
douteuse l'identité de l'objet considéré. Enfin Mars a une atmosphère, el il
se produit là un ensemble de phénomènes que Ton peut considérer comme
météorologiques, par analogie avec ceux qui se jjassent sur la Terre, bien
que vraisemblablement ils soient très différents.
L'ensemble de tous ces changements donne à l'étude de Mars un bien plus
grand intérêt que si tout était invariable, immobile à sa surface. Comme
l'écrivait M. Schiaparelli (') : <( Cette planète n'est pas un désert de roches
'.') L Astronomie, 1889, janvier, \). 20.
AUKlMiUAI'llli:. :.i!
arides; klle vi r : le dévelop[HMiiont de sa vie se révèle dans tout uii système
de transformai ions très com[»liqiit'cs, dont (jiielquesruncs embrassent une
étendue suffisante jjour être visibles aux habitants de la Terre. Il y a là à
explorer un monde tout entier de choses nonvelles, ••minenunent propres à
provoquer la curiosité des chercheurs et à fournir du travail en surabon-
dance aux télescopes pour de nombreuses années. Ces phénomènes, en effet,
dilfèrent tellement et sont diversifiés de tant dr détails, (ju'on ne pourra
reconnaître ce qu'ils peuvent avoir de régulier qu'à la suite d'études rigou-
reuses et complètes; ce sera le seul moyen de tirer des conclusions précises
et à peu prés vraisemblables sur les causes de ces modifications et sur la
constitution physique de Mars. »
On ne peut se dissinmler que de telles études, pour être exactes et com-
plètes, rencontrent maintes difficultés. Parmi les variations qui se produisent
à la surface de la planète, quelques-unes s'effectuent lentement (comme, par
exemple, les augmentations et diminutions périodiques des éclatantes neiges
polaires) et présentent des phases relativement faciles à suivre. Mais il y a
encore des changements d'une autre sorte ; les uns s'accomplissent en
quelques jours, les autres sont presque soudains, et leur effet est visible
dun jour à l'autre; telle, est l'énigmatique duplication des canaux. Il se
présente enfin des phénomènes dont la période dépend évidemment de la
révolution annuelle de la planète. Pour bien comprendre le mécanisme
de ces changements, il serait nécessaire de faire une série d'observations
ininterrompues pendant au moins tout le temps que la planète emploie à
parcourir son orbite autour du Soleil. Cette condition est imposée non seu-
lement par la nécessité d'explorer les taches polaires boréales et australes
aux époques où l'inclinaison de l'axe est le plus favorable à l'observation,
mais aussi par ce fait également certain qu'une partie des phénomènes en
question dépend des saisons de la planète.
A la vérité, un tel contrôle complet n'est pas possible pour un observa-
teur i?tolé; il serait même impossible pour plusieurs observateurs, si ceux-ci
habitent un pays circonscrit et peu étendu de la surface terrestre, l'Europe,
par exemple. Par les jours si rares de bonnes observations, on ne peut guère
utiliser vraiment que deux ou trois heures, pendant le crépuscule, au com-
mencement ou à la fin de la nuit. Il en résulte (]ue, un jour donné, on
aura rarement la chance de pouvoir observer plus d'un quart de la planète
avec une facilité suffisante ; comme, d'autre part, la rotation de Mars diffère
très peu de celle de la Terre, le déplacement des régions accessibles à l'ob-
servation s'accomplit lentement d'un jour à l'autre, de sorte qu'un seul
et même point de la planète peut être observé pendant huit ou dix soirs con-
séculil's. Mais le retour du nit-me aspect des taches aux mêmes heures 1er-
ôlî 1. A iM.AM:ri; maijs.
restres s'eUocluc tlaiis l;i période très Ioul^uo de h\Milc-hiiit jours euviidii.
Par conséquent, telle région que l'on ;i pu étudier huit (Ui dix jours de
suite (pourvu que l'atmosphère terrestre l'ail permise, restera inaccessible
à l'observation pendant un mois entier, et, au bout de ce temps, une explo-
ration attentive révélera parfois des changements très considérables dont il
n'aura pas été possible d'indiquer l'époque et d'étudier la marche. Si, en outre
(ce qui arrive souvent), le temps a été mauvais pendant les huit ou dix jours
qui auraient pu servir à l'exploration de cette contrée, il s'écoulera peut-
être plus de deux mois avant qu'on puisse l'examiner à nouveau; souvent
même, il arrivera qu'une opposition entière passera sans qu'on ait l'occasion
favorable d'étudier une contrée donnée. Pour obvier à toutes ces difficultés,
il n'y aurait qu'un seul moyen, ce serait de répartir un certain nombre
d'observateurs à la surface de la Terre, de telle sorte que pendant toutes les
apparitions de Mars il y en ait au moins un qui voie la planète à une hauteur
sufQsante au-dessus de l'horizon, pour oljtenir une bonne image.
Ce n'est pas tout encore. On ne peut effectuer d'utiles observations de
Mars que quand cette planète est suffisamment rapprochée de la Terre. Pour
l'observation des détails les plus difficiles ( qui sont en même temps les plus
intéressants), il faut que son diamètre apparent soit au moins de 10" à 12".
Cette condition n'est remplie que pendant quelques mois (trois ou quatre),
vers les époques d'opposition ; or cette circonstance ne se présente que par
intervalles de vingt-six mois environ. Cliaque opposition ne peut donc nous
faire connaître l'état de la planète que pendant une faible fraction de sa révo-
lution périodique. Heureusement, cet arc de l'orbite n'est pas toujours le
même, car, quand une opposition se produit à un certain point de l'orbite
de Mars, l'opposition suivante a lieu en un point dont la distance par rapport
à nous est plus grande d'environ 48° de longitude héliocentrique.
On voit donc que, pour pouv(jir suivre la planète dans toutes les inclinai-
sons possibles de son axe et en toutes ses saisons, il faut uncyclede sept à huit
oppositions consécutives, cycle dont la durée est de seize ans en moyenne.
Si les phénomènes martiens étaient exactement périodiques et dépendaient
de la révolution autour du Soleil, on pourrait espérer en écrire l'histoire
complète au moyen d'observations appliquées à l'un de ces cycles ou à quel-
ques-uns d'entre eux. Mais cette périodicité ne paraît qu'approximative,
comme celles de la météorologie terrestre.
Les obstacles qu'on vient de signaler sont d'un caractère purement astro-
nomique. Ceux qui sont causés par le mauvais temps et la mobilité do
l'atmosphère terrestre sont bien plus graves. M. Schiaparelli a constaté par
expérience, à Milan, que l'on peut à peine espérer avoir une atmosphère
suffisamment bonne sur huit ou dix soirs ; parfois même, il se passe des mois
\Ki':;()(jii.\i'iiii: 013
entiers sans que 1 on pni&se faire une observation satisfaisante. JJien plus
rares encore sont les soirs à images parfaites, ceuxoii l'on peut utiliser
toute la puissance d'un instrument (". (Jnoi qu'il en soit, on peut espérer
qu'en étudiant la constitution des climats par rapporta la netteté des imaf^es
l6lescopi(|ues, on arrivera, avec le temps, à réduire ces obstacles à un mini-
mum. Enfin, l'expérience a appris que ladiflicullé de coordonner entre eu.\
les résultats (dilenus par divers observateurs à l'aide d'instruments diifc-
,'j Conseils jiour iobsevvalion de Mars.
Quoiqu'il fasse généralement beau sur Mars et que son atmosphère propre mette peu
d'obstacles à l'observation de sa surface, les dilTérenccs de tons sont souvent si peu ac-
centuées et les contours des configurations si vagues et si incertains — à part quelques
heures exceptionnelles de parfaite visibilité — que l'on ne peut obtenir de résultats
satisfaisants sans une méthode d'observation assez sévère.
Le premier point, naturellement, est d'avoir un bon objectif — ou un bon miroir, s'il
s'agit de télescope. — La dimension de l'instrument est relativement secondaire. Un a
obtenu d'excellentes images avec de petites lunettes de 108""°, 95""" et même 75"" de
diamètre, tandis que des colosses de près d'un mètre de diamètre et même davantage,
comme télescopes, n'ont donné que des vues médiocres et presque impossibles à iden-
tifier. Donc, tout instrument peut servir, s'il est bon.
Le second point est d'avoir la même température à l'instrument qu'au dehors. Si l'on
observe en plein air, rien de mieux. Mais, si l'on se sert d'un équatorial abrité sous une
Coupole, il faut avoir soin d'ouvrir les trappes, les fenêtres et les portes, d'aérer le plus
possible la coupole, plusieurs heures avant l'observation. Les vagues d'air chaud qui
passent devant l'ubjectif, et qui sont grossies proportionnellement aux oculaires em-
ployés, sont le plus grand obstacle à la netteté des images.
En troisième lieu, il importe de ne pas oublier que, les deux conditions précédentes
étant remplies, la précision désirée ne sera pas obtenue pour cela dans les conditions
normales de notre atmosphère, par la raison que lors même qu'elle nous parait parfaite-
ment pure, elle est traversée de couches de densité hétérogène qui se meuvent suivant
les courants et qui troublent la vision. II faut savoir attendre, parfois plusieurs heures,
les moments assez fugitifs en général do calme absolu et de tranquillité parfaite.
Les heures où l'atmosphère est la plus transparente sont celles qui ont été précédées
par une pluie d'orage.
Les heures de jour, aurore et crépuscule, nous ont toujours semblé meilleures que
les heures de nuit.
D'autre part, pour être assuré d'obtenir des vues certaines qui ne puissent élre in-
lliiCMcées par aucune idée précon<;ue, il importe do ne pas se préoccuper de la face de
Mars tournée vers nous à l'heure de l'observation, et d'observer dans Tignorance la plus
grande de ce que l'on doit voir. On ne tarde pas à reconnaître l'une ou l'autre des confi-
gurations. Si l'on a observé plusieurs jours de suite, on sait à peu près d'avance ce
que l'on doit voir, malgré tout l'oubli que l'on voudrait y apporter. Le mieux est de ne
penser à rien et de s'occuper uniquement de constater le mieux possible ce que Ion a sous
les yeux. Dans ce cas, les croquis ou dessins ont la plus grande valeur. Si l'on calcule
d'avance le méridien central et si Ion met devant soi le globe ou une carte de Mars, on
est préparé à voir ce qui doit être, et c'est déjà trop. D'ailleurs, on perd tout le plaisir
à identifier ensuite c<.' que l'on a découvert. Ajoutons qu'il n'est pas mauvais de faire cette
identification immédiatement après l'observation.
I^'œil s'acoutume aux conditions instrumentales et se perfectionne. Les premières
observations ne sont, en général, guère satisfaisantes. De jour en jour on voit mieux.
Pour arriver à bien dessiner Mars, il faut que l'œil s'habitue aux aspects de la planète
liendant plusieurs jours. Les premiers croquis ne valent rien, en général, et ressemblent
aux dessins primitifs faits par les anciens observateur;?.
Fl.\mm.\iii(i.\. — Murs. 33
514 I. A IM. vNi; 1 1; M vus.
rents et^l par cUo-niOme un (.«mprcliemenl (rcs grave : colle dilûcullc ne
disparaîtra que quand la Photograpliie céleste sera assez avancée pour repro-
duire les détails les plus minutieux que nous parvenons à découvrir à laide
de nos bons télescopes actuels.
Ces taches foncées et ces taches claires, permauenles.cL qui ne se substi-
tuent jamais les unes aux autres, doivent être <\r natures diirércntes. Il va,
à la surface martienne, des liquides et des solides, car nous observons des
neiges, des brumes et de la vapeur deau, et, si tout était liquide, la perma-
nence séculaire des taches n'existerait pas. Les étendues aquatiques sonl-
elles représentées par les taches foncées ou par les claires ?
Tout nous invite à penser que ce sont les foncées qui les représentent.
D'abord, les eaux, les liquides en général, absorbent plus de lumière que les
surfaces continentales, à moins que celles-ci ne soient couvertes d'une vé-
gétation très sombre. D'autre part, nous assistons annuellement à la fonte
des neiges martiennes, et cette fusion entoure les neiges restantes d'une
bordure foncée. En troisième lieu, la forme des rivages découpés en golfes
ou en caps s'accorde mieux avec l'attribution des mers aux taches sombres.
En quatrième lieu, les variations observées, les élargissements ou raccoui--
cissemenls, s'appliquent mieux à la première interprétation qu'à la seconde.
En cinquième lieu, les changements de tons observés si fréquemment sur
les taches foncées, depuis le noir d'encre jusqu'au gris clair, et la mobilité
de ces tons s'appliquent mieux également à un élément liquide qu'à un élé-
ment solide. (Ainsi, par exemple, il y a des années où la mer Terby a paru
noire comme de l'encre, si foncée, que l'on a proposé de la substituer à la
baie du Méridien pour le méridien initial. Eh bien ! cette année 1892, depuis
trois mois que je l'observe en particulier, elle est vague, grisâtre, indécise.)
Nous considérons donc les régions claires comme des continents et les
régions foncées comme des mers.
Dans cette interprétation, la distribution géographique martienne est
toute différente de la nôtre.
Sur la Terre, les trois quarts de la surface sont couverts par les eaux, cl il
n'y a pas le quart du globe d'habitable par la race humaine.
Sur Mars, la répartition est moins inégale, les deux éléments s'y partagent
à peu près par moitié l'étendue du globe ; il y a seulement un peu plus de
terres que de mers : 77 millions de kilomètres carrés de terres, et 6G d'eau.
En éliminant les cercles polaires, les terres habitables de Mars représentent
une surface cinq à six fois supérieure à celle de l'Europe.
Mais ces eaux ne doivent pas être, chimiquement ni physiquement, les
mêmes que les nôtres. 11 se passe sur Mars des phénomènes qui n'offrent
aucune analogie avec ceux des éléments terrestres. Xous voulons parler des
Aui:()(.i{ Ai'iiii;. 515
variations observées dans les aspects de Mars. (l'csl là un sujet capital ijn'il
importe d'étudier intégralement ici avant d'aller plus loin, et c'est ce (jue
nous allons faire en l'un des chapitres suivants.
Quelle est la cause de la coloration rougeàtrc des continents ?
Nous avons vu que ce n'est pas l'atmosphère \\. 133, 188, etc.).
C'est la couleur du sol, du sol visible, c'est-à-dire de la surface.
Nous pouvons donc ou supposer que la surface de ces continents est nue,
stérile, sablonneuse, sans aucun revêtement végétal, ou bien que ce revête-
ment général est rougeâtre.
Pour se ranger à la première opinion, il faudrait considérer Mars comme
un désert éternellement aride, admettre que l'atmosphère, l'eau et le soleil
y jouent un rôle diamétralement contraire à ce qui est arrivé sur notre
globe, admettre, en un mot, que les combinaisons des éléments soient res-
tées là-bas absolument improductives, tandis qu'ici elles ont conduit à cette
vie végétale et animale immense et multipliée, qui emplit les eaux et les airs
et se développe en tous licu.x avec une abondance si féconde et si prodigieuse.
11 nous semble impossible de condamner un monde à une destinée de ce
genre, surtout un monde doué de tous les éléments de vitalité que nous
voyons réunis sur notre voisine la planète Mars.
La coloration des continents a donc, beaucoup plus vraisemblablement,
pour cause celle du revêtement végétal, quelconque d'ailleurs, qui s'est
formé à leur surface.
Celte coloration n'est pas aussi rouge qu'on le croit en général. Nous l'avons
toujours assimilée, pour notre part, à celle des champs de blés mûrs vus de
la nacelle d'un ballon. Elle varie, d'ailleurs, dune terre à l'autre, et aussi
pour les mêmes régions. Ainsi, cette année 1892, le continent Béer, à droite
de la mer du Sablier, m'a paru plus rouge que le continent Herschel, à
gauche de la même mer; et la terre de Lockyer, qui sur notre carte (p. 69)
est foncée, paraît cette année aussi claire que les continents.
Pourquoi, dira-t-on, la végétation de Mars ne serait-elle pas verte ?
Pourquoi le serait-elle? répondrons-nous. La Terre ne peut pas être con*
sidérée, à aucun point de vue, comme le type de l'Univers.
D'ailleurs, la végétation terrestre pourrait être rougeâtre elle-même, et
elle la été en majorité pendant bien des siècles, les premiers végétaux ter-
restres ayant été des lycopodes, dont la couleur est d'un jaune roux tout
martien. La substance verte qui donne aux végétaux leur coloration, la chlo-
rophylle, est composée de deux éléments, l'un vert, l'autre jaune. Ces deux
éléments peuvent être séparés par des procédés chimiques. 11 est donc par-
faitement scientifique d'admettre que, dans des conditions différentes des
conditions terrestre:*, la chlorophylle jaune puisse seule exister, ou dominer.
:,it. 1 A ri.ANKTi-; m ai; s.
Sur la Terre, la proporLion csl de 1 pour lUU. (le pcuLclrc leeonlrairc sur Mars.
La théorie cosrao.uouique la plus probable nous monlrc Mars comme l'oruié
anlérieurenienl à la Terre et comme plus avancé clans sa destinée.
llclmhollz a calculé (]ue la condensation de la nébuleuse primordiale en
soleil a dû produire '28 millions de degrés cenligrades. .Vppliquant ces mêmes
principes à la Terre et à Mars, M. Schiaparelli trouve que cette chaleur de
concentration a dû être de 8988" pour la Terre et 1795" seulement pour
Mars. Ce globe doit être depuis longtemps refroidi jusqu'à son centre.
On sait d'ailleurs que la chaleur intérieure du globe terrestre n'a aucune
influence sur la température de la surface ni sur les phénomènes de la vie
végétale et animale.
L'ancienneté de Mars e.\i)liquerail loul naiurellemenL la plus grande rareté
des eaux à sa surface et le nivellement probable de ses continents.
Xous avons vu que ses mers consistent en méditerranées qui paraissent
peu profondes. Des régions intermédiaires sont tantôt sèches et tantôt inon-
dées, ou peut être couvertes de brumes. Signalons, comme îles, 1" l'ile nei-
geuse de Hall, située dans Tocéan de la Rue, par 47" de longitude et 22° do
latitude {Voy. notre carte, p. 69), qui est tantôt visible lorsqu'elle est cou-
verte de neige ou de nuages [Voij. p. 278, 303, 315), et tantôt invisible, et à
laquelle M. Schiaparelli a donné le nom de terre de Protée ; 2° l'île de
Dawes, appelée aussi terre de Jacob et Argyre, située au-dessus de la pré-
cédente [Voy. p. 09, 187, 302). La neige atlantique et la neige olympique
paraissent représenter des pics parfois couverts de neiges, situés en pleines
terres, le premier par 267" de longitude et 17" de latitude boréale, le second
par 128" de longitude et 21° de latitude boréale (Voy. p. 333 et 336).
Nous avons vu aussi que les chaînes de montagnes sontrares. Tout semble
nivelé. Cependant il en reste, comme le montrent les taches blanches obser-
vées sur le términateur [Vuy. p. 466). Les rives droites de la mer du Sablier,
jusqu'au détroit d'IIerschel, doivent être en falaises, non en plages, car,
d'une part, les extensions de cette mer se produisent toujours sur la rive
gauche et, d'autre part, une bordure blanche assez fréquente indi(|ue là des
neiges, gelées blanches ou nuées.
L'hémisphère boréal de Mars est à un niveau supérieur à celui de l'hémi-
sphère austral : les mers occupent surtout celui-ci. Il en est sensiblement
de même pour le globe terrestre. La cause peut être attribuée à l'ellét de
l'attraction solaire sur les hémisphères martien et terrestre les plus rappio-
chés de lui pendant la demi-période de révolution de la ligne des apsides à
l'époque critique de la consolidation définitive de l'écorce.
i; \ rMi>si'iii;i!i; m: maus. Tii?
CIFAPITRK V.
L'ATMOSPHÈRE DE MARS.
MÉTÉOROLOGIE ET CLIMATOLOGIE MARTIENNES
LES CONDITIONS DE LA VIE SUR MARS.
!/(\\isloncc de ralmosi»hèro do Mars osl rendue absolument certaine par
rciisemljlo dos observations, l.cs témoignages en sont de diverse nature et
do diverses valeurs.
Au premier rang, nous signalerons b\s taclics polaires dont l'étendue varie
avec les saisons et [)roporlionnellem('nt à la chaleur solaire reçue. Que ces
neiges soient de même nature chimique que les nôtres ou toutes difTérentes.
peu importe ici. Le seul fait de leur existence prouve qu'il y a là des trans-
ports de vapeurs qui se condensent en précipités blancs et disparaissent
sous rintluence de la chaleur ])our se reproduire de nouveau pendant la
saison froide. Vapeurs tantôt invisibles, comme noire vapeur d'eau atmo-
sphérique, tantôt visibles sous forme de nuées légères, tantôt condensées
en neiges variables et sans doute aussi en eaux, en liquides, dans les mers.
Ces neiges polaires suffiraient à elles seules pour prouver que cette planète
est entourée d'une enveloppe atmosphérique.
Les nuages proprement dits, les immenses agglomérations opaques qui
s'étendent dans l'atmosphère terrestre ne se voient pas souvent sur Mars.
Mais on y observe des brumes, en apparence fort légères, parfois semi-trans-
parentes, qui voilent fréquemment de vastes contrées, surtout en hiver. Ces
brumos, ces troubles de visibilité, sont un second témoignage de l'existence
de l'atmosphère.
Un troisième témoignage nous est ofTerl par la graduation lumineuse du
disque, du centre vers le contour. La circonférence intérieure du disque do
Mars est blanchâtre et les taches sombres s'effacent pour notre vue en attei-
gnant cet anneau pàlo. Comme l'hémisphère éclairé est précisément tourné
vers nous pendant les périodes d'opposition, il est naturel d'attribuer celte
blancheur circulaire à l'accroissement de l'épaisseur atmosphérique sur la
sphère relativement à notre rayon visuel et à la lumière solaire réfléchie
par cette épaisseur. (»ii pourrait, il est vrai, supposer que le globe de Mars
se couvre pendant la nuit d'une couche de gelée blanche, qui fond lorsque
le Soleil est assez élevé; mais, comme cet anneau blanchâtre s'étend aussi
bien sur les régions aquali(jues que sur les contincnlales, et que les taches
5IS 1 A n. \NKTr, M \1{S.
s'altt'iuiont oi disparaissont on ai-rivanl au bord, relie soi'ondo liypolhèsc
n'est pas soutenable. Nous remarquerons, en passant, (juo le contraste entre
celte bordure blanche et le ton jaune ocré goiicral des continents se remarque .
licauconp mieux pendant la nuit que pendant le jour i c'est là une observa-
lion que nous venons encore de faire tout récemment — le l^juillct 1893, —
l'anneau dont il s'agit était beaucoup plus évident à 3''du matin qu'au lover
du soleil). L'atmosphère de Mars en est certainement la cause productrice.
11 peut être dû soit à des brumes légères, soit à la réfraction des couches
atmosphériques situées au delà de la tangente de notre rayon visuel an
contour de la sphère, réfraction qui relève les images et doit agrandir légère
ment le globe par un anneau blanchâtre.
Cette dégradation lumineuse plus ou moins intense et plus ou moins large,
en raison inverse de la transparence de l'atmosphère martienne, pourrait,
il est vrai, s'expliquer par la réflexion de montagnes, comme il arrive pour
la Pleine Lune, dont le bord est également plus brillant que le centre. Cette
explication a été adoptée par Zollner (' ;, qui supposait la surface de la pla-
nète hérissée de montagnes, comme la surface lunaire, montagnes dont les
pentes auraient été inclinées de 76° sur l'horizon. Mais elle nous semble un
peu forcée, et comme la présence de l'atmosphère de Mars la remplace avan-
tageusement, elle devient inutile.
L'observation établit que les taclies de Mars, môme les plus foncées, de-
viennent invisibles en général lorsqu'elles arrivent à 53° du centre du
disque; parfois on les distingue jusqu'à 60° et même 65°, mais c'est extrê-
mement rare. Les régions très blanches se voient plus loin ; les neiges po-
laires sont visibles tout à fait au bord du disque, leur éclat perçant le voile
atmosphérique. Ces régions blanches paraissent mémo plus lumineuses vers
les bords du disque que dans la région centrale, par exemple les deux îles
de Thulé, l'île d'Argyre et l'Hellade (Schiaparelli, 1877). Plus d'une fois
même on a pris alors ces régions pour des neiges polaires. Cependant cette
année l'Hellade, ou terre de Lockyer, qui se présente plus de face que d'ha-
bitude, est au contraire particulièrement claire.
D'autre part, l'Analyse spectrale est venue confirmer l'existence del'almo-
sphère martienne en y révélant, de plus, les raies d'absorption de la vapeur
d'eau. Les recherches de Huggins, Vogel et Maunder s'accordent pour cette
constatation, notamment pour la raie d'absorption de longueur d'onde 628,
et pour la ligne 656 (voy. p. 213 et 308). Il y a une dizaine de groupes do
lignes identifiés d'une manière satisfaisante. Nous devons donc admettre
qu'il y a là de la vapeur d'eau, et sans doute chimiquement la même eau
''; nitolomelrinche L'nter.<mchunçien . p. 127; J.r'ipsig, 1865.
L'ATMOSPIIKKF DK M A US. r.l*)
(}u'ici. Ce fait n'cmpôche pas la poBBibilité d'autres substances aériennes.
L'existence de l'atmosphère niarticnnc est donc absolument démontrée.
Celte atmosphère diffère de la nôtre à plusieurs égards.
D'abord, elle ne se charge pas de nuages comme celle que nous respirons.
On n'y voit point d'immenses régions couvertes, comme il arrive chez nous,
pendant des jours, des semaines et des mois. En général, cette atmosphère est
transparente, et elle no s'oppose presque jamais à ce que nous distinguions
les configurations de la surface. Lorsque nous ne pouvons rien observer sur
Mars, la faute en est presque toujours à notre atmosphère.
Vue de loin, la Terre est beaucoup plus difficile à observer que Mars : son
épaisse atmosphère l'enveloppe d'un voile rarement transparent.
Ce que nous disons là s'applique surtout à l'hémisphère martien qui est
en été. Là, le ciel est presque constamment pur pour toutes les latitudes. Il
en est de même, en général, à l'équateur. Mais assez souvent latmosphère
est voilée au-dessus de l'hémisphère qui est en hiver. Ainsi, par exemple,
en ce moment (juillet-août 189-2), l'hémisphère austral de Mars est en été :
date de son solstice d'été : 13 octobre, et l'hémisphère boréal, au contraire,
est dans son automne et approche de son hiver; eh bien! on aperçoit sensi-
blement moins de détails sur cet hémisphère que sur l'autre.
Il semble que le froid voile l'atmosphère de Mars et que la chaleur la clarifie.
Le limbe oriental du disque se montre généralement plus blanc que l'oc-
cidental. Peut-être y a-t-il là (c'est le méridien du lever du soleil ou du
matin) de légères brumes que l'astre du jour ne tarde pas à dissiper.
Quels effets peuvent produire, vus d'ici, les nuages flottant au-dessus
d'une planète?
Lorsque les nuées se projettent sur les taches foncées de Mars, elles se
montrent sous l'aspect de lignes diffuses et de formes variables. Elles peuvent
être aussi brillantes que les régions les plus claires de la planète. En d'autres
cas. elles peuvent paraître moins claires, mais pourtant toujours plus que
lo fond sur lequel elles se projettent. « Ces tons indiquent probablement non
une couleur particulière des nuages, écrit M. Schiaparelli, autrement on
pourrait en voir de sombres sur de fonds clairs, ce qui n'arrive pas, mais
une plus grande transparence, qui n'empêche pas devoir entièrement, mais
qui voile les détails. C'est ce que j'ai observé notamment sur la mer Erythrée
et la terre de Noé. «
Les brumes atmosphériques paraissent s'éclaircir progressivement sur les
terres équatoriales du solstice d'été austral à l'équinoxe d'automne suivant.
L'atmosphère paraît claire au-dessus des mers intérieures pendant les mois
qui suivent immédiatement le solstice austral.
Dans in zone comprise entre le lO*" et le 30*^ degré de latitude australe.
520 !. \ ri.AXF.TI-: M A 11 s
frappée (lirectemenl par les rayons du Soleil à l'epoqno du solstic(\ ou nob-
serve rien d'analogue aux zones de pluies et de calmes équatoriaux terrestres
qui accompagnent sur nos mers le mouvement du Soleil en déclinaison. On
n'y voit même pas de nuages du tout, pour ainsi dire. I.a météorologie mar-
tienne ne ressemble donc pas tout à fait à la niMro. On n'y observe presque
jamais de tempêtes ni d'aspects cycloniques.
Aux époques solsticiales, un hémisphère paraît presque entièrement con-
sacré à l'évaporation, et l'autre à la condensation. Aux époques intermé-
diaires, une zone d'évaporation parait limitée au sud et au nord de deux
zones ou plutùt calottes de condensation. La déclinaison du Soleil et la ré-
partition des terres et des mers influent sur la largeur de ces zones suivant
les saisons. Les mers ont un ciel généralement plus pur, les îles et les terres,
au contraire, condensent Thumidilé atmosphérique.
Voilà pour les observations : atmosphère généralement pure, peu do nuages.
brumes pendant l'hiver, peut-être le matin, et probablement la nuit, et assez
souvent, sans doute, gelées blanches.
Voici maintenant ce que la théorie peut ajouter à l'observation.
La pesanteur à la surface de Mars étant beaucoup plus faible qu'à la sur-
face de la Terre (0,376), tous les corps y pèsent moins dans la même pro-
portion, et l'atmosphère est dans ce cas. Si chaque mètre carré de la surface
de Mars supportait la même atmosphère que la nôtre, la pression de cette
atmosphère serait réduite dans la proportion précédente, c'est-à-dire que le
baromètre, au lieu d'être à 760""", au niveau de la mer, ne serait qu'à 285"'"'.
C'est la pression que nous trouvons en ballon, à 8000" de hauteur, et c'est
celle des montagnes les plus élevées. Au sommet du }iIont-Blanc, la pression
est de 424°"".
Il est bien certain que l'atmosphère de Mars n'est pas analogue à la nôtre
et que l'eau n'y est pas dans les mômes conditions, car la surface de la pla-
nète se trouverait ainsi au-dessus de la ligne du zéro de température, même
sans tenir compte de la plus grande distance au Soleil, et nous aurions de-
vant les yeux un globe de glace, ce qui n'est pas. Nous voyons, au contraire,
sur Mars les neiges parfaitement limitées, et ces limites varier avec la tem-
pérature, et si l'on considère un hémisphère martien pendant son été, il
n'a pas plus de neiges que nous à son pôle : il en a même beaucoup moins.
Celles que l'on aperçoit de temps à autre en certains points des régions
tempérées sont également fondues (').
(■, Tout récemment (/vno\i'/edg(?, juin 1892), en réponse à une lettre de M. \V. il. Picke
ring sur les glaciers polaires de Mars, M. Ranyard écrivait : «Nous sommes, sembie-t-ii.
forcés d'admettre ou que les caps polaires de Mars ne sont pas de la neige, ou que la tem-
pérature moyenne des régions équatoriales et tempérées de Mars est supérieure à zéro.
i; ATM os PII KHI- Dl' M A H S. âjl
Nmis tlovoiis donc penser, d'api-L-s los observiilions conimt- d'-iprcs lo
calcnl, (juc ratmosphère ûo Mars est moins dense qu^* la nôlro, qu'il s'y
forme moins de nuages, que les courants y ont moins d'inlensiU', fjue ii-
vent n'y est jamais très fort, que les lomptMos en sont absentes. Les condi-
tions de densité et de pression sont très diirércntes de ce qu'elles sont ici.
Le point 0°, auquel l'eau se solidifie, n'est pas le même quici. L'atmosphère
ne doit pas être chimiquement ni physiquement la même. La température
moyenne peut y être plus élevée que sur la Terre. Les effets observés cor-
respondent à un degré de chaleur anibiaiilc plus élevé relativement aux
conditions réunies.
Si l'on représente jiar 1000 la dislance de la Terre au S(;leil, celle de Mars
sera représentée par 1524. La limiière et la chaleur solaires reçues sont en
i-aison inverse des carrés de ces nombres. Mars ne reçoit donc que les -iVoj
c'est-à-dire moins de la moitié, de la chaleur solaire reçue par la Terre. En
raison de la grande ellipticité de l'orbite, cette proportion est un peu plus
forte au périhélie, un peu moins à l'aphélie, dans le rapport do .') lapliélie)
à G (moyenne) et à 7 (périhélie;.
11 faut donc que l'atmosphère de Mars agisse autrement que la nôtre,
puisque les effets météorologiques produits par la température sont ana-
logues à ceux qui s'observent sur notre globe et correspondraient même
plutôt à un état de température plus élevé.
La vapeur d'eau seule suffirait pour amener ce résultat. On sait qu'une mo-
lécule de vapeur d'eau est 16000 fois plus efficace qu'une molécule d'air sec
pour conserver la chaleur solaire reçue. Que la proportion de cette vapeur
dans l'atmosphère martienne soit plus élevée qu'ici, et le résultat est obtenu.
Mais l'eau n'est pas le seul corps qui jouisse de cette propriété. Les vapeurs
desôtherssulfurique, formique, acétique, del'amylène, de l'iodure d'éthyle,
du chloroforme, du bisulfure de carbone, sont dans le même cas. Quelque
substance de propriétés analogues dans l'atmosphère de Mars suffirait pour
expliquer cette climatologie remarquable.
En résumé, les choses se passent sur Mars comme si la température
moyenne y était à peu près la même qu'ici, soit que réellement la ihermo-
c'est-à-dire qu'il fait plus chaud là que ne l'indiquerait la distance au Soleil. On peut
expliquer ce fait en admettant que l'atmosphère martienne est plus dense que la nôtre.
Mais peut-être n'est-ce pas de la neige. Des cristaux blancs d'acide carbonique s'éva-
porent à une température fort inférieure au plus grand froid que nous observions sur
la Terre. »
Nous pensons toutefois qu'il est plus simple d'admettre que la densité de l'atmosphère'
martienne correspond ;\ celle de la planète, et est. par conséquent, beaucoup plus faible
que la nôtre, mais qu'il y a là beaucoup de vapeur d'eau et peut-être d'autres vapeurs
contribuant aussi à emmagasiner la chaleur solaire.
:)•:•: i \ im \m: rr: m vus.
niùlrio non ill!!ère pas sensililomenl. soit que la natiiro y ait de organisée
à lin clei,MC tljonnométrique inférieur, qui serait samoyenn»' iiornialo, rela-
tivement aussi ('levée pour elle que la nôtre pour nous.
Les climats et les conditions de vitalité de laplauète Mars ne paraissent pas
oirriravecrétat terrestre des divergences telles que des espèces vivantes peu
différentes de la nôtre ne puissent habiter là. « Lorsque nous considérons
combien facilement l'homme peut s'adapter aux climats tropicaux ou arc-
tiques, disait à ce propos un astronome anglais ('), lorsque nous compa-
rons les températures moyennes dans lesquelles vivent les Groénlandais ou
les Esquimaux dune part, les Papous ou les nègres de l'Afrique centrale
d'autre part, nous sommes conduits à penser qu'il suffirait d'une légère
transformation de l'organisme humain pour l'adapter aux conditions du
monde de Mars. >
Le même auteur ajoute que les habitants de Mars doivent être plus grands
et plus forts que nous, à cause de la faiblesse de la pesanteur ([iii doit rendre
un homme de cinq mètres de haut aussi agile et aussi léger qu'un hommo
terrestre de moins de deux mètres. Ces grands corps pourraient maintenir
une plus haute température que les nôtres, et leurs yeux plus grands au-
raient besoin de moins de lumière.
Toutes conjectures sur la forme des habitants de Mars seraient évidem-
ment prématurées et hors de cadre dans un ouvi'age technique de l'oi-tlre de
cehii-fi.
CHAPITRE VL
LES SAISONS SUR LA PLANÈTE MARS
La révolution de la planète autour du Soleil, ou son année sidérale, est,
nous l'avons vu tout à l'heure, de G8G jours 23 heures 30 minutes 40 secondes,
soit de 686,979, soit 687 jours, à y|ôprès. Cette orbite est une ellipse mar-
quée, dont l'excentricité est de 0,093. Le grand axe, ou ligne des apsides,
du périhélie à l'aphélie, est tracé dans la direction 334° (périhélie) à 154°
.aphélie). Le solstice d'été de l'hémisphère austral arrive à la longitude
héliocentrique 3.56° 48', et la ligne menée de ce solstice au solstice opposé est
tracée dans la direction .3.î6°48' à 176°48'. Voy. la figure p. 493).
') E. Ledger, The Sun, ils planelîi rtnd Iholr !<ntpllilps.
Mis SAISONS Sri{ I, A l'I.ANKTi; M Ail S. .-,'^3
l/inclinaison île réquatoiir dr M.iis sur le plan de son orbite ostdo 24" 52',
Les saisons y sont donc sensiblement du nicnio (tnhe que los saisons ter^
restres, l'inclinaison do rêquatcur lerresfre d'Iant de 23''27'. La difTérenco
n'est (juo de 1°2.V. Si notre planète recevait cette inclinaison (elle peut du
reste, l'atteindre), nos saisons seraient à peine cjiangées, seulement un peu
plus marquées.
Si nous traçons, dans lorbite de Mars, une liguf perpendiculaire à la
ligne dos solstices, passant par le Soleil, nous trouvons la position des ôqui-
noxes, époques où le Soleil éclaire un liémisphèro de Mars passant juste par
les pôles. Ces deux points seront donc respectivement aux longitudes hélio.
centriques 86» i 8' et 266° i8'.
luette ligne des équinoxos partage l'orbite de Mars en deux parties iné-
gales, à cause de l'excentricité de l'orbite. Comme le solstice d'été austral est
assez voisin du périhélie '_ à 23° de distance angulaire et à 36 jours), la section
de droite \vo\j. p. 493) est plus courte en arc que la section de gauche, et,
de plus, parcourue plus rapidement, selon la loi des aires. 11 rn résulte des
inégalités très marquées sur la durée des saisons.
I** Pour aller de l'equinoxe do printemps austral ;\ l'équinoxe d'automne au-
stral, la planète emploie moins de temps que pour aller de l'équinoxe d'automne
à l'équinoxe de printemps. Cette section de l'orbite est parcourue en 30G jours,
tandis que l'autre section en demande 381. La diiïérence s'élève à 7.b jours.
2" La section la plus rapidement parcourue est celle qui va do l'équinoxe do
printemps de l'hémisphère austral au solstice d'été suivant, parce que le passage
rapide au périhélie est compris dans cette section. La durée de cette saison n'est
que de 145 jours.
ijo La .saison qui vient ensuite comme durée, est la suivante, du solstice d'été
do l'iiémisphère austral à l'équinoxe d'automne : elle est de IGO jours.
i" Les deux autres saisons sont, respectivement, celle de l'équinoxe d'automne
austral au solstice d'hiver suivant, opposée à la première et par conséquent la plus
longue, de 190 jours, et la dernière, de ISi jours. En tenant compte des fractions
de jours, nous avons :
Durt'C dcK f<aUnns do .l/ar.s, en jours lorrestvai.
!" De l'équiuo.xc de printemps austral au solstice d'été siiivanl. liô.C
'!■• Du solstice d'été austral .'i l'équinoxe d'automne suivant 160, 1
.30 De l'équinoxe d'automne austral au solstice suivant 199,G
•i° Du solstice d'hiver austral à l'équinoxe suivant 181.7
087,0
Saison cliaude de l'hémisphère austral . .305,7
Saison froide du même hémisphère 381 ,3
I. A PIANtlTI- M Ans.
Voici les dates des solstices et des équinoxes injur W dornicr cycle uiarlitMi, de
1S7T i'i !S9?.
CaLENDHIER MAnTlKN.
Dntos des snisorin. solstices et équinoxi'f:. sur Jn planclc Mnr<:.
Ili-misplièrc austral
(supérieur).
."^oistico dV'té.
lÀjuinoxe d'automne.
Solstice d'hiver.
l]i|uinoxe de printemps.
Sùlstlce d'été.
Iv^uinoxe d'automne.
Solstice d'hiver.
K'iuinoxe de printemps.
.•-iolstice d'été,
tquinoxe d'automne.
Solstice d'hiver.
Éiiuiiioxe de printemps.
Solstice d'été.
Équinoxe d'automne.
Solstice d'hiver.
Équinoxe de printemps.
Solstice d'ét(''.
Équinoxe d'automne.
Solstice d'hiver.
Ucmispliùre bori-.il
(inférieur).
Solstice d'hiver.
Kquinoxe de printemps.
Solstice d'été.
Équinoxe d'automne.
Solstice d'hiver.
Equinoxe de printemp--.
Solstice d'été.
Kquinoxe d'automne.
Solstice d'hiver.
Équinoxe de printemps.
Solstice d'été.
Kquinoxe d'automne.
Solstice d'hiver.
Kquinoxe de printemps.
Solstice d'été,
l-lquinoxe d'automne.
Solstice d'hiver,
l'xiuinoxe de printemps.
Solstice d'été.
Kquinoxe do printemps. Kquinoxe d'automne.
Solstice d'été.
Kquinoxe d'automne.
S;lstice d'hiver.
Équinoxe de printemps.
Solstice d'été.
Kquinoxe d'automne.
Solstice d'hiver.
Kquinoxe de printemps.
Solstice d'été.
Kquinoxe d'automne.
•Solstice d'hiver.
Solstice d'hiver.
Kquinoxe de printemps. 31 juill. 1887
Solstice d'été.
Équinoxe d'automne.
Solstice d'hiver.
Kquinoxe de printemps
Solstice d'été.
Kquinoxe d'automne.
Solstice d'hiver.
Kquinoxe de printemps
Solstice d'été.
Kquinoxe de printemps. Équinoxe d'automne,
Solstice d'été. Solstice d'hiver.
I.niisîituile
D.itcs. il miili.
V sept. 1877 357» 1'
G mars 1878 8G 53
21 sept. 1878 17G 'lO
'2-2 mars 1879 267 0
l 'i août 1879 356 25
22 janv. 1880 87 1
8 août 1880 176 'iS
0 fév. 1881 267 3
2 juil. 1881 357 5
9 déc. 1881 87 3
26 juin 1882 176 49
25 déc. 1882 267 5
19" mai 1883 356 31
26 oct. 1883 86 35
13 mai 1884 176 52
10 nov. 1884 266 .32
5 avril 1885 356 33
12 sept. 1885 86 38
31 mars 1886 176 54
28 sept. 1886 266 3i
21 fév. 1887 356 34
86 40
16 fév. 1888 176 57
15 août 1888 266 37
8 janv. 1889 356 36
17 juin 1889 86 41
2 janv. 1890 176 32
3 juill. 1890 266 39
26 nov. 1890 350 40
5 mai 1891 86 44
20 nov. 1891 176 34
20 mai 1892 266 41
13 oct. 1892 356 41
n\lcrvallos
en jours.
160
19!)
1S2
1Î5
IGl
199
182
146
160
199
182
l'i5
160
200
181
146
160
200
181
r.(i
160
200
181
146
160
199
182
liG
160
199
182
140
liâtes des
uppixitious.
5 sept. 1877
i;! nov. ISTO
26 déc. 1881
janv. 1884
6 mars 1880
11 avril 1888
27 mai 1890
4 août 1892
Nous avons calculé dans ce Tableau, outre les dates des équinoxes et des sol-
stices de Mars, les intervalles en jours qui correspondent aux époques oîi la planète
est passée par les longitudes héliocentriques de chaque position, à midi, et nous
avons ajouté en regard les dates des oppositions. On voit que l'opposition de 1877
est arrivée 22 jours avant le solstice d'été de lliémi sphère austral; celle de 1870,
89 jours après; celle de 1881, 17 jours après l'équinoxe d'automne; celle de 1884,
103 jours avant le solstice d'hiver; colle de 1880, lô jours avant; celle de 1888,
.-i.j jours après; celle de 1890, 37 jours avant l'équinoxe d'automne; et celle de 1892,
76 jours après. La série des oppositions parcourt ainsi tout le cycle d^s saisons et
les observateurs ont chaque fois des aspects différents sous les vfux.
ij;s SAISONS si:i( la im.am.ii. .\iau> 02:.
li inclinaison du <^h)\)c de Mars étant do i'v'yl' et la longituilo liélloccntiiiiM»,' de
kl planète à ses solstices dtant 350" 48' pour le solsti<-e- d'été de riicniisphére
austral et 17G" if<' pour le solstice d'été boréal, il en résulte que le Soleil se trouve
pour les habitants de Mars, au solstice d'été de l'hémisphère austral, au zénith
do la latitude australe 21° 5-2' et par ITC°iSde longitude, et au solstice d'été boréal
au zénith de la latitude •?'i"r)2'et par 350" '18' de longitude. Le premier de ces
points est dans la constellation du Lion, et le second dans la constellation du
Verseau: au lieu d'être les tropi<[ues du Cancer et du Capricorne, les cercles ana-
logues de la sphère de Mars sont donc les tropiques du Lion et du \'erseau. Quant
aux noms réels qu'ils peuvent porter chez nos voisins du ciel, il serait superliu
de les chercher.
Les durées que nous venons de donner pour les saisons de Mars sont exprimées
en jours terrcsta'cs. Il n'est pas moins intéressant de connaître ces durées en
jours martiens. Or nous avons vu que la durée do la rotation sidérale de Mars est
2i''37'»22',0(j et que le jour civil do Mars est de 24'' 3'J'" 35'. II y a C68,G de ces
jours civils dans l'année de Mars.
Ces 6G8,G jours martiens de l'année tropique se partagent les saisons dans la
proportion suivante :
Durcc des saisons en jours martiens.
[' De l'équinoxe de printemps austral au solstice d'été suivant.. 1 42 j
2» Du solstice d'été austral à l'équinoxc d'automne suivant.. 156 )
3' De l'équinoxe d'automne austral au solstice suivant 19i ^
4° Du solstice d'hiver austral à l'équinoxe suivant . I7G P
L'inclinaison do l'a.xe de rotation de la planète Mars étant peu diiforcnlo
do celle de l'axe terrestre, les saisons qui en résultent sont sensiblement du
même ordre que les nôtres, quoique près de deu.x fois plus longues. Le?
tompôraluros dépendent d'ailleurs de la constitution de l'atmosphère. Si
par exemple, cotte planète était dépourvue d'atmosphère, le sol ne s'échauf-
ferait pas du tout, et resterait glacé, même en plein midi, comme les cimes
du Mont-Blanc, dos Andes ou des Cordillères, et plus encore, puisque Mars
est plus éloigné du Soleil que la Terre.
Mais ce globe est environné d'une atmosphère dans laquelle la vapeur
d'eau existe en quantité notable et dans laquelle peut-être existent d'autres
vapeurs ou gaz. Il peut en résulter — et l'observation prouve qu'il en ré-
sulte, en efîot. — des températures lou des conditions délat) comiiarablos
aux nôtres.
L'excentricilo do rurbile, si considérable, jouo-l-clle un rôle dans l'ia-
lensité relative des saisons de chaque hémisphère i*
Examinons d'abord, comme poinl do comparaison, los saisons do la Torif.
.•sec. I. \ ri.ANKTi; MAKS.
A. — SArsONS ET OLIMATS DES DEUX HÉMISPHÈRES TERREj^TRES.
Lorbite terrestre iiest déjà plus uue circonférence, mais une ellipse mar-
quée. Lexcentricité, c'est-à-dire la distance du centre de l'orbite elliptique
au foyer, en unités dudemi grand axe, est 0,01677. En admettant i4'J millions
de kilomî?tres (- étant 8", 82) pour ce demi grand axe ou distance moyenne,
nous voyons que cette valeur est de •2 498730 kilomètres. La Terre est donc
de 4997460 kilomètres plus proche du Soleil au périhélie qu'à laphélit'. On
a pour ces distances :
Distance périhélie 0,98323 146501-270 kilomètres.
Distance moyenne.. . . l. 00000 149000000 »
Distance aphélie .. . L01677 15149S730 »
r.ette excentricité étant environ ^V de la distance moyenne, le Soleil est
il environ -j^ pl^is près de nous au périhélie qu'à l'aphélie. Comme la lu-
mière et la chaleur solaires irradient dans toutes les directions tout autour
du Soleil et se répandent en divergeant sur la surface dune sphère qui va
toujours en s'agrandissant, l'intensité de cette lumière et de cette chaleur
diminue en raison de l'agrandissement des surfaces de cette sphère, c'est*
à-dire en raison du carré de la distance. Par conséquent, l'hémisphère expose
au soleil reçoit au périhélie ^ ou ^ plus de chaleur qu'à l'aphélie (',.
La proportion est à peu près de 106,5 à 100.
La Terre passe au périliélie le 1" janvier et à l'aphélie le 1°' juillet. Les
hivers de notre hémisphère arrivent donc quand la Terre est le plus proche
du Soleil et les étés quand elle est] le plus loin. Il résulte de cette circon-
stance que nos hivers sont moins froids qu'ils ne le seraient s'ils arrivaient
de l'autre coté de l'ellipse, et nos étés moins chauds. C'est le contraire pour
l'autre hémisphère. Il semble donc que le pùle austral devrait avoir plus de
neiges que le boréal en hiver, et, au contraire, moins que le nôtre en été.
Xous ne devons pas en conclure immédiatement que les hivers de l'hémi-
sphère austral sont plus froids que les nôtres, parce que l'absorption de la
chaleur solaire reçue dépend beaucoup de l'état de la surface qui la reçoit.
Si cette surface est un océan, jjar exemple, Teau des mers ne s'échauffe
jamais à plus de 29", même sous les tropiques (Hu.mboldt, Mélariges. p. 441 ),
Si ce sont des forêts, la températui-e du sol pourra s'élever à 36" ou 40°; si
c'est du sable aride, elle pourra atteindre 60"* et même 70^ La distribution
des températures est ensuite réglée par la conductibilité des eaux, par le
régime des vents, par l'humidité de l'atmosphère. Nous ne devons donc rien
6-2\5 "31 s 961
l5y; == -^ p^" p^^^ [m) = [w) = îHxi ■•" yù ^'" r:-
i.HS SAISONS sLi{ I. V i'i.AM:ii; MAUs. .•>•.':
( oMcluio diiu [tnini de vue <'xcliisiveiuenl ^'é(»méln«iiK'. l/lK-iuisplièr»' tr-i-
leslre austral est surtout aquati(|ii<'.
Ainsi, à l' époque du solstice d'hivL'r de notre li<'mis|.lii'M-r-. qui se trouvr
actuellement voisin du périhélie et n'en diffère que de 1 1 jours en position,
le glo])e terrestre reçoit par jour le maximum de chaleur (ju'il puisse recevoir
du Soleil. En ce solstice de décembre, c'est le pôle austral qui est exposé au
soleil et ccsl l'hémisphère austral qui a les jours les plus longs. Géométri-
quement parlant, ses étés devraient donc être plus chauds que les nôtre?.
Au solstice de juin, c'est notre hémisphère Loréal qui est exposé au soleil,
mais à la plus grande dislance du Soleil; nous devrions donc, avoir des étés
moins chauds, et en même temps l'hémisphère austral devrait avoir ses
hivers plus froids.
Mais ici vient se placer une autre considération.
Quoique la Terre soit plus proche du Soleil au périhélie qu'à l'aphélie, et
qu'elle en reçoive plus de chaleur, si l'on considère une moitié entière de
i'orbite, par exemple, la moitié comprise entre l'équinoxe de septembre et
l'équinoxe de mars, on constate que la quantité de chaleur solaire reçue est
la même pour les deux moitiés; eUe n'en reçoit pas davantage du 21 sei>-
tembre au 20 mars que du 20 mars au 21 septembre.
Sans doute, il y aurait une différence, si les saisons t-taient d'égale durée.
Mais le mouvement de notre planète le long de son f»rbite n'est pas uni-
forme. La vitesse angulaire de la Terre sur son orbite varie en raison inverse
du carré de la distance, précisément comme la lumière et ta chaleur. Il en
résulte que les mêmes quantités de chaleur sont reçues du Soleil pour les
mêmes arcs parcourus, quelle que soit la section de l'ellipse que l'on con-
sidère.
Les durées des saisons sont inégales à cause de cette variation dans la
vitesse de la Terre. Son mouvement est le plus rapide au périhélie, le plus
lent à l'aphélie; si elle reçoit plus de chaleur dans la première position que
dans la seconde, elle passe plus vite et reste moins longtemps sous l'action
des rayons solaires. Voici la durée actuelle des saisons, en prenant notre
hémisphère comme point de départ :
Diiréo lies saisons terrcstr'-'
lli.'ini>i>hiTe burcal.
Prinlemps.. . . 02» 21'' / ,
Ét.> 93 14 i'^^"'
Automne 89 19 <,-,.,,,
Hiver... 89 0 i
C'est le contraire pour l'autre hémisphère.
Le Soleil reste donc huit jours de plus sur Ihémisphéie boréal que sur
528
LA PLANKTK M A 11 S.
riiémisplièro austral. La Torre met liuiL jours tic plus pour aller de l'éijui-
iioxc de mars à l'équinoxe de septembi'C que pour aller de léquinoxe de sep-
tembre à celui de mars. Mais, si l'on examine le globe dans son ensemble,
on trouve que la compensation est exacte : le Soleil, malgré ses variations
de ilistancc périhélique et aphclique, restant plus longtemps sur une section
de l'orbite que sur lautre, verse exaclcmeut sur cbacune d'elles la môme
quantité de cbaleur.
Ainsi, la quantité de chaleur que la Terre reçoit du Soleil dans chaque
partie de l'année est proportionnelle à l'angle décrit, durant le même laps
de temps, par le rayon vecteur du Soleil. Cette relation peut être comparée
à la deuxième loi de Kepler, d'après laquelle les aires ou surfaces décrites
par les rayons vecteurs des orbites sont proportionnelles aux temps em-
ployés à les parcourir, en remplaçant le temps par les angles. Ainsi, en
allant de A cnB f//^.258';, dans la section de l'orbite la plus proclie du Soleil.
Êgalilc de cluilcur reçue pour des arcs égaux.
la Terre ne reçoit pas plus de chaleur en parcourant cet arc de 90" qu'elle n'en
reçoit dans l'autre section, en se rendant de G en D pour parcourir un même
arc de 90°. Seulement, elle a mis plus de temps pour parcourir le second arc
que le premier.
La quantité de chaleur rcrue par une planète quelconque en chaque point
de son orbite varie exactement comme sa longitude héliocentrique, de -sorte
que les mêmes quantités de chaleur sont reçues du Soleil pour des angles
égaux, quelle que soit la position de l'orbite que l'on considère. Coupons, par
exemple, l'orbite ten-estre par un diamètre quelconque passant par le Soleil;
puisqu'il y aura 180° de longitude de part et d'autre de cette ligne, la même
quantité de chaleur solaire sera reçue par chaque segment. Donc» en passant
d'un équinoxe à l'autre, (jue ce soit de A en B par l'aphélie [lig. 2.j9i ou de
LliS SAISONS suit I.A l'LANKII': .MAIIS.
r)2'.)
15 (.Ml A [liir le i>érili61ii'. tuulo plain'li; reroil du Soleil la lacuic tiaaulilu de
chaleur, ([11(3 ce soit du côb' du périhélie oa ilu côté di.' l'aphélie.
Il en résulte ([ue. duranl l'année cnlicrc, clia([ai,' héuiisphérc rcijoil la niéiiic
Kig. 251».
Pirihélic
Aphélie
La Terre rci;ait la même nuantile de chaleur tic A en B ^ue tic 15 ( [lenliélie tu A. par l'apliélie.
(juaiilité de chaleur solaire, qur-llc que suit la posilioa des équinoxes sur
l'orbite et quelle que soit Texcentricilé.
Si nous considérons encore yfuj. :200i des arcs parcourus en temps égaux.
Les quantités de chaleur rei:iie sont proportionnelles aux arcs.
par exemple, en un mois de périhélie ;CDj et un mois d(' l'aphélie (El'i, la
quantité de chaleur reçue sera proportionnelle à l'arc; dans le premier cas.
l'arc est de 90" et, dans le second, de G" : la proportion serait de 15, c'esl-
à-dire que, dans l'ellipse décrite, l'astre recevrait, en un mois, quinze fois
moins de chaleur à l'aphélie qu'au périhélie.
L'égalité dont nous venons de parler, en vertu de laquelle chaque hémi-
sphère reçoit dans le cours de l'année entière la même (|uanlité de chaleur,
n'empêche pas les contrastes causés par les diirérences de dislances du péri-
hélie et de l'aphélie.
l"'L.\Mii.\nio.\. — Mnrx. 34
530 LA l'I.A.NÉTi: M A H S.
La Terre reroit plus de clialour au [iciilu-Iic (|u';t l'aiihclie, eu raisuu in-
verse du carré de la distauce.
L'hémisphère e.\i)Osé au Soleil dans la section du périhélie est l'avorisé
dans la même proportion. Xous avons vu qiie celte proportion est de Z^.
Elle pourrait être beaucoup plus grande. On peut imaginer des ellipses
allongées de telle sorte que cette proportion y devienne ,'u, 1. '7, 2. 5, 10, 20
et davantage. La comète de ilalley, par exemple, a pour cxcejilrciilé 0,1)073
[jlg. "201 '. son demi grand axe étant de 18,00, ce (]ui représente J7, il pour
celte excentricité: la. distance aphélie est de 35, il 12, la distance périhélie,
0,5889 ; la comète est donc 00 l'ois plus proche du Soleil au périhélie (]u'à
Fig. 2G1. — Excentricité de Torbitc du la comctc de Ilalley,
l'aphélie, et par conséquent, reçoit alors 3G00 fois plus de chaleur. Imaginons
({uece soit là l'orbite d'une planète dont l'axe serait couché sur son éclip-
lique et parallèle à la ligne du grand axe : jamais les neiges ne fondraient sur
Ihémisphère aphélique passant dans l'ombre au périhélie. Sans doute, les
planètes n'ont pas des excentricités pareilles. Cependant celle de la petite
j)lanète .Etlira est de 0, 38, plusieurs autres dépassent 0, 30, celle de Mercure
est de 0, 2056, et celle de Mars est de 0,09320.
Examinons maintenant chaque hémisphère séparément pour sa saison d'été
(d'un équinoxe à l'autre! et sa saison d'hiver.
L'inclinaison de l'axe du globe apporte un élément de différentiation entre
l'hiver et l'été. 1 Xous appelons ici hiver les six mois compris de l'équinoxe
d'automne à l'équinoxe du printemps, et été les six mois compris dans l'autre
section de l'orbite.) L'excentricité et la position de la ligne des équinoxes
ne causent aucun changement, mais il n'en est pas de même de l'inclinaison.
Il est évident que si la Terre avait son axe perpendiculaire à l'orbite, comme
Jujjiter, il n'y aurait pas de saisons du tout.
L'inclinaison de l'équateur terrestre sur l'écliptique est de 23''27' et varie
dans le cours des siècles entre 21^58'36" et 24°35'58''.
S'il est vrai de dire que la chaleur reçue par la Terre entière de l'équinoxe
de printemps à l'équinoxe d'automne est égale à celle qui est reçue de l'équi-
noxe d'automne à l'équinoxe de printemps, il ne le serait pas d'ajouter que
la chaleur reçue par chaque hémisphère pendant son hiver soit égale à celle
qu'il reçoit pendant son été.
LES SAISONS sfH I. A im.am:ti: m vus. ÔJl
En fait, ce rapport est très inégal. Si l'on représenle par lUO la (inanlilé
totale de chaleur solaire rcrne par un hémisphère dans le cours de lannée.
G3 pour 100 appartiennent à la saison d'été et 'M nmir JOO à la saison
d'hiver (' .
(') Sir Roiiert IJai.l. TIu; cause of an tce luje. IS'Ji; - \Via.\Kii, t'cbcr tlic Sldrhc
der Z^es/j-a/i/jn(g,Zeitschrift (lerCXistcrreichischeinGcselIschnltfiir Météorologie, 1870.
211
Soit — la (|nantité de chaleur solaire tombant perpendiculairement sur une surface
égale à la section de la Terre, à la distance moyenne a, dans l'unité de temps;
Soit ô la déclinaison Ijoréale du Soleil.
La proportion re<;ue par l'Iiéniisplière nord sera
77 J -+- smo,
et, par Phénusphère sud.
A la distance r, et dans le temps (//, la chaleur reçue par l'iirmi-idieic nord sera
mais uuus avons
d'où l'expression devient
D'autre part.
— . I ■ - sin'>^ dl:
V'(ll) = h (II.
" -. • ^^ ,,
T =^ i 1 -h sino 1 ((0.
sino = sinOsins.
e étant l'obliquité de l'écliptique.
La chaleur totale reçue par riiémispliére boréal de l'équiiiuxe de |irintemps à 1 equi-
noxc d'autonuie est donc
/ ^{1 -siiusinO)(ZO = ^(it^-2.sinî;
De ces formules résulte le théorème suivant :
Soit 2E, la quantité totale de chaleur solaire reçue on une anni-c sur la Terre entière.
Cette quantité se i>artagc comme il suit :
Eté : L -
Hémisphère boréa
/ Hiver : E - — ^
Il î
Les formules sont les mémi\s ptnir l'éti' et l'hiver de l'hémisphère au>tral.
Pour £ = 23'27', on trouve que la chaleur reçue pendant l'été (d'un équino.xe à l'autre)
de chaque hémisphère est 0,627 E, tandis que la chaleur correspondant à l'hiver est
0,373 E (*). Le rapport est presque -. Si chaque hémisphère reçoit dans l'année une
quantité de chaleur solaire reitrésentéc par 3G5 unités, l'été sera représenté par 229 ol
l'hiver par 13G. Ces nombres sont indéi)endants de l'excentricité de l'orbite.
n. 141.59 + 2.3970'. sin : = 9,5998-2
ti,-ÎH.y2 " - 0.3979'i
■2.-,ini -0,790&S /
" "^'*''''- K^i='^'^''
i), llly'.i — O.Î'J08S = -',:J4J7i :"i,'28:t-' ".'.'■'
532 I.A IM.ANKii: .\1.\I5S.
On pcul exprimer ce même rapport aulreiiioul. Si l'on prend pour unilc la
chaleur moyenne reçue chaque jour du Soleil par un hémisphère terrestre,
la ijuanlilê annuelle sera représentée par le nombre 305. Sur cette quantité,
'220 de ces unités sont appliquées à l'été et 136 à l'hiver.
Il en résulte un contraste sensible entre les climats des deux hémisphères.
Si nous considérons rhéinisphore boréal, nous trouvons que les 2^9 unités de
son dtc sont répandues sur ISO jours, ce qui donne uuc moyenne diurne de 1,21 ;
et que les 136 unités de chaleur de son liiver sont répandues sur 179 jours, ce qui
donne une moyenne diurne de 0, 7.').
Nous avons donc pour rhémisphère boréal :
Clialcur moyenne diurne rerue en élé (18G jours) I,2i.
Clialcur moyenne diurne reflue en hiver ( 179 jours) 0,75.
C'est le contraire dans rbénnsplièrc austral.
li"hcuiisphèrc boréal jouit donc acluellcnient d'une situation tcuipéréc. l/hénii-
sphère austral, au contraire, ayant des hivers plus longs et des étés plus courts,
subit une condition plus rude.
D'après ce qui précède, nous pouvons maintenant nous rendre compte
exactement de l'ordre des saisons de Mars dues à l'excentricité.
15. — Saisons et climats des deux iiÉMisPHÈnES de Mahs.
Cette excentricité est de U, 09326, le demi grand axe étant 1 , 52369 ; elle est
donc représentée dans l'orbite de Mars par le nomhre 0, 1 i2099'j5.
Nous avons, pour les distances de Mars au Soleil :
ICn kilomètres
ixjur r. = 8",S-.> = 1 if) 000 000''"'.
Distance périliélie 1,3815920 205 857 000 <>.-,[ j~.
Distance moyenne . 1 ,5236913 227 030 000 j ^ " '. -42 3iC
Distance apliélie 1,0657907 2i8 203 000 ^ '1 1~3 )
La différence entre le périhélie et l'aphélie est, comme on le voit, de
42 346 000 kilomètres, c'est-à-dire plus du cinquième de la distance moyenne,
5,36. Ainsi l'excentricité (moitié de la dislance entre les deux foyers) est de
7^ au lieu de ç-V comme pour la Terre, la différence entre le périhélie et
l'aphélie est de y—y^^, et la différence entre la chaleur reçue dans les deux po-
sitions extrêmes est le carré de ce dernier nomhre, soit presque un demi :
vÎt. Tandis que le Soleil ne verse qu'un quinzième de plus de chaleur sur
la Terre au périhélie qu'à l'aphélie, sur Mars il en verse environ la moitié
en plus.
Or l'axe de Mars est situé de telle sorte que, de même (]ue pour !a Terre .
LES SAISONS S('l{ I. A Pr.AM.Ti: MAKS. .'.3:1
c'osl riiéinisphèro auslral ((ui l'sl luuriié vers lo Soleil au |)t''iiliflie. Cet In'--
misplière austral doit duiu', eu une propdrtiuii licaucoup plus ;:rando, avoir
(les élés plus chauds ({ue ceux do riiéniisphèro l)or<';il el des hivers plus
froids.
Par suite do cette plus grande exccnlricito, les dlirr-rences entre la Ion-
gueur des saisons sont beaucoup plus nianiuécs sur Mars ([uo sur la Terre.
Nous avons vu plus haut que la Terre eniploio 181) jours 1 1 heures pour aller
de Téquinoxe de mars à l'équinoxe de septembre, et huit jours de moins, soit
178 jours 19 heures pour aller do l'équinoxe de septembre à celui de mars.
Sur la planète qui nous occupe, la disproportion est beaucoup plus grande.
La saison chaude do riiémisphi'ro boréal compte 381 jours terrestres ou
370 jours martiens, tandis que la saison froide ne compte que 30G jours ter-
restres ou 208 jours martiens. Il y a 7-4 jours martiens de diirérence (sur GG8,
en faveur de cette section do l'orbite, de morne que sur la Terre il y en a 8
(sur 305). La disproportion est donc très grande entre la Terre et Mars au
point do vue de l'excentricité. Sur Mars, les deux moitiés de l'année, sépa-
rées par les cquinoxes, sont dans le rapport de 10 à 1.").
En appliquant à Mars la formule donnée plus haut pour les saisons ter-
restres (p. 531), nous trouvons des résultats analogues à ceux qui concernent
la Terre, (juant à la dislribulion do la chaleur relativement à chaque hémi'
sphère (').
Si l'on représente par 100 la quantité de chaleur totale re(juc par la planète
Mars dans son cours annuel autour du Soleil, cette quantité est partagée en
deux parties très inégales. Chacun de ses deux hémisphères reçoit pendant
son été 03 pour 100 de la chaleur totale, et seulement 37 pendant son hiver.
On voit que c'est la mémo proportion que pour la Terre. Il n'y a de diffé-
rence que dans les millièmes. En effet, rinclinaison de l'axe est à peine su-
périeure.
L'année martienne se compose de C87 jours. Si nous représentons par le
[') Pour riiémis]ilièro bonvil :
-■,,. „ it--2sin24°52'
Lite : lîi -
Hiver : E ""-
2it
— '2 siii2'i"")î'
Été : Ilivei- :
siii24» 52' =9,62377
>i =0,42051 7C-2JI =2,30057
2n = 0,84102
,r 4-2)1 ^.3,98201 z — 'in
2ir - 6,28.318 ■>- ~ ^'"^^'^
"-T-^J^ -0,034
534 I- A PI.ANKTI- MA US.
nomlnv GS7 les unités d*^ chaliMir ivriies ]>;ir chaijuc llomi^illll(''ro pondanl
l'année entière, TcMé de cha(jue liéniisplière recevra i3() de ces unités el
l'hiver 551.
Remarquons maintenant qu'il y a une grande inégalité de durée entre
l'été et l'hiver de chaque hémisphère. Pour l'hémisphère austral, l'été dure
306 jours et l'hiver '381. La chaleur diurne moyenne reçue par cet iK-nii-
sphére est donc de
430 unités de rlinhnir répandues sur 30G jours,
ce qui lui donne pour chaque jour : 1 . 4-3.
En hiver, cet hémisphère re(;oit
l'A unités de rlialeur r('iirnulucs sur 381 jours,
ce qui lui donne pour chaque jour : O.dG.
La différence est considérahle. Si les conditions météorologiques de Mars
étaient les mêmes que celles de la Terre, cet hémisphère suLirail une époque
glaciaire. Il est prohahle que la neige y est heaucoup moins épaisse : elle
fond presque entièrement après le solstice d'été.
Chaque hémisphère ayant des saisons symétriquement opposées, l'hémi-
sphère boréal de Mars a un été de 381 j(nirs et un hiver de 306. La chaleur
diurne reçue par cet hémisphère est donc pour son été de
•'i3G unités de chaleur répandues sur 3<S1 jours,
ce qui lui donne pour chaque jour : 1,14.
Et dans son hiver, cet hémisphère reçoit
^51 unités de chaleur répandues sur 30G jours,
ce qui lui donne pour chaque jour : 0,8-2.
Les climats de cet hémisphère martien sont donc plus tempérés que ceux
de l'hémisphère austral. Ceux-ci sont beaucoup plus rudes. C'est le même
cas que sur la Terre, mais incomparablement plus accentué, car, au maxi-
mum d'excentricité de l'orbite terrestre., le plus grand contraste est 1,38 et
0,68.
Quant à la différence de distance périhélique et aphélique, l'hémisphère
austral reçoit, à son solstice, environ une fois et demie plus de chaleur que
l'hémisxthère boréal. Il semble que les neiges australes devraient diminuer,
en été, dans une proportion beaucoup plus grande que les neiges boréales,
si les conditions géographiques étaient les mômes. Mais, comme sur la Terre,
il y a xdus d'eau dans l'hémisidière austral martien que dans son hémisphère
boréal.
Huelles indications les observations nous fournissent-elles sur ce point?
C'est ce que nous allons oxaminer.
I.I'S SMSONS SUH I. A l'f. WIITT M VMS. .-.jr.
(!. — Oiisi;uvATiONs c.viTKs SLT. LES NicicKs poLAinKS i)\: Mahs.
Dès r.inndo 17S1, William Ilerschol avait déjà romaniuo les variations des
neiges polaires, correspondant aux saisons de la planète. Eu mars, juin et juillet
de cette année-l;\. la tache polaire australe se montra six fois i)lus large en dia-
mètre qu'aux mois de septembre et d'octobre. Dans les premiers mois, « elle
devait s'étendre jusqu'au GO'^' dcgrd de latitude » et mesurer un arc de grand cercle
égal ;\ 00".
Les anni'cs 1781 et 1783, des observations dllerschel, étaient des années d'op-
position pi'-rihéliquo, dans lesquelles Mars incline vers nous son pôle austral. Le
pôle nord na pu être qu'imparfaitement observé.
11 en a été de môme en 1798, pendant les observations de Sclirœter, qui con-
stata aussi que les neiges polaires australes diminuèrent considérablement d'éten-
due depuis le mois de juillet jusqu'à la fin d'octobre. Les dessins le montrent huit
fois plus large à la première époque qu'à la dernière. On trouve à peu près les
proportions suivantes dans les figures d'IIcrschel et de Schrœtcr ;
Neige australe. 1781 \V. IIi^uscnEi,;.
Arc .irûocentrifiue.
Juin r.0°
Octobre 10
Neige australe. ITOS (SniimHnnTi :.
Juillet 50°
Novembre G
11 faut arriver ensuite à l'opposition de 1830 pour trouver des documents d'une
certaine précision. C'est encore une opposition p('rih<:''lique. et c'est encore b-
pille austral qui est observé.
Neige australe. 1830 (Bnnn e( MÀnLiMi;
LiititiicU-
Date en !)ii|iposaiit !<■ )inlc nnyoïi
(les observation^. :iii n'utr.v .le la tadir. ni.nmètre.
31 août .s:;.;: 0"53' ii'-'tC
10 septombi-p . . Si. 15 .j.'iT) ll.3(i
15 » ... 8G.25 3.35 7.1.0
2 octobrp 8G.50 3.10 G. 20
5 .. 87. 7 2.53 5./|G
20 » 85. .W 'i. I s. 2
Le solstice austral de Mars a eu lieu, en 1830. ]o 18 .septembre.
Ces observations ont été faites, comme on le voit, vers lépoqucdu solstice, et
environ un mois après. Elles indiquent seulement le minimum de la tache polaire
australe. Les observateurs prennent soin d'ajouter qu'elle est considc'rablemont
jilus grande lorsiiuolle est éloignée de son solstice d'été.
:,3G I.A PLANKTi: MARS.
La j'i-oinière cowparnisou que nous puissions faiic dos neiges boréaloi et au-
strales est fournie par les observations de Bcer ot Miidler en 1837; ce sont des
dpoques d'oppositions aphéliqucs, pendant lesquelles la planète nous présente
sou pi'dc boréal. Ces époques sont moins bonnes que les premières pour les
observations, puisque la planète est alors beaucoup plus loin de la Terre; mais
les observateurs avaient en jtartie suppléé à cet éloignement en se servant d'un
instrument beaucoup plus puissant que le premier, supportant un grossissement
double et ayant six fois plus de lumière.
H Dans toutes les observations, sans exception, écrit MiUller, du 12 janvier au
'2i mars, la tache blanche du pôle boréal a été visible i\ un degré de clarté que
nous ne nous rappelons pas avoir jamais vu dans celle du pôle austral; en même
temps, elle était considérablement plus grande que l'australe de 1830, et elle
était si brillante que l'on aurait jiu croire que la planète était, à cet endroit-là,
couverte par une autre planète. Une tache foncée l'entourait.
» On a pu reconnaître une trace certaine de la neige australe. IJn raison do
l'inclinaison de ce pôle, alors invisible pour la Terre, il fallait que cette neige
atteignit au moins le 55* degré de latitude pour être visible. Il en résulte qu'en
février et mars 1837, la neige australe était beaucoup plus étendue qu'en sep-
tembre et octobre 1830. On a la proportion suivante :
DiamctiT.
Neige australe, 1830. Solstice d'été 6° rr
» 1837. Solstice d'hiver 70 ±: ».
Mais les observateurs peuvent avoir pris les iles neigeuses australes pour le
pôle.
Q:iant aux neiges boréales, les mêmes observateurs ont trouvé :
1837. 12 JMiivirT, 0 ,27 du diamètre do la planète,
(lU 31°, i du globe de Mars,
ou lï°, ■) de latitude pour sa limite
Ainsi. " la neige boréale, en 1837. à l'époque de son été, était beaucoup plus
étendue que la neige australe en 1830, ù, l'époque également de son été; mais elle
était beaucoup plus petite que la neige australe de 1837, à, l'époque de son hiver »
(en admettant que les observateurs aient vraiment vu la neige du pôle sud, ce
qui n'est pas probable).
Ils concluent que « la neige du pôle sud varie en proportion beaucoup plus
grande que celle du pôle nord ».
Mais ces observations ne sont pas suffisantes pour décider.
Nous aurions, provisoirement :
Herschcl. Sclirrcter. MikIIit.
'Pôle sud. Variation 10° à G0° G" à ôÛ" G° à 70°
Les maxirna sont très incertains. Les observations continuèrent en 1839 pour
la neif:e boréale.
l.i:S SAISONS Sl'K I, A IM.AM.Ii: MARS. 537
Neige boréale, 1839.
rilitiid.-.
2G f('-viicr. . .
78» 33'
1" avril..
SO.'iS
10 »
S2.2()
1" iii;ii
81
ll.iyiin.
Dlanifctrp
I1-27'
22«.JV
•.).12
18. 2i
7.i()
1.0.20
•J. 0
18. 0
'. 'l'aiidis que la neig(^ aiislralc climiiiiio jusqu'à i> do diamètre, la boréale
aurait encore à son maximum 15°, c'est-à-dire une surface cinq fois plus considé-
rable. » Bcer et Mildler estiment que le minimum de cliaque tache arrive j^ d'an-
née après le solstice d'été de chaque pôle, ce qui correspond aux T^ juillet et
IC janvier do notre calendrier.
Pendant l'opposition de 1802, analogue, pour la présentation do la planète, i\
celles de 17S3, 17'JS et 1830, lord Rosse, Lockyer et Lassell ont observé, à leur
tour, ces neiges polaires. Leurs observations donnent les résultats suivants :
Neige australe. 1SC2.
Solstice d'ct(} : 9 se|itemIiro.
22 juillet 48 jours avant le solstice. %" Lord Rosse).
Série de Lassfll.
21 octohrf 43 jours après. S'C
23 » 4,') 0 7, G
25 > . . 47 » 8,0
27 » 49 .. 8,2
» 8,0
» 9,3
» 7.1
»> 5,ô
') 8,2
» 9,1
n 7,5
» 9,5
13 septomhro . .
• • i J
iiIU'S ,'ljM-è'î.
20" 0
20
.. 11
))
l'..3
22
, . 13
.
13,0
24
. . 13
..
9,0
23
.. k;
»
11,1
27
. 18
.)
9.3
29
. . 20
1)
1(1.4
11 octobm
. 32
..
7,0
13 ..
, . 34
1)
10, G
15 "
. 3G
»
9,4
17 ..
,. 38
,.
9,1
18 »
. 39
„
9,3
1 niivomlire. . .
01
■) » . . .
. 38
13 »
. GS
17
. 70
18 .. . .
. 71
22
75
8 déceinhrc. . .
. !)1
11
. 94
Série do Lockvfr.
17 septembre .T.. . 8 jours après. IS'O 3 octobre .t 24 juurs aiirès. 9°5
17 .) b... H » 13,8 3 » b 2i » 8,8
23 » a... 14 .) 10,0 3 ,. r 2i » 10,0
23 » h... 14 » 12,9 ;) .. 30 » 11,0
n.. .
8 j
ours
ai
très.
18«0
b...
a.. .
8
M
13,8
10,0
b...
('■ . .
(1...
II
»
12,9
12,9
11,3
.) . . .
IG
11
10,0
b...
10
»
9,3
23 I) r... li II 12,9 11 I) 32 « 8,4
23 » '/... 14 » 11,3 15 I) a 30 » 7,3
15 1) b.. .. 3G -> 6,8
25 » b... 10 » 9,3 18 » 39 » 7,3
Les irrégularités des déterminations proviennent de la difliculté d'une appré-
ciation précise de l'étendue exacte de la tache polaire, et aussi du fait quelle ne
maniue pas juste le pôle, mais lui est excontri([uo e( tourne autour de lui, de
538 I.V PI.ANKTi: M A US.
sorte qn'oUo se itrt^scnto sous clifTéronts anplcs ù ruhsorvalcur. l)ii voit toutefois
que les limites du diamôtre de la neige polaire australe ont ('té, en 18Gv,
de 3G' r-, 48 jours avant le solstice.
à 0* , 70 jours après.
Kn IS73, j'ai observé les neitrcs boréales, alors très blanches et très nollcmcnt
terminées (juin 1873). Elles s'étendaient jusqu'au 80° degré do latitude et sem-
blaient parfois dépasser le disque, par un elTet d'irradiation. Quant aux neiges
australes, voici ce que j'écrivais : « La région sud est visiblement marquée d'une
traînée blanche près du bore!. Est-ce la neige qui descendrait jusqu'au 'lO'" degré
de latitude sud! Il est plus que probable que ce sont des nuages >•. (C. 7v.,p, 278.1
L'opposition de 1877 a été analogue à celle de 1862 : périhélie et pôle austral.
M. Schiaparolli. à Milan, a fait les observations suivantes :
Neige australe. 1877.
Solstice d'été : -IG septembre.
"23 août .^4 jours avant. 28°G 2î septeniliro. . 'i jours avant. 14"7
28 » 29 .- 23,9 24 « ..2 » 13,8
3 septembre 23 - 26,0 2.') » ..1 » 11,5
10 .) 1G .. 23,9 2G .) .. jour(hisolsticp.\l,b
10 )' IG ," 18,5 .30 » .. 4 jours après. 12,5
11 • ... . 1.') ■ p 20.2 !"• octobre 5 » 13,7
12 » 14 ■■ 17,4 2 » .... G » 11,8
13 i> 13 1G,9 4 ...... 8 » 12,7
14 » 12 ,. 17.4 10 0 .... 14 » 10,4
15 » 1! .. 14.1 12 » .... IG » 9,5
15 . 11 ..- 1G,1 13 » .... 17 » 9,3
IG .- 10 1G,1 li ..... 18 ., 7,0
18 - 8 19,1 27 »... 31 ). 7,0
20 .. .... G « 18,5 4 novomliro. . . .39 » 7,0
On voit, par cette série, qu'en 1877 les limites du diamètre delà neige polaire
australe ont été
dr> 29". 34 jours avant le solstice,
à 7". 39 jours après.
Lorsque la tache n'était pas ronde, l'observateur a sul)stitur au diamètre fie la
neige celui d'un cercle de surface équivalente.
A la fin d'octobre et au commencement de novembre, le point blanc était
devenu si exigu, que l'observateur s'attendait à le voir disparaître tout à fait un
jour ou l'autre. Mais il n'en fut rien. Pendant les mois de novembre, décembre
et une partie de janvier, on continua de le voir briller, et môme, au milieu de
décembre, il parut augmenter et atteindre 15". Mais l'existence de ce cap polaire
devenait de plus en plus difficile à constater, soit par l'obliquité croissante de
la vision, soit par l'invasion de l'ombre, et aussi à cause des nuages qui com-
mencèrent à paraître et à se confondre avec la calotte blanche, à mesure que le
pôle avançait dans sou automne. Le minimum de la tache polaire paraît avoir eu
lieu à la fin de novembre, soit deux mois environ après le solstice.
IJ-S SAISONS SIU LA l'I.ANKTI-: MARS.
■>39
Ce luiiiiiiiniii de 7" est incoiiii),'\ral)lomr'nl, plus polit que (ont fe qui arrive dans
nos étds aux pùles toi-rostros. Les- glaces polaires ne fondent pas et empêchent
d'aborder vers le pôle au dch'i du 84" degrd de latitude vers le 70" degré de lon-
gitude ouest et au dch\ du 7.V degrd vers le IKJ'* de longitude est.
En 1879, l'habile astronome de Milan a repris les mémos observations, tou-
jours pour ce pôle austral de Mars, aujourd'hui si bien connu de nous (bca^ucoup
mieux, ou vcimIi-, ipie nos propres pôles terrestres), et a trouvé :
Neige australe, 1870.
Solstice (ït'tr : li août.
.ivs. fV'l
11.:.
'.j.r>
5.7
4.4
4.3
5.5
12.0
li.3
Les observations n'ont pu commencer que .")'.) jours après le solstice et ont été
faites en de mauvaises conditions, à cause de l'obliquitt'- du pôle (très grande,
notamment le 28 octobre). L'auteur croit néanmoins pouvoir conclure que le mi-
12 octobre
. 59 j
ours ;
prrs.
T'O
17
. 01
11..-.
IS
. r.j
'.)..'!
21
. 08
8.U
22 "
. 09
1)
0.7
23
. 70
)i
9.5
28 u
7j
..
3.8
8 novembre. .
. 8G
»
4.0
Il) »
. 88
«
4. G
1!
. 89
»
11.0
17 novnmhrf^ .
9.'j joui
18 .. . .
. 90
27 ....
. 105
28
. iOG
28
lOG
29 »
. 107
21 dcrcnibro . .
129
20 »
. I3'i
2 jiinvicr. , , .
. lil
i50 ilot-
Fi;,'. 2Cy2. — Le pulc s\i.l (l- .Mars a l'.poiiue lUi ininiiiuiin dr> neiges polairos.
nimum a eu lieu dans la seconde moitié de novembre, trois mois et demi après
le solstice austral. Grandes lluctuations dans les dimensions estimées.
La dimension minimum a du être de 'i". Plusieurs fois, celte tache blanche
paraissait sortir du disque par irradiation, qui doit doubler la grandeur a])])arente.
Le diamètre rdel serait donc réduit à ■!". ou à lîO kilomètres.
D'après les observations de Bessel en 18.10, Kaiser, Lockyer et Linsser en 18G2,
Hall et Schiaparelli cm 1877, et ce dernier de nonveaii en 1870, la position de la
ÔIO I.A PI..\Ni:TK MARS.
neige polaire australe, lorsqu'elle est rrdnito à sa plus petite dimension, est ;
Distanco nu pûlo céoprrnphiiiuo j".4
J.ongitiulo 30°
La douille figure précédente i pn. '202 i représente la neige polaire australe à ses
niinima de 1877 et 1S79.
Kn ISSI, le polo austral se trouva juste au cercle tcrminateur, pendant l'été,
Jusqu'au 11 septembre, où il s'inclina tout à fait dans riiémispliéro invisible. Il
lut donc impossible de l'observer pendant l'opposition d'octobre 1881 àavril 1882.
On aperçut parfois des taches blanches; mais ce n'était pas lui : c'étaient les
iles australes. En juin, il mesurait 25", en juillet, 10°. Le solstice arriva le 25 juin.
Sept mois après son solstice, en janvier et février, la neige polaire australo n'a-
vait pas plus de 10° de diamètre, car on no l'apercevait pas. Kilo n'augmentait
donc pas encore.
De 18S1 à 1888, le pôle boréal a pu être étudié à son tour. Le pôle austral est
resté à peu près caché aux observateurs terrestres.
Pendant ses observations du 30 septembre 1879 au 2'i mars 1880, M. Schiapa-
relli avait remarqué cinq ramifications bien curieuses, paraissant émerger du pûlo
boréal invisible, et disposées en couronne entre 30° et -'lO" de distance polaire.
Pendant l'opposition suivante (1881-82), on put vérifier si ces taches blanches
venaient bien du pôle, car ce pôle se présentait à la vue de l'observateur ter-
restre, exactement sur la limite de l'hémisphère visible. Depuis le 26 octobre 1881
jusqu'au 25 janvier 1882, aucune neige polaire permanente n'a pu être constatée
dans l'endroit du pôle; mais des neiges éparses en émanaient, formant huit
rameaux différents, dont plusieurs occupaient les positions observées en 1879.
Ces rameaux se raccourcirent et augmentèrent de blancheur, pendant le mois de
janvier, et se concentrèrent graduellement vers le pôle. Le 20 janvier (on n'avait
pu observer les jours précédents, à cause du temps), le pôle était marqué par
une immense calotte de neige, à peu près ronde, mesurant environ 4jo de dia-
mètre, provenant de la concentration, de la coagulation en une seule masse, des
rameaux dont nous venons de parler. Cette condensation do rameaux de neiges
en une seule masse polaire n'a rien d'analogue sur la Terre. Cette phase de con-
centration s'est produite vers le 25 janvier, c'est-à-dire cinq mois avant le solstice
d'été boréal, qui est arrivé, en 1882, le 25 juin. L'auteur a trouvé ensuite, pour
le diamètre de cette neige polaire boréale :
Neige boréale, 1882.
Solstice d'été lioréal : 25 juin.
26 janvier 150 jour.'; rivant le solstice 45"
28 » lis » 45
4 février 141 » 40
17 » 128 B 30
27 >^ 118 » 20
10 mars 107 » 30
4 avril 82 » 20
10 .) 77 » 27
Li:S s VISONS s II! LA l'I. VMill- .M A US.
51!
L;i i)rcci5>ion n'est pas très i,'ran(Jc, à cause de l'obliquitû du pùle et parce que
les limites n'étaient pas toujours nettes. Cette calotte polaire n'a pas été seule-
ment le rc'sultat de la suppression des branches neigeuses signalées plus haut
l-'ig. 263. — I.e pùlc nord et rUémisphcre boréal de Mars eu 1879 et 1881. Tiainécs de neig>.\
mais plutôt de leur contraction vers un noyau central, de leur accroissement en
largeur eu même temps que leur longueur diminuait, remplissant les intervalles,
qui pourtant restèrent parfois visibles en plusieurs points.
L'équinoxe de printemps de l'hémisphère boréal de Mui.v avant eu lieu le
8 décembre J88i et le solstice d'été boréal le -25 juin 188"2, on voit (juc la plus
grande dispersion de la blancheur polaire sous forme de branches lancées vers
léquateur, a eu lieu quelques mois après le solstice d'hiver; mais la plus grande
intensité de la neige, comme surface et comme éclat, n'a eu lieu qu'un mois et
plus après l'équinoxe de printemps, ou seulement cinci mois avant le solstice
d'été. Co maximum a correspondu à une calotte réguliero do i'*" de diamètre en-
:.4-2 LA IM.AMVli; M vus.
viroii. conceutrùiiK'' nu pnk' nord, (ini a ensuite iliniiniu' lentement en approcluint
de lotc.
L'astronome de .Milan a essayé de représenter irranhiquement {/'nj. 263) ces
particularités de la neige polaire boréale, déduites de ses observations de novembre
et déccrabre ISSi. Les huit branches ressemblaient aux tracés esquissés ici autour
de la région polaire.
De plus, trois stries blanciuUres, bien formées, et d'une largeur uniforme,
allaient, en tournant, atteindre l'équateur aux longitudes 5", 95° et 350°. On en
apercevait encore une autre, moins sûre, traversant la mer du Sablier et lon-
geant ses rivages. C'était comme une série de spirales, partant du pôle nord et
se dirigeant obliquement vers le Sud-Ouest. Ou pense aussitôt que cette direction
se rattache au mouvement de rotation de la planète et à la théorie des vents ali-
ses. Ces traînées de neige produites pendant le printemps indiquent des courants
réguliers, moins troublés que ceux de l'atmosphère terrestre par des circon-
stances accidentelles. Lorsque ces rubans de neige traversent des canaux, ils
cessent d'être visibles sur ces canaux, comme de la neige qui, en tombant sur de
l'eau, y fondrait, tandis qu'elle resterait sur les régions sèches. On peut penser
que ces traînées blanchâtres, qui sont restées visibles pendant des semaines et
des mois, n'étaient pas des nuages, mais de la neige, sans doute peu épaisse.
Nous arrivons maintenant à l'opposition de I88i, qui a donné au même obser-
vateur les mesures suivantes :
Neige boréale, 188i.
Solstice d'été boréal : 13 mai.
20 janvier 1 1 i jours avant. 3G°
15 février 80 » 31
23 mars 51 » 23
2 mai H » 15
On n'a pu suivre jusqu'au solstice.
Les séries de 188G et 1888 offrent des résultats analogues :
Neige boréale, 1886.
Solstice d'été boréal : 31 mars.
1880. 18 janvier 02 jours avant le solstice. 25"
20 f(:'vrier 33 » » 10
l'i mars 17 » <> 0
28 » 3 » » G
21 mai 51 jours après. » 5
l" juin 02 y » 9
1888. 7 mai SI - - 12
2 juin 107 w )' 11
Juillet pou visible .
La tache a diminué rapidement d'éclat en juillet 1888 par suite de l'énorme
obliquité de l'illumination solaire, suivie bientôt par son immersion dans la nuit
du pôle. Le pôle boréal est entré dans l'ombre le 1."} août, jour de l'équinoxe.
LKS SAISONS SUK I.A l'I.AMMK MAIlS. 5i3
D'après l'eusemble des observalioiis, lu neige polaire boréale est centrée sur
le pôle, taudis que, comme nous l'avons vu, la neige australe est à côte.
L'opposition de 1890 nous a présente la planète avec ses deux pôles visibles.
Kn juin, juillet, août et septembre, on a pu voir en même temps les neiges po-
laires boréales et australes, mais juste au bord du disque, la tache boréale étant
mieux marquée, plus inclinée vers nous d'ailleurs : je lui ai trouvé environ 20°
le 30 juillet. La Terre est passée par le plan de l'équateur de Mars le 23 sep-
tembre. A partir de cette époque, on a mieux vu le ca]) polaire austral. J'ai
trouvé :
Neige australe, 1890.
Sulslicc d'étO aus-lr;d : % nuvcnibro.
•24 septembre 03 jours avant le solstice. .30'
'2 octobre 55 « » '25
9 » 48 » » "25
12 » 35 M M -20
13 décembre — . . 17 juins après. » 10
'20 février 80 » « 8
Récapitulons toutes ces observations :
VARIATIONS DE [.A NEIGE l'OLAIUE ALSTRALE.
Uianiétrr.
1781 Max. (30°
1798 50
1830
1837 70
1862 30
1877 2'J
1879
1890 30
VAHIATIOXS DE LA NEIGE POLAIRE nOREALE.
1837-30 Max. 31' Min. 15° iJeer et Miidler,
1882 l". '> Schiaparclli.
1884 Id.
1886 ' "i Ll.
Si nous éliminons de la première série l'appréciation de 1837, fondée sur une
tache blanche non identillée avec le pôle alors invisible, les variations des deux
pôles deviennent comparables entre elles, contrairement à la théorie et à l'opi-
nion de Becr et de Miidler. En effet, M. Schiaparclli a mesuré en 1S82, l.-iO jours
avant le solstice, 'lô" à la neige boréale. Ce nombre pont ne pas coïncider avec le
maximum absolu, qui peut atteindre .'lO'' et même OO". De plus, le même observa-
tour a vu descendre en 1886, ce cap polaire boréal à ô". Ces limites sont égalu-
mcnt celles des neiges polaires australes.
Diamètre.
Min. 10»
W. Ibrschel.
50
Sclirœter.
G
Béer et Madler.
1)
M.
0
llosso et LasscII
7
Schiaiiarelli.
4
Id.
8
Flammarion.
544 I. \ PI. am:ti; m vus.
Il est fort possible que les années ue se ressemblent pas, sant> douLo, iiu'il y eu
ait de froides et de chaudes pour chaque hémisphère. De plus, on assiste parfois,
du jour au lendemain, à des transformations d'aspects considérables, que l'on
peut attribuer ;\ d'énormes chutes de neige. On se souvient dos photographies
prises par M. Pickering, les 'J et 10 avril ISOO ip. îOîi. dans lesquelles toutes
celles du second jour montrent la tache polaire australe beaucoup plus vaste que
celle du premier jour.
Il y a donc des variations météorologiques plus ou moins rapides sur Mars
aussi bien qu'ici. Le temps change h\ comme ici — mais moins.
On le voit, l'ensemble des observations sur les neiges polaires ne nous
conduit pas à conclure que l'excentricité de l'orbite ait pour résultat de faire
subir aux neiges australes des variations annuelles plus considérables que
celle du pôle boréal. Dans tous les cas, la dilTérence est légère.
Très certainement, il fait plus cJiaudan pôle sud à son solstice d'été qu'au
pôle nord à son solstice d'été également, puisque le premier passe alors au
périhélie et le second à l'aphélie. La neige polaire australe devrait être plus
complèten:!ent fondue. Elle l'est, en effet, tout à fait au pôle géographique:
mais il reste toujours un résidu de 120 kilomètres de diamètre à 324 kilo-
mètres du pôle, vers 28° de longitude, au milieu de la mer. Il y a proba-
blement là une île, vaste et élevée, sans laquelle, peut-être, la glace fondrait
entièrement. Au pôle géographique nord, au contraire, la glace reste centrée
à ce point. Mais il n'y a là aucune grande mer.
Les hémisphères austral et boréal de Mars sont d'ailleurs bien différents
au point de vue de la distribution des eaux et des mers. Gomme sur la
Terre, le premier est surtout maritime, le second surtout continental : les
mîmes lois géologiques ont, sans doute dirigé le relief des deux surfaces plané-
taires^ élevant le sol boréal au-dessus du niveau moyen, (^ettc différence a
un efîet climatologiquc qui n'est pas sans importance. Cet effet est de rendre
les saisons et les climats plus tempérés dans le premier, plus extrêmes dans
le second, c'est-à-dire d'agir en un sens absolument contraire à celui qui
résulterait de l'excentricité et qui, peut-être, le neutralise entièrement. 11
faudrait aussi ajouter ici une influence indirecte sur la distribution des
températures, celle des courants, maritimes et aériens.
En résumé, les saisons de Mars sont tout à fait comparables aux saisons
terrestres, malgré la plus grande distance au Soleil et l'excentricité consi-
dérable de l'orbite. Les neiges polaires fondent en été, à chaque pôle. Jjeau-
coup jjlus complètement que les nôtres. Les hivers paraissent moins rudes.
L'èvaporation et la condensation s'y effectuent plus rapidement qu'ici. Le
régime météorologique y semble très tempéré, A l'exception des brumes
d'hiver, l'atmosphère y reste presque constamment pure.
LES SAISONS suit LA PLANKTE MARS. 543
D. — CoxcLusroNs.
Cette analyse comparée des saisons sur la Terre et sur Mars nous conduit
aux conclusions suivantes :
Les saisons de Mars sont à peu prés de mrine intensité que les nôtres,
mais près de deux fois plus longues.
La saison chaude dure 381 jours sur riiémisiilierc boréal, et la saison froide
a la mrmc durée sur riiéniisphère austral,
La saison froide dure 30G jours sur l'hémisphère boréal, et la saison chaude
a la nirme durée sur riiémisphère austral.
Chaque hémisphère reçoit pendant son été 63 pour 100 de la chaleur
annuelle totale, et 37 pour 100 pendant son hiver.
Les saisons de l'hémisphère austral sont en plus grand contraste que
celles de l'hémisphère boréal.
Les neiges polaires de la planète Mars varient suivant les saisons. Elles
atteignent leur maximum de trois à six mois après le solstice d'hiver de
chaque hémisphère et sont réduites à leur minimum également de trois à
six mois après leur solsticQ d'été. De même que sur la Terre, les années ne
se ressemblent pas.
Dans les deux hémisphères, la neige polaire paraît atteindre, en hiver,
45" à 50' de diamètre et se réduire, en été, à 4° ou 5°. Nous n'en pouvons
rien conclure sur les effets de l'excentricité de l'orbite pour chaque hémi-
sphère. Des observations plus complètes sont très désirables.
En dehors des glaces polaires, des chutes de neige ont été observées dans
les régions tempérées, et parfois même jusqu'à l'écjuateur. On a vu dans
l'hémisphère boréal des traînées en spirale venant du pùle, indiquant des cou-
rants atmosphériques influencés par le mouvement de rotation de la planète.
La calotte polaire boréale paraît centrée sur le pùle. L'australe en est
éloignée à 5°, 4, ou 340 kilomètres, à la longitude 30°, de sorte qu'aux époques
de minimum le pôle sud est entièrement découvert : la mer polaire est libre.
La climatologie du monde de Mars offre les plus grandes analogies avec
celle de la Terre : ses conditions paraissent plutôt meilleures. L'éloigne-
ment de Mars du Soleil et la légèreté de son atmosphère, dife à l'infériorité
de sa masse, sont compensés par des conditions physiques plus favorables
que les nôtres.
La théorie de la variation séculaire des climats terrestres fondée sur
l'excentricité de l'orbite, proposée par Adhémar, reprise par James CroU sur
d'autres bases, n'est pas conQrmée par l'examen de Mars. Cette planète a une
excentricité cinq fois et demie supérieure à l'excentricité actuelle de la Terre,
Fi..\MM\nioN. - Murs. 35
540 i. A ri.ANinH M A us.
et celle-ci ne peut jamais atteindre celle de Mais. Celle planète est donc un
excellent type à étudier comme contnMo. Justement, c'est aussi son hémi-
sphère austral qui a son été au périhélie, et son hiver à l'aphélie qui a son
été le plus chaud et le plus court, son hiver le plus long et le plus froid.
La théorie dont nous parlons admet que le pôle sud, terrestre se refroi-
dit d'année en année, parce qu'il a huit jours de moins de soleil par an.
Pour Mars, la différence s'élève à 74 jours. On pourrait penser, en effet, que
l'été plus court que l'hiver ne suffit pas pour fondre entièrement les glaces
formées au pôle sud pendant l'hiver. Or, il n'en est rien, comme nous venons
de le voir. La calotte polaire australe est aussi complètement fondue, après
son été, que la boréale après le sien. Il n'en reste qu'un résidu de 120 kilo-
mètres de large, excentriquement au pôle, et sans doute sur une île.
Comme sur la Terre, le solstice austral de Mars est voisin du périhélie.
La demi-révolution de la ligne des apsides terrestres s'effectue en 10 500 ans ;
le solstice d'été austral — et, par conséquent, le solstice d'hiver boréal, —
est arrivé au périhélie en l'an 1248 de notre ère. Sur Mars, la demi-révo-
lution de la ligne des apsides s'effectue en 9866 de ses années. Sur ce temps,
il y a (en 1892), depuis la dernière position égale des saisons, 4235 années
martiennes d'écoulées; il en reste 5631 jusqu'à la prochaine. Actuellement,
le solstice d'été de l'hémisphère austral de Mars arrive 36 jours après le pé-
rihélie, à la longitude héliocentrique 357°, la longitude dupérihélie étant 334°.
Le froid de l'hiver au pôle sud de Mars doit être de beaucoup supérieur à
celui du pôle terrestre. La nuit polaire y est presque double de la nôtre; elle
dure 338 jours, au lieu de 182, et l'air y est sans doute de moitié moins
dense. Eh bien, en quelques mois, à la suite du solstice d'été, cette neige
est fondue.
Cette fonte des glaces pourrait être attribuée, pour le pôle austral, aux
eaux plus ou moins tièdes de la mer et à des courants marins analogues à
notre Gulf-Stream; mais cette explication ne s'appliquerait pas au pôle nord,
puisqu'il n'y a point là de vaste mer. Nous sommes autorisés à penser qu'il
y a moins d'eau et moins de vapeur d'eau sur Mars que sur la Terre, moins
de nuages, une moindre quantité de neiges, et que l'épaisseur des glaces
y est beaucoup moindre qu'ici. Peut-être aussi, la durée de l'été, du double
Ijlus longue que sur la Terre, suffit-elle amplement pour fondre toutes les
glaces. Il y a des limites à la production des neiges; tandis que le Soleil
reste pendant près d'un an au-dessus de l'horizon de chaque pôle.
En résumé, l'analogie climatologique avec la Terre ressort de toutes les
observations, et l'étude de la planète Mars apporte des lumières particulières
à la connaissance générale de noire propre globe.
CHANGEMENTS ACTUELLEMENT OBSERVÉS. 547
CIIAIMTRK VII.
CHANGEMENTS ACTUELLEMENT OBSERVÉS A LA SURFACE
DE LA PLANÈTE MARS.
Le monde de Mars ressemble beaucoup à celui que nous habitons, et c'est
même là ce qui nous intéresse le plus dans son étude, c;u-, en général, nous
sommes portés à croire que ce qui nous ressemble est plus intéressant (jut>
tout le reste. Mais, d'autre part, ce petit globe dilfùre assez du nôtre pour
éviter la monotonie, et à ce titre son étude est peut-être plus suggestive en-
core. La question des changements qui s'opèrent incessamment à sa surface
nous pose à ce point de vue l'un des plus curieux problèmes de l'Astronomie
contemporaine. Nous signalons ce fait depuis l'année 1876 {voij. p. 241).
Les observations prouvent que des variations considérables se manifestent
réellement dans les aspects géographiques de cette planète. Toutefois, nous
ne devons admettre la réalité de ces variations qu'après les plus expresses
réserves et lorsque nous avons la certitude que ces différences d'aspects ne
sont pas dues à des diifércnces de visibilité, d'observation, ou d'interpré-
tation.
Tout observateur de Mars sait combien la perception si\re des détails de
sa surface est itifficile, et combien l'interprétation précise et absolue par le
dessin est plus difficile encore. Chacun voit un peu à sa façon et dessine
aussi à sa façon. Indépendamment des différences dues au pouvoir de défi-
nition, les yeux ne sont pas les mêmes. Tel observateur aperçoit mieux les
petits détails; tel autre remarque une nébulosité qui passera inapeirue pour
son voisin. Des 572 dessins télescopiques ou cartes aréographiqucs que nous
venons de passer en revue, il n'y en a pas un seul qui représente complète-
ment la réalité nue qui se révélerait à un observateur voisin, examinant la
surface de Mars du haut d'un Lallon.
L'analyse critique de tous ces dessins nous a convaincu de leur insuffi-
sance. La dislance est trop grande, notre atmosphère est trop épaisse, et nos
instruments ne sont pas assez parfaits.
Est-ce à dire pour cela que ces représentations martiennes n'ont aucune
valeur? Nullement, et la meilleure preuve qu'elles en ont une, c'est qu'on
s'y retrouve, eu delinitive, et qu'elles nous donnent une idée générale de la
planète.
54S LA IM.ANKTK M A US.
Mais il ne faut en prendre aucune à la lettre.
Sans doute, il y a des heures decalme parfait et de pure transparence qui
donnent d'excellentes images télescopiques. et même récommciit nous ve-
nons d'être favorisés (le ([iicli[nf<-unes dt' ces heures (nuils du IT) au Kî juil-
let 1893, du 31 au 1" août, du 5 au G août, et du 12 au 13); mais on est loin
de tout voir, et même devoir exactement cette curieuse topographie.
Imaginons un papier de tapisserie dont le dessin serait formé d'un enche-
vêtrement de figures humaines, les unes riant, les autres pleurant, alter-
nant avec des figures d'animaux, des plantes et des fleurs de toute espèce,
le tout disposé par alignements entrecroisés et de divers tons, formant dans
l'ensemble de grands dessins géométriques.
De très loin, on ne distinguera que ces grands dessins géométriques,
cercles, carrés, losanges, étoiles, rectangles, triangles, polygones, etc.
De moins loin, on remarquera qu'au fond tout est aligné suivant des
lignes droites entrecroisées sous divers angles.
De prés, on distinguera des plantes, des animaux et des hommes.
De plus près encore, on reconnaîtra des figures humaines, des animaux,
des plantes, des visages qui rient, des visages qui pleurent. Et alors l'aspect
général de l'ensemble sera perdu pour l'œil de l'observateur.
C'est là l'histoire de ce qui arrive dans l'observation de la planète Mars.
Il importe donc que nous soyons d'abord convaincus des étonnantes diver-
gences qui existent entre les dessins des meilleurs observateurs munis des
meilleurs instruments. Nous les avons eues sous les yeux dans tout le cours
de cet Ouvrage. Rappelons seulement quelques exemples bien démonstratifs
à cet égard.
I. — Différences dues aux observateurs.
Voici {fig. 264 et 265) deux dessins faits le même jour et presque à la même
heure, à l'aide d'excellents instruments parfaitement comparables, par deux
observateurs compétents, soigneux et habiles (et précisément ce sont deux
de leurs meilleurs dessins, obtenus dans les meilleures conditions). Ils re-
présentent à peu près le même hémisphère de la planète, le 18 octobre 1862,
à 8''13'" pour le petit dessin, fait en Italie par Secchi; à 8''0'° pour le grand,
fait en Angleterre par Lockyer. La première heure est celle du méridien de
Rome, et la seconde, celle de Greenwich. Par conséquent, en temps de Paris,
le premier dessin représente la planète à 7''33'" et le second à 8*' 9™. La diiîé-
rence de temps est de 36"" : la tache ronde entourée de blanc, que l'on voit
vers le centre du disque, est plus avancée de 36™ vers la gauche dans le
grand dessin que dans le petit.
CHANGEMENTS ACTUELLEMENT OHSERVftS.
5i9
Eh bien, ces deux dessiiiïi sont très caractéristiques par la tache circulaire
dont nous parlons. L'observateur romain la voit allongée du Nord au Sud,
Fjg. 26i. — Dessin clo Mars fait lo 18 octobre mi, à 7''.33'" (heure do Paris), par Secchl.
et l'observateur anglais, allongée, au contraire, de l'Est à l'Ouest. De plus,
Fig. 265. — De-sàiii d-.- Mars fait le même soir, à S'-O", par Lockycr.
le premier l'entoure d'une courbe ombrée donnant l'idée d'un cyclone, d'un
tourbillon atmosphérique, et il dit, en effet : " La crederei una gran bur-
rasca in Marte «. Le second y voit simplement une mer tranquille, qu'il
appelle la Baltique. L'impression des deux observateurs est totalement dif-
550
I.A IM^ANliTR MARS.
férontc. Comparez les détails des deux dessins, vous en recevrez la même
impression.
Comparons aussi deux dessins faits également le même jour, et presque
à la même heure, le 4 juin 1888, l'un par M. Schiaparelli, à Milan (ftg. 2G6),
l'autre par M. Perrolin, à Nice [fig. 2G7), et tous deux à l'aide d'excellents
instruments. Sans contredit, ces deux dessins indépendants se confirment
aussi l'un l'autre. On voit sur tous les deux : 1° la mer du Sablier (un peu plus
avancée vers la gauclic, par suite de la rotation de Mars, sur le second dessin
0 \llc-^l
M
§ 'ê /
"rVirrliOc
Fig. 2CG. — Dessin de Mars fait le 4 juin 1888, par M. Scliiaparelli, à Milan.
que sur le premier ; 2° son prolongement appelé Protonilus; 3° un golfe con-
duisant a Astaboras; 4° la petite ligne nommée Astusapes; 5° les deux canaux
doubles du Phison et de l'Euphrale montant en ligne droite de Protonilus
pour se joindre à la mer supérieure; 6°rHiddekel allant du lac Ismenius à la
baie fourchue; 7° le Gehon partant d'un point assez éloigné de ce lac pour se
rendre à la même baie; 8" la tache polaire inférieure; 9° l'Euphrate allant
jusqu'à celte tache polaire; 10° une échancrure sombre dans cette tache à
gauche. La concordance est assurément incontestable, ce qui nous prouve
que ces lignes droites extraordinaires existent réellement.
Mais pourtant quelles différences dans les aspects! Le Gehon est incompa-
rablement plus large dans le dessin de M. Perrotin que dans celui de M. Schia-
parelli (il est vrai qu'il se rapproche du centre) ; la baie de la mer du Sablier,
vers Astaboras, est plus marquée et plus importante; il en est de même du
Protonilus, composé d'un seul estompage dans le dessin de Nice et d'un
CHANGEMENTS ACTUELLEMENT OBSERVÉS. 551
double canal dans celui de Milan. On pourrait croire à des changements
réels si les dessins étaient do deux dates différentes. Ils nous montrent, au
contraire, que dans les observaliuns astronomiques, comme dans la vie habi-
tuelle, lorsqu'on en arrive aux nuancés, chacun a un peu sa manière de voir.
Considérons encore, si vous le voulez bien, un troisième exemple du mémo
ordre. Voici [ftg. 268 et 2G9) deux dessins faits au même instrument, — et ce
instrument, c'est le plus puissant du monde, le grand équatorial do 0"',91 de
l'Observatoire Lick, — par deux observateurs différents, le même jour, à un
\
\
'^.
■<.^,
\, i. y -Polr -^
Fig. 2G7. — Dessin de Mars fait le même soir, par M. Perrotin, à Nice (une heure environ
après le précédent).
quart d'heure d'intervalle. Ils sont tous deux du 27 juillet 1888. Le premier a
été fait par M. Iloldon, le second par M. Keeler. Dans chacun de ces deux
croquis, la mer du Sablier traverse le milieu du disque du haut en bas. Mais
quelles différences dans les aspects! C'est à n'y pas croire! Ainsi, en même
temps, au même instant, un observateur voit l'aspect de la fig. 268 et un autre
voit celui de la fuj. 269. Si l'on partait de là pour conclure à des changements
réels arrivés sur la planète, on serait dans l'erreur la plus complète.
Les croquis des jours précédents et suivants montrent que M. Holden
voyait bien réellement, à gauche de la mer du Sablier, les deux traînées
grises verticales qui y sont dessinées, tandis que M. Keeler ne les voyait
pas : il voyait autre chose.
Du reste, nous avons vu passer plus haut sous nos yeux, notamment
p. 482, plusieurs cas analogues.
1. \ l'I AM.TK MARS.
Ces oxemplcs, quil est supeiihi de multiplier, prouvcnl à n'en plus pou-
voir douter, que chaque observateur voit selon sa rétine et dessine à sa façon, et
Fier. WS.
iMi,'. vîfiO.
Dessin de Mars fait par M. Holden,
à l'Observatoire Lick, au grauil équatorial,
le 27 juillet 1888, àSi'O^la, ile blancliàtre).
Dessin de Mars fait par M. Keeler,
au même Observatoire et au même instrument,
le même jour, un quart d'heure après.
que nous ne devons pas prendre leurs dissemblances de dessins pour des
changements réels arrivés à la surface de la planète (•).
A ces différences d'observations personnelles, il convient d'ajouter tout de
suite ici celles qui peuvent être imputa])les aux instruments.
II. — Différences instrumentales.
Les instruments jouent, en effet, un rôle qui n'est pas sans importance.
Et d'abord, même avec nos instruments modernes, dont le pouvoir de
définition est fort supérieur à celui des anciens, nous ne voyons presque
jamais nettement les détails que nous avons le désir de représenter. Les
contours ne sont pas précis, les images sont plus ou moins vagues. Nous
essayons de dessiner aussi fidèlement que possible ce que nous voyons, mais
les nuances, les tons, les contours, les détails ne peuvent être identique-
ment rendus. Gomme cependant il faut que nous définissions notre dessin,
il y a là une cause inévitable de divergences plus ou moins marquées.
('; La vue de chaque obsercateur joue un grand rôle. Pour moi, par exemple, qui
lis parfaitement l'heure à minuit aux fines aiguilles de ma montre, à la seule clarté des
étoiles, et qui suis un peu myope, je ne distingue rien nettement de loin, tandis que
d'autres yeux sont dans un cas diamétralement contraire. Le meilleur observateur
d'étoiles doubles que nous ayons, M. Burnham, qui a découvert tant de couples serrés
à moins d'une seconde, n'a jamais pu voir les nébuleuses des Pléiades, etc.
( : 1 1 V N < ; r m i- n t s a c t r f. ij. e m i- n r ( i n s r w v i-: s :>:>\i
Celle cause esl évidciniiKMit réduilo à son rniiiinmm lorsque robservatcur
se préoccupe d'avance de co (ju'il doit Irouver sur la plhnole, lorsqu'il connaît
par les épliéinéridcs quelle est la loni,'ilud<! du méridien central et quel est
l'aspect (jui doil se préscutt-r à sfs yeux. C'est ce <|ui est arriv(' notam-
ment dans les .•bservalions de M. Terby, de Louvain, pendant l'opposition
de 1888. Cet astronome avait reçu les dessins de M.Scbiapandli et rherchait
tout exprès à vérifier et conlirmer les observations de Milan. Son in.slrument
est un excellent équatorial de 8 pouces ou ()'", -20 construit par (Irubb, de
Dublin, tandis .jne celui de l'Observatoire de Milan est un 18 pouces (0"", iO)
parfait, sortant des ateliers de Merz, de Municb.Eli bien, comparons au des-
sin publié plus haut {fig. 266) de M. Scliiaparelli, celui de M. Terby (fig. 270),
Fip. 270. — Dessin de Mars, fait par M. Terby, à Taide d'un objeclif deO"',QO (à comparer
a la pg. 2GG, obtenue par M. Schiaparclli à Caidc dun objectif de 0'",40).
résultat de plusieurs soirées, et dans lequel il a réuni tout ce qu'il a pu voir,
et, tout en tenant compte de ce que nous avons dit tout à l'heure sur les
difTérences d'yeux et de méthodes, nous attribuerons une part notable aux
instruments employés. Il y a beaucoup moins de détails dans le second
dessin que dans le premier.
La dissemblance sera plus grande encore si l'observateur ne se met pas
au courant d'avance de la face de la planète qui doit se présenter à lui et
dessine simplement ce qu'il parvient ;i voir, sans aucune idée préconçue.
Pour ma part, c'est un principe dont je ne me suis jamais départi, craignant
les illusions.
La grandeur de l'objectif, mais surtout sa valeur comme puissance de
définition, sont deux conditions importantes à considén-r. Le pouvoir op-
tique de l'appannl eiuployé joue un grand rôle; le grossissement des ocu-
laires en joue un autre : souvent lui grossissenicml moindre donnera des
images plus nettes et plus complètes à la fois qu'un grossissement plus fort.
L'étal de notre atmosphère ajoute encore une autre cause de dissemblance
dans les images, précisément eu rapport avec le grossissement employ<'.
bôi LA PLANÈTK MAHS.
Toutefois, la dimension des instriinients n"a pas autant d'importance
qu'on serait porté à le croire. Les plus puissantes lunettes des Observatoires
actuels, celles du mont Ilamilton, en Californie, celle de Nice, celle de
Pulkowa, n'ont point donné d'images comparables à celles qu'a obtenues
M. Schiaparelli à Milan, à l'aide de son objectif de 0'",46, et même à l'aide
de celui dont il s'est servi jusqu'en 1886, et qui ne mesure que 0m,21. Sans
doute, les vagues de l'air et les différences de température contrebalancent-
elles les avantages du grossissement en diminuant la netteté des images.
L'œil et ia manière d'observer doivent donc être placés en première ligne.
III. — Conditions atmosphériques terrestres.
L'état de notre atmosphère entre pour une part considérable dans la net-
teté des images. Parfois elle semble parfaite, et cependant les images sont
onduleuses et indécises, parce que les couches d'air superposées au-dessus
de l'observateur sont à des températures différentes et glissent les unes
dans les autres comme des fleuves d'air. La température du lieu de l'instru-
ment joue également un rôle notable, et d'autant plus grave que l'objectif
est plus puissant. 11 faudrait que l'instrument et môme loeil de l'observa-
teur fussent à la température extérieure, et que cette température fût homo-
gène sur une grande étendue en hauteur.
Le clair de lune, les brumes même ne nuisent pas toujours. Parfois les
images sont plus nettes, vues à travers des nuées légères passant devant
l'astre et en tempérant l'éclat. J'ai remarqué que pour Mars, en particulier,
les dessins sont souvent plus faciles à obtenir pendant le jour, môme en
plein soleil, une heure après son lever ou avant son coucher, et pendant la
clarté du crépuscule que pendant la nuit complète.
La diversité de ces conditions, suivant les positions des Observatoires et
leur altitude au-dessus du niveau de la mer, est donc une cause de variété
pour les observations.
IV. — Présentations diverses du globe de Mars.
Voici maintenant une cause de différences d'aspect qui provient de la pla-
nète eUe-même.
Le globe de Mars ne se présente pas toujours de la môme façon. Sans
compter sa distance à la Terre, perpétuellement variable par suite de son
mouvement et du nôtre, sans compter la variation de grandeur qui en
résulte pour son disque et pour tous ses aspects géographiques, remarquons
qu'il vogue incliné de 24° 52'. Il ne se présente donc pas souvent avec son
axe de rotation perpendiculaire à notre rayon visuel, pôle sud en haut, pôle
CHANGEMENTS ACTUKLLi: M K NT OBSERVfiS. 555
nord en bas cl ligne cciuatorialc le travorsaiil horizontalement au milieu.
Tantôt il incline vers nous son pôln supérieur, et nous dén^be son pôle infé-
rieur; dans ce cas, la ligne équatoriab; est fort au-dessous d'une ligne hori-
zontale médiane qui couperait son disque en deux parties égales. Tantôt, au
contraire, il relève de notre côté son pôle inférieur et nous cache son pôle
supérieur : alors l'ciiuateur est fort au-dessus du centre. Laspect de toutes
les conQgiirations varie, de ce chef, considérablement, à ce point que cer-
taines figures deviennent absolument méconnaissables.
On s'en rendra compte par les trois globes publiés plus haut (p. 30, 32 et 53),
ainsi que par les projections des pages 502 et 503.
Si nous considérons une tache caractéristique, par exemple la mer du
Sablier, elle se présente dans l'inclinaison supérieure australe, comme une
énorme tache en forme de V dont la pointe touche presque le bord inférieur
du disque. Dans le cas contraire, cette même mer se présente comme
un canal délié occupant le centre du disque et allant en s'élargissant vers le
haut, comme un entonnoir, ou encore, à cause de la mer inférieure adja-
cente, comme un sablier. Les aspects ne se ressemblent pas du tout, et l'on
pourrait croire qu'il ne s'agit pas de la même face de la planète.
Avant de comparer plusieurs dessins entre eux, il importe donc de se
rendre compte de l'inclinaison de la planète à la date de l'observation et des
effets de perspective qui en résultent pour la forme des taches. Autant que
possible, les jugements doivent porter sur les taches voisines du centre du
disque, vues presque de face et affranchies des variations dues aux raccourcis
de la sphère dans les régions qui approchent des bords.
Une partie des variétés des nombreux dessins aréographiqucs que nous
avons sous les yeux provient de cette cause, à laquelle nous devons adjoindre
le mouvement de rotation, qui est du môme ordre pour la question qui nous
occupe ici.
L'étendue des configurations, leurs positions sur le disque, leurs distances
respectives, surtout lorsqu'il s'agit de lignes minces comme les canaux, aug-
mentent considérablement en largeur vers le centre, et diminuent de mémo
en approchant des bords, par suite de cet effet de perspective.
Voici maintenant une cinquième cause de dilTércnces.
\ . — \ ArUATIONS .A.TMOSPHÉniOLES SLIt I. V in.ANKTE MaRS.
Cette cinquième cause n'est pas aussi imporUuih.' (jue b.-s <|ualre precè-
cédentes, parce que l'atmosphère de Mars est généralement pure. Cependant
elle est loin d'être négligeable, car il y a là comme ici des nuages et des
brumes variables qui parfois masquent absolument de vastes contrées sous
550 l-\ PlAM/n: MARS.
leur voile Manc et modiriciiteiilièivmeiil l'aspecl delà configuration géogra-
phique normale.
Que ratmosphèrc de Mars donne naissance à des précipités analogues à
nos neiges, c'est ce qui n'est douteux pour aucun observateur. Le ciel y est
toutefois beaucoup moins couvert qu'ici, même en hiver, comme on peut
facilement s'en convaincre parla comparaison des observations. Cependant, il
l'est quelquefois, et nous avons des dessins sur lesquels plus de la moitié du
disque de la planète est caché sous un voile blanchâtre. Parfois, ces nuages
sont partiels et disparaissent assez vite. Nous ne citerons pas comme exemple
la bourrasque apparente signalée par Secchi dans laquelle nous avons
reconnu tout à Tlieure, au contraire, une configuration fixe de la planète,
un lac circulaire bien connu. Mais on peut citer comme observation de
nuages celle de Lockyer du 3 octobre 1862, de 10" 30'" du soir à 11" 23"'.
Revoyez un instant les pages 156 et 157 de cet Ouvrage et la fig. 97, la région
qui s'étend àQ x i\y se montrait blanche ; dans le dessin de 1 1" 23"' [fUj. 98 ),
au contraire, on voit en y une sorte de golfe gris se dessiner, à mesure que
les nuées qui le recouvraient se dissolvent. Ce golfe est le golfe Main (ou lac
Mœris). M. Lockyer considère cette observation comme démonstrative de la
présence de la variation de nuages à la surface de Mars.
La même impression résulte de l'aspect d'un dessin de M. Phillips, fait à
Oxford le 15 octobre 1862, et qui montre toute la ligne du rivage marquée
par une bordure de nuages blancs [voy. p. 165, fig. 107).
Ces nuages de Mars ont été l'objet d'une étude spéciale de M. Trouvelot,
qui, plusieurs fois, grâce à une grande persévérance, a eu la bonne fortune
d'en voir se former graduellement sous ses yeux, dans l'intervalle de moins
de deux heures, sur les points où il n'avait pu en reconnaître aucune trace
auparavant — surtout sur le long des rivages [voy. notamment fuj. 200,
p. 373).
M. Schiaparelli écrivait, à la date du 14 octobre 1877, qu'une tempête ve-
nait, entre le 4 et le 10 octobre, de couvrir presque entièrement de nuages
la mer Erythrée et la Noachide.
Du 21 au 25 mai 1886, M. Perrotin [voy. p. 394) avait l'impression de
nuages ou brouillards étendus sur la mer du Sablier.
Nous avons eu la même impression en plusieurs observations, mais plus
rarement qu'on ne serait porté à s'y attendre par les vicissitudes si fré-
quentes de notre propre atmosphère.
L'atmosphère de Mars est non seulement plus claire, mais encore plus
calme, plus jjacifique que la nôtre. Parlant des traînées d'apparence nei-
geuse qu'il a observées en novembre et décembre 1891, sous forme de bandes
spirales partant du pôle nord, visibles sur les continents, invisibles sur les
CHANGEMENTS ACTUELLEMENT OBSRR VflS. :,.-,7
mers, M. Schiaparelli ajoute (luc crt aspect donne l'idée de courants aériens
réguliers et moins troublés par des circonstances accidentelles que ceux de
notre atmosphère [Memoria terzo, p. 88).
Il est sensible que, pour distinj,Mier nettement cequiexiste à la surfacedu
plobe de Mars, il ne suffit pas qu'il fasse beau chez nous et (jue notre atmo-
sphère soit transparente, mais évidemment il est nécessaire qu'il fasse éga-
lement beau sur Mars, sur l'hémisphère tourné vers la Terre au moment de
l'observation. L'absorption atmosphérique est manif(.'ste sur cette planète,
car elle éteint, elle elFace toutes les taches vers les bords du disrjue; mais
lorsque celte atmosphère est pure — et c'est le cas le plus fréquent — on dis-
tingue nettement les configurations géographiques. Qu'il y ait çà et là des
brumes, des brouillards ou des nuages même très légers, cela suffit pour mo-
difier l'aspect du disque, masquer des contrées plus ou moins vastes, empê-
cher de voir des mers ou des continents, mettre une tache claire blanche
(nuage vu d'en haut, éclairé par le soleil), au lieu du ton foncé des mers et
du ton jaune roux des continents.
Des nuages peuvent-ils paraître sombres, vus d'en haut? En général, on
ne l'admet pas. Cependant le fait n'est pas impossible. De la vapeur noire,
de la fumée, s'élevant au-dessus des terrains clairs, pourraient, me semble-t-il,
paraître plus foncées. Il peut se faire que sur Mars il y ait des vapeurs noires.
Le pouvoir réfléchissant dépend de l'état de la surface de ces brumes.
Quoi qu'il en soit, il y a là une cause certaine de variations apparentes
d'aspects dans les configurations géographiques de la planète Mars.
Voilà donc une série de causes à éliminer tout d'abord si nous voulons
savoir à quoi nous en tenir sur la valeur réelle des changements apparents
observés à la surface du globe de Mars. Différences d'œil, de méthode, d'ha-
bileté dans l'observation et dans le dessin, d'instruments, de conditions
atmosphériques, différences dans la manière dont le globe de Mars se pré-
sente à nous, suivant ses diverses inclinaisons et sa rotation, variations
apportées dans son aspect par son atmosphère elle-même, différences que
nous pouvons classer dans l'ordre suivant, selon leur importance :
1» L'œil de l'observateur;
2" Sa méthode d'observer;
3" L'interprétation par le dessin ;
4" Les diiïérences d'instruments;
;')■' Les conditions atmosphériques terrestres, heures;
0" Les variations de l'inclinaison de Mars;
7° L'atmosphère de Mars.
Ces diverses causes de variations apparentes dans les aspects des configu-
558 LA PI.ANkTK MARS.
ration? pt^ographiques de Mars snftisenl-olles pour rendre compte de toutes
les variations observées?
Non.
Des changements réels ont lieu à la surface de la planète, changements
qui n'ont rien d'analogue dans ce qui passe h la surface de la Terre.
L'étendue des taches sombres, le ton de ces taches sombres varient incon-
testablement.
Nous ne parlons pas ici de la variation périodique des neiges polaires
suivant les saisons : cette variation est connue, mesurée même depuis long-
temps, et expliquée. Nous voulons parler de celle de l'étendue des taches
sombres regardées comme mers, lacs ou cours d'eau.
Sans doute, il faut des preuves bien irrécusables pour admettre de telles
variations. Ces preuves, nous les avons disséminées, pour ainsi dire, sur
toute rétendue de cet Ouvrage, et nous allons les résumer.
Il se passe là des phénomènes absolument étrangers au monde que nous
habitons, et c'est ce qui fait que nous n'arrivons à les admettre qu'après de
grandes perplexités, et parce que nous ne pouvons pas faire autrement.
Nous venons d'exposer et de discuter les causes de variations apparentes
dans les aspects de Mars. Arrivons aux changements réels.
L'un des plus persévérants et des plus assidus observateurs de la planète
Mars, Schrœter, deLilienthal, dont les observations s'étendent de 1785 à 1803,
concluait de ses études qu'il n'y a rien de stable à la surface de ce monde
voisin et que toutes les taches que nous y observons sont de nature atmo-
sphérique. L'un des plus anciens observateurs de Mars, Maraldi, exprimait
la même opinion dès 1710 sur l'instabilité des taches de Mars. Leurs obser-
vations et leurs dessins justifient, jusqu'à un certain point, cette conclusion.
Schrœter a fait 230 dessins de la planète : nous avons ces dessins sous les
yeux, et nous en avons reproduit 65 ; on comprend fort bien qu'ils aient
conduit l'auteur à l'idée de considérer les aspects de Mars comme analogues
à ceux de Jupiter et de nature atmosphérique. (Il admettait que les nuages
vus d'en haut peuvent *paraître plus foncés que le sol ou les eaux. )
Commençons cette étude comparative par la mer la plus caractéristique
de Mars, la mer du Sablier, dont nous possédons des dessins depuis
l'an 1G59. La région qui s'étend à gauche de la mer du Sablier, au-dessous de
la mer Flammarion, et qui a reçu le nom de Libye, est particulièrement
remarquable au jjointde vue de ses variations d'aspects, et il est désormais
impossible de douter qu'elle ne paraisse tour à tour submergée et découverte.
La largeur de la mer du Sablier varie incontestablement, et cette mer dé-
borde souvent à sa gauche. En voici des témoignages certains et déjà sé-
culaires.
CHANGEMENTS ACTUELLEMENT OBSERVÉS. 559
A. — Changements observés dans la mer du Sablier.
Ainsi, par exemple, en IGôO, dans les tont premiers dessins de la planète
par Hiiygcns, cette mer paraît si large qu'elle occupe une grande partie du
disque. ( Voyrz p. IG, fîg. 9).
Il en est de même en 1072, dans un croquis dumCmeaslronorae (p. 32,/Î5'. 19).
On a la même impression en examinant un croquis fait par Maraldi, en
1719 (p. 41, fig. 2-i D). Ces trois époques (1659, 1072, 1719) sont des époques
auxquelles Mars s'est présenté, vers son périhélie, en d'excellentes condi-
tions d'observation et à peu près avec l'inclinaison de la fig. 20, page 32. In-
contestablement, la mer du Sablier était alors très large, même en accordant
aux incertitudes des observations et des croquis toutes les limites possibles.
Un dessin de William Herschel en 1777 {voy. p. 51, fig. 17) la montre, au
contraire, très étroite et comme étranglée en cf. Celte année-là, Mars fut
observé vers son aphélie, incliné comme fig. 28, page 53.
Nous la retrouvons, assez large, dans un dessin de Schrœter du 18 no-
vembre 1785 (voy. p. 71, fig. 2) (en celte époque la planète se présente à peu
près droite, comme la projection de la p. 30). On voit celte même mer très
large dans un croquis du même astronome, du 9 septembre 1798 (p. 74),
épo(]ue où la planète se présente également à peu près droite, légèrement
inclinée du pôle supérieur; très étroite, au contraire, dans un dessin du 20 ne-
vembre 1798 du même observateur (p. 70), ainsi que dans un autre croquis
du 24 octobre 1800. L'année 1798 est une année d'opposition périhélique,
mais comme l'opposition a eu lieu le 1" septembre et que l'observation est
du 20 novembre, la planète est déjà très relevée.
On voit sur le dessin du 24 octobre 1800 (p. 78, fuj. IGl), à environ 90° à
droite de la mer du Sablier, un disque noir qui correspond à la baie du
Méridien. Ce point était donc très foncé en 1800, comme Béer et Madler l'ont
vu en 1830.
Une observation faite par Schrœter, le 2 novembre de la même année,
montre la mer du Sablier très large. L'axe delà planète se présente perpen-
diculairement au rayon visuel.
Cette grande variété de dessins, auxquels nous prions le lecteur de vouloir
bien se reporter, et que nous ne reproduisons pas pour ne pas trop étendre
ce volume, donne déjà l'impression de variations considérables dans la lar-
geur de celte mer, et Schrœter en concluait que ce ne sont pas là des con-
figurations géographiques appartenant à un sol stable, mais des produits
atmosphériques, des nuages ou des brumes. Cependant il serait assez étrange
de retrouver les mêmes formes après tant d'années d'intervalle, comme par
:.60 1, \ IM. ANIVri" M AHS.
exemple de 1719, dessin de Maraldi (p. 4!, D) à 1798 (p. 74, //,7.56), Schrœter.
Les observations vont devenir plus précises, et, en nous rapprochant de
notre époque, nous trouverons des exemples plus certains encore des chan-
gements observés.
Pendant la fameuse opposition de 18.%. (]ui. ciiln' les mains de Béer et
Miidler. inaugura réellenirnl Taréographie, nous ne trouvons guère, relati-
vement à la mer du Sablier, qu'un dessin intéressant : c'est celui qui porte
le n" 6 dans la planche de ces auteurs (p. 105); il est du 19 septembre, à
10*'6"'. La mer dont nous nous occupons ici est assez large.
Cette même mer du Sablier apparaît fort étroite dans un excellent dessin
fait par Warren de la Hue, le 20 avril 185G (voy. p. 128).
On la retrouve sensiblement plus large dans les dessins du P. Secchi,
de 1858 (t'oy. p. 139 et 140).
Elle se montre également très large dans les dessins de Lockyer et Kaiser,
en 1862 {fig. 271). Au contraire, elle est très étroite en 1864, sur ceux de
Dawes.
Ici intervient un autre facteur. Considérons un instant le dessin de Dawes,
Fig. 271. — Dessin de Mars, par M. Lockyer, le 3 octobre 1862. De :c ii jy : Libye.
du 26 novembre \S(ji{fîg. 272). Nous remarquons, pour la première fois, l'ap-
pendice qui s'élève comme une feuille tenue par son pédoncule sur la rive
gauche de la mer du Sablier, et en même temps nous pouvons reconnaître
que le rivage est indécis et comme brumeux. Eh Ijien! il en est souvent de
CHANGEMENTS ACTUELLEMENT OUSEUVÉS. ÔCI
même dans les représciitalioiK .1.' .-..iie ivgion. Ainsi, par exemple, l'obser-
Fig. 212. — Dessin de Mars, par Dawes, le 20 novembre 1864.
vation faite par Lockycr le 3 octobre 18G-2, à 11''51"', donne la même impres-
sion, comme on peut le reconnaître sur la fig. 211 .
Comparons aussi le dessin fait par M. Schiaparelli le 28 octobre 1879 et qui
Fig. 27.1. — Dessiu do Mar=. par .M. Scliiaparelli, le 28 octobre 1879.
offre une si remarquable similitude avec celui de Dawes. La région dont
nous parlons s'y montre éi^alemeut voilée et brumeuse.
Dans ces deu.x dessins, qui correspondent comme position de la planète
(1864-1879), la mer du Sablier est très étroite et sa région limitroplie à gauche
est comme fumeuse ou marécageuse (c'est la Libye). Cette mer est encore
plus étroite dans les dessins de 1877.
Flam.m.\hio\. — Mar^. 36
5(V: I \ l'I VM.TI. M A H s.
On remarque, à ganclie de celte mer. le jïolfe Main, appelé aussi le lac
Mœris. Ce petit lac se voit tort l)ien sur les dessins do Uawcs en 18G't.
En 1877, les observations de M. Schiaparelli lui ont ajouté un prolongement
curviligne qu'il a baptisé du nom de NépiMitbès, En 1888, ce Népenthcs
s'»'Sl présenté sous une forme toute différente, comme un canal courbe,
double, surmonté du lac Mœris réduit à une dimension insignifiante et rap-
proché de la mer. A la même époque (2-4-6 juin ), une légère teinte d'inon-
dation couvrait le sud de la Libye jusqu'à la mer Flammarion, comme
en 1882. D'après M. Perrotin, l'inondation aurait été beaucoup plus étendue
1864 1879 ^ 1883
Fig. 274. — Changements sur Mars. Le lac Mu^ris en lso4 (L»awes|, en 1«7'J et 1S88 (Schiaparelli).
au mois de mai. Cette variabilité de teinte de la Libye est un fait connu
depuis longtemps : il se passe là ce qui se passe dans la région de Deu-
calion ainsi que sur Pyrrhœ Regio, Protei Regio, lac Tithonius, etc. Mais
les changements survenus au lac Mœris sont encore plus dignes d'attention
peut-être : Comparez les trois dessins de 1864, 1879 et 1888 [fig. 274).
En 1864 (26 novembre), Dawes a également tracé un ton gris le long de cette
région.
M. Schiaparelli, du reste, a pu conclure de ses propres observations les va-
riations de la mer du Sablier dont nous venons de parler (voy. fiçj. 230, p. 439).
.\in.si, il n'y a pjlus l'ombre d'un doute à conserver. Il se passe en ce mo-
ment même sur cette planète voisine des choses extraordinaires.
Voilà une série d'observations dues aux meilleurs astronomes ; quelques-
unes des dissemblances peuvent être attribuées aux causes énumérées plus
haut, vague et incertitudes de la vision, difficultés des représentations par le
dessin, etc.; mais ces grandes différences de largeur indiquent évidemment
aussi des différences réelles dans l'aspect de la planète, car elles dépassent
les limites des diversités d'appréciation possibles. D'ailleurs, la série des ob-
servations suivies d'année en annéeptarM. Schiaparelli dex^uis 1877 confirme
absolument cette variabilité d'étendue. Ces variations ne sont donc pas appa-
rentes^ mais doivent être considérées comme n'clloa.
cil ANCKMHNTS ACTUi: IIKM lAT OMSKRVflS.
5G3
Voici maintenant d'autres témoignages de variations non moins évidents.
Ils nous sont foiiiiiis par les excellents dessins de SchriL'tcr.
15. — (.'lunii/nnciilx olisrrvrx dans lu buie Gruiiliuisen ou Syrlls Parvn.
Considérons d'aboid ici [j'kj. 275) trois dessins faits par cet astronome
le 8 décembre 1800, à G*" 19"", C'^S" etO»" 'i3'". Ces trois dessins en confirment
d'autres de la même époque, iiutamim;nl ceux des 1", 2 et i novembre précé-
dents. Le premier de ces trois croquis a pour lonj,àtude du méridien central.
.^^
Fi^. 275. — Trois dessins lie Mars laits par S<lii(uter le 8 dé<einljre ISlhJ, montrant une mer
inconnue à gauche de la mer du Sablier (entre a cl b).
d'après les calculs de M. Van de Sande Bakhuyzen, 24.5". On y remarque une
traînée grise traversant la iilanèlc de l'Est à l'Ouest et une tache triangulaire
descendant en pointe vers le Nord, laquelle tache ressemble beaucoup à la
mer du Sablier. Or, ce n'est pas elle, et il n'y a pas de mer à cette position.
On trouve là, sur notre carte ( voir plus haut, p. 69) une baie de la mer Flam-
marion, la baie Gruithuisen, descendant vers le 255* degré jusqu'à l'équateur.
Pour expliquer cet aspect, il faut admettre l'allongement et l'élargissement
de cette haie, que M. Schiaparelli a appelée Syrtis Parva.
Le croquis suivant, fait une heure 2G minutes après, conlirme ce dessin,
lequel s'accorde d'ailleurs avec ceux des 1", 2, 3 et i décembre : il montre
ladite mer avancée, par la rotation de la planète, près du bord gauche,
et la mer du Sablier arrivant par la droite. Le dessin qui vient après, fait
à 9''43'", montre, en effet, cette mer du Sablier au milieu du disque, dont
la longitude centrale est 309°.
Cette mer inconnue, située vers 2i0° ou 250» est indiquée, avec une étendue
plus ou moins large, sur un grand ncmibre de dessins de Schripter, notam-
ment sur ses fig. 58, du 12 septembre 1798; 03, du 10 septemlire ; 89, du
18 octobre; 92, du 25 octobre; 17-.'. du 1"' novembre 1800; 175. ihi 2 no-
vembre; 227, du 2i décembre 1802. Nous reproduisons ici [jig. 270) le cro-
quis du V' ndvcmbro : b est la mer du Sabliei*.
\CA
l.A PI AM-TE MARS.
L'iiii (!••> (lo>>iii>(iui ifsscnililenl le plus à l;i //^. l'TG est celui ([uia été fait
parM.Schiaparelli lc28 oclobro lS79.Xous vcuous ilt,' le reproduire (//Vy. 273).
Il suflirait d'allonger la baie Iriangulairo (jue l'on reniarcjue à i^auche du
centre pour reproduire la nier inconnue dessinée par Schrœter. Remarquons
on même temps sur le premier dessin du 8 décembre 1800 [fKj. 275) la ré-
ijion blanche, au-dessus de a, qui vient écliancrer la mer et qui doit être
due à des nuages. X ajouter à ce que nous avons dit plus haut sur les varia-
tions atmosphériques.
On ne peut pas douter que Schrœter ait observé cette mer avec l'étendue
/
>'
:y
Fig. 276. — Dessin analogue, du \'^ novembre 1800.
qu'il lui a donnée sur ses dessins. Nous devons donc considérer cette région
de la planète Mars comme susceptible de présenter des variations d'aspects
\ /
Fig. 277. — Dessins de .Mars par Schrœter. en 1708, montrant une pointe de mer
en une région où nous n'en voyons plus.
plus ou moins considérables. Sans multiplier les dessins, de crainte d'en fa-
tiguer nos lecteurs, nous constaterons simplement que la comparaison des
cartes de Green et de Burton confirme d'autre part cette conclusion : celte
contrée y est esquissée sous des formes indécises et variées.
Nous pouvons conclure avec certitude, de la comparaison des dessins an-
ciens et modernes, que cette région aussi subit des variations d'aspects
considérables. Ces variations peuvent être peu importantes en elles-mêmes,
CIIANGEMKNTS ACTUKI.I.KMKNT fHlSKFl V f-H . Tj^â
mais en apparence elles sont très étendues. Supposons, par exemple, qu'en
certaines circonstances météorologiques elles se couvrent d'une fumée
, noire, cela suffirait pour expliquer ces changements d'aspects. Mais, comme
toutes ces taches ont l'aspect et lo Ion des mers, il ne serait pas impossible
que ce fussent là de véritables inondations. OlioI qu'il en soit, la variation
d'aspect de cette région (Syrtis Parva et Léthé de Schiaparelli) est certaine.
Trois autres dessins de Schrœter, de 1798, 19 septembre, à 7''31'", 20 sep-
tembre, à 7''27"', et môme soir, à 9''48"', montrent, par 190» de longitude,
dans une région où nous no voyons rien aujourd'hui, une pointe de mer
descendant de la mer Maraldi. Nous les reproduisons également ici (fuj. 277).
Voir aussi le dessin de Secchi du 1" décembre 1864, p. 1 i9.
G. — Changements observés dans le détroit dlkrschcl II
cl la baie du Méridien.
D'après ce qui a été remarqué plus haut, l'un des moyens les plus sûrs
de résoudre la question de ces changements problématiques est de compa-
rer entre elles les observations faites en des oppositions analogues, pendant
lesquelles le globe de Mars s'est présenté à nous avec la même inclinaison.
En prenant cette précaution, nous éliminons les causes de différences dues
aux variations d'inclinaison du globe.
Les oppositions de 1798 et 1800, 1815, 1830, 1845, 1862 et 1877 sont dans
ce cas. En ces diverses époques, la planète est passée en opposition vers son
périhélie, c'est-à-dire dans les meilleures conditions d'observation, et avec
la même inclinaison relativement à la Terre. Ainsi, par exemple, le solstice
austral de Mars est arrivé, en 1830, le 18 septembre et l'opposition a eu lieu
le lendemain 19 ; en 1862, le solstice austral est arrivé le 9 septembre et
l'opposition le 5 octobre ; en 1877, ce solstice est arrivé le 26 septembre et
l'opposition avait eu lieu le 5 septembre. Dans ces diverses périodes donc,
les observations ont été faites dans des conditions à peu près semblables, et
la planète s'est présentée aux observateurs dans la même position.
En tenant compte de la différence des instruments employés ainsi que des
différences d'acuité de vue et d'appréciation des observateurs, on devrait
par conséquent s'attendre à des représentations analogues de la planète. Or,
entrons maintenant dans des détails plus précis et comparons entre elles
les excellentes observations faites en 1830, 1862 et 1877.
En 1830, Béer et Madler firent, du 10 septembre au 20 octobre, 17 séries
d'observations et 35 dessins. Ce qu'ils remarquèrent do plus caractéristique
sur la planète, ce fut une petite tache ronde et noire, rattachée Aune grande
tache grise par un arc fortement recourbé et serpentant. Elle était le point le
5r.«>
\ IM. ANkTi; M VHS.
plus lui «lu disque. Déjà nous l'.ivons si.iiiialcr daus iiu dessin de Schrœter
du 24 octobre 1800 (p. 78, fig. 11)1). On la voit aussi sur deux dessins de
Kunowsky de 1821 et 1822 (p. 93).
Celle pelite tache ronde et noire lui lout spceialenienl observi'c cl dessi-
née par eux et choisie connue point normal pour délcrminci- la rotation.
Six dessins, des 10 et 14 septembre et 14, 10 et 20 octobre, la représentent
Fig. 27S.
Le ruban ondulé dessiné en 1830 par Béer et Màdler.
avec une netteté parfaite, bien détachée, avec Tare serpentant dont elle
forme l'extrémité [fiQ. 278).
L'instrument employé pour ces observations était un équatorial de
4 pouces ou 108"""', de Fraûnhofer.
En 1862, M. Lockyer entreprit la môme série d'observations à l'aide d'un
Fi-. ÎTO.
-'r^iÇ^'^"''-
i^^ï
•Vgù^y'ip^i
Le même ruban oliscrvc en 180:2
(25 septembre), par Lockyer.
Le ineme, ob.servé en 1879
(28 nov. ), par M. Schiaparelli.
équatorial de 6 pouces \ ou 158""", de Cooke, et retrouva, coinnic ^m pouvait
s'y attendre, le même aspect d'ensemble, avec un peu plus de détails, cor-
respondant à la plus grande puissance de l'instrument. Mais on peut remar-
quer une différence notable entre les formes dont nous venons de nous
occuper. Au lieu d'un disque rond et noir attaché à un arc serpentant, lob-
servateur a dessiné une tache rectangulaire continuant une sorte de ruban
assez large (voy. fig. 270). Les dessins de Kaiser, faits pendant la même
opposition, concordent avec ceux de Lockyer et confirment l'élargissement
de l'arc de Béer et Madler et la forme rectangulaire allongée dont il s'agit.
Comparons, par exemple, celui du 31 octobre (p. 174).
r.ii \Mii:Mi:NTs \(:Tri:i.i.i;.Mi;NT (>iisi;i{vi':s
Si inainlfiuiiil nous coiiliiiuoiis la (.-oiiiparaisoii de ce mC'ïw point par les
observations de 1877, nous constatons uno dilïï'renc»; encore plus frappante.
A l'aidf d'un cfiualorial de 218""", d(i Merz, plus puissant que les doux pré-
cédents, M. Schiaparelli obtient des détails jusqu'alors inconnus. Mais si
nous considérons spécialement et simplement l'aspect dont nous nous occu-
pons ici, nous ne retrouvons plus du tout le disque rond attaché i un mince
ruban, de l'opposition de 1830, ni les aspects de 18G2, mais une vaste traînée
sombre, ([ui ne se détache pas de la tache supérieure et lui est associée par
une teinte j^rise intermédiaire. Jamais, au p:rand jamais, cette configuration
ne pourrait être prise pour un disque circulaire noir mieux approprié que
tout autre, par son isolement et sa netteté, à servir de point normal pour la
mesure do la rolalion. Ile plus, dans les observations de 1830 et dans celles
Fig. 280.
V;irialinii> uli.sci'Vii's sur .Mars (haicdii Mcri'lnMi I
de 1862, ce point se relie à une vaste mer triangulaire ;la mer du Sablier),
laquelle mer, en 1877, est réduite à presque rien par une langue de terre
qui la pénètre et la détache presque de la mer supérieure. Toute cette con-
trée, que M. Schiaparelli a nommée Deucalionis Regio, Mare Krythranmi et
Japygic, est donc certainement variable, et avec elle cette tache normale de
Béer et de Miidlcr, que nous appelons aujourd'hui la baie du Méridien.
Comparons, par exemple, aux dessins précédents, celui du 20 octobre 1877
(p. 295). C'est, du reste ce que nous avons déjà mis en évidence dans notre
Aslronomie populaire, en 1879, par la figure comparative (fin. 280) que nous
reproduisons ici et qui résume la variation dont il s'agit.
Tandis qu'eu 1830 cette haie du Méridien se détachait nettement en noir
d'un fond clair environnant, en 1877 elle se confondait avec los marais
adjacents, et si l'on avait dû choisir un point noir, net, circulaire, caracté-
ristique, comme en 1830, pour déterminer la rotation par son déplacement,
ce n'est pas du tout ce point que l'on aurait alors choisi, mais le lac circu-
laire situé à 90 degrés de distance ;ï l'Est arcographique, et qui se détachait,
en 1877, comme un disque noir cl absolument net.
56S
I.A ri ANKTK MARS
L'observation de colle nit'me h-Mo du Méridirn. ou 1879, donne encore un
résullat sensiblement dilTérent : on y rcmaïque un élranglement qui en
modifie singulièrement l'aspect, coniparalivement surtout à celui de 1862.
Ainsi cette région, la baie du Méridien, subit, clic aussi, des variations
«évidentes. Ce n'est pas d'aujourd'liui que nous les avons remarquées.
Le ruban curviligne dont lo disque circulain» forinç rextrémité aboutit à
gaucbe, dans les six dessins de Miidler de l'année 1830, à une mer, presque
à angle di*oil, et semble même s'y continuer par sa Icintc plus sombre, sui-
Fig. ?8I.
Le détroit d'Herschel II en ISOO.
vant l'ondulation durivage(uoî/.les deux dessins ci-dessus, /t^. 278). Cette mer
a reçu le nom d'océan Dawes dans les cartes de Proctor et Grecn. M. Schiapa-
relli l'appelle Mare Erytbrœum. Les dessins de 1862 concordent absolument
avec cet aspect. Or, on ne trouve plus rien de pareil dans les observations
de 1877 et 1879. Donc, ce que M. Schiaparelli a appelé la mer Erythrée parait
n'être, au-dessus même du ruban qui forme son rivage, qu'une plaine, la-
quelle sans doute était couverte d'eau (ou de quoique autre chose), en 1877
el 1879, depuis le 330^ jusqu'au 5'- méridien notamment, mais qui, en 1830,
avait, dans cette région, absolument l'aspect des continents, ce qui est arrivé
de nouveau en 1862, et s'est renouvelé presque identiquement en 1879.
Colle région, occupant environ 35 degrés de longueur de l'Est à l'Ouest, sur
20 du Nord au Sud ( 14^ à 34''), c'est-à-dire environ deux mille kilomètres de
cil an(;i;mi:nts actukijj-mknt ohskuvks.
longueur sur mille ou douze cents de largeur, parait vraiment tour à tour
découverte cl snliraer-^ée. Les variations observées ne fieuvcnt être attribuée*;
à des nuages, étant donnée la netteté des dessins de 1830 depuis le 10 sep-
tembre jusqu'au 20 octobre.
Examinons encore un instant cette région.
Voici {/ig. 281 ) un disque de Mars dessiné en 181)0, sur lequel on voit plu-
sieurs canau.x dédoublés. Le supérieur, horizontal, le détroit llersclit;l II.
n'a jamais été, jusqu'à ce jour, considéré comme un canal double. Comme
Fig. ^«2.
La même région en 1888.
comparaison, nous mettons encore en regard (fig. 282) le dessin fait on 1888
par M. Schiaparelli.
L'aspect topograpliique est entièrement transformé. Au lieu d'être sinueuse,
la ligne du rivage est droite et double, partagée par un sillon blanc longitu-
dinal. Double aussi, comme d'habitude d'ailleurs, la baie du Méridien. Double
aussi également un petit lac inférieur.
Cette région est, comme la précédente, l'une de celles que nous signa-
lons depuis 1870 pour les changements observés, et déjà, précédemment,
nous avons montré un dédoublement analogue momentané observé en 1877.
C'est cette tendance au dédoublement qu'il s'agit surtout d'e.xpli(iuer.
Si ces canaux dédoublés sont les deux côtés d'une bande d'eau, comme on
serait porté à le croire par l'aspect comparatif du détroit, qui a déjà été vu
maintes fois plus clair dans sa ligne médiane que le long des bords, il reste
à expliquer comment cette transformation s'opère. Admettre qu'un banc de
sable s'élève ainsi, nous semblerait un peu téméraire, et d'ailleurs ce soulè-
570
I \ l'i \m:ti. m \hs
venioni ferait ('couler reaii do pari et (l'autre, sans (loniicr uéccssaireiuonl
naissance à des bonis reetiligues.
D. — Changements observrs aidoiir dr la mer Tei-by.
Dans les dessins de 180'.^ on rcmaniuo entre autres une tache ovale allongée
de l'Est à l'Ouest et rallachée à gauche, par un lilel étroit, mais toujours
■^y^^j^^i?fs«^mmm
Fig. 28.3. — La mer Torby ou lac ilu Soleil en 186;J (Lockycr)-
visible, à la mer voisine. Celte tache, en forme d'œil, se voit notamment
dans les dessinsde M. Lockyer des 17 septembre cl 18 octobre de cette année-là,
I-'i,!.'. x'.s'j. — La iMcinc mer en 1877 (Grecoj.
ainsi que dans ceux de Kaiser des 24 octobre et 23 novemjjre et des 1(J et
18 décembre 1864, et dans ceux de Dawes de la même année. Il ne peut y
avoir aucune incertitude sur l'existence du détroit reliant ce lac circulaire à
la mer voisine. Les dessins des 18 octobre (Lockyer) et 23 novembre
(Kaiser), suffisent amplement pour s'en rendre compte.
Comparons à ces aspects ceux de 1877, soit, par exemple, les dessins de
r. Il wdKMKNTs \(:tiki.i.i;.mi:n 1 (»usi;n\i;s :.7i
MM. Scliiaparolli cl (iioen (/iij. 2«i), do scplonilire à (léct'inluT! : ce détroit
a absolument disparu, quoique l'œil et tous ses envirojis soient bien visildes
et non voiles par des nua,u<'S. Sur mes (b'ssiiis de rxïtte ainn'f 1877, le lac
n'est, non plus, jamais rattache à la mer. Voilà donc encore ici une variation
incontestable. Hemarquons que Tobservateur italien a fait tous ses efforts
pour retrouver l'émissaire dont il s'apit et n'a pu parvenir à en apercevoir
la moindre trace. Cependant ce tracé est déjà indiciué en 1830 sni- la carte
aréographique de Béer et Miidler. Ainsi le changement est absolument prouvé.
Voir ci-dessous le dessin de Grcen conforme, d'ailleurs, à tous les autn.'S de
la même année.
Ce d»''troit est redevenu visible en 1879, mais incomparablement plus minco
qu'il ne s'était montré en 18G2.
Ce lac circulaire mesure 17 degrés de longueur sur li de largeur, soit
1020 kilomètres sur 840, c'est-à-dire que sa superficie est un peu supérieure
à celle de la France.
Cette étude conduit donc à la conclusion certaine que des changements
réels s'opèrent constamment à la surface de ce monde voisin.
D'après M. Schiaparelli, en 1877, ce lac est circulaire (fifi. 285) ; un affluent
4(1 ,^ <;■'
;VrfjyF(
/!•: : ithiu-ii ■
no J20 jx> uo
- ■ : ;-— 1
u'i nii-
/• r iiJcio
> \' ' .\V
i S,',
VJ^
N
.s?
'SI
^
.;<' JO 6L' TO
:ti KM no Jj(> uo Jiii
Fig. 2S,i. — Le lac du Soleil en 1877.
le rattache à droite au petit lac du Phéiii.x, cl un second aflluent, plus large,
mais plus pâle, le relie en haut de la mer australe. L'auteur a examiné celle
région avec un soin tout spécial, parce qu'elle diirérait déjà sensiblement
des dessins faits i»ar Dawes, Lockyer et Kaiser en 1862 et 180 i : le lac. était
alors ovale, allongé dans le sens Est-Ouest. Au contraire, en 1877, il était
u parfaitement circulaire, avec le liord légèrement ondulé », et quelquefois
même il paraissait plutôt allongé dans le sens vertical. De plus, en 1862
:.:•: la pi. \ m: ri: mars
cl 1803, ou voyait un larrjr afjlucnt relier à gauelic le lae à l'océan voisin. Au
lieu de cela, l'observateur milanais vit la place tout à fait nclle et découvrit
en 1877 le petit cercle inscrit sous le nom de Fontaine du Nectar.
Mars revient vers la Terre en 1879, et on l'observe de nouveau. Des clian-
Fig. 280. — Le lac du Soleil eu iST'J.
gements évidents sont constatés. L'affluent dont nous venons de parler, qui
était tout à fait invisible en 1877, est maintenant perceptible, quoique très
j~~^"^ ft
Fig. 287. — La même région ea 1881.
mince, et reçoit le nom de canal du Nectar; l'Aurea Cberso est élargie, le
Chrysorrhoas a changé de place : au lieu de descendre verticalement le long
du 86* degré, il part du 78^ pour aller rejoindre le 11". Le lac est légèrement
allongé vers le canal du Nectar, « ce qui lui donne la forme d'une poire »
dont la queue monterait de 15" à 20". L'affluent supérieur est incomparable-
ClIANr.FMI-NTS A( TIKM.RMKNT OnSKRVÉS.
,73
ment moins lary;e (jn'fn 1877 ol :i re»;u It^ nom d'Amljrosi.i, Le l.ic du l'Iif'nix
est très diminué. On cherche on vain hi Fons Juventx. .
Nouvelles études en 1881, et nouvelles transformations. Le lac se montre
décidément allonge dans le sens Est-Ouest, concentriiiue avec le contour de
la Thaumasia. Le lac du Phénix est devenu un centre d'allluenls nombreux.
L'Aval hoihemon donne naissance à un lacdéj;\indi<iuéen 1877, maisaujour-
dhui très développé, et i\m reçoit le nom de lacTilhonius. Cette vue corres-
r --wm^ "^--.
Kf
X
Fig. 'JS8. — La même région en 1890.
pond à celles de 18G2 et 1864. La Fontaine de Jeunesse, qui avait disparu
en 1879, est revenue.
« Che il Lago del Sole cambi di forma e di grandezza, écrit l'éminent obser-
vateur, e cosa induhUabile. » Sa coloration a été très sombre, et plus sombre
lorsque la rotation l'amenait au bord du disque que lorsqu'il passait au
méridien central. C'est sans doute, comme dans plusieurs autres cas, parce
que les régions environnantes deviennent alors plus blanches.
L'Araxes s'est montré net, allant droit de la mer Sirenum au lac du Phénix,
et non plus tortueux comme en 1877.
Ainsi voilà un lac (ou tout au moins quelque chose qui y ressemble) qui
était ovale en 1862 et 1881, et rond en 1877, et tous ses environs changeant
également.
Ces trois dessins suffisent pour établir sans contestation possible l'état de la
planète pendant ces observations. Eh bien, voici maintenant 1890 [fig. 288).
Le lac est fendu en deux ; — le petit lac Tithonius inférieur est également
partagé en deux ; — le grand affluent du lac, ce que nous avons appelé plus
haut la queue de la poire, vient du Nord-Est au lieu de venir du Sud-Est
(dans tous les dessins le Nord est en bas); — l'Ambrosia incline à droite du
méridien au lieu d'incliner à gauche; — le canal Ciirysorrhoas est double,
jusqu'au lac de la Lune, et au-delà, jusqu'à la mer Acidalium.
Du lac du Soleil descendent deux nouveaux affluents inconnus jusqu'ici.
Voilà l'état de la question. Il n'y a pas à le dissimuler, des changements
57A 1. \ l'I. AM'.Ti: MARS.
réels, incontestables, et considcrabh's, s'accomplissi-nt à la surface de ce
monde voisin.
La question no manque pas d'iiitoivt. Outre qu'il est déjà curieux de savoir
que nous pouvons voir d'ici ce qui se passe sur Mars, il ne Test pas moins
de constater que, tout en ressemblant beaucoup à notre planète par sa con-
stitution générale, son atniosplière, ses eaux, ses neiges, ses continents, ses
climats, ses saisons, ce globe voisin en dillere cependant de la manière la
jtlus bizarre par sa configuration géograpbiquc, ses canaux dédoublés, et
surtout par cette faculté de transfoi-mation superlicielle et de dédoublement
des lacs eux-mêmes, de lacs grands comme la France !
Comment expliquer ces variations ?
L'bypotbèsc la plus simple serait d'imaginer que la surface de Mars est
plate et sablonneuse, que les lacs et les canaux n'ont pas de lits, pour ainsi
dire, sont très peu profonds, et n'ont qu'une très faible épaisseur d'eau, et
qu'ils peuvent facilement, suivant les circonstances atmosphériques, les
pluies, les marées peut-être, se rétrécir, s'élargir, déborder, et même cbanger
de place. L'atmosphère peut être légère, l'évaporation et la condensation
des eaux faciles. Nous assisterions d'ici à des inondations plus ou moins
vastes et plus ou moins durables. La séparation du lac du Soleil en 1890
serait due, par exemple, à une diminution ou à un déplacement de l'eau de
ce lac, la ligne de séparation pouvant être considérée comme un banc de
sable mis à découvert.
Cette explication peut rendre compte d'une partie des faits observés. Mais
elle est insuffisante pour le caractère particulier de ces aspects : le dédou-
blement.
Remarquons d'abord qu'il ne semble pas qu'il y ait moins d'eau, puisque
les affluents de ce lac sont plus nombreux, et que celui de gauche a la lon-
gueur d'un bras de mer.
Déplacements d'eaux dus à des marées? Ce serait périodique, ne durerait
que quelques heures, et ne caractériserait pas comme ici des saisons entières.
Devons-nous plutôt admettre que le banc de saljle s'est élevé au-dessus du
niveau des eaux et qu'en général, les déplacements d'eaux soient dus à des
soulèvement.'* du sol ?
Il est égalem.ent difficile d'accepter cette interprétation, d'abord parce
qu'une telle instabilité du sol serait bien extraordinaire, ensuite parce qu'il
faudrait que ces boursouflements du sol fussent en général rectilignes;
enfin parce que les aspects reviennent, après jdusieurs années, tels qu'on les
a vus d'abord. Et puis, ces déplacements d'eaux n'expliquent pas le fait ca-
pital, on pourrait dire caractéristique, des changements observés sur Mars :
la tendance au doublement.
t. Il wdKMKNTS a(:tui:i.i.i:.mi:.\ I (iusi:i{\ i:s. r.7r.
Il est donc, reconnaissons-lo, cxtroincinonl diftîcilc, pour ne pas dire im-
possible, d'expliquer ces transformations parles forces .naturelles que nous
connaissons. Mais c'est peut-être ici le lieu df reiMai-i|n<'r (jue nous ne con-
naissons pas toutes les forces de la nature, et (jue d<;s choses très proches de
nous restent souvent ignorées. Les hahilanls des tropicjues qui viennent à Paris
en hiver pour la première fois, et (jui n'ont jamais vu d'arbres sans feuilles
ni de neige, sont stupéfaits de nos climats, (l'est une curiosité toute nouvelle
pour eux de prendre dans leurs mains de l'eau solidifiée, de cette éclatante
blancheur, et ils doutent un instant que ces squelettes tout noirs des arbres
doivent, qutdques mois plus tard, être couverts d'un hi.xuriant feuillage. Sup-
posons un habitant de Vénus n'ayant jamais vu de neige. Arriverait-il, en
observant la Terre, à com[iren{lre ce (|U('. sont les taches blanches qui recou-
vrent nos pôles? Certainement non. Nous le pouvons, nous, habitants de la
Terre, pour les neiges de Mars. Mais nous ne nous expli([uons pas ces varia-
tions de rivages, ces déplacements d'eaux, ces canaux reclilignes et leurs
dédoublements, parce (jne nous n'avons ici-bas rien d'analogue.
E. — Changements dans tes canaux.
Considérons encore les petites cartes ci-dessous [fuj. 289 à -^Qî). En 1877,
('lian!.'ements dans le cours îles lleuvos mi canaux.
la mer du Sablit-r était très étroite, et aucun canal n'a été vu dédoublé. Un en
57t'i
I.A PLANETE MARS.
remarquai! un, entre autres, auquel ou a doinié le nnm île IMiisnu. Ku 1.S79,
mer plus large, le Nil semble avoir changé de cours, cl l'on voit deux canaux
au lieu d'un. En 188"2, nouveau changement au cours du Nil et dédouble-
ment; les deux canaux de 187'J se montrent également dédoublés, et Ion en
découvre cinq autres. En 1888,rEuphrate, le Phison, le Nil (appelé mainte-
nant Protonilus), se montrent dédoublés comme en 188-2, mais on voit un
nouveau dédoublement, l'Astaboras, qui descend obliquement de la mer du
Sablier au lac, et un autre canal voisin (voy. fuj. 288). Ce sont encore là
des changements. En 1890 {fig. 292) l'Eupbrate et le Phison se montrent
dédoublés, ainsi qu'une partie seulement du Protonilus, mais lAstaboras
ne l'est pas, le canal de 1888 a disparu, et, comme nous l'avons déjà re-
marqué, le détroit supérieur s'est partagé en deux dans le sens de sa lon-
gueur !
La même conclusion pourrait être tirée de l'examen des cours d'eau qui
arrivent à la baie du Méridien (Hiddekel, Gehon, Oronte, Edom), ainsi que
de celui de THydaspe et de l'Indus, tels que les représentent les dessins de
Secchi en 1858, de Kaiser en 1864 et de Schiaparelli depuis 1877. Nous ne
multiplierons pas ces dessins, déjà trop nombreux pour l'attention du lec-
teur; mais nous ferons remarquer que l'Hiddekel, large et évident en 1877,
était complètement invisible en 1879 et remplacé par un fleuve d'une autre
forme (l'Oronte). Il n reparu en 1882, l'Orontc y aboutissant très loin de la
mer, et s'est montré encore sous une autre forme en 1888, l'Oronte venant
jmm
■IBjjH
■r .
^^^^H
'^^H
^m
^^^H'
m ■^%.
^H'
■ '"^
^^Hi
1 . ^
^ m
v-'^
.^1
Hl
1 ' 'li^^^^^^M
^
-/" ^..^^^^^^H
1- ig. -'.JJ. — J/ilyUaspe, uij.-JurvL' par Succlii en ISOS.
au contraire se jeter dans la baie du Méridien, à la même embouchure;
Remarquons aussi que l'Hydaspc est très large sur les dessins de Secchi
en 18.Ô8, comme on le voit sur ceux-ci, des 3 et 5 juin de cotte année-là.
L'Indus varie dans les mômes proportions, n y a môme ici un fait particu-
cil \N(.i:Mi;Nis Aciri-i.i.K.MKM ()usi:uvfcs.
rj
lièrement remaniiiahl».', c'est qui-, par siiili; de ces variations, la mer du
Sablier paraît rci)rodiiitc (]iiel(iiiefuis exactement à 95.» de dislance à droite
jiar renibouchurc de l'Indus, et ogalwment, d'autre part, à 10" de distance
à jrancliG par rallcngcnient de Syrtis Parva, comme déjà n(jus l'avons vu
par les dessins de Sciirœter, de sorte que celte forni»; paraît répétée trois
fois au moins, en certaines années.
Il est lùen dillicile de se refuser à admettre que les «canaux » (jiii varient
Fig. 2!t.l.
Lac fuiiui; l'ur rinlerscction de iilusiciirs cauuiix.
ainsi représentent quelcjue élément mobile. Ils aboutissent tous, sans excep-
tion, par leurs deux extrémités, à une mer, à un lac ou à un canal, et, par
conséquent, l'eau ne doit pas y être étrangère. Aux points d'intersection où
ils se rencontrent, on remarque souvent une taclie (jui donne absolument
l'idée d'un lac, comme le montre la fi(j. 294. L'aspect de ces nœuds change
d'une manière analogue à ceux des canaux, se dédoublant avec eux, et dans
le même sens. De plus, on voit quelquefois pendant l'hiver dé longues traî-
nées de neige traverser ces lignes : or, ces neiges sont fondues là comme
le ferait la neige en tombant sur do l'eau.
Auraient-ils pour origine des crevasses géométri(]ues dues à quelque pro-
cédé naturel dans la formation du globe de Mars';* Peut-être; nuiis des cre-
vasses seules, même remi>lies d'eau, n'expliqueraient pas les variations
observées.
Les canaux sont quelquefois complètement invisibles, dans les meilleures
conditions d'observation. Cette disparition arrive de préférence vers le sol-
stice austral de la planète.
Leur largeur est très difTércnte. Ainsi le Nilosyrtis mesure quelquefois 5»
ou 300 kilomètres de largeur, tandis que d'autres mesurent moins de 1'' ou
de GO kilomètres.
Fi.AMMAïuoN. -- MarK. 37
r)78 I. \ PI wi.ri; m \I{s.
Quclquos-uns sont (l'iiiie imiiionso longueur, plus du. quart du méridien,
plus de 5 iOO kilomètres.
Tous changent de largeur.
Tous, ou presque tous, se dédouMrni.
Le lecteur est du reste au courant de lous les l'ails relalifs ;V ces rlranges
formations par la dissertation de M. Scliiaparelli publiée plus haut i^p. 4î2
à 4581, et il serait superlUi d"y revenir.
Ce sont là des faits vraiment hien extraordinaires et auxquels il est dilli-
cile d'adapter une même interprétation e.xplicative.
En résumé, il est dilieile d'admettre des changements de niveau dans le
sol, des mouvements de bascule, de supposer que la surface du glolic de
Mars est mobile, se soulève et s'abaisse, que les mers peuvent facilement et
fréquemment prendre la place des terres et réciproquement. Une telle con-
clusion est bien difficile à accepter, d'aliord parce que nous ne comprenons
pas bien une surface planétaire d'une pareille instabilité, ensuite parce que
nous retrouvons actuellement des configura tiuns géographiques observées
il y a plus de deux siècles. On ne s'imagine pas une planète se gonflant ou
dégonflant même partiellement comme une sphère de gaz recouverte d'une
mince pellicule. Sans doute, noire pro[)re Terre ressemble de loin à cet
état, puisque de siècle en siècle les mers ont pris la place des terres et réci-
proquement, et que tous les jours sans exception la surface terrestre remue
en un point ou un autre. Mais que cette instabilité prenne les proportions
indiqnées par les phénomènes de Mars, que du jour au lendemain, par
exemple, l'Océan arrive à Paris et retourne à Cherbourg, c'est ce (]u'il (;st
bien difficile d'admettre, étant donné surtout que l'ensemble de la géogra-
jjhie martienne reste en définitive sensiblement stable.
Examinons d'un peu plus près encore cette curieuse question des canaux
de Mars.
i.i:s c w \i \ :,79
(•.IIAIMTIU; VIII.
LES CANAUX, LES FLEUVES, LE RÉSEAU GÉOMÉTRIQUE
CONTINENTAL, LA CIRCULATION DES EAUX.
Nous arrivons ici au point le plus délicat do mtlre œuvre, et nous en
ressentons toute la difficulté.
Devons-nous admettre cet immense réseau géométrique qui s'étendrait
sur tous les continents? Si nous l'admettons, pouvons-nous en trouver
l'explication ?
On conçoit sans peine tous les doutes (jui ont accueilli les affirmations de
M. Schiaparelli. D'abord, ces lignes droites menées d'une mer à l'autre et
s'entrecoupant mutuellement ont paru si peu naturelles qu'il eût été diffi-
cile de les accepter sans vérification. Ensuite, la vérification s'est longue-
ment fait attendre, et, lorsqu'elle est arrivée, on pouvait penser que l'on
avait cherché ces lignes en en ayant la carte sous les yeux et qu'une idée
préconçue prépare souvent une sorte d'auto-suggestion. Ces canaux ont été
découverts en 1877 et surtout en 1879, et vus dédoublés en 1882. Quelques-
uns d'entre eux se retrouvent, il est vrai, dans les dessins anciens. Le Nec-
tar se voit en 1830 (p. 107) sur la carte de Béer et Miidler, l'IIydaspe sur les
dessins de Secchi en 1858 (p. 138); nous en retrouvons aussi sur ceux de
Dawes en 1864 (p. 18G-187), liurton et Dreyer en 1879 (p. 317), Niesten en
1881 (p. 3G7), Knobel en 1884 (p. 379) : mais il faut arriver jusqu'en 188G
et 1888 pour voir vérifié, au moins en majorité, le curieux réseau de
M. Schiaparelli par MM. Perrotin et ThoUon, à Nice, et Terby, à Louvain,
puis, en 1890, par MM. Stanley Williams en Angleterre et Pickering aux États-
Unis, etc. Un grand nombre d'observateurs les ont vainement cherchés,
même avec les plus puissants instruments, et quant à nous, personnelle-
ment, nous n'avons pu apercevoir que les plus larges (Nilosyrtis, Gange,
Indus), et en 1892 seulement, à notre équatorial de 0'°,24 de l'Observatoire
de Juvisy, qui en a montré un très grand nombre à un observateur doué
d'une vue particulièrement perçante, M. Léon Guiot. Il est juste d'ajouter
qu'en ces dernières oppositions, la planète est restée très basse au-dessus
de l'horizon de Paris et ne s'est pas dégagée de lépaisseur atmospbériquc
des couches inférieures.
Il nous parait difficile de ne pas admettre l'exactitude des observations de
M. Schiaparelli. D'une part, l'astronome de Milan est un excellent observa-
580 1. A l'i. \\iv\'\: M A us.
tour; d'autre pari, elles sont eu partie vérilici's aujuuivriiui par un certain
nombre d'observateurs dillerents. Nous eruyoïis donc devoir considérer cet
é,lranj5'e réseau de lignes droites comme existant réellemenl. au nutins dans
son canevas essentiel. Certains détails restent douteux.
Pouvons-nous en trouver l'explication ?
Il n y a rien d'analogue sur la Terre. Et nous n'avons malheureusenicnt
que nos idées terrestres pour raisonner.
Les hypothèses ne manquent pas, assurément ; mais c'est la véritable
cause qu'il faudrait découvrir.
Celle que nous avons examinée plus haut, présentée par M. Fizcau à l'Aca-
démie des Sciences, et qui consiste à voir dans ces canaux des crevasses
ouvertes en d'immenses champs de glace, ne nous parait pas admissible,
par la raison toute simple que nous observons d'ici les glaces de Mars et
que nous les voyons limitées à quelque distance des pôles. Les mers et les
continents présentent un tout autre aspect, les premières gris plus ou moins
foncé, les seconds jaune d'ocre plus ou moins rouge, qui les distingue abso-
lument des glaces blanches. Voudrait-on imaginer que les glaces des conti-
nents sont rougeàlres tandis que celles des pôles restent blanches ? Mais si
la planète était à une époque glaciaire, pourquoi ses mers, encastrées dans
des continents gelés, ne seraient-elles pas gelées aussi ? Ces mers sont,
pour la plupart, toutes petites et n'ont presque pas d'eau. Si les continents
de Mars étaient des glaciers profonds et crevassés, tout serait gelé là. Or,
même en hiver, les mers sont foncées et non gelées. Mars n'est donc pas un
glacier.
On a ijroposé aussi d'admettre (voy. f Asironomic , 1888, p. 384, article de
M. E. Penard) que ces lignes énigmatiques pourraient représenter des fis-
sures, des cassures géologiques, produites par le refroidissement de la pla-
nète. La vallée du Rhin, entre les Vosges et la Forêt-Noire, résulte d'une
action de ce genre. Le cours du Rhône paraîtrait également rectiligne vu de
loin. L'hypothèse est plausible, sans doute, et plus acceptable que la précé-
dente, mais elle a contre elle la régularité de ces immenses lignes droites et
leurs entrecroisements non moins rectilignes. Il faudrait admettre que le
globe de Mars soit entièrement fendillé sur toute sa surface continentale.
Ce n'est pas impossible. Les eaux pénétreraient facilement dans toutes ces
cassures. Mais il faut avouer que l'aspect de ces lignes (revoyez les cartes,
p. 361 et 440) ne favorise pas cette hypothèse naturelle. La nature trace-t-elle
sur un globe de pareilles lignes droites s'entrecoupant de cette façon ?
M. Schiaparelli s'est demandé [voy. p. 444), sans solution acceptable, s'il
n'y aurait pas là un résultat géologique rappelant les formes géométriques
cherchées dans l'orographie terrestre elle-même par Elie de IJcauniont.
I.l > ' \N.\rX. 581
M. Dauhréo a cliorclié [miicz SociùK; Aslruimmiiiuô du Franco, sr-ancft du
7 mai 1890, cl LWalronomic, 18!)Û, p. 213) à reproduire le "réseau descauaux de
Mars ou compriniaiU un globe en caoulciiouc dans le but de le déformer, de
le rider, de briser son enveloppe sphéroïdale parreffet d"uue contraction, et
n'a rien pu obtenir qui y ressemblât, quoiqu'il eût obtenu une imitation des
cbaîncs de montagnes terrestres, des continents etdrs mers. Mais il a réussi
à imiter le réseau martien par un procédé contraire, par la dilatation d'une
croûte spliéroïdale et par les cassures qui en résultent. Un enduit de plâtre,
de masiic à mouler ou de paraffine étant appli(iué sur un ballon en caoutchouc
que Ion dilate par Tiulroduction graduelle d'eau sous pression, finit par pré-
senter des brisures recliligncs, souvent parallèles deux à deux et se coupant
suivant diverses directions, ressemblant à ce que l'on voit sur Mars.
(In pourrail encore supposer, comme l'a fait notamment M, Armelin à la
Société Astronomique de France, que les continents de Mars sont des grèves,
des plaines sablonneuses, et que l'eau des pluies ruisselle à la surface,
donnant naissance à des cours d'eau qui peuvent changer de place d'une
saison à l'autre. Mais la longueur de ces lignes, leur rectitude géométrique,
et surtout leurs entrecroisements, sont d'insurmontables difficultés.
Vraiment, plus on regarde ces cartes, ces dessins, moins on y sent l'œuvre
aveugle de la nature.
Un commencement d'explication du mystère des canaux de Mars ne pour-
rait-il être essayé en réduisant la question à sa plus simple expression et en
considérant non plus l'ensemble de ce réseau énigmatique et peut-être in-
certain en plus d'une de ses parties, mais simplement d'abord une — ou
quelques-unes seulement — de ces lignes foncées que leur asperl a coïKlnii,
dès l'origine, à assimiler à des cours d'eau ?
Dans ce bul, nous nous permettrons de reprendre la question antériinire-
ment à la découverte des « canaux », faite par M. Schiaparelli tni 1877.
Antérieurement à cette époque, nous écrivions que h certains golfes des
mers martiennes, certaines ]»aies allongées en pointes dans l'intérieur des
terres, donnent l'idée d'embouchures de grands ileuves. »
Il n'est peut-être pas hors de i>ropos de revenir à celte idée.
Replaçons, par exemple, devant nos yeux, le dessin de Dawes du 20 no-
vembre 1864 (p. 187, fifj. 1). Nous y remarquons, dans la région marquée a,
la baie fourchue découverte par Dawes lui-même, point adopté pour premier
méridien de la géographie de Mars, et pour Icijuol nous avons proposé 1g
nom de « baie du Méridien ».
L'observation de ce golfe a donné à l'éminent observateur u l'impression
de deux très larges embouchures de Ileuves » qu'il chercha à remonter, mais
dont il ^( ne put découvrir la trace ».
5SÎ 1. A PI.AM'.TI. M\|{S.
Or, parmi les « i'an;iii\ )^ do M. Schiaparclli, on pinil en reniariiuor doux,
l'Hiddekel et le richoii, qni aboulissenl précisément à ces embouchures
(roi/, la ligure suivant»', '296).
Pourquoi ces lignes foncées ne seraient-elles pas les fleuves indiqués par
ces embouchures? Ne les suit-on pas, en quelque sorte, étalés en nappe pour
former une mer sans doute peu profonde;*
Continuons cette assiniilalion.
Sur ce dessin de Dawes nous remarquons, à droite de cette baie fourchue
du Méridien, une autre embouchure, plus allongée encore.
'"^<Ui
Fig. J'jo. — Fleuves de 3Iars. — Le Gchon, riliddekel et l'Orontes aboutissant à la baie
du Méridien. L'Oxus et l'Iudus.
C'est l'embouchure de llndus, dans laquelle arrive rOxus.
Ici donc encore nul besoin d'imaginer des canaux ou des mystères. Voilà
bien, et très naturellement, encore un fleuve, très large, dira-t-on, plus large
que le Mississipi, le Saint-Laurent et l'Amazone, — mais ce n'est pas là une
objection, surtout pour des terrains plats.
Ainsi, la discussion attentive des observations de Dawes et leur compa-
raison avec celles de M. Schiaparclli conduisent à proposer le commence-
ment d'explication suivante :
L'Hiddekel, le Gehon, l'Indus et l'Oxus sont tout simplement des fleuves.
Peuvent être également considérées comme des fleuves toutes les lignes
foncées qui aboutissent à des golfes ou embouchures, telles que : le Léthé,
qui se jette dans la mer Flammarion, à la baie Gruithuizen (carte de Green
et p. 69) ; le Titan, qui se jette dans la mer Maraldi, à la baie Tiouveloi ; le
Phison, qui se jette dans le détroit d'Herschel II, à la baie de Schmidt; le
Gange ou la Manche, qui se jette dans la baie Christie; le Chrysorrhoas, qui
LKS r.AN.vrX 583
se joltc dans lo lac varia). If de Titlioiiiiis; l'Aiaxcs, le Sirenus et en général
toutes celles qui aboutissent à des golfes et des emboiichurcs.
Tous ces fleuves vont du Nord au Sud, comme s'ils arrivaient, par des
transformations successives, des neij^es [xilaires lidn-ales et de continents
plus élevés (]ue les mers équatoriales dans les(|uellcs ils se jettent, ces mers
équatoriales s'étendant d'ailleurs et se disséminant vers le [lôle sud sans
qu'on ne rencontre plus aucune grande terre.
Ces étendues d'eau sont sujettes à des variations considérables. Parfois
rindus est lie;iucnu[t jdus lar^e que l'IIydaspe, parfois c'est le contraire.
Ainsi, par exemple, dans ses observations de ISôS, le P. Secchi a constam-
ment observé et dessiné : 1° la baie du Méridien, golfe simple, allongé en
pointe, 2° IVrabouchure de l'Indus, 3° l'IIydaspe, sans jamais avoir figuré
rindus hii-nième ; nous venons même de le rappeler à la fin du cliapitre pré-
cédent. Les comparaisons faites sur les autres points conduist'iit à la même
conclusion.
Ici, il y a un caracli're important à signaler.
L'existence de nombreux cours d'eau reetilignes traversant en t(»us sens
les continents de Mars indique que ces continents sont de vastes plaines.
Le fait d'inondations fré({ucntes sur d'immenses étendues, le long des
rivages, conduit d'autre part à la même déduction.
Nous pouvons donc admettre que les continents sont presque absolument
plats.
Mais le nom de fleuves n'en est pas moins applicable à ces cours d'eau,
fleuves très larges, nappes d'eau sans profondeur.
Ainsi il peut et il doit exister des lleuvcs dans ces tracés, tout au moins
des fleuves primitifs, qui d'abord, sans doute, prenaient naissance en terre
ferme par des lamifications de rivières et de ruisseaux, et qui ensuite ont
été allongés d'une mer jusqu'à l'autre, peut-être par suite d'une cause aréo-
logiquc, donnant le même résultat que celle dont M. Daubrée parlait plus
haut. Des brumes d'une nature spéciale peuvent s'étendre sur ces cours
d'eau. Des phénomènes de réfraction peuvent les doubler en certaines
circonstances. Ces brumes jouent peut-être un grand rôle dans les faits
observés.
Sur la Terre, l'eau existe en cinq états ditrérenis : l'eau solidifiée en mi-
néral, appelée glace, les flocons de ncif/c, l'état liquide, l'état nuaycuxel l'état
invisible de vapeur transparente répandue dans l'atmosphère. Peut-être pour-
rions-nous conclure des observations que sur Mars il existe en six états, et
que l'état nuageux se partage là en deux autres.
Déjà ici, les nuages et les brouillards dill'èrent sensiblement les uns des
autres. Le brouillard est stationnaire; le nuage voyage. Le vent passe à
584 1 A PLAM-TI- MARS.
U*avers le brouillard sans le (Irplaccr sensilileinent : le vont emporte le
nuage. Nous avons donné dans r Atmosphère et dans nos Voyages en ballon les
preuves de cette distinction.
Le sixième état que nous imaginons ici pourrait offrir une certaine res-
semblance avec nos brouillards et en être en quelque sorte l'exagération. Il
peut exister là un étal de vapeur très dense et très proche de l'état liquide.
Supposons une nappe de brouillard épais, visqueux, sombre, foncé, con-
tinuant les mers le long des rivages, remplaçant même parfois les lacs
partiellement ou totalement. C'est une transformation de l'eau que nous
pouvons accepter. En certaines conditions atmosphériijues, l'eau peut passer
de l'état liquide à l'état visqueux, puis à l'état nuageux, puis à l'invisibilité
de la vapeur.
Les choses se passent comme si l'eau n'était pas absolument liquide, con-
densée par la pesanteur en des bassins stables, comme si ses molécules étaient
séparées, formant seulement un fluide visqueux, plus lourd que l'air, soumis
à d'autres forces qu'à la gravité. Imaginons, un instant, que ces molécules
aient une tendance à s'agréger, mais puissent néanmoins ol)éir à d'autres
influences, telles, par exemple, que l'électricité, le magnétisme planétaire,
et d'autres forces inconnues (car nous ne devons pas avoir la prétention de
connaître toutes les forces de la nature). Ces eaux, liquides peut-être au
centre des mers, mais fluides, à l'état de vapeur ou de gaz visqueux sur les
bords et sur les hauts fonds, ainsi que dans les fleuves ou canaux, peuvent
s'étendre ou se resserrer suivant les conditions atmosphériques de chaleur,
d'électricité, etc., n'ont plus de limites précises. Ces traînées de vapeurs
seraient essentiellement variables d'aspect, d'épaisseur, de densité. Si, en
certaines conditions, ces molécules sont électrisées, elles peuvent se re-
pousser, comme on le voit dans les phénomènes dits d'électricité positive
et négative, et produire les dédoublements observés. Ces canaux, ces lacs,
ces étendues aqueuses peuvent changer de place. Ce seraient des sortes de
brumes assez denses, et obéissant docilement aux forces qui les régissent :
le voisinage des mers, rhumiditc du sol, Yrliû hygrométrique de l'air, la tem-
pérature, l'électricité, etc.
Il faut admettre, il est vrai, une atmosphère bien calme. Or, tel paraît être
l'état de celle de Mars.
Une telle hypothèse expliquerait ces variations d'étendue et de tons, ces
dédoublements, ces disparitions et ces renaissances suivant les saisons, et
tous ces innombrables changements d'aspects assurément difficiles à expli-
quer par des eaux de même nature que les nôtres.
Ces eaux martiennes ne doivent être ni chimiquement ni pbysiquement les
mêmes que les nôtres. Qu'elles leur ressemblent à certains égards, c'est
m: s CANAUX. :.sj
rendu probablo par l'aspect des in-iges, blanches conimc les nôtres, et qui
fondent — en s'ovaporant sous l'action de la chaleur solaire, — comme nous
l'observons sur la Terre. Cette analogie est rendue plus probable encore par
les raies d'absorption du sjjeclrc de l'atmosphère martienne, raies qui cor-
respondent à celles de la vapeur deau. Mais il n'en est pas moins probable
que ces eaux doivent différer des nôtres.
Qui sait si au lieu du chlorure de sodium, par exemple, associé à l'iiydro-
gène et à l'oxygène, comme dans nos mers, il n'y a pas là toute une autre
combinaison d'éléments?
La densité, d'une jiart, n'est pas la même qu'ici. Un mètre cube d'eau ter-
restre pèse 1000 kilogrammes; un mètre cube d'eau martienne a pour den-
sité 0,711 et ne pèse que 711 kilogrammes, en adm.ettant que la densité de
cette eau soit la même que celle de l'eau -terrestre proportionnellement à la
densité moyenne de la i)Ianèle. Si l'eau marlieniie avait la même densité ab-
solue que la nôtre, les matériaux auraient pour densité spécill(jue 3,01 au
lieu de 5,50. Mais, d'autre part, la ditférencede pesanteur est beaucoup plus
grande encore, puisque 1000 kilogrammes terrestres transportés à la surface
de Mars ne pèseraient plus que 376 grammes.
Les conditions sont donc entièrement différentes de ce qu'elles sont ici. Il
en est de même de l'atmosphère dont la pression joue un rôle .si important
dans les transformations de l'eau. Si l'atmosphère terrestre disparaissait, l'eau
des mers s'évaporerait immédiatement pour donner naissance à une nouvelle
atmosphère aqueuse, jusqu'à ce que la pression devînt assez forte pour main-
tenir l'eau à l'état liquide. En continuant de faire disparaître l'atm-osphère,
on unirait par dessécher totalement toutes les mers.
Si Mars avait la môme atmosphère que la Terre, cette atmosphère serait
toutefois beaucoup moins dense que la nôtre, dans la proportion de 37Gà 1000.
Le baromètre, au lieu de marquer 7G0""", au niveau de la mer, n'en marque-
rait que 286. C'est la pression barométrique au sommet de nos plus hautes
montagnes, à près de 8000 mètres d'altitude. Ce serait là une couche aérienne
très raréfiée, même au niveau de la mer, et il semble bien que l'atmosphère
de Mars ne soit pas très éloignée de cette condition.
Mais elle peut posséder des substances, des gaz, des vapeurs, qui n'existent
pas dans la nôtre.
Ne nous dissimulons pas toutefois que la plus grosse difliculté reste : le
tracé rectiligne et géométrique de ce réseau ne païaît jias nalun-1. l'ius
nous regardons ces dessins (ouvrons encore ce livrr aux pages 361 et 440).
et moins il semble que nous puissions les alliibuer à des causes aveugles.
Pourtant, n'oublions pas que nous sommes loin de connaît i'- ioiii.'>; l.-^ fnn-.^s
de la nature.
5Sfi I \ ri. ANi.Ti-: MAiis.
TmiU'ftus, daulro [kiiI, soniincs-nous aulorisrs à i-cjoier de ii;irti prisTliy-
potlirsed'uno action inlolligenle do la pari des haMlaiils possibles de cctlo
pianote voisint'?
Les conditions actuelles d'habitabilité de ce globe sont telles, comme nous
l'avons vu plus haut, que nul n'est en droit de nier qu'il ne puisse être habité
par une espèce humaine dont l'inlelli.uence et les moyens d'action peuvent
être fort supérieurs aux nôtres.
Nit>r (|u"ils ait-nl ])u rectifiiM' les ilevivcs ]iiiniilifs. à mcstii'c ([iic les eaux
dovenaiont plus rares, et exécuter un système (b^ canaux conçus dans l'idée
d'une répartition générale des eaux, nier la possibilité de cette action serait
anti-scientifique, dans l'ignorance absolue où nous sommes à cet égard.
L'hypothèse d'uiio oriuine intelligente de ces tracés se ]irésent(' d'elle-
même à notre esprit, sans que nous puissions nous y opposer. (Juelque
téméraire qu'elle soit, nous sommes forcés de la prendre en considération.
Tout aussitôt, il est vrai, les objections abondent. Est-il vraisemblable que
IfS habitants d'une planète construisent des œuvres aussi gigantesques que
celles-là y Des canaux de cent kilomètres de largeur? Y pensc-t-on? Et dans
quel but ?
Eh bien (circonstance assez curieuse), dans l'hypothèse d'une origine hu-
maine de ces tracés, on pourrait en trouver l'explication dans l'état de la
planète elle-même. D'une part, nous avons vu que les matériaux y sont beau-
coup moins lourds qu'ici. D'autre part, la théorie cosmogonique donne à ce
monde voisin un âge beaucoup plus ancien que celui de la planète où nous
vivons. Il est naturel d'en conclure qu'elle a été habitée plus tôt que la
Terre, et que son humanité, quelle qu'elle soit, doit être plus avancée que
la nôtre. Tandis que le percement des Alpes, l'isthme de Suez, l'isthme de
Panama, le tunnel sous-marin entre la France et l'Angleterre paraissent
des entreprises colossales à la science et à l'industrie de notre époque, ce ne
seront plus là que des jeux d'enfants pour l'humanité de l'avenir. Lorsqu'on
songe aux progrès réalisés dans notre seul xix® siècle : chemins de fer, télé-
graphes, applications de l'électricité, photographie, téléphone, etc., on se
demande quel serait notre éblouissement si nous pouvions voir d'ici les
progrès matériels et sociaux que le xx^, le xxi'' siècle et leurs successeurs
réservent à rimmanité de l'avenir. L'espiit le moins optimiste pj-évoit le
jour où la navigation aérienne sera le mode ordinaire de circulation; où les
prétendues frontières des peuples seront effacées pour toujours ; où l'hydre
infâme de la guerre et l'inqualifiable folie des armées permanentes, ruine
et opprobre d'un état social intellectuel, seront anéanties devant l'essor glo-
rieux de l'humanité pensante dans la lumière et dans la liberté! N'est-il pas
logique d'admettre que, plus ancienne que nous, l'humanité de Mars soit
I.KS CANAUX. ',S7
aussi jilus porfcctioiiin'i', ci t|iic liiiiitr fiiroiidc des jiniplçs, les trav;iii\ di;
la ]»aix aioul pu allriudre des tlévrloppcMiciits cDiisidcvables;'
Nous ignorons ce que pcuveul idrcccs longs Iracrs sombres à travers les
contincnls. si loulo leur rpaisseur est honiogèuo, et rien ne n<»us prouve
assurénn'nl que ce soient là des canaux pleins d'eau. (In [leul faire là-dessus
mille conjectures. On y peut voir des travaux de drainage des eaux devenues
rares sur la planète; on y peut imaginer do préférence une sorte «le cadastre
de cultures collectives sur un glolie « ari-ivé à la période d'iiarinniur >, ; un
se souvient que Proctor, traitant ce sujet dans un intéressant article du
Timcs^ a suggéré l'idé*' (|ue « les habitants de Mars p<!uvent être engagés en
de vasli^s tiavaux d'ingr'nieurs, attendu que C(.'s lignes sont tracées dans
toutes les direclions et gardent entre elles une distance constante et signi-
ficative; et (pi'à une séance de la Société Royale astronomique de Londres,
M. Grecn, l'habile ol)servateur de Mars, signalant cette interprétation, ajou-
tait qu'il n'a aucunement l'intention d'introduire un sujet de plaisanterie dans
une matière scientifique aussi importante, mais que de tels aspects géf)gra-
phiques méritent la plus grave attention et qu'il est ilu plus haut intérêt de
les vérifier; M. Maunder, de l'Observatoire de Greenwich, a fait remarquer
que ce qu'il y a de plus étrange, c'est que ces canaux paraissent changer de
jjlace et sont tantôt visibles et tantôt invisibles; pour plusieurs observateurs,
ce ne seraient pas des canaux proprement dits, mais plutôt des bordures de
districts jilus ou moins foncés. Quoi (ju'ilen soit, la nature peut avoir éti'-
corrigée; les inondations faciles, fréqueutes et toujours menaçantes, sur
des continents nivelés par l'usure du temps, peuvent avoir donné l'idée
d'une régularisation rationnelle des eaux. Il semble bien qu'il ne nous soit
pas plus possible d'arriver à expliquer ce réseau géométriciue sans inter-
vention intellectuelle qu'un habitant de Venus ([ui prétendrait vouloir
expliquer nos réseaux de chemins de fer par le seul j<'u des forces géolo-
giques naturelles.
Le globe de Mars doil cire à peu près nivelé par les siècles. et l'eau n'y est
Jilus qu'en faillie (|uaiilité. Ce qui ai'rivera dans quebjues millions d'années
pour la Terre doit être arrivé pour Mars. Les pluies désagrègent lentement
les montagnes, les fleuves en transportent les débris à la mer dont le fond
s'exhausse graduellement; mais en même temps la quantité d'eau diminue
en pénétrant dans rinlérieur du globe et en se fixant sur les roches à l'étal
d'hydrates. Tout globe terminé S(,' nivèle lentement. 11 n'y aurait rien
lie surprenant à ce (jue. sur Mars les eiforts (h- la civilisation eusseni
surtout tendu à une répai'liliou fcconde des eaux à la surface de ces vieux
continents.
Ces tracés rectiligues mettant en communication toutes les mers mar-
588 I.A PI A Mil; MA US.
tiennes les unes avec les autres paraissent intentionnels. Est-ce île Fean qui
coule là? Oui. sans doute, en principe; mais il peut s'y associer une autre
forme de Teau, dont nous parlions tout à l'Iicure. des brumes allongées au-
dessus de ces trac(-*'S, qui les élargissent à nos yeux et leur font sujiir des
changements apparents considérables.
Peut-être aussi des phénomènes de végétation s'ajoulent-ils à cette cir-
culation des eaux.
Quant au.x dédoultlements, il est difficile d'admettre que réellement de
nouveaux canaux se forment du jour au lendemain, semblables et parallèles
aux premiers : nous préférons imaginer qu'ils puissent être dus soit aux
brumes dont nous avons parlé, soit plutôt à une doulile réfraction dans
l'atmosphère martienne. Étant données les conditions de température (la
chaleur solaire traversant facilement l'atmosphère martienne pour échauf-
fer le sol), l'évaporalion doit être très intense, et il doit y avoir constam-
ment, au-dessus de ces cours d'eau, une grande quantité de vapeur rapi-
dement refroidie, qui peut donner naissance à des phénomènes de réfraction
spéciaux. (loy. aussi L'Astronomie, 1889, p. 461, article de M. Meisel). Il nous
paraît rationnel de ne pas oublier les effets de la réfraction, surtout à cause
de cette particularité que parfois toute trace d'un canal disparaît pour faire
place à deux nouvelles lignes seulement voisines.
M. A. de Boëa attribué ces dédoublements à des images secondaires qui se
formeraient dans l'œil de l'observateur, comme il arrive, en effet, en regar-
dant une ligne droite tracée à l'encre sur un carton blanc placé en deçà ou
au delà de la vision précise. Mais peut-on admettre que les observateurs
des canaux ne les voient que lorsque l'image n'est pas au point?
Quoi qu'il en soit des explications, qui sont assurément prématurées et que
nous ne présentons qu'à titre de premières hypothèses, les variations con-
sidérables observées en ce réseau aquatique sont pour nous un témoignage
que cette jjlanète est le siège d'une énergique vitalité. Ces mouvements
divers nous paraissent s'effectuer en silence, à cause de l'éloignement qui
nous en sépare; mais, tandis que nous observons tranquillement ces con-
tinents et ces mers, lentement emportés devant notre regard par la rota-
tion de la planète autour de son axe, tandis que nous nous demandons sur
lequel de ces rivages il serait le plus agréable de vivre, peut-être y a-t-il là,
en ce moment même, des orages, des volcans, des tempêtes, des tumultes
sociaux et tous les combats de la lutte pour la vie. De même, les astronomes
de Vénus, armés d'instruments d'optique analogues aux nôtres, contemplant
la Terre et la voyant planer dans une calme tranquillité au milieu d'un ciel
pur, ne se doutent pas assurément que sur ces campagnes dorées par le soleil
et sur ces mers azurées qui se découpent en golfes si délicats, l'intérêt, l'am-
l.i;S CANAUX. 58'J
biliou, la ciiiiiilili-, la liarharii; ajoulciil soiivciil IcuiS orages volontaires aux
inleiiipénes l'alalos (ruin- |tlaiit^lc iuipaifailc. N'olls pouvons pourtant espé-
r<'r (|iie le niomlo île Mars élaiil i»lus aiiricu (|ui' li- nôtn', son liuinanid' est
plus avancée el plus sagi,*. Ci; sont sans doute les travaux et 1rs bruits d.,' la
paix qui animent depuis bien des sièclt.'s CL-tle patrie voisine.
L'explication de tleuves modifiés par les habitants de Mars et d'un système
rationuL'l de répartition des eaux devenues rares sur les continents aplanis
par l'usure des siècles ne nous paraît pas absurde. Des brumes se formrM-aient
facilement au-dessus de ces canaux, et quelque double réfraction atmosphé-
rique, rappelant celle du spath dislande, pourrait expli(iuer les dédouble-
ments. Après tout, nous sommes là devant un nouveau monde et nous ne
devons rien nier de parti pris.
Soyons convaincus toutefois que la nature tient en réserve des causes in-
connues de nous et sans doute plus simples que tout ce que nous pouvons
imaginer. Notre savoir est insuffisant. C'est une erreur profonde de nous
imaginer que les sciences aient dit leur dernier mot et que nous soyons en
situation de tout connaître; c'est une erreur non moins puérile de nous
ima.dner que nous soyons au courant de toutes les forces de la nature. Au
contraire, le connu n'est qu'une île minuscule au sein de l'océan de l'in-
connu. Nos sens, d'ailleurs, sont fort limités, nos moyens de perception
s'arrêtent encore au vestibule ; noire science reste et restera toujours fata-
lement incomplète.
Assurément, ces bizarres phénomènes nous transportent sur un autre
monde, bien différent de celui que nous habitons, quoiijue olfrant avec lui
de sympathi(|ues analogies. Au point de vu(! de l'almosphére, des saisons,
des climats, des conditions météorologiques, Mars paraît habitable aussi bien
et mémo mieux que la Terre, et peut fort bien être actuellement habité par
une race humaine très supérieure à la notre, étant, selon toute probabilité,
plus ancienne et plus avancée. L'industrie do ces êtres inconnus est-elle
entrée pour quelque chose dans le tracé de ces canaux rectilignes qui se
dédoublent en certaines saisons? Resle-t-ellc étrangère à ces variations si
soudaines et si énigmatiqucs que nous observons d'ici? Il faudra sans doute
encore bien des années d'observation pour découvrir exactement ce qui se
passe chez nos voisins du ciel.
C'est avancer de quelques pas la question que de préciser les faits et de les
discuter mélliodi(juement. Tel a clé le but de ce travail.
590 I V IM.AM.Ti; M \I{S.
CHAPITRE IX.
RÉSUMÉ SUR LES CONDITIONS DE LA VIE A LA SURFACE
DE LÀ PLANÈTE MARS.
Comme conclusion générale de l'étude de la planète, nous n'en avons pas
de meilleure à ajouter aux pages précédentes que les trois séiies d'articles pu-
bliés dans c-ct Ouvrage même, à la fm de chacune deuos périodes, pages 9G,
24'2 et 485. Il serait superflu de les réimprimer ici, et nous prions le lecteur
de vouloir bien relire ces articles, aux([ucls nous pouvons ajouter, en leriiii-
nanl, le résumé suivant :
43. Le monde de Mars paraît être, comme le remarquait déjà \Mlliam
Herscliel, de toutes les planètes de notre système solaire, celle qui ressemble
le plus à la nôtre. Nous pouvons répéter aujourd'hui, sur Jes haiiitants de
Mars, ce que ce grand observateur écrivait, il y a plus d'un siècle, le 1" dé-
cembre 1783 : « Its inhabitants proba])ly enjoy a situation in many res-
pects similar to ours. »
Comme dimensions et densité, Vénus se rapproclie tout ;'i l'ait de la Terre,
il est vrai, mais nous n'avons encore aucune notion certaine sur sa durée
de rotation, ses saisons et sa géographie.
44. Les faits observés à la surface de Mars établissent que ce globe jouit
d'une température moyenne, de climats et de saisons différant très peu des
climats terrestres, d'ailleurs assez variés eux-mêmes. Du moins sa thermo-
métrie y détermine-t-elle des effets analogues à ceux de la météorologie
terrestre.
45. La durée du jour et de la nuit y est de 24'' 39'" 35'.
4G. Ses années sont près de deux fois plus longues qu'ici et durent G87 de
nos jours et G68 des siens. Il en résulte des saisons également près de deux
fois ijlus longues que les nôtres. Mais l'inclinaison de l'axe est à peu près
la même et l'intensité de ces saisons à peu près la môme également.
47. L'atmosphère y est généralement beaucoup plus pure qu'ici. Elle y est
plus raréfiée et sans doute plus élevée. Les nuages et les pluies y sont rares
et l'on n'y observe jamais de violentes tempêtes.
48. Il y a à peu près autant de terres que de mers. Celles-ci sont fmement
découpées en méditerranées allongées. Les rivages sont des plages unies, en
UfiSUMfi. .Vil
général, exposées à des inondalioiis ou ;ï des bancs de In-nmes bordant les
eaux. Il semble que les mers soient peu profondes.
49. Le diamètre de Mars est près du moitié plus petit que celui du globe
terrestre et mesure G753 kilomètres. Les eaux (tccupent environ GG millions
de kilomètres carrés et les terres 77 millions. La surface babilablc parait éin;
cinq à six fois ccllo de l'Europe.
50. Le Soleil y est vu un peu plus petit quu d'ici : 21' au lieu de 'A\'.
51. Deux lunes minuscules circulent rapidement dans son ciel.
52. Ce globe est plus ancien (juc la Terre et paraît presque complètement
nivelé. L'bémisphère boréal est, toutefois, plus élevé que riiémisphèreauslral.
On n'y a pas reconnu de grandes cliaiiies de montagnes, mais seulement
plusieurs plateaux assez élevés.
53. Les canaux doivent être dus à des fissures superficielles produites par les
forces géologiques ou peut-être même à la rectilication des anciens lleuves,
par les habitants, ayant pour luil la répartition générale des eaux à la surface
des continents.
54. Il est possi])le que ce monde soit actuellement liabilc par une espèce
humaine analogue à la nôtre, plus légère, .sans doute, plus ancienne et qui
pourrait être beaucoup plus avancée. Toutefois il doit exister entre les deux
mondes des différences originaires essentielles. Quant à la forme organique
des « humains » comme à celles des animaux, végétaux ou autres êtres qui
peuvent peupler cette planète, nous ne possédons encore aucun élément
suffisant pour faire à cet égard des conjectures plausibles scientiliquonitMit
fondées. Mais l'habitation actuelle de Mars par une race supérieure à la
nôtre est très probable.
Il y a dans la vie des heures charmantes, des sensations fort agréables, des
plaisirs délicieux, d'immenses joies, des bonheurs qui touchtint au ciel et
des voluptés exquises. Eh bien, parmi ces heures d'enchantement, il en est
peu qui donnent à l'âme une satisfaction plus complète, une émotion plus
noble et plus élevée, que l'observation des aspects de la jilanète Mars pen-
dant une pure soin-e d'été. C'est un regret que si pou d'humains connaissent
cette impression. Voir devant soi un monde, un autre monde, avec ses con-
tinents, ses mers, ses rivages, ses golfes, ses caps, ses îles, ses embouchures
de fleuves, ses neiges éblouissantes de blancheur, ses terres dorées, ses eaux
sombres, placé là devant vous, au bout de votre télescope, tournant lente-
ment sur lui-même, donnant le jour et la nuit à ses diverses contrées, fai-
sant succéder le printemps h l'iiivcr, l'été au printemps, nous offrant en
miniature la vue de la Terre dans l'espace... il y a là une contemplation ({ui
nous transporte en face du plus grand des mystères, celui do la Vie univor-
59-2 I \ PI.ANKTi; M\I{S. HKSrMK.
selle cl éternelle, en face tic la sulilinic Vérité, en face du Iml même de la
création. La Terre devient une province de l'Univers cl nous sentons des
frères inconnus dans les autres patries de l'Inlini !
Et puis, peut-être s'ajoutc-t-il à ce sentiment celui de la Ijcauté et de
la grandeur des concjuèlcs de l'Astrononiie moderne. La nouvoauLc a tou-
jours pour nous un attrait particulier. (Test la première fois, depuis l'ori-
gine de l'humanité, que nous découvrons dans le Ciel un nouveau monde,
assez semblable à la Terre pour éveiller nos sympathies, c'est la première
l'ois qu'un Ouvrage tel que eelui-ci a pu être, conçu et réalisé, et bien des
années se passeront sans doute avant que rélude positive puisse acquéiir
sur notre autre voisine, la planète Vénus, des notions aussi complètes que
celles que nous venons de passer en revue sur ce monde de Mars.
Mais quelles merveilles la Science de l'avenir ne réserve-t-clle pas à nos
successeurs, et (jui oserait même affirmer que l'humanité martienne et l'hu-
manité terrestre n'entreront pas un jour en communication lune avec
l'autre! Les générations passeront et le Progrès continuera longtemps encore
sa marche ascendante.
Pour nous, dont les débuts, en notre adolescence, dans la carrière scienti-
fique et littéraire, ont été précisément la défense de la doctrine de la Plura-
lité des Mondes, et qui avons consacré notre vie entière à montrer que le but
de. l'Astronomie ne s'arrête pas à la Mécanique céleste, mais doit s'élever jus-
qu'à la connaissance des conditions de la vie, actuelle, passée ou future, dans
l'immense Univers, nous sommes heureux d'avoir assez vécu pour assister à
la naissance et au développement de l'Astronomie physique, pour contem-
pler de nos yeux un premier monde exploré dans les cieux, et pour avoir eu
le privilège d'en écrire l'histoire. Puissent nos lecteurs avoir partagé la
même satisfaction que nous, en assistant à cette évolution de la Science : les
pages qui précèdent ne sont qu'un humble et grossier prélude des décou-
vertes que le Progrès réserve à nos successeurs.
aim'KM)[i:k.
i;(»i'i'i)siii()N i»i; 189?.
Au moment <tù nous mettons sons presse la derniùre frnillr île cft Ouvrai^'e,
nn certain nombre d'observations intéressantes ont di^jà »?t«' faites à l'observa-
toire do Jiivisy, caraetéristiques de l'opposition actuelle. Nous sommes heureux
de pouvoir ajouter encore ici quelques-uns de ces dessins, qui n'ont besoin d'au-
cune description pour les lecteurs do ce livre
Ces dessins ont été faits, le n" 1 par M. Sclunoll, le ii" ' par M. Mabire, les
n<» 3 et S par M. Flammarion, les n»» -i, ."., 0, 7, 9, 10, l,', !i. 1.') et K; par M. L«îon
Guiot, les n»» 11 et lii par M. Quénisset.
Fiu'. I. — .7 juin, 2'' t)- ilii matin.
1-iK 2
jllilii't. i'* (lu liKltill.
:î. - |t, juillcl, J"!..- ilii inaiiii. '•■-■- '■ - -.' jmllel. -''' I.'.- .lu malin.
Dessins iik Mabs kaits kn IN'.t.' a i.OiisKUVAToinK de Jdvisy.
Kr,AMMAHiON. — Murs. 38
\<)S
1 A IM \NKTr MARS.
Fig. d. — ?3 juillet. l'-OJ" du matin.
Fig. G. — :;i juillet, P'Sû™ du matin.
i'ii.'. 7. — I'' août. 1^0" du matin.
Fig. 8. — G août, 11'' du soir.
FiL'. 'I. — 7 août, CSO" du matin. Fig. 10. — 7 août, 'J'' 10" du soir.
Dessins nr Mars fait.s t.s 18ÎI-2 a L"OnsERVATOinE de Jlvisy.
ApprNnicr,
■)'.•-,
— Il iiMiii, [><■ IH". ,in
Fi-'. i:. — Il .-ir.ut. In'. ,|ij
Fii.'. 13 — l.'îaoïit, 11'' du soir.
Vi'j!. 14. — i;;auiU, 11''45"' du soir.
Fitr. 15. — IG août, lU"» du soir. Fiic. 16. — 23 août, •J'-l.")'" du soir.
Dessins dk Mahs faits en IS'j-2 \ 1,'On.sEnvAToinn de Jrvisv.
jaiuj: I)i:s mmikkks.
PllKTACK
V
PREMIÈRE PARTIE.
EXPOSÉ i;t discussion des observations.
Première Période. 1636-1830.
I 1G3G-1G38 FoNTANA 6
Premier de.s.sin de Mars 7
L'invention de la lunette d'approche i, 9
il iO'iO-lG'ii IlicciOLi 12
III 1643 HlRZGARTElt 13
IV 1615 SCHYRLE DE HlIEITA 13
V lG'i.5 HÉvÉLius 13
VI 1G5G IIUYGENS 13
\ll 1G57 RicniOLi I.-,
\lll lG.i9 HUYGENS ].-,
Première découverte de la rotat ion 1 .'>
Premier croquis de la mer du Sablier ir;
IX IGCG CASstNi IG
Observations faites à Bologne (Italie). 17
Deu.xiômc découverte de la rotation 18
Aspect lointain d'une planète, par Gamlée et Cassini.. 21
X 1G66 Salvatore Serra. Rome 21
\ I 16G6 IIooKK 25
Observations faites k Londres 27
Les dessins primitifs, rudimentaires 29
XII 1G72 Ulycens 32
Deuxième croquis de la nur du tjaldier 32
XIH 1G72 Flamstei-o 33
XIV 1G83 lIlYGENs 33
XV IGSG FONTENELLE ■. 3i
XVI 1701 Maraldi 35
Première observation des taches polaires.. !G
XVII 1719 Marai.di :VJ
Opposition périhélique précise .39
Observations sur la rotation \0
Aspects changeants du disque 13
Ce que deviennent les dessins astronimiiques.. ij
m TAin.i: ni; s ma ri i; ni: s.
Pages.
xvni i7i'.i HiANciiiM w
\1\ ITSO Cassim II 'iT
XX I7(J4-GI3 Messier M
XXI 1771 L.u.AXDE '18
XXII 1777-79-81-83 William Herschel 49
Constatation des neiges polaires 49
Période de rotation bl
Inclinaison de l'axe. Saisons 58
Diamètre 59
Habitabilité de Mars 59
XXUl 17S;î Messier Ci
XXIV 17S5 lÎAiLLY 61
X X V 178.". à 1803 ScmutnEU 62
Première aréographic générale 62
Taches de Mars assimilées à des nuages 63
L'atmosphère de Mars — 04
Rotation 65
Neiges polaires 65
Inclinaison de l'axe. Saisons 68
Diamètre 08
Carte aréographiquc générale 69
Premières observations de la baie du Méridien.... 7i. 78
XX VI 1794 Von Haun 83
XXVII 1796 à 1813 Fl.vugergues 84
XXVIII 1802 à 1807 Fritsch 89
XXIX 1805 HuTH 89
XXX 1813 à 1847 Gruithuiskn 90
XXXI 1811 à 1847 Arago 90
Aplatissement de Mars 90
Diamètre 91
La lunette de l'Hmpereur 91
XXXII 1821 KuNOWSKY 93
Observation de la baie du Méridien 94
XXXIll 1824 IlARDiNn 91
Conclusions de la Première Période 96
Deuxième Période. 1830-1877.
XXXIV 1830-1841 Béer ET M.XnLER 102
Première Carte aréographique 107
Neiges polaires 108
Saisons 113
Atmosphère 114
Durée de la rotation 118
Sir Jon.N Herschel 120
Bessel 122
Sir Ja.mes Solth 123
Occultation d'une étoile par Mars 124
Galle 124
Napoléon III 126
XXXV
1830
XXXVI
1830-37
XXXVII
1831-32
X XXVIII
1837-39
XXXIX
1839
Tvin.i. m > M \ I ii.Ki;s. . .'lOO
XL 18 i3 à 187.1 .li'MUs S.:ii.MiiiT .. l'20
XLI 18'iJ ;i I8.'i(; MiTGiiEi,, (Jham), WAHUi^N de i.a I{uk, J.\t.<iii, Haoni. .
Wiwjii, Tam.oi! 1»7
\I,II I8i5 à 1875 Main... ... 130
\MII 183G W'iNNECKi; 1^1
XMV 1853 AnAGo 131
Saisons 132
Atmosphère 133
XLV 1859 Le P. Si:.;ciii 13i
Première nomenclaUiro 135
Continents et mers i:j6
Neiges polaires 137
Rotation 1 37
XLV! 18G0 Emm. Liais li!
XLVII 1862 C.Flammarion 113
XLVIIl 186-2 Le P. Secchi lil
Les Saisons sur Mars 145
XLIX 186-2 LocKYER 150
Grands dessins arcograiihiquos 151
Nuages sur Mars 155
La coloration des continents et des mers 157
Neiges polaires 158
L 186-2 Phillips 163
Réllexion du Soleil dans les mers martiennes 166
LI 186-2 Lord Rosse 166
LU 1862 Lassell 168
Lin 1862 Main, Linsser, Nasmyth, Harkness, Grove, Knott,
Ellery, Bulard, etc 170
LIV 1862-6i Green et Banks 172
LV 1862-6i JoYNSON, NoiiLE, Williams 172
LVI 186-2-64 K.viSER 173
Durée de rotation 180
2* Carte aréographiquc 181
LVI I 1862-64 HuGGiNS, Miller, Rutherfurd, Vooel 182
Analyse spectrale de l'atmosphère de Mars 182
LVI II 1864 Dawes 184
Embouchures des fleuves 185
Canaux 187
Ll.X 186i Phillips 189
3° Carte aréographiquc 190
LX 1864 F. VON Franzenai- 191
LXI 1864 Talmage, Secchi, Rudolf WoLF 195
LXII 1864 ZÔLLNER, SeIDEL, SCHMIDT 195
Photométric de la surface de Mars 196
LXIU 186i à 1875 F. Terhy 197
Analyses arèographiques 198
LXIV 1865 C. Flammarion 199
|,XV 1867 lIuGGiNS, Secchi 200
Analyse spectrale lie l'atmosithère de Mars 20(1
LX\ 1 lstJ7 à 1873 BiiowNiNd, Barnes. Johnson, Elgeh, Grover, Knioht,
Backholse, NoiiLrj, Wii.mami^ 202
Giin T.MiLl- l)i:S M AT ii: ni- s.
Papes
LX VII isr.7 à 1877 R.-A. PnocTon 203
4' Carie et nomenclature pônérale 205
Période de rotation 206
I.Wlll 1S71-1S73 Lkhardelay, Grosley, Gi,i;diiill, Buuton, Dennmno,
WiLSON, GUYON, LOWDON, JOYNSON, SpEAR 208
l.XIX 1872-73 Vor.EL. Analyse spectrale 212
LXX 1873 C.Flammarion 213
Eaux et neiges polaires 215
Couleur des continents cl végétation 215
LXXl 1873 F. HoEFER, St. Meunier 216
l.XXll 1873 Green 218
5* Carte aréographique 219
Image solaire dans les mers martiennes 220
LXXllI 1873 K.NODEL, Webr, Groyer 221
LXXI V 1873 Jules Scumidt 222
Durée de la rotation 222
LXXV 1873 Trouyelot 223
LXXVI 1873 LOHSE 226
LXXVII 1872 Amigues, Hennessy, G. -II. Darwin, Flammarion 227
Aplatissement de Mars 230
Rapport de la force centrifugea la pesanteur 235
LXXVI 11 1874 Terhy 236
Aréographie 236
LXXIX 1875 HoLDEN, Bernaerts, Ellery, Flammarion 237
Couleur de Mars 238
LXXX 1870 C. Flammarion 238
Aréographie et climats 240
Changements observés sur Mars 241
Conclusions de la Deuxième Période 2'i2
Troisième Période - Le cycle martien de 1877 à 1892.
Oppositions de 1877 à 1802 247
LXXXL 1877 C. Flammarion 249
C" Carte aréographique 251
LXXXH 1877 Paul et Prosper Henry 254
LXXX 1 1 1 1877 Asaph Hall 2.55
Découverte des satellites de Mars 255
Masse de la planète 260
LXXXIV 1877 XiESTEN 262
LXXXV 1877 Terby 264
LXXXVI 1877 Van Ertiîorn 266
LXXXVII 1877 Crlls 268
LXXX VIII 1877 Dreyer 270
LXXXIX 1877 LoHSE 271
XC 1877 Green 273
7* Carte aréographique 275
lie neigeuse 278
Fonte des neiges polaires 279
Plages inondées 281
XCIV
1879
xcv
1879
XCVI
1879
XGVII
1,S79
TAHi.r: dhs m vtii:iu:s. . r,oi
\(]\ 1877 IIaukness, Noule, Puvtt, John Hkett, IIihst, Huedi*
ciiiN, I{i:uNAi:ivrs, IIautwig, Sciinn, Eli.kry. de Kon-
KOLY, litKDDIKEH, WeiNEK, KLEIN, DuVAL, ctr .'82
8* Carto an'-ograiiliique . -83
XCIl 1S77 SCIIIAPARELLI 288
Direction de l'axe de rotation 289
Trianpulation de G2 points fondamentaux 290
9* Carte aréographiquo 293
Description générale 2%
Canaux 298
lO» Carte aréograi»hiquc : hémisphère austral 305
Variations des neiges polaires 307
XCIll 1877 Malnder 308
Analyse spectrale 308
Opposition de 1879 309
GllEEX 310
Tehiiy 311
Niesten 314
BURTON 316
1 1* Carte aréographique 317
XGVII I 1879 LoHSE, DE KoNKOi-Y, Hartwio 318
12<= Carte aréographique 319
Mesures du diamètre 320
Conjonction de Mars et Saturne 320
SCHMICK 321
G. Flammarion 322
Gliangenients observés sur Mars 322
Les Cartes aréograpliiques 325
lIconiNS 32G
Analyse spectrale 326
SCHIAPARELL! 326
Inclinaison de l'équateur de Mars 327
Triangulation de 11 i points fondamentaux 328
13° Carte aréograpliique 332
Canaux : 334
14° Carte aréographique 337
Neiges polaires . • 339
Satellites de Mars 340
G. -II. Darwin, D. Kirkwooh. Lkdgeu 341
Les marées sur Mars 3Ï3
Adams, Tisserand 344
Inclinaison des satellites 345
Martii 349
Passage de la Terre devant le Soleil 349
(IppiïnHion d«H SS I - 1 SS2 350
Webii 351
St:niAPAREi,Li 351
Dèdoubli-ment des canaux 3;)3
15* Carte aréographique 355
IG* Carte aréographique 3til
CIX [ii6[-Sl (). lioEDOiKER 3G4
XGIX
G
1879
1879
CI
1879
GII
1870
cm
1870
civ
1879
GV
1879
GVI
1879
CVII
1881
GVI II
1881-82
602
ex
18S1-8-2
CXI
1881-82
CXII
1882
ex III
1882
ex IV
cxx
GXXVI
CXXXVJ
1883
cxv
1SS4
ex VI
1884
exvii
1884
ex VI II
1884
exix
1884
1885
exxi
1886
CXXII
1886
CXXIII
1886
CXXIV
1888
CXXV
1888
CXXVII
1888
CXXVIII
1888
ex XIX
1888
exxx
1888
GXXXI
1888
exxxii
1888
exxx m
1888
1888
ex XX IV
1888
CXXXV
1888
1888
TAHI.E ni: S MATIKUES.
Pasres.
RruTON 365
NlESTEN 366
Trouveiait 368
DinVN'INCi, PUITCHETT 369
Mesures du diamètre 370
PioKEiUNG. — Satellites 370
Mahth 370
Période de rotation 371
Opposition de 1884 371
Trouvelot 372
Montagnes 375
Knobet 376
17» Carte aréographique 379
Terby 381
0. BOEDDIKER 382
De.nning 383
Période de rotation 384
Van de Sande Bakhuyzen 384
Période de rotation 384
Opposition de 1886 385
Dexning 386
Pkrrotin 391
Wislicenus 395
Opposition de 1888 396
LonsE 396
18» Carte aréographique 397
Proctor 398
1 9° Carte aréographique 40 1
Perrotin 402
Inondations sur Mars 403
NiESTEN 411
FiZEAU. Hypothèse glaciaire 412
e. Flammarion 415
Teruy 419
Schiaparelli 422
IlOLDE.N, SCHyEHERLE, KeEI-ER 426
Oliservatoirc du Mont Hamilton 428
AVislicenus 430
20° Carte aréographique 430
21^ Carte aréographique 69, 325
GÉRiG.NY. Les marées sur Mars 431
Schiaparelli 436
La constitution physique de Mars 436
22* Carte aréographique 440
Les canaux 442
Doublements ou géminations 448
Phénomènes observés sur les canaux 454
Neiges polaires 458
C. Flammarion 462
Fleuves. — Changements observés 462
Opposition de 1890 463
TABi.K in:s math: m: S. 603
\\ . Il l'iCKKHINC. . . . iGi
IMiMlM^T.iphics de Mars. Neijfes tOl
AsAPii Hai.i \r/i
Keei.eh 4GC
Taches blanches vers le terniinateur 46G
G. Flammahion 467
Tkhby, SniiAPAUEi.i.i, Stam.ey Williams 470
(iriLLAIME, GlOVANNOZZI, WiSLICE.M > 477
23* Carte aréographiquo 481
Gheen, discussion sur les dessins 481
CXLIII 1S90 DoM Laxiey. Couleur de Mars 483
Oppo.s-jfion (/(• 180-2 485
C. FLAMMAnioN. Mesures du diamètre 4S5
Conclusions de la Troisième Période 487
CX.WVII
1S'.¥)
C.WWIII
180<)
i;\x\i\
IK'JO
CXL
IS'JU
CXLI
1890
ex LU
1890
SECONDE PARTIE.
RÉSULTATS CONCLUS DE L'ÉTUDE GÉNÉRALE DE LA PLANÈTE.
Pages
Chapitre I — L'ORniTE de Mars. — Distance au Soleil. — Durée de la révolution.
— Excentricité. — Période synodique. — Retour des oppositions. — Variations
de distances. — Comment Mars est vu de la Terre 491
Chapitre II. - Di.mensions de la Planète. Masse, densité, pesanteur 504
Chapitre III — Rotation. Dun'e du jour et de la nuit .j07
Chapitre IV. — Géographie de Mars, ou Aréographie. — Continents et mers.
Uliservation de la planète 500
Chapitre V. — L'at.mospuere de Mars. Météorologie et climatologie martiennes.
Lis conditions de la vie sur Mars 517
Chapitre VI. — Les saisons sir la planète Mars . . Viî
Chapitre VII. — Changements actuellement observés à la surface de la planète. 547
Chapitre VIII. - Les canaix, les fleuves ; réseau continental; circulation des eaux. 579
Chapitre IX. — Résume sur les conditions de la vie à la surface de Mars 530
APPENDICE - L'Opposition de 189Î ^OS
TviîLi: alimiaiu:tioue sommaire.
Année (1') sur Mars. 49-2, 508, 5ÎÎ.
Aplatissement polaire, 59, G5, 90, 230,
235, 3i5, 347, 506.
Analyse spectrale, 182, 200, 212. 308, 326,
413, 518.
Atmosphère, 38, 42, 55, 64, 84, 95, 102,
123, 132, 136, 145, 154, 166, 182, 190, 199,
200, 212, 277, 296, 308, 326, 413, 517.
Calendrier de Mars, 509, 524.
Canaux, 107, 138, 177, 186, 187, 205, 251,
292, 298, 317, 332, 352 à 363, 389, 391, 402,
412, 422, 442 à 458, 470, 481, 579 à 589.
Changements (voy. Vai'ialions).
Chute des corps sur Mars, 506.
Climatologie de Mars, 517.
Comment Mars est vu de la Terre, 5, 497,
502.
Conjonction de Mars avec une étoile, 8î,
123; avec Saturne, 320; avec Uranus,396;
avec Jupiter, 491.
Continents et mers, 21, 82, 120, 145, 157,
185, 240, 278, 296, 514.
Couleur de Mars, 7, 87, 114, 121, 157, 238,
483, 491, 515,
Diamètre (mesures du), 504.
Différences dans les observations, 557.
Difficultés des dessins, 412, 427, 513, 5.57.
Dimensions apparentes de Mars, 5, 499.
Dimensions réelles, 505.
Distance de Mars, 497.
Doublements ou géminalions des canaux,
353, 448.
Eaux sur Mars. 82, 95, 114, 145, 103, 179,
183, 206, 318, 325, 378, 579.
Éléments astronomiques de l'orbite de
Mars, 492.
Équation personnelle dans les observa-
tions de Mars, 242, 427.
Fleuves, 188, 462, 579.
Fonte des neiges sur Mars, 57, 66, 97, 108,
279, 307, 535.
Force centrifuge et pesanteur, 235.
Gelée blanche, 400, 520.
Géographie de Mars ou aréographie, 240,
509.
Habitants de Mars, 590, 591.
Inclinaison de l'axe et saisons, 59, 08, 97,
327, 522.
Inondations, 403.
Jour et la nuit (le) sur Mars, 507.
Lunette d'approche. Son origine, 4, 9,11.
Lunette de 4 pouces en 1804, 91.
Marées sur Mars, 341, 431.
Masse de la planète, 260.
Mers martiennes, 21, 82, 145, 157, 185, 189,
278, 298, 325.
Météorologie martienne, 297, 32i, 517.
Mouvement apparent de Mars vu de la
Terre, 498.
Montagnes, 277, 3G9, 464.
Neiges, 165, 225, 335,400, 441,464, 466, 541.
Neiges polaires, 36, 41, 49, 51, 57, 58, 65,
73 à 80, 89, 90, 92, 97, 105, 112, 121, 129,
138, 145, 151 et suivantes, 199, .307, 339,
416, 458, 464, 535 à 544.
Nomenclature préférable, 314, 366.
Nuages de Mars, 45, 64, 83, 114, 136, 15'i,
183, 277, 295, 368, 388.
Observation de Mars (meilleures condi-
tions pour ]'), 267, 513.
Occultations d'étoiles par Mars, 123; de
Jupiter, 491.
Oppositions de Mars (Table des), 495.
Orbite de Mars, 493.
Orient et occident sur le globe de Mars, 294.
Passage de la Terre devant le Soleil pour
les habitants de Mars, 349.
Pesanteur sur Mars, 506.
TA nu: AF.ni AHflTFUL'r.
''.05
Pli.ises (Je Mars. VJO, ôdil.
IMiotoinûtiic, l'.).j.
Pùlcs du froid sur Mars. :,t\, 11'.», ns, IIÎS.
305, 3(17, 331), 'iir,. ,J3D.
Relations entre l'orbite de Mars ot celle
de la Terre, 230, 2iS, 371, V.»3.
Rotation (mesures), 500.
Saisons sur la planî;lc Mars, ôîl à .')'i('(.
Satellites, 2JJ :i-2(il,3iO, 3il, 354. 37(1.
Scepticisme, 325, 3G3, SUS, i81.
Siiloil rr-ll<-<lii li.iiis les mers miii l'um-s,
U,\, 220.
Tf'tnprraturo sur Mars, 520, 522, 52(«.
Trianf.'ulution ariÎ0),'rapliinue do la Carte
de Mars, 290, .328.
Variations observées, 3.'.. 39, V.), (^0, (13, lis.
W!2, 179. 189, 194, 22G, 2'él, .322, 352. 381,
430, 547 à 578.
Vég.'tation,122, 132, 142, 215,210, 270, 370,515.
Vie sur Mars (conditionsdela», 517,522,590.
TABLE DES XOMS D'AUTEURS.
Abbadie(d'). lîG.
Adams, 344.
Adhémar. 545.
Airy, 130, 260.
Amigues, 227.
Antoniadi, 484.
Arago, 90, 131, 230.
Armelin, 581.
Arrest (d'), 258.
Bacon, 9.
Bailly, 61.
Bakhuyzen (Van de Sande), 62, 95, 38'j.
Bail (Sir Robert), 531.
Banks, 172.
Barnes, 202.
Bartoli, 48.
Béer et Màdler, 101 à 120.
Bernaerts, 238, 286,
Bessel, 122, 230, 289.
Bianchini, 46.
Boë (A. de), 588.
Bœddiker, 288, 364, 382.
Bose, 47.
Bouquet de la Grye, 463.
Brackett, 341.
Bredichin, 286.
Bressy, 484.
Brett, 277, 284.
Brodie, 129.
Browning, 202.
Bruguière, 396, 484.
Bulard, 171.
Burckhard, 260.
Burnham, 552.
Burton, 209, 316, 365.
Campani, 17.
Capocci, 241.
Cappelletti, 134.
Capron, 363.
Cassini I, 16, 19. 20, 23, 24,123.
Cassini II, 44, 47.
Comas, 484.
Common, 340, 370.
Copernic, 3, 90.
Courtois, 484.
Croll, 545.
Crosley, 208.
Cruls, 268.
Darwin (G.-A.), 234, 341.
Daubrée, 581.
Dawes, 184 à 189, 230, 561, 581.
Decroupet, 484.
Delambre, 96, 260.
De la Bue (Warren), 128.
Denning, 212, 383, 386, 484.
Donati, 5.
Downing, 369.
Dreyer, 270, 316.
De val, 484.
Duménil, 484.
Dutheil, 484.
Duval, 288, 484.
Ehrenberger, 47.
Ellery, 170, 287.
Ertborn (Van), 266.
Fabritius, 241.
Paye, 168, 463.
Fenet, 484.
Fizeau, 412, 580.
Flammarion, 142, 199, 213, 235, 238, 249,
322, 415, 462, 467, 593.
Flamsteed, 33.
Flaugergues, 84.
Folque, 241.
Fontana, 6, 11.
Fontenelle, 34.
Fraissinot, 7.
Franzenau, 191.
TAHI.i; l)i;S NOMS D'AUIKURS.
G07
Fritsch, 89.
tîalilée, 4, J. -21.
(îalle, lîi.
Gérigny, 131.
(Jiuvaiinozzi, 478.
Grant, 1J8.
Green, 172. 218, 273 à 282, 310, 3G3, 390.
481, 569, 587.
Grove, 171.
Grover, 222.
Gruithuiseii, 90.
Guillaume, 477.
Guiot, 395, 39G, 48 i, 483, 579, 593.
Guyon. 212.
Hahn. 83.
Hall (Asaph), 255, 340, 370, 4CG.
Hansen, 2G0.
Harding, 94.
Harkness, 170, 282.
Hartwig, 287, 320. 505.
Hennessy, 230.
Henrionnet, 484.
Henry (Paul et Prosper), 254.
Herschel (William), 49, 50, 55, 115, 210.
Herschel (Sir John), 120.
Hévélius, 13.
Hirst, 28G.
Hirzgarter, 13.
Hœfer, 216.
Holden, 237, 427, 551.
Hooke, 25, 27, 180, 207.
Huggins, 182, 200, 326, 518.
Humboldt, 19, 526.
Huth, 89.
Huygens, 13, 15, 32, 33.
Jacob, 128.
Jansson, 413.
Jansen (Zacharie), 4.
Johnson, 186.
Joynson, 172, 203, 212.
Kaiser, 173 à 182, 207, 230.
Keeler, 427, 466, 551.
Kepler, 3, 6, 258, 498.
Kirkwood, 343.
Klein, 288.
Knobel, 221, 376, 389.
Knott, 171.
Kœliier, 230.
Konkoly (de\ 287, 319.
Kropp (L.), 484.
Kunowsky. 93, 106,
Laiande, 48.
Lamey, 483.
Landerer, 484.
Laplace, 96, 227. '
Lassell. 168. 537.
Laurt-ntiis, 33.
lif-'clair, 48'i.
i.«-dger, 343.
Lehardelay, 208.
Léotard, 484.
Lerebours, 91.
Le Verri<.T, 260, 504.
Liais, 141, 268.
Lihou, 484.
Linsser, 170.
Lippfrshey, 4.
Lûckyer, 150 à 163, 537, 549, 556, 560, 568.
Lohse, 262, 271. 318, 396.
Loiseau, 484.
Lowdon, 212.
Lyell, 231.
Mabire, 485, .593.
Miidler, 101 à 120.
Main, 130, 170, 230.
Maraldi, 35, 39, 44, 371.
Marth, 289, 344, 349, 370, 509, 519.
Maunder, 308, 363, 518, 587.
Meisel, 588.
Messier, 47, 61, 86.
Meunier (St.), 217.
Michez, 241.
Miller, 182.
Mitchel, 127.
Mouchez, 7.
Napoléon III, 126.
Nasmyth, 170.
Niesten, 263. 314, 366, 411.
Noble, 173, 203, 277, 283, 483, 484.
Nordenskiold, 414.
Norguet, 484.
Olbers, 65, 72.
Olufsen, 260.
Oudemans, 122, 230, 289.
Pearson, 121.
Penard, 580.
Perrotin, 391. 402, 550, 556.
Phillips, 163, 189, 220.
Pickering, 341, 370, 464, 481, 520.
Pierquin, 45.
Pluiumcr, 3'il.
Porta, y.
Pratt, 284.
Prilch«:lt. 369.
608
TAHl.l- OES NOMS HAUTEURS.
Proctor, 203. ToO. 3C3, 398. hSl.
Ptolénu'o. .191.
gu(*nisset, iSl, 485, 593.
» an yard, 520.
niioita. 10, 13.
Hiccioli, 12. 1.^.
Hûsso (lord). IfiG. 270.
Uiithorfurd. 182.
Schaîbcrle, 427.
Schiaparolli. 220. 288 à 308. 320 à 3iO, 351
à 3C3, 406, 422, 436 à 462, 474, 510, 540,
550, 5G3, 568.
Schmick, 321.
Schmidt (Jules), 126, 196, 222.
Schmoll, 484, 485, 593.
Schrœter. 62 à 83, 230.
Schultz, 241.
Schur, 287.
Secchi, 134 à 141, 144 à 150, 195, 201, 549.
Seidel, 195.
Serra (Salvatore), 21, 24.
Smyth, 121.
South, 60, 123.
Spear, 212.
Stenberg, 484.
Talmage, 195
Tcrlty, 15.02. 70. 78, 171, 197, 230,250,264,
311, 381, 419, 470, 553.
Thollon, 391.
Tisserand, 345.
Traniblay, 484.
Trouvelol,223, 368, :}72, 556
Tyndall, ."^99.
Vada, 241.
Valderrama, 390, 484.
Vogel, 183, 212, 518.
Vimont, 484.
Voltaire, 258.
Ward, 351.
Wcbb, 130, 222, .351.
Weiner, 531.
Weinek, 287.
Williams, 173, 203.
Williams (Stanley), 470.
\Vilson, 211.
Winnecke, 131, 230, 395.
Wislicenus, 395, 430, 479.
Wolf (Rudolf), 195.
Young, 230, 341.
Zollner, 195,220, 518.
Zucchius, 48.
FIN DES TABLES.
26974 Paris. — Imp. Gauthier- Villars et Iil.s, hi>, quai des Grands-Augustins.
r55
t.l
PcSASci
i^lammarion, Camille
La planète Mars et
ses conditions d'habita-
bilité
PLEASE DO MOT REMOVE
CARDS OR SLIPS FROM THIS POCKET
UNIVERSITY OF TORONTO LIBRARY
fe
%/
î*
■T - ",
-^vî;