L'ARGOT PARISIEN
L'ARGOT PARISIEN
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ÉTUDE DÉTYMOLOGIE COMPARÉE
SUIVIE DU VOCABULAIRE
PAR
Adrien T1MMERMANS
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PARIS
Librairie G. KLINCKSIEGK
11, RUE DE LILLE, 11
1892
Tous droits réservés
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AVANT-PROPOS
Pourquoi les mots ont-ils la prononciation et l'ortho-
graphe par lesquelles nous les connaissons? Pourquoi
signifient-ils ce que nous voulons dire en les employant?
D'où viennent le sens et le son des vocables? Pourquoi
la tradition a-t-elle conservé ces mots et nous les
a-t-elle livrés en bon état? Pourquoi parlons-nous
comme nous avons l'habitude de le faire?
Le langage étant composé de sons et ceux-ci renfer-
mant tout le travail de l'esprit, tout ce que l'expérience
de la vie, l'éducation, les progrès, les peines et les
joies de la lutte nous ont appris, il est de la dignité de
tout homme de se demander quelle est leur origine et
s'ils ont vraiment qualité pour représenter les choses
réelles dont nous avons conscience.
Si les sons des mots ne sont pas l'équivalent acous-
tique de l'idée qu'ils renferment, si le sens qu'ils ex-
priment n'est pas moulé pour ainsi dire dans la matière
fluide dont ils sont composés; si le foud, c'est-à-dire
le sens, n'a pas créé la forme, le langage n'est qu'un
stupide mot de passe et nous avons lieu de nous éton-
ner que les nations les plus éloignées et les plus divi-
sées l'aient conservé uniforme. L'arbitraire aveugle
présidant à la formation de ces sons, il aurait dû se
produire, ce semble, une confusion auprès de laquelle
Babylone n'aurait été qu'une mascarade d'enfants.
— II —
L'animal et la nature inerte reproduisent ce qui se
passe en eux par des sons spontanés toujours sincères.
Si la bête savait imiter, comme nous, les sons qui se
produisent autour d'elle, il est certain qu'elle les répé-
terait comme elle les entend. Le son est-il autre chose
que le signal d'un événement, et celui-ci n'est-il pas
tout entier dans son expression sonore? L'homme
serait donc le seul à méconnaître les ressources que la
nature lui offre pour la création de son langage en né-
gligeant l'unique moyen de le rendre sonore, véridique,
transparent au point de vue du sen.*, et conforme à
l'ordre des choses.
C'est une supposition que rien ne justifie.
Le langage, tel qu'il se présente à l'étude linguis-
tique, est là pour prouver qu'il est la reproduction
fidèle de sons spontanés et que ceux-ci ont reçu un
développement dirigé par la raison. Tout ce que
l'homme éprouve en lui-même se manifeste par des
voix que la nature énonce pour lui. Il les écoute, il sent
ce qu'elles signifient et les emploie comme messages
toutes les fois qu'il veut rappeler et renouveler les faits
dont elles formaient la partie sonore et intégrante. Le
son rappelle la sensation parce que c'est elle qui le
détermine. Ce sont deux éléments inséparables.
Quand, en dehors de sa langue maternelle, on en
connaît une, deux, trois on est frappé des traits de res-
semblance inattendue unissant ces langues entre elles.
Pourquoi cette identité fondamentale, car elle existe,
qui nous frappe dans des langues parlées par des
peuples séparés par de grandes distances, ennemis par-
— III —
fois et invoquant la différence de l'idiome etc., pour
avoir le prétexte d'attaquer et d'asservir. C'est que
toutes les races prennent les éléments de leur langage
dans la nature. Toutes trouvent, en elles, la même ini-
tiatrice; sur son vaste giron nous avons appris le son,
la note, l'intonation de tout ce qui arrive, de tout ce
que nous pouvons concevoir et communiquer. Nous
avons beau composer et décomposer nos impressions
par le travail abstrait de la pensée, le nom de la for-
mule créée ainsi sera toujours celui de l'un des élé-
ments constituauts.
Dans le Traité de V Onomatopée il a été expliqué
que chacune des langues Grecque, Romaine, Française,
Anglaise et Allemande remontait, pour ses thèmes
primaires ou racines irréductibles, au son naturel, que
leur comparaison avec celui-ci prouvait qu'ils en étaient
la reproduction fidèle. Identifier la racine des mots
avec le son naturel constitue la dernière étape du tra-
vail étymologique. Une fois arrivés, nous nous arrê-
tons devant le miracle de la création. La nature parle
ainsi, nous le constatons. Nous pouvons examiner phy-
siologiquement par quels ressorts elle arrive à produire
ces sons significatifs, mais le fait ne nous appartient
guère, pas plus que celui de notre propre existence.
Ce nouveau travail s'impose une double tâche :
1° celle d'aligner les racines primaires du Sanskrit
avec celles des langues précitées, de mettre en lumière
leur origine commune et de faire sentir la raison de
leur identité ;
2° Celle de rendre compte pourquoi l'Argot, alors
IV
qu'il n'est nullement dirigé dans son travail, crée des
phonèmes absolument authentiques et neufs, remplis-
sant toutes les conditions du mot et, souvent, ayant
cours ailleurs, sans que l'originateur s'en doute.
De la comparaison de la langue sacrée des Indes et
du patois gouailleur et profane des barrières de Paris,
îl ressort clair comme le jour que le langage, dans sa
formation, suit toujours la même méthode. Le sans-
krit, éteint depuis des siècles, a pris le son et le sens
de ses vocables dans la nature. Pour lui le son est le
représentant du fait tel qu'il se manifeste à l'oreille :
il l'emploie par conséquent pour rappeler l'acte et
l'agent et cela d'une façon très adéquate. Ce nom. il
l'applique à d'autres agents s'il y a ressemblance avec
le type primitif, c'est-à-dire s'ils sont considérés comme
capables de faire le même acte et, par conséquent, de
produire le même son. L'Argot, ce langage gavroche
qui pousse toujours comme la mauvaise herbe, le der-
nier venu de tous, nous le voyons trouvant la voie ins-
tinctivementet procédant de même. Lui aussi, se forme
par l'onomatopée et parla métaphore. Ces procédés sont
familiiers à tous les créateurs de langues. En effet,
notre ouïe nous faisant distinguer le son comme divers
selon le sens qu'il exprime et selon l'agent qui le pro-
duit, notre raison nous dit, qu'en l'employant comme
nom, nous sommes sûrs d'y reconnaître l'un et l'autre.
Cette manière de former des noms s'appelle l'onomato-
pée ou confection de noms naturels. Ensuite, comme
notre esprit démêle, par la comparaison, les qualités
communes de deux objets, il nous porte en même
temps à les nommer l'un d'après l'autre. Cette seconde
manière de créer des noms s'appelle la métaphore ou
transport du nom d'un objet à un autre. Elle nous
permet de donner un nom à des choses ne se manifes-
tant à l'oreille par aucun son.
Quand nous entendons de l'Argot il nous paraît si
neuf qu'il nous semble né d'hier. Cependant ce n'est
vrai que pour un dixième à peine de ses vocables. Le
reste était courant depuis toujours, soit dans les pa-
tois Français, soit dans les langues étrangères. Cette
fraction, quelque peu importante qu'elle soit, a sa va-
leur. Elle nous fait assister à l'élaboration du langage
quand il s'agit d'onomatopées et de métaphores inédi-
tes. Même lorsque l'Argot découvre des noms dont
personne, autour de lui, n'avait fait usage, bien que
depuis longtemps ils existassent ailleurs sous une forme
identique, il nous est encore utile, parce qu'il permet
de conclure de l'identité du résultat à l'identité de
facture par laquelle il a été obtenu. En présence de
ces faits, on est même porté à croire qu'indépendam-
ment de la race et des traditions, l'homme abandonné à
lui-même et formant son langage d'après la méthode na-
turelle, celle de l'onomatopée et de la métaphore, doit
trouverles mêmes noms que son semblableâ la condition
qu'ils entendent tous deux les mêmes sons et qu'ils aient
lesmêmes connaissances desobjetsdontilssontentourés.
Quand on dit que l'homme crée son langage, il faut
s'entendre. Il le crée ou plutôt il le forme avec les
moyens que la nature a mis à sa disposition, de même
que l'électricien confectionne un phonographe avec des
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corps et des propriétés qu'il n'a pas crées. C'est elle
qui entretient la vie et le mouvement qui produisent
le son; elle anime l'oreille qui le perçoit, elle donne
l'intelligence qui le comprend. C'est elle encore qui
crée la société par le dédoublement de notre être en
homme et femme (1). Cet autre nous-même formant le
langage avec les mêmes sons que nous, nous pouvons,
grâce à la parole, reprendre la communication d'âme
existant spontanément entre deux créatures faites l'une
pour l'autre. L'homme crée donc son langage avec les
éléments que la nature et par delà sa Cause Inconnue
et Innommable a préparés pour le maintien et le déve-
loppement de la société humaine. C'est l'homme aussi
qui l'enrichit en étendant ses connaissances de la créa-
tion et de lui-même ou qui le fait dépérir par la misère
intellectuelle.
Beaucoup de mots et d'expressions de l'Argot vien-
nent au monde avec deux vices rédhibitoires attri-
buables à leurs originateurs et non à la nature. On
peut donc les éliminer quand on voudra. Il est vrai de
dire qu'en ce cas nous n'aurons plus d'argot et qu'il se
sera fondu avec la langue classique. Le premier dé-
faut qui entache ses produits provient de ce qu'au lieu
d'employer franchement le son naturel et d'en faire un
mot qui signale exactement ce qu'il veut dire, il ne
semble méditer qu'une chose : se soustraire à repro-
duire le son simple et naïf d'un acte tel que tout le
monde l'entendrait. Il l'altère par une confusion voulue
(1) Deus creavit homineip masculum et fœminam. (Moïse).
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VII
avec des sons similaires permettant à la gaillardise de
son esprit de prendre ses ébats et de faire des jeux de
mots.
Le deuxième est la conséquence du premier. En
employant l'expression homonyme au lieu de l'onoma-
topée vraie, on tombe dans l'équivoque et l'on ouvre la
porte aux fausses analogies.
Lepremiernousa valu des onomatopées bâtardes, mais
qui souvent visent à insinuer discrètement un sens ma-
lin : un pavillon p. e., un mensonge imite comme son
le babillage, le bavardage, mais le présente en même
temps comme ayant la grosseur d'un pavillon; avoir
son boisseau, son poteau disent non seulement qu'on a
pris de la boisson, mais aussi qu'on en a ingurgité par
boisseaux, qu'on est raide comme un poteau, petit ou
grand selon qu'il est kilométrique ou télégraphique.
Le second nous fournit des métaphores amusantes,
p. e., l'argent étant rond, celui qui a de ces ronds métal-
liques est qualifié de miche, ou, par une nouvelle méta-
phore, comme ayant de la galette. La filiation du sens
est celle-ci : le miche a du pain, il a de quoi vivre,
il a de l'argent, je tâcherai d'en avoir ma part. La
même logique permet à l'argot de dire: il a sa barbe
pour exprimer qu'il a bu : ayant bu on a pompé, on
est pompette, on a son pompon, son plumeau et par
suite la barbe de la plume de son plumeau- A ces
énigmes on risque de perdre son latin plutôt que la vie.
Le sphinx qui nous les pose n'a rien de traître; s'il
prend un air sérieux c'est pour ne pas éclater de rire.
Il est inutile de parler de déformations systéma-
tiques comme de boucher en loucherbé, ce procédé ne
faisant que travestir des mots tout faits. Voilà tout ce
que l'on dira ici de l'Argot. Il ne tombe pas dans le
plan de ce travail de faire la critique de son genre
d'esprit ni des renseignements qu'apporte son diction-
naire. S'il y a un tort grave à signaler c'est que le bon
style a admis des expressions comme grisette, la sœur
de charité habillée de gris, pour la femme accomo-
dante,le canard, — le dire sans fond pour le cancan, —
le violon pour la boîte où la police donne l'hospitalité
forcée — et qu'il semble ouvrir la porte à des expres-
sions comme passer à tabac, filer la pipe, chiquer sans
tabac qui ne veulent dire, frapper, que parce que le
chiquant, un des noms du marteau, rime avec chiquer,
mâcher du tabac. Dans sa partie raisonnable l'Argot
suit la méthode qui a présidé à la formation du Fran-
çais et des langues congénères. Il a fait les noms des
choses avec le son qui accompagne leurs actes et a
distribué ces noms à des objets similaires, Il n'y a
même pas d'exception à établir pour des cas comme
celui-ci. L'Argot emploie le motsinerpour priser, aspi-
rer le tabac en poudre, le Latin et le Français pour
sentir, aspirer des odeurs, avec autant de raison l'un
que l'autre : l'acte et le son sont les mêmes dans les
deux cas, l'application du nom est seule différente.
L'onomatopée justifie parfaitement l'attribution du
nom du souffle à la poitrine qui respire, en Latin si-
nus, en Français sein et par métaphore au golfe (en
Latin sinus) à la forme arrondie comme le sein, ainsi
qu'à l'acte de faire comprendre par des détours, appelé
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insinuer. A la suite d'une permutation explicable entre
nos moyens de perception le factionnaire qui ouvre
l'œil, qui écoute s'appelle la sentinelle, l'homme d'es-
prit el de raison un homme sensé, l'homme facilement
touché un homme sensible (en Anglais raisonnable).
Le sens de tous ces vocables auxquels nous pou-
vons ajouter le mot sentine justifie la présence du
son naturel siner, le même qui se trouve, par méta-
thèse, dans le mot nez, l'organe qui aspire, sent,
évente, et au moyen duquel l'esprit comprend, etc.
Il n'y a donc pas de différence dans la façon dont l'Ar-
got et les autres langues se développent bien que les
résultats soient plus ou moins complets.
Le langage étant fondé en dernière analyse sur le
son naturel, la linguistique possède en lui une base
tangible tout comme les autres sciences d'observation
qui ont leur point de départ dans les faits de la vie de
la nature. Les lois d'après lesquelles se forment l'ono-
matopée et la métaphore sont immuables.
Au point de vue du son la nature ne change pas
sa voix. Elle nous parle le même langage qu'elle
a parlé à nos ancêtres et qu'elle répétera à nos descen-
dants. Elle ne change non plus la forme des objets ni
la façon dont ils se présentent à notre attention. Comme
elle nous a tous doués du même sens des identités et
des différences, nous sommes capables d'établir les
mêmes comparaisons et de donner, par conséquent, un
même nom à deux objets similaires.
Dans toutes les langues ces deux principes de forma-
tion se font contrepoids en se substituant l'un à l'autre.
Aussitôt que nous connaissons deux objets, notre es-
prit en saisit la ressemblance, de sorte que le second
se confond, pour ainsi dire, avec le premier et que le
même nom, soit identique, soit à peine diversifié, nous
semble convenir pour tous les deux. Aussi bien en
créant l'onomatopée qu'en donnant des noms par mé-
taphore nous sommes dans l'exercice de nos facultés
innées, Tune de percevoir et de répéter des sons déno-
minateurs qui suggèrent à notre semblable les mêmes
notions qu'à nous et l'autre de saisir les rapports évi-
dents pour tous. D'après ce qui précède, le travail éty-
mologique consiste à indiquer quel est le son naturel
contenu dans la racine des mots et ensuite de démêler
les rapports d'identité qui ont fait donner le nom d'un
objet à un autre. Pour y arriver, il faut rapprocher
le son du thème de celui de la nature et comparer
entre eux les objets portant le même nom. Dans le
premier cas le son naturel forme la clef étymologique
pour les racines, irréductibles au point de vue du son
aussi bien que de la signification ; d'autre part c'est la
connaissance de la somme des propriétés des objets
ayant un nom homonyme, qui guide l'esprit pour pré-
ciser les rapports que nos ancêtres ont établis entre
eux. Tout le travail linguistique aboutit à la constata-
tion du son dans l'onomatopée et à justifier le transport
de cette onomatopée à d'autres objets.
Les noms que nous avons donnés aux choses ne dif-
férent de leurs types naturels que par l'intonation que
nous leur donnons dans le discours. Les notes de la
nature sont infiniment nuancées comme hauteur. Dans
— XI —
notre bouche elles se maintiennent à un niveau d'élé-
vation qui leur permette d'être entendues à une cer-
taine distance. Les racines des langues Indo-Euro-
péennes sont les mêmes. Le développement qu'elles
ont reçu est divers.
L'unité est le fait de la nature qui ne change ni la
voix des choses, ni leur composition, ni la façon dont
elles sont reliées entre elles. La diversité provient de
l'homme. Elle est la suite de la mobilité de ses impres-
sions, de ses caprices, de ses erreurs. Rattacher le
Français et les formations incultes de l'Argot aux lan-
gues congénères ; démontrer qu'une même méthode a
présidé à la formation de toutes les langues maternelles
du groupe Indo-Européen ; garantir â ceux qui vou-
draient s'adonner à la philologie qu'ils cultivent une
science des plus délicates, sans doute, mais aussi sûre-
ment fondée dans la réalité et la logique que n'importe
quelle autre ; engager à l'étude des langues étrangères
en assurant qu'on trouvera en elles des proches pa-
rentes de la sienne, tel a été le but qu'on a recherché
à atteindre dans l'élaboration de ce travail. Puisse le
résultat répondre aux espérances.
La raison de l'agencement institué dans ce livre est
la suivante, Tout ce qui se passe en nous et au dehors
venant se répercuter jusqu'à notre appareil phonateur,
les sons onomatopiques qu'il profère ont été attribués à
la bouche, au nez, au gosier, à la langue, ce qui ne veut
pas dire, cependant, 'qu'aucun de ces organes ait été
seul à les former, mais seulement que son action s'y
montre à la première place.
— XII —
En tête des formations linguistiques se place le pro-
totype fourni parla nature. C'est un son spontané dont
l'homme fait le thème primaire de ses vocables. A sa
suite s'alignent, en outre de l'Argot, les mots qui en ont
été formés en Sanskrit (Skt) — en Grec (G.) — en Latin
(L.) — en Français (F.) — en Vieux Français (V. F.) —
en Anglais (Ang.) — en Allemand (AIL), c'est-à-dire
dans les langues les plus étudiées en France. Des cita-
tions du Hollandais (H.) — du Danois (D.) — du Sué-
dois (Suéd.) — de l'Espagnol (Esp.)et de l'Italien, (I.)
toujours prêts à compléter la série des affinités, vien-
nent s'unir au concert de témoignages en faveur de
l'unité des langues.
La nature qui a dicté à tous les peuples les mêmes
sons et inspiré le même langage, a voulu apparemment
qu'ils se comprennent et s'entendent.
LA HOUCIIK
Le motpshutt , avec son ps chuinté et son double t final,
présente un son qui intrigue l'oreille; par son ortho-
graphe il étonne les yeux, habitués à des formes plus sim-
ples. On lui prête le sens de excellent, sans trop savoir
si telle est sa valeur intrinsèque ou si une convention
sociale la lui attribue gratuitement. Les Dictionnaires
sanskrit, grec et latin, aussi bien que ceux des langues
vivantes, sont muets sur son compte : seuls les recueils
de mots de l'argot en font mention en le caractérisant
comme néologisme. Cependant qu'est-il ? De quelle lan-
gue ou de quel dialecte sort-il? Dans quel patois natif
et rude aurait-il pu naître ? Comment est-il parvenu à
faire son apparition dans le style mondain et sur quels
mérites repose le bon accueil qu'on lui a fait ? Est-il
Grec avec son ps, Anglais avec son s h, Allemand avec
son tt ? Est-ce un son qui a sa réalité dans la nature et
se passe-t-il, alors qu'il se produit, quelque chose dont
nous puissions avoir une notion exacte? Est-ce un son
traduisant une exclamation humaine, un cri animal, un
bruit mécanique? Faut-il croire que c'est un cri repro-
duisant une sensation de fou ou simplement un mot
imaginé par quelque farceur appartenant à la société
qualifiée pshutt qui aurait voulu se payer le plaisir de
voir les imitateurs s'en emparer de bonne foi? Pourquoi
veut-il dire excellent, élégant et pas autre chose? —
1
Certes, si c'était simplement un mot imaginé de toutes
pièces pour exprimer ce qui cadre avec des idées ex-
clusives d'élégance, l'étymologie serait à plaindre de
s'acharner à y trouver une origine raisonnable ; mais
aucun plaisant ne s'est vanté encore d'en être l'auteur :
nous ne savons donc pas de source certaine que nous
soyons dupes d'une mystification linguistique quand
nous le considérons comme un mot. En outre, afin de
mieux nous persuader qu'il vaut la peine de rechercher
l'identité de ce terme, nous nous répétons que les
Dictionnaires de l'argot le citent comme un néologisme;
que dans ce langage particulier la forme des mots et
leur sens ont un rapport réel avec ceux de la langue
classique, qu'ils ont cours soit dans les dialectes et les
patois de la France, soit dans les langues étrangères.
Nous nous souvenons aussi que des gens raisonnables
se servent de ce mot, alors que, pour en exprimer le
sens, ils ont tant de termes autorisés à leur disposition.
On ne connaît pas dans l'histoire de cas où l'on ait forgé
de toutes pièces un mot qu'il ne fût ou l'imitation d'un
son naturel ou la réédition d'un mot existant déjà. Poli-
chinelle n'aurait jamais voulu nous imposer ses élucu-
brations. Pourquoi une personne sérieuse se donnerait-
elle le ridicule de prétendre en avoir le talent? Les esprits
les plus futiles prévoient qu'ils perdraient leur temps, par
ce que l'instinct leur fait sentir que pour créer quoi que
ce soit:le son qui doit dire quelque chose à notre oreille,
aussi bien que l'objet qui doit frapper nos yeux, il faut
qu'il y ait un fond de réalité, sans laquelle nos produc-
tions n'ont pas plus de consistance ni de forme que le
nuage que le moindre souffle transforme en une succes-
sion de chimères. Les choses étant ainsi, à défaut de
certificats d'origine, interrogeons le mot lui-même.
Né sur le sol Français, à Paris même, peut-être, bien
que n'ayant dans son extérieur ni l'élégance ni le poli
qui caractérisent les produits delà capitale, ce phonème
original ne laisse pas de se présenter à l'examen fran-
chement, faisant l'effet d'une végétatiou robuste à [la-
quelle la serpe du jardinier n'aurait pas donné une
forme plus sobre. Pshutt, quand notre oreille a-t-ellepu
entendre ce son ; dans quelles circonstances celui-ci
a-t-il fait concevoir à notre appréciation le sens de ex-
cellente Est-il l'écho d'un événement qui produit sur
notre esprit l'impression de bon, de beau? — Or, le
goût étant le principal organe de l'appréciation et en
même temps celui où le son s'associe naturellement à la
sensation, cherchons dans les bruits concomitants à
l'absorption des aliments, si un signe phonique pshutt
ne se présente pas en même temps que l'idée d'excel-
lence et par analogie de beau, d'agréable, les yeux étant
toujours disposés à voir en beau ce qui délecte le goût.
Eh bien ! quand on déguste un liquide savoureux, on ne
se presse pas de l'avaler. Les lèvres s'entrouvrent et
font entendre, ou du moins esquissent le premier son
p ; l'inspiration qui entraîne le liquide entre la langue
et le palais sonne le s chuinté qu'on a pu représenter
par sh anglais au lieu de cJi ou de/ français; elle se ter-
mine par le son tt se produisant quand,, à la fin de la dé-
gustation, la langue toque et retoque contre le palais au
moment même ou la déglutition commence. Une dégus-
— 4
tation plus sèche aurait donné le son àepsut et sa va-
riante pist, le bruit général du sifflement dont les Grecs
ont fait <]htt( Çw siffler. Le son pst a pu être présent à
l'esprit de celui qui, le premier, le paraphrasa par siffler
dans l'expression siffler un verre et nomma ensuite le
verre uriQJïute ou un sifflet comme on dit dans certains
pays ou dans certaines sociétés. Le son ps et le sens de
humer avec sifflement suggèrent celui de sb (sibilo) qui
n'est qu'une forme inverse de l'orthographe du même
son, de sorte que l'association entre pshutt et siffler est
toute naturelle sans que pour cela il soit nécessaire que
celui qui découvrit le son pshutt et le lança dans le lan-
gage se soit inspiré de l'expression siffler un verre.
Voilà ce que nous permet de conclure l'orthographe du
mot, grâce aux soins du grammairien qui a essayé de
rendre visible en signes écrits, groupés dans l'ordre de
de leur production, le son complexe qui a frappé l'oreille.
En fixant ainsi sa forme éthérée et fuyante, il a enrichi
le vocabulaire écrit d'un phonème nouveau.
Le sens de excellent est, comme il est facile de s'en
rendre compte, intimement lié au son pshutt. C'est la
sensation même qui parle et se traduit à l'oreille en pre-
nant la forme sonore. C'est le sens du goût, c'est-à-dire
toute l'activité du mécanisme dont il est le produit, qui
se reflète dans le son, de sorte que le sens de l'ouïe as-
siste par son organe propre à ce qui se passe dans celui
du goût. Il existe ainsi entre le son, l'acte qui le produit
et la notion qui en résulte dans notre entendement, un
accord si parfait que l'esprit comprend par l'oreille la
sensation qui est éveillée dans l'organe du goût. Pour
cela, quand nous voulons évoquer chez notre semblable
l'impression de ce qui est excellent, nous employons
instinctivement le son pshutt, ayant, en agissant ainsi,
la certitude complète que, chez lui comme chez nous, il
accompagne et par suite éveille la sensation de ce qui
flatte le palais; que par conséquent il saura le compren-
dre, aussi bien dans sa signification primordiale d'une
sensation agréable produite sur le palais par l'absorption
d'un liquide savoureux, que dans celle de beau, de ce
qu'on aime à regarder. Car, de même que 'nous admet-
tons que son goût et son oreille perçoivent comme les
nôtres, nous croyons également, cela se passant et
devant se passer ainsi, qu'il est capable de faire les mêmes
comparaisons, de saisir les mêmes analogies, d'employer
les mêmes métaphores, et par conséquent de passer
du sens de bon à celui de beau.
Admettant jusqu'à preuve du contraire que dans
l'identification du son psliutt la bonne foi de l'étymolo-
gisten'apas été surprise par des coïncidences trompeuses
nous avons le droit de nous demander si un son (1)
aussi essentiel, inhérent qu'il est a un acte aussi naturel
et aussi fréquent, n'a pas fait son apparition dans le
langage bien avant notre époque. Est-ce bien véritable-
ment un néologisme, ou ne serait-il pas plutôt la redé-
couverte d'une forme qui existait déjà, mais que les ac-
cidents de l'évolution des mots auraient altérée, soit
dans l'orthographe, soit dans le sens. Car depuis que
(1) Le mot pshutt se prononce par expiration, bien qu'on hume le
liquide. C'est pour faciliter l'élocution qu'on agit ainsi. La même chose
se passe avec absorber, humer, siffler.
l'homme existe sa bouche a dû produire ce groupe de
lettres quand il dégustait. En effet, on retrouve le son
pshutt, devenu mot, dans toutes les langues de la fa-
mille Indo-Européenne. Sa nouveauté consiste dans une
forme originale et rustre que l'usage n'a pas eu le temps
d'adoucir; ensuite dans une application exclusive au
sens de distingué^ selon le goût d'une partie de la so-
ciété à notre époque. Le Sanskrit présente une forme
similaire et un sens tout analogue dans sudate doux,
svadê avoir un goût agréable, svadâ qui a un goût
agréable, formes où la sifflante précède la labiale; dans
le grec nous trouvons yjou^ où l'esprit rude remplace
l'aspirée sifflante s et dont le digamma ou w s'est
perdu; le latin possède le mot suadeo je persuade, dont
le sens primitif, sur la foi de l'orthographe, doit être
adoucir, apaiser une personne par des conseils qu'on
lui fait agréer, suavis doux, dont le son dénote une
inspiration qui semblerait ne pas devoir aller jusqu'à la
déglutition; le Français & persuader, persuasion, suave,
anciennement souëf; l'anglais sweet doux au goût et
une variante soft doux au toucher, par une extension
du sens; l'allemand sùsz doux, sachte sans bruit, sanft
mou. Bien des fois on surprend les gens naïfs à faire
s/, st à la vue d'une chose qui plaît, voulant dire par là
qu'ils la trouvent à leur goût, qu'ils la humeraient. Les
mots rapportés ci-dessus en sont tout bonnement les
onomatopées. Le mot latin suavium un baiser, montre
très bien cette inhalation de l'air s qui fait dire v aux
lèvres quand elles cessent de faire siphon, pour
employer un terme qui peigne le fait. L'acte du
baiser vit dans le son et, grâce à l'écriture, c'est celui-ci
qui a survécu au peuple romain et à ses affections.
Dans ce cas, comme dans tous les autres, la parole est le
fantôme d'un souffle qui a vécu. Dans suauium on
entend le souffle et l'on sent le mouvement des lèvres.
En gaie compagnie on s'exprime d'une façon analogue
en disant : sucer la pomme pour dire : embrasser, ren-
chérissant sur le mot suavinm, forcément, à cause de
la présence du mot pomme, pour tête en forme de boule.
Les grecs appelaient un baiser immodéré |xav5oX<dTov,
celui qui tire la bouche, le museau, H. een mondje, un
beccot, une becquette.
L'évolution de pshutt n'a pas fait grand chemin dans
le langage. Sans doute qu'on lui a reconnu un manque
d'esprit que la multiplicité des consonnes heurtées
n'était certainement pas faite pour compenser. Le
pshutt est une expression qui a une valeur collective
comprenant dans une abstraction les personnes, les
choses, les manières d'être qui nous font dire pshutt !
par assimilation avec un excellent liquide; un pshut-
teux (1), unpshuttard sont des sobriquets pour ceux qui
ont la prétention du pshutt ; car pshutt est la qualifi-
cation de ce qui répond au goût courant : mais voilà, à
peu près, les seuls mots que le radical ait été appelé à
former. Le parti pris de l'originateur était de créer un
terme qui fût la propriété exclusive d'un cercle étroit et
ne devait pas devenir populaire. Etreint dès sa naissance,
son développement s'en est ressenti. Des expressions
(1) La terminaison eux est une déformation de eur, courante dans
le patois du Berry : un carreleux pour un carreleur.
comme mépshutt pour dxipshutt où il y aurait un vice de
forme, dépshutter en manquer la note, pshuttiser pour
épouser les idées dxipshutt et quitter les manières so-
bres et correctes, il y en ûpshutt pour beaucoup, et tant
d'autres auraient pu naître si le mot et la chose avaient
été plus avant dans les préoccupations de l'esprit des
gens. S'ils n'existent pas, c'est qu'ils n'étaient pas né-
cessaires à l'expression de la pensée.
Cependant, les expressions qui ont accru le vocabu-
laire, comme celles qui auraient pu s'y faire une place,
suffisent pour mettre en lumière un fait grammatical,
utile, par sa spontanéité surtout, à la connaissance phy-
siologique du langage. D'abord, c'est que le sonpshutt,
né organiquement de l'acte de la bouche faisant siphon
pour l'inspiration d'un liquide, de simple son physique
qu'il était, devient mot par l'emploi de la figure dite :
l'onomatopée, c'est-à-dire facture de nom ou son devenu
dénominateur par un acte intentionnel et conscient. Au
lieu de rester un son lié à un acte d'une façon secon-
daire^ n'ayant d'existence et de signification que pour
un moment, et seulement pour l'individu chez lequel il
se produit, il devient, par l'onomatopée, un moyen de
communication parce qu'il naît chez les autres dans les
mêmes circonstances, et qu'en l'énonçant on est intime-
ment convaincu qu'il sera compris. Celui qui a trouvé
le son, qui l'a retenu et en a formé un mot, compte
parmi les anonymes qui ont créé le langage. Cette créa-
tion consiste dans la découverte du son naturel, s'in-
corporant à un sentiment dont on a conscience, dont on
fait un nom par l'onomatopée qu'on applique, par
comparaison, à des objets produisant sur nous une im-
pression analogue, qu'on redit ensuite à ses semblables,
sûrs de réveiller en eux l'image vivante et fidèle de ce
qui se passe en nous. Pshutt est, au point de vue théo-
rique, un thème primaire, une racine irréductible, un
son tout spécial et individuel emportant en lui sa signi-
fication propre ; c'est un son que le sens, c'est-à-dire
l'acte dont nous avons conscience, a formé par lui-même
et pour lui seul. L'acte étant un et simple, le son qu'il
fait entendre est simple et monosyllabique comme celui
de toutes les racines pures.
L'expression collective le pshutt est utile pour nous
montre r, dans un fait contemporain, comment se forment
les termes abstraits. En effet, notre entendement voit
sous cette dénomination tout ce qui a la qualité vi-
vante de ce qui est élégant d'après un type convenu,
abstraction faite des objets ainsi qualifiés, soit cravate,
dîner, bal, réunion, salon, cercle, etc. C'est donc un
terme abstrait, un prédicat généralisé, le nom d'un acte
qualificatif employé pour désigner un ensemble d'objets
concrets dans chacun desquels il se rencontre.
Ses divers emplois dans la phrase servent aussi à
éclairer la syntaxe sur ses pi océdés habituels. Pshutt
est le son d'un acte, donc verbe de sa nature. Habitués
que nous sommes à ne voir que des verbes composés
d'une racine et d'une terminaison, contrairement à ce
qui se passe en Angl. où l'on dit ûre feu et tojire faire
feu, nous disons pshutterf à moins que l'expression
analytique/a/re du pshutt ne nous paraisse plus con-
venable. Dans c'est pshutt, le mot est adjectif pris
- 10 —
prédicativement. Lepshutt est un substantif. Il y en a
pshutt, expression qui n'a pas cours, aurait fait classer
ce prédicat dans l'ordre des noms de nombre généraux.
Il remplit donc dans la phrase les diverses fonctions
auxquelles se prête chacune de ses propriétés, de sorte
qu'il figure alternativement comme verbe, substance,
qualité et quantité, à la place exigée par la logique dans
l'ordre du discours.
L'argot anglais a le mot phizzing (1) pour délicieux,
beau. C'est le son d'un breuvage aspiré avec plaisir.
Pour cela on l'a trouvé propre à rappeler le sens de ce
qui est bon et beau, comme la boisson qui fait phizz
dans la bouche. C'est un homonyme de pshutt, la mé-
tathèse de siffler : toutefois, il ne s'appuie sur aucun de
ces mots, ce qui prouve que le langage se forme et se
développe de la même façon dans tous les pays. L'argot
s'approche du classique to phizz faire entendre un sif-
flement, et présente la métathèse de to sip siffler un
verre, le siphonner en quelque sorte. L'argotier anglais
a trouvé ce mot dans les sons naturels de sa bouche ; il
l'y a pris de confiance, croyant que c'est le vrai, sans se
douter qu'il pouvait exister chez lui ou à l'étranger, soit
avec le même sens de bon ou de' beau, soit avec toute
autre signification analogue. On serait étonné à juste
titre si l'on entendait soutenir que des deux langues
l'une a dû l'emprunter à l'autre. Rien n'empêche que
le son ne soit le même des deux côtés de la Manche,
tant qu'il garde l'originalité qui lui vient de la nature,
(1) To phizz veut dire faire de la mousse : c'est l'air qui produit
d'innombrables bulles ; to phizsle signifie persiffier.
— 11 —
comme dans le cas présent. 11 n'est pas nécessaire, non
plus, d'aller à l'école l'un chez l'autre pour connaître le
rapport intime entre bon et beau, et pour faire passer le
mot du sens concret au sens métaphorique. Phùzîng
est le son ps dont il a été parlé déjà, devenu mot et
verbe. Dans l'argot de la langue française il ne s'est pas
développé, sa place étant prise par des termes syno-
nymes, tels que humer, siffler, siphonner, sabler, tuber,
siroter, absorber. Les onomotapeessktes/)«s^ vénérer,
pûj, honorer, "se rattachent au son pshutt. Le sens est :
apprécier comme beau, auguste.
A cause de la conformité du sens, bien que le son le
range parmi les onomatopées linguo-dentales , le mot
tschock, synonyme tout nouveau de pshutt, demande une
place à côté de lui. Pour identifier ce dernier mot, rap-
pelons-nous qu'après avoir bu un trait de la dive bou-
teille la langue fait entendre un claquement particulier,
un toc toc accompagné d'un chuintement, d'un jute-
ment particulier par lequel on signale l'absorption d'un
breuvage de qualité. Peut-être ce mot, en s'étendant,
viendra-t-il à désigner une foule d'autres choses pro -
duisant un effet semblable à celui de la boisson. Il lui
faudrait un nombreux public, le temps de vivre et
moins de concurrents. Le claquement de la langue
après la déglutition est un signe de contentement.
Rappelons que c'est en faisant entendre ce son que la
nourrice cherche à éveiller l'appétit chez le poupon, sa-
chant que ce chuintement doit lui rappeler le mouve-
ment de sa langue quand il avale le lait. La poule, elle
aussi, appelle ses petits avec un son qui ressemble fort
— 12 —
à un claquement de sa langue. L'anglais to chuck ex-
prime cet appel. Il n'y a pas de mot dans le vocabulaire
français reproduisant cet appel. Le coq dit la même
chose lorsque, en galant oiseau, il attire l'attention de
la poule sur le grain qu'il lui a destiné.
Tschock etpshutt peuvent avoir été trouvés pendant
la dégustation d'un même verre de Champagne. L'un et
l'autre sont des créations linguistiques très récentes, du
moins dans leur forme actuelle. Cependant, il paraît
qu'ils vont céder la place au mot ah, qui, lui aussi, est
capable de rendre le sens depshutt. En effet, pour ex-
primer le désir, le soulagement, la satisfaction, l'admi-
ration, nous trouvons au fond de notre gosier large-
ment ouvert le cri spontané ah} L. heu cri de l'admira-
tion. Le gosier largement ouvert se manifeste dans
àya^ai j'admire, formé du même cri avec une orthogra-
phe plus gutturale. Ce gosier entr'ouvert par le désir,
par la satisfaction rêvée, par le soulagement, prête son
cri à l'action des yeux, dont la pupille se dilate, dont
les paupières s'ouvrent toutes larges, pour jouir à leur
façon de l'objet admiré. Il y a donc une corrélation
physiologique entre le sens du goût et celui de la vue,
l'un et l'autre éveillant dans l'âme le sens de ce qui est
bon ou mauvais, beau ou laid. Celui qui regarde ouvre
la bouche (la gueule) comme celui qui respire, qui dé-
sire, qui s'étonne. La vue, l'ouïe, le toucher, l'odeur sont
forcés d'emprunter le son des phénomènes du goût, parce
que lui seul est muni d'un organe sonore qui peut tra-
duire pour l'oreille les sensations d'agréable et de dé-
plaisant qui ont pu être perçus par les autres sens. La
— 13 —
sensation du goût(l), bien qu'elle soit perceptible par
la langue seule, semble accaparer également les lèvres
et le gosier, c'est-à-dire tout l'organisme de la phona-
tion appelé à traduire par des sons tout ce qui nous
émeut. C'est avec ses accents spontanés que nous ren-
dons les sentiments analogues de bon ou mauvais avec
leurs nuances, tels que nous les apportent les autres
sens. Voir aux mots oculaire, rebouiser, spéculer,
éprouver (1).
Pshutt, tschock et ah représentent donc la notation
de trois façons d'apprécier. Chacune de ces impressions
est capable de suggérer l'autre, les trois sensations se
confondant dans une idée unique de bon et, par analo-
gie, de beau, d'agréable. L'expression c'est beau à cro-
quer paraphrase cette union entre ce qui est beau et ce
qui flatte le goût. Le goût, du reste, est reconnu comme
l'arbitre de ce qui est élégant. Le mot sgoff'be&xi est
une forme du radical qui a formé gober avaler et trou-
ver bon, beau. Sous sa forme gaffer il veut dire regar-
der, admirer.
Les synonymes juteux, urf, vlan seront expliqués
plus loin.
Pshutt, composé de p que l'air inspiré fait sonner
sur les lèvres, de shu qui lui succède en passant entre
les dents et la langue et de it que celle-ci fait entendre
en venant toucher le palais, représente une modulation
(1) LAll. der Geschmack le goût, H. smaak attribuent la faculté,
non au gosier, guttur, gustus, mais à la bouche.
(1) Le H. proeven goûter, représente l'examen comme fait par la
mastication, Voir au mot barbaque. L'Ang. taste goût le place dans
le tact : tdter de.
-- 14 —
spéciale que l'instrument compliqué de notre bouche
fait produire à l'élément fluide. Nous allons voir le son
de l'air se modifier et former d'autres phénomènes sui-
vant que l'acte qui les provoque demande l'intervention
d'autres organes, tels que la langue ou le gosier avec
ses voyelles, ses aspirées et ses gutturales, combinées
ou non avec les labiales ou les dentales. Un son signifi-
catif appelé à devenir vocable demande autant de lettres
que le fait qu'il exprime affecte d'organes dans l'appa-
reil de la phonation.
Ainsi, l'organe dont le mouvement imprime à l'air le
son 6, p, v, w, f, ph, soit qu'il souffle, soit qu'il parle,
qu'il mange, boive ou bave, prend le nom révélateur de
babines (1). Dans le thème primaire bab, nous distin-
guons le son des lèvres qui s'entr'ouvrent en faisant
entendre ba et qui se referment avec un bruit 6. Ce son
devient substantif dans babines lèvres. La terminaison
ine indique une espèce mignonne. Dans l'intention de
l'originateur du mot, ce sont des lèvres un peu bouffies
et douces : cela ressort du son plein ba au bruit du-
quel elles s'entr'ouvrent et se closent. Ce nom a été
attribué à l'organe avec autant de bonne foi et pour
d'aussi bons motifs que celui de coucou à l'oiseau qui
annonce le printemps par ce cri, de pipit à l'espèce
d'alouette des environs de Paris, de courlis au vanneau
qu'on reconnaît de loin à ce cri, de coq. etc., car, elle
aussi, a un son unique qui la distingue toujours. Une
*
(1) Le Grec yeiloç lèvre est l'onomatopée de la gueule dont les ba-
bines sont une appartenance éloignée. Le mot lêore, en L. labia, est
le nom onomatopique de la langue, comme l'indique le H. leppen
licher, une franche lippée et le L. lambo.
— 15 —
très grosse lèvre s'appelle une pampine. Selon les actes
auxquels cet organe se trouve mêlé, elle prend le nom
de bade, balot et avec jeu de mot de baleines, au Centre
de papette bouche et lèvre; elle concourt à former les
onomatopées bec, bouche et les formes burlesques bo-
bèche et bobéchon bouche et par synechdoche tête, mots
qui jouent sur bouche et bec, ainsi que banquette men-
ton par jeu de mots; elle inspire les mots/)//5 le nez,
organe du souffle, comme la lèvre, et sa caricature^/?,
par jeu de mots. Dans le pif les ailes font office de
lèvres. Nous retrouvons les babines dans les barbes les
joues, les barres les mâchoires, les bacchantes la barbe,
le barant, en H. bron, par prosopopéela bouche d'eau,
la fontaine, dans bégarol trou, bouche par assimilation
à l'organe humain. Certainement qu'au lieu de ban-
quette, barbes, barres, l'originateur anonyme de ces
mots aura voulu trouver des onomatopées plus justes :
mais, comme il est difficile de saisir la note originale et
exacte des sons et d'en tirer des onomatopées absolu-
ment imitatives, on s'est contenté du mot à côté, se
consolant de sa défaite par un calembour comique. Il
est tout naturel que l'artiste, quand l'imitation exacte
ne lui réussit pas, cherche à cacher son insuccès en
nous faisant rire : c'est une malice pardonnable. Cepen-
dant, cette façon de procéder a ses inconvénients, car,
d'abord, banquette et barres sont des jeux de mots peu
égayants : c'est le revers de la médaille pour ce genre
d'amusement; l'esprit étant dans la nécessité de chercher
une assonance, n'est pas toujours libre de trouver des
choses amusantes. Au point de vue de la franchise du
— 16 —
langage, on perd à ce jeu : car, au lieu d'onomatopées
de bonne foi et faites d'un jet, nous n'avons que le com-
mencement 6, c'est-à-dire l'élément labial agissant dans
chacune d'elles, tandis que le reste détonne... Desinitin
piscem... C'est 'regrettable : il eût été facile de faire
mieux. En écoutant bien quels sons la mâchoire infé-
rieure produit ou esquisse en s'ouvrant avec p et en
laissant échapper du fond du gosier un son og, ag, on
aurait retrouvé le skt pîça le menton ou le G. Tcéytùv,
dont le sens actuel est barbe ; il est vrai que le langage
populaire se rattrape avec rigolboche (I. bocca). A dé-
faut d'un mot ressemblant à l'équivalent Grec, on aurait
pu trouver un mot sonnant comme l'Allemand Backe
joue, comme dans barbaque.
Pour mettre un peu d'ordre dans les mots où se sont
incorporés le sens et le son du souffle labial, commen-
çons par ceux qui expriment simplement l'air, l'élément
vague, flottant et libre.
L'air, et par assimilation le vent en entrant dans le
nez, fait entendre le son varié p, f, comme s'il était
aspiré par les lèvres. Les ailes en touchant la cloison
intérieure font, du reste, entendre ce bruit. Plus le
canal de l'organe se trouve obstrué ou rétréci, comme
p. e,. dans l'enchifrènement, plus le son vocal se fait
aigu et se rapproche de*. Dans ces circonstances, l'ono-
matopée pif est venue se substituer à la forme plus
commune nez et l'onomatopée pimer a été appelée à
exprimer le sifflement aigu que le nez fait entendre
dans le rhume de tête. L'original une fois créé, l'imita-
tion donne des produits abondants : voilà qu'on l'appelle
— 17 —
fifi, par allusion à l'oiseau qui piaule, piffre, qui n'est
qu'une corruption defiffre, surnom du nez, ce mot étant
le nom de l'instrument nazillard qui fait concurrence au
pif Le nez ayant son jeu physionomique particulier,
piffer ou faire le/ marque l'arrogance et le mépris. Le
souffle du pif pendant le repos a fourni le thème pour
former les mots qui expriment onomatopiquement
l'acte du sommeil : pioncer, piausser signifient dormir;
l'endroit où l'on dort est l&pionce ou le pieu, le lit.
Le pif est synonyme du bec, l'un et l'autre consti-
tuant des organes de la respiration. Le nez affectant la
forme du bec, on l'a surnommé pic (1). De ce mot se
sont formés piauler dormir, souffler du bec, ouvrir et
fermer le bec en respirant, souvenir de piailler, la
piaule, la niche où l'on dort, la maison. Le Bas Nor-
mand a pour pioncer vioncher, mots où le ch comme
sa forme sèche c3 traduisent le chuintement et le sibile-
ment de l'air dans l'arrière-bouche. Le Picard a le mot
viondir pour dormir. Le al de cette forme est probable-
ment dû à l'influence de l'homonyme ventj dont le son et
l'idée viennent à l'esprit quand on pense au souffle.
Viondir est une onomatopée mixte. Envoyer au piau-
tre est envoyer au lit. Piautre veut dire : pas du tout,
va te coucher.
Le tabac à priser s'appelle le fanfouin, du bruit de
vent qui en accompagne l'aspiration; priser se traduit
yarfanfouiner en langue naturelle. C'est la réduplication
de fa nasalisé. Un marque l'intervention de la langue
(1) La pie en skt pika, le pivert en H. speeht, doivent ces noms à
leur bec.
18
fermant l'ouverture de la bouche pour permettre au nez
de respirer plus puissamment. Le son naturel du vent
sur nos lèvres p,f, v met notre néologue en harmonie
avec les aborigènes de l'Hindoustan qui léguèrent au
sanskrit les noms onomatopiques de pa vent, va souf-
fler. Le procédé pour former les mots est le même,
malgré les diversités qui distinguent l'homme de nos
pays de celui de là-bas et malgré la différence des âges :
l'un et l'autre expriment par le langage les faits de la
vie en leur conservant le plus qu'il est possible à l'imi-
tation leur voix naturelle. C'est ainsi que l'Ail, dit
wehen et le H. waai/en pour venter, mots qui contien-
nent le thème skt va (en Gr. a) plus un h et un y pour
faire la liaison avec le suffixe en. La nature n'a rien
changé, ni le son des choses, ni l'organe de l'homme;
d'autre part, elle n'a pas modifié notre intelligence qui
nous pousse, comme par le passé, à employer les sons
universels et identiques pour la race humaine toute en-
lière, afin d'en former le langage au moyen duquel nous
devons communiquer avec l'âme de notre semblable :
car il est évident pour nous, qu'en frappant son oreille
par les sons naturels des choses, il doit assister au même
événement et en recevoir les mêmes impressions que
nous.
L'esprit est comme le vent : il souffle partout : on
ignore d'où il vient, on ne sait où il va. Le son nasalisé
du vent qui se fait entendre dans fanfouiner a été en-
tendu jadis dans une diversité de pays et partout on l'a
utilisé pour exprimer l'action du souffle, comme le
prouvent p'anda le ventre gonflé, TrvsJ^a le souffle,
— 19 —
pantex le ventre, ventus, vent, wind_, der Wind. Fan-
fouiner a un pendant dans le H. f nie* en éternuer. Ce-
pendant, les originateurs Français et Hollandais ne se.
sont pas abouchés pour donner ces noms à peine divers
à deux actes dont le premier consiste à aspirer l'air et
l'autre à le chasser du nez {nie* en éternuer) : c'est du
moins ainsi que l'expliquent les mots. Le langage
humain est fait de ces rencontres. Ce qui est argot en
France, parce qu'il est patois ou neuf, est parfaite-
ment courant et accepté ailleurs; le contraire a lieu
aussi (1).
Le nom du nez qui aspire et son équivalent la bouche
deviennent par prosopopée le nom de l'instrument qui
nous sert de siphon : le même souffle donne le nom aux
uns et aux autres. C'est ainsi que se sont formés \&pipe,
Angl. pipe, Ail. diePfeife, que le Gr. et le L. possèdent
sous une forme analogue à laquelle se mêle un sifflement
particulier : crfywv, siphon, le siphon. La soupape est,
d'après l'expression du son, la pipe par laquelle passe
une respiration : A. to sigh, Ail. seàj*en, H. zuchten
soupirer. V. au mot assoupir. Aspirer un liquide a
donné l'onomatopée identique sugare sucer, dont sou
est un débris. Le mot bouffée une bouffée d'air, de
fumée, a suggéré les mots bouffarde la pipe et la bouf-
(1) L'Angl. to sneeze, AU. niesen diffèrent à1 éternuer, L. sternuo,
pour la raison que ce dernier dérive de tor, reste de torqueo tordre
et de nu, débris dé nasus. To sneeze veut dire qu'il s'agit d'un pico-
tement du nez qui disparait en éternuant. Le s indique le sifflement
de l'organe, eomme le /le fait à sa manière, en le nommant vent.
Eternuer veut donc dire : avoir le nez tordu par un chatouillement,
éprouver le besoin d'éternuer. Pour la genèse de nez et tordre,Y. ces
mots.
— 20 —
fardière la cheminée. L'une et l'autre émettent de la
fumée, comme une bouche vivante : ce sont donc des
prosopopées. Apoffirif) au C. veut dire souffler, étein-
dre par une bouffée d'air, appelée en Angl. a puff ou
whiffi en skt pcœâka tourbillon de vent. — La, pompe,
pump, diePumpe est une forme variée de pipe, imposée
en quelque sorte, parce que l'instrument change de na-
ture. C'est une pipe, H. pijp tuyau dans lequel le piston
(siffleur) aspire l'eau comme le feraient nos lèvres avec
un son pst! V. Traité, p. 15.
La bise, H. bies la bise, biezen souffler en bise, bui
bise accompagnée d'eau représente un sifflement parti-
culier du vent, se rapprochant de celui de la bouche
humaine. Nous le retrouvons dans fascina la grosse
abeille, ^'.ÔupKw souffler tout bas, faire pst\ — vespa la
guêpe j fistula le pipeau, festuca le scarabée bourdon-
nant, le bisard le soufflet, le fétu (skt husa paille), la
fistule la plaie qu'on drame à l'aide d'un tube, fuser
siffler comme la poudre enflammée qui s'échappe d'un
tube, la fusée, — to buzz, to wheeze être asthmatique,
weasand la trachée-artère, to whistle siffler, — der
Pùster, skt b'âstrâ le soufflet, pisten siffler, faire pst\
La bise sonne également dans çucaco (2), lephgséter
(1) La fumée, skt bâmb, est une prosopopée. C'est un gaz assimilé
à une bouffée d'air sorti d'une bouche humaine, ^éçoç fumée, ténèbres.
(2) La nourrice, quand elle veut que le môme fasse pipi, dit : ps!
ps! pour rappeler à l'enfant de quoi il s'agit par un bruit connu. Le
cocher, pour faire uriner son cheval, ne dit pas ps ! ps ! il siffle, ce
qui ne rend plus le même son du tout. Heureusement, comme le che-
val est une bête très intelligente, il comprend ce que le patron veut
dire et le résultat est obtenu tout de même. Ps! ps! répond au
L. mingo, migo, minxi, onomatopée formée de ms! pour ps! skt mih
mûtr. Le Norm. Jïser veut dire jaillir, skt bis.
— 21 —
le souffleur, Y emphysème (to wheeze faire entendre le.
sifflement de l'emphysémateux), Ouest, — West le vent
d'Ouest, — der West id., die Weste le vent.
S'éboustijler (fier de /lare) veut dire s'époumonner.
Ce mot joue sur boustifailler. Le siège du souffle s'ap-
pelle en A. bosom la poitrine, Ail. der Bàsen id., skt
pupp'usa poumon.
Une onomatopée qui dénote que le son ps! dont elle
est formée se prolonge, que les lèvres, prêtées au vent
par l'imagination, répètent leur sifflement et font en-
tendre psp nous est présentée dans ïj^ps; le soir, le
vent du ponant, — Vesper les vêpres, — to whisper
chuchoter, whisp le fétu, le soufflant, wispern chu
choter.
L'origine onomatopique de pistolet a été exposée
p. 96 du Traité. Dans le langage familier, il prend les
noms de sifflet, de petouse et de blavin, mots qui dési-
gnent l'instrument à vent actionné par un piston, tel
qu'on le voit encore dans les mains des enfants : il siffle,
pette, souffle avec ou sans métaphore. L'Anglais l'ap-
pelle popgun, l'Ail, der Pùffer le pistolet.
La clarinette étant un instrument à vent, est devenu
synonyme de fusil, comme le sifflet de blavin : la pro-
portion a été bien gardée. Le blavin (1) est le canon
d'où sort l'air, le souffle (subflare) activé par la poudre
enflammée. Le son Jl dénote un souffle qui, pour se pro-
duire tel, exige l'intervention de la langue. Il s'est fait
mot dans \ p\d vent, — raXefyjuov le soufflet, le poumon,
(1) Le son v naît sur les lèvres quand le son a arrive jusqu'à elles.
Le thème est fia, L. flare soufflet.
— pulmo poumon, flare souffler, — soufflet, gonfler
(conflare), flûte, — to blow souffler, flaw rafale, bel-
lows le soufflet, to blast faire crever par la distension
du vent (skt phal), blasen souffler, — H. vlaag coup de
vent.
Le nez que nous avons rencontré tantôt sous la déno-
mination de pif à cause d'un des bruits aigus qu'il pro-
duit, se présente cette fois sous le nom de blair. Il a
plu au public, qui fait son langage, d'y voir un souf-
fleur. Le mouchoir qui sert à recevoir les humeurs que
le souffle expulse du blair (1) s'appelle le blave, le blard
ou le blavard. Le mot pompier mouchoir se rattache
d une façon analogue à pif, pipe et pompe. Il pompe le
liquide. L'argot qui s'inspire des faits tels qu'ils se pas-
sent s'est trouvé d'accord, une fois de plus, avec la
façon de s'exprimer adoptée ailleurs. L'Anglais dit à un
enfant blow your nose, l'Italien soffia il naso mouche
toi (souffle le nez). — Au moyen âge la trompette du
héraut d'armes soutenait en guise de hampe les armoi-
ries du chevalier brodées sur un drapel. Comme chaque
chevalier avait ses armoiries, sa devise et son signal
personnels, armoiries et devise ont pris le nom de bla-
son, Ail. blasen souffler, sonner de la trompette, forme
assibilée de flare. Le sibilement^s a été retrouvé par
un anonyme qui s'est rappelé le son esquissé par les
lèvres et la langue quand on souffle dans la flûte et uti-
lisé ensuite pour former les mots blésimarder (mard
est le radical de la bouche, le même qui a formé mordre
(1) Le blaireau, L. M. bladarius, suéd. gravsvin, porc fouisseur tire
son nom de blair qui chez lui a les proportions d'une hure.
— 23 —
Y. ce mot) siffler un acteur en marronnant contre son
jeu, et blésî /tarder c'est-à-dire flairer après le vent qui
mettrait le nez sur la piste d'une aventure. L'un et l'au-
tre mots présentent des synthèses du type : arc-bou-
tant, bain-marie, Hôtel-Dieu où le qualificatif prend la
deuxième place, comme dans la phrase analytique habi-
tuelle où l'on dirait : arc qui boute, bain de Marie,
Hôtel de Dieu, comme on dirait également siffler de la
bouche et flairer du nez. Le génie de la langue française
qui est analytique persiste donc, lors même qu'elle
semble rechercher la synthèse. Dans le grec, le latin,
l'anglais et l'allemand, le qualificatif se place dans les
composés avant le mot qualifié. En français on suit Tor-
dre inverse. — L'argot du crime a le mot blase pour
nom : entrer dans une piaule sous faux blase. Etre blasé
est une adaptation au moral du sens de la racine blas.
Il s'agit d'un cœur dont l'animation est partie; c'est
comme un vin évaporé, une fleur qui ne sent plus ; l'es-
prit est plat, indifférent, ennuyé. En anglais il y a une
expressiou similaire : the flowers are blown les fleurs
sont passées, elles n'exhalent plus de parfum; to pall
veut dire perdre son arôme, sa force, ail. Jlait fade. V.
Traité, p. 76. Etre vanné veut dire que les esprits vi-
taux ont perdu leur vigueur par suite d'une grande fa-
tigue. Il ne dénote |qu'une lassitude corporelle passagère.
C'est un jeu de mots sur éventé, évaporé. — Avoir vent
de quelque chose, reconnaître par le flair s'exprime par
vên connaître, tj.yjzvm flairer, reconnaître — venarl chas-
ser en profitant du flair des chiens — éventer — to wind
flairer — wittern sentir — l&.werwaayen avoir vent de.
— 24 —
— Le brouf, skt brimi ouragan est le vent soufflant du
large; l 'esbrouf Ang. blustering (1) ; H. blufla vantar-
dise; esbrouffé Ail. verblûfft abasourdi; d'esôroz^avec
violence. Le classique ébouriffé étonné est une forme
qui s'appuie sur esbrouffé) ébouriffé avec le sens de
désordre dans les cheveux (la bourre) marque le boule-
versement de l'esprit transporté à la coiffure.
Le vent charrie la puanteur et fait, pour ainsi dire,
corps avec elle. C'est ce que les expressions suivantes
vont mettre en lumière. Souvenons-nous que le linguiste
ne trouve pas à analyser que des mots exprimant des
choses parfumées ou convenables. Il partage le sort de
son confrère en chimie que son métier force d'opérer
sur toutes sortes de matières. Plaignons-les et exami-
nons sans fausse pudeur. — La fumée est un souffle plus
ou moins acre ou étouffant : skt b*ambla, G. <ï>s?o; le
brouillard. Les mots latins suffio (subfto) et suffbco
veulent dire : remplir de fumée. V. Traité, p. 39. —
L&fiente tc(vo; et le fumier exhalent une odeur nauséa-
bonde. La bouse apporte un vent sui generis. Bousiller
prend un sens plus matériel : il "signifie : gâcher, sali-
goter le travail.
La puanteur, la fétidité s'expriment par des mots tels
que pût/ puer, vas odeur en général (2), xyôw —foeteo
— visio vesser, visium vesse — puer, fétide, vesse — to
Jizzle vesser —fiesten et pfaùf en y esser etpetter,H. poe-
pen petter et vunzen vesser, sentir mauvais. Le bouc s'ap-
(1) Bodsting en Ang. veut dire une vantardise moins bruyante.
(2) Loufer est une autre onomatopée pour vesser : c'est la méta-
thèse de flare qui se retrouve dans le lof le vent, AU. die Luft l'air, H.
lucht air, luchten sentir.
— 25 —
pelle en Skt le puant : beda. Le mouton en Danois a le
nom de bede. C'est le même mot que le skt, ce qui prouve
qu'on s'est aperçu que le bouc sent mauvais dans le pays
du blond Danois aussi bien que chez les Indiens basa-
nés. Tous deux le qualifient par la même propriété,
celle d'exhaler un air fétide. Le L. haedus, Ang. we-
ther, Ail. das Widder rappellent vas odeur, vâtas le
vent — 53u) sentir (HvOs; le fumier), odor, odeur, icea-
ther l'air, le temps, das Wetter. Ces mots ne nous font
sortir ni du sens ni du son vent. — L'anus s'appelle en
en AU. die Fot^e, H. vot. Jean-fesse et ses assonances
Jean-f outre, Jean-foutu sont l'équivalent de TAU.
Hùndsfott anus canis. Le fesse-mat hieu est un terme
d'opprobre qui caractérise l'usurier, l'homme d'une
avarice sale et sordide. Fouetter de la carafe, asso-
nance de fétide (foeteo) avec fouet, veut dire : avoir
mauvaise haleine. Ceux qui. au lieu de prendre leur
langage tout fait, l'inventent disent la venne pour la
honte, paraphrasant ainsi l'expression honteux comme
un pet sans autres frais de rhétorique. Ce terme, comme
la venette et le vestige (1) qui désignent par jeu de mots
la peur (1) deviennent des expressions pour un état
moral qu'annonce l'odeur traîtresse. Le calembour est
trop en faveur pour que le Vésinet (la Vicinité) et Vésoui
(Visolium) ne servent pas pour former vêsiner, vêsouil~
(1) Coquer le vestige équivaut à donner le taf, métathèse de foeteo
fétide, V. ce mot. Avoir le trac rappelle stercus, Ail. Dreck fiente»
V. ce mot. Ce sont toujours des paraphases du sens : faire dans son
pantalon, avoir la venette.
. (2) La peur, L. pavor, skt Vî, epopoç semblent exprimer l'effroi qui
fait trembler les lèvres, AU. beben,H. biberen trembloter.
— 26 —
1er en remplacement de vesser. On a l'esprit prompt et
l'on aime toujours la rigolade dans le pays du vaillant
Rabelais. Du reste, le franc rire assainit l'esprit et la
pensée. — Le haricot et tous les siens ont été toujours
désignés par un sobriquet plutôt que par un nom hono-
rable qu'ils mériteraient cependant. Il s'appelle :
xÛMoç,faba,fève,féverole,bean, die Bohne ou ça^cXs;
phaseolus (pisum pois), phaseole, pois, Ang. pea3 plu-
riel pease (1) ou ydbtoç lentille, pCxta, vicia, vesce, vetch,
die Wicke mots dont le son répond à Ang. funk puan-
teur, H. vuig pourri, L.faex la fiente, se déféquer. Il
y a des gens à qui rien n'échappe et qui conservent
toujours la malice ingénieuse de l'enfance. Le haricot
(V. ce mot) est pour eux un vesto de cuisine, mot qui
fait allusion à vesse comme pour d'autres plus éloquents
une Jlûte, un flageolet. — Crépiter se traduit -p&rpetter
sans que cela blesse les convenances. A Liège on dit
petter un lièvre pour lui tirer un coup de fusil; jouter
pour éclater est d'un usage général. La petouse est le
nom de l'argot pour le pistolet. — Le son prout ! est dans
la nature. Les gens grossiers s'en servent pour expri-
mer le peu de cas qu'ils font d'une chose. C'est le bruit
des bar douilles et c'est pour cela que celles-ci en por-
tent le nom. Il a formé les onomatopées pard puer,
rcspSw prouter, puer, $p&p&ç la puanteur, leopardalus le
fauve qui sent mauvais, qui sent le prt (2), léopard,
(1) Le nom AU . die Erbse (Vers) pois est la description de sa ron-
deur : opopoç le pois, orbis, orbe le rond.
(2) Chaparder ruser, chercher à surprendre se fonde sur le chat-
pard le tigre et décrit ses allures perfides et félines.
— 21 —
prouter, to. fard, fùrzen, H.liet is niet prut celanevaut
rien, ce n'est pas même prt (1) — L'histoire dit qu'un
héros accablé à Waterloo trouva au fond de son ennui
le mot merda en réponse à une sommation de se rendre.
Ce mot est une onomatopée comme prout avec la seule
différence que le m remplace le p, échange qui se fait
habituellement entre ces deux lettres jumelles. On dit
irrévérencieusement Cambronne. (2) Le mot baudrouil-
ler avoir peur, fuir se rattache comme baudrier la
courroie qui enserre le ventre au mot bolge (bougette),
Angl. belly ventre : il marque l'effet d'un ébranlement
des intestins.
Le langage a considéré ce qui est vil comme un air qui
sent mauvais. Vil revient par asssociation à un flatus
qui nous remplit le nez et l'âme de dégoût II exprime
l'effet d'une appréciation par laquelle se manifeste notre
sens inné de ce qui est mauvais, la pudeur, V. ce mot.
A vil: répondent ça 6\oq sale, polluo salir, polluer, foui,
faut infect, H. vuil synonyme de vies puant, L. fœdo
salir.
L'air parfumé trouve son expression dans àvôo; la
fleur, mot qui a laissé tomber son digamma v ou w, V.
(1) La frousse rappelle le H. vreesen craindre de nriezen geler.
C'est l'effroi. Ang\.fright. Ail. Furcht {frigidus). Le son fait allusion
à prout.
(2) Bran! est comme prout! une expression de mépris très vilaine.
Ce mot ainsi que son dérivé embrener semblent désigner la couleur du
stercus, V. au mot brun. Ce n'est pas respecter sa bouche que de le
proférer. Rabelais l'emploie très souvent. Bran devient par jeu de
mots Bernard. Passer la jambe à Jules est de l'argot militaire . L'ex-
pression s'efforce de dire honnêtement: renverser la boite jaune, L.
gilvus, yellow, gelb, V. au mot jaune. Tirer l'oreille à Thomas à le
même sens.
— 28 —
Traité p. 48; dans odeur et ses congénères, V.p. 55; dans
l&Jleur ■ skt p'ull s'épanouir, Angl. toblow, V. au mot
fleur; dans t'ov, viola, violette, violet, Veilchen. Flairer
veut dire se servir de son blair AIL die Plàrre la gueule
(d'où plârren crier, Ang. toblurt id.). Blair répond à
pharynx, V. ce mot. Sentir s'appelle ailleurs ccrç/paivs^ai
(c'Çtà) exhaler un vent parf umé,yra#mre odorer, et sans
l'idée de parfum, la brise, la fraise, tobreathe souffler,
breast la poitrine qui souffle, die Brust la poitrine,
H. brieschen s'ébrouer, skt prôV hennir. — La
braque est le chien de chasse renommé pour son flair.
La sagacité de l'agent de police lui a valu le nom du
flair : le bricul et le briculé (qui sent le — ), lejliquart
comme appartenant à \&flique ou police, lejriquet jeu
de mot sur friquet moineau, L.fringilla. V. au mot
fredonner (1), skt bar h parler.
Le gonflement la boursoufflure se présentent dans le
langage comme l'effet du vent qui s'est introduit dans
une enveloppe quelconque. Les mots vessie, vésicule
doivent le son de leur racine au souffle vs gonflant une
peau et lui donnant son nom. Il en est de même de :
spôta tumeur, — çoarfoxriç tumeur, — pustula, — pus-
tule, — botch, — der Baùsch le gonflement, bausen
bouffer — de çuœxy], — vesica, — vésicule et àepapula
la papille, Bsugwv, — bubo, — bubon est un ulcère vi-
rulent. Les mots Anglais pump bosse, pimple pustule
ont également le nom de wen petite ampoule, mot qui
(1) Si la nomenclature des parfums est courte, qu'on se souvienne
qu'elle s'allonge cependant à l'infini avec les innombrables espèces de
fleurs, de bois, de sucs, de gommes, d'huiles et des mille arômes aux
effluves agréables, sains et désinfectants.
— 29 —
nous fait rentrer dans le sens de vent. Le bobo est une
enflure, une bouffissure qui s'appelle plaisamment le
bonbon, par assonnance, et par une assimilation cruelle
bonbon fondant ou à liqueur quand il s'agit des tu-
meurs scrofuleuses du cou. Il n'y a pas de 6060 veut
dire : il n'y a pas de mal; le bobotier est celui qui se
plaint toujours. — Papilla le sein gonflé fait en Patois
la poupe, Angl. pap le sein, en sktpapu la nourrice, la
babou. — Le pompon icexo». — pepo, — pompon est une
pomme, Angl. pumpkin la courge et par métathèse
apple la pomme, Ail. der Apfel id., d'où, par asson-
nance avec pomper boire, aspirer comme la pompe :
prendre du pompon, avoir son pompon. Le pépin le
noyau et les extensions du sens incorporés dans pépite
le pépin d'or, d'où la pépette l'argent, rappellent la
forme bombée, boursoufflée. Le Grec a incorporé ce son
dans luoxxiSÇtd souffler, le L. dans bufo le crapaud bouffi
nommé en G. d'une façon analogue ?J<raXo; le bour-
soufliez le skt dans pupp* usa poumon. La bobine doit
son nom à sa forme arrondie et bombée. Par métaphore
la bobine, son préjoratif la bobinasse et par assonnance
la pipe deviennent le nom de la tête à cause de la ron-
deur qui est leur propriété commune : on l'appelle pour
la même raison pomme, poire. Il n'a plus dejil (1) sur
la bobine veut dire qu'il a le crâne dépouillé. Ce mot
nouveau donne lieu ainsi à un néologisme, ce qui prouve
qu il est familier à celui qui l'emploie. — La bobe la
la montre est assimilée à la bobine : l'action de la re-
(1) Le fil est ce qui forme pelote, une fois enroulé autour de la bo-
bine. C'est le même mot. V. au mot boule.
— 30 —
monter ressemble, en effet, à celle d'enrouler du fil sur
une bobine. — Le vent souffle dans le bouffi, la bouf-
figne le vent (Shakespeare : blow wind and crack thy
cheeks) qui présentent le son ff de l'élément pur, à
moins qu'on ne préfère y voir sa personnification, la
poésie lui prêtant des joues bouffies. Un bouffiasse est
un homme gros, un patapouf wiq grosse pâte d'homme
bien levée. Un bout/est un orgueilleux qui s'enfle pour
se donner un volume considérable. Le skt peint l'or-
gueil par le même son et la même idée dans bîbh se
bouffir, s'enivrer d'orgueil. Les passions sont les mêmes
partout et se manifestent au dehors par les mêmes ac-
tes. La bouffe est un autre nom pour la tête ; elle s'ap-
pelle en plus bouffe la balle , la balle-bouffe. — Les
choses futiles, H. beuzelingen portent dans leur nom
le son caractéristique de ce qui est vain. Elles nous font
dire ouit ! ft! on peut s'en ficher. Ce sont, autrement
dit, des foutaises, des foutaisons ou avec le son du
souffle bb des babioles, des bibelots, des bimbelots, des
bibus, Angl. baubles, bubbles des bulles d'eau et ba-
bioles. — La balle est la tête, parce qu'on se l'imagine
ronde. Balle et bille étant rondes désignent l'argent :
de là billancher payer, (V. au mot billon.) — Le souf-
fle bl semble avoir renflé et arrondi PaXovoç le gland à
la forme sphérique, — pila la balle, — le ballon, bille,
boule, boulon, pelote, peloton, la sphère avec r pour /,
le bilboquet (bille et bouche), — bail la boule, — der
Bail id. — BéXoç., — pilum (javelot), — d'où bélemnite
coquille fossile de la classe des céphalopodes, — pile la
flèche, der Pfeil id. et le skt/)z7 lancer sont des varian-
— 31 —
tes des mots ci-dessus indiquant une transformation du
projectile arrondi en flèche (1) ou projectile allongé afin
de s'adapter à l'arc et à l'arbalète. — Le pilier d'un pont
AIL der Pfeiler affecte la forme d'une flèche d'arc. Le
projectile en forme de flèche courte lancée par l'arba-
lète s'appelle Angl. boit, Ail. der Boteen. La forme
change ainsi pour s'approprier à de nouveaux usages,
mais l'idée primitive subsiste toujours. Envoyer bouler
veut dire envoyer promener avec un mouvement de
boule, en skt pal marcher, en L. polar i errer; abouler
skt bal donner, diriger sur quelqu'un à la guise d'une
balle qu'on lui lance; le boulevari est le bruit du bou-
leversement (vari-verto). — La peau est, ainsi qu'en
témoigne le physique du mot, une enveloppe gonflée :
bal protéger, — ?Xofeç, — pellis, — pellicule, peau{2),
balle, — fell la peau, — das Fell id. V emballage est
l'enveloppe. En argot criminel être ballonné ou emballé
veut dire : être en prison. Pour ne pas manquer un jeu de
mots, celle-ci s'appelle le bal. Soit dit en passant que
les barres de fer de la fenêtre d'une prison s'appellent
la harpe dont elles figurent les cordes. Le détenu pince
de la harpe quand, pour regarder au dehors, il s'ap-
proche des barreaux de sa cage. — Le vendeur de bal
est le ramasseur de chiffons, en Suédois, pialter lam-
beaux. Le paltocjuet est l'homme dont les habits sont
en lambeaux et qui est déchu au physique et au moral :
c'est uue variante de pleutre, H. ploert (plorren les
(1) La flèche semblerait tirer son nom de ce qu'elle frappe, fligo,
Angl. to fling frapper en lançant. V. au mot affliger.
(2) La blaude, la blouse et avec r le bourgeron représentent ce vê-
tement comme assimilé à la balle.
— 32 —
lambeaux). — Le poil porte le nom de la peau qu'il re-
couvre : *tXoç feutre, — pilas, — poil, épiler, pelisse,
pelletier, feutre, — felt, — cler FiL. De là le chapeau,
L. pileus le feutre et le bloutn, le bloumard, mots qui
se rattachent à l'Ail, cler Flaiim le duvet. — La fla-
nelle est une étoffe pileuse, une laine couverte de pelu-
che. Faire flanelle joue sur flâne et flâner : c'est flâner
d'un café à l'autre sans dépenser, comme sur le trot-
toir. Flâner veut dire aplanir, polir les pavés, H. straat-
slypen émoudre la rue. V. aux mots plat, plan. —
La bulle est une boule d'air dans une enveloppe d'eau :
puppula borborygme, — ttc^oXu?, — bulla, — bulle, —
bell, — die Belle; la billevesée est une imagination creuse
et vaine comme la bulle et la vessie. C'est un mot com-
posé où un terme renforce l'autre plutôt qu'une batto-
logie. Floutière, qui rappelle le mot filou, veut dire :
rien, tu es volé!
D'un corps renflé par le vent l'esprit peut ne retenir
que la forme extérieure et admettre que l'intérieur soit
rempli en matière solide : ainsi on dit bombe pleine et
bombe creuse. Disons en passant que ce mot est une
variante de pomme et de pompon. Ainsi dans \&fouU
titude, mot formé de Joule et d'un débris de multi-
tude, la première partie rappelle le skt pul être grand,
pur remplir, parus moult, — rcX^ôo; la multitude, —
plebs, populus, — le peuple, la plèbe, le populaire, la
foule, — folks le peuple, — das Volk id. et puni, —
tcXsoç, — plenus, — plein, remplir, plantureux, à planté
en abondance, — Jull plein, — voll id., comme aussi
wXoBtoç la richesse, la plénitude des biens — Plutus le
— 33 —
dieu de la richesse, — la ploutocratie, Plut us, Pluton
la richesse souterraine, le dieu des Enfers, — fulness
l'abondance, — die Fulle id. — L'eau soulevée par le
vent forme des renflements pleins dans les noms des-
quels persiste le bruit du souffle : sktplava moutonner,
ondoyer, — nekorféç la mer, le flot, ofd^z (1) le flot du
sang, — jluctus le flot, — pluie, flot, fluctuation, phlé-
bite, fluide, — toflow ondoyQr,flood le déluge,— fliesz-
en ondoyer, couler. Des flottes veut dire beaucoup, à
flots. Plonger revient à immerger dans les flots,
skt pul, H. plonsen, plempen. Spoelen en H. veut
dire rincer. « Fluctuât nec mergitur » Ma barque
se maintient sur les flots est la devise de Paris,
Mer gère immerger veut dire : couler en mer, comme
plonger s'enfoncer dans les flots. V. au mot mer, Mer-
gus L. est l'oiseau appelé plongeon. L'Angl. dit pour
couler: to be swamped; le sens de swamp est marais,
Ail. der Sàmgfle terrain spongieux, imbibé, g&jaçoç, etc.
— Lo blague est une peau gonflée : arkfarxyèq l'intestin,
5A>/.T'.; ampoule, pustule, — bulga le sac, — le flanc le
ventre, malebolge, bougette, budget „ — belly le ventre,
bilge le ventre du navire, bulge sac, — der Balg le sac,
le ventre. Le L. stomachor s'estomaquer est une ex-
pression qui place le siège de la colère dans l'estomac
Il se traduit en H. par zich belgen s'irriter. Pour le H
la colère prend aussi son origine dans l'estomac, le ven-
tre : de balg, L'Angl. voit l'acte du ventre boursoufflé
(1) En L. vena veine, de vent, analogue à arteria artère que Pline
définit spiritus semita le chemin, le couloir du souffle. C'est le con-
duit d'ai pris pour le canal du sang.
3
— 34 —
dans to belch roter . V océan courroucé, le flot courroucé
sont des métaphores hardies . Ce quali ficatif veut dire rouge
de colère : il dérive de cqrusco,àe ruscus rouge, rutilant,
Le rouge est la couleur de la colère, mais le flot est dans
l'intention du poète Neptune lui-même. L'expression
hollandaise : de verbolgen oceaan l'océan en colère ex-
prime le courroux par un mot qui rappelle le flot, le
sein de l'océan soulevé par la colère. F lue tus .flanc (1)
et verbolgen sont de la même origine. H. zich bel g en
s'estomaquer. Chez Homère on trouve la même image
o'(z\m 0àXa<7<7Y;; le gonflement de la mer, mot dont le sens
s'éclaire par œdème. V. ce mot, Traité p. 55.
Dire des blagues , blaguer signiûediredes riens. Par jeu
de mots blag uer devientflaq uer(placere plaire), plane h et ■
s' amuser. UAW.plânkeln escarmoucher, peloter en atten-
dant partie semble en être l'équivalent. Etre am-
poulé est d'un style prétentieux et vide. — La blouse du
billard est une forme de la blague. C'est un follis, fol li-
licule (2). Cette difEérentiation de la forme répond au
sens particulier que le mot est appelé à exprimer. Etre
blousé ou être au bloc veut dire être en prison. Je me
suis blousé veute dire je me suis trompé. Le bloc, vendis
en bloc, un bloc enfariné répondent à l'Anglais bulk
masse, c'est-à- dire un volume renflé qui a de la consis-
tance et de la solidité : tc&oç, —pila, —pile, — Angl.
bulk le tas, la masse. — Le blocus à son origine désigne
un siège fait au moyen de Blockhaus Ail. , c'est-à-dire :
(1) Le mot flanc qui veut dire le ventre qui se soulève par la respi-
ration devient l'expression pour une entité abstraite en désignant un
point à droite ou à gauche d'un objet central.
(2) Le folliculaire est le journaliste peu consciencieux.
— 35 —
maison (Haùs) construite avec des billes de bois. Blo-
quer a perdu le us qui répond à Haùs et veut dire tel
qu'il est là : enserrer avec des billes de bois. H. balk
poutre, skt pallava branche.
La bille (1) et le billon, Angl. hullion le métal mon-
nayable en barre, ainsi que billot, se rattachent, comme
on voit, à bloc et expriment comme lui un morceau
massif plus ou moins approchant de la boule et pouvant
servir de rouleau. — Baloufen langage de voleur veut
dire gonflé, excessif.
l^Vipoche, Suéd. pose etjficka de posa bouffir, Angl.
poke, pouc/i, pocket ipoche et bag sac, Ail. der Bauch
le ventre, le sac reparaît dans bagage avec une forme
individuelle. Une bagatelle est une chose de rien, sans
valeur intrinsèque, d'intention première une blague.
Le gilboque est le billard, pourvu qu'il est de poches et
de calots. — La panse, H. pens, Angl. paunch, Ail.
der Wanst est une variante onomatopique du Skt panda
le ventre — h-zpzv, à cause de la perte du digamma,
ventre, — botulus le boyau farci, le saucisson — boyau,
bedon, bedaine, bedonner ballotter comme un gros ven-
tre, aller bedon bedaine — bowels les intestins — der
Beutel le sac par prosopopée. — La boîte terme de mé-
pris pour maison est un objet industriel dont le type se
trouve dans la nature. En Angl. le mot pod, variante
de bass, bast enveloppe, écorce, est le nom de la cap-
sule qui contient la graine des fleurs. C'est, comme la
bouture, une transformation du bouton, H. bot bouton,
(1) Les mots qpâXXoç, — palus, palissade, — pale, poteau, pôle,
perche, — der Pfahl le poteau sont des variantes de bille, billon.
— 36 —
uitbotten bourgeonner. Oter cette gousse, cette écorce
a donné les onomatopées pat dépouiller — g-oUm enle-
ver l'écorce — putare peler, nettoyer; put us nettoyé,
propre — amputer, butin dépouille — booty id. — die
Beute id. Le G. yùacz vésicule, follicule etc., sont des
variantes onomatopiques de bouton. Dans tous ces mots
on aperçoit la présence d'un des sons radicaux du souf-
fle. Les correspondants déboîte son wuÇ(ç diminutif —
pyxis — baquet, bac, box d'écurie, boîte, poquette ren-
flement, pochette — box boîte (1), bunker caisse, pox la
petite vérole — die Poche id. — H. bus boîte. La bous-
sole I. bossola est prise pour la tête, la boîte crânienne
qui dirige, la raison qui sert d'aiguille aimantée. — La
boîte, la capsule a fourni le modèle pour le tonneau :
b'anda vase, pitaka corbeille — tcéôoç — Pithaegia fête
qui coïncidait avec le poissement des tonneaux, vas le
vase - bassin, bouteille, bidon, — vat tonneau —
das Fasz id. dex Bottich id. - Bassiner veut dire
ennuyer parce qu'on s'ennuie le temps qu'on bas-
sine le lit et qu'il faut attendre pour y entrer. L'Esp.
bodega est la cave aux vins, et par extension, la ré-
colte, ce qu'on met dans les tonneaux, ainsi que le maga-
sin qui les contient. De là par un nouvel élargisse-
ment du sens la boutique en Arg. la boutance, la bou-
toque, le boucard, — La gousse, la boîte donne l'idée de
(1) Le thème de boite se trouve dans l'Angl. bolsterous gonflé, to
boast se vanter. La bagnole est la casquette, la tête, la mesure, la
bagnole le cabriolet, la bâehasseles travaux forcés sur les pontons, aller
à la bâche ou bâcher aller au lit; le bocson, le bocard, le bouts sont
des boites, des mauvais lieux. Le bateau se rapporte à la patache
embarcation et voiture.
— 37 —
la cale du vaisseau : de la péta bateau ?aair)Xoç la gousse
pour le fruit — phaseolus fésole — bateau, vaisseau,
pont, ponton, pont à bac — boat le bateau — das Boot
id. — H. boot vaisseau et tonneau. La patache est le
bâtiment léger des douaniers et la voiture publique. —
Faire office d'écorce, couvrir est le sens des mots skt et
G. spud revêtir, gafafj vêtement, H. bast écorce.
Dans ce qui précède nous avons vu les mots qui se rap-
portent à la vie et à sa reproduction provenir de radicaux
représentant divers son s du souffle. Tels étaient le ventre,
le flanc chez la femme, le bouton p&ravov, la fleur chez
Aes végétaux. On peut ajouter (tëXpoç, — bulbus — bulbe
— bail — de/- Bail, — H. bol pour les plantes. La vie
elle-même s'exprime par bu vivre,, b'û être (1), avoir le
souffle, p'usp fleurir, pus' alimenter — ?uu) engendrer,
-at; diminutif, un petit enfant, l'élève, rS^ parent —
pupilla une mineure, poppeia poupée, pupillus l'orphe-
lin, pusio le petit garçon^ pumilus le nain, — pupille,
poupon poupée, poupard, — boy enfant, garçonnet —
cler Bùbe le garçon. Ce dernier a fourni à l'argot \epuf
de spispufj AU. der Spitebube, celui qui tient la tête
de la corporation : die Spitze la pointe. Avec la forme
jl nous avons bàla jeune enfant, çuXyj la tribu, tt&Xcç
jeune cheval ou autre petit d'animal —Jllius û\s,pullus
poulain, pouliche, polisson avec le sens de dévergondé,
polichinelle,, poule, — foal poulain, filly pouliche —
das Fûllen le poulain. — Suéd. pilt le garçon. D'autres
mots encore ont été formés de ce son spontané : TusXXaÇ
la jeune fille — Pallas la vierge Athénienne, pellex la
(1) Etre est stare exister, être debout. C'est une autre onomatopée.
— 38 —
fille de mauvaise vie — le paillard le coureur de filles,
paillasse l'équivalent de polichinelle — der Biihle Ail.
l'amant. La feuille qui sort d'un renflement en bourgeon
s'appelle/) 'ulha feuille, ytfXXcv — folium — feuille, fo-
liole — blade — das Blatt. V. au mot feuille ailleurs.
Le son pu, put a formé putt être petit putra fils —
9'jtov la branche — puer le g&rcon, fustis la branche, la
trique — fustiger donner des coups de bâton, puéril,
futaie, poutron ou pute fille, putain fille et fille de mau-
vaise vie — Fitz (1) dans les noms propres — die Piite
dinde analogue à poule — Patois Néerlandais poeter
coq. — Le bébé alias bibi qui piaule, qui prend la poupe
de la nourrice en skt papu, l'enfant qui bégaie a donné
les variantes piote le petit militaire et pioupiou le li-
gnard. Ce sont des réminiscences de faute enfant, bébé
d'où le fantassin. Les mots skts pôta, pôtaka un jeune
quelconque se retrouvent dans le péjoratif potache le
collégien-. Pantin est un jeu de mots sur fantoche : il
fait allusion à pante, ou peintre. Pantre et Pantinois
sont les faux noms que par jeu de mots l'argot du crime
donne à Paris-lès-Pantin. Paris (2) s'appelle également
Pantruche. Le pantin, le fantoclie s'appelle aussi le
bouiboui variante de bébé; par jeu de mots bouiboui
(1) Czareviteh le fils du czar a son équivalent dans ôiôç fils — vi-
geo être fort — végétation — wight enfant, der Wicht id. mais avec
un sens avili, maintenant, H. icicht un petit enfant.
(2) Pantin rappelle Pantano le Marais : pota fond — 7i6vxoç — pro-
fundum — le fond — bottom — der Boden. Bath Angl. et das Bad
Ail. le bain marquent l'endroit où l'on se baigne; bed. Angl. et das
Bett le lit marquent le trou — H. bedding lit du fleuve. Skt. bad se
baigner.
— 39 -
s'applique au boxon, à la boite (1), an bordel. Au Centre
on appelle une petite fille pauque, skt pijga jeune ani-
mal même mot que le Danois pôike où que — ke équi-
vaut au quin de mannequin, bouquin, AIL chen va-
riante de kind petit enfant, petit. Puck Angl. est un
petit bonhomme, le Suéd. piga une petite fille, le H.
pinh une jeune vache. L'élève de l'école polytechnique
s'appelle pipo, forme fantaisiste qui semble rappeler
l'idée de jeune, hepivaste est le bébé qui tette. Ce mot
joue sur pitié boisson, vin. Il en est demêmedejoé-
vouine le tendron, de pouijfe ou pouiffle la fille publi-
que. La pouffiaee est la prostituée. La pougniffe et la
ponante ont la même signification. La forme du pre-
mier semble poussée dans le sens de ponere, mettre sur
un même plan avec l'horizon.
La branche,, le brin est le bourgeon, développé en
skt paru. lisse rattachent à pras, pra procréer — gpjw
bourgeonner, pulluler — frons\s feuillage — embryon,
frondaison — sprout le bourgeon — der Sprosz id. —
H. spruiten bourgeonner. Un souffle de vie gonfle le
bouton et le fait perler sur la tige. Le bras skt parvan
nœud, joint est comme une branche du tronc humain,
lafourche un embranchement comme la brisque le
chevron en fourche qui marque les années de service
militaire sur la manche du briscard. Le bersaglier bra-
que son fusil, le pose sur une fourche pour éliminer de
son tir l'effet de la vibration de ses nerfs. Rembroquer
(1) Le sens primitif de ce mot est un meuble en planches ou bar-
deaux, de la même racine que la brette le sabre en argot la planche
Ail. das Brett la planche, Angl. cupboard l'armoire, le dressoir. Le
nom Holl. de bordel est Kast châsse, caisse.
40
— rembroquable voir, visible sont des déformations
de braquer les yeux, les lunettes. La bricole ^iyzz
est la branche qui sert de lien : c'est le bras végétal qui
embrasse. Abraqué veut dire lié, débringué dénote une
démarche déhanchée, dé fringue et débraillé marquent
l'absence de (freins) brides (1) dans la toilette. Atta-
cher se traduit dans le centre par brayer, H. breyen tri-
coter.
La frette est un anneau de fer qui sert de bride, de
lien. Il offre l'image de la rondeur, d'une embrasse,
Esp. abarcon, G. zép-r, anneau. Cette qualité trans-
portée aux ronds qui facilitent le roulement des mar-
chandises nous valent les mots braque liard, bridoche
et brobèche centime, ainsi que la brisque l'année, la
broquille la minute, le temps qui parcourt un cercle.
L'anneau est la brobicante.
La bricole au billard est le mouvement de ressaut
qu'imprime la bande élastique à la bille. L'esprit se re-
porte à la branche qui revient à sa première position
par son ressort naturel chaque fois qu'une force étran-
gère lui a fait quitter sa position normale. Ce mot ré-
pond à l'Angl. to spring, Ail. springen sauter. L'Angl.
springe signifie le trébuchet. Le brin d'estoc est une
adaptation française du H. springstok. Broncher, It.
brancolare, skt b'ranc, indique le manque de fixité
comme dans la branche agitée. Franchir un fossé se
fait en imprimant aux jarrets le ressort de la branche,
H. springen sauter ; fringant sautillant équivaut à
l'Angl. tofrisk.
(1) La bridaukil est la chaîne de montre volée et vtndue au kilo.
— 41 —
Le berceau est la couchette de l'enfant qui s'ébranle
comme la branche balancée par le vent; brimbale est le
manche d'une pompe qu'on lève et abaisse; brandir,
skt b'rânta mis en mouvement et ébranler parlent d'un
mouvement de va et vient imprimé à d'autres objets ;
la brancllllante est la sonnette, la branlante la montre
avec son mouvement oscillatoire. Frétiller, un frétillon,
le fretin rappellent la petite branche flexible exécutant
un mouvement vibratile : skt sp'ar vibrer, avoir
un mouvement brusque comme une branche qui fait
ressort, — àszatpo) frétiller, — vibrare avec réduplica-
tion vibrer, — vibration .frétiller, — to sprawl agiter
les jambes. — purzeln id. — Lafertille (frondaison,
sprout) est le chaume agité : fertasser, ferclasser et
vardiller dans le Centre sont comme le pullulement de
cette forme. Le mot fronde désigne un instrument ba-
listique auquel le bras imprime le mouvement de la
branche qui revient dans son état normal après qu'une
force a pesé dessus. Si ce mot se base sur le L.funda,
il y a de fortes présomptions que l'ébranlement de la
branche, — son brandi ssement étant analogue à celui
de la funda et se présentant à l'esprit comme son image,
— a fourni le r qui a tout à fait l'air de s'être glissé
dans ce mot à la faveur de ce rapprochement.
Les rejetons d'une même famille sont des bourgeons,
des branches d'un arbre généalogique humain : bhrâtâ
frère, — ?MTïiP frère et associé. <?prJTpy) la tribu, l'asso-
ciation, — f rater, — frère, fraternel, — brother, tu
breed élever, engendrer, — der Brîider frère, brûten
faire éclore. De là, par jeu de mots, un franc, un af-
- 42 —
franchi celui qui appartient à la confrérie des voleurs,
un frère de l'argot, une f ranci une une amie, franchir
faire amitié, embrasser, le far nandel ou fanandel Y ami
(analogue au Grec àp6[xs; articulation et amitié), Angl.
friend ami, Ail. der Freund. — Le f Hanche est le dé-
linquant qui va en cassation pour se rendre amis les
juges. Enf rayer veut dire enchanter; le franc, V affran-
chi est le complice. Lefralin et le frangin sont le frère.
Le Suéd. fria, en AIL freien veut dire courtiser.
Ma vieille brandie (1) veut dire mon vieil ami, mon
vieu-t-ami par une liaison bonâ fide. — Les cheveux
ont été considérés comme une bourre, comme une fron-
daison végétale. C'est pour cela qu'ils ont reçu le nom
de hrigants ou hrigeants, termes qui rappellent les mots
bourgeon, bourre et brosse. La transformation du vrai
nom est due à l'influence qu'a exercée sur lui le rap-
prochement avec le mot brigand, le forban qu'on a
l'habitude de se figurer hirsute.
La végétation qui se développe du bourgeon, bour-
soufflé par la sève, montre son activité dans le sens que
nous accordons à : bri nourrir, vfih, vrij, produire,
(1) L'argot a souvent la main heureuse. Le mot franchir embrasser
est comme une résurrection du Grec <piXéw embrasser, faire ami, comme
disent les braves gens. «ÊûXr, est la tribu, ce qui veut dire les enfants
de même race, du même clan. Ils sont forcément des associés et des
amis, qpcXot amis et solidaires, sodales, filii, des fils. Quelque éloignés
que nous soyons comme descendants des premiers ancêtres, nous ne
cessons d'être frères au sens naturel et religieux surtout, car religion,
une forme de lex et de légalité, est l'engagement du cœur à l'ordre
providentiel. Nous sommes de vieilles branches, très vieilles, tous les
peuples. Il y a de méchants frères dans les familles; il y a des faux
frères en amitié : mais malgré nos colères nous ne devons pas oublier
notre affinité, sous peine d'avoir les remords de Caïn. Tel est le sens
du mot Français et Républicain : la Fraternité.
— 43 —
fructifier, — gpûw croître, aica^i à<*> être gonflé de sève, —
fruticor fructifier, fruor jouir des fruits, les recueillir,
brutus natif, à l'état de nature, frons la frondaison, —
bourgeon^ brin; fruit, brousse, burre, — sprig bran-
che, to sprout bourgeonner, — spriesjsen id. et jaillir,
der Sparren le chevron. Une blinde est une femme
longue et maigre. Brouter, en Angl. to browse veut
dire : manger les jeunes pousses; la broute est la nour-
riture. La branche désigne dans le langage populaire
la patte, AU. die Brante la patte de Tours, It. branca
la griffe par assimilation avec la branche et ses rami-
fications. Abraqué veut dire embrassé, lié ensemble par
une branche, tenu par ce qui forme bras. La bourre,
chez Hesychius Mfov, est un produit animal ou végé-
tal : l'esprit la rapporte toujours au bourgeon. C'est
elle qui a donné le nom à l'animal qui en est hérissé :
yzi-io; le hérisson marin, l'oursin (1), — porcus, — porc
le broussailleux qui fournit la bourre pour les brosses
le bourru le caractère hérissé d'aspérités, la bardane
la carde — farrow le goret, brush la brosse, boarle
sanglier, — das Ferkel le goret, die Bilrste, la brosse,
der Burzel la queue du cerf, du sanglier. Les picots
des végétaux ont pu donner leur nom à l'acte de KÛpu
traverser — foro — forer, — foret — to bore, to prick
percer — bohren forer. La bourre de soie est la femme
de mauvaise vie, porca. L'Esp. borracha est une peau
de mouton, une outre,, équivalent à gupaa — bursa —
(1) Oursin est le petit ours, le petit velu mi? à la place de hérisson.
L'origine de ce mot est skt us, uro brûler, à cause de son poil roux
ou brun. Bear Angl., der Bar Ail. désignent également le brun»
Bruin H. est le surnom de l'ours, en skt fralla le noir, l'ours.
— 44 —
bourse — purse — die Bôrse. Borra ou h or r ego est le
mouton, en Suéd. far. La bourriche, primitivement
l'outre en peau de mouton ou de chèvre, a donné son
nom à des réceptacles comme le panier aux huîtres. Se
monter le bourrichon (la caisse) se monter la tête, pa-
raphrase par âpeu près, l'Espagnol borraehear s'eni-
vrer, se remplir l'outre, le sac. La brosse est une repro-
duction artificielle des plantes qui grattent, telles que la
bardane, Angl. bur/\ Se brosser le ventre est une
expression ironique et cruelle. Quand on a bien bu, bien
mangé, il y a des gens qui se carressent le ventre, don-
nant à entendre par là qu'ils y éprouvent un sentiment
de satisfaction. Tu peux te brosser veut dire : tu n'as
pas eu ce que tu désires, tu es frustré. On dit de la même
façon : tu peux te fouiller V. ce mot. Des brosses et les
variantes brica, broquille veulent dire : rien, tu peux
te brosser. Une brousse est une brossée, un raclage, une
ratapiaule, une raclée. Les mots viridis et vert mar-
quent la couleur de la végétation ( V. au mot bourgeon)
skt paru être vert — irpaasv — porrum — poweau —
H. prei. S'arrondir en bourgeon, en perle, en [gemme,
en bulle végétale a signalé pour l'originateur du nom la
présence du souffle vital : flare souffler. De là p'al
s'épanouir, phul fleurir — gXaaTavio s'épanouir — pullu-
lare se reproduire — to blow s'ouvrir — blùhen fleurir.
Repliée dans le bourgeon, quand la feuille fait éclater
son enveloppe, elle commence à s'étendre dans le sens
de la largeur et de la longeur jusqu'à ce qu'elle atteigne
sa forme parfaite. Cette forme plane de la feuille, digitée
ou non, a de la ressemblance avec la main. En effet, nous
— 45 —
pouvons lareplier et l'étendre; si nous écartons les doigts
nous donnons à la main la forme de la feuille digitée ou
édentée; si nous les resserrons, par contre, elle a la
forme d'une feuille à bords unis. C'est grâce à ce rappro-
chement que la main s'appelle p'alka corps étendu —
raXapit] — palma — paume(l) — palm — diePalme œil
de la vigne, empan et rameau du palmier. La paume
qui frappe se fait sentir et entendre dans la plantasse,
lajlamousse, vlan! Ce vlan s'écrit aussi avec une apos-
trophe v'ia/i, comme si l'on y voyait un composé inter-
verti de : en voilà, en v'ià. Il n'est cependant qu'une
consonnance de plan, rataplan! le bruit de la main
plane ou plate transporté aux sons du tambour. Vlan
est synonyme de tape. C'est tapé veut dire : c'est tou-
ché juste, bien fait, beau, et grâce à cet enchaînement
d'analogies vlan prend le sens de iischutt. Une paume
est une perte, un coup, une plamasse (2). Toucher, tâter,
examiner de la main, de la paume s'appelle Wrfayât*
— palpo — palper. Comme la paume de la main, la
plante du pied, qui lui est assimilée, doit son nom à
l'éclatement du bourgeon qui permet à la feuille de se
développer, Le pied est fait comme la main : l'un et
l'autre sont digités ; les articulations du doigt s'appel-
lent orteils (pour arteils) quand il s'agit de celles du
(1) Pomaquer veut dire prendre, mettre dans sa paume.
(2) On ne rencontre pas dans plamasse le bruit qui sort de l'objet
frappé, bien que l'esprit soit porté à croire que c'est cela que le mot
doit exprimer. C'est le son radical du phonème paume qui tient la
place des diversités de bruits que produit son application sur les dif-
férents objets dont elle réveille le son. La nature du son provoqué
peut-être spécifié par des prédicats.
— 46 —
pied; l'animal se sert de ses pieds comme de mains pour
saisir, tenir; le mot patte s'emploie pour la main
et pour le pied (1). La plante du pied s'appelle
77ÉA[xa — planta — plante du pied et pied d'arbuste,
d'où planter, planton — plant pied de végétal — die
Pflanze la plante. Le sens abstrait de plan, plat tire
son nom de la plante du pied, le pied posé à plat, d'où
l'expression de plain pied. Le développement horizon-
tal de ce membre du corps humain est assimilé à la
feuille. L'étendue horizontale est décrite dans prath
étendre — Tckât-ti la palette — plaudo claquer des pau-
mes — applaudir, aplatir, plat, le plateau — Jlat
plat — platt — comme aussi dans xXtvOo; la planche,
la dalle — planus — plan, polir, plain uni — plan le
plan — der Plan la plaine. La largeur est une autre
propriété du développement dans l'espace. Elle
emprunte sa dénomination à la largeur de la paume ou
de la plante du pied : la main et le pied ont longtemps
servi d'unité pour la mesure de l'étendue. La largeur
s'exprime p&rpraf élargir — tcXcctuç large — amplus
large — ample — broad large — breit id. — Le mot
sprachir que le Wallon cite à juste titre comme preuve
de la puissance imitative de son langage, exprime
l'aplatissement de la chose écrabouillée. C'est le sans-
krit praV étaler.
Le pied et sa variante la patte doivent leur nom à la
bouche dont ils partagent la préhensilité, la faculté de
s'ouvrir, de se fermer, etc. Ils ont, en outre, plusieurs
(1) Son correspondant végétal est le pétale, la feuille, skt patra.
— 47 —
aptitudes qui leur sont spéciales, entre autres celles de
battre, de courir, de former le fond, la surface plane,
l'extrémité. Telle est la façon dont la genèse du pho-
nème pied et ses dérivés a été expliquée quand ce mot
a été étudié dans le Traité de l'Onomatopée. Cependant,
il est préférable d'envisager la patte comme un pétale
humain et de se la figurer comme un développement en
sens horizontal du bouton. C'est de cette façon que se
sont produits les phonèmes paume, la plante du pied
par assimilation à la feuille. D'une façon analogue le
pétale doit avoir été le prototype du pied. L'origine de
pied, patte est donc la même que celle de bouton, le
renflement d'où sort la feuille (V. au mot bouton). Le
pied s'appelle pùd, — r,z S;, — pes, — pied, patte, pé-
dale et par assimilation pétale, — Jbot, — Fàs^, das
Pâtschchen la petite patte. Battre s'exprime par pat
battre de l'aile, butk butter, frapper, — t.x-zz™, — peto,
— batuo, — battre, bataille, — to patter taper des
pieds, — patsch! le bruit du coup. Une patoche est un
coup de férule. Patata peint le coup de sabot du cheval,
patapatapan le coup de tambour, patatrot la montre
qui marque le pas du temps, la patrouille et par jeu de
mots la patraque la ronde qui marche en marquant le
pas et que l'argot appelle pour cela la sonne. Patatrot
est la patte qui trotte, faire patatrot fuir, patatras le
bruit d'une chose qui dégringole : c'est un bruit pour
un autre, d'où le Provençal a tiré le verbe patraccarse
se flanquer par terre. Patafioler est battre la fiole, la
tête. Caresser de la patte se dit en un mot pateliner et
en Argot paqueliner. — Poser, mettre sur pied, imiter
- 48 -
une de ses attitudes se trouve dans pôta le fondement,
— gacnç la base, — podium appui, ponere poser, postis
montant de porte, — appui, butte, imposte, — post le
poteau, die Pfoste. — Ponere poser sur pied est une va-
riante defundare fonder.
Le butant ou le culbutant est le fond du pantalon, le
pantalon : Kâ'O'piQv — fundus — fond — bottom — der
Boden. L'adjectif bas veut dire ce qui est au fond. Le
bout est une variante de fond, l'extrémité. Les bas sont
des pattes en laine, etc. Perdre ses bas veut dire ne
plus savoir où l'on en est. Fundus a inspiré aussi le mot
fodio je fouille, j'approfondis: de là la fouit lo use \&
poche et par ironie tu peux te fouiller : tu n'auras rien
pas plus que dans une poche vide. — La main est ré-
tractile et capable de serrer, de lier. Cette propriété
s'exprime par bandh, bundh lier — gkxc^xi lier, serrer
funis corde, spasmus corde, tiraillement — bandage,
funiculaire — to bind lier — binden id. Ce qui lie au
moral, ce qui engage s'exprime par le nom du lien, du
serrement qu'on orthographie serment : bandh lier —
rdsv.q la foi — fides id., sponda le lit, l'union des
époux, spondeo je promets, Jidelis fidèle — fédéral
époux — pawn gage, variante du.'L. pignus, bond l'acte,
fait h la foi — das Band le lien moral, bieder fidèle,
loyal, das Pfand le gage. Le phonème et le sens de lien
se retrouvent dans le bât It. basto dont le sens primitif
semble être botte en H. bundel paquet et par extension
la selle sur laquelle on pose le paquet, la charge, en G.
gaaTaÇto prendre dans la main, serrer dans les bras et
porter. Le bastage devient aussi le nom du travail, la
— 49 —
bâtée un bât plein, du bâtard un tas de choses. Basta!
bastel veulent dire : la charge est complète; il n'en faut
plus. Le mot bâtard (1) l'enfant illégitime est une va-
riante depseudo trompeur et du skt frant tromper. Ce
phonème est formé du son radical ps ! qui exprime un
sifflement moqueur. Il est synonyme du L. spurius qui
n'est pas d'origine sérieuse, mot qui rappelle sport et le
skt b arts railler (V. ce mot). — Le violon est la prison
par métonymie : c'est la boîte, l'emballage (la balle —
emballé — le bal. V. ces mots) qu'on veut dire. Violon
vient defides les cordes, comme^cr defido. Ajoutons
que finis fin est l'endroit où deux choses se joignent,
Angl. boundary les confins, bounds la limite. Bis veut
dire deux fois, bini deux à deux. Ces mots désignent
deux unités liées ensemble. De là débiner le truc dé-
monter un complot, montrer la combinaison.
L'eau qui sort en bouillonnant de la source, de la
bourbouille (V. au mot flot)'a fourni le verbe prV faire
jaillir, — gpjw sourdre, — bullio, — bouillonner, bor-
borygmes les bulles montant de l'estomac, — to sprout
sourdre, spring la source, — sprieszen jaillir, ainsi que
parsh asperger, r^t^ la goutte, a^sipa) semer, répandre,,
— spargo, — aspet^ger, sporadique, spore } — to
sprinkle arroser, freckles les taches de rousseur, —
sprenkeln arroser (2). La mousse aue produit le bouil-
lonnement de la fontaine s'appelle Angl. froth, Ail. der
Braus,
La pierre ponce L. pumex est une pierre très
(1) En skt bândakinêya.
(2) Skt prot* s'ébrouer, H. brieschen rappelle le mot brise (V- ce
mot). Le cheval souffle de ses naseaux et en fait jaillir l'écume.
— 50 —
poreuse : le mot la décrit comme une mousse fossile. Le
phonème est emprunté à spuma,H. spuwen (V . au
mot pituite), le mucus écumeux que la bouche rejette.
On emploie la pierre ponce pour lisser les surfaces. De
là, l'expression poncer pour nettoyer.
Par la suite, ce mot est devenu synonyme de laver la
tête, laver les oreilles, moucher, donner un savon, une
lessive — corriger.
Un mouvement spasmodique, un hoquet soulevant le
pharynx sous la poussée du trop plein de l'estomac ar-
rache à delui-ci le bruit dégoûté bure. Il n'est pas en-
core devenu mot courant. Cependant, il existe. Un
plaisant malicieux le surprit un jour et en fit de suite
un mot en disant : t'appelles donc Bure, feignant de
croire que son camarade soulographe appelait quelqu'un,
alors qu'il faisait entendre ce bruit involontaire. C'est
répondre à un heureux instinct que de détacher l'esprit
d'un spectacle révoltant en faisant diversion par la
transformation d'un bruit honteux dans le nom d un
mystérieux personnage. Dans t'appelles clone Bure on
surprend sur le fait, non pas seulement la naissance
d'un mot mais encore celle d'un personnage qui pour-
rait figurer dans la mythologie populaire à côté de tant
d'autres qui ont une origine moins curieuse même.
L'homme au sable appartient à cette catégorie. Son
rôle est connu : il passe le soir et jette aux yeux des
moutards une poudre subtile qui fait qu'ils n'y voient
plus.
C'est le moment d'aller faire dodo. La poussière
symbolise l'ombre de la nuit, qui est comme le nuage
— 51 —
poussiéreux. — A Tours Hugo est un fantôme de flam-
mes, un feu follet qui fuit et seteint quand on a le cou-
rage de siffler, de faire hu, huchel dont on a fait Hugo
(Angl. Hugh, prononcer ïou) comme Bure de hurc\
Hugo est comme tous les spectres : il né veut pas être
troublé dans sa solitude. Le mythe est bâti sur cette
vérité banale, ce que les Anglais appelleraient un
truîsm : sifflez, c'est-à-dire soufflez sur la flamme, elle
s'éteindra. La même fable se raconte dans leLimbourg.
Là, l'homme de feu s'appelle le Vuurman l'homme de
feu. Il a la réputation d'être malfaisant en ce sens qu'il
éloigne du bon chemin ceux qui le suivent et les noie
dans les marais. — Au centre, on dit aux enfants de ne
pas sortir l'hiver parce que le bonhomme Fret (le froid)
est dans la rue. D'autrefois, c'est le dalu, une bête
malfaisante qui donne l'onglée. (Suédois dalraoudarra
trembler. Voir ce mot.) La monnaie de Ste-Farce, la
Sainte-Boute-en-train, passer chez Pain, rappellent
des personnifications qui attendent qu'on écrive leur
histoire. Au Limbourg, le printemps si long pour les
imprévoyants et les paysans pauvres, est devenu un
personnage appelé de lange Linte le long printemps,
dont les faits et gestes font l'objet d'un conte qui amuse
beaucoup les bébés. Bure, de même que Y Homme au,
sable, pourrait devenir un personnage sous la plume
imaginative d'un conteur populaire et jouer vis-à-vis
des soûlographes le rôle d'un médecin administrant un
émétique (1).
(1) Les matelots sifflent, parait-il, pour faire venir le vent. Ils font
de même quand ils voient le feu Saint-Elme, cherchant ainsi à l'éteindre
Ils le prennent pour un mauvais présage.
— 52 —
Dans brc, nous avons un nouveau radical, un thème
complexe, mais irréductible, parce que l'émission de
ce bruit se fait d'un jet et par un seul effort. L'organe
dans lequel naît ce bruit s'appelle, pour avoir fait en-
tendre des bruits semblables : oip'jyc, le pharynx d'où
le G. pharagx le gouffre, le barrathrum et bragchos
la raucité, l'enrouement qui affecte les bronches, autre
trachée'qui émet le même bruit — branchiae — bronches
pharynx, les bronches, le foéchet — breast la poitrine,
die Brust id. L'Angl. to break wind veut dire : éructer
des gas; l'Ail, sich brechen vomir, H. hrahen id., G.
gpïfa™ avoir un haut de cœur et aTrapacraw soulever l'es-
tomac, exciter à vomir. Avoir le cœur brisé, Angl. to
die ofa broken heart, mourir le cœur brisé donnent à
entendre que les chagrins ont tellement rempli le cœur
de soupirs que, ne pouvant plus les dévorer, il éclate.
En H. het zalje opbreken : tu auras des déboires (1) a
an sens spiritualiste, les sensations de l'estomac servant
à expliquer les regrets de l'âme.
Absorber, faire passer par le pharagx, s'appelle
gpir/to avaler. S'ébrouer (v. ce mot) rappelle par sa
forme un souffle bronchique.
Le son hure se présente à point pour montrer une
fois de plus que dans la formation du langage nous
procédons instinctivement. Nous entendons un son se
produire sous le coup d'une irritation physiologique.
(1) Déboire est un mot savant, respectueux des oreilles, mis à la
place d'une onomatopée dont le son rappelie l'acte. L'esprit de bien-
séance éloigne du Français tel qu'il est parlé par les gens de la bonne
société bien des mots naturalistes qui ont cours dans les campagnes
et dans les argots.
— 53 —
L'organisme d'où le bruit s'échappe en fait son nom,
comme dans le cas de coucou, cri et oiseau. La substance
a soin de se nommer elle-même. Faire bure, appeler
Bure, bùrquer (si voluerit usus), l'enrouement en G
bragehos, tousser brèsso et bruche* manger, le mot pa-
tois safragner, s'égosiller, nous présentent l'organe,
dénommé par un de ses sons habituels, dans l'exercice
d'actes qui lui sont propres. Nous verrons ci-après la
parole se revêtir du nom de l'organe et nousjfournir les
onomatopées, b*fiu parler, prac1 interpeler — Bpdr/w
crier — praeco le héraut — préconiser,, fredonner —
to hrag parler gros, se vanter — sprechen parler. Ce que
dit le son, c'est-à-dire le sens, est aussi irréductible et
absolu que le son lui-même.
Quand le patient produit le son bure et son effet, les
autres sens sont affectés autant que son oreille et il en
reste une impression dans son âme plus ou moins com-
plète. Après, quand il l'entendra, l'ouïe donnera l'éveil
aux autres sens, si bien que le son aura suffi pour lui
rappeler l'intégrale réalité de l'événement qu'il accom-
pagnait. En général le son, incorporé dans le mot est
suffisant, non seulement pour rappeler les faits dont
nous avons une connaissance personnelle, mais il peut
même faire deviner, par association, ceux qui ne se
sont pas passés en nous. Il est tellement révélateur
qu'il présente au physiologue une précieuse indication
pour connaître les états des organes d'après le son plus
ou moins juste qu'ils font entendre à la percussion.
L'é'ude des divers objets que la richesse infinie de la
nature offre à notre attention fait que nous y recon-
— 54 —
naissons des propriétés, des substances actives qui sont
le partage de plusieurs à la fois. Notre esprit se trouve
ainsi naturellement amené à désigner un objet par le
nom d'un autre. Pour cela nous ne perdons pas de vue
les éléments qui les distinguent et nous nous réservons
la liberté de les faire connaître sous forme de qualifica-
tifs si la clarté de l'exposition l'exige. La connaissance
cle deux objets qui se ressemblent entraîne ou bien la
formation d'un nouveau mot ou une extension du sens
du premier. Donc, si pharygx, brogchos, pharagx et
bragchos en Grec et leurs correspondants barant, bour-
boule etc., offrent des différences, c'est que celles-ci dé-
crivent des nuances de son qu'entraîne la variété de
de l'organe et de ses actes ou bien encore des notations
diverses d'un même son. Mais, comme l'on voit, la com-
paraison et l'analyse permettent toujours de retrouver
le son et le sens primitifs dans l'homonymie des mots.
Ici le thème qui persiste est hr avec le gue (g) bronco-
palatal. Une fontaine donnant un liquide bourbeux (V.
ce mot), un barant qui serait comme un égout offrirait
l'image de ce qui se passe quand on appelle Bure (1).
Nous avons fait observer que bure est irréductible étant
l'expression unique d'un acte spécial. Chaque élément
de ce bruit forme par lui-même, un son produisant un
(1) Vomir est l'onomatopée du radical vm, que nous avons vu dans
bombe. Vomir, homir en Provençal est avoir l'estomac comme sou-
levé par des vents qui éclatent en éructations ; skt vam - £(xéo) sans
le digamma vomir — vomo — vomir-wdmblings nausées de l'estomac,
to wamble avoir l'estomac qui se révolte — die Wamme, die Wampe
la panse, der Wamms le gilet, wammsen rosser, houssiner le
Wamms. L'Ail, a pour vomir le mot kotsen qui exprime l'action
du gutter gosier.
— 00 —
mot qui exprime le sens du bruit : bao crier, épo (1)
parler, rlieo parler, aïo je dis, écho l'écho, la parole ré-
pétée, mais tous les quatre ensemble ne donneraient
jamais le sens de faire bure vomir, à moins d'être unis
par la nature même dans un ensemble exprimant le
haut de cœur par le son propre. Il ne faut donc pas
chercher à l'analyser. Dans ce mot [c'est bu qui forme
la partie essentielle ; le u spasmodique de la gorge en-
traîne le r et celui-ci le g {gué), qui en G. s'associe avec
un n (pharynx). — Nous verrons dans la suite une au-
tre onomatopée pour bure quand nous traiterons du
mot éructer L. ructare. (2)
Une baguette, une canne qu'on brandit, — un bouchon
de paille, un torchon passés vivement sur un autre
corps, — une corde tournée rapidement, — une bran-
che feuillue qu'on agite produisent dans l'air un siffle-
ment qui sonne les lettres fs, fch, etc. Ficher, fiche,
fouter ou foute à la porte sont des onomatopées popu-
laires et calembouresques de ce son naturel. Ils expri-
ment que la personne ainsi éconduite est comme balayée,
nettoyée, avec un bouchon de paille, A, whisk, qui
(1) Epo et boao ont un équivalent dans le mot du centre hupper
crier qui varie avec supper, zupper et jupper comme d'une façon
analogue, l'aspiration grecque permute avec le s latin : hyper et super.
Grâce à une autre permutation l'Angl. possède to hoop hupper et sa
variante to ichoop. Le même échange a lieu entre le grec et le latin,
comme nous venons de voir dans émétique et vomitif 'de eméo et vomo.
— A to whoop se rattachent viouper hurler comme le chien, puis
pleurer et viper crier .
(2) Ajoutons que la bourbe est envisagée dans le langage comme le
produit d'un débagoulement, d'un soulèvement de l'estomac qui éclate
avec le bruit bure, d'où le G. pôppopo; la bourbe, la saleté analogue
à cœnum la boue, obscénité ce qui dégoûte comme la boue, mots qui
se rattachent au son gn (de la gueule) d'où le L. ganeo le glouton,
cœna le repas, la cène, canal etc.
— 56 —
ferait entendre les sons/s. Ficher son camp est lever le
camp, nettoyer la place comme avec un balai produi-
sant un sifflement dans l'air. Fiche-moi la paix veut
dire : va-t-en vite pourque je sois tranquille; ficher ou
foute un coup donner un soufflet. Ce dernier mot est
une variante du premier (le son/^ pourjfcA) H. een
veeg geven, donner une frottaison de [vegen frotter,
biffer. Les mots bichonner parer, caresser, le bichon
le petit chien à poil soyeux et ondulé bien brossé, bien
peigné, le bouchon (1) branche de verdure, d'arbre ou
botte de foin qu'on met à la porte du cabaret pour enga-
ger le charretier à entrer promettant qu'il [trouvera de
quoi émoucher son ^cheval ou le nourrir, bouchonner
frotter le cheval avec un bouchon de paille, Angl. to
whisky Ail. wischen, sont des onomatopées qui ont le
son du souffle pour radical primaire. Seulement, ainsi
qu'il arrive presque toujours, au lieu de former des
mots neufs," le néologue se paie le plaisir du calembour
et se contente de mots approchant seulement du son
naturel et vrai, comme ficher variante de fixer, qui
manque de cachet original, et comme bouchonner qui
joue sur bouchon le corps qui obture l'orifice. L'origi-
nateur de ces mots aurait pu enrichir la langue de mots
distincts, clairs et sonores, tandis qu'ainsi on n'a que
des expressions équivoques et bâtardes. Les autres lan-
gues se sont contentées de rendre le son à l'état nature,
p. e. l'anglais io whisk away s'échapper, filer comme
le vent, Ail, entwischen. Le plaisant qui a formé ces
(1) De là le bouchon le cabaret. Le Skt. vêga exprime la rapidité
de la flèche.
— 57 —
onomatopées que le calembour fait dévier du son juste,
qui a recherché ces assonnances qui prêtent à rire, ne
s'est pas préocuppé du fait quefch existait dans la langue
maternelle dans fugitif, celui qui fiche le camp, dans
fuire, yeuyo), fugefe ficher le camp. Cela lui aurait
prouvé que Grecs et Latins, deux peuples qui ont parlé
des langues modèles, suivaient la nature dans la forma-
tion du langage et ne sacrifiaient pas la vérité à la
plaisanterie.
Un morceau de toile qu'on 'passe vivement sur une
surface s'appelle biffe, d'où biffer effacer, Angl. to
whipe effacer, whisp bouchon de paille, Ail. wischen
essuyer, effacer, H. vcgen (1). Le biffin est le chifffon-
nier, le marchand de buffet on celui qui vend des con-
tremarques, le béni Mouffetard le chiffonnier du quar-
tier Mouffetard (où il sent mauvais, H. muf qui sent le
moisi, It. mqfete lieu où il y a des exhalaisons) parce
qu'il porte un bé abréviation de bière et de bard (2)
civière. Ce bé est devenu par jeu de mots béni. Le bij-
Jïn est aussi le nom du soldat d'infanterie, son havre-
sac étant sa hotte à lui. Le son qui a formé le mot biffe
nous le retrouvons dans ozfir, la crinière ondulée qui
fouette le cou du cheval et , avec la sifflante dentale,
dans su agiter — vifa avec perte du digamma la queue
qui fouette, crs(o) agiter sans le digamma — sabanum
l'essuie-mains, la serviette — faubert l'espèce de balai
pour nettoyer le navire — to sweep passer comme le
(1) L'Angl. fair ancienne forme fayer, Suéd. vacher veulent dire beau.
Ce sens dérive de celui de essuyé, propre. H. vagevuur le purgatoire
le feu qui purifie.
(2) En skt b'ara qui porte, à la façon de l'arbre fruitier
58
vent, to swop foncer sur la proie avec la rapidité du
vent, to swab} swob biiïer, nettoyer, swift rapide
comme le vent, schweben voguer sur le vent avec un
bruit d'aile, essorer, derSchweif la queue, der Schwanz
id. Ces mots nous font toujours revenir au radical ff
dont l'Angl. offre des onom. pures dans whiff, piiff une
bouffée de vent. — A côté de biffe, il convient de placer
le mot vadrouille H. zwabber (Angl. to swob); lefau-
bert (même mot), le balai de loques avec lequel on lave
le navire, l'écouvillon qui nettoie le four ou l'intérieur
du canon est toujours l'objet qui est censé passer rapi-
dement sur la surface d'un objet pour le nettoyer. Le
sifflement produit rappelle le skt vâtas, vàjus le vent,
Angl. to wheedle agiter la queue, flatter, tromper
comme le chien qui caresse quelquefois dans un but
égoïste, to waddle marcher d'une façon déhanchée qui
imite le mouvement de la queue, Ail. der Wadel, der
Wedel la queue, watsheln comme to waddle. La ter-
minaison ouille est comme le diminutif Normand et It.
erello. Vadrouiller est se conduire comme le vadrouil-
lard, celui qui passe son temps sur le trottoir et dans les
mauvais lieux. Ce mot semblerait surtout devoir s'ap-
pliquer aux vadrouilleuses, c'est-à-dire aux femmes dont
le mouvement de la robe imite le va et vient du balai
sur le trottoir : l'un et l'autre sont sensés balayer la
rue, comme le flâneur à peu près qui fait comme s'il
avait à la polir. Le fouet s'appelle en argot un bouis :
c'est le son naturel de la corde, de la badine qui fait
siffler le vent quand on la secoue dans l'air. Fouetter
le camp est une variante sur ficher et f outer le camp .
- 59 —
Unefouataison est une badine. L'Angl. whip le fouet,
l'Ail, wippen donner l'estrapade, répondent à y6$rt la
crinière, au L. vibex, la marque sur la peau d'un
coup de baguette, d'un fouet. — Les animaux qui se
distinguent par le fouettement de leur queue ont le
radical du vent dans leur nom, p. e. : fyOuç sans di-
gamma -piscis — poisson, piscicul 7 1/ re,ichthyophage,
stockfish morue sèche comme un stick — Jish-der Fisch ;
lefouetteur, nom original pour son homonyme oacr-avoç-
pkasianus — faisan — pheasant — der Fasari, Aussi
longtemps qu'il existe, le faisan s'est fait remarquer
par la longueur de sa queue qu'il fouette quand il prend
son vol Ce terme de l'argot est correct à peu près
comme son et très juste comme image. Il y a toujours
des traces de la prévention pour les mots existants
surtout pour ceux qui prêtent aux allusions surprenantes
peut-être parce qu'on a peur de paraître trop simple en
imitant franchement le son naturel d'un acte. Le paon,
L. pavo, Angl. peacock, Ail. der Pfaù porte le nom
du vent pf qu'il fait avec sa queue. Les /ouates, une
troupe de mimes burlesques qui a donné des représen-
tations à Paris avaient les bras et les jambes tellement
flexibles, le corps tellement souple, qu'ils donnaient à
leurs mouvements quelque chose de l'ondulation du
fouet secoué. Le L. canda queue et son acte quatio,
concutio sont les mêmes que to wheedle, der Wadel que
nous avons vus plus haut. Le u de quatio équivaut
graphiquemeut au w et l'aspiration c ou k remplace le
h ou sch (comme dans TAU. Schweif queue le même
mot que l'Angl. whip fouet). L'ancien Haut Ail. et
— 60 —
l'Anglo- Saxon écrivaient hw. Accouer les chevaux
veut dire : les lier ensemble par la queue; le mot nor-
mand une escouette un plumeau, est formé de queue
comme accouer; secouer* pour escouer dénote primiti-
vement l'agitation imprimée à la queue. — Un fouet-
teur encore est le hoche-queue, Angl. wagtail, Ail. die
Bachstelze. Dans le midi, on l'appelle bataqua, l'oiseau
qui, comme le faisan, bat de sa queue ou la fouette. A
Paris, ce mot désigne la prostituée, celle qui balaie le
trottoir avec la queue de sa robe, analogue à l'Angl.
draggletail (1) celle qui balaie le trottoir de sa traîne.
Le mot funda la fronde est une onom. qui tout en s'ap-
prochant defundus fond n'en imite pas moins le siffle-
ment du projectile lancé.
Le feu est d'essence gazeuze. Il fait sur nous l'effet
d'un souffle chaud. Telle est du moins l'opinion de ceux
qui l'ont nommé : les mots en font foi. Le haie du soleil
est une haleine chaude; prendre l'air du feu est une
expression naïve qui tombe juste. Le son du souffle se
retrouve dans b'às briller et brûler, b lâ éclat et étoile —
<pào) luire, yéyyoç la splendeur — focus — feu, fanal,
foyer. fougueux — beam le rayon (Skt bâma lumière) —
der Funke l'étincelle et les noms de couleurs h.fuscus
rouge sombre, fucus le pourpre, Angl. fox le renard
au pelage feu, Ail. derFuchs id. ; de même dans frakta
cuit — owya) cuire, brûler — popina la cuisine, la gar-
gotte — fougon la cuisine du navire, pepsine, dispep-
tique, la fouace le pain cuit sous la cendre — bacon
le lard à frire, to bake cuire — backenid. IlaiwvPéanest
(1) Tail veut dire primitivement étoupe et corde, Suéd. tagel crin.
— 61 -
le dieu du soleil et également le dieu de la médecine.
Le soleil est si bien un médecin, un Péan, que le peuple
dit qu'il chasse celui-ci. Ce fut Apollon qui tua le Typhon
en assainissant les contrées marécageuses. Phaebus est
un autre nom du dieu du soleil, congénère de Péan.
Péan hymne et du phêbus de l'enflure dans le style se
rattacheut à ces deux noms. Phêbus rappelle la bouffée
d'air chaud, It. vampa l'ardeur, la flamme, comme
Jbcus rappelle fog lebrbuillardet/)Mr . G le feu labruine.
La pivoine mziuvfa la fleur aux couleurs radieuses doit
son nom à Péan, et c'est pour cela peut-être qu'elle doit,
par surcroît, d'avoir été considérée comme plante médi-
cinale. B'r frire, b€raç briller, brush brûler. — rcup le feu
febris, br avec réduplication/c le feu dans le sang —
braise, fébrile, frire, j'rieasser (1) — to burn brûler —
das Feuer le feu, brennen brûler, rappelleut le radical
qui a formé l'onom. brise, d'où rcuppoç rouge, feu —
burrhus la bourrique au pelage brun ou cendré — brun,
briller, briller, la brune le soir — brown brun, bear
ours brun — braun et der Bar id., comme le radical
fa a donné ow.iz — badins ou bajus avec d ou j pour
prévenir l'hiatus — bai entre le roux et le brun — bat/,
— sans équivalent en Ail. — Le thème fa a donné
au skt pa vent, va sonffler,- H. waayen, Ail. wehen.
B\l (pa(v« avoir l'apparence de, qui s'appuie sur ce
radical a donné <po(vt£ la couleur de feu, de grenade —
phœniçeus,punicus Carthaginois, rouge —fané blanchi,
foin — fine beau, ayant l'éclat du îeu,fein id. Le Skt a
(1) La brème Ail. der Brachs le poisson à frire, la friture et les
noms de la pâte cuite : ôricheton, brigolet, Jjrignolet qui ont poussé
sur brioche, la brique la pierre cuite se rapportent à frire.
— 62 -
b'ûs embellir. $$fôjpeç veut dire gai, ensoleillé en parlant
de l'esprit. V. pp. 53 et 54 du traité. L'oiseau Phénix,
né en Arabie, avait le plumage si rouge qu'il parais-
sait en feu, d'où la fable que la flamme le consumait
sans qu'il mourût, même qu'il sortait renouvelé de sa
cendre (de sa mue). Ce mythe, comme tant d'autres,
est bâti sur une métaphore.
L-à flamme nous ramène au souffle^/? : &kt p'ius brû-
ler, b'arg* briller — <pXsf<* brûler — fulgur le feu du
ciel — fulgeo briller, flaveo être clair, jaune — foudre,
flamme _, flamber ^flamberge^ fulgurant, flagrant — to
tlicker étinceler, blaze éclat — to blinh luire, — blin-
ken reluire, der Blitz l'éclair, H. bliksem l'éclair,
blaken brûler pour, blakeren incendier, blaak fumée.
— Le f lingot est le fusil, l'arme à feu ; l'Angl. flintstone
la pierre à fusil (1), le silex; l'Ail, die Flinte le flingot.
Le fusil, l'acier à donner le fil au couteau est assimilé
au silex, la pierre à fusil, parce qu'il en sort des étin-
celles par la friction. Nous avons le même son dans
œicX^v la rate, la rutilante — splendeo resplendir —
splénétique^ splendeur, resplendir , blinder aveugler,
par analogie avec éblouir frapper les yeux d'un éclat
trop vif, donner un aveuglement passager — blind
aveugle — blind id., blinzeln fermer les yeux à moitié,
blenden aveugler. Avec le r au lieu de l nous avons
bhrajj, H. braayen - çp^w frire — frigere fricasser —
Le fusil dérive de foeus feu. Celui-ci est une prosopopée duL. faux
le gosier qui souffle le chaud. Plus nous nous essoufflons plus la cha-
leur du corps est intenee, plus nous soufflons dans la braise plus elle
devient ardente. L'air, le souffle et le feu sont des essences insépara-
bles dans l'esprit des gens.
— 63 —
frire (V. au mot friquet) — to broil griller, to parc h
griller — braten frire. La braise (skt paru feu) est la
cendre et par métaphore la monnaie, l'or, transport de
sens analogue à celui qui a donné à carme (cremo) le
sens de monnaie. — L'Angl. hrass est le cuivre rouge
le bronze. Le feu, grâce à la lumière qu'il répand sur
les objets, fait ressorti rieur couleur naturelle. Le prisme
décompose la lumière blanche et nous la rend sous la
forme d'un écheveau nuancé imitant les couleurs de
l'arc-en-ciel. Dans l'esprit de ceux qui ont formé le lan-
gage, c'est le feu qui donne aux objets leur lumière et
leur coloration. Quand il éclaire intensément un objet,
celui-ci paraît blanc : pâli ta chenu — oi\zz — bel /us —
bel, beau — blinking étincelant — blinkend id., H.
Jlonkeren id. et blyken au moral être clair, évident.
Quand il fait rayonner un objet, celui-ci devient res-
plendissant, éblouissant, aveuglant : (âXàvQç qui voit
(mal). V. au mot resplendir; ses tons mats le rendent
pâle : L, pallidus — pâle, en argot blescht — bleak
gris, to bleach blanchir — bleich pâle; sa nuance jaune
donne la teinte 'L.flavus jaune — blond — blond —
blond; plus vif il communique la teinte L. fulvus et
furvus roux — fauve rouge clair — fallow id. — fahl
id. Le L. férus fier, farouche et la bête sauvage veut
dire en principe la couleur feu de l'animal. Quand le feu
noircit l'objet, il devient gXooupoç noir et par analogie
terrible — pull us noir — blaichard l'encre noire —
black noir. L'Ail, flackern brûler, flamber n'a pas
donné d'adjectif signifiant noir, brûlé. Une nuance
moins profonde du noir est le bleu, Angl. blue, AIL
— 64 — '
blau, Le bleu mat est blafard, plombé d'où le L
plumbum, plomb, AIL das Blei, le métal blanc sombre.
Les expressions : c'est bleu, elle est bleue veulent dire :
la chose est éblouissante, elle donne la berlue, elle a
pour effet que l'esprit n'y voit plus clair, et, par ana-
logie, elle est surprenante, incroyable; en être bleu, en
bâiller tout bleu signifient être tout effaré. L'Angl. to
look blank (blanc) veut dire avoir l'air de ne pas com-
prendre grand' chose. Une colère bleue est une colère
noire. C'est passé au bleu veut dire : c'est passé dans
la nuit, on n'en découvre plus trace. — En Angl. Fve
got the blues veut dire : j'ai des idées noires, appelées
sans élimination desubtantif : Mue demis. Ces expres-
sions démontrent combien il a existé peu de fixité dans
la dénomination des nuances de la lumière.
Quand l'air est trop comprimé, il cherche, tant que
son élasticité subsiste, à reprendre l'espace perdu, et
s'il arrive à se dégager de l'étreinte, il éclate avec un
bruit de paf, pouf, poue, pan, analogue à celui qui
accompagne la décharge d'un fusil. C'est ce bruit,
approchant de l'aboiement du chien (appelé pour cette
raison bafe, Argot Angl. bufe, H. baffen aboyer) qui a
donné l'onomatopée mixte debat/afln, petouse, le pis-
tolet. En Argot Anglais le pistolet s'appelle barking
iron le fer qui aboie. Aboyer se disait en St b las c aboyer.
H. bassen et bukk mot auquel ressemble fort le Grec
<77:àÇ le chien. Par analogie un bayaf est un aboyeur,
un butor. — Unepaffe, une baffre, une boffette, Angl.
buffet est Un coup sur l'oreille, assimilé à l'effet d'une
explosion d'arme à feu; un paffe est le soulier qui
— 65 —
claque sur le sol, à peu près comme le sabot du piaj-
feur, le cheval.
Le bruit produit par un corps dans sa chute contre
terre se traduit par paf et pouff. Faire unpuffou un
pouff veut dire faire sauter les sous des déposants,
causer un krach, en G. 6692; le bruit. Le H.poffen veut
dire prendre à crédit : il n'y a que le crédit qui soit
sujet à essuyer des pouffes. La rebuffade est un coup
qui fait reculer, au moral, un refus. Les correspondants
de poue sont r.-j--y.\ — vox poppusmatis — poue,
pouff — puff coup, to bump frapper, to boom le bruit
du canon — der Puffle coup, pumpsl le bruit d'un
coup et d'une chute. Le Skt a ban résonner, le H. bim
bambom le son du bourdon, comme dans Frère Jacques
et boffen toucher (terme du jeu de mail), par extension
réussir. Le banban est l'affligé qui boîte, qui imite en
marchant le battail de la cloche, en Skt panib, par/
marcher. Le mot Normand alipan L. alapa a pris un
peu de la physionomie du synonyme pan. Il répond au
H. Map tape. Les formes nasales pan etpang d'où le
Skt ba-yga le coup, la beigne ou beugne, Angl. to bang,
to bounce faire claquer, bane accident,, malheur, Go-
thique banja blessure ont dû se plier, comme presque
tous les sons primitifs que le langage populaire dé-
couvre, aux exigences du calembour. Une beigne, une
beugne sont des assonances de poing, bien qu'ils ne
soient pas des coups assénés avec la main fermée. S'es-
bigner veut dire se sauver de l'endroit où l'on peut
recueillir des beugnes. Il y a dans ce mot une atténua-
tion de la voyelle radicale toute classique, comme il
— 66 —
arrive dans illido de laedo.\ L'argot a donc des chan-
gements de son. Au lieu d'une beicjne on donne, avec
jeu de mots, un pain (panis). Passer chez Pain être
battu est une personnification du son pan ! par calem-
bour pain ! L'habitude de ces personnifications existe
depuis des siècles. Elle a été contractée à l'école. Dans
les moralités d'avant la Renaissance on voyait figurer
des personnages représentant la Vertu, la Sagesse, le
Vice, la Trahison, la Fausse Honte. Ceux-ci représen-
taient, du moins, des dispositions de l'âme humaine
avec lesquelles nous pouvons nous identifier tant soit
peu, bien que la chair et les os leur manquent. Mais
quelquefois on faisait jouer un rôle à Tartelette, Ognon,
Vinaigre qui, eux aussi, se mettaient à raconter leurs
propriétés physiques et à débiter ce que nous en
savons. C'était la chimie et la physiologie person-
nifiées. La faculté d'idéaliser, d'abstraire, de quintes-
cencier était poussée ainsi à des extrémités ridicules
qui devaient la mettre en discrédit. Pain est de la caté-
gorie de Tartelette. Heureusement pour ce personnage,
l'équivoque lui donne comme un peu d'esprit. L'habi-
tude de personnifier des qualités, continue dans la
littérature moderne, malgré la faveur accordée au
réalisme. Causette, Javert (le gagneur), Gavroche en
sont de brillants exemples.
Un corps renflé, comme la boule, le balai, le bour-
geon, la bulle, la blague, quand il vient, soit à crever
soit à heurter^un antre corps, les bruits variés qui si-
gnalent ces événements ne s'expriment pas. Ainsi le
Skt sp'al palpiter désigne le bondissement d'un corps
— G7 —
rond, d'une boule, et par extension, du cœur, du pouls.
Le bruit peut-être très varié ; c'est à nous à le deviner,
le mot ne nous donnant d'autre indication si c© n'est
qu'il se passe quelque chose comme quand la boule
bondit en heurtant un autre corps — y\iiù frapper
semble se faire parle choc d'une boule, xaXXw ébranler
semble imprimer à l'objet ébranlé un mouvement on-
dulatoire comme de flots, BXottu atteindre paraîtrait
la suite du choc d'un corps rond — palpito palpiter,
pello frapper, palpebra (BXéicu regarder, la paupière
qui bat) — la balafre la marque d'un coup, une pile un
coup — a peal ofthunder un cowp de tonnerre — plat-
zen éclater, faire explosion — H. ploffen donner un
coup contre terre, ontploffen faire explosion, B\ià le
bruit d'un corps qui s'aplatit en tombant. L'Anglais to
blow veut dire souffler et frapper. Une Jloupée est une
rossade \floper et velopei'(AngL to icallop) mots Nor-
mands veulent dire frappe/- . Ce mot est lui-même une
variante defapper battre, congénère wvecfloper.
Une blague, un ballon etc. s'aplatissent en éclatant.
Deux corps qui se choquent sont sensés faire la même
chose. Ce n'est pas le bruit particulier de l'aplatisse-
ment que nous entendons : le langage dit seulement
qu'il se passe quelque chose comme lorsqu'un corps
arrondi crève et s'affaisse ou s'aplatit en heurtant un
autre. Il n'y a pas d'autre bruit dans palwala la flaque
d'eau — -Aay.6s-.; le gâteau plat, ttasc; le plateau — pla-
centa — plaque,, place,, flaque — place place, fleck ou
blot pâté — flat plat (1) — Flecklenà&éflach plat, plan,
(1] Voir à ce sujet le développement du sens de paume, plan.
— 68 —
den Fladen ou der Plate la tarte *— H. vlek bourg.
Le flot dégonflé reprend la forme de la surface plane
dont nous retrouvons le sens dans palava la flaque
d'eau, palus — paludéen, flaque — plash flaque d'eau,
to splash patouiller, 7300/ la mare, peel le marais —
der Pfiihl la mare, plàtschern patouiller, pladdern et
planschen plonger — H.. peel tourbière,' polder marais
drainé, floddereti patouiller. (Sktjo ul submerger, G.
rç^X©$ la bourbe). Ici encore le langage ne nous montre
l'étang, le marais que comme un flot soulevé. V. au
mot flot. — L'idée de l'aplatissement se retrouve dans
une foule d'expressions. La polenta est une purée de
marrons qui s'étend et prend la forme du plat. Son
nom est tcoXtoç — puis — polenta — pultacé — poul-
tice un cataplasme — der Platzla, galette. Le plâtre —
plaister plâtre et emplâtre — das Pflaster le pavé de
la rue et l'emplâtre révèlent dans leur nom le sens ori-
ginal d'une matière fluitante dont la nature est de s'af-
faisser et de s'étendre tant qu'elle conserve de l'humi-
dité. Mettre en plan veut dire porter chez ma tante,
mettre en gage sur les planques du mont de piété,
appelé la planque; laisser en plan, rester en plan,
laisser, rester en gage, comme au mont de piété,
jusqu'au paiement des consommation; plaquer quel-
qu'un le laisser en plan, le planter là. Flanquer par
terre joue sur flanc pour dire avec plus d'esprit plaquer
ou flanquer contre terre. Flanquer une gifle veut dire
plaquer la main sur la figure de quelqu'un. On dit de
même donner une giroflée (1) à cinq feuilles. — Le lit
(1) Le mot parait devoir être décomposé en fiée, mot Normand
— 69 —
s'appelle leftac our flacul parce qu'on s'y 'étend hori-
zontalement ou à plat. La planche, la latte,, le sabre
joue sur planche synonyme de bardeau (V. ce mot) et
de brette d'où bretteur, Angl. plank, All.dasplanktàerk
ouvrage en planques ou palanques. Le placard est une
armoire. La signification primitive est place pareille
au sens du Latin loculi armoire, de lôculus petite
place. La placarde est une place, une ville, H. vlek
bourg. Le calembour H. de plant poetsen nettoyer la
plaque veut dire s'esquiver {poetsen rappelle le L. pu-
tus nettoyé V. au mot (imputer). Le schuflick est le
savetier qui plaque des morceaux sur les souliers
troués de YAÏÏ.flicken rapiécer, coudre des morceaux.
Le choc produit par un corps arrondi aplatissant ou
entraînant un autre se retrouve dans : beal frapper, se
fendre, — -Xv/o id. — Jligo id., flagello flageller —
affliger porter un coup, attrister profondément, blesser,
la plaie, la flèche (Skt pâla. G. piXoç), le fléau — to
fling frapper, lancer, flail le fléau, to fly voler, battre
des ailes, to flee fuir à tire d'aile — der Flegel le fléau,
fliegen battre des ailes, H. de blouwer le marteau, AIL
der Blâuel le maillet, Norm. fiais ou fiée fléau. Une
balle de coton un coup est une paraphrase de bour^
rade, le coton étant assimilé à la bourre. V. aux mots
bourre et emballage. Une volée de coups est une
image qui fait ressortir que l'esprit a comparé le bras
qui frappe avec ie battement de l'aile de l'oiseau qui
vole. La dalle à paver s'appelle en Angl. flagstone
pour fléiu, et gyrus ie tour de bras, suggéré par girouette. La giro-
flée est le caryophyllon des Grecs.
J0 —
plaque de pierre; le H. plagge veut dire gazon. A la
suite de ces déductions nous voyons que le nom du
coup est formé, en dernière analyse, de la môme
matière que le souffle de nos bronches. En effet c'est
un souffle vital qui arrondit la boule et celle-ci, par
son éclatement ou son choc contre un autre corps pro-
duit un son très variable que frapper, floupée, coup etc.
suggèrent sans le spécifier. La variété des sons du coup
dépend de la nature de l'objet frappé et de l'instrument
de la percussion. On prévoit dès lors que la variété des
sons ira se multipliant indéfinimenf et que la générali-
sation s'impose. C'est pour cela que le sens pratique de
l'homme ramène toutes sortes de coups à l'éclatement
d'une boule ou à son choc contre un autre corps et leur
son à celui du souffle vital.
Le mot bris est une prosopopée. Au sens poétique
c'est comme si un pharynx, en Suéd. bringa poitrine,
ouvert dans l'objet lésé, jetait ce cri. Le son de briser
naît de l'éclatement d'une enveloppe que l'esprit se
figure arrondie par insufflation et dont le nom est
représenté par le h. fur fur balle, brou l'enveloppe
épineuse, bourre, bourse V. ces mots, et leurs dérivés
baraque, barrique. Le bris se manifeste dans vraçh
déchirer, vran blesser, urîs, brus1 briser, plus parta-
ger — S7:apàc7a(i) déchirer, ?apao; fragment — frustum
le morceau, frango briser, fragor le fracas — briser,
bris, sprique, le vrac, le bric-à-brac — to break bri-
ser, brittle fragile, wreck naufrage — brechen briser,
der Brosam la miette en G. fk^zz. Brimer, la bri-
made sont des formes éloignées de briser. On brime ou
— 71 —
brise un nouveau compagnon, comme on fait avec un
cheval pour le rendre docile ou avec une chaussure
pour l'assouplir. En Angl. to break a horse veut-dire
le dresser. C'est ce qu'exprime le mot wpdfoç doux,
apprivoisé, dans le fait, brisé. La bricole est la sou-
plesse acquise par la pratique; connaître la bricole
veut dire avoir de la ruse, un bricoleur un rusé, un
farceur (1). Le biribi est un ustensile de voleur servant
à faire fric frac, c'est à dire à fracturer les portes. Il
joue sur barre, Angl. croicbar biribi. On l'appelle
aussi sucre d'orge, l'un et l'autre ayant la forme d une
barre. — Tirer une bordée veut dire s'écarter du droit
chemin, faire la noce, emportés que nous sommes par
un vent de dissipation. Ce mot dérive de bord. Bord et
borne sont la brisure, la solution de la continuité, le
départage. Partager s'appelle plus — çapu> — partior
— partager, partir — to partake prendre sa part,
brink et brim bord, boume borne — verbràmen garnir
d'un bord.
La berme, le bord du chemin, répond à brim. Le
bran ou la balle qui éclate, qui laisse le noyau, quel
qu'il soit, à nu, a donné lieu aux expressions, watfpoç
dénué, dépouillé — pauper — paupérisme, pauvre —
to spare épargner 3 bare nu — sparen épargner, baar
nu, pur. Parer enlever le vieux bois, le bois mort,
Angl. to pare et to bare veulent dire dépouiller du
superflu, ôter l'écorce, dénuder. Purus et pur veulent
dire nettoyé, que l'enveloppe grossière est enlevée, que
(1) Dans l'expression : Comment çà va-t-il? çâ bricole > ce mot rap-
pelle broncher, aller canin cahan, mots qui rappellent cahot. V. au
mot broncher.
— 72 -
le noyau se montre à l'état émondé. Privé et propre
dans le sens de particulier et de net veulent dire ce qui
est séparé de l'ensemble; ce qui ne fait plus corps avec,
ce qui est devenu particulier. La propriété est donc un
bien séparé de la richesse commune moyennant un
prix. C'est une part acquise. — Borgne ou caliborgne(l)
veut dire : borné de la vue, n'ayant qu'nn œil, qu'un
calot dans la tête. Le calot est le caillou arrondi, la
grosse bille. Sur pauper jouent les expressions : être
dans la purée et être purotin. Le sens essentiel de
purée est une masse écrasée, affaissée, aplatie : c'est un
brouet épais dont la masse va s'étendant (Skt part'ava
étendue), c'est le brai qui fait comme h pâte; c'est
TAngl. porridge le potage épais; c'est l'Ail, der Brei,
même sens. Celui qui nous dépouille, qui nous écorche,
le spoliateur se découvre dans le mot <?wp — fur —
fourbe, furtif celui qui agit comme le fur. — Bernique,
nibergue, niberte sont des mots 'qui sortent de l'Alle-
mand. C'est haar nichts purement rien (nihil nichts).
Au sujet de ne V. Traité, p. 77. Ce nique se trouve
aussi dans niquedouille AU. der nichts thut un inno-
cent, un simple, un suive. — Enlever la peau, ôter la
balle, peler se retrouve dans dépiauter peler, blute/'
ôter la balle, boulanger le bluteur et dans l'Angl. to
peel peler, to flay écorcher, bald le chauve qui n'a
plus de gazon sur le préau, plus de fil sur la bobine, le
genou, le caillou, celui qui n'a plus de bourre sur le
paillasson, pour l'expliquer en Argot, abbalgen ôter la
peau, das Fell la peau, derBalg id; dans xX^v excepté,
(1) Calorgne veut dire qui lorgne du calot.
- 73 -
hormis, piller (1), Angl. to plunder, Ail. plûndern
écorcher, dépouiller, dans le L. praeda butin, ytùpv.x
le larcin, la déprédation. Le pli est une brisure molle
n'entraînant pas la solution de la continuité. V. Traité
p. 38. Frotter fricare est faire des brisures, des plis;
le froufrou est le frottement d'une étoffe sur elle-
même; le fripier est celui qui fait le commerce de vête-
ments usagés; la frange en Angl. fringe dénote l'effet
de fricare : c'est une bande d'étoffe froncée, plissée,
godronnée et par analogie effilochée; ft ruser est faire
des plissés. L'ancien Français a pour frange les mots
frèpe et ferpe. Ces mots se retrouvent dans la fri-
pouille, la f râpe qui dénotent l'état de délabrement
des habits et la classe de gens qui ne pensent pas à les
entretenir. A ces mots répond le H. frommelen chiffon-
ner. Le fripon appartient à la frappe. La bribe est un
morceau, H. brok, Skt spriç broyer : ce mot s'appuie
sur briffer manger, consommer la barbaque. Lebricard
est là partie d'escalier d'un palier à l'autre; c'est une
brisure. La brèchetelle, Ail. die Bretzel est une pâtis-
serie très-croquante qui s'effrite facilement (2).
Nous avons vu que pan était le bruit d'un éclate-
ment de l'air comprimé dans un canon de fusil et que
(1) Avoir un poil dans la main est un jeu de mots pour dire avoir
une fêlure, une faute, une faille dans la [main. La fêlure est la
suite d'un éclatement d'une enveloppe, ici la peau. Une pièce d'or
rend un son terne quand elle est fêlée : on dit qu'elle a une paille
soit par jeu de mot, soit par un rapprochement défectueux. Une faille
dans une roche est une crevasse, une fente. Faillir, L. fallere veut
dire létat de dépouillement et, par suite, du besoin.
(2) Il faut encore rattacher au pli le mot flancher, mollir devenir
flanchant au lieu de rester ferme : (^rp/poç — flaccidus - flaxe - to
flinch manquer de fermeté — sich hinfletsehen se coucher, s'asseoir
lâchement en sont les équivalents.
— 74 —
par suite de notre imitation imparfaite il a l'air de sor-
tir de notre bouche. Quand une enveloppe, un bouton,
V. ce mot, crèvent sous l'action du souffle qui les dis-
tend, nous avons l'image de l'entrebâillement. Elle se
reproduit par l'acte de bind fendre — gt.ôuù arrache]-,
cncdfôcov l'ennuque — spado ici., spatka épée, findo
je fends — espadon, épée — spit la broche, to spay
châtrer, spade la houe — derSpaten la houe. L'éclate-
ment est l'effet d'une extension qui se traduit par
aTT'.Oàp) empan (V. ce mot, ainsi que paume et pétale).
«jTraOàw dépenser, s^évco) répandre — pando épandre,
pateo être large ouvert — patois le langage du plat
pays, répandre, dépenser > le pas, l 'empan — span
'empan, to spend dépenser — die Spanne l'empan,
spenden dépenser et répandre et par le L. spatium —
espace — l'Esp. patio la cour. — Pendere peser,
mettre dans la balance et pendere de la deuxième con-
jugaison marquent la tension (l'extension) que le poids
exerce sur le corps qui le soutient. — V éclat le mor-
ceau arraché s'appelle put écorce, pat arracher dépouil-
ler, punya pur (1) — a^àOY) l'écorce dont on fait la
corde, la corde, ttyjvs; la toile — penuria le dépouille-
ment, paene à peu près, pannus le morceau d'étoffe —
pan, — panneau, — fanion, gonfalonier, pennon,
gonfanon, pénurie (tAvo^xi être dans le dénûment) —
vane drapeau, pane carreau de vitre — die Fahne le
drapeau — H. spint l'aubier. Avec t nous avons les
mots ripaton ou ripatin des souliers rapiécés (Skt pata
(1) A punya se rattachent uotv^ — poena — punir châtier — pain —
die Pein.
— /o —
morceau d'étoffe), Angl. to patch, Ail. der Fetzen la
pièce, le morceau, 1t. pezzo qui est le Français pièce et
pasclin la place pour patelin comme paqueliner pour
pateliner. Skt. padam place. Un panas, un panail-
leur est le marchand de loques et de verre cassé, de
panas c'est à dire de débris de toute sorte. Etre panne,
être pannesard ou avec jeu de mots parmesard, être
dans la panade, expression qui joue sur panade soupe
au pain, veulent dire être dépenaillé, fripé, être dans
la misère ou dans la panne. Etre panne ccmme la
Hollande veut dire avoir autant de misère que la Hol-
lande... fabrique de toile, c'est à dire beaucoup. L'argot
n'a pas fait de contre-sens, comme on pourrait croire
au premier abord, la Hollande étant généralement con-
sidérée comme un pays riche. Panoter veut dire tendre
des lacets; le panoteur est le braconnier. Se repagno-
ter est se moucher avec un carré de toile. Etre en
panais joue sur panais pastinaca et veut dire n'avoir
que la chemise sur le dos. Par l'assonance de panais
avec fanion, pétition on l'appelle le drapeau : le dra-
peau passe, arborer le drapeau blanc. Le mot pantalon
est peut-être pour pannellone avec t euphonique, le
drap dans lequel on enveloppe le bas du corps des
enfants. L'argot l'appelle pantahar, la toile pannus
qu'on tire de bas en haut, idée qui se trouve reproduite
dans la grimpante, La panoufle est la pantoufle faite
de lisière de drap. Panteler est imiter l'ondoiement du
pennon, du drapeau qui flottent au vent : c'est être
secoué par l'émotion. Se panader est une corruption de
se pavaner, V. au mot paon.
76
Le son des lèvres b répété a formé les onomatopées
qui expriment l'acte de boire. Le bêbê, le bambin en
prenant le sein, la poupe (comme on dit au Centre) ou
le biberon ne fait entendre d'autre son. Les plaisants
que la dive bouteille ou la chope met en veine ont joué
sur l'onomatopée primitive et l'ont remplacée ainsi par
une foule de rimes ou d'assonances. Nous allons passer
la revue des vraies onomatopées formées du son conco-
mitant à l'acte de boire ainsi que de leurs caricatures. —
Boire s'appelle pâ la potion — rJ.u boire — bibo, poto
id., pipire sucer, allaiter — imbiber, (Skt pinv) boire,
boisson, potion, buvoter (1), papette — to bib, topim-
ple biboter, buvoter, beuerage mot plus juste que breu-
vage où le r a changé de place, pap la papette^ le lai-
tage — die Pappe le brouet clair pour les enfants —
H. feppen, fuiven, pimpelen, pooyen boire. — L'eau
claire s'appelle ap — ctuoç le suc — - potus la boisson —
au Centre effe eau, évier, abée — eaves le cheneau —
die Aue le pré irrigué, Hqff "havre. Le radical de boire
bi, le p de potion riment avec pie l'agasse, L. pica. Le
jeu de mot étant plus amusant on dit de la pie pour du
vin et pier pour boire. La pive, le joivois le vin, la
bibine la boisson avec la terminaison diminutive ine
qu'on trouve dans cantine, le bibard, le bibassier le
buveur, mots qui désignent également le vieillard qui
rabâche, rappellent pi de pie et le b de boire. Pomper
veut dire : aspirer comme la pompe; delà être pom-
pette et avec jeu de mots avoir son pompon. V. au mot
(1) La ripopette est un mélange de restes de vins servis de nou-
veau.
— u —
pomme* Le pompon conduit l'esprit dans la série des
ornements du chapeau. Pour varier 1 expression on n'a
qu'à choisir : aussi bien on trouve avoir sa cocarde,
son panache, son plumet, son plumeau et même avoir
sa barbe parce que le plumet, le panache étant faits de
plumes ont des barbes, ce qui pour l'argot justifie assez
l'expression précitée.
La série des panaches étant épuisée l'anonyme far-
ceur s'est mis à dépecer la plume pour trouver une
expression neuve. Malheureusement celle-ci nous con-
duit trop loin de boire et de pompette : on ne la com-
prend plus du tout n'ayant plus l'homonymie pour nous
guider; il faut intercaler dans la série des comparai-
sons le terme pompon, égal à plumet, pour justifier
l'expression avoir sa barbe. Le plaisir cesse quand il
faut se donner tant de peine pour comprendre; il faut
même faire un effort pour ne pas en vouloir à Torigina-
teur d'être si ingénieux et ne point gâter la satisfaction
qu'il en éprouve sans doute : les énigmes du sphinx
étaient plus dangereuses mais moins difficiles. Cepen-
dant, par une indulgence qui est certainement réci-
proque, ces expressions forcées, basées sur des assimi-
lations impossibles, ne manquent pas dans le langage
courant; p. e. passer à tabac, chiquer sans tabac s'ex-
pliquent à la fin, mais auparavant il faut avoir étudié
l'algèbre du calembour pour saisir ce qu'il y a de rai-
son. Ce qui a pu faire penser aux barbes de la plume
c'est l'expression se rafraîchir les barbes pour la
bouche, H. hakkebaarol la barbe sur les joues. Esp.
las barbas le menton, Skt paxman la moustache.
— 78 —
Ainsi badouiller veut dire se rafraîchir les bâcles (lè-
vres) et ensuite boire avec excès. La bamboche d'où
bambocher avec le sens de boire et manger avec excès,
en 1t. bombare, bombettare, rime sur bambin. Boire
un coup, avoir un coup de vin a pu suggérer les calem-
bours êtrepaf être ivre et dupqf&e l'eau de vie, s'em-
paffer s'enivrer. Pqf est le bruit de l'air qui s'échappe
brusquement. Il est pavois veut dire il est paf parce
que le mot rime avec pavois It. pavese le pavillon (1).
Piper la linotte pour siffler, boire fait penser à la pipe,
le tuyau, le chaume dont on se sert pour aspirer les
boissons glacées. Le chaume appelle la buse, l'objet
qui lui ressemble, dont on a fait buser (2) et bouser
boire, bousin le cabaret. Le bousingot le cabaret joue
sur son homonyme, qui dans le Centre veut dire l'avor-
ton^ le dernier de la couvée tout envahi par la bouse du
nid. L'Angl. to bouse, H. buizen boire, tuber sont des
trouvailles équivalentes. Le bousin fondu est lemastro-
quet qui a fait faillite. Fondre implique que le pauvre
diable maigrit de sa perte, que son bedon lui entre
dans le dos, car bouse a rappelé devant l'esprit du mali-
cieux faiseur de mots la poche gonflée (V. ce mot) et
par association le ventre. Le propriétaire du bousin, du
lieu où l'on boit s'appelle le bauce et avec jeu de mots
le Bauceron (la Bauce), réminiscence du mot Flamand
baas, patron, ou comme dit l'argot le singe (simia la
(1) En It. padiglione de pandere, étendre. Le sens est analogue à
tente.
(2) Notons en passant que les seins s'appellent les bessons, Ang.
biestings le premier lait, le colostre, Ail. der Bietz le lait jaillissant
du pis (pectus) avec un son pst (Skt dis lancer). On les appelle égale-
ment bossoirs, allusion au devant au navire en Bosse.
— 79 —
ressemblance humaine). C'est à baas que se substitue
le bousin. En somme le bousin fondu est le bauce du
bousingot à qui la faillite enlève son embonpoint. Ce
n'est pas que l'enfant qui est sans pitié quand il s'amuse.
— Le mot le bauce rappelle le Skt pati maître celui
qui commande, Angl. to bid. Le mot bistrot, le caba-
rétier est formé d'un débris de buse et d'une contrac-
tion de la deuxième partie de mastroquet. Le langage
du peuple à la conservation duquel ne veille aucune
académie et qu'aucune grammaire n'a réglementé reste
dans la main de ses créateurs une matière plastique
qu'ils façonnent à leur gré. Ce mot et tant d'autres en
fournissent la preuve. La bastringue est un cabaret de
tout à fait second ^ordre; c'est aussi la guinguette de
bas étage. La fin de ce mot est formée de trinquer V.
ce mot Traité p. 24. Le bec du pichet (Angl. pi g gin),
la petite cruche en terre a servi pour former les mots
pic lier boire. Les correspondants de pichet sont l 'Angl.
pi t cher cruche, beaker gobelet, AU. der Bêcher \i
coupe, It. bicchiere id. et pignatta pot. Le picotin est
probablement, à l'origine, un vase à bec comme le
pichet : ainsi s'expliqueraient le picolo, le picolet, le
picton pour piqueton, la piquette, le pichenet le vin.
Ce dernier mot joue sur pichenette, la chiquenaude, la
détente d'un doigt qui le fait arriver sur le nez dont
nette et naude sont des déformations, V. au mot nez.
Picher rappelle picchiare It., frapper. V. au mot beu-
gne. — Le bec salé est le buveur toujours altéré. Le
pochard celui qui joue du pichet, du bocal et remplit
la poche de son ventre. C'est une paraphrase de sac à
- 80 -
vin. Se pocheter(ï), se pocharder, veulent dire s enivrer.
Le rigolboche est le bon vivant qui se pocharde gaî-
ment en rigolant dans les rigolbochades, les festins à
boire et à rire. Une boucanade synonyme de rigolbo-
chade est un jeu de mots sur boucaner, fumer, en
parlant de la viande et du poisson. Le hareng saur ou
fumé, en H. bokking rappelle boucaner, fumer, skt
pac. — Le pichet, le picotin sont des mesures d'une
capacité modérée. Il faut qu'on ait bu vaillamment
pour avoir son boisseau (L. pyxis,, Angl. bushel) sans
calembour. Le boisseau se présente à l'esprit parce
qu'il rime avec boisson et qu'il sert de mesure. Le
poivrot le soulographe et se poivrer se soûler sont
synonymes de bec salé. Le poivre et le sel donnent
soif. — Le pot est la copie industrielle d'une enveloppe
végétale qui contient la graine et que l'imagination a
assimilée à une boursoufflure quelconque : skt spot a
tumeur, b'ânda vaisselle — tcùôoc — pithœgia fête des
tonneaux — vas, vase, bidon, pinte, — pod capsule,
pot pot — der Pott le pot, die Hambutte le gratte-cul,
der Bottich le fût. Les mots fût, pipe (fût) ont été
formés ainsi. La bouteille appartient au même ordre
d'onomatopées. V. au mot bateau. De \è,potiner boire,
jouer du pot, avec jeu de mots. Avoir sa pointe joue
sur pinte : il veut dire avoir bu. On se pique le nez
à force d'avoir des pointes. Avoir une pistache avoir
(1) Le mot poche devient par allusion la baguenaude. La bague-
notte est le portefeuille. La bacreuse est la poche creuse, la poche.
Le ventre et la poche s'appellent aussi bauge, Ail. der Bauch le ven-
tre — avec jeu de mot bocal. Le bocal est l'instrument à boire,
poculum en Latin.
— 81 —
bu, joue sur le mot rccorobua — pistacia — pistache, fruit
assimilé au pois. V. ce mot. Pitancher boire s'inspire
de pitance. Avoir son poteau dit qu'on a potiné, pinte.
Le poteau suggère à l'esprit le poteau kilométrique :
c'est là un degré de poteau ou d'ivresse bien sérieux
déjà ; mais il y a un état d'ébriété plusieurs fois super-
latif : c'est quand on a son poteau télégraphique.
Poteau par lui-même est ce qui est posé sur pied, ce
qui se tient droit. H. poten planter. V. au mot pied,
en skt pad être ferme. L'acte de manger exige l'inter-
vention des babines. On les voit s'ouvrir avec la bouche
partageant chaque mouvement de la préhension, de la
mastication, de la déglutition et les entend répéter plus
ou moins distinctement le son qui leur est inhérent et
que nous avons figuré par le h et ses nuances. La forme
la plus simple de l'acte est représentée par pi, psâ
manger (Ail. die Speise le mets). — ty le ver qui mange
le bois, obsono acheter (onéomai en G.) des victuailles,
epulor manger — bahouiner manger, c'est-à-dire faire
marcher les babines avec allusion au babouin (1) le
singe. La pampine est la sœur de charité, la sœur
nourricière. Les bades se retrouvent dans badigoin-
cer (2) manger (guancia en It., en Ail. die Wange la
joue, partie de la bouche). Les dents s'appellent chez
Hésychius ça-ovs; les mangeuses, parce qu'elles font
partie de la bouche et que les joues, en AIL die Backen,
die Wangen suivent leur mouvement. Backe se re-
trouve dans rabâcher dire toujours la même chose. —
(1) Le babau ou bau est le masque effrayant qui dit hou!
(2) bouder en Angl. to pout exprime une grimace des lèvres. Le
poutoun, Méridional, est un baiser.
— 82 —
Le son radical qui a formé bouche, bucca, skt pic'a
menton, congénère du L. faux et de son cri vox la
voix — donne aussi b'ax manger — jîéxxoç le pain —
çàyw manger — pasco paître, pacage, pâture, anthro-
pophage, pignocher. L'Anglais a l'équivalent du mot
bouche dans beak bec et celui de balots lèvres dans bill
bec, celui de manger dans to pick becqueter la graine
en parlant des oiseaux. En Ail. die Backe veut dire la
joue et pichen becqueter. Le mot bec se retrouve dans
becquetance la mangeaille, bègue l'avoine (L.pinguis,
gras, bien nourri). La bauge la nourriture joue sur
bauge ventre, skt b'uj' manger. Les mots bidoche la
pitance et la biture la grosse consommation répondent
à l'Angl. to bait nourrir, to bite mordre. Bicher veut
dire mordre en parlant des poissons; biger embrasser,
donner une bise. Le Skt a comme correspondants de
biture vaf, baf être gras, Angl. fat gras, to batten
engraisser, to abet amorcer, exciter. Au moral par
métaphore better et best meilleur, le meilleur veulent
dire au concret ce qui nourrit davantage. La boëte dont
on a beaucoup parlé à propos de la question de Terre-
Neuve est un mot Normand équivalent à bait amorce;
de là boëter to bait, au moral to abet amorcer, taqui-
ner. Badouiller est manger, boire d'où la badouillerie,
le badouillar^d. — La barbaque, le barbaqui est la
nourriture; la barbacane est par prosopopée la bou-
che, la meurtrière, l'ouverture ménagée dans un mur
pour l'écoulement des eaux. — Le radical qui a produit
pharynx (le premier a est enthétique) a donné b 'fi nour-
rir, vrin manger — g'.gpway.co manger — voro dévorer
83
— hread le pain, tofret ronger — fressen manger, das
Brod le pain. Briffer et sa variante, le calembour
fripper veulent dire manger. Ce sont les Patois de la
France qui fournissent la plupart des mots de l'Argot
de Paris. On le conçoit facilement en pensant qu'à ce
moment, seulement un tiers de la population Parisienne
est née à Lutèce la Belle et que Paris a été de tout
temps très-hospitalière. Ainsi au Centre on dit friper
pour manger, la fripe pour la friandise. Dans telle
chanson provinciale on entend : « les rats l'auriont
« briffé. — Il n'en restiont plus qu'la têto et l'bout de
« ses riboués » (ses souliers rebouisés). — Barboter se
présente en Skt et en G. avec des formes à peine dis-
tinctes : b'arv manger — ?ép6w id., t3agp'.^ la gencive.
Barbouiller veut dire se salir dans un barbotage (où il
y a à manger et encore plus à boire). Le poëte Colletet
avait fait des vers sur le bassin de Versailles. Richelieu
les goûta fort et les paya largement. Cependant, à
l'idée du fondateur de l'Académie le passage « la canne
s'humectant de la bourbe de l'eau » aurait gagné si la
canne avait barboté dans la bourbe (en G. borboros),
comme il fait en réalité. — 11 est vrai que humecter (1)
n'a ni le sens ni le son de barboter, car ce mot, bien
que nous ne voyions plus dans barbe que le poil qui
recouvre le menton, rappelle toujours à l'oreille le son
bucal et par là l'acte du bec. Le barbotin est le nom du
butin qu'on va bouloter, dépenser d'une façon quel-
conque. Barbotter un prisonnier est examiner ce qu'il
(1) Humecter veut dire aspirer des lèvres; c'est une variante du son
b de boire. Humor est le liquide ; humecter signifie mouiller.
— 84
a sur lui à son entrée en prison, de là le barhaudier le
surveillant. Ce transport du sens de fouiller avec le
bec, de barboter au sens de examiner le place à côté
des mots (3£a6éuw — probo — éprouver, prouver,
preuve — to prove — prûfen examiner, dont cependant
il n'est pas la réédition. En effet la mastication et la
déglutition (goûter, V. ce mot) sont une façon de se
rendre compte et d'apprécier qui reviennent à l'idée
quand il faut juger de la valeur de n'importe quoi. En
H. een proef une épreuve veut dire un échantillon par
où l'on juge du reste et proeven goûter. La boustifaille
est ce qu'il faut pour manger, synonyme du H. mond-
behoefte ce qu'il faut pour la bouche. Bouffer, le biffre
la nourriture, bouloter jouent sur bouffi et boule. Dans
biffre l'Argot se rencontre avec le Skt pîv, pinv nour-
rir, engraisser, et avec le G. rctwv gras — pinguis d'où
pingouin. Dans n'importe quel pays la bouche remplie
qui va et vient pendant la mastication, donne aux joues
l'air d'être bouffies et la forme de deux hémisphères
qui dansent. Pimpeloter manger rappelle la pompe,
bien qu'il n'ait pour but que de faire entendre le bb des
lèvres, qui accompagne l'acte de manger aussi bien
que celui de boire. Le Skt valbh manger fait supposer
que la bouche exécute le même mouvement que lors-
qu'elle balbutie.
La parole est la voix des choses qui sont présentes à
notre esprit. Elle rappelle le son des événements de
notre vie propre et de toutes celles qui s'agitent autour,
de nous. Une fois l'événement devenu souvenir sous la
forme d'une image, le son par lequel il a frappé notre
— 85 -
oreille revient à la bouche, toutes les fois que cette image
surgit dans la mémoire, soit parce qu'elle reste devant
les yeux par une préoccupation continue, soit parcequ'à
nouveau des sensations semblables nous la rendent pré-
sente. Aux animaux, aux plantes, aux choses de la na-
ture inerte nous avons donné des noms selon les im-
pressions que notre contact avec eux a produites sur
nos sens et notre esprit. En même temps que le souvenir
de ces impressione revient à la pensée le mot qui les a
incorporées se présente aux levrès. Nous mettons sou-
vent une impression et le mot qui l'exprime à la place
d'une autre, mais toujours pour rappeler la même chose.
Par exemple, le cou du canard et des oiseaux de son
espèce, les chénoidés, est un des détails qui frappent
Je plus dans leur forme. La gueule qui s'ouvre rend chez
nous comme chez les animaux qui ont cet organe à peu
près formé comme le nôtre un son guttural chan d'où
yv l'oie, le Skt. hansa, cygne, L. cygnus, où cy est
-réduplication et gn repprésente le quan-quan, ciconia,
cigogne, canne, canard. Si l'on appelle cet oiseau ca-
nard ou comme en H. gans, oiseau-cou, oiseau quan on
veut rappeler que l'animal, surtout sa sœur l'oie, a le
cou très caractérisé. En lui donnant le nom de barbot-
teur on le rappelle par le nom d'une autre impression.
Y. au mot barbotter. Canard et barbotteur rappellent
donc le même oiseau parce que le quanquan, le quiqui
et le barbottement le distioguent suffisement des autres
créatures. Pourquoi les noms ne sont-ils pas les mêmes,
pourquoi y a-til une différence qui pourrait paraitre in-
compréhensible comme celle deequus etcaballus? — On
86
vient de le voir, c'est parce que le le canard produit une
foule d'impressions selon que l'esprit est frappé de tel
détail de son idiosyncrasie vivante. Le fait qui produit
chacune de ces impression rêvet un son particulier et
chacun de ces sons, devenumot, désigne l'ensemble par
un procédé instinctif qui nous fait indiquer la partie
pour le tout. Qu'on l'appelle palmipède et l'on feranaitre
l'impression qui a produit les sons et les onopatopées
palma et pes. V. ces mots. Avec le nom anatide nous
voyons le canard nageur, celui qui se plait'dans l'eau et
nous avons l'impression qui a produit l'onomatopée
nager. V. ce mot. Le langage nous présente le volatile
par un bout: le tenant ainsi, c'est notre faute si nous ne
le tenons pas tout entier. Le mot pilet nous le présente
comme un oiseau se signalant par son bec. V. ce mot.
Quelque désir que l'on ait de s'amuser ou de se moquer
du travail étymologique, on aurait mauvaise grâce à
chercher à renouveler sur les synonymes: canard, pal-
mipède, anatide, oiseau aquatique, barbotteuse, anse-
ride, pilet, chénoïde l'effort burlesque de transformer
étymologiquement caballus en equus. V. Traité, p.
160, parce que ces deux mots se ressemblent comme
sens. On conçoit que tous ces synonymes fournissent la
la preuve'qu'on a comparé le canard à d'autres animau^,
qu'on lui a reconnu une somme de propriétés qui exis-
tent séparément ailleurs et que plus un même objet a
de noms mieux il est connu. Combien serait triste l'état
de notre langage, si non de nos connaissances, si pour
tout ce qu'il est. pour tout ce qu'il fait, nous étions forcés
par la pénurie de notre vocabulaire à dire : can au lie
— 87 —
de pouvoir le désignerpartant de noms descriptifs. Bar-
boteur n'est donc pas le même mot que canard, bien
qu'ils appellent tous deux devant l'esprit le même oiseau:
par contre la canule, la canne le roseau, le canon, le
canal, le canivet, le cheneau, le chenal, le caniveau
sont à peu près le même mot étant formés du même
radical et ne signifient pas du tout le même objet. Il n'y
a de commun entre eux que l'idée de gorge, de con-
duit semblable au quiqui et à cette partie du canard d'où
sort son quanquan. L'Italien nomme notre gosier un
canal, un tuyau de roseau dans le verbe tracannare
couper la siffle ou le silïïet comme dit l'argot des cri-
minels.
La parole se manifeste d'abord par le mouvement des
lèvres b'an parler — Iicw parler, c\j.ort voix, mot dans le
quel on voit se dessiner l'autre labiale, le m que nous
expliquerons bientôt — epos — épique, babiller, pa-
poter, potiner — io babble babiller — papeln id. Ba-
biller devient l'expression pour lire, faire hh des lèvres
en épelant les mots, de même que légère remuer la
langue pour lire, tout comme si l'on parlait ; delà la
babillante le journal, la lettre, l'AU. papperlapapp les
potins interminables. — Les lèvres s'appellent, comme
nous avons vu, les bades, son composé du mouvement
labial b dont la langue emboîte le pas en faisant entendre
le son d quand elle touche le palais. Delà bader parler
sans dire grandechose, Skt. vad dire, pat parler et lire.
Les lèvres s'appellent aussi les badigoinces ; tout l'at-
tirail de la phonation a pour nom la batterie, mot qui
est comme toujours, un essai de reproduction du son na-
— 88 —
turel échoué dans le calembour et n'ayant de l'onoma-
topée que le premier son. La bouche, par une assonance
câline, s'appelle le papillon. Au Centre elle s'appelle
papette. Les mots qni représentent l'idée de com-
mandement etc. sont représentés par pat demander avec
autorité — ôaatXsùeiv être commandant de troupes, être
roi (tXyj le peloton, la cohorte), ttsOsg) désirer, demander
— peto pétitionner, postulo — postuler, pétitionner* —
to bid commander — bitten-prier, gebieten commander,
ainsi que l'Angl. to bode annoncer, entbieten mander,
Skt. bodhaga informer. C'est à ce radical que se rat-
tache bauce le despote, le maître, en argot Angl. boss
le patron.
Bettauder mendier est l'équivalent de l'Ail, betteln,
Ang. to beg. Le son du Skt. b'âs se confesser se réper-
cute dans ©ao) parler — fateor dire, confiteor confesser,
fatum la dictée du sort — confesser, fatidique, la, fée,
le farfadet, le fade la part du^butin attribuée par le
sort. — Viper, viouper hurler comme le chien, pleurer
sont formés d'un cri ou qui avec la labiale a donné Skt.
hwê invoquer, blâ interjection pour appeler — oui'. —
vae — ô — woe — weh. Das Weh le mal, la douleur.
— Bouffeter s'emploie pour bavarder, ainsi que baver
qu'on paraphrase en disant: dépenser de la salive, tailler
une bavette. Il est naturel que ces expressions prêtent à
des échanges avec celles qui décrivent d'autres opéra-
tions de la bouche, celle-ci présentant dans différents cas
des aspects à peu près semblables et proférant des sons
dont il n'est pas toujours facile de saisir les nuances.
Au Centre on dit bavouiller et en Français bqffouiller
— 89 -
pour avoir la parole embarassée, s'énoncer mal, par ce
qu'on est gêné ou parce qu'on n'est pas maître de son
sujet. Un pavillon est un racontar, toujours avec asso-
nance et calembour sur papillon la bouche. La bouche,
le bec se retrouvent dans bogue le nom, bigorne papo-
tage, bigornion blague, bourde, bigorniau Auvergnat,
charabia, par jeu des mots bigorneau (biscornu) le co-
quillage, un Rebecca quelqu'un qui est mal embouché,
qui réplique, qui bougonne toujours. Autant de mots,
autant d'onomotopées manquées volontairement et
n'ayant du son naturel que le commencement 6. Se re-
béquer veut dire s'aboucher de nouveau. Bonir, le 60-
nisseur, le boniment veulent dire blaguer, le blagueur
et la blague qu'on adresse aux bonnes gens, aux gogos :
ce sont des allitérations à des mots tels que bader, baver,
bouffeter. Ces mots jouent sur bon. Le boniment est la
sauce piquante à laquelle on arrange une viande médio-
cre. Le Skt. a le radical bn dans b*an dire, b lanj parler.
Le bêcheur est le hâbleur : le mot dérive de bec et joue
sur bêche. Bêcher qq. est entamer sa réputation comme
avec une bêche: c'est une rime qui fait entrevoir un sens
complexe ; c'est une expression syllep tique qui réunit
bec et bêche t le pic. U avocat bêcheur est celui qui abîme
la partie adverse, comme si l'on pouvait laver son client
avec la crasse de l'adversaire. L'équivoque de bêcher
avoir un bagou inique a été poussée plus loin. Bêcher
a conduit à, jardiner, si bien qu'on ne manque pas de
dire: jardiner qq. faire du jardinage. A ce jeu on devient
incompréhensible pour la plupart des Français, sans
parler des étrangers. Ces expressions sont des amusettes
90
dans la conversation, mais indignes du langage sensé.
Bajoter joue sur baiser: il veut dire parler. Le patois
se rencontre avec le Skt. 6 ï^ dans bigotter mendier,
Angl. to beg demander. Le bigot estcelui qui prie bau-
cbup, mais comme il y en a qui prient pour qu'on ait
une bonne opinion de leur dévotion, il est devenu sy-
nonyme d'hypocrite. L'AIL beichten, le H. biechten
signifient se confesser, primitivement parler, Skt vac'
Le bagou est le flux de bouche, Skt. vac' parler. — Les
balots les lèvres, Angl. bill le bec, ont donné balauder
mendier, baloter pour bouloter. L'Angl. blubberlips
désigne des lèvres gonflées, des lèvres balottantes.
B léser est balbutier remuer les lèvres d'une façon emba-
rassée et faire entendre en même temps un zézaiement
Le Norm, bauber marque l'embarras delà bouche dans
renonciation des mots. Le mot Angl. bill se retrouve
dans pilet canard de petite espèce. -De même que le mu-
fle et le museau comprennent le nez et la bouche, le bill
auquel répond pilet, le bec-canard, à suggéré le blaire
le nez. L'Angl. to blurt, Y 'Ail. plàrren crier, vociférer
sont comme le blaire, \epil, qui crient. Au Centre pile,
pilon etpiron veulent dire oison, en patois H. pielhen
poule à bec, canard. On les appelle en répétant leur
noms : pielel pielel conme on dit au Centre : biheri !
biberil
Le son radical bal se transforme naturellement en
bar dès que le a, cessant de glisser sur la langue abais-
sée, se fait guttural dans l'intensité de renonciation.
C'est à cette façon d'articuler que nous devons le Skt
Barbara le langage incompréhensible où l'on ne voit
— 91 —
que le mouvement des balots — gapgaps; — barbarus
— barbare — brogue l'argot, de même que les expres-
sions pour le langage articulé barh, rarh, briu parler,
prac' interpeler, b'ranc' nom des dialectes employés
dans les drames - spa^w parler - pracco le héraut - phrase
— brangle, to brcurl criailler, quereler, to brag parler
gros, se vanter, to prate causer — sprechen parler —
H. spreken, Skt spric id., praten babiller. Parler d'un
ton interrogateur ou de prière a produit brahma prière,
prac demander — proco je demande — briguer — Ail.
fragen demander en It. bramare désirer. Bredouiller
est parler un langage confus, mal conçu. C'est un terme
de mépris qui rappelle le bruit des bardouilles etproutl
H. een boer un rot avec assonance à borborygme. Par-
ler bredibreda est bredouiller, avoir l'air de dire
Breda (1) (Ville de Hollande signifiant Eau-large). Le
H. a encore le mot proesen pour éternuer, s'ébrouer
et éclater de rire (2). Brailler, bruire, braire, bramer
sont formés du même son radical. — Le mot se hproum
est une orthographe naïve du mot Ail. Gebrumm le
grondement, le frémissement : b'r-fga bourdon — gp^w
— fremo — frémir, bramer — to purr ronronner —
brummen gronder. L'organe a nom en H. pram le sein,
la poitrine.
La bouche, le bec est capable de serrer, de tenir. Le
bec de l'oiseau qui pique, qui tient répond par sa forme
et ses actes à V épine, à la pointe, à la pioche, au peigne,
(1) En Skt praV étendu et a pour ap eau.
(2) Les équivalents de ce mot sont bourde le gros mensonge qui
fait éclater de rire, Angl. sport la plaisanterie, H. boerten dire des
bourdes, plaisanter.
— 92 —
au poinçon, à V épingle (en Angl. pin). Mettre au clou
se dit également bien : mettre au pégole, H. spijker le
clou, Angl. peg la pointe, spike la barbe de l'épi, Ail.
der Speicher l'armoire, la penderie, L. pungere poin-
dre. — La bouche servant d'instrument pour saisir,
pour serrer a incorporé son activité dans pax prendre,
paç, spaç lier — n%<*> prendre, figer — Jîgo fixer —
ficher, faisceau, Jîger ; fixer, pincer — fang (1) la
griffe, to pack serrer, tofasten lier — fassen etpacken
s&isir, fang en attraper, fest fixer. Le poing ^j; — pug-
nus — poing — finger le doigt qui serre, V. plus haut,
fist le poing — der Finger le doigt, die Faust le poing
— H, vinger doigt, pink petit doigt, Skt spaç toucher
du doigt — le poing est la main qui serre, acte analogue
au serrement pratiqué par la bouche. L'Argot s'est em-
paré de ce radical : il en a fait piger prendre, pégrer
voler, la pègre la corporation des voleurs, le pognon,
lapesce, la pèse, la pèze, la pezotte et avec suppression
de la première syllabe la zozotte pour dire l'argent
qu'on palpe, qu'on serre dans son poing; il en a formé
également pesciller et pescigner qui veulent dire pico-
rer, pégrer, prendre de la pèze. Piquer un fard, un
soleil veulent dire attraper des couleurs; piquer son
chien attraper un peu de sommeil, dormirle jour comme
le chien; piquer son renard être surpris par des nau-
sées, renarder, goupillonner.
La bouche étant capable de se serrer prête son nom
au poing. Par suite du jeu de ses articulations cet
(1) Le Skt pane' a — uévre — quinque pour hwinhwe — cinq — five
— fùnf veut dire le poing, les cinq doigts.
— 93 —
organe peut offrir l'image vivante du compas. De là les
noms b'uj'a courbe, bâha bras — r^yyq le coude, x^
la hanche, la fesse — Callipyge — Callipyge — bough
branche, to bow courber, elbow coude — biegen cour-
ber, dcr Bug l'épaule. — Le poing représenté comme
frappant a donné la pige l'heure qui sonne, en It. pic-
chiare frapper, la bogue la montre qui sonne les heures,
le bocard le moulin, boxer donner des coups de poing.
Le coup se montre dans le Skt I/anj frapper, pun's
broyer — ituYjjrç le pugilat — pugno je combats, pinso
je pétris, pistor le boulanger — inexpugnable^ pugilat
— to pounce frapper, to poke pousser, to bang choquer
— pochen frapper. Un bochon est un coup de poing,
la pichenette un petit coup sur le nez, représenté par
nette) la bince le couteau qui frappe, Skt pic' c', vie'
séparer, scinder. — Le peigne Allemand désigne les
cinq doigts. Le peigne étant composé de pointes montre
le bec qui pique, qui point (1). Se peigner veut dire se
prendre par les cheveux. — Piquer se retrouve encore
dans le pégoce le pou qui pique les gosses et dans le
pégocier le pouilleux; de même dans péniche, en H.
spitsneus nez pointu, le bateau à nez ou bec pointu et
par assimilation une grande chaussure.
C'est par les mouvements de la bouche, par ses bruits,
par les différentes formes qu'elle sait prendre que nous
exprimons les mouvements de notre être conscient, de
la vie de notre âme. L'esprit, pour exprimer ce qu'il
ressent se sert des sons dans lesquels s'incorporent les
il) La bécane la locomotive joue sur hec et sur décan oiseau, va-
riante de pfi : l'un et l'autre sifflent .
— 94 —
sensations qu'il éprouve. Ainsi le dégoût trouve son
expression dans le souffle/au moyen duquel nous éloi-
gnons un mauvais air ou indiquons simplement qu'il y
a quelq ue'chose qui pue, un mauvais air, un ventcoulis. Le
son/3 est représenté en Français par/z, Ang\. f y, f au g h,
foh, Ail. pfui, H.foei û et verfoeijen faire fi de. Le son
f s'ouvrant un passage entre le palais et la langue fait
rebondir celle-ci contre le palais et provoque ainsi un
bruit que nous notons par d. t. s etc.. De ce radical ont
été formés pâti (1) la puanteur — (JSeXu.aaojJuxt abhorrer
— pudet on a honte, repudio je regrette, fastidio je
suis dégoûté de — pouahl expression de dégoût, répu-
dier, pudeur, pouacre sale — bad mauvais en Argot
vain, au Centre c'est peut c'est laid en H. vies dégoû-
tant — AU. pfui fi dont on n'a pas formé de mot. — It.
oibo, puh pouah! — Le peu de cas que l'on fait d'un
objet, l'indifférence, le mépris s'expriment par/>^! in-
terj. qui dénote le mépris, push mépriser, bush et
s'punt id. — bah! put! ouit! ouitche! Angl.f udge! des
bêtises. Piau! la piaûl jeux de mots sur peau équiva-
lent à l'exclamation : des balançoires, des blagues ! La
prévention pour le jeu de mots a substitué fo in et foin
de aux mots bah, put! — Le mépris se marque en cra-
chant. On évacue la salive en l'amenant aux lèvres (p)
et en soufflant dessus (s) : L. respuo rejeter — conspuer
— Ail. spotten se moquer de — Suéd. spe la moquerie
V. au mot sputation. — Bafouer est un composé d'un
mot qui subsiste dans l'It. beffare s'éboufïer, pouffer de
rire etfouer que nous retrouverons. Le bouffon est
(1) Vis1 Skt est l'ordure, V. au mot vésouiller.
— 95 —
celui qui amuse par de grosses plaisanteries. D'après le
mot c'est un gros bouffi, quand il rit du moins, qui
nous fait pouffer de rire. Sefouer, sefouter de sont les
onomatopées du son méprisant put, foin! Une bagatelle
est une chose qu'on méprise, qui fait dire bah ! comme
les mots -populaires foutaise etfoutaison expriment des
choses qui amènent aux lèvres un ft! Une fichue affaire
en est une qui dans le fond ferait dire put, ouitche mais
qui ne laisse pas que d'être embarrassante. Il n'est pas
fichu de rien faire de bon veut dire qu'il ne fiche rien
de bon, que la vue de ce qu'il fait provoque chez nous
un ouitche de mépris; il est fichu, il est mal fichu —
sa vie ne vaut plus un souffle; c'est fichu — c'est mal
fait; se ficher de(l) — se moquer de, par une assonance
à Vf s du sifflement, au p de put, au ou (w) de ouit-
che etc. En It. ficarsi faire claquer les doigts est le
geste de celui qui se fiche. Unfico n'est peut-être qu'un
calembour sur le mot fischiare siffler. En Provençal
firharse veut dire se moquer. Fichtre, fouchtr a, foutre !
marquent qu'on est ennuyé de toutes ces fadaises, de
toutes ces bagatelles. — La pochade le croquis bur-
lesque, Ail. die Posse, der Spasz le plaisir — H. poets
marquent qu'il y a de quoi rire. Le son primitif ps est
celui de l'air qui s'échappe pendant le rire. Se baucher,
se baucoter veulent dire se moquer. Ces mots jouent
sur bauge, sur bag de bagage, sur TAU. Bauch le
ventre. Quand on rit le ventre se dresse. Embabouiner
duper n'est qu'un jeu de mots sur embobiner, V. aux
(1) V. au mot badiner.
96
mots babouin et bobine. Le bateleur (1) est le pitre (H.
Pieter Pierre, pierrot), le bonisseur des tréteaux de la
foire. Ces mots représentent des onomatopées manquées
par leur originateur à cause de sa prévention pour le
jeu de mots. Baver veut dire parler, la batterie l'atti-
rail de la parole. — Battre Job signifie ainsi amuser le
gobeur, par jeu de mots Job, le battage la tromperie.
La porte une fois ouverte au calembour, on en profite :
battre conduit à bateau et en prenant monter dans 1 ex-
pression synonyme : monter le coup on a monter un
bateau à quelqu'un, chercher à le tromper. Le bateau
rappelle à la mémoire le ponton, le pont à bac et le
pont : de là couper dans le pont croire au boniment et
devenir dupe. — Basteler veut dire faire du batelage,
professer le métier de bateleur.
La bise est le vent qui siffle : le son a l'air de sortir
de notre bouche, effet inévitable de notre imitation. Le
mot bizarre montre dans notre nature quelque chose
qui ressemble au caprice du vent qui se lève et s'abat
sans cause connue. Lit. bùza veut dire colère subite,
emportement, l'Ail, base fâché. Danois et Suéd. bister
courroucé, Skt bifratse se fâcher.
Un puant est un orgueilleux qui trouve tout mau-
vais, qui fait^ de tout excepté de lui. L'orgueil s'ap-
pelle, par jeu de mots, le piaf. L'inanité, le vide, le
vent qui est au fond du cœur, de l'intention, d'un acte,
s'appelle la vanité. La pompe est l'inanité des exhibi-
tions publiques, l'enflure du style; le faste une parade
vaine et odieuse; la fatuité l'inanité de nos prétentions.
(1) Le Skt push veut dire mépriser; l'Angl. fudge, foin de.
— 97 —
Ces mots sont formés de la même matière que put ,
foin et ouitclie ! ils s'appellent l'un l'autre. La colère
est une animosité violente accompagnée d'un gonfle-
ment de l'estomac (stomachor), qui cherche à se soula-
ger en soufflant : ce sifflement s'appelle bisquer,
variante de bise et de l'Italien bùza qui a donné
bizarre. Avoir son bœuf est un jeu de mot sur bœuf
qui veut dire qu'on a l'estomac tourné, qu'on manque
sa digestion, qu'on a des flatulences, qu'on est gêné, ne
pouvant éclater contre le prochain. Bœuf est une ono-
matopée manquée qui indique le mot bouffi (1), Angl.
puff une bouffée de vent. Bœuf est aussi une expres-
sion à laquelle l'esprit a recours pour dire ce qui est
bêtement étonnant : un succès bœuf un gros succès.
Le Sanskrit a l'onomatopée b'amba pour désigner
l'orgueil, et bxam pour faire comprendre l'idée d'irrita-
tion. Celui qui a des accès de colère est le bœufîer. —
Le dépit, Angl. spite, H. spyt semble indiquer que
l'on se mord les lèvres; Angl. to bite, Ail. beiszen
mordre.
L'éclat de rire fait dire pouf à nos joues, gonflées
par le souffle retenu : de là s'ébouffer rire aux éclats.
— Avancer les lèvres pour marquer la mauvaise
humeur a donné le son de bouder et avec jeu de mots
bouffer, Angl. to pout. — L'étonnement nous fait
ouvrir une grande bouche : bè (2), bà, bah ! Autour de
ce mot pullulent les variantes et les jeux de mots :
(1) Le Skt. TAmba disque marque l'objet arrondi par le souffle;
vap tisser semble vouloir dire : enrouler sur une bobine. V. aux
mots bombe et bobine.
(2) Le Skt p'ut interjection veut dire qu'on ne comprend pas.
7
— 98 —
baba, pape, papasse, papote qui veulent dire étonné.
Pocheté par jeu de mots veut dire épaté, ébahi, ébaubi,
Angl. abashed, H. verbaasd. Le baba est celui qui
s'épate de tout, Svaaoz. Le verbe s'épater lui-même est
un jeu de mots sur bah! L. papœ, G. 6aéa(. Abqfointé
veut dire étonné, mais en même temps qu'on est indif-
férent pour l'objet qui cause l'étonnement. — V. au
mot foin. Rester bouche bée équivaut à être interloqué.
Le pigeon est un sinve, un simple qui se laisse enjôler
par d'honnêtes apparences. Les variantes de ce nom
sont bige} bigeot, bigeois qui riment sur biger donner
un beccot. Un badouillavd est un niais : sa grosse
bouche et ses discours ont l'air de l'affirmer. — Un
béard est un homme tranquille : il n'a la bouche
tiraillée par aucune passion.
Le bec pris pour la figure comme il arrive avec le
mot Latin os, bouche et physionomie devient le terme
pour le masque et ses expressions. Le babouin est le
masque dont on se couvre le visage pour se préserver
de la piqûre des abeilles quand on va châtrer les
rayons. Le jeu de mots faire la babou veut dire
grimacer, H. bietebaauw l'épou vantail, la malebête.
La boubane désigne la perruque au point de vue du
déguisement. Le pignouf, le pignoufle, le pignoiiflard
est un mufle. Pour les former on n'a eu qu'à changer
ce dernier mot en un des homonymes de bec. — Le
masque effrayant est le bau, V. plus haut. Il effraie les
enfants en disant d'une voix sourde bau bruit qui
imite l'aboiement du chien, Skt b *as effrayer. H. boe-
man, le babau, l'homme qui fait bau ! La figure mys-
— 99 —
térieuse de certains singes leur a valu le nom de
babouin» — Lajrasquè\ Aïigi^Jreak la grimace,, le
caprice semblent s'appuyer, comme l'Allem. das
Fratëengesicht la figure grimacière, die Fratze la
grimace, sur pharynx et ses opérations, Angl. to fret.
AW.Jressen briffer, manger. Das Ge frits: en Ail. veut
dire la figure (la bouche qui mange). Saisir par le
regard, par les yeux est synonyme dans le langage de
prendre avec la bouche. Quand on veut comprendre
une chose qui fait notre surprise, notre étonnement,
notre admiration, nous ouvrons les yeux pour voir, la
bouche pour saisir, le nez pour connaître par l'odorat ;
dans cet ordre d'idées on dit de même dresser les
oreilles : on voit les enfants et les personnes naïves qui
ne s'observent pas ouvrir même les mains comme pour
attraper l'objet qui frappe les yeux. Les sons radicaux
qui ont fourni les noms de la bouche ou de ses actes
vont reparaître ici avec le sens de voir : au observer —
tùty le regard — optica — optique — ophthahnie — to
spy épier — spàhen espionner, skt paç, spaç surveiller.
L'opinion est la manière de voir. L'option s'appelle
probablement ainsi parce qu'elle se fait d'après le juge-
ment des yeux. L'Angl. hope l'espérance, Ail. die
Hoffnung expriment la perspective du bonheur. C'est
le regard tourné vers l'avenir. L'expectative exprime
la même idée par un radical congénère que nous ver-
rons de suite. Le H. vooruitzigten les vues d'avenir, la
perspective, l'Ail, die Zuversicht l'espoir expriment la
même idée par un terme synonyme. — Remarquer
s'appelle rebouiser ; ce mot veut dire aussi donner un
— 100 —
nouvel aspect, retaper, requinquer (1) : de là un ri-
bouis, un ribis un soulier réparé, un dix-huit (deux
fois neuf). P imper veut dire regarder avec une nuance
de brutalité, Angl. topeep regarder indiscrètement. Le
sens de regarder, de saisir par la bouche, ce qui le rend
synonyme de comprendre, apprendre se trouve exprimé
avec la racine bucale dans : spaç regarder, id. —
p-TcéxXov le miroir — spéculum id. — specio voir —
respecter, haruspice, espiègle abréviation du Holl.
Uilenspiegel miroir des hulottes, des farceurs — to
spy épier — der Spuk le revenant, le spectre, das Ge-
spinst id. — H het spook id. — Le mot expectare
parvient à signifier attendre parce que l'objet de l'at-
tente et du désir nous font diriger les regards vers
l'avenir. De là l'adaptation Anglaise expectations ce
qu'on peut attendre. (Rester dans l'expectative,obser\eT
l'attitude de quelqu'un qui attend venir les choses).
L'Anglais in abeyance veut dire en perspective. —
Aller en vacquerie joue sur vache, vacque dans le
Nord, L. vacca : le sens est aller flairer une aventure,
épier un coup à faire, rebouiser. — Le phonème bâcles
lèvres revient dans le Skt budK reconnaître, bud'di
l'intelligence, la lumière de l'esprit, le coup d'œil,
budlda le sage, le savant, Bouddha, Foda le réveil —
qadauclei\ le badaud le museur qui regarde des choses
peu intéressantes, béer aux corneilles, ne rien faire;
abadie, abadis foule qui regarde, allusion au nom de
Abadie. Badaud et bud'da sont des sens divergents de
(1) Ce mot rappelle le quinquet de l'inventeur de ce nom. Le sens
est : présenter sous un nouvel aspect, une autre lumière, retaper.
— 101 —
la même idée. Badauder marque un état très-inférieur
de la curiosité : bud'da est comme ac?s; — sapiens —
sage, sapience, savant, celui qui regarde pour con-
naître. L'Angl. to bide attendre est une variante de
expectore et du H. verbeiden id.; to abide rester et
demeurer, Skt vid habiter, sens auquel se rattachent le
Suéd. bo id., by village, bygd voisinage, TAU. das
Bùhl le hameau, qui semblent avoir pour sens primitif
celui de muser sur place, de s'arrêter dans sa course
vagabonde, anal, à celui de maneo qui veut dire rester,
demeurer et dont le sens propre est muser. V. Traité,
p. 71. Baguenauder, par allusion au jeu de la bague-
naude et au fruit, est par lui-même un composé de deux
homonymes de bec et de nez ayant le sens de courir çà
et là, de perdre son temps à muser, dans le fond, de
rebouiser (Skt vaktra bouche, vâgdala lèvre) et de
renifler selon le sens de l'Argot. — Le tremblement
des lèvres bb annonce la peur, l'ébranlement des nerfs :
b*t crainte — o£îz\j.v. je crains — hydrophobia — gal-
lophobe — Ail. behen — H. beven et le fréquentatif
hihheren. — Le beccot étant le signe de la réconcilia-
tion, l'accord s'exprime par se rabibocher se réconci-
lier, çà baise on tombe d'accord, se rapapilloter jeu de
mots sur papillote et papillon s'accorder de nouveau.
Un baiser se dit en Langue d'Oc poutetde pot ou pout
la lèvre, la bade. Un petit museau, un mignon s'ap-
pelle poutouno.
Le mot bouche est une adaptation Gauloise du L.
bucca formé du radical bue et de la terminaison a avec
redoublement, du c. Bue est le son naturel de l'organe :
— 102 -
Grâce à l'onomatopée, il en devient le nom. Tel que le
son le représente, il ne paraît composé que des lèvres
et du gosier : ce sont du moins les seules parties de la
bouche qui se soient fait entendre quand le grammairien
a noté ce phonème. — Nous venons d'entrevoir que
le son des lèvres peut être accompagné de chacun des
sons propres aux différentes parties qui composent
l'appareil complexe de la bouche. Celle-ci étant l'organe
de la respiration et de la nutrition, tous les actes se
rattachant à ces deux fonctions doivent forcément se
traduire en sons spéciaux, sensibles et perceptibles
pour l'oreille. Les sensations intérieures qui précipitent
ou ralentissent la respiration aboutissent également â
la bouche et s'exhalent par des cris particuliers. En
conséquence le corps du mot, c'est-à-dire la façon dont
on le prononce, l'épelle ou l'écrit, change, selon que
les lèvres, le gosier, la langue, les dents, le palais, le
nez, seuls ou réunis, contribuent à l'acte de cet organe
complexe et simultanément au son qui en résulte. C'est
la somme des sons spéciaux de chacune des parties de
l'organe mises en jeu qui composent les radicaux pri-
mitifs et constitue ainsi le fond des mots que l'onoma-
topée en a formés. Les nombreuses consonnances que
l'Argot met à la place d'onomatopées d'origine ne
comptent pas. Nous avons vu comment il prend des
mots homonymes tout faits dont le sens lui fournit
l'équivoque recherchée : comme cela il n'a pas à se
donner la peine de reproduire le son et avec lui le sens
intégral tels que la nature les présente. Il se contente
de mots qui riment avec le son naturel dont il a la per-
103
ception au fond de son oreille. Il aime le calembour,
surtout celui qui ajoute quelque chose au sens qu'il faut
exprimer. Ainsi dans l'expression : il a son bœuf, qui
veut dire il est bouffi, il est gonflé de colère, il souffle
la colère, le mot bœuf est une rime du mot bouffi, mais
qui ajoute au sens que la colère, l'animosité est de la
taille d'un bœuf.
La métathèse de bucca bouche est gobe, gaffe. Ces
mots qui veulent dire gosier, reproduisent les mêmes
sons dans l'ordre inverse, tel qu'il en existe dans le
bruit de l'acte même. Dans le cas présent c'est le gosier
qui sonne le premier en s'ouvrant pour saisir et cette
ouverture entraîne celle des babines qui font entendre
leur note à elles, le b. Dans bouche ce sont les lèvres,
l'orifice qui entraînent les autres sons, c'est-à-dire la
voyelle et la gutturale : aussi bien, ceux-ci sont-ils en
quelque sorte secondaires. C'est pour cela que le sens
de bouche prédomine bien que le gosier ait sa part
avec uc. La bouche est donc une gobe et une gobe une
bouche, Ail. die Backe la joue. A cause de la prédomi-
nance de la partie de l'organe indiquée par la première
lettre, nous ne prenons pas ces mots comme équiva-
lents bien que la même activité des mêmes parties de
l'organe produise la somme égale des éléments sonores
qui constituent leur radical. La différence d'ordre dans
la mise en mouvement des organes établit donc une
différence fondamentale entre bouche et gobe. Il n'en
est pas de même quand la lettre initiale, comme p. e.
le 6 de bouche est remplacé par une autre labiale, car
les mots qui désignent la bouche se rencontrent dans le
— 104 —
langage aussi bien avec m qu'avec 6. Ces deux labiales
sont jumelles (1). Le son m se prépare quand nous
pressons les lèvres l'une contre l'autre : il se produit
quand elles se desserrent. Si au lieu de les séparer sim-
plement pour renonciation du son, nous chassons au
dehors l'air contenu dans notre bouche, nous énonçons
f, b, p, mb, mf, etc. — Le 6 et le m étant jumeaux, ces
deux lettres se trouvent volontiers ensemble, p. e. :
Skt ap et ambu eau, cubo et accumbo je couche. Le m
n'étant pas soufflant et par conséquent incapable d'ex-
primer la respiration, le gonflement, nous ne rencon-
trerons pas de mots avec m dans lesquels ces actes
soient incorporés. Il n'y a d'exception à faire que pour
le cas où la bouche est prise pour le nez, synonymie
qu'il est d'autant plus naturel à établir que la bouche
suit les mouvements de cet organe et semble aspirer en
même temps que lui. — Les diverses onomatopées
produites par l'organe labial désigné par m se rangent
dans les mêmes catégories que celles du phonème bou-
che. Les mots qui vont suivre sont donc simplement
des variantes avec m du mot bouche avec le sens de
lèvres ou d'ouverture de l'appareil phonétique et par
synecdoche des organes secondaires qui en font partie.
Ainsi au Centre on dit très-bien j'ai mal à mes bouches
pour j'ai mal aux lèvres, en Skt vâgdala. La bouche
sous sa dénomination de [xûv.ç le museau, en Skt masta
tête par synecdoche, se confond avec la mâchoire et
les joues, parce que, quand la bouche agit, on voit
plusieurs de ses parties se mouvoir à la fois. De là les
(1) Le son soufflant de m est f.
— 105 —
noms de muk'a bouche et voix — [l-xz-xï mâchoire —
mandibulum id., maxilla joue, parceque le mouvement
des deux est simultané — mandibule, maxillaire, mâ-
choire, le mégot le bout de cigare mâché — mouth la
bouche et le verbe to munch mâchonner — der Miind
la bouche et schmunzeln bouder. Le museau désigne
aussi bien le nez que la bouche et par synecdoche toute
la figure : Skt mukKa visage — [xjv-r^ le nez, la trompe
mugit — le muge (1) la grosse bouche, le poisson ainsi
fait. La mandibule est une variante de bade, maxil-
laire de bouche. Les balots reviennent dans la variante
•j.jaaîv lippe, grosse* lèvre, [tuXXoç le mulet — mulus id.
mulet (2), dans le Limbourg H. moon variante de
mond museau, bouche, AU. das Maul la bouche. Le
mculard est le veau {meugler, beugler)] malarder
expectorer, rejeter de la bouche. Les babines ont leur
son équivalent dans le mufle, AU. der Muffel l'homme
aux grosses lèvres. Les autres langues ont le radical,
mais elles n'en ont pas formé de substantif désignant
l'organe en lui-même. Ainsi marmara murmure —
[tt|ifO|MK (3) marmotter contre, H. mompelen exprimer
son mécontentement tout bas — mimus le mime, en Skt
mâja, qui simule le jeu d'une autre mine — to mump,
(1) Les mots correspondants peuvent manquer en Angl. et en AU.,
mais les radicaux existent avec un sens synonyme, comme Angl. maw,
Ail. der Magen la bouche, la gueule pour l'estomac, mogen aimer,
suivre les désirs de l'estomac, où se rattache le Skt magla bon-
heur.
(2) Le correspondant Angl. existe dans meal le repas, Ail. das
Mahl id. — Le son de la bouche, du museau évolue dans to meicl
tirer la bouche, pleurnicher, Ail. schmollen rechigner, dans le G.
as'.&'.âo) rire, variante de badiner. V. au mot bâtard.
(3) Un mauvais trait de la bouche exprime la haine [xio-éw d'où mi-
santhrope et le Skt mis' a envie.
— 106 —
to mumble manger comme les enfants et les vieillards,
to mope faire la moue, bouder, être triste; mumps la
moue, to mumble parler indistinctement — mùffeln
manger la bouche close. — Tous ces mots comprennent
un radical qui avec ou sans terminaison aurait pu si-
gnifier la bouche (la marmouse, la barbe qui entoure la
mâchoire et suit ses mouvements). Le nom du bujle
congénère du Skt mahî vache se confond avec celui de
son mufle : l'un et l'autre sont formés du son mu avec
répétition de la labiale. Le H. a buffelen et muffele/i
manger à bouche close, de sorte qu'on n'aperçoit que
le mouvement des lèvres ; de là H. buf une bouchée
{le buffet le garde-manger), Skt batn mâchoter.
Parmi les noms exprimant un acte volontaire ou in-
volontaire de la bouche et commençant par h on trou-
verait à rapprocher baver, babiller, bibarder, bibasser,
bavarder j bouffer etc. qui tous marquent un son de la
bouche produit dans des circonstances différentes. Le
mot mine sert d'expression pour la figure toute entière,
mais ne désigne que la bouche selon la valeur du son,
Suéd. mun bouche. Ce radical mn se montre dans
\xvrjpo[)M se plaindre, tirer la bouche — minae menaces,
c'est à dire figure qui présage des malheurs — menace
— mind l'esprit, l'imagination , la mémoire, la faculté
qui conserve les images, les formes des choses et les
enchaîne — die Minne le souvenir, l'amour en Skt
mind aimer. Montrer monstrare veut dire rendre pré-
sente, retracer la figure des objets, monstrum le signe
analogue à l'Angl. beck signe. Le masque qui désigne
toute la figure est à l'origine le nom de la bouche seule.
- 107 -
Il se retrouve dans maja (1) la mômerie, maxa l'hypo-
crisie V. Traité p. 124, dans ^rj/w mâcher — moschus
le jeune bufle — mâcher*, manger — to miïnch, mâcher
— mucken et muchsseri bouder, être rancunier, mun-
keln parler tout bas (y-Yyb; qui parle la bouche fermée,
Skt manmana chuchotement ' — Suéd. mask mite qui
ronge, la larve, le mouton la larve du charançon — H.
masker et une variante mom le masque (2) — Angl. to
mumm masquer — Ail. die Mummèréi la masquerade,
la bouffonnerie. — La marmouse est la barbe. Ce mot
est composé de deux sons bucaux dont le premier se
retrouve dans marmoter, marronner, marmonner et
l'autre dans museau : la signification naturelle du mot
serait donc museau, bouche. — Là màrgoulettê est la
bouche : ce mot se compose de niar signifiant la bou-
che et goulette gueule. Margoulette et son synonyme
marmotte passent du sens de bouche, gueule à celui de
caisse fermée, malle analogue comme sens à muette Y.
ce mot. De là le margoulin le petit marchand forain
qui vend à la boite et margouliner vendre au détail,
porter la marmotte comme le margoulin. — Le Grec a
encore formé le mot Mé£i*w le masque horrible, l'épou-
(1) Le Skt maja le maye est une variante de bud'da le sage et un
congénère de rebouiseur et de mouchard.
(2) Le produit de la bouche s'appelle d'après une de ses variantes
mucus la mucosité. Il faut y rapporter le muche l'honnête jeune
homme qui devient facilement la dupe des roublards, variante de
'pigeon. Le mousse le petit matelot est représenté comme quelqu'un
dont le dessous du nez est encore humide. Il n'y a pas honte : il y a
en Espagnol Las mocedades del Cid, lepoëme qui chante la jeunesse
du Cid pour prouver que tout jeune et par conséquent peu considéré
on peut avoir de la valeur. S'amucher la figure veut dire : se donner
des coups sur la figure, sur la bouche, alias des mandoles, mot qui
rappelle museau, (H. mond).
- 108 —
vantail, variante de jjlo^y; la figure. Ces mots nous
ramènent à marmouse la barbe. Le mot du Centre mar-
mouser bavarder lui restitue son vrai sens de bouche.
Il y a le même échange en Grec entre ww^wv dont le son
dit bouche et dont le sens est barbe. De même le L.
mentum le menton veut dire en AU. der Mund la bou-
che entière. Le marmouset est la figure laide, le mar-
mot le singe, l'enfant. Mornos et mornée veulent dire
mor bouche et nos nez, donc museau. — Le mot Ver-
mouth imité de l'Ail, der Wermuth est un doublet de
armoise et sous sa première orthographe une mauvaise
représentation graphique du Grec et du Latin artemi-
sia. Le mot Allemand semble faire allusion au sens de
wehren et de Mund, l'herbe qui défend à la bouche
d'approcher : les mamans, en effet, pour détourner les
poupons du sein frottent la mamelle avec le suc de cette
herbe. L'Anglais, aussi peu ûxè sur le sens, en a fait
wormwood le bois contre les vers. Artemisia est le nom
de l'absinthe, l'herbe de la vierge. Artemis est le nom
de la Pucelle Grecque, appelée Diane (1) et Phébé
comme Reine de la nuit. V. Traité p. 91. Les surnoms
de l'absinthe sont la verte, la perruche, le perroquet.
Allumer le mistouf est une expression de l'argot qui
veut dire éclairer une figure de la lumière du regard,
l'examiner. Le mistouflet est le poupard, l'enfant gâté;
le maffion l'enfant éveillé, le petit museau. — La mor-
nifle est un coup qui atteint le mor (V. mandole) radi-
cal de la bouche et le nifle le nez (V. renifler), La man-
dole représentant le coup, le mandolet devient le nom
(1) V- au mot diurne. L'Argot l'appelle la luisante.
109
du pistolet à un coup. Le moirrhoufe est l'enfant joufflu
de moir pour mor et moufe qui rime avec mufle. Em-
brasser sur la bouche, sur le mufle se présente avec ce
radical dans moufier embrasser, le moutier (Angl.
mouth la bouche), le mounin le baiser (Suéd. mun
bouche). Le mqfflu, le moufflet l'enfant joufflu, le mot
Normand mataflu id. sont des composés d'un radical
rappelant la bouche et àeflare souffler. — Le mouflon
est le chevreuil muflé. On dit le m ufle pour caractériser
le nez et la bouche de la race bovine ainsi que des cerfs.
— Le mouchard est le nom de l'image, du portrait qui
reproduit la figure. L'Argot, abandonné à ses propres
ressources, retrouve par comparaison des mots analo-
gues à imago, i mit or l'image, imiter, reproduire la
figure, la bouche. V. Traité p. 62. Le Skt, à la suite
d'une comparaison similaire nomme le miroir makura.
Le moucheron par jeu de mots est le petit minois d'en-
fant, le morbec un composé qui dit la même chose
deux fois. Le môme, le momaque, le mômard, le mo-
m ig /^//'(/désignent toujours l'enfant par sa petite bou-
che qui fait m m.
Le nom du meut lier le poisson blanc présente dans
son orthographe une déformation du mot Berrichon
meugnon le chabot quia grossebouche somme le muge,
le mulet, le goujon, (gave) en H. moon. Dans le Berry
ce nom indique aussi le museau. Le macaque, au Centre
maca, Angl. monhey, Esp. mona la guenon rappellent
leur masque étrange, leur babouin, au sens del'argot. —
Le margouillis (1) est le vomissement et par prosopopée
(1) La boue payka, la bourbe sont représentés dans lelangage comme
110
la boue qui sort d'une bouche, d'un égout, d'une cana-
li nation quelconque. Delà le margoulin celui qui fait du
margouillis, du gâchis, le gâcheur, le mauvais ouvrier.
Nous avons vu comment le son margoulette indique la
bouche: le margoulis représente ses cris et par assimi-
lation le scandale. Le moure la figure mignonne joue
sur amour. L'expression un moule à claques cache un
mot comme l'Ail, das Maul\& gueule (V. mulet) et joue
sur moule\a, forme. Or le moule est le modèle. Moule à
claques est donc, grâce à l'équivoque, et une figure
qu'on claquerait plutôt qu'une autre et la forme où se
moule la main. Moule (2) est la contraction du latin mo-
dulus la norme, la mesure. La mesure est dans la main.
Celle-ci emprunte son nom à la bouche telle que nous
la connaissons par mounin baiser, Suéd. mun bouche.
Ce que l'esprit L. mens médite, la bouche se le mar-
mote tout bas et la main le mesure quand la justesse
de l'idée et la pratique le permettent.
Le Skt. a man penser, mêd méditer variantes de
bud' reconaître, rebouiser. La mesure qui est dans
la main s'emprime par mâtra — \xé-pov — metrum —
mètre — meter — der Meter. Modus la norme, le me-
sure d'après laquelle se font les choses en est une va-
riante, ainsi que modiusle muids, la mesure. Le moss
est une déformation de l'Ail, das Mas* la mesure de
bière. — Malarder veut dire, comme nous avons vu
expectorer; il rappelle le L. mala la mâchoire, dans
un produit de la bouche. Le péché en L. peccatum signifie la boue, la
souillure.
(2) La moule L. musculus est le coquillage qui s'ouvre et se ferme:
[xûw fermer. Une moule est un homme sans vigueur.
— 111 —
d'autres langues la bouche; il est homonyme et congé-
nère de piïkoç la dent molaire, en Argot molard. V. au
mot moulin.
Le museau, le nez aspire, sent, souffle, coule, etc.
Tous ces verbes paraphrasent des actes s'exprimant par
les noms du nez, du museau. Ainsi \kuxv; le museau se
retrouve à l'état actif dans musser flairer. Ce qui exhale
une odeur empestée s'appelle d'après le museau reniflant:
matka — la punaise — \uhboç l'excrément humain, dou-
blet de fiente — mutire puer — Norm. émeutir puer —
AU., des Mi&tle fumier — H. muf qui sent le moisi.
De même les bonnes odeurs que nous aspirons s'appel-
lent d'après le museau : ;/(vOa — mentha — menthe —
mint — die Miïn^e.
L'Angl. mugwort veut dire absinthe, l'herbequi par-
fume. Le L. mephitis l'odeur soufrée, méphitique se
retrouve dans mofette, mouffette, Méphistopheles, AIL
miiffen et mucheln sentir le moisi, puer. Le muguet
emprunte son nom à son parfum, de même que le musc
qu'on nous donne à aspirer: \j.izyzz — muscus — musc
— musc — der Muskus. L'Argot a fait de ce mot, par
antiphrase: mouscailler, fienter. Les fraises du bois s'ap-
pellent les mousses à cause de leur parfum. La mous-
ser ie est la chaise percée. — En terme de voleur musser
veut dire sentir. — Le flair est dans son sens plus
étendu l'exercice d'un organe ou d'une faculté qui nous
renseigne sur l'identité des personnes et des choses, sur
leur valeur, etc. C'est pour cela que l'examen, la recon-
naissance s'expriment par le radical qui a formé museau.
Le museau agit dans ;j.as7£Joj examiner, interroger, y.av-
— 112 —
6 avw apprendre - matliesis -mathématique. Remoucher
le pante veut dire l'observer; remouchicoter chercher le
vent d'une aventure. L'agent de police a été comparé
au chien de chasse qui s'élance, le nez sur la piste, à la
poursuite du malfaiteur ; de là les mots mouchard en
Skt. mâja celui qui flaire, observe et moucharder,
mouchailler épier. Etre mouchique (1) à la police être
dans le nez de la police joue sur mougikle paysan Russe
et se rattache peut-être aux démêlés des nihilistes avec
la police Française. Dans le composé Rupinhqff un
Russe Rupin ou urf nous avons un débris de noms
Russes, servant d'indice pour la nationalité du Mon-
sieur urf. (V. au motchickmann). Le mouton est quel-
qu'un qui musse, qui moucharde. Sa spécialité est
d'espionner ses codétenus. Un morne a le même sens :
c'est le mouton avec allusion à mornos la bouche, le
museau'qui mouchicote. Etre en quête de s'exprime éga-
lement par une autre racine delà bouche, que nous avons
déjà rencontrée dans marmouse, margoulette : c'est
marauder. Le maraud est le quêteur d'aventures dans
son mauvais sens (2). Le marpeau ou marpaut est le
niais qui regarde bouche bée sans comprendre ; peau
semble être mis à la place de bah. V. ce mot. La mu-
raille est le nom de la multitude, des badauds. Manette (3)
marque d'étonnement. Ce mot contient le son de museau
(1) En Skt. hogika valet, palefrenier; l'homme à gages, Skt. boga,
La variante est mû lier, faire un pacte.
(2) Le sens de courir les aventures se trouve dans miter, synonyme
de chaparderY. ce mot. Miter est faire comme mitis, commele matou.
(3) Mazette, mauvais petit cheval est une variante de Mœhre, mot
AU. qui veut dire jument et qui se trouve dans cauehemar, le succube
avec allusion a chevaucher et couche. L'Angl. hagridden exprime une
idée analogue : chevauché par les sorcières.
— 113 —
qu'on suppose entrebâillé, cherchant à comprendre les
merveilles qui s'offrent aux yeux, Angl. amazed étonné.
C'est également le nom du marpaut. Faramineux
marque l'effarement lisible sur la mine. Le radical
mar employé pour exprimer l'étonnement dans le mot
maraille fait le même office dans mirov j'admire, c'est à
dire j'ouvre \vanarmouse,lamargoulette en me laissant
aller à la contemplation. Gaffer les mirettes démontre
l'assimilation, presque constante dans le langage,, des
yeux et de la bouche; le sens est ouvrir les yeux, gober
de la bouche et des regards. Les correspondants dans
les aulres langues sont: ma connaisance, smar penser,
vismayé s'étonner — [/.sp^aipo j'examine — miror —
admirer, remarquer (1) — to mark faire attention —
bemerken remarquer. Démarquer le linge s'appelle
dêmorjîler, retirer le fil qui marque le nom et en quel-
que sorte la figure du propriétaire. Mur revient au La-
tin os bouche et figure, \j.i?or, figure, équivalent au Lat.
forma (le même son que mormo V. ce mot), It. morJXa
la figure. — Le maroufle Suéd. murfvel veut dire pri-
mitimevement un homme d'un aspect commun. C'est
une variante de mufle. — Le regard intérieur, l'âme
qui subsiste en nous active quand l'observation à cessé
s'exprime par le nom de la bouche. Nous savons que
l'attention de l'esprit venant aboutir à elle, devient so-
nore et rend un son 6 ou m et qu'ainsi le regard qui est
muet entre dans le domaine du langage de la façon la
plus naturelle .' Ainsi ont été formés mati pensée —
(J.YJTIÇ — mens — mental, démence — mind l'àme — die
(1) Le Skt. marmika est l'homme savant, pénétrant.
8
— 114 —
Minne l'amour, le souvenir, das Gemûthe l'esprit, le
cœur, — hemot morningue la monnaie dérive depyaqiat
— mnâ mentionner — menti onem facio je fais men-
tion, moneo j'avertis, monstro je montre, moneta —
monnaie, monument, admonester montrer — to remind
rappeler — das Merkmal le signe, das Denhmal le
monument. La monnaie porte l'effigie du gouvernant et
l'indication de sa valeur. Morningue rappelle mornos
la figure, l'effigie. La mémoire est la vue présente des
choses passées. L'idée première d'observation persiste
dans le nom. C'est par l'observation que l'âme s'éveille
et s'éclaire. Tous les peuples l'ont pensé et exprimé ainsi :
smar qui se souvient — [j,vs(a la mémoire — memor qui
se souvient — mémoire — to remind se souvenir —
das Gemûthe ce qu'il y a de pensée et de sentiments
dans le cœur. Le Skt. place le courage dans la pensée :
sans doute qu'il la suppose forte parce qu'elle est
bonne et juste : manjus. L'Anglais mettle a dévié : c'est
la témérité. Le mot Ail. der Muth place le courage
également dans la pensée. Le mot du Centre s'éméïer,
Ang. to be dismayed veut dire se décourager. — Ba-
dauder, muser, c'est a dire regarder la bouche ouverte
a voulu dire quelquefois : passer le temps à des riens ;
ils n'ont même plus d'autre sens. L'idée de muser, de
s'attarder, de demeurer, de rester sur place semble se
rattacher à la badauderie qui nous immobilise : man-
dira étable — [acvtj la demeure — maneo rester sur place,
demeurer, mora la demeure, le retard — mansion, le
masx le ménage, la demeure, le séjour, le retard — to
mouthe badauder, muser — die Musse la badauderie,
— 115 —
mussig museur, inoccupé, fainéant — H. niarren tarder
— Le Skt. a manda le paresseux,, môgla vain, inutile,
le Gr. jjwtwoç vain.
La corde, le lien qui attache le navire à la rive, qui
le fait demeurer près du rivage s appelle Y amarre, d'où
ornai Tct 'attacher au rivage, en'Angl. to moor, démarrer
quitter la halte. Lemot Latin remurca signifie la toue :
remorquer, prendre à la remorque et remorqueur en
dérivent. La corde qui amarre s'appelle en Gr. |xëXe0pov
l'instrument par le quel on effectue le retard, le lien.
Attacher est en Skt. murv. Ce mot répond à jAéXXu je
muse, je m'attarde dans une méditation qui n'en finit
pas. Démarrer fait en Argot démurger, forme plus
rapprochée de remurca. Le marmenteau est le bois de
haute futaie qui demeure debout alors que le reste tombe
sous la cognée. — Nous revenons au sens de nez avec
moucher donner un coup sur le nez, variante de amucher
amocher et de donner une mandole. On remouche qq.
en lui tirant un coup de blavin, mot qui veut dire mou-
choir et pistolet. V. au mot blavin. Le mouflon est un
autre nom du mouchoir : c'est un torche-moufle. Le
mufle et sa variante le moufle se retrouvent à l'état actif
dans moufler flairer. L'Angl. to s mell sentir j congénère
de myrrhe et du Skt. marut vent, est formé d'une façon
analogue d'un radical qui se montre dans to mewl pleur-
nicher et dans l'Ail, clas Maul le mufle. On entend le
mufle aspirer dans la muffetée la prise de tabac. Une
muflée est une bonne quantité, plein une bouche, un
mufle. Le même sens se trouve dans l'expression : avoir
une vraie muffée avoir bu à l'excès. — La morgue est
- 116 -
l'endroit où Von montre, où l'on va rebouiserv, (1) gaffer
les morts. Le mot marque la bouche ouverte. C'est nous
qui regardons les cadavres : l'endroit où ils sont ex-
posés porte le nom de l'acte de nos yeux eyprimé par
le phonème de la bouche. Morgue est congénère de
remarquer et de montrer. V. ce mot. La morgue l'or-
gueil veut dire une figure sur laquelle se peint l'envie
de primer les autres, primitivement l'ostentation. Les
mots Normands moucher, mouquer veulent dire : faire
une réprimande, dans le fait torcher le nez. Cette der-
nière expression passe au sens figuré de « corriger »
par l'association même qui donne à savonner, laver les
oreilles celui de reprendre. Moucher veut dire enlever
les muscosités : mue couler — \xû& — mucus — muci-
lage — mug, mud boue — oler Schmutz la boue, die-
Schmierelsi crasse, le produit du museau, du mufle.
D'une façon analogue la boue et le margouillis sont
représentés comme l'éjection d'une bouche, d'une mar-
goulette; la bave apparaît comme formée par les lèvres;
la bourbe comme le dégorgement d'un barant qui bor-
boryse. La bouche s'appelle -r^r, la bouche d'eau, la
fontaine par prosopopée — fons — fontaine — bug le
marais — der Bach le ruisseau. Le mot borborygme a
des congénères dans prus1 arroser — 6pw bouillonner,
jaillir — ferveo oujerbeo bouillir — effervescent, fer-
vent— to pearl perler, to purl murmurer comme la
source qui jaillit — perlen perler. V. au mot bure. La
mousse surle liquide est assimilée àun mucus spumeux.
(1) Le Skt. maxa est une variante de respect. Il se rattache à la
même racine. Mêv veut dire honorer.
— 117 —
Y. au mot poncer. L'écume est en SkX.p*êna. La mousse
la plante parasite (Skt. mridu de mrid humecter) passe
dans le langage comme un mucus. La plupart du temps
elle est un produit de l'humidité. — Le mot morve,
l'humeur qui coule du nez semble s'appuyer sur un
radical qui se trouve dans morfier manger, maroufle.
C'est le museau représenté par une onomatopée congé-
nère. Se relicher le morviau veut dire s'embrasser sur
la bouche et attraper un peu de l'humidité du nez. Le
sein s'appelle en Argot monzu ou mouzu, H. min la
nourrice. La première partie est le radical de le bouche,
semblable à celui de mounin baiser, la seconde est un
reste du verbe sucer. V. Traité pp. 15 et 17. C'est par
assimilation de l'eau avec la bouche ou la fontaine qui
la dégorge que se sont formés les mots minv arroser —
ma couler — mî aller — ^pw couler d'une source, d'un
fleuve — mare la mer (Skt. mira), muraena l'anguille
de mer, mergo je coule, muria la marinade (Skt. màr-
j'ana la baignade), la saumure, manare couler — mer,
murène, maritime, Meuse 3 Moselle, marais, la mare,
méat le couloir — moor, marsh le marais, mère le
lac — das Meer la mer der Morast le marais. Ces
mots sont desprosopopées au même titre que les pro-
duits de la bouche d'eau et du barant. V. ces mots.
— Le Skt. manda nous présente un congénère de
mousse écume. Mjron et morgane qui veulent dire
sel marin sont des assonnances à maron et à mor-
ganer (1) manger et jacasser. Le sel donne du piquant,
il mord en quelque sorte. En Argot le radical de la
(1) Le mot nous reporte à amelgo. V. Traité, p. 16. En Skt. Mriç
- 118 -
bouche n'exprime le feu que dans le mot méruche le
fourneau. Ce mot joue sur maure noire comme le nom
de l'ustensile de cuisine appelé coquemar. V. Traité
pp. 52 et 53.
Manger, donner de l'exercice à l'organe qui fait
entendre cette variété de sons radicaux mor, morg,
morf, s'exprime par l'onomatopée morfier (morfia),
morjigner et morjiler avec jeu de mots sur morJîL La
morfe est le repas, comme son congénère le mess. Le
morjil, le marfil est l'ivoire, la matière dont est faite la
dent qui mord. Le muget est la soupe, la lavasse que la
bouche barbotte. La mite doit son nom à ce qu'elle
mange les draps : ^aoiÇsiv être mangé par les mites,
devenir teigneux — manduco jejmange — démangeai-
son, mite — mangy galeux, moth la teigne, mite civon
— die Motte la teigne — H. made mite, mot teigne.
En Normand le man est le ver blanc (1). — Le mastar
est le nom du plomb qui recouvre les faîtes des maisons :
il le doit à sa nature ductible, à son épaisseur qui le
font ressembler au gras double. Or, mastar est une
adaptation phonétique de l'Ali, der Mastdarm l'intestin
droit de maesten nourrir, engraisser et de Bar m en L.
tormina les convolutions des intestins (2). Mastarou-
Jler veut dire rafler ou rouffler le mastar. — Mastoc
veut dire grossier, sans art. C'est une adaptation du
mot Ail. der Mastochs le bœuf gras. Pour le sens de
Ochs V. Traité p. 107. On dit à peu près de la même
(1) Le morbec et le morpion sont des parasites qui causent des
démangeaisons.
(2) Die Mast le pacage, le bois a donné le mât, Angl. mast, Ail.
der Mast l'arbre du vaisseau.
— 119 —
façon : un succès bœuf. — Le gallimatias est un dis-
cours confus. C'est un mot fantaisiste composé des élé-
ments gueule transformé en galli et matias souvenir
de Math ias, Matthieu, dans le fait, le radical de museau
qui a donné moutier le baiser, Angl. moût h. La partie
phonétique démontre que le gosier ainsi que la bouche
(le museau) se font entendre : le sens de cou fus découle
des circonstances. Dans galimafrée nous voyons la
gueule et la bouche (mafïïu) se donner un vigoureux
exercice : de là le sens d'un repas très-abondant.
Mordre est un autre acte du museau , Pour varier
l'expression on attribue cette propriété à la figure, au
visage qui en Argot et dans le patois Normand s'appel-
lent morgue. Ainsi s'est formé le mot morganer man-
ger. En Grec le radical a été employé pour rendre le
sens de voir, badauder et non celui de mordre : [jipow
veut dire considérer, remarquer, bien que le même mot
que mordeo je mords — mordre, remords — smart
douleur — der Schmers id. au figuré. Démorganer
veut dire démordre de ses opinions, ne plus s'entêter.
— Le sens de broyer, d'écraser vient s'enchaîner à
celui de mordre. Les instruments servant à l'écrasement
ou à des actes produisant le même effet tels que couper,
séparer, diviser prennent des noms dont le thème
remonte à la bouche et à son acte de mordre. Tels sont
p. e. le mailletj le martau, le martinet, la masse, la
massue, la meule, la meulière. Ainsi l'effet du coup
assimilé au broiement opéré par la bouche se montre
dans mac' frapper — \j.iyx:?x le couteau qui coupe,
Tépée — mactare abattre — la maque le brisoir, au
— 120 —
Centre mâcher, machurer, la masse — a smack (1)
un coup de fouet — die Schmicke le fouet. L'instru-
ment, quelle que soit la forme que l'industrie lui ait
donnée dans le cours du temps, garde toujours à travers
ses transformations progressives le nom primordial de
sa destination première. Le fouet s'appelle en Grec
puzoTiÇ. A la racine de ce mot on peut rattacher mas1
abattre, mêdt frapper, ma'dya maque, maf broyer —
[MGïiXkiù mutiler — mutilare, mutilas — mousse, mou-
que, émoussé — to smite frapper schmeiszen lancer.
Mixpéç Dor. [jl(xxœç représente l'effet d'un coup ; c'est un
morceau, un débris de. — La houe s'appelle mah abat-
tre— fxaxeXXa — mactare abattre, macellum boucherie,
mancus mutilé — le massacre,, le masquart le bou-
cher, manquer (où il y a eu diminution), manchot, la
masse, le moignon, matador, mater — to smash bri-
ser — mank manchot.
A la manque veut dire où il manque quelque chose,
incomplet. MauXiàç est le couteau qui frappe, qui coupe
(couteau-hache), Skt mar broyer, malana écrasement
malleus — malléable, maillet — to maul frapper,
small petit, un morceau de — schmal étroit, extension
du sens petit. Le moulin, le bocard où la pierre mue
par une roue écrase le blé s'appelle malana écrasement
[jujXy] — mula — moulin — mill — die Mûhle. La mil-
lerie est la loterie, la roue de la fortune assimilée à
celle du moulin. Le mouloir désigne les dents, sens
analogue à celui de molaires. L'Angl. mattock la houe
(1) Ce mot signifie encore le baiser, le bruit des lèvres quand on
embrasse et le goût, en Ail. der Schmatzle baiser, der Geschmack le
goût.
— 121 —
se rattache à mâfa la route battue, [AixaXXov la fosse,
la mine — semita, sentier, metallum — métal et mé-
daille — métal, sentier — das MetalL La mine elle-
même appartient au groupe jptvthj la pioche — minuo
— diminuer, menu, mine — mine la mine,, mole la
taupe qui sape, qui mine — mi /idem diminuer, der
Maulwurf la taupe, à proprement parler la taupinière.
Le sens abstrait de \xzvbq repose sur l'idée d'un objet
concret diminué, séparé du tout. — Nous venons de
voir le sens de [itxpéç et ses variantes small et schmal
se rattacher à maque et maillet : la soustraction, la di-
minution arithmétique, bien qu'étant une opération
toute intellectuelle ayant lieu sur des nombres et non
sur des choses^ remonte à un fait concret, celui de di-
viser, d'ôter une partie, V. au mot mine. Moins répond
à ;;.£'wv — minor, minus — moindre, moins — to make
smaller diminuer — mindern. — Le marteau _, le mar-
tinet répondent au Skt mar broyer,, mrid briser. Le
Latin marculus répond à brac de bric à brac et au H.
braken broyer. Le Latin mulco je frappe, multa ou
muleta l'amende dont on est frappé sont des variantes
de marculus : le / a permuté avec r comme dans re-
murca et remulcum la toue. Le morceau (Angl. mor-
sel) est obtenu par une morsure. Le c remplace le s.
La maturité est l'état du végétal qui demande à être
moissonné, coupé; meto moissonner,, messis la mois-
son, V. au mot mutiler, Ail. das Messer le couteau,
Skt maVa marteau. Le Centre possède les mots moi-
son tronçon et moisonner couper. — Mitonner signifie
bouillir à petit feu, de façon que la chaleur donne aux
— 122 —
légumes un haut degré de maturité. Le Latin mitis
doux est une des qualités de ce qui est arrivé à la ma-
turité. En Suéd. mûr s'appelle moyen, mûrir mogna.
Le H. mak veut dire doux^ traitable. Au Centre les
enfants mettent les fruits qu'ils ont picores quand ils
sont encore trop surs pour les manger de suite, dans
une cachette et ne les en retirent que quand le temps
leur a donné la maturité. Le mot est Scandinave comme
beaucoup d'autres employés au Centre. Les Goths l'ont
introduit et non les Latins et c'est dans leur langage
seul qu'on retrouve ce mot. Mag est une forme gothi-
que du latin mat. Le magot,, l'argent qu'on tient caché,
doit son nom par assimilation au magot des petits ma-
raudeurs. Mijoter a le sens de mitonner sous une forme
un peu différente. Dans le H. quand on élide le cl on le
remplace, dans la prononciation du moins, par un j :
moecier — moejer mère. — Rendre malléable semble
s'être reproduit dans |ÂaXàtàu — mollio — malaxer,
mollir — mild mou, doux — mild id. Une variante de
malleus se présente dans fiipjbôv la houe — marra — la
marre — to maul broyer — die Schmarre le coup, la
balafre — Skt ma/% marn broyer.
Le partage, le morcellement s'exprime par des mots
formés de diverses racines primaires provenant de sons
bucaux avec m : marya borne — ^sp(Ça) je partage —
meridies — méridien ou (Skt. maf broyer) yAcoq —
médius — médian, moitié — micldle milieu — die
Mitte le milieu. De là être de mèche être de moitié ; un
mistich un voleur étranger opérant en France, un métis,
un demi- race, mistiche demi. Le moyen est l'instrument
— 123 -
par lequel on effectue quelque chose, l'intermédiaire,
la voie qui conduit du principe à la fin, en Zend madh,
miïas mutuellement — \Uoqh — médium, remcdium,
medeor — remècfej moyen — means moyen, middle-
rate moyen terme — das Mittel le moyen. 77 n'y a pas
mèche veut dire: il n'y a pas moyen. — Mêler deux
deux choses ensemble est dans le sens le plus simple
prendre la moitié de chacune d'elles et les réunir. C'est
le sens que comporte la forme du mot : micr ou misr
mêler — [M^eu — misceo — mixture (1), mélange —
to miru jle, to mell mêler, to medde se mêler de, among
parmi — mengeln mélanger. Majaw, jwrfùi pétrir sem-
blent être des variantes de [i(f« mêler et signifier en fait
mélanger, réduire en pâte — maceria le torchis —
maie, mie, miette, miche, masser. Le miche ou michet
est celui qui a de la galette, des ronds, la miche étant
ronde; le macaron l'huissier, le notaire dont l'enseigne
a la forme du macaron, pâtisserie en forme de miche.
La maquette est l'ébauche faite avec une matière pâteuse
comme la miche. — Fichumacer veut dire faire un
fichu travail. Ce macer ou masser et avec jeu de mots
sxxvmaculer et maquillage, maquiller répond à wyayàw
effectuer à l'aide d'un moyen, wysq le moyen, l'expé-
dient — machinor — machine, mécanique — to make
faire — machen id. , V. au mot moyen. Par jeu de mots
on appelle le travail le mastic et travailler marner.
Mêlé à ou mêlé avec s'exprime par la préposition
\kziz — meta — meta — meeting une société, des gens
(1) La grandeur, au concret, résulte du mélange: Skt. mahat, (jiyaç,
Angl. much et la variante multus, moult, skt. mayxu baucoup.
— 124 —
qui s'assemblent, met qui s'est rencontré avec, to meet
rencontrer — mit avec, ensemble. La réunion des deux
moitiés a fait le mariage : l'une des deux moitiés s'ap-
pelle [jipo; la moitié, la partie — mas - maris le mâle
le mari — man l'homme — der Mann id., en Skt manu,
AU. der Gemahl l'époux. La ménesse est la femme.
Ces trois derniers mots rappellent la racine de commu-
nié commun, communauté etc. V. au mot mêler. Mas-
culin rappelle miscere mélanger. La femme la moitié,
est en Lat. mulier. La racine de ce mot a formé égale-
ment L. mulus la mule, Angl. mule, Ail. das Maul-
thier, le Suéd. emellan parmi. La moucaire la femme
malpropre est une édition peu correcte de l'Esp. muger
de muliei' femme. Le mot Angl. man reparaît dans
mannequin, la mounine la femelle et dans les mots du
Patois Berrichon mogne, mougne, moigniau la petite
fille, la petite femme. Les époux mas et mulier s'ap-
pellent en Suéd. make, c'est-à-dire les personnes
mariées. En H. de magen veut dire les parents. L'An-
glais a le mot match la réunion des époux et, par
extension, de personnes et de choses qui se conviennent;
de là le sens de égal, pair, compagnon. Le compagnon,
l'ami assorti s'appelle en H. makker ou quand il s'agit
des compagnons dans la marine : muât, Suéd. make,
Angl. mate, to mate, to match être pair et compagnon
avec. Le Skt maetrya veut dire amitié. Il se peut que
du nom H. maat, arrangé par jeu de mots en Mathurin
et Mathelin, soit devenu le nom matelotet son homonyme
Mathurin. Le H. a par la suite emprunté au Français
le mot matelot qui par contraction est devenu matroos,
- 125 —
avec le même sens que maat. En Angl. matros veut
dire servant d'artillerie de marine. Les Mathurins ne
sembleraient pas avoir à faire autrement que par jeu
mots avec saint Mathurin qui est le patron contre la
folie (1). Faire trimer les mathurins veut dire par jeu
de mots mâcher, mettre les mandibules en mouve-
ment (2). — De l'idée d'union naît celle de pluralité.
L'une et l'autre s'incorporent dans le même radical.
Ainsi moult, multiple, multitude rappellent par leur
racine les mots mulier, mule et l'Ail, cler Gemahl
l'époux, sic h vermâhben convoler. Formés d'un autre
radical, reproduction également d'un son de la bouche,
nous trouvons les mots makâ grand — ^va; — mag-
nus — magne grand, c'est-à-dire beaucoup de qualités
réunies, mélangées — mucJi^u. pluriel many beaucoup
— mancher plus d'un. — Le Meg des Megs est le
Grand des Grands, Dieu.
La main emprunte son nom à la bouche. Chez l'en-
fant, aussitôt qu'à la vue d'un objet le désir s'éveille,
les yeux, la bouche, la main semblent obéir à la même
inspiration et rassembler leur effort en un mouvement
unique, celui de prendre possession de la chose convoi-
tée. C'est pour cela que ces deux instruments du moi
portent le même nom : muni poignet — [xapy; (1) —
manus — main. L'Angl. et l'Ail, n'ont pas le mot avec
(!) La folie s'appelle en Skt môta le trouble de l'esprit, Angl. mad
fou, It. matto. Le sens parait être qui s'amuse à des choses insensées.
Le Skt mûr a veut dire fou.
(2) Ajoutons que le Holl. op mijn gemak à mon aise veut dire que
la position me va. est en harmonie avec mes désirs. L'Ail, gemdchlich
exprime le même sens. Le Skt man veut dire désirer. Angl. to minci'
(3) Le radical mn se trouve dans la métaphore {jlvôc — mina — mine
la mesure, minot. V. au mot mètre.
126
la même labiale, mais Angl. fanrj la griffe, Ail. die
Finger les doigts qui dérivent de bouche le remplacent
dans l'esprit de ces peuples et n'en sont du reste que
des variantes. — La manique est le gant et le métier,
la main d'œuvre; faire la manivelle, jouer à la mani-
velle sont des jeux de mots sur manique et des syllepses
de turbin : la manivelle a un mouvement rotatoire, le
turbin également. V. ce mot. A propos de museau
Suéd. mun et" de main ajoutons que le son radical de
moi, l'ensemble des désirs personnels, est pris sur les
lèvres qui demandent : ma^x désirer — [xaw id. —
amo aimer. Le pronom personnel mâm moi — y.i —
me — moi, me — me — mich et les possessifs assortis
représentent l'acteur pris pour l'acte. Moi, cette chose
parfois si oublieuse des autres, rappelle le premier âge,
Les lèvres l'ont appris en s'attachant à la mamelle,
mais comme tout notre moi était tourné vers le sein de
notre mère, c'est ce mot et celui de papa que nous
avons appris les premiers. Ce n'est que plus tard et
seulement à la suite des satisfactions reçues que le sens
du moi se développe outre mesure et que le mot devient
odieux. Le Skt maga veut dire le bonheur — le G.
;j.a-/ap bienheureux, l'Ail, ich môchte je voudrais. La
bouche étant l'organe de la parole qui retentit à nos
oreilles, c'est elle qui a prêté son nom au mot. Tout ce
que la bouche profère de sons significatifs pour en com-
muniquer le sens à nos semblables s'appelle mot, acte
et produit du museau. Exercer l'organe de la phonation
s'exprime par muj' ,. munj' parler, maç, miç crier, max^
murmurer; l'effet se trouve dans [j.ùOz; — mythus —
— 127 —
mythe, mot — to mutter murmurer — der Volksmund
le dire des gens, die Mundart le dialecte. Mot est une
variante de izzq la parole et de verbum verbe dont les
correspondants dans les langues congénères ont un sens
plus vague : tatpfapifay parler, ïpM avec perte du dé-
gamma parler — verbum — verbe (1) — word — das
Wort — Suéd. ord la parole. — Renfermer la parole
dans la bouche, la comprimer en serrant les lèvres pro-
duit le mutisme : mûka muet, mona silence — ;/uvcb;
id. — musso ne pas ouvrir la bouche, mutus muet —
marmotter, marmonner murmurer tout bas, mystère
— mumps le silence, la bouderie — mùcken ne pas
dire mot avec un mélange de bouderie. Motus et mut,
deux mots du patois, signifient le secret : on les fait
comprendre par un geste qui consiste à serrer les lèvres
et à mettre le doigt dessus. Le mystère est la connais-
sance qu'on ne divulgue pas. La mystification s'appelle
de là mistouf, mistoufle. La maffia, société secrète
formée en Italie, dont on a parlé beaucoup, il y a quel-
que temps, à propos des événements de la Nouvelle-
Orléans, est une forme du mot mystère qui s'approche
de mufle. Nous avons à faire, en effet, au radical dont
on a formé mafflu et le maffion l'enfant dont le museau
exprime la vivacité, le mouflard au visage rebondi,
AU. der Mùffel l'homme aux grosses babines. A côté
de maffia il convient de placer moufler couvrir, enve-
(1) Le mot verbe la parole et verbe nom d'action, est une preuve
que les mots sont à leur origine des verbes. Le verbe substantif est
un mot d'élection ennobli par ses acceptions élevées. Au point de vue
du son il répond au thème de barbarus, de bdlbus et rappelle le mot
Esp. las barbas le menton, l'organe labié.
128
lopper de mystère, Angl. to muffle, mot parallèle à
boucher, fermer l'embouchure êùw, — la moufle, H.
mqf, Angl. muff, Ail. das Mïiffchen la mitaine qui re-
couvre la main d'où emmitoufler, — misti enveloppé,
— la moufle le couvercle, Ail. die Muffel. La mitaine
est une variante formée du radical que nous avons ren-
contré dans mutisme : elle emmitoufle la main et la
protège contre les intempéries.
L'anglais a to smuggle; TAU. schmuggeln passer se-
crètement des marchandises sans payer pour elles les
droits d'entrée, mogeln tricher au jeu, der Meuchel-
mord le guet-apens dans le meurtre ; le Skt a le mot
mus1 dérober. La malle arrive à désigner le secret, la
cachette par la même voie que la moufle. La serrure,
la cachette sont assimilées à des lèvres qu'on serre. Le
radical est ml : nous l'avons vu dans mulet le poisson.
V. ce mot. La mitre, la motte, le muitard la prison où
l'on met les malfaiteurs au secret, la muette, la mue,
Angl, mew, (au Centre se musser se cacher, la mus-
souère la cachette,, la musse trou caché pratiqué dans
une haie), la meute la bande de chiens qu'on tient dans
la muette doivent leur nom au sens de mystère, de
cachette qu'ils expriment. Au Centre on rencontre
encore le mot moume avec le sens d'enveloppe des
fleurs des graminées et moque ou mente capsule de la
châtaigne qui ne contient pas de fruit. Le morion le
casque d'assaut présente une forme congénère de ca-
chette faite du son bucal moi\ Comme celui-ci Vau-
musse, AU. die Mùtze, H. de muts emmitoufle la tête,
acte qui s'appelle en Skt munf couvrir, cacher, mand
— 129 —
couvrir, vêtir, dont mante et manteau sont des formes
connexes. Par une association d'idées très-rapprochées
l'une de l'autre la cachette s'assimile au mur : c'est ce
que les mots semblent indiquer : mura clôture, mur
envelopper — ap.uv« la défense — murus — mur —
mure — die Mauer ou avec n munt couvrir — à^vw je
défends, mœnia la muraille, munimentum — munir.
Oter l'enveloppe s'exprime par la forme verbale du
substantif : mundare. De là mundus (1) nettoyé, dé-
pouillé, mondé, émondé, et par conséquent pur, pro-
pre.
La bouche sert à l'expression des états de notre âme.
Dans sa mimique elle entraîne les autres parties de la
figure, si bien que selon la variété de nos impressions.,
la physionomie présente un masque différent. A cha-
cun des mouvements de la bouche répond un son qui
est en parfait accord avec ce mouvement et qui donne
ainsi une voix spontanée aux états de notre âme. Nous
allons voir ces sons radicaux ainsi que les mots qu'ils
ont fourni au langage en se transformant en onomato-
pées. Le regard, l'examen, l'étonnement, l'admiration,
le désir, la méditation, le calcul, le mystère s'expri-
ment par des mouvements de la bouche en y provo-
quant un mouvement particulier. Ces pensées et ces
émotions sont loin d'épuiser tout ce que la figure est
capable d'exprimer. — Elle sert de type pour qualifier ce
qui est beau. Ainsi l'ancien Français dit qu'un objet
est misti pour dire qu'il paie de mine, qu'il est d'un
(1) Mundus le monde pourrait avoir le sens du monde élégant, poli,
comme -/.o-tjao; monde, veut dire ce qui est égoussé, ce dont le contact
n'est pas rude. V. au mot gousse.
130
aspect agréable ; muche et moût veulent dire gentil ,
mignon a le sens de charmant, aimable. Muche a pour
correspondant Skt mayk orner, Ail. schmûcken em-
bellir, H. mooi. Affecter la gentillesse par des mines
étudiées s'appelle mignarder, minauder, faire des
mistions. Des mièvreries sont de petites mutineries,
de petits airs effectués avec la bouche (mufle). L'Angl,
miffish veut dire boudeur. La mijaurée est la femme
qui mijaude, qui cherche à être mignonne. Faire mine
de se retrouve dans le mot [aùvïj l'apparence, le pré-
texte. Les nuances de la laideur percent dans marron
déplaisant comme la figure du marronneur, dans
moche, mouche ce qui présente un air de moue. La
menace en L. minœ, (minax menaçant) appelle devant
l'esprit une mine sombre qui médite la vengeance. Le
sourire donne à la bouche l'expression du contentement
charmé : smi — («tîtaw sourire, Angl. to smile, to
smicker, to smirk sourire, Ail. schmeicheln sourire,
cajoler. Le H. smeeken supplier, dénote une expres-
sion attristée et boudeuse du museau. Léminence est
par prosopopée une hauteur dont la mine, le front dé-
passe le pays à l'entour. — S'amuser est dans le fait
être là le museau bâillant, regarder à l'aise ; de là n'a-
voir rien à faire, être libre de soucis, s'oublier dans ce
que l'on voit. L'argot dit se marrer, offrant ainsi au
Français classique un mot que celui-ci n'a pas et qui
existe ailleurs : Skt mrêd être fou — [xàpoc le fou,
l'homme amusant — morio id. — marant risible —
merry plaisant. Le correspondant Ail. manque. La
richesse des racines dans l'Argot est le résultat de son
— 131 —
habitude de préférer le son naturel : il l'entend se pro-
duire dans des circonstances dont ses yeux peuvent se
rendre compte. 11 compose son langage plutôt avec les
sens qu'avec la réflexion. Il ne synthétise pas assez pour
trouver des abstractions au sens universel comme dé-
mence) un détraqué, un aliéné sont des qualifications
raisonnées créées par un effort du cerveau. Aucun de
ces termes n'a rien d'individuel, rien de précis. Il faut
à l'Argot ou le nom juste comme mavant amusant, qui
a été cueilli sur la bouche du badaud qui s'amuse, ou
une image qui peigne bien la situation, p. e. : il bat la
campagne. Le voici qui surprend encore le son propre
de la badauderie : le matassin est le museur, d'abord,
celui qui s'amuse, et ensuite l'homme plaisant, risible,
qui amuse les autres. Pas plus que marrer ce mot
n'existe dans le Français classique. Le Grec a p&raibç
museur et de là vain, plein d'inanité, Angl. mad fou
(to mouthe regarder), It.matto. — On devient malin (1)
à force d'observer : mariole est la qualité de celui qui
s'est bien rendu compte, qui est devenu avisé à force
d'ouvrir les yeux ; le marlou (2) est un finaud ainsi que
ses homonymes le marloupate, le marloupiat. C'est un
individu qui mouchicote. Le loup en tant que mot est
la gueule qui hurle (ulf). Matois veut dire rusé comme
le matou, — miter se conduire comme mites, fureter.
Mites équivaut à l'Ail, der Mietz — H. mies. Ces mots
(1) Le Skt mala sale, le L. malus mauvais, mal ce qui l'ait rechi-
gner, ce qui provoque sur les lèvres l'expression du déplaisir. V. ma-
larder.
(2) Le marlou a été fainéant, museur, gaffeur, guappeur avant de
devenir souteneur : le sens primitif est gaffeur.
— 132 —
et leurs variantes Angl. et Yi.jniss et poes semblent
être le mot mus - mûris souris, AngL mouse, au pluriel
mice, Ail. die Maus, plur. die Mâuse, H. muis qu'on
répète au chat pour attirer son attention (en Grec) est
qj,(vôa. Le sens du mot semble être sapeur, mineur,
mulot, l'animal qui fait des trous. V. au mot mine.
Mites et matou n'ont les radicaux mit et mat que grâce
à la fantaisie du jeu de mots. Moumoute est le petit
minois, la petite chatte. — La chattemite est la per-
sonne qui se fait douce comme mites pour mieux sur-
prendre. Croquemitaine est mites qui croque les souris
employé comme épouvantail. — Mâtin et mâtine sont
des qualificatifs du finaud. On veut dire matois, madré
mais on préfère un jeu de mots sur mâtin le chien de
race mélangée, le métis, V. ce mot. Madré } madrice,
madrin sont le mot madré et ses variantes qui veulent
dire variole, pointillé, au lieu du terme propre matois
rusé comme chat. — Madré qui se dit des taches dans
le bois et sur la peau est une corruption de macula
macule, Angl. measles la rougeole, Ail. die Maseru
id. — Maculer répond à [j/.aivw maculer, à l'origine, avec
les mucosités qui coulent de la bouche. Macula est le
point où la salive (Ail. spuck) a touché et forme mou-
che (Angl. speck) en quelque sorte. Le Skt a mud
émettre, faire jaillir d'une bouche. Le madrouillage
est la ruse. — Moumer veut dire remuer la bouche :
c'est une variante labiale de bouger > Ail. mîicken, H.
mikken. Pour l'expression de la moquerie et du men-
songe V. les radicaux et les dérivés, Traité, pp. 68
et 69.
133
Le canal du nez a deux embouchures, l'une sur l'air
extérieur, l'autre sur le pharynx et les poumons. La
continuité de ce conduit est ménagée par la langue qui
en se collant contre le palais empêche la cavité de la
bouche de s'y amorcer et de constituer une seconde
issue (1). Les bruits que le passage de l'air provoque
dans ce canal sont différents selon qu'ils se produisent
sur l'un des trois points indiqués. Quels sont ces bruits
et par quels signes alphabétiques les reconnaissons-
nous?
(1) Si ce sont les lèvres m of /qui interceptent le passage de l'air
par la bouche, il passe soit dans les fosses nasales en faisant entendre
un sifflement s comme dans museau, soit dans le pharynx où il pro-
duit le son g eomme dans mugir, mucus, moucher, remouehicoter, ou
bien il occasionne l'apparition des sons n, t ou nt parce que, pendant
que le nez souffle, la langue est collée contre le palais. Nous avons
rapporté les onomatopées ainsi formées à la bouche parce qu'elles se
présentent avec un m initial.
LE NEZ
Tout le monde peut se convaincre que dans les nari-
nes l'air donne le son du sifflement réprésenté parl'hy-
éroglyphe S, image du serpent qui se contourne et qui
siffle. Dans le pharynx l'air provoque un bruit guttural
r qui lui-même entraîne le son de la gorge profonde, le
g ou le ch. Du côté de la langue c'est le n qui s'ébauche.
Si la pression de l'air force la langue à se serrer davan-
tage contre le palais et à glisser en avant c'est le son nt
qu'elle produit en se détachant de la voûte bucale; si,
au contraire, un serrement intense de la langue refoule
l'air vers le pharynx, c'est un g qui se dessine. Les
consonnes s, i\ nt chacune accompagnée d'une voyelle
plus ou moins ouverte forment ainsi les sons naturels
que le fonctionnement de l'organe fait entendre. Cha-
cune, soit qu'elle se produise séparément, soit accom-
pagnée de ses voisines, rendra un bruit significatif de
l'organe et de ses actes. Chacun de ces bruits présen-
tera pour l'étymologie un thème primaire, une racine
irréductible qui est le terme ultime de l'investigation
linguistique. Au delà nous tombons dans le domaine de
la physiologie : à elle d'expliquer la nature des organes
ainsi que les causes qui déterminent leur action. Cette
racine ainsi générée est monosyllabique. En eflet, c'est
toujours, soit un seul organe, soit deux ou trois réunis
dans un accord parfait qui produisent un bruit ou sim-
— 135 —
pie ou bien composé, mais d'une façon indissoluble.
Pour notre esprit le sens de cet acte est simple et irré-
ductible également. Le bruit et l'acte qu'il accompagne
sont inséparablement liés à l'intelligence que nous
avons de l'un et de l'autre. De cette union intime est
né le sentiment de l'harmonie imitative des mots, c'est
à dire des onomatopées qui reproduisent la voix des
choses agissantes. L'acte, le son et l'intelligence s'en-
chaînent si bien dans une seule inspiration, dans un
seul mouvement qu'ils forment une trinité dont les élé-
ments, bien que pris à part, s'appellent Constamment
l'un l'autre. Ces bruits employés comme noms des actes
donnent des onomatopées, c'est à dire des mots qui
reçoivent la mission irrévocable de servir de signes
pour les choses de l'expérience humaine. Ce ne sont
plus des voix spontanées et involontaires qui échappent
à la vie dans son activité, mais des signes reconnus
exacts et vérédiques que nous employons sciemment et
avec intention pour rappeler des faits lors même qu'ils
ne sont pas présents. Le mot est ainsi la première his-
toire de l'homme en société en même temps que la plus
intime et la plus populaire des épopées d'une nation.
La plupart des mots exprimant un acte du nez pré-
sentent des métathèses l'un de l'autre quand on les com-
pare entr'eux. Or ces métathèses n'ont pas été faites de
propos délibéré. Le grammairien "qui s'est chargé de
transmettre les mots par l'écriture les a notés dans l'ordre
qu'ils semblaient présenter à l'oreile, et a donné la pre-
mière place à celui des trois s, n, r, qui prédominait
dans le bruit, d'où il lui est arrivé quelquefois de ne
— 136 —
point tenir compte des autres.
Le nez comme organe a plusieurs propriétés : il re-
spire, hume, éternue, sent, perçoit, se rend compte pour
éclairer l'intelligence; il a ses impressions de ce qui
est bon ou mauvais et par extension de ce qui est
convenable ou non. Assimilé à la bouche il en accepte
les attributions. Le bec de l'oiseau et la prédominance
de cet organe dans la figure des animaux l'ont fait con-
fondre avec la bouche. Le museau, le mufle, le groin,
la hure désignent le nez et la bouche à la fois.
La respiration nasale se présente dans an respirer,
antar âme — afvsnoç animus — anémomètre et avec la
notation de la labiale dans le Skt. vâti vent, l'Angl.
wind le vent — der Windid. — Suéd. and esprit et
souffle. — La puanteur s'appelle çvôoç le fumier. — Le L.
anima est l'acte du soufle vital transporté à ce qui est
impérissable dans nos désirs : la conscience d'être, de
sentir, d'aspirer à un'idéal de bonheur. Le Grec ex-
prime l'âme, la vie de la conscience par ^u^ onoma-
topée du souffle labial. Ce mot se compose du souffle
linguo-labial psu entraînant un son guttural ch. V. le
radical ps au chapitre bouche. Le n en refoulant l'air
comprimé par la langue vers le pharynx y fait naître
un g. Ce son ng a donné lieu à plusieurs onomatapées :
Suéd. àng la vapeur, le souffle — a%ku<; la vapeur, le
brouillard et à des dérivés exprimant lapénurie du souffle :
à'Yx<*> ôter le souffle, #jnr*péç (prononcez ng) celui qui
s'essouffle, qui peine — angélus ange, le messager —
ahaner s'essouffler -*■ angel l'ange — der Engel id. (1)
(1) Aspirer après donne au Skt. vay.r désirer, Angl. tu wish, Ail.
— 137 —
Le nom de la vie doit sans thème au son du souffle
nasal : friu V. Traité p. 57. L'organe prend le nom des
bruits qu'il fait entendre. Le nom le plus commun est
le nez : Skt. nâsa. Le Grec a la forme métathétique de
naris narine dans ptv le ronflant et la forme nez guttu-
ralisée dans kvcoww ronfler, dormir — nasus — nez —
nose — die Nase. L'Argot a le mot schnes le nez qui se
place à côté de TAngl. snout, Ail. die Schnautze — H.
muit — Angl. et H. snot la morve; H. den neus snut-
ten se moucher; un jeu de mots a donné nazareth le
nez. — Le son des narines reparaît dans le Skt. navd
mugir — vàpxtj le ronflement, le sommeil léthargique et
la torpille qui donne le sommeil électrique, Sveipoç le'rêve,
le sommeil; anal, à somnium sommeil et songe — nar~
coticus — narcotique — to snore, to snort faire trom-
bonner le nez en dormant — schnarchen id. L'organe
s'appelle en Ail. die Sehnurre nez ou narines et gueule
d'où der Schnurrbart la moustache, le poil du nez —
H. opsnorren rechercher en reniflant.
Un bruit nasal qui ressemble à un ronflement sort de
la corde qui vibre : pour cela on lui a prêté le nom de
cet organe comme le démontrent snâsa la corde —
vsopsv — neruus — nerf — snare ou noose le lacet dans
lequel on prend le gibier — die Schnur la ficelle — H.
snaar la corde du violon, snoer le fil. Ces mots sont le
phonème métathétique de péyxw ronfler l'acte du rynche
qui s'annonce par ce bruit spécial — ronchizo — ronfler,
ronronner — H. ronken. L'Angl. ni l'Ail, n'ont ap-
pliqué ce radical au sens de ronfler. En Argot le ron-
vùnschen. Suéd. enska.
— 138 —
Jlant est le poêle qui ronfle. V. p. 127 du Traité. Le
mot nuage en Skt. nak est une prosopopée du souffle
du nez. V. Traité p. 51. L'Argot a tiré de 1 AU. le mot
nasalbor onguent pour faire disparaître la rougeur du
nez, de Nase et Salbe onguent. Les gens à la recherche
d'expressions nouvelles disent mon niert, (1) mon
gniasse pour moi-même et par une tournure analogue
mon orgue (nez)^ ma fiole, expressions qui rappellent
le ronflement et le souffle du nez. Le nez dont niert et
gniasse sont des déformations tient lieu ici de la physio-
nomie, de ce qu'il y a de plus personnel dans l'individu.
Le snoboye est par métaphore un homme qui a des
goûts plats, qui s'émerveille de choses ordinaires: dans
le premier cas il est synonyme de mw/fe, dans le second
de gaffeur. Les mots Angl. snob et snobbism marquent
un homme et des manières sans distinction. Snoboye
veut dire aussi splendide, ce qui a de la mine (Snob
rappelle le reniflant le nez). Au Centre le mouchoir s'ap-
pelle le gniau. Le son du nez sert ici d'indice pour le
blavin. — L'Argot qui a le sentiment de la verbalité du
sens des mots trouve d'instinct le renâclant et le reni-
flant pour le nez . Renifler (2) aspirer par le nez a des
correspondants dans to sniff sentir, prendre le vent, to
snuff priser, ou par un mot naturaliste qui est la méta-
thése du verbe Angl. fanfouiner] — Ail. schnauben souf-
fler du nez. — H. snuiven priser, aspirer le vent et
(1) Pour dire moi-même on a inventé également les expressions me-
sigo (moi et ego), mésigue et avec jeu de mots mézieres.
(2) L'Argot a renobler pour reconnaître, mais comme ce mot dérive
de gnosco avec g initial nous le rapportons aux expressions formées
des sons du gosier.
— 139 —
souffler du nez, snuffèlen fureter (1), sneven et sneu-
velen expirer. — Le nez qui se confond dans ces ex-
pressions avec le rostre ou bec, comme nous le faisions
pressentir plus haut, a donné en fait de mots provenant
de cette racine: Angl. s/iqffle espèce de mors qui bou-
che à volonté les deux narines, snipe (2) la bécasse au
long nez ou bec — Ail. der Schnabel le rostre, die
Schnepfe la bécassine et la grue dans le sens de l'Argot
— H. snaoel, snep et snifi bec.
Les mots odeur, ozone jSeateunsont faits du thème de
l'aspiration nasale s ou d, V. Traité p. 56. Sentir ré-
pond au Skt. ci^g* flairer et sentir bon. — Le sens de
de l'odeur servant a la reconnaissance, la renifler pu
contracter le sens de la police, le renijleur (3) de l'a-
gent qui comme le chien se confie au témoignage du
nez pour se mettre sur la trace du malfaiteur. On s'a-
perçoit parce synonyme de mouchard combien la police
fait l'objet des préoccupations de l'argot criminel. Re-
nifler veut dire aussi reculer parce qu'on a vent des dif-
ficultés que présente l'affaire dont on nous parle. Gniouj
est un son nasal par lequel on exprime que. l'odorat est
satisfait et que l'appétit est éveillé; il en est probable-
ment de même pour ni/': du vin nif, de Veau nife dési-
gnent du vin clair, de l'eau limpide et fraîche qui n'of-
fense pas l'odorat. Lef du son nif semble indiquer que
les ailes du nez ont touché la cloison médiane et ont
(1) Le Skt. nisk qui veut dire considérer, peser, renifler a un sens
analogue.
(2) La connivence dénote qu'on ferme d'oeil comme un bec; le mot
du Centre niber a le sens de voir, de regarder avec de petit yeux.
(3) Le Latin nasutus veut dire malin, le Skt. niç penser, méditer,
nisn-ita habile, instruit.
- 140 -
formé le /'habituel aux lèvres. — Le gniqf \e cordon-
nier tire son nom de la senteur de la poix et du cuir
neuf qui imprègne ses habits et sa boutique. De la
gniaffer synonyme de saboter, faire de la mauvaise be-
sogne. Il y a du g nqf veut dire qu'on sent quelque chose
de suspect. Après rafle gniqf donne à entendre qu'après
un bon coup de dés ont tombe dans la déveine, nommée
par les Allemands Pech poix qui sent, qui excite le
son gniqf du reniflant. — Les mots nez, nasal ont sug-
géré la déformation la renache ou Varnache, synonymes
de la renifle la police. L'Argot Angl. a le mot nark
espion. Le renaché est le fromage dont on sent les
odeurs acres. Ces expressions donnent une nouvelle
preuve que le peuple aime à s'exprimer par des mots
qui reproduisent la perception par les sens et s'écarte
des termes réfléchis tels que police, agent, la sûreté, la
brigade centrale, — Renâcler (1) veut dire se montrer
peu satisfait, synonyme de renifler. Dans cet ordre
d'expressions et d'idées nous avons les mots renas, le
renaclement, le mécontentement, le renaudla, querelle,
le bruit qui en est la suite, en Skt. nind blâmer, en Gr.
ovetèoç le blâme, le renaudeur le grognon. — Le bruit
du nez est par fois pris pour celui de la bouche: de là
le Skt. nâs crier, nal parler, les termes d'Argot narguer
confesser, le narquois espèce d'argot, Ail. schnattern
remuer le bec, le schnes — H. snappen et snateren
jaser.
Nous avons déjà vu le nez exprimer dans sentiment,
(1) Le Skt. a nal avec l pour r sentir; l'Ail, schnurrer pour fureter,
examiner du nez. Le mot Suéd. sniit exprime le génie, en principe le
nez, le flair.
— 141 -
renifle, renache, renâcler, renifler des fonctions du
sentiment intérieur. Quelque naturaliste que soit leur
origine, ces mots deviennent des signes d'actes appar-
tenant au domaine de l'esprit. Narguer, narquois,
l'Angl. to sneer, l'Ail, die Sc/i/iurre, die Schnarre la
moquerie, schnurrig comique indiquent certaine ex-
pression qu'imprime au nez le sentiment de ridicule et
de mépris que les faits et les gestes d'une personne font
naître dans l'esprit des autres. Der Narr Allem. est le
sot.
Le nez assimilé au bec fait comme lui fonction d'or-
gane préhensile : de là l'Angl. to snatch, Ail. schnappen
prendre, le Schnapps Ail. et Argot, la goutte qu'on
avale d'un trait. Le schnick est la goutte et l'eau de vie:
c'est une variante du H. slohjeune gueulée. V. au mot
lac. Le Patois du Centre de la France contient des ono-
matopée nasales que le langage populaire de Paris sem-
ble ignorer, p. e. un nasillard, quelq'un qui renâcle,
nasiller jaser, parler avec malveillance, (H. snateren),
le gnoufe, le gnoufle le nez, arnauder maltraiter (re-
naud), renieer, amoqueter refuser, en Limousin niflo
nez, siner priser. V. le Dictionnaire des Patois du Cen-
tre de la France par M. le Vicomte Jaubert.
Le mot ?>;/:; metathèsede nares — rostrum le bec —
ringor tordre la bouche, rictus — ornithorynche —
reedle roseau par prosopopée, rush id. — der Rûssel
la trompe,, das Rohr le roseau (1), le tube et par méta-
phore der Runks le mufle nous conduisent du nez à la
(1) Roseau et ses congénères Angl. et Ail. s'appuient sur pwôtov le
nez, d'où ruderc, rugir, raire.
— 142 —
gargouille, variante de gorge et gosier. Les Patois du
Centre nous ramènent au radical de ce mot avec rignaut
grognon, rigner, roincer, roigner, ruinger, runger
grogner, roincer et roinger ruminer, c'est à dire expulser
le contenu de l'estomac avec un rôt afin de le remâcher,
rouincer pleurnicher; le langage populaire et l'Argot
avec ronchonner montrer sa mauvaise humeur en gro-
gnant, rogner être rogne, rognionner même sens que
ronchonner. — Ici s'arrêtent les citations des mots où
la présence de n indique spécialment que le nez a sapart
dans la production du son de leurs racines. Les onoma-
topées avec leur sens soit primitif soit métaphorique qui
vont demander notre attention reposent sur les bruits
de la gorge provoqués dans cet organe par des causes
physiques ou morales. Le son r qui part de la gorge s'as-
socie avec ceux que produisent les autres organes de la
la parole entraînés dans le mouvement. Nous nous trou-
verons ainsi en face de son simples et complexes qui se
rendent par les phonogrammes r, rr, rg,rch\rt9rth,
ri, rm, m, rng, etc. Ce que nous avons vu arriver'avec
le b et le m de la bouche se reproduit avec le r guttural.
Dans les deux cas ce sont des raisons physiques et
morales qui déterminent l'intervention des organes dans
la production des sons afin de les accorder avec la di-
versité des impressions dont ils sont le signal.
LA GORGE
L'Argot nomme l'organe la mette, employant comme
presque toujours l'homonyme au lieu du son certain et
ferme. Il était cependant si près du Lat. os-o/is bou-
che (2). Ce mot a pu provenir de l'association de la
gorge avec le ravin (la gorge), la rigole, le ru dont/w
(cou loir) et /-a et te sont des variantes. LeSkt. a ru par-
ler, ran résonner; leSuéd. rôst le cri. Comme organe
de la parole le gosier a produit des onomatopées congé-
nères en rue" parler — pôu id. — rhetor — rhéteur —
to rout parler à tort et à travers, to roum, to rown, to
round parler bas (du gosier), to ring résonner — vaurien
parler bas, die Rune, la rune la parole mystérieuse —
H. rinkelen résonner. C'est lui encore qui donne eFpco
demander et parler — oro prier, rogo demander — ro-
gatoire, interroger, oraison. L'Angl. to read signifie
lire mais veut dire dans le fond parler, reproduire la pa-
role écrite. L'Argot dit d'une façon analogue babiller
pour lire. L'Ail, reden veut dire parler. Le ragot est le
bavardage, métathèse de argot le langage guttural. Au
Centre des rogatons veut dire du rabâchage, roga-
touner, roincer, rouinger rabâcher. De là le Français
(1) L'onom. Grecque orôfxaveut dire la voix, d'où son sens actuel de
bouche. 11 répond à l'Ail. Stimme voix, H. stem id. radical produit par
le mouvement de la langue et des lèvres. V. au mot tatouil. Os est
lorgane au son duquel nous devons les phonèmes aura air, L., et uru
poitrine, Skt.
— 144 —
des rogatons des restes de viande, qu'on sert de nou-
veau. L'Argot a le mot arçonner parler avec jeu de
mots sur arçon. Le mot argot désigne un langage se
composant de sons gutturaux, du moins où il n'y a
qu'une chose de claire,, c'est à dire que le gosier marche
tout le temps. Les Grecs et les Romains appelaient les
étrangers des barbares parce qu'ils n'apercevaient de leur
langage que le mouvement labial bar. Le Centre a les
mots ricard le geai qui ricane (1). ricasseï * rire. Ce sont
toujours des sons de l'organe qui se proclame lui-même
dans son bruit habituel : rynchusMogonnerol rouspéter
veulent dire parler. Ce dernier mot a la même racine
que le H. ripsen. Ail. rûlpsen roter. Roubler signifie
parler, déposer, anal, à manger le morceau avouer,
débiner le truc, composé de deux onom. avortées dont
le son indique le mouvement des lèvres quand on parle;
râper chanter ; ravaudage cancan par jeu de mots. La
langue, par association avec la gorge s'appelle la rous-
caillante, 11 y a là un jeu de mot sur rouge, L. ruscus ;
l'argot Anglais l'appelle red rag la loque rouge. Le
thème de pi^oç bec, par métathèse ïpzooz le gouffre,
l'enfer se retrouve dans rumor — la rumeur, le ramage
— to roup vendre à la criée (H. uitroep criée) — ru/en
appeller — H. roepen id. et reppen bouger — Skt. rêb,
(1) Margot est un autre nom du geai, H. gaai. C'est un jeu de mots
sur Margot, Marguerite . Le geai ainsi que la pie ont un rire sec et
humiliant. De là margauder éreinter par une critique féroce, par un
ridicule cruel, où la sympathie ni l'équité ne pourront jamais avoir de
place. Le H. appelle le geai meerkol de meer pour mare la nouvelle
et kol pour kouw le geai, le choucas. Ce dernier s'appeile en AU. die
Dohle, L. monedula, de la racine de tatouille, Angl. to. tell dire- Le
mot mare répond à jjiàprjp le témoin — Martur — martyr -- (to
murmur) — die Maehre la comunication.
145
rép résonner. Un rême est une réprimande de même,
que de la rêmone et Romaine avec jeu de mots sur ra-
moner et de la Romaine la salade ; passer à Rome veut
dire se faire réprimander: toujours le penchant pour
le jeu de mots, comme si Ton voulait cà toute force
brouiller les idées. Il y cependant plus de mérite à les
distinguer.
Boire est un acte qui dans certaines circonstances
provoque un bruit guttural. Celui-ci entraîne un fré-
missement des lèvres. C'est ce qui est arrivé quand on
a entendu le radical de ramponner boire, à proprement
parler absorber. Ace mot répondent sarhli — po^éw. A
la métathèse du mot Grec répondent sorheo — absor-
ber, sorbet, sirop — sherbet le sorbet,, [strup — der
Sirop — H. stroop — S. sôrpla. L'Argot se laissant
guider par la notion instinctive que le son naturel donne
le mot le plus véridique et l'expression la moins récu-
sable a trouvé urf, h urf pour dire excellent à absorber
et, par extension, excellent, beau, pshutt. C'est la mé-
tathèse du mot Grec qu'il rend, du reste, à la lettre
dans rupin. Le transport du sens bon à celui de beau
provient de ce fait que lorsqu'un breuvage (siroté) est
bon,, les yeux le voient en beau sur la foi du goût (*a-
XayMa). En trouvant un néologisme si étrange et si
fruste parmi les expressions du langage courant on se
demande d'où il vient et si l'on n'est pas dupe d'une
mystification. Et cependant ce mot n'a pas été créé par
miracle; c'est une réédition des onomatopées indiquées
ci-dessus. En effet les sons qui se succèdent dans l'ab-
sorption se composent de celui qui marque l'ouverture
10
146
de la bouche o ou u avec un son sifflant s que le Latin,
le Français et le Suédois ont noté, mais que le Grec et
l'Argot ont omis. 11 est juste dans un sens de dire
l'Argot, mais cette fois-ci il parle comme la nature,
circonstance qui doit faire disparaître tout ce qui peut
s'attacher de blâme à ce nom. Le s est déterminé parla
position de la langue : l'air inspiré entraînant le liquide
vers le gosier y réveille le son tremblé r et détermine
en même temps sur les lèvres vibrantes le son def.
L'Étymologie pour identifier ce mot qui n'a pas reçu
de baptême, que l'Académie n'a pas officiellement in-
scrit sur ses registres n'avaient qu'une donnée : le son,
seule clef étymologique pour les racines intégrales. La
reconnaissance des sons naturels, leur identification
avec les voix de la nature est le terme extrême del'éty-
mologie. Nous ne pouvons y arriver qu'expérimentale-
ment, en comparant le son des mots et leur sens impli-
cite avec le bruit et le sens de l'acte dont il signale la
présence. L'érudition la plus vaste, après avoir rattaché
urf&xi Sanskrit ou à des langues plus anciennes encore
et plus primitives aura toujours à expliquer la genèse
du mot. La cosmogonie Indienne qui, afin de trouver
un appui pour notre globe le place sur le dos d'un élé-
phant, se voit forcée de poser celui- ci sur un autre et
ainsi de suite, sans jamais cesser de voir toujours le
vide bâiller au dessous de son interminable échafau-
dage. — Mais au point de vue des mots et de l'origine
du langage, la nature demande-t-elle une fondation
artificielle? Ne se soutient elle pas par le système de la
Création? Et ses accents sont-ils si dépourvus de sens
— 147 —
et de son pour qu'ils ne puissent figurer dans notre lan-
gage? Le son est-il donné à la voix pour déguiser les
sentiments du cœur? Mais lui-même nous donnerait un
démenti ; la nature entière nous accuserait de fausseté.
Si Grouchy à deux pas de Waterloo avait écouté la
voix du canon, elle lui aurait dit que ses frères d'armes
étaient engagés. Il serait accouru à cet 'appel suprême
et son nom ne serait pas flétri dans l'histoire à l'égal de
ceux des traîtres.
Chaque racine a eu sa naissance selon la nature. Elle
est le premier et l'inaltérable cri d'un acte de la vie.
Nous, comme tout ce qui remue, spontanément ou non,
nous avons des voix qui viennent diverses selon la
nature même du mouvement et l'organe dont la Provi-
dence a doué tout ce qui fait partie de la Création. La
matière inerte elle-même rend des sons qui varient
selon les corps quand un ébranlement quelconque les
secoue de leur torpeur. Les rudiments du langage, en
se confondant avec des bruits spontanés que provoquent
les événements de la vie et s'identifiant avec les mani-
festations d'une nature spontanée et franche proclament
eux-mêmes leur raison d'être. Ils existent parce qu'ils
doivent exister. La philologie en trouvant dans le son
naturel une base aussi évidente et aussi sûre que celle
des sciences expérimentales prend rang parmi les
sciences positives. Elle entre en possession d'elle-même;
elle connaît son principe et sa fin qui est de veiller par
la grammaire à la conservation intacte du son et du
sens vrais; à ce qu'un nom ne soit appliqué à autre
chose que lorsque les objets désignés par le terme com-
— 148 —
mun ont entre eux une analogie frappante ; à ce que les
mots soient enchaînés selon Tordre des événements
qu'ils décrivent ou arrangés selon les habitudes ou les
mouvements, môme exceptionnels, de la pensée, qui
eux-mêmes restent toujours tributaires de la logique.
— En cherchant à expliquer le son et le sens inhérents
à urf, la bonne foi linguistique pourrait avoir été sur-
prise par ses illusions ou ses facilités et donner ainsi
dans le piège d'une mystification. Mais pas plus que
pour le mot pshutt le mystificateur ne s'est nommé
pour recueillir des applaudissements pour le tour qu'il
aurait joué. De plus dans tous les mots que nous avons
vus et qui appartiennent comme urf au langage popu-
laire nous avons vérifié des énonciations franches et
primesautières. C'était Esaû qui parlait, ce n'était pas
la voix de Jacob imitant celle de son frère. Nous avons
vu que les gens trouvent les nouveautés de leur langage
dans la voix de la nature, toujours les mêmes et tou-
jours neuves, plutôt que dans la réflexion ou dans la
ressource des gens instruits, les livres; qu'il rencontre
la métaphore, ce néologisme de l'esprit, dans la compa-
raison des choses de la vie telle qu'il la pratique et
telles qu'il les connaît; que pour cela les gens qui
aiment à siroter appliquent la qualité des liquides qu'ils
ont l'habitude d'absorber à ce qui leur plaît autrement,
p.e., à ce qui charme les yeux. — Les autres langues
n'ont appliqué l'impression de ce qu'on absorbe ni à ce
qui est bon ni à ce qui est beau ; mais ces associations
n'en sont pas moins, naturelles; elles auraient pu le
taire sans nous étonner, nous qui nous apprivoisons
— 149 —
avec d'aucunes de leurs métaphores infiniment plus
hardies. L'Argoten appliquant le sens de ce qui est bon
à ce qui est beau est de ce fait parfaitement d'accord
avec l'association d'idées contenue dans l'expression
binaire Grecque to xaXév te xVfdfôov. U n'y a peut-être
que cette différence que les Grecs, du moins selon Pla-
ton, mettaient le beau avant le bien.
Au lieu de rupin on dit rupino avec une termi-
naison Italienne et on dit rupinkoff pour exprimer
le urf Russe ou chocnosoff pour désigner leur chic.
L'Arabe a sharab bieuvage et le Lithuanien srobti
aspirer, siffler. Une autre expression pour ce qui est
bon et chic est le mot juteux. La racine de ce vocable
est une variante phonique de celle de urf. La différence
consiste en ce que le s de l'inspiration qui se note dans
sorbet est remplacé par un j chuintant. Juteux vient
de jus — juris, Angl. juice. Le même radical se ren-
contre dans le Grec crupCÇw (1) siffler (2) (siffler un verre
est en quelque sorte le faire juter dans la bouche) ; le
sureau, L. sambucus est le tuyau, le siphon qui sert à
aspirer, dans lequel on siffle (to sip buvoter, Ail. sau-
fen); c'est toujours la tige creuse qui forme pipe, V. ce
mot et au mot piston. Le Skt a le mot j'usha soupe.
Le souffle en passant dans le gosier fait entendre un
bruit qui a été traduit dans l'onomatopée roupiller,
Picard ruquer, Normand rouquer, Skt vrin'h. Le rêve
(1) La seringue est un instrument qui absorbe le liquide pour le
projeter ensuite. La racine est la même.
(2) Le saffre est le friand, le goulu. Le jus s'appelle, d'après d'autres
sons de l'aspiration : ^[iô- jus. Le Lat. succidus veut dire juteux.
On suce le #Çuç oç, jw'uba, jujupe, qui répond au Skt su faire, juter,
presser.
— 150 —
est le sommeil, le roupillement comme le songe est le
somnium, la respiration sm, sf qu'on entend marcher.
L'Angl. to rest reposer, Ail. ruhen id., die Rast le
repos, le sommeil sont des onomatopées faites avec le
bruit d'un pwôwv, rostrum, rostre, c'est-à-dire le ryn-
chus, le nez qui ronfle. Au Centre rouffer, veut dire
souffler en parlant du vent ; râler s'y traduit par rou-
mioner. La rafale se rattache, comme phonème, au
verbe rouffer. Brantôme appelle le râle le roumiau,
qui comme roumioner s'inspire de rhume, l'écoulement
par une ruette. V. ce mot. Roumeler et rouiner respi-
rer appartiennent également au Patois du Centre. A
force de roumeler il se forme au bout du nez une perle
liquide qu'on appelle la roupie, dont le sens primitif
est respiration pénible : c'est l'effet prenant le nom de
la cause.
Dans le Centre l'appendice nasal du dindon s'appelle
roupie, reuche ou rouche. Le roupion est le jeune
commis d'un magasin de confections : c'est une traduc-
tion du sens de morveux. La roupie est une formation
parallèle à l'Ail, der Rotz la morve. Le râle sonne
dans ^ir/cpayia râle, Ail. rôcheln, au Centre raucher,
roucher respirer avec bruit; H. ronken. Le râle d'eau
est nommé d'après son cri. Les Grecs ont entendu le
son de y.ps£. Le Patois du Limbourg décrit le bruit
guttural plutôt qu'il ne le nomme dans graasstr^euts le
gosier des prés ou bien le teersman qui rappelle l' Angl .
throat gosier; les enfants signalent sa présence en
criant rèpe, rèpe qui est une reproduction locale d'un
bruit analogue à celui de rouffer > rouffioner.V. au mot
— 151 —
râper. Le roquet veut dire le petit chien grognon.
Le gosier est sujet à quantité d'affections qui sont
indiquées par son phonème habituel. Ainsi roter se
traduit par ip s •>;:;;.*•. — ructo — éructation, roter en
Argot rouffionner — to reacli vomir, avoir des hauts de
cœur — H. rispeti roter — Ail. rùlpsen id., ainsi
que râuspern tousser pour évacuer les crachats. — Le
bruit que provoque le rhume dans le gosier se nomme
le roumion dans le Centre; il a des variantes dans le
ramion et le rouinement. Ronronner s'y appelle fa-
miouncr. Raminagrobis a un routnionnernent grave.
Le Centre a le mot vaguer vomir, formation parallèle
à l'Anglais to reachx to rëtch vomir. — A côté des
causes physiques qui viennent affecter le gosier, il y a
des états d'esprit : ceux-ci s'expriment également par
son nom habituel arrangé en verbe. . La mauvaise
humeur, l'irritation, la colère s'abattent sur l'organe et
lui arrachent des bruits qui nous disent ce qui se passe
dans le cœur. Ainsi la rage s'appelle tyyiç — rancor
et sa variante phonique rabies — rancune et par une
étymologie de bonne foi populaire rancœur, Angl.
anger (1) la rage — der Aerger id., sich aergern se
fâcher. La mauvaise humeur est nommée rouspétance
(peter) ; grogner fait rogonner, variante de ronchon-
ner, le raguenasseur (nez) est le grognon ; rognionner
et rogner veulent dire être de mauvaise humeur. Au (C.)
raigne et resse signifient fâché, ramiouner bougonner,
(1) Le ng pour g permute avec sa voisine gutturale r. Le mot Ail.
arg qui veut dire mauvais a un correspondant dans l'Angl. arch dont
le sens est malin, plaisant. La relation intime entre g et r se montre
dans la prononciation quasi gutturale de IV Espagnol.
— 152 —
la riotte la querelle, Angl. riot émeute. L'Anglais to
rue, l'Ail, reuen, H. berouwen regretter est le son
d'un soupir qui fait vibrer les cordes vocales. Le mot
regret est une expression analogue. Le Suéd. greta, et
le Holl. schreyen et greyen est une variante de gri-
dare crier, quereler. L'odeur est le vent chargé de
senteurs que le nez respire. Le pharynx débouchant
dans cet organe, le son produit par le nez se répercute
jusque dans le gosier. Ainsi se sont formés : rék, rag
soupçonner, éventer et la métathèse ghrà sentir —
poyéw fleurer — rosa, rancidus qui sent fort — rose,
rance — to rankle se gâter, devenir purulent — rie-
chen sentir. Etre téméraire, être homme à ne pas se
rendre compte par les sens et la réflexion de ce qu'on
entreprend, s'appelle en Angl. reckless, sans flair, sans
odorat, Ail. ruchlos — H. roekeloos et reukeloos, de
reuk l'odorat (Skt uru la poitrine qui respire). — Le
souffle du nez a donné son nom à la fumée : Angl. reek
la fumée, rack les nuages, Ail. der Ranch la fumée —
H. rook. Une roustissure est une fumisterie, V. au
mot roustù La chaleur qui sort du gosier a fait que le
feu a été nommé par prosopopée du vocable de l'or-
gane. Elle est décrite comme une exhalaison qui fait
l'effet d un haie. Brûler s'appelle ark, briller comme le
feu^os, rich, hrîc- aiiw brûler, à<o souffler, auptov l'aurore
- uro brûler, areo dessécher - aride, ardre - hearth le
foyer — der Heerd id. Le pain cuit au four s'appelle
àpxcc en Argot artiche ou artif. La couleur dufeu, le rou-
ge a nom ru dira, milita — èpuôpoç — rutilus, rubus,
rufus, rusceus — roux, rougey rutilant - red - roth.
— 153 —
Ces mots appellent auprès d'eux l'expression la
rousse la police. Nous avons déjà vu les noms friquet
et la variante Jlicard qui rappellentyh're, fricasser et
le Latin fragrare sentir. On entend dire dans le Lim-
bourg : tu t'es brûlé ou roussi pour dire gracieusement :
tu as vésiné, tu sens mauvais. Or, quand l'argotier dit
la rousse pour la police, le roussi pour l'agent il veut
nous faire comprendre que ce qui est roussi, et par con-
séquent devenu roux, sent, et, par une assimilation
vicieuse flaire le malfaiteur : il met prendre des odeurs
à la place d'en donner. Peut-être l'originateur du mot
a-t-il eu l'idée de nous faire accepter roussir comme
l'onomatopée de l'acte de sentir, mettant, comme il
arrive souvent le mot assonant au lieu du son vrai: ryn-
chus qui ronfle, ronronne et aspire avec un bruit guttu-
ral. — La police forcée de se défendre tape : cette
habitude lui a valu le nom de roustamponne. Par allu-
sion à rouspéter parler, elle s'appelle la rouspétance.
Par jeu de mots sur la ville de ce nom le rouen est
devenu le synonyme du roussi en ce sens qu'il signifie
l'officier de gendarmerie. Le Rouin est l'agent de
police, Martin Rouot le gendarme : l'un et l'autre
jouent sur rousse. Rouin semble rappeler le Latin
ravus ronan, Angl. roan rouge, bai. Attrimer les
robaux veut dire mettre la gendarmerie sur les dents,
les forcer à trimer, à parcourir les trimards (les che-
mins) à la recherche des malfaiteurs. Robaux est une
altération de rubus, rufus rouge d'où l'Angl. robin le
rouge gorge. Le Martin de Martin Rouot rappelle
Martin pêcheur qui a le ventre rouge, le dos vert et
— 154 —
azur. Le râteau jeu de mots sur rutilant est l'ex-offi-
cier de police. Par une autre allusion qui nous sort
complètement du son de rouge il prend le nom de
bigarreau (bis variolus). Entre le bigarreau et le flair
le chemin est très long à parcourir et encore faut-il le
trouver. Que serait-ce si Ton se croyait forcé d'unifier
les mots bigarreau, roussi, rouin ou râteau, comme
on croyait devoir le faire pour equus et caballvs parce
que ces mots ont le même sens. Si jamais l'envie pre-
nait au public de faire entrer ces mots dans le langage
courant et dans le Dictionnaire, qu'il se demande
d'abord comment l'enfant pourra arriver à comprendre
que bigarreau puisse devenir une appellation pour
l'agent de police. Il saisirait si l'agent portait un uui-
forme rouge ou que telle fût la couleur d'une des pièces
de son habillement. Mais quand on voudra faire entrer
dans sa tête que le bigarreau mérite ce nom parce
qu'il a le flair très développé et qu'il fait la chasse aux
malfaiteurs il sera bouleversé de l'esprit de ses aînés.
Ces énigmes rebutent celui qni ne comprend pas,
l'étranger d'abord. L'étude du Français Classique offre
des difficultés qu'il surmonte avec bonne grâce : bigar-
reau pour agent de police lui paraîtra toujours dérai-
sonnable lors même qu'il saura que c'est un effet de
l'équivoque. Nulle langue n'en fit jamais une figure de
style. On conçoit que ces mots naissent dans une cor-
poration qui a besoin de mystère; que d'autres en rient
parce qu'ils sortent de l'ordinaire : mais les métaphores
de l'argot des voleurs répondent à une tournure d'esprit
que ne partage qu'un infime nombre de Français. C'est
— 155 —
donc un abus de vouloir les faire accepter comme d'ac-
cord avec les idées et le langage de la généralité. Ce
serait faire trop d'honneur à l'esprit et au langage des
voleurs que de leur emprunter l'un et l'autre : ils se-
raient les premiers à s'en étonner puisque leur argot se
compose presque tout entier du langage des honnêtes
gens devenu dans leur bouche une sinistre caricature
ne montrant que des mots déformés exprès avec un
sens qu'on a éloigné le plus possible du vrai.
La gueule fait entendre chez l'animal quand il saisit
sa proie, la tient et la déchire, le son guttural de la rage
jalouse. En même temps que la gueule, la griffe se tend
vers l'objet convoité, innervée qu'elle est par l'organe
qui gronde dans le ventre affamé. A cause de la simul-
tanéité dans le jeu des ressorts du gosier et de la griffe
celle-ci prend le nom de la gueule : pays; les ongles qui
déchirent comme elle.
Nous connaissons le son du runchus et de ses réprésen-
tants. Nous les retrouvons encore dans le mot AU. der
Radie la gueule et dans le H. raak le palais, dans
V argot et Varguche le badaud qui regarde à gueule
ouverte, le bêta. L'appétit qui tend les ressorts de la
gueule et de la griffe s'appelle^/v^a passion — opeîfo
l'appétit — irritatio,orexis — anorexie — to reach(l)
tendre, atteindre — der Reù l'appétit, l'attrait — H.
reiliJiahen tendre le cou, appéter, désirer ardemment.
D'autres appétences s'expriment par spyrj la passion,
pdrpj l'excitation — urgeo j'excite — urgence la néces-
(1) Piyéw être tendu, raidi par le froid — rigor — rigueur mar-
quent une tension fixe appliquée à uu autre objet.
156
site. L'Argot appelle la faim organe, Cette dénomina-
tion s'écarte du vrai vocable qui est orexis par jeu de
mots sur organon orgue. L'orgue s'est présenté à l'es-
prit à l'appel du mot tortorer manger, satisfaire son
appétit, se remplir les tormina, les tripes qui font des
tours dans notre corps. Tortorer rappelle les tours qu'on
fait faire à la manivelle de l'orgue. Tarter, l'expression
pour excréter est en rapport avec tortorer et organe .
Nous verrons par la suite comment organe est devenu
le nom de l'articulation.
L'animal que la faim dévore s'appelle Skt. urkas le
loup en Suéd. varg. Orcus est le gouffre, l'enfer, la
tombe vivante des anciens. Nous 'connaissons le loup
par le cri de sa gueule affamée, l'ululement, le hurle-
ment qui se reproduit dans le Suéd, ulf. V. p. 1 du
Traité. — La griffe et par extension la main s'appelle
l'argamine, composition dans laquelle on distingue
mine pour main et arga, le mot organe mutilé. Uarga
est la part du butin, ce qu'on palpe ou touche de l'arga-
mine. Ar gamine se place tout proche de payse les ongles
dont sa première partie forme la metathèse. Leur pré-
sence se fait 'sentir dans lik gratter, rixa divisé — pït-
yo) déchirer — riscits la fente, la déchirure primitive-
ment produite par les ongles, rimor je déchire, runco
j'arrache, rumpo je romps — arracher, ronger, rogner,
rompre (1), la racaille — rag le lambeau arraché (?a-
(1) Par la permutation de l et de r nous avons obtenu les mots
lambeau. lopin, l'Angl. slip une bande, lap le pan de l'habit. AIL
der Lumpen le lambeau. De là le frelampier le vagabond, équivalent
de l'Ail, der Lump le déguenillé. Skt lup couper, lôpa morceau, H.
lubben couper.
— 157 —
xsc), to 7 we fendre — reiszen arracher, rùcken tirer —
Skt racla moitié, produit du partage. — Rayer une
surface, la gratter constituent des actes primitifs de
l'ongle, puis de l'instrument qui les remplace : ptàfj la
lime, puxavT»; le rabot, la varlope — raïa et rhina le
patin, rado raser, runcina le rabot, rastrum le râteau,
rutabulum id., ranca instrument crochu pour sarcler
— rabot, râteau, racler, raser — to rake ratisser —
(1er Râchen le râteau — H. rahen érafler, atteindre —
Suéd. rnka tondre, raser — Skt rad fendre. La raie
se rencontre également dans pu-Tw racler — raspa le
râpe, ruspor gratter, et avec / pour /', Jappa la bardane
— râpe — rasp — die Raspel la râpe, die Raspe la
gale. Au Centre le râpé est le marc de raisin tiré des
râpes, le rapillon le grappillon. La grappe qui porte
les baies doit son nom à sa forme hérissée : on l'associe
de loin au râteau : c'est ce que démontre pa; la grappe
— racemvs — raisin, ribes — Ail. der Rogen la grappe
dœufs du poisson (1). — Rude, dans le Centre rufe,
rufle et rufard marquent une surface raboteuse. Le
Suédois raka tondre et le Danois rakker écorcheur
appellent auprès d'eux comme forme ou comme sens les
mots du Centre ragàche la rosse qui n'est plus bonne
qu'à être écorchée, le riquet et la rique le bidet. L'Alle-
mand exprime un sens analogue dans die Schindmàhre
la jument qui ne vaut plus que sa peau. Le prêtre s'ap-
pelle le ratichon à cause de sa tonsure, l'église la ratiche,
l'endroit où le ratichon officie. Le capucin qui garde
(1) L'Anglais rack signifie entre autres une suite de clous qui ser
vent de denderie.
— 158 —
toute sa barbe a reçu le nom de barbichon. Le sens né-
gatif de rare découle de ce qui est rasé : virala — àpa-
'i;, pao'.vo; — ravus — rare — rare — raar — It. rado.
Le Skt exprime un sens analogue dans rad fendre. —
Ratisser est en Esp. rastare, rastrare, rastrellare,
rastagnare. Le râteau laisse des traces sur le sentier;
les coups de gourdin ou de fouet strient la peau d'ecchy-
moses. La peau se dit vulgairement cuir, en Esp. cuero.
Tel Espagnol des Colonies qui avait l'habitude de mal-
traiter ses esclaves a reçu le nomderastaquouère, grat-
teur de peau. Ce sobriquet s'est étendu aux Brésiliens
d'abord et ensuite à tous les étrangers qui ayant gagné
leur fortune avec le travail et la souffrance du nègre
viennent le dépenser avec ostentation à Paris. La même
image se reproduit dans tanner le cuir ou la basane,
ratisser la couenne (cutis la peau — cutaneus), la
peau, le cuir pour frapper. Des variantes de ratisser se
trouvent dans rosser et raser. Une ratapiaule est un
châtiment appliqué sur la piaule, forme provinciale de
peau, pellis. Une raclée, une rouffle marquent l'effet
de plusieurs coups laissant des stries sur la peau. On
dit à peu près avec le même sens une torchée. V. au
mot torcher. — Le riflard (1) est une espèce de rabot :
on l'applique par jeu de mots à un vieux parapluie tout
ri fié, tout râpé, tout éraflé. — Le rabiot ou rabiau est
un restant de potage ou de vin : il faut soi-disant racler
le fond pour l'avoir. Ils représentent également le sup-
plément qu'on gagne à veiller^ le surplus de temps qu'on
reste au service pour purger les punitions. La variante
(1) On peut y rattacher le linve le couteau. V. au mot lisser.
— 159 —
rafiau est le temps qu'on reste à l'hôpital après la mala-
die. Rafale est un jeu de mots sur râpé. Rater veut
dire glisser à la surface, l'éraller sans pénétrer : de là
le raté, celui qui manque le but. Lerapin gratte, soi-
disant, la toile avec le pinceau.
De la tension énergique de notre esprit vers un objet
naît la ligne droite du chemin que nous prenons pour
y arriver. Celle-ci devient à son tour l'expression pour
le rang, l'ordre : zpyz; l'alignement, 5£0oç droit — ordo
ordre, le rang — ordre, rang, rangée — rank rang,
row id. — der Rang l'alignement, die Reihe tour —
Suéd. rad rang, file. La race est la lignée, l'ordre des
descendants. Arrimer est mettre sur une même ligne.
Compter par unités ou lignes, arranger des nombres s'ap-
pelle Angl. to reckon calculer (1), AU. rechnen id. Le
H. rooster (gril) est un tableau d'ordre, une échelle de
la même structure que \&ridelle et le râtelier. L'Arith-
métique est d après le nom et le sens une méthode in-
stituée pour aider au sens du droit: apiôpcç le nombre
est primitivement la ligne qui rappelle la façon dont les
gens peu instruits comptent encore en alignant des
traits perpendiculaires qu'on barre cinq à cinq ou dix à
dix. Il a pour variante jtôOpo; le nombre, la mesure —
rythmus — ratio et sa métathèse ordo — raison —
ordre. La raison ratio est donc le sens du droit qu'il
faut appliquer en toute chose. Les Grecs l'appelaient
a:*;:; la parole, ce que la langue dit, parce que la pa-
role était pour eux l'expression rationelle, aussi exacte
(1) To reckon se fait par traits, ealculer par cailloux.
— 160 —
que le nombre (1). C'est pour cela que leurs œuvres
littéraires sont des modèles de proportion et de mesure.
Leur architecture semble la solution du problème le
plus simple et le mieux posé. Leurs personnes mêmes,
si nous pouvons en croire les statues qu'ils nous ont
laissées, avaient dans leur port et leurs attitudes cette
mesure qui est le reflet de la pondération, de la vigueur
et de la grâce qui en résultent. Les Grecs étaient d'autant
plus portés à prendre le mot logos pour le nombre (no •
men — numerus) qu'ils n'avaient pas des signes spé-
ciaux pour les chiffres mais se servaient des lettres de
leur alphabet. Du reste comme nous venons de le voir
numerus qui veut dire primitivement nomen prouve
que la même habitude existait un jour chez les Romains.
Pascal, qui postulait pour les termes une définition ri-
goureuse avant de les faire servir pour le raisonnement,
tâchait de faire du mot un logos. Le Latin exprime par
le verbe reor — ratus sum qu'il croit, qu'il opine parce
qu'il raisonne, que sa raison est satisfaite, que c'est sa
raison qui parle. Res est la chose dont il est question,
une chose de raison (reor, ratio) : elle fait l'objet du
raisonnement et s'enchaîne avec les autres selon ses lois.
— Un enchaînement, une rangée s'appelle selon la di-
versité de l'objet auquel il s'applique, varga rangée —
opyoq id.. piyiç l'éspine dorsale, l'enchaînement des
astragales, pxyia le promontoire, la chaîne des rochers
— rupes le rocher — la roche, le rocher, rachitique,
le rable l'épine dorsale, le dos — ridge la chaîne de
(1) Ce mot veut dire parole, discours, compte, calcul, supponatint,
rapport et proportion.
— 161 —
montagnes (le Wallon a l'expression analogue un tiers
une tirade, un enchaînement de colline), rak les arti-
culations du cou, reefle rocher, le récif, rump lermble
- der Rùcken le dos, c. à. d. l'épine dorsale, der Rumpf
le rable, le tronc, der HundsrÛck nom d'une chaîne de
de collines. L'Angl. rib côte, Ail. die Rippe id., peu-
vent être rattachés à ces mots comme formant les arêtes
du rable (1). Le rumpsteak est un morceau de viande
bien connu dans les cuisines. — La main qui gratte a
la même attitude que la main qui prend. De là la pré-
sence de son nom dans rafler, ribler voler, ratiboiser
voler (gratter le bois), roustir, avec jeu de mots sur
roux. Le Skt. pour dire voler a le mot runt. Agripper,
soitpar le p&^oq bec, soit par tel instrument qui le rem-
place comme le harpon, la griffe, le harpin, le ragot
la clampe, V ergot l'éperon du coq, s'appelle xpr.iZu —
rapio — Harpagon, ravir, ravager — to rob ravir —
rauben id. — La griffe, la patte, la main (en Argot de
voleur les accrocs) sont formées d'un enchaînement
d'articulations qui lui permettent de se recourber en
griffe ou grappin au gré de la volonté. Nous pouvons
nous figurer la main comme paume, c'est 'a dire plate;
comme empan, c'est à dire étendue afin de se rendre
compte de la dimension d'un objet; comme grappin,
c'est à dire dans l'attitude convenable pour saisir. Cette
dernière capacité s'exprime par ar atteindre, arjas at-
taché — àpTao) je suspends — srpw je noue — aipsw j'a-
(1) Que le lecteur veuille bien examiner s'il ne serait pas préférable
de rattacher le sens de ces mots à l'idée de courbe, de rondeur. La
racine est la même, le sens semble comporter Tune et l'autre expli-
cations. V. la genèse du sens de courbe.
11
— 162 —
grippe — haereo — adhérer — héritier celui qui prend
sa part (L. hercisco je partage) — hard dur, qui tient
— hart id,, der Erbe (1) 'héritier et avec la permuta-
tion de /pour r halten tenir, en Angl. to hold, — Les
points où les membres de notre corps s'adaptent l'un à
l'autre sont, ainsi que le démontrent la réalité et le lan-
gage, des clampes renforcées par des tendons. Le fait de
l'accrochement s'exprime par les mots péOcç membre,
opYu»a coude, àp6pcv articulation — artus — articulé —
wrist le poignet avec un w notant le mouvement des
lèvres qu'entraîne la prononciation de r, lettre absolu-
ment secondaire dans le son de l'acte, to wrestle s'ac-
crocher à son adversaire, to wring tordre — der Rist
le pouls, sans le di gamma comme le Grec rethos — H.
het gewricht l'articulation — Suéd. vj Hda tordre. —
Enchaîner, adapter l'un à l'autre comme par des arti-
culations s'exprime par des mots où transparaît le nom
de l'organe: oLç>iio\m\ préparer, gréer (en Angl. to make
ready, H. gereed maken), à'pw coordonner — artire,
artare emboîter — articuler (2). L'expression Angl.
to hold with tenir avec quelqu'un implique une conve-
nance quelconque entre le deux parties, de même que
l'Ail, es mit jemandem halten. A l'idée d'arrangement
par adaption se rattachent encore les expressions: aram
convenable — £pt juste, apT» juste, ap-rtoç convenable —
ars l'art, l'ordre dans la disposition, la convenance des
(1) Prendre s'exprime en Anglais par to earn gagner, en Grecapvu^a-,
je reçois.
(2) Etre ébranlé dans l'articulation, oseiller à la suite d'un accroc
s'appelle heurter, Angl. tohurtle cahoter, to hurt ébranler, blesser en
choquant, H. cen horrel un heurt et l'intensif horten donner contre.
— 163 -
parties, la proportion d'où l'unité dans l'ensemble. —
L'Ail, die Art veut dire ordre, espèce, l'adjectif artig
joli, convenable, l'effet des choses bien ordonnées. Les
Grecs préoccupés d'ordre et de convenance ont dans
leur langage de nombreuses expressions rendant ces
idées : àpéaxœ je plais, je conviens, àpfyjia) je m'accorde
avec, à'pOy.o; (1) l'amitié, la convenance des caractères,
r^i'j.y. graduellement. '
Une articulation bien connue dont le nom se ratta-
che à la racine ar est îrmas bras — affjxoç nœud —
armus — armon — ami — der Arm. Le sens d'har-
monie a été conçu en écoutant des sons se soutenant les
uns les autres. Par assimilation le nom qui l'exprime
se confond avec les mots qui veulent dire articuler, en-
chaîner : àpy.érw coordonner, ap;^-. sur le champ, incon-
tinent comme a{sxt (2) juxta — harmonia, ritus le rit
— harmoste le magistrat qui dirige, harmoniser.
La tension exercée par la volonté sur les articula-
tions, sur les phalanges et généralement sur tout ce qui
dans le corps humain est susceptible de se tendre et se
détendre, transforme ces derniers en agents, en instru-
ments : spyavov — organum — organe (V. au mot
(1) Le sens d'articuler, d'adapter l'un à l'autre s'accorde également
avec l'image de la ligne droite synonyme de rang et d'ordre. Cepen-
dant l'ordre par adaptation étant plutôt celui de la nature et celui de
la ligne droite l'œuvre de l'esprit, on pourrait être tenté de rapporter
le sens d'ordre à celui del'adaptation, de l'organisation. L'image en-
trevue dans l'esprit est, ou bien une main recourbée qui trace une
règle, une raie sur laquelle viennent s'aligner ces éléments, ou bien
ce même organe qui les accroche les uns aux autres. Les racines des
deux mots sont congénères : la forme des mots ne semble pas s'y
opposer. Que le lecteur veuille bien examiner le cas et le résoudre
pour lui-même. «—
(2) L'autre racine gutturale d'où se développent les noms de l'accro-
chement est ach. V. Traité, pp. 78 et 86.
— 164 —
Articulation L'opération de ces organes s'exprime par
arj faire ipy<%c\k& je travaille — ergastulum — ergas-
tule — to tvork avec digamma travailler, wirken id.
On dit très juste : arriver à la force du poignet. C'est
une paraphrase du travail des organes. Les ressorts
intérieurs nerveux ou musculaires qui soutiennent la
volonté s'appellent par un terme collectif paya la force
— energia — énergie (1) ou xpzzr, — virtus — vertu la
force morale qui donne le courage de l'action, ou bien
encore l'^rn pir.r, l'impulsion et p^rt la force — robur
— robuste. Nous avons expliqué le mot orexis l'appétit
au début du chapitre des racines gutturales. Exciter se
dit Hpo), bpvûtù mettre en mouvement. Les articulations
des végétaux sont assimilés dans l'esprit et dans le lan-
gage à des bras : de là îr/nas le bras, L. ramus — ra-
meau, ramée. Pour personnifier le végétal et le consi-
dérer comme occupé par un démon ou le produit d'une
métamorphose humaine, l'invention poétique n'avait
qu'un pas à faire. Les racines congénères ont servi,
elles aussi, à former les noms de la branche : Ipvaç
branche, Hp^a? id.^ péTraXcv verge — virga la verge et
virgo la vierge, le tendron, la jeune branche par assi-
milation, le nouveau jet de l'arbre, virgultum l'arbris-
seau - vergeter, verge, vergue en H. ra. Le mot pé6sç (2)
articulation, reparaît avec des sens divers dans radius
bras de roue - radié, rayon-rod la verge - die Ruthe id. ,
en Skt rudh croître. La branche paSiÇ a donné ràdix
— racine, radicelle — root racine die Wur^el id.
(1) On peut ajouter aXxr, la force en faisant permuter le l avec r.
(2) Le travail de l'articulation se traduit par è'pôw, p4£w faire.
— 165 —
A la suite d'une assimilation avec le bras et le mou-
vement rotatoire qu'il est capable d'exécuter la rame a
reçu le nom de ce membre : de là aritra la rame —
èpécrffw ramer — réunis la rame — rallum la godille
(cauda la queue, Y. ce mot) — rame — to row ramer,
car rame, rudder gouvernail — das Rùder id. — H.
rietn rame et roer gouvernail. L'oiseau est un rameur
aérien. Le mouvement de ses bras (Ipvo; branche), de
ses ailes battant l'élément fluide, ressemble au mouve-
ment de la rame dans l'eau. De là Spvrç l'oiseau, la
poule — aies l'oiseau avec permutation de /* avec sa
voisine linguale / et les mots de l'argot ornie, orniffe,
ornichon poule. Ce n'est pas la première fois que nous
voyons des mots qui dénotent la connaissance du Grec
figurer dans l'Argot. Il y a donc eu des gens dans la
corporation qui avaient étudié. L'Angl. a aery le nid
d'aigle, l'Ail, der Aar l'aigle, en Hollandais arend,
Suéd. ôrn l'oiseau de proie par excellence (1).
La courbe reproduit l'image de l'articulation qui
plie. C'est, comme dans tous les cas précédents, notre
racine gutturale avec la terminaison que lui donne la
grammaire, appliquée à un objet particulier. Ce sens
particulier fait partie de la somme des capacités dont
l'organe est doué. L'esprit, pour deviner le sens spéci-
fique des mots se trouve guidé soit par les circons-
tances, soit par des terminaisons, soit par des nuances
que présente la forme même et qu'on dirait expresses:
(1) Aquila aigle répond à l'Ail, der Vogel oiseau. Ang. fowl poule.
Ces expressions dénotent le battement de l'aile, de l'articulation. V.
au mot aigle. L'oiseau en L. avicula, Skt vi doit son nom au vent
qu'il fait avec ses ailes.
— 166 —
armon, rame, rameau. L'arc bandé comme une articu-
lation sur les tendons de laquelle tirerait notre volonté
s'appelle ipiç l'arc-en-ciel — ar^cus — arc, arcade,
arceau, rinceau, arganeau. La roue (1), l'arc complet
a nom ari la roue, urnâ la laine qu'on file — apxuç le
filet en roue comme celui de l'araignée, àpa/vr, le rouet,
l'araignée — arachne, rete le filet, restis le lacet (va-
riante du sens de lacs), rota la roue — rets, rotation,
roue, araignée, rouet, raquette — rack roue, rundle
marche d'échelle — dos Rad la roue, die Reuse la
nasse. La ruse est le sens abstrait et général de rets,
Reuse, — Imiter le mouvement dé la roue, tourner,
touiller, il le faut pour préparer le rata ou la rata-
touille : le mot contient l'enseignement culinaire. La
roue a donné son nom à la voiture qui roule, qui mar-
che sur roues. Ce vieux sens se trouve exprimé dans le
mot nouveau : la roulotte : rata chariot — apjjux cha-
riot — rheda id. , paraveredus le palefroi (perveho et
rheda) petorritum voiture à quatre roues (petor An-
cien Ail. jieder — quatre et ritum rota) — roulotte,
palefroi — to ride aller à cheval — reiten id. , ancien-
nement aller en voiture. Le vaisseau dans sa dénomi-
nation L. {ratis) semble être une métaphore de rheda.
Le rond, le cercle complet s'expriment par un mot de
même provenance : Içyiq testicule — orchestra l'en-
droit où l'on danse en rond, orbis le cercle — orbite,
orchidée, orchestre, rigodon — ring anneau, bague —
(1) Imprimer un mouvement d'oscillation autour d un point de sus-
pension ou d'accrochement s'appelle to rock ébranler en Ang., rùtteln
secouer, en Ail. Ces mots ont un sens voisin de heurter causer un
ébranlement dans l'objet qui donne contre un autre. V. ce mot.
— 167 —
der Ring id., der Reigen la ronde. — Le sens de s'agi-
ter en cercle, se tordre, se contourner trouve son
expression avec cette racine, d'où hure' aller en courbe,
ramb circuler, pépfa tourner, sp-w et sa métathèse pi-u
serpenter — rhombus la raie, le cercle magique —
rampe, rhombe — to roam, ta ramble, to rove rôder
(Skt vritta rond) — rope la corde tordue sur elle-
même, roof ie toit en arcade, la voûte — der Reif\o
cercle — H. reep cerceau, roef le toit arrondi de la
cabine du vaisseau. — Les mots radis, Angl. radish,
Ail. der Rettig le légume rond, rave, chou-rave Angl.
râpe, Ail. die Rilbe navet, tiennent ieur nom de [leur
forme ronde. Pas un radis est un jeu de mots pour pas
un rond, nom de la monnaie à cause de sa disposition
circulatoire. Un tableau radis est celui qui revient sans
avoir trouvé d'acheteur. Il y a idée de retour, de cercle
parcouru et le sens de renvoi suggéré par le navet mi-
nuscule. La roue de derrière est la pièce de cent sous,
le rêche le sou (araignée, rack). L'un et l'autre ont la
forme ronde, emblème de la circulation. L'adjectif
rond reparaît dans le Skt rat rouler — patgs; courbe —
rotundus rond — rond — round, to run circuler,
courir — rond et par jeu de mots gironde replet, aux
contours arrondis. L'Arigl. to ravel veut dire entor-
tiller. — Le sens de rouler, être en bordée s'exprime
par une variété de mots tels que river, être en ribote,
rouscailler. Le rouleur s'appelle le ribaud, le ribleur,
la femme lancée dans ce chemin, la ribaude, larivette.
La rouflaquette est une roue de cheveux plaquée sur la
tempe. Le mot roublard nous présente un roué qui
— 168 —
roule son monde : c'est un jeu de mot sur rouble, le
rond Russe. Rouler quelqu'un est le rendre dupe : le
mot est le Latin rotulare, Angl. to roll rouler, to vile
troubler en tournant, anal, au Skt rup troubler, Ail.
rollen rouler. — On rive un clou en le retournant sur
lui-même; river le clou à quelqu'un veut dire faire en
sorte que son langage ne blesse plus, rabattre son
caquet. — Les rondes que fait la police lui ont valu le
nom de raille. L'Angl. réel désigne une espèce de
ronde. L'Ail, reisen voyager, revient à roue, faire un
tour, Angl. to travel, to make a trip faire un grand, un
petit tour. — Le cercle que décrit le temps s'exprime
par la même racine dans y are — wps; année, temps —
wpa temps — hora — heure — year année — olas Jahr
id. "Eap en Ionien ftp avec digamma exprime le retour
du beau temps, du soleil et de la vie dans la nature, le
renouveau. Il a ses correspondants dans le Lat. ver, le
printemps orthographié avec le mouvement labial v,
dans vernal et primevère. Ce v (1) se trouve également
noté dans ver ter e tourner, ver g ère incliner, tourner —
conversion, converger, vertèbres, virer — to whirl
tourner — ivirbeln tourner, der Wirbel l'articulation
vertébrale, werden devenir (to turn tobe) — H. zhoer-
ven avec assimilation virer, voyager sans but.
(1) Esca et cescor la nourriture et manger en L. est un exemple de
l'emploi presque facultatif de ce v, comme en Suéd. ulf, en Ang.
wolf. Ajoutons, qu'étant donné qu'on dit aussi bien er que re, il faut
s'attendre à des métathèses fréquentes de la voyelle avec la consonne
r ; la voyelle initiale a pu être aspirée ou non au gré de la pro-
nonciation locale, de sorte qu'on trouve les orthographes hélice et
révolution sans sortir delà même racine. Pour ces deux derniers mots,
ils se rattachent à ce groupe, pour peu qu'on tienne compte du chan-
gement de r en l.
— 169 —
Les mots renie et vergue sont des variantes du mot
ville, en Danois vaern. Le sens de ces mots est identi-
que : il n'y a entre eux qu'une différence d'orthographe
qui consiste dans la permutation de r avec sa voisine /.
Le sens est garde, endroit gardé. Le sens de garder
découle de celui de tenir, d'enserrer, propriétés l'une
et l'autre de la gorge et du croc (1). Il s'exprime par
rina place de guerre, rar clore, ceindre, ra/t sa méta-
thèse préserver, rrinj ', rrl écarter — spjw protéger,
garder derrière des murs, gpxoç enceinte, Sfpjjux appui'
pa>w fortifier — Roma la ville forte, môme racine que
rai la///, la verne, arceo défendre, arx la citadelle,
arcanes ce qui est défendu contre la curiosité profane,
arguo maintenir, défendre une proposition — boule-
r</rd, argument, guêret champ entouré d'une haie, en
H. ïoaard polder, garde — bulwark boulevard — die
Warte la garde, die Werke les remparts. Le même
sens s'exprime par les formes congénères ulciscorL. se
venger, Angl. to wreak, Ail. sich rœchen, repousser,
rendre la pareille.
Le rergne l'aune commun ou glutineux préserve les
ouailles contre le maurouge. C'est la description qu'en
donne le précieux Dictionnaire des Patois du Centre.
Cette explication éclaircit le nom de l'arbre et rend
compte de son homonymie avec la rergne, vallum
(Skt rail couvrir). — 'Epuw répond au Latin serrare
conserver et au Skt vri couvrir (2). Cet .s presque fa-
(1) Les mots grippe et croupe qui dénotent la gorge diversement
affectée font ressortir l'identité du nom de cet organe et de la
griffe.
(2) Le Skt a encore varuna la calotte des deux, varanda rembal-
lage, vârana obstacle, empêchement.
170
cultatif marque comme le v une des hésitations de
l'orthographe. Les grammairiens qui se sont chargés
de. noter le son des mots n'ont pas été d'accord pour
arrêter s'il fallait considérer comme partie indispen-
sable et intégrante du mot les sons secondaires qu'en-
traîne l'émission des voyelles, tels que h, l'aspiration
gutturale, s l'aspiration sibilante que nous venons de
voir dans servare, v le contact de la voyelle avec les
lèvres que les Grecs représentaient autrefois par le di-
gamma et quelquefois par b. Non pas seulement dans
des langues différentes,, mais aussi dans chacune prise
isolément se manifeste l'effet de cette incertitude :
kpûiù veut dire tirer, aupo> avec s également ; 7E»pa est la
chaîne qui Jire, qui ferme ou bien la série, tout comme
z(p\j.oq le même mot sans le s. Esprit doux et digamma,
esprit rude et sigma permutent entre eux et tous en-
semble. On voit donc qu'il y a bien des causes qui,
pour être toutes naturelles, n'en changent pas moins
l'aspect des mots à telles enseignes qu'on doute parfois
qu'ils soient les mêmes. Et cependant c'est bien le cas.
— Une variante orthographique qui a lieu de nous
surprendre est celle de gu Français avec w Allemand.
Le double v doit avoir été prononcé ou tout large avec
une aspiration. L'organe Gaulois inhabitué aux sons
gutturaux profonds l'a transformé en son dur prononcé
à la hauteur de la glotte (1). C'est ainsi que verne est
une variante orthographique répondant aux mots gar-
nir > garnison les troupes de défense. Dans l'un et
(1) On dit que le Français parle de la bouche et que c'est pour cela
qu'il a le cœur sur la langue.
— 171 —
l'autre mots la prononciation évite le son guttural pro-
fond.
La guerre, Angl. war est une défense : c'est le rem-
part du bras, des armes. Ce mot peut se rendre en
Grec par Ipjxa défense, l'armature — arma — armes
— icear digue — das GeweJir l'arme, le fusil, die
Wehr la défense. La guérite est une protection pour
la sentinelle, Angl. to ward garder, AU. warteri avec
le génitif faire attention à, en Angl. to attend on, Lat.
subservire. La varenne (lieu dit) H. warande, Va-
rennes nom de Ville, WareMme dans la Province de
Liège sont le substantif garenne. Le warrant est une
garantie en marchandises, AU. die Gewâhr. Guérir
veut dire dans le fond préserver de la maladie, défen-
dre le patient contre la déchéance physique. — La
garde exercée par les yeux, l'observation est l'origine
de regarder : Angl. to be aware s'apercevoir, AU.
gewahr werden id. — H. ontwaren apercevoir. Les
expressions Françaises tiens, tenez qui accompagnent
voici, voilà et la tournure Anglaise behold regarde, à
proprement parler tiens, paraphrasent le sens de obser-
ver et de son congénère regarder.
Regarder se traduit en Grec par le congénère 5pao>.
Ce mot nous ramène à la prosopopée oupoç le fossé, le
trou — os - oris la bouche — oral, orifice. Nous ou-
vrons instinctivement la bouche pour apercevoir, com-
prendre et saisir au sens moral, tout comme s'il s'agis-
sait d'un objet matériel dont nous voudrions prendre
possession. — L'AU. die Warte la garde permute avec
dieWacht (Angl. to wait on avoir des attentions
172
pour, servir) r et ch (1), étant deux gutturales voisines
l'une de l'autre. Die Wacht a donné les mots guet et
guetter. L'échauguette la tour d'observation se décom-
pose phoniquement en schauen, la forme Allemande de
ay.e7rictj.at (2), en Argot //r/^er ouvrir le gavion, regarder,
et son synonyme guette répondant au substantif fémi-
nin die Wacht. Dans le mot vagmestre, Ail. (1er
Wachtmeister le chef de la garde, le mot original s'est
conservé presque intact.
La garde, l'éveil se montre dans vîxê regarder —
êyeipo) s'éveiller — vigilo — veiller, vigilant, vigile —
to awake s'éveiller — erwachen id. Le regard s'appelle
cxxos — oculus — oeil, oculaire — eye — das Auge —
Skt. axi. Ces mots montrent la gutturale g mise à la
place de sa voisine r. La montagne cpoç est au fond
une garde, un poste d'observation. Notre Dame de la
Garde de Marseille, l'église qui regarde la mer exprime
poétiquement cette idée/Oupsu; est le veilleur, le garde.
Le mot Allemand die Wacke veut dire la pierre, le
rocher. Ce mot est la variante de guet et Wacht avec
le sens métaphorique de montagne. La montagne par
sa hauteur est une garde, un poste d'observation. La
variante Allemande de wachten est achten considérer,
avoir des égards; gieb Acht veut dire fais attention. Ces
doublets orthographiques sont fréquents, comme nous
avons pu remarquer, dans toutes les langues. Le mot
Hort la place gardée, le trésor, en Angl. hoard nous
(1) En Anglais le ch s'est changé en i. Il y a là un abandon de ia
gutturale, déterminé, sans doute, par l'influence de la prononciation
Anglo-Normande.
(2) En Skt k'av se montrer comme les spectres (visions).
— 173 —
présente une troisième variante, qui nous rapproche de
la gutturale ch, l'accompagnement naturel de /'dont
nous parlerons plus loin.
La préfixe re en Skt. ritu retour périodique, exprime
le retour, le tour de roue. L'expression Anglaise : when
the year cornes round au renouvellement de l'année, à
son retour en est une paraphase. Le mot'7'etro est un
composé de [re (rota, rete V. au mot araignée) et tro
qui veut dire tour également avec tous ses congénères
-zbiM tourner — teres rond, terebra vrille — tour —
to t/trill tourner — drehen tourner. La genèse du mot
et du sens de roue ont été élucidés plus haut. V. Traité
p. 91, celle de tro sera expliquée après. Comme une
conséquence nécessaire du retour la particule re ex-
prime parfois la négation (1), le verso, le revers de ver-
te re tourner. (V. au mot conversion), ainsi qu'il a lieu
dans révéler, Angl. to unveil dévoiler. En Latin re-
vincio réprouver, désapprouver, remitto abandonner la
rigueur, en Français relâcher, refuser, réfuter mon-
trent également le sens négatif de re. Dans une révo-
lution complète il y a toujours une moitié qui est
négative, c'est à dire celle qui prend depuis le milieu
jusqu'au point de départ. Ce re, comme tous les mots
d'un usage fréquent, surtout ceux qui s'allient conti-
nuellement à d'autres mots, représente les restes d'un
phonème qui est encore en usage. C'est une ruine mais
dont il y a assez de bout pour permettre de reconstituer
l'ensemble. Dans cette entreprise l'étymologie trouve
(1) Par la même marche d'idées les originateurs du Skt ont donné a
rite le sens de excepté et de en outre.
— 174 —
un appui dans des expressions comme redivivus qui
revit, reddo je redonne, je rends, redlmo je rachète où
re montre une forme plus complète, red répondant au
H. rad roue. D'Autres mots exprimant le mouvement
en rond, comme p. e. le Grec po) se mouvoir,, Allem.
rilhren touiller, émouvoir, troubler, H. roeren trou-
bler, de Raad van beroerten le conseil des troubles in-
stitué parle duc d'Albe dans les Pays-Bas contre la Ré-
volution du seizième siècle nous montrent la particule
re à l'état de racine intégrale. Il en est de même du
Skt. îr, 77, ri aller, circuler — ïypM aller mal, bricoler —
erro — errer — errand le tour, la course — sich irren
être dans l'erreur. L'Ail, der Ort est la circonscription,
le cercle. Dans l'investigation du sens l'étymologie
trouve la piste tout indiquée par des expressions comme
\xQ,rt rotule du genou, à proprement dire le moulin ; se
démoleter le bras au Centre veut dire se le déboîter,
démonter la molette. Elles rattachent si bien l'idée de
tour à l'articulation qu'elles l'expriment par une image
dont le sens ne laisse aucun doute. Pour faire le mou-
linet il faut admettre une articulation autour de laquelle
se meuve le bras; de même, afin de ruer, il faut que le
cheval fasse la roue avec sa jambe. L'articulation em-
porte donc dans l'esprit des gens l'idée de tour comme
nous l'avons vu ressortir des citations rapportées plus
haut. Ce qui prouve encore que dans re nous avons bien
à faire à un congénère de roue'c'est que dans le Centre
on trouve pour recoin un rabicoin et pour errer reber
dont nous avons rencontré des affiliés dans rioette et
dans l'Angl. to ramble, to roam, to rove errer.
— 175 —
La lettre g est tellement rapprochée dans le gosier
du point où se produit le r que l'une entraîne l'autre
comme on le voit dans ru et rigole, ronchonner, rogner
et grogner, raturer et gratter, garde et guet (Ail. wacht).
Bien des mots qui commencent par un r se rencontrent
aussi avec un g initial dans la même langue: rictus,
rynckus et gurges, /'acier et carer (1).
Le même mot dans deux langues diverses se rencontre
avec r aussi bien qu'avec g initial: rigoler, en Allem.
gielieln rire, roucouler AU. girreti — H. Ixirrcn. Au-
cun de ces mots pris en particulier ne cesse pour cela
d'être une onomatopée indépendante. Aucun n'est la
copie ni même la métathèse de l'autre. La différence
provient de ce qu'ils ont produit sur l'oreille de l'audi-
teur une impression tant soit peu différente. Les sons
naturels ont eux-mêmes leurs nuances de ton et pour
les reproduire les peuples n'ont pas eu a leur dispo-
sition un alphabet commun dont les signes fussent les
représentans exacts des sons naturels. Delà baucoup de
diversité dans l'orthographe. Selon que d'autres or-
ganes s'unissent à l'action qui prend son point de départ
dans le gosier nous verrons tour à tour les voyelles, les
consonnes linguales, les dentales, les labiales, isolé-
ment ou toutes à la fois s'associer au son guttaral comme
nous avons vu pour bouche et rynchus. Quel que soit
l'acte de l'organe^ qu'il respire, saisisse, déchire, avale,
grogne etc., etc., c'est toujours lui qui agit et le son as-
ti) Nous parlerons plus tard de la permutation de l et de r, de gur-
gulio pour gulgulio, de gurges et gula, de hurler pour ululo. Disons
que dans la prononciation le g descend au dessons de r et que le l
remonte vers la bouche.
— 176 -
sorti ne peut manquer de se produire avec l'acte, vu que
l'appareil sert à l'accomplissement de ces fonctions et à
leurphonation en même temps. Si nous reproduisons ces
actes sous la forme de souvenirs, de notions et d'idées,
même abstraites, c'est à dire, lorsque par un acte de
notre volonté nous mettons le langage au service de
qui ce qui se passe dans notre esprit, nous nous servons
des sons entendus quand ces actes se passaient dans la
la réalité. Le son rend le fait présent à notre esprit et
réveille par association tous les sens par lesquels il fut
perçu. C'est même dans l'usage que nous savons faire
intentionnellement de ces sons pour la communication
avec nos semblables que réside la haute valeur du lan-
gage. Il constitue la preuve delà supériorité de l'homme
car seul parmi les créatures il a su le créer, le conserver
et le développer. L'homme retient les sons et forme des
mots parce qu'il a conscience de ses actes dont les sons
sont l'accompagnement révélateur et parce que cette
conscience lui est nécessaire pour connaître l'état de
son âme, se diriger et être libre dans le sens élevé du
mot. Il conserve et développe son langage parce qu'il
poursuit, pour sa postérité comme pour lui-même, un
idéal de progrès et de perfectionnement illimité tandis
que les autres créatures ne paraissent point capables de
sortir des bornes où le sort les a parquées. L'homme a
le sentiment d'avenir tandis que l'animal paraît se con-
tenter des sensations du moment et se reposer sur le
milieu plus que sur lui-même. Entretemps le langage
que se créent les humains donne à leur pensée un
support pour les aider dans l'étude d'eux-mêmes et
— 177 —
de la Création qui les entoure afin que, par la connais-
sance des rapports qui les unissent à la société et à l'u-
nivers, ils trouvent leurassiette dans ce monde.
Les sons que fournit la gorge pour la formation de
noms sont simples ou complexes, nous le savons déjà,
d'après que ses diverses parties attenantes et abouti-
santes contribuent à l'accomplissement d'un acte dont
il paraît seul l'initatieur. La composition des racines re-
produit l'image fidèle du concours des différentes parties
de l'organe dans la production du son significatif.
Contrairement a ce qui a été fait pour les onomato-
pées de la bouche et du rynchus qui ont été groupés
d'après leur sens, chaque thème, cette fois, sera traité
en particulier. Nous n'y rattacherons que les noms qu'il
a été seul à former, en ayant soin, comme par le passé,
d'indiquer les liens qui unissent les nouvelles formations
à leur point de départ.
Le nom le plus simple du gosier est le quiqui (1). Ce
mot désigne, en outre du cri et de l'endroit d'où il sort,
le cocJion et son cri coï, Angl. to queack, Ail. quiecksen.
Par jeu de mots le quiqui devient le coco. Bu riquiqui
est de l'eau-de-vie qui ravigote. Le cri étant le signe de
l'animation et de la gaillardise chez l'oiseau et l'enfant,
et l'eau-de-vie les donnant ou les rendant à l'homme
exténué, elle doit son nom honorable à ce bienfait pas-
sager. Des quiquis sont des abattis de poulet, des cous
surtout, qu'on trouve dans les tas de balayures ména-
gères. Couper le quique veut dire couper le cou. Par
jeu de mots on dit couper la chique pour interloquer,
(1) On l'appelle au Centre le cacquet et le gagouet.
12
178
ôter l'usage du quique. La planche au chicage est le
confessionnal, le chicage le caquet, le mensonge. L'é-
glise s'appelle la chique en raison du mouvement des
lèvres dans la prière : c'est une paraphrase de la pri-
ante (1). Criailler, disputer sur des riens s'appelle chi-
caner et avec une variante chicoter par jeu de mots sur
chicot reste dune dent, souche. Faire couic veut dire
mourir. Le quack (2) est une note forcée, un affaisse-
ment de la voix.
Quand le gosier s'ouvre, les mâchoires, les joues, la
bouche partagent le mouvement de sorte qu'un nom
semble convenir pour l'organe tout entier aussi bien
que pour ses parties. Ainsi le H. kaak signifie la mâ-
choire et la joue, tandis que quique, le même mot
cependant, veut dire gosier et que le L. gingiva les gen-
cives veut dire la partie charnue des mâchoires et non
le g avion. Le Skt a comme correspondant de quique
kla cavité, assimilée au gosier, le Grec yxzq — hiatus
— hiatus. Les verbes exprimant le cri, le chant, la
parole sont fort nombreux : Skt u, ku etc. résonner,
ah, kâ dire, gâ, gae chanter, kac' crier — xair/ac^at je
me vante — aïo je parle — huer, faire hou\ caqueter
— to cackle caqueter, to raise the hue and the cry crier
après quelqu'un. — gackern caqueter comme la poule
qui a pondu — H. uitjonwen huer. Coquer veut dire
dénoncer comme ses congénères goualer et g ourler)
le coqueur est celui qui dénonce, qui fait aller le quique
(1) L'entonne et Vantiffe sont des noms de l'église, ayant le sens
probable de chant qu'on entonne (chantante) et antiphone.
(2) L'Angl. quack, Ail. der Quacksalber est le charlatan. Charla-
tan rappelle l'It: ciarlare caqueter.
— 179 —
ou coco. — Parmi les oiseaux qui doivent leur nom à
leur cri figurent le coq (V. Traité pp. 9. 10. 11) en Skt
kùliala le coq. La cocotte, la cocodette, la cocodès
surnoms de la femme galante équivalent à poule. La
cocotte signifie la jument par allusion à pouliche,
comme coco le mâle à poulain, congénères de poule.
Le œquebin est le célibataire : bin est l'Ail. Bein
jambe, membre qui se fait remarquer dans la démarche
fière du vieux garçon. Le Ski kàgaoxx kâka veut dire
corneille, en Patois Néerlandais kaah ou kwaak équi-
valents de geai et de choucas. D'après le son le Grec
xaxxagcç la perdrix est le nom du coq en général comme
il semble confirmé par le nom Ail. clas Rebhuhn et H.
veldhoen poule des champs. Le Latin quacula répond
au Français caille, Angl. quail, Ail. die Wachtel au
lieu de Quaclitel — H. Kwartel avec permutation de
la gutturale avec le /'. — Le cochon (V. p. 11 du Traité)
a en Angl. le nom de hoc/. C'est le son de son aspiration
gutturale : l'équivalent verbal est hogner avec le sens
de grogner.
En outre des cris qu'il est capable de produire, l'or-
gane dans son sens métonymique sert également à la
mastication; delà \jax manger, Angl. cheek la joue,
to chew mâchonner, Ail. Kâuen id. La chique est le
tabac qu'on mâche, chiquer et avec jeu de mots cacher
manger, le chiqueur le glouton. Chiquer par jeu de
mots avec choaer, attraper les oiseaux en se servant de
leur ennemie la chouette pour les attirer, lui a valu le
sens de tromper, duper. Parce que chiquer appelle
l'idée de tabac, au lieu de chouer ou de ses dérivés,
— 180 —
nous nous trouvons appointés, grâce à ce jeu de mots,
de l'expression : raconter un tabac. Cette méta-
phore repose sur l'échange de chiquer pour chouer :
elle est incompréhensible à moins qu'on ne tienne
compte du jeu de mots, c'est à dire d'une licence qu'on
ne devrait point se permettre avec sa langue maternelle.
Sans doute qu'elle n'a jamais eu la prétention de
passer dans le style sérieux : pour cela il faut que les
écrivains de valeur qui respectent le Français ne les
introduisent jamais sous la protection de leur drapeau.
Dans chiquer et ses homonymes nous voyons le quiqui,
le quique, le kique, le coco fonctionner comme verbe
avec le sens de mâcher, sens qui ressort de la forme
particulière des mots qui l'incorporent sinon des cir-
constances dans lesquelles ils sont employés. Du reste
le nom seul de l'organe nous met sur la trace de ses
actes en nous faisant penser à ses propriétés.
Le rire secoue le gosier ; on entend son cri dans :
Skt jaks rire, kak\ gagg* id., Angl. to giggle, AU.
gichéln. C'est le haha, hihi transformé en onomatopée.
Les correspondants sont y.ayy^G) rire — jocor faire le
fou — jongler — tojoke plaisanter — cler Geck le fou
qui rit — H. gekken badiner, gek fou. V. au mot gail-
lard. — Les spasmes du gosier qui accompagnent le
hoquet ont fait nommer celui-ci d'après le bruit habituel
du gosier : Skt hikk avoir le hoquet. V. au mot gaga.
Les mots Français hoquet et coqueluche (V. ce mot),
l'Angl. hickup et chincough par un rapprochement vi-
cieux avec chin menton, l'Ail, cler Keichhusten la coque-
luche, das Aecluen le hoquet du sanglot, le soupir, le
— 181 —
H. kinkhoest la coqueluche, de hik le hoquet expriment
comme le Skt l'événement par le son. Le resserrement
de la gorge, l'étôuffement se traduisent par le même
son, ainsi qu'en témoiguent tf/yi l'esquinancie - angtna
— angine — to choke étouffer, to cough tousser — kei~.
chen avoir de l'asthme (1) — H. kugchen tousser —
Skt kas tousser, kaça rhume. Au Centre le hoquet
s'appelle chiquot, choqaet et loquet. Ce dernier mot
nous met en présence de lingua et de hie/ie, la seconde
partie de coqueluche (a-j^o) sangloter). La cahuette est
la coqueluche. Ce mot contient une réduplication du
son guttural ou plutôt les deux sons congénères ca et
// if, dont le dernier a fourni l'Ail, husten, H. hoesten.
Les correspondants sont rue' pleurer — xwxuw sangloter
— Cocytus le lieu des sanglots — le Cocyte. L'Anglais
to keck exprime le hoquet qui accompagne le vomisse-
ment, le haut de cœur. Les désirs s'expriment par les
cris qui s'échappent du gosier à la vue de l'objet con-
voité : îhâ ardeur, ic\ ha^x désirer, Angl. to ask dé-
sirer, eager désireux, to wish avec digamma désirer,
Ail. tcùnschen désirer, heischen et sa variante heiszen
auxquels répond souhaiter — H. wenschen et haken
(V. au mot an.rieux) id. — A gogo a volonté a été
formé de la même façon. Les choses qu'onme désire
pas resserrent le gosier : anxius — anxieux — Ail.
die Angsï la crainte; la colère le fait davantage, elle
nous étouffe, nous prend à la gorge comme une angine :
Angl. ange/' colère. La voix eurouée se fait entendre
(1) L'organe de l'asthme s'appelle par prosopopée 1'<t6(xoç le gosier,
]p cou qui relie une presqu'ilc au continent, en L. isthmus.
— 182 —
dans l'Ail, heiser rauque où la gutturale s'est adoucie.
Le ah de la douleur a donné l'onomatopée àysc la dou-
leur. — La fumée est assimilée à un souffle qui sort du
gosier et entraîne un bruit guttural : <r/va fumée, Suéd.
ang vapeur, Skt vaxas poitrine. Le feu est selon le
langage la chaleur du souffle : agni — ày\'jc caligo, la
fumée — ignis — igné — ingle le feu — Suéd. ugn le
four, le feu et ôk brûler, ôk* dessécher, ka feu — xatco
brûler — coqueo cuire — le queux le cuisinier, décoc-
tion — cake gâteau (cuit), kitchen la cuisine — der
Kuchen le gâteau, die Kûche la cuisine, kochen cuire
— H. kagchel le poêle, kok cuisinier. La préfecture de
police s'appelle la cuisine, celle-ci rappelant le feu qui,
à son tonr, nous fait souvenir de roussi l'agent, de
rousse la police, qui sent. — Briller s'appelle Skt eue'',
l'éclat au yr;.
Le gogo est celui qui regarde à bouche (gueule) ou-
verte; goguenarder veut dire narguer (narder) le gogo.
Le bruit qui accompagne l'entrebâillement de la bouche
sert d'expression pour le regard avide des yeux. La
raison en est que l'avidité du gosier, étant sonore, peut
seule servir d'expression pour celle des yeux et de la
main qui est muete. — Le gosier, les yeux, la main
obéissent à une seule et même impulsion qui part du
cœur et fait crier le gosier. Quelle que soit la dénomi-
nation de cet organe, quel que soit le cri par lequel il
se fait connaître ou le synonyme qui tient la place de
ses onomatopées ou noms réels, toujours l'acte de re-
garder revient à un mouvement de la bouche entr'ou-
verte commepourappréhender, apprendre, comprendre,
- 183 —
saisir, ainsi que nous avons vu dans reboaiser, optique,
béer, badaud, gaffer 4 inspecter, épier. De là encore la
présence du son guttural clans ci, ich apercevoir, ix, ax
regarder,, a^k noter, kaxa regard, axi œil — àyaw j'ad-
mire, je suis stupéfait — faire ah\ (V. ah à la rubrique
pshutt), cxxoç œil — oculus — oculaire — etjc — das
Auge, gucken regarder — H. kijken id. Le mot Latin
regarde, voici ont des correspondants dans gué,
yé et aga du Centre. Le Provençal possède le mot aga-
char considérer. Hagard veut dire qui a les yeux fa-
rouches. La perception par l'oreille s'exprime par un
mot formé de la même racine : sr/.s Ju> écouter, soi disant
la bouche ouverte. Que cette métonymie ne nous étonne
pas trop, puisque la sentinelle veille par l'odorat. C'est
un sens pris pour un autre. — La science considérée
comme fruit de l'observation s'appelle kâ intelligence,
organe des sens, ki connaître, uh concevoir, gag id. —
v.ziM comprendre, yar^ le voyant. V. au mot renobler
les congénères formés de la racine gn.
L'œil, V. ce mot, s'appelle par jeu de mots le co-
quard, le coquillarcl, expressions qui rappellent la
coque et la coquille. En typographie une coquille est
une gaffe du compositeur. Le mot est une variante de
toquard l'œil ouvert. Le sens est ironique comme dans
gaffe, l'une et l'autre sont des bévues. Le compositeur
prend bien, mais ne vérifie pas sa lettre. — Le guiche-
tier, le surveillant, celui qui doit avoir l'œil au guet,
s'appelle l 'escargot. Ce mot signifie carcasse, cuirasse,
V. ce mot. E car quitter les yeux, veut dire faire l'es-
cargot, regarder, gaffer les mirettes. C'est une exprès-
184
«ion où il y a une redondance provenant de ce qu'on a
pas bien compris le sens de écarquiller, qui est analo-
gue à jouer des coquards, les ouvrir. Le mot coquard n'a
ses correspondants dans caglza — x^ot la coquille —
coucha — conque et par analogie caque, casque — keg
ou kag caque — der Karikev l'araignée à cause de sa
ressemblance avec le crabe, en L. cancer, qui a une
carapace, — H. kaak caque. Avoir son casque et par
jeu de mots son caquet est synonyme de avoir son
pompon, son plumet. Le sens de ces mots semble être
puisé dans celui de tenir, contenir yàw comprendre,
iyiù avoir. Que le lecteur veuille bien examiner pour
son propre compte si cette assimilation mérite la pré-
férence sur d'autres que la nature de la coquille et la
forme du mot peuvent suggérer. La gousse, l'enve-
loppe sert de désignation pour v.ômcç — coccus — coc-
cinelle — cockchqfer le hanneton } le coléoptère,
cockroach le cafard — Kackerlach, le concrelat, pour
y.apy/ivs; — cancer^ cancre, pour la coque et le cocon. A
cause de ses glands couverts d'une gousse, d'une co-
quille, le chêne s'appelle en Angl. oàk, Ail. die Eiche;
La tête s'appelle le coco, parce que dans l'esprit de
l'originateur du mot c'est une boîte (anal, à caisson),
une gousse dont la pervelle forme le noyau. Par exten-
sion, ce mot devient le nom de l'individu : un drôle de
coco. L'œuf tire son nom de sa coquille : Angl. égg,
Ail. das Ei. Les cocanges sont les coquilles de noix,
la cocarde la boîte crânienne, comme coco (1) et avoir
(!) La tête à cause de sa forme arrondie s'appelle aussi ciboule,
citron.
— 185 —
sa cocarde (mot formé de conque) avoir son pompon,
son plumet, son casque.
Le coquillage prenant la forme du cône en spirale a
prêté son nom à la cale qui sert à fixer une roue. C'est
une contraction qui reconstituée donne le H. Kegel
quille, en Ail. (1er Kegel le cône contracté cler Keil la
cale. La forme arrondie du coquillage a donné les mots
die Kugel la bille, la balle, H. Kogel id. Jouer des
quilles veut dire s'en aller. — C'est un souvenir du jeu
dequilles ainsi que l'expression envoyer bouler, ancien-
nement envoyer quiller. La coquille servant d'enve-
loppe et de cachette son nom a passé au rideau appelé
le coquerit, à la coquante l'armoire, au coquard l'ar-
bre, probablement le chêne. V. plus haut, si ce n'est
la souche, homonyme de chicot V. ce mot. Le sens de
prendre, de tenir que nous avons rencontré dans les
attributions du gosier et de la main se retrouve dans la
hanche et les autres jointures du corps. Prendre s'ap-
pelle kuk prendre, kac , kanc lier, aj", yug, yu joindre
— vA0) je prends — jungo je joins, juxta jouxtant,
joignant — juste, jonction — to hook, to hang accro-
cher — hànken accrocher, liàngen être pendu. —
L'ongle qui agrippe comme le gosier s'appelle nakhas
— cvj; — unguis — ongle — nail (contraction de na-
gil) — der Nagel. Mettre le croc sur un objet, le pren-
dre, le voler s'exprime par coquer saisir avec les on-
gles, quiger, aquiger voler, prendre. Coquer veut dire
aussi donner, à la façon d'un coup de pied. V. au mot
gigoter. — V ongle, le sabot en L. ungida, par une ex-
tension du sens, est arrivé à signifier le soulier, leripa-
— 186 —
ton, le vêtement pour les pieds. De là chou ou chu de
chiiflick. A chu répondent fféxxoç — soccus — soc,
socle — shoe — der Se huit — Suêd. sko — H. schoen.
Le soc du mot soccus est une désagrégation au sk, sh
en Grec Ç (x) comme il arrive avec seco qui répond au
Grec ?é(i) au lieu de vAm couper. — L'ongle étant poin-
tue, crochue, a donné le mot aqucher variante de agacer
It. agiuzare, déchiqueter arracher avec l'ongle. Les
mots Normands chiquet ailler, chicoter gratter sur le
prix, obtenir de petites diminutions; l'Angl. to haggle
marchander en est une variante. Le soc de la charrue
Ail. der Secht répond à secare, V. plus haut. La pointe
qui coupe, l'ongle s'appelle àVr,. La souche est le chicot,
ce qui reste planté après que ce qui sort de terre a été
coupé. Son nom Normand est chouque, chuque, chi-
que. — L'or nie nous l'avons cru démontrer, désigne le
rameur. L'aigle, l'oiseau par excellence, tire son nom
du mouvement de ses aisselles, de ses ailes. Or nie et
aigle expriment la même idée rendue par deux radicaux
différents sans cesser d'être congénères. L'aisselle
s'appelle asas épaule, ayga membre en général, ka
tout ce qui remue, aksha l'essieu — ax^oç — axilla —
aisselle — axle essieu — die Achsel l'aisselle. — En
se figurant l'aisselle comme imprimant le mouvement
au bras on a une indication caractéristique pour l'oi-
seau : c'est celle qu'énoncent le Skt vâka la grue aux
grandes ailes — ôttovoç — aquila — aigle (1) au vol
puissant, l'Angl. fowl poule, Ail. der Vogel l'oiseau
(1) Le mot oiseau avicellus veut dire qui évente : skt od souffler —
au>. Son nom Skt est vdj'in leventeur.
— 187 —
avec digamma, H. wigchelaap augure. Agiter l'articu-
lation soit de l'épaule, soit de la hanche s'exprime par
les verbes iyk\ a^g, an' h, ak, kaki kaykt ug, uk\ uyk*
vaciller, aller, nak* aller, kaka homme déhanché, dé-
gingandé — ayo) peser, mettre dans la balance, x(w je
vais, je remue les jambes — agere agir, cio ou cieo je
meus, jacere (e court) jeter en agitant le bras et avec
digamma vactllare (Skt çayk douter) vaciller — oscil-
ler, injecter \, choquep — to wag vaciller, to go aller,
to shake choquer, remuer, to quake trembler, to
swing avec digamma aspiré osciller — gehen aller,,
rranken. schwanken vaciller, die Schwinge l'aile, hin-
ken clocher. Les caprioles du bouc et de la chèvre leur
ont valu le nom de bondisseur aj'ci bouc — ai; chè-
vre (1). Se coucher en s'appuyant sur les coudes ou en
s'accroupissant sur les [hanches [constitue des actes où
l'articulation est en jeu, ainsi que le dénotent les noms
ki être couché — xsÉjAat je suis couché, quiesco je
repose jacco je suis couché, cossim à croupetons, sur
les cuisses — adjacent, gésir, quiétude, cimetière —
to Iiitc/i être accroché — kauern se mettre à croucrou,
à croupetons, hocken rester sur place, ne pas avancer
— It. accosciarsi, accocolarsi s'accroupir. Le hic est
l'endroit où cela tient, où l'empêchement agit.
(1) L'eau qui s'avance en faisant des vagues s'appelle vâyka la mer,
caha cours d'eau — oitysi les ondes — aqua — vague, aqueux, eau,
voguer — icave (Anglo-Saxon waeg) — die Woge. La vague expri-
mant le mouvement (le chemin qui marche et qui porte) se rencontre
avec açva le cheval — oyiu) convoyer, atye; les ondes que les pein-
tres et les poètes représentent comme les chevaux de Neptune —
equus — équestre — icay chemin, gait démarche — der Weg le
chemin, der Gang la marche.
- 188 —
La hanche, l'ischion, la cuisse s'appellejV/Y/yV? jambe (1)
gigot chez le mouton, le chevreuil, en Ail. der Schinke
le gigot de porc, der Schenkel le tibia, Angl. shank
l'os^en Ail. avec une variante s ur Schinke le jambon der
Knoch. A gigot se rattachent la gigue la danse, gigoter
agiter les jambes, cahoter subir des secousses, les mots
Anglais tojoggle, tojingle, to j angle cahoter, subir des
déhanchements, gig la gigue, la voiture légère qui
saute facilement — die Geige le violon sur lequel l'ar-
chet exécute un mouvement de va et vient. Le chahut
est le cahot des jambes qu'on leur fait subir en les agi-
tant avec violence. La chacone, espèce de danse répond
c'anc, kak, chanceler, çayk douter, balancer de l'esprit
Angl. toshahe, Ail. schaukeln balancer. Cequi ébranle
agite ou son effet se nomme le choc. Au Centre on dit
coquer pour choquer (Skt. kaj' remuer). Aquiger veut
dire frapper, lancer un coup de pied, Angl. tokick ruer.
Le chiquant est le marteau qui frappe, qui aquige : de
\h passer à tabac par jeu de mot sur la chique rie tabac
etjîler la pipe par une aggravation de l'équivoque.
Aquiger sous la forme anglaise sonne to hack tailler
avec la hachette, Ail. hacken id. La chiquenaude est
un petit coup sur le nez (naude). La hanche et les au-
tres articulations emportent dans l'esprit l'idée d'agen-
cement, de coordination: de là l'Ail, schicken arranger.
Le H. opschik la parure, l'arrangement dans la mise
(1) En Français les mots hanche, ischion, agent, adjacent, vaciller,
osciller, gigot, aiguille, (skt ahi), acuité, chanceler, guingois, dégin-
gandé, genou, angle (skt vayka détour), aine, (L. inguen), chignon,
nuque, ongle, (skt. nak'a), anguille, ischion, sciatique dérivent tous de
la même racine gutturale, avec les métathèses et les accroissement
phoniques qu'elle comporte. Ajoutons joindre, skt uc', juste, jouxte.
— 18(J —
est l'équivalent du Français le chic le fond d'élégance
dansla façon de s'habiller, de se tenir, de la manière de
faire, etc.. La coche, Angl. chink fente nous ramènent
à hacher et sa métathèse xsw couper, delà même racine
que châtrer (késtron). — Avec le bal, la guinçhe et
la guinguette^ le bal de la barrière où l'on danse avec
force gigotements nous revenons aux mouvement de la
hanche et du genou. Guignolet le pantin qui danse;
gance est le mouvement mesuré, H. gang la démarche;
le cancan le gigotement démesuré avec jeu de mots sur
cancan cri du canard et par extension racontar, le ca-
nard et l'oie, l'autre chénoïde, étant bêtement loquaces.
Le guingois dénote quelque chose qui ne suit pas un
mouvement normal : c'est le contraire de chic. Dans un
habit ginguet il y a un guingois, un faux pli. Ginginer
veut dire cligner des yeux, les lever et les abaisser conti-
nuellement. La g uigne est le mauvais œil qui ensorcelle
entre deux clignements, de paupière: Angl. towink,A\\,
winken cligner. Le dégoût s'exprime par ah! d'où les
onomatopées tioyfioç laid, àtoxtfvtj la pudeur, le sens du
laid qui nous arrache l'exclamation ah ! C'est une nausée
se terminant dans un hoquet que l'obscénité, la turpi-
tude produit en nous. V. au mot hoquet, Angl. to keck
vomir. Kaxbç mauvais est la qualité d'une chose qui nous
inspire du dégoût, ce qui menace d'amener un hoquet.
Le gaga d'où par euphémisme le gâteux (™z-6ç — Angl.
shit, Ail. Scheis^), rappelle le son guttural qui a formé
canal, colon, goulotte, quique, Coenum la saleté, in-
quino salir, obscénité sont des mots formés d'une racine
qui a donné canal, ganeo le glouton, etc. Ils dénotent
- 190 —
ce qui sort d'une gorge, d'un canal quelconque: le vo-
missement (1). La laideur, le dégoût se rencontrent
dans les noms L. acco la femme dégoûtante, Angl.
uglg laid, Ail. cler Ekel le dégoût, H. hekel aversion
et probablement dans leL. œger malade, le dégoût des
aliments, du jeu, du plaisir.
Nous allons aborder maintenant un nouveau thème
formé par le fonctionnement du gosier g qui lui-même
entraîne le mouvement des lèvres b. Les sons g et b
sont l'accompagnement phonique de fonctions variées.
Ils sont donc inévitables étant inhérents à l'activité de
l'organe. Nous trouvons l'onomatopée de celui-ci dans
kûpa — y.j-y;, par prosopopée, trou — scaphus (2) le
creux de l'oreille — goffe bouche et langue, ^/are bouche
et estomac, torrent et ravin ou gorge, gaviot bouche et
gorge, deux endroits qui se font suite dans l'organe, ja-
veau gosier, guimbarde porte par assimilation à la
bouche ouverte ou fermée, les gaffes les joues, le jabot
l'estomac, la jappe la bouche - chaps la mâchoire, la
gueule, gap le gouffre — cler Kiefer la mâchoire. Par
analogie le mufle, le nez s'appelle le cep, It. cefïo. La
mort est appelée la camarde avec m pour p a cause de
sa jappe hideuse. La camuse est la carpe à cause de son
gros mufle. Tous ces mots nous font entendre les onoma-
topées bouche, bagou, etc., dans leur forme métathé-
tique. Ce sont, aussi bien, les mêmes organes qui ont
formé les deux phonèmes pendant l'accomplissement
(L) Le skt çakan, leL. cacare sont dans le même cas.
(2) L'usage n'a pas appliqué ce mot au gosier parce que la nécessité
d'un nom pour cet organe ne s'est pas fait sentir. Le mot aurait été
très-juste comme son et comme image.
— 191 —
du même acte physique, avec cette différence que dans
l'un l'action semble être partie de la gorge et dans l'au-
tre de la bouche. — Pour rendre le sens de manger le
langage nous montre la bouche, la gaffe, le cep en action.
L'imagination supplée le reste. La nourriture que l'on
prend s'appelle cibus L. mets, cive herbe, d'où cioard
pré, civade avoine, en Esp. cebada.
Saisir, afin de mordre, est un acte du même organe :
on n'a qu'à le présenter comme verbe, les circonstances
dans lesquelles il est présenté disent le reste. De \$l hap-
per, habiner, Angl. to hap, Ail. happen saisir, mordre
et le chien qui happe le hobin, le hubin ou avec jeu de
mois le caban, le cabot. La voix qui présage ce mou-
vement a été notée dans japper ouvrir la jappe. V. pp.
42, 43, 99 du Traité. Prendre, saisir de la bouche ou
par des instruments capables de la remplacer, s'appelle
paryàpta apte — a-Tco accrocher — apto adapter, habeo
avoir, tenir, adipiscor j'obtiens — adapter, recevoir,
chiper, capter 3 chasser, cage — to hâve avoir, to Ram-
per retenir — haben avoir. Lajlanchipe, la Jlouchipe
désignent la bouche en la représentant par des balots
qui chipent, qui happent. — L'accrochement des mem-
bres l'un à l'autre,, l'articulation tirent leur nom de ce
thème : gamb jambe, kamb, kamp' aller, remuer les
jambes, cav, kap} kêp, kup id. ,çapa serment, çap pro-
mettre — y.6jjigoç le nœud — copula la jonction, cubitus
le coude — accouplement, cubital^ coude, jambe, en
Argot guibe, guibole, guibone le membre accroché —
hip la hanche — die Hùfte id. Faire marcher l'articu-
lation a donné le Skt gam aller, le Français gambiller^
— 192 —
gambader, guiber, regimber, l'Angl. to gambol sau-
tiller et le H. schommelen osciller, balancer. En rem-
plaçant le p par le m nous avons l'articulation appelée
omoplate. Ces formations sont parallèles à celles qui
ont pour thème l'articulation nommée par le son g,
d'où gigoter, etc. — La gavotte est une espèce de
danse. La guimbarde doit son nom à la baguette en
acier qui sursaute sous la pression du doigt. Camboler
veut dire broncher, tomber. Le pli, le coude formé par
une conversion incomplète de l'articulation, se trouve
reproduit dans les phonèmes kûb, xub' fléchir, kam
s'accroupir, se reposer — /.à^w courber — scambus
arqué des jambes, scsevus gauche — cambré, gibbosité,
s'esquiver, s'échapper, prendre la tangente, faire un
coude pour s'en aller, — hump (hunch) bosse — sehief
en biais, en coude, die Gabel la fourche. La patte qui
happe, qui agrippe, comme le gosier, marque sa pré-
sence dans çapa l'ongle du cheval, le sabot — c-Xyj —
capulus manche, poignée — sabot (1), et par attribu-
tion de la propriété de l'ongle cable qui retient, qui lie
— hoqfle sabot — der Hufid. — Saper incorpore une
autre propriété de la griffe, celle de creuser, de fouil-
ler. Le s est le sk ou se zézayé.
Selon le livre des Juges, ceux d'Ephraïm pronon-
çaient Sibboleth au lieu de Chibboleth (écrire sh) tout
comme les Méridionaux. De tout temps il arrive aux
tribus et aux nations ce qui arrive chez les enfants des
mêmes parents : telle sœur ne sait pas prononcer le k
. (1) Sabot désigne le revêtement par le nom du pied, comme rlpaton,
patin par celui de la patte, corset par celui du corps, et en Wallon
ventrin le tablier, par celui du ventre.
— 193 —
dans son enfance et met de bonne foi un ti à la place.
La petite serre trop la langue aplatie contre le palais en
voulant produire du gosier le k dur, qui demande un
trop grand effort. C'est ainsi qu'au lieu de coucou elle
a dit tiou-tiou jusqu'à ce qu'avec un peu d'exercice elle
s'est mise à parler comme les autres. Si le Méridional
veut ramener un peu sa langue en arrière, le son chuin-
tant viendra tout seul en même temps que le sifflement
doux. Ce bégayage enfantin des langues est pour beau-
coup dans leur diversité. — Saper répond à avAr^u,
congénère de ;éo> couper. Travailler grossièrement ,
comme s'il s'agissait de faire un sabot, s'appelle sabo-
ter, sabouler. Un sabourin est un ouvrier inhabile.
Sabouler, sabouloter, veulent dire donner une avalan-
che de coups de sabot. Le sabouleur est le mendiant
qui simule des attaques d'épilepsie en agitant les pieds
sabotés. V. au mot digue-digue. Savate est une va-
riante de sabot, de même que ses congénères escqfe et
escqfignon, en Skt cap1 a le sabot.
La main qui tient présente l'emblème de la garde,
de la protection. De là capâla le crâne, kavaka le
champignon. — gxétty; le toit — capsa la boîte, squam-
ma écaille — échoppe, squammeux, capsule, chapeau,
champignon,, chape, chef, caboche, coiffure, coupe,
coupole, cabochon, caban — cap casquette, shop bou-
tique, échoppe, heaven le ciel, la calotte des cieux —
der Schoppen l'échoppe, die Schuppe la squamme,
l'écaillé, das Haupt le crâne, la tête (1). La maison,
(1) Au Centre cive, cicot, ciboule veulent dire la tête d'ognon, d'où
cipollata — l'Ail. Zwiebel ognon, H. siepel.
13
— 194 -
l'abri, se traduisent par cambuse^ cambriau, le cabou-
lot, cambriole la chambre. Le cambrioleur truque les
cambrouses, fait rafle des objets qu'il trouve sous la
main. Les mots kûpa rocher — «ixéiceXeç — scopulus —
êcueilf cap représentent une éminence, une hauteur
assimilée à la tête, au crâne : Y.zyi\r, caput — chef —
cape le cap — die Kuppe la cime. Le mot caisse, en
Latin capsa, a donné par jeu de mots sur casque (V.
ce mot), le verbe casquer payer, sortir de la caisse. —
Etre coiffé de quelque chose équivaut à : en avoir la
toquade (la toque, V. ce mot). L'expression repose sur
une équivoque, de même que avoir le casque, ressentir
un engouement passager, toque, casque et casquette
étant synonymes.
Avaler, gober, se gaver, nous montrent une autre
activité du gosier : Skt c'am manger, boire — za^Tw je
mange avidement — cibus la nourriture — gober ava-
ler, et au moral aimer — to quqff boire — kâuen en
H. kaauwen mâcher, l'acte du Kiefer la mâchoire. Le
goinfre et le gouffier sont des gloutons. Gobsec (qui
avale sec) est un personnage (de Balzac) usurier et ladre :
car comment donnera « qui lèche son couteau » dit
une poésie du moyen-âge. — Dêgobiller marque le
gosier qui rejette au dehors les aliments que l'estomac
refuse. A cause de la ressemblance de goupillon avec
gober, gobiller et dêgobiller, ce dernier a été remplacé
par renarder. Entre ces deux, la liaison doit être éta-
blie en intercalant un troisième terme : le goupillon, la
queue de renard qui nous suggère le mot renard, vul-
pes-, vulpilis (cauda), en Français goupil , goupillon ,
— 195 —
Le gosier parle quand nous lui faisons répéter sciem-
ment, à l'usage de l'auditeur, les sons qui ont répondu
au mouvement de notre âme ou qui se forment à la
suite du fonctionnement de notre organisme. Ces deux
catégories de sons constituent le fond, c'est-à-dire les
racines primaires des mots que nous souffle notre pro-
pre nature. Il reproduit également les cris des animaux
et les rumeurs que font entendre les corps inertes
quand une réaction quelconque secoue leur torpeur.
Ces deux nouvelles catégories forment les thèmes pri-
maires des onomatopées dont l'origine est en dehors de
nous. Il est inévitable que les sons extérieurs contrac-
tent, en passant dans notre bouche, quelque chose
d'humain et que notre conception des êtres et des
activités qu'ils nomment en subit le contre-coup, c'est
à dire que nous nous faisons, de ce qui nous entoure
dans la création, une opinion d'après nous-mêmes.
Toutes les impressions reçues ainsi et conservées dans
notre mémoire avec leur son se renouvellent en nous-
mêmes et chez l'auditeur quand nous les répétons par
leurs onomatopées, c'est-à-dire leur essence exprimée
par le son. Avec l'onomatopée, incorporation vivante
des objets de notre expérience, la pensée compose les
expressions qui en contiennent une synthèse quelcon-
que sous la forme de collectifs, termes abstraits, etc.
Tout ce matériel du langage se réunit dans un mot
marquant tout ce que la bouche peut proférer : Skt
çabd dire, çub parler, jap parler bas. A ce thème se
rattachent les onomatopées javoter parler, lejauwd le
causeur, du jobelin du potin , cabasser et capir parler,
— 196 —
comberger confesser, gomberger narrer, la comberge
le confessionnal, le cabot, le cabotin l'acteur. Les voci-
férations, les cris tumultueux trouvent leur expression
dans chamberder faire du chambard ou du chamber-
dage et avec jeu de mots faire du chabanais. Le Skt
cumb dénote la bouche qui donne le beccot. Ce mot en
est la métathèse. — La gave s'ouvre (Skt y 'ab\j'amb')
pour saisir en quelque sorte ce que les yeux voient :
elle fait le simulacre d'appréhender afin de compren-
dre. La bouche qui s'ouvre est l'emblème de l'esprit
qui apprend, comprend, saisit sous une forme maté-
rielle et physique, la seule capable de donner un son à
l'idée. De là que l'admiration, l'émerveillement s'ex-
priment par s'équaffer, ce qui est beau, pshutt par
sgoff. De là encore comberger calculer, méditer, caveo
je suis sur mes gardes, j'ai en suspicion, gaffer les mi-
rettes ouvrir les yeux et tout uniment gaffer, gqffiner
observer, gaffeur gardien de la paix, avec jeu de mots
cabestan (H. kaapstander cabestan et fanal). Javert le
personnage créé par V. Hugo est une variante de gaf-
feur. Faire gaffe veut dire faire attention : une gaffe
par ironie est une bévue. L'argotier et le Skt s'expri-
ment de la même façon : celui-ci a ç am regarder. Le
gobilleur est le juge d'instruction qui reconnaît, qui
voit. Le gavroche doit son nom à son attention d'en-
fant, à sa curiosité inépuisable qu'il peut satisfaire de
mille façons dans sa grande ville natale. C'est le mot
gaffeur ou gaffre avec la terminaison péjorative occio,
uccio. Le gobet, le guappeur désignent le rôdeur
qui guette la mangeaille, la boisson (xwjjipç le festin).
— 197 -
La guappe est la corporation des guappeurs ou goi-
peurs. (1). Par jeu de mots sur giberne, goiper devient
gibernev. — Par prosopopée l'observation se trouve
transportée de l'œil à d'autres objets. Ainsi ont été
formés kup, çub* briller, k'éo considérer, respecter,
honorer — wcéicxoixat je regarde — scepticus — scepti-
que— to show montrer — schauen contempler, die
Rundschau la revue — Esp. gaffa la lunette, ainsi que
les mots cabonde, cabonte participes présents, camom-
ble, calbombe, et camoufle. C'est la lumière qui fait
office d'œil, qui comme lui éclaire, éclaircit, observe.
D'une façon analogue le gaffeur l'agent de police qui
observe les allées et venues du malfaiteur est appelé le
lampion. La giberne est la cage, la boîte, V. au mot
caisse, La camoufle veut dire aussi le visage (gueule)
et camoufle r observer. Le camouflet est un tuyau de
papier qu'on allume par un bout pour en souffler la
fumée dans le nez de quelqu'un qui dort. Ainsi fait, il
ressemble à la chandelle. Souffler au nez d'une per-
sonne la fumée d'une chandelle ou d'un cigare est un
acte de mépris. De là le sens d'affront qu'on attribue à
ce mot. La camoufle (terminaison upola) veut dire
aussi le masque, le faux visage. C'est la métathèse des
racines congénères de masque et de moqueur, V. ces
mots. Camoufler veut dire sophistiquer, donner une
fausse apparence. Le Skt kape, en G. v.f^oc, désignent
le singe par sa camoufle. Donner une fausse apparence,
camoufler, se traduit par c'ap tromper — cnub-rcte») se
(1) 11 porte aussi le nom de gouillou (gueule) de gouspin et gous-
sepain, celui dont la gueule demande le pain. Gouspiner veut dire
badauder, jaspiner dire oui.
— 198 —
moquer — ccwillor id. , Gabba nom transparent du fou
de Tibère — se goberger se moquer, se gaber id., des
gabes, de la gabatine la moquerie (Skt kapata fraude)
— to scoff se moquer, to make game of se jouer de,
plaisanter — der Gimpel le gogo, le jobard. La gabegie
est la duperie. Prendre son café est par jeu de mots se
gaber, se moquer, à cause de la consonnance de ce der-
nier avec moka, la fève de l'Yémen. — Le gogo s'ap-
pelle par une variante Job et Jobard. Battre Job ainsi
que les verbes jobarder et chaparder veulent dire se
moquer du gogo. V. au mot battre. En Normand battre
Job veut dire flâner, c'est-à-dire battre le pavé en Job,
en gaffeur, en badaud. Jaspard, au contraire, est l'ob-
servateur intelligent, celui qui est capable de tromper
les autres. Gaspard est le Normand qui observe bien,
qui est finaud.
En nous imaginant la figure (la gaffe) comme laide,
nous nous expliquons le sens de goffe ridicule,, mal fait
et de gaupe femme laide et ridicule. Les désirs du
cœur s'expriment par le nom du gosier qui saisit : Skt
kam désirer, être cupide. Le g avion ouvert pour pren-
dre haleine ou laisser échapper les ahan, les ah de la
fatigue et de l'essoufflement se retrouve dans le sens
des onomatopées xà^vw être fatigué, *z~\ôuù peiner —
gemo - gémir — to gape bâiller, to gasp être essoufflé
— der Kummer le gémissement, la peine. — A ces
onomatopées s'attache le mot geindre, le mitron (1) qui
manie la lourde masse de la pâte et geint chaque fois
(1) Celui qui mélange la pâte. V. au mot mêler.
199
qu'il la laisse retomber après l'avoir péniblement sou-
levée. C'est l'air accumulé et retenu pendant l'effort
qui s'échappe, en gémissant, quand le soulagement
arrive. Geindre est le clamor concomitans du métier,
exprimé, non par le soupir spécial qui est s! mais par
un mot qui désigne le gémissement en général. C'est
pour cela qu'il est devenu le nom de l'agent qui le pro-
duit. Le marin qui haie la corde, le campagnard qui
enfonce le pieu, le forgeron qui bat le fer ont un cri de
soulagement après l'effort. C'est ainsi que s'est formé
ahaner auquel répond le mot Grec angaros l'homme
de peine. La métathèse de gemo est [j^îm avoir de la
peine, soupirer — mugio — mugio — Ail. die Mûhe
la peine — H. moeite id. Al), gm, mg sont trois cla-
meurs concomitantes d'actes spéciaux, trois sons signa-
lant un événement. Clamor concomitans est un nom
savant pour ce qui signifie essentiellement thème pri-
maire, le son devenu nom de ce qui sonne et formant
la racine des onomatopées. Tous les thèmes primaires
sont des clameurs concomitantes : leur orthographe en
est la reproduction notée. Grâce à cette reproduction
orthographique, nous sommes à même de les rappro-
cher de leurs prototypes dans la nature et de les identi-
fier avec eux. Le thème primaire a un sens, indéfini, il
est vrai, comme un verbe à l'infinitif, mais il y a un
sens. Il consiste dans la notion spontanée (subjective)
ou acquise par l'observation (objective) de ce qui se
passe au dedans ou au dehors de nous quand l'événe-
ment et le son se produisent. Une clameur est conco-
mitante à un acte pour que l'acte s'explique par elle ;
— 200 -
elle est pour l'oreille l'acte même et pour l'esprit la
résurrection du fait.
Au Centre la tige, les côtes s'appellent jebiche ou che-
biche mots auxquels répondent axr^Tpcv — sceptrum,
cippus, scipio le bâton — sceptre, cippe, chevron —
shqft tige — der Schaft le bois, façonné — H. Keper
le chevron façonné à la hache, Angl. to chop, couper,
hacher. V. Traité p. 99 et dans ce livre au mot saper.
De là lacibige et la chibichelz, cigarette, le tabac qu'on
vend ayant parfois trop de côtes. Le mot cive en H.
kip poule est formé sur le mot chapon, le coq coupé V.
Traité p. 99. Donner des coups de cible veut dire donner
des coups de pied dans la cibleplacéeaubasdudos: AU.
die Scheibe — H. schijf disque, plaque à proprement
parler tranche, de la même racineque couper. Cestmoi
qui écope veut dire : c'est moi qui paie les cibles, les
ronds, en H. schijven les ronds. — Le sabre, 1t. scia-
bola, Ail. derSâbel. le couteau qui sert de hache à servi
de thème aux mots sabreur, sabrenas, sabrenat le sa-
vetier, le mauvais ouvrier, le sabotier; à sabrenasser,
sabrenauder travailler mal, saboter, V. ce mot. Le sabre
d'abattis est le couteau en forme de sabre avec lequel
on se fraie un chemin dans les taillis. Chapuiser veut
dire donner certaine forme en taillant: Skt. çip être
raboté, Angl. to shave raser, AU. schaben et hobeln ra-
boter. Escoffîer veut dire tuer à coups de hache, de
couteau.
Le r guttural imprime à la glotte d'abord, à la langue
en suite une vibration qui, au bout de ce dernier organe
se transforme en l.
— 201 —
Il y a des personnes qui pour une cause quelconque
ne font pas vibrer la glotte et passent directement au
son /. Pour cela nous trouvons ces lettres confondues
dans l'orthographe du même mot comme dans à^ély^
et à;j.Éypw traire (H. melken), calupto et krupto cacher,
colonos et corone cime — scribo et glubo,gurgulto ré-
duplication de gula gueule — clampeet crampe, hurler
et ululer, glouteron et carde. — H. rieken et luchten
sentir. Cet échange se présente plus souvent dans les
mots appartenant à des langues différentes, l'uniformité
étant plus difficile à établir : gargouille H. hais, en L.
vollum et gula — àp-cq et altus haut — vJ.ppoç et le H.
geel, en L. gilvus jaune — calebasse et le L. cucurbita.
Mais dans la plupart des cas les permutations de lettres
qui se présentent dans les mots appartenant à des lan-
gues diverses se produisent aussi dans chacune prise
isolémentà raison delà facilité même avec laquelle l'or-
gane humain passe d'une lettre à sa voisine. Il y a plu-
sieurs dialectes dans la même langue, comme il y a
plusieurs façons de prononcer chez les enfants d'une
même famille et, dans l'ordre moral, plusieurs caractères;
dans le même homme il y a des natures diverses : la
philosophie, à tort ou à raison, en a établi deux, l'une
qui entraîne au bien et l'autre au mal, l'esprit de dé-
voûment et l'egoïsme.
Nous pouvons tous nous en convaincre, dans notre
organe le g provoque soit un g soit un r. Cet r se tras-
formant en /, c'est le son radical ou thématique ainsi
obtenu qui va nous occuper d'abord, afin de suivre
l'ordre alphabétique. L'organe qui émet le son se pré-
— 202 —
sente sous la forme gola — yw/^àletrou, la grotte pro-
sopopée de gueule — gula gueule — gargouille —
halse (Chaucer) cou — der Hais le cou et sa variante
die Kehle le gosier. Par analogie le gueulard,, la gueu-
larcle désigne le sac qui bâille, comme gousset sac de
gilet et la paraphase la creuse ou la profonde, en Grec
vwXsqç sac — culeus id. et par extension yô\yZiz les in-
testins {la goulotte). V. Traité p. 58. Le cri de cet or-
gane se manifeste par le Skt çûl crier, kali querelle., en
H. kwelen chanter, Skt. kêl chanson.
En Argot chialer veut dire crier, au Centre pleur-
nicher. Galouser signifie chanter ; il est formé de la
même racine que gallus coq, en Skt. kalâvika. En
Skt. le courlis s'appelle kalika. A l'Ail, klingen sonner
se rattache le clec la monnaie. — Le gosier soufflant,
haletant donne haloter avoir la respiration fréquente et
halot soufflet.
Le gosier qui s'ouvre tout seul dans l'étonnement
comme s'il voulait saisir l'objet qui frappe, donne s'ê-
quoler analogue ks'équaffer admirer. Le souffle embrasé
du gosier, le halot ardent se retrouve dans yjX'.o; le soleil
— sol — soleil, haie, halo — sun soleil, summerYètè
— Suéd. sol. La couleur feu, or ou jaune en dérive son
nom : hirana or, ¥aru blanc — x4Xoç beau — clarus
clair — clarté — clear — klar, de même que le cuivre
XoXxeç et l'or, en Angl. et Ail. gold et das Geld Ail.
l'argent, la monnaie, les jaunets. Le jaune s'appelle en
L. gilvus — jaune — yellow — gelb. Le noir, la
nuance la plus foncée de la couleur feu s'appelle kâlos
noir, xéXatvo;. La guette, la gaite, la gueltouse est l'or*
- 203 —
l'argent, la monnaie bénéficiaire sur les ventes faites
par les commis. Le jalo est l'ouvrier qui travaille le
cuivre, le métal jaune ; le galuche, le galon, le passe-
ment d'or. L'ancien Français a galandé avec le sens de
orné, en Provençal agalhar embellir. V. Traité p. 52. Le
1ml e du soleil, en Grer ï\rt auquel répond le Suéd. eld
le feu permute avec crsXaç la splendeur. Le s prend sou-
vent la place de l'aspiration sifflante c. "HXwç permute
avec cdp soleil, en tenant compte du changement de l en
r. Ce mot se retrouve avec une légère variante dans
rjpi'Çb) souffler en général sans idée de chaleur. Le sens
de brûler par un souffle ardent se présente dans sru des-
sécher, swar briller — jeCpo brûler — sera la brune —
le soir, saur séché, fumé, roussi — to sear brûler,
havir — schwars noir, couleur de brûlé — Suéd. sort
noir. Le soir, le commencement de la nuit sombre dé-
rive de seiro brûler comme brune de brûler, V. ce mot
et consulter le Traité pp. 128 et 133. L'Argot appelle la
nuit très-savamment la sorne et la sorgue. Du mot
sorne brune, nuit on a fait le verbe sorniller brunir et
comme brunir signifie donner del'éclat, ce nom devient
synonyme de donner un savon, laver les oreilles. Le
soulier astiqué est le sorlot. Lesartanier est le membre
de la sartane, la poêle à frire, en Latin sartago. Le
sérieux caractérise une figure, une parole sèche. Le si-
roco est le vent sec rappelant le Skt. sûrx dessécher —
Sirius est l'astre de la canicule. Les Syrtes doivent leur
nom à leurs bas-fonds qui sont presque à sec. Dans le
Limbourg les bancs dans la Meuse s'appellent Droogen,
Syrtes, endroits secs (taris). Le blé sarrasin est noir
— 204 -
comme ceux qui portent le nom du qualificatif. Le
temps serein est caractérisé par l'absence d'humidité, en
Latin serenus, delà même origine que ÇiqpaÉvw dessécher,
mot qui a le x pour le s. Le mot Français sournois dé-
signe le rêveur mélancolique, couleur du soir, ou sorne
et ensuite qui cache ses intentions, qui médite le mal
en silence. Il y a donc eu un temps ou sorne était de
du bon style.
La chaleur s'exprime par c'ûl, c'ur brûler — %kidvtù
— caleo — avoir chaud — to glow — gluhen.
Que le lecteur veuille bien prendre note que si le thème
qui nous occupe se trouve accompagné d'une gutturale
finale g, ch, ng, nch c'est que dans leur prononciation
le g initial et le r (ou l) qui le suit ont entraîné ces
lettres. Ce g et cet r ont été entraînés eux-mêmes par
la prononciation gutturale des voyelles. Si gl est suivi
d'un t ou d'un s ceux-ci ont été déterminés par la vi-
bration de la langue qui produit le son t ou sa forme
adoucie s lorsqu'elle touche le palais. Quandil se trouve
une labiale à la fin on peut admettre que c'est le r (ou sa
variante /) venant après le g qui a entraîné celui-ci de
sorte qu'on peut considérer ces nouveaux thèmes comme
équivalents de ceux qui se composent der6, rp avec une
voyelle, thèmes dont nous avons expliqué la genèse en
traitant du rynchus. Ces explications ont été motivées
par le mot clec à cause de son c final. En effet, en di-
sant de, le cl qui permute avec cr (claquer, craquer),
même le e voyelle etàplus forte raison cl et e combinés
sont capables d'entraîner dans la prononciation lec dur
de la fin. Le c dur final peut à son tour s'associer un n
— 205 —
en forçant la langue raidie à toucher le palais, ce qui
produit le n, d'où le Latin clango, Angl. to cling, Ail.
klingen. — La gorge secouée par l'effet d'une joyeuse
surprise éclate en sons spasmodiques qui représentent
le rire ou plutôt la gorge (gueule) en activité : Skt.
hlâd se réjouir — ytkita je ris — Jtilaris (1) — hilarité
— g ail lard 'joyeux compère — yule le cri de Noël, Noël
glee la joie, glad joyeux — geil lascif — H.jool joie —
Suéd. galen fou. La galleure, la galloise sont les noms
de la femme agréable.
La moquerie, le sens de tromper par l'apparence, par
le masque (la gueule), par la grimace a donné kala la
fraude en Skt, l'Angl. to gull, H. kullen. Peut être ces
mots veulent-ils dire simplement se rire de, V. hilarité.
— Le gosier mangeant a donné le Skt gai manger —
la goûtée, engouler, engoulevent, Angl. to swallow
engloutir, Ail. schwelgen id.; H. Italien engouler. Dé-
goûtant se dit dègueulboche. — La main faisant dans
la préhension l'office de la gueule a reçu son nom: yv^
griffe , variante naturelle de rt as; clou et de %e(p main,
par métathèse p^t'i; les ongles. De là que l'idée de agrip-
per, de saisir avec les griffes ou ses auxiliaires se rend
par kul, lui lier, faire office de clampe — y.sAAaw coller
— glus colle, gluten la matière gélatineuse, le gluten,
glutino coller, glacies la glace qui fait coller, gelu la
la gelée — la glu, la colle, la glèbe, globe, aggloméra-
tion, cliché] — clay argile, to cleave coller, to cling s'at-
tacher à — hleben coller, der Kleister la papette. La
(i)
le h
C'est la voyelle initiale prononcée gutturalement qui entraîne
- 206 -
c lampe qui attache a une variante dans clavin la
grappe et dans clavigne ou calvigne mots composés de
clou et de vigne. La clampe servant de croc et d'ongle
et par extension de grattoir se retrouve dans le mot ea-
labre pour grattelle, la gale, variante de ce mot. La
clanche variante de clampe se retrouve avec un sens
verbal dans les mots Anglais to cling s'attacher, to
clench fermer le poing, dans l'Ail, die Klinke la che-
villette. Nous le retrouvons également dans clic et dé-
clic, dans déglinguer décrocher, variante de dégringo-
ler se décrocher. La clampe organe s'appelle çrone —
xXoviç — clunis la hanche, la cuisse. Déglinguer que
nous venons de voir signifie aussi avoir une démarche
déhanchée, lochante, claudicante (1), en Ail. schlen-
kern locher. Der Schlingel est le dégingandé. -Pousser
une colle dans un examen veut dire attraper le candidat
comme à une glu. On est décollé quand on perd sa place,
son crédit. — Le gosier s'appelle dans le Centre où la
langue Française est si riche la cloquette, sans doute
en souvenir du son glou-glou qui éclate dans le goulot
d'une bouteille. Le H. a le mot kolk variante de golfe
le gouffre. Le goulot _, la goulotte, en Skt k'alla, s'ap-
pelait à Rome cloaca, le cloaque, en Angl. slough le
marais, par prosopopée, Ail. die Schlinge la lamie (V.
ce mot), der Schlauchle gosier, le gouffre, verschlingen
engloutir. De là répandre une mauvaise odeur, ouvrir
le cloaque chelinger ou chlinguer sentir mauvais. Le H.
slokken, slikken engouler se retrouvent dans un verre
de schnick een slokje.
(1) Attacher, fermer d'une façon quelconque s'appelle xXôsto je ferme
— claudo, id.— clore — sluice l'écluse— der Schlùssel la clef.
— 207 —
Pour manger il faut actionner le gosier : de là cla-
quer avec jeu de mots pour engouler. Le gosier qui
agit en proférant le son et la parole se reproduit dans
çulk, rwal/i, çlôk parler. La poule glousse, en H.
klokt : c'est le cri de son gosier. Le cri d'un objet qui
se brise retentit dans l'onomatopée claquer,, calancher
qui a le sens de mourir. Le gilquin est une claque,
grâce à un jeu de mots sur le dimunitif de Gilles. Le
Skt kléç veut dire blesser : il incorpore le son d'un
coup qui fait claquer ou craquer l'objet atteint. Ce son
forme également le thème de l'Angl. to clash heurter,
en Ail. schlagen frapper, d'où la schlague les coups,
le châtiement. Celui qui observe bien, celui qui ouvre
les yeux et la cloquette devient ce que TAU. appelle
klug malin. Le H. kloek veut dire, par extension, cou-
rageux. La fausse apparence, le masque joyeux a donné
le mot H. klucht. Nous avons avec la labiale un nom
pour le gosier : le galoubet par association du sens de
ce mot avec celui de siffle ou sifflet, surnom du gosier.
Galoubet s'aligne avec %&k*oç le sein — colpos le colos-
tre et par prosopopée — golfe — gulf— der Golf Le
galoubet se mettant en train de manger nous fournit,
pour exprimer ce sens, le mot clebjer. Le galfâtre est
le goulu comme le g alioufard, nommé au Centre ga-
laffre et goulipard, en Anjou goulipate.
Engouler se traduit en Suéd. ghtffa. En parlant, le
gosier se fait connaître dans une nouvelle activité par
les mots galp, jalp dire, klap, hlap^ lap parler. Le
galop est par jeu de mots la réprimande; par jeu de
mots également, galvauder veut dire réprimander avec
— 208 —
aigreur. Les bruits de la nature inerte ayant été assi-
milés à des cris analogues à ceux que profère notre
gosier quand nous sommes secoués, battus, blessés, il
s'en est suivi que la voix a été appelée clipet (1) et
qu'en Wallon la langue s'appelle clapette, congénère
avec les mots Angl. clap coup, AIL klopfen battre, H.
Map coup, kloppen frapper, klepel battant de cloche,
klepper le cheval qui frappe la terre du mouvement
cadencé de ses sabots. Le Latin sclopus, It. achtoppo
par le changement habituel de / en i a donné le Fran-
çais escopette avec perte de l ou i. Ce mot exprime un
engin qui donne un éclatement, qui produit un coup.
Les mots Angl. to clepe nommer et H. klappen et
klikken (cloquette) rapporter, ne diffèrent pas du nom
du coup clap.
En Hébreux le nom du chien est celeb, en Arabe kelp.
Selon la Bible, Dieu fit venir les animaux devant Adam
pour qu'il leur donnât un nom. Celui de Celeb paraît
avoir été donné d'après le même principe que tant
d'autres. C'est, si nous pouvons en croire la correspon-
dance des mots, le nom de la gueule, du galoubet dont
la genèse a été expliquée plus haut, présenté comme
verbe avec le sens de aboyer. Le son kelp signifie
gueule qui aboie, comme cabot et hubin veulent dire
gueule qui happe et jappe en même temps, comme
chien signifie gueule qui s'ouvre en disant houn,
comme bayafe veut dire bouche qui aboie, aboyeur.
Le chien aurait pu être appelé basser, baffer d'après
les racines primaires bas et baf reproduisant pour
(1) Clapper veut dire faire claquer la langue.
— 209 -
l'oreille Hollandaise le bruit de l'aboiement. Tous ces
noms tiennent compte de bruits réels qui se produisent
divers selon l'espèce des chiens et leur état d'excita-
tion. Een keffev dénotera toujours pour l'oreille Hol-
landaise un petit chien à la voix perçante. Le chien
comme hurleur, à l'instar de son frère le loup qui est
resté dans les bois, aurait pu être appelé comme lui. Et
cela arrive en effet, car en Angl. whelp et en H. welp
veulent dire petit de chien ou de loup. Ces mots sont
des variantes de TAngl. wolf (prononcez woulfe) et du
H. wolf loup. Tous ces noms sont justes parce qu'ils
sont formés de cris naturels accompagnant des actes de
la vie de l'animal; ils attestent en outre qu'ils sont le
produit de l'observation juste. Pour nous autres, bien
que Dieu ne nous place pas lui-même devant les ani-
maux et la machine du monde en mouvement, nous
nous trouvons de fait avec tous nos sens larges ouverts
en présence des réalités qu'il s'agit de connaître, de
comprendre et de nommer telles que leur nature les
manifeste. Le son les manifeste à notre oreille, et en les
nommant d'après ce système, comme Adam semble
avoir fait pour celeb et le Français pour clabaud, nous
respectons la création dans sa miraculeuse réalité telle
que la Providence la fit et l'a maintenue depuis. Les
noms qui ne sont pas spontanés, mais reposent seule-
ment sur des analogies avec un objet qui a révélé son
nom par sa voix propre, ceux-là sont justes aussi dans
la mesure de l'exactitude de nos comparaisons et pour
cela conformes à la nature du langage. Aussi bien ce-
lui-ci, s'il ne contient pas tous les sons réels, consiste
14
— 210 -
au moins exclusivement de sons vrais et conformes
aux actes et aux sujets qui les produisent. Dans toute
langue, la quantité de racines primaires ou de sons
spontanés est en raison inverse des noms créés par
analogie. Notre esprit, le sixième sens en quelque
sorte, le plus intime et le plus subtil certainement, de-
vient bientôt plus actif que notre oreille et prend une
part toujours plus grande dans la fixation des noms. En
faisant la connaissance d'une fraction quelconque de
l'infinie diversité des êtres, le sens intérieur est natu-
rellement frappé aussi bien des propriétés qui leur sont
particulières que de celles qu'ils partagent avec d'au-
tres. Il est donc aussi naturel de désigner un objet par
le nom d'un objet analogue que de le signaler d'après
son nom spontané. Dans le premier cas c'est donc l'es-
prit qui détermine le nom, dans le second c'est l'objet
lui-même. Ce dernier est spontané et par conséquent
individuel, l'autre ne l'est pas, bien que l'objet con-
tienne dans la somme de ses propriétés celle dont le
son naturel forme la racine de son nom d'emprunt.
L'esprit humain étant perpétuellement pénétrable à la
vérité et à l'évidence et les êtres n'ayant pas changé la
somme de leurs propriétés, il est prévu que l'homme
peut trouver les mêmes rapports entre les mêmes objets
et les exprimer par un nom commun, et que d'autre
part les mêmes propriétés se rendent par des noms dif-
férents suivant la quantité d'objets dans lesquelles on
peut les rencontrer. Les langues les plus diverses four-
nissent la preuve de cette assertion. Ainsi, quand nous
appliquons le mot clabauder au sens de criailler (Skt
— 211 —
klap\ hlap,jalp parler), nous donnons à entendre que,
d'après notre observation, les hommes crient et se que-
rellent quelquefois comme des chiens. Le mépris avec
lequel on accueille la médisance fait que nous l'assimi-
lons volontiers à l'aboiement d'un chien qui nTose nous
attaquer de front. Les éléments pour ces comparaisons
et ces assimilations se trouvent partout. Le clabaud
est le chien de chasse qui donne de la voix hors de
propos. En Ail. kleffen veut dire aboyer, clabauder,
klqffen ouvrir la gueule, das Klaftev la brasse, la me-
sure de deux bras étendus, transportant le nom de la
déhiscence du gosier aux bras. Cerbère, le chien de
l'enfer, est probablement le môme mot que clabaud.
On § esclaffe de rire lors qu'en poussant son ah ah on
a l'air d'aboyer. Sa variante glapir qui est tout proche
de l'Angl. to yelp dénote une voix de chien aiguë et
intéressée (to yaup, japper). L'attention ou tout sim-
plement la badauderie, l'amusement aux choses inu-
tiles où mauvaises s'expriment par la racine de galoubet
transformée en verbe. Pendant que nous badaudons,
le galoubet s'ouvre eu même temps que les yeux. Nous
avons vu aussi la bouche entrouverte prêter son nom
au spectateur, au rebouiseur etc. Le Gaffeur va repa-
raître ici sous une dénomination congénère, car géné-
ralement quand il y a des racines équivalentes telles
que ga, gai, gaf, golf, on tire de chacune d'elles des
homonymes ayant le même sens. Ainsi le museur, le
coureur s'appelle le galvaudeux. Galvauder son argent,
veut dire le dépenser en s'amusant d'une façon licen-
cieuse. Le galapiat) le galapiau sont synonymes de
— 212 —
galvaudeux. Ces mots proviennent du Centre où ils
ont pour synonymes les congénères galuriau, galefer-
tiau, vallaupiau, galibard,galetru, galbiau et gale-
taud. Le galvaudage s'appelle au Centre le gallouage.
Le galopin paraîtrait plutôt un jeu de mots sur galop
que le mot galop lui-môme et tenir la place de galvau-
deux, gavroche. C'est en effet un petit voyou (1), un
garçon impertinent. Le galifard, la galifarde dési-
gnent le petit apprenti et la petite demoiselle de ma-
gasin. Ce sont deux petits museaux qui gaffinent soit
pour apprendre, soit par curiosité. Le galfâtve est
l'imbécile qui regarde sans comprendre. La galupe est
la coureuse, la galvaudeuse. — Le masque joyeux, la
moquerie, peut-être le rire qui l'accompagne, s'exprime
par le mot galipette qui a le sens de farce (H. klucht) ;
le galipeteur est le plaisant. La gueule qui saisit, qui
enserre, a prêté son nom à l'instrument qui agit comme
elle : de là le mot clampe et ses congénères ; gluc\
glunc' saisir — vXsXq la clef qui tient — clava l'articu-
tion, clavis la clef, clavus la barre du gouvernail qui le
fait tourner — clef, club, agglomération (avec m pour
b ou p) — clubfoot pied bot, ramassé autour de l'arti-
culation club groupe de sociétaires, claw griffe, clue-
glomus, pelote — die Klaue la griffe, die Keule le
gigot, la hanche. Etre perclus^ claudicant, marque un
défaut dans l'accrochement. Cette articulation défec-
tueuse mise en mouvement donne le sens de kola boi-
teux — 70)Xbc id. (yXouTfç la hanche) — claudus qui
(1) Voyou est synonyme de gavroche. Voir est assimilé à g affiner .
Pour la genèse du son vid, V. Traité, p. 55. Via* en Sanskrit veut dire
savoir.
— 213 —
cloche, claudiquer, clocher, clodoche qui a les articu-
lations décrochées (1) — to hait claudiquer (cluster
grappe, to clutch agripper) — schlottern locher. Le
galop en Grec xaXxt] semblerait avoir le sens de clava
sabot, avec la qualification de frappant la terre. Tel est
le sens de galop lorsque, par jeu de mots, il est em-
ployé pour rossée, grêle de coups. V. au mot c tapette.
Ce mot, par redoublement d'équivoque, se remplace
par danse, le tapement des pieds. La patte, le membre
articulé qui frappe, V. au mot chiquer frapper,
exprime son acte par xcAao^o) je frappe, je châtie —
alapa le soufflet — le galop — to clap frapper —
klopfen battre.
La clampe qui tient, qui enserre, a donné son nom
à l'enveloppe, à la protection : kalapa carquois, kôlaka
casque — vS/-rt crâne, cime, rocher élevé — chlamys le
manteau et glubo ôter l'écorce, le glume, clam d'une
façon couverte, cachée — heaume, calebasse — helmet
le casque, clam coquillage comestible, scollop coquille
der Helm le casque. De là le mot globe 3 en L. globus,
l'objet qui a la rondeur de l'enveloppe, en Argot le
ventre, à cause de sa forme rebondie. De là encore le
galbe, la forme qui présente des contours arrondis
comme le globe. Calypso est la nymphe qui se cache.
Sans la labiale nous avons, pour exprimer la cachette,
la protection : ç'il vêtir, kûl protéger, empêcher, kôli
carquois — xuXtta je défends — cilium le sourcil, che-
lys la tortue — cellule, cale, calotte, écaille (2) —
(1) Eclopé marque un défaut de la clampe, comme l'Ang. to limp
être éclopé (sans gutturale) et le Skt klarn variante de çram .
(2) La galure, le galurin désignent le couvre-chef, le chapeau.
— 214 —
scale écaille — die Hïdle idem. — La rondeur de
l'enveloppe se retrouve dans le galet avec sa
forme roulée et dans son congénère le calot, en Latin
calculuSj le caillou et en Patois Limbourgeois lads
bille. Le caliborgne est borgne des calots. En Patois
du Limbourg schèle kuls, est le sobriquet de celui dont
les calots roulent en sens opposé. La galette est la
miche qui a la forme du galet. Avoir de la galette veut
dire avoir des ronds, de la monnaie. La rondeur se fait
sentir dans c'al vaciller, c'U, hwalj kêl, kwêl rouler;
kKal, xal vaciller; cal, kar se mouvoir — rtuXfo id. —
cylinder — cylindre, caillou, calcul, calculer — to
coil enrouler en cercle — der Kelter le manège pour
écraser les grappes, le pressoir, kollern avoir le ver-
tige — H. hollen s'emballer (1). — Le coloquet nous
ramène à l'enveloppe. Le sens est calotte, en Flamand
klak. Le mot est modelé sur cloche, variante de calice,
avec le sens de ampoule et écaille servant de grelot.
Oter l'écaillé, la gousse (V. plus haut), nommé en H.
schillen, donne le sens et le son de séparer et concerne
les choses qui ont de la différence entr'elles. Noncha-
lant est une expression qui équivaut au H. onvej^scldl-
lig,peu me chault à het kan me weinig schelen. L'Ang.
skill veut dire habileté ; ce sens découle de celui de
discernement, inhérent à ce phonème. Une calotte est
par jeu de mots un coup sur la tête. Au fond, on veut
dire un coup de calot, V. ce mot. Cette expression est
synonyme de gilquin. — Sans la labiale de la fin et
• (1) Le sens de s'emballer est : bondir comme la balle, rouler avec
des soubresauts comme la bille, la boule, partir comme la balle du
fusil.
— 215 —
avec l'aspiration remplaçant la gutturale, nous voyons
l'accrochement s'exprimer par v-c le clou — vola avec
le digamma, le creux de la main et accrocher par la
saisir — etXw id. — haereo adhérer — adhérent, aclhê-
siony haler tirer sur — to hold tenir — halten id. —
Le mouvement imprimé à l'articulation produit la ro-
tation de l'aile, du bras, de la jambe. — èXfosca tourner
volvere et sans le digamma ala l'aile, aies oiseau, volo
je vole (comme l'oiseau), V. au mot ornie — évolution,
mllebrequin (1), hélice, valse — to wheel tourner, to
toallow rouler — malien voyager, rouler — H. wiel la
roue — Skt val aller, circuler.
A fin de rester fidèle à l'ordre alphabétique nous trai-
terons le thème c-n avant celui qui sonne le c-r malgré
l'intime liaision de ce dernier avec la racine c-l dont
nous venons de suivre quelques évolutions.
Quand nous raidissons la langue pour prononcer le g
dur, nous la sentons qui touche le palais et produit ainsi
le son/z. Réunis ils forment le thème g-n. Le nde son
côté en fermant par sa production même l'ouverture
bucale amène le g dur. Il n'est donc pas étonnant de voir
ces deux lettres prendre, dans le même mot, indif-
féremment la première ou la deuxième place. L'ac-
cession de n à g dur se produit, par exemple dans guin-
gois de la même racine que agiter, dans le H. ik ging
j'allais de ik gaje vais (jegigote), dans le Grec -Av>zéiù(2)
extension de y.vao) gratter et xsw fendre. La métathèse,
nous l'avons vue appliquée dans genou et angle, — L'or-
(1) La première partie ville est une variante de virer.
(2) Quand nous appuyons la langue contre le palais pour former le n
il se produit un t.
- 216 —
gane qui produit le son gn et en dérive sa dénomination
s'appelle gandi goitre,, ganda — ysytis la joue, le men-
ton — gêna id. — ganache (1) — r chin le menton — das
Kinn id, la mâchoire inférieure qui suit les mouvements
du gosier et en emprunte le nom. Par prosopopée il
s'appelle canna. V. au mot canal et Traité pp. 135 et
137. Un des bruits du gosier a donné l'onomatopée
hogner, grogner comme le chien. V. Traité p. 1. L'a-
nimal hogneur s'appelle en Skt çuna, çwan. D'autres
sons du canal guttural se présentent dans km, kan,
swan, kwan, c'un qui veulent dire crier, à peu "près
comme clabauder signifie aboyer et criailler. Le chien
est pris pour ses qualités dans la boutade: ce qu'il y a de
meilleur dans l'homme c'est le chien. Il a du chien veut
direil est vaillant, fidèle. Les mauvaises qualités du chien
ont servi pour désigner des dispositions analogues dans
dans l'homme (2). Etre chien veut dire être avide et
avare comme lui. Câner signifie être lâche comme
canis. Au Centre on dit s'escaner pour se sauver
comme le chien. L'adjectif cagnard exprime sa paresse:
de là le canasson le cheval paresseux. Le cagneux a les
jambes arquées du basset. Au Centre le cagnard est le
mur ensoleillé propice aux paresseux, le câgnaudle pa-
pelard, l'homme confus, l'individu caressant avec hy-
pocrisie.
Le pays de Cocagne est le pays des paresseux, des
(1) A l'aide d'un jeu de mots la ganache signifie le fauteuil. C'est le
mot banquette assonance de bouche (V. ce mot) qui sert de trait d'u-
nion entre ganache, mâchoire inférieure du cheval et le sens de fau-
teuil. Ganache et fauteuil n'ont qu'un rapport d'équivoque.
(2) Aduler en L. adulari rappelle le chien qui ulule par montrer sa
joie. Quand la joie est trop démonstrative elle est souvent fausse chez
l'homme.
— 217 —
gens qui aimeraient à passer leur temps à dormir comme
le chien. Le mât de Cocagne porte une couronne à la-
quelle sont attachés tous le dons du pays de Cocagne.
On n'a qu'à aller les décrocher. Nos pères étaient sages
de faire comprendre qu'on n'arrive aux biens que par
la peine. Le trésor, au lieu d'être caché dans le champ,
comme chez le Fabuliste, est suspendu en l'air: le sens
est le même. — Au Centre le cagni est le petit polisson
par allusion à la pétulance du jeune chien. — Caner la
pégresse veut dire crever la misère, être maigre comme
le chien pauvre. La cane est la mort et ses angoisses
qui nous font peur, le canage l'agonie et l'abattement
qui l'accompagne. — Le cri du chien se retrouve dans
xyoÇéw ouvrir la gueule, japper en parlant du chien —
gannio id., en Angl. to tchine pleurnicher comme le
chien, AÏÏ; winseln ululer — It. gagnolare id. — Le
quenottier est le spécialiste qui soigne les quenottes.
La quenotte veut dire à proprement parler la gueule,
le canal oesophagique, puis la ganache, la mâchoire et
les dents. C'est la partie prise pour le tout. Les badi-
goinces désignent les lèvres seulement, au lieu des lèvres
et des joues ensemble, comme le dit ce composé de badi
pour bades et goinces équivalent de rit. guancie joues ;
delà badigoincer manger. La henné et la hane sont des
prosopopées synonymes de gueularde sac. — La voix
de l'organe se reconnaît encore dans kand gémir,, pleu-
rer — y.avayéo) par prosopopée, résonner — cano —
chanter (1).
(1) Le chenoïde, l'oiseau qui dit qudn-quan, Angl. goose, a, comme
la poule, donné son nom aux jeunes enfants et par extension aux ado-
lescents. De là le gosse l'enfant de 7 à 15 ans, le gosselin et le gosse-
218
Quand la gueule happe et saisit, lamâchoire inférieure
s'abaisse puis se resserre. De ce jeu le langage ne donne
d'autre détail si ce n'est que le gosier (yioc) agit. L'a-
grippement produit par le gosier prête son nom aux
ongles, au coude (àyy.civy;), à Vçdselle, à la cheville (H.
enkel), au talon (H. hak), au genou, à \&hanche, au gond
ou emboîtement de la porte, en It. ganghero, etc.
U ongle se mouvant avec l'articulation et se confon-
dant avec elle a prêté son nom aux objets qui sont tran-
chants. De là les noms de kantaka pour l'épine, V acan-
the en H. beerenklaaw griiïe d'ours — féwq hache,
(Skt kâta), même nom que pour dire menton et joue —
cuneus le coin — le coin variante de angle, cognée —
cant le bord tranchant — die Kante id. Couper, se ser-
vir d'un coin, d'une cognée s'appelle han couper
xnu aiguiser, c'unt et kunV couper, k'ad fendre —
ca(vo) couper extension de y.sw couper et de £xrt pointe
— scindo — scinder, le chantier où l'on débite le bois,
la cantine où l'on détaille le vin, êchandole copeau —
keen tranchant, to sned, to snathe, to notch couper, en-
tailler — schneiden entailler. L'expression de champ
sur le côté devrait être ortographiée de chant comme
le H. op zijn kant (de chant). Le chantage est un at-
tentat sur notre bourse (cutpurse, coupe-bourse): au lieu
de nous voler le chanteur veut nous faire donner nous
mêmes en nous menaçant de scandale,, dans l'intérêt de
sa bourse, bien entendu, et non pour venger la justice.
Faire chanter quelqu'un pour: lui extorquer de l'ar-
man l'enfant avec les terminaisons lin en AIL lein, diminutif et man
homme, le gonse, la gonzesse la femme. Gonsaiez est un jeu de mot
pour gonse. Goslin Angl. est une jeune oie.
— 219 —
gent pour le chantage est peut-être un jeu de mots
voulu : en tout cas ce n'est pas le verbe chanter, ca-
nere(l). L'expression juste serait chanter qq, le mettre
en coupe. La racine de ce verbe théorique se retrouve
dans chanteau, en Skt kanda morceau, copeau, éclat de
bois mince, échantillon morceau détaché par lequel on
juge du tout, dans chanlatte et dans le verbe chantour-
ner (2).
L'Argot montre souvent qu'il connaît la bonne adresse
pour se fournir de vocables. Le mot gandille pour cou-
teau qui se rattache au groupe ci-dessus, peut servir
de preuve. — Cogner jusqu'à ce que mort s'ensuive,
avec un coin, une cognée ou n'importe quel istrument
meutrier a donné cônir tuer. Nocher, enAngl. tonotch,
est la métathathèse de cogner.
L'articulation qui s'emploie à saisir, à tenir fait venir
à l'esprit l'idée de garder, de conserver, d'enserrer ; de
c'and, gunt couvrir, g'ana le cuir — xovôapo; vase et
cantharide le coléoptère— cant/iarus le vase — échine
le dos c'est à dire la peau du dos — skin la peau —
sâhinden ôter la peau, écorcher. De là chiner et avec
jeu de mots faire la chine, aller à la Chine porter sur
le dos. Chiner quelqu'un veut dire lui enlever la peau,
lui faire tort avec de méchants propos, s'échiner se
donner mal dans le dos, s'éreinter à force de travailler.
(1) Ces deux verbes se ressemblent parce qu'ils sont formés de la
même racine. Chanter et scinder sont deux capacités de la gueule,
le premier de la gueule elle-même, le second d'un agent analogue qui
porte son nom.
(2) Ajoutons que dans l'expressiou avoir une aiguille, ce dernier mot
désigne une barbe hérissée de picots tranchants qui appellent le
rasoir.
— 220 —
Le guinal, en Argot Angl. sheeny est l'usurier qui
écorche. - La reconnaissance emprunte son nom au son
de la bouche (gosier) qui s'ouvre instinctivement pen-
dant l'observation. De là g an apprécier, j' nâ connaître
— yvco) id. — cognosco id. , genius le génie, l'étude
approfondie — ken le coup d'œil, to know connaître
— kennen connaître. L'argot a renobler pour récon-
naître.
L'organe qui remplace la bouche dans la préhension
et telle de ses actions s'appelle hnu, gin, g un prendre
— xavBàvw je prends — prehendo id. — appréhender,
apprendre, hanter tenir avec, être l'associé de — hand
la main — die Hand id. — La gloutonerie se devine
dans les mots qui ont pour thème le son du gosier tels
que le Skt /£'&/, k'êt manger, k'ànikale trou, le L. ganeo
le glouton, dans le F. le goinfrée; l'acte de ronger, d'e-
xercer les quenottes dans l'Angl. to gnaw ronger, en
A. knaupeln id., dans knirren et knarren égruger 'les
dents, dans knirschen id. et dans le H. knutcen mâ-
chonner, pressurer sous les quenottes. La gorge dont
nous avons rencontré des bruits, des noms et des actes
dans les onomatopées contenant les thèmes g} gb, gl,
gn, nous allons la reprendre à propos du radical gr par
lequel elle s'énonce également. Ces deux lettres sont en-
traînées par l'émission de la voyelle, celle-ci faisant vi-
brer le gosier g et la racine de la langue r. Depuis ces
deux sons s'appellent réciproquement de sorte qu'on
les trouve volontiers réunis dans le même nom: r venant
après g et g après r. Le g dur s'associe souvent avec
n comme il a été exposé plus haut. Quand lé g s'échappe
— 221 —
de la gorge avec un sifflement nous avons le phonème
gs qui se transforme en gt quand la langue, au lieu de
le laisser échapper, l'intercepte en se collant au palais.
La gorge, gurqes,est ainsi une variante métathétique
de rynchus. Le r de ce mot a été entraîné par le g ini-
tial et tous deux par la voyelle o. Le second g est un ap-
pendice de la prononciation de r. Le n de rynchus est
né en même temps que le ch dur. Le nom Skt est krika.
La racine de ces onomatopées, est empruntée au cri de
l'organe, l'un des plus habituels et des plus frappants.
Le coeur est selon l'opinion populaire l'estomac: n'a-
voir rien sur le cœur, avoir mal au cœur rentrent dans
le sens populaire de l'organe. Ainsi compris on peut
s'expliquer l'homonymie de coeur avec gurges, celui-ci
formant l'entrée du tube digestif dont l'estomac forme
la partie la plus considérable et la plus sensible. Son
nom Skt est hrid auquel répondent vAxp — cor — cœur
— cordial — heart — dos Herz. V. Traité pp. 12 et
13. En Argot la gorge s'appelle la gargagoitche, mot
composé de gorge, gargouille et de gouache ou goualche
qui rappellent Fit. guancia joue: la gar gante et la
gar goule sont des noms congénères. Ainsi que le Skt
k'ihHrdka tube, roseau. Au ^Centre on l'appelle la
goure équivalent du nom Provençal gourgue et de
celui de gour qui, par prosopopée, désigne un trou dans
une rivière ou une baie fluviale. Boire à tire Varigot
veut dire boire à grands traits. Arigot est une forme
allongéede argot, l'organe où seproduit le langage de ce
nom. Tirer marque, dans cette expression, l'effet d'il-
lusion optique qui t'ait qu'on prend la descente de la
222
boisson par l'argot comme l'effet d'une traction exercée
sur lui. Uaricoteur est le bourreau qui coupe le cou ou
V (tricot, par jeu de mots sur haricot. Aricot et arigot
présentent des métathèses de gurges et de rynchus.
D'autres noms du cou nous sont offerts dans gargarousse
gargoine, garguine et g ar gamelle par lesquels on
cherche à lier les idées àe>rougeui\ de gargante, de ga-
melle avec celle de gorge.
En donnant à notre figure une expression qui n'est
pas la vraie nous formons la grimace, en Angl. grin.
Gourer veut dire tromper par de fausses apparences,
peut être, se jouer de, en riant, H. kullen tromper, du-
per. V. au mot hilarité.
Le cri dont l'organe a tiré son nom est présent dans
les noms de toute espèce de sons : kur, g'ur résonner,
kruç, krid, hril crier — Y^pjw parler — garrio fredon-
ner, gazouiller, carmen le chant — charmer, crier —
to erg, to shriek; toscream crier — kreischen, schreien
id. — Haro veut dire simplement cri ; crier haro ré-
pond à F Angl. to raise the hue and the erg huer quel-
qu'un et crier après lui; harauder signifie tenir des
propos malveillants quand la victime a le dos tourné ;
gourler, variante de goualer ouvrir le gosier, parler,
dégorger son secret, avouer à la justice; churler crier;
cribler à la grive crier : attention ! voici le guet ! La
grive est par jeu de mots le nom de l'agent qui met le
grappin sur le voleur. - Le jargon est le nom d'un
langage particulier où l'on n'entend soi-disant que des
sons gutturaux. Le Normand l'appelle jargole, l'Italien
gergone. Le H. gorgel veut dire gorge. Jargouiller a
— 223 —
le sens de parler d'une façon incohérente Jcu^viller de ja-
boter. Décide/' son jars semble être une corruption,
peut être un jeu de mots en guise d'adaption, du vo-
cable Angl. i/arn qui veut dire une longue histoire, par
extension du vrai sens : fil, chanvre fordu en corde.
Les correspondants de ce mot sont: yùpoç — gyt'us —
// //vw la partie du corps où l'on met la ceinture, girouette
— to gird ceindre, garter lajarrettiere — der Gilrtel
la ceinture. Voir pour la genèse de ces mots les expli-
cations données à propos de rinceau et de croc. Le jars
est le mâle du canard, nommé ainsi d'après le cri de la
gorge comme la grue. Jarc' et j'arj' en Skt veulent
dire parler.
Quand il se produit une solution de continuité comme
dans l'écrasement, le cri de la nature inerte imité par
nous contracte quelque chose d'humain. De là les pro-
sopopées Sanskrites gris* broyer, c'urn écraser —
v.pzj(ù — crotalum, crepitaculum grelot, crécelle —
écraser, égruge/% gruge/', gruau, crcCquer, croquer —
tu crus h écraser, to creak craquer, to craunch croquer,
to grind moudre, groat gruau — die Grutze id. , kra-
chen craquer, der Gru/id le sol, le sable menu, va-
riante de der Grind le sable. De là le croquenau le
soulier qui craque, le gringue le pain croustillant qui
croque quand on le grignote, écrabouiller écraser,
c/'a bosser écraser et bosseler, une croquignole un petit
coup sur le nez (gnole), cramser et crapser crever. La
cravache emprunte son nom- à ses coups qui produisent
l'effet de quelque chose qui crève.
Le cri guttural du corbeau lui a valu son nom Skt
— 224 -
de kâraua, en Suéd. korp. Kâkâri est une espèce de
hibou nommé d'après son cri, karata la corneille : l'un
et l'autre sont Skts. L'Angl. cur le chien mâle veut
dire grogneur : « r est la lettre du chien » dit Shakes-
peare. Le H. kirren présente la métathèse de roucou-
ler : l'un et l'autre mots cherchent à noter un bruit
guttural. Le nom de la grue au long cou a été expliqué
Traité p. 12. La grenouille en L. rana, doit son nom
à son cri guttural. Un autre nom de la gueule, celui de
quiqui, a valu à la tribu aquatique le nom de peuple
coassant — Ce mot répond au H. kwekken, kwaken.
Grenouille contient la racine de ypwr, par prosopopée
gargouille, en L. suggrundia, équivalent de Ht. gron-
dana, La cagnotte (1), le magot qu'elle contient s'ap-
pelle populairement la grenouille : au jeu du tonneau,
c'est la coasseuse qui avale les palettes quand le joueur
est assez adroit pour les lui lancer dans le chasme de
son gosier.
Le cochon grogne par habitude. Le sanglier (singu-
lier, en Angl. single, synonyme de solitaire), en Skt,
a le nom de ses congénères apprivoisés. V. Traité,
p. 12. A cause de sa ressemblance avec le cochon,
l'homme sale s'appelle le g or g niât. En assimilant le
goret, le petit cochon domestique, avec le marcassin
(le goret marqué, strié de blanc) du bois et en tenant
compte que ce dernier mot désigne également le petit
apprenti , on s'explique qu'on l'appelle aussi bien
groule et g roulasse, variantes de goret. Le graoudjem
(1) La cagnotte semble désigner un canal, un gosier de chien au fond
duquel glissent les sons économisés. La tirelirç représente un gosier
quelconque. V. au mot sternum.
— 225 —
est le charcutier. Ce mot paraît cacher l'élément goret
et heim, terminaison de plusieurs noms de famille en
Allemagne, et désigner le charcutier Allemand établi à
Paris. Ce serait donc une formation analogue à chic-
mann, le tailleur Allemand, désigné par la terminaison
mann indicative de l'origine. Heim répond à hameau ;
mann se retrouve dans mannequin, V. ce mot. Les
poissons ne disent rien. Il y en a un cependant, un seul
peut-être qui a le nom de son cri : c'est le grondin, en
Angl. (jurnard le grogneur, comme en H. knorvish
poisson (piscis) qui a la voix du cochon. Les onomata-
pées hure et groin désignent la tête du cochon d'où
s'échappe le grognement. Au lieu de nommer l'animal
d'après son cri, comme il arrive pour goret, coq, cou-
cou, c'est sa gueule et par extension sa tête, son mufle.
YS horreur (1) en h.horror fait que les cheveux se hé-
rissent comme les picots du hérisson. V. Traité, p. 12.
Hérisson répond à goret. Le Centre où le Français est
si véridique, a les mots goure pour truie, gouri pour
goret, agrasser pour exprimer le grognement de ten-
dresse que la truie fait entendre en allaitant ses petits.
Au delà de la Loire, girolle et agrolle désignent le cor-
beau.
En mangeant, le gosier est censé faire entendre son
bruit habituel : de là gar manger, mot qui nous pré-
sente le gosier mangeant — Ypaw id. La gargotte est la
maison où l'on mange, où la gargagoitche trouve à se
satisfaire.
(1) En Ail. grauen et grieseîn avoir horreur, en H. afgrijselijk
horrible.
15
— 226 —
Le mécontentement provoque dans le gosier un gro-
gnement qui exprime l'état moral dans lequel nous
nous trouvons placés. De là le grignon, le juge sévère,
qui aux yeux du voleur se fâche, parce qu'il punit selon
la loi. Ce mot contient la même racine que les mots
Allemands der Grimm, der Gram la colère, dev Groll
la rancune. De là encore grubler, en Angl. to grumble,
en H. grommen grogner, être crin, être grincheux,
avec jeu de mots sur crin cheveu, parceque de grogner
l'esprit, par association, passe au bruit du crincrin,
haricauder se fâcher pour un rien, hargoteur querel-
leur, hargne pour hargneux. Le Skt a krud1 s'irriter,
l'Angl. to grudge garder rancune.
La main, comme instrument de la préhension, prend
le nom de la gorge qui saisit. De là les vocables kara
main, grue accrocher — x£,'p ^a main et le nom des
instruments formant croc : hirpex le grappin, la herse
— crochet, et en Argot des voleurs carouble fausse clef,
caroubier user de fausses clefs, faire du caroublage —
harrotOj la herse, le râteau — die Harke id. Le croquis
est l'esquisse vivement faite, croquée, c'est-à-dire liné-
amentée prestement. Ce mot représente le dessein
comme fait avec un crochet, un stylet de graveur, une
plume qui écrit. Croquis est formé d'une racine congé-
nère de celle qui se trouve dans gravure et dans graf-
fognade tableau. Le peintre inhabile gratte ou râpe la
toile sans effet : de là son nom de rapin. Cliquer le
marmot veut dire passer son temps à attendre de la
besogne et le tuer en faisant des croquis de marmots,
de marmouses (figures) sur le buvard. — L'agrippe-
— 227 —
ment se manifeste dans grimer, grouper, groumer,
grubler qui veulent dire voler. Tous ces mots sont des
onomatopées manquées, influencées qu'elles sont dans
leur forme, par des réminiscences de grimer, grouper,
groom et grubler (grogner en Argot). La grive est
l'oiseau grivelé, c'est-à-dire marqué de gris (V. au mot
g risette) et par jeu de mots le guet qui empoigne, qui
agrippe : de là par extension le grimer la sentinelle. —
La grimpante désigne le pantalon (1) qu'on fait grim-
per sur les jambes (2). On grimpe en sagraphant par
les crocs aux rugosités de l'arbre. Agripper se traduit
par grah saisir, grabli agripper — xafwfÇu recueillir
les fruits — carpo je recueille — carpe articulation de
la main, agripper ~, crampon, gerbe la javelle recueillie
to crop aoûter, recueillir, to grapple accrocher, atta-
quer, to grope chercher à prendre, tâtonner — greifen
saisir, der Krieg la guerre, plus juste l'attaque, krie-
gcn prendre, obtenir. Gerber en argot veut dire con-
damner. Peut-être l'argotier se dit-il qu'étant gerbe,
c'est-à-dire ligoté comme la gerbe, il est près d'être
emballé dans la grange, en prose, d'aller en prison.
L'Argot appelle le crédit crome ou croume. Credo
semble vouloir dire je donne (do) ma foi. Cre se trouve
pour cred, ainsi que le prouve credulus facilement
croyant. Chez Plaute on trouve creduam et creduim
pour crediderim ce qui donne à supposer que do - didi
est postiche ou une mauvaise interprétation de credo
qu'il eût fallu lire crecl - o. En Sanskrit çrat veut dire
(1) L'Argot l'appelle le pantalsar ou le grand col.
(2) La façon de marcher des insectes a été transporté à la locomo-
tion, d'où les mots Skts k'arb, garb,c'arb.
— 228 —
lien et fidélité, çrad s'en remettre à quelqu'un. Les
correspondants semblent se présenter dans ys?îrt le
lien, la corde — chorda — corde dont le sens est vo-
lute, V. aux mots giron, girouette. Ainsi compris
cre, revient à je lie, j'engage, je donne ma foi (fidem)
ce qui explique le sens de penser, tenir pour vrai. La
forme de l'Argot semble vouloir remplacer la corde
par la clampe, H. kram. V. aux mots religion et fidé-
lité.
La griffe qui agrippe est armée pour gratter, rayer,
entailler une surface. De la carer voler en SktArz enle-
ver, rafler, racler (sa métathèse) dont l'origine est la
même que celle de récurer, en H. schuren, de l'Angl.
to char ranimer la braise en la raclant, de l'Ail, schar-
ren gratter et schuren exciter le feu. — Par jeu de
mots carer devient carotter et tirer une carotte. Par
jeu de mots encore le careur, le carottier devient le
charron. Le receleur s'appelle le charrieur pour le
distinguer de son complice le charron V. ce mot. —
Gratter et son effet tondre, couper s'exprime par les
onomatopées xur, cur, kur, tondre — v.dpiù id. —
securis la hache, le couperet, crinis le crin, les che-
veux obtenus par la taille — écharper, déchirer — to
shred déchirer (k'ard mordre), to carve couper, sharp
tranchant, shears ciseaux, hoir le crin — die Scheere
ciseaux,, das Haar le crin, die S charte la fente, forme
à laquelle répond écarter séparer. Au moral le discer-
nement, la discrétion expriment la distinction, la sépa-
ration qu'on sait faire entre le vrai et le faux, le bien
et le mal : y.p(vo> — cerno — discerner, crible, L'Argot
229
des malfaiteurs fait preuve encore une fois de sa con-
naissance du Grec avec le nom qu'il donne à son triste
couteau, le surin d'où suriner et chouriner assassiner à
coups de couteaux. Le Skt ciri, l'Angl. sword, l'Ail.
das Schwert l'épée désignent, sous la même dénomi-
nation des armes plus fières du moins. Couper se traduit
en Skt par çrt, swr. Le Latin serra scie dénote un
instrument servant à couper. L'escorte est la compagnie
détachée du gros de la troupe. Le Latin cohors, forme
redoublée déco/ -s, désigne la même chose. Avec /au lieu
de/'nous retrouvons l'acte de couper dans /ca/joc/m ciseaux
— Y^?w Je sculpte — sculpto — sculpter — to cleave
fendre, to clip couper, clever qui discerne, qui est
capable — kliehen fendre. La griffarde est l'instru-
ment qui sert à écrire, à griffonner, le grqfin le chiffon-
nier qui racle les tas de détritus. V. Traité de l'Onoma-
topée, page 42.
La griffe servant à enserrer, l'enveloppe et ses pro-
priétés se forment du même radical. Telle a été l'origine
de karpara le crâne — xpixvfov la tête — cranium,
corona, cerebrum (le contenu pour le contenant) —
crâne, couronne 3 cervelle — crown couronne — die
Krone id.. La tête, la partie la plus élevée et la plus
noble du corps est l'emblème du pouvoir : xpÉa> je
commande — euro j'ai soin — cure, aristocratie —
care soin, cark souci — Herr chef. De là kâra seigneur,
chef, cura héros — xtipioç — herus — Hera la dame de
Jupiter — hère avec mépris — harlot homme méprisa-
ble, churl homme grossier — der Herr, der Kerl
homme grossier. Le Vieux Français a arlot Angl.
— 230 —
harlot avec la terminaison augmentative otto : Arle-
quin est le diminutif de arle, arlot.
Le chef débande s'appelle Coire(Coros, Cyrus) chez
les voleurs. L'Argot qui a peu de termes se rapportant
à la religion ou à la morale a un nom pour Dieu : Ha-
riadan. Il est probable que ce mot marque l'expression
Allemande Herr I - ott Seigneur Dieu avec la pronon-
ciation commune de ïpour gue (Gott), comme il arrive
pour gilvus — jaune — yellow. La terminaison an
semble être une manière de hébraiser le mot pour lui
donner un air de famille avec Nathan, Jonathan, etc.
Puisque le mot Gott semble se rencontrer dans ce com-
posé, nous l'analyserons plus loin. Le crâne (la cou-
ronne) se transforme en adjectif dans l'expression :
c'est crâne, c'est d'un esprit résolu, hardi, d'une tête
ferme. La corniche est un entablement près de la cou-
ronne d'un édifice. Par extension du sens de crâne, la
crête en L. crista marque le point le plus élevé de la
tête. Le coryphée marche à la tête du chœur. — Le
nom de l'enveloppe a des formes très-variées qui se
reflètent dans àu^àpa — crusta — croûte, escarre —
crust — die Krustc. La substance cornée, dure comme
l'écorce, s'appelle y.épaç — cornu — corne — horn —
das Horn. Corner veut dire ronfler, faire entendre des
bruits qui ressemblent aux sons tremblotants du cor ;
le cornard est le cheval asthmatique. — La matière
cornée de l'enveloppe a donné son nom à la carapace
et aux animaux qui en sont pourvus, tels que la cre-
vette , le caret la tortue de mer, l'êcreuisse, le crabe,
le scarabée et par assimilation le scorpion, en Skt
- 231 —
k'arj'ûra, le crapaud à la peau sèche et rugueuse, en
AIL die Krôte. Le Latin crabro, en Angl. hornet, dési-
gne le frelon au ventre couvert de lames concentriques,
au corps garni d'une carapace. L'escargot doit son nom
à sa carapace, de là caracoler, exécuter des volutes à
cheval, imiter dans ses mouvements la spirale de
l'escargot. Dans le Nord le crangon est le nom de la
petite crevette. En Angl. crayjish dénote l'écrevisse,
crawfish la langouste. — Les fruits à gousse tirent leur
nom de leur enveloppe, tout comme les animaux à ca-
rapace. C'est ainsi que nous avons karkâru noix —
v.x'pjx — corylus le noisetier, cornum le fruit du cor-
nouiller à cause de son noyau, hordeum orge, cerasum
la cerise, fruit à noyau, cucurbita courge — caroube,
gourde, haricot, haricot de Varennes huître comme
on dit inversement dans le Napolitain noce di mare
noix de mer pour moule, carquois, carillon, grain,
graine, crotale, grenade — core noyau —das Korn le
seigle, die Gurke le cornichon. La cruche a été, en
principe, une gousse,, une gourde : karîra cruche —
y.pwcrcrc; — ceramus (H. scherftèt) — cruche — croc-
kery ware la faïencerie — der Krug la cruche. La
carafe, Valcaraza sont des objets similaires. Fouetter
de la carafe avoir mauvaise haleine, contient un dou-
ble jeu de mots : fouetter rappelle fétide (fœteo) et
carafe l'endroit où se forme le croup, où l'on est grippé,
H. krop jabot. — La grêle est assimilée aux noyaux
des fruits : kara — yiXx'Çx — grando — grêle — corn
grain — der Kern le noyau. — Un carbeluche galicé
est, par assimilation avec la carapace qui recouvre, le
— 232 —
chapeau de soie. Galice répond à l'Angl. gloss et â
l'Ail, der Glanz le lustre. V. au mot chaleur. — La
gousse qui est l'image de la coque du navire, a donné
son nom à la carène, en L. carina, Angl. keel, Ail. der
Kiel. La caraque en H. kraak, la caravelle sont deux
navires à coques différentes. — L'écorce protectrice
prend le nom de l'enveloppe, de la carapace fcura le
sabot de cheval : yipxr^ l'écorce, le papier — charta
papier, quercus le chêne et en particulier le chêne
liège, cortex l'écorce, carbasa les voiles, corium le
cuir — êcorcher ôter le cuir, Vêcorce — cork le liège,
le bouchon de liège, der Kork id. — La carence dans
procès-verbal de carence marque l'enlèvement de
l'écorce, le dépouillement, le dénûment. — Le carcer
H. kerker est assimilé à l'enveloppe qui garde, qui en-
serre. En Argot il s'appelle la carruche. Mettre à la
care veut dire garder, mettre de côté, la care la ca-
chette, le carreur et par jeu de mots le charrieur le
receleur. La garde se trouve également dans */apa; le
rempart — carceres la barrière du champ de course,
accore appui pour renforcer un mur, êcharpe, carique
ÇR.jurk) caraco — shore la côte, la falaise qui protège
la terre — der Schrank l'armoire. L'obstacle, l'Argot
l'appelle avec jeu de mots escare. Une falaise accore
est une falaise à pic, un mur naturel. La même idée et
la même racine se présentent dans écran, en Angl.
screen et dans êcrin, en Angl. shrine, en Ail. der
Schrein, dans escarmoucher , escrimer , Ail. schirmen
protéger par les armes, en Angl. to skirmish escar-
moucher, dans FAU. die Schûrze le jupon. L'enceinte,
— 233 —
la clôture s'appellent çxi = couvrir — xûP°? l'enceinte
hortus le jardin — jardin, horticulture — garden —
der Garten et dans les noms de ville Grad, Kars}
Carthagène selon les pays.
Dans les mots ypuq — corpus — corps on est en droit
de voir l'enveloppe, l'habitacle de 1 ame. De là sans
doute des paraphrases comme dépouille mortelle, gue-
nille. Selon la Bible le corps fut fait de terre comme le
vase du potier. Le têt s'appelle en Skt kharpara, en
Angl. sherd, en AIL die Schei^be. La chair hîra —
y.pÉa; — caro — chair, en Argot crie et criolle d'où
criollier et par jeu de mots crinolier boucher. La griffe
le carpe, en Skt karabâ se disposant a saisir affecte la
forme du croc et présente ainsi l'image primitive de la
courbe. Les idées d'angle (sinus) et le cercle sont ana-
logues à celles de la courbe. Ainsi se sont formés le
nom Eolien xûfaoç — curvus — courbe — to crimp re-
croqueviller — krumm courbe. L'angle s'appelle carne,
en Angl. corner le coin, en Suéd. hornsten pierre an-
gulaire. Il le devine dans crux — croix — cross — das
Kreiu, dans TAngl. crutch la béquille, en Ail. die
Krûcke. Le L. car do désigne le gond, le clou en croc
sur lequel tourne la porte. C'est une espèce de char-
nière et une variante de ce mot. Il partage la forme et
le sens avec carduus le chardon qui est pourvu de pi-
cots recourbés. — Le cercle s'exprime par y.ipy.oç — cir-
culus — circus, cirrus boucle — cercle, cirque, cerco-
pithèque — curl boucle — der Kreis le cercle, der
Kreitz la circonscription, kraus bouclé,, der Kreisel la
toupie — H. hring cercle. V. au mot girouette. Autour
— 234 -
du mot cercle il convient de grouper charron nom par
jeu du mots du récéleur, ainsi que charrier voler, en
suite char, carrière, courir, se carapater courir en
faisant retentir le pavé du bruit des pattes. Se mouvoir
en cercles, en replis tortueux se traduit par les mots
congénères srip — Ip™ (1) — serpo — serpent — to
creep ramper, to cringe ramper, faire des bassesses
pour obtenir ce qu'on demande, to crave implorer lâ-
chement — kriechen ramper.
L'avidité du goulu, en H. guhigaaral (engouleur),
analogue au Skt k'at désirer s'exprime par le nom du
gosier présenté comme verbe. C'est la convoitise du
cœur qui fait que le gosier se tend, que la main saisit.
Le son du gosier se présente sous la forme métathétique
dans le Skt rc désirer, dans go urmand, dansl'Angl.
greed l'envie, en Ail. die Gier, d'où gierig avare ain-
si que l'adj. geizig avare, der Geizhals l'avare (le cou
avide). — La bonne volonté, la bienveillance s'exprime
par yapiq — gratia, carus — grâce, gré, cher — to
yearn désirer tendrement — gern volontiers — H.
gaarne et graag volontiers — begeeren souhaiter, mé-
tathèse de rogare demander.
L'odorat s'exprime par une forte aspiration nasale
qui produit un ronflement au fond du gosier. C'est ce
que prouvent le Skt ghrâ sentir, en H. geuren répandre
son parfum. Ces mots attribuent aux fleurs l'acte de
notre organe, comme quand on dit la fleur sent.
La chaleur et le feu tirent leur nom, par prosopopèe,
(1) L'Ail, die Raupe en H. rups la chenille est formé de la même
racine que ramper.
- 235 —
du souffle du gosier. V, au mot jaune. C'est son nom
qui se retrouve dans/? farw blanc, liari jaune, clair, mar-
quant desefïets de lumière, crip éclairer, g'arin briller
— yapYcdçxji resplendir — crocus jaune — chrysolithe,
crocus, gris noir mêlé de blanc — gray gris — grau
id. La vieillesse blanchit les cheveux, delà :j'rc blanchir
vieillir — yrjpa^la vieillesse — Géronte — hoary blanc
— dcr Greis le vieillard. Delàencore le nom delà gorge
dans crû cuire, k'ara chaud — ypagiov torche, d'après
le son et les correspondants, le tison ardent — carbo
le charbon — to char brûler — die Griebe la rillette,
gaar cuit, die Schaarwochelâ semaine des cendres. —
La grisette, synonyme de cocotte, avec la différence du
temps et par conséquent des mœurs, doit son nom à une
assimilation équivoque. La sœur de charité, ou tel ordre
de sœurs voué aux œuvres de charité, porte un uniforme
gris. Confondant l'amour avec la charité on a nommé
l'ouvrière complaisante grisette. -Le carme est l'or roux
ou jaune, la monnaie qui a la couleur du feu. Le mot
se rattache à xapfu dessécher — cremo je brûle — cré-
mation — cream la crème, la croûte qui se forme sur
le lait chauffé, en Ail. derRahm, avec perte de la guttu-
rale. -Quand le g s'adoucit il entraîne après lui un siffle-
ment s. Si ce sifflement devient aigu la langue touche
le palais et produit t au lieu de s. De cette racine natu-
relle ont été formés yefaov la gargouille par assimilation
à notre gosier — guttur — guttural, goitre, gosier —
gâte la porte, l'ouverture, par prosopopée — die Gasse
la rue, le couloir — Suéd. gâta rue. — Répandre de
l'eau revient à l'acte d'un gosier qui dégorge un liquide
— 236 —
k'ôd jeter, lancer, gad couler — yit>) je répands — chy-
mus — chyme — gueuse bloc de fonte— to cast fondre,
to gush jaillir — gieszen fondre, répandre, kotzen vo-
mir. Le souffle, le gaz ont été traités p. 37 du Traité.
Le Skt à le mot }glanda odeur, kuf puer. La toux qui
secoue le gosier s'appelle en Skt kâxa. L'Ali, heiser
veut dire égosillé, rauque. La parole, le chant, tels
bruits manifestent leur origine gutturale dans had,
kand, kud, kêd gazouiller, gad parler, dans les mots
de l'Argot jaspiner parler, gouspiner dire, jaspùi
oui, c'est ce que je dis. Quand on dit que les oiseaux
gazouillent on donna à entendre que leur gosier rend
des notes qu'on ne spécifie pas.
Le chat huant, V. Traité p. 10, veut dire chat qui
hue. En H. on dit katuil hibou chat (hulotte), en Ail.
Gaîich et Kautz hibou. Ce dernier mot est une différen-
ciation de Katze chat. L'Ail, der Uhu est le huant, le
hibou. Chat-huant contracté a donné les mots chouan,
chouette et chevinette en It. civetta. De ce que l'oiseleur
se sert de la chouette pour attirer les oiseaux sur les
gluaux on a employé le mot chouer, comme TIt. civet-
tare, pour tromper. Par calembour on dit chiquer pour
chouer. Delà l'expression chiquer sans tabac tromper,
expression qu'on n'arriverait jamais à comprendre sans
faire intervenir l'homonyme chouer. V. au mot chiquer.
Jouant ensuite sur chiquer on a fait le mot aquiger sé-
duire dont la forme approche de aquiger prendre. Dans
le Centre chouer prend des formes variées qui en éclair-
cissent l'origine. Là on dit cahuer, acahuer, achcœan-
ter pour chouer. Il a également lé mot chouser pour
— 237 —
tromper, équivalent de l'Angl. to hoax cajoler, de to
cheat et de l'Ail, huzen qui veulent dire tous deux
tromper. Là bas le chavan est un objet qui représente
un chat huant en terre dans lequel on souffle pour
imiter ainsi la voix du hibou et attirer les oiseaux contre
lesquels ils est sans défense le jour.
Le coucou, V. Traité p. 10, qui trompe les oiseaux
en pondant dans leur nid et en faisant couver par le
voisin, a servi à former le son et le sens de cocanger
tromper et par extension escroquer, cuocter tromper,
en Angl. to coax cajoler, to decoy séduire. Acoquiner
veut dire allécher, tromper, s'acoquiner se laisser pren-
dre. Avec le mot populaire chevinette qui veut dire ma
belle, mon cœur, nous revenons à la chouette. C'est
chouet c'est joli. Ces deux mots [ont une variante dans
le mot coquet et dans la coquette la femme qui cherche
à attirer l'attention par des manières agaçantes. Ces
manières on les a comparées a celles delà chouette qui,
cherchant à regarder la lumière en face, travaille des
yeux et tourne la tête d'une façon si drôle qu'on ne peut
s'empêcher de rire. Les oiseaux reconnaissent à ces
gestes involontaires que leur ennemi est aveuglé par le
jour; l'absence du danger les attire pour lui donner la
chasse, mais l'oiseleur qui voit, lui, les attend la pour
les attraper à ses gluauxoules prendre dans ses filets ten-
dus autour de l'appeau.- Ce qui fait rire est cocasse (1),
comme les manières de la chouette, en Ail. Gauch. Le
(1) Le H. uilenspiegel, miroir des hulottes, a donné le mot Français
espiègle {spéculum). Le livre, ainsi intitulé, contient des histoires
cocasses.
— 238 —
H. koddig risible rappelle le chat-huant et ses mouve-
ments burlesques
Nous avons vu l'origine du son et du sens d'appré-
hender en traitant des racines congénères. L'articula-
tion est décrite dans le langage comme l'endroit où
deux membres tiennent ensemble par accrochement.
Elle s'appelle en AIL die Kothe, La goutte est une
affection arthritique qui siège de préférence dans le
grand orteil. Ce mot est une déviation du son incom-
pris de Kothe vers celui de goutte qui était familier. Le
H. huit désigne le mollet, les muscles en dessous de
l'articulation du genou. — Les parties charnues du
corps s'appellent généralement d'après leur emplace-
ment vis-à-vis du squelette. Le siège de la maladie
détermine parfois son nom, comme il arrive pour het
pootje la petite patte, nom H. de la podagre et pour
goutte maladie de l'articulation (1). — Le déhanche-
ment, comme nous avons vu pour botter, avoir l'em-
boîtement dérangé, clocher et comme il sera prouvé
pour locher, s'exprime en indiquant tout simplement
la hanche. Les circonstances doivent dire le reste. La
jointure s'appelle en Skt ganda, l'aisselle k'andtka : à
nous de comprendre que k 'ôd signifie être boiteux,
comme les congénères g'att et çuf — axàÇw boiter —
scandalizo faire broncher, faire tomber, cadere tomber
primitivement, fléchir dans l'emboîtement chute, cet-
(1) Nous rattachons ce mot à -/avSàvw ajjprêhender, V. ce mot,
pareeque l'articulation s'est présentée jusqu'ici comme un accroche-
ment, une prise. Au lecteur de vouloir bien examiner les motifs qui
pourraient faire incliner vers un rapprochement avec le verbe encas-
teler, enchâsser, emboîter.
— 239 —
dence — to shunt faire aller sur une route de traverse,
to squint loucher (oxatupéu) et, selon l'Argot espiègle,
boiter des châsses (V. ce mot) — die Schande la honte,
le scandale — H. schuin en biais. La queue, en Latin
cauda, s'agite au gré de l'animal. Le son du mot est
celui que nous venons de voir ; le sens est assimilé au
va et vient ménagé par l'articulation. Dans cauda on
retrouve le sens de quatio, concutio secouer, en Ail.
schùtteln, en H. schudden, en Skt gatt, d'où kHà
k'ad tourmenter. La bataqua est dans le Midi le hoche-
queue (qua contraction de cauda), l'oiseau qui bat de
la queue, qui la secoue, le fouetteur, en Skt kanâlina.
A Paris c'est le nom de la traîneuse, parceque dans ses
allées et venues sur le trottoir, la queue de sa robe est
agitée de mouvements continuels, en Angl. draggle-
tail qui salit sa traîne. La godille diminutif de cauda
est à la barque ce qu'est la queue pour le poisson. Le
cador, le cajor sont des noms du chien empruntés à sa
queue que dans son désir de plaire il agite souvent :
de là cajoler, imiter le cajor, flatter, chercher à
plaire.
Préserver, garder, envelopper, sont considérés,
d'après le son des mots, comme des effets de la pré-
hension. On la distingue dans katti — jtfewj — cista
caisse — encasteler, enchâsser, châsse, en Argot
châsse œil qui comme l'armoire ou la caisse s'ouvre et
se ferme — chest armoire — die Kiste la caisse ; dans
gud1 gousse, gudh couvrir — crxtfxoç cuir — cutis peau
— cytise arbre à gousses, housse, gousse, cutané —
hide peau — die Haut id. , die Schote la gousse ; dans
240
kakud cime — xottî) crâne — Angl. head tête — AIL
der Scheitel le crâne ; dans kaVinâ vase — xi/roç carène
catinus écuelle — écuelle — scuttle id. — die Schùssel
id.; dans chad, skudj k'att couvrir — y.sJGw cacher —
castra le retranchement — château, case, écusson —
shed abri, to shut fermer — schûtzen protéger, die
Scheide la gaîne. La protection qui nous vient du vête-
ment s'exprime dans ridingcoat redingote et dans l'Ail.
die Kotze ou die Kutze la couverture. — Le chapeau
s'appelle le gadin.
Le goût (gustus) d'après les Latins résiderait dans
le gosier. Certes quand on a faim tout est bon. Cepen-
dant ils avaient le mot deliciœ délices, en H. lekker-
nyen qu'ils appréciaient par le contact de la langue : le
mot est là pour le dire. Pour cela elles étaient considé-
rées comme luxus luxe, le contraire des goûts sobres.
Goût répond à kâ organe des sens — y£uo) goûter —
guttur — gosier, guttural, gar gante — Angl. to
guzzle avaler. Ce que l'on goûte on le trouve bon, en
Angl. good, en Ail. gut, en G. àyaOc;. God (1) et Gott
les noms de Dieu en Angl. et en Ail. semblent signifier
bon. C'est le nom que les féroces Arcadiens donnèrent
au leur quand ils résolurent de vivre sous des lois de
bonté et de douceur. Les faux Dieux s'appellent en
AU. gôtze. En Suéd. et en H. Gud et God veulent dire
Dieu, god et goed bon. On peut admettre que ces
(1) Le Bien Suprême est un des noms du Dieu Chrétien . Il fait lever
son soleil sur les bons et les méchants. Il ne demande pas la mort
du pécheur, mais qu'il se convertisse et vive. Dans le parallèle des
vies de Thémistocle et de Camille, Plutarque décrit l'essence divine
comme faite de bonté : « Car, bien que la nature des Dieux, qui est la
« bonté même et qui se hâte de pardonner et tarde à punir, etc. »
— 241 —
mots, ainsi que le nom Gothique Guth ne présentent
dans leur forme que des difïérentiations imposées par
la diversité du sens qu'ils doivent exprimer et qu'au
fond ils sont les mêmes. La bonté ainsi divinisée mar-
que un effort de l'homme pour élever son âme vers
l'Etre Accompli, aussi bien que lorsqu'il l'appelle
Dieu (1) -Lumière, ou Jehovah — Celui qui est. Comme
Etre Accompli son nom est ineffable et incommunica-
ble.
L'ongle qui accroche es* en même temps le prototype
de l'instrument tranchant. De là la présence de la ra-
cine gutturale dans le nom de la main (hand) assimilée
au gosier qui prend et dans l'ongle. V. aux mots acan-
the, appréhender. L'acte d'une ongle se trouve dans
k'adj cat fendre, çastrî - jteorppv couteau — cœdo
couper — incision — to eut couper — scheiden séparer.
— Les marches d'un escalier consistent en autant de
planches ou de plaques obtenues par la taille ou la sec-
tion : T/izrt — scandula, sclieda — scédule — shingle
plaque — das Scheit copeau, branche de bois : de là
gravir des marches : scando, ascendo monter —
ascendant. — Manger est un acte du gosier, en Argot
gosi. On n'a qu'à se le figurer en action pour deviner
ce que le verbe signifie. — Ainsi se sont formés klê
manger, gcas id., gada manger et dans l'Argot gousser
et regatter manger, la regatte la viande trouvée sur
les tas d'ordure.
(2) L'Argot appelle Dieu le Avre, le Havre et le Aure. Ce sont des
variantes du même thème. Avre donne Aure comme robur chêne
donne rouvre. Le sens est suprême : v%ep — super — super — hyper
— up — oben, auf, sur, au-dessus.
16
LA LANGUE
L'organe qui fait suite à la gorge est la langue. Le
son tout spécial par lequel nous distinguons son action
est le l. De là le nom de l'organe, en Skt lôla, lalanâ.
Etre trémulent comme la langue s'exprime par lôla
tremblant en Skt et en H. par Mien trembler, lel lobe
de l'oreille. Selon que d'autres organes de la phonation
seront engagés avec elle dans la même action, les mots
qui la représentent contiendront la lettre, ou le son spé-
cial à chacun d'eux. Ainsi nous voyons l'intervention de
la lèvre dans le v de lavika, l'organe qu'entre autres
fonctions on voit prêter son concours pour laper —
\â[xoç la gueule pour les lèvres, "kfyoç le cou, pour les
lèvres, comme laissant échapper l'air (V. au mot lou-
voyer) Xigaç, parprosopopée, la fontaine, les lèvres d'où
s'épanche le liquide — labia — lèvre, lippe, labié —
lip — die Lippe, dieLefze. Abalobêen Argot veut dire
pourvu de grosses lèvres, en Skt lulapa le mufle. Au-
cun de ces mots ne désigne spécialment cette 'partie de
l'appareil phonique qui a nom langue, bien qu'elle joue
un rôle apparent comme l'indique sa place au premier
rang. Le contraire a lieu également : ainsi le Skt haka
désigne la langue bien que ce soit le nom propre du
quique. En tirant la langue on fait voir la gueule et
c'est, sans doute, cette impression que le spectateur
traduit.
— 243 —
Il en est de même pour laper, lamie gueule : quand
le chien lape le spectateur peut être autant frappé par
sa bouche qui suit le mouvement de la langue que par
l'activité de cet organe même, et quand les Grecs se fi-
guraient une Lamie dévorant les enfants ils étaient im-
pressionnés autant par les lèvres de cette gueule avide
que par la langue sur laquelle elle était censée recevoir
la pâture. D'autres fois nous voyons la gorge prendre
une part prépondérante dans l'action commune. Il se
forme alors des onomatopées comme Xauxavîa la gueule
— lucius le brochet vorace, le loup des rivières et des
étangs, le même motque Mxoç le loup, en AW.des Lac/ts
laças par prosopopée — lac V. Traité p. 22.
Il arrive aussi que le souffle, se trouvant enfermé
entre la langue et le palais, la prononciation amène un
s qui, lorsque le sifflement devient aigu et que la langue
touche le palais se transforme en^. Cette dernière lettre
s'associe volontiers avec un n. Le Skt lus s'amuser et
le Latin laetus joyeux dont nous verrons la genèse, in-
cessamment sont des produits de cette phonation.
A cause de la proximité des sons r et /, le premier
logé à la racine, le second dans la partie mobile de la
langue ceux-ci se confondent souvent dans la pronon-
ciation et par conséquent dans l'orthographe. Plusieurs
des mots qui seront cités ici sont simplement des doublets
des mêmes phonèmes avec r. Notons encore que les
mots où le l remplace le r ont trait à la gorge ou à ses
opérations et qu'on doit, par conséquent, s'attendre à
voir ces mêmes mots figurer dans le langage avec g, ce
qui constitue une nouvelle série de doublets. Ceci posé
244
nous allons voir défiler les noms des diverses propriétés
de la langue ainsi que des organes comme la larynx et
les lèvres auxquels elle a communiqué son vocable par
un effet de syllepse.
Quand la poitrine est essoufflée, haletante la langue
s'abaisse et s'allonge pour permettre à l'air d'entrer, plus
large. Tirer la langue veut dire être très fatigué, essouf-
flé. Quand le chien est hors d'haleine il avance la
langue. Cette façon de respirer est exprimée par Xco<pàw
respirer, XaTXa6 le vent — lips id. — le lof le côté du
vent, louvoyer prendre le vent — sleep le sommeil, la
respiration qui entretient la vie pendant la torpeur de
la conscience, slumber le sommeil léger, life la vie,
luff bu loqfle lof — der Schlafle sommeil, der Schlum-
mer le sommeil léger, der Leib le corps pour la vie,
das Lebenlsi vie, die Luft i'air respirable. Delà Schlqf
le sommeil. Le siège du souffle s'appelle en Angl. lungs
le poumon, en Ail. die Lunge, en H. long et son con-
tenu lucht l'air (1). L'Argot a des applications nom-
breuses de cette racine: ainsi lof veut dire boursouf-
flure, abcès, louffer sentir mauvais, loffard le condanné
à vie sur les pontons, loffitude blague, loffat chat qui
va flairer, quêter. La racine de ces mots est la variante
de celle cle roupiller, ronfler. L'air se manifeste dans
lavayga la giroflée. — La gueule est l'organe prédomi-
nant du loup : aussi l'a-t-on nommé Xuxoç nom trasparent
qui a le sens de l'Ail. Schlinge gouffre — lupus, lynx
— loup. La cicogne qui un jour retira l'os de son gosier
(1) Chelingner ou chlinger veut dire sentir du Schlauch, de la
Sclinge mots Ail. qui veulent dire gueule.
245
doit sonnom également à son cou: ciconia. Lecygne est
l'homonyme de la cicogne parce que les deux mots dé-
crivent un cou très long chez l'un et l'autre oiseaux. Le
loupiau et par jeu de mots le loffiat est le petit ap-
prenti, métaphore dans le genre de marcassin, de
groule et groulasse. Un loup dénote une lacune dans un
texte, un endroit qui bâille comme la gueule du loup.
C'est peut-être le mot lacune lui-mêmequi a suggéré le
nom loup: l'idée dans les deux cas est gouffre. L'erreur
et la dette sont assimilés à la lacune et se nomment loup
également (1). Le louflon est le louveteau, la lipette la
prostituée, lupa; louper veut dire vagabonder, ne rien
faire.
Lécher nous montre la langue en activité. — L'organe
a ses racines dans le gosier, comme l'indique la pré-
sence de la gutturale. Nous constatons la présence du
son qui le caractérise dans lila, loi, lih lécher — Xs->/<.>
— lingo, lambo — lécher \ licher, laper — to lick —
lecken.
Le verbe Grec offre la métathèse: yt Ck s; lèvre. Le ber-
lingot est le bombon qu'on pourléche. Dans le Patois
du Limbourg on l'appelle babbeleer habilleur, nom qui
qui marque le mâchonnement et le jeu des babines.
Boire s'appelle Xz-tw — libare répandre des boissons,
faire des libations — lampée — to slop boire immodé-
rément — schlemmen boire à l'excès — H. slempen.
Liber est le nom deBacchus, qui aime les libations, les
lampées. — L'acte de manger demande l'intervention
(1) Le louffiat est l'imbécile, la bouéhe bée, louflouf veut dire mon
gros, le gros ayant la réputation d'être béard, paisibe, de ne pas être,
malin, loufoque bête.
— 246 —
de la langue comme nous voyons par lêha aliment —
Xa9'jc<7(*) je mange, liboje goûte, libum le pain en Angl.
loqf, en AU. der Laib.
Le désir de manger et parsuite la convoitise, l'envie
de jouir' se manifestent par une agitation de la langue
et des organes qui s'associent avec elle. C'est ce que
révèlent les onomatopées lub aspirer à, désirer vivement
Aaw désirer, X&rti id. — libet, lubet l'envie existe, libo
je choisis, je marque une préférence — libidineux qui
suit trop ses désirs — to love aimer — lieben,ià.,et avec
d'autres lettres que la labiale: \i%vûçiù — ligurio désirer
— luxus le désir de la jouissance, d'abord par legosier,
puis parles yeux et les autres sens, deliciae les délices -
luxurieux, se délecter — lecherous libidineux, to list
avoir envie, to like aimer, to long désirer — lécher dé-
licieux, lûstern qui convoite, die Lust la joie. Le lous-
tic est le garçon joyeux. Le Skt a pour désirer les verbes
loi, luh, las\ lipsê, lash. - La faim est le désir de man-
ger; delà H[xoc faim, boulimie une grande faim, (grande
comme une bouche qui bâille tout large: bou) une faim
canine. — La joîe se découvre diverse dans le¥ folâ-
trer— Xatxaç la fille de joie, XoXoç le fou - laetus joyeux
ludus l'amusement — liesse ^illusion, éluder, la lolotte,
la louille, en Argot, la fille de joie — to laugh rire —
lachen id. — die Luge le mensonge, la bourde, une vé-
rité pour rire — H. lel lolotte, loi plaisir, en Skt lalana
amusement — Suéd. leka, s'amuser, comme en Skt le
rire. — Le dégoût, l'ennui que l'enfant manifeste en ti-
rant la langue se marque dans lâd darder la langue,
laid odieux à la vue, to loll the tongue tirer la langue
— 247 -
par mépris, en Ail. leidig odieux, en Suéd. leda aver-
sion. L'AIL das Leid veut dire l'ennui, le chagrin. - Le
sanglot est représenté dans le langage comme un hoquet
qui secoue le gosier: XuYyavw je sanglote — lugeoje m'at-
triste. Inclus le deuil, lugubre triste. La douleur rend
la lèvre boudeuse: Xthnj. — La parole est due au mouve-
ment de la langue combiné avec celui des autres organes
de la phonation : lâta, land parler — Xa«, \ly<a — lo-
quor — êlocution — to lull en répétant lala, hdlaby
chant pour endormir l'enfant — lallen parler — Julien
divaguer. La lumière et la chaleur sont un souffle em-
brasé sortant d'un gosier. Dans les mots qui suivent
nous avons à faire à des doublets de rouge et ses congé-
nères. V. ces mots. Tel est le témoignage le layg* briller
Xtyvtiç fumée, fumée ardente — lux, lucide, lumière,
lucifer (1), lustre — light lumière, link torche — das
LicJit la lumière, lodern luire, die Lohe la flamme.
En Argot le' luisant est le soleil, la luisante la lune, le
luisard le jour. — Approcher une lumière, peut-être
celle du regard, éclairer se traduit par lax, lôk regarder
ASJ7-w — je vois, lustro j'examine. — En Skt laka veut
dire le visage. Le Latin limus dénote celui dont les
rayons visuels se croisent; c'est leur mot pour lou-
cher (2). La luque est le témoignage écrit qui éclaire
(1) Le bois, en L. lignum, d'où le lignite, le bois fossile veut dire,
au principe, combustible, feu et lumière. Le rossignol, en L. luscinia,
de lucus et cano (Angl. log bûche) est le chanteur du bois. 11 ne chante
que pendant une saison trop brève. Après il redevient passereau et
on n'y fait plus attention. 11 en est ainsi des objets qui ne sont beaux
qu'autant que la mode dure. Après ce sont des rossignols, par ironie.
(2) Le L. luscus veut dire borgne. Le sens primitif est celui de son
congénère Grec ),o|b; oblique, qui s'écarte de la ligne droite, qui
ouche .
— 248 —
la religion des autorités. En Ail. der Schein ce qui
éclaire,' beseheinigen prouver par des documents ont un
sens analogue. La berlue de ber pour sphère, btlleet lue
qui rappelle luquer, reluquer, en Angl. tolook en H.
lonken et loeren regarder, diriger la lumière des yeux
vers un objet, veut dire que l'objet tourne devant les
yeux et que les idées dans l'esprit suivent le même
mouvement. Le mot hurluberlu contient deux fois le
mot lu et exprime une berlue en double, hur étant une
forme de gyrer (Angl. hurlwind tornado), signifiant
qui tourne comme la sphère ou la boule. Rabelais a le
mot emberlucoquer pour coquer la berlue, donner le
vertige des yeux. V. au mot coquer. Au Centre ember-
lificoter veut dire ce qu'espriment ses éléments, c'est à
dire ficoter ou faire (eflficere) en sorte qu'on donne la
berlue. Il n'y voit que du feu est une paraphrase du
mot du Centre embaufumer dans lequel bau rappelle
plus distinctement la boule et où fumer prend la place
de luer illuminer. Dans cette contrée il arrive malheu-
reusement ce qui se produit partout : à force de tour-
menter la forme des mots on l'altère, si bien que ceux
qui n'ont pas assisté à leur travestissement continuent
pendant quelque temps à s'en servir encore, puis les
laissent tomber en désuétude comme des vocables qui
n'ont pas de sens Français.
Le nombre de mots ayant gardé le costume carneva-
lesque que dans des moments de gaîté l'esprit leur a
fait endosser est considérable. Il y a de l'esprit qui tue
le sens en caricaturant la forme. Qui reconnaîtra le sens
de (emberluer) dans emberlauder,etemberlaiser et dans
— 249 —
ce comble emberliner. Nous, après nous être gaussés,
notre esprit reprend son niveau de calme et le rire s'ef-
face dans notre visage, mais le mot continue à grimacer
comme les masques qui garnissent les vitrines après les
jours de carnaval. — Loucher variante de luquervmt
dire avoir vent de quelque chose, commencer à s'aper-
cevoir; il rend aussi le sens de désirer secrètement et
vivement parce qu'on n'ose pas avouer par un regard
droit qu'on convoite l'objet placé devant nos yeux. La
louche est la police qui reluque, la lotisse la gendar-
merie de province qui guette. Le H. luisteren écouter
{luister veut dire lustre) emprunte son nom à l'acte des
yeux : c'est l'oreille qui éclaire notre esprit, par procu-
ration ou par échange d'office, les deux organes aboutis-
sant à un même sens central qui est l'âme. Les corres-
pondants Angl. et Ail. sont to listen écouter et lausche/i
id. Regarder se traduit dans ces langues par to leer et
lauern — H. loeren, lorgner. L'oreille s'appelle la
loche en Argot. La couleur claire, la nuance blanche se
présente sous le vocable de la lumière : Xeux6ç blanc —
lucidus clair, luridus pâle — lucide — light clair —
leuchtend id. et avec/ dans oXfoç blanc — albus —
aube, albe, dans XafAitw je brille, d'où lampe, Angl.
lamp, Ail. die Lampe. La couleur de brûlé, la nuance
foncée se montre dans A(gus Africain, le Latin liveo, au
contraire, signifie être pâle, livide. "EXasc; le cerf est
nommé ainsi à cause de son pelage roux, nom analogue
à celui de fauve. Alces en H. elk, en Français élan est
un mot qui peut signifier roux (Angl. roe le chevreuil).
Il présente peut-être une métathèse de luceo). "EXe<paç
- 250 —
est l'animal à la peau noire, avec baucoup de probabilité.
Ce vocable présente une variante de «Xçcç blanc. Blanc
en Français est noir en Angl. : black, sans équivoque.
Blanc est comme vocable une variante de bleu parce
qu'on passe d une nuance à une autre avec baucoup de
facilité, le feu produisant tous les tons depuis le blanc
jusqu'au noir.
La lessive, en L. lixivia de lix la cendre,, nous ramène
à l'Argot qui est souvent lucide parce qu'il suit son in-
stinct et l'évidence. N'appelle-t-il pas par un nom de-
scriptif très-juste la lusquine la cendre, le lusquin le
le charbon. D'autre part il appelle le soleil le luisant,
le jour le luisard, la lune la luisante. On voit que dln-
stinct il crée des noms verbes comme nos ancêtres dont
les premiers vocables, appelés par nous thèmes pri-
maires, avaient une valeur verbale qui persiste à tra-
vers toutes les dénominations grammaticales ou synta-
xiques sous lesquelles on les a fait passer depuis. Le
larbin, le jeune domestique, l'apprenti, doit son nom à
sa figure qu'il fourre par tout. On est spontanément
curieux quand on trouve tout à apprendre. Le mot
trouve des congénères dans les variantes Xapuy^ le la-
rynx — lurco je mange gloutonnement — larve la fi-
gure, le simulacre. Le Latin larvœ dénote la figure, le
simulacre de personnes mortes et, par extension, des
visions. La larve est le premier simulacre, le premier
état de l'insecte au sortir de l'œuf. Le morilarve est
une figure basanée, un visage de maure. — L'Allemand
schlûrfen est né de lamême façon que sorbeo, absorber,
excepté que la langue s'est mise à vibrer avec le son l
— 251 —
pendant l'inspiration. V. au mot absorber pp. 5 et 145.
Il y a une articulation qui s'appellle \£i. Le mot
n'existe qu'à l'état d'adverbe ayant le sens de avec le
talon. C'est une variante de calx le talon, plus juste la
cheville, l'articulation du pied avec la jambe, la clampe,
la clanche et un congénère de lacerta le bras, la liga-
ture, de l'Angl. limb membre, en Suéd. lem et du H.
lid membre. Le même sens s'exprime par le H. hak le
talon, en L. ungula le sabot, la jointure du pied, par
spécification des sens de jointure en général. Le mot
Grec est une métathèse depa; la main et traduit un acte
du gosier Xauxavfo, (V. au mot loup), qui consiste à
agripper, saisir, tenir, lier. Ce dernier verbe s'appelle
AÉy<.) \Tj.$hiù je saisis — //^o, laqueus le lacs, le piège
lacet, lien, lier, ligature, lutter primitivement s'atta-
quer à — link le lien, loch serrure, linchpin esse —
das Liesch l'osier, das Gelenck l'articulaton, dieLunse
l'esse, die Luke le volet — H. luiken fermer, lesen col-
liger, glaner. — Remuer l'articulation se retrouve avec
des sens divers dans le Skt li-yk, lac, lie aller, se mou-
voir — to leap sauter, dans l'AU. laufen courir, lenken
diriger. — La ligature, l'articulation qui fonctionne
mal se montre dans la^g boiter — Xc;b; qui va de tra-
vers — obliquus oblique, linquo lâcher, luxor luxer,
langueo languir — lâche, locher — loose relâché, to
louage traîner, to linger languir, to limp boiter — loos
libre, délié, locher friable — H. log lourd, languissant.
Ajoutons Xocihç la main gauche qui manque d'entraîne-
ment, qui est longue à faire, qui languit — laevus —
languir — left gauche — link id. Relâcher, cesser de
— 252 —
se tenir debout, se coucher se traduit par H coucher
"kéyopoti je suis couché — ledits lit — lochies — to lie
être couché — liegen id. — Le lieu où l'on couche ou
relâche s'appelle "k6%oç guet-à-pens — lustrum lerepaire,
locus l'endroit — colloquer, lieu, location, louer — loir
le repaire — das Lager le dépôt, le camp. — A ce qui
est lâche se rattachent les idées de longueur, de lenteur,
et de retard : "kayaphç mou, as?œ6c; le dernier — long us,
lentus — long, lent, lanterner — long long, slow lent,
slack lâche, slender mince, en longueur, late tard —
lang long, schlentern traîner, der Letzte le dernier,
schlank grand et bien découplé. — Barloquer veut dire
être détaché par un bout, osciller comme une boule au
bout d'une corde. La pendeloque barloque au bout de
l'oreille à laquelle elle est suspendue. — Le Suédois
lâmpa sig s'arranger exprime par la ligature ce que
l'harmonie exprime par l'articulation. Fléchir, ne plus
tenir de bout se traduit par XaxaÇw mollir — labasco je
chancelle, labor je tombe, laboro je suis faible — le
labeur qui plie — to limp locher, être éclopé — lahm
éclopé, paralysé — H. loom lourd, qui se traîne, lan-
guissant. Nous avons déjà vu un vice d'articulation, de
cohésion dans lâcher : le voici reparaître avec p : Xëfaa
lâcher — ellipsis,eclampsie — to leave\hchQY,furlough
permission, leave id. — Urlaub id. — Suéd. lemma
laisser, lemming résidu variante de reliques, reliefs.
Selon le langage la liberté consiste dans le jeu facile
des ligatures. Le lobe de l'oreille, le ventre qui fait
bedon bedaine sont décrits comme lo chant. De là les
mots Ackapcç ventre, laparotomie l'opération du ventre
— 253 —
et Xogèç — lobus — lobe — lob. Ajoutons l'Angl. lubber
l'homme sans énergie, limber pliant — l'Ail, der Lqffe
l'homme fade, der Lu m me/ et sa variante der Schlingel
un grand flandrin déhanché, un garçon sans énergie,
schlqff mou. La queue qui remue, qui s'agite s'appelle
en Skt lama; agiter troubler se dit lub. Le L. coluber
la couleuvre et lumbricus le lombric, le ver de terre
doiventleur nom à leur façon d'avancer par zigzags, dé-
terminés par les articulations dorsales ou les anneaux
parallèles. Delà l'Anglais to slip se glisser, glisser
(comme le serpent) et l'Ail, schlùpfen id. Les mots
Angl. leech la sangsue, s/^/y lalimaceen H. s/a&sont des
variantes de lombric et de l'Ail. Schlange le serpent,
coluber, en Skt lâ^galin id. La^gala en Skt veut dire
queue. Lancer, en Angl. to sling , en AU. schleudern
— IL slingeren, de slinger la fronde, le pendule veu-
lent dire projeter un objet en imprimant à sa volée l'ef-
fet d'une oscillation de bras.
L'articulation étant capable de dresser et d'abaisser
le membre qu'elle lie à un point plus central se retrouve
avec ce sens verbal dans lagu léger — ïkàfpiç id. —
levo lever — alège, lever — to lift lever, to lighten al-
léger — leicht léger, lùften lever. Léger veut dire ce
qui ne tient pas, ce qui ne tire pas, ce qui est libre.
Engloutir, en L. glutio a deux congénères en Ail. :
der Schlund le gouffre et der Schott la cheminée, la
canalisation pour la fumée. Le radical commun se
retrouve dans des mots qui marquent un agrippement
une prise, comme si c'était un gosier qui l'effectue en
faisant entendre le son qui lui est propre. V. ua mot
- 254 —
lien. De là latus le côté, l'endroit où se trouvent les
hanches, la hanche même — latéral — H. lid, Ail. dos
Glied. Le lien, dans l'esprit du langage, estl'attacheur.
11 se nomme dans Xfvov — linum — lin — linen lin et
linden le tilleul, tilia dont l'écorce fournit la matière
première pour faire la toile — der Lein le lin, das
Lint le ruban, die Linde le tilleul. T,ocher s'exprime
par un verbe formé de ce radical dans l'Angl. to loiter
marcher lentement, 'dans l'Ail, schlentern id., schlottern
traîner les jambes, dans le Suéd. luns lourdaud. Le
Normand landon est congénère du mot lambineur par
le nom et par le sens. Lumber en Angl. veut dire toutes
sortes de choses qui traînent.
Pour arriver à la déglutition nous sommes forcés de
nous servir de la langue et de prononcer le son n. Ce
bruit se faisant entendre lorsque la langue touche le
palais, le t et le gue qui se forment simultanément
s'associent avec le n et ne forment avec lui qu'un seul
et même signe. La déglutition, concernant la langue et
le gosier, ce dernier organe apparaît avec le son r dans
quelques phonèmes exprimant cet acte. L'enfant qui
tette fait continuellement entendre ce petit claquement :
c'est par là qu'il exprime qu'il a faim; c'est par ce son
que sa nourrice se met en communication avec lui quand
elle veut lui faire comprendre en son propre langage
qu'il y a à tetter ou à manger pour lui et que c'est bon.
Lui-même porte le nom de ce claquement : c'est une de
ses premières énonciations. Pour cela on l'a appelé
vavo^ le petit bonhomme, Tom Pouce — nantis —
nain — ninny — nana kindje sont des mots H. qu'on
— 255 —
répète pour endormir l'enfant sur le sein — en Esp.
nigno (1) enfant. Les seins s'appellent chez le peuple les
né net s, les nichons : c'est le petit claquement lingual
de l'enfant qui tette avidement qui leur a valu ce nom.
Tous les membres de la famille occupés à nourrir, à
élever le bébé sont baptisés du nom de nourriciers :
nara homme, nari femme — révvoç l'oncle, vfoç la belle-
fille — nurus id. — Au Centre, nênet, nênin grand
père, nonne la mère, nonain le père, en Argot nonne
frère, nonnain et nonne ami — en Ail. der Genosse
l'associé. Le ventre qui nourrit s'appelle en Grec. vifiSoç.
Nourrir, donner la pâture qui provoque ce claquement
primitif (Skt nad) s'appelle par onomatopée niv devenir
gras, anna nourriture, ny' — vé;j.o) paître — nutrio je
nourris — nutrition, nourrir, la nounou (la nourrice)
— neat le bétail, l'élevage — genieszen jouir, derNut-
zen l'utilité — H. nut utilité, nutticjen prendre comme
nourriture. Les friandises s'appellent en Normand du
nannan; en manger fait en Ail. naschen et nutschen.
L'Ail, a encore ernàhren, peut-être, comme nourrir.
une contraction de nutrire. — Le d étant voisin du n il
se substitue à ce dernier son dans les mots Skis udan
onde d'où ude rendre humide, en Suéd. avec le digamma
vand eau. La prosopopée nous présente l'eau comme
sortant des mamelles de la terre, comme coulant d'une
source à laquelle nous la puisons en faisant entendre le
n, nd3 d comme lorsque l'enfant tette. Nous trouvons
dans les congénères udra loutre — uowp eau — udo
(1) Ce qui est jeune et neuf comme des nourrissons s'appelle nava
— véo; — novus — neuf — new — H. nieuw.
- 256 —
j'humecte, hydra le serpent'd'eau, hydria la cruche qui
va à l'eau, unda onde — hydre, hydrophobie, onde —
water l'eau — das Wasser id., die Otter la loutre
(pour l'outre). La présence du radical qui signifie l'eau,
par assimilation au suc nourricier, se manifeste dans le
Ski und mouiller, nirw arroser, nea navire — vaw na-
ger — nato id. — nager — snake le serpent d'eau, en
Skt nâga, d'où to sneak ramper, se glisser furtivement
die Schnecke la limace, par assimilation au serpent,
tiasz mouillé — H. nat id., de Nés l'eau, en A. F.
non mare. Nahon et Non sont des noms de rivières
signifiant eau ; de là Vie sur Non et Selles sur Non.
Le Skt Nîra veut dire eau. Dans le Limbourg on a les
noms Neer et Niers (Skt nâra eau) pour deux rivières
qui se jettent dans la Meuse. Les deux Nèthes (Skt
nada rivière) passent par la Province d'Anvers. Laver,
plonger dans l'onde se rend pas snâ3 snu} nig* laver —
v(Çu> id. — nitrum le sel qui suinte — nitre — to tcash
variante de water laver — waschen id.. De là goua-
che (1) peinture à Teau mêlée de gomme. Pour les pho-
nèmes où le son t se substitue à n dans les onomatopées
se rapportant à la nutrition, V. Traité pp. 17. 18. Toto
en Lat. todillus fait en Argot titi le gamin et l'oiseau.
Dans le Limbourg tiet est le mot par lequel on appelle
les poules pour leur donner à manger. Le son de ce
mot rappelle la voix de la poule, quand elle cherche à
attirer ses petits. L'Anglais le traduit par chuek(tchuck
avec chuintement). Toto est un nom familier pour
(1) Guéer répond à l'Angl. to wade {Prononcez ouéde) AW.waien
passer dans l'eau : water.
— 257 —
tette, l'Argot dit les tétais. Dans la Provence on dit
titoun; attitouné veut dire, collé à la mamelle. Au
Centre le téteron,tetiiteron,latuterolle désignent le
bout du sein par où s'écoule le lait. L'Ail, die Dûte le
cornet, le H. tuit tube, goulot, tuyau sont des congé-
nères de ce mot. qui tous doivent leur son à celui de
tetter. Le tuton est l'homme mou n'ayant pas plus de
fermeté que l'enfant qui tette. Tetter répond au Skt
tuh et duh traire avec la bouche, 'de boire, ta nectar.
La soif, le désir de boire s'annonce par udanya soif —
zi'lx id.; le L. temetum veut dire la boisson forte, temu-
lentus un peu gris — abstèmequi s'abstient de boissons
fortes, tuber boire comme au tuyau, au tuteron — to
tipple boire, to tope id., tipsy ivre, to dabble mouiller
et avec la variante n : nipple le bout du sein — die
Dûtte la tette, die Zitze le bout du sein — H. tepel (1)
id. et dans le Limbourgeois deem, en Ail. Ziemer, Skt
tumba trayon. Le mot tub, d'introduction récente, a
désigné primitivement un vase à tube ou goulot. Il
répond à zi-xz la coupe, en AU. der Zuber la cuve, en
H. tobbe id. et stoop broc. Les nourriciers s'appellent
da père et mère {ad manger), tâtala père, attâ mère
— à'TTa père — atta papa — en Argot tiiine sœur (Skt
atti sœur aînée) — dad, daddy père — H. Tante
tante. La dédèle est la femme, comme le Grec ôyjac;.
A-ôéX-fùi veut dire traire, mot congénère du H. tel g en-
fant. La dabesse, la doche est la mère; le daron, le
dab, le darbe le père; la dabe, la dabuche la fille, la
(1) Les bonnes gens, pour dire qu'ils ont soif, portent aux lèvres le
pouce recourbé en forme de goulot.
17
— 258 —
dabuchette la jeune mère (ca^ap épouse). Aâ;j.aX'.; la
génisse dont les trayons (1) commencent à s'allonger.
En Skt dam veut dire épouse — domina. Le mot Angl.
doe désigne la femelle du chevreuil qui donne à tetter,
le H. teef (Skt tumburi) la lice, la femelle du chien.
L'utérus, le sac, le petit d'animal est en Skt dimba, A
ce mot répondent dogue, en Angl. do g le chien et,
comme forme le Suéd. docka la poupée, le poupon,
dâgga téter, Skt 'dayâ petite fille. — Remuer la
langue pour parler a donné les mots du Centre tatiller
et tatouiller bavarder, en Limbourgeois taatsch ba-
varde. Le Hébreux dabar le sermon se retrouve dans
dabêrer parler et dans le mot du Centre le tapis obtenu
par jeu de mots sur tapette langue, mais où persiste le
son de la langue. Corner à l'oreille, comme dans un
tube, a donné le mot Ail. dùten corner, en H. toeten,
de tuit tuyau, au Centre tuet. L'Anglais to tote racoler,
soi disant à sons de trompe, a la même origine. — Avec
r nous rencontrons au Centre le turlu l'alouette huppée,
turelure le son de la flûte,, turluter siffler. Ces mots,
ainsi que tirelire la goulotte par laquelle glissent les
sous mis de côté nous amènent à l'onomatopée du go-
sier. Le H. tierelieren répond au G. 8puXX(Ç(o. Triler
veut dire crier comme la bécasse. La turelurette est la
grisette éveillée, la sœur de Mimi Pinson. Letourlou
ou tonrlourou désigne le jeune militaire. Tralala est
un bruit de la gorge et de la langue remplaçant les pa-
roles de la musique, taratata le cri du gosier appelé au
Centre, truite en Angl. throat. — Le trou est un gosier
(1) En Argot les tettettcs.
— 259 —
par assimilation, comme son congénère -zdr;\zz érosion,
trou. Faire un trou à la lu ne s'explique très bien par
la paraphrase Anglaise to vanish behind the moon dis-
paraître derrière la lune : on est passé au bleu, mais
par précaution, on se cache derrière la lune.
Le t qui accompagne le son n dans les actes tetter,
traire reste dans le langage le son de l'effort. Les sons
auxquels nous devons les onomatopées deva, en Skt, le
souffle, l'esprit, diète, sont l'accompagnement de nos
premiers efforts pour attirer l'air dans nos poumons et
la nourriture dans Festomac. Toutes celles que nous al-
lons voir de suite, celles du gosier, des dents, de la main,
des pieds et par métaphore celles de la pensée emprun-
tent leurs vocables à ce son primordial. Les voyelles ou
consonnes qui raccompagnent marquent par leur son
spécial le concours prêté par les autres organes à l'effort
principal signalé par le son de la langue t, nt, nd (ou
n p. e. animus, anima, en Suéd. and esprit souffle) et
marquant la nutrition et la respiration. Ainsi dans
tuber,V. ce mot ce sont les lèvres qui prennent leur
part dans l'aspiration et la déglutition des boissons.
Dans typhon, steamer, typhoïde (V. Traité p. 153) les
lèvres interviennent encore dans l'inhalation et l'expi-
ration de l'air, du gaz, de la fumée.
Dans la production du thème du mot trachée c'est le
gosier qui s'est joint à l'action de la langue, en ce sens
que l'inhalation profonde de l'air réveille les sons dont
nous avons vu les onomatopées dans rynchus et ses
congénères. Dans trinquer, en Angl. to drink c'est la
déglutition de la boisson qu'on exprime, en confondant
— 260 —
bravement la prise d'air, la trachée avec l'œso-
phage (1), le conduit par lequel les aliments sont intro-
duits dans l'estomac. Le r et le g, qui marquent l'in-
tervention de la gorge, étant jumelles, nous allons
trouver avec g à peu près tous les phonèmes formés
par tr (<rzéyu et ffxepiÇw affermir), à moins de les voir
réunies comme c'est le cas pour le mot que nous venons
de citer. Il se trouve que le son t, en allant se répercu-
ter dans la gorge, peut s'associer avec toutes les ono-
matopées que cet organe a fournies pour son propre
compte et ne former avec elles qu'une seule et même
expression. Ainsi péoiù - péjifto qui veulent dire tourner
aboutissent, comme son, à un bruit de la gorge (V. leur
genèse au mot ramper) ; le t de son côté, étant capable
d'exprimer la courbe (V. au mot tour) et réveillant le
son guttural trouve des phonèmes synonymes tout
prêts avec lesquels il contracte aussitôt une alliance
intime : de là que -cpé™ et aipé^w signifient tourner l'un
et l'autre, qu'arracher et le Suéd. tràsa signifient, le
premier déchirer et le deuxième la déchirure, le lam-
beau. Dans quelques actes de la langue, comme dans
celui qui a donné le mot tatouille, le son t se répète.
Souvent le t se change en son sifflant comme dans
l'Ail. Ziemer (Skt 'dênu vache à lait), Zitze pour
Butte tette ; d'autres fois il s'associe avec sa jumelle n
comme dans sinus et sentio la poitrine et la respiration.
— La linguo-palatale ou linguo-dentale se trouvera,
(1) L'œsophage étant placé derrière la trachée et régnant sur toute
sa longueur visible, communique à cet organe tous ses mouvements,
de sorte, qu'à moins de connaître l'anatomie, on est fort exposé à les
confondre.
— 261 —
par conséquent, au commencement de thèmes, soit
simples, c'est-à-dire consistant en t associé avec une
voyelle seule, soit composés, c'est-à-dire formés de t
accompagné d'une voyelle et des consonnes b, p, ch, r,
/, rg% Ig, rb, Ib.
Cette fois-ci, nous trouverons les différentes racines
groupées selon le sens qu'elles expriment. Les lacunes
que laissera l'inégalité de leur développement dans les
langues traitées ici, il est probable qu'elles pourraient
être comblées en fouillant les autres langues du groupe
Indo-Européen. Respirer s'exprime par a'd souffler, au
figuré âme — *-\j.zz — atmosphœra — atmosphère —
weather temps — das Wetter id., der Athem la respi-
ration, l'haleine. Dans ces mots le t ou ses équivalents
marquent que pendant l'inhalation et l'expiration de
l'air la langue a touché le palais. Le t est congénère
dans ce cas de la sifflante s ou z, de sorte qu'on pour-
rait rapprocher a'd et Çào vivre, souffle. — La bour-
soufflure est considérée comme un gonflement produit
par le vent, de quelque façon qu'elle se produise, à
preuve : id gonfler — zlciu id. — oedema — oedème,
Edipe au pied gonflé — wound la blessure — die
Wunde id. , selon le témoignage du mot, le gonflement.
Pp. 55 et 58 du Traité on trouve expliqué comment le
sens de voir, en Skt vid, se rattache à celui d'éventer,
d'apercevoir par l'odorat. On y verra en même temps
que l'esthétique aussi bien que l'ouie doivent leur nom
à leur assimilation au même sens et que c'est le souffle
qui donne l'audace, dans son acception primitive de
courage. — L'organe qui emprunte son nom au souffle,
— 262 —
à l'inhalation et à l'expiration, se trouve dans la proso-
popée M\koq — isthmus — isthme primitivement le
cou, dans la suite l'étranglement de terre qui attache
une presqu'île au Continent — weasand la trachée.
L'AIL n'a pas de nom pour la trachée dans lequel entre
ce thème. Il aurait été facile pour leurs ancêtres de
former le nom de l'agent avec le thème de Athem ou
Odem qui signifient haleine. — Avec la gutturale le H.
a formé le mot togt, le courant d'air causé par un vide
qui forme trachée aspirante. Il est certain qu'on peut
considérer, à juste titre, que ce mot se rattache par
assimilation à l'acte tygen tirer, exécuté par la main.
Mais on dit : naar zijn adem tygen respirer avec diffi-
culté, phrase dont le sens indique que les poumons
attirent l'air par la trachée et que l'action vient de l'in-
térieur. Il en est de même de hartstogt (1)^ en Skt
dôha, la convoitise du cœur, où ce sont les ressorts
intérieurs qui se tendent veis l'objet auquel nous aspi-
rons. Dans le tirage d'une cheminée,, l'échange d'air se
fait comme par une trachée. En H. on dit de schoor
steen trekt : il y a un bon tirage dans la cheminée.
Dans les deux cas, que ce soit la main ou la trachée qui
tire, c'est l'inhalation et l'expiration qui donne le son
tj tg, tr. Les besoins de la vie, les désirs du cœur
aboutissent tous au gosier et à la bouche : ceux-ci leur
donnent leur accent propre, puis, en transmettant leur
voix à notre oreille, ils nous suggèrent leur nom natu-
rel. — Le souffle, le feu, la lumière s'expriment par
(1) Le H. mededoogen la pitié, l'attraction qu'exerce le malheur, se
traduit en Skt par de.
263
deva esprit, dé, têf soupirer — Ze3ç, Zyjv en Dialecte
Dorien Ay;v, au gén. Atbç Zeus, le nominatif indiquant
le souffle, le génitif le jour, la lumière (dies), ôsoç Dieu,
Esprit. (OJo) fumer, brûler) — Deus — Dieu — day le
jour — der Tag id.. der Docht le lumignon, en Angl.
taper. La diversité de ces mots semble due à la permu-
tation des sons affiliés ~, th ,detk l'analogie du sens de
feu, lumière, jour qui marquent le souffle embrasé ou
ses effets. Il paraît rationnel d'admettre que la pre-
mière idée de Dieu a été d'un Esprit ne s'incorporant
exclusivement dans aucun objet particulier de la na-
ture. Le Skt dyu veut dire briller, diva sa le jour, le
Véd. dyo le jour, le ciel.
— Dans le langage la fumée est assimilée à un produit
de la respiration et c'est pour cela qu'elle lui emprunte
son nom. Au point de vue physique, c'est une bouffée
d'air chargée d'autres matières. Elle s'exprime par
dhûma fumée (1). dûp fumer, dhmà souffle — Qù[xzz le
le cœur, la poitrine, <|>éço; les ténèbres. La série com-
plète des thèmes de l'inhalation et de l'expiration tra-
duit le sens de fumer; ainsi, avec la simple voyelle
nous avons Ojw brûler des parfums, en L. ater, teter
noir enfumé, brûlé; avec r le L. tlius au génitif thuris
— thuriféraire. Avec la labiale nous rencontrons tamâ
la nuit — Tuço) soulever de la fumée ou de la flamme —
tenebrœ la fumée, les ténèbres , Typhon le tourbillon
— ténèbres, steamer, la typhoïde la fièvre occasionnée
par les exhalaisons marécageuses — damp l'humidité
(1) Dhûma marque le souffle linguo-palatal, fumée celui des
lèvres.
— 264 —
occasionnée par la vapeur^ der Dampfer steamer. —
Le parfum, la fumée des plantes et des fleurs s'exprime
par 6upL;3pa l'herbe parfumée — thymbra — thym. Le
tufre en Argot est le tabac. Le Skt tant veut dire
étouffer, l'Ail, der Duft veut dire le parfum. — Le
brouillard, la nuit, la poussière qui aveuglent se mon-
trent dans TuapXb; aveugle, dans le mot Angl. dim obs-
cur, dun de couleur sombre, dans l'Ail, dumpf sourdJ
en parlant du bruit, der Staub la poussière — H. dof
couvert de brouillard, dans les mots Sanskrits dhûlis
la poussière, dôsâ la nuit, dans l'Ail, dûnkel et dùster
obscur. — Le mauvais air, le souffle qui empuante
s'exprime par cstaaa la puanteur, par l'Angl to stink
puer, en Ail. stinken. — L'exagération du sentiment
de sol, le fait de grossir son mérite, sa valeur constitue
l'orgueil. Le gonflement particulier à ce défaut est
décrit par le mot cdamba orgueil, tup se gonfler, par
7 ùvoq l'orgueil — tumidus gonflé. Au physique le gon-
flement, la boursouffiure se nomme dans tuber le tu-
bercule, tumere gonfler, tumulus la butte, le renfle-
ment, tumultus une réunion houleuse.
Le feu est représenté comme un souffle ardent,
comme un gaz en ignition : indh allumer, dâh brûler,
dî briller, djô jour, edha combustible — eau*) brûler —
dies jour, lumière, taeda torche, atrium l'âtre, taedet
cela me cuit — diurne (Skt diva jour), âtre, édifier de
aedas foyer, maison — day le jour,, wood combustible,
bois, wood colère — der Tag le jour, die Wuth la
colère — Suéd. ved bois, id zèle, feu. Telle est encore
la description que présentent les mots ushà à l'aurore,
— 265 -
us* brûler — ot£w id. — asso dessécher, aestas l'été —
éther l'air pur, clair, sec, été — as h la cendre, oast le
four — die Esse la forge, die Asche la cendre, heiter
serein, sec et clair. La couleur feu, pourpre est décrite
par efftpcov — ostrea — huître — oister — die Auster le
coquillage qui la donne (1). Avec y la description du
souffle ardent se présente dans tap brûler, consumer,
dêp brûler (2) — tjom id., -iopx cendre — Oa*™ brûler
les corps, ensevelir — tepeo être tiède, templum l'en-
ceinte où l'on brûle les victimes, don m s maison, Skt
dama de dà brûler — tiède, étuve, dôme — stove
poêle — die S tube l'endroit où l'on fait du feu, la cham-
bre — H. stoof chaufferette, en Limbourgeois poêle.
Dans ÔépiMj chaleur on ne décrit non pas la chaleur
mais bien le durcissement, le dessèchement qu'elle
produit dans les corps soumis à son action. V. au mot
étendu. Le dessèchement, le durcissement ont été assi-
milés à ce qui est tendu, raidi et s'expriment, par con-
séquent par la lettre de l'effort. De là tars'a la soif —
-xp'.yh; le séchoir^ le hourdeau, la claie pour sécher le
fromage — sterilis stérile, torreo je brûle, je dessèche,
thermœ — stérile (3), torride, tarir — dry sec —
durre id., dôrren dessécher. Le /* de cette racine en-
traînant un g ménage le groupe congénère suivant :
(1) Ajoutons la chaleur qui donne la transpiration : svidjama —
VSo; —.sudor — sueur — sweat — Schweisz la sueur.
(2) A ce mot et à son congénère dhuma il. faut rattacher le feu, le
foyer, la maison Sôjxoç — domus maison, dôme coupole — et dam —
8o(Lâ(d — domo — dompter — to tame - zaehmen apprivoiser, addo-
mestiquer .
(3) Estourbir tuer signifie primitivement faire dessécher comme une
branche détachée du tronc. Les correspondants sont en Angl. to staroe
mourir de faim. Ail. sterben mourir.
266
clrak' dessécher — Ôapy^Xia fêtes en Thonneur d'Apollon
et de Diane où l'on offrait toutes sortes de graines
cuites, Tp'jyaw récolter, plutôt sécher la récolte au soleil
avant de la rentrer, Tapies Ie poisson desséché anal,
comme sens à stockflsh le poisson rendu sec et rai de
comme le bâton - tergeo sécher — abstergent — drought
la sécheresse — trocken sec (1). — L'organe qui se
nomme lui-même dans ipâyyjkoq la trachée, le cou est
l'agent primordial pour les actes de tendre, de tenir,
de tirer, d'attirer : la trachée (le gosier) a agi avant la
main cpa~; celle-ci reçoit son inspiration et son nom du
gosier, comme lui-même obéit à un besoin de la vie.
Ce besoin s'exprime par le son de la déglutition t, qui
est en même temps celui du désir, de l'appétit, en H.
trek appétit (attraction) et au moral la tentation, la
convoitise des choses défendues. Ainsi l'appétit, en
partant de l'intérieur, vient prendre nom à la gorge et
le communique ensuite à la main qui est l'auxiliaire
des besoins de la vie. La trachée devient par assimila-
tion le nom de l'entonnoir, en AU. cler Trichter, en H.
tregter l'attireur, le goulot par lequel entre un liquide.
Elle se montre dans trogne et trognon la tête, la figure
(la gueule) et dans leur variante tronche même sens.
Le trognon de pomme, de chou sont nommés ainsi par
assimilation à la trachée, parce qu'ils réunissent la
tête, la boule au reste du végétal (2). Selon la légende
populaire, la protubérance de la trachée qui s'appelle
(1) Dans le Centre on dit se déterger pour boire, ôter la soif, la
sécheresse du gosier en Angl. thirst, en Ail. der Durst la soif,
verzehren consumer.
(2) Dévisser le trognon veut dire tordre le cou.
— 267 —
larynx, marque l'endroit où s'étrangla le trognon de la
pomme qu'Eve donna à Adam. Trognon redevient
aussi trachée et le rapport entre ces deux mots se trouve
établi sans l'intervention de l'étymologie. — Le feu du
ciel nous est décrit comme un trait, une trace dans les
mots à<rrpa'TCTG> éclairer, ràpoinj l'éclair Steropes, l'un des
Cyclopes. Oa'X-o) réchauffer, qui contient une variante
avec / de la racine de wé^pç stérile, montre l'action du
feu comme aspirant l'humidité des corps de sorte
qu'ils subissent le tiraillement, la contraction, le dur-
cissement qui caractérisent l'objet desséché. La pierre
qui consume, qui dessèche, qui brûle, s'appelle tfcavoç
la chaux; le L. Titanus et le F. Titan représentent
primitivement le feu; le tan est la couleur feu, en Skt
tit'a, et par suite l'écorce de chêne qui la donne, en
Angl. tan. Tinder dans cette langue, en Ail. der Zun-
der de ^iïnden, en Suéd. tcinda allumer, est la matière
inflammable, l'amadou. L'Ail, die Tanne est le sapin,
le bois résineux qui servait de torche. Le rayonnement,
les traits de lumière ont donné leur nom à tara l'étoile,
en zend çtâre — crr(Xgw l'acte de briller, de rayonner,
Stella (1) — étoile — star — der Stem.
Manger, sens que nous avons vu exprimer par un
groupe de noms congénères en traitant du mot comes-
tible, se traduit également par ad — sà-Tw manger,
gsTt:v:v le repas, ca-avzo) consommer, dépenser — dapes
les mets. — Le L. tuburcinor manger rappelle le tube,
(1) Astre veut dire feu. V. au mot édifier. A cette racine se ratta-
chent encore le L. testa têt, tesserula cube, un composé de carrés,
tescjua des endroits stériles, titio le tison, Dœdalus qui révèle de
8aÀb; tison.
— 268 —
l'ésophage et le mot de l'Argot organe la faim qui fait
que nous mangeons avec tant d'avidité que nous nous
étranglons (H. wurgen avec digamma serrer le cou,
étrangler).
Le nom spontané de l'acte de la déglutition se re-
trouve dans la boisson et dans le liquide en général ;
de là : ta le nectar, kdâv laver — osuw saturer d'eau,
irriguer, o Jo> plonger — Anadyomène — dew la rosée
— der Thau id. La même racine avec p a formé l'Ang.
to dip, to steep immerger, to dab, to dabble patauger
dans l'eau, mouiller, et l'Ail, taufen, baptiser, imbi-
ber — H. dompelen plonger. Hareng à la daube veut
dire que ce poisson baigne dans une sauce aromatisée.
Le Skt tim veut dire être humide, en Angl. damp, hu-
mide.
La racine avec g nous a donné tôya eau — -î^^m
humecter, Seîxoç mou, amolli dans un bain — tingo —
teindre, tache — dank mouillé, tank vivier, to duck
plonger, duck canard — die Dinte l'encre, tauchen
plonger, ùbertûnchen qui se retrouve dans le Français
badigeonner {betûnchen).
La goutte d'eau s'appelle axpàyc. Les noms des mala-
dies stranguria, strangurie et l' Angl. to trickle dégout-
ter contiennent ce mot. L'Angl. dram veut dire une
goutte de liqueur forte. La drogue, en Angl.druck est
de la même racine que to drink boire, to be drowned
être immergé, se noyer et que l'Ail, drinken boire,
d'où trinquer. Le cabarétier s'appelle le trinckmann.
mot composé d'éléments Allemands; le mannestringue
est le cabaret, le bar ; mannestringuer veut dire boire
— 269 —
et, comme le zingue, par sy necdoche signifiejle cabaret,
mannezinguer veut dire la même chose. — Le sens
primitif de traire a été boire à même la mamelle :
iOsAyd) traire, trinquer. Dans le Nord dragler veut dire
avaler un liquide. A tire Varigot décrit l'acte de boire
comme si le liquide était tiré par l'estomac quand il des-
cend par le gosier. Avaler d'un trait exprime que le
gosier ne fait qu'un seul effort pour engloutir la bois-
son.
L'acte d'attirer à soi, appliqué à la main ou par ex-
tension à la patte préhensile, a reçu le nom de xaco
attraper d'où tyjty; la disette, le dépouillement, vtpàm
arracher de la main, ainsi que de %dund chercher en
tâtonnant — 'Qr-.iu id. — tâtonner, au Centre tats le
lambeau arraché, en H. tod — to taste tâter de, goûter,
tatter lambeau, toe le doigt du pied — die Tatze la
patte. — Avec g nous trouvons les formations tuh, duh
attirer — Uyoy-u je prends — dux qui mène, digitus le
doigt préhensile — doigt, dé, digité, digitale, taquet,
taquiner, attacher, attaquer — to tdke prendre —
zucken forme intensive de ziehen tirer, forme à laquelle
répondent zigzag, saccade, souquer et sacquer: tirer
en It. saccare (1). Saisir par l'esprit, concevoir, com-
prendre s'exprime par ldgae concevoir, dî intelligence
— CS7.ÉG) estimer, concevoir comme tel, penser, Uyyœ
opinion ferme, c6;a la bonne opinion des autres, la
gloire — disco j'apprends, duco je pense — disciple
élève, dogme — to think penser — denken id., mich
(1) Le sens d'arracher se traduit par ôpéiro) — strigmentum pelure
— drap morceau arraché — to strip arracher, trappings draperies —
abstreifen écorcher.
— 270 —
dunkt, mir dâucht je pense. La gratitude, la recon-
naissance s'expriment en Angl. et en Ail. par to thanh
remercier, garder le souvenir de, en Ail. danken id.
Avec r nous rencontrons -zphz rapide, variante de -y.yy;
id. — torrens — le torrent, tirer — to tear id. — ser-
ren id.. Avec h, g, (ss),# nous avons drâk vite, dri
tirer — cpàa™ prendre — traho je tire — traction —
to drag, to draw tirer — tragen porter, pour tirer,
ertragen endurer, — H. [trekken tirer. Avec / pour r
-JXkm j'arrache — titillo j'excite, je chatouille. — L'or-
gane préhensible se nomme par prosopopée Tip-zpz; —
Tartarus — 'Taitare le gosier, le gouffre, les entrailles
de la terre — thi^oat le gosier — der Strudelle gouffre.
Dans le riche langage du Centre, la trachée a un congé-
nère dans trute gosier. La truite, V. Traité p. 27, ainsi
que r autruche doivent leur nom à leur gosier. Le tho-
rax, variante de trachée et trute nous offre le /• accom-
pagné de son associé habituel le g. A Owpa^ il faut
rapporter turgeo soulever le sein, se tuméfier, en Ail.
strotzen se gorgiaser, H. trotseh orgueilleux, en Skt
drék. L'Ail, die Drilse (synonyme de l'Italien gavigna)
marque la glande du cou : de là die Druse la gourme
en H. droes. — Le sternum autre variante de trachée
s'appelle en Grec c-ipiocz la poitrine, auquel répond le
mot trompille, nom argotique de l'animal en général,
trompe, en Angl. trunk, et le Suéd. struppe gosier. Le
cri de cet organe se reproduit dans strepitus le bruit,
dans le H. gedruis le fracas, dans tieren crier qui à son
tour rappelle le Skt drék crier,, Opéa) parler, clamer. Aux
noms d'oiseaux appelés d'après leur gosier, V.
— 271 -
p. 21 du Traité, il convient d'ajouter les mots Latins
strix le hibou au cri strident et tringa hypolcucus
espèce de pluvier. Le Skt drâyx veut dire pousser des
cris stridents. Roupiller, attirer l'air dans le gosier
avec le bruit qui a donné le nom à l'organe appelé
traie etc. s'exprime pour cette raison par drâ dormir
— capôavo) id. — sterto avoir la respiration bruyante et
de mauvais augure — stertoreux et avec m, phonème
qui rappelle p^c; le bec, par dormio — dormir — to
dream rêver, pour dormir, comme songe -pour sommeil,
somnium — trâumen rêver. Un autre nom pour l'or-
gane de la préhension est -ipzzq variante de cpx- —
tarsus — tarse, sens analogue à celui de tiret, tirant.
L'Angl. et l'Ail, n'ont pas formé de to tear, serren
tirer un mot désignant spécialement la main. En fait
d'objets qu'on tire ou qui servent à tirer ces deux lan-
gues ont drawer le tiroir, der Propfenzieher le tire-
bourre. Un autre organe qui doit son nom à la tension,
à la rétractilité ou à l'extensibilité dont il est capable,
est le Skt tàla la main étendue, ôevap la paume, la main
étendue. Le H. teen ou toon veut dire le doigt du pied^
organe qui a des propriétés identiques. De là teneo —
je tiens et par assimilation 'di lier — céw id. — induo
j'enveloppe, je ceins, je revêts — tenir, loue, zodiae —
thong courroie, tongs pincettes, sinew le nerf — die
Zange les pincettes, die Seline le nerf, das Tau la
corde — Obtenir par le sort présente une nouvelle
application du sens de tirer à soi qui s'exprime par
dund chercher en tâtonnant — xtrffvw obtenir, —
contingere arriver par hasard, A en croire les mots dé-
272
toce et détoche qui veulent dire infortune l'argot a eu
connaissance du Grec guœtj/yî le mauvais lot, le mauvais
sort qu'on tire. Le mot Espagnol die ha fortune d'où
por ou a dicha par hasard semble être le positif de déto-
che en Esp desdicha.
Tenir devant les yeux, montrer au doigta peut être,
est le sens de cdwaja signe, die montrer, du indiquer
du doigt — Bao) montrer. 8t8àcrxa) enseigner, Mxv mon-
trer — doceo enseigner — docteur qui enseigne — to
teach enseigner, montrer une science — zeigen indiquer
deuten expliquer — H. beduiden signifier, (Skt dût a
messager) toonen id. (toon doigt du pied). La marque,
l'indice s'appelle en Angl. token, en AIL das Zeichen.
Tenir sur pied, être droit debout, suppose une ten-
sion qui s'exprime par la racine contenant le son de
l'effort ; de là : 'data la balance — gtoIw — sto — être,
état — to stand être debout — stehen. Planter, mettre
debout se rend par 'dà — Géw poser — thesis — thèse
— star/ étai — stûtzen appuyer. Avec k nous avons
ffTYJYG) être ferme — tignum la poutre — êtancher,
stock pile, étançon. stick — staunch ferme — der
Stock le bâton. Avec p - stipe souche, stipuler arrêter.
— Instituer un certain ordre forme le sens de -:xssm
arranger — syntaxis — syntaxe l'ordre des mots, tas
— to stow arrimer — stauen id.
Avec r le sens de se tenir droit debout se montre
dans fdru être solide — <jTr,pi'Çu affermir — stirps le
tronc, trabs id. — travée, architrave, extirper, tor-
peur — tree arbre, stripling adolescent, jeune arbre —
der Strauch l'arbuste. La fermeté du caractère, être
— 273 —
inébranlable dans ses décisions, la confiance se ratta-
chent au sens de drsc affronter ■ — OappÉw oser, avoir
confiance en soi — Thraso nom transparent d'un per-
sonnage de comédie — Thrasybule qui est ferme dans
ses desseins — to dare oser — dùrfen id. , uertrauen
confier. Avec r pour l nous avons le sens de fermeté
dans talli la jeune fille, le tendron — crfar, la stèle —
stoh la branche — stèle, étal (1) — stalk tige — stel-
len poser, der Stiel le manche (de balai), der Stall
l'étable d'où étalon, en Angl. stallion. Avoir l'intelli-
gence dure comme la bûche forme le sens verbal de
stûhlas bête, en L. stolidus et stultus bête, imbécile
— en Angl. doit bûche, dull stupide (2) — der Tôlpel
la bûche. — Etre endurant, se soutenir dans l'infortune
s'appelle tul — TaXaw supporter (tca^o) oser, avoir de
l'assurance) — tolero, tollo tolérer, supporter — tolé-
rer — to thole endurer — dulden souffrir, die Geduld
la patience. — Fouler le sol, condenser s'appellent avec
la gutturale tak, ta^g, tanc marcher — g-v:/m id. —
vestigium le vestige, la trace du pied, indago traquer,
suivre les vestiges, examiner — vestige — to stalk
marcher — der Steg le chemin et avec la labiale div
fouler, dap accumuler — <7te((3w je condense — stipare
id. — constiper, étape (3) marche — step pas, to stamp
fouler, donner des coups de pied — stapfen marcher
(1) L'étal, en Ang. stall (Skt tal fonder) est l'établi sur lequel on
expose les marchandises en vente. S'étaler par terre veut dire tomber
tout de son long-, par moquerie, s'étaler comme une marchandise.
(2) Voir la genèse du mot stupide et de l'étonnement, en Skt stam
à la page 50 du Traité. La timidité, Skt tàma, timor rend stupide,
cloue sur place.
(3) Le Dan. stoever veut dire le chien de chasse qui suit la piste du
gibier, l'Ail, durchstôbern traquer.
18
— 274 —
stampfen donner des coups de pied — H. stapel pile
— It. stampare faire une empreinte comme avec une
estampille, imprimer — H. stoet, en L. stipatio les
clients qui entourent le patron, les serviteurs qui se
pressent autour du seigneur, du maître (1). — La jambe
qui exécute la marche s'appelle tibia (Skt nitamba qui
a de belles fesses), être ébranlé dans la marche, de
sorte qu'elle se démène plus qu'il ne faut, se traduit
par le réduplicatif titubo — tituber, en Angl. to stag-
gei\ A cause de l'homonymie de tibia avec tuba, V.
au mot tube, ce mot veut dire flûte. La botte, la cou-
verture pour la jambe s'appelle en L. tibiale, en Angl.
stocks la botte de bois,, l'instrument de torture, d'où en
H. de stokkenknecht le geôlier, stockings les bas et en
Ail. der Stiefel la botte. — Les cheveux qui se tien-
nent raides et droits comme le stipe ou comme Vêteule
s'appellent en Argot les tiffes, mot répondant à tcûtcti
— stupa — étoupe — tow — stubble éteule — stoppel
id., en Suéd. tqfva le lin le plus dur.
La toque est une protection pour la tête. Le sens de
protéger est raffermir, fortifier. De là que nous trou-
vons notre racine dans de, st'ag couvrir — c-é^r, toit —
tego id., tectum toit, toga toge — toque — to thatch
couvrir de chaume, to deck couvrir, vêtir — decken
id., das Dach le toit. Etre coiffé d'une toque, être
toqué rime avec toqué (Skt dâç frapper), touché atteint
d'un coup de marteau. Par une confusion voulue de
(1) En Argot V antijje ou l 'ctntifîle est le chemin, d'où antifîler
marcher. Vantiffe est par jeu de mots l'église : le mot vrai est anti-
phone chant et par synecdoche l'endroit où on la chante ou entonne.
Ce mot donne le nom synonyme de entonne, église.
— 275 —
ces deux expressions on dit pour être fou de, avoir une
prévention pour, être coiffé de, avoir un béguin pour,
un cheveu pour. — Avoir la toquade de veut dire
avoir l'esprit tellement frappé d'une chose, en être féru
à tel point qu'on ne pense plus aux autres. — A Cam-
brai, à l'hôtel de ville, il y a un Nègre et une Négresse
en bronze qui, un marteau à la main, comptent les
heures en frappant sur une cloche. Le marteau leur a
fait donner les noms de Martin et de Martine. Les
coups que les automates font retentir sur la ville font
dire aux voisins que les habitants de Cambrai sont to-
qués. 11 est vrai qu'ils sont très-fiers de ces deux bron-
zes., dont la légende remonte aux croisades. Avoir le
timbre (1) fêlé veut dire que le corps de la cloche a
cédé sous les coups et que le son est devenu discordant.
Un coup sur la boîte crânienne, assimilé au coup qui
fait craquer le timbre, produit le dé raisonnement. Par
analogie le sens de délire provient de l'assimilation de
l'esprit avec les sons d'un instrument à cordes détra-
qué. Se mettre martel en tête veut dire s'alarmer. Le
sens d'être toqué se retrouve dans toc fou, en Suédois
tok; togue, toque amusant; dans tocon, tocard, tocas-
son, toq liasse , toque drôle, laid; tocasse méchant, ma-
licieux comme il arrive aux fous. — Le sens de
frapper se rencontre encore dans digue-digue l'épilep-
sie, parce qu'elle est accompagnée de tiraillements
nerveux qui se déchargent en coups de pieds incon-
scients. — Le toc est la paraphrase du clinquant, de ce
(1) La cloche sur laquelle tape le battail : Tv[x7ravov — tympanum
— tympan, tambour, taper, tapette — to thump battre — zappeln
taper des pieds. V. au mot estampille.
— 276 —
qui claque avec bruit, en H. klatergoud or qui claque.
Il s'applique à tout ce qui est de qualité inférieure. —
Toucher de la main, atteindre, entrer en contact d'une
façon légère ou vigoureuse se traduit par ^«/'atteindre,
dâç frapper. — ôtyw id. — tangere toucher — to
thwack frapper — to tick toucher légèrement — to
dash, to dang heurter — ticken toucher doucement.
Plaute a l'expression : taxi taxi in tergo meo, toc,
toc! tape, tape! (Skt tup frapper) sur mon dos. Le
tocsin est la cloche, prise pour le signal qu'elle donne
quand le battail toque contre la coupe. Tic tac est le
bruit d'une pendule réglant la marche de l'engrenage,
du contact des roues dentelées. La racine avec n, nd
ou d s'applique au même sens : tu, tud blesser, tan,
tad frapper — 6sivw id. — tundo id. — tondre couper
— contondant — to stunt écourter — ziistutzen id.,
dégrossir. L'effet du battail sur le corps de la cloche se
reproduit dans les mots dundu tambour, dan, stan,
tan faire tinter — Ttvàsso) id. , c'.véw ébranler — tinnio
retentir, tintinnabulant sonnette — tintouin, retentir,
ton, tinter — din bruit, to tink frapper sur le métal —
tônen retentir. Ces onomatopées sont le digue digue
don (en H. tingeling) de la cloche transformés en mots.
L'oscillation du battant s'appelle du même nom que
l'acte de tinter : de là le dandin, celui qui se dandine
sur les hanches dans un mouvement semblable à celui
du battail de la cloche, le dandy le fat qui se donne des
airs dandinés en marchant, envoyer dinguer (1) et sa
(1) Au Centre on dit : envoyer dringuer, c'est-à-dire bouler, rouler,
V. au mot dringue.
— 277 —
paraphrase envoyer balancer ou tout uniment balan-
cer, c'est-à-dire envoyer dandiner ou promener, un
bras dodu dont les chairs se dodelinent. Des balan-
çoires sont des affaires de rien qu'on envoie dinguer ou
promener avec ceux qui les proposent. Aller à dada
sur les genoux fait éprouver aux enfants le plaisir du
dandinement. Le dada est le cheval dont la marche
imprime un balancement au cavalier. — Dodeliner
(It. dondolare balancer) veut dire faire aller la tête de
çà et de là comme la cloche ou la sonnette mises en
branle pour les faire tinter. La cloche a le nom expres-
sif de dandillon (Skt danda bâton, tad battre), mot
qui répond au Skt dnla la balançoire, au Grec Bevc-Xag)
se balancer, en Angl. to dandle, to dangle (Skt
tâda^ka pendant d'oreille) se dandiner (1), balancer,
brandiller, toddler le petit enfant dont les jarrets flé-
chissent en faisant ses pas, to doze hocheter de la tête
en sommeillant, en H. clutten (dodeliner de la tête) id.,
(lui: cl en être sous l'impression du sommeil, avoir le
vertige, en Angl. diàsy somnolent, emberlucoqué.
Sans le n l'Angl. a le mot to totter être ébranlé, se-
coué. L'Ail, die Zote est la guenille qui barloque. Le
Skt tan' s veut dire secouer, tandaka le hochequeue.
L'Argot a dandiner pour frapper, c'est-à-dire imiter le
mouvement du battail de la cloche sur le dos de quel-
qu'un. Le Skt a danda la tige qui dandine. Le bruit
d'un coup contre terre donne en Angl. le phonème
ilnid (tundo — tutudi je frappe, Skt tattura son de la
(l) Danser est de la même origine (A. to dance,K\\. tanzen. Skt
tûndi la danse).
— 278 —
tymbale) — Se schtosser dérive de l'Ail, anstoszen.
Ce verbe veut dire : faire toucher les verres avant de
boire, insigne de camaraderie. L'Argot lui a prêté le
sens de s'enivrer à tort. Stoszen répond à tas secouer,
UV heurter — wôéo) id. — sisto — résister — to stutter
toquer de la langue contre les dents, être affligé de cet
embarras particulier de la langue qui fait précéder
renonciation de la parole du son involontaires^ répété,
bégayer — stottern id., stoszen. — Le contact de la
langue avec le palais a fourni au langage le son par
lequel nous exprimons ce qui concerne l'acte de parler:
'dwan résonner — 9667775 (1) le langage — dingua
anciennement la langue, dicere dire — dicter, diction,
dire — tangue la langue et le langage, to tink retentir
— die Zunge la langue.
Le langage, le chant s'expriment, par des onomato-
pées formées de la racine dont: adri chantre — aow
chanter, ucw crier — aëdes — aëde — tatouille (2) —
oath la parole donnée, le serment — derEid la parole,
le serment. Avec la linguale redoublée nous rencon-
trons : TtTtÇu) piauler comme les moineaux (V. au mot
titï) et l'Ail, zetern crier de douleur, mot qui a pour
base un cri que les Grecs écrivaient ana-ai. Sophocle
le met continuellement dans la bouche de Philoctète
blessé au pied par une flèche empoisonnée. At, ta, te et
(1) Le /"du mot Grec marque l'intervention des lèvres dans l'émis-
sion de la parole, comme le p de psyché dans l'émission du souffle
sch. Le H. dit niezen éternuer et fniezen-, l'Angl. to sneeze bien que
l'instrument s'appelle nose le nez. Le H. fniezen répond au G. pnéo
souffler.
(2) A tatouille, la femme qui jacasse ilfaut rapporter le H. tut, tut.
Les contes et le Skt tudd mépriser, considérer comme des blagues. Le
Skt tad veut dire parler.
— 279 —
*e sont des notations du son que profère quelqu'un qui
tremble la fièvre. — Avec' r nous retrouvons la ra-
cine t dans Opso) parler, Tov0opt5Çw je murmure — dans
l'Angl. droite l'abeille mâle^ le frelon, dans le H. tieveti
crier. Avec / nous avons les onomatopées to talk parler,
taie conte, toll nombre, to tell raconter — erzahlen id.,
die Zahl lenombre, zilken chirper comme le moineau,
en Angl. to ehirp, en H. tjilpen piauler. L'Ail, die
Stimme la voix rappelle s-z\j.ozz le bruit, s-ly.* la
bouche.
La tension se présente avec une multiplicité de
nuances. Tendre quelque chose devant soi, afin de le
faire passer dans une autre main, tendre avec l'intention
de donner s'exprime [par la palatale simple : Skt dû
— coo) — do, dos la dot — datif et avec n: cave; le prêt
— dono — donner. — La tension qui allonge l'objet,
qui l'amincit s'exprime par ta, tan — tsivu — tendo —
to thin amincir — dehnen étendre, — delà tuvvoç mince
petit — Tavab; étendu — tenuis — tenu, atténué — thin
— dùnn. L'allongement du temps s'exprime par durer >
tarder — to tarry tarder — dauern, durer et par le
H. dralen s'attarder, dur en durer. Ce qui est dur ré-
siste à la traction, tient ensemble (1). A ce mot répon-
dent comme sens tanc resserrer — caaù; — densus —
dense — tight — dicht et le Suéd, tât, tung. Le Skt
tafk veut dire vivre dans la misère, à l'étroit. La dèche
se rattache à ces mots : elle dénote le resserrement de
l'argent. La tigne veut dire une multitude compacte,
(1) L'Angl. strong, l'Ail, stark fort ont un sens analogue, en Skt
dràg être fort au moral comme au physique.
— 280 —
le tocard l'avare qui a lamain serrée, dure à la détente,
en Angl. stingy. Etendre par terre donne les mots
GTopào) — sterno — prosterner, stratégie — to strew —
streuen, en H. strooyen et streuen. — Tendre ses re-
gards vers un endroit s'exprime par dric — Sépxœ regar-
der fixement, en Angl. to stare, to steer, en Ail. an-
starren. Le Latin et le Français ontpu exprimer le sens
de ces verbes par la paraphrase : tendre le regard.
L'Ail, betrachten veut dire contempler, méditer.
Elever, faire devenir tige, arbre, s'exprime par tu
croître, takma (1) la progéniture Téxvov l'enfant — tig-
num la poutre tocologie — doxy jeune fille, twig
branche — seugen engendrer, zûchten élever, die
Zucht l'éducation, le régime, gedeihen prospérer, der
Zweig la branche. Avec r nous avons -pssw — atrophia,
tyro l'élève, turio le drageon,, trossulus le jeune amou-
reux — atrophie- to thrive prospérer — treiben pous-
ser — en H. tieren croître, venir bien. Le H. a le mot
optrekken élever; le Skt drêk croître, dravaja le dra-
geon. Ces mots trouvent des congénères avec / dans
ozloùq l'utérus — adelphi les frères utérins — adelphe
— to till cultiver, en H. teelen produire, teelt cul-
ture. La tension de la volonté, l'effort de l'àme pour ac-
complir le bien a donné les mots daks avoir de la vertu,
tu être fort, en Angl. doughty brave, en Ail. die Tu-
g end \& vertu, taugen être propre à, tilchttg vaillant, en
H. duchtig ferme, degelyk solide, réel. — Le désir
s'exprime par drâyx désirer — c-ép^u aimer — trahax
avide — attrait, attraction — to be drawn towards
(1) Avec n Skt tantr nourrir.
— 281 —
subir l'attrait de — der Drang le désir — en H. trek
envie. — L'effet moral s'exprime encore avec la racine
trch: to struggle lutter pour, to try tâcher,, to strain
id., s'efforcer et l'Ail, trachten tâcher. Le struggie for
life est l'effort pour se soutenir dans la vie. Avec^/nous
avons une nouvelle forme des mêmes phonèmes : to
strtve s'efforcer, AU. streben id., derStreit le combat,
Skt trad s'efforcer. — L'effort qui donne de l'activité à
la main s'exprime par tax fabriquer — xeifyu faire —
technicus artisan, ingénieur — technique — to do faire,
thing la chose à faire ou faite — thun faire, das Ding
le produit d'une industrie. — Le H. stop (bouchon), en
Ail. Zapfen la broche produit l'arrêt. Etancher veut
dire empêcher le sang de couler ; une cloison étanche
empêche l'eau d'envahir le reste du vaisseau, en Angl.
staunch etancher, en H. stelpen. To stop, stopperveut
dire arrêter un train ou toute autre chose en mouve-
ment. C'est l'effet d'un tampon, Angl. tap, Ail. Z ap-
pert, Etancher, comme le H. stoppen se pratiquait en
enfonçant une broche dans l'ouverture par où s'écoulait
le liquide. C'est l'idée d'enfoncer qu'on a retenue dans
tikta piquant, g-;Xu poidre — stigma marque — stuc
plâtre qui colle, instigation, estoc, stigmatiser, étui, —
to stitch faire des points, coudre, to stickle exciter, to
stick coller — stecken insérer dans, stechen poindre —
L'étui est la gaîne etc. dans laquelle on enfonce l'objet
qu'on veut garder. Se tapir se dit du gibier qui s'en-
foncedans un creux du terrain.
L'objet qui fait pointe s'exprime par les phonèmes
similaires toupet — top pointe — derZipfel l'extrémité.
- 282 —
La division est considérée comme l'effet d'une main
qui arrache, déchire, d'une dent qui coupe : delà da-
jate fendre, data action, défendre — ca-o) séparer, 5fexo<;
le disque, planche arrondie, cible — discus — disque -
desk table, pupitre -- der Tisch la table — H. de disch
la table,, lanourriture, et avec la labiale té^vw — anato-
mia — anatomie, table — table — die Tafel\& planche,
anal, à l'Angl. board la table et la nourriture. Tran-
cher une question, discerner le juste et l'injuste s'ex-
primer parles congénères damna juger- comdamner -
to deem juger, en Ail. urtheilen juger. — La planche
obtenue par division s'appelle H\~oq tableau — delta
tablette — delta planche triangulaire — dalle planchette,
pavéen[forme de planche, tailler (1) partager, tillac pont
en planches du navire, dalot tranchée — deal planche,
to deal séparer, to dole partager, dell et dingle vallée
— Thaï id., theilen partager, die Diele le plancher où
l'on bat le grain, der Teller tailloir (2). Les correspon-
dants avec r sont tiras à travers — Tpwyw corroder —
truncus tronc, trans- trancher, dard, darder -through
à travers — durch id. — trennen séparer. Ils marquent
l'effet du tarse, capable de déchirer. La ligne qu'on tire
s'exprime par <m£ — distichon vers de deux lignes —
distich. Ajoutons les congénères : strie, étrille (Skt.
turi) tiret, trait, trace, traquer, détraqué — to stroke
caresser, faire venir]des traces, streak strie, to strike (3)
(1) Variante de ôeîpo) écorcher. Skt dri — diviser.
(2) Rincer la dalle à quelqu'un, pour — le dalot, veut dire : régaler
sans retour, par assimilation des dalots avec le gosier.
(3) A ce mot répondent Skt strih, trih frapper — trucido — trucider
et les variantes d'rb' frapper — ôpûuTO) id., Angl. to drub battre. La
strie fait orpéE — stria, l'étrille axXéYytç — strigil.
— 283 —
frapper, faire des stries, ratisser le cuir — streicheln
caresser. Le H. streep ligne et trace, striemià., en Ail.
der Streif la trace sont le même phonème avec la va-
riante labiale. — Le tarse, dans son sens primitif, est
capable de s'étendre et de se replier sur lui-même. Ce
mouvement a pour phases le tour, la torsion et autres
variétés de la rondeur. Le croc, les doigts recourbés en
griffe s'expriment par taquet, attacher, en Angl. par
tack et tag pointe,, croc qui attache, tusk le croc de
l'éléphant, du sanglier. — Le tour se voit dans xdvbri
courber — tepéu tourner — terebro id. — teres rond
dard, darder, tarière, tour, contorsion, tors, tarer
gâter, perforer comme à la tarière — to thrill émou-
voir, to drill tarauder, to stir retourner, troubler —
drehen tourner, stôren troubler, stùrzen rouler, s'é-
crouler. Ce même phonème avec n nous donne : Skt.
drun aller en courbe, Tspvsûw — torno je tourne, tornus
le tour — tourniquet, tournée — to trend, to trundle
faire tourner — der Strehn l'écheveau — Suéd. trind
rond. — Retourner l'esprit, le bouleverser se rendent
par trap se troubler — Tpéw trembler, être troublé, -ieipw
vexer — tremo je tremble, tristis troublé, triste —
trembler, troubler, attrister — drowsy trouble —
triïbe troublé — H. trillen frémir. — La dariole et la
tor gniole, en H. draai tour, désignent un coup donné
à la fin d'une rotation complète du bras ; de là dourder
frapper, donnerdesdarioles. Tortiller veux dire tourner
de l'œil, mourir ; tortiller la vis, tordre le cou, les an-
neaux de la tranchée étant considérés par les grossiers
assassins comme des pas de vis. Marcher comme une
— 284 —
personne estropiée se dit également tortiller, ne pas
marcher droit. La tortillante est la vigne qui s'enroule
autour du support. — La tarte affecte la forme ronde.
La nouille s'appelle en L. turunda le rond (nouille de
l'Ail. Nudel revient a nœud). La tartine, par assimila-
tion à la tarte, parce que sur le pain on met de la confi-
ture, et, au figuré, une histoire longue et ennuyeuse, est
un diminuitif de tarte. Tarter veut dire fienter, par jeu
de mots, l'excrément affectant la forme ronde, en H.
drijten,à'où~-ip^Mcç — stercus — stercoraire, étron —
die Strunze saloppe,H. stront stercus, drol. Rond se
dit en G. <rtf 0776X05. Avoir le trac veut dire sentir la
peur. Ce mot s'appuie, probablement, sur l'Ail, der
Dreck même sens (1). Le truand est le vagabond tou-
jours en tournée ; la trôleuse la coureuse, la rôdeuse
enrôlée dans le corps de Venus vulgivaga. Tourner
avec la variante /se trouve dansofoa/, tal tourner. tùXioow
id. — touiller. L'Ail, a toll, qui a le vertige. Le H. toi
veut dire toupie. Ecraser sous la meule, broyer dans un
mouvement de rotation s'appelle drâd sebriser — ts(pw
— tero — triturer — to thrash battre en grange —
dreschen id. On faisait autrefois sortir le grain des épis
en les faisant fouler sous les pieds de bœuf attelés dans
un manège. — Le voyage circulaire, le mouvement en
cercle s'exprime par dôrsta, par synecdoche, le trot, le
pas précipité — trotter — totread avancer pas à pas —
treten id. — Les omonotapées provenant du thème r et
signifiant le croc, la courbe, les cercles vont reparaître
(l)La drèche, Angl. dregs, Ail. die]Treber est la partie trouble d'un
liquide. V. au mot trouble. Trouilloter en L.trullare veut dire vesser.
Pour la racine voir au mot trute.
— 285 —
dans les mots suivants associés avec le son t. Ainsi tr
avec la labiale nous donne TpÉ-io tourner — trapes le
pressoir, turbare troubler en imprimant un mouve-
ment de rotatian à un liquide — perturbation — tramp
truand, draff\& drèche — die Treber résidu des grappes
pressées — en H. drqf drèche et drabbig trouble.
Le travail figure dans le langage comme étant fait
circulairement, peut être comme une tribulations Ar-
got est encore une fois d'accord avec les originateurs
de la langue en appelant le travail turbin, travailler
turbiner, en AIL der Betrieb le métier, treiben s'occu-
per de., en H. bedrijf métier, bedryven commettre,
faire. Il a fait de travail un doublet à forme Latine avec
une science parfaite de la valeur de ce mot. Le turbin,
d'autre part, veut dire le trouble, dénommé aussi, par
jeu de mots, le tremblement. La variante de turbiner
esttrimer. L'idée de voyager (circulairement) s'exprime
par le mot trimbaler porter çà et là, de trimer et bouler
tromboler courir après, même composition, letramivay
la route, la voie circulaire, le trimard, le chemin, le
trèpeligueur le vagabond appartenant à la corporation
de l'argot, la trape la rôdeuse, — en Angl. par to travel
voyager, (Skt tarb aller) trip petit tour, to drive aller
en voiture. — La strophe, le tourbillon, la turbine,
les tripes, la trombe, le strobile, la truffe le tubercule
marquent tous le contraire de la ligne droite. Tromper
ia le sens de circonvenir, envelopper; l'argot dit truffer,
par jeu de mots (1). - - La turpitude est le nom de ce
(1) Attraper a le même sens; la trape est ce qui tourne sur une
charnière.
286
qui est trouble. — Le sens de tordre se trouve dans
cjTpécpcç la corde — torques la chaîne — étrivière, estra-
pade - strap corde - der S trop fie nœud coulant. Es-
tropié veut dire perclus, étranglé en quelque sorte dans
les articulations comme si une corde (V. les mots ci-
dessus) les serrait étroitement. Estropier dans le sens
de manger paraît vouloir dire s'étrangler en mangeant
goulûment (1).
Le sens de troupe est) synonyme de peloton, agglo-
mération, un entortillement de inonde. Le mot de l'Ar-
got est trèpe. Le Skt a drb* troupe, le Latin turba et
turma, en H. drom. Le sens de tordre s'exprime aussi
par la racine arg ou rag avec t. De là le nom de la
corde, en Argot la tourtouse, le toron, (en L. tortus la
guirlande) : 6p(E la tresse, les cheveux tressés — tracta
le fil (Angl. thread, AIL Draht), torques le collier —
tresse, tresser, tricoter — string le lien — - der Strick.
— Prendre dans un lacet se nomme tricher (2). attra-
per l'adversaire au jeu. — La trousse, le trousseau est
un paquet serré dans des cordes, en Ail. der Trosz les
bagages. Le Skt drâxâ est la grappe de raisin, en H.
tros. — L'enchaînement d'astragales ayant été assimilé
à une corde (en Patois du Limbourg rugstrang la corde
du rable) le dos qui en est formé s'appelle àa-pàvaXc. les
spondyles, les vertèbres — tergum et dorsumle dos —
tergiverser tourner le dos à son devoir, comme le soldat
lâche à l'ennemi, dos (dorsum), astragale vertèbre —
(1) Le sens de tortiller et de tortorer est équivalent de estropier et
s'explique de même.
(2) A tricher répondent truquer, le truc — l'Angl. totricli et 1*A11.
trûgen. Entrôler est voler; le sens primitif est tromper.
— 287 —
sïring corde — Sfrang id. — Resserrer, rétrécir avec
une corde se rend par drinh affermir, comprimer —
mpoFfttùiji — 'strangulo étrangler, stringere lier —
étrangler, contraindre, astreindre, strict, étroit, dé-
troit — to strangle étrangler, throng foule compacte
— dringen serrer, drûcken presser, das Gedrânge la
presse, V. au mot tourbe et les correspondants dans les
groupe tocard.
Le cercle emprunte son nom à cette racine. Nous la
découvrons dans zpo%oç la roue — torculus le manège
du pressoir, trochus le cerceau, trochlea la poulie —
le treuil, truc wagon plat — truck id., truckle petite
roue — sich trollen (se trotter) s'en aller. De là l'idée
de courir, d'imiter la roue : trix, ldraj' aller — tpsxw
courir, Aoriste lzpT^> congénère de trimardet du Skt
tarb aller. La truche est le vagabondage, latruanderie,
le trucheur le mendiant, le truand, aller au truc aller
mendier, la dringue la roue de derrière, la pièce de
cinq francs de fort diamètre; l'Angl. to straggle, to
stray errer, vagabonder, to trudge marcher à pied;
l'Ail, der Landstreifer le vagabond, en Angl. tramp.
— L'ennui provenant de ce qui tire en longueur s'ap-
pelle le triau. Durer outre mesure s'appelle en Angl.
to tire ennuyer, to drawl tarder, en G. crîpsjyw tarder,
ennuyer (1) Skt dîr'ga allongé.
Le s est le son qui naît avant t dans l'inspiration et
(1) Le t prend quelquefois la place du k dans la prononciation;
c'est ainsi que nous avons tufu pour cucu, tuite pour cuite. Le n
appelle près de lui un k ou un t. On passe donc facilement de nh à
ut. La disparition de n complète la transformation, V- au mot shiObo-
leth.
288
l'aspiration. Le t procède souvent de lui, en ce sens que
le sifflement s provoque le t, en attirant la langue
jusqu'au palais où elle produit cette consonne. — Selon
que l'inspiration et l'expiration affectent d'autres orga-
nes, les lettres qui forment le son spécial de chacun
d'eux, viennent s'adjoindre à Y s dans l'ordre de leur
production. Nous nous trouverons ainsi en présence
des sons s, ss, #, st, sb, sm, sg, sr, si. Ceux-ci présen-
tent la notation des sons naturels et spontanés d'actes
de la vie et forment les racines primaires et irréducti-
bles des onomatopées, noms d'actes ou d'agents, qui
vont suivre. Ainsi le son du souffle s a formé le nom
du phonème qui exprime la vie, le souffle vital : as
être — Serti il est — esse être — il est, ils sont — / was
avec digamma je fus — das Wesen l'être et en Skt sa
le vent, çvas respirer. L'âme, en Gothique, saivala,
marque le souffle a la production duquel les lèvres ont
prêté leur concours. La contraction de ce mot a donné
l'Angl. soûl, l'Ail, die Seele. Le mot saivala peut-être
considéré comme la métathêse des mots bisardet bosotn
poitrine, sein parce que les mêmes organes ont servi a
la production du souffle dans les deux cas. Ceux-ci
présentent eux-mêmes la métathêse de sibilo — siffler
— to sigh soupirer — seufzen id. — Le Grec exprime
cette idée par tyjyrt l'âme, le souffle des lèvres, d'où
Psyché si psychique. La métathêse de ce mot forme les
correspondants Angl. gust bouffée de vent, ghost es-
prit et l'Ail, der Geist id.. Le son même de psyché se
rencontre dans l'Angl. to sigh soupirer et dans l'Ail.
suchten id.. Le nom de psyché ou son synonyme ani-
— 28i) —
ma âme sont des noms qui ne disent pas la chose, pas
plus que chêne, qui veut dire blanc, canus, chenu,
(guercusalba), ni peuplier qui veut dire noir (popu lu s
nigra en G. -aXo; noir) (1) ne nous font sentir ce que
sont ces deux arbres en eux mêmes. Ces noms sont des
indications qui doivent nous guider vers l'objet. En
effet, le souffle, il faut le renouveler à chaque moment,
afin de soutenir la vie, tandis que l'activité de l'âme
persiste sans que nos sens aient besoin de ramener
l'image de la réalité passée qui survit toute seule dans
notre esprit. Nous prenons cette survivance comme un
gage de durée. — Le souffle n'est donc pas la même
chose que le souvenir; ce n'est pas plus la conscience
ou la notion comparative des objets de la pensée : mais
sans le souffle et, par conséquent, sans la vie, la faculté
de connaître intérieure, qui existe avec l'homme et par
qui survivent les impressions des sens, n'aurait pas
trouvé d'emploi et n'aurait pu développer en nous le
souvenir et la conscience selon les réalités dans les-
quelles nous nous trouvons placés. Psyché, grâce à ce
rapport intime, désigne donc la vie du corps aussi bien
que celle de l'âme, tout comme sptrttus, qui primitive-
ment veut dire respiration désigne la vie par son acte
le plus essentiel et V esprit. Le souffle labial qui a formé
psyché s'entend également dans les mots soupir (suspi-
rium), espérance, aspiration : tous les trois marquent
l'état d'une âme qui demande autre chose : aussi bien
expliquent-ils qu'elle se soit mise à rêver d'une exis-
(1) Pelarrjos est le nom Grec de la cigogne blanche et noire. L'Argot
en a fait largue pé grue.
19
— 290 —
tence plus parfaite, désespérant de trouver dans la vie
la satisfaction complète de ses aspirations et de son
besoin d'aimer. — Se gonfler sous l'effort d'une insuf-
flation se traduit par l'onomatopée Skte çva se gonfler.
Dans l'Angl. et l'Ail, ce souffle s'est associé avec le nom
d'un objet gonflé en boule pour former les mots tosweil
se gonfler, en Ail, schwellen id..
Le soufïie étant le seul acte vital qui nous frappe
dans le sommeil et sa régularité ou sa force étant le
symptôme de l'assoupissement, son bruit se retrouve
dans ci le repos, cas dormir — ejow je dors — sieste.
Associé au souffle labial il donne les onomatopées suap
dormir — Drcvoç sommeil — sopio je dors. — assoupir
— Ancien Angl. sweveri songe, Suéd. sofva dormir,
sômn songe, comme somnium sommeil donne songe,
le rêve. Le H. suffen veut dire être engourdi, ne pas
avoir conscience de ce qui se passe, comme lorsqu'on
est endormi — souffler tout bas se traduit b'ôs interj.
pour appeler s'ât faire st ! ou pst! — ù>M'Cu susurrer —
st ! — chut ! silence, chuchoter, parler tout bas — to
hush assoupir, inviter au sommeil en faisant un bruit
de vent du soir, hist, hush, whist 1 silence! — sâuseln
murmurer comme le vent — H. sussen calmer St^éw et
éwitoLM veulent dire tous deux faire silence; r^r/iy. (1)
le silence — L. silentium — silence — en Ail. schwei-
geri se taire. — Susurrus et susurrement marquent
un souffle tremblotant. — L'Angl. to sing et l'Ail.
singen sont probablement des formes dues à l'associa-
(1) A cette forme répond le Skt seij' , Angl. to sigh, AU. sûchtcw
soupirer.
— 291 —
tion du chant et de la parole avec le sifflement. To say
dire et l'Ail, sagen id. semblent avoir signifié à l'ori-
gine la parole prononcée à voix basse. La sagacité du
chien consiste à bien flairer la trace : sg dénote le
bruit de son souffle nasal. De là la sagacité, la pénétra-
tion de l'esprit. L'Angl. to seek chercher, en Ail.
suchen marquent l'emploi de cette propriété. — Uas-
tuce en L. astus (1) remonte à l'odorat, au flair des
bêtes malfaisantes, des fauves, telles que le renard,
V, au mot odeur (2). Le Normand dit xi\ xi\ pour
exciter les chiens l'un contre l'autre. En H. ces mêmse
bruits sont orthographiés kiê ! kis ! Ces phono-
grammes marquent le son du souffle qui alimente le
feu et par analogie la colère. En Ail. on dit husz pour
exciter le chien à la chasse du lièvre. — Le mépris
s'exprime par un sifflement : il en -est ainsi dans le Skt
où çtt et sit veulent dire mépriser. La chose qu'on siffle
est vide et vaine comme le vent : c'est ce qu'on veut
faire comprendre en sifflant. Delà sut\ ouic/iel uistl
Un sùtiste est un Jeanfoutiste. — Un aus} un haus est
un client qui dans un magasin de manufactures fait
déballer beaucoup sans acheter : pour dire file comme
le vent on répète le bruit indicateur s qui marque la
voix du vent, du souffle qui passe. Ce mouvement vif
s'exprime en AU. par kuschl p. e. : laisch ola war er
fort : ans ! ou s ! et le voilà parti. Le verbe Angl. to
oust évincer est probablement l'onomatopée de ce son.
Le sens de ce mot est le même que celui de ho us te!
(1) C'est une forme dé sentio.
(2) Vendroit qui sent s'écrit en chiffre 100.
— 292 —
comme dans l'expression houste à la paille, avertisse-
ment qu'on adresse au chien. — Un zêzè met le z à la
place de ge. Zézayer veut dire : donner dans ce vice de
prononciation en voulant parler une langue qui n'est
pas la nôtre de tout point. V. au mot shibboleth.
Aspirer un liquide produit le son qui s'est incorporé
dans sugo — sucer — to suck et sai/gen, comme dans
vypbç ce qui contient de l'humidité et dans l'Angl. sea
la mer, en H. het sop (la soupe), en Ail. die See id., la
plaine liquide, l'eau en général. Zw;^,- le jus, en Esp.
zumo provient du même son naturel que sucer. Ojuoç le
suc — opium suc de pavot — opium id., mots où le
sifflement qui accompagne l'aspiration du liquide n'a
pas été marqué, à rencontre de ce qui s'est fait pour
soupe, sabler (1) boire, avec jeu de mots sur sable —
to sip buvoter, sap le jus — saufen boire, cler Saft le
jus et pour le Skt xîb avoir bu. Le L. sitis la soif mar-
que l'envie de boire par le son de l'aspiration st. Le
liquide sort de l'orifice avec un sifflement s. Ce bruit a
formé le nom de l'écoulement qui se produit dans vis'
et mis' répandre — àivS:^ tomber goutte à goutte, tyùtç
la goutte comme quand on filtre, dans gicler, gigler^
jiscler, jicler s'écouler avec un jet très-fort (Skt sic
asperger) — sewer gouttière (Skt xap, xip lancer) —
seichen s'écouler avec un jet pressé, uriner, sickern
s'écouler, seihen passer au filtre, seigen id. L'écoule-
ment du liquide, l'abaissement du niveau se montrent
dans to sink s'écouler, s'abaisser et dans l'Ail, sinken
id. Le dessèchement qui se produit à la suite de l'écou-
(1) Patois Néerlandais sabbelen baver en mâchonnant.
— 293 —
lement du liquide se nomme dans orauxoç — szccus —
sec et dans l'Ail, versiegen tarir. Le H. zakken abaisser
son niveau, variante de sinken rappelle le sens et le son
de sac, primitivement le filtre : uk* se dessécher —
aaxxoç le sac, axv.yJZb) je filtre — saccus — .sac — sack
— der Sack. Le filtre, le sac a suggéré le nom diffé-
rencié du sas le crible : liflta cribler — sasser — sieve
le sas — die Siebe id., sichteii sasser.
Le souffle ardent marque sa trace dans 'Ciu bouillir,
exprimant le sifflement des bulles qui éclatent — zelus
l'ardeur de la volonté, sudum le temps sec et beau,
sudes le pieu carbonisé par un bout — Sud le côté du
vent du Midi, zèle — South sud — der Sud id.
La sputation (Skt pitta bile) développe plusieurs
bruits plus ou moins ressemblants, dont voici quelques
spécimens sous leur forme onomatopique : Skt "3*tîo
en H. et en Flamand tuffen ; pud émettre — «Vjttw —
sputo cracher, faire sortir les sécrétions des glandes
avec un bruit de piston ménagé par l'action de la lan-
gue, pituite — to spit cracher — speihen id. — der
Speichel le crachat, spucken cracher — en H. speeksel
id. — Par assimilation on a l'Angl. spout une bouche
d'arrosoir, le jet d'eau, et TAU. die Spritze avec r (Skt
prit* lancer — to spurt jaillir — Ail. sprudeln sour-
dre). L'Angl. speck et spot tache, marquent l'éclabous-
sure. — L'épave est ce que la mer rejette, crache,,
vomit. Ce mot rappelle le H. spuwen cracher des
lèvres, et l'Angl. spawn mucilage du poisson et des
plantes (mucelium) et spaicl le crachat. Spa estle nom
de la source devenu nom de ville, comme Aix. C'est
— 294 —
une variante de spout, la bouche d'eau, le jet. V. plus
haut. La salive, en L. saliva, en Angl. slaver, d'où
to slobber, to slabber, to slop répandre, salir marquent
le produit de la sécrétion de la langue s'échappant par
la bouche. Le G. aiaXov, avec perte du digamma, sa-
live, répond au H. zijver même sens.
Le Centre où la langue Française est si pleine de vie
a les mots chimer, suner^ siner, chigner et chouiner
pour dire pleurnicher. Ce nicher est la métathèse de
chigner. Comme, du reste, pleurnicher l'indique, quand
on est chagrin, les soupirs s'échappent en abondance
avec les pleurs et on est forcé de soupirer par petites
saccades qui, dans le nez produisent le bruit dont les
mots ci-dessus sont la reproduction onomatopique. Ce
mouvement du nez se reproduit également daus rechi-
gner (1), faire grimacer le nez, le retrousser en flairant
une besogne désagréable. V. au mot nez. Au Centre on
appelle le tabac à priser du choimbre, mot formé d'un
bruit nasal particulier. Priser s'appelle en Argot chou-
iner, fait du même bruit que chiner. Le Skt xu veut
dire éternùment.
(1) Chiner sur V ouvrage veut dire : rechigner devant le travail : de
là, par jeu de mots, le chinois, l'ouvrier qui ne trouve aucune tâche à
son goût.
CONCLUSION
Le contenu de ce livre peut se résumer ainsi.
Le vocabulaire des langues Indo-Européennes s'est
formé de deux façons : par la voie de l'Onomatopée,
en employant comme nom distinctif le son d'un événe-
ment et en l'appliquant à l'acte, à son agent ou à son
effet; 2° par la voie de la métaphore qui fait que nous
transportons le nom ainsi formé à un objet similaire,
parce qu'il contient dans la somme de ses propriétés un
acte, un agent ou un effet identiques.
Formés par ces deux procédés les noms constituent
des indications rationnelles qui ne sauraient f tre faites
autrement, le son, la chose signifiée et ses analogies se
manifestant tels dans la nature.
Le son est inséparable du sens : par sa variété même
il exprime la nature du fait qu'il accompagne et le dési-
gne ainsi à notre discernement. A sa source il est tou-
jours le même : monosyllabique dans son énonciation
parce qu'il répond à un mouvement unique ; spontané
parce qu'il se produit tout seul; il a un sens verbal
parce qu'il est l'expression vocale d'un acte. Ces carac-
tères spontanés répondent exactement à ceux qui dis-
296
tinguent les thèmes primaires que l'étymologie a recon-
nus dans le Sanskrit et que l'analyse retrouve dans
l'Argot aussi bien que dans les langues classiques du
groupe Indo-Européen. En comparant le son naturel
avec ces thèmes primaires on reste convaincu qu'ils ne
sont qu'une seule et même chose : on retrouve en eux
la notation graphique des sons qui se produisent dans
la nature et qui sont inhérents au sens qu'ils expriment.
Dans la vie d'où le langage les tire, ils sont représentés
par la voix du cœur humain, les cris des animaux, les
sons qui accompagnent le fonctionnement des organes,,
les bruits que fait entendre la nature inerte lorsque un
ébranlement quelconque la secoue dans sa torpeur.
L'étymologie aboutit donc à constater dans les mots,
ou bien la reproduction d'un son naturel, ou une commu-
nication de l'appellatif , formé de ce son, à un'objet simi-
laire. C'est là son ultime étape. Ce qui la guide pour
identifier le son des mots c'est l'idée de le comparer
avec les voix de la nature agissante; d'autre part, c'est
l'homonymie des noms portés par des objets divers qui
la renseigne sur l'analogie à laquelle est due cette iden-
tité du nom. La distribution des noms ainsi formés, leur
transport d'un objet simple à un objet composé, du
concret à l'abstrait, d'un individu à une généralité etc.
se fait selon la règle des tropes.
Ni la permutation entre sons d'un même organe ou d'un
organe attenant, ni leur métathèse, soit spontanée, soit
provenant d'une diversité dans la prononciation et dans
l'orthographe des mots ne peuvent supprimer l'identité
du phonème. La différence des langues est surtout dans
— 297 —
les noms qu'on leur a donnés et dans l'individualisme
éxgagéré de ceux qui les parlent. Leur divergence
résulte du développement particulier donné à des élé-
ments identiques. Le nombre de ces éléments dépend
de la quantité de choses connues et nommées. En
remontant le cours de ces développements la linguis-
tique aboutit à la nature qui parle et annonce un évé-
nement : aussi est-ce dans le son naturel et spontané
que les langues Indo -Européennes retrouvent leur unité
primordiale.
FIN
VOCABULAIRE
L'Argot se trouve reculé do l'alignement. — A. derrière les mots à l'alignement veut
dire qu'ils appartiennent également à l'Argot. — B. veut dire Berrichon. — C. Patois
du Centre. — I*. Languedocien. — N. Normand. — P. Populaire. — Pr. Provençal.
W. Wallon.
abadis, 100.
abafointé, 98.
abalobé, 242.
abée, 76.
aboyer, 64.
a braqué, 40.
absorber, 5, 145.
abstème, 257.
abstergent. -26(5.
acahuer, 236, C.
j acanthe, 218.
| accore, 232.
accouer, 60.
! accouplement, 191.
achavanter, 236, C.
! acoquiner, 237.
; acoustique, 183.
adapter, 191.
adhérer, 162, 215.
adjacent, 187.
admirer, 113.
admonester, 114.
aduler, 216.
aëde, 278.
affliger, 69.
affranchir, 42, A.
s'afragner, 53, X.
aga. 183, C.
agacer, 186.
agachar, 183. Pr.
agalhar, 203, Pr.
Agathe 240.
agglomération, 205, 212.
agiter, 215.
agrafer, 227.
agrasser, 225, C.
agripper, 161, 227.
agrolle, 225, C.
ah, 12, 182, 183, 189.
ahan, 198.
ahaner, 136.
aigle, 186.
aigu, 165.
aiguille, 219.
aile, 215.
aimer, 126.
aisselle, 186, 218.
albe, 249.
alcaraza, 231.
aliéner, 131.
alipan, 65, N.
allège, 253.
aller, 215.
amarre, 115.
âme, 136, 259.
amocher, 115.
ample, 46.
ampoule, 33.
amputer, 36.
amucher, 107.
amuser, 130.
Anadyomène, 268.
anatide, 86.
anémomètre, 136.
ange, 136.
angine, 181.
angle, 215.
animé, 136.
anorexie, 155.
anseride, 86.
anthropophage, 82.
antiffe, 178, 574.
antifïïer, 274.
anxieux, 181.
aplatir, 46.
apoffir, 20, C.
applaudir, 46.
appréhender, 220, 238.
apprendre, 220.
appui, 48.
aqueux, 187.
aquicher, 186.
aquiger, 236, 185.
araignée, 166.
arc, 166.
arcanes, 169.
arc-boutant, 23.
arçonner, 143.
ardre, 152.
arga, 156.
argamine, 156.
arganeau, 166.
argot, 155.
arguche, 155.
argument, 169.
aricoteur, 222.
aride, 152.
arigot, 221.
aristocratie, 229.
arithmétique, 163.
arme, 171.
armoise, 108.
armon, 163.
arnache, 140.
arracher, 156.
— 300
arrimer, 159.
art, 162.
artiche, 152.
artif, 152.
articulé, 162.
ascendant, 241.
asperger, 49.
aspiration, 289.
assoupir, 290.
astragale, 286.
astre, 267.
astreindre, 287.
astuce, 291.
atmosphère, 261.
âtre, 264.
atrophie, 280.
attacher, 269, 283.
attaquer, 269.
attraction, 266.
attrimer, 153.
aube, 249.
aumusse, 128.
Aure, 241.
aurore, 152,
avoir, 191.
Avre, 241.
B
Baba, 98.
babau, 81.
babillarde, 87.
babiller, 87.
babines, 14.
babioles, 30.
babou, 98. P.
babouin, 98, 99, P.
babouiner, 81, P.
bac, 36.
bacchantes, 15.
bacreuse, 80.
badaud, 100, 114.
bade, 15, 78..
badigeonner, 288.
badigoinces, 81, 217.
badouillard, 98.
badouiller, 78, 82.
bafe, 64.
baffouiller, 88.
bafire, 64.
bafouer, 94.
bagage, 35.
bagatelle, 35, 95.
bagou, 90, P.
baguenaude, 80, P.
baguenauder, 101.
baguenotte, 80.
bah, 94, 97.
bai, 61.
bailler, 64.
bain-marie, 23.
baiser, 101, A.
bajoter, 90.
bal, 31, A.
balafre, 67.
balancer, 277, P.
balençoires, 277, P.
balauder, 90.
balbutier, 84, 90.
baleines, 15.
balle, 30, 31, 69, 71, P.
ballon, 30.
ballonné, 31.
baloter, 90.
balots, 15, 82.
balouf, 35.
bambin, 76.
bamboche, 78, P.
banban, 65.
banquette, 15, 216.
baptême, 76.
baquet, 36.
barbacane, 82.
barbaque, 16, 82.
barbaqui, 82.
barbare, 91.
barbaudier, 84.
barbe, 15, 77.
barbichon, 158.
barbotin, 83.
barbotter, 83.
barbotteuse, 86.
barbouiller, 83.
bard, 57.
bardane, 43.
bardeau, 39.
barque, 70.
barre, 15, 43.
barrique, 70.
bas, 78.
basilique, 88.
bassin, 36.
bassiner, 36, P.
bastage, 48.
baste, 49.
basteler, 96.
bastringue, 79, P.
bât, 48.
bataille, 47.
bataqua, 60, 239.
bâtard, 49 , A.
bateau, 37, 96, 80. A.
bâtée, 49, A.
bateleur, 96.
battage, 96.
batterie, 87, 96, A.
battre, 47, A.
bau, 81, 98.
bauber, 90.
bauce, 78.
bauceron, 78, A.
se baucher, 95.
se baucoter, 95.
baudrouiller, 27.
bauge, 80.
bave, 116.
baver, 88, 96.
bavouiller, 83.
bé, 57.
bè, 97, 98.
béard, 98.
beau, 63.
bébé, 38, 76.
bec, 15, 79,91.
bécane, 93.
bée, 98.
béer, 183.
bêcher, 89, A.
bêcheur, 89, A.
becquetance, 82.
bedonner, 35.
bégard, 15.
bègue, 82.
béguin, 275.
beigne, 65.
bélémnite, 30.
béni, 57, A.
berceau, 41.
berlingot, 245.
berme, 71.
Bernard, 27.
bernique, 72, P.
bersaglier, 39.
bessons, 78.
bettauder, 88.
beugler, 105.
beugne, 65.
bibard, 76.
bibassier, 76.
— 301
bibelot, 30.
biberi, 90, C.
bibi, 38.
bibine, 76.
bibns, 30.
bicher, 82, P.
bichon. 50.
bidoche, 82.
bidon, 36, 80.
bière, 57.
biffe, 57.
biffer, 57.
bitfin, 57.
biffre, 84.
bigarreau, 154, A.
bige, 98.
bigeot, 98.
bigeois, 98.
biger, 82.
bigorne, 89.
bigot. 90.
bigotter, 90.
bilboquet, 30.
billancher, 30.
bille, 30.
billevesée, 32.
billon, 35.
billot, 35.
binibamboin, 05.
bimbelot, 30.
bince, 93.
biribi, 71.
bisard, 20, 288.
bise, 20, 82, 96.
bisquer, 97.
bistrot, 79. P.
biture, 82.
bizarre, 96.
blafard, 64.
blague, 33.
blaguer, 34.
blaichard, 63.
blair. 22, 28.
blaireau, 22.
blanc, 250.
blard. 22.
blase. 23.
blasé, 23.
blason, 22.
blaude, 31.
blavard, 22.
blave, 22.
blavin, 21.
blescht, 63.
bléser, 63
blésimarder, 22.
blésinàrder, 22.
bleu, 63, 64, 260.
blinder, 62.
bloc, 34.
blocus, 34.
blond, 63.
bloquer, 34.
bloumard, 33.
bloume, 32.
blouse, 31, 34.
bluter, 72.
bobe, 29.
bobèche, 15.
bobine, 29.
bobo, 29.
bobotier, 29.
bocal, 80. A.
bocard, 93.
bochon, 93.
bodéga, 36.
boète, 82.
bœuf, 97, 119.
boffette, 64.
bogue, 89, 93.
boire, 76.
boisseau, 80.
boîte, 35, 36.
boiter, 238.
bombe, 254.
bonbon, 29.
boniment, 89.
bonir, 89.
bonisseur, 89, P.
borborygme, 49, 116.
bord, 71.
bordée, 71.
bordel, 39.
borgne, 72.
borne, 71.
bossoirs, 78.
botanique, 37.
botte, 48.
boubane, 98.
boucanade, 80.
boucaner, 80.
boucard, 36.
bouche, 15, 91, 116.
bouches, 104.
bouder, 56, 81, 97.
boue, 116.
bouffarde, 19.
bouffé, 30.
bouffée, 19,61.
bouffer, 8i, 97.
bouffeter, 88.
bouffi, 29, 30.
bouffiasse, 30.
bouffigne, 30.
bouffon, 94.
bougette, 27.
bougonner, 89.
bouiboui, 38.
bouif, 30.
bouillonner, 49.
bouis, 58.
boulanger, 72.
boule, 30, 290.
bouler, 31.
boulevard, 169.
boulevari, 31.
boulimie, 246.
boulotter, 83, P.
bourbe, 55, 116.
bourde, 91.
bourgeon, 43.
bourgeron, 31.
bourre, 43.
bourriche, 44.
bourrichon, 44, P.
bourrique, 61.
bourru, 43.
bourse, 44, 70.
bourse, 24.
bouser, 78.
bousiller, 24.
bousin, 78.
boussolle, 36.
boustifaille, 84, P.
boutance, 36.
bouteille, 36, 80.
boutique, 36.
bouton, 35.
boutoque, 36.
bouture, 35.
box, 36.
boxer, 93.
boxon, 39, P.
boyau, 35.
brai, 72.
brailler, 91.
braire, 91.
braise, 61, 63.
bramer, 91.
302 —
bran, 27, 71.
branche, 39, 42, 43.
brandillante, 41, P.
brandir, 41.
banlante, 41, P.
braque, 28, 40.
braquer, 39.
brayer, 40, C.
bréchet, 52.
brèchetelle, 73.
Breda, 91.
bredibreda, 91.
bredouille, 91.
brème, 61.
brette, 39.
breuvage, 76.
brica, 44.
bric-à-brac, 70, 21.
bricard, 73.
bricheton, 61.
bricole, 39, 40, 71.
bricoleur, 71.
bricul, 28.
briculé, 28.
bridaukil, 40.
bride, 40.
bridoche, 40.
brigand, 42.
brigants, 42.
brigeants, 42.
brignolet, 61, P.
brigolet, 61.
briguer, 91.
briller, 61.
brimade, 70.
brimbale, 41.
brin, 39, 43.
brinde, 43.
brin d'estoc, 40.
brioche, 61.
brique, 61.
bris, 70.
briscard, 39.
brise, 28, 61.
brisé, 52.
briser, 70.
brisque, 39, 40.
brobèche, 40, P.
brobicante, 40.
broncher, 40.
bronches, 52.
bronze, 63.
broquille, 44.
brosse, 43, 44.
brosser, 44.
brou, 70.
brouet, 72.
brouf, 24.
brousse, 43, 44.
broute, 70.
brouter, 70.
bruine, 61.
bruire, 91.
brûler, 61.
brun, 43.
brune, 61.
budget, 33.
buffet, 106.
buffetoi
bul, 31.
bulbe, 37.
bulle, 32,
bure, 50.
buse, 78.
buser, 78.
butant, 48.
butin, 36.
butte, 48.
buvoter, 76.
Caban, 191, 193.
cabasser, 195, P.
cabestan, 196, A.
caboche, 193.
cabochon, 193, P.
cabonte, 197.
cabot, 191, 196, P.
cabotin, 196, P.
caboulot, 194, P.
cacare, 190.
cacher, 179, A.
cacquet, 177, C.
cadence, 238.
cador, 239.
café, 198.
cage, 191.
cagnard, 216, C.
cagnaud, 216, C.
cagneux, 216.
cagni, 217, C.
cagnotte, 224.
cahincahan, 71.
cahot, 71.
cahoter, 188.
cahuer, 236, C.
cajoler, 239.
cajor, 239.
caïabre, 206.
calancher, 207.
calbombe
calcul, 214.
calculer, 159.
cale, 185,213.
calebasse, 201, 213.
caliborgne, 72, 214.
calice, 214.
calorgne, 72.
calipyge, 93.
calot, 72, 213.
calotte, 213, 214.
calvigne, 206.
Calypso, 213.
camboler, 192.
cambré, 192.
cambriau, 194.
cambriole, 194.
cambrouse, 194.
cambuse, 194.
camoufle, 197.
camoufler, 197.
camouflet, 197.
camuse, 190.
canage, 217.
canal, 55, 87.
canard, 85.
canasson, 216, P.
cancan, 189.
cancer, 184.
cancre, 184.
cancrelat, 184.
cane, 217.
câner. 217.
caniveau, 87.
canivet, 87.
canne, 85, 87.
canon, 87.
cantharide, 218.
cantine, 219.
canule, 87.
cap, 194.
capir, 195.
capsule, 193.
capter, 191.
caque, 184.
caquet, 184.
caraco, 232.
caracoler, 231
303
carafe, 231.
chantier, 219.
chouan, 236.
carapace, 230,
chantourner, 218.
choucas, 179.
se carapater, 23 i, 1*.
chaos, 178, 218.
chouer, 179, 236.
caraque, 232.
chaparder, 26, 198.
chouet, 237, P.
caravelle, 232.
chape, 193.
chouette, 236.
carbeluche, 231.
chapeau, 193.
chouiner, 294, C.
carcer. 232.
chapon, 200.
chouquer, 186, C.
carde, 201.
cha puiser, 200.
chouriner, 229.
cardinal. 233.
char, 234.
chouser, 236, C.
care. 232.
charbon, 235.
chrysolithe, 235.
carence. 232.
chardon, 233.
chuchoter, 290.
firène, 232.
charlatan, 178.
chuflick, 186, P.
carer, 175, 228.
charnier. 222.
churler, 222.
caret. 230.
charnière. 233.
chut, 290.
carillon, 231.
charrier, 228, P.
chute, 238.
carique. 232.
charrieur. 232.
chyme, 236.
canne. 63, 235.
charron, 228.
cibiche, 200, P.
carotte, 22S. 1\
châsse, 239.
cibige, 200, P.
trotter, 228, P.
chasser, 191.
cible, 200, P.
caroube, 231.
château, 240.
ciboule, 184, 193.
carouble, 226.
chat-huant, 236.
cigogne, 245.
carpe, 227, 233.
chattemitte, 132.
cimetière, 187.
carquois, 231.
chaud, 204.
cinq, 92.
carreleur, 7, P.
chavant, 237, C.
cipollata, 193.
• carrëur, 232.
chef, 193, 194.
cirque, 233.
carrière, 234.
chénoïde, 86.
citation, 187.
carruche, 232.
cher, 234.
citron, 184.
Carthagène, 233.
cheveu, 275.
civade, 191.
case. 240.
chevinette, 236,237, P.
civard, 191, P.
casque, 184, 194.
chevron, 200.
cive, 191, 193, 200.
cauchemar, 152.
chialer, 202.
civot, 193.
cellule, 213.
chic, 189, P.
clabaud, 209.
cène. 55.
chicage 178.
clair, 202.
cep, 190.
chicot, 186.
clameur, 199.
céramique, 231.
chicoter, 178, 186.
clampe, 291, 206, 212
Cerbère, 211.
chien, 216.
clapette, 208.
cercopithèque, 233.
chigner, 294, P.
clapper, 208.
lerise, 231.
chimer, 294, C.
claquer 207.
cervelle, 229.
Chine, 219, P.
clarinette, 21, A.
chabanais, 196, P.
chiner, 219, 294, P.
clarté, 202.
chaconne, 188.
chinois, 294, P.
claudicant, 206, 213.
chahut, 188, P.
chiper, 191.
clavigne, 206.
chair, 233.
chique, 179.
elebjer, 207.
chaloir, 214.
chiquer, 236.
clec, 202.
chambard, 196, P.
chiquenaude, 188.
clef, 212.
chamberder, 196, P.
chiquetailler, 186, N.
clic, 206.
champ, 218.
chiqueur, 179.
cliché, 205.
champignon, 193.
chiquot, 181, C.
clipet, 208.
chanceler, 188.
chlinguer, 206, 244, P.
cloaque, 206.
chanlatte, 218.
chocnosoff, 149, Pr.
cloche, 214.
chantage, 218.
choïmbrer, 294, C.
clocher, 213, 238.
chanteau. 218.
choquer, 187.
clodoche, 213.
chanter, 217.
choquet, 181, C.
cloquette, 206, 207.
304
clore, 206.
club, 212.
coasser, 224.
cocagne, 216.
cocanger, 237.
cocanges, 184, 237.
cocarde, 77, 184.
cocasse, 237.
coccinelle, 184.
cochon, 179.
coco, 177, 179.
cocodette, 179.
cocon, 184.
cocotte, 179.
Cocyte, 181.
cœur, 221.
cognée, 218.
cogner, 218.
cohorte, 229.
coiffé, 194, 275, P.
coiffure, 193.
coin, 218.
Coire, 230.
col, 227, A.
colle, 205, 206, P.
colloquer, 252.
coloquet, 214.
comberge, 195.
comberger, 195.
comestible, 267.
communauté, 124, 194.
concussion, . 59, 239.
condamner, 277.
confesser, 288.
cônir, 218.
conque, 184.
conserver, 169.
conspuer, 94.
constiper, 273.
contingent, 24.
contondant, 275.
contorsion, 28, 31 J
contraindre, 287.
conversion, 168.
convoyer, 187.
coq, 14, 179, 184, 225.
coquante, 185.
coquard, 183.
coque 184.
coquebin, 179.
coqueluche, 186.
coquemar, 118.
coquer, 185.
coquillard, 183.
coquille, 183.
coquerit, 185.
coquet, 237.
coquette, 237.
corbeau, 223.
corde, 228.
cordial, 221.
cornard, 230.
corne, 230.
corner, 230.
corniche, 230.
cornouiller, 231.
corps, 233.
corset, 192.
coryphée, 230.
cosmos, 129.
coucou, 14, 225.
coude, 191.
couenne, 158.
couic, 178.
couleuvre, 253.
couper, 93.
couper, 96, 200.
coupole, 193.
courbe, 233.
courir, 234.
courlis, 14.
couronne, 229.
courroucé, 34.
crabe, 230.
crabosser, 233, P.
crampe, 201.
crampon, 227, P.
cramser, 223.
crâne, 229, 230.
crangon, 231, N".
crapaud, 231.
crapser, 223.
craquer, 223.
cravache, 223.
crécelle, 223.
credo, 223.
crémation, 235.
crème, 235.
crête, 230.
crevette, 230.
crible, 228.
cribler, 222.
crie, 233.
crier, 222,
crin, 226, A.
crochet, 226.
crocus. 235.
crôme 227.
croquemitaine, 132.
croqueneau, 223, P.
croquer, 13, 223.
croquignole, 223.
croquis, 226.
crotale, 231.
croume, 227.
croupe. 169, 231.
croûte 230.
cruche, 231.
cubital, 191.
cucu, 287, P.
cuir, 158,
cuisine, 182.
cuite, 287, P.
culbutant, 48.
cure, 229, 232.
cutané, 539.
cygne, 85, 245.
cylindre, 214.
cytise, 239.
Czarevitch, 38.
1>
Dab, 257, P.
dabe, 257, P.
dabérer, 258.
dabuche, 357.
dalle, 272.
dalot, 272. 282.
dandillon, 277. P.
dandin, 276.
dandiner, 277.
dandy, 276.
danser, 277.
darbe, 257.
dard. 282.
darder, 282.
dariole, 283.
daron, 257.
datif, 279.
daube, 268.
dé, 269.
débiner, 49, P.
déboire, 52.
débraillé, 40.
débringué, 40. P.
dèche, 279, P.
déchiqueter, 186.
— 305 —
déchirer, 228.
déclic. 206.
décoction, 182.
décoller. 206.
dédale, 2(>7.
dédèle. 257.
déféquer, 26.
défringué, 40. P.
déglinguer, 206.
dégobiller, 194.
dégringoler, 206.
dégueulboche, 205, P.
se délecter, 247.
délices, 240.
démangeaison, 118.
. démarquer, 113
démarrer, 115.
démence, 113.
demeure, 114.
demeurer, 114.
démoleter, 174. ( '
démorfiler, 113.
démorganer, 119.
démurger, 115.
dense, 279.
dépenaillé, 75.
dépenser, 74.
dépiauter, 72, P.
dépit, 97.
dépouiller, 73.
déprédation, 73.
détoce, 272.
detoche, 272.
détraqué, 131, 282.
détroit, 287.
dévorer, 72.
dicter, 278.
Dieu, 263.
digitale, 269.
digité, 269.
digue digue, 275.
diguedon, 27ô.
diminuer. 121.
dinguer, 276, P.
diphtongue, 278.
discernement, 282.
disciple, 269.
discrétion, 282.
disque, 282.
distich, 282.
diurne, 264.
docteur, 272.
dodeliner, 277.
dodu, 277.
dogme, 269.
dogue, 258.
doigt, 269.
dôme, 265.
dompter, 265.
donner, 279.
dormir, 271.
dos, 286.
dot, 279.
dourder, 283.
dragler, 269.
drap. 269.
drèche, 284.
drille, 282.
dringue, 287.
dringuer, 276, C.
drogue, 268.
durer, 279.
dyspepsique, 60.
dyspnée, 278.
E
Éblouir, 62.
s'ébouffer, 97.
s'éboustifler, 21
ébranler, 41.
s'ébrouer, 49.
écaille, 213.
écarquiller, 183.
écarter, 228.
ecce, 183.
échandole, 219.
échantillon, 218.
échapper, 192.
écharpe, 232.
écharper, 288.
échauguette, 172.
échine, 219.
s'échiner, 219.
écho, 55.
échoppe, 193.
eclampsie, 252.
éclopé, 213.
écluse, 206.
écoper, 200.
écorce, 232.
écorcher, 232.
écrabouiller, 223.
écran, 232.
écraser, 223.
écrevisse, 230.
écrin, 232.
écrire, 226.
écuelle, 240.
écueil, 194.
écusson, 240.
édifier, 264.
Edipe, 261.
effe, 76.
effervescent, 116.
effroi, 27.
égruge-r, 223.
élan, 249.
éléphant, 249.
ellypse, 252.
élocution, 247.
embabouiner, 95.
emballage, 31.
emballer, 31, A.
s'emballer, 214.
embaufumer, 248, ( '.
emberlaiser, 248, G.
emberlauder, 248, C.
emberlificoter, 248, C.
emberluer, 248.
embobiner, 95, P.
embryon, 39.
s'éméier, 114, C.
émétique, 55.
émeutir, 111, N".
éminence, 130.
emmitoufler, 128.
émoussé, 121.
empaffer, 78, P.
empan, 61, 74.
emphysème, 20.
emplâtre, 68.
encasteler, 239.
enchâsser, 239.
énergie, 164.
enfrayer, 42.
engloutir, 253.
engoulevent, 205.
entonne, 178, 276.
épargner, 71.
épater, 98.
épave, 293.
épée, 74.
épi, 92.
épier, 99.
épingle, 91.
épique, 87.
époux, 78.
s'équaffer, 196, 202.
20
306
équestre, 187.
s'équoler, 202.
ergastule, 164.
ergot, 161.
errer, 174.
éructation, 151.
éructer, .55.
s'esbigner, 65, P.
esbrouf, 24, P.
escafignon, 193, P.
s'escaner, 216, C.
escare, 230, 232, A.
escargot, 183, 231, A.
escarmouche, 232.
s'esclaffer, 211.
escoffier, 200, Pr.
escopette, 208.
escouette, 60, N.
escrimer, 232.
espace, 74.
espadon, 74.
espérance, 289.
espiègle, 100, 237.
espionner, 99.
esprit, 289.
s'esquiver, 192.
rite, 288.
estampille, 273.
estoc, 281.
estourbir, 265, P.
estrapade, 286.
estropié, 286.
estropier, 288, A.
étal, 273.
étaler, 273.
étalon, 273.
étancher, 272, 281.
étançon, 272.
étape, 273.
état, 272.
été, 265.
éternuer, 19.
éteule, 274.
éther, 265.
étoile, 267.
étonnement, 273.
étoupe, 274.
étrangler, 287.
être 272.
étrille, 282.
étroit, 287.
étron, 284.
étui, 281.
évaporé, 23.
évier, 76.
évolution, 215.
expectative, 99.
exstirper, 272.
F, 17, A.
fade, 88.
faille, 73.
faillir, 73.
faisan, 59.
faisceau, 92.
fanal, 60.
fanandel, 44.
fané, 61.
fanfouin, 17, 18.
fanion, 74.
fantassin, 38.
fantoche, 38.
faramineux, 113.
Ste, Farce 51, P.
farfadet, 88.
farnandel, 42.
farouche, 63.
faste, 96.
fastidieux, 94.
fatidique, 88.
fatuité, 97.
faubert, 57.
faute, 73.
fauve, 63.
fébrile, 61.
fédéral, 48.
fée, 88.
fêlure, 73.
fendre, 74.
ferdasser, 41, C.
ferpe, 73, A. F.
fertasser, 41, C.
fertiller, 41, C.
fervent, 116.
fesse-mathieu, 25.
fétide, 24.
fétu, 20.
feu, 60.
feuille, 38.
feutre, 32.
fève, 26.
fi, 94.
ficher, 56, P.
ficher, 92.
se ficher, 95. P.
fichtre, 95, P.
fichu, 95, P.
fichumacer, 123. P.
fiente, 24.
fifi, 15, 17, A.
fifre, 17, A.
figer, 92.
fil, 29.
filer, 188.
filon, 32.
fin, 49.
fiole, 138.
fiser, 20, K
fistule, 20.
Fitz, 38.
fixer, 56, 92.
flac, 69.
flacul, 69.
flageller, 69.
flageolet, 26.
flagrant, 62.
flair, 111.
flairer, 28.
flamber, 62.
flamberge, 62, P.
flamme, 62.
flamousse, 45.
flanc, 33.
flancher, 73.
flanchipe, 141, 191,
flâne, 32, 34, 73.
flanelle, 32, P.
flâner, 32.
flanquer, 68, P.
flapper, 67.
flaque, 67, 68.
flaquer. 34.
fléau, 68.
flèche, 31, 69.
flée, 68, N\
fleur, 28.
flicard, 153.
flingot, 62, P.
fliquart, 28.
flique, 28.
floper, 67.
flot, 33.
floupée, 67.
floutière, 32.
flûte, 4, 22, 26.
foin, 61, 97.
folliculaire, 34.
— 307 —
follicule, 34.
fond, 48.
fontaine, 116.
forer, 43.
fouace, 60.
fouataison, 59.
fouates, 59.
fouchtra, 95, 1*.
foudre. 62.
iuer, 25.
fouet, 25, 28,
fouetter, 25, 58. P.
fouetteur, 58.
fougon, 60.
fougueux, 60.
fouiller, 44.
fouillouse, 78.
foule, 32.
foultitude, 32.
fourbe, 72.
fourche, 39.
foutaise, 30, 95.
foutaison, 30, 95.
foute, 55.
fouter, 55.
foutre, 95.
foyer, 60.
fragile, 70.
fraise, 28.
fraiser, 73.
fralin, 42.
franc, 42. A.
franche, 42, A.
franchine, 42, A.
franchir, 40, 42, A.
frange, 73.
frangin, 42.
frappe, 73, A.
frapper, 67.
frasque, 99.
fraternité, 42.
fredonner, 28, 53.
frelampier, 156.
frémir, 91.
frèpe, 73, A. F.
frère, 41.
frétiller, 41.
frétillon,41.
fretin, 41.
frette, 40.
fricasser, 61.
fricfrac, 71.
fringant, 40.
fripe, 83, C.
friper, 83, C.
fripier, 73.
fripouille, 73.
friquet, 28, 153.
frire, 161.
froncé, 73.
frondaison, 43.
fronde, 41.
frotter, 73.
froufrou, 73.
frousse, 27, P.
fruit, 43.
fugitif, 57.
fuir, 57.
fulgurant, 62.
fumée, 20.
fumier, 24.
funiculaire, 48.
furtif, 72.
fusée, 20.
fuser, 20.
fusil, 21, 62.
fustiger, 38.
fût, 80.
futaie, 38.
futile, 30.
G
Gabatine. 198, P.
gabegie, 198, P.
se gaber, 198.
gabes, 198.
gaffe, 103, 183, 191, 196,
P.
gaffer, 13, 172, 196.
gaffeur, 196, 197.
gaga, 189, Pr.
gagouet, 177, C.
gaillard, 205.
gaite, 202.
galaffre, 207, C.
galande, 203.
galapiat, 211, P.
galbe, 213.
gale, 206.
galefertiau, 211, C.
galet, 214.
galette, 214, P.
galfatre, 207, 212.
galicé, 231.
galifard, 212, P.
galimafrée, 119.
galipette, 212.
gallimathias, 119.
galloise, 205.
gallophobe, 107.
gallure, 205.
galon, 203.
galop, 207, 212, 213, P
galopin, 212, P.
galoubet, 207, 211.
galuche, 203.
galure, 213.
galvauder, 211.
gambade, 191.
gambiller, 191.
ganache, 215.
gandille, 218.
garde, 169.
garenne, 171.
gargagoitche, 221.
gargamelle, 222.
gargante, 211.
gargoine, 222.
gargotte, 225.
gargouille, 201.
gargouine, 222.
gargoule, 221.
garnir, 170.
garnison, 170.
Gaspard, 198.
gâteux, 189.
gaupe, 198, P.
gave, 190.
se gaver, 194.
gavion, 172, 178.
gaviot, 190, P.
gavotte, 192.
gavroche, 66, 196.
gazouiller, 236.
geai, 179.
geindre, 198, P.
gémir, 198.
gencives, 178.
génie, 220.
genou, 215, 218.
gerbe, 227, A.
gerber, 227.
Geronte, 235.
gésir, 187.
gibbosité, 192.
giberner, 197.
gicler, 293, C.
gigler, 293, C.
— 308 —
gigot, 188.
gigoter, 192, P.
gigue, 188, P.
gilboque, 35.
gilquin, 207, 214.
ginginer, 189.
giroflée, 68, A.
giron, 223.
gironde, 167, P.
girouette, 223.
glace, 205.
glapir, 211.
glèbe, 205.
globe, 205, 213.
glouglou, 206.
glousser, 207.
glouteron, 201.
glu, 205.
glume, 213.
gluten, 205.
gniaf, 140.
gniaffer, 140.
gniasse, 138.
gniau, 138, C.
gniouff, 139.
gobe, 103.
gober, 13, 194.
se goberger, 198.
gobet, 196, P.
gobilleur, 196.
gobsec, 194.
godille, 165, 239.
goffe, 198.
gogo, 181, 182, 198, P.
goguenarder, 182.
goinfre, 120, 194.
goitre, 235.
golfe, 206.
gomberger, 195.
gond, 218.
gonfalonnier, 74.
gonfanon, 74.
gonfler, 22.
gonsalez, 218.
gonse, 218.
goret, 224.
gorgniat, 224.
gosier, 235, 240.
gosse, 217, P.
gosselin, 217. P.
gosseman, 217, P.
gouache, 256.
goualer, 178.
gouffier, 194.
gouillou, 197.
goulée, 205.
goulipard, 207.
goulot, 206.
goulu, 234.
goupillon, 194.
gour, 221, C.
gourde, 231.
goure, 221, C. 225.
gourer, 222.
gouri, 225, C.
gourgue, 221, P.
gourler, 178, 222.
gourmand, 234.
gouspin, 197.
gouspiner, 197, 236.
gousse, 239, P.
gousser, 241.
gousset, 202.
goût, 240.
goutte, 238.
grâce, 234.
Grad, 233.
graffin, 229.
graffognade, 22(i.
grain, 231.
graoudjem, 224.
grappin, 161.
graveur, 220.
gré, 234.
gréer, 162.
grêle, 231.
grenade, 231.
grenouille, 224.
griffarde, 229.
griffe, 161.
grignon, 226.
grimer, 227.
grimpante, 75, 227.
grincheux, 226.
gringue, 223.
grippe, 169.
grippé, 231.
gris, 235.
grisette, 285.
grive, 221,227.
grivelé, 227.
grivier, 227.
grogner, 151.
groin, 225.
grolle, 225, C.
grondin, 225.
groulasse, 224.
groule, 224.
groumer, 227.
grouper, 227.
grubler, 226, 227.
grue, 224.
gruger, 223
guappeur, 196, P.
gué, 183, C.
guéer, 256.
guelte, 202.
guêpe, 20.
guérir; 171.
guérite, 171.
guerre, 171.
guet, 172.
gueularde. 202. 21
gueule, 155, 202.
gueuse, 236.
guibe, 191.
guiber, 192.
guibone, 191.
guigne, 181.
guinal, 219.
guinche, 189.
guingois, 189, 215.
guignol, 189.
grumbarde, 190, 192.
guinguette, 189, P.
guttural, 240.
H
Habiner, 191.
hagard, 183.
haha, 180.
haie, 202.
haler, 215.
halot, 202.
haloter, 202.
hameau, 225.
hanche, 188, 218.
hane, 217.
hanter, 220.
happer, 191.
harauder, 222, P.
hargne, 226.
Hariadan, 228.
haricauder, 229, P.
haricot, 231.
haricoteur, 226.
harmonie, 163.
harmoste, 163.
— 309 —
haro, 222.
Harpagon. 161.
harpe, 31. A.
harpon, 161, 226.
haus, 291,
Havre, 241.
heaume, 213.
hélice, 215.
henné, 217.
hère, 221).
hérisson, 42, 225.
héritier, 103.
herse, 226.
heure, 168.
heurter, 162.
hiatus, 178.
hic, 187.
hihi, 180.
hilarité. 205.
hobin, 191,
hochequeue. 60.
hogner, 179. 216.
hoquet, 180.
horreur, 225.
horticulteur. 233.
Hotel-Dieu. 23.
hou, 178.
houste. 291.
hubin, [91.
huer, 178.
Hugo, 151, C.
huître, 2<>5.
hulotte, 237.
humecter, 83.
humer, 5.
humeur, 83.
hupper, 55, C.
hure, 225.
hurler, 201.
hurleur, 209.
hurluberlu, 248.
hydre, 256.
hydrophobie, 256.
hyper, 55, 241.
Ichthyophage, 59.
igné, 182.
illusion, 246.
imaçe, 109.
imbiber, 76.
imiter, 109.
immerger, 33.
imposte, 48.
incision, 241.
inculquer, 251.
inexpugnable, 93.
injecter, 187.
instituer, 272.
Iris, 166.
irritation. [55.
ischion, 188.
isthme. ISl, 262.
.1
Jabot, 190.
jalo. 213.
jambe, 19 1.
jappe. 190, P.
japper. 191.
jardin, 233.
jardiner. S9, A.
rargole, 222. X.
jargon, 222.
jarguouiller. 223.
jarretière, 223.
jars. 223, A.
jarviller, 223.
jaspard, 198.
jaspin. 236.
jaspiner, 197, 236.
jaune, 202.
javeau. 190.
Javert, 66, 196.
j a voter, 195, P.
Jean-fesse, 25.
Jean-foutre, 25.
Jean-foutu. 25.
jebiche, 200.
jiscler, 293, C.
jobarder, 198.
jobelin, 195.
joignant, 185.
jonction, 185.
jongler, 178.
jour, 263.
jouxtant, 185.
jujupe, 149.
Jules, 27.
jupper, 55, C.
juste, 185.
juteux, 149.
Kars, 233.
L
Labeur, 252.
labié, 242.
lac. 243.
lacet, 251.
lâche, 251.
lacs, 251.
laid. 246.
lambeau, io6.
lambiner, 254.
lamie, 243.
lampe, 249.
lampée, 245.
lampion, 197, A.
lancer, 253.
landon, 254, N.
languir, 251.
lanterner, 252.
laparotomie. 252.
laper, 243, 245.
larbin, 250, P.
larguepé, 289.
larve, 250.
latéral, 25 i.
laver, 116.
lécher, 245.
léger, 253.
lent, 252.
léopard, 26.
lessive, 250.
lever, 253.
lèvre, 14, 242.
libation, 248.
liberté, 252.
libidineux, 246.
Libye, 249.
licher, 14, 245.
lier, 251.
liesse, 243.
lieu, 252.
ligature, 251.
lignite, 257.
lin, 254.
linve, 158.
lipette, 245.
lippe, 292.
lippée, 14.
lit, 252.
livide, 249.
lobe, 253.
lochant, 206, 238.
loche, 249.
— 310
lochies, 252.
locution, 252.
lof, 24, 244.
loffard, 244.
loffat, 244.
loffiat, 245.
loffitude, 244.
logique, 160.
lolotte, 246.
lombric, 253.
long, 251.
lopin, 156.
loquet, 181, C.
louche, 247, 249, A.
loucher, 249.
louffer, 24, 244.
louffiat, 245.
louflon, 245.
louflouf, 245.
loufoque, 245.
loup, 244, 245.
louper, 245, P.
loupiau, 245.
lousse, 249.
loustic, 246.
loutre, 256.
louvoyer, 244.
lubie, 246.
lucide, 247 249.
lucifer, 247.
lugubre, 247.
luisant, 247, A.
luisard, 247.
lumière, 247.
luque, 247.
lusquine, 250.
lustre, 247.
lutter, 251.
luxe, 240.
luxer, 251.
M
macaque, 109. C.
macaron, 123, A.
macer, 123, P.
mâcher, 120, C.
machine, 123.
mâchoire, 107.
machurer, 120, C.
maculer, 123, 132.
madré, 132.
madrouillage, 132.
maffia, 127.
maffion, 108.
mafflon, 127.
mafflu, 109, 119, 127.
mage, 107.
magne, 125.
magot, 122.
maie, 123.
maillet, 119.
main, 125.
mal, 131.
malarder, 105.
malaxer, 122.
mâle, 124, 128.
malébolge, 33.
malle, 107.
malléable, 120, 122.
maillet, 120.
man, 118, N.
manchot, 120.
mandibule, 105.
manger, 107, 118.
mandole, 107, 115, P.
mandolet, 108.
manique, 126.
manivelle, 126.
mannequin, 124, 225.
mannestringue, 268.
mannezingue, 269.
manque, 120, A.
manquer, 120.
mansion, 114.
mante, 129.
maque, 119.
maquette, 123.
maquillage, 123.
maquiller, 123. A.
maraille, 113.
marais, 117.
marant, 130.
marauder, 112.
mare, 117.
marfil, 118.
margauder, 114.
margot, 144.
margouillis, 109, 116.
margoulette, 107, 113.
margoulin, 107, 110.
mari, 124.
mari oie, 131.
maritime, 117.
marlou, 131, P.
marloupate, 131.
marloupiat, 131.
marmenteau, 115.
marmonner, 107, J29.
marmot, 108.
marmotter, 105, 107, 127.
marmouse, 107, 108,
113.
marmouser, 108, C.
marmouset, 108.
marner, 123.
maron, 117.
maroufle, 113, 117.
marpaut, 112.
marre, 122.
se marrer, 130.
marron, 130.
marronncr, 1 07, P.
marteau, 119, 121.
martel, 275.
martinet, 119, 121.
martyr, 144.
masculin, 124.
masquart, 120, P.
masque, 106.
massacre, 120.
masse, 119, 120.
masser, 123, A.
massue, 119.
mastar, 118.
mastaroufler, 118.
mastic, 123, A.
mastoc, 118, P.
mastroquet, 79, P.
mât, 118.
matador, 120.
mataflu, 119, N.
matassin, 124. P.
matelot, 124.
mathelin, 124.
mathématique, 112
Mathurin, 124.
mathias, 119.
Mathieu, 119.
mâtin, 132.
mâtiné, 132.
matois, 131, 132:
matou, 112.
maturité, 121.
maure, 118.
maxilliaire, 105.
mazette, 112.
méat, 117.
mécanique, 123.
- 311 —
mèche, 122.
médian, 122.
médaille, 121.
meeting, 124.
Meg, 125.
mégot, 115.
mélange. 123.
mémoire, 114.
menace, 106.
ménage, 114.
ménesse, 124.
mensonge, 132.
mental, 113.
mente, 128, C.
menthe, 111.
menton, 108.
menu, 121.
Méphisto. 111.
méphitique, 111.
nier. 117.
merda, 27.
méridien, 122.
méruche, 118.
mésigo, 138.
118.
ie>ure. 110.
îeta, 123.
létal, 121.
îétis, 122, 132.
îètre, 110.
îeugler, 105.
îeugnon, 109, B.
meulard, 105.
îeule, 119.
meunier, 109.
Meuse, 117.
meute, 128.
Mézières, 138, A.
miche, 123.
miche, 123.
michet, 123.
micros. 120.
miction, 120.
mie. 123.
miette, 123.
mièvreries, 130.
mignarder, 130.
mignon, 130.
mijauder, 130.
mijaurée, 130.
mijoter, 122.
millerie, 120.
mime, 105.
minauder, 130.
mine, 106, 130.
mine, 121.
minot, 125.
mirettes, 113, P.
misanthrope, 105.
misti, 129.
mistiche, 122.
mistions, 130.
mistouf, 108, 127.
mistouflet, 108.
mitaine, 128.
mite, 118. .
miter, 112, 131.
mitis, 112, 131.
mitonner, 121.
mitre, 12S.
mixture, 123.
moite, 130.
modèle, 110.
mofette, 111.
magne, 124, B.
moi, 126.
moignon, 120.
moindre, 121.
moirmoufe, 109.
moison, 121, C.
moisonner, 121, C.
moissonner, 121.
moitié, 122, 134.
moka, 198, A.
molard, 111.
mollir, 122.
momaque, 109.
môme, 109, P.
monnaie, 114.
monde, 129.
monos, 121.
monstre, 106.
monter, 96.
montrer, 106, 114, 115.
monument, 114.
monzu, 117.
moque, 128, C.
moquerie, 132.
morbec, 109, 118.
morceau, 121, 130.
mordre, 119.
morfe, 118.
moi-fier, 118.
morfigner, 118.
morfil, 118.
morfiler,
morgane, 117.
morganer, 1 19.
morgue, 115.
morgue, 116, 119.
morion, 128.
morne, 112.
inornée, 108.
mornifle, 108.
môrningue, 114.
niornos, 108, 114.
morilarve, 250.
morpion, 118.
morve, 117.
morviau 117.
Moselle, 117.
moss, 110.
mot, 126.
motte, 128, A.
motus, 127, P.
moucaire, 124.
mouchard, 109, 112, P.
mouchailler, 1 12, P.
mouche, 130.
moucher, 115, 116, P.
moucheron, 109, P.
mouchique, 112.
moufette, 111.
Mourïètard, 57.
mouiflet, 109.
moufier, 109.
mouflon, 115.
mouflard, 127.
moufle, 128.
moufier, 115.
mouflon, 109.
moule, 110.
moulin, 120.
mouloir, 120.
moult, 123, 125.
moume, 228, C.
moumer, 132.
moumoute, 132, P.
mounin, 109, 117, P.
mounine, 124.
mouquer, 116, X.
moure, 110.
mouscailler, 111.
mousse, 107.
mousse, 117.
mousse, 120.
mousserie, 111.
mousses, 111.
moutier, 109, 119.
312 —
mouton, 107, 112.
mouzu, 1 17.
moyen, 122.
muche, 107, 130.
mucilage, 116.
mucosité, 107.
mucus, 116.
mue, 128, C.
muet, 127.
muette, 128.
muffée, 115.
muffetée, 115.
mufle, 90, 105, 106, 113.
muflée, 115.
muge, 105.
muget, 118.
muger, 199.
muguet, 111.
muids, 110.
muitard, 128.
mule, 124.
mulet, 105.
munir, 129.
mur, 129.
murène, 117.
murmure, 105.
musc, 111.
museau, 90, 105, 111.
muser, 114.
museur, 131.
musser, 111, 128, C.
mut, 127.
mutisme, 127.
myrrhe, 115.
mystère, 127.
mythe, 127.
rv
Xager, 86, 256.
Xahon, 256.
nain, 254.
narcotique, 137.
narguer, 140, 141.
narine, 137.
narquois, 140, 141.
nasalbor, 138.
nasiller, 141, C.
naufrago, 70.
Xazareth, 137, A.
nénets, 255.
nénin, 255, C.
nerf, 137.
Nèthes, 256.
neuf, 255.
nez, 137.
niber, 139, C.
nibergue, 72.
niberte, 72.
nicher, 294, C.
nichons, 255.
niert, 138.
nif, 139.
niquedouille, 72, P.
nitre, 256.
nocher, 218.
nom, 160.
nombre, 160.
nonnain, 255.
nonne, 255.
Nou, 256.
noune, 255.
nounou, 255, P.
nourrir, 255.
O
Oblique, 251.
obscénité, 55, 189.
oculaire, 172.
odeur, 25, 139.
oedème, 261.
œil, 172.
oiseau, 165, 186.
omoplate, 192.
onde, 255.
ongle, 185, 218.
opinion, 99.
opium, 292.
ophthalmie, 97.
option, 99.
optique, 99.
oraison, 143.
oral, 171.
orbe, 26.
orbite, 166.
orchestre, 166.
orchidée, 166.
ordre, 159.
orifice, 171.
organe, 156.
organe, 163.
organe, 268.
orgue, 138, A.
ornie, 165.
oniine. 165.
orithorynche, 141,
osciller, 187.
Ouest. 21.
ouiche. 291*, P.
ouit, 94, P.
ouitche, 94, P.
oursin, 43.
ozone, 139.
Pacage, 82.
pacte, 112.
paf, 64, 78.
paffe, 64.
paillard, 38.
paillasse, 38.
paille, 73.
Pain, 51, 61, A.
pâle, 63.
palefroi, 166.
palissade, 35.
Pallas, 37.
palmipède, 86.
palper, 45.
palpiter, 67.
paltoquet, 31.
paludéen, 68.
pampine, 8 1 .
pan, 64, 74.
panache, 79.
panade, 75.
se panader, 75.
panailleur, 75.
panais, 75.
panas, 75.
panne, 75.
panne, 75.
panneau, 74.
paunesard, 75.
panoter, 75.
panoufle, 15, 75.
panse, 35.
pantalon, 75.
pantalzar, 75. 21
pante, 38.
panteler, 75.
pantin, 38.
Pantinois, 38.
pantoufle, 75.
pandre, 38.
Pantruche, 38.
paon, 59.
— 313 —
papasse, 98.
pape, 98, A.
papette, 15.76. 88„ 98 C.
papill-
papillon. 88.
papoter, 87, P.
paqueliner, 47, 75.
parer, 7 1 .
parmesard, 75.
partager, 7 1 .
partir, 71.
pas. 74.
pasclin, 75.
patache, 37.
patafiole, 47, P.
patapouf. 38, P.
patapatapan, 47. P.
patata, 47, P.
patatras, 47, P.
patatrot. 47. P.
pateliner 47.
patoche. 47. P.
patois, 74.
patraque, 47..
patrouille, 47.
patte, 46.
pâture, 82.
paume, 29, 45. 161.
pauque, 39, ('.
paupière, 67.
pauvre, 71.
se pavaner. 75.
pavillon, 78, A.
pavois. 78. A.
peau, 31.
péché, 110.
pégoce, 93.
pégole, 91.
pègre, 92.
pégrer, 92.
peigne, 91, 93.
•peine. 74.
pelisse, 32.
pellicule, 31.
■ pelote, 29, 30.
pendeloque, 252.
péniche, 93.
pennon, 74.
pénurie, 74.
pépette, 29, P.
pépin, 29.
pépite, 19.
pepsine, 60.
perler, 116.
perroquet, 108.
perruche, 108.
persuader, <>.
perturbation, 285.
pesce, 92.
pescigner, 92.
pesciller, 92.
peser, 74.
pet, 25.
pétale, 76.
pétitionner, 88.
petouse, 21, 26.
petter, 24, 126.
peuple, 32.
peuplier 289.
peut, 94, C.
pévouine, 39.
pharynx. 52.
phaséole, 26,
Phébus, (il.
phénicien, 61.
phénix, 62.
phlébite, 33.
phobe, 25.
phrase, 9 1 .
physéter, 20.
piaf, 96.
piaffeur, 65.
piaule, 17.
piauler, 17.
piausser, 17.
pic, 17, 89, A.
pichenet, 79, P.
pichenette, 79, 93.
picher, 79.
pichet, 79.
picolet, 79.
picolo, 79.
picotin, 79.
picton, 79.
pie, 17, 76.
pièce, 75.
pied, 46.
pieu, 17, A.
pif, 15, 16.
piffer, 17.
piffre, 17.
pige, 93.
pigeon, 98, A.
piger, 92.
pignocher, 82, P.
pile, 34, 67.
pile 90, C.
pilet, 86.
pilier, 31.
piller, 73.
pilon, 90, C.
pimer, 16.
pimpeloter, 84.
pincer, 92.
pingouin, 84.
pinte, 80.
pioche, 91.
pioncer, 17.
piote, 38.
pioupiou, 38, P.
pipe, 19, 80.
piper, 78.
pipi, 20.
pipit, 14.
pipo, 39.
piquer, 80, 92.
piqueton, 79.
piron, 90, C.
pisciculture, 59.
pistache, 80, P.
pistolet, 21, 26.
piston, 20.
pitancher» 81.
pitre, 96, P.
pituite, 50, 293.
pivaste, 39.
pive, 39, 76.
pivois, 76.
placard, 69.
placarde, 69.
place, 67, 69.
plain, 46.
plamasse, 45.
plan 45, 68.
planche, 39, 45, 69, A.
plancher, 34, A.
planque, 68.
planté, 32.
planton, 46.
plantureux, 32.
plaque, 67.
plaquer, 68.
plat, 46.
plâtre, 68.
plèbe, 32.
plein, 32.
pleurnicher, 294.
pleutre, 31.
pli, 73.
— 814 —
plomb, 64.
plonger, 33,
ploutocratie, 33.
pluie, 33.
plumeau, 77.
plumet, 77.
Pluton, 33.
Plutus, 33.
pochade, 95.
pochard, 79. P.
se pocharder, 80, P.
poche, 135.
pocheté, 98, P.
se pocheter, 80, P.
pognon, 92.
poil, 32, 73.
poinçon, 92.
poing, 65, 62,
pointe, 80, 91.
poire, 29, A.
poireau, 44.
pois, 26.
poisson, 59.
se poivrer, 80, P.
poivrot, 80, P.
polder, 68.
polenta, 68.
polichinelle, 37.
polir, 46.
polisson, 37.
polluer, 27.
pomaquer, 45.
pompe, 20.
pompe, 96.
* pomper, 76.
pompette, 76.
pompier, 22, A.
pompon, 29, 76.
ponante, 39.
ponce, 49.
poncer, 50, 116.
pont, 37, 76, A.
pont- à-bac, 96.
ponton, 37.
populaire, 32.
porc, 43.
poser, 47.
postuler, 88.
pot, 80, 105.
potache, 38.
poteau, 81.
potiner, 80, 87, P.
potion, 76.
pouacre, 94.
pouah, 94, P.
poue, 64, P.
poutf, 65, 97, P.
pouffiace, 39.
pougniffe, 39.
pouiffe, 39.
poulain, 37.
poule, 37.
pouliche, 37.
poumon, 22.
poupard, 37.
poupe, 29, C.
poupée, 37.
poupon, 37.
pout, 101, L.
poutet, 101, L.
poutoun, 101, L.
poutron, 38.
préconiser, 53, 91.
priante, 178.
primevère, 168.
privé, 72.
propre, 72.
propriété, 72*
se prosterner, 279.
prouver, 84.
pseudo, 49.
pshutt, 1.
pshuttard, 7.
pst, 290.
psyché, 278.
psychique, 287,
puant, 96, A.
pudeur, 94.
puer, 24.
puéril, 38.
puff, 65, P.
pugilat, 93.
pulluler, 44.
pultacé, 68.
Punique, 61.
punir, 74.
pupille, 37.
pur 71.
pure, 72, A.
purotin, 72.
put, 94, P.
putain, 38.
pute, 38, P.
Quack, 178.
quanquan, 85, 217.
quenotte, 220, P.
quenottier, 217, P.
quereler, 152.
queue, 59, 239.
queux, 182.
quiétude, 187.
quiger, 185.
quille, 185, P.
quique, 177, 242.
quiqui, 177.
R
Rabâcher, 81.
rabibocher, 101.
rabicoin, 174, C.
rabiot, 158.
rable, 160.
rabot, 157.
racaille, 156.
rachitique, 160.
racine, 164.
raclée, 158, P.
racler, 157, 228.
radié, 164.
radis, 167, A.
rafale, 150, 159.
rafle, 140.
rafler, 118, 228, 161.
regâche, 157, C.
rage, 151.
ragot, 143, 161.
raguenasser, 151.
raguer, 151, C.
raigne, 151.
raie, 167.
raille, 168.
raire, 141.
raisin, 157.
raison, 159.
râler, 150.
ramage, 144.
rame, 165.
rameau, 164.
Raminagrobis, 151.
ramion, 151, C.
ramiouner, 151, C.
rampe, 167.
ramper, 234.
— 315 —
Ë ramponner, 145.
Tan ce, 152.
qpancœur, 151.
rancune, 151.
Rang, 159.
rapapilloter, 101.
■pe, 157.
Kpé, 157, C.
râper, 144.
rapillon. 157, C.
; rapin, 159. 226.
raquette, 166.
rare, 158.
157.
■iBtaquouère, 158, P.
166, P.
rat.. piaule. 158, P.
plan, 45.
■itatouille, 166, P.
râteau, 154. 157. A.
Râtelier, 159.
later, loi),
ratiboiser. 161, P.
ratichon, 157.
ratisser, 158.
raucher, 150, C.
161.
ravaudage. 144.
167.
ravin. 142.
161.
157.
164.
[je, 173, 174.
■rebecca, 89.
■béquer, 189, P.
feber. 174, C.
g rebouiser, 99.
rebutfade, 65.
■cevoir, 191.
1 rèche, 167.
rechigner. 294.
wcurer, 228.
redingote. 240.
Bel, 160.
Mfcgarder. 171.
irregatte, 241.
[■gimber, 192.
«gret, 152.
»fiefs, 252.
relique. 252.
Hftquer, 218, P.
remarquer, 113.
rembroquer, 39.
rême, 145.
remède, 123.
rémone, 145.
remords, 119.
remorque, 115.
remouchicoter, 112.
remoucher, U2.
renache, 140.
renaché, 140, 194.
renâclant, 138.
renâcle, 140.
renas, 140.
renicer, 141, C.
reniflant, 138.
renifle, 139.
renifleur, 139.
renobler, 138, 220.
repagnoter, 75.
répandre, 74.
répudier, 94.
requinquer, 100.
résister, 278.
respect, il(i.
resse, 151, C.
retentir, 275.
rétrécir, 287.
rétro, 173.
rets, 166.
reuche, 150, C.
rhéteur, 143.
rhombe, 167.
ribaud, 167.
ribes, 157.
ribis, 100.
ribler, 161.
ribleur, 167.
ribotte, 167.
riboué, 83.
ribouis, 100.
ricaner, 144.
ricard, 144, C.
ricasser, 144, C.
rictus, 141.
ridelle, 159.
riflard, 158, P.
rignaut, 142, C.
rigodon, 166.
rigol boche, 16,80, P.
rigole, 143.
rigueur, 155.
riotte, 152.
ripatin, 174.
ripaton, 74, 185.
riquiqui, 177.
rite, 163, 288.
river, 167, 168, A.
rivette, 167.
robau, 153.
robin, 153, A.
robuste, 164.
roche, 160.
rogatoire, 143.
rogaton, 143, 144, C.
rogner, 142, 156.
rogonner, 144, 151.
romaine, 145.
Rome, 145, 169.
rompre, 156.
ronchonner, 142.
rond, 167.
ronflant, 131.
ronfler, 137.
ronger, 156.
ronronner, 137, 151.
roquet, 150.
rose, 152.
roseau, 141.
rosser, 158.
rossignol, 247.
rostre, 150.
rotation, 166.
roter, 151.
roublard, 167.
roubler, 144.
rouche, 150, C.
roucouler, 124, 171.
roue, 166, 167.
rouen, 153, A.
rouffer, 150, C.
rouffionner, 151.
rouffle, 158.
rouflaquette, 167, P.
roufler, 118.
rouge, 152, 247.
rouin, 153.
rouinement, 151, C.
rouiner, 150, C.
rouler, 168.
roulotte, 166.
roumeler, 150, C.
roumionner, 150, C.
rouot, 153,
roupie, 150.
roupiller, 147, P.
roupion, 150.
316 —
rouscaillante, 144.
rouscailler, 167.
rouspéter, 144
rouspétance, 151.
rousse, 152, A.
roussi, 153, A.
roussir, 161.
roustamponne, 153.
rouvre, 241.
roux, 152.
ru, 143.
rue, 143.
ruer, 174.
ruette, 143.
rugir, 141.
rumeur, 144.
rumpsteak, 161.
rune, 143.
ranger, 142, C.
rupin, 146, P.
rupinkoff, 149, P.
raquer, 149, Pic.
ruse, 166.
rutilant, 152.
rythme, 159.
Sable, 51.
sabler, 292.
sabot, 192, 193.
sabouler, 19.
sabouloter, 193.
sabourin, 193.
sabre, 200.
sabreur, 200.
sabrenas, 200.
sabrenauder. 200.
sac, 293.
saccade, 269.
sacquer, 269, C.
saffre, 149.
sagacité, 291.
sage, 101, 192.
salive, 295.
sapience, 101.
sarrasin, 203.
sartane, 203.
sartanier, 203.
sasser, 293.
saur, 203.
savant, 101.
savate, 193.
scandale, 238.
scarabée, 230.
scédule, 241.
sceptique, 197.
sceptre, 200.
schlague, 207, P.
schlof, 244, P.
schnes, 137.
schnick, 141, 200, P.
schproum, 91.
se schtosser, 278.
schuflick, 69. P.
scinder, 219.
scorpion, 237.
sculpter, 229.
sec, 293.
sein, VIII.
sentier, 121.
senteur, 139.
sentine, VIII.
sentir, 139.
serein, 203.
seringue, 149.
serpent, 234.
sgoff, 43.
siffler, 4, 10, 287.
sifflet, 4, 21.
silence, 290.
simple, 72.
siner, 294, C.
sinve, 72.
sinus, VIII.
siphon, 8, 19.
Sirius, 203.
siroco, 203.
sirop, 145.
snobbisme, 138.
snoboye, 138
soc, 186.
socle, 186.
soif, 292.
soir, 203.
soleil, 202.
songe, 271.
sont, 280.
sorbet, 145.
sorgue, 203.
sorlot, 203.
sorne, 200.
sorniller, 203.
souche, 186.
souef, 6.
soufflet, 21.
souhaiter, 181.
soupape, 19.
soupe, 292.
soupir, 289.
souquer, 269, C.
sournois, 203.
spa, 293.
spectre, 172.
sphère, 30.
spispuf, 37.
splendeur, 62.
splénétique, 62.
sporadique, 49.
spore, 49.
sport, 49.
sprachir, 46, W.
sprique, 70.
sputation, 293.
squammeux, 193.
st, 290.
steamer, 263.
stèle, 293.
stercoraire, 284.
stérile, 265.
sternum, 270.
stertoreux, 271.
stigmatiser, 28 1 .
stipe, 272.
stipuler, 272.
stock, 272.
stockfish, 59.
stopper, 281.
strangurie, 268.
stratégie, 279.
strict, 287.
strident, 271.
strie, 282.
strobile, 285.
strophe, 285.
struggle, 281.
stupide, 273.
suave, 6.
suc, 229.
sucer, 117, 292.
sud, 293.
sudorifique, 265.
sueur, 265.
suffoquer, 24.
suner, 295, C.
super, 55, 241, C.
supper, 55, C.
sureau, 149.
— 317
.surin, 229.
surrement, 290.
ntaxe, 272.
rtes, 203.
tabac. 77. 179, 188.
itche, 268.
taf. 25.
tailler. 272.
tailloir, 272.
'tambour, 275.
tampon, 281.
tan, 267.
tangente, 27(>.
fcanuer, 158, P.
tante. 257.
tapé. 45.
taper, 275.
tapette, 258, P.
se tapir, 281.
tapis. 258, C.
taquet, 269, 283.
taquiner, 269.
"-tarder, 279.
tarer, 283.
tarière. 283.
'tarir, 265.
tarse, 271.
Tartare. 270.
tarte, 284.
tarter. 284.
tartine, 284.
tàter. 73.
tâtonner, 269.
tatouille, 144,258,0.
teindre, 268.
tendre, 279.
ténèbres, 263.
'tenir. 271.
tentation, 266.
tenu, 279.
têt, 267.
tétais, 257.
tète. 15.
tette, 257.
tettettes, 258.
thermes, 265.
thèse, 272.
Thomas, 27.
thorax. 270.
Thrasybule, 273.
thuriféraire, 263.
thym, 264.
tibia, 273.
tictac, 275.
tiède, 265.
tiers, 161, W.
tiffes, 274.
tigne. 279.
tillac, 272.
timbre, 275.
timidité, 273.
tinter, 276.
tintouin, 276.
tirage, 262.
tire, 269.
tirelire. 224, 258.
tirer, 270.
tison, 267.
Titan, 267.
titi, 266.
titine, 257.
titoun, 257, I\
tituber, 274.
toc, 11.
tocard, 279.
tocologie, 280.
tocon, 275.
toile, 254.
toit, 274.
tolérer, 273.
toile, 273.
ton, 276.
tondre, 275.
toquade, 275, P.
toquasse. 275. P.
toque, 274,
toque, 275.
toqué, 274.
torchée, 158.
tordre, 19.
torgnole, 283, P.
toron, 286.
torpeur, 272.
torrent, 270.
torride, 265.
tors, 283.
tortillante, 284.
tortiller, 284, 286.
tortorer, 156, 286.
toto, 256.
toucher, 276.
toue, 271.
touiller, 284.
toupet, 281.
tour, 173, 283.
tourbillon, 268.
tourlou, 258-
tourlourou, 258.
tournée, 283.
tourniquet, 283.
tourtouse, 286.
trac, 284, P.
trace, 282.
trachée 259, 266.
traction, 270.
traire, 269.
trait, 269.
tralala, 258, L\
tramway, 187, 285.
trancher, 272.
trans, 282.
trape, 285.
traquer, 282.
travail, 285.
travée, 272.
tremblement, 285, P.
trembler, 283.
trèpeligueur, 285.
tresser, 286.
treuil, 287.
triau, 287.
tribulation, 285.
tricher, 286.
tricoter, 286.
triler, 258.
trimard, 285, 287.
trimbaler, 285, P.
trimer, 285, Pr.
trinckmann, 268.
trinquer, 259, 268.
tripes, 285.
triste, 283.
triturer, 284.
trogne, 266.
trognon, 266.
trôleuse, 284.
trombe, 285.
tromboler, 285.
tromper, 285.
trompille, 270.
tronc, 272.
tronche, 266.
trotter, 284.
trou, 258.
troubler, 283.
trouilloter, 284.
318
troupe, 286.
trousse, 286.
truaud, 284.
truc, 287.
truche, 287.
trucheur. 287.
trucider, 282.
truffe, 285.
truite, 270.
truite, 258, C.
truquer, 286.
tube, 267.
tuber, 267.
tubercule, 264.
tuet, 258, C.
tufre, 264.
tuite, 287.
se tuméfier, 264.
tumulte, 264.
tumulus, 264.
turbin, 285.
turbine, 285.
turelu, 258, C.
turlurette, 258, P.
turpitude, 285.
tuteron, 257, C.
tuton, 257.
tutu, 287.
tuyau, 257.
tympan, 275.
typhoïde, 263.
typhon, 263.
U
Ululer, 201.
urf, 13, 146.
urgence, 155.
Vaciller, 188.
vacquerie, 100.
vadrouille, 58, P.
vagmestre, 100.
vague, 187.
vain, 94, A.
vaisseau, 37.
vallon, 169.
valse, 215.
vanité, 96.
vanné, 23, P.
vantardise, 29.
vardiller, 41, C.
Varenne, 171.
vase, 180.
végétation, 38.
veiller, 172.
veine, 33.
veloper, 67.
venaison, 23.
venette, 25.
venne, 25.
vent, 17, 136.
ventrin, 192, W.
vêpres, 21.
verbe, 127.
verge, 164.
vergne, 169.
vergue, 164.
vermouth, 108.
vernal, 168.
verne, 169.
vert, 44.
verte, 108.
vertèbre, 168.
vertu, 164.
vesce, 26.
vésicule, 28.
vésiner, 25.
vésouiller, 25.
vesser, 24.
vessie, 28.
vestige, 25, 273, A.
vesto, 26.
vierge, 164.
vil, 27.
villebrequin, 215.
violette, 28.
violon, 49.
vioncher, 17. X.
viondir, 17, P.
viouper, 55, 88.
viper, 55, 88.
virer, 168.
vlan, 13, 45.
voguer, 187.
voir, 212.
voix, 82.
volée, 69.
voler, 215.
vomir, 54.
voyou, 212., P.
vrac, 70.
W
Waremme, 171.
warrant, 171.
Xi, 291.X.
Yé, 183. C.
Zèle, 293.
zézayer, 292.
zézé, 32, 292.
zigzag, 269.
zodiac, 271.
zozotte, 92.
zupper, 55.
zut, 291.
zutiste, 291.
yiiivinv "i-vii ,
FEB 6 t975
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PC Timmermans, Adrien
3761 L'argot parisien
P2T5