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Full text of "La prostitution contemporaine à Paris, en province et en Algérie"

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^ " O'j G C 



\ 



LA PROSTITUTION 



CONTEMPORAINE 



 PARIS. EN PROVINCE. EN ALGÉRIE 



Pour L'viler tl'acliotep une ImiLation, fore 
inexacte, ou une contrefaçon, non tenue à jou^ 
faut avoir bien soin de demander aux libraîs 



LÉDITION DES DOCTEUKS 

PARENT-DUCHATELET i Urbiin RtCl 



plus de 200 Correspo 



ndan^ 



IL 



Voir, à la page 3-2q, l AVIS IMPORTANT rei 
à ceux de nos lecteurs qui désirent collaborer à n 
enquête générale. 



Pour l'Éffiion de 1902, " 

Les réponses i noire QUESTIOHNtlRE DE COLLABORI 
du IK féva-i«a- »u IS ntaa's (dernier déli 



' Enqui^te £4^néi'alo ot poi-ninnente 



.A PBOSTimiON 

CONTEMPORAINE 

PARIS, en PROVINCE 

ET EN ALGÉRIE 



Docteur ^IIREIMT-DUCHATELET 

MtHBnE DE L'ACADEMIE DE MEDECINE 
MÉDECIN EN CHEF DE 1^ PRISON SAINT-LAZARE 



Docteur URBAIN RICARD 

Ex-Chiru>gian des Hôpllaux. Membre de plusieurs Soeict^a savnDtos 

LE SEUL OUVRAGE DE CE GENRE 

TENU I JOUR A CHAQUE REIMPRESSION 



EDITION DE 1901 



PARIS 
UBRAIRIE DU XX= SIECLE 

A. CHtRLES, 8, RUE KOIISIEUR-LE'PRIIICE. S 



^ 



HC'^^v 






3 



/ / 



LA PROSTITUTION CONTEMPORAINE 

à Paris, en Province et en Algérie 



PRE]^\CE DE LA NOUVELLE ÉDITION 



Parmi les diverses ctudea qui ont été faites sur la prosti- 
tution, aucune, de l'avis général, n'approche, comme va- 
leur et intérêt, de celle de notre illustre maître, Parent- 
Diicbâ-telet ; car le bon et savant docteur a ot^, mieux 
que personne de aon temps, à même d'étudier de près cette 
hideuse lèpre morale, grâce à sa situation exceptionnelle 
et à soa jiidieieux esprit d'observation. Son étude du 
1 monde des prostituées est remarquable aussi par son im- 
partialité, dominant tout, et par la grande bienveillance 
qui se dégage de ces merveillenses pages, écrites avec au- 
tant de science que de cœur. Pour ces causes, chaque réim- 
pression de l'iramortol chef d'œuvre de notre maître vénéré 
a reçu du public le meilleur accueil. 

Aujourd'hui, il nous est permie d'extraire de cet ouvrage 
capital tout ce qui s'y trouve en fait d'observations ayant 
ane éternelle actualité, et notre propre expérience de mé- 
I, deein nous autorise à le mettre à jour ; car noua avons 
pTi égalemi'nt étudier la prostitution, non seulement à 
comme notre cher maître, mais «icore en province 
et dans notre principale colonie- Cependant, ajoutons hien 
TÎte que, malgré quarante-trois années d'cs 
a été matériellement impossible de tout voir de nos propre: 
yeuXj et c'est pourquoi nous avons 



lA PROSTITUTION COXTKMPOR.IIKË 

obBcrvatioiiB d'un grand nombre de non confrèreB ; au anr 
plus, nous avons consulté les autours les mieux qualifiés s 
lee plus comp^tenta qui ost traité 1» même question, e 
principalement les deus guides infaillibles qui se placent 
au premier rang : 

C.-J. Lecour, l'ancien chef do la 1" division à la Prf* 
feeture de Police, dont Je souvenir est toujours vi 
comme celui d'un adminiBtrat«ur modèle, d'un magiatraÉ 
éclairé et perspicace, allant droit son cbfmiii, dédaigneux 
des injustes att^ujucs qui l'ont assailli, non pour le diacre' 
diter personnellement, — car sa vertu et sa loyauté étaient 
au-dessus de toute atteinte, — mais pour battre en brëcha 
les sages 'et salutairee institutions donb il avait pris ta 
défense avec tuit de courage ; 

Et le docteur O. Commenge, naguère médecin en chef 
du Diapenaaire de Salubrité de Paria, qui complétait Pa- 
rent-Duchâtelet par son étude spéciale, si minutieuse, ■ 
documentée, sur la prostitution clandestine, eb appuyant 
ainsi de nouveaux chifErea irréfutables l'argumentation de 
Lecour, a réduit à néant toutes les fantaisies déclamatoires 
des adversaires de la Police des Mœurs, et qui, Ini ausaï, 
a édifié une œuvre de granit, véritablement indestTnctibl& 

Pabent-Dcchatelet, Lecotje, Commkhgb, trilogie de. 
bonté, de justice, et de tcience, trois termes qui, réunis 
dans l'espèce, constituent la vérité. 

En ce qui nous concerne personnellement, — et tout e 
suivant la trace de ces maîtres et en recourant h leurs 11 
mières, — nous avons cru qu'il était utile, à l'aurore du 
nouveau siècle, de montrer l'état actuel de la question dans 
toute la France, l'Algérie j comprise. A l'instar de Parent- 
Duchâtelet, do Lecour et do Commenge, noua avons toa- 
jours puisé aux sources oScielles, qui seules présentent lett 
garanties nécessaires d'authenticité. 

Ainsi, ce nouvel ouvrage, tout en étant condensé, sera 



LA PH.OSTITHTION' CO-NTEMPORAISE 3 

S complet de tous ceus qui ont paru jusqu'à ce jour ; 

1 surplus, l'avantage de pouvoir être consulté 

idant de longues années, puisqu'il présente aux médita- 

B des sociologues rexamcn de la prostitution contem- 

e dans notre pays. . 



'C'est, en effet, une grave question sociale qui n'a cessé 
de se dresser devant bous. Parent-Duchâtelet, qui avait 
d'abord attiré l'attention publique sur les réformes à. opé- 
rer pour r assainissement matériel de la ville de Paria, 
écrivait très sagement ces lignes dans son introduction : 

(i Si j'ai pu, sans scandaliser qui que ce soit, pénétrer 
dans les cloaques, manier les matières putrides, passer une 
partie de mon temps dans lea voiries, et vivre, en quelque 
Bort.e, au milieu de tout ce que les réunions d'hommes ren- 
ferment do plus abject et de plus dégoûtant, pourquoi 
rougirais-je d'aborder un cloaque d'une autre espèce 
(cloaque plus inimonde, je l'avoue, que tous les autres), 
dans l'espoir fondé d'opérer quelque bien, en l'examinant 
sur toutes lea faces qu'il peut offrir 1 En me livrant à des 
recherches sur les prostituées, serais-je donc nécessair»- 
ment flétri par le contact da ces malheureuses 1 Et si de 
vénérables dames qui, par leur naissance et leur position 
sociale, appartiennent à tout ce que nous avons de plus 
élevé, ne croient pas déroger en venant de temps en temps 
au milieu des prostituées pour lea instruire et lea éclairer, 
pendant qu'elles sont dans les prisons ou dans les infirme- 
ries, que dois-je craindre, moi, en imitant leur conduite, 
et en tâchant d'arriver au même but, bien que je sui^-e Hne 
route un peu différente de la leur 1 

« Une des lois constantes de la nature, c'est que les ftrea 
vivants ressemblent à ceux qiii les produisent, et que les 



â 



■1 Ul PEOSTtTDTION COXTEMI'OHAISB 

générationB ae transmettent les vices aussi hirn que les 
boojips qualités du corps et de l'Rsprit ; de là le précepte, 
donni^ aux chefs des Etats par les législateurs de tous les 
temps, de surveiller les générations présentes eji vue dea 
génération^ futures, d'éloigner d'elles lea maladies et 
infirmités en fortifiant leur constitution, et de faire c 
coutir au perfectionnement moral et physique des popula- 
tions tous les moyens capables de conduire à ce but. 

(' Maintenant, je demande à tout être tant soit peu intel- 
ligent si, dans l'intérêt des générations présentes et futures, 
il est utile ou non d'étudier et d'observer les prostituées, et 
si l'homme qui se dévoue à ces recherches, qui en affronte 
les dégoûts, qui y sacriAe son temps, sa fortune et 
peines, mérite bien ce mépris que lea préjugés enfantés par | 
l'ignorance ont entretenu jusqu'à présent î... Quant à n 
qui croia voir les cboses aotis leur véritable aspect, et qui 
sais que la considération attachée aux travaux n'est pas 
toujours proportionnée aux services qu'ils rendent ni aux 
difficultés qu'ils peuvent offrir, je m'en remets au jugement 
des hommes senség qui voient et apprécient les inlentiotu ; 
et, tout en reipecfant les préjui/és (les autre». Je déploi 
leur areugle ment. » 



Il convient d'ajouter que la publication d'une étude 
comme celle de Parent-Duchâtelet est devenue plus néces- 
saire que jamais, à notre époque de suffrage universel, en 
raison des violentes campagnes qui se sont produites depuis 
quelques années pour inciter les Parlementa à abolir la 
réglementation de la prostitution. D'excellents esprits se 
sont laissés égarer et ^'imaginent, avec une bonne foi par- 
faite, que la prostitution, pour s'affaiblir, doit cesser d'être 
j l'empire d'une police spéciale; il en est même qui 



I 



LA rEOSTITTJTION CO?ITEMPOE.UNE 5 

ont proclamé, comme un droit humain, la liberté de la pro- 
stitution, la réclamant pour notre paye telle qu'elle existe 
en Angleterre, telle qu'elle a été expérimentée récemment 
en Italie, bous le ministère de. M. Crispl. 

On a prononcé de grands mots ; on a débité beaucoup de 
tirades, plus ou moins ronflantes, mais toujours majes- 
tueuses. Or, la masse du public ayant malheureusement 
trop de tendance à subir l'influence des déclamations so- 
nores, il est indispensable de l'éclairer et d'opposer les 
faits à la phraséologie des abolitionnistes. 

Loyalement, en tête de cette édition, nous donnerons les 
arguments de nos adversaires ; la pleine lumière suffira 
pour faire justice des sophismea que voici : 



:( I. L'Etiit représente la justice et le bien; pnr conséquent, 

ne doit jamais favoriser le mal. Cependant, c'est ce qn'il 

foit BXL autarisnnt et en prenant sous sa surveillance les 

i de tolérance. Far l'inscription officielle dos femmes 

H'publiques, il fait de leur métier infâme use profession régu- 

1 liëre et légitime; il se met ainsi en contradiction avec lui- 

ïmême, puisque, d'autre paît, il punit l'ejcitiition â la dé- 

f bauche. 

ic II. En autorisant et en sur 

n de faire la part du feu, allni 

u do la ville et crée lui-même 

B la BOTt«, il organisa le mal, le rend d'un, facile accès pour 

p jeunesse, et ainsi il contribua à la démoralisation de celle-ci, 

|nand elle devrait être et qu'elle eat, bous d'autres rapports, 

■objet de sa Bollicitude. 

L « m. La prostitution surveillée n'empêche nullement, 

jp'autre part, le développement de la prostitution clandestine 

a outre, an point de rue hygiénique, les maisons de tolérance 

l 'diminue nt-e Ile la propagation des maladies vénérienne!' Cela 

t discutnbfc. Mais, ni^anmoins, quand bien même la visite 

(anitaire des prostituées restreindrait le nombre des eonta- 



eillant les lupanars, l'Ëtat, 
e ou contraire l'incendie au 
n foyer actif de corruption; 



L PEOSTITCTION CONTEMFOBAINR 



r 

^^^^ gions, ou ne saurait aastmiler les conséquences lie la débanche, 
^^^B puisque celle-ci est volontiiire, aux épidémies, par oiemple, 
^^^B qni sont une pure fatalité. Du reste, il eat iiomoral au premier 
^^H chef d'enlever au vice aes conséquences naturelles et de lui 
^^^1 otcr ainsi sa sanction. 

^^V II IV. Tont homme possédant en lui le sentiment de la jus- 

^^" tice doit eonaidérer que les malheureuses qui peuplent les 
maisons de tolérance se trouvent, par ce fait seul, soustraites 
au droit commun et soumises à l'arbitraire. Les partisans de 
la liberté humaine s'élèveut contre la prison préventive; or, 
l'habitation au lupanar est une séquestration à Tétut latent. 
i< Y. II y a lieu de considérer aussi que les prostituées de 
ces maisons sont l'objet d'un honteux trafic, que la prostitu- 
tion réglementée entraîne l'embauchage des mineures, et que 
la police, en demandant l'assentiment des parents, prête 
complicité à un crimo (car les parente n'ont pas le droit de et 
sentir à l'infamie de leurs enfants); que la condition des filles 
soumises est une véritable servitude, plus avilissante e 
que l'esclavagu Joa nègrea. 

Cl VI. Enfin, en réglementant la prostitution, on la reconnaît 
comme vice légal; d'oii il résulte qu'on dégrade indignement 
la femme, et ce mépris de la femme eat dangereux pour l'ordre 
moral et social tout entier. » • 

Nous avons reproduit ces arguments abolitionnietea, 
dans leur style même ; et ceux-ci constituent la grosse artil- 
lerie contre le système de la réglementation, 
négligé les exagérations qui ne prêtent qu'&ii 
que cette grave facétie imiigjnée dans un congrès intemar- 
tional et formulée comme un axiomo : La Tisite sanitaire 
d'une prostituée eat un viol périodique, dont le coupable 
est le médecin du Bureau des Mœurs, avec la, complicité 
de 1» polie 

Les faits, nous le répétona, répondent victorieusement à 
toute cette fantasmagorie de rhétorique ; ils en démontrent 
l'inanité ; ils prouvent, d'une façon péremptoire, que tout 



LA PEOSTITUTIOX C0NTKUF0R4IKE 7 

t dea abolibioaniâtea cougiste à déplacer la queHion, et 

, riea de co qu'ils reprochent à la proetitutioii 

flemcntée qui ne aoit le fait, non de l'administration, 

a de la prostitution eUe-même, avec cette circonstiuiCQ 

IggFayante quo toutes les abominations dont il s'agit se 

iultiplient et se gén<5raliaent dans la prostitution claades- 

I (et à plus forte raison dans la prostitution libre, 

e en Angleterre), tandis qu'elles sont exceptionnelles 

Barmi les personnes soumises à la surveillance de la police 



[ Mais nouG avons liâte d'aborder, avec Parent-Duchâtelet, 
ette étude socialrï si intéressante, dont l'utilité n'est plus 
mteatée aujourd'hui. Le lecteur aura bien vite constaté 
:, même en se plaçant au point de vue sentimental, la 
nirité n'cEt pas du côté des partisans d& la liberté de la 
j^rostitution. 

« L'utilité, écrit notre maître, je dirais presque la néces- 
a travail m'étant démontrée, je devais l'aborder 
iraacliement, et c'est ce que j'ai fait. Traitant un sujet 
sérieux, et m'adressant à des gens graves, j'ai dû appeler 
les choses par leur nom et marcher droit à mon but. 
Homme libre et d'une entière indépendance, jo distribuerai 
Ikvbo impartialité la louange et le blâme ; honuie religieux, 
B n'aurai pas à rougir de ce que ma plume aura tracé ; 
i exempt de préjugés, je saurai dire tout ce que 
" peuvent réclamer de moi la science, le bien de la société et 
celui de la classe infortunée qui m'a fourni tant de sujets 
d'études et de méditations. " 
^^1' A son tour, le disciple Eer% iîdMe à ces principes de 
^Bbancbise et d'honnêteté. Lui aussi, il surmontera son do- 
^^K{ofit, quand il lui faudra descendre dans le cloaque, 
^^^Klonger dans les abîmes de la dépravation, et mettre eo 






LA rROSÏITUTIOS COSTEMrOEAINE 

parallÈle la prostitution réglementée et la proBtitutioa 
olandeatine ; ce qui est indispensable pour établir à quel 
point on se moque du peuple quand on lui représente les 
filles insoumises comme relativement moins dangereuses I 
que les autres. 

Nous ne perdrons jamais de vue que ce livre, préparé , 
lentement au profit de la science, doit servir à la morale , 
et qu'il a pour principal objet le bien public. C'est donc ' 
flux plus nobles sentiments que nous faisons appel, en , 
nous adressant exclusivement aux hommes d'un âge mûr, 
et le vice, tel qu'il est montré par Parent-Duchâtelet et 
par nous, n'apparatb point sous des couleurs aimables. 

Ainsi que notre illustre maître, nous avons la conviction 
de faire œuvre bonne et saioe. 

D' Urbain EICARD. 



Indépendamment de nos renseignements personnels et de 
ceux que quelques uns de nos confrères ont bien voulu nous 
communiquer, c'est-à-dire en dol-ora même d'un important e 
semble d'observations inédites, nous avons consulté les o 
vrages suivants, afin que t-out tût contrôlé, afin de pouvoir 
oSrir à nos lecteurs une œuvre aussi exacte que compliite, bien 
que sous une forme succincte: 

1. }iotes cumpUmentairex, ajoutées il la première êditio 
de Parent-Duehàtelet, par M. Trébuchet, ehof du. Bureau 
Sanitaire, secrétaire du Conseil de Sululicité de la ville 
Paris, et par M. Poirat-Bural, chef de bureau à la Préfecture 
de Police. 

2. La FTnstiiiition- Olaiulestiite , p»r le docteur Martineau. 

3. i!iiphiUs et Frottitution eAe: les Ins'iumUes minewei, pat 
le docteur 0. Commenge, médecin en chef du Dispensaire de 

lilubrité de In Préfecture de Police. 



LA 



■ CONTEMPOBAIXE 



M. La Pruetit'ation ClandEHine à Paris, par Je même. 
\£. Za Prostitutifin à Paris et à Londres, par C.-J. Lecour, 
if de la 1" diviBion à la Préfecture de Police. 
f 6. La Campagne eotUre la Préfectwe de Poïiee, envisagée 
wriout itu point de rue du Service des Mirurs, par le même. 
l 7. Support au nom de la Cnmmigsion municipale sanitaire 
r la TCiiroanisatioh du Service de Santé relatif à la Prosfi- 
■ Emile Iliaîiaid, conBeiller ronnEcipa! de Paris; 
(apport dtl'poBé en m&rs 1890, et discuté dans les Béauvei du 
seil, des 9, 11,16 et 16 juillet 1890. 
i. Parie, ses organeg, ses fonctions et sa i)ie (3* volame), par 
[fkzime du Camp, de l'Académie Française. 
t S. Bel Clasies dangereuses de la population ilans les grandes 
ir A. Frégier, chef de tareau à la Préfecture de la 
ivmge couronné par l'Institut de France, Académie 
!B tîcieiicea morales et politique;. 

10. La Prontitution, par le docteur A. -A. Tnrdieu, profes- 
r de médecine légale, doyen de la Faculté de Paris, membre 
l'Académie de Médecine, commandeur de la Légion d'hon- 

■; étude publiée dana le Dietioniuiire d'Hygiène publique. 

11. Etude midieo-lâgale sur Us Attentats aux mœurs; des 
mditions dans lesguelles s'exercent la Pédérastie et la Sodu- 

t, par le même. 
■ 12, La Prostitution à Paris, par le docteur Corlieu, 
I 13. La Corruption à Paris, par Ali Coffignon. 
I 14. Les Vierges Folles, par Alphonse Esquiros. 
I 15. Les deux Prostitutions, par P. Carlîer. 
I 16. La Prostitution, par Tvea Guyot. 
1 17. Le» Maisons de Tolérance, par le docteur Louis Fiaui, 

18. La Corruption tin^de-sitcle , par Léo Taiil. 

19. Gibier de Saint'Laeare, par Macé, ancien chef de la 
Sûreté. 

20. SfureTiirs d'un Préfet de Police, par Louis Andrieui. 

21. Mémoires d'un ancien Chrf de la Sûreté, par Canler. 

[ 32. L'AmoTir à Paris, par Qoron, ancien chef de la Sûreté. 
t S3. La Prostitution dans Paris, par A. Grauveau. 



LA PROSTITUTION CONTEMPORAINE 

:. Les condamnées de Saini-Lasare, par Pauline de Qrand- 



25. SyphUia et Prostituée!, par le doctear Mairean. 

26. Quelque» considérations svr la Prostitution à Paris, put 
le docteur A. Lntaud, médecin de Soint-LaKare. 

27. Les Prisons de Paris, par A. Goillot, jage d'inatraction; 
couronné par l'Académie Française. 

39. Prostitfition et Syphilis, par le docteur Butte, médecin 
du Dispensaire de Salubrité de la Préfecture de Police. 

29. Des Aberrations di» sens génésÏQiie, par le docteur Mo- 
rean de Tours. 

30. Les Abberations sexuelles, par le docteur Magnaji. 

31. La PTOstitwtion des Filles mineures, par le docteur 
Augagnear. 

32. lo ijyphilis et la Prostitution dans leurs rapports avec 
la morale, l'hygiène et la loi, par le docteur Mireur. 

83. La Prostitution ait XIX' Siècle, par le docteur Jeaimel. 

34. La Prostitution en France, par la docteur Armand Des- 
prèa, membre de la Chambre des Déput«a. 

35. Les Vénériens des Champs et la Prostitution à la Cam- 
pagne, par le docteur Lardier. 



1 



i 



ILLUSTRATION DE CE LIVRE 



r Etant donné que ce livre, œuvre de vérité et de lumière, 
s'adresse aux personnes honnêtes et de jugement eaiu qui 
veulait BB rendre compte de ce qu'est la prostitution de nos 
jours, sans pourtant se commettre avec ce inonde interlope, 
noua avons cru utile de l'illustrer de quelques gravures 
d'une représentation exacte et d'une exécution artistique. 
yéatitnoinf, ttnant à ne donner aucune prise à la critique, 
et la p/vdenee en ces matièret n'étant jamaU excessive, 
nout n'avons choisi que des denins juridiquement au- 
torisés. 

Ces tableaux ont, en effet, une histoire. 

Ils faisaient partie de l'illustration d'un ouvrage 
{d'étnde scientifique, comme la nôtre), qui fut publié en 
1BS4 BOUS deux formée très distinctes : 1" en livraisons po- 
pulaires ; 2° en volume. Le Parquet poursuivit toute la série 
des dessins parus dans les livraisons à 15 centimes, et n'in- 
crimina pas la publication de ces mêmes dessins dans le 
volume, lequel continua à se vendre librement, sans être 
jamais l'objet d'une saisie. En première instance et en 
appel, le ministère publie soutint que la livraison ne devait 
pas bénéficier des immunités accordées au livre, par l'ar- 
ticle \" de la loi du 2 août 1882 ; l'éditeur de l'ouvrage en 
question, et l'auteur du teste, qui avait pris la responsa- 
bilité des gravures, plaidèrent que ces dessins, reconnus 
innocents dans le volume, ne pouvaient pas être déclarés 
coupables dans les livraisons, qui, disaient-ils, ne sont pas 



i PEOSTITrTIOK COXTEUPORAINE 



3 qui sont II 



, di-bité 



12 

le Journal visé par la loi, 
par fractions. 

La cour de Pane trancha la question, par son arrêt 
du 9 marsil885, qui donna raiBon au Parquet, tout on re« 
connaÎBBant quL 1 ouvrage pir lui-môme était irrépro- 
chable, mais qu il aurait du £tro limité à l'édition bous 
forme de volume , statuant ensuite sur toute la série des < 
dessins mis en cau&e la cour n'en retint que trois comme .' 
vepréhensiblea piui lumqut fait d'avoir élè publiée dans 
des livraiions populaiiei, (c était les trois gravures: le 
Sadisme, les Tribades, les Pédérastes), et la Cour déclara 
non condamnables, même en livraisons, les autres dessina. 
Le volume poursuivit donc, plus librement que jamais, sa 
vente, avec la totalité des graviires, Bien plus, la pureté 
des intentions de l'éditeur et da l'auteur ayant été recon- 
nue, il leur fut fait remise gracieuse de l'amende, à laquelle 
ils avaient été condamaés pour les trois dessins qui n'arii- 
raient pas dû paraître dans les livraisons à 15 centimes. 

Ainsi, les gravures que nous publions dans ce livre oi 
subi L'EPREUVE JUDICIAIRE et ont été jugées ne 
déliotueuBes, c'est-à-dire iiiMucRutcM, par un arrêt do 
la Cour de Paris, statuant en dernier ressort. L'ouvrage 
dont U s'agit étant épuisé, nous avons acquis le droit da 
les reproduire, 

L'Editeur. 



i 



PREMIERE PARTIE 



La PROSTITUTION à PARIS 



l^ar 



CHAPITRE PREMIER 

QUESTIONS GÉNÉRALES 

^■Hiiifion : pi-oslituéc, px-nstitlltion. 

Cea deux mots n'ayant pas, iIcuih l'eaprit et le 
langage de tout le monde, la même signification, 
noua commencerons ce travail eu écartantjoute éciui- 
voque par une définition nette et précise. Pour la 
généi'alité du public, la prostitution est l'état d'une 
personne qui fait marchandise de son corps, l'acte 
de luxure ne se produirait-il qu'une fois. Il n'en est 
pas de même en stylo administratif, et, pour donner 
le nom de prostituée à une femme qui s'abandonne 
au d"éaordre, à une fille qui ae livre au premier venu, 
il faut aux yeux de l'autorité une réunion de circon- 
stances dont l'indication assez complète se trouve 
dana le Moaaage adreasé par le Directoire exécutif 
au Conseil des Cinq-Cents, le 17 nivôse an IV: ce 
fut le gouvernement de la première Eépulilique qui 
proclama la nécessité de réglementer la prostitution, 
tt Voici, dit ce documenr., ce qui constitue la pro- 
stituée ou fille publique : récidive et concours de 
plusieurs faits particuliers, légalement constatés, no- 
toriété publique, arrestation en flagrant délit attesté 
lar dea témoins autres que le dénonciateur ou l'agent 



r*^ 



14 



LA PKOSTITUTION . 



1 



de police, s Parmi cea circonatances particulières, il 
faut noter eu premier lieu le racolage public réitéré. 
Bu conséquence, étant admis que toute iemme 
débauchée n'est pas encore une prostituée, c'est avec 
raison que l'administration distingue entre la dé- 
tauclie publique et la prostitution publique : car ce 
mot de prostitution n'implique pas une série d'impu- 
dicitéa, uniquement. Eh Térité, une fille que l'on 
débauche ou qui se débauclie peut demeurer simple 
femme galante, cela se voit souvent. Mais il est vrai 
aussi que la débauche publique alimente la prosti- 
tution publique ; elle est le passage d'une vie honnête 
à l'état d'abjection d'une classe qui se sépare delà 
société, qui y renonce, qui, par des habitudes scauda- 
leuses, hardiment et coustamment publiques, déclare 
abjurer cette société et les lois communes qui la 
régissent. Tant qu'une femme se renferme dans les 
habitudes ordinaires do la vie, l'administration ne 
peut la considérer que comme un être qui fait partie 
de la société ; elle lui doit protection, et n'exerce à 
^on égard aucune surveillance spéciale ; mais cette 
position de l'une et l'action de l'autre changent an 
moment même oit la femme passe dans cet état de 
brutalité scandaleuse dont l'autorité a le devoir de 
réprimer les e^cès. A ce moment donc, la débauchée 
vénale est qualifiée de prostituée dans le langage 
administratif, et comme telle elle doit être mise en 
surveillance. 

Ces distinctions paraîtront peut-être un pea 
subtiles à quelques personnes ; mais elles deviendront 
plus claires lorsque l'on connaîtra bien le.s différentes 
classes de prostituées st les circonstances particu- 
lières qui précèdent et nécessitent leur inscription 
iHUr les registres du Bureau des Mœurs. 



LA FEOSTITCTION A PARIS 



B. Nombre des prostituées excrçnut leur métier 
à Paris. — 



[ On n'a point de reuseignenients sur ce nombre 
les temps anciens, et ce n'est que depuia 
ptelqneB années qu'on possède des données à peu près 
aictea sur ce point important. 
i A vrai dire, on est fixé de la façon la plus certaine 
' la quBJitité dea filles soumises, c'est-à-dire des 
roatituéos placées sous le contrôle de la police ; 
s ce nombre, déjà très variable d'année en année, 
k insignifiant dans l'eflectif total de la prostitution. 
^après les statistiques officielles de la Préfecture de 
^lice en ces dernières années, nous relevons, d'abord, 
r l'état général dea inscriptions de filles soumises. 
s mayenne annuelle de 4,200. Mais de ce nombre 
l'faut déduire, d'une façon courante, un millier envi- 
mn, qui se répartissent ainsi : 1° celles qui sont â 
(aint-Lazare, soit par punition administrative, soit 
I lia section des détenues de droit commun, en pré- 
intion ou condamnées par les tribunaux (ce sont 
nombreuses, une vingtaine par an), soit à 
irmerio comme malades vénériennes, soit encore 
i hospitalité ; 2° celles qtii sont dans divers hôpi- 
bux, comme malades non vénériennes ; 3" celles qui 
Bit disparu (ce sont les plus nombreuses, en moyenne 
9 600 à 700 par an). Ce millier étant déduit, il nous 
psate donc un nombre de 3,300 : voilà le chiffre 
Boyen de la circulation réelle des filles inscrites. 

Quant à celles qui échappent à la surveillance 
administrative, elles sont des légions. Le service de 
la police des mœurs est des plus insuffisants vis-à-vis 
de la prostituliou clandestine. En outre, pour qu'une 



IG 



LA PROSTITUTION / 



prostituée non inscrite aoit arrêtée, il faut, ou qu'elle 
ait été BUiprise lors d'une descente de police dans une 
maison secrète de débauclie, ou bien qn'elle ait été 
l'objet de quatre constatations de raccrochage dans 
la rue, et le témoignage d'un seul agent ne suffit pas. 
Eh bien, malgré l'insuffisance numérique des agents 
des mœurs, malgré l'exigence des règlements pres- 
crivant cette multiplicité des constations, la mo- 
yenne annuelle des arrestations de cette sorte est de 
^,300. Or. comme il y a à Paris en tant lôÙ inspec- 
teurs et agents affectés à cette suiTeîllance (parmi 
lesquels un certain nombre de gardiens de la pais 
en mission spéciale), il est très modeste de dire qu'on 
ne réussit pas à prendre une prostituée clandestine 
sur cinquante ; et si l'on en prenait une eiir cin- 
quante, ce chiffre de 2,300 arrestations eu moyenne 
représenterait 115,000 filles publiques insoumisea. 
Avec M. Maxime du Canip, nous estimons au minî- 
mum à cent iiingt mille prostituées l'effectif tolal de 
la prostitution parisienne. 

« Qu'on ne se récrie point ! dit l'éminent académi- 
cien ; il n'y a qu'à regarder impartialement antour 
de soi pour être convaincu. » 

3. Quel» Hont Icx pnj')4 qui fournissent Iv» |iros- 
tituv-e**, et cinns qttt-llc |ii-o|i»i'tioii (.■hiifiiii d'ei 



Pour répondre à cette question, il est indispensable 
de se reporter aux statistiques ofKciellea, (Tph* 



immense travail 
sujet. (*) Je m 



qu'il 



C'est 

•n'a fallu enti'eprendre à 
donc fait communiquer 



(*) Pour tons les passages de l'œuvre de Parenfr-Dueh&telet, 
1 iea observations personne llp.5 sont demeurées vnlablea ac- 



LA PEOSTITTITION A PAKIS 1| 

sSosaiera de 12,707 prostituées inscrites à Paris, pea- 
lant une période de quinze années consécutives ; j'ai 
Jiossédé ainsi les éléments d'un recensement général, 
Mentionnons seulement ici le résultat sommaire du 
dépouillement de tous ces cîossiers. 

J'élimine d'abord 24 de ces femmes, ({lù n'ont 

Hamais pu indiquer les pays qui les avaient vues 

laître. Jetées dans le monde dès leur plus tendre 

ifance, elles avaient oublié le nom même des per- 

i qui leur donnèrent les premiers soins, et ces 

Malheureuses trouvaient dans la prostitution, qui 

leur paraissait un état tout naturel, un moyen de 

wurvoir à leur triste existence. 

31 étaient étrangèreB à l'Europe, dont 18 Améri- 

y^aines, 11 Africaines, 2 Asiatiques. — - Les Améri- 

iaines venaient du Canada, des Etats-Unis, de Saint- 

^mingue, de la Guadeloupe, de la Martinique et de 

Guyane française. — Les Africaines apparte- 

Bhaient à l'Egypte, au cap de Bonne-Espérance, aux 

1 Mascareignes (la Réunion et île Maurice), et à 

Uadagascar. — Les Asiatiques étaient originaires des 

anglaises, l'une née à Calcutta, et l'autre à 

Uadras. 

Voici, maintenant, la répartition des Eiiropéennes 

trangèrea à la France: — 23 Anglaises (dont 17 de 

«ondres), 4 Irlandaises, 1 Ecossaise, soit 28 venant 



tuellement, noua conserrons l'empbi, qui est habituel à notre 
fcéneré maître, tle la première personne au singulier. Par 
roontre, lorsque la, mise à jour àe son œuvro nous oblige à une 
modifieation, pour une statistique Douvelli;, ou pour un fait 
plus contemporain qui chunge tel passage lie l'œuvre, ou 
encore pour toute addition d'observations autres que celles de 
Parent-Duchàtelet, nous employons la première personne au 
pluriel. 



du Royaume-Uni ; — 15 AutricJiiemies (dont 8 de 

Vienne), et 3 IHyriennea, aoit 18 originaires de 

l'Empire d'Autriche; — ICI Belges, et 23 HoUan- 
J^iaes (dont 12 d'Amsterdam), aoit 184 du pays 

flamand ; — l'Italie a fourni 11 Piéniontaîses, 9 Mi- 
Planaises, 7 Romainea, 4 Florentines, 3 Napolitaines, 
I 3 Sardes, 1 Sicilienne, et 1 fille de l'île d'Elbe, aoit 
f Italiennea ; — 14 Espagnoles (Madrid et Cadix se 
■'partageant également cette fourniture), et 1 Portu- 
f gaiae, aoit 15 fiUea venant de la péninaule Ibérique ; 
■ la Busaie a fourni 8 prostituées, dont G Polonaises 
I et 3 Euases ; — 2 ont été f ourniee par la Turquie ; — 
1 1, par la Suède ; - — 1, par l'île de Malte. 

J'ai gardé pour la fin les Allemandes et lea Suis- 
leaaea, afin de faire mieux ressortir une particularité 

curieuse. En général, ce sont toujours les capitales et 
I les grandes villes qui fournissent la njajeure partie 
I des filles envoyées par chaque pays ; mais la Prusse 

-fait exception à la règle: sur 58 prostituées venues 
I de ce royaume, Berlin n'en a fourni que 7 ; la ma- 
I jeure partie du contingent de ce paya eat venue de la 

Fruase rhénane. Quant au reate de l'Allemagne, il 
i noua en est veuu : 6 Bavaroises, 2 Hanovriennea, 
[ Z Badoiaes, 3 Westphaliennea, et 4 filles des villes 

hsnséatiques ; au total, TS Allemandes. Eu ce qui 
, concerne la Suisae, elle offre ceci de remarquable : 
I tous lea cantoua, sauf trois, ont envoyé un pareil 
' nombre de filles à Paris ; il n'y a que celui de 
i Genève qui, dans cette fourniture, l'emporte sur les 
I autres, attendu que j'ai trouvé 15 Genevoises sur le 

nombre total de 69 Suissesses. 

En résumé, 429 Européennes étrangères à la 
fcFrance ; et j'ajoute que ces étrangères arrivent tous 
B ans à Paria dans des proportions à peu prèa sem- 



LA PEOHTITUTM)?) 1 



19 



Bables, ce qui est on fait bien coustaté par les sta- 
tiques, et, en Térité, très curieux. 
' Arrivons aux prostituées originaires de France, 
l'en ai trouvé 13,227 dans cea dossiers qui constituent 
1 recensement de quinze années consécutives. 
Le département do la Seine arrive en tête, natu- 
^llement : il a fourni à Paris 4,744 prostituées, dont 
ies à Pai'is même. 
Les départements les plua rapprocliés de la capî- 
Rle ont aussi do gros chiffres, toutes proportions 
: — Seine -et- Oise, 874, dont 339 venant de 
jTersailIes ; — Seine- Inférieure, 546, dont 313 de 
■ouen ; — Seine-et-Marne, 453, dont 36 de Melun : 

- Oise, 337, dont 57 de Beauvaîs ; — Aisne, 327, 
bnt 27 de Laon ; — Nord, 308, dont 80 de Lille ; — 

, 302, dont 101 d'Amiens ; — Tonne, 272, 

î d'Auserra ; — Marne, 262, dont 4S de Châ- 

- Loiret, 256, dont 152 d'Orléans ; — Aube, 

107, dont 92 de Troyes ; — Côte-d'Or, 206, dont 57 de 

Dijon ; — Calvados, 194, dout 71 de Caen ; — Eure- 

t-I-oir, 180, dont 79 de Chartres ; — Eure, 179, dont 

t d'EvretLs ; — Pas-de-Calais, 163, dont 34 d'Arraa. 

; Citons ensuite, non plus en tenant compte des 

Eegréa d'éloignement de Paris, mai^ seulement dans 

perdre de décroissance ntimérique : — Meurtbe-et- 

Eoaelle, 154, dont 84 de Nancy ; — Haute- Marne, 

Biâ8, dont 17 de Chaumont ; — Meuse, 131, dont 10 de 

ir-le-Duc ; — Oine, 117, dont 33 d'Alençon ; — 

khône. 104, dont 97 de Lyon ;— Haute-Saône, 99, 

lont 13 de Vesoul ; — 'Manche, 98 ; — Ardennes, 83 ; 

- Sarthe, 79, dont 44 du Mans; — Ille-et-Yilaine, 77, 
[ont 47 de Renues ; — Doubs, 65, dont 41 de Besan- 

— Loire -Intérieure, 63, dont 53 de Nantes ; — 
pay-de-Dôme, G2, dont 36 de Clermont-Ferraud ; — 



à 




I 

I 



t.* FROSTITrTIO>r A FAEIS 

Indre-et-Loire, 59, dont 48 de Toura ; — Loir-ot- 
Cher, 54, dont 21 de Blois ; —Mayenne, 46, dont 12 
de Laval ; — Vosges, 43 ; — Pinistère, 42 ; — Saône- 
et Loire, 40 ; — Gironde, 39, dont 37 de Bordeaiix ; 

— Nièvre, 39, dont 18 de Nevera ; — Morbilian, 38 ; 

— Maine-et-Loire, 35, dont 18 d'Angers ; — Allier, 
34, dont 22 de Moulina ; — Jura, 32 ; — Charente- 
Inférieure, 27, dont 11 de La lîocîielle ; — 
Cher, 26, dont 19 de Bourges — Bouche s- du -Rhône, 
25, dont 20 de Marseille; — Cantal, 20: — Vienne, 
18, dont 11 de Poitiers ; — Côtes-du-Nord, 16 ; — 
Luire, 14;— Indre, 14;— Ain, 13; — Savoie, 12; 
- — BasBea-Pyrénées, 12 ; — Isère, 12 ; — Creuae, 12 ; 

— Haute-Loire, 10, exclusivement fournies par Le 
Pny ; — Haute-Savoie, 10 ; — Hérault, 9 ; — Haute- 
Garonne, 8 ; — Charente, 8 ; — Drôme. 8 ; — Haute- 
Vienne, 7 ; ~ Deux-Sèvrea, 6; — Var, 6 ; — Gard, 5 ; 
■ — Lot-et-Garonne, 6 ; — Hautea-Pyi'énées, û ; — Py- 
rénéea-Orientalea, 6 ; — - Alpes-Maritimes, 4 ; — 
Aveyron, 4 ; — Vendée, 4 ; - — Tarn-et-Garonne, 4 ; — 
Ariêjre, 3 ; — Corrèze, 3 ; — Dordogne, 3 ; — juandea, 
3 ; — Tarn, 3 ; — Bassea-Alpes, 2 ; — Vaucluse, 

— Ai'dèche, 1 ; — Aude, 1 ; — Corso, 1 ; — Gers, 1 ; 

— Hautes-Alpes, 1 ; — Lot, 1. 
La Lozère est le aeul département qui n'ait jamais 

foiimi à Paria aucune prostituée dans cette période 
de (fuinze années. 

Par contre, ai nous considérons l' Alsace-Lorraine 
comme toujours française malgré aon injuste et 
odieuse annexion à l'Allemagne, voyons la fourniture 
de nos aneiena départements:- — Moselle, 105 filles 
inaeritea, dont 89 de Metz ; — Bas- Ithin, 101, dont 
C5 de Strasbourg ; — Haut-UIiin, 26, dont 11 de 

ilmar. 



PAEIS 21 

Dans la nomenclature ci-dessus, nous avons négli- 
I gé d'indiquor les chefs-lieux qui ont fourni moins de 
I 10 filles publiques inscrites. 

D'autre part, il est intéressant, après avoir exa- 
r miné cette fourniture par dépai-tement, de la classer 
L de nouveau en examinant la provenance de ces filleB 
|. d'après nos anciennes provinces, dont le souvenir 
I n'est pas encore perdu, certes, et qui forment des 
fc.populationa se distinguant l'une tle l'autre par les 
, les habitudes, quelquefois même par le lan- 
[ gage. J'ai fait encoTe ce travail en compulsant les 
î dossiers, 
trouvé ainsi que, sur les 12,227 prostituées 
l.d'origine française inscrites à Paris, il en a été 
I fourni par: — l'Ile-de-France, 0,735 ; — la Norman- 
T.'die, 1,134; — la Champagne, fi90 ; — la Bourgogne, 
r518;— la Lorraine, 492 ;— l'Orléanais, 490; — la 
iriandre, 308 ; — la Picardie, 302; — la Bretagne, 
- la Franche-Comté, 196 ; — l'Artois, 163 ; — 
[■l'Alsace, 127 ; — le Maine, 125 ; — le Lyonnais, 118 ; 
\' — l'Auvergne, 82; ^ la Touraine, 59; — la 
[Guyenne, 52 ; — la Provence, 41 ; — le Berry, 40 ; 
-le Nivernais, 39; — l'Anjou, 35; — l'Angoumoàs. 
- le Bo.urbonnaiB, 34; — le Poitou, 28; — le Lan- 
guedoc, 26 ; — la Gascogne, 24 ; — la Savoie. 23 ; — 
a Daupliiné, 21 ; — la Bresse, 13 ; — la Marche, 12 ; 
- le Limousin, 10 ; — le Telay, 10 ; — le Eouaail- 
Fjon, 5 ; — le Périgord, 3 ; — le A'^ivarais, 1. 

Ces détails sur le nombre des prostituées qui af- 
fluent à Paris de tous les points de la France, sont 
curieux ; mais nous font-ils connaître les mœurs et 
le degré d'immoralité de telle et telles régions? Non, 
assurément ; car il peut se faire, ot il arrive, en effet, 
que les pvostituées nées dans un pays très immoral 



I restent toutes, ou presque tontes, dans le pays, tanm 
que celles qui habitent à&a endroits où elles ne sont 
l pas supportées, cherchent à Paris un lieu de refuge 
I Toutefois, on ne saurait contester l'intérêt qu'offre 
f cette statistique, A leur tour, M. Trébuchet, ch.ei du 
t Bureau Sanitaire, et M. Poirat-Duval, autre chef de 
ll>ureau à la Préfecture de police, se sont lÎTrés à des 
•lecherchea semblables, en les faisant porter sur une 
■-période de dix années, et ils ont trouvé, tant pour la 
■fourniture de l'étranger que pour celle de Paris et 
M^Aes départements, à peu prés les mêmes chitïres, dans 
Bdes proportions presque pareilles. La Lozère, eepen- 
f-dant, avait fourni i filles pendant ces dis années-là. 

•3. Posillnn sociale dt's familles des prosliluées. 

' L'examen que j'ai fait à ce sujet a porté sur les 
[actes de naissance de plus de 3,000 filles exerçant la 
I prostitution à Paris ; je les ai passés en revue, sans 
I en éliminer aucun, et en les suivant dans l'ordre 
L chronologique de l'inscription des filles. 
I En premier lieu, pour les filles publiques nées à 
\ Paris, j'ai trouvé, en fait de pères: 

113 journaliers et hommes de peine ; — 28 maçons, 
couvreurs, carreleurs ; — 31 menuisiers, charpentiers, 
I scieurs de long ; — 31 cultivateurs ; - — 23 domesti- 
I ques, parmi lesquels des portiers ; — 35 cochers de 
I fiacre, charretiers; — 3 chiffonniers : ^ 11 eharbon- 
I niera ; — 12 colporteurs ; — ■ 8 ferblantiers, chaudron- 
niers ; — 18 garçons épiciers, fruitiers, merciers ; — 
V 4 rémcnileurs ; — 21 taillaurs de pierre, paveurs, car- 
r riera, plâtriers ; — 11 tonneliers, charrons ; — 
r 23 mare chaux-f errants, serruriers, cloutiers ; — 
L 6 potiers, faïenciers ; — 2 verriers ; — 2^ ouvriers 



■iyy— 



LA PEOSTITUTIOÎf A PAHI3 23 

taillpurs ; — 6 mariniers, dpbardeiira ; — 4 ouvriers 
I marbriers ; — 6 cartonniers, etc. 

En résumé, les prostituées nées à Paris aortent 
J presque toutes de la claaae des artisans. Parmi les 
I* pères exerçant une profession plus relevée que celles 
i-desfitis, ou moins pénible, je citerai : — 8 éventail- 
listes ; — 5 doreurs, argenteurs ; — 18 ciseleurs, 
mouleurs; — 16 coiffeurs; — 1 acteur et 1 saltim- 
banque;— 5 graveurs, émailleurs ; — 16 tnbletie^B, 
ébénistes; — 9 cnisiniers, confiseurs; — 8 pâtissiers; 
- 6 tourneurs ; — 11 mécaniciens, armuriers, coute- 
liers ; — 23 limonadiers, marchands de vins, liqno- 
ristes ; - — 1 pompier ; — 20 peintres- déco rataurs ; 
-16 horlogers ; ^ 5 typographes;^! amidannler; 
— 2 fontainiers ; — 2 sculpteurs siir bois ; — 6 cha- 
peliers, etc. 

Notons encore à part: — 4 rentiers ; — GO compta- 
L Wes et employés de commerce ; — 5 logeurs ; — 
instituteurs ; — 1 avocat ; — 1 médecin ; — 1 
I chirurgien ; — 1 pharmacien ; — 4 architecte» ; — 
1 6 musiciens ; — 3 maître de danse ; — 1 homme de 
1 lettres ; — 2 huissiers ; — 30 militaires invalides ; — 
KlO oSciera de différents grades. 

J'ajoTjIo qn'one de ces allés avtiît un général pour 
I parrain et témoin ayant aigné son acte de Daissaooe, 
Imais son père était charcutier : qu'une autre, fille 
lâ'aa notaire, avait pour parrain un prince, et pour 
■ jnarraine une demoiselle d'un grand nom ; qn'nne 
Isommée D"" est véritablement d'une famille il- 
I lustre : que trois aotres sont à peu près dotu le m&ae 
1 eaa. Mais que sont quelques ezceptiom à U règle 
l:g#nérale? La vérité est qu'on aurait tort de croire, 
I on l'a dit, qoe bon nombre de pmstîtvém 
9t à des ^milles trës distiagoées. 



24 lA rfiOSTITUTIOS A PAfilS 

Si nnua pLissona aux filles publiques qui, nées hors 
de Paris, y arrivent de toua les départementa de 
Francp, nous y trouvons parmi les pères, notamment: 

541 manouvrierB, toua or.cupés à (îea travaux rudes 
et péniblea ; — - 335 cnyiivateurs ou gêna employée 
aux travaux des champs ; — 192 tisseurs de toute 
espèce ; - — 182 charpentiers, menuisiers, charrons ; 

— 181 maçons, plâtriera, tailleurs de pierres ; — 
77 domestiques ; — GO cochers, chaiTetiers, palefre- 
niers ; — - 88 m a ré chaux- ferrant s, serruriers, forge- 
rons ; — 93 cordonniers ; — 47 colporteurs, 
marchands forains ; — 35 tanneurs, corroyeurs ; — 
46 ouvriers tailleurs ; - — 35 ouvriers chapeliers ; 

— 29 marina et mariniers, etc. 

Eelevons à part: 35 meuniers; — 55 aubergistes; 

— 51 épiciers et merciers; — 34 perruquiers; — 
2G horlogers; — 53 bouchers et charcutiers;^ 26 bou- 
langers et pâtissiera; — 9 brasseurs; — 3 douaniers; 
1 acteur ; — 20 musiciens ; — 31 instituteurs, maîtres 
d école; — 3G coniptablea et employés de commerce; 

— 6 médecins, chirurgiens, officiera de santé; — 
24 hommes de loi, y compris des huissiers; — 79 mi- 
litaires non gradés; — 28 officiers de terre et de mer; 

— 49 rentiers. , M 
Enfin, xine de ces prostituées dont j'ai eu les actes 

de naissance entre les mains, était fille de bourreau; 
et, parmi les témoins qui ont signé à ces actes, j'ai 
trouvé 12 prêtres. 

En somme, ce que j'ai constaté partout, c'est que, 
d'une manière générale, sauf quelques curieuses ex- 
ceptions, lu classe de la société d'où sortent les pro- 
stituées est celle des ouvrieia et des gens peu favorisés 
de la fortune, qui, par conséquent, ne peuvent ni 
soigner l'éducation de leurs filles, ni les surveiller, 




LA rEosTiTUTiON A p.uirs 25 

, et encore moins pourvoir à leurs besoins quand elles 
ont acquis un certain âge; c'est (ïe cea familles que 
sortent lea domestiques et les filles d'ateliera, ces 
foyers de corruption dont on doit déploi'er les perùi- 
cieux eliets, tout en admirant les produits qu'ils four- 
nissent. 

G. Conflidi'ratioDH «ur l'c-tul'OlTildps proslituéex, 

Une foule de personnes s'imaginent que les pr-o-— 
stituécs sont, pour la plupart, des enfants naturels, et 
même qu'il existe parmi elles un très grand nombre 
d'enfants trouvés. (Jette opinion ne repose que sur des 
imaginations et des préjugés. 

J'ai étudié, il ce point de vue, une suite de 4,981 dos- 
siers, dans l'ordre chronologique des inscriptions à 
la police des mœurs. Parmi ces filles exerçant la 
prostitution à 'Paris, 1,183 étaient nées dans la 
capitale même, 90 dans sa banlieue, !Î.C67 dans nos 
divers départements; j'ai laissé de côté les quelques 
dossiers de filles nées à l'étranger. Or, voici ce qui 
résulte de mon examen des actes de naissance dressés 
en France: 

Sur les 1,183 filles nées à Paris, 940 étaient des en- 
fants légitimes, 118 étaient filles naturelles , mais 
reconnues par le père à l'époque même de la nais- 
sance, et 119 seulement étaient filles naturelles non 
reconnues. En ce qui concerne le département de la 
Seine en dehors de son chef-lieu, sur 90 prostituées 
qui étaient nées dans cette banlieue de la capitale, 
j'ai trouvé 85 filles légitimes, 3 naturelles recon- 
nues, et 2 natureUes non reconnues. Enfin, sur les 
3,667 prostituées nées en province, j'ai trouvé 
3,283 filles légitimes, 133 naturelles reconnues, et 
L2Ô2 naturelles non t 



7 



26 LA PIiOSTITrTI0\ 1 



it ane 41, ■ 



Quant aits enfants-trouvéB, il n'en existait qae 41, 
allés ayant été recueilHeB et élevées par l'administra- 
tion des hospices, mais ayant mal tourné. 

Donc, cette suite ininterrompue de 4,981 inscrip- 
tiona de prostituées françaises, exerçant leur métier à 
Paria, ne donne {à côté îles 41 filles qui seules appar- 
tiennent à la catégorie des enjEants- trouvés) que 
627 filles naturelles, contre 4,313 filles légitimes; et 
encore, sur cea 627 fiUes naturelles, 354 avaient été 
reconnues par le père lors de leur naissance. 



6. Professions exercées par les prostituées au 
moment de leur inscription au Bureau des 

Toujours en suivant l'ordre chronologique des ins- 
criptions, une statistique portant sur 3.120 proati- 
tnées, dont on a pu conn^tre la profession en mo- 
ment de leur enregistrement, a démontré d'une 
manière éblouissant* la mauvaise influence des tra- 
vaux sédentaires des fabriques et des ateliers. TJn 
nombre infime de ces filles appartenaient \\ une classe 
un peu élevée, et voici leurs cas exceptionnels: 
3 étaient sages-femmes; 7 avaient été marchandes en. 
boutique et bien établies; 1 peignait tiès bien le pay- 
sage; 6 étaient musiciennes et dosnaient des leçons 
(piano, harpe); 16 avaient été actrices ou figurantes 
sur différents théâtres de Paris et des dépai't«ments % 
3 enfin, exception rarissime, possédaient des rentes de 
200 francs, de 500 francs, et même de 1,000 francs. 

Toutes les autres exerçaient des métiers fort pe» 
lucratifs. On sait combien sont minimes les gaina 
attribués aux pauvres ouvrières, et l'un se demande^ 
souvent s'il est possible de se procurer, avec de 8i 



!*ùb 



i 



LA FEOSirrUTION A PASSS 37 

faibles ressources, le plus strict nécessaire. N'oublions 
pas aussi qu'une foule de CBoaes viennent, à chaque 
instant, suspendre les travaux des fabriques, et ré- 
duire a, l'inaction, pentiant deux ou trois mois, ties 
ouvrières qui ont toujours vécu au jour le jour, qui se 
sont trouvées dans l'imposHibilité de faire dea écono- 
laies, et qui souvent, par suite de la division du 
travail introduite daûs les nianuiactui'ea, ne savent 
confectionner qu'un objet spécial. Que peut faire, 
dans une pareille circonstance, une malhenienBe, 
seule, isolée, sans appui, sans instruction premièi-e, 
entourée de eéductiona et de mauvais exemples, en 
proie à toutes les privations, et n'ayaat pour perspec- 
tive que la mort la plus cruelle, celle que détermine 
la faim?... Ces considérations sont graves; elles font 
naître plus il' une réflexion. 

Uue statistique foi-t intéressante est celle que noua 
devons à iI5I. Trébuphet et Poirat-Duval, chefs de 
bureau à la Préfecture de police. Ces deux fonction- 
naires, bien documentés, ont relevé les professions des 
filles soumises, sur une suite de 10,000 inscriptions; 
les dossieis do 874 ne portaient aucune profession au 
moment de l'enregistrement. Restent 9,12fj femmes 
ou filles qui ont abandonné leur profession pour faire 
le honteux métier de prostituées. Voici leur triste 
nomenJclature, en commençant par les professions 
ayant fourni le plus grand nombre de fiiles de dé- 
bauche: 

817 domeetiques; — 524 giletières; — 476 épi- 
leuses; — 46i journalières; — 314 ehauBsonnières; — 
229 lingères; — 223 polisseuses; — 217 régleuses; — 
197 couturières; — 171 brodeuses- — 167 passemen- 
tières ; — 137 modistes ; — 13G artistes dramatiques ; 
133 corsetières ; — 131 blanchisseuses ; — 125 bou- 



J 



3R LA PEOSTITDTION A PARIS 

tnnuières; — 122 gantières;— 113 fleuristes; — 102 co- 
loristes; — 101 plumnaaièrea; — 100 casquettières; 

— 9d piqueuses de bottines; — 95 c.ulottières; — 
90 demoiselles de mapiiBin ou de comptoir; — 84 m- 
vaudeuses; - — 77 marchandes ambulantes; — 76 rem- 
pailleuses; — 72 car tonni ères; — 55 tapissières; — 
63 brunisseuses; — 5H doreuses; — 49 écaillères; — 
39 raccommodeuses de dentelles; ■ — 36 vernisseuBea; 

— !14 frangieuses; — 32 matelassières; — 24 bro- 
cheuses et relieuses: — 22 sages-femmes; — 12 mo- 
dèles: — 11 femmes de ménage. 

Cette statistique est postérieure à celle à laquelle 
nous avons fait allusion, et noua en avons donné de 
préférence le détail, parce que les professions y sont 
mieux divisées: mais l'une et l'autre se confirment. 
Elles n'acciisent une diJïérence que sur la prostitu- 
tion des femmes pourvues d'une meilletu'e situation 
que les malheureuses ouvrièxes, et dont le nombre de 
débauchées s'accroît. Ainsi, l'ancienne statistique 
portait sur environ 3,000 prostituées, et la nouvelle 
porte sur 10.000: les fenames de théâtre, qui se fai- 
saient inscrire dans la proportion de 5 sur \m millier 
de filles soumises, se sont élevées à 13 par mille; 
les sages-femmes, 3 sur 3,000, ont doublé leur nombre 
propoi-tionnel, en atteignant le chiffre de 22 sur 
10,000 prostituées, chiffre d'autant plus énorme que 
la coi-poration est loin d'être nombreuse. 

La misère n'est donc pas seule à ouvrir la porte à 
la prostitution. Le désir de briller, d'avoir de belles 
toilettes, contribue aussi à faire faillir ces malheu- 
reuses, et, une fois ce premier pas fait, idles ue s'ar- 
rêtent plus dans la voie où elles sont entrées. On ne 
jurait s'imaginer, disent Mit. Trébuchet et Poirat- 
kival, jusfiu'où va le besoin, chez ces femmes, de 



LA PROSTITUTION A F.tBIS 29 

H'empni-ter sur leurs compagnes. T7ii riche person- 
s'étant épris d'une iilJe galante, lui ilonnaifc 
9,000 francs par mois; mais, cette somme lui étant 
iBvenue insuffisante, elle allait dans les maisoiis clau- 
Hestinos de débauche, où elle fut un j'onr arrêtée ; aux 
febsei-vations qui lui furent faites, elle répondit 
'elle lie pouvait se priver de sa voiture et licencier 
1 domestiques, et qu'elle se prostituerait plutôt à 
^nn cocher s'il voulait s'engager à nourrir ses 
chevaux. 

7. Quel csl le deKi-i-d'iiislriii-tiiiiiftes]>rostiliié(!»î-.* 

Nous passons sur l'instruction des parents ; il est 
acquis, depuis longtemps, que les pères sont, pour un 
tiers, dans l'ignorance la plus crasse. 

Occupons-nous seulement des filles. 

Avant la loi sur l'iiistnictioii obligatoire, on fit 
l'examen de plus de 11,000 engagements de proati- 
liuées BOuscrivanti leur inscription' (exactement, 
11,308 nées en Prance). Il se trouva que G,684, tout- 
à-fait ignorantes et brutes, avaient déclaré ne pas 
savoir signer ou s'étaient contentées de tracer une 
croix ou un zig-zag quelconque h la place de leur 
nom; 4,479 avaient signé d'une écriture mal tracée, 
incertaine, dénonçant la difficulté et le défaut d'habi- 
leté dans la personne qui tenait la plume; 205 seule- 
ment avaient signé bien et d'une manière expéditive. 

Aujourd'hui, toutes savent signer. Mais, comme 
précédemment, on n'en trouve guère que 200 (sur 
10,000) dont l'éducation a été cultivée et entretenue 
par l'usage; pour la presque totalité, elles sont de- 
meurées ignorantes, et celles qui Savent quelque 
chose n'ont eu qu'une éducation avortée, 



I choB 



LA PROSTITUTION" A PARIS 



ià, t^iiel est l'âge des pFoBtitu< 
métier à Paris ? et tiepnim c 
l'exepcent-elles ? 



js exer>;ant leur 
aibiei) de temps 



Ponr résoudre ces deux questions, dont l'intérêt 
égale l'importance, j'ai choisi au hasard -une époque 
quelconque, et j'ai relevé, sur les feuilles indÎTi- 
duelles de toutes les prostituées préseutes à cette 
époque, les renseignements dont j'avais besoin. Cet 
examen a porté sur 3,235 allés, dont 931 originaires 
du département de la Seine, 2,170 de la province, et 
134 des paya étrangers; il y en avait, en outre, 282 qui 
n'avaient pu fournir leur acte de naissance. Quelques 
lignes m.e suffiront pour donner le résultat d'un tra- 
vail aussi long que faeticlieux. 

Kn ce qui concerne la première question, j'ai 
trouvé 560 filles publiques âgées de moins de 
21 ans, soit la sixième partie du contingent : 216 de 
ans; 115 de 19; 101 de IS; 55 de 17; 44 de 10; 17 de 
15; 8 de 14; 3 de 13; et 1 âgée de 12 ans seulement. — 
Ici, nous coustat(His purement et simplement. Sur la 
question si discutée de l'inscription des mineures, 
nous nous expliquerons quaud nous en serons au cha- 
pitre relatif aux formalités de l'inscription, et nous 
en parlerons aussi à pripoa de la prostitution clan- 



fassons aux majeures. J'ai trouvé 204 filles de 
21 ans; 249 de 22; 240 de 23; 207 do 24; 193 de 25; 
205*de 26; 159 de 27; 151 -e 28; l^U de 29; 113 de 30; 
127 de 31 ; 109 de 32 ans. A partir de cet âge, la 
décroissance des chiffres est do plus en plus rapide, 
ce qui n'étonnera personne: 78 prostituées de 33 ans; 
( 78 aussi de 34; 64 de 35; 51 de 30; 43 de 37; 39 de 38; 



LA TEOSTITUTIO*) A PARIS 31 

r de 39; 31 de 40; 25 de 41; 21 de 42; 23 de 4;J; 

fp de 44; 14 de 4ô; 11 de 46; 13 de 47; 6 de 48; 

piOde 49; 5 de 50; 8 de 51; 3 de 52; 3 de 63; 2 de 54; 

I de 55 ; 1 de 56 ; 3 de 57 ; 2 de 58 ; 1 dô 59 ; 1 de 64 ; 

enfin, 1 prostituée de 65 ans. 

La doyenne était ane provinciale; la soua-doyenne, 

I de 64 ane, était nne étrangère, ainei que la fille de 

I ans; les 2 de 5S ans étaient, l'une parisienne, 

L Tautre étrangère. De 41 à 57 ans, 7 étrangêrea seule- 

] ment: 3 de 42 ana; 2 de 48; 1 de 49; et 1 de 51. Pour la 

I auénte période d'âge, notr-e capitale avait fourni: 

^8 prostituées de 41 ans; S de 42; 12 de 43; 9 de 44; 

^ de 45; 1 de 46; 6 de 47; 1 de 48; 6 de 49; 2 de 61; 

l de 54; 2 de 55; 1 de 57. Quant à la province, elle 

brait fourni comme prostitaéea très mûres: 16 de 

fil ans; 10 de 42; il de 43; G de 44; 9 de 45; 10 de 46; 

1 7 de 47 ; 3 de 48 ; 3 de 49 ; 5 de 50 ; 5 de 51 ; 3 de 52 ; 

î de 63; 1 de 54; 2 de 55; 1 de 56; et 2 de 57 ans. 

Quant aux plus jeunes, celle de 13 ans était née à 
paris; les 3 de 13 ans, l'une née à Paris, l'autre en 
Mvince, la dernière à l'étranger; sur les 8 de 14 ans, 
J de Paris, 3 de province; sur les 17 de 15 ana, 9 de 
îa, 8 de province; et sur les 44 de 16 ana, 20 de 
^aris, 22 de province, 2 de l'étranger. Pour la pé- 
tiode de 17 à 20 ans, Paris avait fourni 143 filles, la 
;e 217, et l' étranger 27, 
La seconde question que j'ai posée est: Depuis 
• Combien de temps les prostituées dont nous nous 
. occupons exercent-elles leur honteux métier à Paria ? 
- Ici, puisque notre examen est Laaé sur la date de 
L l'inscription, noua pouvons ajouter les 282 filles qui 
n'ont pu fournir leur acte de naissance, et noua opé- 
rons sur la totalité des 3,517 prostituées en exercice 
3 filles s 



32 



. PROETITrTIOX A PARIS 



439 faisaient leur "vil métier depuie moiiia d'un au; 
590 depuis im an et plus, Siins aller jusqu'à 2 années 
d'exercice; 440, de 2 à 3 ans; 485, de 3 à 4 ans; 
294, de 4 à 5 ans; 139, de 6 à 6 ans; 150; de 6 a 7 ans! 
143, de 7 à 8 ans; 9G, de 8 à 9 ans; 100, de 9 à 10 ans;' 
109, de 10 à 11 ans; 93, de 11 à 12 ans; 99, de 12 à 
13 ans; 98, de 13 à 14 ans; 107, de 14 à 15 ans; 80, de 
15 à 10 ans; 19 seulement, de IG à 17 ans; 14, de 
17 à 18 ans ; 17, do 18 à 19 ans. EnEn, 4 (dont 3 pari- 
siennes et 1 étrangère) avaient de 19 h 20 ans de 
métier, et il y en avait encore une dont la prostitution 
n'avait pas ehômé depuis plus de 21 ans. Cette der- 
nière, si elle avait vécu aii Japon, où la prostitution 
est en honneur, y aurait reçu sans doute une récom- 
pense solennelle ; mais c'était une fille de Paris, 
n'exerçant qu'à Paris. 



9. Quelle est la cause |>i 



•àv: lu |il-i>sti(utii 



Il résulte des renseignements nombreux que j'ai 
pris à ce sujet, que les causes premières de la prosti- 
tution sont extrêmement variables, qu'elles ne sont 
pas les mêmes pour les filles des villes et pour celles 
des campagnes, pour les filles de la province et pour 
celles de Paris, et qu'elles dépendent d'une foule de 
circonstances qu'il serait impossible d'exposer en dé- 
tail. Je me contenterai donc d'indiquer les princi- 
pales, celles qui se sont le plus souvent présentées 
dans les réponses qui ont été faites aux questions que 
j'adressais et aux recherches auxquelles je me livrais; 
I paraissant par cela même mériter plus de con- 

B, c'est sur elles que j'insisterai davantage. 

. doit regarder comme constant que toutes les 
iies qui se livrent à la prostitution publique ont déjà 



LA rROSTITl'TrOX A PAEIS 33 

Pbcu dans le désorili'e pendant un temps plua ou 
Moins long. En l'espace de dix ans, à peine a-t-on 
wncontrê au Dispensaire troia ou quatre filles qui 
nuea se faire inscrire, n'ayant pas encore été 
téflorées; la prostitution peut donc être considérée, 
kour un certain genre de filles, comme la consé- 
lence presque inévitable d'un premier oubli du pins 
mportant des devoirs; il n'y a pas, à ce sujet, de dia- 
BÎdence d'opinions parmi ceux qui ont été à même de 
'faire sur les prostituéea des recherches et des obser- 
vations. 

Cette cause est générale et agit sur toutes les 
prostituéea indistinctement; mois il est des caTiaea 
secondaires, et pour ainsi dire individnellea, que je 
vais passer en revue. 

La paresse peut être mise au premier rang; c'est 
le désir de se procurer des jouissances sans travailler, 
qui fait que beaucoup de filles ne restent pas dans les 
places qu'elles ont ou ne cherchent pas à en trouver; 
la paresse, la nonchalance et la lâcheté des prosti- 
tuées sont devenues proverbiales. 

La misère, poussée souvent au degré le plus af- 
freux, est encore une des causes les plus actives de la 
prostitution. Que de filles abandonnées de leur fa- 
mille, sans parents, sans amis, ne pouvant se réfugier 
nulle part, sont obligées de recourir à la prostitution 
pour ne pas nioui'ir de faim ! Une de ces malheu- 
reuses, susceptible encore de sentiments d'honneur, 
lutta Jusqu'à la dernière extrémité avant de prendre 
un parti qu'elle regardait comme extrême, et, lors- 
qu'elle vint se faire inscrire, on acquit la preuve 
qu'elle n'avait pas mangé depuis près de trois jours, 
La vanité et le désir de briller sous des habits somp- 
tueux est, avec la paresse, xmo des causes les plus 



u_ 



à 



34 LA PHOSTITTTIOX A PARTS 

actives de la prostitution, particulièrement à Paria: 
quand la simplicité, et à phis forte raison le délabre- 
ment des vêtements, sont dans nos mœurs actuelles 
an véritable opprobre, faut-il s'étonner que tant de 
jeunes filles se laissent aller à la aédaction d'un cos- 
tume qu'elles désirent d'autant plus, qu'il les fait, 
pour ainsi dire, sortir de la position dans laquelle 
elles sont nées, et qu'il leur permet de se mêler à une 
classe dont elles se croient dédaignées? Ceux qui 
connaissent jusqu'à quel point l'amour de la parure 
est poussé chez quelques femm.es, apprécieront aisé- 
ment quelle peut être, à Paris, l'activité d'une pa- 
reille cause de la prostitution. 

II est, pour les filles de province, une cause parti- 
culière dans leur détermination: le délaissement 
absolu dont elles sont tont-à-eoup vietimea de la part 
de leurs amants. Une foule de jeunes gens, militaires, 
étudiants, commis- voyageur s ou autres, séduisent en 
province des jeunes filles, se les attaclient, et, par la 
promesse mensongère d'un mariage, d'un établisse- 
ment quelconque, ou par le besoin qu'elles ont de se 
cacher, les amènent à Paris; mais elles y sont bientôt 
abandonnées et livrées à elles-mêmes. Qu'on s'ima- 
gine la position de ces maHieurcuses, laissées dans un 
garni, pai'fois même à la rue, ne connaissant per- 
sonne dans une ville comme Paris, n'ayant pas d'ar- 
gent, et, pour comble d'infortune, ne pouvant repa- 
raître dans leur pays, qui connaît leur ineonduite, ni 
rentrer chez leurs parents, qu'elles ont déshonorés et 
dont elles se sont attiré la haine et la malédiction ! 
Est-ii surprenant qu'une fille, dans une telle position, 
se laisse aller aux suggestions et aux promesses de 
^ toutes les personnes qu'elles rencontrent? Il est, en 
niefiet, démontré que c'est sur ces sortes de tilles que 



LA PHffKTirrTION" ; 



35 



1 fcmiues abominables, dnnt le méfiei- est Je cor- 

Rompre et de pervertir la jeitnesae, fixent particuliè- 

mcnt leurs regards; elles les guettent et lea 

cherchent partout, et déploient dans leur art inier- 

^al une adresse remarquable. 

Cependant, pour tout dire, il convient d'ajouter que 
.es proTÎncialea ne sont pas toutes amenées 
Wit Paria de cette seule manière? beaucoup y viennent 
■ spontané meut, après une première séduction; la capi- 
tale leur semble un refuge oii elles peuvent dérober 
leur ftshonneur aux yeux de leura procLes et de leiirs 
compatriotes, et où elles espèrent trouver une res- 
rarce contre la misère qui les menace ou les accable. 
Des chagrins domestiques et les mauvais traite- 
|ients que quelques filles éprouvent de parents inhu- 
luains et barbai-es sont, pour quelques unes, le motif 
leur détermination: a'il faut ajouter foi à ce 
d'elles répondent au chef du Bureau des Mœura, 
»est pour fuir la brutalité d'un beau-père on d'une 
Barâtre qu'elles ont quitté la maison paternelle. Tou- 
il est plus souvent croyable qu'en réalité elles 
ont été chassépa, probablement à cause de leur 
Oiconduite; car, a'il eat des parents barbares, du 
Rioiiis leur nombre est heureusement très limité. 

Un long séjour dana un hôpital est encore pour 
jeauconp de filles la cause déterminante de leur enrô- 
lement comme prostituées; d'autre part, rien n'est 
fatal aux domestiques comme oos mauvais garnis qui 
Vies reçoivent lorsqu'elles sont- sans place; le plus 
[grand nombre de ces logeuses, complices dea abomi- 
lablea bureaux de placement, sont, comme ceux-ci, 
1 relation avec les proxénètes. Or, les infâmes pour- 
Ivoyeuaes de la prostitution entretiennent, dans ces 
•divers endroits, des agentea qui les avertissent de 



36 LA PEOSTITUTION A PAEIS 

tout ce qui s'y fait, et leur font passer des notes sur 
toutes les filles qui peuvent leur convenir. 

L'incrmduite des pai'ents et les mauvais exemples 
de toute espèce qu'ils donnent à leurs enfanta . 
doivent être considérés, dans le cas de beaucoup de 
filles, surtout à Paris, comme une des causes pre- 
mières de la chute définitive et de l'avilissement de 
ces malheiu'euses, Les dossiers des filles inscrites, les 
procès -verbaux d'interrogatoires, font sans cesse 
mention de désordres dans les ménages, de pères 
veufs vivant avec des concubines, des amants des 
mères veuves ou mariées, de pères et mères séparée, 
etc. Quelle surveillance de tels parents peuvent-ila 
exercer sur leui's enfants ? et s'ils jugent convenable 
de faire une réprimande ou de donner un bon avis, 
quel poids et quelle autorité pourront avoir dans leur 
boucbe de pareilles obsei'vationB ? 

Ainsi, la dépravation, l'insouciance, la position né- 
cessiteuse de beaucoup de gens de !a dernière classe | 
ne pi'éviennent pas ou ne peuvent empêcher la cor- 
mption des enfants, et même, ti'op souvent, hélas ! I 
la provoquent. . . Pour ne parler que des jeunes filles, , 
quelle idée de vertu pourront-elles avoir, lorsque, dès 
l'âge le plus tendre, leurs oreilles ne sont pas plus 
ménagées que leurs yeux, et lorsqu'elles voient les 
auteurs de leurs jours (si toutefois elles ne sont pas 
enfants naturels) se quitter et contracter des liaisons 
adultères ? Jetées pour la plupart sur la voie publique 
dès la pointe du jour, pour y vendre des fruits, des 
légumes, ou des cliansous, ou bien confondues dans 
des ateliers avec des jeunes gens de leur trempe, elles 
prennent bientôt des habitudes licencieuses, et forment 
prématurément des liaisons immorales; leur innocence 

t perdue avant même que la nature ait parlé. Ces , 



LA FKOSTITVTIOX A PAR15; 37 

rrn pciivent être et lie sont pas durablea, et ces 

aialheui'cuses auiit iléjà prostituées au sein du travail 

i aous les yeux de leurs parents. Avec de pareils 

mté ce dents, est-il surprenant que la vue de leurs 

tnarades déjà lancées dans la pi'ostitution, que la 

mresse toujonra compagne du vice, que le bruit venu 

i leurs (iieilleB du plaisir que procure la débauche, 

larce qu'elle permet de satisfaire sans travail à tous 

tes désirs, est-il, dis- je, surprenant qu'un tel concours 

vâe circonstances rende une jeune fille sans force 

■contre la séduction ? Il ne faut qu'un reproche, une 

Rjjarole, une rencontre, pour décider de sa nouvelle 

rocation, et plonger pour toujours la jeune fille dans 

■ l'abîme de la honte et de l'ignominie. 

De toutes les causes de la prostitution, partieuliè- 

Eement a Paris, et probablement dans les autres 

■tfrandes villes, il n'en est pas de plus actives que le 

^éfaut de travail et la misère, suite fatale de salaires 

isuiBsants. Que gagnent nos couturières, nos lin- 

[ères, nos ravaudeuaes, et en général toutes celles 

bnt l'aiguiile est le gagne-pain? Que l'on compare 

I gain des plus habiles avec celui que peuvent réa- 

îes qui n'ont que des talents médiocres, et 

^on verra s'il est possible à ces dernières de se pro- 

rer le strict nécessaire; que l'on compare surtout le 

rix de leur travail avec celui de leur déshonneur, et 

sera d'être surpris d'en voir un ai grand 

[ubre tomber dans un désordre pour ainsi dire iné- 

latable. 

I Cet état de choses tend malheureusement à s'ac- 
(oître dans notre société actuelle, par suite do l'usur- 
»tion, faite par les hommes, d'un grand nombre de 
favaus, qu'il serait plus convenable et plus hono- 
îable pour notre sexe de laisser dans le domaine de 



3S 



L. PEOSTITUXIOK A PAHIS 



l'autre. K'eat-il pas, par exemple, lionteux de voir 
Paris (les milliers d'iiommes, dans la vigueur de l'âge, 

■I' dans des cafés, dans des boutiques, dans di 
magasins, la vie molle et efEéminée qui ne peut con- 
venir qu'à des femmes, et n'y être occupés qu'à 
essuyer de la vaisselle ou à manier des chiffons P 

Un se demande, en voyant ces tristes résultats, si la 
société s'est assez occupée du soi-t des femmes, cette 
partie d'elle-même ai digne de sa solllicitude et qui , 
exerce une si grande influence sur tout ce qui con- 
cerne le mécanisme d'un Etat. Quant à moi, je crois 
, que notre société de progrès est, sous ce rapport, 
encore bien arriérée; je dis même qu'elle est grave- 
ment fnutive, et que noua avons tort de ne pas opérer 
toutes les améliorations nécessaires, de ne pas nous 
bâter de faire un meilleur sort au sese féminin, à ce 
sexe tendre et dévoué à qui nous devons nos nières. 

On aura peine à croire que la carrière de la prosti- 
tution ait été embrassée par certaines femmes comme 
moyen de remplir les devoirs que leur impose laur 
titre de flUe ou de mère; rien, cependant, n'est plus 
vrai. Il niest pas rare de voir des femmes mariées, 
abandonnées ou privées de leur mari, et par consé- 
quent de tout soutien, devenir prostituées dans 
l'unique dessein de ne pas laisser mourir de faim une i 
famille nombreuse; il est assez commun aussi de 
trouver des jeunes filles, qui, ne pouvant trouver Jana 
le travail les moyens de pourvoir aux besoins de leurs 
parents vieux et infirmes, font le soir le métier de 
prostituées, pour compléter ce qui leur manque; il 
est plus commun encore de rencontrer des filles qui 
recourent à !a prostitution pour ne pas se séparer de 
leur enfant, que le produit de leur travail, devenu 
i plus minime en raison du temps qu'elles sont obligée» 



"LX PEOSTITrTION A PAKIS 39 

cet enfant, ne leur permet paa 
^'élever. 
Parmi plusieurs exemples fort touchants, que nous 
jpourrions citer, en Toici un tout-à-fait digne d'intérêt; 
jil noua a été révélé par MM. Trébuchet et Poiral- 
(l>uval. Une jeune fille bien élevée vivait avec aa 
Rière, que fies revers de fortune avaient réduite à un 
•état voisin de l'indigence, L'excèa du travail, les 
Fveillea prolongées, rendirent la mère presque aveugle. 
Séduite par le propriétaire de la maison, cotte jeune 
fille devint grosse, puis ac<;ouc-ha, et fut aussitôt lâ- 
chement abandonnée par son séducteur. Ne pouvant 
lourvoir aux besoins de son enfant, à ceux de aa 
taère, elle vint demander son inscription au Bureau 
jifiea Mœurs. Elle était majeure; donc, le séducteur ne 
K>uvait pas être poursuivi en vertu de l'article 334 
jin Code Pénal, qui punit seulement la séduction des 
mineures, La Préfecture fit plusieurs démarches au- 
àprès de cet homme; ellea n'eurent aucun succès. Le 
préfet de police accorda de sa bourse à l'infortunée 
Tictimo quelques secours, qui retardèrent la cata- 
trophe, mais ne purent toutefois l'empêcher. Chose 
[étrange, cette fille n'était pas bien vue des autres 
qu'elle ne fréquentait pas, du reste. Elle 
sontracta, coup sur coup, plusieurs iiiîcctions syphi- 
litiques graves; et, à la mort de sa mère, elle disparut, 
,ns que l'on ait jamais pu savoir depuis ce qu'elle 
tait devenue. 

Enfin, en dehors de toutes les causes de prostitu- 
ion qui viennent d'être exposées, il faut en recon- 
laître une d^raière, celle qui est le fait d'un tempé- 
rament lubrique. Il existe, en effet, des filles qui se 
prostituent par suite d'un dévergondage, qii'on ne 
beut expliquer chez elles que par l'action d'une ma- 






40 



LA PROSTITTITIOX A FAJLIS 



ladie mentale, laquelle diminue beaucoup leur cul- 
pabilité aux yeux de celui qui les observe et les 
étudie de près; mais, en général, ces Messalines sont 
rares. Je n'ai ti'ouvé qu'une opinion unanime sur ce 
fait, que mes recherches personnelles ont, en outre, 
pleinement confirmé. 

Pour conclure, ra'étant livré à une minutieuse en- 
quête, j'ai totalisé ensuite en neuf groupes mes ren- 
seignements, qui portent sur 5,183 prostituées in- 
scrites il Paris, et qui me permettent de faire 
connaître dans quelle proportion les principales 
causes déterminantes ont agi sur ces malbeureuaes. 
Voici le résultat de ce long travail, voici le résumé 
i de mes patientes et laborieuses investigations: 



CAUSES DÎTERMINAHTKB DE LA PSOSTITUTION 

Exeèi de jnisère, dénûment absolu. — 570 cas 
conatatés chez dea prostituées nées h, Paris ; 809 chez 
des provinciales ; 62 chez des fiUeB nées à l'étranger. 1,44:! 

FUlex eéduiteg à Paris, ayant vécu avec leurs 
amants pendant un temps plue au moiiii lomi, puig 
ahandonnéet, et n'ayant plus su que faire. — 559 nées 
à Paris; 796 originaires de la province; 70 néea à 
l'étranger l,4S& 

Pei-ten lies pères et mires ; expulsion de la maison 
paternelle; abandon complet par la famille. — 
647 nées à Paris ; 569 originaires de la province (en 
général, nées dans des départements peu éloignes 
de Paris) ; 39 nées à l'étranger 1,255 

k Amendes à Paris par des m,ililaires, des commis- 
voyageurs, des étudiants et autres amants, et ahan- 
données presque ijnmédiatemenl. — 367 néea en 
province ; 47 nées à l'étranger 40i 



LA PHOSTITDTIOîr A PAEIS 41 

Damestiquen séduites à Paris par leurg maUre-f, 
.renvoyées par eux. — 123 nées à Paris ; 168 nées 

province; aucune étrangère 289 

FiUeg venues à Parts pour n'y cacher, et en espé- 
it y trouver des ressources. — 280 cas conatatéa 
iluaivement chez des filles nëes en province ; 

june étrangère 980 

Filles ou. femmes veuves, pour soutenir des va- 
vieux et infirmes. — 37 caa constatés exclu- 

rement chez des prostituées nées à Paris 37 

Aînées de famille, n'ayant ni père ni mère, pour 
>er leurs jeunes frères et sixurs, et quelquefois 
neveux et nièces. — 29 cas exclusivement pari- 
ons comme ci-deesus ; aucune provinciale ni étran- 

29 

Femmes veuves ou abandonnées par leur mari, 
ayant une famille nombreuse à élever, • — 23 cas, 
flore exclusivement parisiens ; aucune provinciale 

étrangère 23 

Total des cSiS constatés à Paris : 5,133 
Les détails suivants, qui se rattii.thent jusqu'à un 
irtain point à la question que je traite en ce mo- 
lent, pourront y jeter encore quelque lumière. 
Sur lea 5,183 personnes qui figurent diina le ta- 
ean précédent, j'ai trouvé: 1G4 fois les deux sœura 
rant demandé leur inscription ensemble; 4 fois les 
ois sœurs ; 3 fois les quatre sceurs ; en tout, 
>2 sœurs. En outre, IG fois la mère et la fille se sont 
iroléee ensemble dans la prostitution; 4 fois la tante 
; ia nièce; 22 fois les cousines germaines. Au total: 
3tî personnes réunies par les liens de la parenté la 
(lus proche. Bien entendu, ces inscriptions portent 
ur une période de plusieurs années, — Pai'raî les 
52 sŒurg dont il vîeut d'Stre question, 119 étaient 



42 

de Paria, les 13S autres venaient des dépai-témenta; 
et parmi lea 16 mères, 13 étaient parisiennes, et les 
4 auti'es étaient nées en province. 

Un peut juger par là de l'immoralité profonde des 
familles auxquelles appartiennent lea prostituées. La 
perte de ces femmes est due, le plus souvent, aux per- 
nicieux exemples qu'elles ont eus sous lea yeux pen- 
dant leur enfance. 

Une observation est nécessaire, pour terminer. Par 

(' un sentiment de convenance, de pudeur même, la 

j Préfecture de police, lorsqu'une mère et sa fille se 

I font inscrire, exige rigoureuHement leur séparation, 

soit qu'elles veulent entrer en maison de tolérance, 

floit qu'elles préfèrent être prostituées eu carte; en 

aucun cas, ellea ne peuvent demeurer dans le même 

[ immeuble. I] en est de même s'il s'agit de deux 



Cette règle, on le reconnaîtra, est tout à l'honneur 
de l'administration. Dana la prostitution clandestine, 
au contraire, ces cas exécrables de débaiiche collec- 
tive, pratiquée en commun par des femmes du même 
I sang, sont d'autant plus fréquents qu'il existe une 
I certaine catégorie de libertins qui y trouvent un 
f piment à leur luxure; et, par conséquent. les proxé- 
nètes et les entremetteuses les favorisent de leur 
mieux et souvent même les provoquent. Quant aux 
pays, comme l'Angleterre, où la prostitution s'épa- 
nouit dans le régime de liberté rêvé par nos abolitîon- 
i nistes, cette infamie y est répandue au point d'être 
[ devenue banale; les mères s'y prostituent en compa- 
! de leurs filles, même extrêmement jeunes, soit 
} leur propre domicile, soit comme pensionnaires 
d'un disorderly-bouse (maison de débauche ou lupa- 
r libre). 



LA PEOSTTTl'TION- .' 



43 



^ « CJu'on ue croie pas f|ue les faits de ce genre 
ait rares îi Londres, écrit M. Léon Faneher. Lo 
leteur William Logan m'a raconté récemment qu'il 
lait de rencontrer dans un hôpital cinq Jeunes 
lies qui souffraient d'un mal honteus, l'une âgée de 
19, l'autre de douze, la troiBièrae de onze, la 
bnatrième de neuf, et la cinquième de huit. La mère 
) cette deriiiére était aussi dans l'hospice, attaquée 
> la même maladie. Trois de ces jeunes filles, trois 
aœurs, avaient été débauchées dans la maison de leur 
mère, celle-ci étant à la fois prostituée et proxénète. » 
« II n'y a, à Londres, qu'un article de débauche 
iQui floit couramment coté plue haut que la jeune 
Slle vierge, prise avant sa puberté, écrit à son tour 
'. Tictor Guîlhert de Préval; car. sous le régime 
mglais de la prostitution libre, on vole, à la sortie 
les écoles, de toutee jeunes fillettes, pour les mener, 
fous prétexte d'un gâteau, au disorderly-house, od 
s amateurs d'enfants peuvent, à leur fantaisie, com- 
mettre des viols, eu y mettant le pris. Si, dans un 
Inpanar londonien, la matrone, après avoir informé 
I client qu'elle a mis la main sur une fillette non 
taéfiorée, ajoute qu'elle possède aussi, mais sans pou- 
._ r en offrir )a primeur, deux jeunes sœurs, !e riche 
bibertin n'hésite pas; son Tice est aussitôt surexcité, 
n la seule pensée de s'allonger sur un lit avec deux 
Ifilles de même sang, d'un© étroite parenté. 

Un disorderly-house à la mode, situé dans une 
I des rues proches de Drury-Lane, est en faveur auprès 
[ des vicieux cousus d'or, uniquement à cause do cette 
F spécialité. La règle de la maison est d> coucher avec 
I deux femmes, proches parentes; au plus bas prix sont 
Vlea cousines germaines; on y trouve aussi un complet 
1 assoHiment de couples féminins, composés de la mère 



\ 



44 Ll PEOSTlTirTION A PARIS 

et de la fille; comme marchandise BUpérieure, 
lupanar libre tient un lot de sœura jumelles, deux 
petites irlandaises qui se ressemblent à s'y mé- 
prendre. Il 

Nous n'avons pas voulu que le lecteur restât aous 
une fausfle impression, après la dernière statistique 
que nous venons de donner; si nous décrivons la pro- 
stitution parisienne, c'est dans l'intérêt de la vérité,, 
c'est pour appeler l'attention sur une grave question 
sociale, et nullement pour qu'on s'imagine que notre 
capitale est la pire des Babylones. Le vice, chez 
nous, si affreux qu'il soit, est presque un lys en com- 
pariiison de la luxure britannique. C'est pourquoi il 
nous a paru bon de terminer ce cliapitre par deux 
édifiantes citations. 



CHAPITRK II 

MŒURS ET HABITUDES DES PROSTITUÉES 

l.Opiiiiuii <|uc les iiroHtiluéeht ont U'elleH-iiiciueSi 

Si l'on n'examine les prostituées que dans les rues et 
dans l'exercice de leur métier, si l'on ne fait attention 
qu'à leur ton, à leur impudeur et aux mots lubriques 
qui sortent de la bouche de quelques unes, on pour- 
rait croire qu'elles considèrent ce métier comme 
autre, qu'elles u'ont pour lui aucune antipathie, et 
que peu s'en faut qu'elles ne s'en fassent un titre de 
gloire. En effet, devant des étrangers, et devant de» 
jeunes gens nu des plaisantins a conversation libre, 
elles vantent leur savoir-faire, elles reprochent à leurs 
camarades leur inhabileté et leuivdonnent alors le uom 



m. 



LA FEOSTITUTION A PABIS 45 

fi-nssier temie de mépris par lequel elles 
idésignent souTent une femme honnête. 

Mais ce n'est pas dans ces circonstances qu'on peut 

Stndier l'esprit et le cœur da ces femmes; c'est en 

Ijnison, c'est à l'hôpital, c'est à Saint-Lazare, dans 

■ 'leurs moments de peine et de souffrances, c'est sui'- 
Itout lorsqu'on a au, par de bons procédés, s'attirer 
l.leur confiance, que l'on découvre ce qui se passe 

■ dans leur âme, et combien est pesant pour elles le 

■ poids de leur ignominie. On constate alors qu'elles 
TBavent qu'elles font mal, et l'on peut dire que c'est 

■ avec justice qu'on les méprise; aussi, pour la plupart, 
■ne sont-elles bien qu'entra elles et avec les mauvais 

ijets. 

Si, dans l'exercice de leur métier, elles affichent 
la hardiesse et l'impudeur, il en est un certain 
nombre qui, en d'autres circonstances, mettent tous 
leurs soins à ne point paraître ce qu'elles sont; celles- 
Ljà se mettent avec une décence remarquable, quand 
■elles viennent au Dispensaire pour y subir la visite; 
s'eiïorceut de ne pas être aperçues, y arrivant 
■presque furtivement et s'y glissant, pour ainsi dire. 
In en est qui, appartenant à des familles honnêtes, se 
^ confinent dans des quartiers très retirés, fuyant ainsi 
les personnes qui les ont connues; d'autres habitent 
leur quartier comme femmes honnêtes, n'y compro- 
mettent pas leur réputation, ne reçoivent jamais 
^d'hommes chez elles, n'ont même pas un amant, mais 
ront se prostituer chaque jour dans les arrondisse- 
Pments éloignés du leur. En général, les filles de cette 
■catégorie, d'ailleurs peu nombreuse relativement à 
jJa masse, ne redoutent rien de plus que la rencontre 
pde ceux qui les ont connues lorsqu'elles étaient 
j'en ai vu, dans les hôpitaux, qui 



46 LA PROSTITUTIOX A P.iEIS 

n'étaient devenues malades que par le aaisii 
ime de ces lîlles devint folle par suite de l'imi 
que lui causa la vue subite d'un de ses compatriotes. 
En résumé, toutes, ou presque tuutos, ont le senti- 
ment profond de leur abjection ; elles sont à, elles- 
mêmes un sujet d'horreur ; le mépris qu'elles 
s'infligent dépasse souvent celui que leur portent les 
personnes vertueuses: elles regrettent d'être dé- 
chues, elles font des projets, et même des efforts, pour 
sortir de leur état ; mai» tous ces efforts sont infruc- 
tueux, et ee qui les désespère, c'est de se sentir consi- 
dérées, aus yeux de toni le inonde, comme la fange 
É^t- l'ordure de la société. Au cours de mon enquête, 
uiie laitière, nouvelle mère de famille, fut autorisée 
à aller et venir à l'intérieur de Saint- Lazare : cette 

'< femme, fort naïve, mais eu même temps très sans 
façon, prit avec les fiU^ publiques une sorte de 

' liberté : elle leur parlait quelquefois daua les couia ; 
il s'ensuivit un incident des plus caractéristiques, 
quoi qu'il puisse paraîti'e invraisemblable : i Com- 
ment ! s' écriaient- elle s, elle nous parle comme si 
is étions d'honnêtes femmes! c'est abominable! * 
TJne d'elles, causant dernièrement avec un médecin 
.du Dispensaire, lui disait, dans l'effusion de son 
cœiu', qu'elle ne voulait pas s'attacher d'une manière 
particulière à un homme, parce, que, chaque fois 
^'elle l'embrasserait, elle croirait le souiller par son 
éOntact. Me trouvant un jour à i'improviste daus une 
^lle de Saint-Lazare, sans être Japerçu, j'entendis 
une fille s'écrier, en admirant la beauté du ciel : 
« Que Dieu est bon de nnug envoyer un si beau 
temps I il nous traite mieux que nous ne méritons [ ■ 
Et toute la salle de répondre avec ensemble : « CoHt 
hh:, vv.u ! » 







■m 



pauis 47 

D'autre part, et! sentimont <le leur abjection et du 

ns qu'où leur porte exeita davantage leur orgueil, 

leur amour-propre ; défaut qu'elles poussent à un dc- 

_ :é excessif i celui qui les blesse de co côté encourt à 

[jamais leur disgrâce et ne peut riea obtenir d'elles ; 

'mais, ai on leur parle avec douceur, si op lem- té- 

inigne de l'intérêt, ai on leur, fait entendre qu'elles 

luvent rentrer dans la société et recouvrer l'estime 

■publique, ce seul espoir les ranime et les fait .palpiter 

de joie. 

Enfin, par un phénomène singulier, leur vanité 
domine mêm-e da.ns la honte ^^^'élles ont d'elles- 
mêmes, eu ce. sens que, tout en ayant conscience de 
leur ignominie, elles s'imaginent être moins déehuei 
selon le dçgré des bénéfices que leur vaut leur vil 
métier. De là, le mépris que les dilîérentes classes 
de prostituées ont pour «Milles qui sont au-dessouf^ 
d'elles, et la baine que les. classes inférieures portent, 
LUS supérieures ou à celles qui l'emportent eu (^râcea 
eu beauté ; ce sont des. disputes contiotielles, à 
int- Lazare, sur ce chapitre ; la grosse injure, entre 
jHes, est de se traiter de allés à vingt sous ; même 
illea qui appartiennent au plus bas étage ne veillent 
LB en convenir, et rien n'est curieux comme de les 
itendre se quereller, quand elles font assaut de van- 
irdise au sujet du priîc auquel elles prétendent 
tndre leurs faveurs. 



. Du scntiiuent religieux chez les |iro«titute, 

Sûus le rapport religieux, on peut dire qu'elles 

git toutes d'une ignorance profonde, sauf quelques 

options rares ; ce qui ne les empêche pas d'être 

Kuperatitieusea à l'excès. En d'autres termes, les 



48 L.\ pnosTixrTXON a taris 

croyances qu'elles r>nt soni des plus vagues, leur inca- 
pacité (le suivre un raisonnement eu matière reli- 
gieuse ou philosophique eat absolue ; mais, comme il 
leur reste quelque chose de leur ancien temps de 
catéchisme, leurs paroles, aussi bien que leurs actea, 
sont en perpétuelle contradiction. 

Dana l'exercice de leur métier, dans les conversa- 
tions qu'elles ont aven leurs clients de passage, elles 
n'épargnent sur les objets du culte et de la religion, 
ni les quolibets ni les sarcasmes ; par cimtre, à la rue, 
elles ne manquent pas de se signer avec un zèle pieux, 
lorsqu'elles rencontrent un enterrement, et, quand 
vient le jour des lîameaux, elles t'ont le plus ^and 
cas des branches de buis bénit que distribuent les 
églises. Eu danger de mort, elles réclament le prêtre, 
aussi bien à l'hôpital que si la maladie les a subite- 
.ment saisies dans leur chambre, même en maison 
publique de prostitution. 

Une d'elles reçut un rendez-vous dans l'église 
Saint-Sulpice ; mais elle le refusa, disant qu'elle 
était indigne d'entrer dans une église, et qu'elle 
avait juré de n'y pas mettre les pieds tant qu'elle 
ierait son métier. Un m'a cité aussi l'histoire d'une 
fille de la plus basse classe, qui perdit son enfant à 
la suite d'une longue maladie ; pendant tout le temps 
que dura cette maladie, la mère ne cessa pas de faire 
des neuvaines à la vierge du Bon-Secours et de pla- 
cer devant son autel des cierges allumés. li n'y a pas 
longtemps qu'une prostituée étant morte à son domi- 
cile, toutes ses camarades ae cotisèrent poui' lui faire, 
quelques jours après, un superbe service et payer un 

t grand novibre de messes. La m6me chose étant arri- 
Tée à une autre fille d'une classe moins élevée, ses 
camarades, vêtues de blanc, la conduisirent à l'église 



(S 
a' 



LA PROSTITUTION' A PABIS 4» 

mirent autour do son corps un nombre prodigieux 

cierges,.. Qui le croirait? on a vu une ancienne 

istituée, devenue dame de maison, assister tous les 

anches à la grand'niessc de Saint-Germain- 

^Auxerrois, sa paroisse, où elle se rendait gravement 

■ec un magnifique livre d'heures et où elle ne per- 

t pas un mot du prédicateur ; en outre, aa chambre 

.it pleine de tableaux de saints, avec une statuette 

sur la cheminée, et un grand crucifix dans 

Icôve. 

La croyance à l'influence néfaste du vendredi est 
ihez ces filles ; c'est le jour où les inscrip- 
iona et les visites sont le moins nombreuses au Dis- 
pensaire. Enfin, leur superstition est telle, qu'il y en 
a qui ont fait dire des messes, lors du conseil de révi- 
sion, pour obtenir du ciel que le service militaire fiit 
évité à leur amant ; d'autres, si leur souteneur passe 
à une rivale, font également dire des measea pour le 
"avoir, ou encore adressent une supplique h saint 
toine de Padoue, dont elles alimentent le tronc 
■ec gênéi'osité. 

a. L«s pruHtituées, malgré leur» linliitudes et 
Ieur« vic-es, t-oitservent-elles <|uclque reste de 

Si on ne juge les prostituées que d'après leur lan- 
gage et leur tenue en public, on pourrait croire que 
la pudeur, qui fait le plus bel ornement de la femme, 
leur est devenue un sentiment tout-à-fait étranger ; 
mais, si on les examine attentivement et dans des 
circonstances particulières, on trouvera que les plus 
grands écarts n'ont pas toujours effacé ce sentiment, 
et qu'il en reste chez quelques unes au moins des 
vestiges. 



^^avi 
Hknl 
^^Kve 



50 L4 PltOSTITOTION A PAKIS 

Quand j'entrais à l'improvÎBte au Dépôt de la Pré 
fecture on dans les dortoirs de Saiiit-Lazt 
moment de leur lever ou de leur toilette, je les voyaii 
à l'instant se couvrii' ou croiser les bras sur lei 
poitrines. Si l'une d'elles, étant ivre, a été dépouillé 
de quelques uns de ses vêtements et conduite ains 
au Dépôt, rien ne pouiTa la forcer de paraître en c 
état devaut le conimist-aire interrogateur ; elle era- 
pruntera à ses camarades ce qui lui manque, et toute 
s'empresseront de le lui fournir. Au Dispensaire, elle 
s'attachent à un médecin particulier, elJea ne vien 
nent qu'aux heures où elles sont sûres de le trouve! 
et manifestent leur mécontentement, lorsque p4 
hasard il admet avec lui une personne étrangère. J'^ 
suivi les cours que faisait Michel Cullerier, et je n'a 
jamais oublié, tant j'en fus frappé, l'impression prd 
fonde que produisait sur les prostituées la démonstra 
tien de leurs maladies devant un nombreux auditoire 
toutes sans exception, et jusqu'aux plus ékontée£ 
devenaient cramoisies ; elles se voilaient la face, 
leurs deux mains, et regardaient comme un suppIiQ 
l'épreuve à laquelle on les soumettait, 

4, Car»fti-re et tournure d'esppil des prostituées 

La légèreté et lu mobilité d'esprit constituent 11 
fond de leur cai'actère: rien de plus difficile cjue d 
leur faire suivre un raisonnement ; la moindre choai 
les distrait et les emporte. En outre, on dirait que ca^ 
malheureuses ont un besoin de mouvement et d'à 
tation qui les empêche de rester en place, et qui lei 
rend nécessaires le bruit et le bavardage sar 
ni raison ; il est impossible de dire jusqu'où ■ 
loquacité ; ceci se remarque partout où elles i 



w 

^ T\'. 



LA PROSTITtmOtf A PAEIS 51 

D'autre part, à propos de rien, elles déménageut 
sans cesse, ou encore passent d'une clasae dans une 
autre, tout à tour filles en carte et filles do lupanar. 
Cette agitation et cette inconstance ne seraient-eLies 
pas le signe d'un malaise intérieur et la preuve 
qn'elles recherchent partout ua bonheur qui les fuit ? 

Allons plus loin. Ke pourrait-on pas expliquer, par 
cette tournure d'esprit, l'impreToyance de ces femmes, 
le peu d'inquiétude que leur procure ta pensée du 
lendemain, et l'indiflerence complète où elles parais- 
sent être sur leur sort à venir? Ne serait-il pas 
possible d'attribuer à ce caractère, et, pour tout dire, 
à cette altération de l'intellect, leurs fautes et leur 
inconduite, et par conséquent atténuer beaucoup leur 
c alpabilitc aus yeux des gens sensés ? 

^^Kâ< La manie du talunage chez len \n-ostituées. 

On sait le goût de nos soldats et de nos marins pour 
ces figures plus ou moins bizarres qu'ils s'impriment 
en bleu ou eu rouge sxir la poitrine et sur les bras ; 
cette manie du tatouage s'est tranKiuiso aux filles 
publiques, et on In constate chez toutes (ou presque 
toutes) celles des classes inférieures. 

Chez les soldats et les matelots, ces figures, impri- 
mées d'ordinaire sur les avant-braa, sont en général 
de grandes dimensions et représentent des sujets 
dont le goût et l'esprit sont assei: variés. Au contraire, 
chez les prostituées qui ont cette manie, jamais leur 
tatouage ne se trouve sur les paities du coi'ps habi- 
tuellement découvertes ou qu'elles peuvent découvrir 
dans les usages de la vie commune ; c'est sur le haut 
du bras, sur le deltoïde, ou dessous des mamelles, et 
L^nr toute la poitrine, qu'on le trouve ordinairement : 

1 



52 LA F 

il consiste presque totijoura en nn prénom suivi de cea 
mots. Pour la Yie, ou de l'abréviation, P. L. V. ; 80ii-<J 
vent cette inscription est entre deux petites fleurs on 
BOUS deux cyBurs entrelacés et traversés d'une âèche;J 
Au surplus, ce qu'on sera étonné d'apprendre, c'eafej 
que ce prénom est masculin ou féminin, suivant l'a 
de la fille: si elle est jeune, le tatouage présenlÉ 
presque toujours un prénom masculin : ai ell 
d'un certain âge, c'est le plus ordinairement un 
nom féminin qui est inscrit, et, dans ce cas, il i 
constamment tracé dans l'espace qui sépare le pubis 
du nombril. On comprendra mieux ce que cette der* 
nière particularité sijfniHe, quand on aura lu ce que 
je dis plus loin au sujet des tribades. 

Ces inscriptions sont une preuve de la facilité avei 
laquelle ces femmes cTiangent d'amants. Sur le busti 
d'une femme, j'ai compté plus de trente de ces pro 
testations d'attachement pour la vie, avec tout autait 
de prénoms difEérents, sans compter celles qu'elle 
pouvait avoir sur d'autres parties du corps. Cepen- 
dant, quelques unes, en inscrivant un nouvel aman^ 
effacent le nom du prédécesseur : pour cela, elles eat 
ploient de l'indigo dissous dans du vitriol ; avec ni 
pinceau, elles en humectent l'endroit tatoué ; l'épi 
derme s'enlève alors, et, avec lui, la partie du cho 
rion sur laquelle avait été fixée le corps étrangef 
colorant ; il ne résulta de cette opération qu'utt 
petite cicatrice, nullement difforme, un peu moinj 
colorée que la peau qui l'entoure, et légèremenl 
fripée. J'ai pu constater l'existence de quinze de eei 
cicatrices sur les bras, la gorge et la poitrine d'uni 
fille qui n'avait pas vingt-cinq ans. i 

Je dois enfin dire que ces tatouages ne contiennent 
1 de contraire à la décence ; à cette règle générale; 



LA PEOSTITTTTIOS A P.UITS 03 

jamais conataté qu'une exception, sur un 

tavre de prostituée qui me servit it des reelierehea 

iatomiques ; et eucnre cette inscription exception- 

Hle était plutôt une plaisanterie qu'une obscénité. 

a est lie même des figures dessinées en tatouage: 

médecins de Saint-Lazare n'en ont jamais vu, de 

mon temps, qu'une seule qu'on pût blâmer. Sous ce 

rapport les proatituées diffèrent beaucoup de leurs 

souteneurs. 

G. A quoi les prostituées passe» t-cUcs li-ur temps 
daus rintervalle de l'exercice de U'up inOtiep"? 

Les différentes classes présentent à cet égard des 
différences extrêmes, Les neuf dixièmes, entre les 
moments passés avec le client, ne font rien du tout. 
Celles d'une classe un peu relevée se lèvent tard, se 
lavent tant bien que mal, boivent, mangent, sautent, 
ou se couchent nonchalamment sur leur lit ou sur 
quelque meuble ; les plus nombreuses, celles des 
classes inférieures, restent dans les cabaretu ou à la 
porte (le leur maison, boivent et mangent sans règle 
ni mesure, comme les premières, et causent avec le^ 
mauvais sujets qui les fréquentent. Bans la première 
catégorie, celles qui savent s'occuper fcnt des brode- 
ries, des fleurs, des objets de toilette : quelques unes 
lisent ; très peu font de la musique. Parmi les prosti- 
tuées qui ne s<mt pas en maison publique, il y en a 
qui exercent des métiers, mais fort peu ; dans ce cas, 
ces filles vendent de n'importe quoi dans les rues, et 
leur vente est un prétexte à Taccrochage. 

Les prostituées qui lisent ont pour lecture favorite 

les romans publiés en feuilleton ou en livraisons 

illustrées, surtout ceux qui décrivent des scènes tra- 

^dques capables d'exciter de vives émotions. Ce qui 



54 



Li FEOSTITUTION A PARIS 



paraîtra, peut-être singulier, c'est qu'on n'a jamais 
rencontré dans leurs mains ces livres licencieux et 
obscènes que les jeunes gêna recherclient avec tant 
d'ardeur et qui en corrompent un si grand nombre. 
Qu'est-ee, en effet, que cea sortes de livres pourraient 
apprendre à ces filles ? la satiété ne rend-elle pas fade 
et monotone ce qui dans toute autre circonstance est- 
un puissant ai^illon? 

Toutes les prostituées, quelles qu'elles soient,, 
aiment beaucoup la danse ; à Paris et dans sa ban- 
lieue, elles vont, chaque fois que cela leur est pos- 
sible aux établissements de bal où elles savent 
rencontrer les gens à leur convenance. Un autre 
passe-temps qui leur plaît fort ,au8si, c'est cplui des 
cartes, principalement pour se faire des réussites. 
Enfin, elles jouent avec passion au loto, auquel elle» 
passent des heures entières, quand elles sont en- 



Paris est par excellence, le pays des contrastes : la 
plupart des prostituées y font leur métier le soir, 
mais il en est d'autres gui l'exercent toute la journée;. 
il s'en trouve même qui ne le font qu'à ceiiaines 
heures du jour, par exemple, de dix heures du ma- 
tin à quatre heures de l'après-midi. Ces dernières 
sont des filles ayant leur domicile, et qui se sont fait 
une clientèle ; passé l'heure qu'elltis se sont Ëxée 
pour la réception des amateurs payants, elles ferment 
leur porte et courent tonte la soirée, avec leur ainant 

..de cœur, les bals, les spectacles, les cafés-concerts. 
Au sujet de ces clientèles que se font certaines 
filles, il en est de vraiment curieuses. Ainsi, j'ai 
connu une prostituée, ma foi, très ingénieuse, qui 

Ldéclarait garantir la santé à tous ses clients. Pour 
sJa,e}lc ne recevait que des hommes marjês.qui tous 



U FKOSTITrTIOS A P.UtlS 

\t CDnnnissaîeiit : od n'était admis chez elle que sur 

I présentation de quelques habitués et aYec l'aesen- 

n^nt do tnna les autres, an nombre de quai'aiite à 

iquante; tout îionime qui devenait veuf rentrait 

jiB la classe des célibataires, et, d'après les règle- 

tenta de l'association, ne pouvait plus prétendre aux 

(■veuM de la fille; aussi les mettait-elle à un pris 

t élevé. On conçoit aisément qu'il faut un certain 

prit et nn grand savoir-faire pour sortir ainsi de 

îng et s'élever, malgré tons les obstacles, â une 

ieition tout exceptionnelle. Mais, comme dans 

mtes les carrières les hommes de génie sont rares, 

l'en est de même dans le métier de prostituêo ; pour 

: ou trois qui surgisseikt et arrivent au pinacle. 

mbien no font que de médiocres affaires ! combien 

fcupissent dans les derniers rangs, et meurent dans 

■misère et dans la dernière dea abjections 1 



pFaux-nonia pris par la plupart des prostituées. 

■ Avant qu'on exigeât l'acte do naissance pour l'in- 

Hfiption au Bureau des Mœurs, les trois quarts des 

sstituées avaient l'habitude d'altérer leur nom ou 

prénoms, ou même d'en changer tout-à-fait,. 

tojourd'hui, on est à peu près sûr d'avoir leur véri- 

pjle nom; laais, lorsqu'elles restent daus la caté- 

3 des filles isolées, il s'en reneontro encore assez 

lovent qui emploient ce stratagème pour dérouter 

inspecteurs. Voici les principaux cas qui les 

terminent à recourir à de telles niaes; pour éviter 

"s punitions administratives qu'elles ont encourues ; 

r cacher leur manquement à un grand nombre de 

bîtes sanitaires; par crainte de l'administration, fi 

I Buite d'un départ furtif de maison ç^j^jY-iti^t, wj«ï^ 



56 LA PROSTITrTION A PAHIS 

emporté des Tétemeata appartenant à la tenanciliTe. 

Quand elles se font ainsi passer pour une autre, dont 
elles savent le lieu de naissance et l'âge, se rappro- 
chant du leur, c'est qu'elles savent aussi que la per- 
sonne dont elles prennent le nom est éloignée depuis 
longtemps du paya natal ; mais elles ne poussent 
l'audace si loin, que lorsqu'elles ont commis déjà 
plusieurs méfaits ; car, la punition étant tnujours 
plus forte pour les iillea qui sont eu récidive, elles 
cherchent par tous les moyens possibles h l'éviter. En 
dehors de ces cas, ou en voit quelques iiues' changer 
de nom sans aucune raison apparente, pour le seul 
plaisir de tromper l'administration; ces dernières 
appartiennent à la catégorie des plus mauvais sujets. 
Indépendamment de ces supercheries relatives à 
l'état-civil, qui d'ailleura deviennent de plus en plus 
rares, il y a lieu de relater l'usage des sobriquets que 
les prostituées se donnent on reçoivent de leurs 
camarades et sous lesquels elles sont volontiers com- 
nnea. Ces noms de guerre offrent de grandes dissem- 
blances, suivant les classes de Elles, et donnent à 
eux seuls une idée de ce que peuvent être leur clien- 
tèle, leur genre de lectures, l'éducation qu'elles ont 
acquise, et la valeur qu'elles attachent aux expres- 
sions. 

En voici quelques spécimens : 

Glaises inférieuree. — Rousaelctte, M ont- Saint-Jean, 
La Courtille, Parfaite, Colette, Boulotte, Monrette, La 
Kuelle, L» Boche, Bocote, Poil-Raa, Poil-Long, Pompon- 
nette, Bâton, Baquet, La Picarde, la Provençale, l'Ësp^ 
gnole, Belle-Cuiaae, Faux-Cul, Belle-Gueule., la Bancale, 
i Bœuf, Crucifix, Beignet, Bouquet, la Blonde, Blondi- 
L nette, Brunette, Louehon, Peloton, Rosier, Papillon, Mi- 



^^6s 



LA FEOSTIXrTIO^T A PARIS 57 

l'Impératrice, Fusil. Cocarde, Bourdonneuae, 
gitte-d' Araignée, Mange-Tout, la Goulue, Moustache, la 
mal eu se, BastringTiette, etc. 

'lasêen eupé?if lires. — Armide, Zulnia, Oalliope, Irma, 
Sarah, Arnaud a, Paméla, Natalie, Sidonte, 
ipe, Flore, Thalie, Arthémiae, Balzamine. Armande, 
Ûocadie, Zoé, Malvina, Octavîe, Théo, Virginie, Frédé- 
gonde, Azélina, lamérie, Palmyre, Lodoïska, Clorinde, Ab- 
pasie. Thaïs, Lucrèce, Clara, Flavie, IrÈne, Angélina, 
Emélie, Anaïs, Delphine, Fanny, Célina, Froufrou, Cal- 
lipyge. Naïmé, Sélika, Olga, Véra, Alexandra, Carmen, 
Evelyn, Judith, Edith, Eva, Iris, Herminia, Rosabel, 
Edwige, Rosamonde, Ulrique, Yolandej etc. 

[.Cette liste eat farcêment incomplète. J'ajoute que 
Burnoma les plus en faveur sont toujours ceux, 
[es liérnines de romans à la mode, dea personnages 
principaux d'opéras et d'opérettes. Enfin, quelques 
filles prennent un double-nom, c'est-à-dire ajoutent 
à leur prénom celui de leur souteneur, surtout lorsque 
cet ensemble produit un effet iiarmonieiis. 

H, Malpra|iPOt('- de-n prostituées. 

Voici encore une constatation qui étonnera sans 
doute: les prostituées se distinguent par une indiffé- 
rence absolue en ce qui concerne les soins de propreté, 
soit du corps, soit des Têtements ; celles de ces filles 
qui vont au bain sont très rares. A la presque unani- 
mité, elles n'ont soin que de ce qui les pare et les 
couvie extérieurement; le reste est entièremnt né- 
gligé. 

Hors des regards de leurs cîients, peu leur importe 
de porter des vêtements en lambeaux ou même de 
n'en point avoir ; elles ne témoignent pas le désir de 



1 



i 



58 LA PEOSTITTTTION A PARI 

?voir du liEge blanc, et ce n'est quii l:i dermes 
extrémité qu'elles nettoient cehti qu'elles pdasèdent. 
A l'égard des maisons de tolérance, l'administration. 
peut, du moins, agir jusqu'à un certain point pour 
combattre ces tendances à la malpropreté ; mais elle 
est désarmée via-à-via des allés qui vivent indépen- 
dantes chez elles ou en g-arni, à l'état d'ianlées. D'ail- 
leurs, leurs clients les prennent naïvement pour des 
personnes très propres, parce qu'ils les voient se livrer 
devant eux à des ablutions des organes génitaux ; et, 
en effet, ce lavage spécial, qui est plutôt excessif 
cbez beaucoup, n'est négligé que par les fîUes abso- 
lument abruties et dégradées : mais les libertins 
ignorent que le nombre de prostituées que le Diapen- 
î est sans cesse obligé d'envoyer à l'hôpital 
comme galeuses peut compter sérieitsement. et qu'il 
est surtout énorme parmi les filles arrêtées pour pro- 
stitution clandestine; si les amateurs des Phrynés 
modernes lisaient les statistiques annuelles, ils se- 
raient dégoûtés et épouvantés. 

Uiiant aux 'poux vénériens, vulgairement appelée 
morpions, aucune classe de prostituées n'en est 
exempte. Seulement, il est juste de dire que ce sont 
les débauchés qui véhiculent cette vermine des filles 
de basse classe à celles d'un rang plus élevé; car 
ce serait une erre\ir de croire que les libertins riches 
sont escluaivement clients dos horizontales plus ou 
moins huppées : les dépravés, payant bien, qui vont 
rechercher des jouissances ignuliles dans les bougea 
les plus infects, sont innombrables ; il leur arrive 
donc maintes fois d'y recueillir la vermine véné- 
I Tienne et de la transporter ensuite dans les lits de 
I soie des courtisanes à la mode. 



, PHOSTITUTION A PAEIS 



9. Défauts psirticuliers aux protttituées. 

Pl faut mettre on tête do leurs défiiuta ]a guur- 
mdise, et l'amour du tïh et des liqueurs fortes, 
nr gloutoQuerie est extrême : on eu voit qui man- 
iait continue II émeut, et qui consomment ce qui sufii- 
t à trois ou quatre femmes de le\ir âge; c'est une 
ttaine catégorie de clients, cens qui ue craignent 
B de sortir avec elles, qui leur font conti'acter cette 
aitude, en les emmenant dîner dans les gargottes 
les restaurants de divers tons. Quant à leur goût 
Oir les liqueurs fortes, il est général, bien qu'à des 
différents ; elles le contractent de bonne 
Rire ; la plupart ne commencent à boire que poiir 
tourdir; peu à peu, elles s'y accoutument, et 
c'est une passion tellement forte qu'elle 
Jppose a. tout retour à la vertu; elle finit m&me 
f en plonger quelques unes dans le dernier degré 
îbrutis sèment. 

V cette cause première qui agit sur toutes, il faut 
Bjoindre une autre bien plus puissante, mais spé- 
L la basse classe des prostituées, la plus nom- 
lïreuse : les gens du p»uple, et particulièrement les 
soldats et les marins, sachant par expérience combien 
i'abus dea lîqiieurs fortes aggrave les maladies syphi- 
litiques, s'imaginent que la fille qui ne boit pas outre 
mesure n'est sobre que parce qu'elle est malade ; ils 
la font donc boire pour s'assurer de son état de santé, 
et, dans ces niomenta d'orgie, n'épargnent pas les 
libations. Avec une pareille vie, qu'on pense à l'état 
d'une malheureuse obligée de tenir tête, dans le 
même jour, â tant d'individus différents 1 

Par contre, les filles qui n'ont pas une clientèle 
populaire, sachant que de tels excès éloigneraient 



LA FEOSTITUTIOX J 



^^fe d'elles pour toujours, s'enivrent assez rarement ; 
^^H elles font grand usage du punch, litjueur que toutes 
^^B les prostituées préfèrent ; elles consomment aussi 
^^B beaucoup de vin de Champagne. 

^^B Plus générale encore est, chez les prostituées, l'ha- 

^^B bitude du mensonge, née de la position toujours 
^^m fausse et gênée dans laquelle elles vivent, et de l'opi- 
^^B nion qu'elles savent qu'on a d'elles ; ne voyant par- 
^^Ê tout que des ennemis et ne pouvant les fuir, elles 
^^B s'accoutument à tromper tout le monde et finissent 
^^B par mentir sur des riens. Il faut don* être très circon- 
^^B spect dans l'emploi des renseignements qu'elles peu- 
^^B vent donner, et se croire dans l'erreur jusqu'à ce 
^^B qu'on Boit éclairé ; mais elles se coupent aisément, 
^^B et, lorsqu'elles sont jeunes, elles ne savent pas dissi- 
^^fl muler longtemps. Il n'en est pas de même de celles 
^^H qui ont mûri dans le métier ; il est difficile de conce- 
^^P voir à quel degré elles portent l'art de feindre ; lei 
^^ vieilles surtout sont de vrais phénomènes de dissi- 
mulation. 

la colère est fréquente chez les prostituées, qui, 
dans cet état offrent une étonnante énergie de corps 
et d'esprit : c'est un flux de paroles qui, par leur 
nature et l'originalité des expressioas, forment une 
éloquence d'un genre à part, laquelle ne saurait se 
confondre avec celle des halles et de la populace : 
dans cet état, elles en viennent souvent aux mains, 
se battent à outrance et se font des blesstires quelque- 
fois très graves. En vingt ans, à Saint-Lazare, les 
médecins ont vu douze de ces blessures se terminer 
par la mort. Ces accès de cojfere ne sont souvent dus 
qu'à une jalousie excitée par ujie préférence, lin 
reproche de laideur, et d''autre8 raisons aussi futiles : 
les prostituées sont toutes, sous ce rapport, plus 



Il'' enfai 



LA FEOSTITUTIOX A FAEIS Cl 

enfants que les enfanta de douze ans; elîen tiennent 
aussi beaucoup à ne pas passer pour lâches, et se 
croiraient déshonorées si elles laissaient une injure 
impunie. 

D'ordinaire, dans ces disputes, elles n'emploient 
que les pieds et les poings, mais quelquefois aussi 
des instruments tranchants, et plus valontiers leur 
peigne à chignon. J'ai vu cinq à aix blessures pro- 
fondes faites avec une pièce de monnaie de cuivre, 
arme traîtiesse, dont la moitié avait les bords ai- 
guisés. 

Cette colère, poussée jusqu'à la furie et capable de 
produire des déterminations si graves, tombe et 
s'éteint généralement aussi vite qu'elle s'est allumée ; 
c'est un feu de paille, La réconciliation se fait promp- 
tement, excepté pourtant dans les querelles entre 
tribadea. 

lO. Boiinefl finalité» des prostituée». 

n serait injuste de méconnaître leur bon cœur ; 
car un de leurs caractères tlistinctifs est de a'entr'ai- 
der.Si l'une d'elles tombe malade,c'est une désolation 
générale parmi celles qui vivent avec elle ou qui la 
fréquentent ; s'agit-il d'une prostituée isolée, ses- 
camarades de trottoir s'empressent de la secourir, 
elles la conduisent à l'hôpital, et viennent souvent la 
visiter. A Saint-Lazare, quand une fille j est entrée 
avec des vêtements prêtés ou qu'elle les a vendus pen- 
dant sa détention, il faiit voir, au moment où elle va 
sortir, avec quel empressement toutes les autres se 
cotisent pour lui procurer ce dont elle a besoin ; elles 
se dépouillent elles-mêmes de ce qui leur est nécea- 



Hiaire. 



i 



LA FHOSTITrTlO.N- A PABIR 

Ce caractère généreux, qui les rend piotliguea de 
l'tout ce qu'elles ont, est une particularité géuérale et 
loonstante ; il est d'autant plus remariiuable qu'il les 
j)orte à secmirir les mallieureux qui n'appartiennent 
la à leur classe, tels que les vieillards sans appui, 
8 pauvres infirmes, ou des familles nombreuses dans 
|i|a misère. 

Elles deviennent surtout l'objet d'une étude fort 
intéresBante, lorsqu'on les considère comme mères et 
somme nourrices. 

La plupart de celles qui n'ont pas d'enfants s'en 

îSésolent : j'en ai rencontré qiiî m'avouaient avec 

■rcandeur, , et avec une grande énergie d'expressions, 

T qu'elles trouveraient, dans les soins que réclament 

[.ces petits êtres, une jouissance qui leur ferait oublier 

Lies peines inbérentes à leur méfier ; l'une d'elles me 

Bdisait, eu pleurant, que la dignité de mère la relève- 

pTait à ses yeux de l'abjectiou dans laquelle elle était 

tombée^ et qu'elle se sentait capable' de s'attirer 

l'estime de ceux qui verraient avec quel soin elle 

s'acquitterait de toutes les fonctions imposées aux 

femmes par les lois de la nature. Une de ces malheu- 

I reuses devint folle par suite du cbagrin qu'elle 

1 éprouva d'accoucber, pour la troisième fois, d'un en- 

I fant mort. Ce besoin que les prostituées éprouvent 

] de devenir mères, pour se rébabiliter, pour recevoir 

i les caresses d'un être pur, elles qui ne reçoivent que 

i mépris des hommes auxquels elles se vendent et mau- 

i traitement de ceux auxquels elles se donnent, 

r ce besoin est si impérieux, que des filles qui ne pou- 

t valent devenir mères, ou dont l'enfant n'avait pas 

I survécu, en ont volé; déplorable larcin aussi fatal 

: pauvres êtres soustraits à leur famille qu'aux 

?08tituées elles-mêmes. 



^Vl- I 



Li PEOSTITTITION A TARIS G3 

1 Ajoutons ceci, avec MM. Tréb\ieliet et Poirat-Du- 

fial : quoi qu'il eu soit du dévououient dea filles 

hnbliques pour leurs eniants, l'administration exige, 

pins l'intérêt même de ces enfants, que leurs mères, 

jbaîti'esses de maison ou filles, les fassent élever hors 

j leur domicile, à partir de l'âge de quatre ans. 

TJne obseiTation constante, c'est qu'une fille pu- 

1)lique, en devenant grosse, s'attire aussitôt les préve- 

lances et les attentions de toutes ses camarades. Maïs 

■c'est surtout pendant et après l'accouchement que ces 

■ marques d'intérêt redoublent et ae multiplient : c'est 

pà qui lavera le linge de l'eniant; c'est à qui soignera 

la mère; c'est ii qui s'empressera de lui prodigiier 

tout ce dont elles peuvent se passer elles-mêmes. 

L'ejii'ant s'élêve-t-il, il ne manque pas de berceuses; 

i se l'arrache; toutes veulent l'avoir; c'est au point 

i mère n'en est plus la maîtresse. 
Ce qui précède s'applique aux prostituées qui se 
mettent aux règlements administratifs, et non 
Bjïux prostituées clandestines, lesquelles, au contraire, 
lorsqu'elles accouclieut, ne sont pas plus disposées à 
jgarder et à nourrir leurs eniants que les filles-mères. 
Cette différence s'explique naturellement par la posi- 
'lon des unes et des autres: la fille soumise, prostî- 
snée avérée, se relève en élevant sou eniant ; l'insou- 
lise, prostituée clandestine, plus hypocrite encore 
q^ue Ttcieuse, ne voit dans son eniiint qu'une gêne 
9 l'exercice de son bonteux métier ; la fille-mère, 
e aussi, si elle gardait cei enfant qui est le fruit de 
a faute, ne ferait qu'afficher sa houte et se fermerait 
^B portes auxquelles elle compte frapper pour de- 
mander du travail. 

C'est donc un devoir pour moi de dire bien haut 
Hu'il n'est pas de meilleures nourrices que les prosti- 



€4 LA PEOSTITUTION A TAEIS 

tuées inscrites, soit eous le rapport des soiiiB, soit aous 
le rapport de rattachement qu'elles ont pour leurs 
enfants et pour les nouri'issons qu'elles adoptent ou 
qu'on leur donne. L'une d'elles, ayant perdu un petit 
garçon d'un mois, faillit devenir folle de chagi'in; elle 
ne se consola que lorsqu'on lui eut donné un enfant- 
trouvé. Une autre, qui demeurait en chambre, 
s'étant fait mettre en prison pour ime dispute assez 
grave, ne put emmener son enfant avec elle; il fallut 
qu'elle le plaçât: cette séparation de son bébé lui 
causa un tel chagrin, que je la vis dépérir de jour 
ur, et, pour lui sauver la vie, j'obtins du préfet 
de police sa libération, bien avant l'expiration du 
temps que devait durer son emprisonnement. 

On se demande enfin comment ces enfants sont 
élevés et ce qu'ils deviennent. Il règne à ce sujet une 
incertitude et ua vague que je n'ai jainaig pu éclair- 
cir; ■ce qui est certain, c'est qu'il en meurt un nombre 
prodigieux. Quant à cens, qui survivent, leurs mères 
observent- elles de la réserve dans l'exercice de leur 
métier, pendant qu'elles les élèvent? Il est évident 
que l'administration ne tolère exceptionnellement ces 
enfants aux filles ayant leur domicile à elles, que sï 
elles sont bien notées comme se conduisant avec une 
extrême discrétion. * 

Voici, à ce propos, l'histoire d'une race rocheuse dont 
la conduite avait toujours été très réservée, jusqu'au 
jour où je ne sais plus quelle contravention adminis- 
trative lui valut un certain temps de détention. Cette 
e avait une petite fille de quatre à cinq ans; une 
'oisine l'amena un jour pour voir sa mère; la fillette, 
interrogée devant moi, dit entre autres choses: « Moi, 
■este seule dans ma chambre; maman me couche 
lUs les jours de bonne heure pour aller chercher 



i 



LA PROSTITUTION A PARIS 66 

papa; mais, bien que je soia seale, je n'ai jamais 
peur. » Et, comme on lui demanda ce qu'était son 
çère et si elle le connaissait, elle nous répondit: 
■ Mon papa? je ne l'ai jamais vu; quelquefois, le 
soir, si je ne dors pas, je l'entends, quand il cause et 
rit avec maman. » 

On voit, par cet exemple, qu'il est des prostituées 
qui mettent de îa retenue dans leur conduite, par 
égard pour leurs enfants; et même quelques unes les 
élèvent bien, et font tout |ec qui dépend d'elles pour 
que ces enfants ignorent toujours ce qu'elles sont 
elles-mêmes. J'aime à pouvoir dire que, d'après les 
preuves que j'ai acquises, les mères qui se conduisent 
ainsi forment \h masse de celles qui conservent leurs 



CHAPITRE m 

LES AMANTS DES PROSTITUÉES 

t. Les amants de rociir, les sauteaeurs. 

I Si le libertinage et l'impétuosité des passions sont 
i cause première de la prostitution pour un eerfain 
Qibre de filles, on peiit, d'autre part, regarder 
ne règle constante que ces malheureuses, 
[ne fois lancées dans leur nouvelle carrière, restent 
froides et indifférentes pour tous ceux qui les ap- 
prochent, si toutefois un sentiment de dégoût et une 
véritable répugnance ne sont pas cachés sous les ca- 
resses que l'appât de l'or et souvent la faim leur font 
jirodiguer. Ne soyons donc pas snipris de les voir 
s'attacher à un homme d'une manière particulière, et 



. PEOSTITUTlOy i 



^m 6G 

^^1 tâcter de combler par là le vide immense que laissent 

^^B néceHsaireineiit dans le cœur la vie qu'elles m.èiieut, 

^^H lee mépris dont on les accable, et les remords qui les 

^^1 doivent aBsiéger. 

^^H la plupai't des prostituées ont donc un amant pai'- 

^^1 ticulier, c|ue dans leur langage elles désignent sous 

^^H le nom i\!anunit de cœur; mais la position sociale à& 

^^M ces individus, on le conçoit aisément, varie autant 

^fr que la classe à laquelle elles appartiennent ellea- 

■• mêmes dans la biérarchie de la débaucbe. Les lettres 
qu'elles reçoivent à Saint-Lazai'e, les réclamatioBs 

I adressées à leur sujet à la Préfacturo de Police, 

^^1 prouvent qu'il se trouve, parmi ces amants, des gens 

^^1 non seulement bien élevés, mais qui, par leur nom et 

^^H leur situation dans le monde, excitent la surprise^ 

^^V lorsqu'on les trouve compromis dans ces sui'tes d'af- 

^^m faires. On y voit figurer le général et l'bomme de 

^^^ lettres, le noble, le financier, et successivement toutes 

^^M les autres classes, jusqu'à celle qui occupe le dernier 

^^H rang dans notre société. J'ai lu de ces lettres, et tou- 

^^H jours, avec un haut- le- cœur, chaque fois que j'y songe, 

^^H je me demande commentdesliominesquenousrencaa- 

^^H trous tous les joiirs ou dont nous entendons sans cesse 

^^M parler, peuvent, sans bonté, les écrii'e et y apposer 

^^B leurs noms. Me croira-t-on, lorsque Je dirai qu'i^- 

^^B viennent quelquefois eux-mêmes dans les bureaux ûe 

^^M la Préfecture pour réclamer ces femmes, les défendre 

^^M et plaider leur cause contre l'administration?... 
^^H Ordinairement, la classe la plus distinguée des pro- 

^^P stituées choisit ses amants de cœur pai-mi les étti' 

^^K dîants en droit, les étutlîants en médecine, et les 

^^Ê jeunes avocats ; l'insti^uction que possèdent ces 

^^^ jeunes gens, et surtout les agréments de leur esprit- 

^^K cultivé, les font recberchei' par les prostituées qui 



lA FEOSTITUTlOy A PARIS 6* 



ivent elles-mèmea se faire reniariiuGr par quelques 
iB de l'intelligeuce, et qui, à raifion de cela, ont 
ur clients habitueh lea gêna (le la bonne igompa- 
ie; mais ces femmea sont peu nombreuses, conipa- 
ivement à la masse des filles publiques. C'est 
rmi les employés de commerce, les jeunes tailleurs 
tabits, les commis de magasina, particulièrement 
rmi les calicots, que la classe moyenne dea prosti- 
Ses recrute ses aniaats à Paris; on peut y joindre 
garçons perruquiers, les musiciens de guinguettes, 
chanteurs de petits cafés- chantant s, ainsi que les 
outiers et lea orfèvrea. Toutes tes autres s'aban- 
onent à dea ouvriers de toute espèce, prineipale- 
int à ceux qui ont le travail en horreur, en un 
rt, aux maxivaia sujets qui ont bientôt déserté 
telier à jamais, des qu'ils ont trouvé une fille dont 
prostitution peut les faire vivre; ce sont ceux-ci 
•tout qu'on nomme soutencuTs. 
L'attachement de ces femmes à, leurs amants est 
trème; on ne saurait croire ce qu'elles font pour 
conserver: non seulement elles n'en tirent aucun 
intage sous le rapport de l'argent, mais un grand 
mbre d'entre elles les nourrissent, les habillent, les 
^retiennent complètement; beaucoup de jeunes 
as à Paris n'ont pas d'autres moyens d'existence. 
[1 n'y a pas longtemps, les filles qui préfèrent la 
I en maison de tolérance à celle en logement libre. 
Baient leurs conditions à la tenancière, en entrant 
(Z elle; elles stipulaient, pour leur amant de cœur, 
droit d'entrer sans payer trois ou quatre fois par 
.aine. L'administration a dû interdire aux maî- 
sses de maison et aux filles Togées dans leurs 
subies de recevoir ces hommes pondant la nuit; 
aljitation avec un concubinaire est également dé- 



■lÀ 



70 LA PEOSTIirTIO^" A PAEIS 

fendue à toulo pro8tituée,de la façon la plus formelle, 
Quant aux filles de maison, dont le succès est mar- 
quant dans r établis sèment où elles sont pension- 
naires, elles en profitent pour exiger des sorties 
tout un jour, du matin au soir, et elles passent ce 
temps au dekors avec leurs amants: ces hommes sont; 
eu général, le désespoir des tenancières; maiq ello^ 
sont obligées d'en passer par là, sous peine de n'avoU 
pas de filles. 

Dans la classe inférieure des race rocheuses, p'esl 
un attachement en quelque sorte furiev.r qu'elles oui 
pour leurs souteneurs; les reproches, les invectives, 
les coups, les blessures, et jusqu'au péril de leur vie, 
rien n'est capable de les ébranler. J'en ai vu venir 
Saint-Lazare, les yeux hors de la tête, la figure ei 
sanglantée, et le corps menrtri des coups que leurs 
amants, ivres ou non, leur avaient portés; maïs, 
peine guéries, elles retournaient avec eux. L'une 
d'elles, qui était allée featiner avec son homme hors 
Paris, le suivait de loin, quand il rentra en ville, dans 
un état complet d'ivresse; elle veillait ainsi sur lui; 
l'ayant vu tomber dans un fossé, elle courut chercher 
du seconiB, aida à le relever, mais se coustitua à l'ins- 
tant prisonnière au poste voisin, i pour se soustraire 
à sa fnreur », dit-elle; le lendemain, elle alla le 
chercher au Dépôt, oii elle sut qu'il avait été 
transpoiié. Une autre, voulant arrêter son amant, qui, 
le marteau à la main, brisait sa glace, ses meubles et 
tout ce qu'elle avait, augmenta tellement la rage de 
ce furieux, que, poursuivie ellB-même, elle ne put 
échapper à une mort certaine qu'en se précipitant 
par la fenêtre d'un troisième étage; guérie de quelques 
contusions, résultat de cette chute, elle retourna avec 
le même homme, qui, six mois plus tard, dans un 



BP 



LA PfiOSTITrTlOy A PAKTS 71 

cabaret lia bariièics, la mit dans la nécessité de sa 
jeter encnre par une fenêtre; cette fois, elle se oasBa 
le iras, fut Boignée encore, mais n'en resta que plus 
attachée à l'homme qui lui témoignait si étrangement 
son amitié. 

On le Toit, cet empire que les prostituées, surtout 
de la basse classe, laissent prendre sur elles par leurs 
amants, dégénère, de la part de ces hommes, en une 
véritable tyrannie, Xon contents de se faire nourrir 
et vêtir, les souteneurs, qui appellent ces malheu- 
reuses leurs marmites, terme significatif, les sur- 
veillent sans cesse dans un but odieusement intéressé: 
ils savent quand elles ont gagné trente ou quaranto 
sous, et, à peine le client parti, ils leur prennent de 
vive force le salaire de leur honte, si elles se refusent 
ù le donner de bonne grâce, et les obligent 5. venir le 
dépenser au cabaret avec eux. Lorsque ces pauvres 
filles restent avec de pareils êtres, souvent ce n'est 
plus par amour, mais par l'impossibilité de s'adresser 
à un autre, aana riaqxier d'être battues et sans com,- 
promettre leur existence. 

Au surplus, ces filles ont eu, de tout temps, besoin 
de souteneurs: ils font le guet, quand elles se livrent 
Il leur raccrochage; ils les avertissent de l'arrivée des 
iigents des mtpurs, contre lesquels il leur arrive par- 
fois d'engager la lutte; ils favorisent les vols et volent 
eux-mêmes; ils sont une des plus hideuses plaies de 
la capitale, et nous attendons toujours une loi sévère, 
mais juste, qui les mettrait, comme de raison, à l'en- 
tière discrétion de la police. 

Nous alloua même jusqu'à dire que les souteneurs 
devraient être, eux aussi, assujettis aux visites sani- 
i qu'à leurs conséquences. 






LA PROSTITUTION l 



2. Len tribadRH, 



nter-f4>iiiînineM 



« |iroHl)ttiC-eM. 



Il est impossible de passer sous silence ces amaats 
que, par un goût dépravé et contre-nature, ua assez 
grand nombre de prostituées choisissent parmi les , 
personnes de leur sexe, de préférence à un- souteneur 
ou à tout autre amant masculin. Ce vice n'est, d'ail- 
leurs, pas nouveau; il remonte à la plus haute anti- 
quité, et jamais aucune puissance morale, aucun pou- 
voir politique, aucune condamnation fulminée par 
les chefs des diverses religions, n'ont pu le faire dî*- 
paitre. I 

Ce vice, appelé saphùinB, tire son nom de Sapâo, ' 
la courtisa no -poète, qui s'y adonna et qui le célébra 
en des vers d'un lyrisme passionné. On le nomme I 
aussi amour labien, parce que lea habitantes de 
Lesbos étaient accusées de cette dépravation; et lea 
femmes qui s'y livrent sont dites tribades, du mot 
grec tribas, qui vient du verbe tribein, frotter. 

Oui, il faut parler de ce vice monstrueux; car, après 
être resté longtemps à l'état latent, il a fait aujour- 
d'hui des progrès énormes, et ce n'est pas seulement 
dans le monde fermé de la prostitution qu'il sévit. 
Ailleurs, on J'avoue, on l'affiche presque. Dans une 
lettre particulière qu'Alexandre Dumas fils écrivait 
au pi-éfet de police, en septembre 1874, et que M. Le- 
cour a publiée, on lisait ces ces lignes prophétiques: 
■ Lesbos fait concurrence à Cythère, et je n'ai pas 
besoin de vous dire combien cette interprétation de 
l'amour a progresses; vou! avez des renseignementa 
sur le développement de cette église nouvelle. C'est 
encore dans les Catacombes; dans vingt ans, ce sera 
sur la place publique. » 



LA PHOSTITUTION' A P.VRIS 73 

[ Tout d'abord, il cunvieiit de reconnaître, à l'avan- 
ce clea prostituées de métier, que, dans leur milieu 
^écial, pourtant bien corrompu, on ne se flatte pas 
L moins de ce vice. Aucune ne veut convenir d'y 
re adonnée; car, lorsqu'on les questionne, elles ré- 
pondent avec vivacité et d'un ton d'impatience; Je ne 
t'iuù que pour homme, et n'ni jamais été pour fem-me. 
Ijjll faut être en situation de les étudier dans tous leurs 
"instants du jour et de la nuit, il faut les voir de très 
près, par exemple à Saint-Lazare et dans lea hôpi- 
taux, pour pouvoir discerner les tribades. En effet, 
vis-à-vis de quiconque n'est pas des leurs, cellea-là 
mêmes qui n'ont pas subi la contagion du saphisme 
ont également bonté de ce vice pour elles, innocentes, 
et pour leurs compagnes coupables. 

En général, les tribades sont méprisées et mal vues 
par les autres prostituées; elles inspirent à beaucoup 
une sorte d'iiori'eur q\ii poi-te à lea éviter, à les fuir. 
Pendant les réunions et les tète-à-tête qui ont lieu à 
Saint-Lazare, on ne leur épargne pas les reprocbes et ' 
les moqueries, mais toujours à mots couverts; au mi- 
lieu même de leurs disputes où elles s'injurient dans 
les termes les plus grossiers, elles conservent à cet 
égard une certaine retenue. Ainsi, l'expression la plus 
méprisante qu'elles emploient dans leur langage, 
pour flétrir une tribade, est celle-ei: a espèce de gou- 
gnotte », mot sans étymologie, qui n'a par lui-même 
nen d'obscène ni d'ordurier, qui paraît être une 
simple fantaisie d'argot, et qui demeure tout-à-fait 
incompréhensible aux étrangers qui l'entendent. 

Il n'y a que la jalousie et le besoin de se venger 

qui puissent les porter à dénoncer une tribade quel- 1 

quefois, et encore cela s'observe rarement. En dehors 1 

^^de ces motifs, je ne connais que deux cas de dénoncia- J 



r 



I 



74 LA PSOSTTTUTIOS A PAR] 

tioB, absolument exceptionnela. Une tenancière, qui 
était sujette au vice en question, avait fait entrer 
chez elle une très jolie fille, qu'elle voulait s'attacher; 
cette fille sortit pour cette unitiue raison, reffr»'*»»*. 
disait-elle, le bien-être qu'on lui procurait et les 
gourmaudises de toutes sortes dont sa maîtresse la 
comblait. Une fille de bas étage, voulant, dans on 
état voisin de i'ïvresse, faire violence à une de ses 
compagnes qui refusait de répoudre à ses désirs, 
excita dans la maison un tel tapage, que les gnrdiMis 
d« la pais furent obligés d'intervenir; toutes les filles 
de la maison, en proie à une indignation extraordi- 
naire, la dénoncèrent au commissaire de poHca 
comme coupable à'aUeniat aux mœurs. 

Notons, pour la réfuter, une opinion quelque pe» 
répandue. Certaines personnes croient et disent qUft 
le foyer du sapliisme se trouve dans les maisons do 
tolérance, et que c'est de là que ce vice se propage 
dans la société. Cette opinion ue tient pas debout, 
dès qu'on l'examine; car c'est précisément tout le 
contraire qui est la vérité. 

Certainement, les maîtresses de maisons publiques 
ont un grand avantage à ce que leurs pensionnaire; 
s'adonnent à l'amour lesbien. Lorsque ces filles ont 
un amant de cœixr, elles doivent satisfaire les de- 
mandes d'argent de cet individu ; i-Iles lui consacrent 
leur jour de sortie hebdomadaire et font les frais de 
la n balade * ; c'est autant d'argeut qui échappe à la 
rapacité de la tenancière. Les saphistes, par contrej 
consacrent leur jour de sortie à s'enfermer dans una 
chambre, en se payant mutuellement des liqueurs e; 
des friandises achetées dans la maison ; en ouirB 
rompant toutes relations avec le dehors, elles oi 
beaiicoup moins do tendance à quitter l'établiâsi 



L* PEOSTITUTTOS A PARIS tO 

fteiit oi\ leur liaison n'est pas coniraj'iée. Mtiia on ne 
teit pas comment ces filles, plus cloîtrées encore que 
ailes de lenra compagnes qui n'ont pas leur vice, 
[Ourraient se faire propagandistes de sapltisme à 

Etérieur. 

f D'autre part, les observations peraévériintes et mî- 
s qui ont été faites à Saint-Lazare, senl lieu 
l l'on puisse bien étudier les goûts et les peuchants 
lominants des pristituées, ont prouvé que presque 
mutes les tribades appartenaient aux diverses caté- 
Jjorieg de filles libres, et l'on a constaté deux sources 
gai alimentent le sapkisme. 

La première vient des prisons civiles. Qui ne sait, 
en effet, i|ue ce vice honteux sévit aven intensité 
dans les prisons de femmes (comme le vice opposé 
infeste les prisons d'hommes), et qu'il est peu de 
prisonnières qui puissent y résister, lorsque la déten- 
tion se prolouffe au-delà de dis-huit mois ou de deux 
' C'est vers l'âge de vingt-cinq à trente ans que 
I prostituées sont adonnées à ce genre de liberti- 
', et après qu'elles ont exercé leur métier pendant 
Ix, huit ou dix années, à moins qu'elles n'aient 
îéiouraé quelque temps dans les prisons civiles. Si 
|Pon voit parfois de jeunes prostituées, novices dans 
» métier, présenter les mêmes penchants, elles n'y 
lat pas portées d'elles-mêmes et peuvent être con- 
Kdérées eummt* les victimes de celles qui les ont 
iduites. Mais il est peu de vieilles prostituées qu'on 
pe paisse ranger parmi les tribades ; elles finissent 
: avoir leurs clients en horreur, tout en les satis- 
iaant dans leiirs divers genres de débauches favo- 
ptes, et, pour terminer leur carrière, se prostituant 
t-ci et le cherchant pour elles-mêmes leurs 
lanea compagnes, elles a'associent en outre aux 




^^der 



76 LA Fi 

voleurs et à tout ce qu'il y a de plus abject et 
crapuleux. 

Telle est une des soureea du sapli: 
prostituées ; c'est celle qui se répand dans 
iniérieures. 

Il en est une autre, et celle-ci descend de haut. Et 
pourquoi ne pas le dire ? elle vient des sommets de 
la société ; nous allons la retrouver tout à l'heure. 
Des dames du meilleur monde, convaincues que leur 
or leur donne droit sur les filles d'amour, rechei'client 
les prostituées, pour satisfaire ces goûts anormaux 
dont nous parlons. Il leur faudi'ait ti'op d'audace 
pour s'adresser aux maisons de tolérance : sans dnute, , 
les tenancières accepteraient parfaitement ces clien- 
tes; mais, étant donné que, si elles étaient sur- 
prises, le retrait de la tolérance serait la conclusion. 
de l'incident, tenancières et trîbades mondaines y 
regardent à deux fois. Ces clientes-là vont donc daOB 
les maisons de prostitution clandestine, ou font la 
cliasse aux filles eu carte, plus ou moins huppées, qui 
se prostituent chez elles, en chambre ; on :i vu de ces 
Baphistes, même pai'mi les élégantes, suivre de vul- 
gaires raccroche use s, et bon nombre de celles-ci, 
Bâchant qu'une cliente paie double et même davan- 
tage, acquiescent d'un clignement d'œil, eu ayant 
l'air de regarder une vitrine, et donnent vivement 
l'adresse où bientôt toutes deux se retrouveront. 

C'est ainsi que des prostituées chindestiues et des 
filles en carte apportent à Saint-Lazare ces liabitudea 
lesbiennes qu'elles ont contractées dans leur vie libre; 
et là, dans la prison administrative, elles les infiltrent 
à d'autres prostituées, ellcis font ce qu'elles appellent 
un mariage. Saint-Lazare est, de la sorte, un centre 
de recrutement, et pour le saphisme, et pjur les mai- 



^^^ LA PKOSTITrTIOS A PARIS 77 

BOUS de tolérance ; ifs amîes, après y avoir formé un 
ménage, vimt s'enfermer dans une maison de tolé- 
rance pour être entièrement l'une à l'autre. De nom- 
breux cas de ce genre ont été observés ; ils 
démontrent^ pour n'y plus revenir, que le aaphisme 
que l'on ù'ouve (comme partfiut ailleurs) dans les 
maisons publiques tolérées, loin de produire de là 
une contagion extérieure, y a été versé, au contraire, 
par le vice du dehors. 

Il ne faudrait pas conclure, de ee qui précède, que 
l'administration ne fait rien pour enliser le mal. Il 
existe, à ce sujet, certaines dispositions d'un règle- 
ment qui date de 1824, lesquelles sont toujours ob- 
servées, et des visites de nuit ont lieu, à l'improviste, 
dans les maisons Je tolérance, pour en assui'er l'exé- 
cution. Malheureusement, malgré ces précautions, la 
corruption oppose à tous lea efforts une réaistance 
indomptable ; surtout dans les maisons à clientèle 
aristocratiques ou bourgeoise, peu de prostituées en 
sont exemptes aujourd'hui. Comment pourrait-il en 
être autrement, puisque ces malheureuses ne reçoi- 
vent que mépris, humiliations, mauvais traitements 
de la part des hommes, et que ceux-ci sont souvent 
les premiers à les exciter à pratiquer, devant eux, un 
vice qui devrait leur faire horreur P 

Un fait digne de remarque, c'est qu'il y a souvent 
une assez grande disproportion d'âge et d'agrément 
entre deux femmes qui s'unissent de cette manière ; 
et ce qui est bien fait pour surprendre, c'est qu'une 
fois l'intimité établie c'est ordinairement celle qui 
l'emporte par la jeunesse et les agréments qui té- 
moigne i\ l'autre un plus profond attachement et un 

lur plus passionné. 

oniment expliquer cela? — Je me suis procuré, à 



I 



7S lA PROSTITDTIOX A PAEIS 

Saint-Lazare, la eorrespondaace entre tribades, 1g»~ 
qu'elle avait été surprise et aaiaie ; je l'ai toujours 
trouvée rumanesQue, contenant les expressions fami- 
lières aux amants, et indiquant en tout la plus grande 
exaltation de l'imaginaiiDn, Ce que j'ai yu de plus 
curieux à cet égard était une suite de lettres écrites 
par la même personne à une antre détenue : la 
première de ces lettres contenait une iléclaraticoi 
d'amour, mais d'un style voilé, couvert, et des plus 
réservés ; la seconde était plus espansive ; les der- 
nières exprimaient en termea brûlants la pasaion la 
plus violente et la plus effrénée. 

D'ordinaii'e, le défaut d'éducation ne permet pas 
les moyens de inpprocliement qui supposent un 
esprit cultivé ; c'est par des caresses, des soins, des 
attentions, des pi'éveuances de toute espèce, que loa 
femmes mûres et quelquefois Jes vieilles séduisent de 
jeunes filles et pai'viennent à se les attacher à un de- 
gré inouï, invraisemblable. On voit ces ^"ieilles tra- 
vailler avec une aideur extrême pour augmenter leur 
gain et faire des libéralités à celles qu'elles veulent 
séduire; elles a'offi-ent pour achever leur tàcbe dans 
les ateliers; en un mot, elles déploient tout ce que 
peut inventer l'art de la séduction, pour compenser, 
par des ciualitéa particulières et factices, ce qui leur 
manque et ce qui pourrait éloigner d'elles. 

Une fois ces liaisons établies, elles offrent à l'ob- 
servateur certaines particularités curieuses. 

Ainsi, il n'en est pas, chez les prostituées, do 
l'abandon d'un amant do leur sexe, cuninic de l'aban- 
don d'un amant d'un sexe différent. Dans ce dernier 
cas, on se console aisément, on retrouve bientôt de 
quoi faii'o oublier celui auquel les plus vives protes- 
ttions n'étaient pas épargnées. Quelle différence 



lA. PEOSTITCTION A PAEIS JÎ) 

p les antres ! Aussi leur attacliement approclie-t-il 
;ôt de la frénésio que de l'amour : la jalouaie les 
>re ; la crainte (l'être supplantées et de perdre 
là l'objet de leur affection» fait qu'elles no se 
ittent jamais, qu'eUea se suivent pas à pas, qu'elles 
it arrêtées pour les mêmes fautes, et qu'elles trou- 
it toujours le moyen de sortir ensemble de la 

Iiorsqu'ellea arrivent à Saint-Lazare et que, signa- 
B comme tribadea, un les met à dessein dans deux 
rtoirs séparés, ce sont des observations sans fin et 
ivent des désolations d'enfants, des ri'is et des 
rlements ; elles jouent une multitude de rôles pour 
rejoindre ; elles simulent des maladies pour être 
ses Fune cA l'autre à l'infii-merie ; ou en a vu se 
T6, dans cette intention, des plaies et iloa blessures 
(S graves. Queliju es-unes, plus rusées que toutes les 
très, et maîtresses consommées dans tous les trucs 
. métier, s© sont appliqué, sur quelques points des 
.rtiea génitales, de petits morceaux de potasse caua- 
|ue, à l'aide desquels elles se procuraient des ulcé- 
,tions simulant à un tel point les chaneres Tené- 
iens, que l'Homme le plus exercé n'aurait pas pu 
y reconnaître. La plupart ont un talent merveilleux 
our simuler la gale ; ce qu'elles font en se piquant, 
■ee une aiguille rougie au feu, les parties du corps 
û parEÛt cette éruption. 
L'abandon d'une tribade par «elle qu'elle affec- 
mnait devient, à Saint-Lazare, une cirronstance 
ù mérite de la pai-t des gardiens une attention par- 
îculière : il faut que celle qui a été délaissée tire nue 
'latante vengeance, et de celle qui l'a abandonnée, 
de celle qui l'a supplantée; de là naissent de véri- 
,bles duels, dans lesquels on se bat avec les assiettes, 

i 



SO LA PROSTITUTIOS A PARIS 

les faurehettea, et quelquefois m&me les couteaux j 

BÎ le combat a lieu hors du réfectoire, c'eat le peigne 

à chignon qui est l'arme la plus usitée, à moins que 

les batailleuses n'aient préparé quelqu'une de ces 

' armes spéciales et perfides dont j'ai parlé plus haut 

I à propos de la colère des prostituées. Il en résulte des 

f blessures parfois fort graves ; on en a vu plusieurs de 

I mortelles. 

Ces haines et ces fureurs ckez des êtres aussi mo- 

l biles ne sauraient durer indéfiniment ; sa vengeance 

I Batisfaite contre sa rivale, la trihade abandonnée 

cherche à ramener l'infidèle, ce qui arrive quelque- 

r fois; mais, si elle ne peut y parvenir, sa rancune 

I e'apaiso peu à peiij et, tentant alors do nouvelles 

I conquêtes, elle remet en usape ses pernicieux talents. 

I II est, cependant, un cas par lui-même irrémissible, 

I et qui réclame une vengauce continuelle : c'est celui 

) dans lequel une tribade quitte son amante pour 

I prendre un homme comme amant ; ce crime est ini- 

I pardonnable, rien ne peut le faire oublier. Malheur 

i la femme qui s'en rend coupable ! car, si elle n'est 

pas la plus forte, elle est sûre d'être battue chaque 

fois qu'elle rencontrera celle qui se croit en droit de 

lui reprocher le plus sanglant affront qu'une tribade 

puisse recevoir. 

Chose curieuse, mais que les médecins expliquent 
jusqu'à un certain point, les grossesses se remarquent 
plus fréquemment chez les tribades que chez le com- 
mun des prostituées qui n'ont pas encore contracté 
ce goût désordonné. Autre remarque : la grossesse, 
dans cette circonstance, devient le sujet des plaisante- 
ries et des quolibets de toutes les autres filles. 

On peut donc eonaidérer les tribades comme tom- 
bées dans le dernier degré du vice auquel une créa- 



. PKOSTITTTTIOX / 



81 



i humaine puisse choir ; l'infamie de Gomnrrlie 
bëst aussi monstrueuse et dégi'adée que celle de So- 
EBome. Pai' cela même, les tribsules exigent aine suv- 
fe-eîllance toute particulière (le l'administration, ot, 
Silus spécialement encore, du personnel de Saint- 
Lazare. D'après le règlement de 1824, toujours en 
fcigueur, il est expressément défendu au^ maitressea 
VB maison de permettre à leurs prostiiuées de cou- 
■ deux_dan9 le même lit ; on punît de plusieurs 
Rours de prison celles qui, dans les inspections, sont 
Rurprises couchées ensemble, et les inspections efîec- 
f tuées dans ce but ont toujours lieu à l'impromptu; 
l'autorisation de tolérance a été retirée, de ce chef, li 
une maîtresse de maison q^ui fut surprise dans le lit 
d'une de ses femmes. Mais on comprend que l'admi- 
nistration a de bien plus grandes difficultés pour agir 
ms ce sens à l'égard des filles, mémo insentes, qui 
tdgent dans leurs meubles, et qu'elle est totalement 
lésarmée sur ce point vis-à-vis des proatituéea elan- 
festinea. 

Enfin, d'après l'évaluation des personnes compé- 
tentes, s'il est impossible de fixer la proportion exacte 
i filles publiques qui s'adonnent à l'amour lesbien, 
fcn peut, sans craindre de troji s'écarter de la vérité, 
^ire, en ce qui concerne du moins les filles inscrites, 
toue les tribades, parmi elles, ne forment pas le quart 
^e leur eil'ectif total. 

Pour en finir avec cette question du sapbisme, il 
aious paraît nécessaire de le flétrir, comme il doit 
l'être, non seulement chez ces malheureuses prosti- 
mées qui acceptent le joug nécessaire, indispensable, 
i la Préfecture de police, mais encore chez les filles 
ablan destines, dont la permanente révolte est un for- 
lidable danger pour les mœurs et la santé publique. 



^ 



■ 82 LA PEOSTITrTIOX A rARI'f 

et sui-tout L-hez les dames riches et désœuvrées qniont 
mis ce vic.o à la luode dans leurs spkères mondaines, 
où l'action administrativa ne peut s'exercer. 

C'est avec laison que M. Maxime du Camp traçait, 
çn 1872, ces lignes indignées, dans los Convulsion» 
de Paru: 

« Lee différentes phases politiques, que la France 
a traversées depuis une soixantaine d'années, ont été 
singulièrement propices à la corruption des mceurs. 
L'instabilité de, nos institutions, l'iiicousistaiice d& 
notre état social ont, nécessairement, amené la vie 
à outrance, et l'on s'est hâté de jouir, piirce qu'on 
u'était pas certain de posséder longtemps. Plus encore 
que par le passé, Paris a été une ville de plaisir, une 
sorte de Venise du dix-septième siècle. S'amuser est 
devenu la plus importante, sinon l'unique préoccu- 
pation du plus grand nombre. Un vent d'abrutisse- 
ment a Boufilé, qui a courbé les volontés les meil- 
leures, balajé toute retenue, desséché les instincts 
les plus précieux. L'esprit ayant répudié ses droits, 
la nmtière a naturellement abusé des siens. 

( La licence des mœurs semble avoir fait effort 
pour égaler celle que l'on a justement reprochée à la 
B«geQce et au Directoire. Nous sommes aujourd'hui 
an présence d'écuries d'Auffias, où les gens de toute 
catégoi'ie et de toute condition se sont empressés de 
verser leur fumier. Quel Hercule aura le courage et 
la force de nettoyer le cloaque? Jamais la gangrène 
l'a été si profonde ; elle atteint les œuvres vives, et 
va, si l'on n'y veille, désagréger l'être entier, s 

Cette prodigieuse perversité, — prodigiosa Venut, 
lelon l'expression du poète latin Martial,- — n'indi- 
gne, hélas ! que les moraliatea. Dnas le monde, 
^mmes et femmes, en général, en sourient. Honoré 



LA rBOSTtTnTTOy A, PAEIS S3 

■ Balzac, Théophile Gautier, Adolplic Belot, en 
feettant le saphisme en action, dans tel el te! de leurs 
mt donné à, ceux-ci une très grande vugue. 
irnii les débaucliés qui fréquentent les maisnna de 
postitution, publiques et clandestines, a certains, 
pus dit le docteur Jeannel, font exécuter ou simuler 
i leur présence, par dea groupes de prostituées nues, 
B monstrueuses obscénités ; un tapis de velours noir 
t alors étalé sur le parquet du salon, etc. i De leur 
Bté, les grandes dames voluptueuses, insatiables de 
ure, en sont venues à trouver banal l'adultère qui 
^ sous le coup de la loi, et, toujours à la re- 
clierche de jouissances inédites, préfèrent les amantes 
.lUx amants. 
î^ De même que certains vieux garçons paillards 

Iennent une « bimne à tout faire », il y a des dames 
ii se paient une tribade comme femme de cliamhre ; 
L procès correctionnel, intenté sur la plainte d'une 
Tonne de S***, qui accusait d'un larcin 1^ nommée 
iehelle p"**, a appris au public quel rôle jouÊ^it 
rtaines domestiques auprès ue leur malti-csse ; ce 
i; procès a été jugé à Paris, par la dixième chambre, 
en juin 1888. La plaignante, une blonde vaporeuse, 
affirmait qu'une bague lui avait été volée par Mî- 
rbellc, fille déjà mûre, ayant passé la quarantaine. 
Tout ie monde a pu lire dans les journaux de l'époque 
ce fragment ti«s caractéristique du dialogue échangé 

Iatre le président et la plaignante : 
« Le président. — Quel rôle jouait chez vous la 
révenue ? 
( La baronne. — itichelle était entrée chez moi 
Dmme domestique, mais dans de certaines conditions 
articulières ; i! avait été convenu que, au lieu d'être 
u mois, elle serait à mon service au jour le jour... 



u 



LA pfiOSTITUTION A PARIS 

I Sans ces demiera temps, j'étais très fatiguée d'elle... 
Le président. — Pourquoi alors ne pas l'avoir 
L renvoyée P 

■ La baronne. — Elle me disait qu'elle m'aimait 

P- 

Le président. — Que voulez- vous dire? 
La bnrontie. — Vous comprenez bien, mes- 
[ BÎeurs!.,. Un jour, elle m'a griffée, parce que je no 
I voulais plus me laisser faire. » 

Le tribunal, ne prenant pas au sérieux l'accuaa- 
Ltion du vol de la bague, et ne voyant dans l'affaire - 
I qu'une querelle entre tribades, prononça l'acquitte- 
I ment de la trop aimante domestique. 

Le saphisme s'est développé à un tel point dans les 

\ classes élevées, que beaucoup de tribades mondaines 

j se réunissent par groupes. Ce sont de véritables aca- 

• demies lesbiennes, où l'on se livre en commun à des 

I orgies sans nom ; il y a, pour fournir à ces salons de 

L débauche, des pourvoyeuses qui vont corrompre les 

î filles jusque dans les ateliers. Entre groupes, 

ton se dispute les nouvelles recrues, et il s'en suit des 

I rivalités terribles, il. Ooffignoà, dans son excellent 

\ livre la Corruption à Paris, a cité deux baudes fa- 

f meuses, ayant à leur tête, l'une, iine marquise, l'autre, 

■nue princesse, toutes deux de noblesse très authen- 

■• tique. Un a cité encore dans la presse, en ISUU, la 

I lande Marceau et la bande Friedland, ainsi nommées 

parce que les dames chefs de ces groupes saphistes, 

habitaient, l'une, avenue Marceau, l'autre, avenue 

Triedland, en plein Paris aristocratique. 

I TTn jour, écrit l'anteur que nous reproduisons, 
msieur fi'isant la quarantaine, riche rentier, 
faire à la Préfecture de Police la déclaration 



LA PEOSTITtJTIOX A P.tllIS 85 



I< — Je dois épouser dans trois jours M"° Lu- 
ienne X*"'. Cette jeune fîUe a vingt-deux ans; ji; 
ai connue très sage ; j'ai commis la faute de la 
séduire, et, après réflexion, j'iti résolu de réparer ma 
faute, ilii fiancée demeure chez une vieille ~ parente 
à elle ; elle se réjouissait beaucoup de notre mariage, 
ainsi que sa famiUe, qui réside dans un département 
voisin. Ces jours-ci, elle est sortie afin de faire divers 
achats pour son trousseau ; je lui avais remis, à cet 
effet, une assez forte somme. Hier, dans l'après-midi, 
elle soiiit encore, sans doute pour s'occuper de nou- 
pelles emplettes ; mais elle n'a plus reparu à son do- 
micile. Sa tante est désolée. Sous avons télégrapiiié 
à ses parents; ils ne l'ont pas vue. Je ne sais que peu- 
eer ; je crois à un crime. » 

* La police de sûreté fut mise en réquisition, et se 
livra à de nombreuses recherches, mais sans aucun, 

■ Un mois environ après le jour qui avait été fixé 
pour le mariage, la jeune fille revenait tranquille- 
ment chez elle, et déclarait, sans vouloir donaer 
aucun motif, qu'elle renonçait à épouser sou fiancé. 
Celui-ci et la tante furent irappés de l'état de déla- 
brement dans lequel se trouvait M"^ Lucienne X***, 
au retour de cette escapade inexplicable: la jeune 
fille avait les traits tirés, la figure amaigrie, les yeux 
caves brillant d'un feu sombre; en outre, elle toussait 
beaucoup. Il fut impossible de tirer d'elle la moinike 
explication. Sa mèi-e vint à Paris et ne put réussir à 
la décider à revoir son fiancé, qu'elle avait catégori- 
quement congédié et à qui elle avait rendu les 
sommes remises par lui à la veille de la publication 
des Bans. Du reste, Lucienne montra sa bourse, qui 
était bien garnie, disant cyniquement qu'elle no voa- 



L. FI!0STITT"TION' A l'AEIS 



E|ait plus désormais ni mari ni mî^me un protecteur. 
W a Quel était donc ce mystère? que s'était-i] passé? 
I « Ou finit par le savoir. Lucienne, dans une bou- 
Riqiie oii elle faisait ses emplettes, s'était rencontrée 
KftTee une dame élégante, ([ui avait paru tout-à-coup 
fe'intéresser vivement à elle, ainsi que la commer- 
Rçante, patronne du magasin. La vendeuse avait pria 
Jfion adi'esse, était venue lui porter elle-uiOme la mar- 
Fchandise achetée-, le lendemain d'assez bon matin, 
■avait pénétré auprès d'elle, et était parvenue â la cor- 
Kompre par des embrassenients saphistes, auxquels la 
Keune filie n'avait pas su opposer de la résistance. 
I L'aprèa-midi, Lucienne, qui avait pris rcndez-voiîB 
f avec la marchande, avait été conduite par oello-«î 
L chez la dame élégante entrevue la veille; c'était une 
I femme du monde, appartenant à l'une des acaâémi«a 
I leabiennea de Paris. 

[ « La malheureuse Lucienne était prise et bien 
I prise. Pendant quatre semaines, elle se livra aax 
L nonibreuses adeptes de la bande Fi'iedland, étonnée 
ï d'éprouver des sensations jusqu'alors inconnues, 
I a'adonnant à son tour avec fi-énésie au vice qu'elle 
L Tenait de conti'acter, heureuse, au surplua, de se toûp 
L comblée de cadeaux, en bijoux et en billets do 
[ banque, s 

f Les faite comme celui-ci ne sont pas rares. 
i M. Cûffignon cite encore un très haut persounago, 
I ■ quelque chose comme un ministre ou un sons- 
I secrétaire d'Etat », à qui une aventure presque aem- 
I blable arriva en ces derniers temps. Ce personnage, 
I lui aussi, se disposait à épouser une jeune fille, qui 
l avait été d'abord sa maîtresse. La corruptrice de la 
^£ancée fut, cette fois, iine simple cimimise de maga- 
KÎn, et ce fut pour elle seule qu'elle détourna cette 



LA PEOSTITmON A PARIS S7 

n.TeIIe i"ecriic du supliisme. Il j eut ëgolement eii- 

: infructiiGUse de la police, retoui' <1p la jeuue 

s après quinze jours de disparition, et refus de sa 

t de renoncer au vice qui brisait son oxistpnce. 

I^out c«ci est navrant et léToltaut; et le plus dêplo- 

Bblc, c'est qu'il n'y a rien à faire, dans l'état actuel 

' de la législation. Le sapliisme n'est pas un délit prévu 
par le Code. Les pourvoyeuses de tribades mondaines 
ont soin de ne paa s'attaquer îi des jeunes filles mi- 
neures. Ou ne pourrait déférer ces dépravées aux tri- 
bunaux que si elles se laissaient surprendre dans une 
d© leurs pr:t(i(HtGs obscènes en un lieu déclai'é public 
par la loi; il y a délit, par esemple, dans un bosfiuet 
d'un buis non privé, dans un. liacre, dans un wagon de 
chemin de fer; mais, lorsque ces exercices s'aecom- 
plisseot à domicile, Iiors de la vue des voisins, et entre 

> majeures, la justice est désarmée. Elle a eu, maintes 
fois, l'occasion de prononcer des condamnations aé- 
Tères contre le vice opposé à eehii-ci; cela tient à ce 
que. dans l'aberration des pédérastes, ces erotiques 
éprouvent quelquefois une délectation bizarre a 
courir des risques dans l'accomplissement de leur 
ignoble contact, et qu'alors ils recherchent les en- 
droits écartés, mais néanmoins légalement publics. 
Lea tribades, au contraire, ont d'autant plus besoin 
du huis-clos, que le plus souvent elles doublent par 
la gourmandise des gâteaux et des liqueurs le plaisir 
de leurs épancheraents. Enfin, les procès contre elles 
sont encore impossibles; attendu que la violence ne 
saurait être incriminée par le ministère public; en 
effet, la séduction saphiste ne s'exerce que par un 
excès de douceur, et les malheureuses qui se laissent 
corrompre no viennent jamais ae plaindre, même 
lorsque les débaiicbées qui abusent d'elles les 



8S 



. PEOSTITUTIO:^ i 



mettent à deux doigta de lu mort, pai épuisement. 
Voilà donc la situation, au point de vue lépreasii. 
Un vice épouvantable étend chaque jour, de plus en 
plus, ses ravages au sein de la Bociété moderne, et la 
justice, sans aucune arme, ne peut sévir. Le sapliiame 
' trouve encore sa propagation facilitée par cette cir- 
constance pai'ticulière: c'est q^ue les tribades, à ren- 
contre des pédérastea, sont presque toutes actives «f 
lassives à la fois. 

Les tribades se rencontrent aujourd'hui partout, s 
Paria. Ce sont, dans les brasseries, ces jeunes filles 
qui affectent de porter, deux par deux, un costume 
exactement semblable, et que les étudiants s'amusent 
à appeler des n petites-sœurs n. Ce sont, au théâtre, 
ces cabotines qui font ménage dans !a même loge et 
se quittent jamais. Ce sont, au milieu des 
honnêtes gens eux-mêmes, ces deux amies de couvent, 
à ([ui l'internat a été fatal en faisant éclore chez elles 
une affection réciproque parfaitement exagérée, mais 
que leurs deux familles croient innocente, ou encore 
cette femme mai'iée qui approche de la quarantaine 
et sa jeune amie, son inséparable, qui refuse obsti- 
nément, sans dire pourquoi, tous les partis que ses 
parents lui proposent. 

Mais, si chez les prostituées le saphisme se mani- 
feste rigoureusement par couples, sans aucune excep- 
tion à cette régie, par contre les unions de ce genr0 
n'existent qu'à l'état de minorité dans le monde 
bourgeois et aristocratique; et plus une lesbienne ap- 
partient à un degré élevé de l'échelle sociale, plus elle' 
est dévergondée dans son vice; véritable libertine, elle 
recherche les femmes nvec acharnement, ne s 
tachant plus à aucune, et faisant ainsi concurrence 
( débauchés de l'autre sexe. 



LA FEOSTITUTION A TAKIS Olt 

La ti'ibade, eu quête d'une de sea pareilles, a un 
signe «iistinctif; c'est le magnifique caniche, frisé, 
pomponné, bichonné, enrubanné parfois, qui l'accom- 
pagne dans sea promenades, à pied ou en voiture. 

Aux Champs-Elysées, l'observateur remarque aisé- 
ment le manège des élégantes lesbiennes en chasse 
d'aventures. Voici un équipage attelé superbement: 
dans la voiture, une femme seule, en toilette plus ou 
moins luxueuse, avec l'inévitable caniche auprès 
d'elle. Cette femme, en descendant de la place de 
l'Etoile, regarde avec attention les promeneuses à 
pied, principalement entre le rond-point et la place 
de la Concorde. Une promeneuse voit la femme au 
caniche et croise son regard avec le sien, tout en exé- 
cutant un rapide mouvement de la langue et des 
lèvres; c'est le signe conventionnel, adopté entre tri- 
bades, pour dire: « Je suis pour femme ». Bientôt, 
la voiture fera demi-tour, remontera l'avenue, et la 
dame au caniche, ordonnant à sou cocher d'arrêter, 
prendra la promeneuse inconnue, comme une amie, 
pour l'emmener dîner avec elle eu cabinet particulier. 

Cela se pratique publiquement; il faut être aveugle 
pour ne pas le voir. Au théâtre, aux bala, aux courses, 
aux ventes de charité, aux expositions, les tribades du 
monde, du demi-monde et de la haute galanterie se 
reconnaisisent ainsi entre elles. Et ces enragées 
n'attendent pas le soir pour se rechercher et s'en- 
traîner; au bois de Boulogne, il y a une avenue, l' Alliée 
des Poteaux, ou le racprochage des femmes par les 
femmes s'exerce le matin même, de dix heures à 
midi. Celui des Champs-Elysées s'effectue le soir, à 
partir de quatre heures jusqu'à la tombée de la nuit, 
c'est-à-dire au moment du retour du bois. Ces tri- 
bades promeneuses, qui se tiennent îi la disposition 



LA PEOSTrrlUTIOIÎ A TAEIS 



H 

sont d'ae- 



(les davnea du munile lïl Jos hautes oocnttos, sont 
iliuaire des femmes de vingt-cinq à trente ans, mises 
eans ostentation, mais avec un certain chic; elles 
portent les cheveux courts, loa vêtements de coupe 
masculine, et elies ont l'allure garçonnière. On peut 
les prendi'C poui' des étrangères originales, iiiaÎB 
néanmoins pour des personnes honnêtes, si l'on ignore 
l'existence de leur spécialité; on dirait des étudiantes 
russes appai'teuant à des classes riches. Que l'on ne 
s'étonne pas de cette comparaison: dans les grandes 
villes de fiuBsie, le saphisme sévit plus fortement 
encore qu'à Paris. 

La prophétie d'AJexandre Dumas fiJs n'est paa 

^ tout-à-iait réalisée: le schisme goide encore une cer- 
taine réserve sur la place publique; mais i! est bel et 

■ bien sorti des Catacombes. 



CHAPITRE IV 

NOTES PHYSIOLOGIQUES ET PATHOLOGIQUES 



1 . Sur renilioti|ioiiit et la. v 



•ilf; Oc 1,1 voix. 



L'emban'point chez les prostitiicti, — Un grand 
' nombre de cea filles brillent par l'embonpoint; mais, 
L quoique ceci se remarque dans la majorité, on ne doit 
I pas en tirer des conclusions absolues, puisqu'on voit 
r aussi tous les jours des prostituées qui sont très ordi- 
ires à cet égard, et qu'on en rcuoontre mcme qui 
' Se distinguent par leur maigreur, L'emlumpoint des 
prostituées ne se développe guère qu'à IVige de vingt- 
cinq à trente ans; on l'observe rarement uu-dessotu 
i cet âge et chez les débutantes dans ie métier. 



^TDan 



LA PKOSTITUTION A PAHIS 91 

Sans le public, on est porté k attribuer cet eiiibou- 
point aux préparations mercurielles dont ces femmes, 
suivant, l'opinion générale, font nn uaage habituel. 
C'est une erreur; les médecins du Dispensaire et de 
Saint-Lazarp observent fréquemment cet état du 
corps chez des femmes qui n'ont pas eu de maladies 
vénériennes depuis plusieurs années, ou qui ont été 
assez heureuses pour n'en avoir jamais contracté. 

Il est plus logique de voir dans la vie inactive et 
la nouiriturc abondante de ces filles la cause de cet 
embonpoint chez la plupart. Indili'érentes pour 
l'avenir, mangeant à chaque instant, consommant 
beaucoup plus £|np toutes les autres femmes du 
peuple qui travaillent péniblement, ne se levant qu'à 
dis oii onze heui'os du matin, comment, avec une vie 
aussi animale, n'en graisseraient-elles pas? S'il en est 
quelques unes qui restent maigres, c'est qu'il est dea 
constitutions qui résistent aux moyens les plus 
propres à donner de l'embonpoint; c'est que toutes 
les prostituées, loin d'avoir le superflu, ne sont pas 
oaaez heureuses pour se procurer tous les jours le 
strict nécessaire , — Ajouttms que, si l'embonpoint 
est iréqueut chez les prostituées, il l'est bien davan- 
tage chez les maîtresses de maison; ces dernières sont 
I quelquefois, à cet égard, véritablement remarquables, 
I La -voix ravque des prostituées. — Il est dea pros- 

',' tituées resplendissantes de beaiité et de fi-aîcheur. 
distinguées par leur mise et l' élégance de leurs 

i manières, et qu'à leur tournure on prendrait pour les 
personnes les mieux élevées ; mais quel désenchante- 
ment dès qu'elles parlejit !,.. Ce n'est plus ce timbre 
de voix qui ajoute tant aux charmes de la femme 
^_ il ne sort de leur bouche que des sons rauques et ilis 
^Haerdants qui déchirent les oreille», ci qu'un ubarretier 



i 



r 



I 



LA PEOSTITUTION A PARIS 

pourrait à peine imiter, ilais cette altération de I* 
voix est loin d'être générale chez ces filles; les ex- 
ceptions sont nombreuses. 

Cette raucité de la voix survient d'ordinaire vera 
vingt-cin^q ans. Des physiologistes l'ont attribuée à 
tort au saphisme; un grand nombre de tribadea n'ont 
nullement une voix mâle, comme on se l'imagine. En 
réalité, les voix rauques a'observent le plus ordinaire- 
ment chez les filles de la classe infime, chez celleB 
qui se tiennent dans les cabarets, et qui, daiia 
l'ivresse, ont l'habitude de crier et de vociférer, et 
aussi chez un certain nombre de filles, qui, grâce & 
leurs agréments physiques ou à leur science luxu- 
rieuse, sont parvenues à une plus ou moins haute 
classe, après un stage de trottoir. 

L'altération de la voix chez beaucoup de prosti- 
tuées n'est donc pas un phénomène extraordinaire; 
elle tient surtout à deux causes qui agissent tantôt 
isolément et tantôt simultanément : d'une part, l'abuA 
des liqueurs fortes; d'autre part, les courants d'air 
auxquels les filles des classes inférieures sont sans 
cesse exposées, leur déshabillage continuel et sans 
aucune précaution hygiénique, les refroidissements 
éprouvés dans une foule de cas, et tant d'aiitres im- 
prudences du même ordre, qui tiennent, pour toutes, 
à leur genre de vie. 

S, Sur la (.•ouIcuF des cheveux et livn jeux. 

Il n'est pas question ici, bien entendu, des chevft^ 
lures teintes, selon la mode absurde de notre époque. 
Mais la question de la couleur des cheveux et des 
yeux tient de près à l'histoire naturelle de l'huma- 
nitê, et le document curieux que j'apporte ne se 
trouve nulle part. 



LA PEOSTITCTIOX A P.OIS 93 

[L'examen dont il s'agit a été fait sui' 12,600 filles 
Bcrites aiiccessivement à Paris, dont 12^015 nées en 
Ërance. Sur le total de ces prostituées, on a ronataté : 
K730 à cheveux châtains; 2,G42 brunes ordinaires; 
fe486 brunes à chevelure très noire; l,()94 blondes; et 
ea seulement. En outre, en déclassant spé- 
B^lement les Françaises selon leur pays d'origine 
sônes du Nord, du Centre et du Midi), les tableaux, 
font il serait fastidieux de donner le détail, ont indi- 
uué nettement que, dans notre population féminine : 
les cheveux noirs et les cheveux châtains de- 
viennent plus fréquents à mesure qu'on descend du 
lord au midi; 2" les cheveux bruns prédomineut 
i dans le nord; 3° ceux d'un ton blond se font 
pPautant plus souvent remarquer qu'on l'enionte du 
nord; 4" enfin, la couleur l'ousse, si rare 
Qu'elle soit, suit la même loi que la couleur blonde 
t ne s'est pas trouvée dans la zone des départements 

Sridiouaux. 
[ En ce qui concerne les yeux, on a trouvé les quan- 
: suivantes : yeux gris, chez 4,612 prostituées; 
is, 3,529; bleus, 2,878; roux, 730; et noirs, 705. 



3. Sur In taille des prostituéeH de Puris. 

Si la couleur des cheveux et des yeux est considé- 
Kjrée comme un point intéressant dans tout ce qui re- 
farde l'histoire naturelle d'une population quel- 
wnque, à plus forte raison doit-on s'occuper d'un 
pbjet beaucoup plus saillant : la taille de cette même 
Mspulatinn. Au sujet de l'homme, on a, pour les ob- 
lj«ervatiuns, la- mensuration quiî s'effectue lors du 
■ïecriitement militaire ; c'est la base des statis- 
^bgues. Au sujet de la femme, ce sont les prostituées 



LA l'KOM'nTUTIOy A PARIS 

seules qui peuvent nous t)fl'rir une indication sérieuse,' 
en opérant siir un grand nombre, mesurées successi- 
vement sans en passer aucune ; notre 
porté sur plus de 12,000 inscrites à Paris, On verra par 
là que IVffectif de la prostitution parisienne compte 
de ti'ès petites femmes, et aussi de très grandes. 

Taille moyenne, de V^m à 1=^. — 829 prostituées dé 
1»50 : — 406, de 51 : — 572, de 52 : — 57f), de 53 : — 903, 
de 64 ; — 883, de 55 ; — 637, de 56 ; — 622. de 57 ; — S44, 
de 58 ; — 507, ile 69 ; — 806, de 60, 

Grandes frmnie.i, au-dessus de l^eo. — 277, de 61 (l'écart,: 
on le voit, est très remarquable) ; — 346, de 62 ; — 23(^. 
63 ; — 274, de 64 ; — 333, de 85 ; — 144, de 66 ; — 108, 
87 ; -- 101, de 68 ; — 75, de 69 ; — 119, de 70 . 

Très gramh» femmes. — 17 prostituées de 1°71 ; — 
de ra ; — 10, de 73 ; — 28, de 74 ; — 30, de 75 ; — 3, de 76 ; 

— 2, de 77 ; — 7, de 78 ; — 2, de 78 ; — 3, de 80 ; — 1, de 
81 ; — 0, de 82 et 83 ; — 1, de 84 ; — et 1, de I"! 

Petites femmes, au dessous de l^ôO ; quantités par ordrt 
de décroissance. ■ — 349 prostituées do 1°'49 (l'écart e 
core très remarquable entre la taille d'un mètre 50 et cellâ 
d'un centimètre de moins) ; — 405, de 48 ; — 212, de 47 ; 

— 262, de 46 ; — 281, de 45 ; — 147, de 44 ; 

— 36, de 42 ; — 93, de 41 ; — 211, de 40. 
Très petites femmes, c'est-à-dire celles dont le somme! 

de la tète est moins haut que l'épaule d'un homme de taiU; 
moyenne. — 52, de X°39 ; — 97, de 38 ; — 2fi, de 37 ; — 
de 36 ; — 75, de 35 ; — 17, de 34 ; — 7, de 33 ; — 4B, de 

— 9, de 31 ; — 95, de 30. 
Qiiaai-na/iies, ou prostituées extrêmement petites, 

quelles sont très recherchées par les vieux lihertîuB 
dans leurs goûts désordonnés, veulent se créer l'illnsii 
qu'ils ont affaire à des fillettes. — 13, de l'"29 ; — MB, i 
2a ; — 1. de 27 ; — 59, de 26 ; —.57, de 2ô ; — 1, de 23;— 
~ 3, de 31 ; — enfin, 1, de I^IS, et 1, de I^IS. — 



LA PROSTITUTION A PAEIS 



95 



exceptions, qui se trouvaient parmi les tailles 

mtre 1°25 et l^SB, toutes lea autres quasi-naines, c'eat- 
■dïre 235, ont été fournies par Paris même et par les 
Spartements septentrionaux. 



S'il est une npinion généralement admise, c'est que 
ièe parties génitales des prostituées doivent présen- 
^r des altérations et une disposition particulière. 
^nséquenco inévitable de leur métier ; il faut en- 
tendre à ce sujet les jeunes et les vieux libertins de 
i plus haute et de la plus basse ancîété : il faut sur- 
oît écouter lea plaisanteries que ces derniers se per- 
pettent à l'égaril de leurs camarades qui épousent 
, qui prennent pour concubines d'anciennes pro- 
fettuées. J'ai trouvé, souh ce rapport, des médecins 
peuple qr.e le peuple lui-même ; considérant, 
1 effet, que toutes les professions qui exigent l'ac- 
Bon continuelle d'un membre ou d'un or^fane quel- 
jonque, font (jue ceux qui les exercent présentent or- 
iiaîrement, dans ces parties, des altérations qui 
(nt qxielquefois assez remarquables pour faire con- 
^ître la profession exercée, ils en concluent, par ana- 
bgie, qu'il ne saurait en être autrement poui' la classe 
Vb prostituées, et ce qui ne leur avait d'abord ap- 
fcm que comme vi-aisemblabla finit par devenir. 
j leur imagination, une vérité démontrée. 
Cette façon de raisonner est formellement contre- 
Ete par les constatations quotidiennes des praticien» 
^mpétents, c'est-à-dii-e par les médecins du Dispen- 
9 et do Saint-Lazare. Yoici la vérité vraie : 
Les parties génitales des prostituées ne présentent. 
Aieune altération spéciale et qui leur soit partie 



i 



96 LA PEOSTTTniOX A PAKIS 

lière ; soug ce rapport, il n'existe pas de différeîM 
entre elles et les femmes mariées les plus lionnètoB 
L'emploi du spéculum pour leur visite sanitaire I 
prouvé que l'amplitude et l'étroitesse d\\ 
étaient, pour beaucoup de femmes, un étiit nature 
et congénital, et dont il ne faut pas plus s'étonna 
que des dimensions de n'importe quelle autre j 
du corps qui varient d'une manière si remarquai 
suivant les individus. On rencontre tous les jours, ai 
Dispensaire et à Saint-Lazare, des jeunes prostituéet 
presque débutantes dans le métier, et n'ayant jamaî 
eu d'enfant, dont le vnjrin est plus dilaté que ne l'ee 
quelquefois celui d'une femme mariée après cintj a 
six accDueliements ; et, par opposition, on y voi 
d'autres femmes ayant vécu pendant douze ou quinzi 
ans dans la prostitution, dont le visage porte le carao 
tère de la décrépitude, et dont les parties génitalei 
et le vagin en pai-ticulier, n'offrent aucune trac 
d'altération. " '^ 

La pseiido-virghiitc de certaines prostitttéea.' 
Entre autres filles publiques, j'en ai vu une de 51 ans 
vivant de la prostitution depuis sa quinzième annéi 
(soit 36 ans de métier), et dont les parties génitale 
auraient pu être confondues avec celles d'une viergi 
sortant de la puberté. SIM. Trébucbet et Poiraf^ 
Duvalont cité aussi une fille soumise, inscrite de^ui 
douze ans ; elle a, disent-ils, les signes de la vir^ni" ' 
et les aura toute sa vie, et cependant elle a contrac 
plusieurs fois la maladie vénérienne ; cette fille, liabi 
lement exploitée par les proxénètes, a été livj 
comme pucelle, autant de fois au moins qu'élit i 
d'années, à des libertins qui ont épuisé avec e! 
leurs forces et leur argent, — Indépendamment de c 
cas, dûs à un état nature], il est juste d'ajouter qu( 



. PBOSTITCTIOX , 



97 



K'paeu'do- virginité se praticLiie à Paris sur une vaste 
telle. Dana la prostitTition clandestine, nombreuses 
bt les proxénètes qui exploitent les nniateurs ae 

t Tert. 

Toute maison de rendez-voua a sa vierge en réserve, 

!âie ou faiisae ; vraie parfois, raaia rarement, à 

toina qu'une ignoble mère ne vienne proposer elle- 

ESme son enfant, dit M, Coffignon ; maïs encoi'e la 

roxénète y regarde à denx fois avant d'accepter le 

Wché ; elle redoute, en effet, par dessus tout qu'une 

^prudence, venant à amener un gros scandale, ne 

[oiible son petit commerce. D'ailleurs, elle fabrique 

rec tant d'art lea fausses pucelles, qu-'elle ne recon- 

t pas la nécesaité périlleuse d'en avoir de vraies. 

Beat une simple fille publique qui joue ce rôle, par- 

9 une clandestine, souvent même une fille en carte 

ni s'y prête très volontiers en dehors de sou domicile. 

t la cboiait malingre, chétive, peu dévoloppée. C« 

ht jamais une couturière, les vieux débauchés ne 

Ipient plus aux couturières ; c'est une bruniaseuse, 

ne fleuriste teignant les pétalea de fleurs, etc. ; bref, 

i lui trouve^ une profeaaion. laiaaant aux maina dea 

lacée indéniables. Quelques jours avant de livrer 

tte fille à l'individu malpropre qui a chèrement 

i le plaisir d'être mystifié, la proxénète lui fait 

iîvre un traitement spécial : une continence absolue 

i est imposée ; puis, les moyens médicaux sont em- 

gés pour amener le resserrement des muqueuses ; 

Pfrictions avec une pommade astringente composée 

JTaaeline blanche, d'extrait de ratanhia, de teinture 

xiaea de Provins, de teinture de vanille et de tein- 

I de capricum, ou bien des lotions fréquentes 

têc une mystérieuse liqueur, qui n'est autre qu'une 

pacération de t|uinquina gris. Ce n'est pna tout 



r 



LA PROSTITUTION A PAEIS 

, débauche précoce a fatigué le corps eiitief 
de la fiîle. il faut raffermir ses chairs pour lui rendra 
une jeunesBC qu'il n'a déjà phia : on y arrive eu lui 
faisant prendre des bains dans lesquels ou a versé 
la mixture suifante : Tinaigre fort, teinture de ben- 
join, teinture de l'oses l'ours (200 grammes dé 
chaque). L'illusion est complète. Cependant pas da 
virginité sans hymen ; qu'à cela ne tienne ! au der- 
nier moment, on pourvoira nti l'on suppléera à la i 
tauratiun de la probante membrane, de façon à c 
sacrer la défloration par des preuves ausai éridented 
que sanguinolentes. 

Etat du Clitoeis. ^ Le clitoris étant le siègi 
principal de la sensibilité Toluptueuae chez la femmo 
et ce petit organe charnu acquérant quelquefoi 
dimension considérable, on a prétendu qu'il devail 
présenter ce développement plus souvent chez lfl| 
prostituées que chez les autres femmes, et devait êt*i 
en raison de leur lasciveté et des vices honteux qa 
les dominent parfois. 

Encore un raisonnement fau:x, encore nne erreur 
Les fiUes publiques de Paris ne présentent riai 
d'anormal dans la disposition et dans les dimei 
du clitoris ; chez elles, comme chez les femmes i 
riées, il existe quelques variétés, mais qui n'ont riai 
de remarquable, et que l'on peut assimiler à 
autres variations dont il a été question plue haut ; 
organes génitaux de l'bo'mme offrent soua ce rapport 
dea variations bien plus fréquentes et bien autremeâ 
tranchées. 

Pendant tonte la période de mon enquête, il : 
s'est trouvé à Paris que trois prostituées profesmo 
iieîles dont le clitoris présentât un (léveloppemeïi 
notable ; mais, sur l'une d'elles, ec développera 



PARIS 99 

pit énorme : 'le clitorÎB de cette fille avait en loa- 
i centimètreB, et en grosseur il égalait l'index 
nain moyenne d'homme ; on y eonstatait un 
md Lien formé et recouvert d'un prépuce, au- 
la duquel se trouvait de la matière sébacée ; 
, à s'y méprendre, la verge d'un enfant de douze 
latoree ans, peu avant sa pubeiié. Cette fille, âgée 
,ngt-trois ans, n'avait jamais été réglée et n'nfErait 
I la moindre trace de mamelles : il est probable 
^elle manquait également d'iitérus, car le toucher 
t le vagin ne faisait reconnaît)» qu'uB tubercule 
Bérique sans ouverture, et la même exploration pra- 
tée par le rectum constatait l'absence de l'organe. 
mtre part, grâce à de nombreuses observations, 
■t à la prison qu'après sa mise en liberté, grâce à 
^ eurveillance spéciale et à des informations de la 
liée, on acquit la preuve qu'elle était aussi inditté- 
i pour les hommes que pour le» femmes, qu'elle 
Vêtait livrée à la prostitution que par excès de 
, et que, sï elle avait eu pendant quatre ana 
Bhmant dans son paya, c'était parce qu'il pour- 
SiiÈ alors à son existence. Toute la conformation 
B fille n'était donc qu'une de ces erreurs de la 
pre qui ae constatent exceptionnellement : eu par- 
ter, l'organe dont il s'agit, mi-clitoria, mi-pénia, 
tevait nullement ses dimensions anormales ni à 
titution ordinaire, ni au eaphisme. 
mt aux deux autres filles, dont le clitoris était 
ippé outre mesure, sana atteindre pourtant les 
tiens de celui de la première, elles étaient bien 
a et fortes eu mamelles ; et, néanmoins, snus le 
t des penchants, elles présentaient avec le sujet 
Ment la plus grande ressemblance. 

irtout il Siiint-Lazart- que les méde- 



i 



100 1.4 PEOSTIXUTION A PAEIS 

cina ont le plus d'occasions d'étuilier ces particula- 
rités : tous les jours, oa y reçoit quelques unes tle C 
filles d'une lasciveté effrénée, ou de ces femmes, plus. 
lascives encore, adonnées au vica honteux du 
phisme ; on examine ces femmes comme les autres, 
filles publiques, ces exaniens s'effectuent avec le plus. 
g^rand scdn, et jamais elles n'ont présenté, Jans leur 
organisation, la moindre chose qui les distinguât du 
reste des prostituées, ou du commun des femmes. 

Cette erreur à propos du clitoris est la sœur jumelle 
de l'erreur qui consiste à dire que les tribades ont ei^ 
général la taille élevée, les membres vigoureux, 1% 
figure hommasse, uno voix de contralto, le ton impé- 
rieux et des manières hardies. Tout cela n'est qu» 
pure imagination. J'ai connu et observé longuement 
un bon nombre de ces tribades, qui se faisaient, 
remarquer, au contraire, par leur jeunesse, leur délin 
catesse, la douceui' de leur voix, et par d'autr 
charmes qui n'ont pas moins d'Influence sur leuj;^ 
semblables que sur les individus appartenant à l'autro; 
sexe. 

Est-il un caractère plus tranché et qui sépare plna 
Fhomme Je la femme, que la barbe?... Eh bien, 
trois filles que je viens de citer n'eu avaient pas 
de traces, bien que les parties qui, dans leur sene, 
doivent être velues, le fussent comme chez toutes legi 
autres. Par contre, cette barbe s'est fait lemarque? 
chez plusiexirs filles publiques, et l'on a pu constater^ 
à Saint-Lazare, que le clitoris de celles-ci n'avait; 
rien que de naturel. L'une de ces filles barbues a po, 
mieux que toute autre, être observée à loisir : comme 
elle joignait à cette particularité une belle prestanoo 
et quelque chose de mâle, elle était recherchée par 
[ les hommes les plus riches et les plus distingués, et. 



PARIS 101 

»tait fait dans son métier une (grande réputation.; 

Ibis, son caractère lui faisant commettre nombre de 
revenait Bans cesse à la prison, où l'œil 
B médecins et des gardiennes a pu la siii-veiller tan- 
t liuit jours, tantôt deux semaines, tantôt un mois, 

^ cela pendant une période de quinze années ; or, 
I s'est assui'é qu'elle n'était pas sujette au vice 
aiteux et dégradant dont son physique se faisait le 
înonciateur, d'après tes idées erronnéea qui sont en 



("ÉTAT DES Nymphes et des Grandes Levées. — -Il 

A des prostituées dont les nymplies ou petites lèvres 
^t développées outre mesure. Ce cas se présente 

ielquefois ; mais est-il dû au métier? Pour ma part, 
i doute fort. Sur plus de ;i,000 filles inscrites, se 

touvelant chaque année pour un tiers, la cousta- 
llitjn de ce cas s'élève annuellement à un chiffre 

riant de 15 à 20. C'est bien peu pour tirer une 
pclusion. 

D'autre part, cliez quelques vieilles prostituées, la 

nbrane muqueuse du vagin devient comme tannée 

H cartilagineuse, ou, pour mieux dire, elle acquiert 

1 qualités extérieures de la peau ; cliez quelques 
rares filles publiques surannées, les petites et les 

odes lèvres, loin de s'allonger, disparaissent com- 

bement et sont remplacées par des masses informes 

ttisBU gi'aisseux ; mais ces diverses altérations sont 
'. rares que celles dont il a été pi'écédemment 
^stion. 

ËTAT DE l'Anus chez les Prostituées. — Ces 
nlheureuses, livrées à la brutalité d'une foule 
Bionimea blasés sur les jouissances que permet la 

aire, ne refusent pas toujours ces contacts illicites, 
BÏ, pour avoir lieu entre individus de sexe différent, 



Jj 






I.A l'BOSTITrTIOX A PAEIS 



n'en sont pas moins révoltaotea. Arrivées à uu cet 
âge, presque toutes les fiUea publiques acceptent < 

se prêter à c&a tiiipitudes ; néanmoins, aucune i 
l'avoue : elles repoussent avec horrfur les qviestionU 
du Biédeein à ee sujet, et affectent uno vive indigna- 
tion quand il les soupçonne. Cependant, les déstadri 
locaux, qui sont parfois le résultat des pratiques il 
la sodomie, se présentent ordinaiiement sous un. tel 
aspect, qu'on ne peut se méprendre sur leur origine i 
dans ce cas, c'est toujours par le silence et jamais par 
un aveu direct que l'on apprend la vérité. 

Ainsi, paur reconnaître certaines maladies, lei 
nécessités de l'exploration obligent parfois à recou- 
rir au toucher rectal. Ce toucher se fait avec l'index, 
graissé préalablement : la femme étant debout, 
couchée sur le ventre, nu bien ear li^ dos, mais 11 
bassin élevé, l'index explorateur est introduit daxu 
l'anus et glissé dans le rectiun ; alors, le médecin 
recourbe son doigt en avant, pour esyininer la £ 
Bon rectG-vaginale, dans laquelle se développent quel- 
quefois des tumeurs ciez les prostituées, ou poui 
palper la partie postérieure de la matrire, qu'on i 
touolte pas aisément par lé vagin, ou encore pow 
sentir et reconnaître le fond même de l'utérus, daaj 
le cas de rétroversion. C'eit en opérant le toucbei 
rectal qu'il arrive de constater que la prostituée t 
prête à satisfaire le vice des sodomistes ; mais, poïul 
^ue les signes soient certoinB, il faut que cette i 
tique lui soit habituelle depuis longtemps. Buoa i 
cas, l'anus, déformé, présente la forme du 
noir ; le doigt explorateur du médecin constate 
immédiatement le relâchement du sphincter, l'e 
cernent des plis, et des ihagades ou crevasses juaqti* 
. dans le rectum, si l'usage de ces communications 



lA. PEOSTlTCTIO>- A PARIS 103 

(Outre-nature est iavétéré. Les ilé3ordre§ locaux sont 
mcore plus graves si, clans ces ij^nobles contacts, la 
lemme a contracté r(uelr|u'Dne des maladies qui atiot 
fcartioulières k la sodomie, telles ijue la blenaorrhagie 
^tale, la cristnlline, et autres maladies des plus 



) pr^ 



Malheureusement, ces cas ne sunt ]>a3 rares ; 
p^est surtout cliez les £Ues clafidestinos qu'ils s 
(entent. 

ËTAT DE LA M Es^TjtuATiON, — 11 n'est pas san3 
intérêt de connaître jusqu'à quel point la vie que 
mènent les prostituées peut modifier la menstruation, 
fonction si importante à la santé des femmes. A cet 
égard, les renseigneTuents les plus dignes d'être rete- 
nus sont ceux qui proviennent des internes et sur- 
tout des inli]'iaièrea et des surveillantes de Saint- 
Lazare : ces dames, en effet, ne quittent jamais les 
prostituées, dont, au surplus, elles inspectent et 
loignent le linge. D'après leurs oLservatinns, l>eau- 
Bcoup de ces filles n'ont pas leurs l'èg'les depuis deux 
a trois ans, et ne s'en portent pas plus mal pour cela; 
i«u bien elles ont des inteiruptinns pendant trois ou 
{Tiatre mois, sans qu'on puisse en reconuaitre la 
■«ause. D'autre pai't, un a constatû que toutes celles 
r.^ui, touefiées de repentir, entrent dans les maisons 
■ àe rel^ig«, y aiTivent sans être Fé9lé€>s ; et ce qui est 
fort extraordinaire, c'est que la menatruatioQ ne se 
rétablit pas pendant leur séjoui' dans oes établisse- 
ments, malgré le repos dont elles y jouissent. 
£n résumé, il est eei'tain qu'un nombre très notable 
a prostituées sont bien réglées, sans que leur métier 
traisse avoir aucune action sur cette fonction ; mais 
nbre, très considérable aussi, ne sont pas ré- 
sléea ; enfin, la menstruation semble siiivre chez i 



e, pen^a^^Ê 



10-1 LA PfiOSTITVTIOZiî A PAUIS 

fenimea sa marche périodiiiue et i-ÉgulièrG, 
un temps plus ou moins long, et finir par s'altérer. 
On conçoit même diificilement qu'il puisse en être 
autrement ; car elles se liîrent à tous les excès, s'ex- 
posent à toutes les intempéries, et commettent mille 
imprudences, des plus pernicieuses aux fonctions da 
leur sexe ; sans parler île celles qui se font (jeu très 
dangereux), des injections froides fréquemment ré- 
pétées, pour supprimer leurs menstrues et ainsi ne 
point interrompre trop longtemps les ressources 
qu'elles tirent de leur m.étier. 

5. De la fùcroodité fiiez Iff* pFi>(«lituûe9. 

Il est généralement admis dans le monde et parmi 
les médecins que les prostituées sont stériles. Cette 
opinion n'est pas exacte, si on la prend (l'une façon 
absolue; mais il est cependant prouvé que ces fiUea 
sont beaucoup moins fécondes qu'elles ne le seraient 
en menant une vie conforme aux lois de la nature. 

Sauf quelques exceptions, c'est à la Maternité que 
vont de préférence, pour accoucher, les prostituées de 
la basse classe et même celle d'une classe supérieure: 
mais elles ne se font pas connaître pour ce qu'elles 
sont. « Néanmoins, m'a dît la sage-femme en elief de 
cet établissement, *aprè s quelques jours d'observation, 
nous les distinguons facilement, surtout par les pro- 
pos qu'elles tiennent dans les salles et les promenoirs. 
II est rare qu'elles accouchent heureusement; la len- 
teur du travail nécessite toujours l'emploi du forceps. 
Leurs enfants vivent rarement, souvent même ils ar- 
rivent morts, et les accidents les plus graves suivent 
constamment ces accouchements. ■ 

[autre part, ces malheureuses ne sont pas toujours 



W LA PEOSTITUTION A P.tRIS 105 

libres d'acfoiiclier où elles veulent, et Saint-Lazare 
en recueille quelques unes, soit qu'elles y soient en- 
voyées comme malades, soit qu'elles aient à subir 
une détention pour un délit administratif. 

Quant à celles qui sont dans leurs meubles, la plu- 
part se confient en ville ans soins d'une sage-fenuue; 
les unes font connaître leur cas à la police des mœurs, 
les autres profitent de l'occasion pour disparaître. Au 
total, d'après des notes spéciales prises pendant plu- 
sieurs années consécutives, on peut dire que la 
moyenne des prostituées présentant des accouche- 
ments à terme s'élève à !^1 pour 1,000 par an. 

Une autre question se pose, celle de l'aptitude que 
ces filles peuvent avoir à l'imprégnation; il faut 
se demander aussi que! est, en généi'al, le résultat de 
leurs conceptions. A Saint- Lazare, les avorte ment s 
Bout fréquents vere les sept à huit mois de la groa- 
sesse, et plus fréquents encore à une époque moins 
avancée; mais, comme il n'y a pas lieu alors d'in- 
scrire des naissances, nous n'avons aucune constata- 
tion précise. 

A ce propos, en songeant aux interruptions assez 
longues des règles dont j'ai parlé plus liaut, ne pour- 
rait-on pas les attribuer à une conception et à une 
véritable grossesse? Voici, sur ce point, le résultat 
des observations d'un de mes collègues, le docteur 
Serres : a Les pei'tes abondantes, m'écrit-il, sont rares 
chez ces femmes; mais les plus jeunes ont souvent des 
retards de leurs règles, qui se terminent par l'expul- 
sion de ce qu'elles appellent un bondon. Fendant 
deux années, je ne fis pas attention à cette expression; 
mais, ayant dirigé mes recherches sur l'embryologie, 
j'examinai avec soin ces productions, et il me fut fa- 
cile d'y reconnaître tous les caractères de l'œuf hu- 




LA PKOSTITUT 



pu, dans un coui't eapaiie de t.em; 
îillir, il notre liùpitai, un grand nombre qui 
t sortis à une époque iudîquaiit nue conci 
de qiialre h cinq semainea. C'est toujours sur daa' 
de dix-lmit à vîngt-quati'e aus que j'ai pu fai 
observatious. n 

Il résulte de ces détails que, ei les filles puW 

§Aiiièiient à bien un très petit nombre d'enfants, 

font à l'impréguatian uno aptitude plus gmuda 

Kne le semble au premier aspect. Les prostitui 

Trejetant ces productions organiques, ne croienl 

I faire des fausses couelies; à toutes celles qu'i 

Lavouent, il faut donc ajouter oea hondons. Plus p«r- 

Riiculièrement, les filles clandestines provoquent sou- 

rrent leurs fausses coucher. Mais, sans parler de cef 

Ljnauoauvres criminelles, l'exercice seul du métiar 

fjs.' est-il pas plus que suffisant pour tout expliquer? Sj 

Via vie que mènent les prostituées nous étonne, 

|jious avons peine à concevoir que leur santé puisse 

K résister à des excès de tous les genres et de tous Ibb 

"instants, nous comprendrons aisément l'action fi- 

clieTise que peut avoir sur une grosaease commençantô 

une réunion si nonibreuss de causes de désordre et da 

desti'uction; tout s'expliquera, lorsque uous saurons 

que ces filles fout leur métier jusqu'à la dernière 

extrémité, que plusieurs ont accouché dans lea bu- 

reaiix de l'administration» et jusque dans la rue, au 

momL^nt où elles raccrochuient lea passants. 

Pourquoi ces malheureuses, qui pourraient être. 

admises à la Maternité un mois ou six semaines avant 

leur accoHcbement, et y jouir de toutes les douceuça 

ii'on y prodigue aux femmes enceintes, ne profitent- 

yies pas de cette ressource? On en concevra facile» 

tnt la raison, lorsqu'on saura <|u'iine prostituée 



LA PROSTITOTIOS- A TARIS 107 

I cet état eat plus recliercliéc, et gagne trois ou 
»tre fois plus que lorsqu'elle se troiive dans une 
ution ordinaire; c'est donc la nécessité ou l'appât 
L gain qui fait qu'elle s'expose à cette nouvelle 
rase d'avortement. L'état de grossesse les met dans 
1 catégorJG des filles qui se font remarquer par 
elque particularité insolite; l'existence de la barbe, 
I peau d'un noir tl'ébène, une taille d'une gran- 
r démesurée ou d\ins petitesse extrême, et jusqu'à 
I infirmités, ont presque toujours des résultats sem- 
lafales. 

• Abordons un autre point. Les prostituées croient, 
tesque toujours, pouvoir indiquer d'une manière 
Witive l'auteur de leur grossesse. XJn employé de la 
l^lïce aanitaii'e, désireux de contribuer aux enquêtes 
questions qui intéressont le plus la science 
physiologique, eut l'idée de demander à toutes les 
filles qu'il inscrivait si elles avaient eu des enfants, 
et si elles vivaient avec un amant en titre. Sur 620 
femmes, 217 refusèrent de répondre, et, parmi 1-es 40U 
autres, 213 déclarèrent qu'elles n'avaient pas 
d'amants et n'avaient pas eu d'enfants; 31 dirent que, 
bien qu'elles eussent un amant, elles n'avaient pas eu 
d'enfants; 133, ayant été mères, affirmèrent leur cer- 
titude relativement au père; 26 seulement, ayant eu 
des enfants, ne savaient à qui les attribuer. Ce sin- 
gulier ducumeiit nous montre la vérité de ce que j'ai 
avancé sur la fécondité des prostituées, sur les causes 
de cette fécondité, et sur l'habitude qu'elles ont de 
s'attacher plus particulièrement à un individu et de 
l'affectionner d'une façon sauvent singulière; il nous 
montre encoie que quelqaea Tines (2C sur 40:j) 
peuvent être fécondées par le client de passago 
^^jiu'elles n'ont juniiiis vu et ne reverront jamais. 



L 



I lOS LA pnosTiTrxios a l'.utis 

Tout semble doue prouver que les prostituées sont 
plus aptes à la fécondation qu'on ne le croit; qu'il 
faut, pour que cette fécondation ait lieu, une réunion 
l de circonstances, et, pour ainsi dire, le concours de 
I la volonté ou du laisser-aller de la fille, Téritable 
f état intellectuel et moral étranger à l'exercice habi- 
tuel de son métier: que si les filles publiiiues amènent 
rarement leur grossesse au terme normal, c'est 
qu'elles avortent presque toujours, soit que ces 
avorfements soient dus à des manœuvres criminelles, 
Boit qu'ils aient pour cause les excès do leur métier. 
Cependant, il est des filles publiques qui se sous- 
traient aux règles générales, et cbez lesquelles la fé- 
condité est remarquable; je pourrais en citer un 
grand nombre qui, tout en faisant leur métier, ont eu 
sept, huit, et jusqu'à dix enfants. Mais cette fécon- 
dité est surtout le cas de celles qui, négligeant le mé- 
tier et l'abandonnant en^ fait, s'attachent à un seul 
homme; les grossesses de celle-ci se succèdent, ellM 
sont toujours heureuses, et les enfants qui en pro- 
viennent sont aussi vivaces que les autres. 

En dehors de ce cas, les enfants des prostituées qui 
' restent professionnelles de la débauche sont victimes 
d'une mortalité effrayante? Infiniment peu survivent; 
c'est un fait acquis, 

6, lie rinnuen<.-c que |teul avoir siii- la santé g:éné- 
rale des pi-ostitiiées l'exerfiee de leur métier. 

De tontes les maladies auxquelles les prostituées 

sont exposées, il n'en est pos de plus fréquentes que 

la Bypbilis,les diverses autres maladiesvénérienneB,et 

les affections parasitaireg, telles que la gale et l'in- 

W'Bficn de cette vermiue qui se multiplie si prompte- 



r 

l* ment du 



I.A PROSTITUTION A PARIS 109 



IHBnt (l'une façon étonnaEte, le pou du pubis ou pou 
vénérien, vulgairement appelé morpion. Ces maladies 
sont le l'ésultat inévitable de leur métier; elles sont 
à leur égard ce «lue la colique métallique est aux ou- 
vriers qui préparent et maaient les sels de plomb. 
Maia je n'ai pas l'intention de traiter ici cette impor- 
tance question; je veux seulement parler des maladies 
communes et vulgaires dont ne sont pas exemptes 
les prostituées, et qui peuvent les attaquer aussi sou- 
vent et peut-être plus souvent que les autres femmes, 
Saint-Lazare est, sans doute, le meilleur endroit 
pour les observations à ce sujet; cependant, il faut y 
adjoindre les divers hôpitaux, oii les prostituées ma- 
lades savent iori bien se faire admettre en dissimu- 
lant leur profession honteuse, ce qui ne les empêche 
pas d'être bientôt reconnues par l'interne et les infir- 
mières; il faut y ajouter aussi la Maison municipale 
de santé, du faubourg Saint-Denis, asile préféré des 
filles galantes en bonne situation pécuniaire; enfin, 
il eût été fâcheux de négliger les observations d'un 
certain nombre de médecins à qui beaucoup de ces 
nmes s'adressent volontiers pour se faire soignei' 
z elles. J'ai donc procédé à une enquête générale. 
En voici les conclusions :' 
) Les pertes abondantes, constituant une maladie et 
Bna la moindre lésion organique, sont assez fré- 
juentes chez les prostituées. Leur métier en est-il 
peaponsable? Tous les genres de preuves s'accu- 
kLulent en faveur d'une réponse affirmative : on a 
b'baervé ces pertes sur des filles de quatoi'ze et quinze 
; or, quoi de plus rares que les pertes à cet âge 
ihez les femmes ordinaires? Une preuve capitale de 
L justesse de cette opinion, c'est que ces pertes iift. 
■'observent pas dans les maisons 4e iéVft-ïL'wsvï. ^■ç*^ 



110 LA paosTiTunoif a paeis 

cialemeiit consacrées aux prévenue a et condamnées 
de droit coommn; mes renfleignements ont été pris 
' dans toutes ces prisons de Prance. 

Les prostituée 8 présentent fréquemment, dans 
l'épaisseur des grandes lèvres, des tumeurs qui com- 
mencent par un petit noyau d'engorgement, et se tu- 
méfient à chaque époque menstruelle; on ne les 
observe jamais que d'un côté à la fois, et, lorsqu'elles 
sont abandonnées à eUes-mémes, elles acquièrent nn 
volume assez considérable; elles n'occasionnent au- 
cune douleur aux femmes et les gênent à peine; il 
est rare que ces tumeurs soient fibreuses; le plus or- 
dinairement, elles sont remplies d'un liquide albami- 
neus très épais, ou d'une substance mélicérique. 
Quelques unes se développent aussi à la base des 
petites lèvres; mais ces tumeura-là, tout en étant do 
même nature que les autres, sont fort douloureuses 
et n'acquièrent jamais un grand développement. 

Le métier des prostituées explique le travail in- 
■ flammatoire qui s'effectue quelquefois dans ces 
tumeurs et les fait aboutir; mais elles se remplissent 
en peu de temps, ou déterminent des fistules fort désa- 
gréables; on ne peut guérir ces fistules qu'en enle- 
vant les kystes qui les forment, ou en les faisant sup- 
purer. Sous le rapport de la fétidité, aucun liquide 
pathologique ne saurait être comparé à celui que 
contiennent ces kystes, ces tumoura; lorsque les méde- 
cins de notre service sont obligés de les percer, il 
leur faut recourir a. un bistouri à manche très long, 
pour éviter le contact du liquide et se préserver de 
son odeur affreusement puante, qui, sans cette pré- 
caution, resterait inhérente à leurs mains pendant 
deux ou trois jours, sans aucune possibilité de la 

ire disparaître. 



LA PBOSTITUTIOS A PAHIS Hl; 

Hien de plus fréquent que les abcès ordinairea 
'épaisBeur des }^aiides lèvres; ils ont toujours 
te marche aigiiej et se fer minent comme ctez 
ites les autres femmes qui y sont exposées. Il n'en 
pas de nkêm.e de ceux qui se développent dans la 
lison recto-Taginale, partie qui est très amincie 
les prostituée8;ceu3-ci dégénèrent souventen fis- 
très difficiles à guérir, et que les filles qui eu 
Lt affectées gardent souvent toute la vie. Le plus 
lairement, ces fistules se rétrécissent et ne 
;ent pas obstacle â. l'exercice du métier; à un 
ent donné, noua avons eu, à l'bôpital-prison, six 
avec cette infirmité dégoûtante, et l'opinion des 
lecins du Dispensaire et de Saint-Lazare était que 
comptait au moins une trentaine de prostituées 
le même cas. Qui le croirait ? on a vu de ces fis- 
tules guérir complètement, malgré l'influence de 
tant de causes capables de les entretenir et de les 
aggraver. Ce n'est pas cependant ce qui arrive le plus 
'Bouvent : chez une fille, les tentatives que l'on fit 
pour obtenir la guérison déterminèrent une ouverture 
■ iPane dimension telle, que le vagin et le rectum ne 
■îormèrent plus qu'un seul conduit, un seul orifice, 
ttosei large que répugnant; ce qui n'empêchait pas 
cette fille d'être une des plus recherchées. 

Ces fistules sont quelquefois le résultat de chancres, 
qtd, négligés par les prostituées clandestines, se sont 
«ggravés; mais, dans ce cas, la perforation a lien gé- 
n&alement très près du sphincter et de l'ouverture 
d^ Fanus. 

D'après nos observations, ces fistules recto-vagi- 
ItaleB coÎDcident presqne toujours avec la phthisie. 
Scuvent aussi, elles s'accompagnent d'un engorge- 
ment des grandes lèvres; mais cet engorgement n'eat 



i 



E 



112 U PROSTITUTIOS A PAHIS 

pas une infiltration ou un œdème ordinaire : il est 
dur et résistant, il ne cède pas à la pression, et il 
n'eat pas douloureux. Parfois, cette infirmité prend 
un tel accroissement, cet engorgement atteint do 
telles proportions, que lea filles ne peuvent plus faire 
leur m^étier; alors, telles de ces malheureuse^ qui 
sont sans ressources, cherchent un asile pour y ter- 
miner leTir triste existence; elles se font enfermer à 
Saint-Lazare, et il n'est pas d'année qu'on n'en éva- 
cue quelques unes sur les Dépôts de mendicité. 

Sans revenir à ce qui a été dit plus haut au sujet 
des lésions du rectum, provenant d'actes contre- 
nature, passons à wne grave question sur laquelle 
les avis sont partagés : il s'agit du cancer de l'utérue; 
les prostituées sont-elles plus disposées que d'autres 
à cette maladie, une des plus aiîreuses dont l'espèce 
àumaiiie puisse être affligée P — II résulte, pour moi, 
de mes observations personnelles et de toute mon e 
quête, que les prostituées ne sont pas à l'abri du can- 
cer de l'utérus, mais que cette maladie est, chez elles, 
beaucoup moins fréquente que certains docteurs le 
croient; ces cancers se constatent à Saint-Lazare f 
tant que cas rares, et dignes, par cette rareté, de 
fixer l'attention. — Ce que je viens de dire peut être 
appliqué aux allongements, atis irritations et aux 
phlegmasies du col de la matrice; les prostituées i 
sont pas à l'abri de ces maladies; mais elles en sont 
assez rarement affectées. 

Enfin, il est une affection qui ne saurait être passée • 
sous silence, en ce temps où le vice du saphisi 
s'est si considérablement propagé : c'est une variété 
de la vulvite à laquelle 1m tribades sont plus exposées 
que les autres femmes débauchées; cette vulvite est 
'vcompagnée d'une inHammation des glandes de Bar- 



L4 PEOSTlTCTIOîï A PASIS 113 

lin, en dehors de toute complication blennorrha- 




; que certaines prostituées, dont la clien- 
> refuse le coit (libertins blasés ou redoutant la 
philis), se sont iaît la spécialité d'être ce que Sué- 
fcone et les autres bistoriens de la dêpravatiou ro- 
maine appelaient ftUatrices, de même les tribades, 
entre elles, sont lavtbentes, le plus souvent d'une ma- 
nière réciproque, soit à tour de rôle, soit simultané- 
meut. Or, dans cette pratique lesbienne, cUloris Bar- 
tholinigue glandviœ extra modnvi ac veïicmcntiss^imè 
stîmulati sunt labore îinguœ lambentis, semper ac- 
tuosè rcpefito. H peut ne résulter de cet abus véné- 
rien qu'une hypersécrétion des glandes vulvo-vagi- 
nalea; mais, lorsque l'abus est excessif, cas assez fré- 
quent, l'inflammation de ces glandes ne tarde pas à 
se déclnrer; en outre, l'observation a constaté que, 
dans un couple de tribades d'âges différents, c'est 
toujours la plus jeune qui est sujette à cette variété 
de ht vulvite, et que, lorsqu'elles sont du même âge, 
la maladie les frappe d'ordinaire toutes les deux 
presque en même temps. 

Dans ces excitations sexuelles, il sui&t souvent d'un 
attouchement voluptueux ailleurs même qu'aux par- 
ties honteuses, ou encore d'un baiser eolombin 
quelque peu prolongé, pour que l'excrétion du li- 
quide des deux glandes se produise d'une manière 
soudaine sous cette influence; ce liquide est un mu- 
cus incolore, fllant, ordinairement alcaloïde, assez 
clair, et surtout n'ayant aucune ressemblance avec le 
mucus (lu col utérin qui est légèrement gluant : 
lorsqu'elles parlent de ce jet brusque, qui correspond 
au paroxysme d'érection du clitoris, chez les tribades, 
Bt qui marque l'instant d\i p\us W\iV àe^fe i^V^^ 



114 



LA PEOSTITUTION ; 



r 

^^B Tolupté, ces femmes disent que ee fait, se produisant 
^^V en dehors de leurs pratiques habituelles, leur cause 
^^P chaque fois une surprise; l'expression dont elles 
^^M servent pour désigner ce cas particulier, est a qu'eUes' 
^^B ont été mouillées 
^^K On le conçoit sans peine : si, dans leur état d'éner- 

^^^ vement paseionné, il leur en faut si peu pour pro- 
^^H Toquer l'éjaculatiou des glandes de Bartholin, à 
^^B plus forte raison l'excrétion du liquide est violente et 
^^m abondante, lorsqu'elles se livrent complètement à 
^H leur vice, alia aliam lambens vel amhœ se mutuà 
^H IfjTiibcntes. L'irritation eat, pour ainsi dire, fatale, et' 
pen nombreuses sont, parmi ces femmes dissolues, 
celles qui ne sont pas de temps en temps atteintes 
d'une inflammation de la vulve. 

Alors, lorsque cette vulvile s'est déclarée, le li- 
quide sécrété par les glandes de Bartholin filtre en 
quantité notable, comme une sueur plus ou moins 
abondante, mais toujours trouble, et il finit par consti- 
tuer du pus, qui, dès lors cesse de suinter, s'accumule 
dans la glande, et y détermine la formation d'un ab- 
cès. La malade éprouve un prurit désagréable, auquel 
s'ajoute bientôt la douleur, la rougeur, une tumeur 
plus ou moins volumineuse, avec chaleur et élance* 
ments. L'abcès s'ouvre souvent spontanément; mais 
la malade n'est pas ii l'abri des rechutes 

Cette maladie n'a lien de dangereux, et, bien qu'elle 
soit fréquente, elle prête à peu d'observations à Saint- 
Lazare. Ceci tient à deux motifs : en premier lieu, 
les tribades sont beaucoup moins nombreuses parmi 
les filles soumises que parmi les prostituées clandea- 
tines; en second lieu, le traitement ordinaire est telle- 
k ment simple et à la portée même des plus inintelU- 
pentea de ces femmes, qu'une fois qu'elles ont été 



LA paosnTmos a p.utis 115 

«itéea à la prison ou dans un hôpital pour cette vul- 

, elles ne manquent presque jamais de se traiter 

8-mêmes lors des récidives, sans même faire appe- 

Tin médecin. Elles s'enseignent, d'ailleurs, ce 

■ait«nient de l'une à l'autre; toutes les vieilles tri- 

kdes le connaissent; or, comme celles-ci sont le 

Loins souvent atteintes, elles soignent les jeunes, 

leurs victimes. Ce traitement se résume à des cata- 

Itlasmes et à des bains. 

Nous n'avons pas besoin d'ajouter que, si ces 

mmea peuvent se soigner sans médecin lorsque la 

laladie est bénigne, elles ont tort de ne pas le faire 

■appeler quand cette vulvite est douloureuse. Ce qni 

I retient, c'est la bonté d'avouer la déshonorante 

use du mal dont elles 8ou:ffrent, et elles préfèrent 

n rapporter à l'expérience des vieilles tribades, 

teura complices en int'araip. Pourtant, le médecin leur 

ksratt nécessaire, dès l'instant que la sécrétion du pus 

t déterminé un abcèë; car il vaut mieux que cette 

menr soit l'objet d'une ponction (qu'un médecin 

nul peut convenablement opérer), au lieu d'attendre 

que l'abcès s'ouvi^ de tui-mème. 



ff. Accidents nerveux et paptieulnrité» l'eLitives 
A l'aliénation mentale oitservés dieu Icn pros- 
tituées. 

Les accidente nerveux, convulsions et affections 
spasmodiques, étaient autrefois très fréquents dansles 
hôpitaux destinés aux prostituées; mais, comme en 

kceci l'imagination était la grande coupable, tout ren- 
tra dans l'ordre lor8(iu'une direction énergique me- 
naça de faire plonger les trop nerveuses, la tète la 
première, dans une grande tonne d'eau froide. Au- 
L . 



116 



L4 PROSTITUTION l 



jowrd'hui, tous ceux qui soignent, surveillent et oli- 
servent les prostituées sont d'accnrd pour reconnaîtra 
qu'il est extrêmement rare de remarquer ehez elles 
des crises d'hystérie ou de véritables convulsions; si, 
à Saint- Lazare et aiUeurs, elles fcn éprouvent 
quelquefois, il faut les attribuer aux profonds cha- 
grins très comniuna pbez nombre de ces femmes, et 
surtout aux accès de colère et aux contrariétés 
provenant de leui's disputes, ou à une prolongation 
forcée du séjour dans un hôpital lorsqu'elles ont des 
motifs pressants d'en sortir; dans ce dernier cas, elles 
Be roulent à terre, elles crient, elles vocifèrent; mais 
cet état n'est jamais permanent. 

Bien plus sérieuse est la question de l'aliénation 
mentale, maladie plus commune chez les filles pu- 
bliques qu'on ne le croit. 

Au Bureau des Mœurs, il est notoire qu'un grand 
nombre sont faibles d'intelligence; cela ressort des 
procès-verbaux, rapports et autres documenta, où. 
cette circonstance est alléguée pour motiver l'indul- 
gence de l'administration en faveur de tcllaa et telles 
prostituées. Remarquons, en passant, que c'est rare- 
ment chez les plus jeunes que cet état mental se 
manifeste. 

Une enquête, portant sur les entrées des filles pu- 
bliques au principal asile d'aliénés pendant cinq ans, 
a donné le nombre de 105, soit une moyenne de 21' 
par an sans parler de celles dont le métier de 
bauche n'a pu être constaté, étant couvert par une 
profession fictive. Sur ces 105 prostituées devenues 
folles, la plus jeune avait 16 ans; 3 autres étaient 
âgées de 18, 19 et 20 ans; 15, de 20 à 25 ans; 26, de 
25 à 30 ans; 25, de 30 à 35 ans; 18, de 35 à 40 an8;10, 
. de 40 à 45 ans; 5, de 45 à 50 ans; 1, de 58 ans, et 1 de 



LA PROSTITUTION A P.iBIS 



117 



r, €2 ans. Près des deux tiers de ces filles qui de- 
viennent aliénées tombent donc dans cet état à l'âge 
le 25 à 40 ana, 

La cause première de cette aliénation est restée 
inconnue pour 37; chez 3, on a pu l'attribuer à la 
frayeur; chez 3, à l'excèa du libertinage; chez 8, à 
des suites de couches; chez 11, à l'excès de la misère; 
chez 3, au traitement mercuiiel; chez 13, à l'abus du 
Tin; chez 27, à dea chagrins profonda. Nous devons 
cette précieuse statistique à l'obligeance du médecin 
en chef de la Salpêtrière; c'est dire avec quel soin 
> elle a été dressée. 

Sur les 27 dernières prostituées folles, le chagrin 
I de 14 (plus de la moitié) n'était occasionné que par 
I l'infidélité de leur amant ou aouteneur; une de ces 
, 27, était devenue folle par le chagrin qu'elle éprouva 
d'être reconnue dans l'exercice de son métier, par 
quelqu'un de aon pays; une autre perdit la tête par 
suite de la douleur qu'elle ressentit en étant accou- 
chée pour la troisième fois d'un enfant mort. 

Quant à la nature du délire particulier à ces 105 
prostituées échouées à la Salpêti'ière, la mélancolie a 
été signalée chez 36, la manie chez 43, la démence 
chez 18; quant aux huit autres, leur genre de folie 
n'a pu être caraictérisé d'une façon absolument pré- 
cise. Sur les 30 mélancoliques, 10 avaient un pen- 
chant bien marqué au suicide, et nécessitaient, soua 
ce rapport, la plus grande surveillance; sur les 43 ma- 
niaques, on n'a remaqué que 8 fois des symptômes 
hystériquea. A ce propos, il est bon de noter que rien 
n'est plus lare que le délire erotique chez les prosti- 
tuées, que ce délire soit chronique, comme dans la 
folie, ou qu'il soit le résultat de fièvres ou de maladies 
aiguës; d'après les observations de la Salpêtrifeïa, ^i. 






U. PEOSTITPTIOÎf A PARIS 



roule presque toujoius sur des idées d'anibitioD, 
.d'hoaneur ou de richesses. 

Oe quelques fiifirniilépi eon§r6nftaleE4 qui, bieo 
que singulières, a'enipêpbeat pa» les {irostituces 
d'exercei' leur uaétier. 

On rencontre fréquemment des prostituées boi- 
I teuses, par suite de vices de coniormation ou de lu- 
Ixations non réduites; quelques unes de cea 
I maliieui'euaes ne peuvent ae passer de béquilles; chez 
[ TuiB boiteuse qui venait au Dispensaire il y a 
I quelques années, et qui ne pouvait pas faire un pas 
p.s se balancer à droite et à gauche d'une manière 
pénible, les jambes étaient tellement rapprochées 
[l'une de l'autre que les genoux ne pouvaient s'écar- 
Iter que de seize à dix-huit centimètres au niasimum. 
l'Tjne fille bossue, horriblement contrefaite, est restée 
i plusieurs années sur les registres do la police. 

Comment la métier de prostituée peut-il être exercé 
l;aTec des infirmités de cette nature? Le médecin qui 
ïa sondé les abîmes de la dépravation des liouimes, gé- 
Wxait et ne s'étonne plus. Qu'on se rappelle ce qui a 
I été dit plus haut h propos des prostituées enceintes 
1 et des femmes à barbe. Ce qui est certain, c'est que 
I les infirmes dont je parle ici trouvent des amateurs, 
I et ne sont pas celles qui ont le moins de succès, même 
[ lorsqu'elles ont conti'acté souvent les plus horribles 
I maladies. Parmi ces femmes qui font d'excellentes 
1 afiairea, j'ai vu une sourde-muette, et une autre qui, 
dans une dispute, ayant perdu un œil, l'avait rem- 
placé par un œil artificiel qui la défigurait de la fa- 
çon la plus hideuse, IIM. Trébuchet et Poirat-Duval, 
pour prouver à leur tour que la difformité procure 



Ll PROSTITUTION A PAEIS 119 

âoTivent plus de béuéficea que la Ijeauté, oût cité une 
fille publique, dépourvue de tous agréments phy- 
siques, qui avait douaé une vogue considérable à une 
laaiaon de prostitution, uaïquement parce qu'elle 
brait une jambe de bois; elle recevait plus de vingt 
'Lommes par jour, saiiâ que sa santé en souffrît. 

Signalons enfin la fréquence de la constitution 
scrofuleuse et des scrofules développées chez les 
prostituées de Paris; c'est une des causes de l'en- 
combrement de nos infirmeries, car elle aggrave les 
symptômes vénériens et les rend quelquefois indes- 
tructibles. Il faut lui atti'ibuer ces viens ulcères in- 
tarissables, ces a&euses lésions de la peau, ces 
destructions du nez, ces repoussantes plaies de toute 
espèce, qu'on rencontre si souvent, et qui n'arrêtent 
pas les débauoliéji ! 

CHAPITRE V 

DE UNSCRIPTIOH DES PROSTITUEES 

L. Sagesse des uiesures admiaistratives de l'iiis- 
vriptloiii 

L'enregistrement des filles de débauche est le pre- 
mier moyen d'arrêter le désordre inévitable de la pro- 
stitution. Tï est légal, ayant été ordonné par la 
Convention; en outre, il est des plus justes, attendu 

Igue l'inscription fait connaître l'identité de la fiUe 
publique, et que celle-ci, voyant qu'on a des moyens 
de la découvrir, reste plus craintive, s'abandonne 
moins au désordre, et n'a pas ai souvent recouTB à 
des noms supposés, chaque fois qu'elle se rend cou- 
pable d'un délit nouveau. 



I 



W*120 LA PROSTITUTION A PAfilS 

I (Jette inscription se fait de deux façons 
[•fille se présente d'elle-même et se déclare Boumise 
Laux règlements; ou bien, arrêtée à une quatrième 
«"constatation de raccrochage ou prise dans une mai- 
l-joa clandestine de proatitntion, elle est inscrite 

■ d'office. Mais, dans n'importe quel cas, elle est inter- 
rrogée avec un soin tout méticuleux 

I Pendant qu'un inspecteur porte au bureau des ren- 
|. Beiguements judiciaires un bulletin indiquant son 

■ nom, son âge, son lieu de naissance, sa profession et 
I.Bon domicile, on la questionne sur les points suivants: 
I ei elle est mariée, veuve ou célibataire; si ses père et 
I mère sont vivants, et leur profession; si elle demeure 
I avec eux, et, en cas de réponse négative, depuis quand 
1 elle en est séparée et pour quel motif elle les a quit- 
I tés; si elle a des enfants, et, si oui, comment et oii ells 
I les élève; depuis quel temps elle habite Paris; si 
I quelqu'un pourrait la réclamer à Paris; si elle a été 
I arrêtée, combien de fois et pour quels motifs; si elle 
I a déjà fait le métier de prostituée, où et depuis com- 
I bien de temps; ai elle a actuellement ou si elle a eu 
r une ou plusieurs maladies Ténériennea; si elle a reçu 
I une éducation quelconque; enfin, en cas d'inscription 
I demandée, quels motifs la déterminent, 

I Ces questions et beaucoup d'auti'es que les réponses 
I suggèrent, font bientôt connaître à qui l'on a affaire: 
I si la fille est corrompue ou sans aucune ressource; 
I si elle est véridique dans ses réponses; si elle ne fait 
K que débuter; ai elle cherche îi se cacher sous le voile 
\ de la prostitution; dans quelle classe il faut la placer; 
I si de plus amples renseignements sont nécessaires, etc. 
I Sous ce rapport, l'étnde continuelle de ces filles donne 
I aux inteiTogateurs du Bureau des Mœurs une saga- 
I cité et une perspicacité vraiment remarquables. 



LA PROSTITUTION A PAHIS 121 

iProcèa-verbal est dresBé de cet interi'ogatoire, et In 

le est conduite au Dispensaire par un inspecteur ; 

médecins la visitent et la renvoient par le même 

ipecteur, à qui ils remettent un bulletin indiquant 

ÎJb l'ont trouvée saine nu malatle. Ainsi se forme 
dossier spécial de la filie. Dans l'intervalle, arrive 
réponse du bureau dea renseignements judiciaires, 
i sert à contrôler ce que la fille a dit au aujet de 
) antécédents. 
XI est rare qu'une fiUe venant se faire inscrîrfl 

pporte son acte de naissance; à plua forte raison, 
9 inscrites d'office ne l'ont jamais. On le demande 
inc au maire de la commune natale, de façon à ce 
l'il ne puisse comprendre de quoi il s'agit ; en outre, 
i lui expédie sous enveloppe fermée une lettre à 
ansmettre aux parents, lettre qui, exposant som- 
airement les faits, les invite à venir chercher la 
une fille ou à charger une personne sûre du soin de 
, leur renvoyer ; s'il s'agit d'une malheureuse, qui 
été abandonnée et se trouve sans ressource, l'admi- 
istration offre les secours de route. Hélas ! il faut 
ïen le constater, les réponses des parents, sauf de 
arissimes exceptions, disent qu'ils ne veulent plus 
ntendre parler de celle qui a déshonoré leur nom. 
l'est alors que la fille est définitivement iusciite sur 
) sommier général. 
En conséquence, la nouvelle inscrite signe son an- 
Bgement de se soumettre aux règlements sanitaires 
t; de police. Ajoutons que les renseignements que 
onnent les filles au moment de leur inscription sont 
resque toujours exacts ; à peine 30 par an, en 
loyenne, font des déclarations reconnues fausses par 
a suite. 
En ce qui concerne particulièrement les filles in- 



1 

i 



122 LA FEOSTIXIITION A PAOIS 

Bcrites d'office, celles qui ont été prises eu flagrant 
délit dans une maison clandestine de prostitution 
opposent en général moins de résistance à leur enre- 
gistrement que celles qui ont été l'objet de quatre 
constatations de raccrocliage sur la voie publique ; 
celles-ci, le plus souvent, donnent des démentis aux 
agents et nieut l'évidence la plus lumineuse, quoi- 
mette soiia leurs yeux les rapports mention- 
nant les circonstances détaillées des faita probants 
qui les concernent. Malgré les preuves flagrantes, 
l'administration temporise encore dans la plupart des 
cas, excepté si la fille est reconnue vénérienne. 

verrons, au para^aphe suivant quelle grave 
responsabilité l'administration assumerait si elle 
n'inscrivait pas les filles malades, même mineures, et 
l'on constatera que la police des mœurs, décriée par 
les ignorants et quelques polémistes de mauvaise foi, 
mériterait plutôt des repi'ocheB pour son jadulgenoe 
parfois excessive. 

Ea résumé, d'après une statistique de seize années, 
j'ai constaté que, sur 1,000 prostituées inscrites, il y 
en a en moyenne : 589 venant demander elles-mêmes 
l'inscription pour être mises en oarte, c'est-à-dire 
pour faire le métier à leur profit personnel ; 354 (à 
peu près le tiers) ayant recours à l'envegistrement 
pour entrer dans une maison de tolérance, et, par 
conséquent, choisissant cette existence sous l'in- 
fluence des maîtresses de maison, lesquelles agissent 
au moyen d'intermédiaires; enfin, 57 seulement in- 
scrites d'office, qui presque toutes refusent l'entrée 
en maison et préfèrent la carte. Sur un total de 
12,644 inscriptions, il n'y en a eu que 720 qui se sont 
imposées d'une façon absolue, les filles ayant été 
enregistrées d'office après récidive de flagrants délits 



LA PKOSTITCTIOÎÏ A PABIB 123 

de prostitution, la plupart avec constatation de ma- 
ladie vénérien ne; quant aux autres inacriptious 
de cette statiatique, elles avaient été sollicitées par 
les filles, dont 7,388 pour être mises en carte, et 
4,436 pour entrer en maison de tolérance. 

X. Ue l'iaticriptioD des prostituées mineareii. 

Cette question est le grand cheval de laataille des 
adversaires de la police des mœurs. Il est évident 
qu'il n'est pas, en effet, de question plus grave, plus 
épineuse et plus embarrassante pour l'administratioiU, 
et véritablement, chaque fois que le cas se présente 
d'inscrire une fille mineure, on préférerait mille fois 
ne pas avoir à prendre une décision à ce sujet. Exa- 
minons donc les faits en toute impartialité. 

On se demande d'abord si une mineure, que la loi 
déclare incapable de tester, et qui ne peut disposer 
d'elle-même et do ses actions sans l'aveu de ses pa- 
rents, peut ëtie admise à déclarer qu'elle entend se 
déshonorer elle-même, couvrir d'opprobre sa famille, 
et aliéner sans retour sa propre réputation. On se 
demande ensuite jusqu'à quel point l'administration 
peut, sans s'exposer au reproche de favoriser la pro- 
stitution de filles mineures, suppléer au défaut de 
consentement de la famille, et sanctionner une pa- 
reille déclaration en en donnant acte à qui la fait. 

Tous les préfets qui se sont succédé à la Préfec- 
ture de police ont envisagé cette situation avec leurs 
idées pai'ticulières, et pendant longtemps ils ont fait 
varier d'une manière remarquable l'âge auquel on 
pouvait inscrire ces mineures. Finalement, après 
divers tâtonnements, on s'est décidé à adopter l'âge 
de seize ans comme la limite extrême de l'inaccv^- 



^e 



I 



124 LA PROSTITUTION A PARIS 

tion ; celles qui sont inscrites avant cet âge ne sont 
que des exceptions extraordioairement rares, des cas 
de la plus douloui'euse nécessité, comme on le verra 
plus loin. 

Un premier fait, digne d'attirer l'attention de tous 
les législateurs, de tous les administrateurs et de 
tous les moralistes, c'est que sur ce total de 18,544: 
filles cité plus liaut et représentant une statistique 
d'inscriptions pendant plusieurs années consécutives, 
deux imllc. quarantB'trois, abandonnées pour ainai 
dire à elles-mêmes, avaient demandé à être inscrites 
sans avoir atteint l'âge de dix-huit ans, et que le 
même cas s'était présenté pour six mille deuse cent 
soixante quatorze (soit la moitié de toutes les prosti- 
tuées) en fait de filles n'ayant pas atteint la fin de 
leur vingt-unième année, c'est-à-dire non parvenues 
à leur majoi'ité. A quelques variations près, les pro- 
portions se présentent toujours les mêmes, quelles 
que soient les anées que l'on observe ; d'où il faut 
tirer cette conclusion, que c'est aller contre les lois 
qui régissent notre ordre social que de vouloir empê- 
cher une femme de se livrer à la prostitution avant 
majorité légale. 

Un autre fait, attesté par tous les observateurs, 
c'est que lorsqu'une fille de dix-sept, de seize et même 
de quinze ans, s'est prostituée pendant un certain 
temps et en a contraeÉé l'habitude, elle persévère 
dans son infamie malgré la police et malgré ses pa- 
rents, par cela même que l'éducation qu'elle a reçuB 
n'a pas eu le pouvoir de l'en détourner ; si elle ne 
vient pas elle-même réclamer son inscription, on est 
toujours sûr de la surprendre un jour ou l'autre dans 
les maisons de prostitution clandestine ou de la ren- 
contrer raccrochant sur la voie publique. 



L\ FEOSTITUTION A PAEIS 125 



^^ftSi, en refusant d'inscrire une iille mineure sur le 
^^Bgistre des prostituées, en l'empêcliait de se livrer 
^^B la prostitution et de déalionorer sa familie, nul 
^^pbute qu'il ne fût indispensable d'ajourner cette 
^^buBcription ; mais, par cet ajournement, obtiendrait- 
^pbn ce résultat? Loin de là; car voici ce qui arrive ; 
^* — En n'inscrivant pas une mineure qui le réclame, 
on la pousse, non pas vers les maisons de tolérance 
()ù elle sait qu'elle serait saisie par l'administration, 
mais vers les proxénètes des lupanars clandestins, qui 
savent les cacher, et vers les plus abominables pro- 
cureuses, qui ont mille moyens de se soustraire aux 
investigations de la police; bous le titre de modiste, 
de couturière ou de lingère, des femmes patentées at- 
tirent et reçoivent chez elles les jeunes débauchées, 
3 prostituent dans des coins retirés, ou les envoient, 
na carton au bras, aux libertins qui les leur de- 
mandent; elles sont, sous ce rapport, le plus grand 
is mœurs et de la santé publique, 
i, enregistrer une fille mineure après toutes 
les formalités et les précautions que réclame un acte 
ne cette impoi'tance, n'est pas ouvrir ïi ces malheu- 
I le chemin du vice et favoriser la débauche ; 
;u contraire, c'est se procurer le moyen d'exer- 
ler sur elles une surveillance tutélaire, c'est donner 
^ l'administration la facilité de découvrir et de rendre 
, leurs familles des jeunes filles qui n'ont eu que 
9es écarts et ne se sont pas totalement perverties (ce 
s ae présente assez souvent), qui fuient peut-être le 
jegard de la justice ou ceux de leur père et mère, et 
, livrées sans frein et sans contrôle à la débiiuche, 
H achèveraient de se corrompre et de miner leur sauté. 

Bien plus importante encore est cette quest: 
^'inscription des mineures, si noua l'envisageons sotLa 






126 LA PEOSTITUTION A PAKIS 



r 

^H le rapport de la coDtagton et des ravages de 1 affreuse 
^H syphilis. Pas d'inscription, pas de surveillance saiii- 
^H tare ; or, noua venons de voir que la moitié des filles 
^H inscrites le sont avant leur majorité ; ne pas les in- 
^^B scrire, c'est comme ^i on laissait voJontairement deâ 
^H légions de prostituées exercer librement leur métier 
^* dans Paria pendant quatre ou cinq ans, en leur don- 
nant le droit de propager un dea fléaux lea plus ter- 
ribles. Mais, ces filles, étant les plus jeunes, sont par 
Icela même les plus l'echerciiées; leur jeunesse, indé- 
pendamment des coïts plus fréquents, rend cliez elles 
les accidents vénériens plus graves et plus nombreux; 
elles exigent donc une surveillance plus attentive, 
plus souvent répétée que toutes les autres. A ce point 
de vue, rien n'est plus édifiant que la statistique de 
dix années qui a été publiée par le docteur Com- 
menge, médecin en clief du Dispensaire de salubrité- 
de Parii. i 

Dans son remarquable travail, le docteur Oom- 
menge s'est occupé spécialement de la prostitution 
clandestine. Il a pris la période décennale de 1878 à 
1887 : il a relevé toutes les arrestations de filles in- 
soumises, qui, nous le répétons, ne sont arrêtées que 
lorsque leur raccrochage a été constaté quatre fois 
par deux agents. Pendant oes dix ans, le nombre 
total do ces arrestations a été de 27,007, se subdivi- 
sant ainsi : 13,615 aiTeetationa de prostituées clandes- 
tines mineures, et 14,^92 arrestations d'insoumisos 
majeures. Eh bien, quoique les arrestations de ma- 
jeures soient plus nombreuses que celles de mineures, 
malgré cela, ce sont les clandestines mineures~ijut 
sont trouvées malades en plus grand nombre. £il 
effet, les unités Tnineures malades (dont le nombre 
exact s'obtient en déduisant du total les arrestation» 



^ tl PHOSTITCTION A FAttlS 127 

nouvelles de la même personne dans la même année) 
représentent 4,712 jeunes filles infectées, suns parler 
des récidives de plusieurs d'entre elles, tandis que le-* 
utdtés majeures malades ont été en tout 3,232 seule- 
ment, pendant la même période décennale, quoique 
les majeures soient en moyenne arrêtées plus souvent 
que les mineures. 

Ces 4,712 prostituées clandestines mineures, trou- 
vées malades, se répartissent ainsi, sous le rapport de 
leurs maladies contagieuses : — 2,651 syiiliilitiques ; 
— 2,169 atteintes d'affection s vénériennes nonsyphilî- 
tiques (blennorrliagies, métrites purulentes, vagi- 
nites et vulvîtes graves, végétations, ulcérations de la 
vulve sans caractère déterminé, ulcémtions du col de 
la matrice avec catarrlke utérin, etc.); — 31t) galeuses. 

Remarquons, en passant, que le calcul de propor- 
tion indique im chiffre de 363 syphilitiguei par 
1,000 malades. Quant à la gale, on aurait tort de la 
considérer comme nne maladie anodine chez les pro- 
stituées ; l'expérience de tous les jours prouve que 
très souvent une fille reconnue galeuse so trouve sous 
l'influence de la syphilis à l'état d'incubation. Voici 
un de ces nombreux cas, cité à titre d'exemple des 
plus significatifs ; une fille M*'", prostituée clandes- 
tine arrêtée le 20 octobre 1SS7 et envoyée le lende- 
main à Saint-Lazare pour la gale, a dû faire un sé- 
jour de tept 711013 à l'infirmerie, parce que des acci- 
dents secondaires se sont montrés peu de jours après 
son passage au Dispensaire : la durée du traitement 
dit suffisamment la gravité des manifestations syphi- 
litiques qui se produisirent chez cette galeuse. 

De la statistique du docteur Commenge, nous ex- 
trairons les chiffres relatifs au département da la 
Seine eu ce qui concerne l'otigvne àe% ïAe'^ «^^-«sî^- 



128 lA PEOSTITriIOM A PAEIS 

nées ; car ils contiennent un enseignement capital, 

de nature à ouvrir lea yeux des personnes qui hésitent 
encore à approuver l'inscription des niineurea. Parmi 
ces prostituées clandestines arrêtées et trouvées at- 
teintes de maladies contagieuses dans cette période 
de 1878 à 1887, celles qui étaient originaires du dé- 
partement de la Seine atteignaient le total de 2,317, 
parmi lesquelles 1,714 mineures (dont 1,507 nées à 
Paris même), et seulement 603 majeures (dont 527 
nées àPari8).Ce8cliiffre9officiels, autlientiques,nesur- 
prendront pas les observateurs, qui ont pu souvent 
constater, comme nous, combi<.'n est rudimentaire k 
Paris le sentiment de Iji pudeur cliez les jeunes rac- 
croclieuses clandestines ; cette impudeur semble êti'e 
l'apanage de leur jeunesse, déjà Hétrie par le vice : 
elles trouvent aussi naturel de faire marchandise d« 
leur corps qu'elles trouvent normal de vendre une 
denrée quelconque, pour en tirer bénéfice pécuniaire. 
Ces ehiiîres éloquents montrent donc que Paris et 
sa banlieue tiennent un rang exceptionnel dans le dé- 
veloppement de la prostitution clandestine précoce, 
et aussi dans la propagation des maladies vénériennes. 
Dans l'ensemble de la prostitution parisienne, ce 
sont les insoumises majeures nées à Paris même, qui 
se font aiTêter le moins souvent ; et ceci n'a rien 
d'étonnant, puisque leur âge et leur connaissance 
parfaite de leur ville natale leur valent mille rea- 
aources de ruses de toute espèce pour se dérober auii 
constatations des agents des mœurs, ressources que 
n'ont pas les jeunes inexpérimentées, ni les autres 
insoumises (majeures ou mineures) provenant de la 
province et de l'étranger. 

Maintenant, en ne nous arrêtant qu'à ces 1,607 pro- 
^^Éi'tuées miiieures nées ii Paris même, arrêtées et 



IxA PROSTITUTION A PAEIS 129 

trouvées malades pendant cette période décennal?, 
on ne sera paa fâché de connaître leur répartition par 
arrondiaaement d'origine. M, le docteur Commenge 
donne aussi cette intéressante statistique, année par 
année; le total décennal indique que ices 1,507 pro- 
stituées précoces ae sont miaes 1,956 fois dans le cas 
d'être envoyées à l'infirmerie de Saint-Lazare ; an- 
née par année, îes unités malades ont été 164 ponr 
1878, 14G pour 1879, 245 pour 1880, etc., et finale- 
ment 1,777 en faisant l'addition des chiffres annuels, 
nombre que la réduction décennale fait tomber à 
1,507, en retranchant les récidives. 

En classant les arrondissement de Paris, suivant 
le plus grand nombre de mineures malades qu'ils ont 
fourni à la prostitution clandestine, dans cette pé- 
riode de dix ans, nous trouvons : 

En I" ligne, 201 originaires du XI' arrondiasement 
(Popincourt) ; — au 2' rang, 166 du XVIIP (Montmartre); 

— au 3' rang, 165 du XX» ( M énilmontant-B elle ville) ; — 
au 4» rang, 157 du XIX" (Buttes Chaumont, la Villette) ; 

— au ô' rang, 118 du X" (Enclos Saint^Laurent) ; — au 6' 
rang, 111 du XV (Vaugirard-Grenelle) ; — au 7' raug, 103 
du XII' (Reuilly) ; — au 8' rang, 100 du V= (Panthéon) ; 

— au 9" rang, 97 du XVII' (Battgnolles) ; — au 10» rang, 
93 du XIV° (Observatoire, Montrouge et Plaisance) ; — au 
11' rang. 88 du IV" (Hôtel de Ville, Notre-Dajne de Paria 
et île Saint Louia) ; — au 12» rang, 68 du XIII' (Gobelins); 

— au 13' rang, 51 du VII' (Palais-Bourbon et Groa- 
Caillou); — au 14° rang, 53 du III' (Temple); — au IB" 
rang, 51 du VI' (Saint-Sulpice, Monnaie, N.-Dame-des- 
Champs); — au 16" rang, 34 du I" (Louvre, Halles, 
Saint-Honoré-Vendôme) ; — au 17' rang, 33 du VIII" 
(Ohampa-ElyaéeB, Madeleine et quartier d'Euroçe^ -, — wi. 



130 I^ PEOSTITUnON A PAUIS 

18P rang, 31 du XVI' (Auteuil, Pasey, les BasaiiiB) ; 
an 19' rang. 30 du IX' (Opéra) ; — enfin, au 20" eb derr 
nier rang, 26 du II" (Bourse) 

Ce qni saute à l'œîl, c'est que ce sont les arroudiar 
sements les plus populeux, ceux où dominent l'élé- 
ment ouvrier et les établissements industriels, qoj 
ioumissent le plus de recrnea à la proatitutioD clan- 
destine des mineures. Mais, d'autre part, il est cit* 
rieux de constater aussi que les deux arrondissementa 
qui viennent en derniBi rang pour cette fourniture, 
sont précisément ceux qui donnent l'hospitalité la 
plus large aux £lles de toutes catégories, aoumiees' 
ou insoumises : -56 seulement sont nées dans le IX* 
et le II*, l'Opéra et la Boxirse, c'est-à-dire dans ces 
quartiers de Bréda-Lorette, Chaussée-d'Antin, Eo- 
chechouart, fanboiirg Montmartre, grands Boulevards, 
me Montorgueil et Montmartre, Vivienne et Riche- 
lieu, rue du 4 Septembre et avenue de l'Opéra 
square Monthofon et alentours de la gare Saint- 
Lazare, où s'exhibent sur les trottoirs les phia efErou- 
tés marchés de femmes. 

Après cela, il est encore plus intéressant d'exami- 
ner comment ces prostituées clandestines mineure», 
reconnues atteintes de maladies contagieuses, se 
répartissent soua le rapport de l'âge ; mais ici ne 
treignons pas notre examen à celles qui sont nées & 
Paris ; en d'autres termes, tâchons de nous rendre 
compte du danger présenté par tontes ces prostituées 
précoces, sans distinction d'origine, qui fuient l'in- 
scription et la TÎsite sanitaire, et ne perdons jamaû 
de vue que la quantité de celles qu'on a pu mentt 
RU Dispensaire n'est presque rien dans le total de 
ces jeunes insoumises. 



LA FKosnrmos a paris 1.11 

am: GS troa-rve» nudactn, dont 5 l'ont été deux 
^d&BB l'anD^. — 19 ont: 84. trouvrôs mitlndee. dont 6 
[ foi» dans l'annce. — l? anr : 101 niAladra, dont 8 deux 
- 17 ans: 88 mal&des, dont 4 deux fois et 1 trois fuis. 
an*: 50 malades, dont S deux fois ^t 1 trois fois. ~ 
.- SO maladee, dont 5 denx fois. — li ans : Q maliulea, 
! quatre fois. — 13 an» : I seule malnd? do cet âgv, 
■e vénérienne. 

al pour Tamiée : 438 dandntinee ininouree ont M 
nvées malades ; mais, comme 3S ont itè arrft^os plu- 
. foia et trouvéea malades pliiBieure fois, il s'imsuit 
« manifestations morbides constat^ea (474) sont plus 
nbrouaes qoe lee unités mineures arrêtées. ■- Eu oa qui 
> particulièrement les plus jeuntw, 164 Agé.t» eenle- 
Dt de 13 à 17 ans ont présenta ensemble (i oiw de gai» 
[177 cas de maladies vénériennes, 
1879— m ont: 83 trouvées malade§, dont C l'ont élé 
i fois dans l'année et 1 trois fois. — 19 an» : 82 malades, 
dont 2 deux fois et 1 troia foia. — IS an» : 80 malados, dont 
6 deux foia. — 17 ans: 72 malades, dont n deux foi». — 
— 16 ans : 44 malades, dont 4 deux fois. ^ iTi mit : 21 ma- 
lade», dont 3 deux fois. — li ans : 10 mnindrs, dont 1 trois 
fois. Pas de mineure au-dessous de cet Agi', 

Total pour l'année: 394 clandestines mineures tronv(ea 
malades, ayant fourni 429 manifestations morbides. — Lus 
plus jeunes ; 147 àgâea de 14 à 17 ans, ayant préitontù en- 
semble 14 cas de gale et 147 maladies vénérienne*. 

1880-^ W ans: 165 trouvées malades, dont IS deux 
fois, 4 troia fois et 1 quatre foia. — 19 ans: llfl ma- 
lades, dont 12 deux fois et 3 trois fois. - m an»; 140 
mala.deâ, dont 31 denx fois et 3 trois foi». - ■ J7 an*.* 
89 malades, dont 7 deux fois et 6 trois fuis. — iGatu: 
67 malades, dont 16 deux fois. — J5 am: 30 malades, 
dont 3 deux fois. — 14 ant : 6 maladcH, dont 2 doux tôt». 



132 LA PROSTITUTION A PARIS 

— 13 ans : 1 spule malade (plaques muqueuBes de la vulve). 

Total pour l'aande t 614 clandestines mineures trouvées 
malades, ayant fourni 720 manîfeatiitioiiB morbides. — Les 
plus j'ùuneB : 183 âgées de 13 à 17 ans, ayant présenté en- 
semble 14 cas de gale et 207 maladies vénéricnnea. 

1881— HO ans: 87 trouvées malades, dont 7 deux fois. 

— 19 ans: 102 malades, dont 4 deux fois. ~ IS ans: 103 
malades, dont 10 deux fois. - — 17 ans : encore 103 malades, 
dont 7 deux fois. — 16 ans : 50 malades, dont 3 deux fois. 

— 15 ans : 34 malades, dont 3 deux fois. — 14 ans : 5 ma- 
lades, dont 1 deux fois. — IS ans i 2 malades, dont l'une 
avait un chancre, et l'autre la gale. 

Total pour l'annM ; 476 clandestines mineures trouvées 
malades, ayant fourni 51S manifestations morbides .^ Les 
plus jeunes : IS') âgées de 13 à 17 ans, ayant présenté en- 
emble 17 cas do gale et ISl maladies vénériennes. 

1882 — mo ans : 137 trouvées malades, dont 12 deux 
fois et 1 trois fois. — 19 ans : 123 malades, dont 3 deux foia 
et 1 trois fois. — 13 ans : 122 malades, dont 13 deux foîa 
et 3 trois foîa. — 17 ans 100 malades, dont 10 deux fois. 

— 16 ans : 69 malades, dont 3 deux fois. — 15 ans : 22 ma- 
lades, dont 1 deux fois. — 14 ans : 7 malades, aucune réci- 
dive dans l'année. — 13 ans : pas de malade de cet âga^ 

— IS ans : 1 fillette, prostituée galeuse. 
Total pour l'année: 581 clandestines mineures trouvée 

malades, ayant fourni 640 manifestations morbides. — Le 
plus jeunes : 199 âgées de 12 à 17 ans, ayant présenté ac 
semble 10 cas de gale et 194 maladies vénériennes. 

1883— SO ans : 103 trouvées malades, dont 3 deux foia. 

— 19 ans : 103 malades, dont 10 deux fois. — IS ans 
malades, dont a doux fois. — 17 aits: 85 malades, dont I 
deux fois. — 16 ans : 49 malades, dont 9 deux fois. — 
15 ans : 23 malades, aucune récidive dans l'année. — 14 otw: 

e récidive dans Tannée. — IS ans .- 4 fil 



LA PEOSTITUTION A PABIS 133 

lettes de cet âge troavées maltides (1 fois, ch&ncre ; 1 fois, 
plaques muqueuses de la. vulve ; S fois, accidents vénérieiiB 
non syphilitiques). 

Total pour l'année : 479 clandestines mineures trouvées 
malades, ayant fourni 512 manifestations morbides. — Les 
plus jeunes : 167 âgées dé 13 à 17 ans, ayant présenté en- 
semble 6 cas de gale et 176 maladies vénérienneB. 

1884 — 30 a-ns : 119 trouvées malades, dont 6 deux fois. 

— 19 atis : 82 malades, dont 5 deux fois. ^ IS ans : 96 ma- 
lades, dont 6 deux fois et 1 trois fois. — 17 ans: 82 mala- 
des, dont 5 deux fois et 1 trois fois, — 16 ans : 43 malades, 
dont 3 deux fois. — 15 ans : 14 malades, dont 1 deux foi». 

— li ang : 2 malades, aucune récidive dans l'année. Pas 
de mineure au-dessous de cet âge. 

Total pour l'année : 438 clandestines mineures trouvées 
malades, ayant fourni 468 manifestations morbides. — Les 
plus jeunes : 141 âgées de 14 à 17 ans, ayant présenté en- 
semble 152 maladies vénériennes; aucun cas de gale. 

1885 — 20 ans : 123 trouvées malades, dont 9 deux fois. 
— 19 an» : 113 malades, dont 7 deux fois. — IS ang : 112 ma- 
lades, dont 7 deux fois. — 1? ans : 79 malades, dont 5 deux 
fois et 1 trois fois. — 16 ans : 41 malades, dont 5 deux fois, 
et 1 trois fois. —15 ans: 17 malades, dont 2 deux fois. — 
14 ans : 1 malade (chancre), sans récidive dans l'année. 

— IS an) .■ l fillette de cet âge, vénérienne non syphilitique. 
Total pour l'année ; 487 clandestines mineures trouvées 

malades, ayant fourni 526 manifestations morbides. — Les 
plus jeunes : 139 âgées de 13 à 17 ans, ayant présenté en- 
semble 4 cas de gale et 161 maladies vénériennes. 

1886 — SO ans : 92 trouvées malades, dont 5 deux fois. 

— 19 ans : 82 malades dont S deux fois. — 18 ans : 97 ma- 
lades, dont 7 deux fois. — 17 ans : 84 malades, dont 6 deux 
fois. — JG ans : 44 malades, aucune récidive dans l'année. 

^— - 15 ans : 13 malades, dont 2 deu? fois. — 14 ans ; 4 mtb- 



J 



134 



LA FEOSTITUTION- A PAEIS 



Iodes, aucune récidive dans l'année. Pas c 
deBBOUs de cet &ge. 

Total pour l'année : <116 clandestioes mineures trouvées 
malades, ayant fourni 441 manifestations morbides. — Les 
plus jeimea : 145 âgées de 14 à 17 ans, ayant présaité en- 
semble 9 cas de gale et 144 maladies vénériennes. 

1887 — .30 ans : T6 trouvées malades, dont 5 deux fois, 
— 19 ans: 85 malades, dont 4 deux fois. — IS ans : encore 
S5 malades, dont 3 deux fois. — 17 ans : 71 malades, dont 
5 deux fois. — 16 ans : 33 malades, dont 5 deux fois. — 
15 ang: 27 malades, dont 2 deux fois. — 14 am r 9 malades, 
dont 1 deux fuis. ^ IS ans : 2 malades dont l'une avait des 
plaques muqueuses à la vulve, avec roséole aypliilitique, 
et l'autre fillette atteinte de maladie vénérienne non ayphi- 
litiqua — IS ans : 1 fillette prostituée de cet âge, vénérienne 
non syphilitique. 

Total pour l'année : 389 clandestines mineures trouvées 
malades, ayant fourni 414 manifestations morbides. — Les 
plus jeunes : 143 âgéec de 12 â 17 ans, ayant présenté e 
semble 12 cas de gale et 144 maladies vénérieimes. 

Ainsi, pendant cette période décennale, les arres- 
tations de fiUea mineures se livrant clandestinement 
à la prostitution ont fait constater qu'un nombre 
considérable d'entre elles sont atteintes de maladies 
contagieuses. 

Parmi ces filles infectées qui préparaient le mal, 
on en a trouvé : — 1,073 âgées de 20 ans; — 977, de 
19 ans; — 1,046, de 18 ans; — 853, de 17 ans; 
490, de 16 ans; — 201, de 15 ans; — 55, de 14 ans; 
— 11, de 13 ans; — et 2, de 12 ans. — Si l'on s'arrête 
particulièrement sur les cas des plus jeunes, on fré- 
mit en remarquant qu'il s'en, est trouvé 1,01^ 
âgées de moins de dix-huit ans et qui étaient ma- 
' ~ ; et, comme un certain nombre d'entre elles ont 



^^P i«i PROSTmJUpN A pAais 135 

été arrêtées plusieurs fois dans la même année, ces 
toutes jeunes prostituées clandestines ont fourni au 
Dispensaire et à rinfirmerie de Saint-Lazare la con- 
statation de dùi-sept cent soixante-trois cas de mala- 
dies contagieuses, dont : 1,663 maladies "vénériennes, 
et 100 cas graves de gale. 

En vertu des règlements, ces 1,612 prostituées elan- 
destine!^, si jeunes et déjà si profondément vicieuses, 
n'ont pu êtiB arrêtées pour la première fois qu'après 
leur quatrième raccrochage constaté par deux agents. 

Or, on ne peut contester qu'elles étaient éminem- 
ment dangereuses, puisque la preuve a été faite 
qu'elles répandaient la contagion. On les a soignées 
et guéries ; ce qui n'a pas empêché un nombre assez 
grand d'entre elles de contracter de nouveau des ma- 
ladies vénériennes et de les répandre plus que jamais. 
Su voyant tant do dépravation à cet âge, comment 
pourrait-on soutenir que l'inscription des prostituéss 
mineures ne s'impose pas, au nom des mêmes néces- 
sités qui exigent l'inscription des prostituées ma- 
jeures ? 

Noua venons de dire que, psirmi ces toutes jeunes 
filles, 100 étaient galeuses. Voyons comment se sont 
répartis, chez les autres du même âge, les cas de 
maladies vénériennes, et, pour cela, résumons encore 
les précieux tableaux statistiques du docteur Com- 
menge; il donne les plus m.inutieux détails, tous les 
différents cas clasHéa par chaque année d'âge (20 ans, 
19 ans, etc.) dans chaque année de la période 
décennale 1878-1887. Pour ces détails, nous ren- 
voyons à son beau livre La Prostitution clandestine 
à Farts. 

kEn résumé, dans l'ensemble de ces prostituées 
trômement jeunes, il y a eu 840 cas vènéTiens "uwi^ 



1 



u 



136 



. PEOSTirUTION / 



syphilitiques (blennorrliagieB, métrites purulentes, 
etc.). Quant aiix ■manifest^itians syphilitiques, elles 
se sont présentées au nombre total de huit cent 
quaTante-quatre parmi ces 1,612 toutes jeunes fillea. 
Et voici le total pour ctaquG forme spéciale de l'hor- 
rible maladie : 

38 fois, érosion chancreuse; — - 256 foia, chancre; — 
96 fois, plaques muqueuses de la bouche; — 319 ioia 
plaques muqueuses de la vulve et de l'anus ; — 9 fois, 
muqueiises de la bouche et de la vulve; — 39 fois, 
plaques muqueuses de la vulve; — 72 fois, plaques 
roséole syphilitique; — 5 fois, syphilidea papub 
— 4 fois, angine syphilitique; — 3 fois ulcération, 
chancreuse; — 3 fois, accidenta secondaires du col 
de la matrice . 

■ — Après les chiffres, citons quelqiies cas particuliers; 
nous les prenons au hasard parmi les innombrablee 
observations du médecin en chef du Dispensaire. 

T... (Emilie), âgée de seize ans, est visitée au Dispen- 
saire de salubrité le 1" septembre 1887 et trouvée atteintee : 
1° à'angine syphilitique ; 2° de plaques muqueuses des lè- 
vre» supérieure et inférieure ; 3"* de plaques muqueuses Aj/- 
pertrophiées de la vulve et de l'anus. C'était un type extra- 
ordinaire d'accidents syphilitiques monstrueux. Au point 
de vue des accidente de la vulve et de l'anus, c'était 
à faire photographier pour l'instruction des jeunes géné- 
rations médicales. 

Cette jeune personne, bien que mineure, avouait se li- 
vrer à la prostitution clandestine depuis un an ; elle 
malade depuis quatre mois ; sachsint parfaitement qu'elle 
était malade, elle avait continué, sans la moindre vergogne, 
lir des hommes ; d'après son évaluation, elle avait eu 



I 

I 



LA PfiOSTITrTIOX A P.IBIS 137 

des rapports, depuis qu'elle était malade, avec une série 
d'individus variant de 80 à 100, a-t-elie dit ; soit une cen- 
taine d'individus empoisonnée par cette fille, et ayant, 
à leur tour, répandu la contagion. 

D... (Annette-Louiae), ex-blanchisseuse, âgée de dix-huit 
ans. est née à Paris (XIII* arrood'), la 18 juillet 1873. Elle 
se livre à la prostitution clandestine depuis deux ans, 
c'est-à-dire depuis l'âge de seize ans. 

Comme elle ne voulait pas travailler, son pÈre a obtenu 
qu'elle fût envoyée trois mois en correction à la Fouilleuse ; 
elle en est revenue sans que ses instincts pervers se soient 
modifiés. Elle a quitté le domicile paternel pour vaga- 
bonder et se prostituer. 

Lorsqu'elle a été arrêtée, elle n'avait pas de domicile fixe 
et couchait dons lea escaliers des maisons où elle parve- 
nait à s'introduire. Lorsqu'elle rencontrait des ^nateurs 
peu difflcileg, elle les conduisait dans les garnis de la rue 
Saint-Denis ou de la rue Quincompoix. Arrêtée le 23 oc- 
tobre 1891, elle a été examinée au Dispensaire le 24 et trou- 
vée atteinte de typhilidee papuio- tuberculeuse ulcérées de 
la vulve, qui paraissaient exister depuis plusieurs mois. 
C'est un état syphilitique des plus graves ; ce qui ne l'a 
pas empêchée d'avoir des rapports avec des hommes, d'une 
façon quotidienne. Il est impossible de comprendre que 
l'odeur repoussante dee manifestations syphilitiques dont 
elle était atteinte n'ait pas fait fuir ceux qu'elle raccro- 
chait. 

Oette malheureuse fille, malade depuis cinq ou six mois, 
n'a pas eu un instant la pensée d'aller à la consultation d'un 
hôpital quelconque. Cette incurie est d'auttmt plus étrange 
que cette insoumise est sans domicile et ne sait pas souvtait 
oh aller coucher. Comment expliquer, en outre, le cynisme 
de cette fille mineure qui a l'audace de chercher des clienta. 



r 



138 LA PaOSTITUTION A PARIS 

alors qu'elle savait être très malade, depuis plusieurs mm%, 

et qu'elle n'ignorait pas devoir contaminer lea individus 
qui l'approchaient ! 

Envoyée à Saint-Lazare le 24 octobre 1891, elle ne quitte 
l'infirmerie que le 17 novembre 1892, après un traitement 
de treize mois. Elle est rendue à son père. 

Le long séjour iait à l'infirmerie de Saint-Lazare ne 
semble pas avoir développé dans son esprit le désir de 
changer de conduite. Elle recommence à se livrer à la 
prooUtution, est arrêtée plusieurs fois, notamment le 
2S août 1S94 ; elle avait alors des accidenta syphilitiques de 
la voûte palatine. Envoyée à Saint-Lazare, elle en sort 
le 15 novembre 18S4, et la CommiBsion décide son inscrip- 
tion le lendemain; elle était alors majeure. — N'aurait-il 
paG mieux valu, demanderons-nous, que le Bureau des 
Moeurs ait eu le droit d'inscrire, sans contestation, cette 
allé dès les premiers tempe oii elle quitta le domicile pa- 
ternel pour vagabonder et se prostituera 

V... (Victorine), ez-blanchisseuEe, née à Clichy (Seine), 
est âgée do seize ans. Arrêtée à la porte Sainb-Denis, elle 
est examinée au Dispensaire le 13 octobre 1888 et trouvée 
atteinte de plaquée muqueuses de la vulve et de Vamis. 
Ces accidents syphilitiques aont très développés et datent 
de quatre à cinq mois. 

Celte jeune fille, qui parait très timorée et a un main- 
tien convenable, avoue être malade depuis quatre moia ; 
ce qui ne l'a pas empêchée, depuis cette époque, de voir 
plusieurs hommes par jour, sans songer à se faire soigner. 
Envoyée à Saint-Lazare le 13 octobre 1888, elle en sort le 
2 février 1889. 

H... (Eugénie), ex-couturière, née à Paris (BatignoUea), 
est âgée de quinze ans et demi. Elle a été arrêtée h, la porte 
Saint-Denis avec l'insoumise précédente, qui est bmi amie^ 



LA FEOSTITUTION A P.VEIS 13& 

et avec lai^tielle elle a l'habitude d'aller chercher des ama- 
teurs et de lui servir d'aide. Examinée au Dispensaire le 
13 octobre 1B68, elle est trouvée atteinte d'angine gyphi- 
litique grave et de typhilide» très développéet de la vulve 
et de l'anuf. Elle avoue se savoir inala.de depuis cinq 
mois, ne pas avoir consulté de médecin, et n'avoir pas cessé 
de se livrer à la pTOstitntiou jusqu'au moment de son ar- 
restation. 

Envoyée à Saint-Lazare avec son amie, elle est guérie un 
peu plus tôt que Vîctorine; la sortie d'Eugénie a eu lieu, eu 
effet, le 21 décembre 1888. — Voilà donc deux prostituées 
clandestines, tr&s jeunes , qui, toutes deux gravement 
malades, ont répandu la syphilis dans des proportions 
effrayantes, puisque, rochorchant ensemble les liberbins, 
multipliaient chaque jour leurs contacts empoisonneurs. 

H... (Céline), ex-bruniaseuBe, née à Paris (XX" arrond'), 
est Âgée de dix-neuf ans. Arrêtée pour vol d'un porte- 
monnaie au préjudice d'un amateur qu'elle avait conduit 
dans un garni, elle est examinée au Dispensaire le 29 
août 1B38 et trouvée atteinte d'accidents tecatidaires de 
la vulve et de l'anuf. Il y avait trois mois que la syphilis 
s'était manifestée chez elle pour la seconde fois ; elle le 
savait, et quotidiennement elle se prostituait, aussi bien 
depuis l'apparition des accidenta secondaires qu'à l'épo- 
que de l'accident primitif. 

Envoyée à l'infirmerie de Saia^Laza^e le 29 août 1889, 
elle est rendue à la liberté le 12 novembre 1889. 

M... (Clémence), ex-domestique, née à Charly (Aisne), 
est âgée de diï-buît ans. Cette jeune fille, qui était venue 
à Paris en avril 1389, s'était placée domestique à Pantin ; 
mais elle ne resta en place que doux mois et demi. Da 
juillet à fin octobre, prostitution clandestine ; puiB, retour 



LA PHOSTirmOX A PABIS 

à Bon pays. A ce moment, bien qu'elle eût des lioutoas à 
la viilve, elle n'a pas consulté de médecin. Revenue à Paris 
au commencement d'avril 1890, elle eât entrée comme do- 
mestique dons an jeune ménage, et n'a gardé ea, place que 
sept semaines. B'il faut l'en croire, elle n'aurait eu de 
rapport avec aucun homme pendant qu'elle était on place ; 
cependant, dhe le Jour même (24 mai) où elle a quitté ses 
patrons, elle s'est livrée à la prostitution. Quatre jours 
aprËs, le 28 mai, k une heure et demie du matin, elle 
a été arrêtée avec une de ses camarades, sur l'avenue de la 
République, pour cause de violent scandale; toutes deux, 
elles voulaient entrer de force dans un poste de pompiers. 
L'ex-domestique Clémence étant examinée au Dispensaire, 
on constate qu'elle a ; 1° une angine syphilitique occupant 
gpéeialement 'le voile du palait; 2° dei plaques muqueuses 
fortement hypertrophiées de la vulve et de l'anus. Elle est 
envoyée à Saint-Lazare le S9 mai 1S90, 

Voili donc une jeune fille, qui, malade depuis huit mois, 
n'a jamais songé à se guérir et ne s'est jamais préoccupée 
dra ncoidents, syphilitiques qu'elle pouvait transmettre 
AUX amateurs à qui elle se prostituait. Elle avait une jolie 
figure, avec un air modeste et réservé, qui devait facile- 
ment tromper les maîtres qu'elle a servis quelque temps. 
Elle était dangereuse au plus haut degré, et pour ceux 
qui, croyant à une vertu relative, devaient chercher à lui 
plaire, no soupçonnant gu&re à quels sérieux périls ils 
s'exposaient, et pour ses maîtres et leurs enfants, puisque 
la syphilis peut ae communiquer non seulement par un 
baiser pur et simple, mais encore de la façon la pli 






baiser pur et simple, mais encore de la façon la plus in- i 

consciente, par l'intermédiaire d'une fourchette, d'une I 

LciiillÈre, d'un verre ii boire, d'une épingle, etc. I 

N... (Marie), âgée de vingt ans, originaire du départe- I 

mont Ati l'Ain, a été arrêtée au bois de Vincennes, ponr I 



LA PEOSTITUTION A PAEIS 



141 



Kacola^e HcaDdaleux de militaircB, le 1-i juillet 1895. Je 
l'eKamine au Dispensaire, le 15 juillet, dît le docteur Com- 
lïtenge, et je constate dea maaifeatations syphilitiques trba 
jravea ; 1° angine ëyphilitique violente ; 2" nombreuses 
laques muqueuses hypertrophiées et ulcérées de la vulve 
it de la région anale ; 3° gale; 4' uréthrite hîennorrhagique. 
^ette jeune fille, qui est malade depuis quatre moie, n'a 
mais eu l'idée d'aller à la consultation d'un hôpital, bien 
jon domicile fût à deux pas de 1'h.opital Saint-Antoine; 
a continué, quand même, à se livrer à la prostitution, 
l'Mchant fort bien qu'elle était très malade. Elle subissait, 
u reste, à ce sujet, l'infiuence de sa patronne, marchande 
chez laquelle elle était censément domestique. 
iri, marchand de vin, l'avait reçue à ce titre, et, à 
'ée en place, elle n'était pas déflorée ; cette entrôa 
ce de ces débitants remonte seulement à six moia 
byant l'arrestation qui l'a amenée au Dispensaire; c'est sous 
li'influenco da sa patronne qu'elle perdit bientôt sa virginité, 
; dès lors elle s'est livrée indistinctement à tous lea 
riients de passage, qui venaient boire dans cette maison, 
lit avec elle, dans le même établissement, quatre 
«utres jeunes femmes, dont une majeure, de vingt-sept ans, 
b trois mineures, de vingt, dix-neuf et dix-huit ans. Ces 
jeunes femmes no touchaient paa de salaires ; elles étaient 
s et logées, et ne recevaient, comme argent, que ce 
i leur était donné par les hommes avec qui elles avaient 
uàea rapports. La patronne du débit leur donnait l'esemplo _ 
■te la prostitution, en faisant monter avec elle les consom- 
lateurB dans sa chambre, aous l'œil da son mari, 
f L'histoire de cette jeune Bressanne, échouée à Paria 
a cabaret de prostitution clandestine, montre, une 
Joia de plus, l'incurie des filles insoumises en ce qui con- 
cerne leur aanté et la sécurité de leurs clients ; elle fait 
constater, en outre, l'existence d'un de ces établissementa 



142 LA PK0STIT17TI0N A FAEI5 

interlopes de marcliands de vin, coiame il y en a, tajit, qui 
remplacent progrerssivBinent les maisons de prostitution 
surveillées, au grand détriment de la santé publique. 

Ajoutons, à notre tour, que cet exemple démontre encore 
combien est abominable le métier de ces bureaux de place- 
ment, qui envoient dajis lea lupanars clandefitins, masquée 
s l'enseigne d'un débit de vins et spiritueux, des jeûnas 
filles naïves, à peine débarquées de leur province, et qui, 
abusant do la confiance que ces malheureuses ont en leurs 
relations de placeurs soi-disant honnêtee, jouent par cupt- 
dité le rôle deB plua infâmee intermédiaires, puisque, 
connaissant bien leur cliaitAle d'offreurs d'emplois, ik 
contribuent à livrer même des vierges à la prostitution !.., 
En moins de deux mois, cette pauvre fiUo, Marie N..., qui 
croyait avoir trouvé «ne place de domestique, non seule- 
ment était déflorée, mais encore, pour comble de malheur, 
se trouvait affreusement contaminée, pourrie de sypbilifi, 

M.. . (Louise), âgée de dix-huit ans, passe au Dispensaire 
le S août 1BB5, dit plus loin le docteur Commenge. L'exajneo 
m'a fait constater ; — 1" à sa lèvre inférieure, il exiête 
dam la moitié droite de la lèvre une tuméfaction trè> prO' 
noncée, avec déchirure de» titma en certains pointe, qui 
ternblenl avoir été enlevée à V emporte-pièce dans la partie 
la plua extérieure; dans la surface plua interne, il y a 
« très large plaque muqueuse qui paraît s'être développée 
T le siège même de l'aeeident primitif, gui a dû être Is 
chancre infectant, point de départ des autres manifesta- 
tions syphiUtiguea; — â° il existe des plaques muqueuses à 
la voûte palatine ; — 3' une roséole syphilitique généralisée 
et des syphilidta pigm^ntairea du cou ; — i" de très nom- 
breuses papules nmqueuses hypertrophiées et ulcérées oe- 
cupent la région vuliiaire et la région anale ; elles sembletiG 
exister depuis deux ou trois mois. 



i^ paosTirrrioN a paris 143 

Cette jeune fille, si gravcmeat malade, ne s'est pas soi- 
le s'est préseatéc à aucun liôpital pour deinaader 
a coDscîL Elle a été domestique cbex un marchand de vin, 
1 elle est sortie dans cet état d'infection le 6 juil- 
1 1S95 : et, malgré sa maladie si virulente, elle a continué 
k aroir des rapports avec de« hommes, pendajit un mois 
xre. C'est le hasard d'une perquisition de garni, opêr^ 
les le 6 août 1S95, qui l'a fait découvrir commâ 
rostituêe claaciestine,, et qni, du Dépôt, l'a conduite an 
ispensaire. Quelle prodigieuse source de poison a été 
> jeune fille, cette mineure, et pendant combien ds 
mps I... 

, Kon8 venons de citer hxiit cas, sur la quantité 
hiorme, colossale, dont les médecins du Dispensaire 
ls cesse la constatation ; mais ces citations 
ffisent, il nous semble, à faire juger la question. 
îeux qui s'élèvent dp bonne foi contre l'inBcription 
ifia mineures font du sentiment sans réfléchir, et leur 
lieuse est dans leur ignorance des faits. Après avoir 
1 tout ce qui précède, il n'est plus possible de criti- 
[tier les règles que l'administrât inu s'est imposée h ce 
Nljet, et, croyez-le bien, avec douleur. Il n'est pas, en 
ftet, au pouvoir de la Préfecture, de changer l'âge 
unes filles, de faire qu'elles ne soient pas mi- 
lores : tel fait existe, comme ceux que nous venons 
I rapporter; l'administration le constate, et, dans 
mpossibilité de changer l'ordre des choses, il est 
p son devoir de limiter le mal dont elle est témoin, 
t de l'atténuer par tous les moyens possibles: contre 
1 nécessité, il n'est pas de règlements, ni même da 

Supposons que l'a^iniatration cesse la surveil- 
lance; que répondrait-elle alors aus reproches qu'on 



144 LA FROBTITUTION A PARIS 

lui adresserait avec justice?... En vérité, en arrêtant 
les mineures surprises (juaire fois à raccroclier, la 
police des mœurs, loin de commettre un abus, rend 
au contraire à la société un service immense, dont 
on ne saurait trop lui savoir gré. Et, s'il y a lieu 
d'émettre un regret, ce ne peut être que celui qua 
nous éprouvons en constatant que la Préfecture n'est 
pas safSsamment armée : ces prostituées clandestines 
mineurea, dont l'état syphilitique nécessite l'envoi ii 
Saint-Lazare, devraient être, à leur sortie de l'jnflrme- 
rie, mises de droit aous la surveillance la plus étroite 
de la police sanitaire; loin de là, parce qu'elles sont 
mineures, et si indignes qu'elles soient, on garde en- 
core avec elles des ménagements. 

Médecin, noua allons même plus loin. Si la grande 
majorité des filles clandestinea n'ont aucun souci de 
leur santé personnelle, il en est, cependant, qui, lors- 
qu'elles se voient atteintes d'une maladie vénérienne 
douloureuse ou dont elles a'effrtfîent pour elles, voiit 
se faire soigner à l'hôpital Broca, ou à Saint-Louia, 
ou à la Maison municipale de aanté, ou dans tout 
autre hôpital où elles réussissent à se glisser; mais, 
comme on ne peut les y retenir, elles en sortent sui- 
vant leur fantaisie, en état incomplet de guérison, 
pour peu qu'elles se sentenjt soulagées ou qu'elles 
croient pouvoir continuer le traitement à leur gnisB 
chez elles. II y en a même qui vont seulement à la 
consultation des hôpitaux ; le Dispensaire de la Pré- 
fecture a souvent la preuve de ces pratiques d'inaou- 
miaes vénériennes, qui se soignent tant bien que 
mal, et qui n'attendent aucunement d'être guéries 
pour reprendre le métier de prostituées. Celles-ci en- 
core répandent donc le mal, en parfaite connaisaauce 
mÂa cause. Eh bien, nous le disons bien haut, il fau- 



LA PROSTITUTION A PARIS 145 

n&it, que, pour les vénériennes, les pouvoirs publics 
MDnnussent, d'une façon formelle et une fois pour 
la nécessité absolue d'asiles sanitaires fermés. 
' Pour noua renfermer dans la question des mineures 
1 ne saurait trop dire et répéter que 99 sur 100 de 
! jeunes filles sont abandonnées de leurs parents. 
lorsqu'on presse ceus-ci de reprendre leurs enfantSj 
I répondent piesque toujours : a L'administration 
1 qu'à en faire ce qu'elle voudra, n Aux personnes 
i désireraient des exemples caractéristiques, noua 
mseillona la lecture du livre du docteur Commenge; 
B la page 142 à la page 176, son grand in-octava re- 
«îduit une foule de lettres adressées au préfet de 
tolice par dea pères, mères et autres parents de 
i prostituées clandestines arrêtées et trouvées 
bériennea; elles confirment pittoresquement la ve- 
nté que nous venons d'énoncer. 

D'autre part, on n'ignore pas que quelques pères 
îrent parti du déshonneur de leur fille; mais la police 
I peut rien savoir offieiellement dans ces cas par- 
îculiers, et d'ailleurs ces rares infamies se font dans 
» plus grand secret : on ne voit guère que 5 ou G 
s par an venir donner eux-mêmes leur consente- 
Lent à l'inscription de leurs fillfea mineures. Quelques 
xpulsées de Paris, sont revenues avec ce con- 
tentement par écrit; mais l'administration se gardo 
[bien d'exiger cette pièce, trop révoltante. 

En définitive, ce que l'on doit exiger de l'adminia- 

;»tion dans une affaire si grave, c'est une sévère 

attention, c'est un religieux discernement, c'est une 

^ge temporisation dans tous les cas douteux; or, 

H'çxpérience dea ann^ea a prouvé que la Commission 

i statue sur les inscriptions s'est montrée, de tout 

mps, d'une prudence plutôt excessive. 



( 



i 



146 lA PEOSTITDTION A PAEIS 

Terminons par quelques une de ces cas particuliers 
qui mettent la Commission préfectorale dans la né- 
cessité d'inacrire parfois des fiUea de quinze ans et 
même de quatorze. — Une fille de quinze ans, plu- 
sieurs fois arrêtée et trouvée vénérienne, était tou- 
jours réclamée par sa mère; comme on acquit la 
preuve iiue cette femme tirait paiti du désordre de 
sa fille, sans qu'on p«t la poursuivre juridiquement, 
on se décida, dans l'intérêt de !a santé publique, à 
inscrire cette fille, — Une fiUe de quinze ans se pré- 
sente pour demander son inscription : on fait venir 
son père, qui ne veut pas la reprendre; seul, son 
amant (r*) se présente à cet effet; on passe par-dessua 
les observations, et on l'inscrit. — Deux filles de 
quinze ans, arrêtées l'une et l'antre huit ou dix fois, 
étaient toujours réclamées par leurs parents : on 
n'inscrivit pas l'une, parce qu'elle couchait dans la 
maison paternelle ; on inscrivit l'autre, parce qu'elle 
logeait en garni. 

J'ai trouvé dans les archives de la Préfecture l'iiia- 
toirc de deux sœurs, <iui, dès Vâge de treize à quatorze 
ans, arrêtaient les hommes en plein jour avec uu3 
impudence extrême. Arrêtées, elles étaient à l'ÎDstant 
même réclamées par leurs parents; à plusieurs re- 
reprise s, elles leur furent rendues, après avoir été j^né- 
ries d'affections vénérienneB. Enfin, lors de leur 
inscription, la plus jeune avait été arrêtée vingt-cinq 
fois, et l'aînée trente-huit fois. Ne poniTait-on pas, 
dans les cas comme celui-ci, blâmer l'administration 
et lui reprocher d'avoir trop temporisé? Que l'on 
juge, d'après cet exemple, des précautions qu'elle 
prend, et jusqu'oii va la prudence do la Commission. 

La bonne ou la mauvaise conduite dos parents, ieuJ' 
état d'aisance ou leur misère extrême, l'impossibilité 



LA PEOSTITUTIOK A PABIS 147 

, ils peuvent être de surveiller leurs filles et do 
«urvoir à leurs besoins, font varier forcément la coa- 
luite de l'administration à l'égard des jeunes prosti- 
Pourra-t-on compter sur la aurveillance de 
3 et m^ères séparés et ayant, chacun de son côté, 
s existence peu louable ? Quelle garantie présente- 
pont des paieuts qui ne sortent pas de l'ivresae, ou 
iÇui, par état, sont toujours absents ? Leur rendre leur 
le, constamment récidiviste du rac«roclia}^ et de la 
philis, la confier encore à leur surveillance, aprèa 
lept, huit et quelquefois dix épreuves inutiles, et 
girès voir épuisé tous les moyens conseillés par la 
H et la prudence, n'est-ce pas compromettre de 
Eiîté de cœur la santé publique et faire aux bonnes 
Ifiœars plus de mal que de bieu? C'est évidemment 
B cas d'inscrire d'office ces malheureuses. 
Par conti'e, dans toute circonstance, !a probité et 
1 bonne conduite des pareuts font qu'on leur rend 
toujours leurs iîlles mineui'es, et que, dans la mesure 
du possible, l'administration ne néglige jamais rien 
pour pousser toute famille lionnête à reprendre son 
enfant cjDupabjle et déchue, quels que soient les 
reproches qu'on puisse adresser à celle-ci. 

On voit par là. l'impossibilité d'établir des règlea 
strictement invariables sur tout ce qui concerne l'in- 
scription des mineuiea; on comprend qu'il est indis- 
pensable d'abandonner à la Commission préfectorale 
l'appréciation et le jugement administratif de tous 
les cas qui peuvent ae présenter et qui varient 
autant que les individus. On voit aussi combien sont 
mal fondées et injustes les attaques des adversaires 
de la police des mœurs, qui ont même osé, ne recu- 
lant pas devant la calomnie, accuser la Préfecture de 
jEaire main basse sur toutes filles çqmi çwkçV^î ^Rft- 

É I 



148 



L PaOETITUTION A PAEIS 



maiHona de tolérance ; calomnie atroce, puisque, dans 
le cas d'indigence d'une famille hoiiuète qui par- 
donne à son enfant, l'administration la lui renvoie 
toujours, si fautive aoit-elle, par réquisition de trans- 
port, c'est-à-dire sans qu'il en coûte un centime aux 
bons parents pauvres, pour ce voyage de retour. 

Enfin, sur la nécessité de l'inscription générale dea 
prostituées, majeures ou mineures, ainsi que de leur 
viaite sanitaire .périodique, nous ne connaissons pas 
de paroles aussi sensées et ayant vibré avec autant 
d'éloquence, que celles que le docteur Mougeot da 
l'Aube prononça en 1867 au Congrès médical inter- 
national de Paris; paroles qui, aujourd'hui encore, 
sont de pleine actualité. 

Noua considérons comme un deToir de les repro- 
duire; car elles répondent admirablement aux so- 
pliismes des inconscients qui voudraient faire abolir 
la réglementation de la prostitiition. 

C'est en vain, s'écriait !e docteur Mougeot, qu'on 
nous opposerait le respect de la liberté individuelle 



et de la vie privée !. 



a' est-ce qu'une liberté indivi- 



duelle qui menace et détruit la liberté individuelle de 
plusieurs ? Qu'est-ce qu'une vie privée où il y a 
une immixtion incessante d'étrangers, et qui va 
colporter ici et là, à domicile et partout, une contami- 
nation qui peut être terrible en ses effets ? 

Eh quoi ! l'on exproprie, pour cause d'utilité pu- 
blique, les plus belles années de la vie d'un homme, 
en l'envoyant à la caserne, et l'on hésiterait à ex- 
proprier, pour cause de salubrité publique, quelques 
heures, quelques jours, quelques mois, s'il le faut, 
de la liberté d'une fille de mœurs suspectes ou misé- 
rahlefc!.:. On sacrifie des hommes considérables et 
les dévouements les meilleurs pour conjiirer des 



LA FHOSTITUTION A P.UIIS 149 

fléaux transmissiblea comme le choléra, la fièvre 
jaune, la peste bovine, etc.; oa impose d'onéreuaea 
quarantaines à d'honnêtes gens, sur le simple soup- 
çon detre imprégnés d'un air empesté.... Et, pour 
éteindre le fléau, bien autrement redoutable, de la 
syphilis, qui ne punit pas seulement le coupable, 
mais par celui-ci l'innocent, et qui pis est toute une 
descendance, on s'arrêterait devant la liberté indivi- 
duelle et la vie privée d'une prostituée ! 

• Cela ne peut pas être. La concurrence vitale 
est la loi de tout ce qui a "vie dans la nature. Rien 
n'y échappe, pas plus les nations que les individus. 
Jja nation qui, par une coupable insouciance vis-à- 
vis d'une corruption physique et morale, aura laissé 
amoindrir le nombre de sea enfants et la force cor- 
porelle de chacun d'eux, deviendra nécessairement 
la proie des nations qui se seront maintenues plus 
nombreuses et plus fortes. Le secret de l'avenir est 
là, comme l'explication du paaaé. 

i Donc, au nom des intérêts les plus élevés, nous 
tenons pour les plua grandes rigueurs dans les me- 
sures administratives, non seulement pour les femmes 
publiques ot soumises, mais vis-à-vis de tout ce qui 
touche plus ou moins la prostitution clandestine. 
Toute cette catégorie appartient, selon nous, aux éta- 
blisseiiienta insalubres et doit en subir la réglemen- 
tation. Ici, nulle exception, dussent ces rigueurs 
s'étendre jusqu'à ces bétaïi'ea qui, loin de faire de la 
prostitution clandestine, affichent^ par tous les 
moyens possibles, ce qu'elles sont, et vont jusqu'à 
mettre à l'encan, dans les grands clubs, la clef de 
leur alcôve, n 

Parmi les médecins qui applaudîsaaient ces saïgas 
r paroles, se trouvaient les plua émiiietta à.oiA«vi3»V 



1 



J 



I 

I 

I 



lÔO LA PROSTITUTION A FAHIS 

notre pays, Tardieu, Broca, Charles Eobin, Jaccoud, 
Iiasè^e, Wurtz, doyen de la Faculté, Bouchardat, 
Gosselin, Eiconi, lîarthez, BenonviilierB, Béelard, 
toutes les gloires de la science médicale, tous les pro- 
feseeura qui portaient alors les noms les plus vénérés. 

Ils applaudirent encore le docteur Garin, médecin 
en chef de l'Hntel-Dieu de Lyon, qui, dans une bro- 
cliure récente traitant le même sujet, avait écrit ces 
ligne 3 énergiques : 

« Pourquoi tant ménager cette classe de femmes, 
ostensiblement entretenues, dont la porte, presque 
ouverte à tout venant, a, pour ainsi dire, une clef 
banale en circulation? Pourquoi ces filles de joie, qoi 
ne sont, après tout, que la bohème plus ou moins 
fringante de la prostitution, ont-elles le droit de rui- 
ner impunément, non seulement la santé, mais les 
mœurs et la fortune de la jeunesse ? Pourquoi cee 
Laïs et ces Phryné de notre époque, à qui leurs ex- 
ploita font un nom et dont le scandale fait toute la 
gloire, peuvent-elles sans crainte étaler, sur les pre- 
miers bancs de nos spectacles et de nos fêtes, leurs 
extravagantes toilettes et leurs allures tapageuses, 
comme un effronté défi au luxe décent de nos 
femmes, comme une provocation ouverte au liber- 
tinage de nos filsP 

e Est-ce que l'honnêteté aurait quelque chose à 
pOTïlre à voir ces odalisques de rencontre chaBséea 
àe nos lieux de plaisirs?... Est-ce que la santé pu- 
WJque n'aurait rien à gagner à les savoir sévèrement 
astreintes aux mesures d'hygiène devant lesquelles 
se coui'bent d'autres courtisanes, moins bien chape- 
ronnées, il est vrai, mais nullement plus dange- 
reuses?,.. Et pourrait-on gémir beaucoup sur 
'Jionneur de quelques i.b'ûleaseg soumises au joug. 



LA PROSTITUTION A PARIS 151 

land on applaudit h la capture ds ces bandit» 
mérites qui ne sont pas plus haut plates, dans les 
iabiletés dii crime, que ne le sont ces sirènes, dans 

B raffinements du vice? b 

3. Dee radiatioDS et de« péiuscripUoiiM. 

En ménie temps qu'on inscrit une prostituée, on 
ptnï remet une notice imprimée spéciale, dont le but 

t de lui l'appeler les obligations auxquelles elle est 
BBOnmise en vertu des réglementa administratifs et sa- 
nitaires. Mais aussi, sur ce même imprimé, figure la 
mention suivante : « Avis im-portant. Les filles in- 
scrites peuvent obtenir d'être rayées des contrôles 
de la prostitution, sur leur demande, et s'il est établi 
par une vérification, faite d'ailleurs aveo discrétion 
et réserve, qu'elles ont cessé de se livrer à la dé- 
bauche. B II est donc faux de dire que la police des 
moeurs maintient, malgré elles, dans la prostitution, 
les femmes qui veulent en sortir. 

On conçoit, d'autre part, que les formalités de la 
radiation ont besoin d'être entourées de précautions 
et qu'elles nécessitent, dans bien des cas, un temps 
(l'épreuve, dont la durée est naturellement variable. 
On n'nrrive pas de plain-pied, au sortir de la dé- 
bauche, à se eonatituer une position qui offre des 
garanties* morales et matérielles décisives. L'expé- 
rience prouve tons les jours, au surplus, que beaucoup 
de proNlituées ne demandent leur radiation que pour 
ee soustraire aux règlements, aux visites sanitaires, 
et surtout ati désagrément dV-tre enfermées parfois 
plus ou moins longtemps à l'hôpital -prison. 

La demande de radiation doit, d'abord, être faite 
par écrit et par l'intéressée elle-même. La fiUea^^'T^^ 



r 

H 152 

^^P tée a 

^^B est te 
^^ les I 



lA PROSTITUTION ^ 



Dispensaire, et, une fois reconnue saine, elle 
est tenue d'indiquer au Bureau des Mœure quels sont 
les moyens d'existence koimête qu'elle a ou sur 
lesquels elle compte. 

En cas de mariage, la radiation définitive est im- 
médiatement accordée ; mais on exige l'exhibition du 
contrat, ou la présentation d'un certificat de l'état- 
civil attestant que les formalités pour le mariage 
sont commencées. Voici un autre cas oii la radiation 
est immédiate, et sans que l'inscrite eoit obligée de 
paraître devant la police sanitaire : c'est lorsqu'une 
fille, étrangère à Paria et rentrée depuis quelque 
tempa dans sa famille, donne la preuve de sa bonne 
conduite et désire que son nom disparaisse des re- 
gistres de l'administration. 

Passons aux cas nécessitant une épreuve, La ra- 
diation est accordée en principe, mais à titre provi- 
soire ; pendant deux ou. trois mois, l'intéreasêe est . 
mise en surveillance, pour savoir si elle a réellement 
des ressources pour vivre, et si son changement de 
conduite est véritable; on s'infonne de la moralité 
des personnes chez qui elle travaille; d'après ces ren- 
seignements, un rapport est rédigé et adressé au 
préfet de police, qui ordonne la radiation définitive 
ou le maintien de l'inscription. Parfois, le tempa 
d'épreuve peut dépasser trois mois : en effet, quelle 
garantie peut présenter, par exemple, une fille qui, 
après avoir contracté l'habitude de la gourmandise 
et d'un certain luxe, allègue, pour moyen d'existence, 
elle qui s'est complue longtemps dans l'oisiveté, le 
gain qu'elle pourra s'assurer dans la broderie, dans 
la couture, ou dans d'autres professions qui ne rap- 
lortent que quelques sous à celles qui les exercent? 
£aut-il pas, pour la rayer, avoir des preuves cer- 



LA PEOSTirrTIOX A PAHIS 153 

Inès de son retour au bien ?. . . D'ailleurs, Venquét© 

t toujours faite avec une délicatesse extrême : uae 

laladresse pourrait occasionner une divulgation et, 

■ suite, un malheur; car, dans certains cas, elle 

«ntraverait et compromettrait la reprise, par une 

prostituée, d'une vie honnête et laborieuse. 

Quand un père ou une mère vient appuyer la de- 
■mande de i-adiation, l'enquête porte aussi sur eus : 
' s'ils peuveut à peine se suffire à eux-mêmes pour ne 
pas mourir de faim, comment pourront-ils venir en 
aide à leur tille de façon à ce qu'un chômage imprévu 
ou la perte de sa place ne la poussent pas à reprendre 
son vil métier de prostituée? D'autre part, si ces 
parents ont favorisé la débauche de leur iille, s'ib 
l'ont exploitée, s'ils ont déjà obtenu une première fois 
la radiation sans qu'il eu soit résulté un amendement 
dans la conduite de cette tille, qui, surpriae de nou- 
veau ù. se prostituer, a dii être réinscrite, on comprend 
que les sollicitations de tels parents sont plutôt sus- 
Buspectes: nécessairement, dans ces cas, le temps 
d'épreuve doit être prolongé, avec une surveillance 
plus active et plus étroite que dans les cas contraires. 
Il en est de même dans le cas d'une fille qui 
annonce son intention de renoncer à la prostitution 
publique pour vivre maritalcTnent avec uu homme 
tombé amoureux d'elle. Rien n'est plus douteux que 
la durée de telles liaisons, aussi fragiles que la pas- 
flion qui les a fait naître. Ce cas offre donc de 
sérieuses difficultés, et l'expérience, ce guide infail- 
lible, a prouvé que le bien véritable ne peut se faire 
ni par la radiation définitive immédiatement accor- 
dée, ni par un refus formel. Si, en effet, on ne prenait 
pas de i^enseignements, et si l'on radiait d-t?. Vi. ^^i- 
Ljnande. il n'est pas une fille t\ul ne ^.ïOM-sfttw^^V "^ "*'»*'( 



i 



.64 LA PHOSTITUTION A PARIS 

IKmr se pi'êsenter coîiime son garant, «luelqu'un de 
i«eB individus qui se font entretenir par les fentmea, 
'ils ont un emploi rétribué; voyez ce qui a 
été dit plus haut au sujet des amante de cteui'. 

ftuelquofnia, par contre, ce sont des personnes cha- 
ritables qui appuient la demande de radiation, soit 
[n'elles s'occupent habituellement de bonnes ttuvrea, 
it que des circonstances particulières les portent à 
'intéresser à quelque fille de leur pays ou de leur 
mnaissanoe. On pense bien que toutes les facilités 
int accordées à ces personnes; mais, dans ce cas 
lême, la radiation ne devient définitive qu'après 
ieux ou trois mois. 
î a-t-il abus d'autorité, de la part de l'adminiatra- 
tion, dans cette manière d'agir^ viole-t-elle ainsi la 
l-îiberté individuelle de ces filles? Personne ne pour- 
lit le Boutenip sérieusement. Si, en maintenant pro- 
lirement ces filles sur le registre de leur ins- 
<oription, on les mettait dans la nécessité de continuer 
leur métier de prostituées, là serait le mal, et rien ne 
pourrait l'excuser : mais cette mesure, toute de pru- 
dence, ne leur ôte pas la faculté de faire tout ce qu'elles 
veulent: les visites sanitaires, auxquelles elles restent 
assujetties, peuvent être ignorées, s'il leur est néces- 
saire de s'en cacher, et ce n'est pas cela qui peut les 
«mpêcher de vivre ctimme les personjies les plus ver- 
;ttïeuBeB; an surplue, l'habitude qu'elles ont de ces 
iaitea fait qu'elles ne leur sont plus péniHe^. Mais 
\tm connaît les goûts et les penchants de ces femmes; 
lueurs antécédents réclament des garanties, et l'admi- 
nislration, gardienne de la santé publique, a le îroLt» 
I— que dis-je! — a l'obligation de les exiger. 

Une fois que la demande de radiation a été faite, 
à pliiB forte raison lorsque la radio-tiou a été accot- 



LA PHOSTITUTION A PARIS 155 



I, si la fille est Riirprise ea flagrant délit de r 

iage ou trouvée dans une maison de prostitution 

tandestitie, an cours d'»me descente de police, sa 

iscription ii lieu, puisqu'il est démontré indiscn- 

kablement qn'elle n'a demandé et obtenu sa radiation 

feTie pour tromper la police sanitaire. 

(Jertainea radiations sont faites d'office, soit défini- 

EtÏTenient, en cas de décès, soit provisoirement, dans 

tnelquea cas. Ainsi, les radiations prononcées à 

1 des filles publiques devenues maîtresses de 

I de tolérance sont de droit, mais provi soirée, 

fèlles constituent une sorte de privilège octroyé à ces 

ieminea, non pas qu'on leur accorde la moindre 

estime, mais parce que, dans un intérêt de discipline 

facile à comprendre, il est important de ne pas affai- 

■ autorité vis-à-via des filles qu'elles logent, 

6 même, on radie d'office, à titre provisoire, les filles 

jUJOi subissent une condamnation de droit commun, 

■«Bui à les réinscrire à leur sortie de piison, si, leur 

■ châtiment ne les ayant pas covrifcées, elles ne veulent 

Kéemander leurs moyens de subsistance qu'à la pro- 

Enfln, la radiation d'ofBce mais provisoire, a'ap- 

iUqiie aux filles disparues, et cette catégorie nous 

lermettra de montrer encore ia sagesse «t la bîenveil- 

lUce de l'administration. En effet, ai l'on voit, d'une 

, des femmes attacher la plus grande importance 

L faire rayer leur nom des registres de la police des 

■jtooeurs, l'immense majorité, d'autre pari, e^t sans 

^ aucun souci à. cet égard, aussi bien celles qui ont 

trouvé les moyens de reprendre une vie lionnête ou 

tout au moins exempte de débauches, que celles dont 

le seul but est de se soustraire aux obligations régle- 

i mentaires, sans cesser de se livrer à la. ■çTO'î^^tosSKraB- 



l 156 LA PROSTITUTION A FABIS 

Les unes et les autres, simples insouciantes on 
révoltées clandestines, changent donc de domicile, 
I ne donnent à personne leur nouvelle adresse et ne 
' reparaissent plus au Dispensaire. Or, il faut néces- 
sairement prendre un parti à leur égard ; car elles 
ne peuvent pas rester à jamais sur les listes, et deve- 
' nir à chaque instant l'objet de recherches qui ab- 
sorbent le temps des employés et fatiguent en pure 
rperte la plupart des inspecteurs. C'est pourquoi la 
I radiation provisoire est prononcée d'office à l'égard 
I de toute femme dont on est resté trois mois sans nou- 
Telles, sans avoir pu découvrir ce qu'elle osf devenue. 
A vrai dire, on la retrouve presque toujours, un 
b jour ou l'autre, au moment où depuis longtemps on 
i recherchait plus. Alors, de deux choses l'une : 
Y ou cette fille a passé dans la prostitution clandestine, 
' la plus dangereuse; dans ce cas, on l'appréhende, ou 
la réinscrit, et on lui inflige, comme punition, une 
détention administrative à Saint- Lazare, plus ou 
moins longue suivant le cas ; ou bien le hasard, qui 
lui vaut d'être rencontrée et reconnue par un inspec- 
teur, fait comprendre à celui-ci qu'elle ne se livreplu^ 
à la prostitution ; dans ce second cas, elle est l'objet 
d'un rapport tenu rigoureusement secret, suivi d'une 
surveillance de quelque temps, exercée de la façon la 
plus discrète, afin de ne pas lui nuire, et cela 
quoiqu'elle ait commis le tort de ne pas se faire ra- 
dier régulièrement : une fois qu'on a acquis la certi- 
tude de sa bonne conduite, sa radiation provisoire à 
titre de disparue est transformée en radiation défini- 
tive. 

Quiconque n'est pas de parti-pris reconnaîtra qu'il 
est impossible de procéder avec plus de tact, de jus- 
tice et de sagesse. On voit ainsi le néant des 



LA PEOSTITUTION A PARIS 157 

jcusations portées contre la police des mœurs, qui, 
d'être cruelle et inexorable, comme on l'a 

retendu, se montre, au contraire, paternelle chaque 
bis que l'occasion s'en présente, tout en veillant, 
ptant qu'il est en son pouvoir, au bon ordre et aux 
8 intérêts de lu, morale et de !a santé publiques. 
WBx ce qui précède, on comprend aussi pourquoi le 

Êrtal des dispames forme toujours un nombre des 
çlus considérables à côté de ceux des radiations pour 
d'autres motifs. 

Dans la période décennale relevée par le docteur 
Commenge, 1878 à 1887, les radiations définitives se 
sont trouvées, en tout, au nombre de 789, soit près 
de 80 par an en moyenne. — Voici leur répartition : 
1° pour cause de décès, 391, soit 39 comme moyenne 
annuelle ; 2° pour mariage, 75 ; mais depuis lors 
cette cause de radiation a fort augmenti;, puisque 
en 189Ô il y a en jusqu'à 25 mariages de prostituées 
inscrites, au lieu de la moyenne annuelle de 7 aupa- 
ravant ; 3° l'adiées comme vivant de leur travail, 
186, soit 18 à 19 formant la moyenne annuelle; 
4° comme ayant des moyens d'existence, en dehors de 
la reprise de travail, 137, soit 13 à 14 pour la moyenne 
annuelle. 

Quant aux radiations provisoires comme disparues, 
elles fiottent entre 1450 et 1500 chaque année, parmi 
lesquelles 20 poiur 100 représentent des filles mises 
en observation comme ayant repris une vie exempte 
de débauche et rayées définitivement dès que l'admi- 
nistration sait bien à quoi s'en tenir. D'autre part, 
les filles publiques qui sont rayées provisoii ement 
comme étant devenues maîtresses de maison de tolé- 
rance, figurent dans les statistiques pour 2 par an en 
^loyenne. Les radiées par suite de coTidai.\û.'Sia.\iyïtis. ?«*. 



1^ 



LA P20STITUTI0N A FAEIS 

droit commun piéBentent une trentaine comme 
moyenne annuelle ; tout-à-fait exceptionnellement, 
leur nombre s'est élevé à 248 en 1881. 

'SoMS terminerons en disant un mot des radiations 
I (jui, au moment où on les prononce, sont conaidérésB 
comme tléfinitives, et qui néanmoins sont, plus oa 
moins longtemps après, snivies de léinacriptiona ; cea 
cas démontrent qu'il est presque impossible d'afBr- 
mer qu'une prostituée est pour toujours sortie de 
l'abîme de fange, même si elle en a été tirée par un 
mariage, ayant complètement effacé le passé. On cîte 
comme une merveille nne lilîe de lupanar dont le 
directeur d'anc ^ande compagnie de cbemins de fer 
s'éprit et qui, devenue la baronne ï***, fut vérita- 
blement uu modèle de vertu conjugale; mais cet 
exemple contemporain appartient an domaine de 
l'exti-aordinaire. A ce miracle, il est juste d'opposer 
la fréfiuence des cas contraires, parmi lesquels le doc- 
teur Commenge en a relevé un, des plus caractéris- 
"tiques : 

Louise L'"*, née en 1870 dans le 111° arrondisse- 
ment de Paria, s'était livrée pendant trois ans à la 
prostitution clandeatine, lorsqu'elle fut inscrite en 
mai 1SS9 : elle demanda alors à entier en maison de 
tolérance. Un peu moins de deux ans après, dans les 
visites hebdomadaires qu'elle faisait à sa grand'mère, 
«De eut l'occasion de rencontrer, plusieurs fois, un 
OTivrier tourneur en cuivre, qui habitait dans la 
• maison que son aïeule. Cet bomme, qui igno- 
rait sa situation de fille inscrite, demande à l'épouser; 
Louise s'empresse de quitter la maison de prostitu- 
tion, poiir demeurer chez sa grand'mère; puis, elle 
imploie sa radiation en vue de ce mariage, en sup- 
pHani de ne rien révéler de ses antécédents à son 



LA PHOSTITUTION A PAUIS 159 

ineé ; elle jure que le passé sera réparé, et qu'elle 
bien trop lieiirense de trouver quelqu'un qui 
reuille d'elle pour épouse. L'administration n'a pas 
i prévenir l'homme ; son rôle obligatoire est de rester 
teutre et discrète. Le mariage ae fait : il eut lieu le 
ieptembre 1S91, à la mairie du III* arrondisse- 
Itaeut, avec cette particnlarité que la mariée était en 
jblanc et ornée de flenra d'oranger, comme une 
■TÎerge irréprochable. Moins d'un an après, le mari 
meurt, le 18 juin 1892. Eh bien, sa jeune veuve s'est 
empressée de retourner à aes anciennes habitiides; de 
nouveau, elle s'est fait inacrire, le 29 juin 1892; 
quelques jours à peine après la mort de son mari, elle 
était encore pensionnaire dans une maison publique. 
Les fleurs d'oranger qui avaient couronné son front 
étaient restées sans vertu ; sans aucune influence sur 
elle, la vie réffulière et honnête n'avait pas modifié 
ses penchants. 



CH.\PITRE VI 

CLASSIFICATION DES PROSTITUÉES 

K Aux yeux de l'administration, les prostituées ont 
F%]ie classification peu compliquée: les fiUea soumises 
se divisent en filles à nutnéro et en filles eti carte. Le? 
premières sont les pensionnaires des maisons de tolé- 
rance, et font l'objet d'une comptabilité en partie 
double : elles figurent à la fois sur deux registres, 
dont l'nn, consacré spécialement ans établissements 
tolérés, porte toutes modifications sui-venues dans le 
personnel de chaque maison ; le eetoivi ïft^\'ifts«.. 



J 



I 



E^ 



160 LA PROSTITUTION A P.UtlS 

livi'e de contrôle du premier, porte les filles de mai- 
son dans l'ordre chronologique de leur inscription 
parmi les prostituées de cette catégorie, chacune 
d'elles ayant son numéro distinctii, bous lequel sont 
mentionnés ses changements de maison. Quant aux 
Elles en carte, qui figurent aussi sur un registre 
spécial où elles signent leur déchéance, on les quali- 
fie ainsi, parce qu'étant relativement libres elles 
reçoivent une carte avec laquelle eltes doivent se 
présenter lors de leur visite au Dispensaire, et sur 
cette carte le timbre apposé par le médecin visiteur 
indique la constatation périodique de leur état de 
santé; ces filles sont aussi appelées ûlles isolées, 
parce qu'elles vivent à part, soit dans leurs meubles, 
soit en chambre garnie, soit comme adjointe à une 
autre fille qui a créé ce qu'on nomme un a loge- 
ment s, aorte d'appartement discret, fréquenté par 
une clientèle assidue, et que beaucoup de libertins 
prennent pour un lieu de prostitution clandestine. 

En dehors de ces deus catégories, toute prostituée 
est, pour l'administration, une iNSonMisE, soit que 
sa prostitution s'eserce clandestinement, soit qu'elle 
l'affiche avec plus ou moins d'audace comme horizon- 
tale de haute marque, à qui les protecteurs ne font 
pas défaut pour la soustraire au joug des visites 
sanitaires. 

Mais la classification administrative, en soumises 
et insoumises, n'est pas sufEsante, si l'on veut envisa- 
ger l'efiectii de la prostitution parisienne sous ses 
aspects si multiples. Soujniaes ou non, ces femmes 
se cataloguent alors selon leur degré dans la hiérar- 
chie de la débauche et selon leur genre spécial. 

Exclusivement insoumises, les femines galantes 
mt à citer en premier lieu, ainsi que les fer. 



PAEIS 161 

trtiei; les premières sont, presque toutes, des filles 
pitretenues ; les secondes se distinguent par leur 
^écialité, qui consiste à avoir un salon dont les 
^enta se connaissent. Noua reparlerons des unes et 
autres au chapitre consacré à la prostitution 
Ludestine. 

l Un assez grand nombre de fcTitmes mariées se pro- 
(ituent à Paria, la presque totalité comme insou- 
Celles qui se font inscrire, infiniment peu 
mbreuses, sont à ce sujet l'objet d'un luxe inouï 
B précautions, qu'on ne saurait comparer qu'à celles 
iqtù précèdent un enregistrement de mineure ; l'ad- 
ministration ne prend une décision qu'après que le 
mari, invité à faire réintégrer le domicile conjugal 
à sa femme, s'y refuse et l'abandonne. Néanmoins, il 
arrive, dans la majorité des cas, que la séparation 
entre le mari et ]a femme ayant eii lieu depuis long- 
temps par suite de torts réciproques, celle-ci ne peut 
indiquer ce qu'est devenu son miiri: l'administration 
le fait rechercher ; mais, quand les Techerehes 
n'amènent aucun résultat, ai l'enqnéte établit, d'autre 
part, que la femme se livre depuis longtemps à la 
prostitution, l'inscription a lieu. Nous ne saurions 
trop rappeler, d'ailleurs, que l'inscription des 
femmes mariées, comme celle des mineures, est une 
mesure à laquelle on ne recourt que dans le cas d'une 
absolue nécessité. 

Le nom de Mies d'amour est donné aux femmes 
qui forment le personnel, soit d'un logement, soit 
d'une fausse boutique ; ces filles, ayant leur domicile 
ailleurs, vieonent s'installer, pendant certaines heures 
de la journée, dans l'appartement ou le magasin, 
dont l'arrière -bon tique ou l'entresol est affecté à leur 
prostitution, et elles retournent cheî, e\'ie;'ft i.-M\.* Ns»- 



162 lA PEOSTITUTION A FJlBIS 

soirée. Un assez grand nombre de âllea en carte 
sont ainei ûlleg d'amour, mais surtout eu logement ; 
ce sont celles qui ne se font jamais arrêter pour rac- 
crocliage scandaleux dans la rue, attendu qu'elles 
trouvent mieux leur affaire à se prostituer dans cea 
appartements spéciaux, d'autant mieux acbalandés 
qu'ils sont plus discrets ; elles ne séjoutneut à Saint- 
Lazaie, que loisque par liasurd la visite du Dispen- 
saire les a trouvées malades ; et encore ce cas est 
assez rares, car ces allés sont en général fort expertes 
«t visitent avec soin leurs clients avant de satisfaire 
leurs goûts dans n'importe quel geni'e de luxure. Pa* 
contre, les iilles d'amour qui se prostituent en fausse 
boutique, et qui eout au coïirant aussi de toutes les 
pratiques du sadisme, appartiennent presque toutes 
à la prostitution clandestine. 

Il en. est de même des Hlleg de hranerie, dont la 
clientèle eat principalement constituée par les jeunea 
gens des classes moyennes. \ un degré inférieur sont 
les ûïlei de eahoulots, parmi lesquelles il faut compter 
en nombre formidable les pseudo-bonnes de mar- 
chands de vins, formant une classe importante de la 
prostitution clandestine de bas étage. Il faut joindre 
à ces dernières les Hlles à soldats, qui font leur métier 
dans certains estam.inets, mais dont beaucoup exer- 
cent aussi le racolage n'importe où, à la rue, dans 
les promenades et les squares des quartiers éloignés 
du centre et fiéquentés par les militaires, dans la 
zone des fortifications, sans compter celles qui pa- 
pillonnent par essaims nombreux uux environs des 
casernes et dans le bois de Vineennes. 

Pai' raccrocheuses proprement dites, on entend ces 

légions de prostituées qui accostent effrontément le 

, passant dans la rue, ou qui, plus on moins modestes. 



U^ FEOSTITUTION A PAitlS 163 

E font anivre, soit par manque de hardiesse, soit par 
ïeffet d'un habile calcul jour se faire payer plwB 
. On les nomme encore ûUes de troUoir, par op- 
nsition aux prostitnéeB en cb;imbre qui raccrochent 
1 fenêtre. 

Cette prostitution du trottoir comprend les genres 
9 plus variés de filles soomiaes et d'iosoumisea. On 
1 trouve d'élégantes dans les beaux quartiers ; on en 
K-Zencontre qui ont la spécialité du costume sombre, 
favec grande voilette de deuil, et qui, selon leur âge, 
mt fausêes orphelines ou bien fausses veuves. Le 
■^ottoir ne manque pas non plus de fausses domes- 
Y'tigues, avec tabHer blaac, bonnet de soubrette et 
Btit panier pour le marché; ni de fausses ouvrière», 
■soi-disant en course pour les commissions de leurs 
ronnes, et ayant les attribiita de leurs pseudo- 
létiers, dont la variété est des plus remarquables, 
ins la quantité totale des raccrocheuses du trottoir, 
i cartes, quoique nombreuses, sont néan- 
Loins l'infime minorité : les neuf dixièmes sont dea 
restituées clandestines. On les distingue générale- 
ment, les unes des autres, à lettre dessous : la trimar- 
^euse, nom spécial de la tille en carte racolant sur 
ie publique, est propre, sauf de très rares excep- 
: c'est une nécessité de son métier; au contraire, 
i presque toujours des dessous douteux. 
C'est la remarque unanime des médecins du Dispen- 
saire. 

Aux bas degrés des Elles de la rue, il faut not«r 
les Itallières, rebut de la prostitution, Elles ignobles 
qui raccrochent dès deux heures du matin aux envi- 
rons des haltes, rôdant autour des charrettes des 
maraîchers et guettant ceux qui ont fini de déposer 
leur marchandise sur le carreau. î^oV«ia, ^■«i'tïii 



À 



wr^jr- 



ï 



164 LA PEOSTITUTION A PAEIS 

pai-t, lea voleuses, pour qui la prostitutioii n'est 
qu'un voile leur servant à cacher une autre industrie; 
leur véritable métier est de voler et de favoriser lea 
voleurs et les filous de toute espèce. Enfin, la catégo- 
rie la plus abjecte est celle des pierreuses ou feTnmea 
de terrain ; on désigne ainaî certaines dégoûtantes 
créatures, qui ont vieilli dans l'exercice de la prosti- 
tution du plus bas étage, et qui ne sortent pas de 
jour, étant trop repoussantes pour exciter le désir 
même des derniers voyous; toujours deux de compa- 
gnie, elles se prostituent la nuit dans les endroits lea 
plus obscurs, aux bords de la Seine, sur les escaliers 
des quais et sous les ponts, ou encore dans les ter- 
rains vagues, auprès des vieilles usines abandonnées 
après faillite, et surtout an miKeu des pierres de 
taille, des poutres et autres matériaux qui encom- 
brent les cliuntiers de couatruction. Elles rappellent 
ces aales prostituées de la Rome antique, décrites 
Plaute en ces termes : a crottées, sordides, 
filles à vermine, sentant le fumier, le grabat et la 
crapule, jamais homme libre n'a voulu les toucher, 
vieilles peaux à deux oboles, qui ne sont bonnes 
qu'à lécher la crasse des esclaves, « 

Mais il y a d'autres raccrocheuaes que celles de la 
fenêtre et celles du trottoir. Nous devons mentionner: 
la femme de calé, habitant en meublé, ne sortant 
guère que vers la fin de l'après-midi, a à l'heure de 
l'absinthe», s' attablant dans certains cafés connus 
des libertins qui viennent y faire leur choix, raccro- 
chant en se faisant offrir une consommation, parais- 
sant ensuite le soir dans les cafés-concerts et y 
racolant de même, retournant ensuite au café dont 
elle est cliente assidue, y séjournant, s'il le faut, 
jusqu'à rheiire de la fermeture, et visant surtout à 



■ LA PROSIITUTION A TARIS 165 

■amener chez elle un homme pour coucher ; la sou- 
wpeuse, qui présente quelque analogie avec la précé- 
Kente, mais à un degré supérieur, fréquentant pi'in- 
Ripai enient les restaurants de nuit, se prostituant 
bIus souvent en cabinet particulier que chez elle, en 
E^néral ancienne fille de fausse boutique, et quali- 
Bée aussi d'agenouillée, en raison de son art fella- 
Bbire qui est d'ordinaire sa spécialité; l'aîlumeuse, 
Kont le champ de manœuvre est le bal public, oii elle 
Kanse et raccroche, où l'amateur, avant d'être ramené 
Bshez elle, lui doit payer un extraordinaire arrosage 
■de punch, sans compter les bouquets, qu'elle rend 
TO'esque aussitôt à la bouquetière de l'établissement 
Ht dont elle partage le prix avec celle-ci, ce qui lui 
■procure un petit supplément d'honoraires ; la rati- 
W^onnfjise ou fîlîe à curés, catégorie essentiellement 
^terisienne et d'une habileté consommée, qui tend ses 
nièges spécialement aux dévots et aux prêtres, qui 
Efa dans lea églises aux jours de sermons des predï- 
Kateurs en vogue, qui fait de l'œil, sans en avoir l'air, 
■Ka se pi'osternant le plus pieusement possible, qui sait 
be faire suivre, après un frôlement savant à la sortie 
Kirès du bénitier, et qui se sert même du confessionnal 
nonr se faire une clientèle ecclésiastique ; la cow- 
pewje d'omnibus, spécialiste des voitures publiques, 
■toujours très bien mise, gantée, ayant comme la pré- 
■teédente une apparence des plus sérieuses, dont la 
Uonmée commence dan» un bureau d'omnibus très 
Wléquenté et qui, avant de monter, trouve toujours le 
■moyen de demander de la façon la plus naturelle on 
tïenseignement au monsieur qui l'a déjà dévisagée, 

■ et dont elle achève la conquête, soit à la station 
Isnème, soit dans l'omnibus ou le tramway, en conti- 
^tuant son manège, avec toutes les mines d'ii'a.ïi ^i»- 



r 



1G6 LA PHOÏTITIITION A PAEIS 



quetterîe raffinée. Toutes ces sortes de raccrocheuaea 
spéfialisteB appartieiment à la prostitution clandes- 
tine, sauf de rai'isaiiues exceptions. 

Il cwEvient de noter encore la baladevse cycliste, 
très fréquente depuis que la vêlocipédie et l'automo- 
bilisme sont devenus sports à la mode ; cette clan- 
destine spécialiste, qui t fait son persil > eu pédalant 
sur les grandes routes, à travers les commîmes sufaai*- 
baines, raccrocLeuso infatigable k la recherche des 
( ramaseeurs de pelles > qu'il s'agit de consoler, est 
généralement une très impure émanation du quattiec 
Latin. 

Une curieuse spécialité d'allumenses se ren- 
contre en certaines localités de la banlieue de Paris, 
partout où les 'parties de plaisir ont pour élément 
principal la promenade à cheval ou à âne. Montmo- 
rency et Kobiusou sont les deux endroits où le typ« 
de Vallu/mt^usc amazone se présente avec un genre de 
raccrochage tiès caractéristique. Il ne s'agit nulle- 
ment d'une Jille venue elle-même en partie, pour 
s'amuser tout en faisant son métier de vendeuse 
d'amour ; elle est, au contraire, prostituée clandes- 
tine domiciliée dans la localité, et les loueurs de 
chevaux et d'ânes lui prêtent gr:ituitement !a mon- 
ture qu'elle désire ; elle ^rt ainsi d'amorce, allant 
et venant jusqu'à ce qu'un libertin, croyant à une 
bonne fortune, loue à un tarif exagéré le quadrupède 
sur lequel il chevauchera en forêt pour accompagner 
la belle. Celle-ci est non seulement d'accord avec les 
loueurs de chevaux et d'ânea, mais avec les restau- 
rateuis du pays, qui la rémunèrent du zèle qu'elle 
prend à leur conduire le client naïf ; une additioa 
fantastique est la conclusion inévitable de la joyeuse 
aventure du monsieur, t^ans compter un autre oui- 



■ I.A PHOSTITITIOS A PARIS 167 

B)Uit sonvenir, plus coûteux encore, qu'il emporte 
Blès fréquemmeut. 

H Nous avuns dit, plus haut, à propos des trib'ades 
H(page 89), qnel est le ra^crochaf^ des <■ {smmes pour 
MlBmniesB, qui satisfont le vice lesbien, très répiindu 
Hlaiis la hiiute société. 

H Dans les sommets de la prostitutioii claadestiiie, 
Hboub dévoua mentionner encore les filles de tMtre, 
^Hes catiua parvenues au g^rade de cocotte à ia mode, 
^nt les femmes du monde déclassées. 
M Les premières sont appelées Ttiouchea d'or ; elles 
Ksont, selon l'expression du docteur ï'nurnier parlant 
^» la tribune de l'ADadémie de Médecine, « cette 
HDnrbe interlope qui ne pi^end place dans le public 
fcjrtistique que pour le salir et qui compose ce qu'on 
Htourrait plus justement nommer la prostitution des 
Kfatnclies. > 

B Les cocottes û la mode sont aujourd'liui les demi- 
Hbondaines, appelées autrefois alionness et «bichesa. 
■pe Bont les prostituées parvenues par le hasard de 
Bre eloues circonstances inespérées, ou bien lancées par 
Hsl on tel richissime entreteneur, héritier d'une 
^vrende industrie, jeune sportman millionnaire, ou 
Hboursicr à qui le luxe fou de sa grue sert de rêelame. 
■Râles sont, en général, de basse extraction, et, pourvu 
Bjn'ellea soient jolies, les plus bêtes sont celles qui 
Hrénssissent le mieux. Elles ont, cependant, mal^"'é 
Heurs bijoux et les billets de banque que leurs ado- 
^^t«urs leur prodiguent, le sentiment de l'abîme de 
Honte au fond duquel elles sont descendues ; on l'a 
nonstamiueut remarqué, en effet, le dimanche, quand 
ufari.stocratie s'est donné rendez-vous sur le turf de 
VVincennes, aucune de ces eacottea huppées n'ose (aire 
Isiaffer ses chevaux dans la traversée du faubourg 



168 LA PROSTITUTION A T.iHIS 

Antoine, où elles redoutent les sifflets des ouTrièreB 
an petit bonnet et dea travailleurs aux mains cal-i 
leuees. 

Quant aux demi-mondaines qu'Alexandre Dumag 
fila mit en relief d'une façon si brillante, c'est-à-dîra. 
les déclassées du grand monde, elles ont changé de 
nom vers la fin du dix-neuvième siècle ; on Isa 
appelle aujourd'liui des demi-castors. Le demi-castor 
est une grande dame à qui les portes des sali 
de la tauto société sont devenues fermées, à la aiiite 
d'un scandale intime qu'on n'a pu étouffer ; rare- 
ment veuve, plus souvent femme séparée ou tlivorcée, 
c'est une mondaine dont le monde ne veut plus, ou, 
pour mieux dire, dont les femmes du monde ne veu- 
lent plus ; car, si elle n'est plus reçue par ses an- 
ciennes amies, elle reçoit chez elle leiirs maris. Etant 
bannie des salons du vrai monde, elle se rattrape sur 
le monde des rastaquouères ; elle est lo plus bel orno- 
ment dea salons cosmoj^lites qui pullulent dajxti 
Paris, et c'est là surtout qu'elle trouve son gibier. 

Les hommes du monde, dit M, Victor Joze, aimeui 
à fréquenter les demi-caSiors, dont la société leur 
plait mieux que celle des cocottes. Cela a'expïiqna 
facilement : le demi-castor, par son éducation, par 
le rang élevé qu'elle a occupé dans la hiérarchii 
sociale, a plus d'attrait pour un vrai mondain qu' 
fille do concierges devenue actrice ou horizontale & 
la mode. Les cocottes sont plutôt recherchées par let 
jeunes mirlifiores qui croquent gaillardement la for- 
tune de papa ; une fois qu'elles ont été lancées par» 
un agioteur roublard, celles-ci chai-raent et plongent 
dans le ravissement tous ces petits-crevés iuibécilea» 
a raie médiane, à favoris en nageoire de phoque,' 
gantés de peau couleuj- de chair, vêtus de jaquettes 



LA FEOSTITUriOM A PAEIS 169 

kridicules, ces eocodèa, en un mot, nue l'on reucontre 

Lfor l'asphalte parisien, au bois de Bonlo^e ou aux 

Kvoujses, la face pâle, l'œil atone, niâchonnaut la 

l-.pommeau de leur stick, promenant leur sottise et ao 

jiîaisant un devoir d'affecter un j'menfichisme ennayé, 

l:«n attendant d'être pourvus d'un conseil judiciaire. 

Dédaignant donc les jeunes gaudina, qu'elle laisse 

: cocottes, le demi-castor s'attache de préférenca 

, satisfaire lea appétits dea beaux meaaieurs des 

tercles aristocratiques et chaase aux étrangers de 

i^nde marque. 

Une rivalité continuelle existe entre les deniî- 

■ oastors et les dcmi-momdainca. lîlles s'observent au 

f ihéâtre, aux courses, aux audiences dea causes cé- 

. Elles ont les mêmes fournisseurs, les mêmes 

liCoiffeurs, et savent fort bien les unes ce qui se passe 

hez les autres, et réciproquement. Les demi-castors 

B font souvent dresser dans leur nouveau métier par 

d'anciennes femmes de chambre de grandes cocottes 

fenomméea ; elles les interrogent pour savoir tous 

i secrets d'alcôve d'une vraie fille de joie, et elles 

''imitent leurs procédés, eu tâchant de les améliorer, 

d'après leur goût, et leur tact de mondaines. 

Enfin, au sommet de l'échelle, se trouvent le** 
espionnes, pourvues quelquefois d'un mari complai- 
sant et agent secret, comme sa femme, à la solde 
d'un gouvernement étranger. Il y en a, en moyenne, 
dit le docteur Commenge, une cinquantaine dans 
Paris, venant de tous les pays ; mais elles sont plus 
particulièrement allemandes, autrichiennes ou russes. 
Les unes sont officiellement espionnes pour leur gou- 
vernement ; les autres le sont officieusement, dans le 
But d'être protégées par leur ambassadeur ou leur 
consul général, et de devenir ensuite espionne offi- 



170 LA PHOSTITCTION A PARIS 

cîelle. Presque toujours ces femmes, JustruiteB, dis- 
tinguées, séduisantes, sont très jolies et jouent à la 
femme du monde. Les unes sont installées pins ou 
moins ricliêment avec leur mari et ont une maison 
très mondaine et très courue, ou l'on donne des dînera 
et des soirées musicales. D'autres vivent librement, 
comme ayant leur mari resté au pays, ou bien comme 
veuve, ou encfire comme voyageuse prolongeant vo- 
lontiers son séjour dans la capitale française et se 
donnant franchement pour hétaïre aristocratique. 

TTne des plus fameuses est la marquise de Païva, 
dont le fastueux hôtel a été mis en vente aux en- 
chèrea publiques tout récemiftnt (26 mai 1901), Née 
en Pologne, fille d'un pauvre cordonnier allemand 
nommé Laclimann, elle passe toute jeune en Russie, 
où un ouvrier tailleur de Moscou l'épouse. Bientôt 
elle abandonne son mari et va de ville en ville, se 
prostituant ; c'est ainsi qu'elle arrive ii Paris, où elle 
connaît toutes les misères de la basse débauche. Tan- 
tôt fille de ruisseau, tantôt soupeuse. elle éprouve le» 
fluctuations les plus incohérentes du vice. Touji.ura 
confiante pourtant en su bonne étoile, elle ne perdit 
pas l'espoir, même un jour où elle tomba d'inanition. 
à demi-morte de faim, dans les Champs-Elysées (du 
moins, c'est elle qui l'a raconté), et, à cette heure 
de suprême détresse, elle se jura que là s'élèvei-ait 
son hôtel, quand le sort l'aurait enfin favorisée. Un' 
hasard lui fait rencontrer le célèbre pianiste et com- 
positeur Henri Herz, officier de la Légion d'honneur, 
qui, épris d'elle, la fait passer pour sa femme et la 
présente comme telle aux Tuileries ; malheureuse- 
ment, au (luatrième ou cinquième bal de la cour au- 
quel elle assiste, itn capitaine de ta garde iropérialff- 
"w la icconnail, et, peu galant, s'empresse de dire qui' 



1^4 PROSTITUTION A FAOIS 171 

■«Ile est; scandale et expulsion. Herz, tout honteux 

l'île cet esclandre, et, en outre ruiné par elle, s'enfuit 

Amérique. Sur ces entrefaites, elle apprend la 

; de son niaii, le petit tailleur moscovite ; un 

toble portugais, le marquis de Païva a brigaé ia suc- 

■ëesaion de Herz ; elle lui tient la dragée haute, et peu 

■ïqirès Toi là la Ë13e du cordonnier, la Lachmauii, 

ft^iouse légitime d'un grand seigneur, la voilà mar- 

■qnise. Mais elle est bientôt veuve, le marquis de 

|Païva s' étant brûlé la cervelle dans des circonstances 

matiques qui n'ont jamais été éclalrcies. 

Quelle existence!... C'est alors qu'elle se lance 

lans l'espionnageielle a la haine de la France, àcause 

i l'aflrout qu'elle a subi à la cour. TIu diplomate 

issieu, le comte Henkel la prend pour niaitiesat, 

, dès ce moment, elle manie l'or à pleines mains, 

ftCest alors qu'elle se fait bâtir son hôtel des Gbamps- 

lysêes, cité comme une merveille artistique et dont 

( splendeurs éclipsent celles des palais les plus ad- 

biréa jusqu'alors. La façade de !a maison étonne le 

«nt par ses sculptures capricieuses; les pièces de 

^tion sont l'objet de décorations prodigieusement 

tdches; Paul Baudry, Géiôme, Boulanger, Cabanel 

ixécutent là quelques unes de leurs plus belles corn- 

isitions. Longtemps on parla dans Paris du grand 

ilier d'honneur de la Païva, tout d'onyx et de 

Marbre rose. £t toute ia haute société intellectuelle 

b politique mendiait la faveur d'une invitation aux 

wii'ées de la divine marquise : Léoii Goslan, ïhéo- 

Jdiile Gautier, le prince Kapoléon, Paul de Saint- 

*ictor, Eugène Delacroix, Emile de Girardin, la 

Fcomtesae Koger de Beauvoir, la princesse de Metter- 

le prince de llobenlohe étaicul les hôtes 

fABsidus de la maison. 11 fallut la ii\\"a\.e \ie W.'ïo^vt* 



^ 



w 



LA PBOSTITUTION , 



pour amener la découverte du Tériiable rôle de la 
Païva : elle avait été la plus habile espionne de 
l'Allemagne, elle avait collaboré à la préparation bls- 
marckienne de la fatale guerre de 1870-1871; toutes 
les célébrités politiques étaient venues chez elle lui 
raconter noa aflairea en dînant. 

Elle eut le temps de s'enfuir de Paris où elle avait 
débuté comme fille soumise. Epousée par le diplo- 
luate prussien qu'elle avait si bien servi, elle devint 
.Comtesse Heokel de Donnesmarck; elle acheta les 
■diamants de cette impératrice française qui l'avait 
repoussée; elle mourut enfin dans ses terres seigneu- 
ales de Siléaie, où, dernière ironie, elle avait fait 
iconstruire pour elle, par Lefuel, l'architecte des pa- 
rais impériaux, ce château des Tuileries dont elle 
ivait été expulsée. 

Une autre grande prostituée espionne, dont le nom 
'n'est pas oublié, fut cette Fanny Lear, véritable si- 
I, qui avait un pied-à-terre dans toutes les capi- 
lales d'Europe, et qui s'était acquis la spécialité 
■d'engluer les fils aînéa de souverains; Paria était 
son refuge habituel. La devise qu'elle avait adoptée 
ïenait en trois mots : Je prends tout. 

On n'a pas oublié non plus la fine et blanche ba- 
ronne de Kauila, nom et titre de fantaisie qui mas- 
quaient l'épouse séparée d'un de noa plus diatinguéa 
officiers de l'état-major; espionne prusaienne, elle sut 
prendre dans ses filets le ministre de la guerre lui- 
même, le général de Ciasey. 

Une de ces espionnes a été récemment découverte, 

grâce à la perspicacité do la police des mceura, et 

voici sou histoire, que nous conte le docteur Com- 

menge. M*"' X..., personne fort jolie, se disant 

lors qu'elle était née en Prusse, mais 



^^k grâce à 1 
^^B voici sou 
^^Ê menge. 



Ont épousé un américain, fixé en Allemagne comme 

idustni'l, habitait Paris pendant hnit à dix mois de 

nuée: très lancée dans le monde intelligent, elle 

ncevait les hommages des notabilités de la presse. 

Kâulée et très accueillante, elle s'arrangea pour avoir 

1 nombre de ses meilleurs amis le fils d'un anibassa- 

: français, tant et si bien qu'elle fut sa maîtresse 

mdant deux ans, et l'excellent jeune homme n'eut 

Kb lors plus de secrets pour une femme si charmante 

fc si adorablement jolie; il eu était si amoureux, que 

^usieuvs fois, quand la dame était obligée de pas- 

r quelques semaines en Allemagne, il n'Iiésîta pas 

à fie reudre de Taris à Stuttgard, rien que pour la 

roir pendant quelques heures, dans l'intervalle de 

: trains. Jamais l'amoureux ne s'est douté qu'il 

ait affaire à une espionne; mais le préfet de police, 

intB fin, a fini par expulser la dame, sans tapage. 

t Ï^EoxÉ. VÊTES. — En dehors des prostituées de toute 
tégorie et de tout genre, il convient de dire ici 
Lfilques mots de leurs auxiliaires du même sexe; 
: le proxéuétisme, qui est l'accompagnement iné- 
JHable de la prostitution, ne comprend pas uuique- 
lent les souteneurs, dont nous avons parlé plus 
IJBiut (voir page Uô). Le souteneur vît de la fiJle 
nablique, qu'il rançonne, en se tenant à l'écart du 
jlieat; il ne se fait pas le guide de celui-ci auprès de 
prostituée dont il est l'amant tyrannique. Ce 
[file d'intermédiaire, rempli esclusivemeat en France 
? des femmes, se produit dans des cas trop nom- 
breux pour ne pas être l'objet d'une classification, 
bvêc laquelle nous compléterons ce chapitre. 

On peut dire que ces femmes proxénètes se 
Muvent partout, sous l'apparence du luxe le çbis. 



w 

^^m BOi 

^P en 



174 LA PBOSTITTrTION . 



1( 

■: 



Bomphieux, comme aous les haillons de la niisèrej 
ellea prennent mille foi-mea, et trouvent presque ton- 
]ours le moyen do bo diTober aux investigations de 
la police. En générai, elles sont toutes adroites, in- 
sinuantes et persuasives, rarement de ia première 
jeunesse, et le plus grand nombre d'entre elles 
n'entreprennent ce métier qu'après avoir acquis une 
longue expérience dans l'eKercice personnel de la 
prostitution. 

Pour la classe moyenne des proatituéea, ce aoni.' 
I surtout les maTchande,s à la toilette qui se livrent . 
[de la façon la plus courante aux manœuvres dn 
I proxénétisme : sou3 prétexte de vendre aux femme» ' 
* tout ee qui concerne leur toilette, elles se présentent!, 
partout; n'achetant que des efl'ets usagés, elles sont 
sans cesse fréquentées par des femmes de toute es- 
pèce, les unea venant leur vendre ce dont elles oe 
veulent plus, les autres venant se nippei' à prix ré- 
^^V duits: elles attirent ainsi les vertus déjà ébranlées, 
^^H prodiguent les mauvais conseils, aclièvent de per- 
^^H vertir, facilitent les rendez-vous. Entre elles, les filles 
^^^É donnent le nom A'ogresses à ces marctandes; c'ei 
^^^V presque toujours à une ogresse que la fille de trot- 
^^H toir doit, par un crédit de vêtements, de s'élever t 
^^^B rang de femme de café ou de aoupeuae de restaurant 
^^^K nocturne. Quelques ogresses ont des spécialités, 
^^H ne a'adi'essent qu'à un certain genre de femmes, aux 
^^V danseuses et aux actrices, pai' exemple; d'autres font 
^^m le métier plus en grand, entretiennent des correspon- 
^^^ dances avec la province et l'étranger, et envoient 
^^K leurs victimes dans nos grandes villes, ainsi qu'b- 
^^1 Londres, Bruxelles, etc. 
^^P Le nom de pTocuretiie et â' entremetteuse sont des 



LA PHOSTITOTION A PARIS 175 

r signification, et qui s'appliquent exclusivement 
i proxénétisme clandestin, La courtière et la pla- 
! aont, au contraire, des procurenaes qui s'entre- 
tettent spécialement entre les prostituées et les 
manoières, sans rechercher len libertins. D'antre 
rt.on appelle Tnarclieutes certaines proxénètes clan- 
Mtinea, qui, allant et venant dans la rue, se gKasaiit 
i milieu de la ioule^ indiquent à vois Lasse aux 
mes qu'elles peuvent les condmre auprès de 
mes filles dont elles ont, en quelque logement se- 
, un assortiment plus au moins varié; ce nom 
tait donné autrefois ù des vieilles femmes, attackées 
aux maisons de tolérance et qui avaient le droit de 
circuler sur le trottoir bordant l'immeuble, afin d'in- 
viter les passants de bonne composition à visiter l'éta- 
blissement; mais, la Préfecture ayant retiré ce di'oit 
au5 inaÎBOiis de tolérance, il n'y a plus aujourd'hui 
que des marcheuses clandestines. 

En fait de spécialités du proxénétisme clandestin, 
signalons encore Yindicatrice de femmes Tuariées 
appartenant à la petite bourgeoisie, d'épouses d'em- 
ployés et autres prostituées adultères de rang infé- 
rieur; ce rôle est rempli par un certain nombre 
d' herboristes, qui vendent des emménagogues à cette 
partie de leui' clientèle féminine, et des agants 
d'amour » aux clients du sexe fort. Ces femmes pro- 
voquent habilement les rencontres entre le libertin 
discret et prudent et la petite dame qui se prostitue 
en secret : elles reçoivent ainsi des deux mains, et 
sans jamais se compromettre, attendu qu'amateur et 
débauchée se bornent à faire connaissance chez elles 
et vont terminer leur idylle ailleurs. 

Mais la plus abominable des proxénètes est, sans 
contredit, la mère infâme, dont la criminelle t 



ire 



LA PEOSTITTITION A PAEI3 



remonte à la plus haute antiquité. Déjù sont biei 
ignobles une mère et une fille majeure se proatituanl 
ensemble, cas rare relaté plus haut (IG fois sur 5,183' 
prostituées, voir page 41); mais le cas, plus fréquent 
et bien plus ignoble encore, dont noua parlons ici, 
est celui de la mère qui élève sa fille dans le but bien 
arrêté d'en faire un jouet des hommes les plus vi- 
cieux, et qui le plua souvent la livre avant mémE 
. qu'elle soit pubère. Cette infamie, odieuse au point* 
de révolter les plua indifférents, se renconti'e à tous 
les degrés de la prostitution clandestine. Elle en est 
arrivée à souiller l'enfance jusqu'à lui faire jouer le 
rôle des petits chiens de certaines cocottes; noua vou- 
lons parler de ces petites bouquetières qui courent 
les cafés et les brasseries pour ofPrir leurs sen 
beaucoup plutôt que leur marchandise. Est-il rien 
de plua navi'ant, dit M. Golïiguon, que cet aviliase- 
ment de l'enfance, que la précocité de ces frêles bam- 
bines aux regards luisants de démons dans de doux 
visages de vierges ? est-il rien de plua épouvantable 
que l'exploitation à laquelle se livrent Ses horribles 
gères, surveillant à distance, assises sur un banc, 
le trafic de leur progéniture? Sollicitant le vice du 
vieux monsieur attardé ou de la belle dame maquil- 
lée, les pauvrettes seraient battues, si elles ne rappor- 
taient pas quelques pièces blanches, pour prix des 
complaisances les plus immondes. 

Enfin, en ce qui concerne les tenancières, toute»' 
celles de la prostitution clandestine sont des pro» 
cureuses habiles en l'art d'organiser les intrigues;. 
celles qui dirigent les maisons de tolérance ne valent 
pas mieux, dans le fond; mais, se sentant surveillées 
d'une manière permanente par la police, leur pro- 
pagande àe dêbaiiche se borne en général à une pu- 



L.I PEOSTirrTION A P.UtIS 177 

tlicité voilée dont le but est d'achalander leur 
établi a aem eut, et elles ne se risquent pas, comme lea 
tenancières des maison secrètes de rendez-vous, à des 
déma relies auprès de n'importe quelles femmes, 
même honnêtes, qui leiir sont désignées par des li- 
bertins insatiables, affreusement pervertis. îfous al- 
lons, d'ailleurs, consacrer un chapitre aux tenancières 
des maisons de tolérance. 

^B CHAPITRE TU 

B LES DAMES OU MAITRESSES DE MAISDN 

^^VLes maisons publiques de prostitution ont existé 
^^Rns tous les temps et dans tous les pays, et n'ont 
offert que des modifications tenant aus climats, aux 
mœurs et aux habitudes de la société. 

Dans la Grèce antique, ces maisons étaient appe- 
lées dicterions, mot dont l'étyiaologie est discutée : 
les uns le font venir de deikmimi, je montre; les 
autres y voient un souvenir de la grotte sacrée du 
mont Dicté, en Crète, antre célèbre où la reine Pasi- 
phaé donna l'exemple de la plus basse débauche, 
en se faisant couvrir par un taureau, d'après la lé- 
gende. Chez les Itomains, la maison de prostitution 
était nommée lupauar, mot qui est encore usité dans 
notre langue, et qui vient de lupa, louve, par allusion 
à la vie brutale qu'on menait en ces lieux; et la copu- 
lation pratiquée là était désignée sous le nom de 
. lornicatio, mot qui vient de forni,T, voûte, parce que 
■^buQs l'origine les lupanars étaient voiitês. 



Ul. PttOSTIÏDTIOÏf A PABIS 

Au uioyen-ùge, on disait bordeau. Les étymolo 
gistes affirment qu'it cette époque les maisons à 
prostitution étuieul toutes ou presque toutes aitaé< 
au hord de l'eau, c'eat-à-dîre au bord des rivières, { 
principalement dans les établissements de bains, - 
comme, de nos jours encore, dans la Suisse allemand^ 
en Autriche- Hong rie, etc. — Vers la Ilenaiasanea 
parut un nouveau mot, qui fut employé surtoQ 
comme ti>rme <le mépris : clapier, par analogie au 
demeures sonterrainea des lapins; ce mot répond aBS 
au iornix des Romains. 

Du mot hordeau- est venu celui de bordel, qui < 
définitivement resté, mais qui est une expreasïo 
grossière. Indépendamment de ce terme malséant, 1 
clients de ces maisons se servent aussi, pour les dét 
gner, des mots t bazar, boucan, claque-dent, boxos 
Le terme administratif est : maison, de toléraiti 
Quant aux tenanciers et tenancières de ces établias 
méats, la plupart, avec une pointe d'orgueil, se d 
& la tête d'une maison de société. 

En vertu des règlements de police, deux i 
de tolérance ne peuvent pas avoir la même entr 
et encore moins ne peuvent être situées dans le m.êl 
immeuble, l'un au-dessus de l'autre, avec le mémo e 
calier; il est aisé de comprendre quelles querefl 
flcandaleuses se produiraient, s'il n'en était pas aie 
En outre, dans tout lupanar toléré, chaque ] 
naire doit a^Tiir sa chambi'e à elio; autant de filï^ 
autant de chambres. 11 est stipulé encore que les m 
SOaB de toiérance ne peuvent avoir aucune commui 
cation avec les habitations voisines, ni posséder i 
portes do derrière ou cachées. 

Quelque Boit le quartier dans lequel une i 
de tolérance est située, c'est généralement lui vit 



LA PKOSTITUTIOS" A PAHIS 179 

immeublo n'apparteaant pas à la tenancière, mais 
ayant pour propriétaire — et pour propriétaire exi- 
geant — un uêgociant, un industriel, un rentier, on 
toot autre personnage bien considéré, qui ne ae fait 
aucun scrupule d'en tirer de fin'ts loyers pour établir 
ses fils et doter ses filles. En 1870, époque où Paria 
comptait 143 maisons de tolérance, voici quels étaient 
les propriétaires de ces immeubles : 97 rentiers, 22 te- 
nancières de lupanar, 3 avocats, 2 agents d'affaires, 
1 agent de change, l avoué, 1 bijoutier, 1 chapelier, 
1 commissionnaire de roulage, 1 entrepreneur de ma- 
çonnerie. 1 épicier, 1 fabricant de literie, 1 filateur, 
1 graveur, 1 Lurloger, 1 logeur', 1 magistrat, 1 mar- 
chand de chevaux, 1 restaurateur. 1 syndic de Tentes, 
1 tailleur d'habits, 1 vannier; plus 1 notaire, qui 
n'était li qu'à titre de gérant d'une succession. 

Outre sa dépendance complet* ris-à-Tis de la Pré- 
fecture de police, la maison de tolérance a ceci de 
bon : c'est qu'où ne s'y aventure qu'en connaissance 
de cause; les volets cIob, le pros numéro qui se dé- 
tache en chifl'res pouvant atteindre une hauteur de 
soixante centimètres, tels sont les signes distinctiis, 
ni hj-pocrites, ni scandaleux, auxquels l'amateur re- 
couuait l'établissement qu'il recherche, 

ij'ouvert\ire d'une maison de tolérance à Paris est 
autorisée directement p;ir le préfet de police: cette 
autorisation ne se donne qu'î» des femmes, et sous les 
conditions suivantes : la postulante doit justifier du 
bail do la maison qu'elle se propose d'afiecter à la 
tolérance, ou tout au moins d'une promesse de bail; 
si elle est mariée, elle est obligée de produire le con- 
sentement do son mari. Ces deux conditions remplies, 
la police des mcpurs procède à une enquête spéciale, 
qui porte sur U future tenancière et sur l'immeuble- 



AÀ 



I 

I 



180 LA PROSTITUTIOS A PABIS 

Ce dernier ne peut être situé que daas une me un pîS 
détournéo (sauf queltiaes exceptions pour les quaiw 
tiers excentriques); il faut qu'il ne ae trouve pas danff' 
ie voisinage d'une église ou d'un temple, d'un i 
blissement d'instruction ou même d'un palaia servant 
de demeure aux grands fonctionnaires. 

D'une manière générale, on peut diviaer les maî- 

na de tolérance en cinq catégoriea ; 1" les lupanai 

aristocratiques; 2° lés maisons de second ordre; 3° le&' 

maisons dites de q\>artier; 4° les maisons à estaminç^ 

Ô" les maisons de bas étage . 

^La première catégorie comprend les étabIiflB9- 
ûîefats montés av^ec un véritable luxe ; ce sont éea^. 
dont 'l'installation a coûté des centaines de uiîIE^ 
bancs, parfois des millions, et que les étrangers- A 
manquent pas de venir visiter, un soir que l'Opé^, 
fait relâche. Ici, dit M, Coffignon, nn vient voir un^ 

grotte mystérieuse, avec des praticables et des i" "" 

rie lumière qu'on ne retrouve que dans les féeriaf) 
Là, c'est une baignoire, qui est une véritable œuvi 
■l'art. Ailleurs, c'est une série de chambres plus on' 
■noins indiennes, persanes, égyptiennes, chinoise^' 
■îtc. Tel lupanar se distingue par son escalier moilUi; 
jiental et ea chambre noire pour tableaux vivaulit 
le dernier mot de la mise en scène erotique : 
^6 figure une vaste chambre toute tendue de é^tîa 
noir, dont le milieu est occupé par une sorte d'af. 
trade, en forme de lit bas et non moins noir, eatputi 
d'une balustrade de chêne saulpté ; en face, se dressfr 
mr la muraille l'image de la Vérité élevant un flam- 
-.leau au-dessus de sa tête ; -et voilà que tout-à-coup d« 
*e flambeau part UR.]et de lumière électrique-, qui, 
.!onno aux chairs éparses sur le satin iioir de l'estrada 
Ja blancheur des marbrea; puis, tout rentre dans une 



LÀ PEOSTITUTION A VASIS 183 

i-oltscurité, dans laquelle des omtrea s'agitent 
ce que le flambeau se rallume pour un autra 
TÏvant. 
-inaisuiiB do second ordre sont moins luxueuaes ; 
IB oat ennore un nombre important de salonB, 
de sauvegarder l'incognito désiré par la plupart 
clients. A chaque étage, il y a, près du palier, un 
cabinet ouvert où se tient constamment une servante 
'en observation ; dès qu'un client monte ou descend, 
elle donne un signal, et aussitôt tout se fenne sut 
son passage. Les salons sont riches ; les chambres, 
coquettes, ont leur lit plat, parfois entouré de glaces. 
Quant à la troisième catégorie, celle des maisons 
^jdîtes de quartier, elle se distingue de la précédente 
ijiar son grand salon, unique, aux mura revêtus de 
glaces. Les chambres sont, sinon splendidement meu- 
blées, du moins confortables. La maison de quartier 
a pour clientèle la petite bourgeoisie, les employés 
de commerce, les gens qui viennent faire à la hàto 
■ une passe», isolément dans la journée, ou bien à 
-deux ou trois ensemble dans la soirée, libertins qui 
it leurs habitudes et se tiennent dans les prix modé- 
; eomnie clientèle passant îa nuit, ces maisons 
guère que les voyageurs de commerce, lesquels 
,àe bonne heure retenir une femme et 
coucher, après la sortie des théâtres. 
maisons à estaminet sont d'un aspect bien 
fnt. La pièce principale est l'estaminet, très 
avec beaucoup de clinquant, des glaces à pro- 
., des becs de gaz partout. Les pensionnaires 
d'une table à l'autre, la clientèle aimant la 
m et la femme au même degré ; dans un groupe 
l'un se décide à t monter », et les autres ooai- 
à boire en l'attendaut. Les cb.aiaiVe5, wi-c\ 



184 LA PEOKTITUTION A PAR: 

meublées comme celles des hôtels garais 
inférieur. 

Euâa, les maisons de bas étage sont d'ù 
bouges, sans confort et, à plus forte raison, i 
cun luxe : une salle commune, nvec tablfift^ 
de bois, où la clientèle se mêle et assez «olorf 
dispute, est la grande pièce de l'établi s se ment. QnJ 
aux cbambres, leur mobilier est des plus éléia| 
taii'es : un lit de fer avec paillasse, un escabeauJ 
c'est tout. Les m.aisona de cette TÎIe catégorie tendl 
à disparaître, en raison de la concurrence forini^ 
que leur font les cabarets a. prostitution clanjl 
tine, anti'es de crapuleuse débauche, au moins as 
infects, mais recherchés de préférence par la lies 
peuple. * 

Il peut sembler que la police ne devrait pas avj 
riser des maisons de ces deux deinière^i catégoiJ 
qui sont celles où se produisent parfois des désorta 
des rixes ; mais c'est généralement là que les cîîfl 
nels se rendent pour dépenser le fi'uit de leurs * 
et s'étourdir daua une orgie. C'est donc parce que j 
maisons se prêtent » merveille aux coups de Si 
qu'on les tolère. Là aussi, le garçon de tolérantMâ 
un élément indispensable ; sa mission, oi*^m||| 
prend, consiste beaucoup moins à nettoyei^Tfe 3^ 
brea de l'établissement qu'à jeter dehors les bâta 
leurs. 

Nous avons dit tout à l'heure que la maison 
tolérance a pour signe distinctif un gros numér 
néanmoins, c'est surtout dans les catégories iaj 
rieures que les chiffres indicateura''atteign6nt u 
grandeur formidable. Les maisons à clieiitèle discrj 
n'exagèrent pas trop, au contraire, la dimension 
Jeur numéro ; en revanche, le fronton de la porte i 



^frné de ] 



, PEOSTITUTIOS A FAEIS 18Ô 

'né de petites figures allégoriques, cupidoKS minus- 
cules eu bas-relief ou autres emblèmes (juï, saoK 
comporter la moindre indécence, sont de nature à 
^trigiier le passant : en constatant au surplus la 
(rigoureuse fermeture de toutes les fenètrea de la 
mateon, l'amateur est immédiatement fixé, 

La porte extérieure est solide et ferrée, Souvei^ 
Inême, il y a deux portes consécutives, et aloi 
première est eutr'ouvorte ; celle qui donne accès ea^ 
presque toujours fermée à double tour et munie d'un 
judas fortement grillé, à travers lequel la saiis-mai- 
tresse, avant d'ouvrir, s'assure des apparences paci- 
fiques des visiteurs ; s'ils sont trop nombreux, s'ils 
paraissent ivres, elle refuse d'ouvrir. 

La soua-maîtreBse est un personnage important 
dans la maison de tolérance ; elie y joue le rôle d'in- 
tendante, ayant la haute main sur les autres domes- 
tiques de la maison, et secondant la tenancière, 
d'autre part, en ce qui concerne la direction des filles 
et la perception des divers impôts prélevés sur les 
clients, pour prix de la débauche et des consomma- 
tions vendues très cher par l'établissement. Cette 
sous-maîtresse, qui a toujours passé la trentaine, est 
une ancienne prostituée, d'un esprit plus pratique 
que les autres; quoique la règle lui interdise de se li- 
Trer aux hommes, elle continue à subir les visites 
sanitaires, par mesure de précaution. 

Dans les maisons les plus convenables, celles qui 
n'ont pas un estaminet comme annexe, les clients 
sont introduits dans un salon ; on rallume le gaz ou 
les becs électriques, éteints avant leur entrée ; on 
referme les portes ; les clients s'assoient sur les fau- 
teuils et les canapés ; puis, une voix retentit, celle 
de la soua-maîti'esse qui crie : ■ Ces damea a«. %a,V«îi. 



i 



loti LA PROSTITTTTIOS A PAKIS 

Ijleu ! > OU tout autre désignation en usage dans 1 
maison. Les dames, qui étaient dans un salon d'un 
autre couleur, occupées à consommer avec d'autre* 
clients, quittent tous ceux qui ont déclaré a qu'ils na 
montent pas i et viennent au salon qui leur est indi- 
qué. Les portes s'ouvrent, et toutes les filles font 
irruption auprès des nouveaux visiteurs. Chacune t 
s'asseoir auprès d'un homme et le cajole, faisant 
valoir ses agréments particuliers. Ce sont aussi des 
demandes: a Voyons, gros chéris, est-ce que vouM 
nous payez du Champagne ? ■ Les gros chéris paient^ 
du Champagne... ou de la bière, s'ils ne sont pas ea 
veine de générosité. Quelquefois même, ils ne paient 
rien du tout, et alors, étant constaté qu'on a affaire 
à de simples flâneurs, la sous-maitresse intervient et 
affirme que ces dames sont appelées dans un autre 
salon. 

Les prostituées appellent michets aêrîeux les 
clients qui ■ montent >, et û-anellcs ceux qui se 
contentent de flâner, de flirter (q\\ •peloter, selon le 
langage du lieu), et de payer modestement de la 
bière on un simple petit verre de liqueur. 

Quelquefoie, les clients, principalement les étu> 
dîants, les jeunes ouvriers et les commis de magaaiaj 
ae cotisent pour former la somme destinée au paie^ 
ment d'une seule fille. On réunit le pris de la passe ; 
la sous-maîtresse arrive avec un jeu de cartes ; 
visiteurs se rangent autour d'une table, et, aprèî. 
avoir battu le jeu et fait couper, la sous-maitreaM* 
distribue à la ronde les cartes ; celui à qui le basarâo 
décerne l'as-de-cu'ur choisit une dame et monte. Cet 
usage, qui ne se pratique paa dans les maisons de 
premier ordie, est assez courant ailleurs, surtout dans 
Ja catégorie moyenne. Les trois quarts du temps, le. 



if 



. rROSTITTTTIOX . 



187 



m^ 



"plus maKn de la bande a. eu aoin, eu entrant., de glis- 
ser à la dérobée une pièce de vingt sous à la 80U8- 
maîtresse ; il peut être cortnin r[ue c'est à lui que 
tombera l'as-de-cœur, et les camarades n'y auront vu 
que du feu. Ceux qui n'ont pas été favorisés par le 
sort, — souvent corrigé ainsi par l'habileté de la 
sons-maîtresse, — attendent patiemment dans le sa- 
lon, dont on baisse les lumières, )e retour de leur 
ami, à qui d'ailleurs le temps de la passe est stricte- 
ment limité. 

Quand un client arrive seul, les clioses se passent 
autrement. La porte lui est toujours ouverte sans 
difficulté, et la soua-maîtreBse raetmeille avec son 
pluB gracieux sourire. Le monsieur qui vient diaorfe- 
tement est à coup sûr un michet sérieux, et même un 
micliet qui ne perd pas son temps à de futiles préam- 
bules, A peine a-t-il mis le pied dans le corridor, 
qu'ime voix retentît : t Permez les portes ! » Cela 
signiËe que les salons qui sont occupés par des groupes 
d'autres visiteurs, doivent être fermés de façon h ce 
que le nouvel arrivant ne soit vu de personne. En 
même temps, toutes les filles abandonnent en un clin 
d'œil les âanellea, et se précipitent dans le plus beau 
salon de la maison, où elles ae rangent siir deux files. 
■ Au chois, mesdames ! » prononce gravement la 
aous-maî tresse. Le michet sérieux fait sou entrée. 
Aucune des femmes ne doit lui adresser uae invita- 
tion' verbale particulière ; mais toutes lui envoient 
des regards brûlants, se dandinent, prennent des 
poses excitantes, lui sourient, et même agitent la 
langue, pour faire comprendre clairement qu'elles 
ont à la disposition du client mille raffinements de 
olupté. Le michet parcourt du regard les deux files 
ces prêtresses de Vénus, fixe son choix sur «.■&» 



LA PEOSTITrTIOX A PARIS 

d'entre elles et lui offre galamment la main. C'est A» 
[,1a vraie mise en Bcène. A ce moment, la comédie 
; la dam.e choisie quitte le salon avec son ama- 
Kteur, et les autres retournent auprès des clients moins 
I pressés qu'elles ont un instant abandonnée. 

"Une fois que le michet sérieux est monté avec 
[l'odalisque à qui il a daigné jeter le mouchoir, celle- 
F ci disparaît pour quelques minutes ; elle va se mettre 
tenue de travail b et procéder à ses; ablutions 
[hygiéniques. Cet intermède est, d'ailleurs, des plus 
I courts. Parfois, l'odalisque favorisée propose aussi 
I son amie » ; si le monsieur aime cela, il prend les 
r deui femmes; il y en a même qui en prennent trois, 
t mais ce cas est rare. Ce sont toujours les hommes 
I qui, au dehors, ont les apparences les plus austères, 
. gens mariés, d'un âge mûr, appartenant a\ix classes 
► les plus élevées de la société, ou financiers qui 
gagnent beaucoup dans les spéculations de hourse; on 
I rencontre peu de commerçants parmi les clients h 
; passions insatiables. 

A Paris, les maisons de tolérance sont disséminées, 

[ au lieu d'être groupées selon la coutume de la plupart 

I des villes de province. D'autre part, leur nombre va 

toujours en diminuant : en efïet, en 1843, Paris et s^. 

I banlieue avaient 235 maisons de tolérance 

1 en comptait 219 ; puiiS, 194 en 1860, et 1^ 

1S71 ; (lis ans après, le nombre était tombé à 

\ en 1891, il n'y en avait plus que 60 dans tout Ift 

' ' partement de la Seine, et en 1900, au total 48, doi 

r dans la banlieue. 

I Un moraliste superficiel, écrit à ce sujet" 
l M. Maxime du Camp, peut se réjouir de la décrois- 
sance numérique de ces maisons et voir là une preuve 
( l'amélioration des mœurs publiques. 11 faut s'en 



LA PBOSTITUTIOS A PAEIS 189 

affligpr, nu contraire ; car cet étiit de chosea inrliiiue 
une clémnralisation croissante et des plus dange- 
reuses. Il faut d'abord constater que les filles sou- 
mises ont une tendance prononcée à quitter les 
rjnaisous où l'administration a, pour les rettenir, un 
intérêt facile à comprendre ; elles cliorchent mainte- 
nant, bien plua volontiers qu'autrefois, l'isolement et 
cette sorte de liberté relative qui, sans dérouter 
complètement la surveillance, la rend plus difficile 
et moins efficace. L'unique préoccupation de cea 
êtres corrompus est d'écbapper tout-à-fait à l'admi- 
nistration et de vivre dans une indépendance qui 
devient pour la santé publique un péril de premier 
ordre et de tous les instants. » 

La diminution des maisons de tolérance concorde, 
en effet, avec l'augmentation incessante de la prosti- 
tution clandestine. La Préfecture de police étant 
désarméi^ pour atteindre les insoumises, les libertins 
trouvent partout où il leur plaît toutes facilités à 
satisfaire leurs vices, et propagent impunément les 
maladies vénériennes que les prostituées non visitée; 
leur communiquent (voir ce i^ui a été démontré plus 
liant, k piopos de l'inscription des mineures, page 120). 

Comment les maisons de tolérance se répartissent- 
elles entre les divers arrondissements de Paris? 

Plusieurs auteurs, qui ont traité la question, ont 
publié les renseignements les plus précis pour leur 
époque ; il en est même un, conseiller municipal de 
Paris et adversaire de la réglementation de la prosti- 
tution, qui, après avoir foudroyé les tenancières dans 
son volume, a inséré aux dernières pages leur liste 
complète, donnant le nom de cliacune, avec le nu- 
méro même de la ru& pour chaque établissement : il 
^^^pi sans dire qu'aucune de ces tenancières n'a pour- 



[ 190 LA PEOSTITUTIOX A PARI 

r suivi ce fougueux ennemi des maiBona de tolérani 
■r )a réclame était cousue de fil bliinc. 

En réalité, ni lo nom Je la, personne ni le numéro 
l «sact que la maison occupe dans la rue ne préBentent 
^ un intérêt de statistique. Quant à nous, noua n'irons 
_, pas jusque là. S'il peut ëtïe utile de se rendre compte 

du genre de rues que la prostitution préfère pour y 
1. installer ses campement», l'intérêt de l'ubservatiao, ■ 
f jfaite clans un but moral, ne saurait a'aecommodfflr 
r d'une désignation précise des maillons mêmes ; nous 

laisserons donc à cet auteur abolitionniste lu honte de 

:Bes malpropres indications. 

HivE Deoitb 

Sur la rive droite de la Seine, trois arrondissements n'ont 
aucune maison de tolérance. Ce sont, d'abord, côte à côbe^ 
le VIII" arrondissement, quartiers des Champs-Elysées, 
du faubourg du Roule, de la Madeleine ei de l'Europe 
arrondissement où la prostitution clandestine aristocra- 
tique est en pleine prospérité, et le XVI" (Passy), quartiers 
des Bassins, de la Porte-Dauphine, de la Muette et d'Au- 
teuil; puis, d'autre part, le X° (Enclos Saint-Laur«it), 
quartiers de Saint-Vincent-de-Paul, do l'hôpital Saint' 
Louis, de la porte Saint-Martin et de la porte Saint-Dmis, 
arrondissement où les raccrocheuses de touts espèce ne 
manquent pae. 

Les autres arrondissemeate ont des maisons de tolérance, 
dans les proportions que voici ; 

I" (Louvre). — Quartier de SaintrGermain-l'AuxcrroÎB,, 
néant; — q. des Halles, 1 maison, rue du Pélican, avec 
8 femmes en moyenne ; — q. du Palais-Boy al, 4 m&isons, 
3 Moulins, rue Thérèse, rue Sainte-Anne, avec une 
ne totale de 40 femmes ; ^ q. de la place Vendôme, 




LA PaOSTITUTIOS A TARIS 191 

' (Bourse). — Quartier Gaillon, néant; — q. Vi- 

aine, 5 maisons, rus Chabanais, rue Colbert, rue Fey- 

d'Amboise, avec uds moyenne totale de 

. du Mail, 1 maison, rue des Petita-Oar- 

iptix, avec 8 femmes en moyenne: — q. Bonne- Nouvelle, 

la Lune, rue d'Aboiikir, rue Sainte- 

te-Foy, rue Blpndel, avec une moyenne 

e de 56 femmes. 

[• (Temple). — Quartier des Arts-et-Métiers, I maison, 

e Blondel, avec 9 femmea en moyenne ; — q. des Ënfants- 

llougee, néant ; — q, dee Archives, néant ; — q. Saint- 

Avoye, néant. 

1V° (Hôtel-de-Ville). — Quartier Saint^Merry, néant; 

Saint-Gerïais, 2 maisons, rue de Fourcy, rue de 

Hôtel -de-Ville, avec une moyenne totale de 16 femmes ; — 

de l'Arsenal, 1 maison, rue Jean-Beau sire, avec 

^ femmes en moyenne ; — q. Notre-Dame et île Saint- 

4MiiB, néant. 

I-IX' (Opéra). — Quartier Saint<Jeorges, néant ; — q. de 

h Obaussée-d'Antin, 3 maieone, rue Joubert, rue de Fro- 

Tattbout, avec une moyemie totale de 

S femmes ; — q, du faubourg Montmartre, I maison, rue 

de Montyon, avec 18 femmes en moyenne ; — q. Roclie- 

cbouart, néant. 

XI' (Popincourt). — Quartier de la Folio-Mérieourt, 
néant ; — q. Saint^Ambroise, néant ; — q. de la lioquette, 
néant ; — q. Sainte-Marguerite, 1 maisOD, rue de Mon- 
treuil, avec 5 fwnmes en moyenne. 

XIl" (Reuilly). — Quartier de Bel-Air, néajit ; — q. de 
PicpuB, néant ; — q. de Bercy, né^nt ; — q. des Quinze- 
Vingts, 1 maison, rue Traversitre, avec 8 femmes en 
moyenne. 

XVII' (Batignollea). — Quartier des Ternes, néant ; — 
q. de ift plaine Monceau, néant ; — q. des Batignolles, 



J 






maison, passage Cardinet, avec 15 fRimucs en mayenne;' 
— q. des EpinoUea, néant. 

XVIII" (Montmartre). — Quftrtîor des Grandes-Car- 

fiÈres, néant; — q. Cligna:ncourt, néant; — q. de la 

' Goutte-d'Or, 2 maisons, boulevard de la Chapelle, rue 

i, Pleury, aveg une moyenne totale de 18 femmes ; — q. do 

[ la Chapelle, néant. 

XIX" (Buttes-Chaumont). — Quartier de la Tillette, 
I i 3 maisons, Ijoulevard de la Villette, avec une moyenne 
I totale de 40 femmes ; — q. du _Pont-de -Flandre, néant ; — 
d'Amérique, 1 maison, boulevard Sérurier, avec 
' 8 femmes en moyenne ; — q. du Combat, néant 

XX" (Ménilmontant). — Quartier de Belleville, 1 mai- 
L Bon, boulevard de Belleville, avec 8 femmes en moyenne ; 
] — q. Saint^Fargeau, néant ; — q. du Père-Lachaise, néant ; 
»■ •— q. de Charonnc, néant. 

Rive Gauche 
seul arrondissement n'a aucune maison de tolérance 
Bur la rive gauche: le VII° (Palais-Bonrbon), quartiers 
Saint-Thomas-d'Aquin, des Invalides, de l'Ecole Militaire 
et du Gros-Caillou; mais la prostitution clandestine s'y 
épanouit dans l'ombre bous toutes ses formes, depuis le» 
cocottes on chambre ayant la clientèle du noble faubourg 
Saint-Germain, jusqu'aux basses raccrocheuaes noctumeB 
de l'esplanade des Invalides et aux pseudo-bonnes des mas> 
troquets avoisinant l'Ecole Militaire. 

Y" (Panthéon). — Quartier Saint-Victor, 1 maison, rue 
Maître-Albert, avee B femmes en moyenne; — q, du Jardin 
des-Plantes, néant; — q. du Val-de-Grâce, néant; — q. de 
la 8orbonne, néant. 

VI' (Luxembourg). — Quartier de la Monnaie, ! maison, 
rue Mazarine, avec 5 femmes en moyenne ; — q. de l'Odéon, 
1 maison, rue des Quatre-Vents, avec 5 femmes en mo- 



L4 PEOSTirrTIOM A PAHIS 193 

— q. Notre-Darae-des-Cliampa, néant ; — q, Saïnt- 
Q-d«B-PréB, néant. 
f.XIIP (Gobelina). — Quartier de la Salpêtrifere, néant ; 

- q. de la Gare, néant ; — q. de la Maison-Blanche, 2 mai- 
boulevard d'Italie, avec une moyenne totale de 

mmes ; — - q. Croulebarbe, néant. 
XIV° (Observatoire). — Quartier Montparnasse, 2 mai- 
e Jolivet, avec une moyenne totale de 14 femmes ; 

- q. de la Santé, néant; — q. du Petit Montrouge, néant; 

— q. de Plaisance, néant. 

XV« (Vaugirard). — Quartier Saint-Lambert, néant; 

— q. Kecker, néant; — q. de Grenelle, 3 maisons, boulevard 
de Grenelle, avenus Lowendal, avenue de Suffren, avec 
une moyenne totale de 27 femmes; — q. de Javel, néant. 

Banlieue de Pari a 
2 maisons à Saint-Denis, route de Pierrefitte et route 
de la Hévolte, et 1 maison à Vincennes, rue de France, 
avec une moyenne totale de 22 femmes. 

Total Général. — 43 maisons de tolérance, qui. au 
31 décembre 1900, avaient ensemble 504 filles 



i^m 



Ce tableau justifie, par une démonstration frap- 
pante, l'appréciation de M. Maxime du Camp, que 
nous avons reproduite plus haut: l'habitant de Paris, 
qui va et vient dans la ville, reconnaîtra, après avoir 
parcouru la liste ci-dessus, combien est juste l'opiuiou 
formulée par l'éminent académicien, et point n'est 
besoin, pour se ranger à son avis, d'avoir fi'équenté 
des prostituéefi; ii suffit de n'être pas aveugle. 

Dans le IX' arrondissement, par exemple, les quar- 
tiers Saint- Georges et Rocliecliouart sont les deux 
qui n'ont pas de maisons de toléranc*; qui oserait 



[194 



LA rHUSTITUTION A PAHIS 



|,<lire qu'ils sont lo séjour do la, vertu?'... C'est par 
J -eentaineB que demeurent, précisément dans cea deux 
\ quartiers, les raccrocheuses de café et les soupeuses; 
C le faubourg Montmai-tre en est littéralement encom- 
l'iré, quand elles descendent de Bréda et de Xotre- 
J Dame-de-Lorette, pour se rendre aux grands boule- 
I Tarda dès l'heure de rabsinthe. 

Et que dire de ces deux aiTondissements de Popin- 
I court et de Beuilly qui se touchent (le XI' et le 
L,^II°), et qui n'ont en tout, dans leurs huit quartier», 
î maisons de tolérance, comptant 13 femmes en- 
f-Bemble?... C'est par milliers, eu cette région parï- 
f sienne, que grouillent les prostituées insoitmises do 
' basse classe, n'attendant même pas la tombée de la 
' nuit pour battre le trottoir, boulevard Voltaire, ave- 
I nue de la llépublique, boulevard Richard Lenoir, 
I avenue Parmentier, place de la République, plaça 
Ledru-Rollin, place de la Bastille, place de la N^ation, 
i boulevards de Bercy, de Reuilly, de Picpus, avenues 
j Daumesnil et de Saint-Mandé, cours de Yincennes, 
I •etc., etc. 

On pourrait multiplier les exemples. En examinant 
Paris quartier par quartier, on constaterait qu'en tout 
point oii une maison de tolérance périclite et d'où 
elle finit par disparaître, c'est pour être remplacée 
par des tanières clandestines, déversant sur la rue 
des légions de filles malsaines, pins dangereuses à 
tous les points de vue que les prostituées des lupanars, 
même de ceux de la dernière catégorie. 

Mon Dieu ! nous le savons, il est de mode aujour- 
d'hui, dans la presse, de dauber sur la police des 
mœurs et de déclarer hautement que l'institution des 
maisons de tolérance doit être abolie au plus tôt, 
ie lupauar étant, prétend-on, la source de la corrup- 



i 



LA THOSTITUT lO.V A PARIS 



195 

rs. En réalité, cette indignation est fac- 
car tel qui publie à l'occasion un ai-ticle 
julmînaiit, accepte les invitations d'une tenancière de 
polérance, pourvu que la maison snit de premier 
wdre. 

Voici, à ce sujet, une anecdote qui ne remonte paa 
t, liîen loin : 

A Paris, les lupanars qui ont une certaine vogue 

(ont gratifiés d'un nom de fantaisie par le public li- 

Krtin, ou bien on les désigne par le nom de la ru© 

1 ils se trouvent. Ainsi les deux maisons du "VT ar- 

londissement sont, de temps immémorial, appelées 

par les étudiants, l'une, la Botte-de- Paille, et l'autre, 

Mes Quatre-z'Effes, Par contre, on nomme tout simple- 

nnent le Colbert, le Chabanais, le Montyon, le Jou- 

, le Taitbout, les Moulins, etc., les maisons qui 

lOnt situées chacune seule dans une de ces mes. 

Or, en décembre 1891, l'un des établissements en 

rogue iut incendié, et les journaux, dans leur récit 

■du dér^asti'e qui fut seulement matériel, ne se firent 

^as faute de dépeindre la panique des prostituées 

Eft'écbappant comme elles purent de la maison eu 

lammes, et, dans le plus simple appaieil, se réfu- 

jit par les toits chez les habitants des immeubles 

Wûine. 

Rien à redire à ce fait-divers, qui fit le tour de la 
Base, sur le ton do la plaisanterie, puisqu'il n'y 
^Tait eu aucun accident de perBoune. 

Après quoi, cinq mois se passèrent, pendant lesquels 

k tenancière du lupanar incendié fit procéder à sa 

hauration, mettant à profit la circonstance pour 

Kdonner à son établissement plus de luxe que jamais; 

■parmi les peintres qui déployèrent leur art à la déco- 

i^tion des salons, on cite celui-là même qui, du tem.)5& 



3.96 LA mOSTITUTION A PAHlf 

) i£. Wilson (gendre du président Grévy), dirigea 
i restauration du célèbre château de Cheuonceaux, 
Ktin (les plus beaux monuoieuta historiques de Prance. 
puis, tous les travaux étant terminés, la tenancière 
pïoulut célébrer maguifiqu eurent la réouverture de 
raon lupanar, et ce fut la presse parisienne qu'elle con- 
rfvia à la fête, avec grande abondance d'invitations : 
^■« Messieurs les journalistes, disait la lettre, me feront 
fcautant d'bonneur que de plaisir, a'ils veulent bien 
■."Rccepter les agréables surprises que leur réserve cette 
lolennité intime du vernissage de mes salons, j 
Le croira-t-onP,.. La plupart (les journaux accep- 
r tfereut l'invitation. La presse accourant à la réouver- 
ture d'un lupanar, buvant le Champagne aux frais 
3 la tenancière et portant des toasts à sa prospérité, 

■ voilà ce qui s'est vu à Paris en juin 1892. Un jour- 
Inal même, dans un numéro qui débutait par un ar- 
Iticle du grave et austère Auguste Vacquerie (ce n'eat 

j le liappelj, publia une poésie rendant compte de 
\ l'événement. 

La chanson, — car on indiquait qub ces vers 
Lipbuvaient se chanter sur l'air de La tour Saint- 
m/acgues, ■ — était précédée de ces quelqiies mots, en 
répigraphe : o Mardi dernier, le joyeux {ici, en toutes 

■ lettres, le nom du lupanar) fêtait sa réouverture; il 
I ne reste plus trace de l'épouvantable catastrophe de 
I décembre dernier. » Cette poésie étant un véritable 
' document, pour l'histoire de la prostitution envisagée 

1 point de vue de ses rapports avec la presse, nous la 

reproduisons, mais en remplaçant par des pointa le 

1 nom du lupanar, qui, nous le répétons, figure en 

I toutes lettres dans le journal dont il s'agit, au titre 

^de la chanson ainsi qu'au premier couplet, 



LA PROSTITUTION A PABIS 197 



LA REOUVERTURE DU .... 
(Le Vernissage des Salons) 



De l'épouvantable accident 

Il ne reste plus trace ; 
Le joyeux établissement 

Va reprendre sa place ; 
Dans cet asile haut coté, 

Le plaisir nous invite ; 
Au ressuscité 

Allons rendre visite ! 
Et la Matrone, sur le seuil. 

Un œillet au corsage. 
Nous fait un chaleureux accueil, 
Disant : Messieurs, tout est à l'œil, 
En ce grand jour de Vernissage ! 

II 

Glissant sur un tapis discret, 

Nous passons la revue; 
Le bataillon, au grand complet. 

Est en grande tenue. 
La surveillante fait l'appel 

De toutes ces tendresses ; 
Augmentation de personnel. 

J'aperçois deux négresses ! 
La Matrone donne à chacun 

Un coupon de voyage; 
Petit cadeau très opportun 
Et qui nous fait dire à plus d'un : 
Ah ! quel drôle de Vernissage ! 



198 LA PROSTITUTION A PARIS 

III 

Un orchestre aux joyeux accords, 

En passant, nous salue ; 
Partout de merveilleux décors 
' Réjouissent la vue : 

Sur tous les murs, de gais tableaux. 

Des scènes sans pareilles ; 
Le grand peintre de Chenonceaux 

A semé des merveilles ! 
Un escalier monumental 

Mène au premier étage, 
Où, dans un salon de cristal. 
Attend un somptueux régal, 
Le five-o-clock du Vernissage ! 

IV 

Au fond d'un vaste corridor, 

Un peu noyé dans l'ombre, 
Dans un grand salon rouge-ct-or, 

Mystérieux et sombre. 
Un tas d'ustensiles discrets 

Dans de vastes vitrines ; 
Ce sont tous les menus objets, 

Qu'on a sauvés des ruines ! 
La Matrone nous y conduit, 

Comme en pèlerinage; 
Et tout le personnel qui suit 
Est admis dans le saint réduit, 
En ce grand jour de Vernissage I 



Après avoir tout visité, 
Etage par étage. 



L.1 PEOSTirrTIOX 



FAIUS 



Le coupon de voyage ! 
Chacun de nous est obligé 

De faire une prouesse ; 
Et nous allons prendre congé 

De notre aimable hôtesse. 
Après avoir \ihs humblement 

Présenté nos hommages. 
Nous la quittons, le cœur content. 
Désirant rencontrer souvent 
D'aussi merveilleux Vernissages ! 

f II est inutLle de donner le nom de l'auteur de ce 
mpte-rendu mis en couplets; selon toute probabi- 
Jté, ce jom-nalîste regrette aujourd'hui sa cliauson. 
(îous avons voulu seulement muutrer qu'où aui'ait 
Sort de prendre trop au sérieux les accès de verttt 
fOce qui, de temps en temps, prennent nos écrivains 
foule vardiers, et qui se traduisent pat de violentes 
philippiques contre les maisons de tolérance et contra 
l'administration préfectorale. 

Pour terminer, il est nécessaire de dire qup les maî- 

80US de prostitïition, placées sous le contrôle de la 

police des mœurs, sont sujettes à des changements 

—et à des mutations, que l'on peut rapporter à huit 

^uses principales. 

Un relevé de ces divers cas a été fait, portant em 

E années consécutives, et voici le total pour chaque 

- 51 tolérances se sont transportées dans un 

putre immeuble; — 47 mutations out eu lieu par suite 

, décès de la tenancière; — 116 tenancières ont 

idé leur établissement, comme un fonda de com- 

— 32 ont fait faillite; — 99 se sont vo^on- 

urement retiiées du métier, en fermant leur maison 



[200 

[.purement et simplement; — 14 ont été expulsées; 
I 27 établisaementa ont eu leur tolérante suspendue 
Lpar r administrât ion; — 50 ont été fermés complète- 
rment par l'administration. 



ftS. Ce qu'ont été. primitivement le» niaili 
■uaisouH; qualités f 
tralion exigR de eett f 
le livre! ilr toléfance. 

Dana le langage populaire, on donne le nom de 
t maquerelles aux tenancières de maisons de prostitu- ' 
r tion, aussi bien s'il s'ag-it d'un lupanar clandestin 
I que c['une maison de tolérance; ce terme était 
1 une expression familière îi nos pères, qui qualifiaient 
I aussi ces femmes, ' dérisoirement de baUlîves, d'ai- 
r iesses, de supé-rieuTes, de Tna-mans. Le nom de Tnal- 
I tresses de maison ou daines de maison ne paraît pas 
[■avoir une origine antérieure à 179C; ce sont les tenan- 
1 cières de tolérance qui ae le sont donné, et l'admini- 
' Bti'atiou l'a adopté. Quant à la clientèle, elle leur 
I donne assez volontiers le titi'e de matrones, du moins 
I dans les établissements d'ordre supérieur. 11 est digne 
^ de remarque, soit dit en passant, que ces femmes 
' ont en liorreur l'expresaiou de ■maquerelles; s'en ser- 
vir devant elles, c'est les irriter; les apostropher en , 
l'employant, c'est les mettre en fureur; leurs maria, 
lorsqu'elles en ont, sont à cet égard bien plus suscep- 
tibles encore, A Paris, enfin, les filles de maison 
■. appellent leur tenancière tantôt « madame » et tan- 
tôt « la maquasse », selon qu'elles- veulent la respecter 
■ ou la mépriser; ce qui dépend de leur bonne ou mau- 
vaise liumeur, ainsi que des circonstances. 

ïj|Q ce qui concerne l'origine des tenancières de to- 
•ance, on peut les ranger en quatre classes : 



LA PROSTITUTION . 



201 

[ 1° Quelques unes ont, comme on dit, couru le 

loB.de, c'est-à-tlire ont suivi des officiers ou des gens 

, Boit nationaux, soit étrangers, qui, après les 

fooîr entretenues pendant un temps plus ou moins 

, s'en sont dé barrasses, soit en leur laissant une 

le, soit en les cautionnant, soit en les 

Éndonnant à leurs seules ressources. Cette catégorie 

t infiniment restreinte parmi lea maîtresses de to- 

'. ; en revauche, elles sont très nombreuses 

les tenancières de lupanars clandestins. Ce 

par-dessiis tout, des femmes d'iutriguea, que 

r esprit et leur usage du grand monde rendent sou- 

lïit fort dangereuses et qui rendent extrùniement 

ffioile la mission de la police des mœurs. 

[2° De vieilles prostituées, qui ont su réaliser des 

SOQOmiea en exerçant leur métier isolément, créent 

1 achètent un maison de tolérance et déploient alors 

pte leur expérience pour faire fructifier ainsi leur 



D'anciennes sous-maîtresses succèdent à leur 
1, soit en acquérant le fonds comme un corn- 
î qu'elles achètent payable par annuités, soit ea 
Ijit des fournisseurs et des prêteurs qui leur ac- 
t confiance, s'il s'agit d'une direction de tolé- 
fevenue libre par décès ou par banqueroute de 
Sâncière. Lea femmes de cette catégorie ont l'ba- 
Ëtude de rétablissement don.t elles sollicitent le livret ; 
|les connaissent parfaitement la manière de conduire 
i tilles et d'empêcher la clientèle de se livrer à des 
Ksordres; aussi, étant précieuses sous ce rapport, l'ad- 
linistration, qui trouve en elles certaines garanties 
ppréciables, les préfère à toutes les autras, quand 
^es remplissent par elles-mêmes les conditions re- 



Jl 



202 LA FEOSTITUTION A FAHIS 

' La dernière classe se compose de femmes qttÎT 
n'ont jamais été proatitnéea, qui so>iveut sont mariéea I 
et ont des enfants; c'est l'appât dn gain qui les tent^ 1 
ou bien elles demandent la tolérance pour consorverl 
un garni dont lea locataires sont des prostituées jufr'B 
qu'alors clandestines, ou encore leur "but est d'à " 
lander nu estaminet qu'elles ne trouvent pas i 
productif par le seul débit des boissons. C'est dans î 
maisons publiques les plus inâmes que se trouvent 1 
, tenancières de cette classe. 

On a vu plus haut quelles sont les conditions I 
quises pour un immeuble destiné à être une maison q 
tolérance, et nous avons dit que la postulante tenanA 
cière est personnelle m eut l'objet d'une 
Ainsi, on n'admet pas de mineure, mariée ou i 
comme maitregse de maison; et, même majeure, ] 
postulante ne doit pas être trop jeune, afin qn'e 
puisse avoir sur les filles l'autorité nécessaire, aûy 
que sur la clientèle qui a trop souvent besoin d'^ 
frein pour réprimer ses tendances au désordre. 

De la force, de la vigueur, de l'énergie moralo3 
physique, l'habitude du commandement, qtfj 
chose de mâle et d'imposant, sont à désirei {' 
dame de maison; si h rtJs qualités elles joiâl 
bons antécédents, si elles ont un casier judioS 
tact, si elles ont quelque probité, si elles n'ont iaitoi 
favorisé la débauche clandestine, si elles ne sont pas^ 
' sujettes à l'ivrognerie, si elles savent lire et éorire, f 
si, ayant été simples prostituées, elles ne se sont pasj 
montrées sujettes à enfreindre les règlements, dans-l 
ces cas, il n'y a pas d'inconvénieut à leur accorderfl 
l'autorisation. L'enquête relative à la personne de la.|| 
postulante porte sur ces points. 

^u suiplus, silademande est agréée.lesprincipl 






t^f 



LA PHOSTITITTIOjr A PAHIS ^3 

conditions iudispensablea à la bonne tenue de l'éta- 
blissement Bont imprimées en tête du livret de tolé- 
rance que la Préfecture remet à îa nouvelle maâtresse 
de maison. 

Voici quelques unea de ces obligationa : 
f Les maîtresses de maison sont tenues de faire 
eJiregistrer, dans les vingt-quatre heures, au bureau 
administratif du Dispensaire de salubrité, les filles 
qui se présentent chez elles pour y demeurer. — Lors- 
qu'une iîlle inscrite sur le livre d'une maîtresse de 
maison vient à sortir de chez elle, celle-ci doit égale- 
ment, daus les vingt-quatre heures, en faire la décla- 
ration au même bureau. — Les maîtresses de maison 
doivent tenir leurs croisées constamment closes, en 
faire dépolir les vitres ou les garnir de persleunes 
fermées par des cadenas. — Lorsque, dans l'inter- 
valle d'une visite à l'autre, elles découvriront qu'une 
fille est atteinte d'une maladie contagieuse, elles de- 
vront la couduiie immédiatement au bureau médical. 
— Il leur est expressément enjoint d'informer sans 
retard, indépendamment de l'avis à donner au com- 
missaire de police, le chef du service actif du Dispen- 
saire, de toute espèce d'événements qui auraient lieu 
dans l'intérieur de leur maison ou au dehors par le 
fait des femmes qui demeurent chez elles. — Il leur est 
défendu de recevoir des mineurs et des élèves des 
écoles nationales civiles et militaires en uniforme. ~ 
Comme il leur est interdit de faire circuler les filles 
sur la voie publique, elles devront veiller à ce que 
celles-ci ne s'absentent jamais sans motif plausible. 
Les portes d'entrées devront rester constamment 
fermées. — Il leur est interdit de placer en évidence 
■rrcs. bouteilles, flacons et autres objets indi- 
it qu'oii donne à boite", cette \ïAfe\A!vcV\a». ft^^. w^- 



204 LA PROSTITUTION A PARIS 



r 

^^H plicable aux maisons de tolérance qui ont des 
^^M estaminets. — Les maîtresses de maison qui oontre- 
^^B viendront aux dispositions qui précèdent seront pu- 
^^B nies par suspension ou par retrait définitif de leur 
^H toIéra,n'C«. . 

^™ ' A eea dispositions imprimées, il faut en joindre 
quelques autres, qui, pour n'être pas consignées btut 
le livret, n'en sont pas moins exécutoires, — - Leg 
maîtresses de maison ne peuvent garder leurs enfants 
auprès d'elles que jusqu'à l'âge de cinq ans. — H 
est interdit à leur mari de se mêler de la gestion de 

Ila maison; la Préfecture de police demande bien le 
consentement du mari; mais, une fois ce conseuter 
ment donné, elle ne veiit plus le connaître. 11 est 
vrai que ces maris-là contribuent fort souvent à diri- 
ger l'établissement d'une façon active; l'administra- 
tion ferme les yeux, quand i] s'agit d'une maison c 
basse classe, où la clientèle est presque toujours tur- 
bulente, et où, par conséquent, l'aide du i 
pas inutile. 
En outre, les maîtresses de maison ne peuvent cou»; 
tracter bail que pour neuf ans au plus, et par périocle' 
de trois ans à leur choix ou au clioix l'espectif âeï 
parties; à l'expiration de la première période, ella^ 
doivent obtenir l'agrément de l'administration ] 
commencer la seconde période, et de même pour 1», 
ti-oisième; elles ne peuvent renouveler le bail sans ]0> 
consentement de l'administration : sui'croîta de pré"; 
caution que celle-ci a cru devoir prendre pour, en càff 
de circonstance imprévue, pouvoir fermer la maisôu 

a paraître commettre une injustice, bien qu'e 
se soit réservé le droit de retirer le livret quand bofti 
^,lni semble. 

Il faut ôire, enfin, que le livret de tolérance, auj 



i 

L 



LA FBOSTITrTlOX A PAIUS 205 

jquel sont relatées l'entrée et la sortie des filles, porte 
i outre, pour chacune, l' inscription du résultat des 

mites médicales, qui ont lieu une fois par semaina 

lans l'établissement. 

Opinion que les tnaitresses de itiaisoii ont 
d'clles-inêiiies ; tournure de leur esprit; leur 
atroce cupitlilé; quelques partieulitrités de leur 

Un a TU, quand il a été question uniquement dea 
prostituées en gêuéral, l'opinion que ces malheu- 
reuses out d'elles-mêmes, comment elles envisagent 
leur métier, et comltien leur est pénible le mépris 
dont elles sont l'objet. On va voir maintenant que 
les tenancières ne sauraient être confondues en au- 
cune façon avec les filles publiques qu'elles ex- 
ploitent; car, à peu d'exceptions près, on uc saurait 
imaginer d'être aussi orguetllens qu'une maîtresse 
de maison. 

Dans la pensée de la plupai't de ces femmes, leur 
métier est une industrie qu'il n'est pas plus honteux 
d'exercer que beaucoup d'autres ; elles tiennent à une 
distance immense les prostituées qu'elles out sous 
leur conduite ; elles exigent, de leur part, non seule- 
ment obéissance, niaia respect et déférence ; elles Jea 
regardent comme des esclaves ou des bêtes de somme, 
qui doivent leur rapporter tant par jour ; en parlant 
d'une fille qui, pour une raison quelcnnque, est 
recherchée et attire chez elles des pratiques, elles 
disent que « cette fille travaille bien». C'est le seul 
motif qui fait qu'elles s'y attachent ; elles les ren- 
voient sans pitié, dès qu'elles n'eu peuvent plus tirer 
parti, 

itien ne saurait mieux donner une idée de la men- 



t 



"206 LA PROSTITTTIOX A TAUIS 

talité des maîtresseB de maison que leur correspoit- 
douce (voir l'écHtion complète do Parent- Du châtelet, 
en 2 volumes grand in-octavo; ensemble, 18 francs; 
Paris, librairie J.-B, Baillicre et fils); il faut lire les 
lettrea, véritablement stupéfiantes, qu'elles adressent 
au préfet de police, soit pour obtenir une talérance, 
Boit pour demander l'autorisation de changer de 
local. 

Les unes déplorent la honte d'avoir été jusqu'alors 
prostituées et font entendre que c'est pour se réhabi- 
liter dans l'esprit de leurs concitoyens, dans l'estime 
dea honnêtes gens, qu'elles veulent employer leurs 
économies à monter ou acheter un lupanar. Beau- 
coup, pour se rendre intéressantes, allèguent pour 
raison qu'elles ont un vieux père à nouiTir, des frères 
à élever, toute une famille à leur charge ; les «i- 
quêtes ont établi que ces motifs sont presque toiijoura 
mis en avant par les femmes les plus viles qui, héber- 
geant les voleurs, les forçats libérés ot autre crapule, 
redoutent d'être refusées. Il en est souvent qui à ces 
motifs ajoutent des sentiments religieux. 

Toici, par exemple, la lettre d'une vieille proxé- 
nète : 

« Agée de quatre-vingt-deux ans, mère d'une nombreuse 
famille, j'implore, monsieur le préfet, votre aide et votre 
protection. Vous qui êtes le père des pauvres, l'appui de la 
veuve et de l'orphelin, le soutien dea affligés et l'asile des 
malheureux, vous ne refuserez pas certainement ma de- 
mande. Dans un âge aussi avancé, et me sentant sur le 
point de rendre mon âme h Dieu, il est de mon devoir, 
avant de paraître devant mon créateur, de pourvoir aUï 
13 de mes enfants, eu leur assurant des moyens hoQ' 
d'existence... n 



LA rsnSTITtTIOS A PAKIS 307 

■Cette vieille coquine suppliait le préfet d'accorder 
Be tolérance à sa fille et à sa petite-fille. 
i Beaucoup de maîtresses de maison se croient les 
issantes moralisatrices de leur quartier ; il eu est 
L ne sont pas éloignées de se juger dignes d'une 
nédaille d'honneur de la Société d'encouragement 
BU bien. 

En voici une qui s'imaginait tout simplement 
qu'elle était capable de moraliser Paris, et comment ? 
en transportant successivement son lupanar de 
quartier en quartier : 

« Monsieur le préfet, avant mon arrivée dans le cjuartie^ 
que j'habite, le désordre le plus affreux, tout ce qui répugne 
aux bonnes mœurs, tout ce qui blesse la décence, s'y com- 
mettait publiquement et j attirait la plue immonde ca- 
naille de la capitale ; à force de soins et de vigilance, j'ai 
fait disparaître cet état de choses, et j'ai rendu à l'admi- 
nistration le plus signalé dca services en rétablissant le 
bon ordre et la tranquillité. Afin de me permettre de con- 
tinuer à travailler â la moralisotion de notre cher Paris, 
voua ne me refueerejt donc pas, monsieur le préfet, l'autori- 
sation néppssairo pour transporter mon ctabliaeement de 
. la rue X""^^ à la rue ï***». 



^^sior 



jTJne tenancière avait eu sa maison impitoyable- 
ment fermée, parce qu'indépendamment de ses pen- 
sionnaires inscrites elle attirait chez elle des femmes 
mariées pour les procurer aux libertins dédaigneux 
de la vulgaire fille publique. Une renommée spéciale 
s'était, à raison de ce genre de prostitution, attachée 
à cette maison. Pensant que cette clientèle patticn- 
, Hère affluerait de nouveau, si l'établissement était 
j^^^éouvert. une piostituée ne craignit pas de se çroijo- 



i 



L PROSTITUTION . 



Ber pour prendre à son compte la léouve 
nar. Sa pétition débutait ainsi : 



> du lupa- V 



li A Son Exeellence le préfet de police, que les grands 
devoirs absorbent, qui, par aes soins et b& prévoyance, im- 
prime à la capitale un nouvel aspect. 

H Voua excuserez, monsieur le préfet, la dame D***, si 
elle voua demande l'autorisation de réouvrir la maison 
Z*** ; elle sait combien elle engage sa responsabilité en 
prenant une telle charge. Mais la conduite austère de la 
suppliante, sa retenue et ea circonspection, sa vie calma 
et paisible, parlent assez haut pour ello ; et les renseigne- 
ments que l'on pourra prepdre sur son compte ne tourne- 
ront qu'à son avantage. 

u Elle peut voua assurer, monsieur le préfet, qu'elle 
n'imitera pas la conduite infâme et scandaleuse de celle 
qu'elle désire remplacer... etc. » 

Informations prises, la postulante était une rou- 
leuse de cafcinets particuliers, et son yéritable pro- 
gramme montrait trop le bout de l'oreille; sa demande 
fut rejetée. Il en fut de même pour la pétition d'une 
maîtresse de maison du Havre, qui, ayant mis une 
gérante à sa place, désirait étendre le cercle de aes 
opérations à Paris, où elle s'était installée; elle avait 
loué pour cela une maison rue Saint -George s, et 
voici la lettre qu'elle adressa au préfet de police : 

« Monsieur le préfet, je viens de louer une maison, re- 
- marquable par sa beauté, sa grandeur, sa situation, et j'ai 
l'intention de l'employer à créer une maison de tolérance, 
digne de faire honneur à votre administration. 

'ai l'îionneur de vous prier, monsieur le préfet, de ne 
U cou fondre rétablissement que je prépare avec cens déjà 



^fcu 



LA PHOSTI'rrTIOX A PAEIS 209 

[•existants dans la capitale, avec ces mauvais clapiers, dont 
I la situation, la malpropreté et l'oepèco de femmes qui les 
L habitent, sont faites pour en écarter tous les honnêtee gens, 
■i que le peu de sûreté que l'on y trouve, tant indivî- 
■duelle que pour la aant^, parce qu'on n'y trouve que la lie 
■des femmes qui fréquentent sans choix et indistinctement 
[toutea les classes d'hommes qui osent les aborder. 

1 L'exposante ose vous promettre, monsieur le préfet, 
Ltout ce qu'il y a de plus distingué en femmes qui se con' 
icrent à ce métier, et qui, par conséquent, ne verront que 
Blés hommes d'une classe telle, que la dëcence, la tranquil- 
lité, l'ordre, fa fidélité et la santé en seront les résultats 
f Joévitables. 

(1 Elle ose encore vous promettre, monsieur lo préfet, que 

Me ton de ses femmes sera en harmonie avec le règlement 

intérieur qu'elle établira dans sa maison, dont le décor et 

Tameuhlement répondront au luxe dont se glorifie la ville 

Bâe Paris, et à tout le hrillant qu'elle ose vous annoncer. i< 

Cette (Tei'nière lettre, où. se trouve employée Tex- 
iression rèyïement intérieur, nous donne l'oceaaion 
de parler de l'une des formes de l'exploitation dea 
prostituées pur les tenancières. Il y a, en effet, une 
fTill'êreuce très caractéristique entre les maisons de 
tolérance de Paris et celles de province : là, lo lupa- 
nar fermé eouinet les pensionnaires à une sorte de 
séquestration, dans presque toutes les villes; ici, au 
contraire, la fille à numéro est libre d'entrer à son 
gré dans telle ou telle maison, et non moins libre de 
la quitter dès que la fantaisie lui prend, et personne 
ne peut la retenir contre sa volonté. 

La condition de fille de maison à Paris serait donc 
à peu près supportable, si la malheureuse n'était en 
Jjutte à une atroce exploitation de la part de la tenon- 



lèsrm. 



210 LA FHOSÏITUTION A PAE,] 

cière qui tâche de tirer d'elle jusqu'à sou dernier 
de façon à la tenir toujours à sa merci. Lii fille à nu- 
mérc», nourrie et logée de droit par la tenancière, qui, 
en outre, lui doit le combustible, la lumière, le linge, 
le blanchissage, le costume intérieur pour le salon de 
la maison, la coiSure et l'entretien en général, ne 
touche rien sur le prix de la « passe i, laquelle est 
tarifée à un minimum dans chaque maison et se paie 
avant de monter. Mais, d'autre part, la fille se fait 
toujours donner dans la chambre par son visiteur une 
somme au moins égale, à titre de ganta, somme qu'elle 
n'a pas à partager avec la tenancière et qui est sa 
propriété reconnue. Dès lors, toute l'astuce de la 
maîtreBse de maison consiste à trouver le moyen de 
s'emparer de cet argent. 

L'an des prétextes de confiscation est le fameux 
règlement intérieur, édicté par le caprice de la 
patronne. Telle tenancière, dît M. Cuifignon, ne. veut 
pas entendre parler argot, sous peine d'une amende 
de cinq francs à son profit ; telle autre fait marcher 
son troupeau féminin à son de cloche, et le moindre 
retard est impitoyablement puni, Ce système des 
amendes constitue la première partie de la spoliation 
organisée par la inaquasse : pour être descendue à 
table sans corset, amende ; ne pas s'être levée quand. 
Madame fait son entrée dans la salle à manger, 
ameude ; propos inconvenant à table devant Madame, 
amende ; avoir renversé de la sauce, un verre de vin 
sur la nappe, amende ; avoir été insolente avec nn 
client, amende ; avoir bu dans le verre d'un client qui 
s'est formalisé de cette familiarité, amende; avoir, 
dans la chambre, affecté par malice iine froideur exa- 
gérée à l'égard d'un client, qui s'en est plaint (en 
es de métier, avoir fait la planche), amende ; 



^H LA PHOSTITUTIO' A PAHIS 211 

SToir fait un suçun, ou long baiser en ventouse lais- 
sant empreinte, but le cou, la gorge ou les épaules 
d'une autre penaionnaii'e, amende ; client conservé 
au-delà du temps de passe usité, amende, etc., etc. 

En second lieu, toutes ces cupides maîtresses de 
maison spéculent effroyablement sur la gounnauilise 
et la coquetterie de leur personnel. Les filles ont 
droit, par exemple, pour tel repas, à un plat de 
viande, un plat de légumes, et un quart de vin; 
mais le règlem.ent intérieur prévoit les extras et les 
tariie : vius lins, confitures, gâteaux, café, liqueurs 
et tabac, dont les pensionnaires font une grande con- 
sommation. Bien entendu, ces suppléments sont dé- 
livrés à dps pris fabuleux : dans les tolérances 
moj-ennes, le cliiiïre nuotidien minimum des supplé- 
ments de table (vin, café et liqueuis compris) est de 
5 francs par pensionnaire : dans les basses tolérances 
il descend à S francs, et, dans les maisons de premier 
ordre, il se tient entre 10 et 15 francs. Pour donner 
une idée de ce que la tenancière gagne là-deesus, 
tlisona que le tarif porte ù 50 centimes, 60, et même 
75, non pas le litre de vin ordinaire, non pas le demi- 
litre, mais le carafon ! Or, il est facile d'imaginer ce 
que peuvent l'entraînement, la vanité, la griserie 
parmi ces malheureuses : celle qui ne consommerait 
pas des extras serait une avare, mal vue, raillée par 
les autres ; chacune doit payer à tour de rôle sa tour- 
née de bourgogne, de Champagne. 

La tenancière, avons-nous dit, doit à la fille son 
linge de corps, ainsi que le costume d'apparat avec 
lequel elle se présente aux visiteurs; mais, en 
réalité, dans la plupart des lupauars, on ne met à sa 
disposition qu'une toilette et du Unge insuffisants, 
et il est bientôt convenu que, si elle veut « mieux. 



it 



212 



i TEOSTITCTION . 



'est alôrff'^l 
achat ; di 



que ça » pour se faire valoir davantage, c'est n 
Bes propres frais, par location ou par achat ; 
même, pour le vêtement extérieur, destiné à aes Bor 
tiea. La tenancière se fait ainsi le fournisseur géaérA 
de ses femmes : elle est couturière, lingère, cordoa 
nière, parfumeuse, bijoutière. 

Et tout, au lupanar, se vead à des pi'ix fous. Un* 
chemise de soie qui se paie de 25 à 30 frauca a,\ 
Louvie, au Bon-Marché, au Printemps, est yenâa^É 
190 francs par la tenancière à la prostituée ; 
paire de bas de soie, du pris réel de 15 à 20 francs, 
est vendue le triple; une paire de souliers mordoré 
à jour, article de 12 à 15 francs, est vendue 45, 48 
60 francs ; le tulle de coton pour écbarpe, qt 
s'achète partout à 90 centimes le mètre, passe 
3 francs et jusqu'à 4 francs 50 le mètre; une pain 
- de jarretières de 6 francs est vendue '35 francs. Quan^ 
il s'agit de la fourniture de robes de ville, de cos- 
tumes en étoffes de haute laine et de soie, les chiffres 
deviennent plus exorbitants encore ; une robe de 
250 à <100 francs est couramment vendue 800 franCI 
par la tenancière. Les prostituées, d'ailleurs, qui foui 
parfois des achats en ville dans leurs jours de sortie) 
ne sont pas dupes de ces vols. 

Si la tenancière n'est pas vendexise, elle loue leS' 
trousseaux de son vestiaire, par le même procédé, 
c'est-à-dire en n'offrant gratuitement à chaque fille 
que ce qui la mettrait en état d'infériorité par i 
port aux autres; de là, un versement hebdomadaire dé 
20 à 50 francs, sous prétexte d'entretien, d'usure, da 
modifications dans le détail, sous prétexte d( 
disant renouvellement niensiiel ou trimestriel. 

La question du linge de coi-ps, et surtout du linge 
tâe lit et de toilette, a, par le fait du métier, i 



LA PKOSTITrnOX A PAKIS 213 

portaiice facile a, coniprendre ; aussi, la tenancière en 
profite-t-elle pour réaliser de ce chef les plus sérieux 
bénéiices par des prix de blancliissage fantastiques ou 
des conventions particulières inimaginables. Uaiia uu 
grand nombre de maisons, par exemple, les draps du 
lit de cbaque chambre de passe sont seulement 
renouvelés tous les quinze jours t lu fille doit s'arran- 
ger pour ne pas les laisser polluer, dit le docteur 
Fiaux ; si le change est indispensable avant le délai 
fixé par le règlement intérieur, le blanchissage est 
porté au compte do la pensionnaire. Dans les mai- 
sons où les chambres de passe servent en même 
temps de lieu d'habitation aux filles, le change des 
draps de lit ne se fait également qii'une fois par 
quinzaine ; la pensionnaire répond des avaries. Dans 
ces mêmes maisons, si une fille veut que ses aer- 
TÎettes de toilette ne servent pas aux clients, elle 
doit payer un supplément de linge ; réglementaire- 
ment, elle n'a droit qu'à deux serviettes par semaine, 
et le blanchissage de chaque serviette supplémen- 
taire, qui vaut un sou, est compté 50 centimes par !a 
tenancière à la prostituée. Quant au linge de corps, 
la fille étant persuadée que la toile ordinaire et le 
coton ne la feraient pas valoir suffisamment, la 
tenancière lui loue des chemises de dentelles, mou- 
choirs de batiste, etc.; et, en dehors du prix de loca- 
tion, elle exige les frais de blanchissage, en stipulant 
que tout ce linge précieux doit être lavé à l'eau de 
riz. On voit où ces frais mènent les filles de mai- 
son ! . . . 

L'abonnement à la coiffure est directement payé k 
la tenancière. Tous les jours, vers trois ou quatre 
heures, le coiffeur vient procéder à l'édification sa- 
vante d'un édifice qui doit être à la fois élégant et 



Ji 



i 



214 

solide; les fi-isares, poses de postiches, application» i 
de teintures avec usage de séchoir, ne sont pas conû- 
prises dans le prix de l'aboniicment, qui n'est jaainia 
moindre d'un franc par jour. Le poiffeur ne tofuche 
jamais que le tiers de la somme, ou la moitié au plus; 
c'est à cette condition qu'il est concessionnaire diï 
privilège. Quant aux articles de parfumerie, la tenan- 
cière les compte aux filles a des pi'ix du quintuple 
au décuple plus élevés que ceux des meilleures mai- 
sons du boulevard. 

Bans les grandes tolérances, il y a. encore l'abonn»- 
ment au pédicure, à la manicure ; soit, uu nouveaa 
versement de 5 à 10 francs par semaine, perçus par la 
tenancière. 

Passons à l'usage des bijoux, qui est général dans 
toutes les maisons de prostitution : c'est un des côtés 
de la parure sur lequel la tenancière pousse le plus 
ses femmes ; d'autre part, celles-ci se laissent d'au- 
tant plus facilement su^eationner à cet égard que 
les bijonx font hausser le montant de leurs • gants », 
surtout s'ils ont l'air de leur appuil.euir: elles mon- 
trent alors volontiers ces parures aux clients, comme 
éclatante preuve de ce qu'elles ont été appréciées 
par des hommes généreux, et beaucoup, ignui'd&t 
que ces riches objets, même s'ils sont uu chiffi-e de la 
fille, ne sont que de la bijouterie louée, ne lésinmt. 
pas au moment d'offrir le ■ petit cadeau » d'usagfe 
C'est ainsi que la location de parures avec dianiaafcg 
atteint des chiffres usuiaires abaoluuient extrava« 
gants. Le docteur Piaux, qui a eu des notes à ce 
sujet, affirme que, dans les lupanars aiistocratiquea, 
m les filles ne l'cculent devant aucuns frais, si excea- 
■ifa qu'ils soient, pour rivaliser de luxe entre ellD% 
un diadème rubis et diamants est loué à ces femmes 



LA PROSTITrTinX A PARIS 215 

ESO francs par jour, une aigrette perles et diamants 
) francs par jour, une montre chiffrée en diamants 
et 60 fraucH par jour ; le prêt quotidien des 
:ueB et bracelets va de là à 50 francs. Le bijoutier 
ttitrê d'une maison de oe genre réalise des bénéfices 
Sonsidérables, tout en ne touchant que le tiei-s et 
iiême le quart de ce que la tenancière extorque à la 
wstitiiée vaniteuse. Dans les maisons d'ordre infé- 
^euT, la manie des bijoux sévit de même ; les parures 
ait de valeur moindre, voilà tout ; on loue à ces filles 
b la bijouterie en vrai, à moins qu'elles ne préfèi-ent 
■ du faux ; ici et là, les bcuéflcea usuraires 
Kint proportionnés au degré plus ou moins élevé 
" I l'établissement. Les bijoutiers figurent souvent, 
Kailleura, parmi les commanditaires et créanciers de 
térances. M, Macé, alors qu'il était chef de la 
ïreté, a eu entre les mains, dans la succession d'une 
inde tenancière parisienne, la facture d'un bijou- 
montant à 100,000 francs ; cette maîtresse de 
taison achetait donc à crédit les bijoux qu'elle 
uait, non pas au mois ni à la semaine, mais au jour, 
s pensionnaires ; 100,000 francs de parures enri- 
SÏes de pien-es précieuses, dont elle n'avait pas même 
""xjursé le prix, lui rapportaient 5 à 600 francs par 
, grâce à la confiance qne le fournisseur avait en 
I solvabilité ; ce qui représente un placement à 
B pour 100 par an 1 
L^ous avons parlé tout à l'iieui-o des extras de 
ile ; eli bien, ils sont peu de chose à côté des ex- 
s de l'estaminet ou du bahut. Ce dernier mot, dans 
(. langage des filles de maison, s'applique à l'étage 
jérieur de l'immeuble d'uue tolérance luxueuse, 
; sont situées leurs chambres particulières, con- 
tsirement aux maisons à estaminet où la chambre 



^ 



d'habitation de chaque pensionnaire est en iai 
temps sa chambre cfo passe. 

Or, quelle que soit la classe d'un lupanar, on y 
boit, ici dans l'estaminet formant salle commune, 
là, dans les salons ; et partout les filles excitent le 
client à boire, afin d'être bien vues de la patronne. 
Le premier mot d'une prostituée en maison 

■u'eat-ce que tu payes ?. .. Tu n'otfres rien ? » est 
atéréotjfpé comme une consigne. Hors de table donc, 
le prix des consommationa servies au café ou au 
bahut, tout exorbitant qu'il soit, est le même pour 
les filles que pour les visiteurs : dans des 
de troisième et quatrième ordre, où la passe est dé 
2 à 3 francs, la tasse de café est à 1 franc, Iq, canetjta 
de bière à 2; la consommation est tarifée, on le voJti 
presque l'équivalent de la femme. Dans presquo 
toutes les maisons à estaminet, un grand cai-ton 
indiquant le pris des boissons est aecroeké aiii 
murs ; l'un des côtés donne le prix avant, et l'autr» 
le prix après minuit ; il n'y a qu'à retourner ïg' 
carton. 

La tenancière est anaai marchande de tabacs ; Iç. 
paquet de cigarettes ou le cornet de tabac est tou- 
jours servi sur le plateau en même temps fjue leK 
plus minimes consommations. Le pris en est doublé:, 
les quinze grammes de caporal ordinaire sont comp« 
'es 40 centimes ; ce qui met à 25 francs le Vilog d( 
12 francs 50. Le cahier de papier à 'cigarettes, d( 
deux BOns, bc paie 30 centimes. 

Toute dette quotidienne est portée immédiatemi 
c sur l'ardoise », et de là sur le livre de comptes, ^ 
la fin de la journée. Ce livre, en < doit » et « avoir »» 
est tenu avec la minutie apparente d'une comptabi- 
ié strictement commerciale. Le docteur Fiaux, qui 



LA PEOSTITUTIOM A PARIS 217 

noue tlomîo ces renaeignements si précie, complétant 
cens Je M. Coflignou, a eu sous les yeux le livre 
d'une teDîiucière parisienne ; chaque fille y avait une 
page grand format, divisée eu S colonnes, dont 7 
pour le doit, et 1 pour l'avoir. Lea oolounea réser- 
vées à, riuacription des dettes portaient ces rubriques; 
1° suppléments de nourriture et extras ; 2° vente et 
location de vétemeuts, linge et parfumerie ; 3° vente 
et iocation de l'ijoux ; 4° voitures et spectacles ; 
5° fourniture de bains, médicaments, honoraires mé- 
dicaux : 6° sommes d'argent avancées à la peusion- 
naire; 7° sommes remises à des parents et amia de la 
pensionnaire. La colonne de i'nvoir portait l'inscrip- 
tion des sommes versées à la tenancière par la pros- 
tituée en amortissement de sa dette courante. La 
balance s'établissait invariablement par un passif 
mensuel de 200 à 500 â'ancs an* préjudice de la Jiile. 
Or, !a maison dont il a'agit était de secontl ordre. 

Au jour de l'an, à la fête de Madame, à la fête de 
Monsieur, il faut se cotiser entre filles pour offrir 
un cadeau qui en Taille la peine ; et, comme un ca- 
deau pourrait faire double emploi avec ce qu'ils ont 
déjà leçu. Monsieur et Madame font Bavoir qu'ils 
préfèrent do l'argent. — Madame a le spleen; elle 
fait à une de ses pensionnaires l'honneur insigne de 
Ijli perutettre de l'accompagner en promenade; on 
prendra une voiture dans l'après-midi, on dînera dans 
un cabaret élégant, on ira finir la journée au théâtre : 
c'est la fille qui paiera toute la dépense. — Monsieur 
fume. Madame aime les fleurs ; la fille qui a pris 
ur de congé no rentrera pas, si elle veiit être 
bien vue, sans apporter un bouquet pour Madame, 
un paquet de cigares pour Monsieur, 

On n'eu finirait pas, ei l'on voulait citer lea 
Yi 



i 



218 



LA PROSTITFTION A PARIS 



ssm 



mille in délicate 3 se s à l'aide desquelles les maîti' 
de maison dépoiaillent leurs pensionnsiirea n, écrit 
M. Carlier, ancien olief de la police des mœura à 
Paris. 

Ajoutons cependant, pour être complet, que 
ploîtation de la fille à numéro par. la maquaase en- 
traîne l'exploitation par la liaute et basse domesti- 
cité, depuis la sou s -maîtresse jusqu'aux filles de 
cuisine, en passant par toutes les classes du perBOn- 
nel de service, liugères, couturières, bonnes, gar- 
çons, etc. Dans les grandes maisons, il n'y a souvent 
pas moins de buit à dix employés pour le 
vice do la table et des cliambres de passe; pour n'être 
pas toujoui'H nécessairement d'anciennes prostituées 
ni des souteneurs, tout ce monde-là n'en prétend pas 
moins faire ■ son beurre i dans l'établissement. La, 
bonne qui sert à table, celle qui fait les lits, la cui- 
sinière, la laveuse de vaisselle, le garçon qui cire les' 
bottines et vide les cuvettes, le garçon de courses, qui 
va cbez la blancbisseuse et fait au-debors les com- 
missions permises par la patronne, cbacun et cbacuae 
entendent bien ne pas travailler pour les beaux. 
yeux de la fille ; il leur faut, à eux aussi, leur pour- 
boire, leurs gants. Exemple typique : le simple poi 
d'une lettre au bureau de poste voisin leur est pai 

5 BOUS. 

La aous-maîtrease ne se contente pas do ees appoint. 
tements, ni même de menus bénéfices. Or, comme ellft 
est le grand factotum administratif, les pensionnaires 
ont tout intérêt à se concilier ses bonnes grâces, 
puisque c'est d'elle qu'elles dépendent. Appointée 
au mois comme une simple domestique dans les mai- 
sons moyennes (30 à 50 francs), la sons-niaitressB, 
,ui reçoit dans les grandes tolérances un traitemeni 



LA PEOSTTTrTION . 



219 



annuel de 2,400 à 6,000 francs, double partout très 
largement son salaire fixe. Afin d'être désignées par 
' elle, quand le client, ne vonlant pas paraître au 
I Balon, s'en remet au bon goût de l'intendante pour 
I lui appeler une fille, il n'y a pas de cadeau que 
I les femmes ne lui fassent. De son côté, elle vend 
clients cigares, cigarettes, pastilles de cacliou, 
i tionbons pour parfumer l'haleine, oranges, ban- 
I drucbes et caoutclioucs préseiTatifs ; sur les consom- 
r mations servies en chambres de passe, elle prélève 
L iine abondante libatioii, qu'elle levend ensuite aux 
r filles, etc., etc. Dans les maisons moyennes, par 
j exemple, le cigarede deuxsous se paiede 50 à75cen- 
times à la aous-niaitresse ; ou peut, par là, avoir une 
, idée des bénéfices qu'elle réalise sur les hommes, 
I tout en contribuant à tondre les femmes. 

surplus, en présence de ces agissements dont 
I les filles à numéro sont victimes, leur insouciance 
rdépasse toutes les bornes ; il semble qu'elles en 
rtfloient réduites à l'état de bétail humain. Quand la 
lienancière et sa domesticité les ont tondues autant 
r qu'il leur est possible, le souteneur vient glaner ce 
I qui reste. Les tribades seules, par le l'ait de leur vice 
I spécial, s'exemptent de ce dernier impôt ; toutes les 
loutres filles de maison ont leur amant de cœur, qui 
ivTit au-dehoTS ; jamais elles ne s'amourachent d'un 
I garçon de service du lupanar, attendu qu'elles ont 
^our eux le plus dédaigneux mépris. Dans les mai- 
r&ons de tolérance îles faubourgs, les amants do ces 
I filles vont eux-mêmes chercher leur prt't ; dans les 
I maisons du centre de Paris, où le souteneur est 
reonsigné à la porte, il envoie un commîssionuaïre 
|ioucher l'argent de sa mêneise. 

La seule bonne qualité que reconnaissent aux maî- 



ià 



f 220 



PEOsTirrTios , 



de prSr 



I tresses de maison ceux qui les ont étudiées de 
c'est la tendresse maternelle. Sauf des exceptions 
infiniment rtires, on peut dire que ces femmes élèvent 
leurs enfants dans la perfection. Jamais ils ne met- 
tent les piedfl dans leur établissement. Celles qui ont 
quelque uiaancc les placent dana de bons pension- 
nats, et ils reçoixent toujours une éducation supé- 
rieure à leur position. Quoiqu'elles considèrent leur 
industrie comme très licite, dès que leur progéniture 
commence à grandir, elles prennent crainte du senti- 
ment public qui pourrait nuire à ces enfants, et cette 
crainte leur fait employer mille ruses pour les tenir 
à l'écart et leur faire croire qu'ils sortent de. famille 
honnête ; ce n'est que dana des maisons étrangères 
qu'elles les voient, et tout se traite par des personnoB 
tierces. Une de ces femmes maria ses deux filles, qui 
n'apprirent que longtemps après leur mariage quelle 
Stait l'origine de leurs dots. 
On a vu, cependant, des filles de maîtresses de 
maison être mises nn jour au courant de la situation 
par leur mère même, en prendre leur parti, et finale- 
ment faire passer à leur nom le livret de tolérance ; 
mais, nous le répétons, ces cas ne se présentent 
qu'avec une extrême rareté. 
^^_ Sous ie rapport du caractère, les tenancières se 
^^B font remarquer presque toutes par la violence et 
^^^p l'irascibilité, surtout celles d'un ordre inférieur; 
^^B dans leurs querelles, elles injurient les agents de 
l'autorité, et ae jettent comme des furies sur les filles 
qui leur résistent, ou même sur les hommes qui se 
trouvent dans leur maison, ilien n'égale, d'autre part, 
kla jalousie et l'envie que beaucoup ont les unes 
Jjeonire les autres ; elles cherchent à se faire récipro- 
Uempnt le plus de mal possible. Voici dans quelles 



LA PROSTITCTIOS A PAEIS 221 

circonstances éclateut ces haines et ces animosités : 
C|Tielque£oiSj c'est le simple dépit de voir «ne rivale 
prospérer et s' enrichir daus un établissement que l'on 
avait dû céder à bas prix, n'ayant pas réussi soi- 
même ; pins souvent, la rivalité a pour cause un 
trop grandrappi'ochementjOu. l'installation d'une mai- 
son nouvelle, mieux tenue et mieux montée, qui 
attjie les anciens habitués ; mais, de fous les motifs 
de conflit, il n'en est pas de plus fréquent et de plus 
grave que l'enlèvement d'une fille qui fiiisalt la for- 
tune de celle qui la possédait; conmieut pardonner 
les intrigues mises en usage pour arriver à ce but, et 
voir la foule des libertins porter chez une autre l'ar- 
gent qu'elle répandait sans compter chez soi ! 

Quand une tenancière déclare la guerre à «ne 
f autre, les hostilitéa commencent d'ordinaire par des 
, dénonciations anonymes, qui révèlent à l'administra- 
) tiom les diverses contraventions que les inspecteurs 
I n'avaient pu découvrir ; naturellement, tous les faits 
I ainsi révélés sont exagérés. Parfois, ou ne s'en tient 
r pas là, et des actes de violence ne tardent pas à se 
I produire ; la tenancière envieuse embauche tons les 
I mauvaie sujets qu'elle peut connaître et les envoie 
I casser les vitres de sa rivale à coups de coquilles 
L d'huîtres, le projectile préféré des souteneurs. Il est 
■ 'juste de dire que la guerre est promptement terminée 
I par l'intervention administrative, la tolérance étant 
r aussitôt retirée à la tenancière qui a suscité le dé- 
laordre, les voies de fait et le scandale. 
I En définitive, les tenancières sont infiniment plus 
r aéprisablea que les prostituées elles-mêmes. Impar- 
1 iialement, nous avons dit leur unique bonne qualité. 
[ Infatuées d'elles-mêmes, envieuses et méchautes, 
I plus âpres au gain que les pires asvLriei"&,'Ç';s£easvV'«xaA 



p 



. rEOSTITKTION J 



Tiolence, elles ont une ' 



cesse de l'hypOLTisie 
pierre à la place An cœur. 

II arrive parfois que r|uelques inaîtresBes de mai- 
son font soigner chez elles des iîUes tombées ma- 
lades ; mais ne croyez pas que ce soit par affection 
ou par humanité ! Non, certes ; car l'intérêt le pins 
sordide les dirige toujours, jusque dans les actions 
en apparence les plus louables. Incapable d'un bon 
sentiment, la tenancière ne prend soin, en cas de ma- 
ladie, que des filles qui font le succès de sa maison ; 
elle cherche à s'attacher par là un être vivant qui 
lui rapporte quelques milliers de francs par mois ; 
elle agit comme le sportman qui, propriétaire d'une 
écurie de courses, fait veiller incessamment sur la pré- 
cieuse santé de ses chevaux gagnants de premiers 
prix. C'est ce même motif qui porte les maîtresses 
de maison à faire passer à ces mêmes âiles des se- 
cours à Saint-Lazare, lorsqu'elles sont forcées d'y ■ 
aller, afin qu'une autre ne les y accapare pas pendant 
qu'elles y séjournent. Il explique encore le langage .. 
doucereux et les manières pleines d'affabilité des. te- . 
naucières à l'égard de leurs filles à succès; elles flat- 
tent celles-ci, les cajolent sans cesse ; c'est un pâte- ' 
linage, qui, pour bien des gens, serait insupportable, i 

Si cette oonduite désarme ces malheureuses fille? 
et leur fait supporter patiemment la rigueur de leur 
condition, elle ne les tiompe pas sur le compte des 
maîtresses de maison, et toutes les détestent à un 
degré dont il est difficile de se faire une idée ; elles 
les considèrent comme des voleuses, et proclament 
qu'elles n'ont pas de plus grands ennemis sur la 
terre; en cela, elles ne se trompent pas. 
Jînfin, lorsqu'on sait ce qu'est une prostituée, et 
'rribifi situation de telles qui, faute de ressources, 



L-V PEOSTITCTIOX : 



233 



uliligèeâ ù'eiifrer eu Diai^OD Je tolt-rance, on 

Jera surpris de trouver parmi ces filles des êtres 

BTobes, et qui reculeraient devant le moindre larcin: 

Sepeudaut, il y en a ; bien plus, il s'en rencontre qui 

tonsidèrent comme sacrées les dettes que les astu- 

tdeuses tenancières leur ont fait contracter. On pense 

s bonnes filles, vrais phénomènes de naïveté, smit 

techerciiées par les rouées exploiteuses '.... Maïs la 

plupart des prostituées, par contre, pensent et disent 

Hn'elles auraient tort de se gî-ner vis-à-vis de leurs 

iqnasses ; aussi, quand elles ont décidé de (Quitter 

me maison, elles se font un jeu, eu profitant de leur 

loar de sortie, d'emporter et de vendre te plus beau 

costume de ville qu'elles ont réussi ît se faire prêter. 

De là, des plaintes continuelles des tenancières, et 

ni de l'administration, qui n'aime pas à in- 

r dans les litiges de cette espèce. 

Pour tranclier la difficulté, on a prescrit que les 

EÛtresses de maison ont l'obligation de donner gra- 

nitemeut à toute fille restée chez elles trois mois con- 

lutiis un habillement complet et en bon état, afin 

u'ellû ne puisse être retenue pur manque de linge 

t de costume, et aussi afin de lui ôter tout prétexte 

S'emporter des effets ne lui appartenant pas. Cette 

prescription donne, en général, de bons résultats ; 

mais il est des prostituées assez malignes, qui, lors- 

K^u'ellfis ont médité un départ furtif pour passer de 

pétat de fille à numéro à celui de fille en carte, se 

ardent bien de ae faire prêter le linge tin et la riche 

toilette qu'elles convoitent ; la haine de fexploita- 

ion qu'elles subissent rendant celles-ci plus rusées 

nue la tenancière, elles achètent it compte ferme les 

[effets désirés, font nu premier versement aussi 

Vmaigro que posaible, et décampent un beau v^a.'s.xîi- 



LA raOSTITCTniN A PARIS 

r Sans ce cas, i]Ug faire? II y a eu vente; la teuanci^é^ 
1 qui, prise à aon propre piège, crie nu vol, ne peut 
is néamnoins déposer une plainte, puisque son livre 
> comptes parti cul iei'B, où se trouve celui de la fille- 
[dont elle accuse la mauvaise foi, établirait contre 
[ elle-mûme, par centaines, par milliers, les preuves 
<- de ses usures sous forme de location, mettrait en lu- 
mière ses escroqueries quotidiennes par majoiatifia 
I excessive de la valeur des objets vendus, et uiontr©- 
( rait, en un mot, d'une manière éclatante, tout 
I l'odieux de ses perpétuelles extorsions d'argent. 

D'ailleura, l'administration refuse de connaître 
I tout engagement pris en dehors des obligations qui 
i«ont imposées par elle aux tenancières, et elle ren- 
f Voie les parties, quand il y a contestation, à se 
poiu-voii- par les voies de droit. C'est donc à leurs 
risques et périls que les maîtresses de maison avan- 
cent de l'argent aux filles ou se trouvent leurs créan- 
cières par suite de vent* d'objets incomplètement 
[ réglés. 

[ 4. Comment lea dame» 4le niaiiton rp<^rlllmt leur 
personnel de fillps. 

Une légende des pbis absurdes doit être démentie 
i par nous tout d'abord. Les adversaires de la police 

des mœurs ont répandu le bruit dans le public et 
I 8ont parvenus à faire croire à quelques âmes can- 
I didee que les maisons de tolérance sont des endroits 
, où les jeunes filles se pervertissent. Eien n"est plus 

faux. Ce sont, au contraire, les tenancières de maisons 
' clandestines et toutes les proxénètes de la prostitution 

insoumise, qui s'attaquent aux jeuues filles linnnèteB 
i à Délies n'ayant encore commis qu'une faute, qui 



LA PEOSTITTTIOX A PAUIS 226 

f les attirent, qui trompent et font séduire les pre- 
1 miêres, et qni dêbaucheot tout-à-fait les autres. 
[ Quant aux maitresacs de maisons de tolérance, la 
I sarveillance qu'on exerce but ces femmes, la dépen- 
Hance où elles sont de la police, qui peut à toute heure 
J faire pénétrer sea à^nta dans leur établissement. 
Iles obligent à se contenter d'offrir à leurs clients 
rdeâ filles déjà perdues, et les empêchent d'îijouter une 
' noUTelle infamie à celles dont elles sont abondam- 
ment couvertes; même lorsqu'elles ont des mineures 
■ cliez elles, ce sont de» jeunes vicieuses, des créatures 
précocement perverses et profondément corrompues 
âepuis lon^emps (voir, pape 123 et sui^intea, ce 
qui a été dit au sujet de l'inscription des mineures). 
Les hôpitaux, et en particulier l'hôpital Broca 
j ^anciennement Lourcine^, fournissent aux tenan- 
I eiëres un grand nombre de filles, qui, après voir vécu 
misérablement de prostitution clandestine, se dé- 
. cjdent à essayer de la maison de tolérance; Saînt- 
I Xazare leur fournit aussi une assez forte proportion 
de prostituées se trouvant dans le même cas. Broca eet 
l'hôpital où vont se faire soigner les vénérionnes dites 
an civil, c'est-à-dire autres que les femmes qui sont 
I Tieitées régulièrement par le Dispensaire de salu- 
f Iwité ; cependant, il arrive aussi que des vénériennes 
glissent ailleurs, favorisées par les internes 
I désireux de compléter leur éducation médicale, prin- 
r eîpalement aux hôpitaux Saint-l(Ouis, Tenon, Ilôtel- 
Dieu, la Charité. Saint- Antoine, la Pitié, Laënnec, 
Seaujon. Lariboisiëre. 

Dans ces divers hôpitaux, ii y a toujours quelque 

[ vieille fille publique, surannée, qui, pour obtenir un 

1 courtage renseigne les tenancières sur les femmes en. 

traitement, qu'elle pense devoir cou'^ttïivc a, c«* 



ji 



22G LA PKOSTITUTIOX A PARIS 

L après guériaou. A Saint- Lazare, tant à l'infirmerie 

l qu'au quartier des détenues adminiatratives. ce sont 

[ les prostituées elles-mêmea qui, eu ee liant, causent 

I dea lupanara où ellea ont passé et s'entraînent les 

[nnea les autres, quand elles espèrent trouver quelquô 

I avantage dans telle ou telle maison de tolérance. La 

I £lle qui amène une camarade plaisant à la tenancière, 

L reçoit de celle-ci un petit cadeau; quant aux vieilles 

r procureuses qui opèrent dans les hôpitaux ordinaires, 

I elles touchent une prime, plus ou moins forte, auivant 

la beauté, les agréments physiques ou intellectuels, 

et surtout suivant lea talents de luxure des prostituées 

clandestines qu'elles ont découvertes parmi les ma- 

ladea et qu'elles ont décidées à entrer en maison; cette 

primo va souvent juaqu'à 50 iranca. 

Quelques damea de maison, plus astucieuses que 
les autres, ont des correspondants en province et à 
l'étranger; il en est qui entretiennent un conunis- 
voyagcur, toujoui's en chaaae pour engager les grï- 
settea perverties des grandes villes, ou lea anciennes 
ouvrières, en rupture d'atelier ou d'usine, se prosti- 
tuant dans les pays de fabrique. 

Quelques unes encore s'entendent avec ces indivi- 
dus, exploiteura comme ellea, dont le métier est de 
pressurer les domestiques sans place, et qui couvrent 
de leurs mensongères offres d'emploi la porte de leur 
maison et souvent les mura voisina. A part de très 
rares exceptions, ces tenanciers et tenancières de bu- 
reaux de placement étudient les tilles plus ou moins 
jolies qui viennent dans leur officine, et procurent 
aux célibataires libertins, comme bonnes d tout faire, 
celles dont la vertu leur paraît le moins solide; puis, 
je les perdant pas de viie et ne négligeant rien pour 
t,télÉrer leur chute irrcniédiab\e, \\a \es, précipitent 



■^^ 



Ul PHOSTITUTHiX A PARIS 



ins l'abime de la prostiftition, lorsqu'elles sont à 
loint et qu'ils ont intérêt h recevoir une forte prime 
î quelque maîtresse de maison, tolérée ou clandes- 
ine. Très habiles à tromper la police, ces placeurs 
i placeuses, tristes gens sans aucun wrupule, sojit, 
jour la plupart, il'actifa pourvoyeurs de toutes les 
rostitutious; les statistiques officielles des métiers 
icdonués par les filles qui viennent se faire iuscrire 
I la police ou qui sont arrêtées comme insoumises, 
éloquerament l'influeuce néfaste des bureaux 
j placement, exécrable institution appelée à dispa- 
liti-e bientôt; <lu moins, espérons- le (voir page 27. 
tatîstique deg anciens métiers des filles publiques). 
( Enfin, il est des maîtresses de maison, parmi celles 
1 dernier ordre, qui envoient des vieilles recruteuses 
[ la porte des hôpitaux, pour guetter à leur sortie 
I femmes qui pourraient être à leur convenance 
t dont elles devinent la misère et le vice; ces vieilles 
Kruteuses, douées d'un flair remarquable, vont 
pême pratiquer leur embauchage dans les environs 
I Dépôt et partout oii se trouve une maison de cor- 
Kition, une prison quelconque; 'la présence des soute- 
Leurs leur indique le gibier qu'elles recherchent; 
} sont ainsi les placeuses des condamnées qui ont 
fini leur temps. 



S. Les innrlH et n 



lits 4lpM ilanivs <l(- uiiiiMnaK, 



Parmi les maîtresses de maison, il est des femmes 
mariées, mais clans une faible proportion: sur 21^ dos- 
siers de tenancières que j'ai compulsés, j'en ai trouvé 
47. soit un peu moins d'un quart, pourvues d'un légi- 
time époux. Les trois quarts ne sont pas mariées, maïs 
ont toujours un amant en titre, sinon plusieurs. 



I 

I 



228 LA pRoSTirrrioN" a pahis 

Sauf 7 ou 8, les tenancières mariées ne dirigeaient 
que des tolérances de la basse catégorie. La plupart 
de ces maris sont des ivrognes, des voleurs; plusieurs 
prélèvent sur la recette du lupanar de quoi entretft- 
nîr au-dehors une concubine, ce qui cause à leOT 
femme le plus grand cbagrin/ Aucune tenancière ma- 
riée n'est connue officiellement à l'administratk» 
son nom conjugal; son livret no porte que lea. 
nom. et prénoms figurant à son acte de naissance. 
Ponr plusieurs raisons iaciles à comprendre, la Pré- 
fecture recule toujours devant la présence d'un marîi 
lorsqu'il s'agit d'accorder une tolérance; il hii faut la 
perspective d'une maison clandestine à supprimer, 
fl'un repaii'e de malfaiteurs à détruire, ou d'un bien 
quelconque à opérer, pour lui faire passer par-dessus 
les graves inconvénients que ces personnages pré- 
sentent. 

Quant aux amants des tenancièies veuves, céliba- 
taires ou divorcées, leurs inconvénients sont à pfra 
près les mêmes, mais à un degré Leaucoup moindre 
oer ils n'ont pas d'autorité directe sur la maîtresse de 
maison, laquelle reste libre de ses actions, sanft 
craindre les observations et les réprimandes d'un 
mari, son maître légal, souvent impérieux et fort peu 
laisonnable. Ces amants, pouvant être changea au 
premier caprice, sont donc plutôt les serviteurs 
que les dominateurs des dames de maison, et, s'il» 
sont dangereux, c'est lorsqu'ils s'emploient à protéger 
I es femmes contre les inspecteurs qui ont constaté 
des contraventions; c'est lorsqu'ils aident les filles h 
iLB jouer de l'administration; c'est surtout quand ils 
contribuent à faciliter des duperies, parfois suivies de 
violences, à l'égard des libertins novices venus dans la 
maison. D'autre part, on s'imagine aisément ce qae 



lA PEOSTITrTlON A PARIS 231 

peat produire la rivalité de tels étros, lorsqu'une te- 
nancière entretient à la fois deux ou trois lunants ; 
rien n'égale le désordre que cela occasionne; et, lors- 
qu'il existe, on peut être certain que l'établissement 
ne durera pas longtemps, qu'il croulera de lui-même, 
ou que l'administration se trouvera dans la nécessité 
de le supprimer, 

La piiaitiun sociale de cea hommes varie suivant la 
classe de maison et suivant l'âge, le caractère et l'édu- 
iation de leur maîtresse. Quelques uns ont dans le 

konde ou dans l'armée de très belles positions; 
Vautrea sont artistes; d'autres, enfin, ne sont que de 

tapies artisans. Leur manière d'être dans la maison 
îi'est pas la même partout : dans tels lupanars, ils 

(Ht pour ainsi dire à demeure, mangeant à la même 
gtble que les filles, et défrayés de tout; dans tels 
gitres, ils ne viennent que passagèrement, sans même 

J'ai lu, dans les archives de la Préfecture de police, 

Ikistoire d'un homme marié qui n'eut pas honte de 

rattacher à une de ces dames de maison et de vivre 

publiquement avec elle; cette misérable fit périr la 

jBmme de son amant, moina peiit-ctre par le chagrin 

■u'elle lui causa, que par les injures, les coups et les 

lauvais traitements Je toute nature dont elle l'acca- 

Ëait chaque fois qu'elle la rencontrait, 

F (dominent remédier à l'inconvénient que présentent 

Wb amants de cette espèce ? C'est encore un point sur 

•quel l'administration a toujours vu ses meilleures 

tentions et ses plus sages mesures rester sans offi- 

iBÎté, On peut ne point accorder une tolérance à une 

[ne mariée, en lui opposant les difficultés de sa 

iuation; mais, comme les maisons publiques sont à 

neago des hommes, il est impossible de prévoir q-u- 



f 2-33 LA PROSTITUTIOX A PA! 

tel qui y ontre saura se faire aimer Je la tenancièreii 
On ne peut donc que retirer la tolérance, lorsque 
l'amant de celle-ci aura fait du scandale on occs- 
Bionné quelque scène de désordre. 

Une anecdote, d'après M. Carlier, permettra d'ap- 
précier la mentalité dea maris de tenancièrea. 

"Le digne époiix d'une maîtresse de maison était de- 
Tenu veui : ne pouvant se résigner à céder à une 
i antre tenancière l'immeuble dont il était devenu pro^ 
I priétaire par Iiéritage, il demanda et obtint un délai; 
I puis, il annonça que aon intention était de contracter 
I tm nouveau mariage avec une femme qui demande- 
I rait le transfert du livret de tolérance à son nom. Pln- 
I sieurs fois, le délai sollicité fut renouvelé. Voyant que 
[ sa situation irrégnlière ae prolongeait par trop, on dut 
1 le mettre en demeure d'en finir, s'il ne voulait pas que 
1 l'établissement créé par la défunte fût fermé pour 
I toujours; on lui fixa donc une dernière limite pour 
[ faire sa cession, puisqu'il paraissait évident qu'il 
I n'avait personne en vue pour un mariage, contrairc- 
L ment à ce qu'il avait déclaré d'abord. 
I Cet homme écrivit alors an préfet de police une 
I lettre, dont voici un extrait essentiel : 

I t( J'ai clierché à vendre, disait-il ; maia je n'ai pu 

I réussir. J'ai voulu me marier : je n'avais jusqu'ici trouvé 
I rien qui me plût; maia on m'a parlé hier, dans la journée, 
I d'une fille du quartier Bréda qui pourrait me convenir. 
I Jo me Buia présenté le soir même cbeï elle, à neuf heures; 
I la concierge m'a dit qu'elle était sortie, mais que je pour- 
[ rais la trouver vers la fontaine Saint-Georges, où elle 
I fait habituellement son commerce. Je m'v suis rendu, et, 
I grâce à son signalement qu'on m'avait donné, et surtout à 
^^in costume qui m'avait été fidèlement dépeint, je 1' 
^^^Êftoe BaMB peine. 



LA FEOSTITUTIOS A PARIS 23^ 

ufe l'ai observée pendant plus dune demi-heure, sane 

a mai présence ait été remarquée par elle; je l'ai vue 
r et venir, et j'ai, été enchanté de son activité. J'allais 

wrder, lorsqu'elle a pria le chemin de 6on domicile 
l compagnie d'mi monsieur, qui la suivait de quelques 

i. J'ai marché derrière eux; J'aj attendu devant sa porte. 
pendant près d'une demi-heure, que ce monsieur fût parti. 
Lorsqu'elle est redescendue seule, je l'ai accostée en mi- 
chet sérieux; elle m'a fait monter ehea elle. 

» J'eus bientôt acquis la certitude que sa figure et sa 
conversation me plairaient; Je lui demandai alors s'il lui 
conviendrait de tenir ime maison de &lles. Comme la 
proposition paraissait lui sourire, je lui ai dit : ii Je suis 
II maître de maison, je suis veuf j et j'ai besoin de me rema- 
i( rier pour conserver ma tolérance; vous pourriez faire 
Il mon affaire. » 

« Elle m'a demandé jusqu'à cet après-midi pour ré- 
fléchir, d'autant mieux qu'ella ne pouvait pas rester plus 
longtemps avec moi, parce qu'elle attendait son amant 
à dix heures et qu'elle voulait le consulter à ce sujet. 

11 Je dois retourner aujourd'hui à deux heures, eb je 
crois bien que l'affaire s'arrangera. Pour mon compte, 
je le désire vivement, parce qu'elle m'a paru modeste et 
très comme il faut. 

a Je voudrais donc qu'on m'accordât un dernier délai, 
d'un mois seulement, à l'ej^iiration duquel je me serai 
défait de ma maison, si je ne me euia pas marié. » 

Ce document typique confirme et complète tout ce 
qu'on peut dire eur l'absencB totale de sens moral dea 
tenanciers et des tenancières; leur mentalité profon- 
dément abjecte eat invoquée comme argument décisif 
par les adversaires du régime de la réglementation de 
la prostitution. Mais, comme l'a dit très justement un 
de nus confrères, on ne voit pas eu quoi l'indignité dft 



•i.34 LA PHOSTITUTION A PARIS 

ces individus justifierait l'abolition de la police des 



Les abolitionnistes l'èvent, pour la France, le ré- 
gime de la prostitution libre de l'Angleterre; or, dan», 
ce pays, les tenanciers de disorderly-house, (maison 
de débauche) sont mille fois plus infâmes que tous lea 
maîtres et maîtresses de maisons de tolérance fran- 
çaises. Le rapt et le viol des eniants des seus sexes, 
Tolés à la sortie de l'école et livrés, au-dessous même 
de huit ans, aux riches et immondes dépravés de 
Londres, sont d'une pratique cnui'ante dans les lupa- 
nars libres; les auteurs impartiaux, qiii ont étudié 
sur place la prostitution anglaise, sont unanimes 
pour flétrir les ci'imes inouïs, quotidiens, commis de 
l'autre côté de la Manche, grâce à l'absence de la 
réglementation. 

D'autre part, on ne saurait trop le rappeler, l'Italie, 
sous le ministère Crispî, a voulu expérimenter (1888) 
le système de la prostitution libre, et bientôt il a fallu 
revenir an salutaire régime de la police des mœurs; 
(If<91), tant la contagion syphilitique s'était accrue, 
en même temps que l'audace des proxénètes ne sen- 
tant plus le frein. Or, supposons un instant que l'ex- 
périence italienne ait été faite en France : croit-on 
que l'auteur de la lettre qu'on vient de lire aurait 
perdu le moindre de ses vices, aii lendemain de la pro- 
' clamation de lu liberté de la prostitution ? suppose- 
t-on que cet être à l'âme de boue, décidé k se marier 
avec une fille de trottoir, et cela en prenant un ar- 
rangement amiable avec son souteneur, se serait amé- 
lioré dans un sens quelconque, lorsqu'une loi dite de 
réforme lui aurait annoncé qu'on s'en remettait dé- 
:mais à sa conscience de tenancier libre pour don- 
tde bons conseils à ses pensionnaires, en cessant de 



BsMa â M 



LA PRORTITFTIOS A PAHIS 2^5 

9 esci'oquer, et pour dissuader de tout contact celles 
ui Tiendraient à être vénériennes ? 
Non, non; et c'est pourqiioi nous disons avec le 
lecteur Grandier-Moiel : 

a Ces ignobles individus c:s:ifitent, ont existé de 
tout temps, existeront toujours. Puisque la santé pu- 
blique exige que la prostitution soit surveillée par la 
lolice et les médecins spéciaux, — et elle ne sera ja- 
rveiîiée de trop près, — c'est iatalcment ces 
lividus-lâ que l'administration trouvera toujours 
(partout à la tête des maisons de débauche. Les abo- 
Btionnistes, qui veulent la prostitution libre, au nom 
) la dignité liumaine, et qui iulminent contre l'in- 
oiie particulière des tenanciers et tenancières tolé- 
(b, ont-ils à proposer queliiuos vertueux patriai'ches 
i une seule bonnête mère de famille, pour veiller do 
B que les prostituées syphilisent le moins pos- 
m\e leurs imbéciles clients ? » 

6. Des eliances do riiint.- et do foptiine que ppf<- 
senle la gestion d'une diuIkou de tolérance. 

Il en est de cette industrie comme de toutes les 
autres : parmi les femmes qui l'exercent, quelques 
unes s'enrichissent, la plupart végètent, plusieurs s'y 
ruinent complètement. En général, les tenancières 
qui ont de l'ordre font d'excellentes affaires, quels que 
soient le quartier et la classe de leur établissement : 
celle qiii va elle-même aux provisions, qni soigne son 
linge et qui entre dans d'autres détails intérieurs, et 
dont le mari frotte les chambres et les escaliers, a 
toujours pour elle des chances de fortune; tandis que 
celle qui s'en rapporte à ses domestiques, qui vit avec 
des amante, qui les attire dans sa maison et les y laisse 



^ 



I.A PEOSTITUTIOH A PARIS 

boire et manger toute la journée, croulera îuiaillible^ 

ment. 

Une autre cause de ruine est à noter: le développe- 
ment, de plus en plus formidable, de la prostitution 
clandestine. Laases d'être exploitées, les filles dea 
lupanars de premier et second ordres finissent un jour 
ou l'autre par avoir Eicquis dans l'art de la luxure une 
expérience assez ^ande pour être assurées de vivre 
au dehors sans être obligées de descendre à la rua; 
celles dea maisons inférieures s'entendent avec leiuB 
Bouteneura, ne rentrent pas après une sortie, et vont 
grossir rarmco des raccrocheuses insoumises; quant à 
celles des maisons de quartier, classe moyenne des 
filles à numéro, elles désertent en moins grand nombre 
le lupanar, et généralement, loraqu'ellea le quittent, 
c'est pour passer à l'état de filles en carte. Sôtels 
borgnes et cabarets avec personnel de servantes proe- 
tituées, sans compter les brasseries de femmes, foni 
une concurrence terrible ans maisons de tolérance; 
les tenancières trouvant que la situation n'est pas te- 
nable, les unes ferment et laissent leurs créanciers ai 
débrouiller comme ils pourront, les autres rendent l8 
livret à la Préfecture et transforment leur immeuble 
en débit de boissons ou vont s'établir aillexira, eaoiâ- 
nuant toujours, d'une façon ou d'une autre, la pro- 
stitution, mais plus ou moins secrètement désormais. 

En ce qui concerne les tenancières de toléranceai 
dont l'industrie ne périclite pas, beaucoup, après quel- 
ques années d'exercice, ee retirent avec 5 à 10,000 fc 
de rente; il n'est pas rare d'en voir qui amassent jus- 
qu'à yO.OOO francs de revenu, et quelques-unes vont i 
25 et même 30,000. Ce n'est pas toujours dans 1 
beaux quartiers et dans les maisons les plus opn^ 
lentes que se fout ces brillantes affaires ; telle dam* 



LA PEOSTITUTIOiV A FAKIS 237 

h maison, dont le lupanar était eitué prèa de la ea- 
1 l'Ave-Maria, y ga^na, en peu d'années, de 
i acLeter quatre maisons dans Paris, et donna en 
i 60,000 francs de dot à sa fille, qu'elle maria à 
1 ancien officier de la garde impériale, décoré de la 

jiSgion d'honneur; telle tenancière, qui exploitait une 

tolérance de dernier ordre dans la sale petite rue de 
la Bûcherie, pi'ès de la place Maubert, acheta aussi à 
Paris plusieurs immeubles d© rapport, et entre autres 
une très jolie maison dans la rue Marbeuf. destinée 
& sa retraite. Telles et telles maisona de tolérance se 
vendent aussi cher que des chargea de notaire ou 
d'avoué; on peut citer quinze cessions d'établisse- 
ments de ce genre, qui, pour les frais de mutation, ont 
produit au fisc une somme de 17,786 francs. 

Actuellement, un lupanar aristocratique, que nous 
ne nommerons pas, dont l' installation à coûté un mil- 
lion et demi, et qui a 300 francs de fi'aia quotidiens, 
ne rapporte pas moins de 250,000 francs de boni par 
an. Dans tel autre, les bénéfices annuels se chiffrent 
par une moyeuue de 75 pour 100. Et voici un exemple 
très caractéristique encore : au bout de six mois 
d'exercice, la sous-maifresse d'une grande maison 
parisienne, gérante provisoire par suite de décès Je la 
titulaire, pouvait s'engager, lorsqu'elle sollicita le 
livret à son nom, à rembourser uue dette de 300,0(J'J 
francs, à déposer immédiatement uue somme impor- 
tante en garantie et à racheter le fonda d'une valeur 
(ip l;'iO,000 francs, de façon que les intérêts d'une 
mineure, enfant de la défunte (intérêts représentés 
par le droit au bail et le matériel de la maison), 
fussent eauvegardés. Rappelons, enfin, que le procès 
relatif au testament de la Tarcy. célèbre tenancière 
parisienne, procès entre ses héritiers et la ville i 



i^ 



LA PHOSTITrTIOS . 




spécia- 



^V 238 

^^V Montargia, a attesté des bénéfices d' 

^^m vente qui ont dépassé le million. 

^^1 Dans la période décennale de 187S i 

^^H tement étudiée par le docteur I"iaux, 7 

^^B lérance ont rapporté, en moyenne, un bénéfice annuel 

^Hr net de 120 à 250,000 francs; B maiaona ont rapporté de 

50 à 65,000 "francs; 4 maisons, de 30 à 50,000 francs; 

8 maisons, de 20 à 30,000 francs; 49 maisona, de 6 d 

8,000 à 15,000 francs. D'autre part, dans cette même 

période, 65 maisons de tolérance, ne faisant pas leurs 

affaires, ont disparu. 

La tenancièi'e qui se retire après fortune faite, n'est 
jamais embarrassée pour trouver un mari; et ce ne 
sont pas seulement les aventuriers de la noblesse dé- 
chue, les déchets de l'armée, les cyniques de la plume,, 
qui fournissent cette spécialité d'épouseurs; on y voit 
des artistes non sans talent, des officiers supérieurs, 
,. des négociants connus, etc. Quelques unes de ces 

femmes, ne se mariant pas, se retirent dans de 
jolies maisons de campagne, aux environs de Paris, 
et elles ont une cour d'amants opulents, qui ne se ja- 
lousent pas et portent l'innocent titre d'amis; maia 
le plus grand nombre tiennent à faire une fin honorée, 
et, sitôt leur lupanar vendu, recherchent l'époux qui 
leur permettra de paraître avoir vécu d'une vie imma- 
culée. Je pourrais nommer un coquet village où sa 
trouve une de ces enrichies : celle-ci ne reçoit en ap- 
parence que de la bonne compagnie; elle assiste régu- 
lièrement aux offices de la paroisse, avec aa maison 
et tous ceux qui viennent la voir; le curé la tient en 
très haute estime et n'est jamais si heureux que 
lorsqu'elle daigne distribuer elle-même le pain bénit 
pendant la grand'messe; elle lui donne largement 
iflur ses pauvres, et il la charge volontiers d'aller 



LA PEGSTITUTIllX A FAHIS 2-39 

quêter pour ses œuvres pies chez les habitants aisés 
de la commune; elle a épousé dernièrement, un 
homme décoré, de bon ton et d'élégantes maiiiérea, 
et s'est présentée à l'autel en habits blancs, avec tout 
l'extérieur de la vierge la plus chaste. 

Quant aux tenancières qui ne réussissent pas, il en 
est dont la déconfitui'e est si complète qu'on les a 
vues dans la nécessité de redevenir prostituées ou 
simples servantes dans les lieux mêmes oîi elles 
avaient été maîtresses. 

Et maintenant que nous connaîssoBs les dames de 
maison et que nous pouvons les apprécier à leur juste 
valeur, nous allons montrer que les tenancières de la 
prostitution clandestine, loin de valoir mieux, sont 
encore pires; car celles-ci, aussi bien que celles-là, spé- 
culent, par cupidité et par habitude vicieuse, sur la 
corruption publique, sur les goûts dépravés que le 
libertinage fait naître; les unes et les autres no vivent 
que de désordres et d'infamie. Mais, s'il est vrai que 
la maison d'une inaîtrease de tolérance est un asile 
ouvert à toutes les jeunes imprudentes qui ont laissé 
leurs parents ou ont franchi le cap de la majorité, il 
n'en est pas moins vrai, d'autre part, que les tenan- 
cières clandestines, échappant à la surveillance de la 
police, sont infiniment plus dangereuses: c'est la 
proxénète clandestine qui est à la piste même des mi- 
neures non déflorées: c'est elle qui, recherchant tout 
joli minais de nature à plaire aux libertins, tend des 
pièges abominables aux jeunes filles, dès que ses ra- 
batteurs lui en signalent qui ont des penchants à la 
coquetterie; c'est elle surtout qui est par essence la 
corruptrice de la jeunesse et la poui-voyeuse du vice. 

La maison de tolérance et la maison clandestine 
aont, Tune et l'autre, un lieu de rendez-vous pour tous 



\ 240 LA PHOsirruTiox a pakis 

ceux que des passions honteuses font sortir des bomi 
du devoir; mais le lupanar clandestin, la maison de 
passes secrètes, ayant à sa tête une proxénète qui 
brave la police des mœurs, voiKi la véritable école de 
scandale où des enfants à peine formées viennent 
faire apprentissage de la prostitution. 

CH.U'1TRE VIII 

LA PROSTITUTION CLANDESTINE 

1. Ile la prostilulion claDdestinr, eii glanerai. 

On entend par prostitution etande^tine celle qaï' 
s'exerce daae l'ombre, qui se cache sous les formMi 
les plus variées, et qui ne se soutient que par la ruse, 
la fourberie et le mensonge. Cette sorte de prostitu- 
tion, dont une foule de personnes ne soupçonnent paa 
l'existence, est, sous le rapport de la sauté publique 
et des mœurs, bien autrement pernicieuse que la pro- 
stitution soumise au contrôle de la polîee ; c'est cette 
prostitution là qui, on ne saurait trop le redire, e'afc- 
tatiue même à l'innocence, la séduit et la corrompt; 
c'e^t elle qui, revêtant parfois les apparences les plus 
honnêtes, paralyse l'autorité et propage impunément 
la contagion la plus affreuse e(; l'immoralité la plue 
grande. 

Le plus ordinairement, la prostitution clandestine 
ne se cache que pour soustraire à l'administration dei 
jeunes filles à peine sorties de la tendre enfance, et 
qui, à raison de cela, sont vendues très cher aux 
mondes débaucbéa qui les recherchent. Jl^éanmoins, 
elle est exercée aussi par des prostituées adultes, soit 
^ee. femmes mariées dont les goûts dispendieux ne 



k 



ui FBOSTrrrTiox A P-uiis 241 

,t pas satisfuits par les ressources du ménage, Boit 
jeunes iillea précocement perverses et mal sur- 
illées par leurs parents, soit des demi-muudaiiieB 
l'entreteueur et lee amants aecrets ne subvien- 
t pas suffisamment à toutes les fanfaisiea de luxe, 
it des lemmes de toute classe, qui, d'une façon géaé- 
redoutent de se soumettre aux visites sanitaires 
ne veulent pas être exposées aux inspections des 
nts des mœurs, dans la crainte d'être reconnues 
itir ce qu'elles sont, là où elles habitent. 
Itien n'est comparable aux ruses que iea proxénètes 
la prostitution clandestine inventent pour dépister 
police. Il y en a qui, après les études nécessaires, 
font recevoir sages-femmes pour couvrir de ce pa- 
ïen le véritable métier de leurs pensionnaires. On 
cite une qui s'installa comme dentiste, assurant 
ses prospectus que nul au monde, pas même Du- 
ae, le célèbre cliirurgien du carrefour Drouot, na 
lait dans l'art de fairei disparaître comme par 
ihantement les plus cruelles douleurs de dents; on 
la demandait qu'à ce titre, et les jeunes victimes, 
que les amateurs, ne montaient jamais chez elle 
ivoir la mâchoire entourée de linge et sans don- 
les signes d'une vive souffrance. Une vieille co- 
line, affectant le costume et le langage d'une dame 
charité, conduisait par la main deux petites filles, 
illées modestement, et qui, par- leur grâce et leur 
gentillesse, intéressaient quiconque les voyait; sout) 
prétexte de leur obtenir des secours, cette misérable 
les menait dans les hôtels, et principalement auprès 
des riches voyageurs anglais, car elle connaissait les 
goûts de cette race hypocrite; elle cachait si bien son 
jeu, que tout le monde la respectait. 

Ou n'en finirait pas, si l'on voulait ne rien ometti-ç^ 



Kl 



S42 LA PROSTITTJTIOX A FAEIS 

dans cette revue générale de In piustitution claiiâea< 
tine; noua renvoyoïia le lecteur j, ce que noua avoïis 
dit au chapitre conaatie .i !a classification des prosti- 
tuées. Pourtant, il est Ijon de noter qu'nn grand 
nombre de ces dangereuse piosenelea ont souvent un 
modeste appartement, ne contenant qu'une ou deux 
pièces en bus de celles qui leui sont strictement néces- 
lis elles en louent un autre sous le nom 
d'une complice, au quatrième ou cinquième étage de 
même maison, et la restent en permanence dei 

fanU, qui sont censées ne descendre chez elles que 
pour jouer et passer le temps. On eu a vu s'intituler 
peintres, ouvi'ir un ateliei', et prostituer aux michets 
ilandestins leurs soi-disants modèles. D'autres diri- 
gent un reatauraut, avec tahle d'hôte particulière à 
leiiaina liabitués; la salle réservée à ces repas, nu l'on 
l'est admis qu'en étant bien connu de la patronne, 
est garnie de cocottes dîneuses, et communique, par 
un escalier secret, avec des chambres de passe. 

Mais c'est surtout en prenant dea patentes de divers 
états, ou simplement le titre de lingèi'e, de coutu- 
rière, de blanchisseuse, de modiste, etc., que la pllt-. 
part des proxénètes clandestines échappent à la sur-' 
veillance de la police et pai-viennent à se justifier."! 
Beaucoup ne reçoivent pas d'hommes chez elles, 
envoient à domicile, sous un prétexte quelconque, lesi 
jeunes filles qu'on leur demande; elles instruisent cetff/ 
jeunes filles de tunt ce qu'il faut faire pour dérouteiPi' 
les inspecteurs. Une d'elles prenait réellement Iff' 
linge sale de ses clients libertins, mais le passait iÉ\ 
une véritable blanchisseuse qui le lavait a sa place}' 

panier des jeunes prostituées du lupanar clandestin 
et le linge qu'elles tran spoliaient ne servaient qu'à 

ijJer le véritable motif de leurs allées et venues. 



Ui. PROSTITrTIOX J 



24,1 



Il suiSt d'exposer un pareil ordre de thoaes ponr 

aire comprendre la gravité des conséqueucea qu'il 

kdoit avoir, tant soua le rapport moral que sous le rap- 

Iport sanitaire. Mais il serait injuste d'aecuser l'admî- 

Imatration de manquer de vigilance. Que peut-elle 

liaire avec une poignée d'iuspecteui's des mœura dans 

luue ville immense comme Paris? et même, s! le 

■.nombre de ces agents spéciaux était décuplé, een- 

Btoplé, comment agir, avec les lois actuelles? Chaque 

in obstacle légal ou bien une influence im- 

■prévuL' arrêtent les poursuites et font échapper les 

têoupablea, qu'on a découverts par hasard. Pour tra- 

f^uire devant les tribunaux ces proxénètes clandes- 

ftinès, il faut le flagrant délit; comment l'établir? On 

KÎie le pourrait qu'à l'aide de manœuvres par elles- 

Bjnêmes immorales, que l'administration doit se garder 

■^'employer. On lance donc quelquefois des mandats 

Me rechei'chea et de perquisitions; on tend surtout h 

ftmettre la main sur la correspondance de ces femmes, 

EbSu d'y puiser les preuves de leurs incessants détour- 

kïiements de mineures; maïs, presque toujours, on ne 

Jjjécouvre rien. Comment, sous le régime d'une légîsla- 

li protège à outrance le domicile, et (jui ren- 

Eenne l'action des agents dans des limites très étroites, 

»mmeut atteindre une proxénète qui s'est mise h 

l'abri bous le couvert d'un commerce honnête, justifié 

r une patente, par des commandes et des livraisons 

Selles, par une comptabilité en règle? et même, en 

Pdebors de ce cas, comment avoir raison d'une madrée 

"procurenae qui, dans son domicile privé, pourra 

toujours objecter qu'elle est libre de recevoir cbea 

elle ses amis et ses connaissances, et pour laquelle 

les voisine prendront souvent pai-ti ? 

Au lieu de erîtiquei' à tuit et à iriivet:« ^ y^'às» 



244 



l'ROSTITt-TIO^ A FABIS 



des mœurs, il faut Jonc, au contraire, lui savoir gré 
de ses ex cep ti on n elles réussites dans la constatation 
des délita; car c'est grâce à elle que île temps en temps 
on voit des proxénètes passer en correctionnelle et y 
récolter des condamnations pour excitation de mi- 
neiires à la débauche. 

Eniin, il eat des prostituées clandestines qui font 
leur métier sans entremetteuse ni procureuse. Ce sont 
Bua'tout lea femints calantes, allant dans les lieux 
publics, où lien ne les distingue des femmes hon- 
nêtes : fines et l'usées, trompant leui' entreteneur, 
elles ont des habitudes spéciales; elles savent, aussi- 
tôt qu'elles le veulent, atlecter un ton, une conte- 
nance et des regards qui sont significatifs pour ceux 
qui recherchent cette classe particulière; elles se 
laissent accoster, se font suivre et reconduire, et c'est 
chez des amies ou dans dos maisons particuîièrea 
qu'elles reçoivent discrètement. D'autres s'intitulent 
masseuses et donnent leur adresse et leui's heures au 
public, au moyen d'annonces dans certains journaux 
quotidiens très répandus; ces annonces n'indiquent' 
pas seulement de pi'étenduea masseuses, et l'on en lit' 
parfois qui sont de véritables chefs d'œuvre de rouerie 
pour attirer les libertins, en leur faisant même con- 
naître le prix de la femme et sa spécialité de raffine- 
ments luxurieux. 

n existe même des domestiques d'une intelligeacA, 
fort au-dessus de la moyenne, qui, loin d'abandonner 
leur état quand elles se mettent à se prostituer, le 
gardent pour se gaiantïr contre la police : telle eat 
soubrette, telle autre est un véritable cordon-bleu; le 
bourgeois ignore que sa servante ne monte dans 
sa chambre du sixième, après le service, que pour 86 
^lettre en toilette de grue, redescendre par le petit 



lA PKOSTITCTION- A PARIS 245 

leBCalîer, et aller raccroelier dans les lieux de plaisir; 
r il y en a qui poussent l'audace jusqu'à ramener la 
i client cliez elles, et non a, l'hôtel, et, dans ce cas, un 
I franc par monsieur qui monte de nuit avec une bonne 
I àe la maison est le prix habituel de .la complaisance 
1 des concierges parisiens. 

. Quelques exemptes autheutiques de proSII- 
tntion olandeatiae organisée. 

Nous avons dit avec impartialité tout ce qui montre 

I sous un jour défavorable les uiaisons de tolérance. Les 

^ adversaires de la police des mœurs y puisent des argTi- 

I ments spécieux en faveur de leur thèse; mais ils se 

gardent bien d'ajouter que le lupanar clandestin est 

BOUB tous les rapports, que la maison publique 

^e prostitution. Aussi cupide que la maîtresse de 

Euaison, ayant lei mt'mes vices qu'elle, la tenancière 

F clandestine les aggrave par une hypocrisie scélérate 

' en perpétuelle révolte contre la loi, par une audace 

sournoise qui ne recule devant rien. 

Au premier rang de ces mauvais lieux, il faut 

Fplacer les maisons à parties, antres les plus dangereux 

|de la haute prostitution clandestine, maisons de dé- 

nbauche raffinée, fréiiuentées secrètement par un. 

F public d'élite, et contre lesquelles l'administration 

[préfectorale est malheureusement impuissante. 

Quelques dames, d'un esprit souvent très vif, ayant 
f 5e l'instruction et grand genre, et possédant surtout 
I le caractère de l'intrigue, donnent chez elles des dé* 
f jeuners et des dîners, où se rendent les débauchés de 
i toutes les sociétés mondaines; ils sont sûrs d'y trouver, 
avec les prostituées les plus agréables, cette classe 
particulière île femmes déclassées que l'administra- 



246 



L PROSTlTITTIoy -' 



tion n'a pas le droit de soumettre aux visites sanî- 

r tairea des filles publiques, bien qu'elles en exercent 

Téritablenient le métier. Souvent ces parties se font 

' à la campagne ou dans des endi'oits retirés, tantôt sur 

I im point, tantôt sur un a»itre ; on y joue des sommea 

énormes; et, couime les filoua spirituels et de bon 

ton sont toujours de connivence avec la maitrease de 

la maison et son escadron volant de filles, on conçoit 

aisément le danger de ces réunions, plus pernicienses 

mcore pour !a bourse que pour la santé. 

Il existe de ces maisons, tenues sur un très ïiaut 
pied, dans lesc[uelle8 les bommes font des dépenses 
fantastiques, laissant bien au-dessous d'elles les pro- 
digalités effectuées au sein des tolérances de premier 
ordre; elles sont tenues par des femjnes que la police 
connaît, mais contre lesquelles elle ne peut agir. Ceux 
qui les fréquentent ayant un intérêt majeur à ne pas 
être compromis eux-mêmes, jamais une plainte ne sa 
produit contre ces tenancières clandestines ;leur clien- 
tèle a toujours pour les protéger, mille influences 
diverses prêtes à être mises en œuvre; au surplus, ces 
femmes affichent en tout les dehors de la réserve et 
de la modestie, et passent, dans leur quartier, souvent 
même dans la maison où elles demeurent, pour les 
personnes les plus honnêtes du monde. 

Viennent ensuite les maisons de rendez-vous, avec 
divers degrés de clientèle. Celles de premier ordre, 
comme les maisons à parties, sont les foyers d'in- 
tripies absolument incroyables; c'est là qu'elles s© 
trament; c'est là que viennent les femmes de théâtre 
Sévergondées, les cocottes à la mode se trouvant un 
moment à court d'argent, et certaines femmes ma- 
riées, de la bonne société, qui, véritables Messolines, 
.viennent se livrer à des orgies sans nom et à la 



LA PaOSTITrTION - 



247 



[ébauche la plus efl'rénée; c'est là, enfin, que ae dis- 

iotent et que se vendent les moyens de pi'ocuier à UK 

nomme telle femme qu'il convoite et qu'il désire, avec 

a'autant plus d'ardeur que les obstacles qui s'opposent 

It l'accomplissement de ses désirs paraissent plus in- 

nnnontables. 

On se rendra assez bien compte de ce qu'est une 

laison clandestine de rendez-vous, en lisant le doeu- 

t que noua reproduisons ci-après. C'est uu rapport 

[ chef de la sûreté (M. Macé) au préfet de police. 

* un de ces lupanars secrets, un financier connu 

itait mort d'une attaque d'apoplexie foiidroyante; le 

réfet saisit l'occaaion pour y envoyer le chef de la 

lâreté, et M, Macé, après sa visite, a rédigé le rapport 

i détaillé que voici : 

it L'extérieur de l'hôtel de la veuve F***, avec sa porte 
^ deux vantaux, n'offre aucune remarque .particulière. 
l l'intérieur, le vestibule large, rendu volontairement obs- 
', conduit à un cabinet pla«é entre deux escaliers; dans 
i cabinet, se tiennent en permanence la maîtresse et sa 
[oablure. Ces vieilles femmes expérimentées connaissent 
i fond le Paria galant. Au moyen d'un jeu de glaces et 
nar le jour produit au moment de l'ouverture de la porte 
pTontrée, lea proxénètes peuvent facilement voir, recon- 
s la clientèle, même les femmes, malgré leurs vête- 
ments sombres et la voilette recouvrant leur visage. 

n La salle à manger, la cuisine, sises au rez-de-chaussée, 
flairent par une cour vitrée donnant accès à un troi- 
B escalier, celui réservé au service général. Dans cette 
mr existe l'entrée spéciale aux fournisseurs et à la do- 
Bticité du l'hôtel. 

H Au premier étage se trouvent le petit et le grand sa- 

, le fumoir, la salle de musique, le cabinet de lecture 

i le boudoir. Tontes ces pi^ceB sont richement m«cAA.fesj& j 



I 



248 LA rROSTITCTION A FAHIS 

statues, tableaux, bronzes, lustres, objets d'art, vases, Ji 
diniÈres garnies de fleura exotiques, rien ne manque à 
cette luxueuse installation; la pose des glaces, la confor- 
mation et la nature des meublea, la couleur dos étoffes re- 
couvrant chaiaea longues, canapés, fauteuils, divans, poofs 
soigneusement capitonnés, indiquent le véritable caractère 



k 



•i Le second ëiage comporte les cbambrce. Dana chacune, 
le lit de milieu, surmonté d'un baldaquin, est gami de 
tentures s'harmonisant avec les meubles et les tapisseries; 
au-dessUB de la table-toilette existe un grand miroir à bor^ 
dure de fleura, feuillages, oiseaux, au milieu deaquela 
émergent des porte-lumières en cuivre doré; sous cette 
table prend place le petit meuble de bois, à quatre piedi,. 
soutenant une faïeJice en forme de guitare, Lee portes ex- 
térieures et intérieures de toutes les chambres sont i 
quéee par do lourdes portières en drap bordé de larges 
bandes de tapisserie; la couleur de ces bandes sert à dai- 
gner la chambre. 

Il Le troisième étage est réservé au cabinet du docteur, 
pourvu du fauteuil indispensable aux visites médicales; 
& la lingerie, composée d'un stock de chemîsea-peignoim 
en soie et en batiste; aux ateliers de coiffure et de couture, 
nécessaires à préparer les costumes; enfin, aux petits e 
droits et logis des domestiquée. 

Il Cet hôtel, ingénieusement combiné, permet de défier 
Ëï moindre curiosité. Les rencontres entre hommes I 
femmes ne peuvent y être que volontaires, et tout est 
ijalculé dans cette nouvelle merveilleuse Tour de Neslea 
pour autoriser clandestinement les Marguerites à se pro- 
stituer par intérêt aux viveurs pressés; car aujourdlmî 
tout marche à la vapeur, et sans causerie ni préambulu 
passe du salon au canapé. 
La cavo de la veuve F*" mérite une mention spémall 



w 



LA PROSTITUTIOJf A PARIS 1^49 



pour la qualité de sea vins. Sur des étiquettes j'ai relevé : 
CloB-Vougeoti- Gavai lion, grand vin Latour-Cannet, vieux 
Château- Yc|uem, Chât^au-Margaux, muscat Frontignan, 
fine-champagne 18â0, kirschwasser 1S72. Comme je lui de- 
mandai le pris du Champagne, elle me répondît : ii Tingt- 
cinq francs, qu'elle qu'en aoit la marque »; et elle ajouta : 

Le vin ordinaire eut pour le service; et la bouteille de 

Sauteme, de Saint-Julien ou de Muaigny ne ae livre paa 
ne de dix francs; d'ailleure, la plus légère 

consommation, un cigare, une cigarette, eat payée . 

>«ïiiq fraucB. n 

Le décèa du banquier E*"^ m'imposait l'obligatiaa 

'examiner minutieusement le côté mystérieux de l'iiô- 

« Tout son mécanisme réside dans l'armoire de fer, în)- 

!ofEre-fort dont l'ouverture m'a causé un vif étonne- 

Ittent. En voici l'inventaire : 

« Sur la plaque supérieure étaient rangées des fiolea 

ofermant le précieux liquide astringent, si nécessaire 

; femmes voulant jouer momentanément le rôle de 

•iérges. Près des fioles, j'ai ouvert la boîte sur laquelle 

t lit: fiants d'amou-r ; aorte de préservatifs contre la 

Bondité et la maladie. 

II La seconde plaque do fer contenait les albums de gra- 
vures obscènes; celui des diableries est rare, curieux, ori- 
.. Fuis, le roman de Justine, du marquis de Sade, le 
r humain dévoilé-, de Restif de la Bretonne, des guides 
«ïatiques pour guérir les affections syphilitiques, et une 
tollection de photographies représentant les célébrités ga- 
Lstes, parmi lesquelles figurent les actrices à la mode, 
■a surtout rccommandablw par le caractère et le talent; 
ques unes sont reproduites dans des poses, des enlace- 
lents qu'elles n'ont jamais eus en public; le photographe 
h seulement ajouté leur tfto à des corps inconnus. 



250 LA PEOSTITVTION A PARIS 

H Sur la troisième tabletle étaient Ica invitations impri' 
mées en caractèreB elzéviriens. La carte, fine, rose, satinée, 
porta : ic Madame F*** a l'honnenr d'informer Monsieur 

« qu'elle reçoit tous les jours, de trois à sept heures, 

« et de neuf heures à y Puis, près de ces invitations, 

les lettres-circulairee manuscrites à envoyer aux notabilités 
françaises et étrangères, lettres ainsi conçues : 
n couaaissant votre goût pour les sculptures, j'en possède 
(I d'esceptionnellea, notamment des boites à ouvrage très. 
« artistiques, que je déaire vous montrer. Honorez-moi, jo 

« vous prie, d'une visite à mon hôtel, rue , n".., non 

Il loin du parc Monceau. " 

H Mon attention s'est axée sur les registres aux tranch» 
dorées, mentionnant, avec les adresses et par ordre al- 
phabétique, les noms des habitués do la maison. Dn côté 
; armée, magistrature, marina, 
de l'Etat, gros industriels, membres 
ca étrangers, millionnaires, et jua- 
démolitions. Du eôt4 
jeunes veuves, épouses délaissées, aé- 
ises, femmes do province, baronnes et com- 
moins authentiques, actrices, ou simples 



des hommes, 
finaocf'. foncti 
du Jockey-Club, pr 
qu'à des entrep 
femmes, je relève 
parées, bourgeoiset 
tesses plus ou 
filles galantes. 

<i J'estime qu'il y a lieu de ne pas s'en rapporter exclu- 
siveanent aux livres tomus par cette méprisable entremet- 
teuse, qui cherche, je pense, à compromettre des 
personnalités connues, des artistes en vogue n'ayant jamais 
pénétré dans un de ses salons, et cela dans le but évident 
de donner du relief à son triste et lucratif métier. Mal- 
noms appartiennent à des femmes, 
i, se donnant à ceux qui leur plaisent, 
sans marche, en bons camarades, 
le de l'armoire sont les carnets quotidienne- 
ir, et relatifs aux dépenses et recettes. 



légères, inconsf 
s librement. 



LA FROSTITrTION A PARIS 



251 



l^'uu 



lUx-ci D'onL rien de conventionnel, el, pour i5clairer votre 
igion, je crois devoir, monsieur le préfet, voub aotimettre 
comptabilité galante de l'année dernière; elle est curieuse 
plus d'un titre et se termine par d'énormes bénéfices. 
'buB y constaterez les accouplements d'homracs et de 
s, séparés par ;in chiffre qui forme le trait-d'union 
B rapproche. Le chiffre varie de cinri à cinquante 
jamais moins, jamais plus. Cette somme de mille 
reparaât assez souvent; elle n'est versée par les 
lateurs d<-' plaisirs coâteux que pour les actrices k la 
recherchées, courues et amenées sur commande : 
jouissance d'une pareille marchandise est à l'heure, et 
séjour dans la maison comprend l'arrivée et le départ; 
Bont des étoiles filantes. • 

I L'examen des carnets permettra d'établir un sérieux 

itrôle des rapports signés A dcmnîn, que la veuve F"** 

Iressaît sous co pseudonyme à votre administration. A 

istar de ses pareilles, j'ai pu me rendre compte que 

projténf^te ne faisait même pas honnêtement son 

Loble métier. Je vois, par exemple, une chanteuse d'opé- 

en renom figurer au mois d'août sur le carnet des 

ittes; or, à cette époque, eUe était en représentation à 

;ranger; on a, par une ressemblance, trompé le naïf amé- 

.in, qui, pour vingt^cinq louis, a cru posséder la véri- 

ile comédienne. Un boulevardier ne se laisserait pas 

lei duper; il sait qu'on peut rencontrer, dans les maisons 

rendez-vous, do jolies filles faisant do l'amour une 

,ire, et reasemhlant à s'y méprendre à des célébrités 

théâtrales : mais Iqs étrangers sont moins méfiants, et les 

proxénètes exploitent habilement les reasemhiances. Lea 

ateliers du troisitme étage n'ont été créés que dans ce 

but, et là stationnent le coiffeur et la coutiirii-re, qui vûuh 

transforment une frMiçaise ayant beaucoup de cheveux, 

'(EÎl vif, pas trop de nea, une bouche réussie et de jolies 



LA rKOSTITCTIO>f A PAH 

dents, en. italisnne, cspaignole, russe, aJIemajide ou i 
glflise, au choix du visiteur; le tout est de savoir s'y 

« Dans un compartiment spécial du coffre-fort, il y 
avait les diamants, bijoux, dentelles, appartenant à des 
femmes du monde constamment tourmentées par les dettes. 
Pour rembourser de ses prÉts la veuve F***, ne pas dé" 
choir ( !), soutenir leur existence luxueuse à fn'impoite 
quel prix, la plupart, s'abandonnent aux 'amateurs do- 
grandes dames, et celles-ci peuvent afBrmer que ce n't^ 
pas toujours par plaisir qu'on fait commerce de galante 

II Que de gêna font l'ofSce de prosénètea, ai j'en juge pi 
les intermédiaires servant à recruter le personnel féminin 
de l'hôtel F*"* !... J'ai transcrit sa liste. Couturiers, cou- 
turières, modistes, lingèree, blanchisseuses, marchandes îb 
la toilette, marchands de meubles, professeurs de chant, de 
musique, de danse, accordeurs de pianos. Loi 
véreux, usuriers, directeurs de bureaux do placement, 
d'agences matrimoniales, dramatiques, commerciales, pho- 
tographes, somnambules, tireuses de cartes, dentistes, 
coiSeurs, pédicures, manicurcs, épileuscs, sages-femmes, 
cochera, gérants de cercles, garçons de restaurants, de ca- 
fés, d'hôtels. Cette dernière catégorie tient au courant les 
proxénètes de l'arrivée des personnages importants, soit 
par leur position, soit par leur fortune. 

<i Tous ces industriels, courtiers du vice, racoleurs de 
filles, pourvoyeurs de brasseries, jouent un rôle important, 
et n'oublient point que la femme doit plaire et être jolie. 
Ils s'entendent pour exploiter la coquetterie et s'attachent 
aux pas des vertus aux abois, sans travail, souvent pa- 
resseuses, mais toujours jeunes, fraîches et bien propor- 
tionnées. C'est un moyen, disent-ils, d'améliorer la position 
sociale de la femme, en lui montrant le chemin attrayant 



rr fi 

LA TROSTITUTrON A FAKIS 25-1 

«fe facile de !» prostitution; carrière toujours disponible, 
plus lucrative et moina pénible qu'un travail honnête, 
mais irrégiilier. En traitant les conditions des ignobles 
marciiés, ils arrivent peu s. peu à l'initier aux principes 
de la vie galante et finissent par lui faciliter l'occasion de 
franchir les premiers obstacles par dee avances d'argent 
ponr renouveler la toilette. 

« Les relations entre les membres de cette nouvelle franc- 
maçonnerie sont de tous les jours, de tous les instants; 
elles s'étendent à Bruxelles, à Londres, à Berlin, a Vienne, 
à Madrid, à Florence. Les recruteurs sont partout : aux 
villeG d'eaux, aux bains de mer, dans les forêts de la 
Bohême, La correspondance de la veuve F*** ne laieae 
aucun doute à ce sujet. Livrer toujours les filles aux mes- 
sieurs, tout est là ; et les coulisses de la vio galante seront 
toujours curieuses à étudier. 

V Parmi un millier de lettres, que j'ai saisies, — presque 
toutes signées d'un sobriquet, sans doute conventionnel, — 
je prends au hasard, les dernières arrivées, et je vois 
d'abord qu'un baron allemand a l'intention de riccaler 
huit jours avec un ehoUe françaisej M"* V***, sa procu- 
reuse prussienne lui a donné l'adresse de la veuve f ***. 
Puis, je lia suoceasîvement : 

Il J'aime mon Bis à ma fa^on. Il est emplojé au ministère 
de la Justice, et j'ai besoin, pour le distraire quelque temps, 
d'une femme grave et aiire. Je compte sur voua. » (Cette cor- 
respondante a signé de son nom de famille, en toutes lettres 1) 

II J'ai un cbanaant petit liâtel, et je suis avec le comte (ici 
le nom). C'est liai, nous deux, car il quitte co soir Paris pour 
la Roumanie, et je tiens à l'oublier avec d'autres. Je voudrais, 
ma bonne potit« madame F"', que vous vous occupiez de 
moi d'une manière sérieuse.. Trouvez-moi un amant solide, 
mais pas de marital 1 Je veux gagner énormément d'argent, 
et les collais sont la perte des femmes. Si vous avies la maîo, 
heureuse pour me procurer un homme marié, nous noua 






X^.1 



i 



w 



. PEOSTITÎ^'l'ION i 



entendrons, tout le temps que durera cette 
fiïo que vous m'aurez obtenu. 

i( Hier, au boia de Boulogne, j'ai rencontré 







i fait € 



grand brun 
disant qu'il habitait 



n'a parlé et offert un cheval, en m 

[ rbôtel"", et que je lui écrive ou que je vienne le voir. CJonune 

j'étais avec le comte, je n'ai pas pu lui demander Bon nom 

I pour eurrespondre; je l'ai oublié, ce nom! Bayez assez gen- 

I tille pour me l'envoyei. Je ne désire pna vous tromper; car 

at rouB qni me l'avez adressé. — Signé : Luisante. >i 

I Libre en ce moment; pensez à moi, car j'ai besoin d'aiv 

I gent. Pour dîner ou souper, j'en suis. Je connais l'art d'amn- 

r les hommes : ma mère, comme vous le savez, était mar- 

l ohande de volailles, et, bien jeune, m'a montré comment on 

■ plume les oiieaux. — Signi : Vautour, ii 

Il Ayez la complaisance de prier M. le duc de m' attendre 

■ jusqu'à sis heures; mon amant ne veut pas me quitter, et je 
I ce puis le mettre dehors sans éveiller ses soupçons. La peur 
J'd'être lâchée me rend seule fidèle. — Siané : Sylrine, n 

.1 Permetlea-inoi de venir tous les jours, comme les deux 
I Mexicaines, la Milanaise et la Viennoise. En ma qualité de 
I figurante aux Bouffes, je me prête à tous les travestissements 
lux exigences des amateurs; je suis remplie de bonne to- 
[ lonté, mais je redoute les umunts à domicile. — Higi'v : Dn 
[ Marché. •> 



Il Noua sommes arrivées à Nice, enchantées du soleil et des 
y a du très beau monde, ici. Envoyez-moi deR 
issea. Si vous étiez près do nous, avec votre suprême tact 
1 feriez grand bien aux damos. Sous le couvert d'une 
ngence théâtrtile, noua noua glissons près de la célèbre chan- 
teuse italienne; c'est une reine qui nous servira à suivre oe 
qu'il y a de mieux. 

(t Nous sommes inscrites sur la liste des étrangers, publiée 
par les journaux du payai — Sigiii : Laure. ii 



- Je ^ 



1 adresse deux ravissantes jeunes 
Paris, l'une brune, l'autre blonde. 



LA PEOSTITFTION A PAHIS 2^ 

J'attends la réciprocité. li faut refnira par des dépiacetneate 
leur virginité. Méfiez-Tous, car elles ont épuisé la clientèle 
des mniaoua de conversation de Londres, Vienne, Berlin et 
Bruzellea. Elles ne sont neuv«a que pour les PariaieuB. — 
Sigiif : Bataillon. » 

i\ Puisque vous m'avez promîa votre STtnpatliie, y comptant 
et y tenant beaucoup, je viens vons demander de vouloir bien 
me faire part directement de ros observations, les choses hu- 
maines prenant un aspect entièrement amer. Il est évident, 
madame, que je commence un noviciat, et ce n'e^^t pas sans 
d'obligeants avis que j'arriverai à développer certaines qua- 
lités et à savoir mettre à profit l'expérience de ceux qui veulent 
bien s'adresser à moi. 

Il Commençant a, être moins cernée par la difficulté, qui 
ne plaisante pas, je respire un peu plus h l'uise, pensant que 
ma tigure, ma personne, mon moral même, se ressentiront de 
cet horizon moins sombre. Cependant, je viens vous demander 
de me dire, en toute franchise, ce que vous pensez de moi et 
si votre clientèle m'agrée; Bans cela, j'avoue que je perdrais 
tout courage ; je vous demande donc un petit mot. — iiigné : G. 
de la Tristesse, ii ■ 

Il Je voua prie de me dire si voua pourriez m'avoir Mlle ^l<A 
lo nom), du théâtre des Nouveautés; et à quel priiP — Siyné : 
Orly K. .. 

II CunnaïsseZ'VouB (et je sais qu'il y en a> une jolie femme 

mariée, que l'on peut voir et saluer lorsqu'on la rencontre?... 

[.Ce genre est assez cher; mais cela m'est égal. Le difficile est 

r le rendez-vous. Elles sont toujours d'un certain âge, 

Cs^éralemcnt de vingt-cinq à trente ans; plus jeunes, elles 

'listent encore. Vous me direa le prix. Je la veux blonde, c'est 

ce. Par une couturière à la modo ou une grande lin- 

is auriez des renseignements utiles... Je suis un visi- 

r fatigué, ne sachant plus où semer l'or.— Signé. ■L'Absolu. ■> 

i Vieille ratatinée, 
<i Je t'adore, mais tu ne m'expédies que de vilaines poupées, 
de vrais dromadaires I La tête de la dernière avait un aspect 
canaille, et ses mains de domestique sentaient la cuisine. 



p 



LA PHOSTITTrTION . 



256 

Je passerai chez toi mardi, vers trois heurea, . 
choix. Je veux une fille aux olInreH gargonniêres, battant le 
plein de sa beantê et de sa TOgue, gaie, adroite en amoar, 
«t pluB ricienae que paAsionnée. — fiio'né : Surmeoé. n 



« 3e sors d'avoir une véritable affection, cela vons anr- 
[ pieodra; mais aujourd'hui les prévenances cessent, et nous 
[TOUS à rbabitude... Ne voulant plus mo laisser accaparer, 
je piacB mon cœur sur mes lèvres, et je compte sur tooi... 
a hommes sont si bèteal Le mien est du nombre; ils pré- 
fèrent les femmes qui les trompent et les font souffrir. 
Signé : Laurence. » 

i< Adressez-moi d'urgence les vingt-cinq louis du prince. 
I J'ai pcis les florins de ma note pour des francs, et je me tronve 
L dons l'embarras, malgré mes nuits laborieiises. — Signé : < 
\ Ohi&recourt. n 

Il Londres. — Je vais venir à Paria en visite arec une ami 
Elle est ravissante. Occupez-vous de nous deux... Un mot a' 
lei affaires; car i! vaut mieux tenir que courir. Ici, la Aer- 
nière quinzaine de décembre n'a pas été bonne, et l'on m' 
BUre que Paris, la ville de luxe, devient une ville de i 
•ère. — Signé : Odine. ii 



« Nous sommes insensibles aux hommages de vos clients; 
mais nous pouvons cependant les charmer par la mimiëre 
amoureuse dont nous buvons le Champagne en costume dn 
paradis terrestre. Nos tableaux vivants représentent e 
intime. — Signé : les Sœurs Sia 



: L'écriture est plus bavarde encore que les âllea, eb 
ces lettres laconiques représentent assez exactement la co- 
médie du vice, en donnant une triste idée de l'espèce hu- 
maine; elles prouvent que la dépravation des prostibiéw 
équivaut à la pourriture morale de ces hommes qui four- 
millent dans les diverses clasea de la société, et^ si ceaz-<d . 
n'achetaient pas les femmes, aucune d'elles n'aurait lia 
pensée de se vendre. 
}f De toutes les agences galantes, monsieur le préfet, cdla 



i 



LA PHOSTmJTION A PAEIS 257 

1 benae par la veuve F*** eat encore la moins suspecte; aa- 
Lonn acte délictueux n'a pu être jusqu'ici relevé contre 
Eeea déplorables agissements. Du restie, par principe, ea. 
P^maÎEon fonctiouae contrairement aux habitudes des autres 
leûta de ce genre : le Jeu y est interdit, et elle 
ili'accept« que des sujets majeurs, en pleine liberté de corps 
( d'esprit. 

1 Ses habituées ne logent point chee elle; à partir de 
rois heures, elles arrivent, et les femmes prëeentes au 
{rand salon, habillées en toilette élégante, paraissent tou- 
8 Être en visite . 
M La veuve F*** est le type parfait de la véritable proou- 
. Elle a soixante ans, l'air respectable, les cbeveux 
mdrés, et se donne des airs de duchesse. Le monde irré- 
r la salue. C'est une farceuse qui s'est enrichie de la 
roatîtution après des alternatives de bien-^tre et de mi- 
fcre. Ayant tout vu, tout entendu, elle met sa funeste 
^érience au service des libe>rtins; et, d'après sa compta- 
ilité, malgré son âge, elle aurait, pour certains person- 
E goûts corrompus, des bontés d' arrière-saison. •• 

M. Andrieux, dans ses Souvenirs d'un ancien Pré- 
Jet de police, l'avait dit, et l'on a pa le comprendre 
le rapport ci-deaaus : on ne se doute pas à quel 
lint les hrimmes, dès que leur position sociale 
s'élève au-dessus de l'ordinaire, éprouvent le besoin 
:de se faire connaître aux filles de joie et, plus encore, 
ans proxénètes, et de leur raconter celles de leurs 
affaires dont le récit confidentiel peut le mieux faire 
ressortir leur importance; il en résulte qu'une proxé- 
nète clandestine, aussitôt découverte, s'empresse de 
renseigner la police, et lorsqu'elle est dans le cas de la 
veuve F"**, c'est-à-dire s'il est constaté qu'elle ne 
irostitue pas des mineureB, ses rapports sont acceptés. 



àà 



I 258 LA PEOSTITrTION' A TARIS 

SOUS bénéfice d'inventaire, bien entendu. Que si au 
contraire on acquiert la preuve qu'elle commet des 
délits, elle est livrée aux tribunaiix, chaque fois que 

. la rigueur des lois peut lui être appliquée. 

TJne femme qui a eu une assez grande célébrité, 
c'est cette étrange créature, a. la fois proxénète et 
prostituée, qui se faisait appeler a la baronne 
d'Ange », nom et titre de haute fantaisie. C'est eu 
18r)4 que, quittant son village natal, elle vint à Paris, 

[ où elle se livra immédiatement à la prostitution clan- 

I destine. 

Née en 1844, elle n'avait donc alors que vingt ans, 

] et déjà ses instincts de procureuse perçaient : nuUe- 

J ment jolie, sans être laide pourtant, elle n'avait pas 
de plus grand bonheur que celui de rechercher, pour 
les clients qu'elle se faisait, des camarades de 
débauche, de quatorze à seize ans, et elle tenait à lea 
ofirir aussi belles filles que possible; elle s'attachait 
aux libertins aadistes, à qui le contact naturel ne 
suffit pas, et qui veulent, pour la satisfaction de leur 
luxure, avoir deux ou trois femmes ensemble-Vicieuse 
au suprême degré, elle était certaine de ne pas être 
délaissée par ses habitués pour une quelconque de ses 
comparses, cellea-ci fussent-elles de la plus éclatante 

^ beauté. 

En quatre ans, ses manœuvres lui valurent plu- 
sieurs ariestatioua administratives; deux fois elle fut 
traduite en correctionnelle pour excitation de mi- 
neures à la débauche; finalement, en ISGS, le préfet 
de police la fit inscrire d'office comme fille publique. 
Ses goûts luxueux et son amour de la dépense ne 
l'empêchaient pas d'être très positive; aussi, dès 
qu'elle eût amassé quelque argent, elle s'empressa de 
e mettre dans ses meubles. Ne voubint plus se risquer 



i 



LA PROSTITUTIOS A PARIS L'O» 

comparaître devant lea tribunaus, elle ne s'adjui- 

DÎt désormais que des insoumises majeures ou fies 

meures inscrites comme elle. Cette période de sa 

■ie dura neuf années, pendant lesquelles elle Tint 

■ujours très régulièrement à la visite du Dispensaire, 

it jamais il n'y eut lieu de l'envoyer à l'infirmerie de 

laint-Ijazare, tellement elle savait bien se gai'er des 

laladies vénériennes; à l'époque de son inscription, 

ille avait étudié, en efEet, la question d'une façon 

sérieuse que pratique, en attirant cbez elle les 

:udiants en médecine, dont elle ne convoitait pas 

l'argent, mais les leçons; en peu de temps, elle était 

devenue ainsi très experte. En revanche, comme elle 

isait, d'autre part, à augmenter sans cesse sa cHen- 

■le, elle était d'une impudence extraordinaire dans 

la pratique du raccrochage par la fenêtre, adressant 

faux passants les signes les plus obscènes du répertoire 

les prostituées; ses arrestations pour cette cause 

.rent innombrables, et les détentions adniinis- 

•atives qui lui étaient infligées, coup siir coup, 

raie la corrigeaient pas; obligée de changer constam- 

lent de domicile, par suite des plaintes des voisins, 

■plie recommençait toujours et partout ses appels, ses 

■flignes, ses exhibitions indécentes. 

Un beau jour, un homme du meilleur monde, 
lonté chez elle à son t pstt « provocateur, s'amou- 
,cha follement de cette raccrocheuse; e]le était dans 
trente-troisième année. Il semble que. de son 
ité, elle fut d'abord sensible à cette affection; car 
ille congédia ses adjointes, se transporta dans un 
nouvel appartement, sans en donner l'adresse à ses 
habitués, et se montra d'une correction parfaite. Son 
amant vint appuyer lui-même la demande en radia- 
'tion, qu'elle avait écrite dans une lettre d'une ortLo- 



260 LA pRofiTirrTioN a paris 

grapho aa-dessoua de toutes les facéties boqmllott- 
nesques; il se porta son garant; elle fut alors, en 1877, 
rayée des contrôles de la police des mœura. 

Cette liaiaon ne paraît pas avoir duré pins de deux 
années. L'entreteneur se montra d'une très grande 
générosité; puis, la donzelle n'ayant pas résisté aux 
offres d'anciens clients rencontrés par hasard et revus 
dès lors par elle en cachette, son amant finit par 
ouvrir les yeux; leur brouille eut lieu vers la fin de 
1879. C'est à ce moment que la police eut à se ieaïx 
de nonveau en éveil à son sujet, Mais elle avait lar- 
Ifement espinité l'amour du monsieur; d'importantes 
sommes étaient, chaque mois, déposées par elle à l'on 
de nos grands établissements de crédit, tant et si bien 
que, lorsque la séparation entre elle et son ornant fut 
définitive, elle acheta, rue Saint-Georges, cet hôtel 
qu'elle rendit fameux, dès son installation en 1880, 

A partir de cette date, le tout Paris libertin connaît 
le nom de la baronne d'Ange; la maison de la rue 
Saint-Georges acquiert une renommée fantaatjque; 
c'est un Capharnaùra invraisemblable, où le pris dea 
passes saute et rebondit dans des cabrioles extrava- 
gantes. IJa baronne a le talent de se faire lancer par 
la presse; c'est à qui imprimera contre elle des petits 
mots méchants ou des sentences d'un mépris sévçre; 
en attendant, son nom est partent, et c'est ce qu'il lai 
faut; aussi, tandis qu'elle taxe au minimum de dix 
louis les riches étrangers de passage, elle a soin de 
dire à tout journaliste qui vient chez elle : u Faîtes 
savoir, je vous prie, à vos confrères que, pour vobs 
autres, ce n'est que cent sous, s Elle donne des dîners, 
où ses invités sont précisément ceux qui l'éreintent le 
plus aigrement dans leurs échos et faits-divers. Ua 
^roniqueur boulevardier et boulangiste lui emprunte 



PAais 261 

e l'argent, lui BOuacrii des billets, que des adversaires 
) celui-ci achctent, étant restés impayés; et le jour 
i notie homme pose bel candidature à la députation, 
1 affiche le libellé de sa dette, comme manceiivre Ae 
k dernière heure. 

Aux Champs-Elysées et au bois, loua les prome- 
teurs apprennent à connaître la b^onne d'Ange, dont 
j équipages sont fort beaux; souvent, elle conduit 
ile-même une voiture à deux chevaux très fringants. 
i vogue de sou bôtel de la rue Saint-Georges est 
lelle, que tout autour, à côté et en îace, des rac- 
Eocheases s'établissent, faisant la fenêtre et glanant 
t clientèle des débauchés insuffisamment lenseignéâ. 
a dans ces parages par la notoriété de l'illustre 
fellatrice, mais ignorant le numéro exact de la 
ion. Quant aux amateurs qui savent l'adresse, ils 
Lennent eu foule; les fenames y affluent aussi, les 
mes pour des rendez-vous, les autres comme pension- 
; et les plus jolies, lee plus belles sont toujours 
lipsées par la baronne, dont le inuseau de guenon 
fait prime; en vain offre-t-eile ses com- 
pagnes; neuf fois sur dix, c'est eUo qu'on veut. Elle 
gagne un argent fou. 

Cependant, le scandale qui résulte de tout ceci 
amène des plaintes; les commerçants et les familles 
du voisinage protestent contre cet état de choses. En 
1883, le préfet de police décerne un mandat de per- 
quisition, et la tenue de lupauar clandestin eut con- 
statée; plusieurs femmes sont arrêtées, en compagnie 
de la pseudo-baronne; elles avouent tout. Commtt 
conclusion, ou remet en carte la prostituée proxénète, 
et l'on expulse deux catina belges, trouvées au nombre 
de ses adjointes, dont l'une avilit pourtant un entre- 
teneur qui lui donnait mille francs par acmaiiie', ce 



, 262 LA PRosTi'n-nn?j a taiii 

, flui ne l'empêchait pas de venir aux rendez-vous que ' 
lui procurait son amie d'Ange. 

Se tenant alors, comme autrefois, en règle avec le 
[ 'Diepenjaire, la taronne ne vit aucimement décroître 
sa prospérité. En 1S85, aea économies iui permettaient 
d'acquérir un immeutle important aux Ctamps-Ely- 
18, en sus de l'iôtel de la rue Saint-Georgea dont 
î était propriétaire. A quarante- quatre ans, c'estr-à- 
dire en 1888, elle s'éprend d'un journaliste, de dix- 
huit annéea moins âgé qu'elle, jeiine homme appar- 
tenant à une famille des plus honorahles. Elle licencie 
son gi'oupo de hoautés auxiliaires; et la voilà légi- 
time épouse de ce garçon déséquilibré. Elle l'aime 
tant, que le niariage lui est fatal, à elle; a\i bout de six 
elle succombe à une maladie d'épuisement, 
laissant un testament par lequel son adoré est inatititâ 
.légataire universel de cette fortune amassée dans la 
' iange des débauches à la fois raffinées et ordurîères. 
Parmi les célébrités de la prostitution clandestine, 
il faut citer aussi la femme L***, la fameuse proxé- 
nète de la rue Duphot, puis de la rue Lavoisier. 
Celle-ci vit encore. Elle est mariée : le mari paraît 
. s'occuper de la vente de diamants; en réalité, sa 
I femme et lui s'entendent admirablement et exploitent 
la même industrie, le proxénétisme, dit le dooteur 
Commenge. Ils ont figuré l'un et l'autre dans le 
procès de la rue de Surêne et ont été condamnés pour 
: excitation de mineures à la débauche, le mari à huit 
de prison et la femme à trois ans. Ce malheur ne 
les corrige pas. Ils établissent des lupanars clandes- 
tins en appartement, rue Caninartin, puis rue Neuve- 
des-Capucines, ensuite rue de Rome. Expulsés succes- 
sivement de ces divers endroits, ils se décident enfin 
i prendre rue Duphot une maison tout entière. 



LA PEOSTITDTION A PARIS 2G3 

En peu de temps, cette maison tle randez-Tous se 
liait connaître aux amateurs cle fruit Tect; elle prend 
f la spécialité des mineures, q^uoiqu'on y procure aussi 
des femmes de tout Sge et de toutes les conditions, la 
police des mœurs intervient; une descente est nr- 
[ donnée; tout Paris, en 18S0 et 1881, ne parle que du 
L flcandale de la rue Duphot. Malheureusement, il se 
f produit alors, entre le préfet de police et le juge d'iii- 
letruction, un. conflit grâce auquel la femme L*** a 
I la chance d'échapper aux poursuites. A cette époijue, 
i lieu le suicide d'un général, portant l'un des plus 
■'grands nome de l'épopée napoléonnienne ; un journal 
■ belge en attribue la cause à la maison de la rue Du- 
[iphnt : menacé par un père de famille dont la fille 
Imineure lui avait été procurée par la femme L***, et 
P qui menace d'une plainte au parquet, à moins do re- 
f cevoir 600,000 francs d'indemnité, le général, pour 
t«chapper à un procès infamant ou au chantage, a 
Jcherché la tranquillité dans la mort. M. .\ndrieux 
râémentit ce récit, mais sans révéler la cause du sui- 
f eide. 

A la suite de cette affaire, la femme L*** passa la 
-main à une matrone de ses amies, qui lui acheta 
I 160,000 francs son droit av. bail de la maison de la 
I rue Duphot. Mais ne croyez pas que la femme L'*" 
f prit sa retraite, après cette belle opération: elle s'ins- 
I talla rue Lavoisîer, ayant acheté l'immeuble. C'est un 
riinmeuble dans le genre de celui décrit par le rapport 
rfiité plus haut : les rendez-vous y ont lieu d'une façon 
"assez discrète et seulement de trois à sept heures du 
Boir; la proxénète part ensuite pour coucher à la cam- 
pagne, où elle possède une propriété, et ne rentre à 
Paris que le lendemain vers une heure de l'après- 
1 midi,- Pendant longtemps, elle s'est interdit de t*- 



XA FEOSTITUTIOS A PARIS 

eevoir des mineures; aussi les voisina n'ont-ila paa eu 
l'occasion de se plaindre. Cette réserve extraordînair» 
ne pouvait pas dnror; les visites devinrent plus nom- 
breuses, et de toutes jeunea filles furent attirées ruo 
Lavoisier, 

En 1SS4, on a beaucoup parlé, dans les couiiasea de 
l'Opéra, de l'audace inouïe de la femme l"** et de 
ses émissaires qui ne crai^irent pos de s'introduira 
dans certaines familles pour exciter les mineures à la 
débauche; on a cité notamnlent im fait qui s'est 
produit pour une jeune fille de seize ans, danseuse à 
l'Opéra, qui avait été, pendant plusieurs mois, l'objet 
d'obsessions fréquentes d'un» proxénète en soua-ordre, 
agissant pour le compte de la femme L***. Cette 
émissaire avait cherché à attirer la jeune fille dans la 
maison de la rue Lavoisier, où elle devait rencontrer 
un abonné de l'Opéra, fort riche, qui, étant très amou- 
reus d'elle, était disposé à ne reculer devant aucun 
sacrifice d'ai'gent pour obtenir ses faveurs; après lui 
avoir offert, à plusieurs reprises, des sommes impor- 
tantes pour une simple entrevue, alors même qu'elle 
ne consentirait pas à céder airs désirs de son amou- 
reux, l'entremetteuse eut le cynisme de se présenter 
chez les parents de la jeune fille et demanda à lui 
parler en particulier; c'est à la suite de cette dé- 
marche que le parquet fut saisi d'une plainte de» 
parents. Des lettres parvinrent également à la Préfec- 
ture de police, pour signaler l'existence de cette 
maison et de plusieurs autres analogues. En voici une 
fort intéressante à tous les points de vue : 

« Monsieur le préfet, 
Veuillez permettre à un de vos administrés de vous 
lin avis. J'ai appris que vous étiez disposé à se- 



^■^ » Veui 



^'W" 



I-A FROSTTTrTIOÎJ A PARIS 265 

r contre toute cette tourbe infâme de ûlles et de aoute- 
mn qui peuplent les rues de Paris; or, o'cst à ce sujet 
e permets de vous écrire. 

it une espèce de femmes, qui livrent des jeunes 

nies, presque des enfante, h des individus avec lesquels 

i ont traité à forfait. Cet immonde tripotage, cette 

e des blanches se fait sur une vaste échelle, presque 

lia rue de tone, et ce serait une indignité de tolérer cela 

i longtemps, d'autant plus qu'on est sujet, dans ces 

L attraper les plils horribles maladies; c'est ce 

ïi, malbeureu sèment, eet arrivé à mon fils, et c'est par lui 

s je suis parvenu à connaître l'adresse de ces femmac 

une, je crois, des entremetteuses (suit la noriitm- 

Mature). 

\ V Espérant, monsieur le préfet, que vous voudres bien 
i lettre en bonne part et donner, de votre 
ngne vigoureuse, un coup de balai dans tout cela, je me 
in votre dévoué serviteur. — N*** » 

I C'est par milliers que la Préfecture reçoit de» 
ttres, de ce genre, mais très rarement signées et 
ipant surtout des hommes qui ont appris à leurs 
ipeiis que l'on n'est pas à l'abri des maladies véné- 
ines en recherchant de préférence les prostituées 
Uandestines. Les chiffres sont là, qui attestent les " 
ZLgers de la contagion et prouvent combien sont in- 
jants les pouvoirs accordés à l'administration, 
mbien est insuffisant le nombre des agents des 




NECESSITE DE Lit POLICE SANITAIRE 



.-«rtitude 

de In police de« 



Lt-s ««tiitistiquvN aiiitui'llfM 
('MitstHtvs élahli^bteiit, a 

absolue, que lu («u|>|ii'eHHi. .. 

iiio'ufs Herait une mesure déNastr< 

De toutes les maladies riui peuvent affecter l'espèce 
humaine par voie de contagion, et qui portent à la. 
société les plus grands préjudices, il n'en est pas de 
plus grave, de plus à redouter que la sypliilis; les dé- 
sastres qu'elle entraîne l'emportent sur les ravageai 
qu'ont exercés toutes les pestes qui, de temps en 
temps, sont venues porter la terreur dans le monde. 

La peste, et en général toutes les épidémies, nous 
effraient, parce que nous n'y sommes pas accoutumés, 
parce qu'elles frappent ostensiblement Tin grand 
nombre de victimes, parce qu'elles se jouent des 
moyens qu'on leur oppose et des remèdes avec lesquels 
on cherche à les combattre. Mais tous ces fléaux sont 
passagers; les vides qu'ils laissent dans les populations 
sont à peine sensibles; de longs intervalles séparent 
le plus ordinairement lea moments de leurs appari- 
tions, et les coups que frappent quelques uns tombent 
souvent de préférence sur les vieillards, les infirmeSj 
et ces êtres débiles, inutiles à la société, et qui, dans i 
tout état de choses, ne sauraient longtemps pro- 
longer leTir carrière. 

La syphilis est chez nous, elle est chez nos voisins, 

elle est dans l'univers. Elle ne tue pas immédiatement, 

^iJ est vrai, comme beaucoup d'autres maladies; mais 

i n'empêche pas que \e nombre de ses victimes ne 



LX PROSTITUTIOX A PARIS 267 

soit immense. Ses ravages n'ont pas d'intenuption. 
Elle frappe de préférence cette partie de la population 
qui, par aon âge, fait la force aussi bien que la ri- 
chesse des Etats : le fléan vénérien vient énerver, 
pourrir cette population au moment même de son exis- 
tence, où, par les lois de la nature, elle se trouve en 
état de procréer des êtres vigoureux; et si la ayplulis 
no rend pas cette popiiiation stérile, les naalhenreux 
qui en proviennent forment une race abâtardie, em- 
poisonnée dans le sang et jusqu'aux moelles, aussi 
impropre aux fonctions eîviles qu'au service militaire, 
et qui en définitive est un fardeau pour la société. 
Enfin, l'innocence et la vertu la plus pure ne sont pas 
à l'abri de ses atteintes; que de nourrices mercenaires, 
que d'épouses vertueuses, que d"enfants à la mamelle 
en sont tous les uns cruellement attaqués ! 

Ce parallèle entre les ravages que font les grandes 
épidémies et ceux que la syphilis exerce d'une 
façon permanente, nous montre en peu de mots com- 
bien fut déplorable la faute commise par uos pères, 
qui, depuis 1494, époque oii parut le temble fléau 
vénérien, jusqu'à la Hévolution, ne se préoccupèrent 
pas d'arrêter les progi'ès de cette teiTible maladie. 
Pendant trois cents ans, les pr'.istituées, abandonnées 
à ellea-mêmea, ont pu répandre leur venin avec toute 
la liberté possible; on frémit, rien qu'en y pensant. 
Nous devons donc réparer la fatale erreur de nn^ 
pères, en tenant les filles publiques dans une étroite 
surveillance, en maintenant rigoiireusement l'obliga- 
tion de les soigner, chaque fois qu'elles sont trouvées 
contaminées. 

Ces soins, cette réglementation ne blessent pas la 
morale : dans toute grande agglomération d'hommes, 
il y aura toujours des individus portés à la luxura. 



« 



»w 



U\ PROSTITUTIOS A FAI 

comme d'autres ont la passion du jeu, et, par coi 
quent, les prostituées sont aussi inévitables que les 
égouts, les voiries et lea dépôts d' immondices; c'est 
pourquoi l'autorité doit être la même à l'égard dca 
uns qu'à l'égard des autres; son devoir est d'atténuez 
par tous les moyens possibles les înconvénienta qai 
leur sont attachés, et, pour cela, leur canalisation, 
si l'on peut s'exprimer aiosi, est indispensable. 

n est iaus de dire que le système de la réglemen- 
tation encourage le libertinage; les abolitionnisteB 
sont obligés de reconnaître eux-mêmes que les A&- 
baucbés recherchent de préférence les prostituées iit- 
Boymiaes, et le nombre formidable de celles-ci 1» 
prouve d'ailleurs sans réplique, lorsqu'on le compare' 
à la quantité relativement minime des allés sounaiseft' 
Et non seulement le régime de la réglementation, 
avec ses sévérités nécessaires, n'eacourage pas la dé- 
baiiche: mais encore il contribue à coaaerver la aantâ 
d'une foule d'êtres innocents; il diminue le nombre 
des prostituées, des infanticides, et des enfanta aban- 
donnés. La salubrité publique, la morale, la charité, 
commandent cette surveillance et ces soins. 

a Puisque le vice existe malheureusement dans sm 
mœurs, écrivait l'honnête Haspail, tâchons au moisa 
d'en paralyser les conséquences. > Loin de demander 
suppression des maisons de tolérance, Raspail 
était d'avis que la visite des hommes devrait y être 
obligatoire. « Pour mieux parvenir à extirper la con- 
tagion des maladies syphilitiques, écrivait-il eneore, 
je voudrais que l'on établît en usage que, dans les 
maisons publiques de prostitution, qui sont les aeulm 
tolérables, une matrone experte fût chargée de visiter 
^ceux qui entrent, tout aussi bleu qu'on y visite Iss 
talbeureases créatures qui servent à ce honteux 






LA PEOSTITDTIOS . 



métier; on prendrait ainsi des précautions salutaires 
pour que l'infection ne revînt pas du deliors à l'ins- 
tant où la visite du médecin a pourvu à ce qu'elle ne 
vînt pas tlu dedans, » Et il ajoutait: « Que mes 
lecteurs ne perdent pas de vue qu'en prenant à cœur 
l'intérêt de la santé du jeune libertin, je prends peut- 
être celui de leur gendre futur et de leurs petits- 
enianta; en un mot, l'amour de l'humanité, qui doit 
être pratique nous fait un devoir de chercher à débar- 
rasser la société d'un virus qui abâtardit l'espèce. > 

Les cabarets à pseudo-bonnes, filles insoumises, les 
brasseries de femmes, les innombrables légions de 
prostituées clandestines qui se font suivre à la rue, 
qui raccrochent au café en attendant l'amateur auprès 
d'un boet, les soupeuses dea restaurants de nuit, les 
ouvrières des faux ateliers, les demoiselles des fausses 
boutiques, les coureuses d'omnibus, lea allameusea des 
bais publics, les domestiques dépravées, les hallièrea. 
les pieiTeuses, et tout aussi bien les femmes des 
maisons de rendez-vous, les filles à parties, les soi- 
disant masseuses et autres secrètes prostituées qui 
attirent les libertins chez elles par des moyens discrets 
ou une publicité habile, les mouches d'or du théâtre 
et du café-coueei-t, les cocottes de tous les degrés, les 
demi-mondaines et même les derai-cnstors, et jus- 
qu'aux épouses indignes qui pratiquent l'adultère 
vénal, en s'embusquant dans les parcs, les jardins 
publics et surtout les aqnares proches dos grands 
mafrasins. voilà lea sources malsaines d'où la syphilis 
et les autres maladies vénériennes se répandent avec 
la plus intarissable abondance. 

Nous :ivons établi plus haut (voir page 16) que le 
cbifEre moyen de la circulation réelle des filles ins- 
crites, soit ensemble les pensionnaires des maisons de 



r 

I 



I 



LA PROSTITUTION A TAHIS 

tolérance et les filles eu carte, est de 3,200 ou tota 
ammellement. Knua rappelons, d'autre part, que 1 
moyenne annuelle des arrestations de prostitoéei 
laudestiues est de 2,300, et que, Paris n'ayant en tou- 
que 150 inspecteurs et agents préposés à cette œuvw 
spéciale de moralité et de salubrité, on ne réussit p 
à prendre une clandestine sur cinquante; 2,300 am 
tations d'insoumises représentent un eiîectif clan- 
destin de 115,000 prostituées, nombre qui se rap- 
proche de l'évaluation de M. Maxime du Camp. 

Or, 2,400 filles en carte, soumises à l'obligatio 
venir se faire visiter au Dispensaire une semaine nou 
l'autre, donnent lieu, pour les régulières, à un total 
annuel de 64,000 visites, lequel s'élève jusqu'à 57,6 
avec les irrégulières; et SOO filles à numéro, hebdoma- 
dairement visitées dans les maisons de toléranc©, 
donnent lieu à un total annuel de 41,(!00 visites ; 
ensemble, 99,200 visites pour 3,200 filles inscrites, 
c'est-à-dire pour l'effectif de la prostitution tolérée, 
à raison de sa soumission aux règlements. Par 
contre, 2,300 arrestations de prostituées flandestïnes 
ne représentent, forcément, que le même nombre de 
visites; soit seulement 2,300 visites par an, dans on 
effectif de 115,000 filles insoumises, Itetenez bîen'( 
cErffres. 

Maintenant, sachez que la récente période décea 
nale, spécialement étudiée par le docteur CommengQJ 
médecin en chef du Dispensaire, a fourni un total de 
8,592 constatations d'accidents syphilitiques chez dev 
prostituées; notez que nous négligeons les cas d'uloé* 
rations, de blennorrhagie et de gale plus ou moinS 
vénérienne, et que nous nous occupons exclusivement 
ici des cas de syphilis. Ces 8,593 constatations, ayaili 
iBotivé autant d'envois de femmes à l'infirmerie d© 



LA PROSTITUTIOJf A TARIS '-i71 

iiit-Lazare, se sont réparties ainai : 954 aceùleiits 
B fiUea en carte, 1,361 chez des filles en maison 

315 au total pour la prostitution réglementée), et 

b7 accidenta chez les filles du Dépôt et autres clan- 

■tînea découvertes par hasard, et conduites à l'exa- 
1 du Dispensaire. 

j avons ainsi les diverses moyeuuea annuelles, 

) certaines, puisque ce sont là dea chifirea d'une 
nidiscutable authenticité; ce sont les chiffres mèmea 
du Dispensaire et de Saint- Lazare. Donc, nous avoua, 
par an, 231 accidents syphilitiques sur les 99,200 vi- 
sites annuelles du personnel de la prostitution 
soumise, et 627 constatations de syphilis, également 
par an, sur 2,300 visites d'insoumises, amenées par le 
hasard des arrestations, représentant la cinquantième 
partie de l'effectif clandestin. Il faut, en conséquence, 
multiplier par 50 le chiffre des clandestines syphili- 
tiques arrêtées par hasard, pour avoir le total appro- 
ximatif des insoumises contaminées, et pour pouvoir 
opposer ce total à celui des soumises, malades du 
même mal, lesquelles sont l'objet d'une suiTcillance 
permanente. 

Conclusion : 231 accidents syphilitiques annuels 
chez 3,200 filles soumises, contre 31,350 également 
annuels chez 115,000 insoumises. 

Autre conclusion: en attendant que nos législateurs 
se décident à fortiiïer les poiivoirs de la police dos 
mœurs, il faut pourtant apprécier le bien qui résulte 
de l'envoi de ces 8.593 prostituées syphilitiques 
à Saint-Lazare. Elles y restent en traitement trente 
jours, moyenne d'une évaluation très modérée. Ces 
malhenreusea ont donc été mises pendant 257.700 jours 
dans l'impuaaibilité de transmettre leur maladie; or, 
comme elles ont ime moyenne de 5 contacta ça.v ifwa 



F 



372 LA PROSTITUTION A FAEIS 

la pcilice aanitaire a empêché 1,288,800 cas probables' 
de contagion, en dix ans, à Paris. 

Troisième et dernière concluBion, qui s'impose; sup. 
primer la police sanitaire, spéciale aux proatitnée^ 
serait, ci plus ui moins, un crime contre la HOciété, 
contre l'Humanité. 



NOTICE SPÉCIALE 

Statistique officielle d« la prostitution à Paris, 
en l'an 1900. 

Pour démontrer victorieueement !a nécesaité de lai po- 
lice aanitaire, il n'y a pas, croyons-nous, de chiiEres plu» 
probants que ceux de la statistique de 1900, chiSrea offiiâd^ 
indiscutables, que chacun peut vérifier; car l'administr»- 
tioD préfectorale, dont la rigide discrétion au sujet éa 
personnes bq comprend, ne fait, par contre, aucun my»- 
tère de ses constatations numériques. 

Voici donc les chiflres officiels de 1900, année de grs 
Exposition uniTBreelle, et la dernière année du xiz* siëalei 

Nous avons vu (page 193) que Paris comptait 48 maiaoïui 
de tolérance, avec 504 filles à numéro, an 31 décembre 1300;. 
il est bon de savoir qu'au 1" janvier les dites mai 
étaient 49, une de plus, avec 490 âllea, sait 14 fillea d«] 
moins. Quant à la totulitii des fillca inscrites, elle atteî?> 
gnait le ngmbre de 6,180 au 1" janvier, et celui de 
6,222 à fin décemlire; ne l'oublions pas, ceci ne veut pas 
dire qu'il y a eu, à ces deux dates, 6,180 et 6,222 fiUes 
circulation; il en faut déduire un bon nombre (voiï 
page 15). Toutefois, la déduction ordinaire étant d'uM 
millier, on est obligé de reconnaître que des progrès s'ac- 
complissent, puisque, de 3,200, précédente moyenne, doua 
sommes arrivés, après la déduction habituelle, à 5,200 



L.1 PROSTITUTION A P.UfIS 2 M 

îres ronds, Boit une pluB-value de 3,000 filles astreintes 
h la mirveillaoce saoîtaire; ce nombre est important, et 

a ne saurait trop en féliciter la. police des moeurs. 

E L'année 1900 a compté 680 inscriplions. 

1 D'autre part, les radiations y ont atteint le total de 945. 

B nombre se décompose ainsi : 122 radiations définitives, 

B 823 radiations provisoires (voir, pages 151 et suivantes, 

I chapitre relatif aux radiations). Les provisoires ont 

6 uniquement des radiations ordonnées par le préfet de 

dice pour le fait de disparition remontant à plus de 

B mois, Boit 8S3 disparitions au lieu de 1,4T5, chiffre 

■ la moyenne précédente (voir page 157); il n'y a pae ii, 

I 1900, ^e prostituées devenues maStresses de maison, 

t de filles soumises ayant encouru une condamnation de 

m. Les 122 radiations définitives se subdivisent 

me suit : il y a eu 26 décès de filles soumises; 39 se 

}Dt mariées en cette année, chiffre énorme, puisque la 

me de ces mariages est 7 par an (exceptionnellement, 

|: en 1895); enfin, le nombre des radiées pour abandon 

^ la prostitution sous d'autres motife que le mariage, 

b la moyenne ordinaire est 31 (soit 18 comme vivant de 

' travail, et 13 comme ayant trouvé des répondants 

irieux), s'est élevé à 57 en 1900. 

9qub le rapport des lieux d'origine, parmi les 680 prosti- 

I dont l'inscription a eu lieu k Paris en 1900 : — 

M sont nées à Paris mâme ou dans sa banlieue; — 412, nées 

a le reste de la France; — 44,. nées à l'étranger. 

(Quant à la prostitution clandestine, elle a donné lieu k 

mbre d'arrestations plus élevé que celui de la 

tyenne annuelle ordinairei, qui se tenait à 2,300: rn cette 

) 190O, ces arrestations d'insoumises sont mciiitées à 

u total, malgré la regrettable insuffisance du nombre 

a agents des mœurs. 

iDisons d'abord que ces 2,&40 prostituées insoumises, 



274 LA rnosTiTCTiox a taeis 

n a. pu mettrB en état d'arrestation, reprÉBenfcent 
réalité 3,800 unit*8, parce qu'il faut déduire 140 réarree- 
Lations do certaîneB d'entJ'e elles, prises plusieurs fois 
dans le courant de la même année. En efEet, on a trouvé^ 
saines 1,133 inaoumises majeures et 1,030 insi 
neures; et les autres insoumises ont donné lieu à la conBba~ 
tation de 637 cas de maladieE vénériennes, se répartissant 
entre 190 majeures et 422 mineures, au total 612 unitéH 
' malades, plus 25 récidives de quelques unes dans la okême 
année. Oee 637 cas d'affections vénériennes, constatés ehœs 
les prostituées clandestinea, se divisent en 319 cas de sy phi-- 
lis et 318 cas de maladies vénériennes non sjpliilitiquee. 

On voit par là que l'empoisonnement vénérien des ûHes 
insoumises est toujours formidable, puisque c'est à peins 
si l'on peut surprendre et saisir une prostituée clandestine 
sur cinquante. 2,-940 arrestations de 2,800 insoumisea a-yv/ab 
amené la constatation de 637 maladies vénériennes, près du' 
quart de coa prostituées rebelles soat donc en état d'io^ 
fecfcion; ce qui permet de dire que les 912 unités maJades 
dont il s'agit donnent le droit de croire à 30,600 ûlles clui- 
destinsB vénériennes sur l'effectif total de 120,000 (chiffre 
de M. Maxime du Camp). 

Par contre, nous avons constaté avec satisfaction que 
l'œuvre du Dispensaire de salubrité de la Préfecture dft 
police est de plus en plus eflËcace. Les filles de maison, 
qui sont visitées régulièrement, et dont le nombre a âott^ 
de -190 au 1" janvier à 504 au 31 décembre, 
que 29 malades dans toute l'année, soit S3 mises en traite- 
ment pour sypliilis, et 6 pour autres affections vénérienne» 
non syphilitiques. Quant aux filles en carte, qui 
moins régulièrement à la visita, elles ont présenté quasd' 
même beaucoup moins do dangers de contagion que le* 
prostituées insoumises : leur nombre moyeu ayant ét^ 
de 5,700 en 1900 (soit environ 5,200 en circulation), on a 



•y^ 



LA rjtOSTITrTIOX A PAKIS 



h en. envoyer à Saint^Lazare 214 pour Ëyphili», et 153 pour 
vénériennes non syphilitiquee. 
VËn résumé, l'année 1900 a permis de constAter, comme 
itteintee dn maladies vénérienneB, à Paria : 

Filles de maison 1 sur 17 

Cilles en carte 1 sur 13 

Fillea inaoumisoB 1 sur 4 



PAprès cela, qui oserait dire que la police BîuiibaireF 
~Bectée à la surveillance des prostituées, est inutile? 
mJJa fait très caractéristique prouvera l'excellence de son 

Bvice. On est en droit de croire que la grande affluence 
1 visiteurs pendant cette année d'exposition a pu avoir 
e action morbide exceptionnelle, dont lee prostituées pa- 

isiennee ont dû multiplier les dangers. Cela est, sans 
;, vrai pour la prostitution insoumise, dont le nombre 
da vénériennes s'est élevé au quart de l'effeotif; mais les 
filles aoumisea, étant surveillÉea de trta près, ont donné 
lieu, en 1900, à un total de 396 accidenta vénériens, tandis 
qu'en 1889 elles en avaient fourni 421, soit 25 de plus. 

Enfin, il faut noter que, parmi les femmes qui sont ar- 
rétéee en flagrant délit de raccrochage quatre fois constaté, 
il s'en trouve toujours, malheureusement, qui sont obligées 
d'avouer, à leur honte, qu'elles se prostituent, étant femmes 
mariées, pour pourvoir en secret à leurs frais de coquet- 
terie; la position de ces femmes met, chaque fois, la police 
dea mœurs dans un grand embarras. En 1900, il s'en est 
trouvé environ 14 par mois dans ce cas; chiffre navrant! 
Dans toute l'année, parmi les prostituées clandestines, 
185 femmes mariées ont été arrêtées; tel est le chiffre 
officiel. Sur ce nombre, 25 ont été trouvées atteintes de 
maladies vénériennes : t/etix sur treize!. .. 



SECONDE PARTIE 

La PROSTITUTION en PROVINCi 

EN ALGÉRIE ET EN TUNISIE 

La prostitution n'a pas, en province, le mê 
aspect qu'à Paria: en général, plus la rille 
d'ordre inférieur sous le rapport de la popalatûni 
plus les prostituées paraissent y observer une ploi 
grande réserve; sauf de rares exceptions tenant at 
genre spécial de la population, la toute petite villQ 
lorsqu'elle a des filles de débauche, n'a point le c 
grément de les voir se livrer au scandale, et les inscni' 
mises n'y sont pas efErontéea, ni les filles en carte; j 
n'y a que les plus grandes villes, où un 
nombre de prostituées, moins timorées que la mai 
des autres, afEeetent, selon leur rang, soit les allni 
tapageuses des cocottes de la capitale, soit la voyou 
série cyniqiie des basses raccrocbeusea parisiennes. 

En province, le régime des maisons de tolérauiM) 
dans presque tous les départements, accorde à la p 
sionnaire, en sua de la propriété de ses a gai 
tant sur le montant de la passe, le plus ordinairemai 
la moitié; en revanche, et contrairement au réginxe i 
Paria, ces filles paient leur pension, de 90 à 200 fraxu 
par mois, selon le degré plus ou moins élevé de ] 
maison. Mais, là cnmmo ici, elles sont exploitées j 
la cupidité insatiable et féroce des tenanciers et i 



^^p»f« 



L-K PEOSTITCTIOS A TASIS 277 

lancières. Le compte des recettes s'établit par 
j frappée avec auméro d'ordre et remis à cliaque 
: en montant avec le client, la fille donne son 
à la patronne ou au patron ( à la gous-maitresse, 
i les lupanars d'ordre supérieur), et ce jeton est 
issitôt déposé dons une tire-lire mtmie de cadenas; 
t dépouillement est fait chaque matin en présence 
I intéressées, et le résultat est porté sur le livre de 
mptes; la balance est établie à la fin du mois , 
ftOants et moitié des passes sont, comme on pense, 
lorbés par les diverses dépenses de ces filles, pour la 
bpart nourries et entretenues fort mal. Dès leur 
trée, elles sont chargées d'une dette, provenant du 
llrtage accordé aux placeurs et placeuses. Ensuite, 
que l'établissement leur fournit, comme à 
ffîa, leur est vendu i des prix usuraires. La seule 
qui peut leur arriver, c'est de faire le 
îBprice 1 d'un viveur bien argenté, qui les sort du 
ianar, en o payant ta dette », et devient amant 
[«teneur, tant que dure son ■ béguin », sa fan- 
^^ ce qui arrive quelquefois dans les grandes 

L Tilles. Sinon, la fille de maison reste à l'entière discré- 
tion de la tenancière, qui ne la laisse partir que lors- 
qu'une autre maîtresse, en la prenant, rembourse ce 
qu'elle est censée devoir, La dette grossit ainsi sans 
cesse, et plus ou moins fortement selon le snceèa de 
la fille; il n'est pas rare qu'une prostituée qui 
a changé plusieurs fois de maison se trouve endettée 
de sommes dont elle ne peut jamais se libérer. 

Dans les lupanars clandestins et les maisons 
secrètes de roudez-vous, le personnel féminin eat 
exploité d'une autre façon: c'est la proxénète qui per- 
çoit directement l'urgent du client, et, comme il est 
convenu entre eux deux que la femme touche par l'in- 



J 



a78 



LA PaoSTITl'TlON' EN PEOVISCË 



termédiaire de la propui'euse le prix de six honte, celle' 
ci ne remet à l'autre que ce qu'elle veut, le moînff 
possible, et la prostituée ne reçoit presque jamais de 
■ ganta ». Au surplus, les proxénètes clandestinea 
s'arrangent toujours pour être en compte avec leurs 
prostituées, pensionnaires ou iabituéea; elles vendent, 
exactement comme les tenancières de tolérances; elles 
font naître les occasions de dépenses, de façon à lie 
pas cesser d'être créaucières de leurs victimes, et rien 
ne coûte plus cher que le semblant de liberté de ces 
filles insoumiaea. Si la fille qui vient se prostituer 
dana une de ces maisons clandestines est mineure, 
c'est par la menace de faire tout savoir à sa famille 
qu'on la tient; si elle est mnjeuvi?, ou lui donne à 
craindre la police et le lupanar fermé; d'une intelli- 
gence en général très boi'nêe, ces filles ne songent paa 
un instant à se dire que de telles menaces sont une 
comédie, puisque la proxénète ne peut les réaliser 
qu'en se compromettant elle-même. 

A vrai dire, au point de vue des gains, c'est la fi 
en carte et vivant isolée en chambre, qui serait 
mieux favorisée en province, ai elle n'avait paa contr» 
elle le préjugé presque unanime des clients. Les liber- 
tins, de passage dans une ville, préfèrent les maisons 
de tolérance, et ceux qui habitent l'endroit n'aiment 
pas s'exposer à être reconnus, un jour ou l'autre, par 
des filles inscritea à la police et librea de leurs allées 
et venues; ila vont donc au lupanar, toléré ou claur 
destin, ou bien fréquentent celles des insoumises- 
isolées, dont l'intérêt est de ne se livrer à la débauche 
que dans le plus grand seciet. 

Toute proportion gardée, les lupanars de province 
sont à peu près comme ceux de Paris; on n'y trouve 
cependant aucune tolérance de premier ordre, qui soit 






^^u< 



Ui PROSTITfTIOX EN PROVINCE 279 

la liauleur de cea luxueuses grandes maisons de la 
tpitale dont la renommée est universelle, ni des 
laisons de rendpz-vous montées lîOmme celle de la 
baronne d'Ange ou comme lea hôtels de la veuve F**«, 
de la femme L**', etc. D'autre part, la province a 
deux spécialitéa extraordinaire ment turbulentes : le 
< boxon à matelots », dana les ports de mer. et la 
« maison à soldats », dans les villea de garnison. 

Edmond de Concourt, dans son roman La Fille 
Elisa, a décrit de main de maître ce dernier genre de 
lupanar à estaminet, avec sa coliue de lignards, d'ar- 
tilleurs, de dragons, et ses grosses femmes, faisant 
déborder leurs nudités molles sur le drap des uni- 
formes. Nous regrettons de ne pas avoir assez de place 
pour reproduire cette page, merveilleuse de vérité. 
Enfin, sous le rapport des maladies vénériennes, 
ou ne peut guère se prononcer en toute certitude, au 
aujet de la prostitution dans les départements. La sur- 
veillance n'y dépend pas de la Préfecture de police, 
et, en ce qui concerne les insoumises, les munici- 
palités ferment volontiers les yeux et laissent faire, 
pourvu qu'il n'y ait pas de scandale; de soi-te que, les 
statistiques étant presque partout fort incomplètes, 
les chiffres trop peu nombreux que l'on a, se montrant 
tantôt avec de grands écarts de variation, et tantôt 
contradictoires même, ne sauraient être considérés 
comme décisifs. Le bon sens seul permet de dire qu'ici 
et là, comme ailleurs, comme partout, une prostituée, 
visitée par les médecins d'une manière régulière et 
fréquente, est naturellement moins malsaine que celle 
qui, livrée à elle-même, se préoccupe peu de ces acci- 
dents sj-phititiques, dont, en somme, elle n'éprouve 
pas de douleur; le cliancre de la syphilis, les plaques 
.uqueusos. lu roséole et autres sypliilides, inquiètent 



L.< PKOSTIT€TI0N EN PROVINCE 

nioina les prostituées que la blenncirrliagie, la 
rrliagie, et certaines maladies de l'utérus, de la vulve 
ou du vagin, non comprises parmi les affections véné- 



â. Etat a<-lucl d« la proittîtiiti 



1 Provluce 



I 



Répartition de 784 maisons de tolérance, 9,657 filles 

(dont 4,591 fliles de maison et 4,966 (Ulea en carte), et 
35,491 filles insoumises, proBtitnces plna on moins clandes- 
tines. — Tableaa général donnant les effectifs par dépar- 
tement ; division particulière détaillant la, prostitution da 
chaque ville, et comprenant même les petites communes 
rurales signalées à l'occasion de cas curieux de débaudie, 
plus ou moins notoires ; obseirations caractéristiques, niinï^ 
tieusement recueillies dans notre enquête générale. — 
Influences diverses, avec^leurs ctiffres moyens annuels de 
' prostituées : Tilles de garnison, ports de nier, centres induav 
triels et manufacturiers, gares de cbemins de fci dans lea 
communes rurales, villes d'eaux, stations biTemales et sta^ 
tioos balnéaires, localités avoisinant lea lieux de pèlerinage. 
— Appel à la collaboration do nos lecteurs. 

Dans la nomenclature qui va suivre, nous n« 
donnons que soub réserves les chiffres d'évaluation 
relatifs à la prostitution clandestine; ces chiffrea-lii, 
quand ils sont quelque peu élevés, sont des moyennes 
annuelles, qui manquent forcément de précision, et 
c'est seulement lorsque le uomtre de prostituées clan- 
destines signalées est très minime, que nous avons nn 
cMfEre bien certain. Au contraire, les chiffres se rap: 
portant au total d'arrestations dans chaque départe- 
ment, sont des moyennes annuelles précises, ainsi que 
les nombres des prostituées en maisons de tolérance et 
ceux des filles en carte. Pour fixer ces moyennes 
annuelles, on a opéré sur un ensemble d'années con- 
flécutives, et cet ensemble a varié suivant les localités; 



■^ 



K pnosTiTunox E>r provii^ce 281 

mais jamais on n'a eu un groupe de moina de ciuq 
aimées, prises toujours à la fin du dix-neuvième 
siècle, ce qui permet de tenir nos moyennes annuelles 
pour certaines. Quant aux chiffres, se rapportant aux 
maisons de tolérance elles-mêmes, comme lenr varia- 
tion est décroissante, il ne fallait pas donner une 
moyenne annuelle; nos cliiffi'es s'appliquent donc aux 
maisons existant en 1900. Enfin, pour que le lecteur 
puisse se livrer à une étude comparative, il nous a 
paru utile de placer, après le nom do chaque ville, le 
nomhre de ses hahitants. 

Nous remercions ici, comme elles le méritent, les 
personnes qui ont Lien voulu répondre à nos 
demandes de renseignements: les docteurs en méde- 
cine, nos confrères, ainsi que MM. les journalistes et 
secrétaires de mairie, qui ont compris l'utilité de 
notre enquête, oBt droit à la reconnaissance de noa 
lecteurs; car, sans cette aimahle et officieuse collaho- 
ration de plus de 200 correspondants, nous n'aurions 
pas pu dresser un tableau aussi précis de l'état actuel 
de la prostitution en province; vu l'absence de tout bu- 
reau central d'informations à ce sujet, le travail que 
nous présentons aujourd'hui au public n'avait pu être 
fait par aucun auteur. 

TABLEIU DES EFFECTIFS PAfl DËPARTEMEIIT 

Les noDiB de viUeB, imprimés -en Petitbs CiPiiiXBS, sont 
ceux des chefs-lieui do départenkent et des sous-prêfectnrea, 
le chef-lÎBU préfectoral placé en tèto; !ea locaiitéa, qui ont 
un effectif de prostitubion, sans être àea souB-préfectnres, ont 
leurs noms imprimés en Ikiliqves. — Pour ne pas répéter Biins 
cesse les mêmes mots dans cette nomenclature, ce qui en aurait 
allongé inutilement le texte, nous avons dû recourir aux 



, 283 I-A PKOSTITL'TION EX l'EOTIXCE 



abréviations : h., habitants; m.f., maisons de tolêrancAf 
f-m., filles de maison; f.c, fillefi en cncte; pr.el., filles de pro- 
stitntion clandestine; arr., moyenne des arrestations annueUes 
dans la totulité du département ; r. g., ville de garnison ; st., 
Btation de chemin do fer; p.m., port de mer; dtp., départe- 
ment; ciif., environ, pour indiquer qu'un nombre est variable; 
cli.L, obff-licu dii département. 



Ain. — BotTRO : 18,968 b.; st. et v. g.; 1 m, t,, avenue 
des Pavillons; 12 f. rn.;Of. c; 60 pr. cl. — Bellev : 6,295 h,; 
at. ot V. g,; 1 m. t., rue Saint-Martin; 8 £. m. ; f, c.; pr. 
cl. — Gex : 2,659 h.; néant. ~ Nanttta : 3,297 h,; st.; néant. 
— Teévoux : 2.689 h.; st. ; néant. — Sallionaj/ : 3,382 h.;at. 
et camp permanent d'une division militaire; 1 m. t., me 
de Lyon; 7 f. m.; plus de !D0 pr. cl, en garnis. — Bret- 
tolles ; 501 h, ; camp de la Valbonne; 1 m. t., avec 6 f., ou- 
Tcrte l'dté seulement, route de Montluel. — arr. — Dazis 
ce département, la prostilution se consacre presque exclu- 
ï garnisons. * 



Aisne. - LAr.N : 14,139 h.: st. et v. g.; 1 ni. t., rue des 

Frères; 10 f. m.; 15 f. c.; 60 pr. cl. — Château-Thierry : 

7,015 h.; st.; m. t.; 6 f. c; 20 pr, cl. — SAiNT-QuEurm : 

50,150 h.; 2 m. t., ruo des Patriotes et rue des Corbeaux; 

17 f. m.; 108 f. c; 200 pr. cl. — Soibsons : 12,074 h.; at. et 

Ï.;I m. t., rue Neuve-de-l'Hôpital; 8 f. m.; 5 1 c.;30pr. 

I b1. — Vebvinb : 3,233 h.; st.; 1 m. t., rue de 1» Oité- 

,' OnvriÈre; 6 f. m.; 2 f. c.; 10 pr. cl. — Ckauny : 9,315 h,; 

, rue (les Lavoirs; 6 f. m.; 15 f. c. ; 40 pr. cl. — 

I Cuise : 8,153 h.; st.; 1 m. t., rue Robbé; 5 t. m.; i. c; 

Opr. cl. ^ liinon : 6,294 h.; st.; 1 m. t., rue de La Haye; 

i t. m.; f. c; 15 pr. cl. — La Fère .- 5,109 h,; st. et 

e de l'Arc; 8 f. m.; î. c; 20 pr. cL 




psosTirmos en phovînck 283 

^ ilOKLise : 22,680 h. ; st. et v. g.;3m. t.. iiiesd^ 
a. FraUrnit*. et du Hiv^çe; 20 f. m.; il f. c; 
e déclare que 1a prostitiition clandestin» 
■£e et Bfphilise affreusement ses clients 
civils et militaires. — Gaknat ; 5,764 h. : st. ; m. t : f . C. ; 
5 à 6 pr. libres, assez connues pour qu'on vienne chez elliv 
après le marché du samedi. — La Palisse : 3,950 h.; st.; 
néant. — Mostluçon : 35,095 h.; st. et v. g.; 3 m. t,, rue 
de la Treille; U f. m.; 10 f. c; 40 pr. cL — AiiMSf-leCftA- 
teau : 2,403 h.; 2 pr. cl. — Cusset : 6,454 U.; 5 pr. ci. 
— Vichy : 10,870 h.; at; 1 m. t., avenue Victoria; 6 f. m.; 
15 f. c; 20 pr. cl., en résidence permanente, et plus de 
200 pendant la saison. — 125 arr, 

Basses-Alpes. - Digke : T,3G1 li.; et. et v. g.: 1 m, t., 

rue des Epincttes; 5 f. m.; 2 f. c; 8 à 10 pr. cl. — Bakcr- 
LOBNETTE : 2,303 h.; néant. — Castellane : 1,921 h,; 
néant. — Foecalquibe : 3,138 h.; 4 à 5 ÛUes des alentours 
viennent se prostituer les lundis. ~~ Sisteron : 3,996 h. ; st. ; 
10 à 12 pr. cl., dont 3 permanentes. — Mattoique : 5,788 h, ; 
«t.; env. 15 pr, cl,, allant et venant ilana la localité, dont 
4 fixées aux alentours. — 10 arr. au ch. 1.; ailleurs. 

Hautes - Alpes. — Gap : 10,666 h.; et. et v. g,; I m. 
t,, rue de Valaerre; 6 f. m.; 7 1 c.; 26 pr. cl. — BRiAftçO» : 
B,677 h.; st. et T. g.; env. 13 pr. cl, — Embrun : 4,017 h,; 
■t. et y. g,; env. S pr. cl., dont 2 permanentee. — Aucune 
arr. dans le dép, 

Alpes-Maritimes.— Nice : 125,099 h.; st .et v. g.;7 m, 
t., rues Saint-Michel, d'Alger, EoquebiliÈre, et place Pel- 
ligrini; B9 f. m.; 35 f, c; 200 pr. cl,, et plus du double 
pendant la meilleure saison de Monaco, ~- Grasse : 
14,016 h.; st.; 1 m. t., avenue Sainte-Loretto; 8 f . m; 2 f, o. ; 






284 LA PHOSTiTrno.N en phovince 

30 pr. cl. — PuQET- Thé NIEES : 1,42G h.; st.; 1 pr. d. 
Antibes: 7,401 h.; st. et v. g,; 1 m. t., rue du Chemin de 
fioDde; G f. m.; f, c; 12 pr. cl. — Cannes : 19,983 h.; st.; 
1 m.t., rue des Marronniers; 8 f. m.; 9 f. c; 40 pr. ol. — 
Menton: 9,050 h.; st. et v. g,; 20 à 25 pr. cl. — Viilefra 
che: 3,589 h.; st., v. g. et p. m.; eny. 30 pr. cl. — 60 arr. 

Ardëche. — Privas : 7,921 h.; st. et v. g,; l m, t., me 
des Fileurs; 5 f. m.;0 f. c.jenv. 20 pr. cl. — LARGENnitBS t. 
2,820 h.; néant. — Touknob : 5,286 h.; st.; iO pr. cl. — 
Annonay : 17,297 h.; et.; 1 m. t., rue de Roanne, affectant 
le genre d'une maison de rendez-voua; 6 f . m.; 13 f. 
dont quelques-unes vont faire parfois des possea à la m. . 
t.; CUV. 50 pr. cl. — Aubenas : 8,260 h.; st.; 7 pr. cl. — - 
Bourg-Saint- Andéol : 4,250 h.; st.; 2 pr. cl, — Vah s 
3,664 h.; st; 4 à 5 pr. cl., venant des alentours, de PÂqttU 
au 15 octobre. — 40 arr, 

Ardennes.— Mézièbes : 6,700 h,; st. etv. g.; 1 m. t., rue 
Champagne; S f. m.; 3 f. c; 10 pr. cl. — Eethel : 7,415 h.; 
at,; 14 f. c; 20 pr. cl. — RocEOi : 2,977 h.; st et v. g,; 
3 pr. cl — Sedan : 20,292 h.; st. et v. g.; 3 m. t., rat 
d'En-Haut; 17 f. m.; 16 f. c.; 50 pr. cl .— Vodzierb i 
3,808 h.; st. et v. g.; 1 m. t., rue du Cbamp-de-Foîre; 5 f. 
m.; f. c; 2 pr. cl. — Charleville : 19,390 h.; st.; 1 m. t., 
rue de la Gravière; 10 f. m.; 5 f. c; 30 pr. cl. — Givet : 
7,783 h.: st.; 2 m. t., quai du Fort^de-Bome; 9 t. m.; f. c.; 
(I 3pr. cl. — 62 arr. 

^^H Ariêge. — Foi.^ : 7,568 h.; st. et v. g.; 1 m. t., route 
^^H de Pamiers; 4 f. m.; f. c; 20 pr. cl. — PAuraaa ; 
^^K 11,944 h.; Et. etv. g.;lm. t., rue du Maréchal Clauzel; 6 f. 
^^B m.;0 f. c; SS pr. cl. — Saiht-Oisoss : 5,443 h.; st.; 4 pT> 
^^^ cl. — 30 arr. 



LA PROSTIITTIOX EX rEOVINCE 28o 

^.Aube. — Tboï-es : 53,159 h.; st. Pt v. g.; 5 m, t., rue des 

mes, passage Bresson, rue Perdue; 41 f. m.; 54 f. c; 

■. cl. flottant entre 450 et 500; depuis 1S81, la mairie a 

astitué un dispensaire gratuit pour les hommes atteints 

B maladies véni^rieones. — Arc is-sce- Aube : 2,928 h.; st.; 

h pr. cl. — Bak-buk-Aube : 4,636 h,; st.; 5 pr. cl. — Bak- 

Boe-Seinb ; 3,227 h.; st.; 2 pr, cl, — Noqent-suk-Seike : 

^704 h.; Bt; 8 pr. cl. — RomiUy : 0,938 h.; st.; l m. t., rue 

iB Ohamps-Elyaées; 5 f. m.; i. c; 10 pr. cl. — 20 arr. 

[ Aude.^ Caecabsonne : 29,453 t.; st. et v. g,; 6 m. t., 
i^es Oapelet et Laraigaon; 28 f. m. ; 22 f, c, dont plusieurs 
int faire des passes en m. t. ; anv, 60 pr. cl. — Casteluah- 
: 10jl59 h.; st. et V. g.; 2 in. t., rues de la Fontasse 
( des Jardins; 10 f. m.; f. c; env. 30 pr .cl. — Limoux : 
h.; st.; 1 m .t., rue du Rempart; 5 f. m,; f, c.; 
cl. — Nabbonne ; 29,760 h.; st. et v. g.; 2 m. 
,, rues d'Isly et Mosaïque; 13 f. m.; 21 f. c.;env, 80 pr. cl.; 
1 y a 20 aoH, les m. t. étaient 6 avec 26 f. m., et, par 
Bitre, les pr. cl. n'étaient que 40 cnv. — Ckalahre : 
; ch. 1. de canton à 16 kil, d'une gare; m. t.; mais 
jB f. c; 5 à 6 pr. cl. — Courmn : 3,513 h.; st.; 3 pr, cl. — 
B Nouvelle : 2,524 h.; st. et p. m.; 9 pr .cl. — Lhtgnan : 
î 11.; at; 12 pr. cl. — 73 arr. 

Aveyron. — BoDEZ ; 16,122 h.; st. et v. g.; 1 m. t, rue 
de la Bullifcre; 6 f. m.; f. c; cnv. 50 pr. cl. — Esfaljon : 
3,935 11.; st.; 4 pr. cl. — Millau : 16,G28 h-; st.; 1 m. t., 
rue Monplaisir; 5 f. m.; 12 f. c; env. 30 pr. cl. — Saint- 
AyFRiQUE : 7,598 h.; st.; 5 pr. cl. — VnXEFRANcnE : 
10,066 h.; Bt; essai de m. t., elle a dtt fermer; 8 f. c; 20 à 
25 pr. cl. — Deeazerilh : 9,025 h.; st.; autre essai de m. 
t., fermée t. c; eav. 20 pr. cl. — Âiihm: 9,117 h.; «t.; 
I^S pr. cl — 4S arr. 



il 



¥ 



I 28G LA rUOSTITLITIOX I:\ PROVINCE 

Boucîies>du- Rhône.— Mabseille : 464,769 li,: st., v. 
et p. m.; vilîe où la décroissance di^a m. t. s'est forteinent 
manifestée; il y a 25 ans, 87 m. t., avec 43S f. m.; aujour- 
d'hui, 11 m. t. proprement dites, rues Ventomagy, de la 
Reynardc, et de Bourgogne, avec 82 f. m.; le reste B'eet 
transformé en débits de boissons, avec f. e., clientèle ex- 
dusivement de matelots; toute cette prostitution grouil- 
i [«nte forme un petit quartier spécial, aus alentours de 
' la halle Vivant (criée dea poissons), et nommé <i le Coin 
do RcLoul II, au Vîeus-Port; aux f. c. qui serveat. dans oi 
débiU, se mêlent beaucoup de pr. el. ; le nombre des f. c 
de 358 en 1S76, est tombé à une moyenne de 200; dans les 
quartiers du contre, beaucoup de petite logements jouant 
l'ofBce de maison de rendez-vous, les uns avec f. c., 
plus grand norabie avec pr. cl.; l'efEectif total do pr . 
est évalue a, 2,ÛC0 env., dont les trois quarts de classe in- 
— Aix : 29,357 h.; st. et v. g.; 2 m. t., ruea 

11a Fonderie et des Jardins (il y a 20 ans, 7 m. t.) ;9f. i 
f. c, la mise en carte ayant été supprimée en 1878; il 
n'y a d'inscription que pour la m. t.; hors do là, liberté 
absolue; environ 100 pr. cl., dont 10 à 12 demi-cocottes, 
et le reste se partageant entre basses rarcrocheuses et. 
allés en chambre ayant clientèle d'habitués. — Arles : 
24,288 h.; st.; 5 m. t., rues du Bout^d'Arlea. et des Ql*- 
ciÈreB;21f. m.;10f. c.;env. 70 pr. d. — Aubnf/ue : 8,l5ih.i 
Bt,; 3 pr. el. — C/u'rteavretuird ; 5,801 h.; st.; 2 pr. oL ^- 
Syguière» : 2,Û91 h.; st; 2 pr. cL — Irirtrg : 3,708 h.; 
1 pr. cl. — La Giotat; 10,824 h.; st. et p. m.; 1 m. t., ru* 
des Chaudières; 6 f. m.; f. c.; 30 pr. cl. — Lambeic -• 
2,765 h. ; 2 pr. cl. — Martigiics: 6,483 b. ; st. et p. m. j 
8 pr. cl, — Orijon: 2,816 li.; st.; 4 pr. cl., femmes 
da Cavaillon (Vaucluse), ne demeurant pas ici, i 
x-enaat y faire leur métier chaque mardi. — Saint-Rémy ,- 
5,815 h.; Bt; 3 pr. cl. — Sahn : 5,898 h.j 



T" 



LA PHOSTITITIO?; EN- PROVINCE 2S7 

t ni. t., rue do l'Abatloir; 5 f. m.: f. c; 12 pr. cl. Tti 

.-9.B33h.;st. etv. g.; 1 m. t., rue du Viatiuo; f. m.; 
20 pr. cl, sans compter celles de Beaucnire (Gard), 
i viennent ici régulif: rement, — 1,915 an-. 

Calvados. — Caen ; 44,524 h. ; st. et v. g. ; 3 m. t., rues 
Ëaase, Venelle- Pavée, et Cour du Meanii-Thourct; 13 f, ni. ; 

.; env. 120 pr. cl. — Bayeux : 8,347 h.; st.; 1 m. 
Sainl^Floxcl; 4 f. m,; f. c; 30 pr. cl. — 

B : 8,518 h.; et. et v. g.; 1 m. t., rue Vonelle-dii- 
(3rand-Coq;6f. m.; II f. c; env. 35 à 40 pr. cl. — Lisikux: 
hs,WO h.; si. et v g.; 1 m. t., ruo du MouIin-à-Tan; 7 t. 

f. c. ; env. 50 pr. cl. — Pont-l'évêqde ; 3,068 h, ; si. : 
12 pr. cl. — Vire: 6,735 h.; st.; 1 m. t., ruo do§ Usinai; 
5 f. m.; 16 f. c; 30 pr. cl.— Aulnay : 1,925 h,; 2 pr. cl, -- 
Bernifreu, Coumeulfes et Saint-Auhin-aur-Mtr : cea 3 coin 
munes voîainea, ayant ensemble 3,613 h. et pogaddant ch«, 
cune une gare, sont exploitées, pendant la aataon dm 
bains de mer, par 30 à 40 pr. cl. dont 18 ttppartiennejit i 
ces lotalitiîs et les autres viennent do Douvres. — Cnbourg 
694 h. ; st. ; forto pr. cl. en été, fournie en partie pur Ir 
cantons de Dozulâ et de Troarn, en bus des filles vcnnn 
de Paris; env. 60 à 70 pr. cl— Condé-mr-Noireau : e.T&l h- 
st; 30 pr. cl. — Douvres: 1,898 h,; st.; env. 20 pr. c! 
très hardies, qui battent le pays, vont aux plages da Bei 
nifres, Coui-seulles, Saint-Aubin, et font mémo do bonne 
affaires au célèbre pèlerinage de N.-D. de la Délivrandt' 
îiéqusaté par plus de 100,000 pèlerins normands. - 
Bonjleur : 9,460 h.; st, et p. m.; env, 50 pr, cl, — Utgny 
2.750 h.; st.; 3 pr. c\. ~ lAon-iw-Mer : 1,127 h.;2pr. oL - 
Livarot: 1.761 h,; 7 pr. cl, — Livry : 1,161 h.; 5 pr, cl. 
exploitant Liviy, Caumont et les pèlerins da la cbapelL 
Saint^Sulpica — Luc: 1,450 h.; l'été, 15 pr, cl. — Orbte 
J,151 11. ; si. ; 25 pr, cl, — .Vain t-Picrre-mr-Dive» : 2,067 h. 



. mOSTITUTION J 



^V 28S 

^H Bt.;4pr. ci. ~ Ti/hj-mr-Setilki : 1,127 h.; 2 pr. cl. —Trou- 

^^H ville: 6, 243 b.,* st. et p. m.; env. 30 pr. cJ. permancateB, 

^^B et plus de 300 pendant la saison. — Villiers-sur-Mer . 

^^Ê 1,469 b.; st.; 20 pr. cl. — 175 arr. 

^Hf Cantal. — ÂDBILLAC : 15,824 h,; st. et v. g.; 2 m. t., nu 
duBuifl;9f. m.;3-f. c.;32à 35pr. cl. — Maoriac : 3,831 h.] 
at.j néant. — MuaAT : 3,203 b.;8t.; 2pr. cl. — Saint-Floi^I 
5,745 h.; st.; env. 20 pr. cl. — 10 arr. 

Charente. — Anqoulëiue : 36,955 h.; st, et v. g.; 8 b 
t.; rue du Foint-du-Jour (il y en avait M, il y a 2S OO^ 
12 f. >n. ; 65 t c. ; 120 à 130 pr. cl. — Bakeezieux : 4,104 Ik j 
Bt.;-1 m. t., nie du TrapiVe; i t. m.; 3 f. c; 20 pr. cl. ■ 
CooNAO : 17,393 h.; at; I m. t., boulevard Chatenet; 7 f. .i 
12 f. m.; 66 f. c, ; 120 à 130 pr. cl. — Baebezibux : 4,104 fa.} 
— RcFFEO : 3,527 b.; st.; 8 pr. d. — Brie-de-la-Roehefou 
cauîd: 1,718 b.; 3 pr, cl, — ChahoTuiis : 1,860 h.; st; S pr, 
cl, — Champniurs : 3,255 h,; 4 pr. cl, — C/iiMMi»«»lj] 
2,403 fa. ; st. ; 5 pr. cl., dont 1 habitant Saint-Olftiid ■-> 
Ohûteauneuf: 3,204 h.; st,; essai d'une m. t, qui a dÉ 
fermer; 12 pr. cl. — Jamac: 4,450 h,; st.; I m. t., ruedslf 
Côte ; 4 f, m, ; f , c. ; 20 pr. cl. — L'Soumeau-i'ontouvrei 
2357 b.; env. 30 pr. cl. allant faire leurméticr ii. AngouISai* 
— ZaJ?(»e//f/oï(fauW;2,8C2h.;at.;4pr. cl, — Saint-Am 
cle-Boixe (1,582 fa.), et Vars (1,034 b.) ; oommunes rappi*- 
ebées, cbacunc une gare, exploitées par 10 à 12 pr, cLu 
qui vont aussi le dimanche & Angoiilème, — 192 arr. 

Cbarente - Inférieure. — tk Rochslle : 31,318 h. 

r. g. et p. m,; a m. t., rucadca Voiliers, eiPortc-Mur<?e;38Â 
m.; 13 f. c; 80 à 100 pr. cl. — Jqnzao : 3,43! h.; st.; eaT* 
10 pr. cl. — Makesnes : Q,C07 h.; st. et p, m,; l m. t., nia 

^ Ja Kocfae-Française; 5 (. m.;0 1 c; 12 pr, cl. — BoaD> 



LA MAISON A SOLDATS 



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tuf'bulunlfi., iiarmi 'luaqui-llc» 11 faut ciler sunom la"^ .'mBiBoii à"" sol- 
data I. <lans fus •illua JesaruiaDii. EdmDudde Goncourt, dniiB son comau 
M /Ule BtUa, > décrit da mûn da maître ca âernior gsnrc' de lupanar à 
aatamlnct. aves sa cobua de tignarda, d'artitleun, da dragODs, et sex 
BioueB fammua, fatauit déborder lauiB ebaira moUeB sur la îita des 
nuUormeB Ipago 3T9J. 



I 



LA PROSTITUTION EX PBOVINCE 291 

3â,52a h. ; at. et p. milit.; 10 m. t.. rues du Port, des 

ea, et Sainte- Catherine ; 74 f . m. ; 39 f . c. ; env. 120 pr. 

§.cl. — Saintes : 18,461 h. ; st. ft v, g, ; 2 m. t., rues Désilles, 

get de la Souche; 10 f. m.; 6 f. c; 60 pr. cl. — Saint-Jkaîi- 

d'Anoély : 7,297 h.; st.; 1 m. t., rue de la Fourche; 6 f. m.; 

) f. c; 23 pr. cl. — Châteaa-il'Oléron : 3.458 h.; p. m.; 

., rue dM Eemparta; 6 f. m.; f. c; 15 pr, cl. — 

Soyan: 1, 247 h.; at. efc p. m,; 1 in. t., rue. Bel-Air; 5 f . m.; 

. ; env. 30 pr. cl. — Saint-Martin-rle-Ré : 2,838 h. ; p. m. ; 

t., ruedesCharitaina;4 f. ia.;Of. c; 10 à 12 pr. cl — 

1 175 arr. 



Cher. — Bourges : 46,13S b.; st. et v. g.; 3 m. t., me 

|fiouB-lc3-Cepa, et boulevard Auger; 12 f. m.; 31 f. c; env. 

3 pr. cl. — Saint-Amabd : 8,673 h.; st.; 1 m. t., rue du 

"Cheval-Blanc;4f. n].;7f. c.;30pr. cl. — Sancerhe:3,853 h.; 

st; 2 pr, cl. — Châteaumf-iUant : 3,745 h.; 2 pr. el. (les 

3 sceurs que la mbre ellB-mËinc prostitue à tous les libcr- 

B la rëgion). — JJiin-sur-Àuron ; 4,556 h.; 5 pr. cl. — 

¥nr'jci-en-Septaine; 1,200 h; cette petite commune occupe 

là pou prÈa le centre du canton de Baugy, où le libertinage 

est 1res grand, et l'on y vient en parties l'été; elle a. eu 

B^uaqu'à 3 m. t. en même tompg, il y a 20 ans; aujourd'hui, 

■. 30 pr. cl. allant et venant dans le canton, — Vterzon: 

KlO,Oâ9 h.; st; m. t. fermée; env. 120 pr. cl. — 52 arr. 

Corrèze. — TuLLK : 18,961 b.; st. et v. g.; 3 m. t., ruea 

1 Fosse, et Roc-WPierre; 13 f. m.; 2 t. c.; 25 pr. cl. — 

KIVE : l(î,803 h.; st. et v. g.; 2 m. t.. route de Toulouse, et 

Byue des Boucheries, à clientèle très distincte: l'une, dite 

l Villa Coquette, fréquentée par les oESeiera et la bourgeoisie; 

l'autre, par les ouvriers et les soldats; ÏO f. m.; 7 f. c; env, 

100 pr. cl. — Ussel: 4,832 h.; st.; contraste avec le reste 

du département; moralité excellente. — 39 arr. 



LA PROSTITUTION EN PROVIKCË 



3 

pr. cl 



i 



Corse. — AjACCio : 20,19T h.; st., t. g. et p. 
uea des Glacis et dea Fossés; 10 f. m.; 2 f. c; 
- Bastia : 23,388 h.; st., v. g. et p. m.; 2 m. 
kMulels et de l'Esplanade; II f. m.; 15 f, c. ; env. 50 pr. 
- Calvi : 2,023 h.; p. ra.; 12 pr. cL — Ooete : 5.136 h.; 
:.; 4 pr. cl. ^ Bartène : 5,748 h.; pr. cl. — Bonifaâo : 
3,116 h.; p. m.; 15 pr. cl. — l'orto-Vecchio : 2,655 h.; p. 
; 12 pr. cl. — iSaint- Florent: 803 h.; p. m.j 2 pr. cl, — 
SatUa-Lucia-di-Talfano : 1,259 h. ; 2 ou 3 pr, cl. à la saison 
dee bains. — Au mois de mai, époque préférée dee tou- 
ristes, la pr. cl. se développe d'une façoa remarquable aur 
les divers pointa de l'île qui attirent les voyageurs. — 
48 arr. 

Côte-d'Or, — Dijon : 70,428 h.; st. et v. g.; 4 m. t., rues 
Dauphine, Louis-Blanc, et Petite rue haussier; 25 f. m. 
<il y a 20 ans, 13 m. t., et 76 f. m.); 97 f. c. Ici, lea in- 
soumises se prostituent dune façon presque secrète, du 
moins celles de classes moyenne et inférieure, attendu qu'on 
I met d'office en carte toute femme qui raccroche ostensi- 
, blement; on évalue à 200 pr. cl, cet eSectif caché; il 
' i».ut compter, en outre, env. 50 pr. cl. de classe supé- 
rieure qui se montrent, mais font leur métier avec assez 
d'liabilct« pour ne provoquer aucun scandale. — Beaitnb : 
12,470 h.; st. et v. g.; 1 m. t., rue Bouzaise; 6 f. i 
. 20 pr, cl. — Ohatillon-suk-Seine : 5,127 h 
^ 10 pr, cl. — Semur : 3,908 h.; st.; 5 pr. cl. — Au, 
7,164 h.; st. et v. g.; 2 m. t., rue du Rempart-de-l'Est; 16 f. 
m.;4 f. c; 40à50 pr. cL — Seurre: 2,413 h.; st.; 4 pr, d. 
— 125 arr. 

C6tes-dU'Nord. — Saist-Brieug : 19,948 h.; st., v. g. 
el p. m. : 3 m. t., rue de Gouët, et montée des Forges; Il f. 
12 f. c; env. 30 pr. cl. — Dinan : 10,444 h.; st„ v. 



LA PEOBTITUTIOX EV PEOVINCE 296 

g. et p. m.; -2 m. t., rue SaintMarc; 13 f. m.; î. c; env. 
100 pr. cl. — GuiNOAMP : 9,196 h.; st. et v. g.; 1 m. t., rue 
du Petit-Trotrieus; 5 f. m.; f. c; 23 pr. cl. — Lannioh r 
6,002 h.; st. et p. m.; env. 15 pr. d. — Loctdéac : 5,915 h.; 
st.; 3 pr. cl. — Bime: 2,231 h.; p. m.; 2 pr, cl. — 
Elables: 2,221 h.; p. m.; 3 pr, cl. ~ Painnml : 2,213 h.; st. 
et p. m.; env. 12 pr. cL — Boitrenen: 1,968 h.; at.; afflueiic« 
depr. cl. en août ^Saint-Nicolas-du-Pelem:3,SQOh.;&pr. 
cl. permanentes, et IB à 20 à l'époquo du pèlerinage de 
Quyaudet. — Trésvirr: 2,763 h.; p. m.; 12 pr. cl. perma^ 
nentea, sans compter une affluence considérable de ces filles 
on mai, pour le grand pardon, de Saint-Yves. — SO arr. 

Creuse. — Guéret: 7,799 h.; at. et v, g.; 1 m. t., rue 
da Paris; les soldats du 76' appellent la tenancière « la 
mère Martie au perroquet r&uge »; 5 f. m.; f. c; 30 pr. 
cl. — AuBuBSON : 6,672 h. ; st ; env. 25 à 30 pr. cl. — Bodb- 
GANËUP ; 3,803 h. ; st. ; 3 pr. cl. — Boobsao : 1,34-1 h. ; néajit. 

— Bonuat : 2,687 h. ; 2 pr. cl. — FeUetîn : 3,375 h. ; at. ; 18 pi 
cl. — La Souterraine : 4,562 h. ; st. ; 30 pr. cl. au rainimun 

— Le Grand'Sourg-Salagrtae : 3,0)5 h.; 7 pr. cl. — arr. 

Dordogne. — Pékioceux : 31,399 h.; st., et v. g.; 
L, mes Judaïque et St-Joseph; 17 f . m. ; 32 f . c, ; env. 200 pr. 
cl. 11 y a 20 ans, la ville comptait 8 m. t., avec 99 1 
m.; les f. c. étaient 51; les pr. cl. ne dt^paasaient pa 

— Beboekad ; 14,735 h.; st et v. g.; 2 m. t., rue Clairat; 
11 f. m.; 2 f. c; 40 pr. cl. — Kontkon; 4,151 h.; st.; 3 pi 
cl. — BiBÉRAC : 4,047 h.; st.; 8 pr. cl. — Sarlat : 6,615 h. 
st.; essai d'une m. t. qui a dû fermer; env. 20 pr. cl. - 



Doubs. — Besançon: 55,266 h,; st. et v. g. ; 8 m. t., 
dont 7 rue Sachot, et 1 rue du Porteau; 65 f. m.; 52 f. c; 



JJ 



t I.A PEOSTITCTIOÎJ ES PROVINCE 

-. 250 pr. cl. — Baume-les-Dames : 2,555 h,; st.; 7 pr. c!, 

- MoNTBÉLiAKD : 9,561 h.; at et v. g.; 2 m. t., me du 

tourg-Vauthier; 15 f . m. ; f. c. ; 60 pr. cl. — Pontaelikr : 

W,IS& h.", 20 pr. cl, — Arc-el-S'enanB : 1.306 îi.; al.; 2 pr, cl. 

!►- Saint-Vit .■ B08 h. : st. : 3 pr. d. — 75 arr. 



Drame. — Valence : 25,283 li.; st. et v. g.; 10 m. t, 
ftiâ'*'it^ 8 rue de la Cittwielle, 1 rue du Puits-Salé, et 1 rue 
B4u Coq; 58 t m.; 9 f. c; env. 200 pr. cl. Lea m, t. ont eu, 
Lil y a 20 ans, jusqu'à 100 et 105 Elles; les f, c. variaient 
lâlora de 25 à 30. Les însoumisea, très relielles, peuvent 
Wtre rendues aujourd'hui responsables de prèB de 3,000 ao- 
I eidents vénériens d'hommes par an. — Die : 3,729 h.; st.; 
1 12 pr. cl. — MoNTBLiMAE : 13,764 h.; st. et v. g.; 2 m. t., 
tjue du Chemin-Neuf; 8 f . m,; 10 f. c; 50 pr. cl. — Nyons : 
1.; st.; 4 pr. el. — Bomam: 16, 545 h.; at. et v. g.; 
, rues de l'Epaule, et Jamonet; 26 f .m.; 11 f. c; env. 
pr. cl. — 65 arr. 



Eure. — EvREUX ; lG,9ô2 h, ; st. et v. g. ; 2 m. t., ruB ■ 
[Baint; 15 f. m,; 6 f. c.; 40 pr. cl. — Beenay : 8,310 h.; at 
g. ; 1 m. t., rue Saint-Michel ; 5 f. m. ; 18 f. c. ; 27 pr. 
- Les Andelys : 6,040 li. ; et. ; 1 m. t., rue de la 
Gabelle ; 4 f. m. ; f. c. ; 13 pr. cl. — Louvibrs : 10,053 h. ; 
1 m. t., rue des Maillets ; 6 f. m. ; f. c. ; env. 60 pr. 
- Pont-Addemer : 6,163 h. ; st. ; env. 50 pr. cl, — 
<nns: 3,577 h. ; st. ; 9 f. c. ; 20 pr. cl. — Cf/vckei: 
' h. ; Et. ; 8 pr. cl. — Fleury-mr-Andelle : 1,373 h; 
at. ; 5 pr. cl. — G'isors: 4,462 h. ; st. ; 25 pr. cl. — Ifeu- 
bour/j : 2,437 h. ; st ; 2 pr. cl. — Paey-mr-Eure : 1,926 h, ; 
st. ; 4 pr. cl. — Pont-de-VÂTche : 1,752 h. ; at. ; 1 pr. al. — 
Vemeuil : 4,270 h. ; at. ; 15 pr. cl. — Temon : 8,288 h. ; 
st. et V. g. ; 2 ra. t., rue Qrévarin, et route de Rouen; 



•^M /. m. ; f. ( 



■. 40 pr. cl. 1 



47 a 



LA PROSTITUTION EX mOVINCE 295 

Eure-et-Loir.— Chartres; 23,108 h.; eb v. g.; 3 m. 

t., rue des Juifs ; 17 f. m. ; 9 f. e. ; env. ^5 pr. cl. — 
Chateaudum : 7,147 li. ; at. et v. g. ; 1 m. t,, rue d'Avi- 
gnon ; 6 £. m. ; f. c. ; 18 pr. cl. — Dreux : 9,364 h, ; st. ; 
et V. g. ; 1 m, t., rue du Valgelé ; 6 f. m, ; f, c. ; 23 pr. 
cl. — NoGEHT-LE-RoTROU : 8,6S8 h. ; at. ; 1 m. t., rue de 
Sully ; 4 f. m. ; 15 pr. cl. — Brou : 2,656 h. ; st. ; 4 pr. cl. 

— La Loupe: 1,617 h, ; 1 pr. cl. — Souaneé: 914 h. ; at. ; 
2 pr. cl. — 8 arr. 

Finistère. — Qpimîee : 17,406 b. ; st., v. g. et p. m. ; 
1 m, t., rue Pen-ar-Stajig ; 6 f. m. ; 4 f. c. ; env. 80 pr. cl. 

— Brest: 81,948 h. ; st., v. g, et p. m. ; 7 m. t., ruea 
Klëlier et Ouyot (le double, il y a 20 ans) ; 46 f. m. ; 
223 f, c. ; env. 150 pr. cl. connues, mais ne faisant pas de 
scandale ; il y faut ajouter lea femmes se livrant secrète- 
ment à la débauche, dont le nombre doit être énorme, 
sans pouvoir être exactement évalué. La police des mœurs 
de Brest mérite d'être citée comme exemple en province : 
" une main de fer dans un gant de velours », se plaît-on à 
dire pour la qualifier ; les ministÈres de la Guerre et do 
la Marine contribuent aux frais de son Dispensaire par 
une subvention annuelle de 4,500 fr. — Ohateaulin; 
3,677 h. ; at. ; néant. — Morlaix ; 16,302 h, ; st. ; 1 m. t,, 
rue Tenelle-aux-Pât^a; 6 f. m.; 14 f. c; 30 à 35 pr. cl. — 
QuiMPEBLÉ : 8,049 h, ; st. ; 7 pr. cl. — Coneanieau : 
5,243 h. ; st. ; et p. m. ; 20 pr. cl. — Douarnenei : 8,809 h. ; 
st. et p. m. ; env. 30 pr. cL — Landerneau : 9,078 h, ; at. ; 
et p. m, ; 25 à 30 pr. cl. — 84 arr. 

Gard. — Nîmes : 80,355 h. ; st. et v. g. ; 9 m. t., ruea 
SainH^urent, de la Treille, Florian, et du Cerisier ; 4-1 f, 
m. : 28 î, c. ; plus de 500 pr. cl. permanentes et connues. — 
ALAia : 2;i,156 h. ; st. ; 2 m. t., rue Cavalerie ; 13 f. m. ; 






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' 8 



ri!(>sTiTL*nn.\ es feovince 



29G 

f. c; 26 pr. cl. — Le Vioan : 5,374 h.; st.; 9 pr. cl. — 
UzÈa : 4,989 h, ; Bt. ; 1 m. t., ne Tour-du-Eoi ; 5 f . m. ; 
7 pr. cl. — Beaitcaire; 9,724 h. ; st. ; env. 30 pr. cl., s&vs 
compter cellea qiiï viennent de Tarascon les dimanchea et 
jours de fêtes ; de même, les libertina d'ici traversent le 
pont pour aller chez les pr. do la rive provençale. — Se«- 
aèges: 10,8tf) h. ; st. ; 1 m. t., me de la Gare; 6 f. m. ;. 
f. c. ; env. 30 pr. cl. — La Urtmd'Combe: 12,248 h. ; st. î- 
env. 50 pr. cl. — Pont-Saint-Ësprit : 4,985 h. ; at. et V* 
g. j 1 m. t., impasse Faubourg de la Tour ; 7 f. m. ; f. 0. J- 
17 pr. ci. — Saint-Hippoii/te-dv-Fort : 4,245 h. ; at ; 
env. 10 pr. cl. — Vauvert : 4,H0 h. ; st. ; 3 pr. cl. — 61 arr. 

Haute-Garonne. — Totjxouse : 147,696 h. ; st, et v. g. ; 
10 m. t. groupées rues du Oanal et Arnaud-Vidal (le quar- 
■f- tier des caf ^-concerts, aux allées Lnfayette, est d'ailleur» 
le grand marché de toutes les proBtitutions) ; 63 f. m. ; 
172 f. c. ; plus da 1,000 pr. cl. ; ou évaluait celleB-ci à 600, 
il y a 20 ans, époque oii Toulouse comptait 26 m. t., aveo 
156 f. m. Nota ; la proatitution toulousaine représante à 
peu près le 3 pour 100 de la population féminine de 16 à 
50 ans ; ce qui est énorme pour une ville de province. — 
MuBBT : 4,142 11. ; st, ; 5 pr, cl, — Baint-Gapdbns 
7,023 h, ; st. et v. g. ; 1 m. t., rue de la Caserne ; 6 f . m. 
f. c, ; env, 35 pr. cl. — Villefe.v.nche-de-Lai7RAQcai8 
2,566 h. ; st. ; 5 pr, cl, — Baj/nères-de-Luchon : 4,286 h. 
at. ; 23 pr. cl, permanentes ; leur nombre so quadruple 
pendant la saison. — En général, ce département est 
d'une immoralité triss intense jusqu'au fond des cam- 
pagnes. — 115 arr. 

Gers. — Adch: 16,142 11. ; st, et v. g, ; 4 m. t., ruea 
SaintGeorges et Tourterelle ; 16 f. m. ; 9 f, c, ; 30 pr. cL 
- Comion : 7,805 h. ; st. ; 1 m, t., rue du Cornet ; 3 f , m. ; 



LA PEOSTITrTTON EX PROVINCE -'1(1 

S f . e. ; lu pr. cl. — Lectocre : ô,5û2 h. ; at. ; 12 pr. cl. — 

LoMBEZ : 1,692 h. : néant. .— Mikandb : 4,244 h. ; st. et v. 

g. ; CUV. SO pr. cl. — Bareelonne: 1,903 h. ; 2 pr. cl. — 

; 1,572 h. ; 1 pr. cl. — Caatelnaii-Bai-bareng : 

ll,178 h. ; 1 pr. cl. — Castelnau-d'Auzan: 1,893 h. ; 3 pr. cl. 

- Casauban : 2,8T1 h. ; 1 pr, cl. — Duran, petite com- 

■ mune de 200 h. à peine, compte 3 filles qui, au vu et au su 
'de tous, se prostituent ; 2 ont des clients qui viennent 

lï'Auch régulièrement à leur intention. — Sauzc ; 4,405 h. ; 

P pr. cl. — Fleuranee : 4,443 h. ; st. ; 12 pr. cl. — Gimont : 

b,316 h. ; st. ; 5 pr. cl. — Jegun: 1,883 h. ; 2 pr. cl. — 

VIsle-ue-Noé: 959 h. ; st. ; et Monte»qiiiou: 1,5&4 h. ; ces 

t localit.^, voisines, sont exploitées par les mÊmea pr, 

ne Tune et l'autre commune ; ensemble, 7 pr. cl. — L'itle- 

H-Joiirdain : 4,501 h. ; st. ; 15 pr. cl. — Marciae : 1,872 h. ; 

B2 pr. cl. — Maiseube : 1,736 h. ; 3 pr. cl. Cette localité 

■a'est distinguée, il y a peu d'années, par une singularité 

:e dans les annales de la prostitution : une femme, 

I habitant la commune, a. hardiment déclaré au maire 

■ qu'elle faisait commerce de son corps, qu'elle entendait 

J pas avoir de tracasseries de l'autorité à ce sujet, et 

que, pour cela, elle se aonmettait aux visites périodiques 

du médecin qu'on voudrait bien lui désigner ; il fallut donc, 

fait sans précédent, inscrire cette femme et créer une 

carte pour elle ; et elle Bt dès lors son vil métier, sans 

aucun scandale, il est vrai ; mais tous les libertins du 

canton sachant la chose "it connaissant sa demeure, elle 

gagna pas mal d'argent. Les personnes qui douteraient 

I >âe l'authenticité de c« cas bizarre, peuvent le constater dans 

I l'ouvrage du docteur Armand Desprès, /a Prostitution en 

France (Paris, 1883), page 54. — Mauvezin: 2,587 h.; 

2 pr. cl, — Miélan: 1,953 h. ; st. ; 3 pr. cl, ~ Miradoux: 

1,392 h.; Ipr. cl, — Montréal :%m: h.; \çt. cl. —Nogaro: 

I 2,424 h. ; 2 pr. cl, — Plaisance : 2,095 h. ; 4 pr. cl. — ËiscU : 

I "• I 



LA PROSTITUTiriN E?J PBOVIXCE 

,; st. ; S pr. cl., dont l'une est plus connue k' 
'Aigium, localité voisine, de 1,649 h. — fSaint-Clar: 
1,697 h. ; 3 pr. cl., qui cependant n'exercent pas leur 
inétier dans cette commune, mais font partie des !2 signa- 
fi à Fleurance. — Samatan; 2,477 h. ; 4 pr. cl. ; même 
Aaervation ; eo3 4 f. ae pr. à l'isle-en- Jourdain principa- 
ment, et vont et viennent. — Valence: 1,705 h.; 1 pr. cl. — 
fic-Fetrnsac : 4,195 h,; 7 pr. cl. — Vtllecomlal-sur-Arros : 
182 h. ; st. ; 2 pr. cl. — 28 arr. 

', Gironde.^ Bordeaux: 257,471 h.; st., v. g. tt p. m.; 
. t., groupées près de la place Mériadek, 2 rue de 

^oiasae, 1 rue Saint-Claude, 5 rue Lambert, 2 rue de 
it 3 rue Berquin ; 62 f. m. ; 279 f. c. ; plus de 

îjODO pr. cl. Il y a 20 ans, Bordeaux comptait 70 m. t., 
c 310 f. m. ; mais il y avait moitié moine de pr. cl. — 
^ab: 4,943 h.; st.; 7 pr. cl. — Blaye : 5,015 h.; st. 
). m.; 1 m. t., rue de la Vieille-Hallo; 4 f. m.; 15 pr. 
— Lespaere ; 3,972 h. ; st. ; 12 pr. cl. — LiBOC-ENE : 
167 11. ; st. et V, g. ; 2 m. t., rue Saint-Martial ; 11 f. 

lo. ; 45 à 60 pr. cl. — La RéOle : 4,177 h. ; st. ; 3 pr. cl. — 

''^atiffon: 4,733 h. ; st. ; 9 pr. cl. — Pauillac: 4,564 li. ; st ;. 

i pr. cl. — 2,105 arr. 

Héranlt. — Montpeiher: 7G,364 h. ; st. et y. g. ; 

, boulevard d'Orient et rue d'Alsace; 16 f. m.; 

|,<1S f. en maiaona dites mistea : 32 f. c, isolées en chambre ; 

IV. 300 pr, cl. — BÉZIEES : 52,077 h. ; st., et v. g. ; 5 m. 

, dont 1 rue de Talmy, 1 rue Lafontaine, et 3 rue Lamar- 

;27f. m. ; 14 f. c. ; 150 à 170 pr. cl. 11 y a 20 ans, 17 m. 

i avec 95 f . m. — Lodève : 9,060 h. ; st. ; 1 m. t. , rue des Ca^ 

bernes; 6 f. ni.;9f. c.;27pr. cl. — Saint- Pons : 3,247 h.; at.; 

^éant. — Ai/de : 8,370 h. ; st. et p. m. ; 1 m. t., rue Sainb- 

^J'acqueB; 4 î. m.; 35 pr. cl. — Bédarieux.- 6,925 h.; st.; 1 m. 



LA PROSTITUTION F.X l'ROVIXCE 299 

K rue Saint-AIesandre; 5 f. m. ; 20 pr. cl. — Cette : 33,065 h. ; 
V. g, et p. m. ; 4 m. t., ruo Souras-Haut ; 17 f. m. 
:. t., avec 36 f. m., il y a 20 am) ; eny- 100 pr. cl. — 
mant'VHérauU : 5,430 h. ; at. ; easai d'une m. t., qui 
\ dû fermer ; env. 20 pr. cl. — Florensae: 3,698 h. ; at. ; 
f pr. cl. — Frontignan : 3,164 h. ; st. ; 9 pr. cl. — Ganr/es : 
1342 h. ; Bt. ; 2 pr. cl. — Graimeme ; 3,089 h ; st. ; 2 pr. 
- Lunel: 6,793 h.; st. et v. g.; 1 m. t., avenue da 
!bamp-dc-Mara ; 8 f. m. ; 30 pr. cl. — Marseillan: 
p. m.; 5 pr. cl. — MarsiUargues : 3,327 h.; st.; 
l'pr. cl. — Mèze: Sfiet h. ; p. m. ; 3 pr. cl. —Monlagnac: 
Bi460 h. ; Bt. ; 1 pr. cl. — Pétenas : 7,364 L. ; st. ; 2 m. t., 
faubourg de la Vilîette et rue de Tivoli ; 8 f. m. ; 23 pr, 
d. — Sa/retat-.'nir-Ai/out: 3,548 h. ; 2 pr. cl., dont l'une 
^talilie à proximité de Rieumajou. — Sérignan: 3,048 h. ; 

4 ou 5 pr. cl. pendant la saison des bains de mer. — 
2&1 arr. 

nie-et-Vîlaine. — Rennes : 74,006 h. ; st., et v. g. ; 

5 m. t., rues de Châtillon, Saint-Georgea et Saint-Benoît ; 
24 f. m, ; 75 f. c. De 188Ô à 1870, il y avait à peine 5 ou 

6 pr. cl. ; en 18B1. il y avait 116 filles Boumiaea, dont 60 en 
31 m. t.. et l'on signalait env. 50 pr. cl. ; aujourd'hui qu'il 
n'y a plus que 5 m. t., les filles insoumises dépassent 120, 
et le nombre d'hommea vénériens a décuplé. — Fouoèrkb : 
18,221 h.; at. et v. g. ; 1 m. t. rue de la Forêt ; 6 f. m. ; 8 f. 
c. : 40 pr. cl. — MONTFOKT : 2,464 h.; st.; néant. — Redon : 
6,929 h. ; st. ; 11 pr. cl. dont 2 habitant AUaire et 1 Saint- 
Jean-la- Poterie. — Saint-Malo : 11,896 h. ; st., v. g. et p. 
m, ; 3 m. t., ruea Thévenard et Champs- Vauverto ; IS f. 
m. ; env. 50 pr. cl. A cette ville, il faut joindre naturelle- 
ment Saint-Svrvan : 12,163 h. ; at., v. g. et p. m. ; 1 m. t., 
rue Duval; 7 f. m.; env. 60 pr. cl. — Vitré : 10,607 h.; 
st. et v. g. ; env, 30 pr. cl. — Cancale : 6,523 h. ; ç. m..^ 



300 LA rRosrrri'iio.v r.s i-ro^tsce 



H 30 

^^m 12 à 15 pr. ul. — C'/uHeauboury : 1,31S h. ; et. ; 5 pr. eL 
^^M permanentes ; leur nombre s'augmcntis beaucoup (tav. 25 
^^^^ à 30), venant de plusieurs points de la région, et s'in»- 
^^K t&Uant à Châteaubourg et au s Lacs (st. voisine) de 
^^H Pâques k la Toussaint, (époque de continuels pélerinagea à 
^H ÎI.-V. de la Peiniëre, commune de SainUDÎdier. 
^^H Vinard, Saint-Briac, Saint-Enoqal et ,<airU-Liinaire, sta- 
^^H tions balnéaires ayant ensemble 7,540 h. ; cnr. 50 pr. cL 
^^f pendant la saison. — Dol.- 4,814 h.; st.; SO pr. cl. — 

Paramé: .3,969 h. ; env. 30 pr. cl. pendant la saison. — 

384 arr. 

Indre. — CnATKAnKonx : 24,032 h. ; st. et v. g. ; 2 m. 
t., rues de l'Indre et de la Fontaine ; 8 f. m. ; 13 f. c; 
env. 40 pr. cl. — lasocnuN : 11,928 h.; st. et v. g.; 1 ra. t, 
boulevard Ghampionnet ; 6 t. m. ; 13 f. c. ; env. 25 pr. cl. 
— La Chatee : 6,018 h. ; et. ; 1 lu. t., rue Bel-Air ; 3 t 
m. ; 10 pr. cl. — Le Blanc : 7,389 h. ; st. et v. g. ; 1 m. 

»t., rue de Pouligny;4 f. m.; 15 pr. cl. — 27 arr. 
Indre-et-Loire. — Toueb : 04,448 h. ; at. et v. g. ; a m. 
t., ruea André-Duchesne, de Ballan, de la Caserne, du 
Petit^SoleJl, de la Poissonnerie, des Prêtres, et du Singo- 
Vert ; 49 f. m. ; 63 f. c. ; env. 150 pr. cl. — Chi»oh ; 

»6,119 h. ; at. ; 1 m. t., rue des Marais ; 5 f. m. ; 20 pr. cL — 
Loches : S,132 h. ; st. ; 3 pr. cl. — Bourgueil : 3,307 h, ; 
8 pr. cl. dont 2 de Chouzé. — CMteau-RenauH : 4,316 h, ; 
8t. ; 6 pr. cl. — Langeait: 3,548 h. ; st. ; 10 pr. cl. penn&- 
nentea, et plus de 60 à la Saint-Jean d'été, époque de la 
grande foire. — Sainte-Maure-de-Touraine : 2,510 h. ; st. ; 
4 pr. cl. — Youvray : 2,266 h. ; st. ; 5 pr. cl, — 39 arr. 



^^tK 



laère. — Grenoble: 68,052 h. ; st. et v. g. ; 3 m. É., 
dea Beaux-Tailleurs, de Lorraine, et Gronde-Kuâ; 



1 

LA FEOSTITTJTIOIT EN PROVINCE 301 ■ 

i f. m.; de3 f. c. le nombre flotte entre 75 et 110 ; env. H 
200 pr. i! y a, 20 ans, et plus de 300 aujourd'hui; sur 100 ar- ■ 
restations de pr. cl. dénoncéps comme vénériennes par V 
leurs victimes, il y a en moyenne 40 mineures ; au bàtî< 
ment du Refuge, le Saint-La/are grenoblois, la moyenne 
de séjour dos filles sypliili tiques est d'un mois ; ce Eont 
e toutes des insoumises que l'on a à soigner, et sur- 
es filles de brasserie ; les hommes (civils) atteints 
raffectioDs vcuériemies foumtEaent ensemble 2,600 jour- 
llées d'hôpital, comme moyeiine annuelle ; nous n'avons 
FpHB de renseignements de l'hô-pitaJ militaire. — La TouB' 
fcJDU-Pis : 3,ô7I il.; st.; 2 pr. cl. — Saint-Maeceujn ■ 
|.ïl,3»2 h, ; st. ; 1 pr. cl. — ViEKNE : 2-1,995 h. ; st. et v. g. ; 
KB m. t. (au lieu de 7 ÏI y a 20 ans), rues Cornemuse et de 
jHft Tour-Peinte ; 14 f. m. ; 17 t c. ; env. 50 pr. cl. — 
Âllevard : 3,205 h,; 7 pr. cl. — Bourgoin et JaHiett: 
11,603 h. ; at. et v. g. ; 1 m. t., rue du Orand-Bion, à Bour- 
goin ; 5 f. m. ; 35 à 40 pr. cl. — Crémieu : 1,785 h. ; et, ; 
20 pr. c!. (chiffre énorme pour une localité si peu impor- 
tante et entourée de communes très minimes). — Giérei: 
1,112 h. ; st. ; 3 pr. cl. pcrmaoentâs, et env. 10 pendant la 
belle saison, à cause du double voisinage de Grenoble et 
d'Uriage. — La Mure : 3,626 h. ; 2 pr. cl. — PontiU-Bcau- 
voititi: 1,087 h. ; st. ; essai d'une m. t, qui a dû fermer ; 
8 pr. cl. — Vitiay : 2,768 h. ; st. ; 5 pr. cl. permanentes, et 
le double de mai à octobre, visant les pèlerins de N.-D. de 
rOaier. — Voiron: 11,604 h. ; st. ; essai d'une m. t. qui a 
dû fermer; plus de 100 pr. cl. — 120 arr. 

Jura. — Lons-Ls-6ai7LHIEB : 12,610 h. ; st. et v, g. ; 
2 m. t, rue Neuve ; 13 f. m. ; 11 f. c. ; 25 à 30 pr. cl. — 
DoiX: 14,253 h. ; st. et v. g. ; 1 m. t., rue des Prison»; 
7 (. m.; 9 t. c; env. 40 pr. cl. — Poliony : 4,433 h.; 8 f. 
c; 10 à 12 pr. cl. — SAiNT-CLAnDE : 9,782 h.; st.; 5 pr. 

« 



302 LA l'RnSTITlTIOX EX PROVINCE 

cl. — Arbois : 4,355 li. ; st. ; env. 25 pr. cl. ; cette commiiiie, 
il y a 20 ans, avait 2 m. t. avec 11 f. m. — Mores: 
6,124 h. ; 3 pr. cl. — Salins; 6,419 11. ; st. ; 1 m. t., fau- 
bourg Saint^Nicolaa; 7 f. m.; 15 f. c. ; 30 pr. cl. peniia* 
nentea, et plus du double pendant la belle saison. — 



Landes. — Mont-de-Maïsan :12,D31 h. jet.; 1 m. t., ma 
Montluc; 7 f. m,; 12 i. c; 40 pr. cl. — Dax : 10,530 h.; at; 
1 m. t., rue de la Croix-Blanche; 4 f. m.; 5 f. c; 60 pr. cl. 

— Saint-Sever : 4,805 h.; st.; 3 pr. cl. — Bion-des-Landes : 
2,535 ti, ; et. ; I pr. cl. — 42 arr. 

Loir-et-Cher. — Bloib : 23,457 h.; st. et v. g.; 2 m. 
t., rues de Lauricard, et des Degrés Saint-Nicolaa; 14 1 
m. ; 18 f. c. ; 46 pr. cl. — Romohantim : 7,813 li. ; at. ; 1 m. 
t., rue des Limouaina ; 5 f. m. ; 20 pr. cl. — YEN'DâuE ; 
9,538 h.; at. et v. g.; 2 m. t,, rue de la Mare; 10 f. m.; 7 f, c; 
3 pr. cl. signalées comme exerçant leur métier d'une façon 
auffisaranient connue du public, et l'on évalue à 20 les 
autres plua diacrètea, — 45 arr. 

Loire. — Saint-Etiennë : 14C,67I h.; et, et v. g.; 13 m. 
t., dont; 1 rue Praire, 1 rue Baese-Ville, 6 rue Saiat^Pierre, 

3 rue de la Vigne, 1 rue de l'Attache-aux-Bœufa, et 1 rue 
Citée; 87 f, m.; 74 1 c; plus de 200 pr. cl. — Montebison : 
7,410 h.; st. et v. g.; 1 m. t., rue do la Commanderie; 4 f. 
m.; 7 f. c.; 18 pr. cl .— Roanne : 34,568 h.; st. et v. g.; 

4 m, t., ruea Détournée, et Magdeleine; 18 f. m.; 21 f. c; 
90 à 100 pr. cl. signalises, sans compter la masse de pr. ol. 
intermitteatea qu'on évalue au triple. Par principe, on 
n'inscrit pas les mineures, excepta si elles sont totale- 
ment abandonnées par leurs parents, ayant été trouvées 

. y^nériennes; si elles ont été reconnues saines, on les reUche, 



LA PEOSTITUTIOX E\ PROTISCE ^03 

même si leur prostitution permanente est avérée, — Char- 
Heu: 5,247 h.; st.; 7 pr. cl. — Rive-de-Gier; 14,816 h.; st.; 
4 m. t., ruca de la République, de la Boirie, du Mouillon, 
et faubourg d'Egarande; 33 f. m.; 60 pr, cl. — Saint- 
C/iamoiu/ : 14,149 h.; st.; 2 m. t., place Fourvieux, et rue 
de Janon ; 9 f. m, ; 13 £. c. ; env. 80 pr. cl. — Saînl-Gal- 
viier : 3,022 h. ; st. ; 4 pr. cL — 234 arr. 

Haute-Loire. — Le Pfy : 20,308 h.; at. et v. g. 
t., rue du Bouillon; U f. m.; 23 f, c. ;60pr, cl. — Beiotjd^ 
4,928 h.; st.; néant. — Ysbinoe-MJx: Ï,B59 h.; 2 pr. cl. - 
Craponne : 3,601 h. ; 2 pr. cl. — Lanijcac : 4,238 h. ; 
7 pr. cl. — m arr. 

Loire - Inférieure. — Nantes: 128,349 h.; st., v. g. 
et p. m.; 17 m. t. dont 1 rue Gigant. 5 rue d'Ancin, et 11 
rue des T roi a-Matelots; 67 f. m.; 91 t. c.; plus de 300 pr. 
cl. La police sanitaire est admirablement faite à, N^antes; 
la visite de cbaque î. soumise a lieu 2 fois par semaine; 
une pr, trouvée malade, étant ainsi atteinte depuis trts 
peu de temps, fait toujours un court séjour à la salle spé- 
ciale de l'Hôtel-Dieu; 5 jours au maximum suffisent pour 
le traitement, 3 jours est la moyenne. Le nombre des 
hommes du civil, à qui Burviennent des accidenta vénériens, 
et qui se font soigner à l'hôpital, est en moyenne 330 par 
an; ce qui est fort peu pour une ville aussi importante, 
étant donné surtout que les Sociëtés de secours mutuels 
do Nantes excluent des secours les malades vénériens. A 
l'hôpital militaire, la moyenne des hommes traités pour 
accidents vénériens est 85 par an, sur une garnison do 
2,750 hommes. Toute pr. cl. majeure trouvée malade est ins- 
crite d'office et mise en carte; les mineures sont assujettieB 
aux visites sanitaires, sans inscription sur le registre de 
la prostitution. — Ancenib: 5,544 h.; al., et v. g.; env. 



304 LA PIÏOSTITUTION EX PEOVINCE 

1 pr. cl. — OuATE-^UBRiANT : 6,533 h-; st.; 4 pr. cL - 
Paimbœitf : 2,259 h. ; st. ; 1 m. t.. rue du Taisan ; 4 f. m. 
2 pr, cl. — Baint-Kazaire : 34,671 b.; et. et p. m.; 3 m. t., 
rues Ville-Auhry, et des Caboteurs ; 3Q f. m. ; 45 1 C 
} euv. 100 pr. cl. — Couéron: 4,377 li.; st.; 2 -t. d. ■ 
■ Guérantle, : 7,020 h.; sL; 6 pr. cl. — T.e Cruh-ic: 2,463 h.; G 
efc p. m.; 3 pr. cl. permanentes, et 10 à 12 pe-odast la 
sarieon balnéaire, lesquelles vont aussi à Batz, à Pomichet, 
à la Baulo et au Pouliguen. — Savenay : 3,272 ; st. ; 4 pf. 
cl. — flâ aiT. 

Loiret. — Orléams : 67,639 h.;at. et v. g.; 8 m, t., m 
Saint-FJour, des Juifs, et des Noyers; 49 f. m.; 45 f. 
finv. 200 pr. cl. — GiEN ; 8,519 h.; st.; 18 pr. cl, — MONTiB- 
ois : 11,609 h.; st. et v. g.: 2 m. t., quai du Patia, et à 
Bel-Air; 12 f. m.; 3 f. c; env. 30 pr. cl. — PithivibbB ; 
9,381 h. ; Bt. ; 1 m. t., quartier de Bel-Âîr ; 6 f . m. ; 6 f. 
■o.;15pr. cl — Beaugency : A,2\Z h.; st.; fi pr. cl. —Tleurth 
attx-Chftux: 1,3B3 h.; 2 pr. cl. — Metinu-tur-LoircT 
3,435 h. ; st. ; 7 pr. cl. — Ouzouer et Dampïerre : 2,355 h. ; 
st. ; 2 pr. cl. — 225 arr. 

Lot. — Gabdbs : 15,622 h.; st. et v. g.; 3 m. t., rua 
Bouscarrat; 14 f. m.; B f . c; 30 pr, cl. — Figeac : 7,380 h." 
hL; 7 f. c; 10 à 12 pr. cl. — Gochdon : 5,029 h.; néant. - 
Gramat: 4,032 li.; st.; B pr. cl. — Saini-Céré: 4,240 i 
2 pr. cl. — Souillae: 3,586 h.; 4 pr, cl. — 18 arr. 

Lot-et-Garonne. — Ages : 23,234 h.: st. et v. g.; 8 r 
t., rueTraveraiÈre(15in. ilya20ana);25f. m.;32£. e.;«it 
60 pr, cl. ~ Maemande; 10,341 h.; st, et v. g.; 3 m. t 
route de Beaupuy. et allée des Tilleuls ; 13 f. m, ; en 
40 pr. cl. — NÉRAC : 7,826 h.; st.; 1 m, t., rue des Champs; 
va.; 60 pr, cl. — Viu-bneute-sue-Lot : 14,598 h.; 



ir 



LA PEOSTITUTION 1 



t. rue Trinchant; 15 f. m. ; 8 f . c. ; 50 pr. cl. — Tonneins : 
7.090 h,; Bt.; 60 pr. cl. — 38 arr. 

Lozère. — Menue : 7,678 h.; st.;] m. t., dite n la maison 
rouge »; 4 f. m.; 3 pr. cl. — Flokac : 2,328 h.; néant. — 
Makvejols : 5,650 h.; st.; 4 pr. cl. — arr. 

Maine-et-Loire. — ^Angers : 82,966 h.; st. et v. g.; 9 m. 

t., dont 4 rue de Crimée, et 5 rue Basse-de-lo-Chartre; 
43 f. m. ; 9T f. c. ; env. 150 pr. cl. — Bauoé : 3,623 h. ; st. ; 
5 pr. cl. — Cholet : 16,891 h.; st. et V. g.; 1 m. t., rue du 
Lait-de-Beurre.; 6 f. m.; env. 60 pr, cl, — S.^dmtjb: 
14,687 h. ; st. ; 2 m. t., rues de la Viflitaticm, et du Bêlais ; 
10 f. m. ; 29 f. c. ; 50 pr. cl. — Seqr£ : 3,531 h. ; st. ; 2 pr. 
cl. — 140 arr. 

Manche. — Saint-Lo : 11,425 h, ; st., et t. g. ; I m. t, 
rue du Pré-de-Baa; 6 f . m.;6f. c: 13 pr, cl. — Avhanchbs: 
",7S6 h.; st.; 1 m. t., rue Chapet; 5 f. m,; 10 pr. ol. — 
Cherbourg: 42,952 h.; st., v. g. et p. m.; 4 m. t., mes 
Thomas- Henry, du Faubourg, et Troude; 33 i. m.; 68 f. 
c; plus de 200 pr. cl. — Coutances : 8,145 h. ; st. ; 5 pr. cl. 
— MoETAiN : 2,331 h.; st.; 1 pr. cl. — Taloonks : 5,791 h.; 
st.; 2 pr, cl. — Briguebec; 3,757 b.; 2 pr. cl, — Carentan: 
3,483 h.; st.; 7 pr. cl. — Grant'ille : 12,721 h.; st., T. g. et 
p. m.; 1 m. t., rue du Nord; 6 f. in.;35pr. cl. permaneates, 
plu» de 100 pendant la saison. — 2'oritjniêur-Tirc : 1,998 h.; 
3 pr. cl. — 35 arr. 

Marne. — Chalons : 25,883 h. : st. et v, g. : 4 m. t., 
rue La Cliarrière, et boulevard Saint-Jean; 26 f. m.; 12 £. 
c; 40 pr. cl. — Eplknay : 13,361 h.; st. et v. g.; 3 m. t., rua 
des Rocherets ; 18 f. m.; il f. c; 25 pr. cl. — Rkmb : 

17,773 h. ; 3t. et v. g. ; 3 m. t., boulevards Jules-Ccaar, 



^^Û7 



30G LA TEOSTITt-TIOX KN rfiOVIKCE 

de la République, et rue Montlaurent ; 17 î. m. ; 85 t. o. ; 
. 300 pr. ci. — Ici, lea arrestations sont trÈB rarcB : 
mais les filles qui contreviennent aux r&glementa sont 
l'objet d'un rapport des agents de mœurs, citées en police 
iDuaîcipale, et condamnées, suivant la contravention, de 
1 fr. d'amende à 10 fr, et de 1 à 3 jours de prison, — 
Sainte- M EKEHOULD ; 5,298 h. ; st. et v. g. ; 1 m. t., rue 
Chantereine ; 4 f . m. ; 9 pr. cl. — Vitry-le-Peançai3 : 
8,022 h. ; at. et v. g. ; 1 m. t., rue Saint-Mange ; 4 f . m- ; 
■ 5 f. c. ; 25 pr. cl. — Ây : 5,398 h. ; at, ; 8 pr, cl. — Cor- 
monlreuil : 641 h. ; 1 pr. cl. qui va surtout à Beims faira 
Bon métier le dimanche et le lundi. — Fiam-e» : 3,184 h. ; 
st. ; 5 pr. cl. — M ourmelon-le-Grand (camp permanent) : 

,247 h. ; 2 m. t., rue Canrobert ; 12 f. m. ; 5 f. c. ; env. 

!) pr. cl, — Sêîanne; 4,933 h. ; at, et v. g. ; 1 m, t,, ma 
Notre-Dame ; 5 f. m. ; 18 pr, cl, — 204 arr. 

Haate-Marne. — Chaumont ; 13,280 h.; st. et v. g, 
1 m. t,, rue du Gaz; 8 f . m.;30pr, cl. —Lanqbeb : 11,129 h.; 
h et V. g.; 1 m. t., rue DonferUloAereau; 8 f , m,; !Q f. c: 
i pr. cl. — Vasby : 3,986 h,; 4 pr. cl. — Bouibonne 
4,14S h.; st.; 3 pr. cl, permanentes, et 15 à 20 pendant la 
saison, — Joinvilfe : 4,035 h.; 8t,;4 pr. cl, — Sahit-Dhier ; 
13,372 h.; st.; 15 pr. cl. — S arr. 

Mayenne. — Laval: 29,734 h.jat. etv. g, ;3m. t,, rues 
Saint-Nicolas, des Lices, et route d'Emée; 25 f. m,; 14 1 
V. 60 pr. cl. — Chatbau-Gontier : 7,28i h.; st.; 1 m. 
t., rueNoel;5f. m.;6f. c.;12 pr. cl. — Mayenne : 10,686 h.; 
st. et V, g.; 1 ni, t., rue des Bonn es-Femmes; 5 f. m.; 4 f. 
c. ; 35 à 40 pr, cl, — C'raon : 4,434 h, ; st. ; 7 pr. cl. — 160 arr. 

Meurthe-et-Moselle, — Kancv : 102,463 h.; at. et t.' 
a.; 10m. t., dont S rue du Moulin, et 4 rue du Maure-qui- 



^F 1..V TROSTITUTIOS EX mOVIN'CE -jUT 

trompe ; ô3 f. m. ; 165 f. c. ; env. 300 pr. cl. — Briey : 
2,131 h.; st.; néant. — Lunéviljj; : 21,542 h.; st. et v. g.; 
2 m. t., rue Jolivet, et faubourg d'Euville ; 15 f. m. ; 19 f. 
c.;pluB de 100 pr. cl. — Totti. : 12,138 h.; st. et t, g.; 4 m. 
t., rue de la Monnaie; 26 f. m.; 7 f. c; env. 50 pr. cl. — 
Baccarat : 6,013 h. ; st. et v. g. ; 1 m. t., rue Caplet : 5 f. 
m. ; 20 pr- cl. — Lowjuyon: 2,618 h. ; et. ; 10 pr. cl. — 
Longwy : 6,978 h.; st. et v. g.; 1 m, t,, rue Villette; 4 £. 
m,; 31 pr. cl. ~ Montmédy : 3,092 h.; st.; 1 m. t., rue de 
1 m. t., chemin des Haras; 4 f. m.; env. 40 pr. cl. — .'iainU 
Nieola»-<Iu'Fort et Varangeville : ensemble 6,817 h.; at. et 
V. g.; 6 m. t., rua de la Californie; 38 f, m.; 23 f. c; env. 
ao pr. cl. — Thiaueourt : 1,463 h. ; st. ; 4 pr. cl. — 370 arr, 

Meuse. — Bae-le-Ddc : 18,7fil b.; st. et v. g.; 2 m. t., 
rues de Véel, et Polval ; 9 f. m. ; 9 f. c. ; 30 pr. cl. — Com- 
MEKCY ; 7,483 h.; st. et v. g.: 1 m. t., rue Haptouté; 6 i. 
lu, ; 21 pr. cl. — Montmédy : 3,092 h. ; st. ; 1 m. t., rue de 
la, Ohevée ; 3 f. m.; 7 pr, cl. — Veedun : 19,852 h. ; Ht. et 
V. g. ; 6 m. t., rue de la Californie ; 38 f. m. ; 23 f. o. ; env. 
40 pr. cl. — Salnt-Mihid: 8,126 h.; si. et v. g.; 1 m. t., 
faubourg de Commercy; 9 f. m.; 4 pr. cl. — Sainpigny : 
1,123 h.; Et, et dépôt de remonte; 4 pr. cl. — Stenay : 
3,205 h.; st.; ! m. t., route de Mouzay; 1 f. m.; 11 pr. cl. — 



Morbihan. — Vannes : 21,504 h.; at. et v. g,; 2 m. t., 
rue de la Tannerie; 12 f. m.; 31 f. c; 45 à 50 pr. cl. — 
LoEiENT : 44,082 b.; st., v. g. et p. m.; 8 m. t., 4 rue Sully, 
et 4 rue de l'Enclos-du-Port; 59 f. m.; 41 f, c; 90 à 100 pr. 
cl. Les f, m. et c. sont visit«fB 2 fois par semaine; la polies 
sanitaire est très rigide; les accidents vénériens d'hommea 
sont à une moyenne annuelle de 55 à rbôpital civil et 80 à 
l'hôpilàl militaire. — Ploëkmel : 5,913 h.; st.; 10 pr. cl. 






308 LA PHOSTITITIOX EN PILOVI\CE 

ur Dombrc se double pendant la belle 
e triple même lors des grandes fêtée; pliuieun 
vont alors à Josselin et exploitent les dévote du pèlerinage 
dit des ahoyetin (N.-D. du Roncier). — Poxtivt : 9,375 h.; 
t., rue des Fontaines ; 6 f, m.; env. 80 pr. 
cl. — Auray : 6,B70 h. ; st.; pr. cl. en nombre très variable, 
mais dont 25 au minimum se aont fixées à ce ch. 1. de 
cantoa; leur affluence s'élève parfois jusqu'il 60 au moment 
dei grands pèlerinages de Sainte-Anne, et pluHÎeun 
osent même aller à Pluneret attendre les pèlerins; la char- 
treuse d'Auray et la chapelle expiatoire, constammeoit 
viaitéea par les touristes, étrangers curieux ou riches vmh 
déens et bretons, leur valent au surplus une clientèle de 
voyageurs dont elles tirent encore un assez bon profit; de 
, Pentecôte, elles ont coutume de faire 
isolément leur pèlerinage personnel b. Sainte-Anite et pro- 
diguent les cierges à ce sanctuaire renommé. ~- Caudan! 
6,458 h. ; 7 pr. cl. — Hennehant ; 5,888 h. ; st. ; 8 pr. d. — 
Le Palais (à Belle- 1 aie-en- Mer) : 4,907 b. ; p. m. ; 7 pr. 
û. — Forl-Laitis : 3,324 h. ; p. m. ; 19 pr. cl. — 200 arr. 

BTiëvre. — ÎTevers : 27,345 h.; sfc. et v. g.; 7 m. t., 1 me 
de la Boulerie, et les autres rue Au-Blanc ; âS f. m. ;. 
5 f. c, ; env. BO pr. cl. — Chatbad-Chinos : 3,673 b. ; et. ;. 
2 pr. cl. — Claheoy : 5,318 h. ; st. ; 7 pr. cl. — CoSHB f 
8,712 h. ; st. et t. g. ; 1 m. t., rue des ILivières Saiot>' 
Âignan ; 6 f. m. ; 16 pr. cl. — Decise : 4,027 h. ; et. ; pen* 
dant longtemps, 1 m. t. (arec 4 f. m.), aujourd'hui fer- 
mée ; 12 pr. cl. — Domy : 3,638 h. ; ^ pr. cl. — La Charité r 
5j443 h.; st.; 14 pr. cl. — 35 arr. 

Nord. — Lille : 215,431 h. ; st. et v. g. ; 14 m. t., éxnk, 
me de l'A. B. C, 7 rue Frénelet, et 1 rue de Fives^ 
53 f. m. ; 85 £. c. ; env. 600 pr, cl. — Avebnbb : 6,496 h. ; 



^B Ul phostitutios es province duy 

9t. et t. g. ; 1 m. t., rue Bultot ; 5 f. m. ; 22 pr. cl. — 
Oambbai : 24,123 li. ; et. et v. g. ; 2 m. t., rues des 
Binettes, efc des ChaufEoura ; U f. m. ; 15 f. c. ; eov. 80 pr. 
cl. — Douai : 33,918 h. j st .et v. g. ; 4 m. t., rue Pépin, 
et Baint-Antoine ; 29 f. m. ; 19 f. c. ; plua de 100 pr. cl. — 
UcNKERQDE : 40,329 h. ; st., v. g. et p. m. ; 12 m. t., dont 
1 rue Roseadaèl, 1 place Calonne, et 10 rue des Casernes 
de la marine ; 83 f, m. ; 13 f. c. ; env. 150 pr. cl. — Haze- 
BEoncK : 11,672 h.; st.; 20 pr. cl. — VAiENOiENNEa : 
31,007 h. ; 8t. et v. g. ; 8 m. t., dont 1 rue Percepain, et 

7 rue des Canonniers ; 42 f. m, ^ 9 £. c. ; env. 100 pr. ol. — 
Amint ll,53S t. ; st. ; 35 à 40 pr. ci. — Ârmentièret : 
28,837 h. ; st, : 1 m. t., me de l'Octroi ; 6 f. m. ; env. 100 
pr. cl. — Bailleul: 13,276 h. ; 24 pr. cl. ^ Bourhourff : 
2,468 b. ; st. ; 3 pr. cl. — Bruaij : 4,934 h. ; st. ; 2 pr. cl. — 
Caudry : 8,Oi5 h. ; st. ; 5 pr. cl. — Condé-mr-V Etcaut : 
4,772 h. ; st. ; 6 pr. cl. — Denain: 18,258 h. ; at. ; env. 50 
pr. oL — Fournîtes: 15,895 h. ; Bt. ; eisai d'une m. t. qui 
a dû fermer ; env. 50 pr. cl. — Gravelinee .■ 5,952 h. ; st. 
et p. m.; 14 pr. cl. — Hautmont: 9,204 h.; st.; env. 60 
pr. cl. — Le Gâteau : 10,544 h. ; at. ; 1 m. t., rue du Chêne- 
Arnaut ; 5 f. m. ; 18 pr. cl. — Maahtage : 18,863 h. ; st. 
et V. g. ; 2 m. t., rues de l'Intendance, et Saint-Guîlhem ; 

8 f. m. ; env, 80 pr. cl. — Mer-ville : 7,028 h. ; st. ; 10 pr. 
cl. ^ Eose-iittaël: 6,223 h. ; et. ; env. 30 pr ,cl. permar 
nenlee, dont la plupart vont faire leur métier à 
Dunkerque, et 60 à 70 pendant la saison balnéaire. ~ 
Soubaix : 124,660 h. ; at. ; 3 m. t., rue de Babylone ; 12 f, 
m., qui changent fréquemment ; on a inscrit jusqu'à 
70 t. m. dans une seule année pour ces 3 m. t. ; le nombre 
annuel des f. c. varie de 4 à 10 ; le nombre des pr. cl. défie 
l'évaluation, car on serait certainement au-dessous de la 
vérité en le fixant à 500 ; en effet, il y a au moins 80 cabarets 
connus, servant de maisons de passe et ayant un per- 



310 



. ntOSTITUTIOS EN PHOTINFE 



i moyenne. 



i compter les autres 



r 

^^R soimel de 3 filles 

^^H* pr. cl. La pr. ici ne s'exerce pas âiir la rue ; on ne roit 

^H jamais de f. faire le trottoii' connue a. Litlo ; les libe^ 

^^B tins connaisBent la demeure des pr. cl. et vont les trouver, 

^^P Eu outre, les jeunes oiivrifTcs. pour peu qu'elles soient 

^^ft jolies, sont contraintes à se débaucher, par les patrons, 

^^K les directeurs et les contre-mai Lrcs ; il est toute une claesB^ 

^^H les piriûriËrcs, dont la pr. est obligatoire, par le fait des 

^^^1 hommes à qui elles sont forcéee d'avoir recours pooi 

^^B obtenir, à la fabrique, les pièces d'étoffe dont elles euEb- 

^^^P vent ou réparent les défauts chez elles. Oette corruption 

^^H s'étend tous les jours, et, cependant, patrons, directeurs, 

^^H employés, sont, en immense majorité, cléricaus; toutes 

^^m les malheureuses qu'ils débauchent doivent remplir leurs 

^^M devoirs religieux ; c'est la seconde condition pour obtenir 

^^K du travail! (N'été de la Mairie de Roubaix.) — Saint- 

^^B Âinaiul-leS'f-aux: 12,043 h. ; st. ; env. 30 pr. cl. — TouV' 

^^m coin// : 79,468 h. ; au moins 300 pr. cl. ; pour les ourrières, 

^^ mÈme situation qu'à Roubaix ; de plus, à proximité des 

2 villes, à la frontif-re, il faut signaler un hameau belge, 

le Mont-à-Leu, qui possède une quarantaine de cabarets 

desservis chacun par 3 ou 4 filles se livrant publiquement 

<t la pr., et ce hameau est, pour Boubaix et Tourcoing, un 

vrai foyer d'infection. — 230 arr. 

Oise. — Beadvaie : 19,382 h. ; st. et v. g. ; 3 m. t., rue 

Jean-SIazille ; 23 f. m. ; li f. o. ; env 40 pr. cl. -^ 
Olehmokt ; 5,617 h. ; st. ; 8 pr. cl. — Comfiîigbï î 
14,486 h. j st. et V. g. ; 1 m. t., rue des Sablons ; 9 f . m. ; 
20 f . c. ; 34 pr. cl. — Senub : 7,131 h. ; st. et v. g. ; 1 m. t., 
rue du Temple; 5 f. m. ; 21 pr. cl. — Bretèuil: 3,146 h. ; 
st. ; 4 pr. cl. — Creil: 8,183 h. ; st. ; 23 pr. cl. — Crépj/-tti' 
Vahi»: 4,134 h. ; st ; 2 pr. cl. -- Lianeaurt : 4,035 b. ; st. ; 
5 pr. cl. — Méru: 4,360 h. ; st. ; 3 pr. cl. — Montatairêt 



" ■ «I» " 

LA FEOSTrCCTION KS PROVINCE 311 

5,801 h. ; st.; env. £0 pr. cl. — Ncuilly-tn-ThcUe : 1,732 h. ; 
8t. ; 2 pr. cl. ^ Nogent-lea-Viergea : 1,854 h. ; les pr. cl. 
d'ici vont surtout à Creil ; on en signale 4. — Noyon : 
6,144 h. ; 8t. et, v. g. ; 1 m. t., rue de l'Arc ; 4 f . m. ; env. 
20 pr. cl. — Pierrefand» : 1,746 h. ; st. ; 3 pr. cl. fiscs, et 
a à 10 im sus pendant la saiBon, — 70 arr. 

Orne. — Alknçon : 18,319 h. ; et. et v. g. ; 3 m. t., place 
Champs-du-Roi, nie Grande- Sarthe, et ruelle de la Demi- 
Lune ; 15 f. m, ; 11 f. c. ; 20 pr. cl, — Akoentan : 6,ai7 h, ; 
st. et V. g. ; 1 m. t,, route d'Ecouché ; 5 f. m. ; 3 f. c. ; 
B pr. cl. — DoMFEONT : B,083 h. ; st. ; 3 pr. cl. — 
MoRTAONE : 4,541 h. ; st. ; 7 pr, cl. — BaUÊme: 2,863 h. ; 
st. ; 13 pr. cl. — Fier»: 14,045 h. ; st. ; 1 m. t., n»e du 
Parc ; 5 f. m. ; 27 pr. cl. — Igé : 1,495 h. ; dans la semaine 
qui précède le dimanche des Rameaux, affluence des pr. c!. 
du canton, env. 20, juaqu'aprèa Pâques ; 2 seulement per- 
manentes. — Juvhjny : 91 li. ; 3 pr, cl. Ce nombre de pr., 
en résidence use dans une commune si minuscule, éton- 
nera certainement le lecteur ; mais il faut savoir que 
Juvigny, à 3 kil. d'Argenlan, est la localité oii tous les 
contribuables du canton viennent payer leurs impôts, et 
que dans ce petit trou, pourvu d'un notaire, se traitent 
énormément d'affaires entre paysans normands et perche- 
ions. — La Ferté-l'resnel : 530 h. ; st. ; 20 à 25 pr. cl. du 
canton venimt ici en mai à l'occasion des pèlerinages au 
grand Saint-Antoine (sanctuaire de N.-D. du Vallet), ainsi 
qu'aux grandes foires de fin juin et fin novembre. — 
La Ferlé-Maeé: 8,121 h. ; st. ; essai d'une m. t. qui a dû 
fermer; env. 30 pr. cl. — Laiijle: 6,078 h. ; st. ; 1 m. t., 
nie des Jetées ; 5 f. m. ; env. 40 pr. cl, — Li'jnerallei : 
345 b. ; st. j réunion de quelques pr, cl. (8 à 10) du canton 
de Tourouvre, en septembre. — Mauvcs-aur-iluine: 
. 1,300 11., avec Corbon ; st. ; 2 pr,, exploitant les pèlerins 



LA PKOSTrr0TION ES PEOVINCE 

des Âmee du Purgatoire, à la Chapelle-Montligeon. 
Séez ; 4,272 h. ; at ; 5 pr. cl. — 130 arr, 

Pas-de-CalalH.— Areas : 25,786 h. ; st. et v. g. 
rues Guériol, du C'rinchon, et Héronval ; 23 f. m, 
env. 40 pr. cl. — Bbthunb : 11,09B h. ; st. et v. g. 
rue Serrée ; 4 f. m. ; 12 f. c. ; 23 pr. cl. — Bodloqne-8DK- 
Me& : 49,083 h. ; st. et p. m. ; 4 m. t., rue 8aint-Pol ; 19 f. 
m. ; 23 f. c. ; enT. 60 pr. cl. — Montebuil ; 3,603 h. ; st. ; 
G pr. cl. — Saint-Omee : 21,661 h. ; st. et v. g. ; 5 m. t, 
rues do l'Ecu-d' Artois, du Bourg, et de l'Echelle j 20 £. 
m. ; 16 f. c. ; env. 40 pr. e!. — Saikt-Pol : 3,705 h. ; st. ; 
5 pr. cl. — Aire-»ur-la-Lys : 9,409 li. ; st. ; 1 m. t., rue de 
Gournaj; 4 f. m.; 4 f , c; 12 pr. cl. — Bapaume: 3,335 h.; 
st.; 4 pr. cl. — Berck-eur-Mer: 5,752 h.; st.; 2 pr. cl. fixaS), 
et 6 à 6 pendant les 3 mois de la saison. — Calai» (y com-. 
pris Saint-Pierre) : 59,793 h.; st., v. g. et p. m.; 3 m. t., 
rues des Cinq-Boulets, des Remparts, et des Pèlerins ^ 
16 t. m. ; 18 f . c. ; env, 80 pr. cl, — Desvres : 4,801 h. ; et j 

1 pr. ci. — Staples: 3,816 li. ; st. ; 5 pr. cl. — Guines.' 
4,502 h. ; st. ; 3 pr. cl. — Lens : 13,883 b. ; st. ; 1 m. t. 
rue du Cliapitre ; 5 f. m. ; 25 pr. cl. — Le Portet 
5,331 h. ; st. et p. m. ; 18 pr. cl. — Lillers : 7,609 h. ; «t ; 
12 pr, cl, — Marquise: 3,511 h. ; st. ; S pr. ol. — Yitry 
sur-Scarpe : 2,837 h. ; 4 pr. cl. — 141 arr. 

Puy-de-Dûme. — Clekmont-Fereand : 52,017 h. 
st. et V. g. ; 10 m, t., dont 1 rue des Peîgneurs, 3 petite 
rue des Fauchera, et 6 rue des Trois-Raiains ; 68 f. 
59 f. c. ; 80 pr. d., ce nombre se triplant pendant la, 
saison de Eoyat. — Aubebt : 7,907 h. ; st. ; 12 pr. cl. 
IseoifiE: 6,273 h.; st.; 1 m. t., rue N.-D. de Ponteil j 
4 f. m. ; f . c. ; pr. cl, — Hiou : 11,139 h. ; st. et 

2 m. t., rues Grenier, et Neuve; 8 f . m.; 15 pr. 



lA PROSTITrTION RS PROVINCE îtlS 

Thikes : 1G,8H h. j st, : i m. t, rue de lu Tour ; 5 f . m. ; 
S6 pr .cl. — Ariane; 3.638 h. ; at. ; 15 pr. cl. — Billoin: 
4,121 h. ; st. ; 8 pr. cl. — Brasaae-lesM ine» : 2,237 h. ; st. ; 
plus de âO pr. cl. Ce petit bourg, très commerçant, sur la 
rive g. de l'AIlÎPr et lu limite du dép. de la Haute-Loire, 
est le centre do la fabrication de la paitsementerie pour 
dames ; en outre, les principaux négociants en grOB et 
commissionnaires en charbon y résident. — Mont-Dore: 
1,160 h ; 10 à 12 pr. cl. pendant la saison. ~~ Saint-Rfinii- 
tuT'DvruUc : à,56i h. ; sL ; 3 pr. cl. — 125 arr. 

Basses-Pyrénées, — Pau: 34,692 h.; st. et v. g.; 
3 tn. t., rue Qu^rilla«q; 21 f, m.; 35 f. c; env. 150 pr. cl. 

— Baton-ne : 27,192 h.: st., v. g. et p. m.; 3 tn. t., rues de 
Morcenz, des Augustins, et Remparb-Lachepaillet; 25 f. m. : 
23 f. c; plus de 100 pr. cl. — Mact^os : 2.5fi9b.:8t,; néant. 

— OlOhont 8,931 b.; st.; 3 pr. cl. — Orthez : 6,210 h.; 
st.; 4 pr. cl. — Biarritz: 8,527 h.; st. et p. m.; 19 pr. cl. 
permanentes, et cnv. 5() pendant la saison. — Larun» : 
2,459 h.; st.; 4 à 5 f. des ciintons de Laruna et Arudy y 
viennent chasser, pcndo.ot la eaisoD, lee touristes et les 
clienlH des Eaus-Eonnea et des Eaux-Chaudea. — Safiet-dr- 
Béarn: 5,296 h.; st.; 8 à 10 pr. cl. — Saint-Jean-de-Lri~ . 
4,451 h.; Et. et p. m.; env. 20 pr. cl. — 180 arr. 

Hautes-Pyrénées. — Tarbes: 25,263 b.; at. et v. g.; 
6 m. t., rue des Jardins; le nombre de f. m. flotte entre 
27 et 60, suit'anb les circonstances; les f. c, <le 12 à 26; lee 
pr. cl., de 40 à 100; l'augmentation de ces dernières se 
remarque dts que la saison, étant favorable, amène une 
recrudescenco de pèlerins à Lourdes. (Nota. C'est la 
docteur Armand Desprès, qui, le premier, a signalé, ot 
spécialement à propos de Lourdes et de Sainte-Anne 
^d'Aura)-, la coïncideace des accrowsetocnts de prostitution 



314 LA PBOSTITUTIOX ES l'EOATNCE 

ic lo grand mouvement de population qui se produit 
aux lieux de pèlerinage ; notre regretté confrère, qui fut 
uii adversaire résolu de la laïcisation des hôpitaux, ne 
saurait être suspect de tendances anticléricalas.) — Ar- 
GEXÈB : 1,890 h.; st.; néant. — Bagnèkeb-db-Bioobkb : 
8,038 b.; st.; l.m. t., rue du PonWe-la-Moulette; 5 f. in. 

2 f. 0.; 15 pr. cl, fiscs, et 30 à 40 pendant 1» saison. - 
Cauterets: 1,685 h.; 10 f. c; 8 à 10 pr. cl. fixes, et 25 à' 
30 pendant la saison. — Lannerneian : 1,859 h.; st.; 5 pr.- 
cl. — 2S2 arr. 

Pyrénées -Orientales, — PEsnoNAN : 35.757 h.; st. 
et V. g.; 17 m. L, dont 1 rue de Poitiers, 1 rue des Cuï- 
raasiera, 2 rue Jasmin, 2 rue des Bohémiens, 2 rue d( 
Pompe-defl-Portiers, 3 rue Bailly, 3 rue des Bemparta, et 

3 ruo de la Savonnerie; 74 f. m.; 31 f. c.; plus de 200 pr. 
cl. — C:ÉRBT : 3,828 h.; st.; 12 pr. cl, — Pkadeb : 3,762 h.; 
at,; 9 pr. cl. — Àmélie-hs-Baim : 1,783 h.; st.; env. 20 pp. 
cL — Banyuls-sur-Mer : 3,119 h.; st. et p. m.; 18 pr. cL 

— Forl-Vendres : 3,025 h.; st. et p. m,; 1 m, t., avenue de 
la-Oare; 5 t m.; 25 pr. cl. — Eivemltee : 6,016 h.; st.; enr. 
30 pr, cl. — Saint-Paul-de-Fenouillet : 2,280 h.; 12 pr. cl. 

— 75 arr. 

Haut-Rhin. — Belfout: 25,445 li.; st. efc v. g. j 4 m. 
t., rues Danjoutin, et des Tanneurs; 20 i. m,; env. 60 pr, 
cl. — Beaucourt: 4,315 h.; 7 pr. cl. — Dellr: 2,140 h.;st.f 
3 pr. cl. — Giromagny : 3,424 h.; st.; 6 pr. cl. — Grand' 
ri/lara: 2,198 h.; st.; 11 pr. cl. — Eougcmoiit : 2,075 h.; 2 pr. 



Rlidne. — Lyon : 453,145 h.; st. et v. g.; 14 m. t. pouf 
la plupart dispersées (au centre : I rue Stella, I rua 
Neuve, 2 rue de l'Arbre-Sac, 1 rue de la Monnaie; à Per^ 



-A PROSTITUTION EN' PROVINCE 315 

raehe, 1 rue Smith; à Saint-Paul, 1 rue de l'Oure; à la. 
Oroix-Rou3sc, 2 passage du Gaz; à Vaiae, 1 rue du Bour- 
bonnaÏE; et à la Gutllotière, 4, dont 1 rue de Béara, et 3 
formant un petit groupe : I rup de Turenne, 1 rue de l'Epée, 

I rue Marignan): 106 f. m.; il y a 20 ans, Lyon comptait 
25 m. t, avec 19S f. m. Le nombre des f. c. se tient toujours 
à une moyenne de 300. Par contre, la pr. cl. est ici for- 
midable; les plus modérés évaluateurs indiquent le chiffre 
de 5,000, soit 2 fois 1/2 le nombre donné pour la ville 
rivale, Marseille, qui eet pourtant un port de mer. A part 
les filles de tavernes, fréquentées par les jeunes gcna des 
classes aisées, la prostitution lyonnaise n'est pas bruyante, 
et le raccrochage se fait sans scandale. Comme à Paria. 
et toute proportion gardée, Lyon compte un très grand 
nombre de maisons de rendez-vous, à clientèle de libertins 
riches. D'ailleurs, on y considère dans cette ville la prosti- 
tution comme un état, sinon banaJ, du moins nullement 
choquant, pourvu qu'une certaine discrétion aoifc observée, 
et voici un signe très caractèrislique de cette façon de voir 
les choses : il se publie chaque année à Lyon un annuaire 
général du commerce, nommé Ylndiratcur Fournier, gros 
volume de 2,500 pages; c'est le Bottin lyonnais, tous les 
conimerçanta l'ont, et on le trouve dans tous les cafés; eh 
bien, le croiraitHanî à la a liste des habitants par rue )■, 
exactement comme s'il s'agissait d'un honnête commerce, 
les maisons de prostitution figurent, chacune à sa rue et 
à son numéro, sous le nom de Maison Garnie (en belles 
italiques, s. v. p.), pour les distinguer des vulgaires 

II meublés », — Villefbanchb- Bim- Saune : 12,928 h.; st.; 
4 m. t., rue Chaaset; 19 f. m.; 13 f. c; env. 40 pr. cl. — 
Amphptiit : 7,U3 h.; st.; I8 pr. cl. — Btanjeu: 3,836 h.; st.; 
4 pr. el. — Cliarhonnièrps ,- 839 h. ; st ; d'avril au 15 octobre, 
affiuence de pr. cl. des cantons de Vaugneray et L'.\rbreBle; 
env. 30 se succédant les unes aux autres, par 2 ou 3 venant 



i 



r 



k 



^IC LA rHOSTIXrTIOX EX rEOVISCE 

onBcmble. — Ca/uire-et-Cuire : 9,940 h. ; st.; plus de 500 pr, 
cl. — G'it'ore: 10,992 h.; st.: essai d'une m. t. qui a dft 
fermer; pins de 20 pr. cl, — L'Arbresle: 3,148 h.; st.; 5 pr. 
cl. — N euville-eur-Sa&ne : 3,054 h, ; st. ; 2 pr. cl. — OulUn* ; 
7,643 h.; at.; 34 pr. cl. — Sainl-MaHin-en-Eaut : 2,701 h.; 
9 pr. cl. — Tarai'e-: 12,580 h. ; st; esasi d'une m. t. qid ■ 
dû fermer; plus de 50 pr. cl. — Tkhy : 4,12a h. ; st.; 1£ pr. 
cl. — Villeurbanne:' 12,567 h.; st.; plus de 100 pr, d.' 



Hante-Saône.— Vebocl : 9.770 L.; at. et v. g.; l m, 
rue des Casernes ; 3 f, m. ; 7 f. c. ; 18 pr. cl. — Grat i 
G,908 h. ; st. ; 3 m. t., rue des Carrières j 19 f. m. ; 5 f. c. ; 
10 pr. cl. — LuRE : 4,83B h.; st. et v. g.; 1 m. t., rue dea 
Cloyes ; 4 f. m. ; 6 f , e. ; 12 pr. cl. — Sêricourt : 3,669 h. ;■ 
st. et V. g. ; env. 30 pr. cl. — Luxcuil : 4,811 h. ; st. ; » pr. 
cl. - 27 an-. 

Saflne-et-L.oire. — Maçon : 19,703 fa. ; st. et t. 
2 m. t., rue dea Trois-Têtest 12 i. m.; env. 50 pr. cl. 
AonjN : 15,187 h.; st. el v. g.; 1 m. t., ruelle Saint-Jean; 
7 f. m. ; env. 30 pr. cl. ~ Chalon-sce-Saone : 24,688 h.,; 
st. et V. g.; essai d'une m. t. avec 13, puis 9 f. m.; qai a dfi 
fermer; 25 f. c; env. 80 pr. cl. — OhaRoij.es : 3,246 h.; 
st. ; 5 pr. cl. — LouHAUB : 4,348 h, ; st. ; 2 pr. cL ■ 
Chagjiy : 4,730 li. ; st. ; 6 pr. cl. — Le Creusât : 30,541 h. j., 
st. ; essai d'une m. t., qui a dû fermer ; 32 pr. cL — Mont- 
ceau-les-Mincs : 16,805 h. ; st. j 13 pr. cl, — Paray-lc' 
Moniai: 3,832 fa.; st.; 7 pr, cl. permanentes; leur 
sombre se triple en juin et octobre, époqu«s des graiu 
pèlerinages. — 50 arr. 



Sarthe.— Le Maiïb : 6S,fi4â h. ; st. et v. g. ; 6 m. t. ;> 

le ées Chapelains, escalier et rue dea Pans-de-OorrtW {. 



LA FaOSTÏTCTIOX EN PEOVlNrE -317 

32 f. m. (il y a 20 ans, 13 m. t., avec 65, f. m.) ; 81 f. c ; 
eav. 200 pr. ci. — La Flèche : 10,249 h, ; st. ; l m. t., rue 
du Parc ; 6 f . m. ; env. 40 pr, cl. — Mamebs : 6,016 h. ; Bt. ; et 
V, g. ; 1 m. t., rue ChUtdaine ; 4 f- m. ; 12 pr. cl, — Saint- 
Calaib : 3,fiI3 h.; st.; 1 pr. cl. — C/uitenu-iiu-Loir: 
3,803 h. ; et. ; 8 pr. cl. — Ecamitwy : 3,686 h, : st. ; 5 pr. 
cl. — La Ffii-t^-Bernard : b,3Sa h. ; st ; 11 pr. cL — Sablé: 
8,195 h. ; 9t. ; 1 m. t,, rue de la Chartrie ; 5 f . m. j env. 
23 ^, cl. — SiUé.-U-GuiUaume : 3.252 h. ; bL. ; 4 pr. cl, — 
120 arr. 

Savoie.— Chambébv : 20.922 h. st. et v. g. ; 2 m. t., 
mes Dacqiiin, et Fodéré ; 13 f. m. ; «nv. 30 pr. cl, — 
Albertville : 5.S54 h. ; bè, ; I m. t., quai des Allobroges ; 
5 i. m. ; 13 pr. cl. — Moûtierb : 2,397 h. ; at ; 2 pr. cl. 
penuaacnteB ; affluencc des Elles golanteH de la Tarentaise, 
env. 25, pendant la saison de Salins ; les deux tiers vont 
surtout exploiter Brides, où viennent tous les richarda 
obèses do ta contrée. — Saint-Jeam-dk-Maueiemne : 
3,1H h. ; st. ; néant. — Aix-le«-Saina : 6.296 h. ; st. ; 1 m. 
t., rue au Caveau ; 6 f. m, ; pendant U saison, et surtout 
en juillet et août, envahissement de la pr. cl. de Savoie 
et d'ailleurs ; demi-mondaines Élégantes, se succédant sans 
interruption, plus do 500 passant là. quelques jours 
à tour de rùle, ot mettant en coupe réglée les heureux 
joueurs du Casino ; leur point de njncentration est la 
Villa des Fleura. — Modane : 3,039 h, ; st. ; pittoresque m, 
de pr., dite » le Chilet des Alpes », ne ressemblant pas 
aux m. t. ordinaires, et n'ayamt évité la fermeture que 
grâce aux visites sanitaires auxquelles sont soumises les 
pr. plus ou moins passagères qui y séjournent ; leur nom- 
bre flotte de 4 à 10. — Pas d'arr, — Ce dép. et le suivant 
sont signales comme envoyant xia nombre relativement 
K^portaut de pr. à Paria, Lj'on et Genève. 



318 



L. PROSTITUTION ES PIiO\^^'CE 



I 



Haate-Savoie. — Annecy : 11, 947 h. ; st. et v. g, 
l m. t., escalier du Château ; 6 f. m. ; 5 f. c, ; 20 pr. cl. - 
BoNNEViLLE : 2,375 h.; st.; 3 pr. cl. — Saint-Juliem : 
1,524 h. ; at. ; 5 pr. cl. — Thonoh : 5,780 h. ; st. ; 2 pr. 
cl. permanentes, et env. 20 pendant la saison. — Ânme- 
viagie: 2,393 h. ; st. ; 1 pr. cl. — Ev/an: 2,777 h. ; et. ; pp. 
cl. uniquement pendant la saison ; env. 12. — La Roehf : 
3,350 h. ; st. ; 2 pr. cl. — liiniiilly : 4,461 h. ; at. ; 5 pr. cL 
— Samoëna : 2,5-10 h. ; pas de pr. cl. dans cette commune ; 
maie, pendant la saison, parmi les étrangers qui vienaent 
y prendre pension, plusieurs se laissent prendre aux piè- 
ges de 2 filles de Sixt et 1 do Morillon (villages très 
voisins), dont Samoens est alors le lieu de pr. — ! 
3 arr. par an. 

Se lue -Inférieure. — Roiten : 115,914 h. ; st. et v. 
16 m. t., dont 1 passage do l'Hôtel-de-Ville, 1 rue Jacques 
Lelieur. 1 rue des Espagnols, et 13 rue des Cordelière; 
125 f. m. ; 61 f. c. ; env. 300 pr. cl — Dieppe : 22,771 h. ; 
st. et p. m. ; 1 m. t. ouverte toute l'année, quai de la 
Caserne, avec 9 f . m. ; en outre, l'été, le tenancier de cette 
m. augmente son personnel, qui va alors à 12, 13 et 14 f., 
et, avec une partie de ses pensionnaires, ouvre, pour la 
saison, une seconde m. t., chemin de Saint-Pierre ; 15 f. 
c. ; env. 60 pr. cl. — Le Havee : 129,044 h. ; st. ; v. g. et 
p. m.; 7 m. t., dont 1 rue des Remparts, et 6 rua^ 
d'Albanie ; 52 f. m. (il y a 20 ans, 29 m. t. avec 190 f. m,> ; 
62 f. c. ; plus de 500 pr. cl, au lieu des 200 env. d'il y 
a 20 ans. — Neufchatel : 4,027 h. ; st. ; 5 pr. cl. — 
Ttktot : 7,617 h. ; st. ; env. 40 pr. cl., dont la bonne 
moitié habitant les localités voisines et venant ici par 
occasion, les dimanches, jours de fêtea, foires, marchés. — 
Bolbec: 12,023 h.; st.; 9 pr. cl. — Caudebee-en-GauxT 
2,336 h. ; st. et p. m. ; 7 pr. cL — CaiiJc.hec-/cs-Elbeuf :■ 



TJl PfiOSTITUTION EN PEOTISCE 



319 



h. ; Et. ; plua de 100 pr, cl. — Duclair: l,02i 
pr. cl. — Elheuf: 21,404 h.; st.; 2 m. t., rues 
\ Avl. Pré-Bazile, et de la Prairie ; 12 f . m. ; 10 f . c. 
} env. 300 pr. cl. — Eu: 5,105 h. ; st. ; 1 m. t,, rue Pasteur 
; 20 pr. cl., qui presque toutes, pendant la aaiaon, 
[ vont faire leur métier au Tréport. — Fécam-p : 13,577 h. 
\ «t. et p. m. ; 1 m. t., rue des Prés ; 5 f. m. ; env. 100 pr, 
- Forye-s-leS'Eaux : 1,867 h. ; st. ; 3 pr. cl. — Gournay 
t'3,8S9 h. ; at. ; 2 pr. cl. — LiUehonne : 6,504 h. ; st. ; 5 pr 
d«I. — Montivilliers: 5,344 h. ; st. ; 3 pr. cl. — Pavilhj 
.. ; st. ; 2 pr. cl. — Saint-Valéry-eti-Caux : 4,496 h. 
I. m. ; 20 pr. cl. au minimum. — 980 arr. 



Seine-et-Marne — Melun : 12,792 h. ; st. et v. g. 
2 m. t., rues Saint-Michel, et des Casernes ; 8 f. m. 
24 pr. cl. — CouLOMMiERS : 6j239 h. ; st. et v. g. ; 1 m, t. 
rue de l'Are ; 6 f. m. ; 10 pr. cl. — Fontainebleau 
14,222 h. ; st. et v. g. ; 2 m. t,, rue Dancourt ; 11 f. m. 
10 f. c. ; env. 60 pr. cl. — Meaux : 12,833 h. ; st. et v. g. 
4 m, t., rue du Rempart ; 24 f. m. ; 13 f. c. ; env. 40 pr. 
cl. — Provins : 8,340 h. ; st. et v. g. ; 1 m. t., boulevard 
Carnot ; 11 f. m. ; 3 f. c. ; 25 pr. cl. — Claye-Souilly : 
1,912 h. ; st. ; 3 pr. cl. — Daminartin: 1,709 h. ; st. ; 2 pr. 
cl. — La Ferté-Gaucher : 2,287 h. ; st. ; 1 pr. cl. — La 
Ferté.-tovu-Jouarre : 4,859 h. ; st. ; 7 pr. cl .— Monfereau : 
7,672 h. ; st. ; 1 m. t., rue de Provins ; 5 f. m. ; 16 pr, cl. 
— Moret : 2,068 li. ; st. ; 3 pr. cl. ~ JS'emoure : 4,528 h. ; 
8t ; 2 pr. d. — 70 arr. 



Selue-et-Oise. — Versailles : 54,081 h. ; st. et v. g. ; 
12 m. t., dont 2 Petite Place, 3 rue de Marly, 3 rue Basse, 
et 4 rue Madame ; 94 f. m. ; 35 f. c. ; plus de 100 pr. cl. — 
CoRBEit: 8,184 h. ; st. ; G pr. cl. — Etawpes : 8,526 h. ; 
8t. ; 5 pr. cl. — Mantes ; 7,082 h. ; st, ; 3 pr. cl. — 



320 LA PROSTlTrTlOS e:ï PEOVTXCE 

L PoKTOiBB : 7,433 h.; st.; 8 pr. el. — Eahbocillet f^ 

ri,B9T h. ; st. et v. g. ; l m. t., rue de Grouasaj' ; 7 f. 

15 pr, cl. — Âryentetiil : 13,S39 h. ; st. ; IB pr. 

— Arpajoa: 2,987 li. ; st. ; 1 pr, cl. — Confianu- 

ySaiiUe-IIùnorine : 2,480 h.; bL; 2 pr. cl, — Cormâltee.' 

\ 1,918 h. ; Bt. ; 2 pr. cl. — Dourdan : 3,124 h. ; st. ; 5 pr. 

- Enghien: 2,683 h, ; st. ; 14 pr. cl. — Long jumeaux 

i 2,551 h, ; Bt. ; 1 pr. cl. — Mahotu-Laifitte: 4,774 b. ; st. ; 

23 pr. cl. — Meulan: 2,792 h. ; st. ; 3 pr. cl. — Montmo- 

reaejf : 4,577 h.; st.; 7 pr. ci. fixes, et plus de 30 de jnio 

à octobre. — liueil : 9,937 h, ; at. et v. g. ; 1 m. t., rue de 

la Bénarde ; 5 1 m. ; 12 pr. cl, ~ Saint-Cloud- : 5,660 h, ; 

8t. ; 18 pr. cl. — ,)laint-Germain-en-Lai/e : 16,729 h. ; et. et 

V. g. ; 3 m. t., dont 1 cour du Lion d'Argent, et 2 me 

SaÎDt-Jacquea ; 25 f. m.; cnv. 60 pr. cl. — Sannoù; 

3,857 h. ; st. ; 5 pr. cl. — Vit-leHfuve-Saînt-Otorge» t 

5,334 h. ; st. ; 4 pr. cL — VilUers-îe-Bel: 1,649 h. ; s*. ; 

2 pr. cl. — 90 arr. 



DeQx-Sèvres. — Niout : 23,335 h. ; st. et v. g. ; 3 m. 
t., rue du Vieux- Fourneau ; 11 f. m. ; 10 f. c. ; 50 pr. cL 
L'inscription n'a lieu que pa,r arrêté spécial pris par le 
maire, à la suite de la visite, lorsqu'une pr. cl. dônoncéd 
est reconnue vénérienne ; un assez grand nombre de pr. 
enregistrées ici sont filles naturelles ; les 3 m. t. renou- 
vellent fréquemment leur personne], elles ont eu jusqu'il 
36 pensionnaires par an. ■ — Bressoibb : 4,723 h. ; at. ; 
1 m. t., rue de la Bobinette ; 4 f. m. ; 13 pr. cl. ~- Mellk ; 

848 h- ; st. ; 6 pr. cl. — Paethenay ; 7,297 h. ; st. et v. 
; 1 m. t., rue du Puite-Saint-Jean ; 4 1 m. ; env. 30 pr. 

. — Saint-Maixent : 5,620 il. ; at. et v. g. ; 1 va. t., rue 
I Granges; 9 f. m.; 6 f. c.; 23 pr. cl. — Thoaaréi 
G9 h. ; st. ; 1 m. t,, place du Champ-de-Foiro ; 4 f. m.'î 
8 pr. cl. — 37 arr. 



i PROSTITUTIOS KX PBO\TN'CE 521 



Somme — Amiksb : 90,038 11. ; st. et v. g- ; 2 m. t., rue 
Portd'Aval ; 13 f. m. (U y a 30 ans, 13 m. t. avec 61 t. 
m.) ; 34 f. c. ; plus de 100 pr. cl., au lieu de 25 en 1880. — 
Abeeville : 19,851 h, ; st. et v. g. ; 4 m. t., nies du 
Hangar, de la. Cour-Ponthien, de la Caserne, et place 
Saiat-Gilles ; 17 f. m. ; 4 i. c. ; 12 pr. cL — DouLtENS ; 
4,631 h. ; et. ; 3 pr. cl. — Montdidiec : 4,617 h. ; st. ; 8 pr. 
cl. — PÉEONNB : 4,772 h.j st. et v. g.; 1 m. t., rue Saint- 
Sauveur ; 4 f. m. ; 12 pr. cl. — Albert : 6,175 h. ; st. ; 4 pr. 
d. — Corbie: 4,782 h. ; st. ; 3 pr. cl. — Gralibus: 192 h. ; 
st, ; 1 pr. cl. — Ham ; 3,082 h. ; st. ; 10 pr. cl. — lïarbon- 
nièreu: 1,960 li. ; 3 pr. cl. — Boye: 4,028; st. ; chiffra 
^onne de pr. cL, env. 40. — Saint-Va/cry-sur-Somme ; 
3,541 h, ; st. et p. m. ; 6 pr. cl. permanentes, et plus da 
20 pendant la saison. — 250 arr. 



Xarn. — Aici : 21,34B h. ; st. et v. g. ; 3 m. t., rua 

n ; 13 f. m. ; 6 f, c. ; env, 50 pr. cl. — Castres : 

; st. et V. g. ; G m. t., dont 2 rue de l'Agoùt, et 

e Croix-de-Fournès ; 33 f. m. ; 18 f. c. ; env, 80 pr. cl. 

ÏOaillac : 8,421 h. ; et. ; env. 30 pr. cl. — Lataue : 

JB3 h.; env. 40 pr. cl. — Gravlhef : 7.067 h.; env. 30 pr. 

K— Stazamet: 14,361 h. ; st. ; env. 50 pr. cl. — 18 arr. 



il-«t-Garoiine. — Montaubas : 30,603 h. ; st. et t. 

m. t., ruea Lalande, Bayle, et Delcassé ; 17 f. m. ; le 
tobrc de f. c, très variable, flotte de 10 à 22 ; env. 50 pr. 
W. On n'arrête et l'on inscrit les pr. que sur une plainte 
fondée et après une enquête dans leur quartier, ou lors- 
qu'elles sont prises en flagrant délit ; la visite sanitaire est 
hebdomadaire ; les accidents véni^riens, sur une garnison 
de 4,000 hommes, sont en nombre variable, de 33 à 63 cas 
par on. — CAsrELBAEBAsm : 7,772 h. ; st. ; 1 m. t., rue des 
Sieneviers ; 5 f. m. ; 3 f. c ; 10 pr. cL — M01B8AC ; 



V PROSTITUTION' EX PROVINCE 



■■■ : a S| 



8,829 h. ; at. : 1 m. t., rue Tourneuvc 

env. 25 pr. cl. — Beaumont-de-Lomagne. .• 4,571 h. ; 6 pt... 

cl. — Valence-d'Âgen : 3,75" h. ; st. ; 8 pr, cl. — 70 air. 

Vax. — Draguibnan : 9,816 h.; st.; 2 m. t., boulevaxâ' 
des Bemparts; 18 f, m.; 6 pr. cl. — Beionoles: 4,811 h,j 
st.; 3 pr. cl. — Tottu)n : 101,172 h.; gt; v. g, et p. m,; 
15 m. t, dont 1 me de la VÎBitation, 1 rue Lirettc, 2 rue 
Baint-Bemard, 3 rue Traverse-Lirette, et 8 rue des 
Bemparte; 87 f. m. (il y a 20 ans, 45 m. t. avec 246 f. m.); 
89 f. c; plus de 400 pr. cl., au lieu de 150 en 1880. — Fréjusr 
3,139 h.; st.; 5 pr. ci. — Ilyèret: 14,983 h.; st.; I m. t., 
rue Neuve; 7 f . m.; 16 pr. cl. permanentes, et env. 40 pen- 
dant la saison, ^ La Seyjie: 14,332 h.; st. et p. m.; env. 
60 pr. cl, — OUÎQuJes: 3,250 h.; ai; 7 pr, cl. — Saint-Ra- 
phaël: 3,950 h.; st, et p, m,; 10 pr. el. permanentes, et 
, plus du double pendant la saison. — Saint-Tropez : 3,815 h.; 
st. et p. m. ; exactement comme à Baint-Ra,pliaë1. — Slo arr. 

Vaucluse. — Avignon: 40,209 h.; at. et v. g.; S m. 
t., mes Cliiron, et des Grottes; 11 f. m. (il y a 20 ans, 
13 m. t. avec 62 f. m. ); env. 120 pr. cl., au lieu de 25 en 
1880. — Apt : 5,725 h,; st.; 6 f, c; pr. cl, — Cakpenteab : 
9,778 h..; at,; 2 m. t., rue du Refuge; 8 f, m,; 9 f. c; pr. cL 
— Oeangb ; 10,280 h.; st. et v. g.; 1 m. t., route de ChÀ: 
teauneuf; 4 f. m.; 7 f, c; env, 20 pr, cl. — CavaHloni 
9,077 h.; st.; 8 pr. cl, — Pertuii : 4,927 h.; st.; 3 pr. cl. — 
40 arr. 

Vendée. — La Hoche-sue-Yon : 12,215 h.; st. et v, g.; 
1 m, t,, rue de la Koche-sur-Ton; 51 m.; 21 f. c; 10 pr. cl. 
particulièrement signalées, mais ce nombre est fort au- 
dessua de la réalité, attendu que les soirs de foire men- 
suelle (2* lundi) on constate que beaucoup d'ouvrières vont 



^^V tA l'HOSTITUTION" EX FROVIXCK 333 

et vienneut, à la i-euherche du premier venu. — Fontenay- 
LE-CoMTE : 9,964 h.; et. et v. g.; 1 m, t., impasse du Petite 
Sergent; 5 f . m. ; env. 20 pr. cl. — Les Sables-d'Olonne : 
11,557 h.; st. et p. m.; I m. t., ruo de l'Ami donnerie; 5 f. 
m.; 9 pr. cl. fixes, et plus de 30 pendant la saison. — 
Beauroir-sur-Mer : 2,414 h.- p. m.; 5 pr. cl,, moins fré- 
quentées par les marins que par les gens qui viennent ici 
pour le commerce des bêtes à cornea et des chevaux de 
luxe. — C7irr?fmis: 4,917 h.; st.; 3 pr. cl. — Chantonnay : 
3,70tHi.;8t.; 1 pr. cl. —Coex: 1,558 h.; at.; 6 pr. cl., dont 
1 fixée dans cette commune et les aulres venant des loca- 
lités voisines, exploitent les pèlerins qui se rendent à, Cha- 
pelIe-Hermier ou qui en reviennent, surtout à Pâques, 
oii les viticulteurs vendéens vont en foule brûler des 
cierges à N,-D. de Garreau pour obtenir à leurs vignes 
d'être préservées du phylloxéra et autres maladies. — 
Lartffon: 1,542 h.; st.; 1 pr. cl. — Les Herbiers: 3,628 t.; 
4pr. cl. — i(fro«.-6,536h.;14pr. cl. — Montaigu: 1,751 h.; 
fit.; a pr. cl. — Mortagne-stir-Sèvre : 2,157 h.; st.; 5 pr, cl.; 
ces filles, comme celles de Coex, s'embusquent ici pour ex- 
ploiter dos pèlerins; c'est à la gare d'Evrunes-Mortagne 
que débarquent et s'embarquent lous les dévots de saint 
ûrignon, dont le sanctviaire. situé à Saint-Laurent-sur- 
Sèvre, attire plus do 40,onO fidèles de Pâques à la Tou.'îsaint; 
or. pour être dévot, on n'en est pas moins homme, et, soit 
à l'aller, soit au retour, bon nombre de nos pèlerins sa- 
crifient aussi à Vénus {note d'un docteur vendéen), — 
NoirinoiHier : 5,924 h.; p. m.: 3 pr. cl. — Pouzauges: 
3,107 h, ;Bt,;15pr, cl. ; centre important, 2 foires par moîa. 
— Saint-Gilles : \,b1ï h. ; Bt. et p. m. ;4pr. cl. —17 art. 

Vienne, — Poitibes : 39,535 h.; st. et v. g.; 5 m. t, 
dont 1 impasse Bonneveau, et 4. rue du Calvaire; 31 f. 

Ë; 20 f. c; env, 70 pr. cl. — OHATELLEEAtTLT : 22,522 h.; J 



S24 



L.4 PHOKTITDTION EX PttOVIXCE 



' at. et T. g.; 2 m. t., rue Poulain; 15 f. ni.; env. 50 pr. i 

- CiVEAY : 2,553 li.: st.; néant. — LotfDDN : 4,652 h.; st.; 

m. t., me dee Augustins; 4 f. m.; 15 pr. d. — Montho- 

' BitLOK : 6,268 h. ; st. ; 2 pr. cl — Ghairoux : 2,085 h. ; 3 pi. 

— lAffugé: 1,421 h.; st.; 3 pr. cl. — Yivonne: 9,398 h.?. 

st.; 4 pr. cl. — 25 arr. 

Hante-Vieune. — Limoges: 83,569 h.; st. et t. 
4 m. t.. dont 1 raa de l'Arbre- Peint, et 3 rue Borneilh; 
17 f. m.; f. c. en nombre très variable, de 89 à 130; eftT. 
300 pr. cl. — Bellao : 4,903 h.; at. et v, g.; 1 m. t., route 
du Dorât; 3 f. m.; 2 f. c; 10 pr. cL — Rochechoitaet : 
4,606 h.; st.; 7 pr. cl. — Saint- Yhieix : 8.711 t.; st.; 12 pr. 
. cl. ^ Le Dorai: 3,895 b.; st.; 4 pr, cl. — Magnac-Laval: 
4,069 h.; V. g.; 1 m. t, rue du Pont-du-Gué; 4 f. m.; a f. 
c. j 15 pr. d. — Saint- Juniea : 0,376 b. : at. ; 6 pr. cL - 
Saint-Léonard: 6,175 h,; st.; env. 20 pp. cl— 110 arr. 



Vosges.— Episai. : 23,223 h.; tt. et v. g.; 2 m. t., vieille 
route des Bains, et chemin de Bellevue; 17 f. m.; 14 f. c; 
env. 40 pr. cl — Mieecoubt : 5,141 h.; st.; 3 !. c; 6 pr. ni, 
— NEtTFCHATEAU : 4,348 h.; st. et V. g.; 1 m. t., rua de 
l'Abattoir; 6 f. m.; 1 f. c; env, 30 pr. cl. ~ Eemikbmo: 
9,374 h.; st. et v. g.; 1 m. t., route de la Joneherie: 8 i, 
m.; 1 f. c; env. 30 pr. cl — Saint-Di6 : 18,136 b.; st. i 
T. g.; 2 m. t., rues de la Prairie, et d'Ormont; 12 t m.; 
32 f. c; env. BO pr. cl — Bniyèrei: 4,221 11; st.; 15 pr. 
cl. — Buisang : 2,844 h.; st.; 9 pr. cl, dont 4 venant do- 
Sain t-Maurice-sur-Moselle. — Charnue»: 3,423 h.; st.; 2 f, 
c; 15 pr. cl — Saint- Junien: 9,376 h.; st.; 5 pp. cl. — 
st.; env. 12 pp. cl. — Fraise: 2,738 b.; st.; 5 pr. cl - 
GérarJmer: 7,187 b.; st.; 22 pp. cl. ^ Phmhièrcn : 1,869 h.;.' 
st. ; essai d'une m. t. qui a dÛ fermep; env. 20 pr. cl peadsOt 
ion. — Eambervilliere ; 5,703 b.; st. et v. g.; 1 m. t.»- 



LA paosTiTn:oN kn photlsce :J25 

Vieux Chemin da Homont; 7 f, m.; 12 f. c. ; 20 pr. cl. — 

Saon-l'Elnpe: 4,082 h.; st.; 14 pr. cl. ~~ Setianeg : 3,193 h.; 
et; S pr. cl. — •^aulxitrex-sur-Moselolfe : 3.4B9 h.; st.; 
2 pr. cl. — Xerdgvy: 3,925 h.; st.; 5 pr. cl. — 45 arr. 

Yonne. — Auxerre : 18,036 h.; st. et v. g.; 3 m. t., ruea 
des Murailles, ot du Puits-des-Damea; 19 f. m.; 3 f, c.; 
env. 40 pr. cL — Avaixon ; 6,076 h.; st.; 3 pr. cl. — 
JoiHNS : 6,518 h.; st. et v. g.; 2 m. I., route de Brion; 10 f, 
m.; 25 pr. cl. — Sens : 14,057 h.; st. ot v. g.; 2 m. t., rue de 
la Louptifre; 13 f. m. ; env. ao pr. cl. — Tonnerre : 4,812 h. ; 
8t.; I m. t., boulevard Saint-Michel; 5 f. m.; 10 pr. cl. — 
Chahifi : 2,239 11. ; st. ; 5 pr. cl. — Saint-Cydroine-la-Raehe : 
1,120 h.; st.; 2 pr. cl. — Saint- Florentin: 2,502 h.^ at; 
7 pr. cl. — Vi/leneuve-sur-Tonme : 5,02B h.; st.; 15 pr. cL 



L'ensemble des renaeigiieinenta groupés dans cette 
nomenclature est assez important pour permettre auï 
hommes d'étude, qu'intéresse la grave question sociale 
de ]a prostitution, de juger son état actuel en province 
et d'en déJuiie des conséquences. D'ailleurs, au fur et 
à mesure que nos éditions se succèdent, les peraonnes 
qui comprennent la portée de noti'e œuvre nous met- 
tent en mesure de lui donner de plus en plus la préci- 
sion qui est nécessaire en pareille matière, tout en 
noua apportant de nouvelles iniormations concernant 
les départements encore incomplets. (Voir notre Avis 
très important, page 329.) Il nous est même permis 
d'espérer que bientôt, grâce au précieux concours de 
nos lecteurs, cette vaste et si utile enquête générale 
aura atteint son complet développement et ne laias 
plus rien ù désirer. 



i 



r^T- 



32G 



LA PHOSTITUTION EN PEOTIXCE 



Actuel le ment, nous noua trouvona donc en présetuW' 
des totaux que voici pour la province ; 

784 maisons de toléranee, existant au 31 d»** 
cembre 1900; 

9,557 filles soumisea {moyenne exacte annuelle)], 
Be subdivisant en 4,591 filîes de maison, et 4,966 filles 
en carte; 

35,491 iillea inaoumisea (minimum signalé), plus ou 
moins clandestines : les unes, en faible quantité pro- 
portionnelle, débaucbées scandaleuses ù divers degréa; 
et les autres, se prostituant avec une discrétion éga*' 
leuient de degrés variés. 

D'autre part, pas un cbef-lieu de département 
n'-^chappeâla prostitution; ijuantaux sous-préfecture*, 
on n'en compte que 31 où aucune prostiluée ne sait 
8r^:nnlée. Ce sont : Ges, Nantua, Trévoux, de l'Aia; 
L;i Palissi*, de l'Allier; Tîa réel ou nette, Castellane, des 
Basses-Alpes; Largentîère, de l'Ardècke; Mauriac, 
du Cantal: TJssel, de la Corrèze; Boussae, de la Creuse; 
Lombez, du Gertg Saînt-Pons, de l'Hérault; Moutfort, 
de rille-et -Vil aine; Brioude, de la Haute-Loire; 
Gourdon, du Lot; Florac, de la Lozère; Briey, de 
Meurthe-et-Moselle; Mauléon, des Basses-PjTÙnéesî 
Argelès, des Hautes-Pyrénées; Saint- Jean -de-Mau- 
rienne, de la Savoie; et Gîvray, de la Vienne. 

Parmi les départements qui ont le moins de prosti- 
tuées, il faut noter : 7 avec un effectif inférieur à 100, ■ 
Lo/ère, Basses-Alpes, Hautes-Alpes, Arlège, Cuntal, 
Lot, Haute-Savoie; 20 avec un effectif de 101 à. 
200 prostituées, Haute-Loire, Haut-Rliin, Haut»- 
Saône, Ardècbe, Haute-Marne, Creuse, Landes, Indre, 
Loir-et-Cher, Tarn-et-Garonne, A'endée, Cori-èze, 
L Aveyron, Mayenne, Eui-e-et-Loir, Deux-Sèvrea, 
•Tonne, Ain, Xièvre, Vaueluse. Mais les chiffres peu 



LA PROSTITUTIOIS" EX PROVINCE 327 



élevés de la proHtitutîoii de ces départements ne sont 
pas à retenir pour poser des conclusions, attendu qu'il 
en est plusieui'B sur lesquels notre enquête n'est pas 
complète encore; en outj'e,, quand nous aurons les 
chiffres définitifs, il faudi'a voir la proportion des pros- 
tituées avec le chiffre de population départementale. 
Ainsi, il est évident que le Haut-Rhin, se trouvant 
réduit au petit territoire de Belfort, a beaucoup de 
prostituées, ijuoique 109 seulement y soient signalées. 

Par contre, il est ineonste stable qu'il y a très forte 
abondance de prostitution en G départements : le 
Bhône, avec 5,793 prostituées; le Nord, avec 2,877; les 
Bouches-du-Rhone, avec 2,596; la Gironde, avec 
2,446; la Seine-Inférieure, avec 1,843; la Haute-Ga- 
ronne, avec 1,378, Ces ^} départements tiennent ainsi 
la tête. Après eux, viennent : l'Hérault, comptant 
923 prostituées au total; Meurthe-et-Moselle, 879; le 
Gard, 793; le Calvados, 765; ]a Loire, 735; l'IsèrcTlU; 
la Loire- Inférieure et le Var, chacun 692; la Marne, 
675; le Finistère, 651; l'Aisne, 631; l'Aube, 627, etc. 

On ne peut pas, d'après les chiffres seuls des eS'ec- 
tifa de prostitutiou, conclure à plus ou moins d'imm»- 
ralité des femmes de telle région; ce serait e'esposet 
à commettre des erreurs d'appréciation : mais il faut 
approfondir les chiffres et connailro au moins lea 
principales circonstances qui les occasionnent. Ainsi, 
comme race, les Savoyardes sont identiquement les 
mêmes dans leurs deux départements, et cependant 
la Haute-Savoie ne compte que 82 prostituées, tandis 
que la Savoie en compte 601; c'est que, ici, dans la 
balance, Aix-les-Bnins vient jeter un poids énorme. 

Par contre, Scine-et-Oise est relativement pauvre 
de prostituées, avec son total de 503, et Seine-et- 
Marne paraît plus pauvre encore, n'en ayant que 284, 



M 




328 LA PROSTITDTION EN FKOVINCE 

Maïs il ne faut pas pei'dre de vue que a&s deux d^ 
tements entourent celui de la Seine, où Pi 
un goufEre, attire les débauchées qui ont pris la déci- 
sion de faire commerce de leur corps. Kappelona-noiu 
la statistique relative aux paya d'origine des prostfc- 
tuées exerçant leur métier à Paris {page 16): aur un 
ensemble de 12,227 de cea filles, dont Parent-Duchâ- 
telet a compulsé les dossiers, Seine-et-Oise en a fourni 
874, et Seme-et-Marne 453. 

Nous voyons aussi qu'il n'est aucun frein contre la 
fougue des passions. Si des prostituées se trouvent 
quelque part, c'est qu'il y a par là dea libertins 
proportion. Or, les départementH renommés pour leur 
esprit religieux, sont loin de se distinguer par une 
pénurie de prostituées. Prenons, par exemple, le 
groupe vendéen, angevin et breton du nord-oueat 
Vendée, 152 prostituées; Mayenne, 178; Côtea-du- 
Nord, 361; Morbihan, 450; Maine-et-Loire, 463; 
Manche, 456; Ille-et-Vilaine, 584; Finistère, 651; 
Loire -Inférieure, 692; ensemble, 3,976 prostituées, 
A ce groupe provincial, il n'est pas déraisonnable 
d'ajouter, étant liraitropLes, les 3 départements nor- 
mands ofi fleurissent le p5us les œuvres de piété, c'est- 
à-dire : Orne, avec 257 prostituées; Eure, 390; Calva- 
dos, 765. Voilà donc les 12 départements réputés le« 
plua dévots de France, avec un ensemble de 6,388 
prostituées, sans compter les filles normandes (1,134 
sur 12,227), bretonnes, angevines et vendéennes qui 
viennent se prostituer à Paris. C'est un total consi- 
dérable pour ce groupe de départements qui repré- 
sente à peine la septième partie de la province. 

"lais nous le répétons : c'eat seulement quand notre 
enquête se trouvera complète, que l'on pourra en tir^ 
toutes les conclusions. 



^H iWX 



LA PEOSTITrTIOW EN PEOVIXCE 



AVIS 1?n^£:iS IlMP'OItTA.lVT 

APPEL A NOS LECTEURS. — Maintenant que voîcï 
cet ouiTagi.' publié sous sa forme nouvelle, chacun peut 
constater que c'est- seulement en procédant comme nou» 
l'avons fait qu'il y aura poeaibilité de réunir tous les élé- 
ments instructifs de cette grave question. Parmi les per- 
Bonnea à qui noua nous BommcLS adressé en premier lieu, 
plusieurs ne noua ont paa répondu; mais, h. présent, tous 
sont en mesure d'apprécier la portée des Questionnaires 
imprimés que nous envoyons, sur demande, à nuiconque 
est en situation de noua fournir des renseignements com- 
plémentaires (ou rectificatifs, puisqu'en cette matière les 
chiffres peuvent subir chaque année des variations); et 
noua accepterons toujours avec reconnaissance les informa- 
tions des maires, commissaires de police et secrétaires de 
mairie, docteurs en médecine et pharmaciens, hommes do 
lettres, officiers ministériels, commerçants établis et in- 
dustriels, et autres personnes désireuses de collaborer, par 
leurs enquêtes ou observations particulières, à cette œuvre 
capitale, dont l'intérêt général a été si ijien démontré par 
notre vénéré maître Parent- Duchitelet. 

Ainsi, nos éditions seront toujours lenues à jour. 

Le Que>«tionuaîre iui|ii1i»ë esl expédié «ur de- 
mande adressée i\ 11. le docteur L'i'liain Itiuard, 
à la Librairie du XX- Hièvie, H, rue Munt^ieur-lt-- 
PHut-e. îi Paris. 

Nos divoraes questions se rapportant exclusivement aux 
statistiques, il nous faut purement et simplement des 
cliifEres et des renseignements d'ordre général; il n'est 
tenu aucun compte des* réponse* qu'on nous envoie, 
lorsque notro correspondant se livre à des personnalités 



330 I,A PROSTITUTION EN AUîÉllIB 

OU s'écarte du programme qui lui est tracé par le Quctttil 
naire. 

Sitôt qu'un Questionnaire noua parvient, rempli par un 
correspondant qui s'est fait connaître à noua, nods lb lui 
BETOUKNONS, après avoir recopié ses râponsea pour notre 
prochaine édition; ainsi, nul n'a à craindre qu'il soit fait 
abusivement usage de son nom par quelque mauvaia 
plaisant, voulant nous glisser dee informations de fan- 
taisie. 

On peut, d'autre part, nous demander d'envoyer le Ques- 
tionnaire à une adresse d'initiales en poste restante; mais, 
lorsque le renvoi nous en est fait, nous ne tenons aacun 
compte des répouBes anonymes. 
, Toutes les mesures que nous avons adoptées garantissent, 
en outre, à nos lecteurs, le caractère sérieux de notre en- 
quête et l'esactilude de ses résultats. 



3. I^a prostilulion m Algt^rie et Tunii^ir. 

Lea renseignements que nous possédoBs sur notre 
grande colonie de r.i\iri(ju.e du Nord sont loin <le noua 
donner satisfaction quant à présent, nous l'avouons 
en toute aïncérité; presque partout, en Algérie et en 
Tunisie, nos envois de questionnaires ont été mal com- 
pris, mal interprétés : aussi, espérons-nous (|Ue cette 
édition lèvera tous les doutes, ot que des lecteurs 
algériens et tunisiens viendront contribuer à notre 
enquête, pour les éditions suivantes. 

Voici, néanmoins, un aperçu. 

En premier Heu, il faut dire que les maisons de 
tolérance, selon le système de la métropole, ne signi- 
fient presque rien en Algérie et Tunisie, oil la débau- 
che est fort intense et se rit de tous les efforts de l'auto- 
Jité. 



ul PRosTrn."Tio \- v.s ALcÉniE 331 



Ïi'ravmce d'Alijer. En tout, 26 maîsotiB de tolérance. 
Alger en a 12, dont 1 impasse René Caillé, 1 rnc Caftan, 
rue du Chêne, 1 rue des Maugrebins, 2 me BarbRronsBc, 
rue Kattarouggil. — 2 à Milianah, bd des Régbas et bd 
du Nord. — 2 à Médéab, rue Rabelais. — là Orléaneville, 
rue de Lounne!. — 1 à Tizi-Onzou, rue PoisBOnnière. — 
i Affrcville, rue de Paria. — 1 à Aumale, "Inre- du 
Ford. — là BHdab, rue Zaouïa. — là Bouïra. — là 
Iherchell, rue du Kenipart. — là Dellys, rue Carnot. — 

i, bd de l'Est. — 1 à Teniefc-el-Haad. 
\ Des esBaiB infructueux d'établissements ont é\é faits à 
[loléah et à Fort-Nationel. 

ii'ince de. Conttantine. En tout. 17 maisons de tolc- 

' Conetantine en a 4, dont 1 rue Cirllia, 1 rue Hackpttc, 
2 rue Perrégaux. — là Batna, me Bugeaud. — 3 à Bine, 
soit 1 place d'Hippone, et 2 rue Bouguentas, — 1 à Bougie, 
ruelle des Vieillards. ^ 1 à Guelma, mo Bélisaire. — 
1 à Philippeville, porte de Conatantine. ^ 1 à Sétif, nio 
Sparta«us. ^ I à Bordj-bou-Arréridj, porte de Bougie. — 
1 à Biakra, rue Richard. — 1 à CoUo. — 1 à Djidjelli. — 
1 à Soubaras, rue de la Douano. 
r Essai infructueux, à La Calle, 

I Fravinpe d'Oran. En tout, 29 maisons de tolérance. 
I Oran en a 8, ensemble rue Monthabor. — 1 à jinscara, 
Aie de la Mina, et 2 autres dans la commune mixte du 
BËme nom. — 4 à Mostaganem, ensemble rue des Jardins. 
S à Bidi-bel-Abbts, bd du Nord et bd de l'Est. — I à 
rue Belle-Treille. — 1 à Aïn-Sefra (Sahara 

Igérien). — 1 à Aïn-Temouchent, bd de l'Est. — 1 à Arzew, 
fpc du Rempart. — là Giîryville (Sahara algérien). — 
\ à Méchéria (Sahara algérien). — là Nemours. — 

[ à Perrégaux, — là Relizane, bd de Zommorab. — 



SJS 



i 

^^M l a Solda, ru 
^^B bd de la Gare. 

I 



'mOX ES ALGERIE 



de la Marine. 
— 1 à Tiaret, ru 



- 1 à Saint-Deoia-da-Sig, 
des ReiD parte. 



Tuwnte. En tout, 5 
Tnnîa eu a 4, dont 1 
M^±ar. — 1 à Sousse, i 



loléranca. 
Bordj-Cherch. 



Enaomble, l'Algérie et la Tunisie comptent doue, 
actuellement, 77 maisons de tolérance. Les prostituées, 
penaionnaires dans ces maisons, sont au total 338, 
comme chiffre de moyenne annuelle; en effet, leur 
nombre, qui eat assez variable, a été, dans le coura des 
cinq dernières années {1S9G-1900), de 30i au mini- 
mum, et 372 ans maximum. 

Il importe, maintenant, de savoir que, dans notre 
grande colrmie africaine, il existe, concurremment au 
petit nombre de maisons de tolérance fermées, nne 
quantité formidable de maiHtina dites ouvertes, que 
l'autorité laisse fonctionnel'; là viennent des fiUea 
cartêes, qui y passent la joiirnée et sont, en quelque 
Borte, demi-pensionnaires. Plus nombreuses encors 
BOnt les filles inscrites qui, ayant leur cbambre eiH 
ville, s'y prostituent isolément. Toute cette pai'tie de 
la prostitution soumise triple le chiffre des iillea de 
maisons fermées. 

Mais tout cela n'est, rien auprès de la prostitution 
insoumise, dont le commerce malsain s'exerce plus 
eu moins clandestinement dans les villes du littoral 
et dans les communes voisines des grands centres, mais 
qui n'a plus aucune vergogne au fur et à mesure que 
ses champs de manoeuvre sont éloignés du littoral et 
des principales villes. 

Tant que les éléments d'une enquête minutieuse 
et détaillée n'auront pas -été réunis, il est inipoaaible 



■ LA PROSTITCTIOX EN ALGÉRIE 33S 

d'évaluer, même approximativement, à quel chiffre 
s'élève l'effectif de cette prostitution clandeatine. Nou= 
allons faire comprendre cette impossibilité par un 
simple exemple : à im moment donné, Blidali, 
ville comptant aujourd'hui 27,772 habitants, dont 
6.991 français, et qui a une seule maison de tolérance, 
avait comme femmes mauresques inscrites au dispen- 
saire municipal 37 prostituées; or, sur ces -37 filles sou- 
m-isea, il y avait 32 épouses légiti-mes, 1 veuve, el 
4 célibataires seulement. D'après cela, puisque 
32 épouses n'avaient pas ci-aint de se déclarer otficiel- 
lement prostituées, comment pourrait-on supputer le 
nombre des autres épouses mauresques qui faisaient 
également commerce de leur corps, maîa qui se déro- 
baient au contrôle de la police sanitnire ?.., Eh bien, 
il en est ainsi partout. 

Dana les villes quelque peu importantes, le contin- 
gent des filles inscrites comporte plus d'eui'opéennes 
que d'indigèues. Un de nos confrères a bien voulu rele- 
ver pour noua, en se heurtant à mille difficultés. 
quelquea chiffres concernant Alger, Oran. C'ouâtan- 
tine, Bone et Tlemcen, c'efit-à-dire les 5 villes les plus 
populeuse» d'Algérie. II résulte de ces renseignements, 
puisés à des sources officielles, mais malheureusement 
incomplets, qu'en général, sur 1,000 filles inscrites 
(en maisons fermées, en maisons ouvertes, et cartéea 
iaolées), il y a environ 640 européennes et 360 indi- 
gènes. Toujours sur 1,000 inscrites, les prostituées 
d'origine française comptent pour- 500; les espagnoles 
viennent ensuite avec une moyenne de 90; puis, une 
vingtaine d'allemandes, ime quinzaine d'italiennes, 
7 à 8 auiasesBefi, 9 à 10 anglaises. Quant aux 360 indi- 
gènes, ellea se subdivisent en 250 mauresques environ, 
,£0 kabyles, 35 juives, et 15 négresses; ces dernièrp" 



334 LA FKOSTITUriOX ES ALGÉRIE 

e ti'ouvent exclusivement dans les inaisoua fermées. 

Par contre, les femmes et filles judlgènea snnt prodi, 
[ gieusement en majorité et en nombre incalculaWe 
I dans la prostitution insoumise, plus ou moins clandes- 
I tine. 

Bans les villes quelque peu importantes, il se trouve, 
en dehors des insoumises arabes qui se tiennent dans 
la basse prostitution, beaucoup de femmes, qualifiées 
commituément tilles galantes, dont plus des deux tiera 
sont d'origine européenne, soit immigrées, soit néea 
en Algérie de parents européens établis colons; ces 
prostituées exercent leur métier à l'abri d'une pro- 
fession plus ou moins réelle ou nominale, siègent dans 

i comptoirs, les débita de tabac, louent des appar- 
tements garnis, vendent à la toilette, ou sont censées 
appartenir à des ateliers de modes, de couture, etc. Le 
nombre des insoumises de cette catégorie peut être 
évalué, attendu que ces filles ne se cachent pas et sont 
reconnais sable s à leur grand déploiement de toilette, 
aux habitudes de vie luxueuse et sensuelle qu'elles 
affichent, hôtesses assidues des bals, des tripots et des 
cabinets particuliers de restaurant. Dans leur nombre, 
il y a, pour un peu moins d'un tiers, des juives et des 
mauresques, qui ont été assez adroites pour sortir des 
bas-fonds de la prostitution indigène. Voici les chiffres 
de proportion, sur 1,000 de ces filles galantes : 520 fran- 
çaises, 100 espagnoles, 40 italiennes, 20 anglaises, 
d'une part; et, pour les races indigènes, d'autre part, 
180 mauresques, et 140 juives. Ces chifîres ont été pris 
sur l'ensemble des 5 villea les plus popiileuses, 

A propos des espagnoles, une remarque s'impose : 
il ne faut pas englober dans cette qualification de 
prostituées espagnoles les femmes et les filles des 
Mahonnais, qui, par la douceur de leurs mœurs, la 



^™ CM 



i 



LA PaOSÏI'trTION liN ALGÉRin 335 

igularité Je leur conduite et une grande persévé- 
mce au travail, acquièrent généra lein en t une cer- 
aîaance, et qui constituent, pour ainsi dire, à 
'part, une population honnête au milieu de leurs com- 
latriotes. 
Pour en revenir particulièrement aux races indî- 
laènea, la prostitution -y sévit à l'état latent. Presque 
IU8 les établissements de bains publics sont des éco- 
is de débauche. Grand nombre de femmes, réputées 
honnêtes, y vont non seulenient pour le bain îi l'orien- 
tale, avec massage, mais aussi et surtout pour se payer 
des jeunes garçons vicieux, qui, déguisés en filles, y 
sont introduits par les servantes, aux lieiires ofi ces 
établissements s'interdisent de recevoir les hommes. 
Celles qui ne se procurent, pas ainsi une heure de 
luxure secrète avec ces adolescents débauchés, s'y coi- 
impent d'une autre manière; dans ce péle-mêle de 
tmmes inaj-iéee ou de jeunes filles, Je msanatcs (cor- 
cabines qui se prostituent à l'insu de leur entreteneur) 
et de donrrïas (filles publiques proprement dites) jui- 
ves, mauresques, négresses, qui pourrait dire ce qui 
ee trame d'intrigues, ce qui s'élabore de tromperies 
à l'encontre des maris jaloux, et quels conseils pei- 
nicieux se donnent, quels instincts per^ters se propa- 
gent, quelles négociations d'entremise et de proxé- 
nétisme clandestin s'effectuent, sous l'inviolabilité de 
ces sombres étuves ' 

L'Algérienne de race indigène a le vice dans le sang; 
elle est toujours prête à s'abandonner, quand l'occa- 
sion s'en présente, au premier venu, fût-ce un coquin, 
un bélître, un sodomiste. A la lascîveté de l'Orientale, 
elle joint la dépravation de l'Kgj-ptienne, sa voisine de 
l'Afrique du Nord. Il est juste d'ajouter, à titre d'es- 
ilication et comme circonstance atténuante, qu'elle 



l 



!3G LA PROSTITUTION EX ALGÉRIE 

est plus victime que coupable cJaiiB cet estraordinaitO' 
relâciiemeiit des mœurs : mariée dès 1 ago de douze, 
quelquefois tuit ou neuf ans, livrée innocente et sans 
aucune expérience de la vie à la brutalité d'un éponx 
dont elle est en réalité l'esclave et pour lequel elle 
n'est le plus souvent qu'un instrument de plaisirs, 
la jeune Arabe glisse facilement sur la peute où 1'^- 
traînent soit la prertiière satisfaction de mauvais 
instincts, soit le besoin de se dédommager, de s'af- 
franchir, même par des écarts de conduite, de la chaîna 
qui ne lui offre en perspective que eétiuestration; coi^s 
et violences de toutes sor+.es. 

Une coutume mahométane contribue beaucoup & 
transformer rapidement la jeune femme mariée, mau- 
resque, en prostituée. Comme tout musulman, l'époux 
arabe a la répudiation facile : or, durant l'intervalle,, 
imposé aux femmes séparées entre la l'épudiation et 
un second mariage, ces pauvres créatures, entreposée» 
elie>! leur père, leur frère ou un proche parent, jouis- 
sent, faute de protecteur intéressé et responsable, 
d'une lijaeité d'allures illimitée; pendant cette période 
d'attente, elles se prêtent sans retenue, par intérêt, 
et le plus ordinairement par besoin, à des relations 
illicites, sans prendre même souci de les dissimuler. 
D'autre part, l'obligation de recevoir dans la famille 
les femmes auxquelles la séparation conjugale ménage 
de si commodes loisirs, maintient à la courtisane, chez 
les musulmans, un niveau de position dont notre civi- 
lisation, toute indulgente qu'elle soit, ne saurait de 
beaucoup s'accommoder: là, en efl'et, même les filles 
publiques ne sont point, comme chez nous, traitées en 
êtres dégradés; les meilleures maisons leur resteat 
accessibles; elles y font visite, devisent en commun, 
ireanent leurs repas, assises à la même t-able que 




dréb à blftiKi, pour imiter la pâleur cadavérique ; le vam^ 

an pied du lit, et marmotto dua De Profundis ; c'eat pou 

d'innensé ; nikis on peass bi la psnudo-ilLitunto a de U pe 

n afifoui!,.. Plus danKci-uux sasore gne aroteaqun, le piéJ 

.ADJr;o<>ii> pas nuËllé lu B<:BiidBlM tÎu minst, qui lui val 



^Htluaiun (jiage maj. 



i-ÏJlre, «t pou! 
e s'agenaalllii 



I 



LA PEOSTITFTinN' T.S ALGÉRIE Îj39 

l'épouse légitime et ses filles, sovteut avec elles pour 
aller aux emplettes, à la promenade, au bain, etc. 

Pour ne parter que (le l'arrondisse ment de Guelina, 
sur lequel un officier de notre armée a bien voulu nous 
transmettre une petite notice, la population féminine 
arabe y atteint le ii^^bre de 58,630 sur une totalité 
de 129,819 bubitants {lea colons français y comptent 
pour 5, 725 et les colons étrangers pour G93); notre 
coiTespondant estime que, « parmi les femmes arabes 
de cet arrondissement, il y a certainement plus de 
3,000 prostituées >. 

Entin, on ne peut passer sous silcTice la débauche 
des filles du désert même; car, pour changer un peu 
d'aspect en a'éloignant des villes vers lea tribus du 
centre et jusque dans le Sabara, la prostitution indi- 
gène n'en conserve pas moins son double et désolant 
caractère de vogue et de gravité. Déjà, eu Kabylie, 

1 lea Barbacliaâ, les Ygnïfsals, les Ouled-Kab&e, les 
Béni- Amers, sont réputés pour le libertinage de leurs 
femmes, écrit le docteur Bertberand, médecin-major, 
flt chaque tribu possède son effectif de prostituées 

' libres, avouées, payant patente à un chef spécial, le 
■mézoïiar. Mais c'est surtoiit la prostitution nomade, . 
Tenant du pays des sables et des oasis, qu'il faut faire 

' connaître à nos lecteurs. 

Cette dépravation n'est pas seulement en plein exer- 
cice dans sa lointaine contrée; elle a ses cours et ses 
cotes sur les marchés voisins, et elle est toujours 
accueillie avec plaisir dans les localités moins éloi- 
gnées du littoral; elle fait la renommée et ia richesse 
de sa région; elle organise des caravanes; des phalanges 
d'émigration féminine abandonnent périodiquement 
le sol natal, pour aller approvisionner au loin, dans 
^— les oasis cTu désert, les endroits maltraités du ciel 

i i 



340 



LA rKOSTITrTIOM KS .IIGERIE 



SOUS le. l'apport du nombre et de la beauté des fenuiies. 
Les Oiiîed-Naïls, au Bud-nueat de la province de 
iPpnBtantine, fournissent l'exemple, sinon !e plus com- 
;, du moins le mieux connu de la traite des prosti- 
iB saliariennes. Dans cette populeuse tribu, de nom- 
■ treux essaims de j'eunea filles, la plupart remarqua- 
blement belles, quittent chaque ajinée leurs famillefl 
pour fie rendre dans les diverses localités où les attend 
le proxénétisme arabe. Les unes se dirigent ■vera 
l'est et vont à Gbadamès, ville tripolitaine, située but 
les confins du vilayet de Tripoli, à 30 degrés de latitude 
nord, et en même temps à proximité de la pointe ex- 
trême de la Tunisie et de la partie méridionale de la 
province de Constantîne; bien que ne comptant que 
5,000 habitants, Ghadamès est le centre d'un impor- 
tant commerce; les indigènes y vendent l'ivoire brut, 
les plumes d'autruche, les peaux de bêtes sauvages, 
les cuirs et maroquins, la poudre d'or, et achfet«at 
toiles, cotonnades, verroteries et produits coloniaux de 
tout genre. Quant aux autres filles de la tribu (4ea 
Oued-Naïls, prenant la direction nord-ouest, «Ubb 
vtmt à Ouargla (à 800 kil. d'Alger), grand marché de 
dattes et de burnous, à Touggourth (à 455 ki!. de Cona- 
tantine), fourmilière arabe de 47,776 habitants, dnnt 
74 français seulement, et, poussant plus loin vers lo 
littoral, à Bou-Sâada, immense commune indigène, 
de plus de 800,000 hectares (50,642 hab., dont 13 fran- 
çais), dont la gtire la plus rapprocbée, celle de Bouïra, 
est à 82 kilomètres; il en est qui se risquent même 
jusqu'à Boghar (à 166 k. d'Alger), chef-lieu de cercle 
militaire, commune indigrène, avec 33,604 habitants, 
dont 56 français, et 376,140 hectares de superficie. 
. A Ouargla, c'est sous les murs mêmes de la ville que 
ces filles viennent camper; à Touggourth, elles ont 



LA l'ROSTirrTio^' v.y algéhie :(41 

leur montagne Baci'ée au Drâa-el-GLerael (uiainolon 
des poux); à Bou-Sâada, elles plantent leur tente au 
coin de la principale place publique, à côté d'un fon- 
donk (nom des cararansérails dans cette région). 

Située un peu en arrière de la ligne du Tell, eu avant 
du désert, dans des conditions excellentes qui en font 
un marché d'écliange des plus fréquentés, la^ commune- 
indigène de Bou-Sâada peut être considérée, dans sa 
partie centrale, comme le grand lupanar du pays. Au 
sujet de cette ville arabe d'Algérie, nous tei'minerona 
ce cliapitre par qiielques détails, fournis par notie dis- 
tingué confrère, ie docteur Bertherand, sur la manière 
dont la débauebe s'exerce en ces contrées si peu con- 
nues; ainsi, le lecteur sera parfaitement initié à la vie 
galante des gitanes de la prostitution saharienne. 

Qu'on se ligure une cour entourée de Ifi à 18 naba- 
nons destinés à loger chacun deux filles ouled-naila, 
la plupart très jeunes (il en est qui n'ont pas douze 
ans), jolies et bien tournées, sons le costume — nous 
allions dire le déguisement grotesque — dont elles 
s'affublent. Vers huit heures du matin, le cliaous, pré- 
posé à la garde de ces houris terresti^es, donne la clef des 
champs à ses pensionnaires; elles se répandent bientôt 
dans les cafés maures qui se pressent autour du harem. 
Là, au son d'une musique dont un tambour de basque 
fait à peu près tous les frais, elles s'évertuent, par 
toutes sortes de danses, piincipalement la fameuse 
danse du ventre, et par de brusques arrêts à pose» 
lascives, entremêlées de chansons, à éveiller les dè- 
BJrs des fumeurs ou des oisifs que leur présence attire. 

Rien de plus étrange qu'une parure d'ouled-naïl. 
A voir ces visages sahariens, chargés de toutes cou- 
leurs, les joues enluminées de carmin, le front jauni 
- d'ocre, les lèvres rutilantes de vermillon, les yeux en- 



J 



I 



343 L.4 PEflSTITL-TlOX EX ALr.j';RIF, 

cerclés (le sombre koheul, Ica smii'cils nt)yéa tlana une 
brune et épaisBe eouclie de henné, ie tout parsemé de 
mouchée faites de pommade noire à la rose, on croirait 
asBÎater à une exMbition de momies on de reliques, 
animées par le mécanisme secret de quelque Vaucan- 
Hon. Ajoutez à ces affreux pastels l' encadrement d'une 
chevelure tressée en lourdes nattes mélangées de laine; 
pour vêtement, le haïk, sorte de chemise longue, recou- 
verte d'un châle rayé, négligemment jeté sur l'épaule 
et fixé par des plaques de métal enjolivées tle chaî- 
nettes d'argent et de cuivre, de coraux, d'amulettes; 
enfin, un petit miroir de pacotille, suspendu à la cein- 
ture; vous aurez le ne c-p lus-ultra de toutes les res- 
sources de la coquetterie chez les bayadères de la dé- 
bauche nomade. 

Dès qu'un amateur se laisse teuter. la conversation 
s'engage par un dahklac ( j e t'en prie) doucereux; puis, 
sur un ton formel : Ouallah! héïti béîUic (par Allah! 
ma chambre est ta cbambie; après quoi, discussion du 
pris; enfin une fois l'accord établi, et avant d'emmener 
le galiint, l'immanquable phrase : HiU cl-fuuloûi 
(donne l'argent), ou tout au moins celle-ci : Ahtini 
ghàboûn {paie-moi une partie de la somme d'avance). 

Ce qui se passe chez les femmes sahariennes est à 
l'inverse de celles du Tell et de la région des hauts 
plateaux, lesquelles passent du rang d'épouses à celuî 
de prostituées. Tout au contraire, après deux ou trois 
ans d'exercice du métier de fille publique, les jeunes 
ouedr-naïls, enrichies d'un petit pécule, regagnent 
la tribu natale, où elles sont fort recherchées en ma- 
riage ; réintégrées dans la vie de famille, nul souvenir 
du passé ne les poursuit dans leur considération; pre»- 
que toutes, affirme-t-on, sont réputées pour leur booite 
mères et comme épouses. 



APPENDICE 

LES ABERRATIONS DU SENS GÉNÉSlQilE 

aadiame ; aea variétés ; son influence dans la prostitution 
clandestine ; la bestialité ; le yampirisme on passion du 
cadavre. — La pédérartia ; la. prostitution inaaouline et sa 
clientèle ; gîtons et rivettos ; petits-jésus et chanteurs. 

Ainsi que noirs éminent confrère, le docteur Paul Mo- 
reau de Tours, l'a dît en termes excellents, « l'aber- 
ration constitue une dérogation aux lois qui régissent 
la sensibilité propre des organes et des facultés; 
par ce mot, il faut entendre ces cas dajia lesquels l'obser- 
vation fa,it constater un. changement contre-nature, escep- 
tionnel et tout-à-fait pathologique, cbangemenfc qui 
apporte un trouble palpable au fonctionnement régulier 
d'une faculté ". Or, ce que l'on constate par exemple 
pour l'appétit qui, aoit augmenté démesurément, soil 
perverti, donne lieu aux phénomènes connus sous les 
noms de boulimie, do pica, est vrai également pour lea 
appétits vénériens : le goût étrange qui poussa certains 
individus à rechercher dans les plaisirs hors nature une 
jouissance nouvelle, ou qui obéissent malgré eux à un en- 
traînement qu'ils ne pcuvenb maîtriser, constitue bien 
réellement une aberration du sens générique, notre 
sixième sens. 

Un des crimes plus parLiculîË rement imputables à la 
prostitulion clandestine est de contribuer, d'une manière 
effrayante, au développement de ces aberrations, de ces 
goûts desordonnés, qui mènent le lilicrtin plus ou moins 
promptement à la folie. Le marquis de Sade, dont l'exis- 
tence fut un résumé de toutes les horreurs volup tue usée, 



w 



':i44 APPËNincn 

a laissé son nom à Tensemble des principales dépravitf 

tïons érotiquefi; le sadisme, en eSet, comporte pluaieun 
variétés, à divers d^rés obscènes et immondes. 

Les aadistea peuveat Stre répartis en trois catégories i 
les blasés, les monomanes, lee paBsionnels. Mais, à vrai 
dire, entre ces traia genres de débauchés maniaques, lu 
distinctions sont 1res subtiles. Ce que nous avons à retenir 
ici, c'est que, si le personnel des maisons de tolérance 
subit parfois fertaines exigences de ces érotomanes, du 
moins ces maisons, étant surveillées, ne peuvent pas se 
prêter à toutes les fantaisies insensées des dépravés et des 
fous, tandis que les &lles galantes, chevronnées du Yiai, 
et les proxénijtes clondestinea établissent, par calcul et 
avec rimpunilé de leur situation, leurs meilleures chances 
de fortune en exploitant spécial^ueut tous les genres et 
sous-genres du sadisme. 

C'est dans les maisons de rendea-vous que les blasés 
oherebent l'adultère et la virginité; tels autres sadistee, 
qu'on nomme voyeurs, y trouvent l'excitation de leur ra- 
mollissement par le spectacle de la luxure d'autrui. Pour 
certaine monomanes. les lupanars clandestins ont des 
vestiaires : tel individu ne veut avoir aSaire qu'à aa» 
fenmte en toilette de bal, tel autre à une danseuse en tata; 
d'autres blasés, monomaueB ou passionnels, déjà sodo- 
mistCB, mais n'osant pas encore aborder la prosLitutîcm 
masculine, exigent que la fille, jeunette et maigriol^ n 
costume en mousse, en marmiton, en petit télégraphiste. 
Il y a peu d'années, une dcBcente de la police des meeurif 
eSectuée dans une maison clandestine de la rue Radziwill, 
fit découvrir un vestiaire oii se trouvaient même des cos- 
tumea de sœurs de cliarité, pour les femmes, et des soutiMici^ 
■pour les clients; on y saisit aussi des pénis factices, dUi 
gaude-mihi, destinés aux sodomisles à manie passive. 

Beaucoup de blasés recherchent les fellatrices, ou Mûd, 



> m 

APPËNDICIî 345 

pour B'excitcr, réclament de la. femme un long esercice 
de doigté par tout le corps, on encore pratiquent eus- 
mêmeB la pollution labiale et linguale sur la prostituée, 
et il est juste de reconnaître que ces trois sorte* de pra- 
tiques luxurieuses aont en usage partout, les filles sou- 
mises s'y prêtait avec autant de complaisance que les 
Pnisoumisea; les deux premières de ces manœuvres sadiques 
Bont des plus pcmicieiises pour la santé des hommes qui 
y prennent goût, et la troisième amène l'êpuiseinent des 
femmes qui acceptent les clients ayant cette sale passion. 
Par contre, une passion inofEensive pour elles, c'est celle 
des monomanes dont le plaisir quasi-solitaire se satisfait 
en chaussant ou en décliaussant une prostituée; ces ma- 
niaques paient tr^a cher le soulier féminin ou le baiS qu'ils 
emportent, qu'ils baisent avec tendresse, avec frénésie, 
qu'ils mordent, et que finalement ils polluent. 

On trouve de ces monomattcs jusque dans la rue : le ma- 
nège des frottciirs est bien connu des agents, qui en arrl- 
Ptent souvent, croyant d'abord avoiraSaireàdcs pickpockets, 
D'autre part, il est des sadiates qui, au lieu de prodiguer 
des attouchements lascifs aux prostituées, éprouvent une 
▼olupté à les battre, ou bien à se faire battre par elles; 
filles en carte et filles clandestines ont pour cela des fouets. 
des verges, des orties; tels autres clients maniaques se font 

I enfoncer des épingles d'argent dans les parties génitales. 
Sans un genre tout contraire, on n'a pas oublié le procès 
û'an marchand de diamants qui, sur la chair de pauvres 
filles, épinglait un fichu de soie et l'arrachait ensuite avec 
les denta; les maisons de tolérance, du moins, ne peuvenli 
pas ee prâter à ces folies. 
Le Inpanar clandestin est, enfin, le refuge de la bestialité 
«t du vampirisme, ces deux derniers degrés de la démence 
sadique. A Marseille, notamment, il y a une trentaine 
d'années, la police découvrit une villa où des débauchés 



i 



34fi APPENDICE 

entraînaient des cocottes cl, au prix de vingt Iouib et pluâi 
les fa^isatent couvrir par des gros chiens; e 
servaient de ces bêtes, activement ou passivement; de 
hautes interventions firent étouffer l'affaire, qui auraii 
été par trop scandaleuse. 

Quant au vampirisme ou passion du cadavre, il a eu 
eee tristes héros, d'une hideuse célébrité, parmi lesquels 
le fameux sergent Bertrand, qui avait, en qiielques a 
déterré et violé plus do cent cadavres, qui unit par Être 
pris une nuit au cimetière Montparnasse, à Paris, et qui 
fut condamné à la prison perpétuelle. Mais lous les vîwn- 
pires n'ont paa l'audace d'aller escalader les murs de cim& 
tiëres et se contentent de recourir aux lupanars clandestina, 
qui. moyennant finances, leur servent la comédie funèbpe 
de leur profanation désirée. Tel était ce monsignor Maret, 
curé du Vésinet, client asaidu d'une maison de rendez-vouB 
parisienne, et dont un crime révéla l'épouvantable mania 

Aux sadistes comme celui-ci, il faut une femme faisaot 
la niorte, couchée sur un lit mortuaire, poudrée à blanc 
pour imiter la pâleur cadavérique, entourée de cierges 
allumés, les murs de la chambre recouverts de tenturee 
noires semées de larmes d'argent; le vampire s'agenouilla 
au pied du lit, et marmotte des De l'rofumlis; c'est pour 
lui un plaisir d'insensé, mais on pense si la pseudo-défunta 
a de la peine à tenir son sérieux I... Finalement, le répu- 
gnant passionnel se rue sur la catin qui se prête à ce jea 
macabre et stupide. 

Plus dangereux encore que grotesque, le prélat Maiat 
devait mal finir; on n'a pas oublié son procès, jugé m 
avril 1879 par la Cour d'assises de Versailles. Ce misérable, 
que la simulation du cadavre mettait en rut, à défaut du 
cadavre mêine, viola une fillette de treize ans, dont U 
enterrait le père, son paroissien; il pril l'enfant avec lui 



APPESDICK 347 

clans 11! coupé attenant au corbillard, et il commit le viol 
pondant les olisètiues, à côté du cadavre; la fillette n'oea 
pas Ir dénoncer; ce fitt une maladie véaérienne, résultat 
du crime, qui 6b tout décourrir. Mgr Maret fut condamné 
à dix ans do réclusion. Dana les perquisitions faites à son 
preabytère, on trouva une collection do poils, en plusieurs 
petits paquets, Goign eu sèment étiquetés au nom d'une 
quinzaine de ses pénitentes; aadiate à double titre, le curé 
caraérier du pape, chanoine honoraire de quatre diocèses, 
président de l'archi confrérie de l'Immaculée-Conception, 
élait coupeur de poils en même temps que vampire. 

Passons aux pédérastes, dont nous devons dire quelques 
mots, pour terminer. M. Carlier, ancien chef de la police 
des mœurs, a montré, le premier, la conaesité existant 
entra la prostitution féminine clandestine et la prostitu- 
riinn pédérastique: autrefois, filles d'amour et gitona fai- 
taient leur vit métier en deux camps parfaitement distincts, 
ftcbacunc et chacun se prostituant à son bénéfice exclusif; au- 
jourd'hui l'association entre les deux prostitutions est des 
■plus fréquentes. Il y a des m.aisons de rendez-vous, en très 
Egrand nombre, oà deux ou trois gitons sont en quelque 
lortc attachés à rétablisBement; s'ils ne se trouvent pas en 
permanence dans la maison même, ils so tiennent à proxi- 
■niité, de façon à venir au premier appel. D'autre part, cea 
jeunes garçons efFcminés, qu'on nomme lanfes ou tapettes, 
wnt presque toujours associés à des prostituées clandes- 
pinee, vivant isolément; si la femme voit qu'elle a affaire 
< homme à passions n, elle propose el fait paraître 
B mignon avec lequel elle est de connivence; c'est, d'ordi- 
in jeune ami de son souteneur. Dans une enquèti^ 
jgadiciaire que noua avons sous les yeux, une < 
■déclare que » les deux liera des hommes qui vienaent cbo2 
[slle sa présentent uniquement pour demander des jeunes 
EArcoQS »; une aiilre raconte qu'elle rencontre habituel- 




I 



' 348 j t•I'K^'DICî: 

iement sur la voie publii"|Uc des jeunes gens qui raccrocliwit 
les hommi?iS comme elle. et. «lit-elle, " ils viennent toujours 
demander ans femmes de les recevoir avec les michets qu'ils 
ont faits, parce qu'ils ne savent pas oii aller ». 

Les gîtons qui racolent a-inai à la rue sont appelée 
perêilieuses; ce sont les seub individus qui, dans la pros- 
titution masculine, cherchent à ae faire remarquer : barbo 
-entièrement raaée et de tria pria; cheveux longs pona- 
madés, presque toujours roulés par le bas; regard la»- 
goureux; voix traînante et iaible, affectant le timbre î^ 
minin; col de chemise rabattu, et cravate à la colin, c'esfc- 
àndire nouée d'une façon tiks lâiche, ou retenue par une 
bague; eorame coiffure, presque toujours une casqiwtte 
à visière de cuir verni tombant sur les yeux; jaquette 
' courte, ou veste boutonnée de façon à dessiner fortement 
k, la taille, qui déjà est maintenue par un corset; pantaJon 
L-:âHi? boucle et parfaitement ajusté sur les reins; enfis,. 
r'-BouHers vernis, ou escarpins légers. tr6s découverts. ïel 
L ^e8t le type, pour ainet dire classique, du prostitué pédé- 1 
I Taste qui fait le trottoir à Paris. 

k, Une autre variété de gitons est celle dee ■Jésus, garçonnets 
I Ticieux, qui, ordinairement associés à un ou deux coquim 
r «xperts en l'art du chantage, servent d'amorce pour attirer 
' -danB un piège les riches pédérastes actifs; les soutenenn 

dos petita-jéfiua sont, pour cela, qualifiés e/ianteitrs. 
I • Les clients pédérastes, appelés rivcttea ou hojitetmei, 
-évitent les regards, contrairement aux persillenaes, re- 
l jettent et écartent avec soin tout ce qui pourrait les foin 
' seconnaitre, sont habillés comme tout le monde, 
' ne les trahit, si ce n'est leur polite-sse affectée, leur miuiîe 
des parfums, et surtout leur voix quelque peu féminine. 
' 'Cette catégorie est composée de personnes appartenant Jk 
, toutes les claeaea de la société, sans aucune exception. 
} a. Carlier, pendant son passage à la direction de U 




APPENDICE 349 

^lice des mœurs, s'était composé un double album, daxk 
lequel il réunit les pliatographies des pédértutes purisiena 
les plus aignaiés, actifs et paasïEa, rivettes du grand monde 
et persilleTiees en vogue, entreteneura et entretenus; car 
les riches pédérastes, qui se méfient, des Jésus et des 
chanteurs, accaparent un giton de la catégorie des pPr- 
silleuses et l'entretiennent esactemeut comme l'est une bo- 
rizoatale de haute marque; dans ce monde igoohle, il 
arrive encore qu'actifa et passifs s'associent par petits 
groupes, à l'instar des académies lesbiennes. 

Or, la collectiwi de M. Carlier, qui est d'une valeur ines- 
timable, a ceci d'intéressant, qu'à chaque photographie est 
jointe en marge une notice manuscrite s'appliquant à 
chaque individu et expliquant les unions de ces divers 
pédérastes, ainsi que leurs divorces, leurs rivalités, etc.. 
Ce document précieux a été acheté avec une partie de la 
bibliothèque de M. Carlier, apr^e sa mort, par M. Cha- 
cornac, libraire du quai Saint-Michel, qui récemment 
a voulut bien nous le prêter pendant quelques instants. 
Bien n'est plus frappant que la diversité des types, et l'on 
est surpris de voir là des physionomies ne présentant abso- 
lument rien de ce qui pourrait faire soupçonner des mœurs 
inavouables. Le mélange des classes y est aussi très cu- 
rieux : le duc, le comte, le grand industriel, le cabotin, le 
boucher, le gargon coiffeur, lo marchand de vins, et le 
plus infect voyou. 

En effet, nous le répétons, on trouve le pédéraste dans 
tous les mondes; le vice commun efface toutes les diffé- 
rences sociales : le maJtre et le valet de chambre sont sur 
le même pied; le millionnaire et le vaurien sans domicile 
fraternisent; l'aristocrate du noble faubourg et le repris 
de justice échangent leurs immondes caresses, 

I] est du devoir de la police d'avoir l'œil ouvert sur cette 
■a ie débauche, comme sur tous les libertinages; mais, ea 



350 APPETn)iCE 

ce qui concerne la pédérastie, il n'est guère possible à 
l'administration d'agir contre des individus qui ne tombent 
sous le coup d'aucun article de loi pour ce seul fait, c'est- 
à-dire tant qu'ils se vautrent dans leur ordure à huis-clos. 
A moins de flagrant délit dans un lieu public ou déclaré 
tel légalement, que faire? Il est évident qu'à cet égard 
une lacune existe dans notre Code; mais, si quelque légis- 
lateur a songé un jour à la remplir, peut-être a-t-il aussitôt 
reculé devant la délicatesse d'une pareille tâche. 



F'.y 



TABLE DES MATIERES 



^KBPÂCB »K u Nouvelle EDiiinN... 



PllEMŒUK PARTIE 

LA PROSTITUTION A PARIS 

f — Questlona générales 

Détinittoii : prostituée, proGtitntîon (p. 13). 
;. Nombre îles priistituées exerçant leur métier à 
: (p. 15). — 3. Quels sont le& paya qui fonrnissent 
les prostituées, et dans quelle proportion chacun d'eux les 
envoie-t-il à Parigp (p. 16). — 4. Position soriala des 
families des prostituées (p. 22). — S. Considérn tiens 
tur l'état-civii des prostituées (p. 35). — 6. Professions 
exercées par les prostituées au moment de leur inscrip- 
tion au Bureau des Mœurs (p. 26). — 7. Quel est te 
degré d'instruction des prostituées? (p. 29). — S . Quel 
est l'âge des prostituées exerçant leur métier à Paris P 
et depuis combien de temps l' exercent-elles? (p. 30). — 
9. Quelle est la cause première de la prostitution P 



n. — Uœurs et habitudes des prostituées 
H . Opinion que les prostituées ont d 
(p. 44). — S. Du sentiment religieux chez les prostituéca 
(p. 47). — !*. Los prostituées, malgré leurs habitudes et 
leurs rices, conservent-elles quelque reste de pudeur? 
(p. 49). — «5. Caractère et tournure d'esprit dos prosti- 
tuées (p. 50). ~ S. La manie du tatouage chez les pros- 
tituées (p. 51). — ft. A quoi les prostituées passent-elles 
leur temps daus l'intervalle de l'exercice de leur métier? 
- Tf. Faus-noms pris par ta plupart des pros- 



; DES UATlfiRES 

tituéea (p.Sô). — K, Malpropreté des prostituées (p.S7)- 

— it. DéFauts particuliers aux proatitaées (p. 69). — 
14k. Bonnes qualités des prostituées (p. Ql). 

m, — Les amants dos prostituées 

1 . Les amants de cceur, les souteneurs (p. 65). — 
ît. Les tribades, ou les amours interféminines des pros- 
tituées {p. 72). 

IV. — Notes physiologiques et pathologiques 

1. Sur l'embonpoint et la raucifcé de la roii (p, 90). 

— a. Sur lu couleur des cheveux et des yeus (p. 92), — 
•t. Sur la taille des prostituées de Paris (p, 93). — 
4 , Les parties Eexuelles et l'anas chez les prostituées; 
état de leur menstruation (p. 95). — es. De ia. fécondité 
chez les prostituées (p. 104). — <ï. De l'influence que 
peut avoir sur la santé générale des prostituées l'exercice 
de leur métier (p, 108). — '?. Accidents nerveux et par- 
ti oularités relative à l'aliénation mentale observées 
chez les prostituées (p. 116) . — S, De quelques infirmités 
congénitales qui, bien que aingalières, n'empêchent pas 
les prostituées d'exercer leur métier (p. 118). 

V. — De l'iusoriptiau dea prostituées 111 

1 ■ Sagesse des meaurca administratives de l'inseriplion 
(p. 119). ^ —■ De l'inscription des prostituées mineures 
<p. 123). — :t. Des radiations et dos réinscriptions 
<p. 151). 

VI. — GlaeaifioatioQ des prostituées 1 

Tilles soumises : KUea à numéro ou de mait 
rance; ftUea en carte ou isolées. Filles 
Femmes galantes; femmes à parties. Femmi 
Filles d'amour, en loEement; en fausse boutique. Pilles 
de brasserie; filles de caboulots; filles à soldats. Kacoro- 
cheuBes. filles do trottoir : trimardenses; hallières; pier- 
reuses on femmes de terrain. Baccrocbeuses ïrpécia- 
listes : la femme de café; la soupeuse ou agenouillée; 
l'allumeuse; la mtichonneuse ou fille à curés; la coureuse 
d'omnibus; la baladeuse cycliste; l'allumeuse amazone; la 
femme pour femme. Sommets de la prostitution clandas- 
tine : mouches d'or; demi-mondaines; demi-castors; proï- 



a de tolé- 



TA-ULE DliS MATIÈRES 

tituécs espionnes. — ProKénètes : marcliandes à la toi- 
lette ou ofn^ases; procureuSieB et entremettenses; 
courtières et placoases; marcheuses; indicatricas de ' 
femmes mariées; raèrea infâmes; tenancières. 

VII. — Lesdsmea ou maîtresses de maison 177 

■ .Los maisons de fnlêrauce; conditions priocîpalM 
exigées pour leur établifaement; leur classement en cinq 
ealégories; la soiis-miïtreisse; nomenclature des maisons 
de tolérance existant à Paria en 1900; leur répartition 
par arrondiasement, moyenne des fiLes de maison dans 
chaque quartier; Jes maison» de la banlieue de Paris; 
l'absenoe totale de maisons do tolérance ou le peu de filles 
à uuniéro dans un quartier ne prouve pas la moralité àe 
l'endroit, au contraire; la presse parisienne et les mai- 
sons de tolérnnce; compte-rendu poétique de la réouver- 
ture d'un lupanar de premier ordre; changements et 
mutations (p. 177).^S.Co qu'ont été primitivement les 
maîtresses de maison; qualitéii personnelles que l'admi- 
nistration exige de ces femmes pour leur accorder le H- 
•net de tolénuii»; leurs principales oblisHtions (p. 198). 
—!ï. Opinion (|Ue les maîtresi^s do maison ont d'elles- 
limêmea; tournure de leur esprit; curieux exemples tirés 
leurs lettres au préfet do po]icBi leur atroce cupidité; 
roulement intérieur qu'elles édictent., les amendes 
u'clles infligent aux filles, autres prétextes imaginés pur 
s femmes avides pour extorquer l'argent de leurs pen- 
; quelques particularités du caractère des te- 
uicièree; haine profonde dont elles sont l'objet de la 
^_jart des prostituées; comment un certain nombre de 
KBlles réussissent, à leur tour, à les voler impunément 
E{p. 303). — 4 , Comment les dames de maison recrutent 
Vlieur personnel de iillcs (p. 234). — *. Les miiris et 
e des dames do maison Ip. 227). — 6. Des chonceB 
de ruine et de fortune que présente In gestion d'une 
maillon de tolérance (p. 235). 

Vm. — La prostitution olandeetine 240 

S - De la prostitution clandestine, en fténéral : ru^s 

des proxénètes clandestines: les patentes commerciales; 

, difficultés que rencontre l'administration; les femmes ga- 



354 



'AnLE 



IKS MATlÈltKl 



lantes; la prosiitutîon des domestiques on plnc« (p. 840). 
— — . Quelques exemples authentiques do prdsfcitotion 
clandestine orKaniséc : les maisons à parties; tes maïï^ons 
de teii(tez-vons; rapport d'ur chef de la sûreté sur l'hôtel 
de la veuve P'"; reproduction de 15 lettres saisies dans 
une Jimiaun de rendez-vous; biographie de la baronne 
d'Ange; la femme L'"' et ses deux maisons, me Duphot 
et me Lavojsier; plaintes des victimes (p. 24j), 

EX. — NéoesBîtè de la polioe sanitaire 26S 

Les statistiques annuelles des cas vÛDéricni. con-tatL'a 
établissent, uvl>c une certitude uli:olue, que la suppreS- 
' sïim de la police des mceur& serait une mesure désas- 
treuse. 

NontE Scit^iALE. — Statistique ollicielle de la prosti- 
tution à Paris, en l'an 1900 ■■ 



SKCOXDi; l'ARTIE 

LA PROSTITUTION EN PROVINCE 

EN ALGÉRIE ET EN TUIflSIE 

I. — Coasidèraliosa générales 278 

Difforeni'e d'aspect et d'allure entre la prostitution des 
départements et telle de ia capitale; régime des maisons 
de tolérance en province; la " dett« » des filles; lupanars 
clandestins et maisons Eecrètes do rendez-vouî^; préjugé 
des libertins contre la fille en carte; la maison ù soldats; 
incertitude des cltilTres «.ous le rapport do ia statistique 
des maia^lieB vénériennes en province. 

n. — Etat aotuel de la prostitution en proTÎnce ! 

Bépartition de 7M maisons de tolérance, !),557 filles 
«oumises (dont 4,S91 filles de maison et 4,960 filles en 
earte), et 35,491 fîUes insoumises, prostituées plus ou 
moins clandeetines. Tableau ifénéral donnant les effectifs 
par département; division particulière détaillant la pros- 
titution de chaque ville, et comprenant même les petites 
communes rurales signalées à l'occasion de cas curieux 
de débauclie. plus ou moins notoires; observations carac- 



TABLE DKS MATIÈRES 355 

téristiques, minutieusement recueillies dans notre en- 
quête Konérale. Influences diverses, avec leurs chiffres 
moyens annuels de prostituées : villes de fçarnison, ports 
de mer, centres industriels et manufacturiers, phares de 
chemins do fer dans les communes rurales, villes d'eaux, 
stations hivernales et stations balnéaires, localités avoi- 
sinant les lieux de pèlerinage. — Appel à la collaboration 
de nos lecteurs. 

ill. — La prostitution en Algérie et en Tunisie 330 



APPENDICE 

LES ABKRUATIONS DU SENS GÉXÉSIQUE 

Le sadisme; ses variétés; son influence dans la prostitu- 
tion clandestine; la bestialité; le vampirisme ou passion 
du cadavre. — La pédérastie; la prostitution masculine 
et sa clientèle: gitons et petits-jésus; chanteurs 34î 






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